Quechua/ Qichwa/ Qhichwa/ Quichua/ Kichwa 
Alphabet phonétique de la langue quechua : Mémoire lu au Congrés des Américanistes á Nancy

Citation preview

~

Biblioteca Nadol\ol deI Perct C.oiecctóR quechaa-a'jD\Ma

P,

lIL RlvtT 1057

ALPHABET PHONÉTIQUE DE LA

LANGUE QUECHUA l!ÉMOIRE LU Aln CONGRES DES AllÉRICANISTES A NANCY

PAR

GAVINO PACHECO-ZEGARRA

NANCY

PAR IS

G. CRÉPI1 -LEBLO D

LIBRAIRIE ESPAGNOLE

Jl! PRBIEUR

14

1

GRAND'RUE

VJLLE-VIEJLLE

'1 87 5

15 1

R UE

MO ' SI GN Y

ALPHABET

PHONÉTIQUE

DE LA

LANGUE

Q U E CHUA

lVIessieurs, la paro le étant la pensée en action , c'est dans la lang ue d'un peuple que l'on trouve la trace de toules les améliorations morales et maté rielles qui constituent sa civilisation; al\SSi a-t-on dit des langues, avec raison, qu'elles sont les archives du progrés . Le mayen le plus sur d'arriver a connaitre aussi complétement que possible un peupl e, soit ancien, soit moderne, est done d'éludier· la langue qu'il a parlée ou qu'il parl e; c'est pourquoi, les hommes voués a l'étude du passé et du présent, ont ajoulé aux foyers scientifiques universitaires et acaclémiques , celui des Congrés ioternationaux. Ayant l'h9nneur de prendre la parole dans cette assemblée, et sachant quelle importance elle attache aux études linguistiques, j'ai l'espoir que ce modeste travail sur l'alphabet de la langue bdrna, !'un des idiomes Íes plus importanls du Nouveau Monde, recevra un bienveillant accueil. Je dois tout d'abord avouer que, depui s mon · arrivée en Europe, j'ai co nslaté, non sans surprise, que beaucoup de personnes, Glont quelques-unes se piqu ent de connaltre les choses de l'Amérique, tant moderne qu'ancienne, considérent le b11i.ua comme étant une langue mo1te, ou tout au moins su1· le point de dispara1tre. Ricn n'est plus inexact. Dans to us les dépai•temenls de la République du l érou, qui se trouvent de l'autre c.óté des Andes, c'est-a-dire Puno, Cuzco; Auracu-

CONGfl~S DES A~If:IUCANISTES .

302 cho, en parti e I-Iuancayc lica el Jauja, les Indiens ne parlent que le b11'rna; et, les individus d'o ri gine espagnole qui habiten t ces con lrées, conna issent cetle la ngu e aussi bien que le castillan. Il y a e nco re, dans ces régions, des villes de 20 a 30,000 1\mes, ou, a l' excep Li on du curé, du gouverneur et de quelques ra res citadins , personne ne comprend la lang ue espagnole. J e calcu le , a l'aicle des Lableaux de recensement que, clans le P érou seul, le b1hua est parlé par environ ·1, 500,000 habi tan ts ; si l'on aj ou le a ce nombre, celui des indigé nes de l'Équaleur, de la Bolivie et meme de la Républiqu e Argentin e, qui font u age de cet idiome, on peut porler a 2,000,000 le chiffre qui précéde. Ce fait n'a rien que de trés - na turel, pui s que le b11'rna, au lemps des Incas, élait parlé par plus de 6,000,000 cl'hommes. Né dans le pa~1 s ou se parle cetl e lang ue, je la pratique depuis mon e nfance el la considere comme ma lang ue malernelle ; aussi puis -j e ass urer que parmi les nombreuses grammaires dont ell e a été l'objet, aucune ne donne une id é.e meme approximativem ent exacte, ele son alphabel, et a plus forle raison de la langue ell e-m eme. Un e tangue se compose de mols, les mots se composent de syllab"\S et cell es- ci sont form ées par la réunion de sons simples, représentés chacun par un e leLLre; la détermination des so ns ~ impl es et l'étude de l'alphabet qui doit étre le cadr e complet do ces sons, constituent done les bases de la connaissan ce d'une langue. Dans so n Alfabeto fon ético de Ja lengua castellana, reuvre unique de ce genre qui ait élé publiée jusqu'a ce jour su 1· la la tangue espagnole, M. Uricoechea répand sur la démonstraLion de cetle vé rité l.a clarté de l'évidence. iW. Georges ' i\Tith er s a pub lié l' an derni er, sous le Litre de Tbe English Jangunge spollod a pronounced, un tranti l non moins importanl et non moins conclu anl. Comm e ces écriva ins, j'estim e qu'il importe nux prog rés de la lin g uistiqu e et de la philologie que, dans l'alphabet

303

ALPHAllET fa¡'flUA .

