Étudiants du tiers-monde en Europe: Problèmes d'adaption. Une étude effectuée en Autriche, en France, aux Pays-Bas et en Yougoslavie [Reprint 2018 ed.] 9783111557144, 9783111186740

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French Pages 236 [240] Year 1972

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Étudiants du tiers-monde en Europe: Problèmes d'adaption. Une étude effectuée en Autriche, en France, aux Pays-Bas et en Yougoslavie [Reprint 2018 ed.]
 9783111557144, 9783111186740

Table of contents :
Remerciements
Table des matières
Introduction
1. Caractéristiques personnelles de l'échantillon
2. Raisons de la venue dans le pays de séjour
3. Succès académiques et satisfaction universitaire
4. Relations humaines
5. La satisfaction au niveau de la situation matérielle
6. Discrimination
7. Statut national
8. Le changement d'opinion
9. Satisfaction générale et rôle de l'information
10. Suggestions des étudiants pour l'amélioration du séjour
Conclusions et implications
Conclusions and implications
Références
Questionnaire

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Etudiants du Tiers-Monde en Europe

Publications du Centre Européen de Coordination de Recherche et de Documentation en Sciences Sociales

4

Mouton La Haye . Paris . The Hague

Étudiants du Tiers-Monde en Europe Problèmes d'adaptation Une étude effectuée en Autriche, en France, aux Pays-Bas et en Yougoslavie OTTO

KLINEBERG

et J E A N N E

BEN

BRIKA

Avec la collaboration de R U D O L F EDER, JOSIP GORICAR, BOEM RAVENSWAAIJ et MARISA Z A V A L L O N I

Mouton La Haye . Paris . The Hague

VAN

Diffusion en France par la Librairie MALOINE S. A. Éditeur Librairie de la Nouvelle Faculté 30, rue des Saints-Pères,

Librairie Maloine S. A. 8, rue Dupuytren,

7 5 — PARIS VII*

75 —

PARIS VI"

Diffusion en dehors de la France : Mouton & Co P.O. Box 1132 LA HAYE

Library of Congress Catalog Card Number: 78-171097 © 1972, Mouton & Co Printed in France

Remerciements

Les auteurs tiennent à adresser leurs très vifs remerciements : au professeur R. Kerschlagl de l'Université de Vienne, qui fut à l'origine du projet et dont il a défini les buts et la signification pratique ; aux directeurs de recherche des quatre pays considérés : le Dr R. Eder, assisté de M. Krobath, en Autriche ; le professeur J. Goricar, avec la collaboration de M. P. Jambrek, en Yougoslavie ; le professeur B. van Ravenswaaij aux Pays-Bas et au Dr M. Zavalloni, à la fois responsable de l'étude en France et principalement chargé de l'analyse des données de l'enquête dans son ensemble ; aux personnes responsables des travaux du Centre européen de coordination de recherche et de documentation en sciences sociales (Vienne, Autriche) et tout particulièrement à M. E. Raynaud, ex-directeur du centre, et à M. P. Kellermann, chargé de la coordination du projet ; au professeur P. Lazarsfeld de l'Université de Columbia, en tant que consultant sur les problèmes d'échantillonnages et de statistiques ; au professeur J. Goricar de l'Université de Ljubljana, organisateur de la réunion à laquelle ont participé les directeurs de recherche des quatre pays considérés ; à l'Aquinas Fund pour l'aide généreuse accordée au Centre international d'études des relations entre groupes ethniques, pour la préparation de cette recherche ; à I'UNESCO, pour avoir favorisé cette étude dont elle a rendu la réalisation possible grâce à son assistance financière ;

6

Remerciements

à monsieur J.-L. Durand-Drouhin, chargé de recherche du Centre européen de coordination de recherche et de documentation en sciences sociales, pour l'aide apportée à la préparation du manuscrit ; enfin, et tout particulièrement, aux étudiants étrangers des quatre pays qui ont accepté de participer à cette enquête et nous ont permis de voir les problèmes qu'ils rencontrent au cours de leur séjour dans les universités européennes. O. K. et J. B. B.

Table des matières

Introduction Summary in English, p. 13.

9

1. Caractéristiques personnelles de l'échantillon 1. La composition des échantillons nationaux, p. 15 ; 2. Caractéristiques personnelles, p. 19 ; 3. Conclusion, p. 34 ; Summary in English, p. 35.

5

2. Raisons de la venue dans le pays de séjour

37

1. Autriche, p. 37 ; 2. France, p. 38 ; 3. Yougoslavie, p. 42 ; Summary in English, p. 43. 3. Succès 1. p. p.

académiques et satisfaction universitaire La satisfaction universitaire, p. 45 ; 2. Les examens, 51 ; 3. Echecs et difficultés, p. 54 ; 4. Comparaisons, 57 ; 5 Conclusion, p. 64 ; Summary in English, p. 65.

45

4. Relations humaines 1. Les contacts, p. 67 ; 2. Raisons de satisfaction ou d'insatisfaction des relations humaines, p. 82 ; Summary in English, p. 92.

67

5. La satisfaction au niveau de la situation matérielle 1. Aanalyse par pays, p. 93 ; 2. Comparaisons, p. 107 ; Summary in English, p. 116.

93

6. Discrimination 1. Quelques discriminations particulières, p. 120 ; 2. Réactions à la discrimination, p. 129 ; Summary in English, p. 135.

117

Table des matières

8 7. Statut national

137

1. Autriche, p. 138 ; 2. France, p. 138 ; Summary in English, p. 149. 8. Le changement d'opinion

151

1. Changements favorables et défavorables, p. 152 ; 2. Facteurs responsables, p. 156 ; Summary in English, p. 163. 9. Satisfaction générale et rôle de l'information

165

1. Niveau de satisfaction générale, p. 165 ; 2. Rôle de l'information, p. 167 ; Summary in English, p. 180. 10. Suggestions des étudiants pour l'amélioration du séjour . .

181

1. Suggestions pour améliorer les conditions d'études, p. 182 ; 2. Suggestions pour améliorer les relations humaines, p. 192 ; 3. Suggestions pour améliorer les conditions matérielles, p. 198 ; 4. Suggestions pour éliminer la discrimination, p. 204 ; Summary in English, p. 210. Conclusions et implications

211

Conclusions and implications

217

Références

221

Questionnaire

225

Introduction

La plupart des universités ont dans le monde entier ouvert leurs portes aux étudiants étrangers malgré les incidences financières considérables et la charge accrue en équipement et en personnel enseignant. Plusieurs facteurs sont à l'origine de cette ligne de conduite. Tantôt, elle est dictée par le désir d'encourager des amitiés nouvelles, d'obtenir des alliés pour le pays hôte ; le plus souvent, elle reflète la notion d'Université en tant qu'institution véritablement universelle, accessible à toute personne capable de bénéficier des avantages offerts ; parfois encore, elle est conçue sous forme d'assistance technique ou de coopération qu'il convient d'accorder plus particulièrement aux étudiants des pays en voie de développement. C'est sous ce dernier aspect et sous l'angle des études à l'étranger que la présente enquête a été menée. La plupart des personnes concernées, qu'il s'agisse d'administrateurs, de directeurs de facultés ou d'étudiants, ont considéré qu'il était nécessaire d'en évaluer les implications et les conséquences et d'en faire ressortir les réussites et les échecs, afin de déterminer les améliorations à introduire pour en mieux assurer l'efficacité. C'est dans cette intention que nous avons procédé à des interviews des étudiants eux-mêmes, pour connaître les raisons qu'ils ont d'être satisfaits ou mécontents, leurs appréciations au sujet des étudiants à l'étranger, et leurs suggestions quant aux moyens de rendre le système plus profitable dans son ensemble. L'enquête a été menée dans quatre pays : la France, l'Autriche, les Pays-Bas et la Yougoslavie. Dans les trois premiers, nous avons interrogé des étudiants de plusieurs universités, ce qui nous a permis d'établir des comparaisons intra-nationales aussi bien qu'internationales. Les étudiants interviewés étaient originaires de pays en voie de développement. L'échantillon était composé d'Africains, de Nord-

10

Introduction

Africains, d'Asiatiques, de Moyen-Orientaux et de Latino-Américains. En conséquence, nous avons pu comparer, pour un même pays de séjour, les attitudes d'étudiants venant de régions différentes, bien que dans certains cas, nos sous-groupes aient été trop petits pour nous permettre d'accorder beaucoup d'importance à ces comparaisons. Nos interviews ont porté sur divers aspects du séjour : connaissance du pays «nouveau» avant l'arrivée dans ce pays ; premiers contacts ; expérience universitaire proprement dite ; problèmes financiers, logement ; contacts avec les citoyens du pays hôte ; discrimination raciale ; changements d'attitude au cours du séjour ; suggestions en vue d'une amélioration possible des conditions de séjour ; etc. Comme il fallait s'y attendre, les résultats obtenus ne permettent pas d'établir un jugement sur la situation de l'étudiant étranger poursuivant actuellement ses études dans une université européenne, qu'il soit ou non originaire d'un pays en voie de développement. On constate des différences considérables entre les expériences rapportées, et dans la manière d'interpréter ces expériences. Les étudiants sont-ils satisfaits de leur propre expérience dans une université européenne ? Certains le sont, d'autres ne le sont pas. Sontils animés d'intentions plus favorables envers le pays hôte ? C'est vrai parfois, ce ne l'est pas toujours. Ont-ils eu suffisamment de contact avec les citoyens de ce pays ? Les uns répondent par l'affirmative ; d'autres se plaignent ; d'autres encore ne s'intéressent pas à la question. Et il en va ainsi de toutes nos questions ; les généralisations sont dangereuses et injustifiées. Nous avions pour but de découvrir certaines des variables fondamentales auxquelles il convient d'attribuer cette grande diversité de réactions individuelles. Nous espérons avoir ainsi pu faire progresser d'un pas l'analyse et avoir dégagé une base suffisante pour comprendre, en partie tout au moins, les différences d'attitudes que notre enquête a révélées. Nous espérons aussi avoir modestement contribué par notre tentative à la solution du problème pratique que constitue l'amélioration des conditions de séjour des étudiants des pays en voie de développement. Nous devions cependant indiquer que les résultats obtenus sont limités à certains égards de façon significative. Tout d'abord, nous disposions d'échantillons nationaux plutôt réduits, qui une fois divisés en sous-groupes ne permettent d'établir des comparaisons que sur un nombre insuffisant de cas individuels. Nous regrettons surtout

de

Introduction

11

n'avoir pu en France interviewer plus d'étudiants, mais notre enquête, malheureusement, a été interrompue par les «événements de mai» ; il nous a semblé inutile après ces «événements» de procéder à de nouvelles interviews : il y avait un climat de méfiance vis-à-vis de tout questionnaire. Nous avons pensé également que la situation des étudiants étrangers se trouvait modifiée du fait de la nouvelle dimension et de la valeur que prenaient les relations interpersonnelles. Us pouvaient malgré leur position politique et administrative ambiguë avoir des relations avec les étudiants français. L'étudiant étranger devenait une sorte de témoin, qui, riche de plusieurs expériences culturelles et universitaires, pouvait comparer, critiquer et aider ainsi dans la recherche de connaissance et de reconstruction. L'échantillon a été en Yougoslavie beaucoup moins important qu'en Autriche ou en France, en partie parce que la proportion d'étudiants provenant des pays en voie de développement est plus faible dans les universités de Ljubljana. Aux Pays-Bas, l'échantillon était composé de deux populations distinctes, dont l'une comprenait des étudiants plus âgés et plus avancés dans leurs études que ceux interviewés dans les autres pays, ce qui a pour résultat de réduire le nombre d'étudiants des Pays-Bas dont les réponses pouvaient équitablement être comparées à celles données dans les autres pays. Une deuxième limite est venue du fait que la nationalité d'origine des étudiants étrangers présentait dans les quatre pays considérés des différences très marquées. Ainsi, par exemple, on a pu constater dans l'échantillon français la présence de nombreux étudiants africains, alors qu'ils étaient peu nombreux ou même absents dans les autres échantillons. Nous avons établi des comparaisons lorsqu'elles nous ont parues justifiées, mais n'avons pu le faire aussi souvent que nous l'aurions espéré. Une troisième limite a résulté du manque d'uniformité complète dans les questions spécifiques que comportaient nos interviews dans les quatre pays. En Yougoslavie, par exemple, des modifications nombreuses ont été introduites rendant la comparaison impossible sur bon nombre de points. Ceci est imputable en partie sans doute à un manque de communication suffisamment bien établie, mais sans doute également aux changements en cours d'enquête survenus dans la direction de l'étude yougoslave. Cependant, il restait fort heureusement

12

Introduction

une certaine quantité de points qui rendaient des comparaisons possibles. La poursuite d'une étude comparative entre pays est toujours complexe. Nous avons tenté, pour notre part, d'obtenir des résultats comparables au moyen d'une série de réunions entre les directeurs de recherches des quatre pays afin qu'ils se mettent d'accord sur les questions à poser, les échantillons à obtenir, les méthodes à utiliser dans les interviews. L'approche en général a été faite de manière satisfaisante ; mais elle n'a pas réussi à éliminer complètement les différences entre pays dans la manière de diriger la recherche. Forts de cette expérience, nous suggérons, lorsque le budget le permet, de plus nombreuses réunions de travail, tout particulièrement en début d'enquête afin de mettre au point les détails pour arriver à une parfaite entente. Il serait bon que les enquêteurs reçoivent chacun un exemplaire de l'accord auquel ils sont parvenus, et qu'ils le retournent, après signature, à la personne chargée de coordonner l'enquête internationale. L'étudiant étranger a déjà fait l'objet de nombreuses recherches et il en est résulté une assez vaste documentation. Mais il ne nous a pas paru nécessaire de faire ici le résumé des recherches antérieures, puisque l'auteur principal a publié une revue critique du matériel disponible il y a quelques années (Klineberg, 1966) et que depuis lors il n'y a pas eu de développements importants. Le présent rapport contient à plusieurs reprises des citations de cette revue critique, particulièrement sous forme d'hypothèses susceptibles d'être vérifiées par les résultats de l'enquête menée. En outre, il est fait mention de certaines recherches spécifiques lorsqu'elles se rapportent directement à notre analyse. Il convient d'ajouter que la plupart des études précédemment faites n'ont pas porté sur les étudiants des pays en voie de développement, et que relativement peu d'entre elles concernaient la situation dans les universités européennes. Etant donné ces considérations, ainsi que la direction pratique donnée à notre étude, nous espérons avoir pu par ce que nous avions à dire contribuer à la documentation existante. Nous avons tout au moins fait un premier pas dans une direction que nous souhaiterions voir suivre par d'autres enquêteurs.

Introduction

13

SUMMARY IN ENGLISH

The present study was carried out on students from developing countries now studying in four European countries—Austria, France, the Netherlands and Yugoslavia. The interview dealt with various aspects of the sojourn; the knowledge of the " n e w " country before arrival, the university experience, problems of housing, contact with citizens of the host country, racial discrimination, etc. A number of difficulties arose in carrying out a truly comparative study. In spite of the consequent limitations, it is believed that the results have significant practical implications.

1 Caractéristiques personnelles de l'échantillon

Ce chapitre contient des informations sur les populations d'étudiants interviewés. Les statistiques qui s'y rapportent concernent principalement l'origine géographique, l'âge, la religion, le statut marital, la profession du père, la spécialisation universitaire, les ressources financiaires, le logement, etc. On pourra constater que les échantillons des quatre pays considérés diffèrent grandement à tous ces égards. H faut tenir compte de ces divergences lorsqu'on interprète les résultats des comparaisons internationales dont il est question dans les chapitres suivants. Les différences ne sont pas dues en majeure partie aux conditions rencontrées dans les pays hôtes ou les universités de ce pays, mais plutôt à la nature des populations d'étudiants étrangers, ou bien à ces deux facteurs agissant conjointement. Les données contenues dans le présent chapitre doivent permettre d'estimer si les comparaisons qui suivent peuvent être considérées comme étant raisonnables et valables.

1. LA COMPOSITION DES ÉCHANTILLONS NATIONAUX Cette étude a été conduite en 1968 dans quatre pays européens : l'Autriche, la France, la Hollande et la Yougoslavie auprès d'étudiants de sexe masculin originaires de pays en voie de développement. L'élaboration des échantillons a été faite en fonction de la représentation de ces étudiants dans chacun des pays hôtes. Ainsi, en Autriche, l'échantillon est exclusivement composé d'étudiants du Moyen-Orient et d'Europe du Sud-Est, puisque la majorité des étudiants étrangers qui étudient dans ce pays sont originaires de ces régions.

Caractéristiques personnelles de l'échantillon

16

1.1.

AUTRICHE

L'échantillon est composé de 277 étudiants de sexe masculin originaires de pays en voie de développement et interviewés entre mai et août 1968. Parmi eux, 206 résident dans la capitale de l'Autriche : Vienne, et 71 dans une ville de province : Graz. Les pays compris dans cet échantillon sont divisés en deux groupes selon l'origine de l'étudiant : TABLEAU 1-1

Composition de l'échantillon Nombre d'étudiants (277)

Europe du Sud-Est Moyen-Orient

118 159

L'Europe du Sud-Est comprend ici la Grèce (102 personnes) et la Turquie (16) ; le «Moyen-Orient» inclut les pays suivants : Egypte (16), Iran (7), Irak (84), Jordanie (21), Liban (5) et Syrie (21).

1.2.

FRANCE

L'échantillon est composé de 168 étudiants interviewés entre les mois de janvier et de mai 1968. 77 % d'entre eux ont été questionnés à Paris et 24 % dans deux villes de province : Marseille (10 %) et Aixen-Provence (14 %). D'après leurs pays d'origine *, les étudiants ont été regroupés en «zone d'origine». * Les étudiants interviewés étaient originaires des pays suivants : Afrique du Nord : Tunisie, Maroc, Algérie ; Afrique noire : Madagascar, Côte-d'Ivoire, Dahomey, Haute-Volta, Cameroun, Mali, Congo, Togo, Guinée, Gabon, Malawi, Burundi, Des Comores, Djibouti, Mauritanie, Tchad, République Centrafricaine, Sénégal, Niger, Nigeria, Ghana ; Moyen-Orient : Liban, Iran, Syrie, Jordanie, Koweit ; Asie du Sud : Inde, Pakistan, Afghanistan, Ceylan ; Extrême-Orient : Vietnam, Cambodge, Laos, Chine Populaire, Formose, Philippines, Corée du Sud, Indonésie, Hong Kong, Thaïlande ; Amérique latine : Brésil, Colombie, Chili, Venezuela, Mexique, Haïti, Guyane, Costa Rica, Antilles.

La composition des échantillons nationaux

17

Composition de l'échantillon

TABLEAU 1-2

Nombre d'étudiants (168) Afrique du Nord f francophone 59 ) Afrique noire l anglophone 6 ) Moyen-Orient Asie du Sud * Extrême-Orient Amérique latine

38 65 11 11 29 14

* Pour la commodité de la comparaison, les étudiants indiens, afghans, pakistanais et ceylanais seront désignés comme Sud-Asiatiques.

1.3.

PAYS-BAS

120 étudiants ont été interviewés au cours du printemps 1968. 62 d'entre eux étaient inscrits dans une université (Leyde : 35 et Delft : 27). Les autres dans un institut international (Institute of Social Studies : 30) et dans un Centre international : 28. Ces étudiants étaient originaires de 37 pays en voie de développement. TABLEAU 1-3

Composition de l'échantillon

Asie Afrique Amérique latine Moyen-Orient

2

Universités

Instituts

Total

(62)

(58)

(120)

34

22

56

5

22

27

6

7

13

17

7

24

Caractéristiques personnelles de l'échantillon

18

1-4.

YOUGOSLAVIE

69 étudiants, interviewés à Ljubljana, constituent cet échantillon très représentatif puisqu'au cours de l'année scolaire 1967-1968, 100 étudiants étrangers étaient inscrits à cette université. TABLEAU 1 - 4

Composition de l'échantillon Nombre d'étudiants (69)

Pays arabes Pays asiatiques Pays africains Amérique latine

29 14 25 1

Le premier groupe inclut l'Irak, le Yémen, la Jordanie, le Maroc, la Palestine, la Syrie et le Soudan ; le second l'Inde, l'Indonésie, la Mongolie, le Népal et le Pakistan ; le troisième comprend l'Ethiopie, le Ghana, le Kenya, le Lesoto, le Nigeria, la Sierra Leone, la Tanzanie, l'Ouganda et la Zambie et le seul étudiant latino-américain interviewé était bolivien *. Les échantillons qui font l'objet de cette étude sont ainsi très différenciés par la nationalité. La présence de cette variété, ces différences, le fait de n'avoir que deux zones géographiques représentées en Autriche, par exemple, opposé au morcellement des nationalités en France, posait le problème de la constance des difficultés que peuvent rencontrer ces étudiants. Un des buts de l'étude est de voir si malgré des différences d'échantillonnage les formes d'adaptation, les points d'achoppement sont similaires, quel que soit le pays d'origine et le pays de séjour. * La répartition en zone d'origine, telle qu'elle a été faite en Yougoslavie, diffère de celle adoptée dans les autres pays. Ainsi le premier groupe yougoslave comprend le Moyen-Orient, l'Afrique du Nord et un pays africain, le second groupe, l'Asie du Sud et l'Extrême-Orient, alors qu'en France ces groupes sont séparés.

Caractéristiques personnelles

2. CARACTÉRISTIQUES

19

PERSONNELLES

Nous présentons maintenant quelques-unes des caractéristiques personnelles des étudiants.

2.1.

2.1.1.

AUTRICHE

Age

Un étudiant sur 2 est âgé de 24 à 29 ans, un tiers a plus de 30 ans. TABLEAU 1 - 5

Age des étudiants selon la région d'origine Europe du Sud-Est (118)

Moyen-Orient (159)

5 15 20 24 22 10 2 2

3 13 23 34 21 5

%

moins de 18 ans 18-20 ans 21-23 ans 24-26 ans 27-29 ans 30-32 ans 33-35 ans 36-38 ans 39 ans et plus 2.1.2.

%



1

Religion

Le groupe le plus important se composait de musulmans (49 %) ; Europe du Sud-Est (12 %), Moyen-Orient (78 %). Un deuxième groupe d'importance presque égale se composait de chrétiens : catholiques romains (4 %), protestants (1 %) ; orthodoxes grecs (43 %). Les étudiants restants n'avaient aucune appartenance religieuse identifiable. 2.1.3.

Statut marital

73 % des étudiants des deux zones étaient célibataires, 8 % fiancés, et 20 % mariés (Europe du Sud-Est 17 %, Moyen-Orient 20 %).

Caractéristiques personnelles de l'échantillon

20

12 % des étudiants étaient mariés à une Européenne, 8 % à une compatriote. Tous les autres étudiants fiancés ou mariés l'étaient à une Européenne ou à une compatriote. Presque tous étaient accompagnés, pour la durée de leur séjour, de leur fiancée ou de leur épouse. 2.1.4. Profession du père Les pères d'une partie des étudiants exerçaient une profession libérale (17 %) ; certains étaient employés (16 %), commerçants (23 %) ; entrepreneurs (import-export) (12 %). Les autres se divisaient presque également entre ouvriers et artisans (7 % ) * . 2.1.5.

Fiche signalétique universitaire

Près des trois quarts des étudiants interviewés séjournaient en Autriche depuis plus de 6 ans ; 29 % même depuis plus de 10 ans. Ce dernier pourcentage varie considérablement selon les deux zones d'origine. 38 % des étudiants du groupe de l'Europe du Sud-Est séjournaient en Autriche depuis plus de 10 ans ; alors que le pourcentage correspondant n'était que de 20 % pour les étudiants originaires du MoyenOrient. Presque tous les étudiants sont entrés à l'université soit dès la première année de leur séjour en Autriche, soit au cours de l'année suivante. La plupart des étudiants ont obtenu leur diplôme de fin d'études secondaires ; parmi eux 3 % ont un diplôme universitaire. En général, ils ont obtenu l'un ou l'autre diplôme dans leur pays d'origine avant leur arrivée en Autriche. La moitié d'entre eux ont choisi les sciences naturelles comme discipline d'étude ; 31 % ont choisi la médecine ; les autres le droit, les beaux-arts ou le commerce. Comme le montre le tableau 1-6, une différence sensible existe entre les deux zones considérées en ce qui concerne la discipline choisie. Les étudiants ont choisi leur discipline d'étude soit selon leur penchant personnel (57 %), soit pour répondre aux besoins de leur pays. Les différences entre les deux groupes régionaux compris dans l'échantillon sont peu considérables — les étudiants du groupe MoyenOrient semblent avoir été guidés moins par leur intérêt personnel que par les besoins du pays d'origine. * Nous ne disposons pas de l'ensemble des résultats.

Caractéristiques personnelles TABLEAU 1 - 6

21

Disciplines choisies selon la région d'origine

(118)

MoyenOrient (159)

(277)

69 7 24

36 49 15

51 31 19

Europe du Sud-Est

%

Sciences naturelles Médecine Disciplines diverses 2.1.6.

%

Total

%

Ressources financières

Un faible pourcentage des étudiants (12 %) reçoit une bourse de leur propre gouvernement (4 %), du gouvernement autrichien (5 %) ou d'autres sources (3 %). La plupart des étudiants qui reçoivent des bourses n'ont pas d'autres ressources ; seule une faible proportion d'entre eux dispose de ressources supplémentaires provenant de leurs familles ou procurées par leur travail. Trois cinquièmes des étudiants non boursiers sont financés par leurs familles ou disposent d'autres ressources personnelles. 8 % des étudiants vivent uniquement de leur travail et 20 % complètent par leur travail les ressources dont ils disposent. Par divers moyens — la plupart du temps grâce à leurs amis étrangers et autrichiens, ils se sont procurés des emplois comme veilleurs de nuit, vendeurs de journaux, ou des travaux qui se rattachent à leurs études. Ils travaillent à plein temps ou à temps partiel — un tiers d'entre eux 36 heures ou davantage par semaine. Un tiers estime que leurs études ont parfois à souffrir de cette situation, seul un étudiant sur dix trouve que son emploi n'affecte en rien ses études. Parmi les rares étudiants qui estiment avoir eu des difficultés pour trouver du travail, 5 % l'attribuent au préjugé racial. 23 % de la totalité des étudiants ont cherché un emploi mais n'ont rien trouvé qui leur convienne. Parmi les différents empêchements indiqués, il est fait mention des horaires, de la rareté des travaux convenables suffisamment rétribués, et ici encore 2 % des étudiants accusent le racisme. Le revenu mensuel des étudiants se situe en moyenne entre 2 000 et 3 000 schillings (400-600 francs). Deux tiers des étudiants disposent de moins de 3 000 schillings par mois. Comme l'indique le

22

Caractéristiques personnelles de l'échantillon

tableau 1-7 une différence apparaît entre les deux groupes régionaux si l'on prend comme base de comparaison un revenu mensuel de 3 000 schillings : TABLEAU 1-7

Ressources financières selon la région d'origine

(118)

MoyenOrient (159)

57

74

66

43

26

34

Europe du Sud-Est

%

Moins de 3 000 shillings 3 000 schillings ou davantage 2.1.7.

%

Total (277) %

Logement

Complétant les caractéristiques des étudiants, quelques questions touchaient le type et le mode de logement dont ils disposaient. Environ les trois quarts des étudiants habitent dans des chambres indépendantes qu'ils louent directement ou qui leur sont sous-louées. 13 % des étudiants vivent dans leurs propres appartements (Europe du Sud-Est : 9 % ; Moyen-Orient : 15 %) ; 8 % des étudiants habitent dans une résidence universitaire. Le logement leur a été procuré le plus souvent par l'intermédiaire d'un compatriote ou d'un ami autrichien. Plus des trois quarts ont eu des difficultés à résoudre ce problème : ils évoquent la crise du logement et la rareté des chambres convenables à bon marché (55 %) ; ou encore le préjugé racial et la discrimination (30 %). Les difficultés éprouvées sont les mêmes pour les deux groupes régionaux de l'échantillon ; cependant 4 étudiants sur 5 se déclarent maintenant satisfaits de la solution qu'ils ont trouvée.

2.2. 2.2.1.

FRANCE Age

Un étudiant sur deux est âgé de 24 à 29 ans. Seule une minorité a plus de 30 ans (8 %). C'est parmi les Nord-Africains que l'on trouve le plus

Caractéristiques personnelles

23

de jeunes (71 %), contrairement aux étudiants originaires des autres zones, où la moitié au moins a plus de 24 ans. TABLEAU 1 - 8

Age des étudiants selon la région d'origine Ensemble (154)

18-20 ans 21-23 ans 24-26 ans 27-29 ans 30 ans et plus

2.2.2.

4 ) 38 34 34 j 53 19 8

Afrique du Nord (38) % 71

8

63 ji 24 ) 5

29

!

i



Afrique Noire (65) % 2

)

;

26 ! 35

)

25

\

12

28

MoyenOrient (11) N

Asie du Sud

(1)



(11) N

(2) (6) 60 | (8) (3) i (3) — (2) —

(5)

j

«>

ExtrêmeOrient (29) %

»1S

"

Amérique latine (14) N

s

I

«

• ï I - S i »> 6



Statut marital

La plus grande partie des étudiants sont célibataires. 5 % d'entre eux sont fiancés et 10 % mariés à une compatriote, le plus souvent elles ne séjournent pas avec l'étudiant en France. 2.2.3.

Profession du père

23 % des étudiants ont un père paysan, 14 % fonctionnaire, 13 % commerçant, 10 % entrepreneur, 8 % un père exerçant une profession libérale, 5 % occupant une fonction élevée dans l'administration ou dans le gouvernement et 27 % ont fait état de professions diverses (militaires, ouvriers, instituteurs). Selon l'origine des étudiants l'accent est mis sur une profession ou sur une autre. Ainsi la profession de paysan est citée par 42 % des étudiants africains, celle de commerçant par 27 % des Sud-Asiatiques, celle d'ouvrier ou d'artisan par 21 % des Nord-Africains, celle de fonctionnaire par 23 % des Latino-Américains. 45 % des étudiants moyen-orientaux ont un père «entrepreneur» : commerçant en gros dans l'import-export, ou industriel. Il n'y a pas de différence entre les échantillons de Paris et de province, on peut seulement dire que les étudiants dont le père est entrepreneur sont en majeure partie à Paris (11 % comparés à 3 %). La situation s'inverse lorsqu'il s'agit d'étudiants dont le père est paysan : 26 % sont en province, 19 % à Paris.

Caractéristiques personnelles de l'échantillon

24

2.2.4.

