Soins infirmiers : pédiatrie. [2e édition. ed.]
 9782765056409

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Le classique de

WONG

SOINS INFIRMIERS

PÉDIATRIE

2e ÉDITION

Marilyn J. HOCKENBERRY • David WILSON • Cheryl C. RODGERS ÉDITION FRANÇAISE DIRECTION SCIENTIFIQUE France Dupuis Linda Massé DIRECTION PÉDAGOGIQUE Yvon Brassard avec la collaboration de Hélène Gousse et Éric Lavertu

TABLE DES MATIÈRES SOMMAIRE

PARTIE 1

PARTIE 5

Inrmière, enfant et famille

CHAPITRE

1 2 3

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

CHAPITRE

Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté          

2

Inuences socioculturelles sur les soins de santé                                         

40

Croissance, développement et promotion de la santé                                      

64

13

Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation                             526

14

Techniques de soins                            564

PARTIE 6

Troubles liés aux systèmes

CHAPITRE

PARTIE 2

Évaluation clinique

CHAPITRE

4 5

Examen clinique : anamnèse et examen physique                                         130

Troubles liés au système respiratoire        636

16

Troubles liés au système cardiovasculaire    724

17

Troubles liés au système gastro-intestinal    808

18

Troubles liés aux systèmes hématologique et immunitaire               888

19

Troubles liés au système génito-urinaire    926

20

Troubles liés au système nerveux            972

21

Troubles liés au système endocrinien        1040

22

Troubles liés au système tégumentaire      1104

23

Troubles liés aux systèmes musculosquelettique et articulaire           1166

24

Troubles liés aux systèmes neuromusculaire et musculaire               1230

Évaluation et traitement de la douleur      202

PARTIE 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

CHAPITRE

6

Problèmes de santé du nourrisson           242

7

Problèmes de santé du trottineur et de l’enfant d’âge préscolaire               276

8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent             306

9

Maladies infectieuses et immunisation      364

PARTIE 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

CHAPITRE

10

15

Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie                                 398

11

Déciences intellectuelles et déciences sensorielles                                      434

12

Enfant atteint de cancer                       468

ANNEXE A

Normes de croissance de l’OMS pour le Canada       1277 ANNEXE B

Valeurs normales des résultats d’analyses de laboratoire courantes                                  1285 ANNEXE C

Valeurs normales des signes vitaux                     1292

SOINS INFIRMIERS

PÉDIATRIE

2e ÉDITION

SOINS INFIRMIERS

PÉDIATRIE

2e ÉDITION

Marilyn J. HOCKENBERRY, PhD, RN, PPCNP-BC, FAAN David WILSON, MS, RNC-NIC (deceased) Cheryl C. RODGERS, PhD, RN, CPNP, CPON ÉDITION FRANÇAISE DIRECTION SCIENTIFIQUE France Dupuis Linda Massé DIRECTION PÉDAGOGIQUE Yvon Brassard avec la collaboration de Hélène Gousse et Éric Lavertu

Soins infirmiers Pédiatrie, 2e édition © 2017 by Elsevier Inc. (ISBN 978-0-323-35316-8) Traduction et adaptation de : Wong’s Essentials of Pediatric Nursing 10th de Marilyn J. Hockenberry, PhD, RN, PPCNP-BC, FAAN, David Wilson, MS, RNC-NIC and Cheryl C. Rodgers, PhD, RN, CPNP, CPON This edition of Wong’s Essentials of Pediatric Nursing 10th by Marilyn J. Hockenberry, PhD, RN, PPCNPBC, FAAN, David Wilson, MS, RNC-NIC and Cheryl C. Rodgers, PhD, RN, CPNP, CPON is published by arrangement with Elsevier Inc. © 2019 TC Média Livres Inc. © 2012 Chenelière Éducation inc. Conception éditoriale : Benoit Bordeleau et André Vandal Édition : Johanne Losier, Gabriel Tremblay-Gaudette, Sophie Dumoulin, Nathalie Jalabert et Laure Peinchina Coordination : Frédérique Coulombe, Mélanie Nadeau et Julie Garneau Recherche iconographique : Rachel Irwin Traduction partielle de la 2 e édition : Christiane Foley et Geneviève Ross Traduction de la 1re édition : Jean Blaquière, Valérie Cauchemez, Marie-Andrée Dionne, Marie Dumont, Christiane Foley, Lucie Leblanc, Anne-Marie Mesa, Lucie Morin, Julie Paradis, Ethel Perez, Mélissa Perez, Laurence Perron, Marie Préfontaine et Geneviève Ross Révision linguistique : Chantale Bordeleau Correction d’épreuves : Marie Le Toullec, Michèle Levert (Zérofôte), Francine Raymond et Catherine Baron Conception graphique : Pige Communication Conception de la couverture : Josée Brunelle Impression : TC Imprimeries Transcontinental Coordination éditoriale du matériel complémentaire Web : Sophie Dumoulin et Julie Cadotte Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada Hockenberry, Marilyn J. [Wong’s essentials of pediatric nursing. Français] Pédiatrie / auteurs de l’édition originale, Marilyn J. Hockenberry, David Wilson, Cheryl C. Rodgers ; direction scientifique, France Dupuis, Linda Massé. 2e édition. Traduction de la 10e édition de : Wong’s essentials of pediatric nursing. Comprend des références bibliographiques et un index. ISBN 978-2-7650-5640-9 1. Soins infirmiers en pédiatrie. i. Wilson, David, 1950 août 25-2015, auteur. ii. Rodgers, Cheryl C., auteur. iii. Dupuis, France, 1958-, éditeur intellectuel. iv. Massé, Linda, 1963-, éditeur intellectuel. v. Titre. vi. Titre : Wong’s essentials of pediatric nursing. Français. RJ245.W4214 2018

618.92’00231

Des marques de commerce sont mentionnées ou illustrées dans cet ouvrage. L’Éditeur tient à préciser qu’il n’a reçu aucun revenu ni avantage conséquemment à la présence de ces marques. Celles-ci sont reproduites à la demande de l’auteur en vue d’appuyer le propos pédagogique ou scientifique de l’ouvrage.

La pharmacologie évolue continuellement. La recherche et le développement produisent des traitements et des pharmacothérapies qui perfectionnent constamment la médecine et ses applications. Nous présentons au lecteur le contenu du présent ouvrage à titre informatif uniquement. Il ne saurait constituer un avis médical. Il incombe au médecin traitant et non à cet ouvrage de déterminer la posologie et le traitement appropriés de chaque patient en particulier. Nous recommandons également de lire attentivement la notice du fabricant de chaque médicament pour vérifier la posologie recommandée, la méthode et la durée d’administration, ainsi que les contre-indications. Les cas présentés dans les mises en situation de cet ouvrage sont fictifs. Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant déjà existé n’est que pure coïncidence. TC Média Livres Inc., Elsevier, les auteurs, les adaptateurs et leurs collaborateurs se dégagent de toute responsabilité concernant toute réclamation ou condamnation passée, présente ou future, de quelque nature que ce soit, relative à tout dommage, à tout incident – spécial, punitif ou exemplaire – y compris de façon non limitative, à toute perte économique ou à tout préjudice corporel ou matériel découlant d’une négligence, et à toute violation ou usurpation de tout droit, titre, intérêt de propriété intellectuelle résultant ou pouvant résulter de tout contenu, texte, photographie ou des produits ou services mentionnés dans cet ouvrage.

Le matériel complémentaire mis en ligne dans notre site Web est réservé aux résidants du Canada, et ce, à des fins d’enseignement uniquement.

C2018-941098-1 L’achat en ligne est réservé aux résidants du Canada.

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Gouvernement du Québec – Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres – Gestion SODEC.

Dédicace Nous dédions la 10 e édition du présent ouvrage à David Wilson, décédé le 7 mars 2015, après une longue bataille menée contre le cancer. David a été le coauteur des manuels de sciences inrmières Wong pendant plus de 15 ans. Il était connu à titre d’inrmier clinicien et d’inrmier enseignant expert. Il a occupé son dernier poste de clinicien dans les Services de santé St. Francis à Tulsa (Oklahoma), où il a œuvré au sein du Children’s Day Hospital en tant que coordonnateur des soins pédiatriques avancés. Les étudiants et les professeurs de la faculté ont tous reconnu les contributions de David aux manuels Wong pendant de nombreuses années. Il était un extraordinaire enseignant et mentor auprès des étudiants en soins inrmiers ; son souci de l’excellence clinique a toujours été très présent dans son travail. Les personnes ayant participé à la production des manuels et ayant eu la chance de travailler avec David connaissent l’importance du rôle dirigeant qu’il a joué en enseignement des sciences inrmières auprès des étudiants et de ses collègues. C’est grâce à son expertise clinique que tous les manuels Wong se sont toujours distingués par leur pertinence et leur contenu fondé sur des données probantes. David a été l’exemple même de l’excellence en soins inrmiers cliniques. Son sens de l’humour, sa loyauté envers ses amis et ses collègues et son appui indéfectible vont manquer aux personnes l’ayant bien connu, ainsi qu’à toutes celles qui ont étroitement collaboré avec lui pour la production des manuels Wong au l des ans. Mais c’est surtout son amitié qui va nous manquer : il était toujours prêt à donner son soutien et ses encouragements. Nous avons perdu un inrmier extraordinaire qui n’a ménagé aucun effort pendant toutes ces années pour améliorer les soins donnés aux enfants et aux familles. Le souvenir de David restera gravé à jamais dans notre mémoire à tous et toutes.

AVANT-PROPOS DE L’ÉDITION ORIGINALE Depuis sa publication initiale, il y a près de 40 ans, Essentials of Pediatric Nursing est demeuré un ouvrage de référence incontournable en soins inrmiers pédiatriques. Un tel succès nous a conféré l’immense responsabilité de mériter votre soutien lors de la parution de chaque nouvelle édition. C’est ainsi que, grâce à vos encouragements et à vos commentaires constructifs, nous sommes en mesure de vous proposer cette dixième édition, revue en profondeur. Le manuel s’appuie sur l’héritage de Donna Wong et David Wilson, nos chers collègues. Nous apprécions au plus haut point leur contribution et chérissons le souvenir de leur recherche de l’excellence dans tout le travail qu’ils ont accompli. Dans ce but, Marilyn J. Hockenberry, directrice d’édition, Cheryl C. Rodgers, coéditrice, et un grand nombre d’inrmières et inrmiers experts et de spécialistes multidisciplinaires ont revu, réécrit ou rédigé des parties portant sur des domaines caractérisés par leur évolution rapide et complexe, tels que les soins inrmiers communautaires, le développement, l’immunisation, la génétique, les soins à domicile, l’évaluation et le traitement de la douleur, les soins pour les nourrissons, les questions de santé chez les adolescents, les soins en n de vie et de nombreux troubles pédiatriques. Les éléments de l’ouvrage ayant reçu une approbation générale ont été soigneusement maintenus : les données fondées sur les travaux de recherche les plus récents, l’accent mis sur la famille et le milieu de vie, la structure logique et conviviale du texte. Nous avons tenté de satisfaire les demandes croissantes des professeurs et des étudiants voulant enseigner et apprendre dans un contexte qui change rapidement. Ce manuel encourage les étudiants à faire preuve d’esprit critique et sert de référence pour les inrmières et inrmiers qui travaillent en milieu clinique.

REMERCIEMENTS Nous exprimons notre reconnaissance à Donna Wong, notre mentore et collègue dont le soutien a fait de nous de meilleures inrmières pédiatriques. Nous avons eu la chance de travailler pendant de nombreuses années avec David Wilson, coéditeur de multiples éditions précédentes. Il nous a beaucoup manqué pour la production du présent manuel. Nous sommes également reconnaissantes à tous les membres de la faculté des sciences inrmières, aux praticiens et aux étudiants pour leurs divers commentaires, leurs recommandations et leurs suggestions. Nous remercions plus particulièrement les collaborateurs et les nombreux relecteurs pour leurs critiques constructives, leurs suggestions pertinentes et l’expertise clinique qu’ils ont mise au service de la présente édition, laquelle n’aurait pu voir le jour sans leur dévouement constant. Aucun livre ne saurait être publié sans le travail acharné et la persévérance du personnel chargé de l’édition. S’il est impossible de nommer tous les membres du personnel d’Elsevier ayant déployé des efforts exceptionnels pour la publication de cet ouvrage, nous tenons à remercier particulièrement Sandra Clark et Heather Bays pour leur appui et leur recherche permanente de l’excellence. Nous exprimons nos plus chaleureux remerciements à Heather Bays, dont l’engagement est si vivement apprécié et a été si bénéque aux nombreuses éditions des manuels Wong. Enn, nous remercions nos familles et nos enfants, pour leur amour si bien partagé et leur patience innie, qui nous permettent de consacrer une si grande partie de notre vie à nos carrières respectives. Les enfants nous ont donné l’occasion d’observer directement le monde merveilleux de l’enfance. Marilyn J. Hockenberry Cheryl C. Rodgers

Avant-propos de l’édition originale

VII

AVANT-PROPOS DE L’ÉDITION FRANÇAISE Soins inrmiers – Pédiatrie est la version française du classique de Donna Lee Wong, Essentials of Pediatric Nursing, dont la 10e édition a été rédigée par Marilyn J. Hockenberry, David Wilson et Cheryl C. Rodgers. Une équipe d’expertes, composée de chercheuses, d’enseignantes, de praticiennes et d’universitaires, a travaillé à l’adaptation de cette nouvelle édition an d’en assurer la rigueur scientique et sa conformité à l’état actuel des connaissances et de la pratique en milieu clinique québécois et canadien. Fidèle à l’orientation donnée à toute la collection Soins inrmiers, Pédiatrie accorde une importance fondamentale au développement du jugement clinique. Résolument axé sur l’apprentissage des étudiantes, l’ouvrage propose un ensemble de stratégies et de ressources pédagogiques enrichies qui faciliteront l’assimilation des connaissances et leur transfert en milieu de pratique. Ainsi, l’équipe pédagogique a produit des situations de santé variées, que ce soit au moyen des capsules de jugement clinique, des analyses de situation de santé en n de chapitre, des situations d’apprentissage du Guide d’études ou des études de cas évolutives en ligne. Cette édition entièrement renouvelée constitue un outil d’enseignement et d’apprentissage déjà apprécié par des centaines d’enseignantes et des milliers d’étudiantes qui, au l des ans, ont adopté les ouvrages de cette collection phare.

REMERCIEMENTS La 2 e édition de l’ensemble didactique Soins inrmiers – Pédiatrie est le résultat des efforts et de la collaboration d’une imposante équipe d’adaptatrices et de consultantes, sous la conduite de deux directrices scientiques, qui a su bâtir un ouvrage adapté aux besoins des étudiantes et des enseignantes du Québec et du Canada sur la base d’une œuvre originale réputée. À ces personnes s’ajoute l’équipe de direction pédagogique. Sans sa connaissance approfondie du milieu des soins inrmiers québécois et de l’enseignement, cette réalisation n’aurait pu être possible. Merci également à toutes les évaluatrices, participantes aux groupes de discussion et consultantes des quatre coins du Québec qui ont permis de rehausser encore davantage la qualité de l’ouvrage. De même, le professionnalisme d’une équipe éditoriale compétente déterminée à produire un ouvrage qui répond aux attentes des enseignantes et des étudiantes était indispensable à la production de cette nouvelle édition. Chenelière Éducation tient à remercier chaleureusement toutes les personnes qui, par leur talent, leur intelligence, leurs efforts et leur rigueur, ont rendu possible la publication de cet ouvrage et en ont fait le manuel en soins inrmiers pédiatriques le plus utilisé au Québec.

NOTES DE L’ÉDITEUR Valeurs normales d’examens paracliniques Les valeurs indiquées dans les ouvrages de la collection Soins inrmiers sont fournies à titre indicatif et peuvent varier d’un établissement de santé à l’autre, selon les méthodes et les appareils utilisés. Référez-vous à votre établissement pour obtenir les valeurs de référence qui s’y appliquent.

Techniques et méthodes de soins Les techniques et les méthodes de soins présentées dans les ouvrages de la collection Soins inrmiers s’appuient sur des résultats probants issus de la recherche et sont conformes aux lignes directrices et aux normes édictées par l’Ordre des inrmières et inrmiers du Québec et par des organisations reconnues en santé. Il est à noter que certains établissements peuvent en préconiser d’autres en fonction des usages et des études sur lesquelles ils s’appuient.

VIII

Avant-propos de l’édition française

DIRECTION

Terri L. Brown, MSN, RN, CPN Assistant Director Clinical Outcomes & Data Support Texas Children’s Hospital Houston, Texas

Marilyn J. Hockenberry, PhD, RN, PPCNP-BC, FAAN Bessie Baker Professor of Nursing and Professor of Pediatrics Associate Dean for Research Affairs Chair, Duke Institutional Review Board Duke University Durham, North Carolina

Meg Bruening, PhD, MPH, RD Assistant Professor School of Nutrition and Health Promotion College of Health Solutions Arizona State University Phoenix, Arizona

David Wilson, MS, RNC-NIC (deceased) Staff Children’s Hospital at Saint Francis Tulsa, Oklahoma

Rosalind Bryant, PhD, RN, PPCNP-BC Pediatric Nurse Practitioner Texas Children’s Hospital ; Instructor Baylor College of Medicine Houston, Texas

ÉQUIPE DE RÉDACTION DE L’ÉDITION ORIGINALE

Cheryl C. Rodgers, PhD, RN, CPNP, CPON Assistant Professor Duke University School of Nursing Durham, North Carolina

COLLABORATION Rose U. Baker, PhD, PMHCNS-BC Assistant Lecturer School of Nursing College of Health Professions Akron, Ohio Annette L. Baker, RN, BSN, MSN, CPNP Nurse Practitioner Cardiovascular Program Auburndale, Massachusetts Raymond Bared, MD, PhD Associate Professor of Pediatrics and Christian Philosophy ; Director Pediatric Quality of Life and Palliative Care Duke University Durham, North Carolina Amy Barry, RN, MSN, PNP-BC Pediatric Nurse Practitioner Leukemia and Lymphoma Service Aac Cancer and Blood Disorders Centers Atlanta, Georgia Heather Bastardi, MSN, BSN, PNP Heart Failure/Heart Transplant Coordinator Boston Children’s Hospital Boston, Massachusetts Debra Brandon, PhD, RN, CNS, FAAN Associate Professor School of Nursing Duke University Durham, North Carolina

Cynthia J. Camille, MSN, RN, CPNP, FNP-BC Pediatric Nurse Practitioner Pediatric Urology Duke University Health System Durham, North Carolina Patricia M. Conlon, MS, APRN, CNS, CNP Pediatric Clinical Nurse Specialist ; Assistant Professor of Nursing Mayo Clinic Children’s Center Rochester, Minnesota Erin Connelly, APRN, CPNP Aac Cancer & Blood Disorders Center ; Children’s Healthcare of Atlanta Emory University Atlanta, Georgia Martha R. Curry, MS, RN, CPNP Instructor Immunology, Allergy, and Rheumatology Department of Pediatrics Baylor College of Medecine Texas Children’s Hospital Houston, Texas Amy Delaney, RN, MSN, CPNP-AC/P Pediatric Nurse Practitioner Boston Children’s Hospital Boston, Massachusetts Sharron L. Docherty, PhD, PNP-BC, FAAN Associate Professor School of Nursing ; Associate Professor Department of Pediatrics ; Director Center for Excellence in Cognitive/Affective Symptom Science Duke University Durham, North Carolina Équipe de rédaction de l’édition originale

IX

Angela Drummond, MS, APRN, CPNP Pediatric Nurse Practitioner-Orthopedics Gillette Children’s Speciality Healthcare St. Paul, Minnesota Jan M. Foote, DNP, ARNP, CPNP, FAANP Clinical Associate Professor The University of Iowa College of Nursing Iowa City, Iowa Pediatric Nurse Practitioner Blank Children’s Hospital Des Moines, Iowa Quinn Franklin, MS Manager Child, Adolescent, and Young Adult Life Program The University of Texas MD Anderson Children’s Cancer Hospital Houston, Texas Debbie Fraser, MN, RNC-NIC Associate Professor Faculty of Health Disciplines Athabasca University Athabasca, Alberta, Canada ; Advanced Practice Nurse, NICU St. Boniface General Hospital Winnipeg, Manitoba, Canada Teri Lavenbarg, MSN, APRN, PPCNP-BC, FNP-BC, CDE Nurse Practitioner Medical Center University of Kansas Kansas City, Kansas Patricia McElfresh, MN, RN, PNP-BC Pediatric Nurse Practitioner Hematology Oncology Children’s Healthcare of Atlanta Atlanta, Georgia Tara Merck, CPNP Director of Advanced Practice Providers Children’s Specialty Group Medical College of Wisconsin Milwaukee, Wisconsin Mary A. Mondozzi, MSN, BSN, RN Burn Center Education/Outreach Coordinator Akron Children’s Hospital The Paul and Carol David Foundation Burn Institute Akron, Ohio Rebecca A. Monroe, MSN, RN, CPNP Certied Pediatric Nurse Practitioner Medical City Children’s Hospital Urgent Care Dallas, Texas

X

Équipe de rédaction de l’édition originale

Kim Mooney-Doyle, PhD, RN, CPNP-AC Postdoctoral Research Fellow School of Nursing University of Pennsylvania Philadelphia, Pennsylvania Patricia O’Brien, MSN, RN, CPNP-AC Nurse Practitioner Cardiovascular Program Boston Children’s Hospital Boston, Massachusetts Cynthia A. Prows, MSN, CNS, FAAN Clinical Nurse Specialist, Genetics Cincinnati Children’s Hospital Medical center Cincinnati, Ohio Patricia A. Ring, MSN, RN, CPNP Pediatric Nurse Practitioner Pediatric Nephrology Children’s Hospital of Wisconsin Milwaukee, Wisconsin Maureen Sheehan, MS, CPNP Pediatric Nurse Practitioner Child Neurology and Epilepsy Stanford Children’s Health Palo Alto, California ; Clinical Faculty (Volunteer) School of Nursing University of California, San Francisco San Francisco, California Anne Feierabend Stanton, MSN, APRN, PCNS-BC Pediatric Clinical Nurse Specialist University of Kansas Medical Center Kansas City, Kansas Barbara J. Wheeler, RN, BN, MN, IBCLC Neonatal Clinical Nurse Specialist & Lactation Consultant St. Boniface General Hospital ; Professional Afliate Manitoba Centre for Nursing & Health Research ; Instructor II College of Nursing University of Manitoba e-Health Services Winnipeg, Manitoba, Canada Kristina D. Wilson, PhD, CCC-SLP Senior Speech Language Pathologist and Clinical Research Texas Children’s Hospital ; Adjunct Assistant Professor Division of Plastic Surgery Baylor College of Medecine Houston, Texas

CONSULTATION Sharon Anderson, MSN, NNP-BC, APNG Instructor School of Nursing Rutgers, The State University of New Jersey Brigit M. Carter, PhD, RN, CCRN Assistant Professor; Project Director Health Equity Academy Duke University School of Nursing Durham, North Carolina Enrique Chaves-Carballo, MD Clinical Professor, Departments of Pediatrics and History and Philosophy of Medicine The University of Kansas Medical Center Kansas City, Kansas Elizabeth Conoley, RN, MSNEd, CPN Assistant Professor Brenau University School of Nursing Gainesville, Georgia Ciara Culhane, MS, RN-BC, CPN Professional Development Specialist Children’s Hospital Colorado Aurora, Colorado Jacqueline Sayre Dorsey, MS, RN, ANP Assistant Professor Nursing Monroe Community College Rochester, New York Patricia A. Duclos-Miller, MSN, RN, NE-BC Professor Capital Community College Hartford, Connecticut

Kari Gali, DNP, RN, CPN Pediatric Nurse Practitioner Distance Health/MyCare Online Cleveland Clinic Cleveland, Ohio Bonnie Jensen, RN, BSN, MSN Faculty Provo College Provo, Utah Christine B. Kavanagh, RD, MSN, PNP-BC Instructor Nursing Programs School of Health Sciences Pennsylvania College of Technology Williamsport, Pennsylvania Ann Marie McCarthy, RN, PhD, FNASN, FAA Professor & Associate Dean for Research College of Nursing The University of Iowa Iowa City, Iowa Carmella Mikol, PhD, CPNP, CNE, RN-BC Instructor College of Lake Country Grayslake, Illinois Deborah A. Roberts, MSN, EdD Professor and Chair Department of Nursing Sonoma State University Rohnert Park, California Nicole Shonka, MS, RN-BC, CPN Professional Development Specialist Children’s Hospital Colorado Aurora, Colorado

Stephanie C. Evans, PhD, APRN, PNP Assistant Professor, Nursing Harris College of Nursing and Health Sciences Texas Christian University Fort Worth, Texas

Équipe de rédaction de l’édition originale

XI

ÉQUIPE DE RÉDACTION DE L’ÉDITION FRANÇAISE direction scientifique France Dupuis, Ph. D. (sciences inrmières) Professeure agrégée à la Faculté des sciences inrmières de l’Université de Montréal, elle s’intéresse à la pratique inrmière auprès de familles ayant un adolescent atteint d’un problème de santé chronique, ainsi qu’à l’échange de connaissances dans ce domaine. Linda Massé, inf., M. Sc. A., L.L.M., CSIP(C) Détentrice d’une maîtrise en sciences inrmières, d’une maîtrise en droit de la santé et d’une certication en soins critiques pédiatriques de l’Association des inrmières et inrmiers du Canada, elle a obtenu le prix Gustav Levinshi 2016 pour l’excellence de ses soins inrmiers. Elle est professeure associée et inrmière directrice du programme d’inrmière praticienne spécialisée en pédiatrie à l’École des sciences inrmières Ingram de l’Université McGill. Ses fonctions d’inrmière en pratique avancée aux soins intensifs pédiatriques de l’Hôpital de Montréal pour enfants englobent des soins directs aux enfants et à leur famille, l’enseignement aux familles et aux inrmières et l’élaboration de protocoles de soins.

direction pédagogique Yvon Brassard, B. Sc., M. Éd., D.E. Pendant près de 30 ans, il a œuvré dans le milieu de l’enseignement des soins inrmiers au niveau collégial. Il a également donné de nombreuses conférences et activités de formation sur la rédaction des notes d’évolution au dossier, sujet sur lequel il a écrit deux volumes. Auteur d’un ouvrage sur les méthodes de soins, puis adaptateur, il assume depuis de nombreuses années la direction pédagogique de la collection Soins inrmiers de Chenelière Éducation ainsi que des guides d’études et des activités interactives qui l’accompagnent. Hélène Gousse, inf., B. Sc. Inrmière depuis 35 ans, elle détient un baccalauréat en sciences inrmières ainsi qu’un certicat en santé communautaire. Tôt dans sa carrière, elle se dirige vers la santé communautaire, en CLSC, puis au sein d’un organisme à but non lucratif. Pendant 17 ans, elle a été enseignante en soins inrmiers au Cégep de Saint-Jérôme, au programme initial et à la formation continue. Elle fait partie de l’équipe de direction pédagogique des ouvrages de la collection Soins inrmiers de Chenelière Éducation. Éric Lavertu, inf., B. Sc., M. Éd. D’abord inrmier en cardiologie, il se tourne vers l’enseignement en 2001. Professeur engagé, il s’intéresse au développement du jugement clinique des inrmières. Son mémoire de maîtrise propose un outil pour évaluer la pensée critique chez les étudiantes durant les stages en milieu clinique. En plus de collaborer à l’adaptation de nombreux manuels en soins inrmiers, il a donné diverses formations continues aux professeures en soins inrmiers de différents cégeps et a présenté des ateliers dans plusieurs colloques. Il fait partie de l’équipe de direction pédagogique des ouvrages de la collection Soins inrmiers de Chenelière Éducation. Il a contribué à la mise en place du Centre S, un centre de simulation d’immersion clinique au Cégep de Sainte-Foy.

XII

Équipe de rédaction de l’édition française

ADAPTATION Marie Antonacci, inf., B. Sc. Détentrice d’un baccalauréat en sciences inrmières et d’un diplôme d’études collégiales en acupuncture, elle cumule plus de 37 années d’expérience en soins inrmiers, dont la majorité en tant qu’assistante inrmière gestionnaire aux soins intensifs pédiatriques de l’Hôpital de Montréal pour enfants. Elle a participé au développement de protocoles, au processus d’approbation des médicaments, à l’enseignement en soins inrmiers, à la promotion de programmes d’éducation et à la coordination de services psychosociaux pour les familles. Dalila Benhaberou-Brun, B. Sc. inf., B. Sc., M. Sc. Inrmière diplômée d’État (IDE) de France en 1988, elle obtient ensuite un baccalauréat en sciences de l’Université de Montréal, puis une maîtrise en sciences biomédicales de cette même université. Elle a œuvré comme inrmière et coordonnatrice en recherche clinique au Centre universitaire de santé McGill. Depuis 2005, elle est rédactrice indépendante et publie des articles et des livres sur des sujets cliniques variés. Denis Blais, inf., B. Sc. Inrmier clinicien en maladies infectieuses et tuberculose, il a obtenu un baccalauréat en sciences inrmières à l’Université de Montréal en 1993. Il pratique depuis au CHU Sainte-Justine de Montréal, où il coordonne la clinique de consultation externe des maladies infectieuses et de tuberculose depuis 1999. Il a collaboré au projet de recherche sur les compétences des inrmières des unités d’hospitalisation du CHU Sainte-Justine en vaccination en 2001. Il a également créé un groupe de travail sur le projet de loi no 90 et élaboré un protocole de vaccination chez les enfants atteints de cancer (2011) et chez les greffés d’organe solide (2014). Anne Choquette, inf., M. Sc. Titulaire d’une maîtrise en sciences inrmières (option formation) de l’Université de Montréal, elle possède également une certication en soins pédiatriques oncologiques (CPON) de la Oncology Nursing Certication Corporation. Ses fonctions d’inrmière en pratique avancée au sein de l’équipe d’hématologie-oncologie de l’Hôpital de Montréal pour enfants du Centre universitaire de santé McGill comprennent l’expertise clinique, l’enseignement, l’évaluation et la recherche dans les domaines liés aux maladies hématologiques ou au cancer chez les enfants. Stéphanie Duval, inf., M. Sc. Détentrice d’une maîtrise en sciences inrmières de l’Université du Québec à Trois-Rivières, elle est cadre-conseil en sciences inrmières à la Direction des soins inrmiers du CHU Sainte-Justine depuis 12 ans. Par son rôle transversal, elle gère des projets touchant à la qualité et à la sécurité des soins pour développer la pratique inrmière, comme les normes sur le circuit du médicament, les mesures de contrôle en pédiatrie et les pratiques liées aux accès vasculaires et à l’intraveinothérapie. Raphaèle Ferland-Verry, Dt. P. Diététiste-nutritionniste diplômée de l’Université de Montréal, elle œuvre comme clinicienne à sa clinique privée et en milieu hospitalier dans les domaines de la gastro-entérologie, la psychiatrie, la neurologie, ainsi qu’auprès des femmes enceintes et des nourrissons. Également titulaire d’un baccalauréat en journalisme et forte d’une expérience de six ans comme journaliste en télévision, elle fait de la révision scientique d’articles et d’ouvrages, et donne des formations aux professionnels de la santé, comme les nutritionnistes, les inrmières et les médecins.

Christine Genest, inf., Ph. D. Professeure adjointe à la Faculté des sciences inrmières de l’Université de Montréal, elle est chercheuse au Centre de recherche et d’intervention sur le suicide et les enjeux éthiques de n de vie (CRISE) et chercheuse associée au Centre de recherche de l’Hôpital Rivière-des-Prairies. Elle a travaillé pendant plusieurs années comme inrmière en pédopsychiatrie au CHU Sainte-Justine. Ses champs d’expertise sont la pédopsychiatrie, la prévention du suicide et l’intervention auprès des endeuillés par suicide. Bernard Groleau, inf., B. Sc. N. Inrmier clinicien aux soins intensifs pédiatriques à l’Hôpital de Montréal pour enfants, il a également travaillé en néphrologie, en se spécialisant en greffe rénale pédiatrique. Il est membre de l’équipe d’assistance respiratoire extracorporelle et de l’hémoltration continue de l’Hôpital de Montréal pour enfants. Il est titulaire de deux baccalauréats, l’un en soins inrmiers et l’autre en biologie médicale. Caroline Hachey, inf., B. Sc. Détentrice d’un baccalauréat en science inrmière de l’Université de Moncton, campus de Shippagan, et étudiante à la maîtrise en science inrmière à l’Université de Moncton, elle est également chargée d’enseignement clinique à cette même université. Ses champs de recherche portent sur la douleur des enfants au cours d’une procédure douloureuse. Maude Julien, inf., B. Sc., B. Ed., microprogramme M. Dev. Pharma. Détentrice d’un baccalauréat en sciences inrmières de l’Université de Montréal, d’un baccalauréat en sciences de l’orientation et d’un microprogramme de maîtrise en développement de produits pharmaceutiques de l’Université Laval, elle a été inrmière en obstétrique à l’Hôpital SaintSacrement et au Centre mère-enfant à Québec pendant 10 ans. Après avoir travaillé pendant 7 ans comme inrmière de recherche en santé de la femme et en pneumologie, elle a fondé le Centre de pédiatrie sociale de Lévis (Fondation du Dr Julien) en 2010. Depuis, elle en assure la direction générale et y travaille comme inrmière clinicienne. Chantal Labrecque, inf., M. Sc. Détentrice d’une maîtrise en sciences inrmières, elle est spécialisée dans le domaine des soins de plaies. Actuellement, elle est consultante pour différents établissements d’enseignement et de santé ainsi qu’en entreprise. Chargée de cours depuis plus de 20 ans, elle enseigne la cicatrisation et le soin de plaies dans trois universités québécoises. Elle est aussi auteure de plusieurs publications dans son domaine d’expertise. Line Lamarche, inf., B. Sc., D.E. Détentrice d’un baccalauréat en sciences inrmières de l’Université du Québec à Rimouski, campus de Lévis, et d’un diplôme de deuxième cycle en enseignement collégial de l’Université de Sherbrooke, elle est professeure en pédiatrie au Cégep de Lévis-Lauzon depuis 2002. Ses domaines d’expertise portent sur la pédiatrie générale et la pédagogie. Elle s’intéresse à la pédiatrie sociale, aux problèmes de santé mentale pédiatrique et à la promotion de la santé chez les enfants et les adolescents.

Marie-Andrée Latrémouille, inf., B. Sc. N. Œuvrant à l’Hôpital de Montréal pour enfants depuis 30 ans, elle y est maintenant inrmière clinicienne en gastroentérologie pédiatrique, après avoir obtenu une certication dans ce domaine de l’Association des inrmières et inrmiers du Canada. Elle a auparavant travaillé aux soins intensifs comme inrmière au chevet et assistante gestionnaire, et a fait partie de l’équipe de transport médical pour Skyservice et Hasting Aviation. De plus, elle a travaillé comme professeure de stage en pédiatrie au CHU Sainte-Justine. Sylvie Le May, inf., Ph. D. (sciences cliniques) Professeure titulaire à la Faculté des sciences inrmières de l’Université de Montréal et chercheuse au Centre de recherche du CHU Sainte-Justine, elle est détentrice d’un doctorat en sciences cliniques et d’un postdoctorat en sciences inrmières. Ses principaux champs d’intérêt sont la gestion de la douleur pédiatrique ainsi que l’élaboration et la validation d’échelles de mesure clinique. Caroline Lemay, inf., M. Sc. Chargée de cours et détentrice d’une maîtrise en sciences inrmières de l’Université du Québec à Trois-Rivières, elle s’est spécialisée dans les soins à l’enfant et à la famille. Ses champs d’intérêt et de recherche sont la périnatalité, la petite enfance et la santé communautaire. Stéphanie Lepage, inf., M. Sc. inf. Détentrice d’une maîtrise en sciences inrmières de l’Université McGill, elle est éducatrice au développement professionnel en chirurgie et médecine pédiatrique au Centre de chirurgie d’un jour à l’Hôpital de Montréal pour enfants depuis 15 ans. Elle est impliquée dans l’orientation et la formation continue des inrmières, dans la rédaction de protocoles ainsi que dans l’implantation de différents projets en lien avec la douleur associée aux aiguilles et dans la création de module d’apprentissage en ligne. Evelyne Ouellet, inf., B. Sc. N. Détentrice d’un baccalauréat en sciences inrmières de l’Université McGill, elle a œuvré en chirurgie pédiatrique avant de se joindre à l’équipe de soins palliatifs pédiatriques de l’Hôpital de Montréal pour enfants. À titre d’inrmière clinicienne, elle accompagne les enfants et leur famille, assure une liaison entre le centre hospitalier et la communauté, et joue un rôle dans la formation des inrmières et le développement de protocoles. Elle poursuit une maîtrise en sciences inrmières à l’Université de Montréal. Suzanne Plante, inf., M. Sc. Détentrice d’un baccalauréat en sciences et d’une maîtrise en bioéthique de l’Université de Montréal, elle a œuvré pendant 23 ans au CHU SainteJustine. Elle travaille présentement pour le Cégep Marie-Victorin à titre de formatrice en entreprise. Pierre Verret, inf., M. Sc., CSIO(C) Détenteur d’une maîtrise en sciences inrmières et d’une certication en oncologie, il est chargé d’enseignement et responsable de la formation « examen clinique » à l’Université Laval. Son expertise porte sur l’évaluation des besoins biopsychosociaux des enfants atteints de cancer et de leurs proches, ainsi que sur les effets à long terme de la maladie et des traitements chez les jeunes guéris.

Équipe de rédaction de l’édition française

XIII

RÉVISION SCIENTIFIQUE

Julie Diotte (Cégep Saint-Jean-sur-Richelieu)

Tableaux et encadrés Pharmacothérapie Thanh-Thao Ngo, B. Pharm., M. Sc. (Hôpital de Montréal pour enfants - CUSM)

Chantal Fafard (Cégep de Saint-Hyacinthe) Véronique Fenech (Cégep de Saint-Laurent) Mélanie Giard (Cégep du Vieux-Montréal)

CONSULTATION Nancy Auger (Collège de Valleyeld) Geneviève Barrette (Cégep de Saint-Jérôme) Johanne Beattie (Cégep de Saint-Jérôme) Josée Bonnoyer (Cégep André-Laurendeau) Céline-Michelle Cacchia (Cégep Édouard-Montpetit) Élisabeth Chouinard (Cégep Limoilou) Dominique Darveau (Cégep de Sherbrooke) Marie-Pierre Dionne (Cégep de Sainte-Foy)

XIV

Équipe de rédaction de l’édition française

Nathalie Houle (Cégep de Trois-Rivières) Line Lamarche (Cégep de Lévis-Lauzon) Mélanie Langlois (Cégep de Lévis-Lauzon) Chantale Lemieux (Université de Montréal) Cindy Patry (Université Laval) Bruno Pilote (Cégep de Sainte-Foy) Julie Senécal (Cégep de Saint-Jérôme) Marie-Michèle Tremblay (Cégep Limoilou) Pierre Verret (Université Laval)

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XV

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Jugement

clinique Mathilde, âgée de cinq ans, est hospitalisée pour une fracture du fémur. Selon le calendrier d’immunisation du Québec, elle doit recevoir son vaccin DCaT-VPI. Compte tenu de l’âge de Mathilde, quel est le site de choix pour lui administrer le vaccin ? a) Dans le quadrant supéro-externe du muscle fessier.

clinique

Jugement

b) Dans le centre du muscle deltoïde. Pénélope est âgée de 3 ans. Elle est hospitalisée c) Dans la face latérale externe de la cuisse. à la suite d’une chute qu’elle a faite d’une d) Dans la face externe du balançoire, bras au-dessus du coude. malgré la surveillance de son grand frère. Elle a perdu conscience pendant quelques minutes, mais elle a obtenu un résultat de 15 à l’échelle de Glasgow à son arrivée à l’urgence. Le lendemain, l’évaluation de son état de conscience donne un résultat de 13 à l’échelle de Glasgow. Devriez-vous aviser le médecin de ce résultat ? Justiez votre réponse.

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MAIS SI...

Si le résultat était inverse, c’est-à-dire qu’à l’arrivée de Pénélope, l’échelle de Glasgow était à 13 et qu’elle est maintenant à 15, devriez-vous alors aviser le médecin ?

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Repérez d’un coup d’œil les mises en garde importantes grâce... • aux capsules Alerte clinique

ALERTE CLINIQUE

L’invagination peut mettre la vie des enfants en danger. L’inrmière doit donc connaître les tableaux cliniques de cette affection, observer très attentivement les enfants qui en souffrent et les orienter en vue d’autres examens.

XVI

• aux capsules Pharmacovigilance

PHARMACOVIGILANCE

La diminution des taux sériques de potassium intensie les effets de la digitaline, ce qui augmente le risque de toxicité liée à la digoxine. Il faut donc surveiller étroitement les taux sériques de potassium.

Saisissez les principaux concepts et retenez l’essentiel grâce... • aux cartes conceptuelles

• aux mots clés en ouverture de chapitre

MOTS CLÉS Autonomie                      Deuil                            Euthanasie                      Handicap                       Maladie chronique              Normalisation de la vie familiale   Ordonnance de non-réanimation  

415 430 422 400

telles

par

telles

400 402 422

diagnostiqué par

• aux capsules Ce qu’il faut retenir dont

CE QU’IL FAUT RETENIR

L’évaluation de l’état de conscience demeure l’indicateur premier d’une amélioration ou d’une détérioration de l’état neurologique.

complications fréquentes

Enfant atteint de cancer

traité par

importance

complications fréquentes

CONSEIL CLINIQUE

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Si aucun pansement n’est utilisé, une pochette cousue à l’intérieur d’un t-shirt est utile pour ranger le cathéter enroulé pendant que l’enfant joue.

Et retrouvez rapidement les contenus que vous recherchez grâce... • à la liste des tableaux et encadrés thématiques, page XII • à la liste des techniques et méthodes de soins, page XVI

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Quelles sont les deux bactéries les plus susceptibles d’avoir contaminé les lésions de Pierrot ?

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XVII

LISTE DES TABLEAUX ET ENCADRÉS THÉMATIQUES Développement des habiletés langagières – Encadré 3.1 ........................

Collecte de données

71

Effets néfastes de la fumée secondaire du tabac – Tableau 15.17 ............ 687

Détection d’une allergie au latex – Encadré 24.8........................................ 1253

Entretien du plâtre – Encadré 23.9 ................................................................ 1218

Évaluation d’un symptôme (PQRSTU) – Encadré 4.5 .................................. 143

Fièvre : savoir la reconnaître et la traiter – Encadré 14.4 .......................... 571

Exemples de questions à poser au moment de l’histoire de santé (AMPLE) – Encadré 4.6 ....................................................... 144

Gestion des convulsions fébriles – Encadré 20.11 ..................................... 1010

Modes fonctionnels de santé : préparation à l’hospitalisation et au jour de l’admission – Tableau 13.5........................................... 535 Utiliser la technique PQRSTU pour évaluer la douleur – Encadré 5.3 ............ 211

Critères diagnostiques du DSM-5

Gestion des crises de colère – Encadré 3.13 .............................................. 100 Habitudes de vie et alimentation des enfants de 2 ans et plus atteints de dyslipidémie – Encadré 16.10 ......................................... 780 Hémophilie – Encadré 18.8 ............................................................................. 912 Inculcation des attitudes socialement acceptables chez l’enfant – Tableau 1.2 ..........................................................................

Critères diagnostiques de l’anorexie mentale (Anorexia nervosa) – Encadré 8.5 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 337 Critères diagnostiques de la boulimie (Bulimia nervosa) – Encadré 8.6 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 338 Syndrome de Gilles de la Tourette – Encadré 8.8 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 345 Trouble de décit de l’attention / hyperactivité – Encadré 8.7 . . . . . . . . . 342 Trouble de stress aigu – Encadré 8.10 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 349 Trouble de stress post-traumatique – Encadré 8.9. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 347

18

Information sur l’alopécie – Encadré 12.7 .................................................... 489 Intégration de l’enfant au service de garde – Encadré 3.8 .......................

88

Interventions pour faciliter le sommeil du trottineur – Encadré 3.12 ..........................................................................................

94

Lecture labiale – Encadré 11.3 ....................................................................... 453 Liste de vérication pour les parents qui doivent laisser leur enfant seul à la maison – Encadré 3.16 .................................... 117

Trouble dépressif caractérisé – Encadré 8.11 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 351

Maison et environnement à l’épreuve des allergies – Encadré 15.14 ........................................................................................ 706

Trouble du spectre de l’autisme – Encadré 11.4 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 464

Maîtrise de l’érythème fessier – Encadré 6.9 ............................................. 263 Maîtrise des manifestations cliniques de l’intolérance au lactose – Encadré 8.1 .......................................................................... 327

Enseignement à l’enfant et à ses proches

Maîtrise pharmacologique de l’épilepsie – Encadré 20.9 ......................... 1008

Administration de la digoxine – Encadré 16.7 ............................................. 757 Aliments au cours de la première année – Tableau 3.9 ............................

81

Anémie falciforme – Encadré 18.4 ................................................................ 903 Anémie ferriprive – Encadré 18.2 .................................................................. 898 Application de la discipline selon des critères garantissant son efcacité – Tableau 1.3 ...............................................................

19

Apport adéquat en magnésium – Encadré 6.2 ............................................ 247

Mesures de prévention pour l’enfant atteint d’un trouble épileptique – Encadré 20.10 ............................................................... 1008 Mesures préventives du syndrome de mort subite du nourrisson – Encadré 6.11 .......................................................................................... 270 Méthode des éveils programmés – Encadré 7.2 ........................................ 288 Précautions pour l’enfant portant une attelle de Pavlik – Encadré 23.4 .......................................................................................... 1191

Carie du biberon – Encadré 3.11 ...................................................................

93

Prévention de l’étouffement avec des aliments des enfants de moins de quatre ans – Encadré 15.10 ......................................... 681

Cododo et sécurité de l’enfant au moment du coucher – Encadré 3.5 .........

83

Prévention de l’infection des voies urinaires – Encadré 19.1 .................. 940

Congé d’un centre de soins ambulatoires – Encadré 13.12 ...................... 557

Prévention et mesures à prendre en cas d’abus sexuels envers les enfants – Encadré 7.7 .................................................................... 301

Congé et suivi à la suite d’une intervention chirurgicale cardiaque – Encadré 16.8 ................................................................... 773 Conseils de sécurité pour le transport de nourrissons en voiture – Encadré 3.7 .....................................................................

85

Conseils pour l’administration des médicaments par voie orale, ophtalmique, auriculaire et nasale – Encadré 14.21 ...................... 602

XVIII

Liste des tableaux et encadrés thématiques

Prise de médicaments solides par voie orale – Encadré 14.14 ........................................................................................ 586 Prise en charge après un cathétérisme cardiaque – Encadré 16.1 .......................................................................................... 735 Prise en charge d’un enfant en état d’apnée – Encadré 6.12 .................. 273

Prise en charge du nourrisson souffrant de coliques – Encadré 6.10 .......................................................................................... 266 Problèmes liés au sommeil – Tableau 6.1 .................................................... 261 Problèmes liés au sommeil – Tableau 7.4 .................................................... 286 Prodiguer des conseils pour une utilisation positive des médias – Encadré 2.1 ...................................................................

47

Histoire de santé Exemples de questions à poser pour déterminer la présence d’un trouble cutané – Encadré 22.1 .................................................. 1117

Mise en œuvre d’une démarche de soins

Promotion de la vaccination – Encadré 9.5 ................................................. 374 Promotion du sommeil réparateur chez l’enfant d’âge préscolaire – Encadré 3.14 ................................................................. 106 Recommandations concernant le lait maternel – Encadré 3.4 ............................................................................................

80

Recommandations concernant les suppléments en fer – Encadré 3.3 ............................................................................................

79

Recommandations pour favoriser l’activité physique chez les trottineurs – Tableau 3.15 ...................................................

94

Recommandations pour favoriser un bon sommeil chez l’enfant dès les premiers mois de vie – Encadré 3.6 ......................

83

Recommandations pour favoriser une alimentation saine chez les adolescents – Encadré 3.18 ............................................... 122 Recommandations pour la promotion de l’activité physique chez les enfants d’âge préscolaire – Tableau 3.21 ........................ 106

Diarrhée – Encadré 17.3 .................................................................................. 832 Embonpoint ou obésité chez l’enfant ou l’adolescent – Encadré 8.2 ............................................................................................ 333 Enfant atteint de diabète de type 1 – Encadré 21.8 .................................... 1093 Épilepsie – Encadré 20.8 ................................................................................. 1004 Évaluation de la famille dont l’enfant a des besoins de santé particuliers – Encadré 10.11 .............................................. 413 Exemple type d’une démarche de soins dans un centre local de services communautaires – Encadré 1.6 .........................

31

Fente labiale ou fente palatine – Encadré 17.11 ......................................... 865 Infection aiguë des voies respiratoires – Encadré 15.2 ............................ 642

Régime alimentaire – Encadré 14.3 ............................................................... 569

Infection par le virus de l’immunodécience humaine et syndrome d’immunodécience acquise – Encadré 18.14 ..................................................................... 918

Restrictions alimentaires ou liquidiennes – Encadré 19.6 ........................ 962

Insufsance cardiaque congestive – Encadré 16.6 ................................... 755

Signes avant-coureurs du suicide – Encadré 8.12 ..................................... 359

Maladies infectieuses – Encadré 9.6 ............................................................ 390

Signes précoces de complications d’infections respiratoires – Encadré 15.3 .......................................................................................... 648

Maltraitance – Encadré 7.8 ............................................................................ 303

Soins à l’enfant ayant une stomie – Encadré 14.31 .................................... 633

Principales étapes d’une démarche de soins – Encadré 1.5 ...................

Paralysie cérébrale – Encadré 24.4............................................................... 1244 29

Soins d’urgence en cas d’hypoglycémie – Encadré 21.7 .......................... 1090 Soins relatifs à la chambre implantable – Encadré 14.18 ......................... 597 Soutien aux frères et sœurs des enfants ayant des besoins particuliers – Encadré 10.9 ................................................................. 412 Stratégies cognitivo-comportementales – Encadré 5.4 ............................ 216 Stratégies pour la promotion d’habitudes alimentaires saines – Encadré 8.3 ............................................................................................ 334 Suggestions pour aider les adolescents à dormir davantage – Encadré 3.19 .......................................................................................... 123 Surveiller la glycémie – Encadré 21.9 ........................................................... 1099

Pharmacothérapie Approche thérapeutique des effets indésirables des opioïdes – Tableau 5.11 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 231 Arthrite juvénile idiopathique – Encadré 23.6 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1210 Diurétiques employés dans le traitement de l’insufsance cardiaque congestive – Tableau 16.8 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 754 Médicaments adjuvants – Tableau 5.8 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 222

Syndrome d’immunodécience acquise – Encadré 18.15 ........................ 919

Médicaments pour le traitement de l’asthme – Tableau 15.22 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 699

Technique cognitivo-comportementale pour soulager la douleur – Encadré 5.17 ................................................................... 237

Médicaments utilisés pour la réanimation cardiopulmonaire pédiatrique – Tableau 14.12 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 622

Technique d’utilisation de la soie dentaire chez l’enfant par le parent – Encadré 3.10 ......................................................................

92

Utilisation d’un aérosol-doseur – Tableau 15.23 ........................................ 708 Utilisation du retrait – Encadré 1.3 ................................................................

20

Posologie des analgésiques non opioïdes pour les enfants – Tableau 5.5. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 219 Posologie des analgésiques opioïdes et de la naloxone en pédiatrie – Tableau 5.6 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 220

Liste des tableaux et encadrés thématiques

XIX

Posologie et voie d’administration des anticonvulsivants – Encadré 20.6 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1000 Principaux opioïdes : équivalence analgésique entre différentes voies d’administration – Tableau 5.7 . . . . . . . . . . . . . . 222 Principaux paramètres pharmacocinétiques des opioïdes – Tableau 5.10 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 230 Propriétés des analgésiques topiques et transdermiques – Encadré 5.11 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 228

Pratiques inrmières Adapter l’examen physique en fonction de l’âge de l’enfant – Tableau 4.3 ............................................................................................ 151 Adapter les interventions inrmières selon les besoins de santé particuliers de l’enfant – Tableau 10.3 .................................. 407 Administrer aux enfants des médicaments par voie orale – Encadré 14.15 ........................................................................................ 587 Administrer du sucrose – Encadré 5.6 ......................................................... 218

Schémas insuliniques – Tableau 21.12 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1086

Administrer un vaccin – Encadré 9.4 ............................................................ 371

Types de médicaments utilisés dans le traitement de la paralysie cérébrale – Tableau 24.1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1239

Aider l’enfant à se détendre an de palper l’abdomen – Encadré 4.17 .......................................................................................... 190 Alimenter l’enfant ayant un retard de croissance – Encadré 6.8 ............................................................................................ 260

Plan de soins et de traitements inrmiers

Assurer la préparation générale de l’enfant aux interventions – Encadré 13.8 .......................................................................................... 546

Enfant asthmatique – PSTI 15.2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 705 Enfant atteint d’insufsance cardiaque congestive – PSTI 16.1 . . . . . . . 758 Enfant atteint d’insufsance rénale aiguë – PSTI 19.1 . . . . . . . . . . . . . . . 962 Enfant atteint d’un trouble épileptique – PSTI 20.1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1004

Calculer la numération absolue de neutrophiles – Encadré 12.6 .......................................................................................... 484 Calculer les besoins liquidiens quotidiens de l’enfant – Encadré 17.1........................................................................................... 813 Communiquer avec l’adolescent – Encadré 4.3 .......................................... 139

Enfant atteint d’une décience intellectuelle – PST 11.1. . . . . . . . . . . . . . 439

Communiquer avec l’enfant – Encadré 4.2 .................................................. 137

Enfant atteint d’une infection aiguë des voies respiratoires – PSTI 15.1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 645

Comprendre la mort et les réactions chez l’enfant – Tableau 10.5 .......................................................................................... 424

Enfant atteint de diabète – PSTI 21.1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1095

Consigner les données d’évaluation de cas présumés de maltraitance – Encadré 7.6 ................................................................. 296

Enfant atteint de paralysie cérébrale – PSTI 24.1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1244 Enfant ayant une appendicite – PSTI 17.1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 845

Effectuer les tests auditifs recommandés chez le nourrisson et l’enfant – Tableau 4.10 .................................................................... 179

Enfant en n de vie – PST 10.1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 426

Évaluer et traiter l’œdème interstitiel – Encadré 17.2 ................................ 822

Maltraitance – PST 7.1. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 302

Évaluer la croissance – Encadré 3.2 .............................................................

73

Exercice de pratique réexive – Encadré 1.10 ...........................................

38

Expliquer le traitement à la famille – Encadré 13.10 .................................. 551

Pratique fondée sur des résultats probants

Faciliter les interventions inrmières grâce à des activités ludiques – Encadré 13.6 ...................................................................... 541

Évaluation de la mise en place des sondes nasogastriques et orogastriques en pédiatrie – Encadré 14.30 . . . . . . . . . . . . . . . . 628

Favoriser l’intégration des soins spirituels auprès de l’enfant et de sa famille – Encadré 2.2.............................................................

Fréquence de remplacement des dispositifs d’administration intraveineuse – Encadré 14.23 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 607

Fixer et stabiliser le cathéter intraveineux périphérique – Tableau 14.9 .......................................................................................... 606

Mesure de la température en pédiatrie – Encadré 4.10 . . . . . . . . . . . . . . 164

Intégrer la pratique fondée sur des résultats probants dans la démarche de soins inrmiers – Tableau 1.4 ....................................

37

Interagir de façon adaptée à la culture de la famille – Tableau 2.3 ............................................................................................

62

Soins à apporter aux ports des cathéters veineux centraux – Encadré 14.19 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 597

Juger de la nécessité d’une évaluation familiale approfondie – Encadré 1.1.............................................................................................

10

Soins à domicile et durée d’hospitalisation – Encadré 1.8 . . . . . . . . . . . .

Manipuler des agents cytotoxiques – Encadré 12.5................................... 476

Politique interdisant l’école aux enfants qui ont des lentes – Encadré 22.2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1133

XX

Liste des tableaux et encadrés thématiques

33

53

Mener une entrevue avec un enfant divulguant des mauvais traitements – Encadré 7.5 ................................................................... 296

Réduire le stress lié aux soins de la brûlure – Encadré 22.5 .......................................................................................... 1161

Mener une entrevue en compagnie d’un interprète – Tableau 2.2 ............................................................................................

Surveiller l’administration d’une épidurale – Encadré 5.10 .......................................................................................... 227

60

Prendre en charge l’admission à l’hôpital – Encadré 13.5 .......................................................................................... 538 Prendre en charge l’admission dans une situation critique de santé – Encadré 13.13 .................................................................... 559 Prendre en charge l’admission non prévue à l’unité de soins intensifs pédiatriques – Encadré 13.14 .................................. 561 Préparer et effectuer l’examen physique pédiatrique – Encadré 4.8 ............................................................................................ 150 Préparer l’enfant à l’évaluation de la douleur – Encadré 5.2 ............................................................................................ 204 Préparer l’enfant aux interventions selon son stade de développement – Encadré 13.9 ......................................................... 547 Prévenir les conséquences primaires et secondaires de l’immobilisation et prodiguer les soins inrmiers associés – Tableau 23.1....................................................................... 1170 Prévention de l’atopie chez les enfants – Encadré 6.6 .............................. 255 Procéder à l’auscultation et l’identication des bruits cardiaques – Tableau 4.13 .................................................................. 187 Procéder à l’hygiène des mains – Encadré 9.3 ........................................... 369 Procéder à une consultation téléphonique (Info-Santé 811) – Encadré 4.1 ............................................................................................ 134 Procéder aux soins d’urgence en cas d’amputation accidentelle – Encadré 23.11 ........................................................................................ 1226 Procéder aux soins d’urgence en cas d’épistaxis – Encadré 18.11 ........................................................................................ 916 Procéder aux soins d’urgence en cas de fracture – Encadré 23.2 .......................................................................................... 1184 Procéder aux soins d’urgence en cas de traumatisme abdominal – Encadré 17.18 ................................................................. 885 Prodiguer des soins culturellement compétents selon les lignes directrices de Douglas – Encadré 2.3 ...................................

58

Prodiguer des soins d’urgence en cas de traumatisme crânien – Encadré 20.12 ...................................................................... 1015 Prodiguer les soins postopératoires – Encadré 13.11 ............................... 555 Protéger l’enfant durant les convulsions épileptiques – Tableau 20.7 .......................................................................................... 1007 Recourir à des stratégies non pharmacologiques pour soulager la douleur – Encadré 5.5 .................................................... 217 Réduire le risque de chute des enfants hospitalisés – Encadré 14.6 .......................................................................................... 574

Surveiller l’alimentation de l’enfant malade – Encadré 14.2 ..................... 568 Utiliser des techniques créatives de communication avec les enfants – Encadré 4.4 .................................................................... 140

Soins non traumatiques Analgésie préemptive – Encadré 5.16 .......................................................... 236

Soutien inrmier Accompagner la famille et l’enfant durant le processus de normalisation – Encadré 10.3 ........................................................ 403 Accompagner la famille lors du diagnostic de maladie chronique ou de handicap – Encadré 10.2 ....................................... 401 Aider la famille à s’adapter à la maladie chronique de l’enfant – Encadré 10.10....................................................................... 413 Aider les parents d’adolescents à améliorer leurs pratiques parentales – Encadré 3.21 ................................................ 128 Aider les parents d’enfants d’âge préscolaire à améliorer leurs pratiques parentales – Tableau 3.22 ...................................... 110 Aider les parents d’enfants d’âge scolaire à améliorer leurs pratiques parentales – Tableau 3.25 ....................................... 119 Aider les parents de nouveau-nés et de nourrissons à améliorer leurs pratiques parentales – Tableau 3.11 .....................

88

Aider les parents de trottineurs à améliorer leurs pratiques parentales – Tableau 3.17.................................................................... 102 Atténuer les craintes des jeunes enfants – Encadré 4.9 ........................... 162 Communiquer autrement – Encadré 14.22.................................................... 602 Créer un partenariat parent-professionnel de la santé – Encadré 10.1........................................................................................... 401 Diminuer l’inconfort et améliorer la collaboration pendant l’examen otoscopique des jeunes enfants – Encadré 4.15........................................................................................... 176 Encourager l’ouverture de la bouche pour l’examen – Encadré 4.16........................................................................................... 181 Inciter à la libre expression des émotions – Encadré 10.8 ........................ 408 Solliciter la participation des parents – Encadré 14.16.............................. 588 Soutenir l’adaptation de l’enfant – Encadré 10.5......................................... 405 Soutenir la famille en deuil – Tableau 10.7................................................... 432

Liste des tableaux et encadrés thématiques

XXI

TECHNIQUES ET MÉTHODES DE SOINS Prendre la température selon le siège et les méthodes de mesure adaptés – Tableau 4.6 ..................................................... 163

Techniques de soins Administrer des médicaments par voie nasogastrique ou orogastrique, ou par gastrostomie – Encadré 14.20 ...................... 599

Préparer l’enfant pour une ponction lombaire et assurer son suivi – Encadré 14.8 ...................................................................... 578

Administrer un médicament par voie intramusculaire – Encadré 14.17 ........................................................................................ 591

Procéder à la réanimation cardiorespiratoire – Tableau 14.11 ............... 619

Aspirer des sécrétions nasopharyngées – Encadré 14.24 ....................... 612 Diminuer la douleur et l’anxiété lors de prélèvements sanguins – Encadré 14.12 ................................................................... 583

Procéder à un cathétérisme vésical – Encadré 14.11 ............................... 582 Procéder à un prélèvement d’oxyures – Encadré 9.8 ................................ 395 Procéder à une aspiration trachéale – Encadré 14.28 .............................. 615

Évaluer la fonction respiratoire – Encadré 15.1 .......................................... 641

Procéder à une intubation – Encadré 14.25 ................................................ 613

Évaluer la force des membres – Encadré 4.18 ............................................ 195 Évaluer les bruits respiratoires – Tableau 4.11 ........................................... 184

Procéder aux soins d’urgence en cas de brûlures thermiques – Encadré 22.3 .......................................................................................... 1150

Évaluer les nerfs crâniens – Tableau 4.17 ................................................... 197

Procéder aux soins de la peau – Encadré 14.1 ........................................... 566

Évaluer les réexes ostéotendineux – Tableau 4.16................................... 196

Procéder aux tests de la fonction cérébelleuse – Encadré 4.19 ............. 195

Insérer une sonde nasogastrique ou orogastrique chez l’enfant et administrer un gavage – Encadré 14.29 ........................ 626

Prodiguer les soins relatifs à la traction – Encadré 23.10.......................... 1224

Installer un sac de prélèvement d’urine – Encadré 14.10 ......................... 580 Intervenir en situation d’état de choc – Tableau 16.22 .............................. 800

Traiter des accès de cyanose paroxystique (malaises anoxiques) – Tableau 16.10............................................... 763

Mettre en place des contentions avec attaches – Encadré 14.7 ............ 576

Traiter la dépression respiratoire causée par les opioïdes – Encadré 5.13 ................................................................ 233

Prélever des sécrétions respiratoires – Encadré 14.13 ............................ 585

Traiter les blessures oculaires – Tableau 11.6 ........................................... 458

Prélever un échantillon – Encadré 14.9 ....................................................... 579

Utiliser les tableaux de la pression artérielle – Encadré 4.13 .................. 169

Vous trouverez d’autres méthodes de soins* applicables en pédiatrie dans les guides suivants : (Lemire et Perreault, 2016) et (Lemire et Perreault, 2016). MS 4.1-4.5 MS 5.3 MS 6.1

MS 6.6

Méthodes liées aux signes vitaux Ponction veineuse Administration de médicaments par voie orale Administration de médicaments par voie auriculaire Administration de médicaments par voie nasale Administration de médicaments par voie ophtalmique Administration de suppositoires rectaux

MS 2.2 MS 2.4 MS 4.1-4.9 MS 5.1 MS 7.5

Aspiration des sécrétions par la canule trachéale Soins d’une trachéostomie Méthodes liées à la thérapie intraveineuse par voie centrale Préparation et installation d’une perfusion d’acides aminés, de lipides et d’insuline Application de produits et de pansements interactifs

MS 6.2 MS 6.3 MS 6.4

* Liste non exhaustive

XXII

Techniques et méthodes de soins

MS 6.10

Administration des injections par voie souscutanée MS 6.11 Administration des injections par voie intramusculaire MS 6.12 Administration des injections par voie intradermique MS 7.1 Aspiration des sécrétions MS 8.1-8.6 Méthodes liées à la fonction digestive MS 9.4 Cathétérisme vésical et installation d’une sonde vésicale à ballonnet MS 10.1-10.10 Méthodes liées aux thérapies intraveineuses

TABLE DES MATIÈRES PARTIE 1

2.4

Inrmière, enfant et famille

CHAPITRE 1 Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté

CHAPITRE 3 Croissance, développement et promotion de la santé

1.1

Principes généraux des soins inrmiers pédiatriques . . . . . . . . . . 1.1.1 Soins non traumatiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.1.2 Soins axés sur l’autonomie et le développement. . . . . . . . . 1.1.3 Soins centrés sur la famille . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.1.4 Accompagnement de la famille. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

1.2

Compréhension de la famille . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 1.2.1 Théories sur la famille. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 1.2.2 Modèles d’analyse et d’intervention familiales . . . . . . . . . . 6 1.2.3 Évaluation de la situation familiale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 1.2.4 Congurations familiales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 1.2.5 Fonctionnement de la famille et rôles de ses membres . . . 15 1.2.6 Éducation des enfants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16

1.3

4 4 4 4 4

Rôles de l’inrmière en pédiatrie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.3.1 Coordination . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.3.2 Recherche. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.3.3 Promotion de la santé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.3.4 Aide à la prise de décision éthique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

23 23 24 24 25

1.4

Soins pédiatriques en santé communautaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.4.1 Objectifs des soins inrmiers en santé communautaire. . . 1.4.2 Principes des soins communautaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.4.3 Démographie et épidémiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.4.4 Démarche de soins auprès d’une population . . . . . . . . . . . .

26 26 26 27 28

1.5

Soins à domicile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.5.1 Enjeux actuels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.5.2 Objectifs. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.5.3 Planication . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

30 30 32 33

Exercice d’une pratique inrmière réexive . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.6.1 Pensée critique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.6.2 Pratique fondée sur des résultats probants . . . . . . . . . . . . . 1.6.3 Évaluation de la relation inrmière-famille . . . . . . . . . . . . . .

36 36 36 37

1.6

3.1

Croissance et développement : dénitions et concepts . . . . . . . . . 3.1.1 Facteurs inuents . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.1.2 Croissance et développement physique . . . . . . . . . . . . . . . . 3.1.3 Développement psychologique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.1.4 Rôle et fonctions du jeu dans le développement . . . . . . . . . 3.1.5 Promotion de la santé et prévention des risques durant l’enfance et l’adolescence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

66 66 67 69 72

3.2

Croissance et développement du nourrisson (0-12 mois) . . . . . . . . 3.2.1 Croissance et développement physique . . . . . . . . . . . . . . . . 3.2.2 Développement psychologique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.2.3 Promotion de saines habitudes de vie du nourrisson . . . . . 3.2.4 Prévention des blessures et des traumas . . . . . . . . . . . . . . . 3.2.5 Préoccupations courantes des parents . . . . . . . . . . . . . . . .

76 76 78 78 83 87

3.3

Croissance et développement du trottineur (1-3 ans) . . . . . . . . . . . 3.3.1 Croissance et développement général . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.3.2 Promotion de saines habitudes de vie chez les trottineurs (1-3 ans). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.3.3 Préoccupations courantes des parents . . . . . . . . . . . . . . . .

88 88

2.1

Culture. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42 2.1.1 Concepts et dénition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42 2.1.2 Culture et développement de l’enfant . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43

2.2

Inuences de l’héritage culturel de l’enfant sur les soins de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.2.1 Facteurs héréditaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.2.2 Facteurs d’origine familiale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.2.3 Facteurs socioéconomiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Inuences des croyances et des pratiques culturelles sur les soins de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.3.1 Croyances religieuses et croyances en matière de santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.3.2 Conceptions et perceptions culturelles de la maladie . . . . 2.3.3 Pratiques traditionnelles en matière de santé . . . . . . . . . . . 2.3.4 Pratiques alimentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

48 48 49 51

52 54 55 56

90 98

Croissance et développement de l’enfant d’âge préscolaire (3-6 ans) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103 3.4.1 Croissance et développement général . . . . . . . . . . . . . . . . . 103 3.4.2 Promotion de saines habitudes de vie chez les enfants d’âge préscolaire (3-6 ans) . . . . . . . . . . . . . . . . . 104 3.4.3 Préoccupations courantes des parents . . . . . . . . . . . . . . . . 108

3.5

Croissance et développement de l’enfant d’âge scolaire (6-12 ans). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111 3.5.1 Croissance et développement général . . . . . . . . . . . . . . . . . 111 3.5.2 Promotion de saines habitudes de vie chez les enfants d’âge scolaire (6-12 ans) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112 3.5.3 Préoccupations courantes des parents . . . . . . . . . . . . . . . . 116

3.6

Croissance et développement de l’adolescent (12-18 ans). . . . . . . 119 3.6.1 Croissance et développement général . . . . . . . . . . . . . . . . . 119 3.6.2 Promotion de saines habitudes de vie chez l’adolescent (12-18 ans) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 120 3.6.3 Préoccupations courantes des parents . . . . . . . . . . . . . . . . 126

PARTIE 2

Évaluation clinique

CHAPITRE 4 Examen clinique : anamnèse et examen physique 4.1

52

74

3.4

CHAPITRE 2 Inuences socioculturelles sur les soins de santé

2.3

Rôle inrmier dans la relation avec l’enfant et sa famille . . . . . . . . 57 2.4.1 Connaissance de sa culture . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57 2.4.2 Compétence culturelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57

Communication . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 132 4.1.1 Examen clinique : dénition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 132 4.1.2 Création d’un environnement propice à la communication . . 132 4.1.3 Consultation téléphonique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133 4.1.4 Communication avec les parents . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133 4.1.5 Communication avec l’enfant en fonction de l’âge . . . . . . . 136 4.1.6 Techniques de communication . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 139 Table des matières

XXIII

4.2

4.3

Anamnèse : collecte de données subjectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142 4.2.1 Renseignements d’identication. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142 4.2.2 Motif de la consultation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142 4.2.3 Évaluation d’un symptôme (PQRSTU). . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142 4.2.4 Histoire de santé (AMPLE) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142 4.2.5 Revue des systèmes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 147 Examen physique : collecte de données objectives . . . . . . . . . . . . 149 4.3.1 Préparation à l’examen physique de l’enfant . . . . . . . . . . . . 149 4.3.2 Examen de l’apparence générale et mesures anthropométriques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 152 4.3.3 Évaluation de l’état nutritionnel. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157 4.3.4 Mesures physiologiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 158 4.3.5 Examen de la peau . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 168 4.3.6 Examen des ganglions lymphatiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 170 4.3.7 Examen de la tête et du cou. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 171 4.3.8 Examen des yeux et de la vision . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172 4.3.9 Examen des oreilles et de l’audition. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 175 4.3.10 Examen du nez . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 179 4.3.11 Examen de la bouche et de la gorge . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 180 4.3.12 Examen du thorax . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 181 4.3.13 Examen de l’abdomen. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 188 4.3.14 Examen des organes génitaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 190 4.3.15 Examen des fesses et de l’anus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 192 4.3.16 Examen du dos et des membres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 192 4.3.17 Examen neurologique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 195

CHAPITRE 5 Évaluation et traitement de la douleur 5.1

Dénitions de la douleur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 204

5.2

Évaluation de la douleur chez l’enfant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 204 5.2.1 Examen physique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 204 5.2.2 Outils d’évaluation de la douleur. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 205 5.2.3 Situations particulières. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 211

5.3

Approche thérapeutique de la douleur. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 215 5.3.1 Traitement non pharmacologique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 215 5.3.2 Traitement pharmacologique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 218

5.4

Soulagement de certains types de douleur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 234 5.4.1 Douleur procédurale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 234 5.4.2 Douleur postopératoire. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 236 5.4.3 Maux de tête récurrents. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 236 5.4.4 Douleurs cancéreuses chez l’enfant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 237 5.4.5 Douleur et sédation lors des soins de n de vie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 239

PARTIE 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

6.3

Troubles du sommeil . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 261

6.4

Troubles cutanés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 262 6.4.1 Érythème fessier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 262 6.4.2 Dermite séborrhéique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 263

6.5

Autres troubles du nourrisson . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 264 6.5.1 Douleurs abdominales paroxystiques (coliques) . . . . . . . . . 264 6.5.2 Syndrome de mort subite du nourrisson . . . . . . . . . . . . . . . . 266 6.5.3 Malaise grave du nourrisson. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 271 6.5.4 Plagiocéphalie positionnelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 273

CHAPITRE 7 Problèmes de santé du trottineur et de l’enfant d’âge préscolaire 7.1

Intoxication . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 278 7.1.1 Manifestations cliniques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 278 7.1.2 Approche thérapeutique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 278 7.1.3 Intoxication par des métaux lourds . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 282 7.1.4 Intoxication par des plantes vénéneuses . . . . . . . . . . . . . . . 283

7.2

Approches médicales et nutritionnelles complémentaires. . . . . . . 284 7.2.1 Produits de santé naturels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 284 7.2.2 Végétarisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 284

7.3

Troubles du sommeil . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 286

7.4

Troubles du langage. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 288 7.4.1 Bégaiement. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 288 7.4.2 Trouble d’articulation du langage. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 289

7.5

Maltraitance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 289 7.5.1 Portrait de la situation au Québec . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 289 7.5.2 Types de maltraitance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 290 7.5.3 Diagnostic . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 295

CHAPITRE 8 Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent 8.1

Problèmes liés à l’élimination. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 308 8.1.1 Énurésie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 308 8.1.2 Encoprésie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 309

8.2

Troubles du système reproducteur féminin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 310 8.2.1 Aménorrhée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 310 8.2.2 Dysménorrhée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 310 8.2.3 Syndrome prémenstruel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 311 8.2.4 Vaginite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 312

8.3

Troubles du système reproducteur masculin . . . . . . . . . . . . . . . . . . 312 8.3.1 Cancer des testicules . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 312 8.3.2 Varicocèle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 313 8.3.3 Épididymite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 313 8.3.4 Torsion testiculaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 313 8.3.5 Gynécomastie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 313

8.4

Problèmes de santé et risques liés à la sexualité. . . . . . . . . . . . . . . 314 8.4.1 Grossesse à l’adolescence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 314 8.4.2 Contraception . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 315 8.4.3 Infections transmissibles sexuellement et par le sang. . . . 320 8.4.4 Atteinte inammatoire pelvienne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 323 8.4.5 Agression sexuelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 323

CHAPITRE 6 Problèmes de santé du nourrisson 6.1

6.2

Troubles nutritionnels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 244 6.1.1 Déséquilibres vitaminiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 244 6.1.2 Déséquilibres minéraux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 246 6.1.3 Malnutrition pédiatrique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 247 6.1.4 Allergies et intolérances alimentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . 251 Troubles alimentaires. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 256 6.2.1 Régurgitation et crachotement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 256 6.2.2 Retard de croissance (retard staturopondéral) . . . . . . . . . . 257

XXIV

Table des matières

8.5

Troubles liés à l’alimentation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 326 8.5.1 Intolérance au lactose . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 326 8.5.2 Obésité. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 327 8.5.3 Anorexie mentale, boulimie et troubles non spéciques de l’alimentation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 335

8.6

Troubles liés à la santé mentale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 341 8.6.1 Trouble de décit de l’attention/hyperactivité . . . . . . . . . . . 341 8.6.2 Syndrome de Gilles de la Tourette . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 344 8.6.3 Troubles anxieux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 345 8.6.4 Évitement scolaire anxieux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 346 8.6.5 Trouble de stress post-traumatique et trouble de stress aigu. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 347 8.6.6 Douleur abdominale fonctionnelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 347 8.6.7 Dépression . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 350 8.6.8 Schizophrénie infantile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 352

8.7

9.2

9.3

9.4

Infection, transmission et contagion. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 366 9.1.1 Modes de transmission . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 366 9.1.2 Prévention et contrôle des infections . . . . . . . . . . . . . . . . . . 367 9.1.3 Infections nosocomiales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 367 9.1.4 Maladies et infections en service de garde . . . . . . . . . . . . . 369 Immunisation des enfants de 0 à 18 ans. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 370 9.2.1 Calendrier d’immunisation du Québec. . . . . . . . . . . . . . . . . . 370 9.2.2 Couverture vaccinale chez les enfants . . . . . . . . . . . . . . . . . 373 9.2.3 Fausses croyances liées à la vaccination. . . . . . . . . . . . . . . 373 9.2.4 Contre-indications et précautions à la vaccination. . . . . . . 374 9.2.5 Atténuation de la douleur et de l’anxiété lors de la vaccination . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 374 9.2.6 Manifestations cliniques possibles après la vaccination . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 374 Maladies infectieuses et transmissibles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 376 9.3.1 Principales maladies infectieuses et transmissibles . . . . . 376 9.3.2 Conjonctivite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 391 9.3.3 Stomatite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 392 Parasitoses intestinales. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 393 9.4.1 Lambliase . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 393 9.4.2 Entérobiase . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 394

PARTIE 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

CHAPITRE 10 Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie 10.1

Répercussions de la maladie chronique ou du handicap sur l’enfant et sa famille. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 404 10.2.1 Réactions de l’enfant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 404 10.2.2 Réactions des parents . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 406 10.2.3 Réactions des frères et sœurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 410 10.2.4 Organisation de la vie quotidienne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 414

10.3

Répercussions de la maladie chronique ou du handicap sur le développement de l’enfant. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 414 10.3.1 Première année de vie et début de l’enfance. . . . . . . . . . . . 417 10.3.2 Âge scolaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 418 10.3.3 Adolescence. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 419

10.4

Transition des soins à l’âge adulte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 419 10.4.1 Dés de la transition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 420 10.4.2 Préparation de la transition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 420

10.5

Soins prodigués aux enfants en n de vie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 420 10.5.1 Dénition et principes relatifs aux soins palliatifs . . . . . . . . 420 10.5.2 Considérations éthiques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 422 10.5.3 Prise de décision dans une situation de n de vie. . . . . . . . 422 10.5.4 Processus de la mort . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 425 10.5.5 Autopsie et don d’organes ou de tissus. . . . . . . . . . . . . . . . . 429 10.5.6 Deuil . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 430

Problèmes liés aux comportements à risque élevé . . . . . . . . . . . . . 352 8.7.1 Toxicomanie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 352 8.7.2 Automutilation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 358 8.7.3 Suicide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 358

CHAPITRE 9 Maladies infectieuses et immunisation 9.1

10.2

Soins prodigués aux enfants ayant des besoins de santé particuliers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 400 10.1.1 Soins centrés sur la famille . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 401 10.1.2 Approche centrée sur le développement de l’enfant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 402

CHAPITRE 11 Déciences intellectuelles et déciences sensorielles 11.1

Déciences intellectuelles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 436 11.1.1 Concepts généraux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 436 11.1.2 Syndrome de Down . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 444 11.1.3 Syndrome du X fragile. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 446

11.2

Déciences sensorielles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 447 11.2.1 Décience auditive . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 447 11.2.2 Décience visuelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 454 11.2.3 Surdicécité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 462

11.3

Trouble du spectre de l’autisme. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 463

CHAPITRE 12 Enfant atteint de cancer 12.1

Enfants atteints du cancer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 470 12.1.1 Épidémiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 470 12.1.2 Étiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 471 12.1.3 Diagnostic . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 472 12.1.4 Approche thérapeutique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 473 12.1.5 Complications du traitement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 479

12.2

Cancers des systèmes sanguin et lymphatique . . . . . . . . . . . . . . . . 493 12.2.1 Leucémies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 493 12.2.2 Lymphomes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 497

12.3

Tumeurs du système nerveux central. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 502 12.3.1 Tumeurs cérébrales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 502 12.3.2 Neuroblastome. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 509

12.4

Tumeurs osseuses . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 513 12.4.1 Considérations générales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 513 12.4.2 Ostéosarcome . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 514 12.4.3 Sarcome d’Ewing. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 515

12.5

Autres tumeurs solides . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 516 12.5.1 Tumeur de Wilms . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 516 12.5.2 Rhabdomyosarcome . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 518 Table des matières

XXV

12.6

12.5.3 Rétinoblastome . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 520 12.5.4 Tumeurs des cellules germinales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 523 12.5.5 Tumeurs hépatiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 523

14.3

Fièvre et hyperthermie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 569 14.3.1 Traitement de la èvre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 570 14.3.2 Traitement de l’hyperthermie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 571

Survivants d’un cancer pédiatrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 523

14.4

Sécurité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 572 14.4.1 Sécurité des jouets . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 572 14.4.2 Prévention des chutes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 572 14.4.3 Transport du nourrisson et de l’enfant. . . . . . . . . . . . . . . . . . 572 14.4.4 Mesures de contention. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 574 14.4.5 Positionnement de l’enfant selon l’intervention . . . . . . . . . . 578

14.5

Prélèvement d’échantillons . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 579 14.5.1 Échantillon d’urine. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 579 14.5.2 Échantillon de selles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 582 14.5.3 Échantillon de sang . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 583 14.5.4 Échantillon de sécrétions des voies respiratoires. . . . . . . . 585

14.6

Administration des médicaments . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 585 14.6.1 Calcul de la posologie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 585 14.6.2 Administration par voie orale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 586 14.6.3 Administration intramusculaire. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 588 14.6.4 Administration sous-cutanée et intradermique . . . . . . . . . . 592 14.6.5 Administration par voie intraveineuse . . . . . . . . . . . . . . . . . . 593 14.6.6 Administration nasogastrique, orogastrique ou par la gastrostomie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 598 14.6.7 Administration par voie rectale. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 598 14.6.8 Administration ophtalmique, auriculaire et nasale . . . . . . . 599 14.6.9 Aérosolthérapie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 601 14.6.10 Enseignement à la famille sur les soins à domicile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 601

14.7

Maintien de l’équilibre hydrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 602 14.7.1 Mesure de l’apport liquidien et du débit urinaire. . . . . . . . . 602 14.7.2 Perfusion de soluté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 603

14.8

Maintien de la fonction respiratoire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 608 14.8.1 Oxygénothérapie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 608 14.8.2 Drainage bronchique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 610 14.8.3 Drainage postural avec percussion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 610 14.8.4 Aspiration des sécrétions nasopharyngées . . . . . . . . . . . . . 611 14.8.5 Intubation à séquence rapide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 612 14.8.6 Ventilation assistée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 612 14.8.7 Réanimation cardiorespiratoire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 617

14.9

Alimentation de substitution . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 625 14.9.1 Alimentation entérale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 625 14.9.2 Alimentation par gastrostomie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 627 14.9.3 Alimentation par sonde nasoduodénale ou nasojéjunale . 630 14.9.4 Alimentation parentérale totale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 630 14.9.5 Enseignement à la famille sur les soins à domicile . . . . . . . 631

PARTIE 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

CHAPITRE 13 Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation 13.1

Changements dans les soins pédiatriques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 528

13.2

Effets de l’hospitalisation sur l’enfant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 528 13.2.1 Facteurs de risque liés au stress durant l’hospitalisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 528 13.2.2 Effets néfastes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 529 13.2.3 Effets positifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 532

13.3

Effets de l’hospitalisation sur la famille . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 533 13.3.1 Réactions des parents . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 533 13.3.2 Répercussions sur la fratrie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 534

13.4

Interventions inrmières au cours de l’hospitalisation . . . . . . . . . . 534 13.4.1 Préparer l’enfant et sa famille à l’hospitalisation. . . . . . . . . 534 13.4.2 Favoriser la gestion du stress . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 538 13.4.3 Utiliser judicieusement la contention. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 539 13.4.4 Proposer des activités adaptées au stade de développement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 539 13.4.5 Proposer des activités récréatives. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 540 13.4.6 Maintenir la routine de l’enfant. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 542 13.4.7 Favoriser l’expression des sentiments. . . . . . . . . . . . . . . . . . 542 13.4.8 Soutenir les membres de la famille . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 543 13.4.9 Fournir de l’information. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 544 13.4.10 Planier le congé de l’hôpital et les soins à domicile . . . . . 545

13.5

Interventions inrmières liées aux interventions diagnostiques et thérapeutiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 546 13.5.1 Préparer l’enfant aux interventions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 546 13.5.2 Favoriser l’adhésion au traitement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 549

13.6

Interventions inrmières liées aux interventions chirurgicales . . . 551 13.6.1 Préparer l’enfant à l’intervention chirurgicale . . . . . . . . . . . 551 13.6.2 Procéder aux soins postopératoires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 554

13.7

Situations hospitalières particulières . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 556 13.7.1 Soins ambulatoires ou externes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 556 13.7.2 Mise en isolement liée à la prévention des infections . . . . 557 13.7.3 Service des urgences . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 558 13.7.4 Unité de soins intensifs pédiatriques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 559

CHAPITRE 14 Techniques de soins 14.1

14.2

Hygiène. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 566 14.1.1 Soins de la peau. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 566 14.1.2 Hygiène buccale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 566 14.1.3 Bain . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 566 14.1.4 Hygiène capillaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 567 Alimentation. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 567 14.2.1 Perte d’appétit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 567 14.2.2 Déshydratation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 568 14.2.3 Régime alimentaire particulier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 568

XXVI

Table des matières

14.10 Élimination . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 631 14.10.1 Lavement. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 631 14.10.2 Stomie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 632

PARTIE 6

Troubles liés aux systèmes

CHAPITRE 15 Troubles liés au système respiratoire 15.1

Caractéristiques des infections des voies respiratoires . . . . . . . . . 639 15.1.1 Étiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 639 15.1.2 Manifestations cliniques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 640

15.2

Infections des voies respiratoires supérieures. . . . . . . . . . . . . . . . . 646 15.2.1 Rhinopharyngite aiguë . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 646 15.2.2 Pharyngite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 648 15.2.3 Amygdalite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 650 15.2.4 Grippe. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 653 15.2.5 Otite moyenne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 656

15.3

Syndromes du croup . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 661 15.3.1 Épiglottite aiguë . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 661 15.3.2 Laryngite aiguë. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 664 15.3.3 Laryngotrachéobronchite aiguë . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 664 15.3.4 Laryngite spasmodique aiguë . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 666 15.3.5 Trachéite bactérienne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 666 15.3.6 Trachéomalacie et bronchomalacie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 667

15.4

Infections des voies respiratoires inférieures. . . . . . . . . . . . . . . . . . 667 15.4.1 Bronchite. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 668 15.4.2 Bronchiolite. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 668 15.4.3 Pneumonies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 672

15.5

Autres infections des voies respiratoires. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 676 15.5.1 Coqueluche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 676 15.5.2 Tuberculose . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 676

15.6

15.7

15.8

Dysfonctionnement pulmonaire attribuable à des irritants non infectieux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 679 15.6.1 Aspiration d’un corps étranger . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 679 15.6.2 Pneumothorax . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 681 15.6.3 Pneumonie par aspiration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 682 15.6.4 Syndrome de détresse respiratoire aiguë ou lésion pulmonaire aiguë . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 682 15.6.5 Lésion par inhalation de fumée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 684 15.6.6 Exposition à la fumée secondaire. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 687 Dysfonctionnement respiratoire chronique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 688 15.7.1 Troubles respiratoires obstructifs du sommeil. . . . . . . . . . . 688 15.7.2 Asthme. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 690 15.7.3 Fibrose kystique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 710

16.5

Cardiopathies acquises . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 773 16.5.1 Endocardite infectieuse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 773 16.5.2 Rhumatisme articulaire aigu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 776 16.5.3 Dyslipidémie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 778 16.5.4 Arythmies cardiaques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 782 16.5.5 Hypertension artérielle pulmonaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 785 16.5.6 Cardiomyopathie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 786

16.6

Transplantation cardiaque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 788 16.6.1 Étiologie et physiopathologie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 788 16.6.2 Pronostic . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 789 16.6.3 Complications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 789

16.7

Troubles de la fonction vasculaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 790 16.7.1 Hypertension artérielle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 790 16.7.2 Maladie de Kawasaki . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 793 16.7.3 État de choc . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 796 16.7.4 Anaphylaxie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 800 16.7.5 Choc septique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 801 16.7.6 Syndrome de choc toxique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 804

CHAPITRE 17 Troubles liés au système gastro-intestinal 17.1

Principaux troubles gastro-intestinaux. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 812 17.1.1 Déshydratation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 812 17.1.2 Œdème. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 821 17.1.3 Diarrhée. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 822 17.1.4 Constipation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 833 17.1.5 Vomissements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 835

17.2

Troubles de la motilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 836 17.2.1 Maladie de Hirschsprung. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 836 17.2.2 Reux gastro-œsophagien. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 839

17.3

Troubles liés aux douleurs abdominales fonctionnelles . . . . . . . . . 841 17.3.1 Étiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 841 17.3.2 Physiopathologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 841 17.3.3 Diagnostic . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 841 17.3.4 Approche thérapeutique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 841

17.4

Troubles inammatoires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 842 17.4.1 Appendicite aiguë . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 842 17.4.2 Diverticule de Meckel. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 846 17.4.3 Maladies inammatoires de l’intestin . . . . . . . . . . . . . . . . . . 847 17.4.4 Ulcère gastroduodénal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 851

17.5

Troubles hépatiques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 853 17.5.1 Hépatite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 853 17.5.2 Cirrhose . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 858 17.5.3 Atrésie des voies biliaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 859

17.6

Anomalies structurales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 860 17.6.1 Fente labiale et fente palatine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 860 17.6.2 Atrésie de l’œsophage avec stule trachéo-œsophagienne. . . 866 17.6.3 Hernies. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 870

17.7

Troubles obstructifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 870 17.7.1 Sténose hypertrophique du pylore . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 872 17.7.2 Invagination . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 874 17.7.3 Malrotation de l’intestin et volvulus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 876 17.7.4 Malformations anorectales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 876

17.8

Syndromes de malabsorption. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 879 17.8.1 Maladie cœliaque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 880 17.8.2 Malabsorption par résection intestinale . . . . . . . . . . . . . . . . 882

Insufsance respiratoire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 720

CHAPITRE 16 Troubles liés au système cardiovasculaire 16.1

Troubles de la fonction cardiovasculaire. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 728 16.1.1 Diagnostic . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 728 16.1.2 Examens paracliniques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 729

16.2

Cardiopathies congénitales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 735 16.2.1 Étiologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 735 16.2.2 Physiopathologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 736 16.2.3 Classication des malformations cardiaques. . . . . . . . . . . . 737

16.3

Conséquences cliniques de la cardiopathie congénitale . . . . . . . . 750 16.3.1 Insufsance cardiaque congestive . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 750 16.3.2 Hypoxémie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 761

16.4

Interventions inrmières en cas de cardiopathie congénitale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 765 16.4.1 Soutien à la famille pour l’adaptation à une affection cardiaque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 765 16.4.2 Information à la famille sur la maladie. . . . . . . . . . . . . . . . . . 766 16.4.3 Soutien à la famille pour gérer la maladie à domicile . . . . . 767 16.4.4 Préparation de l’enfant et de la famille aux interventions invasives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 768 16.4.5 Congé de l’hôpital et soins à domicile . . . . . . . . . . . . . . . . . . 773

Table des matières

XXVII

17.9

Traumatisme abdominal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 884 17.9.1 Étiologie et physiopathologie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 884 17.9.2 Approche thérapeutique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 885

CHAPITRE 18 Troubles liés au système hématologique et immunitaire 18.1

Évaluation des fonctions hématologique et immunitaire. . . . . . . . . 892

18.2

Troubles hématologiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 892 18.2.1 Troubles liés aux globules rouges . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 894 18.2.2 Troubles de l’hémostase . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 909

18.3

18.4

Troubles immunitaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 916 18.3.1 Infection par le virus de l’immunodécience humaine et syndrome d’immunodécience acquise . . . . . . . . . . . . . . 916 18.3.2 Décit immunitaire combiné sévère. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 920 18.3.3 Syndrome de Wiskott-Aldrich . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 920 Techniques utilisées pour le traitement des troubles hématologiques ou immunitaires. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 921 18.4.1 Transfusions sanguines . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 921 18.4.2 Aphérèse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 924

CHAPITRE 19 Troubles liés au système génito-urinaire 19.1

Dysfonctions rénales et urinaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 929

19.2

Troubles, infections et anomalies du système génito-urinaire. . . . 935 19.2.1 Infection des voies urinaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 935 19.2.2 Uropathie obstructive . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 940 19.2.3 Anomalies externes. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 942 19.2.4 Troubles du développement sexuel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 949

19.3

Maladie glomérulaire. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 951 19.3.1 Syndrome néphrotique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 951 19.3.2 Glomérulonéphrite aiguë . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 955

19.4

Syndrome hémolytique et urémique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 957

19.5

Insufsance rénale. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 958 19.5.1 Insufsance rénale aiguë. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 958 19.5.2 Insufsance rénale chronique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 963

CHAPITRE 20 Troubles liés au système nerveux 20.1

20.2

Évaluation de l’état neurologique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 976 20.1.1 Évaluation initiale. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 976 20.1.2 Examen spécique de l’enfant de moins de deux ans . . . . 976 20.1.3 Évaluation de l’état de conscience. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 976 20.1.4 Examen neurologique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 978 20.1.5 Examens paracliniques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 982 20.1.6 Décès neurologique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 982 Approche thérapeutique pour l’enfant inconscient . . . . . . . . . . . . . 985 20.2.1 Examens fréquents de l’enfant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 985 20.2.2 Maintien de la perméabilité des voies respiratoires . . . . . . 986 20.2.3 Surveillance de la pression intracrânienne . . . . . . . . . . . . . 987 20.2.4 Maintien de la thermorégulation. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 990 20.2.5 Maintien de l’alimentation et de l’hydratation . . . . . . . . . . . 990 20.2.6 Maintien de l’élimination . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 991 20.2.7 Administration des médicaments . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 991

XXVIII

Table des matières

20.2.8 Soulagement de la douleur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20.2.9 Prestation des soins d’hygiène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20.2.10 Adaptation de la posture et des exercices . . . . . . . . . . . . . 20.2.11 Stimulation de l’enfant inconscient . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20.2.12 Reprise de conscience . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20.2.13 Soutien à la famille . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

991 992 992 993 993 993

20.3

Troubles convulsifs. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 994 20.3.1 Épilepsie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 994 20.3.2 Convulsions fébriles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1009

20.4

Lésions cérébrales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1010 20.4.1 Traumatisme craniocérébral . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1010 20.4.2 Quasi-noyade . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1021

20.5

Infections intracrâniennes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20.5.1 Méningite bactérienne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20.5.2 Méningite lymphocytaire bénigne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20.5.3 Encéphalite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20.5.4 Syndrome de Reye. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

20.6

Malformations cérébrales. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1031 20.6.1 Déformations crâniennes. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1032 20.6.2 Hydrocéphalie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1032

1023 1023 1028 1028 1030

CHAPITRE 21 Troubles liés au système endocrinien 21.1

Système endocrinien . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1044

21.2

Troubles de la fonction hypophysaire. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21.2.1 Hypopituitarisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21.2.2 Hyperpituitarisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21.2.3 Puberté précoce . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21.2.4 Diabète insipide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21.2.5 Syndrome de sécrétion inappropriée d’hormone antidiurétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

1044 1044 1051 1052 1053

21.3

Troubles thyroïdiens. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21.3.1 Hypothyroïdie juvénile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21.3.2 Thyroïdite de Hashimoto. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21.3.3 Goitre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21.3.4 Hyperthyroïdie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

1056 1056 1057 1058 1059

21.4

Troubles parathyroïdiens. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1061 21.4.1 Hypoparathyroïdie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1061 21.4.2 Hyperparathyroïdie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1064

21.5

Troubles surrénaliens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21.5.1 Insufsance corticosurrénale aiguë . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21.5.2 Insufsance corticosurrénale chronique (maladie d’Addison). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21.5.3 Syndrome de Cushing . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21.5.4 Hyperplasie surrénale congénitale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21.5.5 Phéochromocytome . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

1065 1065

21.6

Troubles congénitaux. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21.6.1 Hypothyroïdie congénitale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21.6.2 Phénylcétonurie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21.6.3 Galactosémie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

1074 1074 1076 1079

21.7

Troubles de sécrétion des hormones pancréatiques. . . . . . . . . . . 1080 21.7.1 Diabète et ses complications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1080

1055

1067 1068 1070 1073

CHAPITRE 22 Troubles liés au système tégumentaire

23.3.4 Anomalie squelettique des membres. . . . . . . . . . . . . . . . . . 1194 23.3.5 Ostéogenèse imparfaite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1195

22.1

Troubles cutanés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22.1.1 Lésions cutanées. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22.1.2 Typologie des lésions cutanées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22.1.3 Cicatrisation des plaies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22.1.4 Traitement des troubles cutanés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

1107 1107 1110 1112 1113

22.2

Infections cutanées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22.2.1 Infections bactériennes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22.2.2 Infections virales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22.2.3 Épidermomycoses (infections fongiques) . . . . . . . . . . . . . . 22.2.4 Infections mycosiques (fongiques) systémiques . . . . . . . .

1120 1120 1121 1121 1123

Troubles cutanés secondaires au contact avec des agents chimiques ou physiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22.3.1 Dermatite de contact . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22.3.2 Plantes toxiques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22.3.3 Réactions aux médicaments . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22.3.4 Corps étrangers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

1123 1123 1124 1125 1126

Troubles cutanés secondaires aux morsures et piqûres . . . . . . . 22.4.1 Gale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22.4.2 Rickettsioses . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22.4.3 Maladie de Lyme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22.4.4 Pédiculose de la tête. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22.4.5 Morsures et égratignures d’animaux. . . . . . . . . . . . . . . . . . 22.4.6 Morsures humaines . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

1126 1128 1129 1129 1131 1134 1134

22.5

Autres troubles cutanés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22.5.1 Ichthysoses et troubles cutanés atypiques . . . . . . . . . . . . 22.5.2 Nævus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22.5.3 Dermatite. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22.5.4 Dermatite atopique (eczéma) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22.5.5 Acné . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

1135 1135 1137 1138 1139 1142

22.6

Brûlures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22.6.1 Caractéristiques d’une brûlure . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22.6.2 Réactions locales et systémiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22.6.3 Traitements et interventions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

1144 1145 1148 1149

22.3

22.4

23.4

Malformations acquises . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23.4.1 Maladie de Legg-Perthes-Calvé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23.4.2 Épiphysiolyse fémorale supérieure . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23.4.3 Cyphose . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23.4.4 Lordose . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23.4.5 Scoliose idiopathique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

1196 1196 1198 1199 1200 1200

23.5

Infections osseuses et articulaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23.5.1 Ostéomyélite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23.5.2 Arthrite septique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23.5.3 Tuberculose squelettique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

1204 1204 1207 1208

23.6

Troubles articulaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1208 23.6.1 Arthrite juvénile idiopathique (arthrite rhumatoïde juvénile) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1208 23.6.2 Lupus érythémateux disséminé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1214

23.7

Immobilisation et amputation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1216 23.7.1 Dispositifs temporaires d’immobilisation. . . . . . . . . . . . . . . 1216 23.7.2 Amputation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1226

CHAPITRE 24 Troubles liés aux systèmes neuromusculaire et musculaire 24.1

Maladies neuromusculaires ou musculaires congénitales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1234 24.1.1 Paralysie cérébrale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1234 24.1.2 Anomalies du tube neural . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1248 24.1.3 Amyotrophie spinale de type I (maladie de Werdnig-Hoffmann). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1255 24.1.4 Amyotrophie spinale de type III (maladie de Kugelberg-Welander). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .1258 24.1.5 Dystrophies musculaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1258 24.1.6 Dystrophie musculaire de Duchenne (pseudohypertrophique). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1259

24.2

Troubles neuromusculaires acquis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24.2.1 Syndrome de Guillain-Barré (polyradiculonévrite infectieuse) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24.2.2 Tétanos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24.2.3 Botulisme. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24.2.4 Lésions médullaires. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

CHAPITRE 23 Troubles liés aux systèmes musculosquelettique et articulaire 23.1

23.2

23.3

1263 1263 1266 1268 1270

Immobilisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23.1.1 Répercussions physiologiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23.1.2 Répercussions psychologiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23.1.3 Répercussions familiales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

1170 1170 1174 1174

Annexe A Normes de croissance de l’OMS pour le Canada . . . . . . . . . . 1277

Traumatismes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23.2.1 Blessures des tissus mous. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23.2.2 Fracture . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23.2.3 Blessures sportives. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

1177 1177 1180 1184

Annexe C Valeurs normales des signes vitaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1292

Malformations congénitales et troubles du développement . . . . 23.3.1 Dysplasie développementale de la hanche . . . . . . . . . . . . 23.3.2 Pied bot . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23.3.3 Metatarsus adductus (varus) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

1186 1186 1191 1193

Annexe B Valeurs normales des résultats d’analyses de laboratoire courantes. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1285

Glossaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1295 Sources iconographiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1305 Références. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1307 Index

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1354

Table des matières

XXIX

Chapitre

1

Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté Écrit par : Marilyn J. Hockenberry, PhD, RN, PPCNP-BC, FAAN Quinn Franklin, MS Kim Mooney-Doyle, PhD, RN, CPNP-AC Adapté par : Dalila Benhaberou-Brun, B. Sc. inf., B. Sc., M. Sc.

MOTS CLÉS

OBJECTIFS

Adoption . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20 Cheminement clinique . . . . . . . . . . . . . . . . 23 Consentement libre et éclairé . . . . . . . . 25 Counseling . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 Développement familial . . . . . . . . . . . . . . 6 Famille binucléaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 Famille nucléaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 Famille reconstituée . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22 Incidence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 Morbidité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 Prévalence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 Soins à domicile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30 Soins communautaires . . . . . . . . . . . . . . . 26 Soins interprofessionnels . . . . . . . . . . . . . 23 Stress familial. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

Après avoir étudié ce chapitre, vous devriez être en mesure : • • • • • • • • • • •

Disponible sur • À retenir • Carte conceptuelle • Encadrés Web • Solutionnaires

Guide d’études – SA01

2

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

de décrire le rôle de l’infirmière en pédiatrie ; de détailler les composantes d’une évaluation familiale ; d’analyser les différentes structures familiales ; de décrire les différents types de familles ; d’expliquer les différences et les difficultés dans le vécu d’un enfant selon le type de famille dans lequel il évolue ; d’expliquer certains problèmes relatifs à l’éducation des enfants dans des contextes liés à l’adoption, au divorce et au séjour dans des familles d’accueil ; de définir les termes associés à la démographie et à l’épidémiologie ; d’expliquer les particularités de la démarche de soins appliquée à la santé communautaire ; d’expliquer l’importance de la continuité et de la coordination des soins dans un contexte de soins à domicile ; de déterminer quelle doit être la place accordée à la famille dans les soins à domicile ; de résumer les compétences nécessaires à l’infirmière qui travaille en soins pédiatriques à domicile.

Carte conceptuelle

Cette carte conceptuelle illustre schématiquement les principaux concepts décrits dans le présent chapitre. Sa lecture vous permettra d’avoir une vue d’ensemble des notions qui y sont présentées.

présente

1

a besoin de

situations particulières

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visent à

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Chapitre 1

Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté

3

1.1

Principes généraux des soins inrmiers pédiatriques

En pédiatrie, l’inrmière est appelée à assumer de nombreux rôles autant auprès de l’enfant que de ses parents. Elle doit savoir communiquer avec des enfants de tout âge et adapter ses échanges en fonction du milieu de soins dans lequel elle évolue. L’inrmière doit considérer le bien-être de l’enfant en tout temps dans sa pratique professionnelle.

1.1.1

Soins non traumatiques

Bien que des progrès remarquables aient été accomplis dans le domaine des soins pédiatriques, nombre de techniques utilisées pour soigner les enfants demeurent néanmoins traumatisantes, douloureuses, perturbatrices et intimidantes. Les professionnels de la santé doivent donc s’efforcer d’offrir des soins non traumatiques. Il s’agit d’interventions permettant d’éliminer ou de réduire au minimum la détresse physique et psychologique que peuvent vivre les enfants et leur famille dans le réseau de la santé lors d’interventions pouvant causer de la douleur à l’enfant. La détresse psychologique peut comprendre l’anxiété, la peur, la colère, la déception, la tristesse, la honte ou la culpabilité. La détresse physique peut être liée à l’insomnie, à l’immobilisation ou à des stimulus sensoriels perturbateurs comme la douleur, des variations de la température ambiante suscitant un inconfort, des bruits gênants, une lumière vive ou l’obscurité. L’objectif primordial des soins non traumatiques est, avant tout, de ne pas nuire. Ils se fondent sur trois principes : 1) éviter ou réduire au minimum la séparation de l’enfant d’avec sa famille ; 2) favoriser l’existence d’un sentiment de maîtrise ; et 3) éviter ou réduire au minimum les traumatismes et la douleur physiques.

5 Les interventions à pratiquer an de limiter la douleur sont présentées dans le chapitre 5, Évaluation et traitement de la douleur.

Les soins non traumatiques relèvent à la fois de la prévention, du traitement ou des mesures palliatives en cas d’affection grave ou chronique. Ils incluent également le maintien de la relation parent-enfant durant l’hospitalisation, la préparation de l’enfant avant tout nouveau traitement ou intervention, la gestion de la douleur 5 (Harrison, Joly, Chretien et al., 2014), le respect de l’intimité de l’enfant, le fait d’offrir des occasions à l’enfant d’exprimer ses peurs et son agressivité par des activités ludiques, de permettre à l’enfant de faire des choix et de respecter les différences culturelles FIGURE 1.1.

1.1.2

Soins axés sur l’autonomie et le développement

Peu importe le contexte dans lequel sont prodigués les soins, l’inrmière doit agir de façon à favoriser

4

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

FIGURE 1.1 La présence d’un parent pendant l’intervention rassure l’enfant et permet à l’inrmière de lui offrir des soins non traumatiques, mais aussi d’enseigner aux parents les soins à prodiguer à domicile.

une prise en charge autonome de certains soins autrement effectués par les professionnels, enseigner comment utiliser le matériel ou favoriser la gestion des soins de l’enfant par la famille (Association canadienne de santé publique [ACSP], 2010). Ainsi, grâce à une formation appropriée et à une aide adéquate, les membres de la famille de l’enfant ayant des besoins de santé particuliers seront en mesure de pratiquer des interventions complexes et de lui prodiguer les soins nécessaires même lorsque l’enfant sera à domicile.

1.1.3

Soins centrés sur la famille

Un autre aspect important des soins pédiatriques est celui des soins centrés sur la famille. L’inrmière doit respecter le rôle central de la famille, qui consiste à prendre soin des enfants, et s’y associer. En effet, les proches sont les mieux placés pour reconnaître les capacités de l’enfant ainsi que pour évaluer ses besoins et ceux des autres membres de la famille (Keeling, 2014 ; Wright et Leahey, 2013). Plusieurs théories permettent de décrire les familles ainsi que la manière dont l’unité familiale réagit aux événements internes ou externes. Les inrmières doivent s’appuyer sur plusieurs théories à la fois lorsqu’elles travaillent avec les enfants et leur famille (Wright et Leahey, 2013).

1.1.4

Accompagnement de la famille

L’accompagnement de l’enfant et de sa famille repose sur un échange réciproque d’idées et d’opinions an de poser les bases d’une solution à un problème. Il permet à l’inrmière d’offrir un enseignement et vise à faciliter l’expression des sentiments ou des opinions, et aide la famille à mieux composer avec le stress. Dans des conditions optimales, cette démarche permet non seulement de résoudre une crise ou un conflit, mais aussi

d’améliorer le fonctionnement familial et l’image que la famille se fait d’elle-même, en plus de favoriser le rapprochement entre ses membres. Grâce à la relation de collaboration qu’elle établit avec l’enfant et sa famille, l’inrmière peut déterminer leurs besoins affectifs et vérier s’ils requièrent du soutien, voire du counseling. L’inrmière peut alors offrir son appui par une écoute active, un contact physique et sa présence. Le toucher et la présence physique s’avèrent des outils de communication non verbale efcaces auprès des enfants (Sohnen-Moe et Benjamin, 2013). L’inrmière doit également accompagner l’enfant et les membres de sa famille de façon à bien déterminer leurs besoins et à les aider à établir leurs objectifs an de planier les interventions les plus susceptibles de convenir à leur situation (Duhamel, 2015). Entre autres, l’inrmière doit aider l’enfant et sa famille à faire des choix éclairés, et à agir dans l’intérêt fondamental de l’enfant. Elle doit vérier que la famille connaît l’ensemble des services de santé qui sont à sa disposition, qu’elle est informée des traitements et des interventions, que sa participation est bien prise en compte dans les soins de l’enfant, et qu’elle est en mesure d’accepter ou de modier des pratiques de soins mises en place.

1.2

Compréhension de la famille

La famille est une construction sociale qui dépend de notre culture, de la société dans laquelle nous vivons, de nos origines ethniques, de notre religion et de notre appartenance sociale (Lacourse, 2015). La structure et la dynamique familiales peuvent avoir une inuence durable sur l’enfant, et affecter sa santé et son bien-être (Duhamel, 2015 ; Wright et Leahey, 2013). Les inrmières doivent donc connaître les théories sur la famille, les fonctions de la famille ainsi que les différents types de structures familiales, et ce, dans le but d’orienter leurs interventions et de personnaliser les soins.

1.2.1

famille sont basés sur des théories systémiques (Wright et Leahey, 2013). En vertu de ces théories, la famille est considérée comme un système en relation avec des sous-systèmes (p. ex., les personnes) qui gravitent dans un contexte où coexistent plusieurs suprasystèmes (p. ex., la famille élargie ou la communauté) FIGURE 1.2. La théorie générale des systèmes (von Bertalanffy, 1968) réfute le principe de causalité qui établit un rapport direct entre la cause et l’effet (p. ex., l’enfant fait de l’asthme parce que sa mère est trop émotive). Elle propose une explication circulaire dans laquelle les composantes sont étroitement liées. Par exemple, lorsque l’enfant est hospitalisé pour une crise d’asthme, la mère devient très émotive et pose sans cesse des questions à l’inrmière ; les réponses fournies par l’inrmière inuencent à la fois la réponse émotive de la mère et la réaction de l’enfant aux traitements qui, à leur tour, influenceront la réponse de l’infirmière aux membres de la famille. Ainsi, cette théorie met l’accent sur les liens qui unissent les différents membres du système. Il devient ainsi évident que tout changement survenant dans une partie du système familial a un effet sur les autres composantes du système. Ainsi, le changement qui touche un membre de la famille affecte les autres membres, ce qui entraîne un nouveau changement chez le membre initial.

Counseling : Ensemble de pratiques dévolues à l’inrmière consistant à traiter, à orienter, à aider, à informer et à soutenir le client et ses proches.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Il est primordial que l’inrmière explore les relations, les événements et les projets qui ont de l’importance pour la personne soignée.

L’accent est donc mis sur l’interaction entre les membres du système. De cette façon, les problèmes rencontrés ne résident pas chez un membre en particulier, mais relèvent plutôt du type d’interactions qui existe au sein de la famille. En d’autres mots, la source du problème se situe généralement dans les relations entre les personnes plutôt que chez la personne considérée comme élément unitaire, et c’est pourquoi la famille, et non les personnes qui la composent, devient l’objet des soins. Le système familial fonctionne au sein d’un système plus large (suprasystème) constitué de la famille élargie, de la sous-culture, de la culture et

Théories sur la famille

Plusieurs théories permettent de décrire les familles ainsi que la manière dont l’unité familiale réagit aux événements d’ordre interne ou externe. Chaque théorie repose sur des postulats assortis des forces et des faiblesses inhérentes à une structure familiale. Les inrmières doivent s’appuyer sur plusieurs théories à la fois lorsqu’elles travaillent avec les enfants et leur famille (Wright et Leahey, 2013).

Théories systémiques La plupart des modèles, des conceptions ou des écoles de pensée en soins inrmiers ciblant la

FIGURE 1.2 Représentation des soussystèmes et des suprasystèmes de la famille

Chapitre 1

Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté

5

1

de la société. Suivant cette logique selon laquelle « le tout est plus grand que la somme de ses éléments », l’inrmière doit tenir compte des relations entre les membres de la famille et des rapports de la famille avec son environnement. Pour produire des changements positifs au sein d’une famille, il est nécessaire de considérer longuement les différents systèmes qui interviennent dans la vie familiale et de s’y référer avant de décider de l’intervention. Le concept d’adaptabilité permet d’envisager la famille comme un système exible qui tente de s’adapter à toute nouvelle situation an de maintenir son équilibre (Wright et Leahey, 2013). Le concept de frontière, la ligne imaginaire séparant la famille des autres systèmes et de son environnement, est d’une grande utilité pour mesurer l’adaptabilité du système. En effet, des frontières trop perméables ou trop rigides ont des conséquences importantes sur l’adaptabilité du système. La connaissance de ces frontières est essentielle et aide à déterminer quel enseignement ou quels conseils seront donnés aux familles. Les familles dont les frontières sont ouvertes peuvent s’avérer plus réceptives aux interventions, alors que l’inrmière qui traite avec des familles aux frontières fermées (p. ex., lorsque les parents redoutent que leurs compétences parentales soient jugées) devra se montrer plus sensible et plus habile an de gagner leur conance et leur acceptation.

Théories du développement familial Les cycles de la vie familiale sont expliqués en détail dans le chapitre 15 du manuel de Potter, P.A., et Perry, A.G. (2016). Fondements généraux (3e éd.). Montréal : Chenelière Éducation.

Les théories du développement familial envisagent les changements familiaux dans le temps et décrivent des stades du cycle de la vie familiale, qui reposent sur des modications prévisibles de structure, de fonction et de rôles au sein de la famille. Ainsi, Duvall (1977) a décrit le développement de la famille en étapes qui jouent un rôle dans la consolidation du système familial. Dans cette approche, l’âge de l’enfant aîné fait ofce de marqueur de transition d’un stade à l’autre. Plus récemment, McGoldrick et ses collaborateurs (2016) se sont plutôt basées sur les grandes transitions de vie pour décrire six stades du cycle de la vie familiale nord-américaine : 1. jeune adulte vivant seul ; 2. formation du couple ; 3. famille avec de jeunes enfants ; 4. famille avec des adolescents ; 5. famille au départ des enfants ; 6. parents à la période de la retraite. Peu importe le modèle utilisé, le principe de base demeure le suivant : la famille doit remplir certaines tâches et s’approprier certains rôles selon l’étape où elle se situe. Les théories du développement familial peuvent permettre à l’inrmière

6

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

d’évaluer dans quelle mesure la famille s’adapte aux différents stades de développement qu’elle franchit.

Théorie du stress familial Le stress est une composante inévitable de la vie, et tout événement, même heureux, peut créer du stress dans la famille. La théorie du stress familial analyse comment les familles réagissent et s’adaptent aux événements stressants. Les familles peuvent se heurter à divers agents stressants (événements qui peuvent alors affecter le système que constitue la famille), dont certains sont normatifs et prévisibles (p. ex., la condition de parent ou le deuil), et d’autres, imprévisibles (p. ex., la maladie, l’alcoolisme, le chômage, la faillite personnelle, la perte du domicile ou l’incarcération) (Chui, 2016 ; Roubinov et Boyce, 2017). Ces agents stressants sont cumulatifs et exercent des pressions simultanées sur la vie professionnelle, familiale et communautaire (Institut national de santé publique du Québec [INSPQ], 2011). Les familles font face au stress et s’y ajustent de diverses manières et avec une efcacité très variée. Une famille soumise à trop d’événements stressants dans une période relativement courte peut épuiser sa capacité à faire face aux difcultés et risque d’atteindre le point de rupture tandis que ses membres s’exposent à des problèmes de santé physique ou mentale. Lorsque la famille se heurte à trop d’agents stressants pour pouvoir y faire face adéquatement, un état de crise s’installe. Un changement dans la structure ou dans les interactions familiales s’impose pour permettre l’adaptation. Le modèle décrivant le mécanisme de récupération du stress et de l’adaptation familiale précise qu’une situation stressante n’est pas nécessairement pathologique ou nuisible à la famille, mais que celle-ci doit cependant apporter des changements structuraux ou systémiques fondamentaux pour s’adapter à la situation (Rasheed, Rasheed et Marley, 2011).

1.2.2

Modèles d’analyse et d’intervention familiales

Au Québec, plusieurs établissements de santé ont choisi d’adopter des modèles de soins visant la famille. Le modèle Allen, développé à l’Université McGill en 1987 (Gottlieb et Rowat, 1987), et l’approche systémique familiale (ASF) de Calgary, mise au point par deux inrmières albertaines en 1984 (Wright et Leahey, 2013), sont les deux modèles les plus utilisés au Québec. Ces modèles proposent aux inrmières de considérer la personne à travers une optique familiale plutôt qu’individuelle au moment de l’évaluation de la situation de santé. Ainsi, les soins basés sur ces deux approches théoriques accordent une grande

importance aux interactions entre les personnes ainsi qu’au respect du cheminement de l’enfant et de sa famille, et elles misent particulièrement sur les forces et les capacités des familles pour surmonter les obstacles liés aux différents problèmes de santé pouvant affecter l’enfant.

Modèle Allen Plus communément appelé le modèle McGill, ce modèle inrmier a été originalement conçu dans une optique de promotion de la santé par des inrmières de l’Université McGill. Il est basé principalement sur la théorie générale des systèmes (von Bertalanffy, 1968) et vise le développement de stratégies d’adaptation de la famille pour lui permettre d’optimiser sa réponse à un problème de santé. Il s’agit d’un modèle conceptuel inrmier qui précise le rôle de l’inrmière en fonction des quatre concepts centraux du métaparadigme inrmier, soit : 1. la santé ; 2. l’environnement ; 3. la personne ; 4. le soin. Au l du temps, le modèle a évolué pour spécier davantage l’importance des croyances et celle des forces individuelles et familiales dans l’évolution de la maladie (Paquette-Desjardins, Sauvé et Pugnaire Gros, 2015).

Approche systémique familiale de Calgary Cette approche est basée sur plusieurs théories mises en commun an de fournir aux inrmières un cadre théorique permettant de guider l’évaluation de la dynamique familiale et d’intervenir auprès des familles dans une perspective dite systémique, c’est-à-dire en tenant compte de la réciprocité existant entre l’évolution de la maladie et la dynamique familiale. Les auteures ont également incorporé, de manière très approfondie, le concept de croyance dans leur approche, soulignant leur rôle important autant dans l’évolution du problème de santé que dans le choix des interventions inrmières (Wright et Bell, 2009 ; Wright et Leahy, 2013). Plusieurs outils ont été conçus par ces auteures pour aider les inrmières à remplir leur rôle auprès des familles, par exemple le génogramme et l’écocarte, qui seront abordés plus loin dans le chapitre.

Relation inrmière-famille La relation inrmière-famille constitue le point charnière de toute pratique inrmière auprès d’enfants ou d’adolescents, et l’établissement d’une relation de conance entre l’inrmière et la famille constitue indubitablement un fondement de la prestation de soins inrmiers de qualité (Wright

et Leahey, 2013). Il est important, pour l’établissement d’une bonne relation inrmière-famille, que l’inrmière respecte les connaissances et l’expertise de la famille (Duhamel, 2015). De plus, l’infirmière doit valoriser les connaissances propres à la famille an que ses membres puissent croire en leurs compétences. Pour ce faire, il est essentiel de comprendre les besoins des parents et leurs désirs. La considération des perspectives des familles représente parfois un dé pour les inrmières, mais elle n’en demeure pas moins une occasion de discussion (Hielkema, De Winter et Reijneveld, 2017). Le but premier de cette démarche de reconnaissance de l’expertise de la famille est d’optimiser la qualité des soins prodigués à l’enfant.

1

Le modèle Allen est présenté en détail dans l’ouvrage de Paquette-Desjardins, D., Sauvé, J., et Pugnaire Gros, C. (2015). Modèle McGill. Une approche collaborative en soins inrmiers. Montréal : Chenelière Éducation.

Partage des rôles L’inrmière en pédiatrie doit être proche des enfants et de leur famille, tout en demeurant consciente de ses propres besoins et de ses émotions. Dans une relation infirmière-famille constructive, des limites claires séparent l’inrmière de l’enfant et de sa famille, permettant de départager les rôles respectifs de chacun. Ces limites revêtent un caractère positif et professionnel, et font en sorte que la famille conserve la maîtrise des soins de santé prodigués à l’enfant. Le respect des droits de la famille passe par l’établissement et le respect de limites qui permettent la promotion de la relation de conance (Leprohon, Truchon et Roger, 2008). L’inrmière et la famille assument ainsi chacune un certain pouvoir et protent d’une communication ouverte. L’inrmière doit prendre conscience de l’interaction entre ses propres croyances et celles de la famille, entre les croyances parfois divergentes entre les membres de la famille, et ce, tout en préservant une attitude de neutralité (Duhamel, 2015). Lorsque ce n’est pas le cas, la relation qui s’établit autour de limites floues s’avère peu constructive. Dans ces circonstances, certaines des interventions de l’inrmière peuvent n’avoir pour but que de combler des besoins personnels, comme l’envie de se sentir indispensable et appréciée, plutôt que de chercher une réponse aux besoins de la famille, avec le risque potentiel de nuire aux relations existant entre les membres de cette dernière. Par exemple, il n’y a pas lieu de recueillir des informations sur la famille à propos d’éléments pertinents gurant déjà dans le dossier de l’enfant. L’inrmière devrait expliquer le motif de ses questions, surtout pour celles qui risquent de sembler indiscrètes. Il est approprié d’indiquer à la famille quelles personnes pourront consulter ces informations et de l’informer de son droit à la condentialité 4 . La communication avec les

Chapitre 1

Une adaptation du modèle de Calgary est présentée dans Duhamel, F. (2015). La santé et la famille : une approche systémique en soins inrmiers (3e éd.) Montréal : Chenelière Éducation.

Croyances : Les croyances sont des idées, des convictions auxquelles l’individu adhère. Ces croyances guident ses actions et déterminent son adaptation à une problématique de santé. CE QU’IL FAUT RETENIR

La relation inrmièrefamille constitue le point charnière de toute pratique inrmière auprès d’enfants ou d’adolescents.

4 La communication avec la famille est étudiée dans le chapitre 4, Examen clinique : anamnèse et examen physique.

Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté

7

Jugement

clinique Gabrielle, âgée de quatre ans, a été heurtée par une voiture hier soir. Elle est actuellement à l’unité de traumatologie avec une traction cutanée en raison d’une fracture au fémur droit. Elle est souffrante. Ses parents sont anxieux et supportent difcilement de la voir souffrir. Quelle stratégie devriez-vous privilégier pour établir une relation de conance dans cette situation où la famille est en état de choc ? a) Ne pas tarder à intervenir selon les demandes de Gabrielle ou de ses parents. b) Démontrer de la sollicitude envers Gabrielle et ses parents lors des soins. c) Respecter les droits de chacun en laissant les parents prodiguer certains soins à Gabrielle. d) Expliquer en détail et dans un langage clair les soins à prodiguer à Gabrielle.

Jugement

clinique À titre d’inrmière scolaire, vous rencontrez Devon, un élève de maternelle, car, depuis quelques jours, ce dernier est triste et fait des dessins sombres montrant sa maison qui est détruite. Il se serait même disputé avec sa sœur durant la récréation ce matin. Parmi les questions suivantes, laquelle pourriez-vous poser en guise d’introduction si vous souhaitez déterminer la nécessité de procéder à une évaluation familiale plus approfondie ? a) Est-ce qu’il y a quelque chose qui te rend triste ces jours-ci ? b) Peux-tu m’expliquer ce que représentent tes dessins ?

membres de la famille devrait inclure le partage de l’information complète et impartiale sur tous les aspects de l’état de santé de l’enfant et des soins. Les parents se sentent souvent frustrés lorsqu’ils ne parviennent pas à obtenir des précisions sur la maladie de leur enfant et sur sa gestion (Bonnet, 2015). Un plan de soins peut être élaboré avec les parents pour les renseigner tout au long du suivi. L’information devrait être partagée avec la famille de manière à ce qu’elle ait un sens dans son contexte culturel (Dabney, McClarin, Romano et al., 2015). Beaucoup de parents soulignent le fait qu’ils préfèrent parler avec des soignants qui manifestent de l’empathie et de l’intérêt (Bry, Bry, Hentz et al., 2016). Cependant, le besoin des familles est variable en ce qui a trait à la quantité d’information qu’elles souhaitent obtenir sur l’état de santé de leurs enfants.

1.2.3

Évaluation de la situation familiale

Le style de fonctionnement propre à une famille, les relations entre ses membres d) Qu’est-ce qui a causé la dispute avec ta sœur et les forces particulières ce matin ? de chacun sont des ressources importantes que les infirmières peuvent mettre à profit pour répondre aux besoins des familles (Wright et Leahey, 2013). Les relations que l’enfant entretient et les rôles qu’il est amené à jouer permettent de mieux comprendre certains comportements de l’enfant. L’infirmière évalue le degré de satisfaction que ces relations apportent à l’enfant et relève celles qui, à l’évidence, nécessitent des changements. Dans la mesure où la qualité de la relation fonctionnelle entre l’enfant et les membres de sa famille constitue un facteur décisif de sa santé affective et physique, l’infirmière se doit de recueillir des données sur la composition de la famille et sur les relations établies entre ses membres (Wright et Leahey, 2013). Lorsque la composition familiale est évaluée, il est parfois difficile de confirmer c) Comment ça va à la maison avec tes parents et ta sœur ?

8

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

le statut des relations qui ont cours entre les adultes. Si l’un des parents ne mentionne pas l’autre, l’infirmière demandera : Où est le père [ou la mère] de l’enfant ? Miser sur les qualités qui garantissent le bon fonctionnement d’une famille et en consolider les ressources contribue à renforcer l’unité familiale. L’évaluation familiale n’est pas une thérapie familiale, mais elle peut néanmoins avoir des effets thérapeutiques. Lorsque les membres s’engagent dans des discussions concernant les caractéristiques et les activités de la famille, ils illustrent la dynamique et les relations qu’ils entretiennent. Le génogramme FIGURE 1.3 et l’écocarte FIGURE 1.4 sont deux outils particulièrement efficaces qui donnent un aperçu visuel de la structure familiale et des rapports établis entre ses membres et leur réseau social. En raison du temps nécessaire pour effectuer une évaluation familiale approfondie, l’inrmière devra préalablement juger si l’information dont elle dispose déjà sur le fonctionnement familial est sufsante an de faciliter les soins inrmiers ENCADRÉ 1.1 . Lorsque les contacts avec les membres de la famille ont été brefs et qu’un examen complet ne convient pas, l’inrmière peut se faire une idée de la santé du système familial ou de la nécessité de faire d’autres examens en posant simplement une ou deux questions de chaque catégorie ENCADRÉ 1.2.

1.2.4

Congurations familiales

Structures familiales Traditionnellement, la structure familiale renvoyait à une famille nucléaire ou élargie. Au cours des dernières années, la composition familiale a connu de nouvelles transformations ; par exemple, les familles monoparentales et recomposées sont devenues très courantes. Les inrmières doivent être en mesure de répondre aux besoins des enfants issus de structures et de situations familiales diverses. Le type particulier de structure familiale à laquelle se rattache un enfant peut avoir un effet sur sa santé et sur l’orientation des soins inrmiers (Ward, Hisley et Mitchell Kennedy, 2016).

Famille nucléaire La famille nucléaire est composée de deux parents, mariés ou non, et de leurs enfants. Il peut s’agir d’enfants biologiques, par alliance, adoptés ou en famille d’accueil. Aucun autre parent ou personne extérieure à la famille ne fait partie du ménage. Les couples en union libre et les couples mariés représentent respectivement 16,7 % et 67 % des familles (Statistique Canada, 2011a). Au Québec, les couples en union libre représentent 39,7 % des

familles, comparativement à 60,3% des familles formées de couples mariés (Institut de la statistique du Québec, 2013).

Famille élargie Une famille élargie comprend des personnes de plusieurs générations, apparentées ou non, dont au moins un parent et un enfant. Les enfants et les parents, de même que les enfants entre eux, peuvent être liés par des relations biologiques, matrimoniales ou adoptives. La famille élargie peut être une famille d’accueil. Dans certains pays ou groupes culturels et ethniques, la famille élargie est très présente et joue un rôle important. Cette organisation peut faciliter la gestion de ressources limitées et permet d’assurer la garde des enfants dont les parents travaillent. Dans ce type de famille, les grands-parents sont parfois responsables de l’éducation de leurs petits-enfants, et les jeunes parents peuvent être considérés comme trop jeunes ou trop inexpérimentés pour prendre leurs décisions en toute indépendance. En raison du vieillissement de la population, il est de moins en moins rare que quatre générations se côtoient dans une même famille ; ainsi, il peut arriver que le parent plus âgé détienne l’autorité et qu’il prenne les décisions après avoir consulté les jeunes parents FIGURE 1.5.

plus vive que la discrimination liée au statut de chef de famille monoparentale 2 . Au Québec, les familles vivant en contexte de vulnérabilité sont soutenues par le programme Services intégrés en périnatalité et pour la petite enfance (SIPPE) (ministère de la Santé et des Services sociaux [MSSS], 2016b). Pour recevoir ces services, l’un des futurs parents doit être une femme enceinte ou une mère de moins de 20 ans, ou encore une femme enceinte ou un parent de 20 ans et plus qui n’a pas obtenu de diplôme (DES ou DEP) et qui a un faible revenu. Il s’agit d’abord et avant tout d’offrir un soutien sous forme de visites à domicile dès la 12e semaine de grossesse, ce soutien se poursuivant jusqu’à ce que l’enfant ait atteint l’âge de 5 ans.

2

1

L’incidence des facteurs socioéconomiques sur la santé est abordée dans le chapitre 2, Inuences socioculturelles sur les soins de santé.

Famille monoparentale Une famille monoparentale se forme après un divorce, un décès ou un abandon, ou lorsqu’une personne célibataire décide d’avoir ou d’adopter des enfants. Au Canada, en 2011, 16,3 % des familles étaient de type monoparental et 19,3 % de tous les enfants de moins de 15 ans vivaient dans une telle famille (Statistique Canada, 2011a). Les statistiques de la même année faisaient ressortir que 80 % des familles monoparentales, soit 1,1 million de ménages, avaient une femme à leur tête. En 2011, les familles monoparentales ayant un homme à leur tête représentaient 3,5 %, contre 12,8 % pour celles dirigées par une femme (Statistique Canada, 2011b). La gestion de ressources nancières limitées, du temps et de l’énergie à consacrer aux diverses tâches est une préoccupation majeure pour plusieurs chefs de familles monoparentales. Traditionnellement, ces familles sont parmi les plus défavorisées sur le plan économique (Statistique Canada, 2011a). Le fardeau nancier des parents seuls est encore plus lourd pour un parent adolescent et peut avoir des conséquences à long terme pour lui et son enfant. La pauvreté est un facteur connu présageant des effets indésirables sur la santé et le bien-être de l’enfant. Il est possible que les stigmates de la pauvreté laissent une empreinte

FIGURE 1.3 Exemple d’un génogramme familial dans lequel Tom, 2 ans, est le client principal

Chapitre 1

Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté

9

FIGURE 1.4

Exemple d’écocarte décrivant les liens de la famille avec les ressources externes

Pratiques inrmières ENCADRÉ 1.1

Juger de la nécessité d’une évaluation familiale approfondie

L’inrmière peut procéder à une évaluation approfondie de la famille dans les cas suivants :

• Enfant requérant des soins à domicile complexes

• Enfant ayant reçu un suivi préventif complet pendant l’enfance, par exemple dans le cadre du programme Services intégrés en périnatalité et pour la petite enfance (SIPPE)

• Enfant victime de blessures accidentelles répétitives ou de violence soupçonnée

• Enfant soumis à des événements de la vie particulièrement stressants (p. ex., une maladie chronique, une incapacité, un divorce parental, le décès d’un membre de la famille) Source : Adapté de Cantrill et Cottrell (1997).

10

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

• Enfant présentant des retards dans son développement

• Enfant présentant des problèmes comportementaux ou physiques susceptibles de résulter d’une dysfonction familiale • Famille ayant des difcultés à s’adapter au problème de santé de l’enfant

ENCADRÉ 1.2

1

Entrevue pour une évaluation familiale approfondie

LIGNES DIRECTRICES GÉNÉRALES

– Quelle est la langue la plus souvent parlée dans la famille ?

• Planier l’entretien à un moment convenant à tous les membres de la famille ; inclure autant de membres que possible ; énoncer clairement le ou les objectifs de la rencontre lors de l’invitation.

– Les membres de la famille parlent-ils et comprennent-ils le français ?

• Commencer l’entrevue en demandant à chaque personne son nom et son lien de parenté avec les autres. • Énoncer de nouveau le but et les objectifs de l’entrevue. • Amorcer une conversation initiale générale de façon à mettre les membres de la famille à l’aise et à obtenir une vue d’ensemble de la famille. • Déterminer les principaux problèmes et en faire part aux membres de la famille pour s’assurer que toutes les parties sont d’accord. • Mettre n à l’entrevue en récapitulant ce dont il a été question et planier d’autres séances, au besoin. DOMAINES D’ÉVALUATION STRUCTURELLE

Composition de la famille

– Quelles croyances religieuses ou ethniques pourraient inuencer la perception familiale de la maladie et de son traitement ? – À quelles méthodes la famille recourt-elle pour prévenir ou traiter des maladies ? – Comment les membres de la famille savent-ils qu’un problème de santé nécessite une consultation médicale ? – À qui les membres de la famille s’adressent-ils lorsqu’un membre est malade ? – La famille a-t-elle recours à des guérisseurs, ou à des remèdes culturels ou religieux ? (Dans l’afrmative, leur demander de décrire le type de guérisseur ou de remède.) – Vers qui les membres de la famille se tournent-ils pour obtenir du soutien (clergé, guérisseur, membres de la famille) ? DOMAINES D’ÉVALUATION FONCTIONNELLE

• Membres immédiats du foyer (nom, âge et lien de parenté)

• L’inrmière peut se servir de ces questions d’évaluation :

• Membres signicatifs de la famille élargie • Antécédents de mariage, de séparation, de divorce ou de décès d’un conjoint Environnement domestique et communautaire • Type de logement, nombre de chambres à coucher et d’occupants

– Quelles activités les membres de la famille effectuent-ils ensemble ? – À qui les membres de la famille s’adressent-ils lorsque quelque chose les perturbe ?

• Organisation des lits

– Quelles sont les corvées ménagères dont s’acquittent les membres de la famille ?

• Nombre d’étages, accessibilité des escaliers et ascenseurs

– En général, qui supervise la scolarité ou les soins de santé des enfants ?

• Commodité des salles d’hygiène

– Dans quelle mesure les membres de la famille acceptent-ils facilement d’assumer de nouvelles responsabilités ou d’en changer ?

• Paramètres de sécurité (escaliers de secours, détecteurs de fumée et de monoxyde de carbone, glissières de sécurité sur les fenêtres, utilisation de dispositifs de sécurité en voiture) • Dangers environnementaux (salubrité des lieux, pollution, circulation automobile importante dans la rue) • Accessibilité et emplacement des établissements de soins de santé, des écoles et des aires de jeux

Autorité, prise de décision et résolution des problèmes • L’autorité désigne l’inuence que chaque membre de la famille exerce sur les autres ; elle se manifeste dans la prise de décisions familiales et dans la résolution des problèmes. • La principale préoccupation concerne la clarté des limites établies entre les parents et les enfants quant à l’autorité.

• Crise récente ou changements survenus à la maison Profession et scolarité des membres de la famille

• Une méthode d’évaluation particulière consiste à formuler un conit ou un problème hypothétique, comme l’échec scolaire de l’enfant, et de demander à la famille comment elle réagirait à cette situation.

• Type d’emploi

• L’inrmière peut se servir de ces questions d’évaluation :

• Réaction et ajustement de l’enfant à des stress récents

• Horaires de travail

– En général, qui prend les décisions dans la famille ?

• Satisfaction à l’égard de leur emploi • Sources de revenus et capacités nancières

– Lorsqu’un parent prend une décision, l’enfant peut-il faire appel à l’autre parent pour qu’il la modie ?

• Effet de la maladie sur le statut nancier

– Qui établit les règles et se charge de les appliquer ?

• Diplôme ou niveau de scolarité le plus élevé

– Quel est le rôle des enfants dans les prises de décisions ou dans l’établissement des règles ?

Traditions culturelles et religieuses

– Que se passe-t-il quand une règle n’est pas respectée ?

• L’inrmière peut se servir de ces questions d’évaluation : – La famille se sent-elle liée à une religion ou à un groupe ethnique précis ? Les deux parents appartiennent-ils à ce groupe ? – Quelles traditions religieuses ou culturelles spéciales sont respectées à domicile (p. ex., le choix et la préparation des aliments) ? – Quel est le lieu de naissance des membres de la famille ? Depuis combien de temps vivent-ils au pays ?

Chapitre 1

Communication • La communication a trait à la clarté des modes de communication et à leur caractère direct. • Une autre forme d’évaluation consiste à demander périodiquement aux membres de la famille s’ils ont compris ce qui vient d’être dit et de répéter le message.

Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté

11

ENCADRÉ 1.2

Entrevue pour une évaluation familiale approfondie (suite)

• L’inrmière peut se servir de ces questions d’évaluation : – Les parents ou les frères et sœurs aînés ont-ils tendance à sermonner les autres ? – Les parents ont-ils tendance à réduire l’enfant au silence (en parlant plus fort) ? • Elle doit noter ses observations : – Qui parle à qui ? – Est-ce qu’une personne parle à la place d’une autre ou l’interrompt ? – Certains membres ont-ils l’air de perdre leur intérêt lorsque d’autres parlent ? – Quelle est la concordance entre les messages verbaux et non verbaux ?

Expression des sentiments et de l’individualité • L’inrmière peut se servir de ces questions d’évaluation : – Les membres de la famille peuvent-ils exprimer leur colère ou leur tristesse librement ? – Qui se fâche le plus souvent ? De quelle manière cette personne agit-elle ? – Si quelqu’un est contrarié, comment les autres membres de la famille s’efforcent-ils de le réconforter ? – Qui est chargé de rassurer certains membres de la famille ? – Lorsqu’un des membres formule une aspiration, par exemple essayer un nouveau sport ou chercher à obtenir un emploi, quelle est la réaction des autres membres de la famille (aide, découragement ou aucun conseil) ?

pour soulager les parents et prévenir le surmenage ; des centres de perfectionnement pour les parents, grâce auxquels ceux-ci pourront augmenter leur instruction et leurs habiletés professionnelles, prendre part à des activités de loisir et à des cours sur l’éducation des enfants. Les parents seuls doivent avoir des contacts sociaux autres que ceux qu’ils ont avec leurs enfants, pour leur propre croissance sur le plan affectif de même que pour celle de leurs enfants.

Famille binucléaire

FIGURE 1.5 Les enfants peuvent bénécier des interactions avec les grands-parents, qui assument parfois le rôle de parents.

La famille binucléaire est une famille dans laquelle les parents, séparés ou divorcés, assument tous les deux leurs rôles de parents (Wright et Leahey, 2013). Le degré de coopération et le temps que l’enfant passe avec chacun des parents peuvent varier. Dans les cas de garde partagée ou conjointe, le tribunal assigne aux parents divorcés les mêmes droits et responsabilités à l’égard des enfants mineurs. Cette conguration familiale témoigne de la volonté de la part des personnes concernées d’envisager le divorce comme un processus de réorganisation et de redénition de la famille plutôt que comme une dissolution familiale (Poitras, Mignault et Goubau, 2014).

Famille recomposée À Montréal, la Maison Oxygène (www.maisonoxygene. com) offre un hébergement provisoire et du soutien aux pères vivant des difcultés.

Les visites visent à favoriser le développement optimal des enfants et à améliorer leurs conditions de vie. An d’assurer une continuité des services, l’intervenant le plus apte à répondre aux besoins prioritaires de la famille est désigné pour effectuer ces visites (p. ex., une inrmière, un travailleur social, un psychoéducateur), en collaboration avec une équipe interprofessionnelle (Guay, Bell, Doré et al., 2015). Les ressources sociales et communautaires dont les familles monoparentales ont besoin sont, entre autres, des services de soins de santé ouverts les soirs et les ns de semaine ; des services de garde de bonne qualité ; des services de garde de répit

12

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

Une famille recomposée est une famille formée de deux parents dont l’un ou l’autre, ou les deux ont eu des enfants lors d’une précédente union (ministère de la Famille et des Aînés [MFA], 2016). Au Québec, parmi les familles comptant deux parents, 12,6 % sont des familles recomposées (Statistique Canada, 2011a). L’entrée d’un beau-parent dans une famille déjà constituée requiert des ajustements de la part de tous les membres de la famille et peut entraîner des tensions (Pylyser, Buysse et Loeys, 2017). Les facteurs faisant obstacle aux ajustements de rôle et à la résolution de problèmes familiaux incluent

Par une approche préventive, l’inrmière peut favoriser les échanges, le dialogue (expression des sentiments, des besoins de chacun, etc.) et le soutien entre les membres de la famille. Elle peut intervenir pour orienter les discussions et doit permettre à tous de s’exprimer an de soutenir certains membres de la famille qui, à un moment ou à un autre, éprouveraient des difcultés plus grandes. Elle peut encourager le développement d’un réseau de soutien entre des familles qui vivent la même expérience an de rompre l’isolement. Elle peut fournir à ces familles certains modèles de référence et renforcer les capacités parentales par l’amélioration de la communication ainsi que par l’apprentissage de certaines habiletés facilitant la résolution de problèmes.

Parents homosexuels et transsexuels Deux personnes de même sexe ayant des enfants forment une famille homoparentale (Wright et Leahey, 2013). Certains enfants de familles homoparentales sont biologiquement liés à l’un des parents du fait d’un précédent mariage, d’une précédente relation ou de fécondation articielle. Les enfants peuvent également avoir été adoptés ou placés en famille d’accueil. La Cour supérieure du Québec a afrmé que les parents transgenres ne doivent pas être traités différemment de n’importe quel autre parent en ce qui concerne la garde d’enfants (Éducaloi, 2015). Selon Statistique Canada (2011a), le nombre de couples mariés de même sexe a presque triplé entre 2006 et 2011 au Canada. De ce nombre, moins de 15 % des couples féminins ont au moins 1 enfant qui vit à la maison, et moins de 2 % des couples masculins ont au moins 1 enfant qui vit à la maison. L’environnement que procure une famille homoparentale ne diffère pas de celui des autres familles (Farr, 2017 ; Wright et Leahey, 2013) FIGURE 1.6. Cependant, il n’est pas toujours évident pour les parents de même sexe d’expliquer leur sexualité à leurs enfants et de se faire

accepter par leur entourage. Les infirmières doivent s’abstenir de porter des jugements, et plutôt apprendre à soutenir et à ne pas discriminer les enfants issus de couples homosexuels ou transgenres (Coalition des Familles LGBT, 2014). Par ailleurs, plus l’infirmière aura des connaissances détaillées de l’environnement familial des enfants et de leur mode de vie, plus elle sera en mesure de les aider, eux et leurs parents (Association mondiale des professionnels pour la santé transgenre, 2013 ; Kirouac et Tan, 2017).

Position ordinale de l’enfant

1

FIGURE 1.6 L’environnement que procure une famille homoparentale ne diffère pas de celui des autres familles.

L’ordre de naissance de l’enfant pourrait inuencer le développement de sa personnalité (Schultz et Schultz, 2016). Les parents traitent leurs enfants différemment, et les interactions fraternelles varient en fonction de l’ordre de naissance de l’enfant dans la famille. Le pouvoir est réparti inégalement entre frères et sœurs, et les plus âgés tendent à dominer les plus jeunes. Par conséquent, les frères et sœurs plus jeunes développent des habiletés interpersonnelles de même qu’une aptitude à négocier et à mieux accepter les situations défavorables (Pronovost et Legault, 2009). Les cadets interagissent avec d’autres frères et sœurs dès la naissance, et paraissent plus extravertis et plus habiles à se faire des amis que les premiers-nés. Les caractéristiques générales des enfants selon leur position ordinale sont présentées dans le TABLEAU 1.1. Cependant, les enfants sont extrêmement différents les uns des autres, et il est impossible de généraliser.

Enfant unique

clinique

Être l’enfant unique d’une famille était traditionnelleRamona est âgée de six ans ; elle est l’aînée de la ment considéré comme un famille. Son tempérament est très différent de désavantage. Les enfants celui de la cadette, qui se montre beaucoup plus uniques passaient pour des réservée. Sa mère se demande quelle peut être la enfants égoïstes, gâtés, raison de la différence qu’elle observe dans leur dépendants et solitaires. comportement. Que devriez-vous lui répondre ? Cependant, ils ne montrent pas plus de signes d’inadaptation ou d’égocentrisme que les autres enfants, et ils tendent à présenter les mêmes caractéristiques que les premiers-nés (Chen et Liu, 2014).

Chapitre 1

Jugement

la perturbation des modes de vie et d’interaction antérieurs, la complexité inhérente à la formation de nouvelles relations et l’absence de soutiens sociaux. Ainsi, les familles qui participent à des programmes de soutien semblent développer une relation plus harmonieuse (Lucier-Greer, AdlerBaeder, Harcourt et al., 2014). La exibilité, le soutien mutuel et une communication franche sont essentiels à la réussite des relations dans les familles reconstituées et à l’éducation des enfants par beaux-parents interposés. Toutefois, les familles reconstituées ne cherchent pas toujours à obtenir de l’aide pour prévenir les problèmes. Elles ne sollicitent d’ordinaire de l’information et du counseling que lorsque les problèmes apparaissent et qu’il n’est plus possible de les ignorer. Une approche préventive plutôt que correctrice s’impose (Wright et Leahey, 2013).

Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté

13

L’Association de Parents de Jumeaux et de Triplés de la région de Montréal inc. (www.apjtm.com) offre plusieurs services aux parents d’enfants multiples (rencontres, soutien téléphonique, activités en famille, etc.).

Les enfants uniques obtiennent de meilleurs résultats aux tests cognitifs, font preuve d’une grande maturité, démontrent une sensibilité sociale plus développée et une plus grande facilité avec les langues que les autres enfants (Pronovost et Legault, 2009). Ils ont aussi l’avantage d’avoir des parents qui peuvent leur consacrer plus de temps. Cependant, un isolement relatif peut être observé vis-à-vis de leurs pairs, ce qui semble contribuer à leur goût pour les activités intellectuelles, à la richesse de leur imagination, à leur indépendance et à leur originalité TABLEAU 1.1 .

Naissances multiples Le taux de naissances multiples au Canada a connu une augmentation soutenue depuis le début des années 1990. Au Québec, la proportion de naissances multiples est passée de 2,5 % en 2000 à 2,9 % en 2016 (Institut de la statistique du Québec, 2017b). La hausse du taux de naissances multiples a été associée à l’augmentation des grossesses chez les femmes plus âgées et à l’emploi plus répandu des médicaments permettant d’augmenter la fertilité (Institut de la statistique du Québec, 2012). L’arrivée d’un tout nouveau membre dans un ménage crée du stress, mais en cas de naissances multiples, au moins deux membres doivent s’intégrer en même temps à la famille. Une récente méta-analyse a mis en évidence des problèmes de santé mentale plus importants dans ces familles que pour les familles qui ont un seul enfant (Wenze, Battle et Tezanos, 2015). Outre les détails pratiques liés aux soins physiques de deux nourrissons en même temps, les parents font face à des dés psychologiques importants. La planication devient essentielle, et le développement des enfants amène de nouveaux problèmes et de

TABLEAU 1.1

nouveaux ajustements (p. ex., des réaménagements de l’espace et des plages de temps consacrées au sommeil, le choix d’une poussette et des autres équipements). Les études récentes suggèrent d’étendre les recherches, notamment en ce qui concerne les possibilités de soutien (Wenze et al., 2015).

Inuences entre frères et sœurs Âge des enfants et écarts entre eux La différence d’âge entre les frères et les sœurs exerce un effet sur l’environnement de l’enfant, mais moins que le sexe des enfants de la fratrie. L’arrivée d’un frère ou d’une sœur est difcile pour les trottineurs (de 1 à 3 ans) et pour les enfants d’âge préscolaire (de 3 à 6 ans), mais elle est particulièrement délicate pour les enfants âgés de 2 à 3 ans (Wright et Leahey, 2013). Ces derniers sont encore très attachés à leurs parents et ne saisissent pas le concept de partage. Il n’y a pas d’écart d’âge idéal, et les réactions de l’enfant plus âgé varient selon sa maturité et le temps que les parents passent avec lui (Naître et grandir, 2015). Un enfant plus âgé peut comprendre la situation et il risque moins de percevoir le nouveau bébé comme une menace, quoiqu’il ressente la perte de son statut d’enfant unique. Les relations fraternelles ont longtemps été appréhendées dans une perspective freudienne mettant l’accent sur le concept de rivalité fraternelle. Ces relations sont aujourd’hui examinées selon une perspective écologique des soins ou développementale mettant l’accent sur les interactions au sein des systèmes familiaux (MFA, 2014). Ces perspectives, plus larges, offrent une image riche et variée des interactions fraternelles FIGURE 1.7.

Inuence de la position ordinale sur les enfants

PREMIERS-NÉS

ENFANTS D’UN RANG INTERMÉDIAIRE

DERNIERS-NÉS

ENFANTS UNIQUES

• Se montrent plus axés sur la réussite.

• Apprennent à faire des compromis et à s’adapter.

• Se montrent moins dépendants que les premiers-nés.

• Partagent plusieurs caractéristiques avec les premiers-nés.

• Ont une haute estime de soi.

• Sont moins stimulés par la réussite.

• Risquent moins d’être atteints de dépression ou d’anxiété.

• Sont inuencés par leurs aînés.

• Apparaissent moins tendus, plus affectueux et de nature plus avenante.

• Paraissent d’une plus grande maturité et plus cultivés.

• Obtiennent de plus grandes réussites scolaires (collège et université).

• Tendent à s’identier davantage à un groupe de pairs qu’aux parents. • Démontrent une plus grande exibilité dans leur raisonnement. • Peuvent être rebelles.

Source : Adapté de Schultz et Schultz (2016).

14

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

• Démontrent une maîtrise supérieure de la langue.

diffèrent de ceux de leurs frères ou de leurs sœurs. Chaque famille détermine les expériences réservées aux enfants, celles dont ils doivent être préservés, et comment chacune de ces expériences répond aux besoins des membres. Lorsque les liens familiaux sont solides, le contrôle social est extrêmement efcace, et la plupart des membres se conforment à leurs rôles de plein gré et avec engagement. Les conits surviennent lorsque certains ne remplissent pas leurs rôles d’une manière qui satisfait les attentes des autres membres de la famille, soit parce qu’ils n’ont pas conscience de ces attentes, soit parce qu’ils décident de s’y soustraire. FIGURE 1.7 Les enfants d’âge scolaire peuvent s’occuper d’un jeune frère ou d’une jeune sœur, sous la supervision de leurs parents.

Interactions entre frères et sœurs Les relations fraternelles ont comme caractéristique tout à fait singulière leur durée, puisqu’elles se prolongent tout au long de la vie. Les frères et les sœurs ont le potentiel, comme les parents, d’être les uns pour les autres une source de réconfort et de sécurité. Ils offrent un espace sûr d’expérimentation de nouveaux rôles et de comportements. L’affection entre frères et sœurs inuencerait de façon positive leur capacité à gérer des situations stressantes, et serait un facteur de soutien et de protection dans leur développement (Howe et Recchia, 2014). Les frères et les sœurs exercent un pouvoir les uns sur les autres, échangent des services et expriment des sentiments de manière réciproque, souvent hors de la présence des parents. Les enfants apprennent grâce à leurs frères et sœurs à négocier et à marchander, parfois à manipuler. Les interactions qui se produisent entre eux leur permettent de mettre en place des stratégies productives de gestion de conflits (Dirks, Persram, Recchia et al., 2015).

1.2.5

Fonctionnement de la famille et rôles de ses membres

Le fonctionnement familial fait référence aux interactions des membres qui composent le foyer, mais surtout à la nature des interactions et des relations qui se créent. Chaque personne occupe une position ou un statut spécique au sein de la famille, déni selon les valeurs et les normes de cette dernière (Duhamel, 2015 ; Wright et Leahey, 2013) 2 . Chaque famille a ses traditions et ses valeurs propres, et xe les normes qui régissent les interactions à l’intérieur comme à l’extérieur du groupe. Les parents assurent la sécurité physique des enfants en établissant les règles de conduite, et les enfants respectent les règles dictées selon leur stade de développement. Les adolescents ont eux aussi des règles à respecter et des droits qui

1

Rôles des parents Dans tous les groupes familiaux, le statut socialement reconnu du père ou de la mère est assorti de rôles consacrés qui supposent un comportement approprié et des responsabilités liées à l’éducation des enfants. La mesure de l’engagement des parents et la manière dont ils remplissent leurs rôles dépendent d’un certain nombre de variables et de leur propre expérience de socialisation (Naître et grandir, 2014). Les nouveaux parents possèdent une expérience et une connaissance limitées du rôle de parent et apprennent souvent leurs nouvelles responsabilités sur le tas, par essais-erreurs. Fréquemment, les seules personnes que les parents ont déjà pu observer étroitement dans ce rôle sont probablement leurs propres parents. Il en résulte une continuité générationnelle : les parents élèvent parfois leurs enfants de la manière dont ils ont eux-mêmes été élevés (Jeon et Neppl, 2016). Plusieurs facteurs peuvent inuer sur la transition vers la parentalité (Coehlo, 2015). Les parents expérimentés qui ont au moins un enfant semblent plus détendus ; ils connaissent moins de conits liés à la discipline et sont plus conscients de ce qui est requis pour une croissance et un développement harmonieux. Inversement, le degré de stress éprouvé par l’un des parents inexpérimentés ou les deux peut empiéter sur leur capacité à se montrer patients et compréhensifs à l’égard de leur enfant, et à réagir à son comportement. Certaines difcultés vécues avec l’enfant peuvent par ailleurs amener les parents à perdre conance en eux et à douter de leurs aptitudes. Les enfants qui ont des besoins de santé particuliers peuvent occasionner un stress additionnel important. Enn, les tensions conjugales peuvent avoir un effet négatif sur la transition vers la parentalité, car elles peuvent perturber les routines de soins. Inversement, le soutien et les encouragements réciproques des parents inuencent de façon positive l’établissement d’un rôle parental satisfaisant FIGURE 1.8.

2 L’incidence du contexte culturel sur les soins de santé est abordée dans le chapitre 2, Inuences socioculturelles sur les soins de santé.

Les aptitudes essentielles que les parents doivent maîtriser pour se sentir à l’aise dans leurs rôles incluent une compréhension élémentaire de

Chapitre 1

Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté

15

FIGURE 1.8 Apprendre ensemble les nouveaux rôles de père et de mère peut renforcer les liens de parentalité. 3 L’enseignement à la famille des étapes du développement de l’enfant est abordé dans le chapitre 3, Crois­ sance, développement et promotion de la santé.

la croissance et du développement des enfants, de l’hygiène, de l’alimentation, du recours au jeu et des habiletés de communication interperson nelle. L’inrmière remplit une fonction importante dans l’enseignement aux parents quant au développement et aux besoins de l’enfant selon son âge. Elle est aussi un modèle par ses interventions auprès de l’enfant (MSSS, 2008) 3 .

Les inrmières peuvent suggérer aux nouveaux parents de pratiquer une écoute active, de s’impliquer dans l’éducation, de rester au fait des avancées en recherche, d’encourager les visites régulières chez un professionnel de la santé de l’enfant, notamment pour le suivi de sa vaccination, de s’assurer de sa sécurité à l’intérieur comme à l’extérieur de la maison, de passer du temps en tête-à-tête avec l’enfant et de se concentrer sur l’amélioration de la communication au sein de la famille en général FIGURE 1.9.

Conciliation de la vie familiale et de la vie professionnelle Les rôles parentaux ont évolué du fait des changements survenus dans la structure économique et de la place faite aux femmes. Aucun changement du mode de vie familial n’a eu plus d’effets que l’arrivée massive des femmes sur le marché du travail. Au Québec, le nombre de femmes occupant un emploi à temps complet a augmenté de façon

considérable entre 2006 et 2016 ; le nombre d’heures hebdomadaires de travail est en hausse chez les femmes, à raison de 32,5 heures (Institut de la statistique du Québec, 2017a). La famille est donc soumise à plus de stress, puisque les deux membres du couple sont mis au dé de concilier les exigences de leur vie professionnelle avec celles, parfois concurrentes, de leur vie familiale. La surcharge de tâches est une source courante de stress dans les familles où les deux conjoints travaillent. Les exigences liées au temps et à la planication représentent des problèmes majeurs pour toutes les personnes qui travaillent. Pour les travailleurs qui sont parents de jeunes enfants, ces exigences peuvent être encore plus importantes. La garde des enfants devient un élément important de leur bien-être. La qualité des services en la matière demeure une préoccupation constante pour tous les parents qui travaillent (INSPQ, 2013). Les déterminants de la qualité des services de garde se rapportent à des exigences en matière de santé et de sécurité, à des interactions chaleureuses et réceptives entre le personnel et les enfants, à des activités appropriées du point de vue du développement, à un personnel formé, à un groupe de petite taille (selon le nombre de professionnels) et à des espaces intérieurs et extérieurs adéquats. Les inrmières jouent un rôle important en informant les familles concernant ces critères essentiels an de les aider à trouver des services de garde qui leur conviennent et en préparant les enfants à cette expérience.

Participation du père Puisque le rôle de la femme évolue, le rôle de l’homme connaît lui aussi des changements. Encourager les interactions précoces entre les pères et leur enfant a permis de constater leur intérêt tout aussi marqué pour leur enfant, quoique les interactions père-enfant soient d’un autre type que celles qui se forgent avec la mère (SchoppeSullivan, Kotila, Jia et al., 2013). Aujourd’hui, les pères jouent un rôle essentiel dans le développement de l’enfant et doivent être encouragés dans leur participation active (Tully, Piotrowska, Collins et al., 2017) FIGURE 1.10.

1.2.6

FIGURE 1.9 Le temps passé en tête-à-tête avec un enfant est essentiel à la santé et au bien-être de la famille.

16

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

Éducation des enfants

Il revient à la famille de susciter chez les enfants des comportements appropriés d’un point de vue social et culturel au rôle qui est attendu de leur part. L’apprentissage des rôles se fait dans le cadre du processus de socialisation. Au cours des différentes étapes du développement, les enfants apprennent et mettent en pratique, dans leurs interactions avec les autres et par les jeux, plusieurs rôles sociaux. Un rôle peut interdire certains comportements et en permettre d’autres. Le comportement observé chez chaque enfant est une

Les parents permissifs exercent peu d’autorité, voire aucune, sur les actes de leurs enfants. Ils évitent d’imposer des normes de conduite et laissent les enfants déterminer autant que possible leurs propres activités. Ces parents se considèrent comme des ressources, et non comme des modèles pour les enfants. Lorsque des règles existent, les parents en expliquent la raison sous-jacente, sollicitent l’opinion des enfants et les consultent au moment de prendre des décisions. Ils ne xent pas de limites et n’empêchent pas les enfants de contrarier la routine domestique.

FIGURE 1.10 Les pères qui s’occupent de leurs enfants dès la petite enfance se sentiront plus à l’aise et compétents dans leur rôle paternel.

manifestation unique, une combinaison d’inuences sociales et de processus psychologiques individuels. La conjonction du système intrapersonnel (le soi) de l’enfant et d’un système interpersonnel (la famille) est donc perçue simultanément comme la conduite de l’enfant. La structuration des rôles se fait d’abord au sein de l’unité familiale dans laquelle les enfants assument une série de rôles et réagissent à ceux de leurs parents ainsi qu’à ceux des autres membres de la famille. Ce sont surtout les parents qui façonnent le rôle des enfants en exerçant des pressions directes ou indirectes destinées à induire un comportement souhaitable ou à forcer l’enfant à adopter les modes de comportement désirés. Les parents conçoivent leurs propres techniques et ils déterminent la manière dont le processus de socialisation pourra suivre son cours. Par exemple, les comportements récompensés par l’amour, l’affection, l’amitié et les honneurs sont ainsi renforcés.

Styles d’autorité parentale Plusieurs facteurs ont une inuence dans le processus d’éducation : l’âge de l’enfant, son état de santé, le statut socioéconomique de ses parents, la qualité de la relation parentale, les expériences passées des parents en matière d’éducation, les systèmes de soutien dont ils bénécient et les effets du stress sur leur comportement. Les styles d’éducation des enfants employés par les parents peuvent être décrits comme étant autoritaires, permissifs, démocratiques ou désengagés (Gagnier, s.d.). Les parents autoritaires s’efforcent de régir le comportement et les attitudes de leurs enfants par des règles incontestées. Ils valorisent et récompensent l’obéissance absolue, l’approbation muette à leurs discours, et un respect sans faille des principes et des convictions de la famille. Ils punissent énergiquement tout comportement contraire aux normes parentales. Leur autorité s’exerce en se passant d’explications, et l’enfant n’a pas une grande part dans la prise de décisions. Ils oublient de fournir chaleur et affection.

Les parents démocratiques combinent les pratiques des deux styles précédents. Ils règlent le comportement et les attitudes de leurs enfants en mettant l’accent sur la raison d’être des préceptes et en recourant au renforcement négatif en cas d’écarts. Ils respectent l’individualité de chaque enfant, qui est libre d’exprimer son opposition aux normes ou aux règlements de la famille. Le contrôle parental est ferme et cohérent, mais tempéré d’encouragements, de compréhension et d’un sentiment de sécurité. Ces parents favorisent l’autodétermination, c’est-à-dire qu’ils encouragent une régulation du comportement basée sur des sentiments de culpabilité ou de honte en cas de méfait, et non sur la peur d’être pris en faute ou puni. L’autorité est partagée, et les enfants sont inclus dans les discussions de manière à encourager leur participation indépendante et afrmée dans la vie de famille.

1

CE QU’IL FAUT RETENIR

Ce sont surtout les parents qui façonnent le rôle des enfants en exerçant des pressions directes ou indirectes destinées à induire un comportement souhaitable ou à forcer l’enfant à adopter les modes de comportement désirés.

Les parents désengagés n’offrent ni chaleur, ni attention, ni affection ; de plus, ils ne mettent en place aucun encadrement. Lorsqu’elles travaillent avec les familles, les inrmières doivent accorder le même respect à ces différents styles d’éducation. Les interventions inrmières pour le bien-être de l’enfant et de sa famille doivent comporter des moments jugés propices à l’éducation pour discuter du développement, explorer les sentiments parentaux quant à l’éducation, distinguer des actions positives entre le parent et l’enfant, et recadrer d’autres actions plus négatives des parents vis-à-vis des comportements de leur enfant (Varcoe et Hartrick Doane, 2014).

Limites et discipline Dans son sens le plus large, le terme discipline signie enseigner, et il désigne une série de règles régissant la conduite (Société canadienne de pédiatrie [SCP], 2016a, 2016b). Dans un sens plus strict, la discipline renvoie aux mesures prises pour faire respecter les règles en cas de manquement. L’imposition de limites consiste à établir des règles ou des directives liées au comportement. Par exemple, les parents peuvent imposer des limites au temps que les enfants peuvent consacrer à la télévision, aux jeux vidéo ou au clavardage. Plus les limites sont claires, plus elles

Chapitre 1

Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté

17

sont appliquées avec cohérence et constance, et moins les mesures disciplinaires seront nécessaires.

Enjeux de la discipline

Encadré 1.1W : Valorisation des comportements positifs des enfants.

Les inrmières peuvent aider les parents à établir des règles réalistes et concrètes. Des limites bien déterminées et une certaine discipline sont des composantes positives et nécessaires dans l’éducation des enfants (SCP, 2016b). Elles remplissent plusieurs fonctions utiles, puisqu’elles aident les enfants : • à tester les limites de ce sur quoi ils peuvent exercer leur maîtrise ; • à canaliser certains sentiments indésirables en une activité constructive ; • à agir de façon à se protéger du danger ;

• à faire l’apprentissage de comportements socialement acceptables. La meilleure approche consiste à structurer les interactions avec les enfants de manière à prévenir ou à réduire au minimum les comportements inacceptables TABLEAU 1.2. Les passages à l’acte, comme les crises de colère, peuvent correspondre à une frustration, à un mécontentement, à une dépression ou à une douleur non maîtrisés chez l’enfant. Une stratégie consiste à renforcer les comportements positifs des enfants .

Principes de la discipline L’inconduite peut survenir lorsque l’enfant cherche à tester son pouvoir et déer l’autorité, lorsqu’il éprouve des problèmes d’attention ou un sentiment

Enseignement à l’enfant et à ses proches TABLEAU 1.2

Inculcation des attitudes socialement acceptables chez l’enfant

Nouveau-né et nourrisson Moins de 1 an

COMPORTEMENTS OBSERVÉS

CE QUE PEUVENT FAIRE LES PARENTS

• Pleure pour faire connaître ses besoins.

• Aidez votre nourrisson à apprendre à se consoler lui-même, lorsqu’il n’est pas malade ou trop souffrant. Par exemple, présentez-lui des objets réconfortants (doudou, mobile musical, etc.).

• Explore partout. • Apprend par le toucher, le goût, l’odorat, la vue et l’ouïe.

• Dites non à votre bébé lorsqu’il fait quelque chose que vous ne voulez pas qu’il fasse, par exemple s’il vous mord. • N’utilisez pas les techniques comme le retrait ou les conséquences. Trottineur de 1 à 2 ans

• Commence à tester ses limites en explorant son autonomie.

• Créez un milieu sécuritaire que votre enfant peut explorer.

• Peut être craintif au moment d’être séparé de vous.

• Donnez de l’attention à votre enfant lorsqu’il se conduit bien.

• Apprend à dire non. • Curieux, aime explorer. • Trop jeune pour se souvenir des règles. Trottineur de 2 à 3 ans

• Devient plus autonome. • Devient frustré lorsque vous xez des limites, et il vous le fait savoir. • Devient très possessif, ne comprend pas le concept de « à moi » par rapport à « à quelqu’un d’autre ».

Enfant d’âge préscolaire de 3 à 6 ans

• Utilisez la réorientation suivie d’une brève explication (« Non : c’est chaud »). • Une certaine frustration est positive, car elle incite votre enfant à apprendre à résoudre des problèmes, mais souvenez-vous que votre enfant sera incapable d’affronter certaines situations. • Offrez des choix lorsque vous le pouvez.

• Se laisse facilement distraire.

• Expliquez brièvement pourquoi le comportement est inacceptable.

• Devrait être en mesure de mieux accepter les limites, mais ne prend pas toujours les bonnes décisions.

• Votre enfant a besoin de règles claires et constantes.

• Essaie de plaire et veut se sentir important.

• De petites conséquences, adaptées à l’incident, fonctionnent aussi.

• Peut respecter des directives simples. • Peut faire des choix.

• Montrez l’exemple par vos propres actions.

• Pose beaucoup de questions.

• L’approbation et les louanges encouragent votre enfant à adopter de bons comportements.

• Est autonome.

• Les longs sermons ne fonctionnent pas.

• Essaie de dire quoi faire aux autres enfants. • Peut rapporter. Source : Adapté avec autorisation de Société canadienne de pédiatrie (2016a). Guidez votre jeune enfant grâce à une discipline positive. Tous droits réservés.

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Partie 1

Inrmière, enfant et famille

d’inadéquation (p. ex., l’enfant manque l’école parce qu’il a peur d’être incapable de s’acquitter du travail), mais elle peut aussi résulter du manque de clarté des règles ou de leur application inconstante. De nombreuses stratégies, comme la modication des comportements, ne peuvent être mises en place de façon efcace que si les principes de cohérence et de systématisme sont respectés. Des cycles d’application occasionnels ou intermittents des limites ne font que prolonger le comportement indésirable : les enfants en retiennent que s’ils se montrent persévérants, leur comportement nira par être autorisé. Reporter une sanction à plus tard ou la faire appliquer par l’autre parent en affaiblit l’effet. De plus, les phrases du type « Attends que ton père rentre à la maison » font rejaillir les messages négatifs sur l’autre parent. L’inrmière peut promouvoir une discipline efcace grâce à une évaluation appropriée, à des conseils d’ordre préventif et à des conseils d’orientation TABLEAU 1.3.

Mesures disciplinaires Pour limiter l’inconduite, les parents doivent mettre en œuvre des mesures disciplinaires appropriées. Il en existe de nombreuses. Le raisonnement, employé pour expliquer à l’enfant pourquoi un acte est répréhensible, convient généralement aux enfants plus âgés, surtout lorsque des raisons morales sont en cause. Le renforcement positif et négatif est à la base de la théorie de modication du comportement :

le comportement récompensé se répétera ; celui qui ne l’est pas disparaîtra. Le recours aux récompenses constitue une approche positive. En encourageant les enfants à se comporter d’une certaine façon, les parents réduisent le risque d’inconduite. Ignorer un comportement avec constance aura pour effet d’en venir à bout ou de le réduire au minimum. Bien que cette approche paraisse simple, elle est souvent difcile à mettre systématiquement en pratique.

1

Les châtiments physiques sont vivement déconseillés par la Société canadienne de pédiatrie (SCP, 2016a). Ils causent des effets délétères : 1. ils apprennent aux enfants que la violence est acceptable ; 2. ils peuvent entraîner des blessures d’une gravité variable pour l’enfant, surtout lorsque la correction est administrée par un parent incapable de maîtriser sa rage ; 3. ils engendrent une habitude ou une attitude de dé chez les enfants. La fessée peut provoquer des lésions physiques et psychologiques, et nuire à une bonne interaction entre le parent et l’enfant (Okuzono, Fujiwara, Kato et al., 2017). Du reste, lorsque le parent n’est pas dans les parages, l’inconduite est probable, puisque les enfants n’ont pas appris à se comporter correctement pour leur propre bien.

Enseignement à l’enfant et à ses proches TABLEAU 1.3

Application de la discipline selon des critères garantissant son efcacité

CRITÈRE

EXPLICATION

Cohérence

Appliquer les mesures disciplinaires exactement comme convenu et pour chaque infraction.

Systématisme

Engager une mesure disciplinaire dès que l’enfant se conduit mal.

Engagement

Appliquer la discipline jusque dans les détails, par exemple le décompte des minutes ; éviter toute distraction susceptible d’interférer avec le plan prévu.

Unité

S’assurer que tous les intervenants auprès de l’enfant souscrivent au plan de discipline et en connaissent les détails an d’éviter la confusion et les alliances parallèles entre l’enfant et un adulte.

Flexibilité

Opter pour des stratégies disciplinaires appropriées à l’âge et au tempérament de l’enfant, de même qu’à la gravité de l’inconduite.

Planication

Planier les stratégies disciplinaires et préparer l’enfant, si possible (p. ex., lui expliquer le concept du temps de réexion avant d’agir) ; en cas d’inconduite imprévue, s’efforcer de rester calme avant d’imposer une mesure disciplinaire.

Critique constructive du comportement

Toujours exprimer sa désapprobation à l’égard du comportement, et non envers l’enfant lui-même, par des déclarations du type : « Tu peux être en colère, mais tu ne peux pas frapper. »

Condentialité

Appliquer les sanctions en privé, surtout pour les enfants plus âgés, qui peuvent se sentir honteux en face des autres.

Clôture de l’incident

Une fois la punition terminée, considérer que l’ardoise est effacée et éviter d’évoquer à tout propos l’incident ou de faire un sermon à l’enfant.

Source : Adapté de SCP (2016b).

Chapitre 1

Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté

19

L’adoption est réglementée par le Code civil du Québec (livre deuxième, titre deuxième, chapitre deuxième, section I) et par la Loi sur la protection de la jeunesse (section VII). Les deux documents sont disponibles au http:// legisquebec.gouv.qc.ca/fr.

Le retrait est une technique qui consiste à mettre un enfant à l’écart an qu’il se calme et rééchisse FIGURE 1.11. Le temps de retrait est une période de répit à la fois pour l’enfant et pour le parent. Cependant, pour être efcace, ce procédé doit être planié. Il ne devrait pas être utilisé avant l’âge de deux ans (Naître et grandir, 2013) ENCADRÉ 1.3.

Situations particulières L’éducation des enfants est une tâche exigeante ; aussi, la famille doit parfois faire face à des situations particulières qui augmentent le risque de perturbations familiales. L’adoption, le divorce ou l’adaptation au contexte de famille d’accueil en sont des exemples.

Adoption L’adoption établit une relation légale entre un enfant et des parents non biologiques, mais c’est une relation dont les droits et les obligations sont les mêmes que ceux qui existent entre enfants et parents biologiques.

FIGURE 1.11 Le retrait est une excellente stratégie disciplinaire pour les jeunes enfants.

Contexte légal Le Code civil du Québec (C.c.Q.) stipule que « [l]’adoption ne peut avoir lieu que dans l’intérêt de l’enfant et aux conditions prévues par la loi » (C.c.Q., art. 543). Lorsque la liation est établie, les parents biologiques reconnus à ce titre, soit le père, la mère ou les deux, doivent renoncer à leurs droits pour permettre l’adoption (C.c.Q., art. 551). Depuis que les droits des enfants ont été reconnus, les enfants plus âgés peuvent dissoudre leur lien juridique avec leurs parents biologiques et se faire adopter par les adultes de leur choix, en fonction des circonstances et de l’évaluation du tribunal. Ainsi, l’enfant de 10 ans et plus doit consentir à l’adoption (C.c.Q., art. 549) ; le refus de l’enfant de 14 ans et plus est un obstacle à l’adoption (C.c.Q., art. 550). Comme prévu par la Loi sur la protection de la jeunesse (RLRQ, chapitre P-34.1), les démarches pour l’adoption d’un enfant domicilié au Québec ou hors Québec doivent être coordonnées par un organisme agréé par le ministère de la Santé et des Services sociaux, qui a pour mission de défendre les droits de l’enfant et ses intérêts, ou d’améliorer ses conditions de vie. De plus, toute famille désireuse d’adopter un enfant doit faire l’objet d’une évaluation psychosociale (RLRQ, chapitre P-34.1, art. 71.7).

Adoption internationale L’adoption d’enfants d’une autre origine que celle de la famille est courante au Québec. Dans les cas d’adoptions internationales, les renseignements médicaux communiqués aux parents sont parfois incomplets ou sommaires, et le poids, la taille ainsi que la circonférence de la tête sont les seules données objectives gurant dans le dossier médical de l’enfant. De nombreux enfants adoptés par voie internationale sont nés avant terme, et des problèmes de santé courants comme la diarrhée et la

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 1.3

Utilisation du retrait

• Comme lieu où l’enfant pourra passer un temps de réexion, il faut choisir un endroit sûr, pratique et non stimulant, mais où il est possible de garder un œil sur lui, comme la salle de bain, le corridor ou la buanderie. • Il est important de déterminer à l’avance avec l’enfant les comportements qui requièrent un temps de réexion. • Il faut s’assurer que l’enfant comprenne bien les règles et le comportement attendu. • L’adulte doit expliquer à l’enfant le processus du temps de réexion : – S’il se comporte mal, l’enfant recevra un avertissement. – S’il n’obéit pas, il sera envoyé à l’endroit désigné pour le temps de réexion. Source : Adapté de Naître et grandir (2013).

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Partie 1

Inrmière, enfant et famille

– Il y restera assis pendant une période précise. – S’il pleure, refuse d’obtempérer ou a un comportement perturbateur, la période de réexion ne débutera qu’une fois qu’il se sera calmé. – S’il est sage pendant la durée prescrite, il pourra ensuite quitter le lieu désigné pour le temps de réexion. • Pour ce qui est de la durée du retrait, la règle est la suivante : une minute par année d’âge ; il vaut mieux utiliser une minuterie de cuisine avec un timbre sonore plutôt qu’une montre pour vérier le temps écoulé. • Le retrait doit se dérouler dans un espace public convenable, à défaut de quoi il faudra prévenir l’enfant qu’il devra se soumettre à une période de réexion dès son retour à la maison.

Pour favoriser leur attachement à leur nouvelle famille, les enfants qui ont fait l’objet d’une adoption internationale doivent apprendre à composer avec leurs différences physiques et culturelles. Les parents adoptifs sont encouragés à tenter de préserver le patrimoine ethnique et culturel de l’enfant adopté, si cela est possible (Piché, 2017).

Préparation de la famille Contrairement aux parents biologiques qui se préparent à la naissance de leur enfant par des cours prénataux et qui protent du soutien de leurs parents et amis, les parents adoptifs disposent parfois de peu de ressources offrant un appui ou les aidant à préparer l’arrivée d’un nouveau membre dans leur famille. Les inrmières peuvent offrir l’information, l’assistance et le réconfort nécessaires pour atténuer l’anxiété des parents liée au processus d’adoption ; elles peuvent aussi les orienter vers les groupes de soutien des parents pouvant exister dans leur région (Wright et Leahey, 2013). La plupart des problèmes que rencontrent les parents adoptifs ne diffèrent pas de ceux que connaissent les parents biologiques. Les parents adoptifs sont parfois craintifs et anxieux, et ils peuvent avoir besoin de plus de soutien. Plus tôt les nourrissons sont placés dans leur foyer adoptif, meilleures seraient les chances pour qu’un lien d’attachement s’établisse entre eux et les parents (Barone, Lionetti et Green, 2017 ; Pace, Cavana, Velotti et al., 2014). Cependant, plus l’enfant a eu de gardiens avant l’adoption, plus son attachement à une nouvelle personne devient problématique. L’enfant doit rompre le lien avec son précédent gardien et en créer un autre avec les parents adoptifs. La création de ce nouveau lien dépend de la qualité des relations que l’enfant a eues avec ses gardiens précédents (mère biologique, inrmière, personnel de l’agence d’adoption) (Colonnesi, Wissink, Noom et al., 2013). Les frères et sœurs, adoptés ou biologiques, qui sont assez âgés pour comprendre la situation, doivent prendre part aux décisions relatives à l’adoption et être rassurés sur le fait que l’objectif n’est pas de les remplacer. Il est important d’insister sur les manières dont les frères et sœurs peuvent interagir avec l’enfant adopté FIGURE 1.12.

Information à l’enfant La plupart des experts s’accordent pour afrmer que les enfants doivent être

mis au courant de leur adoption (SCP, 2017). Le choix du moment est extrêmement personnel, mais il doit convenir à la fois aux parents et à l’enfant.

1

Les parents doivent s’attendre à un changement de comportement après la révélation de l’adoption, surtout chez les enfants plus âgés. Les enfants adoptés fantasment parfois à propos de leurs parents biologiques et peuvent ressentir le besoin de remonter jusqu’à leurs origines pour tenter de se dénir et de se forger leur propre identité. II est important que les parents gardent une communication constante et qu’ils rassurent leur enfant sur le fait qu’ils comprennent la nécessité de cette quête d’identité. FIGURE 1.12 Un frère aîné L’adolescence peut être une période paren compagnie de sa sœur adoptive. ticulièrement éprouvante pour les enfants adoptés et leurs parents (SCP, 2017). Les affrontements normaux entre parents et adolescents sont, à certains égards, plus douloureux dans Le site Web Soins de nos les familles adoptives. Alors qu’ils s’attellent à enfants de la Société construire leur identité, le sentiment d’avoir été canadienne de pédiatrie abandonnés par leurs parents biologiques peut (www.soinsdenosenfants.cps. germer et s’intensier chez les adolescents adopca) offre aux parents plusieurs tés. Parallèlement, un sentiment d’insécurité conseils pour discuter ouver­ amène éventuellement les parents à devenir trop tement et sereinement de permissifs. Les enfants adoptés, comme tous les l’adoption avec leur enfant, autres enfants, ont besoin d’un amour inconditionchaque fois que celui­ci en nel combiné à une discipline et à des limites ressent le besoin. fermes. Les enfants et les familles qui vivent difcilement cette situation peuvent tirer prot d’un counseling individuel ou familial. L’inrmière doit pouvoir les orienter vers les ressources adéquates.

Séparation des parents

clinique

En 2011, la proportion de personnes de plus de 15 ans Pascal, âgé de 16 ans, est un enfant adopté. Ses divorcées ou séparées au parents s’inquiètent de son comportement. Il Canada était de 11,5 % (Stacherche à rencontrer sa mère biologique et accuse tistique Canada, 2011b). Le ses parents adoptifs de ne pas répondre à ses processus de séparation ou besoins. Est­ce une attitude courante dans cette de divorce commence par situation ? Justiez votre réponse. une période de conit conjugal de durée et d’intensité variables, suivie d’une séparation, du divorce légal proprement dit et d’une réorganisation de plusieurs aspects de la vie quotidienne, y compris le lieu de résidence, les rôles familiaux et le réseau social (Magnuson et Berger, 2009) ENCADRÉ 1.4.

Jugement

malnutrition du nourrisson sont susceptibles de retarder leur croissance et leur développement. Certains enfants présentent des problèmes de santé graves ou multiples (virus de l’immunodécience humaine [VIH], syphilis, etc.) qui peuvent être très stressants pour les parents (Chicoine, 2014). L’inrmière doit être avertie de ces situations particulières, et évaluer les besoins de l’enfant et de sa famille, ainsi que les ressources disponibles.

Adaptation des parents Après la séparation ou le divorce, une réorganisation du foyer familial s’opère. La période de transition et de réorganisation peut présenter des caractéristiques telles que du désordre dans la maison, un tempérament plus explosif chez les parents ou les enfants, une diminution de la présence parentale, un sentiment

Chapitre 1

Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté

21

ENCADRÉ 1.4

Stades du processus de séparation

PHASE AIGUË

• Le couple prend la décision de se séparer. • Cette phase comprend le départ de la maison d’un des parents. • Elle dure de plusieurs mois à plus d’un an, et s’accompagne d’un stress familial et d’une atmosphère chaotique. PHASE DE TRANSITION

• Les adultes et les enfants adoptent de nouveaux rôles, et les relations sont modiées. Ces nouvelles perspectives leur sont peu familières et peuvent être insécurisantes. • Cette phase s’accompagne souvent d’un changement de résidence, d’une diminution

du niveau de vie et d’une modication du style de vie, car l’un des parents assume une plus grande part des responsabilités économiques, et les relations parent-enfant sont modiées. PHASE DE STABILISATION

• La famille qui a vécu une séparation ou un divorce retrouve une unité familiale stable et fonctionnelle. Les rôles parentaux sont plus clairs, et l’enfant retrouve une routine sécurisante. • De nouvelles unions sont fréquentes, ce qui entraînera d’autres changements et des périodes d’adaptation pour la vie familiale.

Source : Adapté de Magnuson et Berger (2009).

Encadré 1.2W : Sentiments et comportements liés au divorce chez les enfants.

Le site Web Soins de nos enfants de la Société canadienne de pédiatrie (www.soinsdenosenfants.cps. ca) offre plusieurs conseils aux parents pour aider leurs enfants à s’adapter à une séparation ou à un divorce.

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Partie 1

d’impuissance chez le parent, un relâchement de la discipline et un respect moins constant des rou­ tines domestiques. La perturbation de la structure familiale peut provoquer de forts sentiments de culpabilité chez les parents (Wright et Leahey, 2013). Leur capacité d’adaptation peut s’en trouver compromise. Ils peuvent aussi être absorbés par leurs propres sentiments, leurs besoins et les chan­ gements survenant dans leur vie, et ne pas être disponibles pour leurs enfants. Les parents qui commencent un nouveau travail, généralement les mères, sont plus susceptibles de coner la garde des enfants à de nouvelles personnes, dans des milieux inconnus, ou de les laisser seuls après l’école. Quelquefois, l’adulte se sent seul et effrayé, et risque de dépendre de l’enfant comme s’il en faisait un substitut du parent absent. Cette dépendance place un lourd fardeau sur les épaules de l’enfant (Milevsky, 2016). Par ailleurs, les parents qui n’ont pas la garde des enfants sont peu préparés au rôle de visiteur ; ils peuvent sentir qu’ils perdent leurs responsabilités de parents. Il est possible aussi qu’ils vivent dans un logement qui convient mal aux visites des enfants (espace, sécurité, jouets, etc.). L’infirmière doit être à l’affût de ces situations et offrir un counseling approprié.

Réactions des enfants Le divorce peut avoir des répercussions profondes sur les enfants. Un grand nombre d’entre eux éprouvent des difcultés psy­ chologiques et sociales liées à la réorganisation de la vie familiale après le divorce, ou aux nouvelles formes de stress qui en découlent (Clark, 2013). Même lorsque le divorce se fait ouvertement et à l’amiable, le souvenir de la séparation de leurs

Inrmière, enfant et famille

parents évoque souvent chez les enfants la perte, le chagrin et la vulnérabilité aux forces qui échappent à leur maîtrise. L’incidence du divorce sur les enfants dépend de plusieurs facteurs, notamment du sexe et de l’âge des enfants , de l’issue du divorce, de la qua­ lité de la relation parent­enfant et de l’attention parentale durant les années consécutives au divorce. Cependant, les caractéristiques familiales sont plus déterminantes pour le bien­être de l’enfant que les facteurs propres à celui­ci, comme l’âge ou le genre (Yap, Fowler, Reavley et al., 2015). Les conits familiaux intenses et soutenus sont associés à des problèmes de développement social, de stabilité émotionnelle et d’habiletés cognitives chez l’enfant (Moroni, 2016). L’inrmière peut intervenir pour aider l’enfant en l’incitant à expri­ mer ce qu’il ressent. Les effets à long terme du divorce dépendent de l’ajustement des enfants et des parents au pas­ sage d’une famille entière à une famille monopa­ rentale ou binucléaire et, parfois, à une famille reconstituée (Emery, 2011). Une famille qui reste fonctionnelle après un divorce, qu’il s’agisse d’une famille monoparentale, binucléaire ou reconsti­ tuée, peut améliorer la qualité de vie des adultes comme des enfants. Si les conits sont résolus, il peut en résulter une meilleure relation avec l’un ou l’autre des parents et, pour certains enfants, une diminution des contacts avec un parent instable. Une plus grande stabilité à la maison et la sépara­ tion des parents qui se disputent peuvent être favo­ rables au bien­être à long terme de l’enfant.

Annonce de la séparation aux enfants Les parents manifestent parfois de l’hésitation quant à la manière d’informer les enfants de leur séparation ou de leur divorce. En effet, la façon dont ce sujet aura été abordé détermine souvent comment les enfants s’adapteront à la nouvelle conguration familiale (Benzohra et Barroux­Chabanol, 2017 ; Emery, 2011). Si possible, les deux parents et les frères et sœurs devraient être ensemble au moment de la divulgation initiale. Par la suite, des discus­ sions individuelles avec chaque enfant pourront avoir lieu. Il faut consacrer tout le temps nécessaire à ces discussions et il est souhaitable qu’elles se déroulent dans un moment de calme, et non après une dispute. Durant ces discussions, la raison de la séparation doit être évoquée (si l’âge des enfants le permet), et les parents doivent rassurer les enfants sur le fait que le divorce n’est en rien de leur faute. Les parents doivent être attentifs aux réactions de leurs enfants. Ces derniers ont besoin d’expri­ mer leurs sentiments. Ils peuvent ressentir de la culpabilité ou une impression d’échec, ou s’ima­ giner qu’ils sont punis pour leur inconduite. Ils éprouvent normalement de la colère et du

ressentiment, et doivent pouvoir manifester ces sentiments sans risquer d’être punis. Les enfants connaissent également la peur de l’abandon. Si les parents ont arrêté de s’aimer, les enfants peuvent craindre qu’ils cessent de les aimer, eux aussi (Benzohra et Barroux-Chabanol, 2017). Les enfants ont besoin de cohérence et d’ordre dans leur vie. La réorganisation de la vie quotidienne doit être discutée. Les enfants doivent savoir où ils iront habiter, qui s’occupera d’eux, et s’ils seront avec leurs frères et sœurs. Ils peuvent aussi se demander comment se dérouleront certaines journées particulières, comme les anniversaires et la période des vacances, si les deux parents assisteront aux événements scolaires et s’ils auront encore les mêmes amis. Si des répercussions nancières sont à prévoir, avec des effets sur la vie des enfants, il est préférable d’en discuter avec eux. Les parents doivent être attentifs à leurs questions et les rassurer.

Garde et responsabilité Contrairement à la pratique antérieure qui privilégiait la mère, les tribunaux conent maintenant la garde des enfants au parent qui est le plus en mesure d’assurer leur bien-être (Poitras et al., 2014). Un autre arrangement consiste à accorder aux deux parents la garde à temps partagé. Ainsi, les parents assument à tour de rôle et sur une base équitable la garde des enfants, tout en conservant des responsabilités parentales juridiques communes. Les parents demeurent tous les deux les tuteurs légaux et contribuent ensemble à l’éducation des enfants. La coparentalité a des bienfaits substantiels pour la famille : les enfants peuvent être proches des deux parents, et la vie avec chacun d’eux peut s’en trouver apaisée (Benzohra et Barroux-Chabanol, 2017 ; Kolak et Volling, 2013). Pour y parvenir, les parents doivent être particulièrement déterminés à donner une éducation conjointe à leurs enfants, et savoir faire une distinction entre leurs conits conjugaux et leur rôle de parent. Quel que soit le type d’arrangement retenu pour la garde, la principale considération doit demeurer le bien-être des enfants.

Placement des enfants dans un centre d’hébergement ou en famille d’accueil Le placement en famille d’accueil ou dans un centre d’hébergement consiste à placer un ou des enfants, dans des conditions autorisées, hors de sa famille d’origine. Il peut s’agir d’un foyer d’accueil autorisé, où l’enfant cohabitera possiblement avec d’autres enfants, ou d’une famille hébergeant l’enfant au cours de la période précédant son adoption. Les parents d’accueil s’engagent à offrir un foyer aux enfants pour une durée déterminée.

Plus de 100 000 enfants canadiens vivent en famille d’accueil, et un grand nombre d’entre eux connaîtront des problèmes affectifs, physiques ou comportementaux devant être traités (Hébert et MacDonald, 2009). Les enfants placés en famille d’accueil présentent une incidence plus élevée de problèmes de santé aigus et chroniques, de même que des sentiments d’isolement ou de confusion (Hébert et MacDonald, 2009). Sur le plan de la santé, ils sont souvent considérés comme étant à risque en raison de leur environnement de garde précédent. Les infirmières doivent s’efforcer de mettre en œuvre des stratégies pour améliorer les soins de santé destinés à ce groupe d’enfants. Plus précisément, des habiletés d’évaluation et de gestion de cas sont requises pour amener des professionnels d’autres disciplines à collaborer pour mieux répondre aux besoins de ces enfants (Schneiderman, Kennedy et Sayegh, 2017).

1.3

L’Agence de la santé publique du Canada (www. canadiensensante.gc.ca) invite les parents à être atten­ tifs, compréhensifs et ouverts à la discussion avec leurs enfants en cas de séparation ou de divorce.

Rôles de l’inrmière en pédiatrie

La pratique inrmière des soins inrmiers en pédiatrie présente des dés particuliers et exige de l’inrmière des connaissances spécialisées l’amenant à prodiguer des soins interprofessionnels centrés sur la famille et adaptés au niveau de développement et aux besoins spéciques de l’enfant, quel que soit le milieu d’intervention, hospitalier ou communautaire. Ainsi, l’infirmière est responsable des soins qu’elle prodigue, à la fois vis-à-vis d’elle-même, de la profession et de l’établissement qui l’emploie, mais elle est surtout responsable de ses actes envers les utilisateurs des services de santé, soit l’enfant et sa famille.

1.3.1 Coordination En tant que membre de l’équipe soignante, l’inrmière coordonne les soins inrmiers et collabore avec les autres professionnels gravitant autour de l’enfant et de sa famille. Seule une approche globale et interprofessionnelle permet d’offrir des soins holistiques (Fletcher, 2014). Dans le respect des attributions et des limitations de chacun concernant les soins à prodiguer à l’enfant, l’inrmière collabore avec les autres professionnels de la santé pour offrir à la famille des soins de grande qualité. Le cheminement clinique peut alors devenir un outil utile pour l’inrmière. Il s’agit d’un plan de soins interprofessionnels visant à mesurer la qualité des résultats des soins pour l’enfant (Phaneuf, 2012). Le cheminement clinique peut également être utilisé pour aider les inrmières et les autres

Chapitre 1

Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté

23

1

intervenants de la santé à apprendre à prodiguer des soins centrés sur la famille ; chaque plan devrait être partagé avec les membres de la famille concernée an de les informer de l’orientation des soins et de les aider à mieux en comprendre les buts. CE QU’IL FAUT RETENIR

L’inrmière est dans une position stratégique pour intégrer l’enfant et sa famille dans le plan de soins, de manière directe ou indirecte, en faisant part des opinions de ces derniers à l’équipe soignante.

Même lorsque l’inrmière exerce sa profession en région éloignée, loin des autres professionnels de la santé, elle ne peut être considérée comme travaillant seule : elle agit en interdépendance avec l’enfant et sa famille en tâchant d’évaluer les besoins et de planier les interventions an que le plan de soins réponde vraiment aux besoins de l’enfant. L’inrmière est dans une position stratégique pour intégrer l’enfant et sa famille dans le plan de soins, de manière directe ou indirecte, en faisant part des opinions de ces derniers à l’équipe soignante (O’Reilly, Lee, O’Sullivan et al., 2017).

Défense des droits des familles L’inrmière travaillant auprès d’un enfant se retrouve fréquemment en position d’exercer un rôle pour la défense des intérêts de ce dernier en raison de sa vulnérabilité. Ainsi, elle peut plaider en faveur d’un renforcement de son autonomie ou défendre Matis est âgé de 13 ans et il est paraplégique. l’intérêt de l’enfant et de sa Aujourd’hui, il reçoit son congé de l’unité où il a été famille en facilitant la comtraité pour une infection urinaire. Le physiothéramunication et l’accès aux peute demande un transfert en centre de réadaptaservices, et en cherchant des tion pour un suivi fonctionnel rendu nécessaire en solutions correspondant raison d’une poussée de croissance. La travailleuse aux valeurs de la famille sociale désire s’entretenir avec la famille des (Davoodvand, Abbaszadeh et difcultés d’adaptation inhérentes à la situation, Ahmadi, 2016 ; Water, Ford, qui exige des hospitalisations à répétition. Spence et al., 2016). Le souL’inrmière en soins des plaies désire évaluer les tien dans la prise de décision récidives des plaies au siège, et l’ergothérapeute a est important, et les besoins un nouveau fauteuil roulant à proposer à Matis. comme les désirs de la Comment pourriez-vous collaborer avec chacun des famille doivent être respecintervenants professionnels dans la situation de tés. Pour ce faire, les inrMatis ? Justiez votre réponse. mières doivent posséder une bonne connaissance de l’enfant et de sa famille, et reconnaître leur caractère 4 unique et distinct. Elles doivent agir en ayant comme objectif l’intérêt fondamental de l’enfant. La condentialité ainsi que La plaidoirie sur laquelle se fonde l’inrmière qui les directives générales pour assume ce rôle de défenseur des droits des familles l’évaluation de l’état de santé repose sur le principe d’autonomie selon lequel de l’enfant sont présentées une personne doit rester libre de toute inuence dans le chapitre 4, Examen et demeurer compétente dans son jugement, et sur clinique : anamnèse et le principe de bienfaisance qui vise la contribution examen physique. au bien-être d’autrui (Johnstone, 2015).

Jugement

clinique

1.3.2

Recherche

Peu importe leur niveau de formation, les inrmières devraient contribuer à faire avancer la recherche. La priorité donnée aux résultats mesurables pour évaluer l’efcacité des interventions (souvent en lien avec leur coût) impose aux inrmières de déterminer

24

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

si les interventions cliniques produisent ou non des résultats positifs chez leurs clients. Cette exigence conforte la tendance actuelle d’une pratique fondée sur des résultats et qui pose les questions suivantes : Pourquoi telle méthode fonctionne-t-elle ? Existe-t-il une meilleure façon de faire ? Lorsque les inrmières appuient leur pratique clinique sur des données scientiques et qu’elles étayent les résultats de leur propre pratique, elles sont en mesure de valider leur contribution au bien-être et à la santé, et ce, non seulement vis-à-vis de leurs clients, des contribuables et des institutions, mais aussi vis-à-vis de la profession inrmière (Melnyk et Fineholt-Overholt, 2014). L’évaluation est une étape essentielle de la démarche de soins inrmiers, et la recherche en est un élément important, comme cela est décrit dans une section ultérieure.

1.3.3

Promotion de la santé

Parmi les éléments inclus dans le concept de promotion de la santé gurent l’éducation à la santé, la nutrition, l’hygiène, les soins maternels et infantiles, l’immunisation, la prévention ainsi que la lutte contre les maladies endémiques. La promotion de la santé s’appuie également sur le renforcement des communautés, l’influence des politiques publiques, l’organisation des services de santé et la création d’environnements physiques favorables à la santé (Lessard, 2016).

Prévention des risques et des maladies Toute inrmière qui travaille auprès d’enfants doit se préoccuper de soins préventifs. Quelle que soit la nature du problème à traiter, l’inrmière doit prévoir des interventions qui favorisent tous les aspects du développement et de la croissance de l’enfant. L’entrevue et l’examen physique approfondis de ce dernier permettent de déceler des problèmes touchant la nutrition, la vaccination, la sécurité, les soins dentaires, le développement, la socialisation, la discipline et la scolarisation 4 . En présence d’un problème, l’inrmière peut soit intervenir elle-même, soit orienter la famille vers un autre professionnel de la santé ou un organisme.

Éducation à la santé L’éducation à la santé est indissociable du respect des droits de la famille, ainsi que de la promotion de la santé et de la prévention (Sharma et Romas, 2012). Elle est un objectif direct ou indirect du travail de l’inrmière. Par exemple, l’éducation à la santé peut apparaître comme un objectif direct dans un cours sur le rôle parental. Elle est un objectif indirect lors d’autres interventions inrmières : aider des parents et leur enfant à comprendre un diagnostic ou un traitement médical ; encourager un enfant à poser des questions sur son propre

1.3.4

Aide à la prise de décision éthique

L’inrmière peut se retrouver en présence d’un dilemme éthique lorsque des considérations morales divergentes sous-tendent l’approche thérapeutique d’un problème de santé. Parents, inrmières, médecins ou autres membres de l’équipe soignante peuvent parfois vouloir opter pour des approches différentes, tout à fait défendables, selon l’importance qu’ils attribuent à différentes valeurs morales. Parmi ces valeurs morales gurent : 1. l’autonomie, le droit du client à l’autodétermination ; 2. la non-malfaisance, l’obligation d’éviter de nuire ; 3. la bienfaisance, l’obligation de promouvoir le bien-être du client ; 4. la justice, le concept d’équité (Johnstone, 2015). Ainsi, il arrive que l’inrmière se trouve confrontée à un dilemme éthique devant le refus de traitement exprimé par un enfant en n de vie 10 . Dans le cadre d’une aide à la prise de décision éthique, l’inrmière doit déterminer quelles interventions sont les plus bénéques (ou les moins préjudiciables) pour l’enfant. Elle doit tenir compte du cadre imposé par les mœurs de la société moderne, les normes de la pratique professionnelle, la loi, les règlements de l’établissement, les préceptes religieux et les valeurs de la famille. L’inrmière joue un rôle important de modèle lorsqu’il s’agit de montrer comment instaurer un climat de respect mutuel et de compréhension à l’égard de l’enfant et de sa famille. Le respect qu’elle démontre envers les personnes dont elle s’occupe doit exprimer clairement qu’elle considère les clients au même titre qu’elle-même. L’inrmière doit se préparer à participer à des processus de prise de décision éthique et contribuer à instaurer un climat propice aux discussions sur des sujets d’ordre éthique (Blondeau, 2013 ; Johnstone, 2015). Le Code de déontologie des inrmières et inrmiers du Québec dénit, entre autres, les devoirs inhérents à l’exercice de la profession, les relations entre l’inrmière et le client, la qualité des soins et des services, et les relations avec les personnes avec lesquelles l’inrmière est en rapport dans l’exercice de sa profession. L’inrmière qui travaille auprès des enfants doit plus particulièrement connaître les principes encadrant le consentement libre et éclairé, les droits des parents et des enfants, et les règles relatives à leur participation aux décisions qui concernent l’enfant.

Consentement libre et éclairé Le consentement libre et éclairé est l’acceptation par une personne de subir une intervention ou de Le Code de déontologie des recevoir des soins après avoir reçu tous les renseiinrmières et inrmiers, mis gnements nécessaires à sa décision. Le consenteà jour en 2015, peut être ment aux soins chez les enfants et les adolescents consulté au www.oiiq.org. est régi, au Québec, par le Code civil du Québec. Dans ce code, le terme mineur réfère à toute personne de moins de Camille, âgée de 16 ans, est atteinte d’une 18 ans, le terme adolescent décience intellectuelle moyenne. Son comporteinclut les jeunes de 13 ans et ment et son langage sont comparables à ceux d’un plus, et le terme enfant enfant de 4 ans. Elle est hospitalisée pour une désigne les jeunes de 12 ans et pyélonéphrite depuis 72 heures. Vous avez été moins. Le terme parent inclut témoin d’une interaction au cours de laquelle une aussi le statut de tuteur . de vos collègues a traité Camille de bébé gâté et Ainsi, les adolescents de refusé de l’aider pendant ses soins d’hygiène. Elle moins de 18 ans peuvent lui aurait même parlé avec un ton agressif à pluconsentir à leurs soins s’ils sieurs reprises. Que pourriez-vous faire relativesont eux-mêmes parents d’un ment aux comportements de cette collègue ? enfant ou s’ils ont le statut de MAIS SI... mineurs émancipés (et ne sont donc plus sous l’autorité Mais si, quelques jours plus tard, vous constatez que parentale). Les enfants de cette collègue a écrit un commentaire à propos de 14 ans et plus peuvent donner Camille, sans toutefois la nommer, sur les réseaux leur consentement libre et sociaux. Que ferez-vous à la suite de cette découverte ? éclairé pour des soins ou des traitements exigés par leur état de santé si celui-ci ne requiert pas un séjour de plus de 12 heures dans un établissement de santé. Dans tout autre cas, le titulaire de l’autorité Encadré 1.3W : Extraits du Code parentale doit être avisé et consulté. civil du Québec déterminant le

clinique

Jugement

corps ; diriger une famille vers un professionnel de la santé ou une autre ressource ; fournir de la documentation détaillée à des clients et leur offrir des conseils préventifs.

Le Québec est la seule province canadienne ayant xé l’âge du consentement aux soins, mais ce concept est fréquemment remis en question au prot du concept de maturité, qui a cours dans le reste du Canada. La maturité cérébrale ne serait pas complètement acquise avant le milieu de la vingtaine. Dès lors, chaque mineur doit être évalué individuellement an de déterminer si sa maturité et son niveau de compréhension sont sufsants pour comprendre la nature, les bénéfices et les risques du traitement proposé ; en ce sens, des chercheurs se demandent si les parents devraient être exclus du processus décisionnel (Brabant, 2016). La responsabilité de déterminer la capacité d’un mineur à prendre ses propres décisions repose sur tout professionnel de la santé qui a l’obligation d’obtenir un consentement libre et éclairé. Lorsque le médecin a déterminé qu’un mineur est capable de donner un consentement libre et éclairé, les professionnels de la santé doivent respecter le droit du client à la condentialité.

droit de consentir aux soins chez les mineurs. 10 Les considérations éthiques liées au traitement d’un enfant en n de vie sont abordées dans le chapitre 10, Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie.

Pour que le consentement soit libre et éclairé, l’inrmière doit s’assurer que les informations sont comprises et que les questions posées par l’enfant ou ses parents ont reçu une réponse jugée satisfaisante.

Chapitre 1

Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté

25

1

Jugement

clinique

Il est possible qu’un mineur ait la capacité de Korine est une adolescente de 16 ans. Elle a prendre des décisions sur accouché d’une petite lle il y a 3 mois. Elle vient certains types de traitement, d’être admise à l’hôpital pour quelques jours en mais qu’il ne l’ait pas pour raison d’une infection des voies respiratoires. Votre des traitements plus comcollègue vous demande si ses parents ont signé la plexes ; il doit cependant être formule de consentement aux soins. Que devriezinformé de l’évolution de son vous lui répondre ? état de santé et des soins qui sont envisagés. « Cela implique de promouvoir [sa] participation de manière appropriée à [son] niveau de développement dans un processus de prise de décisions nécessairement partagé avec [ses] parents et les soignants » (Bailly, 2010).

1.4

Soins pédiatriques en santé communautaire

Les soins en santé communautaire sont prodigués dans une pluralité de milieux, aux endroits mêmes où vit la population. Divers organismes et établissements participent à la santé communautaire : organismes de soins à domicile, écoles, groupes de médecine familiale, cliniques de soins ambulatoires, services des urgences, centres d’appels téléphoniques (Info-Santé), MSSS, direction de santé publique, établissements de Vous êtes l’inrmière clinicienne attitrée au détention pour les jeunes, programme Famille, enfance et périnatalité du colonies de vacances, gardecentre intégré de santé et de services sociaux ries, foyers d’accueil, centres de (CISSS) d’un quartier défavorisé. Vous devez évaluer soins palliatifs et centres les déterminants qui inuent sur la santé de la de réadaptation. population desservie par le CISSS. Parmi les facteurs La santé communautaire ci-dessous, lequel risque d’avoir la plus grande est en constante évolution et incidence sur la santé des enfants pour les familles s’adapte au visage contempodesservies par le CISSS pour lequel vous travaillez ? rain de la santé dans le a) L’accès aux services de santé. contexte d’un virage ambulatoire, du vieillissement de la b) Le niveau de scolarité des parents. population et de l’augmentac) L’environnement familial. tion des maladies chroniques. d) Le revenu familial. Les soins en santé communautaire ne présentent pas un caractère gé ; ils sont fréquemment remaniés an de mieux répondre aux besoins changeants des populations (Anderson et McFarlane, 2015). CONSEIL CLINIQUE

Jugement

clinique

L’inrmière en soins communautaires collabore avec les professionnels d’autres disciplines. Cela signie qu’elle comprend les termes employés par les démographes, les épidémiologistes et les économistes.

26

Partie 1

1.4.1

Objectifs des soins inrmiers en santé communautaire

L’Association des inrmières et inrmiers du Canada (2013) dispose d’une liste d’objectifs pour les soins inrmiers en santé communautaire permettant d’en déterminer la qualité et d’encadrer la prestation de ces soins dans tous les milieux. Ces objectifs sont de :

Inrmière, enfant et famille

1. faciliter l’accès aux services de manière efcace ; 2. promouvoir la santé et de prévenir la maladie chez les populations vulnérables ; 3. promouvoir la santé à travers toutes les étapes de la vie ; 4. prévenir les infections et de contrôler les maladies contagieuses ; 5. maintenir la santé et d’offrir des soins de n de vie ; 6. promouvoir un environnement sain ; 7. promouvoir les capacités de la communauté à améliorer la santé de ses membres ; 8. s’impliquer dans l’organisation des secours lors de désastres ou de situations d’urgence ; 9. démontrer sa responsabilité professionnelle. Par exemple, l’inrmière qui travaille dans une clinique pédiatrique assume plus d’un rôle lorsqu’elle prodigue des soins à un enfant atteint de diabète. Elle effectue alors : 1. de la gestion de cas en évaluant les besoins et en coordonnant les soins issus de différentes disciplines ; 2. du soutien à l’enfant et à la famille au cours de la période de crise qu’ils traversent ; 3. de la prévention en décelant les facteurs de risque présents chez les frères et les sœurs de l’enfant ; 4. de la promotion de la santé en aidant la famille à améliorer ses habitudes de vie. L’inrmière peut aussi s’investir dans le développement de programmes ou d’outils pour améliorer la santé des enfants qui vivent la même problématique. En somme, l’inrmière qui œuvre en santé communautaire auprès d’enfants doit faire preuve de leadership dans la mise en application de programmes de promotion de la santé. Elle est, pour les acteurs communautaires qui gravitent autour de l’enfant, une facilitatrice dans l’application d’un plan d’intervention stratégique ciblant une préoccupation commune à la population et aux intervenants de la santé (ACSP, 2010).

1.4.2

Principes des soins communautaires

Les soins communautaires requièrent la participation active des membres de la communauté et un engagement de la population. Les intervenants en soins communautaires font équipe avec la communauté an de choisir, de planier, de mettre en œuvre et d’évaluer les actions susceptibles d’améliorer la santé de cette communauté. Les soins communautaires font appel à la collaboration de

En faisant participer le plus grand nombre possible de personnes et d’intervenants issus de tous les secteurs de la communauté (santé, éducation, justice, économie, etc.), les inrmières doivent contribuer au développement de politiques publiques favorisant une santé optimale (ACSP, 2010). Ainsi, les soins inrmiers communautaires dénis par l’ACSP (2010) comprennent : 1. la promotion de la santé ; 2. la prévention des maladies et des blessures ; 3. la protection de la santé ; 4. la surveillance de la santé ; 5. l’évaluation de la santé de la population ; 6. un rôle actif dans la dénition d’éventuelles mesures à prendre et dans les interventions d’urgence. Les inrmières qui cherchent à améliorer l’état de santé des membres d’un groupe doivent penser leurs activités en fonction de ce groupe. Les valeurs communes conditionnent souvent les comportements des populations et des sous-populations en ce qui concerne la promotion de la santé et la prévention de la maladie (Maurer et Smith, 2013) 2 .

1.4.3

Démographie et épidémiologie

La démographie est l’étude des caractéristiques des populations. Les caractéristiques démographiques incluent l’âge, le genre, l’origine ou l’ethnicité, le statut socioéconomique et l’éducation. Les personnes, les familles et les communautés peuvent présenter des caractéristiques démographiques susceptibles de constituer un risque pour la santé (McFarlane et Gilroy, 2015). Le risque correspond à une probabilité accrue de contracter une maladie ou de se blesser. L’âge est l’un des plus importants facteurs de risque à considérer dans la prévention des maladies et de certains états de santé ; il constitue ainsi une donnée cruciale pour l’inrmière qui œuvre auprès des enfants. Par exemple, les nourrissons sont plus susceptibles de mourir des suites de malformations congénitales, les enfants et les adolescents, d’un accident, et les adultes d’âge moyen, d’un cancer (INSPQ, 2009) 3 . Le sexe joue également un rôle important : par exemple, les garçons se blessent plus souvent que les lles. L’origine ou l’ethnicité sont depuis longtemps associées à certains risques accrus de maladie ou d’incapacité. Un faible statut socioéconomique prédispose les enfants à différents problèmes, et ce, dès leur plus jeune âge (Chin-Lun Hung, Hahn, Alamiri et al.,

2015 ; Conseil québécois des médecins de famille [CQMF], 2015). L’inrmière doit dépister la pauvreté au même titre que les autres antécédents de santé (CQMF, 2015). L’épidémiologie est l’étude de la santé d’une population en rapport avec différents facteurs susceptibles d’inuer sur la morbidité et sur la mortalité (Macha et McDonough, 2012). Le suivi épidémiologique permet de caractériser la distribution et les causes d’une maladie ou d’une blessure dans une population (McFarlane et Gilroy, 2015). Il est un outil important pour la mise en place des programmes de santé et la dénition des enjeux prioritaires. Les professionnels de la santé qui travaillent au sein d’organisations de santé à l’échelle d’une communauté, d’une province ou du pays se réfèrent à ces objectifs pour élaborer des programmes qui ont une très grande incidence sur la santé des enfants.

clinique

Jugement

plusieurs professionnels de la santé, intervenants sociaux et communautaires, décideurs politiques, organismes de gestion intégrée des soins de santé, et entreprises pour la prise en charge des enfants et des familles de la communauté considérée.

1

Dans le cadre de votre travail, vous pratiquez la vaccination dans les écoles primaires du quartier. Cette tâche relève-t-elle de votre rôle en santé communautaire ? Justiez votre réponse.

Distribution d’une maladie ou d’une blessure Les taux de morbidité servent à mesurer l’importance d’une maladie ou d’une blessure dans une population et, jumelés aux taux de natalité et de mortalité, ils permettent d’obtenir un portrait objectif de l’état de santé d’une communauté. On distingue deux types de taux de morbidité : l’incidence et la prévalence. L’incidence correspond au nombre de nouveaux cas dans une population pendant une période donnée, alors que la prévalence englobe le nombre de cas existants (anciens et nouveaux) dans une population pendant une période donnée (Macha et McDonough, 2012). Par exemple, l’incidence du diabète de type 1 se mesure d’après le nombre de nouveaux cas au sein d’une population, divisé par la population à risque. De même, la prévalence du diabète de type 1 se mesure d’après le nombre de cas existants au sein d’une population, divisé par la population à risque. L’incidence et la prévalence sont habituellement exprimées en nombre de cas pour 1 000, 10 000 ou 100 000 personnes, selon la fréquence .

2 Les contextes économique, social et culturel ainsi que leur incidence sur les soins de santé sont étudiés dans le chapitre 2, Inuences socioculturelles sur les soins de santé.

Encadré 1.4W : Taux de mortalité et de morbidité fréquemment utilisés.

Triangle épidémiologique Le triangle épidémiologique se compose de trois éléments dont les rapports mutuels inuencent le risque de contracter une maladie ou de souffrir d’une affection (Macha et McDonough, 2012). Ces facteurs sont l’agent, l’hôte et l’environnement FIGURE 1.13. L’agent est l’élément causal d’une affection ; il peut être infectieux (p. ex., le Mycobacterium tuberculosis), chimique (p. ex., le plomb dans la peinture) ou physique (p. ex., le feu). L’hôte est l’élément qui désigne ce qui est propre à une personne ou à un groupe, comme des facteurs génétiques non

Chapitre 1

3 Les causes de mortalité selon l’âge sont présentées dans le chapitre 3, Croissance, développement et promotion de la santé.

Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté

27

FIGURE 1.13

Triangle épidémiologique

contrôlables ou des facteurs liés au mode de vie (p. ex., les choix alimentaires ou le degré d’activité physique). Les facteurs environnementaux conditionnent le milieu dans lequel l’hôte vit ; ils comprennent les conditions climatiques, les facteurs liés à l’habitation, au voisinage et à l’école.

Jugement

clinique Vous êtes inrmière clinicienne dans une école. Kealan, âgé de huit ans, est allergique aux arachides. Vous souhaitez que les inter­ venants qui s’occupent de lui sachent com­ ment intervenir en cas de réaction allergique. Est­ce que cela relève de votre rôle ? Justiez votre réponse.

CONSEIL CLINIQUE

La démarche de soins est un processus de résolution de problème dynamique. L’inrmière évalue l’état de santé de l’enfant sur une base continue et adapte ses interventions en fonction des changements qui surviennent.

28

Partie 1

Niveaux de prévention Les programmes de santé communautaire se fondent sur les trois niveaux de prévention de la maladie (Issel et Wells, 2013). La prévention primaire est axée sur la promotion de la santé et la prévention des maladies ou des blessures. Elle consiste notamment en des services de consultation pour enfants bien portants, en des programmes de vaccination, en des programmes pour la promotion de la sécurité (casques de vélo, sièges d’auto, ceintures de sécurité, contenants à l’épreuve des enfants), en des programmes ciblant la nutrition, en des efforts d’ordre environnemental (programmes d’assainissement de l’air), en des mesures d’assainissement (chloration de l’eau, collecte des ordures, traitement des eaux usées) et en des formations relatives au rôle parental. La prévention secondaire est axée sur le dépistage et le diagnostic précoces des maladies, et comporte, par exemple, des programmes de dépistage de la tuberculose et de détection du plomb, et des programmes d’aide psychologique en cas d’événements éprouvants comme une séparation, un divorce, un deuil ou une catastrophe naturelle. La prévention tertiaire est axée sur l’optimisation de l’état fonctionnel des enfants affectés par une incapacité ou une maladie chronique. Les interventions tertiaires englobent les programmes de réhabilitation et de prise en charge de maladies telles que l’asthme, la drépanocytose, le cancer et l’anorexie, ainsi que des programmes d’éducation spécialisée pour enfants.

FIGURE 1.14 Le dépistage fait partie des rôles de l’inrmière en santé communautaire.

prévenir sa propagation et sa progression (Simpson, Beaucage et Bonnier Viger, 2017). Cependant, toutes les maladies ne se prêtent pas de la même manière au dépistage. Même si ce dernier présente des avantages, il offre aussi certains inconvénients, comme c’est le cas pour toute intervention. Avant de mettre en place un programme de dépistage, il est essentiel de disposer d’éléments probants pour s’assurer que les avantages du dépistage en excéderont les risques et les coûts. À ce titre, le cas de la scoliose idiopathique, une courbure du rachis de plus de 11° survenant au début de l’adolescence, est intéressant. À la suite de nombreuses recherches auxquelles des intervenants en santé scolaire ont contribué en effectuant le dépistage de cette affection, il est désormais recommandé de ne plus dépister la scoliose idiopathique (Beauséjour, Goulet, Ehrmann Feldman et al., 2017). En effet, on a constaté que le dépistage engendrait un taux élevé de faux positifs. De plus, les résultats probants ne sont pas concluants quant à l’efcacité des traitements non invasifs offerts tels que le corset, l’électrostimulation et la kinésithérapie.

1.4.4

Démarche de soins auprès d’une population

La démarche de soins inrmiers est une méthode de dénition et de résolution de problèmes suivant laquelle l’inrmière décrit et justie ses interventions (Alfaro-LeFevre, 2014). La démarche reconnue comporte cinq étapes : 1. la collecte des données (évaluation initiale) ; 2. l’analyse et l’interprétation des données ; 3. la planication des soins (formulation des objectifs et des résultats escomptés) ;

Dépistage

4. l’exécution des interventions inrmières ;

L’inrmière en santé communautaire est souvent appelée à effectuer du dépistage, une activité de prévention secondaire FIGURE 1.14. Le dépistage a pour but de détecter la maladie et de la soigner tôt, dans la période de pathogenèse, afin de

Tout au long du présent manuel, des encadrés relatifs à la mise en œuvre d’une démarche de soins guident l’organisation des soins inrmiers

Inrmière, enfant et famille

5. l’évaluation des résultats (évaluation en cours d’évolution).

sur le modèle de l’ENCADRÉ 1.5. Comme nous le verrons en n de chapitre, il est possible d’intégrer à la démarche de soins les principes d’une pratique fondée sur des résultats probants. Que le client soit un enfant ou une population d’enfants, les étapes de la démarche de soins sont les mêmes ; seuls diffèrent le type d’interventions et les indicateurs de bien-être et de maladie (Anderson et McFarlane, 2015). Le rôle de l’inrmière varie selon l’envergure du projet, la population cible et l’expertise des membres de l’équipe.

Collecte des données – Évaluation initiale La collecte des données consiste à recueillir de l’information subjective et objective sur une communauté an de faire ressortir ses problèmes prioritaires concernant, par exemple, une population d’âge préscolaire (de 3 à 6 ans), d’âge scolaire (de 6 à 12 ans) ou d’adolescents (de 12 à 18 ans). Pour la population d’âge préscolaire, les démarches prioritaires peuvent viser la sécurité physique des enfants, qui sont sujets à divers accidents (intoxication, chutes, etc.), ou encore cibler leur développement optimal. Chez les adolescents, il pourra être question de santé sexuelle, de prévention des grossesses et de suicide. L’information subjective correspond à ce que les membres de la communauté expriment au sujet de ce qu’ils considèrent comme étant leurs besoins les plus pressants. Cette information peut être obtenue de plusieurs manières, par exemple en distribuant des questionnaires à un échantillon de la population, en interrogeant directement les membres de la communauté, en communiquant avec des personnes qui représentent le groupe (comme les dirigeants de la communauté) ou en planiant des rencontres avec elles. L’information objective correspond aux données que l’inrmière recueille par observation directe ou au moyen de sources écrites. L’exploration du voisinage constitue une méthode d’observation directe. Ainsi, l’inrmière peut observer qu’un parc, fréquemment visité par des enfants d’âge scolaire à la sortie de l’école, est parfois jonché de seringues ayant servi à l’injection de drogues. L’inrmière peut également obtenir de l’information objective sur la santé de la communauté par l’entremise de la chambre de commerce du quartier, du bureau de Statistique Canada, des services de bibliothèque, du MSSS et de sites Web d’organisations bénévoles vouées à la santé ou d’organismes gouvernementaux.

Analyse et interprétation des données Au cours de la collecte des données, l’inrmière établit dans quelle mesure la communauté peut répondre efcacement aux besoins des enfants en matière de soins de santé. Une fois la collecte des données complétée, l’inrmière communautaire s’entoure d’une équipe an d’analyser les résultats des enquêtes et

Mise en œuvre d’une démarche de soins ENCADRÉ 1.5

1

Principales étapes d’une démarche de soins

COLLECTE DES DONNÉES – ÉVALUATION INITIALE

L’inrmière recherche des manifestations cliniques. Elle recueille de l’information, subjective et objective, auprès de l’enfant et de sa famille, ainsi qu’en ayant recours à toute autre source d’information pertinente et en considérant les contextes physique, psychologique, socioculturel et spirituel de l’enfant et de sa famille. ANALYSE ET INTERPRÉTATION DES DONNÉES

Après avoir complété la collecte des données, l’inrmière formule et valide, avec l’enfant et sa famille, les problèmes et les besoins actuels de l’enfant, ainsi que les troubles potentiels liés aux facteurs de risque décelés. RÉSULTATS ESCOMPTÉS

L’inrmière établit les priorités, détermine les objectifs et justie les résultats escomptés an d’établir un plan de soins. INTERVENTIONS INFIRMIÈRES

L’inrmière élabore et met en œuvre des stratégies et des interventions inrmières, et elle note les rétroactions. ÉVALUATION DES RÉSULTATS

En se basant sur les directives ou les interventions inrmières qui ont été mises en œuvre, l’inrmière met en place une méthode pour évaluer la réponse de l’enfant et de sa famille aux soins prodigués. Elle détermine ensuite les ajustements à faire au plan de soins. Source : Adapté de Alfaro-LeFevre (2014).

des questionnaires, de déterminer dans quelle mesure les organismes communautaires en place peuvent répondre aux besoins exprimés par les membres de la communauté, et de déterminer les personnes qui sont le plus à risque. L’analyse des caractéristiques démographiques permet ensuite de comparer les taux de morbidité et de mortalité de la communauté aux taux standards. Les taux standards peuvent provenir d’une autre communauté, d’une autre ville, de la province ou du pays. Par exemple, si les taux d’infections transmissibles sexuellement ou par le sang (ITSS) ou de grossesses à l’adolescence sont supérieurs à ceux d’autres communautés, il peut devenir prioritaire de prévoir des interventions pour modier cette situation. La découverte d’un problème de santé communautaire est un indice de l’état de santé d’une communauté et doit amener l’inrmière à considérer les risques ou les besoins générés par un agent causal.

Les directives ofcielles pour mettre en œuvre la démarche de soins sont approfondies dans le chapitre 9 du manuel de Potter, P.A., et Perry, A.G. (2016). Fondements généraux (3e éd.). Montréal : Chenelière Éducation.

Planication communautaire des soins En collaboration avec les membres de la communauté, l’inrmière élabore un plan axé sur les besoins et les problèmes des jeunes de la population cible. Pour maximiser l’utilisation des ressources communautaires, il est souhaitable de préciser tout d’abord les priorités en se basant sur le degré de gravité des problèmes, sur les besoins exprimés par la communauté et sur la capacité de l’inrmière communautaire à susciter des changements. Une fois établie la liste des priorités, l’inrmière travaille avec les

Chapitre 1

éactivation des connaissances Lors de l’examen physique d’une personne, indiquez dans le bon ordre les quatre étapes que l’inrmière effectue pour recueillir des données objectives.

Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté

29

Jugement

clinique Vous êtes inrmière clinicienne en santé communautaire et procédez à la visite des garderies du territoire couvert par le centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS). Vous constatez que les enfants jouent à l’exté­ rieur sur les glissoires et les balançoires, et qu’ils portent de longs foulards. À la suite de cette constatation, donnez une intervention priori­ taire à effectuer auprès des éducatrices et des parents. Justiez votre réponse.

membres de la communauté à xer au moins un objectif pour chacun des problèmes auxquels l’équipe aura décidé de s’attaquer. Les objectifs sont des résultats escomp­ tés qui orientent les interven­ tions et permettent d’évaluer dans quelle mesure celles­ ci apportent ou non des changements.

Les interventions com­ munautaires se présentent souvent sous la forme de pro­ Si, après discussion avec la directrice de la grammes de santé des tinés garderie, l’inrmière constate que les parents des à améliorer l’état de santé enfants qui la fréquentent ont un faible revenu et d’une population cible. Le que certains pourraient difcilement suivre la groupe de planication éva­ recommandation qu’elle a proposée, que lue les ressources déjà en pourrait­elle faire ? place dans la communauté et estime celles dont il aura besoin pour mettre en œuvre ce programme. La durée du programme, le budget et les stratégies de CONSEIL CLINIQUE nancement sont déterminés en amont. L’inrmière peut communiquer avec d’autres professionnels de Chaque communauté a la santé qui ont mis sur pied des programmes ef­ ses forces et ses limites. caces au sein d’autres communautés ; ces personnes L’inrmière en santé com­ sont susceptibles d’offrir des conseils précieux et munautaire mise sur les des suggestions qui feront gagner du temps. points forts d’une commu­ nauté pour résoudre les Interventions inrmières problèmes. L’inrmière et les membres de la communauté ont généralement la responsabilité de la mise en CE QU’IL FAUT RETENIR œuvre des interventions relatives au programme. Que ce dernier soit simple ou complexe, il est L’inrmière à domicile doit nécessaire de s’assurer que toutes les personnes tenir compte des besoins impliquées demeurent en communication les unes de l’enfant sur les plans avec les autres, suivent les idées directrices du physique, culturel, affectif, projet, et consignent chaque jour les activités spirituel, développemental menées et les dépenses engagées ; ces données se et mental, tout en étant révéleront d’une très grande valeur au moment de consciente des différences la phase d’évaluation des résultats de soins. qui existent entre les enfants et les familles à cet égard. Évaluation communautaire des résultats –

programme d’éducation à la santé, le nombre de dépliants distribués et l’efcacité du programme. Quant aux résultats, ils permettent de déter­ miner si les objectifs du programme et de la communauté ont été atteints. L’évaluation du pro­ gramme doit se faire en continu an de contrôler les initiatives visant une amélioration de la perfor­ mance et de faire en sorte que l’amélioration de la prestation des soins de santé se traduise par une amélioration de l’état de santé de la population cible. L’ENCADRÉ 1.6 donne un exemple de projet de planication et d’évaluation communautaires.

MAIS SI...

Évaluation en cours d’évolution

Le site Web de l’Association canadienne des programmes de ressources pour la famille (www.frp.ca) et celui de Parents vous comptez (www. parentsvouscomptez.ca) permettent d’en connaître davantage sur ce sujet.

30

Partie 1

L’évaluation permet de déterminer si les objectifs du programme ont été atteints. Il existe divers modèles d’évaluation de programme. La méthode d’évaluation qui prend en compte la structure, le processus et les résultats est utilisée couramment par les organismes de soins de santé. La structure s’attarde essentiellement aux points suivants : les compétences du personnel ; le caractère adéquat des bâtiments, des bureaux, des fournitures et du matériel, ainsi que les caractéristiques de la population cible. Le processus se concentre sur l’interaction entre les clients et les professionnels de la santé. Les indicateurs du processus sont le nombre de personnes qui ont participé à un

Inrmière, enfant et famille

1.5

Soins à domicile

Les soins à domicile sont conçus pour promouvoir le développement optimal de l’enfant. Ils com­ portent une évaluation de son développement et de ses besoins, la planication des soins, l’orientation vers d’autres services lorsque cela est nécessaire, ainsi que des interventions visant le développement optimal grâce à des autosoins. Ainsi, l’amélioration de la qualité de vie de l’enfant et de sa famille est l’objectif fondamental du transfert de l’hôpital à la maison d’enfants qui sont pourtant dépendants de la technologie. La normalisation consiste à intégrer le traitement de l’enfant dans sa routine quoti­ dienne et à favoriser son développement normal. L’Association canadienne de soins et services à domicile (ACSSD, 2011) promeut la santé, l’auto­ nomie et la dignité du client et des proches aidants. Les soins à domicile doivent être prodi­ gués dans une perspective de long terme. Les objectifs de l’ACSSD pour 2020 sont « la promo­ tion de la santé, l’enseignement, les interventions curatives, les soins de n de vie, la réadaptation, le soutien et l’entretien ménager, l’adaptation et l’intégration sociales, ainsi que le soutien aux aidants familiaux » (ACSSD, 2011, p.1). Les soins à domicile favorisent une relation intime et enrichissante entre l’inrmière et la famille. Un des aspects les plus importants de cette relation est le maintien des frontières profes­ sionnelles et l’établissement d’un partenariat per­ mettant d’assumer un rôle thérapeutique de soutien pour l’enfant et sa famille, sans les envahir (Ward, Glass et Ford, 2014).

1.5.1

Enjeux actuels

Les soins prodigués dans la communauté, parmi lesquels gurent les soins à domicile répondant aux besoins des enfants, sont devenus un choix courant dans le réseau actuel des soins de santé en raison de l’évolution des attentes du public, des avancées technologiques et de l’augmentation du coût des soins en établissement (Santé Canada, 2016) ENCADRÉ 1.7.

Mise en œuvre d’une démarche de soins ENCADRÉ 1.6

1

Exemple type d’une démarche de soins dans un centre local de services communautaires

Le centre local de services communautaires (CLSC) de quartier suit quelque 500 enfants et leur famille au sein de son programme Enfants, jeunes et familles. Les inrmières rattachées à cet établissement sont chargées d’évaluer les besoins de la communauté et d’élaborer un plan de soins.

Le programme que les inrmières choisissent d’adopter repose sur le guide d’intervention intitulé La pédiculose du cuir chevelu. Lignes directrices pour le contrôle de la pédiculose du cuir chevelu dans les écoles et les services de garde éducatifs à l’enfance (MSSS, 2016a).

COLLECTE DES DONNÉES – ÉVALUATION INITIALE

Les inrmières se réunissent à intervalles réguliers. Leur première tâche consiste à faire l’évaluation des besoins de la communauté. À cet effet, les membres de l’équipe envoient des questionnaires à un échantillon de familles choisies au hasard et ayant un ou des enfants âgés de 3 à 12 ans. Ils organisent des groupes de discussion avec les membres de la communauté an de recueillir de l’information subjective sur leurs besoins. Voici l’information recueillie d’après les données démographiques disponibles auprès du gouvernement : • Population : le CLSC est situé dans un quartier urbain dont la population se compose à 30 % d’Hispaniques, à 30 % d’Afro-Américains, à 10 % de Caucasiens et à 30 % d’Asiatiques. • Économie : 68 % des familles comptent au moins 1 membre travaillant à temps plein, 30 % des familles vivent sous le seuil de pauvreté. Ce chiffre n’a pas changé depuis 10 ans. • Éducation : 20 % de la population adulte détient un diplôme d’études secondaires, et 4 % de ce groupe comptent au moins une année d’études universitaires. Dans le quartier, le taux de fréquentation scolaire est plus élevé que le taux provincial. • Communication : 75 % des foyers ont accès à Internet, comparativement à 30 % 10 années auparavant. Près de 42 % de la population cible ne parle pas français.

Les membres de l’équipe évaluent quelles sont les ressources nécessaires à la mise en œuvre du programme, y compris le personnel, les fournitures et le matériel, et ils ont estimé le coût total nécessaire à la mise en place du programme et à son maintien durant deux ans de manière à soumettre une demande de subvention au Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSS), à l’Institut national de santé publique du Québec et au ministère de la Santé et des Services sociaux. RÉSULTATS ESCOMPTÉS

Les objectifs ciblés par le CLSC au moment de la mise en œuvre de ce programme sont les suivants : • Vérier les connaissances sur la pédiculose et donner des informations, le cas échéant. • Éradiquer les poux et prévenir la réinfestation. • Donner des informations sur la façon de soigner les signes secondaires d’infestation. INTERVENTIONS INFIRMIÈRES

Les actions menées sont les suivantes : • Au début de la démarche, les inrmières organisent des cafés-rencontres avec les parents et les enfants an de présenter des informations sur la pédiculose.

• Services sociaux : parmi les familles vivant sous le seuil de la pauvreté, 73 % reçoivent l’aide sociale.

– Biologie des poux ;

• Santé : dans la communauté, les parents se plaignent d’infestation régulière de poux et de nombreuses récidives. Le problème est persistant depuis plus d’un an. La pédiculose du cuir chevelu constitue un problème de santé mineur qui touche régulièrement les enfants âgés de 3 à 11 ans. Les coûts associés à cette problématique sont élevés. À partir de ces constatations, la hausse du nombre de cas de pédiculose au cours de la dernière année a été déterminée. Plus qu’une éclosion de poux, les professionnels de la santé qualient la pédiculose d’épidémie, puisque de très nombreux cas ont été déclarés au sein des familles desservies et que de multiples cas de réinfestation après traitement ont été rapportés. Des signes primaires et secondaires d’infestation inquiètent beaucoup les parents et les enfants.

– Manifestations cliniques et moyens de détection ;

ANALYSE ET INTERPRÉTATION DES DONNÉES

Les membres de l’équipe du CLSC conviennent que les cas de pédiculose devraient faire l’objet d’un suivi serré au cours des deux prochaines années. An de trouver des exemples de communautés ayant expérimenté des problèmes semblables, les membres de l’équipe doivent effectuer les actions suivantes :

– Principes d’infestation ; – Traitements : produits et matériel. • À la fin de chaque café-rencontre, les infirmières distribuent aux parents des brochures contenant toutes les informations présentées. En raison des barrières linguistiques, les brochures sont disponibles en espagnol, en portugais, en anglais et en tagalog (Philippines) pour les parents. • Les inrmières supervisent les parents pour qu’ils mettent en pratique les moyens de détection des poux. ÉVALUATION DES RÉSULTATS – ÉVALUATION EN COURS D’ÉVOLUTION

Les infirmières de l’équipe du CLSC assument la responsabilité de la mise en œuvre du programme dans les délais prévus, de même que son évaluation. Au bout d’une période n’excédant pas trois mois, les inrmières effectuent un sondage parmi les familles desservies par le CLSC pour :

• Revue de la documentation pour trouver des exemples de communautés ayant eu ce problème de réinfestation.

• comptabiliser les cas de pédiculose ;

• Analyse des résultats de programmes ayant été implantés avec succès.

• évaluer les connaissances sur le matériel et la technique d’éradication.

Chapitre 1

• déterminer s’il s’agit d’une réinfestation ;

Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté

31

Plusieurs ressources existent pour accompagner les proches aidants. Ainsi, auprès des organismes suivants, on trouve notamment des solutions pour obtenir des moments de répit : le Regroupement des aidantes et aidants naturels de Montréal (http://raanm.net) et le Réseau aidant (https:// lereseauaidant.ca).

Les progrès technologiques spectaculaires réalisés ces dernières décennies se sont traduits par une augmentation de la survie des enfants souffrant de maladies congénitales ou acquises. Auparavant, les enfants qui dépendaient d’un respirateur articiel (ventilation mécanique) ou d’un traitement médical lourd étaient exclusivement traités dans une unité de soins intensifs ou de soins de longue durée. Ces enfants sont maintenant capables de vivre avec leur famille dans leur propre maison (Gay, Thurm, Hall et al., 2016 ; Redouane, Cohen, Stephens et al., 2016). Par exemple, les enfants atteints de cancers, de troubles rénaux, de brose kystique, de spinabida, d’anomalies cardiaques, de troubles gastrointestinaux, de maladies neurodégénératives ou d’une infection par le VIH peuvent requérir des soins continus en raison de la maladie, de son traitement ou des effets indésirables entraînés par ce dernier (Adde, Alvarez, Barbisan et al., 2013 ; Jibb, Stevens, Nathan et al., 2017). Diverses interventions peuvent être menées an d’informer les parents ou les proches aidants à propos du processus de la maladie et de les aider à s’adapter au changement du rôle parental, et ce, dans le but de répondre à tous les besoins de l’enfant dans un environnement familier. Le coût est un autre enjeu important du système actuel de prestation des soins. Les coûts considérables liés aux hospitalisations longues sont en partie responsables de la réduction des séjours hospitaliers. Les enfants sont rarement admis à l’hôpital et, le cas échéant, ils obtiennent

ENCADRÉ 1.7

• Favorise les activités permettant d’acquérir la conance en soi et une plus grande estime de soi ; • Contribue à une meilleure perception du travail accompli par les inrmières à domicile et engendre un respect accru à leur égard ;

Objectifs

Les soins à domicile prodigués aux enfants ne sont pas uniquement destinés à ceux qui souffrent d’une maladie chronique. Dans d’autres cas, des visites peuvent être planiées à la suite d’une hospitalisation pour une condition aiguë nécessitant des traitements intermittents et à court terme, comme la photothérapie, la surveillance de l’apnée ou l’administration d’un antibiotique par voie intraveineuse ENCADRÉ 1.9. L’inrmière à domicile peut avoir à gérer les besoins d’un certain nombre de clients et à mettre en œuvre les plans de soins requis par leur état de santé. Les infirmières qui offrent des soins

• Encourage un partage des perspectives avec la famille, et non pas seulement les tâches et les fonctions ; • Se présente comme un soutien pour la famille, dont le rôle de soignant principal reste irremplaçable ; • Se conçoit comme le partage d’une expertise entre la famille et l’inrmière en vue de prodiguer les meilleurs soins à l’enfant ; • Procure une aide à la famille tout en reconnaissant l’utilité de sa contribution ; • Contribue à faire ressortir les forces de l’enfant et celles de sa famille ;

• Permet de prendre conscience que les familles et chacun de leurs membres dénissent leur rôle de façon variable ;

• Favorise les échanges pour mieux cerner les options, les priorités et les préférences ;

• Contribue à démontrer une bonne compréhension de l’approche souhaitée par la famille pour les soins à domicile ;

• Offre un soutien à la famille pour l’aider à faire face à la situation en lui permettant de donner un sens aux soins qu’elle prodigue à l’enfant à la maison.

Source : Adapté de McIntosch et Runciman (2008).

Partie 1

1.5.2

Objectifs des soins à domicile centrés sur la famille

Les soins collaboratifs, c’est-à-dire effectués en partenariat, permettent à l’inrmière et à la famille de travailler ensemble, et de partager de façon profonde et signicative les résultats obtenus (Agrément Canada, 2017). Cette approche, essentielle dans le milieu des soins à domicile, présente les caractéristiques suivantes :

32

rapidement leur congé. Les soins inrmiers à domicile permettent également de réduire la durée du séjour hospitalier (Parab, Cooper, Woolfenden et al., 2013) ENCADRÉ 1.8. Cependant, si les soins à domicile réduisent les coûts pour le réseau de la santé, une partie du fardeau nancier est alors transférée à la famille. Cette dernière peut être forcée d’absorber les coûts de certains médicaments, des fournitures, du transport, du logement, des services publics, de la nourriture, du ménage et d’une partie des soins inrmiers. Au l du temps, les enfants chroniquement malades, notamment ceux souffrant de maladies rares, sont susceptibles de devenir une charge nancière pour la famille (Angelis, Tordrup et Kanavos, 2015). La coordination des soins à domicile peut être difcile, frustrante et compliquée pour la famille.

Inrmière, enfant et famille

pédiatriques à domicile font face à des exigences accrues ; elles doivent en effet fournir des soins de grande qualité avec peu de ressources et obtenir des résultats positifs pour l’enfant. En conséquence, elles doivent souvent compter sur leur capacité à déléguer pour s’assurer que l’enfant et la famille reçoivent les soins nécessaires. La délégation consiste à assigner des activités de soins à d’autres intervenants de la santé, comme

l’auxiliaire familiale (Ordre des inrmières et inrmiers du Québec [OIIQ], 2011).

1.5.3

1

Planication

Le succès des soins à domicile, particulièrement pour l’enfant qui dépend de la technologie ou qui souffre de problèmes médicaux complexes, repose principalement sur une planification et une

Pratique fondée sur des résultats probants ENCADRÉ 1.8

Soins à domicile et durée d’hospitalisation

QUESTION CLINIQUE

RECOMMANDATIONS POUR LA PRATIQUE INFIRMIÈRE

L’accès aux soins à domicile destinés aux enfants contribue-t-il à réduire la durée de leur séjour hospitalier ?

Les données conrment que les soins à domicile permettent de diminuer la durée du séjour hospitalier et le nombre de consultations. L’inrmière peut orienter l’enfant et sa famille vers les ressources adéquates.

RÉSULTATS PROBANTS

• Stratégies de recherche : la recherche a été faite de façon à repérer uniquement des articles de recherche sur les populations d’enfants qui ont été publiés au cours des 10 dernières années. • Bases de données utilisées : PubMed, CINAHL, Cochrane Collaboration, AHRQ. ANALYSE CRITIQUE ET SYNTHÈSE DES DONNÉES

• Certaines recherches évaluent l’incidence des services de soins à domicile sur la durée de séjour de l’enfant à l’hôpital ou sur le nombre de consultations à l’urgence. • Les durées des séjours ont été évaluées à partir des jours-lits, de la durée de l’hospitalisation et de l’utilisation des services hospitaliers. • La durée des séjours hospitaliers est notablement réduite ou le nombre de consultations à l’urgence est diminué lorsque les enfants reçoivent des services à domicile.

ENCADRÉ 1.9

RÉFÉRENCES

DaCosta, A.M., Sweet, C.B., Garavaglia, L.R., et al. (2016). Pharmacist-led model to reduce hospital readmissions in medically complex children. J Pediatr Pharmacol Ther, 21(4), 346-352. Holder-Niles, F., Haynes, L., D’Couto, H., et al. (2017). Coordinated asthma program improves asthma outcomes in high-risk children. Clin Pediatr (Phila), 56(10), 934-941. Khalil, S.T., Uhing, M.R., Duesing, L., et al. (2016). Outcomes of infants with home tube feeding. JPEN J Parenter Enteral Nutr, pii : 0148607116670621. Low, L.L., Vasanwala, F.F., Ng, L.B., et al. (2015). Effectiveness of a transitional home care program in reducing acute hospital utilization : A quasiexperimental study. BMC Health Serv Res, 15, 100. Parab, C.S., Cooper, C., Woolfenden, S., et al. (2013). Specialist home-based nursing services for children with acute and chronic illnesses. Cochrane Database Sys Rev, (6), CD004383.

Typologie des soins inrmiers à domicile

BESOINS DÉCOULANT DE LA SITUATION DE SANTÉ

OBJECTIFS DES INTERVENTIONS INFIRMIÈRES

• Enfant à risque (p. ex., un retard de croissance, une situation familiale ou sociale défavorable)

• Visite initiale an d’évaluer l’état de santé de l’enfant, l’environnement à domicile (p. ex., la sécurité), de déterminer l’état de croissance et de développement de l’enfant, d’évaluer la capacité et le désir des parents d’effectuer les procédures et de xer des objectifs avec la famille en vue d’atteindre des résultats de santé positifs

• Enfant souffrant d’une maladie chronique, stable sur le plan médical, et nécessitant des soins spécialisés et multiples • Enfant dépendant de la technologie (p. ex., ne pouvant se passer d’un respirateur articiel ou d’une trachéotomie, recevant une alimentation parentérale totale à domicile ou une alimentation entérale à l’aide d’une pompe) • Enfant ayant besoin de soins prodigués par du personnel qualié (p. ex., une injection ou une perfusion à heures régulières, un changement de pansements, une photothérapie)

Chapitre 1

• Visites régulières an de prodiguer des soins inrmiers spécialisés, d’enseigner les techniques relatives aux procédures et de superviser l’enfant ou les parents lorsqu’ils les effectuent • Visites ponctuelles en cas d’aggravation de la maladie an de réévaluer l’état physique de l’enfant, d’ajuster le plan de soins et de traitements inrmiers (PSTI) et d’orienter la famille vers les intervenants appropriés, si nécessaire (p. ex., pour l’obtention d’une aide au transport de l’enfant vers le centre ambulatoire ou vers le cabinet du médecin pour des services d’évaluation et de diagnostic)

Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté

33

13 Les principes généraux de la planication du congé et de la transition vers les soins à domicile sont présentés dans le chapitre 13, Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation.

préparation rigoureuses, souvent réalisées en collaboration avec l’inrmière de liaison du centre hospitalier 13 . La planication des soins à domicile doit donc commencer tôt, dès le début de l’hospitalisation ; elle se fonde sur la préparation de l’enfant et de sa famille. Ce processus interprofessionnel fait intervenir la famille, les professionnels de liaison en collaboration avec les services des soins à domicile, le milieu communautaire et, selon le cas, des représentants des établissements de soins pour les affections aiguës.

Jugement

clinique Vous êtes inrmière clinicienne en soins à domicile. Vous effectuez une visite dans une famille pour évaluer Jody, âgé de six ans, qui est diabétique de type 1. Vous devez évaluer dans quelle mesure les parents sont aptes à prendre en charge les soins de leur enfant. Au cours de cette visite, vous constatez que Jody a des ecchymoses au visage et aux bras. La mère demeure vague sur l’origine de ces blessures. Elle dit que Jody est maladroit et qu’il tombe tout le temps. En plus de procéder à un examen clinique complet de Jody, quelle intervention prioritaire devriez-vous inclure dans le plan de soins ?

L’évaluation des besoins de l’enfant et de sa famille, menée initialement par l’inrmière de liaison, puis par l’inrmière en soins à domicile, porte sur : 1. les besoins de santé de l’enfant ; 2. la détermination des interventions à effectuer et les besoins de formation des soignants familiaux ;

c) Questionner la mère an d’obtenir davantage de détails sur la cause des blessures.

3. l’évaluation, d’une part, de la situation professionnelle du parent qui prend soin de l’enfant à la maison et, d’autre part, de la situation financière de la famille, surtout si un des parents doit cesser de travailler ;

d) Évaluer la résidence familiale à la recherche de risques et de dangers potentiels.

4. la capacité d’adaptation des frères et des sœurs ;

a) Augmenter la fréquence et la durée des visites pour étoffer la collecte des données. b) Procéder à une rencontre avec toute la famille an d’évaluer la dynamique familiale.

MAIS SI...

Si au l des visites, vous avez de plus en plus de raisons de croire que Jody est victime de sévices corporels. Avec quel organisme devez-vous collaborer en tant qu’inrmière ?

5. les ressources communautaires et l’accessibilité des services de soutien psychologique ou de répit (Kelly et Penney, 2011 ; OIIQ, 2010).

La planication complète des soins à domicile comprend le plan de soins, des instructions écrites pour faciliter la continuité des soins et de l’information détaillée sur les résultats escomptés des soins à domicile. Elle devrait également comprendre la gestion des situations d’urgence, et prévoir un soutien social et émotionnel. L’inrmière en soins à domicile s’assure de la cohérence entre les besoins de l’enfant et le plan de soins élaboré ; elle met en œuvre le plan de soins, vérie sa bonne compréhension par tous les acteurs impliqués – famille, enfant ou autres professionnels – et ajuste le plan de soins selon l’évolution des besoins de l’enfant et de sa famille.

Coordination des soins Un programme de soins pédiatriques à domicile doit offrir des soins adaptés au contexte culturel,

34

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

qui s’appuient sur la collectivité, et qui s’avèrent complets et rentables dans un milieu familial protecteur qui maximise les capacités de l’enfant tout en réduisant au minimum les effets de l’affection (Olson, 2017). Avant tout, il est donc essentiel de trouver les ressources communautaires locales adéquates pour soutenir efcacement les familles. De plus, les soins prodigués par de multiples intervenants devraient être coordonnés an de réduire leur complexité et leur fragmentation, d’atténuer le fardeau qu’ils représentent pour la famille et de prévenir le dédoublement des services. Coordonner des soins à domicile signie établir un lien entre l’enfant ayant des besoins de soins à domicile, sa famille, les services et les ressources disponibles, et harmoniser leurs actions an d’offrir des soins optimaux (Johnson, Giesie, Ireland et al., 2016). Pour ce faire, l’inrmière doit arrimer le plan de soins et de traitements inrmiers avec le plan d’intervention interdisciplinaire (PII) de l’enfant. Le PII permet de regrouper l’ensemble des interventions déterminées par tous les professionnels de la santé qui gravitent autour de l’enfant et de sa famille. De plus, il permet de faciliter l’échange et la communication de l’information pertinente à l’enfant quand celui-ci reçoit des soins en établissement (OIIQ, 2010).

Continuité des soins La coordination des soins à domicile vise avant tout la continuité des soins, l’objectif principal étant d’assurer à l’enfant et à sa famille une continuité entre l’hôpital, la maison, l’école, les services thérapeutiques et les autres milieux. Trois dimensions principales traduisent cette continuité des soins : 1) la continuité relationnelle, qui réfère au rapport thérapeutique entre le client et un ou plusieurs professionnels de la santé, notamment l’inrmière ; 2) la continuité informationnelle, qui est dénie comme l’utilisation de renseignements pour réaliser les soins appropriés pour la personne selon sa condition ; et 3) la continuité de direction, qui se traduit par l’élaboration d’un plan de gestion partagé, livré par des professionnels de la santé de différentes spécialités (Andres, Cook, Spenceley et al., 2016). Les autres objectifs de la coordination des soins sont de faciliter l’accès aux services et d’améliorer le bien-être de la famille et de l’enfant (Cady, Looman, Lindeke et al., 2015). La coordination devrait garantir que les besoins de soins médicaux, inrmiers et de soutien sont comblés, de même que les aspects nanciers, psychosociaux et scolaires (Callery, Kyle, Banks, et al., 2013). La coordination des soins est plus efficace lorsqu’un intervenant est désigné comme étant le principal interlocuteur auprès de la famille an d’aider celle-ci à accomplir ses nombreuses tâches et à assumer ses responsabilités. L’infirmière

gestionnaire de cas devrait connaître les ressources communautaires, y compris les services de santé primaires, secondaires et tertiaires ; les services d’orthophonie et d’ophtalmologie ; les services de répit et les programmes d’aide nancière ; les groupes de parents et de défense des intérêts ; les décideurs locaux et les services de transport qui sont offerts. Elle doit être apte à communiquer avec ces ressources à différents niveaux (Santé Canada, 2005). La situation idéale est celle dans laquelle la famille sert de coordonnateur principal des soins, et ce, dans un contexte de soins axés sur la famille en partenariat (Cady et al., 2015). Bien que les professionnels de la santé doivent toujours considérer qu’une partie importante de leur rôle consiste à garantir la prestation de soins intégrés et coordonnés, la coordination des soins devrait aussi servir à promouvoir le rôle de la famille comme principal décideur et améliorer la capacité de celle-ci à répondre aux besoins de l’enfant tout en favorisant l’unité familiale. Les familles peuvent choisir de participer à divers degrés à la coordination des soins de leur enfant. De nombreux parents assument des responsabilités de plus en plus importantes en matière de coordination au l du temps ; ils devraient être encouragés et soutenus dans ce rôle. Une diminution graduelle des services permet aux enfants et aux familles de s’adapter peu à peu aux changements tout en accroissant leur autonomie et la conance en leur capacité à fournir des soins.

Respect de l’environnement familial L’exigence de soins à domicile transcende les frontières sociales, culturelles, spirituelles et économiques. Quelle que soit l’origine de la famille, la prestation des services de soins à domicile doit se faire dans le respect de ses valeurs 2 . En plus de comprendre les soins prodigués à son enfant et d’en maîtriser l’application, la famille doit continuer à gérer ses activités, chaque membre ayant aussi droit à sa vie personnelle. C’est pourquoi l’inrmière à domicile devrait s’attacher à évaluer les règles du foyer familial et s’intéresser à des questions comme l’environnement physique, les zones privées de la maison, la responsabilité de prendre soin de l’environnement de l’enfant, et les interactions avec les frères et sœurs. L’un des dés qu’il peut être important de relever pour les parents consiste à préserver le caractère familial et domiciliaire de la chambre à coucher de l’enfant en dépit de la présence de moniteurs, de respirateurs ou de tout autre équipement sophistiqué FIGURE 1.15.

Mesures préventives La sécurité est une considération primordiale dans les soins à domicile destinés aux enfants et devrait être intégrée dans le plan de soins (OIIQ, 2010).

1

FIGURE 1.15 L’inrmière en soins à domicile aide l’enfant et sa famille à composer avec la technologie en expliquant le fonctionnement des appareils ou en réorganisant la chambre à coucher de l’enfant an qu’elle conserve un aspect familial.

Les compagnies de téléphone et d’électricité doivent être avisées de la nécessité d’un service ininterrompu. Elles pourront ainsi placer la famille sur une liste de service prioritaire, de sorte qu’elle sera avertie de toute interruption et bénéciera, le cas échéant, d’un rétablissement rapide des services. Dans les cas de dialyse à domicile par exemple, l’évaluation des exigences relatives à l’eau et à l’électricité s’avère cruciale pour assurer la sécurité de l’enfant pendant son traitement (Centre canadien d’hygiène et de sécurité au travail, 2017). Il est notamment recommandé de fournir aux équipes de premiers répondants locaux une carte comportant des points de repère dans la maison an de faciliter, en cas d’urgence, un accès rapide à l’enfant et à l’équipement médical spécialisé. Les mesures d’urgence doivent être discutées avec les parents et les soignants. Lorsqu’il est possible qu’elles soient utiles, des directives pour la réanimation cardiorespiratoire devraient être afchées près du lit de l’enfant ou à un autre endroit accessible. Une liste des numéros de téléphone en cas d’urgence devrait se trouver près de chaque téléphone de la maison (911, urgence, médecin, gestionnaire de cas, fournisseur d’appareils médicaux). Les médicaments, les aiguilles, les seringues et tout matériel contaminé doivent en tout temps être rangés de façon sécuritaire hors de portée des enfants. L’inrmière doit établir des arrangements quant à la façon de gérer les instruments pointus ou les objets contaminés, ainsi que les commandes de réglage des respirateurs articiels, des pompes, des moniteurs ou des autres appareils. L’utilisation de ruban adhésif transparent, de couvercles ou de panneaux pour protéger les boutons de commande ou de réglage réduit le risque de modication accidentelle. La plupart des équipements médicaux possèdent des dispositifs particuliers de verrouillage permettant de prévenir

Chapitre 1

2 L’incidence de la culture sur la prestation des soins à l’enfant et à sa famille est traitée au chapitre 2, Inuences socioculturelles sur les soins de santé.

Le document Le transport de bébés et d’enfants qui ont des besoins spéciaux dans des véhicules particuliers : guide de pratiques exemplaires pour les professionnels de la santé, publié par Transports Canada, est présenté sur le nouveau site : www.tc.gc.ca.

Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté

35

ALERTE CLINIQUE

Les précautions pour éviter les risques de strangulation consistent à enrouler les tubu­ lures supplémentaires et à les attacher avec du ruban adhé­ sif au point de sortie, et à faire passer les tubes ou les ls par le pantalon de pyjama.

CE QU’IL FAUT RETENIR

La pensée critique en soins inrmiers intègre des éléments de la démarche de soins an de guider le raisonnement et les soins ; elle inclut également une composante réexive qui amène l’inrmière à se questionner non seulement sur les résultats obtenus, mais aussi sur les proces­ sus décisionnels qu’elle a employés.

une modication accidentelle des réglages. Les ls électriques doivent être aussi courts que possible et maintenus hors de portée des enfants. Quand il ne sert pas, l’équipement doit être débranché, et les ls (p. ex., les électrodes du moniteur d’apnée) doivent être placés hors de portée. Les soins qui se poursuivent au cours de la nuit génèrent d’autres préoccupations concernant la sécurité. En tout temps, les parents ou les autres soignants doivent être en mesure d’entendre clairement les alarmes du moniteur, du respirateur ou de la pompe ; un système peu coûteux d’interphone ou un moniteur pour l’enfant peuvent être utilisés à cet effet. Avant la période de sommeil, il faut aussi faire preuve d’une vigilance accrue et vérier la disposition des ls du moniteur d’apnée, du moniteur cardiaque ou des longues tubulures intraveineuses an d’éviter tout risque de strangulation accidentelle . Pour un transport sécuritaire, les fauteuils roulants et tous les autres équipements médicaux doivent être xés au véhicule avec des dispositifs de retenue appropriés. Au besoin, il devrait y avoir un adulte de plus pour surveiller l’enfant pendant son transport.

1.6

Exercice d’une pratique inrmière réexive

Pour exercer sa pratique de manière réexive, l’inrmière doit développer sa pensée critique an de pouvoir l’appliquer dans une démarche de soins tout en améliorant sa compétence professionnelle. La pratique réexive se situerait au centre de ce processus d’amélioration (Ouellet et Thibeault, 2012). Pour Duhamel (2015), la pratique réexive consiste à considérer ses propres croyances et leurs inuences sur la relation avec la clientèle. CE QU’IL FAUT RETENIR

1.6.1

L’inrmière évalue et révise les interventions tant que les problèmes ne sont pas résolus. Une bonne maîtrise de la pensée critique favo­ rise une évaluation précise, une révision adéquate des éléments du plan de soins et de traitements inrmiers et, le cas échéant, la cessation des soins qui ont mené aux résultats escomptés.

L’exercice d’une profession s’accompagne obligatoirement d’un processus de réexion systématique. Ce processus permet au professionnel de répondre adéquatement aux besoins du client. La pensée critique est un processus de réexion intentionnel, orienté vers un but, qui aide une personne à se faire une opinion fondée sur des résultats probants, et non sur des conjectures (Berthelsen et Hølge-Hazelton, 2017). La pensée critique permet d’évaluer des connaissances avec un dénominateur commun : un esprit discipliné et analytique. Dans un tel processus, les données sont recueillies, analysées et structurées en considérant tous les détails de la situation clinique, dans l’optique de pouvoir

36

Partie 1

Pensée critique

Inrmière, enfant et famille

offrir au client des soins optimaux. Parmi les habiletés cognitives mises à contribution durant cet exercice de réexion de haut niveau gurent la discipline intellectuelle, la créativité, la persévérance et l’intuition, ainsi que la capacité à s’évaluer et celle à prendre des risques (Rubenfeld et Scheffer, 2015). La pensée critique modie la perception que les gens ont d’eux-mêmes, leur compréhension du monde et leur façon de prendre des décisions. Elle repose sur la méthode scientique, qui est également à la base de la démarche de soins inrmiers. La pensée critique et la démarche de soins inrmiers sont deux éléments essentiels à la profession inrmière : elles permettent une approche holistique de la résolution de problèmes. Les exercices de jugement clinique insérés dans le présent manuel visent à faire reconnaître l’importance de cette habileté intellectuelle de l’inrmière œuvrant auprès des enfants et de leur famille. Ils présentent chacun une situation concrète de la pratique inrmière pédiatrique dans laquelle l’étudiante doit faire appel au processus de pensée critique pour élaborer une solution optimale pour l’enfant et sa famille. Une série de questions guide l’étudiante dans l’exploration de données factuelles, d’hypothèses qui sous-tendent le problème, de priorités inrmières et de justications des interventions inrmières an de lui permettre d’appliquer une solution rationnelle et éclairée. Ces exercices permettent à l’étudiante d’affiner son jugement clinique (Voldbjerg, Grønkjaer, Sørensen et al., 2016).

1.6.2

Pratique fondée sur des résultats probants

La pratique inrmière fondée sur des résultats probants consiste en la collecte, en l’interprétation et en l’intégration de données valables, importantes et applicables, rapportées par le client, observées par l’inrmière ou dérivées de travaux de recherche (Rowles et McNaughton, 2017). Elle s’appuie sur des observations et des recherches ayant permis d’améliorer les interventions inrmières. La pratique inrmière fondée sur des résultats probants combine connaissances avec expérience clinique et intuition. Elle est encadrée par des directives de pratique clinique et s’appuie sur une approche rationnelle à la prise de décision découlant de la pensée critique et du jugement clinique. La démarche de soins inrmiers traditionnelle permet de conceptualiser les étapes essentielles de la pratique inrmière fondée sur des résultats probants TABLEAU 1.4. Dans la démarche de soins inrmiers, au moment de la collecte des données et de la définition des besoins prioritaires,

1.6.3

Évaluation de la relation inrmière-famille

Explorer dans quelle mesure sa relation avec les parents est équilibrée peut aider l’inrmière

à repérer rapidement les points qui posent problème dans ses interactions avec les enfants et leur famille. L’inrmière doit donc adopter une pratique réexive telle que dénie dans la section précédente de ce chapitre. L’infirmière qui intervient auprès d’une famille doit rester consciente de ses propres préjugés et du caractère fragmentaire de ses connaissances relativement à la famille ENCADRÉ 1.10. Cette prise de conscience contribue à maintenir un caractère professionnel à la relation qui s’établit entre la famille et l’infirmière (Varcoe et Hartrick Doane, 2014).

clinique

Jugement

l’infirmière effectue un examen critique et recueille les données concernant l’enfant et sa famille. Elle analyse ces données an de dénir la nature d’un problème. Les recommandations pour la pratique inrmière sont établies après une évaluation critique des éléments connus relatifs au problème en cause. En intégrant les résultats probants à l’expertise clinique, l’inrmière appuie le choix des interventions sur des éléments vériés. Lorsque les interventions sont terminées ou lors du processus de soins, l’inrmière doit rédiger une note d’évolution claire, précise, complète, chronologique et objective. Elle doit y détailler les résultats de l’évaluation, les interventions effectuées et la réponse du client.

Vous effectuez des visites à domicile chez Robin, qui est âgé de huit ans. Il est en phase préterminale d’une leucémie. De plus en plus, ces visites vous pèsent, car vous voyez en lui votre neveu décédé dans des circonstances semblables il y a six mois. À chaque visite, vous pleurez avec la mère, et vous ne distinguez plus sa situation de celle vécue par votre sœur et votre neveu décédé. Que devriez-vous faire pour maintenir votre distance professionnelle ? Justiez votre réponse. MAIS SI...

Si aucune autre inrmière ne pouvait vous remplacer, que pourriez-vous faire pour offrir des soins de qualité ?

Pratiques inrmières TABLEAU 1.4

Intégrer la pratique fondée sur des résultats probants dans la démarche de soins inrmiers

MISE EN ŒUVRE DE LA DÉMARCHE DE SOINS INFIRMIERS

ACTION

PRATIQUE FONDÉE SUR DES RÉSULTATS PROBANTS

ACTION

Collecte des données – Évaluation initiale

L’inrmière collecte des données concernant l’enfant et sa famille.

• Détermination d’une problématique

• L’inrmière constate que des problèmes et des besoins spéciques de l’enfant et de sa famille ne sont pas pris en charge de façon optimale.

Analyse et interprétation des données

L’inrmière analyse les données et établit les besoins prioritaires de l’enfant.

• Recherche et analyse critique de résultats probants pour répondre à la question clinique

• L’inrmière consulte des écrits scientiques concernant les problèmes et les besoins de l’enfant, et effectue une analyse critique de la documentation consultée.

Résultats escomptés

L’inrmière liste les objectifs à atteindre ; la planication des soins est établie en fonction des résultats escomptés.

• Formulation d’hypothèses pour répondre à la problématique

• L’inrmière effectue la synthèse des résultats probants pertinents.

Interventions inrmières

L’inrmière met en œuvre les interventions déterminées dans le plan de soins.

• Recommandations pour la pratique inrmière

• L’inrmière intègre les données probantes à son expertise clinique et aux besoins particuliers de l’enfant et de sa famille.

Évaluation des résultats – Évaluation en cours d’évolution

L’inrmière évalue les progrès de santé de l’enfant par rapport aux résultats escomptés.

• Évaluation de l’efcacité

• L’inrmière évalue le degré d’efcacité des interventions fondées sur des résultats probants qu’elle a intégrées à sa pratique.

Chapitre 1

• Formulation d’une question clinique

• L’inrmière rédige une note d’évolution claire, précise, complète, chronologique et objective.

Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté

37

1

Pratiques inrmières ENCADRÉ 1.10

Exercice de pratique réexive

PAR RAPPORT À LA FAMILLE

• Valorisez-vous les forces des familles an de rehausser leur sentiment de compétence ? • Comment collaborez-vous avec les familles pour les rendre plus autonomes relativement à la situation de santé ? Leur offrez-vous des encouragements et du soutien pour favoriser leur autonomie ? • Vériez-vous si les familles éprouvent des sentiments d’anxiété ou de peur, ou si elles se sentent intimidées ? Vériez-vous si elles éprouvent des regrets relativement à une erreur commise, à un sentiment d’incompétence devant les soins à donner à leur enfant ? Vériez-vous si elles ressentent une certaine crainte de voir les professionnels de la santé outrepasser leur mandat et intervenir dans ce qui relève de la famille, ou si, au contraire, le rôle revenant à la famille leur apparaît disproportionné ? • Discutez-vous de ces problèmes avec les membres de la famille ? • Avez-vous développé des aptitudes à l’enseignement auprès des familles au lieu de tout faire à leur place ? • Interrogez-vous périodiquement tous les membres de la famille pour connaître leurs préoccupations du moment (émotions, attitudes, réactions, aspirations) ? Partagez-vous ces informations avec vos pairs ? Mettez-vous à jour le dossier de l’enfant en y incluant les informations les plus pertinentes au sujet de la famille ? • Évitez-vous de vous en remettre uniquement aux données de l’entrevue initiale ou à des suppositions, et validez-vous régulièrement les informations que vous détenez auprès des membres de la famille ? • Quels moyens de communication utilisez-vous pour faire le lien entre la famille, les médecins, les autres professionnels de la santé et vous ?

Comment vous assurez-vous de garder une communication constante, ouverte et efficace ? • Réglez-vous les conits et les malentendus directement avec les personnes concernées ? • Clariez-vous l’information destinée aux familles, ou encore, recherchez-vous la personne compétente pour le faire ? PAR RAPPORT À VOUS-MÊME

• Comment arrivez-vous à distinguer les besoins des familles de vos propres besoins ? • Comment votre propre expérience familiale ou vos propres émotions inuencent-elles vos réactions envers les enfants et leur famille ? En particulier, comment affectent-elles votre tendance à vous investir ? • Quelles habiletés de communication avez-vous acquises ou lesquelles pourriez-vous développer pour vous aider à travailler avec les familles ? • Êtes-vous capable de discuter ouvertement avec une personne qui vous dérange ou dont vous ne partagez pas l’opinion ? • Comment prenez-vous soin de vous-même et de vos besoins ? • Comment arrivez-vous à encourager les familles à participer aux soins ? Quels seraient vos points forts et quels seraient ceux à améliorer sur ce plan ? • Admettez-vous qu’il arrive parfois qu’une relation inrmière-famille se transforme en relation sociale ou en une amitié intime ? Êtes-vous en mesure de reconnaître une telle situation lorsqu’elle se produit et d’en comprendre les raisons ? Êtes-vous capable alors de veiller à ce qu’une autre personne, plus neutre que vous, vous aide ou vous remplace dans la relation inrmière-famille ?

Source : Adapté de Wright et Leahey (2013).

Analyse d’une situation de santé Gary, 9 ans, se rend au groupe de médecine familiale en compagnie de sa mère. Il est asthmatique et suivi pour ce problème par son médecin de famille depuis 2 ans. Ses signes cliniques sont les suivants : sa mère a observé que ses

Jugement clinique activités sont limitées en raison de la toux et de la dyspnée. Gary doit se servir de son bronchodilatateur en moyenne de 4 à 5 fois par semaine. Les symptômes actuels persistent depuis environ 10 jours.

Mise en œuvre de la démarche de soins

Collecte des données – Évaluation initiale – Analyse et interprétation 1. Pourquoi est-ce important d’évaluer les connaissances de Gary et de sa mère quant aux moyens de prévention des crises d’asthme ? 2. Formulez deux questions à poser à Gary et à sa mère pour évaluer leur connaissance de la prévention d’une crise d’asthme.

38

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

La mère de Gary travaille comme serveuse dans un bar, et ses horaires sont très variables. Comme la famille est monoparentale, son ls va souvent chez la voisine pour se faire garder après l’école. Cette voisine possède deux chats, ce qui pourrait déclencher une crise d’asthme chez Gary.

SOLUTIONNAIRE

1

Planication des interventions – Décisions inrmières 3. Quelle solution de rechange au gardiennage par la voisine pourrait en partie diminuer le risque de déclenchement d’une crise d’asthme chez Gary ? MAIS SI...

Mais si la voisine de Gary n’avait pas de chats, indiquez deux autres facteurs de risque de déclencher des crises d’asthme qu’il faudrait évaluer.

Trois jours plus tard, Gary et sa mère se présentent de nouveau au groupe de médecine familiale. La mère dit que son ls a fait une crise d’asthme à l’école la veille. Il n’y avait pas d’inrmière sur place.

Évaluation des résultats – Évaluation en cours d’évolution 4. Puisque aucune inrmière n’était présente au moment de l’événement, qu’est-ce qui aurait pu contribuer à la maîtrise rapide de la crise d’asthme dont Gary a souffert ?

Chapitre 1

VU dans ce chapitre

Sachant que l’asthme touche une portion importante de la population, l’inrmière de l’école que fréquente Gary souhaite mettre en place une intervention de préven­ tion primaire pour les enfants. Indiquez deux interventions possibles.

Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté

39

Chapitre

2

Inuences socioculturelles sur les soins de santé Écrit par : Quinn Franklin, MS Kim Mooney-Doyle, PhD, RN, CPNP-AC Adapté par : Evelyne Ouellet, inf., B. Sc. N.

MOTS CLÉS

OBJECTIFS

Acculturation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49 Choc culturel. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43 Code moral . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42 Communauté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42 Croyance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42 Culture . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42 Ethnie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42 Identité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48 Relativisme culturel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43 Religion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52 Socialisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44 Valeur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42

Après avoir étudié ce chapitre, vous devriez être en mesure :

Disponible sur • À retenir • Carte conceptuelle • Solutionnaires

40

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

• de définir les notions de culture, d’ethnocentrisme, de choc culturel et de relativisme culturel ; • d’expliquer la socialisation et son influence sur le devenir de la personne ; • de décrire les influences des composantes de la culture sur le développement de l’enfant ; • de décrire les influences sociales et culturelles par rapport à l’état de santé et aux soins ; • d’expliquer l’influence des médias sur les attitudes, les croyances et les comportements ; • d’expliquer les effets des changements dans la population canadienne sur l’offre de soins de santé ; • de définir les termes utilisés en ce qui a trait aux Autochtones ; • de nommer des outils pour prodiguer des soins culturellement adaptés.

Carte conceptuelle

Cette carte conceptuelle illustre schématiquement les principaux concepts décrits dans le présent chapitre. Sa lecture vous permettra d’avoir une vue d’ensemble des notions qui y sont présentées.

2

par

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Inuences socioculturelles sur les soins de santé car

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pour

Chapitre 2

Inuences socioculturelles sur les soins de santé

41

2.1

Culture

2.1.1

Concepts et dénition

Les pratiques et les valeurs culturelles soutiennent l’organisation d’une société et sont transmises d’une génération à l’autre par la famille. Tout être humain est un être de culture, et chaque personne possède un bagage culturel qui lui est propre. La culture est dénie comme étant un ensemble de valeurs, de croyances, de normes et de pratiques acquises et partagées (McFarland et WehbeAlamah, 2015). Ces balises et repères explicites et implicites guident les pensées et les actions, et sont transmis d’une génération à l’autre, notamment grâce aux symboles, au langage et aux rituels.

éactivation des connaissances La culture d’une personne est considérée comme un déterminant de la santé. Nommez au moins deux répercussions de la culture sur la santé d’une personne.

CE QU’IL FAUT RETENIR

La culture guide les personnes dans leur quotidien et dans leurs actions, ainsi que dans leur manière de concevoir le monde, la vie, leur environnement et la santé. Par conséquent, elle les guide dans la façon de prodiguer les soins.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les différences ethniques touchent de nombreux domaines et se manifestent de diverses façons, notamment en ce qui a trait aux rôles familiaux, à la langue, aux préférences alimentaires, aux codes moraux et à l’expression des émotions.

42

Partie 1

La culture joue un rôle essentiel dans le développement de l’enfant et de ses parents (LeCuyer et Zhang, 2015). Pour se faire une idée générale de tout enfant, l’inrmière doit acquérir certaines connaissances sur le rôle de la culture dans le développement des relations sociales et affectives, dans les pratiques éducatives ainsi que dans les attitudes à l’égard de la santé. Ce bagage est généralement inconnu de l’inrmière, d’où l’importance d’être à l’écoute de la personne (Douglas, Rosenkoetter, Pacquiao et al., 2014). La culture est aussi une entité complexe dont toutes les parties sont interreliées. Elle forme une lentille à travers laquelle toutes les facettes du comportement humain peuvent être interprétées (McFarland et Wehbe-Alamah, 2015). Il s’agit d’une orientation de la vie bien enracinée qui sert de cadre de référence à la perception et au jugement individuels. Autrement dit, la culture guide les personnes dans leur quotidien et dans leurs actions, ainsi que dans leur manière de concevoir le monde, la vie, leur environnement et la santé. Par conséquent, elle les guide dans la façon de prodiguer et recevoir les soins. La manière de penser, de résoudre des problèmes ainsi que de percevoir et de structurer le monde diffère d’une culture à l’autre (Purnell et Pontious, 2014). Une pratique acceptée à un endroit peut être désapprouvée ou être source de tension ailleurs. La tolérance à l’égard de la transgression d’une norme établie varie d’un groupe culturel à l’autre. De plus, la conformité aux normes établies, même si elle offre une certaine sécurité, décourage généralement le changement. Essentiellement, la culture désigne le mode de vie d’un groupe de personnes qui tient compte des expériences passées, inuence les pensées et les gestes présents, et transmet les valeurs et les traditions aux nouveaux membres du groupe. Toutefois, pour que la culture puisse survivre dans un monde en perpétuel changement, une

Inrmière, enfant et famille

adaptation est nécessaire. Consciemment et inconsciemment, les membres abandonnent et modient des éléments de leur culture, ou en adoptent des nouveaux pour répondre à leur environnement et aux besoins du groupe. Pour établir sa place au sein d’un tel groupe, l’enfant apprend comment se comporter conformément aux normes distinctives du groupe et comment les autres sont censés se comporter envers lui. Cet apprentissage se fait par l’observation et l’imitation des personnes qui l’entourent. Bien que des personnes d’une même communauté puissent partager un certain bagage culturel, il faut éviter les généralisations. Chaque personne est unique et construit son propre héritage culturel à partir de ses expériences de vie, de ses choix et de son environnement. Les professionnels de la santé doivent éviter de considérer la culture comme se limitant aux origines ethniques et langagières des personnes. Des éléments tels que l’âge, le sexe, le revenu, le statut socioéconomique, le niveau d’éducation, l’appartenance à un groupe religieux, pour ne nommer que ceux-là, viennent aussi inuencer le bagage culturel de la personne. En raison des diversités culturelles croissantes de la population canadienne, l’inrmière doit avoir des connaissances en soins inrmiers transculturels (Douglas et al., 2014). Elle doit notamment être sensibilisée aux différences culturelles et être consciente de sa propre culture. L’inrmière qui acquiert des compétences culturelles apprend à connaître d’autres cultures, à évaluer le point de vue des autres et à partager sa propre culture avec autrui (Douglas et al., 2014 ; Purnell, 2013).

L’ethnie, une composante de la culture Il existe une grande différence entre la culture et l’ethnie. L’ethnie est un regroupement de personnes qui partagent un patrimoine culturel, social et linguistique unique, et qui répondent à des critères internes et externes (Bonte et Izard, 2010). Par exemple, ces personnes partagent une même langue, une même culture, un même territoire, un même sentiment d’appartenance. De nombreux anthropologues et ethnologues ont tenté de décrire l’ethnie, mais aucune dénition ne fait consensus. La notion importante à retenir en ce qui a trait à l’ethnie est qu’elle change selon les critères attribués. Ainsi, les différences ethniques touchent de nombreux domaines et se manifestent de diverses façons, notamment en ce qui a trait aux rôles familiaux, à la langue, aux préférences alimentaires, aux codes moraux et à l’expression des émotions FIGURE 2.1. Certaines normes de comportement découlent du patrimoine culturel d’un groupe ethnique particulier. Il convient de noter que le terme ethnique peut avoir une connotation péjorative pour certaines personnes, puisqu’elles l’associent à de la discrimination (Spector, 2016).

nouveau pays ou à toute personne qui doit s’adapter au mode de vie d’un groupe qu’elle ne connaît pas (p. ex., des enfants qui fréquentent une nouvelle école, des enfants hospitalisés). Le choc culturel se caractérise par la difculté à s’ajuster et à comprendre une situation nouvelle ou étrange an d’arriver à fonctionner dans celle-ci (McFarland et Wehbe-Alamah, 2015).

FIGURE 2.1 La famille transmet à ses membres les normes et les attitudes propres à son groupe ethnique.

Choc culturel Au Canada, les métissages culturels et l’attitude d’ouverture à l’autre permettent de modier les frontières interculturelles. Toutefois, il demeure tout de même difcile pour des minorités culturelles de comprendre la culture dominante et de se conformer à ses exigences. La langue et les pratiques utilisées dans les systèmes commerciaux et éducationnels diffèrent de celles utilisées dans certains groupes dits minoritaires. Par conséquent, l’enfant élevé dans un tel environnement éprouve de la confusion à l’égard des rôles et des valeurs, et il adopte généralement ceux de la culture plus inuente. L’ethnocentrisme désigne la tendance à considérer sa propre culture comme la meilleure et la seule façon de faire les choses (Galanti, 2014). Le stéréotype ethnique, ou étiquetage ethnique, découle d’une vision ethnocentrique. L’ethnocentrisme sous-entend que tous les autres groupes sont inférieurs et que leurs façons de faire ne défendent pas l’intérêt du groupe dominant. Cet état d’esprit courant dans un groupe ethnique dominant inue grandement sur l’aptitude d’une personne à évaluer et à interpréter objectivement les croyances et les comportements des autres. L’inrmière peut parfois être bousculée ou heurtée par les différentes croyances et façons de faire des familles. Or, les familles aussi peuvent vivre un décalage, un inconfort ou une désorientation. Cette rencontre est souvent un choc (Vonarx, 2010). Le terme choc culturel a d’abord été décrit par Madeleine Leininger en 1978 comme les « sentiments de détresse et d’inconfort, et l’état de désorientation ressentis par une personne qui tente de comprendre un groupe culturel différent du sien ou de s’y adapter, en raison des différences de pratiques, de valeurs et de croyances culturelles ». Ces sentiments peuvent être ressentis par les familles et les professionnels de la santé qui se déplacent d’un milieu culturel à un autre. Cela peut aussi arriver à des personnes qui immigrent dans un

2

De nombreux facteurs inuencent les réactions à un nouvel environnement. Les barrières de langue, entre autres les dialectes et les jargons particuliers d’un groupe (comme le langage médical), empêchent une communication efcace. Pour une personne qui arrive dans un nouvel environnement, des habitudes, des coutumes (p. ex., des comportements de rôle ou l’étiquette), des attitudes et des croyances différentes des siennes sont incompréhensibles. Elle se sent alors isolée, seule, et elle ne s’identie pas à ce milieu.

Répercussions sur la pratique inrmière Le choc culturel et les difcultés de communication créent une pression au moment de la rencontre entre l’enfant et l’inrmière (Almutairi, McCarthy et Gardner, 2015 ; McKeary et Newbold, 2010). Les difcultés de compréhension de part et d’autre, ainsi que l’absence de points de repère communs, peuvent engendrer des préjugés et de la discrimination. L’inrmière culturellement compétente devrait être empathique et consciente de ses propres points de vue et du fait que ceux-ci peuvent différer de ceux de personnes ayant un bagage culturel différent du sien (Douglas et al., 2014). En étant conscient de ses propres croyances et préjugés, il est plus facile de les mettre de côté, de faire preuve d’ouverture et de se mettre à l’écoute de l’autre. L’inrmière doit être disposée à poser des questions qui lui permettront de mieux comprendre les points de vue de l’enfant ou de la famille, si cela est approprié. Elle doit se dégager de ses propres croyances et préjugés, car cela lui permettra d’offrir des soins adaptés à la culture de l’enfant (Purnell et Pontious, 2014). Pour ce faire, elle doit faire preuve de relativisme culturel. Le relativisme culturel est le concept selon lequel tout comportement doit d’abord être évalué dans le contexte de la culture où il se produit (Purnell, 2013). Pour intervenir efcacement, l’inrmière doit d’abord comprendre les perceptions et les interprétations des expériences de la famille en se basant sur les antécédents de celle-ci et sur son système de croyances culturelles.

2.1.2

Culture et développement de l’enfant

Le milieu culturel dans lequel un enfant est élevé peut inuer sur de nombreux aspects de sa vie, Chapitre 2

Inuences socioculturelles sur les soins de santé

43

depuis son alimentation jusqu’à son comportement en société. L’enfant naît dans une famille ayant un patrimoine ethnique, un statut socioéconomique et des croyances religieuses caractéristiques. Ces composantes modulent grandement le contexte socioculturel dans lequel l’enfant grandit et, par conséquent, inuencent son développement. L’enfant doit apprendre à se comporter envers les autres selon les attentes de cette culture. Il apprend aussi comment les autres doivent se comporter avec lui. La culture module l’estime de soi d’un enfant ainsi que sa façon de se concevoir ; en d’autres mots, la culture forge son identité (Trawick-Smith, 2017). CE QU’IL FAUT RETENIR

Les cultures et leurs compo­ santes contribuent à modeler l’enfant d’une manière si subtile et à un âge si précoce que l’enfant en vient à croire que ses croyances, ses attitudes, ses valeurs et ses coutumes sont partagées par tous, et qu’il ne peut y avoir d’autres façons de concevoir le monde.

3 Les principales étapes de la croissance et les différentes théories sur le développement sont présentées dans le chapitre 3, Croissance, développement et promotion de la santé.

Les cultures et leurs composantes contribuent à modeler l’enfant d’une manière si subtile et à un âge si précoce que l’enfant en vient à croire que ses croyances, ses attitudes, ses valeurs et ses coutumes sont partagées par tous, et qu’il ne peut y avoir d’autres façons de concevoir le monde. Un ensemble de valeurs apprises au cours de l’enfance est susceptible de caractériser les attitudes et le comportement d’une personne tout au long de sa vie en guidant ses actions à long terme, et ses tendances à court terme. Le mode et la séquence de croissance et de développement d’un enfant sont des caractéristiques universelles et fondamentales 3 . Toutefois, plusieurs croient que les variations des réactions comportementales des enfants à des événements similaires sont inuencées par leur culture. Cependant, d’autres composantes viendront aussi agir sur le devenir de l’enfant. En effet, les cultures des écoles et des groupes de pairs ont une forte empreinte sur la construction identitaire de l’enfant et de l’adolescent FIGURE 2.2 . Ces inuences se feront par l’intermédiaire du processus de socialisation et d’acquisition des rôles sociaux.

Rôles sociaux et identité Le concept de soi de la plupart des enfants découle de leurs idées sur leurs rôles sociaux (Denzin, 2010). Les rôles sont des créations culturelles, et la culture préconise des comportements particuliers pour les personnes de diverses positions sociales et de sexe différent. Toute personne ressent donc une forte pression pour se comporter d’une certaine manière. Un rôle peut interdire quelques comportements et en permettre d’autres. La culture déliFIGURE 2.2 La socialisation avec les pairs mite et clarie les rôles. inuence la construction identitaire de l’adolescent.

44

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

Pour sa part, la socialisation est le processus par lequel une personne apprend et intériorise ses rôles, les règles implicites et explicites qui s’y rattachent, ainsi que la façon de se comporter dans un endroit en particulier (Darmon, 2016). Autrement dit, la socialisation est le processus permettant d’apprendre l’ensemble des balises de la culture partagée par un même groupe. C’est donc en raison de la socialisation qu’il est encore fréquent de voir, dans les sociétés nordaméricaines, une petite lle jouer à la princesse, et non un petit garçon.

Socialisation primaire La socialisation primaire donne en quelque sorte un guide à l’enfant pour voir le monde et s’y comporter adéquatement. La famille, les personnes signicatives et l’école, qui exercent beaucoup d’inuence sur l’enfant, marquent son devenir. Cette inuence sera présente tout au long de la vie de la personne. Par exemple, c’est par la socialisation primaire que l’enfant apprend les règles de politesse (Darmon, 2016). Après la famille, c’est l’école qui assure le plus la continuité entre les générations en permettant la transmission de la culture. D’ailleurs, les parents choisissent très souvent une école qui correspond aux valeurs qu’ils veulent transmettre à leurs enfants, par exemple en sélectionnant une école confessionnelle ou un programme d’études en particulier. L’enfant est ainsi préparé aux rôles sociaux qu’il est censé assumer quand il sera adulte. Dans les sociétés occidentales, par exemple, les règlements de l’école sur la présence aux cours, les relations avec les autorités, et le système de sanctions et de récompenses basé sur l’accomplissement transmettent à l’enfant les attentes comportementales du monde adulte de l’emploi et des relations humaines. Traditionnellement, le processus de socialisation de l’enfant à l’école commençait à la maternelle ou en première année. Actuellement, plusieurs mères d’enfants d’âge préscolaire (3 à 6 ans) travaillent à l’extérieur de la maison ; un grand nombre d’enfants commencent donc leur socialisation beaucoup plus tôt dans divers types de services de garde (Denzin, 2010).

Socialisation secondaire La socialisation secondaire arrive plus tardivement dans la vie, durant l’adolescence (12 à 18 ans), et se poursuit jusqu’à l’âge adulte. Elle permet d’intégrer de nouvelles règles et façons de faire. Les associations sportives en sont un exemple : il y a des règles, une façon de se vêtir, de se féliciter au moment d’un bon coup, etc. La socialisation secondaire permet de s’adapter dans une société pluraliste complexe et en perpétuel

Adolescents immigrés Cette situation est bien difcile à vivre pour les adolescents récemment immigrés. Ces jeunes vivent souvent un grand décalage entre ce qu’ils ont appris dans leur société d’origine et ce qu’ils apprennent dans leur nouvelle société d’accueil (Tshibangu, 2015). L’inrmière doit porter une attention particulière à cette problématique. Leurs parents, pour leur part, ne savent pas trop ce qu’ils doivent enseigner à ces adolescents. Ils peuvent souhaiter leur transmettre des valeurs conformes aux leurs, mais buter contre une trop grande différence d’expériences avec ce que la société d’accueil propose. Dans certains cas, l’enfant ou l’adolescent agit comme traducteur et même interprète pour la famille : traducteur dans le sens où le jeune ayant appris les rudiments de la langue d’usage dans leur nouvelle société parle pour sa famille ; et interprète, puisque, ayant acquis des connaissances sur ce nouveau monde, l’enfant aide sa famille à comprendre cette nouvelle société d’accueil. Dans ce contexte, les parents accordent souvent à l’enfant ou à l’adolescent, tôt dans son processus de développement, une autonomie dans certaines prises de décision. Le jeune peut alors avoir des tâches trop lourdes pour son âge. Dans d’autres cas, cette situation peut devenir une source de conflits dans la famille. L’inrmière doit être à l’affût de cette problématique. Groupes de pairs Les groupes de pairs modulent également la socialisation des adolescents (Darmon, 2016). Les valeurs imposées par le groupe de pairs sont particulièrement contraignantes, car le jeune doit les accepter et s’y conformer pour être accepté comme membre du groupe. Quand les valeurs des pairs ne diffèrent pas trop de celles de la famille et des enseignants, le léger conit créé par ces petites différences permet de séparer la vie de l’adolescent de celle des adultes, et de renforcer son sentiment d’appartenance au groupe de pairs (Trawick-Smith, 2017). Toutefois, lorsque les valeurs des pairs diffèrent des valeurs familiales, les adolescents peuvent vivre des conits plus importants. Dans certains cas, ces conits familiaux peuvent même mener à la violence. L’affaire Shaa, survenue en 2009, en est un exemple (Teisceira-Lessard, 2012). Bien qu’il s’agisse d’un cas extrême, qui ne mène

que très rarement à des homicides, cet exemple témoigne de l’intensité des conits et des chocs que ces situations peuvent engendrer au sein d’une famille.

2

Valeurs du groupe Le type de socialisation offert par le groupe de pairs dépend des antécédents, des intérêts et des capacités de ses membres. Certains groupes encouragent la réussite scolaire, d’autres se concentrent sur les prouesses sportives et d’autres encore s’opposent Zakiya, âgée de 18 ans, est dirigée vers la clinique résolument aux objectifs édusans rendez-vous d’un centre intégré de santé et catifs. Le rendement scolaire de services sociaux (CISSS) à la suite de recompeut donc être fortement mandations de votre part, à titre d’inrmière inuencé par le système de scolaire, et de celle d’une enseignante. La jeune valeurs des groupes de pairs. lle a un problème important de consommation De nombreux conits entre d’alcool. Ses notes ont chuté, et elle s’est même les enseignants et les élèves, présentée en classe récemment en état d’intoxicaet entre les parents et les adotion. Ce jour-là, l’enseignante a avisé ses parents. lescents, sont attribuables à la Or, ceux-ci sont dépassés par les événements et ils peur de ceux-ci d’être rejetés sont très fâchés. La famille de cette adolescente par leurs pairs. Le conflit est musulmane, et les parents sont pratiquants. entre les attentes parentales Pourquoi croyez-vous que la consommation d’alcool relatives au rendement scode Zakiya entraîne une réaction aussi forte chez laire et les attentes des pairs ses parents ? est particulièrement prononcé à l’école secondaire. Bien que le groupe de pairs n’ait ni l’autorité traditionnelle des parents ni l’autorité légale des écoles pour enseigner, il réussit à transmettre une quantité substantielle d’information à ses membres. Les relations avec les pairs fournissent également un contexte social important pour le développement de l’image corporelle autant de l’adolescente que de l’adolescent. Même si d’autres groupes comme la famille et les médias inuencent le développement de l’image corporelle, la perception d’une apparence désirable à l’adolescence est créée par des normes et des attentes modelées et renforcées au sein du groupe de pairs (Rayner, Schniering, Rapee et al., 2013).

clinique

Jugement

changement. Puisque la société est un environnement dynamique qui change rapidement, beaucoup de valeurs et de comportements traditionnels appris dans l’enfance grâce à la socialisation primaire ne répondent pas nécessairement aux nouveaux besoins. Le jeune doit ainsi choisir parmi ces valeurs celles qui lui conviennent le mieux, et les adopter de façon à former un ensemble cohérent de rôles et de comportements à intégrer dans son concept de soi.

Rôle des médias Cinquante années de recherches ont permis de démontrer que les médias sont des éducateurs inuents et qu’ils peuvent avoir une grande incidence sur le développement et la santé des enfants et des adolescents. Les messages véhiculés par les médias peuvent être à la fois positifs et négatifs. Les adultes présents dans la vie des enfants ont la responsabilité d’accroître l’effet éducatif et prosocial positif des médias, et de diminuer leurs conséquences désastreuses qui peuvent inuer sur des problèmes de santé importants qui touchent les enfants de tous âges (Société canadienne de pédiatrie [SCP], 2017). Au Canada et à l’étranger, les enfants consacrent plus de huit heures par jour à des activités

Chapitre 2

Inuences socioculturelles sur les soins de santé

45

sédentaires (ParticipACTION, 2016). Une grande partie de ce temps est consacrée aux médias de toutes sortes (télévision, ordinateur, jeux vidéo, téléphones intelligents). Du point de vue de la santé publique, une étude américaine estime que les médias contribuent dans une proportion de 10 à 20 % aux problèmes de santé (Strasburger, Jordan et Donnerstein, 2012). Ainsi, certains médias ne sont peut-être pas une cause directe des problèmes de soins de santé chez les enfants, mais, an de faire de l’enseignement fondé sur des données probantes auprès des enfants et des familles, les inrmières et les autres professionnels de la santé doivent être conscients qu’il existe effectivement un lien. Les enfants et les adolescents utilisent autant les médias traditionnels que les nouveaux médias. À titre d’exemple, la télévision demeure un média populaire auprès des enfants et des jeunes, bien qu’on puisse visionner les émissions de télévision sur plusieurs plateformes et à tout moment sur des appareils mobiles (Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes [CRTC], 2016). En effet, selon le CRTC, malgré l’avènement des nouveaux médias, les enfants de 2 à 11 ans écoutent toujours environ 21 heures de télévision par semaine. La mobilité accrue offerte par les téléphones intelligents et les tablettes électroniques ainsi que l’accès à Internet sans l dans plusieurs lieux publics (p. ex., les restaurants, les cafés, les bibliothèques) permettent aux adolescents d’accéder aux sites de médias sociaux ou de naviguer sur Internet de façon non restrictive, ce qui peut entraîner des conséquences positives ou négatives. Aux États-Unis, des chercheurs ont constaté que la moitié des jeunes de 16 et 17 ans ont admis avoir parlé au téléphone en conduisant, et le tiers d’entre eux, avoir texté au volant (Strasburger et al., 2012). Des recherches ont montré que les médias peuvent être très inuents et avoir une incidence sur les attitudes, les croyances et les comportements. Il y a peut-être un effet de substitution dans lequel le temps passé à interagir avec les médias est en concurrence avec celui où l’enfant pourrait

TABLEAU 2.1

courir, jouer, pratiquer un sport ou participer à une activité créative (Société canadienne de physiologie de l’exercice [SCPE], Groupe de recherche sur les saines habitudes de vie et l’obésité de l’Institut de recherche CHEO, Faculté d’éducation physique et de loisir de l’Université de l’Alberta et al., 2017a). Trois autres théories permettent de conceptualiser la façon dont les enfants et les adolescents vivent l’expérience des médias : 1) la théorie de l’apprentissage social de Bandura (2009), qui met en évidence l’apprentissage par l’observation et l’imitation ; 2) la théorie du scénario (Huesmann, 1998), qui postule que les médias fournissent aux jeunes un scénario ou des directives sur la façon de se comporter dans des situations nouvelles ; 3) la théorie des super-pairs (Strasburger, 1995), qui décrit les médias comme une source extrême de pression par les pairs pour amener l’adolescent à adopter un comportement soi-disant normal (p. ex., les adolescents qui ne pratiquent pas une sexualité sans risque). On estime que les médias traditionnels et les nouveaux médias jouent un rôle dans les questions relatives à la santé qui touchent particulièrement les jeunes. Le TABLEAU 2.1 en fait une description détaillée. Les médias présentent également un grand potentiel d’effets positifs sur les enfants et leur famille. Bien utilisés, ils peuvent initier les jeunes enfants à l’apprentissage et favoriser la maturité scolaire, ils peuvent servir de moyens d’exprimer l’individualité de l’adolescent, d’établir des liens entre les jeunes qui, autrement, se sentent peut-être isolés (p. ex., ceux nécessitant des soins de santé spécialisés) ou peuvent être une source d’exercice et d’activité (p. ex., les jeux vidéo et les vidéos d’exercices). L’ENCADRÉ 2.1 aborde des recommandations que l’infirmière peut faire aux familles et aux autres adultes chargés de promouvoir le bien-être des jeunes et des familles. Certaines familles peuvent trouver difcile de limiter l’utilisation de la technologie à la maison, notamment en raison du fait qu’elles peuvent ne pas disposer des ressources nécessaires pour fournir d’autres sources de divertissement éducatives et sécuritaires (SCP, 2017).

Effets des médias sur les enfants et les adolescents

EFFET DES MÉDIAS

CONSÉQUENCES POSSIBLES

Violence

Des données gouvernementales, médicales et de santé publique montrent que l’exposition à la violence dans les médias constitue un facteur lié au comportement violent et agressif. Aussi bien les adultes que les enfants deviennent désensibilisés à la violence à force d’en être témoins par l’entremise des différents médias, dont la télévision (notamment les émissions pour enfants), les lms (notamment ceux cotés G), la musique et les jeux vidéo. De plus, la cyberintimidation et le harcèlement par texto sont une préoccupation grandissante auprès des élèves du secondaire.

Sommeil

Le temps passé devant un écran, particulièrement avant l’heure du coucher, nuit aux habitudes de sommeil et favorise le développement d’un trouble du sommeil, spécialement chez les jeunes enfants, puisqu’il contribue à la diminution de la sécrétion de mélatonine.

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Partie 1

Inrmière, enfant et famille

TABLEAU 2.1

Effets des médias sur les enfants et les adolescents (suite)

2

EFFET DES MÉDIAS

CONSÉQUENCES POSSIBLES

Sexe

Un grand nombre de travaux de recherche montrent que le contenu à caractère sexuel dans les médias peut avoir une inuence importante sur les croyances et les attitudes à propos du sexe, sur le comportement sexuel et sur le moment des premiers rapports sexuels. Les adolescents ont accès à du contenu sexuel par l’intermédiaire de différents médias : télévision, musique, magazines, Internet, médias sociaux et appareils mobiles. Les sujets actuels qui font l’objet d’une attention particulière dans le rôle qu’ils exercent sur le comportement sexuel des adolescents sont l’envoi d’images explicites sur le plan sexuel par l’entremise d’appareils mobiles (p. ex., le sextage), l’incidence des médias violents sur l’opinion des jeunes sur les femmes, ainsi que le sexe sous contrainte ou le viol et la cyberintimidation des jeunes lesbiennes, gais, bisexuels, transgenres et queer/en questionnement (LGBTQ). Les médias peuvent également servir de source positive d’information sexuelle (p. ex., des renseignements, des applications et les médias sociaux au sujet du consentement, des infections transmissibles sexuellement, de la grossesse chez les adolescentes et de la promotion de l’acceptation et du soutien des jeunes LGBTQ). Les médias peuvent faciliter les échanges et aider à briser certains tabous, comme en atteste le mouvement de masse de dénonciation des agressions sexuelles et du harcèlement #MoiAussi.

Consommation et abus d’alcool et de drogues

Même si les causes de la consommation et de l’abus d’alcool et de drogues chez les adolescents sont nombreuses, les médias y jouent un rôle important. Les industries de l’alcool et du tabac ciblent encore massivement les adolescents et les jeunes adultes. Les émissions de télévision et les lms qui montrent une consommation de ces substances peuvent avoir une inuence sur le fait de commencer à consommer. Les médias montrent également que la consommation d’alcool ou de drogues est répandue et sans conséquence. Enn, le contenu partagé sur les réseaux sociaux peut constituer une forme de pression par les pairs et inuer sur les risques de consommer.

Obésité

L’obésité est une question de santé publique très actuelle chez les enfants de tous âges, et son taux est à la hausse partout dans le monde. Plusieurs études ont démontré un lien entre le nombre d’heures passées devant un écran et la sédentarité, laquelle est l iée à une surcharge pondérale. Les publicités d’aliments malsains auprès des enfants sont une pratique de commercialisation de longue date, ce qui peut faire en sorte d’augmenter le grignotage et de diminuer l’activité physique. De plus, l’augmentation du temps passé devant un écran et la mauvaise alimentation seraient également liées à un mauvais sommeil.

Image corporelle

Les médias peuvent jouer un rôle important dans le développement de la conscientisation et des attentes par rapport à l’image corporelle, et dans l’insatisfaction corporelle chez les adolescentes. Leurs croyances peuvent être inuencées par des images vues à la télévision, dans les lms et dans les magazines. Les nouveaux médias y contribuent également par l’intermédiaire des images sur Internet, des sites de réseaux sociaux et des sites Web qui encouragent les troubles alimentaires (p. ex., les sites pro-ana, qui font la promotion de l’anorexie mentale et des troubles du comportement alimentaire).

Sources : Adapté de ParticipACTION (2016) ; SCP (2017) ; Strasburger et al. (2012).

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 2.1

Prodiguer des conseils pour une utilisation positive des médias

PARENTS

INFIRMIÈRES / PROFESSIONNELS DE LA SANTÉ

• Suivre les recommandations de la SCP (2017) et de la SCPE et ses collaborateurs (2017b), qui sont de ne pas dépasser 1 heure (au total) par jour de temps passé devant un écran pour les enfants de 2 à 4 ans. Pour les enfants de 5 à 17 ans, les recommandations canadiennes sont de limiter le temps d’écran à 2 heures par jour (SCPE et al., 2017a).

• Consacrer quelques minutes par visite à fournir des renseignements et des conseils sur les médias.

• Établir des consignes claires pour l’utilisation d’Internet et assurer une surveillance directe. Avoir des discussions franches sur ce que les jeunes peuvent voir en consultant les médias. Être attentif à sa propre utilisation des médias à la maison. • Encourager les jeux non structurés et l’activité physique à la maison, et prévoir d’aider les enfants à s’adapter à ce changement au sein de la dynamique familiale. Envisager une utilisation planiée et délibérée des médias pour proter des avantages (p. ex., regarder une émission de télévision ensemble dans le but d’amorcer une discussion sur un sujet délicat).

• Déconseiller la présence d’appareils électroniques dans la chambre des enfants et leur utilisation avant le coucher. • Être sensible aux difcultés que peuvent rencontrer les parents dans la mise en application de ces mesures. ÉCOLES

• Offrir des renseignements exacts et actuels sur la sexualité et les drogues. • Favoriser la résilience. • Créer des programmes pour renseigner les jeunes sur l’utilisation intelligente des technologies. • Concevoir et mettre en œuvre des politiques relatives à la cyberintimidation et au sextage.

Chapitre 2

Inuences socioculturelles sur les soins de santé

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Identité L’identité d’une personne comporte plusieurs dimensions. Elle peut être personnelle, collective, sociale, culturelle, voire éventuellement professionnelle. Tout comme les appartenances à un groupe changent au l du temps et des événements, les frontières de l’identité sont en mouvance. Par exemple, un adolescent peut se dénir par rapport à son équipe sportive lorsqu’il fréquente l’école, à son pays d’origine pendant les Olympiques ou à son pays d’accueil durant une fête nationale. L’identité n’est pas une donnée immuable. Il faut donc éviter de catégoriser les personnes. L’adolescence est une étape cruciale pour le développement de l’identité. Toutefois, concevoir que l’identité arrive seulement à l’adolescence serait réducteur. L’identité se construit tout doucement au sein de la famille, de la communauté culturelle et des institutions scolaires (ministère de la Famille, avec la collaboration du ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport et du ministère de la Santé et des Services sociaux, 2014).

2.2

6 L’intolérance au lactose est présentée dans le chapitre 6, Problèmes de santé du nourrisson.

Les variations de la couleur de la peau selon l’origine ethnique sont abordées dans le chapitre 4, Examen clinique : anamnèse et examen physique.

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Certains groupes de personnes sont plus sujets que d’autres à diverses maladies. Une prédisposition innée s’acquiert par des changements évolutifs qui se produisent au l des générations dans des populations restreintes ou isolées. Le climat, les conditions de vie, les facteurs environnementaux et l’état physique général jouent un rôle important dans les éléments associés à des troubles de santé. La malaria (ou paludisme) est un bon exemple de problème de santé lié au climat, à la géographie et aux conditions de vie. Elle touche davantage certaines populations. La vulnérabilité à un problème de santé particulier peut aussi s’expliquer par divers facteurs comme l’héritage génétique, et elle est parfois liée à la consanguinité due à des restrictions géographiques, ethniques ou religieuses (Andrews et Boyle, 2016). Enn, l’état de santé peut aussi s’expliquer par les habitudes de vie, les comportements et les choix alimentaires, bien souvent dictés par l’héritage culturel.

2.2.1

4

Partie 1

Inuences de l’héritage culturel de l’enfant sur les soins de santé

Facteurs héréditaires

Les progrès de la science ont permis de découvrir que de nombreuses maladies sont d’origine génétique. Au l des ans et des études scientiques, il a été possible de déterminer que certaines de ces maladies sont plus fréquemment rencontrées dans des populations données. Par exemple, la brose kystique a une prévalence plus élevée parmi les populations d’origine

Inrmière, enfant et famille

caucasienne, et elle est presque inexistante parmi les Asiatiques. Les rares personnes d’origine africaine touchées par cette maladie vivent généralement dans des régions où habitent des personnes d’origine mixte (Andrews et Boyle, 2016). Certaines variations enzymatiques ou hématologiques doivent être prises en considération dans l’évaluation des enfants. La drépanocytose (anémie falciforme) est une maladie courante des personnes d’origine africaine. La thalassémie est rencontrée plus fréquemment dans les populations des pays bordant la Méditerranée, mais aussi en Afrique, en Inde et en Asie du Sud-Est. L’intolérance au lactose est une autre variation enzymatique. Il s’agit d’une décience de l’enzyme lactase qui permet de digérer le lactose. À l’âge adulte, elle est présente chez une très grande proportion des populations noire et asiatique (Andrews et Boyle, 2016). L’alactasie congénitale (aussi appelée intolérance congénitale au lactose), quant à elle, est une rare condition qui est davantage prévalente en Finlande (National Institute of Health, 2017). L’ingestion de lactose peut causer, aux personnes qui y sont intolérantes, des distensions abdominales, des atulences et de la diarrhée (Purnell, 2013) 6 . Des aliments et des médicaments courants peuvent causer des problèmes de santé dans certains groupes ethniques. Par exemple, le décit en glucose-6-phosphate déshydrogénase (G-6-PD) (ou favisme) est courant parmi les personnes d’origine méditerranéenne, africaine, proche-orientale et asiatique (Andrews et Boyle, 2016). Ces personnes peuvent souffrir d’une anémie hémolytique aiguë après avoir ingéré des féveroles (légumineuses à grains moyens ou à gros grains) ou certains médicaments tels que des préparations à base d’acide acétylsalicylique, des sulfonamides ou de la primaquine. Plusieurs variations en lien avec les caractéristiques physiques et corporelles s’expliquent par une adaptation biologique à l’environnement. Ces caractéristiques peuvent moduler les soins, notamment en ce qui concerne la peau et sa pigmentation. La couleur de la peau est déterminée par la quantité de pigments de mélanine. Les personnes vivant dans des pays situés près de l’équateur ont une peau foncée riche en pigments ; ceux-ci protègent la peau contre l’exposition constante aux rayons solaires. Au contraire, les habitants des pays nordiques ont une peau très pâle qui favorise l’exposition maximale aux rayons solaires (nécessaires au métabolisme de la vitamine D) pendant les courtes périodes de clarté. De grandes variations de la coloration de la peau en raison de l’origine géographique ou du métissage peuvent être observées 4 . Lorsque la peau présente une pigmentation foncée, il peut être difcile de détecter les variations dans la coloration de la peau de

Certains nouveau-nés d’origine asiatique, africaine, amérindienne et sud-américaine présentent communément une tache bleuâtre (tache mongolique) sur la région sacrée. Cette tache, semblable à une éclaboussure d’encre, peut aussi être présente sur les mains et les pieds FIGURE 2.3. Les soignants doivent connaître ces marques ou caractéristiques de naissance. Ils doivent les consigner pendant les examens du nouveau-né et les visites subséquentes an d’éviter qu’elles soient soudainement interprétées comme des ecchymoses (Andrews et Boyles, 2016). Il est fréquent que les enfants provenant de pays asiatiques soient plus petits que les enfants nordaméricains, tandis que les enfants d’origine africaine ou caribéenne ont une croissance physique et un développement moteur plus précoces (Trawick-Smith, 2017). Il faut tout de même éviter de généraliser en fonction de l’origine des enfants, puisque des différences existent au sein d’un même groupe culturel. Ces différences de taille peuvent entraîner des interprétations erronées de l’état de santé. Pour remédier un peu à cette situation et tenir compte davantage des recommandations en matière d’allaitement, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a mis au point des courbes de croissance à partir d’une vaste étude multicentrique d’une population d’enfants allaités de diverses origines. Ces courbes permettent une meilleure évaluation de la croissance des enfants A .

2.2.2

Facteurs d’origine familiale

Le Canada, pays multiculturel, compte plusieurs groupes minoritaires, ethniques et religieux. Selon le recensement de 2016, plus de 250 origines ethniques différentes ont été dénombrées au pays (Statistique Canada, 2017a). En 2016, plus de 1 Canadien sur 5 appartenait à une minorité visible. A Certains groupes minoritaires dépassent en nombre Les nouvelles courbes de le million, notamment les personnes provenant de croissance sont présenl’Asie du Sud-Est et de la Chine. Les groupes ethtées dans l’annexe A, niques minoritaires occupent une place de plus en Normes de croissance plus importante, car leur taux de reproduction de l’OMS pour le Canada. dépasse celui de la population majoritaire. L’immigration dans un pays entraîne un certain degré de métissage culturel et ethnique par l’acculturation. Natasha, étudiante en soins inrmiers, effectue un L’acculturation est le processus stage en pédiatrie. Elle doit s’occuper de Naomie, par lequel une personne se voit une llette chinoise de 16 mois adoptée par des imposer, par le groupe domiparents québécois, qui est hospitalisée pour une bronchiolite. Natasha croit que la petite est vicnant, un nouveau système de time de sévices physiques de la part des parents, normes et de valeurs (Spector, puisqu’elle a plusieurs taches ressemblant à des 2016). Toutefois, les changeecchymoses au sacrum, à l’épaule et au pied. Elle ments se produisent à divers vous demande de l’aider à procéder à l’examen degrés dans les familles et les physique. Que pouvez-vous suspecter d’autre que groupes. De nombreux groupes des sévices physiques ? continuent de s’identier à leur patrimoine traditionnel tout en a) Un problème de coagulation. s’adaptant au mode de vie de la b) Des taches mongoliques. société d’accueil. c) Une fragilité capillaire. Grâce à la sensibilisation, à d) Des taches de purpura. la curiosité et à la compréhension accrue des personnes du groupe majoritaire, qui ont assisté à l’émergence de la erté des groupes minoritaires, les enfants issus de ces derniers prennent conance en leur identité. Et si les gens réagissent de diverses façons à l’appartenance à un groupe minoritaire, c’est, en grande partie, attribuable à des facteurs familiaux.

clinique

Jugement

l’enfant (p. ex., des altérations vasomotrices, une cyanose, un ictère).

Autochtones L’inrmière doit s’assurer d’avoir une connaissance particulière des communautés autochtones, car, selon le recensement effectué en 2016, le Canada compte 1 673 785 personnes autochtones. Cela représente près de 4,9 % de la population canadienne (Statistique Canada, 2017b). Cette proportion est en hausse depuis 1996. La moyenne d’âge chez les peuples autochtones est peu élevée. En effet, près du tiers de la population autochtone est composée d’enfants et de jeunes de moins de 14 ans. De plus, il n’est pas rare que les mères soient très jeunes.

FIGURE 2.3

Tache mongolique

La méconnaissance et la mauvaise utilisation des mots peuvent entraîner des malentendus entre les inrmières et leurs clients. Le ministère des Affaires autochtones et du Développement du Nord Canada (2016a) dénit le terme autochtone

Chapitre 2

Inuences socioculturelles sur les soins de santé

49

2

clinique

La plupart des communautés autochtones conçoivent la santé de façon holistique. Il faut éviter d’isoler les questions physiques et mentales, et considérer également les dimensions spirituelles et affectives. L’inrmière acceptera le silence et laissera aux gens le temps de s’exprimer. Ces clients seront sensibles au fait qu’elle connaît certains de leurs traits culturels (First Nations Health Council, 2010). Lorsqu’elle travaille auprès des Autochtones, l’inrmière doit intégrer les approches traditionnelles dans ses soins. Enn, le respect des aînés est essentiel.

Les Indiens sont donc les Autochtones du Canada qui c) Non, car le règlement de l’établissement l’interdit. ne sont ni Inuits ni Métis. Les Inuits sont des Autochtones d) Non, car c’est dangereux pour la santé de Nibisha. qui vivent dans l’Arctique canadien. Ils habitent surtout les Territoires du Nord-Ouest, le Nunavut, et le nord du Labrador et du Québec. Le mot Inuit signiCONSEIL CLINIQUE e « peuple » dans la langue des Inuits, l’inuktitut. Enn, les Métis sont des personnes qui ont à la En raison de la grande fois des ancêtres européens et des ancêtres autochdiversité des cultures tones. Ils vivent partout au Canada et parlent le présentes au Canada, français, l’anglais ou une langue autochl’inrmière doit approfondir tone (ministère des Affaires autochtones et ses connaissances sur les du Développement du Nord Canada, 2016a ; différences culturelles. 2016b ; 2017).

Le recensement de 2016 au Canada indique qu’un nombre croissant d’immigrants vivent dans le pays (Statistique Canada, 2017a). En effet, plus du cinquième de la population canadienne (21,9 %) est né à l’étranger. De ce nombre, 61,4 % se trouvent dans les grandes villes, soit Toronto, Montréal et Vancouver. Pour sa part, le Québec envisageait d’accueillir, en 2016, 54 700 nouveaux immigrants (ministère de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion, 2016). En 2015, des mesures exceptionnelles ont été déployées par tous les paliers de gouvernement au Canada pour accueillir des réfugiés syriens ayant dû fuir leur pays d’origine en raison de conits. Depuis le début de cette crise humanitaire, au Québec seulement, plus de 10 000 d’entre eux auront été accueillis (ministère de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion, 2017).

Jugement

comme suit : « [Ce terme] désigne les premiers peuples d’Amérique du Nord et leurs descendants. La Constitution canadienne reconnaît trois groupes de peuples autochtones : les Indiens (plus souvent appelés les “Premières Nations”), les Inuits et les Métis. Ces trois groupes distincts ont leur propre histoire ainsi que leurs propres langues, pratiques culturelles et croyances. »

Nibisha est une llette âgée de cinq ans qui vit avec sa famille dans une communauté algonquine en Abitibi. Elle a des infections respiratoires à répétition depuis plusieurs semaines et rien ne semble la soulager. Elle est actuellement hospitalisée, car son état général se détériore de plus en plus. Sa tante demande si elle peut réaliser un rituel de purication avec des feuilles de sauge brûlées dans la chambre de l’enfant et les déposer sur le bord de la fenêtre. Devriezvous accéder à sa demande ? Justiez votre réponse. a) Oui, car c’est un accommodement religieux.

b) Oui, si ça ne nuit pas à la sécurité de l’enfant.

8 Le trouble de stress posttraumatique est présenté dans le chapitre 8, Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent.

50

Partie 1

Ainsi, les Autochtones ne forment pas un groupe unique et homogène, mais ils regroupent plutôt diverses nations ayant leurs propres spécicités et particularités. Les peuples autochtones présentent d’importants dés en matière de santé (Santé Canada, 2016 ; Smylie et Firestone, 2016). L’incidence de maladies transmissibles (p. ex., la tuberculose) et chroniques est supérieure chez les Autochtones que dans le reste de la population canadienne. Le diabète de type 2 touche de 3 à 5 fois plus les Premières Nations qui vivent dans des réserves que les autres Canadiens (Agence de la santé publique du Canada [ASPC], 2011). De plus, l’espérance de vie des Autochtones est plus courte (Santé Canada, 2016). Malheureusement, ces problèmes de santé sont bien souvent en lien avec des inégalités sociales (Smylie et Firestone, 2016). An de bien comprendre ces inégalités et leurs répercussions sur l’état de santé de ces populations, l’inrmière devrait s’intéresser à l’histoire des peuples autochtones et se distancier de ses a priori, de ce qu’elle croit connaître (Douglas et al., 2014). D’ailleurs, les connaissances au sujet des Autochtones proviennent très souvent de sources médiatiques trop souvent sensationnalistes, et elles ne reètent pas l’apport de ces peuples pour le pays ni les éléments qui ont contribué à l’apparition et au maintien des inégalités sociales.

Inrmière, enfant et famille

Immigration

Les membres de ces familles, adultes et enfants, sont exposés à des agents stressants très particuliers, y compris la tristesse et l’anxiété liées à la migration et à l’acculturation, à la séparation de la famille étendue et des personnes de soutien, aux barrières de langue, aux disparités des statuts socioéconomiques en comparaison de ceux de leur pays d’origine et, possiblement, aux événements traumatisants qui ont provoqué leur émigration (Council on Community Pediatrics, 2013). En effet, chez plusieurs immigrants, dont les personnes réfugiées syriennes qui ont dû fuir leur pays en raison de la guerre civile, la violence vécue dans leur pays d’origine, le contexte dans lequel ils ont immigré, les nombreux deuils à faire et l’adaptation nécessaire à leur arrivée au Canada peuvent être la source d’un stress important. Ce dernier peut mener à des problématiques de santé mentale, dont un trouble de stress post-traumatique (Hansen, Maidment et Ahmad, 2016 ; Pottie, Greenaway, Hassan et al., 2016) 8 . Il est question d’immigrants de première génération pour les personnes nées en dehors du Québec ou du Canada qui ont été soumises au stress de l’émigration et de l’adaptation à la nouvelle société d’accueil, laquelle diffère de la société et de la

Pour les enfants récemment immigrés, l’inrmière portera une attention particulière au dépistage des maladies infectieuses et tropicales, car ces enfants peuvent souffrir d’infections (p. ex., le paludisme) qui sont courantes dans leur pays, mais peu diagnostiquées au Canada. Chez les enfants réfugiés syriens arrivés durant l’hiver, le diagnostic d’infections virales, telles que des infections des voies respiratoires supérieures et des otites, est fréquent (Hansen et al., 2016). C’est aussi le cas chez les populations autochtones. La situation de vie, y compris le nombre de personnes habitant sous le même toit, est une des causes de la prévalence plus élevée des infections virales que chez le reste de la population canadienne. Les enfants d’immigrants peuvent ne pas avoir subi d’examens de dépistage à la naissance pour des maladies congénitales telles que des hémoglobinopathies et des erreurs innées du métabolisme. De plus, ils n’ont peut-être pas reçu les immunisations recommandées (American Academy of Pediatrics, 2009 ; Hansen et al., 2016). Ces recommandations se trouvent dans le Protocole d’immunisation du Québec (PIC) (ministère de la Santé et des Services sociaux, 2018).

2.2.3

Facteurs socioéconomiques

Le statut socioéconomique est le facteur qui a le plus de répercussions négatives sur la santé, car il est lié au revenu et au niveau d’éducation de la famille. En effet, ces deux éléments inuencent la culture de la famille, puisqu’ils modifient la façon de voir le monde et les choix des personnes. Les familles issues des classes socioéconomiques inférieures ont peu de ressources, et leur réseau social est souvent plus limité (Spector, 2016). Les personnes des classes moyenne et supérieure disposent généralement de ressources à l’extérieur de leur famille élargie. Elles ont accès à du soutien physique et affectif dans la communauté (Giger, 2014).

Pauvreté La pauvreté est bien plus que le manque d’argent (Spector, 2016). Elle désigne des déciences à plusieurs niveaux interreliés. Il existe donc un appauvrissement visible et invisible (Trawick-Smith, 2017). La pauvreté visible désigne le manque d’argent et de ressources matérielles ; la pauvreté invisible évoque des privations sociales et culturelles telles que des possibilités limitées d’emploi,

d’éducation et d’accès à des services. Plusieurs facteurs contribuent à maintenir la famille dans un cycle de pauvreté : l’isolement social, le peu de scolarisation, le faible revenu, le statut socioéconomique inférieur, le difcile accès aux services, les perspectives d’emploi limitées, les comportements à risque et, dans certains cas, la barrière linguistique ainsi qu’un habitat dans un environnement peu sécuritaire et présentant des risques pour la santé (Spector, 2016). Or, la somme de tous ces facteurs peut avoir une incidence sur la santé (Schreier et Chen, 2013).

clinique

Jugement

culture d’origine (Purnell, 2013). Il est question d’immigrants de seconde génération pour les personnes nées au Québec ou au Canada qui ont conservé une identité et un sentiment de solidarité à l’intérieur de leur communauté ethnique d’origine. De nombreux enfants et adolescents sont des immigrants de deuxième génération. Les immigrants de troisième génération ou plus désignent les personnes nées au Canada et dont les deux parents sont nés au Canada (Statistique Canada, 2013).

Hector, âgé de 8 ans, est né au Québec. Ses parents, originaires de la Colombie, ont immigré au pays il y a 15 ans. Cet enfant est considéré comme un immigrant de seconde génération. Bien qu’il se soit adapté aux coutumes canadiennes, il vous dit que ses amis les plus proches sont aussi colombiens. Pourquoi, selon vous, Hector conserve-t-il un lien aussi étroit avec ses origines ? a) Hector fréquente sans doute un entourage d’origine colombienne principalement. b) Toute sa famille n’est pas totalement intégrée au milieu culturel québécois. c) Il préfère probablement fréquenter des gens de la même origine que lui. d) Il a développé un sentiment de solidarité à l’intérieur de sa communauté ethnique.

En 2015, au Canada, 1,2 million d’enfants de 18 ans et moins vivaient dans une famille à faible revenu (Statistique Canada, 2017c). Selon le rapport du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) sur la situation des enfants dans le monde, l’écart entre les enfants de familles aisées et ceux de familles pauvres ne cesse de grandir au Canada (UNICEF Canada, 2017). D’ailleurs, le Canada se trouve dans les 24 pays de queue de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) à ce chapitre. Les enfants qui vivent en situation d’inégalités sociales sont plus susceptibles d’être confrontés à des problèmes de santé, à l’insécurité alimentaire ainsi qu’au stress parental et familial (UNICEF Canada, 2017). Ces inégalités vécues en bas âge peuvent affecter leur trajectoire de vie (Schreier et Chen, 2013). En effet, la pauvreté est un fort facteur prédictif de la santé infantile, et elle est étroitement liée à de mauvais résultats en matière de santé physique, développementale et mentale (Rothman, 2007 ; UNICEF Canada, 2017). Par exemple, la malnutrition explique de nombreux troubles de santé dans les populations défavorisées. En raison du manque d’argent et de connaissances, l’alimentation peut être très pauvre en substances alimentaires essentielles, particulièrement en protéines, en vitamines et en fer. Cette alimentation inadéquate peut entraîner chez l’enfant un retard de croissance, un surplus de poids, des carences, des difcultés d’apprentissage et des problèmes de santé physique et mentale (UNICEF Canada, 2017). De plus, le manque de soins préventifs entraîne une plus grande prévalence des troubles dentaires chez les enfants (Bernabé et Hobdell, 2010). Certaines familles sont davantage touchées par la pauvreté, notamment les familles immigrantes, Chapitre 2

éactivation des connaissances Nommez au moins trois vaccins recommandés par le PIQ que les enfants devraient recevoir avant l’âge de un an.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Le statut socioéconomique est le facteur qui a le plus de répercussions négatives sur la santé, car il est lié au revenu et au niveau d’éducation de la famille.

CE QU’IL FAUT RETENIR

La pauvreté est un fort facteur prédictif de la santé infantile, et elle est étroitement liée à de mauvais résultats en matière de santé physique, développementale et mentale.

Inuences socioculturelles sur les soins de santé

51

2

Jugement

clinique

les familles Autochtones et les familles monoparenMagalie, âgée de 10 mois, est sous le 10e centile tales (Rothman, 2007, Statisde la courbe de croissance. Elle vit avec sa mère, tique Canada, 2017c). Au qui est sans emploi, et son frère Antonin, âgé Canada, un enfant sur six de 6 ans. Vous soupçonnez que la mère dilue vit dans la pauvreté, mais davantage les préparations commerciales pour dans les populations Aunourrisson en raison d’un manque de ressources tochtones, c’est deux enfants nancières. Quel lien pouvez-vous faire entre le sur cinq (Macdonald et ralentissement de croissance de Magalie et la Wilson, 2016 ; Statistique situation de la mère ? Nommez deux moyens que Canada, 2017c). Pour les vous pourriez proposer à la mère de Magalie pour enfants Autochtones habitant l’aider à offrir une meilleure alimentation à sa llette. dans les réserves, ce sont 60 % d’entre eux qui vivent dans la pauvreté (Macdonald et Wilson, 2016). Les familles immigrantes, souvent en situation de pauvreté, ont de la difculté à se sortir de ce cercle vicieux (Razack, 2007). La pauvreté est une composante socioculturelle qui a une forte inuence. En effet, elle pèse sur les choix de la famille à tous les niveaux. Par exemple, les épiceries des quartiers mieux nantis offrent une plus grande variété d’aliments sains que les épiceries des quartiers défavorisés.

Familles en situation d’itinérance et jeunes de la rue Chaque jour, 35 000 personnes au Canada, dont de plus en plus de jeunes, sont en situation d’itinérance (Gulliver-Garcia, 2016 ; Kulik, Gaetz, Crowe et al., 2011). L’expression jeune en situation d’itinérance correspond généralement à une personne âgée de moins de 25 ans se trouvant dans une extrême pauvreté et n’ayant pas les ressources ni les liens sociaux nécessaires pour se procurer une habitation adéquate. Les enfants qui se retrouvent dans une telle situation de vie sont souvent accompagnés d’une mère de famille monoparentale. Ces jeunes reçoivent peu de soins et ont un accès restreint à l’école FIGURE 2.4. Ils sont souvent victimes de discrimination. À l’adolescence, une importante période de transition, ils souffrent surtout d’un manque de soutien social (Kulik et al., 2011).

FIGURE 2.4 Les soins de santé peuvent être difciles d’accès pour les jeunes en situation d’itinérance.

52

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

Lorsqu’ils se trouvent dans cette situation, les familles et les jeunes vivent dans des parcs, parfois de façon temporaire dans des refuges, d’autres fois chez des amis ou même dans des logements inoccupés, mais sans jamais avoir de domicile xe et de lieu d’intégration. Il est actuellement difficile d’établir le nombre exact de familles et de jeunes en situation d’itinérance au Canada.

Toutefois, Chez toit, un organisme canadien œuvrant auprès de cette clientèle, a noté une augmentation de 50 % de l’utilisation des refuges par des enfants dans les dernières années, ainsi qu’une utilisation des refuges par les familles pour des périodes trois fois plus grandes que les autres personnes en situation d’itinérance (jusqu’à 50,2 jours) (GulliverGarcia, 2016). Parmi ces jeunes en situation d’itinérance gurent les adolescents fugueurs et ceux qui sont chassés de leur milieu de vie. De nombreux fugueurs sont victimes de sévices physiques et sexuels, et ils quittent la maison en raison de problèmes familiaux ou scolaires de longue date. Vivre dans la rue est souvent associé à un piètre état de santé. Ces jeunes sont à risque de nombreux problèmes de santé, notamment en tant que victimes de violence, d’abus d’alcool et de drogues, de grossesses non désirées et d’infections transmissibles sexuellement. Les infections et les infestations de toutes sortes, la malnutrition ainsi que les problèmes de santé mentale sont légion dans ce segment de la population (Kulik et al., 2011 ; Medlow, Klineberg et Steinbeck, 2014). Les jeunes en situation d’itinérance se méent souvent des professionnels de la santé. Les services ne sont pas toujours accessibles pour eux : ils n’ont souvent pas de carte d’assurance maladie, pas d’adresse, pas d’argent. De plus, les cliniques ne sont pas toujours près des endroits qu’ils fréquentent. L’attitude ouverte du professionnel de la santé à leur égard devient très importante, puisqu’une attitude négative pourrait devenir un obstacle à la relation (Kulik et al., 2011).

2.3

Inuences des croyances et des pratiques culturelles sur les soins de santé

2.3.1

Croyances religieuses et croyances en matière de santé

L’orientation religieuse dicte un code de moralité et de valeurs, et elle inuence les attitudes de la famille à l’égard de l’éducation, du rôle de l’homme et de la femme, et des croyances. La religion peut aussi inuer sur le choix d’une école pour un enfant, des personnes que celui-ci peut fréquenter et, souvent, du conjoint. La religion guide les croyances, les rites et les pratiques en lien avec la naissance, les alliances, notamment le mariage, et la mort FIGURE 2.5. Elle peut donc inuencer les soins et la façon de les prodiguer au

Pratiques inrmières ENCADRÉ 2.2

Favoriser l’intégration des soins spirituels auprès de l’enfant et de sa famille

• Respecter les croyances et les pratiques religieuses de l’enfant et de sa famille. • Tenir compte du développement de l’enfant lorsqu’il est question de préoccupations d’ordre spirituel.

sein des familles. Par exemple, les témoins de Jéhovah n’acceptent pas les transfusions et les produits sanguins. Les auteurs ne s’entendent pas tous sur la dénition même de la religion. Toutefois, la religion touche à la relation de l’être humain avec une entité divine qui donne un sens à la vie dans un contexte plus organisé de pratique (Ray, 2016). L’inrmière en pédiatrie qui connaît les traditions, les valeurs et les croyances de l’enfant et de sa famille peut comprendre comment elles peuvent inuer sur la santé de l’enfant (Ray, 2016). La spiritualité concerne davantage les croyances personnelles, c’est-à-dire les expériences qui guident la vie de la personne (Ray, 2016). C’est aussi au cours d’événements affectant la santé que les membres de la famille se tournent davantage vers leur spiritualité et leur religion. Au sein d’une même communauté culturelle et d’une personne à l’autre, on retrouve différents niveaux d’adhésion aux principes religieux. Par exemple, toutes les familles catholiques ne vont pas à la messe le dimanche. Il est donc important d’évaluer la place de la religion dans la vie des familles dont l’inrmière prend soin. Des pistes de réexion sont suggérées dans l’ENCADRÉ 2.2 pour faciliter l’intégration de la culture et de la spiritualité dans les soins. L’inrmière doit porter un intérêt aux croyances et aux valeurs de l’enfant, à ses pratiques quotidiennes et à son engagement dans la communauté. Les croyances religieuses touchent le quotidien avec ses prescriptions et ses interdits, comme la diète, la consommation d’alcool, la prière et la méditation, et elles inuencent des sujets plus délicats comme la planication des naissances, l’interruption volontaire de grossesse ou encore l’éducation des enfants. Par exemple, certains groupes religieux offrent des cours de religion aux enfants pendant que les parents assistent à l’ofce. La religion a une incidence sur la façon dont les gens interprètent la maladie et y réagissent

• Communiquer avec le service de soins spirituels de l’établissement lorsqu’un enfant et sa famille montrent des symptômes de détresse d’ordre spirituel ou demandent des rituels religieux particuliers. • Se renseigner sur les visions du monde des groupes religieux et culturels auxquels appartiennent les enfants dont on prend soin.

• Encourager les visites des membres de la famille, des membres de la communauté spirituelle de l’enfant et des chefs spirituels. • Permettre aux enfants et à leur famille de vous informer sur les particularités de leurs croyances et de leurs pratiques religieuses. • Être consciente de ses propres croyances spirituelles. • Être à l’écoute pour comprendre au lieu d’être en accord ou en désaccord avec les croyances de l’enfant et de sa famille.

Sources : Adapté de Barnes, Plotnikoff, Fox et al. (2000) ; Brooks (et l’Association of Pediatric Oncology Nurses) (2004).

clinique

(Spector, 2016). Les membres de nombreux groupes croient que la maladie, les blessures John, âgé de huit ans, doit subir une amygdalecou la mort sont envoyées par tomie. Il porte au cou une chaîne avec une petite une entité divine comme punicroix offerte par sa grand-mère. L’enfant refuse de tion d’un péché. Certains l’enlever pour l’intervention chirurgicale, car il croit que Dieu le protège davantage lorsqu’il la porte. peuvent croire que les travailCroyez-vous qu’il serait possible de trouver un comleurs de la santé seront incapromis qui satisferait John tout en respectant les pables d’aider une personne principes d’asepsie ? Expliquez votre réponse. que Dieu punit, et ils peuvent exprimer une attitude fataliste à l’égard du traitement en invoquant la volonté de Dieu. D’autres voient la maladie comme une épreuve de force. L’appartenance religieuse a des conséquences sur de nombreuses fonctions et interventions dans le domaine de la santé. Il est rassurant pour la famille d’un enfant malade de constater que ce besoin est reconnu et respecté. L’inrmière doit déterminer si la famille tient à certains usages liés à des pratiques religieuses, notamment des restrictions alimentaires. Il faut Ministre du culte : Personne demander aux membres de la famille s’ils souchargée de diriger les ofces du haitent la présence d’un ministre du culte. Il est culte divin, de donner des direcégalement important de déterminer les volontés tives spirituelles et morales, et de la famille relativement aux rites ou aux prad’accomplir d’autres fonctions tiques mortuaires. La religion, qui offre un soutien associées à la pratique d’une moral et spirituel aux familles, est un atout préreligion. cieux pour les soins de santé.

Jugement

FIGURE 2.5 Peu après la naissance d’un enfant, de nombreuses familles tiennent une cérémonie religieuse selon leurs croyances.

2

De nombreuses familles ont un sentiment d’appartenance à une religion, mais se déclarent non pratiquantes. Malgré cela, devant les événements qui affectent la santé et la vie, ces familles peuvent manifester le désir de rencontrer un ministre du culte ou un agent de pastorale, ou elles peuvent désirer se recueillir, méditer ou prier dans un lieu particulier. À titre d’exemple, les familles catholiques peuvent demander que Chapitre 2

Inuences socioculturelles sur les soins de santé

53

leur enfant hospitalisé reçoive l’onction des malades. Les familles sont parfois mal à l’aise de discuter de ces besoins.

2.3.2

Conceptions et perceptions culturelles de la maladie

Bien que les caractéristiques cliniques d’une maladie ou d’une affection soient essentiellement les mêmes d’une culture à l’autre, la façon dont un enfant ou une famille interprète ou vit cette affection varie. La culture joue assurément un rôle dans cette variabilité. Par exemple, plusieurs cultures voient la diarrhée comme un nettoyage du corps essentiel au maintien de la santé et à la prévention ou à la guérison de la maladie. De plus, les manifestations cliniques de la diarrhée et de la déshydratation qu’elle provoque, tels les malaises, la èvre, l’anorexie et l’irritabilité, peuvent être considérées comme des maladies distinctes.

4 Diverses techniques de communication verbale pour mener un examen clinique sont présentées dans le chapitre 4, Examen clinique : anamnèse et examen physique.

Des groupes culturels peuvent aussi considérer qu’une maladie ou une invalidité chronique touche seulement certains éléments de la vie d’un enfant, et que ce dernier, dans l’ensemble, est normal. Inversement, dans d’autres cultures, on considère souvent que la maladie a des effets globaux sur de nombreux éléments de la vie actuelle et future d’un enfant (Purnell, 2013). Ces points de vue opposés peuvent expliquer les différentes attentes et visées des parents pour leurs enfants. Dans certaines cultures, le sexe de l’enfant peut inuencer la perception des parents quant aux conséquences d’une maladie ou d’une invalidité. Il n’est pas rare de constater que des groupes culturels préfèrent les garçons aux lles. Dans certains cas, le garçon peut recevoir de meilleurs soins de santé et plus de nourriture parce que c’est lui qui prendra soin de ses parents lorsqu’ils seront âgés (Galanti, 2014). La discussion et l’observation permettent généralement à l’inrmière de reconnaître les perceptions et les interprétations culturelles d’une famille en matière de santé. L’inrmière doit étudier et prendre en compte les conséquences de ces perceptions pour planier des interventions adaptées à la culture 4 . Ces croyances culturelles, souvent inséparables des croyances religieuses, inuencent la réaction de la famille par rapport aux troubles de santé ainsi que les interactions de la famille avec les professionnels de la santé. La plupart des cultures ont des croyances liées aux forces naturelles et aux forces surnaturelles ainsi qu’au déséquilibre entre celles-ci.

Forces naturelles Les forces naturelles le plus souvent tenues responsables d’un trouble de santé si le corps n’est pas adéquatement protégé sont l’air froid, les

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Partie 1

Inrmière, enfant et famille

impuretés de l’air ou d’autres éléments naturels. Par exemple, une mère chinoise peut trop habiller son enfant an d’empêcher le vent froid de pénétrer son corps. Plusieurs personnes d’origine asiatique pensent que le froid, la pluie et le vent sont responsables de ce qu’ils appellent des affections froides. Dans la culture africaine, on croit que des phénomènes naturels tels que les phases de la lune, les saisons et la position des planètes inuent sur le corps et ses processus ; on voit donc un lien étroit entre le maintien de la santé et la capacité de lire les signes de l’univers. La plupart des Autochtones considèrent la bonne santé comme un état d’harmonie avec la nature et l’univers.

Forces surnaturelles Il arrive fréquemment que des personnes attribuent les causes de certaines maladies à des forces incompréhensibles et inexplicables. Dans certaines cultures, des inuences maléques, notamment l’envoûtement, la sorcellerie et les esprits du mal, sont considérées comme étant à l’origine d’une mauvaise santé, particulièrement pour des maladies qui ne peuvent être expliquées autrement. Le concept de mauvais œil est une croyance répandue parmi les peuples de l’Amérique centrale, du Moyen-Orient et de la Méditerranée, ainsi que dans plusieurs sociétés de l’Asie et de l’Afrique (Galanti, 2014). Selon la croyance populaire, une personne en ensorcelle une autre, qui est alors frappée de maux divers. Ce geste est généralement motivé par la jalousie. Également, toute culture qui croit qu’un compliment peut attirer le mauvais œil a également des façons de neutraliser celui-ci. Cela fait partie du concept qui considère la santé comme un état d’équilibre, et la maladie, comme un état de déséquilibre. Les nourrissons et les enfants, en raison de l’immaturité de leurs forces et de leurs faiblesses internes, sont particulièrement vulnérables au pouvoir du mauvais œil. Par conséquent, ce concept justie parfois l’apparition inexplicable d’une maladie chez les enfants qui présentent des manifestations cliniques tels que de l’agitation, des pleurs, de la diarrhée, des vomissements et de la èvre.

Déséquilibre des forces Le concept d’équilibre est répandu dans le monde. Un des déséquilibres les plus courants reconnus par les cultures hispanophones, asiatiques et arabes est celui qui existe entre le froid et le chaud. Le froid et le chaud décrivent certaines propriétés et conditions qui n’ont aucun lien avec la température. Les maladies, les parties du corps et les aliments sont classés comme étant chauds ou froids. Selon les croyances chinoises relatives à la santé, ces forces sont le yin, associé au froid, et le

Selon cette même conception, la maladie se traite en rétablissant l’équilibre normal grâce à l’application de remèdes chauds ou froids appropriés. Une affection froide telle qu’une maladie respiratoire est censée être causée par l’exposition au froid, à la pluie ou au vent froid qui pénètre le corps. Elle se traite en administrant des aliments, des plantes ou des médicaments chauds. Les menstruations sont considérées comme une affectation chaude ; les aliments chauds sont donc déconseillés aux femmes durant cette période, car ils peuvent augmenter le ux menstruel ou provoquer des crampes. L’ingestion d’une quantité excessive d’aliments chauds ou froids peut aussi être interprétée comme une cause de maladie. Ainsi, la consommation en trop grande quantité d’un aliment chaud, par exemple la mangue, peut entraîner des éruptions cutanées ou un autre désordre. Les professionnels de la santé qui connaissent cette façon de concevoir l’équilibre physiologique sont davantage en mesure de comprendre pourquoi les enfants refusent de manger certains aliments. Il est possible d’aider les familles à adopter une alimentation équilibrée qui inclut les groupes alimentaires de base prescrits par la culture médicale, tout en respectant les croyances de leur groupe ethnique.

2.3.3

Pratiques traditionnelles en matière de santé

Il existe de nombreuses ressemblances entre les cultures en ce qui a trait à la prévention et au traitement d’une maladie. Dans toutes les cultures, il existe des remèdes maison qui sont utilisés avant de demander l’aide professionnelle. Dans toute communauté, la famille est d’abord consultée, souvent la mère et la grand-mère, pour connaître les soins à prodiguer dans une situation donnée. Les familles consultent parfois des guérisseurs, capables de faire disparaître les maladies dans des situations particulières ou encore lorsque les remèdes maison ne fonctionnent pas. Les membres de communautés d’origine asiatique se tournent vers un herboriste qui connaît les médicaments ou vers un praticien ethnique qui connaît des traitements comme la digitopression, qui consiste en l’application de pression avec les doigts, et la moxibustion, qui consiste en l’application de chaleur. Les Autochtones consultent une variété de guérisseurs ayant des compétences et des connaissances particulières (Purnell, 2013). Ces personnes, appelées sorciers, guérisseurs ou shamans, diagnostiquent la maladie, donnent des traitements non sacrés, généralement un massage et des plantes médicinales, et s’occupent du soin de l’esprit. D’autres spécialistes utilisent des

moyens spirituels. La suerie, pratiquée dans une hutte à sudation, est un exemple de rituel pratiqué par les Premières Nations à des ns spirituelles et thérapeutiques (ministère de la Culture et des Communications, 2013). La cérémonie a pour but de purier le corps ou l’esprit, ou encore de guérir. Durant celle-ci, des paroles, des prières et des chants au son du tambour alternent pendant que de l’eau est versée sur des pierres chaudes au centre de la tente.

2

Les guérisseurs ont un rôle important dans leur communauté. Ils parlent la langue de la famille qui a besoin d’aide, et ils combinent souvent leurs rituels et leurs potions avec des prières et des supplications à Dieu et aux esprits. Ils peuvent aussi créer une atmosphère favorable au succès du traitement. De plus, ils démontrent un intérêt sincère envers la famille et ses problèmes. Certains remèdes traditionnels sont compatibles avec un traitement médical et peuvent être combinés au plan de traitement. Par exemple, la plupart des aliments contre-indiqués pour les personnes souffrant d’ulcères gastroduodénaux sont des aliments chauds et, selon les systèmes de croyances, ils sont à éviter. Toutefois, pluLoubna, âgée de 14 ans, est hospitalisée pour une sieurs remèdes et de nompneumonie. Elle est d’origine inuit. Au cours de breuses pratiques préventives votre visite à la chambre, vous constatez qu’elle ne peuvent pas remplacer ou boit une infusion d’herbes naturelles. Elle vous dit ne sont pas compatibles avec que c’est dans un but curatif. Devez-vous interdire un traitement médical, par à Loubna la consommation de ce produit ? Justiez exemple le port d’ail ou d’ase votre réponse. fétide (Asa foetida, une a) Oui, car cela peut nuire au traitement médical. gomme-résine nauséabonde b) Oui, car l’infusion doit être approuvée par le provenant de diverses plantes médecin. asiatiques et ressemblant à une

clinique

Jugement

yang, associé au chaud. Pour rester en bonne santé, il faut garder un équilibre entre ces deux forces.

éponge séchée) autour du cou pour prévenir les maladies contagieuses et protéger la personne qui les porte pendant sa croissance.

c) Non, parce que c’est un produit naturel. d) Non, si c’est compatible avec le traitement médical.

L’approche de Leininger stipule que les pratiques qui n’ont pas d’effets nuisibles doivent être respectées. En effet, par rapport à ces situations, Leininger et ses collaborateurs suggèrent trois décisions ou actions en lien avec la cohérence entre les soins culturels et les soins professionnels : 1) la préservation et le maintien des soins culturels dans le cas où les soins culturels aident au rétablissement ou ne présentent pas de risque pour la santé ; 2) l’adaptation et la négociation des soins culturels dans le cas où des ajustements sont nécessaires ; 3) le remodelage et la restructuration des soins culturels dans le cas de grandes divergences ou de risques pour la santé (McFarland et Wehbe-Alamah, 2015). Les pratiques de différentes cultures en matière de santé peuvent aussi entraîner des problèmes d’évaluation et d’interprétation. Par exemple, des Chapitre 2

Inuences socioculturelles sur les soins de santé

55

professionnels de la santé non informés peuvent diagnostiquer erronément certaines pratiques culturelles ou certains remèdes culturels comme des preuves de violence envers les enfants. Par exemple, le gua sha ou cao gio, une pratique asiatique consistant à frotter linéairement et de façon répétée la tranche d’une pièce de monnaie sur la peau huilée d’une personne pour débarrasser celle-ci d’une maladie, peut laisser des lésions rayées (Galanti, 2014). L’application de ventouses, une pratique utilisée dans de nombreuses régions du monde (Asie, Amérique latine, parties de l’Europe), consiste à placer un contenant (p. ex., un gobelet, une bouteille, un pot) rempli de vapeur contre la surface de la peau an de tirer le poison ou la source du mal. Quand l’air chaud du contenant se refroidit, cela crée un vide qui produit une tache semblable à une ecchymose sur la peau, directement sous l’ouverture du contenant (Galanti, 2014). Les professionnels de la santé doivent connaître ces pratiques pour éviter de faire une interprétation erronée des symptômes. Les familles doivent quant à elles comprendre que ces pratiques peuvent leur causer des problèmes avec les services de protection de l’enfance (Galanti, 2014). Des remèdes culturels comme la consommation d’argile ou l’absorption de quantités excessives de sel ou de composés qui contiennent du plomb ou du mercure sont néfastes pour la santé. Des antécédents médicaux détaillés peuvent révéler la prise de ces remèdes, mais la collaboration d’un guérisseur sera peut-être nécessaire pour convaincre l’enfant et sa famille d’en arrêter la consommation. La guérison spirituelle et les rituels religieux sont étroitement liés à de nombreuses pratiques de guérison traditionnelle. Le port d’amulettes, de médailles et d’autres reliques religieuses censées protéger la personne et faciliter sa guérison est une pratique courante. Il est important que les professionnels de la santé reconnaissent la valeur de cette pratique et qu’ils laissent ces objets à l’endroit où la famille les a placés ou à proximité FIGURE 2.6. Ceux-ci sont une source de réconfort et de soutien, et ils nuisent rarement aux soins médicaux et inrmiers. Si un objet doit être enlevé pendant une intervention, il doit ensuite être replacé, si possible. Il faut expliquer la raison de son déplacement temporaire à la famille et rassurer celle-ci quant au respect de ses volontés. FIGURE 2.6 Les omamori, des amulettes japonaises, offrent chance ou protection à ceux qui les portent.

56

Partie 1

Il faut éviter de critiquer directement les croyances et les pratiques culturelles traditionnelles en matière de santé en les qualiant de mauvaises ou de nuisibles, ou en laissant entendre que les mesures biomédicales sont toujours adéquates,

Inrmière, enfant et famille

efcaces et qu’elles constituent l’unique mode de prévention ou de traitement de la maladie. De telles critiques entraînent généralement le rejet des professionnels de la santé et de leur enseignement. Généralement, un compromis peut être trouvé, permettant ainsi à l’inrmière d’atteindre ses objectifs et d’offrir la possibilité à l’enfant et à sa famille de conserver les soins qu’ils estiment importants du point de vue de la culture.

2.3.4

Pratiques alimentaires

Le symbolisme et les pratiques alimentaires font partie intégrante de la vie de divers groupes culturels, ethniques et religieux. Bien que, dans un grand pays comme le Canada, la plupart des gens aient des habitudes alimentaires variées héritées de nombreuses générations, on y trouve de multiples traditions et préférences alimentaires ethniques et géographiques. Les fêtes spéciales, les cérémonies et les événements de la vie tels que les naissances, les anniversaires, les mariages et les décès sont généralement soulignés par des aliments particuliers ou des festins. Les pratiques alimentaires distinctives des groupes ethniques dépendent du lieu d’origine de ces derniers et de la disponibilité des produits FIGURE 2.7 . Le poisson est un aliment de base des peuples vivant près de l’eau, notamment pour les Japonais, les Polynésiens, les Scandinaves et les habitants de l’Europe méridionale. Les préférences en matière de fruits et de légumes sont directement liées au climat sous lequel ces aliments poussent naturellement ou peuvent être cultivés. Les types de grains consommés par les différentes ethnies sont aussi ceux qui poussent le mieux dans leur pays d’origine. Des enfants peuvent devoir se conformer à des restrictions alimentaires, notamment de nature religieuse, par exemple la nourriture casher et la préparation de celle-ci par des juifs orthodoxes, ou l’absence de porc dans l’alimentation des musulmans et des juifs. Les enfants qui se retrouvent dans un environnement étranger tel qu’un centre hospitalier se sentent beaucoup plus à l’aise quand des aliments familiers leur sont proposés. La famille peut craindre que l’enfant ne reçoive pas les aliments qui conviennent à sa culture et à ses croyances. Si possible, il est recommandé de permettre à la famille d’apporter à l’enfant ses aliments préférés. La prise en compte des différences d’alimentation est un signe de respect envers le patrimoine ethnique ou religieux de la famille.

ultérieurement, ses environnements de travail ainsi que ses associations professionnelles.

2.4

Rôle inrmier dans la relation avec l’enfant et sa famille

L’inrmière doit savoir qu’il est nécessaire de tenir compte des différences culturelles des enfants et de leur famille dans la prestation de soins. Une connaissance des diverses croyances relatives à la cause des maladies et des pratiques traditionnelles en matière de santé est essentielle au succès de ses interventions. De bonnes connaissances sur les valeurs, les croyances et les coutumes des divers groupes ethniques permettent à l’inrmière de bien répondre aux besoins de leurs membres, d’obtenir leur coopération et de les inciter à respecter le traitement 1 .

2.4.1

Connaissance de sa culture

Il existe un consensus au sein de la profession infirmière pour améliorer la compétence culturelle dans la pratique professionnelle des soins inrmiers. Pour pouvoir comprendre les familles et travailler efcacement avec elles dans une communauté multiculturelle, l’inrmière doit être en mesure de discerner les barrières à la communication transculturelle et s’efforcer de les faire tomber (Gulati, Watt, Shaw et al., 2012 ; Muñoz et Luckmann, 2005). En plus des barrières linguistiques, le jargon médical peut être un obstacle dans les échanges entre l’enfant, sa famille et l’inrmière. En effet, l’inrmière est, elle aussi, un produit de ses propres antécédents culturels. Elle doit reconnaître qu’elle appartient à la culture inrmière. Elle travaille dans un milieu professionnel qui a ses propres valeurs et traditions, et elle devient ainsi socialisée dans cette culture, ses programmes éducatifs et,

2.4.2

2

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les soins inrmiers culturellement cohérents sont ceux qui correspondent aux valeurs et aux croyances de l’enfant et de sa famille.

Compétence culturelle

La compétence culturelle consiste en un savoir-faire critique et complexe fondé sur la capacité et la volonté de développer un partenariat avec l’individu, la famille et la communauté an de prodiguer des soins culturellement respectueux, sécuritaires et efcaces, en reconnaissant les éléments de l’identité culturelle, sociale et politique de chacun (Blanchet-Garneau et Pepin, 2015). La conséquence de cette prise de conscience se répercute dans la façon dont les soins prodigués par le professionnel de la santé sont adaptés culturellement à la personne soignée (Purnell, 2013 ; Tison et HervéDésirat, 2007). La compétence culturelle est un processus continu et interactif (Douglas et al., 2014).

1 Les théories permettant de décrire les familles, les types de congurations familiales et les différents styles d’autorité parentale sont abordées dans le chapitre 1, Rôle de l’inr­ mière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté.

Les normes et les valeurs culturelles d’une famille ainsi que sa structure, son fonctionnement et ses expériences en matière de soins de santé marquent ses sentiments et ses attitudes à l’égard du réseau de la santé. Il est généralement difcile pour une inrmière de se dégager de ses a priori et de ne pas juger les familles dont les comportements et les attitudes diffèrent des siens ou s’y opposent. Il peut alors être frustrant et décevant de se baser sur ses propres valeurs et expériences. C’est une chose de savoir comment traiter un Marie est l’inrmière de Saa, une jeune lle trouble de santé, mais c’en est musulmane hospitalisée à la suite d’une césaune autre de mettre en œuvre rienne. À partir de son expérience antérieure un plan d’action efcace, d’où avec des clientes d’origine musulmane, Marie l’importance pour l’inrmière a demandé au service des repas de ne pas servir de travailler de concert avec les de porc à Saa. Est-ce que Marie a fait preuve de référents socioculturels de la compétence culturelle ? Justiez votre réponse. famille (Debout, 2010 ; Doane et Varcoe, 2015).

clinique

Jugement

FIGURE 2.7 Les pratiques alimentaires peuvent varier considérablement d’une culture à l’autre.

L’inrmière et les autres professionnels de la santé peuvent ne pas être conscients de leurs propres valeurs culturelles ni de l’inuence de ces valeurs sur leur pensée et leurs gestes. Ils doivent comprendre que leurs propres antécédents culturels inuencent leur façon de prodiguer des soins (Douglas et al., 2014 ; Hart et Mareno, 2014). À titre d’exemple, l’Ordre des infirmières et inrmiers du Québec (OIIQ) demande aux inrmières de faire la promotion de l’allaitement maternel auprès des nouveaux parents, et ce, peu importe ses croyances personnelles quant à l’allaitement ou aux préparations commerciales. Il s’agit ici de valeurs véhiculées par la profession. Ces valeurs pourraient aussi être partagées par l’inrmière ou encore être contraires à ses propres valeurs et lui donner l’impression de forcer les mères à allaiter en voulant les convaincre que c’est la meilleure solution.

Chapitre 2

Inuences socioculturelles sur les soins de santé

57

CE QU’IL FAUT RETENIR

La conception qu’a une personne de la santé, de la maladie, d’un mode de vie sain, des soins adéquats ou des traitements efcaces est inuencée par sa vision du monde, qui est ellemême le produit de la culture ou des cultures auxquelles elle appartient.

CONSEIL CLINIQUE

L’inrmière doit évaluer le rôle de tous les membres de la famille an que chacun reçoive l’enseignement nécessaire et applique adéquatement à l’enfant le plan de soins établi.

Dans ses efforts pour comprendre et respecter les croyances culturelles des familles, l’inrmière doit apprendre comment les groupes culturels conçoivent les processus vitaux, dénissent la santé et la maladie, et voient les causes de la maladie. Elle doit combiner ses connaissances interculturelles avec d’excellentes habiletés en communication pour obtenir de l’information de l’enfant et de sa famille sur des questions importantes concernant leurs soins (Douglas et al., 2014 ; Purnell, 2013). Les différents éléments du processus d’acquisition des compétences culturelles de Douglas sont présentés dans l’ENCADRÉ 2.3. Il existe divers modèles de même que différentes approches et théories pour aider l’inrmière à prodiguer des soins culturellement congruents. Madeleine Leininger a été une pionnière dans ce domaine. En effet, elle a été la première à formuler une théorie inrmière établissant un lien étroit entre les soins, la culture et la santé, soit la théorie de l’universalité et de la diversité selon la culture (Leininger, 1978 ; McFarland et Wehbe-Alamah, 2015). Ont suivi le modèle de développement de compétence culturelle de Purnell (2013) et l’approche anthropobiologique de Collière (2001). Le modèle de Purnell décrit la culture comme évoluant au sein de la personne, de la famille, de la communauté et de la société. Il n’a cessé d’évoluer et de s’adapter au l des années. L’approche de Collière, quant à elle, considère chaque expérience de soin comme une situation anthropologique et reconnaît l’individualité de chaque être humain, sans le cataloguer.

Conception du temps En matière de temps, certaines cultures accordent de l’importance à l’heure, tandis que d’autres se

concentrent davantage sur les activités. Des conits peuvent survenir entre des personnes ayant ces deux approches. Par exemple, il existe des communautés qui ont généralement un rapport adaptable avec le temps : une famille peut alors être en retard à un rendez-vous parce que, selon ses expériences antérieures dans son pays d’origine, ce n’était pas l’heure du rendez-vous qui importait, mais bien la journée. En effet, dans plusieurs pays où les transports sont moins accessibles, les professionnels de la santé donnent rendez-vous à une date précise, mais ne se soucient pas de l’heure d’arrivée des clients. D’autres familles ne sortent pas quand il pleut. Encore une fois, ces actions sont très souvent liées aux expériences antérieures. Dans les sociétés occidentales, les gens considèrent que le temps a de la valeur et qu’il doit être utilisé sagement (Lewis, 2014). L’inrmière doit donc discuter sans préjugés avec les membres de la famille an de mieux comprendre leurs actions.

Rôles familiaux et prises de décision Les rôles familiaux diffèrent également d’une culture à l’autre. La prise de décision peut concerner la famille élargie. Les gures d’autorité dans une famille peuvent être la mère, le père ou l’un des grands-parents FIGURE 2.8 . La structure des liens de parenté est aussi déterminée par la culture. De nombreuses cultures notent leur descendance de façon unilatérale à partir d’un ancêtre masculin ou féminin (Galanti, 2014). L’inrmière doit s’informer de toute attitude particulière à adopter avec un enfant d’une culture donnée. Par exemple, certaines familles d’origine caribéenne peuvent laisser un enfant s’occuper seul de la gestion de ses médicaments ;

Pratiques inrmières ENCADRÉ 2.3

Prodiguer des soins culturellement compétents selon les lignes directrices de Douglas

• Acquérir une compréhension des variables culturelles qui ont une incidence sur la santé et le bien-être des individus (familles, communautés et populations diversiées) dont on prend soin (p. ex., les perspectives, les valeurs, les pratiques et les systèmes familiaux). • Prodiguer des soins culturellement congruents en utilisant ses connaissances et ses compétences acquises au niveau de la formation académique, clinique et continue. Les connaissances et les compétences requises devraient être intégrées au curriculum. • Prendre conscience, à l’aide de réexions critiques, de l’impact de son héritage culturel et de ses propres croyances et valeurs sur les soins prodigués. • Se renseigner sur les valeurs, les croyances, les pratiques, les perceptions et les besoins de la famille en utilisant un langage verbal et non verbal culturellement compétent. Source : Adapté de Douglas et al. (2014).

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Partie 1

Inrmière, enfant et famille

• Promouvoir l’inclusion des croyances et des pratiques culturelles des familles dans toutes les sphères des soins et reconnaître l’apport des structures et politiques organisationnelles sur ces soins. • Participer à l’effort de recrutement et de rétention d’une maind’œuvre multiculturelle au sein du système de santé et des institutions académiques. • Utiliser son inuence pour amener les institutions et les communautés à adopter des politiques permettant l’intégration et d’évaluation de soins culturellement compétents. • Appuyer sa pratique et ses interventions sur les données probantes. Si des données récentes et empiriques sur les interventions culturellement adaptées ne sont pas disponibles, les inrmières-chercheuses doivent acquérir de telles connaissances au moyen de la recherche.

Dans tous les cas, l’inrmière doit chercher à comprendre la famille, même si les comportements de cette dernière viennent heurter ses valeurs profondes (Debout, 2010 ; Douglas et al., 2014).

Communication Dans un établissement de santé, la communication entre clients et professionnels peut être difcile, et ce, même si les deux parties parlent la même langue. Le choix des mots, le jargon médical de même que la capacité de lire ou non peuvent affecter cette communication. La communication devient encore plus difcile quand le client et le professionnel de la santé ne parlent pas la même langue. De plus, le même mot peut avoir des signications différentes dans diverses cultures. Par exemple, le mot constipation fait référence à la congestion nasale pour de nombreuses personnes originaires d’Amérique du Sud, alors que le même mot fait référence à un problème intestinal pour une infirmière du Québec. Si cette dernière demande à un client salvadorien s’il a mal au cœur, il peut croire qu’elle lui demande s’il est triste. Les modes de communication peuvent différer selon le style et le comportement, le recours au silence, l’utilisation du contact visuel, les gestes et le langage corporel (Galanti, 2014 ; Purnell, 2013).

Communication verbale La communication verbale peut être une source de détresse et de malentendu entre des personnes de groupes ethniques différents. Le manque de services d’interprètes et de matériel d’éducation à la santé linguistiquement adapté entraîne l’insatisfaction du client, une mauvaise compréhension, la non-adhésion au traitement de même que des soins de santé de qualité inférieure (Flores, 2014 ; Gulati et al., 2012 ; Levas, Cowden et Down, 2011 ; Mosquera, Samuels et Flores, 2016). Les organisations de soins de santé doivent fournir aux personnes ayant des compétences limitées en français un service d’interprète et du personnel bilingue.

Travail avec un interprète Le recours à un interprète professionnel est très utile, tant pour la famille que pour les soignants. Il permet, entre autres, de limiter les erreurs de traduction, d’optimiser l’accessibilité aux soins de santé et la qualité de ces derniers, en plus d’augmenter la satisfaction

des familles et des professionnels de la santé (Brisset, Leanza et Laforest, 2013). C’est aux organisations de santé de fournir ce service et d’en assurer les coûts. Au Québec, la Banque interrégionale d’interprètes (BII) a pour mission de favoriser l’accès aux services de santé et aux services sociaux aux personnes qui ne maîtrisent ni le français ni l’anglais. FIGURE 2.8 Selon les rôles familiaux Dans la région métropoli- attribués dans un groupe culturel, ce peut être le taine, il est même possible père qui accompagne son enfant hospitalisé. de faire une demande d’interprète au moyen de l’application en ligne Jérôme+. L’interprète fait plus que traMalek, âgé de trois ans, est hospitalisé pour un duire les mots. Il peut faire le choc septique. Il est Autochtone. Vous constatez pont entre deux mondes que sa famille le visite très peu. Votre collègue culturels, permettant ainsi croit qu’il pourrait être victime d’abandon. une meilleure compréhenQue devez-vous faire an de comprendre le sion de part et d’autre (Brisset comportement de la famille ? et al., 2013). Même les manifestations cliniques sont teintés par la culture. L’interprète pourra aider dans une pareille situation en évitant de faire une traduction littérale. Certaines règles sont à respecter s’il y a recours aux services d’un interprète (Hadziabdic et Hjelm, 2013 ; Tribe et Lane, 2009). L’inrmière doit d’abord prendre le temps de rencontrer l’interprète. Elle doit lui expliquer qu’il est tenu à la condentialité et au secret professionnel. Travailler avec un interprète nécessite de passer d’une dyade (professionnel-client) à une triade (professionnel-interprète-client). Par exemple, si l’inrmière veut obtenir un consentement éclairé par l’entremise d’un interprète, il est important que les membres de la famille soient pleinement informés de tous les aspects de l’intervention à laquelle ils doivent donner leur consentement. À ce chapitre, l’inrmière ne doit pas déléguer sa responsabilité à l’interprète. Elle doit aussi présenter l’interprète à la famille et expliquer son rôle (Hadziabdic et Hjelm, 2013 ; Tribe et Lane, 2009). Elle doit rassurer la famille en spéciant que l’interprète est tenu de respecter la condentialité. Elle doit être sensible à la différence de classe sociale qui peut exister entre l’interprète et la famille. Cet écart peut avoir pour effet d’intimider la famille et de la rendre moins encline à donner de l’information. Il est donc important de choisir soigneusement l’interprète Santé Montréal dispose dans la mesure du possible et de lui laisser le d’une banque interrégionale d’interprètes qu’il est temps d’établir un lien avec la famille. À la n possible de consulter au de la rencontre, elle doit faire un retour sur cellewww.santemontreal.qc.ca. ci avec l’interprète et vérier s’il a remarqué quelque chose de particulier. D’autres éléments

2

clinique

Jugement

c’est un signe de maturité et d’autonomie. Dans d’autres cultures, un tel point de vue peut être considéré comme irresponsable (Purnell, 2013). Parfois, la famille s’en remet à l’autorité du centre hospitalier pour les soins de l’enfant, sans intervenir. Ses visites à l’enfant sont courtes, mais intenses, ce qui peut être interprété erronément par le personnel comme de l’indifférence ou de l’abandon.

Chapitre 2

Inuences socioculturelles sur les soins de santé

59

favorisant le succès du travail avec un interprète sont abordés dans le TABLEAU 2.2. Le recours à un interprète professionnel est parfois impossible. Les milieux de santé ont alors recours à une banque d’interprètes à l’interne. Il s’agit bien souvent de professionnels qui travaillent dans l’établissement. Bien que cette solution puisse dépanner, elle ne fonctionne pas toujours bien, car ces personnes doivent en priorité vaquer à leurs occupations principales et ne sont pas toujours en mesure de consacrer le temps nécessaire à une entrevue avec un client. Or, le temps est le plus précieux allié dans une situation où il y a une barrière linguistique (Hadziabdic et Hjelm, 2013 ; Tribe et Lane, 2009). Le recours aux interprètes non profes s ionnels devrait s e limiter aux conversations importantes, aux urgences et aux communications téléphoniques. Dans la mesure du possible, il est recommandé que la famille et les amis ne servent pas d’interprètes, à moins que le client ne le demande (Hadziabdic et Hjelm, 2013). Pourtant, dans la pratique, un membre de la famille qui parle la langue d’origine et l’anglais ou le français est souvent utilisé à titre d’interprète. Dans le cas où les parents d’un autre client servent d’interprètes à la famille, des problèmes de condentialité peuvent aussi se poser, car des renseignements condentiels peuvent s’ébruiter. Idéalement, l’enfant ne devrait pas non plus servir d’interprète. L’infirmière doit être consciente du poids trop important de cette

responsabilité sur l’enfant. De plus, dans certaines cultures, le recours à un enfant interprète est considéré comme un affront envers un adulte, car les enfants sont censés faire preuve de respect et ne jamais remettre en question leurs aînés (Giordano, 2007). Par contre, la réalité dans les milieux est bien différente de ce qui est recommandé dans les écrits, et ce, principalement pour les familles d’immigrants de première génération. En effet, plusieurs parents récemment arrivés au Canada ne parlent ni le français ni l’anglais, mais les enfants fréquentent le système scolaire québécois et maîtrisent habituellement l’une des deux langues. Les enfants sont donc souvent amenés à traduire pour leurs parents.

Risques d’incompréhension Certaines personnes qui comprennent mal ou peu la langue peuvent simplement sourire et hocher la tête si elles ne saisissent pas des questions ou des directives. Il est essentiel que la famille comprenne pleinement toutes les conséquences des soins et des traitements offerts à un enfant avant de signer l’autorisation d’une intervention spéciale ou avant d’assumer la responsabilité des soins de l’enfant FIGURE 2.9. Par exemple, pour éviter un désaccord social, il arrive souvent que les membres d’une communauté d’origine asiatique disent oui quand, en réalité, ils veulent dire non. Ils préfèrent généralement être indirects et éviter la confrontation, et ils peuvent devenir évasifs quand des questions directes les mettent mal à l’aise.

Pratiques inrmières TABLEAU 2.2

Mener une entrevue en compagnie d’un interprète

AVANT L’ENTREVUE

AU COURS DE L’ENTREVUE

APRÈS L’ENTREVUE

• Expliquer à l’inter­ prète les raisons de l’entrevue, le sujet ainsi que le type de questions et d’échanges possibles.

• Au début de l’entrevue :

• Laisser sufsamment de temps à l’interprète pour communiquer cer­ taines idées qui n’ont pas pu l’être plus tôt ; lui demander son impres­ sion sur les indices non verbaux de communication.

• Prévoir du temps : c’est la clé du succès.

– Demander le consentement de la famille à travailler avec un interprète. – Présenter l’interprète à la famille et leur laisser le temps d’apprendre à se connaître. – Expliquer que l’interprète doit respecter les principes de condentialité. • Durant l’entrevue : – Regarder l’enfant et sa famille, et non l’interprète. – Observer les membres de la famille pendant les échanges entre eux et l’interprète. – Utiliser un langage simple et éviter le jargon médical. Certains termes médicaux (p. ex., une allergie) n’ont aucun équivalent dans d’autres langues. – Poser des questions simples qui appellent chacune une seule réponse, par exemple : Ressentez­vous de la douleur ? plutôt que : Ressentez­vous de la douleur, de la fatigue ou une perte d’appétit ? – Parler à la personne, et non à l’interprète. Par conséquent, utiliser la deuxième personne, par exemple : Avez­vous mal ? plutôt que : A­t­il mal ? – Éviter d’interrompre le membre de la famille et l’interprète pendant qu’ils discutent.

60

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

• Dans la mesure du possible, pla­ nier les entrevues subséquentes pour que la famille rencontre le même interprète. • Inscrire au dossier le recours aux services d’un interprète professionnel. • Consigner son nom et ses coor­ données au dossier an que d’autres équipes puissent y avoir recours.

Les familles peuvent hésiter à interroger directement des professionnels de la santé ou à entrer en communication avec eux d’une autre façon. Par exemple, les cultures asiatiques considèrent qu’il est irrespectueux de questionner des personnes qui font gure d’autorité. Les membres d’une famille japonaise peuvent attendre en silence plutôt que poser des questions. Ils font conance aux professionnels de la santé et croient que ceux-ci répondront à leurs besoins sans qu’il soit nécessaire de leur demander quoi que ce soit. Les Asiatiques considèrent aussi important d’éviter les critiques. Celles-ci peuvent leur faire perdre la face et leur faire honte, ce qui n’est pas souhaitable. De nombreuses familles considèrent la langue et la bureaucratie comme les plus grandes barrières à l’utilisation des services de soins de santé (Asanin et Wilson, 2008 ; McKeary et Newbold, 2010). Les longs processus d’admission et les temps d’attente sont aussi des obstacles pour les clients. Puisque les membres d’une famille peuvent avoir une faible compréhension de la langue, il faut leur parler lentement et posément, d’une voix douce. De nombreuses personnes peuvent lire et écrire le français mieux qu’elles ne le parlent ou ne le comprennent. De plus, dans des situations anxiogènes, la langue usuelle est généralement utilisée, même par des personnes capables de bien communiquer dans une autre langue dans des circonstances normales. Les formules d’appel et l’utilisation du prénom et du nom de famille varient d’une culture à l’autre, et elles peuvent être une source de confusion. Par exemple, dans les cultures asiatiques, les gens sont d’abord nommés par leur nom de famille, par respect pour celle-ci, et ensuite par leur prénom. Ainsi, les frères et sœurs d’une même famille ont tous le même premier nom. Les Éthiopiens ont un système complexe de dénomination dans

lequel les femmes gardent leur nom de famille après leur mariage et où l’enfant reçoit le nom du grand-père paternel comme nom de famille.

2

Les Autochtones se réservent des périodes de silence pour formuler leurs pensées avant de parler et restent souvent silencieux après avoir écouté les paroles des autres an de bien comprendre ce qui a été dit. L’interruption, l’interpellation et les conclusions hâtives sont perçues comme des comportements immatures.

Communication non verbale L’inrmière doit prendre en compte les techniques de communication verbale et non verbale pour interagir efficacement avec les enfants et les familles de cultures différentes (Purnell, 2013) TABLEAU 2.3. L’espace vital ou la distance à respecter entre les personnes varie d’une culture à l’autre. Par exemple, les hispanophones aiment être près des autres, tandis que les Asiatiques préfèrent garder une certaine distance. Le contact visuel varie également d’une culture à l’autre. Les Nord-Américains regardent généralement les gens droit dans les yeux, mais les personnes d’autres groupes peuvent éviter le contact visuel et être mal à l’aise au cours d’une conversation avec des professionnels de la santé. Par exemple, un client vietnamien peut éviter de regarder directement une inrmière dans les yeux en signe de respect. Les Asiatiques considèrent parfois le contact visuel comme un signe d’hostilité ou d’impolitesse. Certains Autochtones entrent en contact visuel au moment des salutations initiales, mais considèrent un contact visuel continu et fixe comme insultant et irrespectueux. Les gestes peuvent aussi être interprétés de différentes façons. Par exemple, plusieurs Asiatiques considèrent qu’il est irrespectueux de montrer quelqu’un du doigt ou du pied. Les Autochtones considèrent une vigoureuse poignée de main comme un signe d’agression, tandis que bien des gens la voient comme une marque de cordialité. L’expression des émotions varie également selon l’ethnie. Dans certaines cultures (p. ex., les cultures hispanophones ou juives), les gens expriment leurs émotions ouvertement et sont habitués à partager leurs peines et leurs joies avec leur famille et leurs amis. Les peuples nordiques et asiatiques sont plus réservés.

FIGURE 2.9 L’inrmière peut se servir de divers moyens, des documents écrits par exemple, pour communiquer avec la famille.

Comme moyen de communication, les professionnels de la santé posent généralement des questions et utilisent de la documentation, des livrets et, avec les enfants, des poupées et des images. Une telle approche est peu commune dans certaines cultures. Chapitre 2

Inuences socioculturelles sur les soins de santé

61

Pratiques inrmières TABLEAU 2.3

Interagir de façon adaptée à la culture de la famille

STRATÉGIE

ACTIONS

Verbale

• Apprendre les formules d’appel appropriées. • Utiliser un ton de voix positif pour susciter l’intérêt. • Parler lentement, posément et doucement quand les familles ont une mauvaise compréhension de la langue. • Encourager les questions. • Apprendre les mots et les expressions élémentaires dans la langue de la famille, si possible. • Éviter le jargon professionnel. • Expliquer le but des questions posées à la famille, de quelle façon l’information fournie sera utilisée et comment elle peut être utile à leur enfant. • Répéter l’information importante plus d’une fois. • Toujours expliquer la raison ou le but d’un traitement ou d’une prescription. • Utiliser l’information écrite dans la langue de la famille. • Obtenir les services d’un interprète s’il y a un doute quant à la compréhension de l’enfant et de sa famille pendant une rencontre. • Apprendre des familles et des représentants de leur culture comment communiquer de l’information sans créer de malaise. • Prêter attention aux besoins intergénérationnels (p. ex., le besoin de consulter les autres). • Faire preuve de sincérité, d’ouverture et d’honnêteté, et, si cela convient, partager des expériences, des croyances et des pratiques personnelles pour entrer en relation et établir un lien de conance.

Non verbale

• Inviter les membres de la famille à choisir un endroit où s’asseoir ou se tenir debout en les laissant choisir une distance convenable. • Observer leurs interactions avec les autres pour déterminer quels gestes (p. ex., serrer la main) sont acceptables et appropriés. Poser la question en cas de doute. • Éviter de sembler pressée. • Écouter activement. • Recueillir des indices d’un contact visuel approprié. • Apprendre l’utilisation des pauses ou des interruptions appropriées dans diverses cultures. • Demander des explications si la signication non verbale n’est pas claire.

Analyse d’une situation de santé Milena est âgée de 16 ans. Elle est hispanophone originaire de l’Amérique du Sud. Elle est arrivée au Québec avec ses parents vers la fin de l’année scolaire et a fréquenté une classe d’accueil pendant quelques semaines seulement. Elle ne maîtrise pas encore suffisamment la langue française, mais elle arrive à en comprendre quelques mots. Sa famille est catholique et très pratiquante. Milena, accompagnée de ses parents, s’est présentée au service des urgences. Son état général est altéré, et l’adolescente montre des signes de déshydratation. Elle a de la èvre et des brûlures à la miction. Elle est actuellement en observation. L’équipe soignante soupçonne une infection urinaire.

62

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

Jugement clinique L’inrmière explique lentement à Milena qu’il faudra obtenir un échantillon d’urine en utilisant des mots comme cathétérisme, cystographie, etc. C’est à ce moment précis que la situation change. La communication entre la famille et l’équipe soignante est plus difcile en raison de la barrière de la langue. Malgré cela, l’inrmière croit comprendre que les parents de Milena n’approuvent pas ce genre de soins. Elle perçoit surtout de la tension entre l’adolescente et sa mère. Milena pleure et arrive à dire qu’elle se sent seule, rejetée, incomprise et sans soutien de sa famille. Elle explique avec difculté à l’inrmière que ses parents associent cette situation à un comportement sexuel inadéquat. Ses parents croient, à tort, qu’elle leur cache quelque chose.

Mise en œuvre de la démarche de soins

Collecte des données – Évaluation initiale – Analyse et interprétation

SOLUTIONNAIRE

2

1. Nommez au moins trois données à recueillir an de comprendre pourquoi une tension s’est installée dans la famille de Milena. 2. En quoi l’attitude des parents de Milena peut-elle contribuer à augmenter le sentiment de rejet vécu par l’adolescente ? 3. Qu’est-ce qui pourrait vraisemblablement expliquer la méconnaissance des parents au sujet de la situation de leur lle ?

Milena fréquente quelques amies québécoises rencontrées grâce aux activités d’intégration des classes d’accueil. Ses parents sont heureux de ces fréquentations, car cela signie pour eux que leur lle s’intègre bien à l’école et dans ce nouvel environnement. Ils s’inquiètent toutefois de voir que les nouvelles amies de leur lle ne pratiquent pas avec autant de ferveur la religion et ont des perceptions différentes en ce qui a trait à la sexualité.

VU dans ce chapitre

Indépendamment de la barrière linguistique, qu’est-ce qui pourrait expliquer la difculté de compréhension des traitements proposés à Milena ?

4. Comment les fréquentations de Milena peuvent-elles augmenter encore plus les tensions avec sa famille ainsi que son sentiment de rejet ? 5. Pourquoi la compréhension des parents est-elle prioritaire ?

Planication des interventions – Directives inrmières 6. Qu’est-ce qui favoriserait la communication entre les différentes personnes impliquées dans cette situation et la compréhension des parents en lien avec le problème de santé de leur lle ?

Évaluation des résultats – Évaluation en cours d’évolution 7. Qu’est-ce qui vous ferait dire que les parents de Milena ont une meilleure compréhension des soins diagnostiques et thérapeutiques prodigués à leur lle ?

VU dans ce chapitre

Mise à part la pratique de la langue, quel est le principal avantage pour Milena de socialiser avec des jeunes lles de sa culture d’adoption ?

Après quelques heures en observation, Milena peut quitter le service des urgences.

8. Qu’est-ce qui vous permettrait de croire que Milena ressentira moins de rejet et plus de compréhension de la part de sa famille au sujet de sa situation de santé ?

Chapitre 2

Inuences socioculturelles sur les soins de santé

63

Chapitre

3

Croissance, développement et promotion de la santé Écrit par : Quinn Franklin, MS Rebecca A. Monroe, MSN, RN, CPNP Cynthia A. Prows, MSN, CNS, FAAN Cheryl C. Rodgers, PhD, RN, CPNP, CPON Barbara J. Wheeler, RN, BN, MN, IBCLC Adapté par : Dalila Benhaberou-Brun, B. Sc. inf., B. Sc., M. Sc.

MOTS CLÉS

OBJECTIFS

Alimentation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79 Apprentissage de la continence . . . . . 98 Besoin de sommeil . . . . . . . . . . . . . . . . . . 82 Blessures et traumas . . . . . . . . . . . . . . . . 75 Comportement antisocial . . . . . . . . . . . . 118 Croissance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66 Développement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66 Gestion du stress . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107 Importance du jeu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72 Prévention . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75 Promotion de l’activité physique . . . . 94 Promotion de la santé . . . . . . . . . . . . . . . 74 Promotion de saines habitudes de vie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78 Santé dentaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 82 Trouble du langage . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71

Après avoir étudié ce chapitre, vous devriez être en mesure :

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Annexes Web À retenir Carte conceptuelle Solutionnaires Tableaux Web

Guide d’études – SA02

64

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

• de déterminer les facteurs associés à la croissance et au développement de l’enfant ; • de décrire les principes généraux du développement physique et psychologique selon l’âge de l’enfant ; • de décrire les principaux changements physiques par tranche d’âge ; • d’expliquer les stades du développement psychosocial de l’enfant par tranche d’âge ; • d’expliquer les stades du développement cognitif de l’enfant par tranche d’âge ; • de décrire le développement du langage et du concept de soi ; • d’expliquer les interventions infirmières favorisant le développement optimal de l’enfant ; • de fournir aux parents de l’information sur la croissance et le développement de leur enfant afin de favoriser l’exercice optimal de leur rôle ; • de promouvoir de saines habitudes de vie adaptées à l’âge de l’enfant et au contexte familial ; • d’énumérer les principes de base pour satisfaire les besoins nutritionnels de l’enfant, par tranche d’âge ; • de déterminer les besoins de sommeil et les effets de celui-ci sur la santé ; • de nommer les principales recommandations pour favoriser la pratique de l’activité physique chez l’enfant ; • d’énoncer les mesures efficaces de prévention en santé buccodentaire ; • de déterminer les mesures efficaces pour prévenir les blessures et les traumas chez les enfants, par tranche d’âge ; • de déterminer des moyens efficaces pour aider l’enfant et sa famille à gérer le stress.

Carte conceptuelle

Cette carte conceptuelle illustre schématiquement les principaux concepts décrits dans le présent chapitre. Sa lecture vous permettra d’avoir une vue d’ensemble des notions qui y sont présentées.

3 varient selon

inuencent

comprennent

expliqués par

sont

incluent

Croissance et développement

partagés en

incluent

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implique

Chapitre 3

Croissance, développement et promotion de la santé

65

3.1

Croissance et développement : dénitions et concepts

La croissance est synonyme de changement quantitatif, tandis que le développement correspond au changement qualitatif. La croissance, le développement, la maturation et la différenciation sont des processus interreliés, simultanés et continus, assujettis à une succession de facteurs endocriniens, génétiques, constitutionnels, nutritionnels, sociaux et environnementaux (Seidel, Ball, Dains et al., 2011). Ces quatre concepts sont dénis ci-dessous. La croissance est l’augmentation du nombre et de la taille des cellules ; il en résulte une augmentation de la taille et du poids de tous les éléments du corps, ou de certains d’entre eux. Ces changements quantitatifs peuvent être mesurés et normalisés. Le développement est un processus continu d’évolution caractérisé par : 1. des changements et des renforcements graduels ; 2. une progression d’un niveau inférieur à un niveau supérieur de complexité ; 3. l’émergence et le renforcement des capacités d’une personne par l’intermédiaire de la croissance, de la maturation et de l’apprentissage. La maturation est l’accroissement de la compétence et de l’adaptabilité ; le terme maturation désigne en règle générale un changement qualitatif. Ce changement dans la complexité d’une structure fait en sorte que celle-ci peut commencer à fonctionner à un niveau supérieur. La différenciation est le processus selon lequel les cellules et les structures souches sont assujetties à des modications systématiques qui leur permettront d’acquérir des propriétés chimiques et physiques caractéristiques précises.

Soins inrmiers CROISSANCE DE L’ENFANT

Chaque enfant grandit à son propre rythme, et l’inrmière doit considérer un ensemble de facteurs (héréditaires, nutritionnels, etc.) pour évaluer si sa croissance est adéquate. La mesure du poids et de la taille ainsi que de la circonférence crânienne – jusque vers trois ans – constituent des éléments fondamentaux pour vérier l’état de santé globale de l’enfant. En règle générale, les spécialistes traitent la croissance de l’enfant en fonction de groupes d’âge approximatifs ou des caractéristiques propres à

66

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

des groupes d’âge particuliers (Société canadienne de pédiatrie [SCP], 2016k). Par exemple, lorsqu’un enfant connaît une poussée de croissance sur le plan de la motricité globale, le développement du langage, de la motricité ne ou des compétences sociales peut être ralenti. La croissance rapide qui précède et qui suit la naissance ralentit graduellement durant le début de l’enfance. La croissance est relativement lente par la suite, puis elle augmente de façon nette au début de l’adolescence et elle s’arrête au début de l’âge adulte. L’enfance est ainsi divisée en quatre périodes principales qui sont elles-mêmes subdivisées en sous-périodes à l’intérieur desquelles l’enfant est désigné par des termes particuliers faisant référence à son âge TABLEAU 3.1. Le processus de croissance est marqué par des périodes de durée limitée durant lesquelles l’organisme interagit de façon spécique avec un environnement particulier. Les périodes qualiées de critiques, de sensibles, de précaires et d’optimales sont celles durant lesquelles un organisme est particulièrement sensible aux inuences positives ou négatives extérieures. Ainsi, un enfant en bas âge qui vit dans un milieu familial précaire peut subir des carences nutritionnelles (Kakinami, Gauvin, Séguin et al., 2014). Cette notion de périodes sensibles s’applique au développement psychologique et à la capacité d’apprentissage. Les périodes sensibles inuenceront la personnalité en construction ; par exemple, la première année de vie constitue une période particulièrement sensible pour l’établissement du lien d’attachement parent-enfant. La croissance de l’enfant varie selon l’âge, avec des périodes de poussées (durée de 24 heures) plus ou moins importantes et des phases de latence. Des différences ont été notées entre les sexes à cet égard : les lles grandissent en taille durant la semaine au cours de laquelle elles prennent du poids, alors que les garçons grandissent en taille la semaine suivant une importante prise de poids. La sécrétion pulsatile de l’hormone de croissance, dont les modalités sont propres à chaque sexe, coordonnerait la répartition des tissus, le gain pondéral et la croissance linéaire.

3.1.1

Facteurs inuents

La croissance physique et le développement social, affectif et cognitif de l’enfant sont de puissants facteurs qui inuencent directement l’espérance de vie et la santé de l’adulte en devenir (Organisation mondiale de la Santé, 2009). Les facteurs héréditaires, génétiques, neuroendocriniens et nutritionnels, la maladie, le stress de l’enfance, le milieu socioéconomique et culturel, les habitudes de vie ainsi que le réseau social entourant l’enfant sont autant d’éléments à prendre en compte.

TABLEAU 3.1

Développement de l’enfant selon les périodes d’âge

PÉRIODE

DESCRIPTION

Nouveau-né et nourrisson : de la naissance à 12 mois • Nouveau-né : de la naissance à 28 jours

• Adaptation physique du nouveau-né à la vie extra-utérine

• Nourrisson : de 28 jours à 12 mois

• Développement moteur, cognitif et social rapide

3

• Acquisition de la conance de base envers son entourage Début de l’enfance : de 1 à 6 ans • Trottineur : de 1 à 3 ans

• Début de la marche

• Enfant d’âge préscolaire : de 3 à 6 ans

• Activité de découverte intense • Développement moteur et physique • Profond développement de la personnalité • Perfectionnement du langage et des rapports sociaux • Apprentissage des normes de rôle, maîtrise de soi, développement de leur concept de soi

Milieu de l’enfance : de 6 à 12 ans • Enfant d’âge scolaire : de 6 à 12 ans

• Importance des relations avec ses pairs • Développement physique, mental et social soutenu • Coopération sociale et développement moral • Rôle critique dans le développement du concept de soi

Fin de l’enfance : de 12 à 18 ans (de la puberté à l’âge adulte) • Adolescent : de 12 à 18 ans

• Maturation biologique et de la personnalité • Bouleversement physique et émotif • Redénition du concept de soi : une identité personnelle plutôt qu’une identité de groupe CE QU’IL FAUT RETENIR

Facteurs héréditaires et génétiques Les facteurs héréditaires ont une inuence marquée sur le développement. Le sexe de l’enfant xe aussi bien son prol de croissance que le comportement adopté à son endroit. Le sexe et les autres déterminants héréditaires ont un effet sur le résultat ultime de la croissance et sur son rythme d’évolution. Il existe une étroite corrélation entre les parents et l’enfant quant à la taille, au poids et à la vitesse de croissance. La plupart des caractéristiques physiques, comme la forme et le prol des traits distinctifs, la constitution du corps et les particularités physiques, sont héréditaires et peuvent inuer sur la croissance de l’enfant et sur son mode d’interaction avec l’environnement. Les particularités qui caractérisent l’état de santé et la vigueur de l’enfant peuvent également être attribuées à des facteurs héréditaires. Un trouble physique ou mental héréditaire aura pour effet de perturber ou de modier la croissance et les interactions physiques ou affectives de l’enfant 11 .

Certaines perturbations se produisent au cours de l’embryogenèse. Elles sont provoquées par une anomalie ou une mutation génétique durant la grossesse et causent des conditions telles que : • la trisomie 21 ; • la drépanocytose ; • l’hydrocéphalie ;

La plupart des caractères physiques sont héréditaires et peuvent inuer sur la croissance de l’enfant et sur son mode d’interaction avec l’environnement.

• le pied bot ;

15

• la fente palatine ;

La brose kystique est abordée dans le chapitre 15, Troubles liés au système respiratoire.

• le syndrome de Down ; • la mucoviscidose (ou brose kystique)

3.1.2

15 .

Croissance et développement physique

La croissance physique est la caractéristique la plus remarquable durant l’enfance et l’adolescence FIGURE 3.1. La croissance de l’enfant entraîne des modications connexes à la structure et à la fonction des organes internes et des tissus, qui traduisent l’acquisition progressive de la maturité physiologique. Chaque élément a son propre

Chapitre 3

11 L’interférence de certaines maladies invalidantes sur la croissance et le bienêtre de l’enfant est abordée dans le chapitre 11, Déciences intellectuelles et déciences sensorielles.

Croissance, développement et promotion de la santé

67

rythme de croissance, parfois en relation directe avec les changements de taille de l’enfant. La croissance des muscles squelettiques se traduit dans l’ensemble de la croissance corporelle, tandis que la maturation des différents systèmes (p. ex., neurologique, immunitaire, reproducteur) se fait à un rythme qui leur est propre FIGURE 3.2. À la suite d’une maladie grave ou d’une malnutrition aiguë, le retour à la santé ou à une alimentaFIGURE 3.1 La croissance tion adéquate entraîne habituellephysique est la caractéristique la plus ment une accélération spectaculaire remarquable durant l’enfance. de la vitesse de croissance, qui se poursuit en général jusqu’à ce que l’enfant retrouve son rythme de croissance propre.

Axes de croissance 23 Les fractures de stress et les microtraumas sont abordés dans le chapitre 23, Troubles liés aux systèmes musculosquelettique et articulaire.

La croissance et le développement évoluent selon deux axes ou gradients précis apparentés qui traduisent le développement physique et la maturation des fonctions neuromusculaires. Le premier, l’axe céphalocaudal, est celui qui va de la tête aux pieds. Avant la naissance, l’extrémité supérieure de l’organisme, volumineuse et complexe, se développe en premier, tandis que l’extrémité inférieure,

petite et non complexe, prend forme plus tard. C’est pourquoi l’enfant s’assoit avant de se tenir debout, utilise ses yeux avant d’utiliser ses mains et acquiert le contrôle des mains avant celui des pieds. Le second, l’axe proximodistal, est celui qui s’étend de la médiane à la périphérie ; il se développe par la suite. Le développement embryonnaire des bourgeons des membres, qui précède l’apparition des rudiments de doigts et d’orteils, illustre bien l’importance de cet axe. L’enfant acquiert le contrôle des épaules avant celui des mains, et il utilise la main comme un tout avant de se servir des doigts ; le système nerveux central se développe plus rapidement que le système nerveux périphérique. Ces tendances sont bilatérales et semblent symétriques, puisque le développement progresse selon la même direction et au même rythme de chaque côté. Pour certaines fonctions neurologiques, cette symétrie n’est qu’externe en raison d’une différenciation unilatérale de la fonction au stade initial du développement postnatal. Par exemple, à cinq ans environ, l’enfant est porté à utiliser une main plutôt que l’autre, même s’il utilisait indépendamment l’une ou l’autre de ses mains auparavant. La latéralité, soit le fait d’être gaucher ou droitier, apparaît environ à cet âge.

Maturation osseuse Les déterminants de l’âge osseux et l’état de la dentition servent d’indicateurs de développement. Le plus précis est l’âge squelettique ou osseux, c’est-à-dire le degré de maturation osseuse déterminé à l’aide de radiographies. L’âge squelettique semble être plus étroitement corrélé avec les autres indicateurs de la maturité physiologique, comme l’apparition des premières règles, qu’avec l’âge chronologique ou la taille. À la naissance, il y a environ 350 os ; à l’âge adulte, le squelette n’en compte plus que 206 en raison du processus d’ossication. L’inrmière doit être consciente du fait qu’il est parfois très difcile de repérer les fractures qui surviennent au cartilage de croissance, et celles-ci peuvent avoir une inuence notable sur la suite de la croissance et du développement (Mirtz, Chandler et Eyers, 2011) 23 .

Rôle des hormones

FIGURE 3.2 Taux de croissance de différents tissus et organes – Tissus lymphoïdes : thymus, ganglions lymphatiques et masses lymphatiques intestinales. Tissus nerveux : cerveau, dure-mère, moelle épinière, appareil optique et dimensions de la tête. Croissance générale : ensemble du corps, dimensions externes, et appareils respiratoire, digestif, rénal, circulatoire et musculosquelettique. Appareil génital : testicules, épididymes, prostate et vésicule séminale chez l’homme ; ovaires, trompes et utérus chez la femme.

68

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

L’axe hypothalamo-hypophysaire stimule la production de nombreuses hormones, dont l’hormone de croissance (GH), les hormones thyroïdiennes (T3 et T4) et les hormones sexuelles (androgènes, œstrogènes et progestérone), qui inuent, entre autres, sur la croissance osseuse. Il semblerait que chacune des hormones exerce son inuence à une période différente de l’enfance. Ainsi, au cours du début de l’enfance, la croissance osseuse est davantage stimulée par la GH et les hormones thyroïdiennes, alors qu’à l’adolescence, la libération des hormones sexuelles mâles et femelles entraîne une poussée de croissance impressionnante.

Le système nerveux se développe plus rapidement avant la naissance qu’après. Ce développement se prolonge jusqu’à l’âge de 1 an environ. Certains réexes primitifs disparaissent : vers 6 mois, le réexe de Moro, ou réexe d’embrassement ; entre 2 et 4 mois, le réexe de redressement et de marche automatique, et, enn, entre 12 et 24 mois, le signe de Babinski, ou réexe cutané plantaire. La disparition de ces réexes permet notamment l’acquisition de l’équilibre et l’apprentissage de la marche.

Maturation des tissus lymphoïdes La croissance des tissus lymphoïdes, des ganglions lymphatiques, du thymus, de la rate, des amygdales et des végétations adénoïdes présente une évolution particulière. Ces minuscules tissus atteignent leur taille maximale lorsque l’enfant a environ 10 ou 12 ans, et régressent par la suite. Ces tissus jouent un rôle primordial dans le système immunitaire en assurant une protection grâce aux cellules immunitaires (p. ex., les lymphocytes T et B) FIGURE 3.2.

Thermorégulation et métabolisme La température corporelle, indicateur de l’activité métabolique, diminue tout au long du développement. Pour chaque kilogramme de poids corporel, le jeune enfant produit plus de chaleur que l’adolescent. Même si leur mécanisme de thermorégulation s’améliore, les nourrissons et les jeunes enfants demeurent très sensibles aux uctuations de température. La température corporelle varie selon la température ambiante, et elle augmente lorsque l’enfant est très vêtu, dépense de l’énergie, pleure ou vit un stress affectif. Il risque alors de souffrir de hausses de température anormalement élevées. Les infections peuvent mener à une température plus élevée et donner lieu à une augmentation de température plus rapide chez les nourrissons et les jeunes enfants que chez les enfants plus âgés. L’évaluation de l’activité métabolique se fait grâce au métabolisme au repos (métabolisme basal [MB]). Cette donnée est utile lorsqu’il faut assurer les besoins nutritionnels (apport énergétique) d’un enfant ou évaluer un retard de croissance (SCP, 2009).

3.1.3

Développement psychologique

Le développement de la personnalité et l’acquisition de compétences cognitives évoluent sensiblement de la même façon que la croissance biologique, c’est-à-dire que les nouveaux accomplissements découlent des compétences déjà maîtrisées. De nombreux aspects dépendent de la croissance physique et de la maturation.

Fondements théoriques du développement de la personnalité Dans le développement global de l’enfant, la personnalité doit être considérée sur le même plan que le développement physique. Il est impossible de dissocier les deux aspects.

Développement psychosexuel (Freud)

clinique

Jugement

Maturation neurologique

Walter, âgé de quatre mois, est vu à la clinique de vaccination. Il recevra le vaccin combiné contre la diphtérie, la coqueluche, le tétanos, la poliomyélite et les infections graves à Haemophilus inuenzae de type B (DCaT-Polio-Hib) et le vaccin contre le pneumocoque. Tout en discutant avec la mère de Walter, vous observez le développement du garçon. Quelle observation vous permettrait de conrmer que le développement de Walter est adéquat selon l’axe céphalocaudal ?

Selon Sigmund Freud (1905/2010), médecin autrichien et père de la psychanalyse, le comportement humain a) Il contrôle ses mains, mais ne maîtrise pas résulte de l’action de forces psyencore les mouvements des doigts. chodynamiques, une énergie b) Il peut commencer à ramper et explore avec psychique répartie selon trois ses yeux plutôt qu’avec ses mains. instances de la personnalité : le ça, le moi et le surmoi. Le ça, ou c) Sa tête est solide et en équilibre lorsqu’il est assis, et son dos n’est pas arrondi. l’inconscient, est l’instance innée ; elle est animée par les d) Le tronc penche vers l’avant en position assise pulsions. Le ça répond au prinet sa tête reste bien droite. cipe du plaisir de satisfaction immédiate des besoins, que l’objet ou l’action permette ou non de l’obtenir. Le CONSEIL CLINIQUE moi, ou l’esprit conscient, répond au principe de réalité. Il agit comme soi conscient ou dominant, et La èvre provoque une il permet d’opter pour la façon réaliste de satisfaire augmentation du métaboses instincts tout en bloquant le processus de pensée lisme basal et une déshyirrationnelle propre au ça. Le surmoi, c’est-à-dire la dratation ; il faut donc conscience, fonctionne comme arbitre de la morale augmenter les apports et représente l’idéal. Il s’agit du mécanisme qui nutritionnel et liquidien. empêche l’humain d’exprimer des instincts indésirables qui pourraient menacer l’ordre social. Selon Freud, les instincts sexuels jouent un rôle primordial dans le développement de la personnalité. Durant l’enfance, certaines parties du corps ont une importance psychologique particulière comme sources de nouveaux plaisirs, chacune variant au cours des différents stades du développement. Les différents stades de développements sont le stade oral (de la naissance à 1 an), le stade anal (de 1 à 3 ans), le stade phallique (de 3 à 6 ans), le stade de latence (de 6 à 12 ans) et le stade génital (de 12 à 18 ans).

éactivation des connaissances En plus de l’âge de la personne, nommez cinq facteurs inuant sur la température corporelle.

Développement psychosocial (Erikson) La théorie d’Erik Erikson (1963) sur le développement de la personnalité est l’une des plus reconnues. Même si elle repose sur la théorie freudienne, elle est qualiée de théorie du développement psychosocial ; elle met l’accent sur une saine personnalité plutôt que sur une approche pathologique. Erikson utilise également les notions biologiques de périodes critiques et d’épigenèse en décrivant les conits clés ou les problèmes de base que chaque personne s’efforce de résoudre durant les périodes critiques du développement de la personnalité. La résolution ou la maîtrise de chacun de ces conits clés dépend du conit clé précédent. Chapitre 3

Épigenèse : Théorie selon laquelle l’embryon d’un être vivant se développe par multiplication et différenciation cellulaire progressive, et non à partir d’éléments préformés dans l’œuf.

Croissance, développement et promotion de la santé

69

3

CE QU’IL FAUT RETENIR

L’évolution des habiletés cognitives détermine le développement moral, le développement spirituel ainsi que le développement du langage.

Chaque stade du développement psychosocial comporte deux volets, soit les aspects favorables et défavorables du conit de base, et le passage au stade suivant, qui dépend de la résolution de ce conit. Puisqu’il est impossible de résoudre totalement un conit de base, celui-ci risque de resurgir durant la vie. Chaque situation ramène le conit sous une nouvelle forme. Par exemple, lorsque l’enfant qui a déjà acquis un sentiment de conance fait face à une nouvelle situation (p. ex., l’hospitalisation), il doit de nouveau apprendre à avoir conance en ceux et celles qui lui prodiguent les soins an de maîtriser la situation. Erikson détermine huit stades dans sa théorie continue du développement de la personnalité. Les cinq premiers portent sur l’enfance : 1. Espoir : conance ou méance (0-18 mois) ; 2. Volonté : autonomie, ou honte et doute (18 mois-3 ans) ; 3. Conviction : initiative ou culpabilité (3-6 ans) ; 4. Compétence : travail ou infériorité (6-12 ans) ; 5. Fidélité : identité ou confusion (12-20 ans).

Fondements théoriques du développement mental La cognition est le processus par lequel l’humain, durant son développement, acquiert des renseignements sur son entourage et sur les objets qu’il contient. L’enfant naît avec une aptitude au développement intellectuel, mais il doit exploiter cette aptitude par des interactions avec son entourage. En assimilant l’information par ses sens, en la traitant et en agissant sur elle, il arrive à comprendre les relations entre les objets, et entre lui-même et son entourage. Le développement cognitif mène au raisonnement abstrait, à la formation d’idées logiques, et à l’organisation des fonctions ou des performances intellectuelles en congurations plus évoluées. L’évolution des habiletés cognitives détermine le développement moral, le développement spirituel ainsi que le développement du langage. Plusieurs grandes théories ont été développées au cours du dernier siècle.

Développement cognitif (Piaget)

Le Guide d’intervention pour soutenir les pratiques parentales, publié en 2009 par le ministère de la Santé et des Services sociaux, offre des ches d’activités pour développer notamment les capacités langagières de l’enfant. Il peut être consulté au www.msss.gouv.qc.ca.

70

Partie 1

Selon Jean Piaget (1966), l’intelligence permet aux humains de s’adapter à leur entourage pour accroître leur probabilité de survie, et c’est par leur comportement qu’ils arrivent à établir et à maintenir un équilibre avec cet entourage. Quatre stades de l’évolution du développement cognitif sont détaillés dans les sections correspondantes de ce chapitre : 1. Stade sensorimoteur (0-2 ans) ; 2. Stade de la pensée préopératoire (2-7 ans) ; 3. Stade des opérations concrètes (7-11 ans) ; 4. Stade des opérations formelles (11-16 ans).

Inrmière, enfant et famille

Chaque stade découle des acquis du stade précédent et repose sur eux selon un processus ordonné et continu.

Développement moral (Kohlberg) Chez l’enfant, le raisonnement moral s’acquiert également selon une séquence développementale. Le développement moral, tel que le décrit Lawrence Kohlberg (1968), repose sur la théorie du développement cognitif et comporte trois niveaux principaux : 1. Préconventionnel, soit avant que l’enfant ne prenne conscience des conventions sociales (de 2 à 7 ans) ; 2. Conventionnel, dans lequel c’est le groupe, et non l’enfant, qui détient le pouvoir (de 7 à 15 ans) ; 3. Postconventionnel, qui fait que la personne doit mettre en équilibre ses propres principes avec les principes sociaux (plus de 15 ans).

Développement spirituel (Fowler) Les convictions spirituelles sont étroitement liées à la partie morale et éthique du concept de soi de l’enfant et, à ce titre, elles doivent faire partie intégrante de l’évaluation des besoins essentiels de celui-ci. Tout comme l’adulte, l’enfant a besoin de donner un sens à son existence, d’avoir un but et des aspirations dans la vie. Plus encore, le besoin de confession et de pardon est omniprésent chez l’enfant, même chez le très jeune enfant. Au-delà de l’aspect religieux, c’est-à-dire d’un ensemble de convictions et de pratiques établies, la spiritualité a un effet sur tous les éléments de l’être : l’état psychique, le corps et l’esprit. James W. Fowler (1981) décrit le développement de la foi en six stades, dont quatre sont étroitement liés au développement cognitif et psychosocial durant l’enfance : 1. Stade 0 : foi indifférenciée (0-2 ans) ; 2. Stade 1 : foi intuitive projective (2-6 ans) ; 3. Stade 2 : foi mythique littérale (6 ansadolescence) ; 4. Stade 3 : foi synthétique conventionnelle (à partir de l’adolescence).

Développement du langage Le rythme de développement du langage varie d’un enfant à l’autre, et il est en corrélation directe avec la compétence neurologique et le développement cognitif. Graduellement, l’enfant apprend à s’exprimer verbalement par des gazouillis, des babillages, des mots et de courtes phrases (Ferland, 2014). Le langage verbal comprend deux aspects : la compréhension et l’expression. Dans les 2 premières années de vie, l’enfant comprend plus qu’il ne parle, et il développe peu à peu son vocabulaire. Vers l’âge de 2 ans, la construction de phrases courtes fait

partie du développement normal ; l’enfant devrait utiliser environ 50 mots différents (BergeronGaudin, 2014). La période du développement du langage la plus déterminante se situe entre 2 et 4 ans. Chaque enfant apprend naturellement dans un environnement sécurisant où l’interaction verbale est encouragée. Le mécanisme et la capacité de développement des compétences langagières sont innés chez l’enfant, mais ils doivent être stimulés ENCADRÉ 3.1 . Une relation a été établie entre les premières capacités langagières et la maîtrise ultérieure de la lec ture, la conance en soi et la réussite scolaire (Justice, Mashburn et Petscher, 2013). À tous les stades de développement du langage, l’étendue du vocabulaire de compréhension de l’enfant est supérieure à celle de son vocabulaire d’expression, ce qui traduit un processus continu de modifications qui suppose l’acquisition de nouveaux mots ainsi que l’approfondissement du sens des mots déjà appris 7 . Les habiletés de l’enfant progressent plus rapidement et plus facilement lorsque les interactions éducatives sont sensibles, réceptives, patientes et non punitives. Il est important de procurer à chaque enfant des expériences d’apprentissage positives. Les caractéristiques de l’enfant (p. ex., le rang de naissance) jouent aussi un rôle important dans la qualité de ses expériences d’apprentissage du langage 1 . Ainsi, l’aîné de la famille possède, en moyenne, un vocabulaire plus riche que ses frères et sœurs (Rvachew, 2010). Les troubles du langage peuvent avoir des répercussions considérables sur le développement global de l’enfant. Leur dépistage est un aspect incontournable dans l’évaluation faite par l’inrmière ENCADRÉ 3.1.

Développement du concept de soi L’expression concept de soi regroupe toutes les notions, les croyances et les convictions qui constituent la connaissance de soi d’une personne et qui ont une incidence sur les relations que cette personne entretient avec autrui. Le concept de soi n’est pas présent à la naissance. Il se développe graduellement comme résultat des expériences personnelles, des relations avec les êtres chers et de l’interaction avec le monde. Il est décrit comme la composante cognitive du soi, alors que l’estime de soi en serait la composante affective. L’image corporelle, quant à elle, est une composante essentielle du concept de soi.

Image corporelle L’image corporelle renvoie à la conception qu’a une personne de son propre corps et à l’attitude

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 3.1

Développement des habiletés langagières

L’inrmière peut favoriser la stimulation du langage de l’enfant en encourageant le parent à : • utiliser des mots simples en jouant ; • offrir des activités éducatives diversiées ; • faire de courtes lectures dans des livres pour enfants : décrire les images, répéter

lentement les mots, encourager l’enfant à les dire à son tour, lui poser des questions ; • montrer du doigt les objets de l’environnement en les nommant clairement, en répétant lentement le mot, en le prononçant bien ; • féliciter l’enfant lorsqu’il parle.

Source : Adapté de Doré et Le Hénaff (2017).

qu’elle a par rapport à lui. Elle réfère à trois aspects : 1. Physiologique (perception de ses propres caractéristiques physiques) ; 2. Psychologique (valeurs et attitudes qu’a une personne relativement à son corps, à ses habiletés et à ses aspirations) ;

7 Les troubles de langage de l’enfant d’âge préscolaire sont abordés dans le chapitre 7, Problèmes de santé du trottineur et de l’enfant d’âge préscolaire.

3. Social (concept de soi dans le rapport avec les autres). Les trois aspects sont interdépendants. L’image corporelle est un phénomène complexe qui évolue au cours de la croissance et du développement. Le rôle que joue une caractéristique, un défaut ou une maladie sur l’image corporelle de l’enfant dépend des attitudes et du comportement des personnes qui l’entourent. Les personnes chères à l’enfant contribuent le plus à façonner de façon permanente l’image que celui-ci a de son corps. Les qualicatifs utilisés pour désigner l’enfant font partie intégrante de l’image qu’il a de lui-même.

1 L’inuence des rangs de naissance sur le déve­ loppement de l’enfant est abordée dans le chapitre 1, Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté.

Estime de soi L’estime de soi réfère à la valeur accordée à soimême. Elle résulte de la perception de la conance en soi, un sentiment d’être accepté et aimé, et elle est modulée par les parents et l’environnement social (Laporte et Sévigny, 2015). Plus l’enfant acquiert des compétences et établit des liens signicatifs, plus il améliore son estime de soi. Toute diminution de l’estime de soi n’est que temporaire, pourvu que personne ne s’acharne à abaisser l’enfant, à lui faire sentir qu’il a peu de valeur. Les facteurs qui exercent une inuence sur l’estime qu’a un enfant de lui-même sont : 1) le tempérament et la personnalité de l’enfant ; 2) les habiletés et les occasions qu’a l’enfant d’exécuter des tâches développementales adaptées à son âge ; 3) le degré d’importance des interactions entre l’enfant et les personnes de son entourage ; 4) les rôles sociaux acceptés par l’enfant et les attentes qui accompagnent ces rôles. Selon l’âge de l’enfant, il est possible d’évaluer s’il a ou non une bonne estime de lui-même TABLEAU 3.2. Chapitre 3

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les troubles de langage peuvent avoir des répercussions considérables sur le développement global de l’enfant. Leur dépistage est un aspect incontournable dans l’évaluation faite par l’inrmière.

Croissance, développement et promotion de la santé

71

3

TABLEAU 3.2

Manifestations de l’estime de soi

PÉRIODE

CRITÈRES

Naissance et début de l’enfance (entre 0 et 6 ans)

• Être bien dans son corps. • Avoir le sentiment profond d’être aimable. • Avoir la conviction d’être capable. • Être er d’être un garçon ou être ère d’être une lle. • Être à l’aise avec les autres. • Espérer et croire que ses besoins seront comblés et que ses désirs seront, sinon satisfaits, du moins reconnus dans un avenir rapproché.

Milieu de l’enfance (entre 6 et 12 ans)

• Savoir se respecter et s’apprécier avec ses forces et ses faiblesses. • Savoir assumer ses responsabilités. • S’afrmer. • Savoir répondre à ses propres besoins. • Avoir des buts et faire ce qu’il faut pour les atteindre. • Avoir de la considération pour les autres.

Adolescence (entre 12 et 18 ans)

• Savoir assumer ses responsabilités ainsi que les conséquences de ses actes. • S’afrmer et être autonome. • Savoir répondre à ses propres besoins en respectant les règles en vigueur dans la famille, le groupe et le milieu scolaire. • Avoir des buts en se projetant dans l’avenir. • Avoir de la considération pour les autres tout en trouvant sa place dans sa famille, son groupe d’amis et son école.

Sources : Adapté de Duclos (2008) ; Laporte et Sévigny (2015).

3.1.4

Rôle et fonctions du jeu dans le développement

Par le jeu, moyen d’expression universel, l’enfant assimile ce que personne ne peut lui enseigner. Il apprend à connaître le monde qui l’entoure et la façon de composer avec cet environnement d’objets, de temps, d’espace, de structure et de personnes (Ferland, 2009). Il apprend à fonctionner dans cet environnement : ce qu’il peut faire, comment il se situe par rapport aux événements et aux situations, et comment il s’adapte aux exigences de la société à son endroit. L’importance du jeu ne doit pas être sousFIGURE 3.3 Le jeu a un effet estimée ; il tient rôle de travail pour l’enfant. En jouant, l’enfant répète sans cesse thérapeutique à tous les âges ; il permet les processus complexes et stressants de se défaire du stress et de la tension d’apprentissage de la dynamique de la causée par l’environnement. vie, de communication et d’établissement de relations avec autrui FIGURE 3.3 et TABLEAU 3.3. Annexe 3.1W : Les types de jeux dans le développement social de l’enfant et la sécurité.

72

Partie 1

Les enfants de toutes les cultures s’adonnent à des jeux, seuls ou avec d’autres . Les enfants commencent très tôt à se livrer seuls à des jeux,

Inrmière, enfant et famille

lesquels consistent en des activités répétées, avant de passer plus tard à des jeux plus compliqués, comme la résolution d’énigmes ou des jeux vidéo qui mettent à l’épreuve leurs compétences. Les nourrissons prennent part à des jeux d’imitation simples, comme des jeux de mains et des jeux de cache-cache. Les trottineurs et les enfants d’âge préscolaire apprennent et apprécient les jeux formels, qui commencent par un jeu autonome symbolique, comme les jeux de rimes, ou des jeux de sons et de mouvements. Les enfants d’âge préscolaire n’aiment pas perdre ; ils peuvent vouloir changer les règles, demander des exceptions ou tricher pour se sortir d’une impasse. Les enfants d’âge scolaire et les adolescents aiment bien les jeux de compétition, dont les jeux de cartes, le jeu de dames ou les échecs, les jeux de société et les jeux vidéo. Ainsi, l’adolescent conserve un intérêt pour l’activité ludique propre à son âge. Ferland (2009) rapporte quatre catégories de jeux qui intéressent particulièrement l’adolescent : 1) les jeux de vertige : dé des lois de la gravité ; 2) les déguisements : pour jouer des rôles ; 3) les jeux de hasard : jeux de loterie ; 4) les jeux de compétition : face à des adversaires (sports) ou à des machines (jeux vidéo).

TABLEAU 3.3

Rôle et fonctions du jeu dans le développement

Sensoriel et moteur

Cognitif

Social et moral

Créativité

Concept de soi

• Principale forme d’amusement chez le nourrisson

• Couleurs, formes, grosseurs, textures

• Rapports sociaux

• Expériences (peinture, pâte à modeler)

• Façonnement de l’identité

• Imagination (dessin)

• Exploration de son corps

• Activités en groupe

• Distinct de sa mère

• Écoute des propos d’autrui

• Connaissance de soi

• Jeu fondé sur l’activité physique nécessaire au développement des muscles • Élimination de l’excédent d’énergie • Exploration du monde physique alentour • Stimulation tactile, auditive, visuelle et kinesthésique • Mouvements corporels et exploration dans l’espace • Activités complexes avec bonne coordination

• Signication des nombres • Lien entre les mots et les objets

• Résolution des problèmes • Concessions avec enfants du même âge • Fonctions sociales

• Situation dans le monde

• Sens des concepts abstraits

• Comportement et conduite approuvés

• Rapports spatiaux (haut, bas, dessous ou dessus)

• Maîtrise et réglage du comportement

• Valeurs morales et éthiques

• Connaissance de ses propres habiletés

• Résolution de problèmes • Élargissement des connaissances • Sens du plaisir • Compétences linguistiques • Intégration des nouvelles perceptions et des relations avec l’entourage • Compréhension du monde • Distinction entre imaginaire et réel

• Respect des codes de comportement (équité, honnêteté, maîtrise de soi et respect de l’autre)

3

• Comparaison de ses habiletés à celles des autres

• Respect des normes établies au sein du groupe

• Vérication des habiletés par rapport à autrui

• Distinction entre bien et mal

• Fonction sociale sur le plan sexuel

• Normes sociales

• Types de comportement et de conduite approuvés

• Responsabilité de ses actions • Essais / erreurs • Jeux de rôles

Soins inrmiers CROISSANCE ET DÉVELOPPEMENT

Surveiller les courbes de croissance La surveillance de la croissance et la promotion d’une croissance optimale sont des éléments essentiels des soins de santé primaires des nourrissons, des enfants et des adolescents A . Cette surveillance inclut les mesures du poids et de la taille de tous les enfants, de la circonférence crânienne des nourrissons et des trottineurs, ainsi que l’interprétation de ces mesures par rapport à la croissance d’un vaste échantillon de la population d’enfants représenté sur une courbe de croissance sélectionnée ENCADRÉ 3.2. L’évaluation de la croissance devrait se faire au moment des visites de suivi de l’enfant en santé, soit : • dans la semaine ou les 2 semaines suivant la naissance ; • à 2, 4, 6, 9, 12, 18 et 24 mois ; • annuellement chez les enfants de plus de 2 ans et les adolescents.

Pratiques inrmières ENCADRÉ 3.2

Évaluer la croissance

L’évaluation de la croissance s’effectue en accomplissant les étapes suivantes : 1. Mesurer avec précision le poids, la longueur ou la taille, et la circonférence crânienne. 2. Consigner les mesures avec exactitude sur les courbes de croissance convenablement validées. 3. Interpréter correctement le prol de croissance de l’enfant. 4. Discuter du prol de croissance avec les parents ou le tuteur, et s’entendre sur des mesures à prendre, s’il y a lieu. Source : Les diététistes du Canada, Société canadienne de pédiatrie, Collège des médecins de famille du Canada et al. (2014). Le guide d’utilisation des nouvelles courbes de croissance de l’OMS à l’intention du professionnel de la santé. Repéré à www. dietetistes.ca/Downloadable-Content/Public/DC_HealthProGrowthGuideFR.aspx.

Chapitre 3

A Les courbes de croissances sont présentées dans l’annexe A, Normes de croissance de l’OMS pour le Canada.

Croissance, développement et promotion de la santé

73

Évaluer le développement L’Institut national de santé publique du Québec présente une analyse détaillée de ces outils dans son document intitulé Avis scientique sur le choix d’un outil de mesure du développement des enfants de 0 à 5 ans dans le cadre des Services intégrés en périnatalité et pour la petite enfance, qui peut être consulté au www.inspq.qc.ca.

Annexe 3.2W : Test de dépistage de Denver II. 1 L’évaluation de la famille est abordée dans le chapitre 1, Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté.

TABLEAU 3.4

L’évaluation du développement est l’une des composantes les plus importantes d’un bilan de santé complet de l’enfant et de l’adolescent. Il existe deux types d’outils de mesure du développement de l’enfant : l’outil de dépistage et l’outil diagnostique. Le premier permet de noter les signes de retard du développement ou d’un développement anormal, alors que le second permet au médecin responsable de poser un diagnostic. Les techniques de dépistage sont conçues pour repérer de manière rapide et able les enfants qui ont un niveau de développement inférieur à ce qui est attendu compte tenu de leur âge, et qui, par conséquent, requièrent un examen approfondi. Elles fournissent aussi un moyen de recueillir des données objectives sur le développement en cours en vue d’une consultation spécialisée. Dans sa pratique, l’inrmière doit utiliser les tests de dépistage pour lesquels elle a été formée et qui sont préconisés par l’établissement de santé qui l’emploie. Si le test de Denver II est utilisé par certains professionnels de la santé, notamment ceux de première ligne, il existe également d’autres outils . L’inrmière qui travaille auprès de jeunes enfants est amenée à repérer les signes de retard du

développement, notamment dans le cadre du programme Services intégrés en périnatalité et pour la petite enfance (SIPPE). En lien avec ce programme, un groupe de travail de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), mandaté par le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS), a retenu cinq outils TABLEAU 3.4. L’utilisation d’un outil de mesure n’est pas une n en soi. L’inrmière doit l’utiliser en complément des autres techniques et services offerts aux familles.

Soutenir les parents L’inrmière doit faire équipe avec les parents an de promouvoir la croissance et le développement optimal de l’enfant. Dans cet esprit, elle doit être à l’écoute des parents et de l’enfant pour comprendre ce qu’ils vivent an d’intervenir de la meilleure façon possible de manière à soutenir les pratiques parentales. Pour y arriver, l’enseignement est certes un aspect crucial. Toutefois, il faut se rappeler qu’il ne doit pas se résumer à transmettre des connaissances, à donner des conseils et à dire comment agir. L’inrmière doit également évaluer la dynamique familiale, la conception du rôle parental et les disponibilités des parents an de leur proposer les activités adéquates pour promouvoir le développement de l’enfant 1 .

Outils de dépistage du retard du développement utilisés et préconisés au Québec

OUTIL

ÂGE

DOMAINES D’ÉVALUATION

Grille Ballon (Bernier, 2002)

De 0 à 5 ans

Motricité globale, motricité ne, préécriture, développement cognitif, langage, autonomie, développement socioaffectif

Le Brigance – Inventaire du développement (Brigance, 1997)

De 0 à 7 ans

Habiletés motrices et comportements, connaissances générales et maîtrise de concepts, prélecture, lecture, écriture, calcul

Grille d’évaluation du développement de l’enfant (Pomerleau, Vézina, Moreau et al., 2005)

De 0 à 5 ans

Développement cognitif, moteur et socioaffectif

Questionnaire de dépistage du district de Nipissing (Nipissing District Developmental Screen, 2002)

De 0 à 6 ans

Vue, ouïe, communication, motricité ne, motricité globale, fonction cognitive, habiletés sociales, habiletés affectives, autonomie

Questionnaires sur les étapes du développement (Bonin, Robaey, Vandaele et al., 2000)

De 0 à 5 ans

Motricité globale, motricité ne, résolution de problèmes, communication, habiletés personnelles et sociales

3.1.5

Promotion de la santé et prévention des risques durant l’enfance et l’adolescence

La promotion de la santé est un processus actif qui vise à donner des moyens à la population pour améliorer et maintenir sa santé en agissant sur différents

74

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

déterminants. De saines habitudes de vie, un environnement sécuritaire, une bonne couverture vaccinale, la présence d’un soutien social ainsi qu’une bonne connaissance des ressources du réseau de la santé et des services sociaux et communautaires sont à encourager dans les interventions de l’inrmière qui contribuent à la prévention des risques.

Les bienfaits de la promotion de la santé par de saines habitudes de vie sont largement documentés. Ces saines habitudes de vie améliorent les comportements de santé et réduisent de façon notable la mor bidité. Il convient de souligner ici l’importance des politiques de la promotion d’une saine alimentation et de l’activité physique, ainsi que de la prévention des blessures et des traumas (MSSS, 2016). La santé des enfants est aussi étroitement inuencée par le statut socioéconomique des parents et l’environnement. Dans une approche systémique, ces déterminants sont des aspects que l’inrmière doit considérer dans son évaluation et ses interventions. Le partenariat inrmière-parents-enfant est l’une des prémisses à l’établissement du lien thérapeutique. Accompagner les parents pour créer un environnement favorable avec des activités éducatives sur les plans individuel, familial et collectif est incontournable. Par une bonne connaissance des besoins liés au développement des enfants par tranche d’âge, l’inrmière apporte soutien et accompagnement, et elle aide la famille à adopter et à maintenir de saines habitudes de vies. L’exploration des besoins, des croyances et des valeurs des familles sur l’acquisition de saines habitudes de vie est un aspect indispensable de l’évaluation inrmière.

TABLEAU 3.5

Principales causes de décès au Canada, 2008

Moins de 1 an • Malformations congénitales (21,7 %) • Maladies du système nerveux (2,1 %) • Maladies de l’appareil circulatoire (1,9 %) • Blessures non intentionnelles (1,7 %) 1 à 4 ans • Blessures non intentionnelles (20,8 %) • Cancer (20,4 %) • Maladies du système nerveux (10,8 %) • Malformations congénitales (8,3 %) • Maladies de l’appareil circulatoire (6,8 %) 5 à 9 ans • Blessures non intentionnelles (34,9 %) • Cancer (17,9 %) • Maladie du système nerveux (12,4 %) • Maladies endocriniennes, de la nutrition et du métabolisme (5,5 %) • Malformations congénitales (5,5 %) 10 à 14 ans

Prévention des blessures et des traumas non intentionnels

• Blessures non intentionnelles (32,5 %)

Les blessures et les traumas non intentionnels sont la principale cause de décès chez les personnes âgées de 1 à 19 ans au Canada (Agence de la santé publique du Canada [ASPC], 2016b) TABLEAU 3.5 . Ils représentent 1 des 3 principales raisons d’hospitalisation TABLEAU 3.6 (ASPC, 2016a). Les blessures et les traumas chez les enfants engendrent aussi un taux important de consultation dans les services des urgences au Canada. Toutefois, une diminution importante des blessures et des traumas non intentionnels est observée depuis plusieurs années. Ainsi, les blessures ont diminué de 46 % au Canada de 1990 à 2005 (ASPC, 2009). Ces progrès sont dus à une meilleure connaissance de la population quant aux mesures préventives et à l’établissement de normes de fabrication des produits de consommation (INSPQ, 2009).

• Suicides (10,1 %)

Les blessures et les traumas sont des événements évitables. La meilleure prévention réside dans l’éducation, le respect des normes de sécurité et la connaissance approfondie des facteurs de risque, des mesures préventives et des stratégies efcaces de promotion de la santé. En tant que personne-ressource, l’infirmière joue un rôle

3

• Syndrome de mort subite du nourrisson (6 %)

• Cancer (15 %) • Maladies du système nerveux (8,5 %) • Maladies de l’appareil respiratoire (6,5 %) 15 à 19 ans • Blessures non intentionnelles (44,4 %) • Suicides (23,3 %) • Cancer (6,7 %) • Homicides (6,5 %) • Maladies du système nerveux (3,6 %) Source : Agence de la santé publique du Canada (2016). Principales causes de décès, Canada, 2008, hommes et femmes confondus, nombre (taux de décès selon le groupe d’âge par 100 000). Adapté et reproduit avec la permission du Ministre de la Santé (2017). ©Tous droits réservés.

majeur dans la prévention et la promotion de la santé auprès des parents, en plus d’être une partenaire des responsables de la santé publique. La politique de l’ASPC dénit les stratégies de lutte contre les blessures et les traumas, et elle participe au respect des normes de fabrication en vigueur au Canada (normes de l’Association canadienne de normalisation [CSA]).

Chapitre 3

éactivation des connaissances Les déterminants de la santé sont des facteurs internes et externes qui conditionnent l’état de santé d’une personne. Outre les habitudes de vie et un environnement sain, nommez au moins trois autres déterminants.

Croissance, développement et promotion de la santé

75

TABLEAU 3.6

Principales causes d’hospitalisation au Canada, 2009 / 2010

Moins de 1 an • Causes d’hospitalisation périnatale (30,4 %) • Maladies de l’appareil respiratoire (24,7 %) • Malformations congénitales (8,5 %) • Maladies infectieuses et parasitaires (7,3 %) • Blessures non intentionnelles (4,7 %) 1 à 4 ans • Maladies de l’appareil respiratoire (41 %) • Maladies infectieuses et parasitaires (13 %) • Blessures non intentionnelles (7,5 %) • Maladie du système nerveux (6 %) • Maladies de l’appareil digestif (3,9 %) 5 à 9 ans • Maladies de l’appareil respiratoire (27,3 %) • Blessures non intentionnelles (12,9 %) • Maladies de l’appareil digestif (9,4 %) • Maladies infectieuses et parasitaires (7,8 %) • Maladie du système nerveux (7 %) 10 à 14 ans • Maladies de l’appareil digestif (14,9 %) • Blessures non intentionnelles (15,4 %) • Maladies de l’appareil respiratoire (11,5 %) • Troubles mentaux (11 %) • Maladies du système nerveux (5,4 %) 15 à 19 ans • Maladies de l’appareil digestif (13,2 %) • Troubles mentaux (12,8 %) • Blessures non intentionnelles (10,9 %) • Maladies de l’appareil respiratoire (6,1 %) • Maladies de l’appareil génito-urinaire (3,6 %) Source : Agence de la santé publique du Canada (2016). Principales causes d’hospitalisation, Canada, 2009/2010, hommes et femmes confondus, nombre (taux d’hospitalisation selon le groupe d’âge par 100 000). Adapté et reproduit avec la permission du Ministre de la Santé (2017). ©Tous droits réservés.

A

B

En cas d’incident, l’inrmière doit prévenir les risques de récidive en déterminant les causes contributives : l’insufsance des réseaux de soutien, les difcultés conjugales, les méthodes de discipline – en particulier le recours aux punitions physiques –, la détresse parentale ou toute perturbation de la famille ou de ses activités comme les vacances, les déménagements, les visiteurs, les maladies ou les naissances. Selon la situation, l’inrmière offrira alors des ressources adaptées (information, professionnels, centres d’aide).

3.2

Croissance et développement du nourrisson (0-12 mois)

3.2.1

Croissance et développement physique

La période du nouveau-né et du nourrisson est caractérisée par des changements moteurs, cognitifs et sociaux majeurs qui ne se produisent dans aucune autre période de la vie. D’une position quasi fœtale à la naissance FIGURE 3.4, l’enfant évolue physiquement de façon considérable au cours de cette première année. De la position ventrale FIGURE 3.5 à la position assise FIGURE 3.6, puis en passant par la locomotion FIGURE 3.7 , l’enfant parvient à se lever et apprend à marcher.

Caractéristiques physiques Le nourrisson grandit et grossit de façon régulière au cours de la première année. Au Québec, un nouveau-né pèse en moyenne 3 334 g (Statistique Canada, 2016). Les lles pèsent habituellement moins que les garçons (3 275 g contre 3 390 g). En général, le poids à la naissance a doublé lorsque l’enfant atteint l’âge de 4 à 7 mois, et a triplé à la n de sa première année. Les réexes primaires sont forts vers 1 mois, et s’atténuent vers 3 mois. C

FIGURE 3.4 Degré de maîtrise de la tête du nourrisson quand ses bras sont tirés pour l’asseoir – A Il y a chute arrière complète de la tête à 1 mois. B Il y a chute arrière partielle de la tête à 2 mois. C Il n’y a pratiquement aucune chute arrière de la tête à 4 mois.

76

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

B

FIGURE 3.5 Degré de maîtrise de la tête du nourrisson en position ventrale – A À 1 mois, il peut soulever momentanément la tête. B À 6 mois, il peut soulever la tête, le thorax et la partie supérieure de l’abdomen, et faire porter son poids sur ses mains. Il est à noter que cette position facilite le retournement.

Le nourrisson respire principalement par les narines. Vers 5 mois, les dents de lait apparaissent, souvent précédées par des épisodes de èvre et de sécrétion intense de salive (bave). L’enfant mâche et mord pour soulager la douleur associée à l’éruption dentaire.

Motricité globale Alors que ses genoux sont repliés sous l’abdomen à la naissance, l’enfant acquiert peu à peu une force

A

B

clinique

Jugement

qui lui permet de tenir sa tête plus droite vers l’âge de trois mois. Vers quatre mois, il peut s’asseoir droit avec un appui dorsal. Il peut aussi se tourner de la position dorsale à la position ventrale. Vers l’âge de cinq mois, le nourrisson découvre ses mains et ses pieds, et joue avec ses membres. Vers six mois, il commence à s’asseoir avec un appui dorsal, puis sans appui vers l’âge de huit mois. Un mois plus tard, il se tient debout en s’accrochant aux meubles. Le nourrisson se déplace en se traînant sur le ventre ou les genoux aux alentours de neuf mois. Enn, vers l’âge de un an, il peut avancer debout en tenant la main d’un adulte, et il peut être capable de faire quelques pas seul.

Alissa est âgée de 10 jours. Elle est à la maison depuis 1 semaine. Aujourd’hui, à titre d’inrmière des services intégrés en périnatalité et pour la petite enfance, vous rendez visite à Alissa an d’assurer son suivi postnatal. Pourquoi ce rôle inrmier de prévention primaire et de surveillance est-il important ? Vous procédez à l’évaluation physique d’Alissa. Déterminez quatre mesures d’évaluation sur lesquelles vous pouvez assurer un suivi adéquat.

clinique

Jugement

A

Dora est âgée de 11 mois. Sa mère se rend à la clinique avec elle, car elle s’inquiète du développement de sa lle. Elle vous explique que sa nièce, plus jeune que Dora de 1 mois, marche déjà. Dora ne fait que ramper. En examinant la llette, vous concluez qu’elle a un développement normal. Que doit considérer la mère de Dora dans le rythme d’apprentissage de la marche de son enfant ? a) Il est trop tôt pour s’inquiéter de cela.

Motricité ne

b) C’est normal de ne pas marcher à cet âge. Alors qu’il tient ses mains c) La cousine de Dora est en avance pour son âge. presque toujours fermées d) Dora évolue selon son développement. depuis la naissance, le nourrisson les ouvre progressivement MAIS SI... pour tenir des objets vers trois mois. Il commence à jouer avec Si Dora était âgée de 10 mois et sa cousine, de ses mains vers quatre mois et 9 mois, la réponse serait-elle la même ? tente en vain d’attraper des objets. La préhension est encore imprécise. Dès six mois, il manipule de petits objets qu’il porte à sa bouche. La préhension volontaire est acquise. Vers huit mois, la préhension en pince lui permet de saisir les objets de manière plus précise FIGURE 3.8.

C

FIGURE 3.6 Développement de la position assise – A À 1 mois, le nouveau-né a le dos complètement arrondi et il est incapable de s’asseoir droit. B À 4 mois, il a le dos arrondi dans la région lombaire ; toutefois, il est capable de s’asseoir assez droit et il possède une bonne maîtrise de sa tête. C À 7 mois, il peut rester assis sans soutien. Chapitre 3

Croissance, développement et promotion de la santé

77

3

A

C

D

B

FIGURE 3.7 Développement de la capacité de locomotion – A Le nourrisson rampe à plat ventre et se tire vers l’avant à 7 mois. B À 9 mois, il marche à 4 pattes. C À 9 mois, il peut se tenir debout en s’agrippant aux meubles. D À 10 mois, il peut faire des pas délibérés pendant qu’il est debout.

Développement sensoriel Au cours des premières semaines de vie, la vision du nouveau-né est limitée à quelques centimètres. Dès 2 mois, le nourrisson commence à suivre les objets qui lui sont montrés. Il tourne la tête du côté où il entend un bruit. À 2 ou 3 mois, le nourrisson fait un sourire en réponse au sourire de ses parents. Le processus d’accommodation oculaire aux objets proches apparaît vers 4 mois. La permanence de l’objet se développe vers 9 ou 10 mois : le nourrisson cherche des yeux les objets qu’il fait tomber, par exemple.

3.2.2

Développement psychologique

Grâce à la relation qu’il établit avec les personnes qui prennent soin de lui (père ou mère), l’enfant acquiert une conance de base en son entourage, ce qui établit les assises des relations interpersonnelles futures. Le premier mois de la vie constitue une

TABLEAU 3.7

Développement psychologique du nourrisson

Selon Freud

Selon Erikson

Selon Piaget

• Recherche du plaisir

• Acquisition d’un sentiment de conance envers ses proches

• Passage des activités réexes, actes de répé­ tition, puis comporte­ ment mimétique

• Activités orales : succion, mordillage, mastication et vocalisation

• Sentiment de méance si les besoins élémentaires sont insatisfaits

• Curiosité, attrait de la nouveauté • Permanence des objets • Langage, puis représen­ tations mentales

78

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

FIGURE 3.8 Vers l’âge de 8 mois, le nourrisson acquiert la préhension en pince grossière.

période critique. Il est souvent considéré comme une période très particulière en soi en raison de l’importante adaptation physique à la vie extra-utérine du nouveau-né et de l’adaptation psychologique du parent. Le TABLEAU 3.7 résume les principales étapes du développement du nourrisson.

Soins inrmiers NOURRISSON

En prenant en compte l’ensemble du développement psychologique du nourrisson, l’inrmière respecte et valorise la relation parent-enfant lorsqu’elle s’occupe d’un nourrisson (p. ex., en le laissant dans les bras du parent lorsqu’elle fait une intervention, si cela est possible). Elle s’assure qu’il obtient du réconfort pendant et après les interventions, particulièrement les interventions stressantes ou douloureuses. Elle continue de promouvoir le développement d’un attachement parent-enfant sécurisant en considérant les quatre dimensions de l’attachement, à savoir : 1) la sensibilité du parent à l’égard des besoins de son enfant ; 2) la proximité physique et affective entre le parent et l’enfant ; 3) l’engagement, c’est-à-dire le sentiment de responsabilité du parent envers l’enfant ; 4) la réciprocité, qui est la communication mutuelle et partagée avec l’enfant (Larin, St-Georges, Jacques et al., 2006).

3.2.3

Promotion de saines habitudes de vie du nourrisson

La promotion de saines habitudes de vie est un des rôles essentiels de l’inrmière auprès de l’enfant et de sa famille. L’inrmière doit aborder et prioriser des aspects différents du développement en fonction du groupe d’âge auquel appartient l’enfant.

Alimentation L’inrmière doit être proactive an d’enseigner aux parents ce qui constitue une alimentation appropriée pour le nourrisson ainsi que les habitudes qui permettront à ce dernier de croître et de bien se développer jusqu’à l’âge adulte. Une alimentation équilibrée amorcée dès le début de l’enfance favorise le maintien de saines habitudes alimentaires familiales à long terme. Un lien a été établi entre les habitudes alimentaires pendant le début de l’enfance et plusieurs maladies chroniques, notamment l’artériosclérose et l’hypercholestérolémie, l’ostéoporose, l’incidence des coronaropathies et de l’obésité, et le diabète de type 2 (Bertz, 2012 ; Tian et Yu, 2017) 6 .

Promotion de l’allaitement maternel Bien que l’allaitement soit un choix strictement personnel, l’inrmière doit répondre aux préoccupations du couple pour éclairer leur prise de décision en leur fournissant de l’information sur les bienfaits de l’allaitement maternel pour le nourrisson, la mère et la famille (INSPQ, 2011). Les valeurs et les croyances des deux parents doivent donc être explorées par l’inrmière pour personnaliser et optimiser le counseling. L’allaitement fournit au nourrisson tous les éléments nutritifs dont il a besoin, de même que des anticorps protecteurs pour lutter contre les infections (Unité d’évaluation des technologies et des modes d’intervention en santé [UETMIS], 2012). Il est étroitement associé à un meilleur développement cognitif, particulièrement chez les nouveau-nés prématurés et de faible poids (MSSS, 2008). Au Canada, comme partout dans le monde, les associations de professionnels comme la Société canadienne de pédiatrie et Les diététistes du Canada recommandent que les nourrissons soient nourris exclusivement de lait maternel durant les six premiers mois de la vie (Doré et Le Hénaff, 2017 ; SCP, 2016e). Cette recommandation s’harmonise avec celles de Santé Canada (2015). L’allaitement exclusif est déni comme la pratique de ne donner que du lait maternel, y compris le lait exprimé, avec l’ajout possible de vitamines, de minéraux ou de médicaments. L’eau, les préparations commerciales pour nourrissons et les autres aliments liquides ou solides sont exclus (Santé Canada, 2015). Même après l’introduction des aliments complémentaires, la mère peut poursuivre l’allaitement pendant 2 ans, voire plus. Aujourd’hui, près de 85 % des Québécoises allaitent leur nouveau-né à la naissance, et près de 50 % continuent jusqu’à 6 mois ou plus (Institut de la statistique du Québec, 2011).

Suppléments de vitamines et de minéraux Vitamine D Santé Canada (2012a) recommande que tous les nourrissons exclusivement allaités

reçoivent 400 unités internationales par jour de vitamine D en supplément jusqu’à ce que leur régime alimentaire inclue au moins 400 unités internationales par jour d’autres sources de vitamine D.

Fer Le fer joue un rôle essentiel dans la production de l’hémoglobine. Il est indispensable pour le système immunitaire et le développement cognitif. Le taux de prévalence de l’anémie ferriprive est important au Canada, surtout durant la première année de vie. La carence en fer peut notamment affecter les capacités d’apprentissage et la croissance. L’inrmière doit contribuer au dépistage des enfants plus à risque d’anémie, particulièrement ceux issus de milieux socioéconomiques défavorisés ENCADRÉ 3.3.

6 Les troubles alimentaires et nutritionnels du nourrisson sont abordés dans le chapitre 6, Problèmes de santé du nourrisson.

3

éactivation des connaissances Quelle est l’importance de la vitamine D par rapport au calcium ?

Conciliation travail-allaitement Le soutien est important pour les mères qui travaillent et qui désirent continuer d’allaiter. Le père peut encourager la mère qui allaite (MSSS, 2008). L’inrmière doit aider les mères à établir des objectifs réalistes quant à la conciliation travail-allaitement en discutant avec elles des coûts, des risques, des avantages et des possibilités qui s’offrent en matière d’alimentation. Les obstacles auxquels les mères qui travaillent sont confrontées lorsqu’elles allaitent sont l’absence de soutien de la part de l’employeur et des collègues, l’absence ou l’inadéquation des installations permettant de tirer et d’entreposer le lait, et le temps insufsant qui leur est accordé pour tirer le lait pendant les heures de travail (Jantzer, Anderson et Kuehl, 2018). De plus en plus de mères qui allaitent ont recours à l’expression du lait. Cette pratique permet au nourrisson d’être nourri avec le lait de sa mère lorsque cette dernière est absente, ou si le nourrisson est prématuré ou malade ENCADRÉ 3.4 et TABLEAU 3.8. Au cours de la visite postnatale, l’inrmière doit s’assurer que l’allaitement se déroule de façon optimale. Elle peut encourager la mère à avoir recours aux organismes communautaires de soutien à l’allaitement maternel de sa région. Le réseau social et communautaire contribue efcacement à maintenir l’allaitement.

L’apport en vitamine D pour les nouveau-nés est traité dans le chapitre 23 du manuel de Lowdermilk, D.L., Perry, S.E., et Cashion, K. (2018). Périnatalité. Montréal : Chenelière Éducation.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les obstacles auxquels les mères qui travaillent sont confrontées lorsqu’elles allaitent sont l’absence de soutien de la part de l’employeur et des collègues, l’absence ou l’inadéquation des installations permettant de tirer et d’entreposer le lait, et le temps insufsant qui leur est accordé pour tirer le lait pendant les heures de travail.

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 3.3

Recommandations concernant les suppléments en fer

• Les nouveau-nés à terme allaités ou qui reçoivent une préparation commerciale enrichie de fer dès la naissance n’ont pas besoin de suppléments de fer. • Les nourrissons prématurés devraient recevoir des suppléments de fer à partir

de l’âge de huit semaines jusqu’à leur premier anniversaire. • Les enfants de plus de un an n’ont habituellement pas besoin de suppléments de fer, à moins de ne pas manger assez d’aliments riches en fer.

Source : Adapté de SCP (2012b).

Chapitre 3

Croissance, développement et promotion de la santé

79

ALERTES CLINIQUES 1 Les durées de conservation ne s’additionnent pas. Autrement dit, on ne doit pas garder du lait quatre heures à la température ambiante, puis le réfrigérer pendant huit jours pour enn le congeler (Doré et Le Hénaff, 2017). 2 Pour décongeler le lait maternel, placer le contenant dans un bassin d’eau tiède (moins de 40,5 °C) ou le placer dans le réfrigérateur la nuit précédente.

L’eau donnée à un nourrisson de moins de quatre mois doit avoir bouilli à gros bouillons pendant au moins une minute, peu importe d’où elle provient, an d’éliminer tout risque de contamination (Doré et Le Hénaff, 2017). 3

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 3.4

Recommandations concernant le lait maternel

• Avant de manipuler le lait maternel, la mère doit s’assurer d’avoir les mains propres et d’utiliser un tire-lait et des accessoires propres.

• La congélation prolongée diminue légèrement la valeur nutritive du lait maternel. Ses qualités demeurent toutefois supérieures à celles de tout autre lait 1 .

• Si le bébé est nourri uniquement de lait maternel exprimé, il est préférable de le lui donner fraîchement exprimé ou réfrigéré. Source : Doré et Le Hénaff (2017).

TABLEAU 3.8

Temps de conservation du lait maternel

ÉTAT DU LAIT MATERNEL

TEMPÉRATURE AMBIANTE

RÉFRIGÉRATEUR

CONGÉLATEUR

Frais

• 4 heures à 26 °C

• 8 jours à 4 °C

• 6 mois (congélateur du réfrigérateur ; ne pas mettre dans la porte)

• 24 heures à 15 °C (dans une glacière avec un sachet réfrigérant)

a

• 12 mois (congélateur coffre) Décongelé

2

• 1 heure

• 24 heures

• Ne pas recongeler

a La

température du congélateur doit être assez froide pour conserver de la crème glacée dure, soit −18 °C. Source : Doré et Le Hénaff (2017).

6 Les allergies et les intolérances alimentaires sont détaillées dans le chapitre 6, Problèmes de santé du nourrisson.

Solutions de remplacement à l’allaitement maternel

Introduction des aliments complémentaires

La SCP, Les diététistes du Canada et Santé Canada recommandent de donner des préparations commerciales pour nourrissons enrichies de fer aux bébés qui ne sont pas nourris au lait maternel, jusqu’à l’âge de 9 à 12 mois (Doré et Le Hénaff, 2017) 3 .

Au Canada, il est recommandé de commencer l’introduction des aliments complémentaires à partir de l’âge de six mois (SCP, 2016e). Il est essentiel que les inrmières expliquent aux parents que les aliments solides viennent compléter le lait, et non le remplacer, afin de répondre aux besoins de croissance de l’enfant et de diminuer les risques d’anémie (Doré et Le Hénaff, 2017). Les parents doivent offrir des aliments à l’enfant en respectant son rythme, ses besoins et ses réactions 6 .

Le lait de vache entier à faible teneur en gras et écrémé ainsi que les laits en poudre ne sont pas acceptables comme principale source de nutrition pour les nourrissons (SCP, 2016e).

Quantité et fréquence des boires La quantité de préparation pour nourrissons par biberon et le nombre de biberons par jour varient selon les enfants. Ceux qui sont nourris sur demande déterminent habituellement leur propre régime d’alimentation, mais d’autres peuvent avoir besoin d’un horaire plus structuré, fondé sur des habitudes de tétées moyennes, an d’assurer un apport en nutriments sufsant. Peu importe le nombre de boires, la quantité totale de préparation pour nourrissons consommée ne devrait pas dépasser 1 000 mL par jour. Au début de la tétée, le lait maternel est très aqueux, puis, après quelques minutes, il devient plus riche en gras et en protéines (Doré et Le Hénaff, 2017). Lorsque le nourrisson commence à manger d’autres aliments, il est possible de lui offrir de l’eau de temps à autre.

80

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

Choix et quantité Le choix des premiers aliments solides à présenter à l’enfant est variable. Les céréales pour bébés enrichies de fer sont généralement offertes en premier en raison de leur teneur élevée en fer (7 mg de céréales sèches préparées) : le riz, l’orge et l’avoine. Les nouveaux aliments devraient être introduits un à la fois ; par conséquent, les parents devraient éviter les céréales mixtes. Il est possible de mélanger les céréales enrichies de fer pour bébés au lait maternel ou selon les indications inscrites sur le produit. Après les céréales, les légumes sont introduits, puis les fruits. Le TABLEAU 3.9 suggère un calendrier par étapes. Les tailles des portions varient selon le goût et l’envie de l’enfant. Enn, les jus

de fruits naturels ne sont pas essentiels dans l’alimentation des nourrissons (Doré et Le Hénaff, 2017).

Méthodes d’introduction L’enfant est prêt à manger des aliments solides vers l’âge de 6 mois environ, s’il se tient assis sans soutien et qu’il contrôle bien les mouvements de sa tête (Doré et Le Hénaff, 2017). Lorsqu’une cuillère est présentée pour la première fois à un enfant, il arrive souvent qu’il la repousse. Il ne faut pas le forcer et faire une nouvelle tentative plus tard. Quand les jeunes enfants s’habituent à la cuillère, ils acceptent les aliments avec plus d’enthousiasme. Les aliments sont donc offerts après le lait, et ce, jusqu’à 1 an an de prévenir tout déséquilibre hydroélectrolytique (Doré et Le Hénaff, 2017). Il est recommandé de présenter un aliment à la fois à intervalles de 4 à 7 jours an de déceler des allergies alimentaires possibles. À mesure que la quantité d’aliments complémentaires est augmentée, il faut réduire progressivement la quantité de lait an d’éviter de réduire l’appétit pour les autres aliments. Il ne faut pas donner d’aliments dans un biberon et priver un nourrisson du plaisir de connaître de nouvelles textures et d’acquérir des goûts particuliers. Il doit apprendre à manger avec les doigts vers l’âge de 8 ou 9 mois et à bien déglutir les aliments. L’introduction d’aliments complémentaires dans le régime alimentaire de l’enfant peut être une période stimulante pour le parent et l’enfant. La plupart des enfants ont un bon appétit et aiment manger avec une cuillère ou avec les doigts. C’est donc une période de grands apprentissages et d’adaptation pour le nourrisson et ses parents.

Sevrage Le sevrage, qui est déni comme étant l’abandon d’un mode d’alimentation pour un autre, renvoie habituellement à l’abandon du sein ou du biberon au prot d’une tasse. Il n’y a pas d’âge optimal de sevrage, mais, en général, la plupart des jeunes enfants se montrent prêts au cours de la seconde moitié de la première année. Ils ont appris que de bonnes choses proviennent d’une cuillère. Il est recommandé de se baser sur les besoins de l’enfant pour le sevrer. Le sevrage doit être progressif, c’està-dire qu’il faut remplacer un boire à la fois. L’allaitement de nuit est habituellement le dernier à disparaître. Il ne faut jamais laisser l’enfant avec un biberon de lait au lit, car le risque de formation des caries de la petite enfance est accru. Si le sevrage se fait avant l’âge de cinq ou six mois, il devrait consister à offrir un biberon de remplacement à l’enfant an de satisfaire ses besoins de succion continus. Si le sevrage a lieu plus tard, il peut consister à passer directement à l’utilisation d’une tasse, vers l’âge de neuf mois.

Enseignement à l’enfant et à ses proches TABLEAU 3.9

Aliments au cours de la première année

TYPE D’ALIMENT

INDICATIONS

3

De la naissance à 6 mois (allaitement ou biberon) • Lait maternel

• Selon la demande

• Préparation pour nourrissons additionnée de fer

• Moins de 1 semaine de vie : augmentation progressive de 180 à 500 mL • Le 1er mois : 450 à 750 mL • Les 2e et 3e mois : 500 à 900 mL • Les 4e, 5e et 6e mois : 850 à 1 000 mL

• Vitamine D

• 400 unités internationales / jour • Donnée en supplément seulement aux nourrissons allaités ; déjà incluse dans les préparations pour nourrissons

De 6 à 7 mois • Lait maternel ou préparations pour nourrissons additionnées de fer

• Lait maternel à la demande • 750 à 850 mL pour les préparations

Aliments complémentaires • Céréales pour bébés (orge, riz) • Légumes cuits et fruits

• Une céréale, un légume, un fruit à la fois, en augmentant graduellement les quantités • De 3 à 5 mL au début

• Viande (agneau et volaille)

• En purée lisse, en augmentant graduellement la consistance

De 7 à 9 mois • Continuer les aliments complémentaires commencés entre 6 et 7 mois • Lait maternel et préparations pour nourrissons additionnées de fer

• De 750 à 850 mL

• Céréales pour bébés

• Mélange possible, en augmentant graduellement

• Légumes et fruits

• En purée grossière

• Viandes et substituts ; 1 portion parmi :

• Continuer à varier les aliments

– Viande, volaille, poisson – Jaune d’œuf – Légumineuses variées – Tofu ferme De 9 à 12 mois • Variété de légumes et de fruits

• Cuits et mous pour les légumes • Pelés et mous pour les fruits ; en purée ou écrasés pour les petits fruits

• Céréales pour bébés • Autres variétés de produits céréaliers (avoine, couscous, quinoa, pain, pâtes alimentaires, etc.)

Chapitre 3

Croissance, développement et promotion de la santé

81

TABLEAU 3.9

Aliments au cours de la première année (suite)

TYPE D’ALIMENT

INDICATIONS

• Viandes et substituts ; 2 portions parmi : – Viande, volaille, poisson – Jaune d’œuf – Légumineuses variées – Tofu ferme • Lait maternel ou lait de vache, ou 2 portions de substituts (yogourt, kér, fromage doux frais ou ferme)

• 750 mL de lait ; peut être réduit d’environ 250 mL et remplacé par 145 mL de yogourt

Source : Information tirée et adaptée de Doré, N. et Le Hénaff, D. (2017). Mieux vivre avec notre enfant de la grossesse à deux ans. Montréal : Institut national de santé publique du Québec. Repéré à www.inspq.qc.ca/mieux-vivre/ version-pdf.

Santé dentaire

Jugement

clinique

Pour assurer une bonne santé dentaire, les parents jouent Corine, âgée de huit semaines, est allaitée. Sa mère un rôle essentiel dans l’acquiconsulte à la clinique du nourrisson, car sa lle sition de saines habitudes semble avoir toujours faim. Elle désirerait introduire alimentaires et d’hygiène les céréales dans l’alimentation de son enfant. Son buccale au quotidien. La preintention est-elle appropriée ? Justiez votre réponse. mière visite chez le dentiste est recommandée dans les six mois suivant l’éruption de la première dent ou à l’âge de un an (Association dentaire canadienne [ADC], 2017d). Ces mesures préventives ont des répercussions importantes à long terme sur la santé dentaire des enfants. Les parents doivent intégrer le brossage des dents à la routine quotidienne.

Hygiène buccodentaire Le brossage des dents deux fois par jour devrait commencer dès l’apparition de la première dent de lait du nourrisson. Lorsqu’il a peu de dents, les dents et les gencives du nourrisson peuvent être nettoyées avec un linge humide ou une brosse à dents à soies douces. La brosse à dents devrait être changée lorsque les poils sont courbés ou après trois ou quatre mois d’utilisation.

Poussée dentaire

CE QU’IL FAUT RETENIR

La poussée dentaire peut être douloureuse chez certains nourrissons. Habituellement, elle se manifeste par une augmentation importante de la production de salive, des rougeurs et des pleurs.

82

Partie 1

Les premières dents, les incisives, apparaissent généralement vers l’âge de six mois (Doré et Le Hénaff, 2017). La poussée dentaire peut être douloureuse chez certains nourrissons. Habituellement, elle se manifeste par une augmentation importante de la production de salive, des rougeurs sur les joues et des pleurs. Pour soulager la percée dentaire du nourrisson, il est recommandé de lui appliquer une débarbouillette froide. L’enfant aura tendance à mettre son poing dans sa bouche pour se soulager. Les sirops médicamenteux sont déconseillés, car ils ne sont pas efcaces et peuvent diminuer le réexe de déglutition (Doré et Le Hénaff, 2017).

Inrmière, enfant et famille

Caries du biberon La couche d’émail des dents de lait est plus mince que celle des dents permanentes, ce qui les rend plus vulnérables à la carie. La carie de la petite enfance, aussi appelée carie du biberon, désigne celle qui apparaît avant l’âge de six ans. Elle peut se manifester dès l’éruption de la première dent, endommager rapidement les dents primaires et entraîner leur perte prématurée. Le dépistage précoce est important, car certains enfants peuvent avoir besoin d’une intervention chirurgicale lorsqu’il y a atteinte de plusieurs dents. Il faut soigner la carie de la petite enfance. Les parents doivent être informés des effets néfastes de l’utilisation prolongée des biberons durant la sieste et la nuit. Il est déconseillé de laisser un nourrisson s’endormir avec un biberon de lait (même de lait maternel) ou tout autre liquide contenant du sucre. Il faut encourager l’enfant à boire dans un verre dès l’âge de neuf mois an de favoriser l’abandon progressif du biberon et de limiter l’apparition et la progression de la carie (ADC, 2017a). Le régime alimentaire est également déterminant pour la santé dentaire de l’enfant. Il faut recommander aux parents d’éviter totalement ou de n’offrir qu’avec modération des aliments contenant du sucre concentré. Les saines habitudes acquises durant le début de l’enfance ont tendance à perdurer à long terme.

Utilisation des suces Le choix de l’utilisation de la suce appartient aux parents et cela n’affecte en rien le développement du nourrisson. Il existe différents modèles de suces ; qu’elles soient en silicone ou en latex, elles sont sécuritaires, à condition de les changer tous les deux mois, quel que soit leur degré d’usure (Doré et Le Hénaff, 2017). Il faut éviter d’attacher la suce avec un cordon autour du cou ou d’un membre en raison du risque d’étranglement. Une attache-suce sécuritaire doit être utilisée ; elle doit être dotée d’un ruban mesurant de 6 à 10 cm (Benhaberou-Brun, 2017 ; SCP, 2016h). Rien ne doit être appliqué sur une suce.

Sommeil Le sommeil est essentiel au développement physique et intellectuel sain. Le manque de sommeil réparateur a des conséquences importantes chez l’enfant dont l’organisme est en plein développement (Dionne, Touchette, Forget-Dubois et al., 2011).

Besoin de sommeil Lorsque le nourrisson vient au monde, son système nerveux est encore immature. Cela fait en sorte qu’il a des rythmes de sommeil caractéristiques à son stade de développement. Avec le temps, le besoin de sommeil se stabilise : le

Le cycle d’éveil et de sommeil du nourrisson varie selon ses besoins et son tempérament. Certains nourrissons s’éveillent seulement pour boire. D’autres ont de plus longues périodes d’éveil dès les premiers jours de vie (Doré et Le Hénaff, 2017). Généralement, vers l’âge de 3 à 4 mois, la plupart des nourrissons ont adopté un cycle de sommeil nocturne de 9 à 11 heures, mais ils dorment au total environ 15 heures par jour en incluant les siestes. Le nombre de ces dernières varie, mais les enfants font généralement 1 ou 2 siestes par jour vers la n de la première année. La plupart des nourrissons de 6 à 12 mois dorment de 8 à 10 heures par nuit, mais ils totalisent encore 15 heures de sommeil par jour. Il arrive qu’entre 6 et 12 mois, certains nourrissons recommencent à se réveiller la nuit. Ce phénomène est associé à une période normale d’angoisse de séparation et aux poussées dentaires (Doré et Le Hénaff, 2017).

Soutien aux parents Les préoccupations concernant le sommeil sont courantes au début de l’enfance. Si les inquiétudes des parents ont trait au besoin anticipé de sommeil supplémentaire chez l’enfant (p. ex., la sieste), il convient de s’informer des raisons de ces préoccupations et de souligner l’individualité des besoins de chaque enfant. Les enfants qui sont actifs durant les périodes d’éveil et qui croissent normalement dorment sufsamment. En conséquence, l’inrmière devrait discuter des problèmes de sommeil de l’enfant avec l’ensemble de la famille, en plus des autres aspects des soins à

donner au nourrisson en fonction de son développement ENCADRÉ 3.5. L’inrmière qui a une écoute active soutient et aide les parents à trouver des stratégies gagnantes pour promouvoir un sommeil réparateur ENCADRÉ 3.6.

3.2.4

Prévention des blessures et des traumas

Chez les enfants âgés de 0 à 12 mois, la prématurité et les anomalies congénitales représentent les premières causes de décès. Toutefois, les blessures et les traumas demeurent fort préoccupants. Il est primordial d’être conscients des problèmes pouvant survenir et de superviser étroitement l’enfant au fur et à mesure que ses capacités psychomotrices évoluent et se rafnent.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Le cycle sommeil-éveil est inuencé par la lumière, la température et des facteurs externes tels que les activités sociales et les horaires de travail.

clinique

Jugement

sommeil s’organise en périodes moins nombreuses, mais de plus en plus longues. Il s’agit du phénomène de consolidation du sommeil qui évolue rapidement au cours des premiers mois de vie (Dionne et al., 2011) TABLEAU 3.10.

Thomas est âgé de 10 mois. Sa mère consulte à la clinique parce que son ls est affecté par des difcultés d’endormissement. L’enfant s’endort toujours dans les bras de son père et il se réveille en pleurs lorsqu’il est déposé dans son lit. Nommez trois moyens que la mère pourrait prendre pour résoudre le problème de sommeil de son ls.

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 3.5

Cododo et sécurité de l’enfant au moment du coucher

Le cododo est une pratique relativement courante dans la culture nord-américaine ainsi que dans plusieurs communautés ethniques ; les accidents liés au cododo demeurent très rares. Selon l’auteure Evelyne Martello (2015), cette pratique irait à l’encontre des principes de prévention du syndrome de la mort subite du nourrisson. Selon la SCP, au cours de la première année de vie, le lieu de sommeil le plus sécuritaire pour le nourrisson est sa propre couchette. Les autres recommandations pour favoriser la sécurité de l’enfant au moment du dodo sont de le coucher sur le dos, d’éviter les objets de literie mous, de trop couvrir l’enfant et de l’exposer à la fumée secondaire (SCP, 2016a).

Enseignement à l’enfant et à ses proches TABLEAU 3.10

Nombre d’heures de sommeil par 24 heures et par tranche d’âge

ENCADRÉ 3.6

Recommandations pour favoriser un bon sommeil chez l’enfant dès les premiers mois de vie

NOMBRE D’HEURES DE SOMMEIL

• Établir une routine au coucher.

Nourrissons (de 1 à 12 mois)

De 12 à 16 heures par jour

• Faire dormir l’enfant dans l’obscurité la nuit (mais pas le jour).

Trottineurs (de 1 à 2 ans)

De 11 à 14 heures

Enfants d’âge préscolaire (de 3 à 5 ans)

De 10 à 13 heures

Enfants d’âge scolaire (de 6 à 12 ans)

De 9 à 12 heures

Adolescents (de 13 à 18 ans)

De 8 à 10 heures

TRANCHE D’ÂGE

Source : Adapté avec autorisation de Société canadienne de pédiatrie (2012a). De saines habitudes de sommeil pour votre bébé et votre enfant (mise à jour 2017). Tous droits réservés..

• Offrir un bon environnement de sommeil.

• Offrir une chambre fraîche pour la nuit. • Éviter les bruits. • Ne pas endormir l’enfant avant de le coucher dans son lit (à partir d’environ quatre à cinq mois). • Laisser l’enfant s’endormir seul (ne pas rester avec lui jusqu’à ce qu’il s’endorme).

• Ne pas amener l’enfant dans le lit des parents après un éveil nocturne (à partir d’environ quatre à cinq mois). • Instaurer, pour les nourrissons nourris au sein la nuit, un petit délai entre la demande de bébé et la réponse de maman (à partir d’environ quatre à cinq mois). • Garder le même horaire de sommeil la n de semaine. • Donner à l’enfant un objet qui peut l’aider à s’apaiser au début du sommeil (p. ex., une petite couverture, une peluche ou autre), à enlever une fois l’enfant endormi pour éviter le risque de suffocation.

Source : Adapté de Martello (2015). Chapitre 3

Croissance, développement et promotion de la santé

83

3

Étouffement et suffocation 6 Les causes et les mé­ thodes de prévention du syndrome de mort subite du nourrisson sont détaillées dans le chapitre 6, Problèmes de santé du nourrisson.

ALERTES CLINIQUES 1 Parmi les objets dangereux à garder hors de la portée des nourrissons gurent les aimants et les objets magnétiques, les colliers, les objets pointus, les cordons et les sangles, les sacs de plastique et les ballons de latex. 2 En présence d’un doute quant à l’ingestion d’un aimant ou d’une pile par un enfant, il faut appeler le service des urgences (Santé Canada, 2012c).

L’étouffement et la suffocation représentent la première cause de décès par blessures et traumas chez les moins de un an (ASPC, 2009). Voici quelques rappels des facteurs de risque ayant une inuence sur ce type d’accidents.

Petits objets et aliments à risque L’aspiration d’un corps étranger dans les voies respiratoires crée une asphyxie mécanique. La taille, la forme et la consistance des aliments ou des objets (petits jouets) sont les facteurs déterminants pour ce qui est des obstructions mortelles. Les bonbons durs, les noix, les arachides, la gomme à mâcher, les aliments contenant des pépins ou des noyaux, les saucisses entières ou coupées en rondelles sont tous des aliments susceptibles de provoquer un étouffement (Doré et Le Hénaff, 2017). Il est recommandé d’assurer une surveillance étroite au moment des boires et des repas des nourrissons, et il faut éviter de laisser dormir le nourrisson avec son biberon. Les objets de petite taille devraient être gardés hors de portée des nourrissons 1 . Si des petits objets sont ingérés, la majorité sera évacuée sans problème par le système intestinal. Cependant, une attention particulière doit être accordée aux jouets magnétiques et aux objets pointus, car ils risquent de provoquer des lésions avec hémorragie interne 2 . Ces conséquences peuvent même être mortelles (SCP, 2015). Les petits articles, en plus de poser des risques d’aspiration, sont susceptibles de se loger dans l’oreille ou le nez et causer des blessures du tympan ou endommager la muqueuse nasale.

interrogations, des facteurs modiables ont été déterminés et des stratégies de prévention ont été publiées par Santé Canada 6 .

Accidents de la circulation La Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ, 2017) préconise l’utilisation de l’un des trois sièges d’auto adaptés au poids et à la taille de l’enfant : siège de bébé, siège d’enfant et siège d’appoint. Au Canada, des normes de sécurité obligent les fabricants à indiquer sur l’étiquette des sièges d’auto les normes en vigueur pour l’installation du siège selon le poids et la taille des enfants FIGURE 3.10. Le Réseau provincial de vérication

FIGURE 3.9 espace à sécuriser.

Le lit du nourrisson est un

Lits et parcs d’enfant Puisque les enfants dorment en moyenne plus de 5 000 heures durant leur première année de vie, il est important de rendre l’espace de sommeil sécuritaire en prévenant les risques d’étouffement, notamment en s’assurant de l’espacement réglementaire des barreaux, en respectant les dimensions réglementaires du matelas et en évitant l’ajout d’oreillers, de contours de lit coussinés ou de jouets en peluche dans la couchette FIGURE 3.9. An d’éviter que la tête du nourrisson ne se coince entre les barreaux de lit, la loi fédérale canadienne exige que la distance entre les barreaux ne soit pas supérieure à 6 cm (SCP, 2016a). Comme les lits, les parcs doivent être conformes aux instructions du fabricant, selon le poids et l’âge de l’enfant. Ces recommandations mettent l’accent sur la fermeté du matelas et l’importance de bien remonter et enclencher les côtés.

Syndrome de mort subite du nourrisson Entre 2003 et 2007, le syndrome de mort subite du nourrisson était responsable de 21 % des décès postnataux au Canada (ASPC, 2014). Si les causes exactes de ce syndrome soulèvent de nombreuses

84

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

FIGURE 3.10 L’inrmière devrait recomman­ der aux parents de bien s’informer quant aux normes de sécurité des sièges d’auto.

des sièges d’auto pour enfants offre des consultations gratuites, en tout temps et partout au Québec, pour s’assurer que le siège d’auto est installé correctement et pour fournir un soutien technique. L’inrmière doit diffuser l’information sur les normes de sécurité des sièges d’auto auprès des familles, connaître les normes à respecter, distribuer des feuillets informatifs, tenir des séances d’information sur le sujet et collaborer aux campagnes de prévention de la sécurité routière. Elle contribue ainsi à faire respecter les lois régissant le Code de la route ENCADRÉ 3.7.

Chutes Selon les données du Système canadien hospitalier d’information et de recherche en prévention des traumas (SCHIRPT), chez les nourrissons de moins de un an, les chutes sont les premières causes d’hospitalisation (ASPC, 2009). Les chutes sont fréquentes chez les jeunes enfants et peuvent être évitées par une surveillance étroite et un meilleur contrôle de l’environnement. Près du tiers des chutes chez les nourrissons se produisent à partir du lit d’un adulte ; les autres surviennent dans les escaliers, les chaises hautes, les balançoires, les tables à langer et les poussettes. Il faut s’assurer de bien attacher l’enfant avec des courroies en bon état dans les sièges, les balançoires et les chaises hautes, et de bien relever les côtés de lit. Les chaises hautes ne sont indiquées que lorsque l’enfant peut s’asseoir de façon stable. Lorsque les enfants se déplacent, il faut les superviser en tout temps. L’installation de barrières de protection peut être utile, mais celles-ci doivent être installées conformément aux instructions du fabricant et adaptées à l’âge de l’enfant ainsi qu’à l’endroit d’installation (Santé Canada, 2012c).

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 3.7

Conseils de sécurité pour le transport de nourrissons en voiture

• Éviter de laisser un nourrisson dans un siège d’auto pour enfant pendant plus d’une heure. • Au cours d’un long voyage, prendre des pauses régulièrement et changer l’enfant de position. • Installer le siège d’auto de préférence sur la banquette arrière. • Ne jamais installer le siège d’auto pour enfant à l’avant si l’auto est munie d’un coussin gonable du côté passager. Source : Adapté de SAAQ (2017).

Noyades Généralement, les noyades se produisent à cause des deux facteurs suivants : le relâchement de la surveillance et l’absence de mesures préventives. La plupart des noyades chez les enfants de moins de un an se produisent dans la toilette, la baignoire ou un seau (SCP, 2015). Il suft d’un bref moment d’inattention (quelques secondes) pour que l’enfant se noie, et quelques centimètres d’eau sufsent chez les très jeunes enfants. Par conséquent, il faut constamment les surveiller, qu’ils se trouvent dans une baignoire ou près de toute source d’eau telle qu’une piscine, un lac, une cuvette de toilette ou un seau d’eau. La SCP recommande de bannir les sièges de baignoire : ils peuvent procurer un faux sentiment de sécurité, qui risque d’entraîner une réduction de la surveillance (SCP, 2015). Il faut utiliser une baignoire adaptée pour l’âge de l’enfant et assurer une surveillance constante par un adulte. Il est aussi indiqué de fermer la porte de la salle de bain en tout temps. Les piscines ainsi que les autres sources d’eau comme les fontaines décoratives doivent être clôturées, verrouillées ou protégées (Santé Canada, 2016d).

3

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les chutes sont fréquentes chez les jeunes enfants et peuvent être évitées par une surveillance étroite et un meilleur contrôle de l’environnement.

Brûlures Des brûlures sont causées par une température élevée de l’eau, un coup de soleil, un incendie, des ls électriques et des éléments chauffants (p. ex., des radiateurs, des appareils chauffants, des foyers ou des fournaises). La peau d’un enfant subit une brûlure quatre fois plus rapidement et plus profondément qu’un adulte 22 . L’inrmière peut prévenir les brûlures occasionnées par l’eau chaude du robinet en avisant les parents de régler le thermostat central de l’eau à 49 °C et de vérier l’eau du bain avant d’y déposer l’enfant. Il faut éviter de porter un bébé lorsqu’on a une boisson chaude dans les mains. Si le lait pour nourrissons ou des aliments sont réchauffés dans un four à micro-ondes, il faut en vérier la température avant de les donner à l’enfant, car cette dernière peut être inégale et parfois trop élevée, et cela peut causer des brûlures à la bouche (SCP, 2015).

CE QU’IL FAUT RETENIR

La peau d’un enfant subit une brûlure quatre fois plus rapidement et plus profon­ dément qu’un adulte. 22 Les types de brûlures et les traitements sont détail­ lés dans le chapitre 22, Troubles liés au système tégumentaire.

Les coups de soleil peuvent être une source de brûlure du premier ou du deuxième degré. Il faut éviter l’exposition directe au soleil, surtout lors des 6 premiers mois de vie de l’enfant. La lotion solaire n’est pas recommandée pour les enfants âgés de moins de 6 mois, car il y a un risque de réactions allergiques (Doré et Le Hénaff, 2017). Par la suite, un écran solaire avec un facteur de protection solaire (FPS) de 15 ou plus est recommandé (Santé Canada, 2012b). Il faut l’appliquer 20 minutes avant l’exposition et en remettre toutes les 2 heures. Lorsque les enfants sont exposés au soleil, ils doivent porter un Chapitre 3

Croissance, développement et promotion de la santé

85

Jugement

clinique James est âgé de trois mois. Ses parents s’apprêtent à rendre visite aux grandsparents maternels qui habitent à deux heures de route de leur domicile. Ils ont choisi un siège d’auto qui respecte les normes de sécurité. Pourquoi devraient-ils prévoir des arrêts en chemin et changer régulièrement leur enfant de position ? a) Parce qu’il y a risque d’obstruction des voies aériennes si l’enfant reste longtemps dans le siège d’auto. b) An d’éviter que James devienne vite fatigué s’il demeure dans la même position pendant tout le trajet. c) Pour ne pas perturber le sommeil nocturne de James, qui dormirait probablement pendant la durée du voyage. d) Pour éviter une chute de la tête de l’enfant vers l’avant, l’empêchant ainsi de rester confortablement assis.

Jugement

clinique Anouk est âgée de un an. Ses parents aiment bien faire de longues promenades avec leur llette durant les belles journées ensoleillées d’hiver. Devraient-ils appliquer une crème solaire à leur petite au moment de ces promenades ? Justiez votre réponse.

chapeau à large bord et des vêtements en coton tissé serré. Il faut éviter de les exposer au soleil entre 11 h et 16 h. Dans chaque foyer, il est indispensable d’installer un détecteur de fumée et d’en remplacer la pile deux fois par année. Les vêtements de nuit pour enfants doivent être ajustés et en matière ininammable. L’élaboration d’un plan d’évacuation est un autre élément important à prévoir. Les ls électriques au sol représentent un danger immédiat de brûlures pour les nourrissons. Il faut

placer les ls électriques sous tension hors de la portée des enfants pour qu’ils ne puissent ni les mordre ni en briser le revêtement de caoutchouc. Comme la salive est un excellent conducteur, l’enfant risque, en mordant les ls, de s’iniger de graves brûlures autour de la bouche. Les prises de courant devraient être munies de bouchons cacheprise en plastique empêchant l’enfant de toucher ou de sucer la prise, ou d’y insérer un objet (Santé Canada, 2016a). Tout élément producteur de chaleur doit être sécurisé dès que le nourrisson rampe : poser un solide écran devant les foyers, poser un grillage sur les radiateurs de plancher afin d’empêcher les enfants de ramper par-dessus et placer les radiateurs portatifs en hauteur. L’utilisation d’humidicateurs à vapeur froide est à privilégier.

Autres types de blessures corporelles Les attaques d’animaux représentent un danger qui n’est pas toujours reconnu pour les jeunes enfants. En tant que nouveau venu à la maison, le nourrisson sans défense peut provoquer la jalousie chez les animaux domestiques, en particulier chez les chiens et les chats (SCP, 2016g). Les parents doivent exercer une vigilance constante afin de protéger leur enfant contre les animaux de compagnie.

Soins inrmiers BLESSURES ET TRAUMAS

Tableau 3.1W : Résumé des mesures préventives à prendre pour les nourrissons selon les types de blessures.

Plus des deux tiers des blessures subies par les enfants se produisent à la maison. Il est impossible de prévenir tous les dangers. Toutefois, les renseignements fournis par l’inrmière contribuent de façon importante à réduire leur incidence par des mesures de prévention dans l’environnement et par la promotion de comportements sécuritaires (Anderst, Teran, Dowd et al., 2015). Par une connaissance approfondie des risques de blessures par tranche d’âge, l’inrmière devient mieux outillée pour soutenir adéquatement les parents. Les inrmières des soins ambulatoires, des centres de maintien de la santé ou en santé communautaire sont bien placées pour donner de l’information à ce sujet. Les inrmières des hôpitaux peuvent aussi proter des heures de visites pour en discuter. Bien que la femme qui vient

86

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

d’accoucher reçoive rapidement son congé et que l’inrmière ait peu de temps pour renseigner les parents, la période d’hospitalisation est particulièrement propice à la discussion sur la sécurité des nourrissons . Après avoir expliqué les facteurs de risque et les mesures préventives, des feuillets ou toute autre source d’information valide sur le sujet peuvent être remis aux parents ; l’inrmière peut aussi les diriger, au besoin, vers des sites Web pertinents. La mise à jour continue des recommandations en sécurité est une responsabilité professionnelle soutenue par les programmes en pédiatrie. Les parents devraient être encouragés à suivre des cours de premiers répondants (p. ex., la technique à appliquer s’il y a étouffement) et de réanimation cardiorespiratoire pour les jeunes enfants an de réagir efcacement aux problèmes potentiels.

3.2.5

Préoccupations courantes des parents

Angoisse de séparation et peur des étrangers Un certain nombre de peurs apparaissent parfois au début de l’enfance. Toutefois, l’angoisse de séparation et la peur des étrangers, qui surviennent vers l’âge de huit ou neuf mois, sont celles qui préoccupent le plus les parents (Kossowsky, Wilhelm, Roth et al., 2012). Bien qu’elles soient interprétées à tort par certains comme le signe d’un comportement antisocial indésirable, l’angoisse de séparation et la peur des étrangers témoignent d’un attachement parent-enfant solide et sain. Néanmoins, cette période peut présenter des difcultés pour les parents qui peuvent se sentir connés à la maison parce que l’enfant accepte très mal les personnes qu’il ne connaît pas FIGURE 3.11. Pour habituer le nourrisson à de nouvelles personnes, les parents sont encouragés à recevoir proches et amis à la maison. Les nourrissons ont besoin d’occasions pour entrer en contact avec des étrangers en toute sécurité. Habituellement, vers la n de la première année, les nourrissons commencent à s’aventurer loin des parents et à manifester de la curiosité envers les étrangers. S’ils peuvent explorer leur environnement à leur propre rythme, la plupart des enfants nissent par être à l’aise avec les personnes inconnues. La meilleure approche à adopter pour l’étranger face au nourrisson, y compris pour l’inrmière, est de parler doucement, de se positionner au niveau des yeux du nourrisson pour avoir l’air plus petit, de garder une distance sécuritaire, et d’éviter de faire des gestes soudains ou envahissants. Il se peut aussi que les parents se demandent s’ils doivent encourager chez leur enfant un comportement qu’ils considèrent comme dépendant. Il faut rassurer les parents en leur expliquant qu’un tel comportement est sain, désirable et nécessaire au développement affectif optimal de l’enfant. Si les parents sont en mesure de rassurer l’enfant sur la permanence de leur présence, ce dernier ressentira que ses parents sont présents, même s’ils ne le sont pas physiquement. En parlant à l’enfant lorsqu’il quitte la pièce, en faisant en sorte qu’il entende sa voix lorsqu’il parle au téléphone et en utilisant des objets transitionnels (p. ex., une couverture ou un jouet favori), le parent le rassure sur sa présence continue 13 .

Services de garde à l’enfance Même si les parents savent qu’ils représentent les personnes les plus importantes pour l’enfant, les contraintes professionnelles actuelles obligent plusieurs parents à avoir recours aux services de

garde à l’enfance. La peur de laisser l’enfant trop tôt ou encore le souci de bien choisir la structure d’accueil constituent des préoccupations majeures pour les jeunes parents. Au cours du dernier quart de siècle, le taux d’emploi chez les Canadiennes ayant des enfants est monté en èche. En 2014, le taux d’emploi des femmes s’établissait à 82 %, par rapport à 76 % en 1990 (Statistique Canada, 2017). Ces changements sociaux en matière de vie familiale ont nécessité la mise en place de politiques en services de garde (ministère de l’Emploi et du Développement Social Canada [EDSC] 2017).

3

Les pays qui ont un sysFIGURE 3.11 L’enfant peut mettre du tème bien établi de services temps à accepter la gardienne. éducatifs et de garde de très jeunes enfants en récoltent les bénéfices à moyen et long terme avec l’amélioration de la situation des mères de famille, la diminution de la pauvreté infantile et une diminution du taux de décrochage scolaire (EDSC, 2017). Les investissements gouvernementaux en services de garde peuvent atténuer considérablement les effets néfastes de la pauvreté chez les enfants (Geoffroy, Séguin, Lacourse et al., 2012). Il est de plus en plus reconnu que la fréquentation d’un enfant dans un service de garde de qualité a un effet sur la réussite scolaire future, puisqu’elle favorise le développement psychosocial et cognitif (ministère de la Famille et des Aînés du Québec, 2013). L’inrmière peut encourager les parents à proter des nombreux bienfaits liés à la fréquentation des jeunes enfants d’un service de garde éducatif de qualité, surtout pour ceux qui accusent des retards dans le développement du langage. L’intégration d’un enfant en milieu de garde familial ou en installation implique une période de transition affective pour l’enfant et pour ses parents (SCP, 2016j). L’inrmière et les éducatrices doivent s’informer des perceptions et des attentes des parents par rapport à la séparation d’avec l’enfant, car cela a une incidence sur son adaptation affective. Pour favoriser le choix d’un service de garde approprié, les parents peuvent préparer une liste de questions et de critères qui les aidera à prendre une décision. Une fois qu’ils auront effectué le choix du service de garde, l’inrmière peut proposer différents moyens pour faciliter l’adaptation de l’enfant et de sa famille ENCADRÉ 3.8.

Chapitre 3

13 L’angoisse de séparation dans un contexte d’hospitalisation est abordée dans le chapitre 13, Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation.

Croissance, développement et promotion de la santé

87

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 3.8

Intégration de l’enfant au service de garde

• Planier une visite des lieux avant de choisir l’endroit. • Passer quelques heures par jour avec l’enfant an que celui-ci se familiarise avec son nouvel environnement et s’habitue graduellement à une séparation d’avec ses parents. • Offrir un réconfort physique additionnel pour que l’enfant ne se sente pas abandonné. • Laisser à l’enfant un objet familier pour se réconforter et pour établir une continuité avec la maison. • Ne pas quitter le service de garde sans en aviser l’enfant (lui dire à bientôt, l’embrasser, etc.). 9 Les maladies transmissibles pendant l’enfance sont détaillées dans le chapitre 9, Maladies infectieuses et immunisation.

Par ailleurs, l’enfant qui fréquente un service de garde est davantage exposé aux infections 9 . En somme, la première année de vie est une période cruciale du développement moteur et cognitif de l’enfant, et d’adaptation pour les

parents. L’inrmière doit encourager les parents à exprimer leurs préoccupations an de préciser leurs besoins d’apprentissage et de partager avec eux de l’information pertinente qui les aidera à mieux vivre cette période TABLEAU 3.11.

3.3

Croissance et développement du trottineur (1-3 ans)

Entre un et trois ans, le trottineur vit une période d’exploration intense de son environnement au cours de laquelle il cherche à savoir comment les choses fonctionnent. Il essaie aussi de contrôler les autres, et peut le faire au moyen de crises de colère, de négativisme et d’obstination. Les parents et l’enfant apprennent à se connaître.

3.3.1

Croissance et développement général

Chaque trottineur se développe à son rythme sur les plans physique, sensoriel, cognitif et psychologique TABLEAUX 3.12 et 3.13.

Soutien inrmier TABLEAU 3.11

Aider les parents de nouveau-nés et de nourrissons à améliorer leurs pratiques parentales

PÉRIODE

ACTIVITÉS SUGGÉRÉES

De la naissance à 28 jours

• Encourager les parents à : – observer l’enfant pour apprendre à le connaître et à comprendre ses besoins ; – répondre aux pleurs du nouveau-né dès que possible, ce qui le rassure sur le fait que quelqu’un s’occupe de lui et va répondre à ses besoins ; – repérer et utiliser les stimulus externes qui calment ou stimulent l’enfant (musique, voix, toucher) ; – interagir avec l’enfant ; le regarder, lui parler, le toucher délicatement, chanter, le prendre dans ses bras ; – respecter les moments durant lesquels le nouveau-né a moins besoin d’interaction. • Encourager les autres membres de la fratrie, s’il y en a, à s’impliquer auprès du nouveau-né.

De 29 jours à 6 mois

• Encourager les parents à poursuivre ce qui a été commencé avec le nouveau-né et à : – favoriser une certaine structure dans la journée du nourrisson (dans les périodes d’éveil, l’attention du nourrisson pour le jeu est d’environ 15 minutes par heure) ; – continuer à interagir avec le nourrisson : aller au parc, visiter des amis, etc. ; – parler au nourrisson, lui lire une histoire (ces activités stimulent le développement des habiletés langagières) ; – continuer de répondre aux pleurs dès que possible ; distinguer les différents pleurs, ceux liés à la faim, au besoin d’interaction, à une couche souillée, etc. • Aider les parents à comprendre l’enfant en connaissant mieux les liens entre son tempérament et son comportement. • Sensibiliser les parents à l’importance de se garder du temps pour eux.

De 6 à 12 mois

• Encourager les parents à poursuivre ce qui a été commencé et à procurer à l’enfant des moments pour apprendre à se déplacer au sol en toute sécurité. • Discuter avec les parents des questions entourant l’angoisse de séparation en lien avec les services de garde. • Aborder avec les parents la question de l’établissement des limites et de la discipline.

88

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

TABLEAU 3.12

Développement général du trottineur

Caractéristiques physiques et motricité

Développement sensoriel et cognitif

• Contrôle du corps : sphincter vésical, puis anal

• Développement de la vision binoculaire

• Acquisition de la marche entre 12 et 18 mois environ

• Identication des formes

• Course les jambes écartées

• Intérêt pour les images

• Montée et descente d’escaliers avec appui

• Premiers éléments du langage : adjectifs, noms, adverbes, pronoms

• Acquisition du saut et équilibre • Dentition complétée vers 3 ans avec 20 dents de lait • Habiletés : construction de tours, empilage de cubes, vissage et dévissage, dessin

TABLEAU 3.13

Transductif : Raisonnement qui établit un lien de causalité entre deux événements sur la seule base de leur proximité dans le temps (p. ex., le trottineur croit que si deux événements ont lieu simultanément, l’un doit être la cause de l’autre, ou qu’un trait caractéristique d’une personne peut être transféré à une autre).

Développement psychologique du trottineur

Selon Freud

Selon Erickson

Selon Piaget

Selon Kohlberg et Fowler

Concept de soi

• Intérêt pour la région anale

• Acquisition de l’autonomie

• Égocentrisme

• Obéissance pour éviter la punition

• Connaissances des parties de son corps

• Apprentissage de la continence (répercussions durables sur la personnalité de l’enfant)

• Maîtrise du corps et de l’entourage

• Imitation sans compréhension du sens ou de l’importance de ses faits et gestes

• Estime de soi liée au sentiment de sécurité

• Exploitation des compétences motrices

• Compréhension du monde par sa propre perspective

• Imitation

• Pensée préopératoire : ne peut pas faire de déductions

• Sentiment de honte et doute

• Raisonnement intuitif, puis transductif

• Notions du bien et du mal

• Aucun lien entre la compétence et l’approbation sociale

Soins inrmiers TROTTINEUR

En prenant en compte l’ensemble du déve ­ loppement psychologique du trottineur, l’inr­ mière se souvient que l’enfant de cet âge est dans une période de transition entre, d’une part, un état de très grande dépendance envers ses parents et, d’autre part, un désir d’autonomie où il se considère de plus en plus comme un être distinct, créatif et puissant (Burns, Dunn, Brady et al., 2017). L’inrmière aborde l’enfant en tenant compte de cette dualité. En observant attentivement le comportement du trottineur, elle évalue les besoins de ce dernier d’explorer et d’être autonome, et elle les compare à son besoin de rester à proximité de ses parents. Elle adapte ses interventions en conséquence en

respectant le stade de développement de l’en­ fant. Par exemple, elle peut laisser le trottineur se déshabiller seul, lui coner un objet à tenir dans la main ou le laisser ouvrir un placard, mais se contenter de l’aider à lacer ses souliers. Elle encourage et valorise les efforts du trottineur pour parler et pour réussir des choses par lui­ même tout en lui montrant qu’elle comprend son besoin de maintenir un lien étroit avec ses parents. En présence de ceux­ci, l’inrmière continue de soutenir les pratiques parentales qui favorisent un lien d’attachement sécurisant en les encourageant à offrir à leur enfant soutien et réconfort tout en lui permettant d’explorer son environnement de façon sécuritaire et de faire des découvertes.

Chapitre 3

Croissance, développement et promotion de la santé

89

3

3.3.2

Promotion de saines habitudes de vie chez les trottineurs (1-3 ans)

Alimentation De 12 à 24 mois, le rythme de croissance ralentit, et les besoins de l’enfant en calories, en protéines et en liquides diminuent (Doré et Le Hénaff, 2017). Cependant, les besoins en protéines et en calories demeurent relativement élevés, car les tissus musculaires sont en pleine croissance, et le niveau d’activité est élevé. Durant le début de l’enfance, les besoins en vitamines et en minéraux augmentent légèrement.

Comportement alimentaire Vers l’âge de 18 mois, la plupart des trottineurs manifestent une diminution de l’appétit, ce qui correspond à une baisse des besoins nutritionnels ; ce phénomène est connu sous le nom d’anorexie physiologique du trottineur. L’enfant devient difcile et capricieux, et il manifeste de fortes préférences pour certaines saveurs. Le trottineur est de plus en plus conscient du rôle non nutritif des aliments, c’est-à-dire du plaisir de manger, de la dimension sociale des repas et du pouvoir qu’il peut exercer en refusant de la nourriture FIGURE 3.12. Son choix d’aliments est inuencé par des facteurs autres que la saveur. Si un membre de la famille refuse de manger un aliment, l’enfant aura tendance à l’imiter. Si son assiette est trop pleine, il aura tendance Lucas est âgé de deux ans. Ses parents consultent à la repousser, découragé l’inrmière d’une clinique de médecine familiale, devant la quantité offerte. car ils s’inquiètent de l’attitude de leur ls à l’égard Si l’assiette n’est pas appéla nourriture. Il ne peut demeurer assis au moment tissante, il refusera probades repas, mange très peu et refuse parfois catégoblement d’y goûter. En riquement de manger. Nommez deux raisons qui fait, l’heure des repas est peuvent expliquer le comportement de Lucas. davantage inuencée par Quelles suggestions l’inrmière peut-elle faire aux des éléments d’ordre psyparents de Lucas an de s’assurer que celui-ci bénéc ho logique que d’ordre cie d’une saine alimentation ? Nommez-en deux. nutritionnel.

Jugement

clinique

CONSEIL CLINIQUE

En général, la portion pour un trottineur peut être déterminée en comptant la moitié de la portion adulte. Se référer au Guide alimentaire canadien pour les portions.

90

Partie 1

La ritualisation observée à cet âge commande aussi certains principes dans les pratiques alimentaires. Le trottineur aime bien manger dans la même vaisselle à chaque repas. Il peut refuser son aliment préféré simplement parce qu’il lui est offert dans une assiette différente ou parce qu’il a été en contact avec un autre aliment. Chez certains enfants, un horaire régulier des repas contribue à répondre à leurs besoins de prévisibilité et de ritualisation. Si la nourriture est utilisée en guise de récompense ou en signe d’approbation, il peut arriver qu’un enfant mange beaucoup plus sans en avoir besoin. Un enfant ne doit pas être forcé à manger ou à nir son assiette. L’heure des repas devrait

Inrmière, enfant et famille

FIGURE 3.12 Les trottineurs n’associent pas uniquement le repas au besoin primaire de se nourrir.

demeurer un moment agréable. La dimension sociale de l’heure du repas peut distraire les jeunes enfants ; il peut donc être pertinent de les faire manger avant les adultes. Durant un long repas, le trottineur est incapable de rester assis et peut s’agiter. Le fait d’interrompre les jeux 15 minutes avant le repas lui donne le temps de se calmer physiquement et mentalement. La façon de servir la nourriture prend aussi une plus grande importance durant cette période. Le trottineur a besoin d’éprouver un sentiment de contrôle et d’accomplissement en rapport avec ses habiletés. Puisque le trottineur a des manières imprévisibles à table, il est préférable d’utiliser des assiettes et des tasses en plastique, à la fois pour des raisons économiques et de sécurité. Il est recommandé aux parents de laisser le trottineur manger avec ses doigts ou avec une cuillère.

Types d’aliments et quantité En général, il est plus important de se préoccuper du choix des aliments que de la quantité consommée. Les portions doivent être adaptées à l’âge de l’enfant TABLEAU 3.14. Le parent peut offrir à l’enfant un premier aliment, ou un deuxième choix, en remplacement d’un aliment que ce dernier n’apprécie pas, mais il n’est pas tenu de satisfaire tous ses désirs. Le Guide alimentaire canadien représente l’outil par excellence pour un apport sufsant en éléments nutritifs essentiels. Un bon moyen de se souvenir d’un apport quotidien adéquat quant aux portions pour un enfant de 2 à 3 ans, par exemple, est de faire un compte à rebours : 4-3-2-1, ce qui correspond à 4 portions de fruits et légumes, 3 portions de produits céréaliers, 2 portions de lait et substituts, et 1 portion de viandes et substituts. Certains recommandent aussi aux parents de faire conance à l’enfant qui détermine lui-même s’il a faim ou pas (Naître et grandir, 2012). Si le trottineur se voit toujours offrir les mêmes aliments, il n’apprend pas à organiser

l’information sensorielle complexe nécessaire pour apprendre à manger des aliments nouveaux, plus exigeants (p. ex., des légumes d’une texture différente de celle des purées, des fruits à texture glissante). Si les aliments sont servis sous des formes variées, l’enfant peut les sentir, les toucher, les goûter et nir par les accepter. Le sevrage de l’enfant allaité ou nourri de préparations pour nourrissons constitue une transition sur le plan de l’alimentation. La consommation de lait entier (3,25 % de matières grasses), source principale de calcium et de phosphore, devrait en moyenne être de 2 à 3 portions (500 à 750 mL) par jour. Une consommation de lait supérieure à 1 L par jour limite considérablement la consommation d’aliments solides et entraîne une carence en fer et en divers nutriments. Le lait de vache n’est pas une bonne source de fer. Les céréales enrichies en fer et les aliments riches en fer sont donc fortement recommandés. L’inrmière doit être en mesure d’indiquer aux parents les aliments qui contiennent d’excellentes sources de fer ENCADRÉ 3.9. Il faut savoir qu’il existe deux types de fer : • le fer hémique, présent dans la viande et absorbé plus facilement par le corps ; • le fer non hémique, provenant de sources végétales comme les légumineuses, les légumes et les céréales. Pour aider le corps à mieux absorber le fer, ces aliments doivent être combinés avec de bonnes sources de vitamine C comme les oranges, les tomates et les poivrons rouges. Dans certains cas, des suppléments de fer peuvent être nécessaires, et ils seront prescrits par le médecin ou le pédiatre. Jusqu’à l’âge de 2 ans, il faut donner du lait homogénéisé à 3,25 % de matières grasses, car c’est une excellente source d’acides gras essentiels indispensables au développement du cerveau (Doré et Le Hénaff, 2017). Il n’est pas approprié de restreindre la consommation de gras chez les trottineurs, à part celle des acides gras trans et des gras saturés. Avant cet âge, 30 % des calories devraient provenir des gras, et le lait entier est recommandé en tant que source de gras. Chez le trottineur, la consommation de calcium recommandée est de 500 mg par jour. Le lait entier, le fromage, le yogourt, les légumineuses, notamment les fèves, et les légumes, comme le brocoli, le chou vert ou le chou frisé, sont de bonnes sources de calcium. Les céréales et les barres céréalières, ainsi que certains pains blancs, gurent parmi les aliments enrichis de calcium les plus populaires. Selon les recommandations actuelles de Santé Canada (2012a), la dose recommandée de vitamine D est de 600 unités internationales par jour. Or, les préparations de multivitamines qui

TABLEAU 3.14

Exemple de menu d’une journée pour un enfant de 3 ans

DÉJEUNER

DÎNER

SOUPER

• ½ bol de céréales de grains entiers (15 g)

• ½ sandwich au saumon avec pain de blé entier (préparé avec 30 g de saumon en conserve et de la mayonnaise)

• 125 mL de spaghetti avec sauce aux tomates et à la viande (environ 40 g de viande)

• 60 mL de languettes de poivron rouge et tranches de concombre

• 125 mL de compote de pommes

• 125 mL de lait 2 %

• 125 mL de lait

• 125 mL de lait • 1 pêche COLLATIONS

• 60 mL de bâtonnets de carotte et de eurons de brocoli avec vinaigrette

• Céréale d’avoine (15 g)

• ½ banane

• 125 mL de lait

• Eau Source : Santé Canada (2011).

contiennent 400 unités internationales de vitamine D en comprimés ou en liquide sont appropriées si la ration alimentaire est insufsante ou si l’exposition à la lumière solaire est minimale. Le poisson, les huiles de poisson et le jaune d’œuf sont des sources de vitamine D. Par ailleurs, les céréales enrichies, les produits laitiers et la viande sont également de bonnes sources de zinc et de vitamine E.

Santé et hygiène buccodentaire

ENCADRÉ 3.9

Aliments riches en fer

ALIMENTS RICHES EN FER

• Viande : bœuf, agneau, porc, veau, foie, poulet, dinde • Poisson • Œufs • graines et céréales : céréales enrichies de fer, pain complet, pain enrichi, pâtes et riz AUTRES SOURCES DE FER

• Légumineuses : pois chiches, lentilles, pois secs et haricots secs • Légumes : épinards, brocoli, chou de Bruxelles, pois verts, haricots Source : Adapté avec autorisation de Société canadienne de pédiatrie (2012b). Les besoins en fer des bébés et des enfants (mise à jour 2018). Tous droits réservés.

Les recommandations émises pour les nourrissons s’appliquent également aux trottineurs. Généralement, vers l’âge de 3 ans, toutes les dents primaires (20) ont poussé FIGURE 3.13. Une visite chez le dentiste à l’âge de 2 ou 3 ans est utile, puisque le professionnel de la santé pourra évaluer l’efcacité du brossage des dents et dépister les problèmes pour les corriger (ADC, 2017d). La première visite est importante pour rencontrer le dentiste et se familiariser avec le matériel qu’il utilise. Il peut être aidant qu’une personne signicative pour l’enfant donne l’exemple ; l’enfant peut ainsi observer les soins prodigués à son parent, à son frère ou à sa sœur. Chapitre 3

CE QU’IL FAUT RETENIR

Il n’est pas approprié de restreindre la consommation de gras chez les trottineurs, à part celle des acides gras trans et des gras saturés. Avant cet âge, 30 % des calories devraient provenir des gras, et le lait entier est recommandé en tant que source de gras.

Croissance, développement et promotion de la santé

91

3

FIGURE 3.13 Ordre d’apparition et de chute des dents primaires – La majorité des dents primaires apparaissent de l’âge de 1 à 3 ans, et ce n’est qu’au début de l’âge scolaire qu’elles seront remplacées.

Techniques de nettoyage

Jugement

clinique

Il est important de se brosser les dents quotidiennement et Claudie-Anne est âgée de trois ans. Son père selon la bonne technique. Un se demande s’il doit donner des suppléments brossage de dents permet de vitamines à sa lle qui s’alimente très peu. d’éliminer la plaque, qui Nommez deux points pertinents à vérier avant adhère aux dents et cause la de recommander au père d’offrir un supplément carie dentaire et les maladies de vitamines à sa llette. parodontales. Chez l’enfant de plus de un an, la formation de caries est associée à une mauvaise hygiène buccale et à de mauvaises habitudes alimentaires. Le brossage des dents et l’utilisation quotidienne de la soie dentaire constituent les méthodes les plus efficaces d’élimination de la plaque ENCADRÉ 3.10.

La technique du brossage est la suivante. La brosse doit être placée contre les dents avec un angle de 45° an que les poils se situent à la jonction entre les dents et la gencive. Il faut faire un mouvement de la gencive vers les dents, puis nettoyer les faces de chaque dent. Un brossage efcace prend 2 à 3 minutes ; il nécessite la supervision et l’aide des parents, et ce, généralement jusqu’à l’âge de 6 ans FIGURE 3.14 . Le parent peut aider l’enfant à brosser les dents postérieures. Pour un nettoyage efcace, il est recommandé d’utiliser une petite brosse à dents à poils de nylon doux, arrondis, courts et de longueur uniforme. La brosse à dents doit être remplacée aussitôt que les poils sont déformés ou après une infection des

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 3.10

Technique d’utilisation de la soie dentaire chez l’enfant par le parent

• Couper environ 45 cm de soie dentaire et l’enrouler autour du majeur de chaque main, en laissant environ 5 cm de l entre les mains.

• Nettoyer la dent en déplaçant la soie de bas en haut pour les dents du bas, et de haut en bas pour les dents du haut.

• Glisser la soie entre les dents, puis déplacer doucement le l vers la gencive.

• Dérouler la soie au fur et à mesure de son usure.

Source : Adapté de ADC (2017e).

92

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

A

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 3.11

Carie du biberon

Pour prévenir la carie du biberon, l’inrmière doit encourager les familles à avoir une alimentation saine et équilibrée, et à intégrer le brossage des dents dans la routine quotidienne, particulièrement chez les enfants vulnérables. Elle peut aussi consulter des hygiénistes dentaires pour offrir des ateliers éducatifs en santé buccodentaire, en santé communautaire ou dans les milieux de garde.

B

3

sucres, protégeant ainsi les dents contre la carie dentaire (ADC, 2017a). Les trottineurs peuvent souffrir de la carie du biberon, particulièrement ceux issus de milieux défavorisés ENCADRÉ 3.11.

Succion du pouce

clinique

Jugement

La succion est un besoin inné, normal et plus intense pendant Norma est âgée de trois ans. Elle boit du lait les six premiers mois de vie. aux repas et du jus de fruits lorsqu’elle a soif, Vers trois ans, l’enfant ressent ses parents ne l’ayant pas habituée à boire des moins le besoin de sucer. Les boissons gazeuses. Elle adore les frites accompaconséquences potentielles de gnées de sel et de ketchup. Elle aime également cette habitude après l’âge de les bananes au petit déjeuner et les légumes en trois ans peuvent s’avérer plus purée. Elle n’aime pas beaucoup la viande et le ou moins graves sur la croispoisson, mais en mange quand même lorsqu’on sance de sa mâchoire ou la posilui en sert. Parmi les aliments mentionnés, quels tion de ses dents (ADC, 2017b ; sont ceux qui sont cariogènes ? Naître et grandir, 2015a). a) Les frites et le ketchup. L’inrmière peut rassurer les parents en indiquant à quel b) Le lait et les jus de fruits. moment ils doivent encourager c) Les bananes et les légumes. l’enfant à y mettre n pour évid) La viande et le poisson. ter des complications. Il est donc recommandé d’inciter l’enfant de plus de trois ans à cesser ce comportement par une approche constructive en lui donnant du CE QU’IL FAUT RETENIR renforcement positif.

FIGURE 3.14 A Le jeune enfant peut participer au brossage des dents. B Le parent se doit de compléter le brossage pour assurer un nettoyage adéquat.

voies respiratoires. La quantité de dentifrice avec uor recommandée pour un trottineur est de la grosseur d’un petit pois. Une fois les dents nettoyées, le parent passera la soie dentaire pour enlever la plaque. Idéalement, les dents devraient être nettoyées après chaque repas et surtout avant le coucher, et l’enfant ne devrait ni manger ni boire autre chose que de l’eau après le brossage du soir. Lorsque le brossage est impossible, l’enfant peut se rincer la bouche à l’aide d’une gorgée d’eau qu’il avale par la suite. La procédure est répétée trois ou quatre fois.

Habitudes alimentaires et caries L’alimentation joue un rôle critique dans l’acquisition d’une bonne dentition, puisque le processus carieux repose surtout sur la présence de sucres fermentescibles, notamment le saccharose. Le sucre de table rafné, le miel, la mélasse, le sirop de maïs, les barres tendres et les fruits séchés comme les raisins secs sont extrêmement cariogènes. Les glucides complexes comme le pain, les pommes de terre et les pâtes contribuent également à la formation de caries, car ils abaissent le pH de la plaque. Il faut surtout éviter la consommation de sucreries entre les repas. La salive présente au moment des repas neutralise l’acidité des

Sommeil Besoin de sommeil Chez la plupart des trottineurs, le besoin de sommeil diminue très peu au cours de la deuxième année ; il est en moyenne de 12 heures par jour. La plupart font une sieste par jour, puis délaissent progressivement cette habitude vers la n de la deuxième ou de la troisième année. Vers l’âge de 3 ans, la structure de sommeil de l’enfant ressemble à celle de l’adulte ; on dit que le sommeil est consolidé (Martello, 2015). À cet âge, de nombreux enfants ont de légers troubles du sommeil comme les terreurs nocturnes ou les cauchemars ; ils peuvent résister lorsqu’il est temps d’aller au lit (Naître et grandir, 2015b) 7 .

Le sucre de table rafné, le miel, la mélasse, le sirop de maïs, les barres tendres et les fruits séchés comme les raisins secs sont extrêmement cariogènes. 7 Les troubles du sommeil du trottineur sont expliqués dans le chapitre 7, Problèmes de santé du trottineur et de l’enfant d’âge préscolaire.

Soutien aux parents L’instauration d’une routine et d’un horaire régulier pour aller au lit est toujours utile. Toutes les informations données pour les Chapitre 3

Croissance, développement et promotion de la santé

93

nourrissons s’appliquent également aux trottineurs. Il arrive que le trottineur se lève après avoir été couché. Le parent doit limiter le prolongement du rituel du coucher en déterminant la durée et les activités de fin de soirée (p. ex., une dernière histoire). D’autres techniques peuvent être employées afin de faciliter l’endormissement ENCADRÉ 3.12.

Promotion de l’activité physique

Tableau 3.2W : Résumé des mesures préventives à prendre pour les trottineurs selon les types de blessures.

Jusqu’à tout récemment, les jeunes enfants étaient considérés comme étant naturellement actifs. Au cours des 10 dernières années, il est devenu évident que beaucoup d’entre eux ne faisaient pas sufsamment d’activités physiques pour maintenir une bonne santé. Chez les trottineurs, l’activité physique d’intensité moyenne correspond à la course, au saut et aux jeux de ballon ; les enfants ne devraient pas rester inactifs plus de 1 heure de suite, sauf pour dormir (Centre d’excellence pour le développement des jeunes enfants [CEDJE],

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 3.12

Interventions pour faciliter le sommeil du trottineur

• Éviter les siestes trop tard dans la journée, car elles peuvent nuire au sommeil pendant la nuit. • Éviter d’offrir quelque chose à boire à l’enfant avant le coucher. Une vessie pleine peut nuire à une bonne nuit de sommeil. • Commencer à aider l’enfant à se calmer environ une demi-heure avant le coucher, idéalement à la même heure chaque jour. • Adopter une attitude douce mais ferme au sujet du coucher lorsque l’enfant proteste. Source : Adapté de Naître et grandir (2015b).

2011). Il est nécessaire d’informer les parents et de faire auprès d’eux une promotion de l’activité physique, structurée ou non, et de limiter la sédentarité devant les écrans TABLEAU 3.15 .

Prévention des blessures et des traumas Les lésions traumatiques sont la principale cause d’hospitalisation durant l’enfance, et les trottineurs sont les enfants les plus à risque de blessures, compte tenu notamment de leur sexe, de leurs habiletés motrices et leur niveau d’attention (Myhre, Thoresen, Grøgaard et al., 2012) TABLEAU 3.6 .

Noyades La grande majorité des victimes de noyade sont âgées de 1 à 4 ans (Société de sauvetage, 2017). Étant donné leurs habiletés de locomotion plus grandes, les trottineurs sont en mesure d’atteindre des zones potentiellement dangereuses. Comme ils ignorent les dangers de l’eau, la noyade demeure constamment une menace. Les cours de natation pour les enfants et de secourisme pour les adultes, de même que les consignes de sécurité aquatique, sont fortement indiqués et utiles, mais ils ne constituent pas une mesure de protection absolue. L’installation d’une clôture autour de la piscine, bien qu’essentielle, ne réussit pas toujours à empêcher le jeune enfant de se rendre rapidement à la piscine (Santé Canada, 2012d). Lorsque l’enfant est à proximité d’un plan d’eau, il doit porter des vêtements de ottaison qui répondent aux directives des fabricants. De plus, il faut vider l’eau de la pataugeoire après usage et utiliser des tapis antidérapants dans la baignoire. La surveillance étroite et constante par un adulte est de rigueur en tout temps.

Enseignement à l’enfant et à ses proches TABLEAU 3.15

Recommandations pour favoriser l’activité physique chez les trottineurs

ACTIVITÉ PHYSIQUE STRUCTURÉE

ACTIVITÉ PHYSIQUE NON STRUCTURÉE

SÉDENTARITÉ ET TEMPS PASSÉ DEVANT L’ÉCRAN

• Offrir 30 minutes (au total) d’activité physique structurée par jour.

• Offrir de 60 minutes à plusieurs heures d’activité physique non structurée par jour en l’intégrant aux jeux, aux transports et aux loisirs.

• S’assurer que les trottineurs ne consacrent pas plus de 60 minutes consécutives à la pratique d’activités sédentaires (sauf pour dormir).

• Organiser des activités amusantes pouvant être intégrées aux jeux, aux transports et aux activités organisées. • Encourager la pratique d’activités qui aident l’enfant à développer ses habiletés motrices (p. ex., lancer, attraper ou taper dans un ballon).

• Organiser des activités à l’extérieur et des activités de découverte non structurées sous la supervision d’un adulte (p. ex., une promenade au parc, un jeu libre).

• Encourager la pratique d’activités comme les jeux créatifs. • Faire en sorte que les enfants de moins de 2 ans évitent de passer du temps devant la télévision ou les médias électroniques (DVD, ordinateur et jeux vidéo). • S’assurer que les trottineurs de 2 à 3 ans ne passent pas plus de 1 à 2 heures par jour devant l’écran et qu’ils regardent des émissions de qualité. • Ne pas mettre de télévision dans leur chambre. • Inciter les trottineurs à marcher au lieu d’utiliser la poussette.

Source : Centre d’excellence pour le développement des jeunes enfants (2011). L’activité physique chez les jeunes enfants.

94

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

Les blessures résultant d’accidents de la route sont la troisième cause de décès chez les enfants de moins de quatre ans. Elles découlent principalement d’une mauvaise utilisation des sièges ou de l’omission de les utiliser. Un autre danger lié au transport de trottineurs dans un véhicule automobile est le coup de chaleur .

Chutes Les chutes représentent la première cause d’hospitalisation chez les enfants âgés de un à quatre ans. Les facteurs de risque décrits dans la tranche d’âge de zéro à un an sont différents, puisque les trottineurs sont plus mobiles et actifs. Cependant, les informations relatives à la sécurité pour les nourrissons s’adressent également aux trottineurs. D’autres renseignements peuvent être donnés aux parents, en particulier lorsque les enfants commencent à marcher. Les enfants peuvent apprendre comment jouer prudemment au terrain de jeu : éviter de se bousculer sur les glissades élevées ou dans les portiques d’escalade, rester assis sur les balançoires et ne pas s’approcher des balançoires en mouvement (Santé Canada, 2012d). Du gazon, du sable ou des copeaux de bois peuvent être installés sous les équipements de jeu. Les sièges des balançoires doivent être en plastique, en toile ou en caoutchouc, et les rebords doivent être lisses ou arrondis. Les glissades doivent être inclinées selon un angle de moins de 30° et devraient comporter des échelons dont l’écartement est constant et des tunnels de protection. Même si le milieu est protégé, les enfants peuvent trébucher à cause de leurs vêtements. Les chaussettes glissantes ou les semelles lisses, rigides ou caoutchoutées des chaussures peuvent entraîner une chute. Les jambes de pantalon et de pyjama ne doivent pas traîner sur le sol, les chaussures doivent être ajustées et dotées de semelles antiadhésives et antidérapantes, et les lacets doivent être noués. De vrais dispositifs de sécurité devraient être installés à toutes les fenêtres, peu importe leur hauteur. Les meubles devraient être éloignés des fenêtres pour éviter que les enfants ne grimpent dessus et y accèdent. Les portes menant à des cages d’escalier ou à des balcons doivent être fermées à clé, car le trottineur peut aisément les ouvrir. Une barre coulissante ou un crochet xé à une hauteur inaccessible pour l’enfant constituent des dispositifs de verrouillage pratiques ; ces accessoires comportent également un système de fermeture qui ne peut être ouvert par l’enfant. Les balcons, les porches, les plateformes et les marquises présentent tous des risques de chute pour le trottineur plein d’énergie. Les dimensions des garde-fous et des balustrades doivent être adéquates et ne pas dépasser 10 cm d’ouverture.

Les lits avec barreaux sont une autre cause de chutes chez le trottineur. Pour éviter ces accidents, il faut garder les barreaux du lit complètement relevés, et le matelas, le plus bas possible. Il faut retirer les jouets et le contour de lit qui peuvent être utilisés comme appui pour sortir du lit. Dès que l’enfant mesure 90 cm, il est recommandé de remplacer son lit à barreaux par un lit d’enfant. Les mesures de sécurité des lits pour enfants précédemment décrites pour les nourrissons restent valables pour les enfants de un à quatre ans.

Empoisonnements

ALERTE CLINIQUE

Il ne faut jamais laisser les enfants dans une voiture sta­ tionnée ; de plus, il faut vérier la température des dispositifs de retenue (idéalement de couleur pâle, puisqu’ils absor­ bent moins la chaleur). Si ces dispositifs sont trop chauds, il faut les recouvrir pour éviter de brûler l’enfant.

clinique

Ce sont les enfants âgés de 12 à 36 mois qui sont les plus à Francis est âgé de 14 mois. Il commence tout juste risque de subir un empoisonà marcher, mais, la plupart du temps, il se traîne nement, puisque le fait de encore. Comme ses parents sont soucieux de sa porter des objets à leur bouche sécurité, ils ont installé une barrière devant fait partie de leur processus l’escalier du hall d’entrée et ils ne laissent rien d’exploration. Contrairement traîner sur le plancher. Francis porte toujours des au nourrisson, le trottineur vêtements ajustés à sa taille. Il cherche parfois à peut accéder à des produits grimper sur le bord d’une fenêtre, mais elles sont dangereux contenus dans des munies d’une moustiquaire. Sa chaise haute est tiroirs ou des armoires près de la table. Quelles sont les deux caractéris­ FIGURE 3.15 . En procédant tiques de l’environnement de Francis susceptibles par essais et erreurs, le trottide provoquer une chute ? neur peut réussir à enlever le couvercle des bouteilles, des contenants de plastique, des bombes aérosol et des bocaux, y compris ceux à l’épreuve des enfants. Beaucoup de produits d’entretien domestique, de médicaments et de plantes représentent un risque de toxicité s’ils sont ingérés, mis en contact avec 7 les yeux ou la peau, ou inhalés (Santé Canada, La toxicité des plantes 2012c). Le plomb est toxique pour l’organisme. Ce et les intoxications par métal lourd peut être présent dans les bijoux et la les métaux lourds peinture des murs, des meubles ou des jouets, sont détaillées dans le ainsi que les boîtes de conserve venant de pays chapitre 7, Problèmes de autres que le Canada et les États-Unis 7 . Il santé du trottineur et de faut donc veiller à éviter ce type de jouets et de l’enfant d’âge préscolaire. meubles, et rafraîchir la peinture des murs, si c’est nécessaire.

Jugement

Accidents de la circulation

FIGURE 3.15 Les tiroirs et les armoires contenant des produits dangereux devraient être verrouillés. Chapitre 3

Croissance, développement et promotion de la santé

95

3

Au Québec, le Centre antipoison offre un service téléphonique de consultation spécialisée en toxicologie, 24 heures sur 24. Le numéro de téléphone du Centre antipoison est le 1 800 463-5060.

Un empoisonnement est rarement mortel, mais il peut causer des problèmes importants et toucher notamment les systèmes nerveux, digestif et rénal. Les comportements sécuritaires, l’environnement physique et la surveillance des parents ou des personnes qui gardent l’enfant sont des éléments de prévention que l’inrmière doit promouvoir dans son enseignement. Il est fortement recommandé d’installer des loquets aux portes d’armoires et de ranger les substances toxiques dans une armoire verrouillée. En l’absence de contenants protègeenfants, les médicaments, l’alcool, les vernis à ongles et tout produit d’entretien domestique doivent être conservés hors de la portée des enfants. Il est recommandé de suspendre les plantes ou de les placer sur des surfaces élevées plutôt que sur le sol. En 2009, Santé Canada a émis des inquiétudes quant à l’innocuité des produits contre la toux et le rhume ou de tous les médicaments en vente libre offerts pour les enfants âgés de moins de six ans. L’autorité sanitaire a fourni une liste de médicaments jugés dangereux. Il est donc suggéré d’administrer à ces enfants uniquement les médicaments qui sont recommandés par un professionnel de la santé (Santé Canada, 2016b).

Brûlures ALERTE CLINIQUE

Éloigner les trottineurs : • des objets très chauds ou inammables : théières, cafetières, chandelles, bâtons d’encens ; • des produits du tabac : cigarettes, allumettes, briquets ; • des ustensiles de cuisson ; • des cheminées ou des barbecues.

Jugement

clinique

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Patrice est âgé de trois ans. Son père lui a confectionné une fusée à partir de boîtes de carton vides. L’enfant aime y jouer et il s’est même endormi à l’intérieur. Y a-t-il un danger de suffocation ? Justiez votre réponse.

Partie 1

La majorité des mesures préventives expliquées dans la section du nourrisson sont valables pour le trottineur. Les brûlures thermiques les plus fréquentes chez ces enfants sont celles causées par l’eau bouillante. Il est recommandé d’utiliser des napperons plutôt qu’une nappe, car l’enfant pourrait tirer sur une extrémité de la nappe et faire tomber des liquides chauds ainsi que des objets lourds ou pointus . Les vêtements amples peuvent s’enammer plus facilement. Il est préférable de choisir les vêtements en polyester ou en nylon, car ils s’enamment moins que ceux en coton (Santé Canada, 2012c). L’électricité demeure un danger. En effet, le trottineur peut explorer les prises de courant au moyen de petits objets conducteurs et il risque de se brûler les doigts ou la bouche, voire de s’électrocuter. L’installation de bouchons cache-prise est recommandée FIGURE 3.16. Il est nécessaire d’informer l’enfant du danger lié à l’électricité et d’accroître la surveillance.

Étouffement et suffocation Les cas d’aspiration de corps étrangers sont fréquents jusqu’à l’âge de quatre ans. Les mesures préventives mentionnées pour les nourrissons sont aussi pertinentes pour les trottineurs. Il faut continuer de choisir les jouets en tenant compte des dangers que peuvent présenter les pièces de petite taille.

Inrmière, enfant et famille

FIGURE 3.16 L’installation de bouchons cache-prise en plastique dans les prises de courant empêche les enfants d’y glisser leurs doigts.

L’étouffement par enfermement est à considérer. Les vieux réfrigérateurs, fours et autres gros électroménagers, ainsi que les coffres de voiture, sont une menace constante. Le trottineur peut pénétrer à l’intérieur de ces habitacles, en fermer la porte et rester enfermé à l’intérieur. Pour éviter ces accidents tragiques, il faut retirer les portes des vieux appareils avant de s’en débarrasser ou de les entreposer. Les coffres d’auto ne devraient jamais être laissés ouverts sans surveillance. Le trottineur risque aussi la suffocation si un couvercle de coffre à jouets se referme accidentellement sur lui.

Autres lésions corporelles Les enfants de ce groupe d’âge demeurent malhabiles sur plusieurs plans. Ils risquent de se blesser sérieusement avec des objets pointus et tranchants ou en marchant avec de la nourriture ou un objet dans la bouche, comme une cuillère. Il est important de garder les objets tranchants hors de la portée de l’enfant. Les articles longs et pointus tels que les fourchettes ou les cure-dents peuvent occasionner des blessures graves aux yeux ou aux oreilles. Il faut ranger ces articles hors de la portée des enfants et il est préférable d’éviter de donner une fourchette à l’enfant pour se nourrir jusqu’à ce qu’il ait maîtrisé l’utilisation de la cuillère, habituellement vers l’âge de 18 mois. Il est très important d’enseigner au trottineur les principes en matière de sécurité en lui donnant des consignes simples. Les tondeuses à gazon, les articles de jardinage et les taille-bordures motorisés sont des équipements particulièrement dangereux à cause de leur aspect tranchant et de leur capacité à projeter des cailloux et autres projectiles. Les fenêtres, les portes vitrées et les décorations en verre sur les tables peuvent être des sources de blessures. Il faut aussi interdire aux petits de courir, de sauter, de se bousculer ou de jouer à la balle près des structures en verre.

Les portes de garage à ouverture électrique sont une autre cause de décès par lésions traumatiques. Le trottineur peut se retrouver coincé sous la porte, même si les modèles installés à partir de 1993 sont conçus pour que le mouvement de la porte s’inverse si elle heurte un objet. Il faut expliquer au trottineur de ne pas tenter de franchir une porte de garage en mouvement. Le rangement de la manette de commande hors de la portée des enfants gure parmi les précautions à prendre. Par ailleurs, il faut s’assurer périodiquement que le mouvement de la porte s’inverse lorsque celle-ci heurte un objet. Une mesure de précaution supplémentaire consiste à installer un œil magique au niveau du sol pour prévenir la fermeture de la porte lorsqu’un objet est détecté dans l’entrée.

Les objets lourds devraient être placés sur un meuble bas et stable. Entre 1990 et 2007, les blessures dues à des téléviseurs ou à des meubles tombés sur des enfants se dénombraient à environ 9 000 cas par année, dont 70 % concernaient des enfants âgés de 1 à 3 ans (ASPC, 2009). Les enfants peuvent grimper et faire basculer des meubles qui peuvent contenir des objets lourds pouvant causer des blessures graves, notamment un trauma crânien. Il est également recommandé d’être prudents avec les animaux domestiques. Les trottineurs ne doivent pas les prendre pour des jouets, les surprendre, entrer sur leur territoire, leur enlever leurs jouets, les importuner pendant qu’ils mangent ou s’approcher d’eux sans l’accord du maître.

D’autres mesures de sécurité sur les meubles sont détaillées dans le document intitulé Attention ! Des meubles et télévisions peuvent basculer et tomber sur des enfants pouvant être consulté sur le site Web de Santé Canada au www.canada.ca/fr/santecanada.html.

Soins inrmiers PRÉVENTION DES BLESSURES ET DES TRAUMAS

Il est essentiel d’avoir une bonne connaissance du développement et des capacités des trottineurs. L’inrmière, en particulier celle qui travaille dans des unités de soins ambulatoires, en pédiatrie et en santé communautaire, occupe une position clé pour sensibiliser et soutenir les parents dans la prévention des blessures des enfants de ce groupe d’âge. Il n’est pas facile d’enseigner la sécurité aux trottineurs et de les surveiller sans les surprotéger ou les restreindre inutilement et dire constamment non. Le renforcement positif est efficace FIGURE 3.17. C’est habituellement pour prévenir les blessures que les parents établissent une discipline et des limites. Ces dernières doivent être cohérentes et adaptées à l’âge de l’enfant, et lui permettre d’explorer son environnement. Les petites chutes aident les enfants à prendre conscience des dangers, des hauteurs. Toucher un objet chaud une fois permet à l’enfant d’expérimenter la douleur résultant d’une brûlure. Les parents doivent se rappeler que les jeunes enfants ne peuvent pas anticiper les dangers . Ils ne comprennent pas les concepts de cause et d’effet ; en conséquence, ils ne peuvent pas attribuer une signication aux expériences ni aux dangers potentiels. Bien qu’il soit utile d’expliquer pourquoi une chose est dangereuse, il faut toujours éloigner les jeunes enfants de la source du danger. Lorsque les enfants apprennent la signication du mot non, il faut également leur apprendre celle du mot oui. Il faut les féliciter lorsqu’ils jouent avec des objets convenables, renforcer les efforts qu’ils font pour bien se comporter ou les écouter, et leur fournir des jouets innovateurs et créatifs. Par exemple, les enfants aiment déchirer du papier ; plutôt que de les réprimander ou de les restreindre

s’ils déchirent les pages d’un livre ou d’un magazine, il faudrait garder à portée de la main des livres à l’épreuve des enfants (p. ex., des livres en tissu). Si les enfants aiment s’amuser avec des chaudrons et des casseroles, il est possible de mettre dans une armoire qui leur est accessible des ustensiles avec lesquels ils pourront jouer sans danger.

FIGURE 3.17 Le renforcement positif est efcace pour aider le trottineur à observer les consignes.

Offrir du soutien aux parents par les soins à domicile

Les visites à domicile, les consultations téléphoniques et les ateliers éducatifs en prévention doivent être intégrés dans les interventions de l’inrmière. En plus de fournir de l’accompagnement pour prévenir les blessures et les traumas, l’une des responsabilités de l’inrmière consiste à fournir aux parents des occasions d’exprimer leurs sentiments et à les aider à trouver des moyens pour répondre à leurs besoins physiques, mentaux et spirituels. Pour ce faire, l’inrmière peut les orienter vers des ressources communautaires ou vers d’autres professionnels. Les parents aux prises avec des difcultés liées à l’éducation d’un enfant apprécient le fait de pouvoir exprimer leurs sentiments, leurs frustrations et leurs satisfactions. Ils ont besoin de côtoyer d’autres adultes, d’être libérés à l’occasion des responsabilités liées à l’éducation des enfants et d’être périodiquement séparés de ces derniers. Ils doivent être soutenus dans la mise en place des limites et des mesures préventives fermes, constantes et douces auprès des enfants.

Chapitre 3

CE QU’IL FAUT RETENIR

C’est habituellement pour prévenir les blessures que les parents établissent une discipline et des limites. Ces dernières doivent être cohérentes et adaptées à l’âge de l’enfant, et lui permettre d’explorer son environnement.

ALERTE CLINIQUE

Chez les trottineurs, les blessures ne sont pas forcément un signe de négligence parentale.

Croissance, développement et promotion de la santé

97

3

3.3.3

Préoccupations courantes des parents

Apprentissage de la continence La majorité des trottineurs deviennent continents entre l’âge de deux à quatre ans (SCP, 2016c). L’inrmière doit prendre le temps de parler avec les parents, de les écouter, de valider leurs croyances et les valeurs liées à l’apprentissage de la continence. Le fait de discuter avec l’inrmière et de recevoir de l’information peut permettre aux parents de démystier certaines croyances, d’avoir des attentes réalistes, de découvrir que chaque enfant a sa propre réceptivité, et de situer ce processus dans un intervalle de trois à six mois, en moyenne, lorsque l’enfant est prêt. Le contrôle volontaire des sphincters, vésical et anal, s’amorce généralement entre 18 et 24 mois. La réceptivité physiologique précède la réceptivité psychologique (SCP, 2016c). Ainsi, des facteurs psychophysiologiques complexes doivent être en place pour que l’enfant puisse amorcer cette étape. L’enfant doit être en mesure de reconnaître l’urgence de son besoin, de le retenir et d’en faire part à son parent. Il doit également avoir la motivation de plaire à son parent en se retenant plutôt que de se faire plaisir en se laissant aller à son envie. Il n’y a pas d’unanimité sur le moment où il faut amorcer l’apprentissage de la continence, pas plus que sur l’âge auquel un enfant devrait être

TABLEAU 3.16

dénitivement continent. De récentes études ont démontré que l’âge de l’apprentissage de la continence était retardé par rapport aux générations précédentes (Wu, 2013). La disposition de l’enfant à intégrer la continence repose sur cinq éléments : la maturité de la vessie, la maturité des intestins, ainsi que la préparation sur les plans cognitif, moteur et psychologique (Kimball, 2016). Entre 18 et 24 mois, l’enfant maîtrise la plupart des mouvements globaux nécessaires et peut communiquer de façon intelligible. Il est moins mené par son désir de s’afrmer et est conscient de sa capacité de contrôler son corps et de plaire au parent. L’une des responsabilités les plus importantes de l’inrmière consiste à aider les parents à reconnaître les signes indicateurs de l’état de préparation chez leur enfant, et non à imposer l’apprentissage de la propreté TABLEAU 3.16. En général, les lles sont prêtes de deux à deux mois et demi plus tôt que les garçons (SCP, 2016c). Il est important de respecter le rythme de chaque enfant dans cet apprentissage. Il faut que cette expérience soit positive, et que l’enfant soit prêt physiologiquement et émotivement (Doré et Le Hénaff, 2017). Le contrôle nocturne de la vessie ne s’acquiert habituellement que plusieurs mois après le début de l’apprentissage de la continence de jour, et peut même prendre plusieurs années. Cela s’explique par le fait que le cycle du sommeil se doit d’être sufsamment développé pour permettre à l’enfant

Évaluation de l’état de préparation pour l’apprentissage de la continence

DOMAINE

CRITÈRES D’ÉVALUATION

Maturité physique de l’enfant

• Contrôle volontaire des sphincters, vésical et anal, habituellement vers l’âge de 18 à 24 mois • Capacité de demeurer au sec pendant 2 heures ; réduction du nombre de couches mouillées ; couche sèche au réveil après la sieste • Évacuation intestinale régulière • Capacité d’effectuer des activités de motricité globale (s’asseoir, marcher, s’accroupir) • Capacité d’effectuer des activités de motricité ne (retirer ses vêtements)

Maturité cognitive de l’enfant

• Reconnaissance du besoin de déféquer ou d’uriner • Capacité de communiquer de façon verbale ou non verbale pour informer le parent du besoin de changer de couche, ou de déféquer ou d’uriner • Capacités cognitives pour imiter les comportements appropriés et suivre les consignes

Maturité psychologique de l’enfant

• Manifestation d’une volonté de plaire au parent • Capacité de rester assis sur les toilettes pendant 5 à 10 minutes sans rechigner ou se lever • Curiosité à l’égard des habitudes d’élimination des adultes ou des frères et sœurs aînés • Intolérance à une couche mouillée ou souillée ; expression du désir d’être changé immédiatement

État de préparation du parent

• Prise de conscience de la capacité de l’enfant de faire l’apprentissage de la continence • Disposition à investir le temps nécessaire à l’apprentissage de la continence • Absence de stress ou de changement dans la famille, comme un divorce, un déménagement, la venue d’un nouveau bébé ou des vacances imminentes

98

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

de se réveiller à temps pour uriner. Il arrive que l’enfant vive un épisode d’énurésie nocturne même lorsqu’il est tout à fait continent le jour. Aussi, un enfant sur six âgé de cinq ans peut encore mouiller son lit la nuit (Association des urologues du Canada, 2014). Ce problème héréditaire se corrige habituellement sans traitement quand l’enfant grandit. Quelquefois, un parent ou les deux en ont souffert durant leur enfance. L’inrmière conseillera aux parents de consulter le médecin si l’enfant n’est toujours pas continent la nuit après l’âge de six ans (Thurber, 2017). Le contrôle des intestins s’acquiert habituellement avant celui de la vessie en raison d’une activité plus régulière et plus prévisible. L’envie de déféquer est une sensation plus forte que celle d’uriner, et elle peut être portée à l’attention de l’enfant. Un régime équilibré comportant sufsamment de bres alimentaires contribue à ramollir les selles ainsi qu’à assurer et à maintenir la régularité. Nombre de techniques peuvent faciliter l’apprentissage de la continence et, à cet égard, les différences culturelles doivent être prises en compte. Les parents devraient commencer par expliquer à l’enfant comment le corps fonctionne en ce qui a trait à l’émission d’urine et de selles. L’apprentissage de la continence doit être aussi simple et facile que possible. Ainsi, le choix de vêtements que porte l’enfant est un facteur important à considérer (culotte, couche à enler, etc.). Un siège percé autoportant procure un sentiment de sécurité à l’enfant, en plus de lui permettre d’appuyer fermement les deux pieds sur le sol, ce qui facilite l’expulsion des selles. L’utilisation d’un siège portable xé à l’occasion sur les toilettes peut faciliter la transition entre le siège percé et les toilettes ordinaires FIGURE 3.18. Un petit

banc placé sous les pieds de l’enfant lui procure plus de stabilité. Il est préférable de laisser le siège percé dans la pièce où sont les toilettes et de permettre à l’enfant d’observer comment ses excréments sont évacués pour qu’il en vienne à associer ces gestes à des pratiques courantes. En l’absence d’un siège percé, il est possible d’asseoir l’enfant face au réservoir des toilettes pour lui permettre un meilleur appui. Les séances de pratique ne doivent pas dépasser quelques minutes, et l’un des parents doit demeurer avec l’enfant et appliquer des mesures d’hygiène après la séance. Il faut féliciter l’enfant pour son attitude collaboratrice ou une élimination réussie. Établir une routine d’élimination (avant les repas, au réveil, au coucher) et encourager l’enfant à imiter les autres peuvent aussi s’avérer des moyens utiles.