5

d'une langue (élant bien enLenclu que ledit alphabet sera le cadre de sons fi xes et b,i en délerminés, représenlés au moyen ele caracteres correspondant a chacun d' eux), le nombre des signes soit égal a celui des sons. Cela n' est malheureusemont pas possible dans nos lang·ues romanes qui, n'ayant a leur disposiLion que l'alphabet latin, sont obligées de représenter des sons absolument diITérents de ceux de la langue latine, au moyen de combinaisons ele signes le plus souvent défecLueuses et parfois in stables . Mais la langue des In cas n'a a cornpLer ni avec l'alphabet latin, ni avece l' éLymologie, et ceux qui Ja parlent aujourd'hui comme leur langue propre, ne savent. pas l' écrire, faute d'un alphaeet ou ils puissent trouver la représentalion dislin cle de chacun des sons qu'ils émeLlent dans le langage oral. Il n'y a done pas lieu d'introduire, dans l' alphabet du fatflua, toules les anomalies que les ling ui sles les plus logiques et les plus autori sés s'efforcenL en vain d'exLirper des langues modernes. D'autre part, le fat'hua différant essenti ell ement des lan g'ues romanes, surlou t en ce qui concerne les so ns élémentaires , il est impossible de donner une id ée exacLe de ces so ns au muyen du seul alphabet latin qui, ainsi que j e viens de le dire, ne peut pas meme sa lisfaire aux ex igences des langues roman es. Ces considérations m'ont amené a composer, pour la Jangue péruvienne, un alphabet spécial que j'ai l'honneur, Mess ieurs, de so umettre a voLre bienveillanLe aLLenlion.

Des Voyelles A, A, E, I, J, O, U, U A, a.

L'A en fa1'hu a, ·se prononce comme dans le mot fran 9ais han, tu; pay, il.

famil!e.~Ex:

6

CONGRh:S DES A~IÉR IC AN ISTES. 304 L'a aigu el es mols cheval, sac et l'a grave eles mots ame, pále lui sont étrangers. A, a.

Le sig ne A r ep résente un son beaucoup plus sourel que le précéelent et qui tient le milieu entre l'a et l'u el es mots anglais hat, cut; il n'a pas d'équivalent en frangais . Ex.: Samay, respirer; Kam ay, ordonner , commander, gouverner. E, e. L'E a le meme son que dans les mots fran gais ohjet, iralet. Ex. : Senha, nez; P erna, mur ; les sons de l' e muet de besoin, de l'é aigu de café et de l' e grave de pretre sont étrangers au br'hua. I, 1 1 tient le milieu entre l'e dont nous venons de parler et l' i fran gais. Ex. : Prsho, oiseau Iskay, deux; il se rapproche beaucoup du i anglais dans les mots this, pin, mais ce dernier est moins guttural et moins sourd .

I, i . Ce son est celui de l'i frdngais . Ex.: Inka, empereur et fils du soleil 1: 'fika, lleur ; 13itay, sauter .

o,

o.

L'O a le meme son que dans les mots fran ga is émotion, abricot. Ex.: hosa, mari; Opa, niais; les sons do l'o aigu de sotte et de l'ó grave d'apótre sont ét.rangers au fa1'hua.

o, u. Le signe O représente un son qui tient le milieu entre la voyelle o et la prétendue diphtongue ou, laqu elle équivaut a l'u espagnol. Ce son a beaucoup el'analogie avec celui du premier o elu mot anglais bosom. Ex. : h usho (Cuzco) , la capilale de l'empire des In cas ; Poka, rouge, 11ermeil ; Tora, frerr.

305

ALPHABET b1'fÜJ A.