Fiche signalétique universitaire

Dans cet échantillon 86 % des étudiants se sont inscrits à l'université l'année même de leur arrivée. Ceux qui ont retardé cette formalité — presque tous d'origine africaine et résidant à Paris — ont attendu parfois jusqu'à 5 ans avant de s'inscrire (13 %). Un étudiant sur deux était alors au niveau du baccalauréat, 20 % de l'échantillon à un niveau inférieur et 35 % poursuivaient des études universitaires dans leur pays et parfois même avaient passé leur licence (13 %). Des différences sont à noter entre les zones d'origine : si un étudiant sur deux originaire d'Asie du Sud, ou d'Amérique latine, a déjà reçu un début de formation universitaire, voire même passé une licence, environ un Africain et un Extrême-Oriental sur trois n'a pas atteint le niveau du baccalauréat. Pour ces derniers, l'expérience en France n'est donc pas seulement universitaire, mais comprend également les études secondaires. TABLEAU 1 - 9

Disciplines choisies selon la région d'origine Ensemble (154)

%

Sciences Lettres Droit Médecine Beaux-Arts Commerce Journalisme Théologie

31 23 20 6 6 9 2 3

Afrique Afrique Moyendu noire Orient Nord (38) (65) (H) % % N 42 21 13 —

11 8 5 —

20 26 22 11 —

12 2 6

Asie du Sud (11) N

Extrême- Amérique latine Orient (29)

%

(14) N

(5) (1) (1) (2) (1) (1)

41 14 28 3 7 7















(1)

(1) (6) (2) —

(2) —

(6) (5) —

(2) —

Les trois quarts des étudiants sont inscrits en sciences (31 %), lettres (23 %) ou droit (20 %). Le nombre d'étudiants en médecine, fort restreint, ne représente que 6 % de l'échantillon global. Dans l'effectif parisien on trouvait aussi quelques étudiants aux beaux-arts, en théologie, journalisme, et commerce. Deux groupes se dégagent si l'on

Caractéristiques personnelles

25

considère les zones d'origine : d'une part se trouvent les Nord-Africains, les Sud-Asiatiques et les Extrême-Orientaux, souvent dans des disciplines scientifiques, d'autre part, les Moyen-Orientaux et les Latino-Américains, dont la moitié font des études littéraires. Les Africains se répartissent presque également entre les différentes disciplines. L'orientation vers les sciences est due souvent au critère d'attribution des bourses, de préférence octroyées aux scientifiques. Le choix est-il dû au goût personnel ou tient-il compte des besoins du pays d'origine ? 76 % mentionnent leur goût personnel, 53 % les besoins du pays. Seuls 17 % des étudiants déclarent n'avoir choisi que pour répondre aux besoins de leur pays. 2.2.5.

Ressources

financières

Ainsi, dans le cas des Africains, Nord-Africains et Sud-Asiatiques 3 étudiants sur 4 sont des boursiers, ce qui est le cas pour la moitié des Extrême-Orientaux et pour un tiers seulement des Moyen-Orientaux. 13 Latino-Américains sur 14 sont boursiers. La moitié d'entre eux disposent d'une source de revenu supplémentaire, mais ce cas de double revenu est moins fréquent dans les autres régions d'origine. Les étudiants non boursiers reçoivent de l'argent de leur famille, travaillent ou vivent de l'ensemble de ces deux sources de revenus *. Ainsi, les étudiants d'origine nord-africaine et africaine, non boursiers, vivent TABLEAU 1 - 1 0

Ressources financières selon la région d'origine

(154)

%

(38) %

(65) %

(H) N

Asie du Sud (11) N

69

77

80

(4)

31

24

20

(7)

Ensemble Afrique Afrique Moyendu Nord noire Orient

Boursiers Nonboursiers

Extrême- Amérique latine Orient (29) %

(14) N

(8)

48

(13)

(3)

52

(1)

* Les étudiants ont obtenu leur emploi par l'intermédiaire d'amis (surtout français), quelques-uns grâce aux services sociaux, après avoir cependant rencontré des difficultés dans la recherche d'un travail. Us sont généralement occupés moins de 26 heures par semaine, et un étudiant sur trois craint que ce travail n'ait des répercussions fâcheuses sur ses études.

26

Caractéristiques personnelles de l'échantillon

généralement de leur travail, alors que les Moyen-Orientaux, les Extrême-Orientaux et les Sud-Asiatiques vivent de l'aide que leur apporte leur famille. Le recours au travail comme moyen de subsistance consiste alors à être veilleur de nuit, livreur, ou employé de maison (ce type d'emploi n'est cité qu'à Paris), à donner des cours particuliers, à être auxiliaire scolaire (moniteur, répétiteur), enquêteur ou à écrire des articles. Cependant, si peu d'étudiants travaillent (13 %), cela ne veut pas dire que d'autres n'aient pas cherché à le faire en vain (21 %). Les difficultés sont dues au sous-emploi, au préjugé racial (ce sont les étudiants de Paris qui en souffrent le plus), aux horaires, ou au manque de qualification des étudiants. Il est intéressant de noter ici que les étudiants qui n'ont pas réussi à trouver de travail, parlent plus souvent de discriminations raciales que ceux qui ont fini par en trouver. Finalement, dans cet échantillon, la moitié des étudiants disposent de 400 à 600 francs par mois. Le minimum pour certains (9 %) étant de moins de 400 francs et le maximum (11 %) de 800 à 1 000 francs ou davantage. Les étudiants les plus aisés sont originaires du MoyenOrient (75 % d'entre eux disposent de plus de 600 francs par mois), les plus démunis sont d'Afrique du Nord (les trois quarts d'entre eux disposant de moins de 600 francs). Un Latino-Américain sur deux a un revenu mensuel de plus de 600 francs. TABLEAU

1-11

Montant des ressources selon la région d'origine

(153) %

(38) %

(65) %

(11) N

Asie du Sud (11) N

65 35

77 23

66 35

(3) (8)

(7) (4)

Afrique Afrique MoyenEnsemble du Nord noire Orient

— de 600 F. + de 600 F.

2.2.6.

Extrême- Amérique latine Orient (27) %

(14) N

67 33

(7) (7)

Logement

La moitié des étudiants environ vivent en cité universitaire. Ce type d'habitat, plus fréquent en province qu'à Paris est cité par les NordAfricains, les Extrême-Orientaux (à peu près les trois quarts d'entre eux

Caractéristiques

personnelles

27

respectivement), et par 64 % des Latino-Américains. Les étudiants originaires du Moyen-Orient se partagent entre le foyer universitaire et d'autres types de logement tels que la chambre indépendante ou l'appartement. Selon que l'étudiant vit à Paris ou en province, on note une différence dans le mode de logement : en effet, si presque tous les étudiants vivent seuls en province, à Paris un tiers pour le moins partagent leur logement. Le «coturne» est alors le plus souvent un compatriote. En général, les étudiants sont satisfaits de leur logement. TABLEAU 1-12

Logement selon la région d'origine

Ensemble (153)

%

Logement universitaire Autre

58 42

Afrique Afrique Moyen- Asie du Orient du Nord noire Sud (38) (65) (13) (H) % % N N 61 40

57 44

(7) (6)

(6) (5)

Extrême- Amérique latine Orient (29)

%

(14) N

62 37

(9) (4)

Les organismes d'aide aux étudiants et le service des bourses ont permis à 53 % des étudiants de trouver un logement. Les autres ont eu recours à des amis (25 %), et une minorité aux ambassades, aux petites annonces ou à des agences. Trouver un logement n'est cependant pas chose aisée : 46 % des étudiants parlent des difficultés qu'ils ont rencontrées. Il s'agit alors de Nord-Africains (55 %), d'Indo-Pakistanais (45 %), d'Africains (42 %), d'Extrême-Orientaux (41 %) et de Moyen-Orientaux (38 %). Seuls 3 Latino-Américains sur 15 disent avoir eu des difficultés. En dehors de la crise du logement, citée plus fréquemment à Paris, un tiers de ces étudiants attribuent leurs problèmes au préjugé racial. Ces étudiants sont alors d'origine africaine (20 %), nord-africaine (19 %) et extrême-orientale (10 %).

Caractéristiques personnelles de l'échantillon

28

2.3. 2.3.1.

PAYS-BAS Age

Si l'on compare les étudiants selon leur âge, on constate des différences marquées selon qu'ils sont à l'université ou à l'institut. A l'université 26 % des étudiants ont plus de 30 ans, alors que 59 % des étudiants dans les instituts sont dans ce cas. A l'université la moitié des étudiants indonésiens a plus de 30 ans, il en est de même pour les étudiants asiatiques. TABLEAU 1 - 1 3

Age selon le lieu d'étude Universités (62) %

Instituts (58) %

Total (120) %

5 65 13 13 5

2 36 47 12 4

4 51 29 13 4

moins de 21 ans 21-29 ans 30-35 ans 36 ans et plus dont on ignore l'âge TABLEAU 1 - 1 4

Statut marital, le lieu d'étude et la région d'origine indonésiens (25) %

Célibataire Fiancé Marié 2.3.2.

75 —

25

Universités asia. . , total tiques (36) (61) % % 76 — 24

67 5 28

Instituts

Total

(57)

(118) %

46 5 49

57 5 38

%

Statut marital

Comme on peut alors s'y attendre, un pourcentage plus élevé d'étudiants des instituts (49 %) sont mariés ; ils sont presque tous mariés

29

Caractéristiques personnelles

à une compatriote (86 %) et celle-ci vit en général dans le pays d'origine (72 % ). La situation des étudiants mariés est toute différente pour les universités (28 %) ; en effet, près de la moitié des étudiants mariés de ce sous-groupe le sont à une femme de nationalité étrangère (47 %) et, parmi eux, 88 % au moins ont leur femme qui habite avec eux aux Pays-Bas. 2.3.3. Religion Une dernière indication doit être donnée, elle concerne la répartition des étudiants selon leur appartenance religieuse : TABLEAU 1 - 1 5

Répartition selon la religion * Universités (62)

%

Ignorée Chrétien Juif Musulman Bouddhiste et Hindou Diverses Aucune



27 2 21 6 19 23

Instituts (52)

Total (114)

4 27 2 15 19 25 8

2 28 2 18 12 22 16

%

%

* Nous ne disposons pas d'informations sur la répartition des étudiants selon la région d'origine.

2.3.4.

Fiche signalétique universitaire

Un autre aspect sous lequel diffèrent les deux échantillons, étudiants de l'université et étudiants des instituts, concerne la discipline étudiée. Comme l'indique le tableau ci-dessous, la répartition en disciplines alpha-bêta-gamma * varie considérablement. Alors que les disciplines «alpha» ainsi que la médecine se rencontrent toutes chez les étudiants du groupe universitaire, les disciplines «gamma» sont plus représentées dans le sous-groupe des étudiants des instituts. * Cette classification est communément employée aux Pays-Bas.

30 TABLEAU 1 - 1 6

Caractéristiques personnelles de l'échantillon Répartition selon les diverses disciplines Universités (62) %

J„

Disciplines alpha Littérature Droit Diverses

3 5 10

Disciplines bêta Sciences naturelles et techniques Médecine

50 11 ¡ 6 1

Disciplines gamma Sciences sociales Diverses

14 7

!21

Instituts

Total

(58) %

(120)



%

)

S ì

32

"

2 3 5

1"

32

io

42 ; 48 6

44 | 68 24

29 ! 44 15

5

Etant donné que la durée des études est en général beaucoup moins longue dans les instituts que dans les universités, il n'est pas surprenant de constater aussi des différences considérables selon la durée du séjour des étudiants des deux groupes interviewés. TABLEAU 1 - 1 7

Répartition selon la durée du séjour* Universités (60) %

Plus de 8 ans Entre 4 et 8 ans Entre 1 et 4 ans Moins d'un an

13 38 27 22

Instituts

Total

(58)

(118) %

%



3 9 88

7 21 18 54

* Nous ne disposons pas d'informations sur la répartition des étudiants selon la région d'origine.

Caractéristiques personnelles 2.3.5.

Ressources

31

financières

Les différences entre les ressources financières des deux groupes sont très marquées. Nous indiquons ci-dessous la répartition entre boursiers et non-boursiers ; entre étudiants interviewés qui en dehors de leurs études occupent un emploi et ceux qui n'en occupent pas ; selon les ressources dont ils disposent mensuellement. La moyenne des ressources pour les étudiants du groupe universitaire est de 470 francs par mois ; elle est de 690 francs pour ceux des instituts. A l'Université les trois quarts environ des étudiants indonésiens et asiatiques n'ont pas de bourses d'études, et disposent de ressources mensuelles inférieures à 450 francs. Les ressources les plus faibles étaient celles d'un étudiant venu d'Asie, soit de 175 francs par mois ; les plus élevées étaient celles d'un étudiant d'Amérique latine : 1 400 francs par mois. (Le montant des bourses est en moyenne d'environ 640 francs par mois.) TABLEAU 1 - 1 8

Quelques indications concernant la situation financière des interviewés Universités (62) %

Instituts

Total

(52)

(120) %

%

Boursier Non-boursier

29 71

95 5

61 39

Emploi uniquement Emploi et autres ressources Sans emploi

12 30 57

21 80

6 26 68

Revenu inférieur à 300 francs Entre 300 et 449 francs Entre 450 et 599 francs Entre 600 et 749 francs Dépassant 750 francs

23 41 12 12 10

— 5 14 61 21

12 24 13 35 15

Compte tenu des différences indiquées dans le statut personnel et les ressources financières, on peut s'attendre à ce que les deux groupes d'étudiants originaires de pays en voie de développement, qui séjour-

32

Caractéristiques personnelles de l'échantillon

nent aux Pays-Bas, aient des réactions bien différentes lorsqu'ils se déclarent satisfaits ou non de leur séjour.

2.4.

2.4.1.

YOUGOSLAVIE

Age

Les étudiants interviewés sont nés entre 1930 et 1949 et la majeure partie en 1941. 2.4.2.

Profession du père

La profession du père est généralement indiquée par les étudiants originaires du Moyen-Orient comme étant : commerçant, propriétaire, «white collar worker» ; les étudiants venant d'Asie indiquent : fermier, «white-collar worker» et «directeur» ; ceux d'Afrique : fermier, commerçant, «white-collar worker» et artisan. 2.4.3.

Fiche signalétique universitaire

Les 69 étudiants étrangers interviewés à l'université de Ljubljana, indiquaient la durée de leur séjour à l'université comme suit : TABLEAU 1 - 1 9

Répartition selon la durée du séjour Nombre d'étudiants (69)

%

Entre 1 an et 4 ans Entre 4 ans et 8 ans

60 40

La durée des études universitaires étant en moyenne de cinq années à Ljubljana, on peut admettre que 65 % de ces étudiants sont à l'université depuis une période normale, alors que 35 % d'entre eux l'ont dépassée. Certains étudiants avaient fait des études antérieures et terminé l'équivalent du « lycée » ou une école professionnelle ;

Caractéristiques personnelles

33

9 % de ces étudiants avaient été précédemment inscrits dans diverses facultés : médecine (3 %), ingénieurs (1 %) et journalisme (1 %). A Ljubljana, les étudiants inscrits se répartissaient ainsi : TABLEAU 1-20

Disciplines choisies Nombre d'étudiants (69) %

Médecine Architecture Electrotechnique Ingénieurs Economie Mines et métallurgie Chimie Pharmacie Technologie chimique Stomatologie Bois et forêts Physique

26 19 17 16 6 4 3 3 1 1 1 1

La majorité des étudiants ont choisi leurs disciplines à la fois pour des raisons personnelles et en considération des besoins de leurs pays (65 %), 27 % uniquement pour répondre aux besoins de leurs pays ; 8 % ont indiqué d'autres raisons. 2.4.4.

Ressources

financières

Sur les 69 étudiants interviewés, 19 % seulement ne reçoivent pas de bourse ; tous les autres sont boursiers pour la plupart du gouvernement yougoslave (47 %), de l'Institut de coopération technique internationale (16 %), ou du gouvernement de leur propre pays (3 %). 15 % reçoivent à la fois une bourse du gouvernement yougoslave et une bourse de leur gouvernement. Les non-boursiers sont aidés financièrement soit par leur famille (15 %), soit par «quelqu'un d'autre» (4 %). 3

Caractéristiques personnelles de l'échantillon

34

Le revenu mensuel moyen (y compris les bourses et autre assistance financière) est le suivant : pour les étudiants d'Asie 793,75 dinars d'Afrique 655,40 dinars du Moyen-Orient 606,66 dinars

3. CONCLUSION Les échantillons des quatre pays diffèrent beaucoup par leurs caractéristiques personnelles, universitaires et financières. Cependant, il est permis de supposer que peut-être, au-delà de ces différences personnelles et les différences dans leurs ressources et leurs modes de vie, les étudiants du Tiers-Monde ont à faire face à des problèmes qui n'en demeurent pas moins constants, et qu'au premier chef les raisons qui ont motivé leur venue dans les quatre pays considérés ont pu être les mêmes.

Caractéristiques personnelles de l'échantillon

35

SUMMARY IN ENGLISH

Chapter I contains information regarding certain characteristics of the student populations interviewed in the four countries. The data presented refer to the national or regional origins, age, religion, marital status, father's occupation, field of study, financial resources, lodging, etc. The populations vary considerably in some respects. For example, there are no African students in the Austrian sample ; there are marked differences in lodgings, with French students more frequently living in university dormitories, etc. These variations should be kept in mind in interpreting the result of the international comparisons which are presented later. Some of the differences obtained may be due not to conditions in the receiving countries or universities, but rather to the nature of the foreign student population, or to both factors operating together.

2 Raisons de la venue dans le pays de séjour

Ce court chapitre résume les motifs qui ont déterminé les études à l'étranger et les raisons données pour le choix d'un pays ou d'une université particulière. A nouveau, on constate une grande variété dans les réponses données ; il est très souvent fait mention de «liens culturels» avec la France par les étudiants originaires d'anciennes colonies — ce qui bien entendu n'est pas le cas pour les étudiants venus dans les trois autres pays. Une juste compréhension des motivations sousjacentes ne peut manquer d'avoir des implications importantes sous les autres aspects de la présente enquête, étant donné que le degré de satisfaction au sujet des études peut être lié aux motifs de la venue de l'étudiant. De plus les sentiments d'anxiété exprimés avant le départ (plus fréquents qu'il n'était prévu) nécessitent des solutions concrètes dans le but de diminuer cette anxiété. Nous avons cité textuellement dans ce chapitre certaines des réponses données par des étudiants (en général, en France) ; il en sera fait de même dans les chapitres suivants. L'objectif principal qu'ont les étudiants en venant en Europe est d'acquérir une formation professionnelle. Mais, comme il est indiqué ci-après d'autres raisons peuvent motiver la venue des étudiants.

1.

AUTRICHE

31 % des étudiants de chaque groupe sont venus en Autriche parce qu'ils s'y sentaient «obligés», d'une façon ou d'une autre : parce que la discipline qu'ils voulaient étudier n'était pas enseignée dans leur pays, parce qu'ils avaient une bourse dans une université autrichienne ou une bourse du gouvernement autrichien, ou parce que leurs parents ou leurs professeurs les y incitaient. La plupart des étudiants, cependant, se décidaient pour d'autres raisons. Ainsi, il

38

Raisons de la venue dans le pays de séjour

n'existe pas en Autriche de numerus clausus d'aucune sorte et il semblait à certains étudiants que c'était la seule possibilité offerte ; ils se représentaient aussi l'Autriche comme un pays où le coût de la vie n'est pas très élevé — 28 % des étudiants ont choisi ce pays pour cette raison. Vient ensuite la réputation des universités autrichiennes ; 27 % des étudiants indiquent avoir été attirés par la qualité des études et des professeurs. Ils étaient désireux d'acquérir de nouvelles connaissances, de nouvelles idées. Les autres raisons données étaient relativement moins mentionnées : 15 % des étudiants sont venus parce qu'ils avaient des amis ou des relations dans le pays ; 11 % ont subi l'attrait de la culture autrichienne en particulier et du prestige culturel et intellectuel qu'on attache en général aux études à l'étranger. Les autres citaient tantôt la liberté — tant individuelle que politique — qui semblait régner en Autriche, la nécessité d'élargir leur horizon, d'autres encore ont voulu suivre la tradition : leurs parents ou leurs amis étaient allés en Autriche. Interrogés sur ce qui les avait attirés davantage vers l'Autriche au moment de leur choix, 29 % ont mentionné la qualité des études et de l'enseignement autrichien. Interviennent également des considérations financières (22 %), la présence d'amis (15 %), l'image qu'ils se sont faite de la culture autrichienne (13 %) et, plus simplement, l'Autriche elle-même, le pays, la géographie, «les montagnes», et le peuple (13 % ) ! En dehors de l'attrait de l'Autriche et des études à l'étranger en général, plus de la moitié des étudiants déclarent avoir éprouvé un sentiment d'incertitude et d'anxiété au moment de prendre leur décision : crainte de l'inconnu, peur du nouveau, difficultés pressenties concernant les contacts sociaux et l'adaptation à un environnement nouveau (17 %), problèmes de langue (10 %), ou difficultés économiques (ressources financières, logement). 76 % des étudiants redoutaient d'avance le mal du pays et l'isolement, 3 % environ souffraient d'un sentiment d'infériorité concernant leurs études. 3 % des étudiants s'attendaient à trouver en Autriche l'existence d'un préjugé racial. 2.

FRANCE

Dans cet échantillon, les étudiants, boursiers ou non, sont venus dans le pays hôte dans le but principal d'étudier, de compléter leur forma-

Raisons de la venue dans le pays de séjour

39

tion. Mais avant d'indiquer ce motif précis (30 %), 47 % des étudiants font mention de circonstances «extérieures». Ce qui signifie que près de la moitié des étudiants sont venus en France par suite d'une pression extérieure, soit qu'ils aient reçu une bourse d'études dans ce pays, qu'ils y aient été encouragés par leurs parents et leurs professeurs, ou encore parce qu'il n'existait pas dans leur pays de faculté pour la discipline qu'ils souhaitaient étudier. «Pour étudier. Mes parents aussi voulaient que je vienne en France. Moi, j'étais plutôt content.» . R

AFGHANISTAN.

«J'ai été envoyé par le gouvernement.»

MAROC

«J'ai été poussé par mes professeurs qui voulaient que je fasse "Normale". La responsabilité des professeurs français en Afrique.» TOGO.

35 % expliquent leur venue en France par les «antécédents» de leur pays : leur pays est une ancienne colonie, ils parlent couramment la langue ou parce que la tradition le veut. «Voir la métropole tant vantée par les livres français.» MADAGASCAR.

«La capitale, la culture française. Nous avons été élevés par la force des choses dans cette culture et nous l'aimons. Nous nous sentons presque chez nous.» MADAGASCAR.

Certains (9 %) sont venus en quête d'un changement, pour se libérer de leur milieu, quitter leur pays, rompre avec des structures rigides. C'est le cas de 20 % des Nord-Africains. Les antécédents du pays jouent un grand rôle dans la venue des Africains (41 %). Les facteurs extérieurs sont importants pour les Nord-Africains (58 %), les Africains et les Sud-Asiatiques (54 %). L'attrait culturel de la France est une raison souvent mentionnée (25 %), notamment par les Moyen-Orientaux

40

Raisons

de la venue dans le pays de

séjour

(73 %) et les Latino-Américains (57 %). 73 % des Latino-Américains étaient attirés par la culture et la civilisation françaises. «Franchement, je voulais savoir si les Français vivaient vraiment comme le disaient mes professeurs français et les livres. Et puis, j'ai toujours entendu dire que la France est un pays de liberté, d'ouverture, de tolérance.» VIETNAM.

«Autrefois, je croyais que la civilisation et la culture françaises étaient prestigieuses. En Asie, la France c'est encore le siècle des lumières. Mais maintenant je vois des lacunes.» PHILIPPINES.

«C'est une habitude au Liban et l'image de la France jouait, la littérature, la culture française, la réputation de liberté. Je voulais voir sur place si cette image était vraie.» LIBAN.

«La France, c'était "l'idéal" pour nous autres colonisés qui ne la connaissions que par les colons et la vie luxueuse qu'ils menaient tous, et leur complexe de supériorité raciale qu'on pensait inexistant ici.» GABON.

«En Afrique on a un complexe d'infériorité vis-à-vis de la France. Tout le monde veut y aller.» DAHOMEY.

En même temps la plupart des étudiants (82 %) se rappellent avoir eu des inquiétudes qui varient généralement selon leur nationalité et leur connaissance du pays hôte et la proximité culturelle. Ainsi tous les étudiants sud-asiatiques éprouvaient des craintes, à comparer avec 86 % des Extrême-Orientaux, 83 % des Africains, 74 % des NordAfricains et seulement 64 % des Moyen-Orientaux. Tous les LatinoAméricains (sauf un) avaient aussi des sujets d'inquiétude, des appréhensions. Ces inquiétudes consistaient en la peur du nouveau (38 %), la nostalgie du pays (32 %), la possibilité de difficultés matérielles (21 %).

Raisons de la venue dans le pays de séjour

41

«Partir sans trop savoir ce qu'on va devenir.» DAHOMEY.

«L'indifférence des gens, être gauche.» TUNISIE.

«Etre seul.» AFGHANISTAN.

«La coupure avec l'Afrique.» MALI.

«Rompre les attaches avec le sol natal.» TOGO.

Quelques étudiants encore parlaient des difficultés universitaires, des mœurs, de l'impact de la décolonisation et de la langue. «A quoi correspondait dans la mentalité française la décolonisation et l'indépendance des Etats africains.» CAMEROUN.

Les étudiants viennent en France parce qu'ils ont une bourse ou parce que la faculté qu'ils veulent suivre n'existe pas chez eux, parce qu'ils sont originaires de pays francophones ou parce que les liens politiques ou culturels entre les deux pays jouent un certain rôle. Ceux qui vivent en province ont choisi le lieu de leurs études et de leur séjour en fonction du climat (49 %), qu'ils veulent le plus proche possible de celui de leur pays, et cela est valable pour la moitié de cet échantillon ; ensuite, toujours dans l'optique du «moins différent», parce qu'ils y auront un rythme de vie plus proche de celui auquel ils sont habitués, parce que la vie est moins chère et qu'ils seront plus suivis par leurs professeurs. Le choix de la province apparaît comme la solution de prudence et doit théoriquement permettre une adaptation universitaire et matérielle plus facile qu'à Paris, ce que semblent confirmer les réponses.

Raisons de la venue dans le pays de séjour

42

3.

YOUGOSLAVIE

Parmi les raisons qui ont motivé leur choix, les étudiants étrangers indiquent tout d'abord que la Yougoslavie est un pays amical, socialiste et pacifique (25 %), ensuite qu'ils ont reçu une bourse pour venir dans ce pays (22 %), 12 % sont venus à la demande de leur gouvernement, 4 % d'entre eux pour acquérir des connaissances qui leur permettraient de contribuer au développement de leur pays, et les autres pour des motifs plus ou moins importants. 3 % d'entre eux ont déclaré être venus parce que les conditions dans les universités yougoslaves étaient meilleures que dans les autres pays, et un étudiant explique avoir lu dans un journal anglais que l'université de Ljubljana était une des meilleures en Europe pour l'étude des mines. Donc, comme l'indiquent les résultats obtenus en Autriche et en France confirmant ceux de Coelho (1962), les étudiants sont venus pour étudier, pour acquérir une formation professionnelle et profiter également du climat culturel de ce pays. La question qui se pose naturellement à un premier niveau est de savoir si les étudiants sont satisfaits de leurs études *.

* Nous n'avons pas de données concernant les Pays-Bas.

Raisons de la venue dans le pays de séjour

43

SUMMARY IN ENGLISH

This brief chapter summarizes the motives for study abroad, and the reasons for choosing one particular country or university. Once again we find great variations ; the frequent mention of "cultural links" with France by students from former colonies is obviously not often in the statements of those who are studying in the other three countries. The understanding of the motivations involved may have important implications for other aspects of this investigation, since the degree of satisfaction with study in a particular university may be related to the reason for coming. In addition, the anxieties expressed before coming (and they are more frequent than was anticipated) suggest the need for a practical approach toward the reduction of such anxieties. In this chapter we have included a few direct citations from the responses of the students (usually in France); this practice will be continued in later chapters.

3 Succès académiques et satisfaction universitaire

Nous avons dans ce chapitre posé la question du degré de satisfaction éprouvé par les étudiants au sujet de leurs études à l'étranger ; nous reviendrons par la suite sur les autres aspects de la question. En général, seule une faible proportion des étudiants interviewés se sont déclarés mécontents. Nous avions supposé, entre autres, que leur satisfaction ou leur mécontentement serait sans doute fonction de leurs succès ou de leurs échecs aux examens. Les résultats de l'enquête n'indiquent cependant aucune relation directe de ce genre. Nous avons dû, il est vrai, nous baser sur les succès et les échecs dont faisaient part les étudiants eux-mêmes ; alors qu'on peut admettre qu'ils aient tous été véridiques, il va sans dire qu'un indice plus objectif eût pour nous été préférable. Les étudiants ont fait mention de certaines difficultés plus spécifiques rencontrées par eux dans leurs examens et il en sera discuté plus loin ; lorsque nous en viendrons à formuler des recommandations d'ordre pratique à l'intention des autorités de l'enseignement universitaire. Un élément de surprise a été pour nous de constater, dans ce chapitre, la fréquence avec laquelle les étudiants ont en France indiqué le «racisme» comme étant lui aussi à la source de leurs difficultés.

1. L A

SATISFACTION

UNIVERSITAIRE

Dans la vie universitaire de l'étudiant, on peut envisager deux aspects : l'un, subjectif, est fait d'expériences diverses et quotidiennes, de contacts avec les personnes, étudiants et professeurs ; l'autre représente l'effet objectif du séjour, à savoir le «rendement» de l'individu, les succès académiques. Les étudiants sont en général satisfaits de leurs études.

Succès académiques et satisfaction

46

universitaire

Il n'y a guère de différence entre les résultats obtenus dans les pays considérés ; cependant un quart des étudiants séjournant en Autriche se déclarent insatisfaits de leurs études, à comparer à environ 10 % des étudiants aux Pays-Bas ou en France. (Nous n'avons pas de statistiques comparables pour la Yougoslavie.) TABLEAU I I I - 1

Très satisfaits Satisfaits Insatisfaits

Satisfaction au niveau des études AUTRICHE

FRANCE

(277) %

(153)

Universités (62)

Instituts (53) %

12 63 25

34 58 8

16 71 13

40 58 2

%

PAYS-BAS

%

Cette conclusion globale sur la satisfaction concernant les études était étayée par quelques questions plus précises touchant les travaux pratiques et les contacts avec les professeurs *.

1.1.

1.1.1.

AUTRICHE

Les travaux pratiques

Les étudiants rencontrent des difficultés dans les travaux pratiques en dehors des problèmes personnels qu'ils peuvent avoir. Un nombre important d'étudiants (36 %) se sent très à l'aise à l'intérieur du groupe par suite de l'atmosphère ouverte, de la confiance et de la qualité des professeurs — 22 % se sentent gênés. Lorsque les étudiants indiquent que leur attitude envers les groupes de travail est «variable» cela signifie en général qu'ils éprouvent des difficultés à s'intégrer. Ces difficultés sont dues parfois aux caractéristiques personnelles de l'étudiant, ou bien à l'attitude du groupe à son égard ; * Les résultats concernant les Pays-Bas et la Yougoslavie manquent.

La satisfaction universitaire

47

mais d'autres facteurs plus objectifs peuvent jouer, pour ne citer que le niveau scientifique des colloques et les qualités personnelles et pédagogiques des professeurs. Un cinquième environ des étudiants se réfèrent à leurs caractéristiques personnelles pour expliquer leur gêne : ils mentionnent l'obligation de s'adapter à un environnement différent (13 %), les dificultés de la langue (4 %), leurs connaissances insuffisantes, leur aversion pour le travail manuel et parfois aussi leur timidité et leur inquiétude. En Autriche 11 % des étudiants imputent leurs difficultés à «l'esprit de corps» des étudiants autrichiens. 8 % critiquent la qualité des sessions de travaux pratiques ou la compétence des professeurs. Un faible pourcentage (3 %) a également parlé de racisme pour expliquer la gêne ressentie à l'intérieur des groupes. 1.1.2.