3 Dix étapes clés pour accompagner son enfant dans l’apprentissage de la continence sont expliquées aux parents sur le site Web Naître et grandir au https://naitreetgrandir.com.

Quand l’enfant commence à être continent régulièrement de jour, les parents peuvent tenter de lui faire porter une culotte. Les accidents sont cependant fréquents, surtout en période d’activité intense : le jeune enfant est alors tellement absorbé par le jeu qu’il tarde à aller aux toilettes, à moins que quelqu’un ne le lui rappelle. De fréquents rappels et des visites répétées aux toilettes sont donc nécessaires. Il convient d’être prévoyant quand le trottineur est en apprentissage de la continence. Ainsi, avant de quitter la maison, il est important de demander à l’enfant d’aller aux toilettes pour essayer d’uriner, et ce, pour réduire le risque qu’il ait envie dans un endroit où il n’y a pas de toilettes. En cas d’accidents ou de besoins mictionnels fréquents, il faut se poser la question sur une éventuelle infection des voies urinaires de l’enfant (les lles en particulier) qui a acquis le contrôle de sa vessie. Il arrive souvent que ce type d’infection ne soit accompagné ni de èvre ni de mictions douloureuses. À mesure que l’enfant maîtrise les étapes liées à l’élimination et à la continence, soit prévenir le parent, retirer ses vêtements, éliminer, s’essuyer, se rhabiller, tirer la chasse d’eau et procéder à l’hygiène de ses mains, il acquiert un sentiment d’accomplissement que les parents doivent renforcer. Si la relation parent-enfant devient tendue, il est possible que chacun ait besoin d’une pause. Il arrive que l’enfant régresse en situation de stress familial, ou encore quand les choses sont trop difciles ou rapides pour lui. La régression fait partie de l’apprentissage de la continence et ne doit pas être vue comme un échec, mais comme un recul temporaire de l’enfant vers une position moins contraignante.

FIGURE 3.18 Au besoin, un siège xé sur les toilettes peut faciliter l’apprentissage de la continence.

L’inrmière prête attention à l’apprentissage de la continence chez le trottineur, et plus particulièrement au climat dans lequel il se déroule. Elle recommande aux parents de ne pas commencer l’apprentissage de la continence durant une période susceptible d’engendrer un stress chez l’enfant (p. ex., une maladie). L’infirmière Chapitre 3

Croissance, développement et promotion de la santé

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intervient en écoutant les parents et en leur faisant des suggestions, au besoin. Les éducateurs en garderie ont également un rôle à jouer dans le soutien et l’enseignement aux parents relativement à l’apprentissage de la continence. Lorsqu’une partie de l’apprentissage de la continence est poursuivie hors de la maison, il est important que les parents informent l’ensemble des personnes qui donnent des soins à leur enfant de leurs valeurs familiales et des besoins spéciques de l’enfant. La continuité et la cohérence dans les soins prodigués au trottineur, de même que de bonnes pratiques d’hygiène liées à un environnement salubre, sont des éléments qui permettent l’acquisition d’habitudes d’élimination et de continence.

Crises de colère Les crises de colère sont courantes durant le début de l’enfance alors que l’autonomie est plus grande et que l’enfant tente de s’attaquer à des tâches plus complexes qui exigent beaucoup de lui sur le plan affectif. Ces crises se passent souvent vers l’âge de deux ans, et c’est la raison pour laquelle elles sont communément appelées en anglais terrible two. Le trottineur veut afrmer son indépendance et peut s’opposer violemment à la discipline, mais il ne possède pas encore le vocabulaire adéquat pour exprimer ses frustrations (Racine, 2013). Il peut se coucher sur le sol, battre des pieds et crier à pleins poumons. Ces crises où l’enfant retient son soufe tout en pleurant, appelées spasmes du sanglot, sont un indice de l’incapacité de l’enfant à contrôler ses émotions. Les spasmes durent quelques secondes à quelques minutes ; ils sont involontaires et inoffensifs, sauf dans les cas urgents où l’enfant cesse de respirer ou s’évanouit (Hôpital pour enfants de Toronto, 2014). La meilleure façon de réduire progressivement les crises de colère consiste à faire preuve de constance, et à avoir des attentes qui tiennent compte du stade de développement de l’enfant et qui sont associées à des récompenses. Plusieurs éléments concourent à conditionner le comportement, notamment : 1) assurer l’uniformité des attentes chez l’ensemble des intervenants ; 2) établir les priorités ; 3) déterminer des conséquences qui sont raisonnables par rapport au niveau de développement de l’enfant.

Le programme Y’a personne de parfait peut procurer un soutien fort utile aux parents. L’information est présentée sur le site Web de l’Agence de la santé publique du Canada au www.phac-aspc.gc.ca.

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Partie 1

Durant la crise de colère, il est préférable que les parents ignorent la situation, à moins qu’elle ne soit préjudiciable à l’enfant (comme dans le cas où ce dernier se cognerait violemment la tête sur le sol). Ils doivent cependant demeurer sur place, car une fois la crise terminée, l’enfant a besoin d’encadrement et de sécurité. Il existe de nombreuses approches éducatives concernant la discipline ; pour gérer ces crises, le recours à un bref moment d’isolement ou à un temps d’arrêt peut être une approche efcace pour discipliner le trottineur. Ces recours doivent convenir aux capacités

Inrmière, enfant et famille

de l’enfant. Dans les périodes où il y a absence de crises de colère, les parents peuvent faire usage de renforcement positif en fonction du développement de l’enfant ENCADRÉ 3.13. Même si les crises font partie du développement normal de l’enfant, l’inrmière doit être attentive aux colères qui nécessitent des moyens de régulation et une évaluation plus poussée, puisqu’elles peuvent aussi être le signe de l’existence de problèmes sous-jacents. Il existe certains programmes sur le sujet, et se référer à un intervenant psychosocial peut être indiqué. L’inrmière peut aussi diriger la famille, selon la coopération qu’elle obtient de celle-ci et l’analyse qu’elle fait de la situation, vers un groupe de soutien en intervention familiale ou individuelle (Turgeon et Parent, 2012).

Afrmation de soi L’un des aspects les plus difciles de l’éducation du trottineur réside dans la réponse continuellement négative qu’il offre à l’égard de chaque demande. Le négativisme n’est pas l’expression d’une attitude entêtée ou insolente, mais une afrmation nécessaire d’autocontrôle. En cherchant à tester les limites, l’enfant arrive à mieux comprendre le monde dans lequel il vit et à apprendre comment modifier son comportement pour répondre aux attentes de la société. Le négativisme commence à s’atténuer au moment où l’enfant se prépare à intégrer la maternelle. Une façon de composer avec le négativisme consiste à réduire les occasions de recevoir un non comme réponse. L’enfant répondra presque certainement par un non catégorique si une question ouverte lui est posée : Veux-tu aller dormir maintenant ? Il vaut mieux dire à l’enfant qu’il est temps d’aller dormir, puis d’agir en conséquence. Dans sa tentative d’exercer un certain contrôle, l’enfant aime faire des choix. Lorsqu’il est mis en face de choix pertinents, il ne peut pas tout refuser

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 3.13

Gestion des crises de colère

• Offrir des choix à l’enfant plutôt que d’imposer la loi du tout ou rien. • Choisir ses batailles avec circonspection et ignorer les petits accrochages ayant trait à des questions sans importance. • Offrir du réconfort à l’enfant une fois que ce dernier a le contrôle de ses émotions, sans céder sur la demande originale. • Complimenter l’enfant pour son comportement positif quand il ne fait pas de colères.

de façon automatique. Le parent devra en tenir compte dans son mode d’éducation et de discipline (Naître et grandir, 2016a). L’inrmière qui travaille auprès des enfants et des parents peut appliquer ce concept lorsqu’elle s’approche du trottineur pour prendre ses signes vitaux. Elle dira, par exemple : Je vais écouter ton cœur. Si l’inrmière pose la question plutôt que de dire ce qu’elle va faire, le trottineur a toutes les chances de répondre non, et si l’inrmière n’en tient pas compte, il n’aura plus conance en elle.

Régression La régression est le fait d’abandonner un mode de fonctionnement actuel pour retourner à des comportements antérieurs. Elle se manifeste habituellement dans des situations de malaise ou de stress, lorsque l’enfant tente de conserver son énergie psychique en revenant à des modes de comportement qui se sont avérés efcaces au cours de stades de développement antérieurs. La régression est un phénomène courant chez le trottineur, puisque pratiquement tout stress supplémentaire entrave sa capacité à maîtriser les tâches développementales du moment. Toute atteinte à son autonomie, comme une maladie, une hospitalisation, une séparation d’avec un parent, la perturbation des activités régulières, ou l’adaptation à l’arrivée d’un frère ou d’une sœur, déclenche un retour vers une dépendance accrue ; le refus d’utiliser les toilettes ; les crises de colère ; l’envie du biberon ou de la suce ; et la perte d’habiletés motrices, langagières, sociales et cognitives nouvellement acquises. Au début, une telle régression semble acceptable et confortable pour l’enfant, mais la perte d’habiletés nouvelles suscite chez lui de la peur et de l’inquiétude, car il perçoit sa vulnérabilité. Les parents nissent par s’inquiéter des comportements régressifs. Souvent, dans leurs efforts pour composer avec la situation, ils imposent un stress supplémentaire à leur enfant : la pression de devoir être à la hauteur de normes établies.

Rivalité fraternelle Il est naturel qu’un enfant éprouve de la jalousie et du ressentiment à l’égard d’un nouvel enfant dans la famille, ou envers un frère ou une sœur, lorsque l’attention du parent est détournée vers cette autre personne ; ce sentiment – normal – porte le nom de rivalité fraternelle (Naître et grandir, 2015c). Ce concept est différent du négativisme. L’arrivée d’un bébé est un événement perturbateur. C’est moins le nouveau-né que l’enfant n’aime pas – ou n’accepte pas – que les changements qu’entraîne l’arrivée de ce frère ou de cette sœur, en particulier la séparation d’avec la mère occasionnée par l’accouchement. Les parents partagent maintenant leur affection et leur attention avec quelqu’un d’autre, les activités quotidiennes sont perturbées,

et le trottineur risque de perdre son lit ou sa chambre, tout cela au moment où il croyait être maître de son univers. La rivalité fraternelle a tendance à être plus prononcée chez les premiers-nés, qui se font pour ainsi dire détrôner (perte de l’exclusivité de l’attention parentale). Elle semble également poser des difcultés chez les jeunes enfants, particulièrement sur le plan de l’interaction mère-enfant.

Des conseils pour les parents qui doivent composer avec les disputes fraternelles sont disponibles sur le site Web Naître et grandir au https:// naitreetgrandir.com.

La préparation de l’enfant à la naissance d’un frère ou d’une sœur diffère selon les cas, mais elle est, dans une certaine mesure, dictée par l’âge de l’enfant. Pour lui, le temps est un concept vague. Il est bon d’aborder le sujet quand le trottineur devient conscient de l’état de grossesse et des changements qui ont cours à la maison en préparation de l’arrivée du nouveau membre de la famille. Il faut que le trottineur ait une idée réaliste de ce à quoi il doit s’attendre avec le nouveau-né. Il vaut mieux que les parents mettent l’accent sur les activités qui se dérouleront quand le bébé sera là, comme le fait de devoir changer le nourrisson de couche, le nourrir, le laver et l’habiller. Par la même occasion, il est important que les parents soulignent les activités quotidiennes qui seront préservées, comme la lecture d’histoires ou la promenade au parc. Si le trottineur n’a jamais eu de contact avec un nourrisson, il serait bon de lui en faire rencontrer un, si possible. Lui offrir une poupée avec laquelle il pourra imiter les comportements parentaux constitue aussi une excellente stratégie. Le trottineur pourra veiller aux besoins de la poupée (la changer de couche, la nourrir) en même temps que le parent s’occupera du nourrisson. La présence d’un nouveau frère ou d’une nouvelle sœur amène son lot de stress ; les parents devront donc tenter d’éviter tout stress additionnel au trottineur, ou de le réduire au minimum. Par exemple, l’attribution d’un lit normal ou d’une nouvelle chambre devrait se faire bien avant l’arrivée du nourrisson. La grossesse est un concept abstrait pour le trottineur. Pour mieux comprendre comment un bébé grandit à l’intérieur de la mère, l’enfant a besoin d’images. C’est l’occasion de lui présenter certains aspects de la reproduction, accompagnés de mots qu’il peut comprendre facilement. Le fait de voir des images simples représentant l’utérus et le fœtus, et de sentir des mouvements sur le ventre de la maman, l’aide à se sentir de la partie. À l’arrivée du bébé, le trottineur ressent avec acuité le changement de centre d’attention qui se produit. Les visiteurs n’ont d’attention que pour le nourrisson et négligent l’enfant plus âgé. Les parents peuvent atténuer la situation en sensibilisant les visiteurs aux besoins du trottineur, en ayant des petits cadeaux prêts à son intention et en lui accordant de l’attention autant que possible durant la visite. Par ailleurs, le trottineur peut prendre part Chapitre 3

Croissance, développement et promotion de la santé

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3

Des conseils à l’intention des parents pour la mise en place d’une discipline positive peuvent être consultés sur le site Web Soins de nos enfants au www. soinsdenosenfants.cps.ca.

1 Plusieurs stratégies disciplinaires, notamment le temps d’arrêt, sont expliquées dans le chapitre 1, Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté.

aux soins du nouveau-né en allant chercher une couche ou en réalisant une autre petite tâche. Chez les enfants, l’expression de la jalousie est assez complexe. Certains frapperont ouvertement le bébé, d’autres chercheront à le retirer des genoux de la mère ou l’empêcheront d’être nourri. Pour la protection du nourrisson, le parent doit donc exercer une surveillance continue sur l’interaction avec les frères et les sœurs. Il arrive que l’expression d’hostilité et de ressentiment envers le nourrisson se fasse de façon plus subtile et voilée. Le trottineur peut exprimer verbalement le souhait que le bébé retourne dans le ventre de maman, ou encore, régresser dans son comportement pour avoir l’attention de ses parents.

Établissement de limites et discipline Le terme discipline signie éduquer, transmettre une structure des codes de vie à faire respecter pour le bien-être de l’enfant et de sa famille. Cela

relève de la responsabilité du parent et peut constituer une source de difcultés (SCP, 2016b). L’enfant apprend à respecter l’autorité parentale. Il est particulièrement sensible à une routine quotidienne, et il est donc important d’établir des habitudes (concept de ritualisation) pour les activités, les jeux, le coucher et les siestes an de lui procurer un cadre sécurisant. À mesure que les capacités motrices de l’enfant évoluent et que sa mobilité s’accroît, les parents continuent d’établir des limites claires et cohérentes pour le protéger et établir une relation parent-enfant positive, ferme et réconfortante. Les parents s’inquiètent à l’idée d’établir des mesures disciplinaires au cours du début de l’enfance ; il importe donc de souligner que plus ils établissent des méthodes disciplinaires efficaces, plus il sera facile de les maintenir 1 . Le TABLEAU 3.17 propose des activités d’enseignement que l’inrmière peut faire auprès des parents. Entre 12 et 24 mois, les

Soutien inrmier TABLEAU 3.17

Aider les parents de trottineurs à améliorer leurs pratiques parentales

PÉRIODE

ACTIVITÉS SUGGÉRÉES

De 12 à 18 mois

• Préparer les parents aux changements de comportements prévisibles chez le trottineur, notamment la période de négativisme et deritualisation. • Discuter de la nécessité d’imposer une discipline ferme, mais douce et positive, et des façons de gérer le négativisme et les crises de colère ; il est important de souligner les retombées positives qu’entraînent des mesures de discipline appropriées. • Faire valoir l’importance, tant pour l’enfant que pour les parents, de bénécier de courtes périodes de séparation. • Discuter avec les parents des jouets qui sollicitent les habiletés de motricité globale et de motricité ne, ainsi que les habiletés langagières, cognitives et sociales.

De 18 mois à 2 ans

• Souligner l’importance pour le développement de l’enfant de fréquenter des camarades de jeux de son âge. • Évaluer la nécessité de préparer l’enfant à la venue éventuelle d’un nouveau bébé ; insister sur l’importance de bien préparer l’enfant à de nouvelles expériences. • Discuter des méthodes de discipline utilisées, de leur efcacité et de ce que pensent les parents de la période du négativisme ; expliquer que le négativisme est une étape importante de l’afrmation de soi et du développement de l’autonomie ; il n’est pas un signe d’entêtement. • Discuter des signes qui indiquent que l’enfant est prêt pour l’apprentissage de la continence ; insister sur l’importance d’att endre que l’enfant soit physiquement et psychologiquement prêt. • Évaluer la capacité de l’enfant à se séparer facilement de ses parents pour de courtes périodes, dans des circonstances familiè res. • Offrir aux parents des occasions d’exprimer leurs sentiments de fatigue, de frustration ou d’exaspération ; reconnaître qu’il e st parfois difcile d’apprécier son trottineur lorsqu’il est réveillé. • Informer les parents des changements de comportement de leur enfant auxquels ils doivent s’attendre dans l’année, comme une att ention plus soutenue, une baisse du négativisme et un désir accru de plaire aux autres.

De 2 à 3 ans

• Discuter de l’importance de l’imitation et du mimétisme, et de la nécessité d’inclure l’enfant dans les activités domestiques. • Discuter des méthodes d’apprentissage de la continence, en particulier des attentes réalistes et des attitudes par rapport aux accidents. • Insister sur le caractère unique des processus de pensée, notamment en ce qui a trait à l’utilisation du langage, à la compréhension limitée de la notion du temps, à la compréhension des relations de cause à effet par rapport aux événements et à l’incapacité de voir leschoses du point de vue d’une autre personne. • Insister sur le fait que la discipline doit continuer d’être appliquée de façon structurée et concrète, sans argumentation qui risque d’entraîner de la confusion, des malentendus et des blessures. • Discuter de la possibilité d’inscrire l’enfant à la garderie vers la n de sa deuxième année.

102

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

enfants ont plus fréquemment recours à l’agression physique. Puis, normalement, l’enfant de 2 ans commence à développer des aptitudes à exprimer ses frustrations et ses émotions de façon plus constructive (sans avoir recours à la violence). Les parents doivent tenir compte des limites cognitives et comportementales de l’enfant. Ainsi, il leur faut mettre en œuvre des mesures de protection adéquates contre les dangers. De plus, l’inrmière doit rassurer les parents et leur dire que le comportement de leur enfant est de nature exploratoire plutôt qu’oppositionnelle à cet âge, et qu’il est principalement centré sur ses besoins primaires : chaleur, amour, nourriture, sécurité et confort. Réconforter l’enfant ou répondre à ses besoins de base n’en fera pas un enfant gâté (Naître et grandir, 2013b). Il est naturel pour les enfants de sonder leur environnement et d’éprouver les limites au cours de l’étape exploratoire de la croissance. Plutôt que de décourager l’exploration, il faut offrir des solutions de rechange sécuritaires, ranger en lieu sûr

TABLEAU 3.18

les articles dangereux, et offrir continuellement à l’enfant réconfort et discipline. En somme, de l’âge de un à trois ans, l’enfant évolue sur plusieurs plans (moteur, langagier, etc.) ; les parents peuvent se sentir démunis devant un être qui n’est plus tout à fait un nourrisson, mais qui demeure très dépendant d’eux.

3.4

Croissance et développement de l’enfant d’âge préscolaire (3-6 ans)

3.4.1

Croissance et développement général

3

À l’âge préscolaire, de nouvelles capacités physiques spectaculaires accompagnent la croissance de l’enfant TABLEAUX 3.18 et 3.19.

Développement psychologique de l’enfant d’âge préscolaire

Selon Freud

Selon Erickson

Selon Piaget

Selon Kohlberg

Selon Fowler

Concept de soi

• Stade phallique

• Initiative : hardiesse et imagination

• Perception plutôt que logique

• Pensée intuitive

• Exploration

• Capacité de considérer le point de vue des autres

• Imitation sans compréhension du sens ou de l’importance

• Vague idée des organes et des fonctions internes

• Différence entre les sexes • Complexe d’Œdipe/castration

• Conscience du danger • Sentiment de culpabilité

• Obéissance pour éviter la punition • Notion du bien et du mal

• Vulnérabilité aux pressions sociales

• Acquisition de l’autodétermination

TABLEAU 3.19

• Conscience des différences entre les personnes

• Autocritique et autoévaluation

Développement général de l’enfant d’âge préscolaire

Caractéristiques physiques et motricité

Développement sensoriel et cognitif

• Poursuite de la croissance physique

• Vocabulaire : 900 mots (3 ans) à plus de 2 000 mots (5 ans)

• Diminution de la fréquence cardiaque et respiratoire

• Connaissance des couleurs, capacité à décrire les images et à compter

• Latéralité vers 5 ans : 90 % de droitiers

• Connaissance des jours de la semaine et du nom des mois

• Perte des dents de lait

• Notion du temps plus précise

• Continence de jour et de nuit

• Capacité d’anticipation

• Saut, montée et descente d’escaliers • Équilibre sur un pied, jeux de balles et saut à la corde • Dessin de formes géométriques, tenue des ciseaux • Début d’écriture • Habillage et déshabillage

Chapitre 3

Croissance, développement et promotion de la santé

103

ALERTE CLINIQUE

Les déséquilibres en calcium sont à surveiller à l’âge préscolaire. L’hypocalcémie peut entraîner des troubles digestifs (nausées, vomissements) et neurologiques (irritabilité, convulsions). L’hypercalcémie se manifeste surtout par une faiblesse musculaire et elle peut affecter le fonctionnement rénal. L’inrmière veille à assurer une hydratation adéquate et à administrer les médicaments nécessaires pour corriger les conséquences des déséquilibres en calcium.

Soins inrmiers ENFANT D’ÂGE PRÉSCOLAIRE

En prenant en compte l’ensemble du développement psychologique de l’enfant d’âge préscolaire, l’inrmière se rappelle qu’il poursuit sa quête d’autonomie et devient de plus en plus hardi. Parce qu’il a besoin de plus de liberté, d’indépendance et d’initiative, comparativement au trottineur, et parce qu’il a le désir de plaire aux adultes, l’infirmière prend soin de s’adresser à l’enfant d’âge préscolaire directement, avec chaleur et respect. Elle lui pose des questions dans un langage qu’il peut comprendre et considère ses réponses avec attention. Elle l’encourage à prendre des initiatives et s’assure de formuler ses commentaires de manière constructive (Rupert et Young, 2014).

3.4.2

Promotion de saines habitudes de vie chez les enfants d’âge préscolaire (3-6 ans)

Alimentation Les exigences nutritionnelles des enfants d’âge préscolaire sont à peu près les mêmes que celles des trottineurs. Les besoins en calories par unité de poids continuent à diminuer légèrement, soit un apport quotidien moyen de 1 800 calories. Les besoins en liquides peuvent également décroître légèrement, mais peuvent varier selon le degré d’activité, les conditions climatiques et l’état de santé de l’enfant. Les besoins en protéines augmentent avec l’âge (CHU Sainte-Justine, 2013). Les besoins en gras de l’enfant d’âge préscolaire sont presque identiques à ceux des trottineurs. La quantité totale de gras est la même, soit entre 20 et 30 % de l’apport calorique quotidien. L’apport en gras saturés, en revanche, devrait être inférieur à 10 % de la quantité totale de calories.

Types d’aliments Calcium Comme il a été vu précédemment, le calcium est un nutriment qui nécessite une attention particulière, puisqu’il joue un rôle déterminant dans la construction osseuse. Frédéric est âgé de quatre ans. Il boit du lait et aime La dose quotidienne recombien le yogourt. Sa mère lui donne quand même des mandée est de 1 000 mg pour suppléments de vitamines et de calcium. Quel risque les enfants de 4 à 8 ans (Santé Frédéric court-il à prendre de tels suppléments ? Canada, 2012a). Le lait et les a) Un surplus de poids. produits laitiers sont d’excelb) De l’hypervitaminose. lentes sources de calcium et de vitamine D. Le lait faible c) Un excès nutritionnel. en gras peut être substitué au d) Des problèmes osseux. lait entier ; ainsi, la quantité

Jugement

clinique

104

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

de lait reste la même, et la consommation globale de gras est réduite .

Jus de fruits La consommation de jus de fruits pour les enfants d’âge préscolaire est la même que celle des trottineurs, soit un maximum de 120 à 150 mL par jour. La consommation de boissons sucrées est fortement déconseillée ; chez les enfants de cinq ans, elle est un facteur prédisposant à l’obésité (Leermakers, Felix, Erler et al., 2015). De plus, la consommation de boissons gazeuses contribue à la carie dentaire. Les enfants ont besoin d’une alimentation équilibrée et variée comportant des aliments provenant des quatre groupes alimentaires : légumes et fruits, produits céréaliers, lait et substituts, viandes et substituts TABLEAU 3.20. Les parents et les autres adultes qui prennent soin des enfants peuvent leur donner des occasions d’apprendre à aimer différents aliments nutritifs en les leur faisant goûter. Il est bon de rappeler l’importance des modèles parentaux en ce qui a trait à la consommation d’aliments et aux habitudes alimentaires ; si le parent ne mange pas un aliment particulier ou si ses habitudes alimentaires sont mauvaises, les enfants seront susceptibles de l’imiter.

Comportement alimentaire De nombreux enfants d’âge préscolaire ont encore des préférences prononcées en matière de goût, comme les trottineurs. À quatre ans, l’enfant devient plus difcile à l’égard de la nourriture, ce qui est généralement caractéristique du comportement rebelle de ce groupe d’âge. Pour les mêmes raisons que pour le trottineur, il faut continuer à lui servir de petites portions et à respecter son appétit en évitant d’insister pour qu’il termine toute son assiette. Vers l’âge de cinq ans, les enfants sont plus disposés à essayer de nouveaux aliments, surtout s’ils sont encouragés par un adulte qui leur permet de participer à la préparation des repas FIGURE 3.19. Habituellement, l’enfant de cinq ans socialise plus et participe davantage au moment du repas en famille. La quantité et la variété des aliments consommés par les jeunes enfants varient grandement d’un jour à l’autre. Par conséquent, les parents s’inquiètent parfois de la quantité et de la qualité des aliments consommés par les enfants d’âge préscolaire. En général, la qualité est beaucoup plus importante que la quantité. Une façon d’atténuer cette préoccupation parentale consiste à suggérer aux parents de tenir un journal hebdomadaire de ce que l’enfant mange. Habituellement, à la n de la semaine, les parents sont nalement surpris de la quantité

TABLEAU 3.20

Nombre de portions alimentaires selon les groupes d’âge

GROUPE ALIMENTAIRE

FILLES ET GARÇONS

FILLES

GARÇONS

RECOMMANDATIONS

2-3 ANS

4-8 ANS

9-13 ANS

14-18 ANS

Légumes et fruits Sources de vitamines, de minéraux et de bres

4

5

6

7

8

Manger au moins un légume vert foncé et un légume orangé chaque jour.

Produits céréaliers Sources d’énergie tirée des glucides

3

4

6

6

7

Consommer au moins la moitié des portions de produits céréaliers sous forme de grains entiers.

Lait et substituts Source nutritive de calories, de calcium et de vitamine D

2

2

3-4

Viandes et substituts Sources de fer et de protéines

1

1

1-2

3

3-4

2

Puisque les jeunes enfants ont besoin de gras pour la croissance, privilégier le lait entier (3,25 % de matières grasses) avant l’âge de 2 ans. Attendre que l’enfant ait au moins 2 ans avant de lui donner du lait plus faible en matières grasses. 3

Choisir une variété de viandes maigres, de volailles et de poissons sans arêtes, des œufs, du tofu, des pois, des haricots secs et des lentilles. Manger au moins 2 portions de poisson par semaine.

Source : © Sa Majesté la Reine du Chef du Canada, représentée par le Ministre de Santé Canada (2011). Bien manger avec le guide alimentaire canadien – Ressource à l’intention des éducateurs et des communicateurs. Repéré à www.canada.ca/content/dam/hc-sc/migration/hc-sc/fn-an/alt_formats/hpfb-dgpsa/pdf/pubs/res-educat-fra.pdf.

nécessaire pour se brosser les dents seul, idéalement sous la supervision d’un adulte.

Sommeil

FIGURE 3.19 Faire participer l’enfant à la préparation des repas est une occasion de lui enseigner les saines habitudes alimentaires.

d’aliments consommés par leur enfant. En général, les enfants d’âge préscolaire mangent environ la moitié d’une portion d’adulte.

Santé dentaire Les consignes pour les enfants d’âge préscolaire sont identiques à celles énoncées pour les trottineurs. Les mesures préventives pour la santé buccodentaire demeurent les mêmes : une saine alimentation, des visites chez le dentiste tous les six mois ou au besoin. L’enfant, aidé d’un parent, doit se brosser les dents deux fois par jour et utiliser la soie dentaire quotidiennement. C’est à partir de six ans que l’enfant acquiert la dextérité

La SCP (2012a) recommande qu’un enfant âgé de 3 à 6 ans dorme au moins 10 à 12 heures par nuit pour favoriser son développement cognitif, socioaffectif et physique TABLEAU 3.10. Les enfants abandonnent leur sieste pendant cette période. Les parents et les éducatrices des services de garde devraient envisager de remplacer ces périodes réservées aux siestes par des activités calmes comme la lecture et la détente. L’inrmière doit être attentive, car les années préscolaires sont une période pendant laquelle les difcultés pour s’endormir et les troubles de sommeil sont courants (Martello, 2015). Au fur et à mesure que les enfants d’âge préscolaire deviennent autonomes, s’adaptent à la séparation et acquièrent la permanence de l’objet, ils commencent à éprouver davantage de troubles du sommeil, et les pleurs avant la mise au lit sont une source d’angoisse pour les parents. Parfois, les jeunes enfants ont de la difculté à dormir, en particulier après avoir pratiqué de nombreuses activités et avoir été stimulés au cours de la journée. D’autres peuvent avoir des peurs associées au coucher, se réveiller la nuit ou avoir des cauchemars ou des terreurs nocturnes. Les recommandations pour faciliter l’endormissement sont détaillées dans l’ENCADRÉ 3.14. Chapitre 3

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les années préscolaires sont une période pendant laquelle les difcultés pour s’endormir et les troubles de sommeil sont courants.

Croissance, développement et promotion de la santé

105

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 3.14

Promotion du sommeil réparateur chez l’enfant d’âge préscolaire

• Normaliser le fait que l’enfant essaie de retarder le coucher.

• Lui donner un objet de transition, comme son jouet favori, ou laisser un verre d’eau à côté de son lit.

• Lui procurer des activités calmes avant le coucher et instaurer une routine constante à l’heure du coucher (bain, lecture d’une histoire).

• Éviter les stimulants, comme les boissons contenant de la caféine.

• Ignorer les comportements visant à obtenir de l’attention.

• Ne pas autoriser l’enfant à avoir une télévision, un ordinateur ou des jeux vidéo dans sa chambre.

• Ne pas laisser l’enfant se coucher dans le lit des parents ni lui permettre de rester debout après une heure raisonnable. • Laisser une veilleuse allumée dans sa chambre.

Promotion de l’activité physique Durant la période préscolaire, le degré d’activité motrice continue d’être élevé et permet d’explorer l’environnement, d’interagir avec les autres et d’apprendre à jouer à des jeux physiques. La coordination et la motricité globale plus développées des enfants d’âge préscolaire leur permettent de commencer à pratiquer différents sports. La maturité physique et psychologique des enfants ainsi que leur aptitude à participer à des sports organisés devraient être établies après une évaluation individuelle. Le choix d’un sport devrait être fondé sur la motivation et le plaisir de l’enfant, et non sur ceux des parents. CE QU’IL FAUT RETENIR

La sédentarité augmente le risque d’embonpoint et d’obésité.

La sédentarité augmente le risque d’embonpoint et d’obésité. Santé Canada (2016c) recommande d’aller à l’école et d’en revenir à pied, de pratiquer des sports et de faire du vélo. Les recommandations pour la promotion de l’activité physique dans ce groupe d’âge sont résumées dans le TABLEAU 3.21.

• Limiter au maximum la télévision avant le coucher.

• Ne pas ignorer les craintes de l’enfant à l’heure du coucher, être à l’écoute et demander de l’aide à un professionnel si le problème persiste.

Les centres de la petite enfance, les écoles maternelles et les services de garde jouent un rôle important dans la promotion de l’activité auprès des enfants d’âge préscolaire. Ils devraient s’assurer que les enfants passent quotidiennement amplement de temps à l’extérieur et leur donner la chance d’être actifs à l’intérieur si le mauvais temps les empêche de sortir. Le personnel devrait recevoir une formation sur l’activité physique chez les jeunes enfants, notamment sur les stratégies appropriées (CEDJE, 2011).

Prévention des blessures et des traumas Comportements sécuritaires Les enfants d’âge préscolaire sont capables de comprendre les consignes de sécurité et de les respecter s’ils sont soutenus et renforcés de façon positive. C’est un moment idéal pour instaurer des mesures de prévention comme le port d’équipement de sécurité (p. ex., la veste de ottaison, le casque de

Enseignement à l’enfant et à ses proches TABLEAU 3.21

Recommandations pour la promotion de l’activité physique chez les enfants d’âge préscolaire

ACTIVITÉ PHYSIQUE STRUCTURÉE

ACTIVITÉ PHYSIQUE NON STRUCTURÉE

SÉDENTARITÉ ET TEMPS PASSÉ DEVANT L’ÉCRAN

Offrir 60 minutes (au total) d’activité physique structurée par jour.

Offrir de 60 minutes à plusieurs heures par jour d’activité physique non structurée en l’intégrant aux jeux, aux transports et aux loisirs.

S’assurer que les enfants ne passent pas plus de 1 à 2 heures par jour devant l’écran et qu’ils regardent des émissions de qualité.

Encourager la pratique d’activités qui aident l’enfant à développer ses habiletés motrices (p. ex., lancer, attraper ou taper dans un ballon).

Veiller à ce que les périodes de jeu libre soient amusantes et sécuritaires, et qu’elles donnent la possibilité aux enfants de faire des expériences et des découvertes.

Ne pas mettre de télévision dans leur chambre.

Mettre l’accent sur la participation, et non sur la compétition.

Fournir quelques directives aux enfants pendant les périodes de jeu non structurées.

Inciter les enfants à marcher au lieu d’utiliser la poussette.

Source : Centre d’excellence pour le développement des jeunes enfants (2011). L’activité physique chez les jeunes enfants.

106

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

vélo). Les habitudes acquises à cette période permettent d’adopter des comportements sécuritaires à long terme. Comme les enfants de cet âge sont de grands imitateurs, ils notent rapidement les écarts entre ce qu’on leur dit de faire et ce que les autres font. Il est particulièrement important que les parents montrent l’exemple. Les enfants d’âge préscolaire sont moins susceptibles de tomber que les trottineurs en raison de l’amélioration de leurs capacités motrices globales et nes, de leur coordination et de leur équilibre. Toutefois, les blessures liées aux chutes de lits superposés sont fréquentes chez les trois à six ans, d’où l’importance de bien informer les parents. Les lits superposés ne sont donc pas recommandés chez les enfants de moins de six ans (Santé Canada, 2014). Les mesures préventives pour contrer l’étouffement, l’empoisonnement, la noyade, les brûlures et les autres types de lésions sont les mêmes que celles pour les nourrissons et les trottineurs.

Accidents de la circulation Les enfants de plus de trois ans sont souvent impliqués dans des accidents automobiles en tant que piétons (ASPC, 2009). En raison de leurs habiletés de motricité globale qui leur permettent de marcher, de courir et de grimper, et de leurs habiletés de motricité ne qui les amènent à ouvrir des portes et des clôtures, ils ont tendance à se retrouver dans des endroits dangereux lorsqu’ils échappent à la surveillance. Inconscients du danger et incapables d’évaluer la vitesse d’une voiture, ils peuvent être victimes d’accidents. Des activités courantes comme courir derrière un ballon, faire du tricycle ou jouer derrière un véhicule stationné peuvent mener à un accident. La prévention des blessures impliquant un véhicule passe par la protection et l’éducation des enfants quant aux dangers que représentent les véhicules en mouvement ou stationnés. Cependant, les enfants d’âge préscolaire ont de la difficulté à observer des consignes de façon constante. L’installation de barrières physiques empêchant les enfants de jouer à proximité des véhicules contribue à prévenir les blessures.

Gestion du stress Pendant le début de l’enfance, les enfants sont soumis à des agents stressants dans leur environnement. Certains découlent de la compréhension particulière du monde à cet âge ou de la personnalité (p. ex., la timidité), d’autres des peurs de ce qui est nouveau comme l’entrée à l’école, un déménagement, le changement de garderie, etc. Les difcultés de langage peuvent aussi créer de la frustration, de la peur et de l’anxiété. Les jeunes enfants sont particulièrement vulnérables en raison de leur capacité limitée à effectuer une bonne gestion du stress (Naître et grandir, 2016b). De plus, chaque enfant s’adapte différemment au stress. Une certaine quantité de stress est bénéque au cours du début de l’enfance et aide l’enfant à acquérir des capacités d’adaptation efcaces.

Pour des informations rela­ tives à l’utilisation sécuritaire des lits superposés, il est possible de consulter un document traitant de ce sujet sur le site de Santé Canada au www.canada.ca/fr/sante­ canada.html.

L’inrmière contribue à déterminer les symptômes associés à une exposition excessive au stress chez les enfants et informe les parents de ces symptômes ENCADRÉ 3.15. Enn, elle leur offre des outils pour mieux gérer le stress. Les enfants peuvent apprendre tôt à utiliser des stratégies d’adaptation simples et adaptées à leur âge. En déterminant la source de stress, l’inrmière peut proposer des stratégies constructives. Dans bien des cas, il suft d’organiser l’horaire de l’enfant an de lui permettre de se reposer et de le préparer au changement, par exemple à l’entrée à l’école. Les recommandations usuelles peuvent être d’écouter son enfant, de passer du temps avec lui, d’éviter d’avoir un trop grand nombre d’activités, de manifester son amour et son intérêt (Naître et grandir, 2016b). L’inrmière peut diriger les parents vers des professionnels spécialisés en intervention psychosociale si cela est jugé nécessaire. Il ne faut pas

ENCADRÉ 3.15

Manifestations cliniques du stress chez les enfants

• Maux de ventre ou maux de tête récurrents • Difculté à dormir et à se relaxer • Irritabilité et pleurs pour des événements anodins • Manque d’appétit

Soins inrmiers PRÉVENTION DES BLESSURES ET DES TRAUMAS

Les recommandations formulées pour la sécurité des trottineurs demeurent pertinentes pour les enfants d’âge préscolaire. Toutefois, l’inrmière doit tenir compte des capacités cognitives des enfants à comprendre et à intégrer les consignes de sécurité. Leur participation active est encouragée .

• Ongles rongés • Énurésie • Comportement d’opposition • Repli sur soi, retrait ou réticence à participer à des activités • Comportements de régression (p. ex., sucer son pouce) • Difculté à se concentrer (distraction) ou changements dans ses attitudes en garderie ou à l’école • Agressivité

Chapitre 3

Tableau 3.3W : Résumé des mesures préventives à prendre pour les enfants d’âge pré­ scolaire selon les types de blessures.

Croissance, développement et promotion de la santé

107

3

oublier que le niveau de stress parental a des répercussions sur celui de l’enfant.

3.4.3

Préoccupations courantes des parents

Les années préscolaires présentent moins de difcultés d’éducation que les années antérieures. Cette étape du développement est facilitée par la compréhension des enfants et leur comportement d’imitation. Les parents et les autres adultes peuvent dorénavant expliquer verbalement les raisons du danger et les façons de l’éviter : ils passent de la protection à l’éducation. Au cours de cette période, il se produit également une transition affective entre le parent et l’enfant. Même si les enfants restent attachés à leurs parents et acceptent toutes les croyances et les valeurs parentales, ils apprécient également la compagnie de leurs pairs. L’entrée à la maternelle marque une séparation du foyer pour les enfants et constitue un facteur de stress important à la fois pour eux et pour leurs parents. Ces derniers peuvent avoir besoin de soutien et d’accompagnement pour s’adapter à ce changement, en particulier si l’un des deux s’est principalement consacré à ses responsabilités familiales au quotidien. Ainsi, tous les membres de la famille s’adaptent au changement, qui fait partie du processus de croissance et de développement.

Expérience de la maternelle Depuis la mise en place de la maternelle à cinq ans à temps plein en 2008, le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport (MELS) préconise maintenant une entrée à l’école dès quatre ans à temps plein pour les enfants vivant en milieu défavorisé (Conseil supérieur de l’éducation, 2014 ; MELS, 2013). Puisque le développement social de l’enfant est favorisé à la fois grâce à ses rapports avec d’autres enfants du même âge et à ceux avec d’autres adultes proches, l’éducation préscolaire fournit une très bonne occasion d’accroître les expériences de socialisation des enfants. Il s’agit également d’une excellente préparation à l’entrée à l’école primaire. Dans les centres préscolaires, les enfants ont l’occasion de s’ouvrir à la coopération avec le groupe, de s’adapter aux différences socioculturelles, et de gérer la frustration, l’insatisfaction et la colère. Lorsque les activités sont structurées de manière à amener les enfants à maîtriser des tâches, ils éprouvent de plus en plus l’impression de réussir et d’être compétents, et ils acquièrent une conance en eux. Le fait d’offrir un apprentissage structuré ou non importe moins que le climat social, le type d’aide et les attitudes de l’enseignant à l’égard des enfants. Si l’enseignant est conscient des capacités et des besoins des enfants d’âge préscolaire sur le plan du développement, ces derniers

108

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

apprendront grâce aux activités offertes. La plupart des programmes comprennent un calendrier quotidien de jeux calmes, d’activités physiques à l’extérieur, d’activités de groupe comme des jeux et des projets, de jeux créatifs ou libres, et de périodes réservées aux collations et au repos. Le milieu préscolaire est particulièrement bénéque pour les enfants qui n’ont pas beaucoup d’expérience de groupe avec leurs pairs, comme les enfants uniques ou ceux grandissant en contexte de vulnérabilité. Une des questions que se posent les parents est de savoir si leur enfant est sufsamment mature pour fréquenter un centre préscolaire ou la maternelle. Les parents jouent un rôle fondamental en matière de maturité scolaire de leur enfant. Ils devraient promouvoir chez lui une attitude positive envers l’apprentissage, lui lire des livres, l’encourager à participer à diverses activités permettant de découvrir ses talents, et choisir des services de garde et des programmes préscolaires appropriés (MELS, 2013). Les programmes éducatifs de qualité destinés aux jeunes enfants inuencent l’apprentissage et le développement. L’inrmière et les autres professionnels de la santé peuvent aider les parents à trouver un programme d’intervention précoce, une école ou un service de garde enrichi sur le plan social et éducatif. À cet effet, l’inrmière peut utiliser les ches d’activités pour l’intégration de l’enfant dans un milieu de garde éducatif (MELS, 2013). Les programmes autorisés par l’État doivent être conformes aux normes établies, lesquelles constituent les exigences et les garanties minimales à respecter (Loi sur les services de garde éducatifs à l’enfance [RLRQ, chapitre S-4.1.1] ; Règlement sur les services de garde éducatifs à l’enfance [RLRQ, chapitre S-4.1.1, r. 2]). Les règlements sont là pour assurer une protection des enfants contre les blessures, et pour favoriser l’établissement des conditions essentielles au développement et à l’apprentissage sain. L’inrmière doit encourager les parents à rencontrer la direction et les employés de certains centres an de faire un choix éclairé. Les enfants ont besoin d’être préparés à l’entrée au préscolaire ou à la maternelle. Pour les jeunes enfants, l’école représente un changement par rapport à leur milieu de vie habituel ainsi qu’une séparation prolongée des parents. Avant de scolariser leurs enfants, les parents devraient leur présenter cette étape comme agréable. Parler aux enfants des activités qui se passent à l’école leur permet d’anticiper la rentrée de façon positive. Ces renseignements aident l’enfant à se sentir à l’aise dans cet environnement étranger. Des objets de transition comme les jouets favoris peuvent également aider l’enfant à faire le pont entre la maison et l’école.

Découverte du corps La curiosité sexuelle est saine et normale chez les enfants d’âge préscolaire, de même que la

masturbation ou l’autostimulation des organes génitaux (Naître et grandir, 2014). Les enfants de cet âge cherchent constamment des explications même si leur pensée n’est pas encore parvenue à maturité. Le mot pourquoi semble remplacer le mot non. Les enfants de cet âge prennent conscience de la différence des corps et des sexes. Un attrait plus marqué s’opère envers le sexe opposé. L’enfant comprend également que ses parents ont des relations privilégiées dont il se sent exclu. L’inrmière aura pour rôle de rassurer les parents sur ces questionnements. Vers l’âge de trois ans, les enfants sont conscients des différences anatomiques entre les sexes et sont très préoccupés par la façon dont les autres fonctionnent, mais ils ne connaissent pas encore les fonctions reproductrices des organes génitaux. Leur curiosité concerne aussi la fonction éliminatoire de l’anatomie. Les garçons se demandent comment les lles peuvent uriner sans pénis ; ils observent donc les lles aux toilettes. Les lles sont tout aussi curieuses de l’anatomie des garçons. Le fait de jouer au docteur permet aux enfants de découvrir le corps du sexe opposé.

Peurs Un grand nombre et une grande variété de peurs réelles et imaginaires sont présentes au cours des années préscolaires. Il y a notamment la peur de l’obscurité, la peur d’être laissé seul (en particulier au coucher), la peur des animaux (en particulier des gros chiens), la peur des fan­ tômes ou des monstres, les peurs sexuelles (cas­ tration), et la peur des personnes ou des objets associés à la douleur (Naître et grandir, 2013a). Les parents se demandent souvent comment gérer ces peurs, parce qu’aucune persuasion logique, coercition ou moquerie ne les fera disparaître. En fait, les enfants sont incapables de distinguer les expériences réelles du monde imaginaire. Le concept d’animisme, soit l’attribution de forces vitales à des objets inanimés, aide à expliquer pourquoi les enfants ont peur des objets. Les enfants d’âge préscolaire ont également peur de perdre des parties de leur corps. C’est notamment le cas lorsqu’ils subissent certaines interventions médicales comme une insertion intraveineuse ou la pose d’un plâtre sur un membre. Ils peuvent penser que ces interventions menacent réellement leur existence. La meilleure façon d’aider les enfants à surmon­ ter leurs peurs est de rester à l’écoute, de ne pas minimiser ou de ne pas dramatiser les peurs, et de les rassurer. Il faut les faire participer activement à la recherche de moyens pratiques pour faire face progressivement à l’expérience effrayante. Allumer une veilleuse dans la chambre à coucher rassure l’enfant sur le fait qu’il n’y a pas de monstre caché dans le noir FIGURE 3.20. Le fait

3

FIGURE 3.20 Un enfant d’âge préscolaire peut avoir besoin d’une veilleuse pour s’endormir.

d’exposer l’enfant à l’objet qu’il craint, dans des mises en situation et des jeux de rôles, peut aider à réduire l’anxiété et les peurs. Habituellement, ces peurs disparaissent vers l’âge de cinq ou six ans. L’explication de la sé­ quence développementale des peurs et de leur disparition graduelle peut aider les parents à gagner de l’assurance par rapport à la gestion des peurs de leur enfant d’âge préscolaire. Parfois, les peurs persistent. Pour les enfants qui entretiennent des peurs sérieuses perturbatrices de la vie fami­ liale, l’inrmière suggérera aux parents d’en dis­ cuter avec un médecin ou un psychologue.

Comportement L’agressivité est un comportement courant qui témoigne de sentiments de détresse et de frustra­ tion. Si elle persiste à l’âge préscolaire, elle peut entraîner à court terme des difcultés scolaires et, à plus long terme, des problèmes de délinquance, de consommation abusive de drogue et d’alcool, des problèmes de santé mentale et d’actes crimi­ nels : ces problèmes vécus à l’adolescence peuvent subsister à l’âge adulte (Tremblay, Gervais et Petitclerc, 2008). Un ensemble complexe de variables biologiques, environnementales, socio­ culturelles et familiales inuence les comporte­ ments d’agressivité, de même que l’âge de l’enfant et son seuil d’irritabilité. Une étude récente démontre que les lles possèdent plus de capacités que les garçons pour réguler leurs comportements durant les conits (Kung, Li, Golding et al., 2017). La question du modelage, ou façonnement, inuencerait les comportements agressifs. Ainsi, les enfants qui voient leurs parents commettre des agressions verbales ou physiques pourraient nir par considérer ces gestes comme acceptables et adopter ces mêmes comportements envers les autres (Nikolas, Klump et Burt, 2013).

Il est possible de consulter les feuillets Les comportements agressifs : les comprendre pour mieux les gérer, Les comportements agressifs 2 : quand faut-il s’en inquiéter ? et Les comportements agressifs : soutenir pour mieux prévenir, conçus par le Centre d’excellence pour le développement des jeunes enfants, au www.excellencejeunesenfants.ca.

L’inrmière doit situer le problème d’agressi­ vité dans un contexte plus large en adoptant une approche familiale et systémique pour bien com­ prendre la situation. L’inrmière doit dépister Chapitre 3

Croissance, développement et promotion de la santé

109

ces comportements destructeurs le plus tôt possible an d’éviter qu’il y ait des répercussions dans toutes les sphères du développement de l’enfant. Elle doit reconnaître les comportements agressifs, qui se caractérisent souvent par des attaques physiques envers d’autres enfants ou des adultes, par la destruction des biens d’autrui, par des crises de colère fréquentes et intenses, par une impulsivité extrême ainsi que par l’absence de respect et d’obéissance. Ce problème d’agressivité est complexe et préoccupant. De façon générale, la différence entre un comportement normal et un autre, problématique, n’est pas le comportement lui-même, mais bien les facteurs suivants : 1) sa fréquence (nombre d’occurrences) ; 2) sa gravité (perturbation du fonctionnement social et cognitif) ; 3) ses facteurs déclencheurs (moment où le comportement commence) ; 4) sa durée (au moins quatre semaines). L’inrmière peut encourager et soutenir les interventions individuelles avec un psychoéducateur ou un éducateur spécialisé auprès de l’enfant, de sa famille et de son milieu de vie, dont le milieu scolaire. Le lien parent-enfant est un puissant facteur d’inuence chez les enfants d’âge préscolaire qui ont des comportements perturbateurs (Tremblay et al., 2008). L’infirmière doit donc favoriser l’établissement et le maintien d’une bonne

communication entre les parents et l’enfant. Elle doit soutenir les parents dans l’adoption de pratiques parentales positives et efcaces en matière de discipline et d’encadrement. L’inrmière scolaire peut faire intervenir des spécialistes à l’école qui proposent des jeux de rôle dans lesquels des actes violents sont simulés et la recherche de solutions est explorée (Institut Pacique, 2014).

Établissement de limites et discipline Les préoccupations quant à la discipline et à l’établissement de limites sont présentes chez les parents des enfants de trois à six ans. Les stratégies qui se sont avérées efcaces pour établir les limites et la discipline chez le trottineur doivent être maintenues ou adaptées chez l’enfant qui grandit. Il se peut que les stratégies utilisées par les parents d’enfants de trois à six ans aient été peu efcaces et nécessitent des ajustements. Dans tous les cas, l’inrmière doit souligner l’importance d’appliquer les stratégies et les principes liés à une discipline positive. À l’âge préscolaire, de nombreux changements préoccupent les parents. L’inrmière doit encourager ces derniers à exprimer leurs préoccupations an d’évaluer leurs besoins d’apprentissage et de partager avec eux de l’information pertinente qui les aidera à mieux vivre cette période. Le TABLEAU 3.22

Soutien inrmier TABLEAU 3.22 Aider les parents d’enfants d’âge préscolaire Enseignement à l’enfant et à sesleurs proches à améliorer pratiques parentales PÉRIODE

ACTIVITÉS SUGGÉRÉES

À 3 ans

• Explorer la position des parents par rapport à la fréquentation de leur enfant dans un service de garde. • Encourager l’inscription à un centre préscolaire. • Préparer les parents à différentes éventualités, notamment : – à l’intérêt accru de l’enfant à élargir ses relations ; – aux moyens que l’enfant pourrait adopter pour réduire les tensions, par exemple le besoin d’un objet transitionnel (doudou) ; – aux changements marqués vers trois ans et demi, si l’enfant se sent anxieux et passe d’un extrême à l’autre sur le plan affectif ; – au trouble normal de la uidité verbale ; – à la recherche d’attention parce que l’enfant vit une insécurité affective et qu’il a peur de perdre l’amour de ses parents ; – au comportement agressif qu’un enfant équilibré pourrait adopter. • Mettre l’accent sur l’importance de la discipline positive et de l’établissement de limites. • Encourager les parents à offrir des choix à l’enfant. • Souligner la nécessité de protéger et d’éduquer l’enfant en vue de prévenir les blessures.

110

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

TABLEAU 3.22

Aider les parents d’enfants d’âge préscolaire à améliorer leurs pratiques parentales (suite)

PÉRIODE

ACTIVITÉS SUGGÉRÉES

À 4 ans

• Analyser les sentiments des parents relativement au comportement de l’enfant.

3

• Explorer la possibilité pour les parents de prendre des moments de répit, par exemple en conant leur enfant à un centre préscolaire pour une partie de la journée. • Souligner l’importance d’établir des limites réalistes quant au comportement, et d’utiliser les principes et les stratégies associés à la discipline positive (MSSS, 2009). • Préparer les parents à différentes éventualités, notamment : – au comportement de l’enfant plus agressif qu’avant, notamment sur le plan des activités motrices et du langage injurieux (bravade des interdits) ; – à la résistance à l’autorité parentale ; – à la curiosité sexuelle accrue ; – au fait, pour leur l’enfant, de devenir très imaginatif, de raconter des histoires à dormir debout (à distinguer des mensonges) et de créer des compagnons de jeu imaginaires. À 5 ans

• Informer les parents qu’ils peuvent s’attendre à une période tranquille lorsque l’enfant atteindra cinq ans. • Aider les parents à préparer l’enfant à l’entrée à l’école. • S’assurer que les vaccins sont à jour avant l’entrée à l’école. • Explorer auprès des parents qui ne travaillent pas à l’extérieur leurs besoins de se livrer à leurs propres activités lorsque l’enfant commence l’école. • Explorer avec les parents la possibilité d’impliquer l’enfant dans des activités sportives (p. ex., la natation).

propose des activités que l’inrmière peut mettre en place pour soutenir les pratiques de parents d’enfants de trois à six ans. De plus, les comportements de régression liés à l’arrivée d’un nouvel enfant dans la famille sont particulièrement fréquents chez l’enfant d’âge préscolaire qui semble accepter le bébé à la maison, mais qui se conduit mal à la garderie ou à la maternelle. L’enfant exerce une forme d’activité de substitution dont le message est : Je ne peux pas faire savoir à mes parents ce que je ressens, alors c’est à vous que je le dis.

3.5

3.5.1

Croissance et développement de l’enfant d’âge scolaire (6-12 ans) Croissance et développement général

dents de lait devrait être terminée vers la n du primaire ; les dents dénitives sont presque toutes en place. Le visage commence à se modifier, notamment en raison de l’élargissement de la mâchoire. L’enfant acquiert de plus en plus d’autonomie et aime avoir des responsabilités TABLEAUX 3.23 et 3.24.

TABLEAU 3.23

Développement général de l’enfant d’âge scolaire

Caractéristiques physiques et motricité

Développement sensoriel et cognitif

• Dextérité

• Acuité visuelle maximale vers sept ans

• Agilité

• Connaissances mathématiques

• Vélo, natation

• Maîtrise de la lecture

• Écriture régulière et rapide

• Concepts : espace-temps, causeconséquence

• Meilleure coordination

• Vocabulaire : phrases simples et complètes

Entre l’âge de 6 et 12 ans, l’enfant continue à grandir et à prendre du poids. La perte de toutes les

• Curiosité intellectuelle

Chapitre 3

Croissance, développement et promotion de la santé

111

TABLEAU 3.24

Développement psychologique de l’enfant d’âge scolaire

Selon Freud

Selon Erickson

Selon Piaget

Selon Kohlberg

Selon Fowler

Concept de soi

• Perfectionnement des compétences

• Exécution de tâches

• Logique et cohérence

• Conformisme et loyauté

• Interaction sociale

• Acquisition des connaissances

• Collaboration

• Tri, classement, ordre, organisation

• Approbation d’autrui

• Connaissance de la structure et du fonctionnement du corps

• Raisonnement inductif (du particulier au général)

• Respect de l’autorité

• Jeux

• Besoin d’acceptation des autres

• Intérêt pour la religion

• Inuence des normes culturelles et sociales

• Socialisation de la pensée

Soins inrmiers ENFANT D’ÂGE SCOLAIRE

8 L’obésité est traitée en détail dans le chapitre 8, Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent.

L’infirmière adapte son approche en tenant compte de l’ensemble des caractéristiques du développement de l’enfant d’âge scolaire. À cet âge, comme l’enfant est pudique, l’inrmière doit respecter son besoin d’intimité. L’enfant est capable de s’occuper seul, alors l’inrmière veille à préserver et à encourager son autonomie, son besoin de solitude, de repos ou d’échanges (périodes de jeux avec les autres enfants). L’inrmière doit adapter ses explications au vocabulaire, à l’âge et à la compréhension de l’enfant, sans oublier de laisser ce dernier poser des questions ou exprimer ses émotions. Puisque, à cet âge, l’enfant est très sensible à l’approbation d’autrui, l’inrmière l’encourage à s’exprimer et elle le félicite lorsqu’il le fait, ce qui renforce un comportement adéquat et favorise chez l’enfant le développement de l’estime de soi.

3.5.2

Promotion de saines habitudes de vie chez les enfants d’âge scolaire (6-12 ans)

Alimentation CONSEIL CLINIQUE

Il faut connaître les aliments qui comblent les besoins en électrolytes comme les bananes pour le potassium, les légumineuses pour le sodium et les amandes pour le magnésium.

112

Partie 1

L’organisme constitue les réserves dont il aura besoin pour le pic de croissance qui surviendra à l’adolescence. Les parents et les enfants doivent être sensibilisés à l’importance d’adopter un régime alimentaire équilibré, garant d’une bonne croissance TABLEAU 3.20. La qualité de l’alimentation de l’enfant dépend des habitudes alimentaires de sa famille. Bien que les préférences et les aversions alimentaires que l’enfant a acquises plus jeune subsistent au cours des années d’école, il commence à apprécier une plus grande variété d’aliments.

Inrmière, enfant et famille

Cependant, l’accessibilité des établissements de restauration rapide près des écoles primaires et secondaires, l’inuence des médias et la tentation de la malbouffe font qu’il est facile pour l’enfant de faire provision de calories vides. Les aliments qui ne favorisent pas la croissance, comme les sucres, les amidons et les matières grasses en trop grande quantité, se retrouvent couramment dans l’alimentation de l’enfant d’âge scolaire. La grande disponibilité d’aliments hypercaloriques ainsi qu’une tendance à adopter des activités sédentaires ont également contribué à l’augmentation de l’obésité observée chez les enfants 8 . Il n’est pas possible pour les parents de surveiller ce que l’enfant mange lorsque ce dernier n’est pas à la maison. L’environnement scolaire est un milieu idéal pour promouvoir de saines habitudes alimentaires. L’inrmière en milieu scolaire a un rôle à jouer dans le changement des politiques alimentaires de son établissement (Ordre des inrmières et inrmiers du Québec, 2015). L’éducation en matière de nutrition (p. ex., les composantes d’une alimentation saine ainsi que la façon dont les produits alimentaires sont cultivés, transformés et préparés) devrait faire partie de l’enseignement donné par l’école. D’importants éléments de l’éducation nutritionnelle sont inclus dans le Guide alimentaire canadien. L’inrmière de l’école peut prendre une part active à l’éducation nutritionnelle en travaillant avec les enseignants à la planication et à la mise en place de modules de formation sur la nutrition, et en offrant aux parents et aux enfants des renseignements sur l’alimentation.

Santé dentaire Comme l’éruption des dents permanentes a lieu au cours des années scolaires, l’hygiène buccodentaire et les soins quotidiens destinés à prévenir la carie sont des composantes importantes de la santé générale de l’enfant à cet âge. À l’examen des dents, l’inrmière peut observer leur alignement, leur

position et leur couleur, ainsi que la présence de tartre, de caries dentaires et de sites d’extraction. Les premières dents permanentes, ou secondaires, apparaissent vers l’âge de 6 ans. D’abord, les premières molaires poussent derrière les molaires temporaires, puis, une fois que les dents temporaires sont tombées, l’éruption des autres dents permanentes se fait à peu près dans le même ordre que celui des dents primaires FIGURE 3.21. Lorsque les deuxièmes molaires permanentes apparaissent vers 12 ans, les dents permanentes sont presque toutes présentes. La croissance de la dentition permanente est plus avancée chez les lles que chez les garçons.

3

Les enfants d’âge scolaire sont capables de comprendre les messages éducatifs et de faire des choix éclairés. De plus, ils ont la dextérité requise pour appliquer la bonne technique du brossage de dents et pour utiliser la soie dentaire (ADC, 2017c, 2017e). Les parents doivent encourager l’enfant dans ces saines habitudes. Il est important de rappeler aux jeunes d’éviter la consommation abusive de sucreries et d’adopter une saine alimentation.

Caries dentaires Avec l’apparition des dents permanentes, il est important de réduire l’incidence et les conséquences des caries. Non traitée, la carie peut entraîner la destruction totale de la dent permanente. Comme beaucoup d’enfants ne reçoivent pas toujours des soins dentaires, un examen sommaire de la bouche fait partie intégrante de l’évaluation physique de l’enfant par l’inrmière en milieu scolaire. Cette dernière peut collaborer étroitement avec les hygiénistes dentaires en milieu scolaire pour promouvoir de saines habitudes de vie en santé buccodentaire. Les dentistes peuvent appliquer des scellants qui agissent comme une barrière de résine empêchant les bactéries cariogènes de se loger dans le creux des dents et d’attaquer l’émail.

Sommeil Le besoin de sommeil et de repos requis à l’âge scolaire varie énormément d’un enfant à un autre. Il dépend de l’âge de l’enfant, de son degré d’activité et de son état de santé. Le rythme de la croissance ralentit durant ces années, et la dépense d’énergie liée à la croissance est moins grande qu’au cours des années précédentes. L’enfant d’âge scolaire n’a habituellement plus besoin de faire la sieste et dort environ 11 heures par nuit à l’âge de 5 ans, et 9 heures à l’âge de

FIGURE 3.21

Séquence d’apparition des dents secondaires

clinique

12 ans (SCP, 2012a). Bien que l’enfant d’âge scolaire éprouve Luce est âgée de sept ans. Elle prend son repas du moins de difculté à aller au midi à l’école. Aujourd’hui, son lunch consiste en lit, il lui arrive encore parfois un sandwich au jambon et au fromage avec pain de résister au rituel du couà grains entiers, un berlingot de lait entier, une cher. L’enfant de 6 ou 7 ans n’a pomme et une carotte crue. Comme elle n’aime habituellement pas de mal à pas ce légume, elle l’échange contre un biscuit à aller se coucher, et il est posl’avoine. Luce a-t-elle un lunch équilibré ? Justiez sible de lui faciliter la tâche en votre réponse. encourageant des activités calmes avant qu’il se mette au lit, notamment le coloriage ou la lecture. Il faut toutefois rappeler fréquemment à la plupart des enfants d’âge scolaire qu’il est temps d’aller dormir. L’enfant âgé de 8 à 11 ans résiste davantage. Il ne se rend souvent pas compte qu’il est fatigué. Il est parfois possible de venir à bout de sa résistance en lui permettant de se coucher un peu plus tard au fur et à mesure qu’il vieillit. À 12 ans, l’enfant n’oppose généralement plus de résistance au moment de se coucher.

Jugement

Le dentiste ou l’hygiéniste dentaire sont les professionnels les mieux placés pour juger de l’habileté de l’enfant à manipuler la brosse à dents, et pour évaluer ses besoins et le soutenir dans cet apprentissage de l’hygiène buccale. La fréquence des visites pour un examen dentaire est la même que pour les enfants plus jeunes, soit tous les six mois.

Le manque de sommeil chez les enfants de 5 à 10 ans est associé à l’obésité en raison d’un déséquilibre hormonal, à savoir une augmentation de la ghréline, qui stimule la faim, et une réduction de la leptine, qui calme normalement l’appétit (Pyper, Harrington et Manson, 2017 ; Wilkie, Standage, Gillison et al., 2016). L’inrmière doit informer les parents de l’importance de la qualité Chapitre 3

Croissance, développement et promotion de la santé

113

et de la durée sufsante du sommeil pour éviter les conséquences nocives sur la santé. 23 Les problèmes de santé liés à la pratique d’activités sportives sont abordés dans le chapitre 23, Trou­ bles liés aux systèmes musculosquelettique et articulaire.

L’inrmière peut consulter l’avis scientique de KinoQuébec intitulé L’activité phy­ sique, le sport et les jeunes au www.kino-quebec.qc.ca.

Promotion de l’activité physique De l’âge de 6 à 12 ans, l’enfant acquiert la coordination, le synchronisme et la concentration requis pour participer à des activités d’adolescents ou d’adultes, mais il n’en a ni la force, ni l’endurance, ni la maîtrise. Il n’est peut-être pas prêt à pratiquer des sports de compétition qui exigent des efforts considérables. L’inrmière doit sensibiliser les enfants et leur famille à l’importance d’adopter un mode de vie actif. Les nouvelles directives canadiennes en matière d’activité physique recommandent au moins 60 minutes d’activité d’intensité modérée à élevée chaque jour pour les enfants de 17 ans et moins (Longmuir, Colley, Wherley et al., 2014). Les enfants âgés de 6 à 12 ans sont encore naturellement actifs, mais, au fur et à mesure qu’ils grandissent, ils ont tendance à adopter des comportements sédentaires.

Les parents et les enseignants devraient encourager les enfants à proter du temps libre qu’ils ont après l’école pour pratiquer des activités physiques. De cette façon, les enfants pourront combler jusqu’à 30 % de leurs besoins quotidiens en matière d’activité physique. Par ailleurs, le fait de courir et de marcher dehors et dans la nature entraîne des bienfaits sur le Audrey est âgée de 9 ans. Avant de faire ses plan psychologique, comme devoirs après l’école, elle aime se promener avec diminuer la colère, l’anxiété, sa trottinette pendant 30 minutes. Elle aime aussi la fatigue et la tristesse, tout jouer à des jeux vidéo avec son frère cadet. Audrey en augmentant les niveaux fait-elle sufsamment d’activité physique ? d’énergie (Lawton, Brymer, Justiez votre réponse. Clough et al., 2017).

Jugement

clinique

A

B

FIGURE 3.22 A Si l’enfant pèse entre 10 et 30 kg, il doit être installé dans un siège d’appoint. B Si l’enfant dépasse ce poids, la ceinture de sécurité standard du véhicule suft.

114

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

Prévention des blessures et des traumas De 6 à 12 ans, l’enfant a gagné en précision dans la coordination et le contrôle de ses muscles, et ses capacités cognitives lui permettent d’adopter des comportements sécuritaires et d’acquérir de saines habitudes de vie s’il est stimulé et encouragé par ses parents et les personnes signicatives de son entourage. Il a tendance à être plus prudent et à respecter davantage les règles parentales. Statistiquement, les blessures les plus fréquentes dans cette tranche d’âge sont les accidents de la route et les blessures sportives, dont les chutes, qui causent la majorité des hospitalisations TABLEAU 3.6 23 .

Accidents de la circulation Au premier rang des cas de décès chez les enfants d’âge scolaire se trouvent les accidents de la route ; les enfants y sont impliqués en tant que passagers d’un véhicule automobile, piétons ou cyclistes.

Passagers d’un véhicule automobile Lorsqu’il pèse de 10 à 30 kg, l’enfant doit être assis dans un siège d’appoint correspondant à son poids et à sa taille FIGURE 3.22. Par la suite, l’enfant peut s’asseoir directement sur la banquette. À tout âge, la banquette arrière reste l’endroit le plus sécuritaire. Piétons et cyclistes L’incidence la plus élevée des blessures chez les piétons se situe chez les enfants âgés de 10 à 14 ans (ASPC, 2009). La prévention nécessite une bonne sensibilisation quant aux dangers que représentent les véhicules en mouvement ou stationnés. Un enfant de moins de 9 ans devrait toujours être accompagné pour traverser la chaussée. Les parents doivent continuer à insister sur l’importance de vérier la présence de véhicules en mouvement avant de traverser la rue, de respecter les codes de la route, les signaux indiquant quand s’arrêter et quand traverser, et de suivre les indications de l’agent de circulation. Ils doivent montrer l’exemple an de renforcer le processus d’apprentissage. Des ateliers sur les consignes des panneaux de signalisation et les marquages au sol sont fortement encouragés dans les interventions de l’inrmière en santé communautaire et en santé scolaire. À vélo, l’enfant doit apprendre à rouler dans le sens de la circulation, à une certaine distance des voitures stationnées et en le indienne lorsqu’il se déplace en groupe. Le casque de vélo doit être porté en tout temps, attaché sous le menton. Il doit bien couvrir le front et être parallèle au sol lorsque la tête est droite. Le port d’un casque de vélo sécuritaire diminuerait les blessures à la tête (Direction régionale de santé publique de Montréal, 2016). Comme ce type de blessures est le principal facteur à l’origine des décès liés au cyclisme, le port du casque protecteur constitue l’aspect le plus important de la promotion de la sécurité à vélo FIGURE 3.23. De plus,

blessures. Les enfants de 6 à 10 ans devraient pratiquer ces activités uniquement sous la supervision étroite d’un adulte.

Noyades

FIGURE 3.23 L’enfant d’âge scolaire comprend les règles de sécurité et est davantage porté à les observer, puisqu’il ne subit généralement pas de pression de la part de ses pairs.

le vélo doit convenir à la taille de l’enfant ; ce dernier doit pouvoir s’asseoir sur la selle et placer la pointe des deux pieds sur le sol. Les pieds peuvent atteindre facilement les pédales avec une légère exion ; l’enfant doit pédaler sans difculté en position assise.

Blessures sportives En 2013-2014, près de 19 000 Canadiens ont été hospitalisés pour des blessures liées à la pratique d’activités sportives (Institut canadien d’information sur la santé, 2015). Les chutes à bicyclette, l’éjection d’un véhicule tout-terrain (VTT) et les chutes en ski et en planche à neige constituent les principales causes d’hospitalisations au Québec. L’équipement utilisé dans la pratique d’activités physiques ainsi que les vêtements, notamment les chaussures, doivent être en bon état et adaptés à la taille de l’enfant. Les enfants qui pratiquent la planche à roulettes ou le patin à roues alignées devraient porter un casque ajusté et d’autres pièces d’équipement de protection, surtout aux genoux, aux poignets et aux épaules, an de prévenir les

Les noyades représentent 13 % des décès accidentels chez les enfants âgés de 5 à 9 ans (INSPQ, 2009). Les consignes de sécurité abordées précédemment demeurent incontournables. Le port d’un dispositif de ottaison doit toujours être conforme aux directives du fabricant et ajusté au poids et à la taille de l’enfant. L’enfant d’âge scolaire peut apprendre à nager et peut faire preuve de prudence, mais il doit toujours être surveillé par un adulte lorsqu’il est près d’un plan d’eau.

Des consignes de sécurité à vélo sont présentées dans le Guide de sécurité à vélo (7e éd.) pouvant être consulté sur le site Web de la Société de l’assu­ rance automobile du Québec au https://saaq.gouv.qc.ca.

Brûlures Les risques de brûlures chez les enfants d’âge scolaire sont similaires à ceux décrits aux tranches d’âge antérieures. Cependant, à cet âge, les enfants sont davantage en mesure d’appliquer les mesures de précaution qui leur sont enseignées et de comprendre les risques encourus. Les enfants peuvent apprendre à ne pas toucher aux matières dangereuses pouvant causer des brûlures. L’enfant doit être vigilant lorsqu’il prépare de la nourriture et qu’il utilise la cuisinière, et les parents doivent lui enseigner comment éviter de se brûler avec des plats chauds ou de l’eau bouillante. Comme les enfants de cette tranche d’âge passent beaucoup de temps à l’extérieur et qu’il est difcile de limiter leur exposition au soleil, il leur faut une protection solaire en tout temps, puisque les coups de soleil risquent de se produire tout au long de l’année.

Autres lésions corporelles Les recommandations proposées précédemment pour les enfants de moins de six ans concernant les objets pointus et tranchants, de même que celles relatives au comportement à adopter avec les animaux sont aussi valables pour les enfants d’âge scolaire.

Soins inrmiers PRÉVENTION DES BLESSURES ET DES TRAUMAS

À l’âge scolaire, il est important que l’inrmière continue d’insister sur le respect des consignes de sécurité et du Code de la route, aussi bien comme piéton que cycliste ou passager d’un véhicule automobile. Il est essentiel de discuter des bienfaits liés aux normes de sécurité avec ces enfants an qu’ils acquièrent une meilleure compréhension des risques et qu’ils puissent adopter de saines habitudes. Pour cela, les parents doivent donner l’exemple.

Les stratégies éducatives ludiques, comme l’apprentissage par le jeu de rôle, sont bien adaptées à cet âge et permettent une meilleure intégration des notions sécuritaires. Les enfants et les parents doivent devenir des partenaires dans l’application des règles de sécurité. L’inrmière doit soutenir les parents pour qu’ils puissent acquérir les connaissances et les compétences requises en matière de sécurité . Pour cela, l’inrmière doit s’appuyer sur leur motivation à promouvoir le plein épanouissement familial.

Chapitre 3

Tableau 3.4W : Résumé des mesures préventives à prendre pour les enfants d’âge scolaire selon les types de blessures.

Croissance, développement et promotion de la santé

115

3

Gestion du stress Dans cette tranche d’âge, le fait de participer à de multiples activités organisées à l’école peut constituer une source de stress. Les exigences de performance des professeurs, des entraîneurs et des parents s’ajoutent et confrontent parfois l’enfant à des attentes irréalistes (Naître et grandir, 2016b). De plus, l’enfant peut être exposé à des comportements d’intimidation et à la pression des pairs. Il peut aussi être victime de moqueries et de mauvais traitements à l’école (Naître et grandir, 2016b). Il y a un nombre important d’enfants d’âge scolaire qui consultent l’inrmière de l’école pour des symptômes récurrents et inexpliqués de maux de tête et de ventre. Un lien direct a été établi entre ces manifestations psychosomatiques et le stress (Naître et grandir, 2016b). L’inrmière doit être vigilante et examiner la situation en tenant compte de ce qui a pu provoquer les symptômes physiques. Pour aider l’enfant à gérer sainement son stress, les parents, les enseignants et les professionnels de la santé doivent le rassurer et lui rappeler qu’il est en sécurité, établir une communication franche et ouverte, l’inciter à exprimer ses sentiments et l’encourager à maintenir des routines régulières (Naître et grandir, 2016b). Les adultes doivent reconnaître les signes indiquant qu’un enfant est soumis à du stress excessif, trouver rapidement la source de ce stress et diriger l’enfant vers les ressources appropriées. Il faut apprendre à l’enfant à reconnaître ces signes, à les interpréter comme des indicateurs de stress et à recourir à des techniques pour gérer ce dernier. Il faut inciter l’enfant à se défouler ; l’activité physique lui permet de relâcher la tension et l’anxiété. Lorsqu’une stratégie ou une technique efcace a été trouvée en réponse à une situation génératrice de stress, les parents peuvent alors montrer à l’enfant comment l’appliquer dans d’autres situations.

Tableau 3.5W : Aide à l’enfant à l’école.

Au stress s’ajoutent d’autres peurs vécues par l’enfant d’âge scolaire, notamment la peur du noir et une inquiétude excessive liée à des actions passées. Ces peurs sont considérées comme normales pour un enfant de cet âge. Durant les années scolaires, l’enfant ne craint plus autant pour sa sécurité physique qu’au cours des années préscolaires, mais la crainte d’être blessé ou enlevé reste présente.

3.5.3

L’entrée à l’école marque pour l’enfant une brusque rupture dans la structure de son univers. Pour nombre d’entre eux, il s’agit d’une première occasion de se conformer à un modèle de groupe imposé par un adulte qui n’est pas l’un de ses parents FIGURE 3.24. Le nombre important d’enfants sous la responsabilité de cet adulte empêche une attention constante et particulière de sa part envers chacun des enfants. L’adaptation est plus ou moins réussie selon la maturité physique et affective de l’enfant, et selon que les parents sont prêts ou non à accepter la séparation d’avec l’enfant. L’enfant apprend de son entourage ce qu’il doit savoir sur sa vie d’élève. De plus, de nombreux enfants ont déjà fréquenté la garderie, le jardin d’enfants ou la maternelle. Le rôle des camarades de classe est essentiel dans la socialisation de l’enfant. C’est à l’école que, pour la première fois, l’enfant fait partie d’un large groupe de personnes de son âge. Au l des ans, les relations avec ses pairs à l’école ont une inuence grandissante sur lui. La nature de l’inuence exercée par le groupe de pairs dépend des origines, des intérêts et des capacités de chaque enfant. Bien que leurs fonctions soient distinctes, enseignants et parents ont pour tâche commune d’assumer un rôle éducatif d’encadrement, et tous sont bien placés pour faire respecter des principes de conduite. Cependant, la responsabilité première de l’enseignant est de stimuler et de guider le développement cognitif, psychologique et social de l’enfant. L’enfant, avec l’appui de ses parents, développe son sens des responsabilités : il apprend à tenir ses promesses, à respecter les délais et à bien se préparer pour ses tâches d’adulte. L’enfant responsable peut parfois demander de l’aide. Une pression trop importante ou une absence d’encouragements de la part des parents peut entraver son développement dans ce sens .

Préoccupations courantes des parents

Vie scolaire L’école permet de transmettre aux enfants les valeurs de la société. Elle sert aussi de cadre pour les relations avec les pairs. Le milieu scolaire est le deuxième agent de socialisation dans la vie de l’enfant, après la famille.

116

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

FIGURE 3.24 Dans la classe, l’enfant obéit à des règles qui ne sont pas dictées par sa famille.

Enfant à clé Avec le grand nombre de parents qui travaillent à temps plein, plusieurs enfants peuvent se retrouver seuls à la maison au retour de l’école. Selon le Conseil canadien de la sécurité (CCS, 2016), les parents ne devraient pas laisser leur enfant seul à la maison avant qu’il ait au moins 10 ans, et même alors, seulement s’il a la maturité requise. Le CCS recommande de ne pas le laisser seul plus de 1 ou 2 heures, et seulement s’il y a un adulte responsable à proximité pour aider l’enfant en cas de besoin. Il incombe aux parents de juger si leur enfant peut se débrouiller seul ou avec des frères et sœurs pendant une courte période avant ou après l’école. L’âge n’est pas le seul critère à considérer pour prendre cette décision. Il arrive, par exemple, que des adolescents et des préadolescents laissés sans supervision s’attirent plus d’ennuis que des enfants plus jeunes. Les parents doivent mettre en place une structure qui assure un milieu sécuritaire et supervisé lorsqu’il n’y a pas d’adulte à la maison ENCADRÉ 3.16.

Éducation sexuelle L’éveil à la sexualité suscite bien des interrogations chez les enfants âgés de 6 à 12 ans. Vers l’âge de 10 ans, autant chez les lles que chez les garçons, le développement et les changements du corps engendrent à la fois curiosité et gêne. Une attitude de non-jugement est nécessaire pour créer un lien de conance et démystier certains comportements associés à la sexualité. L’enfant de cet âge devient pudique, mais il se pose des questions. Il a besoin de renseignements précis et concrets pour répondre à des questions comme : Que faire si mes règles se déclenchent pendant que je suis

en classe ? ou Comment cacher aux autres que j’ai une érection ? Ces questionnements peuvent être discutés entre pairs (CHU Sainte-Justine, 2016). De l’information sur la maturation sexuelle et sur le processus de reproduction réduit les sentiments d’insécurité, de timidité et de solitude qui sont souvent présents chez l’enfant à la puberté. Les programmes sur la sexualité chez les 6 à 12 ans comprennent généralement les aspects suivants :

3

1. la puberté et les transformations du corps ; 2. l’image corporelle ; 3. le cycle menstruel ; 4. l’identité sexuelle ; 5. la masturbation ; 6. la grossesse ; 7. les infections transmissibles sexuellement. L’infirmière doit proposer des discussions ouvertes. Parfois, des jeux de rôle peuvent s’avérer stimulants et bien adaptés à la réalité des enfants d’âge scolaire. L’inrmière doit aborder la sexualité comme étant une caractéristique normale faisant partie de la croissance et du développement. Elle doit répondre aux questions honnêtement et avec autant de profondeur que pour n’importe quel autre sujet. Ses réponses doivent être formulées de façon à ce que l’enfant puisse les comprendre. Selon le contexte, il peut être indiqué de s’adresser aux garçons et aux lles séparément. L’inrmière peut aider les parents à adopter une approche positive et d’écoute en leur expliquant le caractère normal de cette curiosité sexuelle chez leur enfant. Ainsi, il ne s’agit pas de réprouver ces comportements. Il existe d’excellents documents de référence sur l’éducation sexuelle destinés aux

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 3.16

Liste de vérication pour les parents qui doivent laisser leur enfant seul à la maison

• Fixer des règles fermes qui précisent clairement ce qui est permis et ce qui ne l’est pas.

Après quelques essais, répondre aux questions qui suivent :

• Retirer ou mettre sous clé tous les articles dangereux (alcool, médicaments, allumettes, etc.).

• Est-ce que les parents se sentent à l’aise avec l’idée que l’enfant soit seul à la maison ?

• Préciser à l’enfant de quelle manière il doit occuper son temps.

• L’enfant peut-il suivre des règles de manière responsable ?

• Rester en contact grâce au téléphone portable.

• L’enfant est-il capable de comprendre des directives et de s’en souvenir ?

• S’assurer que la maison est sécuritaire : avertisseur de fumée fonctionnel ; lampes de poche, serrures, fenêtres et portes sûres.

• L’enfant s’occupe-t-il à des activités constructives, sans faire de sottises ?

• Préparer une trousse de premiers soins et lui expliquer comment s’en servir. • Limiter le temps où l’enfant est laissé seul à la maison. De courtes périodes d’essai aideront les parents à déterminer si l’enfant est prêt à rester seul à la maison. Augmenter ensuite la durée des absences en laissant à l’enfant des consignes à suivre.

• Est-ce que l’enfant se sent à l’aise avec l’idée d’être seul ?

• L’enfant est-il capable de faire face à des situations inattendues s’il s’en produit ? • Les parents sont-ils en mesure de communiquer facilement avec leur enfant lorsqu’ils ne sont pas à la maison ? • L’enfant peut-il en tout temps joindre quelqu’un en cas d’urgence ?

Source : Adapté de CCS (2016).

Chapitre 3

Croissance, développement et promotion de la santé

117

enfants de 6 à 12 ans. L’inrmière peut suggérer aux parents de s’en procurer et de les lire avant de les montrer à l’enfant.

Comportements antisociaux Durant son parcours scolaire, l’enfant peut adopter ce qu’il est convenu d’appeler des comportements antisociaux. Un enfant qui se comportait bien jusque-là peut commencer à mentir, à tricher ou à voler. De tels comportements sont inquiétants et éprouvants pour les parents.

Mensonge et tricherie Lorsque l’enfant commence à fréquenter l’école, il exagère un récit ou une situation pour impressionner sa famille ou ses amis. Cependant, à l’âge scolaire, l’enfant est en mesure de discerner la réalité de la ction. Si l’enfant n’atteint pas ce stade, les parents doivent lui enseigner ce qui est réel et ce qui ne l’est pas. Il peut arriver que le jeune enfant mente pour ne pas se faire punir ou pour échapper à une situation difcile. L’enfant plus âgé peut mentir pour répondre à des attentes xées par d’autres, qu’il n’a pu respecter. La plupart des enfants savent toutefois qu’il est mal de mentir, et ils sont très préoccupés lorsqu’ils constatent ces traits chez leurs amis. Il faut rassurer les parents et leur faire comprendre qu’il arrive à tous les enfants de mentir occasionnellement. La sophistication dans le mensonge serait liée aux habiletés opérationnelles et cognitives du jeune (Evans et Lee, 2013). Il faut aider les parents à demeurer vrais dans leurs relations avec l’enfant. La tricherie est courante chez l’enfant de cinq ou six ans. Ce dernier trouve qu’il est difcile de perdre à un jeu ou à un concours, et il peut décider de tricher pour gagner. Il n’a pas encore conscience du fait que ce comportement est répréhensible, et il l’adopte presque automatiquement. Ce comportement disparaît habituellement à mesure que l’enfant vieillit. Cependant, dans la mesure où l’enfant imite ce qu’il observe, les parents doivent prendre garde à leur propre façon d’agir.

Vol Comme pour tout autre comportement lié à l’éthique, le fait de voler n’est pas inhabituel chez le jeune enfant. Entre l’âge de cinq et huit ans, le sens qu’a l’enfant des droits de la propriété est limité, et il a tendance à prendre un objet qui l’attire ou à prendre de l’argent pour ce que cet argent va lui permettre d’acheter. Il est rarement utile de faire admettre à l’enfant qu’il a volé en lui posant directement la question. L’enfant ne prend pas la responsabilité de tels actes avant la n des années scolaires. L’enfant plus âgé peut voler parce qu’il juge ne pas avoir assez d’argent de poche, ou parce qu’il

118

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

veut compenser ce qu’il ressent comme un manque d’amour ou combler un besoin qu’il estime essentiel. Dans la majorité des cas, il vaut mieux ne pas chercher à trouver d’explications. Des réprimandes, assorties d’une sanction appropriée et raisonnable, comme demander à l’enfant plus âgé de rendre l’argent ou les objets volés, sufsent dans la majorité des cas. La plupart des enfants peuvent apprendre à respecter les droits de propriété des autres sans trop de difcultés, malgré les nombreuses tentations et les occasions qui s’offrent à eux. Si ses propres droits sont respectés, l’enfant est plus enclin à respecter les droits d’autrui. Certains enfants ont simplement besoin de plus de temps pour apprendre les règles concernant la propriété privée.

Établissement de limites et discipline Le degré, les mesures de discipline ainsi que les limites imposées à l’enfant d’âge scolaire dépendent de nombreux facteurs. Certains d’entre eux concernent la maturité psychosociale des parents, notamment ce qu’ils ont vécu dans leur propre enfance et leur expérience en tant que parents, le tempérament de l’enfant, les circonstances entourant sa mauvaise conduite, et sa réaction aux récompenses et aux punitions. Du moment que l’enfant est capable de saisir une situation en adoptant un autre point de vue que le sien, il est aussi en mesure de comprendre les effets de ses réactions sur les autres et sur lui-même. La discipline doit être exercée dans des conditions positives et favorables, et elle doit faire appel à des stratégies destinées à encourager et à orienter les comportements voulus, sans avoir recours à la fessée (Clément et Chamberland, 2014). Faire appel au raisonnement est efcace pour l’enfant durant les cycles du primaire. Avec l’acquisition d’habiletés cognitives, l’enfant peut tirer prot de mesures disciplinaires plus complexes. Par exemple, suspendre des privilèges, exiger une contrepartie, imposer des conséquences et établir un contrat peuvent donner d’excellents résultats. La résolution de problèmes est la meilleure façon d’établir des limites, et l’enfant lui-même peut prendre une part active au processus visant à déterminer les mesures disciplinaires appropriées. An de soutenir les parents d’enfants d’âge scolaire, l’inrmière aura pour rôle de dédramatiser certaines situations et d’aider le parent à comprendre que l’enfant d’âge scolaire va commencer à acquérir davantage d’autonomie pour se préparer à se détacher progressivement de ses parents. Le TABLEAU 3.25 propose des activités que l’inrmière peut suggérer pour soutenir les pratiques parentales.

Soutien inrmier TABLEAU 3.25

Aider les parents d’enfants d’âge scolaire à améliorer leurs pratiques parentales

PÉRIODE

ACTIVITÉS SUGGÉRÉES

Vers 6 ans

• Encourager les parents à respecter le besoin d’intimité de l’enfant et à lui aménager une chambre séparée, si possible.

3

• Sensibiliser les parents à l’importance d’encourager leur enfant à entretenir des relations avec ses camarades. • Préparer les parents à différentes éventualités, notamment : – à vivre beaucoup d’émotions, car l’enfant pourrait avoir des changements d’humeur imprévisibles ; – à se séparer de l’enfant qui aura de plus en plus de centres d’intérêt à l’extérieur de la maison. De 7 à 10 ans

• Insister sur la nécessité pour les parents de favoriser l’indépendance de l’enfant tout en lui imposant des limites et une certaine discipline. • Préparer les parents à différentes éventualités, notamment : – à se séparer de l’enfant qui voudra passer plus de temps avec ses camarades et s’intéressera davantage à des activités à l’extérieur de la maison ; – à accepter le fait que l’un ou l’autre des parents pourrait être l’objet d’une plus grande admiration de la part de l’enfant ; – à encourager chacun d’eux à faire des activités seul avec l’enfant.

De 11 à 12 ans

• Encourager les parents à appuyer l’enfant dans son désir de grandir tout en tolérant certains comportements de régression, s’il y a lieu. • Insister auprès des parents sur l’importance d’offrir à l’enfant un environnement stable sur les plans physique et affectif. • Préparer les parents à différentes éventualités, notamment : – à une poussée de croissance chez leur lle ; – à l’énergie débordante de l’enfant, mais aussi à son irritabilité, sachant que son humeur devrait se stabiliser à 12 ans ; – à la possibilité que l’enfant se masturbe.

3.6

Croissance et développement de l’adolescent (12-18 ans)

La période de l’adolescence peut s’avérer très intense en raison des changements importants qui surviennent : l’enfant se transforme en quelques années à peine en un jeune adulte. Pour certains jeunes, l’expression crise d’adolescence est utilisée pour expliquer les perturbations qu’ils vivent.

3.6.1

Croissance et développement général

Le développement est surtout caractérisé par la poussée de croissance staturale, parfois

impressionnante chez les jeunes garçons, et des changements de comportements et d’humeur. La transformation du corps de l’enfant en corps d’adulte peut dérouter autant les parents que les enfants eux-mêmes ENCADRÉ 3.17 et TABLEAU 3.26.

ENCADRÉ 3.17

Développement physique de l’adolescent

• Croissance importante : lles et garçons • Seuil de croissance des lles • Poussées successives chez les garçons (95 % de la taille adulte)

Chapitre 3

Croissance, développement et promotion de la santé

119

TABLEAU 3.26

Développement psychologique de l’adolescent

Selon Freud

Selon Erickson

Selon Piaget

Selon Kohlberg

Selon Fowler

Concept de soi

• Organes génitaux : sources de tensions et de plaisirs

• Changements physiques rapides et marqués

• Adaptabilité et souplesse

• Respect des droits, des normes et des lois de la société

• Déception d’ordre spirituel

• Importance de l’apparence physique

• Énergie pour se faire des amis

• Préoccupation de l’image • Harmonisation des rôles avec les amis • Décision concernant l’avenir professionnel

• Questions abstraites, théoriques et philosophiques • Conciliation des contradictions

Soins inrmiers ADOLESCENT

En prenant en considération le développement de l’adolescent, l’inrmière joue un rôle particulier auprès de cette clientèle. Dans un contexte de soins, les explications qu’elle fournit tiennent compte du niveau de confort avec le vocabulaire utilisé, particulièrement s’il s’agit de contraception ou d’infections transmissibles sexuellement. L’information donnée doit tenir compte des questions posées par l’adolescent, et le respect de la condentialité doit être observé, particulièrement si l’adolescent se présente avec ses parents. Les soins physiques doivent être donnés avec retenue et respect en gardant à l’esprit le fait que même si sa physionomie est proche de celle d’un adulte, l’adolescent n’est pas forcément à l’aise avec son corps (Hughes et Gullone, 2011).

3.6.2

Promotion de saines habitudes de vie chez l’adolescent (12-18 ans)

Alimentation

Des informations pratiques à propos de l’alimentation pour les adolescents sont accessibles sur le site Web du Centre de référence sur la nutrition de l’Université de Montréal au www.extenso.org.

120

Partie 1

L’augmentation rapide et considérable du poids, de la taille, de la masse musculaire et de la maturité sexuelle à l’adolescence s’accompagne d’un accroissement des exigences nutritionnelles. Les besoins nutritionnels étant étroitement liés à l’augmentation de la masse corporelle, ils atteignent un sommet dans les années de croissance maximale, période au cours de laquelle la masse musculaire double presque. Les besoins énergétiques et protéiniques sont aussi plus élevés qu’à toute autre

Inrmière, enfant et famille

• Raisonnement

• Idéaux inuencés par la mode et les médias • Culte de la minceur • Importance des amis

période de la vie. En raison de cette augmentation des besoins anaboliques, l’adolescent est très sensible aux restrictions caloriques. Le Guide alimentaire canadien, publié par Santé Canada, suggère un nombre de portions selon l’âge TABLEAU 3.20. Cet organisme recommande également de limiter les boissons sucrées et de modérer l’apport calorique en fonction du niveau d’activité. L’apport calorique peut être adapté pour répondre aux besoins de l’adolescent en croissance ainsi qu’à son niveau d’activité, comme sa participation à des sports.

Comportements et habitudes alimentaires L’adolescence est une période de croissance cruciale pour le développement de l’être humain. Bien que les besoins nutritionnels des adolescents augmentent de façon importante, leurs comportements alimentaires sont souvent décients. Les habitudes alimentaires sont en grande partie liées aux préférences et aux modèles culturels familiaux. Cependant, à l’adolescence, lorsque l’enfant tente d’acquérir son autonomie, l’inuence de la famille diminue. Ses intérêts, ses attitudes et ses habitudes changent à mesure qu’il prend des repas à l’extérieur de la maison. Ces changements sont en grande partie attribuables à la grande valeur qu’accorde l’adolescent à la sociabilité et à l’acceptation par ses pairs. Inuencé par ces derniers, il modifie peu à peu ses habitudes alimentaires. La gestion du temps et des activités à laquelle l’adolescent s’est engagé à participer inuence ses habitudes alimentaires. Les collations, généralement choisies pour leur accessibilité et non pour leur valeur nutritive, font de plus en plus partie des habitudes alimentaires de l’adolescent FIGURE 3.25 . L’apport excessif de calories, de

de l’équilibre entre la quantité d’os acquise au cours de l’adolescence et la quantité d’os perdue au cours du processus normal de vieillissement. Il est important de s’assurer que l’apport en aliments riches en fer répond aux besoins particuliers des jeunes lles qui ont des règles abondantes, car elles sont plus à risque de souffrir d’une carence en fer. De nombreux facteurs qui ne sont pas associés aux besoins nutritionnels inuent sur l’alimentation des adolescents : les préoccupations à propos de l’image corporelle et de l’apparence, ainsi que les régimes à la mode, même lorsque le poids est normal ou insufsant. FIGURE 3.25 Le grignotage d’aliments contenant des calories vides est fréquent chez l’adolescent, surtout au cours des périodes d’inactivité.

sucre, de gras, de cholestérol et de sel est courant chez les adolescents, peu importe le revenu, l’origine ou le sexe. Toutefois, la carence en certains minéraux, comme le fer, le calcium et le zinc, et en vitamines, comme l’acide folique et les vitamines B6 et A, est plus importante chez les lles et les adolescents issus de milieux à faible revenu. Pendant ces périodes de croissance rapide, les besoins en calcium, en fer et en zinc augmentent considérablement. Le calcium est nécessaire à la croissance du squelette, le fer, à l’expansion de la masse musculaire et du volume sanguin, et le zinc, à la formation du squelette et du tissu osseux. L’apport en calcium de source alimentaire est essentiel au cours de l’adolescence pour prévenir l’ostéoporose. La masse osseuse de l’adulte résulte

La préoccupation excessive au sujet du poids est un problème de plus en plus fréquent chez les jeunes. En effet, près de deux adolescentes sur trois sont insatisfaites de leur poids (SCP, 2016i). De plus, les régimes alimentaires durant l’adolescence entraînent souvent des problèmes de surpoids à l’âge adulte. Quels que soient leur poids ou leurs connaissances en nutrition, la crainte de l’obésité peut entraîner les jeunes lles vers des restrictions alimentaires injustiées qui pourraient se traduire par des troubles alimentaires. L’anorexie et la boulimie mentales sont courantes pendant l’adolescence et au début de l’âge adulte. S’ils ne sont pas traités, ces troubles peuvent entraîner une comorbidité sur les plans physique et psychologique, ainsi qu’une augmentation de la mortalité précoce (Arcelus, Mitchell, Wales et al., 2011) 8 . Si les parents ont des inquiétudes concernant les comportements de leur adolescente, ils ne devraient pas hésiter à consulter une nutritionniste.

3

CE QU’IL FAUT RETENIR

La préoccupation excessive au sujet du poids est un problème de plus en plus fréquent chez les jeunes.

8 L’anorexie et la boulimie sont traitées dans le chapitre 8, Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent.

Soins inrmiers ALIMENTATION

Le poids, la taille et l’indice de masse corporelle (IMC) de l’adolescent devraient être évalués au minimum une fois par année et indiqués dans une courbe de croissance. L’inrmière scolaire et celle qui travaille dans les services de première ligne devraient discuter des habitudes alimentaires saines avec tous les adolescents lorsque l’occasion se présente. Elle devrait évaluer avec eux la fréquence des repas pris dans les restaurants rapides ou autres, la consommation de boissons sucrées et de portions excessives. En plus de la nourriture consommée, l’inrmière devrait évaluer le niveau d’activité physique et les comportements sédentaires ENCADRÉ 3.18. Lorsqu’elle planie un enseignement et un soutien nutritionnel, l’inrmière devrait évaluer la motivation au changement, le soutien et les obstacles environnementaux, ainsi

que les antécédents familiaux de diabète, de maladies coronariennes et d’accidents vasculaires cérébraux précoces. L’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux (INESSS, 2012) a publié un guide de pratique clinique pour le traitement de l’obésité des enfants et des adolescents. L’adolescent ne réagit pas toujours bien aux conseils. Il est plus réceptif lorsque son indépendance est respectée, lorsque l’inrmière prend le temps d’écouter ce qu’il a à dire, le renseigne franchement et utilise des méthodes pédagogiques lui permettant de participer activement à ses choix alimentaires. Les interventions doivent être axées sur le mode de vie : approche nutritionnelle, approche axée sur l’activité physique et approche sur la gestion du comportement. Pour maximiser les chances de succès, l’INESSS recommande de combiner au moins deux approches.

Chapitre 3

Croissance, développement et promotion de la santé

121

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 3.18

Recommandations pour favoriser une alimentation saine chez les adolescents

• Favoriser une alimentation conforme au Guide alimentaire canadien pour manger sainement. • Recommander aux parents de limiter la malbouffe sans l’interdire, même si les habitudes alimentaires souvent désorganisées qui surviennent à cet âge peuvent les inquiéter. • Favoriser l’activité selon l’âge, conformément aux recommandations pour une vie active saine. Discuter avec les adolescents des divers bienfaits de l’exercice (ne se limitent pas au contrôle du poids). • Déconseiller les régimes-chocs, le jeûne, le fait de sauter des repas et l’ajout de suppléments alimentaires pour perdre du poids. Cela pourrait entraîner de graves carences, notamment en magnésium et en fer.

• Recommander aux adolescents d’être critiques par rapport à toute proposition de perdre du poids par l’achat de produits amaigrissants (comprimés, injections de vitamines ou substituts de repas). • Dépister les pratiques alimentaires inadéquates ou à risque. • Informer les adolescents de la différence entre un poids santé et un poids désirable d’un point de vue esthétique. • Calculer l’IMC, car cela constitue le moyen le plus efcace d’évaluer le poids de l’adolescent. • Savoir que certaines tentatives pour perdre du poids chez les adolescents reètent peut-être d’autres problèmes : une mauvaise estime de soi, des moqueries liées au poids, des pressions familiales, des problèmes de santé mentale. Une orientation vers un programme multidisciplinaire et une référence médicale sur l’obésité pédiatrique pourraient être bénéques.

Santé dentaire À l’adolescence, il importe de maintenir les soins buccaux quotidiens, dont l’utilisation de la soie dentaire. Chez l’adolescent, les dents permanentes sont en place. Durant cette période, l’incidence des caries diminue, comparativement au début de l’enfance. Certains adolescents doivent porter des appareils d’orthodontie qui constituent fréquemment une source de gêne et de préoccupation. L’adolescent comprend la nature temporaire de ces appareils et leur but (amélioration de la fonction des dents et de l’apparence du sourire), mais il aura besoin d’exprimer ses émotions et son malaise par rapport à cette modication physique.

Sommeil

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les adolescents qui manquent de sommeil risquent davantage d’avoir de la difculté à l’école, car la fatigue inue sur la mémoire et l’attention, ainsi que sur le comportement et la régulation des émotions.

122

Partie 1

Les besoins de sommeil et de repos de l’adolescent sont variés. La rapidité de la croissance physique, la tendance au surmenage et l’activité accrue à cet âge entraînent souvent de la fatigue. Au cours des poussées de croissance, le besoin de sommeil est plus grand. Selon la SCP (2013b), les adolescents ont besoin de 9 à 10 heures de sommeil par jour parce qu’ils vivent une période de croissance physique, intellectuelle et affective accélérée. La tendance naturelle de l’adolescent à se coucher tard a pour conséquences qu’il a du mal à se lever le matin et qu’il dort tard chaque fois que l’occasion se présente. À ce moment de la vie, un bon régime de vie comprend de bonnes habitudes de sommeil et de repos ENCADRÉ 3.19. Les adolescents qui manquent de sommeil risquent davantage d’avoir de la difculté à l’école, car la fatigue inue sur la mémoire et l’attention, ainsi que sur le comportement et la

Inrmière, enfant et famille

régulation des émotions. Il semblerait que 75 % des adolescents dorment moins de 8 heures par nuit. Certains auteurs établissent le lien entre la courte durée de sommeil et un faible rendement scolaire (Matos, Gaspar, Tomé et al., 2016). Les adolescents en carence de sommeil risquent davantage d’être impliqués dans un accident de circulation, car la somnolence réduit leur temps de réaction (Owens, Adolescent Sleep Working Group et Committee on Adolescence, 2014). L’inrmière doit bien évaluer la qualité et la durée de sommeil, particulièrement chez les jeunes lles au moment de la puberté, pour éviter les conséquences du manque de sommeil sur la santé (Vallido, Jackson et O’Brien, 2009). Elles seraient plus affectées que les garçons du même âge à cause des changements hormonaux.

Promotion de l’activité physique La pratique d’activités physiques et sportives diversiées contribue au développement et au maintien d’une bonne santé physique et mentale, car elle améliore la réussite et la persévérance scolaires (ParticipACTION, 2013). Étant donné que la forme physique semble avoir une inuence majeure sur l’état de santé pendant toute la vie, les jeunes devraient être encouragés à exercer des activités qui y contribuent. L’inrmière peut encourager cette participation comme moyen de promouvoir la santé et l’estime de soi. Les activités physiques qui dépassent la capacité physique ou psychologique de l’adolescent ne devraient pas être favorisées. Selon la SCP (2013a), les jeunes âgés de 12 à 17 ans devraient faire chaque jour au moins

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 3.19

Suggestions pour aider les adolescents à dormir davantage

• Adopter une routine relaxante au coucher. S’endormir toujours au lit, pas devant la télévision. Au coucher, la chambre devrait être fraîche, sombre et calme. • La n de semaine, quelle que soit l’heure du coucher, toujours tenter de se lever dans les 2 à 4 heures suivant l’heure habituelle de réveil. C’est particulièrement important si l’adolescent éprouve de la difculté à s’endormir le dimanche soir. • Essayer d’être au lit, les lumières éteintes, au moins 8 heures par jour. • Essayer de se coucher à peu près à la même heure tous les soirs. • Ouvrir les rideaux ou allumer les lumières dès le réveil. • Faire de l’exercice tous les jours, mais éviter de faire des exercices très exigeants le soir. • S’assurer de ne pas avoir un horaire surchargé.

• Éviter tous les produits qui contiennent de la caféine (café, thé et cola) après le milieu de l’après-midi.

3

• Éviter de faire la sieste pendant la journée ou en faire une courte de moins de 30 minutes. • Prendre une légère collation (comme un verre de lait) avant le coucher. • Utiliser le lit seulement pour dormir. Ne pas y manger, ni faire des devoirs, ni utiliser des écrans ou des téléphones intelligents. • Éviter d’utiliser des produits pour aider à dormir (y compris l’alcool, les produits à base de plantes médicinales ou les produits en vente libre qui favorisent le sommeil). Les informations précédentes aideront la plupart des adolescents à dormir assez pour se sentir énergiques pendant la journée. Sinon, il faut envisager d’autres possibilités. Bien qu’ils soient rares, certains troubles médicaux peuvent nuire au sommeil et au niveau d’énergie.

Source : Adapté avec autorisation de Société canadienne de pédiatrie (2018). Les adolescents et le sommeil : Pourquoi tu en as besoin et comment ne pas en manquer. Tous droits réservés.

60 minutes d’activité physique d’intensité modérée à élevée. Dans cette catégorie d’âge, il est aussi recommandé de réduire le temps passé devant un écran à 2 heures par jour et à limiter les déplacements sédentaires (autobus, voiture), la position assise et le temps passé à l’intérieur.

Prévention des blessures et des traumas Les capacités physiques, sensorielles et psychomotrices sont à leur apogée à l’adolescence, conférant un sentiment de force et de conance. De plus, les changements physiologiques de la puberté donnent un élan à de nombreuses pulsions instinctives. Il en résulte une augmentation de l’énergie qui doit absolument être libérée dans l’action, souvent en dépit de la logique et des mécanismes de contrôle. La propension naturelle à courir des risques et le sentiment d’invincibilité rendent l’adolescent particulièrement vulnérable aux blessures. L’expression pensée magique est souvent employée, traduisant le fait que l’adolescent ne pense pas toujours aux conséquences de ses gestes.

Principales causes de mortalité et d’hospitalisation Les hospitalisations et les décès consécutifs à des blessures non intentionnelles chez les adolescents sont plus élevés chez les 15 à 19 ans (INSPQ, 2009). Les décès dans cette tranche d’âge sont principalement dus aux accidents de la route. Les hospitalisations à la suite de blessures et de traumas sont surtout dues à des chutes et à des blessures sportives. Pour les autres types de blessures, les mesures préventives décrites pour les 6 à 12 ans demeurent pertinentes.

Le suicide représente la deuxième cause de décès chez les jeunes au Canada TABLEAU 3.5. Toutefois, cette problématique n’est pas considérée comme faisant partie des blessures et des traumas non intentionnels 8 .

Accidents de la circulation Blessures liées à la conduite de véhicules à moteur Au Canada, le nombre de décès dus aux accidents automobiles est à la baisse (SAAQ, 2016a). Selon la SAAQ, en 2015, les jeunes âgés de 16 à 24 ans représentaient 9 % des titulaires de permis de conduire, mais 21 % des conducteurs impliqués dans les accidents avec blessures ou décès. Cela signie que cette catégorie d’âge est surreprésentée dans les accidents de la route (SAAQ, 2016b). Selon Statistique Canada (2013), 20 % des décès accidentels concernaient le groupe des 15 à 24 ans. De nombreux facteurs contribuent au taux d’accidents chez les conducteurs adolescents : le manque d’expérience et de maturité, la vitesse au volant, la présence d’autres passagers adolescents dans l’auto et la consommation d’alcool ou de drogues.

Des renseignements sur l’activité physique sont présentés sur le site Web de ParticipACTION au www.participaction.com.

8 Le suicide et la dépression sont traités dans le chapitre 8, Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent.

Piétons et cyclistes Qu’ils soient piétons ou cyclistes, les adolescents doivent être encouragés à continuer d’appliquer des comportements sécuritaires : ne pas marcher seul la nuit sur la route, porter le casque de vélo en tout temps et des vêtements clairs la nuit. Il faut offrir des ateliers éducatifs interactifs sur les mesures de prévention en favorisant la participation active des jeunes. Chapitre 3

Croissance, développement et promotion de la santé

123

Blessures sportives Les blessures dues à la fatigue ou au manque de réchauffement avant l’exercice intense sont courantes chez les adolescents. Aussi, l’augmentation de la force et de la musculature que connaît l’adolescent masculin peut le pousser à outrepasser ses possibilités et provoquer des blessures qui sont

cependant mineures. Tous les sports peuvent être potentiellement dangereux, qu’il s’agisse de compétition sérieuse ou de simple plaisir, si des mesures préventives ne sont pas appliquées rigoureusement. Pour éviter ces blessures, l’apprentissage de la pratique sécuritaire de sports et l’utilisation des équipements sportifs adéquats sont essentiels.

Soins inrmiers PRÉVENTION DES BLESSURES ET DES TRAUMAS

Tableau 3.6W : Résumé des mesures préventives à prendre pour les adolescents selon les types de blessures.

Les problèmes et les dangers liés à la croissance et au développement ne s’arrêtent pas au moment où l’enfant devient mature. Les jeunes ont besoin de renseignements sur les mesures de sécurité de base ; il faut leur enseigner, si possible de manière amusante, les habiletés requises pour pratiquer des activités sportives ou pour conduire un véhicule motorisé, et les former sur l’entretien de l’équipement. Au cours de l’adolescence, les informations et l’éducation sur la santé et la sécurité sont plus efcaces si les jeunes y participent activement . Les inrmières doivent renseigner les adolescents et leurs parents sur les dangers de conduire

en état d’ébriété ou de se laisser conduire par un chauffeur ayant consommé des drogues ou de l’alcool ; elles doivent également participer à la mise en place de stratégies pour éviter ces pratiques. La contribution de l’inrmière en prévention peut se faire sur plusieurs plans : la promotion des mesures de sécurité, la diffusion d’informations à jour et la participation à la mise en place de réglementations et de lois sur le sujet. Aider les adolescents à adopter des comportements sécuritaires, à les rendre responsables et engagés en analysant les conséquences négatives possibles ainsi qu’à évaluer les solutions de rechange compte parmi les points importants de la prévention des blessures et des traumas.

Gestion du stress Tableau 3.7W : Promouvoir la prévention dans l’éducation sexuelle. 8 Les problèmes de santé psychologique engendrés par le stress sont abordés dans le chapitre 8, Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent.

Les multiples changements qui se produisent à l’adolescence peuvent devenir des sources envahissantes de stress FIGURE 3.26 et ENCADRÉ 3.20. L’adolescent est confronté aux pressions de ses pairs qui peuvent l’inciter à courir des risques graves pour sa santé (p. ex., l’expérimentation sexuelle, la consommation de drogues et d’alcool, le tabac, les activités physiques potentiellement dangereuses) . Une gestion difcile du stress qui devient chronique chez l’adolescent peut entraîner davantage de dépression et de troubles affectifs qui sont des facteurs associés au suicide (Centre d’études sur le stress humain [CESH], 2017) 8 .

ENCADRÉ 3.20

124

Partie 1

FIGURE 3.26 La solitude est parfois un mécanisme d’adaptation au stress utilisé par l’adolescent. Les professionnels de la santé devraient évaluer si c’est un signe de dépression clinique.

Agents potentiellement stressants pendant l’adolescence

• Recherche de l’identité, de son orientation sexuelle

• Difcultés nancières

• Image corporelle perçue comme étant insatisfaisante • Conits sexuels

• Ambivalence par rapport aux décisions à prendre concernant les rôles actuels et futurs

• Échecs ou difcultés scolaires

• Choix de carrière

• Pressions relatives à la compétition et à la performance

• Conits idéologiques et des valeurs

• Relations conictuelles avec les parents, la fratrie et les pairs

• Risque de dépression liée à une peine d’amour (deuil non résolu)

Inrmière, enfant et famille

Soins inrmiers GESTION DU STRESS

Les techniques de gestion du stress vues pour les tranches d’âge précédentes sont toujours pertinentes. Cependant, pour accompagner les adolescents en difculté, l’inrmière doit évaluer la relation parents-adolescent. L’évaluation du lien entre parents et adolescent est une compétence que l’inrmière doit acquérir pour favoriser leur communication, qui est souvent source de stress. Cela renforce le bien-être familial, prémisse d’un bon développement en période de turbulence. Les programmes et les interventions individualisées dans la gestion de stress visent à soutenir les aptitudes des adolescents à gérer leurs conits internes et externes (CESH, 2017). Une approche chaleureuse et empathique, dans laquelle l’adolescent se sent respecté et valorisé dans son potentiel pour trouver des solutions, est efcace. Finalement, l’inrmière doit pouvoir diriger les adolescents en grande difculté vers les professionnels de la santé appropriés.

Autres domaines de santé propres à l’adolescent Vision Le dépistage des problèmes de la vision constitue un élément à surveiller durant l’adolescence. Une bonne acuité visuelle améliore la réussite scolaire. Le port de lunettes peut avoir des effets psychologiques si l’adolescent croit qu’elles dégradent son apparence physique. Les lentilles cornéennes sont une bonne solution. L’inrmière doit recommander un examen visuel chez tous les adolescents à chaque examen médical général ou lorsqu’elle suspecte des troubles visuels (SCP, 2016f). Elle doit insister sur le fait qu’une baisse de la vue qui n’est pas corrigée peut réduire davantage l’acuité visuelle.

Audition La popularité des téléphones intelligents et des écouteurs légers auprès des adolescents est particulièrement préoccupante pour les professionnels de la santé. Les dommages cochléaires attribuables à l’exposition continue à un niveau élevé de son sont démontrés (de Laat, van Deelen et Wiefferink, 2016). Même si les recommandations sur la réduction du temps d’écoute et du volume de son visent une utilisation plus judicieuse de ces équipements, elles n’atteignent pas toujours leur cible. L’adolescent devrait être informé du danger que constituent les écouteurs sur l’appareil auditif. L’inrmière joue un rôle de prévention en informant l’adolescent, car l’éducation misant sur la

réduction de l’exposition et du volume pour éviter une perte auditive peut avoir un effet positif sur les habitudes. Une autre solution serait de légiférer sur les limites du volume produit par ces écouteurs 11 . La participation du jeune à des activités éducatives est plus stimulante et prometteuse sur le changement de comportement que les discours.

11 La perte de l’acuité audi­ tive est traitée dans le chapitre 11, Déciences intellectuelles et déciences sensorielles.

3

Posture La posture de nombreux adolescents est parfois affectée par la croissance rapide du squelette. Le maintien corporel se module avec l’activité physique par une masse musculaire et un tonus plus développés. L’inrmière peut utiliser cet argument pour favoriser la pratique d’exercices physiques. Certains défauts de posture, comme la scoliose, apparaissent à l’adolescence. Comme il n’est pas possible de prédire quelle déviation risque de s’amplier, tous les cas doivent faire l’objet d’une évaluation plus approfondie. Il existe une corrélation entre le poids du sac à dos sur les maux de dos et les autres douleurs musculosquelettiques chez les jeunes et les adolescents (Nicolet, Mannion, Heini et al., 2014). Il n’existe pas de consensus sur le poids maximal du sac à dos. Toutefois, certaines études recommandent qu’il soit inférieur à 10 % du poids de l’enfant. L’inrmière doit sensibiliser les adolescents et les parents aux dangers liés au port et au poids du sac à dos, lequel doit toujours être bien attaché pour obtenir un meilleur maintien et une meilleure répartition du poids.

Perçage corporel et tatouage Le perçage corporel et le tatouage sont très à la mode et en augmentation (Owen, Armstrong, Koch et al., 2013). Les motivations des adolescents pour ces formes d’art corporel sont l’afrmation de leur individualité et le sentiment d’appartenance aux pairs. Le perçage des oreilles, du nez, des mamelons, du nombril, de la langue ou des parties génitales entraîne parfois des problèmes d’infections cutanées et des risques de transmission de l’hépatite B, de l’hépatite C et du virus de l’immunodécience humaine (VIH) par du matériel contaminé. Même si, généralement, les perçages ne présentent pas de risques de complications ou de conséquences graves pour la santé, il y a toujours un risque de lésions cutanées, d’hémorragie, de dermite ou d’allergie aux métaux. Il incombe à l’inrmière de prévenir le jeune des risques potentiels (Mayo Clinic, 2015) ; elle doit vérier la couverture vaccinale des adolescents pour l’hépatite B et le tétanos. Le perçage devrait être effectué par une personne qualiée qui respecte les règles d’hygiène les plus strictes. L’adolescent devrait aussi être informé du temps de guérison moyen après le perçage et des soins à apporter à la zone percée pendant et après la guérison. Chapitre 3

Croissance, développement et promotion de la santé

125

Hygiène corporelle Les adolescents ressentent le besoin de soigner leur apparence. Les changements corporels liés à la puberté entraînent de nouveaux besoins en matière d’hygiène. Les glandes sébacées et sudoripares sécrètent davantage de sébum et de sueur, causant des odeurs qui nécessitent déodorants et douches plus fréquentes. L’épilation, le maquillage et l’hygiène menstruelle sont des sources d’interrogations courantes. L’inrmière doit être sensible à ces réalités et les intégrer dans ses interventions promotionnelles et préventives de la santé chez les adolescents.

3.6.3

Préoccupations courantes des parents

Établissement de limites et discipline Les parents sentent que les limites ne sont plus ou pas toujours respectées, et que leurs perceptions de même que leurs modes d’imposition de discipline ne fonctionnent plus. Les parents doivent être soutenus et conseillés pour passer à travers ces moments difficiles. Ils ont besoin de comprendre les changements qui surviennent, et d’accepter les comportements qui accompagnent le processus de détachement et l’acquisition de l’autonomie. Ils ont besoin de se préparer à lâcher prise et ils doivent chercher à favoriser l’établissement d’une nouvelle relation parentenfant qui passe progressivement de la dépendance à la mutualité. L’inrmière peut inviter les parents et les adolescents à rééchir ensemble à ce changement ; cette démarche peut s’avérer très efcace lorsqu’une relation de Benoît est âgé de 14 ans. Il a de l’acné au visage conance mutuelle est bien et les cheveux gras. Il est convaincu que c’est pour établie entre eux (SCP, 2017). ces raisons qu’il n’est pas populaire auprès des Il peut être nécessaire que jeunes lles de son entourage même s’il se sent l’inrmière dirige une famille prêt à exprimer ses besoins sexuels. Il n’est pas vers un groupe de soutien en aussi musclé que ses compagnons du même âge intervention familiale ou indiet ne sait trop comment développer son style viduelle selon l’analyse de la vestimentaire. Il n’excelle pas dans les activités situation et la coopération des sportives, mais il réussit très bien dans toutes les membres de la famille. Il faut matières scolaires. À cet effet, il rivalise avec son vérier auprès des ressources ami Pierre-Luc et cherche toujours à obtenir de locales afin de savoir si meilleures notes. Quels sont les deux facteurs des groupes communautaires possiblement les plus stressants pour Benoît ? existent à proximité. a) La perception de son image corporelle et la pression de la performance. Vie scolaire

Jugement

clinique

b) Le malaise relié à la sexualité en éveil et le désir de plaire au sexe opposé. c) Le fait de ne pas réussir dans les sports et d’être un premier de classe. d) L’importance d’avoir son style vestimentaire et de paraître musclé.

126

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

L’une des principales craintes des parents est le décrochage scolaire. Un adolescent sur neuf abandonne ses études secondaires (ministère de l’Éducation, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche

[MEESR], 2015). Les jeunes peuvent se rebeller contre toute forme d’autorité, et l’encadrement scolaire pourrait alors être remis en cause. L’inrmière peut aiguiller les parents et le jeune vers les ressources sociales appropriées. Dans certains cas, l’évaluation du contexte de décrochage pourra révéler des problèmes sociaux sous-jacents. La grossesse, la consommation d’alcool ou de drogues, des troubles d’apprentissage non diagnostiqués ou encore des problèmes de santé mentale pourraient expliquer le décrochage de l’adolescent.

Inuence des pairs et intimidation L’adolescent recherche davantage l’approbation de ses pairs que celle de ses parents. Les amis jouent un rôle prépondérant dans sa vie quotidienne en général, que ce soit pour l’alimentation, la façon de s’habiller ou encore les opinions politiques. Pour certains comportements sociaux, notamment pour la consommation d’alcool et de drogues, l’inuence des pairs peut inquiéter les parents et les professionnels de la santé. L’inrmière peut soutenir les jeunes grâce à des interventions individuelles ou de groupe an de favoriser leur plein épanouissement et les aider à prendre des décisions rééchies en remettant en question, lorsque nécessaire, les choix de leurs amis. De mauvaises relations avec les pairs et l’absence d’identication au groupe peuvent engendrer l’intimidation, qui se dénit comme un acte délibéré et répétitif commis dans l’intention de nuire publiquement à la personne ciblée, en la blessant physiquement ou psychologiquement (Saint-Pierre, 2013). L’intimidation survient le plus souvent à l’école à des moments ou à des endroits où il y a peu ou pas d’encadrement, surtout à la récréation, mais aussi dans les cours d’éducation physique, au réfectoire, dans les corridors et dans les autobus, et plus récemment de façon virtuelle sur les réseaux sociaux. L’intimidateur se méfie habituellement des adultes, adopte un comportement antisocial et est prêt à enfreindre les règlements scolaires. Il éprouve peu d’anxiété, a une forte estime de luimême et a une personnalité dominante ; il peut provenir de foyers où l’implication et le soutien des parents font défaut ; il peut être victime ou témoin de violence et de mauvais traitements à la maison, et souffrir de dépression (Moore, Norman, Suetani et al., 2017). Les conséquences à long terme de l’intimidation ne doivent pas être négligées. Les intimidateurs chroniques reproduisent vraisemblablement les mêmes comportements à l’âge adulte, nuisant ainsi à leur capacité d’établir et d’entretenir des relations. Les victimes, quant à elles, se sentent

souvent rejetées socialement et peuvent avoir peur de l’école, peur qui peut se transformer en phobie ou en problèmes de dépression et de mauvaise estime de soi à plus longue échéance (SaintPierre, 2013).

Développement identitaire et orientation sexuelle Le développement identitaire est une conception organisée du soi qui s’amorce dès l’enfance et il atteint son apogée à l’adolescence (Bagshaw, 2009). La représentation de soi, c’est-à-dire la capacité de se reconnaître comme un être unique et d’acquérir une estime de soi, se solidie vers l’âge de 12 à 18 ans et se prolonge durant toute la vie. Ce passage est tributaire de l’enfance et de l’adolescence, et il est grandement inuencé par la famille et l’entourage. Le jeune prend conscience de sa valeur et se forge une personnalité bien à lui, composée de son bagage héréditaire et modulée par son environnement. Les questions concernant l’identité en général, et l’identité sexuelle en particulier, peuvent se poser (SCP, 2016d). L’inrmière peut soutenir cette individualisation du jeune et la construction du concept de soi. Une écoute active et empathique permet de mieux comprendre ce que vit l’adolescent, sa souffrance et les questionnements de ses parents. L’afrmation de soi ou la capacité de dire non sont des compétences sociales essentielles à aborder avec les jeunes.

Éducation sexuelle Pour éduquer un adolescent à propos de la sexualité, il faut être un guide authentique et avoir une oreille attentive. La communication efcace entre l’enfant et les parents est une composante importante de l’éducation sexuelle continue, particulièrement à l’adolescence. Les parents doivent être ouverts et ne pas éviter le sujet, car l’information que trouve l’adolescent pourrait provenir de sources plus ou moins ables (p. ex., ses camarades ou Internet) et être erronée. Les adolescents peuvent être inuencés par les médias et les produits de consommation qui leur proposent des moyens censés accroître leur popularité et leur pouvoir de séduction. Il existe un phénomène d’hypersexualisation (CHU SainteJustine, 2016), et certains adolescents, pour se conformer à la publicité, vont adopter des comportements sexués et porter des vêtements osés. L’adolescent a besoin d’avoir des modèles et de partager ses expériences de vie dans le respect. Il veut se sentir unique, compris dans sa quête d’identité et de découverte de sa sexualité. Grâce à du soutien, il peut mieux devenir un adulte sexuellement responsable. Quel que soit le milieu dans lequel elle travaille, l’infirmière peut transmettre de

l’information sur la sexualité aux parents et aux adolescents. Pour aborder adéquatement le sujet, elle doit comprendre les aspects physiologiques de la sexualité, connaître les valeurs mises de l’avant dans la culture et la société, et être ellemême consciente de ses propres sentiments, attitudes et valeurs envers la sexualité.

3

L’inrmière peut offrir ses disponibilités pour des consultations individuelles aux jeunes. En outre, l’adolescent a besoin de clarier des interrogations qui le préoccupent et de briser certaines croyances parfois véhiculées sur la sexualité. Il apprend à s’afrmer, à construire son estime de soi. Le respect, l’ouverture, l’accueil chaleureux et la condentialité sont des principes de base en relation d’aide, et l’inrmière doit les adopter dans sa ligne de conduite professionnelle. Ainsi, les jeunes se sentent accueillis dans leur dignité, ce qui renforce leur potentiel d’action et d’estime de soi. Les adolescents de plus de 14 ans n’ont pas besoin d’être accompagnés par leurs parents pour rencontrer un professionnel de la santé et ils peuvent décider par eux-mêmes d’avoir recours à un mode de contraception. Certains sujets sont incontournables, particulièrement à l’adolescence. Il faut présenter en termes clairs et précis l’information sur l’orientation sexuelle, la grossesse, les contraceptifs et les infections transmissibles sexuellement, dont les virus de l’immunodécience humaine et du papillome humain, l’hépatite et l’herpès 8 . Lorsqu’elle rencontre les parents, l’inrmière doit se montrer réceptive, disposée à répondre aux questions et ouverte à la discussion. Elle peut leur servir d’exemple dans leur dialogue avec l’adolescent en utilisant les termes appropriés pour désigner les parties du corps et parler de leur fonction, ainsi que par la façon dont elle traite les questions qui suscitent des réactions émotives, comme les jeux sexuels exploratoires et la masturbation. Elle doit aider les parents à comprendre que les comportements de l’adolescent sont normaux et que la curiosité envers la sexualité fait partie du développement. En évaluant les connaissances des parents et la conception qu’ils ont de la sexualité, l’inrmière sait mieux quels renseignements complémentaires leur transmettre an de les préparer à fournir des explications plus complexes à mesure que leur enfant vieillira. L’inrmière doit connaître les ressources ables d’Internet et avoir à sa disposition des brochures d’information qui peuvent soutenir l’éducation à la sexualité. An de répondre aux questionnements des parents vis-à-vis de l’adolescence, l’infirmière peut offrir des suggestions aux parents ENCADRÉ 3.21.

Chapitre 3

8 Les problèmes de santé liés à la sexualité chez les adolescents sont abordés dans le chapitre 8, Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent.

Le site Web Le sexe et moi, accessible au www.sexandu. ca/fr, est une ressource très utile pour l’adolescent et l’inrmière.

Croissance, développement et promotion de la santé

127

Soutien inrmier ENCADRÉ 3.21

Aider les parents d’adolescents à améliorer leurs pratiques parentales

L’inrmière doit encourager les parents à adopter les comportements suivants :

• Permettre une indépendance croissante à l’intérieur de balises de sécurité et de bien-être.

• Accepter l’adolescent comme personne unique.

• Être disponible tout en évitant de talonner l’adolescent.

• Participer aux activités scolaires et assister à celles auxquelles il prend part.

• Respecter sa vie privée.

• Écouter l’adolescent et essayer d’être ouvert à ses opinions, même lorsqu’elles vont à rencontre des valeurs parentales.

• Réagir aux sentiments et aux mots.

• Éviter la critique sur des sujets sans issue. • Donner l’occasion de faire des choix et d’en accepter les conséquences. • Permettre au jeune d’apprendre en expérimentant, même lorsque les choix et les méthodes diffèrent de ceux des adultes. • Fixer des limites claires et raisonnables à l’adolescent. • Clarier et bien expliquer les règlements de la maison et les conséquences de leur non-respect ; appliquer les sanctions prévues, même si c’est difcile.

128

Partie 1

Inrmière, enfant et famille

• Essayer de partager ses joies ou ses peines. • Être disponible pour répondre aux questions, donner de l’information et tenir compagnie. • Essayer de communiquer sans détour. • Éviter les comparaisons avec les frères et sœurs. • Aider l’adolescent à choisir des objectifs professionnels réalistes et à se préparer à son rôle d’adulte. • Accueillir ses amis à la maison et les traiter avec respect. • Aimer l’adolescent et l’accepter inconditionnellement. • Être prêt à s’excuser en cas d’erreur.

Analyse d’une situation de santé

Jugement clinique

Émilie est âgée de 3 ans. Ses parents se sont séparés il y a 6 semaines. Émilie demeure avec sa mère et voit son père une n de semaine sur deux. La mère consulte à la clinique des enfants de 0 à 5 ans du centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) de sa région, car le comportement de sa fille a beaucoup changé depuis la séparation. Émilie, qui avait acquis le contrôle de ses sphincters, a recommencé à mouiller son lit la nuit, et elle est parfois incontinente le jour. Elle est très colérique et refuse catégoriquement toutes les propositions de sa mère. De plus, à quelques reprises, sa

mère l’a surprise en train de frapper son jeune frère âgé de 1 an. Vous procédez à l’évaluation clinique de la llette. Émilie pèse 15 kg et mesure 96 cm. Selon la mère, elle dessine des bonshommes allumettes, mais elle parle peu. Elle refuse de nommer les parties du corps que vous lui pointez. De plus, elle ne répond pas à vos questions et crie « Non ! » en se collant sur sa mère. Émilie s’habille seule, mais elle ne peut boutonner un chemisier. Elle ne porte aucun intérêt à l’environnement de votre bureau.

3

Mise en œuvre de la démarche de soins

Collecte des données – Évaluation initiale – Analyse et interprétation 1. À la lumière de l’évaluation d’Émilie, quelles sont les cinq composantes préoccupantes de son comportement ?

SOLUTIONNAIRE

2. Quelle cause plausible pourrait expliquer les comportements d’Émilie ? Justiez votre réponse. 3. Émilie suit-elle la courbe de croissance pour son âge ? Justiez votre réponse.

VU dans ce chapitre

Planication des interventions – Décisions inrmières 4. Sur quel aspect du comportement d’Émilie la mère devrait-elle intervenir en priorité ? 5. D’après la réponse à la question précédente, quels moyens pourriez-vous suggérer à la mère d’Émilie pour que le comportement inapproprié de sa lle cesse ? Nommez-en trois. 6. Avant la fin de la rencontre, la mère d’Émilie se demande comment gérer pendant la semaine les autres comportements indésirables de sa lle. Quelle approche devriez-vous suggérer à la mère ?

La semaine suivante, vous revoyez Émilie et sa mère. Les comportements d’agressivité de la fillette envers son frère ont cessé à la suite de l’achat d’une poupée garçon. Émilie s’occupe de cette poupée en imitant sa mère. La maman est très heureuse de l’amélioration.

Évaluation des résultats – Évaluation en cours d’évolution 7. Est-ce que le comportement d’imitation qu’Émilie adopte est normal pour la phase de croissance où elle est rendue ? Justiez votre réponse. 8. Est-ce que ce comportement est adéquat pour la poursuite du plan d’intervention ? Justiez votre réponse.

Faudrait-il suggérer à la mère d’amener Émilie chez le dentiste pour une première visite ? Justiez votre réponse.

VU dans ce chapitre

À quels types de blessures ou d’accidents Émilie est-elle la plus à risque en raison de son âge ? Nommez-en au moins trois. MAIS SI...

Si Émilie était âgée de six ans, à quels types de blessures ou d’accidents serait-elle alors exposée ? Nommez-en au moins trois.

VU dans ce chapitre

Que pouvez-vous suggérer à la mère d’Émilie pour éviter que sa llette fasse de l’énurésie ?

Chapitre 3

Croissance, développement et promotion de la santé

129

Chapitre

4

Examen clinique : anamnèse et examen physique Écrit par : Marilyn J. Hockenberry, PhD, RN, PPCNP-BC, FAAN Adapté par : Pierre Verret, inf., M. Sc., CSIO(C)

MOTS CLÉS

OBJECTIFS

AMPLE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 143 Anamnèse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 132 Auscultation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 183 Communication non verbale . . . . . 135 Communication verbale . . . . . . . . . 135 Évaluation de l’apparence générale. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 152 Évaluation nutritionnelle . . . . . . . . 158 Examen clinique. . . . . . . . . . . . . . . . 132 Examen physique. . . . . . . . . . . . . . . 132 Histoire de santé . . . . . . . . . . . . . . . 142 Indice de masse corporelle (IMC) . . . 155 Inspection . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 168 Palpation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 168 PQRSTU . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142 Technique de communication . . . 132 Techniques d’entrevue . . . . . . . . . 135

Après avoir étudié ce chapitre, vous devriez être en mesure : • d’énumérer les stratégies de communication pour l’entrevue avec l’enfant et ses parents ; • d’adapter les moyens de communication selon l’âge des enfants ; • de décrire quatre techniques utiles de communication avec les enfants ; • d’énumérer les composantes d’un examen clinique ; • de citer trois domaines relevant de l’évaluation nutritionnelle ; • de préparer l’enfant à un examen physique adapté à ses besoins développementaux ; • d’effectuer un examen physique complet en respectant une séquence adaptée à l’âge de l’enfant ; • de reconnaître les résultats normaux prévus en fonction de l’âge de l’enfant ; • de consigner les résultats de l’examen physique.

Disponible sur • • • •

Guide d’études – SA03

130

Partie 2

Évaluation clinique

Animations Annexe Web À retenir Carte conceptuelle

• Encadrés Web • Solutionnaires • Vidéos

Carte conceptuelle

Cette carte conceptuelle illustre schématiquement les principaux concepts décrits dans le présent chapitre. Sa lecture vous permettra d’avoir une vue d’ensemble des notions qui y sont présentées.

4

impliquent

exige

Examen clinique : anamnèse et examen physique

comprend comprend

par

contient

par

Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

131

CE QU’IL FAUT RETENIR

Trop souvent, l’inrmière s’adresse uniquement aux adultes, même lorsque l’enfant est assez grand pour répondre lui-même, se privant ainsi d’une source d’information extrêmement précieuse.

4.1

Communication

4.1.1

Examen clinique : dénition

L’inrmière est souvent la première intervenante à déceler un changement dans l’état de santé de l’enfant ou de l’adolescent. L’examen clinique constitue un outil efcace de dépistage pour guider l’inrmière dans ses observations et pour documenter ces changements. Cet examen comporte : • une anamnèse : collecte de données subjectives recueillies au moyen d’une entrevue ; • un examen physique : collecte de données objectives comprenant, si nécessaire, des examens paracliniques (ces examens ne sont pas traités dans ce chapitre). Généralement, l’anamnèse et l’examen physique ont lieu au moment de l’évaluation initiale et peuvent être répétés ou complétés lors d’une réévaluation ou d’un suivi ; ils impliquent l’infirmière, l’enfant et le parent. Selon le contexte, la raison de la consultation et l’âge de l’enfant, le déroulement de l’examen clinique peut varier. Le respect de certains principes et la maîtrise de diverses techniques de communication adaptées à l’enfant, aux parents ou à la famille sont essentielles pour mener à bien une entrevue pédiatrique et obtenir la collaboration de l’enfant durant un examen physique. Avant d’étudier en détail les composantes de l’examen clinique, la première partie du chapitre est donc consacrée à la communication.

4.1.2

Création d’un environnement propice à la communication

doit inclure l’enfant dans la conversation en lui demandant son nom, son âge et d’autres renseignements utiles. L’infirmière suivra les consignes générales de communication énumérées dans l’ENCADRÉ 4.2 pour les enfants et dans l’ENCADRÉ 4.3 pour les adolescents.

Environnement physique adéquat Le lieu où se déroule l’entrevue est presque aussi important que l’entrevue elle-même. L’environnement physique doit être propice au respect de la vie privée et permettre de réduire au minimum les distractions comme les interruptions et le bruit. Au cours d’une évaluation à domicile, il convient d’éteindre la télévision ou la radio. La température de la pièce doit être adéquatement réglée pour que l’enfant soit à l’aise lorsqu’il sera dévêtu et an que cela ne vienne pas perturber l’observation des signes cliniques (p. ex., la peau de l’enfant est-elle marbrée à la suite d’un problème respiratoire ou parce qu’il a froid ?). L’inrmière doit prévoir l’accès à des jouets pour occuper les jeunes enfants pendant son entrevue avec le parent FIGURE 4.1. S’ils sont interrompus sans cesse par leurs enfants, les parents sont incapables de se concentrer pleinement et tendent à donner des réponses brèves pour mettre n le plus rapidement possible à l’entrevue (Jarvis, 2015).

Respect de la condentialité et de la vie privée La confidentialité est une autre composante essentielle de l’entrevue. Lorsque celle-ci se déroule en présence d’autres membres de l’équipe de soins ou de l’enseignant (dans le cas des élèves), l’inrmière doit informer les membres de la famille des restrictions touchant la con dentialité. Si, dans une situation précise, la

Présentation appropriée éactivation des connaissances Nommez au moins trois situations où l’inrmière n’est pas tenue de respecter la condentialité.

L’inrmière se présente et demande le nom de chaque membre de la famille présent. Elle s’adresse aux parents ou aux autres adultes en utilisant « monsieur » et « madame », à moins qu’ils ne l’invitent à faire autrement. En se servant du titre ofciel ou du nom privilégié plutôt que des prénoms ou de « maman » ou « papa », l’inrmière démontre du respect et de la considération envers les parents et les autres soignants (Ball, Dains, Flynn et al., 2014). Dans la communication thérapeutique professionnelle, l’inrmière établit et dirige l’interaction. Elle s’assure de travailler en partenariat avec l’enfant et ses parents, c’est-à-dire d’égal à égal avec eux. La relation thérapeutique est toujours centrée sur l’enfant. Dès le début de l’entrevue, l’inrmière

132

Partie 2

Évaluation clinique

FIGURE 4.1 L’enfant joue pendant que l’inrmière effectue l’entrevue avec le parent.

L’utilisation des technologies informatiques pour enregistrer et récupérer des renseignements médicaux est devenue une pratique courante. La plupart des cliniques et des hôpitaux conservent des dossiers de santé électroniques de leurs clients, et la sécurité informatique est un enjeu crucial. L’inrmière, à l’instar de toute personne ayant accès à des renseignements médicaux condentiels, a une responsabilité dans la protection des dossiers ; elle doit appliquer les dispositifs de protection contre la divulgation, notamment pour les mots de passe, an d’empêcher toute violation du respect de la vie privée et de la condentialité du client.

4.1.3

Consultation téléphonique

La mise en place d’un service de consultation téléphonique a permis d’accroître l’accès aux services de santé et de donner aux parents les moyens de participer aux soins de santé de leurs enfants. La satisfaction du client s’est considérablement améliorée avec la réduction des visites inutiles aux services d’urgence ou aux cliniques sans rendez-vous, ce qui a également permis de réduire les coûts des soins dans le réseau de la santé ainsi que l’absentéisme des parents au travail. Au Québec, le service de consultation téléphonique est assuré par Info-Santé 811. Au cours d’une consultation, les infirmières peuvent répondre à des questions de santé et donner des conseils, mais aussi diriger la personne vers une autre ressource du réseau de la santé. Elles doivent également évaluer le degré d’intervention comme suit : • Urgent : condition qui requiert une consultation immédiate ou très rapide, soit dans les 2 heures ; • Semi-urgent : condition qui requiert une consultation rapide dans les 24 heures ; • Non urgent : condition qui requiert une consultation dans un délai pouvant varier de plusieurs jours à plusieurs semaines ou qui requiert un

conseil sur les soins à domicile, sans consultation nécessaire ENCADRÉ 4.1.

L’inrmière qui prodigue des La qualité et l’efficacité de l’intervention soins à un enfant et qui a un reposent sur la pertinence, la justesse et la précimotif raisonnable de croire que sion des renseignements fournis par l’inrmière. la sécurité ou le développeUne revue systématique comportant 49 études ment de l’enfant est comprodans lesquelles des inrmières ont trié des appels mis est tenue de signaler sans a permis de constater que la pertinence de la délai la situation au directeur de la protection de la jeunesse décision sur le niveau de priorité et les recom(LPJ, art. 39 et 39.1). mandations subséquentes variaient souvent (Blank, Coster, O’Cathain et al., 2012). Une méta-analyse de 13 études a permis de mieux comprendre de quelle manière les clients se conforment aux recommandations de l’inrmière et sont inuencés par la qualité de Alliah, âgée de deux ans, est hospitalisée pour la communication (Purcune évaluation à l’unité de médecine pédiaStephenson et Thrasher, 2010). trique. Elle a des ecchymoses et de l’épistaxis L’importance de la communidepuis quelques semaines. Roseline, sa tante, cation entre inrmière et client est inrmière dans une autre unité de soins est donc un aspect crucial de du même hôpital. Pendant sa pause du dîner, la formation des inrmières Roseline va consulter les résultats des analyses effectuant des consultations de laboratoire d’Alliah dans le système informatéléphoniques. Il faut cetique. En soirée, elle appelle la grand-mère pour pendant considérer que les lui coner qu’on suspecte une leucémie. Comme compétences d’évaluation elle fait partie de la famille, Roseline a-t-elle utilisées dans les interactions violé le droit à la condentialité d’Alliah ? face à face ne sont pas directeJustiez votre réponse. ment transférables aux interventions téléphoniques. Toutefois, ces compétences fournissent un outil supplémentaire pour la formation sur la prise de décisions (Purc-Stephenson et Thrasher, 2010). Des protocoles cliniques basés sur des données probantes pour la consultation téléphonique fournissent une méthode structurée d’évaluation par l’inrmière (Stacey, Macartney, Carley et al., 2013).

clinique

Jugement

condentialité est un sujet de préoccupation, par exemple quand l’inrmière s’adresse à un parent soupçonné de violence envers son enfant ou à un adolescent qui envisage de se suicider, l’inrmière doit informer l’intéressé que la condentialité ne peut être assurée en de tels cas. En toutes autres circonstances, l’inrmière doit protéger soigneusement les renseignements de nature condentielle. D’ailleurs, l’inrmière doit respecter plusieurs lois et règlements québécois et canadiens visant à protéger la condentialité des renseignements personnels (RLRQ, chapitre I-8, r. 9 ; RLRQ, chapitre C-26).

4.1.4

Communication avec les parents

L’entrevue constitue le mode de communication privilégié pour déterminer l’état de santé et le statut développemental de l’enfant, ainsi que pour obtenir un aperçu des facteurs qui inuent sur sa vie. Il est généralement admis qu’en raison de son lien étroit avec l’enfant, le parent fournit des renseignements ables. Ainsi, les préoccupations qu’il exprime doivent être prises au sérieux, même si les problèmes ne sont pas toujours faciles à établir. L’inrmière doit aussi être attentive aux indices et aux signaux par lesquels le parent communique ses inquiétudes ou son anxiété. Lorsque l’enfant est assez grand pour participer activement à l’entrevue, le parent devient un collaborateur.

Chapitre 4

Au Québec, Info-Santé 811 est un service de consultation téléphonique gratuit et condentiel offert 24 heures sur 24, 365 jours par année. De l’information complémentaire sur ce service est disponible sur le Portail santé mieux-être du gouvernement du Québec au www.sante. gouv.qc.ca.

Examen clinique : anamnèse et examen physique

133

4

Pratiques inrmières ENCADRÉ 4.1

Procéder à une consultation téléphonique (Info-Santé 811)

1) Noter la date et l’heure de l’appel. 2) Demander à la personne de s’identier : • Nom, âge, sexe, coordonnées. 3) Obtenir un bref historique de santé (AMPLE) : • Allergies ;

6) Évaluer le symptôme principal (PQRSTU). 7) Faire une revue rapide des systèmes. 8) Sélectionner la catégorie d’intervention appropriée : • Urgent (< 2 heures) ; • Semi-urgent (< 24 heures) ;

• Médication actuelle ou immunisations récentes ; • Antécédents médicaux, maladies chroniques. 4) Déterminer la raison de l’appel (problème principal). 5) Sélectionner le protocole d’intervention téléphonique approprié.

• Non urgent (> 24 heures, jours ou semaines). 9) Donner des conseils sur les soins à domicile. 10) Vérier la compréhension du client. 11) Conseiller de rappeler si les manifestations cliniques s’aggravent ou ne s’améliorent pas.

Sources : Adapté de ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) (2007) ; Schmitt-Thompson Clinical Content (2016).

Utilisation des techniques de communication verbale Manifestation clinique : Signe objectif ou symptôme subjectif relevé par l’inrmière. Signe : Donnée objective provenant de ce que l’inrmière peut observer et mesurer lors d’un examen physique par inspection, palpation, percussion ou auscultation. Symptôme : Donnée subjective recueillie par l’inrmière lors de l’entrevue avec le client. Il s’agit des manifestations qu’il déclare spontanément ou en réponse à une question directe, et que lui seul peut fournir ou vérier. CE QU’IL FAUT RETENIR

Durant ses explications, l’inrmière doit utiliser des phrases simples, éviter le jargon médical, utiliser un support écrit ou visuel lorsque disponible, s’arrêter fréquemment, répéter et résumer ses propos.

134

Partie 2

Bien que l’entrevue de l’examen clinique n’ait pas une portée thérapeutique, elle a pour fonction d’évaluer les manifestations cliniques, c’est-à-dire les signes et les symptômes, pour en arriver à formuler un constat. Aussi, tout au long de l’entrevue, l’inrmière utilisera différentes techniques issues de la relation d’aide pour obtenir de l’information aussi précise que possible et clarier la compréhension des manifestations cliniques de l’enfant (Wright et Leahey, 2012).

Questions ouvertes et questions fermées Bien qu’aucune méthode ne soit universelle, la formulation de questions pertinentes inuence la probabilité de recueillir les renseignements voulus. Ainsi, l’inrmière obtiendra davantage de renseignements en formulant convenablement des questions ouvertes plutôt qu’en posant plusieurs questions fermées. Une question ouverte permet de recueillir de l’information sans limiter ni conditionner le contenu de la réponse. Elle permet aux parents d’exprimer les points qui sont importants pour eux, de donner leur vision du problème perçu chez l’enfant et d’en préciser les répercussions. En voici deux exemples : Pouvez-vous décrire un repas type de Jimmy en ce moment ? Quel est l’effet de la maladie de votre enfant sur ses activités quotidiennes ?

Évaluation clinique

Les questions fermées sont utiles lorsque l’inrmière a besoin de préciser un élément particulier de l’entrevue ou un détail qui aurait été omis. La réponse attendue se limite souvent à un ou deux mots, sans nécessiter une élaboration. En voici deux exemples : Jimmy mange-t-il la même chose que le reste de la famille ? Avez-vous remarqué d’autres rougeurs sur son corps ?

Encouragement, reformulation et clarication Des hochements de tête, des mimiques ou des expressions verbales brèves telles que « oui » et « hmm » encouragent les parents à s’exprimer davantage sur l’histoire de santé ou les manifestations cliniques observées chez l’enfant. Lorsque l’inrmière répète les propos tenus par les parents, soit avec les mêmes mots (répétition), soit dans ses propres mots (reformulation), elle encourage l’interlocuteur à poursuivre et démontre une écoute active et attentive. Cela lui permet également de s’assurer qu’elle a bien compris les propos. La clarication est un questionnement permettant à l’inrmière de préciser la signication d’un propos énoncé par les parents tout en permettant à ceux-ci de le corriger ou de le développer si ce que l’infirmière a compris est incomplet ou erroné.

Explication et résumé L’explication est le fait de donner des renseignements pertinents sur un soin, un traitement ou un problème de santé, en adéquation avec les besoins des parents et de l’enfant. Ainsi, l’inrmière doit évaluer la quantité et le type d’information à donner, et adapter cette information à la situation clinique de manière à ce que les parents ou l’enfant puissent s’en souvenir. Pour ce faire, l’inrmière évalue d’abord la compréhension des parents quant à la cause du problème de santé an de répondre à leurs inquiétudes. Il est souvent prématuré de poursuivre ses explications avant d’avoir reconnu et pris en compte l’émotion perçue ou exprimée. Par la suite, l’inrmière vérie le niveau de connaissance des parents concernant le problème de santé an d’adapter le contenu de l’information à transmettre FIGURE 4.2. À la n, elle vérie la compréhension des parents en les amenant à formuler ce qu’ils ont compris. Le résumé est l’étape au cours de laquelle l’inrmière reconstitue verbalement les éléments retenus de son entrevue avec les parents. Cette étape lui permet de s’assurer d’une compréhension adéquate de la situation et permet aux parents d’être assurés d’avoir été bien compris ou, au contraire, de rectier une incompréhension ou d’ajouter une information manquante.

devrait songer à lui demander : Vous me semblez fatigué aujourd’hui. Que faites-vous pour vous détendre ? Des commentaires adressés à de nouveaux parents agissent comme un renforcement positif les invitant à poser toutes les questions possibles sur les soins du nourrisson, par exemple : Vous semblez bien vous y prendre avec le bébé. Quelle expérience avez-vous eue avec les enfants ?

4

Orientation de l’entrevue

Respect du silence Respecter le silence fait généralement partie des techniques d’entrevue les plus difciles à acquérir. Cela suppose que l’inrmière a sufsamment d’aisance et de conance en elle pour donner au parent le temps de rééchir sans être interrompu. Le silence permet au parent de se concentrer pour mieux répondre aux questions. L’inrmière prote de ce moment pour l’observer discrètement, pour noter des indices non verbaux et pour planier sa prochaine intervention, qui apportera des précisions sur le problème évalué (Jarvis, 2015). Cependant, il est parfois nécessaire de rompre le silence an de reprendre la communication sur un sujet important ou pour aborder un nouveau sujet. L’inrmière peut commencer en disant : Je vois qu’il vous est difcile de continuer ; puis-je vous aider ? Ou : Souhaitez-vous me dire autre chose ?

Communication non verbale Les attitudes, les mouvements du corps, le contact visuel, l’expression du visage, le ton de la voix, le toucher et la distance entre l’inrmière et les parents au moment de l’entrevue contribuent en grande partie, et bien au-delà des mots, à la communication. Tant l’inrmière que les parents et les enfants seront inuencés par cette forme de communication non verbale. Il est important que l’inrmière ait conscience de cette interaction et qu’elle utilise cette forme de communication pour décoder un renforcement ou une contradiction par rapport à la communication verbale, ou des émotions et des sentiments que les parents ont de la difculté à exprimer verbalement. Parfois, les parents s’expriment aisément et sans difculté. D’autres fois, il peut être nécessaire de réamorcer la discussion en commençant par une observation sur un comportement non verbal, par exemple : Votre lle ne semble pas heureuse aujourd’hui. Si le parent a l’air fatigué ou angoissé, l’inrmière

CE QU’IL FAUT RETENIR

Le rôle de l’inrmière est de guider l’entrevue de manière à ce que le parent ne s’égare pas dans un sujet hors propos.

Écoute L’écoute est la composante la plus importante d’une communication efcace. Lorsque l’écoute vise véritablement à comprendre le client, il s’agit d’un processus actif qui nécessite de la concentration et de l’attention par rapport à tous les aspects de la conversa tion : verbale, non Virginie, âgée de six mois, est hospitalisée pour verbale et abstraite. déshydratation à la suite d’une gastroentérite. Ses L’écoute active, assortie parents ne savaient pas de quelle manière hydrater d’un minimum d’intervenleur lle et ils ont suivi le conseil d’une grand-mère tions verbales, favorise la verqui disait qu’il fallait la laisser à jeun pour reposer balisation du parent ainsi que son estomac. L’inrmière de l’urgence leur a l’émergence de repères, d’indemandé sur un ton sec : « Vous ne lui avez même dices verbaux ou de signaux pas donné de l’eau, du jus ou de Pedialytemd ? » qui permettent de faire avanNommez les trois obstacles à la communication cer le processus d’entrevue. rencontrés par les parents de Virginie à l’urLes références fréquentes à un gence et expliquez en quoi ils nuisent à une sujet d’inquiétude, la répéticommunication efcace. tion de certains mots clés ou

clinique

Jugement

FIGURE 4.2 Lorsqu’elle fournit des explications aux parents, l’inrmière peut utiliser un support écrit ou visuel.

Savoir orienter la discussion pendant l’entrevue tout en accordant le maximum de liberté d’expression est un des objectifs les plus difciles pour parvenir à une communication efcace (Jarvis, 2015). Au moment de l’examen clinique, il est important que l’inrmière se concentre sur la raison de la consultation. Ainsi, au cours d’un examen portant sur un symptôme, elle pourra poser des questions ouvertes, suivies d’une intervention servant à orienter la conversation (Jarvis, 2015). Par exemple, si le parent commence à énumérer les noms des autres enfants, l’inrmière dira : Pouvez-vous aussi me dire leur âge ? Si le parent s’étend de façon détaillée sur chaque enfant, ce qui n’est pas l’objet de l’entrevue, elle réoriente la discussion en disant : Si vous permettez, nous parlerons des autres enfants un peu plus tard. Vous aviez commencé à me parler des difcultés de Paul à s’alimenter. Cette approche démontre de l’intérêt envers les autres enfants, mais réoriente l’évaluation vers l’enfant pour qui la consultation est demandée. Si un parent a évoqué un problème concernant un autre enfant pendant l’entrevue, l’inrmière peut, à la n de celle-ci, revenir sur le sujet en disant au parent : Vous disiez tout à l’heure que votre ls plus âgé avait aussi un problème de santé. Pouvez-vous m’en parler ?

Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

135

ALERTE CLINIQUE

Avant de remettre un document à lire ou à remplir à une per­ sonne, il faut s’assurer que celle­ci sait lire la langue dans laquelle le document est rédigé. 2 L’entrevue avec un interprète est traitée dans le chapitre 2, Inuences socioculturelles sur les soins de santé.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les principaux obstacles à l’écoute sont les distrac­ tions environnantes et le jugement hâtif.

une insistance particulière sur un objet ou une personne servent d’indices à l’inrmière pour orienter la discussion. Les inquiétudes et les appréhensions sont souvent évoquées avec nonchalance et désinvolture par les parents, mais elles ne sont pas moins importantes et doivent se prêter à un examen attentif de manière à cerner les enjeux problématiques. L’écoute permet également d’évaluer la abilité et la justesse de l’information obtenue. Ainsi, certains renseignements obtenus en début d’entrevue peuvent se dévoiler sous un aspect différent à mesure que l’enfant ou le parent se sent en confiance. Il est important de relever toute disparité entre les réponses et d’aborder de nouveau ces sujets pour plus de précision. Cependant, les perceptions de l’inrmière à l’égard du comportement d’un parent sont souvent inuencées par ses propres impressions, ses préjugés et ses suppositions, lesquels peuvent être empreints de stéréotypes religieux et culturels. Une entrevue est efcace lorsque l’inrmière maîtrise consciemment ses réactions et ses réponses, et qu’elle emploie les techniques de communication appropriées.

Empathie

13 Des directives précises pour préparer les enfants, selon leur stade de développement, à des interventions sont présentées dans le chapitre 13, Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation.

L’empathie est la capacité de comprendre ce que vit une autre personne en s’identiant à elle ; elle est souvent décrite comme la capacité de se mettre à la place d’autrui. L’essence d’une interaction empathique réside dans la compréhension précise des sentiments de l’autre. Cela permet aux parents de se sentir compris et leur offre la possibilité de se coner. L’empathie, contrairement à la sympathie, ne suppose pas le partage de sentiments ou de liens affectifs ; il est possible de comprendre ce que ressent autrui tout en conservant une distance affective avec lui (Ofce québécois de la langue française [OQLF], 2017). Alors que l’empathie a des vertus thérapeutiques dans la relation d’aide, la sympathie suppose plutôt un investissement excessif sur le plan affectif pouvant mener à l’épuisement professionnel.

Reconnaissance des diversités culturelles Ostracisme : Action de mettre ou de tenir à l’écart une personne ou un ensemble de personnes par des mesures discriminatoires.

136

Partie 2

La façon dont les symptômes et la maladie sont perçus et rapportés peut varier considérablement selon les cultures. Une même maladie peut être une source d’ostracisme dans une culture ou, à l’inverse, représenter une amélioration du statut dans une autre. L’examen clinique, comme tous les aspects des soins inrmiers, doit respecter ces différences culturelles qui inuencent le comportement de l’enfant et de sa famille, ses décisions en ce qui a trait à sa santé et à sa disposition à faire appel aux professionnels de la santé.

Évaluation clinique

Obstacles à la communication Plusieurs obstacles à la communication peuvent avoir des effets néfastes sur la qualité de l’entrevue. Très souvent, ces obstacles sont attribuables à l’inrmière quand, par exemple, elle donne des conseils non adaptés ou tire des conclusions hâtives (Jarvis, 2015). Le fait de ne pas parler la même langue est aussi un obstacle à la communication . Dans ce cas, il est nécessaire de faire appel à une tierce partie : l’interprète 2 . La surcharge d’information est un autre type d’obstacle. Lorsque la quantité ou la nature de l’information qu’une personne reçoit est écrasante, celleci montre souvent des signes d’anxiété ou de baisse de l’attention. Ces indices doivent alerter l’inrmière et l’amener à alléger l’information ou à éclaircir ses propos. Le TABLEAU 4.1 énumère les obstacles les plus courants à la communication, et notamment les signes d’une surdose d’information.

4.1.5

Communication avec l’enfant en fonction de l’âge

Même si l’essentiel de la communication verbale concerne le parent, l’inrmière ne doit pas exclure l’enfant durant l’entrevue. Elle prête attention aux nourrissons et aux enfants en les observant jouer ou en leur adressant occasionnellement des questions ou des remarques. Elle inclut les enfants plus âgés de manière à ce qu’ils participent activement à l’entrevue. Dans la communication avec les enfants, quel que soit leur âge, les composantes non verbales du processus sont celles qui permettent de transmettre les messages les plus signicatifs. Il est difcile de déguiser les sentiments, les attitudes ou l’anxiété dans les rapports avec les enfants. Ces derniers sont attentifs à leur entourage et accordent une signication à tous les gestes et à tous les mouvements ; c’est particulièrement vrai pour les très jeunes enfants. L’inrmière a intérêt à tenir compte du stade de développement social et cognitif de l’enfant pour adapter son intervention en conséquence 13 . S’efforcer trop énergiquement de se faire l’ami d’un enfant avant qu’il ait pu analyser une personne étrangère tend à augmenter son anxiété. Il peut être utile de continuer à parler à l’enfant et au parent tout en poursuivant les activités qui ne se rapportent pas directement à l’enfant an de lui permettre d’observer la situation en conance. Si l’enfant tient un jouet ou une poupée, l’inrmière parlera d’abord à la poupée. Pour qu’il se sente à l’aise de discuter, elle pose des questions simples à l’enfant, par exemple : Ton ourson a-t-il un nom ? L’ENCADRÉ 4.2 présente d’autres moyens de communication avec les enfants.

TABLEAU 4.1

Obstacles à la communication

COMPORTEMENT DU PERSONNEL INFIRMIER

COMPORTEMENT DU CLIENT : INDICES D’UNE SURCHARGE D’INFORMATION

• Donner des conseils sans retenue, qui n’ont pas forcément été sollicités.

• Observer de longs silences.

• Rassurer le client de manière prématurée ou déplacée.

• Avoir les yeux grands ouverts et une expression faciale xe.

• Encourager le client de manière excessive.

• Bouger constamment ou essayer de s’éloigner.

• Défendre une position ou une opinion.

• Avoir des tics nerveux (p. ex., tapoter, jouer avec des mèches de cheveux).

• Formuler des commentaires stéréotypés ou des clichés.

• Interrompre soudainement la conversation (p. ex., pour aller aux toilettes).

• Entraver l’expression des émotions par des questions directes, fermées.

• Regarder partout.

• Interrompre ou achever la phrase de l’interlocuteur.

• Bâiller, avoir un regard inexpressif.

• Parler davantage que la personne interrogée.

• Regarder souvent la montre ou l’horloge.

• Tirer des conclusions hâtives.

• Essayer de changer de sujet de discussion.

4

• Changer délibérément le cours de la discussion.

Pratiques inrmières ENCADRÉ 4.2

Communiquer avec l’enfant

• Laisser à l’enfant le temps de se sentir à l’aise.

• Parler d’une voix calme, posée et conante.

• Éviter les approches soudaines ou rapides, les grands sourires, les contacts visuels prolongés ou d’autres gestes susceptibles de paraître menaçants.

• Parler clairement, être précise et utiliser des mots simples et des phrases courtes.

• S’adresser d’abord au parent si l’enfant se montre timide.

• Formuler des conseils et des suggestions de manière positive.

• Communiquer grâce à des objets de transition comme des poupées, des marionnettes et des animaux en peluche avant de poser directement des questions à un jeune enfant.

• Ne proposer un choix que s’il en existe un.

• Donner à l’enfant plus âgé l’occasion de parler en l’absence des parents. • Essayer d’adopter une position qui permet d’avoir les yeux au même niveau que ceux de l’enfant.

Les nourrissons comprennent surtout la communication non verbale. Ils communiquent leurs besoins et leurs sentiments par des comportements et des sons non verbaux. Ils sourient et gazouillent lorsqu’ils sont contents, et pleurent lorsqu’ils ont des besoins. Les pleurs sont provoqués par des stimulus internes ou externes désagréables. Les adultes interprètent ces pleurs comme l’indice que le nourrisson a besoin de quelque chose et ils s’efforcent ensuite de trouver la cause pour soulager l’inconfort et apaiser la tension provoquée par la faim, la douleur, une contrainte corporelle ou la solitude. Les nourrissons réagissent également aux comportements non verbaux des adultes. Le son d’une voix ferme, douce et calme les réconforte même s’ils ne comprennent pas les mots qui sont prononcés. Ils se calment

• Permettre à l’enfant d’exprimer ses inquiétudes et ses craintes. • Recourir à diverses techniques de communication.

lorsqu’ils se font câliner ou caresser. Les sons forts et durs, tout comme les mouvements brusques, les effraient. L’attention des nourrissons plus âgés est centrée sur eux-mêmes et sur leurs parents ; ainsi, tout étranger représente une menace possible, jusqu’à preuve du contraire. Tendre les mains en demandant à l’enfant de venir est rarement efcace, en particuVous prévoyez rencontrer monsieur Venne pour lier si le nourrisson est avec préparer le congé de son ls Jonas, âgé de quatre un parent. La plupart des ans. L’inrmière-chef de l’unité vous dit : « Fais nourrissons s’habituent à une attention, le père est agressif et pas facile. » En position particulière et à une entrant dans la chambre, vous constatez que le certaine manière d’être tenus. père semble préoccupé et qu’il afche un air grave. L’inrmière doit observer la Quelle approche contribuerait vraisemblablement à position dans laquelle le établir un lien de conance entre le père de Jonas parent tient l’enfant. En généet vous ? Expliquez votre réponse. ral, les nourrissons sont plus

clinique

Jugement

Nourrisson

• Être honnête avec l’enfant.

Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

137

à l’aise en position verticale qu’en position horizontale. Par ailleurs, l’inrmière doit tenir les nourrissons de manière à ce qu’ils puissent voir leurs parents. Comme ils n’ont pas encore acquis la permanence de l’objet, s’ils ne voient pas le parent, ils croiront qu’il est parti.

Trottineur et enfant d’âge préscolaire Les enfants âgés de moins de cinq ans sont égocentriques. Ils ne perçoivent les choses qu’en rapport avec eux-mêmes et suivant leur propre perspective. Par conséquent, la communication doit être axée sur eux. L’inrmière doit leur dire ce qu’ils peuvent faire et comment ils vont se sentir. Les expériences des autres n’ont aucun intérêt pour eux ; il est donc inutile de faire appel à l’expérience d’un autre enfant pour essayer de faire coopérer un petit. L’inrmière doit leur permettre de toucher et d’examiner les objets avec lesquels ils seront en contact. Bien qu’ils n’aient pas encore les capacités de langage sufsantes pour exprimer leurs sentiments et leurs souhaits, les trottineurs sont en mesure de communiquer efcacement avec leurs Vous devez irriguer le cathéter veineux central de mains pour transmettre des Kyla, âgée de trois ans. Pour ce faire, vous avez idées sans utiliser de mots. besoin d’une seringue et d’une aiguille pour prélever Ils savent repousser ce dont le sérum physiologique et d’un tampon d’alcool. ils ne veulent pas, tirer une Kyla a un système sans aiguille pour l’irrigation personne pour lui montrer du cathéter. Vous prélevez le sérum physiologique quelque chose, pointer du dans la chambre en vous disant que Kyla ne devrait doigt et couvrir la bouche pas avoir peur, puisque l’aiguille ne sert qu’à d’une personne pour signaler prélever le liquide. Votre décision est-elle qu’ils ne souhaitent pas adéquate ? Justiez votre réponse. entendre ce qu’elle dit.

Jugement

clinique

Ils ne peuvent pas comprendre le sens guré des expressions comme « visage à deux faces », « les mains pleines de pouces » ou « perdre la tête », car ils sont incapables de décoder les analogies et de distinguer le fantasme de la réalité. En conséquence, l’inrmière doit éviter d’utiliser une phrase qui peut être mal interprétée par un petit enfant. Les jeunes enfants accordent également des attributs humains à des objets inanimés. Ils craignent donc de voir les objets sauter, mordre, couper ou pincer. Pour atténuer leur crainte, il faut tenir hors de leur vue tout équipement qui leur est inconnu.

Enfant d’âge scolaire Les jeunes enfants d’âge scolaire se ent moins à ce qu’ils voient et davantage à ce qu’ils savent. Ils sollicitent des explications et des raisons pour tout, mais ils n’ont pas besoin de vérication plus approfondie. Ils sont intéressés par l’aspect fonctionnel de tous les objets, les procédures et les activités. Ils désirent savoir pourquoi un objet existe, à quoi il sert et comment il fonctionne. Ils veulent savoir ce qui va se passer et pourquoi il doit en être ainsi. Par exemple, pour expliquer une intervention comme

138

Partie 2

Évaluation clinique

la mesure de la pression artérielle, l’inrmière doit montrer à l’enfant qu’en appuyant sur la poire, l’air est poussé dans le brassard et cela fait bouger l’aiguille sur le cadran. L’inrmière peut laisser l’enfant manipuler l’appareil et, par la suite, lui expliquer simplement l’intervention en disant : « Je veux voir jusqu’où va bouger l’aiguille lorsque le brassard appuie sur ton bras. » L’enfant participera ainsi avec enthousiasme. Les enfants d’âge scolaire s’inquiètent souvent de leur intégrité corporelle. Comme ils accordent une importance particulière à leur corps, ils sont sensibles à tout ce qui constitue une menace ou suggère une blessure. Cette inquiétude concerne aussi leurs possessions, de sorte qu’ils peuvent sembler réagir de manière excessive à l’idée, ou à la menace, de perdre des objets précieux. En aidant l’enfant à verbaliser ses inquiétudes, l’inrmière peut le rassurer, dissiper les mythes ou les peurs, et l’inviter à des activités qui calment son anxiété. Pour instaurer un climat de conance et établir la communication, il peut être utile de lui parler de ses amis, de son école ou encore de son animal de compagnie. Même si ces enfants peuvent utiliser correctement le langage, ils ont quand même besoin d’explications relativement simples et d’exemples concrets, car ils ne maîtrisent pas encore l’abstraction.

Adolescent Lorsque les enfants approchent de l’adolescence, leur pensée et leur comportement oscillent entre ceux de l’enfant et ceux de l’adulte. Ils sont rapidement entraînés vers la maturité, parfois plus que ne le permet leur mécanisme d’adaptation. Par conséquent, dans certaines situations de tension, il se peut qu’ils se ent à la sécurité des attentes plus familières et confortables de l’enfance. En prévoyant ces uctuations d’identité, l’inrmière est en mesure d’ajuster le cours de son interaction avec l’adolescent pour répondre au besoin du moment ; il est impossible de s’en remettre à une approche unique. Par exemple : • face à de la coopération : le faire participer aux soins ; • face à de l’agressivité : essayer de comprendre ce comportement, mais ne pas le tolérer ; • face à de la colère : lui permettre de l’exprimer ; • face à de la fanfaronnade ou de la provocation : se montrer plus indulgente, étant donné son âge. Il est tout aussi erroné de considérer l’adolescent comme un adulte avec une sagesse et une maîtrise de soi d’adulte que de croire qu’il nourrit des inquiétudes et des attentes d’enfant. Souvent, les adolescents sont plus enclins à discuter de leurs inquiétudes avec un adulte qui

ne fait pas partie de leur famille, et ils sont généralement reconnaissants de pouvoir interagir avec une inrmière en l’absence de leurs parents. Ils acceptent volontiers toute personne qui leur témoigne un véritable intérêt. Cependant, les adolescents peuvent rapidement rejeter une personne qui essaie de leur imposer ses valeurs, qui leur témoigne un intérêt factice ou qui semble avoir peu de respect pour eux, pour ce qu’ils pensent ou pour ce qu’ils disent. L’entrevue avec des adolescents comporte quelques points importants. Le premier est de déterminer s’il faut parler à l’adolescent seul ou en présence de ses parents. Bien entendu, si le parent est absent, il faut suggérer à l’adolescent que les parents devront prendre part à une entrevue ultérieure. Si les parents et l’adolescent sont ensemble, s’adresser d’abord à l’adolescent renforce la relation interpersonnelle. Cependant, il est possible d’avoir un aperçu de la relation familiale en parlant d’abord avec les parents. Dans les deux cas, l’inrmière donnera aux deux parties l’occasion de participer à l’entrevue. La condentialité est primordiale pendant l’entrevue avec des adolescents. L’inrmière doit expliquer aux parents et aux adolescents les limites de la condentialité, en particulier pour l’information qui devra être divulguée à d’autres si le problème appelle une intervention, comme les comportements suicidaires ou la violence. L’autre dilemme de l’entrevue avec des adolescents est qu’il existe souvent deux perspectives pour un même problème : celle de l’adolescent et celle des parents. La clarication du problème est une tâche de grande importance. Le cas échéant, il est nécessaire de donner aux deux parties l’occasion de discuter de leurs points de vue dans un environnement ouvert et neutre. L’inrmière incitera les membres de la famille à discuter plus efcacement si elle fait preuve d’habiletés de communication positives ENCADRÉ 4.3.

4.1.6

Techniques de communication

Jeu Le jeu est le langage universel des enfants. Il fait partie des formes de communication les plus importantes, en plus d’être une technique efcace de relation avec les enfants. Il est souvent possible de recueillir des indices développementaux physiques, intellectuels et sociaux à partir de la nature et de la complexité des comportements ludiques d’un enfant. Plusieurs professionnels de la santé utilisent le jeu pour réduire le traumatisme causé par la maladie ou une hospitalisation, ou pour préparer l’enfant à des procédures thérapeutiques 13 .

Pratiques inrmières ENCADRÉ 4.3

Communiquer avec l’adolescent

CONSTRUIRE LES BASES DE LA RELATION INFIRMIÈRE-ADOLESCENT

– Être courtoise, calme, honnête et ouverte d’esprit ;

• Offrir une entrevue seule avec l’adolescent.

– Rester objective ; éviter les suppositions, les jugements et les réprimandes ;

• Garantir la condentialité et le respect de la vie privée. • Encourager l’expression d’idées et de sentiments. • Se préoccuper du point de vue de l’adolescent et tolérer les avis différents. • Vérier les connaissances que possède l’adolescent sur le sujet et demander la permission de les compléter ou de les corriger, au besoin. • Adopter une attitude favorable à la discussion : – Écouter et être attentive au discours de l’adolescent ;

– Ne pas réagir de manière excessive ; – Ne prendre position, en s’opposant à l’adolescent, que sur des sujets importants ; – Après avoir pris position, penser à tous les points sur lesquels l’adolescent pourrait vouloir négocier, se préparer à différentes options possibles et s’assurer que les attentes sont bien comprises. • Valoriser les bonnes attitudes ou les bons comportements de l’adolescent.

Chez les nourrissons, la faculté de percevoir précède la faculté de transmettre ; c’est pourquoi ils réagissent aux activités qui stimulent leurs sens. Les tapotements, les caresses et les autres jeux sur la peau permettent de communiquer des messages. Les actions répétitives comme le fait d’étendre les bras du nourrisson sur le côté pendant qu’il est allongé sur le dos ou de plier les bras sur la poitrine, de surélever et de faire tourner les jambes en mouvement de bicyclette lui fera émettre des sons agréables ou provoquera des pleurs si ces mouvements lui sont désagréables ou douloureux. L’inrmière peut utiliser des objets colorés pour attirer le regard de l’enfant lorsqu’elle examine sa vision, ou faire appel à des sons intéressants, comme le tic-tac d’une horloge, des carillons, des clochettes ou des chants pour évaluer son audition. Chanter Alouette tout en examinant chaque partie du corps de l’enfant peut aussi faciliter l’examen physique.

Autres techniques créatives L’ ENCADRÉ 4.4 présente des techniques de jeu verbales et non verbales. Ces techniques peuvent provoquer l’expression inattendue de fortes émotions. L’infirmière doit être prête à gérer ces situations ou à reconnaître celles qui vont au-delà de ses capacités et qui nécessitent de diriger l’enfant vers un intervenant approprié.

Chapitre 4

4

13 Plusieurs activités récréatives pour distancer l’enfant de sa maladie et du stress de l’hospitalisation sont présentées dans le chapitre 13, Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation.

Examen clinique : anamnèse et examen physique

139

Pratiques inrmières ENCADRÉ 4.4

Utiliser des techniques créatives de communication avec les enfants

TECHNIQUES VERBALES

• Éviter l’utilisation du « tu » ; les messages en « tu » portent un jugement de valeur et mettent sur la défensive. Exemples : Message au « tu » : « Tu ne collabores pas beaucoup à tes traitements. » Message au « je » : « Je suis inquiète de la façon dont se passent les traitements, car je veux que tu ailles mieux. »

• Commencer par demander à l’enfant de raconter une histoire sur un sujet quelconque ; puis, raconter une autre histoire qui ressemble à celle de l’enfant, mais comportant des différences qui aident l’enfant dans certains aspects qui lui posent problème. Exemple : L’enfant raconte une histoire dans laquelle il va à l’hôpital et ne reverra plus jamais ses parents. Raconter vous aussi une histoire à propos d’un enfant (noms différents, mais circonstances similaires) qui est à l’hôpital et dont les parents lui rendent visite tous les jours, mais le soir après le travail, et ce, jusqu’à ce que l’enfant aille mieux et puisse retourner chez lui avec eux.

Technique de la troisième personne

Bibliothérapie

• Exprimer un sentiment en ayant recours à la troisième personne (il, elle, ils, elles). Cette façon de faire est moins menaçante que de demander directement à l’enfant comment il se sent, car cela lui donne la possibilité d’être d’accord ou non sans être sur la défensive. Exemple : « Parfois, lorsqu’une personne est très malade, elle se sent triste et en colère, parce qu’elle ne peut pas faire la même chose que les autres. » On attend alors en silence une réponse ou on l’encourage à répondre en ajoutant, par exemple : « T’es-tu déjà senti comme ça ? »

• Utiliser des livres dans le cadre d’un processus thérapeutique et de soutien.

Messages au « je » • Exprimer un sentiment à propos d’un comportement en employant le « je ». • Décrire l’effet que le comportement a eu sur la personne.

• Cette approche donne trois choix à l’enfant : 1) être d’accord et, espérons-le, exprimer ce qu’il ressent ; 2) ne pas être d’accord ; 3) rester silencieux, ce qui signie qu’il ressent probablement de tels sentiments, mais qu’il n’est pas en mesure de les exprimer à ce stade-ci. Facilitation des réponses • Écouter attentivement l’enfant et revenir sur ses sentiments et ses réponses. • Répondre de façon empathique et dénuée de jugement, et vérier les sentiments ressentis par l’enfant. • Employer des formules qui facilitent les réponses : « Tu te sens _________ à cause de _________. » Exemple : Si l’enfant afrme : « Je déteste venir à l’hôpital et avoir des piqûres », une réponse facilitante serait : « Tu te sens malheureux à cause de toutes ces choses que tu dois subir. » Histoires • Utiliser le langage des enfants pour sonder leur mode de pensée tout en contournant leurs inhibitions et leurs peurs conscientes. • La technique la plus simple consiste à demander à l’enfant de raconter une histoire à propos d’un événement comme « être à l’hôpital ». • Autres approches : – Montrer à l’enfant l’image d’un événement précis, comme un enfant et quelques personnes dans une chambre d’hôpital, et lui demander de décrire la scène. – Découper une série de vignettes d’une bande dessinée, supprimer le texte des bulles et demander à l’enfant d’ajouter le texte.

• Donner à l’enfant la possibilité d’examiner un événement semblable au sien, mais sufsamment différent pour lui permettre de s’en distancer et de rester en contrôle. • Consignes générales d’utilisation de la bibliothérapie : 1. Évaluer le développement affectif et cognitif de l’enfant pour vérier s’il est en mesure de comprendre le message du livre. 2. Bien connaître le contenu du livre (message voulu ou but) et le groupe d’âge auquel il s’adresse. 3. Lire le livre à l’enfant s’il ne sait pas lire. 4. Explorer avec l’enfant la signication du livre en lui demandant : – de raconter l’histoire dans ses propres mots ; – de lire une section précise avec l’inrmière ou l’un des parents ; – de faire un dessin lié à l’histoire et d’expliquer le dessin ; – de parler des personnages ; – de résumer la morale ou la signication de l’histoire. Rêves • Les rêves révèlent souvent des sentiments inconscients et refoulés. • Demander à l’enfant de raconter un rêve ou un cauchemar. • Explorer avec l’enfant la signication possible de ce rêve. Questions hypothétiques (Qu’arriverait-il si ?) • Encourager l’enfant à explorer des situations hypothétiques et à envisager différentes solutions possibles. Exemple : « Qu’arriverait-il si tu tombais malade et que tu devais aller à l’hôpital ? » Les réponses de l’enfant révèlent ce qu’il sait déjà et ce qui l’intrigue, lui donnant ainsi la possibilité d’apprendre des stratégies d’adaptation, surtout dans des situations potentiellement dangereuses. Les trois vœux • Demander à l’enfant : « Si tu pouvais avoir trois choses dans le monde, quelles seraient-elles ? » Si l’enfant répond « Que tous mes vœux se réalisent », lui demander de préciser ses vœux.

Échange d’histoires

Échelles d’appréciation

• Révéler ce que pense l’enfant et tenter de changer ses perceptions de craintes en racontant de nouveau l’histoire d’une manière quelque peu différente (approche plus thérapeutique que les histoires).

• Au lieu de demander à un jeune comment il se sent, utiliser une échelle d’appréciation (chiffres, visages joyeux ou tristes) pour amener l’enfant à évaluer un événement ou un sentiment.

140

Partie 2

Évaluation clinique

ENCADRÉ 4.4

Utiliser des techniques créatives de communication avec les enfants (suite)

Exemple : Lui demander comment s’est passé sa journée « sur une échelle

Consignes pour évaluer les dessins

de 1 à 10.

• Utiliser des dessins spontanés et évaluer plus d’un dessin, si possible.

Jeu d’association de mots

• Interpréter les dessins en fonction de ce que vous savez sur l’enfant et sa famille, dont son âge et son développement.

• Énumérer des mots clés et demander à l’enfant de dire le premier mot qui lui passe par la tête en entendant chaque mot. • Commencer par des mots neutres, puis introduire des mots plus anxiogènes, comme maladie, aiguille, hôpital et opération. • Choisir des mots se rapportant à un événement qui touche la vie de l’enfant.

• Interpréter le dessin dans son ensemble plutôt que de s’attarder aux détails. • Tenir compte de certains éléments du dessin qui peuvent être importants :

Phrases à compléter

– sexe du personnage dessiné en premier : se rapporte généralement à la perception de l’enfant de son propre rôle sexuel ;

• Commencer à énoncer une afrmation et demander à l’enfant de la compléter. Voici quelques exemples d’afrmations :

– taille de chaque personnage : exprime l’importance, le pouvoir ou l’autorité ;

– La chose que j’aime le plus (le moins) à l’école, c’est _________. – Le meilleur (le pire) âge à avoir est _________. – La chose la plus (la moins) amusante que j’ai faite est _________. – Ce que j’aime le plus (le moins) à propos de mes parents, c’est _________. – La seule chose que je changerais à propos de ma famille, c’est _________. – Si je pouvais être tout ce que je désire, je serais _________. – La chose que j’aime le plus (le moins) à propos de moi, c’est _________. Les pour et les contre • Choisir un sujet comme « être à l’hôpital » et dire à l’enfant d’énumérer « cinq bonnes choses et cinq mauvaises choses » à propos de cette situation. • Cette technique est extrêmement utile lorsqu’elle est appliquée aux relations, comme de savoir ce que chaque membre de la famille aime et déteste à propos des uns et des autres. TECHNIQUES NON VERBALES

Écriture • L’écriture est un autre moyen de communication pour les enfants plus âgés. Quelques suggestions : – Tenir un journal intime ; – Consigner par écrit les sentiments ou les pensées difciles à exprimer ; – Rédiger des « lettres » qui ne seront jamais postées (une variante pourrait être d’écrire à un « correspondant » imaginaire). • Conserver au dossier un récit des progrès de l’enfant du point de vue tant physique qu’émotionnel. Dessin • Le dessin est l’une des formes de communication les plus utiles, car il est à la fois non verbal (en regardant le dessin) et verbal (par l’histoire que raconte l’enfant à propos du dessin).

4

– ordre dans lequel sont dessinés les personnages : exprime la priorité en fonction de l’importance ; – position de l’enfant par rapport aux autres membres de la famille : exprime le statut ou l’alliance qu’il ressent ; – exclusion d’un membre : peut indiquer un sentiment de non-appartenance ou un désir d’éliminer ; – parties du corps disproportionnées : exprime généralement une préoccupation à l’égard de sujets particulièrement importants (p. ex., de grandes mains peuvent être un signe d’agression) ; – absence ou ébauche de bras et de mains : sous-entend de la timidité, de la passivité ou une immaturité intellectuelle ; des petits pieds instables peuvent exprimer de l’insécurité ; des mains cachées peuvent signier un sentiment de culpabilité ; – emplacement du dessin sur la feuille et type de tracé : la pleine utilisation de la feuille et un tracé ferme et continu expriment la sécurité, tandis que des dessins limités à une petite surface et dont le tracé est léger et mal assuré ou montre des lignes brisées peuvent être des signes d’insécurité ; – traces d’effacement, ombrages ou hachures croisées : expriment l’ambivalence, l’inquiétude ou l’anxiété dans un domaine particulier. Magie • Utiliser des tours de magie simples pour créer des liens avec l’enfant. • Encourager sa collaboration aux interventions en santé et le distraire efcacement au cours d’interventions douloureuses. • Même si le « magicien » parle, ne pas exiger de réponse verbale de l’enfant. Jeu • Le jeu est un langage universel et fonctionne bien auprès des enfants.

• Les dessins en révèlent beaucoup sur l’enfant, car ils sont des projections de son moi intérieur.

• Il révèle beaucoup de choses sur lui, car il lui permet de projeter ses pensées intérieures.

• Proposer des activités de dessin à l’enfant :

• Proposer des activités de jeu à l’enfant :

– le dessin spontané, qui consiste à laisser l’enfant dessiner librement sans lui donner de consignes ;

– le jeu spontané, qui consiste à lui fournir des jeux et à le laisser jouer librement sans lui donner de consignes ;

– le dessin dirigé, qui consiste à lui donner une consigne précise, comme « dessiner une personne », ou à utiliser la méthode des « trois thèmes » (énumérer trois choses à propos de l’enfant, lui demander d’en choisir une et de la dessiner).

– le jeu dirigé, qui consiste à lui proposer une activité définie, comme jouer avec des instruments médicaux ou une maison de poupée afin d’explorer sa peur des piqûres ou examiner les relations familiales.

Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

141

4.2

Anamnèse : collecte de données subjectives

Au cours de l’examen clinique, l’anamnèse consiste à recueillir, au moyen d’une entrevue, de l’information la plus précise possible sur la raison de la consultation. Pour ce faire, l’inrmière peut avoir recours à différentes techniques : • directe : l’inrmière recueille des renseignements en posant des questions directement au parent et à l’enfant ; • indirecte : le parent fournit des renseignements en remplissant certains questionnaires. Cependant, pour des considérations de temps, s’il n’est pas possible de poser directement des questions aux parents et à l’enfant, l’inrmière passera en revue les réponses écrites des parents et les interrogera relativement à toute réponse qui lui semble problématique. L’entrevue pédiatrique contient différents volets se rapportant à l’état actuel et aux antécédents médicaux des enfants, ainsi qu’aux renseignements concernant leur environnement psychosocial. Voici le contenu d’une entrevue à des ns cliniques : 1. Renseignements d’identication 2. Motif de la consultation 3. Évaluation d’un symptôme (PQRSTU) 4. Histoire de santé (AMPLE) 5. Revue des systèmes Les sections suivantes détaillent chacun de ces volets de l’entrevue pédiatrique.

4.2.1

La plupart des renseignements servant à identier l’enfant sont habituellement déjà disponibles dans le dossier. S’il manque des données, ou si c’est une première visite, l’inrmière complète l’information. C’est une bonne façon d’établir le premier contact après s’être présentée. Cependant, si le parent et le jeune enfant paraissent anxieux, l’inrmière en profitera pour obtenir des renseignements susceptibles de les mettre plus à l’aise en s’informant, Kim, âgée de six mois, est amenée à l’urgence par par exemple, de la région sa mère pour une toux persistante. À la suite de d’où ils proviennent. Tous les votre évaluation, vous consignez la note d’évolurenseignements signalétiques tion suivante : « Présente une toux grasse depuis suivants doivent être consideux semaines, s’étant intensiée depuis les gnés au dossier : quatre derniers jours et s’accompagnant de 1. Nom vomissements. Humidicateur placé dans la 2. Adresse chambre par les parents qui ne dénotent toutefois pas d’amélioration ni de détérioration. » L’analyse 3. Numéro de téléphone du symptôme de Kim est-elle complète selon l’outil 4. Date et lieu de naissance mnémotechnique PQRSTU ? Justiez votre réponse. 5. Origine et groupe ethnique

Jugement

clinique

142

Renseignements d’identication

Partie 2

Évaluation clinique

6. 7. 8. 9.

Sexe Religion Date de l’entrevue Personne interrogée

Personne interrogée La personne interrogée, c’est-à-dire celle qui fournit les renseignements, est un des éléments importants du processus de collecte des renseignements de base. L’inrmière consignera dans le dossier : 1) l’identité de cette personne et son lien avec le client (enfant, parent ou autre) ; 2) son impression quant à sa abilité et à sa disposition à communiquer ; 3) toute circonstance particulière comme le recours à un interprète ou les réponses contradictoires de plus d’une personne.

4.2.2

Motif de la consultation

Le symptôme à l’origine de la consultation est le motif précis de la visite de l’enfant à la clinique, au cabinet ou à l’hôpital. Le motif de la consultation peut être déterminé en posant des questions ouvertes et neutres, par exemple : Comment puis-je vous aider ? ou Pourquoi venez-vous consulter aujourd’hui ? Il faut éviter les questions qui ont pour effet de cataloguer la personne, par exemple : Quelle est votre maladie ? ou Quel est le problème ? En effet, il est possible que la raison de la visite ne soit ni une maladie ni un problème. Parfois, il est difcile d’isoler le symptôme ou le problème à l’origine du motif de la consultation, car le parent en observe plusieurs. Dans ce cas, les questions doivent être aussi précises que possible. Par exemple, demander à la personne interrogée d’énoncer le principal problème ou le symptôme l’ayant motivée à consulter aujourd’hui peut l’aider à se concentrer sur le problème le plus urgent.

4.2.3

Évaluation d’un symptôme (PQRSTU)

L’inrmière doit obtenir tous les détails concernant le symptôme à l’origine de la consultation. Au moment de la détermination du motif de la consultation, un symptôme tel qu’une douleur, de la fatigue ou de la èvre peut être mentionné. Le symptôme décrit n’étant pas forcément visible, l’inrmière doit l’évaluer en profondeur. L’outil mnémotechnique PQRSTU est très utile pour se rappeler les éléments à explorer lorsque l’inrmière évalue un symptôme (Jarvis, 2015 ; Ordre des inrmières et inrmiers du Québec [OIIQ], 2010) ENCADRÉ 4.5.

4.2.4

Histoire de santé (AMPLE)

L’inrmière doit obtenir tous les détails de l’histoire de santé. Les antécédents renferment des renseignements sur tous les aspects antérieurs de l’état de santé de l’enfant et ils se concentrent sur

Collecte de données ENCADRÉ 4.5

Évaluation d’un symptôme (PQRSTU)

Toutes les questions peuvent être posées au parent ou à l’enfant. Pour s’adresser à l’enfant, utiliser la deuxième personne du singulier (tu).

P PROVOQUER / PALLIER / AGGRAVER • Selon vous, qu’est-ce qui a provoqué ce symptôme ? • Que faisait l’enfant lorsque le symptôme est apparu ? • Qu’avez-vous fait pour tenter de régler ce problème ? • Selon vous, qu’est-ce qui aggrave son symptôme ?

• Montre-moi avec un doigt où la douleur va.

S SYMPTÔMES ET SIGNES ASSOCIÉS / SÉVÉRITÉ • L’enfant manifeste-t-il d’autres signes ou symptômes ?

T TEMPS / DURÉE • Depuis quand avez-vous remarqué ce symptôme ? • Lorsque ce symptôme apparaît, combien de temps dure-t-il ?

Q QUALITÉ / QUANTITÉ

• Est-ce la première fois que cela arrive à l’enfant ?

• Comment savez-vous que votre enfant est souffrant ?

• Quelle est la fréquence d’apparition de ce symptôme ?

• Comment évaluez-vous l’intensité de ce symptôme ?

U (UNDERSTANDING) COMPRÉHENSION ET SIGNIFICATION

R RÉGION / IRRADIATION

POUR LE CLIENT

• Dans quelle région percevez-vous ce symptôme ?

• Selon vous, de quel problème croyez-vous qu’il s’agit ?

• Montre-moi avec un doigt où ça fait mal.

• Quelle est la conséquence de ces symptômes pour vous ?

A Allergies / réactions

L’inrmière recueille de l’information sur les allergies connues de l’enfant de même que sur les réactions qu’elles produisent . Ces renseignements sont essentiels pour ne pas exposer l’enfant à un risque de réaction grave en cas d’administration d’un allergène. Toutefois, il ne faut pas confondre une réaction avec une intolérance ni avec les effets indésirables attribuables aux médicaments. M Médicaments

Médicaments et produits naturels L’inrmière s’informera des schémas pharmacologiques actuels, y compris les vitamines, les antipyrétiques (surtout l’aspirine), les antibiotiques, les antihistaminiques, les décongestionnants ou les antitussifs. Elle notera les données relatives à tous les médicaments, y compris leur nom, la dose, la posologie, la durée et la raison de leur administration. Il est fréquent que les parents ne connaissent pas le nom du médicament. Dans la mesure du possible, l’infirmière demande aux parents

d’apporter les contenants à la prochaine visite, ou elle demande le nom de la pharmacie pour obtenir la liste de tous les médicaments sur ordonnance que l’enfant a pris récemment. En général, les parents ne considèrent pas les produits à base de plantes et les suppléments alimentaires comme des ALERTE CLINIQUE médicaments, mais en raison d’interactions médicamenteuses possibles, il est important de savoir Les renseignements concernant si l’enfant en prend. Bien que peu d’accidents liés les réactions allergiques aux aux effets indésirables des approches complémenmédicaments ou à d’autres taires et parallèles en santé aient été déclarés chez produits sont essentiels. En les enfants, comme en fait état le Programme omettant de consigner une canadien de surveillance pédiatrique (Société canaréaction, l’inrmière expose dienne de pédiatrie [SCP], 2012), il faut noter l’enfant à un risque de réaction quand même l’utilisation de remèdes phytothéragrave en cas d’administration peutiques ou de toute thérapie complémentaire de l’allergène en question. dans la collecte de données. Des risques de complications anesthésiques et chirurgicales Ryan, âgé de 13 ans, a subi une greffe rénale à sont notamment possibles. l’âge de 9 ans. Il est actuellement hospitalisé pour Alcool, tabac et drogues une pneumonie à Aspergillus. En effectuant la Les habitudes liées à la collecte de données à l’admission, vous apprenez consommation de tabac, de que Ryan prend du tacrolimus (Prografmd) pour café, de boissons énergi éviter le rejet de son rein. Pourquoi est-ce santes, d’alcool ou de drogues important de savoir qu’il prend ce médicament ? concernent essentiellement les a) Pour connaître la réaction à ce médicament adolescents. Si un jeune admet depuis sa greffe. qu’il fume, boit ou consomme b) Pour déceler les interactions médicamenteuses une drogue, l’inrmière doit possibles. lui demander le type et la

clinique

Jugement

plusieurs éléments, généralement les mêmes que pour un adulte : les allergies, les antécédents médicaux, la prise de médicaments, une intervention chirurgicale ou tout autre traitement. De plus, l’histoire de la naissance, une description détaillée de l’alimentation, les vaccinations, la croissance et le développement font partie des particularités à collecter chez l’enfant. Ces renseignements, qui sont détaillés plus loin, peuvent être recueillis à l’aide de l’outil mnémotechnique AMPLE (OIIQ, 2010) ENCADRÉ 4.6 .

4

• Qu’avez-vous remarqué d’autre ?

quantité, ainsi que la fréquence de sa consommation. L’inrmière pourra questionner l’adolescent en lui demandant, par exemple : As-tu déjà Chapitre 4

c) Le médicament est peut-être en cause dans la pneumonie. d) Les effets indésirables peuvent être confondus avec les symptômes.

Examen clinique : anamnèse et examen physique

143

Collecte de données ENCADRÉ 4.6

Exemples de questions à poser au moment de l’histoire de santé (AMPLE)

Toutes les questions peuvent être posées au parent ou à l’enfant. Pour s’adresser à l’enfant, utiliser la deuxième personne du singulier (tu).

• A-t-il déjà été hospitalisé ? Quand ? Vous rappelez-vous pour quelle raison il était à l’hôpital ?

A ALLERGIES / RÉACTIONS

• Est-ce qu’il y a eu des complications lors de la grossesse ou de l’accouchement de l’enfant ?

• L’enfant a-t-il des allergies connues à un médicament, à l’environnement ou à un aliment ? • Vous souvenez-vous du nom du médicament ou du produit qui a entraîné une réaction allergique ? • Quelle a été la réaction ? À combien de temps remonte cette réaction ?

M MÉDICAMENTS • Prend-il des médicaments prescrits par le médecin ou offerts en vente libre ? Quels sont les noms, les doses et les fréquences d’administration ? • Savez-vous pour quelles raisons il prend ces médicaments ? • Prend-il des produits naturels ou des vitamines ? Quels sont les noms, les doses et les fréquences d’administration ? • Votre enfant a-t-il reçu ses vaccins ? À quand remonte le dernier ? • Est-ce que tu fumes ou consommes de l’alcool, de la caféine ou des drogues ? Quelle quantité ? À quelle fréquence ? (Cette question est habituellement posée en l’absence des parents.)

P PASSÉ

• Y a-t-il des problèmes de santé connus dans votre famille ? Lesquels ?

L (LAST MEAL) DERNIER REPAS • Quand l’enfant a-t-il mangé pour la dernière fois ? Est-ce qu’il s’hydrate bien ? • Pouvez-vous décrire l’alimentation type d’une journée ? Est-ce bien toléré ? • Doit-il suivre une diète particulière (diabétique, faible en gras, sans sel, etc.) ?

E ÉVÉNEMENTS / ENVIRONNEMENT • Quelle école/garderie fréquente-t-il ? • En quelle année scolaire est-il ? • A-t-il des frères, des sœurs ? Si oui, combien ? • Où habitez-vous (milieu urbain, rural) ? • Avez-vous noté des effets du symptôme sur ses activités quotidiennes ? • Est-ce qu’il vit une situation de stress ? • En général, considérez-vous qu’il est en bonne santé ?

• L’enfant a-t-il des problèmes de santé connus ? Depuis quand ? • A-t-il déjà été opéré ? Pour quelle raison ? Quand ?

Depuis juin 2014, les informations concernant la vaccination sont consignées dans le Registre de vaccination du Québec, accessible sur le Portail santé mieux-être du gouvernement du Québec au www.sante.gouv.qc.ca.

bu de l’alcool ou consommé de la drogue ? À quand remonte la dernière fois que tu as bu de l’alcool ou consommé de la drogue ? Ce type de question lui permettra d’obtenir des données plus ables que si elle demandait : Quelle quantité d’alcool consommes-tu ? À quelle fréquence consommes-tu de l’alcool ou de la drogue ? L’inrmière précisera que l’alcool désigne tous les types d’alcool comme la bière et le vin. Si le sujet répond un verre de vin ou une canette de bière, l’inrmière s’informe du volume du contenant.

Vaccination

9 Les principes de la vaccination, ainsi que le calendrier de vaccination du Québec, sont présentés au chapitre 9, Maladies infectieuses et immunisation.

144

Partie 2

Il est également essentiel de consigner tous les vaccins que l’enfant a reçus. Étant donné qu’un grand nombre de parents ne connaissent pas le nom exact et la date de chaque immunisation, la source de renseignements la plus able est le carnet de vaccination, l’hôpital, la clinique, le dossier d’un médecin exerçant dans son cabinet ou le registre de vaccination du Québec 9 . L’inrmière doit pouvoir recueillir des informations sur : 1. le nom du vaccin ou de la maladie spécique ; 2. le nombre d’injections ; 3. le dosage (des quantités parfois moindres sont données si une réaction est anticipée) ;

Évaluation clinique

4. la date d’administration ; 5. l’apparition de toute réaction à la suite de la vaccination. Les enfants doivent faire l’objet d’un dépistage des contre-indications et des précautions à prendre avant chaque administration de vaccins. P Passé

Pendant l’examen des antécédents médicaux, l’inrmière commence par un énoncé général comme : De quelles autres maladies votre enfant a-t-il déjà été atteint ? Dans la mesure où les parents se souviennent probablement mieux des problèmes médicaux graves, l’inrmière les interrogera spéciquement sur les rhumes et les douleurs aux oreilles, puis sur les maladies infantiles comme la rougeole, la rubéole, la varicelle, les oreillons, la coqueluche, la diphtérie, la tuberculose, la scarlatine, l’infection à streptocoques et l’amygdalite. En plus des maladies, l’inrmière pose des questions sur les blessures qui ont nécessité une intervention médicale ou chirurgicale, et sur les hospitalisations. Si le problème n’est pas complètement résolu, elle ne doit pas oublier de noter les dates de chaque incident et de s’informer des

causes ainsi que des effets résiduels. L’inrmière recueille aussi les antécédents familiaux (parents, grands-parents, fratrie) an d’obtenir des renseignements sur l’état de santé ou des causes de décès qui pourraient avoir une incidence génétique sur l’état de santé de l’enfant.

Histoire de naissance Compte tenu des effets de la période prénatale sur le développement physique et affectif de l’enfant, il est essentiel de procéder à un examen approfondi des antécédents à la naissance. Ces antécédents comprennent toutes les données concernant : 1. la santé de la mère pendant la grossesse ; 2. le travail et l’accouchement ; 3. l’état de santé du nourrisson juste après la naissance. L’inrmière doit expliquer la pertinence de ces questions, car il se peut que les parents ne voient pas l’intérêt de la grossesse et de la naissance visà-vis du problème actuel de l’enfant, surtout s’il ne s’agit plus d’un nourrisson. Étant donné que les facteurs émotionnels affectent également le déroulement de la grossesse et la relation parent-enfant subséquente, l’inrmière doit s’informer sur les attitudes prénatales des parents à l’égard du fœtus. Il est préférable d’aborder le sujet de l’acceptation parentale de la grossesse par des questions indirectes plutôt que de demander aux parents si la grossesse était planiée, car ils peuvent répondre de façon afrmative par crainte de la critique si la grossesse était inattendue. Il faut encourager les parents à exprimer leurs vraies réactions en se référant à des faits spéciques relatifs à la grossesse tels que l’espacement entre deux grossesses, un intervalle prolongé ou court entre le mariage et la conception, ou une grossesse pendant l’adolescence. Le parent pourrait vouloir apporter des explications ou, au contraire, refuser de faire part de ses sentiments. Si le parent reste silencieux, revenez à ce sujet plus tard au cours de l’entrevue. L (Last meal) Dernier repas

Les données à recueillir concernant l’alimentation sont similaires à celles de l’adulte. Chez l’enfant, il s’agit d’un sujet essentiel, puisque les inquiétudes des parents à ce propos sont fréquentes et que les interventions du personnel inrmier sont importantes pour assurer une nutrition optimale. Pour mener une évaluation nutritionnelle complète, l’inrmière doit recueillir des données subjectives dans le cadre de l’anamnèse et des données objectives durant l’examen physique. Ces deux volets sont traités ensemble dans la section 4.3.3 de ce chapitre. E Événements / Environnement

L’inrmière doit évaluer les comportements et les perceptions de l’enfant et de la famille concernant

la santé an de déterminer les comportements souhaitables et de relever les comportements, actuels ou potentiels, qui représentent un risque pour la santé. Les comportements à risque actuels doivent donner lieu à une évaluation suivie, tout comme les comportements potentiels qui révèlent un risque pathologique.

Perception et gestion de la santé

4

Chaque personne et chaque famille ont une perception de leur état de santé et de leur bien-être. Comme c’est le cas pour un client adulte, l’évaluation de l’inrmière se fonde sur leur perception ainsi que sur leurs comportements en matière de santé. Elle peut demander à quel type de soins ils ont généralement recours. La culture peut jouer un rôle dans le choix du principal prestataire de soins.

Croissance et développement La connaissance du développement physique, cognitif, linguistique et social des enfants permet à l’inrmière de distinguer la situation normale de celle qui est anormale. Bien que chaque enfant évolue à un rythme différent, son développement suit un ordre prévisible régi par la maturation du cerveau. Lorsqu’un niveau est atteint, l’enfant passe au stade suivant. Si l’inrmière observe la perte d’une acquisition (régression), cela doit soulever chez elle un questionnement. Divers facteurs physiques, sociaux et environnementaux, ainsi que la maladie, peuvent affecter le développement 3 . Des outils comme le et la santé de l’enfant test de dépistage Denver II permettent à l’inrmière de détecter les retards de développement chez les trottineurs et les enfants d’âge préscolaire en évaluant quatre fonctions du développement : la motricité globale, la motricité ne, les habiletés de langage et les habiletés sociales personnelles . L’inrmière doit recourir à des questions précises pour interroger les parents sur chaque étape du développement.

3 Les outils d’évaluation du développement sont présentés dans le chapitre 3, Croissance, développement et promotion de la santé.

Annexe 3.2W : Test de dépistage Denver II.

Sommeil et repos La majorité des enfants acquerront graduellement un prol de sommeil normal. Cependant, plusieurs parents manifestent des inquiétudes à ce propos. Durant son évaluation, l’inrmière s’informe sur les horaires et la durée du sommeil nocturne et des siestes, le type d’activité réalisée avant d’aller au lit et l’utilisation d’un objet fétiche, comme une doudou ou une peluche. Un certain nombre d’enfants peuvent éprouver des problèmes de sommeil. Si tel est le cas, il convient de procéder à un examen plus détaillé des antécédents de sommeil pour déterminer les interventions adéquates 7 .

7 Les problèmes de sommeil chez le jeune enfant sont abordés dans le chapitre 7, Problèmes de santé du trottineur et de l’enfant d’âge préscolaire.

Perception et concept de soi La perception et le concept de soi sont des éléments très révélateurs du type de relations que l’enfant entretient avec autrui, particulièrement Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

145

à l’adolescence. Ce volet de l’évaluation concerne l’attitude que l’enfant a envers lui-même ainsi que la perception qu’il a de ses aptitudes, de son image corporelle et de son estime de soi. Bon nombre de stratégies de communication sont utiles pour obtenir des informations sur leur adaptation et leur concept de soi. Par exemple, l’inrmière peut demander à l’enfant de nommer ou d’écrire cinq choses qu’il aime et qu’il n’aime pas de lui-même. Elle peut aussi utiliser des phrases à compléter telles que « La chose que je préfère (ou déteste) à propos de moi-même est ________ » ou « Si je pouvais changer une chose à propos de moi, ce serait ________. » En observant l’enfant, l’inrmière se fait une idée générale de la manière dont il se comporte du point de vue de la conance, de sa relation avec les autres, de la manière dont il répond aux questions et de l’adaptation aux nouvelles situations FIGURE 4.3. L’inrmière observe également la relation parents-enfant pour déceler les types de messages transmis à l’enfant en regard de ses habiletés d’adaptation et de son estime de soi. Les parents traitent-ils l’enfant avec respect ? S’attardent-ils sur ses forces, ou l’interaction est-elle constamment faite de réprimandes, en insistant sur les faiblesses et les fautes de l’enfant ? Les parents aident-ils l’enfant à apprendre de nouvelles stratégies d’adaptation ou renforcent-ils celles que l’enfant utilise déjà ?

1 L’évaluation familiale est abordée dans le chapitre 1, Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et la communauté.

Relations et rôles Les relations et les rôles permettent de dénir l’enfant dans ses relations familiales et sociales. L’inrmière évalue le degré de satisfaction que ces relations lui apportent et relève celles qui, à l’évidence, nécessitent d’être modiées 1 .

Sexualité et reproduction Les comportements sexuels sont une composante essentielle de l’examen de santé des adolescents. L’inrmière peut amorcer la conversation sur les inquiétudes d’ordre sexuel en commençant par les antécédents d’interactions avec les pairs. L’inrmière peut questionner l’adolescent en lui demandant : Peux-tu me parler de ta vie sociale ? Parle-moi de tes amis les plus proches ? Décris-moi les activités scolaires que tu préfères. Ces énoncés ouverts donnent généralement lieu à une discussion sur les fréquentations et les problèmes sexuels. Pour en savoir plus, l’inrmière s’informe des attitudes de l’adolescent à l’égard de sujets comme l’éducation sexuelle, les fréquentations amoureuses, la vie commune et les relations sexuelles. L’inrmière doit formuler ses questions de manière à indiquer une préoccupation plutôt qu’un jugement ou une critique des pratiques sexuelles de l’adolescent. Quelle que soit la teneur de la conversation sur les antécédents sexuels, l’infirmière doit se

146

Partie 2

Évaluation clinique

FIGURE 4.3 Grâce à une observation attentive, l’inrmière peut en apprendre beaucoup sur la perception de soi de l’enfant.

soucier du langage employé pour recueillir ou transmettre les renseignements. Elle évitera de demander à l’adolescent s’il est actif sexuellement, car le sens de cette expression est très large. La question la plus directe et la mieux comprise serait sans doute : As-tu des relations sexuelles avec quelqu’un ? Comme il est possible que les jeunes aient des relations homosexuelles, l’inrmière évitera d’employer des termes masculins ou féminins pour désigner un partenaire sexuel et utilisera plutôt un terme général comme « quelqu’un ». Si l’adolescent a des antécédents de maladies transmissibles sexuellement, qu’il présente des manifestations cliniques ou qu’il demande un traitement pour ces maladies, l’inrmière doit noter la liste des partenaires sexuels. L’un des aspects difciles mais nécessaires de l’entrevue est de déterminer le site d’une infection possible, étant donné que les infections transmissibles sexuellement peuvent être contractées par tout orice corporel. L’infirmière doit informer l’adolescent qu’une infection transmissible sexuellement peut avoir été contractée même en l’absence de signes visibles de maladie. L’étude des antécédents permet d’élucider les préoccupations liées à l’activité sexuelle ; elle signale au personnel inrmier les circonstances propices à l’administration d’un test de dépistage d’infections transmissibles sexuellement ou d’un test de grossesse ; elle révèle les besoins en counseling de nature sexuelle, par exemple sur les pratiques sexuelles sécuritaires. Selon la complexité du problème, l’inrmière dirigera l’adolescent vers un professionnel de la santé possédant une expertise dans ce domaine.

Adaptation et tolérance au stress L’inrmière évalue les capacités d’adaptation de l’enfant ainsi que l’efcacité de ses mécanismes d’adaptation. Elle pose des questions sur certaines habitudes comportementales comme le fait de se ronger les ongles ou de sucer son pouce, le pica (consommation routinière de substances non comestibles), les rituels (couverture ou jouet de sécurité) et les comportements inusités (trait de caractère ou attitude inhabituels, cognement de la tête, balancement, masturbation manifeste, le fait de marcher sur la pointe des pieds, etc.). Un inventaire des facteurs de stress auxquels l’enfant est soumis régulièrement sera également très utile. L’inrmière note non seulement les stratégies que ce dernier utilise pour faire face à la situation et diminuer la tension ressentie, mais aussi les personnes et les groupes qui le soutiennent.

Valeurs et croyances Les valeurs, les buts et les croyances, y compris les croyances spirituelles, guident les choix de la famille en matière de santé. L’origine ethnique de l’enfant, sa culture et ses croyances ont une 2 . Il est inuence sur son hygiène de vie important de respecter le désir de la famille de poursuivre sa pratique religieuse ou spirituelle et d’utiliser des articles religieux.

Environnement Le lieu de résidence et son emplacement géographique, de même que son aménagement intérieur, peuvent fournir des explications sur les manifestations cliniques observées chez l’enfant. De même, le lieu de naissance ainsi que les divers voyages effectués au pays ou à l’étranger font également partie des aspects de l’entrevue, car ils servent à établir l’exposition possible à des maladies endémiques. Les enfants sont particulièrement vulnérables aux infestations parasitaires dans des conditions d’hygiène médiocres ainsi qu’aux maladies véhiculées par des vecteurs comme les moustiques ou les tiques dans les climats chauds et humides, ou dans les régions très boisées. Un parent qui voyage dans une région endémique peut communiquer des affections transmissibles à l’enfant.

structure familiale, l’histoire familiale et les relations entre les membres. Il donne accès à des informations d’ordre démographique liées au milieu de vie ou à certains événements (p. ex., un déménagement, une rupture, un problème de santé) ainsi qu’aux croyances, aux traditions et aux valeurs familiales. Les principaux sujets de préoccupation sont la composition de la famille, le milieu familial et communautaire, l’emploi et la scolarité des membres de la famille, de même que les traditions culturelles et religieuses. Lors de brefs contacts avec la famille, il n’est pas approprié d’effectuer une évaluation complète ; poser une ou deux questions de chaque catégorie peut sufre à mettre en évidence le besoin d’une évaluation plus approfondie. L’ENCADRÉ 4.7 présente les situations qui nécessitent une évaluation familiale complète.

4.2.5

4

Revue des systèmes

L’inrmière doit obtenir des renseignements sur tout problème de santé éventuel. Une partie de l’entrevue consiste à passer en revue chaque système ou appareil de l’organisme de manière systématique, en procédant de la tête aux orteils TABLEAU 4.2 . L’évaluation du symptôme (PQRSTU) permet un survol complet du système ou de l’appareil touché par le symptôme à l’origine de la consultation. Cependant, comme la pertinence et le bien-fondé des questions concernant d’autres systèmes de l’organisme peuvent échapper aux parents ou à l’enfant, l’inrmière doit expliquer en quoi ces renseignements sont nécessaires.

2 Les inuences des croyances et des pratiques culturelles sur les soins sont décrites dans le chapitre 2, Inuences socioculturelles sur les soins de santé.

L’inrmière commence les questions sur un système précis par un énoncé général, par exemple : Votre enfant a-t-il eu des problèmes aux yeux ? Si le parent afrme que l’enfant a connu des problèmes liés à certaines fonctions corporelles, l’inrmière approfondira ce sujet en demandant plus d’explications : Pouvez-vous m’en dire plus à ce sujet ? Si le parent afrme que l’enfant n’a eu aucun problème, l’inrmière l’interrogera sur des symptômes précis (p. ex., des maux de tête, des yeux qui louchent).

Génogramme La qualité de la relation fonctionnelle entre l’enfant et les membres de la famille est un facteur majeur de la santé émotionnelle et physique de l’enfant. Pour amorcer son évaluation, l’inrmière utilise le génogramme, une variante de l’arbre généalogique. Servant de guide dans les rencontres avec la famille, cet outil permet de situer les membres les uns par rapport aux autres et offre à tous la possibilité d’établir des liens et de donner du sens à des interactions souvent complexes. Le génogramme permet de poser des questions sur la

ENCADRÉ 4.7

Cas nécessitant une entrevue d’évaluation familiale

Effectuer une évaluation familiale complète chez l’enfant qui : • reçoit des soins de confort ; • vit des événements stressants majeurs (p. ex., maladie chronique, invalidité, divorce parental, décès d’un proche) ; • nécessite des soins à domicile complexes ;

Chapitre 4

• est atteint d’un retard de développement ; • a subi des blessures accidentelles répétées ou qu’on soupçonne être victime d’abus ; • a des problèmes comportementaux ou physiques pouvant être attribuables à un dysfonctionnement familial.

Examen clinique : anamnèse et examen physique

147

TABLEAU 4.2

Évaluation complète des organes et des systèmes

SYSTÈME

TYPES D’INFORMATION

Généralités

• État de santé général, fatigue, gain ou perte de poids récents ou inexpliqués (période concernée dans les deux cas), facteurs contributifs (modication de l’alimentation, maladie, variation de l’appétit), tolérance à l’effort, èvre (heure de la journée), frissons, sueurs nocturnes (non liées aux variations du climat), infections fréquentes, capacité générale à effectuer des activités quotidiennes

État mental

• État émotionnel, anxiété, dépression, changements d’humeur, hallucinations, décit d’attention, crises de colère, problèmes de comportement, idées suicidaires, abus de substances illicites

Tête

• Céphalées, étourdissements, blessure (préciser les détails)

Yeux

• Problèmes visuels (comportements indiquant une vision trouble comme heurter des objets, s’asseoir près de la télévision, tenir un livre près du visage, écrire avec la tête près du bureau, se frotter les yeux, incliner la tête dans une position inhabituelle), strabisme, infections oculaires, œdème des paupières, larmoiement excessif, port de lunettes ou de lentilles cornéennes, date du dernier examen de la vue

Oreilles

• Douleur, écoulement, signe de perte de l’acuité auditive (Faut-il répéter des directives à l’enfant ? Parle-t-il fort ? Se montre-t-il inattentif ?), résultats de tout test auditif antérieur

Nez

• Saignements du nez (épistaxis), congestion ou écoulement nasal constant ou fréquent, obstruction nasale (difculté à respirer), altération ou perte de l’odorat

Bouche

• Respiration par la bouche, saignement des gencives, mal de dents, brossage des dents, prise de uorure, difculté à faire ses dents (symptômes), dernière visite chez le dentiste, réaction aux visites chez le dentiste

Gorge

• Douleur, difculté à avaler, étouffement, raucité ou autres irrégularités de la voix

Cou

• Douleur, mouvement limité, raideur, difculté à tenir la tête droite (torticolis), hypertrophie de la thyroïde, hypertrophie de s ganglions ou d’autres masses

Thorax

• Hypertrophie mammaire, écoulement ou masses aux seins, hypertrophie des ganglions axillaires (pour les adolescentes, poser des questions sur l’observation des seins)

Système respiratoire

• Toux chronique, rhumes fréquents (nombre annuel), respiration sifante, essoufements au repos ou à l’effort, difculté à respirer, expectorations, infections (pneumonie, tuberculose), date du dernier examen pulmonaire et réaction cutanée au test de la tuberculine

Système cardiovasculaire

• Cyanose ou fatigue à l’effort, antécédents de soufe cardiaque ou de èvre rhumatismale, tachycardie, syncope, œdème

Système gastrointestinal

• Nausées, vomissements (peuvent indiquer une tumeur cérébrale ou une pression intracrânienne élevée s’ils ne sont pas liés aux repas), jaunisse ou coloration jaunâtre de la peau ou de la sclérotique, éructation, atulences, changement récent dans les habitudes d’élimination (présence de sang dans les selles, coloration inhabituelle des selles, diarrhée, constipation, encoprésie)

Système urinaire

• Douleur pendant la miction, pollakiurie, retard mictionnel, miction impérieuse, hématurie, énurésie ou incontinence (l’énurésie est fréquente chez l’enfant et peut être considérée comme normale jusqu’à l’âge de cinq ans), polyurie, odeur désagréable de l’urine, faiblesse du jet mictionnel, écoulement, date de la dernière analyse d’urine

Système reproducteur

• Fille : ménarche, menstruations, date des dernières menstruations, régularité ou problèmes liés aux menstruations, écoulement vaginal, prurit, date et résultats du dernier frottis de Papanicolaou (test Pap) (inclure les antécédents obstétricaux sur le modèle de la section des antécédents de naissance, s’il y a lieu) • Garçon : modication de la taille du scrotum (poser des questions sur l’autoexamen des testicules) • Jeune actif sexuellement : type de contraception, infections transmissibles sexuellement et type de traitement, s’il y a lieu

Appareil musculosquelettique

• Faiblesse, maladresse, manque de coordination, mouvements inhabituels, raideur du dos ou des articulations, douleurs ou crampes musculaires, anomalie de la démarche, déformations, fractures, foulures graves, niveau d’activité

Système neurologique

• Convulsions, tremblements, étourdissements, perte de mémoire, état général de l’affect, craintes, cauchemars, problèmes d’élocution, toute habitude inusitée

Système endocrinien

• Intolérance aux variations de température, soif ou miction excessives, sueurs excessives, goût salé de la peau, signes de puberté précoce

148

Partie 2

Évaluation clinique

TABLEAU 4.2

Évaluation complète des organes et des systèmes (suite)

SYSTÈME

TYPES D’INFORMATION

Système tégumentaire

• Prurit, modications pigmentaires ou autres décolorations, acné, éruptions cutanées (siège), tendance aux ecchymoses, pétéchies, sécheresse excessive, transpiration excessive d’odeur désagréable, texture générale, troubles ou déformation des ongles, croissance ou chute des cheveux, décoloration des cheveux

Système hématolo­ gique et lymphatique

• Ecchymoses ou saignements faciles, anémie, date et résultat de la dernière formule sanguine complète (FSC), transfusion sanguine, ganglions lymphatiques hypertrophiés ou douloureux (cervicaux, axillaires, inguinaux)

Système immunitaire et allergie

• Réactions allergiques, anaphylaxie, eczéma, rhinite, éternuements inhabituels, problèmes auto­immuns, infections récurrentes, infections associées à des complications inhabituelles

Si le parent conrme l’absence de tels symp tômes, l’inrmière rapporte au dossier les énoncés positifs à la section des antécédents en écrivant, par exemple : « La mère conrme l’absence de tout mal de tête, cognement contre des objets ou strabisme. » Ainsi, quiconque passera en revue les antécédents médicaux saura exactement quels symptômes ont été examinés.

4.3

Examen physique : collecte de données objectives

L’examen physique consiste en une évaluation systématique de l’état physique de l’enfant. Les signes cliniques observés sont considérés comme des données objectives. L’observation d’un signe clinique positif corrobore le fait que l’enfant manifeste ou a manifesté le trouble en question. Il s’avère également important de faire des observations négatives, c’est-à-dire de constater l’absence de certains signes cliniques habituellement associés à un problème. Chez l’enfant, l’examen physique constitue également un aspect essentiel des soins pédiatriques préventifs. Dans ce cadre, un examen complet est réalisé an d’évaluer le développement de l’enfant et d’anticiper tout risque de problème potentiel.

• Protéger la sécurité fondamentale du rapport parents-enfant, en particulier avec les jeunes enfants. • Réduire au minimum le stress et l’anxiété as sociés à l’examen des multiples parties corporelles. • Permettre à l’enfant d’être le mieux préparé possible. • Optimiser l’exactitude et la abilité des résultats des évaluations.

Préparation de l’enfant et déroulement en fonction de l’âge Même si les interventions de l’examen physique sont normalement indolores, il peut être stressant pour un enfant d’avoir un brassard serré autour du bras ou des sondes dans l’oreille et la bouche, de recevoir une pression sur l’abdomen ou d’être touché avec un instrument froid qui sert à écouter les poumons. Il faut donc préparer l’enfant de la même façon que pour une intervention plus importante. L’ENCADRÉ 4.8 présente des directives générales sur le processus de l’examen.

Bien que l’examen physique des enfants soit comparable à celui des adultes, la séquence d’exécution doit être adaptée à la condition des enfants. En utilisant l’âge développemental et chronologique de l’enfant comme principal critère d’évaluation de chaque système de l’organisme, cela permet à l’infirmière d’atteindre plusieurs objectifs :

Le TABLEAU 4.3 résume les directives de positionnement, de préparation et d’examen des enfants selon leur âge. Dans la mesure où aucun enfant ne correspond parfaitement à une catégorie d’âge, il peut s’avérer nécessaire de modier l’approche après une évaluation des étapes franchies et des besoins de l’enfant sur le plan développemental. Même avec la meilleure approche, de nombreux nourrissons ne coopèrent pas et sont inconsolables pendant la majeure partie de l’examen physique. De même, certains enfants d’âge préscolaire peuvent requérir davantage de mesures de sécurité comme un contact continu parent-enfant, et moins de mesures préparatoires convenant aux enfants de leur âge, comme jouer avec l’équipement avant et pendant l’examen FIGURE 4.4.

• Établir une relation de conance avec l’enfant et le parent.

Malgré les nombreuses variations possibles, il est question ici de certaines approches courantes.

4.3.1

Préparation à l’examen physique de l’enfant

Chapitre 4

CE QU’IL FAUT RETENIR

Il faut recueillir tout renseignement pertinent, y compris la présence ou l’absence d’un signe clinique attendu, pour aider à conrmer ou à éliminer la cause du problème.

CONSEIL CLINIQUE

Dans la mesure du possible, il est préférable d’effectuer les interventions invasives ou douloureuses dans un autre endroit que le lit. Le lit doit demeurer un espace sécuritaire pour l’enfant.

Examen clinique : anamnèse et examen physique

149

4

Par exemple, l’inrmière peut modier considérablement la séquence suggérée lorsque l’enfant souffre d’une douleur ou qu’il présente des anomalies physiques évidentes. Dans ces cas-là, elle

examine la zone affectée en dernier an de réduire autant que possible la souffrance en début d’examen et de s’intéresser aux parties du corps normales, saines et fonctionnelles.

Pratiques inrmières ENCADRÉ 4.8

Préparer et effectuer l’examen physique pédiatrique

PRÉPARATION DE LA SALLE D’EXAMEN

EXAMEN

• Faire l’examen dans une pièce appropriée et non menaçante pour l’enfant :

• Commencer l’examen d’une manière rassurante pour les jeunes enfants ou les enfants craintifs en utilisant :

– La salle d’examen doit être bien éclairée et peinte avec des couleurs neutres. – La salle doit baigner dans une chaleur confortable. – Tout équipement d’aspect étrange ou potentiellement effrayant doit être placé hors de la vue de l’enfant. – Des jouets, des poupées, des animaux en peluche et des jeux doivent être à la disposition de l’enfant. – Si possible, les salles seront décorées et équipées en fonction de l’âge des différents enfants. – Des conditions favorisant un entretien condentiel doivent être mises en place, en particulier s’il s’agit d’enfants d’âge scolaire et d’adolescents. PRÉPARATION DE L’ENFANT À L’EXAMEN

• Allouer à l’enfant du temps pour le jeu et pour faire connaissance avec lui. • Observer les comportements qui indiquent que l’enfant est prêt à coopérer :

– Des stratagèmes comme le jeu « Jean dit » pour encourager l’enfant à faire une grimace, à serrer une main, à se tenir sur un pied et ainsi de suite. – La technique de la poupée en papier : › Allonger l’enfant sur le dos, sur la table d’examen ou par terre, par-dessus une grande feuille de papier. › Tracer le contour du corps de l’enfant. › Lui indiquer sur sa silhouette les parties qui seront examinées, p. ex., dessiner un cœur et faire mine de l’écouter au stéthoscope, avant de faire la même chose sur l’enfant.

– Il établit des contacts visuels avec vous.

• S’il faut examiner plusieurs enfants d’une même famille, commencer par celui qui coopère le plus, qui servira de modèle de comportement souhaitable.

– Il accepte de tenir l’équipement qui lui est proposé.

• Faire participer l’enfant au processus d’examen.

– Il vous parle.

– Il accepte d’être touché. – Il s’assoit sur la table d’examen plutôt que sur les genoux de son parent. • Si l’enfant n’a pas l’air prêt, employer les techniques suivantes : – S’entretenir avec le parent et, graduellement, porter votre attention sur l’enfant ou sur son objet préféré, comme sa poupée. – Complimenter l’enfant au sujet de son apparence, de ses vêtements ou de son objet préféré.

– Offrir des choix (p. ex., s’asseoir sur la table ou sur les genoux du parent). – Permettre à l’enfant de manipuler ou de tenir l’équipement. – Encourager l’enfant à utiliser l’équipement sur une poupée, un membre de la famille ou elle-même. – Expliquer chaque étape de l’intervention en un langage simple. • Examiner l’enfant dans une position confortable et sans danger :

– Raconter une histoire amusante ou faire un tour de magie simple.

– L’enfant est assis sur les genoux du parent.

– Utiliser une marionnette pour parler à l’enfant à sa place en guise d’ami non menaçant.

– L’enfant se tient droit en cas de détresse respiratoire.

• Si l’enfant refuse de coopérer, employer les techniques suivantes :

• Procéder à l’examen dans une séquence cohérente (généralement de la tête aux orteils), sauf dans les cas suivants :

– Évaluer les raisons de ce refus tout en gardant à l’esprit qu’un enfant très craintif peut avoir vécu une expérience traumatisante.

– Modier la séquence pour répondre aux besoins spéciques des enfants, selon leur âge.

– Faire participer l’enfant et le parent au processus d’examen.

– Examiner les régions douloureuses en dernier.

– Éviter les explications trop longues au sujet de l’examen.

– Dans une situation d’urgence, examiner d’abord les fonctions vitales (voies respiratoires, respiration et circulation), puis la région blessée.

– Utiliser une approche ferme et directe vis-à-vis du comportement attendu. – Effectuer l’examen aussi rapidement que possible. – Demander à quelqu’un de tenir doucement l’enfant. – Réduire au minimum toute interruption ou stimulation. – Limiter le nombre de personnes présentes dans la salle. – Parler d’une voix douce, calme et conante. – Faire l’examen dans une salle isolée.

150

– Des activités susceptibles d’être présentées sous forme ludique, par exemple un test des nerfs crâniens ou certaines sections des tests de dépistage développementaux.

Partie 2

Évaluation clinique

• Rassurer l’enfant pendant toute la durée de l’examen, en particulier au sujet des préoccupations corporelles qui coïncident avec la puberté. CONCLUSION DE L’EXAMEN • À la n de l’examen, discuter des résultats avec les membres de la famille. • Féliciter l’enfant d’avoir coopéré pendant l’examen ; lui remettre une récompense, par exemple, un petit jouet ou des autocollants.

Pratiques inrmières TABLEAU 4.3

Adapter l’examen physique en fonction de l’âge de l’enfant

POSITION ET CONTEXTE

SÉQUENCE

APPROCHES

• Examiner de la tête jusqu’aux orteils.

• Dévêtir complètement l’enfant si la température ambiante le permet.

Nourrisson • Avant qu’il puisse s’asseoir tout seul – En position couchée sur le dos ou sur le ventre, de préférence sur les genoux des parents

• Effectuer les interventions invasives en dernier (oreilles, bouche, gorge [pendant que l’enfant pleure]).

– Avant 4-6 mois, peut être placé sur une table d’examen

• Si l’enfant est calme, ausculter le cœur, les poumons et l’abdomen.

• Une fois qu’il peut s’asseoir seul – Assis sur les genoux des parents, dans la mesure du possible – S’il est placé sur une table d’examen, l’installer de sorte qu’il puisse voir le parent

4

• Laisser la couche aux nourrissons. • Encourager la coopération de l’enfant à l’aide de distractions, d’objets brillants, de la parole. • Sourire au nourrisson ; parler d’une voix douce et calme.

• Noter les fréquences cardiaque et respiratoire.

• Apaiser le nourrisson avec un biberon d’eau ou de lait, si possible. • Demander l’assistance du parent pour immobiliser l’enfant pendant l’examen des oreilles ou de la bouche.

• Procéder à la palpation ou à la percussion de certaines régions.

• Éviter les mouvements brusques ou saccadés.

• Tester les réexes pendant l’examen de la partie corporelle concernée. • Tester le réexe de Moro en dernier.

Trottineur • Assis ou debout sur le parent, ou près de lui

• Utiliser d’abord le moins de contacts physiques possible.

• Demander au parent de dévêtir l’enfant.

• Allongé sur le dos ou sur le ventre, sur les genoux du parent

• Présenter l’équipement doucement.

• Enlever les sous-vêtements pendant l’examen des segments corporels évalués.

• Inspecter les régions corporelles en jouant à compter les doigts, chatouiller les orteils.

• Permettre à l’enfant de manipuler les instruments servant à l’examen ; en général, il est inutile de lui faire une démonstration.

• Ausculter ; procéder à la palpation ou à la percussion lorsque l’enfant est calme.

• Si l’enfant ne coopère pas, effectuer rapidement les interventions.

• Effectuer les interventions invasives en dernier (comme pour les nourrissons).

• Si l’enfant coopère, parler de l’examen ; utiliser des phrases courtes.

• Si l’enfant coopère, l’examiner de la tête jusqu’aux orteils.

• Demander à l’enfant de se dévêtir lui-même.

• S’il ne coopère pas, procéder comme avec les trottineurs.

• Lui proposer de regarder les instruments servant à l’examen ; lui en démontrer brièvement l’utilisation.

• Recourir à la contrainte, au besoin ; demander l’aide du parent. • Féliciter l’enfant qui coopère.

Enfant d’âge préscolaire • Debout ou assis • En général, bonne coopération en position allongée, sur le ventre ou sur le dos • Préfère que le parent soit proche

• Lui laisser ses sous-vêtements s’il est timide.

• Raconter une anecdote en lien avec l’examen (p. ex., Je vois à quel point tes muscles sont forts [pression artérielle]). • Utiliser la technique de la poupée dessinée (sur un papier). • Proposer des choix à l’enfant, dans la mesure du possible. • S’attendre à ce qu’il coopère ; utiliser des énoncés positifs (p. ex., Ouvre ta bouche).

Enfant d’âge scolaire • Préférence pour la position assise

• Examiner de la tête jusqu’aux orteils.

• Respecter le besoin d’intimité de l’enfant.

• Bonne coopération dans la plupart des positions

• Terminer par l’examen des organes génitaux de l’enfant plus âgé.

• Demander à l’enfant de se dévêtir lui-même.

• Les enfants plus jeunes préfèrent que les parents soient présents • Certains enfants plus âgés préfèrent un examen privé

• Lui permettre de porter ses sous-vêtements. • Lui remettre une chemise d’hôpital. • Expliquer l’utilité des instruments servant à l’examen et la signication de l’intervention, par exemple l’otoscope, qui sert à examiner les tympans, indispensables à l’audition. • Informer l’enfant à propos des fonctions de l’organisme et des soins.

Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

151

TABLEAU 4.3

Adapter l’examen physique en fonction de l’âge de l’enfant (suite)

POSITION ET CONTEXTE

SÉQUENCE

APPROCHES

• Mêmes positions que pour les enfants d’âge scolaire

• Procéder de la même façon que pour l’enfant d’âge scolaire plus âgé.

• Permettre à l’adolescent de se déshabiller en privé.

• Possibilité de proposer la présence du parent

• Examiner les organes génitaux en dernier.

• Exposer uniquement les parties à examiner.

Adolescent • Lui remettre une chemise d’hôpital. • Respecter le besoin d’intimité. • Expliquer les résultats pendant l’examen (p. ex., Tes muscles sont fermes et forts). • Examiner les organes génitaux comme n’importe quelle autre partie du corps. • Commenter de façon neutre le développement sexuel (p. ex., Tes seins se développent normalement). • Insister sur l’aspect normal du développement.

évalués, peu importe le motif de la consultation : la tête et le cou, l’abdomen ainsi que les systèmes pulmonaire et cardiaque. Dans tous les cas, une approche systématique pour l’évaluation de chaque zone corporelle permet de ne pas oublier de segments pendant l’examen. De même, un procédé standard de consignation des données favorise l’échange d’information entre les professionnels de la santé. L’examen physique s’effectue en suivant une méthode systématique qui permet à l’inrmière de se rappeler aisément chaque étape et de ne pas oublier les structures à évaluer. De plus, cette façon de procéder permet un meilleur rappel des données à consigner au dossier après avoir effectué l’examen. La séquence débute généralement avec l’évaluation de l’apparence générale de l’enfant. Par la suite, l’inrmière peut entreprendre les mesures anthropomorphiques et physiologiques, pour nalement se concentrer sur chaque système.

4.3.2 FIGURE 4.4 Permettre aux enfants de jouer avec les instruments qui serviront à l’examen peut aider à leur coopération et les préparer à l’examen physique.

Déroulement par étapes de l’examen Habituellement, durant un examen complet, l’inrmière procède de la tête aux orteils. Dans le cas d’un examen portant sur un symptôme, seuls les systèmes visés par la raison de la consultation et dictés par les éléments recueillis au moment de l’entrevue feront l’objet d’un examen. Cependant, chez les enfants de cinq ans et moins et ceux éprouvant des difficultés de communication, quatre systèmes doivent obligatoirement être

152

Partie 2

Évaluation clinique

Examen de l’apparence générale et mesures anthropométriques

Évaluation de l’apparence générale L’apparence générale de l’enfant est une impression objective et subjective de son aspect physique, de son état nutritionnel, de son comportement, de sa personnalité, de ses interactions avec ses parents et le personnel inrmier (et avec ses frères et sœurs, s’ils sont présents), de sa posture, de son développement et de son langage. Même si l’apparence générale est rapportée au début de l’examen physique, elle concerne aussi toutes les observations relevées pendant l’entrevue et au cours de l’examen physique.

L’inrmière observe la posture et les mouvements corporels. L’enfant atteint d’une diminution de l’acuité auditive ou visuelle peut afcher une inclinaison bizarre et caractéristique de la tête pour mieux voir ou entendre. En cas de douleur, il se peut que l’enfant limite l’utilisation d’une partie de son corps. Un enfant ayant une mauvaise estime de soi ou qui se sent rejeté peut avoir une posture affaissée, un air négligé et apathique. De même, un enfant sûr de lui, apprécié et qui se sent en sécurité, adopte habituellement une posture élancée, droite et bien équilibrée. L’inrmière doit observer ce langage corporel sans l’interpréter trop librement, et elle tâchera de le rapporter de manière objective. L’inrmière prend des notes relativement à l’hygiène de l’enfant, à la présence d’une odeur corporelle inhabituelle, à l’état des cheveux, du cou, des ongles, des dents et des pieds, ainsi qu’à la tenue vestimentaire. Ces observations sont d’excellents indices de possibles conditions de négligence, de ressources nancières insufsantes ou d’une ignorance concernant les besoins des enfants. Le comportement concerne la personnalité de l’enfant, son niveau d’activité, sa réaction au stress, ses demandes, ses frustrations, ses interactions avec les autres (principalement le parent et le personnel inrmier), le degré de vigilance et la réaction aux stimulus. L’inrmière observe la personnalité globale de l’enfant : Se laisse-t-il distraire facilement ? Peut-il obéir à deux ou trois directives successives sans qu’elles lui soient répétées ? Quelle est sa réaction en cas de frustration ? Établitil un contact visuel avec son interlocuteur pendant la conversation ? Comprend-il les explications rapidement ou non ? Bien qu’il soit possible d’évaluer le développement en observant attentivement l’enfant, l’inrmière doit vérier ses impressions au moyen de tests de dépistage 11 . L’inrmière note dans le dossier son estimation d’ensemble du développement du langage de l’enfant, de sa motricité, de sa coordination et de ses réalisations récentes. Par exemple, l’énoncé suivant peut s’appliquer à un enfant de 18 mois : « Développement moteur : grimpe, court et saute ; capable de manipuler des petits objets comme un crayon. Maintien l’équilibre en position debout immobile, exécute les gestes demandés de façon coordonnée (p. ex., frapper des mains). Nomme correctement les objets que je lui montre, fait des phrases de 2 mots ou plus (p. ex., C’est mon papa). »

Mesures de la croissance Chez les enfants, la mesure de la croissance physique est un élément majeur de l’évaluation de leur état de santé. Lorsque l’inrmière dépiste rapidement des problèmes potentiels, les professionnels de la santé et les parents peuvent agir en collaboration, avant que l’état nutritionnel ou Miguel, âgé de 3 ans, est hospitalisé depuis la santé de l’enfant ne soient 2 jours pour une méningite. Cela fait plus de gravement compromis. 12 fois que vous vériez ses signes vitaux, mais il pleure toujours au moment de la prise de Les paramètres de croissance température rectale. Tout a été essayé, mais rien Les paramètres de la croisne fonctionne : il déteste cette intervention. Lequel sance physique incluent le des signes vitaux faudrait-il prendre en dernier ? poids, la taille, l’épaisseur des a) Le pouls. c) La température. plis cutanés, la circonférence des bras, le périmètre crânien b) La respiration. d) La pression artérielle. et l’indice de masse corporelle (IMC) en rapport avec l’âge.

clinique

Jugement

L’inrmière note l’expression faciale de l’enfant et son apparence. Le faciès, par exemple, peut révéler que l’enfant est souffrant, qu’il éprouve des difcultés respiratoires, qu’il est effrayé, mécontent ou malheureux, qu’il a un décit intellectuel ou qu’il est gravement malade.

Les valeurs des paramètres de croissance sont notées sur des courbes de centiles, qui servent à comparer les mesures en centiles de l’enfant avec celles de la population générale. Ces paramètres permettent également d’évaluer l’état nutritionnel. La hauteur et la circonférence de la tête reètent la nutrition passée, tandis que le poids, l’épaisseur du pli cutané et la circonférence du bras reètent l’état nutritionnel actuel. L’épaisseur des plis cutanés est une mesure de la teneur en lipides de l’organisme, car près de la moitié des réserves totales de graisse sont situées directement sous la peau. Étant donné que les réserves de protéines de l’organisme se trouvent principalement dans les muscles, la circonférence des muscles du bras est considérée comme un indice des réserves de protéines de l’organisme. Dans l’idéal, les mesures de la croissance sont effectuées au l du temps, et les comparaisons doivent se rapporter à la vitesse de croissance en tenant compte des valeurs antérieures et présentes. Il est important que ces mesures soient exactes et ables pour surveiller la croissance des enfants. L’utilisation d’un pèse-personne à poids-curseur ou électronique correctement calibré et précis est indispensable. Une toise comportant un appuietête xe et un appuie-pied mobile permet d’obtenir une mesure able chez les nourrissons. Une toise verticale (stadiomètre) xée au mur est utilisée pour les enfants de plus de deux ans qui peuvent se tenir debout sans aide.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les paramètres de la croissance physique incluent le poids, la taille, l’épaisseur des plis cutanés, la circonférence des bras, le périmètre crânien et l’indice de masse corporelle (IMC) en rapport avec l’âge.

11 L’évaluation du langage, de la vision et de l’audition est abordée dans le chapitre 11, Déciences intellectuelles et déciences sensorielles.

Les normes de croissance Les normes de croissance de l’enfant de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), de la naissance à deux ans, sont recommandées parce qu’elles se fondent sur des enfants élevés conformément aux recommandations canadiennes et internationales à jour en matière de santé et d’alimentation dans les collectivités où l’économie est susceptible de Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

153

4

A Les courbes de croissance de l’Organisation mondiale de la Santé revues par Les diététistes du Canada sont présentées dans l’annexe A, Normes de croissance de l’OMS pour le Canada.

CONSEIL CLINIQUE

Saviez-vous que, normalement, la mesure de la taille est plus basse l’après-midi que le matin ? Lorsque l’inrmière mesure un enfant, elle doit noter l’heure de la journée. Chez les enfants ayant un retard de croissance, des mesures sériées (idéalement à trois reprises) devraient être prises à la même heure, lorsque c’est possible, pour établir une vitesse de croissance précise.

soutenir une croissance adéquate. Les nourrissons allaités au sein ont servi de modèle normatif de croissance et de développement. Les courbes démontrent la manière dont les enfants en santé devraient grandir et sont considérées comme la référence idéale pour évaluer la croissance des jeunes enfants. Les courbes de croissance pour surveiller la croissance des enfants et des adolescents de 2 à 19 ans sont mises à jour pour tenir compte de l’épidémie d’obésité et, par conséquent, sont considérées comme correspondant le mieux aux normes de croissance. An d’améliorer le suivi des enfants de diverses origines, l’OMS a intégré, dans ses nouvelles normes de croissance, les différences observées à partir des données issues d’une population d’enfants d’origines variées (SCP, 2014) A .

Évaluation de la croissance Des mesures uniques sur la courbe de croissance, obtenues et consignées avec précision, reètent la taille et le poids de l’enfant. Cependant, ces mesures ne fournissent pas d’information convenable pour évaluer la croissance de l’enfant. Une série de mesures obtenues au l du temps s’avère plus informative et reète le prol de croissance de l’enfant. La plupart des enfants suivent uniformément une courbe de centiles ou se situent entre les mêmes courbes de centiles. Cependant, il est normal pour les enfants de changer de une ou de deux courbes de centiles relativement à leur poids et à leur taille dans les deux premières années. Il peut également être normal de changer de courbes de centiles durant la puberté, dont l’âge d’apparition est variable. Par contre, en toute autre période, une augmentation ou une diminution marquée de la croissance, ou une courbe qui demeure plane, peut être le signe d’une perturbation de la croissance. Des mesures démontrant une diminution inattendue sur la courbe par rapport à un rythme de croissance préalablement établi peuvent être le signe d’un retard staturopondéral. Il faut explorer les changements de poids ou de taille avant qu’un enfant traverse deux courbes de centiles.

FIGURE 4.5 Ces enfants ont le même âge (8 ans), mais ils ont des tailles très différentes. L’enfant de gauche se situe au 5e centile de la taille et du poids, alors que celui de droite dépasse le 95e centile. Cependant, ils ont tous deux une croissance normale.

154

Partie 2

Évaluation clinique

Pour tous les enfants, il faut envisager les facteurs suivants lorsqu’une croissance qui ne suit pas un prol sain est évaluée : la taille des parents, l’environnement de l’enfant, son apport nutritionnel et la présence d’une maladie chronique. Dans le cas des nourrissons, il faut

également tenir compte de l’âge gestationnel, du poids de naissance et du type d’alimentation (lait maternel ou préparation lactée). Il est important de se rappeler que les prols de croissance normale varient chez les enfants du même âge FIGURE 4.5. Parmi les enfants dont la croissance est problématique, il convient de mentionner : • les enfants chez qui les centiles de la taille et du poids sont très disparates (p. ex., la taille est dans le 10e centile alors que le poids est dans le 90e centile, en particulier lorsque l’épaisseur des plis cutanés est au-dessus de la moyenne) ; • les enfants qui n’ont pas les taux de croissance prévus en taille et en poids, en particulier pendant les périodes de croissance rapide du nourrisson et de l’adolescent ; • les enfants qui manifestent une augmentation (excepté pendant la puberté) ou une diminution soudaine au milieu d’un prol de croissance jusqu’ici constant.

Contextes particuliers • Certains enfants obèses ne peuvent pas placer leur tête, les scapulas, les fesses et les talons dans un seul plan vertical tout en maintenant leur équilibre. L’inrmière doit vérier qu’au moins deux des quatre points sont en contact avec le plan. • Si un enfant a une jambe plus longue que l’autre, il faut placer un bloc de dimension appropriée sous la jambe la plus courte jusqu’à ce que le bassin soit au niveau et que les deux genoux soient complètement droits. Pour mesurer la hauteur, garder les jambes ensemble et mesurer du côté de la jambe la plus longue. • Les enfants ayant des besoins particuliers en matière de soins de santé peuvent nécessiter des mesures supplémentaires telles que l’envergure des bras, la longueur craniocaudale (de la tête au coccyx), la hauteur assise, la hauteur du genou ou d’autres longueurs segmentaires corporelles. En général, lorsqu’une longueur couchée est mesurée chez un enfant atteint de spasticité ou de contraction, il faut mesurer le côté du corps qui n’est pas affecté ou qui est le moins affecté. • Toujours documenter la présence de condition susceptible d’entraver une mesure de croissance linéaire précise et able (PENS, 2014).

Nourrisson allaité Les nourrissons allaités ont tendance à grandir plus rapidement que les nourrissons non allaités au cours des six premiers mois de vie, et plus lentement pendant les six mois suivants. Les nouvelles normes de croissance de l’OMS sont conçues selon la croissance des nourrissons allaités. Par conséquent, les nourrissons non allaités peuvent désormais

Dans l’ensemble, les normes de croissance de l’OMS donneront un plus fort taux d’enfants considérés comme étant en insufsance pondérale pendant les six premiers mois de vie ou faisant de l’embonpoint après cette période. Il est nécessaire d’évaluer le prol de la croissance linéaire et du poids par rapport à la taille, et de déterminer si le nourrisson est allaité avant de suggérer des modifications à l’alimentation (Les diététistes du Canada et SCP, 2014).

Prématuré Les normes de croissance de l’OMS n’incluent pas de données sur les prématurés ou sur les nouveau-nés de très faible poids à la naissance (moins de 1 500 g). Leur croissance diffère de celle des enfants nés à un âge gestationnel ou à un poids près de la norme. Il est possible pour l’inrmière de surveiller la croissance des prématurés (moins de 37 semaines d’âge gestationnel) après leur congé de l’unité de soins intensifs néonataux en évaluant les mesures des courbes de croissance par rapport à l’âge postnatal corrigé. L’âge postnatal corrigé permet de tenir compte de la prématurité (Les diététistes du Canada et SCP, 2014). Jusqu’à 24 ou 36 mois, il se calcule ainsi : Âge postnatal en semaines − [40 semaines − âge gestationnel en semaines] Par exemple, à 12 semaines d’âge postnatal, un nourrisson né à 30 semaines d’âge gestationnel devrait avoir : 12 − [40 − 30] = 2 semaines d’âge postnatal corrigé Il existe d’autres courbes pour évaluer la croissance des prématurés et des nouveau-nés de faible poids à la naissance lorsqu’ils sont à l’unité de soins intensifs ou peu après qu’ils ont obtenu leur congé : la courbe de Babson et Benda, mise à jour par Fenton, permet de suivre la croissance entre 22 semaines d’âge gestationnel et 10 semaines après le terme (University of Calgary, 2013).

Enfant atteint de troubles divers Les enfants ayant des troubles intellectuels, génétiques, développementaux ou autres ont souvent des prols de croissance différents de ceux des enfants en santé. Il est également possible de suivre leur croissance sur les courbes de l’OMS ou conjointement avec des courbes conçues spéciquement pour certains de ces troubles (p. ex., des courbes de croissance pour enfants trisomiques).

Indice de masse corporelle L’indice de masse corporel (IMC) représente le poids en kilogrammes divisé par le carré de la taille en mètres : IMC = poids en kilogrammes ÷ (taille en mètres)2 L’IMC chez les enfants est corrélé à l’obésité future et à des facteurs de risque négatifs pour la santé 8 . Normalement, l’IMC commence à diminuer à partir de 30 à 36 mois environ, pour atteindre un creux entre 4 et 6 ans. Il se met ensuite à augmenter pendant l’enfance et l’adolescence. L’augmentation de l’IMC qui se produit après qu’il a atteint son point le plus bas se nomme adiposité, ou IMC de rebond. Une adiposité de rebond précoce, c’est-à-dire avant 4 à 6 ans, s’associe à un risque accru d’obésité plus tard dans la vie (Les diététistes du Canada et SCP, 2014). Contrairement aux adultes, les augmentations d’IMC liées à l’âge s’associent à des augmentations de la masse grasse et de la masse corporelle mince. La mesure selon laquelle chaque élément contribue aux changements d’IMC dépend de l’âge, du sexe et de la maturation pubertaire de l’enfant, des antécédents familiaux et de l’origine ethnique. Il faut également tenir compte d’autres facteurs tels que les comorbidités, le niveau d’activité physique et l’ossature avant de déterminer l’état de croissance. L’IMC pour l’âge est l’indicateur nutritionnel recommandé pour dépister les enfants de deux ans et plus susceptibles de souffrir de cachexie ou d’embonpoint, ou d’être obèses. Les courbes ou les normes de croissance de l’OMS permettent de déterminer un centile pour l’IMC de l’enfant et d’utiliser ce centile en fonction des critères déterminés pour évaluer l’obésité (Les diététistes du Canada et SCP, 2014). Le personnel inrmier est souvent responsable de mesurer la croissance des enfants ; il joue un rôle important dans l’évaluation de l’IMC et l’enseignement aux parents. Il est donc essentiel qu’il comprenne l’utilisation des courbes de croissance, qu’il connaisse la méthode de calcul de l’IMC ainsi que son utilisation en fonction de l’âge de l’enfant. Compte tenu du nombre croissant d’enfants en surpoids, les courbes de l’IMC sont un élément crucial de leur examen physique.

Taille Le terme taille, ou stature, désigne la mesure effectuée lorsque l’enfant est debout, en position droite. L’inrmière mesure la taille en demandant à l’enfant d’enlever ses chaussures, de se tenir le plus droit possible, la tête dans le plan médian du corps et la ligne de vision parallèle au sol. Elle vérie que les talons sont joints, et que les fesses et le dos de Chapitre 4

4

8 L’évaluation et l’approche thérapeutique pour l’en­ fant et l’adolescent obèses sont décrites dans le chapitre 8, Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent.

éactivation des connaissances Quelle est l’exception chez l’adulte pour laquelle l’indice de masse corporelle (IMC) ne s’applique pas ?

CONSEIL CLINIQUE

L’IMC pour le sexe et l’âge peut être utilisé pour cibler les enfants et les adolescents qui sont souspondérés (< 5e centile), ont un poids santé (≥ 5e centile et < 85e centile), sont en surpoids (≥ 85e centile et < 95e centile) ou sont obèses (≥ 95e centile).

clinique

Jugement

donner l’impression de grandir selon un centile plus faible pendant les six premiers mois de vie, et plus rapidement pendant les six mois suivants.

Marcellin, âgé de 2 ans, est trisomique et se situe au-dessus du 97e centile pour son poids. Comment ce résultat devrait-il être interprété ?

Examen clinique : anamnèse et examen physique

155

l’enfant touchent la toise ou une autre surface plane verticale FIGURE 4.6. Elle vérie si les genoux sont pliés, si le dos est voûté ou si les talons sont levés, et elle corrige la situation, le cas échéant. CONSEIL CLINIQUE

Les tableaux muraux et les barres horizontales « ip-up » montés sur des balances ne doivent pas être utilisés pour mesurer la hauteur des enfants (PENS, 2014). Ces appareils ne sont pas stables et ne maintiennent pas un angle droit avec la règle verticale, ce qui empêche une mesure précise et able.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Il est maintenant recommandé de mesurer l’épaisseur du pli cutané pour surveiller la croissance des enfants ayant des besoins particuliers.

Longueur du nourrisson et de l’enfant en décubitus dorsal La longueur, aussi désignée par longueur en décubitus dorsal, fait référence aux mesures prises lorsque l’enfant est couché. L’inrmière doit mesurer la longueur en décubitus dorsal de tous les enfants âgés de 24 mois ou moins, ou ne pouvant se tenir debout seul. Comme le nourrisson est normalement en position échie, l’inrmière doit étendre complètement son corps : 1) en tenant la tête dans le plan médian du corps ; 2) en tenant les genoux ensemble doucement ; 3) en appuyant sur les genoux jusqu’à ce que les jambes soient entièrement étendues et à plat contre la table FIGURE 4.7. Une mesure able est obtenue en utilisant une toise pédiatrique. L’inrmière appuie la tête du nourrisson à une extrémité de la toise, et les talons contre l’autre extrémité.

Poids L’inrmière mesure le poids au moyen d’une balance à éau ou électronique correctement calibrée, précise et able. Avant de peser l’enfant, l’inrmière équilibre la balance en la mettant à zéro et en vériant bien si la marque de la balance coïncide exactement avec le zéro.

Les mesures du poids doivent être effectuées dans une salle où la température est confortable. De la naissance à 36 mois, il faut peser les enfants nus. Les enfants plus âgés sont généralement pesés avec leur petite culotte ou une tunique légère. Si l’enfant doit être pesé avec un vêtement ou un appareil comme une prothèse, l’inrmière inclut ce renseignement dans la mesure du poids. Lorsqu’une mesure précise est nécessaire, l’enfant devrait être pesé indépendamment par deux inrmières.

Prise du poids du nourrisson et de l’enfant en décubitus dorsal Les enfants soumis à une mesure de la longueur en décubitus dorsal sont généralement pesés sur un pèse-bébé, en position allongée ou assise. Lorsque l’inrmière pèse un enfant, elle doit placer une main légèrement au-dessus du corps du nourrisson pour l’empêcher de tomber accidentellement FIGURE 4.8A, ou elle doit se tenir près de l’enfant, prête à prévenir la moindre chute FIGURE 4.8B.

Épaisseur du pli cutané et circonférence du bras Les mesures du poids et de la stature ne permettent pas de distinguer le tissu adipeux des muscles. L’épaisseur du pli cutané est une mesure pratique de l’adiposité corporelle permettant d’assurer un suivi de la croissance des enfants qui ont des besoins particuliers, comme les enfants dénutris. Elle s’effectue au moyen d’une pince spécialement conçue à cette n. Les endroits les plus courants

A

B

FIGURE 4.6 Position adéquate pour la mesure de la taille de l’enfant

156

Partie 2

Évaluation clinique

FIGURE 4.7 A Mesures du périmètre crânien, du tour de poitrine et de l’abdomen, et mesure de la longueur en décubitus dorsal. B Méthode de mesure du nourrisson en décubitus dorsal.

clinique

affecter l’emplacement de la circonférence maximale, l’inVladimir est âgé de deux ans et demi. Son état de firmière effectue plus d’une conscience est altéré en raison d’une encéphalite mesure à partir de plusieurs herpétique. Vous devez absolument le peser pour points au-dessus des sourcils pouvoir calculer la dose de médicament à admipour obtenir le résultat le plus nistrer, mais il refuse de se coucher sur la balance précis. À cette n, une bande pour nourrisson, tentant de se jeter en bas. Il est de papier ou de métal souple incapable de se tenir debout sur la balance vertiest préférable à un ruban de cale. Son père n’arrive pas à le calmer. L’utilisation tissu, car ce dernier peut s’étide la balance métabolique est impossible. Quelle rer et produire des mesures astuce pourriez-vous utiliser pour obtenir le poids inférieures à la réalité. Pour de Vladimir dans un court délai ? une précision optimale, l’inrmière utilise des appareils gradués en dixièmes de centimètre, car les paliers des courbes de centiles ne valent que 0,5 cm. Martial, âgé de L’inrmière indique la mesure du périmètre 5 mois, est d’origine crânien sur la courbe de croissance appropriée. En haïtienne. Il pèse 10 kg général, le périmètre crânien et le tour de poitrine et se situe au-dessus sont égaux entre l’âge de 1 et 2 ans. Pendant du 97e centile sur la l’enfance, le tour de poitrine dépasse le périmètre courbe de croissance. crânien d’environ 5 à 7 cm. Vous constatez que la mère le nourrit au sein. 4.3.3 Évaluation de l’état nutritionnel Nommez au moins 4 questions pertinentes Historique alimentaire et apport quotidien à poser à la mère pour Les prols de consommation alimentaire des documenter l’apport enfants ont changé au cours des dernières années. alimentaire de Martial. La prévalence du surpoids et de l’obésité chez les enfants et les adolescents a signicativement augmenté.

Jugement

A

clinique

Jugement

B

FIGURE 4.8 A Nourrisson sur un pèsebébé. B Trottineur sur un pèse-bébé. (Noter la présence de l’inrmière pour prévenir les chutes.)

de mesure de l’épaisseur du pli cutané sont le triceps, le pli sous-scapulaire, le pli supra-iliaque, l’abdomen et la partie supérieure de la cuisse. Pour garantir la abilité maximale de la mesure, il faut respecter la procédure exacte et noter la moyenne d’au moins deux mesures au même endroit. La circonférence du bras est une mesure indirecte de la masse musculaire. Elle obéit à la même procédure que la mesure de l’épaisseur du pli cutané à ceci près que le point médian est calculé à l’aide d’un ruban à mesurer. L’inrmière place le ruban verticalement, le long de la partie postérieure du bras, contre l’acromion et l’olécrâne ; la moitié de la longueur mesurée correspond au point médian. Cependant, les centiles ne sont pas des valeurs standard ou normatives, puisque les valeurs comprises entre les 5e et 95e centiles ne sont pas des intervalles de valeurs normales.

La connaissance de l’alimentation de l’enfant est un élément essentiel de l’évaluation nutritionnelle. Le Guide alimentaire canadien décrit la consommation alimentaire recommandée pour les différents groupes d’âge de la population. Néanmoins, c’est aussi un des facteurs les plus difciles à évaluer. En effet, les gens ont souvent de la difculté à se rappeler avec précision ce qu’ils ont mangé et bu, en particulier les quantités consommées. De plus, l’inrmière peut avoir du mal à comprendre le type d’aliments consommés par des personnes issues d’autres cultures. Malgré ces obstacles, l’évaluation alimentaire demeure une

Comme valeurs de référence des normes de croissance de l’enfant, il est possible de se référer aux données fournies par l’OMS (www.who.int/ childgrowth/standards/fr), notamment pour le périmètre brachial ainsi que pour l’épaisseur du pli cutané tricipital et du pli cutané sousscapulaire.

Périmètre crânien L’infirmière mesure le périmètre crânien des enfants âgés de moins de 36 mois et celui de tout enfant dont la taille de la tête est problématique. La mesure doit être effectuée sur la circonférence la plus large, soit habituellement légèrement au-dessus des sourcils et du pavillon des oreilles, et à la proéminence occipitale de l’arrière du crâne FIGURE 4.9. Puisque la morphologie de la tête peut

FIGURE 4.9 de la tête

Mesure de la circonférence

Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

157

4

composante importante de l’examen de l’enfant. Pour tous les enfants chez qui un problème alimentaire ou un problème lié à une cause alimentaire (p. ex., une anémie, de l’obésité, un décit ou une carence vitaminique, etc.) est soupçonné, une évaluation spécique de la nutrition est indiquée. CONSEIL CLINIQUE

Les pratiques culturelles sont décisives dans la préparation des aliments, et l’inrmière doit rééchir aux questions et aux jugements durant le counseling. Par exemple, légumes, légu­ mineuses et féculents abondent dans les cuisines hispanique, africaine et amérindienne, et fournissent les acides aminés essentiels même si la quantité de viande ou de protéines laitières est faible.

Encadré 4.1W : Exemples de questions à poser au moment de l’évaluation nutritionnelle.

MS section 4 « Méthodes liées aux signes vitaux » Méthodes de soins 1 (Lemire et Perreault, 2016).

Toute évaluation nutritionnelle doit commencer par des questions sur l’historique alimentaire. Ces questions particulières varient en fonction de l’âge de l’enfant. En général, plus l’enfant est jeune, plus l’historique doit être précis et détaillé. L’aperçu qui en résulte peut servir à évaluer la fréquence et la qualité alimentaires. L’historique doit également concerner les aspects nanciers et culturels qui inuent sur le choix et la préparation des aliments. La méthode la plus courante, et sans doute la plus facile, d’évaluer l’apport quotidien est le journal alimentaire de 24 heures. L’enfant ou le parent doit se remémorer tous les aliments consommés dans les 24 dernières heures, ainsi que les quantités approximatives. Le rappel alimentaire de 24 heures est une méthode optimale s’il représente un apport quotidien typique. Une difculté inhérente au rappel alimentaire quotidien est l’incapacité des membres de la famille à se souvenir exactement des aliments consommés et à estimer précisément les portions. Pour plus d’exactitude, il est recommandé d’utiliser des modèles alimentaires et de poser plus de questions. Pour améliorer la abilité du rappel quotidien, les membres de la famille peuvent tenir un journal alimentaire dans lequel ils rapporteront chaque aliment et chaque liquide consommés pendant quelques jours. Dans la plupart des cas, un compte rendu de trois jours (deux jours de la semaine plus un jour de n de semaine) est représentatif de l’apport quotidien. L’inrmière peut favoriser l’adhésion à cette routine en proposant des tableaux détaillés. Un questionnaire sur la fréquence alimentaire renseigne sur la fréquence quotidienne, hebdomadaire ou mensuelle à laquelle un enfant consomme certains aliments appartenant à divers groupes alimentaires. Un tel outil offre plutôt un aperçu qualitatif général, mais il a l’avantage d’éviter les rappels concernant une journée typique. Il peut être particulièrement utile au moment de vérier un historique ou un journal alimentaire .

Examen physique lié à l’évaluation nutritionnelle C Les valeurs normales des signes vitaux sont présen­ tées dans l’annexe C, Valeurs normales des signes vitaux.

158

Partie 2

L’examen physique permet d’obtenir beaucoup de renseignements sur les carences nutritionnelles générales, particulièrement pendant l’inspection de la peau, des cheveux, des dents, des gencives, des lèvres, de la langue et des yeux TABLEAU 4.4. Les cheveux, la peau et la bouche sont vulnérables en raison du renouvellement rapide du tissu

Évaluation clinique

épithélial et muqueux. Cependant, ces signes cliniques ne permettent pas de diagnostiquer de manière précise le décit d’un nutriment en particulier, et les signes suspects doivent être conrmés par des données alimentaires et biochimiques. De plus, l’examen physique n’indique pas quels sont les enfants exposés à un risque de décit ou d’excédent.

Analyse des résultats et counseling Lorsque l’inrmière recueille les données nécessaires à une évaluation nutritionnelle approfondie, elle analyse les résultats et planie en conséquence un counseling adéquat. À partir des données recueillies durant l’anamnèse et l’examen physique, elle détermine si l’enfant est : 1) mal nourri ; 2) exposé à un risque de malnutrition ; ou 3) bien nourri et doté de réserves sufsantes. L’inrmière analyse le journal alimentaire quotidien en vériant la variété et les quantités d’aliments suggérés selon le Guide alimentaire canadien. Par exemple, si la liste n’inclut aucun légume, elle doit s’informer plutôt que de présumer que l’enfant n’aime pas les légumes, car il se peut simplement qu’aucun ne lui ait été proposé ce jour-là. Par ailleurs, elle doit examiner les renseignements en considérant l’aspect culturel et les ressources nancières de la famille.

4.3.4

Mesures physiologiques

Les mesures physiologiques (signes vitaux) incluent la température, le pouls, la respiration, la pression artérielle et la saturation pulsée en oxygène. L’inrmière compare chaque résultat physiologique avec les valeurs normales de ce groupe d’âge et les mesures prises lors des visites médicales précédentes. Par exemple, une augmentation de la pression artérielle isolée peut indiquer un événement stressant dans la vie de l’enfant et ne pas indiquer une hypertension si les lectures lors des visites précédentes étaient dans les limites normales. La plupart des interventions auxquelles sont soumis les enfants et les adolescents se déroulent presque de la même manière qu’avec les adultes. Cependant, certaines précautions doivent être prises dans le cas des enfants d’âge préscolaire an d’atténuer leurs craintes et permettre de procéder à un examen efcace ENCADRÉ 4.9. Pour obtenir les meilleurs résultats pendant la mesure des signes vitaux du nourrisson, l’inrmière doit suivre les étapes suivantes : 1. compter les respirations (avant de déranger le nourrisson) ; 2. prendre le pouls et la pression artérielle ; 3. mesurer la température

MS section 4

C .

Si l’enfant bouge ou pleure durant la prise des signes vitaux, elle notera ce comportement.