7

u, u. L'U a le meme son qu' en espag nol eL que dans les moLs fran gais quadragésimal, équatio11,. Ex .: Ruku y, souffier; Kunka, cou . Il r ésulte de ce qui précede qu'il y a, en b1hua, huit voyelles bien neLtes et bien distinctes. Afin d'accouLumer l' cci l du lecteur aux signes nouveaux, nous avons répété en tete de chaque paragraphe explicatif le signe co rrespondant. Pour le meme motif et afin que les personnes qui connais saient le b1'frna puissent juger en connaissance de cause, nous donnons ci-dessous une série d' exempl es au mayen desquels nous espérons que l'on pourra se rendre compte des dilTé rences essentielles établies par nous , soit en pronon gant les mots indiqués, soit en les entendant prononcer . Enfln, pour bien préciser la nature de nos voyelles , il es L indispensable d'ajouter : 1° que l'a, l'i et l'u (ou) sont les seules qui se prononcent comme dans le fran gais et dans toutes les autres langues dérivées du latín; 2° que les voyelles a, e, 1, o et u ont le caractere g uttural qui prédomine dans la langue du P érou et qu'elles forment pour les oreilles frangaises des sons exotiques et étranges. A, a - Sara, mai's; Paha, la terre; Ama, 11011; Wasi, m?iso11; Hamp1, médeci11e; Tawa , quatre. A, a - Sum aJ, bonile; Takay, frapp er; PakaJ, celui qui cache; Raway, courir; Ahllay, cl10isir; Rawray, brüler. E, e - Senha, 11ez ; Perita, mur; h ella, oisif; Wehey, pleurer; h ena, flüte ; b epa, arl'iere. I, 1 - R1sba, cinq; Tmkuy, se r encontrer; DkayalI, la rivier e; Sim1, 110m ; h11lka, écriture; Islrnn, lmit. I, i - l.3itay, sauter; Hina, done ; Ih u, paille; Int1, le soleil; Sipry, tuer; Rimay, pacler. O, o - Ol'fw, miile; Sonh u, cceur ; Onhuy, maladie; Ro,Jtu, soul'd ; Opa, niais ; lLOJSly, sortir.

8

CONGn~s

nr:s

A~I É RICANISTES.

306 , u ...,.-- O~o, dedans; rll , colline; Kuka, nom d'une plante péruvienne; Tura, frere; h uy ll or, étoile; R unlo, reuf. U, u - Urna, tete; Supay, diahle; Tut a, nuit ; Rupay, hruler; SumaJ, honite; 13uku, assiette. Parmi les auteurs qui se sont occupés de langue b11J.ua et qui ont écrit dans un temps ou l' on n'attachait aucune importance a la phonélique par suite de cetle id ée préco nyue qu'il ne pouvait y avoir dans au cune lang ue des sons autres que ceux de l'alphabet latin, parmi ces auteurs dis-j e, il n'en est ancun qui ait examin é séri eusement les so ns élémentaires de la langue qu'il prétendait faire connaitre. Tous se sont bornés a conslater le manque de certaines co nsonnes dont l'absence sautait aux yeux, sans comprendre pas plus d'ailleurs qu'on ne le comprend aujourd'hui, que le b1'frna, étant un idiome comp létemen·t différent des langues latines (de la l'absence de plusi eurs des sons usités d'a ns les langues mod ernes) , devait pour cette meme raison, comme cela existe en réalité, posséder beaucoup d'autres sons étrangers a l'alphabet latin. Ainsi, !'un des plus respectables parmi les grammairiens qui, au siecle dernier se sont occupés du b11J.u a, Tórres Rubio, s'exprim e ainsi : « La lang·ue des Indiens de ce r oyaume n'emploie que dix-huit lettres, de sorte que des vin g t-quatre lettres de l'alphabet latín, il y en a s ix qui manquent, ce sont: B, D, F, G, J, X . » Mais comme son oreille lui révélait l'in exactitud e de cette all ég·ation, il ajoute di verses observations curieuses attestant qu'il a comme nous meme constat.é l'existence d'un plus grand nombre de sons é:¡u'il n'a pas cru devoir r eprésenter par des lettres et faire fi g urer dans l'alphabet de l'idiome péruvien. C' est ai nsi qu'il dit, au suj et des voyell es : 11. Quant a la prononciation, on r emarque que les voyelles e, i, d'un e part et o, u, d'aut.re part se ressemblent beaucoup entre ell es, et a Cuzco meme les Indi ens. prennent indifféremment !'une pour l' autre, comme par exemp le Turay pour Toray, frer e ; Quelca pour Quilca,