Les contacts avec les professeurs

Le contact entre professeurs et étudiants en général, sans tenir compte de leur origine, est décrit par 41 % des étudiants comme étant bon ou même excellent avec une différence assez sensible entre étudiants de l'Europe du Sud-Est (54 %) et étudiants du Moyen-Orient (33 %). Les étudiants attribuent leur satisfaction au sujet de ces contacts à la qualité des professeurs et à leur compréhension des problèmes de l'étudiant. Cependant, pour la plupart, ils précisent que très souvent la qualité des contacts est due à l'initiative de l'étudiant. 24 % des étudiants décrivent les contacts entre professeurs et étudiants comme étant en général réservés et assez tièdes, et 34 % considèrent ces contacts comme étant pour ainsi dire inexistants. Dans cette dernière appréciation, on constate des différences très marquées entre les opinions exprimées par les deux groupes régionaux de l'échantillon : 21 % des étudiants de l'Europe du Sud-Est se plaignent de l'absence de contact entre professeurs et étudiants, alors que 42 % des étudiants du groupe du Moyen-Orient le font. Parmi les motifs incriminés, on retrouve avant tout la hiérarchie sociale, la grande distance qui sépare les professeurs de leurs élèves (21 % des étudiants partagent cette opinion), mais parfois les étudiants interviewés ont considéré la situation comme étant inévitable par suite du trop grand nombre d'étudiants. Interrogés plus particulièrement sur les contacts entre professeurs et étudiants étrangers originaires des pays en voie de développement, les

Succès académiques et satisfaction

48

universitaire

étudiants ont varié considérablement dans leurs jugements. Selon l'avis des étudiants d'Europe du Sud-Est, les contacts semblent se détériorer lorsqu'il s'agit d'étudiants étrangers, alors qu'au contraire une amélioration dans les contacts semble résulter des réponses données par les étudiants du Moyen-Orient. TABLEAU I I I - 2

Opinions sur les contacts entre professeurs et étudiants

Europe du Sud-Est (117) Etudiants des pays Etudiants en voie en de dévegénéral loppement % % Contacts : Bons ou excellents Plutôt réservés Presque inexistants Réponses diverses ou sans réponses

Moyen-Orient (159)

Total (276) Etudiants en général

%

Etudiants des pays en voie de développement %

%

Etudiants des pays en voie de développement %

Etudiants en général

54 24

48 30

33 25

36 27

41 24

42 27

21

19

42

36

34

29

1

3



1



2

Parmi les raisons données pour expliquer l'état satisfaisant des contacts entre professeurs et étudiants étrangers il est fait mention de la qualité des professeurs, de leur tendance à venir en aide aux étudiants étrangers et à traiter de façon égale les étudiants autrichiens et étrangers. De nombreux étudiants insistent sur la nécessité d'une initiative de la part de l'étudiant. Le plupart, cependant, déplorent la distance considérable qui existe entre professeurs et étudiants, et certains mentionnent à ce propos le racisme (7 %). 1.1.3.

Conclusion

Après avoir examiné en détail les expériences et les attitudes décrites en réponse au questionnaire — on constate que 75 % des étudiants ont déclaré comme étant satisfaisante leur expérience au sujet de leurs études (12 % d'entre eux l'ont déclarée comme étant très satisfaisante). Les différences entre les deux groupes sont négligeables. (Par ailleurs, le logement de l'étudiant — soit dans la capitale, soit dans la ville de province — n'a aucune portée sur les résultats.)

La satisfaction universitaire

1.2.

49

FRANCE

1.2.1.

Les travaux pratiques

Alors que les étudiants rencontrent ou redoutent de nombreuses difficultés dans les examens et les interrogations, les trois quarts d'entre eux se sentent à l'aise ou très à l'aise dans les travaux pratiques et les séminaires, 43 % d'entre eux expliquent leur attitude par l'atmosphère ouverte qu'on y rencontre. L'étudiant peut dialoguer, avoir des contacts, s'intégrer : «J'y vais le soir, c'est sympa. Je blague avec tout le monde y compris les professeurs et les mémés du 16e. » MAROC.

et c'est aussi pour lui une occasion de montrer ses connaissances, de se faire valoir : «Ayant une culture personnelle étendue du fait de ma préparation à Normale, je domine nettement la moyenne.» TOGO.

Lorsqu'ils ne se sentent pas ou peu à l'aise (25 %), les étudiants évoquent leur manque de travail personnel ou de connaissances, leurs difficultés d'expression et de compréhension au niveau de la langue, les difficultés de contacts dues à la sensation de ne pas être acceptés par le groupe ou dues à des caractéristiques personnelles (timidité, peur du ridicule), le racisme ou le sentiment de particularisme teinté d'exotisme : «Je n'aime pas du tout les travaux pratiques de psychologie. Les Malgaches sont considérés comme des phénomènes, des cas "intéressants" ayant une mentalité différente.» MADAGASCAR.

La mauvaise qualité des travaux pratiques, leur aspect superficiel, sont aussi mentionnés. 4

50

Succès académiques et satisfaction universitaire

La facteur personnel semble ainsi jouer un rôle important dans le sentiment d'être ou de ne pas être à l'aise dans les groupes de travail, de même que la rationalisation que l'on fait de l'attitude des autres ou de la majorité. 1.2.2.

Les contacts avec les professeurs

Amenés à parler des relations avec les professeurs, les étudiants les jugent, plus particulièrement, bonnes lorsque l'interlocuteur est un étranger (60 %) que lorsqu'il s'agit de l'étudiant en général (45 %). Il est clair que ces relations professeurs-étudiants, quelle que soit l'origine de ces derniers, sont plus appréciées en province qu'à Paris (73 % comparés à 56 % dans le cas où l'étudiant est un étranger, 63 % comparés à 39 % dans l'autre cas). Les étudiants qui dénigrent le plus souvent les rapports qu'ils pourraient avoir avec les professeurs sont d'origine africaine (42 %) et nord-africaine (46 %). Les étudiants estiment que les relations étudiants étrangers-professeurs sont bonnes par suite des qualités professionnelles des enseignants et de leur attitude compréhensive, de l'aide qu'ils leur apportent et parce qu'ils les traitent de la même manière que les étudiants français. Lorsqu'ils considèrent ces relations mauvaises, c'est à cause du préjugé racial, du paternalisme qu'affichent les enseignants, ou parce que ceux-ci ignorent tout de leur propre culture : «Les professeurs ignorent tout de la culture asiatique. Ils ne demandent pas aux étrangers d'apporter leur culture en contribution.» PHILIPPINES.

Ici, 19 % des étudiants parlent de la hiérarchie sociale qui nuit aux relations, alors que pour les relations en général, un quart des étudiants en faisaient mention. Les étudiants dénoncent, et cela juste avant les événements de mai 1968, le «mandarinat», le «piédestal sur lequel se trouvent les professeurs», ces «demi-dieux». En dehors de ces attitudes, quelques étudiants pensent que l'on ne peut généraliser, que tout dépend en définitive des écoles, des disciplines, des professeurs et des étudiants.

Les examens 1.2.3.

51

Conclusion

Malgré ces critiques, l'expérience universitaire est presque toujours considérée comme satisfaisante, quelle que soit la zone d'origine des étudiants (92 % environ).

1.3.

PAYS-BAS

On demandait aux étudiants de dire dans quelle mesure ils étaient ou non satisfaits de leurs expériences universitaires. Bien que dans l'ensemble les jugements soient plutôt positifs : 27 % très satisfaits, 65 % satisfaits et 8 % insatisfaits, des différences apparaissent entre les sous-groupes. Le nombre d'étudiants insatisfaits est plus grand parmi les étudiants à l'Université que parmi ceux des Instituts (13 % comparés à 4 %). Tout en soulignant une fois encore, la petitesse de l'échantillon, il est à noter que 24 % des Indonésiens qui étudient à l'Université sont mécontents de leurs expériences universitaires, comparés à 11 % des étudiants originaires d'autres zones et faisant leurs études au même endroit.

2. LES EXAMENS La variable par laquelle on pourrait mesurer l'efficacité du séjour au niveau des études est avant tout les examens, les réussites et les échecs qu'ont enregistrés les étudiants : en effet, son séjour ne sera satisfaisant et rentable que s'il peut dans un temps réduit acquérir un diplôme. Dans le cas d'échecs, et celui plus extrême encore où l'étudiant n'a jamais eu de succès, il faut en chercher la cause, savoir s'ils sont dus à des insuffisances universitaires imputables à l'étudiant (par exemple, manque de travail personnel), aux moyens mis à sa disposition (manque d'instruments de travail), à sa formation antérieure (est-il au niveau des étudiants nationaux auxquels il se joint ?), à la forme d'enseignement auquel il se trouve confronté ou enfin à une situation matérielle et à des relations humaines incomplètes. Cette étude abordait ce problème, avec comme écueil l'impossibilité

Succès académiques

52

universitaire

et satisfaction

de vérifier l'authenticité des réponses, le degré de véracité à accorder à un étudiant qui dit n'avoir jamais ou presque jamais échoué. Les réponses des étudiants sont donc présentées ici telles qu'elles nous ont été données, tout en rappelant qu'une étude plus systématique devrait être faite à ce niveau en se basant sur des résultats d'examens contrôlés. C'est en Autriche, puis en France, que l'on trouve la plus grande proportion d'étudiants ayant passé des examens (soit 99 % et 68 % respectivement, comparés à 40 % des étudiants aux Pays-Bas*). Si l'on considère le nombre des échecs et des réussites que s'attribuent les étudiants lorsqu'ils ont subi des examens, deux points sont à noter. En premier lieu, la situation où l'étudiant enregistre des succès et des échecs se retrouve le plus souvent : c'est le cas de plus de la moitié des étudiants, et même des trois quarts en Autriche. En second lieu, seule une petite minorité d'étudiants dit n'avoir eu que des échecs. TABLEAU III-3

Succès

académiques AUTRICHE

FRANCE

PAYS-BAS

(267)

(97)

(48)

21 79 1

41 53 6

38 58 4

%

Succès seulement Succès et échecs Echecs seulement

2.1.

%

%

AUTRICHE

Depuis leur arrivée, 93 % des étudiants ont déjà passé des examens. Ce pourcentage est exactement le même pour les deux groupes régionaux composant l'échantillon. Presque tous les étudiants ont déjà passé un ou plusieurs examens ; 1 % seulement des étudiants interviewés n'ont passé aucun examen. Un cinquième des étudiants déclarent n'avoir jamais subi d'échecs ; les autres ont tantôt réussi, tantôt * Les résultats en Yougoslavie ne nous ont pas été rapportés.

Les examens

53

échoué. 67 % des étudiants ont déjà passé au moins 6 examens (Europe du Sud-Est : 77 %, Moyen-Orient : 60 %). Quant aux échecs subis, un tiers des étudiants ont échoué à un ou deux examens ; les autres ont subi au moins quatre échecs. Une différence apparaît entre les deux groupes régionaux : les étudiants du Moyen-Orient ont réussi plus souvent et échoué moins souvent que leur collègues de l'Europe du Sud-Est — 43 % du groupe de l'Europe du Sud-Est ont échoué au moins trois fois, alors que ce n'est pas le cas pour le groupe du Moyen-Orient (23 % seulement). Il faut rappeler que les étudiants d'Europe du Sud-Est ont séjourné plus longtemps en Autriche que les étudiants du Moyen-Orient — ce qui explique en partie la différence.

2.2.

FRANCE

Depuis leur arrivée en France, 68 % des étudiants ont passé des examens : des Africains (79 %) et des Indo-Pakistanais (73 %). Au niveau des succès académiques, une distinction a été établie entre les étudiants à «dominante succès» (72% ), ceux qui ont enregistré un même nombre de succès et d'échecs (19 %), et ceux à «dominante échecs» (9 %)*. Ainsi plus des deux tiers des étudiants de chaque zone se classent dans la dominante succès (les plus nombreux étant les Indo-Pakistanais) ; ce sont les Extrême-Orientaux qui le plus souvent disent avoir eu autant de succès que d'échecs, et ce sont enfin un Africain, deux Extrême-Orientaux, un Moyen-Oriental et un Nord-Africain seulement qui se rangent dans la dominante échec. Plus des quatre cinquièmes des Latino-Américains ont passé des examens et n'ont tous eu que des succès ou plus de succès que d'échecs**.

* Ici «dominante succès» indique que le sujet n'a eu que des succès, ou plus de succès que d'échecs. ** Les résultats pour les Pays-Bas et la Yougoslavie manquent.

54

Succès académiques

TABLEAU I I I - 4

et satisfaction

universitaire

Succès académiques selon la région d'origine Afrique Afrique Moyendu Nord noire Orient (22) (45) (6) N % %

Dominante succès Autant de succès que d'échecs Dominante échecs

Indopakistanais (8) N

Extrême- Amérique latine Orient (16) (12) N %

77 18

71 18

(4) (1)

(7) (1)

63 25

4

11

(1)



13

(11) (1) —

Le point qui nous intéresse ici est que plus de la moitié des étudiants ont subi des échecs au cours de leur séjour. Une série de questions avait alors pour but de tenter d'expliquer ces échecs et les difficultés que rencontrent les étudiants dans leurs examens ou lorsqu'ils n'en ont pas passé dans les interrogations pendant les cours.

3. ÉCHECS ET 3.1.

DIFFICULTÉS

AUTRICHE

Parmi les difficultés rencontrées, dans les examens écrits ou oraux, par les étudiants étrangers, on peut mentionner les problèmes de langue (76 %), l'insuffisance des instruments de travail (68 %), la différence du système d'examen (59 %).

3.2.

FRANCE

Les difficultés que les étudiants de cet échantillon pensent avoir ou devoir le plus rencontrer dans les examens et les interrogations se situent au niveau des conditions de travail (insuffisance des instruments de travail (63 %), et au niveau pédagogique : le «manque de directives dans le travail» est aussi mentionné par 64 % des étudiants. Ils parlent des problèmes de langue (41 % ) et il est à noter que les difficultés de langue rencontrées par l'étudiant au début et au cours de son séjour prennent une plus grande ampleur dans les examens. Et cela notamment si l'on considère que même des étudiants de pays

Echecs et

difficultés

55

francophones déclarent avoir été déroutés par une langue qu'ils parlent cependant couramment. Ils ont été gênés par la rapidité, par l'organisation du discours et par les termes techniques familiers aux étudiants français. «Un des grands problèmes c'est qu'il est difficile de saisir la continuité du cours, la logique d'une démonstration du professeur. Pour l'étranger, l'assimilation du cours est difficile surtout dans les sciences humaines. Il faut saisir les nuances, le raisonnement politique.» VIETNAM.

«Nous ne sommes pas tellement au niveau, et les questions de langue apparaissent, contre l'évidence.» TUNISIE.

L'insuffisance de la formation antérieure est également mentionnée par 41 % des étudiants : «Nous avons aux examens et dans les T.P. certaines lacunes. Les professeurs que nous avons chez nous n'étaient pas compétents, ce qui nous crée des difficultés : niveau inférieur. Ces professeurs faisaient souvent partie de la coopération technique et n'avaient pas les capacités nécessaires.» RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE.

«Les méthodes de travail ne sont pas les mêmes. Le niveau est trop élevé.» IRAN.

Un tiers environ des étudiants évoquent respectivement le système d'examen différent de celui de leur pays (35 %), l'insuffisance de travail personnel (33 % ) et — ce point est à souligner — les préjugés raciaux que 37 % d'entre eux pensent avoir ou devoir rencontrer. Les étudiants de toutes les zones se heurtent au manque de directives dans le travail universitaire et à un problème qui ne leur est, en fait, pas particulier : le manque d'instruments de travail. Les étudiants originaires de pays non francophones surtout ont des problèmes au niveau de la langue et de l'assimilation d'un nouveau mode d'examen et d'enseignement.

Succès académiques et satisfaction

56

universitaire

Il faut noter l'importance que revêtent les «préjugés raciaux» lorsqu'ils sont perçus comme un handicap dans les examens : des étudiants de toutes les origines en parlent (à l'exception des Sud-Asiatiques). Ceux qui mettent le plus l'accent sur ce problème sont d'origine africaine (51 %) et nord-africaine (43 %), ces derniers estimant par ailleurs ne pas avoir fait assez d'efforts personnels pour réussir. TABLEAU I I I - 5

Degré d'intensité avec lequel les étudiants ont ressenti ou pensent devoir ressentir certaines difficultés dans les examens

N Difficultés : Langue Manque de directives Manque d'instruments de travail Manque de travail personnel Insuffisance de la formation antérieure Système d'examen différent de celui du pays d'origine Préjugés raciaux

Degré d'intensité beaucoup un peu pas du tout % % %

(154)

23

18

58

(155)

22

42

35

(153)

38

25

37

(151)

15

18

68

(154)

18

23

58

(150)

19

16

64

(150)

9

28

63

Il n'y a pas de différence entre les réponses des étudiants qui ont passé des examens et ceux qui ne l'ont pas fait. Ces derniers s'attendent seulement un peu plus souvent à souffrir du manque de directives et d'instruments de travail.

3.3.

PAYS-BAS

Les problèmes de la langue sont plus importants pour les étudiants des universités qui sont obligés d'apprendre le hollandais pour pour-

Comparaisons

57

suivre leurs études, alors que les étudiants des instituts participants ont une partie de leurs cours en anglais. Alors que plus de la moitié des étudiants à l'université déclarent avoir eu des difficultés de langue dans leurs études, ce pourcentage pour les instituts n'est que de 26 %. Le pourcentage augmente lorsqu'il s'agit de difficultés de langue au cours des examens (université : 75 % ; instituts : 57 %). Bien entendu, les problèmes de langue sont moins fréquents pour les étudiants universitaires indonésiens que pour les étudiants universitaires d'une autre origine. Au moment des examens, dans tous les groupes, le nombre des étudiants ayant éprouvé des difficultés est à peu près le même.

3.4.

YOUGOSLAVIE

Dans la préparation de leurs examens, vient s'ajouter au problème de la langue, pour les étudiants étrangers, le manque de manuels, de livres et de matériel d'enseignement divers. Au nombre de leurs difficultés au moment de leurs examens, 35 % des étudiants interviewés ajoutent qu'ils n'ont pas été suffisamment orientés dans leurs études par les professeurs. En outre, le système des examens diffère de celui de leur pays, et c'est là une difficulté supplémentaire pour les étudiants étrangers (19 du Moyen-Orient, 7 originaires d'Asie, et 17 originaires de pays africains).

4. COMPARAISONS La comparaison des résultats obtenus en Autriche et en France montre que le manque d'encadrement et de directives dans le travail, l'absence d'instruments de travail et l'insuffisance de la formation antérieure sont également ressentis dans les deux pays. Au niveau de la langue ainsi qu'à celui de l'organisation des examens, les difficultés sont, et cela s'explique aisément, plus souvent citées en Autriche et aux Pays-Bas : en effet, une grande partie des étudiants viennent en France parce qu'ils sont de pays ou de culture francophones. Le manque de travail personnel est aussi plus cité en Autriche

58

Succès académiques et satisfaction

universitaire

(53 % comparé à 33 %). Enfin il apparaît que seuls les étudiants en France disent avoir souffert des préjugés raciaux dans leurs examens. La question qui découle de ces données est alors de savoir si ces difficultés sont reliées ou non aux échecs et aux succès de ces étudiants. Les corrélations obtenues pour l'échantillon français laissent penser que le manque d'instruments de travail et l'absence de directives dans le travail sont également ressentis par les étudiants qui réussissent et par ceux qui échouent. Ces difficultés seraient d'ordre général et n'auraient pas trait au passage des examens. TABLEAU I I I - 6

Difficultés rencontrées dans les examens selon le pays de séjour

AUTRICHE

T-. _ T „„ FRANCE

Universités

PAYS-BAS .

YOUGOSLAVIE

(277)

(155)

(62)

(68)

75

41

75

*

57

64

*

35

63

63

*

*

53

33

*

*

51

41

*

*

59

35

*

34

%

Difficultés : Langue Manque de directives Manque d'instruments de travail Manque de travail personnel Insuffisance de la formation antérieure Système d'examen différent de celui du pays d'origine

%

TT

%

* Données incomplètes en ce qui concerne les Pays-Bas et la

%

Yougoslavie.

59

Comparaisons

On retrouve constamment mentionné dans les rapports sur les résultats des recherches le problème que présente l'impossibilité de communiquer suffisamment. Ce problème se pose de manière particulièrement aiguë lorsqu'il s'agit d'étudiants étrangers dont l'empêchement à ce niveau peut devenir fatal au succès de leurs études. Les résultats obtenus par nous montrent que ce problème n'est pas seulement celui de ceux qui échouent, mais qu'il est au contraire davantage mentionné par l'autre groupe (tableau III-7). Cependant au niveau de l'insuffisance de la formation antérieure on note des différences : la moitié des étudiants qui ont enregistré autant d'échecs que de succès ou seulement des échecs disent en avoir souffert, à comparer avec un tiers des autres. La même relation existe lorsqu'il s'agit du manque de travail personnel (52 % comparés à 27 %). Ainsi les étudiants qui échouent disent plus souvent ne pas être au niveau et ne pas travailler suffisamment. La question qui se pose alors est de savoir si leur niveau est plus faible parce qu'ils ne travaillent pas suffisamment, ou si leur niveau étant faible, et malgré tout leur possible, leur travail demeure insuffisant. En dépit de leurs efforts et de leur travail personnel un décalage de niveau persisterait alors avec la moyenne représentée par les étudiants français. TABLEAU III-7

Succès

académiques

les examens

Dominante succès (70) % Difficultés : Langue Manque de directives Manque d'instruments de travail Manque de travail personnel Insuffisance de la formation antérieure Préjugés raciaux

et difficultés

(France)

rencontrées

Autant de succès que d'échecs (18)

%

dans

Dominante échecs (9)

%

43 71

6 16

2 5

66

12

6

27

8

6

34 41

14 8

7 —

60

Succès académiques et satisfaction universitaire

Au niveau des préjugés raciaux, une relation inattendue apparaît. On aurait pu penser que les étudiants à dominante échecs utiliseraient les préjugés, les invoqueraient pour excuser et expliquer leurs échecs, et dégager leur responsabilité. Or l'inverse apparaît : aucun des étudiants qui ont constamment échoué ou qui ont à leur actif plus d'échecs que de réussites n'y fait allusion, contrairement à 41 % de ceux à dominante succès ! Ces résultats posent un problème d'interprétation difficile à résoudre d'autant plus que tous les étudiants à dominante échecs disent par ailleurs avoir rencontré au moins une fois une discrimination. Les étudiants qui réussissent mentionnent-ils les préjugés raciaux pour donner à leurs succès un éclat plus grand ? Ou encore est-ce dû à une réaction d'orgueil : ne pas vouloir que les Français pensent que les gens qui échouent se rabattent sur le «racisme» pour s'excuser ! «Le problème est de savoir comment les étudiants étrangers sont sélectionnés ou triés en vue de leur formation universitaire. Une étude récente faite aux Etats-Unis par le Centre d'information américain et publiée dans Vital Issues (commentée dans le New York Herald Tribune, édition de Paris, 11 janvier 1964) estime qu'en général un tiers environ des étudiants étrangers sont soigneusement sélectionnés, un tiers ne sont aucunement sélectionnés en vue de leurs possibilités d'adaptation personnelle et universitaire. Cette estimation pourtant assez prudente a été elle-même contestée comme étant trop optimiste en ce qui concerne la proportion des étudiants ayant tant soit peu fait l'objet d'une sélection. «Il serait intéressant de comparer par nationalité le procédé appliqué pour la sélection des étudiants allant de divers pays vers des pays divers, en indiquant dans une certaine mesure les succès relatifs remportés par ceux qui ont fait l'objet d'une sélection de la part d'agences officielles gouvernementales, d'institutions privées, et par un procédé d'autosélection, respectivement. «Le problème est mis en lumière dans le rapport Aich (1962, 1963) qui déclare que 80 % des étudiants de couleur (d'Asie, d'Afrique) échouent dans leurs examens de passage, et 40 % dans les examens de fin d'études. Ces difficultés sont peut-être dues en partie aux connais-

Comparaisons sances limitées des étudiants au moment de que l'on peut expliquer par le fait que étrangers se trouvent en Allemagne parce dans leurs propres universités» (Klineberg,

61 leur arrivée en Allemagne, la plupart des étudiants qu'ils n'ont pas été admis 1966).

A ce propos, seuls deux ou trois étudiants expliquaient qu'ils étudiaient en France parce qu'ils avaient été renvoyés de l'école dans leur pays. Si dans cette étude on considère les Africains et les Asiatiques en France comme gens de couleur, on peut constater qu'un tiers d'entre eux (29 %) ont eu autant de succès que d'échecs ou une dominante d'échecs. Ceci n'est pas le cas des Indo-Pakistanais ; mais il faut tenir compte de l'échantillon minime (8), dont 7 n'ont que des succès. La formation insuffisante a été, comme nous l'avons vu précédemment, un des facteurs expliquant les échecs. Quel est alors le rôle de l'âge et du niveau antérieur des étudiants ? En France, les étudiants se répartissent indépendamment de leur âge entre les succès et les échecs. Par contre, la formation qu'avaient les étudiants à leur arrivée joue quelque peu dans la réussite académique : les étudiants qui, au moment de venir en France, faisaient des études universitaires ou avaient déjà une licence, réussissent plus souvent aux examens que les étudiants bacheliers (tableau III-8). Ces résultats sont cependant trop négligeables pour décider, comme le fait Aich (1962), de n'accepter que les étudiants qui ont fini leurs études. «Aich est en effet convaincu qu'il serait préférable de n'admettre que les étudiants ayant déjà terminé leurs études dans leur pays et qui sont désireux de recevoir une formation spécialisée à l'étranger, ou bien ceux qui, en début de carrière, dans l'enseignement par exemple, éprouvent le besoin d'un supplément d'expérience ou d'instruction. Il considère que c'est là le meilleur moyen de protéger l'étudiant étranger contre l'aliénation de sa propre culture dont il est menacé s'il quitte son pays à un âge relativement peu avancé» (Klineberg, 1966).

62 TABLEAU

Succès académiques et satisfaction universitaire III-8

Diplômes obtenus avant l'arrivée et succès académimiques obtenus au cours du séjour (France) Diplômes Engagés dans des études universitaires ou licenciés (23) %

Bacheliers (67)

%

Succès académiques Dominante succès Autant de succès que d'échecs Dominante échecs

69

78

21 10

13 9

Mais ceci, même si nos données nous montrent par ailleurs que les étudiants licenciés à l'arrivée sont tous, tant en Autriche, en France, aux Pays-Bas, très satisfaits de leurs études, ils ne sont pas en nombre suffisant, malheureusement, pour pousser plus avant cette étude (tableau III-9). TABLEAU

III-9

Satisfaction au niveau des études et diplômes obtenus avant l'arrivée (France)

(90) %

Niveau universitaire (33) %

34 58 8

33 52 15

Baccalauréat

Très satisfaits Satisfaits Insatisfaits

Licence (21)

%

43 57 —

On peut noter, pour la France seulement — car les effectifs trop réduits pour l'Autriche et pour les Pays-Bas ne le permettent pas —, quelle est la satisfaction éprouvée par les étudiants qui avaient commencé des études universitaires dans leur pays : les étudiants déjà licenciés se disent tous satisfaits (57 %) ou très satisfaits (43 %) ; ceux

Comparaisons

63

qui n'avaient fait que commencer des études universitaires se disent le plus souvent mécontents de leurs études à l'étranger. Peut-on expliquer, d'une part, la satisfaction de l'ensemble des licenciés par leurs contacts plus directs avec les professeurs, leur plus grande liberté de mouvement, l'absence de contraintes scolaires, et, d'autre part, l'insatisfaction plus particulière à ceux qui étaient déjà étudiants universitaires, par leur expérience, la possibilité pour eux de comparer deux modes universitaires, deux formes de vie estudiantine ? Allant plus avant, nous avons voulu savoir si le fait de réussir ou d'échouer influence la satisfaction générale de l'étudiant quant à son séjour, dans ce cas-ci, en France. On peut supposer, en effet, que des succès rendront naturellement l'étudiant plus satisfait de ses études, et qu'en outre ils lui permettront un plus grand épanouissement personnel et social, ou qu'ils suffiront à lui faire estimer son séjour satisfaisant même lorsqu'il a eu peu de contacts et peu d'argent, dans la mesure où son but principal qui consiste à étudier et donc à réussir aura été atteint. TABLEAU 1 1 1 - 1 0

Satisfaction au niveau des études et succès académiques Succès seulement N %

AUTRICHE

Très satisfaits Satisfaits Insatisfaits FRANCE

Succès et échecs N % (210)

(2) (1) (1) (40)

(51) 40 45 15

PAYS-BAS

(2)

Très satisfaits Satisfaits Insatisfaits

(2)





(55) 9 63 28



Très satisfaits Satisfaits Insatisfaits

Echecs seulement N %

22 65 13 (6)

35 63 2 (28)

(1) (3) (2) (18)

4 79 18

(5) (H) (2)

64

Succès académiques

et satisfaction

universitaire

Presque tous les étudiants, quel que soit le résultat de leurs examens, se disent satisfaits de leur vie universitaire. Cependant, on peut noter ici que la frontière n'est pas entre les étudiants satisfaits et les insatisfaits, mais qu'elle se place entre les «très satisfaits» et les «satisfaits» : près de la moitié des étudiants à dominante succès se déclarent «très satisfaits» — les autres étant «satisfaits» — alors que la majorité des étudiants dont la dominante n'est pas le succès se disent seulement «satisfaits». La situation la plus fréquemment rencontrée, quel que soit le pays de séjour, est celle où l'étudiant se dit satisfait, tout en ayant eu des succès et des échecs.

5. CONCLUSION La variable succès académique est importante dans la mesure où elle répond à la venue de l'étudiant à l'étranger, où elle est ce pour quoi il s'est expatrié. Elle dépend en partie non pas de l'âge mais du niveau de formation qu'avaient atteint les étudiants au moment de leur arrivée : ceux qui suivaient des études universitaires ont eu plus de facilités que les autres. Une formation antérieure insuffisante, un manque de directives et d'encadrement, l'insuffisance des instruments de travail, tels sont quelques-uns des obstacles que rencontrent les étudiants étrangers. Ces problèmes ne sont pas particuliers à un lieu de séjour, mais sont ressentis en France comme en Autriche ou en Yougoslavie, par des étudiants de toutes les origines.

Succès académiques

et satisfaction

universitaire

65

SUMMARY IN ENGLISH

In this chapter we have raised the question of the degree of satisfaction experienced by the students with their studies abroad ; we shall return to other aspects of this issue later. In general, only a small proportion of the students interviewed expressed dissatisfaction. One of our hypotheses was that the extent of satisfaction or dissatisfaction would be related to the success or failure respectively which the students have experienced in their examinations. The results showed no clear relationship of this nature. We depended, however, on the students' own reports of their successes and failures in the examinations, and although they may all have been telling the truth, it would certainly have been better to use more objective indices. The students mentioned a number of more specific difficulties which they encountered in the examinations, and these will be discussed later when we take up the question of practical recommendations to university authorities. One of the surprising results reported in this chapter is the frequency with which the students in France referred to some form of " racism " as source of their difficulties.

4 Relations humaines

Ce chapitre résume les informations obtenues concernant la nature et le degré du contact entre les étudiants et la population du pays hôte, la satisfaction ou l'insatisfaction exprimée par eux quant à ce contact, le choix de leurs amis à divers degrés d'intimité, leurs relations amicales avec les jeunes filles du pays hôte, leur appréciation générale concernant la vie sociale. Ces diverses expériences se rattachent au problème important des différences culturelles qui peut contribuer à faire obstacle à l'ajustement social ; en outre, le lieu de résidence, le nombre de succès scolaires, et la satisfaction au regard des études universitaires sont également des facteurs qui jouent un rôle pour déterminer les «relations humaines» de ces étudiants étrangers.

1. LES CONTACTS Les relations humaines constituent donc un second point important dans le séjour de l'étudiant à l'étranger. En effet, si acquérir une formation professionnelle, accumuler les succès académiques est son premier but, il espère aussi en allant à l'étranger avoir une ouverture sur le monde, une culture générale — culture et ouverture qui ne peuvent se trouver qu'au travers des contacts avec les habitants du pays où il séjourne. Le champ possible des relations est fort large : il peut s'agir d'étudiants garçons et filles, ou de non-étudiants : famille, gens de la rue, par exemple. Outre cette distinction, la nationalité varie : il peut s'agir d'autochtones, de compatriotes, de personnes du même continent ou du Tiers-Monde et d'Occidentaux.

Relations humaines

68

1.1.

1.1.1.