TABLEAU 4.4

Examen physique lié à l’évaluation nutritionnelle

INDICES D’UNE NUTRITION ADÉQUATE

INDICES D’UNE NUTRITION CARENCÉE OU EXCESSIVE

CARENCE OU EXCÈS DE NUTRIMENT POSSIBLEa

• Valeur < 5e ou > 95e centile de la croissance • Absence ou retard des poussées de croissance ; gain pondéral médiocre

• Protéines, calories, lipides et autres nutriments essentiels, en particulier vitamine A, pyridoxine, niacine, calcium, iode, manganèse, zinc

• Gain pondéral excessif

• Excès de calories

• Retard du développement sexuel

• Excès de vitamines A et D

• Lisse, légèrement sèche au toucher

• Durcissement et présence de squames

• Vitamine A

• Élastique et ferme

• Dermite séborrhéique

• Excès de niacine

• Absence de lésions

• Sécheresse, rugosité, pétéchies

• Riboavine

• Couleur adéquate selon le contexte génétique

• Guérison tardive des plaies

• Vitamine C

• Dermite squameuse sur les surfaces exposées

• Riboavine, vitamine C, zinc

• Peau ridée, asque

• Niacine

• Lésions en croûte autour des orices, surtout les narines

• Protéines, calories, zinc

• Prurit

• Excès de vitamine A, de riboavine, de niacine

• Turgescence médiocre

• Eau, sodium

• Œdème

• Protéines, thiamine ; excès de sodium

• Teint jaune (ictère)

• Vitamine B12 ; excès de vitamine A, de niacine

• Dépigmentation

• Protéines, calories

• Pâleur (anémie)

• Pyridoxine, acide folique, vitamines B12, C et E (nourrissons nés avant terme), fer ; excès de vitamine C, de zinc

• Paresthésie

• Excès de riboavine

• Filamenteux, friables, ternes, ns

• Protéines, calories

• Alopécie

• Protéines, calories, zinc

• Dépigmentation

• Protéines, calories, cuivre

• Saillies autour des follicules pileux

• Vitamine C

• Modelage uniforme, saillie occipitale, symétrie du visage

• Ramollissement des os crâniens, saillie des os frontaux, crâne plat et déprimé vers le milieu

• Vitamine D

• Fermeture de la fontanelle postérieure vers 2 mois et de la fontanelle antérieure vers 18 mois

• Fusion tardive des sutures

• Vitamine D

• Bosse dure, sensible dans l’occiput

• Excès de vitamine A

• Céphalées

• Excès de thiamine

• Hypertrophie de la thyroïde, qui peut être très visible

• Iode

Croissance générale • 5e-95e centiles de la taille, du poids et du périmètre crânien • Gain constant avec poussées de croissance prévues pendant l’enfance et l’adolescence • Développement sexuel adéquat en regard de l’âge

4

Peau

Cheveux • Lustrés, soyeux, forts, élastiques

Tête

Cou • Thyroïde invisible, palpable dans la ligne médiane

Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

159

TABLEAU 4.4

Examen physique lié à l’évaluation nutritionnelle (suite)

INDICES D’UNE NUTRITION ADÉQUATE

INDICES D’UNE NUTRITION CARENCÉE OU EXCESSIVE

CARENCE OU EXCÈS DE NUTRIMENT POSSIBLEa

• Clairs, foncés

• Durcissement et desquamation de la cornée et de la conjonctive

• Vitamine A

• Bonne vision nocturne

• Cécité nocturne

• Vitamine A

• Conjonctive rose, brillante

• Brûlure, démangeaison, photophobie, cataracte, vascularisation cornéenne

• Riboavine

• Membrane calciée (diminution de l’acuité auditive)

• Excès de vitamine D

• Irritation et ssures de l’angle nasal

• Riboavine ; excès de vitamine A

• Lèvres lisses, humides, plus foncées que la peau

• Fissures et inammation aux coins

• Riboavine ; excès de vitamine A

• Gencives fermes, rose corail, tachetées

• Gencives spongieuses, friables, enées, rouge bleuâtre ou noires, qui saignent facilement

• Vitamine C

• Membranes muqueuses rose foncé, lisses, humides

• Stomatite

• Niacine

• Langue : texture rugueuse, aucune lésion, sensation du goût

• Glossite

• Niacine, riboavine, acide folique

• Dysgueusie

• Zinc

• Dents : couleur blanche uniforme, lisses, intactes

• Taches brunes, crevasses, ssures

• Excès de uor

• Défaut de l’émail

• Vitamines A, C et D, calcium, phosphore

• Caries

• Excès de glucides

• Nourrissons : forme presque circulaire

• Partie inférieure de la cage thoracique déprimée

• Vitamine D

• Enfants : croissance du diamètre latéral proportionnelle à celle du diamètre antéropostérieur

• Saillie importante du sternum

• Vitamine D

• Hypertrophie des jonctions costochondrales

• Vitamines C et D

• Développement tardif

• Voir sous Croissance générale ; en particulier, zinc

• Palpitations

• Thiamine

• Pouls rapide

• Potassium ; excès de thiamine

• Arythmie

• Magnésium, potassium ; excès de niacine, de potassium

• P.A. élevée

• Excès de sodium

• P.A. basse

• Thiamine ; excès de niacine

Yeux

Oreilles • Membrane tympanique mobile Nez • Lisse, angle nasal intact Bouche

Thorax

• Jonctions costochondrales lisses • Développement mammaire normal selon l’âge Système cardiovasculaire

• Pouls et pression artérielle (P.A.) dans les limites normales

160

Partie 2

Évaluation clinique

TABLEAU 4.4

Examen physique lié à l’évaluation nutritionnelle (suite)

INDICES D’UNE NUTRITION ADÉQUATE

INDICES D’UNE NUTRITION CARENCÉE OU EXCESSIVE

CARENCE OU EXCÈS DE NUTRIMENT POSSIBLEa

• Jeunes enfants : forme cylindrique et en saillie

• Distension, accidité, musculature insufsante

• Protéines, calories

• En saillie, large

• Excès de calories

• Enfants plus âgés : abdomen plat

• Ventre rebondi

• Vitamine D

• Élimination normale des selles

• Diarrhée

• Niacine ; excès de calcium, potassium

• Constipation

• Excès de vitamine C

• Flaccidité, faiblesse, atrophie généralisée

• Protéines, calories

• Faiblesse, douleur, crampes

• Thiamine, sodium, chlorure, potassium, phosphore, magnésium ; excès de thiamine

• Contractions musculaires, tremblements musculaires

• Magnésium

• Paralysie musculaire

• Excès de potassium

• Colonne rachidienne : courbes cervi­ cale et lombaire (courbe double en S)

• Cyphose, lordose, scoliose

• Vitamine D

• Membres symétriques ; jambes droites avec peu d’inclinaison

• Inclinaison des membres, genu valgum (genou cagneux)

• Vitamine D, calcium, phosphore

• Hypertrophie de l’épiphyse

• Vitamines A et D

• Saignement aux articulations et aux muscles, enure des articulations, douleur

• Vitamine C

• Épaississement du cortex des os longs avec douleur et fragilité, bosses sensibles et dures sur les membres

• Excès de vitamine A

• Ostéoporose des os longs

• Calcium ; excès de vitamine D

• Comportement : enfant alerte, réaction aux stimulus, stabilité sur le plan affectif

• Enfant apathique, irritable, léthargique, avachi (parfois craintif, anxieux, somnolent, mentalement lent, confus)

• Thiamine, niacine, pyridoxine, vitamine C, potassium, magnésium, fer, protéines, calories ; excès de vitamines A et D, thiamine, acide folique, calcium

• Absence de tétanie, convulsions

• Expression faciale comparable à un masque, trouble du langage, rire involontaire

• Thiamine, pyridoxine, vitamine D, calcium, magnésium ; excès de manganèse • Excès de phosphore (par rapport au calcium)

Abdomen

4

Appareil musculosquelettique • Muscles fermes, bien développés, force égale des deux côtés

• Articulations exibles, amplitude du mouvement totale, aucune douleur ni raideur Système neurologique

• Convulsions



• Système nerveux périphérique intact

• Toxicité du système nerveux périphérique (démarche instable, engourdissement des pieds et des mains, maladresse dans les activités de motricité ne)

• Excès de pyridoxine

• Réexes intacts

• Réexes tendineux moindres ou absents

• Thiamine, vitamine E

moins de l’indication explicite d’un excès, tous les éléments listés désignent une carence de ces nutriments.

Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

161

Mesure de la température : sièges et technique

Soutien inrmier ENCADRÉ 4.9

Atténuer les craintes des jeunes enfants

Les trottineurs et les enfants d’âge préscolaire craignent les interventions invasives, car leurs limites corporelles sont encore mal dénies. L’inrmière doit donc : • éviter, dans la mesure du possible, les interventions invasives comme la prise de la température rectale ; • éviter d’utiliser le mot « prendre » lorsqu’elle mesure les signes vitaux, car les jeunes enfants interprètent les mots littéralement et pourraient s’imaginer qu’elle leur enlèvera leur température ou d’autres fonctions ; employer plutôt une phrase comme : Je voudrais savoir si tu es chaud.

Température

Encadré 4.2W : Autres voies de mesure de la température pour les enfants malades.

éactivation des connaissances Quelle est la différence entre l’hyperthermie et la èvre ?

CE QU’IL FAUT RETENIR

La température auriculaire est une mesure imprécise de la température corporelle.

La prise de la température sert à mesurer la teneur en chaleur de l’organisme. Bien que certains facteurs tels que l’heure de la journée et l’activité physique puissent inuencer la température corporelle, la température centrale demeure relativement constante malgré les uctuations importantes du milieu externe. Lorsque la température d’un enfant change, les récepteurs de la peau, de la moelle épinière et du cerveau réagissent de façon à rétablir une température normale. En pédiatrie, il n’y a pas de consensus sur les valeurs normales de la température. En ce qui a trait aux températures rectales, une valeur comprise entre 36,6 et 38 °C est acceptable lorsque la perte et la production de chaleur sont équilibrées (SCP, 2017). Dans le cas des nouveau-nés, l’intervalle souhaitable de la température corporelle va de 36,5 à 37,6 °C. Chez le nouveau-né, qui a plus de difculté à réguler sa température, les mesures servent à vérier que la thermorégulation est adéquate, et pas seulement s’il y a de la èvre ; les mesures de la température de chaque enfant doivent donc être soigneusement analysées en fonction de l’objectif et du milieu.

TABLEAU 4.5

Chez les enfants en bonne santé, il est possible de mesurer la température en plusieurs endroits du corps : la bouche, le rectum, les aisselles, le conduit auditif, la membrane tympanique, l’artère temporale ou la peau TABLEAU 4.5. Si l’enfant est malade, d’autres sièges possibles de mesure de la température sont envisageables dans certains cas. L’artère pulmonaire, étant la plus proche de l’hypothalamus, reète mieux la température centrale (Batra, Saha et Faridi, 2012). Bien qu’elle soit la plus précise, elle est aussi très invasive et devrait être utilisée uniquement en contexte de réanimation, lors d’une intervention chirurgicale ou aux soins intensifs. Les autres sites utilisés sont l’œsophage distal, la vessie et le nasopharynx. Toutes ces méthodes sont invasives et difciles à utiliser dans la pratique clinique . Le facteur qui inue le plus sur la précision de la température mesurée est la technique de mesure. Le TABLEAU 4.6 décrit en détail les méthodes de prélèvement de la température. Pour connaître les données probantes sur les méthodes de prise de la température, il convient de se reporter à l’ENCADRÉ 4.10.

Appareils de mesure de la température Les appareils de mesure de la température les plus souvent utilisés pour les nourrissons et les enfants sont les suivants : • Thermomètres intermittents électroniques : Ils mesurent la température à partir de la bouche, du rectum et des aisselles, et ils servent principalement d’indicateurs diagnostiques. • Thermomètres à infrarouge : Ils mesurent la température en recueillant le rayonnement thermique d’un siège précis (p. ex., le conduit auditif). Ils servent généralement de méthode de dépistage et, dans certains cas, d’indicateurs diagnostiques. • Thermomètres continus électroniques : Ils mesurent la température pendant l’administration d’une anesthésie générale, d’un traitement de l’hypothermie ou de l’hyperthermie, et dans d’autres situations qui nécessitent une surveillance continue.

Voies recommandées de mesure de la température selon l’âge de l’enfant

ÂGE

VOIES RECOMMANDÉES

0-2 ansa

1) Rectale (indiquéeb)

2) Axillaire (dépistagec des enfants peu vulnérables)

2-5 ans

1) Rectale (indiquée)

2) Axillaire, tympanique (ou de l’artère temporale en milieu hospitalier) (dépistage)

Plus de 5 ans

1) Orale (indiquée)

2) Axillaire, tympanique (ou de l’artère temporaleen milieu hospitalier) (dépistage)

a

Avant l’âge de un mois, la température rectale est contre-indiquée en raison des risques de perforation de la muqueuse rectale . La température axillaire est alors privilégiée. b La voie indiquée est celle qui est privilégiée pour prendre la température. c La mesure de dépistage permet de vérier si l’enfant fait de la èvre, mais étant moins able, elle ne peut servir au diagnost ic. Source : Adapté avec autorisation de Société canadienne de pédiatrie (2000, 2017). La mesure de la température en pédiatrie. Tous droits réservés.

162

Partie 2

Évaluation clinique

Techniques de soins TABLEAU 4.6

Prendre la température selon le siège et les méthodes de mesure adaptés

SIÈGE ET MESURE

PRÉCAUTIONS ET REMARQUES

Bouche : buccale • Placer l’extrémité du thermomètre sous la langue, dans la poche sublinguale postérieure droite ou gauche, mais pas devant la langue. • Demander à l’enfant de tenir la bouche fermée, sans mordre le thermomètre.

• Les sucettes thermomètres permettent de mesurer la température intrabuccale ou supralinguale ; elles sont commercialisées, mais elles ne bénécient pas de l’appui des données probantes. • Plusieurs facteurs affectent la température buccale : – l’alimentation et la mastication ; – la consommation de boissons chaudes ou froides ; – la respiration par la bouche ; – la température ambiante.

Aisselle : axillaire • Placer l’extrémité du thermomètre sous le bras, au centre de l’aisselle, et tenir près de la peau, mais pas des vêtements. • Tenir le bras de l’enfant fermement contre le côté.

• La température axillaire peut être inuencée par : – une irrigation périphérique insufsante (ce qui fait diminuer les valeurs obtenues) ; – les vêtements ou l’emmaillotement ; – l’utilisation de tables à infrarouge ; – la quantité de graisses brunes chez les nouveau-nés soumis à un stress dû au froid (ce qui augmente les valeurs obtenues). • Cette méthode a comme avantages de permettre d’éviter les interventions invasives et d’éliminer le risque de perforation rectale.

Oreille : auriculaire • Insérer une petite sonde à infrarouge au fond du conduit pour permettre aux capteurs d’obtenir une mesure de la température.

• La taille de la sonde (8 mm pour la plupart) peut inuencer l’exactitude du résultat. Chez les jeunes enfants, cela peut être problématique en raison du petit diamètre du conduit. • La manière convenable de placer l’oreille pendant l’examen prête à controverse : la question est de savoir s’il faut tirer le pavillon de l’oreille comme c’est le cas pendant une otoscopie.

Rectum : rectale • Insérer l’extrémité bien lubriée dans le rectum jusqu’au plus 1,5 cm (nourrisson) ou 2,5 cm (enfant).

• Il est nécessaire de couvrir le pénis, car l’intervention peut stimuler la miction.

• Tenir le thermomètre près de l’anus. • Placer l’enfant sur le côté, allongé sur le dos ou sur le ventre (p. ex., sur le dos, les genoux échis vers l’abdomen). Artère temporale • Placer la sonde d’un capteur à infrarouge sur la tempe (dans le prolongement du sourcil).

• L’artère temporale est la seule artère sufsamment proche de la surface cutanée pour permettre une mesure able de la température. • Cette méthode constitue un bon moyen de dépistage chez les enfants de un à quatre ans, mais elle ne doit pas être utilisée pour prendre des décisions diagnostiques.

Sources : Adapté de Falzon, Grech, Caruana et al. (2003) ; SCP (2017).

Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

163

4

Pratique fondée sur des résultats probants ENCADRÉ 4.10

Mesure de la température en pédiatrie

QUESTION CLINIQUE

Pour les nourrissons et les enfants, quelle est la méthode la plus précise de mesure de la température ? RÉSULTATS PROBANTS

• Stratégies de recherche : la recherche a été faite de façon à repérer uniquement des articles de recherche clinique publiés sur le sujet. Les critères de sélection étaient la langue anglaise, des publications datant des 15 dernières années, des populations de nourrissons et d’enfants, des comparaisons avec des normes de référence : thermométrie rectale. • Bases de données utilisées : PubMed, Cochrane Collaboration, MD Consult, Joanna Briggs Institute, National Guideline Clearinghouse, TRIP Database Plus, PedsCCM, BestBETs. ANALYSE CRITIQUE ET SYNTHÈSE DES DONNÉES

Température rectale La mesure de la température rectale reste la norme de référence pour le diagnostic précis de la èvre chez les nourrissons et les enfants (Fortuna, Carney, Macy et al., 2010 ; Ward, 2017). Cependant, cette intervention est plus invasive et elle est contre-indiquée pour les nouveau-nés de moins de un mois en raison des risques de lésions de la muqueuse rectale (Batra, Saha et Faridi, 2012). Cette voie est également contre-indiquée chez les enfants qui viennent de subir une intervention chirurgicale rectale, ceux qui ont la diarrhée ou des lésions anorectales, et ceux qui reçoivent une chimiothérapie, car le traitement anticancéreux affecte généralement les muqueuses et entraîne une neutropénie (Barnason, Williams, Proehl et al., 2012). Température buccale La température buccale (T°B) indique des variations rapides de la température corporelle centrale, mais la précision de la mesure peut être plus problématique qu’avec la température rectale (Batra et al., 2012). Cependant, il est possible de mesurer avec précision la température dans la bouche (pour les enfants de plus de quatre ou cinq ans) lorsque la technique appropriée est utilisée (Ward, 2017). Elle est contre-indiquée pour les enfants dont l’état de conscience est altéré, pour ceux qui reçoivent de l’oxygène, qui respirent par la bouche, qui ont une inammation d’une muqueuse, qui viennent de subir une intervention chirurgicale ou qui ont un traumatisme à la bouche (El-Radhi et Barry, 2006 ; Ward et Parcells, 2009). L’effet de la température ambiante et l’ingestion récente par la bouche sont certains des désavantages de la T°B (Ward, 2017). Température axillaire Pour la température axillaire, les résultats ne sont pas constants et sont imprécis chez les nouveau-nés et les nourrissons âgés de plus de un mois (Stine, Flook et Vincze, 2012). Une revue systématique de 20 études a permis de conclure que les mesures axillaires présentaient des variations dans les résultats et ne constituent pas une bonne méthode pour une évaluation précise de la température. Chez les nouveau-nés avec de la èvre, la température axillaire ne doit pas être utilisée de manière interchangeable avec une mesure rectale (Hissink Muller, van Berkel et de Beaufort, 2008). Elle peut servir d’outil de dépistage de la èvre chez les nourrissons (Batra et al., 2012). Température auriculaire Une méta-analyse de 101 études comparant des températures de la membrane tympanique avec des températures rectales chez des enfants a permis de conclure que la méthode tympanique était sujette à une grande variabilité, ce qui limite son application en pédiatrie. D’autres publications continuent de démontrer une faible sensibilité de la thermométrie de l’oreille avec les

164

Partie 2

Évaluation clinique

techniques à infrarouge (Barnason et al., 2012 ; Dodd, Lancaster, Craig et al., 2006 ; Paes, Vermeulen, Brohet et al., 2010). Le diagnostic de la èvre sans foyer identiable d’infection ne doit pas être établi à partir de la thermométrie tympanique, car il ne s’agit pas d’une méthode précise de mesure de la température centrale (Batra et al., 2012 ; Dodd et al., 2006). Température de l’artère temporale La température de l’artère temporale ne permet pas de prévoir une èvre chez les enfants âgés de moins de 3 mois, mais elle peut servir d’outil de dépistage d’une èvre de moins de 38 °C pour les enfants âgés de 3 mois à 4 ans (Fortuna et al., 2010 ; Holzhauer, Reith, Sawin et al., 2009). Cependant, une étude de Batra et Goyal (2013) a révélé que la température de l’artère temporale était mieux corrélée à la température rectale que les mesures axillaires et tympaniques dans un groupe de 50 enfants fébriles âgés de 2 à 12 ans. Une autre étude récente révèle qu’en comparaison de la température rectale, la température temporale était moins précise pour les nourrissons dans les incubateurs que chez les nourrissons dans les berceaux (Syrkin-Nikolau, Johnson, Colaizyet al., 2017). RECOMMANDATIONS POUR LA PRATIQUE INFIRMIÈRE

Aucune région unique ne permet une mesure catégorique de la température corporelle centrale. Des études démontrent que toutes les techniques non invasives ont obtenu de moins bons résultats que la mesure rectale. Les écarts de mesures surestiment les températures plus basses et sous estiment les températures plus élevées par rapport à la mesure rectale. La mesure de l’artère temporale semble être meilleure, mais pas encore idéale (Allegaert, Casteels, van Gorp et al., 2014). Les valeurs des mesures axillaire et tympanique concordent peu avec celles des méthodes plus précises de mesure de la température centrale. Les différences sont plus agrantes lorsque la température augmente, quel que soit l’âge. S’il faut recourir à une méthode précise pour mesurer correctement la température centrale, la température rectale est la plus précise des températures non invasives. Considérant les désagréments que cette méthode occasionne, la température buccale pour les enfants de plus de quatre ans est acceptable. RÉFÉRENCES

Allegaert, K., Casteels, K., van Gorp, I., et al. (2014). Tympanic, infrared skin, and temporal artery scan thermometers compared with rectal measurement in children: A real-life assessment. Curr Ther Res Clin Exp, 76, 34-38. Barnason, S., Williams, J., Proehl, J., et al. (2012). Emergency nursing resource: Non-invasive temperature measurement in the emergency department. J Emergency Nurs, 38 (6), 523-530. Batra, P., et Goyal, S. (2013). Comparison of rectal, axillary, tympanic, and temporal artery thermometry in the pediatric emergency room. Pediatr Emerg Care, 29 (1), 63-66. Batra, P., Saha, A., et Faridi, M.M. (2012). Thermometry in children. J Emerg Trauma Shock, 5 (3), 246-249. Dodd, S.R., Lancaster, G.A., Craig, J.V., et al. (2006). In a systematic review, infrared ear thermometry for fever diagnosis in children nds poor sensitivity. J Clin Epidemiol, 59 (4), 354-357. El-Radhi, A.S., et Barry, W. (2006). Thermometry in paediatric practice. Arch Dis Child, 91(4), 351-356. Fortuna, E.L., Carney, M.M., Macy, M., et al. (2010). Accuracy of non-contact infrared thermometry versus rectal thermometry in young children evaluated in the emergency department for fever. J Emerg Nurs, 36 (2),101-104. Hissink Muller, P.C., van Berkel, L.H., et de Beaufort, A.J. (2008). Axillary and rectal temperature measurements poorly agree in newborn infants. Neonatology, 94 (1), 31-34.

ENCADRÉ 4.10

Mesure de la température en pédiatrie (suite)

Holzhauer, J.K., Reith, V., Sawin, K.J., et al. (2009). Evaluation of temporal artery thermometry in children 3-36 months old. J Spec Pediatr Nurs, 14(4), 239-244. Paes, B.F., Vermeulen, K., Brohet, R.M., et al. (2010). Accuracy of tympanic and infrared skin thermometers in children. Arch Dis Child, 95 (12), 974-978. Stine, C.A., Flook, D.M., et Vincze, D.L. (2012). Rectal versus axillary temperatures: is there a signicant difference in infants less than 1 year of age ? J Pediatr Nurs, 27 (3), 265-270.

L’ ENCADRÉ 4.11 présente une description détaillée des différents thermomètres utilisés pour mesurer la température des nourrissons et des enfants .

Pouls L’inrmière peut prendre le pouls radial des enfants de plus de deux ans de manière satisfaisante.

ENCADRÉ 4.11

Syrkin-Nikolau, M.E., Johnson, K.J., Colaizy, T.T., et al. (2017). Temporal artery temperature measurement in the neonate. Amer J Perinatol, 34 (10), 1026-1031. Ward, M.A. (2017). Patient education: Fever in children (Beyond the basics). UpToDate. Repéré à www.uptodate.com/contents/fever-in-children-beyondthe-basics#H5. Ward, M.A., et Parcells, C.L. (2009). Fever: Pathogenesis and treatment. Dans R.D. Feigin, J.D. Cherry, G.J. Demmler-Harrison et al. (dir.). Feigin and Cherry’s textbook of pediatric infectious diseases (6e éd.). Philadelphie, PA : Saunders Elsevier.

Cependant, avec les nourrissons et les trottineurs, le choc apexien (pouls apical), qui peut être écouté au moyen d’un stéthoscope placé contre la poitrine au niveau de la pointe du cœur, est plus able. Les sièges de la prise du pouls seront présentés un peu plus loin dans ce chapitre FIGURE 4.30. En raison des irrégularités rythmiques, il faut compter le pouls pendant une minute entière chez les

ALERTE CLINIQUE

Les thermomètres en verre et au mercure ne sont plus recommandés à cause des risques de bris et d’intoxication. Les appareils électroniques offrent une plus grande précision et une lecture plus rapide.

Types de thermomètres pour la mesure de la température des nourrissons et des enfants

THERMOMÈTRE ÉLECTRONIQUE

• La température est relevée au moyen d’une composante électronique appelée thermistance montée à l’extrémité d’une sonde en plastique ou en acier inoxydable, reliée à un enregistreur électronique. Un couvert en plastique jetable sert de protection contre les infections. • La mesure de la température apparaît sur un écran numérique en 60 secondes. • La sonde peut être placée dans la bouche, sous l’aisselle ou dans le rectum. Thermomètre numérique • Une sonde est connectée à une puce de microprocesseur qui traduit des signaux en degrés et transmet les mesures de température sur un écran numérique. Le thermomètre électronique buccal est utilisé pour mesurer la température buccale, mais aussi rectale et axillaire. Il est plus précis et plus facile à lire, mais parfois plus coûteux qu’un thermomètre de plastique. THERMOMÈTRE À INFRAROUGE

• Le rayonnement thermique est mesuré à partir de l’aisselle, du conduit auditif ou de la membrane tympanique. • La mesure de la température apparaît sur un écran numérique en une seconde environ. • Il existe trois types de thermomètres auriculaires qui fonctionnent à partir du tympan, du conduit auditif et de l’équilibre de chaleur artérielle dans le conduit auditif. • Ces dispositifs sont souvent appelés à tort thermomètres tympaniques. • Les températures mesurées ainsi reètent la température artérielle (vaisseau sanguin). Capteur de température auriculaire • Bien qu’il s’agisse d’une méthode répandue en pédiatrie, et surtout dans les cliniques ambulatoires, la abilité des thermomètres auriculaires en ce qui a trait aux enfants fébriles constitue toujours un débat.

• La plupart des modèles utilisent des compensations pour les calculs internes, transformant la température auriculaire en des températures buccale ou rectale prétendument équivalentes. Capteur auriculaire • Le capteur auriculaire mesure l’énergie de chaleur infrarouge émanant de l’ouverture du conduit ; il balaie le conduit pour lire la température maximale, puis calcule la température artérielle (corrélation élevée avec la température centrale ou corporelle interne). Il en existe deux tailles : la plus petite est destinée aux nourrissons et aux trottineurs. Capteur axillaire • Le capteur axillaire mesure l’énergie de chaleur infrarouge irradiant de l’aisselle. • Il est possible de les utiliser sur une peau mouillée, dans des incubateurs ou avec des tables à infrarouge, des coussins chauffants ou d’autres sources de chaleur. THERMOMÈTRE DE CONTACT CUTANÉ À CRISTAUX LIQUIDES (THERMOMÈTRE À POINTS CHIMIQUES)

• Ce thermomètre à usage unique, jetable et exible, montre des cercles renfermant chacun un mélange précis de substance chimique dont la couleur change pour mesurer des paliers de température de 0,2 degré. • Il en existe 2 types : – Buccal (1 minute), axillaire (3 minutes) ou rectal (3 minutes) ; la couleur change 10 à 15 secondes après le retrait du thermomètre. – Portable, en usage continu, placé sous l’aisselle ; la température s’afche 2 ou 3 minutes après la mise en place du thermomètre, puis continuellement ; jeter et remplacer toutes les 48 heures.

Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

165

4

16 La coarctation de l’aorte et les autres malformations cardiaques sont décrites dans le chapitre 16, Troubles liés au système cardiovasculaire.

nourrissons et les trottineurs. Pour plus de précision, il faut mesurer la fréquence du choc apexien pendant que l’enfant dort et noter en même temps le comportement de l’enfant. Le TABLEAU 4.7 présente les critères d’évaluation de l’amplitude du pouls. L’inrmière doit comparer le pouls radial avec le pouls fémoral au moins une fois à la naissance pour détecter la présence de problèmes circulatoires, comme la coarctation de l’aorte 16 .

TABLEAU 4.7

Respiration CE QU’IL FAUT RETENIR

Les respirations principalement diaphragmatiques chez le nourrisson permettent à l’inrmière de mesurer la fréquence respiratoire en observant les mouvements abdominaux.

L’inrmière mesure la fréquence respiratoire des enfants de la même manière que chez un client adulte. Cependant, chez les nourrissons, il est plus facile d’observer les mouvements abdominaux, car les respirations sont essentiellement diaphragmatiques. En raison de l’irrégularité des mouvements, l’inrmière les comptera pendant une minute entière pour obtenir une mesure précise.

Pression artérielle La mesure de la pression artérielle (P.A.) par des méthodes non invasives fait partie des mesures systématiques des signes vitaux. Bien qu’il soit plutôt rare d’avoir à la prendre chez les nourrissons, elle doit être mesurée régulièrement chez les enfants affichant des symptômes d’hypertension, les enfants aux services d’urgence ou aux soins intensifs, ceux atteints de pathologies augmentant le risque d’hypertension artérielle, et annuellement chez les enfants âgés de trois ans jusqu’à l’adolescence (National High Blood Pressure Education Program Working Group on High Blood Pressure in Children and Adolescents [NHBPEP], 2004). La surveillance à domicile de la P.A. des enfants et des adolescents est une méthode précieuse d’évaluation et de prise en charge en cas d’hypertension soupçonnée.

GRADE

DESCRIPTION

0

Non palpable

+1

Difcile à palper, liforme, faible, facilement supprimé avec une pression

+2

Difcile à palper, peut être supprimé avec une pression

+3

Facile à palper, difcile à oblitérer avec une pression (normale)

+4

Fort, bondissant, non oblitéré avec une pression

arithmétique des pressions systolique et diastolique. Il s’agit plutôt d’une valeur légèrement inférieure à la moyenne arithmétique calculée à partir de l’une ou l’autre des formules suivantes : 1) P.A.M =

Jugement

clinique

166

Partie 2

Évaluation clinique

P.A. systolique + (2 × P.A. diastolique) 3

Exemple : si la P.A. est de 120/75 mm Hg, donc : P.A.M =

120 + (2 × 75) 3

= 90

2) P.A.M =

P.A. systolique − P.A. diastolique + P.A. diastolique 3

Exemple : si la P.A. est de 120/75 mm Hg, donc :

Dispositifs de mesure La P.A. peut être mesurée au moyen de dispositifs électroniques dotés d’un oscillomètre, ou des techniques doppler. Avec l’oscillométrie, les variations de la pression sont transmises au brassard par la paroi artérielle, et les Naïma est âgée de huit mois. Elle pleure et hurle toujours oscillations sont détectées durant la prise des signes vitaux, ce qui rend impossible par un capteur sensible à l’évaluation des fréquences respiratoire et cardiaque. la pression. Les oscilloMême lorsqu’elle est assise sur ses parents, vous n’y mètres sont munis d’un arrivez pas. Quelle astuce pourriez-vous utiliser pour écran numérique pour la obtenir des résultats ables de pouls et de respiration ? lecture de la P.A. systoa) Attendre qu’elle soit calme dans les bras de ses lique, de la P.A. diastoparents. lique, des pressions b) Prendre le pouls et la respiration lorsqu’elle dort. artérielles moyennes c) Demander à un des parents de le faire à votre place. (P.A.M.) et du pouls. La P.A.M. ne correspond d) La bercer pour la calmer avant de faire la vérication. pas à une moyenne

Évaluation de l’amplitude du pouls

P.A.M =

120 − 75 3

+ 75 = 90

La méthode oscillométrique peut être adéquate pour des mesures de routine chez les nourrissons et les jeunes enfants chez qui la méthode auscultatoire est difcile, mais le NHBPEP (2004) recommande au professionnel de recourir à une mesure auscultatoire s’il obtient une valeur anormale ou élevée avec un appareil oscillométrique. L’échographie doppler convertit en signal sonore les variations de la fréquence des ultrasons causées par le mouvement du sang dans les artères au moyen d’un transducteur présent dans le brassard. Cette technique est utile pour mesurer la pression systolique, mais elle n’est pas able pour la mesure de la pression diastolique.

Sélection du brassard

A

B

Quel que soit le type de technique non invasive retenue, le facteur le plus important pour une mesure précise de la P.A. est l’emploi d’un brassard de taille adéquate (la taille du brassard fait référence à la partie interne gonable, et non à la partie recouverte de tissu). Un des moyens de s’assurer de la taille adéquate du brassard consiste à choisir celui dont la partie gonable a une largeur qui représente au moins 40 % de la circonférence du bras à mi-chemin entre l’olécrâne et l’acromion, et qui couvre 80 % de la circonférence du bras (Jarvis, 2015) FIGURE 4.10 et TABLEAU 4.8. La circonférence d’un membre est un critère de sélection du brassard, car elle tient compte des variations de l’épaisseur du bras et de la quantité de pression requise pour comprimer l’artère. De même, les brassards très étroits ou trop larges affectent la précision des mesures de la P.A. Si la taille du brassard est trop petite, la lecture de l’appareil est faussement élevée. Si le brassard est trop large, la lecture est faussement basse 1 . Lorsque d’autres sièges de mesure sont utilisés, les relevés de la P.A. par des techniques non invasives peuvent varier. En général, la pression systolique aux membres inférieurs (cuisse ou mollet) est plus élevée que la pression aux membres supérieurs, alors que la P.A. systolique au mollet est supérieure à celle de la cuisse (Schell, Briening, Lebet et al., 2011) FIGURE 4.11 2 .

Mesure et interprétation Le NHBPEP (2004) recommande de commencer les mesures de P.A. dès l’âge de trois ans ou plus jeune si l’enfant a des problèmes de santé ou des antécédents particuliers ENCADRÉ 4.12. Par souci d’exactitude, la mesure et l’interprétation de la P.A. des nourrissons et des trottineurs doivent être effectuées avec une attention particulière, car : • la taille des membres varie et le choix du brassard doit être adapté à la circonférence des membres ; • la pression excessive dans le pli du coude affecte les bruits de Korotkoff ; • les enfants deviennent facilement anxieux, ce qui fait augmenter la P.A. ; • les valeurs de la P.A. changent avec l’âge et la croissance. Chez les enfants et les adolescents, les valeurs standard de la P.A. sont fondées sur le sexe, l’âge et la taille, offrant ainsi une répartition plus précise de la P.A. Cette approche évite une classication erronée des enfants très grands ou très petits de taille. Les tableaux révisés de la P.A. comprennent dorénavant les centiles du 50 e, 90e, 95e et 95e + 12 mm Hg en fonction du sexe, de l’âge et de la

4

FIGURE 4.10 Détermination de la taille adéquate du brassard – A La chambre pneumatique qui encercle le bras doit couvrir de 80 à 100 % de la circonférence. Sa largeur doit être égale à environ 40 % de la circonférence du bras, mesurée à mi-chemin entre l’olécrâne et l’acromion. B La pression artérielle doit être mesurée dans la fosse cubitale, à la hauteur du cœur. Il faut soutenir le bras. La cupule du stéthoscope est placée sur le pouls de l’artère brachiale, de manière proximale et médiale par rapport à la fosse cubitale, et sous l’extrémité inférieure du brassard.

taille. Aux ns d’utilisation des ALERTES CLINIQUES tableaux dans la pratique clinique, il convient de garder à 1 L’inrmière ne doit pas choisir le brassard uniquel’esprit que le centile de la taille ment en fonction de l’âge de l’enfant (p. ex., un est déterminé à l’aide des courbes de croissance des normes de brassard pour nourrissons peut être trop petit pour l’OMS. Les P.A. systolique et certains nourrissons). S’il n’y a pas de brassard de la diastolique mesurées chez l’en- bonne taille, elle en choisira un plus grand (et non plus fant sont comparées avec les petit) ou elle mesurera la P.A. à un autre endroit dont la valeurs inscrites dans le tableau taille convient mieux à celle du brassard. (garçons et lles) selon l’âge et le 2 L’inrmière doit comparer la P.A. des membres centile de la taille de l’enfant. supérieurs avec celle des membres inférieurs au moins L’enfant est normotendu si la une fois pour détecter des anomalies, comme la P.A. systolique ou diastolique est coarctation de l’aorte, auquel cas la pression dans inférieure au 90e centile. Chez les membres inférieurs est plus basse que celle les enfants de moins de 13 ans, des membres supérieurs. l’hypertension est définie comme une P.A. systolique ou diastolique supérieure ou égale au 95e centile selon les nouveaux tableaux sur le sexe, l’âge et la taille. Le niveau de la P.A. désignant l’hypertension de stade 2 a également été changé pour une P.A. supérieure ou égale au 95e centile + 12 mm Hg. Pour les adolescents âgés de 13 ans et plus, il y a un changement important dans la dénition de l’hypertension. Un examen des nouveaux tableaux de P.A. pédiaéactivation triques indique que le 90e centile chez les adolesdes connaissances cents de 13 ans et plus est proche d’une P.A. systolique de 120 mm Hg et d’une P.A. diastolique Qu’est-ce que les bruits inférieure à 80 mm Hg. De plus, le 95e centile chez de Korotkoff ? les adolescents de 13 ans et plus se rapproche de En plus de l’âge et de 130 mm Hg. Par conséquent, les nouveaux seuils l’anxiété, nommez quatre de la P.A. chez les adultes sont utilisés pour dénir autres facteurs inuant sur l’hypertension chez les adolescents de 13 ans et la pression artérielle. plus. Aussi, an d’être compatible avec la nouvelle Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

167

TABLEAU 4.8

Dimensions recommandées des brassards de mesure de la pression artérielle

GROUPE D’ÂGE

a b

LARGEUR (cm)

LONGUEUR (cm)

CIRCONFÉRENCE MAXIMALE DU BRAS (cm)a

Nouveau-né

4

8

10

Nourrisson

6

12

15

Enfant

9

18

22

Adulte (petite stature)b

10

24

26

Adulte

13

30

34

Adulte (forte stature)

16

38

44

Le bras le plus gros doit pouvoir être encerclé d’au moins 80 % par le brassard. Les dimensions fournies pour les adultes peuvent être utilisées pour les adolescents.

A

B

C

D

FIGURE 4.11 Sièges de mesure de la pression artérielle – A Partie supérieure du bras. B Partie inférieure du bras ou avant-bras. C Cuisse. D Mollet ou cheville.

ALERTE CLINIQUE

Les normes publiées relatives à la P.A. ne sont valides que si la même méthode de mesure (auscultation et détermination de la taille du brassard) est employée dans la pratique clinique.

168

Partie 2

ligne directrice de l’hypertension chez les adultes, le terme préhypertension a été remplacé par le terme pression artérielle élevée pour désigner les niveaux de P.A. d’adolescents de 13 ans et plus considérés comme étant à risque accru de manifester de l’hypertension (Flynn, Kaelber, BakerSmith et al., 2017) ENCADRÉ 4.13 .

Hypotension orthostatique L’hypotension orthostatique, aussi appelée hypotension posturale ou intolérance orthostatique, se traduit souvent par une syncope (évanouissement), des vertiges (étourdissements) ou une sensation de tête légère ; elle résulte d’une hypoperfusion cérébrale. Normalement, le débit sanguin vers le cerveau est maintenu à un niveau constant par plusieurs mécanismes compensatoires qui régulent la P.A. générale. Lorsqu’une personne couchée ou allongée s’assoit ou se lève, il se produit une vasoconstriction des capillaires périphériques, et le sang qui cheminait vers le

Évaluation clinique

système vasculaire inférieur retourne vers le cœur pour être redistribué vers la tête et le reste du corps. Lorsque ce mécanisme est défaillant ou qu’il ne réagit pas assez rapidement, la personne peut avoir des vertiges ou une syncope. L’une des principales causes de l’hypotension orthostatique est l’hypovolémie, qui peut être due à des médicaments comme les diurétiques ou les vasodilatateurs, ou encore à une immobilisation ou à un alitement prolongés. Les autres causes de l’hypotension orthostatique incluent la déshydratation, la diarrhée, les vomissements, la perte de liquide par sudation ou par l’effort, la consommation d’alcool, les arythmies, le diabète, la septicémie et l’hémorragie. Les mesures de la P.A. effectuées lorsque l’enfant est couché puis debout (au moins 2 minutes dans chaque position) peuvent varier et faciliter ainsi le diagnostic de l’hypotension orthostatique. Les causes non neurogènes s’accompagnent d’une augmentation compensatoire du pouls de plus de 15 batt./min, ainsi que d’une diminution de la pression systolique de plus de 20 mm Hg ou de la pression diastolique de plus de 10 mm Hg après 2 minutes en position debout. En l’absence d’augmentation de la fréquence cardiaque de plus de 15 batt./min, l’enfant souffre probablement d’un décit autonome. Chez l’enfant et l’adolescent victimes d’un vertige, d’une sensation de tête légère, de nausées, d’une syncope, de diaphorèse et de pâleur, il est important de surveiller la P.A. et la fréquence cardiaque pour déterminer la cause initiale. La P.A. étant un critère diagnostique important, elle doit faire partie des mesures de routine des signes vitaux.

4.3.5

Examen de la peau

L’examen de la peau et de ses structures accessoires se fait principalement par inspection et palpation. Au moment de son examen, l’inrmière évalue la couleur, la texture et la température de la peau ainsi que la turgescence des tissus qui informe sur l’hydratation et la nutrition. La couleur normale de la peau varie selon l’origine ethnique de l’enfant. Cependant, il peut se produire plusieurs variations de couleur, dont certaines appellent un examen plus sérieux. Le TABLEAU 4.9 énumère les types de changements de coloration de la peau et leurs effets sur les peaux claires et foncées. Le toucher permet d’évaluer : • la texture de la peau : chez les jeunes enfants, elle est lisse, légèrement sèche, non grasse ni moite. • la température de la peau : l’inrmière touche symétriquement chaque partie du corps et compare les parties supérieures avec les parties inférieures. Elle note tout écart de température.

Phanères (poils, cheveux, ongles) Au cours de l’évaluation du système tégumentaire, l’inrmière observe la couleur, la texture, la qualité, la distribution et l’élasticité des cheveux. En général, la chevelure des enfants est lustrée, soyeuse, forte et élastique. Des cheveux breux, ternes, cassants, friables et dépigmentés peuvent dénoter une nutrition insufsante. Cependant, des facteurs génétiques affectent l’apparence des cheveux. Ainsi, les cheveux des enfants d’origine africaine sont généralement plus frisés et plus rêches que ceux des autres enfants. L’inrmière doit prendre soin de noter la présence d’aires d’alopécie ou de raréfaction des cheveux. Chez les nourrissons, l’absence de cheveux à certains endroits peut indiquer qu’ils se couchent souvent dans la même position. L’inrmière avisera alors

ENCADRÉ 4.12

Indications de mesure de la pression artérielle chez les enfants de moins de trois ans

• Prématurité, faible poids à la naissance ou • Greffe d’organes toute autre complication néonatale nécessi- • Cancer osseux ou greffe de moelle osseuse tant un séjour aux soins intensifs néonatals • Traitement pharmacologique connu pour • Malformation cardiaque congénitale augmenter la pression artérielle • Infection urinaire récurrente, hématurie ou • Différentes pathologies systémiques protéinurie associées à l’hypertension (p. ex., la • Maladie rénale ou malformation du système urinaire

neurobromatose) • Pression intracrânienne élevée

Source : Tiré de National High Blood Pressure Education Program Working Group on High Blood Pressure in Children and Adolescents (NHBP). « The fourth report on the diagnosis, evaluation, and treatment of high blood pressure in children and adolescents », Pediatrics, vol. 114, n° 2 Suppl, août 2004, p. 555-576. Repris dans Lemay, C., Germain, P., Fournier, A. et al. (2015). L’hypertension artérielle chez les enfants et les adolescents. Perspective inrmière, 12(3), p. 31-34.

clinique

les parents de la nécessité de changer régulièrement l’enfant de position. L’inrmière vérie également la propreté générale des cheveux et du cuir chevelu. Certains parents traitent les cheveux avec des huiles ou des lubriants qui, s’ils ne sont pas bien rincés, obstruent les glandes sébacées et provoquent des infections du cuir chevelu.

Jugement

• la turgescence des tissus : l’inrmière évalue l’élasticité de la peau en tenant la peau de l’abdomen entre le pouce et l’index, en la gardant tendue, puis en la lâchant rapidement. Un tissu élastique reprend immédiatement sa forme initiale sans laisser de marque ou de pli résiduel. Chez les enfants dont la turgescence cutanée est insufsante, la peau reste suspendue ou tendue pendant quelques secondes avant de retomber lentement sur l’abdomen. La turgescence de la peau est l’un des moyens d’estimer si l’hydratation et la nutrition sont adéquates.

Vous prenez la pression artérielle au mollet de Chan, âgé de un an, alors que l’inrmière du quart de travail précédent la prenait au bras. Sur la feuille des signes vitaux, vous inscrivez l’endroit où vous avez pris la pression. Quelle est la raison pour laquelle il est important de préciser ce détail ? a) Pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïté dans la précision des résultats. b) Pour montrer qu’on varie les sites de prise de la pression artérielle. c) Pour indiquer que la valeur est plus précise au mollet qu’au bras. d) Pour éviter une mauvaise interprétation des valeurs trouvées.

Techniques de soins ENCADRÉ 4.13

Utiliser les tableaux de la pression artérielle

1) Utiliser les courbes de croissance pour déterminer le centile de la taille (voir l’annexe A). 2) Mesurer et consigner les pressions artérielles systolique et diastolique. Si la P.A. dépasse le 90e centile, mesurer 2 fois la P.A. pendant la même visite et noter la moyenne des pressions artérielles systolique et diastolique. 3) Utiliser les tableaux des pressions artérielles systolique et diastolique en fonction du sexe de l’enfant (voir l’annexe C). 4) Trouver l’âge de l’enfant dans la partie gauche du tableau. Suivre la rangée de l’âge horizontalement jusqu’à l’intersection de la ligne du centile de la taille (colonne verticale). 5) Trouver ensuite les 50e, 90e, 95e et 95e centiles + 12 mm Hg de la pression artérielle systolique dans les colonnes de gauche et de la pression artérielle diastolique dans les colonnes de droite. • Une P.A. systolique et diastolique inférieure au 90e centile pour l’âge, le sexe et la taille ; ou une P.A. systolique inférieure à 120 mm Hg et une P.A. diastolique inférieure à 80 mm Hg pour les adolescents de 13 ans et plus sont normales.

• Une P.A. systolique comprise entre les 90e et 95e centiles pour l’âge, le sexe et la taille ; ou une P.A. systolique de 120 à 129 mm Hg et une P.A. diastolique inférieure à 80 mm Hg pour les adolescents de 13 ans et plus équivalent à une P.A. élevée. • Une P.A. systolique supérieure au 95e centile pour l’âge, le sexe et la taille ; ou une P.A. systolique égale ou supérieure à 130 mm Hg et une P.A. diastolique supérieure à 80 mm Hg pour les adolescents de 13 ans et plus peuvent indiquer l’hypertension. 6) Si la P.A. dépasse le 95e centile, déterminer le stade de la P.A. • Hypertension de stade 1 : P.A. égale ou supérieure au 95e centile pour l’âge, le sexe et la taille, et inférieure au 95e centile + 12 mm Hg ; ou P.A. systolique de 130 à 139 mm Hg et P.A. diastolique de 80 à 89 mm Hg pour les adolescents de 13 ans et plus ; • Hypertension de stade 2 : P.A. égale ou supérieure au 95e centile + 12 mm Hg pour l’âge, le sexe et la taille ; ou P.A. systolique égale ou supérieure à 140 mm Hg et P.A. diastolique égale ou supérieure à 90 mm Hg pour les adolescents de 13 ans et plus.

Sources : Adapté de Flynn et al. (2017) ; NHBPEP (2007).

Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

169

4

TABLEAU 4.9

Différences entre les groupes ethniques quant aux changements de coloration de la peau

DESCRIPTION

ASPECT SUR LES PEAUX CLAIRES

ASPECT SUR LES PEAUX FONCÉES

Teinte bleutée de la peau, surtout de la conjonctive palpébrale (paupière inférieure), du lit des ongles, des lobes des oreilles, des lèvres, de la muqueuse buccale, de la plante des pieds et des paumes

• Teinte gris cendré des lèvres et de la langue

Absence de la coloration rosée et diminution de l’éclat de la peau, en particulier celle du visage

• Peaux noires : teinte gris cendré

Rougeur bien visible sur tout le corps

• Détection difcile par simple observation ; il est préférable de se fonder sur les résultats de la palpation (chaleur ou œdème)

Tache violacée qui vire par la suite au vert, puis au jaune ; elle peut être visible n’importe où sur la peau

• Détection difcile, à moins qu’elle ne soit dans la bouche ou la conjonctive

Piqueté violacé qui est surtout visible sur les fesses, l’abdomen et la face interne des bras et des jambes

• Détection difcile, car elle est habituellement invisible, sauf sur la muqueuse buccale, la conjonctive palpébrale et la conjonctive oculaire

Coloration jaune de la sclérotique, de la peau, des ongles, de la plante des pieds, des paumes et de la muqueuse buccale

• Coloration jaune de la sclérotique, de la voûte palatine, des paumes et de la plante des pieds

Cyanose Coloration bleutée de la peau qui traduit la présence d’un taux anormalement élevé d’hémoglobine réduite en oxygène

Pâleur Signe d’anémie, de maladie chronique, d’œdème ou de choc

• Peaux brunes : teinte plutôt jaunâtre

Érythème Rougeur pouvant être causée par une activation de la circulation sanguine attribuable aux conditions climatiques ; une inammation localisée ; une infection ; une irritation de la peau ; une allergie ; toute autre dermatose ; une polyglobulie témoignant d’une adaptation à une hypoxémie chronique Ecchymose Tache relativement étendue et diffuse, habituellement bleue ou noire, traduisant un épanchement de sang sous la peau ; elle a habituellement pour cause un trauma Pétéchie Tache semblable à l’ecchymose, mais beaucoup plus petite : minuscule lésion hémorragique punctiforme de 2 mm de diamètre, qui peut dénoter un trouble sanguin, comme une leucémie Ictère (jaunisse) Coloration jaune de la peau imputable à un excès de pigments biliaires dans le sang

L’infirmière examine aussi la présence de lésions, de desquamation, de signes d’infestation par les lentes ou les tiques, ou de signes de traumatisme comme des ecchymoses, des masses ou des cicatrices.

Tableau 8.1W : Échelle de Tanner – Organes génitaux externes féminins Tableau 8.2W : Échelle de Tanner – Organes génitaux externes masculins Onychophagie : Terme médical désignant l’habitude de se ronger les ongles.

170

Partie 2

L’inrmière inspecte la couleur, la forme, la texture et la qualité des ongles. Normalement, les ongles sont roses, convexes, lisses et durs, mais exibles (sans être cassants). Les bords, généralement blancs, doivent couvrir le doigt. Il se peut que le lit des ongles des enfants de couleur plus foncée soit plus pigmenté. Des ongles non coupés et sales sont un signe de mauvaise hygiène. Des ongles courts et inégaux dénotent une onychophagie dont les événements déclencheurs sont généralement le stress, l’angoisse et l’anxiété.

Évaluation clinique

Chez les enfants près de la puberté, l’inrmière vérie la croissance des poils secondaires, signe d’évolution physiologique des changements liés à la puberté. Elle note le caractère précoce ou tardif de la croissance des poils, même s’il n’est pas toujours question d’une dysfonction hormonale, car cela peut être très préoccupant pour l’adolescent dont la maturation est précoce ou tardive .

4.3.6

Examen des ganglions lymphatiques

Les ganglions lymphatiques sont généralement évalués pendant l’examen de la partie du corps où ils se trouvent. L’organisme dispose d’un important système de drainage lymphatique ; la FIGURE 4.12 illustre les sièges habituels de palpation des ganglions lymphatiques.

4

FIGURE 4.12 Emplacement des ganglions lymphatiques superciels – Les èches indiquent la direction de l’écoulement de la lymphe.

L’inrmière palpe les ganglions avec la partie distale de ses doigts, en appuyant doucement mais fermement, et en effectuant un mouvement circulaire dans les régions où les ganglions lymphatiques sont normalement situés . Pendant l’examen des ganglions de la tête et du cou, l’inrmière place la tête de l’enfant légèrement en extension, mais sans étirer les muscles sternocléidomastoïdiens ou trapèzes. Cette position facilite la palpation des ganglions sous-mentonniers, sous-mandibulaires, amygdaliens et cervicaux. Pour les ganglions axillaires, l’inrmière doit maintenir les bras de l’enfant en position détendue, sur les côtés, mais légèrement en abduction, alors que pour les ganglions inguinaux, il est préférable de maintenir l’enfant en position couchée. L’inrmière note la taille, la mobilité, la température, la texture et la sensibilité à la palpation. Chez les enfants, il est normal de voir de petits ganglions non sensibles, souples et mobiles à la palpation. Des ganglions lymphatiques sensibles à la palpation, non mobiles, hypertrophiés et chauds dénotent généralement une infection ou une inammation voisine. L’inrmière note ces résultats au dossier pour qu’ils donnent lieu à des examens plus approfondis, le cas échéant.

4.3.7

Examen de la tête et du cou

L’inrmière observe la tête et note sa morphologie et sa symétrie. Toute plagiocéphalie, c’est-à-dire un aplatissement d’une partie de la tête, notam ment à l’occiput, peut indiquer que l’enfant est

continuellement allongé contre cette surface. Une asymétrie prononcée est généralement anormale et peut indiquer une fermeture prématurée des sutures (craniosynostose). Chez les nourrissons, l’inrmière note le positionnement et le contrôle de la tête. La plupart des nourrissons de quatre mois devraient être en mesure de tenir la tête droite et de l’aligner dans la ligne médiane lorsqu’ils sont en position verticale 1 .

Examen physique : ganglions lymphatiques de la tête et du cou. Examen physique : force musculaire du cou, des épaules et de la langue.

L’inrmière évalue l’amplitude du mouvement CE QU’IL FAUT RETENIR en demandant à l’enfant plus âgé de regarder dans chaque direction (de côté, vers le haut et vers le Des ganglions lymphabas), ou en plaçant elle-même le jeune enfant dans tiques sensibles, non chaque position . Une amplitude de mouvement mobiles, hypertrophiés et limitée peut indiquer un torticolis, auquel cas l’enchauds peuvent indiquer fant tient la tête d’un côté en pointant le menton du une infection ou une côté opposé en raison d’une blessure au muscle inammation voisine. sternocléidomastoïdien 2 . L’inrmière palpe le crâne à la recherche de sutures libres, de fontanelles, de fractures ou ALERTES CLINIQUES d’enflures. Normalement, la fontanelle postérieure se ferme 1 Après l’âge de six mois, tout retard prononcé dans vers la fin du 2 e mois, et la la capacité à mouvoir la tête suggère fortement une fontanelle antérieure, vers le lésion cérébrale et doit donner lieu à d’autres examens. 18e mois. L’inrmière rapporte 2 L’hyperextension de la tête (opisthotonos) avec toute fermeture précoce ou tardouleur pendant la exion est un signe sérieux d’irridive, car il peut s’agir, dans les tation méningée et doit immédiatement donner lieu deux cas, d’un signe d’affection à d’autres examens médicaux. pathologique. Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

171

Jugement

clinique Laurence, âgée de 5 ans, souffre d’une encépha­ lopathie importante. Elle est hospitalisée pour un état de déshydratation sévère. Sa fréquence cardiaque est à 146 batt./min, et sa pression artérielle est de 80/48 mm Hg. Vous palpez ses membres inférieurs. Pour quelle raison est­il important de procéder à cette évaluation ? a) Pour vérier si Laurence montre une perte musculaire aux jambes. b) Parce que la température de la peau peut être un indice de déshydratation. c) An de s’assurer du bon fonctionnement circulatoire dans les jambes. d) Cela permet d’évaluer les signes neurovasculaires des membres inférieurs.

ALERTE CLINIQUE

Si l’inrmière détecte une masse dans le cou, elle doit en signaler la présence, car les grosses masses peuvent bloquer la circulation de l’air ou signier la présence d’une pathologie plus sévère.

En examinant la tête de l’enfant, l’inrmière observe la symétrie, le mouvement et l’apparence générale du visage. Elle demande à l’enfant de faire une grimace pour lui permettre d’évaluer le mouvement symétrique et faire ressortir le moindre degré de paralysie. Elle note toute proportion inhabituelle dans le visage, par exemple un front excessivement haut ou bas, des yeux trop proches ou trop éloignés, ou un menton petit et fuyant.

En plus d’évaluer le mouvement de la tête et du cou, l’inrmière inspecte la taille du cou et palpe les structures annexes . Normalement, chez les nourrissons, le cou est court et comporte des plis cutanés entre la tête et les épaules ; cependant, le cou s’allonge pendant les trois ou quatre années suivantes.

4.3.8

Examen des yeux et de la vision

Bien que l’inrmière soit en mesure de faire l’évaluation de l’œil et de l’acuité visuelle, cette expertise demande du temps et de la pratique. C’est pourquoi il est peu fréquent que l’inrmière effectue cette évaluation en milieu hospitalier, alors qu’elle la fait régulièrement en milieu scolaire et en suivi clinique.

Inspection des structures externes L’infirmière inspecte les paupières pour vérifier le bon emplacement de l’œil. Lorsque l’œil est ouvert, la paupière supérieure doit reposer sur la partie supérieure de l’iris. Lorsque les yeux sont fermés, les paupières doivent complètement recouvrir la cornée et la sclérotique FIGURE 4.13 .

Jugement

clinique Vous palpez la fontanelle antérieure de Macha, âgée de sept mois, qui est hospitalisée pour une coqueluche. Vous détectez que la fontanelle est déprimée. Quelle peut en être la cause ? a) Une déshydratation possible. b) Un début de malnutrition. c) Un défaut de fermeture de la fontanelle. d) Une complication de la coqueluche. MAIS SI...

Si la fontanelle antérieure était bombée au lieu d’être déprimée, quelle pourrait en être la cause ?

172

Partie 2

Évaluation clinique

L’inrmière détermine l’inclinaison des fentes palpébrales ou des paupières en dessinant une ligne virtuelle qui passe par les deux points du canthus interne (ou canthus médial) et traverse l’orbite externe des yeux, de manière à ce que chaque œil soit aligné sur le même plan. Habituellement, les fentes palpébrales décrivent une ligne horizon tale. Chez les Asiatiques, une inclinaison vers le haut est normalement observée.

FIGURE 4.13

Structures externes de l’œil

L’inrmière vérie également l’intérieur de la muqueuse des paupières, la conjonctive palpébrale. Pour examiner le sac conjonctival inférieur, l’inrmière étire la paupière vers le bas en demandant à l’enfant de regarder vers le haut. Pour tourner la paupière supérieure vers l’extérieur, elle tient les cils supérieurs et tire doucement vers le bas et vers l’avant pendant que l’enfant regarde vers le bas. Normalement, la conjonctive est rose et luisante. Les stries jaunes verticales qui longent la conjonctive sont les glandes de Meibomius, ou glandes sébacées : elles ont presque la taille d’un follicule pileux. À l’intérieur du canthus interne et sur le bord interne des paupières supérieures et inférieures se trouve une petite ouverture, le point lacrymal. L’inrmière notera tout larmoiement excessif, tout écoulement ou toute inammation de l’appareil lacrymal. La conjonctive bulbaire, qui recouvre l’œil jusqu’au limbe cornéen, doit être transparente. La sclérotique, ou partie blanche du globe oculaire, doit être claire. Il est normal d’observer de minuscules marques noires dans la sclérotique des enfants dont le teint est très foncé. La cornée, qui recouvre l’iris et la pupille, doit être claire et transparente. L’inrmière doit noter les opacités, car elles sont un signe éventuel de cicatrisations ou d’ulcérations susceptibles de nuire à la vision. La meilleure façon de tester la présence d’opacités est d’illuminer le globe oculaire en faisant briller une lumière à un angle oblique en direction de la cornée. L’inrmière compare la taille, la morphologie et le mouvement des pupilles qui doivent être rondes, claires et égales. L’inrmière vérie également leur réaction à la lumière en faisant rapidement briller une source lumineuse vers l’œil et en la retirant. Lorsque la lumière approche de l’œil, les pupilles doivent se contracter ; à mesure que la lumière s’atténue, les pupilles doivent se

dilater. Elle évalue les réactions d’accommodation de la pupille en demandant à l’enfant de regarder un objet brillant et lumineux éloigné de lui, qu’elle rapprochera rapidement de son visage. Les pupilles doivent se contracter à mesure que l’objet approche de l’œil. Les résultats normaux de l’examen des pupilles seront rapportés au moyen de l’acronyme PERRLA, qui signie « pupilles égales rondes réactives à la lumière et à l’accommodation ». L’inrmière vérie la couleur, la taille, la morphologie et la clarté de l’iris et de la pupille. La couleur permanente des yeux se xe généralement entre l’âge de 6 et 12 mois. En inspectant l’iris et la pupille, l’inrmière recherche le cristallin, qu’il est impossible normalement de déceler à travers la pupille. L’existence d’une tache blanchâtre traduit la présence d’une cataracte congénitale ou acquise.

Inspection des structures internes L’ophtalmoscope permet de visualiser l’intérieur du globe oculaire, car il est muni d’un système de lentilles et d’une source de lumière de haute intensité. Les lentilles permettent de visualiser distinctement les structures oculaires internes de l’enfant à des profondeurs variables. De plus, ces lentilles permettent de corriger les différences d’acuité visuelle de l’examinateur et de l’enfant an d’obtenir une vision nette des structures examinées.

Préparation de l’enfant L’inrmière prépare l’enfant à un examen ophtalmoscopique en lui montrant l’appareil, la source de lumière et la manière de l’orienter vers l’œil. Elle lui explique également la raison pour laquelle la pièce doit rester sombre. Quant aux nourrissons et aux jeunes enfants indifférents à de telles explications, il est préférable de les distraire pour les inciter à garder les yeux ouverts. Lui ouvrir les paupières de force n’aura pour effet que de rendre l’enfant moins coopérant et de le faire larmoyer.

Examen du fond d’œil Cet examen sur un nourrisson demande beaucoup de pratique et de savoir-faire, et il est habituellement réalisé par le médecin. Cependant, l’inrmière habilitée à faire cet examen peut, à l’aide de l’ophtalmoscope, produire un reet rétinien presque sur-le-champ en s’approchant de l’enfant, puis inspecter rapidement le disque optique, les vaisseaux sanguins, la macula et, au centre de la macula, un minuscule point luisant de lumière rééchie appelé fovéa (fovéa centrale), où la vision est quasi parfaite 1 . La FIGURE 4.14 illustre les structures à examiner au fond de l’œil. Le reet rétinien est une lueur rougeâtre produite par le reet de la lumière sur la rétine et qui s’observe immédiatement à travers la pupille. L’intensité de la couleur augmente chez les enfants au teint foncé 2 .

4

Structures du fond de l’œil

FIGURE 4.14

Examen de la vue L’importance du dépistage des troubles de la vue pendant l’enfance se fonde sur la constatation suivante : de 5 à 10 % des enfants d’âge préscolaire auront des problèmes qui, s’ils demeurent non traités, peuvent nuire au développement de leur acuité visuelle (SCP, 2016b). L’examen de la vue s’effectue au moyen de plusieurs tests. La présente section concerne quatre aspects de l’examen : 1) l’alignement oculaire ; 2) l’acuité visuelle ; 3) la vision périphérique ; 4) la vision des couleurs. Les examens d’acuité visuelle doivent commencer le plus tôt possible et avoir lieu à des intervalles réguliers (SCP, 2016a) ENCADRÉ 4.14.

CE QU’IL FAUT RETENIR

L’acronyme PERRLA, qui signie « pupilles égales rondes réactives à la lumière et à l’accommo­ dation » sert à indiquer des résultats normaux à l’examen des pupilles.

Alignement oculaire Normalement, vers l’âge de trois ou quatre mois, l’enfant peut fixer son regard sur un objet en utilisant simultanément les deux yeux (binocularité). En cas de strabisme, il est impossible de fixer un seul point avec les deux yeux. Si la déviation est constante, l’œil faible devient paresseux, et le cerveau finit par supprimer l’image produite par cet œil. Si le strabisme n’est pas détecté et corrigé avant l’âge de quatre à six ans, il peut évoluer en cécité si l’œil atteint n’est plus sollicité : c’est ce qui est appelé de l’amblyopie.

1 La région de la fovéa cen­ trale ne doit pas être éclairée trop longtemps, car la lumière vive de l’ophtalmoscope est irritante et peut provoquer un malaise.

Les tests courants pour détecter une déviation sont le test du reet cornéen et le test de l’écran. Pour effectuer le test du reet cornéen, ou test de Hirschberg, l’inrmière dirige la lumière d’une lampe de poche ou d’un ophtalmoscope directement dans les yeux de l’enfant, à une distance d’environ 40 cm. Si les yeux sont normaux, la lumière apparaît symétriquement sur chaque pupille. Les brides épicanthiques, c’est-à-dire les plis cutanés excessifs allant de la voûte du nez jusqu’au bord interne du sourcil, peuvent produire une fausse impression de déviation

2 La présence d’un reet rétinien brillant et uniforme est un indice important, car il permet d’exclure de nom­ breuses anomalies graves de la cornée, de la chambre aqueuse, du cristallin et de la cavité vitréenne. Noter tout point foncé ou toute opacité, qui peuvent révéler certaines anomalies dans l’une de ces structures.

Chapitre 4

ALERTES CLINIQUES

Examen clinique : anamnèse et examen physique

173

ENCADRÉ 4.14

Recommandations relatives aux examens de la vue

Les recommandations suivantes sont conformes aux critères établis par le Groupe d’étude canadien sur les soins de santé préventifs.

DE 6 À 12 MOIS

DE LA NAISSANCE À 3 MOIS

• Observer l’alignement oculaire pour dépister le strabisme. Le reet de la lumière sur la cornée doit être centré, et le test de l’écran doit être normal.

• Effectuer un examen complet de la peau et des structures externes de l’œil, y compris de la conjonctive, de la cornée, de l’iris et de la pupille. • Réaliser un examen du reet rétinien pour écarter les opacités lenticulaires ou une importante maladie de l’œil postérieur. • Diriger le nouveau-né ou l’enfant vers un ophtalmologiste en cas d’échec de visualisation ou d’anomalies du reet rétinien. • Faire examiner par un ophtalmologiste les nouveau-nés à haut risque (vulnérables à la rétinopathie de la prématurité ou ayant des antécédents familiaux de maladies oculaires héréditaires).

• Effectuer les examens précédents.

• Observer la xation et la poursuite d’un point. DE 3 À 5 ANS

• Effectuer les examens précédents. • Effectuer le test d’acuité visuelle au moyen d’un outil d’évaluation adapté à l’âge. DE 6 À 18 ANS

• Effectuer les dépistages précédents à chaque examen de santé régulier. • Effectuer un examen dès que l’enfant ou la famille s’inquiète.

Source : Adapté avec autorisation de Société canadienne de pédiatrie (2009, 2016a). Le dépistage des troubles de la vue chez les nourrissons, les enfants et les adolescents. Tous droits réservés. CONSEIL CLINIQUE

Le test de l’écran est généralement plus facile à réaliser si l’inrmière utilise sa propre main plutôt qu’un écran de papier. Les jeunes enfants aiment aussi les écrans amusants, découpés en forme de cornet de glace ou de sucette, par exemple.

Annexe 4.1W : Échelle de Snellen.

(pseudostrabisme) FIGURE 4.15. Les brides épicanthiques sont fréquentes chez les enfants asiatiques. Dans le test de l’écran, l’inrmière couvre un œil et observe le mouvement de l’œil découvert pendant que l’enfant regarde un objet de près (33 cm) ou éloigné (6 m). Si l’œil découvert ne bouge pas, il est aligné. S’il bouge, il y a déviation, car lorsque l’œil plus fort est temporairement couvert, l’œil dévié essaie de xer l’objet. Dans le test de l’écran en alternance, l’inrmière couvre tour à tour chaque œil, et elle observe le mouvement de l’œil masqué aussitôt qu’il est découvert, pendant que l’enfant xe un point placé devant lui FIGURE 4.16. Si l’alignement est normal, les yeux ne bougent pas lorsque l’inrmière couvre chaque œil en alternance. En cas de déviation, l’œil bouge lorsque l’écran est retiré. Ce test exige plus de pratique que le simple test de l’écran, car il faut couvrir tour à tour chaque œil rapidement et avec précision pour apercevoir le mouvement de l’œil. Dans la mesure où il existe divers degrés de déviation, il est important d’effectuer les tests de l’écran en se servant d’un objet proche et d’un objet éloigné.

FIGURE 4.15 En cas de pseudo­ strabisme, les brides épicanthiques internes provoquent l’apparence de désalignement des yeux ; cependant, le reet cornéen révèle une symétrie parfaite.

174

Partie 2

Évaluation clinique

Losqu’elle a accès à l’appareillage, l’inrmière peut procéder au dépistage photo et à l’autoréfraction chez les enfants de 6 mois à 3 ans, et comme solution de rechange pour les enfants de 3 à 5 ans qui ne peuvent ou ne veulent pas coopérer avec des tableaux de vision standard (American Academy of Pediatrics Section

on Ophthalmology and Committee on Practice and Ambulatory Medicine, 2012). Le dépistage photo utilise des images optiques du reet rétinien pour estimer l’erreur de réfraction, l’opacité des médias, l’alignement oculaire et d’autres facteurs pouvant provoquer l’amblyopie chez un enfant.

Acuité visuelle Pour évaluer l’acuité visuelle d’un enfant, il faut choisir des instruments adaptés à son âge, car les échelles sont établies en fonction de la capacité cognitive. Il faut utiliser l’échelle d’acuité visuelle la plus complexe que peut reconnaître l’enfant. La plupart des enfants de six ans peuvent lire les lettres et les chiffres gurant sur l’échelle de Snellen . Les tests du E renversé de Snellen ou de l’échelle HOTV s’avéreront utiles pour les enfants qui ne savent pas lire les chiffres et les lettres. Ces deux tests conviennent donc parfaitement aux enfants de plus de 36 mois (SCP, 2016b). Le test du E renversé utilise un E majuscule orienté dans quatre directions différentes. L’inrmière demande à l’enfant de reproduire la direction dans laquelle le E désigné est orienté. Le test de l’échelle HOTV est un tableau mural sur lequel sont inscrites les lettres H, O, T et V. L’inrmière remet à l’enfant une planche gravée de grosses lettres H, O, T et V. Elle pointe une lettre sur le tableau mural et demande à l’enfant de lui montrer la même lettre sur sa planche avec la main. Le test du E renversé et le test de l’échelle HOTV conviennent parfaitement aux enfants de plus de 36 mois (SCP, 2016b). Le test de l’échelle d’Allen, autrefois utilisé lorsqu’un enfant n’était pas en mesure d’effectuer le test du E renversé ou celui de l’échelle HOTV, est maintenant considéré comme étant trop axé sur une seule culture pour être utile et il n’est plus recommandé par la Société canadienne de pédiatrie (SCP, 2016b).

Nourrisson ou enfant difcile à tester L’inrmière teste la vision des nourrissons en vériant surtout leur perception de la lumière. À cette n, elle fait briller une lumière dans leurs yeux en notant les réactions, par exemple la constriction des pupilles, le clignement des yeux, la vigilance accrue, le fait de suivre la lumière jusqu’au plan médian du corps ou de refuser d’ouvrir les yeux après le stimulus. Quoique la simple vérication de la perception de la lumière et la production d’un réexe pupillaire indiquent que l’appareil visuel est intact, cela ne permet pas de conrmer que le nourrisson voit. Autrement dit, ce test ne permet pas de déterminer si le cerveau reçoit le message visuel et s’il interprète les signaux. Un autre examen d’acuité visuelle chez le nourrisson consiste à évaluer sa capacité à xer et à suivre un visage ou un objet très coloré ou très voyant. Pour cela, l’inrmière tient le nourrisson en position droite en déplaçant lentement son visage de droite à gauche . Les autres signes éventuels d’une perte de vision ou d’autres problèmes oculaires graves incluent les pupilles xes, le strabisme, un nystagmus constant, le signe du coucher de soleil et la lenteur des mouvements latéraux. Mal heureusement, il est difcile de tester chaque œil séparément ; la présence de tels signes peut indiquer une cécité unilatérale de l’œil. Certains examens spéciaux destinés aux nourrissons et aux autres enfants difciles à tester permettent d’évaluer l’acuité visuelle ou de conrmer la cécité. Par exemple, l’examen des potentiels visuels évoqués consiste à stimuler les yeux au moyen d’un ash ou d’une image structurée, puis à enregistrer l’activité reçue dans le cortex visuel à l’aide d’électrodes xées sur le cuir chevelu.

Vision périphérique Si l’enfant est sufsamment âgé pour coopérer, l’inrmière évalue sa vision périphérique ou le champ visuel de chacun de ses yeux en lui demandant de xer un point précis placé directement devant lui, puis elle utilise un doigt ou un crayon qu’elle déplace hors du champ de vision vers le champ périphérique. L’inrmière vérie chaque œil séparément et chaque quadrant de vision. Elle demande à l’enfant de dire « Stop » dès qu’il voit l’objet. L’inrmière mesure ensuite l’angle formé entre l’axe antéropostérieur de l’œil (ligne droite de vision) et l’axe périphérique (point à partir duquel l’objet apparaît pour la première fois). Normalement, l’enfant peut voir à environ 50° au-dessus, 70° en dessous, 60° en direction du nez et 90° par rapport au niveau temporal. Les restrictions de la vision périphérique peuvent indiquer une cécité due aux lésions de certaines structures oculaires ou de l’une des voies de la vision.

Vision des couleurs

A

Le décit de vision des couleurs (daltonisme) le plus fréquent est une anomalie héréditaire récessive liée au sexe qui ne touche normalement que les hommes. Environ 8 à 10 % des hommes ont de la difculté à distinguer les couleurs (Défense nationale et les Forces armées canadiennes, 2012). Dans la plupart des cas, le trouble de la vision des couleurs n’entraîne aucun problème majeur. La principale difculté à laquelle sont confrontés B les enfants d’âge scolaire est leur incapacité à utiliser les couleurs comme repère visuel dans un contexte scolaire. Les personnes atteintes de troubles plus graves peuvent être incapables de distinguer les couleurs jaune et rouge des feux de circulation, et de voir la lumière rouge qui signale le freinage à l’arrière d’une voiture, ainsi qu’avoir de la difculté à distinguer le vert des feux de circulation de certains types de lampadaires incandescents. FIGURE 4.16 Le test Les tests de la vision des couleurs de l’écran en alternance permet de incluent l’atlas Ishihara et le test de détecter l’amblyopie chez les enfants Hardy-Rand-Rittler. Chacun de ces tests atteints de strabisme. A L’oeil est consiste en une série de cartes (pseudocouvert ; l’enfant xe une source lumiisochromatiques) sur lesquelles est imprimé neuse. B Si l’oeil couvert ne bouge un champ coloré composé de pastilles pas lorsque la main est retirée, les dont la couleur peut prêter à confusion. Un yeux sont alignés. chiffre ou un symbole est imprimé au milieu des pastilles, dans une couleur susceptible d’être confondue avec la couleur du fond ALERTE CLINIQUE par une personne atteinte d’un trouble de la vision des couleurs. Le symbole ou la lettre est donc inviSi, à l’âge de trois ou quatre sible pour l’enfant affecté, mais ne l’est pas du tout mois, l’enfant n’est pas en pour celui dont la vision chromatique est normale. mesure de xer un objet ou de le suivre du regard, d’autres 4.3.9 Examen des oreilles examens ophtalmologiques et de l’audition s’imposent.

Inspection des structures externes Toute la portion externe de l’oreille est appelée auricule ou pavillon de l’oreille. L’inrmière mesure l’alignement de la hauteur du pavillon de l’oreille en dessinant une ligne imaginaire entre le coin externe de l’œil et l’occiput, ou la protubérance la plus saillante du crâne. La partie supérieure du pavillon de l’oreille doit intercepter cette ligne. Les oreilles basses sont souvent associées à des anomalies rénales, à une trisomie 21 ou à une déficience intellectuelle. L’infirmière mesure l’angle du pavillon de l’oreille en dessinant une ligne perpendiculaire à partir de la ligne horizontale imaginaire et en alignant le pavillon de l’oreille près de cette marque. Normalement, le pavillon forme un angle de 10° avec la ligne verticale FIGURE 4.17. S’il se situe à l’extérieur de cette zone, l’inrmière rapporte la déviation et recherche d’autres anomalies. Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

175

4

FIGURE 4.17 oreilles

Alignement des

Normalement, le pavillon de l’oreille s’éloigne légèrement du crâne. Sauf chez les nouveau-nés, les oreilles aplaties contre la tête ou en saillie par rapport au cuir chevelu peuvent signaler des problèmes. Par exemple, la présence d’oreilles aplaties chez un nourrisson peut suggérer qu’il est souvent couché du même côté et, comme dans le cas des zones isolées de chute de cheveux, doit amener l’inrmière à vérier que les parents comprennent la nécessité de varier les positions de l’enfant. Une oreille déformée ou absente à la naissance peut être un signe d’une agénésie rénale due au développement embryonnaire simultané.

L’inrmière inspecte la surface cutanée autour de l’oreille à la recherche de petites ouvertures, de fragments de tissu de peau qui pendent ou de sinus. Si elle observe la présence d’un sinus, l’inrmière le note, car il peut s’agir d’une stule dont le contenu s’écoule dans une partie du cou ou de l’oreille. Les acrochordons ne reètent pas un processus pathologique, mais ils peuvent inquiéter les parents quant à l’apparence de l’enfant. L’inrmière évalue également l’hygiène de l’oreille. Un otoscope n’est pas indispensable pour examiner le conduit externe et noter la présence de cérumen généralement de couleur jaune-brun et de consistance molle. Si l’inrmière utilise un otoscope et observe un écoulement, elle note sa couleur et son odeur. Elle doit éviter de transmettre toute substance potentiellement infectée à l’oreille opposée ou à un autre enfant en procédant, entre chaque examen, à l’hygiène des mains et en utilisant des spéculums réutilisables stérilisés ou des spéculums jetables.

Soutien inrmier ENCADRÉ 4.15

Diminuer l’inconfort et améliorer la collaboration pendant l’examen otoscopique des jeunes enfants

Voici deux suggestions pour transformer l’examen otoscopique en une activité ludique : • La recherche du grand éléphant : – Expliquer à l’enfant que l’on cherche un grand éléphant dans son oreille. – Après l’examen de l’oreille, informer l’enfant que la recherche de l’éléphant n’était qu’un jeu et le remercier de sa collaboration. • Le jeu de lumière : – Demander à l’enfant de placer un doigt dans l’oreille opposée pour empêcher la lumière d’en sortir.

176

Partie 2

Évaluation clinique

Inspection des structures internes Choix et utilisation du matériel La tête de l’otoscope permet de visualiser la membrane tympanique au moyen d’une lumière forte, d’une loupe et d’un spéculum. Certains otoscopes peuvent être reliés à un appareil pneumatique qui permet d’injecter de l’air dans le conduit et de déterminer la mobilité du tympan. Le spéculum destiné à être inséré dans le conduit externe est offert en plusieurs tailles, selon les différentes largeurs de conduit auditif. L’inrmière doit utiliser le plus grand format de spéculum qui peut s’insérer confortablement dans l’oreille, de manière à obtenir une zone maximale de visualisation. Certains otoscopes ont une lentille ou une loupe mobile qui permet d’insérer une curette dans le conduit auditif à travers le spéculum, tout en observant les structures par la lentille. Pendant l’insertion du spéculum dans le méat, l’inrmière le fait bouger contre les parois du méat externe pour habituer l’enfant à la sensation d’un objet qui entre dans l’oreille. Si l’oreille examinée est douloureuse, elle touche une partie non douloureuse de l’oreille affectée, puis examine l’oreille non affectée et effectue enn l’examen de l’oreille douloureuse. En général, à ce stade, l’enfant redoute moins tout ce qui peut causer de l’inconfort dans l’oreille et il coopère davantage.

Positionnement de l’enfant Avant de commencer l’examen otoscopique, l’inrmière positionne l’enfant adéquatement et l’empêche de bouger, si nécessaire, an d’éviter les blessures à l’oreille et ses structures. En général, les enfants plus âgés coopèrent et n’ont pas besoin d’être retenus. L’inrmière les prépare néanmoins à l’intervention en leur permettant de jouer avec l’appareil, en leur montrant comment il fonctionne et en insistant sur l’importance de ne pas bouger. Il peut être bon de les laisser observer l’inrmière pendant qu’elle examine l’oreille du parent. Il est nécessaire de restreindre les mouvements des jeunes enfants qui peuvent avoir du mal à rester immobiles durant cet examen ENCADRÉ 4.15. Pour leur protection et leur sécurité, les nourrissons et les trottineurs doivent être immobilisés pendant l’examen otoscopique. À cette n, deux positions sont privilégiées. Dans la première, l’enfant est assis de côté sur les genoux du parent, enlaçant le parent d’un bras et l’autre bras sur le côté. L’oreille à examiner est dirigée vers l’inrmière. D’un bras, le parent tient la tête de l’enfant fermement contre la sienne ou sa poitrine, et de l’autre bras, il enlace l’enfant, ce qui permet d’immobiliser le bras libre de l’enfant FIGURE 4.18A.

L’inrmière examine l’oreille en utilisant la technique de manipulation de l’otoscope décrite ci-après. La seconde position consiste à placer l’enfant sur le côté, le dos ou l’abdomen, les bras sur le côté et la tête tournée de manière à ce que l’oreille à examiner soit dirigée vers le plafond. L’inrmière se penche sur l’enfant, utilise la partie supérieure de son corps pour empêcher le mouvement des bras et du tronc supérieur, et se sert de la main avec laquelle elle effectue l’examen pour stabiliser la tête de l’enfant. Cette position est pratique pour les jeunes nourrissons ou les enfants plus âgés qui requièrent une immobilisation légère, mais elle peut être impossible pour ceux qui protestent vigoureusement. Par mesure de sécurité, l’inrmière peut demander l’aide du parent ou de quelqu’un d’autre pour immobiliser l’enfant FIGURE 4.18B. L’inrmière examine l’oreille de l’enfant qui coopère en lui demandant de s’allonger sur le côté, de s’asseoir ou de rester debout. L’inconvénient du fait d’être debout est que l’enfant peut s’éloigner lorsque l’otoscope entre dans le conduit auditif. Si l’enfant est debout ou assis, l’inrmière penche légèrement la tête vers l’épaule controlatérale de l’enfant pour mieux voir le tympan FIGURE 4.19.

Examen des structures de l’oreille Lors de l’examen, l’inrmière observe le pavillon de l’oreille, le conduit auditif et la membrane tympanique comme s’ils étaient superposés sur une horloge FIGURE 4.20. Les chiffres de l’horloge deviennent d’importants repères d’orientation. Elle introduit le spéculum dans le méat, entre 3 h et 9 h, vers le bas et en avant. Le conduit auditif étant recourbé, le spéculum ne donnera pas une vue panoramique de la membrane tympanique, à moins de redresser le conduit . Chez les nourrissons, la courbure du conduit est orientée vers le haut. Il faut donc tirer le pavillon de l’oreille vers le bas et l’arrière, entre 6 h et 9 h, pour redresser le conduit FIGURE 4.21A. Chez les enfants plus âgés, généralement ceux de plus de 3 ans, le conduit est courbé vers le bas et l’avant. Il faut donc tirer le pavillon de l’oreille vers le haut et l’arrière, à 10 h FIGURE 4.21B. Si l’infirmière éprouve de la difficulté à voir la membrane, elle essaie de repositionner la tête, elle introduit le spéculum à un autre angle et tire le pavillon de l’oreille dans une direction légèrement différente. Elle n’insère pas le spéculum au-delà de la partie cartilagineuse (la plus externe) du conduit, généralement située à une distance de 0,6 à 1,25 cm chez les enfants plus âgés. L’insertion du spéculum dans la partie postérieure ou osseuse du conduit est douloureuse.

Chez les nouveau-nés et les jeunes nourrissons, les parois du conduit sont pliables et molles, compte tenu des structures cartilagineuses et osseuses non formées. Il faut donc insérer le très petit spéculum de 2 mm plus profondément dans le conduit que chez les enfants plus âgés. Il faut veiller particulièrement à ne pas endommager les parois ou le tympan. C’est pourquoi seule une inrmière expérimentée doit insérer un otoscope dans les oreilles des nouveau-nés ou des jeunes nourrissons.

Examen otoscopique

A

4

B

À l’aide du pouce et de l’index de la main libre (généralement de la main non dominante), l’inrmière saisit le pavillon de l’oreille. Dans le cas des deux positions d’immobilisation, elle tient l’otoscope à l’envers, à la jonction de la tête et de la main, à l’aide du pouce et de l’index. Elle place les autres doigts contre le crâne pour permettre à l’otoscope de suivre les mouvements de l’enfant en cas de mouFIGURE 4.18 Position de contention vement brusque. Elle se sert de la pendant l’examen otoscopique – A Nourrisson main dominante pour examiner placé sur le parent. B Nourrisson couché sur les deux oreilles ou elle inverse les le dos. deux mains pour chaque oreille, pourvu qu’elle soit à l’aise. À mesure que l’inrmière introduit le spéculum dans le conduit auditif, elle inspecte les parois du conduit, la couleur de la membrane tympanique, le cône lumineux et les repères habituels des saillies osseuses de l’oreille moyenne. Les parois du conduit auditif externe sont roses et plus pigmentées chez les enfants au teint foncé. De minuscules poils peuvent s’observer sur la partie la plus externe, là où le cérumen est produit. L’inrmière note les signes d’irritation, de corps étranger ou d’infection. La membrane tympanique est de couleur rose clair et nacrée, translucide ou grise. L’inrmière note la présence d’un érythème marqué (qui peut indiquer une otite moyenne suppurante), d’une couleur terne, opaque et grisâtre (qui évoque parfois une otite moyenne séreuse) ou de zones gris cendré (signes de cicatrisation d’une perforation antérieure). Une zone Chapitre 4

Examen physique : oreille externe et conduit auditif externe.

FIGURE 4.19 Positionnement de la tête inclinée vers l’épaule controla­ térale pour bien voir la membrane tympanique

Examen clinique : anamnèse et examen physique

177

processus latéral du marteau. L’inrmière note l’absence du cône lumineux, ou encore une saillie anormale ou inexistante d’un de ces repères anatomiques.

Extraction d’un corps étranger

FIGURE 4.20 Repères de la membrane tympanique avec horloge superposée

A

B

Il arrive souvent que des corps étrangers se logent dans l’oreille des enfants ; il peut s’agir, par exemple, de gommes à effacer ou d’aliments. Les symptômes peuvent inclure la douleur ainsi qu’un écoulement et une diminution de l’acuité auditive. Les objets mous, comme le papier ou les insectes, peuvent être retirés avec des pinces. Les petits objets durs, comme les perles, peuvent être ôtés à l’aide d’une pointe aspirante ou d’un crochet, ou par irrigation. L’irrigation est toutefois contre-indiquée si l’objet est une matière végétale comme des légumineuses ou des pâtes, qui grossissent au contact d’un liquide .

Examen de l’audition

FIGURE 4.21 Positionnement de visualisation du tympan – A Pour un nourrisson. B Pour un enfant de plus de trois ans.

ALERTE CLINIQUE

En cas de doute sur le type d’objet coincé dans l’oreille et sur la méthode adéquate de retrait, l’inrmière doit diriger l’enfant vers le professionnel de la santé approprié.

noire indique habituellement une perforation de la membrane qui n’a pas guéri. La contraction et l’inclinaison caractéristiques de la membrane tympanique entraînent la réexion de la lumière de l’otoscope à peu près entre 5 h ou 7 h. Le cône lumineux est une réexion assez bien dénie, de forme conique, normalement en direction opposée du visage FIGURE 4.20. Les repères osseux du tympan incluent l’ombilic, ou l’extrémité du marteau. Il s’agit d’un petit point rond, opaque et concave près du centre du tympan. Le manche du marteau est une ligne blanchâtre qui va de l’ombilic en se dirigeant vers le haut, jusqu’à la marge de la membrane. À l’extrémité supérieure du manche, vers 1 h (dans l’oreille droite), se trouve une protubérance pointue, en forme de pommeau, représentant le

178

Partie 2

Évaluation clinique

Le dépistage universel des troubles de l’audition chez les nouveau-nés (DUTAN) s’est généralisé en Amérique du Nord, en Europe et dans la plupart des autres régions industrialisées, surtout grâce aux progrès technologiques en matière de dépistage et d’intervention. Le DUTAN est vu comme une stratégie permettant la détection et le traitement précoces des troubles de l’audition (SCP, 2016c). Cette stratégie de prévention secondaire se fonde sur des données probantes selon lesquelles un diagnostic et une intervention précoces permettent de meilleures issues chez les enfants ayant une décience auditive. La plupart des programmes de DUTAN visent le dépistage avant 1 mois, la conrmation du diagnostic avant 3 mois et l’intervention avant 6 mois. Par le passé, une décience importante du langage expressif, constatée bien après l’âge de 1 an, constituait la principale caractéristique diagnostique des jeunes enfants ayant une décience auditive. Chez les enfants non dépistés, l’âge moyen au moment du diagnostic est d’environ 24 mois, et une décience auditive moyenne à modérée demeure souvent non décelée jusqu’à l’âge scolaire (SCP, 2016c). L’inrmière doit être attentive aux manifestations cliniques d’une décience auditive, car elles sont subtiles, et les nourrissons qui en ont une afchent souvent un taux élevé de vigilance à l’environnement. Ainsi, un nourrisson sourd peut sembler tourner la tête au tintement d’une cloche, mais il réagit peut-être à la perception du mouvement de la cloche en raison d’un apport visuel ou sensoriel tactile. Les vocalisations, telles que le babillage, peuvent également sembler se développer normalement (SCP, 2016c). L’inrmière peut faire une évaluation sommaire de l’audition de l’enfant en effectuant des tests simples comme

4.3.10

Examen du nez

Inspection des structures externes L’inrmière vérie l’emplacement et l’alignement du nez en traçant une ligne verticale imaginaire allant du point central situé entre les yeux jusqu’à l’échancrure de la lèvre supérieure. Le nez doit longer exactement cette ligne verticale, et chacune de ses parties doit former une rigoureuse symétrie. Elle note toute déviation d’un côté et toute asymétrie dans la taille globale ou le diamètre des narines. La racine du nez est parfois plate chez les enfants d’origine asiatique ou africaine. Le jeune nourrisson respirant exclusivement par le nez, lorsque celui-ci est obstrué, le nourrisson n’a pas le réexe de respirer par la bouche ; il pleure pour pouvoir respirer et peut rapidement démontrer de la dyspnée. Il est donc important que les voies nasales du nourrisson soient libres de sécrétions ou ne soient pas obstruées par le sein de la mère au moment de l’allaitement.

L’éternuement est fréquent chez le nouveau-né. C’est un système de défense qui lui permet de déloger les saletés, facilitant ainsi la respiration. En cas de difculté respiratoire, l’inrmière peut parfois observer des battements des ailes du nez. Ce signe indique une difficulté respiratoire sévère. La FIGURE 4.22 illustre les structures internes et externes du nez.

Inspection des structures internes

clinique

Jugement

le chuchotement, le test de Rinne et le test de Weber. Chez les nourrissons, le test de Moro peut donner des indications sur la capacité auditive (Jarvis, 2015). Il existe plusieurs types de tests auditifs recommandés pour les nourrissons et les enfants TABLEAU 4.10.

Vous effectuez l’examen otoscopique de Mike, âgé de 18 mois. Il a pleuré vigoureusement tout au long de l’examen. Vous notez que son tympan est rouge, mais vous n’émettez pas l’hypothèse d’une otite moyenne, malgré cette observation. Expliquez-en la raison. a) Il n’y a pas d’autres signes cliniques d’otite.

4

b) L’examen n’est pas valable, car il a pleuré. c) Les pleurs contribuent à rendre le tympan rouge. d) Cela indique un problème plus grave que l’otite. MAIS SI...

Si la membrane tympanique de Mike était rosée, qu’est-ce que cela signierait ?

L’inrmière inspecte le vestibule antérieur du nez en poussant l’extrémité du nez vers le haut, en inclinant la tête vers l’arrière et en éclairant la cavité au moyen d’un otoscope muni d’une lampe sans spéculum d’oreille. Elle note la couleur de la muqueuse, qui est normalement plus rouge que les muqueuses buccales, et tout écoulement, enure, sécheresse ou saignement. Aucun écoulement nasal ne doit être présent. En regardant plus en profondeur dans le nez, l’inrmière

CE QU’IL FAUT RETENIR

Le nourrisson respire exclusivement pas le nez ; celui-ci ne doit donc pas être obstrué.

Pratiques inrmières TABLEAU 4.10

Effectuer les tests auditifs recommandés chez le nourrisson et l’enfant

ÂGE

TEST AUDITIF ET DURÉE

TYPE DE MESURE

DÉROULEMENT

Tout âge

• Otoémissions acoustiques provoquées (10 min)

• Mesure de la réponse cochléaire (cellules ciliées externes) à un stimulus

• Insérer dans le conduit auditif une sonde munie d’un émetteur (qui produira le stimulus) et d’un récepteur (qui captera la réponse cochléaire).

Nourrisson

• Évaluation des potentiels évoqués auditifs du tronc cérébral (15 min)

• Mesure de l’activité électrique du nerf auditif et des voies auditives centrales

• Placer des électrodes sur la tête de l’enfant an de capter l’activité électrique des voies auditives provoquée par les stimulus sonores émis par les écouteurs placés sur ses oreilles (les deux oreilles sont stimulées séparément).

Trottineur

• Audiométrie comportementale

• Mesure de la réaction de l’enfant à des stimulus vocaux et tonaux (sons purs d’intensité variable)

• Observer les réactions de l’enfant aux sons émis par les écouteurs placés sur ses oreilles.

Enfant d’âge préscolaire

• Audiométrie tonale et vocale : méthode ludique (30 min)

• Mesure du seuil auditif dans chaque oreille à l’aide d’un audiomètre transmettant des sons à différents volumes et fréquences.

• Inviter l’enfant à toucher un jouet ou un objet chaque fois qu’il entend un son de façon à ce qu’il associe le stimulus tonal ou vocal qu’il entend à un agent renforçateur.

Enfant d’âge scolaire et adolescent

• Audiométrie tonale et vocale : méthode classique (30 min)

• Mesure du seuil auditif dans chaque oreille à l’aide de stimulus vocaux et tonaux

• Demander à l’enfant de lever la main chaque fois qu’il perçoit un stimulus sonore émis par les écouteurs placés sur ses oreilles.

• Tympanométrie (également appelée impédance)

• Détermination du fonctionnement de l’oreille moyenne et détection du changement de pression dans l’oreille moyenne

• Placer une pointe de plastique souple sur le canal auditif ; le tympanomètre mesure le mouvement du tympan lorsque la pression change.

Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

179

inspecte les cornets, des plaques osseuses dépassant la cavité nasale et recouvertes d’une membrane muqueuse. Les cornets augmentent beaucoup la surface de la cavité nasale pendant l’inhalation de l’air. Les espaces ou les canaux entre les cornets sont appelés méats et correspondent à chacun des trois cornets. Il est normalement possible d’observer l’extrémité avant du cornet inférieur et moyen, et le méat moyen. Leur couleur doit être la même que celle de la muqueuse du vestibule. L’inrmière inspecte la cloison, qui doit diviser les vestibules de manière FIGURE 4.22 Structures égale. Elle note toute déviation, en internes et externes du nez particulier si elle entraîne une occlusion d’un côté du nez. Il est parfois possible d’observer une perforation de la cloison 3 nasale. Si l’inrmière soupçonne une perforation, elle dirige la lumière de l’otoscope dans une La percée dentaire est narine et vérie si elle entre dans l’autre narine. présentée en détail dans Dans la mesure où l’olfaction est une fonction le chapitre 3, Croissance, importante du nez, il est possible d’effectuer à ce développement et promo­ stade un test olfactif ou de le réaliser durant l’évation de la santé. luation des nerfs crâniens.

4.3.11

Examen de la bouche et de la gorge

Inspection des structures externes

Examen physique : examen de la bouche.

Les lèvres forment la principale structure de l’extérieur de la bouche . Elles doivent être humides, molles, lisses et roses, ou d’une teinte plus foncée que la peau avoisinante. Les lèvres doivent être symétriques lorsqu’elles sont détendues ou tendues. L’inrmière en évalue la symétrie lorsque l’enfant parle ou pleure.

Inspection des structures internes Les principales structures visibles de la cavité buccale et de l’oropharynx sont la muqueuse des lèvres et des joues, les gencives, les dents, la langue, le palais, la luette, les amygdales et l’oropharynx postérieur FIGURE 4.23.

Muqueuses L’inrmière inspecte toutes les zones tapissées de membranes muqueuses (l’intérieur des lèvres et des joues, les gencives, le dessous de la langue, les palais et l’arrière du pharynx) pour vérier la couleur, une éventuelle zone de plaques blanches ou d’ulcérations, la présence de saignements, la sensibilité et l’hydratation. Les membranes doivent être rose foncé, lisses, luisantes, uniformes et humides.

Dents L’inrmière inspecte les dents ; elle en fait le décompte sur chaque arcade dentaire, elle vérie

180

Partie 2

Évaluation clinique

FIGURE 4.23

Structures internes de la bouche

leur hygiène, l’occlusion ou l’affrontement des dents antagonistes 3 . La décoloration de l’émail dentaire par une plaque bien visible (revêtement blanchâtre de la surface dentaire) est un signe de mauvaise hygiène dentaire qui révèle la nécessité d’un counseling. Les taches brunes dans les crevasses de la couronne des dents ou entre les dents peuvent être des caries. La présence sur l’émail de zones allant d’un blanc crayeux au jaune ou au brun peut indiquer une uorose (ingestion excessive de uor). Si une dent a une couleur noir verdâtre, il peut s’agir d’une décoloration temporaire liée à l’ingestion de suppléments de fer.

Gencives L’inrmière examine les gencives entourant les dents. Leur couleur est normalement d’un rose corail, et leur surface est tachetée, comme une peau d’orange. Chez les enfants au teint foncé, les gencives sont plus colorées, et il est fréquent d’observer une zone plus ou moins brune le long de la ligne gingivale.

Langue L’inrmière inspecte la langue pour vérier les papilles, des petites projections contenant plusieurs papilles gustatives qui donnent à la langue son apparence rugueuse caractéristique. Elle note la taille et la mobilité de la langue. Normalement, l’extrémité de la langue doit arriver jusqu’aux lèvres ou au-delà. Une langue en forme de cœur lors de la protusion indique un frein trop court, ce qui nuit à la prise du sein du nourrisson. L’inrmière doit signaler la présence de taches blanchâtres sur la langue, le palais ou les muqueuses des joues, qui pourraient signaler la présence d’une infection fongique.

Le plafond de la cavité buccale comprend le palais dur, situé près de l’avant de la cavité buccale, et le palais mou, situé vers l’arrière du pharynx et doté d’une petite saillie médiane appelée luette. L’inrmière inspecte soigneusement les palais pour vérier qu’ils sont intacts. L’arcade du palais doit être en forme de dôme. Si le plafond de la cavité buccale est étroit et plat, ou s’il est élevé et arqué, cela affecte l’emplacement de la langue et peut entraîner des problèmes d’alimentation et de langage. L’inrmière teste le mouvement de la luette en provoquant un réexe pharyngé. La luette doit remonter de manière à séparer le rhinopharynx de l’oropharynx.

Oropharynx et amygdales L’inrmière examine l’oropharynx et note la taille ainsi que la couleur des amygdales palatines, qui sont normalement de la même couleur que la muqueuse avoisinante ; elles ont un aspect glandulaire plutôt que lisse et sont à peine visibles sur le bord des piliers antérieurs du voile du palais. La taille des amygdales varie considérablement pendant l’enfance. Souvent, les amygdales sont invisibles jusqu’à l’âge de deux ans ; par la suite, elles sont facilement observables dans l’oropharynx. L’inrmière doit signaler toute enure et toute rougeur ou blancheur sur les amygdales.

Abaisse-langue et technique de coopération Avec un enfant qui coopère, l’inrmière peut procéder presque entièrement à l’examen de la bouche et de la gorge sans utiliser d’abaisse-langue. L’inrmière demande à l’enfant : • d’ouvrir grand la bouche ; • de bouger la langue dans différentes directions pour qu’elle puisse tout inspecter ; • de dire « ah », ce qui fait baisser la langue et permet de bien apercevoir tout l’arrière de la bouche (amygdales, luette et oropharynx). Pour mieux observer la muqueuse buccale, l’inrmière demande à l’enfant d’utiliser ses doigts pour déplacer la lèvre vers l’extérieur et la joue d’un côté ENCADRÉ 4.16. Les nourrissons et les trottineurs résistent habituellement aux tentatives de leur faire garder la bouche ouverte. Comme l’examen de la bouche peut être désagréable pour l’enfant, l’inrmière s’en acquittera à la n de l’examen physique (en même temps que l’examen des oreilles) ou pendant des épisodes de pleurs. Cependant, l’emploi d’un abaisse-langue est nécessaire. L’inrmière place l’abaisse-langue le long du côté de la langue, et non à l’arrière centre, car cela provoque un réexe pharyngé (Jarvis, 2015). La FIGURE 4.24 illustre le positionnement adéquat de l’enfant pour l’examen de la bouche.

Soutien inrmier ENCADRÉ 4.16

Encourager l’ouverture de la bouche pour l’examen

• Effectuer l’examen devant un miroir. • Laisser l’enfant examiner d’abord la bouche de quelqu’un d’autre, par exemple celle du parent, de l’inrmière ou d’une marionnette, puis examiner la sienne. • Demander à l’enfant d’incliner légèrement la tête en arrière, de

4.3.12

Examen du thorax

respirer profondément par la bouche et de retenir sa respiration ; la langue descend ainsi dans le plancher buccal, sans l’aide d’un abaisse-langue. • Brosser légèrement le palais avec un écouvillon en coton peut contribuer à garder la bouche ouverte pendant l’examen.

clinique

L’inrmière examine le thorax et vérie sa taille, sa forme, sa Felipe, âgé de cinq mois, refuse de boire. Il pleure symétrie, son mouvement, le dès que sa mère place le biberon dans sa bouche. développement des seins et Il prend des antibiotiques pour une otite. Vous les repères osseux formés par pensez à inspecter l’intérieur de la bouche de les côtes et le sternum. La cage Felipe. Qu’est-ce qui pourrait vraisemblablement thoracique comprend 12 côtes être observé sur la muqueuse buccale ? sur chaque côté et le sternum situé dans la ligne médiane du a) Une rougeur prononcée. tronc FIGURE 4.25. Le sternum b) De petits ulcères suintants. est composé de trois parties c) Une sécheresse de la muqueuse. principales. d) Des plaques blanchâtres. 1. Le manubrium, soit la partie supérieure du sternum, peut être palpé à la base du cou à la fourchette sternale. 2. Le plus grand segment du sternum est le corps sternal, qui forme l’angle sternal (angle de Louis) lorsqu’il s’articule avec le manubrium. 3. À la n du corps sternal se trouve un petit appendice mobile appelé appendice xiphoïde. L’angle de la marge costale avec le sternum est appelé angle costal postérieur ; il est compris entre 45 et 50°. Ces structures osseuses sont des repères importants pour l’emplacement des côtes et les espaces intercostaux (EIC), c’està-dire les espaces entre les côtes, qui sont numérotés en fonction de la côte située directement au-dessus de l’espace. Ainsi, l’espace situé juste en dessous de la deuxième côte est appelé deuxième EIC. La cavité thoracique est également divisée en segments observables FIGURE 4.24 Positionnement de l’enfant lorsque des lignes imaginaires sur le thorax et le pendant l’examen de la bouche.

Jugement

Plafond de la cavité buccale

Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

181

4

thorax), du thorax en carène (saillies du sternum vers l’extérieur) ou du thorax en entonnoir (enfoncement du sternum). Au début de l’enfance, la morphologie du thorax est presque circulaire, le diamètre antéro postérieur (de l’avant à l’arrière) étant égal au diamètre transversal ou latéral (d’un côté à l’autre). Au fur et à mesure que l’enfant grandit, le thorax s’élargit normalement en direction transverse, ce qui diminue le diamètre antéropostérieur par rapport au diamètre latéral. L’inrmière note l’angle formé par la marge costale inférieure et le sternum, et palpe la jonction des côtes avec le cartilage costal (jonction costochondrale) et le sternum, qui de vrait être assez lisse.

FIGURE 4.25

Cage thoracique

dos sont dessinées. La FIGURE 4.26 illustre les divisions antérieures, latérales et pos térieures de la cavité thoracique.

A

Déroulement de l’examen

B

C

FIGURE 4.26 Repères imaginaires sur la poitrine – A Antérieure. B Latérale droite. C Postérieure.

182

Partie 2

Évaluation clinique

L’inrmière mesure la taille de la poitrine en plaçant un ruban à mesurer autour de la cage thoracique, au niveau de la ligne mamelonnaire. Pour plus de précision, elle effectue deux mesures – l’une pendant l’inspiration et l’autre pendant l’expiration – et inscrit la moyenne. La taille du thorax est particulièrement importante relativement au périmètre crânien, comme il en est question dans les mesures de la croissance abordées précédemment (voir la page 157). L’infirmière doit toujours signaler les disproportions marquées, car la plupart sont dues à une croissance anormale de la tête. Certaines peuvent résulter cependant d’une modication de la morphologie du thorax, comme c’est le cas du thorax en tonneau (arrondissement du

Le mouvement de la paroi thoracique doit être bilatéralement symétrique et coordonné avec la respiration. Pendant l’inspiration, le thorax s’élève et s’élargit, le diaphragme descend et l’angle costal augmente. Pendant l’expiration, le thorax s’abaisse et diminue de taille, le diaphragme remonte et l’angle costal se rétrécit FIGURE 4.27. Chez les enfants âgés de moins de six ou sept ans, le mouvement respiratoire est principalement abdominal ou diaphragmatique. Chez les enfants plus âgés, en particulier chez les lles, les respirations sont essentiellement thoraciques. Quel que soit le type de respiration, le thorax et l’abdomen doivent monter et descendre simultanément. L’inrmière signalera systématiquement la moindre asymétrie du mouvement.

FIGURE 4.27 Mouvement de la cage thoracique pendant la respiration

Aréole et développement mammaire Pendant l’examen de la surface cutanée du thorax, l’inrmière observe la position des mamelons et tout signe de développement mammaire. Une congestion des mamelons à la naissance est possible en raison des hormones maternelles. Normalement, les mamelons sont situés un peu latéralement par rapport à la ligne médioclaviculaire entre la quatrième et la cinquième côte. Il y a parfois un mamelon surnuméraire. L’inrmière note la symétrie de l’emplacement des mamelons et la conguration normale de l’aréole de pigmentation plus foncée autour du mamelon plat de l’enfant prépubère. Le développement mammaire pubertaire débute généralement chez les lles entre l’âge de 7 et 13 ans . L’inrmière rapporte tout développement mammaire précoce ou tardif et toute autre caractéristique sexuelle secondaire. Chez l’homme, l’hypertrophie mammaire (gynécomastie) peut être due à des troubles hormonaux ou systémiques, mais elle est plus souvent liée au tissu adipeux ou encore à un changement corporel transitoire au début de la puberté. Quel que soit le cas, l’inrmière doit interroger l’enfant sur ses sentiments concernant l’hypertrophie mammaire. Chez les adolescentes ayant atteint la maturité sexuelle, l’inrmière palpe les seins pour vérier la présence de masses ou de nodules durs. Elle prote de l’occasion pour discuter de l’importance d’observer et de connaître ses seins.

Poumons Les poumons sont situés à l’intérieur de la cavité thoracique, à raison d’un poumon de chaque côté du sternum . Chaque poumon est composé d’un sommet, ou apex pulmonaire, légèrement pointu, qui dépasse la première côte ; d’une base, large et concave, qui surmonte le diaphragme en forme de dôme ; et d’un corps, divisé en lobes. Le poumon droit comporte trois lobes : le lobe supérieur, le lobe moyen et le lobe inférieur. En raison de l’espace occupé par le cœur, le poumon gauche n’en compte que deux : le lobe supérieur et le lobe inférieur FIGURE 4.28.

Inspection L’examen des poumons consiste essentiellement à observer les mouvements respiratoires dont il a déjà été question. L’infirmière évalue la fréquence (nombre par minute), le rythme (régulier, irrégulier ou périodique), l’amplitude (profonde ou supercielle) et la qualité (sans effort, automatique, difcile ou laborieuse) des respirations. Elle note le type de bruits respiratoires : sifant, grognant, ronant.

Palpation L’inrmière évalue les mouvements respiratoires en plaçant chaque main à plat contre le dos ou le thorax, avec les pouces sur la ligne médiane, le long de la marge costale inférieure des poumons. L’enfant

4

FIGURE 4.28

Poumons et emplacement des lobes dans la cavité thoracique

doit être assis pendant l’intervention et, s’il coopère, il doit prendre plusieurs respirations profondes. Pendant la respiration, les mains de l’inrmière se déplacent avec la paroi thoracique. L’inrmière rapporte toute asymétrie du mouvement.

Percutation Les inrmières expérimentées peuvent percuter les poumons. Le poumon antérieur est percuté de l’apex à la base, habituellement lorsque l’enfant est en position couchée ou assise. L’inrmière percute symétriquement chaque côté du thorax de manière séquentielle an de comparer les bruits. Elle procède de la même façon et dans la même séquence pour percuter les poumons postérieurs, sauf que l’enfant doit être assis. La résonance est perçue au-dessus de tous les lobes pulmonaires qui ne sont pas adjacents à d’autres organes. L’inrmière note et signale tout bruit inhabituel.

Examen physique : poumons et région postérieure du thorax. Examen physique : bruits respiratoires et région antérieure du thorax.

Auscultation L’auscultation pulmonaire consiste à évaluer les bruits respiratoires au moyen d’un stéthoscope, en n’écoutant jamais moins qu’un cycle complet, soit une inspiration et une expiration. Les bruits respiratoires s’entendent mieux lorsque l’enfant inspire profondément . Cependant, si l’enfant est en bronchospasme ou s’il est asthmatique, une inspiration profonde peut fausser l’évaluation de son état réel, faisant paraître celui-ci plus grave. Il existe trois types de bruits respiratoires normaux : le murmure vésiculaire, le bruit bronchovésiculaire et le bruit trachéobronchique TABLEAU 4.11.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Lors de l’auscultation pulmonaire, il faut écouter un cycle respiratoire complet, soit une inspiration et une expiration.

L’absence ou la diminution des bruits respiratoires est une anomalie qui justie toujours Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

183

Techniques de soins TABLEAU 4.11

Évaluer les bruits respiratoires

AUSCULTATION EFFICACE

ENCOURAGEMENT AUX RESPIRATIONS PROFONDES

RECONNAISSANCE DES BRUITS RESPIRATOIRES NORMAUX

• Vérier que la salle d’examen est calme et confortable.

• Demander à l’enfant de soufer pour « éteindre » la lumière d’un otoscope ou d’une lampe de poche ; discrètement, éteindre la lumière après sa dernière tentative pour que l’enfant ait l’impression d’avoir réussi.

• Murmure vésiculaire :

• S’assurer que l’enfant est détendu et qu’il ne pleure pas, ne parle pas ou ne rit pas. Si l’enfant pleure, le noter. • Réchauffer le stéthoscope avant de l’appliquer contre la peau de l’enfant. • Appliquer une pression ferme sur la cupule du stéthoscope, sans pour autant empêcher les vibrations et la transmission des sons. • Éviter de placer le stéthoscope sur les vêtements, de le déplacer contre la peau, de respirer sur les tubes ou de faire glisser les doigts au-dessus de la cupule, car cela peut produire des sons qui peuvent être confondus avec des problèmes pathologiques. • Procéder de manière symétrique et ordonnée pour comparer les bruits.

• Placer une boule de coton dans la paume de la main de l’enfant ; lui demander de soufer dessus pour que le parent puisse l’attraper. • Placer un petit morceau de tissu à l’extrémité d’un crayon et demander à l’enfant de soufer pour enlever le tissu. • Demander à l’enfant de soufer comme sur son gâteau d’anniversaire ou de faire des bulles.

Jugement

clinique

d’autres examens. La présence de liquide, d’air ou de Annie, âgée de quatre ans, est hospitalisée pour masses solides dans l’esune pneumonie. La radiographie pulmonaire pace pleural entrave la montre que c’est le lobe inférieur droit qui est conduction des bruits respiatteint. Que devriez-vous entendre au cours de ratoires. L’atténuation des l’auscultation de cette région ? bruits respiratoires dans a) Des sibilances. certaines zones pulmonaires peut signaler à l’inrmière b) Des ronchus. que ces zones bénéficiec) Des crépitants. raient éventuellement d’une d) Un murmure. physiothérapie thoracique. L’augmentation des bruits respiratoires à la suite d’un traitement pulmonaire indique un meilleur passage de l’air par les voies respiratoires. Les termes descriptifs se rapportant à divers profils respiratoires sont énumérés dans le TABLEAU 4.12. De multiples anomalies pulmonaires produisent des bruits adventices, qui ne sont normalement pas entendus au-dessus du thorax. Ces bruits s’ajoutent aux autres bruits respiratoires normaux ou anormaux. Ils sont classés en trois grands groupes (Jarvis, 2015) : 1. les crépitants, qui résultent du passage de l’air à travers un liquide, de l’humidité dans les alvéoles pulmonaires ou de l’affaissement de celles-ci (atélectasie) ; 2. les ronchus, qui résultent du passage de l’air à travers un liquide dans les voies respiratoires ;

184

Partie 2

Évaluation clinique

– Ausculter toute la surface des poumons. – À l’exception de la région interscapulaire supérieure et de la région située sous le manubrium, l’inspiration est plus forte, plus longue et plus aiguë que l’expiration. • Bruit bronchovésiculaire : – Ausculter la région interscapulaire supérieure et la région antérieure où bifurquent la trachée et les bronches. – L’inspiration est plus forte et plus aiguë que la respiration vésiculaire. • Bruit trachéobronchique : – Ausculter les poumons au-dessus de la trachée, près de la fourchette sternale et à l’angle de Louis. – La phase inspiratoire est courte ; la phase expiratoire est longue.

3. les sibilances, produites par le passage de l’air dans des conduits plus étroits, quelle qu’en soit la cause, par exemple un exsudat, une inammation, un spasme ou une tumeur. Savoir distinguer les différents types de bruits pulmonaires exige beaucoup de pratique sous la tutelle d’une personne expérimentée. Il est souvent préférable de décrire le type de bruit entendu dans les poumons que d’essayer de l’interpréter. L’inrmière rapporte systématiquement le moindre bruit anormal pour que l’enfant subisse d’autres examens.

Cœur Le cœur est logé dans la cage thoracique, plus précisément dans le médiastin, entre les deux poumons, au-dessus du diaphragme FIGURE 4.29. Il se situe de part et d’autre du sternum : les deux tiers environ de sa masse se trouvent dans la partie gauche du thorax, et le reste dans la partie droite. En forme de trapèze, il s’étend : • verticalement le long du bord droit du sternum, de la deuxième à la cinquième côte ; • horizontalement (bord inférieur) du bord inférieur droit du sternum jusqu’à l’intersection de la cinquième côte et de la ligne médioclaviculaire gauche ; • obliquement du bord gauche du sternum, visà-vis de la deuxième côte, jusqu’à l’intersection de la cinquième côte et de la ligne médioclaviculaire gauche ;

TABLEAU 4.12

Prols respiratoires divers

TERME

CARACTÉRISTIQUE

Apnée

Arrêt de la respiration

Balancement thoracoabdominal (respiration paradoxale)

État pathologique au cours duquel le ventre se dégone à l’inspiration et se gone à l’expiration, à l’inverse du mouve­ ment habituel ; découle de l’utilisation des muscles respiratoires accessoires en cas d’épuisement du diaphragme.

Bradypnée

Diminution de la fréquence respiratoire

Dyspnée

Difculté respiratoire

Hyperpnée

Grande amplitude respiratoire

Hyperventilation

Tachypnée et hyperpnée

Hypoventilation

Faible amplitude respiratoire (supercielle) et rythme irrégulier

Respiration agonique

Dernier soufe avant le décès

Respiration de Biot

Alternance de périodes d’hyperpnée et d’apnée (comme avec la respiration de Cheyne­Stokes, sauf que l’amplitude reste constante)

Respiration de Cheyne­Stokes

Dyspnée caractérisée par une succession de respirations d’amplitude progressivement croissante puis décroissante, chaque cycle étant séparé par une pause respiratoire

Respiration de Kussmaul

Respiration en plateau avec hyperventilation, et respiration haletante et laborieuse ; observée généralement en cas de coma diabétique ou dans d’autres états d’acidose respiratoire

Tachypnée

Augmentation de la fréquence respiratoire

4

• horizontalement (base ou bord supérieur) du bord droit au bord gauche du sternum, au niveau du deuxième espace intercostal.

• juste en dehors de la ligne médioclaviculaire gauche, au niveau du quatrième espace intercostal, chez les enfants de moins de quatre ans ;

Inspection

• sur la ligne médioclaviculaire gauche, au niveau du quatrième espace intercostal, chez les enfants de quatre à six ans ;

Pour inspecter la région du cœur au niveau du thorax, l’inrmière se place en diagonale avec l’enfant pour observer la région précordiale (région du thorax située en avant du cœur) et comparer les deux côtés de la cage thoracique, qui devraient normalement être symétriques . Lorsque la paroi thoracique est mince, il est possible d’apercevoir des ondulations correspondant aux battements cardiaques. Pour qu’elle soit complète, l’évaluation de la fonction cardiaque ne doit pas se limiter au cœur : elle doit aussi inclure la prise de tous les pouls FIGURE 4.30, en particulier les pouls fémoraux, la prise de la pression artérielle, l’évaluation de la fonction respiratoire ainsi que la recherche d’anomalies telles qu’une distension des veines du cou, un hippocratisme digital, une cyanose périphérique ou un œdème.

Examen physique : cœur et région antérieure du thorax.

• légèrement à droite de l’intersection de la ligne médioclaviculaire gauche et du quatrième espace intercostal chez les enfants de sept ans ;

Palpation Chox apexien L’inrmière doit localiser le choc apexien, c’est-à-dire le battement perçu à la palpation à l’extrémité latérale du cœur, qui correspond au choc de l’apex contre la paroi thoracique. Normalement, il se trouve :

FIGURE 4.29

Emplacement du cœur dans le thorax Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

185

• sur la ligne médioclaviculaire gauche, au niveau du cinquième espace intercostal, chez les enfants de plus de sept ans (Duderstadt, 2014 ; Jarvis, 2015). L’emplacement du choc apexien peut donner une idée de la taille du cœur (en cas d’hypertrophie, l’apex se déplace vers la gauche et vers le bas) ; cela dit, il ne faut pas se er uniquement à ce paramètre pour évaluer sa taille, puisque la position du cœur se modifie avec la croissance.

FIGURE 4.30

L’endroit où les battements cardiaques sont perçus avec un maximum d’intensité s’appelle le point d’impulsion maximale (PIM). Il coïncide en principe avec l’apex du cœur. Cependant, le PIM n’est pas Emplacement des pouls toujours situé à l’apex. Par conséquent, il faut bien observer l’endroit du PIM avant d’employer l’expression choc apexien.

Examen physique : remplissage capillaire des extrémités supérieures.

Remplissage capillaire Par ailleurs, l’inrmière doit mesurer le temps de remplissage capillaire, un paramètre important qui permet d’évaluer le débit de la circulation périphérique. Pour ce faire, elle doit appuyer légèrement sur un ongle de la main ou du pied, ce qui aura pour effet de blanchir le lit de l’ongle . Le temps de remplissage capillaire correspond au temps qu’il faut à la peau pour reprendre sa couleur normale 1 .

1 Le temps de remplissage capillaire doit être très court (moins de deux secondes). S’il est plus long que la normale, c’est qu’il y a une réduction de la circulation sanguine ou que la température ambiante est basse.

186

Partie 2

Origine des bruits cardiaques Les bruits du cœur proviennent de l’ouverture et de la fermeture des valves cardiaques et des vibrations produites par le choc du sang contre les parois du cœur et des artères. D’ordinaire, ce sont les deux premiers bruits du cœur, B1 et B2, que l’inrmière entend lors de l’auscultation cardiaque. B1 est produit par la fermeture des valves tricuspide et mitrale (qui sont parfois appelées valve auriculoventriculaire droite et valve auriculoventriculaire gauche), alors que B2 résulte de la fermeture des valves pulmonaire et aortique (qui sont parfois appelées valves semi-lunaires ou valves sigmoïdes). Un dédoublement de B2, à savoir le décalage entre la fermeture des valves aortique et pulmonaire, peut être perceptible à l’inspiration. Ce dédoublement est physiologique, donc normal. S’il est entendu dans la phase expiratoire, sa présence est anormale et fournit d’importantes données cliniques 2 . L’inrmière peut percevoir deux autres bruits, B3 et B4 (ces bruits sont définis dans le TABLEAU 14.13). Si B3 est entendu chez certains enfants, c’est rarement le cas pour B4. D’ailleurs, lorsque ce dernier est perçu, il est généralement recommandé de procéder à une évaluation plus approfondie de la fonction cardiaque.

Distinction des bruits cardiaques La FIGURE 4.31 illustre l’emplacement approximatif des valves qui contrôlent l’entrée et la sortie du sang dans les cavités cardiaques. Il est à noter que les sièges anatomiques des valves ne correspondent pas exactement aux foyers d’auscultation où les bruits du cœur sont les mieux entendus ; les sites auscultatoires se trouvent plutôt en aval de ces valves. Habituellement, B1 est plus nettement perceptible à l’apex du cœur, dans les foyers mitral et tricuspide, et B2 à la base du cœur, dans les foyers pulmonaire et aortique TABLEAU 4.13. L’inrmière doit écouter chaque bruit cardiaque en faisant descendre lentement le stéthoscope le long du thorax. Elle doit également ausculter les régions suivantes à la recherche de l’irradiation de bruits anormaux : région sternoclaviculaire, située au-dessus des clavicules et du manubrium ; région qui s’étend le long de la ligne sternale ; région située le long de la ligne axillaire moyenne gauche ; et région située sous la scapula.

ALERTES CLINIQUES

2 Le dédoublement xe de B2, soit l’absence de variation du dédoublement de B2 au moment de l’inspiration et de l’expiration, est un signe diagnostique important qui peut évoquer une communication interauriculaire.

Auscultation

FIGURE 4.31 Direction de propagation des bruits cardiaques en fonction des sièges anatomiques des valves et des foyers (encerclés) d’auscultation

Évaluation clinique

L’inrmière doit ausculter le cœur de l’enfant au moins deux fois : une fois en position assise et une fois en position couchée. Si elle perçoit des bruits adventices, elle devra procéder à un examen plus poussé, c’est-à-dire ausculter l’enfant lorsqu’il est debout, lorsqu’il est assis, le torse penché vers l’avant, et lorsqu’il est en décubitus latéral. Précisons que B4 est plus facilement perceptible lorsque l’enfant est allongé, mais qu’en général, il n’est plus audible lorsque l’enfant s’assied ou se met debout.

Pratiques inrmières TABLEAU 4.13

Procéder à l’auscultation et l’identication des bruits cardiaquesa

FOYER AUSCULTATOIRE

LOCALISATION SUR LE THORAX

CARACTÉRISTIQUES DU BRUIT CARDIAQUE

Foyer aortique

2e espace intercostal droit, près du sternum

• B2 produit un son plus fort que B1.

Foyer pulmonaire

2e espace intercostal gauche, près du sternum

• Zone où le dédoublement de B2 (décalage entre la fermeture des deux valves auriculoventriculaires, qui augmente normalement à l’inspiration) et le bruit de la fermeture de la valve pulmonaire sont les mieux perçus.

Point d’Erb

3e espace intercostal gauche, près du sternum

• Foyer où sont fréquemment détectés des soufes fonctionnels et des soufes d’origine aortique ou pulmonaire.

Foyer tricuspide

5e espace intercostal gauche, près du sternum

• Zone où B1 est entendu plus fort que B2.

À l’intersection du 5e espace intercostal et de la ligne médioclaviculaire gauche (en dehors de la ligne médioclaviculaire gauche, au niveau du 3e ou du 4e espace intercostal chez les nourrissons)

• Zone où B1 est maximal ; il est d’ailleurs possible de percevoir son dédoublement lorsque le bruit de la fermeture de la valve mitrale est plus fort que celui de la fermeture de la valve tricuspide.

Foyer mitral ou apexien

• Zone où le bruit de la fermeture de la valve aortique est le mieux perçu.

• B1 est synchrone avec le pouls carotidien.

• B3 est surtout perceptible au début de l’expiration, lorsque l’enfant est en décubitus dorsal ou latéral gauche ; il est possible de l’entendre immédiatement après B2 ; la succession des bruits B1, B2 et B3 évoque le galop d’un cheval. • B4 est surtout perceptible pendant l’expiration, lorsque l’enfant est en décubitus dorsal (il est moins bien perçu en décubitus latéral gauche) ; il peut être entendu juste avant B1 ; la succession des bruits B4, B1 et B2 évoque le galop d’un cheval.

a

L’inrmière doit utiliser aussi bien le diaphragme que la cupule du stéthoscope pour ausculter le cœur (c’est la cupule qui permet d’entendre B3 et B4, ainsi que les soufes de basse fréquence).

Voici les paramètres que l’infirmière doit prendre en considération lorsqu’elle écoute les bruits du cœur : 1. la qualité (les bruits doivent être nets et distincts ; ils ne doivent pas lui sembler étouffés, diffus ou distants) ; 2. l’amplitude, en tenant compte du foyer d’auscultation (les bruits ne doivent être ni trop faibles ni trop forts) ; 3. la fréquence (elle doit être la même que celle du pouls radial) ; 4. le rythme (les bruits doivent être réguliers et uniformes). L’arythmie sinusale est un type d’arythmie présente chez de nombreux enfants. Cette arythmie est considérée comme normale et elle est caractérisée par une augmentation de la fréquence cardiaque à l’inspiration et une diminution de celle-ci à l’expiration. Pour la distinguer d’une véritable arythmie, l’inrmière doit demander à l’enfant de retenir sa respiration pendant qu’elle l’ausculte. S’il s’agit effectivement d’une arythmie sinusale, la fréquence cardiaque demeurera stable quand l’enfant est en apnée.

Soufes cardiaques Outre les bruits cardiaques cités précédemment, l’auscultation peut révéler la présence d’un autre type de bruits important :

les soufes cardiaques. Les soufes sont imputables aux vibrations produites par la circulation et les turbulences du sang dans les cavités cardiaques ou dans les artères de gros calibre. Les soufes sont classés selon deux catégories : • Fonctionnel (anorganique ou physiologique) : absence de lésion ou d’anomalie anatomique ; traduit des turbulences dans le ux sanguin. Peut parfois être causé par une anémie. • Organique (pathologique) : présence d’une lésion anatomique s’accompagnant ou non d’une anomalie physiopathologique.

CONSEIL CLINIQUE

Comme B1 est synchrone avec le pouls carotidien, l’inrmière peut palper ce pouls avec son index et son majeur pendant qu’elle écoute les bruits du cœur pour bien faire la distinction entre B1 et B2.

Il convient de noter que l’acquisition de compétences cliniques, telles que la description et la classication des soufes cardiaques, nécessite beaucoup d’entraînement et une longue formation. Les soufes sont distincts des bruits normaux du cœur et ressemblent à des bruissements. L’inrmière doit pouvoir les reconnaître et elle doit noter : 1) leur topographie, ou la région du cœur où ils sont le plus perceptibles ; 2) le moment précis de la révolution cardiaque où ils se font entendre ; 3) leur intensité (en tenant compte de la position de l’enfant) ; et 4) leur force. Les critères de classication subjectifs habituellement employés pour évaluer la force ou l’intensité d’un soufe sont énumérés dans le TABLEAU 4.14. Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

187

4

TABLEAU 4.14

COTE

Échelle de cotation de l’intensité des soufes cardiaques

DESCRIPTION

abdominaux pour réussir à distinguer les anomalies des résultats normaux escomptés FIGURE 4.32. Pour faciliter la description de la cavité abdominale, il faut la diviser en quatre quadrants en traçant une ligne médiane imaginaire du sternum à la symphyse pubienne, et une ligne horizontale imaginaire qui passe par l’ombilic :

1/6

Très faible ; bien souvent, le soufe n’est entendu que lorsque l’enfant est assis.

2/6

Assez fort ; en général, le soufe est entendu sans difculté, quelle que soit la position de l’enfant ; il est légèrement plus fort que les soufes du premier degré.

3/6

Fort ; il ne s’accompagne d’aucun frémissement.

• quadrant supérieur droit ;

4/6

Fort ; il s’accompagne d’un frémissement.

• quadrant inférieur droit.

5/6

Assez fort pour qu’il soit perçu même si le stéthoscope touche à peine la région précordiale ; il s’accompagne d’un frémissement.

Inspection

6/6

Assez fort pour qu’il soit perçu même lorsque le stéthoscope n’est pas en contact avec le thorax ; bien souvent, il suft de rapprocher l’oreille du thorax pour l’entendre ; il s’accompagne d’un frémissement.

4.3.13

ALERTE CLINIQUE

Un abdomen tendu et dur est un signe qui doit être pris très au sérieux. Il peut s’agir d’une occlusion intestinale et d’un iléus paralytique, soit d’une urgence médicale pouvant mener au décès en quelques heures.

TABLEAU 4.15

Examen de l’abdomen

L’examen de l’abdomen se fait en quatre temps : inspection, auscultation, percussion et palpation TABLEAU 4.15. Il vaut mieux procéder à la palpation en dernier, car elle risque de modier les bruits intestinaux, et donc de fausser les résultats de l’examen. Il est indispensable de bien connaître l’emplacement anatomique des organes

• quadrant supérieur gauche ; • quadrant inférieur gauche ;

L’inrmière inspecte tout d’abord le contour de l’abdomen lorsque l’enfant est debout et lorsqu’il est en décubitus dorsal . Normalement, l’abdomen des nourrissons et des jeunes enfants a une forme cylindrique et il est relativement proéminent lorsqu’ils sont debout ou en position verticale en raison de la lordose lombaire et de la faiblesse de la musculature abdominale. Il doit être plat lorsqu’ils sont en décubitus dorsal. Une protrusion de la ligne médiane de l’abdomen dénote habituellement un diastasis. Il arrive aussi qu’une telle protrusion soit observée chez les enfants en bonne santé et, dans ce cas, il s’agit simplement d’une légère variation par rapport au développement musculaire normal.

Examen physique de l’abdomen : inspection, auscultation, percussion et palpation

TECHNIQUE

STRUCTURE À ÉVALUER

ÉLÉMENTS À RECHERCHER

Inspection

Peau

• Coloration, cicatrices, veines dilatées, ecchymoses, érythème, éruptions cutanées, lésions, mouvements de l’abdomen

Ombilic

• Localisation, contour, signes d’inammation, hernie

Contour

• Forme : cylindrique, plat, arrondi, distendu, scaphoïde

• Flancs : voussures

• Symétrie : masse, hernie, diastasis

Auscultation

Percussion

Péristaltisme

• Propagation des ondes péristaltiques

Péristaltisme (borborygme : bruits produits par l’intestin ou parfois l’estomac)

• Claquements métalliques semblables à des gargouillis

Tympanisme

• Estomac, intestin

Matité

• Foie : hépatomégalie

• Intestin : constipation

• Rate : splénomégalie

• Vessie : distension, globe vésical

Palpation légère

Quatre quadrants

Palpation profonde

Foie, rate, rein, gros intestin, vessie

188

Partie 2

• Fréquence (normale : 5 à 35/min) • Péristaltisme : augmenté (diarrhée, début d’une occlusion), diminué (iléus paralytique, péritonite)

• Région douloureuse • Résistance musculaire (défense) volontaire ou involontaire

Évaluation clinique

• Foie : localisation, grosseur (hépatomégalie), consistance (ferme, souple), surface (lisse, nodule)

• Rein : hypertrophie rénale

• Rate : localisation, grosseur (splénomégalie)

• Vessie : distension, globe vésical

• Intestin : constipation, fécalome

sous la forme d’une masse dans le scrotum (Ramsook et Endom, 2016). Pour dépister une telle hernie, l’inrmière doit placer son auriculaire dans l’anneau inguinal superficiel à la base du scrotum et demander à l’enfant de tousser. S’il y a effectivement une hernie, elle la sentira toucher le bout de son doigt.

FIGURE 4.32 Emplacement anatomique des structures abdominales

La peau de l’abdomen doit être ferme en tout point, et exempte de rides et de plis. Des stries (vergetures) blanc argenté ou blanchâtres sont parfois observées sur la peau, en particulier lorsqu’elle est distendue (en cas d’obésité, par exemple). Habituellement, les veines supercielles des enfants minces à la peau claire sont visibles ; elles ne doivent toutefois pas être distendues. L’inrmière doit observer les mouvements de l’abdomen. Normalement, les mouvements du thorax et de l’abdomen sont synchrones. Chez les nourrissons et les enfants minces, il est parfois possible d’apercevoir la propagation des ondes péristaltiques ; ces ondes peuvent être observées en se tenant debout et en plaçant l’abdomen de l’enfant face à soi, à la hauteur des yeux. L’inrmière doit toujours consigner au dossier la présence de ces ondes. Puis, l’inrmière examine l’ombilic (taille et hygiène) et vérie la présence d’une anomalie quelconque, comme une hernie. L’ombilic devrait être plat ou légèrement saillant. En présence d’une hernie, l’inrmière doit palper le sac herniaire pour vérier s’il contient des viscères et évaluer la taille du collet. Il convient de mentionner que les hernies ombilicales sont fréquentes chez les nourrissons (Palazzi et Brandt, 2017). Cette hernie apparaît plus ou moins longtemps après la naissance, à l’endroit où se tenait le cordon ombilical. L’évolution la plus fréquente de cette hernie est la disparition spontanée. Quand l’enfant grandit, l’orice de sortie se rétrécit, et la hernie nit par ne plus se former. Il existe plusieurs variétés de hernies qui font saillie au travers d’autres zones de faiblesse de la paroi abdominale FIGURE 4.33. Par exemple, dans le cas de la hernie inguinale, une partie du péritoine traverse la paroi pour emprunter le canal inguinal. Souvent bilatérale, la hernie inguinale touche surtout les garçons et se présente souvent

4

La hernie fémorale, quant à elle, survient plus souvent chez les filles (Brooks et Hawn, 2017) que chez les garçons et elle se présente sous la forme d’une petite masse qu’il est possible de voir FIGURE 4.33 Sièges des hernies ou de sentir à la surface antérieure de la cuisse, juste sous le ligament inguinal, dans le canal CONSEIL CLINIQUE fémoral (espace virtuel situé de façon médiale par rapport à l’artère fémorale). Pour déceler la La toux sert à augmenter la présence d’une telle hernie, l’inrmière doit pression intra-abdominale, placer l’index de sa main droite sur le pouls qui doit être sufsamment fémoral droit de l’enfant (l’index gauche est élevée pour que l’inrmière placé sur le pouls fémoral gauche) et poser le puisse déceler la présence majeur de la main droite à plat sur la peau vers d’une hernie inguinale. Si la ligne médiane. L’annulaire de la main droite l’enfant est trop jeune pour reposera alors sur le canal fémoral, là où les tousser, l’inrmière peut lui hernies fémorales font habituellement saillie. faire goner un ballon ou le En principe, la détection des hernies de la région faire rire. pelvienne à la palpation fait partie de l’examen des organes génitaux.

Auscultation L’auscultation vise d’abord et avant tout à entendre les bruits intestinaux produits par le péristaltisme. Ces bruits ressemblent à des claquements métalliques et à des gargouillis. L’infirmière doit prendre en note leur fréquence par minute (p. ex., cinq bruits par minute). Elle doit toujours faire état de l’absence de bruits intestinaux et de la présence d’un hyperpéristaltisme, car ces deux phénomènes sont associés à des troubles digestifs.

Percussion L’inrmière utilise la technique de percussion pour évaluer la densité relative du contenu abdominal, localiser les divers organes, et dépister les masses et les liquides anormaux. Elle applique d’abord une percussion légère dans les quatre quadrants an de déterminer le degré de tympanisme et de matité. Le tympanisme devrait prédominer en position dorsale, car l’air contenu dans les intestins remonte à la surface. L’infirmière Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

189

trouvera du tympanisme au-dessus de l’estomac du nourrisson, car ce dernier avale de l’air en buvant. Par contre, à la hauteur de la vessie, il est normal d’entendre une matité qui peut s’étendre vers le haut jusqu’à l’ombilic. Une matité sera également entendue au-dessus des organes pleins comme le foie et la rate.

Examen physique : palpation de l’abdomen.

ALERTE CLINIQUE

Palpation

Si l’inrmière peut sentir le foie à plus de 3 cm sous le rebord costal droit, c’est que l’organe est hypertrophié. De même, si elle peut sentir la rate sous le rebord costal gauche à plus de 2 cm, c’est qu’elle est hyper­ trophiée (Gozman, Kanwar, Sills et al., 2015). Elle doit systémati­ quement prendre en note de telles observations, qui comman­ dent des examens médicaux plus poussés.

FIGURE 4.34

L’inrmière procède en principe à deux types de palpation : une palpation supercielle et une palpation profonde . La palpation supercielle consiste à poser doucement la main à plat sur chacun des quadrants de l’abdomen en vue d’évaluer le tonus musculaire et de déceler d’éventuels foyers de sensibilité ou d’éventuelles lésions supercielles comme des kystes . Bien souvent, les enfants ont l’impression d’être chatouillés durant ce type de palpation. L’inrmière dispose de plusieurs techniques pour atténuer cette impression et les aider à se détendre ENCADRÉ 4.17. Mieux vaut ne pas demander à l’enfant de cesser de rire, car il risque de se concentrer davantage sur ce qu’il ressent et de se montrer moins coopératif.

Palpation des pouls fémoraux

La palpation profonde sert à explorer les organes de l’appareil digestif et les vaisseaux sanguins de gros calibres. Elle révèle les masses suspectes et les foyers de sensibilité qui auraient pu passer inaperçus durant la palpation

Pratiques inrmières ENCADRÉ 4.17

Aider l’enfant à se détendre an de palper l’abdomen

• Installer l’enfant confortablement sur les genoux du parent qui l’accompagne, en position semi­allongée, les genoux échis.

• Demander à l’enfant de tenir la main du parent qui l’accompagne et de la serrer lorsque la sensation lui est désagréable.

• Se réchauffer les mains avant de le toucher.

• Réconforter l’enfant avec sa main libre pendant la palpation de l’abdomen (p. ex., poser son autre main sur l’épaule de l’enfant).

• Détourner son attention de la palpation en lui parlant ou en lui racontant une histoire. • Inviter l’enfant à respirer profondément et à se concentrer sur un objet. • Au besoin, donner le biberon ou la suce. • Commencer par une palpation super­ cielle, puis passer progressivement à la palpation profonde. • Palper les zones sensibles ou doulou­ reuses en dernier.

190

Partie 2

Évaluation clinique

• Pour éviter le plus possible de chatouiller l’enfant durant la palpation : – proposer à l’enfant d’être son assistant (l’inrmière lui demande de placer sa main sur la main qui est en train de le palper) ; – demander à l’enfant de poser une main à plat sur son abdomen, les doigts bien écartés, et palper l’abdomen entre ses doigts.

supercielle. L’inrmière commence toujours par les quadrants inférieurs, puis remonte vers les quadrants supérieurs, de façon à explorer le bord inférieur du foie et de la rate et à déceler ainsi tout signe d’hépatomégalie ou de splénomégalie. Elle ne devrait avoir aucun mal à repérer le foie, mais ce n’est qu’au terme de longues séances d’entraînement sous la supervision d’un tuteur expérimenté qu’elle parviendra à reconnaître à la palpation les autres organes de l’appareil digestif (rate, rein et une partie du côlon). Elle doit noter la présence de toute masse abdominale suspecte. Chez les nourrissons et les jeunes enfants, le bord inférieur du foie peut parfois être pris pour une masse supercielle de 1 ou 2 cm située sous le rebord costal droit (la distance est parfois mesurée en travers de doigts). Normalement, durant l’inspiration, le foie descend quand le diaphragme s’abaisse. Il ne faut pas prendre ce déplacement physiologique vers le bas pour un signe d’hépatomégalie. Pour palper les pouls fémoraux, l’inrmière place la pulpe de deux ou trois doigts (index, majeur ou annulaire) le long du ligament inguinal, à peu près à mi-chemin entre la crête iliaque et la symphyse pubienne. Elle doit palper les deux pouls fémoraux en même temps pour vérier qu’ils sont identiques et qu’ils sont bien forts FIGURE 4.34.

4.3.14

Examen des organes génitaux

Préparation et méthode d’examen L’inrmière prote du fait que l’enfant est allongé sur le dos à la n de l’examen de l’abdomen pour passer à celui des organes génitaux. Chez les adolescents, elle peut procéder à l’inspection de ces organes à la toute n. La stratégie la plus efcace consiste à examiner les voies génitales de manière neutre et à ne pas insister outre mesure sur cette partie de l’examen physique. L’inrmière peut faire part immédiatement de ses observations à l’enfant et à ses parents pour atténuer leur anxiété. Par exemple, elle pourrait dire : Rien à signaler, jusqu’ici tout va bien. Lorsque l’inrmière doit interroger l’enfant, par exemple pour savoir s’il a remarqué un écoulement suspect ou s’il a de la difculté à uriner, elle doit respecter son intimité en couvrant la partie inférieure de son abdomen avec une chemise d’hôpital ou ses sous-vêtements. Pour éviter toute interruption intempestive, situation qui peut être embarrassante pour l’enfant, l’inrmière fermera la porte ou tirera le rideau, et elle y accrochera un signe « Ne pas déranger ». De plus, elle gardera un drap à portée de main pour couvrir rapidement les organes génitaux de l’enfant si quelqu’un venait à entrer dans la pièce. Pendant l’examen des organes génitaux, l’inrmière doit porter des gants pour éviter tout contact avec les liquides organiques.

L’inrmière doit être consciente que l’examen des organes génitaux est le moment idéal pour inciter l’enfant et l’adolescent à lui poser des questions sur le fonctionnement du corps humain ou sur la sexualité, ou pour lui faire part de ses inquiétudes à cet égard. Elle doit également proter de l’occasion pour approfondir ou consolider ses connaissances sur l’anatomie de l’appareil reproducteur en lui nommant chaque organe et en lui décrivant sa fonction. Cette étape de l’examen physique constitue aussi le meilleur moment pour enseigner l’autoexamen des testicules aux garçons.

4

Organes génitaux masculins L’inrmière doit noter ses observations sur l’aspect du gland, du corps du pénis, du prépuce, du méat urétral et du scrotum FIGURE 4.35. En général, le pénis des nourrissons et des jeunes garçons est petit, et c’est à la puberté que la longueur et le diamètre de cet organe commencent à augmenter. Le pénis des garçons obèses semble être plus petit que la normale, puisque les replis de la peau recouvrent en partie sa base. L’inrmière doit bien connaître les étapes de la maturation pubertaire, notamment celle de la croissance des organes génitaux externes masculins, car elles lui serviront de points de référence pour l’examen 8 . L’examen du gland et du corps du pénis permet de détecter les anomalies, comme une étroitesse du prépuce (phimosis), une enure, des lésions cutanées ou une inammation. L’un de ces signes peut indiquer des troubles sous-jacents, dont une infection sexuellement transmissible. L’inrmière inspecte ensuite soigneusement le méat urétral pour vérier s’il est bien situé (normalement, il doit se trouver sur la pointe centrale du gland) et s’il y a un écoulement urétral. Il lui faut aussi noter la pilosité. En principe, il n’y a pas de poils pubiens avant la puberté. L’apparition d’un duvet à la base du pénis est l’un des premiers signes de la maturité pubertaire. À la n de l’adolescence, les poils pubiens forment un losange qui s’étend de l’ombilic à l’anus. Enn, l’inrmière note ses observations sur l’emplacement et la taille du scrotum suspendu au périnée, derrière le pénis ; d’ordinaire, le sac scrotal gauche descend plus bas que le droit. Chez les nourrissons, le scrotum est plus volumineux que le pénis lui-même. La peau du scrotum est lâche et très plissée. Au début de l’adolescence, elle devient généralement plus rouge et plus rugueuse. Chez les enfants à la peau noire ou basanée, la peau du scrotum est habituellement plus pigmentée que le reste du corps. La palpation du scrotum vise à repérer les testicules et les épididymes, et à déceler la présence d’une éventuelle hernie inguinale. Les testicules sont de petits organes ovales qui mesurent environ de 1,5 à 2 cm de long. Chacun d’eux loge dans un sac scrotal. À la puberté, ils doublent presque de volume.

FIGURE 4.35 pubère non circoncis

Principales structures des organes génitaux chez un garçon

Pendant la palpation des testicules, 8 l’infirmière doit prendre un certain nombre de Les caractéristiques de la précautions pour ne pas déclencher le réflexe maturation sexuelle chez les crémastérien. Pouvant être provoqué par garçons sont décrites dans l’exposition au froid, le toucher, l’excitation ou le chapitre 8, Problèmes de l’effort, ce réflexe rapproche les testicules de la santé de l’enfant d’âge cavité pelvienne. D’abord, l’infirmière doit se scolaire et de l’adolescent. réchauffer les mains. Ensuite, si l’enfant est assez grand, elle doit le faire s’asseoir en tailleur pour l’examen afin d’étirer le muscle crémaster et d’empêcher ainsi qu’il ne se contracte FIGURE 4.36A. Enfin, elle doit bloquer l’ascension des testicules en plaçant A son pouce et son index le long du canal inguinal, à la base du scrotum FIGURE 4.36B. En cas de doute sur l’existence de deux testicules, l’infirmière peut former une paire de ciseaux avec B son index et son majeur, puis les placer au milieu du scrotum pour séparer les deux sacs scrotaux. Si, malgré tout, elle ne parvient pas à sentir les testicules, elle doit poursuivre la palpation le long du canal inguinal et dans la région du périnée à la recherche de deux masses, car il se FIGURE 4.36 A Prévention du réexe crépeut que les testicules ne mastérien en demandant à l’enfant de s’asseoir en tailsoient pas encore des- leur. B Blocage du canal inguinal pendant la palpation cendus. Il convient de du scrotum, empêchant l’ascension des testicules. Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

191

rappeler que les testicules peuvent descendre dans le scrotum à n’importe quel moment, mais habituellement, ils descendent dans les trois premiers mois qui suivent la naissance. Ils doivent être examinés à chaque visite tant qu’ils ne sont pas descendus. Après un an, les probabilités d’une résolution spontanée sont faibles, et les risques de stérilité augmentent. Si l’infirmière ne réussit pas à les palper, elle doit consigner cette information par écrit.

Organes génitaux féminins

ALERTE CLINIQUE

Les organes génitaux des lles qui ont été excisées ne correspondent pas aux descriptions fournies ici. L’inrmière ne doit en aucun cas laisser transparaître de la surprise ou du dégoût. Elle doit noter l’aspect des organes génitaux et discuter de l’examen avec l’adolescente.

Chez les lles, l’examen des voies génitales se limite à l’inspection et à la palpation des organes génitaux externes. S’il y a lieu d’effectuer un examen vaginal, l’inrmière oriente l’adolescente vers un professionnel de la santé compétent, à moins qu’elle n’ait elle-même les compétences requises. Pour faciliter l’examen des organes génitaux d’une petite lle, l’inrmière doit l’installer en décubitus dorsal sur la table d’examen ou dans une position semi-allongée sur les genoux du parent qui l’accompagne, puis elle doit s’asseoir face à la llette et poser les pieds de celle-ci sur ses genoux. Pour détourner son attention, elle peut lui demander d’essayer de garder ses plantes de pieds bien collées l’une contre l’autre. Après quoi, elle commence par écarter les grandes lèvres avec son pouce et son index pour exposer les petites lèvres, le méat urétral et l’orice vaginal . En premier lieu, l’inrmière examine la taille et l’emplacement des différents organes qui forment la vulve FIGURE 4.37.

7 Le rôle de l’inrmière en cas d’abus sexuel est abordé dans le chapitre 7, Problèmes de santé du trottineur et de l’enfant d’âge préscolaire.

Examen physique : alignement de la colonne vertébrale.

192

Partie 2

Le mont de Vénus, ou mont du pubis, est une couche de tissu adipeux qui protège la symphyse pubienne. Durant la puberté, il se recouvre de poils, tout comme les grandes lèvres. Habituellement, chez les adolescentes, la pilosité pubienne prend la forme d’un triangle à l’envers. L’apparition d’un duvet sur les grandes lèvres est l’un des signes avant-coureurs de la maturité sexuelle. L’inrmière note la taille et l’emplacement du clitoris, petit organe formé de tissu érectile, qui se trouve normalement à la jonction supérieure des petites lèvres. Il est recouvert d’un petit lambeau de peau appelé prépuce du clitoris. Au nombre de deux, les grandes lèvres sont d’épais replis cutanés qui s’étendent vers l’arrière et vers le bas à partir du mont de Vénus pour se rejoindre à la commissure inférieure du vagin. Elles recouvrent deux autres replis cutanés, les petites lèvres. Les petites lèvres sont généralement proéminentes chez les nouveau-nés, puis s’atrophient progressivement à tel point qu’elles sont presque invisibles durant l’enfance. C’est à la puberté qu’elles augmentent de volume. La face interne des petites et des grandes lèvres doit être

Évaluation clinique

rose et humide. L’inrmière doit noter la taille des grandes et des petites lèvres, et faire état de tout accolement des grandes lèvres, anomalie qui rappelle leur homologue masculin, le scrotum. Normalement, la palpation des petites et des grandes lèvres ne devrait révéler la présence d’aucune masse. Le méat urétral s’ouvre en dessous du clitoris. Il ne fait pas saillie ; c’est un petit orice en forme de V qui est entouré des orices des canaux des glandes de Skene. L’inrmière doit faire état de sa position, en particulier s’il s’ouvre dans le clitoris ou le vagin. Elle doit palper doucement les glandes de Skene, puisqu’elles sont souvent le siège de kystes et de lésions associées à certaines infections transmissibles sexuellement. L’orice vaginal est, quant à lui, situé sous le méat urétral. Son aspect peut varier légèrement d’une lle à l’autre. D’ordinaire, l’examen du vagin consiste, en tout et pour tout, en une inspection. Chez les lles vierges, une ne membrane circulaire ou en forme de croissant, appelé hymen, ferme en partie l’orice vaginal. Dans certains cas, il peut le recouvrir complètement. Les caroncules myrtiformes sont les petits morceaux de chair arrondis qui constituent les vestiges de l’hymen déchiré. S’il est vrai qu’une imperforation de l’hymen indique que l’adolescente n’a pas encore eu de relations sexuelles avec pénétration, le fait que l’hymen soit déchiré ne signie pas pour autant qu’elle a une vie sexuelle active 7 . De part et d’autre de l’orice vaginal se trouvent les glandes de Bartholin, qui sécrètent un liquide muqueux limpide destiné à lubrier le vagin au cours des relations sexuelles. L’inrmière doit les palper à la recherche de kystes. Elle doit également noter l’aspect de l’écoulement vaginal, qui est normalement blanc ou limpide.

4.3.15

Examen des fesses et de l’anus

Lorsque l’inrmière a ni d’examiner les organes génitaux, elle peut passer à l’examen de l’anus. Pour ce faire, elle doit coucher l’enfant sur le ventre. D’abord, elle note la fermeté globale des fesses et vérie si les plis fessiers sont symétriques. Puis, elle évalue le tonus du sphincter anal externe en efeurant la région anale, ce qui devrait déclencher le réexe anal externe, soit une contraction visible et brève du sphincter en question.

4.3.16

Examen du dos et des membres

Rachis (colonne vertébrale) L’inrmière note la courbure générale du rachis . Normalement, le dos des nouveau-nés est arrondi ou en forme de C en raison de la cyphose

et de la bascule pelvienne. L’apparition des lordoses cervicales et lombaires coïncide approximativement avec le développement de la motricité (c’est le cas, par exemple, de la lordose cervicale et du contrôle de la tête) et confère au rachis sa forme typique en S. Toute courbure très prononcée du rachis qui modie la posture doit être considérée comme anormale. La scoliose, c’est-à-dire la déformation latérale du rachis, est un problème de santé important qui touche surtout les lles (Scherl, 2017). L’inrmière peut déceler l’incurvation latérale caractéristique de la scoliose à l’inspection et à la palpation, et les examens suivants permettent d’objectiver le diagnostic : • L’enfant ne doit porter que ses sous-vêtements (les adolescentes peuvent garder leur soutien-gorge). Il doit se tenir debout, le dos bien droit. L’inrmière l’observe de dos à la recherche d’une asymétrie entre les épaules et les hanches. • L’inrmière demande à l’enfant de se pencher vers l’avant, en gardant le dos bien droit, de façon à ce qu’il soit parallèle au plancher. Puis, elle l’observe de prol à la recherche d’une asymétrie ou d’une proéminence de la cage thoracique. Parmi les autres manifestations cliniques de la scoliose, il convient de mentionner une légère claudication et des dorsalgies. Pour une lle, le fait que l’ourlet des robes ou des jupes semble être de hauteur inégale doit aussi faire penser à une scoliose. Par ailleurs, l’inrmière doit inspecter le dos de l’enfant en portant une attention toute particulière au rachis, à la recherche de touffes de poils, de fossettes et d’une décoloration. Il est relativement aisé d’évaluer la mobilité du rachis chez la plupart des enfants, puisqu’ils tiennent rarement en place durant l’examen. Cela dit, au besoin, l’inrmière pourra évaluer ce paramètre en demandant à l’enfant de se pencher vers l’avant pour tenter de toucher le sol avec ses mains sans plier les genoux. Durant ce mouvement, l’inrmière observe la symétrie du dos et des scapulas.

4

FIGURE 4.37 Structures externes des organes génitaux chez une lle pubère – Les structures profondes s’observent en écartant les lèvres.

l’enfant chez un orthopédiste. L’inrmière inspecte les bras et les jambes en vériant également qu’ils ont la même température et la même couleur. Il convient toutefois de préciser que les pieds sont généralement un peu plus froids que les mains. La paume des mains est striée normalement par trois plis de flexion FIGURE 4.38A . Dans certaines situations, comme le syndrome de Down, les deux plis horizontaux distaux fusionnent en un seul pli horizontal (pli pal maire unique, pli transpalmaire ou pli simien) FI GURE 4.38B . L’inrmière ne doit surtout pas oublier de compter les doigts et les orteils. Trop souvent, il va de soi que l’enfant a tous ses doigts et tous ses

A

ALERTE CLINIQUE

Tous les cas d’opisthotonos (hyperextension du cou et du rachis) qui s’accompagnent d’une douleur durant la exion de la tête doivent être immédiatement dirigés vers un médecin.

B

L’examen de la mobilité du rachis cervical tient une place importante dans le diagnostic des troubles neurologiques comme la méningite. Normalement, l’enfant doit pouvoir bouger la tête dans toutes les directions sans aucune difculté .

Membres L’inrmière inspecte les membres les uns après les autres et vérie leur symétrie (longueur et taille) ; en cas d’anomalie, elle doit orienter

FIGURE 4.38 Exemple de plis sur la paume de la main – A Plis normaux. B Plis simiens.

Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

193

Endogyrisme : Trouble orthopédique dû à l’orientation des pieds ou des hanches vers l’intérieur.

orteils, et des anomalies telles que la polydactylie (existence de un ou de plusieurs doigts ou orteils supplémentaires) et la syndactylie (absence de séparation entre les doigts ou les orteils) peuvent passer inaperçues.

les enfants âgés de 2 à 7 ans. Lorsque le genu valgum est très prononcé ou asymétrique, que l’enfant a par ailleurs un retard statural ou qu’il se rapproche de l’âge de la puberté, il faut procéder à des examens plus poussés.

Puis, l’inrmière porte son attention sur la forme des os. Plusieurs types de déformations osseuses peuvent être observées chez les enfants. Si bon nombre d’entre elles inquiètent les parents, il faut savoir que la plupart sont bénignes et ne nécessitent aucun traitement. Parmi ces déformations osseuses se trouvent les jambes arquées, ou genu varum, qui sont caractérisées par une incurvation latérale des tibias. Pour mettre en évidence un tel phénomène sur le plan clinique, l’inrmière demandera à l’enfant de se tenir debout, les malléoles médiales (proéminences arrondies se situant de part et d’autre de la cheville) collées l’une à l’autre, puis elle mesurera l’espace qui sépare ses genoux. Elle conclura à un genu varum si cet espace est supérieur à 5 cm environ FIGURE 4.39A. Les enfants qui commencent à marcher ont généralement les jambes arquées jusqu’à ce que tous les muscles de leurs jambes et de leur région lombaire se soient développés. Toutefois, chez un enfant de deux ou trois ans, en particulier s’il a la peau noire, un genu varum unilatéral ou asymétrique peut dénoter une maladie sous-jacente et commande donc des examens plus poussés.

Les enfants font leurs premiers pas avec les jambes très écartées. Cette posture facilite la marche, puisqu’elle leur permet d’abaisser leur centre de gravité. Puis, à l’âge préscolaire, leurs jambes se rapprochent l’une de l’autre. Enn, quand ils sont en âge d’aller à l’école, leur démarche se rapproche davantage de celle de l’adulte, et ils se tiennent mieux en équilibre.

Les genoux cagneux, ou genu valgum, constituent le phénomène inverse, en ce sens que lorsque les genoux sont collés, les pieds, eux, restent écartés. Pour mettre en évidence un tel phénomène sur le plan clinique, l’infirmière mesure la distance entre les malléoles, qui doit en principe être inférieure à 7,5 cm FIGURE 4.39B. Normalement, un genu valgum est observé chez

A

B

L’inrmière passe ensuite à l’inspection des pieds. Ceux des nourrissons et des enfants qui commencent à marcher semblent être plats, parce qu’ils sont larges et que la voûte plantaire est recouverte d’une couche de tissu adipeux. Cette dernière nit par se creuser naturellement grâce à la marche. Normalement, à la naissance, les pieds sont tournés vers l’extérieur (valgus) ou vers l’intérieur (varus). Pour déceler si une déformation du pied chez le nouveau-né est attribuable à la position adoptée dans l’utérus ou bien à une anomalie survenue durant le développement, l’inrmière doit gratter le bord externe, puis le bord interne de la plante des pieds. Si le pied forme alors un angle normal avec la jambe, c’est que la déformation nira par se corriger spontanément. Lorsque l’enfant commence à marcher, l’angle que peuvent former ses pieds avec une ligne verticale imaginaire tracée au sol est inférieur à 30° lorsqu’ils sont tournés vers l’extérieur, et inférieur à 10° lorsqu’ils sont tournés vers l’intérieur. L’endogyrisme, soit la marche avec la pointe des pieds en dedans, est l’anomalie de la démarche la plus courante chez les jeunes enfants de un à quatre ans (Rosenfeld, 2011) ; il est généralement la conséquence d’une torsion interne (rotation ou incurvation anormale) du tibia. Pour vérier s’il y a torsion du tibia, l’inrmière peut mesurer notamment l’angle pied-cuisse. Enn, l’inrmière doit vérier le réexe plantaire ou le réexe de préhension en exerçant une pression à la fois légère et ferme sur le bord latéral de la plante du pied, en partant du talon pour remonter jusqu’au petit orteil, puis jusqu’à la pointe du gros orteil. Chez les enfants qui marchent déjà, l’inrmière observera normalement une exion des orteils. Le signe de Babinski consiste en une dorsiexion du gros orteil s’accompagnant d’une abduction des autres orteils en éventail ; il est normalement observé chez les nourrissons, peut persister jusqu’à l’âge de deux ans et ne doit plus être présent par la suite (Jarvis, 2015).

Articulations FIGURE 4.39 A Jambes arquées (genu varum) – distance plus grande que 5 cm. B Genoux cagneux (genu valgum) – distance plus grande que 7,5 cm.

194

Partie 2

Évaluation clinique

L’inrmière doit évaluer l’amplitude des mouvements des articulations. Habituellement, elle

n’aura pas à effectuer de test particulier si elle a bien observé les mouvements de l’enfant au cours de l’examen. Toutefois, elle doit systématiquement examiner les hanches des nourrissons à la recherche d’une éventuelle luxation congénitale. Elle doit faire état de toute immobilité et de toute hyperlaxité articulaire. L’infirmière doit aussi palper les articulations. Si elle remarque qu’une articulation est chaude, enée et sensible au toucher, et qu’en plus la peau qui la recouvre est rouge, il est recommandé de faire subir à l’enfant un examen plus approfondi.

Muscles L’inrmière doit évaluer la croissance, le tonus et la force musculaires, et vérier la symétrie dans tous les cas. L’évaluation de la croissance musculaire repose sur l’observation de la silhouette et de la morphologie de l’enfant lorsque ses muscles sont détendus et lorsqu’ils sont contractés. Celle du tonus musculaire consiste à tâter un muscle (habituellement, le biceps brachial) pour en apprécier la fermeté. D’ordinaire, les enfants ne se font pas prier pour serrer le poing an de goner leurs biceps. Enn, l’évaluation de la force musculaire repose sur le principe de la résistance. L’inrmière demande à l’enfant d’exercer un mouvement alors qu’elle lui oppose une résistance

Techniques de soins ENCADRÉ 4.18

Évaluer la force des membres

BRAS

Demander à l’enfant de tendre les bras devant lui. En opposant une résistance au mouvement de ses bras, lui demander d’essayer de les soulever.

4

MAINS

Demander à l’enfant de prendre un ou deux de vos doigts dans sa main et de serrer. JAMBES

Asseoir l’enfant sur une table ou une chaise, les jambes pendantes. En opposant une résistance au mouvement de ses jambes, lui demander d’essayer de les relever.

Techniques de soins ENCADRÉ 4.19

Procéder aux tests de la fonction cérébelleuse

TEST DOIGT-NEZ

Demander à l’enfant de tendre le bras et de toucher son nez, puis votre doigt alternativement avec son index, en gardant les yeux ouverts, puis fermés. TEST TALON-GENOU

Demander à l’enfant de se mettre debout et de caresser avec un talon tout le tibia ou la surface antérieure du tibia de l’autre jambe, avec les yeux ouverts, puis fermés.

ENCADRÉ 4.18.

TEST DE ROMBERG

L’inrmière doit vérier que la force des muscles des membres du côté gauche, notamment celle des mains et des doigts, est similaire à celle des muscles des membres du côté droit ; elle doit noter tout signe de parésie ou de faiblesse musculaire.

Demander à l’enfant de se tenir debout, les yeux fermés et les genoux appuyés l’un contre l’autre ; le signe de Romberg est positif si l’enfant tombe ou se penche d’un côté, ce qui est anormal.

Examen neurologique

Il va sans dire que l’évaluation du système nerveux est l’étape de l’examen physique la plus vaste et la plus diversiée, dans la mesure où toutes les fonctions de l’organisme, qu’elles soient physiques ou mentales, sont contrôlées par des inux nerveux. La majeure partie de l’examen neurologique (évaluation du comportement et de la fonction motrice, et exploration des fonctions sensorielles) a été décrite précédemment dans ce chapitre. Les sections qui suivent visent essentiellement à guider l’évaluation globale de la fonction cérébelleuse, des réexes tendineux et des nerfs crâniens.

Fonction cérébelleuse Le cervelet contrôle le maintien de l’équilibre et la coordination des mouvements. L’évaluation de la fonction cérébelleuse consiste essentiellement à observer la posture, les mouvements corporels et la démarche de l’enfant, de même qu’à évaluer la motricité globale et la motricité ne. La mise en

équilibre sur une jambe et la marche talon-orteils permettent d’évaluer l’équilibre. Il y a plusieurs façons d’évaluer la coordination : l’inrmière peut demander à l’enfant de tendre le bras pour prendre un jouet, de boutonner un vêtement, de lacer ses chaussures ou de tracer une ligne droite sur une feuille de papier (pourvu qu’il soit assez grand pour effectuer ces activités). Elle peut aussi lui demander d’effectuer une séquence de mouvements rapides, par exemple toucher rapidement avec son pouce les autres doigts de la main . Il y a plusieurs tests de la fonction cérébel leuse qui peuvent prendre des allures de jeu ENCADRÉ 4.19. Lorsque l’inrmière effectue la manœuvre de Romberg, elle doit se tenir derrière l’enfant si elle croit qu’il risque de tomber. Les enfants d’âge scolaire réussissent normalement les tests mentionnés dans l’encadré. Toute difculté à effectuer les tests d’évaluation de la fonction cérébelleuse témoigne d’un trouble de la proprioception, en particulier lorsque les yeux sont clos, et d’un manque de coordination, en particulier lorsque les yeux sont ouverts (Jarvis, 2015). Chapitre 4

Examen physique : coordination motrice ne des membres inférieurs et Examen physique : coordination motrice ne des membres supérieurs.

clinique

Jugement

4.3.17

Vladimir, âgé de 15 ans, a fait une chute à vélo et ne portait pas de casque protecteur. Son état de conscience est altéré. Vous décidez de procéder à l’évaluation du signe de Babinski. Est-ce pertinent à cet âge ? Justiez votre réponse.

Examen clinique : anamnèse et examen physique

195

Réexes Examen physique : réexe ostéotendineux rotulien. Examen physique : test des positions cardinales du regard.

L’évaluation des réexes est une étape essentielle de l’examen neurologique. La persistance des réexes archaïques, l’abolition des réexes ou l’hyperactivité des réflexes tendineux indiquent habituellement une atteinte cérébrale. Les réflexes sont déclenchés en frappant un tendon avec un marteau à réflexes (plus précisément, avec la tête en caoutchouc de l’instrument). Si le marteau à réflexes effraie l’enfant, l’infirmière peut se servir de ses doigts ou de sa main. L’évaluation des réflexes est relativement simple ; cependant, l’enfant peut les inhiber en contractant inconsciemment ses muscles. Pour éviter cette situation, l’infirmière peut détourner l’attention de l’enfant et favoriser un relâchement involontaire de ses muscles. S’il s’agit d’un trottineur ou d’un enfant d’âge préscolaire, elle peut lui parler ou le distraire avec des jouets ; s’il s’agit d’un enfant d’âge scolaire ou d’un adolescent, elle peut lui demander de saisir ses deux mains devant lui et d’essayer de les séparer.

Le réexe tendineux entraîne un relâchement et un allongement du muscle stimulé. Le plus connu est sans nul doute le réexe patellaire, ou réexe ostéotendineux rotulien (parfois appelé réexe quadricipital) . Les réexes que l’inrmière doit chercher à déclencher sont illustrés dans le TABLEAU 4.16. L’inrmière doit faire état de toute diminution des réexes (hyporéexie) ou de toute réaction exagérée (hyperréexie) an que ces phénomènes puissent être examinés de manière plus approfondie.

Nerfs crâniens Le TABLEAU 4.17 décrit les tests que l’inrmière effectuera pour évaluer les nerfs crâniens, un aspect important de l’examen neurologique FIGURE 4.40. Elle vériera aussi les positions cardinales du regard (nerfs crâniens sollicités pour le mouvement : III, IV et VI) . L’inrmière peut présenter aux jeunes enfants les tests sous forme de jeu pour gagner leur conance et les sécuriser au début de l’examen. Ou encore, lorsqu’elle examine un organe ou un appareil donné, elle peut tout de suite évaluer les nerfs crâniens concernés.

Techniques de soins TABLEAU 4.16

Évaluer les réexes ostéotendineux

Test du réexe tricipital

Test du réexe bicipital

Allonger l’enfant sur le dos, l’avant-bras posé contre la poitrine. Frapper le tendon des triceps. ou Asseoir l’enfant sur le bord de la table d’examen. Soutenir le bras en abduction en laissant pendre librement l’avant-bras, puis frapper le tendon des triceps. L’extension partielle de l’avant-bras est une réaction normale.

Tenir le bras de l’enfant en plaçant le coude partiellement échi dans votre main et le pouce sur le tendon du biceps. Frapper l’ongle du pouce avec le marteau. La exion partielle de l’avant-bras est une réaction normale.

Test du réexe patellaire (rotulien ou quadricipital) par distraction

Test du réexe achilléen

Asseoir l’enfant sur le bord de la table d’examen (ou sur les genoux du parent) en laissant pendre librement les jambes. Frapper le tendon patellaire sous la patella. L’extension partielle de la jambe inférieure est une réaction normale.

Tenir le pied de l’enfant légèrement appuyé contre votre main. Frapper le tendon d’Achille derrière la jambe, au-dessus du talon. La exion plantaire du pied est une réaction normale (le pied pointe vers le bas).

196

Partie 2

Évaluation clinique

4

Nerfs crâniens

FIGURE 4.40

Techniques de soins TABLEAU 4.17

Évaluer les nerfs crâniens

DESCRIPTION ET FONCTIONS

TEST

Nerf olfactif (NC I) • Région olfactive de la muqueuse nasale : olfaction

• Demander à l’enfant de fermer les yeux et de reconnaître différentes odeurs. Évaluer les narines séparément.

Nerf optique (NC II) • Bâtonnets et cônes de la rétine : vision

• Évaluer la perception de la lumière, l’acuité visuelle, la vision périphérique et la perception des couleurs.

Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

197

TABLEAU 4.17

Évaluer les nerfs crâniens (suite)

DESCRIPTION ET FONCTIONS

TEST

Nerf oculomoteur (NC III) • Muscles extraoculaires : – Droit supérieur, qui dirige le regard vers le haut et l’intérieur

• Évaluer les six directions du regard en demandant à l’enfant de suivre du regard un objet (jouet) ou un crayon lumineux FIGURE A.

– Droit inférieur, qui dirige le regard vers le bas et l’intérieur – Droit médial, qui dirige le regard vers le nez – Oblique inférieur, qui dirige le regard vers le haut et l’extérieur

Figure A • Contraction et accommodation pupillaires

• Effectuer le test PERRLA (pupilles égales rondes réactives à la lumière et à l’accommodation).

• Fermeture des paupières

• Vérier qu’il n’y a pas d’affaissement des paupières.

Nerf trochléaire (NC IV) • Muscle oblique supérieur, qui dirige le regard vers le bas et l’intérieur

• Demander à l’enfant de regarder un doigt placé sous le bout du nez vers le bas et l’intérieur FIGURE A.

Nerf trijumeau (NC V) • Muscles de la mastication

• Demander à l’enfant de serrer les dents, puis d’ouvrir la bouche ; évaluer deux paramètres : la symétrie et la force.

• Fibres sensitives : visage, cuir chevelu, muqueuses nasale et buccale

• Demander à l’enfant de fermer les yeux, puis efeurer les régions maxillaire et mandibulaire ; l’enfant doit sentir le toucher.

• Sensibilité de la cornée

• Déclencher le réexe cornéen en efeurant la cornée avec une boule de coton ou laisser tomber une goutte d’eau dans l’œil (se mettre à côté de l’enfant pour qu’il ne la voie pas s’approcher, sinon il risque de fermer les yeux avant même qu’elle ait touché la cornée).

Nerf oculomoteur externe (Abducens) (NC VI) • Muscle droit latéral, qui dirige le regard vers l’extérieur, à la hauteur des tempes

• Demander à l’enfant de regarder le doigt placé du côté temporal de la tête (vers l’extérieur FIGURE A).

Nerf facial (NC VII) • Muscles faciaux

• Demander à l’enfant de sourire, de faire des grimaces ou de montrer ses dents pour vérier la symétrie du visage.

• Fibres sensitives : deux tiers antérieurs de la langue

• Évaluer la perception du sucré, du salé et de l’acide : demander à l’enfant de tirer la langue et veiller à placer chaque préparation sur la partie antérieure et sur les rebords de la langue. Si l’enfant rentre la langue, les préparations couleront vers la partie postérieure de celle-ci et les résultats du test s’en trouveront faussés.

Nerf vestibulocochléaire (NC VIII) • Oreille interne : audition et équilibre

• Chuchotement : chuchoter des mots derrière l’enfant et les lui faire répéter. • Noter toute perte d’équilibre ou la présence de vertiges.

Nerf glossopharyngien (NC IX) • Pharynx, langue

• Stimuler la paroi postérieure du pharynx à l’aide d’un abaisse-langue ; l’enfant devrait avoir un haut-le-cœur (réexe nauséeux).

• Fibres sensitives : tiers postérieur de la langue

• Évaluer la perception de l’amer (tiers postérieur de la langue).

198

Partie 2

Évaluation clinique

TABLEAU 4.17

Évaluer les nerfs crâniens (suite)

DESCRIPTION ET FONCTIONS

TEST

Nerf vague (NC X) • Muscles du larynx et du pharynx, certains organes de l’appareil digestif ; bres sensitives innervant la racine de la langue, le cœur et les poumons

• Vérier la raucité de la voix, le réexe nauséeux et la déglutition. • Vérier si la luette est bien centrée ; stimuler la luette avec un abaisse-langue ; elle dévie normalement vers le haut, du côté où elle est touchée.

Nerf accessoire spinal • Muscle trapèze • Muscle sternocléidomastoïdien

• Vérier la symétrie et la force : demander à l’enfant de hausser les deux épaules pendant que vous appliquez une légère pression opposée aux mouvements. • Vérier la symétrie et la force : demander à l’enfant de tourner la tête d’un côté pendant que vous exercez une force opposée au mouvement. Répéter de l’autre côté pour comparer.

Nerf hypoglosse (NC XII) • Muscles de la langue

• Demander à l’enfant de bouger sa langue dans toutes les directions, puis de la tirer le plus loin possible ; noter toute déviation. • Vérier la force des muscles de la langue en plaçant l’abaisse-langue d’un côté de la langue, puis de l’autre, et demander à l’enfant de le déplacer par la seule force de sa langue.

Analyse d’une situation de santé Nico est âgé de 1 an. Il est né à 25 semaines de gestation et souffre d’une dysplasie bronchopulmonaire depuis sa naissance. Après avoir reçu son congé de l’hôpital il y a 8 mois, il est demeuré oxygénodépendant à raison de 0,2 L/min en permanence à l’aide d’une lunette nasale. À titre d’inrmière du CLSC, vous le visitez à domicile pour évaluer son milieu de vie et effectuer un suivi de santé, car le poids de l’enfant stagne depuis plusieurs mois. Ioana Florescu, la mère de Nico, est âgée de 41 ans. Elle est prestataire de l’aide sociale et élève seule ses 3 enfants, soit Nico et 2 lles âgées de 14 et 11 ans conçues de pères différents. Lorsqu’elle se déplace avec Nico, elle doit toujours apporter la bonbonne d’oxygène portative, en plus de tout le matériel nécessaire aux soins d’un nourrisson. Madame Florescu démontre des signes d’un grand attachement à son ls ; elle le prend dans ses bras et lui parle tendrement tout en l’embrassant fréquemment. Elle a été présente tous les jours de

Jugement clinique l’hospitalisation de son ls. Elle a même tiré son lait pour Nico, car les inrmières lui ont dit que cela aiderait son enfant dans son développement. Elle conrme que son ls n’a pas pris de poids depuis trois mois. Les 2 llettes sont présentes au moment de votre première visite, vers 11 h 45. Comme leur repas n’est pas prêt, elles se préparent une tartine au beurre d’arachide avec une boisson gazeuse. Quant à Nico, il mâche un bâtonnet de saucisson épicé déshydraté. Vous trouvez qu’il est petit et maigre pour son âge. Par contre, il marche déjà avec assurance en se tenant aux meubles. Pendant que sa grande sœur le prend dans ses bras, la mère en prote pour aller fumer une cigarette à l’extérieur, ce qui vous surprend et vous heurte dans vos valeurs. De plus, madame Florescu tient des propos très familiers et utilise d’emblée le tutoiement.

Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

199

4

SOLUTIONNAIRE

VU dans ce chapitre

Mise en œuvre de la démarche de soins Mise en œuvre dedonnées la démarche de soins initiale – Analyse et interprétation Collecte des – Évaluation 1. Le but de votre visite étant d’évaluer le milieu de vie et l’état de santé de Nico, nommez au moins huit données de la mise en contexte à retenir pour l’évaluation de la situation et justiez-en la pertinence.

Quelle serait la meilleure voie pour mesurer la température de Nico?

2. Nommez au moins quatre moyens que vous pouvez utiliser pour recueillir des données objectives et subjectives sur la situation de Nico et de sa famille. 3. Mentionnez au moins trois données objectives à recueillir au moment de l’examen physique de Nico. Justiez vos réponses.

MAIS SI...

Si Nico était âgé de quatre ans, quelle serait alors la voie à privilégier pour la prise de sa température.

4. Interprétez le poids et la taille de Nico selon la courbe de croissance. 5. An de documenter l’alimentation de Nico, que faut-il demander à la mère pour évaluer objectivement cet aspect ? 6. À ce stade-ci de la situation, quel problème prioritaire numéro 2 devrait gurer dans l’extrait du PTI de Nico ?

VU dans ce chapitre

Extrait de PTI

En plus de peser Nico, nommez deux autres moyens d’évaluer son état nutritionnel.

CONSTATS DE L’ÉVALUATION Date

Heure



Signature de l’inrmière

Problème ou besoin prioritaire

Initiales

Programme / Service

Initiales

RÉSOLU / SATISFAIT Date

Signature de l’inrmière

Heure

Initiales

Initiales

Professionnels / Services concernés

Programme / Service

Extrait des notes d’évolution

2018-06-04 12:15 Mng  bâtn d suc épc dhyrt. Pois : 7,4 kg, tl : 70 c. Pois tagn ds 3 mos, el l mèr.

Puisque vous visiterez régulièrement Nico, vous décidez d’établir un plan thérapeutique inrmier (PTI) pour l’enfant an d’assurer un suivi de sa condition clinique. Nico pèse 7,400 kg et mesure 70 cm.

Planication des interventions – Décisions inrmières 7. Comment devriez-vous vous y prendre pour mesurer la taille de Nico ? 8. Nommez deux stratégies à utiliser pour procéder à l’auscultation pulmonaire de Nico.

VU dans ce chapitre

Quelle est la principale vérication à faire avant de procéder à l’auscultation pulmonaire de Nico ?

Malgré le fait que la scène familiale observée au cours de cette première visite heurte vos valeurs, vous demeurez souriante et respectez le mode de vie de la famille de madame Florescu en ne passant pas de commentaires et en ne la jugeant pas hâtivement.

MAIS SI...

Si la condition respiratoire de Nico était normale, quels bruits pourraient être entendus lors de l’auscultation pulmonaire ?

9. Expliquez les effets positifs d’une attitude ouverte et accueillante envers madame Florescu et sa famille. 10. Comme la mère de Nico vous a abordée en vous tutoyant, devriez-vous faire de même ? Justiez votre réponse.

Vous êtes dans la maison depuis 15 minutes. Lorsque vous voyez le repas des llettes et ce que Nico mange, il vous semble qu’un plan d’intervention portant sur l’alimentation serait prioritaire.

11. Devriez-vous aborder maintenant l’alimentation de la famille avec madame Florescu ? Justiez votre réponse.

200

Partie 2

Évaluation clinique

En attendant le départ des aînées pour l’école, vous discutez avec elles de l’école et de leurs activités. Vous jouez avec Nico, qui est réceptif à cette approche, puis vous discutez de choses et d’autres avec la mère.

12. Perdez-vous du temps d’intervention en agissant ainsi ? Justiez votre réponse. 13. En lien avec le problème prioritaire déterminé à la question 6, émettez une directive inrmière permettant d’en assurer un suivi clinique adéquat.

4

Extrait de PTI SUIVI CLINIQUE Date

Heure



Signature de l’inrmière

Directive inrmière

Initiales

Programme / Service

CESSÉE / RÉALISÉE

Initiales

Date

Signature de l’inrmière

Heure

Initiales

Initiales

Programme / Service

Vous en êtes à votre troisième visite et vous sentez que Nico et sa mère ont conance en vous. Nico vous laisse s’approcher de lui sans crainte, et la mère dit qu’elle vous aime bien. Pour aborder l’alimentation de l’enfant, vous commencez ainsi : « Madame Florescu, je pense que Nico ne semble pas avoir une alimentation adaptée à ses besoins. J’aimerais discuter avec vous de la possibilité de suivre une formation pour que vous puissiez offrir une meilleure alimentation à vos enfants. Cela permettrait possiblement à Nico de prendre du poids et des forces, et, éventuellement, de cesser l’oxygène. » Madame Florescu réplique en disant : « Je sais qu’on ne mange pas bien, mais ce n’est pas facile de se payer de bons aliments avec un chèque de B.S. » Vous lui conez que lorsque vous étiez enfant, votre mère a dû être prestataire de l’aide sociale et qu’elle a toujours réussi à bien manger. Vous ajoutez que vous êtes prête à partager vos astuces avec elle.

14. Nommez au moins deux stratégies utilisées dans cet épisode qui favorisent la communication entre vous et madame Florescu.

Vous avez recueilli plusieurs données sur l’alimentation de Nico et vous en concluez que la mère manque de connaissances sur les besoins nutritifs de son ls et sur le Guide alimentaire canadien. Madame Florescu est prête à apprendre comment cuisiner des plats sains en tenant compte de son budget.

15. Quel autre professionnel pourrait aider madame Florescu à atteindre cet objectif ?

Cela fait cinq semaines que vous travaillez en collaboration avec la nutritionniste à inculquer de nouvelles habitudes alimentaires à madame Florescu.

Évaluation des résultats – Évaluation en cours d’évolution 16. Nommez deux observations qui indiqueraient que le problème prioritaire inscrit dans l’extrait du PTI de Nico est en voie d’être résolu.

Chapitre 4

Examen clinique : anamnèse et examen physique

201

Évaluation et traitement de la douleur

Chapitre

5

Écrit par : Marilyn J. Hockenberry, PhD, RN, PPCNP-BC, FAAN Adapté par : Sylvie Le May, inf., Ph. D. Caroline Hachey, inf., B. Sc.

MOTS CLÉS Analgésie contrôlée par le patient (ACP). . . . . . . . . . . . . . . . . Anesthésie locorégionale . . . . . . . Approche pharmacologique . . . . . Dépendance physique . . . . . . . . . . Dépendance psychologique (toxicomanie) . . . . . . . . . . . . . . . . . . Douleur cancéreuse . . . . . . . . . . . . Douleur chronique . . . . . . . . . . . . . Échelle d’évaluation de la douleur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Évaluation comportementale de la douleur . . . . . . . . . . . . . . . . . . Intervention non pharmacologique . . . . . . . . . . . . . . Opioïde . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Outil d’évaluation de la douleur . . . Posture antalgique . . . . . . . . . . . . . Réaction à la douleur . . . . . . . . . . .

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Animation À retenir Carte conceptuelle Solutionnaires

Guide d’études – SA04

202

Partie 2

Évaluation clinique

OBJECTIFS Après avoir étudié ce chapitre, vous devriez être en mesure : 224 226 230 230 233 237 214 204 206 236 218 205 205 205

• de procéder à une évaluation objective de la douleur chez l’enfant ; • d’énumérer les différents types d’outils d’évaluation de la douleur à utiliser avec l’enfant ; • de nommer les particularités des différents types de douleur courants chez l’enfant ; • de reconnaître les caractéristiques de la réaction à la douleur chez l’enfant ; • de décrire les stratégies essentielles de gestion de la douleur chez l’enfant ; • d’utiliser judicieusement les observations que les parents rapportent concernant la douleur qu’ils perçoivent chez leur enfant ; • de déterminer les éléments de surveillance chez l’enfant recevant des opioïdes comme mesure de soulagement de la douleur.

Carte conceptuelle

Cette carte conceptuelle illustre schématiquement les principaux concepts décrits dans le présent chapitre. Sa lecture vous permettra d’avoir une vue d’ensemble des notions qui y sont présentées.

5 comme

comme

dont

évaluation par tenir compte des

pour collecte des données

Évaluation et traitement de la douleur traitement par

Méthodes de distraction

dont

dont

risque de

incluant

Chapitre 5

Évaluation et traitement de la douleur

203

5.1 Le contexte de la douleur ainsi que les distinctions entre douleur neurogène (neuropathique) ou nociceptive, d’une part, et douleur aiguë ou chronique, d’autre part, sont étudiés dans le chapitre 3 du manuel de Potter, P.A., Perry, A.G., Stockert, P.A. et al. (2016). Fondements généraux (4e éd.). Montréal : Chenelière Éducation.

CE QU’IL FAUT RETENIR

La douleur chez les enfants a longtemps été ignorée et continue encore aujourd’hui d’être mal évaluée par les professionnels de la santé, notamment par les inrmières et les médecins.

Depuis 1994, l’International Association for the Study of Pain (IASP) propose de dénir la douleur comme « l’expérience sensorielle et émotionnelle désagréable d’une atteinte tissulaire réelle ou potentielle, ou décrite comme telle » (IASP, 2017). Étant donné que la dernière partie de cette dénition semblait exclure les personnes ayant une certaine difculté à communiquer, l’IASP a ajouté une note indiquant que l’incapacité de la personne à communiquer verbalement n’indique pas qu’elle n’éprouve pas de la douleur et qu’elle n’a pas besoin d’un soulagement adéquat. En partie en raison de cette absence de communication verbale, la douleur chez les enfants a longtemps été ignorée (McClain et Kain, 2005 ; Pillai Riddell, Stevens et Katz, 2005) et continue encore aujourd’hui d’être mal évaluée et mal soulagée par les professionnels de la santé, notamment par les inrmières et les médecins (Wilson, Sommereld, Drake-Brockman et al., 2017). Pourtant, la perception de la douleur chez l’enfant est largement étayée par des études (Lee et Stevens, 2014 ; Pillai Riddell, Racine, Turcotte et al., 2017). L’enfant possède, dès sa naissance, toutes les structures anatomiques et fonctionnelles nécessaires pour percevoir la douleur (Tobias, 2014). Le nourrisson et le jeune enfant savent transmettre leurs affects et leurs émotions à l’aide d’une communication comportementale non verbale (Lee et Stevens, 2014).

5.2

4 La préparation de l’enfant à l’examen physique ainsi que les principes généraux des méthodes PQRSTU et AMPLE utilisés lors de l’examen sont abordés dans le chapitre 4, Examen clinique : anamnèse et examen physique.

Dénitions de la douleur

Évaluation de la douleur chez l’enfant

L’évaluation de la douleur est un processus continu qui demande une collecte des données à la fois physiologiques, comportementales et psychologiques (Taddio, Appleton, Bortolussi et al., 2010). Cette collecte devrait, dans la mesure du possible, commencer par la description des caractéristiques de la douleur chez l’enfant ENCADRÉ 5.1 4 .

ENCADRÉ 5.1

Caractéristiques de l’évaluation d’un état douloureux chez l’enfant

L’évaluation d’un état douloureux chez l’enfant doit tenir compte de plusieurs éléments : • Le niveau développemental de l’enfant • Le contexte : différents troubles, maladies ou situations qui peuvent inuer sur la perception de la douleur • La réponse émotionnelle et non verbale : vocalisation, pleurs, plaintes, comportements spéciques (p. ex., les positions antalgiques) • La réponse verbale à des questions posées • L’existence de signes de stress (p. ex., un sommeil perturbé ou un changement de comportement) Sources : Adapté de Lee et Stevens (2014) ; Schellak et Matimela (2016).

Les échelles d’évaluation de la douleur décrites dans les sous-sections suivantes sont des outils pour aider la clientèle pédiatrique à décrire sa douleur. Elles permettent à l’inrmière d’objectiver la douleur chez l’enfant et d’évaluer l’efcacité des interventions.

5.2.1

Examen physique

Lorsqu’un état douloureux est suspecté chez l’enfant, l’inrmière doit procéder à un examen physique pour en situer la provenance et en préciser les caractéristiques. La contribution des parents est précieuse non seulement pour compléter la collecte des données, mais aussi pour rassurer l’enfant durant l’évaluation 4 .

Réconfort à l’enfant et à sa famille L’enfant éprouvant de la douleur présente généralement une série de manifestations telles que l’angoisse ou l’anxiété, en plus de la douleur (Pillai Riddell, Racine, Craig et al., 2014). L’inrmière doit donc, avant tout, établir une relation de conance avec l’enfant et sa famille ENCADRÉ 5.2.

Pratiques inrmières ENCADRÉ 5.2

Préparer l’enfant à l’évaluation de la douleur

• Avant de procéder à l’examen, l’inrmière doit : – se présenter, puis expliquer son rôle ; – se mettre au niveau de l’enfant, lui permettre de parler de lui et de ce qu’il aime ; – s’intéresser à sa perception des événements ; – prendre en compte sa douleur ; – favoriser sa participation.

204

Partie 2

Évaluation clinique

• Si l’enfant ne parle pas, l’inrmière peut recourir à d’autres moyens tels qu’un jouet attrayant (p. ex., une poupée ou des bulles de savon) pour établir une relation moins anxiogène. L’examen d’un jeune enfant peut par ailleurs être facilité si l’enfant est laissé dans les bras d’un parent.

Examen

5.2.2

Tout en parlant à l’enfant, l’inrmière palpe progressivement sa peau, ses muscles, ses os et ses articulations, et elle s’assure d’observer ses mimiques et ses réactions à la douleur. L’inrmière doit écouter attentivement l’enfant et ses parents ; elle doit observer tous les comportements de l’enfant et analyser la manière dont il exprime sa douleur, selon son âge. Elle doit également être attentive à des modications de comportement qui traduisent parfois de la douleur TABLEAU 5.1 . Le jeu ou l’utilisation d’une poupée peut aider l’inrmière à observer l’intérêt de l’enfant pour le monde extérieur, ses craintes, ses plaintes, ses facultés de communication, sa capacité à se mobiliser et ses postures antalgiques.

Constater un état douloureux ne permet pas de déterminer l’intensité de la douleur. À cet égard, l’usage quotidien d’un outil d’évaluation de la douleur permet un meilleur dépistage de celle-ci et améliore la qualité de sa prise en charge (McGrath, Stevens, Walker et al., 2014). Les outils d’évaluation de la douleur sont conçus pour évaluer un vécu subjectif, la douleur, de la façon la plus appropriée et la plus objective possible en fonction du développement de l’enfant. Ces outils doivent posséder des qualités psychométriques essentielles (McGrath, Walco, Turk et al., 2008). Cependant, même les outils les plus valables restent imparfaits, car leur validité dépend notamment du développement de l’enfant, de l’âge, du contexte de la douleur (p. ex., une douleur

TABLEAU 5.1

Outils d’évaluation de la douleur CE QU’IL FAUT RETENIR

Les outils d’évaluation sont conçus pour évaluer un vécu subjectif, la douleur, de la façon la plus appropriée et la plus objective possible en fonction du développement de l’enfant.

5

Caractéristiques développementales de la réaction des enfants à la douleur

NOURRISSON (28 JOURS-1 AN)

TROTTINEUR (1-3 ANS) ET ENFANT D’ÂGE PRÉSCOLAIRE (3-6 ANS)

ENFANT D’ÂGE SCOLAIRE (6-12 ANS)

ADOLESCENT (12-18 ANS)

• A des réactions corporelles localisées et rétracte délibérément la zone stimulée.

• Pleure bruyamment et crie.

• Peut adopter tous les comportements observés chez l’enfant plus jeune.

• A moins de protestations vocales.

• Pleure bruyamment. • A une expression faciale de douleur ou de colère (sourcils baissés et froncés, yeux solidement fermés, bouche ouverte et plus ou moins carrée). • Offre une résistance physique ; repousse vivement le stimulus après qu’il a été appliqué.

• A des expressions verbales telles que : « aïe », « oh », « ça fait mal », « bobo ». • A des mouvements violents des bras et des jambes. • Demande que la procédure se termine. • Manque de coopération ; la contention physique est souvent nécessaire. • S’accroche au parent, à l’inrmière ou à une autre personne importante pour lui. • A besoin de soutien affectif comme un câlin ou d’autres formes de réconfort physique. • Peut devenir agité et irritable en cas de douleur continue.

• A des comportements qui reètent de la douleur pendant la procédure douloureuse. • Présente surtout un comportement anxieux ou craintif pendant la période d’anticipation.

• A moins d’activités motrices. • A des expressions verbales claires comme : « Ça fait mal » ou « Vous me faites mal ». • A une tension musculaire et un contrôle du corps accrus. • Peut être en diaphorèse.

• Tente de gagner du temps par des phrases comme : « Attends une minute », « Je ne suis pas prêt ». • A une rigidité musculaire (poings serrés, articulations blanches, mâchoires serrées, membres contractés, raideur corporelle, yeux fermés, front plissé).

• Est capable d’anticiper la douleur associée à un stimulus douloureux expérimenté antérieurement ; repousse le stimulus avant qu’il soit appliqué et reproduit les comportements qui traduisent une douleur avant l’application du stimulus. • Peut exprimer de la colère envers ses parents pour la douleur qu’il ressent. Source : Adapté de Breau, L.M. et Cameld, C.S. (2011). The relation between children’s pain behaviour and developmental charac teristics: A cross-sectional study. Dev Med Child Neurol, 53 (2), e1-e7.

Chapitre 5

Évaluation et traitement de la douleur

205

chronique comparativement à une douleur postopératoire), de la capacité de l’enfant à comprendre l’outil, de l’état affectif de celui-ci au moment de l’utilisation de l’outil et de différents facteurs environnementaux (p. ex., la présence ou non des parents) (von Baeyer, 2014). Aucun outil n’est unanimement recommandé pour l’évaluation de la douleur chez l’enfant (McGrath et al., 2008). C’est pourquoi plusieurs hôpitaux ont conçu divers outils pour répondre aux besoins spéciques de leur clientèle. Les outils les plus fréquemment utilisés au Québec sont présentés dans ce chapitre. Il existe quatre types de mesures de la douleur chez l’enfant : les indicateurs physiologiques, les mesures comportementales, les autoévaluations et les évaluations multidimensionnelles. Leur applicabilité dépend des capacités linguistiques et cognitives de l’enfant, de même que du contexte de soins.

Indicateurs physiologiques De profonds changements physiologiques accompagnent souvent l’expérience de la douleur aiguë. Les indicateurs physiologiques tels que le rythme et la fréquence cardiaques, la fréquence respiratoire, la pression artérielle, la saturation en oxygène et la moiteur des paumes peuvent reéter une réaction généralisée à la douleur (Brand et Thorpe, Vous procédez à la prise des signes vitaux 2016). Cependant, ces d’Océane, âgée de 16 mois, et obtenez les valeurs mesures physiologiques suivantes : peuvent également être inuencées par la maladie, la • fréquence cardiaque : 140 batt./min ; médication et d’autres chan• fréquence respiratoire : 39 R/min ; gements de l’état physiolo• pression artérielle : 125/86 mm Hg ; gique. Il faut donc tenir compte des autres causes • température rectale : 36,9 °C. possiblement associées à ces Vous la croyez souffrante. Nommez deux raisons changements (Brand et pour lesquelles il faut approfondir l’évaluation de Thorpe, 2016 ; Brummelte, la douleur d’Océane. Oberlander et Craig, 2014).

L’évaluation des comportements est réalisée par une autre personne (proxy), généralement par l’inrmière, puis plus tard par la famille. À l’aide d’une échelle comportementale, l’infirmière observe et note les comportements de l’enfant tels que les manifestations cliniques de la douleur (pleurs, cris ou plaintes, consolabilité, frustration, raideurs, positions antalgiques, expressions faciales), les répercussions sur les routines (diminution du sommeil, anorexie), les changements de comportement (agitation, agressivité, évitement, irritabilité) et l’atonie psychomotrice (léthargie, diminution de l’intérêt pour le jeu) FIGURES 5.1 et 5.2. Cependant, il n’est pas toujours facile de distinguer les comportements liés à la douleur des réactions induites par d’autres sources de stress comme la faim, l’anxiété et d’autres types d’inconfort. Ces facteurs diminuent la spécicité et la sensibilité des mesures comportementales de la douleur, qui peuvent être difciles d’emploi

Jugement

clinique

FIGURE 5.1 Pleurs soutenus d’un nourrisson après une piqûre au talon

Outils de mesures comportementales (observationnelles) L’évaluation comportementale de la douleur est utile pour mesurer la douleur chez les nourrissons et les enfants qui ne possèdent pas les habiletés langagières nécessaires an de communiquer leur douleur, ou chez les enfants qui souffrent d’une pathologie ou d’un état de santé limitant leur capacité à communiquer aisément (Brand et Thorpe, 2016 ; von Baeyer, 2014). Bien que les évaluations comportementales nécessitent plus de temps à effectuer, elles fournissent des informations importantes qui ne peuvent pas être obtenues à partir des autoévaluations.

206

Partie 2

Évaluation clinique

FIGURE 5.2 Visage exprimant la douleur après une piqûre au talon – À noter : les yeux fermés, les sourcils gonés, la ride nasolabiale et la bouche étendue.

En cas de douleur aiguë, plusieurs échelles comportementales sont recommandées pour les enfants, dont l’échelle FLACC, conçue pour les enfants de 2 mois à 7 ans (Crellin, Harrison, Santamaria et al., 2015).

Échelle FLACC L’échelle FLACC est une échelle largement utilisée en pédiatrie chez les enfants de 2 mois à 7 ans pour mesurer la douleur aiguë ou la douleur procédurale, et la version révisée de la FLACC (FLACC-R) est utilisée en pratique clinique chez les enfants atteints de troubles cognitifs (Crellin et al., 2015 ; Crosta, Ward, Walker et al., 2014). La FLACC est une échelle d’observation comportementale de la douleur qui comprend cinq catégories de comportement : le visage (face), les jambes (legs), l’activité (activity), les pleurs (cry) et la consolabilité (consolability) (Babl, Crellin, Cheng et al., 2012 ; Merkel, Voepel-Lewis, Shayevitz et al., 1997) TABLEAU 5.2. Chacun des 5 items est coté de 0 à 2, ce qui donne un score total entre 0 et 10 : 0 = calme et sans douleur ; 1-3 = douleur légère ; 4-6 = douleur modérée ; 7-10 = douleur intense.

TABLEAU 5.2

CATÉGORIES DE COMPORTEMENT

Échelle EVENDOL L’EVENDOL (ÉValuation ENfant DOuLeur) est une échelle de mesure observationnelle/comportementale de la douleur aiguë, adaptée pour les enfants de la naissance jusqu’à 7 ans (FournierCharrière, Lassauge, Tourniaire et al., 2006). Elle comprend 5 composantes : expression vocale ou verbale, mimique, mouvements, positions et relation avec l’environnment. Chacune est cotée de 0 à 3, pour un score total pouvant varier de 0 à 15. Le seuil de traitement de cette échelle a été établi à 4/15 TABLEAU 5.3.

Outils d’autoévaluation

clinique

Jugement

dans la pratique quotidienne. Par ailleurs, les mesures comportementales sont plus ables pour évaluer la douleur brève et aiguë, qui est notamment attribuable à des interventions telles que les procédures avec des aiguilles ou les ponctions lombaires, plutôt que pour évaluer une douleur chronique.

Mathew, âgé de 3 ans, a un drain thoracique à la suite d’une pneumonie avec empyème. Il refuse de manger et ne collabore pas à la prise des signes vitaux. Vous remarquez que, 45 minutes après avoir reçu sa morphine par voie intraveineuse, il mange plus de la moitié de son repas et demande de peser sur le bouton pour mettre en fonction l’appareil de mesure de la pression. Considérezvous que les refus de manger et de participer aux soins peuvent être des indicateurs comportementaux de la douleur chez Mathew ? Justiez votre réponse. a) Oui, car il ne peut exprimer clairement qu’il ressent de la douleur. b) Oui, ses comportements ont changé après l’administration de morphine. c) Non, car en raison de son âge, il pourrait dire qu’il a mal.

L’autoévaluation est l’évaluad) Non, car ses comportements peuvent être des réactions au traitement. tion de la douleur par l’enfant lui-même, exprimée par des mots, des chiffres ou un CE QU’IL FAUT RETENIR dessin. Lorsqu’elle est possible, elle est préférable à l’évaluation comportementale. Aucune Aucune échelle d’autoévaéchelle d’autoévaluation pédiatrique n’est optiluation pédiatrique n’est male pour tous les types de douleur ni pour optimale pour tous les toutes les tranches d’âge (von Baeyer, 2014). types de douleur ni pour toutes les tranches d’âge.

Échelle FLACC NOTATION DE LA DOULEUR 0

1

2

Visage

Pas d’expression ni de sourire particuliers

Grimace ou froncement occasionnel, retrait, désintéressement

Froncement fréquent à constant, mâchoire serrée, menton tremblant

Jambes

Position normale ou détendue

Troublé, agité, tendu

Coups de pied ou jambes repliées

Activité

Couché calmement, position normale, bouge facilement

Se tortille, bouge d’avant en arrière, tendu

Cambré, rigide ou crispation nerveuse

Pleurs

Absence de pleurs (éveillé ou endormi)

Gémissement ou geignement, plainte occasionnelle

Pleurs ininterrompus (pleure ou sanglote), plaintes fréquentes

Consolabilité

Satisfait, détendu

Rassuré lorsqu’on le touche, l’étreint ou lui parle occasionnellement ; facile à distraire

Difcile à consoler ou à réconforter

Source : Adapté de Merkel et al. (1997).

Chapitre 5

Évaluation et traitement de la douleur

207

5

TABLEAU 5.3

Échelle EVENDOL

EVENDOL (ÉVALUATION – ENFANT – DOULEUR)

ÉCHELLE VALIDÉE DE LA NAISSANCE À 7 ANS SCORE DE 0 À 15, SEUIL DE TRAITEMENT 4/15

Il faut noter tout ce que vous observez, même si vous pensez que les signes ne sont pas causés par la douleur, mais par la peur, l’inconfort, la fatigue ou la gravité de la maladie. Penser à réévaluer

Signe absent

Signe faible ou passager

Signe moyen ou environ la moitié du temps

Signe fort ou quasi permanent

Expression vocale ou verbale Pleure et/ou crie et/ou gémit ou dit qu’il a mal.

0

1

2

3

0

1

2

3

0

1

2

3

0

1

2

3

Normale 0

Diminuée 1

Très diminuée 2

Absente 3

Mimique A le front plissé et/ou les sourcils froncés et/ou la bouche crispée. Mouvements

S’agite et/ou se raidit et/ou se crispe. Positions

A une attitude inhabituelle et/ou antalgique, et/ou se protège et/ou reste immobile. Relation avec l’environnement

Peut être consolé et/ou s’intéresse aux jeux et/ou communique avec l’entourage. Seuil de traitement 4/15

Score total /15

Source : Reproduit avec l’autorisation de Fournier-Charrière, E., Tourniaire, B., Carbajal, R. et al. (2012) EVENDOL, a new behavioral pain scale for children ages 0 to 7 years in the emergency department : design and validation. Pain, 153(8) :1573-82. © Groupe EVENDOL.

Il n’est actuellement pas possible de dire avec précision à partir de quel âge l’autoévaluation peut être considérée. De ce fait, et par précaution, von Baeyer et ses collaborateurs (2017) recommandent que les outils d’autoévaluation ne soient pas utilisés d’emblée avec des enfants de moins de quatre ans. 3 Les étapes du déve­ loppement physique et psychologique de l’enfant sont présentées dans le chapitre 3, Croissance, développement et promotion de la santé.

208

Partie 2

Bien que les enfants de quatre à cinq ans soient capables d’utiliser des mesures d’autoévaluation, leur capacité peut être inuencée par les caractéristiques cognitives du stade préopératoire (deux à six ans) (von Baeyer et al., 2017) 3 . À cet âge, l’enfant peut avoir de la difculté à dissocier ses sentiments liés à la douleur de ceux en lien avec son humeur. Des phrases simples et concrètes telles que « Ça ne fait pas

Évaluation clinique

bobo [ou mal] » et « Ça fait beaucoup bobo [ou mal] » sont plus faciles à comprendre que « Plus petites sensations de douleur » ou « Pire douleur imaginable ». Les échelles faciales de la douleur sont les mesures d’autoévaluation les plus utilisées chez les enfants de 4 à 11 ans, et elles peuvent être des mesures de l’intensité de la douleur, de l’effet de la douleur ou des deux (von Baeyer et al., 2017).

Échelle des visages révisée (FPS-R) Une des échelles les plus ables et valides est l’échelle des visages révisée (Faces Pain Scale – Revised [FPS-R]) (Hicks, von Baeyer, Spafford et al., 2001). Cette échelle comporte six visages, mais ne présente pas de visage souriant FIGURE 5.3.

Instructions L’inrmière doit expliquer à l’enfant, dans un langage correspondant à son stade de développement, que les différents visages montrent combien quelqu’un peut avoir mal ou bobo. Le visage de gauche montre quelqu’un qui n’a pas mal du tout ou pas de bobo. Les autres visages (l’inrmière doit les pointer un à un, de gauche à droite) montrent quelqu’un qui a de plus en plus mal ou bobo, jusqu’à celui-ci de droite qui montre quelqu’un qui a très, très mal ou beaucoup de bobos. L’inrmière demande ensuite à l’enfant d’indiquer le visage qui montre combien il a mal en ce moment. Les scores se présentent de gauche à droite : 0, 2, 4, 6, 8, 10 ; 0 correspond donc à « pas mal du tout » et 10 correspond à « très, très mal ». Il est important de dénir clairement les limites extrêmes : « pas mal du tout ou pas de bobo » et « très, très mal ou beaucoup de bobos ». Il ne faut pas utiliser les mots « triste ou de la peine » ou « heureux ou content ». Enn, l’inrmière doit bien comprendre qu’il s’agit de décrire la sensation intérieure, et non pas l’aspect du visage de l’enfant.

Échelle des visages simpliée (S-FPS) L’échelle des visages simpliée (Simplied – Faces Pain Scale [S-FPS]) est une échelle d’autoévaluation valide avec les enfants âgés de 4 ans (Emmott et al., 2017). Elle comprend 3 visages représentant des cotes de douleur de 3, 7 et 10 respectivement. Le chiffre 3 correspond à une douleur légère ; le chiffre 7, à une douleur modérée ; et le chiffre 10, à une douleur intense.

FIGURE 5.3

Échelle des visages FPS-R

L’échelle verbale numérique consiste à demander à l’enfant ou à l’adolescent d’évaluer sa douleur (donner un score) de 0 à 10, où le 0 correspond à « Aucune douleur » et le 10, à « Pire douleur imaginable ». L’enfant ou l’adolescent donne alors un score verbal sur l’évaluation de sa douleur.

clinique

Jugement

Cependant, une étude récente d’Emmott et ses collaborateurs (2017) mentionne que la FPS-R est utile pour mesurer la douleur des enfants de 5 à 12 ans, mais qu’elle comporterait trop de visages pour que les enfants de 4 ans soient capables de bien évaluer leur douleur.

Tom, âgé de 13 mois, est hospitalisé depuis 5 mois pour des brûlures aux 2e et 3e degrés sur 60 % de sa surface corporelle. Sa douleur est maîtrisée depuis plusieurs semaines, mais voilà qu’il pleure et se tortille. Vous évaluez la douleur avec l’échelle FLACC, qui démontre une douleur évaluée à 7 sur 10 au moment des crises. Plusieurs médicaments opioïdes sont essayés sans succès. Les signes vitaux sont dans les limites de la normale. Finalement, vous découvrez qu’il s’agit d’une poussée dentaire. Quelle mesure n’avait pas été évaluée, nuisant ainsi à l’évaluation du problème ?

L’échelle numérique et l’échelle verbale numérique a) Les indicateurs physiologiques. sont recommandées pour l’enfant dès l’âge de 6 ou 7 ans, s’il b) Le niveau développemental de Tom. est capable de compter et s’il a c) Les manifestations objectives de la douleur. acquis le concept des nombres d) L’évaluation des données comportementales. et de leur valeur en lien avec les autres nombres (p. ex., l’enfant comprend que le nombre 6 est plus petit que le nombre 8) (Castarlenas, Jensen, von Baeyer et al., 2017).

Instructions L’inrmière doit expliquer à l’enfant qu’à une extrémité de la ligne se trouve le 0, ce qui signie que la personne ne ressent pas de douleur. À l’autre extrémité se trouve le 10, ce qui signie que la personne ressent la pire douleur imaginable. Les chiffres 1 à 3 représentent une douleur légère ; les chiffres 4 à 6, une douleur modérée ; et les chiffres 7 à 10, une douleur sévère.

Instructions Son administration comprend 2 étapes. L’inrmière demande d’abord à l’enfant s’il a « mal » ou « bobo ». Si oui, elle lui demande ensuite de lui indiquer à quel visage correspond son « bobo » FIGURE 5.4.

Échelle numérique ou échelle verbale numérique L’échelle numérique repose sur l’utilisation d’une ligne droite dont les extrémités sont marquées et correspondent, à gauche, à « Aucune douleur » et, à droite, à « Pire douleur imaginable » FIGURE 5.5.

FIGURE 5.4

Échelle S-FPS

L’échelle peut être utilisée horizontalement ou verticalement. Les divisions le long de la ligne sont indiquées en unités de 0 à 10 (le nombre le plus élevé peut varier). Le codage des nombres devrait être le même que celui des autres échelles utilisées dans l’établissement.

FIGURE 5.5

Échelle numérique

Chapitre 5

Évaluation et traitement de la douleur

209

5

Échelle visuelle analogue (EVA) Plusieurs habiletés cognitives comme la mesure, la classication et la sériation (la capacité de placer exactement les choses en ordre ascendant ou descendant) deviennent explicites vers l’âge de 8 ans ; c’est à partir de cet âge que l’enfant devient capable d’utiliser l’échelle visuelle analogue (EVA). L’EVA est une règle, horizontale ou verticale, de 10 cm ou 100 mm, créée par Cline et ses collaborateurs (1992). Elle permet d’évaluer la douleur de l’enfant de 8 ans et plus (McGrath et al., 2008). L’EVA est considérée comme l’outil d’évaluation de référence à partir de cet âge (Bailey, Gravel et Daoust, 2012) FIGURE 5.6.

Instructions Les extrémités doivent être présentées dans des termes neutres à l’enfant ; l’une des extrémités correspond à « Absence de douleur » et l’autre, à « Pire douleur imaginable ». L’inrmière doit ensuite demander à l’enfant de placer une marque sur la ligne (ou déplacer un curseur le long de la ligne) qui décrit le mieux la quantité de douleur qu’il ressent. Enn, elle doit mesurer la distance entre l’extrémité qui représente « Aucune douleur » et la marque tracée par l’enfant, puis noter cette mesure, qui correspond au score de douleur, ou regarder à l’endos de l’échelle le chiffre correspondant à la ligne du curseur.

Échelle de couleur analogue (ECA)

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les outils d’évaluation multidimensionnels permettent de réaliser une évaluation quantitative et qualitative de la douleur.

L’échelle de couleur analogue (ECA ; en anglais, Colored Analog Scale [CAS]) est une variante de l’échelle EVA. Cette échelle comporte un curseur qui se déplace entre les deux points d’ancrage, soit les mêmes que ceux de l’échelle EVA (« Absence de douleur » et « Pire douleur imaginable »). Entre les deux points d’ancrage, il y a un triangle allongé avec un dégradé de blanc à rouge foncé. Plus l’enfant a de la douleur, plus il déplace le curseur vers la zone de couleur rouge foncé. Au dos de l’outil gure une échelle graduée de 0 à 10 cm, avec des gradations de 0,25 cm. Cette échelle peut être utilisée avec les enfants de 5 à 12 ans (Bulloch, Garcia-Filion, Notrica et al., 2009) FIGURE 5.7.

Outils multidimensionnels L’évaluation multidimensionnelle est une combinaison de la mesure physiologique, de

FIGURE 5.6

210

Partie 2

Évaluation clinique

Échelle visuelle analogue (EVA)

FIGURE 5.7

Échelle de couleur analogue

l’évaluation comportementale et de l’autoévaluation ; elle est considérée comme étant l’indicateur de la douleur le plus able (Brand et Thorpe, 2016). Les échelles d’autoévaluation permettent uniquement d’évaluer et de comparer l’intensité de la douleur selon l’évolution de l’état de santé de l’enfant, alors que les outils d’évaluation multidimensionnels permettent de réaliser une évaluation quantitative et qualitative de la douleur (McGrath et al., 2008). Ceux-ci mesurent non seulement l’intensité de la douleur, mais aussi ses différentes composantes telles que la cause, la qualité, le site et la répartition spatiale ou temporelle de la douleur, ainsi que l’effet de la douleur sur la qualité de vie comme le sommeil ou les capacités fonctionnelles physiques, sociales et affectives. La mnémonique PQRSTU est un exemple d’outil multidimensionnel d’évaluation de la douleur. Il s’agit de questionner l’enfant souffrant an d’obtenir le portrait le plus juste possible de la douleur qu’il ressent et de ses composantes, et ce, dans le but d’intervenir d’une manière efficace ENCADRÉ 5.3. Les échelles multidimensionnelles qui s’intéressent aux répercussions de la douleur sur la qualité de vie sont majoritairement utilisées pour évaluer la douleur chronique d’origine cancéreuse ou non cancéreuse (McGrath et al., 2008). Elles sont rarement utilisées dans un contexte de douleur aiguë, car elles sont plus exhaustives, mais

Collecte de données ENCADRÉ 5.3

Utiliser la technique PQRSTU pour évaluer la douleur

La mnémonique PQRSTU permet de se remémorer les questions à poser, soit : P (PROVOQUER / PALLIER / AGGRAVER) • Comment la douleur est-elle apparue ? Qu’est-ce qui la provoque ? Qu’est-ce qui la soulage ? Q (QUALITÉ / QUANTITÉ) • À quoi ressemble la douleur ? Exemples : brûlure, choc électrique, piqûre, sous forme de coup de poing, lancinante, etc. • Quelle est l’intensité de ta douleur ? (Utiliser une échelle d’autoévaluation appropriée à l’âge de l’enfant.)

R (RÉGION / IRRADIATION) • Où ressens-tu la douleur ? • As-tu mal ailleurs en même temps ? S (SIGNES ET SYMPTÔMES ASSOCIÉS / SÉVÉRITÉ) • En plus d’avoir mal, y a-t-il autre chose qui te dérange ? Qu’est-ce que la douleur t’empêche de faire ? T (TEMPS / DURÉE) • Depuis quand as-tu mal ? U (UNDERSTANDING) COMPRÉHENSION ET SIGNIFICATION POUR LE CLIENT) • D’après toi, pourquoi as-tu mal ? Qu’est-ce qui fait que tu as mal ?

L’analyse d’un symptôme (PQRSTU) et l’histoire de santé (AMPLE) permettant de collecter des données sur la douleur sont présentées dans le chapitre 9 du manuel de Lewis, S.L., Dirksen, S.R., Heitkemper, M.M., et al. (2016). Médecine Chirurgie (2e ed.). Montréal : Chenelière Éducation.

elles peuvent être utiles lorsque la douleur aiguë est intense, diffuse ou inexpliquée par le contexte clinique.

Outil APPT L’Adolescent Pediatric Pain Tool (APPT) est un instrument multidimensionnel qui permet d’évaluer, chez l’enfant de plus de 8 ans et chez l’adolescent, 3 dimensions de la douleur : les sites, l’intensité et la qualité. Chacune de ces composantes est notée séparément (Fernandes, De Campos, Batalha, et al., 2014). • Sites : demander à l’enfant de noircir les sites de douleur sur le dessin d’un corps vu de face et de dos FIGURE 5.8. • Intensité : utiliser une échelle d’autoévaluation de la douleur (p. ex., l’échelle EVA) pour en quantier l’intensité. • Qualité : faire surligner les mots qui décrivent la douleur ; un choix de 67 mots regroupés en 4 catégories est suggéré : descriptive (p. ex., dérangeant, terrible, inconfortable), sensorielle (p. ex., engourdi, brûlure, crampe), temporelle (p. ex., toujours, constant, imprévisible) et affective (p. ex., peur, frustration, inquiétude).

5.2.3

Situations particulières

Différences culturelles Étant donné que la douleur est souvent exprimée par la communication verbale, le langage peut devenir une barrière à une évaluation précise de la douleur (Fortin, Gauthier, Gomez et al., 2014). L’adéquation culturelle d’outils d’évaluation qui ont été validés presque uniquement auprès d’enfants blancs constitue un dé majeur dans l’évaluation et la gestion de la douleur chez les enfants. L’origine ethnique et culturelle peut inuencer la

FIGURE 5.8 Outil d’évaluation de la douleur chez l’adolescent (APPT) : silhouettes pour l’évaluation de la douleur – Directives pour l’enfant : « Colorie ces dessins pour montrer les endroits où tu as mal. Dessine des marques aussi grandes ou petites que la douleur, là où tu la ressens. » Ici, l’outil a été utilisé par un enfant atteint de drépanocytose.

abilité des outils d’évaluation de la douleur mis au point dans un contexte culturel unique (Nortjé et Albertyn, 2015 ; Ware, Epps, Clark et al., 2012). Par exemple, pour les enfants d’origine chinoise, la couleur rouge représente la joie et le bonheur. Chapitre 5

Évaluation et traitement de la douleur

211

5

Dans ce contexte, l’utilisation d’une échelle comme l’ECA, comportant plus de rouge vers une intensité plus élevée de douleur, ne serait pas appropriée pour évaluer les enfants élevés dans cette culture, car ils n’auraient pas tendance à associer une augmentation de la couleur rouge à une intensité de douleur plus élevée.

Enfants atteints de troubles cognitifs et de la communication

Hypertonie spastique : Augmentation exagérée et permanente du tonus musculaire d’un muscle au repos qui survient en cas de lésion cérébrale ou spinale.

CE QU’IL FAUT RETENIR

La douleur des enfants atteints de décits cognitifs est souvent sous-évaluée, donc sous-traitée, en raison du manque d’outils d’évaluation adaptés à cette clientèle.

212

Partie 2

Les enfants pour lesquels l’autoévaluation de la douleur peut être problématique sont ceux atteints d’un décit cognitif, neuromusculaire ou fonctionnel (p. ex., une décience intellectuelle, une paralysie cérébrale, une cécité, une surdité), de troubles métaboliques, de troubles envahissants du développement (p. ex., l’autisme) ou d’un trauma crânien grave, ou encore ceux qui ont des entraves à la communication (p. ex., les enfants sous ventilation assistée ou sous sédation importante). Ces enfants sont plus susceptibles de recevoir un traitement insufsant de la douleur en raison d’une mauvaise évaluation ou de l’utilisation d’une échelle inadaptée (Belew, Barney, Schwantes et al., 2014). Les comportements qu’ils manifestent sont des gémissements, des schémas de jeu et de sommeil incohérents, des changements d’expression faciale et d’autres problèmes physiques qui peuvent masquer l’expression de la douleur et être difciles à interpréter (Belew et al., 2014). De plus, les enfants atteints de troubles cognitifs profonds souffrent souvent d’hypertonie spastique et de contractures. Les parents ou le soignant principal sont une source importante d’informations pendant l’évaluation (Birnie, Boerner et Chambers, 2014). Près de 60 % des parents d’enfants ayant une décience cognitive profonde ont déclaré que leur enfant avait éprouvé une douleur ou un inconfort grave qui n’avait pas été géré efcacement (Lenton, Stallard, Lewis et al., 2001 ; Stallard, Williams, Velleman et al., 2002). Les comportements relatifs à la douleur les plus souvent rapportés sont les pleurs, une diminution de l’activité, la recherche de réconfort, les gémissements, l’absence de coopération, l’irritabilité, la raideur, les spasmes, la tension ou la rigidité, une diminution du sommeil, une satisfaction ou un apaisement difcile, des tressaillements, des mouvements antalgiques de défense et de l’agitation (Belew et al., 2014). Les parents d’enfants avec un décit cognitif profond rapportent que leurs enfants éprouvent de la douleur ou un inconfort important qui n’étaient pas gérés adéquatement (Crosta et al., 2014). Zabalia et ses collaborateurs (2011) mentionnent que la douleur des enfants atteints de décits cognitifs est souvent sous-évaluée, donc

Évaluation clinique

sous-traitée, en raison du manque d’outils d’évaluation adaptés à cette clientèle. Deux échelles, entre autres, permettent d’évaluer leur douleur : la grille d’évaluation de la douleur-décience intellectuelle – version postopératoire (GED-DI) et l’échelle FLACC révisée.

Grille d’évaluation de la douleur-décience intellectuelle – version post-opératoire GED-DI La grille d’évaluation de la douleur-décience intellectuelle – version post-opératoire GED-DI révisée, ou échelle NCCPC révisée en anglais (NonCommunicating Children’s Pain Checklist), est un outil conçu particulièrement pour évaluer la douleur des enfants ayant des déciences cognitives (Breau, McGrath, Cameld, et al., 2002). Sa version abrégée a été validée dans un contexte postopératoire chez les enfants de 3 ans et plus. Elle a été traduite en français (GED-DI) en 2004 (Lévêque, Lourenco, Raffour et al., 2008) et validée en 2011 (Zabalia et al., 2011). L’échelle distingue les périodes de douleur et de calme, et elle permet de prédire le comportement pendant les épisodes douloureux subséquents TABLEAU 5.4 . Elle consiste en 6 sous-échelles (expression verbale, comportement, mimique, activité globale, corps et membres, signes physiologiques), et l’évaluation se base sur le nombre de fois que les items sont observés pendant une période de 10 minutes (0 = non observé ; 1 = observé à l’occasion ; 2 = passablement ou souvent ; 3 = très souvent ; NA = Ne s’applique pas). Cette échelle a été utilisée en phase postopératoire et s’est avérée efcace pour évaluer la douleur en milieu clinique (Massaro, Ronfani, Ferrara et al., 2014).

Échelle FLACC révisée L’échelle FLACC, présentée en début de section, a été révisée et validée an d’inclure les comportements propres aux enfants ayant des déciences cognitives (Malviya, Voepel-Lewis, Burke et al., 2006). Chaque catégorie comprend une description du comportement, mais les parents peuvent ajouter des comportements qui représentent une douleur modérée à intense chez leur enfant (Crosta et al., 2014). Chez 52 enfants de 4 à 19 ans ayant une décience cognitive, l’échelle FLACC révisée a démontré une diminution des scores après l’administration d’analgésiques (Malviya et al., 2006).

Douleur chronique ou complexe Les questionnaires et les échelles d’évaluation de la douleur ne représentent pas toujours les meilleurs moyens d’évaluer la douleur chez les enfants, surtout chez ceux souffrant de douleurs complexes (Woodgate, Degner et Yanofsky, 2003).

TABLEAU 5.4

Grille GED-DIa

ITEM OBSERVÉ

NOTATION DE LA DOULEUR

Expression verbale Gémit, se plaint, pleurniche faiblement.

0

1

2

3

NA

Pleure (modérément).

0

1

2

3

NA

Crie/hurle (fortement).

0

1

2

3

NA

Émet un son ou un mot particulier pour exprimer la douleur (p. ex., un cri, un type de rire particulier).

0

1

2

3

NA

Ne collabore pas, grincheux, irritable, malheureux.

0

1

2

3

NA

Interagit moins avec les autres, se retire.

0

1

2

3

NA

Cherche le confort ou la proximité physique.

0

1

2

3

NA

Est difcile à distraire, à satisfaire ou à apaiser.

0

1

2

3

NA

Fronce les sourcils.

0

1

2

3

NA

Changement dans les yeux : écarquillés, plissés ; air renfrogné.

0

1

2

3

NA

Ne rit pas, oriente ses lèvres vers le bas.

0

1

2

3

NA

Ferme ses lèvres fermement, fait la moue, lèvres frémissantes, maintenues de manière proéminente.

0

1

2

3

NA

Serre les dents, grince des dents, se mord la langue ou tire la langue.

0

1

2

3

NA

Ne bouge pas, est inactif ou silencieux.

0

1

2

3

NA

Saute partout, est agité, ne tient pas en place.

0

1

2

3

NA

Présente un faible tonus, est affalé.

0

1

2

3

NA

Présente une rigidité motrice, est raide, tendu, spastique.

0

1

2

3

NA

Montre par des gestes ou des touchers les parties du corps douloureuses.

0

1

2

3

NA

Protège la partie du corps douloureuse ou privilégie une partie du corps non douloureuse.

0

1

2

3

NA

Tente de se soustraire au toucher d’une partie de son corps, sensible au toucher.

0

1

2

3

NA

Bouge son corps d’une manière particulière dans le but de montrer sa douleur (p. ex., échit sa tête vers l’arrière, se recroqueville).

0

1

2

3

NA

5

Comportement

Mimique

Activité globale

Corps et membres

Chapitre 5

Évaluation et traitement de la douleur

213

Grille GED-DIa (suite)

TABLEAU 5.4 ITEM OBSERVÉ

NOTATION DE LA DOULEUR

Signes physiologiques Frissonne.

0

1

2

3

NA

La couleur de sa peau change, devient pâle.

0

1

2

3

NA

Transpire, sue.

0

1

2

3

NA

Larmes visibles.

0

1

2

3

NA

A le soufe court, coupé.

0

1

2

3

NA

Retient sa respiration.

0

1

2

3

NA

a Instructions pour

la notation : 0 = Non observé pendant la période d’observation. Si l’action n’est pas présente parce que le participant n’est pas capable d’exécuter cet acte, elle devrait être marquée comme NA. 1 = Est vu ou entendu rarement (à peine), mais présent. 2 = Vu ou entendu un certain nombre de fois, pas de façon continuelle. 3 = Vu ou entendu souvent, de façon presque continuelle. Un témoin noterait facilement l’action.

NA = Non applicable. Ce participant n’est pas capable d’effectuer cette action. Source : Lévêque, C., Lourenco, M., Raffour, C. et al. (2008). Participation à l’étude de validation de la traduction en langue française d’une grille d’évaluation de la douleur postopératoire du polyhandicapé : la GED-DI. Canadian Journal of Anesthesia / Journal canadien d’anesthésie, 2011, 58, 1016-1023. Springer.

Certains enfants sont incapables d’établir un rapport entre un visage ou un nombre qui décrirait leur douleur, ou d’isoler la douleur des autres symptômes qu’ils ressentent. C’est le cas des enfants atteints d’un cancer dont les multiples symptômes ne sont pas dissociables de la douleur. L’expérience de la douleur peut être compliquée par des processus douloureux qui se produisent dans le système nerveux central (SNC), comme l’hyperalgie, la sensibilisation centrale et l’escalade de la douleur, par d’autres manifestations cliniques, comme la fatigue, les nausées, les vomissements, la diarrhée et la constipation qui accompagnent les traitements médicaux, ou par des complications, comme les infections, l’apparition inattendue de stules et les typhlites causées par la maladie ou les traitements (Schechter, 2014). La douleur peut empêcher l’enfant de manger, de dormir et d’effectuer ses activités quotidiennes (Clinch, 2014 ; Schechter, 2014).

Évaluation de la douleur chronique On considère qu’il y a douleur chronique lorsqu’elle excède de un mois la période normale de guérison pour une intervention ou une maladie (Potter, Perry, Stockert et al., 2016). Chez les enfants souffrant de maladies chroniques, surtout chez ceux qui ont des douleurs complexes, l’aspect le plus important de l’évaluation consiste, pour l’inrmière, à établir une relation de conance avec l’enfant et la famille an de mieux comprendre l’état de santé et le contexte de l’enfant, de même que l’expérience de la douleur. Les composantes importantes à examiner au moment de l’évaluation sont : 1) le moment de l’apparition de la douleur, sa durée et ses caractéristiques ;

214

Partie 2

Évaluation clinique

2) l’efcacité du traitement actuel ; 3) les facteurs qui aggravent ou qui soulagent la douleur ; 4) les autres symptômes et complications simultanés, et l’interférence avec l’humeur de l’enfant ; 5) le fonctionnement de celui-ci et ses interactions avec sa famille (Schechter, 2014). Plusieurs de ces composantes sont comprises dans l’outil mnémotechnique PQRSTU. En plus de demander à l’enfant ou au parent à quel moment la douleur a commencé et combien de temps elle dure, l’inrmière peut évaluer les variations et les rythmes en demandant si la douleur est moindre ou pire à certains moments de la nuit. Si l’enfant souffre de douleurs chroniques ou prolongées, lui ou le parent peuvent connaître les médicaments et les doses qui sont les plus efcaces. Ils peuvent aussi avoir trouvé des méthodes non pharmacologiques pour gérer la douleur, méthodes présentées dans la section suivante. Pour les enfants souffrant de douleurs chroniques ou récurrentes, ou pour les parents d’un enfant souffrant de ces types de douleur, tenir un journal de la douleur est essentiel pour déterminer les interventions efcaces et les moments où l’enfant ressent le plus de douleur (Stinson, Kavanagh, Yamada et al., 2006). Chaque fois qu’une douleur est constatée, l’enfant ou les parents notent son intensité à l’aide d’une échelle d’autoévaluation ou d’une échelle d’observation comportementale, le facteur déclenchant, le traitement pris et les répercussions sur les activités. Le comportement de l’enfant doit être observé dans différentes situations de la vie quotidienne : soins, alimentation, sommeil, interactions sociales, communication et présence à l’école pour les enfants d’âge scolaire.

Il semble que la tenue d’un journal électronique s’avère particulièrement avantageuse pour favoriser l’adhésion et le suivi chez les enfants d’âge scolaire et les adolescents (Palermo, Valenzuela et Stork, 2004).

5.3.1

5.3

Certaines interventions non pharmacologiques, notamment les massages ou la neurostimulation transcutanée, sont basées sur la théorie du portillon. Ce mécanisme de modulation de la douleur repose sur le principe que les impulsions douloureuses peuvent passer du premier au second neurone lorsque le portillon est ouvert, mais qu’elles sont bloquées lorsqu’il est fermé par la stimulation des grosses bres associées entre autres aux massages et à la neurostimulation (Marchand, 2009 ; Melzack et Wall, 1965). Ce soulagement est toutefois limité à l’endroit où il y a une stimulation.

Normalement, tous les enfants éprouvent de la douleur qui peut résulter de blessures mineures, de coupures, d’hématomes, de maux de tête occasionnels, de maux de dents ou de fractures. La douleur peut aussi résulter d’une affection occasionnant des douleurs aiguës ou chroniques qui impliquent parfois des procédures chirurgicales, diagnostiques et thérapeutiques telles que la ponction lombaire, l’aspiration de moelle osseuse ou les prélèvements sanguins. La douleur non soulagée peut avoir des conséquences psychologiques, psychosociales et comportementales à long terme chez les enfants (Uman, Birnie, Noel et al., 2013). Par exemple, selon Clinch (2014), la douleur chronique peut avoir un effet sur l’absentéisme à l’école et sur la capacité de concentration, ce qui peut nuire à la performance scolaire de l’enfant. Son intégration auprès de son groupe de pairs peut aussi être affectée. La douleur non soulagée a également des répercussions physiologiques telles que de la tachycardie, de la tachypnée, une augmentation de la pression artérielle, une augmentation de la consommation d’oxygène par les tissus, la stimulation du système rénine-angiotensine, des nausées, des vomissements et de la rigidité musculaire (Brummelte et al, 2014). Les processus physiologiques de la douleur chez les enfants sont les mêmes que chez les adultes, si ce n’est que les enfants de moins de un an auraient un seuil de sensibilité à la douleur plus bas que les enfants plus âgés et les adultes (Brummelte et al, 2014). Lorsque la douleur n’est pas soulagée, l’information sensorielle provenant des tissus blessés atteint les neurones de la moelle épinière et a des répercussions sur des systèmes multiples. Le traitement de la douleur devrait donc être une priorité pour tous les professionnels de la santé. Le soulagement adéquat de la douleur est tributaire de plusieurs facteurs, tels le type de médication utilisé, la maîtrise de l’anxiété, les expériences douloureuses antérieures ainsi que divers autres facteurs psychosociaux, culturels et environnementaux. Cependant, la douleur est encore trop souvent mal gérée dans différents établissements de santé dans le monde, spécialement en milieu pédiatrique (Bice, Gunther et Wyatt, 2014).

La théorie du portillon ainsi que la neurophysiologie de la douleur sont abordées en détail dans le chapitre 33 du manuel de Potter, P.A., Perry, A.G., Stockert, P.A., et al. (2016). Fondements généraux (4e éd.). Montréal : Chenelière Éducation.

Les méthodes physiques (p. ex., les massages, l’application de chaleur ou de froid, les respirations profondes) et cognitivo-comportementales (p. ex., la distraction) ainsi que les approches complémentaires et parallèles en santé (ACPS) (p. ex., l’hypnose ou l’acupuncture) sont des techniques qui, utilisées isolément ou en complément de traitements pharmacologiques, permettent d’optimiser La mère de Laurent, âgé de quatre ans, vous le soulagement de la douleur. réclame une dose de morphine, car ce dernier dit De plus, chez l’enfant, les être souffrant. L’enfant a subi une appendicectomie facteurs environnementaux il y a six heures. Devriez-vous préparer la dose (p. ex., l’hôpital) et psycholod’analgésique en vous basant sur la demande de giques (p. ex., l’absence des la mère ? Justiez votre réponse. parents, la peur de l’inconnu) peuvent exercer une forte inuence sur la mémoire et la perception de la douleur, qui sont souvent associées à la peur, à l’anxiété et au stress (Noel, Rabbitts, Fales et al., 2017). Ces facteurs peuvent être modiés par des stratégies psychosociales, l’enseignement, le soutien parental et les interventions cognitivo-comportementales.

clinique

Jugement

Approche thérapeutique de la douleur

Traitement non pharmacologique

La combinaison des interventions non pharmacologiques et pharmacologiques semble être une avenue intéressante pour atteindre un niveau de douleur acceptable sans trop d’effets indésirables (Friedrichsdorf, 2015 ; Yaster, 2010).

Approche cognitivo-comportementale Les stratégies cognitivo-comportementales font appel à diverses techniques (la distraction passive et active, la relaxation, le rêve éveillé dirigé, l’hypnothérapie, la stimulation cutanée, etc.) ainsi qu’à certaines approches provenant des ACPS. Ce sont des stratégies d’adaptation qui visent à réduire la perception de la douleur, à la rendre plus tolérable, à diminuer l’anxiété et à améliorer l’efcacité des analgésiques, ou à permettre d’en diminuer la dose requise (Charrette, Fiola, Charest et al., 2015). Selon deux revues systématiques récentes, ces techniques diminuent la perception de la menace de la douleur, donnent une impression de maîtrise, améliorent le confort et favorisent le repos ainsi que le sommeil (Eccleston, Palermo, Williams et al., 2014 ; Chapitre 5

CE QU’IL FAUT RETENIR

Le soulagement adéquat de la douleur est tributaire de plusieurs facteurs, tels le type de médication utilisé, la maîtrise de l’anxiété, les expériences douloureuses antérieures ainsi que divers autres facteurs psychosociaux, culturels et environnementaux.

Évaluation et traitement de la douleur

215

5

Uman et al., 2013). Elles permettent de dévier l’attention de l’enfant vers un autre événement ou un stimulus non agressif. Elles renvoient la douleur à la périphérie de la conscience en incitant l’enfant à se concentrer sur l’élément distrayant plutôt que sur la douleur. FIGURE 5.9 La succion après l’administraPar exemple, en parlant tion de sucrose par voie orale peut améliorer l’analgésie de ses loisirs, de ses habiavant une prise de sang au talon chez le nourrisson. tudes et de ses passions, l’enfant se remémore des moments de plaisir, ce qui permet de réduire non seulement la douleur, mais aussi la mémoire de la douleur ENCADRÉ 5.4.

Jugement

clinique

Christopher, âgé de 6 ans, se plaint d’une douleur variant entre 8 et 10 sur 10 en tout temps depuis 2 jours. Il est hospitalisé pour une crise vasoocclusive d’anémie falciforme, et ses parents sont absents. Vous administrez à Christopher sa dose d’analgésique, lui faites visionner un lm et lui promettez de jouer à un jeu avec lui après votre pause. À votre retour, vous évaluez la douleur de Christopher, qu’il chiffre maintenant à 4 sur 10. Qu’est-ce qui pourrait expliquer le soulagement assez rapide de la douleur de Christopher ? a) La distraction par l’écoute d’un lm. b) Le bon choix de l’analgésique. c) Le pic d’action de l’analgésique. d) L’activité du jeu avec l’inrmière.

Plusieurs études pédiatriques évaluant les inter ventions cognitivocomportementales pour diminuer l’anxiété et la douleur ont été menées auprès d’enfants et d’adolescents subissant des procédures douloureuses à court terme, comme la prise de sang, l’insertion d’un cathéter intraveineux, la vaccination, la ponction lombaire et la biopsie de la moelle osseuse. La plupart de ces études suggèrent que les techniques cognitivo-comportementales réduisent efficacement

l’anxiété et la douleur de ces enfants. Des interventions non pharmacologiques (imagerie guidée et relaxation) ont été utilisées avec succès chez les enfants et les adolescents an de soulager la douleur postopératoire. Ce type d’interventions est également efcace pour réduire la douleur et l’anxiété, ainsi que pour améliorer le fonctionnement physique et psychologique dans différentes populations pédiatriques souffrant de douleurs chroniques, particulièrement chez des enfants souffrant d’une maladie chronique comme le cancer, la polyarthrite évolutive et la fibrose kystique (Charette et al., 2015 ; Taddio, 2014 ; Uman et al., 2013). Une récente revue Cochrane (mise à jour) sur les méthodes non pharmacologiques de soulagement de la douleur a conclu que plusieurs de ces méthodes diminuent de façon importante la douleur liée aux procédures de soins chez les enfants de moins de 3 ans (Pillai Riddel et al., 2017) ENCADRÉ 5.5.

Méthodes complémentaires pour le nouveau-né et le nourrisson Les études sur la douleur du nouveau-né et du nourrisson portent le plus souvent sur la ponction veineuse au talon (Pillai Riddell et al., 2017). Les interventions les plus efcaces pour diminuer les comportements liés à la douleur se sont avérées être l’emmaillotement, le bercement de l’enfant, la stimulation orotactile (suce ou autre) et l’administration de sucrose (Pillai Riddell et al., 2017) ; Stevens, Yamada, Ohlsson et al., 2017). La combinaison de plusieurs interventions, par exemple l’emmaillotement et la succion, potentialise l’effet FIGURE 5.9.

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 5.4

Stratégies cognitivo-comportementales

Les enfants devraient apprendre à utiliser une stratégie cognitivo-comportementale, en particulier avant que la douleur s’installe ou s’intensie. Il est possible de planier cet apprentissage avant une procédure douloureuse ou s’il est anticipé que la problématique de santé de l’enfant provoquera de la douleur. Les enfants sont généralement ouverts aux stratégies de maîtrise de la douleur qui font appel à leur imagination et à leur sens du jeu (Uman et al., 2013). An de réduire les efforts de l’enfant, les instructions relatives aux stratégies comme la distraction ou la relaxation peuvent être enregistrées sur le téléphone cellulaire ou la tablette du parent ou de l’adolescent et écoutées pendant une période où il se sent bien. Cependant, même lorsqu’il a appris la stratégie, l’enfant a souvent besoin d’aide pour l’utiliser pendant une procédure douloureuse. L’apprentissage peut aussi être réalisé après la procédure. Cela permet à l’enfant

216

Partie 2

Évaluation clinique

de récupérer, d’avoir l’impression de maîtriser les choses et de s’adapter plus efcacement (Charette et al., 2015). L’inrmière peut décrire plusieurs stratégies et laisser l’enfant choisir la plus attirante. Il est souvent nécessaire d’essayer plusieurs stratégies pour trouver celles qui conviennent à l’âge de l’enfant, à l’intensité de sa douleur et à ses capacités avant de déterminer laquelle est la plus efcace pour lui. Les parents devraient participer au processus de sélection ; ils connaissent peut-être les capacités d’adaptation habituelles de l’enfant et peuvent aider à trouver les stratégies potentiellement fructueuses. Le fait de faire participer les parents les encourage aussi à apprendre la stratégie avec l’enfant et à agir comme guides. Si le parent est absent, un autre membre de la famille présent au chevet de l’enfant peut l’aider à choisir une stratégie de distraction qui lui convient (Ballard, Le May, Khadra et al., 2017).

Pratiques inrmières ENCADRÉ 5.5

Recourir à des stratégies non pharmacologiques pour soulager la douleur

STRATÉGIES GÉNÉRALES

• Utiliser les interventions non pharmacologiques en complément des interventions pharmacologiques. • Établir une relation de conance avec l’enfant et la famille. Avant une procédure douloureuse • Décrire concrètement et dans les détails, avec des mots compréhensibles pour l’enfant, les étapes de l’intervention et ce qu’il va ressentir. • Éviter de suggérer l’idée de la douleur : – Par exemple, au lieu de dire : « Ça va (peut) faire mal », dire : « Parfois, on sent une poussée, une piqûre ou un pincement, et parfois on ne sent rien. Dis-moi ce que ça te fait. » – Utiliser des descripteurs n’ayant pas de liens avec la douleur lorsque c’est possible (p. ex., « On sent de la chaleur » plutôt que « Ça brûle »). Cela permet une variation de la perception sensorielle, évite de suggérer que ça fait mal et permet à l’enfant de maîtriser la description des réactions. – Éviter les descriptions ou les énoncés exagérés (p. ex., « C’est une intervention terrible » ou « Ça va faire vraiment mal »). • Atténuer le sentiment d’impuissance de l’enfant en lui donnant, si possible, un certain contrôle sur la procédure en lui offrant des choix, par exemple : – l’endroit de l’injection ;

– le pansement ;

– la distraction durant la procédure ;

– etc.

– la personne qui lui tiendra la main ;

• Pour maîtriser la douleur à long terme, donner à l’enfant une poupée qui le représente et qui lui permet de reproduire, sur la poupée, l’intervention qu’il vient de subir. STRATÉGIES COGNITIVO-COMPORTEMENTALES SPÉCIFIQUES

Distraction La distraction doit être adaptée à l’âge de l’enfant et à ses désirs, et elle doit tenir compte de sa fatigue et de sa capacité à se concentrer. La réalité virtuelle est un outil efcace pour distraire l’enfant de sa douleur (Gold et Mahrer, 2018). Son attention est déviée du monde réel et axée vers le monde virtuel grâce à des stimulus visuels, auditifs et interactifs. Plusieurs interventions peuvent être effectuées pour distraire l’enfant de la procédure douloureuse : • Demander aux parents et à l’enfant de déterminer les distractions. • Faire participer l’enfant à un jeu : jeu vidéo, jeu de société, etc. • Lui suggérer de chanter, d’écouter de la musique, de regarder la télévision. • L’inciter à regarder et à manipuler des jouets spécialement amusants ou inhabituels (p. ex., un kaléidoscope). • Compter avec lui des objets, des images. • Lui raconter une histoire ou un conte. • Le faire parler de quelque chose d’agréable qui le concerne (son animal, son école, son jouet préféré, son meilleur ami). • Lui demander de soufer des bulles ou d’éloigner la douleur en soufant. • Utiliser l’humour, par exemple regarder des dessins animés, raconter des blagues ou des histoires drôles, ou utiliser les services d’un clown auprès de l’enfant, lorsque ce service est offert.

• Ajuster la position de l’enfant pour qu’elle soit la plus confortable possible, idéalement sur le parent, tout en respectant les contraintes inhérentes à la procédure. Éviter de lui imposer une contention autoritaire.

Relaxation Avant tout, il faut s’assurer que l’enfant est dans une position confortable.

• Préparer le matériel utile à la distraction : bulles de savon, musique, jouets, lecteur MP3, radio, téléphone intelligent, tablette, etc.

– S’assurer que l’enfant est bien soutenu, par exemple en le tenant verticalement contre sa poitrine et son épaule.

Pendant une procédure douloureuse

– Le bercer avec des mouvements amples et rythmés par une berceuse, ou d’avant en arrière, plutôt que de le faire rebondir.

• Rester avec l’enfant. • Le rassurer et l’encourager à exprimer ce qu’il ressent. • Créer les meilleures conditions : choisir un matériel approprié, limiter l’utilisation d’adhésifs, regrouper les soins, demander à une autre inrmière d’effectuer la procédure après deux essais infructueux. • Permettre aux parents de rester avec l’enfant si celui-ci et ses parents le souhaitent ; encourager le parent à parler doucement à l’enfant et à maintenir un contact avec lui (main, voix, paroles, chanson, regard) et à le distraire. Positionner l’enfant sur le parent, lorsque c’est possible. • Faire participer les parents pour qu’ils apprennent les stratégies non pharmacologiques particulières les plus efcaces et pour qu’ils aident l’enfant à les utiliser. Après une procédure douloureuse • Accompagner l’enfant et conclure le soin en l’encourageant à s’exprimer sur ce qu’il vient de vivre et en le félicitant. • Renseigner l’enfant sur la douleur, surtout lorsque les explications peuvent diminuer l’anxiété (p. ex., la douleur peut se produire après l’intervention chirurgicale et n’indique pas que quelque chose va mal) ; rassurer l’enfant en lui disant qu’il n’est pas responsable de la douleur.

• Nourrisson et trottineur (avant l’âge de 3 ans) :

• Enfant de 3 ans et plus : – Demander à l’enfant de respirer profondément et de devenir mou comme une poupée en expirant lentement, puis de bâiller (faire une démonstration, si nécessaire). – Lui demander de ramollir chaque partie du corps en commençant par les orteils jusqu’à la tête ; si l’enfant a de la difculté à relaxer, lui demander de contracter, puis de relâcher chaque partie de son corps. – Lui permettre de garder les yeux ouverts pendant la relaxation. Rêve éveillé dirigé • Demander à l’enfant de raconter une expérience réelle ou imaginaire très agréable. • Lui demander de décrire les détails de l’événement et d’inclure le plus de sensations possible (p. ex., ressentir la brise fraîche, voir les belles couleurs, écouter de la musique agréable). • Lui demander d’écrire ou d’enregistrer le scénario. • L’encourager à se concentrer uniquement sur l’événement agréable pendant le moment douloureux ; améliorer la visualisation en rappelant des détails particuliers, en lisant le scénario ou en faisant jouer la cassette. • Combiner la relaxation et la respiration rythmée.

Chapitre 5

Évaluation et traitement de la douleur

217

5

L’emmaillotement consiste à envelopper étroitement l’enfant dans une couverture pour augmenter son impression de sécurité. Pour effectuer une ponction au talon, tenir le nouveau-né emmailloté contre soi, en position verticale, serait encore plus protable. Il est également plus efcace de bercer l’enfant dans ses bras plutôt que d’utiliser un berceau (Pillai Riddell et al., 2017). La stimulation orotactile peut être faite à l’aide d’une suce ou de tout autre objet qui stimule le mouvement de succion (Liu, Lin, Chou et al., 2010).

La Commission des praticiens en médecine douce du Québec (www.cpmdq.com) centralise de nombreuses informations sur les médecines douces (dénitions, annuaires des thérapeutes, recension des formations professionnelles, etc.).

Plusieurs études ont démontré que l’administration de sucrose par voie orale est un moyen efcace et sécuritaire pour diminuer les manifestations de douleur (pleurs, grimaces, etc.) chez les enfants de moins de un an (Stevens et al., 2017). Le goût du sucre stimulerait la production d’endorphines et atténuerait ainsi la perception de la douleur. Cette pratique, recommandée par l’Académie canadienne de pédiatrie, tarde à être implantée de façon courante en raison du manque de résultats probants quant à la dose idéale selon l’âge de l’enfant et au moment optimal d’administration (Stevens et al., 2017) ENCADRÉ 5.6. Une autre technique, celle du kangourou, consiste à placer le nouveau-né portant uniquement une couche sur la poitrine nue de son père ou de sa mère (Johnston, Campbell-Yeo, Disher et al., 2017). Il existe des différences signicatives dans la réaction douloureuse des nouveau-nés pendant une incision selon qu’ils ont bénécié ou

Pratiques inrmières ENCADRÉ 5.6

Administrer du sucrose

INDICATIONS

• Pour soulager la douleur modérée chez les enfants de moins de 1 an au cours de procédures simples comme une ponction veineuse ou un changement de pansement. • À utiliser en combinaison avec d’autres mesures pour des procédures complexes comme l’insertion d’un drain, une ponction lombaire, une circoncision. • Sont exclus : prématurés de moins de 31 semaines ; enfants paralysés, sous sédation ou ayant des décits neurologiques ; enfants souffrant d’une instabilité cardiaque, respiratoire ou glycémique. ADMINISTRATION

• Tremper une suce dans 0,2 mL d’une solution sucrée ou administrer la solution

218

Partie 2

Évaluation clinique

sucrée directement sur la langue avec une seringue sans aiguille. • La dose administrée varie en fonction du poids de l’enfant, mais l’administration de doses supérieures à 0,5 g n’a pas démontré une efficacité supérieure (Stevens et al., 2017). • Administrer moins de 2 minutes avant la procédure à la température ambiante ; la procédure doit s’étaler sur une minute. DOCUMENTATION

• Comme c’est le cas pour toute médication, elle doit inclure la procédure, le nom du médicament, la dose et la réponse de l’enfant à l’intervention.

non de la technique du kangourou. Une revue intégrative des écrits, menée par Shorey et ses collaborateurs (2016), indique que la méthode kangourou entraînerait une diminution des paramètres cardiaques et respiratoires, et qu’elle aurait un effet positif sur le contrôle des pleurs et de la douleur des nouveau-nés.

Approches complémentaires et parallèles en santé Les ACPS, ou médecine douce ou complémentaire, excluent toute utilisation de substances synthétiques ou de procédures chirurgicales et emploient d’autres formes thérapeutiques que la médecine ofciellement reconnue (Commission des praticiens en médecine douce du Québec, 2011). La chiropractie, l’acupuncture, l’ostéopathie, la naturopathie, l’homéopathie ainsi que les médecines traditionnelles (p. ex., la médecine chinoise, la médecine autochtone) en sont des exemples. Ces formes thérapeutiques sont de plus en plus utilisées auprès des enfants et des adolescents. Toutefois, très peu de recherches ont été réalisées sur l’efcacité de ces traitements pour diminuer la douleur auprès d’une population pédiatrique. Des questions demeurent et doivent faire l’objet d’études scientiques rigoureuses, notamment quant à la sécurité de ces traitements et aux maladies ou aux états de santé pour lesquels ils pourraient être utiles.

5.3.2

Traitement pharmacologique

Le traitement pharmacologique de la douleur chez l’enfant demande l’application des mêmes principes que chez l’adulte : l’agent pharmacologique doit être administré en fonction de la source physique de la douleur et de l’intensité de celle-ci (évaluée avec une échelle appropriée pour l’enfant), et le contexte de soins ainsi que les facteurs situationnels et affectifs tels que l’anxiété doivent être pris en compte. Particulièrement chez les enfants de moins de deux ans, la sensibilité aux opioïdes est très grande, ce qui demande une surveillance respiratoire accrue (Lehne, 2013). De plus, les doses administrées aux enfants doivent être calculées en fonction de leur poids.

Typologie des analgésiques Les principaux médicaments utilisés pour soulager la douleur sont les analgésiques non opioïdes et opioïdes. Certains médicaments adjuvants comme les antidépresseurs, les anticonvulsivants, les anesthésiques locaux et les sédatifs peuvent également jouer un rôle dans le traitement de la douleur (Lehne, 2013). L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) propose un modèle pharmacologique de soulagement de la douleur liée au cancer dont l’application a été validée pour des problématiques de santé et auprès de différentes populations,

notamment auprès des enfants (Vargas-Schaffer, 2010). Selon ce modèle, les analgésiques non opioïdes tels que l’acétaminophène (TylenolMD) et les anti-inammatoires non stéroïdiens (AINS) sont administrés pour les douleurs légères à modérées TABLEAU 5.5 ; les opioïdes tels que la mépéridine, la morphine, l’hydromorphone, l’oxycodone et le fentanyl sont nécessaires pour les douleurs de modérées à intenses TABLEAU 5.6. La combinaison de ces deux types d’analgésiques agit sur le système nerveux à deux niveaux : les

analgésiques non opioïdes agissent principalement sur le système nerveux périphérique (SNP), et les opioïdes, principalement sur le SNC. La combinaison des AINS et des opioïdes augmente l’analgésie, mais pas les effets indésirables. Avant d’augmenter la posologie d’un opioïde, il est préférable de maximiser l’analgésie non opioïde, par exemple en optimisant la dose d’acétaminophène. Cependant, si cette méthode ne réussit pas, le traitement de la douleur nécessitera un opioïde plus puissant.

5

Pharmacothérapie TABLEAU 5.5

Posologie des analgésiques non opioïdes pour les enfants

MÉDICAMENT

POSOLOGIE

COMMENTAIRES

PRINCIPAUX EFFETS INDÉSIRABLES

Acétaminophène (TylenolMD)

• Enfants de > 1 mois : 15 mg/kg/ dose P.O. q.4-6 h p.r.n. ou 10-20 mg/kg/dose I.R. q.4-6 h p.r.n.

• Offert dans de nombreuses préparations en vente libre

• Bien toléré par le tractus gastrointestinal

• Traitement à privilégier pour la douleur légère

• Aucune interférence avec la fonction plaquettaire

• Nombre maximal de doses : 5 en 24 h

• Effet analgésique augmenté par des posologies plus élevées

• Dose maximale : 75 mg/kg/jour ou 1 g/dose ou 4 g/jour

• Présentation sous forme de suspension (80 mg/5 mL, 160 mg/5 mL), de gouttes (80 mg/1 mL), de comprimés à croquer de 160 mg ou de suppositoires (120 mg, 160 mg, 325 mg, 650 mg par suppositoire) ; en vente libre

• Enfants de > 3 mois : 4-10 mg/ kg/dose P.O. q.6-8 h p.r.n. (maximum : 40 mg/kg/jour)

• Présent dans de nombreuses préparations

• Nausées

• Présentation sous forme de gouttes (40 mg/mL), de suspension (100 mg/5 mL) ou de comprimés à croquer de 100 mg ; en vente libre

• Vomissements

Ibuprofène (MotrinMD, AdvilMD pour enfant)

• Dose maximale : 600 mg pour 1 dose

• Diarrhée • Constipation • Dyspepsie • Ulcères gastroduodénaux • Néphrite • Rétention d’eau

Naproxène (NaprosynMD)

• Doses exprimées en naproxène base

• Prescription nécessaire pour les doses de 250 mg et plus

• Nausées

• Enfants de > 2 ans : 5-7 mg/kg/ dose P.O. q.8-12 h p.r.n.

• Présentation sous forme de suspension (125 mg/5 mL), de comprimés de 250 mg et de 500 mg, ou de comprimés en vente libre (220 mg de naproxène sodique, équivalent à 200 mg de naproxène base)

• Diarrhée

• Dose maximale : 1 000 mg/jour

• Vomissements • Constipation • Dyspepsie • Ulcères gastroduodénaux • Néphrite • Rétention d’eau

Célécoxib (CelebrexMD)

• Enfants de ≥10 kg et de ≤ 25 kg : 50 mg P.O. b.i.d. • Enfants de > 25 kg : 100 mg P.O. b.i.d.

• Offert en prescription • Offert en capsules de 100 mg et de 200 mg ; les capsules peuvent être ouvertes • Une suspension peut être préparée par la pharmacie.

• Inhibiteur sélectif de la cyclooxygénase-2, donc moins d’effets gastro-intestinaux comparativement aux autres AINS

Sources : Adapté de Association des pharmaciens des établissements de santé du Québec (APES) (2008) ; Association des pharmaciens du Canada (APhC) (2017).

Chapitre 5

Évaluation et traitement de la douleur

219

Pharmacothérapie

Posologie des analgésiques opioïdes et de la naloxone en pédiatriea

TABLEAU 5.6

DOSES INITIALES RECOMMANDÉES (ENFANTS < 50 KG)b

MÉDICAMENT

Morphine

DOSE ORALE

DOSE PARENTÉRALE

• Nouveau-nés et nourrissons de ≤ 6 mois : 0,08 mg/kg q.3-4 h p.r.n.

• Nouveau-nés et nourrissons de ≤ 6 mois : 0,025-0,03 mg/kg q.2-3 h p.r.n.

• Constipation

• Enfants de > 6 mois : 0,2-0,5 mg/kg q.4-6 h p.r.n.

• Enfants de > 6 mois :

• Vomissements

• Longue action : 0,3-0,6 mg/kg q.12 h régulièrement Fentanyl

PRINCIPAUX EFFETS INDÉSIRABLES

• Non disponible

– I.M./S.C./I.V. :

• Nausées • Somnolence

› 0,05 mg/kg I.V. q.2-4 h

• Dépression respiratoire

› 0,01 mg/kg/h perfusion I.V.

• Réaction allergique

• 1-2 mcg/kg I.V. ; bolus q.30-60 min ou q.2-4 h p.r.n. (enfants plus jeunes)

• Constipation

• Dose initiale : 0,5-1 mcg/kg/h perfusion I.V.

• Vomissements

• Dose de maintien : 1-3 mcg/kg/h perfusion I.V.

• Somnolence

• Timbre transdermique : ajusté selon la dose totale équivalente de morphine ; peut être utilisé chez les enfants de 2 ans avec douleur chronique recevant l’équivalent de 60 mg/jour P.O.

• Nausées

• Réaction allergique • Convulsions épileptiques • Sevrage graduel habituellement nécessaire au moment de l’arrêt

• Dose intranasale : 50-100 mcg/dose ; administration séparée en 2 doses, une dans chaque narine Codéine

• 0,5-1 mg/kg q.4-6 h

• Pas de forme parentérale

• Maximum : 60 mg/dosec Hydromorphone (DilaudidMD)

• Enfants de > 6 mois et de > 10 kg : 0,03 mg/kg q.3-6 h p.r.n.

Oxycodone (SupeudolMD ; aussi présent en combinaison avec un autre analgésique dans PercocetMD, PercodanMD)

• 0,01 mg/kg S.C. q.3-4 h p.r.n.

• Constipation

• 0,01-0,015 mg/kg I.V. bolus q.3-4 h p.r.n.

• Nausées

• Enfants et adolescents de < 50 kg : 0,03-0,08 mg/kg q.3-6 h p.r.n.

• Vomissements

• Adolescents de > 50 kg : 1-2 mg q.3-6 h p.r.n.

• Dépression respiratoire

• Enfants de ≤ 6 mois : 0,025-0,05 mg/kg/ dose q.4-6 h p.r.n.

• Somnolence

• Non disponible

• Constipation • Nausées

• Enfants de > 6 mois : 0,1-0,2 mg/kg/ dose q.4-6 h p.r.n.

• Vomissements • Somnolence

• Maximum : 5-10 mg/dose

• Dépression respiratoire

• Expérience pédiatrique limitée

Antidote aux opioïdes Naloxone (NarcanMD)

• lntoxication ou surdosage nécessitant un renversement total de l’effet des opioïdes : – 0,1 mg/kg/dose I.V. q.2-3 min p.r.n. ; maximum : 2 mg

220

Partie 2

Évaluation clinique

• Durée d’action : 30-120 min (plus court que la plupart des opioïdes) • Doses répétées parfois nécessaires

TABLEAU 5.6 MÉDICAMENT

Posologie des analgésiques opioïdes et de la naloxone en pédiatriea (suite) PRINCIPAUX EFFETS INDÉSIRABLES

DOSES INITIALES RECOMMANDÉES (ENFANTS < 50 KG)b DOSE ORALE

Naloxone (NarcanMD) (suite)

DOSE PARENTÉRALE

• Dépression respiratoire à la suite d’une dose thérapeutique d’opioïdes : – 0,001-0,005 mg/kg/dose I.V. q.2-3 min p.r.n. ; maximum : 2 mg • Prurit associé aux opioïdes : 1-2 mcg/kg/h en perfusion I.V. continue

• Bouffées vasomotrices (rougeurs au visage et au cou) • Confusion

5

• Étourdissement • Hallucinations • Dyspnée • Hypoxie

a Les

doses recommandées ne s’appliquent pas aux enfants ayant une insufsance rénale ou hépatique, ou d’autres problèmes qui affectent le métabolisme et la cinétique du médicament. doses énumérées pour les enfants ayant un poids inférieur à 50 kg ne peuvent pas être utilisées comme doses de départ chez les nourrissons de moins de 6 mois. Pour les nourrissons de moins de 6 mois non ventilés, la dose initiale d’opioïdes devrait être d’environ un quart à une demie de la dose recommandée pour les nourrissons plus âgés et les enfants. Par exemple, la morphine pourrait être utilisée à une dose de 0,03 à 0,05 mg/kg au lieu de la dose habituelle de 0,1 mg/kg. c Selon la recommandation de Santé Canada : « La codéine ne devrait plus être utilisée (est maintenant contre-indiquée) chez les patients de moins de 18 ans pour le traitement de la douleur après une intervention chirurgicale visant l’ablation des amygdales ou des végétations adénoïdes, étant donné que ces patients sont plus à risque de développer de graves problèmes respiratoires. Peu importe son utilisation, l’administration de codéine (sur ordonnance et en vente libre) est déjà déconseillée pour les enfants de moins de 12 ans » (Santé Canada, 2016). De plus, les doses de codéine supérieures à 60 mg sont souvent inutiles et inappropriées en raison du peu d’analgésie supplémentaire qu’elles procurent par rapport à l’augmentation de la constipation et des autres effets indésirables qu’elles créent. Sources : Adapté de APES (2008) ; APhC (2017) ; Jenco (2017) ; McCaffery et Pasero (1999) ; Tobias, Green et Côté (2016). b Les

La différence majeure entre les analgésiques opioïdes et non opioïdes est que ces derniers ont un effet de plafonnement, ce qui signie qu’à partir d’un certain dosage, l’augmentation de la dose ne soulage pas davantage la douleur. Les opioïdes, sauf la codéine, n’ont pas d’effets de plafonnement autres que ceux imposés par les effets indésirables. Les doses initiales chez les enfants sont généralement calculées en fonction de leur poids, soit en mg/kg ou en mcg/kg, sauf chez les enfants pesant plus de 50 kg pour lesquels la dose pour adultes est utilisée. Puisque l’enfant peut rapidement développer une tolérance, des doses importantes peuvent être nécessaires pour soulager une douleur intense continue (Lehne, 2013). Il est recommandé d’ajuster graduellement la dose en fonction des besoins. Des paliers d’augmentation d’environ 25 à 50 % sont habituellement préconisés (Lenhe, 2013). L’augmentation de la fréquence d’administration de l’analgésique peut aussi procurer un soulagement plus continu.

Analgésiques non opioïdes Tous les AINS présentés dans le TABLEAU 5.5, excepté l’acétaminophène, ont des actions antiinammatoires, antipyrétiques et analgésiques importantes 1 . L’acétaminophène a peu d’effets sur la synthèse périphérique des prostaglandines, ce qui pourrait expliquer son absence relative d’effet anti-inammatoire. Tous les AINS devraient

être utilisés avec prudence chez les enfants souffrant d’insufsance rénale et hépatique 2 .

Analgésiques opioïdes Les actions des divers opioïdes diffèrent. L’inrmière administre les opioïdes en assurant une surveillance clinique ainsi qu’en vériant le soulagement de la douleur et les effets indésirables, et ce, régulièrement, comme nous le verrons plus loin. L’oxycodone, l’hydromorphone et la morphine sont des opioïdes qui se présentent sous forme de préparations à libération immédiate ou prolongée. Le fentanyl a la particularité de pouvoir être administré par voie intraveineuse (principalement à la salle d’opération), par timbre transdermique et par voie intranasale.

Changement d’opioïde S’il faut changer un opioïde pour un autre, la posologie du nouvel opioïde doit être calculée en fonction de son équivalence analgésique, c’est-à-dire un effet analgésique égal à l’ancien. Le TABLEAU 5.7 indique les doses variables suggérées équivalentes aux effets analgésiques de la morphine. La réponse clinique est le critère applicable pour chaque enfant, et le titrage doit être adapté en fonction de cette réponse. Comme la tolérance croisée peut être incomplète entre ces médicaments, il est généralement nécessaire d’utiliser une dose inférieure à la dose analgésique équivalente lorsqu’il y a un changement de médicament, puis de titrer à nouveau en fonction de la réponse de l’enfant (niveau de douleur).