écriture. »

307 ALPHABE'r b 1'f1uA. Il résulle de ceLte observation, non pas que les Indi ens substituent indifférnmment !' une a l'autre les voyelles de ces deux co uples, mais bien qu'il y a dans les mots ciLés par Tórres Rubio_, et notamm ent clans h1llka, un l dont le son ti ent, ainsi que nous l'avons dit, le rni li eu entre l'E et l'l, et que ce grammairi en a confondu un mot renfermant un I avec un auLre mot r enfermant un l. 11 l'a fait, parce qu'il ne c r o~rait pas qu'il püt y avoir des sons en dehors du cadre étroit de l'alphabet espagnol; voi la comment il altribuait de tres bonne foi aux Indiens un e confusion de sons qui était son fait personnel. Relativemcnt au mot toray, frere; il croyait entendre tantót un u et tan tót un o; jamais il n' entendait le son appar tenanra o. Faute d'avoir l' oreill é assez fin e, Tórres Rubio, !'historien Garcilaso , le P. Holguin et les différents auteurs des deux derniers siecles nous ont légué un alphabet fa1Trna cons idé. rablement tronqué, puisqu'il n' est autre que l'alphabet espagnol, déduction fa ite d'un cer tain nombre de lettres . ous ne devrions pas tr op nous étonner de cette maniere de pro céder qui trahit tout d'abord son vice origine!, puisc¡ue de nos jours ou la lin guistique a fait tant de progres, les écrivains qui se sont occupés do la langue du P érou n'o nt fait qu e suivre l' orni ere tracée par leurs devanciees. On lit, par exemple, dans un ouvrage récemment publié (L es rnces aryennes du P érou par DoN VICENTE FrnEL Lori;;z): « L'on ponrrait réduire a trois - a, i , u - le nombre des voyelles fondamen tales du Quichua. Quant aux deux autres voyelle que les E spag nols ont ad mi ses dans l'alphabet de celte langue: l'e et l'o - elles do ivent etre consicl érées comme inorgan iques , ce qui n'a ríen de bien étonnant, si 1' on admet · l'origine aryenne de l'idiome p óruvien. » Quand on voit Lomber dans un e erreur de cette nature un auteur qui para!L connaítre le fa1hu a, on peut dire ele lui qu'il a suivi les anciens errements en s'y attachant plu s fortement qu'aucun de ses prédecesseurs, si toutefois cela es t possibl e.

10

CONGRES DES AMÉRICA ' ISTES.

308

avons déja dit qu e les seul es voyelles du fa1hua qui se pronon cent comme en Frangais, sont l'a , l'i et 1'11 (0 11) ; voici maintenant que M. L ópez les consid ere comme étant les seules voyell es de l'idiome péruvien. Apres avoir mieux constaté qu e ne l'avaient fait ses devanciers, l'idenlité espagnole ou latin e de ces trois sons, il se montre plus rigoureux qu'eux en rej etan t purement et simplement les aulres son qui n'élap t pas id entiqnes aux so ns la lin s, ne s'adaptent point exa lement au moule auditif qu'il a dans l'oreille comme toules les personnes exclusivement habiluées aux sons des langues l.iLines. D'autre parl, que les voyelles dont il s'agit soient fondamentnles ou 11011 fondamentales, organiques ou non organiq11e$ nous es Lim ons que M. L ópez n'est pas enco re parvenu a se r endre com ple de ce qu' est la phono logie da ns son app li cat.ion aux lang ues . En effet, a supp oser que ces dis tin ct.io ns et ces class ifi calions so ient logiqu es , s'en s uit-il que les sons déclarés inorganiques n'exislent pas ? Vo yo ns maintenant si la classification de M. López es L exacte . L es v0yell es fondam enLales, puisque fonclamentales il y a, ne peuvent etre, dans un e lang ue quelconqu e, que les voyelles qu i présentent le plus de confo rmilé avec le caractere gé néral de cett e langue, et qui, pa1· su ite, priment LouLes les a u tres, en donnanL a cel le- ci un aspect qui lui est propre, nous pouvons meme clire une phys ionomie spéciale qui la distingu e des autres langues. Cela élant., les seules voyelles qui, dan s la langue des In cas, laqu elle est essenli ellement gulturale, puissent;, avec une certaine apparence de raison, elre appelées fond amenLales, sont a, 1, e, o, ; en eITet, ces ci nq sons consLituent le co rps voca lique de la tang ue a un le! point que les nutres paraissent etre exotique . Tous ceux qui , comm e nou , parlent le fa1T1u a pou r l'aYoir appri des leu r plus tendre enfance, partageront notre avis a cel égard . Au surplus, le son aigu de l'i , le so n g rave de l'u (ou) e l le son plein de !'a 1ous