AUTRICHE

Estimation générale des contacts avec les Autrichiens

Lorsqu'ils parlent de la fréquence de leurs contacts avec les Autrichiens, les étudiants peuvent se diviser en deux groupes : d'une part, ceux qui disent avoir des contacts nombreux voire même très nombreux (47 %) et, d'autre part, ceux qui estiment leurs contacts peu nombreux ou inexistants (49 %, dont 4 % inexistants). Il n'y a pas de différence entre les deux sous-groupes nationaux. Les étudiants qui ont des contacts nombreux avec les Autrichiens l'attribuent soit aux Autrichiens eux-mêmes (25 % ; Moyen-Orient 31 % — Europe du Sud-Est 17 %), ou à des efforts mutuels (18 % ; Europe du Sud-Est 21 %, Moyen-Orient 17 %). Les facteurs qui jouent alors sont la personnalité de l'étudiant, sa sociabilité et son initiative, son désir de connaître la culture du pays où il vit. D'autres facteurs, situationnels, peuvent intervenir ; par exemple le fait de vivre à l'université, les études. L'hospitalité et la gentillesse des Autrichiens sont mentionnées par 7 % des étudiants. L'autre groupe, plus important, comprenant 53 % des étudiants, attribue la rareté des contacts avec les Autrichiens tantôt aux étudiants eux-mêmes (21 % ; Europe du Sud-Est 15 % ; Moyen-Orient 24 %), tantôt à la fois aux Autrichiens et aux étudiants (19 % ; Europe de Sud-Est 25 %, Moyen-Orient 15 %). Seuls 5 % des étudiants ne blâment que les Autrichiens uniquement pour l'absence ou la rareté des échanges. Les difficultés rencontrées pour entrer en contact avec les Autrichiens sont attribuées au manque d'hospitalité de ceux-ci, à leur tiédeur et à leur tendance à former des groupes fermés (23 %), ainsi qu'à leurs préjugés et à leur racisme (11 % ; Europe du Sud-Est 5 %, Moyen-Orient 14 %). D'autres raisons sont données dans les réponses : manque de compréhension réciproque (15 %) ; crainte de la part de l'étudiant d'être déçu par les échanges sociaux avec les Autrichiens (5 %), manque de temps ainsi que le problème de la langue (2 %). Un petit nombre d'étudiants (5 %) déclarent qu'ils ne tenaient pas à avoir des contacts avec les Autrichiens.

Les contacts 1.1.2.

69

Contacts avec les familles autrichiennes

77 % des étudiants (Europe du Sud-Est 74 % ; Moyen-Orient 80 %) ont été reçus dans les familles autrichiennes. Pour un peu plus de la moitié de ceux-ci les contacts ont été aussi fréquents qu'ils le désiraient ; pour les autres les contacts ont été moins fréquents qu'ils ne l'auraient souhaité. Les étudiants pour la plupart — et plus particulièrement ceux du Moyen-Orient — désiraient être en contact avec la vie autrichienne, élargir leur horizon et sortir de l'environnement scolaire. Certaines réponses font apparaître le désir de se faire des amis, d'être moins isolés, d'échanger aussi des idées, «de combler le fossé». Les étudiants qui ont peu de contacts avec les familles autrichiennes mentionnent la difficulté d'établir des relations sociales avec les familles ; les étudiants se plaignent également de n'avoir eu que des relations superficielles. Plus d'un tiers souhaitaient entrer en contact avec les familles autrichiennes, alors que 2 % environ ne le désiraient pas et préféraient ne fréquenter que leurs amis. 1.1.3.

Les cinq meilleurs amis

Parmi les cinq meilleurs amis de l'étudiant, il est fait mention en général de plusieurs nationalités ; 20 % seulement ne comptent que des compatriotes parmi leur cinq meilleurs amis. La moitié des étudiants n'ont que des amis du sexe masculin, viennent s'ajouter 39 % dont les amis sont pour la majorité de sexe masculin, et pour la plupart les interviewés (89 %) comptent au moins 3 étudiants au nombre de leurs cinq meilleurs amis ; 62 % n'ont que des étudiants pour amis. A peu près la moitié des étudiants indiquent comme amis aussi bien des compatriotes que des Autrichiens et autres Européens. 3 % n'ont que des amis autrichiens. Si l'on compare les deux groupes régionaux de l'échantillon, on constate que l'étudiant appartenant au groupe de l'Europe du Sud-Est tend à avoir plus d'amis parmi ses compatriotes ou parmi les Européens, ainsi que plus d'amies du sexe féminin et moins d'amis parmi les étudiants que le fait l'étudiant du MoyenOrient. Ce dernier par contre, a moins d'amis compatriotes ou européens, mais un peu plus d'amis autrichiens ou d'amis venant d'autres continents, lorsqu'on le compare à un membre du groupe d'Europe du Sud-Est. Les étudiants choisissent leurs meilleurs amis générale-

Relations

70

humaines

ment parmi leurs compatriotes (66 % ; Europe du Sud-Est 73 % ; Moyen-Orient 63 % ) ; l'étudiant du Moyen-Orient plus que l'étudiant du groupe d'Europe du Sud-Est tend à avoir pour meilleur ami un étudiant étranger, c'est-à-dire ni Autrichien, ni compatriote (11 % pour le Moyen-Orient, 2 % pour l'Europe du Sud-Est). 1.1.4. Conclusion Si l'on considère globalement leurs expériences dans le champ des relations humaines, on peut noter qu'environ les deux tiers des étudiants considèrent ces relations comme étant satisfaisantes (64 % étaient satisfaits, 4 % même très satisfaits). Le dernier tiers des étudiants interviewés ( 3 1 % ) considéraient ces relations insatisfaisantes (27 % étaient insatisfaits, 4 % même très insatisfaits). La différence entre les deux groupes régionaux au sujet de leur satisfaction ou de leur mécontentement quant à la vie sociale en Autriche, est ici plus marquée que dans les deux autres champs d'expérience. Alors que 76 % du groupe d'Europe du Sud-Est estiment leurs relations humaines satisfaisantes et que 24 % seulement les considèrent insatisfaisantes, les pourcentages correspondants pour le groupe du Moyen-Orient sont respectivement de 64 % et de 36 % . Ce qui revient à dire qu'en général le groupe du Moyen-Orient est davantage insatisfait dans les trois champs principaux des relations humaines que ne le sont les étudiants appartenant au groupe de l'Europe du Sud-Est.

1.2.

12.1.

FRANCE

Estimation générale des contacts avec les Français

Lorsqu'ils évaluent leurs contacts avec les Français, les étudiants se divisent en deux groupes : les uns ont des contacts nombreux (50 % ) , (45 % nombreux, 5 % très nombreux), les autres peu nombreux (45 % ) ou inexistants (5 % ) . Les étudiants d'origine sud-asiatique (73 % ) , ainsi que les deux tiers des Latino-Américains et les Extrême-Orientaux (65 % ) décrivent leurs contacts avec les Français comme nombreux, alors que les Moyen-Orientaux (42 % ) , les Africains (52 % ) , et les Nord-Africains (65 % ) les estiment peu nombreux.

Les contacts

71

Les contacts nombreux, disent les étudiants concernés, s'expliquent — par leur personnalité et leur initiative : «A moi d'abord. Fondamentalement, j'aime les rapports humains. Je fais tout ce qu'il faut pour les établir avec tous ceux qui y sont disposés. Ce n'est pas dans l'habitude des Français.» CÔTE

D'IVOIRE.

«J'en ai beaucoup par rapport à certains Marocains. Je pense que c'est parce que je suis liant et drôle. Je me fais facilement des amis.» MAROC.

— par les études qu'ils font et qui encouragent les contacts, et les relations qu'ils ont par leur famille. Quelques étudiants évoquent les qualités des Français et leurs efforts communs pour se comprendre. «De mon côté je fais tous les efforts possibles et eux sont assez gentils, accueillants et curieux.» CHILI.

«J'ai beaucoup de contacts avec eux : c'est parce que je suis bavard et qu'ils sont bavards.» INDONÉSIE.

Même si l'absence de contacts est imputable parfois au manque de temps ou d'occasion, elle est, disent les étudiants, le plus souvent due aux défauts des Français : ils forment «des groupes fermés», ils sont «froids, individualistes», «manquent de naturel», «indifférents», «chauvins» et «superficiels» parfois dans leurs rapports. Cette superficialité est cependant peu mentionnée à ce niveau, moins que ne l'entendait N'Diaye (1962) dans son étude sur les étudiants africains en France. «Ils ne font pas d'amis durables, ne veulent pas de notre amitié et enfin se méfient de nous.» NIGERIA.

«Ils sont un peu froids. Chacun pour soi.» DAHOMEY.

72

Relations humaines

Pour certains l'obstacle est le racisme et les préjugés : «Parce que les Français sont sectaires, et qu'au fond ils sont racistes. Ds ont un peu peur des étrangers. Us cherchent bien souvent leur propre intérêt.» IRAN.

«Au début je ne connaissais pas le racisme, puis j'ai été déçu par les Français. Je me suis replié sur moi-même et maintenant ma propre attitude décourage les contacts.» MALI.

«Je ne veux pas en connaître à cause de leur attitude envers les Nord-Africains et les Arabes. Je ne suis pas un fanatique de la politique — ce qui pourrait expliquer mon attitude — mais je sais qu'il ne faut pas se faire d'illusions.» TUNISIE.

«Je crois qu'il y a un certain chauvinisme de leur part. La plupart d'entre eux pensent qu'ils sont les meilleurs. Par réaction nous pouvons avoir tendance à un certain isolationnisme, un certain orgueil. Nous sommes ici parce que nous avons besoin d'eux, et ce n'est pas toujours drôle.» MAROC.

Ainsi qu'il apparaît déjà dans ces derniers exemples, après des tentatives avortées, des expériences malheureuses, l'étudiant se retranche sur lui-même. Son orgueil, allié à sa timidité, le pousse à s'isoler, à mépriser et refuser dorénavant des contacts dont il a envie. « C'est une attitude de repli après des expériences malheureuses.» CAMEROUN.

«Moi, je suis timide, eux ne sont pas ouverts, ni hospitaliers. Ils sont égoïstes et un peu racistes.» VIETNAM.

Les

contacts

73

Le groupe d'étudiants qui dit n'avoir que peu de contacts avec les Français, se décrit comme déçu, blessé et redoutant de l'être, adoptant la plupart du temps une attitude négative à l'idée même de contact. L'étudiant se dit alors responsable du manque de contacts avec les Français. En conséquence il préfère le contact de ses compatriotes ou d'étrangers comme lui qui lui permettront, sinon de connaître la France, du moins de s'intéresser à d'autres pays, à d'autres problèmes : «Après quelques essais qui ont été des échecs, je suis rentré dans ma coquille, je fréquente des compatriotes.» MALI.

«La responsabilité revient aux Français. Ils sont froids. J'ai eu des déceptions et je n'ai plus envie de les connaître. On peut d'ailleurs s'en passer et y trouver des avantages : l'hétéroclité et l'internationalisme. On peut avoir des contacts ici avec toutes les nationalités sauf la France.» MAROC.

Il s'agit alors de savoir dans le cas de ces étudiants, s'ils ont ou non des rapports fréquents avec les Français, quels sont les types de situations, de relations qui leur plaisent ou qui, au contraire, ne leur ont apporté que des déceptions, de savoir qui sont leurs amis et amies, de façon à délimiter, autant qu'il est possible, la gamme des relations humaines vues par l'étudiant étranger. 1.2.2.

Contacts avec les familles

françaises

66 % d'entre eux ont été reçus par des familles françaises, la moitié de ces étudiants regrettent que ces contacts ne soient pas plus fréquents. Ce sont des étudiants d'Extrême-Orient (76 %) et de l'Asie du Sud (73 % ) et ceux d'Amérique latine (86 %) qui ont les plus nombreux contacts avec les familles françaises par comparaison à ceux du Moyen-Orient (58 %), d'Afrique noire (63 %) et aux Nord-Africains (66 %). Les étudiants qui n'ont jamais eu l'occasion d'être reçus par des familles souhaitent souvent en connaître, pour se sentir moins seuls,

74

Relations

humaines

se faire une idée des mœurs, de la vie quotidienne en France, avoir des amis, pour échanger des idées et faire connaître leur pays : «Combler le fossé entre moi et ce pays où j'habite et que je ne connais pas.» HAUTE-VOLTA.

«Pour me sentir moins seul, avoir un semblant de vie de famille et mieux connaître les Français.» CÔTE

D'IVOIRE.

«Pour échanger des idées diverses, pour leur montrer que les NordAfricains ne sont pas tous voleurs, menteurs, etc.» MAROC.

Ce désir de faire connaître son pays, de le réhabiliter aux yeux des Français rejoint ce que nous avions vu auparavant. L'étudiant qui a peu de contacts avec les Français les fuyait par peur d'être repoussé, par crainte des préjugés aussi. Les réunions avec les familles apparaissent alors comme l'occasion possible pour «réparer» l'idée que l'on se fait en France de l'individu noir, arabe ou autre. Le refus d'être en contact avec les familles françaises est attribué aussi, dans le cas d'une attitude moins combative, à l'impression que l'étudiant ne «sera pas à sa place», qu'il figurera comme une bête curieuse : «A tout prix, je ne veux pas renier ma négritude. Je l'assume.» TOGO.

«Je ne veux plus être une bête curieuse, je sens que ce n'est pas ma place que d'être dans une famille française.» CAMEROUN.

L'étudiant craint les préjugés francs ou dissimulés sous le paternalisme : «Les rapports sont superficiels. Il y a trop de préjugés.» GABON.

Les contacts

75

«II y a eu à Rouen une campagne pour recevoir des étrangers. Deux familles sur 84 ont accepté de recevoir des Noirs. Donc : ils ne veulent pas de nous, nous ne voulons pas d'eux.» CÔTE

D'IVOIRE.

Si certains étudiants refusent d'être reçus par des familles «parce que ce n'est pas drôle» et qu'ils préfèrent sortir avec des «copains», d'autres dénoncent l'aspect artificiel de ces rencontres organisées et où l'étudiant se voit imposer une famille à laquelle il est lui-même imposé : «Les Français ne reçoivent les Noirs que s'ils sont introduits par un organisme officiel, si on leur donne une garantie de leur caractère inoffensif.» HAUTE-VOLTA.

«Je voudrais me faire des amis ; mais je me sens capable de les trouver moi-même sans qu'on me les impose.» TUNISIE.

«J'ai été reçu déjà par des familles mais j'ai peu d'intérêt pour ces contacts. Je suis gêné dans la mesure où les Français ne s'intéressent qu'à la culture française. Par exemple, quand j'ai été invité, mes hôtes n'ont pas cessé de parler de Stendhal dont c'était l'anniversaire.» GUYANE.

1.2.3.

Les cinq meilleurs amis

Ainsi l'étudiant préfère pouvoir user de son initiative personnelle, choisir ses relations. Le problème est alors de savoir si, spontanément, l'étudiant a pu se faire des amis français. On demandait ici aux personnes interviewées de dire quelle était la nationalité et le sexe de leurs cinq meilleurs amis, s'ils étaient étudiants et quel était leur ami le plus intime. Ces cinq meilleurs amis sont dans presque tous les cas des étudiants, en majorité de sexe masculin (83 %). Un étudiant sur deux compte parmi ses amis des compatriotes et des Français seulement. Un quart des étudiants ont, outre des amis français et des compatriotes, d'autres amis européens. Si quelques étudiants n'ont que des amis français ou

Relations

76

humaines

que des amis européens, 17 % d'entre eux, par contre, n'ont que des amis non français. Il s'agit alors de compatriotes (7 %), de personnes du Tiers-Monde ou d'autres Européens (tableau IV-1). TABLEAU

IV-1

Nationalité des cinq meilleurs amis

Asie Ensem- Afrique Afrique Moyen- du ble du Nord noire Orient Sud (38) (65) (151) (11) (11) % % % N N Compatriotes seulement Compatriotes et TiersMonde Compatriotes et occidentaux (France exclue) Amis non français seulement

Compatriotes occidentaux et français Compatriotes et français Occidentaux et français Français seulement Des Français parmi leurs amis

7

11

5

7

3

12

3

3

17

17

27

32

48

Extrême- Amérique latine Orient (28)

%

(14) N

14 4







5

(1)



22

(1)



18

(1)

20

(6)

(4)

21

(7)

45

51

(2)

(6)

54

(6)

4

3

5



(1)

4

3

3

2

(2)

-

4

82

83

78

(10)

(11)

83

(1)

(13)

La moitié des étudiants africains, sud-asiatiques et extrême-orientaux ont des amis compatriotes et français exclusivement — comparés à 45 % et 17 % des Nord-Africains et des Moyen-Orientaux. Dans ce dernier groupe, de même que parmi les Latino-Américains, un étudiant sur deux compte des amis compatriotes et européens, Français

Les contacts

77

inclus, ce qui est aussi le cas d'un tiers des Nord-Africains et des Sud-Asiatiques. Ceux qui n'ont que des amis non français sont d'origine africaine (22 %), nord-africaine et extrême-orientale (17 % respectivement). En résumé, on peut dire que quatre étudiants sur cinq ont des amis français. Mais cette proportion change lorsqu'il s'agit de définir, de décrire l'ami le plus intime, qui est presque dans tous les cas un garçon (tableau IV-2). Plus de la moitié des étudiants — notamment ceux originaires d'Afrique du Nord, de l'Asie du Sud, et d'Extrême-Orient — ont un ami intime de la même nationalité qu'eux. Les personnes pour qui cet ami est Français varient entre un quart et un tiers de l'échantillon, soit un quart des Africains et Nord-Africains, un tiers de chacun des autres groupes. Les Latino-Américains sont plus hétérogènes dans leur choix : la moitié d'entre eux ont un ami intime qui n'est ni Français ni compatriote, un tiers un ami compatriote. Il est à noter ici qu'un quart encore des Africains et des Moyen-Orientaux ont des amis intimes étrangers à la France et à leur propre pays. TABLEAU I V - 2

Nationalité de l'ami le plus intime

tnsemoie

Compatriote Français Etranger du même continent Etranger d'un autre continent Il n'a pas d'ami intime

Afrique

Afrique

d u N o r d

noire

e A a f' ^d

Moyenorient

s

Extrême- Amérique Orient latine

(148) %

(37) %

(61) %

(11) N

(11) N

(28) %

(14) N

47 29

57 24

36 26

(3) (4)

(6) (4)

44 36

(5) (2)

12 ) 5 1 7

"

— ) S 8) 11

26 ) 8

3 > 8

(2) j 29

(1) ) (1)

— (3)

— ) • (1) (1) ' — >



(



(2) (5) '

(7)



Le plus souvent les étudiants disent sortir avec des filles de nationalité française (41 %) ou avec des compatriotes (22 %). Ainsi plus de la moitié des Moyen-Orientaux, des Sud-Asiatiques et des LatinoAméricains sortent avec des Françaises seulement, comparés à un tiers des étudiants des autres zones. Les Africains sont les plus nombreux à avoir des amies compatriotes (un cinquième d'entre eux), les

78

Relations humaines

Nord-Africains, des amies de toutes nationalités (Françaises, compatriotes et autres : 21 %) et les Moyen-Orientaux des amies étrangères (autres que Françaises et compatriotes : 25 %) (tableau IV-3). TABLEAU I V - 3

Nationalité des filles avec lesquelles l'étudiant sort

P Afrique Afrique Moyen- Asie du Extrême- Amérique M nnsemoie du Nord noire 0rjent Sud 0rient latine

Françaises seulement Compatriotes seulement Françaises et compatriotes Françaises et autres (pas de compatriotes) Compatriotes et a u t r e s (pas de Françaises) Autres seulement Toutes A u c u n e , ne sort pas

(152) %

(38) %

(64) %

(12) N

(10) N

(27) %

(15) N

41

32

33

(7)

(7)

56

(9)

22

13

31

(1)



26

(1)

6

8

8





4

6

8

8







(1)



3



(1)



(2)

12 9

16 21

6 6

(3) (1)

(2)

3

3

6





2



11 4 —



(2) —



1.2.4. Conclusion Un étudiant sur deux se dit insatisfait (47 % comparés à 53 % des satisfaits). Ainsi les trois quarts environ des étudiants originaires du MoyenOrient (75 %), d'Asie du Sud (73 %) et d'Extrême-Orient (62 %) se disent satisfaits de leur vie sociale. Par contre, la moitié des Nord-Africains et des Africains (53 % environ respectivement) sont mécontents de leur expérience sociale en France.

Les contacts

1.3.

1.3.1.

79

PAYS-BAS

Satisfaction au niveau des relations humaines

La critique de l'aspect social du séjour est faite à l'Université et à l'Institut de façon similaire : 20 % et 17 % respectivement des étudiants se disent insatisfaits. Les sous-groupes où l'on trouve un pourcentage d'insatisfaction élevé sont constitués par les Asiatiques (25 % insatisfaits comparés à 14 % des autres groupes), les étudiants âgés de plus de 30 ans (26 % comparés à 14 % des plus jeunes), parmi les étudiants mariés avec une personne de la même nationalité qu'eux (28 % comparés à 17 %). A l'Institut comme à l'Université peu d'étudiants se disent très satisfaits de leurs relations humaines (14 % environ respectivement). H n'est pas surprenant de trouver parmi les étudiants interviewés plus de mécontents au sujet des aspects sociaux de leur séjour chez les non-boursiers (26 % que chez les boursiers (16 %). Lorsque nous considérons à nouveau les 25 étudiants de l'Université d'origine indonésienne, nous constatons que 6 d'entre eux, soit 24 %, sont mécontents, lorsque le pourcentage n'est que de 16 % en ce qui concerne les étudiants d'université d'autres pays.

1-4.

1.4.1.

YOUGOSLAVIE

Comment les étudiants passent leur temps

La majorité des étudiants étrangers à Ljubljana (62 %) sont rarement seuls, alors que 36 % d'entre eux—y compris 16 Africains— sont plus ou moins seuls (un des étudiants n'a pas répondu à la question). Les réponses données par les étudiants interviewés à la question : en quelle compagnie passent-ils la majeure partie de leur temps, se répartissent ainsi :

80 TABLEAU I V - 4

Relations

Nationalité des personnes avec lesquelles les étudiants passent leur temps

(69)

Pays arabes (29)

19 32 12

21 41 7

(4) (4)

14

14

(4)

9

7

6 9

Ensemble

%

Yougoslaves Compatriotes Etrangers Yougoslaves et compatriotes Compatriotes et étrangers Compatriotes, étrangers et Yougoslaves Pas de réponses

humaines

%

Asie

Afrique

(14) N

(25) 8 24 24



%

Amérique latine (1) N (1) —



8





16



7

(2)





3



20



Il semble, d'après ce tableau, que la moitié des étudiants (53 %) passent leur temps à Ljubljana uniquement en compagnie de compatriotes et d'étrangers, 19 % seulement sont uniquement en compagnie d'étudiants yougoslaves, alors que 20 % passent leur temps en compagnie «mixte» (compatriotes, Yougoslaves, étrangers). Ainsi les étudiants étrangers fréquentent volontiers les étudiants yougoslaves — soit seuls, soit avec leurs compatriotes ou d'autres étrangers. 33 étudiants étrangers, soit moins de la moitié, sont dans ce cas. Seuls 5 étudiants interviewés fréquentent des personnes qui ne sont pas des étudiants, tandis que tous les autres ont des connaissances et des amis parmi les étudiants. Les moins intégrés semblent être les étudiants originaires d'Afrique (8 % d'entre eux seulement passent la majeure partie de leur temps en compagnie de Yougoslaves), viennent en second lieu les étudiants des pays arabes (21 %) — les plus intégrés étant les étudiants originaires d'Asie (4 sur 14).

Les contacts 1.4.2.

81

Contacts avec les familles yougoslaves

Sur 9 étudiants interviewés, 46 ont été invités par les familles yougoslaves pendant leur séjour. Les étudiants ainsi invités auraient souhaité avoir des contacts plus fréquents. Il y a parmi eux 22 étudiants originaires d'Afrique, et il est certain que de ce point de vue ce sont les plus isolés. 1.4.3.

Les trois meilleurs amis

Lorsque les étudiants ont été invités à indiquer la nationalité de leurs trois meilleurs amis, 20 ont répondu que leur meilleur ami était yougoslave — entre autres 8 filles étaient citées, dont 2 étudiantes. Les résultats de la recherche démontrent clairement que les étudiants étrangers à Ljubljana fréquentent des filles yougoslaves, c'est dans ce sens qu'ont répondu 48 étudiants interviewés, alors que 8 parmi eux déclarent qu'ils sortent avec des amies compatriotes ou avec des étrangères. 1.4.4.

Sentiment

d'isolement

A la question concernant un sentiment d'isolement possible depuis leur arrivée en Yougoslavie, les étudiants interviewés ont répondu de la manière suivante : TABLEAU I V - 5

Sentiment Ensemble (69) %

Se sentent isolés : Très souvent Souvent Quelquefois Rarement Très rarement ou jamais 6

16 12

d'isolement Pays arabes (29) %

Asie

Afrique

Bolivie

(14)

(25)

(1)

N

%

N

28 24 44 4

(1)

(1)

17

10 3 49 29

7

10

(2)

48

(8) (3)

Relations humaines

82

Ainsi 76 % des étudiants étrangers (dont 96 % des Africains) se sentent parfois isolés. Ce sentiment d'isolement est motivé différemment. L'une des raisons se rapporte certainement à la discrimination nationale et raciale ; une autre consiste en la grande nostalgie qu'éprouvent les étudiants étrangers envers leur pays d'origine. 1.4.5.

Conclusion

Le sentiment d'isolement des étudiants africains apparaît aussi très nettement dans les réponses données lorsqu'ils estiment leurs expériences en Yougoslavie sous l'angle de la vie sociale qui a été la leur dans ce pays. 84 % des Africains ont répondu qu'ils étaient insatisfaits, soit 44 % insatisfaits et 40 % très insatisfaits. 83 % des étudiants du Moyen-Orient ont indiqué qu'ils étaient très satisfaits, ou satisfaits.

2. RAISONS DE SATISFACTION OU D'INSATISFACTION DES RELATIONS HUMAINES Sauf aux Pays-Bas où les trois quarts des étudiants sont satisfaits de leurs relations humaines, la tendance en Autriche et en France surtout, consiste à être mécontent à ce niveau (36 % et 47 % respectivement). Dans la mesure où les réponses aux différentes questions sont relativement peu éloignées, à la question de savoir ce qui fait qu'un individu soit satisfait ou non de ses relations humaines, vient s'ajouter celle de savoir pourquoi, par exemple les étudiants aux Pays-Bas sont sur ce plan plus contents que les étudiants en Autriche et ces derniers davantage que ceux qui vivent en France.

2.1.

DIFFÉRENCES

CULTURELLES

«Les amitiés peuvent apparaître comme un sujet trop personnel pour qu'elles soient influencées par les résultats de la recherche, mais il est sans doute intéressant d'être mieux renseigné à leur propos. Certains des problèmes rencontrés résultent peut-être d'une fausse interprétation des aspects sociaux et culturels. Ainsi, par exemple, dans certains pays, l'emploi du prénom dénote une intimité beaucoup

Raisons de satisfaction ou d'insatisfaction des relations humaines

83

plus grande que dans d'autres ; lorsqu'un Italien ou un citoyen des Pays-Bas est appelé par son prénom par une de ses connaissances anglo-saxonnes, il peut l'attribuer à un degré d'intimité qui en réalité n'était pas voulu — et cela peut être cause pour lui d'une déception par la suite. Par contre, un Allemand ou un Américain, habitué en général à accueillir facilement chez lui des étrangers, peut se froisser de n'être pas invité chez des connaissances au Mexique ou en France ; il peut attribuer à cela un certain rejet qui n'était pas intentionnel. » (Klineberg, 1966). Dans le cas de la France — que nous envisagerons à ce niveau dans la mesure où des exemples précis sont à notre disposition —, comme on pouvait le remarquer auparavant, la plupart des étudiants ont reçu un choc : les normes sociales, la communication, la valeur des rapports humains ne correspondaient pas à celles en vigueur dans leur pays. Lorsqu'ils parlent des difficultés à se faire des amis ils semblent frappés par la froideur, le manque d'hospitalité, l'individualisme surtout des autochtones : «chacun pour soi», «chacun cultive son jardin», «ils ne savent même pas qui est leur voisin». Ceci est l'expression d'une différence culturelle. A un niveau plus particulier, pour l'interprétation des signes de réticence, une difficulté est parfois mentionnée : le risque de voir ses actes mal compris : 23 % des étudiants en ont souffert au début de leur séjour à Paris. Ce sont des étudiants d'origine nord-africaine et africaine. N'ayant que peu d'information sur ce thème, il était difficile de développer l'étude des différences culturelles et de leur impact sur la formation des amitiés et des relations humaines. Au niveau personnel de l'étudiant, l'âge paraît sans relation avec la satisfaction sociale, et cela tant en France qu'en Autriche et aux Pays-Bas. La satisfaction signifie en général des contacts nombreux avec les habitants du pays : soit connaître des familles, avoir parmi ses amis des autochtones ; dans le cas seulement de la France et des PaysBas ces rapports consistent aussi à sortir avec des filles du pays de séjour et enfin, pour la France, à ne pas se sentir isolé.

Relations

84 2.2.

humaines

M O D E DE LOGEMENT

En dehors de ces points communs aux trois pays étudiés ici, et malgré les différences d'échantillonnage, dans le cas de la France et des Pays-Bas quelques autres aspects des rapports sont à souligner. Ainsi, les résultats en France montrent l'importance du mode de logement de l'étudiant. Si vivre en cité universitaire est l'idéal pour tout étudiant, c'est un facteur qui restreint les possibilités de contacts : les étudiants qui bénéficient d'un logement universitaire ont moins que les autres des contacts avec les Français. L'étudiant vit là avec des étrangers, en vase clos, d'où le danger d'une autosuffisance.

2.3.

RESSOURCES FINANCIÈRES

Un autre facteur qui semble jouer dans les relations humaines, c'est l'argent. En France comme aux Pays-Bas, les résultats mettent en évidence que les étudiants financièrement démunis ont des contacts peu nombreux (33 % de ceux qui disposent de moins de 600 francs se disent mécontents, comparés à 17 % de ceux qui disposent d'une somme supérieure. Aux Pays-Bas, ceux qui sont aisés ont des contacts nombreux et sont satisfaits. Ce point est important. En effet en supposant que l'étudiant puisse avoir des contacts, qu'il en ait établi, ces relations signifient pour lui des sorties, aller dans les cafés, c'est-à-dire suivre un rythme de dépenses même modiques que ne lui permet pas son revenu mensuel généralement de moins de 600 francs. L'étudiant est alors obligé de réduire ses sorties et ses contacts en fonction de ses moyens. Dès lors, cela signifie pour lui ne pas avoir de contacts, ou en avoir fort peu. A travers ces deux derniers facteurs, le rôle du logement et celui des ressources dans les relations humaines, se dessine l'importance d'un domaine que l'on a trop souvent négligé dans l'étude des étudiants étrangers, à savoir la situation matérielle.

2.4.

SUCCÈS ACADÉMIQUES

Il faut aussi noter l'incidence des rapports sociaux sur les études et le passage des examens. Il semble aussi que le plus souvent le succès

Raisons de satisfaction ou d'insatisfaction des relations humaines

85

aux examens va de pair avec la satisfaction au niveau social et que l'échec aboutit au mécontentement. TABLEAU I V - 6

Satisfaction au niveau des relations humaines et succès académiques (France)

%

Dominante échecs ou succès = échecs (27) %

62 38

44 56

Dominante succès (69) Satisfaits Insatisfaits

Ces résultats font ressortir une relation intéressante entre le succès aux examens (et la satisfaction présumée à cet égard) et la satisfaction éprouvée au sujet d'autres expériences, de caractère éminemment social. Il apparaît impossible de distinguer ici entre la cause et les effets ; l'argument serait que la satisfaction est une réaction générale de tous les aspects de l'expérience tentée à l'étranger. TABLEAU

IV-7

Satisfaction au niveau des relations humaines et contacts avec les autochtones Contacts nombreux N

AUTRICHE

Satisfaits Insatisfaits

N

80

%

38 62

20 (76)

Satisfaits Insatisfaits PAYS-BAS

peu nombreux

(97)

(129)

Satisfaits Insatisfaits FRANCE

%

(76) 80

26 74

20 (37) 84

(8) (2)

16

(6)

Relations humaines

86

2.5.