Chapitre 5

PHARMACOVIGILANCE

1. Les doses d’acétamino phène combinées aux autres opioïdes ou aux médicaments AINS doivent aussi être adaptées au poids de l’enfant. La dose quotidienne d’acétaminophène ne devrait pas excéder 75 mg/kg ou 4 g. 2. L’acide acétylsalicylique (aspirine) est aussi un AINS, mais il n’est pas recommandé pour les enfants en raison de son association possible avec le syndrome de Reye. Les AINS dans ce chapitre n’ont pas d’association connue avec ce syndrome. Cependant, il faut être prudent lorsqu’un médicament contenant du salicylate est administré aux enfants qui ont une infection virale connue ou soupçonnée. De plus, les AINS ne devraient pas être administrés aux enfants allergiques aux salicylates.

Évaluation et traitement de la douleur

221

PHARMACOVIGILANCE

Lorsqu’il y a un changement d’opioïde ou de voie d’admi­ nistration d’un opioïde, il est essentiel de déterminer l’équivalence analgésique de la nouvelle posologie. L’omission de cette étape peut avoir des conséquences graves, comme une surdose ou un dosage sous­ thérapeutique.

Ajustement des doses orales et parentérales des opioïdes En raison de l’effet de premier passage, l’opioïde administré par voie orale est rapidement absorbé par le tube digestif et il est partiellement métabolisé dans le foie avant d’atteindre la circulation centrale. En conséquence, les doses parentérales et orales d’opioïdes ne sont pas les mêmes. Les doses orales peuvent être plus importantes pour compenser la perte partielle de la puissance analgésique liée au premier passage hépatique et atteindre l’équivalence analgésique. Les facteurs de conversion pour les opioïdes sélectionnés peuvent être utilisés lorsque le mode d’administration passe des voies sous-cutanée ou intramusculaire à la voie orale, et inversement TABLEAU 5.7.

Médicaments adjuvants Plusieurs médicaments adjuvants, aussi appelés coanalgésiques, peuvent être utilisés en complément des opioïdes TABLEAU 5.8. Cette combinaison

potentialise l’effet analgésique et permet souvent de diminuer les doses d’opioïdes nécessaires pour soulager la douleur ainsi que les effets indésirables des opioïdes. Cependant, ces médicaments ne sont pas des analgésiques et ils devraient être uniquement utilisés pour améliorer les effets des opioïdes, et non pour les remplacer. Ce type de médicaments est souvent utilisé, en combinaison ou non avec des opioïdes, pour la gestion de la douleur neuropathique. D’autres adjuvants sans propriétés analgésiques peuvent être utilisés pour diminuer les symptômes indésirables associés à la douleur. Les médicaments fréquemment employés pour soulager l’anxiété sont le lorazépam (AtivanMD) et le midazolam (VersedMD) ; les laxatifs et les émollients sont utilisés contre la constipation ; les antiémétiques, contre les nausées et les vomissements ; et les antiprurigineux, contre les démangeaisons (Lehne, 2013).

Pharmacothérapie TABLEAU 5.7

Principaux opioïdes : équivalence analgésique entre différentes voies d’administration

MÉDICAMENT

DOSE S.C. ET I.M.

DOSE P.O.

Morphine

10 mg

20­30 mg

Codéine

60 mg

200 mg

Hydromorphone

2 mg

4­6 mg

Mépéridine

75­100 mg

300 mga

Oxycodone

N/D

10­15 mg

a L’administration

de mépéridine par voie orale n’est pas recommandée. Sources : Adapté de Dionne et Gilbert (2008) ; Vigilance Santé (2017).

Pharmacothérapie

Médicaments adjuvantsa

TABLEAU 5.8 MÉDICAMENT

POSOLOGIE

INDICATIONS

COMMENTAIRES

• 0,1 mg/kg/jour P.O. h.s.

• Douleur neuropathique continue associée à des brûlures, à des courbatures, à la dystasie accompagnée ou non d’insomnie

• Ralentit la transmission des signaux de douleur en bloquant le recaptage présynaptique de la sérotonine et de la noradrénaline.

Antidépresseursb Amitriptyline (ElavilMD)

• Augmentation de la posologie de 0,25 mg/kg q.5­7 jours p.r.n. jusqu’à une dose de 0,5­2 mg/kg/jour • Dose initiale maximale : 10­25 mg/jour

222

Partie 2

Évaluation clinique

• Soulage la douleur liée à l’insomnie et à la dépression. • Effets anticholinergiques : xérostomie, constipa­ tion et rétention urinaire ; ces effets peuvent en limiter l’emploi.

TABLEAU 5.8 MÉDICAMENT

Médicaments adjuvantsa (suite) POSOLOGIE

INDICATIONS

COMMENTAIRES

• Gabapentine :

• Douleur neuropathique

• Réduit l’hyperexcitabilité synaptique des neurotransmetteurs du SNC qui sont responsables de la nociception.

Anticonvulsivants Gabapentine (NeurontinMD) et prégabaline (LyricaMD)

– 5 mg/kg P.O. h.s. le premier jour (maximum de 300 mg/dose)

• Les effets indésirables les plus fréquents sont la somnolence, l’ataxie, le nystagmus et le vertige.

– Par la suite, 5 mg/kg/dose P.O. b.i.d. le 2e jour et 5 mg/kg/dose t.i.d. le 3e jour (maximum de 300 mg/dose) ; par la suite, augmentation graduelle des doses habituelles pour une dose de maintien de 10-35 mg/kg/jour en 3 doses

• La prégabaline est utilisée chez les adolescents aux doses adultes. Elle est réservée aux enfants intolérants à la gabapentine.

– Maximum : 3 600 mg/jour • Prégabaline : – 150 mg/jour en 2-3 doses jusqu’à 600 mg/jour Anxiolytiques Lorazépam (AtivanMD)

• 0,02-0,05 mg/kg q.4-8 h P.O. ; S.L. ou I.V. p.r.n.

• Spasmes musculaires

• Maximum : 2 mg/dose

• Anxiété

• Peut augmenter la sédation en combinaison avec les opioïdes. • Son utilisation prolongée est peu étudiée en pédiatrie.

Clonazépam (RivotrilMD)

• 0,01-0,03 mg/kg/jour P.O. jusqu’à 0,2 mg/kg/ jour divisée b.i.d. ou t.i.d.

• Myoclonies

• Il est nécessaire de surveiller les effets paradoxaux sur le SNC.

Diazépam (ValiumMD)

• Enfants de > 6 mois :

• Spasmes musculaires, spasticité

• Peut augmenter la sédation en combinaison avec les opioïdes.

– 0,12-0,8 mg/kg/jour P.O. divisée b.i.d. à q.i.d.

• Benzodiazépine ayant la plus longue demi-vie.

– Maximum : 10 mg/dose Corticostéroïdes Dexaméthasone (DecadronMD)

• Anti-inammatoire : – 0,02-0,3 mg/kg/jour P.O./I.V. divisé q.6-12 h – Dose usuelle journalière : 0,75-9 mg – Doses plus élevées en bolus pour compression médullaire, puis diminution de la dose quotidienne

• Métastases osseuses, douleurs nociceptives osseuses • Compression médullaire ou nerveuse

• Doses variables selon la situation clinique. Les effets indésirables principaux sont l’œdème, l’irritation gastro-intestinale, la prise de poids, l’acné, l’hyperglycémie, l’hypertension artérielle et la suppression de la croissance à long terme. • Pour l’administration à long terme, il faut utiliser des protecteurs gastriques comme des antagonistes des récepteurs H2 (ranitidine) ou des inhibiteurs de la pompe à protons, comme l’oméprazole ou le lansoprazole.

– Sevrage dès que possible ou diminution à la dose minimale efcace Autres Clonidine

• 2-4 mcg/kg/dose (ou 0,002-0,004 mg/kg/ dose) P.O. die à q.i.d.

• Douleur neuropathique, lancinante, aiguë, électrique

• Est un agoniste des récepteurs alphaadrénergiques α2, lesquels modulent la perception de la sensation de douleur.

• Douleur du membre fantôme

• Il est nécessaire de surveiller l’hypotension et la diminution de la fréquence cardiaque. • Ne pas cesser abruptement en raison du risque d’hypertension de rebond. • Le médicament peut provoquer une somnolence.

a Médicaments

dont l’indication principale n’est pas l’analgésie, mais qui possèdent des propriétés analgésiques. doses indiquées sont sous-thérapeutiques pour la dépression, mais adéquates pour l’analgésie. Il est important de rassurer l’enfant et la famille en leur expliquant que le médicament est utilisé pour ses propriétés analgésiques et que cela ne signie pas que l’enfant est dépressif. Sources : Adapté de APES (2008) ; APhC (2017). b Les

Chapitre 5

Évaluation et traitement de la douleur

223

5

Jugement

clinique

Voies d’administration des analgésiques

Mariella est âgée de 1 an. Elle doit recevoir de la morphine à longue action per os 0,5 mg. Sachant qu’elle pèse 12,8 kg, quelle dose, en milligrammes, devrez­vous préparer ?

Si la morphine était administrée par voie I.V. et que l’ordonnance mentionnait d’administrer de 0,05 à 0,1 mg/kg, quelle dose maximale faudrait­il alors préparer ?

Plusieurs voies peuvent être utilisées pour administrer des analgésiques ; la voie la plus efcace et la moins traumatisante devrait être privilégiée. L’évaluation de l’infirmière peut influencer le choix d’une voie d’administration qui correspond le mieux aux besoins de l’enfant.

a) 1,15 mg b) 1,28 mg c) 1,52 mg d) 1,65 mg

Voie orale

a) 0,5 mg

b) 1,8 mg

c) 3,6 mg

d) 6,4 mg

MAIS SI...

PHARMACOVIGILANCE

La dose optimale d’analgésiques est celle qui maîtrise la douleur sans causer plusieurs effets indésirables. Cela nécessite généralement un titrage et l’adaptation progressive de la dose (généralement en l’augmentant), jusqu’à l’obtention d’un soulagement optimal de la douleur, sans sédation excessive. Les recommandations du TABLEAU 5.6 portent uniquement sur les doses sécuritaires, et non sur les doses optimales.

ENCADRÉ 5.7

Méthodes de l’analgésie contrôlée par le patient

Trois méthodes d’administration de médica­ ments peuvent être utilisées seules ou de façon combinée pour l’ACP : 1. L’administration par l’enfant de bolus selon une quantité et un intervalle de sécurité (temps entre les doses) programmés FIGURE ci­contre. Des tentatives plus fréquentes d’autoad­ ministration signient généralement que l’enfant a besoin que les doses et l’inter­ valle soient réajustés pour mieux lutter contre la douleur. 2. L’administration d’un bolus initial par l’inrmière an d’augmenter rapidement la concentration d’analgésiques dans le sang ou pour soulager un accès doulou­ reux paroxystique non soulagé par la dose habituellement programmée. 3. L’administration en continu d’une quantité constante d’analgésiques qui aide à assurer un soulagement continu (p. ex., pendant les périodes de sommeil).

224

Partie 2

La voie orale est avantageuse, car elle est facile d’accès, simple à utiliser, peu coûteuse pour ce qui est du processus d’administration, notamment par rapport à la voie intraveineuse, et plus sécuritaire que toute autre voie (Lehne, 2013). Le délai d’absorption par le système digestif vers la circulation sanguine est par contre un inconvénient s’il faut maîtriser rapidement une douleur intense. Des doses plus élevées d’opioïdes administrés par voie orale sont requises par rapport à une analgésie parentérale équivalente TABLEAU 5.6.

Évaluation clinique

Voie intraveineuse La voie intraveineuse est préférable pour une maîtrise rapide des douleurs intenses attribuables aux procédures et aux douleurs paroxystiques. Le début de l’effet thérapeutique de l’injection intraveineuse d’une dose unique (ou bolus) d’opioïdes est généralement atteint en moins de 1 minute. Le pic d’action de la morphine administrée par voie intraveineuse est atteint environ 15 à 20 minutes après son administration TABLEAU 5.6. Au besoin, l’opioïde donné par voie intraveineuse peut être administré de nouveau pour une meilleure maîtrise de la douleur . Cependant, il est primordial d’effectuer une réévaluation de la douleur, des symptômes, de l’état de santé de l’enfant et de son niveau de conscience avant d’administrer une seconde dose d’un opioïde par voie intraveineuse. Dans le cas d’une douleur intense ou prolongée, une perfusion intraveineuse continue est préférable aux bolus intraveineux intermittents lorsqu’il est possible d’offrir une surveillance clinique étroite. Elle assure une analgésie constante en maintenant la stabilité de la concentration sanguine du médicament (Lacroix, Gauthier, Hubert et al., 2007).

Analgésie contrôlée par le patient Le recours à l’analgésie contrôlée par le patient (ACP) constitue un progrès important en matière d’administration d’analgésiques par voies intraveineuse, épidurale ou sous-cutanée. L’enfant contrôle lui-même la quantité et la fréquence de l’analgésique, celui-ci étant généralement administré par un dispositif spécial de perfusion ENCADRÉ 5.7 et TABLEAU 5.9. L’utilisation de l’ACP vise la maîtrise de la douleur, par exemple après une intervention chirurgicale, une crise de drépanocytose, un trauma, un cancer, etc. La morphine et l’hydromorphone peuvent être administrées par l’ACP. Comme pour tout type de plan de traitement analgésique, l’évaluation continue du soulagement de la douleur de l’enfant est essentielle pour tirer avantage de l’ACP. L’enfant de cinq ans et plus dont le développement intellectuel est normal et dont l’état de conscience est intact peut utiliser un ACP (Howard, 2014) FIGURE 5.10. Aussi, l’enfant doit être physiquement capable d’appuyer sur le bouton-poussoir. Pour l’enfant physiquement limité, mais ayant les capacités intellectuelles adéquates, un bouton-poussoir plus facile à activer est disponible.

Pompe pour l’analgésie contrôlée par le patient

Analgésie contrôlée par l’infirmière L’analgésie contrôlée par l’inrmière est utilisée chez les enfants de moins de cinq ans ou dans les cas d’incapacité intellectuelle à comprendre les principes de l’ACP ou d’incapacité physique à l’utiliser ENCADRÉ 5.8 .

TABLEAU 5.9

Avantages et inconvénients de l’analgésie contrôlée par le patient

AVANTAGES

INCONVÉNIENTS

• Adaptation aux besoins en analgésie propres à chaque enfant

• Coût (achat des pompes et du matériel adapté, formation et présence du personnel inrmier assurant la surveillance)

• Maîtrise de la douleur par l’enfant • Aucun délai entre le besoin d’analgésie exprimé par l’enfant et l’administration du médicament • Collaboration de l’enfant aux soins facilitée par le soulagement immédiat durant les mobilisations, la physiothérapie, les procédures douloureuses, etc. • Effets indésirables moindres grâce aux doses plus fréquentes, mais diminuées (moins de variations de concentration sérique)

• Réussite nécessitant un personnel qualié et une surveillance rigoureuse • Risques accrus d’accidents : erreurs imputables à l’opérateur (défaut de programmation, de mise en route, surdosage de la solution analgésique), problèmes mécaniques

5

• Augmentation de l’activité physique spontanée et diminution des désordres du sommeil postopératoire

Les enfants doivent être évalués toutes les 30 à 60 minutes pour vérier la nécessité des doses en bolus. Les directives concernant la sélection du principal gestionnaire de la douleur dans le cas de l’analgésie contrôlée par le parent s’appliquent aussi à l’analgésie contrôlée par l’inrmière ENCADRÉ 5.9.

Analgésie contrôlée par la famille Les parents peuvent également utiliser le système d’analgésie contrôlée par voie intraveineuse à la place de l’enfant ENCADRÉ 5.9. Ce système est largement accepté pour les enfants atteints de cancers avancés ou les enfants en soins palliatifs. Cependant, l’utilisation est controversée en cas de douleur postopératoire aiguë ou chez les enfants n’ayant jamais pris d’opioïdes. L’évaluation de la douleur par un parent est souvent mal jugée, particulièrement lorsque la douleur est aiguë (Youssef, Murphy, Langseder et al., 2006). Des dépressions respiratoires importantes, y compris l’apnée, sont survenues avec l’utilisation de l’analgésie contrôlée par le parent (Fishman, Ballantyne et Rathmell, 2009).

Voies transmucosales (sublinguale, buccale, intranasale) Les voies transmucosales permettent à certaines substances d’être absorbées à travers une muqueuse. La muqueuse buccale est souvent utilisée à cette n. Des comprimés ou des liquides analgésiques sont placés entre la joue et la gencive (voie buccale) ou sous la langue (voie sublinguale), ou sont vaporisés dans les narines (voie intranasale). Les voies transmucosales sont intéressantes parce que l’effet analgésique est obtenu plus rapidement que par voie orale, grâce à l’absorption presque instantanée du produit dans la circulation sanguine. Cela limite l’effet de premier passage par le foie observé dans la voie orale. Cet effet, qui

réduit l’action analgésique des opioïdes, est donc évité, à moins que la forme sublinguale ou buccale soit avalée, ce qui se produit souvent avec les enfants.

CE QU’IL FAUT RETENIR

L’évaluation de la douleur par un parent est souvent mal jugée, particulièrement lorsque la douleur est aiguë.

Voie intranasale La muqueuse nasale peut également être utilisée pour l’administration de médicaments (voie intranasale par les narines à l’aide d’un atomiseur/vaporisateur). L’administration d’analgésiques par la voie intranasale comporte plusieurs avantages, notamment celui d’être moins invasive que d’autres voies et de causer moins d’effets indésirables du fait que l’on évite le premier passage hépatique (Del Pizzo et Callahan, 2014 ; Rech, Barbas, Chaney et al., 2017). Cette voie est souvent utilisée pour obtenir rapidement un effet analgésique, par FIGURE 5.10 À partir de 5 ans, certains exemple lorsqu’un enfant enfants peuvent contrôler eux-mêmes leur analgésie.

ENCADRÉ 5.8

Bienfaits de l’analgésie contrôlée par l’inrmière

• Permet à l’inrmière d’ajuster encore plus précisément la prise d’analgésiques en fonction de la douleur (plus petites doses titrées, donc possibilité d’obtenir un meilleur soulagement). • Simplie l’administration d’opioïdes, puisque, une fois la pompe programmée, il suft d’une inrmière pour administrer une

Chapitre 5

dose sans avoir besoin d’une deuxième inrmière pour vérier la dose administrée, comme c’est le cas pour l’administration d’opioïdes standard sans pompes préprogrammées. • Permet de donner des bolus avant les soins douloureux, les mobilisations, la toilette, etc.

Évaluation et traitement de la douleur

225

ENCADRÉ 5.9

Directives pour l’analgésie contrôlée par la famille

Un membre de la famille, généralement un parent, est désigné comme le principal gestion­ naire de la douleur de l’enfant, et il a la responsabilité d’appuyer sur le bouton­poussoir de l’analgésie contrôlée, s’il respecte les directives suivantes : • Est presque toujours présent auprès de l’enfant. • Est prêt à assumer la responsabilité de principal gestionnaire de la douleur. • Est prêt à respecter les indications de l’enfant concernant sa douleur (réponses verbales et non verbales) ; sait comment utiliser et interpréter une échelle d’évaluation de la douleur (autoévaluation et comportementale). • Comprend l’objectif et le but du plan de traitement de la douleur. • Comprend le concept du maintien d’une concentration stable d’analgésiques dans le sang. • Connaît les signes de la douleur ainsi que les effets indésirables et les réactions négatives aux opioïdes. FIGURE 5.11 Administration d’un médicament par voie intranasale (au moyen d’un atomiseur) chez l’enfant CE QU’IL FAUT RETENIR

Les voies intranasale (par atomiseur) et intraveineuse sont préférables pour une maîtrise rapide des douleurs intenses attribuables aux procédures et aux douleurs paroxystiques.

se présente au service des urgences avec une fracture d’un membre. L’effet analgésique est obtenu rapidement, soit en 5 à 10 minutes. Le médicament est administré à l’aide d’un atomiseur inséré dans une narine afin de le diffuser vers la muqueuse nasale. Quelques médicaments peuvent être administrés par voie intranasale, notamment la morphine, la kétamine et le fentanyl. La dose est souvent divisée en 2 administrations, une dans chaque narine, car la capacité d’absorption des muqueuses nasales est assez limitée FIGURE 5.11.

Anesthésie locorégionale L’anesthésie locorégionale est une cessation transitoire de la conduction nerveuse dans un territoire corporel prédéfini. Elle peut être médullaire (rachianesthésie, épidurale), périphérique (bloc nerveux, plexus brachial, etc.) ou locale (procédures avec insertion d’une aiguille, inltration cutanée pour des procédures mineures, etc.) (Sethna, Dinakar et Boretsky, 2014). Le choix du mode d’analgésie dépend du type d’intervention, des possibilités de surveillance offertes dans les unités de soins et du désir de l’enfant qui a été informé des risques et des bénéces de chaque technique (Sethna et al., 2014).

Voies épidurale et intrathécale La voie épidurale est un mode de soulagement de la douleur permettant l’administration de médicaments analgésiques ou anesthésiques locaux. Il s’agit d’insérer un cathéter dans l’espace épidural, le plus souvent dans la région lombaire ou caudale FIGURE 5.12 et ENCADRÉ 5.10. Le placement du cathéter dans la région thoracique est généralement réservé aux enfants plus âgés ou aux adolescents qui ont subi une procédure abdominale ou thoracique supérieure, comme une intervention chirurgicale pour pectus excavatum (thorax en entonnoir) ou pour une résection iléocœcale.

226

Partie 2

Évaluation clinique

FIGURE 5.12 pour une analgésie

Placement du cathéter épidural

Les opioïdes comme l’hydromorphone, la morphine ou le fentanyl sans agent de conservation sont souvent combinés avec un anesthésique local comme la bupivacaïne ou la lidocaïne. L’analgésie provient alors de l’effet du médicament sur les récepteurs d’opioïdes dans la corne dorsale de la moelle épinière plutôt que dans le cerveau. Les anesthésiques locaux, eux, stabilisent la membrane des neurones et empêchent la production ainsi que la transmission de l’inux nerveux. Ils sont administrés en bolus simple ou intermittent, en perfusion continue ou sous forme d’ACP. Le cathéter peut également être placé dans l’espace intrathécal. Le médecin injecte, dans le canal rachidien, plus précisément dans l’espace sous-arachnoïdien, un anesthésique local ou un

Pratiques inrmières ENCADRÉ 5.10

Surveiller l’administration d’une épidurale

• Le mot épidural doit être inscrit sur un diachylon collé sur la pompe volumétrique. L’inrmière doit vérier que le circuit ne comporte pas de fuites ; elle ne doit injecter aucun autre médicament par cette voie ; elle doit s’assurer que le bon médicament perfuse au débit adéquat, selon la dernière ordonnance au protocole ; elle doit avoir un médicament de remplacement prêt à être installé dans l’armoire d’analgésiques opioïdes avant la n de la perfusion en cours.

L’hypotension légère, la rétention urinaire et le décit moteur ou sensoriel temporaire sont des effets indésirables courants de l’anesthésie locale par voie épidurale. L’évaluation de la douleur, la présence d’un bloc moteur et d’hypotension ainsi que la surveillance de l’état de la peau autour du point d’insertion du cathéter sont d’autres aspects importants des soins inrmiers (Lehne, 2013).

• L’enfant peut être mobilisé (fauteuil, salle de jeux, etc.), mais une surveillance étroite est requise an de minimiser les risques de chute ; l’enfant doit toujours être accompagné au moment du lever. • L’inrmière doit rassurer l’enfant qui a peur de ne plus sentir ses jambes ou de ne plus pouvoir marcher. • Elle doit également rester vigilante si un cathéter est placé dans la région caudale, car il y a un risque de souillure du site d’insertion au contact des selles chez l’enfant portant des couches. La xation adéquate du cathéter épidural avec un pansement occlusif diminue la possibilité de souillure ou de déplacement par mégarde du cathéter FIGURE ci-contre. • La dépression respiratoire est rare, mais il est possible de la prévenir en vériant le niveau de somnolence ainsi que la fréquence et la profondeur respiratoires toutes les heures, et en avisant le médecin lorsqu’une sédation excessive est détectée. • Les nausées, la démangeaison et la rétention urinaire sont des effets indésirables courants liés au dosage d’opioïdes par voie épidurale.

Pansement couvrant le site d’un cathéter épidural

analgésique qui se diffuse dans le liquide cérébro­ spinal, permettant ainsi un soulagement de la douleur dans la partie inférieure de l’abdomen et les membres inférieurs. L’analgésie morphinique par voie intrathécale (rachianalgésie) est majori­ tairement administrée en injection unique pen­ dant la phase préopératoire d’une intervention chirurgicale, comme une chirurgie correctrice de scoliose ou une chirurgie cardiaque. Son effet dure de 12 à 24 heures. L’analgésie intrathécale est prin­ cipalement administrée lorsque l’installation d’un cathéter épidural est contre­indiquée (non­ acceptation par l’enfant ou ses parents, possibilités limitées des surveillances postopératoires au­delà des 24 premières heures, etc.) (Sethna et al., 2014).

anesthésiques locaux les plus couramment utilisés au Canada pour les enfants sont les préparations topiques comme la crème EMLAMD, l’améthocaïne (AmetopMD) ainsi que la crème de lidocaïne 4 % (MaxileneMD 4) ENCADRÉ 5.11.

Les anesthésiques locaux peuvent aussi être injectés par blocs locorégionaux périphériques et par inltrations. L’anesthésique local permet un soulagement de la douleur en bloquant l’inux nerveux, par exemple le bloc interscalénique après une intervention chirurgicale à l’épaule (Sethna et al., 2014).

La voie intradermique consiste en une injection dans le derme. L’analgésie par voie intradermique est principalement utilisée pour l’anesthésie de la peau. L’anesthésique local, généralement de la lido­ caïne, est injecté sous le derme pour réduire la douleur cutanée causée notamment par une ponc­ tion lombaire, veineuse ou artérielle, par une pro­ cédure chirurgicale externe comme une biopsie de la peau, ou par des sutures.

Voies topique et transdermique Les anesthésiques locaux par voie topique sont reconnus comme étant très efcaces chez les enfants dans les cas de procédures douloureuses, notamment au moment de l’installation de voies veineuses et de prélève­ ments sanguins (Stevens et Zempsky, 2014). Les

La voie transdermique consiste à administrer un analgésique par la peau en vue d’une action systémique ENCADRÉ 5.11. Elle présente l’avan­ tage de ne pas être invasive ou douloureuse, car elle ne nécessite pas d’aiguille. Elle permet d’éviter le passage gastro­intestinal et l’effet de premier passage hépatique. Le fentanyl transdermique (DuragesicMD) est le seul analgésique opioïde qui peut être administré par voie transdermique.

Voie intradermique

Voie sous-cutanée Cette voie est davantage utilisée lorsque les voies orale, transmucosale et intraveineuse ne sont pas accessibles. Des doses en bolus et une perfusion Chapitre 5

Évaluation et traitement de la douleur

227

5

Pharmacothérapie ENCADRÉ 5.11

Propriétés des analgésiques topiques et transdermiques

CRÈME ANESTHÉSIQUE EMLAMD

• Consiste en un mélange eutectique d’anesthésiques locaux (lidocaïne et prilocaïne), présenté en crème ou en timbre unidose. L’anesthésie locale est atteinte après 1 à 2 heures d’application et dure environ 2 heures après le retrait. • Élimine ou réduit la douleur provoquée par la plupart des procédures comportant une perforation de la peau (installation d’une voie veineuse ou prélèvements sanguins). • Doit être placée sur la peau intacte sur le lieu de la perforation ; doit être recouverte d’un pansement occlusif appliqué 1 heure ou plus avant la procédure. • Est l’une des améliorations les plus signicatives en ce qui a trait à la capacité d’offrir des soins non traumatiques aux enfants. AMÉTHOCAÏNE (AMETOPMD)

• Est plus lipophile que le mélange lidocaïne-prilocaïne (EMLA MD) ; permet donc un délai d’action plus court et une durée d’action prolongée. • Après 30 minutes d’application du gel sous un pansement occlusif, l’anesthésie cutanée survient, puis persiste jusqu’à 6 heures après le retrait du gel. • Il y a absence d’effet systémique, car l’améthocaïne est détruite par les estérases plasmatiques. • Il y a un effet vasodilatateur local avec érythème cutané fréquent. CRÈME DE LIDOCAÏNE LIPOSOMIQUE 4 % (MAXILENEMD 4)

• La lidocaine 4 % dans un système de liposomes optimise la vitesse d’absorption. • Nécessite une durée d’application de 30 minutes avec une occlusion par un pansement. • Est très utilisée chez l’enfant pour le soulagement de la douleur associée à des procédures douloureuses comme l’installation d’une voie veineuse ou durant les prélèvements sanguins FIGURE ci-contre. FENTANYL TRANSDERMIQUE (DURAGESICMD)

• Est commercialisé sous forme de timbre transdermique pour une maîtrise continue de la douleur chronique ou prolongée. Le médicament est libéré de façon continue à travers la peau. • Est contre-indiqué pour le traitement des douleurs aiguës.

La crème MaxileneMD 4 est un anesthésique local efcace pour l’installation d’une voie veineuse ou pour un prélèvement sanguin. • Doit être appliqué sur une peau non irritée, sur un endroit plat (bras, poitrine, dos, jambes). Il faut changer de site à chaque application. • Le timbre ne doit jamais être coupé. Si seulement la moitié du timbre doit être appliquée, apposer un pansement (p. ex., Opsite MD) sur la peau an d’empêcher l’adhésion d’une moitié du timbre. • La durée d’action est habituellement de 72 heures. Chez les enfants cachexiques, la durée d’action peut être de 48 heures seulement. • Des doses d’opioïdes peuvent être administrées par d’autres voies d’administration en même temps que le fentanyl transdermique en cas de douleur paroxystique, de douleur subite ou en attendant l’obtention d’une concentration plasmatique optimale du fentanyl. • Peut être utilisé chez les enfants de plus de 12 ans et les adolescents souffrant de douleurs difciles à soulager comme celles occasionnées par le cancer. • En cas de dépression respiratoire, il faut administrer la naloxone selon le protocole de l’établissement.

Sources : Adapté de Poonai, Alawi, Rieder et al. (2012) ; Taddio, Soin, Schuh et al. (2005).

228

Partie 2

continue peuvent être administrées par la voie sous-cutanée. La perfusion sous-cutanée apporte une concentration sanguine équivalente à la perfusion intraveineuse continue.

place un dispositif d’injection intermittente (InsuonMD), évitant ainsi de piquer l’enfant à chaque dose.

La dose totale sur une période de 24 heures nécessite généralement une solution d’opioïdes concentrée pour minimiser le volume administré. L’utilisation de la plus petite aiguille possible (convenant au débit de la perfusion) permet de diminuer l’inconfort de l’enfant lié au site d’in sertion. Il est également possible de mettre en

La voie inhalatoire permet l’utilisation d’anesthésiques comme le protoxyde d’azote (ou MEOPA : mélange équimolaire d’oxygène et de protoxyde d’azote) pour produire une analgésie partielle ou complète avant les procédures douloureuses FIGURE 5.13. Le protoxyde d’azote est rapidement absorbé et éliminé par les

Évaluation clinique

Voie inhalatoire

suppositoire peut provoquer des microlésions et des saignements.

Voie intramusculaire La voie intramusculaire n’est pas recommandée pour la maîtrise de la douleur chez l’enfant ; elle ne fait pas partie des normes courantes de soins : • administration douloureuse (détestée par les enfants) ; • possibilité de dommages aux tissus et aux nerfs avec certains médicaments ; FIGURE 5.13 Analgésie inhalatoire avec un mélange d’oxygène et de protoxyde d’azote (MEOPA) pour prévenir la douleur lors des procédures douloureuses

poumons ; il est hautement insoluble dans le sang et rapidement transporté au cerveau. Il produit un effet analgésique équivalant à celui de la morphine par voie intraveineuse. Le soulagement maximal de la douleur peut être obtenu après environ trois minutes d’inhalation, et la réversibilité est de moins de cinq minutes (Pediadol, 2013). Les inhalations de protoxyde d’azote sont fréquemment utilisées pour une grande variété de procédures qui nécessitent une analgésie puissante pendant un court moment, comme l’insertion ou le retrait de points de suture, le retrait ou le changement de pansements, y compris les pansements sur les brûlures, le retrait d’un drain ou d’un cathéter, la prise de sang ou l’installation d’une voie veineuse, la ponction lombaire et les biopsies (peau, muscle, rein ou moelle osseuse). L’enfant respire dans un masque facial ou nasal, ou dans un embout buccal. L’état de conscience et les perceptions sensorielles de l’enfant sont modiés ; cependant, il reste éveillé, il réagit avec l’environnement et il peut parler avec son entourage (Pediadol, 2013) 1 . L’utilisation est possible chez l’enfant à partir de quatre ans (âge permettant une coopération active) 2 . Le taux de succès chez les enfants de moins de trois ans est plus faible : la concentration alvéolaire minimum efcace est supérieure à celle des enfants plus âgés (ReinosoBarbero, Pascual-Pascual, de Lucas et al., 2011). Les niveaux élevés de protoxyde d’azote dans l’air peuvent occasionner des effets indésirables (p. ex., des céphalées) chez les personnes présentes (professionnels de la santé, enfant, parent, etc.) dans la pièce où est administré le protoxyde d’azote.

Voie intrarectale De nombreux médicaments peuvent être administrés sous forme de suppositoires rectaux. Leur taux d’absorption est variable. Les enfants n’aiment généralement pas cette voie d’administration. La voie intrarectale ne doit pas être utilisée chez les enfants pancytopéniques, car l’insertion du

5

• importantes uctuations de l’absorption du médicament par le muscle ; • absorption plus rapide dans le deltoïde que dans les sites fessiers ; • durée d’action plus courte et coût supérieur aux médicaments par voie orale ; • délai d’absorption inutile pour l’enfant.

Administration de l’analgésique au moment approprié

CONSEIL CLINIQUE

Pour la morphine et l’hydromorphone, l’administration par voie intrarectale est une voie alternative pour les enfants incapables de prendre des médicaments par la bouche ; les doses analgésiques équivalentes utilisées sont en général semblables aux doses orales.

Pour la maîtrise continue de la douleur, qu’elle soit temporaire (p. ex., postopératoire) ou chronique (p. ex., due à un cancer), un horaire préventif de médicaments établi sur 24 heures est plus efcace. Cet horaire empêche que le plasma contienne, à certains moments, de faibles concentrations de médicaments qui auraient pour conséquence d’induire un état douloureux paroxystique. Si des analgésiques sont administrés uniquement lorsque la douleur revient ou PHARMACOVIGILANCE qu’elle augmente, le soulagement peut être difficile. Des doses plus élevées peuvent être 1. Étant donné que le protoxyde d’azote potentialise les nécessaires, ce qui mène à un effets sédatifs des autres dépresseurs du SNC et cycle de sous-médication de la qu’il peut entraîner une sédation excessive, il faut douleur alternant avec des faire preuve de prudence si des opioïdes, des périodes de doses élevées et un benzodiazépines, des antihistaminiques et des médicaments entraînant un effet de sédation sont risque de toxicité. Ce cycle de administrés simultanément. L’administration de maîtrise irrégulier de la douleur protoxyde d’azote et la surveillance de l’enfant ne favorise aussi la surveillance de peuvent être effectuées que par un personnel formé l’horloge par l’enfant, ce qui (Pediadol, 2013). pourrait être pris à tort pour un signe de dépendance. Devant une douleur aiguë circonstan- 2. Le protoxyde d’azote est contre-indiqué chez les enfants ayant un pneumothorax, une occlusion cielle (p. ex., une douleur posintestinale, des voies respiratoires anormales, une topératoire), l’inrmière peut récente blessure à la tête, une maladie respiratoire utiliser les ordonnances p.r.n. chronique et certains types de maladies coronariennes efcacement en administrant le congénitales non corrigées (comme l’hypertension médicament à intervalles régupulmonaire). Dans ces cas, le protoxyde d’azote peut liers au début, puisque l’expresentraîner une extension des poches d’air dans les sion au besoin ne signie pas le espaces connés (poitrine, cavité crânienne, lumière moins possible, mais plutôt intestinale) et créer une pression accrue ainsi qu’un selon le besoin pour prévenir la effet de tension. Un pneumothorax suffocant, une douleur. Dans les cas de douischémie ou un déplacement du contenu intracrânien leur prolongée ou de douleur ainsi qu’une distension intestinale entraînant des chronique, l’analgésique admirisques de perforation peuvent se produire. nistré régulièrement est

Chapitre 5

Évaluation et traitement de la douleur

229

accompagné d’ordonnances p.r.n. pour prévenir les états douloureux paroxystiques (p. ex., pendant des mobilisations ou des efforts). Si les doses sont administrées par bolus intermittents, l’intervalle entre chaque dose ne devrait pas être supérieur à la durée d’efcacité escomptée du médicament. Pour prolonger la maîtrise de la douleur en administrant le médicament moins souvent, il est possible d’utiliser un médicament qui a une durée d’action plus longue (p. ex., certains AINS, de la morphine, de l’hydromorphone ou de l’oxycodone longue action). Il arrive fréquemment que la maîtrise temporaire de la douleur ou la sédation consciente soient nécessaires pour fournir une analgésie avant la procédure prévue. Si la douleur peut être anticipée, il faudrait faire coïncider l’effet maximal du médicament avec l’événement douloureux. Par exemple, avec des opioïdes, l’effet maximal est obtenu environ 15 à 30 minutes après l’administration par voie intraveineuse, et 45 à 60 minutes après l’administration par voie orale TABLEAU 5.10. En ce qui concerne les analgésiques non opioïdes, l’effet se produit entre 1 à 4 heures après l’administration par voie orale (Lehne, 2013). Pour un effet maximal rapide, l’utilisation des opioïdes qui pénètrent rapidement la barrière hématoencéphalique (p. ex., le fentanyl par voie intraveineuse) permet une excellente maîtrise de la douleur.

éactivation des connaissances Quelle est la différence entre un médicament à libération retardée et un médicament à libération prolongée ?

Prévention et surveillance des effets indésirables Les AINS et les opioïdes ont des effets indésirables. Ceux des opioïdes sont toutefois plus préoccupants ENCADRÉ 5.12. Les inrmières sont responsables de la surveillance clinique des enfants sous opioïdes et doivent respecter les

Pharmacothérapie TABLEAU 5.10

Principaux paramètres pharmacocinétiques des opioïdes PIC D’ACTION (MIN)

DURÉE D’ACTION (H)

Orale (forme courte action)

• 45-60

• 3-6

Orale (forme libération prolongée)

• Variable selon produit

• Variable selon produit

Intrarectale

• 30-60

• 3-6

Sous-cutanée

• 15-30

• 3-4

Intramusculaire

• 15-30

• 3-4

Intraveineuse

• 15-30

• 2-3

Intranasale (par atomiseur)

• 5-10

• 0,5-1

• 8-24

Sources : Adapté de CHU Sainte-Justine, Comité de pharmacologie (2009) ; Fraserhealth (2006).

Partie 2

Évaluation clinique

Plus particulièrement, l’OIIQ (2009) dénit cinq degrés de sédation, qu’il est indispensable d’évaluer régulièrement : S = sommeil normal, éveil facile ; 1 = éveillé et alerte ; 2 = parfois somnolent, éveil facile ; 3 = somnolent, s’éveille, mais s’endort durant la conversation ; 4 = endormi profondément, s’éveille difcilement ou pas du tout à la stimulation. L’approche pharmacologique des principaux effets indésirables des opioïdes (dépression respiratoire, somnolence, constipation, nausées et vomissements, prurit, rétention urinaire ou dysphorie, confusion et hallucinations) est résumée dans le TABLEAU 5.11.

Dépression respiratoire La dépression respiratoire est la complication la plus grave. La fréquence et l’amplitude respiratoires peuvent diminuer graduellement, ou alors la respiration peut cesser de façon abrupte. Tout changement signicatif par rapport à la fréquence et à l’amplitude respiratoires antérieures nécessite une vigilance accrue. Une fréquence respiratoire inférieure ne signie pas nécessairement que l’oxygénation artérielle a diminué ; une amplitude respiratoire accrue peut compenser le changement de fréquence. S’il se produit une dépression ou un arrêt respiratoire, l’inrmière doit être prête à intervenir rapidement TABLEAU 5.11 et ENCADRÉ 5.13.

Tolérance et dépendance

VOIE D’ADMINISTRATION

230

protocoles établis par les centres hospitaliers selon les directives de l’Ordre des inrmières et inrmiers du Québec (OIIQ) pour le suivi de leur clientèle spécifique (OIIQ, 2009). Les principaux paramètres à surveiller sont l’intensité de la douleur (avec échelle validée), l’état respiratoire (fréquence, rythme, amplitude, bruits respiratoires et saturation pulsatile en oxygène) et le degré de somnolence (avec échelle de sédation validée).

L’utilisation prolongée des opioïdes peut entraîner la tolérance et la dépendance physique, qui sont des états de neuroadaptation normaux, naturels et physiologiques. La dépendance physique est caractérisée par des manifestations physiques typiques en cas d’arrêt brusque de l’opioïde. Il y a tolérance lorsque la dose d’opioïdes doit être augmentée pour obtenir le même effet analgésique qu’antérieurement avec une dose plus faible. Une tolérance peut survenir chez l’enfant à qui un opioïde a été administré pendant 10 à 21 jours. Le traitement de la tolérance comprend l’augmentation de la dose ou la diminution de la durée entre les doses. Lorsque l’administration d’opioïdes est abruptement interrompue, des manifestations cliniques de sevrage apparaissent 24 heures plus tard et atteignent un sommet dans les 72 heures.

ENCADRÉ 5.12

Effets indésirables des opioïdes

GÉNÉRAL

• • • • • • • • • • •

Constipation (possiblement grave) Dépression respiratoire Sédation Nausées et vomissements Agitation, euphorie Torpeur Hallucinations Hypotension orthostatique Prurit Urticaire Rétention urinaire

• Diaphorèse • Myosis (peut être un signe de toxicité)

• Bâillement • Diaphorèse

• Anaphylaxie (rare)

Signes ultérieurs de sevrage • Agitation • Irritabilité • Tremblements • Anorexie • Pupilles dilatées • Chair de poule • Nausées et vomissements

SIGNES DE TOLÉRANCE

• Diminution du soulagement de la douleur • Diminution de la durée du soulagement de la douleur SIGNES DE SYNDROME DE SEVRAGE CHEZ LES ENFANTS PHYSICODÉPENDANTS

Premiers signes de sevrage • Larmoiement • Rhinorrhée

5

Pharmacothérapie TABLEAU 5.11

Approche thérapeutique des effets indésirables des opioïdes

EFFETS INDÉSIRABLES

TECHNIQUES PHARMACOLOGIQUES

TECHNIQUES NON PHARMACOLOGIQUES

Dépression respiratoire : légère à modérée

• Diminuer ou suspendre la dose d’opioïdes et aviser le médecin pour réévaluation de l’analgésie.

• Réveiller doucement, donner de l’oxygène, encourager à respirer profondément.

Dépression respiratoire grave

• Suspendre la dose et administrer de la naloxone selon le protocole.

• Administrer de l’oxygène suivant le protocole du Pediatric Advanced Life Support.

Somnolence

• Diminuer la dose jusqu’à atteindre la dose minimale efcace.

• Aviser d’urgence le médecin et se préparer pour une réanimation.

• Envisager un autre opioïde si la sédation persiste et ne s’atténue pas avec la tolérance. Constipation

• Polyéthylèneglycol 3350 en poudre pour solution orale (Lax-a-DayMD) : – Laxatif osmotique pouvant être utilisé à long terme – Agent de première ligne – 0,4-1 g/kg/jour P.O. die à diluer dans de l’eau ou du jus ; maximum : 17 g/jour – Possibilité de doses élevées allant jusqu’à 1,5 g/kg/jour pour des cas réfractaires • Lactulose : – Laxatif osmotique pouvant être utilisé à long terme – 1-3 mL/kg/jour divisé b.i.d. ; maximum 60 mL/jour – Débuter avec une petite dose (p. ex., 5 mL), puis augmenter la dose selon la réponse. • Docusate sodique (ColaceMD) :

• Augmenter la consommation d’eau et de bres (consommer du jus de pruneaux, des céréales de son, des fruits et des légumes). • Établir une routine : aller à la toilette dans l’heure suivant un repas, établir un temps pour rester assis sur la toilette pendant une période déterminée selon l’âge (3-10 minutes). • Utiliser un banc sur lequel appuyer ses pieds. • Faire de l’activité physique

– Administrer le ColaceMD en concomitance avec le début de l’administration de l’opioïde (permet d’éviter la constipation). – 5 mg/kg/jour P.O. h.s. ou divisé t.i.d. – Laxatif émollient ; peu efcace lorsque la constipation est installée • Sennosides A + B (SenokotMD) : – Laxatif stimulant P.O. : › Enfants de 2-5 ans : 4,4-6,6 mg h.s. ; maximum de 6,6 mg b.i.d. › Enfants de 6-12 ans : 8,8-13,2 mg h.s. ; maximum de 13,2 mg b.i.d. › Enfants de > 12 ans : 17,6-26,4 mg h.s. ; maximum de 26,4 mg b.i.d.

Chapitre 5

Évaluation et traitement de la douleur

231

TABLEAU 5.11

Approche thérapeutique des effets indésirables des opioïdes (suite)

EFFETS INDÉSIRABLES

TECHNIQUES PHARMACOLOGIQUES

Constipation

• Bisacodyl (DulcolaxMD) :

TECHNIQUES NON PHARMACOLOGIQUES

– Laxatif stimulant généralement utilisé en appoint pour une dose : › Enfants de 3-12 ans : 5-20 mg die P.O. › Enfants de 2-10 ans : 5 mg die I.R. › Enfants de > 10 ans : 5-10 mg die I.R. • Suppositoires de glycérine : – Laxatif osmotique le plus recommandé pour les nourrissons : › Enfants de < 2 ans : ¼ à 1 suppositoire pédiatrique I.R. die › Enfants de 2-5 ans : 1 suppositoire pédiatrique I.R. die › Enfants de > 6 ans : 1 suppositoire adulte I.R. die • Huile minérale en gelée (LansoylMD) : – Laxatif lubriant – Enfants de < 1 an : non recommandé – 1-3 mL/kg/jour ; maximum de 90 mL/jour – Risque de pneumonie lipidique si aspiration – Risque de malabsorption des vitamines liposolubles • Lait de magnésie (hydroxyde de magnésium) : – Laxatif osmotique – Précaution chez le nourrisson qui risque de souffrir d’hypermagnésémie – Risque d’hypermagnésémie, d’hypophosphatémie et d’hypocalcémie en surdose – 1-3 mL/kg/jour (de la formulation 400 mg/5 mL) ; maximum de 60 mL/jour Nausées, vomissements

• Dimenhydrinate (GravolMD) : – 1-1,25 mg/kg/dose P.O./I.V./I.R. q.6 h ; maximum de 5 mg/kg/jour ou 300 mg/jour • Métoclopramide (MaxeranMD) : – 0,1-0,2 mg/kg/dose P.O./I.V. q.6-8 h ; maximum de 10 mg/dose ; maximum de 0,5 mg/kg/jour

• Ne pas forcer l’enfant à manger. • Offrir les aliments préférés de l’enfant ; éviter les aliments épicés ou très odorants. • Proposer des aliments froids (p. ex., des sucettes glacées).

– Risque de réaction extrapyramidale – Contre-indiqué chez les enfants de < 1 an ; utiliser avec précautions en pédiatrie • Ondansétron : – 0,1 mg/kg/dose P.O./I.V. q.6 -8 h p.r.n. ; maximum de 4 mg/dose I.V. ou 8 mg/ dose P.O. ; maximum de 3 doses/jour • Granisétron : – 10-40 mcg/kg/dose die ; maximum de 2 mg/dose • Dexaméthasone (DécadronMD) : – 0,2-0,25 mg/kg/dose P.O./I.V. b.i.d. ou t.i.d. ; maximum de 4-10 mg/dose • Diphenhydramine (BenadrylMD) :

Prurit

– 0,5-1 mg/kg/dose P.O./I.V. q.6 h p.r.n. ; maximum de 50 mg/dose • Hydroxyzine (AtaraxMD) : – 0,5 mg/kg/dose P.O. q.6 h p.r.n. ; maximum de 50 mg/dose • Naloxone : – En perfusion continue : dose habituelle de 0,25-2 mcg/kg/h

232

Partie 2

Évaluation clinique

• Donner des bains avec des produits à base d’avoine ; maintenir une bonne hygiène. • Exclure les autres causes de démangeaison.

TABLEAU 5.11

Approche thérapeutique des effets indésirables des opioïdes (suite)

EFFETS INDÉSIRABLES

TECHNIQUES PHARMACOLOGIQUES

TECHNIQUES NON PHARMACOLOGIQUES

Rétention urinaire (se produit avec l’analgésie rachidienne plus souvent qu’avec l’utilisation d’opioïdes systémiques)

• Évaluer la médication pour déterminer les médicaments adjuvants ayant des effets anticholinergiques (p. ex., les antihistaminiques, les antidépresseurs tricycliques).

• Éliminer les autres causes physiologiques.

• Oxybutynine (DitropanMD) :

• Procéder à un cathétérisme vésical ou à l’installation d’une sonde urinaire à ballonnet.

– Enfant de 1-5 ans : 0,1-0,2 mg/kg/dose P.O. b.i.d. à t.i.d. ; maximum de 5 mg/dose

• Assurer un suivi rigoureux des ingesta et des excreta.

5

– Enfants de > 5 ans : 5 mg P.O. b.i.d. à t.i.d. Dysphorie, confusion, hallucinations

• Évaluer la médication pour déterminer les médicaments adjuvants ayant des effets sur le SNC.

• Éliminer les autres causes physiologiques.

• Aviser le médecin pour réévaluer l’analgésie. • Halopéridol : – 0,01 mg/kg/dose t.i.d. p.r.n. ; maximum de 5 mg/dose Sources : Adapté de APES (2008) ; APhC (2017) ; Rowan-Legg, Canadian Paediatric Society et Community Paediatrics Committee (2011) ; Santé Canada (2015).

Ces manifestations consistent en des signes d’excitabilité neurologique (irritabilité, tremblements, convulsions épileptiques, augmentation du tonus moteur, insomnie), de la dysfonction gastrointestinale (nausées, vomissements, diarrhée, crampes abdominales) et de la dysfonction du système nerveux autonome (diaphorèse, èvre, frissons, tachypnée, congestion nasale, rhinite). Les manifestations cliniques de sevrage peuvent être anticipées et évitées par une diminution progressive de la dose d’opioïdes administrés pendant plus de 5 à 10 jours. L’utilisation d’un protocole de sevrage pour prévenir ou minimiser les symptômes est souvent utile. Alors que la dépendance physique et la tolérance sont des états physiologiques, la dépendance psychologique (toxicomanie) est un état psychologique qui implique un raisonnement de cause à effet (p. ex., « J’ai besoin du médicament parce qu’il me permet de me sentir mieux »). Les nourrissons et les enfants n’ont pas la capacité cognitive d’associer la cause et l’effet, et, en conséquence, ils ne peuvent pas devenir dépendants. Les nourrissons et les enfants traités adéquatement avec des opioïdes peuvent être à risque de tolérance physique et de dépendance physique, mais pas de dépendance psychologique ni d’accoutumance (Greco et Berde, 2005 ; Turner, 2005). Les parents et les enfants plus âgés peuvent avoir peur de la dépendance lorsque des opioïdes sont prescrits. L’inrmière devrait les rassurer en leur expliquant que de tels risques sont extrêmement faibles (Galinkin et Koh, 2014). Il peut être utile de poser la question : Si tu n’avais pas cette douleur, est-ce que tu prendrais ce médicament ? Invariablement, la réponse est non, ce qui renforce

Techniques de soins ENCADRÉ 5.13

Traiter la dépression respiratoire causée par les opioïdes

• Cesser l’administration de l’opioïde. • Stimuler l’enfant (le secouer doucement par l’épaule, l’appeler par son nom, lui demander de respirer).

• Aviser l’équipe de réanimation, si nécessaire. • Administrer de l’oxygène pour maintenir une saturation supérieure à 94 %.

• Assurer un bon dégagement des voies respiratoires (tête de lit à 30°, position latérale si l’enfant est inconscient ou s’il vomit).

• Surveiller l’état respiratoire en continu jusqu’à ce que l’enfant s’éveille facilement (échelle de sédation inférieure ou égale à 2).

• Aviser le médecin et administrer de la naloxone selon le protocole de l’établissement, si nécessaire.

• Vérier les autres médicaments non opioïdes ayant des effets dépresseurs sur le système nerveux central.

Source : Adapté de OIIQ (2009).

la nature uniquement thérapeutique du médicament. Il est également important d’éviter de dire à l’enfant et à sa famille des phrases telles que : « On ne veut pas que tu t’habitues à ce médicament » ou encore « Maintenant, tu ne devrais plus avoir besoin de ce médicament ». Cela pourrait renforcer la crainte de l’enfant et des parents de devenir dépendant. Enn, il n’y a pas de preuves indiquant que l’utilisation d’analgésiques opioïdes tôt dans la vie augmente le risque de toxicomanie plus tard (American Academy of Pain Medicine, American Pain Society et American Society of Addiction Medicine, 2001). L’inrmière doit expliquer aux parents la différence entre la dépendance

Chapitre 5

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les nourrissons et les enfants traités adéquatement avec des opioïdes peuvent être à risque de tolérance physique et de dépendance physique, mais pas de dépendance psychologique ni d’accoutumance.

Évaluation et traitement de la douleur

233

physique, la tolérance et la toxicomanie, et leur permettre d’exprimer leurs préoccupations concernant l’utilisation et la durée d’administration des opioïdes.

Constipation Même si la dépression respiratoire est l’effet indésirable le plus craint, la constipation est un effet indésirable courant et parfois grave des opioïdes. Ceux-ci diminuent le péristaltisme et augmentent le tonus du sphincter anal. La prévention à l’aide de laxatifs émollients et de laxatifs est plus efficace que le traitement une fois que la constipation est installée. Une diète contenant une augmentation des fibres est généralement insuffisante pour promouvoir l’évacuation régulière des intestins. Cependant, les mesures diététiques comme une augmentation de la consommation des uides et des fruits, ainsi que l’activité physique, sont encouragées TABLEAU 5.11 .

Autres effets indésirables

Jugement

clinique Gregory, âgé de 10 ans, prend régulièrement de la codéine 30 mg pour maîtriser sa douleur due à une ostéomyélite au tibia droit. La prescription est la suivante : codéine 15 à 30 mg p.r.n. q.3 h et acétaminophène p.r.n. q.3 h. Il évalue sa douleur à 5 sur 10 avant sa dose, puis à 0 sur 10 environ 1 heure après avoir pris la dose. Il n’a pas été à la selle depuis 5 jours et il en est incommodé. Vous inscrivez au plan thérapeutique inrmier (PTI) le problème prioritaire suivant : « Constipation ». Vous écrivez la directive inrmière suivante : « Donner acétaminophène régulièrement q.3 h et codéine 15 mg q.3 h p.r.n. pendant 24 h et réévaluer ». Expliquez cette décision inrmière.

Le prurit causé par l’épidurale ou par la perfusion intraveineuse peut être traité par l’administration de naloxone en petites doses ou en perfusion continue, ou de diphenhydramine par voie intraveineuse. Les nausées, les vomissements et la sédation décroissent généralement deux jours après l’administration d’opioïdes ; cependant, entre-temps, des antiémétiques administrés par voie intraveineuse, orale ou intrarectale peuvent être nécessaires TABLEAU 5.11.

Évaluation du traitement contre la douleur Il est possible d’améliorer l’efcacité des analgésiques en adoptant une attitude réconfortante envers l’enfant. L’enfant qui comprend la raison de l’administration d’un analgésique et son effet peut anticiper le soulagement de sa douleur et participer à l’évaluation de son efcacité. L’inrmière doit utiliser une échelle de douleur validée, dont certaines ont été présentées plus tôt dans ce chapitre. Pour assurer la abilité de l’évaluation, il faut que l’enfant soit évalué avec la même échelle tout au long de son épisode de soins (OIIQ, 2009). L’inrmière doit procéder à une évaluation périodique de l’intensité de la douleur an de mesurer l’efcacité des schémas posologiques. La fréquence de l’évaluation dépend de chaque situation, de la voie d’administration et du pic d’action du médicament administré ; elle est effectuée au moins une fois par quart de travail, ou

234

Partie 2

Évaluation clinique

lorsqu’il y a un changement dans le traitement ou une modication de comportement de l’enfant. Au cours d’un épisode douloureux, la douleur doit être évaluée minimalement toutes les quatre heures et, lorsqu’il y a administration d’analgésiques, avant et au pic d’action de l’analgésique administré. La douleur au moment des soins doit également faire l’objet d’une évaluation. Il est indispensable de noter le résultat dans le dossier de l’enfant. Une ligne réservée à l’inscription de l’évaluation de la douleur dans le bilan de soins en facilite l’inscription systématique. Les parents peuvent participer à cette démarche, car ce sont eux qui connaissent le mieux leur enfant.

5.4

Soulagement de certains types de douleur

Certaines douleurs (p. ex., la douleur procédurale, les douleurs postopératoires, les céphalées, les douleurs cancéreuses et la douleur en n de vie) peuvent nécessiter une évaluation et une approche thérapeutique spéciques.

5.4.1

Douleur procédurale

La douleur procédurale se dénit comme étant une douleur brève et intense pouvant durer de quelques secondes à plusieurs heures et découlant d’un diagnostic ou de procédures thérapeutiques et préventives (Taddio, 2014). La douleur intense associée aux interventions invasives et l’anxiété liée à ces procédures peuvent être prises en charge par la sédation-analgésie ou par des méthodes non pharmacologiques, ou en combinaison avec un analgésique, lorsque c’est possible. La sédation-analgésie comprend toute une série d’états de conscience ENCADRÉ 5.14. Un examen complet, comprenant l’anamnèse de l’enfant, est essentiel avant toute sédation procédurale. Les éléments clés qui doivent gurer dans l’anamnèse sont : • les antécédents médicaux : problèmes de santé importants, comme l’asthme ; problèmes de santé mentale ; maladie cardiaque ; insufsance hépatique ou rénale ; hospitalisations ou interventions chirurgicales antérieures ; antécédents d’anesthésie ou de sédation ; • les allergies : opiacés, benzodiazépines, barbituriques, anesthésiques locaux ou autres ; • la médication actuelle : médicaments du système cardiovasculaire, dépresseurs du système nerveux central ; prudence requise à l’égard des utilisateurs chroniques de benzodiazépines et d’opiacés ; l’administration d’agents antagonistes peut induire un sevrage ou des convulsions ;

• l’usage de drogues : opioïdes, benzodiazépines, barbituriques, cocaïne et alcool ; • le dernier apport de nourriture : dans les cas considérés non urgents, certaines lignes directrices recommandent un délai de plus de six heures dans le cas des aliments solides et de plus de deux heures dans le cas des liquides clairs ; • l’état volumique : vomissements, diarrhée, restriction hydrique, diurèse, production de larmes. Avant l’administration d’une sédation ou d’une analgésie, on effectue une évaluation de l’état physique selon la classication de l’American Society of Anesthesiologists (score ASA) : • ASA 1 : client normal, en bonne santé • ASA 2 : client avec une anomalie systémique modérée • ASA 3 : client avec une anomalie systémique profonde • ASA 4 : client avec une anomalie systémique représentant une menace vitale constante • ASA 5 : client moribond dont la survie est improbable sans l’intervention An de fournir un environnement sécuritaire pour la sédation et l’analgésie procédurales, le matériel servant à prévenir ou à prendre en charge les événements indésirables et les complications doit être facilement accessible ENCADRÉ 5.15. Un accès intraveineux doit être installé pour l’ajustement de la sédation et des analgésiques ainsi que pour l’administration d’antagonistes et de liquides, le cas échéant. Du personnel qualié (médecin, inrmière, inhalothérapeute) dont l’unique responsabilité est de surveiller l’enfant (plutôt que d’aider à réaliser l’intervention) doit être présent pour surveiller toute apparition d’événements indésirables et de complications.

Gestion de la douleur procédurale liée aux aiguilles Les procédures impliquant des aiguilles, telles que les ponctions veineuses et l’insertion de cathéters intraveineux, sont les plus importantes sources de douleur procédurale (Taddio, 2014). Certaines méthodes pharmacologiques et non pharmacologiques peuvent être utilisées seules ou en combinaison pour gérer ce type de douleur.

Interventions pharmacologiques Les anesthésiques topiques tels que MaxileneMD 4 % ou 5 % et la crème EMLAMD peuvent être utilisés pour diminuer la douleur liée à l’insertion d’une aiguille. Cependant, ces médicaments comportent certains inconvénients tels que le temps d’attente avant que le produit devienne efcace (MaxileneMD : 30 minutes ; EMLA MD : 60 minutes) ainsi que la vasoconstriction des vaisseaux sanguins. Ils peuvent également générer des réactions cutanées locales et, dans certains cas, des

ENCADRÉ 5.14

Niveaux de sédation

• Sédation minimale (anxiolyse) – Réponse normale à la stimulation verbale – Atteinte possible de la fonction cognitive – Systèmes respiratoire et cardiovasculaire non affectés • Sédation modérée (auparavant sédation consciente) – Réponse volontaire à la stimulation verbale, mais peut-être pas à une légère stimulation tactile – Atteinte de la fonction cognitive – Fonction respiratoire adéquate ; système cardiovasculaire non affecté • Sédation profonde

– Atteinte possible de la capacité à maintenir les voies aériennes dégagées – Atteinte possible de la ventilation spontanée ; fonction cardiovasculaire maintenue • Anesthésie générale – Perte de conscience ; impossible de réveiller, même par une stimulation douloureuse

5

– Impossibilité de maintenir les voies aériennes bien dégagées et atteinte de la ventilation spontanée – Atteinte possible de la fonction cardiovasculaire

– Réveil difcile, sauf par une stimulation répétée ou douloureuse Sources : Adapté de Cravero (2014) ; Meredith, O’Keefe et Galwankar (2008).

ENCADRÉ 5.15

Matériel nécessaire pour la sédation et l’analgésie procédurales

• Méthode pour fournir de l’oxygène à haut débit

• Cathéters pour aspiration et de gros calibres

• Pour la prise en charge des voies aériennes : tubes endotrachéaux, ballons ventilatoires et laryngoscopes

• Matériel pour l’accès intraveineux

• Saturomètre, sphygmomanomètre, électrocardiographea, capnomètre en cas d’intubationa

• Agents antagonistes, dont le umazénil et la naloxone

a Appareils

• Médicaments de réanimation, solutés intraveineux

optionnels.

réactions allergiques graves (Beaulieu, 2013). Par ailleurs, le sucrose est la solution sucrée la plus utilisée pour la gestion de la douleur d’enfants lors de procédures impliquant des aiguilles (Stevens et al., 2017). Il peut être administré sur la langue de l’enfant ou sur la muqueuse des joues à l’aide d’une suce ou d’une seringue sans aiguille (Stevens et al., 2017). Les effets du sucrose se font sentir après 10 secondes et ont une durée d’action d’environ 10 minutes. Bien que le mécanisme d’action du sucrose pour la gestion de la douleur soit peu connu, certains avancent l’hypothèse qu’il engendrerait la libération d’un opioïde endogène qui induirait un effet analgésique (Taddio, 2014). L’administration de sucrose est une intervention pharmacologique rapide et peu coûteuse ; elle semble toutefois être plus efficace pour les Chapitre 5

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les procédures impliquant des aiguilles, telles que les ponctions veineuses et l’insertion de cathéter intraveineux, sont les plus importantes sources de douleur procédurale.

Évaluation et traitement de la douleur

235

éactivation des connaissances Dans la terminologie utilisée pour les volumes et les capacités pulmonaires, comment dénit-on le volume courant, la capacité vitale et le volume résiduel fonctionnel ?

Atélectasie : Affaissement des alvéoles pulmonaires qui empêche l’échange respiratoire normal d’oxygène et de dioxyde de carbone (gaz carbonique), et qui entraîne une hypoventilation du poumon réduisant le taux d’oxygène sanguin.

éactivation des connaissances Que signient les abréviations CD ou CR, LA, PA, SR et XL pour les médicaments à libération prolongée ?

nouveau-nés (28 jours et moins) et les jeunes enfants (1 à 12 mois) (Ali, McGrath et Drendel, 2016 ; Stevens et al., 2017).

Interventions non pharmacologiques Il existe plusieurs interventions non pharmacologiques pouvant être employées seules ou combinées à des interventions pharmacologiques pour aider à contrôler la douleur procédurale chez les enfants. Ces interventions font appel à la distraction, qui permet de dévier l’attention de l’enfant de la procédure douloureuse. Ces pratiques ont démontré leur efcacité pour la gestion de la douleur et de l’anxiété procédurales (Pillai Riddel et al., 2017 ; Taddio, 2014). En effet, les inrmières peuvent utiliser certains jouets adaptés selon l’âge des enfants pour les distraire durant la procédure, par exemple une hélice avec des lumières pour les enfants de 0 à 2 ans ou des bulles pour les enfants de 3 à 5 ans (Ballard et al., 2017). Lorsque c’est possible, une combinaison d’interventions pharmacologiques et non pharmacologiques s’avère idéale pour bien gérer la douleur associée à l’utilisation d’aiguilles auprès des enfants.

5.4.2

Douleur postopératoire

Toute intervention chirurgicale ou blessure traumatique (p. ex., des fractures, des dislocations, des entorses, des lacérations, des brûlures) entraîne des changements métaboliques et physiologiques en raison des réactions inammatoires qu’elle

génère (p. ex., une augmentation de la consommation d’oxygène et de glucose par les tissus, un œdème localisé, etc.). Les anesthésiques locaux et les blocs neuronaux peuvent modier efcacement les réactions à la blessure chirurgicale et atténuer ces réactions. Le soulagement efcace de la douleur postopératoire diminue le risque de complications pulmonaires ENCADRÉ 5.16. La douleur non soulagée associée aux chirurgies thoraciques ou abdominales peut amener l’enfant à diminuer son amplitude respiratoire thoracique et abdominale. Il s’ensuit une diminution du volume courant, de la capacité vitale, du volume résiduel fonctionnel et de la ventilation alvéolaire. L’enfant est incapable de tousser et d’éliminer les sécrétions, et le risque de complications, comme la pneumonie et l’atélectasie, est élevé. La douleur postopératoire intense se traduit également par une suractivité du système nerveux sympathique, ce qui augmente la fréquence cardiaque, la pression artérielle et le débit cardiaque. L’enfant nit par subir une augmentation de l’effort cardiaque et de la consommation d’oxygène par le myocarde, ainsi qu’une diminution de l’apport d’oxygène aux tissus.

5.4.3

Maux de tête récurrents

Plusieurs facteurs peuvent causer des céphalées récurrentes chez les enfants, notamment le stress, l’alimentation, les appareils d’orthodontie et les déséquilibres, ou encore la faiblesse des muscles

Soins non traumatiques ENCADRÉ 5.16

Analgésie préemptive

La base d’une bonne maîtrise de la douleur postopératoire chez les enfants est l’analgésie préemptive (El-Fattah et Ramzy, 2013). Ce type d’analgésie consiste à administrer des médicaments (p. ex., des anesthésiques locaux et régionaux – blocs nerveux) avant que l’enfant ressente de la douleur au cours de certaines interventions chirurgicales telles que l’amputation, ce qui permet de contrôler l’activation sensorielle et les changements de cheminement de la douleur du SNC et du SNP. L’analgésie préemptive diminue la douleur postopératoire, la quantité d’analgésiques nécessaires, les séjours hospitaliers et les complications postchirurgicales, en plus de minimiser les risques de sensibilisation du SNC et du SNP qui peuvent entraîner une douleur persistante (El-Fattah et Ramzy, 2013). ANALGÉSIE MULTIMODALE

Une combinaison de médicaments (analgésie multimodale ou équilibrée) est utilisée pour traiter la douleur postopératoire. Elle peut comprendre des AINS, des anesthésiques locaux ainsi que des analgésiques opioïdes et non opioïdes an d’obtenir un soulagement optimal et de diminuer les effets indésirables (Friedrichsdorf, 2015). Les opioïdes administrés sous forme d’ACP sont couramment prescrits pendant les 48 à 72 heures qui suivent l’opération TABLEAU 5.6 . La durée d’utilisation est fréquemment limitée à quelques jours, puisque la cause de la douleur disparaît généralement de

236

Partie 2

Évaluation clinique

jour en jour. La morphine libérée par ce dispositif permet un dosage total moindre de l’analgésie produite par les opioïdes comparativement à l’administration de doses intermittentes d’analgésiques au besoin. Pour certaines interventions chirurgicales (thoracique, urologique, etc.), une combinaison d’un anesthésique local (bupivacaïne) avec une faible dose d’opioïdes (fentanyl) administrée par voie épidurale apporte un bon soulagement de la douleur et diminue les effets gastro-intestinaux (p. ex., la stase intestinale, les nausées, les vomissements) pour une durée de 2 à 4 jours. Après le retrait de l’épidurale ou de la pompe d’ACP, des opioïdes à libération immédiate par voie orale sont prescrits chez les enfants qui peuvent s’alimenter. Les opioïdes à libération prolongée peuvent être utilisés chez les enfants qui ont subi une intervention chirurgicale majeure (p. ex., une chirurgie correctrice de scoliose, une sternochondroplastie). Les opioïdes à libération prolongée apportent un soulagement plus continu de la douleur, améliorant ainsi le sommeil. L’analgésie multimodale peut également être procurée par l’administration concomitante d’analgésiques opioïdes et non opioïdes, ou d’un analgésique opioïde ou non opioïde combiné à une intervention non pharmacologique comme la distraction par un clown ou l’utilisation de compresses froides ou chaudes.

La douleur intense est l’un des symptômes les plus perturbateurs de la migraine. La céphalée de tension est généralement légère ou modérée, et elle produit souvent une impression de pression dans les tempes, comme si l’enfant avait un bandeau serré autour de la tête. Le traitement de la céphalée récurrente nécessite la compréhension des antécédents et des conséquences de la douleur liée à la céphalée. La céphalée consécutive à une pathologie, à un mauvais ajustement orthétique ou à de mauvaises habitudes de vie peut être éliminée par le traitement ou la modication de la cause. La céphalée récurrente causée par le stress peut être soulagée par une approche comportementale ENCADRÉ 5.17.

Journal de la céphalée Le journal de la céphalée permet à l’enfant ou au parent de noter le moment de l’apparition de la céphalée, les activités qu’il pratiquait juste avant, ses inquiétudes ou ses préoccupations jusqu’à 24 heures avant le début de la céphalée, la gravité et la durée de la douleur, les analgésiques reçus et le type d’activité pendant les épisodes de la céphalée. Ce journal permet un suivi continu de l’évolution de la céphalée, indique les effets des interventions et oriente la planication du traitement.

5.4.4

Douleurs cancéreuses chez l’enfant

Caractéristiques des douleurs cancéreuses La douleur cancéreuse est le symptôme le plus prévalent (83 %) (Hickman, Varadarajan et Weisman, 2014). Selon Tutelman et ses collaborateurs (2018), 79,7 % des enfants atteints de cancer éprouveraient de la douleur liée aux traitements (chimiothérapie, radiothérapie, etc.). Il s’agit notamment de piqûres d’aiguille pour des traitements de chimiothérapie par voie intramusculaire (asparaginase-L), d’installation de lignes intraveineuses, de prises de sang, de ponctions lombaires, de ponctions de moelle osseuse, de biopsies, d’enlèvement de cathéters veineux centraux et d’autres procédures diagnostiques invasives 12 .

clinique

La douleur liée à la tumeur se produit fréquemment Soa, âgée de 15 ans, a subi une intervention lorsque l’enfant rechute ou chirurgicale orthopédique à l’épaule gauche il y a lorsque les tumeurs devien12 heures. Elle reçoit une analgésie contrôlée par le nent résistantes aux traitepatient grâce à une pompe. Elle ressent néanmoins ments. Les enfants ayant des un peu d’inconfort et adopte des positions antalgi­ tumeurs solides avec métaques. Quelle intervention prioritaire appliquerez­ stases au SNC ou au SNP vous pour assurer le confort de Soa ? peuvent éprouver des douleurs réfractaires. Les jeunes a) Vérier sa compréhension de l’ACP. adultes ayant survécu au canb) Compter la fréquence d’utilisation de l’ACP. cer pendant l’enfance peuvent c) Bien positionner Soa dans son lit. souffrir de douleur chronique, y compris d’un syndrome d) Administrer une entredose d’analgésique. douloureux régional complexe des membres inférieurs, de douleur au membre fantôme, de nécrose vasculaire, de douleur mécanique liée à un os qui ne s’est pas ressoudé après la résection d’une tumeur et d’algie postzostérienne (Bashore, 2011).

Jugement

oculaires causant une déviation de l’alignement ainsi que des erreurs de réfraction. Les maux de tête peuvent également être la séquelle d’un accident, d’une sinusite et d’autres infections ou inammations crâniennes, d’une pression intracrânienne accrue, de convulsions épileptiques, de médicaments, d’apnée obstructive du sommeil et, plus rarement, de l’hypertension artérielle. Les autres causes peuvent comprendre les malformations artérioveineuses, les perturbations de l’écoulement de l’absorption du liquide cérébrospinal, les hémorragies intracrâniennes, les maladies oculaires et dentaires, les infections bactériennes et les tumeurs au cerveau.

Les autres douleurs liées aux traitements sont : • une douleur abdominale après une greffe de moelle osseuse qui peut être associée à une maladie du greffon contre l’hôte ; • une douleur abdominale associée à la typhlite (infection du cæcum) qui se produit lorsque l’enfant est immunodécient ; • des sensations fantômes et une douleur du membre fantôme après une amputation ; • une douleur de la diaphyse qui peut être associée à l’administration de facteurs de croissance de globules blancs polynucléaires ; • une neuropathie périphérique douloureuse causée par les agents chimiothérapeutiques, surtout par la vincristine et le cisplatine, et rarement par la cytarabine (Hickman et al., 2014). L’arrêt de la chimiothérapie peut éliminer la neuropathie en quelques semaines ou en quelques mois, mais cette dernière peut persister même après l’arrêt. La douleur neuropathique est associée à au moins un des éléments suivants : 1) une douleur qualiée d’électrique ou de semblable à un choc, à un coup de poignard ou à une brûlure ;

12 La physiopathologie du cancer et ses manifestations cliniques sont décrites dans le chapitre 12, Enfant atteint de cancer.

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 5.17

Technique cognitivo-comportementale pour soulager la douleur

En cas de céphalée de stress, l’inrmière peut enseigner une technique comportemen­ tale permettant de soulager la douleur. L’inrmière montre aux parents comment centrer leur attention sur les techniques d’adaptation comme la relaxation. Lorsque les parents utilisent des techniques cognitivo­

Chapitre 5

comportementales de gestion du stress, ils déterminent les pensées et les situations négatives qui peuvent être associées à un risque accru de céphalée. Ils montrent ensuite à l’enfant comment activer des pensées positives et adopter un comportement approprié à la situation.

Évaluation et traitement de la douleur

237

5

2) un signe d’atteinte neurologique (p. ex., une paralysie, une névralgie, une hypersensibilité à la douleur) autre que ceux associés à la progression de la tumeur ; 3) le lieu du cancer solide dans l’organe correspondant à la lésion neurologique qui pourrait augmenter la douleur neuropathique.

Approche thérapeutique Traitement pharmacologique des douleurs cancéreuses Si l’enfant est neutropénique (numération des neutrophiles inférieure à 500/mm 3), la réaction antipyrétique de l’acétaminophène peut masquer une èvre. Les AINS sont contre-indiqués chez les enfants souffrant de thrombocytopénie (numération plaquettaire inférieure à 50 000/mm3) qui peuvent être à risque de saignements. La morphine est l’opioïde le plus largement utilisé pour la douleur modérée à intense, et elle peut être administrée par voies orale (y compris les formules à libération continue comme MS ContinMD et M EslonMD), intraveineuse, sous-cutanée, épidurale et intrathécale. En cas d’effets indésirables limitant les doses de morphine, l’hydromorphone peut être utilisée à la place ; ce médicament a démontré son efcacité chez les enfants atteints de cancer (Drake, Longworth et Collins, 2004). Les enfants et les adolescents souffrant de mucosite après une greffe de moelle osseuse ont bien toléré l’hydromorphone. Son rapport de puissance est d’environ 5:1, comparativement à la morphine (Drake et al., 2004). Toutefois, des études plus récentes n’ont pas fourni de données concluantes sur l’utilisation de l’hydromorphone plutôt que de la morphine en cas d’effets indésirables (Felden, Walter, Harder et al., 2011). Il existe peu de données probantes sur les traitements pharmacologiques les plus efcaces pour le soulagement de la douleur liée au cancer chez les enfants. La plupart de ces douleurs sont considérées comme étant de type neuropathique. Friedrichsdorf et Nugent (2013) promeuvent une approche multimodale comportant à la fois des interventions pharmacologiques telles que l’utilisation concomitante d’AINS, d’opioïdes, d’antidépresseurs (amitriptyline) et de gabapentinoïdes (gabapentine). D’autres chercheurs ont démontré qu’une dose très faible de méthadone (50 % de la dose initiale) a été efcace pour soulager les douleurs neuropathiques associées au cancer (Madden et Bruera, 2017).

Traitement pharmacologique des douleurs neuropathiques Les douleurs neuropathiques peuvent nécessiter des doses élevées d’opioïdes pour obtenir un soulagement. L’utilisation de coanalgésiques dans ce type de douleur s’avère souvent plus avantageuse que d’augmenter les doses d’opioïdes de façon extrême. Les antidépresseurs tricycliques (amitriptyline) et les anticonvulsivants (gabapentine, carbamazépine) ont des effets démontrés sur

238

Partie 2

Évaluation clinique

la douleur neuropathique liée au cancer (Friedrichsdorf, 2015). Une étude clinique comparant l’amitriptyline et la gabapentine pour le soulagement de la douleur neuropathique chez les enfants a démontré que les deux médicaments étaient efcaces pour soulager la douleur neuropathique des enfants impliqués dans cette étude (Brown, Johnston, Amaria et al., 2016). Bien que la kétamine soit souvent utilisée pour assurer l’analgésie et la sédation pendant les procédures douloureuses chez les enfants, son utilisation à long terme pour traiter la douleur neuropathique n’a pas été systématiquement étudiée et ne présente pas d’avantages cliniques pour tous les clients (Cohen, Liao, Gupta et al., 2011). Selon des essais cliniques aléatoires menés auprès de clients souffrant de douleurs neuropathiques chroniques, seulement certains d’entre eux ont bien réagi à la kétamine (Cohen et al., 2011). Enn, très peu d’études rigoureuses portent sur l’efcacité de traitements pharmacologiques pour la gestion de la douleur neuropathique chez les enfants. La plupart des traitements sont dérivés des traitements administrés chez les adultes et adaptés pour les enfants (Howard, Wiener et Walker, 2014).

Soins inrmiers DOULEURS CANCÉREUSES

Préparer l’enfant et sa famille aux procédures douloureuses La préparation du parent et de l’enfant peut diminuer la peur et l’anxiété liées aux procédures douloureuses. Pour ce faire, l’inrmière interroge les parents sur les styles d’adaptation de l’enfant ; elle explique ensuite la procédure et s’assure du soutien des parents. Les analgésiques topiques (p. ex., la crème EMLAMD, les gels d’améthocaïne, etc.) décrits dans la section précédente de ce chapitre procurent une analgésie avant les procédures pour lesquelles une aiguille est utilisée. Certains enfants peuvent ressentir une céphalée après la ponction lombaire, qui peut être traitée à l’aide d’analgésiques non opioïdes et en plaçant l’enfant sur le dos pendant une heure après la procédure. La douleur liée à la ponction de moelle osseuse est causée par l’insertion d’une aiguille large dans l’espace iliaque postérieur et par la sensation déplaisante ressentie au moment de la ponction. La thérapie cognitivocomportementale (p. ex., le rêve éveillé dirigé, la relaxation, la musicothérapie, l’hypnose, l’utilisation des clowns thérapeutiques), la sédation et l’anesthésie générale sont efcaces pour diminuer la douleur et la détresse pendant la procédure.

5.4.5

Douleur et sédation lors des soins de n de vie

En n de vie, les symptômes peuvent être très différents d’un enfant à l’autre, selon son affection primaire : maladie dégénérative, neuromusculaire, cancéreuse, etc. (Drake et McCulloch, 2014). La douleur est généralement le symptôme prédominant et le plus incommodant. Les sources de la douleur sont multiples. Elle peut être causée par la progression de la maladie, comme les céphalées dues à une hypertension intracrânienne. Les traitements, quant à eux, peuvent souvent provoquer des effets indésirables importants tels que la mucosite ou la constipation. S’ajoute à ces éléments la douleur découlant d’interventions comme la pose d’une sonde nasogastrique, une ponction lombaire, des prélèvements sanguins, etc. (Tutelman et al., 2018). Chez la plupart des enfants en n de vie, il est possible de soulager la douleur de manière satisfaisante si le traitement est instauré dès l’apparition des symptômes 10 .

Approche thérapeutique Une combinaison d’opioïdes forts et d’adjuvants analgésiques procure un soulagement dans la plupart des situations. De nombreuses fausses croyances sont encore associées à l’administration de morphine en n de vie (Friedrichsdorf, 2015 ; Vinay, Malouf et Dallaire, 2011). L’inrmière doit rassurer les parents et leur dire que les opioïdes traitent la douleur, mais qu’ils n’entraînent pas la mort de l’enfant. C’est la progression de la maladie

qui cause la mort. Une étude récente a montré l’efcacité des timbres transdermiques de fentanyl pour le soulagement de la douleur cancéreuse chez les enfants n’ayant pas reçu d’autres opioïdes (Othman, Mohamad et Sayed, 2016). Certains enfants peuvent éprouver des symptômes intolérables comme une dyspnée grave, une détresse respiratoire, une douleur intense ou d’autres manifestations cliniques graves (p. ex., des saignements importants), malgré une utilisation appropriée des médicaments pour soulager la douleur et les effets indésirables (Drake et McCulloch, 2014). La détresse respiratoire se caractérise par la tachypnée, le tirage, l’agitation, l’anxiété profonde et la cyanose. Une sédation continue peut être une façon de soulager la souffrance lorsqu’il n’y a pas d’autre moyen acceptable de fournir une analgésie (Kiman, Wuiloud et Requena, 2011). La sédation continue provoque une perte de l’état de conscience qui, combinée à des doses élevées d’opioïdes, permet d’éviter que l’enfant ressente des douleurs difciles à soulager. Si l’enfant est éveillé et qu’il ressent des douleurs légères à modérées, l’utilisation de méthodes comme la distraction, l’imagerie, la relaxation, l’hypnose, les massages et les techniques comportementales, notamment l’art-thérapie, les clowns thérapeutiques, la musicothérapie et les jeux, peuvent être des avenues intéressantes pour aider à réduire la douleur (Friedrichsdorf, 2017 ; Harrop, Brombley et Boyce, 2017). Toutefois, ces méthodes ne doivent en aucun temps remplacer l’analgésie.

CE QU’IL FAUT RETENIR

La détresse respiratoire se caractérise par la tachy­ pnée, le tirage, l’agitation, l’anxiété profonde et la cyanose.

5 10 Les principes des soins de n de vie sont dénis dans le chapitre 10, Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie.

CE QU’IL FAUT RETENIR

L’inrmière doit rassurer les parents et leur dire que les opioïdes traitent la douleur, mais qu’ils n’entraînent pas la mort de l’enfant. C’est la progression de la maladie qui cause la mort.

Soins inrmiers DOULEUR ET SÉDATION DANS LES SOINS DE FIN DE VIE

Procéder à une évaluation initiale En situation palliative, l’évaluation de la douleur est prioritaire. Pour la traiter adéquatement, il faut avant tout l’évaluer de façon systématique avec des échelles adaptées à l’âge et à la maladie de l’enfant, comme celles présentées dans la deuxième section de ce chapitre. Aucune échelle ne permet d’évaluer spéciquement la douleur en n de vie (Drake et McCulloch, 2014). On peut toutefois utiliser l’échelle FLACC révisée pour les enfants qui ne peuvent communiquer. Il est important de toujours utiliser la même échelle pour évaluer la douleur d’un enfant an d’obtenir une évaluation juste et constante (OIIQ, 2009).

Fréquemment, les enfants manifestent plusieurs types de douleur (aiguë, neuropathique, etc.) en même temps et à différents endroits, ce qui complexie l’évaluation (Drake et McCulloch, 2014). Ainsi, il peut être utile de demander à l’enfant de dessiner sa douleur sur un schéma en choisissant des couleurs différentes pour symboliser des intensités progressives de douleur : peu, moyen, beaucoup, très fort. De l’ombragé et du pointillé peuvent servir de symboles pour décrire une douleur particulière, des picotements, des décharges électriques ou une douleur à un membre provoquée par des caresses, un bain ou des manipulations pendant l’habillement (Humbert, 2004).

Chapitre 5

Évaluation et traitement de la douleur

239

Analyse d’une situation de santé Michel a 8 ans et il est d’origine haïtienne. Il pèse 22 kg. Il est atteint de drépanocytose et en est à sa douzième hospitalisation pour crise vasoocclusive depuis maintenant 4 jours. Comme il est à risque d’infection, il est placé seul dans sa chambre en isolement préventif. Il est seul à l’hôpital, car ses parents demeurent à 1 heure de route et n’ont pas de voiture. Son père travaille, et sa mère s’occupe de ses 3 frères et de sa sœur à la maison. Ils sont seuls au pays, le reste de la famille étant en Haïti. Pour pallier son absence, sa mère l’appelle 2 fois par jour, et ses parents viennent lui rendre visite le samedi soir. Cliniquement, Michel souffre de douleurs importantes sous forme de serrements aux membres inférieurs qu’il évalue à 10 sur 10 sur l’échelle numérique. Lorsqu’il reçoit sa dose de morphine, il évalue sa douleur au mieux à 8 sur 10. Michel ne se plaint pas spontanément de sa douleur ; toutefois, il répond aux questions au cours de l’évaluation. L’inrmière a remarqué qu’il mange peu, qu’il ne sourit pas et qu’il se mordille souvent les lèvres.

Jugement clinique Il semble aussi très songeur et demande régulièrement quand ses parents viendront le chercher. Lorsque la crise de Michel sera résorbée, les médecins procéderont à une splénectomie. Michel reçoit une perfusion de D 5 % NaCl 0,45 % + KCl 20 mEq/L. Ses prescriptions sont : • Morphine I.V. q.3 h p.r.n. (0,1 mg/kg) • Dimenhydrinate (Gravol MD) 22 mg I.V. q.6 h p.r.n. • Diphenhydramine (BenadrylMD) 22 mg I.V. q.6 h p.r.n. • Céfotaxime (ClaforanMD) 1 g I.V. q.6 h • Lorazépam (AtivanMD) 0,5 mg I.V. q.8 h p.r.n. • Lactulose (Apo-LactuloseMD) 10 mL P.O. die • Acide folique 5 mg P.O. die Parmi ses résultats de laboratoire, il y a : • Hémoglobine : 69 g/L (N : 110-133 g/L) • K : 3,1 mmol/L (N : 3,5-5,8 mmol/L) • Vitesse de sédimentation: 58 mm/h (N: 1-6 mm/h)

Mise en œuvre de la démarche de soins SOLUTIONNAIRE

Extrait des notes d’évolution

2018-08-11 9:00 S l d dler à 10 r 10  j. Slag à 8 r 10 1 her r vor ç d l hn. N ng u l qur d  eps,   s,  rl l lèvr, x l fenr, demnd égière   rets ienr l chercher biet. 2018-08-12 15:00 Rier  dten lrsq’ ju v o. Éu s dler à 4 r 10.

240

Partie 2

Évaluation clinique

Collecte des données – Évaluation initiale – Analyse et interprétation 1. Pour compléter l’autoévaluation de la douleur de Michel, indiquez au moins sept données additionnelles liées au comportement, autres que celles fournies dans la mise en contexte. 2. Michel a un pouls rapide à une fréquence de 132 batt./min. Vous hésitez à considérer cette donnée pour documenter l’évaluation de la douleur de Michel. Quelle donnée de la mise en contexte pourrait aussi être à l’origine de sa tachycardie ? 3. Trois éléments de la mise en contexte peuvent contribuer à l’exacerbation de la douleur chez Michel. Nommez-en au moins deux et justiez vos réponses. 4. La vitesse de sédimentation de Michel est augmentée. Quel lien établissez-vous entre ce résultat d’analyse de laboratoire et la douleur de Michel ? 5. Vous remarquez que le médecin a privilégié les voies orale et intraveineuse pour l’administration des médicaments. Pour quelle raison n’a-t-il pas choisi les voies sous-cutanée et intramusculaire pour certains médicaments ?

Planication des interventions – Décisions inrmières Extrait de PTI CONSTATS DE L’ÉVALUATION Date

Heure



2018-08-11

9:00

2

Problème ou besoin prioritaire

Soulagement inefcace de la douleur

Signature de l’inrmière

Jeanne Boulanger

Initiales

J.B.

Programme / Service

Unité de pédiatrie

Initiales

J.B.

RÉSOLU / SATISFAIT Date

Heure

Initiales

2018-08-11

15:00

J.B.

Signature de l’inrmière

Initiales

Professionnels / Services concernés

Programme / Service

6. Vous préparez la dose de morphine I.V. de Michel. Effectuez le calcul pour vous assurer que la dose offerte est thérapeutique. 7. Il est 9 h et vous administrez la morphine à Michel en 20 minutes. À quelle heure devrez-vous évaluer la douleur postdose ? Justiez votre réponse. 8. Après avoir administré la morphine à Michel, vous évaluez sa fréquence respiratoire toutes les heures. Justiez cette évaluation fréquente. 9. Immédiatement après la dose de morphine, vous avez administré une dose de lorazépam (AtivanMD) à Michel. Justiez l’administration de ce médicament. 10. Il est 10 h 15. Cela fait environ 1 h 15 que Michel a reçu sa dose de morphine. Sa fréquence respiratoire est à 10 R/min. Quelles devraient être vos 2 interventions prioritaires ? Justiez votre réponse. 11. Michel s’est éveillé assez facilement, mais il se rendort pendant que vous lui parlez. Nommez au moins deux interventions à effectuer auprès de Michel.

Évaluation des résultats – Évaluation en cours d’évolution 12. Un autre élément de la situation a pu contribuer à la diminution de la fréquence respiratoire de Michel. Lequel ?

Cet après-midi, vous avez du temps à consacrer à Michel, car vos autres clients ont reçu leur congé de l’hôpital. Vous décidez d’aller jouer avec lui. Tout en jouant, vous évaluez sa douleur. Vous notez qu’il est rieur et détendu. Il évalue sa douleur à 4 sur 10, du jamais vu depuis son arrivée. La mère de Michel appelle et vous demande le résultat de l’évaluation de la douleur de Michel. Elle n’en revient pas du résultat et vous demande ce qui peut expliquer ce changement.

Planication des interventions – Décisions inrmières 13. En voyant que la distraction contribue fortement au soulagement de la douleur de Michel, vous demandez qu’une bénévole soit présente auprès de l’enfant pendant quatre heures par jour au moins et que le service de clowns thérapeutiques vienne le visiter une fois par jour. Cette décision est-elle pertinente ? Justiez votre réponse.

Évaluation des résultats – Évaluation en cours d’évolution 14. Expliquez ce qui a pu contribuer à soulager la douleur de Michel. 15. Nommez au moins deux indices cliniques qui conrmeraient que Michel est moins souffrant.

Chapitre 5

VU dans ce chapitre

Nommez trois signes observables sur les plans respiratoire et cutané indiquant une probable détresse respiratoire causée par l’administration d’opioïdes.

VU dans ce chapitre

Outre des signes de détresse respiratoire, quel autre effet indésirable courant devrezvous surveiller chez Michel en raison de la prise de morphine ? MAIS SI...

Si Michel recevait en plus un analgésique non opioïde de type AINS, le médecin devrait-il augmenter la dose de ce médicament si Michel n’était pas soulagé ? Justiez votre réponse.

Évaluation et traitement de la douleur

241

5

Chapitre

6

Problèmes de santé du nourrisson Écrit par : Cheryl C. Rodgers, PhD, RN, CPNP, CPON Adapté par : Raphaèle Ferland-Verry, Dt. P. Maude Julien, inf., B. Sc., B. Éd.

MOTS CLÉS

OBJECTIFS

Allergie alimentaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . 251 Anaphylaxie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 252 Atopie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 252 Cachexie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 250 Candidose . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 262 Coliques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 264 Cyanose . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 272 Dermite séborrhéique. . . . . . . . . . . . . . . . 263 Érythème fessier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 262 Intolérance alimentaire . . . . . . . . . . . . . . 252 Malaise grave du nourrisson (MGN). . . . 271 Malnutrition grave . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 249 Plagiocéphalie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 273 Retard de croissance (RC) . . . . . . . . . . . 257 Syndrome de mort subite du nourrisson (SMSN) . . . . . . . . . . . . . . . 266

Après avoir étudié ce chapitre, vous devriez être en mesure : • de dépister les enfants exposés à un risque accru de troubles nutritionnels ; • d’élaborer un plan d’enseignement nutritionnel pour un enfant souffrant de malnutrition grave ou à risque d’en souffrir, ou ayant un déficit ou un excès de vitamines et de minéraux ; • de reconnaître les manifestations cliniques d’allergies alimentaires ; • de dépister les nourrissons sensibles au lait de vache ; • d’effectuer l’enseignement aux parents en lien avec la prévention et les interventions à réaliser en cas de réaction allergique ; • d’enseigner aux parents les interventions à effectuer pour prévenir la régurgitation et le crachotement chez le nourrisson ; • de planifier les soins infirmiers susceptibles de répondre aux besoins physiques et affectifs de l’enfant et de sa famille dans les cas de retard de croissance ; • de prévenir l’érythème fessier chez le nourrisson ; • d’énumérer les mesures à appliquer pour soulager les coliques ; • d’expliquer les soins infirmiers pouvant répondre aux besoins immédiats et à long terme de la famille dont un enfant est décédé du syndrome de mort subite du nourrisson ; • de détecter et de prévenir la plagiocéphalie chez le nourrisson.

Disponible sur • Annexe Web • À retenir • Carte conceptuelle • Solutionnaires

Guide d’études – SA05, RE01, RE02

242

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Cette carte conceptuelle illustre schématiquement les principaux concepts décrits dans le présent chapitre. Sa lecture vous permettra d’avoir une vue d’ensemble des notions qui y sont présentées.

comprenant

6

tels que dont

Problèmes de santé du nourrisson

le cas échéant

prévention

facteurs de risque traitées par

prévenus par

découlant de

dont

dont

dont

comprennent

prévenue par

Causes multifactorielles

deux types de réactions

Carte conceptuelle

Chapitre 6

Problèmes de santé du nourrisson

243

6.1

Troubles nutritionnels

Les troubles nutritionnels graves durant l’enfance recensés dans la plupart des pays développés sont rares, mais certains nourrissons peuvent souffrir d’une forme de décience nutritionnelle. Une étude (Feeding infants and toddlers study) effectuée aux États-Unis en 2008 sur l’alimentation des nourrissons et des trottineurs révèle que les apports nutritionnels habituels des nourrissons, des trottineurs et des enfants d’âge préscolaire (0 à 47 mois) respectent ou dépassent les besoins en énergie et en protéines selon les apports nutritionnels de référence pour les Américains (Briefel, Kalb, Condon et al., 2010 ; Butte, Fox, Briefel et al., 2010). D’après cette même étude, un nombre petit, mais signicatif, de nourrissons présenterait un risque de consommation insufsante de fer et de zinc. De plus, les apports en bres alimentaires chez les trottineurs et les enfants d’âge préscolaire étaient faibles. Les inrmières doivent promouvoir de saines habitudes de vie tôt au cours de la vie de l’enfant grâce à un enseignement aux familles et aux enfants. Cet enseignement portera non seulement sur la promotion d’une alimentation équilibrée, mais aussi sur la pratique régulière d’exercice, ce qui contribuerait à la prévention des maladies associées à un piètre apport nutritionnel et à un mode de vie sédentaire. Les conclusions de cette étude et d’autres rapports similaires revêtent une importance indéniable pour le personnel soignant qui travaille auprès des nourrissons et des enfants. Par ailleurs, les aliments destinés à compléter le lait maternel pendant les deux premières années de vie devraient être frais et peu transformés, et adaptés à la dentition du nourrisson ainsi qu’à sa capacité à mastiquer (Solomons et Vossenaar, 2013).

6.1.1

Jugement

clinique

Déséquilibres vitaminiques

En général, on dénombre peu de cas de décits vitaminiques en Amérique du Nord. Toutefois, on constate des carences chez certaines populations à risque.

Indiquez deux raisons qui expliquent que LéonPaul, un nourrisson d’origine rwandaise vivant à Puvirnituq et allaité par sa mère, présente un plus grand risque de souffrir d’une carence en vitamine D qu’Elliot, un nourrisson à la peau blanche nourri aux préparations lactées et vivant au même endroit. MAIS SI...

Si les parents de Léon-Paul choisissaient d’avoir recours à un lit de bronzage pour réduire le risque de carence en vitamine D, cela serait-il efcace ?

244

Partie 3

chez des nourrissons et des enfants vivant au Canada, la majorité d’entre eux ayant la peau foncée et étant allaités exclusivement et non supplémentés en vitamine D. Un sondage a ensuite été effectué en 2015 auprès des pédiatres canadiens ; 58 d’entre eux ont déclaré 48 cas de rachitisme nutritionnel, dont 67 % avaient de 0 à 2 ans, et 101 cas de grave carence en vitamine D symptomatique sans rachitisme. La majorité des cas sont survenus en Alberta, au Manitoba, en Ontario et au Québec (SCP, 2015). Parmi les populations à risque, il convient de mentionner : • les enfants nourris exclusivement au sein jusqu’à six mois ou allaités pendant plus de six mois avec un apport insufsant en vitamine D dans le lait maternel, les aliments complémentaires ou les suppléments ; • les enfants au teint foncé. La synthèse de la vitamine D dépend de la concentration de mélanine dans la peau. Plus celle-ci est élevée, comme chez les enfants à peau noire, moins la conversion de 7-déhydrocholestérol en prévitamine D3 est efcace. Le temps d’exposition au soleil doit donc être plus long chez les enfants à la peau foncée an de synthétiser sufsamment de vitamine D. Chez les enfants à la peau pâle, l’utilisation de crème solaire bloque les rayons UV, ce qui bloque du même coup la synthèse de la vitamine D par la peau ; • les enfants qui sont peu exposés au soleil ou qui vivent dans des zones urbaines fortement polluées (Wacker et Holick, 2013) ; • les enfants qui vivent dans les collectivités du Grand Nord canadien ; • les enfants dont l’alimentation comporte peu de sources de vitamine D et de calcium ; • les enfants dont la principale source de calcium et de vitamine D provient des produits laitiers ou des substituts de produits laitiers (boissons végétales) non enrichis de vitamine D (p. ex., le yogourt, le fromage, le lait de vache cru, les boissons de soya ou d’amande non enrichies) ; • les enfants obèses ou qui ont un surplus de poids (Turer, Lin et Flores, 2013). Les principales fonctions de la vitamine D sont :

Carence en vitamine D

• l’absorption du calcium et du phosphore ;

Le rachitisme par carence en vitamine D est toujours un problème au Canada (Société canadienne de pédiatrie [SCP], 2004). En effet, selon une étude du Programme canadien de surveillance pédiatrique (PCSP), de 2002 à 2004, les chercheurs ont recensé 104 cas de rachitisme par carence en vitamine D

• le ralentissement de l’excrétion rénale du phosphore ;

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

• la contribution au bon fonctionnement du système immunitaire. Les principales sources de vitamine D sont : • l’exposition directe aux rayons du soleil sans ltre solaire, entre les mois d’avril et de septembre au Canada ; • l’huile de foie de morue, le hareng, le maquereau, le saumon, le tilapia et le jaune d’œuf ;

Apport en vitamine D Pour les nourrissons nés à terme, en santé et allaités, Santé Canada (2012) recommande une dose de 400 unités internationales par jour. Cette dose prévient effectivement une grave carence en vitamine D (taux de 25[OH]D inférieur à 25 nmol/L). Toutefois, selon la Société canadienne de pédiatrie, le taux optimal de vitamine D devrait plutôt être de 25(OH)D supérieur à 75 à 80 nmol/L. Pour cette raison, l’apport en vitamine D de 400 unités internationales par jour de Santé Canada ne suft peut-être pas (Godel, 2017). Chez le prématuré, l’apport total en vitamine D, toutes sources confondues, devrait s’élever à 200 unités internationales/kg/jour, jusqu’à un maximum de 400 unités internationales/jour. La dose subséquente de vitamine D devrait correspondre à 400 unités internationales/jour pour tous les nourrissons pendant leur première année de vie, avec une augmentation à 800 unités internationales/jour, toutes sources confondues, entre octobre et avril au nord du 55e parallèle (latitude approximative d’Edmonton), et entre le 40e et le 55e parallèle chez les personnes présentant d’autres facteurs de risque de carence en vitamine D que la latitude seule (Godel, 2017). Les préparations lactées commerciales prêtes à boire contiennent généralement 400 unités internationales de vitamine D 3 par litre. Ces sources de vitamine D devraient répondre aux besoins des nourrissons s’ils en boivent une quantité sufsante. Quant aux préparations pour nourrissons en poudre ou concentrées à diluer dans l’eau, elles doivent être reconstituées en respectant à la lettre les proportions de préparation et d’eau recommandées par le fabricant, à défaut de quoi l’enfant pourrait souffrir d’une carence vitaminique et nutritionnelle. Cette éventualité est à considérer notamment dans les situations de vulnérabilité (analphabétisme, problème de santé mentale ou de décience intellectuelle, mère d’âge mineur, etc.) (Organisation mondiale de la Santé, 2007).

Carence en vitamine B12

La carence en vitamine B12 a des répercussions importantes sur l’hématopoïèse et le système nerveux central du nourrisson. L’apport insufsant en B12 de la mère doit être évoqué en premier lieu chez les nourrissons allaités exclusivement au sein même en l’absence d’anémie ou de macrocytose chez la mère, puisque ce ne sont pas les réserves en B12 de la mère, mais plutôt son apport quotidien

clinique

(grâce aux aliments ou aux suppléments) qui inuence la Christina est âgée de deux mois. Après avoir teneur en vitamine B12 de son terminé son évaluation et questionné sa mère, lait (Kamoun, Guirat, Maaloul vous croyez que la petite est susceptible de souffrir et al., 2015). Le nourrisson d’une carence en vitamine B12. Parmi les choix de allaité exclusivement au sein réponse proposés, lequel représente le facteur dont la mère est végétarienne de risque le plus important pour Christina ? ou atteinte de la maladie de a) L’utilisation d’alginate de sodium GavisconMD Biermer (anémie pernicieuse) trois fois par semaine par la mère. est plus susceptible de souffrir d’une carence en vitab) La consommation de viande rouge ou de poisson mine B12 si celle-ci ne conpar la mère cinq jours par semaine. somme pas suffisamment c) L’antécédent de dérivation biliopancréatique de cette vitamine sous forme de la mère il y a deux ans. de supplément. Il faut égad) Le fait, pour Christina, d’être exclusivement lement soupçonner une nourrie au sein (allaitement). carence en vitamine B12 chez le nourrisson qui présente une atteinte neurologique et hématologique.

Jugement

• les aliments enrichis : lait, margarine, certains produits laitiers (yogourts), céréales, plusieurs boissons pour petit-déjeuner, boissons végétales, jus d’orange (Les diététistes du Canada, 2017).

Les principales fonctions de la vitamine B12 sont : • la génération de coenzymes nécessaires à la synthèse des protéines ; • un rôle indirect dans la formation des globules rouges (particulièrement la formation des acides nucléiques et le métabolisme de l’acide folique) ; • le fonctionnement normal des tissus nerveux. Les principales sources de vitamine B 12 sont : • les produits d’origine animale, notamment la viande, le foie, les rognons, le poisson, les crustacés, la volaille, le lait, les œufs et le fromage ;

L’apport en vitamine D pour les prématurés est traité dans le chapitre 23 du manuel de Lowdermilk, D.L., Perry, S.E., et Cashion, K. (2018). Périnatalité. Montréal : Chenelière Éducation.

• certains produits de soya enrichis ; • la levure alimentaire.

Autres carences en vitamines Certaines maladies ou leur traitement peuvent aussi exposer les enfants à un risque de déséquilibre vitaminique. Par exemple, en présence de troubles de malabsorption (p. ex., la brose kystique et le syndrome de l’intestin court), des carences en vitamines liposolubles A, D, E et K sont observées (Fibrose kystique Canada, s.d.). Les nourrissons prématurés souffrent parfois de rachitisme au cours du deuxième mois de vie en raison d’un apport inadéquat en vitamine D, en calcium ou en phosphore. Les enfants qui reçoivent de fortes doses de salicylates (p. ex., pour le traitement de la maladie de Kawasaki) peuvent avoir des réserves insufsantes de vitamine C. L’exposition à la fumée secondaire entraînerait une baisse des taux de vitamines A, E et C chez les enfants (Yilmaz, Isik Agras, Hizli et al., 2009). Chez les enfants atteints de maladies chroniques qui peuvent causer une perte d’appétit, une diminution de l’apport alimentaire et une malabsorption nutritionnelle, il faut vérier s’il

Chapitre 6

Problèmes de santé du nourrisson

245

6

Jugement

clinique Durant un stage en soins inrmiers au Cameroun, vous recevez Maha Abassounga, une jeune mère de 20 ans et son ls de 4 mois qu’elle allaite. La mère rapporte qu’en raison de la sécheresse, les réserves de nourriture de son village sont presque épuisées. Après l’évaluation, vous estimez que Maha consomme environ 1 600 calories par jour depuis la dernière semaine. Elle consomme beaucoup de fruits et de légumes, mais peu de viande. Elle ne montre pas de signes de déshydratation. Elle se demande si son lait maternel sera modié. Que devriez-vous lui répondre ? a) Oui. La concentration en vitamine E du lait maternel sera diminuée en raison de ses apports nutritionnels quotidiens. b) Oui. La composition du lait maternel de Maha sera modiée en raison de la diminution des apports caloriques quotidiens.

convient de fournir un apport adéquat en vitamines et en minéraux par une alimentation parentérale ou entérale. Selon une étude, les enfants atteints de thalassémie présenteraient des carences en vitamines A, D, E et K, en folate, en calcium et en magnésium selon les apports nutritionnels de référence (ANREF) recommandés ; ces carences augmentent signicativement avec l’âge (Fung, Xu, Trach tenberg et al., 2012).

Un lien a aussi été établi entre une carence en vitamine A et un risque accru de c) Non. À court terme, le corps de Maha puise cécité chez les enfants atdans ses réserves pour assurer la qualité du teints de rougeole. Toutefois, lait maternel. une récente revue Cochrane d) Non. Maha ne montre pas de signes de déshydes études portant sur l’efdratation ; la composition du lait maternel sera cacité de la vitamine A inchangée. administrée à ces enfants n’a fait état d’aucune réduction B de la morbidité oculaire (Bello, Meremikwu, Ejemot-Nwadiaro et al., 2014). Malgré l’absence Les valeurs normales de preuve, on recommande l’administration de sont présentées dans suppléments de vitamine A aux enfants hospital’annexe B, Valeurs lisés pour la rougeole. Par ailleurs, les complicanormales des résultats tions dues à la diarrhée et à des infections d’analyses de laboratoire s’aggravent souvent chez les nourrissons et les courantes. enfants ayant une carence en vitamine A. Bien que rare dans les pays industrialisés, le scorbut, causé par une carence en vitamine C, affecte les enfants dont l’alimentation contient trop peu de cette vitamine en raison de dysphagie, d’aphagie ou de problèmes alimentaires (Ghedira Besbes, Haddad, Ben Meriem et al., 2010). Le scorbut peut aussi toucher les enfants atteints de malnutrition grave. ALERTE CLINIQUE

L’hypomagnésémie est surtout causée par les diarrhées et les vomissements, ou encore par un jeûne prolongé. Elle se manifeste, entre autres, par de la confusion, des tremblements ou des convulsions. L’hypermagnésémie est principalement dûe à une insufsance rénale et elle se manifeste par de la léthargie, des nausées et des vomissements.

246

Partie 3

Excès vitaminiques Il est généralement reconnu qu’une dose de vitamine est excessive lorsqu’elle équivaut à 6 à 10 fois l’apport nutritionnel recommandé (ANR) pour les vitamines liposolubles, et à plus de 10 fois l’ANR pour les vitamines hydrosolubles. Toutefois, les vitamines liposolubles, surtout les vitamines A et D, tendent à provoquer des réactions toxiques à des doses moindres. L’hypervitaminose A et D pose le problème le plus grave, puisque ces vitamines liposolubles s’accumulent dans l’organisme. Un apport excessif en vitamine A peut se traduire par une peau sèche et rugueuse qui, par la suite, se desquame et se

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

ssure, et par de l’anorexie, des vomissements et le bombement de la fontanelle (Hayman et Dalziel, 2012). De toutes les vitamines, la vitamine D est la plus susceptible de provoquer des réactions toxiques en surdoses relativement faibles. Les vitamines hydrosolubles, principalement la niacine, la vitamine B6 et la vitamine C, peuvent aussi se révéler toxiques.

6.1.2

Déséquilibres minéraux

De nombreux minéraux sont des nutriments essentiels. Ils sont indispensables au bon fonctionnement du corps humain, notamment pour la transmission nerveuse et la fonction cardiaque ENCADRÉ 6.1 . On distingue deux catégories de minéraux : les macrominéraux et les microminéraux. Les macrominéraux, dont il faut un apport quotidien supérieur à 100 mg, incluent le calcium, le phosphore, le magnésium, le sodium, le potassium, le chlorure et le soufre. En ce qui concerne les microminéraux, ou éléments traces, leur apport quotidien recommandé est inférieur à 100 mg ; ils incluent plusieurs minéraux essentiels comme le cuivre et le zinc. Le rôle exact de certains d’entre eux dans la nutrition n’est pas encore connu. La carence en certains minéraux, notamment celle en fer, qui peut entraîner de l’anémie, doit faire l’objet de prévention. Les carences en calcium, en phosphore, en magnésium et en zinc B sont à surveiller. Ainsi, des taux faibles de zinc peuvent occasionner un retard de croissance d’origine nutritionnelle. Le magnésium, quant à lui, joue un rôle prépondérant dans le métabolisme des glucides et des protéines. La régulation de l’équilibre minéral dans l’organisme est un processus complexe. L’inrmière doit en informer les parents. Les aliments riches en magnésium, entre autres, sont souvent consommés en quantité insuffisante ENCADRÉ 6.2 . Inversement, un apport alimentaire excessif en minéraux peut provoquer des interactions entre eux, à l’origine de carences ou d’excès inattendus . Par exemple, pris en trop grande quantité, un minéral comme le zinc peut provoquer la carence d’un autre minéral comme le cuivre, même chez quelqu’un qui prend une quantité sufsante de cuivre. Ainsi, les mégadoses d’un minéral peuvent entraîner la carence accidentelle d’un autre minéral essentiel en bloquant son absorption dans le sang ou dans la paroi intestinale, ou en faisant concurrence aux protéines porteuses requises pour leur métabolisme aux sites de xation. Des carences sont aussi observées lorsque diverses substances alimentaires interagissent avec les minéraux. Par exemple, le fer, le zinc et

ENCADRÉ 6.1

Calcium et fer : deux nutriments essentiels

Fonctions principales du calcium

légumes verts feuillus (sauf épinards), graines de soya, légumineuses, pois

• Développement et maintien des os et des dents (en association avec le phosphore)

Fonctions principales du fer

• Contractions musculaires, surtout du muscle cardiaque

• Fabrication de l’hémoglobine et de la myoglobine

• Coagulation sanguine

• Élément essentiel de plusieurs enzymes et protéines

• Absorption de la vitamine B12

Sources principales de fer

• Activation enzymatique

• Foie, surtout du porc, ensuite du veau, du bœuf et du poulet ; rognons, viande rouge, volaille, crustacés, grains entiers, préparations et céréales pour nourrissons enrichies de fer, céréales et pains enrichis, légumineuses, noix, graines, légumes verts feuillus, fruits secs, pommes de terre avec pelure, mélasse verte, tofu, jus de pruneau

• Conduction nerveuse • Intégrité de la cohésion intracellulaire et membranaire Sources principales de calcium • Produits laitiers, boissons végétales enrichies, jaune d’œuf, sardines, saumon en conserve avec arêtes,

6

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 6.2

Apport adéquat en magnésium

L’inrmière doit fournir aux parents plusieurs recommandations pour assurer un apport adéquat en magnésium chez le nourrisson . • Les besoins en magnésium varient avec l’âge. Ils se situent entre 30 et 75 mg par jour entre 0 et 1 an. • Tout en garantissant un équilibre par rapport au sodium, au potassium et au calcium, l’enfant doit consommer

chaque jour des aliments contenant du magnésium. Les meilleures sources sont les légumineuses, les grains entiers, le poisson, certains légumes verts feuillus (épinards, bette à carde), les noix et les graines. • L’enfant de moins de un an peut manger une très petite portion de ces aliments et largement combler ses besoins en magnésium.

Annexe 6.1W : Apports nutritionnels de référence.

Sources : Adapté de Santé Canada (2010). Guide du consommateur pour les ANREF (apports nutritionnels de référence). Repéré à www.canada.ca/ fr/sante-canada/services/aliments-nutrition/saine-alimentation/apports-nutritionnels-reference/guide-consommateur-anref-apports-nutritionnelsreference.html ; Les diététistes du Canada (2014b). Repéré à www.dietitians.ca/Downloads/Factsheets/Food-Sources-of-Magnesium-FRE.aspx.

le calcium peuvent former des complexes insolubles avec les phytates ou les oxalates (présents dans certains aliments d’origine végétale), ce qui nuit à leur biodisponibilité. Il faut tenir compte de ce type d’interactions chez les enfants dont la famille adhère au végétarisme, puisque certains végétaux, comme le soya, contiennent beaucoup de phytates. Contrairement à un croyance répandue, les épinards ne constituent pas une excellente source de calcium et de fer en raison de leur forte teneur en oxalates, ce qui nuit à la biodisponibilité de ces deux minéraux. Certaines maladies ou conditions médicales sont exposés à un risque accru de retard de croissance, surtout par carences minérales osseuses résultant de leurs traitements, d’une baisse de leur apport nutritionnel ou d’une absorption moindre des minéraux essentiels. Les enfants susceptibles d’être atteints de telles carences sont ceux qui reçoivent ou qui ont reçu de la radiothérapie et

de la chimiothérapie pour un cancer, ceux qui sont porteurs du virus de l’immunodécience humaine (VIH), ceux qui souffrent d’anémie à hématies falciformes, de brose kystique, de malabsorption gastro-intestinale ou de néphrose, ainsi que les nourrissons prématurés de poids très faible ou extrêmement faible à la naissance FIGURE 6.1.

6.1.3

Malnutrition pédiatrique

La malnutrition pédiatrique peut être définie comme un déséquilibre entre les apports nutritionnels et les besoins de l’organisme, ce qui peut

FIGURE 6.1 Les enfants qui ont reçu de la chimiothérapie pour un cancer sont susceptibles d’accuser un retard de croissance.

Chapitre 6

Problèmes de santé du nourrisson

247

CE QU’IL FAUT RETENIR

Une des principales mani­ festations cliniques de mal­ nutrition chronique chez l’enfant est une diminution importante de la taille par rapport à son groupe d’âge.

éactivation des connaissances Une alimentation variée et adéquate assure à l’orga­ nisme une concentration sufsante en nutriments, en vitamines et en miné­ raux nécessaires à son bon fonctionnement. Toutefois, certains aliments, comme le jus de pamplemousse, sont à éviter lorsque l’on suit un traitement pharmacolo­ gique. Expliquez pourquoi.

mener à des décits en énergie, en protéines et en nutriments, augmentant chez l’enfant le risque de retard de croissance, de retard du développement ou d’autres conditions délétères (Mehta, Corkins, Lyman et al., 2013). Parmi les formes les plus graves de malnutrition gurent le marasme infantile, le kwashiorkor et une combinaison marasme-kwashiorkor. Ces formes de malnutrition sont plutôt rares dans les pays industrialisés. Toutefois, plusieurs conditions peuvent mener à une malnutrition légère, modérée ou grave chez les enfants des pays industrialisés. Le rôle de l’infirmière est primordial dans le dépistage des risques ou des signes de malnutrition chez les enfants. Dépister rapidement les enfants à risque de malnutrition permet d’offrir un traitement nutritionnel préventif adapté. Chez les enfants souffrant déjà de malnutrition, un dépistage rapide par l’inrmière permet d’aborder les causes de cet état et, ainsi, de limiter, voire de cesser sa progression (Becker, Nieman Carney, Corkins et al., 2014). Une vaste étude a révélé l’importance de mieux dénir la malnutrition pédiatrique et de proposer des paramètres uniformes an d’en assurer un meilleur dépistage dans les milieux cliniques. Il y est démontré que l’absence d’une dénition claire a mené à un dépistage moins efcace de la malnutrition pédiatrique, entraînant des conséquences importantes sur plusieurs sphères du développement des enfants (Mehta et al., 2013). Les résultats de cette étude fournissent des éléments clés permettant de bien diagnostiquer la malnutrition pédiatrique pour les enfants âgés de 1 mois à 18 ans selon l’étiologie, la chronicité, la gravité et le mécanisme sous-jacent an de mieux en comprendre les répercussions possibles sur le développement des enfants.

Malnutrition liée à une condition clinique La malnutrition pédiatrique dans les pays industrialisés est majoritairement liée à une ou plusieurs conditions cliniques (Becker et al., 2014 ; Grover et Ee, 2009). Elle peut être classée en deux catégories : • La malnutrition liée à une condition aiguë, c’està-dire un événement durant trois mois ou moins (p. ex., un trauma important, de grandes brûlures ou une infection majeure). En présence de malnutrition aiguë, on remarque souvent une perte pondérale menant à une baisse du rapport poids/taille. • La malnutrition liée à une condition chronique, donc s’étendant sur plus de trois mois. On peut penser à la brose kystique, aux maladies cardiaques, aux maladies gastro-intestinales, aux maladies neuromusculaires, au cancer ou aux maladies rénales chroniques. En présence de malnutrition chronique, on voit souvent une

248

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

baisse du rapport taille/âge. Pour les enfants de deux ans et moins, un retard de croissance lié à la taille reète un pauvre statut nutritionnel sur une période prolongée. Dans les deux cas, la malnutrition peut résulter de l’un ou de plusieurs de ces quatre mécanismes : 1. La baisse, volontaire ou non, d’apports nutritionnels ; 2. L’incapacité à assimiler ou à utiliser les nutriments adéquatement (p. ex., un état de malabsorption, un syndrome de l’intestin court) ; 3. Les pertes nutritionnelles excessives (par des diarrhées ou des vomissements importants, en raison d’une protéinurie) ; 4. Un état hypermétabolique menant à une demande énergétique accrue (p. ex., les grands brûlés). Dans ces quatre situations, la demande de l’organisme en nutriments devient supérieure aux apports, ce qui entraîne un déséquilibre nutritionnel pouvant mener à la malnutrition. Enn, dans tous les cas de malnutrition liée à une condition clinique (aiguë ou chronique), un état inammatoire peut s’ajouter. La présence et la gravité de l’inammation inuencent l’état de malnutrition. Son rôle précis dans la malnutrition pédiatrique reste encore à préciser, mais on sait que la présence et la gravité de l’état inammatoire peuvent accentuer le mécanisme induisant la malnutrition, altérer l’utilisation des différents nutriments, augmenter davantage la demande en nutriments ou accentuer l’état catabolique. Il est donc important d’effectuer le dépistage de l’inammation grâce à la protéine C réactive ou aux cytokines an de conrmer sa présence. L’inrmière est la personne désignée pour dépister les conditions pouvant mettre l’enfant à risque de malnutrition légère, modérée ou grave. La consultation d’une nutritionniste est habituellement nécessaire an d’établir un plan de traitement nutritionnel adapté à l’état de santé de l’enfant et ainsi prévenir les conséquences de la malnutrition sur son développement.

Malnutrition non liée à une condition clinique La malnutrition peut également survenir chez les enfants qui n’ont aucune pathologie ou condition clinique particulière, mais qui sont exposés à des facteurs comportementaux ou environnementaux pouvent mener à des apports alimentaires inadéquats en qualité ou en quantité. Dans les milieux défavorisés ou peu scolarisés, le manque de connaissances sur l’alimentation et de ressources nancières, l’accès difcile à la nourriture ou la négligence parentale peuvent être la cause d’un état de malnutrition léger, modéré ou grave. Les troubles de la déglutition, l’hypersensibilité orale

et les aversions alimentaires peuvent aussi être des facteurs de risque de malnutrition. Même si elle n’est pas liée à une condition clinique, la malnutrition causée par des facteurs environnementaux ou comportementaux peut également être aiguë ou chronique. Une baisse importante du rapport taille/âge est souvent un indicateur de malnutrition chronique causée par des facteurs environnementaux ou socioéconomiques (Hagan, 2009 ; World Health Organization [WHO], 1995). Le rôle de l’inrmière est primordial dans l’enseignement de bonnes habitudes alimentaires et dans la transmission des connaissances de base sur l’alimentation an de prévenir le développement de carences nutritionnelles chez les enfants. Diriger les parents et l’enfant vers une nutritionniste peut également être pertinent selon la problématique rencontrée.

Gravité de la malnutrition Le groupe de travail de l’American Society for Parenteral and Enteral Nutrition, tout comme l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), propose d’utiliser le score Z en plus des paramètres anthropométriques habituels pour déterminer la gravité de la malnutrition ENCADRÉ 6.3. • Malnutrition légère ou risque de malnutrition : score Z entre −1 et −1,9 sous la déviation standard de la courbe de croissance de l’OMS A . Ce type de malnutrition survient souvent dans une situation de courte durée (aiguë), qu’il soit lié à une condition clinique aiguë ou à des facteurs environnementaux ou comportementaux. • Malnutrition modérée : score Z entre −2 et −2,9 sous la déviation standard de la courbe de croissance de l’OMS. Il peut s’agir d’un faible poids pour la taille, d’une taille insufsante pour l’âge ou d’une combinaison des deux (OMS, 2018). • Malnutrition grave : score Z inférieur à −3 sous la déviation standard de la courbe de croissance de l’OMS. Ce score correspond à un très faible rapport taille/âge ou poids/taille.

Malnutrition grave La malnutrition grave représente encore aujourd’hui un problème de santé majeur dans le monde, particulièrement chez les enfants de moins de cinq ans. Dans de nombreux pays en voie de développement, la diarrhée (due à la gastroentérite) et les infections chez des enfants souffrant de malnutrition contribuent à une hausse du taux de mortalité infantile (Grover et Ee, 2009). Hormis le manque d’accès à la nourriture, plusieurs facteurs peuvent contribuer à la malnutrition pédiatrique grave dans ces pays, notamment l’alimentation au biberon (dans des conditions

sanitaires médiocres), des connaissances insufsantes en puériculture, l’analphabétisme des parents, les facteurs économiques et politiques, le climat ainsi que les coutumes alimentaires liées à la culture et à la religion. La pauvreté est toutefois la cause principale de malnutrition en raison des conditions de vie inadéquates et de la difculté d’accès à une alimentation de qualité (Imdad, Sadiq et Bhutta, 2011). Les formes de malnutrition grave les plus extrêmes sont le kwashiorkor et le marasme infantile.

Kwashiorkor Autrefois, le kwashiorkor était principalement déni comme une carence protéinique malgré un apport calorique adéquat. Par exemple, un régime composé principalement de grains d’amidon ou de tubercules procure sufsamment de calories sous forme de glucides, mais trop peu de protéines de bonne qualité. Certains signes appuieraient toutefois une étiologie multifactorielle comprenant des facteurs culturels, psychologiques et infectieux interreliés et susceptibles d’exposer l’enfant à un risque de souffrir de kwashiorkor. Des cas de kwashiorkor ont été signalés aux États-Unis chez des enfants nourris exclusivement de boisson de riz (Ashworth, 2016). En raison de sa faible teneur en protéines et en acides gras, la boisson de riz, tout comme les autres boissons végétales, n’est pas un aliment qui convient aux enfants de 24 mois et moins sans un plan de traitement nutritionnel adapté par une nutritionniste. Dans certains cas, des enfants ont développé le kwashiorkor après avoir suivi un régime extrêmement restreint en raison de réactions allergiques présumées ou réelles à certains aliments (Tierney, Sage et Shwayder, 2010). Des cas de kwashiorkor ont aussi été signalés aux États-Unis chez des nourrissons à qui étaient administrés des aliments inappropriés pour diverses raisons : ignorance des principes de nutrition de la part des parents ou des tuteurs, intolérance à la préparation à base de lait de vache ou au lait de vache (Tierney et al., 2010). ENCADRÉ 6.3

6

A Les valeurs normales en fonction de l’âge de l’enfant sont présentées dans l’annexe A, Normes de croissance de l’OMS pour le Canada.

Méthode de calcul du score Z

Le système de score Z exprime la valeur anthropométrique sous la forme d’un nombre d’écarts-types ou de scores Z inférieurs ou supérieurs à la moyenne ou à la valeur médiane de référence. Un intervalle xe de score Z implique une différence de taille ou de poids xe pour les enfants d’un âge donné. Pour les utilisations basées sur la population, un avantage majeur est qu’un groupe de scores Z peut être soumis à des statistiques récapitulatives telles que la moyenne et l’écart-type. La formule pour calculer le score Z est la suivante : Score Z =

(Valeur observée − Valeur médiane de la population de référence) Valeur d’écart-type de la population de référence

Source : Adapté de World Health Organization (WHO) (1997). WHO global database on child growth and malnutrition. Repéré à http://apps.who.int/iris/bitstream/10665/63750/1/WHO_NUT_97.4.pdf.

Chapitre 6

Problèmes de santé du nourrisson

249

Au Canada, l’inrmière doit être attentive à ces mêmes risques d’une alimentation inadéquate du nourrisson.

Manifestations cliniques L’enfant atteint de kwashiorkor a des membres frêles et amaigris, et un abdomen proéminent en raison de l’œdème. L’œdème masque souvent une grave atrophie musculaire qui fait paraître l’enfant moins amaigri qu’il ne l’est en réalité. La peau desquame et s’affaisse en plus de comporter des zones de dépigmentation FIGURE 6.2. Le kwashiorkor peut s’accompagner d’une perte de cheveux et de plusieurs types de dermatoses causées FIGURE 6.2 Nourrisson atteint en partie par des carences vitamide kwashiorkor niques. Une cécité irréversible découle souvent d’un déficit important en vitamine A. Les carences en Un père ghanéen se présente à la clinique de minéraux, notamment en fer, médecine familiale avec sa lle de un an. Il a en calcium et en zinc, sont immigré au Québec il y a quelques semaines fréquentes. La diarrhée (synavec sa femme et ses quatre enfants. La llette drome de malnutrition par est atteinte de kwashiorkor. Elle présente de diarrhée persistante) survient la desquamation et un abdomen proéminent. souvent en raison d’une Quelle fonction sensorielle devriez­vous évaluer résistance amoindrie à l’inen priorité au cours de l’examen clinique ? Justi­ fection et vient accentuer ez votre réponse. davantage les déséquilibres Pourquoi devriez­vous demander au père si son électrolytiques. enfant souffre de diarrhée persistante ?

Jugement

clinique

Marasme infantile

Cachexie : Dégradation extrême de l’état général, accompagnée d’un amai­ grissement souvent lié à une dénutrition. 17 Les principales causes de la diarrhée et les soins inrmiers à prodiguer à l’enfant sont présentés dans le chapitre 17, Troubles liés au système gastro-intestinal.

250

Partie 3

Le marasme infantile découle d’une malnutrition généralisée, tant calorique que protéinique. Il désigne habituellement un syndrome de carences physiques et affectives, et ne se limite pas aux régions où sévit une famine. Il est parfois observé chez les enfants qui connaissent un retard de croissance dont la cause principale n’est pas uniquement nutritionnelle, mais également de nature émotionnelle. Le marasme infantile peut survenir chez des nourrissons d’à peine trois mois si l’allaitement n’est pas possible et qu’il n’existe aucune solution de rechange acceptable. Il se caractérise par une cachexie progressive et une atrophie des tissus de l’organisme, surtout des graisses sous-cutanées. L’enfant paraît très vieux, et sa peau est relâchée et plissée. Les manifestations cliniques du marasme infantile ressemblent à celles du kwashiorkor à l’exception de ce qui suit : dans le marasme infantile, il n’y a pas d’œdème dû à l’hypoalbuminémie ou à la rétention sodique, ce qui contribue à un aspect gravement émacié ; on ne note pas de dermatoses causées par des carences vitaminiques ; la dépigmentation des cheveux ou de la peau est minime.

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

L’enfant est maussade, apathique et replié sur luimême, et sa léthargie évolue souvent jusqu’à la prostration. Dans le kwashiorkor marastique, une forme de malnutrition qui s’accompagne de signes de kwashiorkor et de marasme infantile, l’enfant présente de l’œdème, une cachexie et un retard de croissance. Il souffre d’un apport nutritionnel inadéquat et, souvent, de surinfection. Des déséquilibres hydroélectrolytiques, l’hypothermie et l’hypoglycémie se conjuguent pour assombrir encore le diagnostic.

Conséquences de la malnutrition Peu importe son origine, la malnutrition peut avoir plusieurs conséquences immédiates ou à long terme sur l’enfant. Parmi celles-ci, on peut noter la faiblesse musculaire, la perte de masse maigre, une décience des défenses immunitaires, et donc une plus grande susceptibilité aux infections. On peut aussi observer des retards de développement sur le plan tant moteur que cognitif, comme cela est expliqué dans la section 6.2.2 de ce chapitre. Chez les enfants hospitalisés, la malnutrition retarde la cicatrisation des plaies et entraîne souvent une prolongation de la durée de leur séjour. Enn, il est important de mentionner que les enfants souffrant de malnutrition présentent souvent un sous-poids ou un retard de croissance, mais les nourrissons avec un poids très élevé peuvent également souffrir de malnutrition. An d’effectuer un bon dépistage des enfants à risque de malnutrition, l’inrmière doit donc évaluer les paramètres anthropométriques (taille, poids, circonférence crânienne) et les courbes de croissance, mais aussi les habitudes alimentaires de la famille et les signes cliniques de dénutrition chez l’enfant (peau, muqueuses, cheveux et ongles).

Approche thérapeutique Le traitement de la malnutrition grave inclut une alimentation composée de protéines de qualité, de glucides, de lipides, de vitamines et de minéraux. Lorsque la malnutrition grave survient en raison d’une diarrhée persistante, trois objectifs thérapeutiques prédominent : 1. La réhydratation au moyen d’une solution de réhydratation orale (SRO) afin de combler également les besoins en électrolytes ; 2. L’administration d’antibiotiques pour prévenir les infections intercurrentes ; 3. L’alimentation adéquate (lait maternel ou autre source appropriée si l’enfant est sevré) 17 . Dans les pays en voie de développement, des protocoles locaux sont appliqués pour s’attaquer à la malnutrition grave. Les experts proposent un protocole thérapeutique en trois phases :

1. Phase aiguë ou initiale (de 2 à 10 jours) reposant sur l’instauration d’un traitement de réhydratation orale (avec antidiarrhéiques et antiparasitaires intestinaux), sur la prévention de l’hypoglycémie et de l’hypothermie, suivie d’une prise en charge diététique ; 2. Phase de rétablissement ou de réadaptation (de deux à six semaines) axée sur l’augmentation de l’apport alimentaire et le gain pondéral ;

3. Phase de suivi axée sur les soins ambulatoires après le congé an de prévenir les rechutes, de promouvoir le gain pondéral, de stimuler le développement et d’évaluer les décits cognitifs et moteurs. Durant la phase aiguë, il faut veiller à prévenir la surcharge liquidienne. Une observation étroite de l’enfant est exercée pour déceler le moindre signe d’intolérance aux aliments ou aux liquides .

ALERTE CLINIQUE

L’enfant dénutri qui est réalimenté trop vite peut suc­ comber à une insufsance cardiaque ; l’inrmière doit sur­ veiller le risque de syndrome de réalimentation.

Soins inrmiers MALNUTRITION PÉDIATRIQUE

Puisque la malnutrition peut se manifester tôt dans l’enfance, surtout entre six mois et deux ans, et qu’elle est associée au sevrage précoce, à une alimentation de faible qualité nutritionnelle, à un retard de l’introduction des aliments complémentaires et à des infections fréquentes (Grover et Ee, 2009), les soins inrmiers doivent viser la prévention par un bon enseignement aux parents au sujet des besoins nutritionnels pendant cette période cruciale. L’allaitement maternel exclusif est considéré comme le meilleur mode alimentaire pendant les six premiers mois de vie. Grâce à l’immunité naturelle qu’il confère, non seulement le lait maternel permet-il de nourrir le nourrisson, mais il contribue aussi à prévenir les infections qui accompagnent la malnutrition. Des aliments solides sont présentés à l’enfant entre le quatrième et le sixième mois, ainsi que des céréales enrichies de fer pendant au moins 18 mois. Il est recommandé que la mère qui allaite consomme des suppléments de vitamine B12 si celle-ci n’est pas sufsamment présente dans son alimentation (Les diététistes du Canada, 2014a). L’inrmière doit se référer aux directives canadiennes ofcielles pour indiquer aux parents comment prévenir tout déséquilibre nutritionnel du nourrisson. Santé Canada (2010, 2013) propose des lignes directrices sur l’apport nutritionnel qui englobent les apports nutritionnels recommandés (ANR), mais élargit leur portée de sorte qu’elles incluent d’autres paramètres

6.1.4

Allergies et intolérances alimentaires

Les allergies et les intolérances alimentaires sont des termes génériques qui englobent tous les types de réactions indésirables à des aliments ou à des additifs alimentaires. Il est nécessaire de distinguer certains termes :

6

nutritionnels. Les apports nutritionnels de référence (ANREF) comportent quatre catégories : 1) les besoins moyens estimatifs en fonction de l’âge et du sexe ; 2) la limite supérieure tolérable des apports nutritionnels associés à un risque faible d’effets indésirables ; 3) les apports adéquats en nutriments ; 4) les nouvelles normes en matière d’ANR. Les ANREF chez les enfants, particulièrement les nourrissons de 0 à 6 mois, se fondent sur l’apport nutritionnel requis chez les nourrissons nés à terme, en bonne santé et allaités. Il est indispensable de répondre aux besoins physiologiques essentiels du nourrisson, c’està-dire procurer un apport nutritionnel approprié, une protection contre les infections, une hydratation adéquate ainsi que des soins de la peau, et favoriser le rétablissement de l’intégrité physiologique. Les soins inrmiers comprennent en outre un enseignement sur les vaccinations infantiles et leur rôle dans la prévention des maladies, sur la promotion de la nutrition maternelle et du bienêtre des mères allaitantes, sur une alimentation adéquate après le sevrage, en plus de la sensibilisation et de la participation aux visites de suivi pour les nourrissons et les trottineurs. Ces interventions vont de pair avec les soins qui s’imposent chez tout enfant manifestant un retard de croissance : elles visent à rassurer les parents et à accompagner le développement normal de l’enfant.

• L’allergie alimentaire chez le nourrisson est une réaction de nature immunologique ou non, habituellement modulée par l’immunoglobuline E (IgE) ; elle est parfois immédiate, parfois retardée ; elle peut être bénigne ou grave, comme la réaction anaphylactique 16 . Plusieurs allergies alimentaires ont des manifestations cliniques, des réactions et des pronostics similaires.

Chapitre 6

16 La réaction anaphylactique est traitée plus en détail dans le chapitre 16, Trou­ bles liés au système cardio­ vasculaire.

Problèmes de santé du nourrisson

251

PHARMACOVIGILANCE

On recommande d’administrer de l’épinéphrine par voie intramusculaire à un enfant qui présente une réaction anaphylactique grave ou potentiellement fatale, ou qui présente des manifestations cliniques importantes : picotements, serrement à la gorge, enrouement, toux qui ressemble à un aboiement, déglutition difcile, sibilances, cyanose, arrêt respiratoire, légère arythmie, hypotension, bradycardie importante, hypotension, arrêt cardiaque, évanouissement, etc. (Simons, Ardusso, Bilò et al., 2011). Atopie : Tendance héréditaire à présenter des réactions d’hypersensibilité immédiate (p. ex., asthme allergique ou rhume des foins), ou d’autres réactions allergiques à des allergènes. Anaphylaxie : Réaction allergique grave accompagnée de difcultés respiratoires et circulatoires qui mettent en danger la vie d’une personne.

ENCADRÉ 6.4

• L’intolérance alimentaire est une réaction qui fait appel à des mécanismes non immunologiques, connus ou inconnus. L’intolérance au lactose est l’exemple d’une réaction qui ressemble à une allergie, mais qui repose plutôt sur un décit en une enzyme appelée lactase. • La sensibilité alimentaire inclut les allergies et les intolérances alimentaires ainsi que les sensibilités chimiques (p. ex., une sensibilité à la caféine ou au glutamate monosodique). Santé Canada la dénit comme étant « une réaction indésirable à un aliment que d’autres personnes peuvent consommer sans danger » (Santé Canada, 2015). L’allergie alimentaire résulte d’une exposition à des allergènes, habituellement à des protéines (mais non aux acides aminés de plus petite taille) capables d’induire ou non la formation d’anticorps d’IgE (sensibilisation) après leur ingestion. La sensibilisation fait référence à l’exposition initiale d’une personne à un allergène, entraînant une réaction immunitaire. Toute exposition subséquente induit une réaction de plus en plus forte. Par conséquent, l’allergie alimentaire survient généralement après que la personne a consommé plus d’une fois l’aliment en question ENCADRÉ 6.4 (Boyce, Assa’ad, Burks et al., 2010). Les allergies peuvent être classées en deux catégories : • L’allergie IgE médiée, qui implique le système immunitaire. La majorité des allergies alimentaires font partie de cette catégorie. On en fait le diagnostic grâce à un test sanguin (dosage des

Aliments et sources allergéniques

IgE sériques spéciques, ou test RAST, de l’anglais radioallergosorbent test), conrmé par un test cutané. • L’allergie non IgE médiée, qui n’implique pas la production d’IgE. On l’appelle aussi allergie de type IV ou syndrome d’entérocolite induit par les protéines alimentaires (en anglais, FPIES). On en fait le diagnostic lorsque les manifestations cliniques disparaissent une fois l’allergène retiré de l’alimentation (Allergies Québec, 2014). Une composante génétique est généralement attribuée aux allergies : les enfants dont les deux parents souffrent d’allergies risquent, dans une proportion de 50 à 60 %, de souffrir d’une allergie IgE médiée (Allergies Québec, 2014). Toutefois, les nourrissons dont au moins un parent du premier degré (père, mère, fratrie) souffre d’atopie sont susceptibles d’être atteints à leur tour d’atopie, que ce soit en raison d’une allergie alimentaire ou non (Fleischer, Spergel, Assa’ad et al., 2013). On reconnaît l’atopie chez les nouveau-nés s’ils présentent des taux élevés d’IgE dans le sang du cordon ombilical et dans le sérum postnatal. La sécheresse et la desquamation de la peau sont également des signes d’atopie.

Manifestations cliniques Les manifestations cliniques de l’allergie alimentaire peuvent se subdiviser comme suit (American Academy of Pediatrics [AAP], 2014 ; SCP, 2013) : • Systémiques : réactions anaphylactiques, retard de croissance ; • Gastro-intestinales : douleurs abdominales, vomissements, crampes, diarrhée, difculté à avaler ; • Respiratoires : toux, sibilance, rhinite, inltrats, essoufement ; • Cutanées : urticaire, érythème, dermatite atopique, œdème du visage ou de la langue ;

DIX ALLERGÈNES PRIORITAIRES CHEZ LES ENFANTS

AUTRES ALLERGÈNES FRÉQUENTS

• Noix

• Sarrasin

• Œufs

• Porc, poulet

• Blé

• Fraises, melon, ananas

• Poisson, mollusques et crustacés

• Maïs

• Soya

• Agrumes

• Comportementales : agitation, irritabilité, apathie, absence de réponse.

• Arachides

• Tomates

Réactions allergiques

• Protéine de lait de vache (lait et produits laitiers)

• Assaisonnements, épices

Le syndrome d’allergie orale est observé après l’ingestion d’un allergène alimentaire (souvent des fruits et des légumes). Il est suivi d’un œdème et d’un prurit affectant les lèvres, la langue, le palais et la gorge. Le rétablissement est généralement rapide. L’hypersensibilité gastro-intestinale immédiate est une réaction à un allergène alimentaire modulée par l’IgE, et les réactions incluent une partie ou la totalité des signes cliniques suivants : nausées, douleurs abdominales, crampes, diarrhée, vomissements et anaphylaxie. Parmi les

• Moutardea • Sésamea

• Protéine bovine

• Légumineuses • Chocolat

• Sultesa a

Ces trois aliments font partie de la liste des dix allergènes prioritaires chez les enfants établie par Santé Canada, mais sont peu fréquents chez les nourrissons. Source : Adapté de Santé Canada (2017). Allergènes alimentaires les plus courants. Repéré à www.canada.ca/ fr/sante-canada/services/aliments-nutrition/salubrite-aliments/allergies-alimentaires-intolerances-alimentaires/ allergies-alimentaires.html.

252

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

• Oculaires : démangeaisons, œdème des yeux, écoulement des yeux ; • Cardiovasculaires : pâleur, étourdissements, évanouissement ;

Réactions allergiques mortelles Le décès d’enfants ayant manifesté une réaction anaphylactique à des aliments peut survenir. Les réactions surviennent souvent peu de temps après l’ingestion (de 5 à 30 minutes). La plupart des réactions mortelles ne commencent pas par des signes cutanés, comme l’urticaire, l’érythème et les bouffées vasomotrices, mais prennent plutôt la forme d’une crise d’asthme aiguë (sibilances, gêne respiratoire, dyspnée). Il faut surveiller étroitement les enfants qui souffrent d’anaphylaxie alimentaire en raison des cas de réponse biphasique rapportés, soit une réaction immédiate, suivie d’un rétablissement apparent, puis d’une résurgence aiguë des manifestations cliniques (Simons, 2009).

Désensibilisation Pour des raisons encore inconnues, de nombreux enfants nissent par se désensibiliser, et leurs allergies alimentaires cessent (Nowak-Wegrzyn, Sampson et Sicherer, 2016). L’allergie au lait, au blé et aux œufs peut disparaître avec l’âge, mais l’allergie aux arachides peut persister. Parfois, les enfants allergiques à plus d’un aliment manifestent ensuite, à différents moments, une tolérance à chacun. En raison de cette tendance à se désensibiliser à l’allergie, les aliments allergènes peuvent être réintroduits dans l’alimentation sous supervision médicale an de vérier s’il est possible d’administrer l’aliment sans danger. Même dans le cas des allergies graves, comme l’allergie aux arachides, les enfants peuvent se désensibiliser. Certains centres hospitaliers permettent la désensibilisation à certains aliments allergènes via l’immunothérapie orale. Sous supervision médicale, l’enfant ingère des doses minimes de l’allergène jusqu’à atteindre une portion normale. Dans certains cas, les aliments allergènes peuvent être réintroduits dans l’alimentation de l’enfant de façon permanente.

Allergie au lait de vache L’allergie au lait de vache (ALV) comporte plusieurs facettes qui correspondent à des réactions indésirables systémiques et à des réactions gastro-intestinales locales aux protéines de lait de vache. Environ 2,5 % des nourrissons sont atteints d’hypersensibilité au lait de vache, dont 60 % auront une allergie IgE médiée. Certaines études suggèrent que l’ALV peut persister chez certains enfants jusqu’à l’âge de 16 ans (AAP, 2014). Le lait entier peut être graduellement introduit dès l’âge de neuf mois si l’enfant consomme des aliments

complémentaires riches en fer en quantité sufsante et si son alimentation est variée (protéines végétales et animales, légumes et fruits, céréales enrichies) (Naître et grandir, 2015). L’ALV se manifeste parfois au cours des 4 premiers mois de vie par diverses manifestations cliniques qui surgissent dans les 45 minutes suivant l’ingestion du lait ou après plusieurs jours ENCADRÉ 6.5.

Diagnostic

clinique

Le diagnostic d’ALV se fonde initialement sur l’anamnèse, La mère de Davina est arrivée au service des bien que cette dernière ne urgences en panique quand elle a constaté que les puisse à elle seule le conrlèvres et la langue de sa lle se sont mises à ener mer. Divers examens paracliaprès avoir mangé des fraises et des ananas à la niques peuvent être effectués, collation. La mère a aussi remarqué des plaques dont le test au gaïac, qui vérirouges sur le thorax de sa lle. Quel signe clinique e la présence de sang, d’éodevriez-vous chercher à déceler prioritairement an sinophiles et de leucocytes de vous assurer qu’il ne s’agit pas d’une réaction dans les selles (la colite peut anaphylactique ? occasionner des saignements parfois manifestes, parfois occultes), la mesure des taux sériques d’IgE, des tests d’intradermoréaction et de scarication, et le test RAST qui mesure les anticorps IgE dirigés contre des allergènes spéciques dans le sérum par une technique de radio-immunodosage. Les tests cutanés et immunologiques permettent de reconnaître l’aliment en cause, mais les résultats ne sont pas toujours concluants. Aucun test ne permet de diagnostiquer l’allergie au lait de vache de façon certaine (AAP, 2014).

Jugement

autres allergies alimentaires observées chez les jeunes enfants gurent aussi la gastrite allergique à éosinophiles, la gastroentérocolite allergique à éosinophiles, l’entérocolite induite par des protéines alimentaires et la proctite induite par les protéines alimentaires.

La stratégie diagnostique la plus probante consiste à éliminer le lait et les produits laitiers de l’alimentation, et à les réintroduire à l’essai après l’amélioration des manifestations cliniques. Le diagnostic clinique sera conrmé si les manifestations cliniques s’estompent après l’élimination de la

ENCADRÉ 6.5

Manifestations cliniques courantes de l’allergie au lait de vache

MANIFESTATIONS GASTRO-INTESTINALES

MANIFESTATIONS CUTANÉES

• Diarrhée

• Eczéma

• Vomissements en jet

• Dermatite atopique

• Coliques

AUTRES MANIFESTATIONS

• Reux gastro-œsophagien

• Anaphylaxie

• Selles glaireuses, molles, striées de sang

• Pleurs excessifs

MANIFESTATIONS RESPIRATOIRES

• Pâleur (secondaire à l’anémie en raison des pertes sanguines dans le tractus gastro-intestinal)

• Rhinite • Bronchite • Asthme ou aggravation de l’asthme • Éternuements

• Irritabilité • Inconfort

• Toux • Écoulement nasal chronique

Chapitre 6

Problèmes de santé du nourrisson

253

6

CE QU’IL FAUT RETENIR

L’élimination de l’alimen­ tation des produits conte­ nant des protéines de lait de vache permet non seulement de conrmer le diagnostic d’allergie au lait de vache, mais est également le traitement de ce problème de santé.

protéine de lait de vache de l’alimentation et si deux ou trois tests de provocation engendrent de nouveau les manifestations cliniques (Kattan, Cocco, Järvinen et al., 2011). Les tests de provocation supposent la réintroduction de petites quantités de lait dans l’alimentation an d’observer la résurgence des manifestations cliniques. Ces tests, dont le déroulement s’étale sur plusieurs heures, sont réalisés en milieu hospitalier par un médecin spécialiste de la procédure et en présence de professionnels formés pour la réanimation.

Approche thérapeutique

Les parents de nourrissons souffrant d’allergies alimen­ taires pourront se renseigner auprès d’Allergies Québec (http://allergies­alimentaires. org/fr) ou consulter le document Les allergies alimentaires et les intolérances alimentaires, sur le site de Santé Canada (www. canada.ca/fr/sante­canada. html).

Le traitement de l’ALV consiste à éliminer de l’alimentation les préparations à base de lait de vache et tout autre produit laitier. Chez les nourrissons à qui des préparations à base de lait de vache sont administrées, cela suppose de les faire passer à une préparation d’hydrolysat de caséine de lait ou à une préparation fortement hydrolysée (PregestimilMD, NutramigenMD ou AlimentumMD), dont les protéines ont été décomposées en leurs acides aminés par hydrolyse enzymatique. Au Canada, les recommandations visant le traitement de l’ALV s’inspirent à la fois des lignes directrices de l’European Society for Paediatric Gastroenterology, Hepatology and Nutrition et de l’American Academy of Pediatrics. Même si cette dernière recommande l’utilisation de

préparations hydrolysées dans les cas d’ALV (AAP, 2014), de nombreux médecins leur préférent des préparations de soya. Environ 50 % des nourrissons allergiques aux protéines de lait de vache manifesteront aussi une allergie au soya. Parmi les autres choix offerts aux enfants qui ne tolèrent pas les préparations fortement hydrolysées, il y a les préparations à base d’acides aminés NeocateMD ou PurAminoMD. On ne peut se tourner vers le lait de chèvre en raison de la réaction croisée avec les protéines de lait de vache, de sa faible teneur en acide folique, de sa haute teneur en sodium et en protéines, et de ses piètres propriétés caloriques. Des cas de réaction anaphylactique ont aussi été rapportés chez des nourrissons nourris avec une préparation à base de lait de chèvre qui étaient allergiques au lait de vache (Ehlayel, Bener, Hazeima et al., 2011). Les nourrissons sont maintenus sous un régime sans lait pendant 12 mois, après quoi le lait est réintroduit en petites quantités. Par ailleurs, il arrive que des enfants qui ont une ALV puissent tolérer un lait de vache chauffé à haute température (Dupont, 2014). Une étude rapporte que les enfants atteints d’ALV sont devenus tolérants aux produits laitiers non cuits au l du temps après avoir consommé des produits laitiers cuits (Kim, Nowak-Wegrzyn, Sicherer et al., 2011).

Soins inrmiers ALLERGIE AU LAIT DE VACHE

L’inrmière doit signaler les symptômes aigus au médecin pour une évaluation plus approfondie.

Les inrmières jouent un rôle important dans la reconnaissance d’une ALV potentielle, dans l’enseignement approprié aux parents au sujet de ses manifestations cliniques et dans le choix des préparations substituts appropriées pour les nourrissons atteints de cette allergie. Il arrive souvent que les parents interprètent les troubles gastro-intestinaux (p. ex., les expectorations, les selles molles et l’irritabilité) de leur enfant comme des signes d’ALV et décident de les nourrir avec des préparations substituts sans avoir préalablement reçu ce diagnostic.

Pour que le nourrisson s’habitue au goût des préparations à base d’hydrolysat de protéines, leur introduction peut se faire graduellement à raison de 30 mL par biberon par jour. Chez un enfant présentant des manifestations cliniques importantes, on peut passer immédiatement à la nouvelle préparation. Les bébés s’habituent en général rapidement au goût de la nouvelle préparation.

Il faut veiller à bien rassurer les parents au sujet des besoins de leur nourrisson incapable de s’exprimer par la parole et présentant une vaste gamme de manifestations cliniques. Les nuits sans sommeil et les pleurs d’un enfant suscitent un sentiment d’inadéquation chez les parents et déclenchent des conits liés à leur rôle, ce qui aggrave la situation. L’inrmière doit réconforter les parents en leur expliquant que bon nombre de ces symptômes sont fréquents et qu’ils s’expliquent rarement, mais qu’ils n’empêchent pas l’enfant de croître et de se développer normalement.

254

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Après l’introduction des aliments solides, il faut conseiller aux parents d’éviter les produits laitiers. L’inrmière doit également leur souligner l’importance de bien lire les étiquettes des produits alimentaires an d’éviter toute exposition aux protéines du lait. De plus, de nombreux produits alimentaires habituellement sans produits laitiers ainsi que des substituts de lait, de crème ou de beurre étiquetés comme sans produits laitiers contiennent en réalité des protéines de lait (Kattan et al., 2011) ; la vigilance est donc de mise. Une consultation avec une nutritionniste est souvent nécessaire an d’établir un plan de traitement nutritionnel sans produits laitiers répondant aux besoins en calcium et en vitamine D de l’enfant.

L’intolérance au lactose, qui consiste en une inca­ pacité du métabolisme à digérer le lactose (une protéine contenue dans le lait), est attribuable à une carence en enzyme lactase 8 . Le décit congénital en lactase survient peu après la nais­ sance, après que le nouveau­né a consommé du lait renfermant du lactose (lait maternel ou prépa­ ration du commerce). Ce rare problème de santé repose sur une absence totale ou une grave insuf­ sance en lactase, et il requiert un régime alimen­ taire sans lactose ou à très faible teneur en lactose durant toute la vie. Les principales manifestations cliniques de l’intolérance au lactose incluent la douleur abdominale, les ballonnements, les atu­ lences et la diarrhée après l’ingestion de lactose.

Diagnostic Chez les nourrissons, une malabsorption du lac­ tose peut être diagnostiquée en mesurant le pH fécal et les substances résiduelles dans les selles ; le pH fécal chez les nourrissons se trouve habi­ tuellement inférieur à celui des enfants plus âgés, mais un pH acide indiquerait une malabsorption (Carter et Attel, 2013).

Approche thérapeutique La plupart des nourrissons peuvent tolérer de 8 petites quantités de lactose, même en présence Les cas d’intolérance au d’une insufsance en lactase, et doivent être encou­ lactose qui touchent les ragés à continuer de consommer des produits lai­ enfants plus âgés sont tiers en petites portions pour en tirer les éléments abordés dans le chapitre 8, nutritifs essentiels. Pour l’enfant allaité exclusive­ Problèmes de santé de ment, la mère peut consommer des produits laitiers l’enfant d’âge scolaire et sans lactose. Chez l’enfant nourri au biberon, il de l’adolescent. convient de remplacer les préparations à base de lait de vache par des préparations sans lactose. Pour le parent voulant offrir des boissons végétales enrichies, non recommandées avant l’âge de deux ans, la consultation d’une nutritionniste est essentielle. Ces boissons ne contiennent Yang, âgé de six ans, souffre d’intolérance au pas suffisamment d’acides lactose. Sa mère, qui vient d’émigrer de Chine, gras, nécessaires au bon déve­ vous informe que son ls a régulièrement des loppement du cerveau, et crampes abdominales après les repas. Quels sont certaines ont un contenu insuf­ les facteurs ayant contribué à l’intolérance au sant en protéines. La nutri­ lactose de Yang ? Yang devrait-il éliminer tionniste saura comment complètement les produits laitiers de son enrichir l’alimentation du alimentation ? Justiez votre réponse. nourrisson an de répondre à ses besoins.

clinique

Jugement

Intolérance au lactose

Soins inrmiers ALLERGIES ET INTOLÉRANCES ALIMENTAIRES

se sont révélés être des sources potentielles d’al­ lergies alimentaires ENCADRÉ 6.6.

Il faut enseigner aux parents, aux professeurs et aux éducatrices en services de garde à reconnaître les manifestations cliniques des allergies alimen­ taires. Les personnes qui souffrent d’allergies ali­ mentaires doivent éviter les aliments inconnus. Les nouvelles directives d’étiquetage exigent une mention claire des dix allergènes prioritaires ainsi que des additifs alimentaires, comme les assaison­ nements et les arômes, sur les étiquettes des ali­ ments vendus dans les commerces et les épiceries. Les ingrédients cachés dans les aliments préparés

Elle doit également les informer de l’impor­ tance de faire porter aux enfants qui souffrent d’allergies alimentaires extrêmement graves une pièce d’identité médicale, comme un bracelet MedicAlertMD, et d’avoir à portée de main une car­ touche d’épinéphrine injectable (au Canada, le seul auto­injecteur offert est EpiPenMD). Elle s’as­ surera aussi que les parents savent comment l’uti­ liser. Il est également important que l’enfant dispose d’une copie écrite de son plan de traite­ ment personnalisé pour accélérer le diagnostic et le traitement.

Pratiques inrmières ENCADRÉ 6.6

Prévention de l’atopie chez les enfants

PRÉCAUTIONS PRÉNATALES

Chez la femme enceinte atopique ou ayant un ou des enfants atopiques, il n’est pas recommandé d’effectuer une diète d’éviction des aliments à potentiel allergène pendant la grossesse, puisque les données probantes ne permettent pas de conclure à un effet préventif sur l’atopie chez l’enfant à naître (Chan et Cummings, 2016). Au contraire, une telle diète pourrait mettre la femme enceinte et son enfant à risque de déciences nutritionnelles. Une

diète variée incluant tous les aliments allergènes est donc à favoriser. Toutefois, la femme enceinte souffrant elle-même d’allergies alimentaires doit poursuivre sa diète d’éviction. PRÉCAUTIONS POSTNATALES

Lors des six premiers mois de vie, l’allaitement maternel exclusif est le mode d’alimentation privilégié pour le nourrisson, compte tenu de son rôle dans la protection immunitaire, et ce, même si son rôle dans la prévention des

Chapitre 6

Problèmes de santé du nourrisson

255

6

ENCADRÉ 6.6

Prévention de l’atopie chez les enfants (suite)

allergies alimentaires n’est pas clairement établi (Chan et Cummings, 2016). La durée totale de l’allaitement (au moins six mois) aurait un effet protecteur sur l’apparition des allergies. Toutefois, comme les protéines des aliments sont transmises dans le lait maternel, il est probable que certains nourrissons manifestent des allergies alimentaires pendant l’allaitement ; les allergies au lait de vache et à la protéine bovine en sont des exemples. La mère allaitante doit alors effectuer le retrait complet de l’aliment en cause dans sa diète et voir si les manifestations cliniques disparaissent chez le nourrisson. Une fois l’allergène déterminé, la diète d’éviction doit être poursuivie tout au long de l’allaitement. Ces allergies disparaissent souvent au cours des deux premières années de vie. Si l’enfant n’est pas allaité et qu’aucune allergie n’est présente, une préparation à base de lait de vache partiellement hydrolysée est sufsante (Bon DépartMD, EnfamilMD, SimilacMD). S’il y a une sensibilité moyenne au lait de vache, il faut donner au nourrisson une préparation fortement hydrolysée (Nutramigen MD, PregestimilMD ou AlimentumMD). Dans le cas d’une allergie grave au lait de vache, il vaut mieux privilégier les préparations à base d’acides aminés (Neocate MD ou PurAminoMD).

période, il vaut mieux éviter d’introduire d’autres aliments an de ne pas nuire à la détection d’une réaction allergique potentielle.

INTRODUCTION DES ALIMENTS SOLIDES

• Première recommandation – Bébés qui présentent un risque élevé (eczéma grave ou allergie aux œufs) : sous la supervision du médecin traitant, les parents peuvent introduire des aliments qui contiennent des arachides à partir de l’âge de quatre à six mois.

En 2013, la Société canadienne de pédiatrie a émis de nouvelles recommandations quant à l’introduction des aliments à potentiel allergène chez les nourrissons. L’âge d’introduction des aliments complémentaires au lait maternel recommandé au Canada est autour de six mois. Contrairement aux anciennes pratiques, il est maintenant recommandé de ne pas retarder l’introduction des aliments à potentiel allergène et de les offrir à compter de l’âge de six mois, une fois l’introduction des aliments riches en fer complétée, et ce, même chez les enfants à haut risque d’atopie. L’introduction précoce d’aliments à potentiel allergène pourrait prévenir les allergies alimentaires chez les nourrissons et les enfants (Chan et Cummings, 2016). Pour chacun des allergènes les plus fréquents chez les enfants (lait de vache, œufs, soya, noix, arachide, blé, poisson et fruits de mer), il faut introduire un aliment à la fois pendant trois à cinq jours consécutifs. Pendant cette

17 Le chapitre 17, Troubles liés au système gastro-intestinal, aborde plus en détail le reux gastro-œsophagien.

256

Partie 3

LE CAS DE L’ARACHIDE

L’allergie à l’arachide peut être extrêmement grave. Elle touche 2 enfants canadiens sur 100 (Allergies alimentaires Canada, 2015). Les anciennes lignes directrices suggéraient de retarder l’introduction des arachides chez les nourrissons à haut risque d’allergie. Toutefois, les données publiées ces dernières années ont démontré que retarder l’introduction de cet allergène augmentait la prévalence de l’allergie aux arachides chez les enfants (Nwaru, Takkinen, Niemelä et al., 2013). Une étude menée au Royaume-Uni a même démontré que pendant la période où les arachides étaient intro duites tardivement dans l’alimentation des nourrissons, le développement d’allergies aux arachides a triplé (Hourihane, Aiken, Briggs et al., 2007). En 2017, la Société canadienne d’allergie et d’immunologie clinique a émis les nouvelles recommandations en s’appuyant sur une étude démontrant que l’introduction précoce des arachides chez les bébés âgés de 4 à 11 mois à risque élevé d’allergie aux arachides (bébés qui ont une allergie aux œufs ou qui souffrent d’eczéma grave) contribuait à prévenir son apparition (Du Toit, Roberts, Sayre et al., 2015).

• Deuxième recommandation – Bébés avec eczéma léger à modéré : introduire vers l’âge de six mois des aliments qui contiennent des arachides. • Troisième recommandation – Autres enfants : introduire des aliments qui contiennent des arachides dès l’introduction des aliments complémentaires (Allergies alimentaires Canada, 2017). CONTRÔLE ENVIRONNEMENTAL

• Réduire l’exposition aux acariens, à la poussière, aux moisissures, aux animaux à fourrure, aux produits en latex et à la fumée secondaire.

6.2

Troubles alimentaires

6.2.1

Régurgitation et crachotement

Souvent, le nouveau-né recrache ou régurgite de petites quantités d’aliments après un boire. Il ne faut pas confondre cela avec des vomissements, qui peuvent parfois être associés à des problèmes plus importants. En soi, la régurgitation n’a généralement aucune conséquence, sauf si elle persiste, auquel cas un examen médical permettra d’écarter un diagnostic de reux gastro-œsophagien 17 .

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

La régurgitation et le crachotement se dénissent comme suit : • Régurgitation : retour d’aliments non digérés provenant de l’estomac, habituellement accompagné de rots. • Crachotement : écoulement d’une portion de préparation non avalée par le nourrisson immédiatement après un boire. Ce sont des phénomènes normaux, et il faut le mentionner aux parents an de les rassurer, surtout si ces derniers s’en inquiètent exagérément.

Approche thérapeutique Quelques mesures simples permettront de réduire la régurgitation : tapotements fréquents durant et après les boires pour que le nourrisson fasse des rots et an d’éviter qu’il avale une trop grande quantité d’air ; manipulations minimales durant et après les boires ; et positionnement du nourrisson du côté droit, la tête légèrement surélevée après les boires an d’éviter le reux. Il est possible de remédier aux inconvénients des crachotements en faisant porter au nourrisson une bavette absorbante et en utilisant des piqués ou d’autres dispositifs de protection pour la personne qui le nourrit. Dans certains cas, les écoulements fréquents de préparation provoquent une excoriation aux commissures de la bouche, au menton et au cou. Il faut garder ces zones sèches an de faciliter la cicatrisation. Ainsi, il est suggéré d’appliquer un mince lm de gelée de pétrole ou de l’onguent contenant des vitamines A et D sur les zones affectées après les avoir nettoyées, d’utiliser des bavettes absorbantes faites de ratine non doublée de plastique et de les changer fréquemment.

6.2.2

Retard de croissance (retard staturopondéral)

Le retard de croissance (RC), ou retard staturopondéral, est la manifestation d’un développement sous-optimal dû à une incapacité d’obtenir ou d’utiliser les calories nécessaires à la croissance. Il n’existe pas de dénition universelle du RC, bien que l’un des paramètres les plus courants pour le déceler soit un poids et parfois une taille inférieurs au 5e centile pour l’âge de l’enfant. Le RC peut aussi être la conséquence d’un état de malnutrition pédiatrique. Il faudra s’inquiéter d’une déviation persistante par rapport aux paramètres de croissance reconnus, mais on ne peut toutefois se servir exclusivement de ceux-ci pour diagonstiquer le RC chez les enfants.

ENCADRÉ 6.7

Le RC est souvent multifactoriel et peut reposer sur un amalgame de pathologies organiques du nourrisson, de comportements parentaux dysfonctionnels ou d’un trouble de l’attachement parents-enfant (Cole et Lanham, 2011). La principale étiologie du RC est l’insufsance de l’apport calorique, quelle qu’en soit la cause.

Manifestations cliniques Le retard de croissance se caractérise par plusieurs manifestations cliniques ENCADRÉ 6.7.

Le retard de croissance associé à la naissance prématurée et les soins nutritionnels à fournir sont abordés dans le chapitre 22 du manuel de Lowdermilk, D.L., Perry, S.E., et Cashion, K. (2018). Périnatalité. Montréal : Chenelière Éducation.

Diagnostic Le diagnostic est initialement établi à partir des signes de RC. Si le RC est récent, donc datant de moins de trois mois, le poids, et non la taille, se trouvera inférieur aux normes acceptées (habituellement le 3e centile) 4 et A . Si le RC dure depuis un certain temps, le poids et la taille accusent un retard, ce qui est le signe d’une malnutrition chronique (plus de trois mois). Il faut accorder autant d’importance au questionnaire médical et alimentaire complet (y compris l’histoire périnatale), au dépistage d’une cause organique par l’examen physique et l’évaluation développementale et familiale qu’aux mesures anthropométriques. L’historique alimentaire, soit l’apport nutritionnel type d’une période de 24 heures ou un historique des aliments consommés sur une période de 3 à 5 jours, n’est pas non plus à négliger. Des renseignements sont également recueillis quant au degré d’activité du nourrisson, à la taille des parents et de la fratrie, aux allergies alimentaires possibles et aux restrictions diététiques. Il faut de plus évaluer le fonctionnement de la famille (notamment la relation parents-enfant) et son environnement, et recueillir des données pertinentes sur les comportements et les rituels qui accompagnent les repas.

4

6

L’examen physique ainsi que la mesure et la pesée de l’enfant sont expliqués dans le chapitre 4, Examen clinique : anamnèse et examen physique.

A Les valeurs normales en fonction de l’âge de l’enfant sont présentées dans l’annexe A, Normes de croissance de l’OMS pour le Canada.

D’autres tests sont effectués selon le cas pour écarter certains problèmes organiques (p. ex., une

Manifestations cliniques du retard de croissance

• Ralentissement de la croissance • Retard du développement social, moteur, adaptatif et du langage

• Aucune crainte des étrangers (à un âge où une telle réaction est normale) • Évitement du contact visuel

• Apathie, léthargie, somnolence

• Yeux grands ouverts et regard balayant continuellement les alentours (radar)

• Repli sur soi

• Raideur et résistance, ou accidité et absence de réponse

• Troubles nutritionnels ou alimentaires, tels que les vomissements, le refus de s’alimenter, l’anorexie, le pica et le mérycisme

• Sourires peu fréquents • Irrégularité (faible rythmicité) des activités quotidiennes • Caractère difcile

Chapitre 6

Problèmes de santé du nourrisson

257

intoxication au plomb, une anémie, des substances résiduelles dans les selles, du sang occulte, des œufs et des parasites, une phosphatase alcaline et un taux de zinc bas). Cependant, ces analyses de laboratoire se révèlent souvent peu utiles pour établir un diagnostic de RC (Cole et Lanham, 2011). An de prévenir la surutilisation des interventions diagnostiques, il faut envisager tôt le RC dans le diagnostic différentiel (lequel repose sur la comparaison des symptômes de différentes pathologies). Pour éviter la stigmatisation du RC au cours de la phase d’examen préliminaire, beaucoup de professionnels de la santé emploient le terme ralentissement de la croissance jusqu’à ce que la cause en ait été établie.

La prise en charge nutritionnelle du RC vise quatre grands objectifs :

dans une famille d’accueil peut alléger le fardeau de la famille, protéger l’enfant et lui fournir une certaine stabilité si la cellule familiale est jugée dysfonctionnelle après une évaluation. Une modication des comportements est parfois encouragée an d’établir des rituels à l’heure des repas et de promouvoir la socialisation en famille. L’hospitalisation devient nécessaire dans les cas suivants : • signes anthropométriques de malnutrition aiguë ou chronique grave ; • enfant soupçonné d’être victime de maltraitance ou de négligence ; • déshydratation importante ; • toxicomanie ou psychose chez la personne responsable de l’enfant ; • inefcacité des interventions ambulatoires à combler le retard pondéral.

1. Corriger les carences nutritionnelles et atteindre le rapport poids/taille idéal.

Pronostic

Approche thérapeutique

2. Combler le retard de croissance. 3. Rétablir un équilibre physiologique optimal. 4. Renseigner les parents ou les principales personnes soignantes au sujet des besoins nutritionnels de l’enfant et des modes alimentaires appropriés (AAP, 2014). L’approche thérapeutique du RC porte d’abord sur la correction de son étiologie. L’objectif consiste à procurer sufsamment de calories pour combler le retard de croissance, qui se fait alors à un rythme plus soutenu que prévu pour l’âge et, au besoin, à administrer des suppléments vitaminiques et nutritionnels. Il faut également traiter toute autre comorbidité.

1 L’évaluation familiale est traitée dans le chapitre 1, Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté.

Dans la majorité des cas de RC, pour s’attaquer aux multiples facettes du problème, il faut faire appel à une équipe interdisciplinaire composée d’un médecin, d’une inrmière, d’une nutritionniste, d’un psychoéducateur, d’un ergothérapeute et d’un travailleur social. Il faut tenter d’atténuer les répercussions des autres facteurs de stress qui afigent la famille en offrant à celle-ci des consultations auprès d’agences spécialisées ou en l’orientant vers une banque alimentaire. Dans certains cas, une thérapie familiale s’impose 1 . Le placement temporaire de l’enfant

Le pronostic du RC dépend de la cause de ce retard. Peu d’études à long terme ont été effectuées pour fournir des données probantes sur ce sujet. Certains experts indiquent toutefois que les enfants qui ont souffert de RC lorsqu’ils étaient des nourrissons risquent d’avoir une taille inférieure à la norme et de subir des retards de développement (Nangia et Tiwari, 2013). Les facteurs associés à un pronostic sombre sont les suivants : refus opiniâtre de s’alimenter, manque de connaissances et de coopération de la part des parents, faible revenu du ménage, faible degré d’instruction de la mère, naissance prématurée, retard de croissance intra-utérin et début du RC en bas âge. Comme le fonctionnement cognitif et moteur ultérieur subit l’inuence de la malnutrition au début de l’enfance, bon nombre de ces enfants auront un QI largement inférieur à celui des enfants n’ayant pas souffert d’un RC (Romano, Hartman, Privitera et al., 2015). En outre, ils présenteront une incidence accrue de troubles de l’alimentation et du comportement (Jaffe, 2011). Ces conclusions soulignent l’importance de la mise en place d’un plan de soins et de suivi à long terme pour assurer le développement optimal de ces enfants.

Soins inrmiers RETARD DE CROISSANCE

Reconnaître les manifestations cliniques du retard de croissance L’inrmière joue un rôle crucial dans le diagnostic du RC lorsqu’elle évalue l’enfant, ses parents et les interactions familiales. Elle doit reconnaître

258

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

les caractéristiques de l’enfant souffrant de RC et de sa famille pour effectuer le dépistage et s’assurer que le diagnostic est posé rapidement, le cas échéant ENCADRÉ 6.7 . Pour ce faire, il lui faut procéder à une collecte de données précises sur le poids et la taille de l’enfant lors de la première consultation, ainsi que sur son poids quotidien,

et noter tous les aliments et les liquides consommés. L’inrmière documente le comportement alimentaire de l’enfant, l’interaction parentsenfant pendant les boires, les autres soins prodigués à l’enfant et le jeu.

Identier les comportements alimentaires Le nourrisson atteint d’un RC peut avoir des antécédents d’alimentation difcile, de vomissements, de troubles du sommeil et d’irritabilité excessive. Des comportements tels que les pleurs pendant les tétées, les vomissements, l’accumulation de nourriture dans la bouche, la rumination, le refus de passer du lait aux aliments solides et la présence de comportements d’aversion comme refuser la nourriture ou cracher des aliments deviennent des mécanismes de recherche d’attention permettant de prolonger l’attention reçue au moment des repas. Dans certains cas, l’enfant peut utiliser l’alimentation comme mécanisme de contrôle dans un contexte familial mal organisé ou chaotique. Ainsi, les parents peuvent laisser à l’enfant le privilège de dicter les normes de comportement et d’alimentation en raison de leur inexpérience ou des mauvais modèles de rôle parental qu’ils ont eux-mêmes connus. Au l du temps, le refus de manger ou un régime alimentaire pauvre sur le plan de la qualité nutritionnelle peut devenir la norme de l’enfant. Dans de tels cas, la thérapie familiale est essentielle pour inverser la tendance et aider les parents et l’enfant à comprendre les rôles de chacun.

Promouvoir des boires réguliers Le nourrisson atteint de RC doit boire à intervalles réguliers. Les parents à qui sont conseillés des boires sur demande ne sauront pas s’il faut réveiller l’enfant ou le laisser dormir. En raison de leur inexpérience et faute de conseils éclairés, les parents auront tendance à espacer les boires, ce qui ne permet pas de répondre adéquatement aux besoins nutritionnels du nourrisson. Ces intervalles prolongés entre les boires nuisent particulièrement au nourrisson allaité, qui doit s’alimenter fréquemment pour consommer sufsamment de lait.

Évaluer l’attachement parents-enfant Lorsque des facteurs psychosociaux semblent être à l’origine du RC, l’attachement parents-enfant est à évaluer. Divers facteurs exposent certains parents à un risque accru à l’égard des problèmes d’attachement : isolement et crise sociale ; réseau de soutien inadéquat (p. ex., des mères de famille monoparentale ou adolescentes) ; et modèle parental lacunaire lorsque ces personnes étaient enfants. D’autres éléments sont considérés, notamment le manque d’instruction ; les problèmes de santé phy sique et mentale en raison de violence physique

et sexuelle, de dépression ou de toxicomanie ; l’immaturité, surtout chez les parents adolescents ; et un désengagement à l’égard du rôle parental au prot des loisirs ou du travail. Le stress et de multiples crises émotionnelles, sociales et nancières chroniques afigent souvent ces parents et leur famille.

Personnaliser les soins Étant donné que le problème entre les parents et leur enfant repose sur un sentiment d’insatisfaction et de frustration, l’enfant devrait être coné à une seule infirmière par quart de travail FIGURE 6.3. L’inrmière qui soigne l’enfant peut ainsi mieux apprendre à décoder ses signaux et inverser le cycle d’insatisfaction, surtout en ce qui concerne l’alimentation.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Pour détecter un retard de croissance, l’inrmière peut observer et documenter le comportement alimentaire de l’enfant, les interactions parents-enfants durant les boires, les autres soins prodigués à l’enfant et le jeu.

6

Assurer l’alimentation du nourrisson Étant donné que le nourrisson réagit aux stimulus responsables de son mode d’alimentation négatif, le premier objectif du traitement consiste à structurer son environnement alimentaire de façon à l’encourager à se nourrir. Au début, les membres du personnel et un spécialiste de l’alimentation auront à nourrir le nourrisson pour évaluer avec précision les difcultés rencontrées au moment de la prise d’aliments et établir des stratégies en vue d’éliminer ou d’atténuer ces difcultés ENCADRÉ 6.8. An d’optimiser le plus possible l’apport calorique de l’enfant, un enrichissement de son alimentation est nécessaire. Des matières grasses comme l’huile végétale peuvent être ajoutées aux céréales enrichies. À compter de l’âge de neuf mois, de la poudre de lait écrémé, de la crème et des yogourts riches en matières grasses peuvent être introduits an de fournir davantage de calories à l’enfant. Les suppléments commerciaux comme PediaSureMD ne peuvent être donnés avant l’âge de 12 mois, sauf en cas d’avis contraire du médecin. En présence de carences vitaminiques et minérales, des suppléments de multivitamines renfermant aussi du zinc et du fer sont recommandés. Le recours à l’alimentation entérale ou parentérale totale est uniquement recommandé dans les cas de malnutrition grave, si l’enfant est FIGURE 6.3 Le lien de conance entre l’inincapable de s’alimenter ou si le tube digestif n’est rmière et le nourrisson atteint d’un retard de croissance est essentiel. pas fonctionnel.

Chapitre 6

Problèmes de santé du nourrisson

259

Pratiques inrmières ENCADRÉ 6.8

Alimenter l’enfant ayant un retard de croissance

CONSTITUER UNE ÉQUIPE CHARGÉE DE NOURRIR L’ENFANT

La constance du personnel inrmier permet de décoder les signaux de l’enfant et d’y répondre dans un esprit de continuité, en plus de rassurer l’enfant. FOURNIR UNE AMBIANCE CALME, SANS STIMULUS

aliments en purée, puis, une fois l’adaptation faite, passer aux aliments solides pour trottineurs et, enn, aux aliments normaux. Si l’enfant démontre un réel intérêt pour la nourriture et qu’il a au moins six mois, on peut introduire les aliments avec de gros morceaux.

Certains de ces enfants présentent des signes d’inattention. Chaque stimulus peut les distraire. Pour nourrir l’enfant plus jeune, il faut toujours le tenir dans ses bras.

SUIVRE LE RYTHME ALIMENTAIRE DE L’ENFANT

MAINTENIR UNE HUMEUR CALME ET ÉGALE TOUT AU LONG DU REPAS

ÉTABLIR UNE ROUTINE ENCADRÉE

Les crises peuvent être courantes. Si l’inrmière est pressée ou anxieuse, cela pourrait nuire au processus alimentaire.

Toute perturbation des autres activités quotidiennes de l’enfant a des répercussions considérables sur son comportement alimentaire. Il faut donc voir à structurer le déroulement du bain, du coucher, de l’habillement, du jeu et des repas. Dans la mesure du possible, l’inrmière s’installe de la même façon et au même endroit pour nourrir l’enfant. Elle xe et respecte une limite de temps pour le repas.

INTRODUIRE GRADUELLEMENT LES NOUVEAUX ALIMENTS

Souvent, le nourrisson atteint de RC n’a été nourri qu’au biberon. Si l’introduction des aliments solides pose un problème, il faut commencer par des

L’introduction des aliments solides sans passer par l’étape des purées peut être accomplie en suivant les principes de la diversication alimentaire menée par l’enfant (DME) présentée sur le site Web Naître et grandir (naitreetgrandir.com).

L’enfant établira son rythme après avoir franchi les étapes précédentes.

Parce que les pratiques d’alimentation inadap­ tées contribuent souvent au RC, l’inrmière doit fournir aux parents des instructions précises étape par étape pour la reconstitution de la préparation lactée pour nourrissons ainsi qu’un calendrier écrit de l’horaire d’alimentation. Il faut restreindre l’ingestion de jus chez les enfants atteints de RC, tout comme chez les autres enfants, an de per­ mettre un gain de poids et un apport nutritionnel adéquats à l’aide du lait maternel ou de la prépa­ ration pour nourrissons.

Modier les comportements du nourrisson Des techniques de modication du comportement peuvent être utilisées avec les nourrissons plus âgés. Ces changements de comportements peuvent prendre du temps à s’effectuer chez les enfants souffrant de RC secondaire à une alimentation inadéquate, et ils exigent beaucoup de persévé­ rance et de patience de la part des parents. Des comportements de refus aux nouvelles techniques d’alimentation sont à envisager, principalement lorsque des mesures inadéquates sont en place depuis un certain temps, par exemple l’association de la nourriture avec de bons ou de mauvais com­ portements, ou le fait d’offrir des récompenses alimentaires suivant les bons comportements. Il est important de noter que ces refus alimentaires sont tout à fait différents du refus alimentaire occa­ sionnel chez les enfants plus âgés, pour lesquels le refus fait partie de leur développement normal.

260

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Stimuler le développement par le jeu En plus de subvenir aux besoins physiques de l’enfant, l’équipe interdisciplinaire doit planier des soins pour une stimulation développementale appropriée. Une fois l’âge développemental approximatif établi, un programme planié de jeux débute. Idéalement, une spécialiste du milieu de l’enfant participe à la mise en place et à la supervision de ce programme. Il faut tout faire pour enseigner aux parents comment jouer et inter­ agir avec l’enfant.

Soutenir et informer la famille Les soins inrmiers pour les enfants atteints de RC tiennent compte de la dynamique familiale. En d’autres mots, pour que la santé de la famille entière s’améliore, il faut encourager chaque membre à changer. Les interventions auprès des parents visent à les aider à acquérir une meilleure estime d’eux­mêmes en développant des habiletés paren­ tales positives et efcaces. Au début, cela nécessite la création d’un environnement où ils se sentiront bienvenus et accueillis. L’inrmière peut alors leur manifester de l’empathie en reconnaissant qu’il est difcile d’élever un enfant. Elle peut, par exemple, leur expliquer que de nombreux parents éprouvent de la difculté à s’ajuster à la parentalité et se sentent dépassés par les nombreuses exigences associées aux soins d’un nourrisson. Selon les causes du RC, de nombreux enfants pourront être traités en consultation externe.

Troubles du sommeil

Les préoccupations concernant le sommeil sont courantes au début de l’enfance. Si l’enfant souffre de troubles du sommeil, il est essentiel d’évaluer attentivement la situation et d’en discuter avec les parents. Il existe un lien signicatif entre les problèmes de sommeil chez le nourrisson et les taux élevés de dépression maternelle (Gress-Smith, Luecken, Lemery-Chalfant et al., 2012 ; Muscat, Obst, Cockshaw et al., 2014). Conséquemment, l’inrmière devrait discuter des problèmes de sommeil de l’enfant avec la famille. L’inrmière peut suggérer aux parents de tenir un journal des habitudes de sommeil de l’enfant : la fréquence et la durée de l’éveil, la routine et l’heure du coucher, le nombre de boires nocturnes, le trouble perçu (p. ex., dans quelle mesure le comportement est perturbateur) et les interventions tentées. Cette façon de faire permet de planier des approches efcaces adaptées au trouble du sommeil décelé chez le nourrisson. La suggestion courante donnée pour n’importe quel trouble

du sommeil, à savoir laisser l’enfant pleurer jusqu’à ce qu’il s’endorme, est très difcile à mettre en œuvre et n’est pas pertinente dans certaines situations. Les familles qui ne peuvent tolérer les épisodes de pleurs inattendus pendant que tout le monde dort peuvent essayer la méthode d’extinction graduelle, qui consiste à laisser l’enfant pleurer durant des périodes de plus en plus longues entre de brèves interventions parentales visant à le rassurer sans le bercer, le tenir ou utiliser un biberon ou une suce. Par exemple, les parents peuvent aller voir l’enfant toutes les cinq minutes durant Nathan est un bébé de six mois en bonne santé la première nuit et allonger nourri exclusivement au sein. Il n’y a pas de proprogressivement cet intervalle blème sur le plan de l’allaitement, et il prend sa les nuits suivantes. L’inrmière dernière tétée vers 20 h. Toutefois, ses parents doit évaluer les pleurs de l’ens’inquiètent, car il se réveille chaque nuit vers fant avec les parents en adopminuit et il se rendort seulement après avoir été tant une écoute active, en les allaité et bercé. Puis, le même scénario se répète rassurant et en leur expliquant vers 4 h. Quelles suggestions pourriez-vous donner que les pleurs et les difcultés aux parents pour aider Nathan à dormir plus dans la gestion quotidienne longtemps la nuit ? sont normaux (Smith, 2010) TABLEAU 6.1.

clinique

Jugement

6.3

Enseignement à l’enfant et à ses proches TABLEAU 6.1

Problèmes liés au sommeil

PROBLÈMES ET DESCRIPTION

INTERVENTIONS

Alimentation nocturne perturbant le sommeil L’enfant a besoin d’être allaité ou de prendre un biberon pendant de longues périodes la nuit.

• Accroître les intervalles d’allaitement quotidiens à quatre heures ou plus ; il peut être nécessaire de procéder graduellement.

L’enfant s’endort pendant l’allaitement ou le biberon.

• Offrir la dernière tétée ou le dernier biberon le plus tard possible la nuit ; il peut être nécessaire de réduire graduellement la quantité de préparation ou la durée de l’allaitement.

L’enfant se réveille souvent.

• Ne pas offrir de biberon au lit.

L’enfant ne se rendort qu’après avoir été allaité ; les autres mesures de réconfort (p. ex., le prendre ou le bercer) sont habituellement inefcaces.

• Mettre l’enfant au lit pendant qu’il est éveillé. • Lorsque l’enfant pleure, répondre à des intervalles de plus en plus longs chaque nuit ; le rassurer, mais ne pas le prendre ni le bercer, ne pas l’amener dans le lit du parent, ni lui donner un biberon ou une suce.

Pleurs nocturnes liés au développement L’enfant de 6 à 12 mois qui dormait paisiblement la nuit se réveille maintenant abruptement ; le sommeil peut être accompagné de cauchemars.

• Rassurer les parents en leur expliquant que cette phase est temporaire. • Entrer dans la pièce immédiatement pour voir l’enfant, mais limiter la durée de l’intervention.

Pleurs nocturnes appris (associations inadéquates liées au sommeil) L’enfant s’endort régulièrement ailleurs que dans son propre lit (p. ex., dans la berceuse ou le lit du parent) et il pleure jusqu’à ce qu’il soit pris lorsqu’il se réveille dans son lit (p. ex., il est sorti du lit ou bercé).

• Mettre l’enfant dans son propre lit pendant qu’il est encore éveillé. • Si possible, faire en sorte que l’enfant dorme à l’écart des autres membres de la famille. • Lorsque l’enfant pleure, répondre à des intervalles de plus en plus longs chaque nuit ; rassurer l’enfant, mais ne pas le sortir du lit.

Source : Adapté de Ferber, R. (1987). Behavioral insomnia in the child, Psychiatr Clin North Am, 10(4), 641-653.

Chapitre 6

Problèmes de santé du nourrisson

261

6

6.4 6.4.1

Troubles cutanés Érythème fessier

L’érythème fessier affecte couramment les nourrissons ; il s’agit de l’un des troubles inammatoires aigus causés directement ou indirectement par le port de couches. Il touche surtout les nourrissons de moins de deux ans (Naître et grandir, 2014).

Physiopathologie L’érythème fessier est causé par la friction et un contact prolongé et répété avec un irritant (p. ex., de l’urine, des excréments, du savon, des détergents, des Karla, âgée de neuf mois, présente une rougeur onguents). Bien que, dans la importante à la vulve, aux aines et à la base des majorité des cas, l’irritant fesses. Vous concluez qu’il s’agit d’érythème soit de l’urine ou des excréfessier. Indiquez trois recommandations que vous ments, des facteurs combinés pourriez donner à la mère pour faciliter la guérison contribuent à l’irritation. et prévenir la récidive. Quand la peau est en MAIS SI... contact prolongé avec une Si Karla présente toujours une rougeur périanale couche humide, elle subit trois jours plus tard (le reste des lésions ayant plus de friction, devient irdisparu) en dépit du fait que la mère a observé ritée et plus perméable, et toutes vos recommandations, quel signe pourrait abrite un nombre accru de vous indiquer qu’il s’agit plutôt d’une candidose ? micro-organismes. Dans ces conditions, la peau devient a) La présence d’un écoulement au site de plus vulnérable aux irritants. la rougeur. On a longtemps cru que b) La rougeur présente un contour bien déni. l’ammoniaque était responc) La présence d’une croûte sur la rougeur. sable de l’érythème fessier en d) La rougeur présente des lésions satellites. raison de l’association faite entre la forte odeur des couches et l’érythème, mais l’ammoniaque seule ne suft pas à expliquer cette affection. La nature irritante de l’urine est due à une augmentation du pH, elle-même causée par la dégradation de l’urée en présence d’uréase fécale. Le pH accru favorise l’activité des enzymes fécales, principalement des protéases et des lipases, qui agissent comme des irritants. Les enzymes fécales augmentent aussi la perméabilité de la peau aux sels biliaires, un autre irritant possible contenu dans les excréments.

Jugement

clinique

savons qui subsistent dans les couches de coton mal rincées ou les produits chimiques présents dans les couches jetables ou les serviettes humides jetables sont d’autres causes possibles. Les lésions périanales résultent généralement de l’irritation chimique par les excréments, en particulier les selles diarrhéiques. L’infection à Candida albicans, communément appelée candidose, produit une inammation périanale et une éruption maculopapuleuse avec des lésions satellites qui peuvent traverser le pli inguinal FIGURE 6.5. Une telle infection touche jusqu’à 90 % des nourrissons ayant un érythème fessier chronique, et elle doit être envisagée si l’érythème fessier résiste au traitement.

FIGURE 6.4 est net.

Érythème fessier – Son contour

Manifestations cliniques

éactivation des connaissances Quelle est la différence entre une macule, une pustule, une vésicule et une papule ?

262

Partie 3

L’érythème fessier se manifeste principalement sur les surfaces convexes ou dans les plis. Les types de lésions et leurs formes varient (érosion supercielle, érythème et pustules satellites, plaques érythémosquameuses). Les éruptions de la peau en contact étroit avec la couche (p. ex., les surfaces convexes des fesses, l’intérieur des aines, le mont de Vénus et le scrotum), mais épargnant les plis cutanés, sont susceptibles d’être causées par des irritants chimiques, notamment l’urine et les excréments FIGURE 6.4. Les détergents ou les

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

FIGURE 6.5 Candidose de la région de la couche – L’image montre un érythème central rouge entouré de pustules.

Soins inrmiers ÉRYTHÈME FESSIER

possible d’enlever la couche pour exposer la peau saine à l’air an de favoriser le séchage ENCADRÉ 6.9.

Les interventions inrmières visent à modier les trois facteurs responsables de l’érythème fessier : l’humidité, le pH et les irritants fécaux. Le facteur le plus important pouvant être modié est l’environnement humide de la couche . Une grande partie du problème peut être éliminée en changeant la couche dès qu’elle devient humide. L’inrmière possédant les qualications requises par l’Ordre des inrmières et inrmiers du Québec (OIIQ) peut maintenant prescrire des antifongiques pour les infections à Candida (OIIQ, 2015). De plus, il est

La composition d’une couche inue considérablement sur la fréquence et la gravité de l’érythème fessier ; les couches jetables superabsorbantes le réduisent. Ces couches contiennent un gel absorbant qui xe bien l’eau, ce qui réduit l’humidité de la peau, régule le pH en offrant un pouvoir tampon et diminue l’irritation cutanée en empêchant le mélange d’urine et d’excréments dans la couche. Une autre amélioration apportée aux couches est l’ajout d’un revêtement imprégné de gelée de pétrole.

ALERTE CLINIQUE

L’utilisation d’un séchoir à cheveux ou d’une lampe chauffante pour assécher la région de la couche n’est pas recommandée, car ces appareils peuvent causer des brûlures.

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 6.9

Maîtrise de l’érythème fessier

De nombreuses actions simples peuvent être réalisées an d’éviter l’apparition de l’érythème fessier ou d’en soulager les manifestations. L’inrmière devrait en informer la famille.

• Utiliser un hydratant ou un nettoyant sans savon, par exemple une crème froide ou un produit tel Cetaphil Baby MD pour enlever l’urine de la peau.

GARDER LA PEAU SÈCHE

• Enlever doucement les selles de la peau avec de l’eau et un savon doux.

• Utiliser des couches jetables superabsorbantes pour réduire l’humidité de la peau.

APPLIQUER UN ONGUENT

• Avec les couches lavables, n’utiliser que des couvre-couches qui laissent passer l’air ; éviter ceux en caoutchouc. • Si possible, changer les couches dès qu’elles sont souillées, particulièrement avec des selles, préférablement une fois par nuit. • Exposer la peau saine ou légèrement irritée à l’air, mais pas à la chaleur, pour qu’elle puisse sécher complètement.

• Employer un onguent à base d’oxyde de zinc, un onguent à base de diméthicone (Critic-AidMD) ou de la gelée de pétrole pour protéger la peau, surtout si elle est très rouge ou si elle est humide et irritée. • Ne pas frotter la peau pour enlever les crèmes dermoprotectrices à chaque changement de couche ; enlever les excréments et remettre de la crème.

ÉVITER DE TROP LAVER LA PEAU

• Pour enlever complètement un onguent, particulièrement l’oxyde de zinc, utiliser de l’huile minérale ; ne pas laver vigoureusement.

• Restreindre l’emploi des savons parfumés ou des lingettes du commerce, qui peuvent causer de l’irritation.

• Éviter l’utilisation de produits en poudre pour gérer l’érythème fessier ; il n’existe aucun consensus sur l’emploi de ces produits.

6.4.2

Dermite séborrhéique

La dermite séborrhéique est une réaction inammatoire chronique récurrente de la peau. Elle affecte plus communément le cuir chevelu (calotte séborrhéique), mais elle peut également toucher les paupières (blépharite), le méat acoustique externe (otite externe), les sillons nasolabiaux (ou nasogéniens) et la région inguinale. Sa cause est inconnue, mais elle est plus commune pendant le début de l’enfance, quand la production de sébum augmente. Les lésions sont des plaques huileuses, squameuses, jaunâtres, adhérentes et épaisses qui peuvent ou non être légèrement prurigineuses FIGURE 6.6. Contrairement à la dermatite atopique, la dermite séborrhéique n’est pas liée à des antécédents familiaux d’allergie et elle affecte couramment les

nourrissons peu après la naissance, et les adolescents après la puberté. Le diagnostic est surtout fondé sur l’apparence et le siège des croûtes ou des écailles.

FIGURE 6.6

Dermite séborrhéique

Chapitre 6

Problèmes de santé du nourrisson

263

6

Soins inrmiers DERMITE SÉBORRHÉIQUE

Il est possible de prévenir la calotte séborrhéique grâce à une hygiène adéquate du cuir chevelu. Les parents évitent souvent de laver les cheveux de leur bébé avec du shampoing par crainte d’endommager les fontanelles. L’inrmière doit leur expliquer comment laver les cheveux du bébé au shampoing et insister sur le fait que les fontanelles sont semblables à la peau de toute autre partie du corps. Elles ne se perforent pas ou ne se déchirent pas avec une légère pression.

CE QU’IL FAUT RETENIR

On reconnaît les coliques à l’aide de la règle des trois : des pleurs pendant plus de trois heures par jour, surve­ nant plus de trois jours par semaine et s’étendant sur une période de plus de trois semaines ; à cela s’ajoute l’insatisfaction des parents à l’égard du comportement de l’enfant.

En présence de lésions séborrhéiques, le traitement est axé sur l’exérèse des croûtes. Le shampoing doit être fait chaque jour avec un savon doux ou avec un shampoing pour bébé du commerce. Les shampoings pharmacologiques ne sont pas nécessaires, mais il est possible d’utiliser un shampoing antiséborrhéique contenant du soufre et de l’acide salicylique. L’application d’huile minérale ou végétale sur le cuir chevelu permet également de ramollir les croûtes. Le shampoing est appliqué sur le cuir chevelu et laissé jusqu’à ce que les croûtes ramollissent, puis il est important de bien rincer. Pour enlever les croûtes lâches de la tige des cheveux après le shampoing, un peigne n ou une brosse à dents à poils souples peuvent être utilisés (Sasseville, 2017).

6.5 6.5.1

Autres troubles du nourrisson Douleurs abdominales paroxystiques (coliques)

Les coliques affecteraient de 5 à 20 % de tous les nourrissons et toucheraient davantage les bébés de moins de 3 mois et les enfants au caractère difcile. La prévalence est plus forte chez les prématurés et les nourrissons de faible poids (Milidou, Sondergaard, Jensen et al., 2014 ; Savino, Ceratto, Poggi et al., 2015). Toutefois, les études n’ont révélé aucune tendance particulière Franz est âgé de deux mois. Il souffre de coliques relative au sexe, à l’âge gesse manifestant par des pleurs intenses pouvant tationnel et au poids de naisdurer jusqu’à trois heures. Est­ce que l’intensité sance du nourrisson ni de des coliques risque d’inuencer la prise de poids lien avec le niveau de scolaet le développement de Franz ? Justiez votre rité de la mère (Naître et réponse. grandir, 2017).

Jugement

clinique

264

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Plusieurs théories ont été avancées pour tenter d’expliquer ce phénomène, notamment les suivantes : le nourrisson prend ses boires trop rapidement ou ses boires sont trop abondants, il avale trop d’air, la technique ne convient pas (surtout la posture et les rots), et une tension émotionnelle existe entre le parent et l’enfant. Tous ces éléments peuvent se produire, mais rien ne prouve que l’un d’eux soit constamment présent. Chez certains nourrissons, les coliques constituent un signe d’allergie ou d’intolérance au lait de vache. Chez d’autres enfants, la boisson de soya cause les mêmes malaises que le lait de vache. Quelques experts associent les coliques au tabagisme pendant la grossesse, à des interactions inadéquates parents-nourrisson, aux premiers nés de la famille, à une décience en lactase, à la difculté pour l’enfant de réguler ses émotions et à une motilité gastro-intestinale anormale (Drug and Therapeutics Bulletin, 2013). La plupart des experts qui étudient les coliques s’entendent nalement pour dire qu’il s’agit d’un problème multifactoriel pour lequel il n’existe pas de remède universel efcace. Chez moins de 5 % des nourrissons ayant été vus par un médecin en raison de pleurs intenses, les douleurs étaient attribuables à un problème organique (Akhnikh, Engelberts, van Sleuwen et al., 2014).

Manifestations cliniques Ce problème est généralement décrit comme une douleur abdominale paroxystique ou des crampes qui se manifestent par des pleurs intenses et le échissement des jambes vers l’abdomen chez un bébé en bonne santé. On le reconnaît aux trois facteurs suivants (la règle des trois) : des pleurs pendant plus de trois heures par jour, survenant plus de trois jours par semaine et s’étendant sur une période de plus de trois semaines ; à cela s’ajoute l’insatisfaction des parents à l’égard du comportement de l’enfant (Kim, 2011). Certaines études mentionnent une exacerbation des symptômes (maussaderie et pleurs) en n d’après-midi ou le soir, mais les symptômes peuvent aussi se déclencher à d’autres moments (Morin, 2009). Malgré les signes évidents de douleur qu’il manifeste par son comportement, l’enfant prend du poids et se développe. Aucun signe d’effet résiduel des coliques sur les enfants plus âgés n’est observé, sauf peut-être une relation parents-enfant tendue dans certains cas (Kaley, Reid et Flynn, 2011). Les coliques cessent habituellement entre l’âge de 12 et 16 semaines (Akhnikh et al., 2014).

Approche thérapeutique La prise en charge des coliques doit commencer par une recherche de leurs causes possibles. Si une allergie au lait de vache est fortement soupçonnée, la substitution d’un autre type de préparation est tentée, par exemple une préparation fortement hydrolysée (NutramigenMD, AlimentumMD, PregestimilMD) ou à base d’hydrolysat de lactosérum ou d’acides aminés (NeocateMD, PurAminoMD). Les préparations à base de soya sont habituellement évitées en raison du risque que le nourrisson soit également allergique aux protéines du soya (Drug and Therapeutics Bulletin, 2013). Les mères allaitantes doivent suivre un régime sans produits laitiers pendant au moins trois à cinq jours pour tenter de soulager les symptômes chez le nourrisson. Il faut expliquer aux mères que plusieurs aliments sans produits laitiers peuvent contenir des protéines de lait de vache (caséine, lactosérum), d’où l’importance de bien lire les

étiquettes. Si le régime sans produits laitiers donne des résultats, les mères allaitantes pourraient requérir des suppléments de calcium pour répondre aux besoins de leur organisme. Les enfants nourris au biberon verront leur état s’améliorer si les mêmes modications sont apportées à leur alimentation que pour les nourrissons souffrant d’une allergie au lait de vache. Un survol complet des multiples approches pour soulager les coliques conrme qu’il n’y a pas de remède sécuritaire particulier pour en soulager les symptômes chez tous les nourrissons. Les changements apportés à l’alimentation, comme l’élimination des produits à base de lait de vache du régime de la mère allaitante, et certaines interventions visant à modier les comportements des parents pourraient aider ces derniers à calmer les stimulus et à répondre aux pleurs du nourrisson, mais il semble que ces interventions n’ont qu’une efcacité modérée (Critch, 2011).

6

Soins inrmiers COLIQUES

L’étape initiale dans la prise en charge des coliques consiste à faire un relevé détaillé de la routine quotidienne. Il faut notamment prêter attention aux éléments suivants : • la diète de l’enfant ; • la diète de la mère allaitante ; • le moment de la journée durant lequel les pleurs se produisent ; • le lien entre les pleurs et le moment des boires ; • la présence de certains membres de la famille durant les pleurs et les habitudes des membres de la famille, comme le tabagisme ; • les activités de la mère ou de la personne qui soigne habituellement l’enfant avant, durant et après les pleurs ; • les caractéristiques des pleurs (durée, intensité) ; • les mesures appliquées pour soulager les pleurs ainsi que leur efcacité ; • les habitudes d’élimination (miction, défécation) et de sommeil du nourrisson. L’inrmière évalue avec un soin particulier la façon dont les parents nourrissent l’enfant en les invitant à en faire la démonstration. Une fois le diagonstic de coliques posé, il est important que

l’inrmière rassure les deux parents sur le fait qu’ils ne font rien de mal et que le nourrisson n’est exposé à aucun risque de préjudice physique ou émotionnel. Il arrive que les parents s’impatientent lorsque le nourrisson pleure beaucoup, puisqu’ils perçoivent ces pleurs comme un signe que quelque chose ne va pas bien. L’inrmière doit insister auprès des parents pour qu’ils gardent leur calme en tout temps et ne secouent jamais leur bébé, ce qui pourrait se solder par un syndrome du bébé secoué (SCP, 2016a, 2016b). Une attitude rassurante, empreinte d’empathie et de douceur, ainsi que quelques suggestions et conseils thérapeutiques calment leur anxiété, souvent exacerbée par le manque de sommeil et leur préoccupation constante du bien-être de leur nourrisson. La participation des proches et de la famille élargie peut être sollicitée pour venir en aide aux parents durant cette période difcile. À défaut d’en trouver la cause, il est possible d’abréger les épisodes de maussaderie et de pleurs en aidant les parents à modier leurs interventions pour répondre rapidement aux besoins du nourrisson. L’ENCADRÉ 6.10 présente d’autres approches de prise en charge des coliques. Les parents sont encouragés à en essayer le plus grand nombre possible, car chaque nourrisson peut y réagir différemment.

Chapitre 6

Problèmes de santé du nourrisson

265

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 6.10

Prise en charge du nourrisson souffrant de coliques

L’inrmière doit expliquer aux parents les mesures à prendre pour soulager leur enfant qui a des coliques. • Placer le nourrisson en décubitus ventral sur une bouillotte d’eau tiède isolée ou sur une serviette éponge préchauffée. • Masser l’abdomen du nourrisson. • Répondre immédiatement à ses pleurs. • Le changer fréquemment de position, marcher en le tenant à l’horizontale, visage vers le bas, la main du parent se trouvant sous l’abdomen du nourrisson pour y appliquer une pression délicate FIGURE A.

• Placer le nourrisson dans une balancelle (électrique ou mécanique) pour bébé. • Amener le nourrisson faire une promenade en automobile ou à l’extérieur pour le changer de milieu. • Utiliser un dispositif commercial dans le berceau qui simule la vibration et le bruit d’une promenade en automobile, ou qui fait entendre un son apaisant, des bruits utérins ou de la musique. • Utiliser des biberons qui réduisent la déglutition d’air (incurvés ou munis de sacs souples). • Administrer de plus petits boires plus fréquemment, faire faire le rot au nourrisson pendant et après les boires en le plaçant sur l’épaule ou en l’assoyant droit, puis l’installer dans un siège en position redressée après les boires. • Lui offrir une suce pour stimuler la succion. • Pour la mère qui allaite, éviter tous les produits laitiers pendant une période d’essai. • Si des membres de la famille fument, leur demander de fumer à l’extérieur. • Donner une dose appropriée d’acétaminophène sous forme d’élixir ou de suppositoire en suivant les conseils du médecin (non recommandé pour un usage quotidien).

FIGURE A Cette position peut soulager le nourrisson de

ses coliques. • Utiliser un porte-bébé ventral. • Emmailloter le nourrisson étroitement au moyen d’une couverture douce et extensible.

6.5.2

La documentation de la campagne Dodo sur le dos peut être consultée sur le site Web du ministère de la Famille (www.mfa.gouv.qc.ca) ; la brochure Sommeil sécuritaire pour votre bébé est accessible sur le site Web de l’Agence de la santé publique du Canada (www.canada.ca/fr/santepublique.html).

266

Partie 3

• Si rien ne réduit les pleurs, placer le nourrisson dans son berceau et le laisser pleurer. Prendre périodiquement l’enfant et le réconforter, puis le recoucher. • Tenir des notes sur l’heure où les pleurs commencent, sur les circonstances qui entourent ces épisodes à la maison, sur le type et la quantité du dernier boire, ainsi que sur la durée des pleurs et leurs caractéristiques. Ces informations n’arrêteront pas les pleurs, mais cela peut aider le médecin à en reconnaître la cause possible.

Syndrome de mort subite du nourrisson

Le syndrome de mort subite du nourrisson (SMSN) se dénit comme le décès inattendu d’un enfant en santé de moins de un an qui demeure inexpliqué après une autopsie complète, y compris un examen des lieux où la mort s’est produite et une revue de l’observation clinique. Même si le SMSN peut survenir au cours de la période néonatale (de 0 à 27 jours), plus de 90 % des cas se produisent pendant la période postnatale (de 28 à 364 jours) (Gilbert, Auger, Wilkins et al., 2013). L’incidence du SMSN au Canada pendant la période postnatale a diminué au cours des dernières décennies, passant de 36,9 cas sur 100 000 naissances en 2000 à 6,5 cas sur 100 000 naissances en 2015 (Statistique Canada, 2018). Cette remarquable baisse de 82 %

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

est attribuable à la campagne Dodo sur le dos lancée en 1999. Toutefois, le SMSN demeure la première cause de décès chez les enfants âgés de 28 jours à 1 an (Université d’Ottawa, 2017).

Étiologie L’étiologie du SMSN a fait l’objet de nombreuses théories, mais sa cause réelle reste inconnue. Le TABLEAU 6.2 présente les principales caractéristiques épidémiologiques du SMSN. Selon une hypothèse, le SMSN serait lié à des anomalies du cervelet et de la régulation neurologique des centres de contrôle cardiorespiratoires, lesquels agissent sur les réactions physiologiques et d’éveil lorsqu’une anomalie potentiellement mortelle survient durant le sommeil (Bejjani, Machaalani et Waters, 2013). Ces anomalies comprennent une apnée du sommeil prolongée, une fréquence

TABLEAU 6.2

Épidémiologie du syndrome de mort subite du nourrisson

FACTEUR

CIRCONSTANCES

Âge de pointe

• De deux à trois mois • En moyenne, au moment du décès, les nourrissons prématurés morts d’un SMSN avaient six semaines de plus que les nourrissons à terme morts par SMSN.

Appartenance ethnique

• La fréquence des cas est supérieure chez les Afro-Américains, les Amérindiens et les Latino-Américains. En 2007, le SMSN était 1,9 fois plus fréquent chez les nourrissons afro-américains que chez les nourrissons à la peau blanche. • Le décubitus ventral était également plus utilisé chez les Afro-Américains en 2001 (21 % chez les Afro-Américains, contre 11 % chez les nourrissons à la peau claire).

Facteurs liés à la mère

• Jeune âge, tabagisme (particulièrement durant la grossesse), soins prénataux négligents, toxicomanie (héroïne, méthadone, cocaïne) • Risque accru chez les nourrissons exposés à la fumée secondaire

Fratrie

• Fréquence des cas de SMSN parfois supérieure chez les frères et sœurs

Habitudes alimentaires

• Fréquence des cas moindre chez les nourrissons allaités

Habitudes de sommeil

• Le risque le plus élevé est associé au décubitus ventral, à l’utilisation de literie ou de matelas mous, à la chaleur excessive (stress thermique), au partage du lit avec un adulte, surtout des divans ou des lits non destinés aux nourrissons, et au partage du lit avec un adulte fumeur. • Les nourrissons dormant avec un adulte sont plus à risque s’ils ont moins de 11 semaines.

Incidence

• Au Canada, le SMSN a causé 25 décès chez des nourrissons en 2015 (Statistique Canada, 2018).

Moment de l’année

• Incidence accrue durant l’hiver

Moment du décès

• Durant le sommeil

Naissance

• Fréquence des cas supérieure chez : – Nourrissons prématurés, surtout nourrissons de très faible poids ou d’extrêmement faible poids à la naissance – Nourrissons issus d’une grossesse multiplea – Nouveau-nés présentant un indice Apgar faible – Nourrissons présentant des troubles du système nerveux central et des troubles respiratoires, comme la dysplasie bronchopulmonaire – Frères et sœurs d’un premier-né (augmentation avec l’ordre de naissance) – Nourrissons ayant des antécédents de maladie

Sexe

• Le SMSN affecte de façon plus marquée les nouveau-nés de sexe masculin, qui sont 50 % plus nombreux à être touchés par tranche de 1 000 naissances vivantes de chaque sexe (Mage et Donner, 2004).

Statut socioéconomique

• Taux accru chez les populations défavorisées

Suce

• Fréquence des cas moindre chez les nourrissons endormis avec une suce

a

Bien que le fait soit rare, des jumeaux peuvent mourir simultanément de SMSN. Sources : Adapté de American Academy of Pediatrics (AAP) (2011). SIDS and other sleep-related infant deaths: Expansion of recommendations for a safe infant sleeping environment. Pediatrics, 128 (5), 1030-1039 ; Statistique Canada (2017). Principales causes de décès, enfants, selon le sexe, Canada. Repéré à www5.statcan.gc.ca/cansim/a05?lang=fra&id=1020562.

accrue des pauses inspiratoires brèves, une respiration périodique excessive et un défaut de la réaction d’éveil à l’accroissement des taux de dioxyde de carbone ou à la baisse des taux d’oxygène. L’apnée du sommeil ne serait toutefois pas à l’origine du SMSN. La grande majorité des nourrissons qui font de l’apnée n’en meurent pas, et seule une minorité de victimes du SMSN auraient été atteintes d’autres malaises graves du nourrisson. Selon de nombreuses études et méta-analyses, il

n’y aurait aucun lien entre le SMSN et les vaccins infantiles (Moon et Fu, 2012). L’hypothèse d’une prédisposition génétique au SMSN parmi les étiologies a été émise, notamment une déficience de la composante du complément C4 ainsi que la présence de polymorphismes affectant les gènes de l’interleukine, le facteur de croissance, le facteur de nécrose tumorale et l’interféron gamma (Opdal et Rognum, 2011). Parmi les autres facteurs étiologiques proposés gurent

Chapitre 6

L’indice d’Apgar est abordé dans le chapitre 21 du manuel de Lowdermilk, D.L., Perry, S.E., et Cashion, K. (2018). Périnatalité. Montréal : Chenelière Éducation.

Problèmes de santé du nourrisson

267

6

des vulnérabilités propres à certains nourrissons telles qu’une malformation congénitale au cerveau, un développement anormal in utero ou en période néonatale, et le positionnement ventral pendant le sommeil (Matthews et Moore, 2013).

Facteurs de risque du syndrome de mort subite du nourrisson Une étude rétrospective révèle qu’au moins un des facteurs décrits ci-dessous était en cause dans 96 % des cas de SMSN et que, dans 78 % des décès, on a relevé la présence de 2 à 5 de ces facteurs (Ostfeld, Esposito, Perl et al., 2010).

Tabagisme De nombreuses études épidémiologiques ont fait ressortir le tabagisme maternel durant la grossesse comme l’un des facteurs majeurs du SMSN ; la fumée de tabac dans l’environnement du nourrisson après sa naissance pourrait également avoir un lien avec des cas de SMSN (AAP, 2011). Selon une méta-analyse, l’exposition à la fumée de tabac exacerberait le risque de SMSN selon un facteur de 2,25 durant la grossesse et de 1,97 en période postnatale comparativement à un environnement sans fumée (Zhang et Wang, 2013).

Partage du lit Selon deux récentes méta-analyses, le risque de SMSN serait signicativement plus élevé chez les nourrissons qui partagent leur lit avec un adulte ou un autre enfant (cododo) que chez ceux qui dorment seuls (Carpenter, McGarvey, Mitchell et al., 2013 ; Das, Sankar, Agarwal et al., 2014). Selon une enquête rétrospective, il y aurait deux fois plus de cas de suffocation ou d’étranglement chez les nourrissons qui dorment sur un canapé, probablement parce qu’ils auraient dormi avec une autre personne (Rechtman, Colvin, Blair et al., 2014). D’autres études ont établi une corrélation entre un nombre de cas plus élevé de SMSN et le partage du lit du nourrisson avec une mère fumeuse ou avec plusieurs membres de la famille, et l’asphyxie accidentelle résultant du partage du lit par un adulte endormi et un nourrisson (AAP, 2011 ; Blair, Sidebotham, Pease et al., 2014).

Arythmies cardiaques Une hypothèse soulève la possibilité d’un prolongement de l’intervalle QT ou d’autres arythmies à l’électrocardiogramme comme causes possibles du SMSN. Les dernières canalopathies ioniques cardiaques, qui se produisent à la suite de mutations génétiques, peuvent entraîner des arythmies létales et s’avèrent être un facteur de risque possible pour le SMSN (Klaver, Versluijs et Wilders, 2011 ; Wilders, 2012).

Position de sommeil Le décubitus ventral peut occasionner une obstruction oropharyngée, ou nuire à l’équilibre

268

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

thermique ou à l’état de veille. Certains chercheurs ont avancé l’hypothèse qu’en décubitus ventral, les nourrissons respirent du monoxyde de carbone susceptible de déclencher le SMSN. Les nourrissons placés en décubitus ventral sur de la literie ou un matelas mous sont peut-être incapables de tourner la tête, ce qui accroît le risque de suffocation et de réinhalation létale. Une étude longitudinale met en relation la position ventrale et une insufsance artérielle circulatoire chez le nourrisson de deux à trois mois. Ce ralentissement cardiaque pourrait accroître les risques d’insufsance cardiaque pouvant causer le SMSN (Yiallourou, Walker et Horne, 2008). Le décubitus latéral pour le sommeil des nourrissons n’est plus recommandé à la maison, à la garderie et au centre hospitalier (à moins d’indications médicales), car les nourrissons placés en décubitus latéral peuvent revenir facilement en décubitus ventral. L’Agence de la santé publique du Canada (2014) recommande donc de toujours placer les nourrissons en décubitus dorsal.

Matelas et literie Les lits d’eau sont à éviter. Les peluches et les articles de literie mous (p. ex., les peaux de mouton, les oreillers, les couvertures, les douillettes) doivent être retirés du lit quand le nourrisson est endormi. De même, les bordures de protection pour lit sont à éviter, puisqu’elles ne permettent pas de réduire les blessures des nourrissons (AAP, 2011).

Facteurs de protection du syndrome de mort subite du nourrisson Une méta-analyse a révélé que l’allaitement exclusif, peu importe sa durée, diminue de façon importante le risque global de SMSN (Hauck, Thompson, Tanabe et al., 2011). Selon certaines études, l’utilisation d’une suce chez le nourrisson exercerait un effet protecteur contre le SMSN ; les données sur l’emploi des suces chez les nourrissons pendant leur première année de vie seraient plus convaincantes que celles qui établissent un lien entre leur utilisation et d’éventuelles complications dentaires ou le refus du sein (AAP, 2011). Par conséquent, l’American Academy of Pediatrics (APP) recommande le recours à la suce pour la sieste et au coucher seulement si le nourrisson s’alimente bien au sein, ajoutant qu’il ne faut pas enrober la suce d’édulcorant ni forcer le nourrisson à l’utiliser. Le Groupe de travail sur le syndrome de mort subite du nourrisson de l’AAP (2011) recommande de placer tous les nourrissons en décubitus dorsal pour le sommeil. Il insiste aussi sur le fait de faire de même pour les enfants prématurés dont l’état de santé est stable ainsi que pour les nourrissons ayant reçu un diagnostic de reux gastro-œsophagien, à moins qu’il y ait un problème particulier des voies respiratoires supérieures faisant en sorte que le

risque de mourir de cette affection soit plus élevé que celui du SMSN. Il n’a pas été démontré que le décubitus dorsal pour le sommeil augmente le risque d’étouffement ou d’aspiration chez les nourrissons, y compris chez ceux atteints de reux gastro-œsophagien (AAP, 2011). Depuis le début de la campagne Dodo sur le dos en 1999 au Canada, on a observé une augmentation des cas de plagiocéphalie positionnelle, comme cela est expliqué dans la section 6.5.4 de ce chapitre. Il est recommandé de changer la position de la tête du nourrisson pendant son sommeil pour prévenir ce problème. Le nourrisson peut être placé en décubitus ventral durant ses périodes d’éveil pour prévenir la plagiocéphalie positionnelle et favoriser le renforcement des muscles de la ceinture scapulaire (AAP, 2011). Il a également été démontré que le maintien à jour de l’état vaccinal des nourrissons protège contre le SMSN.

Diagnostic Même si la cause du SMSN demeure inconnue, les autopsies révèlent des signes pathologiques constants tels que l’œdème pulmonaire et les hémorragies intrathoraciques, qui conrment le diagnostic. Par conséquent, la pratique d’une autopsie sur tous les nourrissons décédés chez qui on soupçonne un SMSN est recommandée, et les résultats doivent être transmis aux parents

le plus rapidement possible après le décès. Dans le cas du SMSN et de la suffocation accidentelle ou intentionnelle, comme le trouble factice imposé à autrui, les résultats de l’autopsie sont pratiquement les mêmes. Les personnes ayant peu d’expérience ou de formation pour réaliser des autopsies, comme les coroners au lieu des médecins légistes, risquent donc de ne pas identier correctement certains décès attribuables au SMSN.

Pronostic Aucune épreuve diagnostique ne permet de prédire quels seront les nourrissons qui survivront, et une surveillance à domicile ne garantit pas la survie. Il n’a pas été établi que les frères et sœurs nés après la mort d’un nourrisson par SMSN sont exposés à un risque accru à l’égard de cette complication. Même si ce risque est légèrement supérieur, les familles peuvent être assurées à 99 % qu’aucun autre de leurs enfants ne décédera du SMSN. La surveillance respiratoire à domicile pour ce groupe d’enfants n’est pas recommandée, bien que les médecins y aient souvent recours. Les parents peuvent aussi la demander (AAP, 2011). Rien ne prouve cependant qu’une surveillance respiratoire à domicile puisse prévenir le SMSN (Strehle, Gray, Gopisetti et al., 2012). Il faut donc évaluer au cas par cas si une telle surveillance s’impose.

6

Soins inrmiers SYNDROME DE MORT SUBITE DU NOURRISSON

Les inrmières ont un rôle important à jouer dans la prévention du SMSN en renseignant les familles au sujet des risques associés au décubitus ventral chez les nourrissons de leur naissance jusqu’à six mois, de l’utilisation de surfaces appropriées pour le sommeil du nourrisson, du tabagisme maternel et des dangers qu’il y a à laisser dormir le nourrisson sur des lits non conformes, avec des adultes ou d’autres enfants. De plus, les inrmières ont la tâche importante d’enseigner aux parents les comportements favorables à l’adoption de pratiques qui réduiront le risque de SMSN, comme cela est indiqué dans l’ENCADRÉ 6.11 . Les inrmières doivent adopter une attitude proactive pour contribuer à réduire davantage l’incidence du SMSN ; la planication du congé postpartum, le moment du congé des nouveau-nés, les visites de suivi à domicile, les visites à la clinique de pédiatrie et celles prévues pour la vaccination constituent d’excellentes occasions pour offrir aux parents des renseignements à ce sujet.

Des données indiquent qu’un faible pourcentage d’inrmières continuent de placer les nourrissons en bonne santé en décubitus latéral au centre hospitalier (Mason, Ahlers-Schmidt et Schunn, 2013). Beaucoup de professionnels de la santé craignent que la position en décubitus dorsal pour le sommeil expose le nourrisson au risque qu’il aspire ses vomissements ou ses sécrétions ; pourtant, aucune étude ne révèle une augmentation des cas de décès, de régurgitation durant le sommeil, d’aspiration, d’asphyxie ou d’insufsance respiratoire associée au décubitus dorsal chez les nourrissons (AAP, 2011).

L’Agence de la santé publique du Canada (www.canada.ca/fr/ sante-publique.html) a produit la brochure Sommeil sécuritaire pour votre bébé à l’attention des nouveaux parents.

Soutenir les parents qui doivent composer avec le décès d’un nourrisson

10

À plus d’un égard, le décès de leur nourrisson par SMSN représente une situation de crise pour les parents. En plus du deuil et du chagrin causés par la mort de leur enfant, les parents doivent faire face à une tragédie qui est subite, inattendue et inexpliquée. L’intervention psychologique offerte à la famille tient compte de ces variables additionnelles 10 .

Le processus de deuil et la peine qui en découle sont traités dans le chapitre 10, Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chro­ nique ou d’un handicap, ou en n de vie.

Chapitre 6

Problèmes de santé du nourrisson

269

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 6.11

Mesures préventives du syndrome de mort subite du nourrisson

L’inrmière doit informer les parents des mesures à prendre pour assurer à leur bébé un environnement de sommeil sans danger et pour réduire le risque de SMSN. L’Agence de la santé publique du Canada (2014) recommande les cinq mesures préventives suivantes : 1. Offrir un environnement sans fumée avant et après la naissance. 2. Allaiter l’enfant au moins pendant les six premiers mois. 3. Coucher le nourrisson sur le dos, tant pour la sieste que pour la nuit FIGURE A. 4. Coucher le nourrisson dans un lit d’enfant pourvu d’un matelas ferme et éviter tout article de literie mou (oreiller, douillette, bordures de protection, etc.). 5. Mettre le berceau, le lit d’enfant ou le moïse près du lit des parents pendant les six premiers mois, et ne jamais coucher l’enfant dans un lit, sur un canapé ou dans un fauteuil occupé par un adulte.

Arrivée au service des urgences

FIGURE A Coucher le nourrisson

sur le dos, dans son lit et sans objets encombrants aide à prévenir le SMSN.

Découverte du nourrisson L’information suivante ne concerne pas directement l’inrmière, mais elle contient des éléments importants à connaître pour que celle-ci puisse planifier ses interventions par la suite. Dans la majorité des cas de SMSN, c’est la mère qui découvre l’enfant décédé dans son berceau. En général, l’enfant est retrouvé dans un lit désordonné, blotti dans un coin et la tête enfouie sous des couvertures. Un liquide spumeux teinté de sang emplit sa bouche et ses narines, et le nourrisson est parfois étendu, le visage contre le matelas, au milieu de ses sécrétions, ce qui suggère qu’il est mort au bout de son sang. La couche contient de l’urine et beaucoup de selles, ce qui concorde avec un type de mort tragique. Les mains peuvent serrer les draps, puisque l’enfant était en détresse avant de mourir. L’aspect initial de l’enfant, combiné au choc d’une découverte si inattendue, amplie l’horreur chez les parents. Le parent qui découvre le nourrisson doit faire face au choc initial, à la panique, au chagrin, aux questions des autres membres de la famille et aux décisions à prendre pour obtenir de l’aide. Les premiers intervenants sont les policiers et les ambulanciers. Idéalement, ils prennent la situation en

270

Partie 3

charge en posant quelques questions. Ils ne font aucunement allusion à un possible préjudice, mauvais traitement ou acte de négligence. Ils émettent des jugements prudents concernant toute tentative pour réanimer l’enfant et ils réconfortent la famille, dans la mesure de leurs moyens. Ces intervenants détiennent sufsamment de connaissances au sujet du SMSN pour en reconnaître les caractéristiques et aviser les parents que leur enfant est probablement décédé d’une maladie impossible à prédire ou à prévenir. Une approche empreinte d’empathie et de délicatesse pour la famille pendant les premières minutes aide à atténuer l’immense culpabilité et l’angoisse qu’engendrent généralement ce type de décès.

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Le premier contact de l’inrmière avec la famille se fait généralement au service des urgences, lorsqu’un médecin voit le nourrisson et constate son décès. L’inrmière ne tente généralement aucune manœuvre de réanimation pendant le passage au service des urgences, et ce, en raison de plusieurs enjeux cliniques et éthiques. Elle ne pose que des questions factuelles aux parents, par exemple à quel moment ils ont trouvé le nourrisson, quelle était son apparence et qui ils ont appelé pour obtenir de l’aide. Elle doit absolument éviter toute remarque visant à établir une quelconque responsabilité, par exemple : Pourquoi n’avez-vous pas vérié l’état de l’enfant plus tôt ? Comment se faitil que vous n’ayez pas entendu les cris de l’enfant ? La tête était-elle sous une couverture ? Les frères et sœurs étaient-ils jaloux de cet enfant ? C’est à l’arrivée des parents au service des urgences que la possibilité d’une autopsie leur est suggérée. Bien qu’il puisse être difcile d’aborder la question avec les parents qui sont dans un état émotif vif, le médecin peut leur expliquer qu’il s’agit du seul moyen de conrmer le diagnostic hors de tout doute. Les instructions à propos de l’autopsie et des funérailles devront possiblement être répétées ou transmises par écrit. Si la mère allaitait l’enfant, il faut la renseigner au sujet de l’arrêt soudain de l’allaitement. Il faut également contacter tous les intervenants médicaux effectuant un suivi du nourrisson an de leur apprendre la nouvelle et ainsi éviter qu’ils contactent les parents par mégarde. Les parents qui traversent un deuil périnatal accordent une extrême importance à l’attitude des professionnels de la santé durant leur processus de deuil. Par leur comportement, de nombreux professionnels de la santé peuvent paraître insensibles ou indélicats. Selon les résultats des études, les inrmières et les médecins gagneraient à suivre une formation plus poussée sur le deuil (Flenady, Boyle, Koopmans et al., 2014).

Adieu au bébé et départ des parents Un autre aspect important des soins aux parents prodigués avec compassion consiste à leur permettre de dire adieu au bébé. L’inrmière doit s’assurer que le moment du dernier au revoir est aussi silencieux, paisible et calme que possible. Il est suggéré d’encourager les parents à prendre leur enfant avant de quitter le service des urgences. L’infirmière peut également s’assurer que les parents seront reconduits à la maison par un proche ou encore les accompagner jusqu’à leur véhicule.

Suivi psychologique du personnel soignant Une séance de verbalisation (debrieng) peut aider les professionnels de la santé qui ont eu affaire avec la famille d’un nourrisson décédé à surmonter les sentiments qu’inspirent souvent les victimes de SMSN amenées au service des urgences. Il existe des lignes directrices complètes pour les professionnels de la santé qui procèdent aux enquêtes dans les cas de SMSN an de venir en aide aux familles et de conrmer que la mort du nourrisson n’est pas due à une autre cause, comme la maltraitance (AAP, 2011).

Retour à la maison Lorsque les parents reviennent à la maison, ils doivent recevoir la visite d’un professionnel compétent et qualié le plus tôt possible après le décès. Lors des premières visites, l’inrmière doit établir ce que les parents savent à propos du SMSN, ce qu’ils croient qu’il s’est produit, et la manière dont ils ont communiqué la nouvelle à leurs enfants et à leurs proches. Si des questions comme « Comment cela a-t-il pu arriver à notre bébé ? » ou « Qui est responsable de cette tragédie ? » sont soulevées par les parents, l’inrmière doit se garder de vouloir offrir une réponse impossible à fournir. Il est probable que ces questions habiteront les parents pour les mois ou les années à venir. Idéalement, il faut faire preuve de souplesse quant au nombre de visites et aux plans pour les interventions subséquentes. Par exemple, au début, les frères et sœurs de l’enfant décédé

6.5.3

Malaise grave du nourrisson

Le malaise grave du nourrisson (MGN), autrefois appelé quasi-syndrome de mort subite du nourrisson, fait généralement référence à un événement subit et traumatisant pour l’observateur ; le nourrisson peut manifester une apnée 15 , un changement de teint (pâleur, cyanose, rougeur), un changement de tonicité musculaire (habituellement hypotonie), de la suffocation, un hautle-cœur ou une toux, un état nécessitant en

peuvent sembler accepter l’explication et bien s’adapter, mais plus tard, ils pourraient refuser d’aller dormir ou poser des questions sur les tombes ou les funérailles, ce qui indique qu’ils ont besoin d’aide pour affronter l’idée de la mort. Les parents soumis aux questions d’un enfant survivant ont aussi besoin d’aide. La naissance d’un autre enfant et sa survie, surtout au-delà de l’âge qu’avait l’enfant décédé, représentent des étapes importantes pour les parents. L’inrmière doit également aider les parents à apaiser les sentiments de culpabilité qui les assaillent et qui se retournent parfois contre leur partenaire ; il faut éviter autant que possible qu’une crise conjugale s’ajoute à la situation de deuil qu’ils traversent.

6

Processus de deuil Certains parents sont en mesure de discuter ouvertement de leurs émotions, et l’inrmière doit encourager ce mécanisme de gestion de crise. Toutefois, d’autres parents seront peut-être plus rébarbatifs à l’idée de partager leur peine ; dans ce cas, l’inrmière peut encourager l’expression des émotions en leur demandant s’ils pleurent ou s’ils se sentent tristes, en colère, ou coupables. Cela a comme objectif de les amener à éprouver leurs émotions plutôt que de seulement admettre leur existence. Lors d’une de ces rencontres, il faut aider les parents à explorer leurs mécanismes de gestion de crise an de déterminer s’ils sont efcaces et à envisager de nouvelles approches s’ils ne le sont pas. Par exemple, un des parents peut s’empêcher de discuter de la mort par crainte de froisser l’autre parent, mais il est possible que les deux parents aient besoin de savoir comment l’autre se sent à l’égard de la situation. Étant donné que le deuil reste longtemps présent, il est possible d’envisager une rencontre avec d’autres parents qui ont traversé la même épreuve. Les parents qui continuent d’avoir des questions au sujet du décès de leur nourrisson pendant des mois, voire des années après sa mort, doivent pouvoir les poser au médecin, jusqu’à ce qu’ils aient appris à composer avec la perte de leur enfant.

général une intervention majeure, voire une réanimation cardiorespiratoire (RCR) par la personne soignante témoin de l’événement (Adams, Good, et Defranco, 2009). La dénition du MGN peut inclure l’apnée, bien que cet accident inopiné et brutal puisse également survenir en l’absence de celle-ci (Silvestri, 2009).

15 L’apnée est traitée dans le chapitre 15, Troubles liés au système respiratoire.

Les résultats de l’étude Collaborative home infant monitoring evaluation (CHIME) ont révélé que l’apnée et la bradycardie sont survenues à Chapitre 6

Problèmes de santé du nourrisson

271

des seuils d’alarme tant conventionnels que très élevés chez tous les groupes de nourrissons étudiés : frères et sœurs de nourrissons décédés par SMSN, nourrissons ayant subi un MGN, nourrissons prématurés symptomatiques (apnée et bradycardie) et asymptomatiques pesant moins de 1 750 g à la naissance, et nourrissons nés à terme en bonne santé. De plus, environ 30 % des nourrissons ayant subi un MGN sont nés avant la 37e semaine de grossesse (Hunt et Hauck, 2016). Par ailleurs, de nombreux nourrissons font de l’apnée et de la bradycardie sans pour autant en décéder. Aussi, pour certains auteurs, l’apnée ne serait pas un précurseur immédiat du SMSN, et la surveillance cardiorespiratoire ne représente pas un outil efcace pour dépister les nourrissons exposés à un risque particulier à l’égard du SMSN (AAP, 2011).

Diagnostic

Cyanose : Coloration bleutée de la peau, du lit unguéal et des muqueuses, causée par la présence d’hémoglobine désaturée dans les capillaires ; elle constitue un signe tardif d’hypoxie.

Les éléments essentiels du diagnostic du MGN incluent une description détaillée de l’événement, le nom de la personne qui en a été témoin et sa relation avec le nourrisson, l’endroit où se trouvait le nourrisson au moment de l’événement et, le cas échéant, les activités en cause (p. ex., durant ou après un boire, bien attaché dans le siège d’auto, en présence de frères et de sœurs ou d’autres enfants mineurs) ainsi que le type de vêtements que portait le nourrisson. De plus, il faut procéder à un historique prénatal et postnatal. Il est parfois approprié d’observer le nourrisson pendant son passage au service des urgences, notamment sa façon de respirer et sa réaction aux boires. Il faut bien examiner le nourrisson prématuré lorsqu’il est attaché dans un siège d’auto. S’il a été mal positionné, il peut être sujet à une obstruction respiratoire, ce qui cause l’apnée et la cyanose. Les diagnostics observés chez des nourrissons ayant manifesté un MGN incluent des phénomènes neurologiques tels que des troubles convulsivants (de 10 à 20 % des cas observés), des problèmes gastro-intestinaux, dont le reflux gastro-œsophagien (48 %), des maladies respiratoires (de 20 à 30 %), des troubles cardiaques (de 10 à 20 %), des anomalies des oreilles, du nez ou de la gorge, des problèmes d’ingestion, un trouble factice imposé par autrui ou la maltraitance (moins de 5 % chacun). Dans certains cas, plus d’un diagnostic sera posé (Chu et Hageman, 2013). S’il est impossible d’établir un diagnostic sous-jacent à l’aide de la liste mentionnée plus haut, une surveillance à domicile peut être recommandée. Le type de surveillance le plus fréquemment utilisé consiste à enregistrer en continu les rythmes cardiaque et respiratoire (système de surveillance ou moniteur cardiorespiratoire). Les moniteurs cardiorespiratoires à

272

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

quatre canaux (ou multicanaux) permettent de surveiller la fréquence cardiaque, la respiration (impédance thoracique), le débit d’air nasal et la saturation en oxygène. Un autre système plus élaboré, la polysomnographie (étude du sommeil), enregistre également les ondes cérébrales, les mouvements des yeux et du corps, la manométrie œsophagienne et les taux de dioxyde de carbone en fin d’expiration. Toutefois, aucun de ces tests ne permet de prédire le risque d’apnée ou de MGN. Certains enfants peuvent subir des épisodes d’apnée malgré des résultats normaux.

Approche thérapeutique Le traitement du nourrisson victime d’un MGN dépend de la maladie sous-jacente. Le traitement de l’apnée récurrente (sans trouble organique sousjacent) repose habituellement sur une surveillance continue des rythmes cardiorespiratoires à la maison et, dans certains cas, sur l’utilisation de méthylxanthines (stimulants respiratoires, comme la théophylline ou la caféine). La décision de cesser la surveillance se fonde sur l’état de santé clinique du nourrisson. En général, la surveillance peut être arrêtée lorsque les nourrissons victimes de MGN ont passé deux ou trois mois sans subir un nombre important d’épisodes nécessitant une intervention. Les moniteurs d’apnée les plus récents utilisés à domicile permettent de télécharger l’information, ce qui aide le médecin à décider à quel moment la surveillance à domicile peut être arrêtée. Il faut toutefois se rappeler que le moniteur d’apnée à domicile ne peut prévenir le décès par SMSN (Strehle et al., 2012). De plus, les moniteurs à impédance détectent les mouvements de la paroi thoracique, mais non l’apnée obstructive, à moins que l’épisode ne soit accompagné d’une importante bradycardie. Le diagnostic de MGN soulève beaucoup d’anxiété et d’inquiétude chez les parents, et la mise en place d’une surveillance à domicile représente un fardeau logistique et émotionnel additionnel. Les parents d’un nourrisson surveillé au moyen d’un moniteur d’apnée à domicile peuvent éprouver une détresse émotionnelle, en particulier des sentiments de dépression et d’hostilité au cours des quelques premières semaines qui suivent le congé hospitalier. Pour les parents d’un enfant victime de SMSN qui ont un nouveau nourrisson à surveiller au moyen d’un moniteur d’apnée à domicile, l’incertitude quant à l’avenir de l’enfant et le deuil de l’enfant perdu amplient le sentiment d’anxiété. La surveillance de l’apnée à domicile peut cependant leur offrir un sentiment de contrôle relatif quant à la survie de l’enfant pendant la période d’incertitude.

Soins inrmiers MALAISE GRAVE DU NOURRISSON

Quand une surveillance s’impose, l’inrmière peut devenir une source importante de soutien pour les parents, car elle peut observer l’état du nourrisson et intervenir immédiatement en cas d’apnée, y compris en appliquant la RCR 14 . Pour aider la famille à s’adapter à toutes ces nouveautés, il faut veiller à préparer adéquatement le congé après la naissance du nourrisson et à remettre aux parents des instructions écrites. Au cours des premières semaines suivant le congé, les parents peuvent bénécier des services d’un professionnel de la santé prêt à répondre à leurs questions au sujet des fausses alarmes et des autres problèmes techniques.

Soutenir la famille Beaucoup de facteurs de stress observés au cours de la période de surveillance s’apparentent à ceux que vivent les familles avec un enfant souffrant d’une maladie chronique. L’enfant qui souffre d’apnée ou qui se trouve sous moniteur cardiorespiratoire a parfois d’autres besoins en matière de santé, tels qu’une gastrostomie, une trachéotomie et une stomie, ainsi qu’une myriade de médicaments ou de traitements, ce qui est susceptible d’intensier le stress des parents. Les parents font état d’un stress accru qui inclut la peur de perdre l’enfant, la peur de ne pas être à la hauteur des responsabilités qu’implique la surveillance à domicile, le manque de répit, le manque de temps pour les autres enfants et le conjoint, l’isolement social par rapport aux amis et à la famille élargie, les tâches incessantes et la fatigue. Pour faire face à ces effets potentiels, l’inrmière doit utiliser les

6.5.4

Plagiocéphalie positionnelle

Étiologie et physiopathologie Depuis le début de la campagne Dodo sur le dos, qui prône le décubitus dorsal pour le sommeil des bébés an de prévenir le syndrome de mort subite du nourrisson, une augmentation de l’incidence de plagiocéphalie positionnelle a été observée (Laughlin, Luerssen, Dias et al., 2011). Le terme plagiocéphalie fait référence à une déformation oblique ou asymétrique de la tête ; les expressions plagiocéphalie positionnelle, de déformation et non synostotique font référence à un problème acquis qui survient en raison du moulage du crâne au début de l’enfance, lequel est habituellement causé par la position en décubitus dorsal (van Wijk, van Vlimmeren, Groothuis-Oudshoorn et al., 2014). Étant donné que les sutures crâniennes de l’enfant ne sont pas soudées, le crâne demeure

mêmes interventions que pour les enfants souffrant d’une maladie chronique et savoir à quel moment demander une consultation si elle soupçonne des problèmes 10 . Pour alléger la responsabilité de la surveillance continue, d’autres membres de la famille, par exemple les grands-parents, peuvent apprendre à manipuler l’appareil, à lire et à interpréter les signaux, et à administrer la RCR ENCADRÉ 6.12. Il faut les encourager à s’occuper régulièrement du nourrisson pour offrir un répit aux parents. Les groupes d’entraide, composés de familles qui ont traversé avec succès l’épreuve de la surveillance cardiorespiratoire, offrent aussi un soutien. Il est également possible de se tourner vers les membres des groupes d’entraide ou vers des étudiantes en soins inrmiers comme personnes soignantes qualiées susceptibles de prendre la relève.

10 Les diverses interventions inrmières entourant un enfant souffrant de maladie chronique sont expliquées dans le chapitre 10, Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie.

14 La procédure de réanimation cardiorespiratoire est traitée dans le chapitre 14, Techni­ ques de soins.

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 6.12

Prise en charge d’un enfant en état d’apnée

L’inrmière doit expliquer aux parents la marche à suivre si leur enfant est en état d’apnée. • Le stimuler délicatement à la hauteur du tronc en le tapotant ou en le frottant. • Si le nourrisson est en décubitus ventral, le retourner sur le dos et lui donner des chiquenaudes sur les talons. • En l’absence de réponse, enclencher immédiatement la procédure de RCR en

commençant par les compressions thoraciques. • Appeler le 911 pour réclamer des services médicaux d’urgence et reprendre la RCR jusqu’à ce que les secours arrivent ou que l’enfant respire normalement. • Ne jamais secouer l’enfant. • Ne pas le stimuler pendant plus de 10 à 15 secondes avant de procéder à la RCR.

souple, et la pression prolongée exercée d’un côté du crâne le déforme FIGURE 6.7. Ainsi, lorsque le nourrisson est placé en décubitus dorsal pour dormir, l’occiput postérieur s’aplatit avec le temps FIGURE 6.8, et une région du cuir chevelu est dégarnie, un phénomène habituellement transitoire. Dans certains cas, une légère asymétrie du visage peut être observée. Le muscle sternocléidomastoïdien peut se contracter du côté préférentiel et, dans certains cas, un torticolis s’installe. Le torticolis congénital ou acquis peut provoquer la plagiocéphalie ; celle-ci peut aussi être attribuable à un syndrome craniofacial. Cette section n’aborde que la plagiocéphalie causée par le décubitus dorsal pendant le sommeil.

Sternocléidomastoïdien : Muscle pair du cou, entre le sternum et la clavicule, qui s’insère sur l’apophyse mastoïde de l’os temporal (derrière l’oreille).

Approche thérapeutique Au début, le traitement du torticolis et de la plagiocéphalie passe généralement par des exercices Chapitre 6

Problèmes de santé du nourrisson

273

6

visant à assouplir les muscles tendus et à changer de côté la tête du nourrisson pendant ses boires, son transport et son sommeil. Si la plagiocéphalie ne rentre pas dans l’ordre en quatre à huit semaines de physiothérapie, il faut faire porter au nourrisson une orthèse crânienne (casque adapté) pour réduire la pression du côté affecté du crâne FIGURE 6.9. Si aucune amélioration n’est notée avec la physiothérapie ou le port de l’orthèse au cours d’une période de deux à trois mois, le nourrisson est dirigé en neurochirurgie ou en chirurgie craniofaciale pédiatrique. Selon une étude, le repositionnement ne corrigerait pas aussi efcacement la plagiocéphalie que l’utilisation d’une orthèse crânienne. De plus, les nourrissons traités au moyen d’une orthèse crânienne étaient plus âgés et étaient traités plus longtemps, ce qui mène les auteurs à conclure qu’un dépistage précoce et une intervention hâtive au Nourrisson avec moyen d’une orthèse crânienne offrent de meilleures chances de succès.

FIGURE 6.7 plagiocéphalie A

B

C

FIGURE 6.8 Plagiocéphalie positionnelle. Aplatissement de l’arrière de la tête. B Aplatissement d’un côté de la tête. C Forme normale. A

La plagiocéphalie a essentiellement des conséquences esthétiques ; en l’absence de pression sur le cerveau, aucune atteinte cognitive sérieuse n’est à craindre. Cependant, si la plagiocéphalie n’est pas prise en charge rapidement, le

FIGURE 6.9 Orthèse crânienne utilisée pour corriger une plagiocéphalie

nourrisson peut adopter une posture asymétrique qui affectera ses transferts de position et ses déplacements au sol, et éventuellement sa coordination (Thibault, s.d.).

Prévention La prévention de la plagiocéphalie peut commencer peu de temps après la naissance. Il s’agit de placer le nourrisson en position couchée sur le dos en alternant la position de la tête du nourrisson tous les soirs, en évitant de laisser le nourrisson trop longtemps dans un siège d’auto ou une balancelle, et en plaçant l’enfant en position ventrale de 30 à 60 minutes par jour lors de ses périodes d’éveil (Laughlin et al., 2011).

Soins inrmiers PLAGIOCÉPHALIE POSITIONNELLE

Un léger aplatissement du crâne est sans conséquence, mais il faut enseigner aux parents à prévenir la plagiocéphalie en modiant la position de la tête du nourrisson durant son sommeil. Malgré une augmentation de l’incidence de la plagiocéphalie positionnelle, le décubitus dorsal est toujours recommandé pour le sommeil, puisqu’il a permis de réduire de façon notable les décès par SMSN (AAP, 2011). Pour éviter un moulage asymétrique de la tête du nourrisson, ce dernier est changé de position régulièrement. Les nourrissons sont placés en décubitus ventral sur une surface ferme lorsqu’ils sont éveillés, ce qui prévient la plagiocéphalie et renforce les muscles de la ceinture scapulaire. Cette position contribue au développement progressif des mouvements tels que rouler et se mettre à quatre pattes, qui préparent l’enfant à ramper, puis à marcher.

274

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Les inrmières occupent une position privilégiée dans les cliniques de pédiatrie ; elles peuvent en effet encourager les parents à suivre les lignes directrices qui permettront de prévenir la plagiocéphalie, faire la démonstration des changements de positionnement de la tête durant le sommeil, enseigner des exercices pour le muscle sternocléidomastoïdien (selon l’état du nourrisson) et encourager le décubitus ventral chez les nourrissons durant ses périodes d’éveil. Plus important encore, les inrmières doivent continuer d’encourager les parents à placer le nourrisson en décubitus dorsal pendant son sommeil malgré une plagiocéphalie. Les parents ne doivent pas s’alarmer de la plagiocéphalie au point d’abandonner le décubitus dorsal pour leur nourrisson, mais ils peuvent consulter un médecin pour obtenir d’autres conseils.

Analyse d’une situation de santé

Jugement clinique

Les parents d’Aïcha, un nourrisson de quatre semaines, se présentent en consultation externe à la clinique de pédiatrie à la suite d’une demande d’évaluation des allergies de leur fillette. Ils

mentionnent qu’elle régurgite du lait après chaque séance d’allaitement. Son poids progresse normalement, mais elle a des crampes après chaque boire. Les signes vitaux sont normaux.

Mise en œuvre de la démarche de soins

Collecte des données – Évaluation initiale – Analyse et interprétation

6

1. Relevez au moins sept données supplémentaires à rechercher pour compléter la collecte des données initiale. 2. Dans le dossier de naissance d’Aïcha, quel examen sanguin devez-vous vérier en lien avec une atopie possible ? 3. Si Aïcha souffre d’atopie, sera-t-elle forcément allergique toute sa vie ? Justiez votre réponse. 4. Un facteur génétique pourrait-il être la cause des manifestations que présente Aïcha ? Justiez votre réponse. SOLUTIONNAIRE

Les parents se sentent coupables de l’apparition probable d’une allergie alimentaire chez leur petite lle. Ils croient qu’ils auraient sans doute pu éviter que cela arrive.

VU dans ce chapitre

Planication des interventions – Décisions inrmières 5. Devriez-vous suggérer à la mère d’arrêter l’allaitement maternel ? Justiez votre réponse. 6. Proposez trois recommandations que les parents devraient suivre pour éviter que les symptômes aller giques ne s’aggravent. 7. Nommez deux précautions que les parents devront prendre en tout temps si Aïcha souffre d’allergies alimentaires.

La collecte des données détaillée a révélé que les deux parents souffrent d’allergies respiratoires. En plus, la mère est allergique aux arachides. Les réactions d’Aïcha ne semblent pas être de type anaphylactique. Le médecin soupçonne plutôt un problème gastro-intestinal.

Évaluation des résultats – Évaluation en cours d’évolution 8. Nommez deux signes cliniques à vérier auprès des parents d’Aïcha en lien avec la fonction gastrointestinale. 9. Nommez un examen paraclinique qui permettrait de conrmer le problème soupçonné chez Aïcha. MAIS SI...

Si tous les tests d’allergie sont négatifs, quel autre problème pourrait être suspecté chez Aïcha ? Indiquez trois manifestations cliniques que vous pourriez observer si c’était le cas.

Chapitre 6

Si les tests d’allergie sont positifs et que les parents d’Aïcha vous demandent si leur lle devra absolument éviter ces aliments toute sa vie, que devriez-vous leur répondre ?

VU dans ce chapitre À la n de la rencontre, la mère d’Aïcha vous mentionne que le bébé de sa sœur porte une orthèse crânienne qui ressemble à un casque, car il avait la tête plate. Elle vous demande ce qu’elle peut faire pour éviter que cela se produise avec sa lle. Nommez deux suggestions à lui donner.

Problèmes de santé du nourrisson

275

Chapitre

7

Problèmes de santé du trottineur et de l’enfant d’âge préscolaire Écrit par : Cheryl C. Rodgers, PhD, RN, CPNP, CPON Rose U. Baker, PhD, PMHCNS-BC Mary A. Mondozzi, MSN, BSN, RN Adapté par : Stéphanie Duval, inf., M. Sc. Maude Julien, inf., B. Sc., B. Éd.

MOTS CLÉS

OBJECTIFS

Abus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 289 Antidote . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 282 Bégaiement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 288 Cauchemar . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 286 Charbon activé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 278 Décontamination gastrique . . . . . . . . . . 282 Intoxication . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 278 Maltraitance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 289 Négligence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 289 Parasomnie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 286 Produit de santé naturel (PSN). . . . . . . 284 Saturnisme. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 283 Terreur nocturne. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 286 Trouble d’articulation du langage . . . . 289 Végétarisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 284

Après avoir étudié ce chapitre, vous devriez être en mesure : • d’enseigner aux parents les moyens à mettre en place pour favoriser un sommeil réparateur chez l’enfant ; • de décrire les principales différences entre les cauchemars et les terreurs nocturnes ; • d’enseigner les principes d’une saine alimentation et les mesures à prendre pour prévenir les carences alimentaires ; • de déterminer les principes du traitement d’urgence d’une intoxication ; • de reconnaître les manifestations cliniques des différents types d’intoxication par les métaux lourds ; • d’énoncer trois facteurs soupçonnés d’être associés à la violence et à la négligence envers les enfants ; • d’énumérer quatre éléments de l’anamnèse qui devraient éveiller des soupçons de maltraitance ; • de décrire les soins infirmiers prodigués à l’enfant victime de maltraitance.

Disponible sur • Annexes Web • À retenir • Carte conceptuelle • Solutionnaires

Guide d’études – SA06

276

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Carte conceptuelle

Cette carte conceptuelle illustre schématiquement les principaux concepts décrits dans le présent chapitre. Sa lecture vous permettra d’avoir une vue d’ensemble des notions qui y sont présentées.

7 interventions nécessitent

comme

par

comme

comme

incluent

Problèmes de santé du trottineur et de l’enfant d’âge préscolaire

Chapitre 7

Problèmes de santé du trottineur et de l’enfant d’âge préscolaire

277

7.1

Intoxication

Plus de 90 % des intoxications chez les jeunes enfants se produisent à la maison (Gummin, Mowry, Spyker et al., 2017). Au Québec, les plus récentes statistiques démontrent que 49 % des intoxications sont causées par des médicaments, et 43 %, par des produits domestiques. La plupart de ces accidents sont survenus à la maison et auraient pu être évités grâce à des astuces simples et efcaces (Institut national de santé publique du Québec PHARMACOVIGILANCE [INSPQ], 2012). Bien que les produits pharmaceutiques comme les analgésiques, les remèdes contre la toux et le Les produits suivants, qui sont en vente libre, rhume, les préparations topiques et gastropeuvent entraîner des conséquences graves, voire fatales, si l’enfant en ingère aussi peu intestinales, les antibiotiques, les que 1,25 mL ou un demi-comprimé : vitamines, les hormones et les antihistaminiques soient fréquemment la cause • le salicylate de méthyle (huile essentielle d’une intoxication, d’autres substances de Wintergreen) ; risquent aussi de provoquer un empoison• le camphre ; nement chez les enfants . En effet, de • les imidazolines topiques ; nombreux produits domestiques peuvent • la benzocaïne. causer des intoxications dont la gravité peut varier en fonction notamment de la quantité ingérée. Les causes, les manifestations cliniques et les analyses de laboratoire permettant de détecter l’acidose métabolique, qui peut être due à une intoxication à l’acide acétylsalicylique, sont abordées dans le chapitre 17 du manuel de Lewis, S.L., Dirksen, S.R., Heitkemper, M.M., et al. (2016). Médecine Chirurgie. Montréal : Chenelière Éducation.

14 L’insertion d’une sonde nasogastrique est traitée dans le chapitre 14, Techniques de soins.

ALERTE CLINIQUE

Il ne faut jamais administrer le charbon activé par voie orale à un enfant dont l’état de conscience est altéré en raison du risque d’étouffement. Il faut alors l’administrer à l’aide d’une sonde nasogastrique.

278

Partie 3

S’il y a eu des intoxications répétées chez un même enfant ou chez plusieurs enfants d’une même famille, une inrmière en santé communautaire peut être appelée à effectuer une visite au domicile pour évaluer les dangers et suggérer des mesures de prévention.

7.1.1

Manifestations cliniques

Les manifestations cliniques associées aux différents types d’intoxication sont présentées dans le TABLEAU 7.1.

7.1.2

Approche thérapeutique

Une intoxication peut exiger une intervention d’urgence ou non, mais dans tous les cas, une évaluation médicale est nécessaire an de prodiguer le traitement approprié ENCADRÉ 7.1.

Rôle des proches et des premiers répondants Les parents devraient appeler le centre antipoison avant d’entreprendre quelque intervention que ce soit. Le numéro de téléphone du centre antipoison local devrait être afché près de chaque appareil téléphonique de la maison. Selon le cas, le centre antipoison recommandera aux parents d’entreprendre le traitement à la maison ou d’amener l’enfant au service des urgences. Lorsqu’un appel est reçu, le nom et le numéro de téléphone de la personne qui appelle sont enregistrés an de rétablir la communication si elle est interrompue. Lorsque la quantité exacte ou le type de toxine ingérée ne sont pas connus, il est crucial d’amener rapidement l’enfant dans

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

un établissement de santé doté d’un service des urgences an de procéder à une évaluation en laboratoire et de le maintenir sous surveillance.

Rôle de l’inrmière Décontamination gastrique Le traitement immédiat en cas d’intoxication consiste généralement à retirer le poison ingéré en absorbant la toxine à l’aide de charbon activé, en procédant à un lavage gastrique ou en ampliant la motilité intestinale (catharsis). Toutefois, il est important de retenir que toute ingestion de produit toxique doit être traitée de façon spécique (Albertson, Owen, Sutter et al., 2011).

Lavage gastrique Il est possible qu’un lavage gastrique soit pratiqué si l’enfant est admis dans un service des urgences ; cette intervention est toutefois associée à un risque de complications sérieuses (perforation gastro-intestinale, hypoxie, aspiration), et il n’est pas prouvé qu’elle réduit la morbidité. En outre, elle peut être de peu d’utilité si elle est pratiquée plus de une heure après l’ingestion (Albertson et al., 2011 ; Benson, Hoppu, Troutman et al., 2013 ; Centre antipoison du Québec, 2018). Le lavage gastrique peut être approprié dans certains cas : admission moins de une heure après l’ingestion du produit, ingestion par un enfant dont la motilité gastro-intestinale est réduite, ingestion d’une dose toxique d’un médicament à libération prolongée et ingestion d’une quantité massive de poison mettant la vie en danger (Albertson et al., 2011). Lorsqu’un lavage gastrique est pratiqué, l’installation d’une sonde nasogastrique permet de diminuer les risques d’aspiration ; le calibre de la sonde utilisée doit être le plus grand possible pour faciliter le passage du contenu gastrique 14 . Charbon activé Le recours au charbon activé est une méthode de décontamination gastro-intestinale couramment utilisée ; il s’agit d’une ne poudre noire inodore et insipide qui absorbe de nombreux composés pour créer un complexe stable (Frithsen et Simpson, 2010 ; INSPQ, 2016). Le charbon activé est mélangé avec de l’eau, du jus ou des boissons gazeuses pour former une pâte qui n’est ni grumeleuse ni désagréable au goût, mais qui ressemble à une boue noire. Pour que l’enfant accepte plus facilement le produit, l’inrmière peut le faire boire à l’aide d’une paille après avoir versé le tout dans un contenant opaque muni d’un couvercle, ou encore dans une tasse ordinaire couverte d’un papier d’aluminium ou placée dans un petit sac en papier . Il peut être nécessaire d’installer une sonde nasogastrique pour administrer du charbon activé à de jeunes enfants ou à des enfants somnolents. L’usage de charbon activé peut entraîner certaines complications : l’aspiration du produit (en général chez les enfants somnolents ou dont le réexe nauséeux est affaibli) et, en cas de doses multiples, la constipation ainsi que l’obstruction intestinale.

TABLEAU 7.1

Intoxications les plus courantes chez les enfants

PRODUIT INGÉRÉ

MANIFESTATIONS CLINIQUES

ALERTE CLINIQUE

APPROCHE THÉRAPEUTIQUE

• L’eau de Javel à usage domestique est un produit corrosif fréquemment ingurgité, mais elle cause rarement des dommages sérieux.

• Il est contre-indiqué de provoquer le vomissement, car cela endommage de nouveau la muqueuse.

Matières corrosives (acides forts ou bases fortes) • Produits de débouchage pour les tuyaux et les toilettes

• Douleur intense et vive dans la bouche, la gorge et l’estomac

• Produits de nettoyage pour le four

• Muqueuses blanches, enées ; œdème des lèvres, de la langue et du pharynx (obstruction respiratoire)

• Détergent pour lave-vaisselle

• Vomissements violents

• Dissolvant pour moisissures

• Ptyalisme et diminution du réexe de toux

• Piles • Comprimés servant à détecter la présence de sucre dans l’urine (p. ex., ClinitestMD)

• Signes d’état de choc • Anxiété et agitation

• Les matières corrosives liquides causent plus de dommages que les préparations granuleuses en raison de leur pH plus élevé. • Les produits solides ont tendance à coller aux tissus et à les brûler, causant des dommages localisés.

• Produits de nettoyage pour prothèses dentaires • Eau de Javel

• Il faut contacter le centre antipoison immédiatement. Si c’est impossible ou si un avis et un traitement médical ne sont pas immédiatement disponibles, il peut être approprié de rincer et de nettoyer la bouche avec de l’eau (Centre antipoison du Québec, 2018). • La neutralisation est contre-indiquée (p. ex., avec du lait). Elle peut provoquer une réaction exothermique qui produit de la chaleur et amplie les manifestations cliniques, ou qui produit une brûlure thermique en plus de la brûlure chimique.

Hydrocarbures • Essence

• Suffocation et toux

• Kérosène

• Brûlures à la gorge et à l’estomac

• Huile à lampe

• Nausées

• Huile de colza minérale (trouvée dans les cires pour les meubles)

• Vomissements

• Essence pour briquets

• Faiblesse

• Térébenthine

• Cyanose

• Diluant et décapant pour peinture (certains types)

• Symptômes respiratoires :

• Altération de l’état de conscience (p. ex., une léthargie)

• L’aspiration pulmonaire du produit représente un danger immédiat (même des petites quantités peuvent causer une bronchite et une pneumonie chimique). • L’essence, le kérosène, l’essence pour briquets, l’huile de colza minérale et la térébenthine peuvent causer une pneumonie grave.

– Tachypnée – Tirage

• Il est généralement contre-indiqué de provoquer le vomissement. • Le recours à la décontamination et au lavage gastrique est discutable, même quand l’hydrocarbure contient un métal lourd ou un pesticide. • Le traitement symptomatique de la pneumonie chimique consiste à procurer une humidité élevée, à administrer de l’oxygène et des antibiotiques pour l’infection secondaire, et à maintenir l’hydratation.

– Gémissements expiratoires Acétaminophène • Analgésique et antipyrétique (p. ex., TempraMD, TylenolMD)

• Quatre phases : 1. Période initiale (de 0 à 24 heures après l’ingestion) : – Nausées – Vomissements – Diaphorèse – Pâleur 2. Période de latence (de 24 à 72 heures après l’ingestion) : – Amélioration de l’état de l’enfant

Chapitre 7

• Il s’agit de l’intoxication pharmacologique accidentelle la plus fréquente chez les enfants (Lebel et Dubé, 2015). • La dose thérapeutique recommandée d’acétaminophène est de 15 mg/ kg/dose pour les enfants, en respectant un maximum de 5 doses par 24 h. Dès que l’enfant ingère une dose plus élevée, le risque d’intoxication est présent.

• Il est généralement possible d’administrer l’antidote acétylcystéine par voie orale. Il est d’abord dilué dans un jus de fruits ou une boisson gazeuse en raison de son goût désagréable. • L’antidote est administré en 1 dose d’attaque suivie de 17 doses d’entretien. • En cas d’urgence, lorsque la voie orale est obstruée, l’acétylcystéine peut être administrée par voie I.V. en présence de toxicité liée à l’acétaminophène.

Problèmes de santé du trottineur et de l’enfant d’âge préscolaire

279

7

TABLEAU 7.1

Intoxications les plus courantes chez les enfants (suite)

PRODUIT INGÉRÉ

MANIFESTATIONS CLINIQUES

ALERTE CLINIQUE

APPROCHE THÉRAPEUTIQUE

• L’intoxication peut être causée par une ingestion ponctuelle importante (de 300 à 500 mg/kg provoquent une intoxication grave).

• Il est nécessaire d’hospitaliser l’enfant en cas d’intoxication grave.

3. Atteinte hépatique (peut durer jusqu’à 7 jours et être permanente) : – Douleur au quadrant supérieur droit – Ictère – Vomissements – Confusion – Stupeur – Anomalies de la coagulation – Possibilité d’insufsance rénale ou de pancréatite 4. Plus de 5 jours : – Rétablissement graduel de l’enfant pendant la phase hépatique, mais intoxication mortelle possible Acide acétylsalicylique (AAS) • AspirinMD

• Intoxication aiguë (premiers symptômes) : – Nausées

PHARMACOVIGILANCE

On ne doit pas administrer de l’acide acétylsalicyclique aux enfants et aux adolescents atteints d’une maladie virale en raison du risque d’apparition du syndrome de Reye (Santé Canada, 2006).

– Hyperventilation – Vomissements – Acouphène • Intoxication aiguë (manifestations cliniques tardives) : – Hyperactivité – Fièvre – Confusion – Convulsion épileptique – Insufsance rénale – Insufsance respiratoire • Intoxication chronique : – Mêmes manifestations cliniques que ci-dessus, mais d’apparition discrète (intoxication souvent confondue avec une maladie virale) – Tendance au saignement

• Elle peut être causée par une ingestion chronique (soit 100 mg/kg/jour pendant 2 jours ou plus) ; elle peut alors être plus sérieuse que l’intoxication aiguë. • Le moment où le taux de salicylate atteint son maximum dans le sérum peut être différent en cas d’ingestion d’AspirinMD entérosoluble ou en présence de concrétions.`

• Le charbon activé est administré dès que possible (sauf contre-indication si l’état mental est altéré). S’il y a des bruits intestinaux, l’administration doit être répétée toutes les 4 heures jusqu’à ce que du charbon apparaisse dans les selles. • Le recours au vomissement, au charbon activé, à un purgatif ou au lavage gastrique est possible. (Le lavage gastrique ne retirera pas les concrétions d’ASS). • L’administration de solutés contenant du bicarbonate de sodium peut corriger l’acidose métabolique, et l’alcalinisation de l’urine peut accroître l’élimination de l’AAS (celle-ci est toutefois difcile à réaliser). • Il faut prêter attention au risque de surcharge liquidienne et d’œdème pulmonaire. • Un refroidissement externe peut être utilisé en cas d’hyperthermie. • Des anticonvulsivants peuvent être administrés. • En cas de dépression respiratoire, l’administration d’oxygène et une ventilation assistée pourraient être nécessaires. • En cas de saignement, de la vitamine K peut être administrée. • Une hémodialyse peut s’avérer nécessaire dans les cas graves.

280

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

TABLEAU 7.1

Intoxications les plus courantes chez les enfants (suite)

PRODUIT INGÉRÉ

MANIFESTATIONS CLINIQUES

ALERTE CLINIQUE

APPROCHE THÉRAPEUTIQUE

• Cinq phases : 1. Période initiale (de 30 minutes à 6 heures après l’ingestion ; il est peu probable que l’enfant soit intoxiqué s’il ne présente pas de manifestations cliniques gastro-intestinales en 6 heures) :

• Les facteurs de risque de l’intoxication par le fer comprennent :

• Il est possible d’avoir recours au vomissement ou au lavage gastrique.

Fer • Supplément minéral ou multivitamine contenant du fer

– Vomissements

– Produits facilement accessibles – Contenants individuels renfermant de grandes quantités de comprimés – Manque de vigilance des parents concernant la toxicité du fer

– Hématémèse – Diarrhée – Méléna – Douleur gastrique – Toxicité grave pouvant engendrer une tachypnée, une tachycardie, une hypotension et un coma 2. Latence (jusqu’à 24 heures après l’ingestion) : – Amélioration de l’état de l’enfant 3. Intoxication systémique (de 12 à 24 heures après l’ingestion) : – Acidose métabolique – Fièvre – Hyperglycémie – Saignement

– Ressemblance des comprimés de fer avec des bonbons colorés • La dose toxique est établie en fonction de la quantité de fer élémentaire dans les divers sels (sulfate, gluconate, fumarate), laquelle varie de 20 à 33 % ; une ingestion de 20 à 60 mg/kg est considérée comme étant modérément toxique. Une ingestion de plus de 60 mg/kg est dangereuse et peut être mortelle.