309

ALPHAB1"T

b1huA.

se font. en tendré rarement dahs cette langue; 011 ne peut don e leu r donh er la i.¡ualifi caLíon de fond'am enta ux. Pour nous, ces classificalions n'ont aucnn e importance, et nous n'en voulons pou r premie que l'e muet qui cons titue, en g rande parti e, la beaulé spéciale de la lang ue fran gaise, a ce point qu 'au jugement de nombreux aule urs il luí don ne la grace, l'élégance , un e g rand e ri chesse de nuan ces heu reuses, et, en somm e, cette physionomie caracté ri s tique dont nous parli ons tou t- a-l'heure; certes, cet te VOJ'elle clevrait etre réputée fonda-m entale ; et cependant, bi en des • gens lui repro chenb d'etre obscure, confnse et inorganique, ne prenant pas ga rde qu e si on luí retirait so n e muet, la langue frangaise serait a ttein te bien plus profondément qu e si on luí enlevait le so n a. Un autre vice de l'arg umentation de M. López es t que cet auteur dont le but est de prouver !'orig ine ar~1 e nn e du b1'frn a débute par admettre co mme é tab li ce qu'il devra1t s'a ppliquer a démontrer, et par exemple réduit a trois les voyell es fondamentales uniqu ement en vertu de l'hypo thése qu'ila imaginée . . Puisque la base de ce raisonn ement est purement h ~1 pothé ­ tiqu e, la conclusion l'est également, e t la question n'a pas fait un pas. Ce qu'il y a de certain, c'est qu e la lang ue du P é rou posséde d'autres voyell es qu e celles pré tendu es fondamentales et qu'i l en est de meme pou r les langues ar~·ennes. Voila, soit clit en passant, comment l'on tombe dans les erre urs les plus g raves qu ancl on négli ge l' é tude des sons élémentaires d' un e la ng ue et qu'on céde a l'envi e de les classer et d'en. récl uire le nombre afin de les idenlifie r aux so ns d'un e auLre tangue. Au r es te, !VI. López se co ntred it lui-meme qu and il dit : « Ainsi qu e le r emarqu e fort jus tement M. Tschucli, les

lndiens prononcen t trés - so uvent l'i média l Oll ini tia l, a la fa go n de l'e . » Il s'agit ici du so n mo ye n qu e nous avons r eprésenlé par I et qui a r éson né comme un é a ux 01·ei lles de MM . Tschudi e t López.

·1'.!!

CONGRf:S lJ E::l All Éfü CA. ISTES.

310

Ge demier s'exprim e ainsi au sujet de l'a : « Au commencement et au mi li eu des moLs, l' a quichua sonne fort et plein, tandis qu'a l a fin il sonne bref et parfois meme est peu

  • 1 Cet a bre f, parfoi p eu dis Linct, es t précisément notre a, dont le son est abso lum ent étranger aux tang ues latines. M. López fait, au suj et de l'o, une remarque analogue a celles qui précetlent; il dit que cette voyelle est extremement ¡·are dans l'idiome péruvien, et qu'elle peut etre considérée comme n'éLant qu'uoe simple variante de l'u; cette prétendue sim ple varianl1~ n'est autre chose que notre son média l o. Laissant de cólé l'hypothése de !'ori gine aryenne du b1'hua sur laquelle nous n'avons pasa nous prononcer actuellement, nous constatons que i\I. López, comme M. Tschud i, et tou eleux comme Tón es Rubio, ont enLendu et su dis ting uer les voyelles qu e nous introdu iso ns dans notre alphabet et que nous représentons par des sig nes spéciaux; néa nmoins, ces auLe urs se sont app liqués a les fai re renLre r dans la formu le classique : a, e, i , o, u, lac¡uelle pese comme une malédiction S lll' l'alphabet ele Loutes nos tangues . Comme l'habitude en matiere de conduite, les préj ugés forment en matiére de ra iso nn ement une seconde nature ; aussi, ne serio ns-nous pas étonné de voi r un grand nombre ele personnes rejeter eles sons qui leur sont. in co nnus ou tout au moins les s ig nes nouveaux que nous pro posons d'adopter. Comment en serait-il autrement quand, dans le domaine des tang ues latine , aujourd'h ui si co nnues el si bien étudi ée , tant de pei-so nnes s'obstin ent encare a n'admettre que les cinc¡ voyelles trnd iti onnelles , et que nous voyons ceux-la meme pom' qui le nombre des voyell es frangaises s'éleve au moins a huit, hésiler a donn er aux lroi s sons méco nnus par la rou1ine, la place qui leur revient dans l'alphabet ? Quoi qu'il en soit, jamais un Indien du P érou ne con fonc\ ra so it le son de 1'1 avec celui de l'i, soit le son de l'o avec celui de l'u , pas p lus c¡u' un Anglais n'identifiera