CONTACTS

Le tableau IV-7 donne sans doute des indications par trop évidentes, mais il démontre le caractère constant des résultats obtenus par nous. Le tableau IV-8 peut être également considéré comme faisant ressortir le caractère constant des résultats obtenus ; les étudiants qui disent avoir eu en général plus de contacts avec la population locale, sont aussi ceux qui déclarent avoir eu plus de contacts avec les familles autochtones. TABLEAU I V - 8

Contacts et relations avec les familles autochtones Des contacts avec les familles oui non N % N %

AUTRICHE

(214)

Nombreux Peu nombreux FRANCE

PAYS-BAS

29

48

71

(92)

Nombreux Peu nombreux Nombreux Peu nombreux

(62) 52

(42) 58

36

42

64

(46)

(9) 48

(1)

52

(8)

Ici encore on retrouve un caractère constant ; plus les contacts locaux sont fréquents, plus grande est la probabilité d'avoir des amis parmi les habitants du pays hôte. Le même facteur apparaît si l'on considère les relations avec les jeunes filles du pays hôte ; plus les amis autochtones sont nombreux en général, plus nombreux sont les amis de la nationalité du pays.

Raisons de satisfaction ou d'insatisfactbn des relations humaines TABLEAU I V - 9

87

Contacts et nationalité des cinq meilleurs amis Contacts nombreux N

AUTRICHE

(125)

Des amis autrichiens Pas d'amis autrichiens FRANCE

(145) 51

10 (76)

PAYS-BAS

peu nombreux N %

90

Des amis français Pas d'amis français

49 (76)

97

66

3 (46)

Des amis des Pays-Bas Pas d'amis des Pays-Bas TABLEAU I V - 1 0

%

34 (14)

83

(6)

17

(8)

Les cinq meilleurs amis et nationalités des filles avec lesquelles les étudiants sortent Sort avec des filles du pays de séjour étrangères N % N %

AUTRICHE

(180)

Des amis autrichiens Pas d'amis autrichiens FRANCE

Des amis des Pays-Bas Pas d'amis des Pays-Bas

57

25 (105)

Des amis français Pas d'amis français PAYS-BAS

(83) 75

43 (95)

89

71

11

29

(21) 100 —

(19) (16) (3)

Le tableau IV-11 indique l'effet du lieu de résidence. La vie dans une «cité» ou dortoir universitaire rend les contacts moins fréquents avec la population locale, mais ne les rend pas impossibles.

Relations

88 TABLEAU I V - 1 1

humaines

Contacts et mode de logement (France) Logement .. . universitaire (90)

non . ... • universitaire (64)

3 41 53 2

8 52 33 8

%

Contacts : Très nombreux Nombreux Peu nombreux Inexistants

%

Le tableau IV-12 indique le rôle du revenu et des ressources financières dans la fréquence des contacts avec la population du pays. TABLEAU

IV-12

Contacts et ressources financières (France) Ressources moins de 600 francs Plus de 600 francs (98) (55)

Contacts : Très nombreux Nombreux Peu nombreux Inexistants

%

%

4 42 53 1

9 53 31 7

Le tableau IV-13 est intéressant surtout parce qu'il indique le caractère constant des informations recueillies. Ceux qui disent avoir moins de contacts personnels déclarent plus fréquemment qu'ils se sentent «isolés». Il y a bien entendu de nombreuses exceptions.

Raisons de satisfaction ou d'insatisfaction des relations humaines TABLEAU I V - 1 3

Contacts et sentiment d'isolement

89

(France)

Isolement souvent ou très rarement ou jamais souvent (61) (93) Contacts : Très nombreux Nombreux Peu nombreux Inexistants

%

%

4 32 59 4

7 66 23 5

Ces relations se précisent lorsqu'on considère les différents types de contacts qu'ont pu établir ces étudiants durant leur séjour. Aux Pays-Bas et en Autriche les étudiants qui ont des amis autochtones se disent en plus grand nombre satisfaits de leur vie universitaire que ne le sont ceux qui ne comptent que des amis compatriotes ou étrangers au pays où ils font leurs études (tableau IV-14). TABLEAU I V - 1 4

Satisfaction au niveau des études et nationalité des cinq meilleurs amis Des amis du pays N

AUTRICHE

(187)

Très satisfaisant Satisfaisant Insatisfaisant FRANCE

Très satisfaisant Satisfaisant Insatisfaisant

Pas d'amis N

%

(83) 15

6

66

57

19

37

(125)

Très satisfaisant Satisfaisant Insatisfaisant PAYS-BAS

%

(27) 35

33

58

59

7

7

(44)

(17) 15

(3)

75

(10)

9

(4)

Relations

90

humaines

Lorsqu'ils considèrent en général leurs contacts, en France et en Autriche, les étudiants très satisfaits de leur expérience universitaire disent avoir des contacts nombreux, alors que ceux qui se disent seulement satisfaits, ou insatisfaits, n'en ont que peu (tableau IV-15).

TABLEAU

IV-15

Satisfaction au niveau de la vie universitaire et contacts Très Satisfaits

satisfaits %

Insatisfaits

%

N

%

(130) (147)

18 7

66 60

16 33

(76) (76)

43 26

51 63

5 11

(70) (47)

24 28

69 62

7 11

AUTRICHE

Nombreux Peu nombreux FRANCE

Nombreux Peu nombreux PAYS-BAS

Nombreux Peu nombreux

Par ailleurs, alors que la nationalité des personnes avec lesquelles l'étudiant entretient des contacts joue un rôle important dans la satisfaction de l'étudiant en Autriche et aux Pays-Bas, ce qui compte en France aux yeux des étudiants c'est le fait d'avoir beaucoup de contacts. Le tableau suivant indique aussi que les étudiants satisfaits de leur expérience universitaire ont, en général, des contacts plus fréquents avec les familles du pays (tableau IV-16). Ces relations en France expliquent alors que les étudiants qui échouent se sentent plus souvent isolés que les autres. Echouer aux examens, être mécontent de sa vie universitaire c'est aussi le plus souvent être mécontent de ses relations humaines et se sentir isolé dans le pays de séjour.

Raisons de satisfaction ou d'insatisfaction des relations humaines TABLEAU

IV-16

Satisfaction au niveau des études et contacts avec des familles autochtones A eu des contacts avec des familles N % (214)

AUTRICHE

Très satisfaisant Satisfaisant Insatisfaisant

N

%

(62) 15 48 37

(102)

Très satisfaisant Satisfaisant Insatisfaisant

(50) 30 56 14

36 59 5 (57)

PAYS-BAS

(5)

(1)

16 72 12

Très satisfaisant Satisfaisant Insatisfaisant IV-17

N'en a pas eu

11 67 22

FRANCE

TABLEAU

91

Sentiments (France)

Isolement : Souvent Rarement ou jamais

d'isolement

(3) (1) et

succès

académique

v . Dominante succès (N = 70)' v

Dominante échecs

%

%

61 39

78 22

ou , . echecs = succès

Malgré les quelques différences entre les pays, la tendance demeure : les relations humaines sont liées à la vie universitaire. Une vie universitaire ne peut être satisfaisante que si l'étudiant — en dehors de la nécessité d'une formation scolaire adéquate — a aussi une vie personnelle et sociale épanouie.

92

Relations

humaines

SUMMARY IN ENGLISH

We turn now to the question of the relation of these foreign students to other persons, their human relations. This chapter summarizes the information obtained regarding the nature and degree of contact between these students and the population of the host country, their satisfaction or dissatisfaction with such contact, their choice of friends of varying degrees of intimacy, their relationship with the local girls, their general estimate of their social life. These experiences are related to the broad issue of cultural differences as contributing to the difficulty of social adjustment ; place of residence, degree of success and satisfaction with regard to university studies, all play a part in determining the "human relations" of these students.

5 L a satisfaction au niveau de la situation matérielle

Dans les études antérieures consacrées aux étudiants étrangers, peu d'attention a été accordée à leurs ressources financières, au revenu (bourse et autres) dont ils disposent. Ce chapitre traite de la question des ressources, s'ils ont lieu d'en être satisfaits ou non, s'ils les estiment comparables à celles d'un étudiant autochtone, ainsi qu'à leur propre situation financière dans leur pays d'origine, comment ils répartissent leurs dépenses et comment ils envisageraient de les répartir si leur budget était accru. Les réponses indiquent en général un sentiment plutôt modéré d'insatisfaction, la fréquente insuffisance de ressources qui ne permettent de faire face qu'aux nécessités vitales sans laisser aucune marge des activités de caractère récréatif et (comme il a été déjà mentionné) les conséquences fâcheuses de ce manque de ressources pour le maintien de relations avec la population locale. Une relation directe n'apparaît pas nettement entre la satisfaction exprimée au sujet des ressources financières et la satisfaction ressentie en ce qui concerne la vie universitaire en général.

1. A N A L Y S E

PAR

PAYS

Avant de tenter de mesurer les répercussions de cette situation sur la vie et le séjour de l'étudiant étranger, il est nécessaire de décrire, pour chaque pays, ce que sont les ressources de ces étudiants, leur mode de vie et les différents problèmes qui y sont liés.

La satisfaction au niveau de la situation matérielle

94

1.1.

AUTRICHE

Comme nous l'avons vu auparavant, les deux tiers environ des étudiants disposent mensuellement de moins de 3 000 schillings (595 francs). 1.1.1.

Estimation des ressources par rapport aux besoins

Lorsque les étudiants comparent leurs ressources à leurs besoins, 70 % d'entre eux (Europe du Sud-Est 76 % ; Moyen-Orient 67 %) considèrent leurs ressources comme étant suffisantes ou même plus que suffisantes. Les 30 % restants considèrent leurs ressources insuffisantes, 4 % les considèrent très insuffisantes. 1.1.2.

Estimation des ressources par rapport à celles d'un étudiant autrichien

Invités à comparer leur situation financière avec celle d'un étudiant autrichien moyen, les étudiants se partagent selon les réponses données en trois groupes. Premièrement, viennent ceux qui estiment leur situation comme étant meilleure ou même bien meilleure que celle d'un étudiant autrichien — 32 % des étudiants étaient de cet avis. Les étudiants du deuxième groupe estiment leur situation financière comme étant égale à celle d'un étudiant autrichien (46 %). Le troisième groupe (19 %) considère sa situation financière comme plus mauvaise que celle d'un étudiant autrichien moyen — 12 % des étudiants du groupe d'Europe du Sud-Est et 25 % des étudiants du groupe du MoyenOrient déclarent ne rien connaître de la situation financière des étudiants autrichiens. 1.1.3.

Estimation des ressources par rapport à celles qu'ils avaient dans leur pays

Invités à comparer leur situation financière avec celle qu'ils avaient dans leur pays d'origine, 48 % des étudiants ont considéré que leur situation actuelle en Autriche était plus mauvaise, ou même beaucoup plus mauvaise ; 28 % ont répondu qu'elle était comparable ; et 23 % qu'elle était meilleure et même bien meilleure que dans leur pays.

95

Analyse par pays

Les étudiants du groupe d'Europe du Sud-Est semblent avoir subi une réduction plus marquée de leurs possibilités financières : 19 % des étudiants de ce groupe estiment leur situation actuelle meilleure que par le passé ; 31 % estiment se trouver dans une situation comparable, et 50 % répondent que leur situation est plus mauvaise et même beaucoup plus mauvaise que dans leur pays. Les pourcentages correspondants pour le groupe du Moyen-Orient sont de 26 %, 28 % et 47 % respectivement. 1.1.4.

Dépenses des étudiants

La colonne des dépenses dans le budget des étudiants apporte une indication nouvelle quant à la manière dont ils ont pu s'adapter à leur nouvelle situation financière en Autriche. Des aperçus complémentaires sont donnés lorsque l'on étudie la structure d'un budget idéal fictif : les étudiants ont été interrogés sur la manière dont ils répartiraient leurs dépenses s'il n'y avait pas pour eux de problème financier. TABLEAU V - L

Les dépenses des étudiants

(Autriche)

Place qu'auraient ces dépenses dans une situation idéale N = 277

Place des dépenses dans leur budget % Nourriture Logement Instruments de travail Livres, disques Vêtements Voyages Sorties culturelles Cinéma Restaurants Danse

89 86 80 41 37 32 29 25 17 5

%

85 91 86 72 78 76 69 37 40 22

Les dépenses dans le budget réel des étudiants peuvent se diviser en deux catégories : les dépenses décrites par plus des trois quarts

96

La satisfaction

au niveau de la situation

matérielle

des étudiants comme étant importantes ou très importantes, et les dépenses qui n'atteignaient pas ce niveau. Dans la première catégorie se trouvent les dépenses concernant leur alimentation, que 89 % des étudiants ont considérées comme importantes ou très importantes, venait ensuite le logement (86 %) et les fournitures scolaires (80 %). La seconde catégorie de dépenses consiste en achat de livres et disques (41 %), vêtements (37 %), voyages (32 %), récréation culturelle, c'està-dire théâtres et concerts (17 %), et en dernier lieu les sorties dans les cabarets et dancings, que 5 % des étudiants considéraient comme importantes ou très importantes. Les différences entre les deux groupes régionaux de l'échantillon sont négligeables, sauf deux exceptions : les étudiants du groupe du Moyen-Orient paraissent accorder plus d'importance aux fournitures scolaires (86 %, à comparer avec 72 % pour le groupe de l'Europe du Sud-Est), ainsi qu'aux voyages (32 %, à comparer avec 28 % pour le groupe de l'Europe du Sud-Est). Dans le budget idéal tel que le conçoivent les étudiants, les deux catégories de dépenses sont moins évidentes que dans le budget réel. Si nous conservons la fraction ci-dessus indiquée, soit les trois quarts des étudiants, nous voyons que viennent s'ajouter deux catégories de dépenses — vêtements et voyages — à celles considérées comme étant importantes ou très importantes. En première place dans le budget idéal vient le logement — dépense considérée par 91 % des étudiants interviewés comme étant importante ou très importante ; en second lieu, les fournitures scolaires (88 %), puis l'alimentation (85 %), les vêtements (78 %) et les voyages (76 %). Dans la seconde catégorie de dépenses, on trouve l'achat de livres et de disques (72 %), la récréation culturelle (69 %), ensuite les sorties au restaurant (40 %), le cinéma (37 %), les cabarets et dancings que 22 % des étudiants estiment comme importantes ou même très importantes lorsqu'ils n'ont pas de problèmes financiers. Ces pourcentages permettent de voir comment et selon quel ordre de priorité les étudiants répartiraient leurs dépenses s'ils disposaient dans leur budget de ressources supplémentaires ; ou, en d'autres termes, ils permettent d'établir la liste des besoins que les ressources actuelles des étudiants ne leur permettent pas — ou ne leur permettent qu'insuffisamment — de satisfaire. 44 % des étudiants ayant considéré les dépenses de voyages comme peu importantes, ou fort peu importantes dans leur budget réel, les

Analyse par pays

97

estimeraient très importantes dans un budget idéal ne comportant pas de problème financier ; 4 % des étudiants donneraient une place moins importante qu'elle ne l'est actuellement à l'alimentation. 1.1.5. Conclusion Dans l'appréciation générale de leurs expériences, donnée sous l'angle des conditions économiques, 36 % des étudiants estiment ces expériences insatisfaisantes (2 % d'entre eux les jugent très insatisfaisantes). 32 % du groupe d'Europe du Sud-Est et 39 % du groupe du MoyenOrient sont du même avis. La majorité des étudiants estiment cependant satisfaisante (60 %) ou très satisfaisante (4 %) leur situation économique. Les résultats indiquent un plus grand mécontentement de la part des étudiants, au sujet de leurs expériences en Autriche, quand il s'agit de leur bien-être matériel. On peut opposer au pourcentage indiqué précédemment de 36 % d'étudiants insatisfaits, les pourcentages suivants : 25 % seulement sont insatisfaits quant à leurs expériences universitaires et 31 % mécontents de leurs relations humaines.

1.2.

FRANCE

1.2.1.

Ressources

L'étudiant boursier est doté mensuellement d'une somme qui a été calculée pour lui permettre de subvenir à ses besoins élémentaires. Le montant varie beaucoup, l'organisme émetteur accorde de 500 francs à 1 000 francs. Plus des deux tiers des étudiants considérés dans cette étude sont boursiers et disposent en général de 400 à 600 francs par mois. Dans la brochure Je vais en France à l'usage des étudiants étrangers et encore distribuée en 1969 par le Centre national des œuvres universitaires et scolaires (C.O.P.A.R.), «un budget minimum mensuel» était présenté à l'étudiant. L'étudiant qui allait résider à Paris pouvait y lire : «Ce budget, établi en novembe 1966 et qui est donné à titre indicatif, constitue un minimum.» 7

98

La satisfaction au niveau de la situation matérielle Bénéficiaires * (Francs)

Non-bénéficiaires (Francs)

Logement Nourriture Entretien (linge, chaussures, etc.) Transports Frais d'études (inscription, librairie, papeterie) Frais divers (spectacles, boissons, cigarettes)

130 130

250-300 240

30 50

30 50

100

40

100

80

Total

480

690

* Des œuvres universitaires et scolaires.

Entre la lecture d'un budget «objectivement» suffisant et l'expérience, la distance grandit. S'il est notoire que tout individu considère toujours ses ressources comme étant insuffisantes, quel qu'en soit le montant, il est néanmoins intéressant de voir comment les étudiants apprécient les ressources dont ils disposent. A côté de cette appréciation proprement dite, et afín de mieux comprendre le climat dans lequel vit l'étudiant, il a semblé également intéressant de voir s'il considérait comme différente de la sienne la situation financière de l'étudiant autochtone. Si l'étudiant étranger peut avoir l'impression d'être privé par rapport à l'étudiant autochtone, une différence encore plus grande peut exister entre le statut financier qu'il avait chez lui, dans son pays, et celui qui est le sien ici. 1.2.2.

Estimation des ressources par rapport aux besoins

En jugeant leurs ressources par rapport à leurs besoins les étudiants se divisent en deux groupes, les uns estiment leurs ressources suffisantes (47 %), les autres les trouvent insuffisantes (40 %) ou très insuffisantes (13 %). Les étudiants qui séjournent dans la capitale ressentent davantage l'insuffisance de leurs moyens financiers que ceux qui vivent dans une ville de province. La plus grande proportion d'étudiants insatisfaits sous ce rapport se trouve chez les Nord-Africains et

Analyse par pays

99

les Africains (56 % environ, respectivement). Par contre les deux tiers des étudiants moyen-orientaux et latino-américains et la moitié de ceux des deux autres groupes sont satisfaits de leurs ressources : elles suffisent à leurs besoins. TABLEAU V - 2

Estimation des ressources par rapport aux besoins des étudiants (France)

Ensemble (155)

%

Suffisantes Insuffisantes Très insuffisantes

Afrique Afrique Moyen- Asie du Extrême- Amérique du Nord noire Orient Sud Orient latine (38) (65) (13) (11) (28) (14) % N N % N %

47 40

45 34

43 43

(8) (4)

(6) (4)

50 46

13

21

14

(1)

(1)

4

(9) (5) —

L'insuffisance des ressources s'explique parfois par la place prédominante que prend le loyer pour les étudiants qui ne résident pas en cités universitaires, ou parfois encore par des charges particulières : «J'ai 480 francs par mois et je paie un loyer de 300 francs. Je ne fais qu'un repas par jour, le soir.» ALGÉRIE.

Bien que ce point n'ait pas été systématiquement étudié, quelques interviews ont montré qu'en dehors de son propre train de vie, l'étudiant parfois devait venir en aide à ses parents, à sa mère surtout, comme dans le cas suivant : «Je vis d'un transfert de traitement et d'une bourse, soit 700 francs en tout par mois, mais les bourses arrivent très irrégulièrement et sont très mal réparties. La bourse (400 francs) est payée tous les trois mois, mais elle reste parfois beaucoup plus longtemps avant de parvenir aux étudiants. Pour le transfert de traitement, c'est la même chose. Je suis en France depuis septembre, nous sommes maintenant en février et je n'ai encore rien reçu. De plus, je dois faire vivre ma mère : cela signifie deux loyers, deux personnes à vivre sur cette somme. J'envoie donc à ma mère 350 francs par mois, du moins théoriquement,

100

La satisfaction au niveau de la situation matérielle

car pour le moment je n'ai rien. J'emprunte pour lui envoyer et j'emprunte aussi pour vivre, le moins possible.» MAROC.

1.2.3.

Estimation des ressources par rapport à celles d'un étudiant français

41 % des étudiants croient leurs ressources semblables à celles d'un étudiant français, 16 % les estiment meilleures et 34 % moins bonnes. Les Nord-Africains sont les plus nombreux à partager cette dernière opinion (45 %). Ils estiment leurs ressources moins bonnes que celles d'un étudiant français vivant dans les mêmes conditions qu'eux-mêmes (loin de sa famille, boursier ou non, etc.) parce que l'étudiant français, à leur avis, est dans son pays, qu'il y a des amis, parce que ses parents ne sont pas très loin et qu'il pourra toujours compter sur eux : «Ma situation est moins bonne que celle d'un étudiant français. Dans l'école où je suis, les étudiants ont un certain rang social, supérieur au mien.» TUNISIE.

Quelques étudiants (9 %) étaient dans l'impossibilité de faire cette comparaison, ignorant tout du mode de vie de l'étudiant français : «Je ne sais pas comment vit un étudiant français. Mais de toute façon sa famille est en France, finalement pas très loin de lui et elle peut éventuellement lui venir en aide.» TUNISIE.

«Je ne peux pas faire de comparaison car j'ai très peu de contacts Avec les Français.» GHANA.

1.2.4.

Estimation des ressources par rapport à celles qu'ils avaient dans leur pays

Si un tiers des étudiants estiment leur situation matérielle inférieure à celle d'un étudiant autochtone, ce décalage augmente lorsqu'ils comparent leurs ressources à celles qu'ils avaient chez eux : les trois quarts

Analyse par pays

101

d'entre eux les considèrent comme moins bonnes en France — et cela quelle que soit la région à laquelle ils appartiennent. Ce n'est pas tellement le montant des ressources qui les incite à répondre ainsi, mais le fait que dans leur pays ils avaient moins de besoins (notamment en vêtements d'hiver), que la vie y était moins chère et qu'ils vivaient dans leurs familles. Ce dernier point peut être important pour les étudiants qui doivent travailler pour subvenir à leurs besoins : «Chez moi, j'ai ma famille, mes parents, une voiture, je connais beaucoup de gens. En France, partout où je vais, il faut que je paie. Dans mon pays, les problèmes élémentaires comme la nourriture sont meilleur marché qu'ici, où il faut en plus s'acheter des vêtements chauds... Le niveau de vie, à Paris est très élevé, un étudiant n'a pas assez d'argent pour s'adapter, être à la mode.» VIETNAM.

Le sentiment, réel souvent, de n'avoir pas assez pour vivre, d'avoir moins que lorsqu'on était chez soi, représente une chute dans l'échelle sociale : «Moi, j'étais une personnalité dans mon pays. Ici, je suis un pauvre étudiant.» IRAN.

L'individu qui avait un statut social parce qu'il était d'une famille aisée, ou qu'il était «connu», on savait qui il était, il avait des amis, se retrouve en France anonyme, dépersonnalisé et pauvre. Cette perte d'identité se retrouve plus loin, lorsqu'on lui demande ce qui lui manque de son pays ; «Etre quelqu'un. Chez moi, je suis quelqu'un ; ici je ne suis rien.» CONGO.

Le fait que des étudiants trouvent leurs ressources insuffisantes en fonction de leurs besoins, inférieures à celles dont ils disposaient chez eux, ou moins bonnes que celles d'un étudiant français, pose le problème de l'utilisation de l'argent qu'ils possèdent. Selon la bro-

102

La satisfaction au niveau de la situation matérielle

chure Je vais en France, loyer (universitaire), nourriture, entretien, spectacles, matériels de travail, sont couverts par la bourse. Qu'en est-il en réalité ? A quels secteurs la somme modérée dont-ils disposent est-elle consacrée ? Au détriment de quels autres secteurs ? L'étudiant essaie-t-il de garder le même mode de vie que dans son pays, ou au contraire doit-il abandonner des domaines, qui pour lui étaient importants ? Les trois secteurs* dans lesquels plus de la moitié des étudiants de toutes les origines dépensent beaucoup, sont dans l'ordre d'importance : le logement, la nourriture et les instruments de travail. Par contre, plus de la moitié des étudiants ne dépensent rien pour aller danser, et dans le cas des Nord-Africains et des Extrême-Orientaux, rien pour voyager, pour aller au restaurant ou faire des sorties avec des amis (tableau V-3). Un tiers et plus des étudiants nord-africains, sud-asiatiques et moyen-orientaux ne vont ni au théâtre ni au concert, ni même, dans les cas des deux premiers groupes, au cinéma. La comparaison entre la place occupée par ces dépenses en réalité, et celles qu'elles devraient avoir dans une situation idéale, permet de voir sur quels niveaux les étudiants se sentent le plus privés. Ce qui manque le plus aux étudiants, quelle que soit leur zone d'origine, ce sont les voyages et les vêtements, avec en outre, dans le cas des Sud-Asiatiques et des Extrême-Orientaux, les sorties au théâtre, par exemple, et les sorties avec des amis. Les étudiants dépensent donc pour leurs besoins vitaux : logement, nourriture et instruments de travail. Une grande partie d'entre eux ne vont ni danser, ni voyager, ni au théâtre ou au cinéma, et ne «sortent pas avec des amis>. Mais ce qu'ils voudraient surtout, c'est pouvoir voyager et s'habiller (tableau V-3). 1.2.5.

Conclusion

Concluant sur leur situation matérielle, les étudiants se partagent en deux groupes : 46 % se disent satisfaits de leur expérience, 53 % insatisfaits. H semble donc que les étudiants sont plus mécontents de leur * Les 10 secteurs proposés étaient : logement, nourriture, instruments de travail, vêtements, livres (non scolaires), disques, voyages, cinéma, sorties culturelles (théâtre, concert), restaurants (non universitaires), sorties avec des amis.

Analyse

par

pays

103

situation matérielle, que de leur expérience universitaire (8 %) et de leurs relations humaines (47 %). La moitié environ des étudiants originaires du Moyen-Orient (58 %), d'Extrême-Orient (50 %), d'Asie du Sud (45 %) ou d'Afrique noire (45 %) se disent satisfaits de leurs expérience au niveau matériel, à comparer en cela avec 34 % des Nord-Africains. Presque tous les Latino-Américains sont satisfaits sur ce plan. TABLEAU V-3

Dépenses : Nourriture Logement Instruments de travail Livres, disques Vêtements Voyages Cinéma Restaurants Sorties culturelles Danse

Dépenses réelles (importantes ou très importantes) et dépenses envisagées par les étudiants dans un budget idéal (en % ) Afrique du Nord (38)

Afrique noire (65)

MoyenOrient (13)

Asie du Sud (11)

ExtrêmeOrient (29)

R I 77 74 81 82

R I 87 83 90 88

R I 69 85 76 92

R I 83 100 92 100

R I 89 92 89 92

50 29 32 21 42 23 19 6

55 40 27 19 17 11 14 5

54 54 38 46 46 23 31 8

80 50 30 27 11 10 11

44 23 19 16 12 15 7 4

69 71 82 92 76 55 60 49

87 86 77 88 49 41 62 27

61 69 92 93 85 53 69 38



90 80 81 82 56 67 100 22

77 77 62 81 31 42 65 23

Amérique latine (14) R 100 92

I 92 92

50 57 7 42 21 21 21

100 100 57 93 50 57 64 36



Dépenses réelles mentionnées par plus de 50 % des étudiants Logement Nourriture Instruments

Ce qui manque le plus aux Voyages Vêtements Danse Livres Sorties

R = Dépenses réelles. I — Dépenses idéales.

Logement Nourriture Instruments

Logement Nourriture Instruments Livres et disques

Logement Instruments Nourriture Livres et disques

Logement Nourriture

Nourriture Logement Livres et disques Instruments

Vêtements Voyages

Sorties Restaurants Voyages Cinéma Vêtements

Voyages Sorties Livres et disques Vêtements

Voyages Vêtements Instruments Livres et disques Sorties

étudiants Voyages Vêtements Sorties Livres

La satisfaction au niveau de la situation

104

matérielle

Le montant des ressources des étudiants des différents groupes apparaît en général, comme étant en relation directe avec leurs conclusions quant à la vie matérielle — exception faite des Moyen-Orientaux, qui tout en disposant généralement de plus de 600 francs (69 %) ne sont que moyennement satisfaits. Cette insatisfaction est peut-être due au fait que leur situation à Paris est moins bonne que celle qu'ils avaient dans leur pays (84 % d'entre eux la disaient telle).

1.3.

1.3.1.

PAYS-BAS

Dépenses

On note avec intérêt la grande importance donnée au logement, aux instruments de travail, aux livres et aux voyages. Par contre les aspects plus sociaux sont considérés comme moins importants — par exemple, les sorties culturelles et la danse. Etant donné les revenus relativement faibles de la plupart des étudiants universitaires, il n'est pas étonnant de voir — surtout dans le sous-groupe considéré — qu'un pourcentage relativement élevé d'étudiants interviewés n'ont que de faibles dépenses sous les chapitres : sorties culturelles (32 %) et danse (53 %). TABLEAU V-4

Degré d'importance

donné aux différents

chapitres

du

budget

Logement Vêtements Instruments de travail Sorties culturelles Cinéma Restaurants Danse Livres et disques Voyages

Dépenses importantes %

Peu importantes

86 57 69 26 23 15 8 45 63

3 5 10 32 19 34 53 15 13

%

Analyse par pays 1.3.2.

105

Satisfaction ou insatisfaction au sujet des conditions économiques

A peu près 1 sur 5 des étudiants interviewés se déclare mécontent des conditions économiques en cours d'études. Ce groupe d'insatisfaits est plus important chez les étudiants de l'université (26 %) que parmi les étudiants des instituts (17 %). On peut remarquer que le pourcentage de mécontents est beaucoup moins élevé chez les étudiants originaires d'Asie (13 %) que parmi les étudiants originaires des autres continents (28 %). Il apparaît encore qu'en général les étudiants mariés sont plus souvent mécontents de leur situation financière que les étudiants célibataires : 27 % contre 20 % . Il semble évident, selon ces pourcentages, que les étudiants mariés dont la femme réside aux Pays-Bas ont plus de difficultés quant à leur statut économique (39 % de ce sous-groupe sont mécontents, à comparer avec 14 % de ceux qui ne sont pas accompagnés de leur femme). Etant donné qu'un revenu de moins de 300 florins est aux Pays-Bas presque un budget de famine, on s'étonne que seuls la moitié des étudiants obligés de vivre sur ce revenu soient mécontents. Par contre, le pourcentage de mécontents dont le revenu dépasse 600 florins est assez élevé (20 %) et même plus élevé que pour le groupe intermédiaire dont le revenu se situe entre 300 florins et 599 florins (12 %). On remarque par ailleurs qu'un pourcentage plus élevé d'étudiants de l'Université se dit très satisfait des conditions économiques (18 %), alors que pour les instituts le pourcentage d'étudiants satisfaits n'est que de 12 %. Peut-être peut-on l'expliquer par le fait que la plupart des étudiants des instituts étaient déjà en cours de carrière et recevaient un salaire avant leur arrivée aux Pays-Bas. A l'Université, 16 % des étudiants indonésiens sont mécontents, la proportion double lorsqu'il s'agit d'étudiants originaires d'autres pays.