• En cas d’ingestion de doses toxiques, le lavage gastrique peut être nécessaire pour éliminer tous les comprimés à croquer ou les liquides s’il n’y a pas eu de vomissement spontané. • Un traitement par chélation avec déféroxamine peut être utilisé en cas d’intoxication grave (peut donner à l’urine une coloration orange à rouge). Si la déféroxamine par voie intraveineuse est administrée trop rapidement, les signes cliniques suivants peuvent se manifester : – Hypotension – Rougeurs au visage – Éruption cutanée – Urticaire – Tachycardie – Choc • Le cas échéant, cesser l’injection, maintenir l’accès intraveineux avec une solution physiologique et aviser immédiatement le médecin traitant.

– Choc – Mort (possible) 4. Lésion hépatique (de 2 à 5 jours après l’ingestion) : – Insufsance hépatique – Hypoglycémie – Coma 5. Sténose pylorique possible entre 2 à 5 semaines (rare) Plantes • Vénéneuses : bouton d’or, lierre commun, philodendron, etc. • Non vénéneuses : violette africaine, bégonia, coléus, etc.

• Signes d’intoxication variés selon le type de plante ingérée • Possibilité d’irritation locale de l’oropharynx et de tout le tube digestif • Possibilité de symptômes respiratoires, rénaux et nerveux (système nerveux central) • Dermatite pouvant être causée par le contact direct avec les plantes

Chapitre 7

• Les plantes font partie des substances les plus fréquemment ingérées.

• Le vomissement doit être provoqué.

• Elles causent rarement des problèmes sérieux, bien que l’ingestion de certaines plantes puisse être fatale.

• Il peut être nécessaire d’apporter des soins de confort.

• S’il y a irritation, il faut laver la peau et rincer les yeux.

• Elles peuvent également provoquer la suffocation ou des réactions allergiques.

Problèmes de santé du trottineur et de l’enfant d’âge préscolaire

281

7

ENCADRÉ 7.1

Actions à prendre en cas d’intoxication

En cas d’intoxication, il est impératif, avant toute chose, de mettre n à l’exposition en retirant de la bouche les comprimés, morceaux de plante ou toute autre matière toxique. Par la suite, les quatre étapes suivantes doivent être effectuées. 1. Évaluer l’état de la victime : • Évaluer l’état neurologique ; le réévaluer régulièrement. • Prendre les signes vitaux ; les reprendre régulièrement. • Traiter les complications associées. • Évaluer la possibilité d’un traumatisme ou d’une maladie concomitante ; traiter avant l’instauration de la décontamination gastrique. • En tout temps, intervenir pour maintenir les voies aériennes dégagées et assurer la circulation sanguine ; au besoin, procéder à la réanimation cardiorespiratoire (RCR) 14 . 2. Atténuer les effets du poison : • Rincer continuellement les yeux pendant 15 à 20 minutes à l’aide d’une solution physiologique (ou avec de l’eau du robinet à la température ambiante, si toujours à domicile).

• Rincer la peau et la laver avec du savon et un linge doux ; retirer les vêtements contaminés, surtout si un pesticide, un acide, un alcalin ou un hydrocarbure est en cause. • Amener la victime d’une intoxication par inhalation dans un endroit aéré. 3. Déterminer la nature du poison : • Interroger l’enfant et les témoins. • Rechercher des indices à proximité de l’enfant (contenant vide, liquide renversé, odeur dans l’haleine) et conserver tout ce qui pourrait démontrer l’intoxication (contenant, vomissement, urine). • En l’absence d’autres indices, prêter attention aux manifestations cliniques d’intoxication potentielle, dont les symptômes d’exposition oculaire ou cutanée. • Appeler le centre antipoison ou tout autre établissement d’urgence capable de donner des conseils immédiats pour le traitement. 4. Prévenir l’absorption du poison : • Placer l’enfant en position couchée latérale, assise ou agenouillée, la tête plus basse que le thorax, pour éviter l’aspiration du produit. • Selon la prescription, administrer l’antidote, faire un lavage gastrique ou administrer du charbon activé.

Antidotes 14 La procédure de réanimation cardiorespiratoire est expliquée dans le chapitre 14, Techniques de soins.

Dans une minorité de cas d’intoxication, il existe des antidotes spécifiques pouvant neutraliser le poison. Ils sont très efcaces et devraient être disponibles dans tous les services d’urgence. Les principaux antidotes sont les suivants : • l’acétylcystéine pour l’intoxication par l’acétaminophène ; • l’oxygène pour l’inhalation de monoxyde de carbone ; • la naloxone pour les surdoses d’opiacés ;

Intoxication mercurielle

• le umazénil pour les surdoses de benzodiazépines (p. ex. diazépam, midazolam) ;

L’intoxication mercurielle est une forme rare d’intoxication par un métal lourd qui est attribuable, chez les enfants, à diverses sources comme les thermomètres ou les thermostats brisés, les ampoules uorescentes cassées, des piles boutons, des médicaments topiques, des régulateurs de pression de gaz, des purgatifs et la peinture au latex pour l’intérieur (Bose-O’Reilly, McCarthy, Steckling et al., 2010) . En l’absence de lésions aux voies digestives, le mercure n’est pas toxique s’il est ingéré. Cependant, il se transforme en gaz volatil au contact de l’air et il pénètre dans la circulation sanguine une fois qu’il a été inhalé, causant une intoxication (tremblements, perte de mémoire, insomnie, gingivite, diarrhée, anorexie, perte de poids). La forme classique d’intoxication mercurielle porte le nom d’acrodynie (extrémités douloureuses de coloration bleutée).

• les fragments d’anticorps spécifiques de la digoxine pour l’intoxication par la digoxine ; • le nitrate d’amyle pour le cyanure ; • des sérums antivenimeux pour certaines morsures ou piqûres venimeuses. ALERTE CLINIQUE

Les thermomètres au mercure ne sont plus recommandés, car s’ils se brisent, les vapeurs inhalées peuvent provoquer une intoxication. An de prévenir l’inhalation, il faut vite enlever le mercure répandu à l’aide de serviettes jetables et de gants de caoutchouc, et procéder à l’hygiène des mains par la suite.

282

Partie 3

Les métaux lourds ont une afnité pour certains produits chimiques essentiels des tissus qui doivent demeurer libres pour le fonctionnement cellulaire. Lorsque les métaux se xent à ces substances, les systèmes enzymatiques cellulaires sont inactivés. Le traitement consiste en une chélation, soit l’usage d’un composé chimique qui se combine avec le métal et permet son élimination rapide et sécuritaire par voie urinaire.

Le sirop d’ipéca, un émétique qui exerce son action en irritant la muqueuse gastrique et en stimulant le centre du vomissement, n’est plus recommandé au Québec pour le traitement immédiat de l’ingestion de poison et ne possède plus d’indication médicale. Il est considéré comme un produit naturel par Santé Canada (Albertson et al., 2011 ; INSPQ, 2013 ; Theurer et Bhavsar, 2013).

7.1.3

Intoxication par des métaux lourds

L’intoxication par un métal lourd peut survenir à la suite de l’ingestion de substances diverses (p. ex., du matériel électronique, des piles).

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Intoxication par le plomb

7.1.4

L’utilisation du plomb a diminué depuis les années 1970 (St-Laurent, Levallois, Gauvin et al., 2012). Les enfants intoxiqués par le plomb présentent rarement des symptômes, même à des taux qui nécessitent un traitement par chélation. Le diagnostic de saturnisme, soit une intoxication par le plomb, se fonde uniquement sur le dosage du plomb dans un échantillon de sang prélevé par ponction veineuse. Le niveau de préoccupation, l’urgence et la nécessité d’une intervention médicale varient à mesure que le taux de plomb augmente dans le sang. L’objectif premier des soins inrmiers en ce qui concerne le saturnisme est de prévenir l’exposition initiale de l’enfant au plomb ou de faire cesser une exposition existante (St-Laurent et al., 2012) .

Selon les données recueillies par le Centre antipoison du Québec, 5 % des appels reçus concernent l’exposition à une substance toxique par voie cutanée (Lebel et Dubé, 2015). La dermatite à rhus (herbe à puce) est l’affection de la peau la plus répandue chez les Canadiens (SickKids, 2014). Elle est provoquée par trois plantes qui contiennent une sève vénéneuse, soit l’herbe à puce (Rhus radicans L.), le sumac à vernis (Rhus vernix L.) et Rhus diversiloba. L’herbe à la puce est la plus commune des trois (SickKids, 2014). Parmi les plantes toxiques, seulement quelques-unes peuvent être mortelles. Une liste des plantes vénéneuses et non vénéneuses est présentée dans le TABLEAU 7.2.

PLANTES NON VÉNÉNEUSES

• • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • •

• • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • •

• a b

7

Plantes vénéneuses et non vénéneuses

PLANTES VÉNÉNEUSES (PARTIES TOXIQUES)

• • • •

Annexe 7.1W : Intoxication par le plomb (saturnisme).

Abricot : feuilles, tige, noyau Aracées (dieffenbachia) : toute la plante Azalée : toute la plante Berce du Caucase : sève Bouton d’or : toutes les parties Cerisier (sauvage ou cultivé) : ramilles, graines, feuillage Chêne : glands, feuillage Ciguë : toute la plante Digitale pourpre : feuilles, graines, eurs Glycine : graines, gousses Guia : baies, feuilles Houx : baies et feuilles If : toute la plante Jacinthe : bulbe Jonquille : bulbe Lierre : feuilles Lierre commun : toute la plante Philodendron : toute la plante Philodendron en fer de lance : toute la plante Poinsettiab : feuilles Pomme : feuilles, pépins Prunier : noyau Raisin d’Amérique (phytolaque d’Amérique) : racines, baies, feuilles (lorsque mangées crues) Rhubarbe : feuilles Ricin : fèves ou graines (extrêmement toxiques) Scindapsus (pothos) : toute la plante Sumac vénéneux (herbe à puce), sumac occidental : feuilles, tiges, sève, fruit, fumée des plants brûlés Tulipe : bulbe

Asparagus plumeux Bégonia Begonia hispida var. cuculifera Cactus de Noël Calathéa zébré Caoutchouc Coléus Crassule argentée Figuier pleureur Fougère de Boston Gardénia Hoya Lierre suédois Maranta à nervures blanches de Kerchove Plante aluminium (pilea) Plante araignée Plante de jade Rose Sansevière à trois bandes Tolmie de Menzies Vigne d’appartement Violette africaine

clinique

Jugement

TABLEAU 7.2

Intoxication par des plantes vénéneuses

Julie Sheppard et Marc Hess viennent d’acheter une maison ancestrale construite en 1934. Avant d’emménager, ils envisagent de la rénover en abattant quelques murs pour faire une aire ouverte. Indiquez deux recommandations que vous devriez faire au couple lorsqu’il se présente au rendezvous de suivi de grossesse de Julie.

Un dépliant d’information contenant la liste des plantes toxiques et non toxiques, autant à l’intérieur qu’à l’extérieur des maisons, est disponible sur le site Web du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux de la Capitale-Nationale (www.ciusss-capitalenationale. gouv.qc.ca).

Manger une ou deux baies, ou une ou deux feuilles, n’est probablement pas toxique. Légèrement toxique si ingéré en quantités importantes.

Chapitre 7

Problèmes de santé du trottineur et de l’enfant d’âge préscolaire

283

Soins inrmiers INTOXICATION

Jugement

clinique La mère de Noémie, une llette de quatre ans, désire offrir des suppléments vitaminiques à sa lle. Elle est toutefois ambivalente, car une amie lui a dit que certaines vitamines peuvent causer une intoxication si elles sont consommées en trop grande quantité. Elle vous demande lesquelles sont en cause et pour quelle raison. Que devriez-vous lui répondre ?

En présence d’une intoxication, le principe fondamental est de se préoccuper du maintien des fonctions vitales de l’enfant d’abord, et non de l’identication du poison. Les signes vitaux sont vériés, et une réanimation cardiorespiratoire est mise en place, au besoin, étant donné que l’état de choc constitue une complication de plusieurs types d’intoxication par des produits domestiques, en particulier les produits corrosifs. L’état de l’enfant est réévalué régulièrement, et il est essentiel d’installer et de maintenir un accès veineux pour permettre la réplétion rapide du volume intravasculaire. Il est de la responsabilité de l’inrmière du service des urgences d’être prête pour une intervention immédiate et de disposer de tout l’équipement nécessaire. Étant donné que le temps et la rapidité sont des facteurs critiques pour le rétablissement à la suite d’une intoxication sérieuse, le fait de prévoir les complications et les problèmes potentiels peut représenter la différence entre la vie et la mort.

et une préoccupation globale de la santé (76 %). Une grande proportion de Canadiens (71 %) indiquent que les produits de santé naturels sont meilleurs pour eux que les produits chimiques ou les médicaments. Compte tenu de ces chiffres, il est très important, lors de la collecte de données, que l’inrmière dresse la liste complète des produits de santé naturels que l’enfant consomme, car cette information doit compléter la liste de médicaments que l’enfant prend. Des études plus rigoureuses portant sur les PSN doivent être effectuées avant que des recommandations soient faites pour la population pédiatrique quant à l’efficacité de ces traitements parallèles ; toutefois, l’utilisation de probiotiques est recommandée dans certaines situations cliniques (Vorha et Clifford, 2016). Il y a des avantages à utiliser les probiotiques pour traiter certaines maladies comme la diarrhée associée aux antibiotiques et la diarrhée virale infectieuse aiguë, ainsi que pour contribuer à prévenir l’entérocolite nécrosante du nouveau-né. Les probiotiques peuvent aussi être recommandés pour réduire les symptômes de coliques ainsi que pour prévenir certains symptômes du syndrome du côlon irritable (Marchand, 2015).

7.2.2

7.2

Approches médicales et nutritionnelles complémentaires

7.2.1

Produits de santé naturels

La mauvaise utilisation de produits de santé naturels (PSN) expose certains enfants à des risques pour leur santé. Sont dénis comme produits de santé naturels les vitamines et les minéraux, les plantes médicinales, les remèdes homéopathiques, les remèdes traditionnels (p. ex., la médecine chinoise), les probiotiques ainsi que d’autres produits tels les acides aminés et les acides gras essentiels (Santé Canada, 2016). Selon l’enquête réalisée par Santé Canada, les vitamines Lors de la collecte de données, vous constatez que et les minéraux sont toujours la mère de Noémie s’inquiète surtout des carences les produits naturels les plus en vitamine A. Comme elle mange très peu de utilisés, soit chez 53 % de la viande rouge, elle se demande quels aliments population. Les oméga-3 suielle devrait offrir à sa lle pour réduire le risque vent avec 18 %, ainsi que le de carence. Parmi les choix d’aliments suivants, thé ou la tisane pour 11 % de lequel serait à privilégier ? la population. Les raisons les a) Les poivrons rouges et la laitue. plus fréquentes de leur utilib) Les patates douces et les carottes. sation sont le maintien de la c) Les abricots et le cantaloup. santé, la prévention de la maladie et le renforcement du d) Le lait et le thon. système immunitaire (79 %),

Jugement

clinique

284

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Végétarisme

Le végétarisme gagne en popularité au sein des familles canadiennes (Amit, 2016) en raison des inquiétudes concernant l’hypertension, l’hypercholestérolémie, l’obésité, les maladies cardiovasculaires, les cancers de l’estomac, de l’intestin et du côlon, ainsi que l’inuence des divers mouvements pour la défense des animaux. Les diététistes du Canada ont formulé un énoncé à l’appui du végétarisme pour les adultes et les enfants. Cet énoncé souligne qu’une alimentation végétarienne bien planiée convient à tous les stades de la vie et qu’elle favorise une croissance normale. Le végétarisme chez les enfants et les adolescents favoriserait l’adoption de saines habitudes alimentaires tout au long de leur vie. Ces derniers consommeraient moins de cholestérol, de gras saturés et de gras totaux, ainsi que davantage de fruits, de bres et de légumes, comparativement aux non-végétariens (Amit, 2016 ; Les diététistes du Canada, 2014). Les principaux types de végétarisme sont : • le lacto-ovo-végétarisme, qui exclut la viande, mais inclut les produits laitiers et les œufs ; • le lacto-végétarisme, qui exclut la viande et les œufs, mais pas les produits laitiers ; • le végétalisme, qui exclut tout aliment d’origine animale, y compris le lait et les œufs ; • le régime macrobiotique, qui est plus restrictif et ne permet que quelques types de fruits, de légumes et de légumineuses ;

• le semi-végétarisme, qui ajoute au régime lacto-ovo-végétarien le poisson et la volaille. Il s’agit d’une forme de plus en plus populaire de végétarisme qui ne pose pour ainsi dire aucun risque nutritionnel pour les nourrissons, à moins d’un apport gravement insufsant en matières grasses et en cholestérol alimentaires. Beaucoup de familles soucieuses d’une bonne alimentation souscrivent à des régimes végétariens qui ne cadrent pas nécessairement avec les catégories mentionnées précédemment. Par conséquent, la collecte des données nutritionnelles auprès de l’enfant et de sa famille doit permettre une énumération claire de ce qu’inclut et exclut exactement son alimentation. Parmi les principales lacunes susceptibles d’accompagner le végétarisme, il faut compter un apport décient en protéines nécessaires à la croissance, un apport calorique insufsant pour la dépense énergétique et la croissance, une piètre digestibilité de nombreux aliments naturels en vrac non traités, surtout chez les nourrissons, et les carences en vitamine B6 et B12, en niacine, en riboflavine, en vitamine D, en fer, en calcium et en zinc. 6 . Une surveillance est exercée pour déceler les signes d’anémie ferriprive et de rachitisme chez

les enfants soumis à des régimes végétalien et macrobiotique. Ces anomalies pourraient résulter de la consommation d’aliments végétaux comme des céréales non rafnées, qui nuisent à l’absorption du zinc, du calcium et du fer TABLEAU 7.3.

TABLEAU 7.3

6 Les déséquilibres vitami­ niques sont décrits dans le chapitre 6, Problèmes de santé du nourrisson.

Facteurs inuençant l’absorption du fer

AUGMENTATION

DIMINUTION

• Acidité (pH faible) : administrer le fer entre les repas (acide chlorhydrique gastrique).

• Alcalinité (pH élevé) : éviter les préparations antiacides. • Phosphates : le lait n’est pas indiqué en concomitance avec l’administration de fer.

• Acide ascorbique (vitamine C) : administrer le fer avec du jus, un fruit ou une préparation multivitaminique.

7

• Phytates : sont présents dans les céréales.

• Vitamine A

• Oxalates : sont présents dans de nombreux fruits et légumes (prunes, raisins secs, haricots verts, épinards, patates douces, tomates).

• Calcium

• Tanins : sont présents dans le thé et le café.

• Faible réserve de fer dans l’organisme

• Saturation dans l’organisme

• Viande, poisson, volaille

• Troubles associés à la diarrhée ou à la stéatorrhée

• Troubles de malabsorption

• Cuisson dans des chaudrons de fonte

• Infection

Soins inrmiers L’objectif initial des soins inrmiers en ce qui a trait au végétarisme consiste à déterminer si l’apport nutritionnel est adéquat et à éviter les lacunes, le cas échéant. L’inrmière présente aux parents les aliments indispensables aux enfants végétariens. Le guide alimentaire végétarien mis au point par Les diététistes du Canada inclut des directives pour se conformer aux recommandations minimales en matière de nutriments, ce qui comprend les protéines, le fer, le zinc, le calcium, la vitamine D, la riboavine et l’iode. Le nouveau guide alimentaire s’adapte à différents types de régimes végétariens (Les diététistes du Canada, 2014). Il n’est pas difcile de parvenir à une alimentation végétarienne nutritionnellement équilibrée (sauf dans le cas des régimes les plus stricts), mais cela nécessite une planication soigneuse et de bonnes connaissances sur les sources de nutriments. L’alimentation lacto-ovo-végétarienne convient aux enfants sur le plan nutritionnel ; toutefois, l’alimentation végétalienne requiert la prise de suppléments de vitamines D et B12 pour les enfants de 2 à 12 ans. Les végétariens devraient consommer 2 fois plus de

clinique

fer que les non-végétariens, puisque le fer d’origine végétale est moins bien absorbé Au cours d’une rencontre au domicile d’une mère que le fer d’origine animale qui pratique le végétarisme, celle-ci vous dit que (Les diététistes du Canada, ses enfants sont également végétariens. Quelle 2014). La consommation de question sur son végétarisme devriez-vous lui jus enrichis de vitamine C (en poser en premier lieu ? Justiez votre réponse. quantité modérée, et non comme substitut du lait) avec des aliments à forte teneur en fer améliorera davantage l’absorption de ce dernier (Les diététistes du Canada, 2014). Pour garantir une quantité suffisante de protéines alimentaires, il faut s’assurer de consommer les aliments à protéines incomplètes (qui ne comportent pas tous les acides aminés essentiels) avec d’autres aliments qui fourniront les acides aminés manquants. Voici les trois combinaisons alimentaires de base auxquelles recourent généralement CE QU’IL FAUT RETENIR les végétariens pour se procurer des acides aminés essentiels en quantité sufsante : Les végétariens devraient

Jugement

VÉGÉTARISME

1. Produits céréaliers (céréales, riz, pâtes alimentaires) et légumineuses (haricots, pois, lentilles, arachides) ; 2. Produits céréaliers et laitiers (lait, fromage, yogourt) ; 3. Graines (sésame, tournesol) et légumineuses.

Chapitre 7

consommer deux fois plus de fer que les nonvégétariens, puisque le fer d’origine végétale est moins bien absorbé que le fer d’origine animale.

Problèmes de santé du trottineur et de l’enfant d’âge préscolaire

285

7.3

Troubles du sommeil

Les troubles du sommeil sont fréquents chez le trottineur et l’enfant d’âge préscolaire. Entre 25 et 30 % des enfants éprouvent des problèmes de sommeil ; ce pourcentage est plus élevé chez les enfants ayant une pathologie associée (Martello, 2015) FIGURE 7.1 . Le refus de dormir et les peurs nocturnes sont multifactoriels et peuvent résulter de différents agents stressants que l’enfant a rencontrés durant la journée, comme la pression de l’apprentissage de la propreté, un changement de domicile, la naissance d’un frère ou d’une sœur, l’expérience d’une perte ou le fait d’être séparé de ses parents TABLEAU 7.4 . Les cauchemars et les terreurs nocturnes font leur apparition entre l’âge de deux et six ans, et ils entraînent des perturbations au sein de toute la famille. Les interventions pour ces troubles exigent des approches très différentes TABLEAU 7.5.

FIGURE 7.1 Les troubles du sommeil sont fréquents chez le trottineur et l’enfant d’âge préscolaire.

Les différentes formes de parasomnie sont l’éveil confusionnel, le somnambulisme, la somniloquie (parler dans son sommeil), les terreurs nocturnes et les cauchemars. Elles se produisent habituellement chez les jeunes enfants, et leur fréquence diminue habituellement lorsque l’enfant grandit (Martello, 2015).

Enseignement à l’enfant et à ses proches TABLEAU 7.4

Problèmes liés au sommeil

PROBLÈMES ET DESCRIPTION

INTERVENTIONS

Résistance au coucher L’enfant résiste au coucher et sort continuellement de sa chambre.

• Déterminer si l’enfant est mis au lit trop tôt (l’enfant peut résister au sommeil s’il n’est pas fatigué). • Proposer un objet de transition comme une doudou ou un toutou préféré et l’introduire dans un jeu imaginaire pour convaincre l’enfant que le toutou a besoin de lui. • Placer une photo des parents sous l’oreiller.

Le sommeil de nuit peut être continu, mais lorsqu’il se réveille, l’enfant refuse de se rendormir.

• Établir une routine du coucher à répéter chaque soir et appliquer des limites cohérentes en ce qui a trait au comportement de l’enfant au coucher. • Éviter de déroger aux habitudes de sommeil établies. • Utiliser la méthode de la chaise où le parent s’assois près de l’enfant pour qu’il s’endorme et ainsi le parent s’éloigne du lit avec la chaise peu à peu chaque soir (Martello, 2015). • Offrir des récompenses pour renforcer les nouveaux apprentissages de l’enfant et souligner ses efforts (Martello, 2015). • Suivre le déroulement des nuits sur un calendrier et utiliser des récompenses an de motiver l’enfant.

Peurs nocturnes L’enfant refuse d’aller au lit ou se réveille durant la nuit parce qu’il a peur.

• Déterminer si l’enfant est couché trop tôt (l’enfant peut fantasmer lorsqu’il n’a rien d’autre à faire que penser dans une chambre noire).

L’enfant recherche la présence physique du parent et s’endort facilement si le parent est proche, à moins que la peur ne soit insurmontable.

• Rassurer calmement l’enfant apeuré ; au besoin, laisser une veilleuse allumée. • Offrir des récompenses à l’enfant an de l’inciter à vaincre sa peur. • Éviter les comportements susceptibles de mener à des problèmes additionnels (p. ex., dormir avec l’enfant ou l’amener dans la chambre du parent). • Si la peur de l’enfant est insurmontable, envisager d’avoir recours à une désensibilisation (p. ex., laisser l’enfant seul durant des périodes de temps de plus en plus longues ; consulter un professionnel dans le cas de peurs qui se prolongent indéniment).

Source : Adapté de Martello (2015).

286

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

TABLEAU 7.5

Comparaison des cauchemars et des terreurs nocturnes

CAUCHEMAR

TERREUR NOCTURNE

Description Rêve effrayant ; se produit pendant le sommeil paradoxal et est suivi d’un réveil complet.

Éveil partiel d’un sommeil très profond (stade IV, non paradoxal).

Période de détresse L’enfant se réveille, pleure ou appelle lorsque le rêve est ni, pas pendant le cauchemar lui-même.

Pendant la terreur, l’enfant crie, agite ses bras et ses jambes ; il peut parler et crier, être en sueur ; ensuite, il se calme.

Moment d’apparition Apparaît au cours de la deuxième partie de la nuit, lorsque le sommeil paradoxal est le plus fréquent.

Apparaît généralement de 60 à 90 minutes après que l’enfant s’est endormi, lorsque le sommeil non paradoxal est le plus profond.

Comportement de l’enfant Le jeune enfant se réveille, pleure ; il peut raconter son rêve.

L’enfant peut s’asseoir, se débattre ou courir de façon étrange, avoir les yeux dilatés et un rythme cardiaque accéléré, transpirer, pleurer, crier, parler ou gémir ; sa peur est apparente, ainsi que sa colère ; sa confusion est évidente, car il ne répond pas lorsqu’on lui parle.

Réaction envers les autres Est conscient de la présence de l’autre, et cela le rassure.

Après un épisode, l’enfant peut se réveiller perdu et inquiet.

Endormissement Peut être considérablement retardé à cause d’une peur persistante comme la peur du noir.

Est généralement rapide ; il est souvent difcile de garder l’enfant réveillé.

Description du rêve L’enfant se souvient du rêve, selon son âge.

L’enfant n’a aucun souvenir du rêve, ou d’avoir crié ou frappé.

Interventions inrmières Encourager les parents à :

Encourager les parents à :

• Accepter le rêve comme une peur réelle.

• Observer l’enfant pendant quelques minutes, sans intervenir, jusqu’à ce qu’il se calme ou se réveille complètement.

• S’asseoir avec l’enfant, le réconforter, le rassurer et faire en sorte qu’il se sente protégé. • Éviter d’amener l’enfant dans leur lit pour ne pas créer de mauvaises habitudes ou d’autres problèmes de sommeil.

• Intervenir uniquement si c’est nécessaire an de l’empêcher de se blesser. • Ramener l’enfant dans son lit, si nécessaire.

• Mettre en place une bonne routine, rassurante et relaxante.

• Éviter de raconter les épisodes à l’enfant.

• Éviter toutes les stimulations visuelles avant le coucher comme la télévision, les écrans, les consoles de jeu, etc.

• Tenter de déterminer les facteurs qui précipitent les terreurs nocturnes.

• Choisir les bonnes histoires à raconter avant le coucher.

• Éviter les stimulations visuelles avant le coucher comme la télévision, les écrans, les consoles de jeu.

• Envisager de consulter une inrmière, un psychoéducateur ou un psychologue. Si aucune des actions suggérées par ces professionnels ne fonctionne, consulter le médecin de famille ou un pédiatre.

• Suggérer l’utilisation d’un produit de santé naturel comme la valériane. Insister auprès des parents sur l’aspect normal des terreurs nocturnes ; leur dire qu’il s’agit d’un phénomène courant chez les enfants d’âge préscolaire, qui cesse souvent spontanément.

Source : Adapté de Martello (2015).

Chapitre 7

Problèmes de santé du trottineur et de l’enfant d’âge préscolaire

287

7

Soins inrmiers TROUBLES DU SOMMEIL

L’inrmière formule des recommandations pour réduire les troubles du sommeil seulement après

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 7.2

Méthode des éveils programmés

• Tenir un journal des moments d’apparition des épisodes de somnambulisme ou de terreurs nocturnes pendant environ 2 semaines (période plus ou moins longue selon la fréquence des épisodes).

• Éveiller l’enfant chaque nuit de 15 à 30 minutes avant l’heure habituelle de l’épisode pendant une période d’environ 1 mois. • S’assurer qu’il reste bien éveillé pendant environ 5 minutes, par exemple pour lui offrir de l’eau ou l’amener aux toilettes, puis le laisser se rendormir.

• Établir l’heure moyenne à laquelle se produisent ces épisodes. Source : Martello (2015).

7.4

Troubles du langage

Jugement

clinique François, âgé de deux ans, est enfant unique. Ses parents sont inquiets, car il ne parle pas. Il émet des sons et pointe ce qu’il désire. An de mieux comprendre la situation, nommez deux questions pertinentes que vous devriez poser aux parents. Quel moyen pourriez-vous suggérer à cette famille an d’aider François à développer son langage ? a) Reprendre François jusqu’à ce qu’il dise le bon mot. b) Prononcer chaque syllabe du mot de façon détachée. c) Bien articuler le mot le plus lentement possible. d) Répéter le bon mot à François plusieurs fois.

Au Québec, 13 % des enfants d’âge préscolaire accusent un retard de langage, et 1 enfant sur 4 serait considéré comme vulnérable avant l’entrée en maternelle (Ordre des ortho­ phonistes et audiologistes du Québec, 2014). Diverses mani­ festations cliniques y sont asso­ ciées, notamment un langage incompréhensible, voire inin­ telligible, une difculté à pro­ noncer et à répéter des mots, à exprimer ses idées et à cons­ truire des phrases, de même qu’un bégaiement. Les parents sont souvent les premiers à dé­ celer les problèmes de langage.

En effectuant un dépistage, l’inrmière peut repérer l’enfant qui éprouve des difcultés dans ses capacités langagières et suggérer la consulta­ tion d’un orthophoniste (Bergeron­Gaudin, 2014). Le fait d’informer les parents à propos de l’acqui­ sition du langage peut diminuer leurs inquiétudes et permettre de justier le besoin d’une référence spécialisée. L’orthophoniste effectuera une éva­ luation complète et planiera l’intervention ainsi que le suivi selon les besoins de l’enfant. L’examen médical est aussi recommandé pour bien évaluer les causes liées aux troubles du langage et éliminer des problèmes d’ordre neurologique. Ces derniers peuvent induire une décience auditive,

288

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

une évaluation approfondie du problème. Elle doit rassurer les parents et leur expliquer que cette phase est intermittente et temporaire, et qu’elle se résorbe généralement au début de l’adolescence. Il est important d’encourager les parents à coucher l’enfant dans son propre lit pendant qu’il est encore éveillé (Martello, 2015). L’inrmière peut enseigner aux parents la méthode des éveils programmés pour traiter le somnambulisme et les terreurs nocturnes. Les autres interventions de base à effectuer pour diminuer le somnambulisme sont de favoriser l’établissement d’une routine rassurante et relaxante au coucher, en plus d’éviter toutes les stimulations visuelles comme la télévision, les écrans, les consoles de jeu, etc. (Martello, 2015) ENCADRÉ 7.2.

un retard développemental ou de l’autisme, ainsi qu’une absence de stimulation verbale ou psycho­ sociale (Barbeau, Meilleur, Zefro et al., 2015). Parmi les examens importants, le dépistage systé­ matique de la surdité est une approche privilégiée visant à déceler les nouveau­nés qui pourraient avoir un problème important d’audition, ce qui compromettrait leur développement. Au Québec, un programme provincial de dépistage systéma­ tique a été instauré en juin 2012. Le dépistage s’ef­ fectue dans le premier mois de vie. Il s’agit d’un test comportant des critères spéciques qui permet de dépister les bébés à risque de souffrir de problèmes d’audition. Si le test s’avère positif, le nouveau­né sera évalué en otorhinolaryngologie et en audiolo­ gie, la surdité pouvant donc être ofciellement dia­ gnostiquée avant l’âge de trois mois. L’enfant sourd recevra une intervention ou un traitement approprié plus précoce. Le test est offert gratuitement au Québec et est effectué seulement après l’obtention du consentement libre et éclairé des parents (minis­ tère de la Santé et des Services sociaux, 2012).

7.4.1

Bégaiement

Le bégaiement fait partie des troubles du langage les plus courants. Selon l’Association des bègues du Canada (2013a), environ 4 % des enfants souffrent de bégaiement. Chez certains enfants, le rythme d’utilisation du vocabulaire s’accroît rapi­ dement et dépasse celui de la capacité à produire des mots. Cette absence de maîtrise des intégra­ tions sensorimotrices entraîne le bégaiement lorsque l’enfant essaie de prononcer le mot auquel il pense déjà. Ce trouble de la uidité verbale est

une caractéristique normale du développement du langage chez les enfants de 2 à 5 ans. Il touche plus souvent les garçons que les lles, et il se résorbe généralement au cours de l’enfance (Association des bègues du Canada, 2013b). Si certains bégaiements sont transitoires, d’autres persistent, mais se contrôlent grâce à des techniques orthophoniques. L’Association canadienne des orthophonistes et audiologistes recommande de consulter le plus rapidement possible un spécialiste pour établir le bon diagnostic et instaurer un plan d’intervention adapté.

7.4.2

Trouble d’articulation du langage

Le trouble d’articulation du langage, un trouble de l’articulation prenant la forme d’une régression à un langage infantile, peut apparaître chez les enfants forcés de produire des sons qui dépassent leur stade de développement. Pour prévenir ce trouble, il faut discuter avec les parents des progrès habituels qui se produisent au cours de l’enfance sur le plan de la production du langage. Les premiers mots font leur apparition vers l’âge de 10 à 12 mois, et les phrases, vers l’âge de 2 ans, moment où le vocabulaire de l’enfant augmente de manière exponentielle. C’est habituellement entre 3 et 4 ans que l’enfant commence à formuler des phrases complètes (Ferland, 2014). Jusqu’à 4 ans, il peut être normal que l’enfant éprouve des difcultés à prononcer certains sons. Si le trouble d’articulation du langage persiste après 3 ans et demi ou 4 ans, il importe d’envisager une évaluation plus approfondie auprès d’un orthophoniste an de prévenir des problèmes d’apprentissage à l’école (Ordre des orthophonistes et audiologistes du Québec, 2012).

7.5

Maltraitance

Selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), les enfants de moins de trois ans sont ceux qui risquent le plus de subir de la maltraitance (OMS, 2016). Le terme général de maltraitance envers les enfants englobe la violence et la négligence physiques, la violence et la négligence psychologiques, l’abus sexuel et toutes les violences généralement perpétrées par des adultes à l’encontre d’un enfant. Il s’agit de l’un des problèmes sociaux les plus importants touchant les enfants. Au Canada, les données recueillies proviennent des sources d’information ofcielles, soit les services policiers et les services de protection de l’enfance (Statistique Canada, 2015a). Le Code criminel du Canada ainsi que les lois provinciales et territoriales sur l’enfance sont les deux mécanismes juridiques qui assurent le respect des droits des enfants (Statistique Canada, 2015b). Au

Québec, toute personne a l’obligation de déclarer au Directeur de la protection de la jeunesse (DPJ) les situations dans lesquelles les droits d’un enfant sont lésés. En tant que professionnelle de la santé, l’inrmière doit obligatoirement signaler au DPJ toute situation pouvant compromettre la sécurité ou le développement d’un enfant, de même que toute situation pour laquelle elle est témoin d’un abus physique ou sexuel (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, 2014). L’inrmière doit être consciente des croyances, des préjugés et des opinions qu’elle entretient par rapport à la violence envers les enfants et qui pourraient inuer sur ses interventions auprès de l’enfant et de sa famille. Selon le Code de déontologie des inrmières et inrmiers, l’inrmière « doit notamment exercer sa profession avec objectivité et faire abstraction de toute intervention d’un tiers qui pourrait inuer sur l’exécution de ses obligations professionnelles au préjudice du client » (RLRQ, chapitre I-8, r. 9, art. 21).

7.5.1

7

Portrait de la situation au Québec

En 1998, 15,4 enfants québécois sur 1 000 étaient évalués par les services de protection de la jeunesse ; ce taux a augmenté pour atteindre 18,5 enfants sur 1 000 en 2008 et 20,7 enfants sur 1 000 en 2014. Pour la tranche d’âge des enfants de 0 à 2 ans, le taux de 2014 est de 13 % supérieur au taux observé en 1998. L’augmentation la plus marquée est observée chez les enfants de 3 à 5 ans, passant de 14,7 enfants pour 1 000 en 1998 à 18,3 enfants pour 1 000 évalués par les services de protection en 2014, soit une augmentation de 24 % (Hélie, Collin-Vézina, Turcotte et al., 2017). Au Québec, l’étude d’incidence sur les situations évaluées en protection de la jeunesse a permis de déterminer les catégories suivantes de risque ou d’incident fondé : 27 % de situations de négligence, 21 % de situations de violence conjugale, 19 % de situations d’abus physique, 19 % de troubles du comportement, 11 % de mauvais traitements psychologiques et 3 % d’abus sexuels (Hélie et al., 2017). La négligence physique et psychologique à l’égard des enfants est la forme la plus courante de maltraitance au Canada (Agence de santé publique du Canada [ASPC], 2010). Elle est généralement dénie comme l’incapacité d’un parent ou d’une autre personne légalement responsable du bien-être de l’enfant de combler les besoins fondamentaux de celui-ci et de lui prodiguer les soins adéquats.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les enfants de moins de trois ans sont ceux qui risquent le plus de subir de la maltraitance.

CE QU’IL FAUT RETENIR

La négligence physique et psychologique à l’égard des enfants est la forme la plus courante de maltraitance au Canada.

L’ignorance des besoins de l’enfant, le manque de ressources et l’abus d’alcool ou d’autres drogues sont des facteurs contributifs importants pouvant expliquer la négligence d’une personne à l’égard Chapitre 7

Problèmes de santé du trottineur et de l’enfant d’âge préscolaire

289

ALERTE CLINIQUE

La priorité, en présence d’un cas de maltraitance, consiste à éviter que l’enfant ne subisse de la violence, ce qui peut aller jusqu’à retirer l’enfant de sa famille an de prévenir tout nouveau traumatisme.

d’un enfant dont elle a la garde. Par exemple, les compétences parentales des parents négligents peuvent être décientes. Ceux-ci peuvent ignorer qu’un nourrisson doit être nourri toutes les trois ou quatre heures, ou ne pas savoir quoi lui donner à manger. L’incapacité de reconnaître que les soins psychologiques sont un besoin essentiel pour l’enfant équivaut à un manque de connaissances tout aussi sérieux (Gagné, Richard et Dubé, 2015) .

7.5.2

Types de maltraitance

Au Québec, dans son rapport annuel 2016, la Direction de la protection de la jeunesse emploie le terme « mauvais traitements psychologiques » pour désigner cette forme de maltraitance. En 2015-2016, même si la négligence et la violence physiques demeurent les motifs de signalement retenus les plus fréquents, on observe une hausse constante des signalements en raison de mauvais traitements psychologiques, qui arrivent au troisième rang de la liste des signalements les plus nombreux (INESSS, 2017).

Négligence et violence psychologiques

Négligence et violence physiques

La négligence psychologique fait généralement référence à l’incapacité d’entourer l’enfant de soins affectifs, et de satisfaire ses besoins d’affection et d’attention. Cette notion peut aussi inclure l’absence d’intervention en cas de comportements inappropriés, ou le fait d’encourager ou de favoriser de tels comportements. Chez l’enfant, un mauvais traitement peut avoir comme conséquence une attitude de retrait par rapport aux personnes ou à son environnement, ou un comportement asocial, comme la cruauté envers les animaux ou envers les personnes.

La négligence physique prend la forme de privation des biens de première nécessité comme la nourriture, les vêtements, le logement, la surveillance, les soins médicaux et l’éducation.

FIGURE 7.2 L’enfant victime de négligence ou de violence psychologiques peut manifester un comportement de retrait par rapport à l’environnement et aux personnes.

La violence psychologique, un aspect de la maltraitance encore plus difcile à dénir, fait référence à la tentative délibérée de détruire l’estime de soi ou les capacités de l’enfant, ou de leur porter atteinte de façon considérable FIGURE 7.2 et TABLEAU 7.6. Cette violence peut adopter les formes suivantes : rejeter l’enfant, l’isoler, le terroriser, l’ignorer, le dépraver, l’assaillir verbalement ou exercer sur lui une pression excessive (Hibbard, Barlow, MacMillan et al., 2012 ; Institut national d’excellence en santé et en services sociaux [INESSS], 2017).

TABLEAU 7.6

La violence physique consiste à iniger délibérément un traumatisme physique à un enfant ; elle est généralement exercée par la personne qui en a la garde TABLEAU 7.7 (ASPC, 2010). Les dénitions légales de la violence physique sont incorporées aux lois de chaque province et territoire, ainsi qu’aux lois fédérales. Selon le ministère de la Justice du Canada (2015), « [e]st victime de violence physique tout enfant de moins de 18 ans ayant subi des menaces ou des actes compromettant son intégrité physique ou dont les besoins ont été négligés par une ou des personnes jouissant d’un lien d’autorité ou de conance à son égard ». Au Canada, depuis 1998, bien que le nombre de signalements fondés de violence physique ait augmenté, on observe une diminution générale du nombre de blessures physiques (mineures ou majeures) dues à la violence (Hélie et al., 2017).

Facteurs prédisposant à la maltraitance Les causes de maltraitance d’enfants sont multiples. La violence envers les enfants existe dans

Manifestations cliniques de la négligence et de la violence psychologiques

CONSTATS PHYSIQUES

COMPORTEMENTS

• Retard de croissance

• Comportements d’autostimulation (p. ex., mordre, se balancer, sucer)

• Troubles de l’alimentation

• Chez le nourrisson, absence de sourire social et anxiété en présence d’étrangers

• Énurésie

• Comportement de retrait par rapport à l’environnement et aux personnes

• Troubles du sommeil

• Timidité inhabituelle • Diminution de l’estime de soi • Comportement antisocial (p. ex., destructivité, vol, cruauté envers les animaux ou les personnes) chez les enfants plus âgés • Comportements extrêmes : docilité exagérée associée à la passivité, ou attitude exigeante et agressive chez les enfants plus âgés • Retards de développement affectif et intellectuel, en particulier le langage • Tentative de suicide

290

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

tous les groupes socioéconomiques, religieux, culturels et ethniques (Hélie et al., 2017). Il est possible de considérer certains facteurs pouvant prédisposer les membres de certaines familles à la maltraitance an d’évaluer les risques qu’une telle situation survienne, tout en gardant à l’esprit qu’un indicateur unique n’est pas sufsant pour établir un diagnostic de maltraitance.

TABLEAU 7.7

Au Québec, l’étude de l’Observatoire des tout-petits, publiée en 2017, mentionne cinq grands facteurs de risque de maltraitance : 1. Les conditions socioéconomiques familiales ; 2. Le stress associé au rôle parental et à la conciliation travail-famille ; 3. L’attitude des parents par rapport aux punitions corporelles ;

Manifestations cliniques de la négligence et de la violence physiques

CONSTATS PHYSIQUES

COMPORTEMENTS

Négligence physique • Retard de croissance • Signes de malnutrition (p. ex, maigreur des membres, distension abdominale, absence de graisse sous-cutanée)

7

• Affect maussade et inactif ; passivité ou somnolence excessive

• Mauvaise hygiène personnelle

• Comportements d’autostimulation (p. ex., sucer son pouce, se balancer)

• Vêtements sales ou inadaptés

• Mendicité ou vol de nourriture

• Signes de soins de santé insufsants (p. ex, retards de vaccination, infections non traitées, rhumes fréquents)

• Absentéisme scolaire

• Traumas fréquents dus à un manque de surveillance

• Agressivité

• Abus de substances • Vandalisme ou vol à l’étalage

Violence physique • Contusions et marques de coups : – Sur le visage, les lèvres, la bouche, le dos, les fesses, les cuisses ou des zones du torse – Motifs réguliers correspondant à l’objet utilisé (p. ex., une boucle de ceinture, une main, un cintre de métal, une chaîne, une cuillère de bois) ; marques de pression ou de pincement – Apparence de divers stades de guérison

• Méance à l’égard des contacts physiques avec des adultes • Comportement de retrait • Crainte apparente des parents ou du retour à la maison • Maintien d’une attitude très calme, tout en surveillant l’environnement

• Brûlures : – Sur la plante des pieds, les paumes, le dos, les fesses – Motif correspondant à l’objet utilisé (p. ex., rond pour une brûlure de cigare ou de cigarette) ; zones nettement délimitées à la suite de l’immersion dans l’eau brûlante ; brûlures ayant la forme d’un fer, d’un radiateur ou d’un élément de poêle électrique – Absence de marques d’éclaboussure et présence de brûlures symétriques – Lésions dues à un pistolet électrique : lésions circulaires paires, assez uniformes (jusqu’à 0,5 cm de diamètre) et espacées d’environ 5 cm • Fractures et dislocations : – Crâne, nez et structures faciales – Traumatisme indiquant le type de violence (p. ex., une fracture en spirale ou une dislocation due à la torsion d’un membre, un coup de fouet cervical causé par les secousses inigées à l’enfant) – Fractures multiples, récentes ou anciennes, à divers stades de guérison

• Réaction inappropriée à un traumatisme, comme l’absence de pleurs en réaction à la douleur • Absence de réaction relativement à des événements effrayants • Inquiétude lorsque d’autres enfants pleurent • Attitude amicale et manifestations d’affection distribuées sans discernement et de façon exagérée • Relations supercielles • Passage à l’acte, comme une agression, an d’attirer l’attention

• Lacérations et abrasions : – Sur le dos, les bras, les jambes, le torse, le visage ou les organes génitaux externes – Manifestations cliniques majeures, comme un gonement abdominal, une douleur ou des vomissements attribuables aux coups – Marques inhabituelles, comme celles de morsures humaines ou des cheveux arrachés • Produits chimiques : – Intoxications à répétition inexpliquées, surtout des surdoses de médicaments – Maladie inexpliquée d’apparition soudaine, comme l’hypoglycémie due à l’administration d’insuline

Chapitre 7

Problèmes de santé du trottineur et de l’enfant d’âge préscolaire

291

4. La dépression, l’anxiété et les troubles de la personnalité chez le parent ; 5. La consommation abusive d’alcool et de drogues chez le parent (Hélie et al., 2017).

CE QU’IL FAUT RETENIR

De toutes les formes de violence physique infantile, le syndrome du bébé secoué est le plus dévastateur et le plus destructeur. Les lésions caractéristiques de ce syndrome sont le saignement intracrânien et des hémorragies rétiniennes.

Certaines situations cliniques peuvent être confondues avec une blessure non accidentelle. Par exemple, les troubles hémostatiques, l’ostéogenèse imparfaite, le syndrome de mort subite du nourrisson et des pratiques culturelles comme l’application de ventouses ou la friction avec un objet (triboefeurage, ou gua sha) peuvent prendre l’apparence de signes de violence physique FIGURE 7.3. Des blessures accidentelles, comme des contusions produites par les ceintures de sécurité ou des fractures spiroïdales provoquées par une torsion et une chute, peuvent aussi être confondues avec des signes de mauvais traitements. Il importe de ne pas confondre des variations normales, comme les taches mongoliques ou des anomalies congénitales des organes génitaux, avec des signes cliniques de violence.

Caractéristiques de la famille Les familles au sein desquelles les enfants sont victimes de violence sont souvent plus isolées socialement et ont moins accès à des relations ou à des ressources leur offrant du soutien. Ces parents ont fréJeannot est âgé de deux ans et il est atteint d’un quemment un faible revenu, syndrome polymalformatif (plusieurs malformations) souvent associé à une faible avec trachéotomie. Son état de santé nécessite un scolarité ou à des problèmes important suivi médical allant de quatre à cinq d’abus d’alcool ou de drogues rendez-vous par mois dans diverses spécialités. (ASPC, 2010). L’inrmière coordonnatrice de son dossier constate qu’il

Jugement

clinique

Considérant que les conditions socioéconomiques familiales représentent un facteur de risque de maltraitance, l’étude de Hélie et de ses collaborateurs (2017) rapporte que parmi les enfants évalués par la Direction de la protection de la jeunesse, 65 % d’entre eux vivaient avec un ou des parents n’ayant pas de revenu d’emploi au moment du signalement. Pour 15 % de ces enfants, il est rapporté par les évaluateurs que le ménage manquait régulièrement d’argent pour satisfaire les besoins fondamentaux. Le stress parental peut être inuencé par la présence d’un handicap ou un tempérament difcile chez l’enfant. Parmi les enfants évalués par les services de protection de la jeunesse en 2014, 13 % avaient au moins un parent aux prises avec un trouble mental.

n’a pas été vu à ses rendez-vous depuis environ deux mois. De plus, il n’a pas été vacciné contre la grippe, comme l’avait recommandé son pédiatre. Dans le dossier antérieur, lors du dernier rendez-vous de Jeannot qui a eu lieu en janvier, il est inscrit que Jeannot portait des espadrilles et un blouson de printemps. Vous soupçonnez un cas de maltraitance et contactez la mère pour connaître la raison des rendez-vous non respectés. De quel type de maltraitance pourrait-il s’agir dans cette situation ? Justiez votre réponse.

FIGURE 7.3 tribo-efeurage

292

Partie 3

Exemple de

Toute condition particulière de l’enfant telle que la prématurité, le handicap ou la maladie chronique, qui exigent une attention accrue de la part

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

des parents parfois surchargés, peut avoir une incidence sur leur capa cité à exercer leur rôle parental de manière bienveillante. Cependant, il faut demeurer prudent et éviter les généralisations, puisque bon nombre de familles s’occupent d’enfants ayant des conditions particulières sans user de violence (Hélie et al., 2017).

Caractéristiques des enfants Selon l’étude de prévalence réalisée au Québec en 2014 par Hélie et ses collaborateurs (2017), les principales difcultés de fonctionnement conrmées ou soupçonnées chez les enfants évalués sont la présence d’un trouble de décit de l’attention/hyperactivité (33 %), l’anxiété/dépression/isolement (31 %) ainsi que les difcultés scolaires (31 %). Viennent ensuite les difficultés d’attachement (19 %), l’agressivité (16 %) et les retards de développement (14 %). Caractéristiques de l’environnement Quelques caractéristiques des milieux de vie des enfants traduisent une certaine vulnérabilité. La moitié des enfants évalués avec incident fondé vivent avec un seul parent biologique, alors que 35 % vivent avec leurs deux parents. À titre de comparaison, dans la population générale, le recensement de 2016 indique qu’environ 19 % des âgés 14 ans et moins faisaient partie d’une famille monoparentale (Statistique Canada, 2017). Près des deux tiers des enfants avec incident fondé vivaient avec une première gure parentale qui éprouvait des difficultés de fonctionnement, conrmées ou soupçonnées. Le manque de soutien social et le fait d’être victime de violence conjugale ou de souffrir de problèmes de santé mentale sont les difcultés les plus fréquemment observées chez la première gure parentale. D’autres éléments de vulnérabilité caractérisent les milieux de vie de ces enfants : au moins un déménagement dans la dernière année (37 %), le manque d’argent régulier pour subvenir aux besoins de base (12 %) et la présence de dangers dans le logement (10 %). L’inrmière doit être consciente de tous ces facteurs an de dépister les situations potentielles de maltraitance envers les enfants (Hélie et al., 2017).

Syndrome du bébé secoué De toutes les formes de violence physique infantile, le syndrome du bébé secoué (SBS) (ou traumatisme craniocérébral non accidentel) est le plus dévastateur et le plus destructeur. Les écrits scientiques emploient l’expression syndrome du bébé secoué pour référer au traumatisme craniocérébral non accidentel (TCNA). Le SBS est une forme grave de maltraitance ; il s’agit de secousses violentes inigées à un nourrisson ou à un jeune enfant. Comparativement aux adultes, la tête des nourrissons est proportionnellement plus grosse que le reste de son corps et elle comporte une grande quantité de liquide cérébrospinal ; en outre, les

muscles cervicaux la soutenant sont plus faibles. Une secousse violente entraîne une rotation des structures cérébrales dans la boîte crânienne, ce qui crée des forces de cisaillement pouvant déchirer les vaisseaux sanguins et les neurones. Les lésions caractéristiques du SBS sont le saignement intracrânien (hématomes sous-duraux et sousarachnoïdiens) et des hémorragies rétiniennes (Maguire, Watts, Shaw et al., 2013). Ce syndrome peut aussi s’accompagner de fractures des côtes et des os longs. Souvent, le SBS n’est pas un événement isolé. Une étude a montré que 60 % des enfants ayant subi un traumatisme cérébral après avoir été secoués montraient des signes de lésions antérieures (Kemp, 2011). L’incidence du SBS est certainement sous-estimée en raison de la difculté que représente son dépistage, car les manifestations cliniques qu’il produit ne sont pas exclusives. On estime à plus de 30 cas par année l’incidence du SBS à l’échelle québécoise (Fortin, Frappier et Déziel, 2011).

Manifestations cliniques Les secousses violentes produisent des dommages importants au cerveau, comme les hémorragies intracrâniennes et les hémorragies rétiniennes évoluant vers une hypertension intracrânienne, ce qui se traduit par une variété de manifestations cliniques. Plusieurs des manifestations initiales comme les vomissements, l’irritabilité, le manque d’appétit et l’apathie sont souvent confondues avec les troubles courants des nourrissons et des enfants. Dans les formes plus graves, les manifestations peuvent comprendre les convulsions, l’agitation psychomotrice, l’altération du niveau de conscience, l’apnée, la bradycardie et le décès. Les conséquences à long terme du SBS sont les troubles convulsifs, une détérioration de la vue pouvant aller jusqu’à la cécité, des retards de développement, des troubles du sommeil, des troubles liés à l’alimentation, une paralysie cérébrale et des décits cognitifs (Fortin et al., 2011).

Trouble factice imposé à autrui Le trouble factice imposé à autrui est une forme rare mais sérieuse de maltraitance dans laquelle la personne qui s’occupe de l’enfant lui inige intentionnellement des blessures, exagère ou invente les symptômes d’un problème de santé physique ou psychologique, ou va même jusqu’à provoquer des symptômes .

Abus sexuel Selon l’étude de prévalence réalisée en 2014, au Québec, la fréquence des abus sex uels est de 0,4 cas pour 1 000 enfants évalués avec incident fondé, ce qui représente une diminution depuis 1998 (Hélie et al., 2017). Les abus sexuels inigés aux enfants représentent environ 3 % des cas ofciellement corroborés de violence envers les enfants au Canada (ASPC, 2010).

Les abus sexuels envers l’enfant comprennent divers types de comportements sexuels TABLEAU 7.8. La Loi sur la protection de la jeunesse (RLRQ, chapitre P-34.1, art. 38d) établit qu’il y a abus sexuel « lorsque l’enfant subit des gestes à caractère sexuel, avec ou sans contact physique, de la part de ses parents ou d’une autre personne et que ses parents ne prennent pas les moyens nécessaires pour mettre n à la situation » TABLEAU 7.9. Parmi les signalements d’abus sexuels fondés, les plus fréquemment rapportés sont les attou c hements sexuels (50 % des situations) la pénétration (14 %) et les relations sexuelles orales (11 %) (Hélie et al., 2017).

Caractéristiques de l’agresseur et de sa victime

Le CHU Sainte-Justine propose, sur son site Web (www.chusj.org), les éléments essentiels à connaître sur le syndrome du bébé secoué.

CONSEIL CLINIQUE

En 2002, le CHU Sainte-Justine et ses collaborateurs ont mis sur pied le premier programme périnatal de prévention du syndrome du bébé secoué au Canada (PPPSBS). Un des volets du programme concerne le milieu hospitalier et permet une intervention éducative par l’inrmière destinée aux pères, aux mères et aux conjoints. Les inrmières reçoivent d’abord une formation an d’adapter leur enseignement aux familles. Les objectifs du PPPSBS sont : 1) améliorer les connaissances des parents et favoriser le recours à des stratégies d’adaptation quant aux pleurs du nourrisson ; 2) améliorer les connaissances des parents et favoriser le recours à des stratégies d’adaptation relativement à la gestion de la colère ; 3) améliorer les connaissances des parents sur les dangers de secouer un bébé.

Les agresseurs proviennent de toutes les strates de la société, et 96 % des auteurs présumés d’infractions sexuelles sont de sexe masculin. Parmi ceux-ci, 75 % sont des hommes et 25 % sont des garçons (ministère de la Sécurité publique [MSP], 2014b). La plupart des abus sexuels sont commis par un homme qui est connu de l’enfant ; dans les deux tiers des cas, il s’agit d’un membre de la famille (Breyer et MacPhee, 2015 ; Forsdike-Young, Tarzia, Hindmarsh et al., 2014). Sinon, les auteurs des sévices sont souvent des employés ou des bénévoles qui occupent des positions qui les mettent en contact avec des jeunes lles ou des jeunes garçons, par exemple des enseignants ou des entraîneurs sportifs. Nombre d’agresseurs occupent un emploi à temps plein, sont actifs dans les affaires communautaires et n’ont pas d’antécédents criminels. Au Québec, la majorité des victimes connaissent l’auteur présumé, soit 84,2 % des jeunes victimes et 78,8 % des victimes adultes. De plus, 66 % des victimes d’infractions sexuelles sont âgées de moins de 18 ans : de ce groupe, 80 % sont de jeunes lles et 20 % sont de jeunes garçons (MSP, 2014a).

Annexe 7.2W : Trouble factice imposé à autrui.

Inceste En 2009, selon les données recueillies par les policiers, près de 55 000 enfants âgés de 0 à 17 ans ont été victimes de voies de fait ou d’une infraction sexuelle. Parmi ceux-ci, environ 3 enfants sur 10, soit près de 15 000 enfants, ont été victimes d’une agression commise par un membre de leur propre famille (Statistique Canada, 2015b). L’inceste peut aussi se produire entre les membres d’une fratrie. Dans la moitié des cas rapportés, l’enfant a subi des abus sexuels de manière répétée. Les victimes hésitent habituellement à dénoncer la Chapitre 7

Problèmes de santé du trottineur et de l’enfant d’âge préscolaire

293

7

situation par crainte de représailles ou par peur de ne pas être crues (ASPC, 2010).

Initiation et perpétuation d’abus sexuel S’il ne s’agit pas d’une attaque isolée, comme un viol, le cycle de l’abus sexuel s’amorce habituellement de façon insidieuse. L’agresseur passe souvent du temps avec sa victime an de gagner sa conance avant de tenter tout contact sexuel. Puis, dans la plupart des cas, divers moyens sont utilisés pour contraindre la victime à devenir un accessoire de l’activité sexuelle sans qu’elle ne

TABLEAU 7.8

soit consciente que celle-ci fait partie de la proposition qui lui est faite ENCADRÉ 7.3. Il est possible que l’enfant ne révèle pas la vérité à ses parents de crainte qu’ils ne le croient pas, surtout si l’agresseur est un membre de la famille en qui ils ont conance. Certaines victimes ont peur d’être tenues responsables de la situation, et il arrive souvent que les jeunes enfants, dont le vocabulaire est limité, aient de la difculté, quand ils ont le courage ou l’occasion de révéler l’abus, à décrire les actes qu’ils ont subis.

Manifestations cliniques des abus sexuels

CONSTATS PHYSIQUES

COMPORTEMENTS

• Contusions, saignement, lacérations ou irritation des organes génitaux externes, de l’anus, de la bouche ou de la gorge

• Apparition soudaine de comportements liés à la sexualité (p. ex., masturbation excessive ou en public, jeux sexuels non adaptés à l’âge, promiscuité et comportement ouvertement suggestif)

• Sous-vêtements déchirés, tachés ou ensanglantés

• Mises en scène de fantasmes, surtout en jouant

• Douleur à la miction, ou douleur, enure et démangeaisons dans la région génitale

• Socialisation difcile avec les enfants du même âge

• Comportement de retrait, rêverie excessive

• Écoulement pénien

• Anxiété, perte ou gain de poids, comportements exagérés (p. ex., tendance à s’agripper et à retenir les objets et les personnes)

• Infection transmissible sexuellement, vaginite non spécique

• En cas d’inceste, colère excessive envers le parent du sexe opposé

• Difculté à marcher ou à s’asseoir • Odeur inhabituelle de la région génitale • Infections urinaires récurrentes • Présence de sperme • Grossesse non désirée à l’adolescence

• Comportement régressif comme mouiller son lit ou sucer son pouce • Apparition soudaine de phobies ou de peurs, en particulier la peur du noir, des hommes, des étrangers, ou d’endroits ou de situations particulières (p. ex., peur indue de quitter la maison, de rester à la garderie ou à la maison de la gardienne) • Changements profonds et rapides de la personnalité, en particulier la dépression extrême, l’hostilité et l’agressivité (souvent accompagnés d’un retrait social) À l’adolescence : • Abus de substances, particulièrement l’alcool • Déclin abrupt et rapide des performances scolaires • Tentatives de suicide ou idéations suicidaires

TABLEAU 7.9

Types d’abus sexuels envers l’enfant

INCESTE

Toute activité sexuelle physique entre des membres consanguins ou non d’une même famille ; quiconque commet un inceste est coupable d’un acte criminel

ATTENTAT À LA PUDEUR

Actions indécentes comme des attouchements, des caresses et des baisers inappropriés, la masturbation individuelle ou mutuelle, ou des contacts orogénitaux

EXHIBITIONNISME

Exposition volontaire des organes génitaux en quelque lieu que ce soit, à l’endroit d’une personne âgée de moins de 16 ans

PORNOGRAPHIE JUVÉNILE

Toute représentation photo, lmée, vidéo, enregistrement sonore, enregistrement vidéo, écrit dont la caractéristique dominante est la représentation d’une activité sexuelle avec une personne âgée de moins de 18 ans

PROSTITUTION JUVÉNILE

Participation d’enfants à des actes sexuels en échange d’un bénéce

PÉDOPHILIE

Préférence pathologique d’un adulte à assouvir son excitation sexuelle avec des enfants prépubères

Sources : Adapté de Gouvernement du Canada (2018). Code criminel. Repéré à http://laws-lois.justice.gc.ca/fra/lois/C-46/ ; ministère de la Justice (2015).

294

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

7.5.3

Diagnostic

L’une des responsabilités critiques de l’inrmière est de reconnaître les situations de violence ou de négligence le plus rapidement possible ENCADRÉ 7.4. Dans ces situations, l’inrmière travaillera en étroite collaboration avec plusieurs autres professionnels de la santé. En effet, l’un des rôles de l’inrmière est de s’assurer d’une bonne coordination entre les différents professionnels part icipant au processus de dépistage ou d’évaluation.

Collecte des données La collecte détaillée des antécédents et l’entrevue, combinées à un examen physique approfondi, sont les outils de diagnostic nécessaires pour déterminer s’il y a maltraitance, si cela n’a pas déjà été effectué antérieurement. Il faut, en effet, éviter à l’enfant une surcharge d’examens et de questionnements ENCADRÉS 7.5 et 7.6.

Négligence et violence psychologiques Anamnèse Chaque enfant peut manifester des réactions différentes à la négligence selon sa situation et son stade de développement. L’objectif de l’entrevue est de déterminer si l’enfant se trouve dans un environnement sécuritaire, et si la personne qui en a la charge possède les habiletés et les ressources nécessaires pour s’occuper de lui. Il peut être difcile pour l’inrmière de déterminer si les circonstances reètent des compétences parentales décientes ou de la véritable négligence. Lorsqu’une situation de négligence psychologique ou de violence psychologique est suspectée, l’inrmière doit observer les interactions entre les parents et l’enfant. La documentation précise de ces observations permet de décrire le lien d’attachement entre les parents et leur enfant, en plus de permettre certains constats quant aux compétences parentales. Il est important de discuter des observations en équipe an de mettre en commun les constats de l’inrmière et ceux de l’équipe interdisciplinaire. Certains centres hospitaliers ont mis en place un formulaire de documentation interdisciplinaire afin de regrouper les observations de l’équipe. Examen physique Il est plus facile de reconnaître la négligence par privation des besoins de base que la négligence et la violence psychologiques, car les signes physiques en sont habituellement évidents. Un doute sur la négligence possible impose de procéder à l’évaluation de la taille et du poids de l’enfant, de son état nutritionnel, de son hygiène et des interactions appropriées à son âge. Il peut être facile de soupçonner des mauvais traitements psychologiques, mais il est plus difcile d’en obtenir la preuve. Le bilan de la

Direction de la protection de la jeunesse mentionne que les mauvais traitements psychologiques ont des répercussions sur le plan affectif, comportemental, social, cognitif et physique. De plus, la gravité des conséquences sur l’enfant est augmentée lorsque plusieurs sphères de son développement sont touchées (INESSS, 2017).

Négligence et violence physiques Anamnèse L’établissement d’une relation de conance mutuelle entre la famille et l’intervenant constitue un élément clé de la réussite de l’intervention (INESSS, 2017). Toutefois, l’évaluation peut s’avérer plus complexe si la personne responsable de l’enfant rapporte les événements de façon mensongère ou incomplète, ou si l’enfant s’exprime peu. Une anamnèse habile et en profondeur

ENCADRÉ 7.3

Méthodes employées pour contraindre un enfant à participer à une activité sexuelle

• Des cadeaux ou des privilèges sont offerts à l’enfant. • L’adulte déforme les valeurs morales en afrmant à l’enfant que c’est correct de le faire. • Des enfants isolés ou démunis sur les plans affectif et social sont séduits par des adultes qui comblent leurs besoins d’affection et de contacts humains.

ENCADRÉ 7.4

7

• L’agresseur sexuel contraint sa victime au silence en décrivant leur activité comme un « secret entre nous » que d’autres personnes pourraient leur enlever si elles en étaient informées. • L’agresseur joue sur les peurs de l’enfant : sa peur de représailles de la part de l’agresseur lui-même, sa crainte des répercussions s’il parle et la peur d’être abandonné ou rejeté par sa famille.

Signaux d’alarme de maltraitance

• Signes physiques de négligence ou de violence, y compris les traumatismes antérieurs • Récits contradictoires racontés par les parents ou d’autres personnes au sujet de l’accident ou de l’événement traumatique

cliniques de violence (p. ex., il dit avoir le rhume alors qu’il souffre de brûlures au premier ou au deuxième degré)

• Trauma important et incompatible avec l’explication donnée (p. ex., un enfant souffrant d’une commotion cérébrale ou d’une fracture du bras après être tombé de son lit)

• Réaction inappropriée de la personne qui s’occupe de l’enfant : une réaction émotive exagérée ou absente (p. ex., le refus d’autoriser des examens supplémentaires ou de consentir au traitement nécessaire, un délai excessif pour rechercher un traitement ou l’absence de curiosité de la part des parents)

• Histoire ne s’accordant pas avec le niveau de développement de l’enfant (p. ex., un enfant de six mois qui aurait ouvert le robinet d’eau chaude)

• Afrmation de l’enfant mentionnant avoir subi des sévices physiques ou sexuels • Signalements précédents de violence dans la famille

• Plainte de la part de l’enfant en lien avec un mal qui n’est pas lié aux signes

• Visites répétées au service des urgences pour blessures

• Cause du traumatisme imputée à un tiers

Chapitre 7

Problèmes de santé du trottineur et de l’enfant d’âge préscolaire

295

Pratiques inrmières ENCADRÉ 7.5

Mener une entrevue avec un enfant divulguant des mauvais traitements

• S’assurer de disposer d’un moment et d’un endroit qui permettent une entrevue condentielle.

• Éviter de suggérer des pistes qui pourraient fausser le récit de l’enfant.

• Ne pas promettre à l’enfant de ne rien révéler ; lui expliquer que la loi contraint les inrmières à signaler les mauvais traitements.

• Lui dire qu’il n’est pas responsable des mauvais traitements, et qu’il n’est pas mauvais ni coupable.

• Ne pas se montrer choquée ou critique envers la famille.

• Déterminer son besoin immédiat en matière de sécurité.

• Utiliser le vocabulaire de l’enfant pour désigner les parties du corps.

• Expliquer à l’enfant ce qui se produira à la suite du rapport de l’inrmière.

• Le rassurer en lui disant qu’il a bien fait de parler.

Pratiques inrmières ENCADRÉ 7.6

Consigner les données d’évaluation de cas présumés de maltraitance

HISTORIQUE DE L’ÉVÉNEMENT

EXAMEN PHYSIQUE

• Date, heure et lieu de l’événement

• Localisation, taille, forme et couleur des contusions ; indiquer leur localisation la plus précise possible, leur taille et leur forme sur un schéma représentant le corps

• Séquence des événements dans le temps • Présence de témoins, en particulier la personne responsable de l’enfant au moment de l’événement • Délai écoulé entre l’événement et le début du traitement • Entrevue avec l’enfant au moment opportun, y compris ses citations verbales et l’information obtenue grâce à des dessins et à d’autres activités ludiques • Entrevue avec le parent, les témoins et d’autres personnes signicatives, et consignation de leurs citations verbales • Description des interactions parent-enfant (p. ex., présence ou absence d’interactions verbales, de contact visuel et de toucher ; degré de préoccupation du parent)

• Caractéristiques distinctives, comme une ecchymose ayant la forme d’une main ou une brûlure circulaire (possiblement causée par une cigarette) • Symétrie ou asymétrie de la lésion ; présence d’autres traumas • Intensité de la douleur, sensibilité des os • Signes de blessures antérieures, état général de santé et hygiène • Niveau de développement de l’enfant conforme à son âge, tests de dépistage

• Nom, âge et état de santé des autres enfants du foyer

4 L’anamnèse est détaillée dans le chapitre 4, Examen clinique : anamnèse et examen physique.

ainsi que des questions pertinentes au moment de l’entrevue aideront l’inrmière à établir un plan d’action approprié. Une bonne connaissance des mécanismes de blessures et du développement de l’enfant est essentielle pour effectuer l’anamnèse de manière efcace 4 . Les enfants qui verbalisent facilement peuvent souvent relater l’histoire de l’événement traumatique. En séparant l’enfant de la personne qui s’en occupe, il peut être possible d’obtenir une histoire plus able.

Examen physique L’objectif de l’évaluation physique en cas de violence physique envers un enfant est de découvrir toutes les blessures. Une approche par systèmes permet d’évaluer l’organisme en entier. En cas de violence et de traumatismes graves, l’examen devrait commencer par une évaluation rapide des voies respiratoires, de la respiration, de la circulation et du système nerveux. Un examen systématique allant de la tête aux pieds suit. Il est essentiel de porter son

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Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

attention sur des zones trop souvent négligées, comme le cuir chevelu, l’arrière des oreilles et le frein de la langue. Il faut également procéder à un examen externe des organes génitaux et de la surface dorsale de l’enfant. L’inrmière doit consigner dans ses notes d’examen la localisation de toutes les lésions et en faire une description détaillée. Elle doit noter la couleur, la taille et l’emplacement de toute contusion. Les caractéristiques à consigner concernant les brûlures comprennent leur localisation, leur forme, les lignes de démarcation ainsi que la présence d’escarres ou de cloques. Il est utile de représenter les lésions sur un schéma du corps. Si c’est possible, l’inrmière peut prendre une photographie des lésions après avoir placé une règle à proximité pour fournir une indication de la taille de chacune. Ce ne sont pas toutes les formes de violence physique qui laissent des marques évidentes. Par exemple, il peut y avoir des lésions des organes

Toutes les preuves recueillies doivent respecter les directives strictes qui s’appliquent aux preuves légales ; la traçabilité des preuves matérielles doit être documentée pour faciliter le travail des services de protection de la jeunesse et celui des policiers, si nécessaire. Les renseignements consignés sur le formulaire de traçabilité devraient inclure le nom des personnes qui recueillent ou qui reçoivent les preuves (comme des photographies et des prélèvements d’ADN), le type de preuve recueillie ou reçue, et la date de la réception (Lyden, 2011).

Abus sexuel Anamnèse L’entrevue constitue un élément essentiel lorsqu’il s’agit de déterminer s’il y a abus sexuel. Plusieurs facteurs peuvent empêcher l’enfant de révéler qu’il est victime d’abus sexuel. Dans certains cas, le secret peut avoir été exigé à l’enfant. Il est possible que ce dernier se soit fait dire que personne ne le croirait ou que cela ferait du mal à sa famille s’il révélait les sévices dont il est victime . Il est aussi possible que l’enfant ne soit pas prêt psychologiquement à parler de l’abus. Il est essentiel d’établir un rapport de conance avec lui. Le récit que les enfants font des abus sexuels dont ils sont victimes peut consister en des histoires contradictoires ou, au contraire, en des versions inébranlables de l’expérience. Les histoires qui semblent contradictoires peuvent se rapporter à des expériences que l’enfant a vécues au cours d’abus commis en plusieurs occasions. Par ailleurs, les enfants qui rapportent de façon répétée des faits identiques peuvent avoir été incités à le faire par leur agresseur. Le type d’interrogatoire auquel les enfants sont soumis après avoir rapporté des abus sexuels peut modeler leur pensée. Ainsi, an d’éviter d’inuencer l’interaction, l’inrmière doit se montrer habile lorsqu’elle interroge un enfant qui pourrait être victime d’abus. Ses notes d’évolution devraient rapporter mot à mot les déclarations faites par l’enfant et par la personne qui l’interroge de façon à montrer le caractère approprié et non suggestif des questions et des énonciations utilisées (Dubowitz et Lane, 2016). Les jeunes enfants peuvent imiter des gestes qu’ils ont subis ou qu’ils ont vu faire par d’autres. L’inrmière doit être capable de reconnaître et de distinguer les comportements de curiosité à l’égard du sexe ou d’autostimulation qui sont normaux pour l’âge de l’enfant. Les enfants ne miment habituellement pas des détails précis de l’acte sexuel

ou ne posent pas de gestes importuns envers les autres, à moins de posséder une expérience sexuelle allant au-delà du développement normal pour leur âge (Dubowitz et Lane, 2016).

clinique

Jugement

intra-abdominaux attribuables à un trauma contondant à l’abdomen sans signes externes de contusion. L’inrmière devrait considérer la possibilité de lésions abdominales et cérébrales chez les nourrissons et les enfants qui présentent tout autre signe de violence.

Sophie, qui est âgée de sept ans, adopte des comportements sexuels non adaptés à son âge. Elle se frotte contre les organes génitaux de ses oncles et de son grand-père lorsqu’elle s’assoit sur ces derniers, et ceux-ci sont très mal à l’aise devant cette situation. Elle raconte aussi des histoires explicites à caractère sexuel. Sophie habite avec sa mère, son beau-père et la lle de ce dernier. L’oncle Denis est inquiet et parle avec Sophie pour recueillir des faits. Il n’obtient pas de condences, mais il apprend qu’elle écoute des lms pornographiques avec sa mère et son conjoint tous les vendredis soirs. Que doit faire l’oncle Denis ? Justiez votre réponse.

Il n’existe malheureusement pas de prol typique des victimes, et il faut maintenir un indice de suspicion élevé pour dépister ces enfants. Les signes physiques sont variables ; il peut s’agir de n’importe lequel de ceux qui font partie de la liste des manifestations cliniques d’abus sexuels TABLEAU 7.8 . La victime peut présenter diverses manifestations comportementales, mais aucune de ces réactions prises individuellement ne peut constituer un diagnostic. Quand un enfant victime de violence afche ces comportements, les signes sont parfois attribués à tort aux stress normaux de l’enfance, en particulier chez les enfants d’âge scolaire plus âgés et les adolescents. Même les signes considérés comme étant les plus prédictifs d’abus sexuels, notamment certains constats génitaux, des comportements sexuels inappropriés pour l’âge, l’imitation d’activités sexuelles adultes et l’intérêt intense pour l’activité sexuelle (p. ex., la masturbation), n’indiquent pas toujours qu’il y a eu abus sexuel. À l’inverse, il arrive que des enfants victimes d’une telle agression ne démontrent pas une plus grande connaissance de la chose sexuelle que les enfants non abusés. L’enfant victime d’abus sexuel pourrait démontrer des réactions affectives inhabituelles. Ainsi, l’incidence des troubles du sommeil, des crises de colère, de mauvais résultats scolaires et de la dépression pourrait être plus élevée chez les enfants victimes d’abus (ASPC, 2010 ; Dubowitz et Lane, 2016).

Examen physique Il est particulièrement difcile de dépister les cas d’abus sexuel parce qu’il arrive souvent que les gestes posés ne laissent que peu ou pas d’indications physiques évidentes. L’objectif de l’examen physique est de consigner les constats génitaux 1 . Dans la plupart des cas, l’examen génital est normal, ce qui ne signie pas qu’il n’y a pas eu abus sexuel. En effet, les attouchements ou les contacts génitaux sans pénétration peuvent ne pas laisser de trace physique. L’information concernant le dernier contact sexuel est importante, car elle permet de déterminer si une évaluation médicolégale est nécessaire. L’infirmière doit envisager de recueillir des preuves médicolégales chez un enfant dès qu’elle sait ou soupçonne qu’il y a eu un contact sexuel Chapitre 7

7

CE QU’IL FAUT RETENIR

L’inrmière devrait considérer la possibilité de lésions abdominales et cérébrales chez les nourrissons et les enfants qui présentent tout autre signe de violence.

ALERTE CLINIQUE

Quand un enfant rapporte des expériences possiblement révélatrices d’un abus sexuel, il est important de prendre sa déclaration au sérieux, mais aussi avec prudence an d’éviter d’éveiller des craintes chez lui ou d’accuser quelqu’un à tort.

1 La question du consentement, lorsque des examens physiques sont faits sur des enfants, est abordée dans le chapitre 1, Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté.

Problèmes de santé du trottineur et de l’enfant d’âge préscolaire

297

ALERTE CLINIQUE

L’incompatibilité entre la narration de l’événement et la lésion ou le trauma est probablement le critère le plus important sur lequel baser la décision de signaler une violence soupçonnée.

Une liste des centres habilités à accueillir des victimes de harcèlement sexuel est disponible à l’adresse suivante : www. harcelementsexuel.ca/ centres-designes-quebec.

moins de 72 heures auparavant. Après 24 heures, les chances de prélever une preuve médicolégale directement sur le corps d’une victime prépubère diminuent grandement. La literie ou les sousvêtements de l’enfant ainsi que tout matériel ayant collé à sa peau (bre, tissu, végétation) demeurent les meilleurs sites pour recueillir une preuve (Girardet, Bolton, Lahoti et al., 2011). Il est recommandé que ce soit un médecin ou une inrmière possédant une expérience de ces types de cas qui procède à l’examen. Au Québec, il existe une formation spécique destinée aux inrmières qui procèdent à l’évaluation médicolégale (appelée trousse médico-légale), et ces évaluations ne s’effectuent que dans les centres désignés pour accueillir les victimes d’agression sexuelles. L’examen génital d’une lle devrait comprendre une inspection de la vulve, de l’hymen et des tissus avoisinants. Sa pertinence doit être déterminée en fonction des besoins d’évaluation, et les instruments invasifs ne doivent être utilisés que seulement si nécessaire. Contrairement à la croyance populaire, la taille de l’orice hyménal n’est pas indicative de la probabilité d’abus sexuel (Adams, 2011). Chez les victimes masculines, la présence d’enure, d’abrasions ou de contusions du tissu génital peut laisser soupçonner qu’il y a eu violence. En outre, les muqueuses du vagin et de l’anus étant élastiques, il peut y avoir pénétration sans que les tissus soient endommagés. Cela contredit une autre croyance voulant qu’il soit toujours possible d’établir la preuve de la virginité féminine. L’hymen est élastique et peut s’étirer pour permettre une pénétration totale ou partielle sans garder de trace de traumatisme (Hornor, 2010). Il faut penser à prélever des échantillons an de déceler la présence éventuelle d’une infection transmissible sexuellement qui pourrait avoir été contractée au cours du contact sexuel.

Interactions entre l’enfant et les personnes de son entourage La plupart du temps, l’inrmière détectera des signes de maltraitance durant un entretien avec l’enfant et sa famille, ou avec des personnes de son entourage immédiat. Si de la maltraitance est soupçonnée, l’inrmière devrait rencontrer l’enfant seul, sans adulte. Elle doit éviter de prendre parti lorsque l’enfant rapporte les événements. Il est important de poser des questions ouvertes, non suggestives. L’historique recueilli doit comprendre un récit de l’incident fait par l’enfant lui-même (s’il peut s’exprimer) et par la

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Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

personne qui en a la charge. La date, l’heure et le lieu où l’incident est survenu, de même que le nom des personnes qui étaient présentes à ce moment, font partie des éléments essentiels à consigner . Les antécédents familiaux concernant les troubles hémostatiques ou osseux sont importants. L’inrmière peut proter du contact initial avec la famille pour évaluer les interactions entre l’enfant et la personne qui s’en occupe. Les observations touchant cette personne devraient porter sur le soutien affectif qu’elle témoigne à l’enfant, l’attention qu’elle accorde à ses besoins et les inquiétudes qu’elle manifeste relativement à son traumatisme. Même si les réactions des enfants et des gens qui s’en occupent peuvent varier par rapport à un événement stressant, certaines réactions comportementales des parents envers leur enfant ou envers la personne qui mène l’entrevue devraient alerter l’inrmière sur la possibilité de maltraitance. Ils peuvent être incapables de réconforter l’enfant ou ne pas désirer le faire. Lorsqu’ils interagissent avec les travailleurs de la santé, ils peuvent se sentir menacés et avoir peur d’être jugés, ce qui peut susciter de la résistance de leur part. Pendant l’hospitalisation de l’enfant, il est possible qu’ils ne participent pas à ses soins et qu’ils se préoccupent peu de ses progrès, de son congé éventuel ou des soins de suivi dont il pourrait avoir besoin. Les réactions des enfants maltraités envers leurs parents ou leurs blessures peuvent aussi conrmer les soupçons de mauvais traitements. Bien qu’il n’existe pas de modèle typique, plusieurs comportements peuvent être observés. Par exemple, certains enfants peuvent développer un problème d’attachement envers leurs parents ou un retard de développement, présenter des comportements d’agitation, de violence, d’agressivité ou d’opposition. Il est possible qu’ils évitent le contact visuel. Certains enfants maintiennent une vigilance prudente envers tous les étrangers ; certains sont timides en présence d’étrangers comme s’ils avaient peur, alors que d’autres sont exceptionnellement affectueux et extravertis. Les entrevues ne doivent pas être précipitées. Pour aider l’enfant à discuter de l’abus, il peut être utile de lui proposer des activités ludiques (p. ex., le dessin) tout en conversant avec lui an d’établir un lien de conance. Plusieurs entrevues de même qu’un counseling psychologique peuvent être nécessaires avant que l’enfant devienne disposé à parler de l’abus qu’il subit.

Soins inrmiers MALTRAITANCE

Signaler les cas de maltraitance Au départ, il est essentiel de savoir reconnaître les cas possibles de violence ou de négligence. L’inrmière peut entrer en contact avec des enfants victimes de violence au service des urgences, dans le cabinet du médecin, lors d’une consultation à domicile, en milieu de garde ou à l’école. Elle doit être à l’affût de toute manifestation clinique de maltraitance physique ou psychologique ou d’abus sexuel. En Amérique du Nord, la loi oblige les professionnels de la santé à signaler aux autorités les cas de violence ou d’abus envers les enfants.

Effectuer les procédures judiciaires Une procédure judiciaire peut être nécessaire pour que l’enfant puisse être retiré de son foyer, ou pour que les parents soient déclarés inaptes et qu’ils perdent leurs droits. Au Québec, cette démarche débute par un signalement aux services de protection de la jeunesse (Observatoire des tout-petits, 2017). Lorsque les tribunaux sont impliqués, ils demandent habituellement un témoignage de la part de l’auteur du signalement. L’inrmière peut être citée à comparaître ou ses notes peuvent être incluses dans la preuve au moment des audiences. Il est donc essentiel de procéder à une consignation précise et objective tout au long du processus. Les comportements de l’enfant et de la famille sont décrits, non interprétés, et sont notés quotidiennement an d’établir un registre des progrès. Les conversations entre l’inrmière, l’enfant et le parent sont consignées mot à mot, autant que possible.

Soutenir l’enfant Les enfants chez qui la maltraitance est suspectée sont souvent hospitalisés pour le traitement médical de leurs blessures et pour permettre une évaluation plus poussée de leurs besoins de sécurité. Les besoins de ces enfants sont les mêmes que ceux des autres enfants hospitalisés. Ils doivent être traités comme des enfants ayant les besoins physiques, les tâches développementales et les intérêts ludiques habituels, et non comme des victimes de violence. L’objectif de la relation entre l’inrmière et l’enfant est de fournir un modèle de comportement pour les parents an de les aider à entretenir des rapports positifs et constructifs avec leur enfant.

Soutenir la famille L’inrmière encourage aussi les relations entre l’enfant victime de maltraitance et les membres non agresseurs de sa famille. Quand l’ignorance des pratiques éducatives a joué un rôle dans les mauvais traitements, l’inrmière peut renseigner le parent sur les besoins physiques et affectifs de l’enfant. L’attitude des parents à l’égard de la punition corporelle étant démontrée comme un facteur de risque qui augmente les probabilités de violence et de maltraitance, il est possible que les parents ne connaissent pas de méthodes de discipline non violentes, comme les temps de repos (retrait) (Observatoire des tout-petits, 2017) 1 . Ils peuvent aussi avoir besoin d’aide pour gérer leur frustration de façon à ne pas déverser leur colère sur l’enfant. Durant l’enseignement, le renforcement positif est de mise pour toute habileté parentale qu’ils démontrent an de promouvoir leur sentiment de compétence parentale. Il faut éviter les propos accusateurs ou culpabilisants. Il est pertinent que l’inrmière ait recours à des démonstrations et à des exemples dans son enseignement. L’inrmière recommande aux membres de la famille d’encourager l’enfant à reprendre ses activités normales et de surveiller chez lui les signes de détresse 8 . Les enfants expriment souvent leurs sentiments par leur comportement. Les parents doivent être attentifs aux modifications de comportement qui révèlent une détresse résul tant de l’incident, comme le fait de rester dans la maison ou de refuser d’aller à la garderie, l’agressivité, la colère, un trouble alimentaire, une régression dans son développement, les modications des habitudes de sommeil et l’augmentation de la fréquence des cauchemars (Observatoire des tout-petits, 2017). L’enfant est encouragé à parler de ses sentiments et des cauchemars, puisque plus il parle de l’expérience, plus il acquiert une maîtrise sur elle. L’orientation vers les organismes appropriés de services sociaux est aussi essentielle. Des ressources d’aide nancière, une amélioration du logement et des services d’aide à l’enfance doivent être recherchés au besoin. Au Québec, la ligne Info-Santé (811) et les centres locaux de services communautaires (CLSC) faisant partie du centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) ou du centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSSS) d’une région peuvent

Chapitre 7

1 L’utilisation du retrait comme méthode de discipline est abordée dans le chapitre 1, Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté.

7

8 L’état de stress posttraumatique est expliqué dans le chapitre 8, Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les enfants expriment souvent leurs sentiments par leur comportement. Les parents doivent être attentifs aux modications de comportement qui révèlent une détresse résultant de l’incident.

Il existe des ressources disponibles pour les jeunes, notamment Jeunesse, J’écoute (jeunessejecoute.ca) et Tel-jeunes (www.teljeunes. com), qui offrent des services professionnels de consultation et d’information.

Problèmes de santé du trottineur et de l’enfant d’âge préscolaire

299

guider les parents vers ces ressources. Les groupes d’entraide offrent aussi des services importants (Observatoire des tout-petits, 2017).

Planier le congé d’hospitalisation

3 Les caractéristiques du développement de l’enfant, depuis la naissance jusqu’à l’adolescence, sont abordées dans le chapitre 3, Croissance, développement et promotion de la santé.

La planication du congé devrait s’amorcer dès que possible après que la décision légale a été prise ; il peut s’agir d’un placement temporaire en famille d’accueil, du retour au foyer ou du retrait dénitif des droits parentaux. Cette dernière mesure est la plus draconienne, mais elle est nécessaire dans les situations de violence qui menacent la vie de l’enfant. Quand l’enfant est envoyé dans une famille d’accueil ou un établissement spécialisé pour les jeunes, une occasion d’exprimer ses sentiments doit lui être offerte. Peu importe la gravité de l’abus qu’il a subi, l’enfant pleure habituellement en raison de la séparation d’avec ses parents. Il a besoin d’aide pour comprendre pourquoi il ne peut pas retourner à la maison et que sa nouvelle demeure ne représente pas une punition. Lorsque c’est possible, les membres de la famille d’accueil sont invités à visiter l’enfant à l’hôpital, et l’inrmière doit alors jouer un rôle actif en aidant ces nouveaux tuteurs à comprendre l’enfant. Le cercle vicieux de la violence, de l’abandon et de la négligence ne peut être rompu que par une évaluation continue de la résidence d’accueil et de l’adaptation de l’enfant à son nouvel environnement.

Prévenir la violence dès la naissance

Le Centre d’intervention téléphonique comme la LigneParents (www. ligneparents.com ; 1 800 361-5085) est une ressource gratuite et condentielle disponible 24 heures sur 24 pour aider les parents qui ont maltraité physiquement leurs enfants ou qui craignent de le faire. Le service Info-Santé (811) offre également la possibilité de parler à un intervenant en santé mentale 24 heures sur 24 pour obtenir du soutien.

300

Partie 3

L’éradication de la violence envers les enfants représente un but extrêmement difficile à atteindre. Les programmes visant à dépister les agresseurs éventuels et à mettre sur pied une intervention de soutien avant qu’un acte de violence soit commis ont connu un succès mitigé (Selph, Bougatsos, Blazina et al., 2013). Les inrmières ont toutefois joué un rôle important dans ces programmes. Il semble que la visite d’une inrmière au domicile des primipares qui sont des adolescentes, des célibataires ou encore des personnes de faible statut socioéconomique constitue une mesure préventive efcace (Lane, 2014). Au Québec, selon la région où la famille demeure, ces visites sont automatiques ou sont faites en fonction des besoins. L’inrmière peut faire sa visite dès le retour à la maison de la mère et de l’enfant et revenir un peu plus tard. Elle peut, entre autres, peser le bébé, évaluer son état général et soutenir la mère qui allaite pour la mise au sein (Doré et Le Hénaff, 2017). Le Programme périnatal de prévention du syndrome du bébé secoué, une intervention éducative qui a lieu dans les milieux de soins, est reçu

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

positivement chez les intervenants et les familles. Les inrmières attitrées à ce programme fournissent des renseignements sur la croissance et le développement normal de l’enfant, et sur les soins de santé de base ; elles deviennent des personnes de conance qui peuvent orienter les familles vers les services appropriés lorsqu’elles décèlent un besoin de soutien. De tels programmes fournissent des modèles permettant de réduire les facteurs de risque de violence. Les inrmières peuvent mettre en place des activités semblables dans divers établissements. Les inrmières des cliniques prénatales peuvent ainsi préparer les familles qui attendent un enfant à la réalité de devenir parent. Les inrmières en pouponnière et en suivi postpartum peuvent favoriser le processus d’attachement en incitant les parents à tenir leur nouveau-né et à le regarder, et en leur enseignant les stratégies d’adaptation en cas de pleurs prolongés. Les inrmières des unités de néonatalogie peuvent réduire au minimum les effets de la séparation en encourageant les parents à visiter leur enfant et en les aidant à se sentir à l’aise lorsqu’ils s’occupent de lui. Les inrmières des unités de soins ambulatoires peuvent enseigner aux parents les méthodes appropriées pour le bain, les repas, la toilette, la discipline et la prévention des traumas, tout en mettant l’accent sur les besoins normaux des enfants et les caractéristiques de leur développement 3 . Les inrmières doivent être attentives au besoin d’attention, de réconfort et de renforcement des parents, et orienter ceuxci vers les services communautaires et les groupes d’entraide, au besoin. Les cas d’abus sexuels nécessitent une approche spécique abordée dans l’ENCADRÉ 7.7.

Sensibiliser les enfants aux risques d’abus Contrairement aux efforts de prévention de la négligence et de la violence physiques, qui sont dirigés vers l’agresseur potentiel, ceux destinés à la prévention des abus sexuels envers les enfants se concentrent sur l’éducation des enfants an qu’ils apprennent à se protéger eux-mêmes. La véritable approche préventive de l’abus sexuel consiste à encourager les qualités de respect, d’affection et d’empathie des parents, ainsi que leur capacité à établir des limites, et à fournir des soins et une éducation de grande qualité à leur enfant. Certains jeux comme « Que faire si la gardienne veut jouer à la lutte et te serrer dans ses bras, mais qu’elle te demande de ne pas en parler ? » peuvent se montrer utiles pour explorer à l’avance des situations dangereuses et aider l’enfant à apprendre

l’importance de dire non. L’enfant a besoin de savoir que, peu importe ce qu’une autre personne a dit ou a fait, ses parents désirent le savoir et qu’ils ne le puniront pas. Si une agression a eu lieu, il faut le rassurer en lui disant que ce n’était pas sa faute. Il est également important d’enseigner la sécurité aux enfants en lien avec des situations de risque potentiel. L’inrmière se trouve souvent en position de discuter des abus avec les parents et elle peut leur donner des conseils. De plus, les parents doivent être conscients que des gens sympathiques, même s’il s’agit d’amis et de membres de la famille, peuvent aussi être des agresseurs, et ils doivent observer soigneusement la façon dont les autres se comportent avec leurs enfants. Un changement soudain dans le comportement de l’enfant et une réaction comme

« Je n’aime plus oncle X » sont des indices incitant à s’interroger sur cette relation. En cas de doute, il faut empêcher que l’enfant se trouve à nouveau seul en présence de cette personne. C’est parfois pour le plus grand malheur de l’enfant que ses parents ne prennent pas au sérieux certains commentaires comme « Il me serre trop fort dans ses bras » ou « Je ne veux pas aller avec lui ». Des remarques désinvoltes des parents comme « Il t’aime, tout simplement ! » ou « Tu fais ce que les adultes te disent de faire, c’est tout ! » peuvent mettre l’enfant en péril. Les professionnels de la santé doivent mettre en garde les parents contre de tels dangers et les guider vers une appréciation du problème en fournissant des lignes directrices concrètes pour l’éducation et la protection de l’enfant PSTI 7.1. et

7

ENCADRÉ 7.8.

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 7.7

Prévention et mesures à prendre en cas d’abus sexuels envers les enfants

Les abus sexuels sur des enfants sont beaucoup plus fréquents que la plupart des gens le croient. L’inrmière doit informer l’enfant et ses proches des moyens de prévenir les abus et des mesures à prendre le cas échéant. POUR PRÉVENIR LES ABUS SEXUELS

• Porter son attention sur les personnes qui entourent l’enfant (des attouchements non désirés peuvent venir de quelqu’un que l’enfant aime et en qui il a conance). • Encourager la communication en prenant au sérieux les déclarations de l’enfant ; poser une question ouverte. • Jeter un deuxième regard aux signaux de danger éventuel. • Inclure de l’information sur les abus sexuels dans les enseignements sur la sécurité. • Donner une dénition précise et des exemples d’abus sexuel. • Expliquer à l’enfant que même les personnes gentilles peuvent poser des gestes méchants. • Amener l’enfant à parler de toute personne qui le rend mal à l’aise. • Préparer l’enfant à affronter les tentatives de corruption, les menaces et, éventuellement, les recours à la force physique envers lui. • Encourager l’enfant à se coner à une personne signicative pour lui (ou une personne en qui il a conance) s’il est victime de violence, d’attouchements ou de comportements qu’il n’aime pas.

• Enseigner à l’enfant comment dire non, demander de l’aide, et décider de qui peut le toucher et de quelle façon. • Donner à l’enfant des modèles pour se protéger lui-même et établir ses limites. POUR AIDER L’ENFANT À SE REMETTRE D’UN ABUS SEXUEL

• Écouter attentivement l’enfant an de le comprendre. • Encourager l’enfant à parler en soulignant ses forces, en lui manifestant de la conance et de la sympathie, et en ne lui faisant pas de reproches. • Connaître les ressources locales et choisir soigneusement de l’aide. • Créer des occasions permettant de parler de l’agression. • Offrir des ressources aux membres de la famille, puisqu’une agression sexuelle ébranle tous les membres de l’entourage de l’enfant. POUR FAIRE FACE À CE PROBLÈME SOCIAL

• Fournir des soins et du soutien à ceux qui en ont été victimes. • Mettre sur pied des programmes de voisinage pour soutenir les efforts collectifs visant à protéger les enfants ou encourager les programmes déjà existants. • Encourager les écoles à fournir des renseignements sur les abus sexuels en tant que problème de santé et de sécurité. • Organiser des groupes communautaires pour soutenir les programmes d’éducation et d’application de la loi.

Source : Naître et grandir (2014).

Chapitre 7

Problèmes de santé du trottineur et de l’enfant d’âge préscolaire

301

Plan de soins et de traitements inrmiers PSTI 7.1

Maltraitance

PROBLÈME DÉCOULANT DE LA SITUATION DE SANTÉ

Risque de maltraitance lié à la présence d’une combinaison de facteurs de risque

OBJECTIF

L’enfant ne subira aucun mauvais traitement.

RÉSULTATS ESCOMPTÉS

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES ET JUSTIFICATIONS

• Augmentation du sentiment de soutien

Prévention

• Ouverture à discuter d’un problème de violence ou de négligence • Recours à des ressources d’aide appropriées

• Orienter la famille vers des intervenants spécialisés et des organismes sociaux pour fournir de l’assistance aux parents an qu’ils acquièrent des compétences parentales adéquates. • Collaborer avec l’équipe interprofessionnelle pour regrouper l’expertise dans la prévention de négligence ou de violence futures. • Aider les parents à déterminer les circonstances qui ont provoqué ou qui peuvent provoquer un acte de violence pour favoriser de meilleures compétences parentales. • Aider les parents à admettre qu’il y a eu violence ou négligence pour les amener à chercher de l’aide. Maltraitance • Rechercher chez l’enfant des signes physiques ou comportementaux de violence an de le protéger. • Communiquer les soupçons de maltraitance aux autorités compétentes (obligation légale des professionnels de la santé) pour mobiliser rapidement les meilleures ressources en matière de protection de l’enfance. • Collaborer au retrait de l’enfant d’un milieu dangereux an de prévenir de nouveaux traumatismes ou la poursuite de la négligence ou de la violence. • Maintenir à jour un compte rendu factuel et objectif du comportement de l’enfant et des parents pour documenter les notes d’évolution de l’inrmière. • Être attentive aux signes de récurrence de la violence ou de la négligence pour assurer un suivi et intervenir, le cas échéant.

PROBLÈME DÉCOULANT DE LA SITUATION DE SANTÉ

Peur ou anxiété liées à des expériences d’interactions interpersonnelles négatives, à des mauvais traitements répétés, à un sentiment d’impuissance, à l’éventualité du retrait des droits parentaux se manifestant par du repli sur soi et de l’évitement chez l’enfant

OBJECTIF

L’enfant montrera une augmentation de sa conance envers les autres.

RÉSULTATS ESCOMPTÉS

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES ET JUSTIFICATIONS

• Attitude positive de l’enfant dans des relations de conance avec le personnel soignant

Renforcement du sentiment de sécurité

• Expression de ses sentiments • Expression de ses besoins de façon appropriée

• Assurer la continuité des soins par le même personnel inrmier durant l’hospitalisation an de favoriser la relation de conance. • Établir une relation de conance avec l’enfant pour réduire au minimum les sentiments de honte et de culpabilité. • Complimenter l’enfant sur son attitude pour favoriser son estime de soi par renforcement positif. • Prendre soin de l’enfant comme s’il avait un problème physique précis, et non pas comme une victime de violence. • S’abstenir de poser trop de questions dans un court laps de temps pour éviter de bouleverser l’enfant ou de nuire à l’évaluation. • Utiliser le jeu pour encourager l’enfant à communiquer ses pensées et ses sentiments. • Encourager l’enfant à parler de ses sentiments pour faciliter l’adaptation. • S’assurer que les entrevues condentielles sont faites dans un endroit approprié et aux moments opportuns pour susciter la conance. Préparer l’enfant au retrait des droits parentaux • Encourager l’enfant à exprimer ses sentiments (p. ex., par des pleurs, de la colère, de l’inquiétude, etc.). • Éviter de juger les sentiments ou les réactions contradictoires de l’enfant, car malgré les abus, l’enfant reste attaché à ses parents et risque de ressentir un sentiment d’abandon. • Inciter les parents de la famille d’accueil à se présenter avant le placement, si possible, pour donner à l’enfant le temps de les apprivoiser.

302

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Mise en œuvre d’une démarche de soins ENCADRÉ 7.8

Maltraitance

COLLECTE DES DONNÉES – ÉVALUATION INITIALE

Les actions à entreprendre pour l’évaluation d’un enfant ayant été maltraité ou admis pour possibilité de maltraitance sont les suivantes : • Évaluer les manifestations cliniques de violence envers l’enfant, dont celles de négligence ou de mauvais traitements suspectés. ANALYSE ET INTERPRÉTATION DES DONNÉES

Les problèmes découlant de la situation clinique peuvent inclure les situations détaillées dans le PSTI 7.1. D’autres problèmes sont également possibles : • Altération du lien d’attachement parent-enfant

• Capacité de l’enfant d’entretenir des relations positives avec le personnel soignant • Aptitude des parents à être bien informés des besoins physiques et développementaux de l’enfant • Connaissance des organismes communautaires de soutien et d’éducation, et recours à ceux-ci par le personnel soignant INTERVENTIONS INFIRMIÈRES

Les nombreuses stratégies d’intervention sont abordées dans la présente section Soins inrmiers.

• Présence de comportements violents de la part du parent

ÉVALUATION DES RÉSULTATS – ÉVALUATION EN COURS D’ÉVOLUTION

• Perturbation de la dynamique familiale

L’efcacité des interventions inrmières auprès de la famille et de l’enfant maltraité est déterminée en vériant et en évaluant les soins de façon continue :

• Sentiment d’impuissance • Altération des mécanismes de protection • Syndrome du traumatisme de viol RÉSULTATS ESCOMPTÉS

La planication des soins est établie dans le but d’atteindre les résultats suivants :

7

• Rechercher chez l’enfant des preuves physiques et comportementales de violence ; observer les réactions de l’enfant envers les professionnels de la santé ; si l’enfant est hospitalisé, consulter les horaires du personnel an de prévoir qu’un groupe stable d’inrmières s’occupe de lui.

• Capacité de fournir un environnement sécuritaire

• Évaluer les connaissances des parents sur les besoins physiques et affectifs de l’enfant.

• Capacité de fournir un soutien adéquat à l’enfant et à sa famille, et de les orienter de façon appropriée

• Interroger l’enfant sur ses sentiments concernant son retour au foyer ou son placement à l’extérieur de celui-ci.

• Capacité de l’enfant d’exprimer ses sentiments concernant son retour au foyer ou son placement en famille d’accueil

• Se renseigner sur les programmes communautaires destinés à prévenir la violence envers les enfants.

Analyse d’une situation de santé Josiane, âgée de 14 mois, est amenée au service des urgences de l’hôpital par son père. Celuici rapporte que sa lle vomit depuis hier et qu’elle dort beaucoup. Il ne sait pas ce qui a pu provoquer cela. Après avoir examiné sommairement la fillette, vous constatez que son état est stable et vous la

Jugement clinique conduisez avec son père dans une salle d’examen. En retournant à l’accueil, vous croisez la mère de Josiane qui arrive ; elle semble paniquée. Vous prenez le temps de la calmer, et elle vous indique qu’elle ne comprend pas comment sa lle a pu tomber en bas de l’escalier du sous-sol de la maison.

Mise en œuvre de la démarche de soins

Collecte des données – Évaluation initiale – Analyse et interprétation 1. Quel indice de la situation vous fait croire que Josiane a peut-être été maltraitée ? 2. Vous décidez de recueillir les données entourant l’événement auprès de la mère avant de la diriger vers sa lle et le père de celle-ci. Expliquez la raison de cette intervention. SOLUTIONNAIRE

Chapitre 7

Problèmes de santé du trottineur et de l’enfant d’âge préscolaire

303

3. Vous inscrivez les renseignements obtenus sur l’état de Josiane au cours des entrevues avec les deux parents dans les notes d’évolution au dossier de la llette. Vous rapportez telles quelles vos questions et les réponses obtenues. Pour quelle raison est-il important de consigner dans le dossier tous les détails de ces renseignements ?

Voici un extrait des notes d’évolution indiquées dans le dossier de Josiane.

4.

Qu’est-ce qui est inacceptable dans cette note d’évolution ? Justiez votre réponse.

Au cours de l’examen physique, vous avez observé que Josiane avait des ecchymoses aux côtes et de la douleur lorsque vous la preniez par le thorax. Elle a vomi en jet à deux reprises durant l’examen.

VU dans ce chapitre

Quelle autre évaluation clinique devriez-vous effectuer si vous cherchez à détecter des blessures compatibles avec le syndrome du bébé secoué ?

5.

Nommez au moins huit autres données à recueillir au cours de l’examen physique.

6.

Vous soupçonnez que Josiane est victime du syndrome du bébé secoué. Nommez deux indices de la situation qui corroboreraient vos soupçons.

7.

Nommez deux examens paracliniques permettant de conrmer le syndrome du bébé secoué chez Josiane. Justiez la pertinence de ces examens.

8.

Identiez un facteur ayant pu avoir déclenché le syndrome du bébé secoué et justiez votre réponse. MAIS SI...

Si Josiane avait plutôt des brûlures aux deux avant-bras et que son père afrmait que sa lle a été brûlée en tentant de voir ce qui se trouvait dans une casserole d’eau bouillante sur la cuisinière, quels signes observables sur Josiane laisseraient croire que les brûlures ne sont pas accidentelles ? Indiquez-en deux. 9. Le père de Josiane dit avoir été seul pendant une longue période avec sa lle. Nommez au moins trois autres facteurs de risque parentaux prédisposant à la violence physique.

Le médecin conrme que Josiane a été secouée. De plus, elle a une fracture au fémur gauche sous forme de torsion, démontrant qu’un adulte a tordu sa jambe. Les parents sont rencontrés par le médecin qui transmet les résultats et qui les confronte an de leur faire dire ce qui s’est vraiment passé.

Le père avoue ses actes. Il dit avoir perdu patience, car sa conjointe travaille beaucoup et il est souvent seul avec Josiane qui pleure fréquemment et qui demande énormément d’attention. Il regrette son geste et dit qu’il ne recommencera plus jamais.

Planication des interventions – Décisions inrmières 10. Avant de rédiger vos notes d’évolution, vous êtes allée ouvrir la porte de la salle d’examen où se trouvent Josiane et son père. Vous avisez le personnel soignant d’être attentif à toute anormalité ou à tout comportement suspect. Justiez cette précaution. 11. Comme le père de Josiane est repentant, l’équipe soignante peut-elle laisser tomber le signalement au Directeur de la protection de la jeunesse ? Justiez votre réponse.

304

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Josiane est hospitalisée dans une unité de soins pédiatriques depuis quatre jours. Les procédures judiciaires à l’encontre de son père sont entreprises,

et un ordre de la cour est émis interdisant toute visite de celui-ci à Josiane. Voici un extrait du plan thérapeutique inrmier (PTI) de Josiane. Extrait des notes d’évolution

Extrait de PTI CONSTATS DE L’ÉVALUATION Date

Heure



2018-07-16

12:00

2

Problème ou besoin prioritaire

Initiales

Indices de maltraitance physique

RÉSOLU / SATISFAIT Date

Heure

Initiales

Professionnels / Services concernés

J.B.

SUIVI CLINIQUE Date

Heure



2018-07-20

10:00

2

Directive inrmière

Initiales

Interdiction de visite du père

Signature de l’inrmière

Initiales

J.B

Urgence

Yvette Boucher

Y.B.

Pédiatrie

Heure

Initiales

Y.B.

Programme / Service

Jeanine Béland

CESSÉE / RÉALISÉE Date

Signature de l’inrmière

Initiales

Programme / Service

2018-07-16 11:00 V ds hir  dr eauc (gnmts frs ar l èr). L èr  u s l  té das ’cair  s-o. L èr in  s savr c q   car c ptôm chz s l. Pbt d aratanc ?

12. Vous décidez d’inscrire la directive inrmière suivante dans le PTI de Josiane : «Interdiction de visite du père ». Cette directive inrmière est-elle acceptable ? Justiez votre réponse. 13. Vous désirez aussi mettre à jour le PTI de Josiane concernant sa douleur aux côtes. Les formulations suivantes du problème et de la directive inrmière sont-elles adéquates ? Justiez votre réponse.

Extrait de PTI CONSTATS DE L’ÉVALUATION Date

Heure



Problème ou besoin prioritaire

2018-07-16

12:00

2

Maltraitance

J.B.

2018-07-20

11:00

3

Douleur aux côtes au cours des manipulations

Y.B

Initiales

RÉSOLU / SATISFAIT Date

Heure

Initiales

Professionnels / Services concernés

SUIVI CLINIQUE Date

Heure



2018-07-20

11:00

3

Directive inrmière

Initiales

Ne pas soulever par le thorax (+ dir. p. trav. PAB).

Signature de l’inrmière

Initiales

Programme / Service

Julie Boulanger

J.B

Urgence

Yvette Boucher

Y.B.

Pédiatrie

CESSÉE / RÉALISÉE Date

Heure

Initiales

Y.B.

Signature de l’inrmière

Initiales

Programme / Service

Évaluation des résultats – Évaluation en cours d’évolution 14. Qu’est-ce qui indiquerait que la condition physique de Josiane s’améliore? Nommez au moins deux indices autres que l’amélioration de la condition neurologique. 15. Nommez au moins trois éléments à enseigner à la mère pour prévenir une récidive.

Chapitre 7

Problèmes de santé du trottineur et de l’enfant d’âge préscolaire

305

7

Chapitre

8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent Écrit par : Cheryl C. Rodgers, PhD, RN, CPNP, CPON Meg Bruening, PhD, MPH, RD Adapté par : Christine Genest, inf., Ph. D.

MOTS CLÉS

OBJECTIFS

Agression sexuelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . 323 Dysménorrhée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 310 Énurésie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 308 Grossesse à l’adolescence . . . . . . . . . . 314 Gynécomastie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 313 Infection transmissible sexuellement et par le sang (ITSS) . . . 320 Intolérance au lactose . . . . . . . . . . . . . . 326 Obésité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 327 Suicide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 358 Trouble anxieux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 345 Trouble de déficit de l’attention/hyperactivité (TDA/H) . . . . 341 Trouble de l’alimentation . . . . . . . . . . . . 335

Après avoir étudié ce chapitre, vous devriez être en mesure : • d’élaborer un plan de soins pour l’enfant ou l’adolescent aux prises avec un problème de santé ; • de décrire les troubles courants des systèmes reproducteurs masculin et féminin ; • d’expliquer les problèmes de santé liés à la sexualité de l’adolescent ; • d’élaborer un plan d’information sur les questions ayant trait à la sexualité à l’adolescence ; • d’élaborer un plan de soins pour l’enfant ou l’adolescent aux prises avec un trouble lié à l’alimentation ; • d’expliquer les manifestations de certains troubles de santé mentale, de même que les soins et les traitements infirmiers dans ces cas ; • de décrire les principaux problèmes liés aux comportements à risque, de même que les soins et les traitements infirmiers qui y sont associés.

Disponible sur • Animation • À retenir • Carte conceptuelle • Solutionnaires • Tableaux Web

Guide d’études – SA07

306

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Carte conceptuelle

Cette carte conceptuelle illustre schématiquement les principaux concepts décrits dans le présent chapitre. Sa lecture vous permettra d’avoir une vue d’ensemble des notions qui y sont présentées.

dont

dont

dont

8

comprennent

comprennent

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

comprennent

dont

comprennent

dont

Chapitre 8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

307

8.1

Problèmes liés à l’élimination

8.1.1

Énurésie

L’énurésie est un trouble courant et dérangeant caractérisé par l’émission habituellement involontaire d’urine, le plus souvent la nuit (énurésie nocturne), survenant après cinq ans, soit l’âge auquel le contrôle sphinctérien la nuit devrait être acquis (American Psychiatric Association [APA], 2015 ; Thompson, 2016). L’énurésie est plus fréquente chez les garçons et elle disparaît habituellement vers l’âge de six à huit ans. Elle peut être soit primaire, il s’agit alors d’un retard de manifestation du contrôle sphinctérien, soit secondaire, c’est-à-dire qu’elle apparaît après une période d’au moins six mois de continence urinaire établie. Il semble y avoir une forte prédisposition génétique pour l’énurésie primaire (APA, 2015 ; Kessel, Allmann, Goldstein et al., 2017 ; Nevéus, 2017). Le besoin d’uriner immédiatement (miction impérieuse) peut survenir exclusivement durant le sommeil nocturne de l’enfant qui fait preuve d’un contrôle sphinctérien durant le jour (un seul symptôme) ou se produire également le jour chez l’enfant aux prises avec des urgences urinaires et parfois incapable de se retenir (plusieurs symptômes), en association avec d’autres troubles comme l’apnée du sommeil, l’infection urinaire, le décit neurologique et la constipation, ou en présence d’agents stressants émotionnels (Kessel et al., 2017). L’énurésie nocturne monosymptomatique constitue la forme d’énurésie la plus courante. Le trouble affecte l’esMarc est âgé de huit ans et il est atteint d’énu­ time de soi des enfants résie nocturne. Sa mère consulte, car le problème atteints et peut être particud’énurésie de son ls cause trop de répercussions lièrement perturbant pour négatives. En la questionnant, l’inrmière apprend l’adolescent, qui peut refuser que Marc boit un chocolat chaud pour se détendre le traitement (Tek et Erdem, avant la nuit. Nommez les deux facteurs qui 2014). La présente section peuvent favoriser l’énurésie nocturne chez abordera exclusivement Marc et justiez­les. l’énurésie nocturne.

Jugement

clinique

Étiologie Drépanocytose : Maladie provoquée par la modication des globules rouges (hématies), normalement biconcaves, qui prennent une forme de crois­ sant ou de faucille. Moins élastiques, les hématies falci­ formes peuvent obstruer les petits vaisseaux sanguins et bloquer la circulation sanguine.

308

Partie 3

L’énurésie peut être due à plusieurs causes physiogènes. Il peut s’agir d’un trouble structural de l’appareil urinaire, d’une infection urinaire, d’un décit neurologique, d’un trouble qui accroît le débit urinaire, comme le diabète, ou d’un trouble qui entrave la fonction de concentration rénale, comme l’insuffisance rénale chronique ou la drépanocytose (anémie falciforme). Lorsque la vessie peut recevoir un volume d’urine allant de 300 à 350 mL, elle peut contenir l’urine d’une nuit. Dans d’autres cas, même s’ils n’en sont probablement

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

pas la cause principale, des facteurs émotionnels entrent en jeu dans l’énurésie. Les parents d’enfants énurétiques rapportent que ces derniers dorment d’un sommeil plus profond que le sommeil habituel d’un enfant ; toutefois, cet élément ne serait pas la source de l’énurésie (Nevéus, 2017 ; Tek et Erdem, 2014).

Manifestations cliniques Pour qu’un diagnostic soit posé, il faut que la miction involontaire se produise à au moins deux reprises durant la semaine pendant au moins trois mois chez l’enfant dont l’âge, chronologique ou de développement, est d’au moins cinq ans. La manifestation clinique prédominante est la miction impérieuse, accompagnée d’un malaise aigu, d’instabilité psychomotrice et de pollakiurie, soit une fréquence anormalement élevée de mictions peu abondantes.

Approche thérapeutique Des mesures générales telles que restreindre les liquides avant le sommeil, faciliter l’accès aux toilettes et éviter les aliments contenant de la caféine sont habituellement efcaces pour aider l’enfant qui mouille son lit. La Société canadienne de pédiatrie (SCP) recommande de traiter l’énurésie avec une pharmacothérapie ou des alarmes seulement si ce trouble entraîne un grave problème pour l’enfant (Feldman et SCP, 2016). Les dispositifs d’alarme contre l’énurésie sont constitués d’un appareil xé au corps de l’enfant, qui déclenche une alarme lorsqu’il détecte quelques gouttes d’urine. Ce système peut nécessiter plusieurs semaines, voire plusieurs mois d’utilisation avant qu’une différence dans la fréquence des mictions au lit soit notée. Trois classes de médicaments sont employées dans le traitement de l’énurésie : les antidépresseurs tricycliques, les antidiurétiques et les anticholinergiques (Robson, 2016). L’antidépresseur tricyclique imipramine est utilisé en deuxième intention, étant donné ses effets indésirables tels que la sécheresse buccale et la constipation. L’oxybutynine, un anticholinergique, réduit l’hyperactivité musculaire vésicale ; elle peut être utile en cas de mictions diurnes fréquentes. La desmopressine, un analogue de la vasopressine, diminue le débit urinaire nocturne à un volume inférieur à la capacité vésicale fonctionnelle. Il importe de prévenir les parents que ces médicaments n’entraînent pas la guérison permanente, mais qu’ils aident à prévenir les émissions nocturnes ; il faut également les informer de leurs effets indésirables (Feldman et SCP, 2016 ; Robson, 2016 ; Tek et Erdem, 2014).

Soins inrmiers ÉNURÉSIE

Quelles que soient les modalités de la prise en charge de l’énurésie, l’inrmière soutient et rassure l’enfant et ses parents en leur expliquant les causes possibles de l’énurésie et les conséquences que celle-ci peut avoir sur l’estime de soi de l’enfant. Les parents doivent savoir que la punition et l’humiliation ne sont pas de mise, en raison de leurs répercussions émotionnelles défavorables et de leur inefcacité dans la modication du comportement. Le renforcement positif peut aussi aider à motiver l’enfant. La motivation de l’enfant et l’attitude positive de ses parents sont des facteurs importants dans le traitement de l’énurésie. L’inrmière enseigne aux parents qu’il est préférable d’éviter l’hydratation dans les heures précédant le coucher pour prévenir le remplissage rapide de la vessie. Pour la même raison, l’enfant aux prises avec de l’énurésie primaire devrait avoir une miction avant de se coucher. En cas de recours à la pharmacothérapie, l’inrmière enseigne aux parents la détection des effets indésirables des médicaments.

sa performance scolaire ou sa présence à l’école en souffriront. La qualité de vie des enfants atteints d’encoprésie s’en trouve donc affectée (Shepard et Cox, 2017).

Étiologie La constipation est la cause de l’encoprésie dans la majorité des cas (Shepard et Cox, 2017). Par ailleurs, la plupart du temps, la constipation provient de la rétention volontaire des selles, pour éviter la douleur ou pour éviter d’utiliser les toilettes publiques, par exemple. Si les selles sont retenues pendant une longue période de temps, leur accumulation cause un étirement des sphincters anaux, qui deviendront incapables de retenir les selles (Shepard et Cox, 2017). Des anomalies digestives, notamment la maladie de Hirschsprung, des lésions anorectales, une malformation ou un prolapsus rectal, ainsi que des troubles comme l’hypothyroïdie, l’hypokaliémie, l’hypercalcémie, l’intoxication au plomb, la myéloméningocèle, l’inrmité motrice cérébrale, la dystrophie musculaire et le syndrome du côlon irritable peuvent s’accompagner de constipation et ainsi provoquer l’encoprésie (Roche et Darviot, 2015).

8

Approche thérapeutique

8.1.2

Encoprésie

L’encoprésie consiste en l’évacuation habituellement involontaire de selles de consistance normale ou à peu près normale. Cette défécation survient à au moins une reprise chaque mois durant au moins trois mois chez un enfant dont l’âge, chronologique ou de développement, est d’au moins quatre ans. Elle ne découle pas d’un effet physiologique, comme celui exercé par un laxatif, ni d’une maladie (APA, 2015). L’encoprésie primaire se produit chez un enfant qui n’a jamais été continent alors qu’il a dépassé l’âge habituel d’acquisition de la propreté (APA, 2015). L’encoprésie secondaire est celle qui survient chez l’enfant de plus de quatre ans après une période de continence fécale établie. Le trouble est plus fréquent chez les garçons que chez les lles. Par ailleurs, il semblerait que les enfants ayant des troubles d’élimination, et particulièrement l’encoprésie, sont plus susceptibles d’être atteints d’un trouble de décit de l’attention/hyper activité (TDA/H), d’un trouble anxieux ou d’un trouble de l’humeur (APA, 2015 ; Roberts et Louie, 2015). Dans bien des cas, l’enfant afigé d’encoprésie se sent honteux et tente d’éviter les situations embarrassantes. S’il est persécuté par les autres enfants à l’école en raison de l’odeur qu’il dégage,

Le traitement de l’encoprésie commence par la détermination de la cause de la défécation intempestive, et se poursuit par le choix et la mise en application des interventions appropriées. En cas de constipation chronique, l’utilisation quotidienne d’un laxatif an que l’enfant produise une selle molle par jour peut être encouragée. À cet effet, en pédiatrie, les laxatifs sécuritaires les plus utilisés sont le lactulose, le polyéthylèneglycol (PEG), l’hydroxyde de magnésium et l’huile minérale (Mouterde, 2016 ; Roy, Boige et Mouterde, 2016). Toutefois, l’huile minérale est à éviter en présence de dysphagie ou de vomissements en raison du risque d’aspiration du liquide dans les poumons. L’important n’est pas tant le choix du laxatif que son utilisation thérapeutique quotidienne (Mouterde, 2016). À ce jour, il n’y a pas de régime thérapeutique permettant de traiter efcacement la constipation chez l’enfant. Toutefois, une alimentation équilibrée ainsi qu’une hydratation et une activité physique appropriées pour l’âge sont conseillées pendant et après le traitement (Mouterde, 2016). Une thérapie comportementale couplée à la pharmacothérapie peut être recommandée lorsqu’il y a lieu de dissiper des craintes nées de la défécation douloureuse. Dans bien des cas, l’intervention psychothérapeutique qui s’adresse à l’enfant et à sa famille devient nécessaire (Roy et al., 2016).

Chapitre 8

Dysphagie : Trouble de la déglutition.

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

309

CE QU’IL FAUT RETENIR

Il est important d’éviter d’humilier davantage ou de punir l’enfant lorsqu’il se souille, étant donné qu’il ne s’agit pas d’un comportement volontaire.

CE QU’IL FAUT RETENIR

La plupart des adoles­ centes auront des crampes, des douleurs abdominales, de la dorsalgie et des douleurs aux jambes ; tou­ tefois, dans quelques cas, la douleur peut être insou­ tenable et incapacitante.

Soins inrmiers ENCOPRÉSIE

En cas d’encoprésie, les fonctions inrmières englobent l’éducation et le soutien à la famille, et le traitement de la constipation, le cas échéant. Il est important d’éviter d’humilier davantage ou de punir l’enfant lorsqu’il se souille, étant donné qu’il ne s’agit pas d’un comportement volontaire. L’enseignement porte sur les aspects physiologiques de la défécation normale, sur l’entraînement à la propreté en tant que partie intégrante du développement et sur le traitement conçu pour l’enfant. Le counseling familial a pour but de réconforter la famille, et de lui donner l’assurance que la plupart des problèmes se résoudront, quoique la rechute en période de stress important soit possible.

8.2 8.2.1 Tableau 8.1W : Échelle de Tanner – Organes génitaux externes féminins Tableau 8.2W : Échelle de Tanner – Organes génitaux externes masculins

Troubles du système reproducteur féminin Aménorrhée

La ménarche, qui désigne l’apparition des premières règles, survient relativement tard à la puberté féminine. Le début et la progression de la puberté varient d’une lle à une autre. Il importe de relever l’histoire de santé de l’adolescente qui s’inquiète de ne pas avoir ses règles an de déterminer la progression de son développement pubertaire, s’il est nécessaire de poursuivre l’évaluation ou s’il ne faut simplement que la réconforter et la rassurer. L’aménorrhée fait référence à l’absence de saignement utérin et elle peut être d’ordre primaire ou secondaire. L’aménorrhée primaire se dénit par l’absence de caractères sexuels secondaires et de saignement utérin entre 14 et 16 ans. L’absence de saignement utérin lorsque la maturité sexuelle est évaluée à 5 sur l’échelle de Tanner durant 1 an ou lorsque le développement mammaire compte 4 ans est également un signe d’aménorrhée primaire (Brigham, 2017) .

FIGURE 8.1 Plusieurs adolescentes souffrent de dysménorrhée à divers degrés.

310

Partie 3

L’aménorrhée secondaire est une aménorrhée persistant pendant trois mois chez l’adolescente ayant un

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

cycle régulier ou pouvant aller jusqu’à six mois lorsque les cycles sont irréguliers, ou une aménorrhée qui équivaut à trois cycles menstruels (Brigham, 2017). Elle survient après que les règles se soient établies.

Étiologie La cause de l’aménorrhée primaire peut être anatomique, hormonale, génétique ou idiopathique. La détermination de l’étiologie passe par l’anamnèse, l’histoire familiale et l’examen physique. Comme la grossesse représente la cause la plus courante d’aménorrhée secondaire, il convient d’écarter cette possibilité au moment de l’évaluation de l’aménorrhée, même si l’adolescente nie avoir des relations sexuelles. Quant aux facteurs qui perturbent l’axe hypothalamohypophyso-surrénalien et provoquent une aménorrhée secondaire, il convient de mentionner le stress physique ou émotionnel, le changement environnemental soudain, l’hyperthyroïdie ou l’hypothyroïdie, le syndrome des ovaires polykystiques, la maladie chronique, la perte ou le gain pondéral considérable, l’activité physique intensive, l’anorexie mentale ou la boulimie (hyperoxie), les troubles ovariens ainsi que des agents pharmacologiques, notamment les phénothiazines, le contraceptif stéroïdien et l’héroïne (Brigham, 2017).

8.2.2

Dysménorrhée

Le malaise, à divers degrés, durant le premier ou les deux premiers jours des règles est très fréquent. La plupart des adolescentes auront des crampes, des douleurs abdominales, de la dorsalgie et des douleurs aux jambes ; toutefois, dans quelques cas, la douleur peut être insoutenable et incapacitante FIGURE 8.1. La dysménorrhée primaire se dénit par des règles douloureuses en l’absence de maladie pelvienne. Elle se manifeste dès la ménarche ou dans les 6 à 12 premiers mois suivant celle-ci. La douleur surgit au moment du saignement ou des heures avant, et elle persiste habituellement durant 48 à 72 heures. La dysménorrhée secondaire se caractérise par des règles douloureuses associées à une affection comme l’endométriose et la salpingite, ou une anomalie congénitale du canal de Müller. La dysménorrhée secondaire est beaucoup moins fréquente à l’adolescence. Elle constitue environ 10 % des cas de dysménorrhée (Ryan, 2017).

Étiologie L’étiologie exacte de ce trouble est inconnue, mais la douleur est assurément liée au cycle ovulatoire. La production excessive de prostaglandines utérines y est probablement pour quelque chose ; le taux de prostaglandines des femmes afigées de dysménorrhée est plus élevé que la normale. La sécrétion

Diagnostic L’anamnèse s’attache à l’apparition des symptômes, à la durée et aux caractéristiques de la douleur, au moment où celle-ci surgit par rapport au saignement, à l’âge au moment de la ménarche, aux antécédents familiaux de dysménorrhée ainsi qu’à l’histoire sexuelle. L’inrmière s’enquiert des traitements antérieurs, y compris de la posologie des médicaments. L’étude des symptômes connexes, tels que la nausée, les vomissements, la diarrhée, la douleur aux jambes et la dorsalgie, est utile à des ns diagnostiques et thérapeutiques. Selon l’information collectée, l’examen physique pourra comprendre un examen gynécologique.

Approche thérapeutique Le traitement de l’affection primaire permettra de diminuer ou de traiter les symptômes de la dysménorrhée. Les anti-inammatoires non stéroïdiens (AINS), qui bloquent la formation des prostaglandines et qui sont administrés durant

deux ou trois jours du cycle menstruel, repréPHARMACOVIGILANCE sentent le traitement de première ligne de la dysménorrhée chez l’adolescente. Celle-ci doit prendre Les anti-inammatoires non le médicament dès les premiers signes de crampes stéroïdiens doivent être pris ou de saignement. Si son cycle menstruel est réguavec des aliments pour éviter lier, elle peut même le prendre un ou deux jours les douleurs gastriques. avant le déclenchement des règles . L’œstrogénothérapie cyclique et le contraceptif oral sont également efcaces. Des exercices physiques simples, comme le balancement pelvien et la position des genoux repliés sur la poitrine, de même que des exercices de respiration peuvent être bénéques. An Kathleen, âgée de 13 ans, est menstruée depuis d’atténuer les symptômes, l’in4 mois. Elle souffre d’importantes crampes rmière peut offrir à l’adolesabdominales et de douleurs lombaires, qu’elle cente des conseils sur son traite avec du naproxène (NaprosynMD). Pourquoi hygiène personnelle, lui redevriez-vous lui recommander de prendre le commander la pratique régunaproxène en mangeant ? lière d’une activité physique et a) Cela facilite l’absorption du médicament. lui enseigner des techniques b) Cela réduit l’irritation gastrique. de diminution du stress. Certaines adolescentes ont c) Le médicament agit plus rapidement avec recours à des modications du la prise d’aliments. régime alimentaire, à des supd) Cela diminue le risque de toxicité. pléments ou à des herbes médicinales.

clinique

Jugement

accrue de vasopressine, une hormone qui stimule la contraction de la musculature lisse, jouerait également un rôle dans la dysménorrhée (Ryan, 2017).

Soins inrmiers DYSMÉNORRHÉE

L’adolescente a besoin d’être rassurée et de savoir que les règles sont des manifestations normales du fonctionnement du corps d’une jeune femme. L’inrmière appelée à offrir des conseils à propos de problèmes menstruels a la possibilité d’élargir l’enseignement à la physiologie menstruelle, à la sexualité, à l’hygiène, aux bienfaits d’un régime alimentaire équilibré et de l’exercice physique, ainsi qu’au maintien de la santé en général. Cet enseignement permet de dissiper des mythes à propos des règles et de la féminité. Lorsque l’inrmière se rend compte d’un problème potentiel au moment de la collecte des données, elle dirige l’adolescente vers un médecin, un service de santé ou une clinique pour qu’elle y soit examinée.

8.2.3

Syndrome prémenstruel

De 30 à 80 % des femmes ressentent des symptômes somatiques ou liés à l’humeur au cours de leur cycle menstruel (Lentz, 2012). Le syndrome prémenstruel (SPM) est un état mal compris qui compte au moins un des nombreux symptômes physiques et psychologiques apparaissant au cours de la phase lutéale du cycle menstruel et qui peut

La perspective d’un examen gynécologique est loin d’être réjouissante. Même s’il ne s’agit pas de son premier examen, l’adolescente l’anticipe avec beaucoup d’appréhension. Presque toutes les adolescentes sont timides en ce qui concerne leur corps et sont très conscientes des changements qui s’y produisent. Il importe de les soutenir, de leur offrir des conseils d’ordre préventif pour qu’elles sachent à quoi s’attendre et qu’elles puissent se détendre durant l’examen. La position à demi assise semble être la préférée pour l’examen, d’autant plus qu’elle permet le contact visuel durant l’intervention. Si l’adolescente y consent, elle pourra voir ce qui se passe grâce à un miroir, et le médecin pourra lui décrire des caractéristiques de son anatomie. Si l’adolescente souhaite être examinée par une femme, on accède à sa demande, dans la mesure du possible.

être sufsamment intense pour perturber les habitudes de vie ou le travail. Les symptômes sont la rétention d’eau, les changements comportementaux ou émotifs, les fringales prémenstruelles, les céphalées, la fatigue et les maux de dos. Ce syndrome touche tous les groupes d’âge. Le trouble dysphorique prémenstruel (TDPM) est une forme plus grave du SPM. De 3 à 8 % des Chapitre 8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

311

8

femmes en souffrent et manifestent de façon marquée de l’irritabilité, une dysphorie, une labilité émotionnelle, de l’anxiété, de la fatigue, une modication de l’appétit et un sentiment d’être dépassée (Lentz, 2012).

vaginite infectieuse. Le diagnostic est conrmé à l’examen microscopique de sécrétions vaginales ou de la culture vaginale, ou par un examen gynécologique. Le traitement varie selon le microorganisme en cause.

Approche thérapeutique

CE QU’IL FAUT RETENIR

L’exercice physique peut soulager les symptômes du syndrome prémenstruel. 19 Les anomalies du système reproducteur sont présentées dans le chapitre 19, Troubles liés au système génito-urinaire.

Hématurie : Présence de sang dans l’urine.

Il n’y a guère de consensus sur le traitement. Une anamnèse rigoureuse et détaillée, ainsi que la tenue d’un journal quotidien des symptômes et des uctuations de l’humeur sur une période de plusieurs cycles, peuvent servir à orienter le plan de traitement. L’enseignement est une composante importante du traitement. L’inrmière encourage l’adolescente à utiliser des moyens d’autoassistance qui entraînent souvent une amélioration importante du soulagement des symptômes, comme des modications apportées au régime alimentaire. L’inrmière peut également recommander de limiter la consommation de sucres rafnés, de sel, d’alcool et de boissons contenant de la caféine. La consommation quotidienne de trois repas, petits ou modérés, et de trois petites collations riches en glucides complexes et en bres soulagerait les symptômes (American Congress of Obstetricians and Gynecologists, 2015). L’exercice physique peut également soulager les symptômes. L’exercice aérobique augmente le taux de bêtaendorphines pour contrer les symptômes de dépression et améliorer l’humeur. Des techniques de réduction du stress peuvent également faciliter la gestion des symptômes (Lentz, 2012). Si ces stratégies n’ont pas atténué les symptômes de manière importante au bout de un ou deux mois, des médicaments peuvent être ajoutés. Les médicaments utilisés dans le traitement du SPM sont les diurétiques, les inhibiteurs de la prostaglandine synthétase (des AINS), la progestérone et les contraceptifs oraux ; toutefois, il n’existe aucun médicament unique qui permet d’atténuer tous les symptômes du SPM.

8.2.4

Vaginite

La vaginite peut être d’origine chimique ou infectieuse.

FIGURE 8.2

312

Partie 3

Anatomie du testicule

Les irritants chimiques tels que les produits moussants pour le bain, les produits pour douche vaginale, les serviettes déodorantes et les tampons gurent parmi les causes chimiques. Habituellement, le traitement de la vaginite d’origine chimique consiste simplement à retirer le produit déclenchant ou à cesser d’utiliser la substance irritante. Le champignon Candida, le protozoaire Trichomonas ou une bactérie peuvent causer la

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Soins inrmiers VAGINITE

L’inrmière peut rassurer l’adolescente en lui disant qu’il est normal que le mucus vaginal soit plus abondant à l’ovulation, juste avant les règles ou en période d’excitation sexuelle, et que cela n’est pas un signe de vaginite. L’inrmière doit également s’assurer de l’enseignement des bonnes pratiques d’hygiène et des causes possibles de la vaginite.

8.3

Troubles du système reproducteur masculin

Dans son état normal, le testicule est un organe ferme, de forme ovale, au contour lisse. L’épididyme, casque surélevé, est palpable à la partie supérieure du testicule ; il ne doit pas être considéré comme une anomalie FIGURE 8.2. La plupart des anomalies évidentes du système reproducteur masculin, dont l’hypospadias, l’hydrocèle, le phimosis et la cryptorchidie, sont décelées et corrigées tôt dans l’enfance 19 . Les garçons non circoncis peuvent rencontrer des problèmes liés à un prépuce trop étroit qui ne peut se rétracter derrière le gland (phimosis) et présentent un risque plus élevé d’infections telles que la balanite et la prostatite. Les problèmes qui surviennent le plus fréquemment par la suite sont : • des infections, telles l’urétrite et l’épididymite; • l’hématurie ; • des problèmes péniens, dont l’impossibilité de découvrir le gland du petit garçon non circoncis, le carcinome ou un traumatisme ; • des troubles du scrotum, notamment la varicocèle (élongation, dilatation et tortuosité des veines au-dessus du testicule) ; • la torsion testiculaire (voir la section 8.3.4).

8.3.1

Cancer des testicules

La tumeur siégeant dans un testicule est rare, mais si elle se manifeste à l’adolescence, elle est généralement maligne et nécessite une évaluation immédiate. Le cancer du testicule est la tumeur solide la

plus courante chez l’homme âgé de 15 à 34 ans (Cancer testiculaire Canada, 2017). Le signe clinique caractéristique de ce cancer est une masse lourde, dure et indolore (lisse ou nodulaire) décelable à la palpation. Le traitement consiste en l’exérèse chirurgicale du testicule malade (orchidectomie) ; à cela peuvent s’ajouter la chimiothérapie et la radiothérapie en présence de métastases.

8.3.2

Varicocèle

La varicocèle se caractérise par une élongation, une dilatation et une tortuosité des veines du cordon spermatique à la face supérieure du testicule. Elle est rarement observée chez l’enfant prépubère, mais l’incidence augmente considérablement au début de la puberté. À la palpation, la varicocèle est perçue comme une masse vermiculaire située audessus du testicule dont la taille diminue lorsque le garçon est allongé, et qui se dilate et devient tendue lorsqu’il est debout. La varicocèle idiopathique est la cause traitable la plus fréquente d’infertilité masculine, surtout si elle est dépistée et traitée à un stade précoce (Chiba et Fujisawa, 2016). Une varicocèlectomie est indiquée chez les adolescents lorsqu’il y a un arrêt de la croissance du testicule touché ou que la varicocèle est douloureuse.

8.3.3

Épididymite

L’épididymite est une réaction inammatoire de l’épididyme du testicule, généralement à la suite d’une infection (comme Chlamydia trachomatis), mais qui peut aussi survenir à la suite d’une exposition à un irritant chimique ou en raison d’une cause non spécique, comme un trauma local. Le tableau clinique est lent et insidieux, caractérisé par une douleur, une rougeur et une enure scrotales unilatérales. Les symptômes observés sont l’écoulement urétral, la dysurie, la èvre et la pyurie. Le traitement comprend la prise d’analgésiques, l’utilisation d’un suspensoir scrotal, l’alitement et une antibiothérapie appropriée.

8.3.4

Torsion testiculaire

La torsion testiculaire est due à un enroulement du testicule autour du cordon spermatique en raison d’une mauvaise xation du testicule à la tunique vaginale. Cette anomalie peut entraîner une

occlusion veineuse partielle ou complète, une rotation du testicule autour de l’axe vasculaire et ultimement une ischémie s’il y a une occlusion artérielle. Dans les cas graves de torsion, l’organe peut devenir ené et douloureux ; le scrotum devient rouge, chaud et œdémateux, et il paraît immobile ou gé à la suite d’un spasme des bres du muscle crémaster. Chaque année, la torsion testiculaire touche de 1 garçon sur 4 000 à 1 garçon sur 25 000 âgé de moins de 25 ans, et elle est plus fréquente entre 12 et 18 ans (65 %) (Al-Salem, 2017). La croissance rapide et l’augmentation de la vascularisation des testicules seraient des précurseurs de la torsion, ce qui explique son apparition à la puberté. Habituellement, l’adolescent se plaint d’une douleur aiguë et intense ; des nausées et des vomissements peuvent accompagner la douleur. L’absence du réexe crémastérien conrme la torsion testiculaire (Sheth, Keays, Grimsby et al., 2016). Une intervention chirurgicale d’urgence est souvent nécessaire pour préserver le testicule.

8.3.5

CE QU’IL FAUT RETENIR

Le cancer du testicule est la tumeur solide la plus courante chez l’homme âgé de 15 à 34 ans. Le signe clinique caractéristique de ce cancer est une masse lourde, dure et indolore (lisse ou nodulaire) décelable à la palpation.

8

Gynécomastie

Les seins de l’homme, qui ne font pas partie au sens strict de son appareil génital, réagissent aux fluctuations de la sécrétion hormonale. L’hypertrophie mammaire à un certain degré, unilatérale ou bilatérale, est fréquente durant la puberté masculine. Environ la moitié des adolescents sont afigés de gynécomastie transitoire, durant moins de un an habituellement, laquelle se résorbe spontanément à la maturité des caractères sexuels. En cas de gynécomastie, il convient de déterminer le stade de la puberté ainsi que les antécédents en matière de médicaments, notamment en ce qui a trait aux stéroïdes anabolisants, et d’écarter la possibilité d’un trouble rénal, hépatique, thyroïdien ou endocrinien. Si la gynécomastie perdure, qu’elle est gênante par son ampleur ou qu’elle porte le jeune garçon à remettre en question son identité sexuelle, la chirurgie plastique peut être indiquée pour des motifs d’ordre esthétique et psychologique. L’administration de testostérone n’inue en rien sur l’expansion ou la régression mammaire, et elle risque même d’aggraver le problème.

Soins inrmiers TROUBLES DU SYSTÈME REPRODUCTEUR MASCULIN

L’adolescent se sent embarrassé par les changements qui se produisent dans son corps, et l’inrmière doit le préparer en prévision d’un examen

génital. La meilleure démarche à adopter est celle de l’attitude simple et ouverte dans l’explication précise du déroulement de l’examen, dans la description verbale des gestes posés et des constatations faites durant l’examen.

Chapitre 8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

313

CE QU’IL FAUT RETENIR

L’activité sexuelle peut avoir de graves répercussions sur la santé des adolescents, notamment la grossesse imprévue et les infections transmissibles sexuellement et par le sang.

L’évaluation périodique de l’état de santé de l’adolescent devrait englober l’enseignement sur le cancer testiculaire et l’autoexamen mensuel des testicules. Ce cancer rare se guérit s’il est détecté précocement. L’inrmière est tout indiquée pour enseigner l’autoexamen des testicules en tenant compte des craintes et de l’anxiété du garçon, dans une optique de dépistage précoce et de traitement hâtif.

Le traitement de la gynécomastie se résume à rassurer l’adolescent et ses parents en leur précisant que la situation est bénigne et temporaire. L’examen physique (palpation) sera nécessaire pour distinguer la gynécomastie de l’adiposité accrue due à l’embonpoint. L’adolescent inquiet de son intégrité physique et de sa masculinité sera soulagé de savoir que la gynécomastie est le lot de plus de 60 % des adolescents (Thiruchelvam, Walker, Rose et al., 2016).

8.4

La diminution des grossesses précoces représente un objectif important pour un pays, étant donné le risque d’effets néfastes tant pour la mère que pour l’enfant. Bien des facteurs contribuent à faire augmenter le risque de grossesse pour une adolescente, notamment les relations sexuelles avec un partenaire plus âgé, la méthode de contraception, la pauvreté, un historique familial de grossesse à l’adolescence, une famille monoparentale, la grossesse perçue comme une valeur positive, certaines conduites à risque (alcool, drogues) et l’échec scolaire (Barrett, Katsiyannis, Zhang et al., 2015 ; Leslie et SCP, 2016).

Problèmes de santé et risques liés à la sexualité

Selon l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes de 2009-2010, 39,8 % des adolescents québécois de 15 à 17 ans déclarent avoir eu des relations sexuelles au moins 1 fois. Cette proportion est signicativement plus élevée que celle de l’ensemble des adolescents canadiens de 15 à 17 ans (27,1 %). L’enquête démontre toutefois que la proportion de jeunes Québécois actifs sexuellement a diminué depuis 2003, passant de 40 à 34 % (Joubert et Du Mays, 2014). Toutefois, 20,4 % des adolescents ayant participé à l’enquête rapportent avoir eu leur première activité sexuelle avant l’âge de 15 ans (Joubert et Du Mays, 2014). L’activité sexuelle peut avoir de graves répercussions sur la santé des adolescents, notamment la grossesse imprévue et les infections transmissibles sexuellement et par le sang (ITSS). Les professionnels de la santé doivent connaître tous les aspects relatifs à l’activité sexuelle chez les adolescents et la dynamique psychosociale qui entre en jeu lorsqu’ils interagissent avec eux.

8.4.1

Grossesse à l’adolescence

Le taux de grossesses précoces n’a cessé de diminuer durant les dernières décennies. En effet, depuis 1992, les données issues de Statistique Canada indiquent que les taux ont chuté de près de 50 %, passant de 48,8 grossesses par 1 000 adolescentes à 27,1 grossesses par 1 000 adolescentes (Leslie et SCP, 2016). Le déclin de ce taux observé dans la dernière décennie est imputable à la baisse du nombre de deuxièmes grossesses précoces, à l’utilisation accrue de condoms et à la contraception hormonale de longue durée (Furstenberg, 2016).

Grâce à l’amélioration des services de santé, la mortalité liée aux grossesses précoces est en baisse, quoique la morbidité demeure élevée. Le risque de complications obstétricales, de morbidité et de mortalité néonatales est plus grand chez les adolescentes enceintes de moins de 15 ans que chez celles âgées de 15 à 19 ans (Ganchimeg, Ota, Morisaki et al., 2014). L’adolescente enceinte et le fœtus courent un risque accru de complications au cours de la grossesse et de l’accouchement. Le travail prématuré, le nouveau-né de petit poids, la mortalité néonatale, un indice d’Apgar bas, l’anémie par manque de fer, la disproportion fœtopelvienne et le travail prolongé sont les complications les plus fréquentes (Jeha, Usta, Ghulmiyyah et al., 2015). Les sujets de préoccupation sont le régime alimentaire, la toxicomanie, et plus particulièrement le tabagisme, les ITSS, les effets de la pauvreté, le décrochage scolaire ainsi que les soins prénataux tardifs. Les jeunes mères vivent souvent dans la pauvreté et sont sous-scolarisées. Le taux de grossesse est plus élevé chez les décrocheuses ; de plus, celles-ci choisissent davantage de mener leur grossesse à terme (Organisation mondiale de la Santé [OMS], 2014a).

Soins inrmiers GROSSESSE À L’ADOLESCENCE

L’inrmière joue un rôle important dans la prévention des grossesses, dans la prise de décision de l’adolescente et dans le suivi. Elle doit entreprendre

314

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

des conversations avec celle-ci sur son processus de prise de décision en général, explorer ses croyances sur la sexualité, la contraception et la grossesse, et l’amener à rééchir sur sa façon de prendre des décisions sur des sujets importants liés

à sa santé FIGURE 8.3. Lorsque l’adolescente est enceinte, l’inrmière doit procéder à une évaluation minutieuse pour déterminer le niveau de soutien social disponible pour elle et pour son partenaire. L’adolescente devra prendre de nombreuses décisions et elle pourra trouver difcile de composer avec le stress, étant donné son expérience de vie limitée. Les conseils des adultes proches seront inestimables. L’inrmière doit demeurer neutre au moment du counseling pour aider l’adolescente à prendre une décision éclairée basée sur ce qu’elle veut vraiment. Elle explore avec l’adolescente les raisons qui expliquent sa grossesse et lui demande si la relation était consensuelle ou non. Elle explique les options qui s’offrent à l’adolescente : garder l’enfant, prendre les dispositions pour qu’il soit adopté ou choisir une interruption volontaire de grossesse (IVG). un peu plus de 50 % des grossesses d’adolescentes se terminent par une IVG (Leslie et SCP, 2016). Si la jeune lle choisit de poursuivre sa grossesse, les soins prénataux sont amorcés dès que possible. Une fois de plus, l’inrmière porte une attention particulière au soutien social, car l’aide diminue le stress de l’adolescente enceinte. Une adolescente qui vit du stress est davantage susceptible de mal se nourrir. L’inrmière doit adopter une attitude de caring non autoritaire, offrir son

8.4.2

Contraception

Même si les services de planication familiale se sont perfectionnés et étendus au cours des dernières années, les besoins en matière de services ayant trait à la contraception à l’adolescence sont grands. À cette période de la vie, la pilule contraceptive et le condom demeurent les méthodes les plus prisées. Dans le cadre de la dernière enquête québécoise sur la santé des jeunes du secondaire 2010-2011, 68 % des jeunes de plus de 14 ans qui ont eu des relations sexuelles vaginales mentionnent avoir utilisé le condom lors de leur dernière relation, et dans 51% des cas lors de relations sexuelles anales. Il est important de mentionner que cette utilisation diminue avec l’âge. En effet, les jeunes de 17 ans sont moins nombreux à utiliser le condom que ceux de 15 ans, et ils utilisent davantage les contraceptifs oraux (Pica, Traoré, Bernèche et al., 2012). La peur causée par le risque d’une grossesse constitue habituellement le déclencheur incitant l’adolescente à fixer un rendez-vous. Le counseling sur la contraception doit être adapté en fonction du degré de compréhension de l’adolescent ou de l’adolescente. Pour que ceux-ci choisissent

FIGURE 8.3 L’inrmière doit soutenir l’adolescente enceinte et l’aider à envisager toutes les possibilités qui s’offrent à elle.

soutien et trouver autant que possible des stratégies pour maintenir des contacts avec la jeune lle tout au long de la grossesse et par la suite. Depuis 2004, le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) offre le programme Services intégrés en périnatalité et pour la petite enfance (SIPPE) à l’intention des familles vivant en contexte de vulnérabilité 1 . Une équipe interdisciplinaire comprenant une nutritionniste, une travailleuse sociale et une inrmière font le suivi et accompagnent les familles en misant sur le renforcement de leur pouvoir d’agir (MSSS, 2016a).

Le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur (www.education.gouv.qc.ca) et l’organisme Tel-jeunes (www.teljeunes.com) offrent des ressources en ligne pour orienter les jeunes mères dans leur cheminement scolaire.

8

1 Le programme Services intégrés en périnatalité et pour la petite enfance (SIPPE) est abordé dans le chapitre 1, Rôle de l’inr­ mière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté.

de façon éclairée la méthode qui leur convient le mieux, l’information sur les avantages et les inconvénients respectifs de ces méthodes doit être transmise TABLEAU 8.1. Depuis janvier 2016, les inrmières titulaires d’un diplôme de formation de niveau universitaire en sciences inrmières et ayant reçu une attestation de l’Ordre des inrmières et inrmiers du Québec (OIIQ) conrmant la réussite d’une formation spécique (en contraception hormonale dans le cas présent) peuvent prescrire la contraception hormonale, un stérilet ou la contraception orale d’urgence (aussi appelée pilule du lendemain), et ce, selon le protocole de contraception du Québec (OIIQ, 2015). Pour la contraception d’urgence, il existe le stérilet de cuivre, qui doit être installé par un médecin ou une inrmière praticienne spécialisée en soins de première ligne (IPSPL), et la contraception orale d’urgence (Guilbert, Wagner Bérubé et al., 2016). Celle-ci peut être efcace jusqu’à 4 à 5 jours après la relation sexuelle non protégée (Guilbert et al., 2016). Il est important d’accompagner cette contraception d’urgence d’un counseling sur la contraception et de s’assurer qu’il n’est pas Chapitre 8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

315

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les adolescents sexuellement actifs doivent savoir que seul le condom prévient les ITSS.

Jugement

clinique Clara, âgée de 15 ans, a une vie sexuelle active et consulte pour une prescription de contraceptifs oraux. L’inrmière qui la rencontre peut-elle répondre à la demande de Clara ? Justiez votre réponse.

TABLEAU 8.1

question d’agression sexuelle. Si tel est le cas, il faut diriger la jeune femme vers le centre d’expertise médicolégale désigné et faire un signalement à la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ). L’inrmière est donc en mesure d’amorcer, d’ajuster ou de renouveler la contraception. Au besoin, lorsque la situation clinique le requiert, l’inrmière doit diriger la jeune femme vers un médecin traitant ou vers une IPSPL. Beaucoup d’adolescentes se sentent ambivalentes quant à leur activité sexuelle et évitent de nombreux contraceptifs parce que leur utilisation semble trop préméditée. Le choix repose sur les préférences des adolescents. Cependant, la motivation est nécessaire, quelle que soit la méthode choisie. Ainsi, la pilule est efcace si elle est utilisée comme il se doit, et l’adolescente doit la prendre à peu près au même moment chaque jour. Pour bien des jeunes lles, l’injection de médroxyprogestérone (Depo-ProveraMD) constitue l’option par excellence en raison de sa grande efcacité et de sa fréquence d’administration (toutes les 12 semaines), mais ses effets

indésirables comme le gain de poids et la déminéralisation osseuse peuvent jouer contre elle. Les adolescents sexuellement actifs doivent savoir que seul le condom prévient les ITSS. L’information sur le condom doit être communiquée à tous les adolescents, qu’ils soient sexuellement actifs ou non. La condentialité est primordiale au moment de la discussion sur la contraception avec des adolescents. Ceux-ci s’efforcent de protéger leur vie privée à une période où ils forgent leur identité et nouent des relations sociales. Selon le Code civil du Québec (C.c.Q., art. 14), un mineur âgé de 14 ans ou plus peut consentir à tous les soins requis par son état de santé, et ce, sans que ses parents en soient informés. Cette disposition favorise l’accès des jeunes aux services de santé pour la consultation sur la contraception et le dépistage d’ITSS. L’inrmière évalue les relations que le jeune a avec son environnement (famille et amis) et les autres comportements à risque en même temps qu’elle donne de l’enseignement sur les différentes méthodes de contraception.

Avantages et inconvénients des différentes méthodes contraceptives

MÉTHODE

AVANTAGES

INCONVÉNIENTS

• Efcace à 100 % pour prévenir les ITSS et la grossesse

• Pression exercée par les pairs

• Aucune consultation médicale nécessaire

• Taux d’échec élevé

Méthodes naturelles Abstinence sexuelle Retrait (coït interrompu) • Retrait du pénis avant l’éjaculation

• Taux d’échec relativement élevé en raison de la non-adhésion • Souvent, écoulement de sperme avant l’éjaculation • Éjaculat à l’entrée du vagin pouvant pénétrer dans celui-ci • N’offre aucune protection contre les ITSS.

Calendrier (Ogino) • Abstinence de rapports sexuels durant la période de fertilité (moment de l’ovulation)

• Enseigne aux adolescentes le fonctionnement de leur cycle menstruel • Encourage la collaboration des partenaires

• Taux d’échec élevé • Le cycle menstruel doit être prévisible et régulier (cycles irréguliers fréquents au cours des deux années suivant la ménarche). • N’offre aucune protection contre les ITSS.

Méthodes barrières Condom

Homme : recouvre le pénis pour recueillir le sperme

• Effets indésirables minimes

• Exige une utilisation systématique.

• Facile d’utilisation

• Exige une intention préméditée d’union sexuelle.

• Vendu sans ordonnance

• Peut diminuer les sensations.

• Portatif

• Échoue si mal utilisé.

• Protection contre les ITSS

• Diminue la spontanéité.

• Le condom avec spermicide augmente l’efcacité pour prévenir la grossesse et les ITSS

• Sensibilité ou allergie au latex chez un faible pourcentage de personnes

• Peu coûteux par rapport au condom féminin

316

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

• Grossesse ou transmission d’une ITSS possible si mal utilisé

TABLEAU 8.1

Avantages et inconvénients des différentes méthodes contraceptives (suite)

MÉTHODE

AVANTAGES

INCONVÉNIENTS

Femme : s’insère dans le vagin, et l’extrémité ouverte couvre une partie du périnée ; peut être inséré 8 heures avant un rapport sexuel

• Participation féminine

• Difcile à insérer pour certaines femmes

• Fait de polyuréthane ; aucune sensibilité au latex et peut être utilisé avec un lubriant à base d’huile

• Bruyant

Diaphragme

• Peut être ajusté pour les jeunes lles n’ayant pas encore eu de rapports sexuels

• Taux d’échec élevé chez les adolescentes en raison des inconvénients liés à son utilisation

• Taux d’échec faible si bien utilisé • Peu de contre-indications

• Exige une consultation auprès d’un fournisseur de soins pour déterminer la taille et recevoir des directives sur le mode d’emploi.

• Réutilisable

• Exige une intention préméditée d’union sexuelle.

• Couvre le col de l’utérus pour empêcher les spermatozoïdes d’atteindre l’ovule • Doit être utilisé conjointement avec une gelée spermicide

• Protection contre les ITSS

• Exige une utilisation systématique.

• Peut être inséré de 4 à 6 heures avant un rapport sexuel

• Exige de bien connaître son corps et d’être à l’aise à l’idée de se toucher pour l’insertion.

• Si inséré tôt, vérier sa position avant le coït

• Offre une protection minimale contre les ITSS. • Peut augmenter la fréquence des infections urinaires.

Contraceptif Léamd

• Sans latex (silicone)

• Moins efcace chez la femme qui a déjà eu un enfant

• Contraceptif vaginal réutilisable fait de silicone ; coupole elliptique insérée dans le vagin jusqu’à 48 heures avant un rapport sexuel ; la retirer 8 heures après les rapports sexuels

• Réutilisable

• Vendu sur ordonnance

• Très efcace chez la femme nullipare

• Plus efcace si utilisé conjointement avec une crème spermicide

• Ajustement simple

• Augmentation possible de la fréquence des infections urinaires

Cape cervicale

• Peut être insérée plusieurs heures avant un rapport sexuel

• Coupole de caoutchouc souple avec un rebord rigide, mais exible ; recouvre la base du col de l’utérus près de la jonction du col utérin et du cul-de-sac vaginal

• N’offre aucune protection contre les ITSS.

• Même façon de procéder que le diaphragme pour l’insertion et le retrait

• Offerte seulement en quatre tailles différentes. • Doit être laissée en place au moins 6 heures après le rapport sexuel, mais sans dépasser 48 heures. • N’est pas recommandée chez les femmes dont le résultat du test de Papanicolaou est anormal, qui ont des antécédents de syndrome du choc toxique ou qui ont de la difculté à la positionner correctement. • N’offre aucune protection contre les ITSS.

Substances chimiques Spermicide (mousse, gelée, crème ou suppositoires)

• Vendu sans ordonnance

• Taux d’échec élevé à moins d’être utilisé avec un condom

• Peu coûteux

• Substance insérée dans le vagin pour détruire les spermatozoïdes

• Facile d’utilisation

• Des spermatozoïdes peuvent être éjaculés directement dans l’utérus, évitant ainsi tout contact avec le spermicide présent dans le vagin.

• Aucune préoccupation majeure liée à la santé

• Doit être utilisé juste avant le coït ; exige donc une interruption du rapport sexuel. • Exige de répéter l’application avant chaque rapport sexuel. • Exige une intention préméditée de rapport sexuel. • Est salissant. • Le nonoxynol-9 est associé à une transmission accrue du virus de l’immunodécience humaine (VIH) à la femme ; ne doit pas être utilisé dans un contexte de sexe anal chez le partenaire masculin pour la même raison. • N’offre aucune protection contre les ITSS.

Chapitre 8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

317

8

TABLEAU 8.1

Avantages et inconvénients des différentes méthodes contraceptives (suite)

MÉTHODE

AVANTAGES

INCONVÉNIENTS

Contraceptifs oraux

• Efcaces à 99 %, lorsque bien utilisés

• Œstrogène et composés analogues à la progestérone

• Sûrs pour les adolescentes

• Taux d’échec plus élevé chez les adolescentes que chez les femmes plus âgées

• Méthode privilégiée par la plupart des adolescentes

• Mode d’emploi précis à suivre ; exigent une motivation soutenue et une utilisation systématique

• Administration par voie orale

• Vendus sur ordonnance

• Deviennent un rituel non associé à l’activité sexuelle

• Prix assez élevé pour les adolescentes

Méthodes hormonales

• Empêchent l’ovulation en bloquant la libération des gonadotrophines par l’adénohypophyse

• Régularisent les règles, et diminuent la dysménorrhée, l’acné et le ux menstruel • Préviennent le cancer des ovaires et de l’endomètre

• Effets indésirables possibles : maux de tête, absence de menstruation ou règles peu abondantes, métrorragie et caillot sanguin • Taux accru d’infection à Chlamydia trachomatis • N’offre aucune protection contre les ITSS.

• Préviennent les kystes ovariens fonctionnels Acétate de médroxyprogestérone (Depo-ProveraMD)

• Aucune interruption du rapport sexuel • Méthode invisible

• Effets indésirables possibles : gain de poids important, diminution de la densité osseuse, diminution des lipoprotéines de haute densité (HDL), irrégularité des règles ou aménorrhée, baisse de la libido et dépression

• Progestatif inhibant le cycle hormonal et empêchant l’ovulation

• Retard possible du retour à la fertilité après la dernière injection

• Injection tous les 3 mois

• La Food and Drug Administration des États Unis recommande de cesser les injections après 2 ans en raison de la perte de densité osseuse.

• Consultation nécessaire auprès d’un fournisseur de soins pour l’injection tous les 3 mois

• N’offre aucune protection contre les ITSS. Timbre contraceptif EvraMD

• Efcace à 88,2 %, lorsque bien utilisé

• Non recommandé chez les femmes de plus de 90 kg

• Timbre carré de 4,5 cm de côté contenant de la norelgestromine et de l’éthinylestradiol

• Simple à utiliser

• Effets indésirables possibles : réaction cutanée au site d’application du timbre, nausées, maux de tête, dysménorrhée et sensibilité aux seins

• Appliqué sur la peau chaque semaine pendant 3 semaines à chaque mois • Empêche l’ovulation, épaissit la glaire cervicale et amincit l’endomètre

• Cycles menstruels réguliers • N’est pas associé à l’activité sexuelle • Permet d’éviter le métabolisme de premier passage hépatique, se traduisant par des taux sanguins plus stables

• Augmentation légère du risque de former des caillots sanguins comparativement aux contraceptifs oraux combinés • Timbre parfois visible • N’offre aucune protection contre les ITSS.

Anneau vaginal (NuvaRingMD)

• Efcace à 99,3 %

• Contient de l’étonogestrel et de l’éthinylestradiol

• Retour immédiat de l’ovulation après l’arrêt

• Anneau souple, transparent et exible placé dans le vagin pendant 3 semaines

• Peut être laissé en place pendant les rapports sexuels

• Effets indésirables possibles : maux de tête, vaginite, pertes blanches, nausées et métrorragie

• Permet d’éviter le métabolisme de premier passage hépatique, se traduisant par des taux sanguins plus stables

• Les règles peuvent ne pas être terminées lors de l’insertion de l’anneau suivant.

• Empêche l’ovulation

• Aucun spermicide nécessaire • Aucune érosion vaginale • Aucun gain de poids

318

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

• La femme ou son partenaire peut sentir la présence de l’anneau pendant les rapports sexuels. • L’anneau peut sortir du vagin.

• N’offre aucune protection contre les ITSS.

TABLEAU 8.1

Avantages et inconvénients des différentes méthodes contraceptives (suite)

MÉTHODE

AVANTAGES

INCONVÉNIENTS

Stérilet intra-utérin libérant du lévonorgestrel (MirenaMD)

• Efcacité > 99 %

• Risque de perforation utérine pendant la pose

• Empêche la fécondation de manière efcace, se traduisant par un taux faible de grossesses ectopiques

• Taux d’expulsion de 2 à 12 %

• Règles moins abondantes et de plus courte durée

• Effets indésirables possibles : douleurs abdominales, maux de tête, pertes vaginales et douleurs mammaires

• Diminution de la dysménorrhée

• N’offre aucune protection contre les ITSS.

• Dispositif intra-utérin en forme de T libérant 20 mcg de lévonorgestrel par jour • Inséré dans les 7 jours suivant le début des règles et reste en place pendant 5 ans • Épaissit la glaire cervicale et inhibe la motilité et la fonction des spermatozoïdes Implant d’étonogestrel (ImplanonMD) • Implantation sous-cutanée d’un bâtonnet de 40 mm × 2 mm • Méthode progestative seulement • Empêche l’ovulation

• Non recommandé chez les femmes nullipares ou qui ont plusieurs partenaires

• Aucun gain de poids

• Efcacité > 99 %

• Saignements menstruels irréguliers

• L’efcacité ne dépend pas de l’utilisatrice

• Autres effets indésirables moins fréquents : maux de tête, vaginite, gain de poids (1,7 kg en moyenne après 2 ans)

• Assure une protection pendant 3 ans

• N’offre aucune protection contre les ITSS.

8

• Implantation et retrait d’un seul bâtonnet • Palpable, mais invisible après l’implantation

Contraception d’urgence ou postcoïtale Comprimé de progestatif administré dans les 72 heures suivant le rapport sexuel

• Utile dans le cas d’un rapport sexuel imprévu ou d’un échec de la contraception

• Peut causer des nausées si une méthode hormonale combinée est utilisée.

ou

• Peut être donné à l’avance en vue d’une utilisation d’urgence

• N’offre aucune protection contre les ITSS.

Insertion d’un dispositif intra-utérin (stérilet) en cuivre jusqu’à 7 jours après un rapport sexuel non protégé

• Peut modier la durée du prochain cycle menstruel.

• Vendu sans ordonnance pour les adultes

• La contraception d’urgence fonctionne de trois façons : empêcher ou retarder l’ovulation, empêcher la rencontre des spermatozoïdes et de l’ovule, ou empêcher l’implantation d’un ovule fécondé

Soins inrmiers CONTRACEPTION

L’inrmière participe souvent à l’éducation sur la contraception, qui devrait englober l’ensemble de la sexualité. La communication efcace et des aptitudes en matière de prise de décision sont nécessaires à l’adolescent pour favoriser un début

d’activité sexuelle sécuritaire, au moment où il se sentira prêt. L’inrmière transmet de l’information sur les pratiques sexuelles sans risque. Elle offre la possibilité de faire des jeux de rôle à l’adolescente qui semble avoir de la difculté à bien communiquer ce qu’elle veut à son partenaire sur la question de l’utilisation du condom, par exemple.

Chapitre 8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

319

CE QU’IL FAUT RETENIR

L’adolescent peut s’adonner au sexe oral ou anal non protégé parce qu’il croit qu’il est impossible de contracter une ITSS de cette façon.

18 Le syndrome d’immunodécience acquise (sida) à la suite de l’infection par le virus de l’immunodécience humaine (VIH) et les soins inrmiers qui s’y rapportent sont traités dans le chapitre 18, Troubles liés au système hématologique et immunitaire.

L’enseignement sur la contraception devrait être offert oralement et par écrit, et porter sur les avantages, les inconvénients et les effets indésirables de toutes les méthodes. L’information est transmise dans un langage concret et concis, et elle est accompagnée d’une démonstration du mode d’emploi du contraceptif. L’adolescent devrait reprendre dans ses propres mots sa compréhension de l’enseignement reçu. L’inrmière conseille à l’adolescente qui utilise la pilule contraceptive de déterminer une

activité quotidienne qui servira d’aide-mémoire pour la prise du contraceptif. Si l’adolescent y consent, les parents ou d’autres adultes peuvent participer à la discussion. Il convient de prévoir un suivi deux à trois mois après la première rencontre. Le but est de vérier avec l’adolescent que son choix lui convient encore, de vérier de nouveau sa compréhension de l’utilisation du moyen choisi et de l’encourager à poser toutes les questions qui peuvent lui venir après quelques semaines d’utilisation.

8.4.3

inrmières habilitées peuvent prescrire un médicament pour le traitement d’une infection à chlamydia chez une personne asymptomatique, mais dont les tests de dépistage se révèlent positifs.

Infections transmissibles sexuellement et par le sang

Comparativement aux adultes, les adolescents sexuellement actifs sont plus susceptibles de contracter une infection transmissible sexuellement et par le sang (ITSS). La physiologie de l’adolescente est ainsi faite que la bordure du col de l’utérus est large et se compose de cellules épithéliales prismatiques vulnérables aux ITSS, particulièrement à l’infection due au virus du papillome humain et à l’infection à chlamydia. Des facteurs comportementaux contribuent à la hausse du risque, notamment le début de l’activité sexuelle à un jeune âge, la prévalence élevée de la maladie chez les partenaires sexuels et l’inconstance dans l’usage des méthodes contraceptives barrières ou autres. En outre, l’adolescent peut s’adonner au sexe oral ou anal non protégé parce qu’il croit qu’il est impossible de contracter une ITSS de cette façon (Carde et Baillergeau, 2013). Le TABLEAU 8.2 énumère les infections transmissibles sexuellement et par le sang courantes 18 .

Modes de transmission des infections transmissibles sexuellement et par le sang Infections transmissibles sexuellement et par le sang d’origine bactérienne

Plusieurs textes, rédigés en collaboration avec les agences gouvernementales, peuvent être consultés sur Internet, notamment au www.sexandu. ca/fr et au www.jeunesensante.ca. L’inrmière peut les utiliser au moment de son enseignement aux adolescents au sujet de la sexualité.

320

Partie 3

Chlamydia L’infection génitale à chlamydia (Chlamydia trachomatis) est la plus fréquente des ITSS à déclaration obligatoire. Les jeunes de 15 à 24 ans sont les plus touchés ; ils représentent 59 % des cas masculins et 71 % des cas féminins. L’incidence est en hausse depuis 2010, mais cela pourrait être attribuable, en partie, à un dépistage plus accessible (Venne, Lambert et Blouin, 2015). La période d’incubation pour la chlamydia peut prendre de 2 à 6 semaines ; c’est pourquoi le dépistage, même chez les jeunes asymptomatiques, est pertinent. Diverses complications peuvent être associées à ce type d’infection, dont l’infertilité, une grossesse ectopique, des douleurs chroniques au bas du ventre ou aux testicules, et une infection chronique de la prostate. Depuis 2016, les

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Une bactérie de la famille de Chlamydia trachomatis est également responsable d’une autre ITSS, soit la lymphogranulomatose vénérienne (LGV). Depuis 2013, l’augmentation des cas est préoccupante dans la population masculine homosexuelle (Venne et al., 2015). La période d’incubation peut aller jusqu’à 60 jours, et l’évolution de la maladie se fait en 3 phases. Les lésions causées par la LGV augmentent les risques de transmission du VIH.

Gonorrhée La gonorrhée est une infection gonococcique. L’incidence des cas déclarés ne cesse d’augmenter depuis la n des années 1990. Les jeunes de 14 à 24 ans représentent 29 % des cas masculins et 60 % des cas féminins (Venne et al., 2015). Ce type d’infection peut être asymptomatique, et ce, plus fréquemment chez les femmes que chez les hommes. Lorsque des symptômes sont présents, ils apparaissent généralement de 2 à 7 jours après la transmission. Les complications possibles d’une gonorrhée non traitée sont l’infertilité, les douleurs chroniques dans le bas du ventre, une grossesse ectopique ou une infection aux testicules. Il est d’autant plus important de traiter la gonorrhée qu’elle augmente le risque d’attraper ou de transmettre le VIH. Les inrmières habilitées peuvent également prescrire un médicament pour traiter la gonorrhée chez une personne asymptomatique dont les tests de dépistage se révèlent positifs. Il est important de suivre la mise à jour des recommandations en ce qui a trait au traitement de la gonorrhée, puisqu’il existe certaines souches bactériennes résistantes aux antibiotiques (Venne et al., 2015). Syphilis La syphilis est une autre ITSS d’origine bactérienne (Treponema pallidum). Alors qu’on croyait que la syphilis était en voie d’élimination en 1998, depuis le début des années 2000, les taux augmentent. Ce sont principalement les hommes

(94 %) qui sont touchés. L’incidence semble être en légère baisse depuis 2012 (Venne et al., 2015). Il existe 4 stades de la maladie, et certains symptômes peuvent passer inaperçus. Les premiers symptômes peuvent apparaître jusqu’à 3 mois après la transmission de la bactérie. Si elle n’est pas traitée, la syphilis peut durer des années et entraîner des dommages importants au cœur, au cerveau, aux os et au foie. Le dépistage se fait par prise de sang.

TABLEAU 8.2

Infections transmissibles sexuellement et par le sang d’origine protozoaire Les vaginites ne sont pas considérées comme des ITSS; toutefois, certaines d’entre elles peuvent être transmises sexuellement, comme celles d’origine protozoaire (trichomonase). Ce type d’infection touche principalement les lles, mais les garçons peuvent également ressentir certains symptômes, dont des rougeurs ou des picotements au pénis.

Infections transmissibles sexuellement et par le sang

MANIFESTATIONS CLINIQUES

TRAITEMENTS

SOINS INFIRMIERS

• En cas de gonorrhée urogénitale ou anorectale non compliquée : – Dose de ceftriaxone en injection intramusculaire ou

• Informer les adolescents de la nécessité de s’abstenir de toute relation sexuelle durant 7 jours après le traitement en une seule dose ou durant les 7 jours du traitement.

– Dose d’azithromycine par voie orale

• Déterminer et traiter les partenaires sexuels.

Gonorrhée (Neisseria gonorrhoeae) • Homme : urétrite (dysurie et écoulement jaune abondant, pollakiurie, miction impérieuse, nycturie) ou pharyngite • Femme : cervicite (postpubertaire) ; peut s’accompagner d’un écoulement, de dysurie, de dyspareunie ou de vulvovaginite (prépubertaire), ou pharyngite

8

• Éduquer les adolescents à propos des ITSS et des modes de transmission de l’infection. • Promouvoir l’utilisation du condom dans la population adolescente sexuellement active.

Infection due à chlamydia (Chlamydia trachomatis) • Homme : érythème méatique, sensibilité, démangeaison, dysurie, écoulement urétral, ou asymptomatique

• Azithromycine ou doxycycline • Azithromycine si la femme est enceinte

• Donner la même information que pour la gonorrhée. • Refaire le test de dépistage à l’adolescente de 3 à 4 mois après le traitement (risque d’atteinte inammatoire pelvienne si réinfection).

• Femme : exsudat cervical mucopurulent et érythème, œdème, congestion, ou asymptomatique

• Étudier la possibilité d’une gonorrhée concomitante (et traiter, le cas échéant).

Syphilis (Treponema pallidum) • Stade primaire – chancre syphilitique : lésion indurée, indolore, rouge, au contour prononcé et soulevé, et à la surface érodée avec écoulement jaune léger ; sur le pénis, la vulve ou le col, habituellement

• Pénicilline G benzathine intramusculaire

• Préconiser le port du condom pour éviter de propager l’infection et de contracter une autre infection. • Traiter les partenaires sexuels. • Soumettre l’adolescente enceinte au dépistage habituel de la syphilis durant la grossesse et à l’accouchement.

• Stade secondaire : symptômes systémiques d’allure grippale, adénopathie et rash, qui apparaissent en général de 1 à 3 semaines après la cicatrisation du chancre

• Dépister l’infection chez le nouveau-né lorsque la mère infectée n’a pas été traitée.

Herpès génital (virus herpes simplex [VHS]) • Petites vésicules (douloureuses en général) se formant sur les organes génitaux, les fesses et les cuisses ; premier symptôme : la démangeaison, habituellement ; à la rupture des vésicules, des lésions circulaires supercielles extrêmement douloureuses demeurent

• Aucune cure à ce jour • Cas non compliqué : acyclovir, famciclovir ou valacyclovir • Cas compliqué : acyclovir intraveineux • Possibilité d’une thérapie suppressive chronique si récurrence

Chapitre 8

• Préconiser le port du condom pour éviter de propager l’infection et de contracter une autre infection. • Dépister l’infection chez le nouveau-né, car elle peut se transmettre à l’accouchement.

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

321

TABLEAU 8.2

Infections transmissibles sexuellement et par le sang (suite)

MANIFESTATIONS CLINIQUES

TRAITEMENTS

SOINS INFIRMIERS

• Métronidazole ou tinidazole en administration orale ; le métronidazole peut être administré en une seule dose

• Informer l’adolescent de la nécessité de bannir l’alcool durant le traitement et au moins 48 heures après la dernière dose.

Trichomonase (Trichomonas vaginalis) • Prurit et œdème des organes génitaux externes ; odeur nauséabonde, écoulement vaginal verdâtre ; parfois, saignement après le coït ; peut être asymptomatique, particulièrement chez l’homme

• Traiter les partenaires sexuels.

Virus du papillome humain (VPH) • Verrues qui se forment sur les organes génitaux masculins ou féminins

• Traitement appliqué par l’adolescent :

• Aviser l’adolescent qu’il peut également passer outre le traitement et attendre la disparition spontanée des verrues.

– Solution ou gel de podolox 0,5 % ou

• Informer l’adolescent que le traitement, quel qu’il soit, est douloureux en général, que l’analgésie peut être nécessaire et que le corticostéroïde en crème peut procurer un certain soulagement.

– Crème d’imiquimod 5 % ou onguent de sinécatéchines 15 % • Traitement appliqué par le médecin : – Teinture de benjoin contenant de la podophylline 10 à 25 %

• Mentionner à l’adolescent qu’il devrait inciter sa partenaire à subir le test de Papanicolaou.

– Cryothérapie par azote liquide ou cryosonde

• Informer les jeunes lles âgées de 9 à 18 ans qu’elles peuvent se faire vacciner contre le VPH.

– Acide trichloracétique 80 à 90 % – Traitement au laser, administration intralésionnelle d’interféron ou exérèse chirurgicale

Infections transmissibles sexuellement et par le sang d’origine virale

La clinique médicale l’Actuel (https://cliniquelactuel.com) présente des ressources en ligne sur les ITSS.

17 Les virus responsables de l’hépatite A, B, C, D et E sont expliqués dans le chapitre 17, Troubles liés au système gastrointestinal.

322

Partie 3

Virus du papillome humain Le virus du papillome humain (VPH) est une famille de virus qui en compte plus de 40, pouvant être transmis sexuellement. Certains de ces virus sont plus susceptibles que d’autres de causer le cancer. Plusieurs personnes sont infectées sans le savoir. Dans la majorité des cas, le système immunitaire élimine le virus après plusieurs mois. Par contre, lorsque l’infection persiste, elle peut entraîner des lésions au col de l’utérus. Il s’agit de l’une des principales causes de cancer du col de l’utérus (Société canadienne du cancer, 2017). Il existe maintenant un vaccin pour prévenir le VPH (Agence de la santé publique du Canada, 2013 ; Portail santé mieuxêtre, 2017b). Herpès L’herpès est une ITSS causée par le virus herpes simplex de type 1 ou de type 2. Le type 1 est celui qui se manifeste principalement dans la bouche, mais il peut aussi se transmettre aux organes génitaux. Le type 2 touche principalement les organes génitaux, mais très rarement la bouche. L’infection est très contagieuse, même sans la présence de symptômes. Hépatite Cinq virus différents (virus de l’hépatite A, B, C, D et E) sont responsables de presque tous les cas d’hépatite chez l’être humain 17 .

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

VIH Le VIH est une ITSS. Le sida est une séquelle à long terme du VIH. Ce virus peut se transmettre durant la période périnatale, lors d’une relation sexuelle avec une personne infectée ou lors du partage d’une seringue avec une personne infectée.

Approche thérapeutique L’administration du médicament approprié représente le traitement efcace contre l’ITSS. Il est essentiel que tous les partenaires sexuels soient traités. L’adolescent peut avoir besoin de conseils pour savoir comment s’y prendre an d’informer ses partenaires, et il doit s’abstenir de toute relation sexuelle jusqu’à ce que le traitement soit terminé. Il n’y a pas encore de stratégie prophylactique totalement efcace ; par conséquent, la prévention doit être axée sur le traitement des personnes infectées, sur le dépistage et l’examen des personnes qui ont eu un contact sexuel avec les personnes infectées, sur l’éducation des jeunes à propos des ITSS et sur la promotion de l’usage du condom dans la population adolescente sexuellement active. Au Québec, en vertu du Règlement ministériel d’application de la Loi sur la santé publique (RLRQ, chapitre S-2.2, r. 2), certaines ITSS doivent obligatoirement être déclarées : chancre mou, granulome inguinal, hépatites virales, infection à Chlamydia trachomatis, infection gonococcique, lymphogranulomatose vénérienne, syphilis, infection par le VIH (MSSS, 2016b ; MSSS, 2017).

Soins inrmiers INFECTIONS TRANSMISSIBLES SEXUELLEMENT ET PAR LE SANG

Les responsabilités inrmières couvrent tous les aspects de l’éducation, de la condentialité, de la prévention et du traitement en cas d’ITSS. L’éducation sexuelle des adolescents devrait comprendre de l’information sur les symptômes et le traitement de ces infections, ainsi que des renseignements précis sur les modes de transmission de celles-ci an de réfuter les mythes à ce sujet. Bien des adolescents ne savent rien de cela ou sont mal informés à ce propos. La prévention primaire consiste à encourager l’abstinence et le report de l’activité sexuelle, à promouvoir l’usage du condom, et à veiller à ce que

8.4.4

Atteinte inammatoire pelvienne

L’atteinte inammatoire pelvienne (AIP) touche l’endomètre, les trompes de Fallope ou les ovaires, et elle est le plus souvent causée par une bactérie transmissible sexuellement, comme Neisseria gonorrhoeae, Chlamydia trachomatis ou d’autres bactéries anaérobies. Selon l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC, 2013), environ 100 000 cas d’AIP avec symptômes sont recensés annuellement au Canada. Toutefois, près des deux tiers des cas ne sont pas signalés, rendant impossible la détermination de leur nombre exact. Il est estimé que de 10 à 15 % des femmes en âge de procréer ont déjà eu un épisode d’AIP. Les conséquences à long terme d’une AIP incluent l’infertilité en raison d’une cicatrisation tubaire des trompes de Fallope, une grossesse ectopique et une douleur abdominale chronique. Chez l’adolescente, les manifestations cliniques peuvent être d’ordre général : èvre, douleur abdominale, symptômes urinaires et symptômes d’allure grippale, tels le malaise, la nausée, la diarrhée ou la constipation. Lorsque l’adolescente sexuellement active se plaint de douleur abdominale basse, l’examen pelvien s’impose, car il pourrait s’agir d’une AIP. L’AIP est un grave sujet de préoccupation en raison de ses répercussions dévastatrices sur l’appareil génital. Des complications à brève échéance peuvent survenir, dont l’abcès ovariotubaire, ou des complications à long terme, telles que la douleur pelvienne chronique, la dyspareunie (douleur au cours des rapports sexuels) ou la formation d’adhérences. Cependant, la complication la plus importante demeure le risque accru de grossesse ectopique ou d’infertilité. La prévention représente le principal champ de bataille des professionnels de la santé. Les

les adolescents soient vaccinés contre l’hépatite A et B, et le VPH 9 . L’inrmière a également sa place dans la prévention secondaire en aiguillant les adolescents infectés vers les services médicaux thérapeutiques. Elle peut aussi prescrire un médicament pour le traitement de la chlamydia et de la gonorrhée si l’adolescent ou l’adolescente est asymptomatique, mais que son test de dépistage est positif. Elle peut en outre participer à la prévention tertiaire en réduisant les répercussions médicales et psychologiques des ITSS en animant des groupes d’entraide destinés aux adolescents infectés par le VIH, le virus herpes simplex ou le VPH, et en incitant l’adolescente enceinte à se soumettre au dépistage prénatal approprié et au traitement de l’ITSS, le cas échéant.

méthodes contraceptives barrières, comme le condom, sont celles qui confèrent la meilleure protection contre les ITSS et l’AIP. L’adolescente sexuellement active qui a un nouveau partenaire, ou plusieurs partenaires, devrait être soumise à un dépistage semestriel an de détecter les ITSS asymptomatiques et d’amorcer le traitement au plus tôt pour prévenir l’AIP et ses complications connexes. La réinfection à chlamydia fait grimper l’incidence d’AIP. L’adolescente qui a subi une infection à chlamydia devrait être soumise au dépistage du micro-organisme trois mois après le traitement de la primo-infection en raison du risque d’une réinfection s’il n’y a pas de changement de comportement sexuel.

8.4.5

9 La vaccination prévenant le VPH est expliquée dans le chapitre 9, Maladies infectieuses et immunisation.

éactivation des connaissances Qu’est-ce qui distingue les préventions primaire, secondaire et tertiaire ?

8

Le ministère de la Santé et des Services sociaux a mis à jour son Guide québécois de dépistage des infections transmissibles sexuellement et par le sang ainsi que son feuillet informatif intitulé Intervention préventive relative aux infections transmissibles sexuellement et par le sang (ITSS). Ces deux documents peuvent être consultés au www.msss.gouv.qc.ca.

Agression sexuelle

Le terme agression sexuelle est généralement associé au viol ou à une pénétration vaginale avec agression physique commise par un inconnu. Ce type d’agression sexuelle n’est cependant pas le plus fréquent chez les enfants et les adolescents. Le plus souvent, l’agresseur est une personne connue de la victime, et il n’y a pas de violence apparente comportant coups et blessures. L’agresseur aura recours à la violence verbale ou psychologique et aux paroles méprisantes ; cependant, il peut aussi utiliser la douceur, l’affection et la tendresse pour arriver à ses fins (Cotter et Beaupré, 2014). Le terme agression sexuelle regroupe les notions de viol, d’inceste, d’abus sexuel (terme utilisé surtout par rapport aux enfants et aux adolescents), de harcèlement sexuel, etc. Le Code criminel (L.R.C. [1985], chapitre C-46) et la Loi sur la protection de la jeunesse (RLRQ, chapitre P-34.1) sont les processus judiciaires mis en place pour protéger le jeune dans les cas d’agressions sexuelles sur des mineurs. Chapitre 8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

323

Pour des renseignements et des statistiques sur les agressions sexuelles, il est possible de consulter le site Web du ministère de la Sécurité publique au www. securitepublique.gouv.qc.ca ainsi que le site Portail santé mieux-être au http://sante. gouv.qc.ca.

Le nombre de cas d’agressions sexuelles compilés en 2014 par les corps policiers est de 5 340 infractions (ministère de la Sécurité publique, 2016). Cependant, l’ampleur réelle est difcilement évaluable, puisque tous les cas sont loin d’être rapportés. Les enfants et les adolescents représentent la moitié des victimes d’agressions sexuelles (ministère de la Sécurité publique, 2016). Au Québec, 84,2 % des victimes mineures connaissent leur agresseur (gouvernement du Québec, 2016b). Les infractions sont généralement perpétrées (70 %) dans une résidence privée, puisque la victime connaît l’agresseur (gouvernement du Québec, 2016a).

L’usage de drogues dans le but de commettre un viol se répand à un rythme alarmant. Les jeunes gens fréquentant les bars ou étant adeptes des fêtes techno Claudie Larouche a 27 ans lorsqu’elle dévoile à sa (rave) doivent savoir qu’un sœur une agression sexuelle dont elle a été victime étranger peut facilement verà l’âge de 16 ans. Un camarade de classe l’avait ser une drogue dans leur invitée à une soirée où quelques amis devaient verre sans qu’ils s’en rendent être réunis, mais aucune autre personne n’était compte (Brennan et Van Hout, présente à cette soirée. Pourquoi Claudie n’a-t-elle 2014). Bien que ce soit l’aljamais parlé de cet événement avant l’âge cool qui est le plus souvent de 27 ans ? utilisé comme drogue en vue a) Elle craignait d’être jugée par son entourage à de commettre une agression ce moment-là. sexuelle, d’autres substances b) Elle ressentait de la honte d’avoir subi une peuvent également être utiliagression sexuelle. sées pour diminuer l’inhibition de la victime. Les c) Elle éprouvait les effets à long terme d’un choc substances pouvant être post-traumatique. désignées par l’expression d) Elle se sentait responsable, car elle connaissait drogue du viol sont la l’agresseur. benzodiazépine sédative hypnotique (flunitrazépam [RohypnolMD]), le somnifère gamma hydroxybutyrate (GHB) et l’anesthésique kétamine. Ces ALERTE CLINIQUE substances à action rapide provoquent une désinhibition, de la passivité, de la relaxation musculaire L’inrmière ne doit pas reproet une amnésie prolongée. La victime se réveille à cher à la victime d’avoir tardé un endroit inconnu et se rend compte qu’elle a été à signaler le viol, car elle sait violée. Il est alors possible qu’elle n’en dise rien la nature des sentiments qui pendant longtemps ou qu’elle n’en parle jamais. Le peuvent habiter la personne viol commis par une connaissance n’est pas touayant subi une telle expérience jours signalé, notamment lorsque la victime a, à douloureuse ; elle se concentre tort, le sentiment qu’elle l’a provoqué et qu’il ne plutôt sur le fait que la victime s’agit pas réellement d’un viol . consulte maintenant.

Jugement

clinique

CE QU’IL FAUT RETENIR

Le premier geste à poser à l’égard de la victime en est un de soutien, car l’entrevue et les procédures de l’examen peuvent aggraver le traumatisme causé par l’agression sexuelle.

324

Partie 3

La victime d’agression sexuelle, homme ou femme, subit un grave préjudice physique et émotionnel. Il n’y a pas de cas type. L’homme comme la femme, quel que soit son groupe d’âge, son origine ethnique ou son statut socioéconomique, peut être victime d’un viol. Il convient de noter cependant que les adolescents et les enfants atteints d’une incapacité physique ou d’une décience intellectuelle sont plus vulnérables que les autres aux sévices sexuels (INSPQ, 2017). Les infractions sexuelles commises envers les enfants et les jeunes sont plus susceptibles d’être

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

dénoncées tardivement. Environ 25 % des infractions déclarées le sont plus de 1 an après l’agression (Cotter et Beaupré, 2014). Les causes de ces délais avant la dénonciation pourraient être, entre autres, les traumatismes personnels, la peur d’être blâmé ainsi que l’inuence de la famille et des amis (Cotter et Beaupré, 2014). L’inrmière doit connaître les signes qui lui permettent de suspecter une agression sexuelle an d’intervenir le plus vite possible et d’avertir la DPJ.

Diagnostic Il existe plusieurs paramètres d’évaluation qui orientent l’intervention en cas d’agression sexuelle. Le Guide d’intervention médicosociale (MSSS, 2010) a été écrit par une équipe d’experts dans le but de guider les intervenants au moment de l’entrevue et de l’examen physique de la jeune victime. C’est la source de référence adaptée à la province de Québec sur le plan médical, social et légal pour répondre aux besoins des victimes d’agression sexuelle. L’un des paramètres utilisés dans l’évaluation et le diagnostic est le temps écoulé depuis l’agression sexuelle. Si le délai est de moins de trois à cinq jours, l’intervention médicosociale est jugée urgente, qu’il s’agisse d’une agression unique ou d’une agression chronique dont le dernier épisode remonte à trois à cinq jours ou moins. Si l’agression date de plus de cinq jours, la victime doit être vue dans un délai raisonnable, tout en s’assurant qu’elle est dans un environnement sécuritaire et qu’elle ne souffre pas de détresse psychologique. La recherche de spermatozoïdes n’est plus utile, puisque ceux-ci ne sont plus décelables. La victime peut réagir de bien des manières, et l’examen médicolégal subséquent peut l’effrayer TABLEAU 8.3. Le premier geste à poser à l’égard de la victime en est un de soutien, car l’entrevue et les procédures de l’examen peuvent aggraver le traumatisme causé par l’agression sexuelle. Avant toute chose, la victime doit savoir qu’elle est maintenant en sécurité et qu’elle n’a rien à se reprocher pour ce qui s’est produit. L’adolescent de 14 ans et plus peut signer le consentement pour l’examen et les tests. Pour le jeune âgé de moins de 14 ans, un des parents ou le tuteur légal doit signer le consentement ; l’enfant doit toutefois consentir à l’examen.

Approche thérapeutique L’adolescent victime d’agression sexuelle qui se présente au service des urgences ou au cabinet du médecin peut être accompagné de ses parents, d’amis ou de policiers, mais peut aussi être seul. Une femme devrait assister à l’entrevue et à l’examen de la jeune lle ayant subi une agression si le médecin qui effectue l’examen est un homme. Dans tous les cas, il est conseillé de toujours être

TABLEAU 8.3

Observations possibles chez la victime de viol lorsqu’elle se présente en urgence

ÉMOTIONS ET COMPORTEMENTS POSSIBLES

SIGNES DE CONTRAINTE PHYSIQUE OBSERVABLES

PREUVES OBTENUES PAR L’EXAMEN MÉDICAL

• Pleurs hystériques

• Brutalité

• Pénétration

• Coups légers (gies)

• Éjaculation

• Confusion

• Coups brutaux (tapes, coups de pied, coups de poing)

• Utilisation de la force

• Culpabilité (s’adresse des reproches)

• Étouffement, étranglement

• Rire nerveux • Agitation • Sentiment d’humiliation • Colère et rage • Impuissance • Nervosité

• Calme et en maîtrise d’elle-même (cache son tourment intérieur)

• Crainte ou frayeur à propos du viol ou des blessures

• Sautes d’humeur

deux intervenants au moment de l’examen physique après une agression sexuelle, puisque la jeune victime vient de vivre un traumatisme et qu’elle pourrait mal interpréter l’examen physique. La présence des parents est encouragée lorsque ceux-ci manifestent du soutien à l’égard de leur enfant et que celui-ci y consent.

8

Selon les circonstances, il se peut qu’un traitement prophylactique contre la gonorrhée, la chlamydia, l’hépatite B et même le VIH soit offert. Sauf pour l’hépatite B, les traitements prophylactiques sont rarement administrés d’emblée. Si une infection est détectée en laboratoire, la victime sera avisée et traitée.

Soins inrmiers AGRESSION SEXUELLE

Procéder à l’examen physique Il est important, autant que possible et selon l’âge, d’obtenir un compte rendu précis des circonstances du viol sans contraindre la victime à revivre cette expérience tragique. Les éléments d’information pertinents sont la date, l’heure, le lieu et la description des gestes sexuels. La victime ne doit prendre ni douche ni bain avant l’examen. L’inrmière décrit en termes compréhensibles la nature des tests et des interventions prévues, tout en offrant du soutien émotionnel à l’enfant ou à l’adolescent. L’examen est minutieux et couvre non seulement la région génitale, mais tout le corps, en vue de déceler des blessures ou des signes physiques révélateurs de l’usage de la force. Au moment de l’examen médicolégal, l’intervenant doit suivre le Guide d’intervention médicosociale. Le but premier n’est pas de prouver qu’il y a eu agression sexuelle, mais d’orienter le travail des intervenants vers des actions pertinentes et d’apporter à la victime le soutien nécessaire sur le plan émotionnel. Par la suite, l’intervenant doit remplir les formulaires de la trousse médicolégale et de la trousse médicosociale. Le dossier médical

peut constituer une pièce à conviction maîtresse au tribunal. Ce sont des praticiens formés à cet égard qui procèdent à l’examen de la victime. L’inrmière qualiée en matière d’évaluation de la victime d’agression sexuelle peut être du nombre des membres de cette équipe. Le dépistage d’une ITSS et le test de grossesse sont un volet important pour la santé de l’enfant et de l’adolescent, mais ils ne sont pas toujours révélateurs d’un abus sexuel. Le dépistage des ITSS et le test de grossesse sont faits en urgence dans les cinq jours après l’agression an d’avoir une référence de base. L’adolescente devra être suivie trois semaines après l’agression an de revérier si les tests sont positifs. Nombre d’interventions proposées lorsqu’il s’agit d’un enfant ayant subi des sévices sexuels s’appliquent également à l’adolescent victime d’une agression sexuelle 7 . La démarche inrmière a pour but premier d’éviter d’accentuer le stress déjà énorme que ressent l’adolescent habité par la colère, la confusion, la peur, la honte et la culpabilité. L’inrmière met tout en œuvre pour atténuer le stress de l’entrevue et de l’examen. Même si la plupart des professionnels de la santé et des policiers sont sensibles à l’état de l’adolescent victime d’une agression et s’efforcent de rendre la situation la moins stressante possible, l’inrmière devrait

Chapitre 8

7 Les interventions de l’inrmière auprès de l’enfant ayant subi des sévices sexuels sont traitées dans le chapitre 7, Problèmes de santé du trottineur et de l’enfant d’âge préscolaire.

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

325

être à l’affût des signes indiquant que l’adolescent est bouleversé et stressé. Le langage utilisé par l’inrmière doit être adapté au niveau de compréhension et à l’âge de la victime. L’inrmière doit reconnaître que l’agression sexuelle est une situation difcile pour la victime et pour les proches qui donnent du soutien. Elle démontre de l’empathie, du respect et de l’écoute. Elle ne porte pas de jugement, elle a une attitude chaleureuse et aide la victime à dénir ses besoins ainsi qu’à reconnaître et à exprimer ses pensées et ses sentiments.

Giardiase : Ensemble des manifestations pathologiques essentiellement digestives (diarrhées) déterminées par le parasitisme de l’intestin de l’homme, et surtout celui de l’enfant par Giarda intestinalis.

8.5

Troubles liés à l’alimentation

8.5.1

Intolérance au lactose

L’intolérance au lactose est l’incapacité du métabolisme à digérer le lactose, une protéine contenue dans le lait (Ali, Singh et Hussan, 2017). Elle est attribuable à une carence de l’enzyme lactase, nécessaire à l’hydrolyse (qui transforme le glucose en lactose et en galactose) ou à la digestion du lactose dans l’intestin grêle.

L’insufsance primaire en lactase, parfois appelée insufsance tardive en lactase, en est le type le plus courant. Ce type d’insufsance est CE QU’IL FAUT RETENIR associé à une diminution progressive de la production de lactase par l’organisme, ce qui entraîne Les principaux symptômes des problèmes dans l’absorption du lactose. Cette de l’intolérance au lactose diminution peut débuter après l’âge de 2 ans, mais incluent la douleur abdo­ les symptômes ne surviennent qu’après quelques minale, les ballonnements, années. Ainsi, les manifestations ne débutent les atulences et la diarrhée généralement pas avant l’âge de 6 ans et elles sont après l’ingestion de lactose. plus présentes à l’adolescence et au début de l’âge adulte (Silanikove, Leitner et Merin, 2015 ; Turcotte, 2012). De façon générale, ce phénomène est présent chez près de 70 % de la population mondiale (Turcotte, 2012). Toutefois, parmi les groupes ethniques affectés par une prévalence élevée d’insuffisance en lactase figurent les Asiatiques, les Européens du Sud, les Arabes, les Israéliens et les AfroAméricains, tandis que les Scandinaves ont les taux les plus faibles (Ali et al., 2017). Au Canada, 16 % des personnes ont une intolérance au lactose (Barr, 2013). La malabsorption du lactose similaire à l’intolérance au lactose, se caractérise par par un déséquilibre entre la capacité de la lactase à hydrolyser le FIGURE 8.4 L’intolérance au lactose ingéré et la quantité de lactose lactose crée de l’inconfort chez l’enfant. ingérée (Ali et al., 2017).

326

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Assurer un suivi à long terme La victime peut éventuellement avoir besoin d’un suivi thérapeutique pour une période plus ou moins longue. Outre le besoin de soutien émotionnel, la victime a des besoins qui varient grandement selon la nature de l’agression, son lien avec l’agresseur, son âge au moment du viol, les blessures physiques et émotionnelles subies, la possibilité d’une action en justice, le soutien offert dans le milieu naturel et les réactions de l’entourage, surtout celles des parents.

L’insufsance secondaire en lactase peut survenir à la suite d’une atteinte de la muqueuse intestinale qui réduit ou détruit la lactase. La brose kystique, la sprue cœliaque, la maladie cœliaque, le kwashiorkor ainsi que les infections telles que la giardiase, ou une infection par le VIH ou par un rotavirus, peuvent ainsi occasionner une intolérance temporaire ou chronique au lactose.

Manifestations cliniques Les principales manifestations cliniques de l’intolérance au lactose incluent la douleur abdominale, les ballonnements, les atulences et la diarrhée après l’ingestion de lactose FIGURE 8.4. Elles surviennent dans les 30 minutes à quelques heures qui suivent la consommation de lactose. L’intolérance au lactose est souvent perçue comme une allergie et, dans plusieurs études rapportant des symptômes gastro-intestinaux aigus imputables à une intolérance au lactose, la mesure de l’activité de la lactase se révèle normale (Goldberg, Folta et Must, 2002). Une importante distinction existe donc entre l’intolérance au lactose et l’allergie alimentaire, en ce sens que l’intolérance au lactose ne se manifestera pas comme une réaction de type anaphylactique.

Diagnostic Le diagnostic de l’intolérance au lactose se fonde sur l’anamnèse et sur l’amélioration des manifestations cliniques grâce à un régime à faible teneur en lactose. Le dosage de l’hydrogène expiré permet de conrmer le diagnostic. Chez les enfants qui ont une insufsance en lactase, il y a une augmentation du pourcentage d’hydrogène dans l’haleine (20 parties par million [ppm] ou plus par rapport aux valeurs de référence) (Misselwitz, Pohl, Frühauf et al., 2013).

Approche thérapeutique L’intolérance au lactose est traitée par l’élimination des produits laitiers qui en sont responsables. Toutefois, certains experts conseillent d’en

Le lait pris au repas se tolérerait mieux que le lait pris seul ENCADRÉ 8.1. Le lait prétraité (au moyen de lactase d’origine microbienne) améliorerait l’absorption du lactose. Étant donné que les produits laitiers constituent une source majeure de calcium et de vitamine D, il faut administrer ces éléments nutritifs sous forme de suppléments pour prévenir leur carence. Le yogourt renferme de la lactase sous forme inerte, qui s’active sous l’action

de la chaleur et du pH du duodénum. Cette activité de la lactase compense le manque de lactase endogène. Les enfants toléreraient mieux le yogourt nature frais que les yogourts congelés ou aromatisés. Il est aussi possible d’opter pour des fromages à pâte ferme et des produits laitiers traités à la lactase, et pour la prise de comprimés de lactase avec les produits laitiers.

clinique

Jugement

diminuer la quantité plutôt que de les éliminer totalement, surtout chez les jeunes enfants, car il semblerait que les personnes intolérantes sont capables de consommer jusqu’à 12 g de lactose (250 mL de lait) sans présenter de manifestations cliniques (Misselwitz et al., 2013). On peut se demander si l’élimination des produits laitiers chez les enfants et les adolescents qui souffrent d’une intolérance au lactose ne les expose pas à un risque de baisse de leur densité minérale osseuse et d’ostéoporose (Misselwitz et al., 2013). Selon certains résultats de recherches, le lactose alimentaire favorise l’absorption du calcium, et les régimes sans lactose pourraient nuire à la minéralisation osseuse (Misselwitz et al., 2013). Les personnes qui ont du mal à digérer le lactose sans inconfort peuvent continuer de consommer des produits laitiers en petite quantité aux repas pour prévenir une baisse de leur densité minérale osseuse et l’ostéoporose qui s’ensuivrait. Les probiotiques, soit des préparations alimentaires qui renferment des microorganismes comme des lactobacilles et qui agissent sur la microore gastro-intestinale, réduisent l’intolérance au lactose lorsque la fermentation des produits laitiers se fait grâce à des cultures vivantes. Les propriétés bienfaisantes des probiotiques pour les enfants qui ne digèrent pas le lactose incluent un ralentissement du transit gastrointestinal (plus lent que le transit du lait), des effets favorables sur la microore de l’intestin et du côlon, ainsi qu’une atténuation des problèmes liés à une mauvaise digestion (Misselwitz et al., 2013).

Yang, âgé de six ans, présente de l’intolérance au lactose. Sa mère, qui vient d’immigrer de Chine, raconte qu’il a des crampes abdominales régulièrement après les repas. Quels sont les facteurs ayant contribué à l’intolérance au lactose de Yang ? Yang devrait-il éliminer complètement les produits laitiers de son alimentation ? Justiez votre réponse.

Soins inrmiers INTOLÉRANCE AU LACTOSE

8

Les soins inrmiers relatifs à l’intolérance au lactose sont semblables aux interventions abordées pour l’allergie au lait de vache. L’inrmière explique les restrictions alimentaires à la famille ; elle indique les solutions de rechange pour consommer du calcium, comme les yogourts et les suppléments de calcium ; elle explique l’importance des suppléments ; elle aborde les sources de lactose, surtout les sources occultes, par exemple les diluants de certains médicaments, de façon à contrôler les manifestations cliniques. Il est conseillé aux parents de s’informer de ce risque auprès du pharmacien lorsqu’ils se procurent des médicaments.

8.5.2

Obésité

Selon l’OMS, l’obésité est devenue une épidémie mondiale qui pourrait nuire à l’amélioration de la longévité observée (OMS, 2017a, 2017b). Au Québec, l’obésité a doublé depuis 25 ans. Chez les jeunes de 6 à 17 ans, le surplus de poids touche près de 25 %

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 8.1

Maîtrise des manifestations cliniques de l’intolérance au lactose

• Limiter la consommation de lait à un ou deux verres par jour.

les produits laitiers comme la crème glacée) (Turcotte, 2012).

• Boire du lait avec d’autres aliments plutôt que de le consommer seul.

• Consommer de petites quantités de produits laitiers chaque jour pour aider les bactéries du côlon à s’adapter au lactose ingéré.

• Consommer des fromages à pâte ferme, du fromage cottage ou du yogourt plutôt que de boire du lait. • Utiliser des comprimés d’enzymes (Lactaid , Lacteeze , LactoMaxMD) pour métaboliser le lactose du lait ou combler les réserves de l’organisme en lactase (ajouter les comprimés au lait ou en saupoudrer le contenu sur MD

MD

• Inclure un probiotique (yogourt ou lait mis en culture [fermenté]) renfermant des lactobacilles ou des bidobactéries aux repas ou comme goûter léger. • Ingérer un supplément de calcium si la consommation de produits laitiers comme le fromage est impossible.

Chapitre 8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

327

d’entre eux, alors que pour l’obésité, ce taux est de 9 % (Lamontagne et Hamel, 2016). CE QU’IL FAUT RETENIR

Peu de problèmes durant l’enfance ou l’adolescence sont aussi manifestes, aussi difciles à traiter et entraînent autant de répercussions tenaces sur la santé que l’obésité.

21 Les causes, les manifesta­ tions cliniques et le traite­ ment du diabète sont expli­ qués dans le chapitre 21, Troubles liés au système endocrinien.

A Les courbes de croissance permettant de déterminer l’IMC sont présentées dans l’annexe A, Normes de croissance de l’OMS pour le Canada.

Peu de problèmes durant l’enfance ou l’adolescence sont aussi manifestes, aussi difciles à traiter et entraînent autant de répercussions tenaces sur la santé que l’obésité. Les dénitions de l’obésité et de l’embonpoint sont nombreuses. Certains dénissent l’obésité comme étant une augmentation du poids due à l’augmentation disproportionnée de la masse adipeuse par rapport à la masse maigre. L’obésité n’est plus dénie par le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-5) comme un trouble alimentaire (APA, 2015). L’embonpoint désigne le poids supérieur au poids moyen selon la taille et la stature. À l’heure actuelle, la mesure de l’indice de masse corporelle (IMC) constitue la méthode de dépistage de l’obésité la plus exacte. Cet indice reète avec justesse la masse adipeuse sous-cutanée et la masse adipeuse totale, et il est corrélé avec la mesure de l’épaisseur du pli cutané. Il a également une grande spécicité pour les enfants dont les tissus adipeux sont volumineux. En 2007, l’OMS a publié de nouvelles courbes de croissance pour les enfants et les adolescents. Une révision de ces courbes, pour le Canada, a été publiée en 2014. Ces nouvelles courbes sont maintenant adoptées dans la majorité des centres pédiatriques au Québec A . Étant donné que l’obésité à l’âge adulte accroît la mortalité et la morbidité en raison de diverses complications tant physiques que psychologiques, l’obésité à l’adolescence est considérée comme un trouble grave. Les recherches indiquent que l’enfant ou l’adolescent qui fait de l’embonpoint est plus susceptible d’être obèse à l’âge adulte et qu’il commence déjà à subir les conséquences sanitaires et sociales de l’obésité. C’est pourquoi il est également nécessaire d’évaluer le risque d’embonpoint, et pas seulement celui de l’obésité (Les diététistes du Canada et SCP, 2014 ; Marchand, 2016).

L’obésité chez l’enfant ou l’adolescent est associée à une élévation du cholestérol sanguin et de la pression artérielle, à des troubles respiratoires, à des problèmes qui relèvent de l’orthopédie, à des troubles cardiorespiratoires et à la stéatose hépatique qui Anthony, âgé de 14 ans, est hospitalisé pour des n’est pas d’origine alcooproblèmes de somnolence et de céphalée le jour. Il est obèse, comme ses 2 parents. Cette nuit, il lique. Les adolescents qui subira un test de polysomnographie. Quel problème souffrent d’obésité à prédopourrait être conrmé par ce test ? minance abdominale sont plus susceptibles d’être a) Un trouble lié à l’insomnie. atteints d’un syndrome métab) L’apnée obstructive du sommeil. bolique et de diabète de c) Les effets du stress sur le sommeil. type 2 (OMS, 2016). Par ailleurs, il est établi que le prind) Les répercussions de la somnolence diurne. cipal facteur de risque pour

Jugement

clinique

328

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

le diabète de type 2 chez l’enfant est l’obésité. Au Canada, parmi les nouveaux cas de diabète de type 2 diagnostiqués chez les jeunes entre 2006 et 2008, 95 % étaient obèses, c’est-à-dire qu’ils avaient un IMC supérieur au 95e centile pour l’âge et le sexe (Amed, Dean, Panagiotopoulos et al., 2010). L’incidence du diabète de type 2 chez les enfants a augmenté mondialement au cours des 20 dernières années. Au Canada, on rapporte que, chaque année, 1,5 enfant sur 100 000 sera affecté par cette maladie chronique (Amed et al., 2010) 21 . Les conséquences émotionnelles courantes de l’obésité consistent en une piètre image de soi, une baisse de l’estime de soi, de l’isolement social, une humeur dépressive et une moins bonne perception de la qualité de vie (Rankin, Matthews, Cobley et al., 2016). Ces conséquences sont d’ailleurs plus importantes pour les lles que pour les garçons (Gibson, Allen, Davis et al., 2017).

Étiologie L’obésité est le résultat d’un apport calorique constamment supérieur aux besoins énergétiques et à la dépense calorique ; elle est le produit d’un jeu d’inuences interreliées : héréditaire, médicale, hypothalamique, métabolique, environnementale et psychologique (Centers for Disease Control and Prevention, 2017) FIGURE 8.5.

Inuence héréditaire L’inuence héréditaire est un aspect épidémiologique à prendre en considération, eu égard au poids de l’enfant. L’IMC des enfants est attribuable à l’IMC de leurs parents dans une proportion de 40 % ce pourcentage augmente à 60 % chez les enfants les plus obèses (Dolton et Xiao, 2017). De plus, toujours selon cette étude, l’inuence de l’IMC paternel serait du même ordre que celle de l’IMC maternel. Toutefois, d’autres études portant sur des jumeaux indiquent que cette tendance relève de facteurs génétiques et environnementaux (Llewellyn et Wardle, 2015). La probabilité que l’adolescent souffrant d’embonpoint le demeure à l’âge adulte est de 64 à 90 % (Institut national d’excellence en santé et en services sociaux [INESSS], 2012b). L’inuence respective précise des gènes et de l’environnement sur l’enfant en développement demeure inconnue. Il s’agit en fait d’une relation complexe entre la génétique et l’environnement.

Inuence médicale Les causes médicales de l’obésité infantile sont nombreuses. Il peut s’agir d’hypothyroïdie, d’hypercorticisme, d’hyperinsulinisme ou de dysfonction, ou encore de lésions du système nerveux central dues à une tumeur, à une blessure, à une infection ou à un accident vasculaire. L’obésité est une complication fréquente dans le cas d’une maladie chronique qui entrave la mobilité

comme la dystrophie musculaire, la paraplégie, la trisomie 21 et le spina-bida.

Inuence hypothalamique La recherche sur l’obésité a beaucoup étudié l’inuence hypothalamique dans la régulation de l’appétit. La manifestation de l’appétit tient à un code chimique transmis par l’hypothalamus par un circuit distinct. Les substances orexigènes produisent un signal qui stimule l’appétit et qui incite à manger, alors que les substances anorexigènes produisent un signal inverse qui coupe l’envie de manger (Basdevant et Poitou-Bernert, 2011). Il est désormais connu que, chez les personnes obèses, ces signaux sont parcourus de boucles de rétroaction dans lesquelles un peptide altère la sécrétion d’un autre peptide. Aucun signal ne semble indiquer la satiété.

Inuence métabolique Il semblerait y avoir une certaine inuence métabolique sur le développement de l’obésité. En effet, il y a de légères différences entre les enfants obèses et les enfants de poids normal sur les plans de l’apport calorique et du rythme métabolique, qui pourraient créer un déséquilibre énergétique et un gain de poids, mais il est difcile de quantier précisément ces différences. Il n’en demeure pas moins que la principale caractéristique de l’obésité infantile est la suralimentation, alors que c’est la sédentarité à l’âge adulte.

8

Facteurs environnementaux et socioculturels D’un point de vue environnemental, la tendance à l’obésité se manifeste lorsque les conditions contextuelles favorisent l’augmentation excessive de l’apport calorique. Il s’agit de conditions comme l’abondance alimentaire, l’accès limité à des aliments faibles en gras, l’activité physique réduite et le grignotage incessant au cours des nombreuses heures d’écoute de la télévision ou devant l’ordinateur. Les habitudes alimentaires familiales et culturelles ainsi que des facteurs psychologiques jouent un rôle important. Un écart est constaté entre les enfants de milieux favorisés et les enfants de milieux défavorisés, le surpoids étant apparent avant l’âge de six ans dans la plupart des cas. La prévalence de l’obésité est plus élevée dans les groupes de faible statut socioéconomique, particulièrement chez les lles, que dans les autres groupes. Des facteurs socioculturels inueraient également sur le taux d’activité physique. Selon le rapport Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes de Statistique Canada, le niveau d’éducation ainsi que le statut social ont des répercussions sur l’embonpoint et l’obésité (Joubert et Baraldi, 2016). Les enfants provenant de milieux à revenu moyen sont plus à risque que les enfants provenant de milieux à faible revenu et à revenu élevé. Les jeunes qui vivent dans un ménage avec un plus haut niveau d’éducation sont moins susceptibles de souffrir d’embonpoint et d’obésité.

FIGURE 8.5

Jeu complexe d’inuences entourant l’obésité

Le fait que des enfants restent à la maison plutôt que d’aller jouer dehors parce que le voisinage est dangereux représente l’un des facteurs communautaires qui restreignent l’activité physique. De nombreuses collectivités ont peu à offrir pour favoriser l’activité physique chez les jeunes des familles à faible revenu FIGURE 8.6. Les politiques sociales contribuent également à la hausse de l’obésité. L’offre accrue d’aliments riches en gras, les stratégies d’établissement des prix qui favorisent de mauvais choix alimentaires et la publicité alimentaire omniprésente qui bombarde les enfants et les adolescents d’images alléchantes d’aliments gras et sucrés en sont quelques exemples.

CE QU’IL FAUT RETENIR

La principale caractéristique de l’obésité infantile est la suralimentation, alors que c’est la sédentarité à l’âge adulte.

Facteurs institutionnels Les activités sédentaires nombreuses et attrayantes de plus en plus répandues, dont la télévision, les jeux vidéo, l’ordinateur et Internet, ont accentué la tendance à la sédentarisation des enfants. Selon la Société canadienne de pédiatrie (Strickland, 2017), les enfants, même à un tout jeune âge (moins de 5 ans), passent trop de temps devant les écrans. Seulement 15 % des jeunes d’âge Chapitre 8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

329

préscolaire respectent les normes actuelles, qui sont de 1 heure par jour pour ce groupe d’âge.

Facteurs psychologiques Des facteurs psychologiques entrent également en jeu dans le comportement ou les habitudes alimentaires. L’alimentation réconforte le nourrisson, qui associe bien vite cette activité au sentiment de bien-être et de sécurité, et à la présence réconfortante d’une personne aimante. Se nourrir s’accompagne dès lors du sentiment d’être aimé. De plus, la sensation orale agréable que procure la succion vient lier les émotions et le comportement alimentaire. Bien des parents utilisent FIGURE 8.6 L’activité physique les aliments pour renforcer les comporaide à combattre l’embonpoint et l’obésité. tements souhaités chez leurs enfants. La pratique devient une habitude, et c’est ainsi que les aliments deviennent des récompenses dans l’esprit de l’enfant, un moyen de composer avec la dépression ou l’hostilité. Beaucoup de personnes mangent alors qu’elles n’ont pas faim, parce que l’ennui, la lassitude, la solitude, la tristesse, la dépression ou la fatigue les gagnent. La difculté de ressentir la sensation de satiété ou d’y réagir en cessant de manger peut entraîner des problèmes de poids et compliquer davantage la situation, puisqu’elle s’ajoute au fait de manger en réaction à des signes de nature émotionnelle plutôt qu’aux signaux physiques de la faim.

Diagnostic

Jugement

clinique Mahée est âgée de 15 ans. Elle vous consulte à titre d’inrmière en santé scolaire pour vous parler de son em­ bonpoint. D’après son IMC, elle se situe au 98e centile. Inter­ prétez ce résultat.

L’anamnèse est minutieuse ; elle englobe tous les aspects de l’apparition de l’obésité. Il importe de connaître les antécédents familiaux en matière d’obésité, de diabète, de coronaropathie et de dyslipidémie dans tous les cas d’embonpoint ou de risque d’embonpoint. La collecte des données doit inclure des renseignements sur les répercussions de l’obésité sur les activités quotidiennes courantes, la respiration et le sommeil nocturnes, la somnolence diurne, l’arthralgie, et la capacité de maintenir le rythme des activités familiales et des autres élèves à l’école. À cela s’ajoute l’examen physique nécessaire pour distinguer l’obésité simple de l’adiposité découlant d’une cause organique. L’examen physique est axé sur la détection d’une maladie concomitante ou des causes de l’obésité, par exemple le syndrome des ovaires polykystiques et l’hypothyroïdie. Une entrevue familiale peut fournir assez d’information pour guider les interventions nécessaires dans la démarche de soins inrmiers. Chez l’enfant ou l’adolescent, l’IMC est la meilleure méthode d’évaluation du poids. Le calcul s’effectue en fonction de sa taille et de son poids. Chez l’adulte, l’IMC se dénit sans

330

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

égard au sexe ou à l’âge, alors qu’il varie selon l’âge et le sexe chez l’enfant ou l’adolescent an de tenir compte des particularités de la croissance selon ces deux facteurs. Voici la formule du calcul de l’IMC :

IMC =

poids en kilogrammes (taille en mètres)2

Il existe des seuils minimaux permettant d’orienter l’évaluation ou les interventions plus approfondies chez les jeunes. Ces seuils ne doivent pas servir comme unique critère diagnostique. Il importe de regarder les valeurs du jeune en fonction de son prol longitudinal. Il est aussi à noter que les valeurs seuils ne sont pas les mêmes chez les enfants de 2 à 5 ans et les jeunes de 5 à 19 ans. Il importe de se référer aux bonnes valeurs seuils en fonction de l’âge de l’enfant. Ainsi, le jeune de moins de 5 ans dont l’IMC se situe dans le 85e centile est plus susceptible d’avoir un surplus de poids ; celui qui se situe entre le 97e et le 99,9e centile est considéré comme souffrant d’embonpoint. Pour ce qui est des jeunes âgés de 5 à 19 ans, lorsque l’IMC se situe au 85 e centile, l’embonpoint est considéré. L’obésité survient lorsque l’IMC du jeune âgé de 5 à 19 ans se situe au 97 e centile. L’obésité grave est considérée lorsque l’IMC du jeune est supérieur au 99,9e centile (Les diététistes du Canada et Société canadienne de pédiatrie, 2014 ; Marchand, 2016) TABLEAU 8.4. L’examen physique complet est incontournable. Le professionnel de la santé s’attache aux aspects suivants : 1) la peau, pour déceler des stries ou des dyschromies ; 2) les articulations, pour savoir s’il y a de l’enure et de la douleur ; 3) les voies respiratoires, pour déceler l’obstruction ou l’hypertrophie des amygdales. Les examens paracliniques courants sont le bilan lipidique à jeun, le taux d’insuline à jeun, la glycémie à jeun, les enzymes hépatiques, y compris l’oméga-glutamyltranspeptidase (GGT) et l’hémoglobine glyquée dans certains établissements. D’autres examens, notamment l’étude du sommeil, des analyses métaboliques et la radiographie, s’ajoutent lorsque l’anamnèse et l’examen physique le justient. Ces examens permettront de déterminer s’il y a lieu d’aiguiller l’enfant vers des services spécialisés afin d’approfondir l’évaluation et de préciser le traitement, comme en endocrinologie (résistance à l’insuline, diabète), en hépatologie (élévation des enzymes hépatiques, stéatose hépatique non alcoolique), en orthopédie (maladie de Blount) ou en pneumologie (respiration altérée par un trouble du sommeil, pression positive continue) (INESSS, 2012a).

TABLEAU 8.4

Valeurs seuils pour l’embonpoint, l’obésité et l’obésité grave

ÉTAT DE CROISSANCE

INDICATEUR

Embonpointa

2-5 ANS

5-19 ANS

PERCENTILE

ÉCARTS RÉDUITS

PERCENTILE

ÉCARTS RÉDUITS

IMC pour l’âge

Plus du 97e

>2

Plus du 85e

>1

Obésitéb

IMC pour l’âge

Plus du 99,9e

>3

Plus du 97e

>2

Obésité grave

IMC pour l’âge

s.o.c

s.o.c

Plus du 99,9e

>3

a Une

évaluation plus approfondie s’impose. Rechercher les comorbidités et les causes possibles. Les valeurs seuils recommandées pour les enfants plus jeunes (de la naissance à cinq ans) sont plus prudentes an d’éviter le risque que les professionnels de la santé ou les parents mettent l’enfant au régime. Certains enfants qui font partie de cette catégorie ne souffrent pas d’embonpoint – les seuils du poids pour la longueur et de l’IMC ne tiennent pas compte de la composition corporelle et d’une masse musculaire élevée. Les valeurs seuils recommandées pour les enfants plus âgés (de cinq à 19 ans) coïncident, à 19 ans, à la valeur seuil d’embonpoint pour l’adulte (c’est-à-dire un IMC de 25 kg/m2). b Dénote généralement un excédent de masse grasse et reète de graves risques pour la santé. Les valeurs seuils recommandées pour les enfants plus jeunes (de la naissance à cinq ans) sont plus prudentes an d’éviter le risque que les professionnels de la santé ou les parents mettent l’enfant au régime. Les valeurs seuils recommandées pour les enfants plus âgés (de cinq à 19 ans) coïncident, à 19 ans, à la valeur seuil d’obésité pour l’adulte (c’est-à-dire un IMC de 30 kg/m2). c Non applicable à ce groupe d’âge. Source : Les diététistes du Canada et la Société canadienne de pédiatrie (2014). Le guide d’utilisation des Courbes de croissance de l’OMS pour le Canada. Repéré à www.dietitians.ca/Downloads/Public/DC_HealthProGrowthGuideFR.aspx.

Approche thérapeutique La prévention demeure la meilleure option dans la prise en charge de l’obésité. La détection précoce et des mesures hâtives sont essentielles pour que l’obésité ne s’installe pas. Les professionnels de la santé se doivent d’éduquer les familles à propos des complications médicales de l’obésité et, lorsqu’il y a lieu, de préciser un plan de traitement auquel la famille devrait participer. Le traitement de l’obésité est difcile. Beaucoup de stratégies ne sont pas efcaces à long terme. Les traitements offerts actuellement ne font perdre en moyenne que de 5 à 10 % du poids. La perte de poids peut être bénéque sur nombre d’affections concomitantes, mais le poids perdu se reprend en 1 an ou 2, dans 80 % des cas (Perrot, 2016). En 2012, l’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux a publié un guide de pratique clinique destiné aux intervenants de première et de deuxième ligne quant à la prise en charge de l’obésité chez les enfants et les adolescents (INESSS, 2012b). Ce guide de pratique se base sur quatre grands axes qui sont : 1) évaluer et diriger le jeune vers les ressources adéquates ; 2) traiter ou orienter le jeune en fonction de ses besoins ; 3) suivre et soutenir le jeune et sa famille ; 4) organiser et mobiliser l’ensemble du réseau. Ce guide se base aussi sur une approche multidimensionnelle et intensive pour que les interventions soient efcaces.

Régime alimentaire Tout programme de réduction du poids passe invariablement par la modification du régime

alimentaire. Le counseling diététique se concentre sur l’amélioration de la qualité nutritionnelle du régime alimentaire plutôt que sur les restrictions alimentaires. Les régimes à la mode sont à éviter. La plupart des diététistes et des experts en nutrition s’appuient sur le Guide alimentaire canadien.

8

Il est possible de consulter le Guide alimentaire canadien sur le site Web de Santé Canada au www.canada.ca/ fr/sante-canada.html.

De nombreux programmes préconisent la tenue d’un journal alimentaire pour relever les comportements alimentaires et responsabiliser l’adolescent quant à ses choix. L’objectif consiste à encourager le choix d’aliments sains et à décourager le fait de manger simplement par habitude ou pour chasser l’ennui. Étant donné que les causes de l’embonpoint et de l’obésité sont multifactorielles, l’approche thérapeutique préconisée comporte plusieurs composantes. Les interventions doivent mettre l’accent sur la santé, l’adoption de saines habitudes de vie, une alimentation saine, l’activité physique et la santé mentale, et elles doivent inclure la participation de la famille (Braet, Moens et Latomme, 2015). L’inuence parentale étant très importante, une intervention qui implique la famille serait plus efcace dans bien des cas, surtout chez les jeunes de moins de 12 ans (Braet et al., 2015). Au Canada, le traitement de l’obésité morbide par une diète stricte, notamment par le jeûne modié riche en protéines, le régime cétogène hypocalorique, la diète pauvre en gras et les médicaments suppresseurs de l’appétit, n’est pas recommandé pour les enfants et les adolescents. Ce type de traitement est même à éviter (Findlay et SCP, 2016). Chapitre 8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

331

Chirugie bariatrique La chirurgie bariatrique peut s’avérer la seule option pratique en cas d’obésité morbide, mais elle est très rarement utilisée chez les enfants et les adolescents au Québec. Selon les recommandations internationales, l’adolescent qui fait une demande de chirurgie bariatrique doit avoir été préalablement pris en charge de façon globale pendant au moins six mois. La prise en charge par une équipe multidisciplinaire est de mise autant en phase préopératoire qu’en phase postopératoire (Dubern, 2014).

Prévention Depuis 2007, le gouvernement du Québec, préoccupé par la santé des enfants, a implanté dans

les écoles le programme Pour un virage santé à l’école. Ce programme vise à éliminer la malbouffe des écoles, à promouvoir l’activité physique et à déployer l’approche École en santé pour prévenir et contrer l’obésité (ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport [MELS], 2007). De plus, dans son plus récent guide pour les intervenants en santé publique, l’INSPQ (Bergeron, Alberto, Auclair et al., 2013) maintient le fait que l’intervention en milieu scolaire est une excellente porte d’accès pour la prévention de l’obésité auprès des jeunes. Quelques pistes d’intervention suggérées sont entre autres d’offrir des ateliers de cuisine, d’augmenter et de diversier les activités sportives, et de favoriser le transport actif.

Soins inrmiers OBÉSITÉ

L’inrmière exerce un rôle important sur les plans de l’adhésion au programme de réduction de poids et du maintien de la perte de poids. Elle évalue les progrès accomplis par l’enfant ou l’adolescent souffrant d’embonpoint. Elle a également la tâche importante de dépister les problèmes de poids avant qu’ils ne prennent trop d’ampleur, et de collaborer avec les parents et leur enfant à concevoir un plan de prévention de l’obésité. La démarche de soins inrmiers chez les jeunes souffrant d’embonpoint ou d’obésité doit faire partie du suivi clinique ENCADRÉ 8.2. L’apparence seule ne révèle pas toujours l’obésité. La mesure de la taille et du poids ainsi que le calcul de l’IMC à intervalles réguliers facilitent la détection précoce. L’enfant dont l’IMC est égal ou supérieur au 95e centile pour l’âge et le sexe devrait être soumis à une évaluation médicale approfondie. Lorsque l’IMC est égal ou supérieur au 85e centile, l’évaluation des complications secondaires (p. ex., l’hypertension et la dyslipidémie) et de l’histoire familiale s’impose (Marchand, 2016). L’évaluation englobe l’évolution de la taille et du poids du jeune et des membres de la famille, les habitudes alimentaires, l’appétit et la faim, ainsi que les activités physiques. L’histoire psychosociale est nécessaire pour connaître les répercussions de l’obésité sur l’enfant ou l’adolescent. Avant d’appliquer le plan de traitement, il importe d’être certain que la famille est disposée à modier son style de vie. Si elle ne l’est pas, le plan de traitement est voué à l’échec, et cet échec

332

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

sera une source de frustration qui entravera toute tentative future de régler le problème. L’inrmière discute avec l’enfant ou l’adolescent des motifs qui l’incitent à perdre du poids, car la motivation est la clé de la réussite. L’adolescent doit se responsabiliser quant à ses habitudes alimentaires et à l’activité physique. Quand ses parents l’obligent à consulter, il est rarement motivé, se révolte et s’oppose à tout contrôle de son alimentation. Plusieurs études démontrent que l’implication des parents est très importante pour la réussite d’un programme qui touche la prévention de l’obésité ainsi que la perte de poids chez les enfants et les adolescents (Braet et al., 2015).

Promouvoir un mode de vie sain Le programme de perte de poids ne connaît pas autant de succès que les interventions thérapeutiques prévues dans d’autres troubles. L’accumulation progressive de tissus adipeux durant l’enfance découle d’un mode d’alimentation qui est difcile à modier à l’adolescence. La prévention de l’obésité devrait commencer au début de l’enfance par l’acquisition d’habitudes alimentaires saines, de l’exercice physique périodique et des relations familiales épanouissantes. La prévention de l’obésité à l’adolescence repose sur la détection précoce de l’obésité à l’âge préscolaire, à l’âge scolaire et à la préadolescence. Les professionnels de la santé devraient encourager l’enfant en surpoids ou obèse à consulter fréquemment. Ils devraient aussi s’informer des antécédents alimentaires et assurer un counseling nutritionnel au moment de la visite de chaque nourrisson, enfant ou adolescent bien portant.

Mise en œuvre d’une démarche de soins ENCADRÉ 8.2

Embonpoint ou obésité chez l’enfant ou l’adolescent

COLLECTE DES DONNÉES – ÉVALUATION INITIALE

Les actions à entreprendre pour évaluer l’embonpoint ou l’obésité de l’enfant ou de l’adolescent sont les suivantes :

• Modication volontaire des comportements dans le but d’annuler les effets de la maladie cardiovasculaire • Établissement d’une identité personnelle saine

• Calculer l’indice de masse corporelle de l’enfant ou de l’adolescent.

• Adoption d’habitudes alimentaires saines

• Reporter les valeurs sur les courbes de croissance normalisées.

• Responsabilisation de l’enfant ou de l’adolescent dans la modication de son style de vie an de perdre du poids

• Relever l’histoire de santé exhaustive de l’enfant ou de l’adolescent. • Englober également dans l’évaluation la collecte d’information sur l’apport alimentaire des 24 heures, les antécédents familiaux et les aspects du mode de vie qui inuent sur le bien-être de l’enfant ou de l’adolescent, car l’entrevue de santé et l’évaluation nutritionnelle offrent des indications qui orientent l’entrevue approfondie.

• Évitement des blessures

• Utiliser l’entrevue familiale, puisqu’elle est indiquée et nécessaire pour compléter la collecte des données.

ÉVALUATION DES RÉSULTATS – ÉVALUATION EN COURS D’ÉVOLUTION

ANALYSE ET INTERPRÉTATION DES DONNÉES

Les problèmes découlant de la situation de santé peuvent inclure : • Perturbation situationnelle de l’estime de soi • Excès nutritionnel : apport nutritionnel supérieur aux besoins métaboliques • Risque de blessures • Perturbation de l’identité personnelle RÉSULTATS ESCOMPTÉS

La planication des soins est établie dans le but d’atteindre les résultats suivants : • Perception d’une image de soi positive

Au moment des rencontres avec l’enfant ou l’adolescent pour le counseling nutritionnel, il n’est pas conseillé de lui rappeler constamment qu’il doit perdre du poids. La majorité d’entre eux le savent et sont souvent victimes de harcèlement par leurs pairs à l’école (INESSS, 2012b). Il faut plutôt parler d’un comportement qui vise la santé, et une bonne alimentation en fait partie intégrante. D’ailleurs, l’objectif de l’intervention ne devrait pas être un poids à atteindre, mais plutôt un état de santé à acquérir (INESSS, 2012b). Il est plus facile pour l’enfant et l’adolescent de respecter la diète composée d’aliments variés en portions déterminées que la diète qui préconise l’élimination d’aliments particuliers. Ces dernières années, la publicité a vanté les mérites des diètes faibles en glucides, tel le régime Atkins, pour perdre du poids. Ces diètes ne sont pas à conseiller chez les enfants et les adolescents ; elles sont même à proscrire (INESSS, 2012b). Les recommandations

Des stratégies d’intervention sont présentées dans la rubrique Soins inrmiers. L’évaluation continue de l’enfant ou de l’adolescent permet de déterminer l’efcacité des interventions inrmières, et la réévaluation des soins et des traitements inrmiers repose sur les lignes directrices suivantes : • L’évaluation nutritionnelle, la pesée, l’examen de la diète et de l’apport nutritionnel (p. ex., la tenue d’un journal), l’entrevue avec l’enfant ou l’adolescent au sujet des aliments et des habitudes alimentaires, l’observation des habitudes alimentaires et l’entrevue familiale • L’exploration avec l’enfant ou l’adolescent de la perception qu’il a de lui, l’observation du comportement, la consultation du psychologue et d’autres membres de l’équipe multidisciplinaire quant à l’évolution du cas

• Comportements risqués liés à la santé

Offrir du counseling nutritionnel

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES

• L’observation du comportement de l’enfant ou de l’adolescent, et l’entrevue avec lui au sujet de ses attitudes, de ses préoccupations et de ses comportements

diététiques doivent être pratiques et concrètes. L’adolescent doit éviter de sauter des repas ou d’avoir recours à un régime restrictif. L’inrmière enseigne au jeune et à ses parents qu’il est possible de se constituer un régime alimentaire qui incorpore les aliments favoris et d’effectuer des choix alimentaires sains. L’enfant ou l’adolescent devrait manger la même chose que le reste de la famille, mais en moins grande quantité comparativement à ses habitudes antérieures. L’infirmière peut recommander aux parents d’acheter et de cuisiner en moins grande quantité, ce qui élimine la tentation de la seconde portion. La diète équilibrée comprend la consommation d’aliments reconnus pour leur contenu nutritif, notamment les fruits, les légumes, les grains entiers et les produits laitiers allégés. L’objectif est de limiter les calories et les matières grasses sans les restreindre de façon draconienne. La diète sera efcace si elle a une bonne valeur nutritive et qu’elle procure une sensation de satiété, qu’elle amène la perte de poids souhaitée et qu’elle s’accompagne de services d’éducation

Chapitre 8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

333

8

et de soutien. L’enfant ou l’adolescent ne devrait pas entreprendre un régime amaigrissant sans se soumettre au préalable à l’évaluation de son état de santé et sans bénécier de counseling (INESSS, 2012b).

Encourager la modication du comportement La perte de poids durable passe inévitablement par la modication du comportement et l’abandon des habitudes alimentaires inappropriées. La plupart des programmes de modication du comportement comprennent les éléments suivants : • l’analyse du comportement à modier, dont les habitudes alimentaires ; • la modication ou la maîtrise des stimuli qui inuent sur l’alimentation ; • l’adoption de techniques destinées à modier la vitesse à laquelle les aliments sont consommés ;

éactivation des connaissances

• le renforcement positif des changements grâce à un système de récompense adapté ; • l’encouragement à participer à une activité sportive.

À quoi correspond le métabolisme basal ?

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 8.3

Stratégies pour la promotion d’habitudes alimentaires saines

• Cerner le mode d’alimentation actuel et le comportement lié à l’alimentation en tenant un journal alimentaire, puis relever les éléments à modier. Noter les aliments consommés ainsi que le lieu, le moment et les activités connexes. • Modier les habitudes alimentaires : – Opter pour des boissons sans sucre ou du lait écrémé. – Limiter la consommation d’aliments prêts-à-manger (fast food ) à une seule fois dans la semaine. – Ne jamais sauter de repas. – Prévoir trois repas et une ou deux collations par jour. – Adopter la méthode de division de l’assiette, soit des légumes pour la moitié, de la viande maigre pour le quart et des féculents (pommes de terre, riz) pour le quart. – Au cours du repas, ne reprendre que des fruits ou des légumes (pas les pommes de terre).

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Partie 3

– Éviter les aliments réduits en gras, car ils sont habituellement riches en sucre. – Choisir des pains, des céréales et des pâtes à grains entiers. – Préparer et emporter le repas du midi à l’école. – Choisir des aliments sains pour les collations. • Modier la façon de prendre les repas : – Prendre ses repas à la table en famille. – Éliminer les activités inutiles (p. ex., la télévision). – Ralentir le rythme ; le repas devrait durer au moins de 20 à 30 minutes. • Prévoir d’autres activités que manger pour gérer le stress, notamment s’adonner à un passe-temps, marcher, écouter de la musique, converser avec un ami au téléphone, lire, jouer, faire une activité physique. • Faire preuve d’optimisme. • Susciter la participation et le soutien de la famille.

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

L’ENCADRÉ 8.3 présente des stratégies de modication des habitudes alimentaires.

Promouvoir l’activité physique L’activité physique périodique fait partie intégrante du programme de réduction du poids. L’activité physique accrue, quelle qu’en soit la forme, est bénéque, pourvu qu’elle soit adaptée à l’âge de l’enfant ou de l’adolescent, et qu’elle soit agréable. Les recommandations en matière d’activité physique doivent tenir compte de l’état de santé et du développement de l’enfant ou de l’adolescent. La meilleure option demeure l’activité physique qui procure du plaisir et qui est susceptible d’être durable. Idéalement, il faut favoriser l’intégration d’activité physique dans les activités quotidiennes. Les exercices d’aérobie et d’endurance facilitent l’oxydation des lipides. L’exercice léger, comme la marche, offre à la famille la possibilité d’accomplir une activité ensemble et accroît la dépense énergétique. L’entraînement avec des poids peut accélérer le métabolisme basal et remplacer la masse graisseuse par une masse musculaire. Cependant, cette forme d’entraînement n’est pas recommandée en général avant la puberté, à moins que l’enfant n’ait atteint sa pleine maturité physique et osseuse. À ce stade du développement, favoriser les jeux en plein air aura probablement des effets bénéques. Pour la plupart des enfants, les vidéos d’exercice ou le tapis roulant sont loin d’être stimulants ; il y a fort à parier qu’ils ne seront pas dèles longtemps à ce mode d’exercice physique. Les sports d’équipe et les sports individuels comme la danse, le vélo, la natation et les arts martiaux sont d’excellentes options. Il faut viser un minimum de 60 minutes d’activité physique d’intensité modérée quotidiennement (INESSS, 2012b). En plus d’augmenter l’activité physique, il faut aussi diminuer les activités de sédentarité. Ainsi, il faut limiter à un maximum de 2 heures par jour le temps d’écran (INESSS, 2012b).

Informer et soutenir la famille Il existe une corrélation certaine entre l’environnement familial, les interactions au sein de la famille et l’obésité. L’infirmière explique aux parents leur place dans le traitement de l’embonpoint ou de l’obésité de leur enfant, et elle leur précise les buts escomptés des mesures thérapeutiques. Il importe d’offrir à la famille de l’information sur l’alimentation et du counseling à propos du renforcement des modications et des progrès accomplis, de la modication des habitudes alimentaires et des façons de conserver les attitudes favorables. Les parents peuvent certainement soutenir leur enfant dans la modication de ses

habitudes alimentaires, de son apport alimentaire et de son activité physique.

Encourager la participation à un groupe d’entraide Les groupes d’entraide destinés aux adultes peuvent être utiles à l’enfant ou à l’adolescent qui veut perdre du poids, mais le groupe composé de jeunes de son âge le sera encore plus. Ces groupes peuvent être un camp d’été, animé par des

8.5.3

Anorexie mentale, boulimie et troubles non spéciques de l’alimentation

Les troubles de l’alimentation sont des maladies complexes qui sont mal connues et souvent porteuses de préjugés.

Caractéristiques des troubles de l’alimentation Anorexie L’anorexie mentale est un trouble de l’alimentation qui se caractérise par le refus de conserver un poids minimal normal et par une perte de poids excessive qui ne s’explique par aucune cause physique évidente. L’âge moyen à l’apparition de la maladie est de 13 ans, mais l’anorexie mentale peut se manifester dès l’âge de 10 ans ou ne survenir qu’à 25 ans. De façon générale, la personnalité du jeune atteint d’anorexie mentale se dénit par le perfectionnisme, le rendement scolaire élevé, la conformité aux normes sociales et l’attitude consciencieuse. En règle générale, la personne atteinte d’anorexie mentale déborde d’énergie, même si elle est très amaigrie. L’anorexie mentale peut s’accompagner de périodes d’hyperphagie et de purges (APA, 2015). Elle touche davantage les lles que les garçons, dans une proportion de 9 lles pour 1 garçon (Campbell et Peebles, 2014 ; Lock et Le Grange, 2013).

Boulimie La boulimie (hyperphagie) désigne un trouble de l’alimentation au même titre que l’anorexie mentale. Elle survient habituellement chez la lle à la n de l’adolescence ou au début de l’âge adulte ; la boulimie est rare ou peu documentée chez le garçon. La jeune lle boulimique est de poids moyen ou d’un poids légèrement supérieur au poids normal. Le trouble se caractérise par des accès de fringale suivis de comportements compensatoires inappropriés, tels les vomissements provoqués, l’usage de laxatifs, de diurétiques ou d’autres médicaments, le jeûne ou l’exercice physique excessif (APA, 2015). Pendant l’accès de fringale incoercible, la personne boulimique

professionnels de la santé, un groupe qui se réunit à l’école avec l’appui d’une inrmière, ou un groupe associé à une clinique spécialisée. Ces groupes se préoccupent non seulement de la perte de poids, mais également de la formation d’une image de soi positive et de l’encouragement à l’activité physique. L’éducation nutritionnelle, la planication de la diète et l’amélioration des aptitudes sociales sont des volets essentiels de ces groupes.

ingère massivement de grandes quantités d’aliments dans une brève période (en moins de deux heures, en général). Puis, elle tente de contrer les effets de la fringale par divers moyens purgatifs. À la séquence de gloutonnerie et de purge succèdent la dévalorisation et l’accablement, l’humeur déprimée et le fait de savoir que ce mode d’alimentation est anormal. La boulimie a certains points en commun avec d’autres troubles de l’alimentation, mais les problèmes les plus criants qui la caractérisent sont le manque de contrôle des impulsions et l’absence de régulation de la satiété. Dans bien des cas, les premières manifestations sont des fringales et des purges occasionnelles (par vomissement provoqué, laxatif, diurétique ou lavement) ; l’adolescente a ainsi l’impression de pouvoir manger à l’excès tout en contrôlant son poids, sans crainte de devenir obèse. La maladie prenant de l’ampleur, les accès de fringale se font de plus en plus fréquents, la quantité d’aliments consommés augmente, et la personne boulimique ne parvient plus à stopper la séquence de la voracité et de la purge. La fréquence des accès va d’une fringale par semaine à sept ou huit épisodes par jour. Les aliments hypercaloriques, notamment les sucreries, la crème glacée et les pâtisseries, sont les aliments de prédilection durant ces accès.

8

CE QU’IL FAUT RETENIR

La personnalité du jeune atteint d’anorexie mentale se dénit par le perfectionnisme, le rendement scolaire élevé, la conformité aux normes sociales et l’attitude consciencieuse.

Trouble non spécique de l’alimentation Le trouble non spécique de l’alimentation comporte des traits de l’anorexie mentale et de la boulimie, et il se manifeste par des symptômes d’intensités diverses qui ne correspondent pas forcément aux critères diagnostiques de l’anorexie ou de la boulimie (APA, 2015). C’est d’ailleurs pour diminuer la prévalence des troubles non spéciques que l’American Psychiatric Association, responsable du DSM-5, a revu les critères diagnostiques de l’anorexie mentale et de la boulimie dans la dernière version du guide. Le trouble d’accès hyperphagique est un trouble non spécique de l’alimentation caractérisé par des accès de goinfrerie sans les comportements compensatoires inappropriés. Les personnes souffrant Chapitre 8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

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de ce trouble ressentent une grande détresse durant les épisodes hyperphagiques et peuvent éprouver du dégoût envers elles-mêmes.

Étiologie L’étiologie de ces troubles demeure imprécise. Les troubles de l’alimentation seraient causés par une combinaison de facteurs de risques biologiques, psychologiques et sociaux, c’est-à-dire des facteurs génétiques, neurochimiques, environnementaux, psychologiques, familiaux et socioculturels (Campbell et Peebles, 2014). Se mettre constamment à la diète semble être le trait commun au début de la maladie. La quête incessante de la minceur et la crainte de prendre du poids en sont les traits dominants, mais pas la cause.

Éléments déclencheurs L’adolescence est une période de transition qui demande une grande adaptation. Or, pour les adolescents atteints de problèmes d’alimentation, plusieurs éléments semblent interférer. Ces éléments sont une faible estime de soi, le perfectionnisme, des craintes quant à leur sexualité, une pensée dichotomique, des difcultés relationnelles, des difcultés par rapport aux besoins de séparation et d’individualisation, la nonreconnaissance de leurs désirs et de leurs besoins, ainsi que des prédispositions familiales. Il y a alors utilisation de moyens inefcaces pour réagir face à la situation, parmi lesquels la perte de poids par une diète stricte que s’impose l’adolescent. C’est le début des comportements liés aux troubles d’alimentation. Plusieurs déclencheurs comme une situation générant un stress énorme (p. ex., la séparation ou le divorce des parents) ou des incidents donnant l’impression à l’adolescent de ne pas avoir d’emprise sur la situation (p. ex., des taquineries à l’école, le changement d’école ou l’entrée au secondaire) peuvent donner lieu au désir d’exercer le plus grand contrôle

ENCADRÉ 8.4

Manifestations cliniques de l’anorexie mentale

• Perte de poids marquée ou excessive, ou diminution marquée dans la prise de poids selon la courbe de croissance normale pour l’enfant et l’adolescent

• Peau sèche et ongles friables • Apparition de lanugo • Amincissement des cheveux

• Aménorrhée primaire (avant l’apparition des règles)

• Douleur abdominale

• Aménorrhée secondaire (après le début des règles)

• Constipation

• Bradycardie sinusale

• Faiblesse

• Baisse de la température corporelle

• Cachexie

• Hypotension

• Douleur osseuse lors de l’exercice physique

• Intolérance au froid

336

Partie 3

• Ballonnement • Fatigue

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

possible et, par la suite, à la décision de ne plus manger. L’adolescent peut aussi accorder une importance démesurée à l’adiposité normale au début de l’adolescence ou être rongé par l’anxiété parce que l’entourage a fait remarquer qu’il prend du poids (Campbell et Peebles, 2014). Des experts établissent un lien entre le trouble de l’alimentation et certaines caractéristiques familiales telles que de grandes attentes parentales quant au rendement et à l’apparence, la difculté à résoudre les conits et la piètre communication, le bris des liens entre certains membres de la famille, la dévalorisation de la mère ou du rôle maternel, et la tension conjugale (Wilkins, 2012). Les familles aux prises avec un enfant manifestant un trouble de l’alimentation peuvent avoir beaucoup de difculté à réagir favorablement à l’évolution des besoins physiques et affectifs de l’adolescent. La promotion de la silhouette grande et mince par les médias et dans la société en général y serait également pour quelque chose. Les études évaluant le lien entre les troubles de l’alimentation et les agressions dans l’enfance rapportent des résultats divergents. La boulimie et les accès hyperphagiques seraient davantage associés aux abus durant l’enfance que l’anorexie mentale (Caslini, Bartoli, Crocamo et al., 2016).

Facteurs liés à la santé mentale Il est fréquent que la personne aux prises avec un trouble de l’alimentation soit également affectée par des problèmes de santé mentale, notamment un trouble affectif, un trouble anxieux, un trouble obsessionnel compulsif ou un trouble de la personnalité. Il est probable que la femme adulte qui souffre d’un trouble de l’alimentation ait manifesté des traits comportementaux de nature obsessionnelle compulsive dans son enfance. Les troubles liés à une substance sont fréquents chez les personnes ayant un trouble de l’alimentation, plus particulièrement chez les personnes boulimiques ou à accès hyperphagiques. Les manifestations cliniques observables sont directement liées au degré d’inanition et s’améliorent lorsque l’enfant ou l’adolescent prend du poids (Campbell et Peebles, 2014) ENCADRÉ 8.4. La pratique de sports ou d’activités artistiques qui mettent l’accent sur la minceur (p. ex., le ballet, la course) ou de sports dans lesquels la subjectivité entre en jeu dans l’évaluation de la performance (p. ex., le patinage artistique, la gymnastique) est associée à une fréquence accrue de troubles de l’alimentation, dont l’anorexie mentale et la boulimie. La triade de la femme athlète, un syndrome qui associe un trouble de la conduite alimentaire à l’aménorrhée et à l’ostéoporose, guette la jeune femme souffrant d’un trouble restrictif de l’alimentation et atteinte d’aménorrhée (Gardner, 2017).

Facteurs génétiques Les troubles de l’alimentation relèveraient également de la génétique. En effet, l’homogénéité des manifestations cliniques laisse à penser qu’une origine génétique pourrait être en cause. Les plus récentes études démontrent en effet que les troubles alimentaires sont à la fois causés par des facteurs génétiques et par l’environnement dans lequel évolue la personne (Hoek, 2016).

Diagnostic Le diagnostic d’anorexie mentale s’établit sur la base des manifestations cliniques et conformément aux critères de l’APA (2015) ENCADRÉ 8.5. Quant au diagnostic de boulimie, il est conrmé par la constatation d’au moins deux épisodes d’hyperphagie par semaine durant trois mois, selon le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-5) de l’APA (2015) ENCADRÉ 8.6. L’anamnèse et l’examen physique complet sont essentiels an d’écarter la possibilité d’autres causes de la perte de poids. L’évaluation médicale d’un trouble de l’alimentation est centrée sur les complications du déséquilibre nutritionnel et de

la purge périodique. L’anamnèse inclut la uctuation du poids, le mode d’alimentation ainsi que la fréquence et l’ampleur de la purge et de l’exercice physique excessif. L’examen physique comprend la mesure du poids et de la taille de l’adolescent an de les comparer au poids ou à l’IMC standard selon la taille, l’âge et le sexe. À cela peuvent s’ajouter le dépistage de l’anémie ou d’autres anomalies hématologiques par l’hémogramme ; la détection de signes d’inammation par la vitesse de sédimentation des hématies ou le taux de protéine C réactive ; la mesure des taux d’électrolytes ainsi que du calcium, du magnésium, du phosphore, de l’azote uréique sanguin et de la créatinine ; l’analyse de l’urine, y compris la densité ; et le dépistage de l’ostéopénie, courante dans les cas d’anorexie mentale, par la mesure de la densité osseuse. En cas d’aménorrhée présente au moment de la première visite, la mesure du taux de gonadotrophine chorionique humaine permet de conrmer une grossesse. En présence d’aménorrhée, il est également possible d’évaluer la fonction thyroïdienne et le taux sérique de prolactine et d’hormone folliculostimulante pour écarter la possibilité d’un prolactinome, une tumeur de

8 Ostéopénie : État physiologique précurseur de l’ostéoporose (raréfaction pathologique du tissu osseux) caractérisé par une fragilisation progressive du tissu osseux due à une diminution de sa densité.

Critères diagnostiques du DSM-5 ENCADRÉ 8.5

Critères diagnostiques de l’anorexie mentale (Anorexia nervosa)

A. Restriction des apports énergétiques par rapport aux besoins conduisant à un poids signicativement bas compte tenu de l’âge, du sexe, du stade de développement et de la santé physique. Est considéré comme signicativement bas un poids inférieur à la norme minimale ou, pour les enfants et les adolescents, inférieur au poids minimal attendu. B. Peur intense de prendre du poids ou de devenir gros, ou comportement persistant interférant avec la prise de poids, alors que le poids est signicativement bas. C. Altération de la perception du poids ou de la forme de son propre corps, inuence excessive du poids ou de la forme corporelle sur l’estime de soi, ou manque de reconnaissance persistant de la gravité de la maigreur actuelle. Note de codage : Le code CIM-9-MC pour l’anorexie mentale est 307.1, quel que soit le sous-type. Le code CIM-1 Q-MC dépend du sous-type (voir ci-dessous). Spécier le type : (F50.01) Type restrictif : Pendant les 3 derniers mois, la personne n’a pas présenté d’accès récurrents d’hyperphagie (gloutonnerie) ni recouru à des vomissements provoqués ou à des comportements purgatifs (c.-à-d. laxatifs, diurétiques, lavements). Ce sous-type décrit des situations où la perte de poids est essentiellement obtenue par le régime, le jeûne et/ou l’exercice physique excessif. (F50.02) Type accès hyperphagiques/purgatif : Pendant les 3 derniers mois, la personne a présenté des accès récurrents de gloutonnerie et/ou a recouru à

des vomissements provoqués ou à des comportements purgatifs (c.-à-d. laxatifs, diurétiques, lavements). Spécier si : En rémission partielle : Après avoir précédemment rempli tous les critères de l’anorexie mentale, le critère A (poids corporel bas) n’est plus rempli depuis une période prolongée, mais le critère B (peur intense de prendre du poids ou de devenir gros, ou comportement interférant avec la prise de poids) ou le critère C (altération de la perception du poids ou de la forme de son propre corps) est toujours présent. En rémission complète : Alors que tous les critères de l’anorexie mentale ont été précédemment remplis, aucun n’est plus rempli depuis une période prolongée. Spécier la sévérité actuelle : Le seuil de sévérité, chez les adultes, est établi à partir de l’indice de masse corporelle (IMC) actuel (voir ci-dessous) ou, pour les enfants et les adolescents, à partir du percentile de l’IMC. Les degrés ci-dessous sont dérivés des catégories de maigreur de l’OMS pour les adultes ; pour les enfants et les adolescents, il faut utiliser les percentiles de l’IMC. Le degré de sévérité peut être majoré an de reéter les symptômes cliniques, le degré d’incapacité fonctionnelle et la nécessité de prise en charge. Léger : IMC ≥ 17 kg/m2 Moyen : IMC 16-16,99 kg/m2 Grave : IMC 15-15,99 kg/m2 Extrême : IMC < 15 kg/m2

Source : Traduction française reproduite avec l’autorisation d’Elsevier Masson SAS. Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, Fifth Edition (Copyright 2013). American Psychiatric Association, DSM-5 – Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux. Traduction française par M.-A. Crocq, J.-D. Guel et al., Elsevier Masson SAS, Paris, 2015. All rights reserved.

Chapitre 8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

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l’hypophyse qui sécrète de la prolactine, d’hyperthyroïdie ou d’insufsance ovarienne. En outre, l’évaluation cardiaque exhaustive est recommandée dans bien des cas d’anorexie mentale. D’autres tests seront peut-être nécessaires à la lumière des constatations de l’anamnèse et des résultats des examens paracliniques mentionnés ci-dessus.

C Les valeurs normales des signes vitaux pour tous les groupes d’âge sont présentées dans l’annexe C, Valeurs normales des signes vitaux.

La prise des signes vitaux est primordiale pour évaluer la gravité de la malnutrition et l’état physique en général. L’adolescent qui a une pression systolique inférieure à 90 mm Hg, une fréquence cardiaque inférieure à 50 batt./min le jour et inférieure à 45 batt./min la nuit, une pression orthostatique avec une augmentation de la fréquence cardiaque supérieure à 20 batt./min ou une diminution de la pression plus grande de 10 à 20 mm Hg/ min en passant de la position couchée à la position debout devrait être hospitalisé (APA, 2015) C .

5. le cheminement pour combler les carences affectives et modier les schèmes de pensée par la psychothérapie individuelle. Pour le traitement de la boulimie, la thérapie cognitivo-comportementale (TCC), la psychothérapie, les thérapies familiales et le soutien nutritionnel constituent des options de traitement (Kreipe, 2016). Dans la plupart des cas, le traitement est de nature ambulatoire ; il est administré à l’hôpital lorsque des problèmes graves nécessitent l’hospitalisation, notamment en présence de malnutrition ou de déséquilibre électrolytique grave, ou s’il y a des troubles mentaux (dépression marquée ou idées suicidaires). Une équipe interdisciplinaire formée d’une nutritionniste, d’un médecin, d’une inrmière et d’un thérapeute (travailleur social, psychologue, conseillère-cadre en soins inrmiers) met en œuvre les interventions.

Recommandations nutritionnelles

Approche thérapeutique Les cinq buts majeurs du traitement de l’anorexie mentale sont : 1. le rétablissement du poids santé ; 2. l’adoption d’habitudes alimentaires équilibrées ; 3. la résolution des problèmes qui perturbent les interactions familiales au moyen de rencontres familiales ; 4. l’exploration des habiletés sociales ;

Le but le plus important consiste à traiter la malnutrition mettant en péril la vie de l’enfant ou de l’adolescent, puis à rétablir la stabilité alimentaire et à susciter un gain de poids. Pour ce faire, le gavage peut être nécessaire si la malnutrition est avancée, ou s’il y a refus de la part de l’enfant ou de l’adolescent de s’alimenter. À la reprise de l’alimentation, les professionnels de la santé doivent faire preuve de vigilance pour éviter le syndrome de renutrition inappropriée, caractérisé par un

Critères diagnostiques du DSM-5 ENCADRÉ 8.6

Critères diagnostiques de la boulimie (Bulimia nervosa)

A. Survenue récurrente d’accès hyperphagiques (crises de gloutonnerie) (bingeeating). Un accès hyperphagique répond aux deux caractéristiques suivantes : 1. Absorption, en une période de temps limitée (p. ex. moins de 2 heures), d’une quantité de nourriture largement supérieure à ce que la plupart des gens absor­ beraient en une période de temps similaire et dans les mêmes circonstances. 2. Sentiment d’une perte de contrôle sur le comportement alimentaire pendant la crise (p. ex., sentiment de ne pas pouvoir s’arrêter de manger, ou de ne pas pouvoir contrôler ce que l’on mange, ou la quantité que l’on mange). B. Comportements compensatoires inappropriés et récurrents visant à prévenir la prise de poids, tels que : vomissements provoqués ; emploi abusif de laxatifs, diurétiques ou autres médicaments ; jeûne ; exercice physique excessif. C. Les accès hyperphagiques (de gloutonnerie) et les comportements compen­ satoires inappropriés surviennent tous les deux, en moyenne, au moins une fois par semaine pendant 3 mois. D. L’estime de soi est inuencée de manière excessive par le poids et la forme corporelle. E. Le trouble ne survient pas exclusivement pendant des épisodes d’anorexie mentale (anorexia nervosa).

Spécier si : En rémission partielle : Alors que tous les critères de la boulimie ont été précédemment remplis, plusieurs, mais pas la totalité, ont persisté pendant une période prolongée. En rémission complète : Alors que tous les critères de la boulimie ont été précédemment remplis, aucun ne l’est plus depuis une période prolongée. Spécier la sévérité actuelle : Le seuil de sévérité est établi selon la fréquence des comportements compen­ satoires inappropriés (voir ci­dessous). Le niveau de sévérité peut être majoré an de reéter les autres symptômes et le degré d’incapacité fonctionnelle. Légère : Une moyenne de 1­3 épisodes de comportements compensatoires inappropriés par semaine. Moyenne : Une moyenne de 4­7 épisodes de comportements compensatoires inappropriés par semaine. Grave : Une moyenne de 8­13 épisodes de comportements compensatoires inappropriés par semaine. Extrême : Une moyenne d’au moins 14 épisodes de comportements compensa­ toires inappropriés par semaine.

Source : Traduction française reproduite avec l’autorisation d’Elsevier Masson SAS. Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, Fifth Edition (Copyright 2013). American Psychiatric Association, DSM-5 – Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux. Traduction française par M.­A. Crocq, J.­D. Guel et al., Elsevier Masson SAS, Paris, 2015. All rights reserved.

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Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

ensemble de complications cardiovasculaires, neurologiques et hématologiques dues à la renutrition trop rapide. Il est possible de l’éviter en reprenant l’alimentation à un rythme lent et en ajoutant un supplément de phosphore lorsque la réserve corporelle est épuisée. Le gain de poids souhaité varie d’une personne à une autre, en fonction de l’âge, de la taille, du stade de la puberté, du poids avant la maladie et des courbes de croissance par le passé. Chez la lle qui a déjà eu ses règles, la restauration de celles-ci constitue un paramètre objectif du retour à la santé biologique. Les interventions nutritionnelles, de concert avec la psychothérapie, ont pour but de réfuter les idées fausses à propos de l’alimentation et de promouvoir une alimentation saine, variée et sans produits amaigrissants. L’un des objectifs thérapeutiques consiste à atténuer l’anxiété suscitée par l’acte de manger et à traiter la dépression qui accompagne le trouble de l’alimentation en ébranlant les croyances contraignantes par rapport au poids et aux aliments (Campbell et Peebles, 2014 ; Lock et Le Grange, 2013).

qui a trait à son image corporelle déformée, à son estime de soi, à sa sexualité, à ses relations interpersonnelles avec ses pairs et sa famille, et à son sentiment de contrôle (Campbell et Peebles, 2014 ; Lock et Le Grange, 2013).

Thérapie familiale Plusieurs experts soutiennent que l’approche familiale est le traitement le plus efcace chez les enfants et les adolescents atteints de troubles de l’alimentation (Findlay, Pinzon, Taddeo et al., 2016 ; Harrington, Jimerson, Haxton et al., 2015). L’inrmière n’a pas tous les outils pour être thérapeute familiale. Cependant, une entrevue familiale utilisant une approche systémique devrait être la méthode privilégiée par l’inrmière clinicienne 1 . Prévoir des interventions pour aider les parents à mettre en commun leurs forces an de redevenir une équipe, encourager les frontières claires et une communication directe et explicite, et explorer les croyances contraignantes de tous les membres de la famille sont les interventions pouvant aider l’adolescent et sa famille.

Psychothérapie

Pharmacothérapie

Les interventions qui visent les changements de comportements sont nécessaires dans bien des cas de troubles de l’alimentation an de stimuler l’apport calorique et le gain de poids souhaités. Les interventions visent à amplier chez l’adolescent le sentiment de contrôle et à le responsabiliser quant à son rétablissement. Le but premier est de l’aider à réaliser qu’il vit une difculté et qu’il a un trouble de l’alimentation. La psychothérapie individuelle est centrée sur la résolution de la crise identitaire de l’adolescent, particulièrement en ce

Les antidépresseurs tricycliques et la uoxétine, des médicaments de la classe des inhibiteurs sélectifs du recaptage de la sérotonine (ISRS), sont les plus efcaces dans le traitement de la boulimie chez les adolescents (Harrington et al., 2015).

1 L’approche systémique familiale est expliquée dans le chapitre 1, Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté.

8

Face à l’anorexie mentale, la pharmacothérapie s’est révélée décevante jusqu’à maintenant. Les quelques études dans ce domaine ont surtout évalué l’efcacité des médicaments dans le traitement d’affections concomitantes comme le trouble obsessionnel compulsif et la dépression.

Soins inrmiers ANOREXIE MENTALE, BOULIMIE ET TROUBLES NON SPÉCIFIQUES DE L’ALIMENTATION

L’inrmière intègre dans sa démarche de soins auprès d’enfants et d’adolescents atteints de troubles alimentaires les traitements mentionnés précédemment selon ses habiletés et partage le tout avec les autres membres de l’équipe. Un diagnostic précoce est important dans le traitement des troubles de l’alimentation. Plus le traitement est hâtif, meilleur sera le pronostic (Lock et Le Grange, 2013).

Reconnaître les manifestations cliniques des troubles de l’alimentation L’inrmière doit connaître les manifestations cliniques et les répercussions physiques de l’anorexie mentale ENCADRÉ 8.4. Lorsque l’adolescent rapporte des comportements malsains pour contrôler son poids, comme l’élimination d’aliments qu’il consommait habituellement et

qu’il aime encore, des diètes extrêmes, un végétarisme soudain ou un exercice physique important dans le seul but de perdre du poids, l’inrmière doit penser à un trouble de l’alimentation.