    :3 l l

    ALPllAB1':T b111 UA.

    l'i de this avec celui de Castille et l'o de hosom avec celui de hoat. Les huit voye ll es indiscutables de la langue fran'\)aise sont: a, e muet, ai, i, o, ou, eu, u. Bien qu'élranger, nous discer11ons, dans cette lang·ue, trés.nettement et sans autre aide qua notre oui'e, qui n'es t pas maU\'. aise, les sons-voyelles qui suivent : iº L'a des mots ami, famille. 2° L'a grave de pale, noiratre, ou de flamme, mot clans Jeque ! cet a n' est pas s urmont.é d'un accenl 3° L'a aigu ele cbat, sac, ou ele déJa. 4.0 L'a nasal de gant. 5° L'é aigu dé café ou de chanter . 6° L'e grave de levre, mere. 7° L' e ouvert de pretre. 8° L'e muet de vie, rive . 9° L' e muet ele hesoin, tenÍl' . '10° L'e nasa l de entre.

    11° L'i de pigeon , gilet. i2° L'i aigu de ahime, qui équivaut a l'J' de l¡re. 13° L'i nasal de vin . 14° L'o aigu d'ahricot, paleto!. 15° L'ó grave d'apótre. 16° L'o de rose, pose qui s'allonge quelc¡ue peu et se termine par un arrif-re-son semblable a celui de ou ,

    17° '18° 19º 20° 21° 22º

    mais non cependanL autant que dans les mol. anglais hoat, note. L'o de monsieur, que je ne puis qualifi er . L' o nasal de lepan. L'u de vertu, ]une . L' ú aigu et long de múr, Odie. L'u d' équation, qui sonne comme l' ou de goutte. L'oú aig u et plein de gout, qui n'es t point surmoul é d' un accent dans les mots séjour , court.

    ::l l 2

    28° L'u nasa l de un . L'o11 du nrnt Deur.

    2'~º

    Ce sonL la Loutes les voyelles fr angaises; et, nous som mes pers uadé qu'un F rangais sachant sa langue ne les confondra point entre ell es c¡uand il parle, et, qu'au beso in , il sam·ait relever la moindre faute co mmise a cet"égard par un interlocuteur, sur tout quand celui- ci est un étranger. Cependant, !elle est la force de l'habiLude et des préjugés établis, qu e plus· d'un Frangais sera étonn é de nous entendre dire qu e sa langue compte pour le moins vingt-quatre voyell es. Nous avons que l' on sen e comme pour unir la racine ele la lang ue avec la parti e pos téri eure du palais e t produire, avec une forte aspi1·ation, un son a la fois aig u et doux. Ex . : Kara, déman,qeaíson . Avant d'aller plus loin, nous fe rons remarqu er que les ·inq consonnes Q, h, I;i, fJ , 1 , parfaitement dis tinctes p olll' qui conque pal'le le bi11ua n'o nt j amais été bi en elé terminées el que la plupar t des g rammairiens les ont confonelues avec le son for t ele C (représenlé par K) parce qu e ce on étaiL celui qu'ils cro ya ienL entendre. Que lques-uns eulement , plus pers picaces, ont noté deux sons diffé renl e L ils ont représenté le second, les un. en redoublanL le C (ce) ou le K (kk), les autres en comb ina nt le C avec le K (ck) ou a vec le Q (ce¡), ou encore a l'a iele el'autres combinai ons non moin Yi cieuses. On comp rend aisémenL quelle confu s ion produiL fatalement le procédé consi lant a redoubler un s igne. Quand , pa r exemple, on écri t le motab a. boisson de maT , avec deux C (( acca » , e· t- ce qu'un F ran9ais ne p rononcera pas en do nnant au g roupe ce la va leur q u' il a dans le mot accabler ·. Les g rammai riens elont il s'agit n'onL do ne fa it qu e co nfon d re et provoquer rl es con fu ions. Tórres Rub io do nt la g rammaire montre qu'i l connaissait bien la tangue, repré ente to ules les cun onnes qu i précédent par un seui igne, mais en fai ant des remarques t res curieuses qu i prouven t l'ex istence des sons ai nsi méconnu . (( Cetle tangue, dit- il, étant en majeure partie gutlurale et e pronon9ant avec diverses positions du gosier, il esl nécessa ire pou r se faire bien enlenclre de Indien , d'observer quelle est la posilion ele cet organe qu i COl'l'eSpond le mieux U l'expression gutturale de chaque voJ1elle, parce qu' il y a beaucoup de mots qui expriment des choses trés diITérentes pa r la seule cliITérence g utturale des voyell es en trant dans leur compo ilion . »