1-4.

1.4.1.

YOUGOSLAVIE

Estimation des ressources par rapport aux besoins

Seuls 26 % des étudiants ont estimé qu'ils avaient des ressources suffisantes : 54 % ont répondu qu'elles étaient insuffisantes, et 20 % absolu-

106

La satisfaction au niveau de la situation matérielle

ment insuffisantes. Les 51 étudiants étrangers qui considèrent leurs ressources insuffisantes ou absolument insuffisantes se répartissent ainsi : 23 étudiants d'Afrique centrale et d'Afrique du Sud 20 étudiants des pays arabes 8 étudiants originaires d'Asie Aucun des étudiants n'a dit disposer de trop d'argent. Sept étudiants possèdent une automobile en Yougoslavie — il s'agit de 2 étudiants des pays arabes et de 5 étudiants africains. 1.4.2.

Estimation des ressources par rapport à celles d'un étudiant yougoslave

Invités à établir une comparaison entre leur propre situation économique et celle d'un étudiant yougoslave moyen ne vivant pas dans sa famille, les étudiants (N = 69) ont estimé que leur situation était : bien meilleure meilleure comparable moins bonne beaucoup moins bonne sans réponse

6 14 38 25 6 12

% % % % % %

Plus de la moitié des étudiants étrangers estiment donc que leur situation économique est pratiquement la même que celle d'un étudiant yougoslave moyen n'habitant pas chez ses parents. Il n'a pas été possible de vérifier pourquoi 31 % des étudiants considèrent leur situation moins bonne, ou beaucoup moins bonne, que celle des étudiants yougoslaves. Etaient de cet avis : 11 étudiants d'Afrique, 8 des pays arabes et 1 originaire d'Asie. 1.4.3.

Estimation des ressources par rapport à celles qu'ils avaient dans leur pays

Lorsqu'ils comparent leur situation actuelle aux conditions économiques qui étaient les leurs dans leur pays d'origine, les étudiants interviewés (N = 69) déclarent que leur situation actuelle est :

Comparaisons bien meilleure meilleure comparable moins bonne beaucoup moins bonne sans réponse

107 10 12 26 42 9 1

% % % % % %

Un grand nombre d'étudiants étrangers estiment donc leur situation économique moins bonne ou beaucoup moins bonne ( 5 1 % ) alors que certains (22 %) l'estiment meilleure ou bien meilleure que dans leur pays d'origine. Seuls 26 % ont estimé que leur situation économique était restée la même en Yougoslavie. On note, dans les réponses, fort peu de différence entre les groupes de pays dont sont originaires les étudiants interviewés. H est à remarquer d'ailleurs que, dans chacun des trois groupes, près de la moitié estiment leur situation financière en Yougoslavie comme étant moins bonne ou beaucoup moins bonne.

2. COMPARAISONS Les étudiants originaires des pays du Tiers-Monde estiment — sauf en ce qui concerne l'Autriche — que leurs ressources sont insuffisantes, et que leur situation matérielle est moins bonne que celle d'un étudiant autochtone (tableau V-5). Lorsqu'ils comparent leurs conditions de vie actuelles — en Autriche, en France et en Yougoslavie — avec celles qu'ils avaient dans leur propre pays, la moitié des étudiants, sinon les trois quarts (comme c'est le cas pour la France) considèrent leur statut personnel diminué : leur situation actuelle étant moins bonne que leur situation passée. Dans chacun des pays considérés, la moitié des étudiants consacrent une partie importante de leurs ressources à assurer les besoins immédiats (logement-nourriture), viennent ensuite les instruments de travail et, pour le cas des Pays-Bas, les voyages et les vêtements (à comparer avec 30 % environ des étudiants séjournant dans les autres pays). Ce qui frappe, plus particulièrement, c'est que seuls la moitié des étudiants résidant en France font, dans leur budget, une place assez, ou très importante, à l'achat d'instruments de travail, à comparer avec 69 % et 80 % des étudiants résidant aux Pays-Bas et en Autriche.

La satisfaction au niveau de la situation matérielle

108

Les domaines où ils se sentent le plus privés sont, en Autriche et en France, les voyages, les vêtements et les sorties culturelles. Certains des tableaux qui vont suivre ne comprennent pas les Pays-Bas, où les données sont incomplètes ; certains autres, pour la même raison, ne comprennent pas la Yougoslavie.

TABLEAU V - 5

Suffisantes Insuffisantes

TABLEAU

V-6

Estimation des ressources (récapitulatif) AUTRICHE

FRANCE

YOUGOSLAVIE

(277) %

(155)

(69) %

70 30

47 53

26 74

Comparaison de la situation matérielle avec celle d'un étudiant autochtone AUTRICHE

FRANCE

YOUGOSLAVIE

(277)

(155)

(69)

32 46 18

16 41 34

20 38 30

%

Meilleure Semblable Moins bonne

TABLEAU

V-7

Meilleure Semblable Moins bonne

%

%

%

Comparaison de la situation matérielle avec celle qu'ils avaient dans leur pays (récapitulatif) AUTRICHE

FRANCE

YOUGOSLAVIE

(277) %

(155)

(69) %

23 28 48

6 16 77

21 26 51

%

Comparaisons TABLEAU V-8

109 Les dépenses

des étudiants

(récapitulatif)

Place qu'auraient ces dépenses dans une situation idéale *

Place des dépenses dans leur budget AUTRICHE

FRANCE

PAYS-BAS

AUTRICHE

FRANCE

(277)

(155)

(62)

(277)

(155)

89 86

75 87

88 86

85 91

84 89

80

54

69

86

79

41 37 32

36 28 28

45 57 63

72 78 76

79 77 88

29 25 17 5

15 25 16 5

26 23 15 8

69 37 40 22

65 56 47 6

%

Nourriture Logement Instruments de travail Livres et disques Vêtements Voyages Sorties culturelles Cinéma Restaurants Danse

%

%

%

%

* Données absentes pour les Pays-Bas.

Résumant leurs opinions sur leur situation matérielle, seuls les étudiants qui résident en France se disent en majorité insatisfaits (53 % , comparés à 36 % et 26 % pour ceux qui vivent en Autriche et aux Pays-Bas). Cependant, dans les trois pays, la situation matérielle est le plus souvent sujette à mécontentement. Les étudiants jugent leur expérience universitaire bonne, mais leurs relations humaines et leur situation matérielle insatisfaisantes. La satisfaction que peuvent éprouver les étudiants en pensant à leur vie matérielle est avant tout fonction du jugement qu'ils portent sur les ressources dont ils disposent (tableau V-10). En Autriche, comme en France et aux Pays-Bas, l'étudiant satisfait de sa situation économique est le plus souvent celui qui estime ses ressources comme suffisantes ; celui qui est insatisfait les considère insuffisantes.

110 TABLEAU V - 9

Satisfaits Insatisfaits TABLEAU V - 1 0

La satisfaction au niveau de la situation matérielle Satisfaction au niveau matériel PAYS-BAS

AUTRICHE

FRANCE

(277) %

(155) %

(62) %

(57) %

64

46

74

82

36

53

26

18

Universités

Satisfaction matérielle et estimation des ressources Suffisantes N

AUTRICHE

Insuffisantes %

(196)

Satisfaits Insatisfaits FRANCE

Instituts

N (81)

77

33

23 (76)

Satisfaits Insatisfaits

%

66 (76)

76

16

24

84

PAYS-BAS

(universités) Satisfaits Insatisfaits

(48)

(14) 90

21

10

78

Comme le montrent plus précisément les données en France * la somme «limite» en deçà de laquelle les étudiants sont mécontents et au-delà de laquelle ils sont en général satisfaits est de 600 francs. Les trois quarts des étudiants qui ont soit moins, soit plus de 600 francs par mois sont respectivement insatisfaits ou satisfaits de leur situation économique (tableau V - l l ) . Un autre signe de mécontentement que témoignent à ce niveau les étudiants, dans les trois pays, concerne la situation qu'ils s'attribuent en se comparant aux étudiants autochtones (tableau V-12). Lorsque l'étudiant estime avoir un statut financier supérieur ou égal * Cette analyse n'a pas été faite dans les autres pays.

111

Comparaisons

à celui de son homologue autochtone, il est satisfait, alors qu'au contraire le fait de sentir que sa propre situation est moins bonne, qu'elle est inférieure, lui fait dire qu'il est insatisfait. TABLEAU V-LL

Satisfaction matérielle et montant des ressources (.France) Moins de 600 francs (97)

%

600 francs et plus (54) %

29 71

74 26

Satisfaits Insatisfaits

TABLEAU V - 1 2

Satisfaction en comparaison avec la situation matérielle d'un étudiant autochtone Meilleure que celle de l'autochtone N

AUTRICHE

(106)

Satisfaits Insatisfaits FRANCE

%

N

%

(102)

Moins bonne N

%

(36)

83

60

33

17

40

67

(25)

Satisfaits Insatisfaits

Semblable

(55)

(45)

80

53

20

47

22 78

PAYS-BAS

(universités) Satisfaits Insatisfaits

(13)

(17)

(8)

(12)

(16)

(2)

(1)

(1)

(6)

Ainsi, étant insatisfaits, les étudiants se plaignent de ressources inférieures à la somme de 600 francs, insuffisante par rapport à leurs besoins, et qui leur donne un statut économique inférieur à celui d'un étudiant autochtone qui vivrait dans des conditions similaires (bour-

112

La satisfaction au niveau de la situation

matérielle

sier ou non, ne résidant pas dans la même ville que ses parents, etc.). La situation entre logement et satisfaction au niveau matériel n'existe réellement que dans l'échantillon français (tableau V-13). Elle s'explique peut-être par le fait que peu d'étudiants en Autriche et aux Pays-Bas ont un logement universitaire. Elle montre que les étudiants qui vivent en cité universitaire sont plus satisfaits que les autres et que les étudiants se plaignent également d'avoir rencontré des difficultés pour se loger. La recherche d'un logement, qu'elle soit rendue plus difficile par le préjugé racial et surtout par les loyers élevés, fait davantage ressentir la gêne financière. L'étudiant qui avait pris des dispositions avec un propriétaire ou un service universitaire trouve à son arrivée le chemin tracé. H s'installe. L'autre, par contre, à chaque visite qu'il fait, sent qu'il n'a pas les moyens de s'assurer un logement décent à un prix abordable. Le loyer demandé équivaut pour le moins à la moitié de ses ressources mensuelles.

TABLEAU

V-13

Satisfaction (France)

matérielle et difficultés

Satisfaits (N = 65) A eu des difficultés (19) Logement : universitaire non universitaire

(9) (10)

pour se loger

Insatisfaits (N = 82)

(46)

A eu des difficultés (45)

(31) (15)

(16) (29)

M JNon

Non (37)

(28) (9)

Ce sentiment de privation joue dans l'établissement des contacts : un étudiant assez dépourvu financièrement a moins de contacts que celui qui est aisé (cf. chapitre précédent). Comme le montrent les dépenses des étudiants, tout ce qui est sorties avec des amis, aux restaurants, tout ce qui peut entretenir et consolider des amitiés est négligé : les étudiants ne peuvent pas se permettre de dépenses à cet effet, de même qu'ils ne peuvent s'accorder beaucoup de sorties ou de spectacles, que ce soit le théâtre ou le cinéma.

Comparaisons

TABLEAU V - 1 4

113 Satisfaction au niveau matériel et difficultés pour se loger Difficultés d'ordre général ou dues au racisme N %

AUTRICHE

(187)

Satisfaits Insatisfaits FRANCE

Aucune difficulté N (89)

60

71

40

29

(67)

(84) 31 69

Satisfaits Insatisfaits

%

57 43

PAYS-BAS

(universités) Satisfaits Insatisfaits

(27)

(34) 74

74

26

26

Mais si une relation de cause à effet existe entre dépenses et contacts, qu'en est-il par rapport à la vie universitaire ? Les études peuvent-elles souffrir du fait d'un situation économique précaire ? (tableau V-15). Ceci est un point que nos résultats ne confirment que partiellement et dans le cas de l'Autriche uniquement ; on peut supposer ici que les étudiants satisfaits sur le plan matériel (ceux qui sont boursiers en particulier) auront plus de facilités et donc plus de satisfaction pour ce qui est de leurs études. Les données autrichiennes indiquent que 16 % des étudiants satisfaits au niveau matériel sont insatisfaits quant à leurs études, comparés à 41 % des mécontents de leur situation matérielle. Ces résultats sont influencés par le fait qu'en Autriche et aux PaysBas il y a peu d'étudiants boursiers, peu d'étudiants qui vivent en cité universitaire et également par l'ambiguïté des réponses quant à la satisfaction exprimée au sujet de la vie universitaire : seule une minorité répond qu'elle est insatisfaite. H y a déplacement des répon-

114

La satisfaction au niveau de la situation

matérielle

ses vers la « satisfaction », alors qu'au niveau matériel les étudiants répondent nettement être mécontents. A ces différentes sources de tension concernant l'insuffisance des moyens financiers il faut ajouter les délais dans lesquels les bourses sont versées. Comme on le verra par la suite, lorsque l'étudiant énumère les problèmes à résoudre pour améliorer la vie des étudiants étrangers, il indique que les bourses sont parfois mal réparties au cours de l'année et mettent trop de temps pour parvenir aux étudiants. Une bourse trimestrielle qui n'est reçue que cinq mois plus tard ajoute par ce délai aux autres éléments qui augmentent l'angoisse, l'anxiété de l'étudiant.

TABLEAU V-15

Satisfaction au niveau universitaire et matériel Sur le plan matériel satisfaits N

AUTRICHE

insatisfaits %

(177)

N

%

(100)

Très satisfaits

15

6

Satisfaits

68

53

Insatisfaits

16

41

FRANCE

(82)

(71)

Très satisfaits

37

32

Satisfaits

58

59

6

10

Insatisfaits PAYS-BAS

(universités)

(46)

(16)

Très satisfaits

20

(1)

Satisfaits

70

(12)

Insatisfaits

11

(3)

115

Comparaisons TABLEAU V - 1 6

Satisfaction

au niveau universitaire

Boursiers N AUTRICHE

(30)

Très satisfaits Satisfaits Insatisfaits FRANCE

%

bourses

Non-boursiers N % (243)

27 57 17 (105)

10 64 27 (47)

34 61 5

Très satisfaits Satisfaits Insatisfaits

et

32 53 15

PAYS-BAS

(universités) Très satisfaits Satisfaits Insatisfaits

(18) (3) (14) (1)

(44) 16 68 16

116

La satisfaction au niveau de la situation matérielle

SUMMARY IN ENGLISH

In previous studies of foreign students, relatively little attention has been paid to their financial resources, the income (scholarship or other) at their disposal. In this chapter, we present the responses of our subjects to questions concerning their income, their satisfaction or dissatisfaction with it, their estimate of how it compares with that of local students as well as with their own situation in the home country, the items of which income is expended as well as those which would be included if the income were increased. Among the more significant results should be mentioned the moderate degree of dissatisfaction, the frequent lack of resources for anything but the bare necessities of life with no provision for recreational activities, and (as previously indicated) the impact of finances of relations with the local population. There is no clear relation between satisfaction regarding finances and satisfaction with university life in general.

6 Discrimination

Ce chapitre indique la fréquence avec laquelle les étudiants déclarent avoir été l'objet d'un préjugé ou d'une discrimination de caractère «racial» ou ethnique dans les pays de séjour. L a proportion en est (de l'avis des auteurs) surprenante par son importance, dans les quatre pays considérés, alors qu'aucun de ces pays n'est réputé comme étant particulièrement «raciste». Ce qui surprend davantage encore, c'est que bon nombre d'étudiants, particulièrement en France, disent avoir souffert de l'attitude qu'ils ont rencontrée non seulement parmi la population en général, mais même dans le cadre de l'université. Les citations données des réponses faites par les étudiants eux-mêmes, pose un important problème d'interprétation, car des comportements diamétralement opposés, peuvent l'un et l'autre être considérés comme l'expression d'un préjugé ; une trop grande attention accordée à l'étudiant étranger peut devenir à ses yeux une marque de condescendance paternaliste, et trop peu d'attention un signe de négligence ou d'hostilité. Toutefois, ainsi que W. I. Thomas l'a fait remarquer par le passé, une «définition de la situation» de caractère subjectif peut fort bien être d'égale importance que la situation considérée objectivement. H nous faut davantage de données sur ce point. L a discrimination influe fortement, elle aussi, sur la satisfaction de l'étudiant au regard de ses expériences dans le pays hôte au cours de son séjour. Plusieurs études faites en Bulgarie ou en Union Soviétique, en Angleterre (McFarlane, 1958 ; Tajfel et Dawson, 1965), en Allemagne (Aich, 1962) ou encore en France (N'Diaye, 1962) ont traité du problème de l'étendue et des différentes formes de préjugés et de discrimination que peuvent rencontrer les étudiants «non blancs» dans les pays où ils séjournent. Faire l'objet d'une discrimination du fait de sa race, de sa couleur ou de sa nationalité, ou croire simplement

118

Discrimination

à une manifestation de préjugé racial ou de discrimination sont deux facteurs importants qui affectent la conduite et les attitudes de l'étudiant. La discrimination joue alors un rôle non seulement dans les relations humaines, mais aussi comme on l'a vu plus haut, dans les études, le travail, ou la recherche d'un logement. Il est en premier lieu intéressant de noter qu'un étudiant sur deux, dans chacun des pays considérés, c'est-à-dire l'Autriche, la France, les Pays-Bas et la Yougoslavie, déclare avoir souffert de discrimination. Ceci est remarquable dans la mesure où les échantillons respectifs sont très différents par l'origine nationale, la représentativité et le nombre. Ainsi, l'échantillon autrichien est uniquement constitué de Moyen-Orientaux et d'originaires de l'Europe du Sud-Est ; les PaysBas (universités) sont représentés par 62 étudiants d'origines très diverses, alors que seules la France et la Yougoslavie ont un échantillon africain relativement important. Dans ces deux pays, on observe que plus des trois quarts des étudiants africains parlent de discrimination. Les étudiants les plus en butte au préjugé racial sont les Africains ; viennent ensuite les Nord-Africains et les Moyen-Orientaux. Il est intéressant de noter qu'un seul Sud-Asiatique résidant en France se plaint d'avoir été l'objet d'une discrimination alors qu'il recherchait un logement. Ce dernier groupe diffère des autres dans le processus d'adaptation. On retrouve cette différence dans l'étude de I.E. Galtung (1965), lorsqu'elle comparait le comportement d'étudiants indiens, iraniens et égyptiens (R.A.U.) séjournant en Allemagne, en Angleterre ou aux Etats-Unis. Là aussi l'auteur conclut que les Indiens ont moins de problèmes d'adaptation que les autres et l'explique par le fait de leur culture. L'étudiant se sent «Indien», il possède une culture et appartient à une civilisation que les autochtones ne «dénigrent» pas, il n'a pas besoin de les imiter. Cette constance de comportement et d'opinion l'empêche sans doute d'être sensibilisé vis-à-vis du problème de discrimination. Cependant, Useem et Useem (1955) contredisent ces résultats, en affirmant qu'un quart des étudiants aux U.S.A. et en Angleterre avaient estimé faire l'objet d'une discrimination pendant leur séjour. Est-ce alors que joue, en Angleterre, le rapport entre colonisateurs et colonisés ? Un nombre encore plus grand d'étudiants pense que le racisme est dans chaque pays de séjour un problème réel dont il faut tenir compte.

Discrimination

119

Diverses études comme celle de Veroff (1963) qui portait sur les étudiants africains aux Etats-Unis, celle de Loomis et Schuler (1948) concernant les Latino-Américains, ou encore celle de Useem et Useem (1955) aux Etats-Unis et en Angleterre, ont fait ressortir l'importance de cette conviction : la connaissance du problème sinon sa confrontation directe influe sur le comportement des sujets. Il a été suggéré que même lorsque les actions, les faits incriminés ne concernent pas l'étudiant lui-même, il les interprète lorsqu'ils lui sont relatés comme étant dirigés contre son statut propre, comme une violation de ses droits. Nos résultats ne tendent pas à corroborer ce sentiment. Ce qui compte ici c'est d'avoir expérimenté une discrimination, un préjugé racial, non de l'avoir perçu en tant que problème (tableau VI-1). «Les Français voient mal les Africains nombreux ici et munis des mêmes privilèges qu'eux (attitude de colonisateurs) et les jeunes Français ont tendance à dire que les Africains étant indépendants, qu'ils partent.» MADAGASCAR.

«Pour la nationalité oui, pour la couleur je n'ai rien constaté. La nationalité joue, quand certaines personnes savent qu'un étudiant est Nord-Africain, elles se font automatiquement de mauvaises idées. C'est un malheur que d'être Algérien.» MAROC.

«Ce n'est pas une discrimination à l'américaine, mais elle existe. On la comprend, elle est normale, due au contact de deux entités plus ou moins différentes. Ici ce n'est pas très grave, mais on la sent dans les rapports dans la rue, dans la vie quotidienne, dans les cafés, parfois où on vous laisse attendre indéfiniment.» MAROC.

Comme le montrent ces exemples, le racisme est expliqué par un sentiment de supériorité du Blanc sur les «autres», par la frustration qu'éprouvent les Français face à l'indépendance des anciennes colonies, par la dépossession et par la guerre d'Algérie.

120

Discrimination

TABLEAU V I - 1

Discrimination

L'étudiant a souffert d'une discrimination L'étudiant a perçu l'existence de ce problème

AUTRICHE

FRANCE

(277)

%

(155)

(62) %

(69) %

57

58

45

54

79

75

%

1. QUELQUES DISCRIMINATIONS

PAYS-BAS YOUGOSLAVIE

56

PARTICULIÈRES

H a paru utile de laisser ici la parole aux étudiants et de retranscrire leurs expériences ou leurs opinions sur ce thème. Les exemples de réponses données proviennent de l'échantillon français. On ne peut savoir si les faits relatés sont imaginaires ou réels, mais ils permettent de voir comment les étudiants perçoivent le choc. Les circonstances auxquelles se réfèrent les étudiants concernant la recherche d'un logement ou d'un travail, les rapports avec la faculté, les contacts avec les personnes dans les lieux publics. On remarque que pour l'échantillon français, les circonstances de la discrimination varient selon la couleur ou la nationalité : l'étudiant africain par exemple la ressent plus fréquemment dans la rue, «quand on le voit», alors que l'étudiant nord-africain, de type physique moins prononcé, l'éprouve dans ses contacts, en tentant de se faire des amis.

1.1.

DANS LA RECHERCHE D'UN LOGEMENT ET DE TRAVAIL

A part aux Pays-Bas, plus des deux cinquièmes des étudiants dans les autres pays considérés, disent avoir fait l'expérience d'une discrimination dans cette recherche. En France, le problème apparaît plus particulier à Paris qu'en province. Les étudiants ont du mal à trouver un logement, tout autant d'ailleurs pour des raisons objectives :

Quelques discriminations particulières

121

demande trop grande, loyers élevés, manque de confort minimum, que par suite du préjugé racial : «Il arrive fréquemment qu'en réponse à des annonces lues sur le journal ou au Bus ou au Copar, etc., on téléphone et qu'on vous dise "Nous n'acceptons pas des hommes de couleur". Voici comment cela se passe généralement :"Allô, bonjour madame, vous avez une chambre à louer. — Oui, vous êtes étudiant ? — Oui, est-ce que je peux me présenter ? — Si vous voulez. Dix minutes après je me présente : — Ah, excusez-moi, la chambre vient d'être prise."» DAHOMEY.

«Au racisme. On m'avait donné l'adresse d'une chambre et on m'a dit de passer. J'étais noir, donc c'était fini : la chambre était prise, mais en fait toujours libre après. Nous avons voulu louer une villa à trois : elle était occupée, nous avons envoyé une amie française, elle était libre.» NIGERIA.

«Dans la recherche de logement dès qu'on vous entend parler arabe.» LIBAN.

Pareillement, le racisme apparaît de façon nette et directe dans la recherche de travail. On ne veut pas de gens de couleur ni de NordAfricains : «Les Français pour le travail ne veulent pas d'étrangers, et cela à cause de leurs préjugés et parce qu'ils craignent des complications. La première question que l'on vous pose concerne votre nationalité.» MAROC.

«J'ai cherché à donner des leçons particulières. Les parents n'osent pas confier leurs enfants à des Noirs.» DAHOMEY.

122

Discrimination

«Il y a de la mauvaise volonté, des mensonges et du racisme de la part des employeurs. Quelquefois c'est un racisme ouvert : "Nous n'embauchons pas les Noirs".» MALI. 1.2.

D A N S LES LIEUX PUBLICS

Ce terme englobe les transports, les restaurants ou les restaurants universitaires, les cafés, les bals, les magasins et la rue. C'est là que dans les quatre pays considérés s'exprime le plus ouvertement le racisme, ainsi que le montrent par ailleurs les études faites aux Etats-Unis et en Angleterre : «J'avais été chercher à Orly un ouvrier marocain, ami de ma famille et qui ne parlait pas le français. Pour cela j'avais pris un taxi (ce garçon est blanc, de type européen et parlant très bien le français). Arrivé à Orly, j'ai demandé au chauffeur s'il pouvait attendre et me conduire ensuite en banlieue Nord. Il a accepté. Je suis allé chercher mon ami, qui avait un type nord-africain. Nous montons dans le taxi et parlons arabe. Le chauffeur se tourne vers nous : " Je ne peux vous emmener. " " Pourquoi ? " " L'endroit où vous allez n'est pas dans mon secteur " " Vous avez accepté tout à l'heure. " " Oui, mais j'avais oublié. " " Je ne vous crois pas ; quelle est la vraie raison ? " Le chauffeur fou furieux dit : " J'ai vécu en Algérie et je déteste les Arabes. " " Ce n'est pas une raison de ne pas nous conduire." S'ensuivit un déferlement d'injures dans le style "sale arabe", "sale race", etc. sous le regard étonné de mon ami.» MAROC.

«Dans le métro. Il y avait une femme assise, avec en face d'elle deux places libres. Je me suis assis là. Elle s'est mise en colère. "Vous ne pouvez pas vous asseoir ailleurs ? Non ? Espèce d'Arabe. " Depuis je ne m'assieds plus dans le métro pour ne pas être en butte à de nouvelles démonstrations de racisme.» MAROC.

«Dans le métro les Français évitent de s'asseoir à côté de moi. Je sais bien que je suis propre.» CÔTE

D'IVOIRE.

Quelques discriminations particulières

123

Il s'agit parfois de lieux universitaires, comme dans les cas suivants : «Un incident fréquent, que j'ai vécu avec un gardien de la Sorbonne : "Je ne suis pas raciste, mais..."» MAROC.

«Dans les amphis, même lorsqu'il y a beaucoup de monde, les étudiants ne veulent pas s'asseoir à côté de moi.» VIETNAM.

«Le concierge de la cité est malveillant envers les Noirs qu'il trouve sales et il leur interdit de faire la cuisine pendant le week-end.» HAUTE-VOLTA.

Les exemples précédents décrivent des situations particulières où l'interlocuteur n'est pas universitaire ou qui pouvaient prêter à une interprétation personnelle. Cependant le racisme, dans le monde universitaire, doit être souligné. Cet aspect des relations a toujours été éludé : les relations avec les étudiants autochtones sont considérées comme à part, privilégiées et non sujettes à la discrimination et au racisme. Des réserves apparaissent cependant dans les cas des rapports avec les filles autochtones, dans lesquels interviennent, dit-on, des contraintes sociales. Dans les deux exemples qui vont suivre l'interlocuteur est une fille, mais on ne peut les expliquer par une contrainte quelconque. Ils montrent seulement que les étudiants français peuvent — même si les cas sont rares — avoir des comportements racistes. Le racisme ne se confine pas aux «gens de la rue», mais aussi à des étudiants, comme nous le verrons plus loin, supposés ouverts envers le monde et envers l'étranger ; peu d'étudiants agissent ainsi, dira-t-on, c'est vrai, mais le problème n'en existe pas moins. «Dans un restau-U une fille qui avait fini de manger m'a dit — alors que j'attendais qu'une place se libère — "c'est vraiment dommage de me lever pour un Noir".» MALI.

124

Discrimination

«Au restaurant universitaire, line fille a dit : "Je n'aime pas le vi-naigre" en le répétant tout au long du repas.» GHANA.

Mais alors que la réaction la plus fréquente est sinon la fuite, le silence, l'intention d'éviter de rencontrer de nouveau des réactions de ce genre, comme «ne plus s'asseoir dans le métro», l'exemple suivant est le seul où l'étudiant, loin de se taire, a réagi, a tenté d'expliquer à son interlocuteur l'inanité de ses propos : «J'étais un jour dans l'autobus, quand un vieil homme, français visiblement, est monté. Il y avait beaucoup de monde assis. J'ai eu pitié de lui et me suis levé : "Monsieur, prenez place." "Qu'est-ce qu'il a dit le Noir ?" Quelqu'un lui répète mes paroles d'un air gêné. "Il vous demande de prendre sa place." "Ah, parce que vous croyez que je vais m'asseoir à la place d'un cannibale ! " Il y avait dans l'autobus un agent de police et plusieurs autres Français : personne n'a rien dit. Que pouvaient-ils dire ? Alors, je lui ai parlé : "Monsieur, vous me permettrez de n'être pas désolé de vos paroles et de vous répondre. Vous êtes bien âgé et je sais que ce n'est pas de votre faute si vous avez dit cela. C'est plutôt de la faute de l'époque qui nous a maltraités, c'est-à-dire, la faute du premier Français, du premier Blanc qui est venu s'installer chez moi comme seigneur des Noirs, qui a maltraité l'Afrique, c'est lui qui vous a induit en erreur ! Je regrette pour vous et pour vos enfants, car si la France reste comme cela, comme je vous vois déjà, elle sera appelée à être une foire, où les éléphants danseront. Vos enfants deviendront des attardés, des ignorants et les Africains commenceront à retourner au rôle de cannibales que vous leur avez assigné. Les Français seront incapables de résoudre leurs problèmes ! Pour vous, je ne suis pas civilisé. Mais moi, j'ai connu votre pays alors que j'étais enfant, j'ai appris des histoires sur votre pays que vous ne connaissez peut-être pas vous-même. Je connais plus de choses que vous. Vous prétendez connaître mon pays, tout, mais vous seriez incapable de réciter seulement une ligne de son histoire, de ses traditions. Sachant cela, il vous serait impossible de m'appeler, moi, un homme qui respire et vit comme vous, un cannibale." Cette explication a gêné tout le monde et en descendant, l'agent de police m'a emmené dans un café prendre un

Quelques discriminations particulières

125

verre. Que deviendra la France si une partie de la population agit ainsi ?» DAHOMEY.

Les invitations, se faire des amis, avoir des contacts avec les étudiants sont encore des circonstances où les étudiants ont subi une discrimination.

1.3.

A LA FACULTÉ

Un cinquième environ des étudiants en France et en Yougoslavie ont souffert du fait d'une discrimination dans le cadre de la faculté, soit lorsqu'ils demandaient des renseignements, ou dans leurs contacts avec les professeurs, ou bien encore au sujet de leurs examens (cf. le chapitre sur la satisfaction universitaire) : «Un professeur m'a dit un jour que le dessin industriel n'était pas fait pour un Noir.» CAMEROUN.

Ici le racisme est moins apparent, moins net. L'étudiant émet un jugement subjectif lorsqu'il attribue à la discrimination l'étonnement admiratif que peuvent ressentir étudiants et professeurs devant ses performances. Son savoir n'est plus, estime l'étudiant, jugé pour luimême mais «parce qu'il appartient à une personne de couleur» : «On est regardé comme des bêtes curieuses ; quand on a de bonnes notes tout le monde est éberlué, comme si c'était une chose incroyable.» MADAGASCAR.