Encourager la modication du comportement Dans sa démarche de soins auprès de l’adolescent aux prises avec un trouble de l’alimentation, l’inrmière adopte une attitude bienveillante et ferme an de soutenir l’adolescent, que celui-ci soit suivi en soins ambulatoires ou qu’il soit hospitalisé. Le soutien et le réconfort sont essentiels à l’adolescent qui tente de composer avec son ambivalence au traitement. L’inrmière encourage l’adolescent par de l’enseignement et des activités qui renforcent son estime de lui-même, et qui favorisent la socialisation et l’acceptation sociale dans le groupe de pairs.

Chapitre 8

Plusieurs organismes offrent du soutien et de l’information aux professionnels de la santé, aux jeunes atteints d’un trouble de l’alimentation et à leur famille, notamment le groupe Anorexie et boulimie Québec (http:// anebquebec.com).

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

339

L’inrmière effectue l’enseignement nutritionnel et, par la suite, guide la conversation thérapeutique vers des sujets d’intérêt pour le jeune, mais qui peuvent parfois provoquer du stress, comme l’amitié, l’école, les relations avec la famille, les activités, les sports et la sexualité FIGURE 8.7. Elle encourage l’adolescent à reconnaître et à exprimer ses pensées et ses émotions, y compris la colère. Elle l’encourage aussi à faire de l’exercice avec modération pour le plaisir, lorsque sa santé le permet. Elle explore les craintes, les croyances contraignantes et les stratégies d’adaptation de l’adolescent. Elle favorise un contexte de changement en stimulant l’adolescent à rééchir sur ces divers domaines. Il est nécessaire d’exclure tout commentaire sur son apparence physique, même les commentaires qui se veulent positifs.

famille à structurer leur environnement an d’atténuer la frénésie alimentaire. Limiter la prise des repas à une pièce de la maison et proposer des périodes d’exercice physique, un passe-temps, la visualisation ou la relaxation en remplacement de l’accès de fringale sont des interventions utiles.

La démarche de soins en cas de boulimie s’apparente à celle appliquée en cas d’anorexie mentale. La surveillance étroite des signes vitaux et le soutien alimentaire constituent les soins durant la phase aiguë. L’inrmière encourage l’adolescent et sa

La communication entre les membres de l’équipe est un autre élément essentiel à la réussite du traitement. La communication avec l’enfant et l’adolescent à propos des résultats escomptés revêt également de l’importance. Parfois, les limites établies peuvent sembler déraisonnables ; si l’adolescent ne comprend pas la justication des limites, il peut fort bien saboter tout le programme. La communication avec la famille est également importante. Enn, le plan d’intervention doit prévoir du soutien à l’égard de l’adolescent, de la famille et des membres de l’équipe. Il importe de soutenir les efforts que déploie l’adolescent et de souligner les progrès accomplis vers la normalisation des habitudes alimentaires. Des réunions de suivi sont prévues an de discuter des sentiments et des préoccupations de l’adolescent, des proches aidants et des membres de l’équipe.

FIGURE 8.7 Le counseling nutritionnel est une tâche inrmière importante auprès des enfants et des adolescents souffrant de troubles alimentaires.

Jugement

clinique Amélie est une adolescente de 14 ans. Elle est perçue comme une élève modèle par les enseignants. Étant très rigoureuse dans ses études, elle tient à toujours être la première de classe. D’ailleurs, ses parents sont très ers d’elle et l’encouragent à être la meilleure. Dernièrement, elle a perdu 9 kg parce qu’elle fait beaucoup d’activités sportives quotidiennement : bicyclette sur son heure de lunch, course à pied pendant 1 heure pour revenir chez elle après l’école, participation à l’équipe féminine de basketball. Elle n’est pas menstruée depuis 3 mois et n’en a pas avisé l’inrmière scolaire, qui a tout lieu de croire que l’adolescente montre des comportements d’anorexie mentale. Parmi les données de cette situation, laquelle est un trait de personnalité typique d’une adolescente anorexique ? a) Elle s’implique intensément dans des activités sportives quotidiennes. b) Elle cache volontairement l’arrêt de ses menstruations à l’inrmière. c) Elle excelle dans ses études pour toujours être première de classe. d) Elle satisfait l’ambition de ses parents qui veulent qu’elle soit la meilleure. MAIS SI...

Mais si Amélie était déjà diagnostiquée anorexique et traitée pour un contrôle du poids, qu’est-ce qui indiquerait, en plus du gain de poids, que le traitement donne des résultats satisfaisants pour cette adolescente ? a) Elle aviserait l’inrmière qu’elle est menstruée à nouveau. b) Elle diminuerait la fréquence de ses activités sportives. c) Elle démontrerait moins de rigueur dans ses études. d) Elle ne chercherait plus à satisfaire l’ambition de ses parents.

340

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Adopter une approche interdisciplinaire Indépendamment du milieu de soins, le premier élément dans la démarche de l’équipe médicale est la constance. Premièrement, les membres de l’équipe agissent avec unité an d’éviter tout risque de manipulation ou d’incohérence. En deuxième lieu, ils partagent la responsabilité de la prise en charge, qui ne peut incomber à une seule et même personne. Les fonctions et les limites des membres doivent être clairement définies. Troisièmement, la continuité de la prestation des services est importante ; il est préférable que ce soit toujours les mêmes membres qui interviennent.

Le contrat comportemental, qui inclut une entente entre l’intervenant et l’adolescent selon laquelle ce dernier modiera son comportement inadapté, s’est révélé efcace dans certains cas. L’équipe soignante rédige le contrat sur lequel l’adolescent appose sa signature en guise d’approbation. Si l’adolescent est en désaccord avec les modalités de l’entente, celle-ci peut devenir une épreuve de force. Néanmoins, elle peut être un outil judicieux qui a pour effet de responsabiliser l’adolescent quant à son gain de poids et à la modication de son comportement. L’inrmière, ainsi que toute personne travaillant avec des enfants et des adolescents qui souffrent de troubles de l’alimentation, doit rééchir à propos de ses propres croyances en lien avec le poids, l’exercice et l’alimentation pour ne pas transmettre de fausses croyances qui pourraient faire obstacle au traitement.

8.6.1

Troubles liés à la santé mentale Trouble de décit de l’attention / hyperactivité

De plus en plus d’enfants, d’adolescents et même d’adultes reçoivent un diagnostic de décit de l’attention/hyperactivité. Dans le DSM-5 (APA, 2015), le trouble de décit de l’attention/hyperactivité (TDA/H) se caractérise soit par de l’inattention, soit par de l’hyperactivité et de l’impulsivité, soit par les deux à la fois. Ces caractéristiques sont anormales pour le stade de développement de la personne qui en souffre.

Manifestations cliniques Selon les critères diagnostiques du TDA/H, les symptômes apparaissent avant l’âge de 12 ans et se manifestent au moins dans 2 milieux (p. ex., à l’école et à la maison). En outre, la persistance de l’inattention marquée et inhabituelle par rapport au stade de développement actuel ne doit pas faire partie d’un autre trouble comme un trouble de l’opposition. Les manifestations du TDA/H sont perceptibles dans tous les aspects de la vie de l’enfant, mais plus particulièrement à l’école. Les symptômes s’aggravent habituellement lorsque les situations requièrent une attention soutenue et sans intérêt pour le jeune. Il peut être en mesure de maintenir sa concentration dans des activités qu’il aime comme la télévision ou les jeux vidéo. Le dépistage précoce est important en raison du fait que ces troubles perturbent grandement le développement affectif et psychologique de l’enfant. Toutefois, il peut être difcile de dépister le TDA/H chez les enfants d’âge préscolaire, car certains des critères diagnostiques s’apparentent au développement typique des jeunes enfants (curiosité, moteur). C’est lorsque le contexte devient plus structuré que le niveau d’activité se distingue des autres. Nombre d’enfants auront des comportements inappropriés, causés par leurs difcultés à gérer leur impulsivité ou leur attention, qui nuisent à leurs relations avec les autres et à leur adaptation psychosociale. Ces comportements déclenchent des réactions négatives de l’entourage et, avec le temps, cette rétroaction négative altère la conception que ces enfants se font d’eux-mêmes. En clair, le TDA/H entraîne des difcultés d’adaptation sur le plan tant scolaire que social, et il met en péril l’estime de soi (Myers, Eisenhauer et Ryan, 2003 ; Schachar, 2009).

Diagnostic Les comportements des enfants aux prises avec le TDA/H ne sont pas inhabituels. C’est plutôt la qualité de l’activité motrice ainsi que l’inattention, l’impulsivité et une hyperactivité anormale pour le stade de développement qui les distinguent des autres enfants. Les manifestations du trouble peuvent être nombreuses ou rares, légères ou intenses, et varier selon le niveau de développement de l’enfant. Ce dernier ne présente pas nécessairement tous les symptômes du trouble. Les caractéristiques fondamentales du TDA/H sont décrites dans l’ ENCADRÉ 8.7 . Une évaluation rigoureuse et multimodale doit être effectuée avant de diagnostiquer un TDA/H. Il convient d’écarter la possibilité d’un trouble de santé mentale ou physique, ou d’une expérience traumatisante, ainsi que l’intoxication par le plomb, l’épilepsie, la surdité partielle, la psychose et le fait d’avoir été victime d’un épisode de violence sexuelle.

Le trouble de décit de l’atention/ hyperactivité est expliqué dans le chapitre 25 du manuel de Fortinash, K.M., et Holoday Worret, P.A. (2016). Santé mentale et psychiatrie (2e éd.). Montréal : Chenelière Éducation.

8 CE QU’IL FAUT RETENIR

Les manifestations du TDA/H sont perceptibles dans tous les aspects de la vie de l’enfant, mais plus particulièrement à l’école.

Depuis la publication du DSM-5, les troubles spéciques d’apprentissage sont précisés en catégories, soit lecture, écriture et mathématiques. La comorbidité du TDA/H et des troubles spécifiques d’apprentissage se situe entre 31 et 45 % (Masi et Gignac, 2017). La dyslexie est une Kevin, âgé de huit ans, est atteint d’un TDA/H qui a forme de trouble spéciété diagnostiqué alors qu’il était à la maternelle. Il que d’apprentissage qui est maintenant en deuxième année et il éprouve comprend des difcultés à plus de difcultés dans ses apprentissages. Il reconnaître les lettres, les rapporte aussi à sa mère qu’il n’est bon à rien et syllabes et les mots. La que personne ne veut de lui à l’école. Le médecin de dyscalculie est un terme Kevin suggère fortement à la mère de commencer le utilisé pour décrire méthylphénidate (Ritalinmd). Elle vous avoue qu’elle les apprentissages numériest inquiète par rapport à cette médication et elle ques. Les troubles d’apse demande en quoi cela aidera Kevin. Nommez un prentissage peuvent aller avantage que ce médicament peut apporter à Kevin. de légers à graves. Lorsque le trouble est léger, l’enfant parvient à compenser et à bien fonctionner avec certains aménagements. Une gravité modérée peut compromettre le fonctionnement opérationnel et nécessite un enseignement intensif, des aménagements et des dispositifs de soutien. Finalement, un niveau grave implique des difcultés majeures malgré un enseignement individualisé et soutenu. Ces troubles d’apprentissage persistent à l’âge adulte et peuvent entraîner des problèmes sur le plan professionnel et dans la vie quotidienne.

clinique

Jugement

8.6

Deux autres comorbidités fréquentes sont le trouble des conduites et le trouble oppositionnel avec provocation (TOP). Le premier est caractérisé par des comportements agressifs antisociaux qui violent les droits des autres et les règles sociales. Chapitre 8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

341

Critères diagnostiques du DSM-5 ENCADRÉ 8.7

Trouble de décit de l’attention / hyperactivité

A. Un mode persistant d’inattention et/ou d’hyperactivité-impulsivité qui interfère avec le fonctionnement ou le développement, caractérisé par (1) et/ou (2) 1. Inattention : Six (ou plus) des symptômes suivants persistent depuis au moins 6 mois, à un degré qui ne correspond pas au niveau de développement et qui a un retentissement négatif direct sur les activités sociales et scolaires/professionnelles : N.B. : Les symptômes ne sont pas seulement la manifestation d’un comportement opposant, provocateur ou hostile, ou de l’incapacité de comprendre les tâches ou les instructions. Chez les grands adolescents et les adultes (17 ans ou plus), au moins cinq symptômes sont requis. a. Souvent, ne parvient pas à prêter attention aux détails, ou fait des fautes d’étourderie dans les devoirs scolaires, le travail ou d’autres activités (p. ex., néglige ou ne remarque pas des détails, le travail est imprécis). b. A souvent du mal à soutenir son attention au travail ou dans les jeux (p. ex., a du mal à rester concentré pendant les cours magistraux, des conversations ou la lecture de longs textes). c. Semble souvent ne pas écouter quand on lui parle personnellement (p. ex., semble avoir l’esprit ailleurs, même en l’absence d’une source de distraction évidente). d. Souvent, ne se conforme pas aux consignes et ne parvient pas à mener à terme ses devoirs scolaires, ses tâches domestiques ou ses obligations professionnelles (p. ex., commence des tâches mais se déconcentre vite et se laisse facilement distraire). e. A souvent du mal à organiser ses travaux ou ses activités (p. ex., difculté à gérer des tâches comportant plusieurs étapes, difculté à garder ses affaires et ses documents en ordre, travail brouillon ou désordonné, mauvaise gestion du temps, échoue à respecter les délais). f. Souvent, évite, a en aversion, ou fait à contrecœur les tâches qui nécessitent un effort mental soutenu (p. ex., le travail scolaire ou les devoirs à la maison ; chez les grands adolescents et les adultes, préparer un rapport, remplir des formulaires, analyser de longs articles). g. Perd souvent les objets nécessaires à son travail ou à ses activités (p. ex., matériel scolaire, crayons, livres, outils, portefeuilles, clés, documents, lunettes, téléphones mobiles). h. Se laisse souvent facilement distraire par des stimuli externes (chez les grands adolescents et les adultes, il peut s’agir de pensées sans rapport). i. A des oublis fréquents dans la vie quotidienne (p. ex., effectuer les tâches ménagères et faire les courses ; chez les grands adolescents et les adultes, rappeler des personnes au téléphone, payer des factures, honorer des rendez-vous). 2. Hyperactivité et impulsivité : Six (ou plus) des symptômes suivants persistent depuis au moins 6 mois, à un degré qui ne correspond pas au niveau de développement et qui a un retentissement négatif direct sur les activités sociales et scolaires/professionnelles : N.B. : Les symptômes ne sont pas seulement la manifestation d’un comportement opposant, provocateur ou hostile, ou de l’incapacité de comprendre les tâches ou les instructions. Chez les grands adolescents et les adultes (17 ans ou plus), au moins cinq symptômes sont requis.

342

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

a. Remue souvent les mains ou les pieds, ou se tortille sur son siège. b. Se lève souvent en classe ou dans d’autres situations où il est supposé rester assis (p. ex., quitte sa place en classe, au bureau ou dans un autre lieu de travail, ou dans d’autres situations où il est censé rester en place). c. Souvent, court ou grimpe partout, dans des situations où cela est inapproprié. (N.B. : Chez les adolescents ou les adultes cela peut se limiter à un sentiment d’impatience motrice.) d. Est souvent incapable de se tenir tranquille dans les jeux ou les activités de loisir. e. Est souvent « sur la brèche » ou agit souvent comme s’il était « monté sur ressorts » (p. ex., n’aime pas rester tranquille pendant un temps prolongé ou est alors mal à l’aise, comme au restaurant ou dans une réunion, peut être perçu par les autres comme impatient ou difcile à suivre). f. Parle souvent trop. g. Laisse souvent échapper la réponse à une question qui n’est pas encore entièrement posée (p. ex., termine les phrases des autres, ne peut pas attendre son tour dans une conversation). h. A souvent du mal à attendre son tour (p. ex., dans une le d’attente). i. Interrompt souvent les autres ou impose sa présence (p. ex., fait irruption dans les conversations, les jeux ou les activités, peut se mettre à utiliser les affaires des autres sans le demander ou en recevoir la permission ; chez les adolescents ou les adultes, peut être intrusif et envahissant dans les activités des autres). B. Plusieurs symptômes d’inattention ou d’hyperactivité-impulsivité étaient présents avant l’âge de 12 ans. C. Plusieurs symptômes d’inattention ou d’hyperactivité-impulsivité sont présents dans au moins deux contextes différents (p. ex., à la maison, à l’école, ou au travail ; avec des amis ou de la famille, dans d’autres activités). D. On doit mettre clairement en évidence que les symptômes interfèrent avec ou réduisent la qualité du fonctionnement social, scolaire ou professionnel. E. Les symptômes ne surviennent pas exclusivement au cours d’une schizophrénie ou d’un autre trouble psychotique, et ils ne sont pas mieux expliqués par un autre trouble mental (p. ex., trouble dépressif, bipolaire et apparenté, trouble anxieux, trouble dissociatif, trouble de la personnalité, intoxication par, ou sevrage d’une substance). Spécier le type : 314.01 (F90.2) Présentation combinée : Si à la fois le critère A1 (inattention) et le critère A2 (hyperactivité-impulsivité) sont remplis pour les 6 derniers mois. 314.00 (F90.0) Présentation inattentive prédominante : Si, pour les 6 derniers mois, le critère A1 (inattention) est rempli mais pas le critère A2 (hyperactivité-impulsivité). 314.01 (F90.1) Présentation hyperactive/impulsive prédominante : Si, pour les 6 derniers mois, le critère A2 (hyperactivité-impulsivité) est rempli mais pas le critère A1 (inattention).

ENCADRÉ 8.7

Trouble de décit de l’attention/hyperactivité (suite)

Spécier si : En rémission partielle : Lorsqu’au cours des 6 derniers mois l’ensemble des critères pour poser le diagnostic ne sont plus réunis alors qu’ils l’étaient auparavant, et que les symptômes continuent à entraîner une altération du fonctionnement social, scolaire ou professionnel. Spécier la sévérité actuelle : Léger : Peu de symptômes, ou aucun, sont présents au-delà de ceux requis au minimum pour poser le diagnostic, et les symptômes n’entraînent que des altérations mineures du fonctionnement social ou professionnel.

Moyen : Les symptômes ou l’altération fonctionnelle sont présents sous une forme intermédiaire entre « léger » et « grave ». Grave : Plusieurs symptômes sont présents au-delà de ceux requis pour poser le diagnostic, ou plusieurs symptômes particulièrement graves sont présents, ou les symptômes entraînent une altération marquée du fonctionnement social ou professionnel.

Source : Traduction française reproduite avec l’autorisation d’Elsevier Masson SAS. Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, Fifth Edition (Copyright 2013). American Psychiatric Association, DSM-5 – Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux. Traduction française par M.-A. Crocq, J.-D. Guel et al., Elsevier Masson SAS, Paris, 2015. All rights reserved.

Les comportements sont classés selon quatre catégories : 1) des agressions envers les personnes et les animaux ; 2) la destruction de biens matériels ; 3) la fraude ou le vol ; 4) les violations des règles établies. Quant au TOP, il s’agit de comportements hostiles, négatifs ou provocateurs graves qui entravent le fonctionnement normal de l’enfant et deviennent particulièrement évidents envers les gures d’autorité. Ces enfants ont tendance à blâmer les autres pour leurs écarts de conduite. Bien qu’ils puissent se montrer déplaisants, ils ne violent pas le droit des autres, comme c’est le cas dans le trouble des conduites (APA, 2015).

Approche thérapeutique Le traitement de l’enfant atteint du TDA/H comporte en général plusieurs facettes, notamment la pharmacothérapie, la thérapie comportementale, les modications à l’environnement et au milieu scolaire.

Pharmacothérapie La pharmacothérapie appropriée chez l’enfant d’âge scolaire atteint de TDA/H est composée de médicaments psychostimulants et non psychostimulants. Le méthylphénidate (RitalinMD) et la dextroamphétamine (DexedrineMD) sont les psychostimulants les plus couramment prescrits. Ces médicaments haussent les taux de dopamine et de noradrénaline, ce qui stimule le mécanisme inhibiteur du système nerveux central. L’utilisation des formules à longue action est favorisée, étant donné leur plus grande efcacité (Feldman, Bélanger et SCP, 2016). Il existe aussi un traitement non psychostimulant, l’atomoxétine (StratteraMD), qui agit en bloquant la pompe de recapture de la noradrénaline (Markowitz et Yu, 2016). Durant le traitement pharmacologique, l’enfant est évalué périodiquement. Le psychostimulant peut entraîner des effets indésirables,

notamment la nervosité, des tics, de l’insomnie, la hausse de la pression artérielle et une baisse de l’appétit qui se traduira par une perte de poids. Utilisée à long terme, la dextroamphétamine peut stopper la croissance. Pour éviter les principaux effets indésirables (anorexie et insomnie), ce médicament doit être pris après le déjeuner et ne pas être ingéré après 16 h.

8

Thérapie comportementale La thérapie comportementale est axée sur la prévention du comportement indésirable. Le thérapeute aide la famille dans l’établissement des limites et des récompenses en fonction des besoins de l’enfant. Il peut également guider les parents dans l’exercice de leur rôle parental dans cette situation précise, notamment en ce qui a trait au renforcement positif, à la récompense des progrès accomplis, si petits soient-ils, et aux conséquences appropriées selon l’âge de leur enfant (p. ex., un temps d’arrêt, une punition par le retrait d’un privilège). La liste ou l’horaire des activités d’hygiène personnelle et la liste des tâches sont des outils essentiels. Grâce à ce travail d’équipe, les parents acquièrent un savoir-faire qui favorisera la réussite de l’enfant à la maison et à l’école. Les parents se questionnent souvent sur les approches alternatives pour traiter le TDA/H. Toutefois, ils ne discutent généralement pas de ce type de thérapie avec le médecin de peur d’être discrédités. Il est primordial d’entamer la discussion, car certains traitements alternatifs peuvent interagir avec les médicaments prescrits. Davantage d’études sont nécessaires pour connaître les effets bénéques des approches alternatives (Mazhar, Harkin, Foster et al., 2016).

Modication environnementale La modication de l’environnement favorise la réussite du plan de prise en charge de l’enfant atteint de TDA/H. La première règle est la constance, plus précisément l’uniformité de la famille et des

Chapitre 8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

343

enseignants quant au renforcement des mêmes buts. Faciliter l’acquisition d’aptitudes organisationnelles nécessite un environnement beaucoup plus structuré que ce qui est nécessaire pour la plupart des enfants. La famille et les intervenants encouragent l’enfant à effectuer des choix appropriés et à assumer la responsabilité de ses actes. Dans cette optique, les intervenants préconisent le recours à la liste ou à l’horaire des tâches (p. ex., les activités à accomplir avant de partir à l’école) et l’élimination des sources de distraction lorsque l’enfant effectue ses travaux scolaires (p. ex., éteindre la télévision, offrir à l’enfant un endroit conçu pour l’étude et doté des fournitures nécessaires). Ils enseignent aux parents à donner l’exemple en adoptant des comportements positifs et en mettant en application leurs aptitudes de résolution de problèmes. Il faut mettre l’accent sur les stratégies qui vont aider l’enfant à réussir et à combler ses lacunes, et ce, tout en appuyant ses forces.

Milieu scolaire approprié Pour l’enfant aux prises avec le TDA/H, la classe doit être un milieu ordonné, prévisible et cohérent où les règles sont claires et uniformes. Il peut être nécessaire d’alléger la tâche de cet enfant et de lui

accorder plus de temps pour terminer les divers examens et épreuves. L’enseignant devrait accompagner ses consignes verbales de directives écrites au tableau. De plus, il peut être avisé de prévoir l’enseignement des matières théoriques en matinée, alors que l’enfant jouit de l’effet bénéque du médicament, et d’alterner les activités en fonction du degré d’intérêt qu’elles suscitent an de capter son attention. Les pauses fréquentes à intervalles réguliers lui faciliteront la tâche, car il éprouve de la difculté à rester assis longtemps à la même place. Par ailleurs, nombre d’enfants atteints du TDA/H auront une faible estime de soi, et il est important de trouver avec chacun d’eux des activités qui les valorisent an qu’ils connaissent, eux aussi, des réussites.

Pronostic Avec les interventions appropriées, le TDA/H se maîtrise relativement bien durant l’enfance et le début de l’adolescence, avant de s’estomper à la n de l’adolescence ou au début de l’âge adulte. Bon nombre de personnes atteintes auront cependant des symptômes qui continueront à se manifester à l’âge adulte (Sadock, Sadock et Ruiz, 2014).

Soins inrmiers TROUBLE DE DÉFICIT DE L’ATTENTION / HYPERACTIVITÉ

L’inrmière participe activement à la prise en charge de l’enfant atteint du TDA/H. Celle qui exerce en santé communautaire, dans une optique à long terme, collabore avec la famille et l’école à la planication et à l’application du plan de soins, et à l’évaluation de l’efcacité de ce plan. Elle coordonne les services et sert d’intermédiaire entre les professionnels de la santé et de l’éducation qui interviennent dans le cadre du programme thérapeutique de l’enfant. L’inrmière en milieu scolaire est en mesure de cerner les besoins particuliers de l’enfant et de les faire connaître aux enseignants. La démarche s’amorce par des précisions offertes aux parents et à l’enfant sur le diagnostic, y compris la nature du problème et la dysfonction du système nerveux central à l’origine du trouble.

8.6.2

Syndrome de Gilles de la Tourette

Le DSM-5 classe le syndrome de Gilles de la Tourette dans les maladies faisant partie des troubles moteurs. Il s’agit d’un syndrome qui se caractérise par la présence répétitive et

344

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Pour la plupart des parents, le diagnostic est troublant et suscite un sentiment de culpabilité. Les parents éprouvent fréquemment de la frustration devant les comportements de l’enfant, et leurs différentes réactions aggravent parfois les comportements adoptés par l’enfant (Muñoz-Silva, Lago-Urbano et Sanchez-Garcia, 2017). Quelle que soit leur réaction, les parents doivent avoir la possibilité de s’exprimer et de verbaliser leurs craintes ou leurs préoccupations. Les parents doivent connaître le pronostic et comprendre le plan de traitement. Plus ils connaissent le trouble et ses répercussions, plus ils seront en mesure de mettre en application le programme thérapeutique recommandé. Ils doivent savoir que le traitement n’est pas une panacée et qu’il devra être maintenu longtemps. Cela est d’autant plus important qu’ils doivent modier leur environnement.

quotidienne de tics moteurs multiples et de tics vocaux involontaires (APA, 2015). Un tic est un geste ou une vocalisation rapide, soudaine, récurrente et stéréotypée. Il est à noter qu’une minorité d’enfants ont comme tic vocal de prononcer des obscénités (Ganos, Edwards et Müller-Vahl, 2016). La prévalence de cette maladie, chez les 12

à 17 ans, est de 3,3 cas pour 1 000 en moyenne. Les garçons sont plus touchés que les lles par ce syndrome (Yang, Hirsch, Martino et al., 2016). L’âge moyen de l’apparition des tics vocaux est de 8 à 10 ans (Fourneret, Desombre et Broussolle, 2014). La cause principale de ce syndrome est génétique. Toutefois, d’autres facteurs comme les traumatismes crâniens, l’empoisonnement au monoxyde de carbone et des complications pendant la grossesse peuvent aussi être en cause. Les enfants atteints de la forme la plus légère n’auront souvent plus de tics à l’adolescence, même sans traitement, alors que ceux atteints de la forme la plus grave auront des tics toute leur vie, qui ne répondront pas à la médication. Ce n’est pas vraiment l’intensité des symptômes, mais plutôt la présence de comorbidité qui inuence le pronostic de ce syndrome à long terme. Les principales comorbidités sont le TDA/H et le trouble obsessif-compulsif (TOC), qui vont inuencer négativement le fonctionnement adaptatif et relationnel du jeune (Fourneret et al., 2014). L’ENCADRÉ 8.8 présente les critères diagnostiques tels que déterminés par le DSM-5.

Soins inrmiers SYNDROME DE GILLES DE LA TOURETTE

Selon son milieu de travail, l’inrmière participera à l’évaluation du syndrome de Gilles de la Tourette ainsi qu’au soutien de la famille. Les besoins en enseignement seront grands pour l’enfant, sa famille et son entourage. Par ailleurs, l’inrmière se doit d’être vigilante an d’évaluer la présence d’autres comorbidités qui pourraient nuire à l’adaptation de l’enfant. De plus, l’enfant est souvent stigmatisé, et son fonctionnement social peut être entravé par cette maladie, le rendant plus susceptibles de souffrir de dépression (Fourneret et al., 2014).

Critères diagnostiques du DSM-5 ENCADRÉ 8.8

Syndrome de Gilles de la Tourette

A. Présence de tics moteurs multiples et d’un ou de plusieurs tics vocaux, à un moment quelconque au cours de l’évolution de la maladie mais pas nécessairement de façon simultanée. B. La fréquence des tics peut croître et décroître mais ils persistent depuis plus d’une année après leur première apparition.

C. Le début est avant l’âge de 18 ans. D. La perturbation n’est pas imputable aux effets physiologiques d’une substance (p. ex., cocaïne) ou à une autre affection médicale (p. ex., maladie de Huntington, encéphalite virale).

Source : Traduction française reproduite avec l’autorisation d’Elsevier Masson SAS. Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, Fifth Edition (Copyright 2013). American Psychiatric Association, DSM-5 – Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux. Traduction française par M.-A. Crocq, J.-D. Guel et al., Elsevier Masson SAS, Paris, 2015. All rights reserved.

8 existe différents types de troubles anxieux, comme l’anxiété de séparation, la phobie spécique, les troubles anxieux généralisés, l’anxiété sociale, le mutisme sélectif, le trouble panique, le refus scolaire anxieux et l’état de stress post-traumatique (Denis et Baghdadli, 2017). Par ailleurs, ces enfants sont plus susceptibles d’être atteints d’un trouble anxieux supplémentaire, d’une dépression et d’un problème de consommation de drogues ou d’alcool (Denis et Baghdadli, 2017).

Manifestations cliniques Anxiété généralisée Les enfants atteints d’un trouble d’anxiété généralisée ont des inquiétudes chroniques et excessives dans plusieurs domaines de leur vie : l’école, leurs relations sociales, leurs activités, leur santé, etc. Ils éprouvent souvent des troubles du sommeil, des difcultés de concentration, de l’irritabilité et des tensions musculaires (Denis et Baghdadli, 2017). Ils cherchent constamment à être rassurés an de les aider à gérer une anxiété omniprésente.

Anxiété de séparation

8.6.3

Troubles anxieux

Il est normal que l’enfant éprouve des peurs, par exemple la peur du noir ou des orages. Toutefois, lorsqu’un enfant est atteint d’un trouble anxieux, il ressent des peurs disproportionnées qui l’empêchent de fonctionner et qui ne sont pas de son âge. Ces enfants sont parfois perçus comme étant désobéissants, étant donné leurs crises de pleurs ou de colère, alors qu’il s’agit plutôt de manifestations de peur et d’anxiété. La prévalence des troubles anxieux chez les enfants varie entre 8 et 30 %, ce qui en fait le diagnostic le plus fréquent en pédopsychiatrie (Denis et Baghdadli, 2017). Il

L’anxiété de séparation est le trouble anxieux que l’on retrouve généralement chez les plus jeunes enfants. Le pic d’apparition se situe entre sept et neuf ans. Les symptômes anxieux se manifestent lorsque l’enfant est séparé de ses parents (Denis et Baghdadli, 2017). Lorsqu’ils en sont séparés, les enfants s’inquiètent du bien-être de leurs parents, ont de la difculté à dormir, éprouvent souvent des malaises somatiques et peuvent aller jusqu’à refuser d’aller à l’école.

CE QU’IL FAUT RETENIR

L’anxiété de séparation est le trouble anxieux que l’on retrouve généralement chez les plus jeunes enfants.

Anxiété sociale L’anxiété sociale réfère à un grand inconfort ou à la peur de se retrouver devant des pairs ou des

Chapitre 8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

345

adultes inconnus, ainsi qu’à la peur d’être mis à l’avant-plan dans des situations où l’enfant doit avoir de bons résultats (devant la classe, durant un spectacle, etc.). L’enfant a alors peur du jugement des autres ou il craint d’être paralysé par la gêne. L’anxiété se dissipe habituellement lorsque la situation sociale est évitée ou terminée. Les risques de complications psychiatriques graves à l’âge adulte sont plus fréquents avec ce type de trouble anxieux (Denis et Baghdadli, 2017).

Phobies La phobie spécique fait référence à une peur intense, permanente et irrationnelle vis-à-vis d’un objet ou d’une situation spécique. Le jeune manifestera des symptômes d’évitement. Les phobies sont classées selon quatre types : la phobie des animaux, la phobie des environnements naturels (orages, eau, hauteurs, etc.), la phobie du sang ou des injections et la phobie situationnelle (avion, ascenseurs, ponts, etc.). La phobie du sang est celle qui persiste le plus à l’âge adulte.

Trouble panique Il est important de faire la distinction entre le trouble panique et l’attaque de panique. L’attaque de panique est fréquente chez les adolescents ; elle a un déclencheur particulier et peut être liée à n’importe quel trouble anxieux. Dans le cas d’un trouble panique, la crise peut se déclencher à tout moment, est récurrente et ne se limite pas à une situation particulière causant de l’anxiété.

Trouble obsessif-compulsif Alors que le TOC était considéré comme un trouble anxieux dans le DSM-IV-TR, il est maintenant un trouble à part entière dans le DSM-5. Toutefois, l’anxiété est un élément central de ce trouble ; c’est pourquoi il est traité ici. La majorité des TOC débutent au cours de l’enfance ou de l’adolescence. Ce trouble est caractérisé par des obsessions, c’est-à-dire des pensées récurrentes et intrusives qui produisent de la détresse et de l’anxiété. En réaction à ces pensées, les compulsions sont des actions répétitives ayant pour but de diminuer l’anxiété ressentie. La plupart des symptômes éprouvés par les enfants sont très similaires à ceux des adultes (APA, 2015).

Approche thérapeutique Le traitement des troubles anxieux consiste habituellement en une psychothérapie, à moins que le fonctionnement de l’enfant soit grandement affecté ou que la thérapie ne s’avère pas sufsante. Un inhibiteur sélectif de recapture de la sérotonine pourrait alors être administré. La psychothérapie peut comprendre une des thérapies suivantes : la thérapie behaviorale-cognitive, qui consiste en

346

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

une approche selon laquelle les pensées, les sentiments et les comportements sont en interrelation, ou les thérapies psychodynamique et familiale (Denis et Baghdadli, 2017).

Soins inrmiers TROUBLES ANXIEUX

L’inrmière a une implication différente selon son milieu de travail et ses compétences en lien avec les troubles anxieux. Elle participe à l’évaluation de l’enfant et de sa famille, et elle contribue à établir un plan de traitement approprié. De plus, l’inrmière aide l’enfant à vaincre ses peurs. En règle générale, l’enfant est disposé à participer à la résolution du problème. L’enfant qui a la possibilité de libérer la tension et d’exprimer ses sentiments sera probablement épargné de conséquences durables. Il devrait être encouragé à évacuer le stress et à aborder ses inquiétudes sous un angle critique. Par ailleurs, il est reconnu que les familles ont un rôle à jouer dans l’apparition et le maintien d’un trouble anxieux, dans la réduction de l’anxiété parentale et dans le développement d’habiletés de résolution de problèmes (Denis et Baghdadli, 2017).

8.6.4

Évitement scolaire anxieux

L’enfant d’âge scolaire qui devient extrêmement réticent à se présenter en classe ou qui refuse d’y aller durant une longue période pour cause d’anxiété marquée ou par crainte de certaines activités scolaires manifeste un évitement scolaire anxieux. Ce comportement peut être adopté par les lles comme les garçons, sans égard au statut socioéconomique (Romani, Campredon et Da Fonseca, 2017). Les manifestations cliniques prédominent et elles ne sont pas limitées à une partie du corps (p. ex., de l’anorexie, des nausées, des vomissements, de la diarrhée, des étourdissements, des céphalées, des douleurs aux jambes, des douleurs abdominales, voire une èvre d’intensité légère). La disparition rapide de ces manifestations quand l’enfant est autorisé à demeurer à la maison représente l’un des traits marquants de la phobie scolaire, qui se caractérise également par l’absence de celles-ci durant la n de semaine et le congé. La faible réticence occasionnelle n’a rien de grave, mais si la peur de l’école persiste, il peut s’agir d’un problème à ne pas négliger.

Soins inrmiers ÉVITEMENT SCOLAIRE ANXIEUX

Puisque, dans plusieurs cas, l’enfant a de la difculté à aller à l’école et qu’il éprouve de l’anxiété à y retourner, il faudra mettre en place un plan de retour. Plus il s’absente longtemps, plus il lui sera difcile d’y retourner. Un protocole de retour progressif prévoit un jeu de rôle au cours duquel l’enfant reprend les gestes de la préparation en vue de sa journée à l’école et des activités qui s’y tiennent. Des techniques de relaxation sont également suggérées. Au début, l’enfant va à l’école pendant une demi-journée, et il s’y rend toute la journée après un certain temps. Dans bien des cas, l’inrmière en milieu scolaire est appelée en renfort pour soutenir les parents et l’enseignant durant le retour progressif. Si le problème perdure, on suggère de recourir à des services professionnels.

8.6.5

Trouble de stress post-traumatique et trouble de stress aigu

Le trouble de stress post-traumatique (TSPT) et le trouble de stress aigu sont constitués de l’ensemble des symptômes et des comporte ments qui peuvent apparaître à la suite d’un événement traumatisant. La gravité, la durée de l’exposition et la proximité physique avec l’événement traumatisant sont les facteurs à prendre en considération dans l’apparition du TSPT (APA, 2015). La perception d’une menace mortelle et les blessures physiques augmentent les risques de vivre un TSPT (APA, 2015). Ainsi, il n’est pas étonnant de voir surgir un tel problème chez les victimes d’agression sexuelle, d’agression physique, d’attentat ou de fusillade. Toutes les victimes ne présenteront pas la totalité des symptômes. La durée et l’intensité de

ces derniers sont variables ENCADRÉ 8.9 . La différence entre le TSPT et le trouble de stress aigu est la durée des symptômes. De façon générale, le trouble de stress aigu dure moins de un mois ENCADRÉ 8.10.

Approche thérapeutique Pour le traitement du TSPT ainsi que pour le trouble de stress aigu, il est recommandé d’avoir recours à la thérapie cognitivo-comportementale, mais centrée sur le trauma (trauma-focused cognitive behavioral therapy) (Hunsley, Elliott et Therrien, 2014).

8.6.6

Douleur abdominale fonctionnelle

Parmi les différents types de douleur abdominale récurrente chez l’enfant gure la douleur abdominale fonctionnelle. Il s’agit d’un problème assez fréquent qui touche environ 8 % des enfants dans les pays occidentaux (Müller et Sidler, 2014). L’enfant qui en est atteint ne présente pas les symptômes associés au syndrome du côlon irritable, à la migraine abdominale, à une cause organique ou à la dyspepsie fonctionnelle (douleur ressentie comme une brûlure localisée sur l’abdomen supérieur). Aucune cause métabolique, anatomique, inammatoire ou néoplasique n’est à l’origine de la douleur. Les épisodes sont souvent déclenchés par le stress ou l’anxiété ENCADRÉ 8.10 17 .

8 17 La douleur abdominale fonctionnelle est également abordée au chapitre 17, Troubles liés au système gastrointestinalé.

Manifestations cliniques Il s’agit d’une douleur habituellement difcile à localiser et à décrire, durant moins de une heure, sans lien avec les repas, et qui peut aussi se présenter avec des symptômes tels que la nausée, la céphalée et la fatigue. La douleur peut être assez aiguë pour empêcher l’enfant d’aller à l’école ou de faire ses activités, et elle se produit parfois pendant des périodes de stress dans la famille, au moment de l’entrée à l’école ou lorsque les parents ont peu de temps à consacrer à l’enfant (Müller et Sidler, 2014) TABLEAU 8.5.

Critères diagnostiques du DSM-5 ENCADRÉ 8.9

Trouble de stress post-traumatique

N. B. : Les critères suivants s’appliquent aux adultes, aux adolescents et aux enfants âgés de plus de 6 ans. A. Exposition à la mort effective ou à une menace de mort, à une blessure grave ou à des violences sexuelles d’une (ou de plusieurs) des façons suivantes : 1. En étant directement exposé à un ou à plusieurs événements traumatiques. 2. En étant témoin direct d’un ou de plusieurs événements traumatiques survenus à d’autres personnes. 3. En apprenant qu’un ou plusieurs événements traumatiques sont arrivés à un membre de la famille proche ou à un ami proche. Dans les cas de

Chapitre 8

mort effective ou de menace de mort d’un membre de la famille ou d’un ami, le ou les événements doivent avoir été violents ou accidentels. 4. En étant exposé de manière répétée ou extrême aux caractéristiques aversives du ou des événements traumatiques (p. ex., intervenants de première ligne rassemblant des restes humains, policiers exposés à plusieurs reprises à des faits explicites d’abus sexuels d’enfants). N. B. : Le critère A4 ne s’applique pas à des expositions par l’intermédiaire de médias électroniques, télévision, lms ou images, sauf quand elles surviennent dans le contexte d’une activité professionnelle.

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

347

ENCADRÉ 8.9

Trouble de stress post-traumatique (suite)

B. Présence d’un (ou de plusieurs) des symptômes envahissants suivants associés à un ou plusieurs événements traumatiques et ayant débuté après la survenue du ou des événements traumatiques en cause : 1. Souvenirs répétitifs, involontaires et envahissants du ou des événements traumatiques provoquant un sentiment de détresse. N. B. : Chez les enfants de plus de 6 ans, on peut observer un jeu répétitif exprimant des thèmes ou des aspects du traumatisme. 2. Rêves répétitifs provoquant un sentiment de détresse dans lesquels le contenu et/ou l’affect du rêve sont liés à l’événement/aux événements traumatiques. N. B. : Chez les enfants, il peut y avoir des rêves effrayants sans contenu reconnaissable. 3. Réactions dissociatives (p. ex., ashbacks [scènes rétrospectives]) au cours desquelles le sujet se sent ou agit comme si le ou les événements traumatiques allaient se reproduire. (De telles réactions peuvent survenir sur un continuum, l’expression la plus extrême étant une abolition complète de la conscience de l’environnement.) N. B. : Chez les enfants, on peut observer des reconstitutions spéciques du traumatisme au cours du jeu. 4. Sentiment intense ou prolongé de détresse psychique lors de l’exposition à des indices internes ou externes évoquant ou ressemblant à un aspect du ou des événements traumatiques en cause. 5. Réactions physiologiques marquées lors de l’exposition à des indices internes ou externes pouvant évoquer ou ressembler à un aspect du ou des événements traumatiques. C. Évitement persistant des stimuli associés à un ou plusieurs événements traumatiques, débutant après la survenue du ou des événements traumatiques, comme en témoigne la présence de l’une ou des deux manifestations suivantes : 1. Évitement ou efforts pour éviter les souvenirs, pensées ou sentiments concernant ou étroitement associés à un ou plusieurs événements traumatiques et provoquant un sentiment de détresse. 2. Évitement ou efforts pour éviter les rappels externes (personnes, endroits, conversations, activités, objets, situations) qui réveillent des souvenirs, des pensées ou des sentiments associés à un ou plusieurs événements traumatiques et provoquant un sentiment de détresse. D. Altérations négatives des cognitions et de l’humeur associées à un ou plusieurs événements traumatiques, débutant ou s’aggravant après la survenue du ou des événements traumatiques, comme en témoignent deux (ou plus) des éléments suivants : 1. Incapacité de se rappeler un aspect important du ou des événements traumatiques (typiquement en raison de l’amnésie dissociative, et non pas à cause d’autres facteurs comme un traumatisme crânien, l’alcool ou des drogues). 2. Croyances ou attentes négatives persistantes et exagérées concernant soi-même, d’autres personnes ou le monde (p. ex., « je suis mauvais », « on ne peut faire conance à personne », « le monde entier est dangereux », « mon système nerveux est complètement détruit pour toujours »). 3. Distorsions cognitives persistantes à propos de la cause ou des conséquences d’un ou de plusieurs événements traumatiques qui poussent le sujet à se blâmer ou à blâmer d’autres personnes.

E.

F. G.

H.

4. État émotionnel négatif persistant (p. ex., crainte, horreur, colère, culpabilité ou honte). 5. Réduction nette de l’intérêt pour des activités importantes ou bien réduction de la participation à ces mêmes activités. 6. Sentiment de détachement d’autrui ou bien de devenir étranger par rapport aux autres. 7. Incapacité persistante d’éprouver des émotions positives (p. ex., incapacité d’éprouver bonheur, satisfaction ou sentiments affectueux). Altérations marquées de l’éveil et de la réactivité associés à un ou plusieurs événements traumatiques, débutant ou s’aggravant après la survenue du ou des événements traumatiques, comme en témoignent deux (ou plus) des éléments suivants : 1. Comportement irritable ou accès de colère (avec peu ou pas de provocation) qui s’exprime typiquement par une agressivité verbale ou physique envers des personnes ou des objets. 2. Comportement irrééchi ou autodestructeur. 3. Hypervigilance. 4. Réaction de sursaut exagérée. 5. Problèmes de concentration. 6. Perturbation du sommeil (p. ex., difculté d’endormissement ou sommeil interrompu ou agité). La perturbation (symptômes des critères B, C, D et E) dure plus d’un mois. La perturbation entraîne une souffrance cliniquement signicative ou une altération du fonctionnement social, professionnel ou dans d’autres domaines importants. La perturbation n’est pas imputable aux effets physiologiques d’une substance (p. ex., médicament, alcool) ou à une autre affection médicale. Spécier le type : Avec symptômes dissociatifs : Les symptômes présentés par le sujet répondent aux critères d’un trouble de stress post-traumatique ; de plus, et en réponse au facteur de stress, le sujet éprouve l’un ou l’autre des symptômes persistants ou récurrents suivants : 1. Dépersonnalisation : Expériences persistantes ou récurrentes de se sentir détaché de soi, comme si l’on était un observateur extérieur de ses processus mentaux ou de son corps (p. ex., sentiment d’être dans un rêve, sentiment de déréalisation de soi ou de son corps, ou sentiment d’un ralentissement temporel). 2. Déréalisation : Expériences persistantes ou récurrentes d’un sentiment d’irréalité de l’environnement (p. ex., le monde autour du sujet est vécu comme irréel, onirique, éloigné ou déformé). N. B. : Pour retenir ce sous-type, les symptômes dissociatifs ne doivent pas être imputables aux effets physiologiques d’une substance (p. ex., périodes d’amnésie [blackouts], manifestations comportementales d’une intoxication alcoolique aiguë) ou à une autre affection médicale (p. ex., épilepsie partielle complexe). Spécier si : À expression retardée : Si l’ensemble des critères diagnostiques n’est présent que 6 mois après l’événement (alors que le début et l’expression de quelques symptômes peuvent être immédiats).

Source : Traduction française reproduite avec l’autorisation d’Elsevier Masson SAS. Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, Fifth Edition (Copyright 2013). American Psychiatric Association. DSM-5 – Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux. Traduction française par M.-A. Crocq, J.-D. Guel et al., Elsevier Masson SAS, Paris, 2015. All rights reserved.

348

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Critères diagnostiques du DSM-5 ENCADRÉ 8.10

Trouble de stress aigu

A. Exposition à la mort effective ou à une menace de mort, à une blessure grave ou à des violences sexuelles d’une (ou plus) des façons suivantes : 1. En étant directement exposé à un ou plusieurs événements traumatiques. 2. En étant témoin direct d’un ou de plusieurs événements traumatiques survenus à d’autres personnes. 3. En apprenant qu’un ou plusieurs événements traumatiques est/sont arrivés à un membre de la famille proche ou à un ami proche. N. B. : Dans les cas de mort effective ou de menace de mort d’un membre de la famille ou d’un ami, le ou les événements doivent avoir été violents ou accidentels. 4. En étant exposé de manière répétée ou extrême à des caractéristiques aversives du ou des événements traumatiques (p. ex., intervenants de première ligne rassemblant des restes humains, policiers exposés à plusieurs reprises à des faits explicites d’abus sexuels d’enfants). N. B. : Cela ne s’applique pas à des expositions par l’intermédiaire de médias électroniques, télévision, lms ou images, sauf quand elles surviennent dans le contexte d’une activité professionnelle. B. Présence de neuf (ou plus) des symptômes suivants de n’importe laquelle des cinq catégories suivantes : symptômes envahissants, humeur négative, symptômes dissociatifs, symptômes d’évitement et symptômes d’éveil, débutant ou s’aggravant après la survenue du ou des événements traumatiques en cause : Symptômes envahissants 1. Souvenirs répétitifs, involontaires et envahissants du ou des événements traumatiques provoquant un sentiment de détresse. N. B. : Chez les enfants de plus de 6 ans, on peut observer un jeu répétitif exprimant des thèmes ou des aspects du traumatisme. 2. Rêves répétitifs provoquant un sentiment de détresse dans lesquels le contenu et/ou l’affect du rêve sont liés à l’événement/aux événements traumatiques. N. B. : Chez les enfants, il peut y avoir des rêves effrayants sans contenu reconnaissable. 3. Réactions dissociatives (p. ex., ashbacks [scènes rétrospectives]) au cours desquelles l’individu se sent ou agit comme si le ou les événements traumatiques allaient se reproduire. (De telles réactions peuvent survenir sur un continuum, l’expression la plus extrême étant une abolition complète de la conscience de l’environnement.) N. B. : Chez les enfants, on peut observer des reconstitutions spéciques du traumatisme au cours du jeu. 4. Sentiment intense ou prolongé de détresse psychique lors de l’exposition à des indices internes ou externes pouvant évoquer ou ressembler à un aspect du ou des événements traumatiques en cause.

Humeur négative 5. Incapacité persistante d’éprouver des émotions positives (p. ex., incapacité d’éprouver bonheur, satisfaction ou sentiments affectueux). Symptômes dissociatifs 6. Altération de la perception de la réalité, de son environnement ou de soi-même (p. ex., se voir soi-même d’une manière différente, être dans un état d’hébétude ou percevoir un ralentissement de l’écoulement du temps). 7. Incapacité de se rappeler un aspect important du ou des événements traumatiques (typiquement en raison de l’amnésie dissociative, et non pas en raison d’autres facteurs comme un traumatisme crânien, l’alcool ou des drogues). Symptômes d’évitement 8. Efforts pour éviter les souvenirs, pensées ou sentiments concernant ou étroitement associés à un ou plusieurs événements traumatiques et provoquant un sentiment de détresse. 9. Efforts pour éviter les rappels externes (personnes, endroits, conversations, activités, objets, situations) qui réveillent des souvenirs, des pensées ou des sentiments associés à un ou plusieurs événements traumatiques et provoquant un sentiment de détresse. Symptômes d’éveil 10. Perturbation du sommeil (p. ex., difculté d’endormissement ou sommeil interrompu ou agité). 11. Comportement irritable ou accès de colère (avec peu ou pas de provocation) qui s’expriment typiquement par une agressivité verbale ou physique envers des personnes ou des objets. 12. Hypervigilance. 13. Difcultés de concentration. 14. Réaction de sursaut exagérée. C. La durée de la perturbation (des symptômes du critère B) est de 3 jours à 1 mois après l’exposition au traumatisme. N. B. : Les symptômes débutent typiquement immédiatement après le traumatisme, mais ils doivent persister pendant au moins 3 jours et jusqu’à 1 mois pour répondre aux critères diagnostiques du trouble. D. La perturbation entraîne une détresse cliniquement signicative ou une altération du fonctionnement social, professionnel ou dans d’autres domaines importants. E. La perturbation n’est pas due aux effets physiologiques d’une substance (p. ex., médicament ou alcool) ou à une autre affection médicale (p. ex., lésion cérébrale traumatique légère), et n’est pas mieux expliquée par un trouble psychotique bref.

Source : Traduction française reproduite avec l’autorisation d’Elsevier Masson SAS. Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, Fifth Edition (Copyright 2013). American Psychiatric Association. DSM-5 – Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux. Traduction française par M.-A. Crocq, J.-D. Guel et al., Elsevier Masson SAS, Paris, 2015. All rights reserved.

Chapitre 8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

349

8

TABLEAU 8.5

Facteurs prédisposants et déclencheurs de la douleur abdominale fonctionnelle

FACTEURS

BIOLOGIQUES

PSYCHOLOGIQUES

SOCIAUX

Prédisposants

Tendance à la constipation

Manque de conance en soi

Conits familiaux, séparation parentale

Déclencheurs

Coup dans le ventre par un autre élève

Surmenage scolaire, risque de non-promotion

Marginalisation ou mise à l’écart dans le groupe social de référence

Source : Müller B. et Sidler, M. (2014). Douleurs abdominales fonctionnelles chez les enfants et les adolescents: une mise à jour. Paediatrica, 25(1), 8-11. Repéré à www.swiss-paediatrics.org/sites/default/les/recommandations/recommandations/pdf/08-11.pdf.

Soins inrmiers DOULEUR ABDOMINALE FONCTIONNELLE

5 Les mesures non pharmacologiques de gestion de la douleur sont présentées dans le chapitre 5, Évaluation et traitement de la douleur.

Une fois le diagnostic posé, il convient d’expliquer aux parents et à l’enfant la nature de la douleur abdominale fonctionnelle, qui peut être comparée à une crampe, à une contusion musculaire ou à un mal de tête. L’inrmière rassure les parents en leur précisant que la douleur est rarement due à une maladie grave. Grâce à la communication ouverte et à la connaissance du lien entre les situations génératrices de stress et les symptômes de l’enfant, la prise en charge est sur la bonne voie. Les soins de suivi et le soutien continuel sont essentiels en raison de la tendance à la récurrence et à l’exacerbation des symptômes. Le retour aux activités normales et l’atténuation ou l’élimination de la douleur sont les deux

8.6.7

3 Les répercussions de l’intimidation sur les enfants sont présentées dans le chapitre 3, Croissance, développement et promotion de la santé.

350

Partie 3

Dépression

La dépression infantile est difcile à déceler, car l’enfant ne sait pas encore exprimer ses sentiments lorsqu’il est aux prises avec un problème ou des préoccupations. Les critères diagnostiques d’une dépression infantile sont similaires à ceux des adultes. Toutefois, il existe certaines différences liées entre autres au stade de développement de l’enfant ENCADRÉ 8.11. Les enfants et les adolescents dépressifs peuvent se montrer irritables, colériques ou retirés, causant de l’hostilité ou du détachement envers les amis et la famille, alors qu’ils ont besoin de soutien (Tompson, Sugar et Langer et al., 2017). La dépression demeure rare chez les enfants et elle est plus fréquente durant l’adolescence, période au cours de laquelle la prévalence se situe autour de 8,5 % (Mojtabai, Olfson et Han, 2016). La maladie peut durer des mois, voire des années ; elle peut être récidivante et mener parfois au suicide. Ses conséquences sur la vie sociale et scolaire sont à long terme (Mojtabai

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

buts du traitement. Bien que la cause soit liée au stress, la douleur est bien présente, et il faut démontrer empathie et compassion envers l’enfant. Toutefois, le but est d’éviter de renforcer cette façon négative d’obtenir de l’attention. Il peut donc être utile de planier des temps particuliers consacrés à l’enfant. Le repos dans un environnement paisible et calme ainsi que le réconfort auront tôt fait de chasser les symptômes. La bouillotte pourra procurer un soulagement 5 . Diverses options sont possibles pour réduire la récurrence d’épisodes de douleur abdominale fonctionnelle : la thérapie behavioralecognitive, la psychothérapie et les exercices de relaxation en sont des exemples (Müller et Sidler, 2014).

et al., 2016). De plus, les jeunes vivant une dépression sont jusqu’à 8 fois plus susceptibles de souffrir d’un trouble anxieux et 5,5 fois plus susceptibles d’être atteints de TDA/H. La dépression est aussi souvent associée à la consommation de drogues et d’alcool. Elle n’est donc pas à prendre à la légère. Certaines formes de dépression sont transitoires, notamment la dépression provoquée par un événement traumatique comme une hospitalisation, la perte d’un parent en raison de son décès ou de la séparation conjugale, ou la n d’une relation chère avec un animal, une personne (ami, proche, membre de la famille) ou un lieu (maison, quartier, ville). L’intimidation est un autre traumatisme qui affecte la santé mentale des enfants 3 . Ceux qui en sont victimes sont plus susceptibles que les autres d’éprouver des symptômes dépressifs et anxieux, et ils présentent aussi un risque plus élevé de se suicider (Arseneault, 2017 ; Reed, Cooper, Nugent et al., 2016).

Critères diagnostiques du DSM-5 ENCADRÉ 8.11

Trouble dépressif caractérisé

A. Au moins cinq des symptômes suivants sont présents pendant une même période d’une durée de 2 semaines et représentent un changement par rapport au fonctionnement antérieur ; au moins un des symptômes est soit (1) une humeur dépressive, soit (2) une perte d’intérêt ou de plaisir. N.B. : Ne pas inclure les symptômes qui sont clairement imputables à une autre affection médicale. 1. Humeur dépressive présente quasiment toute la journée, presque tous les jours, signalée par la personne (p. ex. se sent triste, vide, sans espoir) ou observée par les autres (p. ex. pleure). (N.B. : Éventuellement irritabilité chez l’enfant et l’adolescent.) 2. Diminution marquée de l’intérêt ou du plaisir pour toutes ou presque toutes les activités quasiment toute la journée, presque tous les jours (signalée par la personne ou observée par les autres). 3. Perte ou gain de poids signicatif en l’absence de régime (p. ex. modication du poids corporel excédant 5 % en un mois) ou diminution ou augmentation de l’appétit presque tous les jours. (N.B. : Chez l’enfant, prendre en compte l’absence de prise de poids attendue.) 4. Insomnie ou hypersomnie presque tous les jours. 5. Agitation ou ralentissement psychomoteur presque tous les jours (constaté par les autres, non limité à un sentiment subjectif de fébrilité ou de ralentissement). 6. Fatigue ou perte d’énergie presque tous les jours. 7. Sentiment de dévalorisation ou de culpabilité excessive ou inappropriée (qui peut être délirante) presque tous les jours (pas seulement se reprocher ou se sentir coupable d’être malade). 8. Diminution de l’aptitude à penser ou à se concentrer ou indécision, presque tous les jours (signalée par la personne ou observée par les autres).

9. Pensées de mort récurrentes (pas seulement une peur de mourir), idées suicidaires récurrentes sans plan précis, tentative de suicide ou plan précis pour se suicider. B. Les symptômes induisent une détresse cliniquement signicative ou une altération du fonctionnement social, professionnel ou dans d’autres domaines importants. C. L’épisode n’est pas imputable aux effets physiologiques d’une substance ou à une autre affection médicale. N.B. : Les critères A-C dénissent un épisode dépressif caractérisé. N.B. : Les réponses à une perte signicative (p. ex. deuil, ruine, pertes au cours d’une catastrophe naturelle, maladie grave ou handicap) peuvent comprendre des sentiments de tristesse intense, des ruminations à propos de la perte, une insomnie, une perte d’appétit et une perte de poids, symptômes inclus dans le critère A et évoquant un épisode dépressif. Bien que ces symptômes puissent être compréhensibles ou jugés appropriés en regard de la perte, la présence d’un épisode dépressif caractérisé, en plus de la réponse normale à une perte importante, doit être considérée attentivement. Cette décision fait appel au jugement clinique qui tiendra compte des antécédents de la personne et des normes culturelles de l’expression de la souffrance dans un contexte de perte. D. La survenue de l’épisode dépressif caractérisé n’est pas mieux expliquée par un trouble schizoaffectif, une schizophrénie, un trouble schizophréniforme, un trouble délirant ou d’autres troubles spéciés ou non spéciés du spectre de la schizophrénie, ou d’autres troubles psychotiques. E. Il n’y a jamais eu auparavant d’épisode maniaque ou hypomaniaque. N.B. : Cette exclusion ne s’applique pas si tous les épisodes de type maniaque ou hypomaniaque sont imputables à des substances ou aux effets physiologiques d’une autre pathologie médicale.

Source : Traduction française reproduite avec l’autorisation d’Elsevier Masson SAS. Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, Fifth Edition (Copyright 2013). American Psychiatric Association, DSM-5 – Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux. Traduction française par M.-A. Crocq, J.-D. Guel et al., Elsevier Masson SAS, Paris, 2015. All rights reserved.

Soins inrmiers DÉPRESSION

Le dépistage de la dépression et du comportement suicidaire à l’adolescence, et l’orientation de ces cas vers les services spécialisés sont des fonctions inrmières importantes. Une équipe soignante spécialisée dans le traitement des troubles mentaux de l’enfant prend en charge le jeune atteint de dépression. Les répercussions de cette maladie étant profondes et à long terme, le dépistage et le traitement devraient avoir lieu précocement. Ceux-ci reposent sur l’anamnèse minutieuse (santé, croissance et développement, contexte social et antécédents familiaux), l’évaluation de l’enfant ainsi que son observation par l’inrmière, les parents et les enseignants. Le traitement est personnalisé et appliqué dans l’environnement le moins restrictif possible.

L’inrmière participe à l’éducation de l’enfant et de sa famille sur les causes, les symptômes, les risques et l’évolution de la maladie. Les parents doivent être des partenaires dans le traitement de leur enfant ; ils encouragent ce dernier à continuer le traitement, évaluent ses progrès et servent de let de sécurité (Tompson et al., 2017). L’enfant a besoin de soutien, d’écoute active et d’aide avec la résolution de problèmes ; il a également besoin d’aide pour concevoir des stratégies d’adaptation. La thérapie behaviorale-cognitive est souvent sufsante pour traiter une dépression. Toutefois, la dépression grave sera traitée avec des ISRS (Dubicka et Brent, 2017). An d’éviter les rechutes, il est recommandé de continuer le traitement pendant 6 à 12 mois après que les symptômes se sont résorbés. Seuls la uoxétine (ProzacMD) et l’escitalopram (CipralexMD) sont approuvés par la Food and Drug

Chapitre 8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

351

8

Administration (Naguy, 2016). Selon les recommandations internationales en regard du traitement de la dépression à l’adolescence, la uoxétine serait le traitement de choix (Tremey, Courty et Jalenques, 2016). Vers la n des années 2000, des alertes ont été émises en lien avec les ISRS qui seraient liés à une hausse du risque suicidaire.

Toutefois, il a été depuis démontré qu’en traitant la dépression et en améliorant l’humeur de l’adolescent dépressif, les risques de suicide sont diminués (Dubicka et Brent, 2017 ; Naguy, 2016). Devant ces résultats controversés, il est fortement suggéré de procéder à une évaluation fréquente de la tendance suicidaire chez les adolescents.

8.6.8

contextes sociaux. La dissociation de la réalité et la réorganisation subséquente de l’univers de façon fantasmatique constituent les traits marquants de la maladie, qui peut altérer la cognition, la perception, l’affect, le langage et le contrôle moteur. Les bouleversements du langage, des relations personnelles et de l’affect (expression émotive en surpression) en sont les manifestations les plus courantes.

Schizophrénie infantile

La schizophrénie infantile désigne un trouble profond du fonctionnement du moi (mauvaise différenciation de soi) d’ordre psychotique qui surgit avant l’âge de 15 ans. La schizophrénie infantile est une maladie rare dans la population en général; elle touche environ 2 jeunes sur 1 000 (Sadock et al., 2014). À ce jour, il n’existe pas une étiologie unique connue pour la schizophrénie infantile. Différents éléments pourraient interférer dans le développement de ce trouble, soit la génétique, la neurobiologie, les neurotransmetteurs, la consommation de cannabis et les traumatismes dans l’enfance (Driver, Gogtay et Rapoport, 2013).

Manifestations cliniques La schizophrénie infantile se caractérise par des symptômes qui perdurent durant au moins six mois et qui entravent grandement le fonctionnement de l’enfant à l’école, à la maison ou dans d’autres

Approche thérapeutique Le traitement comprend la maîtrise des symptômes, la prévention de la rechute et la réinsertion sociale et professionnelle de la jeune personne. Les antipsychotiques d’usage habituel sont l’halopéridol, la clozapine, la chlorpromazine, l’olanzapine, la quétiapine et la rispéridone. La thérapie et les interventions familiales se traduisent souvent par l’atténuation des symptômes psychotiques et des troubles de la pensée, et l’amélioration du fonctionnement social.

Soins inrmiers SCHIZOPHRÉNIE INFANTILE

Dystonie : Spasme et torsion musculaires des yeux, de la langue et du dos.

La pratique inrmière auprès d’enfants psychotiques est un champ d’exercice hautement spécialisé. Quel que soit son domaine de pratique, l’inrmière doit être consciente que la schizophrénie peut se manifester à l’enfance et ne pas hésiter à diriger l’enfant dont le comportement est

8.7

8.7.1

Problèmes liés aux comportements à risque élevé Toxicomanie

Les résultats de l’Enquête québécoise sur la santé des jeunes du secondaire 2010-2011 (Lasnier, 2017 ; Pica et al., 2012) rapportent que près de 27 % des jeunes ont déjà consommé de la drogue au cours de leur vie, les garçons dans une proportion légèrement plus élevée que les filles (Lasnier, 2017 ; Pica et al., 2012). Pour ce qui est de la

352

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

constamment anormal vers le psychiatre aux ns d’évaluation. Elle enseigne aux parents de l’enfant traité par un antipsychotique la surveillance des effets indésirables. Les plus fréquents sont l’étourdissement, la somnolence, la tachycardie, l’hypotension et les effets extrapyramidaux, notamment la dystonie et les convulsions épileptiques.

consommation d’alcool, 63 % des jeunes du secondaire rapportent en avoir consommé au moins 1 fois dans leur vie (Lasnier, 2017). Concernant la consommation excessive (5 consommations ou plus en 1 seule occasion), 41 % des jeunes du secondaire rapportent avoir eu ce comportement dans les 12 derniers mois. Le cannabis est la drogue la plus populaire chez les jeunes du Québec et du Canada (Lasnier, 2017). Selon l’Enquête québécoise sur la santé des jeunes du secondaire 2010-2011, 25 % des jeunes mentionnent avoir consommé du cannabis dans les 12 derniers mois. Quant aux amphétamines et à l’ecstasy chez les jeunes du secondaire, ce sont 9 % (amphétamines) et 7 % (ecstasy) des

jeunes qui rapportent en avoir consommé dans la dernière année. Les drogues hallucinogènes sont consommées par 6 % des jeunes du secondaire. La consommation de drogues, autres que l’alcool et le cannabis, est nettement plus élevée chez les jeunes contrevenants, les jeunes de la rue, les adolescents gais et certaines populations autochtones. Pour ce qui est de la consommation de cocaïne, elle est plus élevée chez les jeunes de la rue, comparativement aux autres populations (Centre canadien de lutte contre les toxicomanies, 2015a). Il est à noter également que 13,6 % des jeunes de 15 à 19 ans rapportent avoir consommé des analgésiques opioïdes dans la dernière année (Centre canadien de lutte contre les toxicomanies, 2015b). Les problèmes liés à la consommation de drogues et d’alcool sont aussi très présents dans les populations autochtones. Il s’agirait d’ailleurs d’un obstacle majeur au bien-être des collectivités vivant dans les réserves (Commission de la santé et des services sociaux des Premières Nations du Québec et du Labrador, 2016). L’utilisation régulière de drogues et d’alcool au cours de l’adolescence est particulièrement préoccupante, étant donné qu’elle peut interférer avec le développement du cerveau et la capacité d’apprentissage des jeunes. Elle peut également engendrer ou exacerber un trouble de santé mentale, et elle est associée au décrochage scolaire. La toxicomanie, la consommation de médicaments à mauvais escient et la pharmacodépendance, c’est-à-dire l’accoutumance ou la dépendance psychologique, sont des notions qui varient selon la culture, et elles sont le résultat d’un comportement volontaire. La tolérance médicamenteuse, c’est-à-dire le fait qu’un individu ait besoin d’une plus grande dose pour ressentir le même effet, et la physicodépendance (dépendance physique), qui consiste en une adaptation physiologique aux effets d’un médicament qui crée un syndrome de sevrage lorsqu’il est cessé, sont des réactions physiologiques involontaires aux drogues, comme les analgésiques opioïdes et l’alcool, qui sont fonction de leurs caractéristiques pharmacologiques. Une personne, qu’elle soit toxicomane ou non, pourra éprouver des symptômes de tolérance et de physicodépendance, mais la différence majeure réside dans le comportement compulsif du toxicomane envers la consommation de drogue (Centre canadien de lutte contre les toxicomanies, 2014).

Causes de la consommation Dans une enquête réalisée auprès d’adolescents québécois, les motifs les plus fréquents pour consommer de la marijuana ou de l’alcool étaient, par ordre décroissant d’importance : parce que les amis consomment, par curiosité, pour s’enivrer ou être high, parce que c’est cool, pour relaxer, parce

que les jeunes qui consomment sont populaires, parce que le père ou la mère consomme, pour transgresser l’interdit ou défier l’autorité, et pour passer le temps (Obradovic, 2015). Les groupes les plus préoccupants pour les travailleurs de la santé sont ceux qui consomment à hautes doses ou qui mélangent des drogues, parce qu’ils sont à risque de surdose, de même que les consommateurs obsessionnels en proie à la dépendance et au syndrome de sevrage, et dont la vie est complètement perturbée par cette habitude.

Types de drogues consommées N’importe quel médicament et n’importe quelle drogue peuvent être consommés à l’excès, et la plupart sont potentiellement dangereux, principalement pendant que le corps continue de se développer à l’adolescence.

8

Produits légaux Bien que la société ne les range pas dans la catégorie des médicaments ou des drogues, les composés chimiques le plus souvent consommés à l’excès sont les xanthines et les théobromines que renferment le chocolat, le thé, le café, les boissons énergisantes et les colas. La consommation de boissons énergisantes, qui peuvent contenir jusqu’à 500 mg de caféine dans une seule canette, est particulièrement élevée chez les adolescents FIGURE 8.8. La consommation de ces boissons a été associée à l’intoxication à la caféine, aux convulsions, aux épisodes de manie et à l’accident vasculaire cérébral. Il est aussi à la mode de mélanger boisson énergisante et alcool, masquant la sensation d’ivresse et entraînant des comportements dangereux (Petit, Karila et Lejoyeux, 2015). Au Canada, avec l’avènement de la légalisation de la marijuana en juillet 2018, il est à craindre que l’utilisation de cette drogue devienne, elle aussi, plus socialement acceptable.

CE QU’IL FAUT RETENIR

L’utilisation régulière de drogues et d’alcool au cours de l’adolescence est par­ ticulièrement préoccu­ pante, étant donné qu’elle peut interférer avec le déve­ loppement du cerveau et la capacité d’apprentis­ sage des jeunes.

Psychotropes Les hallucinogènes, les analgésiques opioïdes, les hypnotiques et les stimulants sont les drogues psychotropes offertes dans la rue qui posent problème sur les plans médical et légal. D’autre part, les professionnels de la santé s’inquiètent également de la consommation d’alcool et de substances volatiles inhalées dans le but d’altérer les sensations (essence, antigel, colle, correcteur liquide et solvants organiques). Depuis quelque temps, la consommation abusive de médicaments d’ordonnance, comme l’oxycodone et l’alprazolam (XanaxMD), et le FIGURE 8.8 Les adolescents, mélange d’amphétamine et de en particulier les garçons, consomment parfois dextroamphétamine (AdderallMD) des boissons énergisantes à l’excès. Chapitre 8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

353

préoccupent les professionnels de la santé travaillant auprès d’enfants et d’adolescents. Bien des médicaments d’ordonnance sont offerts à un prix plus bas que celui des drogues, sans compter qu’il peut y en avoir à la maison. Les adolescents consomment aussi des médicaments en vente libre, notamment des médicaments contre la toux et le rhume, qui contiennent du dextrométhorphane. Cette substance produit un effet stimulant ou hallucinogène (gouvernement du Canada, 2017a).

éactivation des connaissances Quel est l’effet de la nicotine contenue dans le tabac sur les vaisseaux sanguins? CE QU’IL FAUT RETENIR

Même si le nombre d’adultes et d’adolescents fumeurs a diminué, la cigarette demeure toujours la principale cause de décès évitable. Les dangers du tabagisme sont indis­ cutables, quel que soit l’âge.

Tabac Les données de l’Enquête québécoise sur le tabac, l’alcool, la drogue et le jeu chez les élèves du secondaire rapportent une forte diminution de la proportion des élèves à avoir fait usage du tabac (cigarette, cigarillo ou petit cigare), passant de 21 % en 2008 à 9 % en 2013 (Traoré, Pica, Camirand et al., 2014). La proportion des jeunes qui ont fumé leur première cigarette avant 12 ans a également diminué, tout comme la proportion de ceux qui fument sur une base quotidienne (34 à 24 %) (Traoré et al., 2014). L’adolescent commence à fumer pour divers motifs : imiter les adultes, gagner l’acceptation des pairs, reproduire les comportements et le mode de vie dépeints dans des lms, contrôler son poids (surtout chez la jeune lle). L’inuence des parents peut jouer sur l’initiation au tabagisme. En effet, près de 8 % des jeunes fumeurs s’approvisionnent gratuitement chez leur parent (Traoré et al., 2014).

Bien que le nombre d’adultes et d’adolescents fumeurs ait diminué, la cigarette demeure toujours la principale cause de décès évitable. Les dangers du tabagisme sont indiscutables, quel que soit l’âge, et la prévention du tabagisme est donc impérative à l’adolescence. Parce qu’il entraîne une accoutumance, le tabagisme durant l’enfance ou l’adolescence risque de se prolonger pour la vie et d’occasionner son lot de morbidité et de mortalité précoce. En outre, le tabagisme à l’adolescence est associé à d’autres comportements à risque. La recherche démontre également un lien entre le tabagisme et certains troubles psychiatriques comme la dépression, les troubles anxieux et les troubles psychotiques. Les jeunes auraient tendance à fumer pour diminuer les symptômes associés à leur trouble (Taleb, Kenoui, Semmak et al., 2014). D’autres formes de tabac peuvent être consommées. Depuis quelques années, la cigarette électronique, communément appelée vapoteuse, gagne en popularité dans la population générale, mais aussi auprès des jeunes. Le tabac à mâcher en est une autre. Les jeunes ont tendance à croire que le tabac sans fumée est plus sécuritaire et moins dommageable pour la santé que la cigarette. Toutefois, les risques directs pour la santé buccale sont souvent oubliés. En effet, le tabac sans fumée risque davantage d’entraîner des problèmes dentaires et des cancers des oreilles, du nez et de la gorge (Harvey et Chadi, 2016).

Soins inrmiers TABAC

La prévention à l’adolescence reste le meilleur moyen de réduire l’incidence globale du tabagisme, puisque la grande majorité des fumeurs s’y mettent avant l’âge de 18 ans. La campagne de prévention peut prendre diverses formes : afches, illustrations, présentoirs et kiosques, diffusion d’information et de données statistiques, description des effets pulmonaires néfastes réels. Des écoles transmettent le message par le visionnement de lms et des séances de démonstration dans les cours de sciences. Une récente étude portant sur l’efcacité des programmes de prévention du tabagisme dans les écoles a démontré que les interventions en milieu scolaire sont efcaces pour prévenir le tabagisme à long terme (Thomas, McLellan et Perera, 2013). Les interventions les plus efcaces sont celles qui ciblent à la fois les compétences sociales et l’acquisition des aptitudes sociales. Toutefois, les interventions doivent se poursuivre dans le temps pour vraiment avoir un effet jusqu’à la fin de

354

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

l’adolescence. Pour être réellement efcaces, les programmes doivent miser sur une approche plus globale comportant des mesures comme le prix élevé du tabac, les lois contre le tabagisme autour de l’école, et du marketing social et médiatique. Par ailleurs, l’ascendant et la mobilisation des jeunes par rapport à la lutte contre le tabagisme aideraient à changer les comportements à l’égard de la cigarette. Si un nombre important de pairs inuents réussissent à vendre l’idée que cette habitude n’est pas populaire, leurs camarades les imiteront. Un tel programme insiste sur les conséquences à brève échéance plutôt que sur celles à long terme (p. ex., les répercussions sur l’apparence, dont les taches sur les dents et les mains, la mauvaise odeur de l’haleine et des vêtements). L’interdiction de fumer dans les écoles est productive à plusieurs égards : elle décourage les élèves de succomber à la tentation de fumer, elle réitère les dangers du tabagisme et de l’exposition à la fumée secondaire pour la santé, et elle préconise la norme de l’environnement sans fumée.

Alcool La consommation excessive d’alcool (éthanol), occasionnelle ou chronique, est à l’origine de nombreux actes de violence, de suicides, de blessures accidentelles et de décès. La consommation d’alcool commence habituellement durant les études secondaires ou collégiales, et elle prend de l’ampleur avec l’âge. D’après l’Enquête québécoise sur le tabac, l’alcool, la drogue et le jeu chez les élèves du secondaire, 60 % des jeunes rapportent avoir consommé de l’alcool au cours de la dernière année. Il n’y a pas de différence signicative entre les garçons et les lles sur cet aspect (Traoré et al., 2014). Par ailleurs, le phénomène de la consommation excessive d’alcool chez les jeunes est préoccupant, même si ces proportions sont en diminution depuis les dernières années. Plus de 34 % des élèves du secondaire âgés de 17 ans et plus ont consommé de l’alcool de façon excessive (5 consommations et plus dans la même occasion) au moins une fois dans l’année précédente, et plus de 17 % l’ont fait à 5 reprises et plus (Traoré et al., 2014). L’éthanol est un dépresseur qui chasse l’inhibition sur les plans de l’agressivité et de la sexualité. Le sevrage abrupt s’accompagne de symptômes physiques et psychologiques marqués, et la consommation chronique provoque la destruction tissulaire lente des cellules cérébrales et hépatiques en particulier. Les effets les plus TABLEAU 8.6

remarquables de l’alcool ont trait au système nerveux central, notamment l’altération des fonctions cognitive et autonome, dont le jugement, la mémoire, l’apprentissage et d’autres capacités intellectuelles. L’adolescent s’isole pour boire, et il lui est impossible de contrôler sa consommation. Pour lui, l’alcool est un dérivatif à la dépression, à l’anxiété, à la peur ou à la colère. L’adolescent qui consomme de l’alcool à l’excès ne présente pas forcément tous ces traits, mais si plusieurs sont présents, il devrait être considéré comme étant à risque. Il peut être nécessaire de le diriger vers un professionnel de la santé et en cure de désintoxication.

Formes et effets Les drogues peuvent être divisées en différentes catégories selon qu’elles sont des stimulants, des dépresseurs ou des perturbateurs. Elles peuvent créer une dépendance psychologique ou physique. Il est question de dépendance psychologique lorsque la personne ressent le besoin de consommer de plus en plus pour se sentir bien, se calmer, etc. Quant à la dépendance physique, il s’agit de l’accoutumance du corps à l’effet de la drogue, causant des symptômes de sevrage en cas de manque (gouvernement du Canada, 2017b). Le TABLEAU 8.6 présente différentes drogues selon leurs formes et leurs effets. Cette liste n’est pas exhaustive, et les noms ainsi que les formes peuvent varier.

8

Formes et effets de différentes drogues

TYPE DE DÉPENDANCE

NOMS OFFICIELS ET NOMS COMMUNS

FORMES

EFFETS

Stimulants mineurs :

• Liquide

• Excitation et stimulation

• Caféine : café, boisson énergétique, cola, wake-up, etc.

• Comprimé

• Perte de poids

• Timbre (patch)

• Nicotine : cigarette, NicoretteMD, tabac à chiquer, etc.

• Tabac

• Augmentation de l’éveil et de la force musculaire

Stimulants Créent une dépendance psychologique et physique.

Stimulants majeurs : • Amphétamine : speed, wake-up, peanut, amphé, etc.

• Comprimé

• Cocaïne : crack, coke, neige, roches, etc.

• Capsule

• Sensation d’énergie, de puissance et de performance

• Méthamphétamine : crystal meth, Tina, ice, chalk, meth, glace

• Morceaux (crack)

• Réduction de la faim et de la fatigue

• Poudre

• Idées de grandeur, euphorie

• 3,4 méthylène-dioxy-méthamphétamine (MDMA) (aussi perturbateur) : ecstasy, E, love, etc.

• Liquide

• Abattement (down) qui suit parfois difcile à vivre

Solvants et colles :

• Comprimé

• Détente

• Essence : gaz

• Capsule

• Euphorie

• Aérosol : rush, poppers

• Poudre

• Réduction de la douleur

• Colle : glue, sniffe

• Ampoule

• Perte des inhibitions

• Méthylphénidate : RitalinMD

Dépresseurs Créent tous une dépendance psychologique et physique, sauf les solvants et les colles, qui causent une dépendance psychologique uniquement.

Chapitre 8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

355

TABLEAU 8.6

Formes et effets de différentes drogues (suite)

TYPE DE DÉPENDANCE

NOMS OFFICIELS ET NOMS COMMUNS

FORMES

EFFETS

Tranquillisants et somnifères :

• Somnolence, amnésie et coma possibles

• Benzodiazépine : bleus, jaunes, AtivanMD, downers, RivotrilMD, XanaxMD, etc.

• Arrêt respiratoire possible

Gammahydroxybutyrate de sodium (GHB) : • Ecstasy liquide, g, Gamma-OH, drogue du viol, GH Analgésiques opioïdes : • Codéine : EmpracetMD • Héroïne : smack, héro, cheval, blanche, came, junk • Morphine : M, morph • Fentanyl : Apache, China Girl, China White, Dance Fever, Goodfella, Green beans

Perturbateurs Créent une dépendance psychologique pour le cannabis (physique, si de grandes doses sont consommées) et une réaction à la fois psychologique et physique pour les hallucinogènes.

Cannabis :

• Marijuana : Feuilles, tiges ou eurs séchées

• Détente, créativité, activation des neurotransmetteurs du plaisir

• Haschich : Résine visqueuse séchée sous forme de cube compact

• Difculté de mémorisation

• Liquide incolore sur buvard

• Hallucinations, délires, et parfois passage du rire aux larmes

• Champignons : champignons magiques, mush, mushrooms, shroomz

• Ampoule

• Peurs incontrôlées (bad trips)

• PCP : mescaline, mess, mesc, cristaux, poussière d’ange, angel dust, etc.

• Comprimé

• Kétamine : KetalarMD, spécial K, vitamine K, ket, ketty

• Poudre

• Haschich : hasch, cube, dime, bag • Huile de haschich : résine, hasch liquide • Marijuana : pot, mari, joint, weed, herbe, marijane, bat, pétard

• Hallucinations possibles

• Cannabis de synthèse : spice, K2, encens, dream Hallucinogènes : • LSD, MDA, STP : acide, bonbon, buvard, cap

• Capsule • Champignons séchés • Cristaux

Source : Information adaptée de MSSS (2017a). Connaître les drogues et leurs effets. Repéré à http://sante.gouv.qc.ca/conseils-et-prevention/connaitre-les-drogues-et-leurs-effets/liste-desdrogues-et-de-leurs-effets/.

Soins inrmiers Reconnaître la toxicomanie

potentielle ; 4) l’inquiétude manifestée par un jeune à propos d’un ami ou d’un membre de la famille toxicomane.

L’inrmière travaillant auprès d’enfants et d’adolescents est bien placée pour offrir de l’information sur la toxicomanie. Les situations les plus fréquentes ayant trait à la toxicomanie dans cette population sont : 1) la surdose ou les symptômes de sevrage ; 2) les comportements bizarres ou la confusion découlant de la consommation de drogues ; 3) l’inquiétude manifestée par un jeune quant à l’accoutumance, installée ou

Par ailleurs, l’inrmière qui prodigue des soins à un adolescent hospitalisé doit savoir s’il consomme des drogues de façon compulsive. Le sevrage peut compliquer grandement d’autres maladies. L’inrmière doit surveiller l’apparition de tout signe physique ou comportemental révélateur d’un sevrage ou de l’effet d’une drogue. L’inrmière exerçant sa profession en milieu scolaire ou communautaire occupe une place

TOXICOMANIE

356

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Prodiguer des soins en phase aiguë L’adolescent aux prises avec des effets nocifs ou des symptômes de sevrage se présente habituellement au service des urgences. Le personnel expérimenté des urgences connaît bien la prise en charge de l’intoxication aiguë ainsi que les manifestations cliniques et les comportements caractéristiques de diverses drogues. Lorsqu’ils ne savent pas de quelle drogue il s’agit, leur connaissance de ces aspects facilite la prise en charge et le traitement. Dans bien des cas, l’observation ou la description du comportement de l’enfant ou de l’adolescent est plus utile que son compte rendu ou celui de ses amis. Le traitement de l’intoxication ou du sevrage varie selon le médicament ou la drogue, et en fonction du mode d’intoxication. Tout est mis en œuvre pour déterminer la nature de la drogue, le moment de la consommation, la quantité consommée, le mode d’administration et la description des symptômes. Il est utile de connaître le schéma de consommation de l’adolescent. Ainsi, s’il consomme deux drogues, le traitement n’est peut-être pas le même. Le lavage gastrique peut être indiqué si la consommation est récente et que le réexe de la toux est intact, tandis qu’il sera inutile si la drogue a été injectée ou reniée. Parce que le contenu réel des drogues illicites est rarement connu avec précision, la prudence est de mise dans l’administration de médicaments, sauf peut-être en ce qui concerne l’antagoniste approprié lorsqu’une surdose d’analgésique opioïde est redoutée. Il est également nécessaire de déterminer si l’adolescent a subi un trauma alors qu’il avait les facultés affaiblies par la drogue.

Assurer la prise en charge à long terme Une fois la phase aiguë terminée, l’évaluation approfondie de la place qu’occupe la drogue dans la vie de l’adolescent représente un aspect majeur du traitement et de la réadaptation du jeune toxicomane. La phase de la motivation est axée sur l’examen des facteurs qui inuent sur la consommation de drogue. À cette phase, l’adolescent doit prendre conscience de sa valeur et manifester la volonté de se défaire de sa toxicomanie.

Les sites Web sur les dépendances du ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec comprennent beaucoup d’information ainsi que les coordonnées de plusieurs ressources venant en aide aux personnes dépendantes de l’alcool, des drogues ou du jeu. Il est possible de consulter ces sites au www.dependances. gouv.qc.ca, au www. parlonsdrogue.com et au http://aa-quebec.org.

La réadaptation s’amorce le jour où l’adolescent convient qu’il est en mesure de changer son comportement et qu’il est disposé à le faire. La réadaptation suppose la promotion de relations interdépendantes saines avec des adultes bienveillants et l’étude d’autres mécanismes de résolution des problèmes, qui vont de pair avec une diminution ou la cessation de la consommation de Julie-Anne, âgée de 15 ans, arrive au service des drogue. Les intervenants doivent urgences dans un état comateux. L’ambulancier rapporte qu’elle a été retrouvée couchée dans un s’attendre à ce qu’il y ait récidive ou boisé au cours d’une visite à la cabane à sucre. propension à rechuter, et prévoir un Une de ses amies a raconté l’avoir vue boire plan de réintégration au programme une tasse de vodka pure avec trois garçons. Elle thérapeutique. est intubée pour dépression respiratoire. Vous La plupart des programmes de procédez à l’évaluation initiale et recherchez désintoxication s’inspirent du modèle les signes de violence physique ; vous examinez des 12 étapes appliqué à l’adulte, qui également les organes génitaux et procédez est proposé par les Alcooliques anoà l’examen gynécologique. Quelle hypothèse nymes. La recherche devra détermivoulez-vous éliminer par cette évaluation ? ner si ce modèle est efcace également Justiez votre réponse. chez l’adolescent.

clinique

Jugement

essentielle dans le dépistage de la consommation de drogues par des enfants, des adolescents ou des familles. Elle est témoin du comportement erratique d’un enfant ou d’un adolescent en classe ou sur le terrain de l’école, et elle peut être la première personne à se rendre compte qu’il a consommé de la drogue. La détection précoce du risque de toxicomanie représente un aspect fondamental de la prévention. Les professionnels de la santé exerçant dans le domaine de la pédiatrie peuvent participer à la prévention de la toxicomanie en créant un climat de conance propice aux questions sur les drogues ; ces professionnels peuvent mettre les enfants et les adolescents en garde contre les sites Web ou les personnes qui les encouragent à consommer de la drogue à titre expérimental.

Assurer la prévention L’inrmière occupe une place importante dans l’éducation, l’observation, l’évaluation et le traitement de l’adolescent toxicomane. Un moment charnière dans la prévention de la toxicomanie est la transition entre le primaire et le secondaire. C’est à ce moment qu’il faut travailler à développer la capacité des jeunes à refuser d’expérimenter les diverses substances et à développer leurs habiletés d’adaptation (Renaud, Zanga, Mikedis et al., 2015). L’inrmière devrait également travailler en partenariat avec la famille, puisqu’il a été démontré que l’inuence des parents pouvait être signicative. L’entretien motivationnel et les approches cognitives comportementales seraient aussi à préconiser auprès des jeunes (Renaud et al., 2015). Le programme efcace est celui qui favorise la mise en application des compétences parentales et des aptitudes sociales de l’enfant, et qui fait la promotion du rendement scolaire et de la résistance à la pression des pairs à la conformité.

Chapitre 8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

357

8

8.7.2

Automutilation

L’automutilation est un comportement à risque élevé qu’il est possible d’observer chez l’adolescent. Il se dénit comme une blessure ou un empoisonnement qu’une personne s’inige de façon intentionnelle. Il est difcile de connaître la prévalence exacte de ce type de comportement, puisque les jeunes consultent peu pour cette problématique (Statistique Canada, 2015). Toutefois, il semblerait que près de 17,2 % des adolescents ont, à au moins une reprise, eu recours à des comportements automutilatoires (Swannell, Martin, Page et al., 2014). Alors qu’auparavant, il semblait que les lles étaient plus susceptibles d’avoir recours à l’automutilation, les plus récentes données rapportent plutôt qu’il n’y a pas de lien entre le sexe (garçon ou lle) et le recours à l’automutilation (Swannell et al., 2014). Le début de l’automutilation survient généralement autour de l’âge de 11 à 15 ans (Hornor, 2016).

Causes et facteurs de risque L’automutilation est souvent associée à un problème de santé mentale. En effet, il s’agit d’un critère diagnostique du trouble de personnalité limite et peut être un symptôme des troubles anxieux et dépressifs, de la dépression, de l’abus de substance, des troubles alimentaires et du stress post-traumatique (Hornor, 2016). Les comportements automutilatoires peuvent toutefois être observés chez les personnes qui n’ont reçu aucun diagnostic de santé mentale (Hornor, 2016).

CE QU’IL FAUT RETENIR

Toute expression d’une préoccupation à propos du suicide est à prendre avec grand sérieux.

Le stress est un des plus importants facteurs de risque de l’automutilation. La présence d’expériences traumatisantes dans l’enfance (abus sexuels, physiques et émotionnels, ainsi que la négligence), les difcultés avec l’autorité parentale (abus de drogues et d’alcool, violence conjugale, diagnostic de santé mentale) et l’inuence négative des pairs sont aussi des facteurs de risque externes (Hornor, 2016). Parmi les facteurs de risque internes gurent la détresse psychologique et la dysrégulation émotionnelle (Hornor, 2016).

Soins inrmiers AUTOMUTILATION

Dans un premier temps, l’inrmière doit, dans le cadre de l’évaluation de la condition physique et mentale de l’adolescent, observer la présence de signes d’automutilation (lésions, cicatrices, brûlures). Par la suite, il est primordial de tenter de comprendre la cause du comportement automutilatoire an d’intervenir à la source, et non pas uniquement sur le symptôme.

358

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Le développement d’une relation thérapeutique est primordial pour permettre la communication entre le jeune et l’infirmière (Mangnall et Yurkovich, 2008). L’inrmière doit soigner les blessures de façon appropriée sans culpabiliser le jeune (Association canadienne pour la santé mentale, s.d.; Mangnall etYurkovich, 2008). Elle doit également sécuriser les lieux, c’est-à-dire retirer tout objet contondant ou coupant habituellement utilisé par le jeune pour s’automutiler (Hornor, 2016). Il est important d’aviser les parents si la personne qui s’automutile est âgée de moins de 14 ans et si la sécurité est compromise pour les adolescents de 14 ans et plus en raison du principe de condentialité. Comme il peut être difcile de cesser complètement l’automutilation, il peut s’avérer bénéque de prioriser une approche de réduction des méfaits et de minimisation des comportements (Mangnall et Yurkovich, 2008). En ce sens, des solutions de rechange comme l’utilisation de l’activité physique ou l’art thérapie peuvent être proposées. L’inrmière peut également encourager et accompagner l’adolescent an qu’il développe de nouvelles stratégies d’adaptation et de gestion du stress.

8.7.3

Suicide

Le suicide est un acte autodestructeur délibéré commis dans l’intention de se donner la mort. Il est important d’établir une distinction entre les idées suicidaires, la tentative de suicide et le suicide. Les idées suicidaires sont des pensées à propos du suicide et elles peuvent être les signes avant-coureurs d’un suicide. Bien qu’il ne soit pas rare que les adolescents aient à l’occasion des pensées suicidaires, toute expression d’une préoccupation à propos du suicide est à prendre avec grand sérieux ; l’adolescent devrait être soumis à une évaluation en vue de l’aiguillage approprié, le cas échéant. Quant à la tentative de suicide, elle est un acte intentionnel qui vise la mort, mais qui n’aboutit pas à la mort (OMS, 2014b). En 2015, le suicide était la deuxième cause de décès chez les 15 à 24 ans (Thibodeau et Perron, 2017). Au Canada, les taux de suicide sont les plus élevés chez les hommes. En 2013, le taux de suicide pour les jeunes hommes de 15 à 24 ans était de 12,5 cas par 100 000, alors qu’il était de 4,4 cas par 100 000 pour les jeunes femmes (Thibodeau et Perron, 2017). Même si le suicide chez les enfants est peu fréquent, soit 1,3 cas par 100 000, il n’en demeure pas moins qu’il s’agit d’un phénomène qui existe et que l’infirmière doit prendre en

considération (Thibodeau et Perron, 2017). Il faut noter que le taux de suicide chez les adolescents autochtones est particulièrement préoccupant ; en effet, il est de 5 à 7 fois plus élevé chez les jeunes des Premières Nations que chez les jeunes Canadiens non autochtones (Santé Canada, 2013).

Étiologie Des facteurs de risque individuels, familiaux, sociaux ou environnementaux entrent en jeu dans le suicide. Le facteur de risque individuel le plus déterminant est la présence d’un trouble de santé mentale actif (dépression, trouble affectif bipolaire, psychose, toxicomanie, trouble des conduites). La présence concomitante d’un trouble affectif et d’une toxicomanie accroît le risque de suicide. Les adolescents gais et lesbiennes sont à risque élevé de suicide, particulièrement s’ils ont grandi dans un environnement qui leur refuse tout soutien. Parmi les facteurs familiaux qui exercent une inuence sur le suicide, il convient de mentionner la perte d’un parent, en raison du décès ou d’un divorce ; des antécédents familiaux de suicide, de dépression ou de toxicomanie ; la maltraitance ou l’abus sexuel de l’enfant ; et les conits familiaux ENCADRÉ 8.12 et TABLEAU 8.7. L’isolement, la rupture amoureuse, l’absence de perspectives d’avenir, l’intimidation et la présence d’une arme à feu à la maison représentent quant à eux des facteurs

sociaux ou environnementaux (Korczak et SCP, 2015 ; Macleod, Nada-Raja, Beautrais et al., 2015). Pour les adolescents autochtones, l’isolement géographique et social, la pauvreté, les problèmes familiaux et la désorganisation sociale sont des facteurs de risque inhérents à leurs communautés (Santé Canada, 2013). Pour la période de 2012-2014, la méthode la plus utilisée pour s’enlever la vie était la pendaison, la strangulation et la suffocation (Thibodeau et Perron, 2017). Généralement, les lles vont utiliser des moyens moins radicaux que les garçons pour se suicider.

Motifs Les adolescents qui songent au suicide peuvent y voir, à tort, la n de leur souffrance, un moyen d’obtenir réconfort et sympathie ou encore une façon de se venger de quelqu’un qui les a blessés. Les adolescents ont l’illusion que leur suicide suscitera des remords et de la pitié, et qu’ils pourront être témoins du chagrin que causera leur mort. Pour l’enfant en colère, incapable de punir lui-même les personnes qui l’ont maltraité, l’autodestruction devient une revanche sur ceux qui l’aiment. Les facteurs susceptibles d’augmenter la détresse et de précipiter un passage à l’acte chez les enfants et les adolescents sont la rupture amoureuse, l’échec scolaire et les conits avec la famille ou les pairs (Korczak et SCP, 2015).

8

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 8.12

Signes avant-coureurs du suicide

MESSAGES VERBAUX DIRECTS ET INDIRECTS DE L’ENFANT OU DE L’ADOLESCENT

• Parle clairement ou avec ambiguïté de l’intention de se tuer, de mort, d’écœurement et d’essoufement • Propos de mort, de désir de mourir INDICES COMPORTEMENTAUX

• Changement soudain de la performance scolaire, mauvaises notes, absence aux cours, abandon d’activités • Désir de se départir d’objets chers • Retrait et isolement • Changements dans les habitudes alimentaires et de sommeil • Changements sur le plan de l’hygiène personnelle • Comportements dangereux • Manifestations physiques : maux de ventre ou de tête récurrents • Consultations médicales (ou de l’inrmière, ou aux urgences) à répétition pour traiter des blessures • Comportement antisocial, consommation d’alcool ou de drogues, batailles, actes de vandalisme, fugues, promiscuité sexuelle • Insouciance, témérité

• Attention aux signes trompeurs : soudaine amélioration de l’humeur qui voudrait dire que la personne a planié son geste et qu’elle est sereine au sujet de sa décision INDICES ÉMOTIONNELS

• • • • • •

Désintérêt, perte de désir Pleurs, tristesse, apathie et découragement Brusques changements d’humeur Agressivité Émotions contradictoires et changeantes Anxiété accrue

INDICES COGNITIFS

• Difculté de concentration • Absence de motivation • Indécision SYMPTOMES DE DÉPRESSION

• Perte d’énergie • Sentiment de dévalorisation • Fatigue

Source : Adapté de Association québécoise de prévention du suicide (AQPS) (2017). Reconnaître les signes. Repéré à www.aqps.info/aider/reconnaitre-signes.html?gclid=CjwKEAjwlf_ MBRDU7f7nlqqcz0ESJAA_Bo_ATwLAo-H5ETVV4AyuXQ_4MeY_sxQzOpfTVqnrKx- hFhoCaNDw_wcB.

Chapitre 8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

359

TABLEAU 8.7

Facteurs de risque relativement au suicide chez les adolescents

FACTEURS PRÉDISPOSANTS ET CONTRIBUANTS

FACTEURS PRÉCIPITANTS

FACTEURS FACILITANTS

• Antécédents familiaux de troubles mentaux

• Attentes déçues

• Dysphorie du genre

• Conits avec les pairs

• Forte impression de « perdre la face » (recours au suicide de manière impulsive)

• Conits avec les parents

• Accès à une arme, à des médicaments ; domicile à proximité d’un métro ou d’un pont

• Fragilité narcissique

• Deuils, déménagement, rupture amoureuse, etc.

• Homosexualité • Présence d’un problème de santé mentale (50 % des jeunes qui tentent de se suicider ont des troubles dépressifs, bipolaires et apparentés)

• Démêlés avec la justice

• Échec sportif, scolaire, etc.

• Accès facile à des moyens de passer à l’acte • Couverture médiatique du suicide d’une vedette ou annonce du suicide d’un ami

• Pertes

• Sexe (taux de suicide quatre fois supérieur chez les garçons ; trois fois plus de tentatives chez les lles) • Tentatives antérieures Sources : Adapté de Bedwani (2011) ; Laamme (2007).

Pour l’adolescent en dépression profonde, le suicide apparaît comme la solution à tous ses maux FIGURE 8.9. Les adolescents ne laissent pas toujours voir leur intention de s’enlever la vie, tout comme ils ne parlent pas beaucoup de leurs idées suicidaires. Certains se conent à des amis, leur font part de leurs idées ou de leur projet de suicide, sans en dire un mot à des adultes.

ALERTE CLINIQUE

L’adolescent qui verbalise des idées suicidaires ou qui a un plan précis devrait être surveillé continuellement. Il ne devrait pas avoir à sa disposition une arme à feu, des médicaments d’ordonnance ou en vente libre, des ceintures, des écharpes, des lacets, des objets coupants, des allumettes ou un briquet. En cas d’intoxication, il est placé dans un environnement sûr jusqu’à ce qu’un médecin l’évalue.

360

Partie 3

La fréquence du phénomène de contagion suicidaire ou du suicide par imitation, soit l’effet d’entraînement du suicide médiatisé d’un jeune, est controversée. Il n’en demeure pas moins que la population des jeunes, et plus particulièrement celle des adolescentes, est l’une des plus vulnérables à ce phénomène (Abrutyn et Mueller, 2014 ; Macleod et al., 2015). De plus, les jeunes ne se rendent peutêtre pas compte de la nalité du suicide. La dépression est fréquente chez les adolescents qui attentent à leurs jours. La maladie est caractérisée par des manifestations cliniques qui illustrent la tristesse et le désespoir de l’adolescent. Celui-ci est effectivement envahi par la tristesse, le désespoir, l’impuissance, la lassitude et le désintérêt, et il s’isole. Il peut également se dévaloriser, se reprocher tout et rien, et se sentir coupable.

Approche thérapeutique La menace de suicide est à prendre au sérieux . La tentative de suicide n’est pas toujours un acte impulsif, à un moment de crise ou de dépression temporaire. Si la tentative de suicide n’alerte

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

FIGURE 8.9 Plusieurs motifs peuvent amener l’adolescent à songer au suicide. L’inrmière doit pouvoir reconnaître les signes avant-coureurs.

pas l’entourage de l’enfant ou de l’adolescent par rapport à ses problèmes ou si elle empire sa situation, celui-ci pourrait fort bien en conclure que le suicide demeure la seule solution. L’enfant ou l’adolescent doit pouvoir compter sur une personne bienveillante qui se soucie de lui, et il doit bénécier d’une intervention immédiate et efciente. Bien que le médecin généraliste soit en mesure de prendre en charge la réaction dépressive en phase aiguë, des services psychiatriques diligents sont nécessaires dans le cas de l’adolescent qui a attenté à sa vie ou qui a un plan de suicide précis.

Soins inrmiers SUICIDE

Reconnaître les signes avant-coureurs L’inrmière exerce un rôle crucial dans la prévention du suicide. À cet égard, l’OIIQ a publié une prise de position et un guide pratique sur la prévention du suicide an de reconnaître l’apport de celle-ci dans la promotion de la santé et la prévention du suicide, ainsi que dans l’évaluation, la réadaptation et la postvention (Laamme, 2007). Son rôle, son engagement dans divers milieux et la conance de la population envers elle placent l’inrmière dans un contexte où elle est susceptible de recevoir des condences d’adolescents en détresse. L’élément le plus important de la prise en charge est la détection des signes avant-coureurs indicateurs du trouble de l’adolescent et du risque de tentative de suicide. Les professionnels de la santé se doivent d’être à l’affût des signes de dépression et de prévoir l’évaluation psychologique de l’adolescent dont le comportement laisse entrevoir la possibilité d’une dépression. Chez l’enfant et l’adolescent, la dépression se manifeste de façon différente par rapport à l’adulte. Elle peut être masquée par un comportement impulsif et agressif à l’adolescence. La désobéissance, la bravade, les problèmes de comportement et des troubles psychosomatiques peuvent être les signes d’une dépression, d’idées suicidaires ou d’une tentative de suicide imminente. Les pairs ou les condents sont de précieux observateurs de l’adolescent et d’excellentes sources d’information sur le risque de tentative de suicide. Ils ne peuvent diagnostiquer la dépression, mais ils sont tout à fait en mesure de déceler un changement marqué de comportement. Il faut insister sur le fait que l’ami qui détecte un tel changement chez l’adolescent devrait en parler à quiconque peut aider l’adolescent en détresse (p. ex., un parent, un enseignant, un conseiller, un psychologue, l’inrmière de l’école).

Offrir du soutien et du counseling L’examen de santé habituel de l’adolescent devrait comporter des questions destinées à détecter les idées suicidaires et l’intention de suicide. Une des façons de faire est de commencer en parlant de la souffrance de l’adolescent avant d’aborder les idées suicidaires. Voici quelques exemples de questions : • Plusieurs personnes qui se sentent très déprimées ont déjà pensé à se suicider. Est-ce quelque chose que tu as déjà considéré ?

• Est-ce que tu t’es déjà senti tellement malheureux ou bouleversé que tu aurais préféré être mort ? • As-tu déjà eu des pensées suicidaires ? Quel genre de pensées avais-tu ? Si la personne mentionne avoir des pensées suicidaires, il faut lui demander si elle a un plan. Si elle répond oui, il faut employer la méthode Comment, où et quand (COQ). • As-tu déjà fait une tentative de suicide ? La tentative de suicide étant fréquemment une manifestation de détresse familiale, il est essentiel d’intervenir auprès de la famille, d’évaluer les interactions familiales et de cerner les relations dysfonctionnelles. La méthode la plus efcace consiste à détecter l’adolescent à risque avant que la situation familiale ne s’aggrave et à offrir du counseling familial dès que possible . La prévention doit être axée sur l’amélioration de la communication entre les enfants et les parents, et sur la modication des aspects sociétaux qui entraînent l’échec, le désespoir et les difcultés d’adaptation. Bien que la condentialité soit un élément crucial du counseling offert aux adolescents, elle ne tient plus lorsqu’il s’agit d’un comportement autodestructeur. Le comportement suicidaire est signalé à la famille et à d’autres professionnels, et l’adolescent est informé de cette divulgation d’information. Les professionnels de la santé doivent toutefois s’assurer de préserver leur lien de conance avec l’adolescent en lui expliquant qu’ils se soucient de lui et cherchent à l’aider, même si ce dernier peut le comprendre autrement.

ALERTE CLINIQUE

Étant donné le risque de suicide chez les jeunes, l’inrmière devrait s’enquérir auprès des parents de l’adolescent à risque de la présence d’une arme à feu ou de médicaments sur ordonnance à la maison et, dans l’afrmative, recommander de s’en départir. Il importe également d’éduquer les parents au sujet des signes avant-coureurs du suicide.

Le site Web de l’Association canadienne pour la prévention du suicide (https://suicideprevention.ca) comporte beaucoup d’informations pertinentes.

De nombreuses écoles ont mis en place des programmes de prévention du suicide qui varient en format, en durée et en contenu. Les programmes de prévention en milieu scolaire peuvent être des programmes pédagogiques, des programmes d’intervention préventive ou des programmes de dépistage des personnes à risque. Les programmes pédagogiques visent à améliorer les connaissances des adolescents sur le suicide et à accroître leurs habiletés de gestion du stress. Les programmes d’intervention préventive visent la formation des adultes qui côtoient les jeunes an de les aider à dépister les adolescents suicidaires et à intervenir auprès d’eux. Ces programmes, peu importe celui choisi, n’auraient pas d’incidence négative sur les jeunes. Toutefois, une approche hybride combinant formation et intervention préventive offrirait les meilleurs résultats (Mirkovic, Belloncle, Rousseau et al., 2014).

Chapitre 8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

361

8

Analyse d’une situation de santé Roxanne, âgée de 15 ans, a un problème d’anorexie mentale avec aménorrhée. Elle est suivie en consultation externe depuis 4 mois, mais aujourd’hui, son état inquiète beaucoup sa mère, qui a décidé de l’amener à l’hôpital. Le médecin qui a examiné Roxanne a pris la

Jugement clinique décision de l’hospitaliser, car elle montre des signes de déshydratation et un état général détérioré. L’adolescente pèse 30 kg et elle mesure 1,50 m. Roxanne vous cone qu’elle consomme des laxatifs et des diurétiques, et qu’il lui arrive souvent de se faire vomir.

Mise en œuvre de la démarche de soins

Collecte des données – Évaluation initiale – Analyse et interprétation 1. Calculez l’indice de masse corporelle de Roxanne et interprétez le résultat. 2. D’autres signes objectifs sont observables dans le cas d’anorexie mentale. Nommez au moins huit données objectives que vous pourriez observer chez Roxanne. 3. Vous demandez à Roxanne si elle a vécu un stress important dans les deux dernières années. Pourquoi est-ce pertinent de lui demander cela? SOLUTIONNAIRE

VU dans ce chapitre

Quelle serait la conséquence physique d’une baisse de la température corporelle et de la perte de poids pour Roxanne ? À quoi sert la mesure de la densité osseuse dans le diagnostic d’anorexie mentale, comme celui posé pour Roxanne ?

Des analyses de laboratoire ont été demandées pour connaître la gravité de l’état de Roxanne. Voici quelques-uns des résultats : Biochimie : Sodium : 150 mmol/L ; potassium : 3,1 mmol/L

Protéines sériques : 41 g/L ; albumine : 35 g/L Urée : 15 mmol/L Hématologie : Hb : 65 g/L

4. Nommez au moins deux éléments de la mise en contexte qui peuvent expliquer les résultats obtenus pour le dosage du sodium et du potassium. Justiez vos réponses. 5. Déterminez ce qui a contribué à l’état d’hypoprotéinémie de Roxanne et justiez votre réponse.

Vous l’avez vue se regarder dans le miroir et vous l’avez entendu dire : « Ils vont me faire devenir obèse. »

Planication des interventions – Décisions inrmières 6. Nommez une condition essentielle pour que Roxanne cesse de nier sa maladie. 7. Expliquez le rôle des différents intervenants pouvant aider Roxanne à atteindre les objectifs de traitement : a) l’infirmière spécialisée auprès de la clientèle anorexique ; b) la nutritionniste ; c) le travailleur social ; d) le psychiatre ou le psychologue.

362

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

En discutant avec la mère, vous apprenez que Roxanne est tombée à trois reprises depuis une semaine en se levant de son lit. Le médecin et les membres de l’équipe interdisciplinaire ont décidé d’introduire le gavage pour une semaine afin de favoriser la prise pondérale chez Roxanne sans avoir à la forcer à prendre trop d’aliments par la bouche.

Collecte des données – Évaluation initiale – Analyse et interprétation 8. Qu’est-ce qui pourrait expliquer les chutes de Roxanne ?

Planication des interventions – Décisions inrmières 9. Inscrivez une directive inrmière en lien avec le problème prioritaire inscrit au numéro 2 dans l’extrait du plan thérapeutique inrmier (PTI).

Un des objectifs de soins est la prise pondérale de 400 g par semaine. Roxanne reçoit un gavage nocturne pour favoriser la prise de poids en début de traitement.

10. Quel moyen aiderait Roxanne à atteindre l’objectif de prise de poids ? 11. Au cours des tournées de nuit, pour quelle raison devez-vous vérier si le gavage est branché à la pompe et si celle-ci est en marche ?

Pendant le jour, Roxanne doit prendre trois repas et trois collations. Elle a tendance à mentir sur la quantité d’aliments consommés. Un autre problème prioritaire a été ajouté dans l’extrait du PTI.

8

VU dans ce chapitre Qu’est-ce qui permettrait de déterminer le plus précisément possible ce que Roxanne mange pendant la journée ?

12. Inscrivez une directive inrmière s’appliquant au problème prioritaire numéro 3. Extrait de PTI CONSTATS DE L’ÉVALUATION Date

Heure



Problème ou besoin prioritaire

2018-07-26

10:00

2

Hypotension orthostatique

M.B.

2018-07-30

11:00

3

Consommation partielle des aliments offerts

M.B.

Initiales

RÉSOLU / SATISFAIT Date

Heure

Professionnels / Initiales Services concernés

SUIVI CLINIQUE Date

Heure



2018-07-26

10:00

2

2018-07-30

11:00

3

Signature de l’inrmière

Mina Bournival

Directive inrmière

Initiales

M.B.

Programme / Service

Initiales

Signature de l’inrmière

Initiales

CESSÉE / RÉALISÉE Date

Heure Initiales

Programme / Service

Unité des troubles nutritionnels

Évaluation des résultats – Évaluation en cours d’évolution 13. Roxanne est hospitalisée depuis cinq semaines. Nommez au moins deux signes qui indiqueraient une amélioration de son état.

Chapitre 8

Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent

363

Chapitre

9

Maladies infectieuses et immunisation Écrit par : Marilyn J. Hockenberry, PhD, RN, PPCNP-BC, FAAN Adapté par : Denis Blais, inf., B.Sc. Line Lamarche, inf., B.Sc., D.E.

MOTS CLÉS

OBJECTIFS

Bactérie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .366 Chaîne de l’infection . . . . . . . . . . . . . . . . . .366 Immunisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .370 Infection . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .366 Infection nosocomiale . . . . . . . . . . . . . . . .367 Maladie à déclaration obligatoire (MADO) . . . . . . . . . . . . . . . . . . .388 Mycose . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .366 Parasite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .366 Pratique de base . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .367 Précaution additionnelle . . . . . . . . . . . . .367 Prévention . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .367 Protozoaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .366 Surinfection . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .372 Transmission . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .366 Virus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .366

Après avoir étudié ce chapitre, vous devriez être en mesure : • de décrire les modes de transmission des infections ; • de déterminer dans quelles situations appliquer les précautions de base et les précautions additionnelles en prévention des infections ; • de décrire le rôle de l’infirmière dans la prévention des infections nosocomiales ; • de décrire les principes généraux de l’immunisation ; • de reconnaître les principales manifestations cliniques possibles après la vaccination ; • de décrire les principales caractéristiques des maladies transmissibles de l’enfance ; • de reconnaître les manifestations cliniques des différents types de conjonctivite et de décrire les soins infirmiers appropriés ; • de distinguer la stomatite aphteuse de la gingivostomatite herpétique ; • d’exposer les grandes lignes d’un plan d’enseignement visant à prévenir la transmission des parasites intestinaux.

Disponible sur • À retenir

• Solutionnaires

• Carte conceptuelle

• Tableau Web

Guide d’études – RE03

364

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Carte conceptuelle

Cette carte conceptuelle illustre schématiquement les principaux concepts décrits dans le présent chapitre. Sa lecture vous permettra d’avoir une vue d’ensemble des notions qui y sont présentées.

si précautions non respectées

si maladie infectieuse

dont

9

an de

dont

tels

comme

comme

utilisent différents Moyens de prévention des infections

causées par

incluent

Maladies infectieuses et immunisation

Chapitre 9

Maladies infectieuses et immunisation

365

9.1

Infection, transmission et contagion

L’infection est la pénétration et la prolifération, dans un organisme vivant, d’un agent infectieux, ou micro-organisme, comme une bactérie, un virus, un parasite, une mycose ou un protozoaire. Ces micro-organismes peuvent sécréter des toxines susceptibles de provoquer des maladies, des abcès et des infections graves, voire mortelles, dans différents organes du corps (p. ex., une méningococcémie). Les agents infectieux ont une capacité de transmission qui dépend de plusieurs facteurs : la virulence, la quantité de pathogènes présents, le mode de transmission et la survie dans l’environnement. Une infection ne peut se propager que si tous les maillons de la chaîne de l’infection sont intacts : un agent infectieux, un réservoir pour sa croissance, une porte de sortie du réservoir, un mode de transmission, une porte d’entrée dans un hôte et un hôte réceptif. Pour la contrer, il suft de briser un seul maillon de la chaîne.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les enfants souffrant d’une maladie chronique ou recevant des traitements immunosuppresseurs ou une greffe d’organe solide et de moelle osseuse sont plus sujets aux infections.

Une maladie infectieuse peut être transmise à un sujet sain soit par contact direct, soit indirectement par un hôte intermédiaire (p. ex., une tique, comme dans la maladie de Lyme), des produits contaminés, etc. Il s’agit alors d’une maladie transmissible. Une maladie infectieuse est dite contagieuse lorsqu’elle se propage d’une personne à une autre (transmission interhumaine), comme c’est le cas de la grippe ou des infections envahissantes à méningocoques. Toutes les maladies infectieuses ne sont donc pas contagieuses. Par exemple, le tétanos, une infection transmise par une bactérie présente dans la terre et qui pénètre dans l’organisme par une plaie, n’est pas contagieux, car il n’y a pas de transmission interhumaine. Il est important de souligner que les enfants qui souffrent d’une maladie chronique ou qui reçoivent des traitements immunosuppresseurs ou une greffe d’organe solide et de moelle osseuse sont parmi les clientèles pédiatriques les plus à risque d’infections.

9.1.1

Modes de transmission

Voie aérienne

éactivation des connaissances Comment appelle-t-on les bactéries qui se xent à la peau de l’inrmière lors des contacts avec le client ou son environnement ?

366

Partie 3

La transmission par voie aérienne se produit lorsque sont inhalées des microgouttelettes en aérosol (petites particules de 5 mcg ou moins de gouttelettes évaporées qui peuvent rester en suspension dans l’air pendant longtemps) ou des particules de poussière contenant l’agent infectieux. Les microorganismes ainsi véhiculés peuvent se propager sur de longues distances par les courants d’air et être inhalés par un hôte sensible présent dans la même pièce, ou encore se déposer sur lui. Selon les

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

facteurs environnementaux, ils peuvent aussi parcourir une plus grande distance par rapport à la personne source. Voici des exemples d’infections ou de maladies transmises par voie aérienne : • Rougeole • Varicelle, y compris le zona disséminé • Tuberculose

Gouttelettes La transmission par gouttelettes survient lorsque de grosses particules de plus de 5 mcg contenant des micro-organismes produits par une personne souffrant d’une maladie ou porteuse du microorganisme entrent en contact avec la conjonctive, ou avec les muqueuses nasales ou buccales d’une personne sensible. Les gouttelettes sont surtout produites lorsque la personne source tousse, éternue ou parle, ou pendant des interventions comme l’aspiration et la bronchoscopie. La transmission dépend d’un contact étroit entre la personne source et le receveur, car les gouttelettes ne restent pas en suspension dans l’air et ne se déplacent que sur de courtes distances (maximum de 1 ou 2 m). Voici des exemples d’infections ou de maladies transmises par gouttelettes : • Infections à Haemophilus inuenzae de type B invasif, telles que la méningite, la pneumonie, l’épiglottite et la septicémie • Infections à Neisseria meningitidis invasif, telles que la méningite, la pneumonie et la septicémie • Autres infections respiratoires bactériennes graves, telles que la diphtérie (pharyngienne), la pneumonie mycoplasmique, la coqueluche, la peste pneumonique, la pharyngite streptococcique, la pneumonie ou la scarlatine chez les nourrissons et les jeunes enfants • Infections virales graves, telles que l’adénovirus, la grippe, les oreillons, le parvovirus B19 et la rubéole

Contact (direct ou indirect) La transmission par contact direct comprend le contact cutané et le transfert physique de microorganismes d’une personne infectée ou colonisée vers un hôte sensible, par exemple lorsque l’inrmière effectue un examen physique abdominal. Elle peut également se produire entre deux clients, par exemple par contact avec la main. La transmission par contact indirect désigne le contact d’un hôte sensible avec un objet intermédiaire contaminé, généralement inanimé, présent dans son environnement. Voici des d’infections ou de maladies transmises par contact : • Infections gastro-intestinales, respiratoires ou cutanées ; infections de plaies ; colonisation par plusieurs bactéries résistantes à plus d’un

• Infections entériques par une faible dose d’agent infectieux ou d’agents capables de survivre longtemps dans l’environnement, comme Clostridium difcile ; pour les enfants qui portent des couches ou qui sont incontinents : Escherichia coli O157 :H7 entérohémorragique, Shigella, hépatite A ou rotavirus • Virus respiratoire syncytial, virus paragrippal ou infections entérovirales chez les nourrissons et les jeunes enfants • Infections cutanées très contagieuses pouvant affecter une peau sèche, comme la diphtérie (cutanée), le virus herpes simplex (néonatal ou cutanéomuqueux) FIGURE 9.1, l’impétigo, l’abcès majeur (non contenu), la cellulite ou les lésions de pression, la pédiculose, la gale, la furonculose staphylococcique chez les nourrissons et les jeunes enfants, le zona (disséminé ou chez l’hôte immunodéprimé) • Conjonctivite virale ou hémorragique • Infections virales hémorragiques (Ebola, Lassa ou Marburg)

Vecteurs Il y a transmission par vecteur lorsque l’agent infectieux est transmis par un intermédiaire vivant, par exemple un insecte ou une tique. Voici des exemples d’infections ou de maladies transmises par vecteur : • Virus du Nil occidental (moustiques du genre Culex) • Maladie de Lyme (tiques à pattes noires Ixodes scapularis)

9.1.2

Prévention et contrôle des infections

Pratiques de base et précautions additionnelles Pour limiter la transmission des infections, l’inrmière doit mettre en œuvre diverses mesures de prévention. L’Agence de la santé publique du Canada (ASPC, 2016c) a émis des recommandations visant à prévenir la transmission des infections dans les milieux de soins : les pratiques de base et les précautions additionnelles ENCADRÉ 9.1. Les pratiques de base, qui s’appliquent à toutes les personnes hospitalisées, visent à réduire le risque de transmission de micro-organismes provenant de sources infectieuses reconnues et non reconnues. Des précautions additionnelles doivent également être prises

dans le cas des enfants chez qui est soupçonnée ou constatée une infection ou une colonisation par des agents pathogènes transmissibles très combatifs sur le plan épidémiologique, et qui requièrent d’autres mesures que les pratiques de base pour en interrompre la transmission dans les hôpitaux. Ces précautions consistent à se servir d’équipements comme des gants, des lunettes, une blouse et un masque de FIGURE 9.1 protection pour prévenir la contamination à partir : 1) du sang ; 2) de tous les liquides corporels, des sécrétions et des excrétions (sauf la sueur), qu’ils contiennent ou non du sang visible ; 3) de la peau lésée ; 4) des membranes muqueuses. Il existe trois types de précautions additionnelles liées à la transmission : 1) les précautions aériennes (ou relatives aux particules aérogènes) ; 2) les précautions relatives aux gouttelettes ; 3) les précautions de contact. Dans le cas des maladies ayant plusieurs voies de transmission, ces trois types peuvent être regroupés.

9.1.3

Herpes simplex

9

Infections nosocomiales

Le ministère de la Santé et des Services sociaux ALERTE CLINIQUE (MSSS) estime que, dans les établissements de santé québécois, entre 80 000 et 90 000 personnes De nombreuses infections sont atteintes d’une infection nosocomiale, ce qui peuvent être évitées si le correspond à 10 % des admissions (MSSS, 2017a). personnel soignant utilise Ces infections résultent d’une interaction entre les des techniques méticuleuses clients, le personnel médical, l’équipement et les de nettoyage. bactéries ENCADRÉ 9.2. Par exemple, l’équipement médical le plus répandu, le stéthoscope, peut être une source importante de micro-organismes nuisibles et d’infections nosocomiales. Selon une étude, 80 % des Coralie, âgée de six ans, est conduite au service 200 stéthoscopes analysés des urgences par sa mère, car, depuis ce matin, elle étaient contaminés par au a des macules accompagnées de papules au dos et moins un microbe (Longtin, sur le thorax. La mère mentionne qu’elle vient de changer de détergent à lessive et a peur que ce soit Schneider, Tschopp et al., une allergie. Vous constatez que du liquide s’écoule 2014) . de certaines papules. Que devriez-vous faire de Les micro-organismes façon prioritaire pour diminuer le risque de résistant aux antimicrobiens propagation en attendant le diagnostic ? causent de plus en plus a) Mettre en place des précautions additionnelles d’infections nosocomiales. de contact et installer la llette dans une salle En effet, la majorité d’entre de consultation. elles sont attribuables à sept agents pathogènes : les b) Mettre en place des pratiques de base et installer la llette dans une salle avec la porte micro-organismes à Gram fermée. positif Staphylococcus aureus, les staphylocoques à c) Mettre en place des précautions additionnelles coagulase négative, les relatives aux gouttelettes et installer la llette entérocoques, les microdans une salle d’isolement. organismes à Gram négatif d) Mettre en place des précautions additionnelles E. coli, Pseudomonas aerugiaériennes et installer la llette dans une salle à n o s a, E n t e r o b a c t e r e t pression négative avec la porte fermée. Klebsiella pneumoniae.

clinique

Jugement

médicament, dont la signication clinique et épidémiologique particulière a été établie par les programmes de lutte contre les infections, conformément aux recommandations actuelles de la province, de la région ou du pays

Chapitre 9

Maladies infectieuses et immunisation

367

ENCADRÉ 9.1

Pratiques de base et précautions additionnelles

PRATIQUES DE BASE

PRÉCAUTIONS ADDITIONNELLES

Hygiène des mains

Transmission par voie aérienne

• Lavage des mains avec une solution désinfectante ou avec de l’eau et du savon

• Isolement du client dans une chambre à pression négative 13

• Port des ongles courts, sans faux ongles ni vernis

• Port d’un masque à haut pouvoir ltrant (masque N95) FIGURE. Le masque doit bien épouser la forme du visage et son étanchéité doit faire l’objet d’un test.

• Retrait des bagues Port de l’équipement personnel de protection • Gants • Blouse à manches longues et à poignets resserrés • Masque

• Retrait du masque à l’extérieur de la chambre Transmission par gouttelettes • Port d’un masque de procédure de base si on se trouve à moins de deux mètres de l’enfant • Port d’une protection oculaire et d’une blouse de protection lors de procédures générant des éclaboussures (p. ex., l’aspiration des sécrétions)

• Protection oculaire Mesures organisationnelles • Traitement du matériel (nettoyage, désinfection et stérilisation) • Élimination du matériel coupant, tranchant et piquant • Mise en sac de la literie souillée • Hygiène et étiquette respiratoire

Transmission par contact • Port d’une blouse et de gants de protection lors de contacts avec un enfant ou un site infecté • Port d’un masque de protection en présence de vomissements • Infection à Clostridium difcile : lavage des mains obligatoire, avec de l’eau et du savon

Masque N95 – An de réduire le risque d’inhalation de particules nes qui peuvent rester longtemps en suspension dans l’air (comme la tuberculose ou la varicelle), le masque doit être bien ajusté.

Source : Adapté de ASPC (2016c).

Hygiène des mains 13 La mise en isolement est abordée dans le chapitre 13, Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation.

ENCADRÉ 9.2

Dans les hôpitaux, les clients représentent les sources les plus importantes de S. aureus résistant à la méthicilline (SARM), et le mode principal de transmission se fait d’un client à l’autre par la ore microbienne – résidente ou transitoire – qui se situe sur les mains des professionnels de la santé (Jarvis, 2015).

Facteurs de risque infectieux

Le risque infectieux [dans un établissement de santé] est fonction de plusieurs axes principaux qui interagissent ensemble : personnes (client, soignant et visiteur), processus (ensemble d’activités liées à l’organisation du travail) et environnement physique (locaux, équipements, dispositifs médicaux et technologies). Il dépend principalement des facteurs suivants : • la nature des micro-organismes impliqués, leur nombre, leur mode de transmission et leur pathogénicité ; • l’état de vulnérabilité et le comportement de la personne (personne) ; • les activités médicales et de soins (processus) ; • les activités de soutien clinique, dont le retraitement des dispositifs médicaux (processus) ; • la qualité de l’environnement physique (environnement) ; • l’efcience des mesures en hygiène et salubrité. Source : MSSS (2012).

368

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

La flore résidente est composée de microorganismes présents sous la couche supercielle de la peau ainsi que sur celle-ci. Elle est acquise pendant et après la naissance, et elle évolue au cours de la vie. Plusieurs facteurs peuvent la modier, notamment l’exposition aux antibiotiques, l’hospitalisation et les maladies de peau (p. ex., l’eczéma). Ces micro-organismes (p. ex., Staphylococcus epidermidis, Staphylococcus hominis, Corynebacterium) sont habituellement non pathogènes pour la population en général, c’est-à-dire qu’ils ne causent pas d’infection. Toutefois, ils peuvent causer des infections graves chez certains clients hospitalisés. La ore transitoire est composée de microorganismes pathogènes (p. ex., E. coli, Klebsiella, Acinetobacter baumanii) acquis lors des contacts avec les autres personnes ou l’environnement et qui se retrouvent au-dessus de la couche supercielle de la peau. Cette ore varie dans le temps, mais elle est détruite par une bonne hygiène des mains. Les pathogènes de la flore transitoire sont souvent en cause lors des infections nosocomiales. Selon les experts en prévention des infections, l’hygiène des mains est la mesure la plus efcace pour interrompre la propagation des microorganismes en milieu hospitalier. Les données

provenant de recherches internationales appuyées par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) révèlent qu’une bonne hygiène des mains pourrait réduire jusqu’à 50 % des infections dans les milieux de soins (Institut national de santé publique du Québec [INSPQ], 2014). L’hygiène des mains est reconnue mondialement comme la mesure la plus simple, la plus efcace et la moins coûteuse pour éviter les infections nosocomiales.

Pratiques inrmières ENCADRÉ 9.3

An d’optimiser la prévention des infections dans les établissements de santé, l’inrmière doit procéder à l’hygiène des mains : 1. avant de toucher à l’enfant ou à son environnement ; 2. avant une intervention aseptique ; 3. après un risque de contact avec un liquide organique ; 4. après un contact avec l’enfant ou son environnement (INSPQ, 2014).

9.1.4

Maladies et infections en service de garde

L’enfant qui fréquente un service de garde bénécie de nombreux bienfaits ; toutefois, il y est davantage

exposé aux infections, étant donné son système immunitaire immature, la proximité avec les autres enfants et les nombreux modes de transmission possibles (voie aérienne, salive et jouets) (MSSS, 2015). En effet, les services de garde présentent un risque trois fois plus élevé de transmission des infections chez les enfants TABLEAU 9.1.

clinique

Jugement

Selon l’ASPC, le taux d’observance de l’hygiène des mains des travailleurs de la santé varie entre 31 et 80 %. L’observance des règles d’hygiène de base chez le personnel inrmier était supérieure, comparativement à celle des autres professionnels de la santé (ASPC, 2012b). Les inrmières jouent donc un rôle important dans la prévention des infections dans les établissements de santé ENCADRÉ 9.3. L’Ordre des inrmières et inrmiers du Québec (OIIQ) a émis des recommandations relativement à la tenue vestimentaire du personnel inrmier et précise que les ongles articiels et les bijoux aux doigts favorisent le dépôt de microbes qui peuvent entraîner des infections nosocomiales, particulièrement chez les bébés prématurés (OIIQ, 2006).

Procéder à l’hygiène des mains

Une inrmière sort de la chambre d’un client et se lave les mains avec une solution à base d’alcool pendant 20 secondes. Elle se rend ensuite au poste pour répondre à un appel, puis se dirige vers la chambre d’un autre client. En sortant du poste, elle pousse le fauteuil roulant d’un adolescent, qui est de retour d’un examen et qui attend d’être raccompagné à sa chambre. Elle se rend ensuite à la chambre d’un enfant pour effectuer des soins. À quels moments l’inrmière aurait-elle dû procéder à l’hygiène des mains ?

TABLEAU 9.1

Maladies infectieuses susceptibles d’être transmises en service de garde

RESPIRATOIRES

ENTÉRIQUES

AUTRES INFECTIONS

ÉVITABLES PAR VACCINATION

• Inuenza

• C. difcile

• Conjonctivite

• Coqueluche

• Laryngite

• Cryptospiridiose

• Cytomégalovirus

• Gastroentérite à rotavirus

• Otite moyenne

• E. coli

• Érythème infectieux

• Hépatites A et B

• Pharyngite

• Hépatite C

• Pneumonie

• Gastroentérite virale

• Infections invasives à H. inuenzae de type B

• Rhume

• Giardase

• Infection herpétique (herpes simplex)

• Oxyurose

• Impétigo

• Salmonellose

• Méningite

• Shigellose

• Mononucléose

• Yersiniose

• Pédiculose

• Infection à SARM

• Syndrome pieds-mains-bouche • Tinea capitis • Verrues

• Infections invasives à méningocoques • Infections à pneumocoques • Inuenza • Oreillons • Rougeole • Rubéole • Varicelle

• Virus de l’immunodécience humaine (VIH)

Le guide Prévention et contrôle des infections dans les services de garde et écoles du Québec décrit les recommandations à suivre pour réduire la transmission des infections. Il peut être consulté au www.msss. gouv.qc.ca.

Source : Adapté de ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec (MSSS) (2015). Prévention et contrôle des infections dans les services de garde et écoles du Québec – Guide d’intervention. Repéré à www.publications.msss.gouv.qc.ca/msss/document-000374.

Chapitre 9

Maladies infectieuses et immunisation

369

9

Jugement

clinique

Au Québec, des infirmières en santé communauAïssatou, âgée de cinq ans, est d’origine sénégataire collaborent avec les laise. À la suite d’une appendicectomie, elle a intervenants travaillant dans contracté une infection nosocomiale de type les services de garde reconS. aureus résistant à la méthicilline à la plaie nus an de répondre à leurs opératoire. Pouvez-vous décider par vous-même questions relativement aux d’instaurer des mesures de contrôle de l’infection maladies infectieuses. Pour de la jeune cliente ? Justiez votre réponse. ce faire, ces inrmières se réfèrent à des protocoles entérinés par la Direction de la santé publique. Ce partenariat entre le MSSS et les services de garde permet d’harmoniser les pratiques en prévention des infections.

Le calendrier régulier d’immunisation du Québec est mis à jour régulièrement ; consulter le http://publications.msss. gouv.qc.ca/msss pour avoir les plus récentes mises à jour.

Le guide Mieux vivre avec son enfant, remis aux parents pendant la période périnatale, contient une foule d’informations sur les maladies infantiles. Il est disponible au www.inspq.qc.ca.

TABLEAU 9.2

9.2

Immunisation des enfants de 0 à 18 ans

L’immunisation représente l’une des grandes réussites des programmes en santé publique. L’efcacité de cette mesure préventive s’est traduite par le déclin considérable des maladies infectieuses au cours des xxe et xxie siècles (Moore, 2015). L’OMS (2017a) estime que l’immunisation a permis d’éviter de deux à trois millions de décès à l’échelle mondiale par année. Il faut cependant rester vigilant et continuer de promouvoir la vaccination chez les enfants an de maintenir et d’augmenter la couverture vaccinale optimale pour les protéger efficacement. Les vaccins administrés pendant l’enfance sont nettement plus efcaces que s’ils sont administrés à l’âge adulte. La réponse immunitaire du nourrisson est

très importante, tandis qu’elle diminue avec le vieillissement (Simon, Hollander et McMichael, 2015). Les vaccins stimulent le système immunitaire à fabriquer des anticorps et des lymphocytes T qui protègent l’organisme contre les infections (MSSS, 2018). La vaccination des parents est aussi indiquée pour diminuer les risques de transmission de maladies infectieuses pour lesquelles des vaccins existent. Les études prouvent que la coqueluche chez les bébés de moins de trois mois est transmise par un adulte proche, souvent un des parents ou des grands-parents, d’où l’importance pour ceux-ci de recevoir le vaccin contre la coqueluche (Comité sur l’immunisation du Québec [CIQ], 2015).

9.2.1

Calendrier d’immunisation du Québec

Le calendrier régulier de vaccination des enfants peut différer d’une province à l’autre ; celui du Québec est présenté dans le TABLEAU 9.2. Chaque province est responsable de la mise en œuvre des programmes de vaccination recommandés par le Comité consultatif national de l’immunisation (CCNI). Le MSSS a conçu un guide intitulé Protocole d’immunisation du Québec (PIQ), qui énonce les recommandations applicables à l’ensemble de la population québécoise. Les inrmières doivent intégrer l’immunisation comme un élément de la planication des soins qu’elles peuvent aborder au moment de l’évaluation de l’enfant ENCADRÉ 9.4.

Calendrier régulier d’immunisation du Québec

VACCIN

MALADIES ÉVITABLES

CALENDRIER

TYPE DE VACCIN

VOIE D’ADMINISTRATION

NOMS COMMERCIAUX (MARQUE DÉPOSÉE)

DCaT-HB-VPIHib

Diphtérie, coqueluche, tétanos, hépatite B, poliomyélite, infections graves à Haemophilus inuenzae de type B (Hib)

• 2 mois

Inactivé à protéines puriées

Intramusculaire

• PediacelMD ou Infanrix-IPV/ HibMD (DCaT-VPI-Hib)

Diarrhée à rotavirus

• 2 mois

Rotavirus

• 4 mois

• Infanrix-hexaMD (DCaT-HBVPI-Hib)

• 6 mois (sans HB) • 18 mois Vivant atténué

Orale (liquide)

• RotarixMD, Rota TeqMD

Inactivé à protéines puriées (intramusculaire) Vivant atténué (intranasal)

Intramusculaire ou intranasale

• Intramusculaire : AgriuMD, FluadMD, FluviralMD, InuvacMD, Fluzone quadrivalentMD, Flulaval tetraMD

Inactivé conjugué

Intramusculaire

• 4 mois Grippe

Inuenza (en saison grippale)

• Entre 6 et 23 mois (en saison grippale) • Primovaccination : 2 doses à 4 semaines d’intervalle

Pneumocoque

Infections à pneumocoque (13-valent)

• 2 mois • 4 mois • 18 mois

370

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

• Intranasal : FlumistMD

• SynorixMD, Prevnar 13MD

TABLEAU 9.2

Calendrier régulier d’immunisation du Québec (suite)

VACCIN

MALADIES ÉVITABLES

CALENDRIER

TYPE DE VACCIN

VOIE D’ADMINISTRATION

NOMS COMMERCIAUX (MARQUE DÉPOSÉE)

Méningocoque

Infection à méningocoque (type C)

• 12 mois

Inactivé conjugué

Intramusculaire

• MenjugateMD, NeisVac-CMD

Varicelle

Varicelle

• 18 mois

Vivant atténué

Sous-cutanée

• VarilrixMD, Varivax IIIMD

Vivant atténué

Sous-cutanée

• RROMD, PriorixMD (RRO)

• 14 à 16 ans • 4 à 6 ans

RRO

Rougeole, rubéole, oreillons

• 12 mois

DCaT-Polio

Diphtérie, coqueluche, tétanos, poliomyélite

• Entre 4 et 6 ans

Inactivé à protéines puriées

Intramusculaire

• Adacel-PolioMD, BoostrixPolioMD

Hépatite B

Hépatite B (ajout d’une protection contre l’hépatite A en milieu scolaire) (pour les enfants nés avant le 1er avril 2013)

• 10 ans (milieu scolaire : 4e année du primaire)

Inactivé à protéines puriées

Intramusculaire

• Recombivax HBMD, Engerix-BMD (hépatite B)

VPH

Virus du papillome humain

• 18 mois

• Priorix-TetraMD (RRO-varicelle)

• TwinrixMD (hépatites A et B)

• 1 dose du vaccin HAHB, suivie de 1 dose du vaccin HB 6 mois plus tard • 10 ans (milieu scolaire : 4e année du primaire)

9 Inactivé à protéines puriées

Intramusculaire

• GardasilMD, Gardasil 9MD, CervarixMD

Inactivé à protéines puriées

Intramusculaire

• AdacelMD, BoostrixMD

• 2 doses à 6 mois d’intervalles DCaT

Diphtérie, coqueluche, tétanos

• Entre 14 et 16 ans (milieu scolaire : 3e secondaire)

Source : Adapté mais non révisé par le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec (MSSS) (2018).Protocole d’immunisation du Québec, section Calendrier de vaccination (7e édition). Repéré à http://publications.msss.gouv.qc.ca/msss/chiers/piq/piq_complet.pdf. © Gouvernement du Québec, 2018. L’information complète est disponible sur le site du PIQ.

Pratiques inrmières ENCADRÉ 9.4

Administrer un vaccin

L’inrmière qui administre un vaccin doit suivre les 10 étapes ci-dessous : 1. Vérier, avant de lui administrer un vaccin, le statut et l’histoire vaccinale de la personne à l’aide de son carnet de vaccination, de son dossier de santé ou du registre de vaccination […]. 2. Déterminer la pertinence de vacciner la personne à la lumière des données recueillies, des indications et des contre-indications. 3. Renseigner la personne ou son représentant légal sur les avantages et les risques de la vaccination […]. 4. Obtenir le consentement ou le refus libre et éclairé de la personne ou de son représentant légal avant de procéder à la vaccination. 5. Respecter les indications, la posologie, la voie d’administration, les techniques d’injection et d’atténuation de la douleur et de l’anxiété ainsi que le calendrier d’immunisation.

6. Respecter les consignes pour la manipulation et la conservation des produits immunisants. 7. Noter les vaccinations dans le dossier, le registre de vaccination et le carnet de vaccination. [...] Le vaccinateur peut déléguer la tâche d’inscrire les vaccinations dans le registre à une tierce personne (ex. : un commis). 8. Noter également dans le dossier que le consentement ou le refus de vaccination a été obtenu. Dans le registre, le consentement étant implicite, seul le refus doit être inscrit. 9. Assurer la surveillance requise immédiatement après la vaccination. Respecter la conduite à tenir en cas de réactions à la suite de la vaccination (incluant l’administration d’adrénaline). […] 10. Déclarer au directeur de santé publique de sa région, dans les plus brefs délais, toute manifestation clinique inhabituelle survenue chez une personne qui a reçu un vaccin ou chez une personne de son entourage […].

Source : Ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec. Protocole d’immunisation du Québec. © Gouvernement du Québec, édition mai 2013.

Chapitre 9

Maladies infectieuses et immunisation

371

Maladie chronique

Mathilde, âgée de cinq ans, est hospitalisée pour une fracture du fémur. Selon le calendrier d’immunisation du Québec, elle doit recevoir son vaccin DCaT-VPI. Compte tenu de l’âge de Mathilde, quel est le site de choix pour lui administrer le vaccin ? a) Dans le quadrant supéro-externe du muscle fessier. b) Dans le centre du muscle deltoïde. c) Dans la face latérale externe de la cuisse. d) Dans la face externe du bras au-dessus du coude.

Les enfants ayant une maladie chronique sont plus susceptibles de subir des complications s’ils contractent certaines maladies. C’est pourquoi ces enfants devraient recevoir, en plus des vaccins prescrits par le calendrier vaccinal régulier, les protections supplémentaires contre certaines maladies évitables par la vaccination, qui sont énumérées dans le TABLEAU 9.3.

Vaccination contre la grippe

Le virus inuenza, responsable de la grippe, peut avoir de graves conséquences chez les nourrissons et les jeunes enfants. L’inuenza peut entraîner plusieurs complications : surinfection bactérienne

Environ 1 % des enfants affectés par la grippe saisonnière sont hospitalisés. La façon idéale de protéger les enfants et leur famille contre le virus de la grippe et ses complications est de veiller à ce qu’ils reçoivent tous annuellement le vaccin antigrippal dès l’âge de 6 mois. De plus, les femmes enceintes et toutes les personnes qui s’occupent d’enfants de moins de 2 ans devraient également se faire vacciner. En 2010, le MSSS a établi les critères à prendre en compte pour déterminer quels enfants devraient

x

x

Maladies hépatiques chroniques (porteur de l’hépatite B ou l’hépatite C, alcoolisme, cirrhose)

x

x

Maladies rénales chroniques (hémodialyse, dialyse péritonéale, insufsance rénale, syndrome néphrotique)

x

x

Maladies pulmonaires chroniques (asthme sévère nécessitant un suivi médical, brose kystique, dysplasie broncho-pulmonaire, bronchite chronique, emphysème, autres conditions amenant une diminution de l’évacuation des sécrétions respiratoires ou des risques d’aspiration)

x

x

Maladies métaboliques (diabète, obésité importante, tyrosinémie héréditaire type I)

x

xg

Asplénie anatomique ou fonctionnelle (anémie falciforme, thalassémie majeure, sphérocytose, thrombocythémie, lupus érythémateux disséminé, maladie cœliaque, maladie de Crohn, colite ulcéreuse)

x

x

Implant cochléaire

x

x

x

Conditions amenant une immunodépression (leucémie, lymphome, tumeur solide maligne, cancer non hématologique, chimiothérapie, radiothérapie, traitement immunodépresseur, infection par le VIH)

x

x

x

Greffe de cellules souches hématopoïétiques

x

x

Transplantation d’un organe plein

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x

Décience congénitale en anticorps, décience en complément, en properdine, en facteur D, en facteur H

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x

Hépatite B

Pneumocoqueb

Maladies cardiaques chroniques (cardiomyopathie, insufsance cardiaque)

CONDITIONS MÉDICALES CHRONIQUES

Hépatite A

Grippe

Haemophilus inuenzae type Bd

Vaccinations supplémentaires recommandées pour les enfants de moins de 18 ans ayant une maladie chroniquea

TABLEAU 9.3

Méningocoquec

Jugement

clinique

des voies respiratoires, otite moyenne, bronchite, laryngite et pneumonie. Chaque année, un nouveau vaccin est fabriqué pour protéger la population contre de nouvelles souches du virus de la grippe saisonnière. Ce vaccin est très sécuritaire. Comme tous les vaccins homologués au Canada, il fait l’objet de plusieurs tests rigoureux avant que son utilisation soit autorisée. Les directions de santé publique doivent vérier chaque année les populations qui sont prioritaires pour recevoir le vaccin antigrippal sur son territoire (CCNI, 2016).

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xe xf

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Source : Adapté mais non révisé par le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec (MSSS) (2018). Protocole d’immunisation du Québec, section Calendrier de vaccination (7e édition 2018). Repéré à http://publications.msss.gouv.qc.ca/msss/chiers/piq/piq_complet.pdf. © Gouvernement du Québec, 2018. L’information complète est disponible sur le site du PIQ. a Consulter le Programme d’immunisation du Québec (PIQ) pour connaître les conditions d’administration (nombre de doses et intervalles requis entre les vaccins) selon l’âge de l’enfant. b La vaccination contre le pneumocoque comprend le vaccin conjugué (enfants âgés de plus 5 ans : Prevnar-13) et le vaccin polysaccaridique (enfants âgés de plus 2 ans: Pneumovax-23). c La vaccination contre le méningocoque comprend le vaccin conjugué contre les souches ACWY (Nimenrix ou Ménactra ou Menveo) et le vaccin multicomposant contre la souche B (Bexsero ou Trumenba). d Administrer une dose additionnelle à l’enfant (tous âges) dont la vaccination est complétée, mais qui doit subir une splénectomie élective. e Non-indiqué pour les porteurs de l’hépatite B. f Non-indiqué pour les personnes avec un syndrome néphrotique. g Uniquement pour les personnes atteintes du diabète.

372

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

recevoir gratuitement le vaccin annuel en priorité. Voici ces critères : • Être âgé de 6 à 23 mois. • Être âgé de 2 ans et être atteint : – d’une maladie cardiaque ou pulmonaire chronique (dysplasie bronchopulmonaire, brose kystique, asthme) assez grave pour avoir besoin d’un suivi médical régulier ou de soins hospitaliers ; – d’une maladie chronique ou prendre des médicaments qui affaiblissent le système immunitaire (p. ex., les immunodéciences, le cancer, une infection par le VIH) ; – d’un trouble chronique métabolique (p. ex., le diabète, l’obésité importante), rénal (p. ex., une insufsance rénale), hématologique (p. ex., l’anémie, l’hémoglobinopathie) ou hépatique (p. ex., la cirrhose) ; – d’un trouble cognitif, neurologique ou neuromusculaire affectant la capacité d’expectorer des sécrétions respiratoires (p. ex., une lésion médullaire, l’épilepsie, la dystrophie musculaire). • Prendre de l’acide acétylsalicylique tous les jours. • Résider dans une région éloignée ou isolée. Tous les membres de la famille de ces enfants devraient aussi se faire vacciner annuellement contre la grippe. Cette recommandation vaut également pour les parents ayant des enfants de moins de six mois. En effet, les nourrissons de cet âge ne peuvent pas se faire vacciner, car le vaccin n’est pas efcace. Par contre, ils risquent d’être infectés si un membre de leur famille contracte la grippe.

9.2.2

Couverture vaccinale chez les enfants

La couverture vaccinale permet d’apprécier la réceptivité d’une population aux maladies évitables par la vaccination. Actuellement, il n’existe pas de données concernant la couverture vaccinale au Canada, étant donné l’hétérogénéité des calendriers d’un territoire à l’autre. Selon l’INSPQ, « [e]n 2014, la couverture vaccinale complète à 15 mois des enfants québécois se situe à 80 %. Si on exclut le nouveau vaccin contre le rotavirus, elle est de 91 %. À 24 mois, ces couvertures sont de 71 % et 85 % respectivement. La délité au calendrier de vaccination s’est améliorée depuis la dernière enquête. La couverture complète et sans aucun retard (tous les vaccins administrés dans le délai d’un mois suivant l’âge recommandé, excluant le rotavirus) est passée de 56 % en 2012 à 62 % en 2014 avec la cohorte 1 an, et de 38 % à 53 % avec la cohorte 2 ans » (Boulianne, Audet et Ouakki, 2015). Selon la dernière Enquête sur la couverture vaccinale nationale des enfants, seulement 1,5 % des enfants au Canada n’ont jamais reçu de vaccin

(Dubé, Bettinger, Fisher et al., 2016). Cette enquête révèle que les facteurs socioéconomiques, la monoparentalité et l’indice de défavorisation matérielle sont associés à une moins bonne couverture. Des retards dans le calendrier de vaccination ainsi qu’une administration non simultanée de tous les vaccins au cours d’une même visite sont aussi notés. Des efforts doivent être déployés vleur moment et proter de toutes les occasions pour vérier l’état vaccinal. L’inrmière contribue largement à promouvoir cette activité de prévention auprès des parents et des enfants. Les bienfaits de la vaccination sont réels. Par exemple, les infections à H. inuenzae de type B chez les enfants de moins de 5 ans ont diminué de 97 % depuis l’implantation du programme systématique de vaccination en 1992, et les rares cas pédiatriques déclarés surviennent chez des enfants n’ayant pas reçu d’immunisation (MSSS, 2018). Après une éclosion de cas de méningite et de méningococcémie entraînant plusieurs décès chez les adolescents au Québec, une campagne massive de vaccination contre le méningocoque de type C a été mise en place en 2001. Avec un taux de couverture de 82 %, le nombre de cas d’infections à méningocoques est passé de 58 en 2001 à 27 en 2002 (De Wals, Deceuninck, Boulianne et al., 2004).

9

En 1963-1964, avant la mise au point du vaccin contre la rougeole, on dénombrait de 300 000 à 400 000 cas annuellement. À cette époque, l’infection survenait par cycles, et l’incidence augmentait tous les 2 à 5 ans (ASPC, 2016b). En 2016, l’incidence de la rougeole au Canada était presque disparue : 0,3 cas pour 1 million d’individus, avec un total de 11 cas déclarés au Canada (ASPC, 2017). Depuis l’ajout du vaccin PrevnarMD contre les infections à pneumocoques dans le calendrier vaccinal en 1990, le taux d’infections à pneumocoques est passé de 97 en 1990 à 2 en 2011 au Québec chez les enfants de moins de 5 ans (MSSS, 2018). De plus, pendant les 15 mois suivant le début de l’administration de PrevnarMD chez les nourrissons, on a constaté une diminution de 13 % des hospitalisations imputables à la pneumonie, toutes causes confondues (De Wals, Robin, Fortin et al., 2008). Cependant, la vaccination entraîne parfois des effets indésirables et elle n’est pas sans risque. Une discussion ouverte avec les parents est nécessaire pour répondre à leurs préoccupations et leur permettre d’exercer un jugement éclairé ENCADRÉ 9.5.

9.2.3

Fausses croyances liées à la vaccination

De nombreuses fausses croyances liées à l’immunisation sont véhiculées dans la population. Elles constituent un frein dans l’atteinte des objectifs pour obtenir les couvertures vaccinales optimales et peuvent entraîner des répercussions importantes sur Chapitre 9

Maladies infectieuses et immunisation

373

Immunogénicité : Capacité d’un antigène à induire une réponse immunitaire spécique.

éactivation des connaissances Expliquez en quoi consiste un consentement libre et éclairé.

la santé des populations. Le manque de connaissances des parents concernant les contre-indications et les manifestations cliniques à la suite de la vaccination peuvent empêcher un enfant de recevoir une protection efcace contre des maladies qui peuvent mettre sa vie en péril. L’inrmière doit explorer les croyances et les valeurs des parents et des adolescents relativement à la vaccination, et transmettre l’information basée sur les recherches scientiques et les résultats probants. Une des fausses croyances est que l’administration de plusieurs vaccins combinés au cours d’une même séance peut surcharger le système immunitaire de l’enfant. Les vaccins combinés ont fait l’objet d’études rigoureuses an de déterminer leurs effets indésirables et les taux d’immunogénicité après l’administration. Selon Oft et ses collaborateurs (2002), l’administration de 11 vaccins au cours d’une même séance mobilise 0,1 % du potentiel de réponse immunitaire. De plus, cette pratique permet, d’une part, de respecter le calendrier de vaccination prévu et d’assurer la protection vaccinale plus rapidement et, d’autre part, de réduire le nombre de séances, évitant ainsi les épisodes de douleur pour les enfants et les déplacements pour les parents (Centers for Disease Control and Prevention [CDC], 2016). Les craintes quant à l’innocuité des vaccins, la croyance selon laquelle les vaccins ne sont pas bénéques, la douleur ou la peur des aiguilles, les effets indésirables possibles, la méance envers l’industrie pharmaceutique au sujet des programmes de vaccination et l’omniprésence du discours antivaccination sur le Web sont parmi les autres facteurs qui rendent les parents incertains à l’égard de la vaccination (Dubé et al., 2016). Une étude de Wakeeld et ses collaborateurs (1998) a véhiculé de fausses informations concernant le lien entre l’autisme et le vaccin combiné contre la

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 9.5

Promotion de la vaccination

L’inrmière a la responsabilité professionnelle de promouvoir la vaccination auprès de la population. Cet acte inrmier découle de la Loi sur la santé publique (RLRQ, chapitre S-2.2) visant la protection populationnelle et individuelle. L’inrmière joue ainsi un rôle de premier plan dans la réduction et le contrôle des maladies infectieuses. Les actions et les interventions prioritaires sont de mettre en place un système de relance pour le rappel de la vaccination, d’augmenter l’accessibilité aux vaccins, de soutenir les compétences des vaccinateurs et d’offrir des messages éducatifs à la population. L’inrmière doit expliquer clairement aux parents et aux enfants les bienfaits de l’immunisation, comparativement aux conséquences liées à l’absence de vaccins, et donner des renseignements valides concernant la sécurité des vaccins, leurs avantages et les manifestations cliniques possibles, ou les effets indésirables à la suite de la vaccination, an de favoriser le consentement parental libre et éclairé (MSSS, 2018). Elle doit proposer aux parents et à la famille des ressources (p. ex., des sites Web) pertinentes et reconnues scientiquement, car certains médias sont trompeurs, et leurs informations ne sont pas ables. L’inrmière doit déterminer clairement les raisons justiant la non-administration de vaccins.

374

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

rougeole, la rubéole et les oreillons (RRO) (cette étude a été retirée de la revue médicale The Lancet en 2011). Cela a engendré une baisse inutile de la couverture vaccinale dans plusieurs pays. Des chercheurs ont passé en revue toutes les études ayant porté sur l’autisme et la vaccination, lesquelles concernaient 1,25 million d’enfants. Ils en sont venus à la conclusion qu’il n’existe aucun lien entre l’autisme et l’administration de vaccins, et que les ingrédients contenus dans les vaccins – comme le thimérosal ou le mercure – n’augmentent pas le risque d’autisme (Taylor, Swerdfeger et Eslick, 2014).

9.2.4

Contre-indications et précautions à la vaccination

Il faut renoncer à la vaccination ou la reporter en présence de contre-indications ou par mesure de précaution. Selon le Protocole d’immunisation du Québec, les trois contre-indications à l’administration des vaccins homologués au Canada sont : 1. les réactions anaphylactiques à un composant du vaccin (p. ex., les œufs, le thimérosal, le latex) ; 2. l’immunosuppression importante (pour les vaccins vivants atténués seulement) ; 3. la grossesse (pour les vaccins vivants atténués seulement). L’inrmière doit également prendre certaines précautions lorsque l’état général de l’enfant est affecté ou en présence d’une maladie aiguë, modérée ou grave, avec ou sans èvre. Ces états peuvent réduire la réponse immunitaire aux vaccins administrés, ce qui affecterait la protection (MSSS, 2018). Ces précautions peuvent se traduire par le report de la date de la vaccination ou par une surveillance clinique accrue à la suite de l’administration du vaccin TABLEAU 9.4.

9.2.5

Atténuation de la douleur et de l’anxiété lors de la vaccination

La douleur et l’anxiété liées aux injections de vaccins constituent une barrière importante pour une immunisation complète chez certains enfants. Dans une étude canadienne menée en 2012 auprès de 883 parents et de 1 024 enfants, la peur des aiguilles a été rapportée comme étant la principale raison du refus de vaccination chez 24 % des parents et 63 % des enfants (Taddio, Ipp, Thivakaran, et al., 2012). Plusieurs études ont démontré que des mesures simples permettent d’atténuer la douleur lors de l’administration des vaccins, comme il est indiqué dans le TABLEAU 9.5.

9.2.6

Manifestations cliniques possibles après la vaccination

Les vaccins administrés dans le cadre des vaccinations régulières gurent parmi les produits immunisants les plus sécuritaires. L’OMS (2013) estime que les manifestations bénignes courantes, telles qu’un malaise et de la èvre, sont de l’ordre de 1 à 10 %.

TABLEAU 9.4

Contre-indications et précautions liées à la vaccination

PROBLÈME OU ÉTAT DE SANTÉ

CONTRE-INDICATIONS OU PRÉCAUTIONS

Anaphylaxie (ou réaction allergique immédiate grave) suivant l’administration d’une dose antérieure du même vaccin

Ne pas administrer le même vaccin. Diriger l’enfant vers une clinique spécialisée qui déterminera si le vaccin est la cause de la réaction.

Grossesse

Ne pas administrer de vaccins vivants atténués.

• État d’immunodépression grave : – Décience immunitaire congénitale ou acquise – Leucémie, lymphome ou cancer non hématologique (immunodépression causée par la maladie, la chimiothérapie ou la radiothérapie) – Agents immunodépresseurs (p. ex., des corticostéroïdes, des agents biologiques)

• Enfant recevant de la chimiothérapie ou ayant reçu une greffe d’organe solide ou de moelle osseuse : consulter un spécialiste ou le médecin traitant. • Immunodépression permanente : ne pas administrer de vaccins vivants atténués. • Immunodépression temporaire : vacciner avant l’immunodépression. – Au moins 14 jours avant dans le cas d’un vaccin inactivé ; – Au moins 28 jours avant dans le cas d’un vaccin vivant atténué (6 semaines dans le cas du vaccin contre la varicelle).

Maladie aiguë, modérée ou grave, avec ou sans èvre

Éviter la vaccination pendant la phase aiguë de la maladie.

Administration récente de produits sanguins

Prévoir des intervalles variant de 3 à 11 mois selon le produit sanguin reçu (risque d’interférence entre le produit sanguin et le vaccin vivant atténué, qui pourrait engendrer une faible réponse immunitaire de celui-ci).

Syndrome de Guillain-Barré survenant dans les 6 semaines suivant le vaccin contre l’inuenza ou contre le tétanos

Consulter un spécialiste ou le médecin traitant.

Trouble de la coagulation grave

Appliquer une pression sur le site d’injection pendant 5 minutes. Privilégier la vaccination après une transfusion de plaquettes (dans certains cas).

Syndrome oculorespiratoire survenant après le vaccin contre l’inuenza

Consulter un spécialiste ou le médecin traitant.

9

Sources : Adapté de ASPC (2016a) ; MSSS (2018).

TABLEAU 9.5

Mesures permettant d’atténuer la douleur et l’anxiété lors de la vaccination

MESURES D’ATTÉNUATION

AVANT

• Bien positionner l’enfant. – Favoriser le contact peau à peau (nourrissons seulement), asseoir l’enfant sur les genoux du parent, demander au parent de tenir l’enfant. – S’assurer que le bras est détendu, et non appuyé sur une surface.

0-3 ans

3-7 ans

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• Ne pas dire que ça ne fait pas mal et éviter d’utiliser certains termes, comme piqûre ou piquer.

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• Encourager l’allaitement avant et pendant l’administration des vaccins.

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• Prévoir un moyen simple de distraction (parler durant la vaccination, divertir par une action précise, montrer une vidéo). • Administrer une solution sucrée aux enfants de 2 ans et moins. a • Utiliser un anesthésique topique ou un PENDANT

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analgésique.b

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– Injections intramusculaires : utiliser une aiguille de calibre 25G.

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– Injections sous-cutanées : utiliser une aiguille de calibre 26-27G de 1,25 cm et faire l’injection à un angle de 90°.

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• Administrer les vaccins douloureux en dernier.c

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• Administrer un analgésique.d

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• Rassurer le parent et l’enfant, et discuter des mesures d’atténuation à privilégier à la prochaine vaccination.

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• Insérer rapidement l’aiguille et ne pas aspirer lors de l’injection.

APRÈS

7-18 ans

Sources : Adapté de MSSS (2018) ; Taddio, McMurtry, Shah et al. (2015). a Administrer une solution sucrée de 1 à 2 minutes avant l’injection (1 sachet de sucre dans 15 à 30 mL d’eau) OU administrer en premier le vaccin oral contre le rotavirus, si indiqué. b Appliquer localement une crème anesthésique topique au moins 30 minutes avant la vaccination (selon la marque utilisée). c Certains vaccins sont plus douloureux, notamment Prevnar 13MD, RRO et GardasilMD. d Administrer de l’acétaminophène après la vaccination pour soulager la douleur et la èvre. Il est déconseillé de donner systématiquement ces médicaments en prévention en raison d’un doute sur l’interférence possible avec l’efcacité de certains vaccins.

Chapitre 9

Maladies infectieuses et immunisation

375

clinique

Jugement

Les réactions graves nécessitant une prise en charge médiAprès avoir administré les vaccins de William, âgé cale sont peu fréquentes, voire de 18 mois, vous demandez à la mère de demeurer rares (moins de 1 %). Une revue dans la salle d’attente pour 15 minutes avant de systématique de 67 études partir. Pourquoi prendre cette précaution ? sur la vaccination démontre que s’il est vrai que certains vaccins peuvent causer des effets indésirables graves (p. ex., des convul16 sions fébriles après le vaccin RRO), ces cas demeurent extrêmement rares (Maglione, Das, Raaen L’anaphylaxie est expliquée et al., 2014). dans le chapitre 16, Toutefois, trois types de manifestations cliTroubles liés au système niques peuvent survenir : cardiovasculaire. 1. des réactions locales ; 2. des réactions systémiques ; 3. des réactions d’hypersensibilité ou des réactions allergiques. D’autres réactions peuvent être attribuables à des erreurs dans l’application des programmes de vaccination et ainsi contribuer aux manifestations cliniques observées après la vaccination.

Réactions locales Les réactions locales, qui sont fréquentes, se manifestent par une réaction inammatoire au site d’injection : douleur ou sensibilité, rougeur ou érythème, induration et chaleur FIGURE 9.2. La réaction locale de type inammatoire peut être plus intense chez les enfants à la quatrième ou à la cinquième dose de la série contre la diphtérie, la coqueluche et le tétanos. Dans certains cas, un nodule sous-cutané peut être observé pendant quelques semaines, et ce, particulièrement après l’injection de vaccins contenant du sel d’aluminium comme adjuvant. En lisant la monographie de chaque vaccin homologué au Canada, les manifestations cliniques possibles spéciques par antigène et selon leur composition sont aussi indiquées. Par exemple, pour les vaccins composés de virus vivants atténués tels que le vaccin RRO et celui contre la varicelle, des réactions locales peuvent apparaître plus tardivement. FIGURE 9.2 Manifestations locales après la vaccination : rougeur et œdème

Réactions systémiques La majorité des manifestations systémiques observées après la vaccination ne sont pas spéciques : èvre modérée, malaise ou irritabilité, céphalée, éruptions,

arthralgies ou myalgies, nausées, vomissements ou diarrhée. Une hypotension transitoire, souvent associée à la peur des injections, est parfois observée.

Réactions d’hypersensibilité ou réactions allergiques L’anaphylaxie est la réaction allergique la plus fréquente, quoique rare, qui peut survenir à la suite de l’administration d’un vaccin 16 . D’autres types de réactions locales d’hypersensibilité peuvent aussi apparaître, par exemple la réaction d’Arthus et la nécrose.

Surveillance des manifestations inhabituelles Au Canada, les inrmières et les autres professionnels de la santé doivent déclarer les manifestations inhabituelles qui surviennent après une vaccination (RLRQ, chapitre S-2.2). Il existe également un réseau national de surveillance active de l’immunisation, le réseau IMPACT (Immunization Monitoring Program ACTive), administré par la Société canadienne de pédiatrie (SCP) et constitué de 12 centres au Canada, dont 3 au Québec (SCP, 2017). Le réseau IMPACT s’intéresse aux cas les plus graves d’hospitalisation à la suite de réactions indésirables et inhabituelles. Au Québec, le Programme de surveillance passive des effets secondaires possiblement reliés à l’immunisation (ESPRI) assure le contrôle de la qualité des vaccins offerts et répertorie les déclarations de manifestations inhabituelles faites à l’échelle provinciale.

9.3 9.3.1

Maladies infectieuses et transmissibles Principales maladies infectieuses et transmissibles

L’incidence des maladies transmissibles de l’enfance a diminué considérablement depuis l’avènement des produits immunisants. L’usage des antibiotiques et des antitoxines a en outre réduit les complications graves résultant de ces infections. Toutefois, les maladies infectieuses existent toujours, et l’inrmière doit se familiariser avec les agents infectieux an de pouvoir reconnaître la maladie et intervenir adéquatement TABLEAU 9.6.

Maladies infectieuses et transmissibles

TABLEAU 9.6

Coqueluche – Maladie à déclaration obligatoire Agent causal

• Incidence plus élevée chez les nourrissons et les enfants

• Bordetella pertussis Épidémiologie

• Hospitalisations et décès fréquents chez les nourrissons, surtout ceux de moins de 3 mois

• Maladie endémique cyclique au Canada qui connaît des pics d’activité tous les 2 à 5 ans

• Augmentation notable de l’incidence de la maladie au Canada en 2012 ; les raisons de cette hausse sont inconnues (Smith, Rotondo, Desai et al., 2014)

376

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

TABLEAU 9.6

Maladies infectieuses et transmissibles (suite)

Coqueluche – Maladie à déclaration obligatoire (suite) Source • Écoulement des voies respiratoires de personnes infectées Transmission • Contact direct avec une personne infectée ou transmission par gouttelettes à partir d’une telle personne • Contact indirect avec des objets récemment contaminés Période d’incubation • De 6 à 20 jours ; généralement de 7 à 10 jours Période de contagion • Plus importante durant la phase catarrhale, avant le début des paroxysmes Manifestations cliniques • Phase catarrhale : – Au départ, manifestations cliniques d’une infection des voies respiratoires supérieures : rhinite, éternuements, larmoiement, toux et èvre légère ; manifestations cliniques persistant pendant 1 à 2 semaines alors qu’une toux sèche et quinteuse devient plus intense • Phase des quintes : – Toux plus fréquente la nuit consistant en de petites quintes courtes et rapides, suivies d’une inspiration soudaine accompagnée d’un son aigu qualié de chant du coq (la reprise) ; durant les crises, les joues deviennent rouges ou cyanosées, les yeux sont proéminents et la langue sort de la bouche ; la crise peut se poursuivre jusqu’à ce qu’un épais bouchon de mucus soit délogé ; le vomissement suit souvent une quinte de toux ; cette phase dure généralement de 4 à 6 semaines et est suivie par la phase de convalescence – Possibilité que les nourrissons de moins de 6 mois n’aient pas cette toux quinteuse caractéristique, mais qu’ils maintiennent difcilement une oxygénation adéquate, ayant des sécrétions abondantes et des vomissements fréquents de mucus ou de lait (de formule ou maternel) Complications • Pneumonie (cause habituelle du décès chez les enfants plus jeunes) • Atélectasie • Otite moyenne • Convulsions • Hémorragie (de la sclère ou de la conjonctive, épistaxis ; hémorragie pulmonaire chez le nouveau-né) • Perte de poids et déshydratation • Hernies (ombilicale et inguinale)

• Prolapsus du rectum • Complications rapportées chez les adolescents : syncope, perturbation du sommeil, fracture des côtes, incontinence et pneumonie Diagnostic • Culture bactérienne ou amplication moléculaire (PCR) des sécrétions nasopharyngées Traitement • Traitement antimicrobien (p. ex., érythromycine, clarithromycine, azithromycine) ; les pénicillines et les céphalosporines ne sont pas efcaces contre B. pertussis Soins de confort • Hospitalisation parfois nécessaire pour les nourrissons et les enfants déshydratés ou présentant des complications • Apport accru d’oxygène et d’humidité • Hydratation adéquate • Soins intensifs et ventilation articielle, au besoin, pour les nourrissons de moins de 6 mois

9

Prévention • Vaccination (ne confère pas une immunité à vie) Soins inmiers • Maintenir l’isolement durant la phase catarrhale ; si l’enfant est hospitalisé, mettre en place les précautions additionnelles contre la transmission par gouttelettes. • Porter un masque pour les travailleurs de la santé en contact avec des enfants ayant une toux persistante et chez qui la coqueluche est fortement soupçonnée. • Encourager la prise orale de liquides ; offrir fréquemment de petites quantités de liquide. • Assurer une oxygénation adéquate durant les quintes ; placer le nourrisson sur le côté pour réduire les risques d’aspiration des vomissements. • Administrer de l’oxygène humidié ; aspirer les sécrétions, au besoin, pour prévenir la suffocation. • Surveiller les signes d’obstruction des voies aériennes (agitation, faciès anxieux, tirage, cyanose). • Encourager l’adhésion des membres de l’entourage au traitement antibiotique. • Encourager les adolescents et les adultes à recevoir un vaccin de rappel contre la coqueluche (DCaT).

Diphtérie – Maladie à déclaration obligatoire Agent causal • Corynebacterium diphtheriae Source • Écoulement des muqueuses du nez et du nasopharynx, de la peau et d’autres lésions d’une personne infectée Transmission • Contact direct avec une personne infectée, un porteur ou des objets contaminés Période d’incubation • Généralement de 2 à 5 jours, possiblement plus

Période de contagion • Période variable ; se termine quand il n’y a plus de bacilles virulents (avéré par 2 cultures négatives) ; habituellement 2 semaines, mais parfois jusqu’à 4 semaines • Chez les clients traités par des antimicrobiens adéquats, infection transmissible durant environ 4 jours (ASPC, 2012a) Manifestations cliniques • Variables selon la localisation anatomique de la pseudomembrane atteinte : – Nez : › signes cliniques d’un simple rhume : écoulement nasal sérosanguin et mucopurulent sans signes généraux › Possibilité d’épistaxis franche Chapitre 9

Maladies infectieuses et immunisation

377

TABLEAU 9.6

Maladies infectieuses et transmissibles (suite)

Diphtérie – Maladie à déclaration obligatoire (suite) – Amygdales et pharynx : › Malaise, anorexie, mal de gorge, état subfébrile ; en moins de 24 heures, accélération de la fréquence cardiaque au-dessus des valeurs attendues › Membrane lisse, adhérente, blanche ou grise › Lymphadénite possiblement prononcée (cou proconsulaire ou tuméfaction du cou) › Dans les cas graves, sepsie, choc septique et mort survenant en 6 à 10 jours – Larynx : › Fièvre, enrouement et toux, accompagnés ou non des signes précédents › Obstruction possible des voies respiratoires › Rétractions dyspnéiques › Cyanose Complications • Myocardiopathie toxique (deuxième ou troisième semaine) • Neuropathie périphérique Diagnostic • Présentation clinique • Recherche en laboratoire par échantillon de salive ou de sécrétions dans la gorge

Traitement • Antitoxine diphtérique équine (généralement par voie intraveineuse) précédée d’un test cutané ou conjonctival pour vérier s’il y a sensibilité au sérum équin ; désensibilisation parfois nécessaire • Antibiotiques (pénicilline G sodique [voie intramusculaire ou intraveineuse], pénicilline G benzathine [voie intramusculaire] ou érythromycine [voie orale ou intraveineuse] pour 14 jours) en plus de l’antitoxine équine • Repos complet (prévention de la myocardite) • Trachéotomie en cas d’obstruction des voies respiratoires Prévention • Vaccination de base chez les enfants de moins de 5 ans, puis rappel tous les 10 ans (immunité non conférée par la maladie) Soins inmiers • Appliquer les précautions additionnelles pour prévenir la transmission par gouttelettes, jusqu’à ce que 2 cultures de C. diphtheriae soient négatives ; appliquer les précautions pour prévenir la transmission par contact en cas de manifestations cutanées. • Administrer les antibiotiques en temps opportun. • Participer au test de sensibilité ; garder de l’épinéphrine à portée de la main. • Donner les soins complets pour un enfant alité. • Aspirer les sécrétions, au besoin. • Observer la respiration pour déceler des signes d’obstruction. • Administrer de l’oxygène humidié, comme prescrit.

Exanthème subit (roséole infantile) Agent causal • Virus de l’herpès humain de type 6 (VHH-6 ; rarement VHH-7) Source • Possiblement transmis par la salive d’une personne adulte en bonne santé ; pénétration par les muqueuses nasale ou buccale, ou par la conjonctive Transmission • Toute l’année ; dans la plupart des cas, pas de contact rapporté avec une personne infectée • Cas observés presque uniquement chez les enfants de moins de 3 ans ; fréquence maximale entre 6 et 15 mois Période d’incubation • Généralement de 5 à 15 jours Période de contagion • Inconnue • Fièvre élevée persistant de 3 à 4 jours chez un enfant qui semble en bonne santé

• Retour rapide à la normale de la température avec apparition de l’éruption cutanée • Éruption cutanée : macules ou maculopapules roses, discrètes, apparaissant d’abord sur le tronc, puis se répandant au cou, au visage et aux extrémités ; non prurigineuses ; s’estompent sous la pression ; durent de 1 à 2 jours • Manifestations cliniques générales : lymphadénopathie cervicale et derrière les oreilles, inammation du pharynx, toux, rhinite Complications • Convulsions fébriles récurrentes (possiblement attribuables à une infection latente du système nerveux central réactivée par la èvre) • Encéphalite (rare) Diagnostic • Présentation clinique seulement Traitement • Traitements non spéciques • Antipyrétiques pour maîtriser la èvre Soins inmiers • Enseigner aux parents les mesures pour abaisser la température. • Si l’enfant est sujet aux convulsions, discuter des précautions appropriées et de la possibilité de convulsions fébriles récurrentes.

Infection à Haemophilus inuenzae de type B – Maladie à déclaration obligatoire Agent causal • Bactérie Haemophilus inuenzae de type B (Hib) Épidémiologie • Jeunes enfants de moins de 5 ans

378

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Source • Sécrétions oropharyngées Transmission • Par contact direct • Par projection de gouttelettes

TABLEAU 9.6

Maladies infectieuses et transmissibles (suite)

Infection à Haemophilus inuenzae de type B – Maladie à déclaration obligatoire (suite) Période d’incubation • Inconnue Période de contagion • Tant que la bactérie est présente dans les voies respiratoires Manifestations cliniques • Variables selon les maladies que peut causer l’infection : – Méningite (Hib) (présentation clinique la plus grave) : céphalées importantes, raideur de la nuque, nausées, vomissements – Bactériémie (peut être accompagnée ou non d’une autre atteinte comme la méningite) : èvre – Épiglottite : difculté marquée à avaler avec hypersalivation ; difculté respiratoire survenant rapidement ; détérioration pouvant survenir en quelques heures et nécessiter une intubation – Cellulite : rougeur, douleur et chaleur dans le tissu cutané – Arthrite septique : rougeur, douleur, chaleur et gonement d’une articulation – Pneumonie : toux et douleur thoracique Complications • Méningite à Hib : présentation clinique la plus grave ; décès survenant dans 3 à 5 % des cas ; séquelles neurologiques, notamment surdité et décience intellectuelle chez 20 à 45 % des survivants

Diagnostic • Culture bactérienne des liquides biologiques (liquide cérébrospinal [LCS], liquide pleural, hémoculture dans le sang) Traitement • Antibiothérapie intraveineuse dont la durée dépend du site infecté • Dans les cas de méningite : combinaison d’ampicilline et de chloramphénicol pendant 10 jours Prévention • Vaccination de base chez les enfants de moins de 5 ans (DCaT-VPI-Hib) à l’âge de 2, 4, 6 et 18 mois Soins inmiers • Surveiller les signes de détérioration neurologique. • Observer la respiration pour déceler des signes d’obstruction (p. ex., une cyanose, de l’agitation, un faciès anxieux). • Prendre la température et administrer des antipyrétiques, au besoin. • Évaluer s’il y a présence de douleurs articulaires. • Surveiller les signes d’infection sur la peau : œdème, rougeur, chaleur, douleur au toucher.

9

Infection à pneumocoques Agent causal • Streptococcus pneumoniae (diplocoque à Gram positif) • Plus de 90 sérotypes différents Source • Flore normale du nasopharynx Épidémiologie • Cause la plus fréquente des otites moyennes aiguës et des infections invasives chez l’enfant Physiopathologie • Infections locales (p. ex., otite, sinusite, conjonctivite, pneumonie) ou invasives (p. ex., bactériémie, septicémie, méningite, arthrite septique, ostéomyélite) Transmission • Directement, par contact avec des sécrétions respiratoires Période d’incubation • De 1 à 3 jours Période de contagion • Jusqu’à 24 heures après le début du traitement antibiotique Manifestations cliniques • Fièvre • Variables selon les maladies que peut causer l’infection : – Pneumonie : tirage intercostal, cyanose, tachypnée, toux, diminution de la saturation – Méningite : céphalées importantes, raideur de la nuque, nausées, vomissements – Bactériémie : èvre – Cellulite : rougeur, douleur et chaleur dans le tissu cutané – Arthrite septique : rougeur, douleur, chaleur et gonement d’une articulation

– Ostéomyélite : atteinte osseuse, principalement des os longs (fémur, radius), accompagnée de boiterie et de douleur à la mise en charge Complications • Plus fréquentes chez les enfants ayant : – un implant cochléaire – un système immunitaire affaibli – une néphropathie, une hépatopathie, une pneumopathie ou une cardiopathie – du diabète ou de l’asthme Diagnostic • Culture bactérienne et coloration au Gram de liquide purulent provenant du site d’infection (LCS, liquide pleural ou articulaire) • Hémoculture Traitement • Combinaison de vancomycine et de céfotaxime ou de ceftriaxone intraveineuse pendant 10 à 21 jours selon le site d’infection • Antibiothérapie intraveineuse à domicile à envisager dans certains cas • Pénicilline en dernier recours (résistance des souches de pneumocoque chez près de 40 % des clients) Prévention • Vaccin conjugué antipneumococcique (13-valent) chez le jeune enfant : 3 ou 4 doses au 2e, 4e (6e, si 4 doses) et 12e mois • Pour les enfants avec une maladie chronique, ajout du vaccin polysaccharidique (23-valent) à partir de l’âge de 2 ans Soins inmiers • Prendre les signes vitaux et surveiller la èvre (premier signe d’une infection à pneumocoques).

Chapitre 9

Maladies infectieuses et immunisation

379

TABLEAU 9.6

Maladies infectieuses et transmissibles (suite)

Infection à pneumocoques (suite) • Surveiller les signes de détresse respiratoire associés aux pneumonies : tirage intercostal, cyanose, tachypnée, toux, diminution de la saturation ; administrer de l’oxygène humidié, au besoin. • Surveiller les signes de détérioration neurologique.

• Surveiller les signes d’infection sur la peau : œdème, rougeur, chaleur, douleur au toucher. • Surveiller les signes de douleur à la mise en charge ou de boiterie dans les cas d’atteintes osseuses.

Infection envahissante à méningocoques – Maladie à déclaration obligatoire Agent causal • Neisseria meningitidis (diplocoque à Gram négatif) Source • Sécrétions oropharyngées de personnes infectées Physiopathologie • Infections comprenant Méningococcémie avec début de nécrose principalement la ménin­ des extrémités gite, la méningococcémie et, moins fréquemment, la pneumonie et l’arthrite septique • Éruption méningococcique (Purpura fulminans) : forme la plus grave ; affection due à la coagulation intravasculaire disséminée causée par la bactériémie méningococcique ; peut parfois provoquer la perte de doigts et de membres ; dans le cas d’une atteinte grave, possibilité de choc septique entraînant une insufsance respiratoire et rénale, un coma et parfois la mort dans les 24 heures suivant l’apparition des manifestations cliniques (ASPC, 2011b) Transmission • Directement, par contact avec des sécrétions respiratoires Période d’incubation • De 1 à 10 jours Période de contagion • 7 jours avant l’apparition des symptômes et jusqu’à 24 heures après le début du traitement Manifestations cliniques • Méningococcémie : malaise, irritabilité, èvre, atteinte de l’état de conscience, hypotonie, nausées, vomissements • Méningite : céphalées importantes, raideur de la nuque, nausées, vomissements • Pneumonie : tirage intercostal, cyanose, tachypnée, toux, diminution de la saturation • Arthrite septique : rougeur, douleur, chaleur et gonement d’une articulation • Infections entérovirales

Complications • Méningococcémie : atteinte et décit neurologique ; amputation, principale­ ment des membres ; cicatrices cutanées ; décès • Méningite : atteinte et décit neurologique Diagnostic • Culture bactérienne et coloration au Gram de liquide purulent provenant du site d’infection (LCS) • Hémoculture Traitement • Pénicilline G par voie intraveineuse pendant 7 jours (sufsant dans la plupart des cas) • Chimioprophylaxie (Rifampicine sur 2 jours) à proposer aux proches et aux professionnels de la santé ayant eu un contact étroit avec l’enfant lors d’un épisode de lésions cutanées pétéchiales Prévention • Vaccination contre les souches de méningocoques les plus fréquents (A, B, C, Y et W­135) : – Vaccin administré dans le calendrier régulier ; protège contre le groupe C : 1 dose à 12 mois et 1 rappel à l’adolescence – Deux autres vaccins antiméningococciques protègent contre les souches A, C, Y et W­135, et un autre contre le type B ; vaccins réservés aux enfants présentant des facteurs de risque d’infections fulminantes (asplénie, anémie falciforme) Soins inmiers • Surveiller les lésions cutanées et les pétéchies : localisation, quantité, évolution des extrémités. • Surveiller les signes de choc : hypotension, tachypnée, èvre, irrégularité de la pulsation. • Intervenir de manière urgente en cas de choc : appel à l’aide immédiate, ouverture de la voie veineuse, administration d’un volume important de liquide. • Commencer rapidement l’antibiothérapie. • Prendre les signes vitaux et surveiller la èvre (premier signe d’une infection à pneumocoques). • Surveiller les signes de détresse respiratoire associés aux pneumonies : tirage intercostal, cyanose, tachypnée, toux, diminution de la saturation ; administrer de l’oxygène humidié, au besoin. • Surveiller les signes de détérioration neurologique associés aux méningites.

Infections entérovirales (maladie pieds-mains-bouche et herpangine) Agent causal

Transmission

• Virus de la famille des entérovirus, notamment le virus Coxsackie A16 et l’entérovirus 71

• Par contact direct avec les sécrétions respiratoires

Source

• Par projection de gouttelettes

• Salive, sécrétions respiratoires et selles de jeunes enfants infectés

• Par contact féco­oral : le virus est excrété dans les selles pendant plusieurs mois

380

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

TABLEAU 9.6

Maladies infectieuses et transmissibles (suite)

Infections entérovirales (maladie pieds-mains-bouche et herpangine) (suite) Période d’incubation

Complications

• De 3 à 6 jours

• Encéphalite, péricardite, myocardite, pneumonie, conjonctivite hémorragique ou paralysie, autant chez le jeune enfant que chez l’adolescent

Période de contagion De 1 à 3 semaines Manifestations cliniques • Maladie pieds-mainsbouche – Lésions vésiculaires sur la langue pouvant se Maladie pieds-mains-bouche transformer en petits ulcères et causer des douleurs buccales accompagnées d’un refus de manger

• Possibilité de complications et de tableaux cliniques graves chez les enfants immunosupprimés et les nouveau-nés Diagnostic • Culture virale de sécrétions dans la gorge, l’urine ou les selles • Recherche PCR-entérovirus dans le liquide cérébrospinal Traitement • Aucun traitement spécique Soins de confort

– Éruptions cutanées sur les mains, les pieds et les cuisses, et aux plis des couches

• Antipyrétiques en cas de température subfébrile et d’inconfort

– Fièvre, vomissements, diarrhée et, rarement, adénopathies cervicales

• Aucun vaccin Soins inmiers

• Herpangine – Fièvre élevée – Vésicules et ulcérations douloureuses sur les piliers amygdaliens, la luette et le palais mou, qui rendent la déglutition douloureuse

Prévention

9

• Appliquer les précautions contre la transmission par gouttelettes et par contact avec des selles durant tout le long de l’hospitalisation (maximum 3 semaines). • Surveiller les signes neurologiques. • Encourager la prise de liquides froids durant la phase fébrile ; éviter les liquides irritants (certains jus d’agrumes) et les aliments râpeux.

Mégalérythème épidémique (cinquième maladie) Agent causal • Parvovirus B19 humain Source • Personnes infectées, surtout des enfants d’âge scolaire Transmission • Sécrétions respiratoires, sang et produits sanguins Période d’incubation • De 4 à 14 jours ; peut aller jusqu’à 21 jours Période de contagion • Incertaine, mais avant l’apparition des manifestations cliniques chez les enfants atteints de crise aplasique ; terminée à l’apparition des éruptions cutanées Manifestations cliniques • Manifestations de l’éruption en trois étapes : 1. Érythème facial, surtout sur les joues (comme si le visage avait été gié) ; disparition en 1 à 4 jours 2. Environ 1 jour après l’apparition de l’éruption dans la gure, apparition de taches rouges maculopapulaires distribuées symétriquement sur les membres supérieurs et les membres inférieurs ; progression de l’éruption des surfaces proximales vers les surfaces distales pouvant durer 1 semaine ou plus 3. Atténuation de l’éruption, mais réapparition si la peau est irritée ou traumatisée (soleil, chaleur, froid, friction)

• Éruption généralement absente chez les enfants qui font une crise aplasique ; signes avant-coureurs : èvre, myalgie, léthargie, nausées, vomissements et douleurs abdominales • Crise vaso-occlusive concomitante possible chez les enfants atteints d’anémie à hématies falciformes Complications • Possibilité de complications sérieuses (anémie, anasarque) ou de mort du fœtus si la mère est infectée pendant sa grossesse (surtout durant la première moitié de la grossesse) • Crise aplasique chez les enfants atteints de maladie hémolytique ou d’immunodécience • Myocardite (rare) Diagnostic • Présentation clinique • Recherche dans le sang du virus parvovirus IgM Traitement • Transfusion sanguine possible en cas de crise aplasique Soins de confort • Médicaments antipyrétiques, analgésiques, anti-inammatoires Soins inmiers • Placer l’enfant hospitalisé (immunodéprimé ou faisant des crises aplasiques) chez qui une infection au parvovirus B19 est soupçonnée en isolement respiratoire ; sinon, il n’est pas nécessaire d’isoler l’enfant.

Chapitre 9

Maladies infectieuses et immunisation

381

Maladies infectieuses et transmissibles (suite)

TABLEAU 9.6

Mononucléose Agent causal

• Monotest (anticorps hétérophiles) : peu sensible chez les moins de 5 ans

• Virus herpétique Epstein-Barr

• Recherche d’anticorps spéciques (VCAM ou EBV IgM)

Source

Traitement

• Enfant d’âge préscolaire et adolescent

• Aucun traitement spécique

Épidémiologie

Soins de confort

• Maladie touchant principalement les adolescents en milieu scolaire ; passe habituellement inaperçue chez les enfants d’âge préscolaire

• Repos, hydratation, antipyrétiques Prévention • Aucun vaccin • Si splénomégalie (rate hypertrophiée lors de l’examen physique) : arrêt des sports de contact Soins inmiers • Soulager les manifestations cliniques et assurer le confort. • Enseigner aux parents à prendre la température et à faire baisser la èvre. • Surveiller la formule sanguine complète (anémie, thrombocytopénie). • Surveiller la fonction hépatique (alanine aminotransférase [ALT] et aspartate aminotransférase [AST]). • Soulager les symptômes de l’hypertrophie des amygdales : sucettes glacées (PopsicleMD), pastilles analgésiques, gargarisme.

• Immunité acquise à l’âge adulte chez 95 % des individus Transmission • Par contact direct et indirect Période d’incubation • De 4 à 6 semaines Période de contagion • Inconnue • Persistance possible de l’excrétion pharyngée pendant des mois après une primo-infection Manifestations cliniques • Fièvre, fatigue importante et prolongée, pharyngite exsudative, adénopathie cervicale ou axillaire, hépatosplénomégalie et lymphocytose sur la formule sanguine complète (FSC)

ALERTE CLINIQUE

• Souvent aucune manifestation chez les enfants d’âge préscolaire • Rash secondaire à l’amoxicilline souvent observé Complications • Hypertrophie des amygdales • Rupture de la rate • Atteinte neurologique : syndrome de Guillain-Barré • Thrombocytopénie, anémie hémolytique, hépatite • Déclenchement possible d’une forme de cancer (lymphome) chez l’enfant Diagnostic • Présentation clinique

Consulter de toute urgence un médecin en présence des manifestations cliniques suivantes : • respiration difcile ; • douleur à la gorge si intense que l’enfant est incapable d’avaler des liquides ; • stridor respiratoire ; • douleur aiguë localisée dans le quadrant supérieur gauche de l’abdomen ; • douleur à l’épaule gauche qui augmente avec la respiration ; • douleur thoracique à gauche ; • hypotension soudaine (étourdissement, confusion, pâleur, évanouissement) (Berry, 2017).

Paludisme (malaria) – Maladie à déclaration obligatoire Agent causal • Parasite du genre Plasmodium (Plasmodium falciparum, forme la plus répandue et la plus grave ; Plasmodium vivax, ovale et malariae) Source • Salive de moustiques femelles infectés Épidémiologie • Maladie infectieuse la plus répandue au monde : 216 millions de cas de paludisme en 2016 dont 445 000 décès selon l’OMS (2017c) • Possibilité d’une immunisation partielle et d’infections asymptomatiques dans les zones d’endémie Physiopathologie • Gravité de la malaria en fonction du taux d’attaque des parasites vers les globules rouges ; une parasitémie supérieure à 5 % est un signe de gravité

382

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Transmission • Par un moustique (Anopheles) • Congénitale mère-enfant rare Période d’incubation • Inconnue Période de contagion • De 7 à 50 jours Manifestations cliniques • Fièvre, fatigue, céphalées, douleurs abdominales, frissons, diaphorèse, myalgie, vomissements, splénomégalie ; manifestations associées à une histoire de voyage récent en zone endémique • Enfants fortement atteints : anémie grave, détresse respiratoire consécutive à une acidose métabolique ou paludisme cérébral

TABLEAU 9.6

Maladies infectieuses et transmissibles (suite)

Paludisme (malaria) – Maladie à déclaration obligatoire (suite) Complications • Convulsions, coma, décès Diagnostic • Frottis sanguin et goutte épaisse du sang (au microscope) • Recherche de malaria dans le sang Traitement • Choix du traitement en fonction de la possible résistance, bien connue dans plusieurs régions du monde • Antimalariques : doxycycline, quinine, chloroquine, chlorhydrate de proguanil (MalaroneMD), méoquine ou artésunate – Malaria simple sans complication : MalaroneMD – Malaria grave : artésunate intraveineux ; dans certains cas graves ; des échanges transfusionnels sont parfois nécessaires Prévention • Consultation d’un spécialiste en santé-voyage 4 semaines avant le départ pour discuter des moyens de prévention de la malaria (Boggild, Brophy, Charlebois et al., 2014) • Prise d’antimalariques en fonction des taux de résistance, du pays, des effets indésirables et des interactions avec d’autres médicaments

• Choix de lieux d’hébergement climatisés ou dont les fenêtres sont munies de moustiquaires • Utilisation d’une moustiquaire traitée avec de la perméthrine • Utilisation d’un répulsif ou d’une crème contre les moustiques qui contient au moins 30 % de diéthyltoluamide (DEET) • Port de vêtements à manches longues et de pantalons amples qui couvrent la plus grande partie du corps Soins inmiers • Prendre les signes vitaux et surveiller la èvre (première manifestation du paludisme). • Surveiller les signes de détérioration neurologique. • Reconnaître les manifestations d’une aggravation : somnolence, changement de comportement, détresse respiratoire, jaunisse, convulsions. • Surveiller les signes de choc : hypotension, tachypnée, èvre, irrégularité de la pulsation. • Surveiller les marqueurs biologiques d’une malaria qui s’aggrave : anémie grave (Hb 50 et moins), acidose (pH 7,25 ou moins), hémoglobinurie et parasitémie supérieure à 2 %.

Poliomyélite – Maladie à déclaration obligatoire Agent causal • Poliovirus de type entérovirus ; il en existe trois : – Type 1 : le plus fréquent ; cause de la paralysie, aussi bien épidémique qu’endémique – Type 2 : type le moins fréquemment associé à la paralysie – Type 3 : deuxième type le plus fréquemment associé à la paralysie Source • Matières fécales et sécrétions oropharyngées de personnes infectées, en particulier de jeunes enfants Transmission • Contact direct avec des personnes atteintes d’une infection active, qu’elle soit apparente ou non • Par voie orofécale, oro-orale et par les sécrétions des voies respiratoires • Vaccin oral à virus vivant contre la poliomyélite (qui n’est plus offert au Canada) dans le cas de la poliomyélite paralytique associée à la vaccination Période d’incubation • Habituellement de 7 à 14 jours, avec une étendue de 5 à 35 jours Période de contagion • Pas précisément connue ; le virus est présent dans la gorge et les selles peu de temps après l’infection, et persiste pendant environ 1 semaine dans la gorge, et de 4 à 6 semaines dans les selles Manifestations cliniques • Trois formes différentes : – Abortive ou inapparente : › Fièvre, malaise, mal de gorge, céphalées, anorexie, vomissements, douleurs abdominales › Durée : de quelques heures à quelques jours

– Non paralytique : mêmes manifestations que la forme abortive, mais plus graves, accompagnées de douleur et de raideur au cou, au dos et aux jambes – Paralytique : évolution initiale semblable à la forme non paralytique, suivie d’un rétablissement, puis de signes de paralysie du système nerveux central Complications • Paralysie permanente • Arrêt respiratoire • Hypertension • Calculs rénaux dus à la déminéralisation des os durant une immobilité prolongée Diagnostic • Deux prélèvements de sécrétions pharyngées et de selles dans les 24 heures suivant l’apparition des manifestations cliniques • Consultation d’un spécialiste en maladies infectieuses pour conrmer le diagnostic, puisque cette maladie a presque disparu en Amérique du Nord Traitement • Aucun traitement spécique Soins de confort • Repos complet durant la phase aiguë • Ventilation spontanée assistée en cas de paralysie respiratoire • Physiothérapie pour les muscles après la phase aiguë Prévention • Vaccination en bas âge chez les jeunes enfants : vaccin combiné DCaT-VPIHib (à 2, 4, 6 et 18 mois, puis dose de rappel entre 4 et 6 ans [DCaT-VPI]) • Administration d’une dose supplémentaire aux personnes séjournant dans les zones où des cas sont rapportés (Afrique)

Chapitre 9

Maladies infectieuses et immunisation

383

9

TABLEAU 9.6

Maladies infectieuses et transmissibles (suite)

Poliomyélite – Maladie à déclaration obligatoire (suite) Soins inmiers • Administrer des sédatifs légers, au besoin, pour réduire l’anxiété et favoriser le repos. • Participer aux traitements de physiothérapie (compresses chaudes et humides, et exercices d’amplitude). • Positionner l’enfant de façon à maintenir l’alignement du corps an de prévenir les contractures ou les lésions cutanées ; recourir à des appuispieds ou à des orthèses appropriées pour prévenir la chute du pied ; utiliser un matelas à gonement alternatif en cas d’immobilité prolongée.

• Encourager l’enfant à s’adonner aux activités de la vie quotidienne, dans la mesure du possible ; favoriser l’ambulation précoce par des aides à la locomotion ; administrer des analgésiques pour augmenter le confort durant l’activité physique. • Procurer un régime hyperprotéiné et favoriser l’élimination intestinale en cas d’immobilisation prolongée. • Surveiller les manifestations de paralysie respiratoire (difculté d’élocution, toux improductive, incapacité de retenir sa respiration, respirations supercielles et rapides) ; rapporter ces manifestations au médecin.

Rage – Maladie à déclaration obligatoire Agent causal • Virus Rhabdoviridae Source • Salive d’un animal infecté Épidémiologie • Au Québec, 7 % des chauves-souris sont porteuses de la rage ; à la campagne, les plus grands porteurs de rage sont les chauves-souris, les renards, les mouffettes et les ratons laveurs. Physiopathologie • Après sa pénétration dans un nouvel hôte, le virus se multiplie dans les cellules musculaires et se propage en suivant les voies nerveuses sans déclencher de réponse immunitaire de protection chez l’hôte. Transmission • Salive d’une chauve-souris ou d’un mammifère infecté qui pénètre dans l’organisme à la suite d’une morsure ou d’une écorchure Période d’incubation • De 4 à 6 semaines selon la quantité de virus dans la salive, la distance entre l’endroit de la morsure et le cerveau ou les nerfs, ainsi qu’en fonction du nombre et de la profondeur des morsures Manifestations cliniques • Période de malaise général, de èvre et de mal de gorge non spéciques à la rage, suivie d’une phase d’excitation qui comprend une hypersensibilité et une réaction accrue aux stimulus externes, des hallucinations, des convulsions, une hyperactivité, un comportement maniaque et une suffocation. • Tentatives de déglutition pouvant provoquer un spasme si important des muscles respiratoires que de l’apnée, une cyanose et une anoxie peuvent se produire • Contractures douloureuses des muscles de la déglutition pouvant causer de l’hydrophobie chez près de 50 % des enfants en provoquant une contraction réexe qui se produit à la vue de liquides Complications • Coma, suivi d’une insufsance respiratoire et de la mort, après une période d’excitabilité et d’agitation pouvant durer plusieurs jours

Diagnostic • Immunouorescence des antigènes spéciques sur des tissus du cerveau (cheveux) de la personne exposée ou de l’animal euthanasié (biopsie du cerveau) • Consultation d’un spécialiste en maladies infectieuses Traitement • Nettoyage de la plaie avec de l’eau, du savon et un agent virucide, et administration le plus tôt possible après la morsure des 2 agents antirabiques ci-dessous • Prophylaxie postexposition antirabique composée de 2 types de produits immunisants à administrer simultanément : – globulines, qui contiennent des anticorps préformés – vaccination antirabique en 4 doses à administrer dès le 1er jour, puis les 3e, 7e et 14e jours suivants, ce qui induira une réponse immunitaire active Soins de confort • Agents paralysants et sédatifs Prévention • En prévision d’un voyage en zone endémique, vaccination, notamment lorsqu’un enfant est amené dans une région du monde où la rage chez les chiens errants est omniprésente ; consultation en clinique du voyageur recommandée • Vaccination de tous les animaux domestiques contre la rage Soins inmiers • Hospitaliser l’enfant. • Appliquer les précautions additionnelles d’isolement (gouttelettes et contact). Le virus se transmet par les sécrétions et le liquide cérébrospinal. • Être prudent lors de l’approche à l’enfant aux derniers stades de la maladie, car il peut devenir agressif. Au besoin, l’administration d’agents paralysants et de sédatifs peut soulager l’enfant. • Apporter le soutien émotionnel nécessaire aux parents dont l’enfant va décéder. • Proter de chaque occasion pour rappeler aux enfants de ne pas s’approcher des animaux sauvages.

Rougeole – Maladie à déclaration obligatoire Agent causal • Virus de la famille des Paramyxoviridae Source • Sécrétions des voies respiratoires, sang et urine d’une personne infectée

384

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Transmission • Généralement par contact direct avec des gouttelettes provenant d’une personne infectée ; surtout l’hiver Période d’incubation • De 8 à 12 jours

TABLEAU 9.6

Maladies infectieuses et transmissibles (suite)

Rougeole – Maladie à déclaration obligatoire (suite) Période de contagion • De 3 à 5 jours avant l’apparition de l’éruption cutanée ; jusqu’à 4 à 5 jours après, mais surtout pendant la phase prodromique (catarrhale) Manifestations cliniques • Phase prodromique (catarrhale) : – Fièvre et malaise, suivis dans les 24 heures par une rhinite, de la toux, une conjonctivite, des taches de Koplik (petites taches rouges irrégulières avec un minuscule centre blanc bleuâtre) d’abord observées sur la muqueuse buccale à l’opposé des molaires 2 jours avant l’éruption cutanée ; la gravité des manifestations augmente graduellement jusqu’au deuxième jour après l’apparition de l’éruption, puis s’atténue par la suite • Éruption cutanée : – Apparition de 3 à 4 jours après le début de la phase prodromique ; début sous forme d’une éruption maculopapulaire érythémateuse sur le visage, qui se répand graduellement vers le bas ; plus intense sur les premiers sites touchés (maculopapules conuentes) et moins grave sur ceux atteints plus tard (lésions discrètes) ; aspect brunâtre après 3 à 4 jours et ne desquamation se produisant sur les zones les plus gravement atteintes • Manifestations cliniques générales : – Anorexie, douleurs abdominales, malaise, lymphadénopathie généralisée Complications • Otite moyenne • Pneumonie (bactérienne) • Laryngite obstructive et laryngotrachéite • Diarrhées intenses • Encéphalite (rare, mais mortalité élevée) Diagnostic • Présentation clinique • Culture virale ou PCR-rougeole sur urine, ou sécrétions nasopharyngées

• Dosage sérologique des anticorps : rougeole IgM Traitement • Aucun traitement spécique Soins de confort • Repos durant la période fébrile ; antipyrétiques Prévention • Vaccination des enfants : vaccins vivants atténués combinés rougeolerubéole-oreillons : calendrier à 2 doses (12 et 18 mois) • Supplémentation en vitamine A 1 fois par jour pour 2 jours Soins inmiers • Prévention de la transmission : – Maintenir l’isolement jusqu’au 5e jour de l’éruption. – Si l’enfant est hospitalisé, mettre en place les précautions contre la transmission par gouttelettes. – Favoriser le repos durant la phase prodromique ; proposer des activités calmes. • Fièvre : – Expliquer aux parents comment administrer les antipyrétiques. – Éviter les variations de température ambiante. – Si l’enfant est sujet aux convulsions, prendre les précautions pour assurer sa sécurité. • Soins des yeux : – Tamiser la lumière en cas de photophobie. – Nettoyer les paupières avec une solution saline chaude pour enlever les sécrétions ou les croûtes. – Empêcher l’enfant de se frotter les yeux. • Rhinite, toux : – Utiliser un humidicateur à vapeur froide. – Protéger la peau entourant les narines avec une couche de gelée de pétrole (VaselineMD). – Encourager la prise de liquides et d’aliments mous et peu sapides. • Soins de la peau : – Garder la peau propre ; donner des bains tièdes, au besoin.

Rubéole – Maladie à déclaration obligatoire Agent causal • Virus de la rubéole, dans la famille des Togaviridae Source • Surtout les sécrétions nasopharyngées d’une personne ayant une infection apparente ou non ; le virus est aussi présent dans le sang, les selles et l’urine Période d’incubation

– Température subfébrile, céphalées, malaise, anorexie, conjonctivite légère, rhinite, mal de gorge, toux et lymphadénopathie – Durée : de 1 à 5 jours ; décroît 1 jour après l’apparition de l’éruption • Éruption cutanée : – Apparition d’abord sur le visage se répandant rapidement vers le cou, les bras, le tronc et les jambes ; à la n du premier jour, le corps est couvert d’un exanthème maculopapulaire discret et rosâtre ; disparition dans le même ordre de son apparition, généralement en 3 jours

• De 14 à 23 jours, habituellement de 16 à 18 jours

• Manifestations cliniques générales : température subfébrile occasionnelle, céphalées, malaise et lymphadénopathie

Période de contagion

Complications

• De 7 jours avant l’apparition de l’éruption cutanée jusqu’à environ 5 jours après

• Rares (arthrite, encéphalite ou purpura) ; la plus bénigne de toutes les maladies transmissibles de l’enfance ; le plus grand danger est son effet tératogène sur le fœtus

Manifestations cliniques • Phase prodromique (absente chez l’enfant, présente chez l’adolescent) :

Chapitre 9

Maladies infectieuses et immunisation

385

9

Maladies infectieuses et transmissibles (suite)

TABLEAU 9.6

Rubéole – Maladie à déclaration obligatoire (suite) Diagnostic

Prévention

• Présentation clinique • Culture virale ou PCR-rubéole sur sécrétions nasopharyngées

• Vaccination : vaccins vivants atténués combinés rougeole-rubéoleoreillons : calendrier à 2 doses (12 et 18 mois)

• Dosage sérologique des anticorps : rubéole IgM

Soins inmiers

Traitement

• Rassurer les parents sur la nature bénigne de la maladie qui touche leur enfant.

• Aucun traitement spécique nécessaire

• Utiliser, au besoin, des mesures de confort.

Soins de confort

• Éviter le contact avec des femmes enceintes.

• Antipyrétiques et analgésiques

• Vérier le taux d’anticorps rubéoleux chez l’adolescente enceinte.

Scarlatine Agent causal • Streptocoques bêtahémolytiques du groupe A Source • Généralement, les sécrétions nasopharyngées de personnes infectées ou de porteurs Transmission Scarlatine – Premier jour : langue • Directement, par contact framboisée blanche avec une personne infectée ou par transmission par gouttelettes • Indirectement, par contact avec des objets contaminés, ou par ingestion de lait ou d’autres aliments contaminés Période d’incubation • De 2 à 5 jours, avec une étendue de 1 à 7 jours Période de contagion • Pendant la période d’incubation et la phase clinique de la maladie, soit environ 10 jours • Fin de la contagion après 24 heures d’un traitement antibiotique adéquat • En présence de personnes porteuses du streptocoque dans le pharynx, persistance de l’état de porteur pendant des mois (le risque de transmission est alors minimal) Manifestations cliniques • Phase prodromique : èvre élevée subite, tachycardie, vomissements, céphalées, frissons, malaise, douleurs abdominales, haleine fétide • Énanthème : – Amygdales hypertrophiées, œdémateuses, rougies et couvertes de plaques d’exsudat qui, dans les cas graves, ressemblent à la membrane observée dans un cas de diphtérie – Pharynx œdémateux et rouge vif ; durant le premier ou les 2 premiers jours, la langue est recouverte d’un enduit épais, et les papilles deviennent rouges et enées (langue framboisée) • Exanthème : – Apparition de l’éruption cutanée en 12 heures après les signes prodromiques ; les lésions ponctuées rouges de la taille d’une tête d’épingle deviennent généralisées (impression de papier sablé), mais restent

386

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

absentes du visage, lequel devient tout rouge avec une pâleur péribuccale saisissante ; éruption plus marquée dans les plis des articulations • Desquamation commençant à la n de la première semaine (ne, ayant l’aspect du papier abrasif sur le torse ; par plaques sur la paume des mains et la plante des pieds) et se complétant en 3 semaines ou plus • Après le début du traitement antibiotique, au 4e ou 5e jour, détachement de l’enduit blanc, ce qui laisse les papilles proéminentes Complications • Abcès périamygdaliens et rétropharyngés • Sinusite • Otite moyenne • Glomérulonéphrite aiguë • Rhumatisme articulaire aigu • Polyarthrite (peu fréquente) Diagnostic • Culture bactérienne de gorge • Test de détection rapide de l’antigène streptococcique sur un prélèvement pharyngé Traitement • Cure complète de pénicilline (10 jours) • En présence d’une allergie à la pénicilline, possibilité d’utiliser la clindamycine ou l’érythromycine (ou un autre macrolide) ; utilisation possible de céphalosporine par voie orale chez un enfant pour qui une allergie croisée est peu probable • Antibiothérapie pas toujours indiquée pour les porteurs (cultures du nez et de la gorge positives pour le streptocoque) nouvellement diagnostiqués : dépend de la situation • Possibilité d’administration de pénicilline G benzathine en cas de problème d’adhésion au traitement Soins de confort • Repos durant la phase fébrile • Analgésiques pour le mal de gorge • Antiprurigineux en présence d’une éruption cutanée incommodante Soins inmiers • Appliquer les précautions additionnelles contre la transmission par gouttelettes, jusqu’à 24 heures après le début du traitement. • S’assurer de l’adhésion à l’antibiothérapie orale et de la prise complète du traitement.

TABLEAU 9.6

Maladies infectieuses et transmissibles (suite)

Scarlatine (suite) • Favoriser le repos durant la phase fébrile ; proposer des activités calmes pendant la période de convalescence. • Soulager l’inconfort du mal de gorge grâce à des analgésiques, à des gargarismes, à des pastilles, à des vaporisations antiseptiques et à l’inhalation de vapeur froide. • Encourager la prise de liquides froids durant la phase fébrile ; éviter les liquides irritants (certains jus d’agrumes) et les aliments râpeux (crous-

tilles) ; lorsque l’enfant est capable de manger, commencer par un régime d’aliments froids de consistance molle. • Aviser les parents de consulter le médecin si la èvre persiste après le début du traitement. • Discuter des mesures visant à prévenir la propagation de l’infection (jeter la brosse à dents ; éviter de partager des boissons et les ustensiles).

Varicelle Agent causal • Virus varicelle-zona (VZV) Source • Sécrétions des voies respiratoires Transmission • Par contact direct • Par gouttelettes (aéroportées) et par des objets contaminés • Dans une moindre mesure, par les lésions cutanées (les croûtes ne sont pas contagieuses) Période d’incubation • De 2 à 3 semaines, mais généralement de 14 à 16 jours (peut être aussi courte que 10 jours) Période de contagion • Environ de 1 jour avant l’éruption des lésions (période prodromique) et jusqu’à 6 jours après la première éruption de vésicules, ou jusqu’à ce que toutes les lésions soient croûtées Manifestations cliniques • Phase prodromique : – Légère èvre, malaise et anorexie durant les 24 premières heures – Éruption très prurigineuse qui commence sous forme de macules progressant rapidement en papules, puis en vésicules (entourées d’une base érythémateuse) ; les vésicules deviennent ombiliquées et troubles ; elles se brisent facilement et forment des croûtes – Trois stades (papules, vésicules, croûtes) présents en même temps à divers degrés

• Thrombocytopénie chronique ou passagère • Glomérulonéphrite, arthrite, hépatite (rares) Diagnostic • Présentation clinique • Culture virale et immunouorescence du liquide provenant des lésions vésiculaires fraîches • Agent antiviral acyclovir (ZoviraxMD) ; immunoglobulines contre le virus varicelle-zona (VarizigMD) ou immunoglobulines humaines non spéciques (GamaSTAN S/DMD) par voie intraveineuse après une exposition pour les enfants à risque élevé Soins de confort • Chlorhydrate de diphenhydramine ou antihistaminiques pour soulager la démangeaison Prévention • Vaccination (pas nécessairement d’immunité conférée par la maladie) • Soins de la peau an de prévenir une surinfection bactérienne Soins inmiers • Si l’enfant est hospitalisé, appliquer les précautions additionnelles d’isolement pour prévenir la transmission par contact direct et par voie aérienne, jusqu’à ce que les lésions soient encroûtées ; isoler l’enfant vacciné qui a une poussée modérée de varicelle jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de nouvelles lésions. • Garder l’enfant à la maison, loin des personnes vulnérables, jusqu’à ce que les vésicules aient séché (généralement, 1 semaine après l’apparition de la maladie) et isoler les enfants à risque élevé de ceux infectés. • NE PAS APPLIQUER de calamine (lotion à base d’oxyde de zinc) pour calmer les démangeaisons an d’éviter une surinfection des lésions avec des bactéries logées sur la surface de la peau.

• Propagation : centripète ; lésions se répandant au visage, aux cuisses et aux bras, mais clairsemées sur les jambes et les avant-bras, et moins abondantes sur les zones non exposées à la chaleur (générée par les vêtements ou le soleil)

• Soins de la peau : donner quotidiennement un bain et changer les vêtements et la literie au besoin ; garder les ongles de l’enfant courts et propres ; lui mettre des mitaines s’il se gratte.

• Manifestations cliniques générales : èvre élevée due à la lymphadénopathie ; irritabilité attribuable au prurit

• Maintenir l’enfant au frais (ce qui peut réduire le prurit).

Complications

• Pour soulager le prurit, privilégier des bains apaisants à base d’avoine colloïdale (AveenoMD).

• Surinfections bactériennes (abcès, cellulite, fasciste nécrosante, pneumonie, septicémie)

• Distraire l’enfant.

• Encéphalite

9

Traitement

• Retirer les croûtes lâches qui frottent sur la peau et l’irritent.

• Pneumopathie varicelleuse (enfant de moins de 6 mois ou immunodéprimé)

• Montrer à l’enfant à appliquer une pression sur une zone prurigineuse plutôt que de la gratter.

• Varicelle hémorragique (minuscules hémorragies dans les vésicules et nombreuses pétéchies sur la peau)

• Éviter l’usage d’acide acétylsalicylique (association possible avec le syndrome de Reye).

Sources : Adapté de American Academy of Pediatrics (AAP) (2015) ; CDC (2017) ; Moore (2015) ; MSSS (2015). Chapitre 9

Maladies infectieuses et immunisation

387

Au Québec, les professionnels de la santé et les laboratoires sont tenus de signaler certaines maladies aux autorités de santé publique. Ces maladies à déclaration obligatoire (MADO) peuvent être d’origine infectieuse (p. ex., la rougeole, la tuberculose) ou chimique (p. ex., l’amiantose). La vigie des MADO vise à détecter toute menace à la santé publique et, le cas échéant, à mettre en œuvre des mesures an de la contrôler. Elle permet également de déceler les tendances et de planier les soins à fournir, notamment en matière de prévention (MSSS, 2017b).

Prévention des complications

Virémie : Présence de virus dans le sang.

Toutes les maladies infectieuses ont des complications possibles. Bien que la plupart des enfants se rétablissent sans problème, certains groupes risquent de souffrir de complications sérieuses, voire fatales, à la suite de maladies transmissibles, en particulier les maladies virales que sont la varicelle et le mégalérythème épidémique (cinquième maladie) causé par le parvovirus B19 humain. Les enfants immunodécients – ceux qui reçoivent des stéroïdes ou une autre thérapie immunosuppressive, qui sont atteints d’un cancer généralisé, comme la leucémie ou un lymphome, ou qui sont touchés par un trouble immunologique – sont les plus susceptibles d’être infectés par l’un ou l’autre de ces virus.

FIGURE 9.3 Le zona se présente sous la forme de lésions vésiculaires groupées qui suivent le trajet d’un dermatome sensoriel (bande de territoire cutané innervée par les bres sensitives provenant du même nerf).

La réplication du virus varicelle-zona (VZV) dans le sang risque d’entraîner une virémie chez ces enfants. Le VZV est ainsi nommé parce qu’il cause deux maladies distinctes : la varicelle et le zona. La varicelle touche surtout les enfants de moins de 15 ans. Elle laisse toutefois après elle la menace de zona, une affection extrêmement douloureuse localisée près d’un dermatome unique, c’est-à-dire une région du corps innervée par un segment donné de la moelle épinière FIGURE 9.3. Les dermatomes cervicaux et sacrés sont les plus susceptibles d’être touchés chez l’enfant (Leung,

Jugement

clinique

Le mégalérythème épidémique risque de causer une anémie aplasique chez les enfants atteints d’une maladie hémolytique comme la drépanocytose. Le parvovirus B19 humain infecte les précurseurs des globules rouges et provoque leur lyse, interrompant de ce fait la production de ceux-ci. Par conséquent, le virus peut précipiter une grave crise aplasique chez les enfants qui ont besoin d’une production accrue de globules rouges pour maintenir un volume globulaire normal ; la thrombocytopénie et la neutropénie peuvent aussi résulter d’une infection par le parvovirus B19 humain. La prévention des complications de maladies comme la diphtérie, la coqueluche et la scarlatine est directement liée à l’antibiothérapie. Dans le cas des préparations orales, il faut insister sur la nécessité de poursuivre le traitement jusqu’à la n. L’utilisation de gammaglobulines antivaricelle-zona ou d’immunoglobulines intraveineuses est recommandée pour les enfants immunodéprimés qui n’ont pas d’antécédents de varicelle, et qui risquent de contracter la maladie et d’être victimes de complications (MSSS, 2018). L’agent antiviral acyclovir (ZoviraxMD) peut servir à traiter les infections de varicelle chez les enfants immunodéprimés vulnérables ; il est efcace pour diminuer le nombre de lésions, pour raccourcir la durée de la èvre, ainsi que pour réduire la démangeaison, la léthargie et l’anorexie. L’administration d’acyclovir par voie orale devrait être envisagée, notamment pour les enfants immunodéprimés sans antécédents de varicelle (ASPC, 2011c). Des indices suggèrent que la supplémentation en vitamine A réduit à la fois la morbidité et la B

Jessie, âgée de 12 ans, a reçu une greffe rénale il y a 2 mois et elle prend des médicaments immunosuppresseurs. Elle est atteinte d’un zona depuis les derniers jours. Son néphrologue a décidé de l’hospitaliser et de la placer en isolement strict. Sa mère vous demande si elle peut attraper le zona de Jessie. Que devriez-vous lui répondre ? À la lumière de la réponse à la question précédente, indiquez deux questions que vous devriez poser à la mère de Jessie an de déterminer les risques d’infection.

388

A

Robson et Leong, 2006). Les clients immunodéprimés et les nourrissons bien portants de moins de un an (dont l’immunité est aussi réduite) présentent un risque plus élevé de réactivation du VZV causant le zona, probablement en raison d’un décit de l’immunité cellulaire. Les complications du virus herpes zoster chez l’enfant comprennent des surinfections bactériennes FIGURE 9.4, la dépigmentation et la formation de cicatrices ; la névralgie postherpétique n’est pas courante chez l’enfant.

Partie 3

FIGURE 9.4 Varicelle surinfectée – La surinfection des lésions vésiculaires est une des complications les plus fréquentes de la varicelle. Les deux photos montrent des lésions de varicelle surinfectée caractérisées par la coloration typique verdâtre (lésions encerclées au stylo sur la photo A).

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Soins de confort Les soins de confort sont particulièrement importants dans le traitement des maladies infectieuses. Le soulagement des démangeaisons, des maux de gorge et des douleurs ainsi que le traitement de la èvre contribueront à une diminution de l’intensité des symptômes désagréables liés aux maladies infectieuses.

Démangeaisons Beaucoup de ces maladies entraînent des manifestations cutanées gênantes pour l’enfant. Les infections cutanées, la sécheresse de la peau, les piqûres d’insectes et les allergies constituent les principales causes de démangeaisons ; les bains tièdes (généralement sans savon) et l’usage de lotions neutres ou à base d’avoine colloïdale peuvent s’avérer bénéques 2 . Souvent, refroidir la lotion avant son application soulagera davantage la peau que si elle est appliquée à la température ambiante. Il est à noter que la calamine est contre-indiquée pour plusieurs maladies, dont la varicelle, car elle risque d’entraîner une contamination croisée des lésions et de masquer des lésions surinfectées. An d’éviter la chaleur excessive, qui amplie les démangeaisons, l’enfant devrait porter des vêtements légers, amples et non irritants, et éviter l’exposition au soleil. Si l’enfant persiste à se gratter, il est recommandé de garder ses ongles courts et propres ; le port de mitaines et de vêtements à manches ou à jambes longues peut être nécessaire. Un médicament antiprurigineux comme la diphenhydramine (Benadryl MD ) ou l’hydroxyzine (AtaraxMD) peut être requis en cas de démangeaisons intenses, surtout si celles-ci empêchent l’enfant de

dormir. La loratadine, la cétiriPHARMACOVIGILANCE zine et la fexofénadine ne causent pas de somnolence et 1. Bien que le risque d’intoxication par la vitamine A soit peuvent être préférables pour relativement faible, les parents doivent entreposer soulager l’urticaire durant la ce médicament de façon sécuritaire. Une dose trop journée. élevée de cette vitamine pourrait entraîner des vomissements et des céphalées. Fièvre 2. Les lotions contenant des ingrédients actifs comme Il est fréquent que l’enfant la diphenhydramine qui sont utilisées pour calmer atteint d’une maladie infecles démangeaisons doivent être appliquées avec tieuse fasse de la fièvre ; il modération, en particulier sur les lésions ouvertes, convient alors de lui adminiscar leur absorption excessive pourrait entraîner une trer un antipyrétique et de intoxication. Il faut également être prudent dans le cas contrôler la température des enfants qui reçoivent aussi un antihistaminique par ambiante. L’acétaminophène voie orale, puisque ce type de lotion en contient déjà un. combat efcacement la èvre, 3. Utiliser l’acétaminophène avec précaution pour les mais ne réduit pas de façon nourrissons de moins de 4 mois ou de moins de 5,5 kg importante les manifestations ayant une température rectale supérieure à 38,5 °C. cliniques comme les démanDans ce cas, il faut en aviser le médecin. geaisons, l’anorexie, la douleur abdominale, l’agitation ou les vomissements 3 .

Maux de gorge Le mal de gorge, un autre symptôme fréquent, est 6 soulagé avec des pastilles, des gargarismes salés (si L’administration de l’enfant est assez vieux pour coopérer) et des analgévitamine A est traitée dans siques. Étant donné que l’appétit des enfants diminue le chapitre 6, Problèmes quand ils sont malades, ils préfèrent habituellement de santé du nourrisson. manger des aliments peu sapides et boire davantage de liquides. Durant les stades précoces de la maladie, les enfants réduisent d’eux-mêmes leurs activités et, même si le repos au lit est préférable, il ne faut pas l’imposer, sauf s’il est spéciquement indiVous effectuez la collecte de données auprès qué. Durant les épisodes d’irride Sabrina, âgée de deux ans, qui est admise en tabilité, une activité calme pédiatrie pour une maladie transmissible éruptive (p. ex., la lecture, la musique, la de type varicelle. Nommez au moins six données à télévision, les casse-tête, le colorecueillir au cours de l’examen physique de Sabrina. riage) aide à distraire l’enfant de son inconfort.

clinique

Jugement

mortalité attribuables à la rougeole, et qu’il conviendrait d’administrer des suppléments de cette vitamine à tous les enfants atteints d’une rougeole grave 1 . (OMS, 2017d) 6

Soins inrmiers MALADIES INFECTIEUSES

La détection de l’apparition d’une maladie potentiellement contagieuse liée à un agent infectieux est de la première importance an de limiter l’exposition et de prévenir la transmission. Les inrmières qui travaillent dans les services de soins ambulatoires, les milieux de garde et les écoles sont souvent les premières personnes à observer les signes d’une maladie infectieuse, comme un mal de gorge ou une éruption cutanée 22 . L’inrmière doit conserver une vigilance extrême à l’égard des maladies infantiles courantes an de dépister les cas potentiellement infectieux et de reconnaître les maladies qui nécessitent une intervention médicale

ou des précautions ENCADRÉ 9.6 . Le mal de gorge, dont l’enfant se plaint fréquemment, en est un exemple. Bien qu’il soit le plus souvent le symptôme d’une infection virale mineure, il peut signaler la diphtérie ou une infection streptococcique, comme la scarlatine. Chacune de ces affections bactériennes nécessite un traitement médical approprié an de prévenir des séquelles graves. Lorsqu’une maladie infectieuse est suspectée, il est important de vérier : • l’exposition récente à un cas connu ; • les signes avant-coureurs (signes qui apparaissent entre les premières manifestations de la maladie et son syndrome clinique manifeste)

Chapitre 9

ALERTE CLINIQUE

En cas d’exposition avérée ou d’épidémie, l’enfant à risque élevé de contracter une maladie transmissible doit immédiatement être dirigé vers un médecin. 22 Les maladies derma­ tologiques infectieuses sont traitées dans le chapitre 22, Troubles liés au système tégumentaire.

Maladies infectieuses et immunisation

389

9

ou les manifestations cliniques générales comme la èvre ou une éruption cutanée ; • les antécédents vaccinaux ; • les antécédents concernant cette maladie. Il existe des vaccins contre de nombreuses maladies, et le fait d’avoir souffert de l’infection confère habituellement une immunité à vie ; il est donc possible d’éliminer plusieurs agents infectieux sur la base de ces deux critères.

Prévenir la propagation 1 Les trois niveaux de prévention sont expliqués dans le chapitre 1, Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté.

La prévention de la propagation comprend les préventions primaire, secondaire et tertiaire 1 . La prévention primaire repose presque exclusivement sur la vaccination. Les mesures de contrôle visant à prévenir la propagation de la maladie devraient comprendre des mesures pour diminuer les risques de contamination croisée entre l’enfant et son entourage, qu’il soit hospitalisé ou à domicile. L’hygiène des mains est la mesure la plus importante. Les personnes qui s’occupent directement de l’enfant ou qui manipulent des objets contaminés doivent procéder à l’hygiène des mains et employer adéquatement les précautions courantes au moment des soins. Il faut apprendre à l’enfant à procéder à l’hygiène de ses mains selon la bonne technique après être allé aux toilettes et avant de manger. Si l’enfant est

hospitalisé, il convient de suivre les règles de prévention des infections de l’établissement. Dans le cas des maladies transmises par gouttelettes, l’inrmière enseigne aux parents les mesures permettant de réduire la transmission par voie aérienne. Si l’enfant est assez âgé, il doit utiliser un mouchoir pour se couvrir la gure quand il tousse ou éternue ; sinon, le parent doit couvrir la bouche de l’enfant avec un mouchoir, puis jeter celui-ci. Il convient de rappeler à la famille les mesures d’hygiène habituelles, notamment de ne pas partager la vaisselle et les ustensiles utilisés pour manger ou pour boire.

Soutenir l’enfant et sa famille La plupart des maladies transmissibles sont bénignes, mais elles peuvent susciter des inquiétudes et une anxiété considérable chez les parents. L’apparition d’une maladie comme la varicelle représente souvent le premier événement extrêmement inconfortable pour l’enfant. Les parents ont besoin de soutien pour faire face aux manifestations de la maladie, comme les démangeaisons intenses. La famille et l’enfant ont besoin d’être rassurés sur le fait que la guérison est généralement rapide, même si des signes peuvent rester visibles pendant quelque temps après que l’enfant soit sufsamment rétabli pour reprendre ses activités habituelles.

Mise en œuvre d’une démarche de soins ENCADRÉ 9.6

Maladies infectieuses

COLLECTE DES DONNÉES – ÉVALUATION INITIALE

• Absence de complications

Les actions à entreprendre pour l’évaluation d’un enfant atteint d’une maladie infectieuse sont les suivantes :

• Diminution au minimum de l’inconfort

• Évaluer les manifestations cliniques de la maladie infectieuse ainsi que ses conséquences.

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES

• Évaluer les mesures de prévention des infections à mettre en place en fonction du mode de transmission. ANALYSE ET INTERPRÉTATION DES DONNÉES

Les problèmes découlant de la situation de santé peuvent inclure : • Risque d’infection lié à une exposition à des agents infectieux • Douleur liée à des lésions cutanées • Interactions sociales perturbées liées à l’isolement • Risque d’atteinte à l’intégrité de la peau lié au grattage pour soulager le prurit • Désorganisation de la dynamique familiale liée à un enfant atteint d’une maladie aiguë RÉSULTATS ESCOMPTÉS

La planication des soins est établie dans le but d’atteindre les résultats suivants : • Absence de transmission de l’infection à d’autres personnes

390

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

• Présence d’un soutien adéquat pour l’enfant et sa famille Plusieurs stratégies d’intervention sont décrites dans le TABLEAU 9.6. ÉVALUATION DES RÉSULTATS – ÉVALUATION EN COURS D’ÉVOLUTION

L’efcacité des interventions inrmières auprès de l’enfant atteint d’une maladie transmissible se mesure grâce à une évaluation de son état de santé et des soins en se fondant sur les lignes directrices suivantes : • Observer le respect des mesures de contrôle par les membres de la famille ou se renseigner à ce sujet ; surveiller les signes de la maladie chez les personnes en contact avec la famille. • Surveiller les signes vitaux, en particulier la température ; s’informer des personnes vulnérables de l’entourage et de leur isolement adéquat ; observer l’adhésion au traitement antibiotique ou antiviral, ou s’informer à ce sujet. • S’enquérir de l’efcacité des mesures visant à assurer le confort. • Interroger la famille et l’enfant sur leurs sentiments et leurs préoccupations, en particulier quand l’enfant retourne à l’école.

Conjonctivite

La conjonctivite aiguë (inflammation de la conjonctive) est attribuable à une diversité de causes qui varient selon l’âge de l’enfant. Chez le nourrisson, une conjonctivite récurrente peut être le signe d’une obstruction du conduit lacrymonasal. Une conjonctivite chimique peut apparaître dans les 24 heures suivant l’instillation des gouttes ophtalmiques prophylactiques à la naissance ; ses caractéristiques cliniques comprennent un léger œdème des paupières et un écoulement oculaire non purulent (Fuloria et Kreiter, 2002). La conjonctivite chez les enfants peut être d’origine virale, bactérienne, allergique ou liée à un corps étranger, l’infection bactérienne étant la cause de la plupart des cas de conjonctivite aiguë) . Bien qu’il puisse être nécessaire de mettre en culture un écoulement purulent an de déterminer la cause précise, le diagnostic s’appuie d’abord sur les manifestations cliniques TABLEAU 9.7 . Les bactéries les plus couramment en cause sont H. inuenzae non typable, Moraxella catarrhalis, S. pneumoniae et S. aureus, Neisseria gonorrhoeae et Chlamydia trachomatis. Les virus les plus souvent en cause sont les adénovirus (les plus fréquents et les plus contagieux), les entérovirus et le virus herpes simplex.

similaires lorsque aucun antibactérien n’est utilisé (Jefferis, Perera, Everitt et al., 2011). Lorsque des antibactériens sont nécessaires, des gouttes peuvent être utilisées pendant la journée et un onguent au coucher, car celui-ci reste plus longtemps dans l’œil. En général, l’onguent n’est pas utilisé pendant la journée pour ne pas brouiller la vision. Les cortic ostéroïdes sont aussi à éviter, car ils réduisent la résistance oculaire aux bactéries.

Approche thérapeutique Le traitement d’une conjonctivite dépend de sa cause. La conjonctivite virale est spontanément résolutive, et le traitement se limite au retrait des sécrétions accumulées. Traditionnellement, la conjonctivite bactérienne se traitait à l’aide d’agents antibactériens topiques. Toutefois, cette pratique est aujourd’hui remise en question. L’éradication de la bactérie semble plus rapide avec l’application d’un antibactérien topique, mais une étude démontre que la durée et le taux de guérison de la conjonctivite infectieuse sont

TABLEAU 9.7

clinique

Jugement

9.3.2

Loïc est âgé de trois ans. Depuis quelques jours, il est enrhumé et a un écoulement nasal jaunâtre. Sa mère est venue vous consulter, car, depuis ce matin, il a l’œil gauche rouge et se plaint de sensations de brûlure. Vous suspectez une conjonctivite. Quelle recommanda­ tion devriez­vous donner à la mère de Loïc an de réduire le risque de contamination à l’œil droit ? a) Appliquer des compresses chaudes humides imbibées de NaCl 0,9 % sur l’œil atteint. b) Essuyer régulièrement tout écoulement de l’œil gauche. c) Encourager Loïc à se moucher souvent et à se laver les mains chaque fois. d) Administrer des larmes articielles de façon assidue à l’œil gauche.

Soins inrmiers

9

CONJONCTIVITE

Les soins inrmiers associés à la conjonctivite consistent à maintenir l’œil propre et à administrer correctement le médicament ophtalmique. Pour retirer les sécrétions accumulées, il faut toujours essuyer l’œil à partir de la commissure interne en allant vers le bas et l’extérieur, en évitant de contaminer l’autre œil. Des compresses humides et tièdes, comme une débarbouillette propre passée à l’eau chaude puis bien essorée, sont utiles pour retirer les croûtes. Les compresses ne sont pas maintenues sur l’œil, car un recouvrement occlusif humide favoriserait la croissance bactérienne. Le médicament est instillé en suivant la technique appropriée dès que les yeux ont été nettoyés.

ALERTE CLINIQUE

Les signes de conjonctivite grave qui nécessitent une consultation chez un ophtal­ mologiste comprennent la réduc­ tion ou la perte de la vision, la douleur oculaire, la photophobie, l’exophtalmie, la diminution de la mobilité oculaire, l’ulcération de la cornée et des modes inammatoires inhabituels (Smith, 2010).

En cas de conjonctivite bactérienne, il est important de prévenir l’infection chez les

Manifestations cliniques de la conjonctivite

CONJONCTIVITE BACTÉRIENNE (CONJONCTIVITE AIGUË CONTAGIEUSE)

CONJONCTIVITE VIRALE

CONJONCTIVITE ALLERGIQUE

CONJONCTIVITE CAUSÉE PAR UN CORPS ÉTRANGER

• Écoulement purulent

• Généralement concomi­ tante à une infection des voies respiratoires supérieures

• Prurit

• Larmoiement

• Écoulement lant de consistance aqueuse ou épaisse

• Douleur

• Écoulement séreux (aqueux)

• Inammation de la conjonctive

• Inammation de la conjonctive

• En général, atteinte d’un seul œil

• Œdème des paupières

• Encroûtement des paupières, en particulier au réveil • Inammation de la conjonctive • Œdème des paupières

• Inammation de la conjonctive

• Œdème des paupières

Chapitre 9

Maladies infectieuses et immunisation

391

Jugement

clinique La mère de Michael, âgé de 18 mois, est fâchée, car la garderie refuse de reprendre son ls tant qu’il pré­ sentera des signes de conjonctivite. Pour quelle raison Michael ne doit­il pas aller à la garderie pendant qu’il a une conjonctivite ?

Stomatite aphteuse : Petits ulcères ronds qui surviennent périodiquement et qui se forment dans la bouche, plus précisément sur le palais, les gencives et la langue, ainsi que sur la face interne des joues et des lèvres. Stomatite herpétique : Maladie infantile due au virus herpes simplex de type 1 qui se caractérise par la tuméfaction et le saignement des gencives, et l’apparition d’érosions grisâtres sur la muqueuse buccale ; est aussi appelée gingivostomatite herpétique.

autres membres de la famille. La débarbouillette et la serviette de l’enfant doivent être gardées à l’écart des autres. Les mouchoirs en papier utilisés pour nettoyer l’œil doivent être jetés. L’enfant doit éviter de se frotter l’œil, et il faut lui enseigner la bonne technique d’hygiène des mains. Le parent qui soigne l’enfant atteint d’une conjonctivite doit aussi procéder à une bonne hygiène de ses mains.

9.3.3

Stomatite

La stomatite est une inammation de la muqueuse buccale, qui peut comprendre la muqueuse des joues et des lèvres, la langue, les gencives, le palais et le plancher de la bouche. Elle peut être infectieuse (herpès) ou non, et être causée par des facteurs locaux ou systémiques. On distingue plusieurs types de stomatites. Chez les enfants, la stomatite aphteuse et la stomatite herpétique (ou gingivostomatite) sont généralement observées. Les enfants immunodéprimés et ceux qui reçoivent de la chimiothérapie ou une radiothérapie impliquant la tête et le cou présentent un risque élevé d’être atteints d’une ulcération de la muqueuse et d’une stomatite herpétique.

Manifestations cliniques

La stomatite aphteuse (aphtes ou ulcères buccaux) est une affection bénigne mais douloureuse, dont la cause est inconnue. Son apparition est habituellement associée à une lésion traumatique légère (morsure de la joue, lésion causée à la muqueuse par la brosse à dents ou un appareil dentaire), à une allergie ou à un stress émotionnel. Les lésions sont de petites ulcérations blanchâtres et douloureuses entourées d’une bordure rouge. Elles se distinguent de celles des autres types de stomatites par les tissus adjacents sains ainsi que par l’absence de vésicules et de maladie systémique. Les ulcères perMassimo, âgé de 12 ans, est hospitalisé depuis sistent de 4 à 12 jours et gué5 jours pour une stomatite herpétique grave. Il rissent sans séquelles. semble qu’il ait de multiples lésions buccales La stomatite herpétique s’étendant jusqu’au pharynx. Il pèse 34 kg, soit est causée par le virus herpes 1,2 kg de moins qu’à son admission. Depuis ce simplex, le plus souvent de matin, il reçoit une alimentation parentérale totale. type 1 (VHS-1) FIGURE 9.5. Pour quelle raison Massimo doit­il être nourri par Elle peut se présenter alimentation parentérale ? comme une infection priVous désirez lui administrer une dose d’ibuprofène maire ou réapparaître sous an de diminuer la douleur. Voici la prescription : une forme moins grave nomibuprofène 8 mg/kg/dose q.6­8 h. Calculez la dose mée herpès récidivant de la à lui administrer en arrondissant à la dizaine près. lèvre (couramment appelé La présentation de l’ibuprofène est 100 mg/5 mL. feu sauvage ou bouton de Calculez le volume à administrer. èvre). L’infection primaire a) 12 mL c) 14 mL débute habituellement par une èvre ; le pharynx deb) 13,5 mL d) 14,5 mL vient ensuite œdémateux et

Jugement

clinique

392

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

FIGURE 9.5 Parfois accompagnées d’aphtes sur la langue, les lésions vésiculaires sur les lèvres et les gencives sont caractéristiques de la stomatite herpétique.

érythémateux ; puis, des vésicules font irruption sur la muqueuse et causent une vive douleur. Une lymphadénite cervicale est fréquemment observée, et l’haleine prend une odeur nettement fétide. Dans la forme récidivante, les vésicules apparaissent sur les lèvres, séparément ou en groupe. Un stress émotionnel, un traumatisme (souvent lié aux soins dentaires), l’immunosuppression ou l’exposition excessive au soleil sont des facteurs déclencheurs de l’herpès labial. La maladie peut durer de 5 à 14 jours, et elle présente des degrés variés de gravité. Des antiviraux pourraient diminuer la gravité et la durée des manifestations cliniques. Selon les données recueillies en 2012 par l’OMS, 3,7 milliards de personnes de moins de 50 ans, soit 67 % de la population mondiale, avaient une infection à VHS-1. L’estimation de la prévalence était la plus forte en Afrique (87 %) et la moins élevée, en Amérique (40 à 50 %) (OMS, 2017b).

Approche thérapeutique Le traitement de tous les types de stomatites vise à en soulager les symptômes, surtout la douleur. L’acétaminophène et l’ibuprofène sufsent généralement pour les cas bénins, mais dans les cas plus graves de gingivostomatite herpétique, des analgésiques plus puissants comme la codéine peuvent être nécessaires. Les anesthésiques topiques sont bénéques ; ils comprennent des préparations en vente libre comme Orabase MD. La lidocaïne (XylocaineMD visqueuse) peut être prescrite aux enfants capables de garder une cuillère à café de la solution dans leur bouche pendant deux à trois minutes, puis de recracher le médicament. Un mélange à parts égales d’élixir de diphenhydramine et d’hydroxyde d’aluminium et de magnésium (MaaloxMD) procure une analgésie légère en raison de ses propriétés anti-inammatoires et agit comme un enduit protecteur pour les lésions. Il est également possible d’utiliser le sucralfate en tant qu’agent de revêtement pour les muqueuses buccales. L’utilisation d’agents antiviraux comme l’acyclovir constitue un traitement spécique pour les enfants atteints de gingivostomatite herpétique grave (De Suremain, Armengaud, Arnaud et al., 2014).

Soins inrmiers STOMATITE

Les principaux objectifs inrmiers pour les enfants atteints de stomatite sont le soulagement de la douleur et la prévention de la propagation du virus herpétique . Les analgésiques et les anesthésiques topiques sont utilisés au besoin pour procurer un soulagement, en particulier avant les repas an de favoriser la prise d’aliments et de liquides. Pour les nourrissons et les trottineurs incapables de se rincer la bouche sans avaler le produit, il est possible d’appliquer la solution de diphenhydramine et de MaaloxMD à l’aide d’un coton-tige avant les repas an de minimiser la douleur. Il est important d’expliquer aux parents que l’usage de ces médicaments permet de maintenir une hydratation sufsante chez l’enfant dont la bouche est trop endolorie pour qu’il absorbe des liquides. Boire des liquides peu sapides à l’aide d’une paille permet d’éviter le contact avec les lésions douloureuses. Le froid est un mode de soulagement reconnu dans la stomatite. Chez le jeune enfant, des glaçons concassés risquent de provoquer un étouffement. C’est pourquoi on recommande plutôt des sucettes glacées, des sorbets ou de la crème glacée.

9.4

Parasitoses intestinales

Les parasitoses intestinales, notamment celles causées par des helminthes (vers) et des protozoaires, sont des infections très fréquentes (Feldman, 2010). Les parasitoses intestinales, en particulier la lambliase, sont communes chez les enfants en milieux de garde au Canada (ASPC, 2011a). Les nourrissons et les trottineurs y sont particulièrement exposés, car ils portent fréquemment les mains à leur bouche et ne maîtrisent pas leur activité fécale. Les parasitoses intestinales sont causées par divers organismes infectieux. Les sections suivantes présentent les deux parasitoses les plus communes chez les enfants : la lambliase (ou giardiase) et l’entérobiase (oxyurose) .

9.4.1

Lambliase

La lambliase, ou giardiase, est causée par le protozoaire Giardia intestinalis, aussi appelé Giardia lamblia, Giardia duodenalis et Lamblia

Les soins buccaux sont recommandés ; l’utilisation d’une brosse à dents à soies souples ou d’une brosse à dents jetable à embout en mousse permet un nettoyage en douceur autour des zones ulcérées. Il est essentiel de procéder à l’hygiène des mains au moment des soins aux enfants atteints de gingivostomatite herpétique. Étant donné que l’infection est auto-inoculable, les enfants ne devraient pas mettre leurs doigts dans leur bouche, car leurs mains contaminées pourraient infecter d’autres parties du corps. L’utilisation de manchons de contention aux bras peut être nécessaire chez les très jeunes enfants FIGURE 9.6. Les objets portés à la bouche doivent être soigneusement lavés. Les nouveau-nés et les personnes immunodéprimées ne devraient pas être exposés aux enfants infectés. Étant donné qu’une infection herpétique est souvent associée à une transmission par voie sexuelle, l’inrmière devrait expliquer aux parents et aux enfants plus âgés que la gingivostomatite herpétique est généralement causée par le virus de l’herpès de type 1, qui n’est pas associé à l’activité sexuelle.

ALERTE CLINIQUE

Il faut porter des gants pour examiner les lésions herpétiques. Le virus pénètre facilement dans les ssures de la peau et pourrait causer un panaris herpétique des doigts.

9

FIGURE 9.6 Les manchons de contention empêchent l’enfant de porter ses mains à sa bouche.

intestinalis. Le potentiel de transmission de la lambliase est élevé parce que ses kystes – constitués de protozoaires à un stade non motile – peuvent survivre dans l’environnement pendant des mois. La transmission s’effectue principalement de personne à personne, mais elle peut aussi se faire par la nourriture, les animaux ou encore l’eau contaminée (p. ex., les lacs, les piscines, les pataugeoires). Le protozoaire responsable de la lambliase semble résistant au chlore (Santé Canada, 2012). Chez les enfants, la transmission de personne à personne est la cause la plus fréquente. Les milieux de garde sont des lieux communs de la lambliase, et les enfants peuvent s’y transmettre des kystes pendant des mois (ASPC, 2011a). Il faut aussi suspecter la lambliase dans le cas de personnes qui ont effectué un voyage récent dans une région endémique.

CE QU’IL FAUT RETENIR

La lambliase se transmet facilement car ses kystes peuvent survivre dans l’environnement pendant des mois.

Tableau 9.1W : Autres parasitoses intestinales.

Bien que les personnes atteintes de lambliase puissent être asymptomatiques, les symptômes couramment observés sont les crampes abdominales et la diarrhée TABLEAU 9.8. Chapitre 9

Maladies infectieuses et immunisation

393

TABLEAU 9.8

Manifestations cliniques de la lambliase

ENFANTS ÂGÉS DE CINQ ANS ET MOINS

ENFANTS ÂGÉS DE PLUS DE CINQ ANS

• Diarrhée

• Crampes abdominales

• Vomissements

• Selles diarrhéiques par intermittence

• Anorexie • Retard de croissance si exposition chronique

• Constipation

TOUS LES ENFANTS

• Selles malodorantes, aqueuses, pâles et grasses • Résolution spontanée de la plupart des infections en quatre à six semaines • Forme chronique (survient rarement) : – Selles diarrhéiques par intermittence, nauséabondes – Possibilité de ballonnement abdominal, de atu­ lences, d’éructations au goût de soufre, de douleur épigastrique, de vomissements, de céphalées et de perte pondérale

Diagnostic

A

Le diagnostic de lambliase peut être établi grâce à l’examen microscopique d’échantillons de selles ou de liquide duodénal, ou par la recherche d’antigènes de G. intestinalis dans ces échantillons par des techniques de dosage immunoenzymatique. Étant donné que les organismes de Giardia vivent dans la portion supérieure de l’intestin et qu’ils sont éliminés selon des modes très variables, il peut être nécessaire de procéder à des examens microscopiques répétés avant de découvrir des trophozoïtes (parasites actifs) ou des kystes. Les échantillons duodénaux sont prélevés par aspiration directe, par biopsie ou par l’épreuve du l. Dans ce dernier cas, l’enfant avale une capsule de gélatine à laquelle un l de nylon est attaché. Plusieurs heures plus tard, le l est retiré, et le contenu est envoyé au laboratoire pour analyse.

B

L’avènement des techniques de dosage immunoenzymatique permettant de déceler les antigènes de Giardia dans des échantillons de selles a rendu moins fréquent le recours aux autres tests. FIGURE 9.7 Oxyure – A La femelle de l’Enterobius vermicularis mesure entre 3 et 10 mm. B Elle dépose ses œufs sur la muqueuse rectale durant la nuit.

394

Partie 3

Approche thérapeutique Le médicament de choix pour le traitement de la lambliase est le métronidazole (FlagylMD). Le métronidazole a un goût métallique en plus d’entraîner des effets indésirables gastro-intestinaux, notamment des nausées et des vomissements.

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

9.4.2

Entérobiase

L’entérobiase, ou oxyurose, causée par le nématode Enterobius vermicularis (oxyure vermiculaire), est l’infection helminthique la plus courante en Amérique du Nord (MSSS, 2015) FIGURE 9.7A. Elle est présente partout dans les zones de climat tempéré et peut infecter à tout moment jusqu’à 30 % de tous les enfants. Les endroits bondés comme les salles de classe et les milieux de garde en favorisent la transmission. L’infection commence par l’ingestion ou l’inhalation d’œufs d’oxyures (les œufs ottent dans l’air). Ceux-ci éclosent dans la portion supérieure de l’intestin, puis l’organisme se développe et migre à travers l’intestin. Après s’être accouplées, les femelles adultes se déplacent en dehors de l’anus et pondent environ 10 000 œufs FIGURE 9.7B. Le mouvement des vers sur la peau et les muqueuses provoque une démangeaison périanale intense. Lorsque l’enfant se gratte, des œufs se déposent sur ses mains et sous ses ongles. L’habitude fréquente qu’ont les jeunes enfants de porter leurs mains à la bouche les rend particulièrement sujets à la réinfection. Les œufs d’oxyures persistent dans le milieu ambiant durant deux à trois semaines et contaminent tout ce avec quoi ils entrent en contact, notamment les sièges de toilette, les poignées de porte, la literie, les sous-vêtements et les aliments. En dehors des démangeaisons associées aux oxyures, les manifestations cliniques ne sont pas spécifiques ENCADRÉ 9.7. Le diagnostic de l’entérobiase se fait le plus souvent à partir d’un échantillon prélevé à l’aide de spatules adhésives ENCADRÉ 9.8. On recommande de répéter le test plusieurs fois : 1 test détecte 50 % des infections, 3 en détectent 90 % et 5 en détectent 99 % (MSSS, 2015).

ENCADRÉ 9.7

Manifestations cliniques de l’entérobiase

• Démangeaison périanale intense (principal symptôme) • Manifestations associées à la démangeaison chez le jeune enfant : – Irritabilité générale – Agitation – Troubles du sommeil – Énurésie – Distractivité et courte durée d’attention • Dermatite et excoriation périanales dues au prurit • Si les vers migrent, possibilité d’infection vaginale (vulvovaginite) et urétrale

Approche thérapeutique Le mébendazole (Vermox MD) et le pamoate de pyrantel (Combantrin MD) sont des médicaments utilisés pour le traitement de l’entérobiase. Le médicament de choix est le mébendazole, qui est sécuritaire, efcace et pratique, tout en occasionnant peu d’effets indésirables. Toutefois, il n’est pas recommandé pour les enfants de moins de deux ans. Si le pamoate de pyrantel est prescrit, il faut aviser les parents que ce médicament colore en rouge clair les selles et les vomissements, de même que la peau et les vêtements qui entrent en contact avec la sueur ; il peut être obtenu sans ordonnance, mais est contre-indiqué chez les enfants de moins de deux ans. Étant donné que les oxyures se transmettent facilement, tous les membres de la famille doivent être traités. Le traitement par le médicament antiparasitaire doit être répété deux semaines plus tard an d’éradiquer totalement le parasite et de prévenir la réinfection.

Techniques de soins ENCADRÉ 9.8

Procéder à un prélèvement d’oxyures

PROCÉDURE

1. Tenir la spatule par le capuchon et la retirer du tube. 2. Écarter les fesses de l’enfant et presser fermement la surface collante de la spatule en plusieurs endroits de la région périanale de l’enfant. Ne pas l’introduire dans l’anus. 3. Remettre la spatule dans le tube ; réfrigérer l’échantillon en attendant qu’il soit apporté au laboratoire. 4. Procéder à une hygiène soigneuse des mains. REMARQUES

• Le meilleur moment pour obtenir un échantillon est tôt le matin au réveil de l’enfant, avant qu’il se lève ou aille à la toilette. • Le prélèvement peut également être fait quelques heures après que l’enfant est couché, soit entre 21 h et minuit. • Il est recommandé de prélever des échantillons pendant 3 jours consécutifs. On peut commencer par prélever 3 échantillons et les apporter au laboratoire.

9

Source : Adapté de Département de microbiologie et Service de l’urgence. CHU Sainte­Justine, 2010.

Soins inrmiers Les responsabilités inrmières liées aux infections parasitaires intestinales sont la participation à la détermination du type de parasite, le traitement de l’infection et la prévention de l’infection initiale ou de la réinfection. La détermination du type de parasite est réalisée en laboratoire par l’examen de substances contenant le ver, ses larves ou ses œufs. Elle se fait grâce à l’examen d’un frottis de matières fécales. L’échantillon prélevé devrait être acheminé immédiatement au laboratoire pour examen ou être placé dans un contenant renfermant un agent de conservation en attendant d’y être envoyé. Plus d’un prélèvement est parfois nécessaire, et tous les membres de la famille devraient également subir le test.

Informer la famille Une fois le diagnostic conrmé et le traitement approprié planié, il est essentiel de renseigner la famille sur l’administration des médicaments. Les parents doivent être informés de la nécessité de répéter le traitement, dans certains cas, deux semaines ou un mois plus tard an de détruire les organismes qui ont éclos depuis le traitement initial. Pour certaines parasitoses comme l’entérobiase, la récurrence est fréquente (Pearson, 2017). L’inrmière joue un rôle important dans l’éducation à la prévention concernant l’hygiène et les habitudes sanitaires auprès des parents, des enfants et de toute personne qui s’occupe

quotidiennement de jeunes enfants. Procéder à l’hygiène des mains avant de manger ou de manipuler de la nourriture et après être allé aux toilettes constitue la précaution la plus importante. Des pratiques sanitaires méticuleuses, en particulier au moment du changement de couche, sont à encourager ; par exemple, jeter les couches en papier dans un contenant fermé, changer le papier qui recouvre la table à langer et disposer des installations nécessaires à proximité pour procéder à l’hygiène des mains. Les parents sont invités à garder les ongles de l’enfant courts, à mettre à l’enfant un pyjama d’une seule pièce et à lui donner une douche plutôt qu’un bain. Les jeunes enfants qui sont infectés ou qui ont la diarrhée ne devraient pas se baigner dans des piscines publiques ou privées tant qu’ils ne sont pas guéris de l’infection. Il est déconseillé que les enfants qui risquent d’avaler de l’eau se baignent dans des plans d’eau stagnante et dans l’eau où se sont baignés des enfants infectés. Il est suggéré aux parents d’amener fréquemment aux toilettes tout jeune enfant qui se baigne, d’éviter de laisser les enfants en couche dans la zone de baignade et de faire le changement de couche à l’écart de la source d’eau. Il peut être recommandé de laver les vêtements et la literie à l’eau chaude, et de passer l’aspirateur dans la maison an de prévenir la réinfection. Il existe toutefois peu de documentation sur l’efcacité de ces mesures, car certains parasites peuvent survivre sur de nombreuses surfaces.

Chapitre 9

Le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec (www.msss.gouv.qc.ca) fournit de l’information sur les maladies transmissibles par les eaux de baignade.

clinique

Jugement

PARASITOSES INTESTINALES

Korimar, âgée de 10 mois, est hospitalisée, car elle souffre de diarrhée rebelle et de malaises gastriques qui durent de­ puis plus de 1 mois. Elle a perdu 1 kg en un mois. Le pédiatre soupçonne une infection parasitaire plutôt qu’une gastroentérite, étant donné le tableau clinique. Formulez deux questions importantes à poser aux parents pendant l’évaluation initiale et justiez­les.

Maladies infectieuses et immunisation

395

Analyse d’une situation de santé Pierrot, âgé de six ans, présente des signes de la varicelle depuis quatre jours. Il a une quantité impressionnante de lésions pancorporelles sur tout le corps. Les lésions sont à des stades différents, celles sur le tronc

Jugement clinique étant plus sèches, alors que celles des jambes sont des vésicules fraîches. Ses parents l’ont amené à l’hôpital, car il a cessé de se nourrir et il se gratte énormément, étant incapable de s’en abstenir.

Mise en œuvre de la démarche de soins

Collecte des données – Évaluation initiale – Analyse et interprétation 1. Comment expliquez-vous les différences entre les lésions selon les régions du corps ? 2. Même si tous les signes vitaux de Pierrot sont vériés, lequel revêt une importance capitale dans son cas ? Justiez votre réponse.

SOLUTIONNAIRE

Le père de Pierrot précise que ce dernier ne mange plus depuis deux jours. Il est inquiet et se demande ce qui peut occasionner une diminution de l’appétit chez son ls, étant donné que la varicelle est une maladie bénigne.

3. Qu’allez-vous rechercher au cours de l’inspection de la bouche de Pierrot pour expliquer au père le fait que son ls ne mange pas ?

En complétant votre examen physique, vous observez que deux lésions à la cuisse droite sont différentes des autres. Elles sont d’un rouge plus vif et présentent un léger écoulement purulent. Vous croyez qu’il peut s’agir d’une surinfection bactérienne.

VU dans ce chapitre

Quelles sont les deux bactéries les plus susceptibles d’avoir contaminé les lésions de Pierrot ?

MAIS SI...

Si la mère de Pierrot en est à sa dixième semaine de grossesse, peut-elle venir lui rendre visite à l’hôpital lorsqu’elle rentrera de voyage demain ? 4. Qu’entend-on par surinfection bactérienne ?

Pierrot a été placé en isolement strict. Le personnel soignant doit porter un masque, des gants et une blouse de protection. L’afche placée sur la porte de la chambre indique de laisser cette dernière fermée en tout temps.

Planication des interventions – Décisions inrmières 5. Vous voulez conrmer qu’il s’agit bien d’une surinfection bactérienne des lésions et connaître le type de bactérie en cause. Vous décidez d’effectuer une culture de l’exsudat des lésions à l’aide d’un écouvillon. Pouvez-vous prendre une telle décision sans l’avis du médecin ? Justiez votre réponse. 6. Vous vous apprêtez à procéder à la culture de la lésion ; devez-vous effectuer le prélèvement avant ou après avoir nettoyé la lésion avec du NaCl 0,9 % ? 7. Nommez un moyen permettant de suivre l’évolution des lésions suspectes à la cuisse droite. 8. Expliquez les raisons pour lesquelles il est nécessaire d’appliquer ces précautions dans le cas de Pierrot.

396

Partie 3

Problèmes de santé de la naissance à l’adolescence

Devant le nombre important de lésions, le médecin a prescrit de l’acyclovir (ZoviraxMD) 850 mg q.8 h à Pierrot. Vous surveillez les concentrations sériques d’urée et de créatinine durant le traitement.

9. Expliquez la raison pour laquelle vous devez effectuer cette surveillance.

Extrait de PTI CONSTATS DE L’ÉVALUATION Date

Heure



2018-07-13

09:00

2

Problème ou besoin prioritaire

Signes de surinfection des lésions à la cuisse droite

Initiales

RÉSOLU / SATISFAIT Date

Heure

Initiales

Professionnels / Services concernés

Extrait des notes d’évolution

J.B.

SUIVI CLINIQUE Date

Heure



2018-07-13

09:00

2

Signature de l’inrmière

Jasmine Bertrand

Directive inrmière

Initiales

J.B.

Programme / Service

Initiales

Signature de l’inrmière

CESSÉE / RÉALISÉE Date

Initiales

Heure



Initiales

Programme / Service



Maladies infectieuses



10. Émettez une directive inrmière en lien avec le problème prioritaire « Signes de surinfection des lésions à la cuisse droite» inscrit dans l’extrait du plan thérapeutique inrmier de Pierrot et justiez-la. 11. Vous avez fait des compresses d’eau fraîche à l’avoine colloïdale (AveenoMD) à Pierrot et vous avez remarqué que cela diminue de façon importante son prurit, car il se gratte beaucoup moins. Serait-il pertinent d’ajouter une directive inrmière à cet égard ? Justiez votre réponse. 12. Nommez au moins deux autres interventions pertinentes pour diminuer le prurit de Pierrot. 13. Devriez-vous appliquer une lotion de calamine sur les lésions prurigineuses ? Justiez votre réponse.

Les résultats des cultures de l’exsudat des lésions démontrent la présence de nombreux S. aureus.

14. Est-ce que le traitement de ZoviraxMD est efcace pour ce problème ? Justiez votre réponse. 15. Un des objectifs inscrits au PTI est que Pierrot arrive à manger et à s’hydrater. Nommez au moins deux interventions que vous pourriez appliquer pour qu’il atteigne ce problème inrmier.

Pierrot est hospitalisé depuis neuf jours. Il ne lui reste qu’une seule journée de traitement antibiotique et il obtiendra son congé de l’hôpital.

16. L’isolement strict peut-il être cessé à ce stade-ci ?

Évaluation des résultats – Évaluation en cours d’évolution 17. En comparant avec les données de l’évaluation initiale, décrivez les changements que vous devriez observer pour afrmer que le problème de surinfection est résolu.

Chapitre 9

2018-07-13 09 :00 Dex lins u f à l c rot av lemen plen S lan d p   gra. T° : 38,4 °C

9

VU dans ce chapitre

Deux mois après sa sortie de l’hôpital, Pierrot et sa mère vous consultent au CLSC en raison de maux de gorge qui durent depuis plusieurs jours. La mère de Pierrot mentionne qu’il a manqué ses deux derniers entraînements de hockey en raison d’une grande fatigue qui l’oblige à faire des siestes. Vous suspectez une mononucléose. Quels autres symptômes devriez-vous rechercher ? Quelques jours plus tard, Pierrot et sa mère reviennent pour une visite de contrôle. Le monotest a conrmé la mononucléose. Vous palpez l’abdomen de Pierrot et sentez une fermeté sous le rebord costal que vous croyez être la rate. Quelle recommandation devriez-vous donner à Pierrot et sa mère en regard de ces informations ?

Maladies infectieuses et immunisation

397

Chapitre

10

Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie Écrit par : Sharron L. Docherty, PhD, PNP-BC, FAAN Raymond Bareld, MD, PhD Debra Brandon, PhD, RN, CNS, FAAN Adapté par : Caroline Lemay, inf., M.Sc.

MOTS CLÉS

OBJECTIFS

Autonomie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 415 Deuil . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 430 Euthanasie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 422 Handicap . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 400 Maladie chronique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 400 Normalisation de la vie familiale . . . . . 402 Ordonnance de non-réanimation . . . . 422 Soins de fin de vie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 421 Soins palliatifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 420 Suicide assisté. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 422

Après avoir étudié ce chapitre, vous devriez être en mesure :

Disponible sur • À retenir

• d’expliquer l’évolution des tendances relatives aux soins de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en fin de vie, ainsi que leur portée ; • de distinguer les réactions les plus courantes des membres de la famille de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en fin de vie, ainsi que les répercussions que la situation a sur eux ; • d’expliquer les étapes du processus d’adaptation à l’annonce du diagnostic de maladie chronique ; • de reconnaître les répercussions de la maladie ou du handicap sur le développement de l’enfant ; • d’énumérer des interventions infirmières qui favorisent l’adaptation optimale de la famille à la maladie chronique et au handicap de l’enfant ; • d’énumérer des interventions infirmières qui permettent d’apporter le soutien nécessaire à la famille au moment de la mort de l’enfant malade ; • de définir les manifestations habituelles d’une réaction normale de deuil.

• Carte conceptuelle • Solutionnaires

Guide d’études – RE04, RE05

398

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

Carte conceptuelle

soins prodigués

Cette carte conceptuelle illustre schématiquement les principaux concepts décrits dans le présent chapitre. Sa lecture vous permettra d’avoir une vue d’ensemble des notions qui y sont présentées.

conséquences

suivi

pour

10 Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie pour

reçoit

implique

dernières étapes

implique visent

Chapitre 10

touche

Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie

399

10.1

Soins prodigués aux enfants ayant des besoins de santé particuliers

Les enfants ayant des besoins de santé particuliers sont dénis comme étant des enfants qui requièrent un soutien plus grand que la normale sur les plans de la santé, du développement, des comportements ou des émotions, ou qui sont à haut risque d’éprouver des difcultés dans ces domaines (Caicedo, 2014 ; Leeman, Crandell, Lee et al., 2016) TABLEAU 10.1 . Le nombre d’enfants ayant des besoins de santé particuliers a considérablement augmenté au cours des dernières années grâce, entre autres, aux avancées médicales qui permettent de prolonger l’espérance de vie de plusieurs enfants (Hartling, Milne, Tjosvold et al., 2014 ; Rodrigues, Tatsch Neves, Bigolin Jantsch et al., Nathaniel, âgé de trois ans, est atteint d’autisme et 2016). Par exemple, le taux de il est hospitalisé en pédiatrie pour une pneumonie. Il survie des nourrissons à faible est isolé et n’entre en contact qu’avec sa mère. Les ou à très faible poids à la naissoins sont difciles. De quelle façon serait-il préfésance a substantiellement rable d’entrer en communication avec Nathaniel augmenté (World Health lorsque viendra le moment de vérier ses signes Organization [WHO], 2015). vitaux ? Or, ces enfants peuvent

Jugement

clinique

TABLEAU 10.1

parfois être aux prises avec des problèmes de santé chroniques complexes qui comportent beaucoup d’incertitude quant au pronostic, et qui nécessiteront des soins spéciques et un accompagnement lors du transfert des soins et du passage à la vie adulte (Canadian Association of Pediatric Health Centres [CAPHC], 2016 ; WHO, 2015). L’asthme et le diabète de type 1 sont les maladies chroniques les plus fréquentes chez les enfants, et la brose kystique, la maladie génétique la plus fréquente (Popp, Robinson, Britner et al., 2014). Parmi les maladies chroniques les plus courantes dues à la fois aux facteurs génétiques et environnementaux se trouvent les cancers et le diabète (Agence de la santé publique du Canada, 2009). Enn, les maladies chroniques neurologiques les plus fréquentes sont l’épilepsie, la paralysie cérébrale et le spina bida (Rivet et Matson, 2009). Un nombre accru de tâches et de responsabilités incombe à la plupart des familles dont un enfant a des besoins de santé particuliers (Cousino et Hazen, 2013 ; Kliegman, Stanton, St. Geme et al., 2015 ; Leeman et al., 2016). De plus, la maladie chronique ou le handicap peut avoir des conséquences importantes sur le niveau d’activité et de développement de l’enfant, en plus d’être un stresseur important (Cousino et Hazen, 2013).