    317

    ALPHABET b111 UA .

    19

    En parlant du C il s'exprime ainsi : « le vocable « Cara ii a trois signiílcat.ions selon l'expression gutturale qu'on donne f\ la c1:1nsonne iniLiale ; avec un e gutturalisation douce dans le fond du palais, k arn signiíle le cuir ou la peau ; avec un so n gutlural d'une certain e force, ccar a veuL di re ohauve; avec un son g uttural tres fort provenant du pa lais, K cara a le sens de cuisso n, de cl émangeaiso n.n Apres avoir donné quelques autres exemp les, il conclut en ces termes: « Les [JUUurali ations les plus usi tées so nt a u nombre de oinq . " Voil a comm ent le manque de príncipes rationnel , résu llat ele l'ig noran ce de so n temp·s, co nduit a mille conLradi clions un écrivain estimable a tant. d'égards. Allant jusqu'a ne pas adm ettre d'aulre signe que le e, il est obligé de distinguer jusqu'a cinq sons différents et il essa:e de les représentcr a l'aid e de lett res groupées ou redoub lées. B ien qu'il ait conc; taté l'existence de sons dissemblab les, il ne peut se résoudre et ne se serait probablement j amais résolu a le faire, meme si on l'avait menacé de la corde, il ne peut, disje, se résoudre a inlrod uire ces sons dans l'alphabet eL a donner a chacun d'eux la personnalité d'un signe distinctif. Sans nous arreter plus longtemps a la na'ive té linguis tiqu e de cet écrivain , nous diron s: personne ne dcnne mieux qu e lui la preuve palpable de l'ex istence des sons donL nous venons de nous occuper. ous sommes d'ailleurs persuaclé que nos expli cations ne donneront jamais une iclée exacte de ces so ns qu'il faut examin er avec les sens affecLés a leu 1· perception, par la nat.ure. De meme qu' il n'y a pas pou!' les coul eurs d'autre juge que l'ceil, de meme aussi les sons ne peuvent etre appréciés qu e par l'o rei ll e; nous croyo ns done que la vive voix est l' unique moyen de préciser chacun d'eux, et encore cette voix viva nLe sera -t-'ell e in s ufílsante, quand l'auditeur aura des idées précongues ou que so n oreill e, pour n'avoir j amai s é té ouve rte qu'a des sons latins, au ra une propension invincible a rapporter a ces memes sons tous les sons spéciaux des langues éLrangeres ! éanmoins, ainsi qu e

    CONGRES bES AMÉRI CAÑISTES.

    nous l'avons déja dit, des peuples entiers parlent le b1'hua , et i 1 y a parmi eux des personn es ins truites qui conviendront de la juslesse de nos asserlions. Nous dirons done, une fois pour toutes, que nous reconnais ons exclu sivement pou1· juge en derni er ressort de cet alphabet les personnes parlan 1 le IJ1'h ua , e t qu e nous recevrons avec r co nnaissance les critiques , les observations et les conseils qu'elles voudront bien nou adresser. Dans ce but, nous croJrons devoir donner ici quelques séri es de mots afin que l' on puisse di tinguer mieux la di lTérence des sons jusqu'a ce j our confondus avec d'autres, sans avoir j amais été exarninés de pres . K

    KarnaJ' ordo1111el' . Kay celui-ci . K ka pla11te. Kunka cou. Kahi sel. K ro ver.

    h

    Q Quyay pf,1i11dre, Qi ka épi11e. Qipu écriture des J11 cas. E¡o deda11s . Qarka sale. Qu'hr cocho11 . fa

    h arapeau. h oya la femme de l'J11 ca. h all o Ja11gue. hor1 or. h osa mari. h osl10 vil/e des J11 cas.

    brtrna Ja Ja11gue du P érou . b apaJ ricl1e. b oro camard. b ata pe11te de mo11tag11e. Aba hoisson de mai's. baway regarder.