«Je décèle dans leur attitude un inconscient racisme. Ils s'émerveillent car ils attendent moins que plus de l'individu du fait que c'est un Noir.» HAÏTI.

Le paternalisme, une bienveillance trop marquée, une trop grande indulgence sont eux aussi négativement perçus. L'étudiant voit dans

126

Discrimination

ces attitudes la relation «du Blanc envers le Noir ou le Tiers-Monde», du riche envers le pauvre, du savant envers l'ignorant. Il se sent considéré comme un inférieur, comme quelqu'un dont on ne peut exiger autant que des étudiants français, quelqu'un à qui l'on veut faire oublier qu'il est «différent» : «Bienveillance quelquefois trop marquée.» VIETNAM.

«Oui, prévenance trop marquée, c'est du racisme en négatif.» TOGO.

«Paternalistes. C'est l'héritage de l'ancien colonialisme.» MAROC.

«Très faibles. Le professeur est sur un piédestal et à cela s'ajoute une nuance paternaliste.» HAÏTI.

L'indifférence aussi est parfois ressentie comme un manque d'égards, un manque de curiosité et d'intérêt vis-à-vis du pays que représente l'étudiant étranger : «Dans nos structures l'étranger a une faveur dont il ne bénéficie pas ici. On s'attendait à des égards particuliers pour l'hôte ; à une subjectivité favorable qui n'est pas de règle.» CÔTE

D'IVOIRE.

«Racistes. Ils semblent s'intéresser surtout à la France, ils ne tiennent pas compte des étudiants étrangers dans leurs coins.» TUNISIE.

Les étudiants affrontent également le préjugé racial ou la discrimination dans leurs rapports avec les étudiants. Ce racisme peut être déclaré dans un restaurant universitaire, mais aussi au cours de travaux pratiques. L'étudiant se sent rejeté hors du groupe :

Quelques discriminations particulières

127

«Suivant les professeurs, cela change. C'est parfois gênant quand les autres étudiants sont paternalistes, sûrs d'eux. Il n'y a pas de dialogue.» MADAGASCAR.

«Du côté du professeur, c'est encore un cours magistral. Dans mon cours, je suis le seul Noir et le seul étranger. Je ne participe pas beaucoup aux discussions très françaises et qui ne m'intéressent pas. Il y a un peu de racisme.» NIGERIA.

«Je n'aime pas du tout les TP. Dans les TP. de psycho, les Malgaches sont considérés comme des phénomènes, des "cas intéressants" ayant une mentalité différente.» MADAGASCAR.

Ainsi dans les rapports particuliers professeurs-étudiants étrangers et dans les rapports avec les étudiants, comme l'illustrent ces exemples, l'étudiant ressent comme une marque de discrimination aussi bien la sévérité que l'indulgence, l'intérêt, la bienveillance et l'indifférence. Ce jugement ambigu de l'étudiant qui repousse les extrêmes : une trop grande sollicitation ou une sollicitation trop faible, peut s'expliquer par la sensibilisation de l'étudiant, durant son séjour, aux problèmes de sa couleur, de sa condition. Comme le faisait remarquer en Angleterre un étudiant ceylanais (Tajfel et Dawson, 1965, p. 121) : «L'expression "personne de couleur" a fini par désigner "un citoyen de second ordre".» CEYLAN.

p n effet, l'étudiant est «étranger», il n'a donc pas de droits. Les gens dans la rue ou ailleurs lui font sentir qu'il est «noir», «arabe» ou du Tiers-Monde, en le définissant comme d'une zone inférieure quant à la richesse, au développement, à la civilisation, à la couleur : l'étalon étant toujours blanc et occidental. S'il est d'une ancienne colonie, les rapports sont de colonisateur à colonisé, de conquérant à vaincu. Dès que les rapports se nuancent, dès qu'il n'y a pas de rejet immédiat et direct, l'étudiant se méfie, cherche une

128

Discrimination

trace de racisme. Pour lui, la bienveillance devient paternalisme ; l'admiration un étonnement péjoratif, la marque d'une sous-estimation à priori ; l'indulgence une complaisance vis-à-vis de son infériorité intellectuelle, une compromission ; le manque d'intérêt signifie que le pays qu'il représente n'a pas le même statut que celui où il séjourne ; un trop grand intérêt devient un élan de commisération :

— — — —

«Nous avons des complexes de tout ordre : de sous-développé ; de noir (racisme) ; de pauvre (pas d'argent) ; d'étranger (pas d'amis).» HAUTE-VOLTA.

1.4.

A V E C L'ADMINISTRATION

Les étudiants ont parfois été victimes de discrimination dans leurs rapports avec la police : «Je suis allé déclarer le vol de mon portefeuille et le policier m'a dit que seuls les Marocains, Tunisiens et Algériens les perdaient.» TUNISIE.

«La police a un peu trop tendance à demander aux Noirs leurs papiers sous n'importe quel prétexte.» CAMEROUN.

avec l'administration, ou avec des organismes théoriquement destinés à aider les étudiants : «Dans le métro, pour obtenir des renseignements sur la carte de réduction étudiant. La réponse de la dame a été : Retournez dans votre pays...» NIGERIA.

«Les services spécialisés dans l'information des étudiants sont racistes, sordides et sans intérêt.» IRAN.

Réactions à la discrimination

129

«Quand on se dit algérien il y a toujours un tic.» ALGÉRIE.

« Pour l'équivalence des diplômes on m'a dit : « Vous n'êtes pas du niveau de la licence. » Je ne sais toujours pas ce qui se passe à ce sujet. Je me suis adressé au COPAR pour trouver du travail, on me l'a refusé : « Vous n'êtes pas de nationalité française. » MAROC.

« Je cherchais un logement mais avec la couleur que nous avons : les gens n'essaient pas de savoir ce qu'il y a en dessous, si vous êtes bon ou non. Les adresses de logement que l'on trouve au COPAR n'hésitent pas à mentionner « Je ne veux pas de Noirs ». CÔTE D'IVOIRE.

Ces derniers exemples sont importants dans la mesure où la discrimination se manifeste au niveau de l'administration universitaire. Lorsqu'un organisme français destiné aux étudiants accepte de passer des annonces de logement ou de travail en spécifiant «pas de Noirs» «pas d'Arabes», il se fait l'apôtre du racisme, l'admet et le reconnaît comme un droit. Le problème est alors de savoir en quoi il vient à l'aide à l'étudiant originaire d'un pays du Tiers-Monde, ou plus précisément aux Africains et aux Nord-Africains, puisque ce sont eux qui, avec les Moyen-Orientaux, font davantage l'objet d'une discrimination.

2.

RÉACTIONS

2.1.

A

LA

DISCRIMINATION

DÉCEPTION

L'étudiant a choisi de venir étudier en France parce que ce pays a la réputation d'être «ouvert aux étrangers» ; parce qu'il est parfois originaire d'un pays francophone il pense s'y retrouver chez lui. La connaissance de la langue, de la culture, des coutumes qu'il a faites siennes, le lui font espérer. Ainsi les exemples suivants illustrent cette connaissance qu'il croyait avoir du pays où il se rendait : 9

Discrimination

130

«Je croyais la France un pays de liberté sans problème du point de vue social.» CONGO.

«J'étais attiré par le côté mythique de la France. On m'enseignait que mes ancêtres étaient "gaulois", je parlais la langue, je connaissais leur culture.» CAMEROUN.

«Nous avons été élevés par la force des choses dans la culture et nous l'aimons. Nous nous sentons presque chez nous. C'est ce qui m'attirait.» MADAGASCAR.

L'étudiant qui se rendait en France pensait ne pas y être dépaysé et y retrouver le système d'enseignement auquel il était habitué. Parmi toutes les difficultés qu'il avait pu prévoir — d'ordre matériel, universitaire ou autre — la «discrimination» est le plus souvent absente ; discrimination qu'il a du reste parfois ressentie dans ses contacts avec les Français dans son propre pays. Parce qu'il a eu des amis français chez lui, parce qu'il connaît la France à travers ses études, ses lectures, parce qu'il l'a entendu dire par ses amis, il pense être traité en France d'égal à égal, et n'avoir pas d'autres difficultés que celles que rencontrent eux-mêmes les Français. Une fois en France, l'image idyllique qu'il se faisait de ce pays s'estompe au fur et à mesure de son séjour.

2.2.

PROTECTION VIS-À-VIS DE LA DISCRIMINATION

Les résultats obtenus dans le cadre de l'échantillon français montrent qu'il existe deux facteurs de protection vis-à-vis de la discrimination. D'une part, les caractéristiques physiques de l'individu lui-même (tableau VI-2), de l'autre l'importance de ses ressources financières (tableau VI-3). Plusieurs études ont émis l'hypothèse que la couleur était une variable entrant quelque peu dans le rejet ou dans l'acceptation d'un individu. Allant plus avant dans l'étude de ce processus, on pouvait se

131

Réactions à la discrimination

demander dans quelle mesure des caractéristiques frappantes comme l'apparence physique influençaient également le rejet. L'échantillon était composé d'Africains, de Nord-Africains, de Sud-Asiatiques, c'est-à-dire de personnes de type et de couleur différents du modèle français. On pouvait donc supposer qu'une de ces personnes, considérée comme physiquement attrayante selon les critères européens, serait plus facilement acceptée qu'une autre, considérée comme «très différente» et donc «laide». La couleur, dans le premier cas, devient un élément «exotique», dans le second elle accentue la distance, la différence. Les résultats corroborent cette hypothèse, au niveau des groupes extrêmes qui étaient jugés par les interviewers comme «très beaux» ou comme «laids», moins d'un tiers des premiers ont fait l'objet de racisme, à comparer aux trois-quarts des autres. TABLEAU V I - 2

Discrimination et prestance physique * (France) Laids (12) N

Discriminés Non-discriminés

(9) (3)

Moyennement beaux (33)

%

57 43

Beaux

Très beaux

(43)

%

(12) N

56 44

(4) (8)

* D'après une échelle de prestance établie par l'enquêteur (voir questionnaire).

Si l'aspect physique joue comme un élément d'attrait ou de rejet, d'importance plus ou moins grande, il faut également considérer les conditions dans lesquelles vivent les étudiants. Nous retiendrons deux éléments, le type de logement (tableau VI-4) et le montant des ressources (tableau VI-5). En effet, l'étudiant qui loge en cité universitaire se trouve dans une sorte de vase clos où les rapports quotidiens sont limités en général à un monde universitaire formé d'étrangers et de Français, donc à un monde théoriquement non raciste. En ayant une situation financière aisée, l'étudiant aura moins de difficultés à se loger, n'aura pas à chercher du travail, ainsi de

Discrimination

132

suite. Grâce au logement universitaire ou à ses moyens financiers, il évitera les deux situations où se manifeste davantage la discrimination. Les résultats confirment ces deux points.

TABLEAU V I - 3

Discrimination et ressources de l'étudiant Moins de 600 francs (84)

Plus de 600 francs (59)

75 25

54 46

%

Discriminés Non-discriminés

TABLEAU

VI-4

Discriminés Non-discriminés

(France)

%

Discrimination et mode de logement de l'étudiant (France) Logement universitaire (83) %

Logement non universitaire (62)

51 49

65 35

%

Le fait de s'être heurté au racisme sensibilise l'étudiant, influe tant sur sa personnalité que sur sa vie universitaire et ses relations sociales.

2.3.

DISCRIMINATION ET SENTIMENT D'ISOLEMENT

Au niveau personnel, en France comme en Autriche, l'expérience de la discrimination se manifeste par un sentiment d'isolement plus accentué et fréquent. L'étudiant se sent rejeté, isolé, «étranger».

Réactions à la discrimination TABLEAU

VI-5

133

Discrimination et sentiment Se sentent souvent isolés (N) %

AUTRICHE

Discriminés Non-discriminés PAYS-BAS (Université) Discriminés Non-discriminés

Rarement isolés (N)

%

(77)

(199)

43 57

60 40

Discriminés Non-discriminés FRANCE

d'isolement

(93)

(61) 33 67

68 32 (24)

(38) 13 87

13 87

Il ne semble pas y avoir de relation entre les expériences de discrimination en général et les études, qu'elles soient considérées en général ou plus particulièrement au niveau des succès académiques ou des travaux de groupe. Par contre, les relations humaines des étudiants s'en trouvent affectées. L'étudiant discriminé en est insatisfait, le plus souvent ; mais si l'on ne tient pas compte des Pays-Bas où seuls huit sujets ont ressenti une discrimination, les résultats sont probants en France seulement (tableau VI-6). En étudiant le détail de ces relations, en France, il apparaît aussi que l'étudiant discriminé a moins de contacts avec les Français que celui qui ne l'a pas été (tableau VI-7). Il est probable qu'une expérience quelconque de discrimination sensibilise l'étudiant, l'amenant à craindre tout contact, c'est-à-dire toute situation où il pourrait de nouveau rencontrer du racisme. Le rôle de la discrimination paraît ainsi important dans le déroulement du séjour de l'étudiant. Affecté dans ses relations sociales, dans sa vie matérielle (tableau VI-8), ses rapports journaliers comme le montrent les résultats, l'étudiant en arrive à douter de tout, à s'enfermer sur lui-même, à exagérer aussi parfois la portée de gestes anodins. Cette sensibilisation au problème de la couleur ne le met plus en cause seulement lui en tant qu'individu mais aussi le groupe, la nation qu'il représente. Les tableaux qui vont suivre indiquent cette relation.

134 TABLEAU VI-6

Discrimination Discrimination et satisfaction au niveau des relations humaines Discriminés N %

AUTRICHE

(153)

(124)

Satisfaits Insatisfaits

64 36

FRANCE

(84)

Satisfaits Insatisfaits PAYS-BAS (Universités) Satisfaits Insatisfaits TABLEAU VT-7

Non-discriminés N % 76 24 (69)

42 58 (8) (7) (1)

68 32 (54) 80 20

Discrimination et contacts (France) Contacts nombreux

Peu nombreux

(74)

(70)

43 57

73 27

%

Discriminés Non-discriminés TABLEAU-VI-8

%

Discrimination et satisfaction Discriminés N %

AUTRICHE

(153)

Satisfaits Insatisfaits FRANCE

Satisfaits Insatisfaits PAYS-BAS (Universités) Satisfaits Insatisfaits

matérielle Non-discriminés N % (124)

61 39 (85)

(69)

36 64 (8) (5) (3)

68 32 59 41 76 24

Discrimination

135

SUMMARY IN ENGLISH

This chapter indicates the frequency with which the students reported having experienced prejudice or discrimination of a "racial" or ethnic character in the countries of sojourn. The proportion is (to the present writers) surprisingly large in all four countries, even though none of the four has the reputation of being particularly "racist". Even more surprising is the fact that a number of students, particularly in France, experienced such attitudes not only in the population at large, but even within the university setting. The quotations from the students themselves raise an important problem of interpretation, since diametrically opposite forms of behaviour may both be seen as indicative of prejudice; great attention to a foreign student may be interpreted as paternalistic condescension, and too little attention as neglect or hostility. As W.I. Thomas pointed out long ago, however, the subjective "definition of the situation" may be just as important as the situation seen objectively. We need more data on this issue.

7 Statut national

«Toute la question de la "race" relativement aux échanges d'étudiants est mêlée à celle du statut national, plus particulièrement lorsque le statut attribué par le pays hôte aux groupes nationaux représentés par les étudiants étrangers est inférieur à celui auquel s'attendent ces étudiants, ou auquel ils estiment pouvoir prétendre. Dans leur analyse des réactions des étudiants indiens, Lambert et Bressler (1956) ont précisé que les pays ayant un statut élevé (au regard des Américains) appartiennent en général à l'Europe, ont joui d'une longue période d'indépendance nationale et sont universellement reconnus comme étant puissants ou comme ayant largement contribué à la civilisation mondiale, et dont la population est visiblement et indiscutablement du type caucasien. Les pays de statut inférieur comprennent ceux qui n'appartiennent pas à l'Europe, qui n'ont accédé que récemment à l'indépendance, et dont la population n'est pas du type caucasien ou est de couleur. «De nombreux étudiants, originaires de l'Inde par exemple, appartiennent aux classes supérieures de la population, et ont joui d'un statut élevé jusqu'au moment de leur arrivée dans le pays hôte. Ils se trouvent désormais perdus parmi la masse des étudiants étrangers, ils sont considérés comme étant semblables à tous les autres, et leur statut en principe plus élevé est complètement ignoré. Ce qui, à leurs yeux, apparaît comme étant une discrimination raciale ou ethnique, peut fort bien provenir, selon Aich, d'une certaine répugnance, de la part du pays hôte, à leur accorder le statut auquel ils estiment avoir droit» (Klineberg, 1966). Dans cette perspective, on demandait aux étudiants de dire comment

138

Statut

national

les autochtones considéraient leur pays. Voici les résultats obtenus pour l'Autriche et pour la France.

1.

AUTRICHE

On peut distinguer trois groupes d'étudiants selon l'opinion qu'ils prêtent aux Autrichiens lorsque ceux-ci jugent leurs pays d'origine. 23 % des étudiants pensent que les Autrichiens ont une opinion favorable ou même très favorable sur leurs pays d'origine (soit 29 % des Européens du Sud-Est, 21 % des Moyen-Orientaux). Comme ils l'expliquent, les Autrichiens ont eu de bons rapports avec leurs compatriotes, et il existe des liens traditionnels entre l'Autriche et leurs pays d'origine. Un autre groupe pense que les Autrichiens ont une mauvaise, sinon une très mauvaise, opinion de leurs pays ; 1 étudiant sur 5 en rend responsable le racisme et les préjugés des Autrichiens, 16 % mettent en cause la tendance à généraliser. Les étudiants originaires du Moyen-Orient plus que les autres inclinent à blâmer les Autrichiens pour leur racisme à ce niveau. Un troisième groupe est constitué d'étudiants (28 %) qui prêtent aux Autrichiens une opinion « ni bonne ni mauvaise > : les Autrichiens en général ne montrent qu'indifférence ou ignorance totale. Le groupe d'étudiants moyen-orientaux exprime ce reproche plus que ne le fait le groupe d'Européens du Sud-Est (21 % comparés à 12 % respectivement).

2.

FRANCE

Interrogés sur l'opinion que les Français ont sur leurs pays d'origine, 37 % des étudiants pensent que les Français ne connaissent pas leur pays et ne le considèrent ni en bien ni en mal. 37 % disent que les Français ont une bonne opinion de leur pays et 23 % une mauvaise (tableau VII-1). Au niveau des zones d'origine les différences de perception s'accentuent : ainsi à un extrême, 82 % des Sud-Asiatiques disent que les Français estiment favorablement leur pays (18 % disent que les Français ne le considèrent ni en bien ni en mal). La raison principale

Statut

national

139

qu'ils invoquent pour expliquer cette opinion aes Français est la culture : «La civilisation indienne.» INDE.

«En Angleterre, les Indiens sont soumis au racisme comme les Arabes en France. Mais ici l'Inde est bien vue (le bouddhisme, le yoga...).» INDE.

«En fait ils ne savent pas très bien ce que c'est que l'Afghanistan mais ils sont très gentils.» AFGHANISTAN.

62 % des étudiants d'origine extrême-orientale pensent que la France a une bonne opinion de leur pays, seule une minorité la pense mauvaise (7 %). Ils expliquent l'attitude favorable des Français par la politique de la France et par leurs qualités humaines. Des considérations politiques sont exprimées par les Vietnamiens * : «Par sympathie pour une lutte libératrice. Le Français estime beaucoup les Vietnamiens pour leur engagement politique et leur héroïsme.» VIETNAM.

«A cause de la guerre du Vietnam.» VIETNAM.

«Ils ont pitié du Vietnam agressé, de plus se sentent une certaine culpabilité du fait de la colonisation française.» VIETNAM.

«Par curiosité, parce rares". »

que les Indonésiens sont

les

"oiseaux INDONÉSIE.

* L'échantillon Extrême-Orient (29) comprend 9 Vietnamiens.

140

Statut

national

42 % des Moyens-Orientaux pensent que leur pays est bien considéré par les Français. L'amabilité des gens, dans le cas du Liban, sa politique particulière, les liens culturels sont alors mentionnés : «Peut-être parce que je suis arabe, en général les Français sont racistes mais quelques-uns sont très bien. Le Liban a une situation particulière dans le monde arabe. Le Français voit un pays à travers sa politique et c'est un pays libre et cela leur plaît, et le français est une langue presque maternelle.» LIBAN.

«Ils sont très aimables et curieux de mon pays. En fait ils ne savent pas très bien où il se situe.» IRAN.

Cependant, un étudiant sur trois pense que son pays a un statut national faible. Une telle opinion est généralement attribuée au racisme et au conflit israélo-arabe : «Ils ont des préjugés raciaux contre les Arabes. Cf. la guerre d'Algérie.» IRAN.

«Pour des questions politiques. Après la guerre des Six jours les pays arabes sont mal vus en France à cause de la propagande sioniste. Mais cela va mieux.» LIBAN.

Les étudiants d'origine africaine, en dehors de ceux qui considèrent l'opinion des Français comme ni bonne ni mauvaise (43 %), se partagent entre l'estime (28 %) et la mésestime (25 %). Le premier groupe explique que les Français ignorent tout des différents pays africains, et cette méconnaissance est parfois même volontaire. Elle correspond alors à une mésestime du pays : «Ils ne connaissent pas les Ivoiriens, pour eux, les Noirs sont les Noirs.» CÔTE

D'IVOIRE.

141

Statut national

«Us s'en fichent. Us supportent les étrangers tant qu'ils ne sont pas nombreux, ne les prennent pas très au sérieux au point de vue intellectuel : c'est une forme de racisme.» TOGO.

«Les Français n'ont pas colonisé le Nigeria, donc nous confondent avec le Niger. Ils sont hypocrites et diplomates.» NIGERIA.

«Les gens ne savent pas où c'est : quelqu'un a pris la Guinée pour un pays à tendance socialiste et s'est montré inquiet.» GUINÉE.

Celui qui prête aux Français une bonne opinion sur son pays mentionne les liens qui ont découlé de la colonisation, ou, dans le cas des anglophones, leur indépendance vis-à-vis de la France et donc l'absence de ressentiment réciproque : «Peut-être parce que le Ghana est une ex-colonie anglaise : les Français n'ont pas l'impression que le Ghana a trahi la France en devenant indépendant.» GHANA.

«Il y a deux jours le président a dit à la télé, les rapports entre les deux pays sont excellents, et les Français sont obligés d'aimer les Ivoiriens pour des raisons lucratives : la Côte d'Ivoire est la deuxième Algérie.» CÔTE

D'IVOIRE.

Dans certains cas, des raisons plus ambiguës apparaisent : «Je m'en étonne, car en général les Français se méfient des Noirs, mais les Malgaches sont bien vus peut-être parce qu'ils sont de couleur plus claire.» MADAGASCAR.

Une opinion négative envers le pays d'origine s'explique par la politique et surtout par le racisme :

142

Statut

national

«Assez mal, ils ont des préjugés, sont paternalistes ou racistes. C'est surtout le fait d'être Africain qui joue un certain rôle, car quand on précise la nationalité cela va encore bien. Le Gabon a des accords avec la France.» GABON.

«Ex-colonie belge, avec des troubles constants : mauvaise opinion. » «C'est des nègres, pas des civilisés. »

CONGO. GABON.

«Les Blancs commencent à avoir peur des Noirs. » MALI.

C'est finalement au niveau des Nord-Africains que l'on trouve l'expression la plus pessimiste de l'opinion des Français à l'égard de leur pays : si seulement 19 % de ces étudiants disent que les Français considèrent bien leur pays, 45 % disent «ni bien ni mal» et 37 % très mal. Un statut national neutre est expliqué par les liens «sentimentaux» entre les deux pays, la culture devenue commune, donc par une sorte de similarité de mode de vie, de biculturalisme. «Il n'y a pas de gêne mutuelle. La culture est semblable.» TUNISIE.

«Très exotiques, très «liés» à la France, donc considérés comme de la même famille.» MAROC.

Par contre, l'hostilité, la déconsidération est due, selon ces étudiants, à la colonisation, à la guerre d'Algérie et au racisme dont font l'objet les «Arabes» notamment : «Assez mal. A cause de la guerre coloniale. On a tendance à amplifier tout ce que font les Nord-Africains (viols, etc.). On généralise : on assimile tout Nord-Africain à l'ouvrier, qu'il soit étudiant ou pas.» TUNISIE.

Statut national

143

«Il y a un jugement à priori chez chaque Français, à l'encontre du Nord-Africain et ce à cause du manque d'information générale que j'ai constaté ici.» MAROC.

«Parce que nous sommes Nord-Africains et Arabes.» TUNISIE.

«Parce qu'ils confondent Algériens, Marocains et Tunisiens : ce sont tous des Nord-Africains. Ils râlent pour l'indépendance qu'ils ont dû donner.» MAROC.

Les Marocains et les Tunisiens se plaignent d'être toujours assimilés aux Algériens. Si l'on considère les Latino-Américains, on peut voir que 42 % d'entre eux pensent que les Français n'ont aucune opinion concernant leur pays. Le même pourcentage d'étudiants estime avoir un statut national élevé. Là aussi la politique et l'histoire jouent, ainsi que les qualités humaines, les liens avec l'Occident, l'exotisme. «Leur opinoin n'est ni bonne ni mauvaise. Ils ne connaissent pas. Confusion avec la Bolivie.» COLOMBIE.

Leur opinion est bonne : «L'Amérique latine évoque pour eux Cuba, Castro, "Che", Debray (Régis), la conquête espagnole, l'or, les Incas. Mais il ne font pas de distinction nette entre les pays.» CHILI.

«A cause de la stabilité politique du Chili. Cf. Bolivar, la libération de l'Amérique latine. Les Français se trompent car Bolivar a libéré la Colombie et non le Chili, mais c'est une preuve de sympathie.» CHILI.

144

Statut

national

En résumé, on peut dire qu'en général les étudiants sud-asiatiques, extrême-orientaux et latino-américains estiment que leur pays jouit d'un statut national relativement élevé, alors que les Africains et les Nord-Africains le considèrent faible.

TABLEAU V I I - 1

Statut

national

AUTRICHE

FRANCE

Total %

(277) Moyen-Orientaux %

Total %

(155) Moyen-Orientaux %

23

21

37

42

28 49

21 58

41 23

25 33

Statut :

Elevé Ni bon ni mauvais Faible

La comparaison entre les échantillons autrichiens et français, qui ne peut se faire qu'au niveau des Moyen-Orientaux, montre des différences entre les deux groupes : en France, le statut national est perçu comme plutôt élevé, en Autriche comme étant bas. La présence, dans un même groupe d'étudiants qui s'attribuent un statut national élevé et d'autres qui s'accordent un statut faible, pose le problème du passage d'une position à l'autre. De même qu'au niveau de l'existence d'une discrimination directement ressentie, les étudiants parlent des qualités et des défauts des Français. Ces caractéristiques coexistent en fait dans cette population. A partir de quel moment l'individu perçoit-il comme étant dominant l'un de ces pendants, lorsqu'il juge les Français ? Les hypothèses émises par Lambert et Bressler (1956) et testées ensuite par Morris (1960), sont que les étudiants étrangers subissent un « état de choc » durant leur séjour dans un autre pays. Ce choc joue un rôle extrêmement important dans le processus d'adaptation de l'étudiant. En vivant dans un pays étranger, l'individu devient

Statut

national

145

un représentant, un ambassadeur officieux de son pays et son statut personnel dépend de celui de son pays. Lambert et Bressler se sont surtout intéressés à la relation entre ce statut et l'attitude de l'étudiant au départ vis-à-vis du pays hôte alors que Morris élargissait ce champ à l'adaptation. Avant d'étudier ces deux points, nous avons voulu voir dans quelle mesure la discrimination ressentie influait sur ce que l'étudiant perçoit comme étant l'opinion des autochtones concernant son propre pays (tableau VII-2). On peut en effet supposer que la discrimination ressentie est l'un des facteurs à l'origine de la perception défavorable de l'opinion des autochtones. En arrivant dans le pays où il étudiera, l'étudiant se rend compte par la force des choses qu'il est différent : il est soudain doté d'une race particulière, d'une couleur grossièrement définie par rapport au critère blanc — «race» et couleur qui peuvent ne pas correspondre à celles qu'il s'attribue en réalité. Un étudiant haïtien par exemple, disait avoir eu des préjugés contre les Africains qui pour lui étaient des sauvages, puis au cours de son séjour en France il s'est aperçu que lui qui était «brun clair» était considéré comme un «Noir». Ce fut un choc, une remise en question de toute la gamme des «couleurs». Il se trouvait obligatoirement solidaire d'un groupe qu'il déconsidérait : «Venir en Grande-Bretagne c'est comme si l'on entrait dans un pays dont les citoyens seraient atteints d'une forme singulière de daltonisme...» (Tajfel et Dawson, 1965). De même un étudiant marocain berbère devient Nord-Africain, Algérien ou tout simplement Arabe. L'étudiant se perd ainsi dans une masse uniforme d'étrangers, il n'a plus d'attaches nationales ou autres. En rejetant l'individu, les autochtones sous-considèrent et abaissent le pays qu'il représente. Les résultats confirment cette relation entre la discrimination ressentie et le «statut choc». En Autriche comme en France, un étudiant qui a fait l'objet d'une discrimination raciale prête souvent aux autochtones en général une opinion défavorable envers son pays, mais la considère favorable lorsqu'il n'a pas été l'objet d'une discrimination.

10

Statut national

146 TABLEAU V I I - 2

Statut national et discrimination AUTRICHE

FRANCE

D N-d (150) (122) % % Statut ; Elevé Ni bon ni mauvais Faible

17 31 52

32 41 27

PAYS-BAS

D (75) %

N-d (57) %

D (8) N

N-d (49) %

29 32 39

60 32 9

(2) (3) (3)

59 36 4

D = Discriminés. N. d = Non-discriminés.

On peut alors se demander quelles incidences peut avoir le statut national que l'étudiant se voit attribuer sur les différents aspects de son séjour, c'est-à-dire les succès académiques et les contacts avec les autochtones. Cette partie de l'analyse n'a été faite que pour l'échantillon français (tableaux VII-3, VII-4, VII-5). TABLEAU V I I - 3

Statut national et succès académiques (France) „ . . Dominante s (61)

Dominante echecs . . , ou autant de succès que d'échecs (27)

44 38 18

9 9 9

succes

%

Statut : Elevé Ni bon ni mauvais Faible

%

Il est cependant à noter ici que les étudiants qui échouent se disent aussi souvent un statut élevé (33 %) que faible (33 %). De même, l'idée que se fait l'étudiant de l'opinion des Français est en général plus ou moins favorable selon qu'il a de nombreux, ou au contraire, peu de contacts avec les Français.

147

Statut national TABLEAU V I I - 4

Statut national et contacts (France) Contacts nombreux (70)

Peu nombreux (68)

50 33 17

32 35 32

%

Statut : Elevé Ni bon ni mauvais Faible

%

Ainsi il semble que la perception qu'il a de son statut national soit fonction non seulement de la discrimination rencontrée, mais également de la satisfaction éprouvée dans les relations humaines, et des succès aux examens. TABLEAU V I I - 5

Statut national et satisfaction au niveau des relations humaines (France) Satisfaits (80)

Insatisfaits (69)

49 39 13

26 35 38

%

Statut : Elevé Ni bon ni mauvais Faible

%

Le rejet qu'il éprouve à ces différents niveaux est expliqué par une sorte de sentiment de discrimination par rapport à son pays d'origine. Ces rejets peuvent déclencher d'autres processus, entre autres un changement d'attitude vis-à-vis du pays hôte. Les tableaux qui suivent montrent certaines des relations existantes entre le «statut national» et successivement, le sentiment de discrimination, la satisfaction au niveau des études et des relations lorsqu'il s'agit des étudiants africains et nord-africains en France (tableaux VII-6, VII-7, VII-8).

148 TABLEAU V I I - 6

Statut national Statut national et discrimination (dans le cas des Africains et des Nord-Africains, en France) Discriminés (58)

Non-discriminés (23)

24 36 40

43 48 9

%

Statut : Elevé Ni bon ni mauvais Faible

TABLEAU V I I - 7

Statut national et satisfaction universitaire (dans le cas des Africains et des Nord-Africains, en France)

Statut : Elevé Ni bon ni mauvais Faible

TABLEAU V I I - 8

%

Satisfaits (92) %

Insatisfaits (7) N

27 41 32

— (6) (1)

Statut national et satisfaction au niveau des relations humaines (dans le cas des Africains et des NordAfricains, en France) Satisfaits (45)

Insatisfaits (54)

31 53 16

20 37 43

%

Statut : Elevé Ni bon ni mauvais Faible

%

Statut national

149

SUMMARY IN ENGLISH

This chapter discusses the implications of the status perceived by the students as ascribed to their nation by the host population. Such perceived national status appears to be related to feelings of discrimination, success in examinations, and degree of satisfaction with the university experience and with "human relations" in general. Although there are many exceptions, the trend is sufficiently clear, and indicates the importance of this dimension in the reactions of foreign students.

8 Le changement d'opinion

Un des avantages supposés que présentent les échanges d'étudiants, sur lequel on insiste particulièrement dans les échanges organisés sous les auspices d'organisations internationales telle que I'UNESCO, concerne l'amélioration des relations internationales. Le séjour à l'étranger est censé faire naître chez les étudiants des dispositions plus amicales envers le pays hôte. Ce facteur se retrouve dans les programmes bilatéraux, lorsque les étudiants sont encouragés à se rendre dans un pays particulier, avec l'espoir d'en faire des amis, voire même des alliés. Les résultats de notre étude indiquent que si cette amélioration se produit parfois, il n'en est pas de même dans tous les cas. Certains étudiants ont une attitude plus amicale, alors que d'autres ne signalent aucun changement dans leurs attitudes ; d'autres encore évoluent dans la direction opposée à celle que l'on avait espérée. Les changements qui interviennent peuvent se rattacher directement au statut dont jouit le pays d'origine, à la discrimination expérimentée, ainsi qu'aux « relations humaines » avec la population du pays hôte. L'étudiant se faisait, avant son arrivée dans le pays hôte, une certaine image de la population et du pays en général. Or, comme le disaient Selltiz et Cook (1963, p. 265) : «Il serait trop simple de supposer qu'une période d'études dans un pays étranger aurait pour résultat uniforme une attitude plus favorable envers ce pays.> L'étudiant, du fait même de son arrivée, de ses expériences et de ses contacts nouveaux, est amené à reconsidérer ses opinions, soit en les consolidant ou, au contraire, en s'en écartant.

152

Le changement

1. CHANGEMENTS FAVORABLES E T

d'opinion

DÉFAVORABLES

Les résultats obtenus ici montrent que relativement peu d'étudiants conservent l'opinion qu'ils avaient avant leur arrivée ; celle-ci devient généralement plus favorable envers les autochtones (c'est le cas pour la France et la Yougoslavie) ou, au contraire, moins favorable comme il apparaît en Autriche (tableau VIII-1). Une étude similaire faite en Suède (Persson, 1967) montrait un changement plus défavorable encore. Si l'on considère les zones d'origine, des différences apparaissent : les étudiants sud-asiatiques (82 % ) les Latino-Américains (64 %), les Extrême-Orientaux (59 % ) et les Moyens-Orientaux (50 % ) ont vu se développer chez eux une attitude plus favorable envers les Français. A ce premier groupe favorable, viennent s'opposer les Africains et les Nord-Africains : 40 % environ d'entre eux respectivement ont adopté en France une attitude négative vis-à-vis des autochtones. Ce durcissement des Africains se retrouve encore plus nettement en Yougoslavie : les deux tiers des Africains ont acquis une opinion défavorable ; le reste de l'échantillon dans ce pays, composé d'Arabes et d'Asiatiques, est devenu plus favorable qu'il ne l'était auparavant. Les étudiants originaires du Moyen-Orient et séjournant en Autriche ont par contre évolué dans un sens moins favorable (43 %) envers les autochtones. Si l'on observe les réponses que donnent les étudiants en France on peut voir qu'une attitude plus favorable est en général expliquée par une meilleure connaissance de la France, par la distinction que l'on fait entre les «bons» et les «mauvais Français» ou par les qualités du groupe fréquenté. Quelques étudiants disent avoir été surpris par les Français, par leur absence de discrimination, leur libéralisme ou leur franchise, leur spontanéité : «J'ai appris ici à les connaître.» TUNISIE.

«Je sens les Français plus proches.» COLOMBIE.

Changements favorables et défavorables

153

«Avant, je considérais la France à travers les Français colonisateurs de l'Indochine. Maintenant je vois d'autres milieux et leurs qualités.» VIETNAM. TABLEAU V I I I - 1

Changement d'opinion sur les habitants du pays de séjour

N

Même opinion

Plus favorable

Moins favorable

%

%

%

AUTRICHE

(277)

38

25

37

FRANCE YOUGOSLAVIE

(155)

23

30

(69)

21

42 41

(65)

20

34

40

(25)

20

16

64

37

Changement d'opinion des Africains en FRANCE YOUGOSLAVIE

Changement d'opinion des MoyenOrientaux en AUTRICHE FRANCE

Changement d'opinion des étudiants en F R A N C E originaires de Afrique du Nord Asie du Sud Extrême-Orient Amérique latine

(195)

38

19

43

(12)

(4)

(6)

(2)

(38)

31

31

37

(H) (29) (14)

(1) 21

(9) 59

(1) 20

(4)

(9)

(1)

Si d'autres n'ont pas modifié leur opinion parce qu'elle s'est confirmée dans un sens positif ou négatif ou parce qu'ils sont là depuis trop peu de temps, comme nous l'avons vu, un groupe important d'étudiants

154

Le changement

d'opinion

africains et nord-africains a maintenant une attitude défavorable vis-àvis des Français. Ils expliquent ce changement par leur déception, les défauts des Français (froids, individualistes, etc.) et par le racisme et l'hostilité : «J'étais venu pour apprendre des leçons des Français. Maintenant je sais qu'il n'y a rien à apprendre ici. Si je reste à Paris c'est parce que j'ai besoin d'un certain recul vis-à-vis de mon pays pour mieux me rendre compte de ses problèmes.» CAMEROUN.

«Je les comprends mieux maintenant, mais les difficultés restent. Racisme. Eux sont Français, Européens, moi je suis Africain. Il y a donc décalage entre deux modes de pensée, de valeurs, de façon d'agir. Et le grand tort des étudiants africains, c'est de vouloir qu'ils se comportent comme nous.» NIGERIA.

«Ils se croient supérieurs, sont individualistes, manquent de solidarité. C'est une civilisation invivable alors que les Anglo-Saxons sont plus ouverts, plus amicaux, plus faciles à contacter.» PHILIPPINES.

«Mon opinion est maintenant moins favorable aux Français. J'ai été extrêmement déçu. Je n'ai pas rencontré ce que les Français m'ont enseigné. Us disent et se disent qu'ils nous ont apporté des lumières, mais pour moi ce ne sont que des lumières secondaires et jusqu'à présent je n'arrive pas à voir ce qu'ils nous ont apporté. Notre but en venant en France était en partie de voir si ce qu'ils nous avaient appris et en quelque sorte promis était vrai ou faux. C'étais faux. Si la France tient à maintenir la coopération avec l'Afrique, elle doit avant tout résoudre le problème du «tribalisme» français. Cela est urgent. Elle doit combattre la mentalité que les premiers officiers français envoyés en Afrique comme responsables ont contribué à former.» DAHOMEY.

Changements favorables et

défavorables

155

Dans les deux réponses suivantes, le changement d'opinion vis-à-vis des Français est accompagné d'une réaction personnelle. Dans un cas, l'étudiant réagit au racisme qu'il a rencontré en devenant raciste lui aussi. Il adopte la même attitude que ses interlocuteurs. Dans l'autre, l'étudiant accepte la situation momentanément, mais exprime le désir de se venger à son retour chez lui : «Ils sont racistes, et moi aussi je prends une attitude raciste envers eux. Je le suis devenu ici.» GABON.

«Je ne les croyais pas aussi bornés, surtout envers les Nord-Africains, ils ont tendance à généraliser ; j'ai l'intention de me venger à mon retour.» MAROC.

Comme il l'expliquera plus loin, en enseignant aux enfants dont il aura la charge ce qu'il considère comme le vrai visage de la France : «J'étais enseignant et le serai encore à mon retour. Mais j'exercerai mon métier dans une autre optique : en tenant compte des réalités que j'ai vécues. J'apprendrai aux jeunes Marocains la langue française mais sans m'en tenir seulement au manuel. Je leur dirai les réalités, ce que j'ai vu, la façon dont la France nous traite, la différence de comportement entre les Marocains recevant les Français, et l'inverse. Je leur apprendrai le vrai visage de la France. Car nous sommes hospitaliers, nous les recevons bien, et eux ne le font pas, se moquent de nous. Ce changement d'optique aura des conséquences défavorables pour les Français. Quant à moi, je serai toujours marqué par le mauvais accueil que j'ai reçu.» MAROC.

Trois étudiants d'origine africaine et nord-africaine, exprimaient cette intention.

156

Le changement

d'opinion

2. FACTEURS RESPONSABLES En changeant d'attitude l'étudiant manifeste sa déception, reproche à la France de ne pas être à la hauteur de sa réputation : les étudiants croyaient «qu'il y avait plus d'ouverture vis-à-vis des étrangers», «que la jeunesse était plus intellectuelle», «que les Français avaient l'esprit critique et davantage le sens de l'hospitalité», «étaient moins racistes»,etc. La relation entre l'expérience de discrimination et le changement d'opinion permet d'entrevoir l'influence que ce genre d'expérience peut avoir à ce niveau. Dans leur recueil d'essais, Tajfel et Dawson (1965) relèvent, à partir d'une analyse de contenu de textes, que les étudiants expriment plus souvent l'insatisfaction que la satisfaction. En effet, en Autriche comme en France, la moitié des étudiants qui ont subi une discrimination ont une attitude moins favorable que précédemment envers le pays hôte. Les étudiants qui n'en ont pas ressenti ont une opinion différente selon le pays où ils séjournent : les trois quarts des étudiants en France ont une opinion plus favorable, la moitié de ceux qui séjournent en Autriche déclarent ne pas avoir modifié leur opinion (tableau VIII-3). On en vient logiquement à penser qu'il existe un rapport entre le changement d'opinion et le statut national que les étudiants estiment avoir dans le pays où ils étudient (tableau VIII-4). Cette relation a été longuement étudiée par Morris (1956-1960) dans le cadre des Etats-Unis. Cet auteur estime que des critiques hostiles fréquentes vis-à-vis du pays de séjour se trouveront surtout chez les étudiants qui pensent que les Américains accordent à leur pays un statut national faible. Ces critiques seront au contraire moins fréquentes chez ceux qui estiment avoir un statut élevé, que ce soit à leurs propres yeux ou aux yeux des Américains. Selltiz et Cook (1963) considèrent le facteur du statut national comme important, mais suggèrent qu'il peut ne pas toujours fonctionner comme l'entend Morris. Pour eux, par exemple, un individu qui s'intéresse peu à son pays sera plus indifférent au statut national qu'il supposera avoir. En effet, les résultats obtenus à ce niveau, en France, montrent que les étudiants qui désirent vivre dans un autre pays que le leur (en France ou ailleurs 12 %) sont devenus favorables aux Français, ou ont conservé la même

Facteurs responsables

157

opinion qu'auparavant. Par contre, 94 % des étudiants qui ont maintenant une attitude négative envers la France ne veulent vivre que dans leur propre pays (tableau VIII-2). TABLEAU V 1 I I - 2

Changement d'opinion sur le lieu de séjour et pays où l'étudiant veut vivre plus tard (France) Même opinion (35)

Plus favorable (63) %

Moins favorable (48)

83 18

86 16

94 6

%

Dans leur propre pays Ailleurs

%

Il faut signaler, cependant, que seul un pourcentage relativement faible d'étudiants désirent vivre ailleurs que dans leur propre pays, quel que soit le changement — ou le maintien — de leur opinion au sujet de la France. TABLEAU

VIII-3

Changement d'opinion sur le pays de séjour et discrimination AUTRICHE

PAYS-BAS

Universités D N-d

D (149)

N-d (118)

D (78)

N-d (69)

(8)

(52)

N

%

24

25

26

65

(3)

48

26

53

24

23

(3)

38

50

22

50

12

(2)

13

%

Même opinion Plus favorable Moins favorable

FRANCE

%

%

%

D = Discriminés. N - d = Non-discriminés.

Nos résultats confirment la relation entre le statut national que chacun s'accorde et le changement d'attitude. Il est cependant à noter ici,

Le changement

158

d'opinion

comme au niveau de la discrimination, que les groupes qui considèrent l'opinion des autochtones bonne ou ni bonne ni mauvaise diffèrent dans leurs attitudes selon le pays de séjour. Lorsque l'étudiant s'accorde un statut élevé en France ou aux Pays-Bas, son attitude devient dans presque la moitié des cas favorable ; lorsqu'il pense avoir un statut ni bon ni mauvais, il devient également, dans la même proportion, favorable à chacun de ces pays. Il en va autrement en Autriche : là en effet un statut ni bon ni mauvais prend une signification négative : l'étudiant dit soit n'avoir pas changé d'opinion, soit être moins favorable envers les Autrichiens. Lorsqu'il estime avoir un statut élevé, un étudiant sur deux affirme avoir conservé la même opinion. Plusieurs autres aspects de la vie de l'étudiant peuvent influer sur le changement d'opinion vis-à-vis du pays où il a séjourné. TABLEAU V I I I - 4

Changement d'opinion sur le pays de séjour et statut national Statut ni bien ni mal

bien N AUTRICHE

(63)

Même opinion Plus favorable Moins favorable FRANCE

Même opinion Plus favorable Moins favorable

N

%

mal N

%

(108)

(91) 51

41

28

37

21

21

13

38

51

(55)

Même opinion Plus favorable Moins favorable PAYS-BAS

%

(69)

(32)

24

17

28

58

51

22

18

32

50

(31)

(20)

(8)

39

35

48

55

13

10

(4) (2) (2)

«A maintes reprises les résultats des recherches indiquent que lorsque les étudiants obtiennent ce qu'ils étaient venus chercher (formation spéciale, diplôme, publication d'une recherche, etc.) leur attitude envers

Facteurs responsables

159

le pays hôte tend à être plus favorable» (Klineberg, 1966, p. 14). Ce que confirment nos résultats en France. Si l'on considère que les succès académiques témoignent de l'utilité et de l'efficacité du séjour, deux groupes se distinguent. L'un de ces groupes ne comptera que des succès ou un plus grand nombre de succès que d'échecs. L'autre groupe comprendra les étudiants qui ont constamment échoué à leurs examens ou qui comptent plus ou autant d'échecs que de succès. On constate alors que la moitié des étudiants du premier groupe devient effectivement plus favorable envers les Français, alors que la moitié des étudiants du second groupe, à dominante échecs, devient moins favorable (tableau V I I I - 5 ) . TABLEAU V I I I - 5

Changement d'opinion sur les Français et succès académiques

N Dominante succès Autant d'échecs que de succès Dominante échecs

Même opinion N %

Plus favorable N %

Moins favorable N %

18

51

31

(53) (17) (8)

(2) (5)

(6) (2)

(9) (1)

On peut également supposer que les relations humaines ont une incidence sur l'attitude des étudiants (tableau VIII-6). En effet, il y a par exemple modification de l'opinion selon que l'étudiant a de nombreux ou de rares contacts avec les autochtones et cela aussi bien en Autriche, qu'en France ou aux Pays-Bas. Dans les deux premiers pays, des contacts peu nombreux conduisent à une opinion moins favorable (aux Pays-Bas elle demeure telle qu'elle était). Lorsque les contacts sont au contraire nombreux, en France et aux Pays-Bas, l'opinion devient plus favorable, alors qu'en Autriche elle ne varie pas. A ce niveau, nous manquons de détails sur la situation en Autriche et aux Pays-Bas pour pouvoir expliquer l'importance et la signification de ce maintien de l'opinion. On obtient un schéma de réponses identiques lorsqu'il s'agit des amis autochtones, ou lorsque l'étudiant conclut sur ses relations sociales (tableau VIII-7). Ainsi il semblerait que

160

Le changement d'opinion

l'attitude de l'étudiant change selon la nature et la fréquence des contacts qu'il a pu établir dans un pays. S'il n'a aucun ami autochtone, s'il estime ses contacts avec les gens peu fréquents, s'il se dit enfin insatisfait de ses relations sociales, son opinion change dans un sens négatif envers le pays où il séjourne. TABLEAU V I I I - 6

Changement d'opinion sur le pays de séjour et contacts AUTRICHE

FRANCE

N P ( 1 2 4 ) (143)

Même opinion Plus favorable Moins favorable

%

%

46

31

33 21

17 52

PAYS-BAS

N (74)

P (72)

N (23)

20 62

28

35

52

26

57

45

18

46

9

3

%

P (33)

%

%

%

N = Nombreux. P = Peu nombreux. TABLEAU V I I I - 7

Changement d'opinion et nationalité des meilleurs amis AUTRICHE

(179) %

(81)

A des amis français (120)

41 28 30

32 15 53

24 48 28

A des amis N'en a autrichiens pas

Même opinion Plus favorable Moins favorable

PAYS-BAS

FRANCE

(universités)

N'en a pas

23 27 50

(26)

A

des

amis hollandais (43) % 35 54 12

N'en pas

(16) n (8) (4) (4)

Au niveau des relations qu'ils peuvent avoir avec les filles, si le fait de sortir avec des autochtones rend en France les étudiants plus favorables (52 %), en Autriche les étudiants dans ce cas disent ne pas avoir changé d'opinion sur les autochtones (39 %) ou être moins favorables (34 %) (tableau VIII-8). Ceux qui ne sortent qu'avec des filles étrangères au pays de séjour ont soit gardé la même opinion

161

Facteurs responsables

qu'auparavant, ou bien sont moins favorables envers chacun de ces deux pays. Les contacts avec les filles semblent ainsi influencer le changement d'attitude de l'étudiant, conjointement cependant avec d'autres éléments, notamment dans le cas de l'Autriche. Pourquoi ces relations aboutissent-elles à une opinion favorable en France et négative ou neutre en Autriche ? Nous ne sommes pas en mesure de répondre à cette question. TABLEAU

VIII-8

Changement d'opinion et sorties avec des filles Non autochtones N %

FRANCE

(85)

(53)

Même opinion Plus favorable Moins favorable AUTRICHE

15 52 33

40 25 36

(173)

(94)

Même opinion Plus favorable Moins favorable TABLEAU

Filles autochtones N %

VIII-9

39 27 34 Changement d'opinion

36 20 44 et relations humaines

FRANCE

Satisfaits (74)

%

Même opinion Plus favorable Moins favorable

23 58 19

AUTRICHE

Insatisfaits (70)

Satisfaits (183)

Insatisfaits (83)

26 26

44 27 29

25

%

49

%

%

19 56

Ces résultats vont à l'appui de l'idée qu'un étudiant ne peut être satisfait de son séjour dans un pays étranger et l'aimer que si en dehors même de ses études il a des contacts avec des gens de ce pays — vivre entre étrangers ne suffit pas — et s'il compte parmi eux des amis. Il faut ajouter ici une autre condition, à savoir une situation îi

162

TABLEAU V I I I - 1 0

Le changement

Changement d'opinion et satisfaction au niveau matériel FRANCE

AUTRICHE

Satisfaits (67)

Insatisfaits (79)

Satisfaits (171)

Insatisfaits (96)

21 55 24

27 33 40

41 20 38

32 32 35

%

Même opinion Plus favorable Moins favorable

d'opinion

%

%

%

matérielle satisfaisante (tableau VIII-10). L'étudiant qui se débat au milieu de problèmes financiers et ne sait comment les résoudre, qui juge sa situation moins bonne que celle d'un Français, et ses propres ressources insuffisantes, en rend peut-être responsable le pays où il réside. Sans doute en veut-il davantage à cette société dans la mesure où il ne peut lui-même suffisamment en profiter. Ce résultat est évident pour la France, mais ne l'est pas pour l'Autriche.

Le changement d'opinion

163

SUMMARY IN ENGLISH

One of the alleged advantages of student exchanges, particularly stressed in those exchanges which are conducted under the auspices of international organizations such as Unesco, is the improvement in international relations. The hope is that a foreign sojourn will make students more friendly to the host country. This is also a factor in bilateral programs, with foreign students encouraged to come to a particular country in the hope that they will become friends and possibly allies. The results of this particular study indicate that this happens in some cases, but not in all. Some students do become more friendly, still others move in the direction opposite to what was anticipated. The changes which occur are related to the status ascribed to the country of origin, to the discrimination experienced, and to the "human relations" with the inhabitants of the host country.

9 Satisfaction générale et rôle de l'information

Le présent chapitre commence par donner un compte rendu concernant le degré de satisfaction exprimé par les étudiants étrangers, soit d'une manière générale, soit au sujet de certains aspects particuliers de leur séjour se rattachant à leur expérience universitaire, aux relations humaines et aux conditions matérielles. Une satisfaction beaucoup plus grande est exprimée par les étudiants en Autriche et aux PaysBas, que par ceux de Yougoslavie et de France ; cependant étant donné la difficulté d'établir des comparaisons internationales, on ne peut guère insister sur ces différences. Ce qui est plus important c'est le fait qu'une grande proportion des étudiants dans les quatre pays considérés déclarent être insatisfaits. La question se pose alors de savoir si ce mécontentement n'est pas dû à la nature et à l'insuffisance des informations mises à la disposition des étudiants concernant le pays hôte avant que ne commence leur séjour dans ce pays. Selon les données recueillies ce facteur apparaît comme étant extrêmement important.

1. NIVEAU DE SATISFACTION

GÉNÉRALE

En essayant d'analyser quelques-uns des problèmes qui se posent aux étudiants du Tiers-Monde pendant leur séjour dans un pays européen, nous avons distingué trois secteurs principaux : les études, la situation matérielle et les relations sociales. Il est finalement impossible d'analyser l'adaptation de ces étudiants dans un pays étranger sans tenir compte de chaque secteur, dans la mesure où, comme le montrent les résultats cités, les éléments agissent les uns sur les autres au niveau de l'adaptation des attitudes.

166

Satisfaction générale et rôle de l'information

Cependant, si nous avons pu constater jusqu'ici l'interdépendance de ces éléments, il nous manquait encore une analyse particulière, un jugement d'ensemble sur l'étudiant. L'instrument utilisé ne permettait de l'établir qu'en tenant compte à la fois de la satisfaction des étudiants au sujet de leurs études, de leurs relations sociales et de leur situation matérielle (tableau IX-1). Ce jugement d'ensemble diffère selon le pays de séjour. On peut alors distinguer deux groupes : d'une part, l'Autriche et les Pays-Bas, d'autre part, la France et la Yougoslavie. Dans le premier groupe, un étudiant sur deux environ se dit satisfait ou très satisfait de son expérience sur les trois niveaux ; dans le second groupe, seul un étudiant sur quatre répond ainsi. Ici, les étudiants sont généralement satisfaits de leurs études, mais mécontents de leurs relations humaines, de leur situation matérielle ou des deux. TABLEAU

IX-1

Satisfaction au niveau des études, des relations humaines et de la situation matérielle Satisfaits au niveau universitaire et humain

Satisfaits seulement au niveau universitaire

Satisfaits seulement au niveau humain

Insatisfaits au niveau universitaire et humain

AUTRICHE

(277)

Satisfaits au niveau matériel Insatisfaits

(177)

70

14

11

5

(100)

32

27

15

26

FRANCE

(153) 56 44

38

4 2

7

Satisfaits au niveau matériel Insatisfaits

(71) (82)

46

1

PAYS-BAS

(Universités) Satisfaits au niveau matériel Insatisfaits

(62)

YOUGOSLAVIE

(67)

Satisfaits au matériel Insatisfaits

niveau

(44)

77

14

7

2

(18)

(11)

(3)

(2)

(2)

(15) 38

(6) 33

(1) 16

13

(22) (45)

Si l'on se réfère aux réponses faites en France, les résultats ne surprennent pas, étant donné le nombre des difficultés rencontrées et de critiques formulées au sujet des contacts, des problèmes financiers et autres. L'opinion des étudiants vis-à-vis des Français s'en

Rôle de l'information

167

ressent (tableau IX-2). L'étudiant satisfait à tous les niveaux ou sur le plan des études et des contacts devient en général plus favorable aux Français. Celui qui n'est content que de ses études a une opinion plus défavorable sur le pays hôte. H semble ainsi que la diversité des situations dans lesquelles les étudiants rencontrent des difficultés joue un rôle dans le changement de leur opinion sur les autochtones. Celle-ci ne dépend pas seulement du nombre des difficultés, mais de leur présence répétée dans des domaines aussi différents que les relations humaines et la situation matérielle. Le fait que tantôt la moitié des étudiants en France, tantôt le quart d'entre eux en Yougoslavie soient en définitive satisfaits de leur séjour et le sens défavorable dans lequel évolue leur opinion visà-vis des autochtones posent le problème des améliorations qu'il faudrait apporter dans la condition de ces étudiants. Le tableau qui va suivre indique le rapport qui existe entre la satisfaction exprimée au sujet du séjour à l'étranger, d'une part, et l'opinion sur le pays hôte, d'autre part. TABLEAU I X - 2

Satisfaction globale et changement d'opinion envers les Français Etudiants satisfaits (36) %

Même opinion Plus favorables Moins favorables

17 64 19

Satisfaits dans Satisfaits les études et les seulement dans relations les études humaines (34) (37) % % 24 56 21

24 19 57

2. RÔLE DE L'INFORMATION Les réclamations faites par les étudiants dans chacun des pays considérés, recouvrent les trois aspects de leur séjour (études, relations humaines, situation matérielle). Tout en reconnaissant les efforts faits

168

Satisfaction générale et rôle de

l'information

pour leur venir en aide, les facilités qui leur sont accordées et la bonne volonté des services universitaires, les étudiants regrettent l'inefficacité de ces efforts ou encore et avant tout l'absence presque entière d'informations. En effet, lorsqu'on leur demandait s'ils avaient obtenu avant leur arrivée des renseignements sur le pays où ils allaient séjourner, plus de 60 % des étudiants répondaient, dans chaque pays, par l'affirmative (tableau IX-3). Les étudiants qui devaient venir en France étaient le mieux informés (86 %) soit sur les relations sociales et les conditions matérielles (75 % environ), alors que sur ces deux derniers points seul la moitié des étudiants des autres pays étaient renseignés. TABLEAU I X - 3

Informations

obtenues avant l'arrivée

AUTRICHE

FRANCE

PAYS-BAS

YOUGOSLAVIE

(277)

(153)

(62)

(69)

67

78

53

72

50

75

37

50

*

76 81

47 60

44 70

%

Etudiants ayant reçu des informations sur la vie universitaire les relations humaines les conditions matérielles les trois secteurs

67

%

%

%

* Donnée manquante.

Cependant avant le fait même d'être informé ou non, ce qui est mis en cause ici, c'est l'exactitude et la valeur des renseignements obtenus concernant les études, les relations humaines et la situation matérielle. 2.1.

INFORMATIONS SUR LA VIE

UNIVERSITAIRE

La plupart du temps, les informations reçues, les expectatives des étudiants correspondent avec ce qu'ils trouvent réellement. Cela est vrai pour tous les pays considérés, sauf la Yougoslavie où 45 % des étudiants ont trouvé la situation universitaire moins bonne qu'ils ne l'avaient pensée.

Rôle de

l'information

169

Ces informations leur ont été fournies par des organismes officiels, mais aussi par des parents, des amis. Les étudiants, en Autriche et en France surtout, déclarent qu'ils ont été agréablement surpris par l'Université française ou autrichienne, par la qualité de l'enseignement, les facilités mises à leur disposition, les contacts universitaires *. «C'est une comparaison subjective : par rapport à chez moi, c'est mieux.» MAROC.

«Difficile, mais bonne formation.» MADAGASCAR.

«On fait un bon travail.» CONGO.

«Au niveau d'une thèse, bonnes conditions.» GHANA.

«Excellente formation. Bons professeurs.» TOGO.

Les étudiants qui trouvent la situation universitaire moins bonne que celle à laquelle ils s'attendaient, évoquent les difficultés à l'université, la mauvaise qualité de l'enseignement, les mauvaises conditions de travail, le système universitaire différent de celui de leur pays et le manque de contact avec les professeurs et les étudiants ; quelques-uns encore mentionnent les difficultés matérielles, les conditions de vie difficiles et le préjugé racial qui, pour la France, est presque uniquement mentionné par des Nord-Africains : «Manque d'instruments de travail.» GHANA.

«Trop de gallo-centrisme.» TOGO.

«On m'avait donné des renseignements pour touristes et non pour étudiants.» DAHOMEY.

* Les exemples cités ici proviennent de l'échantillon français.

170

Satisfaction générale et rôle de l'information

«Je m'attendais à trouver une formation pratique, alors qu'elle reste toujours théorique.» TUNISIE.

«Difficultés d'inscriptions, les fonctionnaires nous reçoivent mal, en particulier les étudiants N.A., par exemple au Centre C.O.P.A.R.» MAROC.

«Désillusion : tout cela c'est de la littérature.» TUNISIE.

«D y a trop d'élèves, on n'est pas assez suivi.» BRÉSIL.

TABLEAU I X - 4

Informations et satisfaction au niveau universitaire » • La situation est Jiugee .„ ? meilleure ou aussi , , * bonne que prevue * N % T

AUTRICHE

(38)

Satisfaits Insatisfaits FRANCE

La situation est 1jugée 6 . . aussi mauvaise ou , moins bonne que prévue N % (100)

95 5 (57)

Satisfaits Insatisfaits

84 16 (31)

96 4

84 16

PAYS-BAS (Univer-

sités) Satisfaits Insatisfaits

(25) 96 4

(10) (7) (3)

* Les étudiants disent que la situation est «aussi bonne» que prévue, lorsqu'ils avaient reçu des informations optimistes et qu'elles avaient été confirmées au cours de leur séjour. Par une situation «aussi mauvaise» que prévue, ils entendent la confirmation d'attentes pessimistes.

Rôle de

l'information

171

La valeur des informations qu'ils ont obtenues, la manière dont elles coïncident avec la réalité, jouent un rôle dans le jugement porté sur l'expérience universitaire (tableau IX-4). En effet, les quelques étudiants qui se disent insatisfaits de leurs études ont, presque dans tous les cas, été déçus dans leur attente, donc mal informés. Mais il est à noter qu'en Autriche comme aux Pays-Bas, les étudiants contents de leur vie universitaire déclarent, eux aussi, avoir été mal informés la plupart du temps. Les informations incomplètes erronées ou pessimistes et confirmées déclenchent une attitude défavorable envers les habitants du pays de séjour (tableau IX-5). En Autriche, comme en France, des attentes réalisées de manière satisfaisante aboutissent à une attitude favorable envers le pays hôte, des expectatives non réalisées à une opinion défavorable.

TABLEAU IX-5

Informations

obtenues

et changement

La situation universitaire est jugée aussi bonne ou meilleure que prévue N AUTRICHE

PAYS-BAS

Même opinion Plus favorable Moins favorable

N

%

43

30

46

22

11

49 (33)

(58)

Même opinion Plus favorable Moins favorable

La situation universitaire est jugée aussi mauvaise ou moins bonne que prévue

(96)

(37)

Même opinion Plus favorable Moins favorable FRANCE

%

d'opinion

29

15

47

27

24

58