    Q Qa1;a pelé. Qomer vert. Qata obscur. Qep1 fardeau. Qopa halayure. f;l ello j aune.

    1 ara cuis on. Kila sauvage. l ullo bois. l aki 1118.choil'e. Han! a mai"s r6ti. 1 utoy r o11ger.

    1H9

    ALPHADET b1'f1UA .

    2f

    Il va de soi que les lettres Q et liQ analogues au Q lalin ne nécessitent pas l' emploi de la voyelle u devant e et i, pour conserver leu r valeur respective. Nous n'avons pas conservé le Q dans notre alphabet parce qu'il a Je meme son que le K et que so n emploi au rait donné li eu a des confusions. J, J· Ce signa représente un son beaucoup plus fort que celui du J tel qu'on l'entend souvent dans des bouches espagno les avec un son excessivement g utlural et rude. Comme ce son est incon nu en Amérique et dans un e grande partie de l'Espagne, nous avo ns préféré l'indiquer par le J qu'il ne faut pas confondre avec le J francais, absolument étran ger a la tangue des Incas. Ex . : bapaJ, riche. Il importe de remarqu er que cette consonne ne se rencontre en b1hua qu'a la fin des mots. L{'ls grammairiens ont confondu ce son avec celui clu C final, en écri van t capac au lieu da bapaJ; ils ontainsi espagnolisé et identifié deux sons exclusivement b1Trna .

    It, tl. Cette consonne a la meme valeur que le ch espagnol lequel est éLranger au francais mais non a l'italien, ou il se r encontre sous la forme de ee, ci. Afin d'éviLer toutes les confusions possibles, nous avons adopté un signe nou veau. Ex. Itita, agneau; Itay, celui- ci.

    H, ñ . Ce son :est celui de la consonne précédente prononcée en aspiran t. Ex. : HaP.ha, ébouriffé.

    fl, Y1, Ce signe représente un son beaucoup plus fort que le précédent; on le produit en collanL la tangue au palais et contre les dents et en poussant l'air avec force . Ex.: Haway, fraire.

    22

    320

    COA'GRES "DES AM°éRICANJSTES.

    Comme on a confondu les sons h et h avec celui du ch espagnol il est indispensable que nous donnions quelques exemples:

    H

    It

    H1hi chauve- souris. Hika tant. flapha déguenillé. Hala can ne de mai"s . Iho p aille.

    Ifon fils. I·l;in froid. Itaki pied. Ifaka pon t. Itita agneau .

    H Humay distiller. Hayña chardonner et. ftaki sec. füa lente. ftullo honnet rond. H, h. Cette consonne est toujours aspirée comme en anglais, mais il esta remarquer qu' elle se r encontre aussi en articu culation in-verse. Ex .: Huh, 1111 ; W ahha, mendiant; ahllay, choisir. Il ne faut pas confondre ce son avec celui du j te! qu'il sonne dans Wajsa, édenté.

    L, IL, :tl'f, ~' Ñ. Ces consonnes se prononcent, les quatre premieres comme en frangais, et la cinquieme comme en espagnol. IL se prononce comme clans le mot meilleur et non pas comme dans le rnot illustre; c'est pourquoi nous avons pris la précaution d'unir ensemble les deux L. M et n'ont j amais le son nasal. Ñ équivaut a g-n dans les mots mag-niflque, gag-ner. Ex.: Lawa, créme de mais; !Lama, animal domestique; Maki, main; inu, feu; Ñakuy, médirc, maudire; -Ta[ ay, décflpiter .

    3!1

    23

    ALPHAilET b rfHJA .

    Il ne peut y avoir de doute sur 11,ex istence de ces consonn es cependant de l'L au suj et de laq uelle l'In ca Garci laso