Terminologie relative aux besoins de santé particuliers

BESOIN PARTICULIER

DÉFINITION

EXEMPLE

Retard de développement

Retard de maturation ou vitesse de développement plus lente que la moyenne dans au moins deux sphères (p. ex., le langage, la motricité, la cognition, etc.).

• Troubles envahissants du développement

Incapacité

Limitation fonctionnelle dans les activités de la vie quotidienne ou autres (p. ex., une difculté à marcher, à entendre, à apprendre) qui réduit les capacités de la personne atteinte.

• Difcultés motrices des enfants atteints de paralysie cérébrale

Handicap

Altération importante acquise sur le plan physique, sensoriel, mental ou cognitif, qui limite la participation d’une personne à la vie sociale.

• Cécité

Handicap congénital

Handicap présent depuis la naissance, sans être nécessairement héréditaire.

• Spina bida

Décience

Anomalie organique, mentale ou d’une fonction de l’organisme.

• Décience intellectuelle liée à la trisomie 21

Maladie chronique

Trouble de santé qui nuit au quotidien d’une personne plus de trois mois par année, qui risque d’être permanent et qui cause des limitations dans les activités. Une maladie chronique peut nécessiter des hospitalisations fréquentes ou prolongées ainsi que des soins sur une longue période.

• Maladie de Crohn

Toute maladie ou tout trouble qui suppose une diminution importante du nombre d’années de vie.

• Leucodystrophies

État de décience chronique nécessitant l’utilisation régulière d’un appareil médical essentiel an de compenser la perte d’une fonction vitale. La personne atteinte requiert des soins quotidiens continus ou une surveillance de son état par un professionnel de la santé.

• Dialyse péritonéale

Maladie limitant l’espérance de vie

Situation de dépendance à la technologie

• Amputation

• Diabète • Asthme

• Fibrose kystique

• Alimentation par sonde gastrique

Sources : Adapté de Eccleston, Fisher, Law et al. (2015) ; Garnier, Delamare, Delamare et al. (2012) ; Kliegman et al. (2015) ; Turgeon, Hervouet-Zeiber, Ovetchkine et al. (2014).

400

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

Soins centrés sur la famille

La santé physique et affective des enfants ainsi que leur fonctionnement cognitif et social sont fortement inuencés par la dynamique familiale (Kna, Deatrick, Kna et al., 2013). L’importance des soins centrés sur la famille, une philosophie selon laquelle la famille constitue la constante dans la vie de l’enfant, est particulièrement évidente lorsqu’il est question d’un enfant ayant des besoins particuliers 1 . À mesure que les parents s’impliquent et en apprennent davantage sur les besoins de santé de leur enfant, il n’est pas rare qu’ils deviennent de véritables experts dans l’art de lui prodiguer les soins nécessaires. Il est donc prioritaire pour les professionnels de la santé, dont le personnel inrmier, d’établir un partenariat avec les parents de l’enfant atteint (Harrison, 2010). Cela implique une relation de collaboration basée sur le partage du pouvoir et qui nécessite la participation active ainsi que l’accord de tous les partenaires concernés (Harrison, 2010 ; Jones, Gilmer, Parker-Raley et al., 2011) ENCADRÉ 10.1.

Communication avec la famille lors de l’annonce du diagnostic L’annonce du diagnostic d’une maladie grave chez l’enfant relève du médecin. Toutefois, il est souhaité qu’une infirmière assiste à cette

Soutien inrmier ENCADRÉ 10.1

Créer un partenariat parent-professionnel de la santé

• Reconnaître l’importance de chacun des membres de la famille.

rencontre an de pouvoir mieux accompagner ensuite la famille. Il s’agit d’une étape importante de la relation entre la famille et les professionnels de la santé. Même s’il est possible que les parents ou la famille, sous le choc, ne retiennent pas tout ce qui leur a été dit à ce moment-là, ils perçoivent l’attitude et les comportements non verbaux de l’interlocuteur à leur égard, que ce soit de l’acceptation, du rejet, de l’espoir, du désespoir ou même une absence d’émotion. Ce qu’ils perçoivent peut ainsi inuencer leur capacité à encaisser le choc de la nouvelle et à s’adapter à la nouvelle réalité familiale. Souvent, les parents se doutent depuis un certain temps que quelque chose ne va pas chez leur enfant et ils peuvent être soulagés d’avoir enn une meilleure idée du problème de santé de l’enfant (Nuutila et Salanterä, 2006). Il est suggéré d’inviter les deux parents à être présents au moment de l’annonce du diagnostic. De cette façon, cela évite au parent qui pourrait se présenter seul à l’entretien d’interpréter les conclusions complexes qui ont été tirées, de devoir les présenter par la suite à son conjoint et de composer avec la première réaction affective de celui-ci ENCADRÉ 10.2. Parmi les facteurs d’insatisfaction relatifs à la communication entre la famille et les professionnels de la santé, il convient de mentionner : 1) le manque de compassion ; 2) l’absence d’intimité au moment de l’entretien ; 3) le peu de temps accordé à l’annonce du diagnostic ; 4) le manque de temps pour poser des questions. À l’inverse, les parents se disent satisfaits de l’entretien lorsque le

1 L’établissement de la relation inrmière-famille est expliqué dans le chapitre 1, Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté.

10

clinique

Jugement

10.1.1

Rachel, âgée de huit ans, vient d’apprendre qu’elle a un diabète de type 1. Sa famille et elle se présentent à la clinique pédiatrique an de recevoir de l’enseignement sur la pathologie. Comment les connaissances de base sur le diabète pourraientelles être enseignées à la llette et à ses parents ? Nommez deux éléments. MAIS SI...

Si la mère de Rachel était diabétique, comment cela inuencerait-il la démarche pour l’enseignement sur le diabète ?

• Partager le pouvoir décisionnel. • Être ouvert et respectueux.

Soutien inrmier

• Être tolérant ; éviter de juger les questions et les décisions de la famille. • Reconnaître la compétence des parents ainsi que leur expertise unique dans le cas de l’enfant. • Expliquer ou dénir tout terme médical, technique ou propre à un domaine de spécialité. • Reconnaître l’expérience que vit la famille d’avoir un enfant atteint d’une maladie ou d’un handicap. • Être capable de tolérer l’incertitude liée à l’expérience de santé vécue par la famille. • Reconnaître le besoin d’espoir des membres de la famille, même si le pronostic est sombre. • Être réexif et conscient de l’interaction en cours. Sources : Adapté de Duhamel (2015) ; Giambra, Stifer et Broome (2014) ; Gottlieb et Feeley (2007).

Chapitre 10

ENCADRÉ 10.2

Accompagner la famille lors du diagnostic de maladie chronique ou de handicap

• Faire preuve de compréhension des besoins affectifs des membres de la famille en demeurant ouverte à l’égard de leurs pleurs, de leur tristesse, de leur colère ou de leur déception. • Respecter les moments de silence. • Faire preuve d’empathie en adoptant un langage corporel qui indique une compréhension de ce qu’ils éprouvent en ces moments pénibles ; tenir compte des enjeux culturels si la technique du toucher est utilisée.

• Terminer la séance d’information sur des éléments positifs et constructifs. Par exemple, mettre l’accent sur les forces de l’enfant et son potentiel, sur les forces des parents, de même que sur les services de réadaptation et les traitements disponibles, si nécessaire. • Rappeler aux parents qu’un membre du personnel inrmier est à leur disposition pour répondre à leurs questions et leur apporter du soutien.

Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie

401

professionnel de la santé semble ouvert et honnête, qu’il respecte le besoin d’intimité des parents et qu’il leur laisse le temps nécessaire pour s’exprimer et poser des questions (de Vos, Bos, Plötz et al., 2015 ; Memaj, 2015) FIGURE 10.1 .

CONSEIL CLINIQUE

Il peut être pertinent de fournir à la famille de la documentation écrite accompagnée d’un glossaire des termes, des abréviations et des acronymes les plus couramment utilisés en lien avec la pathologie ou le diagnostic. Si ce n’est pas possible, l’inrmière peut référer la famille à de la documentation en ligne able et reconnue.

Les parents ou les autres membres de la famille pourraient avoir des préférences différentes quant à la quantité et au type d’information qu’on leur transmet, mais la plupart d’entre eux veulent recevoir des informations honnêtes et précises sur l’évolution de la maladie, les complications possibles, le pronostic ainsi que les risques et les bienfaits du traitement choisi. Ils veulent aussi avoir la possibilité de poser des questions, de discuter avec un interlocuteur affable et empathique et, surtout, de disposer de temps (de Vos et al., 2015 ; Memaj, 2015). Il est également essentiel de vulgariser ou d’établir, avec les parents, une terminologie commune en regard de la pathologie an d’assurer une bonne compréhension de leur part (Kliegman et al., 2015). Il est possible d’évaluer la compréhension des explications en

posant la question : Que comprenez-vous des explications que vous avez reçues jusqu’à présent ? Les termes techniques peuvent être expliqués par une dénition simple ou avec de la documentation écrite.

FIGURE 10.1 La séance d’information devrait avoir lieu en privé, dans un endroit confortable où les distractions sont réduites au minimum et où la conversation ne risque pas d’être interrompue.

Soins inrmiers COMMUNICATION AVEC LA FAMILLE LORS DE L’ANNONCE DU DIAGNOSTIC

Le personnel inrmier joue un rôle déterminant à cette étape ; il s’assure de répondre aux besoins de la famille au cours des discussions relatives au diagnostic de l’enfant, de son état de santé et du traitement qu’il devra recevoir.

• si les professionnels de la santé ont répondu à toutes les préoccupations, attentes ou questions de la famille (Teike Lüthi et Cantin, 2011).

• la quantité d’information que la famille est prête à recevoir ;

10.1.2

Normalisation

Approche centrée sur le développement de l’enfant

Lorsque l’accent est mis sur le degré de développement de l’enfant plutôt que sur l’âge chronologique ou sur le diagnostic, ce sont alors ses capacités et ses forces qui sont mises en lumière au lieu de ses difcultés. Ainsi, l’attention est xée sur la normalisation de la vie familiale, sur l’adaptation du milieu dans lequel évolue l’enfant ainsi que sur sa propre capacité d’adaptation. L’inrmière joue souvent un rôle essentiel pour rediriger l’attention des parents et des professionnels de la santé vers une approche axée sur le développement en vue de répondre aux besoins particuliers de l’enfant et de sa famille (Giambra et al., 2014).

Partie 4

• l’adaptation de la famille à ce qu’elle vient d’apprendre sur le plan tant cognitif qu’affectif ;

Étant donné qu’un suivi à long terme sera probablement nécessaire, les recommandations formulées s’appliquent autant aux premières conversations qu’aux discussions subséquentes.

L’inrmière doit évaluer :

402

• le niveau de compréhension de la famille quant à l’information préalablement transmise ;

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

La normalisation de la vie familiale fait référence aux actions entreprises par l’enfant et la famille pour créer une vie familiale aussi normale que possible ainsi qu’aux résultats obtenus lorsque ces interventions fonctionnent (Cervasio, 2010 ; Kna, Darney, Gallo et al., 2010). Dans le cas de l’enfant handicapé ou atteint d’une maladie chronique, cela signie aller à l’école, avoir des loisirs, pratiquer des activités récréatives, trouver un emploi et atteindre un certain degré d’indépendance FIGURE 10.2. Pour la famille de l’enfant, cela peut vouloir dire adapter la routine familiale an de pouvoir répondre aux besoins physiques et de santé de l’enfant malade ou handicapé (Lemons, 2010). Même si cela peut sembler

Soutien inrmier ENCADRÉ 10.3

FIGURE 10.2 Les enfants souffrant d’une décience, quelle qu’elle soit, devraient avoir l’occasion de développer leurs aptitudes et de participer à des activités de leur âge avec d’autres enfants.

Accompagner la famille et l’enfant durant le processus de normalisation

• Encourager la famille à diminuer son stress et ses responsabilités en déléguant des soins et des tâches ménagères.

• Aider à trouver des moyens d’intégrer les soins de l’enfant à la routine familiale déjà établie (p. ex., donner les médicaments du soir en même temps que le brossage des dents).

• Aider la famille à mettre l’accent sur les forces de l’enfant.

• Proposer des outils pour faciliter l’organisation à la maison (liste, cahier de notes) et pour les différents traitements et rendez-vous médicaux.

• Reconnaître les forces de la famille et contribuer à maximiser sa compétence à résoudre les difcultés inhérentes au problème de santé de l’enfant.

• S’assurer que la famille a accès à des services de soutien communautaire adéquats.

Sources : Adapté de Cervasio (2010) ; Toly et al. (2012).

inatteignable à l’annonce du diagnostic, les familles apprennent à vivre avec la maladie ou le handicap de leur enfant, et celui-ci en vient, habituellement, à considérer sa vie comme relativement normale.

l’enfant en fonction de son contexte familial et d’établir rapidement des liens avec les intervenants de la communauté qui prendront le relais après le congé de l’hôpital (Cervasio, 2010 ; Leeman et al., 2016 ; Popp et al., 2014) 1 .

Il n’est pas rare que la notion de normalité soit redénie en fonction de l’expérience vécue par l’enfant et la famille, de leurs besoins et des circonstances qui se présentent (Kna et al., 2010 ; Nelson, 2002). En effet, il arrive fréquemment qu’en dehors du milieu familial, l’enfant doive faire face à un environnement qui n’est pas nécessairement adapté à sa réalité.

De la même façon que la maison représente l’environnement normal pour un enfant, l’école doit, elle aussi, être considérée comme une composante essentielle du développement physique, intellectuel et social de l’enfant. Les enfants qui vont à l’école ont l’avantage de pouvoir apprendre, d’interagir et de s’amuser avec bon nombre de camarades. An de normaliser l’environnement de l’enfant et de favoriser ainsi son intégration, on pourra vouloir l’intégrer à une classe ordinaire, par exemple.

L’inrmière peut aider la famille dans ses efforts de normalisation en évaluant, avec elle, ses activités quotidiennes, son réseau de soutien social, ses stratégies d’adaptation ainsi que les ressources communautaires à sa disposition (Toly, Musil et Carl, 2012). Elle est aussi une référence pour les parents en regard de l’équipement médical nécessaire pour l’enfant. Ainsi, elle peut guider la famille en offrant des conseils sur le déplacement de l’équipement pour faciliter la participation de l’enfant à diverses activités dans sa communauté (Toly et al., 2012) ENCADRÉ 10.3.

Continuité des soins en communauté Le désir de normaliser la vie de l’enfant ayant des besoins de santé particuliers et celle de sa famille incite à recourir aux services d’inrmières spécialisées en soins communautaires ou à domicile, qui se doivent d’être qualiées pour offrir de tels soins (Cervasio, 2010 ; Harrison, 2010) ENCADRÉ 10.4. L’enfant ayant des besoins de santé particuliers dépend des adultes de son entourage pour avoir accès à des soins de santé et suivre le traitement qui lui a été prescrit. C’est pourquoi il est essentiel de planier les soins de

Chapitre 10

1 L’importance de la continuité et de la coordination des soins dans un contexte de soins à domicile est présentée dans le chapitre 1, Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté.

Toute une gamme de programmes additionnels a été conçue pour adapter l’enseignement aux enfants ayant des besoins particuliers, et ce, tant pour les enfants d’âge scolaire que pour les plus jeunes. Par exemple, certaines initiatives visent à créer des places en garderie normale pour des enfants ayant des besoins de santé particuliers. En effet, des efforts conjoints de la part des garderies et des écoles sont déployés an de faciliter l’accompagnement et la transition de l’enfant lors de ces changements (Siddiqua et Janus, 2017).

ENCADRÉ 10.4

Objectifs des soins communautaires à l’enfant ayant des besoins particuliers

• Favoriser l’intégration de l’enfant dans son environnement familial, scolaire et autre. • Réduire les répercussions de l’état de santé de l’enfant sur sa participation à la vie sociale. • Favoriser l’indépendance de l’enfant quant à la prise en charge de ses soins, peu importe son environnement.

Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie

403

10

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les répercussions des besoins de santé particuliers et de l’adaptation à ceux-ci sur l’enfant atteint dépendent de l’âge auquel la maladie ou le handicap se déclare, et elles varient en fonction du développement de l’enfant.

3 Les étapes du développement pouvant inuencer la réaction de l’enfant à la maladie sont traitées dans le chapitre 3, Croissance, développement et promo­ tion de la santé.

10.2

Répercussions de la maladie chronique ou du handicap sur l’enfant et sa famille

10.2.1

Réactions de l’enfant

Les répercussions des besoins de santé particuliers et de l’adaptation à ceux-ci sur l’enfant atteint dépendent de l’âge auquel la maladie ou le handicap se déclare, puisque les aspects du développement caractéristiques de chaque groupe d’âge dictent le stress et les risques particuliers dont sera victime l’enfant malade (Compas, Jaser, Dunn et al., 2012). An d’informer l’enfant et de le soutenir, le personnel inrmier doit savoir que l’enfant redénira le concept de la maladie et ses conséquences à mesure qu’il se développera et grandira, puisque sa compréhension et son environnement changeront (Compas et al., 2012) 3 . Le type de maladie ou de handicap dont souffre l’enfant a également une inuence sur la réaction affective de ce dernier FIGURE 10.3 . La maladie chronique doit être considérée comme un stresseur qui pose des dés supplémentaires pour l’enfant et qui augmente donc le risque de difcultés d’adaptation (Compas et al., 2012). La présence de plusieurs maladies jumelées au stress vécu peut faire en sorte que l’enfant coure un risque accru de souffrir de troubles du comportement (Hartling et al., 2014 ; Pinquart et Shen, 2011 ; Raposa, Hammen, Brennan et al., 2014).

Jugement

clinique Loïc, 10 ans, est atteint de diabète de type 1 depuis l’âge de 6 ans. Chaque année, à Pâques, il est triste de ne pas pouvoir manger autant de chocolat que sa sœur. Parmi les comportements suivants, lequel constitue un mécanisme d’adaptation efcace ? a) Il augmente légèrement ses doses d’insuline, car cela lui permet alors de manger presque autant de chocolat que sa sœur. b) Il trouve que la vie est injuste envers lui, car il souhaiterait ne pas avoir une maladie comme le diabète. c) Lors de la chasse aux œufs de Pâques, il s’installe seul dans un coin et écoute de la musique avec des écouteurs. d) Il cone à ses parents sa tristesse de ne pas pouvoir manger autant de chocolat qu’il le voudrait.

404

Partie 4

Mécanismes d’adaptation de l’enfant Les enfants ayant des besoins de santé particuliers ont habituellement recours à divers mécanismes d’adaptation TABLEAU 10.2. Toutefois, le recours à l’une ou l’autre des stratégies d’adaptation n’est pas xe dans le temps, et il se peut que l’enfant emploie des mécanismes plus ou moins adaptés selon les situations.

Espoir L’enfant est sensible à la présence ou à l’absence d’espoir. Cela est particulièrement marqué chez l’adolescent. L’espoir a des

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

FIGURE 10.3 Il est normal que l’enfant vive des épisodes de tristesse liés à la maladie chronique ou au handicap, particulièrement lorsqu’il y a exacerbation des symptômes.

retombées très positives chez l’enfant atteint d’une maladie chronique, notamment sur ses comportements de santé (Curry, 2016). En effet, l’espoir peut pousser une personne à adopter des comportements qui favorisent la santé et être à l’origine d’une sensation accrue de bien-être (Petersen et Wilkinson, 2015 ; Scioli, ScioliSalter, Sykes et al., 2016).

Colère Les enfants, que ce soit l’enfant malade ou ses frères et sœurs, peuvent également exprimer leur colère (Lane et Mason, 2014). Il se peut donc que l’enfant malade réagisse avec colère aux restrictions qui lui sont imposées, aux traitements ou au sentiment qu’il a d’être différent des autres enfants.

Acceptation Les enfants qui s’adaptent bien à leurs besoins de santé particuliers apprennent graduellement à composer avec leurs limites physiques et arrivent à éprouver un sentiment de satisfaction. Ils comprennent leur maladie et ses répercussions, ce qui leur permet d’assumer leurs responsabilités quant aux soins nécessaires, et de participer activement aux traitements et à la réadaptation. Ces enfants expriment leur tristesse, leur angoisse ou leur colère de façon légitime lorsque les symptômes sont exacerbés, mais ils demeurent généralement conants et optimistes lorsque leur état est stable. Les enfants qui s’adaptent bien sont en mesure de s’identier à d’autres personnes atteintes de la même maladie ou du même handicap qu’eux, ce qui a pour effet de favoriser la erté et la conance en soi relativement à leur capacité de mener une vie à la hauteur de leurs espérances, malgré la maladie ou le handicap (Lane et Mason, 2014) ENCADRÉ 10.5.

TABLEAU 10.2

Réactions et mécanismes d’adaptation de l’enfant ayant des besoins particuliers

RÉACTION DE L’ENFANT À LA MALADIE

MÉCANISME D’ADAPTATION

Réaction optimiste

Adaptation positive

• Conance en soi

• L’enfant mise sur les côtés positifs de la situation et se concentre davantage sur ses forces et ses capacités que sur ses lacunes. • Il s’efforce d’être le plus indépendant possible ; il développe son autonomie.

• Conance dans le traitement

• L’enfant prend les médicaments qui lui ont été prescrits et participe aux traitements. • Il respecte les limites qui lui ont été imposées quant aux activités à pratiquer. • Son comportement indique qu’il est de plus en plus indépendant et autonome dans la gestion de sa maladie (p. ex., l’enfant assume ses responsabilités relativement à sa médication).

• Conance en son réseau de soutien

• L’enfant se cone aux adultes (parents et professionnels de la santé) et aux autres enfants. • Il conçoit des plans dans le but de résoudre les problèmes qui se présentent.

Réaction pessimiste

Risque de mésadaptation

• Sentiment d’être différent

• L’enfant se perçoit comme étant différent des autres en raison de la maladie chronique ou du handicap, et il voit cette différence comme étant quelque chose de négatif.

• Isolement

• Il se trouve moins digne d’intérêt que les autres.

10

• Il met l’accent sur ses faiblesses et restreint parfois ses activités sans raison. • Il ne se dénit qu’au travers de sa maladie. • Irritabilité, morosité

• L’enfant emploie des mécanismes d’adaptation inconscients, bien que ces comportements soient, la plupart du temps, contre-productifs, puisqu’ils n’améliorent pas son amour-propre, ne favorisent pas son intégration sociale et ne permettent pas d’atteindre le but xé.

• Agressivité

• L’enfant adopte des comportements asociaux en lien ou non avec les symptômes de sa maladie ou de son handicap. Sources : Adapté de Immet (2006) ; Leite, Gomes, Ribeiro et al. (2013) ; Pinzon, Harvey et Comité de la santé de l’adolescent (2006).

Soutien inrmier ENCADRÉ 10.5

Soutenir l’adaptation de l’enfant

PRÉPARATION

Préparer l’enfant aux changements que pourrait entraîner son problème de santé ou son handicap. Exemple : Expliquer à l’enfant les effets indésirables de son traitement.

Exemple : Inciter les parents à donner les médicaments à l’enfant en même temps que les autres enfants prennent leurs vitamines ; à cuisiner les mêmes aliments pour toute la famille ; à mentionner aux parents d’amis, lorsque l’enfant est invité ailleurs, les restrictions alimentaires de celui-ci.

PARTICIPATION

CONTRÔLE

Inclure l’enfant dans le processus de prise de décision chaque fois qu’il est possible de le faire, surtout lorsqu’il est question de son plan de soins. Augmenter son implication à mesure qu’il vieillit an de le préparer à la vie adulte. Exemple : Laisser l’enfant prendre lui-même ses médicaments ou organiser les rendez-vous pour ses soins à domicile.

Susciter les occasions au cours desquelles l’enfant se sent en pleine possession de ses moyens et en contrôle de la situation an de réduire chez lui l’incertitude, la passivité et le sentiment d’impuissance. Exemple : Laisser l’enfant choisir les activités qui conviennent à son niveau d’énergie et décider lui-même quand il doit se reposer.

COLLABORATION

Encourager les parents à appliquer les mêmes règles pour l’enfant malade ou handicapé que pour ses frères et sœurs ou amis en santé. Exemple : S’attendre à ce que l’enfant remplisse certaines tâches domestiques et aille à l’école en fonction de ses capacités.

Permettre aux membres de la famille ainsi qu’au réseau d’amis de l’enfant de participer aux soins quotidiens et au plan de soins lorsque c’est possible.

ATTENTES

Source : Adapté de Kna et al. (2010).

Chapitre 10

Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie

405

Soins inrmiers RÉPERCUSSIONS DE LA MALADIE CHRONIQUE OU DU HANDICAP SUR L’ENFANT

Évaluer l’adaptation de l’enfant Lors de ses interactions, l’inrmière devrait prioriser les éléments suivants an d’être en mesure d’évaluer l’adaptation de l’enfant à sa maladie ou à son handicap : • ses réactions à l’égard de la maladie ou du handicap ;

4 Différentes techniques pour inciter l’enfant à parler des émotions que lui fait vivre sa maladie ou son handicap sont présentées dans le chapitre 4, Examen clinique : anamnèse et examen physique.

ENCADRÉ 10.6

• son fonctionnement et son comportement d’adaptation au sein de son milieu et avec ses proches ; • sa compréhension par rapport à ses besoins de santé particuliers. L’inrmière doit être attentive aux réponses émotives de l’enfant et l’encourager à exprimer ses inquiétudes ou ses préoccupations. Cela lui

Exemples de répercussions de certaines maladies chroniques dont l’inrmière doit discuter avec l’enfant ou l’adolescent

• Un jeune atteint de la maladie de Crohn doit être informé que cette affection peut interrompre la croissance et retarder la puberté. • Un enfant diabétique doit savoir que ses changements hormonaux et les besoins accrus attribuables à sa croissance ont une incidence sur la quantité de

10.2.2

CE QU’IL FAUT RETENIR

La réaction des parents à la maladie de leur enfant inuence directement celle des autres membres de la famille ainsi que les mécanismes d’adaptation de l’enfant atteint.

406

Partie 4

nourriture et d’insuline requise pendant cette période. • Une adolescente sexuellement active atteinte de drépanocytose ou de lupus érythémateux dissé miné doit être consciente des risques associés à la grossesse.

Réactions des parents

Chacun des membres de la famille dans laquelle vit un enfant ayant des besoins de santé particuliers reste marqué par cette expérience stressante de vie (de Vos et al., 2015 ; Popp et al., 2014). La réaction des parents à la maladie de l’enfant inuence directement celle des autres membres de la famille ainsi que les mécanismes d’adaptation de l’enfant atteint, en plus d’affecter l’évolution de la maladie ou du handicap de l’enfant (Eccleston et al., 2015). En effet, le fonctionnement de la famille est un déterminant primordial de la qualité de vie et du bien-être de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap (Cousino et Hazen, 2013 ; Leeman et al., 2016). Il n’est pas rare que l’enfant démontre de la erté et une grande conance en sa capacité à composer avec les difcultés auxquelles il doit faire face tout au long de

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

permettra notamment de bien cerner les différents mécanismes d’adaptation employés par l’enfant. Il peut être difcile pour le personnel inrmier de savoir ce que ressent l’enfant à l’égard de sa maladie ou de son handicap. C’est pourquoi il peut être utile d’avoir recours à diverses techniques de communication, dont le dessin et le jeu, en guise d’outils d’évaluation, en complément des informations fournies par les parents 4 .

Informer l’enfant L’inrmière doit renseigner l’enfant sur sa maladie ou son handicap, sur le plan de soins ainsi que sur la façon dont la maladie, le handicap ou le traitement pourraient perturber sa vie quotidienne (Memaj, 2015) ENCADRÉ 10.6. Il arrive que l’enfant redoute que sa maladie ou son handicap modie son apparence physique, par exemple chez les enfants atteints du cancer (Compas et al., 2012). L’inrmière peut renforcer une image de soi positive chez l’enfant en mettant l’accent sur ses forces et sur les aspects normaux de son apparence tout en le laissant exprimer sa colère, son isolement, sa peur du rejet, sa tristesse et sa solitude. Pour qu’il adhère à son traitement et que son état de santé s’améliore, l’enfant a besoin d’un renforcement positif, mais aussi que ses difcultés soient légitimées. Ainsi, tous les moyens sont bons pour l’aider à améliorer son image de soi : le maquillage pour l’adolescent qui veut masquer une cicatrice, les vêtements qui cachent une prothèse ou encore une coiffure ou une perruque qui saura dissimuler une déformation ou une perte de cheveux.

sa maladie lorsque ses parents renforcent ses comportements, l’encourageant du même coup à persévérer. L’inrmière doit accompagner les parents dans ce processus et adapter ses conseils et ses interventions en regard de la problématique de santé particulière de l’enfant TABLEAU 10.3 . Pour les parents, éduquer un enfant ayant des besoins de santé particuliers peut s’avérer une tâche complexe. En effet, en plus de devoir s’occuper de la routine familiale, les parents d’un enfant malade doivent se charger de lui prodiguer des soins complexes et techniques, de soulager ses symptômes, de lui apporter le soutien dont il a besoin ainsi que de chercher et de coordonner les services sociaux et de santé. Les parents doivent ainsi s’assurer qu’il y a un certain équilibre entre ces responsabilités supplémentaires et les besoins des autres membres de la famille, ceux de la

Pratiques inrmières TABLEAU 10.3

Adapter les interventions inrmières selon les besoins de santé particuliers de l’enfant

TROUBLE COGNITIF

DÉFICIENCE PHYSIQUE

MALADIE CHRONIQUE

TROUBLES MULTIPLES

• Si, au moment des évaluations, les parents mettent en doute l’incapacité décelée chez leur enfant, leur indiquer les com­ portements susceptibles d’être attendus de la part de l’enfant, mais qu’il ne manifeste pas.

• Si la perte des fonctions motrices ou sensorielles survient au cours de l’enfance, être consciente que le choc et le deuil de l’enfant et de sa famille seront intenses et qu’il faudra les accompagner au cours de cette période.

• Être conscient que la réalisation de l’ampleur des conséquences peut s’étaler sur des années.

• Inciter les parents à partager leurs observations par rapport au développement de leur enfant.

• S’assurer d’une réadaptation précoce.

• L’enfant ou les parents peuvent avoir besoin de plus de temps pour passer à travers l’étape du choc ; ainsi, être conscient de la possibilité qu’ils soient capables d’entendre un seul diagnostic à la fois an d’assimiler les renseignements et de se préparer à l’annonce des diagnostics suivants.

• Être conscient que la réadapta­ tion physique précède générale­ ment l’adaptation psychologique. • Lorsque la décience est causée par un accident, éviter de sous­entendre que les parents ou l’enfant sont responsables ; leur donner tout de même l’occasion d’exprimer le sentiment de culpabilité qu’ils peuvent ressentir.

famille élargie et des amis, ainsi que leur santé personnelle et leurs obligations an de minimiser les conséquences sur le fonctionnement général de la vie familiale (Hartling et al., 2014). Plusieurs parents dont l’enfant est atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap manifestent des niveaux élevés de stress et parfois des symptômes dépressifs (Cousino et Hazen, 2013). Ils vivent souvent de la tristesse liée au deuil, qui est parfois bien long à vivre avant l’étape de l’acceptation de la maladie (Popp et al., 2014). À mesure que la maladie progresse, les parents peuvent vivre différents deuils associés à la détérioration de l’état de santé de l’enfant et à l’augmentation de la demande de soins.

Principaux agents stressants Plus particulièrement au cours de la première année, mais parfois pendant plusieurs années, les parents luttent pour accepter le diagnostic, les soins que devra recevoir l’enfant atteint ainsi que l’incertitude quant à son avenir, ce qui inuence leur relation avec l’enfant (Popp et al., 2014). Il n’est pas rare que les parents soient sous le choc, qu’ils se sentent impuissants, isolés du monde, déprimés ou qu’ils aient peur (Eccleston et al., 2015 ; Kane, Joselow et Duncan, 2011). Par ailleurs, les caractéristiques propres à l’état de santé de l’enfant, comme l’issue de la maladie ou du handicap, l’exacerbation des symptômes physiques et les transitions développementales telles que l’entrée à l’école, pourront avoir des répercussions sur le fonctionnement familial Chapitre 10

• Aider chacun des membres de la famille à prendre conscience des préoccupations des autres et de l’effet que ces préoccupations ont sur leurs comportements. • Inciter l’enfant à exprimer ses émotions à l’aide de la technique de la troisième personne : Parfois, quand une personne a une maladie qui lui a été transmise par ses parents, cette personne peut être en colère à leur égard. Est­ce un sentiment qu’il t’arrive de ressentir ?

10

(Coffey, 2006 ; Kna et al., 2013 ; Leeman et al., 2016) ENCADRÉ 10.7. Par exemple, la brose kystique, par sa nature chronique et qui limite l’espérance de vie, en plus d’entraîner des exacerbations récurrentes et d’offrir peu de moments de répit, nécessite une réorganisation constante de la vie familiale (Grossoehme, Filigno et Bishop, 2014). Enn, les parents sont touchés par la présence ou l’absence de rétroactions positives (p. ex., un sourire) au cours de leurs interactions avec leur enfant (Pinquart, 2013). Pour ceux dont l’enfant est sérieusement handicapé et qui n’ont pas de rétroactions positives, être parent peut être synonyme d’expérience insatisfaisante, ce qui contribue à leur sensation d’incompétence et d’échec. L’inrmière peut mettre en place plusieurs stratégies pour venir en aide aux parents, dont :

éactivation des connaissances Quelles sont les cinq étapes du deuil selon Kübler­Ross ?

• xer, avec eux, des objectifs mesurables et réalistes que l’enfant pourra atteindre en fonction de ses capacités (Giambra et al., 2014 ; Lane et Mason, 2014) ; • fournir une aide pour qu’ils soient en mesure de reconnaître les forces de l’enfant ; • souligner leurs capacités lorsqu’ils prodiguent des soins à l’enfant ; • favoriser l’accès à des services de répit pour qu’ils puissent se reposer et reprendre des forces.

clinique

Jugement

• Mettre l’accent sur les capacités de l’enfant et sur les interventions qui favoriseront le développement de ses capacités (p. ex., les programmes de stimulation).

• Si la maladie est héréditaire, être à l’écoute de la culpabilité ressentie par les parents.

Noémie, âgée de huit mois, est hospitalisée depuis deux mois pour une encéphalopathie contractée à la naissance par contact avec le streptocoque B. Au moment de votre visite à sa chambre, vous trouvez la mère en pleurs, car elle dit vivre un échec et ne pas avoir d’interaction avec sa lle, puisque celle­ci ne réagit pas à sa présence. Comment pouvez­vous aider la mère à maintenir le lien d’attachement avec sa lle ?

Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie

407

ENCADRÉ 10.7

Sources potentielles de stress parental

ANNONCE DU DIAGNOSTIC

ADOLESCENCE

En plus d’être submergés par les émotions, les parents doivent assimiler une quantité considérable de renseignements.

Les enjeux relatifs à la sexualité et à l’indépendance prennent une grande place dans la vie des parents.

ÉTAPES IMPORTANTES DU DÉVELOPPEMENT

Le moment où l’enfant devrait normalement apprendre à marcher, à parler, à prendre soin de lui-même est retardé ou ne sera jamais atteint. ÉDUCATION DE L’ENFANT

Cette situation est particulièrement stressante lorsque l’éducation adaptée à l’état de l’enfant ne peut être donnée dans une classe ordinaire. ATTEINTE DU POTENTIEL MAXIMAL

PLACEMENT ÉVENTUEL

Les parents doivent prendre une décision quant au placement de l’enfant lorsqu’ils ne sont plus capables d’en prendre soin. PROGRESSION DE LA MALADIE ET DÉTÉRIORATION DE L’ÉTAT DE SANTÉ

Les parents font face à la mort éventuelle de leur enfant.

Les parents se rendent compte que l’enfant ne pourra jamais se déplacer par lui-même ou apprendre à lire. Sources : Adapté de Caicedo (2014) ; Cousino et Hazen (2013) ; Lemons (2010).

Une multitude d’agents stressants supplémentaires peuvent affecter la famille (p. ex., les problèmes conjugaux, les besoins de santé des frères et des sœurs de l’enfant atteint, l’isolement social, l’alcoolisme d’un membre de la famille). Même les activités courantes de la vie quotidienne, comme planier les soins à donner aux frères et aux sœurs de l’enfant malade, entretenir la maison ou se rendre aux rendez-vous médicaux, peuvent mettre à l’épreuve la capacité d’adaptation de la famille (Eccleston et al., 2015 ; Leeman et al., 2016). Les parents doivent également faire face au poids de la responsabilité des soins à domicile, lesquels sont souvent pris en charge par l’un des deux parents, à la peur de voir son enfant mourir, à la pression pouvant être exercée par les membres de la famille et, enn, au caractère parfois héréditaire de la maladie (Eccleston et al., 2015). Par ailleurs, le faible statut socioéconomique et le fait d’être dans une famille monoparentale

Soutien inrmier ENCADRÉ 10.8

Inciter à la libre expression des émotions

• Décrire le comportement (p. ex. : Vous semblez en colère contre l’équipe médicale.). • Démontrer de la compréhension (p. ex. : Avec les événements des derniers temps, il est tout à fait normal que vous soyez en colère.). • Démontrer de l’empathie (p. ex. : Il doit être difcile de vivre des moments aussi douloureux.). • Aider le parent à se concentrer sur ses émotions (p. ex. : Tout parent qui fait face à une telle situation peut ressentir autant de la colère que de la tristesse ou du découragement. Et vous, que ressentez-vous ?).

408

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

sont des facteurs importants qui inuent sur le degré d’adaptation et de stress ressenti par les parents (Kna et al., 2013). En effet, les coûts associés aux soins d’un enfant ayant des besoins particuliers peuvent être exorbitants. Le personnel inrmier et les travailleurs sociaux peuvent aider les parents à évaluer les choix qui s’offrent à eux en matière d’aide nancière, notamment pour ce qui est des assurances, des soins à domicile, des allocations gouvernementales comme la prestation pour les enfants handicapés, des diverses associations ou des organisations caritatives locales. Il existe aussi d’autres sources de tension qui gravitent autour des inconvénients relatifs aux soins, notamment les longues périodes d’attente entre les rendez-vous médicaux ou les trop longs délais avant d’obtenir des services de santé. Il est souhaitable de minimiser ou même d’éliminer ces agents stressants lorsque c’est possible. Les membres de la famille peuvent également faire appel à des professionnels de la relation d’aide qui pourront leur offrir un soutien psychologique, leur apprendre à évaluer et à reconnaître les agents stressants, et les inciter à développer des mécanismes d’adaptation et des stratégies de résolution de problèmes (Chi et Demiris, 2015 ; Herzer, Godiwala, Hommel et al., 2010 ; Lemons, 2010). Durant les rencontres avec les parents, le personnel inrmier devrait les inciter à verbaliser leurs émotions à l’égard de la situation de l’enfant, ou s’exprimer sur les répercussions de la maladie sur leur famille et les situations de stress concomitant, notamment les problèmes financiers ENCADRÉ 10.8.

Au sein d’une même famille, les parents réagissent et s’adaptent souvent différemment aux besoins particuliers de leur enfant. Par exemple, des études ont démontré que les mères d’enfants atteints d’une maladie chronique vivaient plus de périodes de détresse psychologique et d’insatisfaction maritale que les pères de ces mêmes enfants (Rodriguez, Dunn, Zuckerman et al., 2012 ; Zablotsky, Bradshaw et Stuart, 2013). Cela pourrait s’expliquer parce qu’il est encore courant que ce soit la mère qui assume la principale part des soins, qu’elle participe, davantage que le père, aux échanges avec le médecin et qu’elle soit donc plus susceptible que le père de quitter son emploi (Eiser et Varni, 2013). Toutefois, il est important de ne pas mettre de côté le parent qui ne participe pas activement aux soins de l’enfant, car il pourrait se sentir négligé ou oublié, puisque c’est l’enfant qui a l’entière attention du parent impliqué, en plus de ne pas se sentir sufsamment compétent ou informé pour participer aux soins de l’enfant. Si un parent participe peu ou pas aux soins prodigués à l’enfant, il ne peut estimer ou constater l’ampleur de l’énergie et du temps requis pour la réalisation de ces soins. De plus, lorsque ce parent décide de s’impliquer, il peut recevoir des critiques, étant moins habile à prodiguer les soins à l’enfant. Cette situation pourrait avoir comme effet de nuire à la communication et au soutien mutuel à l’intérieur du couple. Par ailleurs, l’implication des pères n’est pas à négliger. En effet, la participation des pères est particulièrement signicative auprès des adolescents atteints d’une maladie chronique, puisqu’elle est associée à une meilleure qualité de vie et à une meilleure adhésion thérapeutique (Swallow, Macfadyen, Santacroce et al., 2012). Le père dont l’enfant a des besoins particuliers fait face à des problèmes qui sont parfois différents de ceux vécus par la mère. Par exemple, il peut ressentir de l’impuissance, car il ne sait pas comment aider et protéger ses proches des problèmes accablants qui semblent se présenter de façon récurrente. Cette impuissance entraîne une impression de perte de contrôle qui peut faire en sorte que le père se sente déprimé, coupable, inquiet, honteux ou en colère. Comme il se perçoit comme le pilier de la famille, il a peu tendance à aller chercher de l’aide et il lui arrive souvent de cacher ses émotions et de se forcer à paraître conant an que ceux qui l’entourent pensent que tout va bien (Nicholas, 2017). Le père s’inquiète de l’avenir de ses enfants, de sa capacité à porter un fardeau nancier toujours plus lourd ainsi que des perturbations quotidiennes vécues au sein de sa famille (Nicholas, 2017). Certains pères se Chapitre 10

servent de leur travail comme d’un répit aux inquiétudes an de se distraire de leur douleur. Les stratégies d’adaptation les plus courantes chez eux sont axées sur la résolution du problème et comprennent notamment la modification des attentes à l’égard de la maladie, la recherche d’information sur la maladie et ses traitements, l’évaluation des options ou le repli sur soi (Nicholas, 2017 ; Swallow et al., 2012).

clinique

Jugement

Différences dans les réactions des deux parents

Les parents de Raphaël, âgé de deux ans, viennent d’apprendre que leur ls a un glioblastome multiforme. Ils désirent consulter un autre neurologue, car ils croient que les symptômes que leur enfant a présentés sont tout simplement dus à des otites récurrentes. Même s’ils disent être satisfaits des soins prodigués à leur petit garçon, ils doutent que les résultats des tests soient dénitifs. Nommez les réactions des parents de Raphaël qui démontrent un déni de la situation de leur ls.

Tous les efforts doivent donc être déployés pour inclure le père durant les visites à la pouponnière, à la clinique ou à l’école spécialisée, ou pour favoriser sa participation aux programmes de stimulation de l’enfant. Le père doit être inclus dans le processus d’évaluation, et l’inrmière doit considérer sa perception des forces et des faiblesses de l’enfant, car il n’est pas rare que les parents perçoivent différemment les aptitudes de leur enfant.

10

Familles monoparentales Les familles monoparentales requièrent davantage de soutien. En effet, le parent en situation de monoparentalité peut ressentir un très grand fardeau sur ses épaules, car il devra s’occuper seul d’un enfant qui aura besoin d’une grande quantité de soins complexes probablement toute sa vie. Il peut également avoir des soucis nanciers ou une absence de réseau de soutien. Le personnel soignant peut donc épauler le parent en le référant, par exemple, à des programmes de soutien nancier gouvernementaux. L’inrmière peut également aider le parent à déterminer les tâches auxquelles la famille proche ou les amis pourraient participer, ou les rôles qu’ils pourraient assumer an de le soutenir.

Adaptation des parents à la maladie chronique ou au handicap La réaction d’une personne à l’annonce du diagnostic peut varier énormément, notamment quant aux ajustements qu’elle apporte et au temps qu’elle met à accepter la situation. Toutefois, il est possible de distinguer certaines réactions qui se produisent au cours de l’adaptation de la famille à la maladie chronique ou au handicap (Kna et al., 2013 ; Popp et al., 2014). Le diagnostic de maladie chronique ou de handicap, lorsqu’il est posé, amène la plupart des parents à traverser diverses phases de réactions, d’abord par rapport à l’annonce du diagnostic (tristesse, choc, déni), ensuite par rapport à l’apprentissage des soins à l’enfant dans la vie quotidienne (anxiété, culpabilité, colère, surprotection) et,

Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie

409

enn, par rapport à l’adaptation aux besoins de santé particuliers (incertitude, conance, sentiment de compétence) FIGURE 10.4. Il convient de noter que certaines des réactions ne surviendront pas de façon linéaire ou ne se produiront pas nécessairement dans le même ordre, et que certains parents ne vivront pas toutes

FIGURE 10.4

410

Partie 4

Adaptation des parents à la maladie chronique ou au handicap

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

les émotions associées aux diverses phases (Lemons, 2010 ; Thyen et Perrin, 2009).

10.2.3

Réactions des frères et sœurs

L’arrivée dans la famille d’un enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap a également des répercussions directes sur la fratrie de

l’enfant. Plusieurs adaptations au sein de la famille auront lieu an de s’ajuster aux besoins de l’enfant. Ces changements peuvent parfois être vécus difcilement par les frères et sœurs de l’enfant malade.

Retombées psychologiques Les frères et sœurs des enfants atteints d’une maladie chronique ou d’un handicap présentent des signes de dépression et d’anxiété dans une plus grande mesure que leurs pairs (Hartling et al., 2014). En revanche, la plupart des chercheurs qui se sont intéressés au sujet s’accordent pour dire que les frères et sœurs des enfants ayant des besoins de santé particuliers ne sont pas plus à risque de souffrir de problèmes psychiatriques graves que les frères et sœurs des enfants en santé.

Attention des parents Certains facteurs accroissent le risque que la présence d’un enfant ayant des besoins particuliers ait des répercussions négatives sur ses frères et sœurs. Tout d’abord, il arrive que les parents accordent une moins grande attention aux autres enfants, et ces derniers peuvent se montrer envieux du temps que les parents accordent à l’enfant malade (Emerson et Giallo, 2014 ; Meltzer et Kramer, 2016). Les frères et sœurs peuvent réagir à cette situation en adoptant une attitude négative à l’égard de l’enfant ou en exprimant leur colère de différentes manières. Il est difcile pour les enfants plus vieux et pratiquement impossible pour les plus jeunes de comprendre la détresse vécue par celui qui est malade ou handicapé. Ils ne voient qu’un enfant qui reçoit toute l’attention de ses parents, de nombreux cadeaux et cartes de souhaits, et qui est au centre des préoccupations et des discussions de tous ceux qui l’entourent. À l’inverse, certains enfants auront tendance à s’effacer an d’éviter d’ajouter au fardeau des parents.

Sentiment de honte Il se peut que les enfants ressentent une certaine honte à l’idée d’avoir une sœur ou un frère malade ou handicapé. Le cas échéant, les parents doivent corriger la situation en adoptant une attitude empreinte d’empathie et de compréhension, sans punir les enfants pour ce qu’ils ressentent. Ainsi, il est souhaitable de parler avec les enfants an de savoir comment ils perçoivent leur frère ou leur sœur malade FIGURE 10.5. Les adolescents, en particulier, peuvent avoir de la difculté à s’exprimer sur ces enjeux importants avec leurs parents. Ils pourraient préférer s’adresser au personnel inrmier. Bon nombre d’enfants bénécient

Chapitre 10

grandement des discussions avec d’autres jeunes dans la même situation. En outre, les groupes de soutien qui s’adressent à la fratrie permettent de réduire l’isolement, favorisent l’expression des émotions et fournissent des exemples de mécanismes d’adaptation efcaces.

Communication au sein de la famille Un des moyens de favoriser l’adaptation de la fratrie est de bien la renseigner sur l’état de santé ou la FIGURE 10.5 L’inrmière explique maladie du frère ou de la sœur. En au frère de l’enfant atteint les répercussions effet, les croyances des autres de la maladie, et elle l’incite à exprimer ses enfants en regard de la cause de la émotions. maladie sont souvent erronées, et ceux-ci traversent plusieurs gammes d’émotions à la suite de l’annonce du diagnostic (Lane et Mason, 2014). Habituellement, ce sont les parents qui se trouvent dans la position la plus favorable pour informer leurs enfants. Cependant, il pourrait arriver qu’ils soient trop préoccupés par la situation de crise médicale dans laquelle ils se trouvent pour trouver le temps de le faire. Bien des parents s’inquiètent de la façon et du moment d’informer les autres enfants de la famille de la maladie de leur frère ou de leur sœur. Cela dépend du caractère et de la compréhension de chacun. Toutefois, dans la plupart des cas, il est préférable d’en informer ses enfants avant que quelqu’un qui n’est pas de la famille le fasse. De plus, si les parents choisissent de se taire ou de mentir aux enfants, ils leur donnent l’impression qu’il n’est pas acceptable de parler de la maladie (Jones et al., 2011).

CE QU’IL FAUT RETENIR

Il est préférable que ce soit les parents qui infor­ ment les enfants de la maladie de leur frère ou de leur sœur plutôt que quelqu’un qui n’est pas de la famille.

Participation aux soins Dans le but d’aider les parents, la fratrie a souvent plus de responsabilités envers elle-même, mais également en regard des soins à prodiguer à l’enfant malade ou handicapé (Gazzano, 2014 ; Lane et Mason, 2014) ENCADRÉ 10.9. Il n’est pas rare qu’elle ait une réaction positive à l’idée d’avoir davantage de tâches, mais une réaction négative à l’idée de ne recevoir aucune reconnaissance pour avoir accompli ces tâches supplémentaires. De telles impressions peuvent être évitées si l’inrmière incite l’enfant à en parler à ses parents lorsqu’une telle situation se produit et qu’elle propose aux parents des façons d’exprimer leur gratitude. Ils pourraient, par exemple, augmenter l’allocation de l’enfant, lui accorder des privilèges et, de façon plus importante, le complimenter verbalement en reconnaissant ses efforts.

Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie

411

10

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 10.9

Soutien aux frères et sœurs des enfants ayant des besoins particuliers

• Valoriser chaque enfant individuellement et éviter de les comparer. Rappeler à chacun ses qualités et ce qu’il apporte aux autres membres de la famille. • Aider les frères et sœurs de l’enfant à percevoir les différences et les ressemblances entre eux et l’enfant ayant des besoins particuliers. Créer un climat dans lequel les enfants peuvent avoir du succès sans se sentir coupables de réussir. • Montrer aux enfants comment interagir avec celui ou celle qui a des besoins particuliers. • Veiller à être juste quant à la discipline, à l’attention ainsi qu’aux ressources accordées à chaque enfant. Exiger de l’enfant malade ou handicapé qu’il soit aussi autonome que son état le lui permet. • Laisser les enfants régler leurs différends. N’intervenir que s’il y a un risque de blessure. • Apprendre à accepter la colère de l’enfant, à condition qu’elle soit justiée. Il arrive aussi aux enfants ayant des besoins particuliers de mal se comporter. • Respecter l’enfant lorsqu’il préfère ne pas être en présence de son frère ou de sa sœur qui est malade, ou lorsqu’il refuse de l’inviter à prendre part à ses activités. • Être attentif an que les frères et sœurs de l’enfant malade ou handicapé sachent que leurs idées et leurs suggestions comptent. • Féliciter l’enfant qui a été patient, utile ou qui a fait des compromis. Ne pas tenir pour acquis qu’il agira toujours de la sorte.

• Reconnaître les forces de chacun ainsi que leur capacité à s’adapter aux situations stressantes avec succès. • Informer les enfants sur l’état de santé de leur frère ou de leur sœur en tenant compte de leur âge. Les tenir au courant de tout changement. Répondre franchement à leurs questions. Discuter de l’avenir avec eux. Informer les enseignants de manière à ce qu’ils soient compréhensifs. • Savoir reconnaître les périodes de stress vécues par la fratrie et faire en sorte d’en minimiser les conséquences négatives. • Réserver du temps de qualité aux enfants ; faire appel à des services de répit ; s’assurer qu’un proche prend la relève lorsque le parent ne peut être là. • Inciter les frères et sœurs de l’enfant à faire partie d’un groupe ou à se créer un réseau de soutien. • Avoir recours aux services professionnels à sa disposition lorsque le besoin se fait sentir. Si les parents sentent que de tels services sont nécessaires, faire en sorte que l’aide soit considérée comme aussi importante que celle apportée à l’enfant ayant des besoins particuliers. • Trouver des moyens réalistes an que les frères et sœurs de l’enfant prennent part aux soins et au traitement qui lui sont prodigués, et les remercier lorsqu’ils accomplissent leurs tâches. • Inviter la fratrie durant les rencontres de planication à l’intention de l’enfant ayant des besoins particuliers. Demander leur avis aux autres enfants quant au traitement et aux services nécessaires.

Sources : Adapté de Lane et Mason (2014) ; Muriel, Case et Sourkes (2011) ; Nolbris et Nilsson (2017) ; Van Pevenage et Lambotte (2016).

Soins inrmiers RÉPERCUSSIONS DE LA MALADIE CHRONIQUE OU DU HANDICAP SUR LA FAMILLE

Évaluer la famille sur une base régulière Le personnel inrmier rencontre les membres de la famille à diverses étapes de l’évolution de la maladie ou du handicap et du processus d’adaptation, et il se doit d’évaluer plusieurs Roxanne, neuf ans, a une sœur atteinte de brose éléments de ce processus kystique. Vous validez la compréhension qu’elle a ENCADRÉS 10.10 et 10.11. Ce de la maladie de sa sœur et vous lui donnez des processus permet, entre informations complémentaires, au besoin. Pourquoi autres, de miser sur les forces est-ce essentiel de le faire ? et les habiletés de la famille tout en permettant d’inter­ a) Cela permet à Roxanne de sentir qu’elle venir sur les difcultés ren­ participe à la dynamique familiale. contrées ou éprouvées. Le b) C’est un moyen efcace de favoriser son personnel infirmier et la adaptation à la situation de sa sœur. famille peuvent se servir de c) Cela permet de mieux soutenir les parents dans différentes questions afin les relations familiales avec Roxanne et sa sœur. d’évaluer la perception de la maladie chez chacun des d) Cela permet d’éviter que Roxanne adopte membres de la famille, leurs une attitude négative à l’égard de sa sœur.

Jugement

clinique

412

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

mécanismes d’adaptation et leurs ressources. Étant donné que les facteurs d’inuence de la réaction des membres de la famille à l’égard de la maladie peuvent changer à tout moment, l’éva­ luation se doit d’être un processus continu.

Soutenir la famille Le personnel inrmier peut aider les membres de la famille en explorant avec eux ce qu’ils consi­ dèrent être la meilleure façon, pour les enfants, de réagir à l’égard de celui qui est malade et en aidant les parents à répondre aux besoins des autres enfants en matière d’attention. Cette discussion doit avoir lieu avant que des conséquences négatives ne se manifestent. Le personnel inrmier peut aussi inciter les parents à discuter avec les frères et sœurs de l’enfant de la façon dont ils le perçoivent et à se montrer compréhensifs à l’égard des émotions qu’ils expriment. L’inrmière peut s’avérer une per­ sonne disponible, neutre et empathique pour la fratrie au cours de la maladie du frère ou de la sœur (Nielsen, Mandleco, Roper et al., 2012).

Soutien inrmier ENCADRÉ 10.10

Aider la famille à s’adapter à la maladie chronique de l’enfant

Après plusieurs entrevues avec des parents dont l’enfant a une maladie chronique, Kratz et ses collaborateurs (2009) ont formulé des recommandations pour les professionnels de la santé an d’accompagner les familles dans leur processus d’adaptation.

De nombreuses ressources bénévoles et communautaires existent dans le but :

RÉAJUSTER LES ATTENTES DE LA FAMILLE ENVERS ELLE-MÊME ET ENVERS L’ENFANT MALADE OU HANDICAPÉ

• d’amasser des fonds pour les enfants. Les organismes nationaux ou locaux peuvent apporter de l’aide et du soutien aux familles qui répondent à leurs critères ou les rediriger vers des ressources régionales existantes.

Être à l’écoute et reconnaître les difcultés auxquelles la famille fait face. Cela néces­ site d’ébranler les croyances contraignantes de la famille (Wright et Leahey, 2013). ENCOURAGER LES PARENTS À PRENDRE SOIN D’EUX-MÊMES ET À PRÊTER ATTENTION À LEUR PROPRE BIEN-ÊTRE

Avoir une conversation avec les parents sur leurs besoins et leur bien­être, ainsi que sur la façon de le favoriser. ÉTABLIR UNE RELATION DE PARTENARIAT AVEC LES PROFESSIONNELS DE LA SANTÉ

Reconnaître l’expertise des parents et tenir compte de leurs suggestions et observations dans la planication des soins à l’enfant. DÉTERMINER ET SUGGÉRER DES RESSOURCES

Se mettre au fait des organismes présents dans la communauté ainsi que des programmes de formation qui s’adressent à des groupes particuliers.

• d’offrir de l’aide ou du répit aux familles ; • de fournir du matériel ;

ENCOURAGER LE SOUTIEN SOCIAL

Encourager les parents à se créer un réseau de soutien, par exemple : • en les incitant à faire partie d’un groupe de parents vivant la même situation ; • en les dirigeant vers d’autres parents qui ont eu à s’adapter à la même maladie ; • en les invitant à siéger à des conseils et à des comités à l’hôpital. Le soutien de parents à parents est effectivement important, car il permet de normaliser l’expérience des familles et aussi d’échanger des trucs pour la gestion de la maladie.

10

Source : Adapté de Kratz, Uding, Trahms et al. (2009).

Mise en œuvre d’une démarche de soins ENCADRÉ 10.11

Évaluation de la famille dont l’enfant a des besoins de santé particuliers

COLLECTE DES DONNÉES – ÉVALUATION INITIALE

L’évaluation initiale doit d’abord permettre à l’inrmière d’obtenir une vue d’ensemble de la situation de santé de l’enfant et des traitements ou des ajustements nécessaires à sa condition an de pouvoir bien évaluer la situation familiale par rapport au problème de santé vécu par l’enfant (Wright et Leahey, 2013). Ainsi, outre les informations essentielles concernant la situation de santé de l’enfant, l’inrmière pourra notamment explorer : • le réseau de soutien à la disposition de la famille ; • les croyances en regard de la cause, de la sévérité, de la prévisibilité et de l’évolution de la maladie ou du handicap ;

• Quelle inuence la maladie ou le handicap de l’enfant a­t­il eue sur vous et sur les autres membres de votre famille ? • Qu’est­ce qui vous inquiète le plus concernant la maladie ou le handicap de votre enfant ? ANALYSE ET INTERPRÉTATION DES DONNÉES

L’analyse découlant de la situation de santé peut porter sur différents éléments, dont : • les forces et les dés de la famille ; • les principales préoccupations ou inquiétudes ;

• la façon de gérer la maladie ou le handicap dans la vie quotidienne et la façon dont cela affecte la vie familiale ;

• les ressources disponibles et leur utilisation par la famille.

• la préoccupation la plus importante de la famille au moment de l’entretien. Voici des exemples de questions que l’inrmière peut utiliser an d’évaluer l’adaptation de la famille à la maladie ou au handicap de l’enfant :

La planication des soins est établie dans le but d’atteindre les résultats suivants :

RÉSULTATS ESCOMPTÉS

• Acceptation de l’aide au moment du diagnostic

• Comment gérez­vous les différents soins à donner à votre enfant ?

• Acceptation des réactions affectives de la famille de la part du personnel inrmier

• Selon vous, quelle est la cause de cette maladie ou de ce handicap ?

• Adaptation de l’enfant et de sa famille à la situation stressante

• Comment avez­vous intégré la prise des médicaments de votre enfant à la routine familiale ?

• Transmission de renseignements pertinents à la famille concernant la maladie ou le handicap dont l’enfant est atteint

Chapitre 10

Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie

413

ENCADRÉ 10.11

Évaluation de la famille dont l’enfant a des besoins de santé particuliers (suite)

• Capacité de la famille de prévoir un environnement qui favorise la normalisation de la vie de l’enfant

• la façon dont les parents expriment verbalement leurs émotions et leurs inquiétudes à l’égard de la maladie ou du handicap ;

• Capacité de la famille à se xer des objectifs réalistes INTERVENTIONS INFIRMIÈRES

• l’attitude des parents, leur acceptation de la situation ainsi que leur façon de s’y adapter ;

De nombreuses stratégies d’intervention sont traitées dans les sections Soins inrmiers de ce chapitre.

• la façon dont la famille démontre sa compréhension de la maladie ou du handicap et des traitements qui s’offrent à l’enfant ;

ÉVALUATION DES RÉSULTATS – ÉVALUATION EN COURS D’ÉVOLUTION

• les objectifs xés par la famille pour elle­même ainsi que pour l’enfant ;

L’efcacité des interventions inrmières est déterminée grâce à une rééva­ luation continue des soins inrmiers par l’observation des points suivants :

• les comportements de la famille an de voir s’ils favorisent le dévelop­ pement de l’enfant et des autres membres de la famille.

10.2.4

Transports Canada a publié en 2008 un document intitulé Le transport de bébés et d’enfants qui ont des besoins spéciaux dans des véhicules particuliers. Guide de pra­ tiques exemplaires pour les professionnels de la santé dans lequel il est question des options sécuritaires. Il peut être consulté au www.tc.gc.ca.

3 Tous les aspects de la promotion de la santé en lien avec le rôle de l’inr­ mière sont présentés dans le chapitre 3, Croissance, développement et promotion de la santé.

Organisation de la vie quotidienne

Les parents ont besoin d’information en ce qui a trait aux perturbations que pourrait entraîner la maladie sur les activités de la vie quotidienne.

Information aux tiers Les parents doivent prendre conscience de l’importance d’aviser les services concernés de la maladie de l’enfant s’il survient une urgence médicale. Même les adolescents pourraient ne pas être en mesure de donner toute l’information médicale les concernant advenant un accident ou une crise. C’est pourquoi tous les enfants atteints d’un problème de santé qui pourrait avoir une incidence sur les soins à recevoir devraient porter sur eux un élément d’alerte médicale. Il peut s’agir d’un bracelet MedicAlertMD ou d’une carte dans leur portefeuille mentionnant le problème de santé ainsi qu’un numéro de téléphone permettant d’avoir accès à un dossier médical d’urgence ou à tout autre renseignement. De plus, l’école, le camp de vacances et les organismes de loisirs doivent être au courant de l’état de santé de l’enfant et avoir des indications à suivre en cas d’urgence. En ce qui a trait à l’école, il peut être judicieux de faire un rappel sur l’état de santé de l’enfant à chaque début d’année scolaire, surtout s’il y a un changement de professeur.

Soins de santé CONSEIL CLINIQUE

L’inrmière doit rappeler aux parents l’importance des soins de santé de base, qui peuvent être négligés parce que toute l’attention est portée vers la maladie ou le handicap de leur enfant.

414

Partie 4

Les enfants ayant des besoins de santé particuliers requièrent les mêmes soins de base que tous les autres enfants. La prévention des blessures, les vaccins, les soins d’hygiène et les examens médicaux réguliers sont essentiels 3 . Le personnel inrmier peut jouer un rôle essentiel à cette étape en rappelant aux parents l’importance de ces soins, lesquels peuvent être négligés parce que toute leur attention est portée vers la maladie ou le handicap.

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

Transport sécuritaire Des modications pourraient devoir être apportées en vue de rendre le transport automobile plus sécuritaire. En effet, il arrive souvent que les sièges classiques ne puissent pas garantir la sécurité des nouveau-nés de faible poids ou celle des enfants souffrant de troubles orthopédiques, neuromusculaires ou respiratoires. Par exemple, un enfant qui porte un spica plâtré à la hanche ne peut être assis convenablement dans un siège d’auto. Il existe également des vestes à l’intention des enfants plus grands qui assurent leur sécurité tout en leur permettant d’être à l’aise. Par ailleurs, l’enfant en fauteuil roulant doit être transporté dans une automobile adaptée qui possède un système d’arrimage sécuritaire. Les parents dont l’enfant est en fauteuil roulant devraient communiquer avec le fabricant du fauteuil an de prendre connaissance des instructions relatives à la sécurité automobile. Si l’enfant doit être transporté avec des appareils médicaux (p. ex., de l’oxygène, un moniteur, un respirateur), ces appareils doivent être xés au sol, sous le siège ou sous le fauteuil roulant. En outre, un rembourrage doit être utilisé pour combler les espaces autour des appareils an d’éviter que ces derniers ne se déplacent. Finalement, un adulte doit être auprès de l’enfant dont la santé est fragile an de pouvoir surveiller son état pendant le transport et intervenir au besoin.

10.3

Répercussions de la maladie chronique ou du handicap sur le développement de l’enfant

Il est possible que l’enfant malade ou handicapé mette plus de temps qu’un enfant en santé à atteindre les différents stades de développement ; l’appui fourni aux parents aura donc pour objectif

d’aider l’enfant à réaliser son plein potentiel (Kna et al., 2010) TABLEAU 10.4. Grâce à une planication adéquate et à une bonne connaissance des stratégies qui permettent d’améliorer leurs capacités fonctionnelles, la plupart des enfants ayant des besoins de santé particuliers arrivent à mener une vie gratiante et productive. L’un des aspects les plus importants de la promotion du développement normal de l’enfant est TABLEAU 10.4

certainement d’inciter ce dernier à accroître son autonomie, tant sur le plan de ses activités de la vie quotidienne que sur celui de son plan thérapeutique. Toutefois, une évaluation des capacités physiques, cognitives et affectives de l’enfant en fonction de son âge doit être effectuée an de déterminer le niveau d’autosoins acceptable chez l’enfant dans le cadre de son plan thérapeutique.

Conséquences de la maladie chronique ou du handicap sur le développement de l’enfant

TÂCHES DÉVELOPPEMENTALES

CONSÉQUENCES POSSIBLES DE LA MALADIE OU DU HANDICAP

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES OU PARENTALES

Nouveau-né et nourrisson : de la naissance à 12 mois • Acquisition du sentiment de conance

• Plusieurs soignants et de fréquentes séparations d’avec les parents, surtout si l’enfant doit être hospitalisé • Instabilité des soins procurés par le parent

• Faire en sorte que ce soient les mêmes soignants qui interviennent, tant à l’hôpital que dans tout autre contexte de soins. • Inciter les parents à être présents le plus possible durant l’hospitalisation et à participer aux soins. • Proposer aux parents de cohabiter avec l’enfant durant l’hospitalisation.

10

• Établissement d’un lien parents-enfant

• Retard causé par la séparation, par le deuil de l’enfant « rêvé » ou souhaité par le parent, ou par l’incapacité du parent à accepter la condition de l’enfant, surtout s’il s’agit d’un handicap visible

• Mettre l’accent sur les aspects normaux et sains de l’enfant.

• Apprentissage sensorimoteur

• Exposition à un plus grand nombre d’expériences plus douloureuses que plaisantes

• Faire en sorte que l’enfant vive des expériences sensorielles plaisantes (p. ex., par le goûter, le toucher, etc.).

• Contact réduit avec l’environnement en raison de mouvements restreints ou du connement

• Inciter le développement des habiletés de l’enfant en fonction de son âge (p. ex., tenir le biberon, manger avec ses mains, ramper ; favoriser le mouvement).

• Dépendance accrue aux parents en raison des soins nécessaires

• Inviter tous les membres de la famille à participer aux soins an d’éviter que l’un d’entre eux ne se sente surchargé.

• Début de la phase de séparation des parents

• Trop grand investissement des parents aux soins

• Aider les parents à comprendre les besoins particuliers de l’enfant an qu’ils se sentent compétents.

• Inciter les parents à prendre des périodes de répit au cours desquelles ils sont exemptés de toute responsabilité. Trottineur : de 1 à 3 ans • Développement de l’autonomie

• Dépendance accrue aux parents

• Favoriser l’indépendance de l’enfant dans ses activités de la vie quotidienne (p. ex., l’hygiène, l’habillement, l’alimentation).

• Maîtrise des aptitudes locomotrices et linguistiques

• Peu d’occasions de tester ses capacités et ses limites

• Donner des idées d’activités qui sollicitent la motricité globale et modier les jouets ou l’équipement de l’enfant.

• Apprentissage sensorimoteur et pensées préopératoires

• Peu d’occasions d’exercer son pouvoir décisionnel

• Offrir des choix simples à l’enfant an qu’il se sente en contrôle (p. ex., lui donner le choix du livre à regarder ou du repas qu’il mangera).

• Exposition accrue à des expériences douloureuses

• Imposer une discipline et des limites adaptées à l’âge de l’enfant. • Comprendre que les comportements négatifs et les rituels peuvent être normaux. • Offrir à l’enfant des expériences de jeu sensorielles (jeu d’eau, bac à sable, etc.).

Chapitre 10

Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie

415

TABLEAU 10.4

Conséquences de la maladie chronique ou du handicap sur le développement de l’enfant (suite)

TÂCHES DÉVELOPPEMENTALES

CONSÉQUENCES POSSIBLES DE LA MALADIE OU DU HANDICAP

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES OU PARENTALES

Enfant d’âge préscolaire : de 3 à 6 ans • Développement de son sens de l’initiative et de son sentiment de compétence

• Peu d’occasions d’accomplir certaines tâches simples ou d’apprendre à être autonome dans la gestion de ses soins

• Promouvoir l’autonomie chez l’enfant. • Lui fournir des appareils qui lui facilitent la tâche (p. ex., pour qu’il apprenne à s’habiller lui-même).

• Maîtrise de la capacité de prendre soin de soi-même Enfant d’âge préscolaire : de 3 à 6 ans • Établissement de relations interpersonnelles

• Peu d’occasions de socialiser avec ses pairs ; perception de l’enfant comme étant encore un bébé aux yeux des jeunes de son âge

• Inciter l’enfant à socialiser avec ses pairs (p. ex., en l’encourageant à inviter des amis à jouer avec lui, en l’inscrivant à la garderie, en l’amenant au parc).

• Protection assurée par une famille tolérante où l’enfant se sent en sécurité ; conséquence chez l’enfant : craintes de susciter des commentaires négatifs et de subir le rejet lorsqu’il est dans un autre environnement

• Trouver des activités et des jeux adaptés à son âge ; les jeux d’association sont particulièrement conseillés.

• Apparition du concept d’image de soi et identication sexuelle

• Conscience du corps axée sur la douleur, l’anxiété et l’échec

• Inciter l’enfant à établir des liens avec des enfants ou des adultes du même sexe que lui et du sexe opposé.

• Apprentissage préopératoire (pensée magique)

• Culpabilité, puisque l’enfant croit qu’il est responsable de sa maladie ou de son handicap, ou qu’il s’agit d’une punition parce qu’il a fait quelque chose de mal

• Détermination du rôle sexuel axée principalement sur le maternage

• Mettre l’accent sur les habiletés de l’enfant et le vêtir de manière à améliorer son apparence physique. • Aider l’enfant à composer avec les commentaires négatifs et à comprendre que la surprotection l’empêche de s’adapter à la situation. • Faire comprendre à l’enfant qu’il n’est pas responsable de sa maladie ou de son handicap, et qu’il ne s’agit pas d’une punition.

Enfant d’âge scolaire : de 6 à 11 ans • Développement du sens de l’accomplissement

• Peu d’occasions de se dépasser ou de compétitionner (en raison d’absences régulières à l’école ou d’une incapacité à participer à des activités athlétiques)

• Inciter l’enfant à aller à l’école ; prendre les rendez-vous médicaux lorsque l’enfant n’est pas en classe et inciter ce dernier à reprendre le travail qu’il a manqué, s’il y a lieu. • Inciter l’enfant à participer à des activités sportives ou artistiques.

• Établissement de relations interpersonnelles

• Peu d’occasions de socialiser avec ses pairs

• Informer les enseignants et les camarades de classe de l’enfant de la maladie ou du handicap dont il souffre, mais aussi de ses aptitudes et de ses besoins particuliers. • Inciter l’enfant à socialiser avec ses pairs. • Encourager les activités sportives en groupe, adaptées aux besoins de l’enfant.

• Apprentissage concret

• Compréhension partielle de l’enfant des raisons des limites physiques imposées et du traitement de la maladie ou du handicap

• Informer l’enfant sur sa maladie ou son handicap. • Inciter l’enfant à participer à des activités de création.

Adolescent : de 12 à 18 ans • Développement d’une identité personnelle et sexuelle

• Sentiment accru d’être différent des autres et capacité réduite à les égaler sur le plan de l’apparence et des aptitudes

• Normaliser auprès de l’adolescent certaines des difcultés qu’il rencontre en expliquant que celles-ci sont des expériences normales liées à l’adolescence (p. ex., la rébellion, la prise de risques, le manque de coopération, l’aversion pour l’autorité). • Aider l’adolescent à développer ses forces et à surmonter ses difcultés en discutant ouvertement avec lui.

416

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

TABLEAU 10.4

Conséquences de la maladie chronique ou du handicap sur le développement de l’enfant (suite)

TÂCHES DÉVELOPPEMENTALES

CONSÉQUENCES POSSIBLES DE LA MALADIE OU DU HANDICAP

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES OU PARENTALES

• Acquisition de l’autonomie et de l’indépendance par rapport à la famille

• Dépendance accrue à la famille ; occasions professionnelles restreintes pour l’adolescent

• Explorer avec lui ses relations interpersonnelles et ses mécanismes d’adaptation. • Inciter l’adolescent à prendre davantage de responsabilités quant à ses soins et à la prise en charge de son problème de santé (p. ex., prendre et respecter les rendez-vous médicaux [idéalement de façon autonome], informer les autres sur l’évaluation et la planication de ses soins de santé, communiquer avec les ressources pertinentes). • Discuter de son avenir et de la façon de faire des choix en fonction de son état de santé.

Adolescent : de 12 à 18 ans • Relations interpersonnelles à plus long terme

• Peu d’occasions d’établir des liens et de discuter des enjeux de la sexualité avec les autres

• Inciter l’adolescent à socialiser avec ses pairs, tant avec des jeunes ayant des besoins de santé particuliers qu’avec les autres.

• Questionnement de plus en plus fréquent de l’adolescent sur la cause de sa maladie ou de son handicap, sur sa capacité future d’être en couple et de fonder une famille un jour, etc.

• Inciter l’adolescent à participer à des activités adaptées à son âge (p. ex, aller à une fête mixte, apprendre à conduire, pratiquer des activités sportives). • Être attentif aux signes qui indiquent que l’adolescent veut connaître les conséquences de sa maladie sur la sexualité et la reproduction. • Comprendre que l’adolescent éprouve les mêmes besoins sexuels et les mêmes inquiétudes que tous les autres jeunes de son âge.

• Apprentissage abstrait

• Difcultés cognitives pouvant nuire à l’apprentissage abstrait

• Guider l’adolescent dans ses prises de décision, son afrmation de soi et dans les autres aptitudes nécessaires à l’organisation de plans personnels.

Sources : Adapté de CAPHC (2016) ; Lehner (2015) ; Lemons (2010) ; Lipstein, Dodds, Lovell et al. (2016) ; McCarthy (2015).

Même les trottineurs peuvent jouer un rôle dans les soins qui leur sont donnés, notamment en tenant certains objets pour leur parent au moment d’une intervention. Avec le temps, les enfants devraient être incités à être de plus en plus autonomes relativement aux autosoins (Lemons, 2010). L’une des principales difcultés consiste à xer des objectifs réalistes à l’enfant ainsi qu’à ceux qui lui prodiguent des soins continus.

10.3.1

Première année de vie et début de l’enfance

Relation de conance L’enfant en bas âge apprend à faire conance grâce à une relation satisfaisante, intime et stable avec ses parents. Cependant, le début de l’existence peut aussi être une période stressante, chaotique, souvent ponctuée d’expériences douloureuses et insatisfaisantes pour un enfant malade ou handicapé. C’est pourquoi il pourrait avoir besoin d’un plus grand soutien de la part de ses parents et de plus de Chapitre 10

marques d’affection avant d’avoir conance en son environnement (Lehner, 2015). Dans un tel contexte, les parents auront besoin de soutien professionnel pour être capables de répondre aux besoins de l’enfant (p. ex., apprendre à tenir un enfant qui manque de tonus ou qui présente une rigidité musculaire, apprendre à nourrir un enfant qui donne des poussées de la langue ou qui a des épisodes de dyspnée, savoir comment stimuler un enfant dont les capacités fonctionnelles sont rares) (Giambra et al., 2014). Si les périodes d’hospitalisation sont fréquentes ou prolongées, tous les efforts doivent être fournis pour préserver la relation parents-enfant (Lehner, 2015). En outre, les politiques hospitalières devraient encourager les visites et la participation des membres de la famille.

Indépendance et autonomie Au début de l’enfance, les principaux objectifs du développement de l’enfant sont la séparation progressive d’avec les parents ainsi que l’acquisition de l’autonomie et de l’initiative. Cependant, la première réaction des parents qui ont un enfant

Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie

417

10

malade ou handicapé est de le surprotéger (Beacham et Deatrick, 2013). C’est pourquoi ils ont besoin de soutien pour comprendre l’importance de marquer de courtes séparations entre eux et l’enfant ainsi qu’entre l’enfant et les personnes qui lui prodiguent des soins. Les parents doivent également mesurer l’importance des activités de socialisation ailleurs qu’au domicile, et s’y adonner le plus régulièrement possible. En outre, les services de répit peuvent s’avérer essentiels, car ils offrent la possibilité aux parents d’être dispensés des tâches quotidiennes. Il est primordial pour l’inrmière de discuter de ces services avec les parents an de les informer, mais également d’atténuer le sentiment de culpabilité ou de honte associé au recours à ces services. Les jeunes enfants doivent aussi avoir l’occasion d’acquérir leur indépendance (Beacham et Deatrick, 2013). Il n’est pas rare que l’enfant soit capable de tenir son biberon, de manger avec ses mains ou d’enlever certains vêtements, mais que les parents continuent de le faire pour lui, limitant alors le développement de son autonomie. L’inrmière peut guider les parents à travers les étapes habituelles du développement de l’enfant. Lorsque l’enfant n’arrive pas à maîtriser une certaine habileté, il est préférable d’avoir recours à une aide fonctionnelle. Grâce à quelques innovations, l’environnement FIGURE 10.6 Les enfants de l’enfant peut être adapté à ses besoins de bien des manières qui contribueront à ayant des besoins particuliers augmenter ses déplacements et son devraient poursuivre leur scolarité aussitôt que leur état le permet. indépendance.

Discipline La discipline, une autre composante essentielle du développement normal de l’enfant, est utile de plusieurs façons. D’abord, elle donne à l’enfant des limites qui peuvent être utilisées pour évaluer son comportement et lui apprendre à distinguer ce qui est socialement acceptable de ce qui ne l’est pas. Il est primordial pour les parents d’appliquer les mêmes limites à tous les enfants de la famille an de ne pas affecter négativement la fratrie. La responsabilité de l’inrmière est donc d’aider les parents à trouver des moyens efcaces de prendre en charge les comportements de l’enfant avant qu’ils ne posent problème.

10.3.2

Âge scolaire

Pour l’enfant d’âge scolaire, les principaux enjeux sont de commencer à fréquenter l’école, puis de faire preuve d’assiduité. En effet, plus ses absences sont fréquentes, plus il lui est difcile de retourner en classe. Une phobie scolaire peut même naître chez lui ; c’est pourquoi il est important qu’il y retourne le plus tôt possible après l’annonce du diagnostic ou après le traitement.

418

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

Intégration de l’école à la routine familiale La préparation à l’entrée à l’école ou au retour en classe est optimale lorsqu’elle est faite en équipe ; celle-ci comprend les parents, l’enfant, l’enseignant, l’inrmière de l’école et l’inrmière attitrée de l’enfant. Idéalement, cette planication doit avoir lieu avant le congé de l’hôpital ou avant l’entrée à l’école, à condition que l’état de santé de l’enfant lui permette de reprendre ses activités habituelles. En outre, un plan bien structuré doit être établi. Ce plan doit tenir compte des soins qui doivent être prodigués à l’enfant pendant qu’il est à l’école. Ainsi, la présence d’un tuteur à l’hôpital ou à la maison, dès que l’enfant est physiquement capable de travailler, permet à ce dernier de comprendre que l’école n’est pas nie et lui donne le temps nécessaire pour se faire à l’idée du retour FIGURE 10.6. L’enfant peut chercher des réponses aux nombreuses questions que ses camarades lui poseront. L’une des façons de bien préparer l’enfant au retour à l’école consiste à faire des jeux de rôle dans lesquels l’enfant joue son propre rôle, tandis que l’inrmière joue le rôle de ses camarades. Si l’enfant retourne à l’école alors que son apparence physique a subi des changements évidents, notamment la perte de ses cheveux, une amputation ou des cicatrices, l’inrmière peut poser des questions sur ces changements an que l’enfant se prépare à de telles questions et trouve une réponse satisfaisante.

Intégration aux camarades de classe Les camarades de classe de l’enfant ont également besoin d’être préparés à l’arrivée, au sein de leur groupe, d’un enfant ayant des besoins particuliers. Le meilleur moyen pour y arriver est de faire en sorte que l’enseignant, l’inrmière, l’enfant et ses parents travaillent de concert à la conception d’un plan. Les élèves de la classe devraient, à tout le moins, être informés de la maladie ou du handicap dont l’enfant est atteint, être préparés aux changements physiques que ce dernier a subis et pouvoir poser des questions, et ce, an de « normaliser » l’enfant et d’éviter, lors de son arrivée dans le groupe, des réactions négatives de leur part. En outre, l’enfant atteint devrait avoir le choix d’être présent ou non à cette séance de discussion. À mesure que l’état de santé de l’enfant change, et particulièrement si la maladie dont il souffre est possiblement mortelle, il est préférable que le personnel de l’école et les élèves se rencontrent sur une base régulière an de discuter de l’état de santé de l’enfant et de se préparer pour la suite.

Relation et interaction avec les pairs Les enfants ayant des besoins particuliers doivent être incités à maintenir leurs relations ou à en créer de nouvelles, ainsi qu’à participer à toute activité

de leur âge dans la mesure de leurs capacités. Les activités qui s’avèrent impossibles ou qui risquent d’empirer l’état de santé de l’enfant peuvent être remplacées par d’autres activités moins exigeantes physiquement. Les événements comme les Olympiques spéciaux et le Dé sportif donnent l’occasion aux enfants ayant des besoins particuliers de se mesurer à leurs pairs et de développer leurs capacités athlétiques. Dans le même ordre d’idées, certains camps de vacances offrent la chance aux enfants de créer des liens et d’acquérir une foule d’aptitudes. Les enfants ayant des besoins particuliers peuvent tirer parti des activités artistiques, dont la musique, la poésie, la danse et le théâtre.

même entraîner des répercussions psychologiques (O’Neill et Robinson, 2016). Étant donné que l’adolescence est une période de changements physiques et affectifs majeurs, il est impératif que le personnel inrmier sache faire la différence entre les changements physiques liés au problème de santé de l’adolescent et ceux qui résultent du développement normal du corps (Thyen et Perrin, 2009). Il peut être rassurant pour le jeune atteint d’une maladie ou d’un handicap invalidants de savoir que bon nombre des changements qui s’opèrent en lui font partie du développement normal.

Les enfants malades ont besoin d’interagir avec des enfants en bonne santé, mais aussi de faire des activités de groupe avec d’autres participants souffrant d’une maladie semblable et qui sont du même âge qu’eux (p. ex., la Fondation pour enfants diabétiques et les groupes qui s’adressent aux paralytiques cérébraux).

Le sentiment d’être différent de ses pairs peut entraîner, chez l’adolescent, la solitude, l’isolement et la dépression (Moola, Faulkner, White et al., 2014). À cet égard, la participation à des groupes d’entraide entre adolescents atteints d’une maladie chronique ou d’un handicap peut apaiser ce sentiment d’isolement et assurer une transition plus douce vers l’âge adulte et le début d’une relation privilégiée avec quelqu’un.

10.3.3

Carrière et avenir

Adolescence

L’adolescence peut être une période particulièrement difcile tant pour le jeune que pour les membres de sa famille. Tous les besoins dont il a été question jusqu’à maintenant s’appliquent aussi à cette tranche d’âge.

Indépendance et autonomie L’acquisition de l’indépendance et de l’autonomie représente l’élément le plus important de cette phase, car l’adolescent songe de plus en plus à son avenir. L’autonomie, autrefois associée uniquement à l’indépendance physique, est maintenant dénie comme étant l’ensemble des capacités d’une personne à prendre ses responsabilités quant à son comportement, à prendre ses propres décisions en ce qui a trait à ses choix de vie et à conserver un réseau de relations d’aide (SalvadorCarulla et Gasca, 2010). À la lumière de cette nouvelle définition, même les personnes dont la maladie ou le handicap sont graves peuvent être perçues comme autonomes si elles sont capables de reconnaître leurs propres besoins et de faire en sorte de les satisfaire, directement ou en demandant l’aide de quelqu’un (Beacham et Deatrick, 2013 ; Huang, Terrones, Tompane et al., 2014). À mesure que l’adolescent gagne en autonomie, l’inrmière peut l’aider à formuler ses besoins et à prendre part à la planication de son plan de soins, ainsi qu’à découvrir comment les autres peuvent lui être d’une aide précieuse et à savoir exprimer ses besoins (Beacham et Deatrick, 2013).

Maladie et développement normal Les symptômes apparents de la maladie ou du handicap font partie des principales préoccupations des adolescents relativement à leur santé et peuvent Chapitre 10

Les plans d’avenir doivent être conçus graduellement avec l’adolescent. Tout au long de ce processus, les parents devraient éveiller chez l’enfant des choix de carrière réalistes. Par exemple, si l’enfant est atteint d’un handicap physique, ses parents peuvent l’orienter vers des activités intellectuelles ou artistiques. Inversement, un enfant atteint d’une décience cognitive peut être dirigé vers des activités caractérisées par du travail manuel. Ainsi, le développement de l’enfant se poursuit vers l’atteinte d’un statut d’autosufsance par l’obtention d’un emploi rémunéré, lorsque c’est possible.

CE QU’IL FAUT RETENIR

La surprotection nuit au développement de l’enfant. Il faut plutôt le laisser participer aux activités qu’il est en mesure de réaliser en fonction de son développement.

Des informations com­ plémentaires sur les Olympiques spéciaux (www.specialolympics. ca), le Dé sportif (www.desportif.com) et des organismes tels que le Camp Carowanis (www. diabetes­children.ca) ou la Fondation Papillon (www. fondationpapillon.ca) peuvent être trouvées sur leur site Web respectif.

L’espérance de vie prolongée chez l’enfant ayant des besoins de santé particuliers fait naître de nouvelles questions et de nouveaux enjeux. Grâce à des conseils éclairés, les personnes ayant des besoins particuliers peuvent souvent se trouver un emploi rémunéré, vivre en couple et fonder une famille. Pour ceux dont la maladie est d’origine héréditaire, il est préférable de consulter avant de songer à procréer. Le futur partenaire de vie gagnerait à discuter de ce qu’il éprouve à l’idée de partager la vie d’une personne ayant des besoins de santé particuliers.

10.4

Transition des soins à l’âge adulte

Lorsque l’enfant atteint l’âge adulte, son suivi n’est plus assuré par l’équipe pédiatrique et celui-ci doit être transféré au système de santé pour adultes. Ce phénomène n’est plus aussi rare qu’avant grâce à l’avancement de la technologie et à l’augmentation de l’espérance de vie des enfants

Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie

419

10

atteints de maladies chroniques (Caicedo, 2014 ; CAPHC, 2016 ; Davis, Brown, Taylor et al., 2014 ; Moola et al., 2014).

10.4.1

3 Les principales causes de décès selon l’âge de l’enfant sont présentées au chapitre 3, Croissance, développement et promotion de la santé.

L’étape de la transition des soins est de plus en plus à l’étude an de faciliter l’adaptation de l’enfant et de maintenir les services auprès de lui et de sa famille, car dans certains cas, les jeunes adultes diminuent leurs suivis médicaux après cette transition (Davis et al., 2014 ; Fegran, Hall, Uhrenfeldt et al., 2014 ; Huang et al., 2014). En effet, la transition peut être difcilement vécue, notamment parce que la culture des soins aux adultes est très différente de la culture des soins pédiatriques (CAPHC, 2016). Les soins pédiatriques laissent une grande place à la famille, que ce soit, entre autres, pour l’enseignement ou la prise de décision, et intègrent le développement de l’enfant dans leur approche. Les soins aux adultes sont plus ciblés, et ils requièrent une grande autonomie et une indépendance de la part de l’adulte suivi. Malheureusement, lors du passage à l’âge adulte, l’adolescent peut ne pas avoir encore développé les habiletés et les connaissances nécessaires par rapport à la gestion de ses soins.

10.4.2 CE QU’IL FAUT RETENIR

Il est impératif de rassurer la famille et de lui faire comprendre que même si leur enfant ne peut être guéri, des soins palliatifs lui seront prodigués an d’assurer son confort et la meilleure qualité de vie possible.

420

Partie 4

Dés de la transition

Préparation de la transition

Les professionnels de la santé évoluant autour de l’adolescent atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap et de sa famille doivent préparer cette future transition et en discuter avec eux an d’en faciliter les étapes. Parmi les interventions à privilégier, il est essentiel d’encourager les parents à intégrer le plus possible le jeune dans la gestion de sa maladie et à lui déléguer des responsabilités an de le préparer graduellement à la transition (CAPHC, 2016). En effet, l’adolescent doit développer sa capacité à s’occuper de façon individuelle et autonome de la gestion de sa maladie, et développer sa capacité à communiquer adéquatement avec les différents professionnels de la santé de son état de santé (Huang et al., 2014). Le professionnel peut, par exemple, s’adresser à l’adolescent directement, et non à son parent. Il peut aussi proposer de rencontrer seul l’adolescent pendant une partie du rendez-vous pour lui donner la possibilité de présenter sa situation de santé et de poser ses questions (CAPHC, 2016). Fournir au jeune de la documentation axée sur sa maladie peut également être une stratégie an d’approfondir ses connaissances. Les établissements de soins peuvent d’ailleurs participer à la transition en offrant des formations aux professionnels qui pourront, à leur tour, organiser des journées d’information sur la transition des soins pour l’adolescent et sa famille. Ces journées permettraient à l’adolescent de rencontrer d’autres adolescents dans sa situation et pourraient ainsi faciliter ce passage obligatoire. De la documentation sur le nouvel établissement ou

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

sur la nouvelle équipe de soins peut aussi être une bonne option pour préparer adéquatement l’adolescent et sa famille.

10.5

Soins prodigués aux enfants en n de vie

Bien que la plupart des maladies infantiles et bon nombre des blessures et des traumatismes répondent bien aux traitements, certains d’entre eux sont incurables. En 2016, le taux de mortalité infantile se situait à 4,5 pour 1 000 naissances, et cette proportion est relativement stable depuis une quinzaine d’années (Payeur, 2017). Chez les 0 à 12 mois, la cause principale de décès est l’affection périnatale, par exemple les malformations congénitales ou la prématurité, alors que chez les 1 à 19 ans, ce sont les blessures causées par des accidents et les tumeurs malignes qui sont responsables de la majorité des décès (Statistique Canada, 2015a, 2015b, 2017) 3 .

10.5.1

Dénition et principes relatifs aux soins palliatifs

Un enfant atteint d’une maladie ou d’un traumatisme grave qui met sa vie en danger a besoin d’un diagnostic, d’une intervention médicale, d’une évaluation et de soins inrmiers, et ce, à court ou à long terme. Le personnel inrmier doit ainsi assurer ces soins tout au long de la maladie, dont la durée est inconnue, ainsi que durant toute la période qui pourrait mener au décès de l’enfant. À cet effet, lorsque la maladie s’avère incurable et que le traitement de prolongation de la durée de vie entraîne douleur et détresse, les parents et l’enfant doivent être informés des options de soins possibles. Il est impératif de rassurer la famille et de lui faire comprendre que même si leur enfant ne peut être guéri, des soins lui seront tout de même prodigués an d’assurer son confort et la meilleure qualité de vie possible. Conséquemment, le personnel inrmier peut s’occuper de l’enfant et de la famille qui vivent une transition difcile entre un traitement curatif ou de rétablissement et les soins palliatifs. Les soins palliatifs visent à améliorer la qualité de vie des enfants et de leur famille qui font face aux problèmes associés à une maladie qui menace ou limite leur vie. Cette action se caractérise par la prévention et le soulagement de la souffrance, et passe par la détermination, l’évaluation et le traitement de la douleur et des autres symptômes physiques, psychosociaux et spirituels (Wolfe, 2011). En outre, l’Organisation mondiale de la Santé dénit les soins palliatifs pédiatriques comme étant des soins actifs et complets donnés aux enfants et à leurs parents (WHO, 1998). Ces soins commencent au moment du diagnostic, puis se

poursuivent, peu importe que l’enfant reçoive ou non des traitements curatifs. En ce sens, les soins palliatifs ne se limitent pas uniquement à des soins de n de vie, mais visent à accompagner sur une plus longue période l’enfant et sa famille lorsqu’un diagnostic de maladie menaçant la vie est posé. Les professionnels de la santé doivent évaluer et soulager la détresse physique, psychologique et sociale à l’aide d’une approche multidisciplinaire qui inclut les parents. Le traitement de la douleur et des symptômes constitue une des préoccupations principales de l’équipe. Avant d’amorcer le moindre traitement, les professionnels de la santé doivent se demander si c’est dans l’intérêt du confort et de la qualité de vie de l’enfant de le faire.

provenant de la chambre de l’enfant. De plus, le plan de soins doit être axé sur le confort de l’enfant et des membres de sa famille.

Soins palliatifs en n de vie

Quand il s’agit d’un enfant, le domicile familial est le milieu que les familles choisissent le plus fréquemment pour recevoir des soins palliatifs (Friedrichsdorf, Postier, Dreyfus et al., 2015 ; Kassam, Skiadaresis, Alexander et al., 2014). Ce contexte offre de nombreux avantages pour la famille. Entre autres, l’enfant en n de vie peut demeurer auprès de ceux qu’il aime et avec qui il se sent en sécurité, de sorte que sa qualité de vie en est grandement améliorée (Friedrichsdorf et al., 2015). En outre, les frères et sœurs peuvent participer aux soins et, par la suite, ils perçoivent souvent la mort de façon plus positive et s’y sentent mieux préparés (Niswander, Cromwell, Chirico et al., 2014).

La mort d’un enfant est un événement des plus stressants pour sa famille, car cela va à l’encontre de l’ordre naturel des choses. Une équipe multidisciplinaire constituée de travailleurs sociaux, d’intervenants en soins spirituels, d’inrmières, de préposés, de psychologues et de médecins spécialisés apporte son aide à la famille en centrant les soins sur l’interaction entre les aspects physique, affectif, social et spirituel de la personne ENCADRÉ 10.12.

Soins palliatifs à l’hôpital La famille pourrait choisir de demeurer à l’hôpital si l’état de santé de l’enfant est instable et qu’il est impossible pour lui de recevoir des soins à domicile, ou encore si les membres de la famille ne sont pas à l’aise pour lui prodiguer les soins nécessaires à la maison. Si la famille prend la décision de rester à l’hôpital pour les soins palliatifs, l’environnement de l’enfant devrait être aussi chaleureux et familial que possible. La famille est d’ailleurs invitée à amener des objets

ENCADRÉ 10.12

Soins palliatifs à domicile Parfois, la famille préfère ramener l’enfant à la maison et demander des soins à domicile. Généralement, ces derniers comprennent des visites d’une inrmière an d’assurer une bonne gestion de la douleur, d’évaluer l’état de santé de l’enfant et de soutenir la famille ou de fournir aux parents les médicaments, le matériel ou les appareils nécessaires aux soins de l’enfant. Un médecin participe habituellement à ces soins, certains effectuant même des visites à domicile.

10

Si les soins palliatifs sont prodigués à la maison, cela ne signie pas que l’enfant doive mourir à domicile. En effet, il pourrait être hospitalisé une dernière fois si les parents ou les frères et sœurs émettent le désir que l’enfant décède ailleurs qu’à la maison, si la famille est trop épuisée pour poursuivre les soins ou s’il souffre d’un problème physique soudain, par exemple.

Principes relatifs à la n de vie d’un enfant

1. SOINS CENTRÉS SUR L’ENFANT ET SA FAMILLE

3. CONTINUITÉ DES SOINS

À cette étape, l’infirmière doit être particulièrement attentive aux besoins, aux peurs, aux croyances ainsi qu’à l’espoir et aux forces de l’enfant et de sa famille. Les décisions sont prises par l’enfant et sa famille en collaboration avec les professionnels de la santé et doivent être respectées. L’enfant a droit à de l’information appropriée à son âge concernant sa maladie, les traitements potentiels et le résultat de ces traitements.

Les soins palliatifs pédiatriques visent la continuité des soins à travers la maladie, la mort et le deuil, et ce, par les soignants tant ofciels qu’ofcieux. Les soins palliatifs comprennent l’accompagnement des membres de la famille avant et après le décès de l’enfant. Le suivi peut ainsi se poursuivre pendant un an, ou même plus.

2. IMPORTANCE DE LA RELATION THÉRAPEUTIQUE

La qualité de la relation inrmière-client-famille est essentielle an d’optimiser les soins dans un contexte palliatif. Cette relation pourra permettre une certaine guérison chez l’enfant ou sa famille au cours de la maladie, de la mort et même durant le deuil.

4. COMMUNICATION

La capacité de bien soutenir la famille dépend de l’habileté des membres de l’équipe de soins et de la famille à communiquer efcacement ensemble. 5. ACCESSIBILITÉ

Il faut s’assurer que les soins palliatifs sont disponibles pour l’enfant et sa famille an de répondre à leurs besoins, et ce, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7.

Source : Adapté de ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) (2006).

Chapitre 10

Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie

421

Maison de soins palliatifs La Maison André-Gratton à Montréal est le seul organisme au Québec à offrir des soins palliatifs pédiatriques. Toutefois, certaines maisons de soins palliatifs pour les adultes ouvrent leurs portes à de plus en plus d’enfants.

Une des options de soins qui se présentent aux familles, selon leur lieu de résidence, est la maison de soins palliatifs, qui est un lieu géré par un organisme de santé communautaire spécialisé dans les soins apportés aux clients dont la mort est imminente. Les soins y sont administrés par une équipe multidisciplinaire constituée de professionnels de la santé. Les maisons qui se consacrent uniquement aux soins palliatifs pédiatriques demeurent toutefois rares.

10.5.2 Des renseignements supplémentaires peuvent être consultés sur le site Web du Réseau francophone de soins palliatifs pédiatriques au www.pediatriepalliative.org et sur le site de l’Association canadienne de soins palliatifs au http://acsp.net.

Considérations éthiques

Un certain nombre de questions éthiques se posent au moment où les parents et les professionnels de la santé décident des soins qui seront prodigués à l’enfant atteint d’une maladie qui menace sa vie. Bon nombre de parents et de professionnels de la santé craignent que le fait de ne pas administrer un traitement possiblement douloureux, mais qui pourrait prolonger la vie de l’enfant, constitue un genre d’euthanasie ou de suicide assisté. Pour qu’aucun doute ne subsiste, il est d’abord impératif de dénir ces notions. L’euthanasie est une action exercée par une personne, autre que le malade lui-même, qui vise à causer la mort d’un malade qui souffre d’une maladie terminale. L’intention est basée sur la conviction que le geste posé permet d’abréger les souffrances de cette personne (Arnstein et Robinson, 2011). Le suicide assisté se produit lorsqu’une personne fournit au client un moyen de mettre n à ses jours et que ce dernier y parvient. La différence majeure entre ces deux pratiques réside dans la personne qui pose le geste nal. La loi canadienne interdit à quiconque de poser des gestes dans le but de mettre n aux jours d’une autre personne. En revanche, elle permet aux professionnels de la santé d’intervenir pour soulager les symptômes intolérables et difcilement contrôlables d’un mourant, même si l’intervention qui s’impose risque de hâter sa mort. Cette intervention s’appelle le principe du double effet. Ce principe stipule qu’un acte peut avoir à la fois un effet positif et un effet négatif (Saint-Arnaud, 2009). L’intention derrière le geste est l’un des aspects qui déterminent si le geste est éthiquement acceptable. Par exemple, il est éthiquement acceptable, selon ce principe, de donner des doses d’anticonvulsivants et de benzodiazépines supérieures à la normale dans l’intention de soulager un enfant mourant qui a des convulsions difciles à contrôler, même si ces substances risquent d’entraîner un arrêt respiratoire. L’intention derrière le geste est ici de soulager la douleur, pas d’entraîner la mort.

422

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

Lorsque le pronostic est sombre et que la mort est la seule issue possible, il est éthiquement acceptable d’interrompre ou d’éviter des traitements qui pourraient causer de la souffrance ou de la douleur au client, et de lui prodiguer plutôt des soins axés sur le confort et la qualité de vie (Vincent, Schetz, De Waele et al., 2014).

Aide médicale à mourir Au Québec, depuis 2016, l’aide médicale à mourir est accessible aux personnes qui en font la demande. Elle consiste en l’administration de médicaments par un médecin dans le but de soulager les souffrances de la personne causées par son état de santé, à sa demande et seulement en n de vie. Plusieurs conditions et critères très précis doivent être remplis an d’obtenir une aide médicale à mourir. Celle-ci peut, généralement, être envisagée lorsque toutes les options thérapeutiques, curatives et palliatives ont été insatisfaisantes et que la personne préfère mourir plutôt que continuer à être confrontée à sa souffrance (gouvernement du Québec, 2017). Au Québec, l’une des conditions à respecter est d’être majeur, ce qui exclut la population pédiatrique.

10.5.3

Prise de décision dans une situation de n de vie

Les discussions entourant la possibilité que la maladie de l’enfant soit incurable et que la mort soit inévitable causent un stress intense à tous ceux qui ont prodigué des soins à l’enfant. Les médecins, les autres membres du personnel médical ainsi que la famille de l’enfant doivent tenir compte de tous les éléments du dossier et prendre une décision consensuelle, laquelle aura une incidence profonde sur l’enfant et les membres de sa famille.

Participation des professionnels de la santé à la prise de décision Il arrive un moment où le médecin doit discuter avec la famille de l’utilisation ou non de certaines interventions médicales qui viseraient à tenter de maintenir l’enfant en vie si jamais son état de santé se détériorait. Avec la famille, une décision consensuelle peut être prise quant à l’ordonnance de non-réanimation en cas de détérioration cardiorespiratoire, c’est-à-dire que la réanimation ne serait pas tentée et que l’accent serait mis sur des soins axés sur le confort de l’enfant et de sa famille au cours de leurs derniers moments passés ensemble (Vincent et al., 2014). Les décisions des médecins en matière de traitements curatifs ou palliatifs sont basées sur l’évolution de la maladie ou l’ampleur du traumatisme, sur les traitements disponibles qui pourraient guérir l’enfant ou faire en sorte qu’il recouvre la santé, sur les répercussions du

Malheureusement, au Canada, au cours des dernières années, très peu d’enfants qui auraient pu bénécier des programmes des centres de soins palliatifs ont pu recevoir ces services (Widger, Davies, Drouin et al., 2007). Dans le même ordre d’idées, il arrive que le personnel inrmier et médical n’ose pas aborder le sujet de l’ordonnance de non-réanimation. Ces situations surviennent pour plusieurs raisons. Parmi celles qui sont les plus fréquemment citées, il y a l’incertitude du pronostic, le fait que la famille ne soit pas prête à reconnaître comme incurable l’état de santé de l’enfant, le manque de connaissances et d’expertise en soins palliatifs des professionnels, le manque de temps et la barrière de la langue. De plus, le fait de ne pas être en mesure de sauver l’enfant est souvent perçu comme un échec (de Vos et al., 2015).

Prise de décision parentale Il est rare que les familles soient préparées aux nombreuses décisions qui doivent être prises relativement à la n de vie d’un enfant. Si l’enfant a souffert d’une maladie chronique ou menaçant sa vie, comme le cancer, et qu’il est maintenant en n de vie, il arrive souvent que les parents ne soient pas prêts à faire face à la réalité. De nombreuses études ont révélé que les familles qui doivent composer avec la mort imminente d’un enfant dépendent de l’information qui leur est transmise par l’équipe des professionnels de la santé. Cette information se doit donc d’être honnête, cohérente et sensible à l’expérience terrible que vivent les parents en vue de prendre les décisions difciles qui s’imposent (de Vos et al., 2015 ; MSSS, 2006). Les inrmières, qui sont les professionnelles de la santé les plus présentes auprès des familles, sont en excellente position pour s’assurer que les parents reçoivent les renseignements adéquats quant aux choix qui s’offrent à eux. La plus importante responsabilité de l’inrmière est de s’informer des désirs de la famille.

Participation de l’enfant en n de vie au processus de décision Les enfants ont besoin d’être informés de façon honnête sur leur maladie, sur les traitements possibles ainsi que sur le pronostic. Ces Chapitre 10

renseignements doivent donc leur être transmis CONSEIL CLINIQUE clairement, dans un vocabulaire simple, en fonction de l’âge. Dans la plupart des cas, le mieux est Il peut être utile d’aborder le d’en faire un processus graduel et exible qui sujet délicat, mais important, s’adapte aux besoins de l’enfant et de sa famille des soins palliatifs à l’aide (Memaj, 2015). Bien que les mots choisis aient une des phrases suivantes : Nous remarquons que votre enfant grande importance, le développement de la relaest de plus en plus souvent tion entre le professionnel de la santé, l’enfant et malade. Ceci nous fait croire sa famille est primordial. En effet, les conversaque sa maladie progresse. tions menées par une inrmière soucieuse d’écouQu’espérez-vous pour votre ter et de mieux connaître la famille et ses besoins enfant dans la prochaine auront plus de succès (Mack et Hinds, 2011). Créer année ? À quel genre de une atmosphère qui invite à la communication, et soins vous attendez-vous ? ce, très tôt dans l’évolution de la maladie, facilite la tâche de répondre aux questions délicates sur l’état de santé de l’enfant, surtout lorsqu’il se détériore. Mettre à la disposition des parents et de l’enfant de la documentation sur la maladie dont ce dernier est atteint et sur le processus de la mort peut aussi être utile. Le moment choisi pour donner l’information et la façon de faire participer l’enfant aux décisions relatives aux soins qui lui sont prodigués à l’approche de sa mort et au moment de son décès relèvent du cas par cas. En outre, l’âge et le niveau de développement de l’enfant sont des facteurs importants du processus TABLEAU 10.5. Les parents devraient donner leur avis quant à la manière d’annoncer le pronostic à l’enfant, en plus de choisir si c’est un médecin, l’inrmière ou le parent qui transmettra à l’enfant les informations sur son état de santé (Memaj, 2015 ; Mack et Hinds, 2011). Certains parents pourraient demander au personnel médical de ne pas dire à l’enfant qu’il va mourir, même si ce dernier pose la question. Dans de tels cas, les professionnels de la santé font face à une situation délicate. Quel que soit son âge, l’enfant est très perspicace et il en sait souvent plus sur le pronostic et la gravité de la situation que le pensent ses parents (Washam, 2010). Les professionnels de la santé peuvent expliquer aux parents que l’honnêteté et le consensus entre eux et l’enfant sont essentiels pour la santé affective de tous, et ils devraient les inciter à aborder le sujet de la mort avec ce dernier. Par ailleurs, le fait de ne pas parler avec l’enfant du pronostic lui envoie le message qu’il n’est pas acceptable de parler de la Maélie, âgée de 11 ans, est atteinte de leucémie mort et le condamne à vivre myéloïde avancée. Elle requiert maintenant des seul avec ses craintes à l’égard soins palliatifs. Elle est consciente et lucide, même de ce processus (Jones et al., si elle est en n de vie. Vous avez demandé aux 2011). Il se peut que les parents parents ce qu’ils désiraient comme soins pour leur demandent le soutien et les lle. Auriez-vous dû également vous enquérir des conseils d’un membre du perdésirs de Maélie ? Justiez votre réponse. sonnel inrmier, d’un travailSi les désirs de Maélie et ceux de ses parents en leur social ou d’un spécialiste regard des soins palliatifs étaient différents, que de l’enfance qui a un lien étroit devriez-vous faire ? avec la famille et l’enfant.

clinique

Jugement

traitement sur ce dernier ainsi que sur le pronostic en général (Davis et Eng, 1998). Les facteurs qui poussent le médecin à aborder le sujet de la n de la vie et des choix qui s’offrent à l’enfant atteint d’une maladie grave sont l’âge de l’enfant, le pronostic, la présence d’un décit cognitif ou d’un état fonctionnel prémorbide, la douleur ou l’inconfort, les probabilités de survie de l’enfant et la qualité de vie (MSSS, 2006 ; Vincent et al., 2014).

Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie

423

10

Pratiques inrmières TABLEAU 10.5

Comprendre la mort et les réactions chez l’enfant

PERCEPTIONS DE LA MORT

RÉACTIONS

PRATIQUES INFIRMIÈRES

• Les habitudes et la routine familiale sont importantes ; un changement dans le mode de vie de l’enfant pourrait le rendre anxieux.

• Être ouverte et réceptive aux émotions des parents pour qu’ils soient moins émotifs devant l’enfant.

Nouveau-né, nourrisson et trottineur (0-3 ans) • L’enfant ne peut pas comprendre le sens et la signication de la mort. • Il est davantage troublé par les absences et les changements qui s’opèrent dans son mode de vie que par la mort en soi.

• L’enfant de 0 à 3 ans réagit davantage à la douleur et à l’inconfort causés par une maladie grave qu’à l’annonce du sombre pronostic. • Il réagit fortement à l’anxiété et à la tristesse des parents.

• Inciter les parents à rester le plus près possible de l’enfant, tout en demeurant attentive à leurs besoins. • Préserver un environnement aussi normal que possible an de ne pas perturber le mode de vie de l’enfant. • Favoriser la continuité des soins entre les différents intervenants.

Enfant d’âge préscolaire (3-6 ans) • Généralement, l’enfant comprend en partie le sens de la mort et il croit que le seul fait d’y penser peut la causer, entraînant un sentiment de culpabilité, de honte et de peur du châtiment.

• Si l’enfant devient gravement malade, il conclut qu’il s’agit d’une punition pour ses mauvaises pensées ou son mauvais comportement.

• Son égocentrisme lui donne une impression de puissance et d’omnipotence incroyable.

• La plus grande peur à l’idée de mourir est celle d’être séparé de ses parents.

• La mort est perçue comme un départ ou un long sommeil.

• L’enfant peut avoir un comportement étrange ou anormal aux yeux des adultes (p. ex., rire, faire des blagues, attirer l’attention, avoir des comportements inappropriés pour son niveau de développement [régression]). Ces comportements indiquent le besoin, chez l’enfant, de créer une distance entre lui et sa tristesse.

• La mort est perçue comme une étape temporaire et graduelle ; la vie et la mort semblent interchangeables. • L’enfant ne comprend pas que la mort est universelle et inévitable.

• L’enfant peut se sentir coupable ou responsable de la mort d’un frère ou d’une sœur.

• Aider les parents à comprendre le comportement de l’enfant. • Inciter les parents à rester le plus près possible de l’enfant, tout en demeurant attentive à leurs besoins. • Préserver un environnement aussi normal que possible an de ne pas semer chez l’enfant la peur de la séparation. • Favoriser la continuité des soins.

Enfant d’âge scolaire (6-11 ans) • L’enfant croit que la mort est causée par un méfait ou une mauvaise pensée. Il se sent donc coupable et responsable de la situation. • Étant donné ses capacités cognitives développées, il répond bien aux explications logiques et comprend le caractère guré des mots.

• Étant donné son degré élevé de compréhension, l’enfant peut avoir davantage de craintes en ce qui a trait : à la cause de la maladie ; à la transmission de la maladie ; aux conséquences de la maladie ; au processus de la mort ou à la mort en tant que telle. • Sa peur de l’inconnu est plus grande que celle du connu.

• Recommander aux parents d’expliquer à l’enfant ce qui leur cause tant de peine tout en le rassurant de leur soutien et de leur amour. • Inciter les parents à rester le plus près possible de l’enfant tout en étant attentifs à ses besoins. • Préparer adéquatement l’enfant, étant donné qu’il craint l’inconnu.

• L’enfant craint particulièrement la mutilation et les châtiments, qu’il associe à la mort.

• L’imminence de la mort menace grandement son sentiment de sécurité et la force du moi.

• Pour certains, la mort ressemble au diable ou à un monstre, alors que d’autres comprennent que le corps est affecté par la mort.

• L’enfant exprime souvent sa peur sous forme d’un manque de coopération verbale plutôt que sous forme d’agressivité physique. • Il s’intéresse aux services posthumes.

• Puisque, à cet âge, l’enfant apprend l’assiduité, proposer des interventions qui lui apprennent à maîtriser son corps et qui lui offrent une meilleure compréhension peut être bénéque, car cela lui fait gagner en indépendance, en amourpropre et en estime de soi, tout en lui permettant d’éviter le sentiment d’infériorité.

• Dès l’âge de 9 ou 10 ans, l’enfant comprend le sens de la mort comme un adulte. Il sait qu’elle est inévitable, universelle et irréversible.

• Il peut poser de nombreuses questions sur le devenir du corps après la mort.

• Inciter l’enfant à parler de ses sentiments et trouver des exutoires pour son agressivité.

424

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

• Inciter les parents à répondre honnêtement aux questions de l’enfant sur la mort au lieu de tenter d’éviter le sujet ou d’avoir recours à des euphémismes.

TABLEAU 10.5

Comprendre la mort et les réactions chez l’enfant (suite)

PERCEPTIONS DE LA MORT

RÉACTIONS

PRATIQUES INFIRMIÈRES

• Il est moins susceptible d’accepter la mort, particulièrement la sienne. L’adolescent a beaucoup de difculté à faire face à la mort.

• Recommander aux parents d’expliquer à l’adolescent ce qui leur cause tant de peine tout en le rassurant de leur soutien et de leur amour.

Adolescent (11-19 ans) • L’adolescent fait preuve d’une compréhension mature de la mort. • Il est encore inuencé par des vestiges de la pensée magique et peut ressentir de la culpabilité et de la honte. • Il perçoit son mauvais comportement comme étant la cause de sa maladie.

• Il se préoccupe davantage du présent que du passé ou du futur, ce qui fait qu’il s’inquiète davantage des changements physiques que du pronostic. • Il se sent parfois coupé de ses pairs et incapable de demander du soutien affectif à ses parents, ce qui a pour effet de l’isoler. • À cause de sa vision un peu idéaliste du monde, il peut heurter ses proches en critiquant les rites funéraires, qualiant ceux-ci de barbares et de non nécessaires, et afrmant qu’ils servent seulement à récolter de l’argent.

Si on lui pose la question, l’enfant dira dans quelle mesure il veut être tenu informé. Les enfants ont besoin de temps pour comprendre ce qu’ils ressentent et traiter l’information qu’ils ont reçue en vue de digérer la nouvelle et de reconnaître le fait qu’ils vont mourir. S’il s’agit d’un adolescent, le personnel inrmier doit être au fait des retards ou des troubles de développement attribuables à la maladie. Les questions juridiques et éthiques deviennent des préoccupations de premier plan selon l’âge du client. La saine communication entre l’adolescent dont la vie est menacée, sa famille et les professionnels de la santé devient alors partie intégrante des soins optimaux à lui prodiguer (Evan et Cohen, 2011).

10.5.4

Processus de la mort

Quel que soit le lieu choisi pour la dernière étape de la maladie de l’enfant, celui-ci ainsi que sa famille ressentent habituellement la peur : 1) de la douleur et de la souffrance ; 2) de mourir seul (pour l’enfant) ou de ne pas être présents à la mort de l’enfant (pour les parents) ; 3) de faire face à l’inconnu (Jones et al., 2011). Le personnel inrmier peut faire en sorte d’atténuer ces peurs en demeurant à l’écoute des besoins de l’enfant et de la famille en matière de soins (Mullenet et al., 2015 ; Rodrigues, Bushatsky et Viaro, 2015) PSTI 10.1.

Chapitre 10

• En cas de conits, éviter de prendre le parti de l’adolescent ou de ses parents. • À l’admission, faire en sorte qu’il puisse être le plus autonome et indépendant possible. • Répondre aux questions de l’adolescent de façon honnête en le traitant comme une personne mature et en respectant ses besoins d’intimité, de solitude et d’expression de ses sentiments. • Aider les parents à comprendre la réaction de l’adolescent quant à la mort et faire en sorte qu’ils sachent que les préoccupations présentes, comme la perte de ses cheveux, ont plus d’importance pour lui que celles qui sont à venir, dont la mort.

Peur de la douleur et de la souffrance La douleur non soulagée ou persistante chez un enfant en n de vie peut avoir des conséquences néfastes sur sa qualité de vie ainsi que sur celle de sa famille (Palermo, Valrie et Karlson, 2014). La douleur de l’enfant est difcile à supporter pour les parents, qui se sentent alors impuissants et qui ont besoin d’être présents et vigilants en vue de s’assurer que l’enfant recevra les analgésiques nécessaires. Le personnel inrmier peut atténuer la peur de la douleur et de la souffrance en pratiquant les interventions, pharmacologiques ou non pharmacologiques, nécessaires an de soulager la douleur et les symptômes inconfortables associés à la n de vie. Pratiquement tous les enfants ressentiraient de la douleur à un moment ou à un autre de leur n de vie (Matziou, Vlachioti, Megapanou et al., 2016). Les recommandations de l’Organisation mondiale de la Santé (WHO, 2012) sur les traitements pharmacologiques de la douleur persistante chez les enfants soulignent que la prise en charge de la douleur doit être adaptée à l’enfant en fonction du degré de douleur qu’il ressent, et que toute douleur modérée ou intense devrait être soulagée. En outre, la douleur éprouvée par l’enfant devrait être évaluée fréquemment, et sa médication devrait être ajustée en conséquence (WHO, 2012).

CONSEIL CLINIQUE

Les réponses aux questions suivantes peuvent aider l’inrmière à connaître ce que l’enfant, ou le parent, veut savoir à propos de son état : Si la maladie revenait, est-ce que tu voudrais le savoir ? Que veux-tu savoir sur ta maladie ? Y a-t-il des symptômes que tu éprouves et qui te font peur ou t’inquiètent ? Qu’est-ce qui t’inquiète le plus ? (Mullen, Reynolds, et Larson 2015 ; Wright et Leahey, 2013).

Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie

425

10

Plan de soins et de traitements inrmiers PSTI 10.1

Enfant en n de vie

PROBLÈME DÉCOULANT DE LA SITUATION DE SANTÉ

Anxiété de l’enfant liée à l’inquiétude ou à la peur de mourir

OBJECTIF

L’enfant connaîtra une diminution des manifestations d’anxiété (p. ex., l’instabilité affective, l’agressivité, le repli sur soi ou l’état dépressif).

RÉSULTATS ESCOMPTÉS

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES ET JUSTIFICATIONS

• Augmentation du sentiment de conance et de contrôle

Diminution de l’anxiété

• Mise en application de stratégies d’adaptation efcaces par l’enfant et ses parents

• Encourager les parents à utiliser avec leur enfant des stratégies an de diminuer l’anxiété, notamment la relaxation et le toucher, et pour calmer le corps et l’esprit.

• Inciter la famille à rester, autant que possible, auprès de l’enfant pour apporter son soutien.

• Inciter l’enfant à exprimer ses émotions ; aider la famille à inciter l’enfant à le faire pour offrir un contexte de proximité et de compréhension au sein de la famille. • Trouver un exutoire sécuritaire et acceptable pour les manifestations d’agressivité ou de colère an de faire comprendre que ces réactions sont légitimes. • Rassurer l’enfant sur le soutien et la présence continue des membres de sa famille et de l’équipe pour promouvoir la conance comme étant l’une des principales forces de la relation thérapeutique. • Répondre aux questions aussi honnêtement que possible, en considérant l’âge de l’enfant, tout en demeurant positif et optimiste pour favoriser la conance et atténuer l’angoisse. • Expliquer l’évolution des symptômes physiques de l’enfant à mesure que la n approche pour atténuer la peur de l’inconnu, laquelle peut être plus grande que la peur de l’intervention ou du traitement réel. • Expliquer la nature et le but des interventions et des traitements pour faire ressortir l’importance accordée à la diminution de l’inconfort de l’enfant. • Aider l’enfant à distinguer les conséquences du traitement des manifestations de la maladie pour atténuer la peur et la perte de contrôle. • Faire en sorte que l’environnement de l’enfant, que ce soit à l’hôpital ou au domicile familial, lui permette d’être aussi autonome et indépendant que possible an qu’il puisse maintenir un sentiment de contrôle.

PROBLÈME DÉCOULANT DE LA SITUATION DE SANTÉ

Douleur chronique et inconfort liés à la maladie

OBJECTIF

L’enfant ne ressentira que peu ou pas de douleur et d’inconfort physique.

RÉSULTATS ESCOMPTÉS

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES ET JUSTIFICATIONS

• Soulagement de la douleur

Gestion de la douleur et des symptômes inconfortables

• Amélioration du sommeil

• Évaluer le confort de l’enfant avec une échelle de mesure appropriée à son âge, et identique d’une évaluation à l’autre, pour faciliter l’évaluation et le suivi.

• Diminution des symptômes inconfortables

• Administrer le traitement contre la douleur 24 heures par jour pour assurer un soulagement continu. • Évaluer la présence de symptômes inconfortables ou désagréables pour cibler des interventions qui diminuent ces symptômes (p. ex., administrer un émollient fécal, un laxatif, au besoin, pour diminuer l’inconfort abdominal). • Opter pour les interventions non pharmacologiques que l’enfant préfère pour obtenir une gestion optimale de l’inconfort. • Créer un environnement réconfortant et agréable autour de l’enfant (lumières, bruits, odeurs, température ambiante, etc.) pour diminuer les stimulus dérangeants. • S’assurer que l’enfant a tout ce dont il a besoin à portée de la main pour augmenter le sentiment de contrôle. • Mobiliser l’enfant avec délicatesse en évitant d’exercer une pression sur les parties du corps qui sont douloureuses et sur toute proéminence osseuse pour ne pas augmenter les stimulus douloureux. • Placer l’enfant dans une position qui lui est confortable à l’aide d’oreillers ou de tout autre objet. • Placer une protection absorbante sous l’enfant si ce dernier est incontinent an de diminuer l’inconfort et les mobilisations. • Limiter les soins à l’essentiel pour diminuer les manipulations et favoriser le repos.

426

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

PSTI 10.1

Enfant en n de vie (suite)

PROBLÈME DÉCOULANT DE LA SITUATION DE SANTÉ

Sentiment d’impuissance lié au deuil anticipé, manifesté par des réactions de retrait et d’évitement de la part des parents et de la fratrie à l’égard de l’enfant mourant

OBJECTIF

La famille participera, à sa convenance, au processus de n de vie de l’enfant.

RÉSULTATS ESCOMPTÉS

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES ET JUSTIFICATIONS

• Expression des peurs, des préoccupations et des souhaits relativement aux soins terminaux

Deuil

• Réponse adéquate aux besoins de l’enfant • Participation active aux soins • Recours à des stratégies aidantes pour diminuer le sentiment de perte

• Parler avec la fratrie et les parents de leur façon de vivre le deuil pour comprendre davantage ce que ressentent les membres de la famille de l’enfant et pour normaliser le fait que les hommes, les femmes et les enfants vivent le deuil différemment. • Explorer avec la famille des façons de garder le souvenir de l’enfant en créant un legs pour faciliter le deuil. • Offrir l’occasion aux membres de la famille de l’enfant d’exprimer leurs émotions de façon individuelle ou collective, selon les désirs de chacun, pour offrir un exutoire aux membres de la famille. • Faciliter l’expression des sentiments des frères et sœurs grâce à l’art et aux jeux pour soutenir la fratrie dans le processus de deuil anticipé. • Aider les parents et les frères et sœurs de l’enfant à légitimer ce qu’ils ressentent à l’égard de la mort imminente de l’enfant pour les aider à accepter leurs émotions. • Inciter les parents à demeurer, autant que possible, auprès de l’enfant pour faire en sorte que les parents sentent qu’ils participent à la vie de leur enfant jusqu’à la n.

PROBLÈME DÉCOULANT DE LA SITUATION DE SANTÉ

Incertitude liée aux soins à l’approche de la mort chez les parents et les frères et sœurs de l’enfant mourant

OBJECTIF

La famille se dira conante dans son accompagnement de l’enfant en n de vie.

RÉSULTATS ESCOMPTÉS

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES ET JUSTIFICATIONS

• Conance accrue des parents quant aux soins physiques

Deuil

• Réponse adéquate aux besoins de l’enfant, et à ceux des frères et sœurs • Augmentation du sentiment d’inclusion des membres de la famille • Processus de n de vie répondant aux volontés de la famille

10

• Garder la famille informée de l’état de santé de l’enfant et des réactions comportementales les plus courantes en n de vie pour favoriser la compréhension et la communication, et pour renforcer le lien de conance. • Inciter la famille à participer aux soins apportés à l’enfant pour faciliter l’adaptation et réduire le sentiment de perte de contrôle. • Encourager les membres de la famille à être à l’écoute de leurs propres besoins an d’éviter l’épuisement. • Offrir la plus grande intimité possible à la famille tout en restant présente an de la soutenir et d’assurer le confort de l’enfant. • Aider la famille à évaluer ses besoins relativement aux services de soutien pour favoriser la discussion des parents avec l’enfant. • Inciter les parents à répondre honnêtement aux questions de l’enfant à propos de la mort pour réduire sa peur et son anxiété. • Trouver des ressources qui aideront les parents à parler de la mort avec leur enfant. • Discuter, avec les parents, du besoin courant des enfants de demander la permission de mourir an d’apporter un soutien et de prodiguer des conseils. • Inciter les parents à partager leur tristesse avec l’enfant pour inciter la famille et l’enfant à s’exprimer et à partager entre eux. • Aider la famille et l’enfant à se rappeler de bons souvenirs. • Aider l’enfant à régler ce qu’il a laissé en suspens pour l’aider à clore ses relations. • Discuter avec les parents de la participation des frères et sœurs an d’éviter qu’ils se sentent exclus. • S’informer des croyances religieuses et culturelles de la famille relativement à la mort pour assurer un soutien spirituel et préparer la famille aux services posthumes. • Proposer à la famille les services d’une équipe de soins à domicile an que l’expérience se passe le mieux possible pour l’enfant et sa famille.

Chapitre 10

Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie

427

ALERTE CLINIQUE

La sédation est un effet secondaire des opioïdes qui précède habituellement la dépression respiratoire, d’où l’importance d’évaluer l’état de conscience, la fréquence respiratoire, la saturation du sang en oxygène et la présence de ronements chez le client. 5 Le soulagement de la douleur et la sédation dans les soins en n de vie sont présentés dans le chapitre 5, Évaluation et traitement de la douleur.

CE QU’IL FAUT RETENIR

De nombreuses fausses croyances sont encore associées à l’administration de la morphine en n de vie. Les opioïdes traitent la douleur, mais n’entraînent pas la mort de l’enfant. C’est la progression de la maladie qui cause la mort.

Les antalgiques devraient être administrés régulièrement, et des entredoses devraient être disponibles an de soulager les épisodes de douleur aiguë et d’assurer le confort de l’enfant. Les opioïdes, dont la morphine, doivent être administrés dans les cas de douleur intense, et la dose prescrite devrait être augmentée au besoin pour favoriser un soulagement optimal de la douleur . Les techniques non pharmacologiques de maîtrise de la douleur et de l’inconfort comme la distraction, la relaxation et l’imagerie mentale dirigée (Davies, 2011 ; Lambert, 1999) doivent être utilisées de concert avec le traitement pharmacologique 5 .

fait partie du processus normal à l’approche de la mort. Les opioïdes peuvent ralentir et calmer la respiration de l’enfant. Une benzodiazépine pourrait être ajoutée en cas de dyspnée non soulagée par un opioïde (Davies, 2011 ; Himelstein, 2006). En outre, la scopolamine, administrée sous forme de timbre topique, peut permettre de réduire les râles. Il est plus probable que l’enfant ait une respiration bruyante s’il est surhydraté, et c’est pourquoi il est recommandé de ne pas l’hydrater par voie intraveineuse an de limiter la production de sécrétions (Wolfe, 2011).

Présence de la famille lorsque le décès est imminent

Lorsque l’enfant est à domicile, les parents sont souvent les principaux soignants. La présence accrue de l’inrmière est recommandée en vue d’apporter du soutien et de répondre aux besoins de l’enfant et de sa famille. Le personnel inrmier qui prodigue des soins à l’enfant et à sa famille doit, entre autres, enseigner à cette dernière les médicaments à donner à l’enfant, la façon de procéder ainsi que les approches non pharmacologiques du traitement. Ainsi, les parents sont invités à participer comme ils le veulent aux soins prodigués à l’enfant. Cette démarche redonne un sentiment de contrôle aux parents. En outre, le deuil serait moins lourd (p. ex., une meilleure adaptation ; une solidarité familiale ; une réduction de l’anxiété, du stress et de la dépression) pour les parents qui ont participé activement aux soins de leur enfant en n de vie (Friedrichsdorf et al., 2015).

Souvent, à mesure que l’état de santé de l’enfant se détériore, les membres de la famille entreprennent une sorte de veillée funèbre. Il est alors rare que l’enfant reste seul pendant longtemps. Cette période est épuisante pour les proches. Le personnel inrmier peut aider la famille en prévoyant un horaire suivant lequel les proches et les membres de la famille se relaient. Ils peuvent donc être présents chacun à leur tour auprès de l’enfant tout en donnant l’occasion aux autres de se reposer. Il est important que la personne de garde sache dans quelles circonstances elle doit aller chercher les parents pour qu’ils retournent au chevet de leur enfant. Si l’enfant passe ses derniers instants à l’hôpital, les parents doivent avoir le droit d’être à ses côtés en tout temps. S’ils doivent s’absenter, il est préférable de prévoir un moyen de communication an qu’ils soient avertis sur-le-champ de tout changement. Le personnel inrmier doit faciliter la présence des parents au chevet de leur enfant et veiller à les soutenir le mieux possible durant les derniers jours de l’enfant. Les manifestations physiques du processus de la mort peuvent être troublantes pour la famille. Il n’est pas rare que l’enfant devienne de moins en moins alerte les jours précédant sa mort. L’inrmière peut aider les parents en les renseignant sur les changements qui s’opéreront à mesure que la fin approche (Wolfe, 2011) TABLEAU 10.6. Au cours de cette période, les visites de l’inrmière sont de plus en plus fréquentes et prolongées en vue d’apporter un soutien accru aux parents à l’approche de la mort de leur enfant. Les changements les plus troublants pour les parents sont probablement ceux qui ont trait à la respiration. Au cours des dernières heures de la vie de l’enfant, la respiration peut devenir difcile, et de longues périodes d’apnée succèdent aux respirations profondes. Cette respiration particulière porte le nom de respiration de Cheyne-Stokes. L’inrmière doit rassurer les parents sur le fait que ce n’est pas douloureux pour l’enfant et que cela

428

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

Mourir à la maison

Si l’enfant meurt à domicile, son décès doit être conrmé. Les services de soins palliatifs prennent généralement les mesures nécessaires pour que cela se déroule sans problème. Un médecin doit remplir un constat de décès. Par la suite, les services funéraires viennent chercher le corps de l’enfant décédé.

Mourir à l’hôpital Les enfants en n de vie et leur famille, qu’ils soient suivis en milieu hospitalier ou à la maison, ont des besoins similaires. À l’hôpital, il est primordial que l’inrmière tente d’adapter l’environnement aux besoins de la famille en préservant son intimité, en mettant de la musique ou en tamisant les lumières, par exemple (Wolfe, 2011). Il peut s’avérer nécessaire de prendre la décision de retirer l’équipement de maintien des fonctions vitales, dont le respirateur, ou de cesser certains traitements invasifs. Une telle situation sous-tend généralement plusieurs questions délicates qui doivent être discutées avec la famille (de Vos et al., 2015 ; Wolfe, 2011). L’inrmière peut aider les parents en les renseignant sur ce qui se passera une fois l’équipement de maintien des fonctions vitales arrêté, en administrant un analgésique adéquat afin d’éviter que l’enfant ne souffre ainsi qu’en laissant le temps aux parents

d’être avec leur enfant et de lui parler avant de retirer les appareils qui le maintiennent en vie. À la mort de l’enfant, la famille doit avoir le droit de rester dans la chambre, de prendre l’enfant ou de le bercer si elle en ressent le besoin. Une fois que l’inrmière a retiré tout le matériel médical (p. ex., les tubes, les appareils, etc.), elle peut offrir aux parents de les aider à préparer le corps de l’enfant en faisant sa toilette ou en l’habillant (MelinJohansson, Axelsson, Jonsson Grundberg et al., 2014). Il est essentiel que l’inrmière s’informe des besoins ou des demandes de la famille, car dans certaines cultures, il existe des pratiques bien précises relativement aux soins à apporter au corps et au processus du deuil. Ne pas respecter ces pratiques pourrait gêner le processus de deuil de la famille (Melin-Johansson et al., 2014 ; Wolfe, 2011). Par la suite, l’inrmière peut demander à la famille si les démarches nécessaires pour les funérailles ont été faites et si un membre du personnel peut lui venir en aide de quelque façon que ce soit. Il n’est pas rare que les parents s’inquiètent du bon déroulement des funérailles, notamment en ce qui a trait à la présence des autres enfants. La meilleure approche est de suggérer aux parents d’explorer les désirs de la fratrie quant à leur présence au salon funéraire (Contro, Kreicbergs, Reichard et al., 2011). Cependant, il est nécessaire de préparer les enfants an qu’ils sachent à quoi s’attendre. Il est préférable que ce soit un membre de la famille qui se charge de cette préparation (Contro et al., 2011).

Autopsie et don d’organes ou de tissus

SYSTÈME

MANIFESTATIONS

Cardiovasculaire

• Hypoxie entraînant une diminution de la fréquence cardiaque et de la pression artérielle • Diminution de la circulation périphérique et diminution du métabolisme entraînant une peau froide et marbrée (progressivement, en partant des extrémités et remontant vers le haut du corps)

Respiratoire

• Diminution de la fonction cardiaque causant une congestion pulmonaire et une hypoxie • Changement du mouvement respiratoire (périodes d’apnée, respiration de Cheyne-Stokes) • Difculté respiratoire pouvant causer de la panique ou de l’anxiété

Musculaire

• Faiblesse musculaire • Difculté à avaler et diminution de la capacité à dégager les sécrétions logées dans l’oropharynx causant l’accumulation des sécrétions et rendant la respiration bruyante (râles)

Nerveux central

• Dépendance au réseau de soutien, puis détachement progressif • Visions, hallucinations, hypersensibilité à la lumière

10

• Anxiété, confusion, agitation • Variation du niveau de conscience avec déclin graduel jusqu’au sommeil ou à la léthargie Rénal

• Diminution de la production d’urine (devient de couleur foncée) • Relâchement des sphincters causant une incontinence fécale et urinaire

Gastro-intestinal

• Diminution, puis perte de l’appétit • Production de selles, même en l’absence d’alimentation

Sources : Adapté de Davies (2011) ; Hellsten et Kane (2006) ; Himelstein (2006) ; Wolfe (2011).

Dans certaines familles, le don d’organes ou de tissus est un geste signicatif, un geste qui, dans la mort, sauve des vies. Il y a souvent confusion quant à la personne à qui incombe la responsabilité d’aborder ce sujet délicat. Dans les établissements où a lieu ce type de transplantation, il y a souvent une personne responsable d’informer la famille sur le don d’organes et qui se charge des détails administratifs. Si un tel service n’existe pas, le personnel doit choisir un de ses membres qui aura la responsabilité de parler à la famille. Idéalement, la personne choisie doit être celle qui connaît le mieux la famille, qui sait quand la mort de l’enfant devrait avoir lieu ou celle qui a au moins eu l’occasion d’être auprès de la famille si la mort était inattendue. Il n’est pas rare que l’inrmière soit la personne idéale pour aborder le sujet du don d’organes et de tissus, après en avoir parlé avec le médecin traitant. Lorsque la situation le permet, il est préférable d’aborder le sujet avant la mort de l’enfant. En outre, la demande devrait être faite dans un endroit intime et calme de l’hôpital, et formulée de manière simple et directe, par Chapitre 10

Manifestations physiques de la mort imminente

exemple : Avez-vous déjà discuté du don d’organes ? (Durall, 2011). Former les professionnels de la santé à adopter une approche respectueuse augmenterait les chances de réponses positives de la part des familles (Durall, 2011 ; Walker, Broderick et Sque, 2013). En outre, la question du don d’organes devrait être soulevée au cours d’une conversation différente de celle portant sur la mort de l’enfant ou sur l’imminence de celle-ci. L’inrmière doit connaître les réponses aux questions les plus fréquemment posées par les membres de la famille d’un donneur potentiel an d’aider ces derniers à prendre une décision éclairée. Les enfants en bonne santé dont la mort est inattendue sont d’excellents candiÉric, âgé de 12 ans, est dans ses derniers moments dats au don d’organes. Les de vie. Il est en phase terminale d’un lymphome dossiers sont évalués au cas hodgkinien. Il a décidé, en accord avec ses parents, par cas en fonction de l’âge de de terminer sa vie à la maison, entouré de son l’enfant et de la cause de la chien Spot, de son frère et de ses proches. Que mort. Pratiquement tous les pensez-vous de la décision d’Éric ? tissus et tous les organes

clinique

Jugement

10.5.5

TABLEAU 10.6

Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie

429

peuvent faire l’objet d’un don (p. ex., peau, cornée, os, reins, cœur, foie, pancréas), et le prélèvement ne mutile ni ne dégure le corps du défunt. En outre, la famille peut quand même exposer la dépouille à cercueil ouvert, et le prélèvement des organes ne retardera en rien le service funéraire. Le don d’organes en soi ne coûte rien, mais les funérailles ou la crémation demeurent la responsabilité de la famille. L’inrmière doit aussi s’informer des croyances religieuses de la famille en ce qui a trait au don d’organes, puisque certaines religions ne sont pas favorables à cette pratique. Pour ce qui est des cas de mort de cause inconnue, de mort violente ou de suicide présumé, la loi stipule qu’une autopsie doit être pratiquée. Dans les autres cas, l’autopsie est généralement facultative, mais les parents peuvent demander qu’il y en ait une. Le cas échéant, les étapes de ce processus ainsi que les formulaires à signer doivent leur être expliqués en détail. Finalement, il est important de faire savoir à la famille que même si une autopsie est pratiquée, les funérailles peuvent avoir lieu à cercueil ouvert (Broniscer, 2011).

10.5.6

Deuil

Le deuil est un processus, et non un moment, au cours duquel une personne a une réaction physiologique, psychologique, comportementale, sociale et spirituelle à la mort d’un proche (Hibberd, 2013 ; Neimeyer, Klass et Dennis, 2014). Le deuil est différent pour chaque personne qui le vit ; ses manifestations varient énormément d’une personne à l’autre. Il s’agit d’une réaction normale, habituellement liée à un sentiment de perte, mais le processus de deuil n’est ni rationnel ni prévisible (Hibberd, 2013). Lorsque la mort de l’enfant est prévue, ou lorsqu’elle est envisageable, ce dernier ainsi que sa famille peuvent vivre un deuil anticipé. Par exemple, la famille peut vivre le deuil de la perte éventuelle de la capacité de s’alimenter normalement chez l’enfant atteint d’un trouble neurodégénératif. Ce type de deuil peut se manifester dans divers comportements d’une intensité variée, notamment par le déni, la colère, la dépression ou tout autre symptôme psychologique ou physique (Contro et al., 2011 ; Price et Jones, 2015). Durant le deuil anticipé, la famille commence à penser à ce que sera leur vie après le décès de l’enfant (Davies et Jin, 2006 ; Laing et Moules, 2015). Les professionnels de la santé devraient rappeler aux membres de la famille que d’entendre la voix du défunt, d’être distant ou de chercher à se faire rassurer et à se faire dire que tout a été fait pour sauver l’enfant sont des réactions normales. Ces réactions n’indiquent en aucun cas que la

430

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

personne s’adapte mal, qu’elle perd la raison ou qu’elle est sur le point de sombrer dans la dépression. C’est plutôt le contraire : cette personne essaie de composer avec un deuil profond. Toutes ces réactions font partie du deuil. L’accompagnement en ce qui a trait au processus de deuil peut aider certaines familles à comprendre que ce qu’elles vivent est tout à fait normal. Pour la plupart des personnes, le deuil se vit sans complications majeures. Toutefois, il est important de reconnaître les membres de la famille qui sont à risque de vivre un deuil plus compliqué. Certains utilisent le terme de deuil compliqué pour décrire un deuil plus intense ou plus long que la normale, bien que la dénition de la normalité d’un deuil soit controversée. Le terme de trouble du deuil prolongé est aussi utilisé et est classifié comme un trouble de santé mentale (Boelen, van de Schoot, van den Hout et al., 2010). Comme le mentionnent Davies et Jin (2006), tout deuil d’un enfant est compliqué, mais il peut parfois être plus compliqué. Certains signes sont plus inquiétants. Spéciquement, l’inrmière devrait évaluer la présence d’idées ou de comportements suicidaires, un historique de pertes ou de traumatismes multiples, la présence de troubles psychiatriques et l’abus d’alcool ou de drogues. Par ailleurs, si les relations familiales étaient fragiles avant le décès de l’enfant, elles sont particulièrement à risque de se détériorer davantage. De plus, il arrive que la personne endeuillée se sente paralysée ou frustrée par le deuil. Si ces éléments sont présents, l’inrmière devrait diriger la famille vers les services appropriés selon ses besoins (Contro et al., 2011 ; Davies, Attig et Towne, 2006 ; Mullen et al., 2015). Le caractère individuel du deuil est un autre aspect important à considérer. Chacun des membres de la famille vivra son deuil de l’enfant d’une manière différente selon la relation qu’ils entretenaient avec lui. Cela peut même créer des conits au sein de la famille, car chaque membre s’attend à ce que les autres vivent leur deuil de la même manière que lui (Contro et al., 2011). Le personnel infirmier qui s’occupe d’une famille en deuil devrait connaître les différentes façons de composer avec le deuil en vue d’aider ses membres à en comprendre le caractère unique et à s’épauler dans leur démarche (Mullen et al., 2015).

Deuil parental Le deuil parental qui suit la perte d’un enfant est considéré comme l’un des deuils les plus difciles, les plus complexes, les plus longs et les plus changeants de tous (Price et Jones, 2015). Bien que la principale perte soit la perte de son enfant,

le parent vit aussi une foule de pertes secondaires, dont la perte d’une partie de soi, celle associée aux aspirations et aux espoirs fondés pour l’avenir de cet enfant, celle de l’unité familiale, la perte du soutien social et affectif de la communauté dont le parent jouissait avant la mort de l’enfant et, souvent, la modication de la relation avec le conjoint et les autres enfants (Contro et al., 2011). Des études menées auprès de parents endeuillés ont démontré que le deuil ne prend pas n avec la coupure du lien avec l’enfant décédé, mais que la relation avec l’enfant se poursuit, bien qu’elle soit différente de la relation telle qu’elle était avant le décès (Moules, Simonson, Prins et al., 2004). Il s’agit d’un processus intemporel qui a pour but de s’adapter, avec le temps, à cette nouvelle réalité de l’absence de l’enfant (Davies, 2004). Il peut y avoir des périodes récurrentes de tristesse, mais elles n’atteignent pas l’intensité de la perte initiale. Il n’en demeure pas moins qu’un deuil parental n’est jamais vraiment ni. La mort d’un enfant peut également éprouver la relation de couple, et ce, de plusieurs façons. Effectivement, il n’est pas rare que la réaction du père et celle de la mère soient bien différentes, les mères étant, par exemple, généralement plus expressives dans leur deuil que les pères (Contro et al., 2011 ; Price et Jones, 2015). Ainsi, cette différence peut entraver la communication et le soutien au sein du couple. Finalement, les attentes et les besoins différents de chacun des parents peuvent créer des tensions dans la relation (Price et Jones, 2015).

Deuil des frères et sœurs Chaque enfant vit son deuil d’une manière différente. En outre, le temps requis pour s’en remettre diffère également d’une personne à l’autre. Qui plus est, les enfants et les adolescents ne vivent pas le deuil de la même manière que les adultes. Tous les enfants, quel que soit leur âge, vivent un deuil lorsqu’ils perdent un être cher et ils devront apprendre à vivre avec cette perte (Contro et al., 2011 ; Youngblut et Brooten, 2013). Toutefois, leur compréhension de la mort ainsi que leurs réactions dépendent de leur âge et de leur niveau de développement. Le deuil de l’enfant peut être long, car ce dernier comprend la mort différemment à mesure qu’il grandit. Par contre, il n’est pas toujours en état de deuil. Chez l’enfant, le deuil jaillit aussi spontanément qu’il repart. L’enfant peut être émotif et triste un instant, puis, l’instant d’après, il peut passer à autre chose et retourner jouer. D’ailleurs, les enfants expriment beaucoup leur deuil dans leur jeu et leur comportement. En outre, l’enfant peut être sensible au deuil que

Chapitre 10

vivent ses parents. Le cas échéant, il essaiera de les protéger en évitant de poser des questions ou de les contrarier. Conséquemment, le frère ou la sœur du défunt peut concentrer tous ses efforts à devenir l’enfant parfait. Les enfants peuvent éprouver certaines sensations physiques et certains troubles de santé, ainsi que la colère, la culpabilité, la tristesse, la solitude, le repli sur soi, le mauvais comportement, les troubles du sommeil, l’isolement et la quête de sens. Une fois de plus, le personnel inrmier devrait porter une attention particulière aux signes indiquant que les frères et sœurs du défunt vivent difcilement leur deuil et conseiller les parents au moment opportun (Lane et Mason, 2014 ; Youngblut et Brooten, 2013).

La Maison Monbourquette offre des services de soutien aux personnes vivant un deuil à la suite d’un décès par l’intermédiaire de son site Web au www. maisonmonbourquette.com ou par téléphone au 1 888 LE-DEUIL.

Il peut arriver qu’un membre de la famille ait besoin d’aide pour vivre son deuil TABLEAU 10.7. Bien que la communication avec la famille endeuillée soit essentielle, il arrive que l’inrmière ne sache pas quoi dire pour lui apporter du réconfort et qu’elle se sente impuissante. La meilleure façon d’aider est probablement d’être à l’écoute, de ne pas juger les réactions des membres de la famille et d’éviter les conseils ainsi que la rationalisation. Il s’agit en fait de se concentrer sur les émotions de l’endeuillé.

10

Les membres de la famille savent qu’il n’y a rien qui puisse être dit pour apaiser leur douleur. Ils ne veulent qu’être acceptés, compris et respectés dans leur processus de deuil. La famille vivra un long processus de deuil. Si le deuil profond peut durer quelques semaines ou quelques mois, surmonter le sentiment de perte peut prendre des années. Les fêtes et les anniversaires sont habituellement très difciles, d’autant plus que ceux qui, jusque-là, se montraient compréhensifs tiennent peut-être pour acquis que la famille doit s’être remise de la perte. Le deuil prolongé est donc souvent une période vécue dans le silence et la solitude.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les membres de la famille vivront leur deuil de l’enfant d’une manière différente selon la relation qu’ils entretenaient avec lui.

Bien des familles ne reçoivent pas le soutien qui pourrait faire en sorte qu’elles surmontent leur deuil. À cet effet, un suivi régulier peut s’avérer aidant. À tout le moins, une rencontre avec la famille de l’enfant décédé ou un appel de suivi devrait être planié, car plusieurs familles rapportent s’être senties abandonnées à la suite de l’absence de communication avec l’équipe soignante (Widger et Picot, 2008). Il est également possible de diriger la famille vers un groupe d’entraide. Si aucun groupe d’entraide ne peut répondre à ses besoins, l’inrmière peut contribuer à rassembler les membres de la famille ou animer un groupe de discussion entre parents ou entre frères et sœurs d’un enfant décédé.

Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie

431

Soutien inrmier TABLEAU 10.7

Soutenir la famille en deuila

PRINCIPES GÉNÉRAUX

AU MOMENT DE LA MORT

APRÈS LA MORT

• Rester avec la famille ; demeurer assis en silence si les membres de la famille préfèrent ne rien dire ; pleurer avec eux, si le besoin se fait sentir.

• Rassurer la famille que toutes les interventions pertinentes ont été essayées en vue de sauver la vie de l’enfant, lorsque c’est approprié.

• Assister aux funérailles si un lien étroit a été établi avec la famille.

• Accepter leurs réactions ; éviter le jugement (p. ex. : Vous devriez déjà vous sentir mieux.). • Éviter de rationaliser la mort de l’enfant (p. ex. : Au moins, votre enfant ne souffre plus.). • Éviter les phrases de consolation toutes faites (p. ex. : Je comprends ce que vous ressentez. Vous êtes encore jeune, vous avez le temps d’avoir un autre enfant.). • Parler ouvertement des émotions telles la culpabilité, la colère et la perte d’estime de soi. • Se concentrer sur les émotions en insérant le verbe ressentir dans ses interventions (p. ex. : Vous ressentez encore la douleur d’avoir perdu votre enfant.). • Diriger la famille vers un groupe d’entraide ou vers un professionnel, au besoin.

• Donner l’occasion à l’enfant et à sa famille de se remémorer leurs plus beaux souvenirs ensemble, si l’occasion s’y prête. • Exprimer ses regrets (p. ex. : Il va tellement nous manquer. On a tout tenté ; nous sommes tellement désolés de ne pas pouvoir le sauver.). • Répondre aux questions de la famille de façon honnête. • Respecter les besoins affectifs des membres de la famille, dont les enfants qui pourraient avoir besoin d’un peu de répit (p. ex., pour sortir de la chambre et jouer.). • Faire tout en son pouvoir pour que les membres de la famille, et particulièrement les parents, soient présents auprès de l’enfant au moment de sa mort, à moins qu’ils n’aient exprimé le besoin contraire. • Permettre à la famille de rester auprès de l’enfant après sa mort pour le prendre, le bercer ou faire sa toilette, et ce, aussi longtemps qu’elle le désire. • Offrir son aide à la famille pour des tâches pratiques, comme celle de rassembler les objets appartenant à l’enfant. • Faire en sorte que la famille reçoive un soutien spirituel adapté à ses croyances.

• Garder le contact (p. ex., en envoyant des cartes de condoléances, en appelant à la maison, en invitant la famille à revenir voir le personnel du service, en visitant la famille.). • Parler du défunt en l’appelant par son prénom ; échanger de bons souvenirs. • Dissuader les membres de la famille d’avoir recours aux drogues ou à l’alcool pour faciliter leur deuil. • Inciter les membres de la famille à exprimer ce qu’ils ressentent au lieu de se taire an d’éviter de contrarier autrui. • Rappeler que le deuil est un processus changeant qui se poursuit dans le temps et qui implique la continuité et la modication de la relation avec l’enfant décédé.

a

La famille comprend tous les proches présents dans la vie de l’enfant, dont les parents, les frères et sœurs, les grands-paren ts ainsi que la famille élargie et les amis proches. Sources : Adapté de Contro et al. (2011) ; Davies et Jin (2006) ; Mullen et al. (2015) ; Price et Jones (2015) ; Wolfe (2011).

Réactions du personnel inrmier à la mort de l’enfant Être témoin de la souffrance et de la mort d’un enfant est une expérience difcile qui peut causer de la souffrance chez les inrmières, tout en étant une source potentielle d’épanouissement personnel (Curcio, 2017 ; Davies et Jin, 2006 ; TaubmanBen-Ari et Weintroub, 2008). Traditionnellement, on enseignait aux inrmières à se détacher affectivement de la situation, ce qui nuisait à la fois aux familles et aux inrmières (Davies et Jin, 2006). Parmi les stratégies qui peuvent aider l’inrmière à travailler dans un tel contexte, il convient de mentionner le maintien d’un bon état de santé, l’épanouissement grâce à des intérêts personnels riches, les techniques de distraction, le recours à un réseau de soutien professionnel et personnel, la compassion, la capacité de se concentrer sur les

432

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

aspects positifs du travail d’inrmière et le recours à des théories valables et à des observations empiriques pour justier ses interventions médicales. La participation à des commémorations aide certaines inrmières à vivre leur deuil. Dans le même ordre d’idées, assister aux funérailles d’un enfant peut être bénéque tant pour la famille endeuillée que pour le professionnel de la santé, et cela ne nuit aucunement à son professionnalisme. Les techniques préalablement mentionnées sont toutes importantes et nécessaires, mais ne sont toutefois pas sufsantes lorsqu’une inrmière travaille avec des enfants en n de vie. Plusieurs auteurs recommandent une réexion personnelle sur l’incidence des relations avec les enfants, les familles et les professionnels de la santé, ainsi que sur la mort et la souffrance, et suggèrent de développer la pleine conscience (Curcio, 2017 ; Davies et Jin, 2006 ; Liben et Papadatou, 2011 ; Lobb, Oldham, Vojkovic et al., 2010).

Analyse d’une situation de santé

Jugement clinique

Joannie, âgée de 10 ans, est en phase terminale d’une leucémie myéloïde. D’après le médecin, il lui resterait 2 ou 3 semaines à vivre. Elle sait qu’elle est en n de vie et connaît très bien l’issue de sa maladie. Malgré l’épreuve à venir, ses parents et

elle souhaitent vivre ses derniers moments à la maison. Elle a une sœur âgée de 12 ans et des frères jumeaux âgés de 7 ans. Une inrmière du service de maintien à domicile vient la visiter quotidiennement.

Mise en œuvre de la démarche de soins

Collecte des données – Évaluation initiale – Analyse et interprétation 1. Sachant que Joannie ressent probablement de l’inconfort sur le plan physique, quelle serait la donnée prioritaire à évaluer auprès de celle-ci ? Justiez votre réponse. 2. Pourquoi est-il important d’évaluer la dynamique entre Joannie, ses frères et sa sœur ?

Au cours d’une visite à domicile, l’inrmière constate que Joannie est très souffrante et pâle. Sa mère mentionne que sa lle pleure souvent, qu’elle a mal partout et qu’elle n’a pas dormi de la nuit malgré les analgésiques qu’elle lui a administrés régulièrement. Elle est couchée la plupart du temps.

D’après la description de la mère, la llette aurait une respiration de Cheyne-Stokes lorsqu’elle arrive enn à s’endormir. Même si Joannie n’est pas hospitalisée, l’inrmière a conçu un plan thérapeutique inrmier (PTI) an d’assurer un suivi de l’état de santé de la jeune lle.

3. D’après les données de cet épisode, quel problème prioritaire nécessiterait un suivi particulier ? Inscrivez votre réponse vis-à-vis du numéro 2 dans l’extrait du PTI ci-dessous.

10

SOLUTIONNAIRE

Extrait de PTI CONSTATS DE L’ÉVALUATION Date

Heure



2018-06-28

08:30

2

Signature de l’inrmière

Problème ou besoin prioritaire

Initiales

RÉSOLU / SATISFAIT Date

Heure

Initiales

Professionnels / Services concernés

Vos initiales Initiales

Programme / Service

Signature de l’inrmière

Initiales

Programme / Service

Maintien à domicile

Planication des interventions – Décisions inrmières 4. En plus de l’administration des analgésiques prescrits, quelle intervention pourrait contribuer à soulager la douleur de Joannie et l’aider à se sentir mieux ? 5. Nommez deux autres interventions qui pourraient également favoriser le soulagement de la douleur de Joannie.

Joannie tient à ce que son chat dorme avec elle. 6. Pourquoi est-il important de respecter cette demande ? 7. Étant donné que Joannie a parfois une respiration de Cheyne-Stokes lorsqu’elle arrive à s’endormir, quelle position contribuerait à favoriser les échanges gazeux tout en procurant plus de confort à la llette ?

Évaluation des résultats – Évaluation en cours d’évolution 8. Quels sont les deux signes vitaux qui indiqueraient aux parents de Joannie qu’elle est moins souffrante ? Justiez votre réponse. 9. Considérant l’âge et l’état dans lequel Joannie se trouve, quel signe vous indiquerait qu’elle est soulagée la nuit ?

Chapitre 10

VU dans ce chapitre

En plus d’avoir un faciès détendu, quel autre élément à évaluer vous permettrait de déterminer le degré de soulagement de la douleur chez Joannie après l’application des mesures antalgiques ?

Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie

433

Chapitre

11

Déciences intellectuelles et déciences sensorielles Écrit par : Rosalind Bryant, PhD, RN, PPCNP-BC Adapté par : Suzanne Plante, inf., M. Sc. Dalila Benhaberou-Brun, B. Sc. inf., B. Sc., M. Sc.

MOTS CLÉS

OBJECTIFS

Anomalie chromosomique . . . . . . . . . . . 436 Autonomie dans les activités de la vie quotidienne . . . . . . . . . . . . . . . . . 440 Déficience auditive . . . . . . . . . . . . . . . . . . 447 Déficience intellectuelle (DI). . . . . . . . . 436 Déficience visuelle. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 454 Habileté sociale. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 436 Moyens de communication selon le type de déficience sensorielle . . . . 441 Problèmes physiques associés au syndrome de Down . . . . . . . . . . . . . . 444 Programme d’intervention précoce . . . 438 Retard global du développement . . . . 437 Syndrome du X fragile . . . . . . . . . . . . . . . 446 Trouble du spectre de l’autisme (TSA). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 463

Après avoir étudié ce chapitre, vous devriez être en mesure :

Disponible sur

• de décrire les classifications de déficiences intellectuelles ; • de décrire le retard du développement ; • d’expliquer les interventions infirmières favorisant le développement optimal de l’enfant atteint d’une déficience intellectuelle, y compris en cours d’hospitalisation ; • de décrire les principales caractéristiques biologiques et cognitives de l’enfant atteint du syndrome de Down ; • d’expliquer les interventions infirmières pour l’enfant atteint du syndrome de Down ; • de déterminer les principales caractéristiques du syndrome du X fragile ; • d’énumérer les classifications générales des déficiences auditives et leurs effets sur le langage ; • d’expliquer les interventions infirmières pour l’enfant atteint d’une déficience auditive, y compris en cours d’hospitalisation ; • d’énumérer les types courants de troubles visuels chez l’enfant ; • d’expliquer les interventions infirmières pour l’enfant atteint de déficience visuelle, y compris en cours d’hospitalisation ; • d’expliquer les interventions infirmières pour l’enfant atteint d’un trouble du spectre de l’autisme.

• Animation • À retenir • Carte conceptuelle • Solutionnaires • Tableau Web

Guide d’études – SA08, SA09

434

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

Carte conceptuelle

Cette carte conceptuelle illustre schématiquement les principaux concepts décrits dans le présent chapitre. Sa lecture vous permettra d’avoir une vue d’ensemble des notions qui y sont présentées.

si

se manifeste par

se manifeste par

se manifestent par causé par

causée par comme

Déciences intellectuelles

comme

comprennent Déciences intellectuelles et déciences sensorielles

11

comprennent

selon localisation

Déciences sensorielles

inclut

comme

prévenue par

prévenue par

affecte sont peut être

se manifestent par

DI : décience intellectuelle

Chapitre 11

Déciences intellectuelles et déciences sensorielles

435

L’instrument d’évaluation MHAVIE (mesure des habitudes de vie), conçu par le Réseau international du processus de production du handicap (RIPPH), est présenté sur le site Web de l’Association du Québec pour l’intégration sociale (www.aqis-iqdi.qc.ca).

11.1

Déciences intellectuelles

11.1.1

Concepts généraux

L’expression décience intellectuelle (DI) est un terme générique qui englobe tout type de handicap intellectuel. Le terme handicap intellectuel a largement remplacé le terme retard mental, comme précisé par l’American Association on Intellectual and Developmental Disabilities (AAIDD) (2010) et l’American Psychiatric Association (APA) (2013). Dans ce chapitre, le terme décience intellectuelle a été privilégié. La dénition de décience intellectuelle chez les enfants repose sur trois éléments : 1. le fonctionnement intellectuel ; 2. les forces et les faiblesses fonctionnelles ;

10 L’adaptation de la famille de l’enfant aux handicaps en général est abordée dans le chapitre 10, Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie.

3. l’âge de moins de 18 ans au moment du diagnostic. Une décience du fonctionnement intellectuel est établie par un quotient intellectuel (QI) de 75 ou moins. De plus, selon le Diagnostic and statistical manual of mental disorders (DSM-5), 5e édition, de nouveaux critères recommandent de ne pas se baser uniquement sur le QI, mais plutôt d’inclure aussi les mesures de fonctionnement adaptatif pour établir le diagnostic (APA, 2015 ; Carr, Linehan, O’Reilly et al., 2016 ; Moran, 2013). Le DSM-5 est le standard du diagnostic et indique que l’enfant avec une DI doit démontrer des décits dans les habiletés adaptatives ayant pour résultat une incapacité à atteindre les standards développementaux ou socioculturels an d’acquérir l’indépendance personnelle et la responsabilité

ENCADRÉ 11.1

• l’infection et l’intoxication, notamment la rubéole congénitale, la syphilis, la toxicomanie maternelle (p. ex., le syndrome d’alcoolisation fœtale), l’ingestion chronique de plomb ou le kernictère (ou ictère nucléaire) ; • un traumatisme ou un agent physique (p. ex., une lésion cérébrale prénatale, périnatale ou postnatale) ; • la nutrition inadéquate et les troubles métaboliques, comme la phénylcétonurie ou l’hypothyroïdie congénitale ; • la maladie cérébrale postnatale grave, comme la neurobromatose et la sclérose tubéreuse ; • l’inuence prénatale inconnue, notamment des malformations cérébrales et crâniennes, comme la microcéphalie et l’hydrocéphalie ; Source : Adapté de Université de Montréal (s.d.-a).

436

Partie 4

Étiologie La DI grave a des causes principalement génétiques, biochimiques et infectieuses. Bien que l’étiologie demeure inconnue dans la majorité des cas, des causes familiales, sociales, environnementales et organiques peuvent être rapportées ENCADRÉ 11.1 . Chez les personnes atteintes de DI, une proportion importante des cas est liée au syndrome de Down, au syndrome du X fragile ou au syndrome d’alcoolisation fœtale.

Diagnostic Le diagnostic de DI est habituellement établi à la suite de questions que peuvent se poser les professionnels de la santé ou la famille au sujet d’un possible retard du développement de l’enfant. Dans certains cas, le diagnostic se conrme dès la naissance, sur la base de signes physiques distincts, par exemple en présence du syndrome de Down ou du syndrome d’alcoolisation fœtale. Dans

Causes potentielles de la décience intellectuelle

Les événements suivants pouvant survenir pendant la période prénatale, périnatale ou postnatale, ou durant la petite enfance peuvent entraîner une décience intellectuelle :

Kernictère : Dépôts de bilirubine présents dans les noyaux gris centraux et dans les divers noyaux du tronc cérébral (Sgro, Shah et Campbell, 2009).

sociale (Moran, 2013). Ainsi, l’enfant atteint d’une DI doit manifester une atteinte fonctionnelle affectant au moins 2 des 10 domaines d’habiletés adaptatives reconnus, soit : communication, soins personnels, vie domestique, habiletés sociales, loisirs, santé et sécurité, autodétermination, scolarisation, utilisation des services communautaires et travail (AAIDD, 2010). Il est donc important que l’inrmière cible les besoins de chacun de manière globale an d’optimiser le développement de ces enfants. Il sera ainsi possible d’améliorer les capacités fonctionnelles des enfants atteints de DI en leur fournissant un soutien personnalisé 10 .

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

• les anomalies chromosomiques d’origine radique, les virus, les substances chimiques, l’âge parental et les mutations génétiques, comme le syndrome de Down, la trisomie 13 et la trisomie 18 ; • les mutations chromosomiques, comme la sclérose tubéreuse et le syndrome du X fragile ; • les troubles gestationnels (p. ex., la prématurité, un faible poids à la naissance et une postmaturité) ; • les troubles psychiatriques se déclenchant durant la période de développement de l’enfant et jusqu’à l’âge de 18 ans (p. ex., le trouble du spectre de l’autisme) ; • l’inuence environnementale, y compris les signes probants d’un manque de stimulation, d’un environnement carencé associé à des antécédents de décience intellectuelle chez les parents ou la fratrie.

Les retards sont typiquement observés sur le plan du développement de la motricité ne et du langage, ce dernier ayant une valeur plus prédictive. Le retard global du développement peut se décrire comme tout décit du développement physique, cognitif, comportemental, émotionnel ou social de l’enfant par rapport aux normes établies. La DI correspond à une atteinte permanente qui englobe un fonctionnement notablement inférieur ENCADRÉ 11.2

Signes d’appel pour reconnaître un problème de développement cognitif

• Caractères dysmorphiques (p. ex., un syndrome de Down, un syndrome du X fragile) • Irritabilité ou absence de réponse au contact • Contact visuel anormal au moment de l’alimentation • Retard de la motricité globale : diminution du jeu spontané • Réaction émoussée à la voix ou au mouvement • Troubles ou retard du langage • Troubles de l’alimentation Source : Adapté de Université de Montréal (s.d.-b).

à la moyenne sur le plan des capacités cognitives et du comportement adaptatif. En l’absence de preuves indiscutables de DI, il faut privilégier un diagnostic de retard global du développement. Les résultats des tests standardisés permettent de poser le diagnostic de DI en fonction des décits cognitifs. Des tests évaluent le comportement adaptatif, comme l’échelle de maturité sociale de Vineland et l’échelle des comportements adaptatifs de l’AAIDD.

CE QU’IL FAUT RETENIR

En l’absence de preuves indiscutables de DI, il faut privilégier un diagnostic de retard global du développement.

Les intervenants qui connaissent le mieux l’enfant (p. ex., les parents, les professeurs ou toute personne soignante) peuvent effectuer une évaluation informelle de son comportement adaptatif. Souvent, ces observations amènent les parents à chercher à faire évaluer le développement de leur enfant. Une approche recommandée en ce qui concerne l’application clinique repose sur une classication effectuée en fonction du potentiel éducationnel ou de la gravité des manifestations cliniques. L’expression décience intellectuelle légère désigne les personnes légèrement atteintes, qui représentent environ 85 % de toutes celles qui souffrent de DI. Le terme décience intellectuelle moyenne s’applique généralement aux enfants qui présentent des taux modérés de DI, ce qui représente environ Pablo est âgé de 15 mois. Sa mère l’amène au 10 % de la population souffrant groupe de médecine familiale de son quartier. de déficience intellectuelle Même si son ls n’a aucune maladie connue, elle (Shapiro et Batshaw, 2016 ; est très inquiète quant à son développement. Il Shea, 2012), et 5 % ont un semble bien en retard dans ses apprentissages par déficit grave ou profond du rapport à d’autres enfants. Nommez quatre signes fonctionnement intellectuel précoces d’une décience cognitive que vous (Centre intégré de santé et de devriez évaluer en premier. services sociaux [CISSS] de la Montérégie-Ouest, 2010).

clinique

Jugement

d’autres cas, le diagnostic devient évident lorsque des problèmes, comme un retard du langage ou des difcultés scolaires, soulèvent des inquiétudes. Dans tous les cas, le diagnostic précoce est fondé sur la présence de plusieurs signes d’un retard du développement ou des comportements précoces indicateurs d’une DI ENCADRÉ 11.2. Un dépistage de routine des problèmes développementaux permet de poser un diagnostic de DI.

Soins inrmiers DÉFICIENCES INTELLECTUELLES

Les inrmières jouent un rôle majeur dans le dépistage de la DI chez les enfants. Chez le nouveauné et le nourrisson, peu de signes peuvent être observés, sauf dans le cas du syndrome de Down. À partir de l’âge de un an toutefois, tout retard à franchir les étapes normales du développement constitue un indice majeur de DI. De plus, les inrmières doivent entretenir de la suspicion à l’égard de tout comportement évocateur d’une DI ENCADRÉ 11.2. Il faut prendre au sérieux les inquiétudes des parents au sujet des retards de développement d’un enfant comparativement à ses frères et sœurs. L’inrmière a souvent la responsabilité de procéder à l’évaluation du développement cognitif de l’enfant et, 3 lorsqu’elle détecte des retards de développement,

elle doit communiquer ses observations aux parents avec discrétion et sensibilité. De plus, lorsqu’elle dépiste un retard, elle doit s’assurer de diriger l’enfant vers une équipe interdisciplinaire spécialisée an de conrmer le diagnostic.

Soutenir la famille lors de l’annonce des résultats des tests Les résultats aux tests doivent être considérés avec prudence et nuancés lorsqu’ils sont annoncés aux parents. Ils ne peuvent être utilisés comme critères d’évaluation ou de résultats dans la planication des soins. Les valeurs approximatives des QI correspondent aux différents degrés d’atteinte, mais elles ne sufsent pas pour conseiller les parents ou pour aider l’enfant. L’approche doit être individualisée et adaptée au niveau de développement de l’enfant (Bowden et Greenberg, 2014).

Chapitre 11

3 Les évaluations du développement de l’enfant sont abordées dans le chapitre 3, Croissance, développement et promotion de la santé.

Déciences intellectuelles et déciences sensorielles

437

11

Promouvoir le développement optimal de l’enfant

Jugement

clinique

Le développement optimal suppose davantage que l’atteinte de l’autonomie : il nécessite des conseils appropriés pour l’établissement d’un comportement social acceptable et le développement de sentiments personnels d’estime de soi, de valorisation et de sécurité (Jacob et Sikora, 2016). Ces attributs ne s’enseignent pas simplement par un programme de stimulation. En effet, l’éducation d’un enfant atteint d’une DI représente un dé quotidien complexe pour les familles. Ces dernières ont aussi besoin d’être accompagnées et d’être aidées pour surmonter ces dés et fournir un environnement qui favorise le développement optimal des capacités de l’enfant.

Au cours d’une rencontre, une mère vous raconte son découragement à propos de Laurent, son garçon de six ans, qui a une décience intellectuelle légère. Il refuse de faire ses devoirs et, même en classe, il ne fait qu’à moitié les exercices donnés. La mère vous demande si son ls ne devrait pas recevoir son enseignement à la maison an de l’aider. Quel serait l’avantage pour son garçon d’être scolarisé à l’école plutôt qu’à la maison ? a) L’école fournit de l’aide aux enfants atteints d’un retard intellectuel. b) Les orthopédagogues sont en mesure de travailler avec cette clientèle. c) Le contact avec d’autres enfants à l’école favorise la socialisation. d) La mère n’aurait qu’à compléter à la maison l’assistance reçue à l’école.

Pour pouvoir offrir de l’enseignement général ou en santé aux enfants atteints de DI, il faut vérier leurs habiletés et leurs décits sur le plan de l’apprentissage. Cela est important pour l’inrmière si elle est appelée à participer au programme de soins à domicile ou à soigner l’enfant dans un établissement de soins de santé. L’inrmière qui comprend de quelle façon ces enfants apprennent peut leur enseigner efficacement certaines habiletés de base ou les préparer à diverses interventions médicales.

Une autre façon de promouvoir le développement optimal et l’estime de soi consiste à s’assurer de la santé physique de l’enfant. Il faut voir à faire corriger toute anomalie congénitale, cardiaque, gastro-intestinale ou orthopédique, et même envisager une chirurgie esthétique si elle permet d’améliorer substantiellement la qualité de vie de l’enfant. La santé dentaire a aussi beaucoup d’importance ; l’orthodontie et la restauration pourront améliorer l’aspect visuel du visage de l’enfant, le cas échéant.

Expliquer des notions concrètes Les enfants atteints de DI manifestent une baisse marquée de leur capacité à faire la distinction entre deux stimulus ou plus en raison de leur difculté à reconnaître la pertinence des différents signaux. Toutefois, ils peuvent apprendre à faire cette distinction si les signaux leur sont présentés sous une forme ampliée et concrète, et si tous les stimulus externes sont éliminés (Gopalan, 2016). Par exemple, le recours aux couleurs pour amplier les signaux visuels ainsi que l’utilisation de

438

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

chansons ou de comptines pour amplier les signaux auditifs peuvent les aider à apprendre. Leur déficit sur le plan de la discrimination implique aussi qu’ils comprennent beaucoup plus efficacement les notions concrètes que les notions abstraites. Il est donc préférable de démontrer les choses plutôt que de les expliquer verbalement, et il faut diriger l’apprentissage vers la maîtrise d’une habileté plutôt que vers la compréhension de principes théoriques qui sous-tendent une opération.

Développer la mémoire à court terme Le décit cognitif peut aussi affecter la mémoire à court terme. Tandis que les enfants dotés d’une intelligence moyenne peuvent se rappeler plusieurs mots, chiffres ou directives simultanément, les enfants atteints de DI en sont moins capables. Ils ont donc besoin de directives simples, présentées une à la fois. L’apprentissage par étape nécessite une analyse des tâches qui permet de les découper en éléments constitutifs. Chaque étape est entièrement enseignée avant de passer à la suivante.

Encourager la motivation et l’autonomie La motivation constitue un autre secteur crucial de l’apprentissage exerçant un effet énorme sur la scolarisation chez les enfants atteints d’une DI. Les programmes fondés sur les principes de motivation appliqués à la modication du comportement, qui utilisent le renforcement positif pour certaines tâches et certains comportements particuliers, ont donné lieu à une amélioration marquée de la capacité d’apprentissage des enfants (Einfeld et Emerson, 2016). Les progrès technologiques ont considérablement aidé en ce sens, surtout chez les enfants gravement décients, qui ont parfois des handicaps physiques limitant encore davantage leurs capacités. Ainsi, grâce à des commutateurs spéciaux, les enfants acquièrent le contrôle de certaines activités dans leur environnement, par exemple allumer le téléviseur. L’écran de télévision devient un renforcement positif pour l’activation du commutateur. L’utilisation répétée de ces commutateurs permet à l’enfant de faire rapidement et simplement un lien au moyen d’un dispositif technique, ce qui peut le faire progresser vers des dispositifs de plus en plus complexes.

Offrir des programmes d’intervention précoce Un programme d’intervention précoce est un programme interdisciplinaire systématique de thérapie, d’exercices et d’activités conçu pour s’attaquer aux retards du développement chez les enfants décients an de les aider à réaliser leur plein potentiel (Canadian Down Syndrome Society, s.d.) PSTI 11.1. Les inrmières qui travaillent avec cette clientèle et leurs familles doivent connaître les types de programmes offerts

dans leur communauté. Les centres de réadaptation en décience intellectuelle et en troubles envahissants du développement offrent des services surspécialisés en complémentarité avec les CISSS régionaux. Les parents peuvent se renseigner au sujet de ces programmes en contactant le CISSS de leur région. La scolarisation de l’enfant doit commencer le plus tôt possible, car il a été

prouvé que l’intensication et la précocité des interventions sont directement liées à une plus grande amélioration du développement cognitif (Wallander, Biasini, Thorsten et al., 2014). À mesure que les enfants grandissent, il faut orienter leur éducation vers une formation professionnelle qui les préparera à mener la vie la plus autonome possible, dans la mesure de leurs capacités.

Pour des renseignements concernant les ressources disponibles dans chaque région, il est possible de consulter le site Web de l’Ofce des personnes handicapées du Québec au www.ophq.gouv.qc.ca.

Plan de soins et de traitements inrmiers PSTI 11.1

Enfant atteint d’une décience intellectuelle

PROBLÈME DÉCOULANT DE LA SITUATION DE SANTÉ

Risque de retard global du développement lié à une décience intellectuelle

OBJECTIF

L’enfant atteindra un potentiel de développement optimal dans la mesure de ses capacités.

RÉSULTATS ESCOMPTÉS

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES ET JUSTIFICATIONS

• Participation sociale optimale

Développement du nourrisson

• Autonomie dans les activités de la vie quotidienne (AVQ)

• Encourager la participation de l’enfant et de la famille à un programme de stimulation précoce des nourrissons pour maximiser le développement de l’enfant.

• Estime de soi accrue

• Évaluer les progrès développementaux de l’enfant à intervalles réguliers et assurer une tenue de dossiers détaillée an de discerner les modications subtiles du fonctionnement dans le but de réviser le plan de soins, au besoin.

11

Promotion de l’autonomie – enfant • Déterminer avec la famille les priorités quant à l’apprentissage de tâches particulières. • Aider la famille à établir des objectifs réalistes pour l’enfant an de promouvoir l’estime de soi de l’enfant par la réussite. • Encourager le renforcement positif des tâches et des comportements particuliers an d’augmenter la motivation de l’enfant. • Encourager les parents à promouvoir et à renforcer l’autonomie de l’enfant dès que possible pour faciliter le développement optimal. • Proposer à la famille des programmes de garderie et de classes spécialisées pour permettre l’apprentissage de la socialisation le plus rapidement possible. • Rappeler aux parents que l’enfant a les mêmes besoins que les autres (p. ex., les jeux, la discipline, l’interaction sociale) pour favoriser le développement optimal du potentiel. • Encourager la famille à enseigner à l’enfant les comportements sociaux acceptables (p. ex., dire bonjour et merci, acquérir de bonnes manières, avoir des contacts physiques appropriés) pour faciliter la socialisation. • Promouvoir la propreté et un code vestimentaire approprié pour l’âge an d’encourager l’acceptation d’autrui et de promouvoir l’estime de soi. • Souligner les caractéristiques normales de l’enfant pour aider la famille à voir l’enfant comme une personne dotée d’un potentiel unique. • Encourager l’inscription à des programmes qui offrent des contacts et des expériences avec des pairs (p. ex., les scouts, les jeannettes, les handisports) pour promouvoir une socialisation optimale. Prévention et promotion de l’autonomie – adolescent • Avant l’adolescence, faire de l’enseignement à l’enfant et aux parents au sujet de la maturation physique et du comportement sexuel. • Offrir de l’enseignement pratique aux adolescents sur la sexualité et déterminer avec eux et leur famille un code de conduite concret pour réduire les risques liés à la maturation sexuelle. • Proposer une discussion avec l’adolescent et sa famille au sujet du mariage et de la parentalité pour diminuer le risque de conits. • Encourager la poursuite d’une formation professionnelle.

Chapitre 11

Déciences intellectuelles et déciences sensorielles

439

PSTI 11.1

Enfant atteint d’une décience intellectuelle (suite)

PROBLÈME DÉCOULANT DE LA SITUATION DE SANTÉ

Risque de dynamique familiale perturbée lié à la décience intellectuelle de l’enfant

OBJECTIF

La famille aura une perception réaliste des besoins de l’enfant et de ses propres besoins de soutien.

RÉSULTATS ESCOMPTÉS

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES ET JUSTIFICATIONS

• Recours à des ressources d’aide appropriées

• Annoncer à la famille la décience dès la naissance de l’enfant ou le plus tôt possible après sa naissance pour prévenir les craintes et les inquiétudes, et offrir un soutien immédiat.

• Sentiment des membres de la famille d’être mieux préparés à prendre soin de l’enfant

• Demander que les deux parents soient présents à l’annonce du diagnostic pour éviter qu’un parent ait à transmettre des renseignements complexes à l’autre, et favoriser le soutien relationnel. • À l’annonce du diagnostic, s’abstenir de donner des réponses dénitives quant au degré d’atteinte ; souligner les capacités d’apprentissage potentielles de chaque enfant pour entretenir l’espoir. • Fournir à la famille, si possible, des renseignements écrits au sujet de la maladie pour que les parents puissent s’y référer, au besoin. • Discuter avec les membres de la famille des avantages et des inconvénients des options de soins (à domicile, répit ou placement) pour faciliter les prises de décisions. • Encourager la famille à rencontrer d’autres familles dont un enfant a un diagnostic similaire pour fournir un soutien additionnel. • Encourager les membres de la famille à exprimer leurs sentiments et leurs inquiétudes pour promouvoir le processus d’adaptation et la collaboration efcaces. • Proposer des organismes d’aide et de soutien pour aider la famille.

Favoriser l’autonomie de l’enfant Le Guide d’accompagnement à l’intention des parents d’un enfant ayant des besoins particuliers est disponible pour aider les parents à comprendre les différentes options de scolarisation et favoriser leur implication. Il peut être consulté sur le site Web de la Fédération des comités de parents du Québec au www.fcpq.qc.ca.

éactivation des connaissances Nommez trois facteurs qui inuencent la croissance et le développement d’une personne.

440

Partie 4

Lorsqu’un enfant naît avec une DI, les parents ont besoin de soutien de la part du personnel soignant an de pouvoir maximiser, chez leur enfant, le degré d’autonomie fonctionnelle que d’autres enfants atteignent plus facilement. Il n’y a aucun moyen de prédire quand un enfant sera en mesure d’atteindre l’autonomie dans les activités de la vie quotidienne, comme s’alimenter, aller à la toilette, s’habiller et veiller à son hygiène, car il existe une grande variabilité chez les enfants avec une DI (Jacob et Sikora, 2016). L’enseignement de ces habiletés nécessite une connaissance de base des étapes de leur acquisition chez les enfants dotés d’une intelligence moyenne. L’enseignement de ces habiletés nécessite également une connaissance pratique de chacune des étapes requises pour les maîtriser. Ainsi, avant de commencer un programme d’alimentation autonome, l’inrmière procède à une analyse de la tâche. Elle observe l’enfant dans une situation particulière, lorsqu’il mange par exemple, pour vérier quelles habiletés il possède déjà. Les membres de la famille doivent participer à ce processus, car leur propre degré de préparation est tout aussi important que celui de l’enfant. Il existe de nombreuses aides techniques pour faciliter l’apprentissage et éliminer certains obstacles, notamment l’utilisation d’une assiette munie de ventouses pour prévenir les renversements

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

accidentels. Le travail en interdisciplinarité permet de s’assurer d’une qualité de soins optimale pour l’enfant et sa famille.

Encourager le jeu et l’exercice Les enfants atteints de DI ont le même besoin de s’amuser et de bouger que les autres enfants. Toutefois, comme leur développement est plus lent, les parents sont parfois moins conscients de la nécessité de les encourager dans de telles activités. L’inrmière doit donc les guider dans le choix d’activités de loisirs et de sports. Un exemple de jeu adapté aux enfants atteints d’une DI est présenté dans la FIGURE 11.1.

FIGURE 11.1 Le fait de placer un objet attirant hors de la portée de l’enfant l’encourage à ramper.

Le type de jeu choisi dépend de l’âge développemental de l’enfant, et il est souvent néces saire de prolonger pendant plusieurs années le jeu sensorimoteur. Les parents doivent utiliser chaque occasion pour exposer l’enfant au plus grand nombre possible de sensations auditives, visuelles et autres. Les mobiles musicaux, les peluches, les jeux aquatiques, les jouets ottants, le fauteuil ou le cheval à bascule, la balançoire, les clochettes et les hochets gurent parmi les jeux appropriés. Il faut amener l’enfant en promenade, par exemple à l’épicerie ou au centre commercial, et encourager la venue de visiteurs à la maison ; ceux-ci doivent en outre interagir directement avec l’enfant, notamment en le prenant dans leurs bras, en le berçant et en lui parlant. Il faut choisir les jouets pour leur utilité récréative et éducative (Ferland, 2009). Par exemple, un gros ballon de plage gonable est un bon jouet. Il encourage le jeu interactif et peut servir à l’apprentissage des habiletés motrices comme se tenir en équilibre, se balancer, donner un coup de pied et lancer. Une poupée dont les vêtements sont munis de divers dispositifs de fermeture permettant de les retirer peut aider l’enfant à apprendre à s’habiller. Les jouets musicaux qui imitent le cri d’animaux ou ceux qui prononcent des phrases sont d’excellentes façons d’encourager le langage. Ces jouets doivent être de conception simple pour que l’enfant puisse les manipuler sans aide. Des commutateurs électroniques peuvent permettre aux enfants souffrant de déciences intellectuelle et physique graves de faire fonctionner certains jouets FIGURE 11.2.

santé de l’enfant (Ferland, 2013) FIGURE 11.3. Des enfants éprouvent parfois des problèmes physiques qui les empêchent de participer à certains sports ; c’est le cas en présence d’instabilité atlantoaxiale chez les enfants souffrant du syndrome de Down. Ces enfants ont souvent plus de facilité à pratiquer des sports individuels ou à deux qu’à pratiquer des sports d’équipe, et ils s’amusent davantage avec des enfants qui sont au même stade de leur développement. La sécurité occupe une place centrale dans le choix des activités récréatives et des sports. Par exemple, certains jouets appropriés pour le stade de développement pourraient représenter un danger pour un enfant assez fort pour les briser ou qui les utilise de façon incorrecte (Ferland, 2014).

Instabilité atlantoaxiale : Instabilité de l’articulation entre les deux premières vertèbres cervicales due, chez les personnes atteintes du syndrome de Down, à une laxité des ligaments cervicaux.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Le jeu donne à l’enfant la chance de développer ses capacités motrices.

Fournir des moyens de communication Le langage repose sur l’ouïe et l’interprétation (habiletés réceptives), ainsi que sur la coordination des muscles du visage (habiletés expressives). Comme ces deux types d’habiletés risquent d’être affectées chez les enfants atteints de DI, ceux-ci ont souvent besoin de tests audiométriques, et il faut leur procurer des appareils auditifs, au besoin. De plus, ils peuvent avoir besoin d’apprendre à contrôler les muscles de leur visage. Par exemple, certains enfants ont besoin d’exercices an de corriger leur manie de sortir la langue, ou il faut leur rappeler gentiment de fermer la bouche.

Il faut choisir des activités physiques adaptées à la taille, à la coordination, à l’aptitude physique, à la maturité, à la motivation et à l’état de

Il existe plusieurs moyens de communication selon le type de décience sensorielle (Edwards, Temple et Dunn, 2012). La communication non verbale convient à certains de ces enfants, et il existe divers dispositifs prévus à cette n. Pour l’enfant qui n’a pas de handicaps physiques associés à sa DI, un tableau vocal peut être utilisé. Pour les enfants atteints de handicaps physiques,

FIGURE 11.2 Un commutateur électronique permet à l’enfant atteint d’une décience intellectuelle de jouer avec un jouet à piles.

FIGURE 11.3 Un jouet préféré procure une stimulation au jeune enfant.

Chapitre 11

11

Pour des renseignements sur les organismes de sports et de loisirs adaptés, il est possible de consulter le site Web de l’Association québécoise pour le loisir des personnes handicapées au www.aqlph. qc.ca ou le site Web http:// laccompagnateur.org.

Déciences intellectuelles et déciences sensorielles

441

CE QU’IL FAUT RETENIR

Il ne sert pas à grand-chose d’enseigner la morale à un enfant s’il ne dispose pas des habiletés cognitives sufsantes pour apprendre par autocritique ou pour tirer une leçon de ses erreurs.

il existe plusieurs modèles ou dispositifs d’aide à la communication pouvant faciliter le choix d’un pictogramme ou d’un mot. Certains enfants peuvent apprendre le langage signé (utilisé par les personnes avec une décience auditive), ou langage Bliss, un système hautement stylisé de symboles graphiques qui représentent des mots, des idées et des concepts. Pour l’utiliser, il faut apprendre le sens de ces symboles, mais il n’est pas nécessaire de savoir lire. Les symboles sont généralement placés sur un tableau, et la personne les pointe du doigt ou utilise un sélecteur pour formuler son message (Centre de suppléance à la communication orale et écrite – Québec, 2014).

Établir une discipline

La discipline doit débuter tôt. Les restrictions doivent être simples, constantes et appropriées à l’âge mental de l’enfant. Les mesures de contrôle reposent principalement sur l’enseignement ou la modication d’un comportement en particulier plutôt que sur la compréhension des raisons qui le sous-tendent. Il ne sert pas à grand-chose d’enseigner la morale à un enfant s’il ne dispose pas des habiletés cognitives sufsantes pour Une jeune mère se présente à la clinique avec ses apprendre par autocritique jumeaux, Jérôme et Julien, âgés de quatre ans. ou pour tirer une leçon de Jérôme est d’intelligence normale et Julien est atteint ses erreurs. La modication d’une décience intellectuelle connue depuis un an. du comportement, et plus Tout à coup, ce dernier frappe son frère au visage. particulièrement le renforceLa mère s’excuse et commence à sermonner Julien ment des gestes souhaités, en lui disant : « Lorsqu’on aime son frère et qu’on ainsi que les temps d’arrêt le respecte, ce n’est pas correct de faire ça. » sont des formes appropriées Sachant que la discipline est importante pour de contrôle comportementous, comment cette mère aurait-elle dû intervenir tal (Ageranioti-Bélanger, auprès de son garçon atteint d’une décience intellectuelle ? Justiez votre réponse. Brunet, D’Anjou et al., 2012).

Jugement

clinique

Encourager la socialisation CE QU’IL FAUT RETENIR

Les adolescents atteints de DI ont aussi besoin de renseignements pratiques sur la sexualité, l’anatomie, le développement physique et la reproduction. Étant donné qu’ils sont inuençables et que leur jugement peut être altéré, il faut leur inculquer un code de conduite bien précis et concret.

442

Partie 4

Acquérir des habiletés sociales est une tâche complexe, tout comme apprendre les gestes nécessaires à l’autonomie (Leclair Arvisais, 2011). Les répétitions actives avec jeux de rôles et séances pratiques ainsi que le renforcement positif du comportement souhaité sont les approches les plus efcaces. Il faut encourager les parents à enseigner le plus tôt possible à leur enfant un comportement socialement acceptable : saluer de la main, dire bonjour et merci, répondre quand il est interpellé, accueillir les visiteurs et s’asseoir correctement. L’évaluation et la description du comportement sexuel revêtent une importance particulière an de réduire les risques d’exploitation sexuelle (Institut universitaire en décience intellectuelle

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

et en trouble du spectre de l’autisme, 2017). Les parents doivent aussi exposer l’enfant aux étrangers pour qu’il puisse ainsi pratiquer ses bonnes manières, puisqu’il n’y a pas chez lui de transfert automatique des apprentissages d’une situation à l’autre. Les vêtements et la propreté sont aussi des aspects importants de la socialisation. L’enfant qui porte des vêtements appropriés pour son âge et qui est propre sera beaucoup plus facilement accepté et acquerra une bonne estime de luimême. Ses vêtements doivent donc être propres, récents et de la bonne taille. De beaux vêtements peuvent être facilement adaptés à l’enfant en les munissant d’attaches VelcroMD ou d’élastiques pour l’aider à s’habiller seul.

Fournir à l’adolescent des renseignements sur la sexualité L’adolescence peut être une période particulièrement difcile pour la famille, surtout en ce qui a trait au comportement sexuel de l’enfant, au risque de grossesse, à d’éventuels projets de mariage et à l’autonomie. Souvent, les parents auront reçu peu de conseils pour préparer leur enfant à l’approche de l’âge de la maturité physique et sexuelle. L’inrmière peut les aider à cet égard en les renseignant à propos d’une éducation sexuelle jugée appropriée en fonction du développement de l’enfant. Par exemple, une adolescente a besoin que lui soient expliquées en termes simples ce que sont les règles et les mesures d’hygiène personnelle qui s’imposent pendant les menstruations. Les adolescents atteints de DI ont aussi besoin de renseignements pratiques sur la sexualité, l’anatomie, le développement physique et la reproduction. Les parents s’inquiètent souvent – et à raison – de la question de la contraception chez leur adolescent. Étant donné qu’ils sont inuençables et que leur jugement peut être altéré, il faut leur inculquer un code de conduite bien précis et concret. Les nuances du comportement sexuel social sont moins utiles que des instructions claires sur la gestion de certaines situations (Institut universitaire de santé mentale de Montréal [IUSMM], 2015). Pour protéger leur enfant contre le risque d’abus sexuels, les parents doivent observer étroitement ses activités et ses fréquentations. Les parents d’adolescents se demandent souvent s’il est à conseiller que deux personnes atteintes d’une DI se fréquentent ou se marient. Il n’y a pas de réponse universelle à cette question. Chaque situation mérite d’être évaluée

Prodiguer des soins à l’enfant au cours d’une hospitalisation Les soins prodigués à l’enfant au cours d’une hospitalisation peuvent présenter un dé particulier. Les inrmières n’ont pas à gérer souvent des cas de déficience intellectuelle, et elles peuvent compenser leur sentiment d’insécurité et leurs craintes en ignorant l’enfant ou en l’isolant. Loin d’être aidante, cette approche peut être nuisible et décourage la collaboration de l’enfant aux soins, ce qui réduit la capacité des parents à faire face au stress de l’expérience. Pour éviter cette situation, il est très important qu’inrmière et parents planient ensemble les soins de l’enfant. Ainsi, les parents sont encouragés à rester avec celui-ci sans éprouver pour autant le sentiment que cette responsabilité leur revient totalement. Au moment de l’admission de l’enfant, un questionnaire détaillé d’anamnèse est rempli, particulièrement en ce qui concerne les activités autonomes 13 . Durant l’entrevue, l’âge développemental de l’enfant est évalué. Il est préférable d’éviter de poser des questions pour recueillir des informations sur les capacités générales de l’enfant. Toutefois, lorsqu’il est possible d’interroger l’enfant, les questions doivent être formulées de façon positive. Par exemple, plutôt que de demander si l’enfant est propre, l’inrmière peut s’informer des progrès de l’enfant sur le plan de la propreté. L’évaluation s’attache aussi à tout dispositif particulier qu’utilise l’enfant, aux mesures efcaces appliquées pour établir les limites, aux routines habituelles ou préférées, et à tout comportement qui nécessite une intervention. Si le parent dit que l’enfant se mutile, par exemple en se frappant la tête ou en se mordant, l’inrmière doit s’informer à propos des types d’événements déclencheurs et des techniques qu’utilisent les parents pour désamorcer la situation (AgeraniotiBélanger et al., 2012 ; Arbuthnott et Lewis, 2015). L’inrmière mesure aussi le fonctionnement de

l’enfant lorsqu’il mange et qu’il joue, sa capacité d’exprimer verbalement ses besoins, ainsi que son lien avec les objets, les jouets et les autres enfants. Elle encourage l’enfant à être aussi autonome que possible à l’hôpital. Consciente que l’enfant peut se sentir seul à l’hôpital, l’inrmière doit s’assurer que des jouets et des jeux lui sont fournis. Elle place l’enfant dans une chambre avec d’autres enfants ayant environ le même stade de développement et, préférablement, dans une chambre à deux lits seulement pour éviter toute surstimulation. En donnant l’exemple ainsi qu’en traitant l’enfant avec dignité et respect, l’inrmière encourage tout le monde à accepter l’enfant et à surmonter la crainte de l’inconnu. Elle explique les interventions à l’enfant en utilisant un mode de communication adapté à son niveau cognitif. En général, les explica tions restent simples, brèves et concrètes, et elles mettent l’accent sur les sensations physiques qu’éprouve l’enfant. Il est toujours préférable de faire une démonstration pratique en ayant recours à des accessoires, au besoin, plutôt que d’expliquer verbalement les interventions. L’inrmière répète les instructions plusieurs fois et elle évalue la compréhension de l’enfant par des questions ou des consignes telles que : Qu’est-ce que tu vas ressentir ? Montre-moi comment tu dois t’étendre. Où sera le pansement ? Les parents doivent participer à l’enseignement préparatoire aux interventions pour leur propre information, mais aussi pour montrer à l’inrmière comment communiquer efcacement avec l’enfant.

Plus d’informations sur la sexualité des personnes avec une décience intellectuelle sont disponibles dans le document intitulé Lignes directrices en matière de sexualité pour les personnes présentant une décience intellectuelle (DI) ou une DI ou un trouble du spectre de l’autisme (TSA) publié par l’Institut universitaire de santé mentale de Montréal (www.iusmm.ca).

11

13 Le questionnaire détaillé d’anamnèse et ses particularités en soins pédiatriques sont abordés dans le chapitre 13, Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation.

Durant l’hospitalisation, l’inrmière doit aussi promouvoir toute expérience favorable à la croissance de l’enfant. Par exemple, l’hospitalisation représente une excellente occasion de rappeler aux parents les habiletés que l’enMalika est une llette de 10 ans atteinte de fant n’a pas encore eu l’occadécience cognitive grave. Elle est hospitalisée en sion de mettre en pratique, pédiatrie pour une crise d’appendicite aiguë nécessicomme s’habiller lui-même. tant une intervention chirurgicale. Comme il est L’hospitalisation peut aussi difcile d’expliquer les soins à la llette, le personnel être une occasion d’interacsoignant a tendance à limiter les contacts avec elle, tions sociales avec ses semsans négliger les soins pour autant. Si vous aviez à blables, de jeux en groupe ou soigner Malika, quelle attitude adopteriez-vous ? de nouvelles activités éducatives et récréatives. Les services sociaux peuvent sensibiliser les parents à l’existence de programmes spécialisés pour l’enfant. L’hospitalisation peut aussi offrir aux parents une pause de leurs responsabilités quotidiennes et une occasion d’exprimer leurs sentiments avec une inrmière ou un autre professionnel compétent.

clinique

Jugement

individuellement. Dans certains cas, l’union est possible, mais la grossesse est à éviter en raison de la complexité excessive des tâches parentales et du risque de transmettre la DI. L’inrmière doit aborder ce sujet avec les parents et avec le jeune couple en insistant sur les conditions de vie et les méthodes contraceptives (IUSMM, 2015). Les nouveaux parents atteints de DI ont besoin d’une aide spécialisée pour apprendre comment répondre aux besoins de leurs enfants (Centre de réadaptation de l’ouest de Montréal, 2014 ; Llewellyn et Hindmarsh, 2015).

Chapitre 11

Déciences intellectuelles et déciences sensorielles

443

TABLEAU 11.1

Manifestations cliniques et comorbidités du syndrome de Down

RÉGION

MANIFESTATIONS CLINIQUES

Tête et cou

• Suture sagittale élargiea • Crâne arrondi et petit • Occiput aplati • Fontanelle antérieure élargie • Fissures palpébrales obliques (vers le haut et vers l’extérieur) a • Excès et laxité de la peau à la nuquea • Cou large et court (avec douleurs) • Troubles visuels oculomoteurs

Nez et oreilles

• Nez petita • Racine du nez aplatie (nez en pied de marmite)a • Oreilles petites et canaux étroits • Troubles auditifs de la conduction

Bouche

• Palais étroit, haut et arquéa • Protrusion de la langue • Fréquentes anomalies de l’alignement des dents • Troubles de la phonation et de la déglutition

Poitrine et cœur

• Cage thoracique plus courte • Fréquence d’anomalies cardiaques congénitales (p. ex., une communication interauriculaire ou interventriculaire)

Abdomen et organes génitaux

• Saillie, relâchement et hypotonie des muscles abdominaux • Diastasis des grands droits • Hernie ombilicale

Mains et pieds

• Mains larges et courtes, doigts boudinés • Petit doigt incurvé (clinodactylie) • Pli palmaire transverse et pli plantaire • Pieds larges et courts, orteils boudinés

Muscles, os et peau

• Courte stature • Hypotonie musculaire • Instabilité atlantoaxiale • Peau sèche • Marbrure de la peau • Troubles de la perception de la douleur

Autres

• Poids moindre à la naissance • Troubles de l’apprentissage (QI moyen de 50) • Hypothyroïdie fréquente • Dysfonction du système immunitaire • Risque de compression de la moelle épinière • Risque accru de leucémie • Démence précoce (chez le tiers des enfants atteints) • Troubles du sommeil

a Signes

les plus fréquents dans le tableau clinique modié. Sources : Adapté de Cuilleret (2017) ; Pueschel (1999).

444

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

11.1.2

Syndrome de Down

Le syndrome de Down est le plus répandu parmi les syndromes généralisés causés par une anomalie chromosomique. Chaque année au Québec, 1 enfant sur 770 naît avec ce syndrome (ministère de la Santé et des Services sociaux [MSSS], 2017b).

Étiologie La cause exacte du syndrome de Down n’est pas connue, mais selon des études cytogénétiques et épidémiologiques, son étiologie serait multiple. Environ 95 % de tous les cas de syndrome de Down sont attribuables à la présence d’un troisième chromosome à la 21e paire, d’où le nom trisomie 21 non familiale. Bien que des parents de tous âges aient conçu des enfants atteints de trisomie 21, il y a un risque d’apparition du syndrome de Down statistiquement plus élevé selon l’âge de la mère. Par exemple, pour les femmes âgées de 30 ans, le risque de concevoir un enfant atteint du syndrome de Down est d’environ 1 par 909 naissances. À 35 ans, les femmes encourent un risque de 1 par 384 naissances vivantes, tandis que chez les femmes de 40 ans, il est environ de 1 par 112 naissances (MSSS, 2017a). Toutefois, la majorité (environ 78 %) des nourrissons atteints d’un syndrome de Down naissent de femmes de moins de 35 ans, car les jeunes femmes ont un taux de fertilité plus élevé (Agence de la santé publique du Canada, 2017). Environ 4 % des cas peuvent être causés par une translocation des chromosomes 15 et 21, ou 22. Ce type d’aberration génétique est généralement héréditaire et il n’est pas associé à l’âge parental avancé. Cinq pour cent des personnes affectées présentent un mosaïcisme cellulaire, soit un mélange de types cellulaires normaux et anormaux (MSSS, 2017a). Le degré d’atteinte cognitive et physique est lié au pourcentage de cellules qui ont une conguration chromosomique anormale.

Diagnostic En général, le diagnostic du syndrome de Down repose uniquement sur les manifestations cliniques, mais une analyse chromosomique doit néanmoins être effectuée pour conrmer l’anomalie génétique (Mundakel, 2017) FIGURE 11.4 et TABLEAU 11.1. Les problèmes physiques associés au syndrome de Down sont nombreux. Plusieurs enfants qui en sont atteints souffrent de malformations cardiaques congénitales, dont les plus fréquentes sont des anomalies du septum . Les infections respiratoires sont courantes et, lorsqu’elles sont combinées à des anomalies cardiaques, elles représentent une importante cause de mortalité, particulièrement au cours de la première année de vie. L’hypotonicité du thorax et des muscles abdominaux ainsi que la dysfonction du système immunitaire prédisposent l’enfant aux infections respiratoires (Glasson, Dye et Bittles, 2014). Les autres problèmes physiques

incluent la dysfonction thyroïdienne, particulièrement l’hypothyroïdie congénitale, et la probabilité accrue de leucémie (King, O’Gorman et Gallagher, 2014).

Approche thérapeutique Bien que le syndrome de Down soit incurable, différents types de traitements sont possibles, notamment la chirurgie pour corriger de graves anomalies congénitales (p. ex., les anomalies cardiaques, le strabisme) (Glasson et al., 2014). Ces enfants ont souvent besoin d’un échocardiogramme peu après la naissance. Il faut examiner leur vue et leur ouïe, et traiter l’otite moyenne pour prévenir la perte auditive, qui peut inuer sur la fonction cognitive. Il est recommandé de procéder périodiquement à des tests de la fonction thyroïdienne, surtout en cas de grave retard de croissance. Les enfants qui participent à des sports pouvant provoquer des coups à la tête et au cou, comme la gymnastique, le plongeon, la nage papillon, les sauts en hauteur et le soccer, doivent subir une évaluation radiologique pour l’instabilité atlantoaxiale.

FIGURE 11.4 Signes physiques du syndrome de Down chez le nourrisson : petite tête de forme carrée, yeux bridés, racine du nez aplatie, protrusion de la langue, peau marbrée et hypotonie

Pronostic L’espérance de vie des enfants atteints du syndrome de Down s’est améliorée depuis quelques années, mais elle reste inférieure à celle de la population générale. La majorité des personnes (80 %) avec le syndrome de Down survit jusqu’à 55 ans et plus

(Association du syndrome de Down, s.d.). À mesure que le pronostic continue de s’améliorer pour ces personnes, il sera important de veiller à combler, à longue échéance, leurs besoins de soins de santé, d’interactions sociales et de loisirs.

11 Tableau 11.1W : Problème cardiaque chez l’enfant atteint du syndrome de Down.

Soins inrmiers SYNDROME DE DOWN

Soutenir la famille au moment du diagnostic Compte tenu de ses caractéristiques physiques particulières, le nouveau-né atteint du syndrome de Down reçoit généralement son diagnostic à la naissance, et les parents doivent en être informés à ce moment. Ceux-ci désirent habituellement être tous deux présents durant l’entrevue d’information pour pouvoir se soutenir mutuellement. Ils souhaitent généralement recevoir de la documentation sur le syndrome et être orientés vers d’autres ressources pour de l’aide ou des conseils, qu’il s’agisse de groupes de parents ou d’experts pouvant les conseiller (Association de parents de l’enfance en difculté, 2012). Lorsque les parents apprennent le diagnostic, c’est un rêve qui se brise : ils espéraient un enfant en parfaite santé et ils doivent en faire le deuil (Inglis, Lohn, Austin et al., 2014). Ils traversent alors une période au cours de laquelle ils doivent accepter l’enfant tel qu’il est. Il n’est pas surprenant que leurs réactions envers l’enfant inuent grandement sur les décisions ayant trait aux soins qui lui seront donnés. Tandis que certaines

familles acceptent volontiers de ramener l’enfant à la maison, d’autres envisagent immédiatement un placement. L’inrmière doit répondre avec beaucoup de tact aux questions portant sur le potentiel de développement de l’enfant et leur indiquer que l’institutionnalisation n’est plus une option. Les familles incapables de ramener le nouveau-né à la maison doivent se tourner vers des foyers spécialisés ou l’adoption.

La Société canadienne de la trisomie 21 (http://cdss.ca) offre de l’information au sujet de cette condition et des ressources disponibles.

Aider la famille à prévenir les problèmes physiques De nombreuses caractéristiques physiques du syndrome de Down posent des problèmes sur le plan des soins inrmiers . L’hypotonie des muscles et l’hyperlaxité articulaire compliquent le positionnement. Les membres asques et mous font penser à la posture d’une poupée de chiffon ; c’est ce qui explique qu’il peut être difcile de tenir correctement le nourrisson. Parfois, les parents perçoivent cette absence de réponse et de cohésion physique comme un signe de leurs piètres habiletés parentales. L’extension du corps augmente la perte de chaleur, car une plus grande surface se trouve exposée à l’environnement. L’inrmière Chapitre 11

ALERTE CLINIQUE

Signaler immédiatement tout enfant présentant les signes suivants de compression de la moelle épinière : douleur persistante au cou ; perte des habiletés motrices établies et du contrôle vésical ou intestinal ; changements affectant la sensibilité.

Déciences intellectuelles et déciences sensorielles

445

encourage donc les parents à emmailloter étroitement le nouveau-né ou le nourrisson dans une couverture avant de le prendre pour plus de sécurité et de chaleur. Elle aborde aussi avec les parents leurs sentiments concernant leur attachement à l’enfant en soulignant que le manque de cohésion physique de l’enfant est une caractéristique physique, et non un signe de détachement ou de rejet. 15 Les mesures pour atténuer les infections aux voies respiratoires supérieures sont abordées dans le chapitre 15, Troubles liés au système respiratoire.

L’hypotonie musculaire compromet l’expansion respiratoire. De plus, le développement imparfait de l’os nasal provoque un problème chronique de drainage inadéquat des sécrétions. La congestion nasale constante force l’enfant à respirer par la bouche, ce qui assèche sa muqueuse oropharyngée et accroît sa sensibilité aux infections des voies respiratoires supérieures 15 . Durant les premiers mois de vie, la peau de l’enfant est souple et douce, mais, graduellement, elle devient rugueuse, sèche et sujette aux crevasses et aux infections. Les soins cutanés reposent sur des traitements appropriés (Janniger, 2017).

éactivation des connaissances Qu’est-ce qui distingue le deuil normal du deuil compliqué ?

Assurer l’alimentation et la nutrition de l’enfant L’accumulation de sécrétions nasales causée par un drainage inadéquat interfère avec l’alimentation. Comme l’enfant respire par la bouche, il a de la difculté à téter, quelle que soit la durée du boire.

11.1.3

Syndrome du X fragile

Le syndrome du X fragile est la cause héréditaire la plus fréquente de DI. Il a été observé dans toutes les ethnies, quelle que soit la couleur de peau. Au Canada, l’incidence de la maladie chez les sujets de sexe masculin est de 1 pour 5 000 et, chez les sujets féminins, de 1 pour 6 000 ou 8 000 (Canadian Paediatric Surveillance Program, 2012) ; 1 femme sur 260 et 1 homme sur 800 sont porteurs du gène (Fragile X Research Foundation of Canada, 2011). Le syndrome est causé par un gène anormal à l’extrémité inférieure du bras long du chromosome X. L’analyse chromosomique peut démontrer un site fragile possiblement causé par une mutation génétique qui entraîne des répétitions excessives de nucléotides dans un segment spécique de l’acide désoxyribonucléique (ADN) du chromosome X. Le nombre de répétitions chez une personne normale varie de 6 à 50. Une personne qui a de 50 à 200 répétitions de paires de bases présente une permutation et est ainsi considérée comme porteuse. Lorsqu’elles sont transmises d’un parent à l’enfant, ces répétitions de paires de bases peuvent passer à 200 ou plus ; il s’agit alors d’une mutation complète (Orphanet, 2012). Le diagnostic prénatal de la mutation du gène du X fragile a été rendu possible grâce aux tests d’ADN directs dans une famille ayant des

446

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

Lorsqu’il prend des aliments solides, il peut avoir des haut-le-cœur en raison de la présence de sécrétions dans l’oropharynx. L’inrmière conseille aux parents de nettoyer le nez de l’enfant avant chaque boire, de lui donner des boires plus petits, mais fréquents, et de prévoir des pauses pendant le repas. La protrusion de la langue interfère aussi avec l’alimentation, surtout dans le cas des aliments solides. Les parents doivent savoir que la protrusion de la langue n’est pas un signe que l’enfant refuse de s’alimenter, mais bien une réponse physiologique. L’inrmière conseille aux parents d’utiliser une petite cuillère munie d’un manche long et droit pour placer les aliments vers le fond et le côté de la bouche, et de redonner les aliments crachés. L’apport alimentaire se fait sous bonne supervision. L’hypotonie musculaire affecte la motilité gastrique et prédispose l’enfant à la constipation. Des mesures diététiques, notamment un accroissement de l’apport en bres et en liquides, favorisent l’élimination. Les habitudes alimentaires de l’enfant pourraient nécessiter une surveillance étroite pour éviter l’obésité. Il faut mesurer régulièrement la taille et le poids, surtout chez le nourrisson. Comme ces enfants grandissent plus lentement que la population pédiatrique générale, des graphiques de croissance spéciaux sont utilisés pour eux (Zemel, Pipan, Stallings et al., 2015).

antécédents conrmés par l’amniocentèse ou un prélèvement de villosités choriales. Une prise de sang peut maintenant conrmer le diagnostic ou le statut de porteur. Les deux sexes affectés sont fertiles et, par conséquent, en mesure de transmettre le syndrome du X fragile.

Manifestations cliniques Chez les hommes adultes atteints du syndrome du X fragile, les signes physiques classiques sont une dysmorphie ou des troubles du comportement (Orphanet, 2012). Chez les femmes porteuses, les manifestations cliniques sont extrêmement variées TABLEAU 11.2.

Approche thérapeutique Le syndrome du X fragile ne se guérit pas. Le traitement médical peut inclure l’utilisation d’agents sérotoninergiques, comme la carbamazépine (TegretolMD) ou le chlorhydrate de uoxétine (Prozac MD ), même si cette dernière molécule ne convient pas à tous les enfants en raison de ses effets indésirables (Wang, Pati, Pozzo-Miller et al., 2015). D’autres médicaments sont administrés pour tenter de réduire certaines manifestations. Ainsi, des psychostimulants peuvent aider les enfants souffrant aussi d’un décit de l’attention/ hyperactivité (Orphanet, 2012). Les suppléments protéiques et les traitements géniques font actuellement l’objet d’études (Wang et al., 2015).

Tous les enfants affectés doivent être orientés vers un programme d’intervention précoce (orthophonie, thérapie du langage, ergothérapie et éducation spécialisée) et une évaluation interdisciplinaire, y compris la cardiologie (p. ex., pour détecter un prolapsus de la valvule mitrale), la neurologie (p. ex., en cas de convulsions) (Fragile X Research Foundation of Canada, 2011).

Pronostic Les personnes atteintes du syndrome du X fragile ont une espérance de vie normale. Elles peuvent bénécier d’interventions comportementales et éducatives pour leur DI.

Soins inrmiers

TABLEAU 11.2

Manifestations cliniques du syndrome du X fragile

CARACTÉRISTIQUES PHYSIQUES

CARACTÉRISTIQUES COMPORTEMENTALES

• Accroissement du tour de tête

• Décience intellectuelle variant de légère à grave

• Oreilles longues, élargies ou décollées • Visage long et étroit, et maxillaire proéminent • Strabisme • Prolapsus de la valvule mitrale et dilatation de l’origine de l’aorte • Hypotonie • Accroissement du volume des testicules (surtout après la puberté) • Pieds plats et macro-orchidie chez les garçons

• Retard du langage ; langage parfois rapide, avec bégaiement et répétition de mots • Brièveté de l’attention, hyperactivité • Hypersensibilité au goût, aux bruits, au toucher • Intolérance aux changements de routine • Comportement de type autistique : battements des mains, évitement du regard, etc.

SYNDROME DU X FRAGILE

Étant donné que la DI accompagne assez souvent le syndrome du X fragile, les soins donnés aux familles sont les mêmes que pour tout enfant atteint de DI. Comme la maladie est héréditaire, l’inrmière doit recommander une consultation génétique pour renseigner les parents et les frères et sœurs au sujet des risques de transmission. De plus, les hommes et les femmes atteints d’un problème mental inexpliqué non spécique doivent subir des tests génétiques et, le cas échéant, être vus en consultation.

11.2

Déciences sensorielles

Les déciences sensorielles incluent la décience auditive et la décience visuelle. Ces troubles entraînent des difcultés à interpréter les stimulus environnementaux (son, lumière, présence d’un danger) et constituent des handicaps chez l’enfant (Institut Nazareth et Louis-Braille [INLB], 2015 ; Guidetti et Tourrette, 2014).

11.2.1

Décience auditive

La décience auditive est l’un des handicaps les plus répandus. Dans le monde, environ 32 millions d’enfants sont atteints d’une décience auditive dite handicapante (Organisation mondiale de la Santé [OMS], 2017a). La Société canadienne de pédiatrie (SCP) (Patel et Feldman, 2016) estime que 3 cas sur 1 000 naissances vivantes subissent une perte auditive à divers degrés. Chez les nouveaunés admis dans les unités de soins intensifs néonataux, l’incidence augmente nettement et passe à environ 2 à 10 pour 100 nouveau-nés prématurés (Almadhoob et Ohlsson, 2015 ; Colella-Santos, Hein, de Souza

et al., 2014). En 2016, Statistique Canada indiquait qu’environ 8 % des enfants âgés de 6 à 19 ans souffraient d’une perte auditive légère ou grave (Statistique Canada, 2016).

Dénitions et classication La décience auditive désigne une incapacité qui peut varier de légère à profonde, et elle inclut différentes sous-catégories de surdité ou de handicap auditif. En cas de surdité, une personne se trouve dans l’incapacité de traiter avec succès l’information sonore perçue par l’ouïe, avec ou sans prothèse auditive. Pour sa part, le handicap auditif affecte une personne atteinte de surdité partielle ou complète et qui, généralement, au moyen d’un appareil auditif, conserve une ouïe sufsante pour traiter avec succès l’information sonore (Gaucher et Duchesne, 2015 ; OMS, 2017b). Des termes tels que sourd-muet, muet ou audimuet ne sont plus utilisés, car ils ne correspondent pas à la réalité. En effet, il est très rare qu’une personne sourde ait aussi une absence de cordes vocales, donc qu’elle soit muette (Association des parents d’enfants décients auditifs francophones, 2012). De plus, les personnes malentendantes ne souffrent pas nécessairement de DI et, si elles sont parfois muettes, elles ne sont atteintes d’aucune autre anomalie physique du langage que leur incapacité à entendre.

La Régie de l’assurance maladie du Québec (www. ramq.gouv.qc.ca) offre un programme d’aides auditives aux enfants atteints de décience auditive.

Les handicaps auditifs se classent selon des critères étiologiques ou anatomo-pathologiques, ou selon la gravité des symptômes. Ces classications sont importantes pour le traitement, les mesures de prévention possibles et la réadaptation.

Étiologie Différents événements prénataux et postnataux peuvent mener à une perte auditive. Cela inclut des antécédents familiaux de décience auditive infantile, des malformations anatomiques de la tête Chapitre 11

Déciences intellectuelles et déciences sensorielles

447

11

Ototoxique : Substance qui provoque une altération de l’oreille interne (p. ex., divers degrés de surdité, des acouphènes, des troubles de l’équilibre, une otospongiose).

15 Les causes, l’évaluation et les interventions inr­ mières en lien avec l’otite moyenne sont abordées dans le chapitre 15, Troubles liés au système respiratoire.

ou du cou, un faible poids à la naissance, une grave asphyxie, des infections prénatales, périnatales ou postnatales (parmi lesquelles le cytomégalovirus, la rubéole, l’herpès, la syphilis, la toxoplasmose et la méningite bactérienne), l’abus de substances toxiques par la mère lors de la période prénatale, l’otite chronique, la paralysie cérébrale, le syndrome de Down, l’administration prolongée d’oxygène en période néonatale ou l’administration de médicaments ototoxiques chez l’enfant (ColellaSantos et al., 2014 ; Grindle, 2014 ; Singh, 2015). De plus, les nouveau-nés à risque élevé qui survivent à des maladies prénatales ou périnatales autrefois fatales seraient sujets à une perte auditive découlant de leur maladie ou de son traitement. Par exemple, une perte auditive neurosensorielle peut résulter des bruits de fond continus ou des bruits élevés associés aux incubateurs, aux cloches d’oxygénothérapie ou aux unités de soins intensifs, particulièrement en association avec l’emploi d’antibiotiques potentiellement ototoxiques (OMS, 2016, 2017b). Le bruit environnemental pose un problème particulier. Les bruits sufsamment élevés pour endommager les cellules ciliées sensibles de l’oreille interne peuvent entraîner une atteinte auditive irréversible. Les bruits brefs et très forts, comme un coup de feu, peuvent entraîner une perte auditive immédiate, grave et permanente. Les expositions plus longues à des bruits moins intenses, mais au demeurant dangereux, comme la musique persistante et puissante entendue au moyen d’écouteurs, d’une chaîne stéréo ou durant un concert, ou les expositions à des bruits industriels peuvent aussi engendrer une perte auditive (Biassoni, Serra, Hinalaf et al., 2014 ; Grindle, 2014). L’exposition simultanée à des bruits élevés et à des substances toxiques (comme la fumée secondaire du tabagisme) engendre un effet synergique sur l’ouïe, ce qui amplie la perte auditive (Talaat, Metwaly, Khafagy, et al., 2014).

Physiopathologie Les troubles de l’ouïe se distinguent par la localisation de l’anomalie. La perte auditive conductive, ou perte auditive de l’oreille externe ou moyenne, résulte d’une interférence dans la transmission du son vers cette région. Il s’agit du type de perte auditive le plus courant, et il résulte le plus souvent d’otites séreuses à répétition. L’atteinte auditive conductive suppose le plus souvent une interférence avec l’intensité sonore (Association du Québec pour enfants avec problèmes auditifs [AQEPA], 2014 ; Naître et grandir, 2015). La perte auditive neurosensorielle, aussi appelée surdité perceptive ou nerveuse, découle d’un endommagement des structures de l’oreille interne ou du nerf auditif. Les causes les plus fréquentes de ce type de perte auditive sont les anomalies

448

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

congénitales des structures de l’oreille interne ou les conséquences de maladies acquises, comme le kernictère, l’infection, l’administration de médicaments ototoxiques ou l’exposition à des niveaux de bruits excessifs (AQEPA, 2014 ; Naître et grandir, 2015). La perte auditive neurosensorielle entraîne une distorsion des sons et des problèmes de discrimination des sons. Bien que l’enfant entende une partie des bruits environnants, ceuxci sont décalés, ce qui affecte grandement la discrimination et la compréhension des sons (Fitzpatrick et Doucet, 2013). Combinant ces aspects, la perte auditive mixte (conductive et neurosensorielle) résulte d’une interférence de la transmission du son dans l’oreille moyenne et le long des voies neurales. Elle découle souvent des otites moyennes à répétition et de leurs complications 15 . Les défauts de la perception auditive centrale incluent toutes les pertes auditives qui ne sont pas liées à des anomalies des structures conductives ou neurosensorielles. Ces pertes auditives se subdivisent en pertes organiques ou fonctionnelles. Le type organique de défaut de la perception auditive centrale a trait à la réception des stimulus positifs le long des voies centrales et à l’expression du message en une communication signicative. La personne entend les sons, mais ne peut pas traiter l’information. Entre autres exemples, il convient de mentionner l’aphasie, qui est un trouble acquis limitant la capacité d’expression ou de compréhension du langage parlé ou écrit, l’agnosie, qui est l’incapacité d’interpréter les sons correctement, et la dysacousie, qui est la difculté de traiter les détails ou de discriminer les différents sons (Kirshner, 2016 ; Slevc et Shell, 2015). En présence du type fonctionnel, la perte auditive ne s’accompagne d’aucune lésion organique permettant d’expliquer la décience auditive centrale. Parmi les exemples de perte auditive fonctionnelle gurent l’autisme, la schizophrénie infantile et l’hystérie de conversion, laquelle consiste en un blocage inconscient de l’ouïe pour éviter le rappel d’un événement traumatisant.

Gravité des symptômes La décience auditive est évaluée en décibels (dB), l’unité de mesure du son ; l’ouïe se mesure en fréquences, telles que 500, 1 000 et 2 000 cycles/sec. ; l’éventail crucial pour l’écoute du langage se situe entre 60 et 70 dB. La décience auditive peut se classer selon les seuils de l’ouïe, c’est-à-dire les mesures de la capacité d’entendre d’une personne au moyen d’un audiomètre, et selon la gravité des symptômes affectant le langage TABLEAU 11.3. Ces classications ne représentent que les grandes lignes de l’effet de la décience auditive sur les enfants, puisque la capacité de chacun d’utiliser son ouïe résiduelle varie grandement (OMS, 2016).

TABLEAU 11.3

Degrés de décience auditive

DEGRÉ DE DÉFICIENCE

VALEUR AUDIOMÉTRIQUE ISO CORRESPONDANTE (dB)

PERFORMANCE

RECOMMANDATIONS

1. Léger/moyen

26­40 (meilleure oreille)

Est capable d’entendre et de répéter des mots prononcés à voix normale à un mètre.

Des prothèses auditives peuvent être nécessaires. Il est recommandé de consulter un audiologiste.

2. Modéré

41­60 (meilleure oreille)

Est capable d’entendre et de répéter des mots prononcés à voix forte à un mètre.

Des prothèses auditives sont généralement recommandées.

3. Grave

61­80 (meilleure oreille)

Est capable d’entendre certains mots criés dans la meilleure oreille.

Des prothèses auditives sont nécessaires. En plus, dans certains cas, il faut enseigner la lecture sur les lèvres et l’interprétation gestuelle.

4. Profond (y compris une surdité)

> 81 (meilleure oreille)

Est incapable d’entendre et de com­ prendre les sons, même une voix criée.

Des prothèses auditives peuvent aider à comprendre des mots. Une réadaptation additionnelle est nécessaire. La lecture sur les lèvres et l’interprétation gestuelle sont essentielles.

Source : Adapté de OMS (2016).

Perte auditive conductive Le traitement de la perte auditive dépend de sa cause et de son type. De nombreuses pertes auditives conductives répondent à un traitement médical ou chirurgical, comme l’antibiothérapie dans les cas d’otite moyenne aiguë ou la pose de tubes de tympanostomie dans les cas d’otite moyenne chronique. Lorsque la perte conductive est permanente, il est possible d’améliorer l’ouïe au moyen d’appareils auditifs. L’inrmière doit se familiariser avec les types, l’entretien de base et la manipulation des prothèses auditives, particulièrement lorsque l’enfant hospitalisé en porte un. Il existe différents types d’appareils, mais chez les enfants, on recommande principalement celui qui se place derrière l’oreille, plus solide et plus polyvalent FIGURE 11.5. L’un des problèmes les plus fréquents associés à

FIGURE 11.5 Un enfant d’âge préscolaire porte une prothèse auditive externe.

l’utilisation des prothèses auditives est le sifement (rétroaction acoustique), un bruit habituellement causé lorsque l’appareil n’est pas encore mis dans l’oreille ou s’il est mal placé. Dans ce cas, on peut soit le placer correctement, soit vérier que rien n’obstrue l’embout ou la coquille. Si l’enfant est assez âgé, il est possible de lui demander d’ajuster lui-même son appareil.

Perte auditive neurosensorielle

CONSEIL CLINIQUE

Pour réduire ou éliminer les sifements produits par la prothèse auditive, il faut essayer de réinsérer l’appa­ reil en s’assurant que des cheveux ne sont pas coincés entre l’embout auriculaire et le canal, en nettoyant l’em­ bout auriculaire ou l’oreille, ou en réduisant le volume de l’appareil.

Le traitement de la perte auditive neurosensorielle est beaucoup moins satisfaisant. Étant donné que cette perte n’a pas de lien avec l’intensité du bruit, les prothèses auditives sont moins efcaces. Les enfants souffrant d’une perte auditive neurosensorielle ont perdu une partie ou la totalité des cellules ciliées ou des bres nerveuses audiHadjia est âgée de 4 ans. Elle est atteinte d’une tives. Souvent, ces enfants ne décience auditive à la suite d’otites à répétition. pourront pas tirer prot des Sa perte auditive correspond à un niveau de 80 dB. prothèses auditives clasElle est admise en chirurgie d’un jour pour une siques, puisqu’elles ne font amygdalectomie. Pourquoi faudra­t­il parler fort à qu’amplifier le son que Hadjia pour qu’elle comprenne ce qu’on lui dit ? l’oreille interne endommagée a) Elle peut entendre des sons normaux si on lui est incapable de traiter. parle tout près de sa bonne oreille. L’utilisation d’implants b) Elle entend les sons forts si on lui parle à une cochléaires, c’est-à-dire des distance de un à deux mètres. prothèses implantées par voie chirurgicale, fournit une c) Elle n’entend que les sons forts à condition sensation auditive aux perqu’elle porte son appareil auditif. sonnes qui souffrent d’une d) Elle peut entendre une voix forte si la personne perte auditive grave ou prose trouve près d’elle. fonde (White et Copper, MAIS SI... 2017). L’implant cochléaire contourne les cellules ciliées Si la perte auditive de Hadjia était à 35 dB pour pour stimuler directement sa meilleure oreille, devriez­vous lui parler fort les fibres nerveuses audi également ? Justiez votre réponse. tives restantes an qu’elles

clinique

Jugement

Approche thérapeutique

Chapitre 11

Déciences intellectuelles et déciences sensorielles

449

11

acheminent les signaux vers le cerveau. Ce dernier interprète alors les signaux pour produire des sons et des sensations (Grindle, 2014). Il existe maintenant des implants multicanaux. Il s’agit d’appareils plus sophistiqués qui stimulent le nerf auditif en certains points au moyen de signaux traités différemment. Ce type de stimulation permet à la personne d’utiliser l’information sur la hauteur tonale des signaux de la parole pour mieux comprendre ce qui se dit. La

tendance est à une utilisation précoce des implants cochléaires, habituellement quand l’enfant est âgé entre 12 et 18 mois, pour lui donner le plus de chances de parfaire ses habiletés d’écoute, de langage et de parole (Hanrahan, 2011). Une récente étude américaine démontre que la chirurgie cochléaire pratiquée avant l’âge de 12 mois apporterait des avantages considérables pour le langage parlé observé à l’âge de 4 ans et demi (Nicholas et Geers, 2013).

Soins inrmiers DÉFICIENCE AUDITIVE

Dépister la décience auditive

4 Les tests de l’ouïe sont présentés dans le chapitre 4, Examen clinique : anamnèse et examen physique.

Le dépistage de la décience auditive chez les enfants fait partie des responsabilités en soins inrmiers. Le dépistage précoce, préférablement au cours des trois à six premiers mois de vie, est indispensable pour améliorer l’acquisition du langage et, éventuellement, le cheminement scolaire des enfants qui en sont atteints (OMS, 2016). Pour atteindre cet objectif, il est actuellement recommandé de procéder à un dépistage universel des troubles de l’ouïe chez le nouveau-né avant qu’il ne reçoive son congé de l’hôpital 4 . Depuis 2015, trois projets pilotes de dépistage

TABLEAU 11.4

systématique de la surdité sont en cours au Québec, soit à Montréal, en Montérégie et dans Lanaudière (Centre hospitalier universitaire mère-enfant Sainte-Justine, 2014 ; MSSS, 2015).

Nourrisson À la naissance, l’inrmière peut observer la réaction du nouveau-né aux stimulus auditifs ; par exemple, le nourrisson peut sursauter, se tourner la tête, cligner des yeux ou cesser de bouger. La réponse du nourrisson variera en intensité selon le degré de vigilance de ce dernier. Toutefois, l’absence constante de réaction doit éveiller les soupçons. Certains signes présentés dans le TABLEAU 11.4 peuvent suggérer qu’un nourrisson ou un enfant entend peut-être mal.

Manifestations cliniques faisant soupçonner une décience auditive

NOURRISSON

ENFANT

• Ne cligne pas des yeux ou ne sursaute pas quand il entend un bruit sec.

• Utilise des gestes plutôt que la verbalisation pour exprimer ses souhaits.

• Ne s’éveille pas lorsque les bruits dans son environnement sont forts.

• Est incapable d’utiliser un langage intelligible à l’âge de 24 mois (s’exprime avec une voix étrange). • Produit des paroles monotones et inintelligibles ; fait entendre un rire discret.

• Ne tourne pas la tête en direction d’une voix ou d’un bruit.

• Fait des vocalises, se frappe la tête ou tape du pied pour produire une sensation vibratoire.

• Ne babille pas ou n’a pas d’inexions vocales entre 4 et 6 mois.

• Produit des cris parfois stridents pour exprimer son plaisir, ses besoins ou sa frustration (crise).

• Ne répond pas aux mots prononcés ; est incapable de suivre des directives verbales.

• Parle très fort ou hausse le volume de la télévision.

• Réagit aux bruits forts plutôt qu’à la voix.

• Fait répéter ou répond incorrectement. • Réagit davantage aux expressions du visage et aux gestes qu’aux explications verbales. • Évite les interactions sociales ; préfère jouer seul. • A des expressions du visage interrogatives, parfois confuses. • Afche une attitude méante alternant avec la coopération. • A des entêtements fréquents en raison d’une mauvaise compréhension. • Est irritable lorsqu’il a du mal à se faire comprendre. • Adopte un comportement réservé, timide et replié sur soi. • Semble souvent dans son monde ou inattentif.

Sources : Adapté de Naître et grandir (2015) ; SCP (2014).

450

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

L’enfant atteint de surdité profonde est beaucoup plus susceptible de recevoir ce diagnostic durant les premiers mois de vie que l’enfant moins gravement atteint (Patel et Feldman, 2016). Si la décience n’est pas dépistée au début de l’enfance, elle sera probablement détectée lorsque l’enfant entrera à l’école et qu’il aura de la difculté à entendre en classe, ce qui pourrait l’amener à être hyperactif ou à s’isoler (Naître et grandir, 2015). Malheureusement, certains de ces enfants sont placés à tort dans des classes spéciales pour élèves souffrant de difcultés d’apprentissage ou de DI. Une décience auditive a un effet important sur le développement du langage (SCP, 2014). Un enfant atteint d’une légère perte auditive conductive peut parler de façon relativement claire, mais d’une voix forte et monotone. Un enfant atteint d’une anomalie neurosensorielle aura habituellement de la difculté à articuler. Par exemple, l’incapacité d’entendre les hautes fréquences peut faire en sorte que le mot sport soit prononcé port. Il faut faire vérier l’ouïe des enfants qui éprouvent des problèmes d’articulation .

Soutenir l’enfant et sa famille Une fois établi le diagnostic de décience auditive, les parents ont besoin d’un soutien élargi pour s’adapter au choc que peut leur causer le handicap de leur enfant, et il faut leur donner le temps de prendre conscience de l’ampleur de ce handicap. Si la perte auditive survient durant l’enfance, l’enfant a aussi besoin de soins adaptés et de soutien durant la période d’adaptation à cette perte sensorielle, qui est souvent longue et difcile. L’une des meilleures stratégies pour favoriser l’adaptation consiste à instaurer sans délai des mesures de réadaptation. Toutefois, les progrès accomplis en matière de communication ne vont pas toujours de pair avec la maturité affective. La dépression ou la colère sont fréquentes, et ces sentiments font partie du processus normal de deuil.

comprendre que 30 % de ce qui est dit (Dupont, 2013). Les parents peuvent aider l’enfant à comprendre les mots énoncés en appliquant les suggestions contenues dans l’ENCADRÉ 11.3. L’enfant apprend à compléter les mots énoncés en étant notamment plus attentif aux indices visuels, au langage corporel et à l’expression du visage (p. ex., les lèvres pincées, la tension musculaire, le contact oculaire).

Langage parlé complété

clinique

Orthophonie

Lecture labiale Même si certains enfants peuvent devenir experts à lire sur les lèvres, les habiletés varient d’un individu à un autre (Cadieux-Laurin, 2015). L’utilisation unique de la lecture labiale ne permet de

Les activités quotidiennes posent des problèmes pour les enfants plus âgés atteints de déficience auditive. Des systèmes de contrôle de

En raison de son handicap auditif, il est crucial que l’enfant développe des moyens de communication adaptés. Ainsi, la lecture labiale, le langage parlé complété et la langue par signes font partie des apprentissages de l’enfant atteint d’un décit auditif.

Si les parents se disent inquiets du développement de l’ouïe et du langage de leur enfant, il faut demander une évaluation auditive. L’absence de syllabes bien formées (da, na, yaya) à l’âge de 11 mois devrait être un signal qu’une demande de consultation immédiate s’impose.

Le langage parlé complété est une méthode de communication qui complète la lecture sur les lèvres. Il s’agit de signaux des mains pour aider l’enfant ayant une décience auditive à faire une distinction entre les mots qui se forment de la même façon avec les lèvres (p. ex., mat et bat). Il est utilisé le Ali est âgé de 18 mois. Il est hospitalisé pour une plus souvent par les enfants bronchiolite. Il parle peu, mais il sourit lorsque son père atteints de décience auditive lui chante une chanson ou lui raconte une histoire. qui utilisent le langage, plutôt L’enfant est plutôt timide. Devriez-vous suspecter une qu’avec ceux qui ne commudécience auditive chez lui ? Justiez votre réponse. niquent pas verbalement MAIS SI... (Dupont, 2013). Si Ali devenait irritable lorsqu’il a du mal à se faire comLangue des signes prendre et qu’il semblait distrait lorsqu’on lui parle, votre Il n’existe pas de langue des réponse serait-elle la même ? Expliquez votre réponse. signes universelle. Le langage gestuel, aussi appelé dactylologie, qui comprend la langue des signes québéDactylologie : Langue des coise (LSQ), le français signé en français et signes permettant de représenl’American Sign Language (ASL) en anglais, est ter les lettres de l’alphabet selon certaines positions de la main. un langage visuel au moyen de signes de la main qui correspondent en gros à des mots et à des concepts précis (Gagnon, 2013). Les proches sont encouragés à apprendre le langage gestuel, car l’utilisation ou l’observation des mains requiert beaucoup moins de concentration que lire sur les lèvres ou parler. En outre, une méthode par symboles permet à certains enfants d’apprendre davantage et plus rapidement (Gaucher et Duchesne, 2015). Sur le plan de l’apprentissage, la tâche la plus considérable d’un enfant qui souffre d’une décience auditive profonde est d’apprendre à parler, car ce type de surdité peut avoir des conséquences irréversibles sur le développement (Naître et grandir, 2015). Le langage s’apprend au moyen d’une approche multisensorielle qui repose sur une stimulation visuelle, tactile, kinesthésique et auditive. Il faut encourager les parents à participer pleinement au processus d’apprentissage.

Faciliter la communication

ALERTE CLINIQUE

Jugement

Enfant

Aide additionnelle

Chapitre 11

éactivation des connaissances À l’âge de un an, les enfants font plus que reconnaître leur propre nom : ils possèdent également un vocabulaire de deux ou trois mots qui comprend pa-pa, ma-man et non. Comment peut-on faciliter l’acquisition du langage chez l’enfant de un an ?

Déciences intellectuelles et déciences sensorielles

451

11

L’Association du Québec pour enfants avec problèmes audi­ tifs (www.aqepa.ca) et la Fon­ dation des sourds du Québec (www.fondationdessourds. net) ont produit un guide à l’intention des parents intitulé Votre enfant a une surdité ? Vous n’êtes pas seuls ! Ce guide peut être consulté sur les sites Web respectifs de ces organismes. CE QU’IL FAUT RETENIR

Il faut donner aux enfants la responsabilité de prendre soin de leur appareil aussitôt qu’ils le peuvent, puisque la promotion de l’autonomie est l’un des objectifs principaux de la réadaptation.

l’environnement permettent d’acquérir de l’autonomie, par exemple avec des appareils détectant quand sonne le téléphone, la sonnette de porte ou le réveille-matin (Ofce des personnes handicapées du Québec, 2011). Les chiens-guides d’assistance à l’audition peuvent procurer une aide considérable, puisqu’ils alerteront la personne en attirant son attention, par exemple lorsque quelqu’un s’approche ou qu’une voiture est en mouvement, ou en lui signalant l’heure du réveil ou les pleurs d’un enfant (Fondation des Lions du Canada, 2011).

Favoriser le port de l’appareil auditif Lorsqu’ils grandissent, les enfants peuvent être mal à l’aise de porter un appareil. Il faut tout faire pour le rendre le plus invisible possible, par exemple au moyen d’une coiffure qui masquera les modèles placés derrière ou dans l’oreille, d’une monture de lunettes attrayante, ou en cachant l’appareil placé sur le corps sous une chemise ou un chandail. Il faut donner aux enfants la responsabilité de prendre soin de leur appareil aussitôt qu’ils le peuvent, puisque la promotion de l’autonomie est l’un des objectifs principaux de la réadaptation .

Encourager la socialisation ALERTE CLINIQUE

Il est nécessaire de rappeler aux parents l’importance de placer les piles des prothèses auditives dans un endroit sûr et d’enseigner aux enfants à ne pas retirer les piles de leur prothèse auditive, ou de surveiller les jeunes enfants à ce propos. Les cas d’ingestion de piles sont très souvent associés aux piles des prothèses auditives.

À mesure que les enfants apprennent à compenser leur problème d’ouïe, ils deviennent extrêmement sensibles aux changements visuels et vibratoires. Souvent, ils sont en mesure de constater qu’une personne souhaite leur adresser la parole, car celle-ci se rapproche et s’arrête près d’eux. Ils sont très sensibles aux expressions faciales et peuvent comprendre les messages non verbaux plus rapidement que les mots exprimés. Étant donné l’importance extrême de la socialisation pour le développement de l’enfant, l’inrmière abordera avec la famille les façons de stimuler les contacts sociaux. Si les enfants fréquentent une école spécialisée pour malentendants, ils peuvent socialiser avec leurs pairs dans ce contexte. Les compagnons de classe ont un bon potentiel de devenir des amis proches parce qu’ils communiquent entre eux plus facilement. Les parents sont encouragés à promouvoir ce type de relations, dans la mesure du possible. Dans un groupe, il est utile de faire asseoir les autres en demi-cercle face à l’enfant. Étant donné que l’une des difcultés associées aux discussions de groupe est que l’enfant ne saura pas qui est sur le point de parler, quelqu’un devrait lui indiquer chaque locuteur. Il est également possible d’attribuer un chiffre à chaque locuteur ou d’inscrire le nom de chaque intervenant sur une étiquette collée aux vêtements lorsqu’il s’apprête à parler. Si une personne annonce le thème principal de la discussion, l’enfant

452

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

peut suivre plus facilement en lisant sur les lèvres. Ces suggestions peuvent accroître la capacité de l’enfant à participer aux sports ou à des activités de groupe, par exemple les scouts ou les jeannettes.

Favoriser l’apprentissage scolaire Les enfants ayant une décience auditive ont parfois besoin d’une aide particulière à l’école ou au cours d’activités sociales. Pour les enfants qui portent des appareils auditifs, il est préférable de réduire au minimum les bruits de fond. Étant donné que nombre de ces enfants peuvent fréquenter des classes ordinaires, le professeur aura besoin d’aide pour adapter ses méthodes d’enseignement à l’enfant. L’inrmière en milieu scolaire occupe, dans bien des cas, une position idéale pour rappeler les techniques qui facilitent la communication, comme lire sur les lèvres ENCADRÉ 11.3. Étant donné que les projets de groupe et les technologies didactiques audiovisuelles peuvent retarder l’apprentissage de l’enfant, ces méthodes doivent être analysées avec soin.

Promouvoir des mesures de prévention de la décience auditive L’un des principaux rôles inrmiers est la prévention de la perte auditive. Étant donné que la cause la plus fréquente des troubles de l’ouïe est l’otite moyenne chronique, il faut instaurer des mesures appropriées pour traiter les infections courantes et prévenir les récurrences. Les enfants qui ont des antécédents d’infection de l’oreille ou des voies respiratoires, ou ceux qui sont atteints de toute autre maladie susceptible d’accroître le risque de décience auditive, doivent subir périodiquement des tests de l’ouïe. Pour prévenir les causes de perte auditive qui commencent durant la période prénatale et périnatale, les femmes enceintes doivent recevoir un counseling sur la nécessité des soins prénataux précoces, y compris une consultation en génétique pour le dépistage des maladies familiales connues ; l’évitement de tout médicament ototoxique, surtout au cours du premier trimestre de grossesse ; les tests pour écarter les diagnostics de syphilis, de rubéole ou d’incompatibilité sanguine ; la prise en charge médicale du diabète de grossesse ; le strict contrôle de la consommation d’alcool ; l’apport alimentaire adéquat ; et l’évitement de l’exposition à la fumée du tabac. Il faut souligner l’importance des vaccinations infantiles de routine pour éliminer le risque de perte auditive neurosensorielle acquise associée à la rubéole, aux oreillons et à la rougeole (encéphalite) (OMS, 2016). La pollution sonore excessive peut entraîner une perte auditive neurosensorielle (OMS, 2017b).

L’inrmière doit évaluer périodiquement le risque associé à la pollution environnementale et informer les enfants ainsi que les parents des dangers potentiels de perte auditive . Lorsque des personnes participent à des activités qui génèrent des niveaux sonores élevés, par exemple faire voler des avions miniatures, tirer à la carabine ou faire de la motoneige, elles doivent protéger leurs oreilles contre le bruit avec des casques ou des bouchons conçus à cet effet. Même les appareils domestiques d’usage courant, comme les tondeuses à gazon, les aspirateurs ou les téléphones sans l, peuvent provoquer une perte auditive induite par le bruit.

Prodiguer des soins à l’enfant durant une hospitalisation Les besoins de l’enfant hospitalisé qui souffre de décience auditive sont les mêmes que ceux de tout autre enfant, mais le handicap pose des dés particuliers à l’inrmière. Il faut compléter les explications verbales au moyen d’aides tactiles et visuelles, par exemple avec des livres ou une démonstration concrète et pratique. Il est important de vérifier fréquemment si les enfants ont bien compris les explications. Si leurs habiletés verbales sont peu développées, ils peuvent répondre aux questions au moyen d’un dessin, à l’écrit ou par gestes. Par exemple, si l’inrmière tente d’expliquer où s’effectue une ponction lombaire, elle demande à l’enfant d’indiquer sur son corps l’endroit où se fera le prélèvement. Lorsqu’elle communique avec l’enfant lors de l’hospitalisation de ce dernier, l’inrmière doit utiliser les mêmes principes que pour faciliter la lecture sur les lèvres. Elle doit être motivée à l’idée d’établir un bon contact avec l’enfant. Elle vérie le fonctionnement adéquat de l’appareil auditif. Si elle doit réveiller l’enfant la nuit, elle peut le secouer délicatement ou mettre son appareil auditif en fonction avant de s’adresser à lui. Avant toute intervention, l’inrmière doit toujours s’assurer que l’enfant peut la voir, même s’il s’agit d’interventions routinières comme un changement de couche ou l’ajustement d’une perfusion. Il faut se rappeler que l’enfant n’est pas toujours conscient de la présence de l’autre personne tant qu’il n’a pas capté d’indices visuels ou tactiles. Idéalement, les parents sont encouragés à cohabiter avec l’enfant. Bien que la présence des parents aide l’enfant à se familiariser avec l’hôpital et à comprendre les interventions, l’inrmière doit s’adresser directement à lui et l’encourager à exprimer ce qu’il ressent par rapport à l’expérience qu’il vit. Si le langage de l’enfant est difficile à

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 11.3

Lecture labiale

• Attirer l’attention de l’enfant avant de parler ; utiliser un toucher léger pour signaler la présence du locuteur. • Se tenir près de l’enfant. • Faire face à l’enfant ou se tenir à un angle de 45° par rapport à lui. • Se tenir immobile ; ne pas marcher de long en large ou se retourner pour pointer ou regarder ailleurs. • Établir un contact visuel et démontrer de l’intérêt.

• Parler à hauteur des yeux avec un éclairage adéquat sur le visage du locuteur. • S’assurer que rien n’interfère avec l’articulation de la parole, comme des aliments ou de la gomme à mâcher. • Parler clairement, et utiliser un débit lent et régulier. • Utiliser les expressions faciales pour accentuer le message. • Utiliser des phrases courtes. • Reformuler le message si l’enfant ne comprend pas les mots.

comprendre, l’inrmière tente de se familiariser avec sa façon de prononcer les mots. Les parents peuvent souvent aider à clarier le langage habituel de l’enfant. Il existe aussi des outils de communication non verbale qui reposent sur l’emploi d’illustrations ou de mots que l’enfant peut montrer du doigt. Il est possible de fabriquer de tels outils au moyen de cartons sur lesquels sont dessinés ou écrits les mots qui représentent les besoins courants, par exemple papa, maman, manger, boire ou toilette. L’inrmière joue un rôle particulier de défense des intérêts de l’enfant, et elle occupe une position stratégique pour informer les autres membres de l’équipe soignante et les autres clients des besoins particuliers de l’enfant en ce qui a trait à la communication. Ainsi, l’inrmière doit accompagner les autres professionnels de la santé qui viennent voir l’enfant à sa chambre pour s’assurer qu’ils lui parlent et que l’enfant les comprend. Les professionnels de la santé oublient parfois que l’enfant peut percevoir et apprendre, malgré sa décience auditive, et ne s’adressent qu’aux parents. Les besoins et les sentiments de l’enfant passent ainsi inaperçus et ils sont négligés.

ALERTE CLINIQUE

Il faut soupçonner la présence d’un bruit dangereux si la personne qui l’entend éprouve l’un des symptômes suivants : 1) des difcultés à communiquer pendant l’émission du bruit ; 2) des tintements dans l’oreille (acouphènes) après une exposition au bruit ; ou 3) une baisse de son acuité auditive lorsqu’elle n’est plus exposée au bruit.

Parce que l’enfant affecté par une décience auditive a parfois de la difculté à établir des liens avec d’autres enfants, il faut lui présenter ses compagnons de chambre et l’encourager à jouer avec eux. Le milieu hospitalier peut offrir des occasions propices à la création de liens sociaux. Avec l’aide d’un spécialiste de l’enfance, l’enfant peut apprendre de nouvelles activités de loisir et faire l’expérience de jeux de groupe ou de jeux thérapeutiques.

Chapitre 11

Déciences intellectuelles et déciences sensorielles

453

11

11.2.2

Amblyopie : Baisse de l’acuité visuelle qui peut être indépendante d’une lésion organique.

Jugement

clinique Dany est âgé de 20 mois. Il penche la tête de côté lorsqu’il veut saisir un objet et s’y prend à quelques reprises avant de l’attraper. Est-ce que cela peut laisser croire que Dany a un problème visuel ? Justiez votre réponse.

Décience visuelle

La décience visuelle constitue un problème pédiatrique courant. Au Canada, près de 20 000 enfants âgés de moins de 15 ans ont une déficience visuelle, dont 3 800 au Québec (Statistique Canada, 2016). Les erreurs de réfraction, dont la cataracte, le strabisme et l’amblyopie, doivent être détectées par les programmes de dépistage. Sinon, ces troubles visuels affecteront de 5 à 10 % de tous les enfants d’âge préscolaire ; s’ils ne sont pas traités, ils peuvent nuire à l’acuité visuelle (Amit, 2016). Le rôle de l’inrmière porte sur l’évaluation et le dépistage précoces, la prévention, l’aiguillage et, dans certains cas, la réadaptation.

Dénitions et classication Le terme général décience visuelle est utilisé pour désigner une perte visuelle impossible à corriger au moyen de lentilles ordinaires de prescription. La Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) dénit une personne ayant une décience visuelle comme quelqu’un qui, « de façon permanente, [est] incapable de lire, d’écrire, de circuler dans un environnement non familier ou d’effectuer des activités liées à ses habitudes de vie ou à ses rôles sociaux » (RAMQ, 2013). Elle permet l’application de dispositions particulières en ce qui a trait au régime scal, à l’admissibilité à des écoles spéciales et à d’autres formes d’aide ou de privilèges.

Étiologie

9 La conjonctivite et les interventions inrmières qui y sont associées sont décrites dans le chapitre 9, Maladies infectieuses et immunisation.

PHARMACOVIGILANCE

Les corticostéroïdes doivent être utilisés avec prudence, car ils peuvent exacerber les infections virales comme l’herpes simplex, ce qui accroît le risque d’atteinte des structures touchées.

454

Partie 4

La décience visuelle peut être causée par certaines maladies génétiques ainsi que par des problèmes prénataux ou postnataux. Cela inclut les infections périnatales, notamment l’herpès, la chlamydia, la gonorrhée, la rubéole, la syphilis et la toxoplasmose ; les traumatismes ; la rétinopathie de la prématurité ; les infections postnatales, comme la méningite ; et les maladies, notamment l’anémie falciforme, l’arthrite rhumatoïde juvénile, la maladie de Tay-Sachs, l’albinisme et le rétinoblastome. Dans certains cas, par exemple les erreurs de réfraction (amblyopie), la cause de l’anomalie demeure inconnue (Amit, 2016). Les erreurs de réfraction sont les types de troubles visuels les plus courants chez les enfants. Le terme réfraction signie courbure et fait référence au changement de direction des faisceaux lumineux qui traversent le cristallin de l’œil. En temps normal, les faisceaux lumineux pénètrent le cristallin et arrivent directement sur la rétine. Toutefois, dans les erreurs de réfraction, ils terminent leur course devant (myopie) ou derrière (hypermétropie) la rétine (Institut national canadien pour les aveugles [INCA], s.d.-a). Les autres problèmes oculaires, comme le strabisme, comprennent parfois des erreurs de réfraction, mais il est important de les connaître parce que s’ils ne

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

sont pas traités, ils peuvent entraîner la décience visuelle consécutive à l’amblyopie. Ces troubles oculaires ainsi que d’autres troubles visuels plus rares sont résumés dans le TABLEAU 11.5. En plus de ces troubles visuels, d’autres problèmes de la vue peuvent découler d’une infection ou d’un traumatisme.

Trauma Le trauma est une cause fréquente de décience visuelle chez les enfants (Boyette, Pemberton et Bonilla-Velez, 2015). Les blessures du globe oculaire et des annexes de l’œil (structures de soutien ou structures accessoires, telles paupières, conjonctives et glandes lacrymales) peuvent être classées selon qu’elles sont pénétrantes ou non. Les blessures par pénétration sont souvent causées par des instruments tranchants, notamment des couteaux ou des ciseaux, des objets propulsés, comme des feux d’artice, des balles de fusil, des èches ou des pierres, ou une forte contusion produite par un instrument contondant, comme un bâton, durant une bagarre ; elles peuvent aussi survenir dans un grave accident de la route. Les blessures sans pénétration peuvent être causées par la présence d’un corps étranger dans l’œil, par des lacérations, un coup au moyen d’un instrument contondant, d’un objet propulsé (balle de baseball, balle molle, ballon de basketball, sports de raquette) ou un coup de poing, ou encore par des brûlures thermiques ou chimiques (Hôpital pour enfants de Toronto, 2014). Le traitement vise à prévenir l’aggravation de la lésion oculaire et relève principalement de la responsabilité de l’ophtalmologiste. Le traitement repose sur un examen adéquat de l’œil blessé (administrer un sédatif ou un anesthésique à l’enfant en cas de blessure grave), sur une intervention immédiate appropriée, comme le retrait du corps étranger ou la suture de la lacération, sur la prévention des complications par l’administration d’antibiotiques ou de corticostéroïdes, et sur un repos complet au lit pour permettre à l’œil de guérir et au sang de se résorber TABLEAU 11.6.

Infections Des infections affectant les annexes de l’œil et les structures du globe oculaire peuvent survenir chez les enfants. L’infection oculaire la plus fréquente est la conjonctivite 9 . Le traitement habituel repose sur l’administration d’antibiotiques ophtalmiques. Les infections graves peuvent nécessiter une antibiothérapie systémique ou le recours aux corticostéroïdes .

Pronostic Le pronostic varie selon le type de blessure. Il est habituellement réservé dans tous les cas de blessure par pénétration en raison du risque élevé de complications graves.

TABLEAU 11.5

Types de troubles visuels

TROUBLES ET DÉFINITIONS

CARACTÉRISTIQUES

Erreurs de réfraction Myopie ou brachymétropie : capacité de voir les objets clairement de près, mais non de loin

• Physiopathologie : – Découle d’une élongation du globe oculaire faisant en sorte que l’image est projetée devant la rétine. • Manifestations cliniques : – Maux de tête – Étourdissements – Frottement excessif des yeux – Tête penchée d’un côté ou vers l’avant – Difculté à lire ou nécessité de se rapprocher – Maladresse ; risque de collision avec les objets – Clignements oculaires excessifs – Incapacité de voir clairement les objets – Piètre rendement scolaire, surtout dans les matières qui nécessitent des démonstrations comme l’arithmétique • Approche thérapeutique : – Correction au moyen de lentilles biconcaves focalisant les rayons sur la rétine

Hypermétropie : capacité de voir les objets de loin, mais non de près

11

• Physiopathologie : – Résulte d’un globe oculaire trop court qui fait que la focalisation de l’image se fait derrière la rétine. • Manifestations cliniques : – Habituellement, possibilité de voir les objets à toutes les distances en raison des facultés accommodatives – Hypermétropie persistant normalement jusque vers l’âge de sept ans chez la plupart des enfants qui en sont atteints • Approche thérapeutique : – Au besoin, correction au moyen de lentilles convexes concentrant les rayons sur la rétine

Astigmatisme : courbure irrégulière de l’appareil de réfraction

• Physiopathologie : – Résulte de l’irrégularité de la courbure de la cornée ou du cristallin, qui réoriente les rayons lumineux dans différentes directions. • Manifestations cliniques : – Variables selon la gravité de l’erreur de réfraction dans chaque œil – Manifestations cliniques possibles de myopie • Approche thérapeutique : – Correction au moyen de lentilles spéciales compensant les erreurs de réfraction

Anisométropie : différence de force de réfraction dans chaque œil

• Physiopathologie : – Peut conduire à l’amblyopie, puisque l’œil le plus faible est moins utilisé. • Manifestations cliniques : – Variables selon la gravité de l’erreur de réfraction dans chaque œil – Manifestations cliniques possibles de myopie • Approche thérapeutique : – Correction au moyen de lentilles, préférablement des verres de contact, pour améliorer la vision de chaque œil an qu’ils travaillent ensemble.

Chapitre 11

Déciences intellectuelles et déciences sensorielles

455

TABLEAU 11.5

Types de troubles visuels (suite)

TROUBLES ET DÉFINITIONS

CARACTÉRISTIQUES

Amblyopie Œil paresseux : réduction de l’acuité visuelle d’un œil

• Physiopathologie : – Survient lorsqu’un œil ne reçoit pas sufsamment de stimulation. – Chaque rétine reçoit des images différentes, ce qui entraîne une diplopie (vision double). – Le cerveau s’y accommode en supprimant l’image la moins intense. – Le cortex visuel nit par ne plus répondre à la stimulation visuelle, avec une perte de vision qui s’ensuit dans cet œil. • Manifestations cliniques : – Piètre vision du côté de l’œil affecté • Approche thérapeutique : – Prévention possible si le traitement de l’anomalie visuelle primaire comme l’anisométropie ou le strabisme commence avant l’âge de six ans.

Enfant atteint d’amblyopie Strabisme : mauvais alignement des yeux • Ésotropie : déviation oculaire interne • Exotropie : déviation oculaire externe

• Physiopathologie : – Peut résulter d’un déséquilibre ou d’une paralysie musculaire, d’une piètre vision ou d’une anomalie congénitale. – Étant donné que les axes visuels ne sont pas parallèles, le cerveau reçoit deux images, ce qui peut entraîner de l’amblyopie. • Manifestations cliniques : – Yeux qui louchent ou sourcils qui froncent – Difculté à faire le foyer entre deux distances – Jugement inadéquat au moment de saisir des objets – Incapacité à voir clairement les caractères d’imprimerie ou des objets mobiles – Obligation de fermer un œil pour voir – Tête penchée d’un côté – Diplopie – Photophobie – Étourdissements – Maux de tête • Approche thérapeutique : – Selon la cause du strabisme – Traitement occlusif (occlusion de l’œil le plus fort) ou chirurgie possible pour accroître la stimulation visuelle de l’œil le plus faible – Diagnostic précoce essentiel à la prévention de la perte visuelle

456

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

TABLEAU 11.5

Types de troubles visuels(suite)

TROUBLES ET DÉFINITIONS

CARACTÉRISTIQUES

Cataracte : opacité du cristallin • Physiopathologie : – Empêche les faisceaux lumineux d’entrer dans l’œil et leur réfraction sur la rétine. • Manifestations cliniques : – Diminution graduelle de la capacité de voir clairement les objets – Perte possible de vision périphérique – Nystagmus (associé à une décience visuelle complète) – Opacité grise du cristallin – Strabisme – Absence de reet rétinien • Approche thérapeutique : – Chirurgie nécessaire pour retirer le cristallin opacié et le remplacer par un implant intraoculaire, une lentille de contact amovible ou des verres prescrits – Traitement sans délai pour prévenir la cécité par amblyopie

11

Enfant atteint de cataractes congénitales Glaucome : augmentation de la pression oculaire • Physiopathologie : – Le type congénital résulte d’une anomalie de la circulation de l’un des éléments de l’humeur aqueuse. – L’augmentation de la pression exercée sur le nerf optique nit par causer une atrophie et la décience visuelle. • Manifestations cliniques : – Perte de vision périphérique, surtout dans les cas où la maladie est acquise – Risque de collision avec les objets – Perception d’un halo autour des objets – Symptômes possibles de douleur ou d’inconfort (douleur, nausées, vomissements si élévation subite de la pression) – Rougeur oculaire – Larmoiement excessif (épiphora) – Photophobie – Clignements spasmodiques (blépharospasme) – Opacité cornéenne – Hypertrophie du globe oculaire (buphtalmie) • Approche thérapeutique : – Traitement chirurgical (goniotomie) nécessaire pour ouvrir les voies d’évacuation – Plus d’une intervention parfois nécessaire

Chapitre 11

Déciences intellectuelles et déciences sensorielles

457

Techniques de soins TABLEAU 11.6

Traiter les blessures oculaires

BLESSURE

INTERVENTIONS

Corps étranger

• Examiner l’œil pour y déceler la présence d’un corps étranger (renverser la paupière supérieure pour examiner la partie supérieure de l’œil). • Retirer tout corps étranger mobile avec la pointe d’une gaze légèrement humectée avec de l’eau. • Ne pas irriguer l’œil ni tenter de retirer un objet ayant pénétré le globe (voir Blessure par pénétration). • Empêcher l’enfant de se frotter l’œil.

Brûlure chimique

• Irriguer l’œil abondamment avec de l’eau du robinet pendant 15 minutes. • Renverser la paupière supérieure pour bien irriguer l’œil. • Tenir la tête de l’enfant en maintenant l’œil sous le robinet d’eau tiède. • Amener l’enfant au service des urgences. • Demander à l’enfant de se reposer les yeux fermés. • Tamiser la lumière dans la pièce.

Brûlure par ultraviolet

• Si la peau est brûlée, appliquer un pansement sur les deux yeux (en s’assurant que les paupières sont complètement fermées) ; refermer le bandage en entourant la tête avec un bandage stérile non adhérent plutôt qu’avec un bandage adhésif. • Demander à l’enfant de se reposer les yeux fermés. • Faire voir l’enfant en ophtalmologie.

Hématome (œil au beurre noir)

• Utiliser une lampe de poche pour vérier la présence d’un hyphéma (hémorragie dans la chambre antérieure ; niveau de liquide visible à travers l’iris, plus facilement observable dans les yeux pâles que dans les yeux foncés). • Appliquer de la glace pendant les 24 premières heures pour réduire l’enure en l’absence d’hyphéma. • Faire voir l’enfant immédiatement en ophtalmologie en présence d’hyphéma. • Demander à l’enfant de se reposer les yeux fermés.

Blessure par pénétration

• Conduire l’enfant au service des urgences. • Ne jamais retirer un objet qui a pénétré l’œil. • Suivre la technique d’asepsie stricte au moment de l’examen de l’œil. • Vérier : – la présence d’une fuite de l’humeur aqueuse ou vitrée (fuite de liquide à partir de la perforation) ; – la présence d’un hyphéma ; – la forme et la symétrie des pupilles, la réaction à la lumière et la présence d’un prolapsus de l’iris (cercle imparfait). • Appliquer une coquille oculaire, si possible, et non un pansement oculaire standard ; appliquer un pansement oculaire sur l’œil non affecté pour éviter les mouvements bilatéraux. • Mettre l’enfant au repos, au lit, en position semi-Fowler, à un angle de 30°. • Interdire à l’enfant de se frotter l’œil.

Soins inrmiers DÉFICIENCE VISUELLE

Évaluer la décience visuelle L’évaluation de l’enfant souffrant d’une décience visuelle est une responsabilité inrmière de premier ordre. Il est important de dépister le plus

458

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

rapidement possible toute décience visuelle an de prévenir les préjudices sociaux, physiques et psychologiques qu’elle pourrait causer à l’enfant. L’évaluation comprend : 1. le dépistage des enfants exposés à un risque en raison de leurs antécédents ;

2. l’observation des comportements indicateurs d’une perte visuelle ; 3. la vérication de l’acuité visuelle et des signes d’autres troubles oculaires, notamment le strabisme, chez tous les enfants. L’inrmière doit reconnaître les manifestations cliniques de divers types de troubles visuels TABLEAU 11.5.

Nourrisson À la naissance, l’infirmière doit observer la réponse de l’enfant aux signes visuels, par exemple la poursuite oculaire d’une source lumineuse ou d’un objet. Le nouveau-né peut manifester une réponse d’intensité variable selon son état de vigilance. Le dépistage de la décience visuelle durant les premiers mois de vie repose principalement sur l’attention que les parents porteront à la réactivité visuelle de leur enfant. Il faut prendre au sérieux les inquiétudes qu’ils pourraient exprimer, par exemple si le nourrisson n’établit pas de contact visuel avec eux . Durant les premiers mois de vie, il faut vérier la présence de strabisme chez l’enfant. L’absence de vision binoculaire à l’âge de quatre mois est considérée comme anormale et doit faire l’objet d’un traitement pour prévenir l’amblyopie (Rogers et Jordan, 2013).

Enfant Étant donné que l’atteinte visuelle la plus fréquente durant l’enfance concerne les erreurs de réfraction, il est essentiel de procéder à des tests d’acuité visuelle. Généralement, il revient surtout aux inrmières en milieu scolaire de vérier la vision des enfants d’âge scolaire. Outre les erreurs de réfraction, l’inrmière doit connaître les manifestations cliniques indicatrices de problèmes oculaires. Si la famille doit faire voir l’enfant pour des tests plus approfondis, elle sera responsable d’effectuer un suivi des recommandations. La nouvelle que leur enfant est non-voyant ou que sa vision est partielle peut constituer un choc pour les familles. Il faut les encourager à se renseigner sur les programmes appropriés de stimulation précoce et de formation pour leur enfant le plus rapidement possible auprès de leur centre intégré de santé et de services sociaux.

Promouvoir l’attachement parents-enfant Il existe une période cruciale dans la vie des nourrissons non-voyants au cours de laquelle ils font la connaissance de leurs parents. Certaines interactions gratifiantes entre le nourrisson et ses parents peuvent faire défaut s’il n’y a pas sufsamment de réciprocité. Par exemple, si le parent regarde amoureusement le visage du nourrisson et qu’il cherche un contact visuel, mais que le nourrisson n’y répond pas parce qu’il ne voit pas,

il peut s’ensuivre un cycle de réactions mésadaptées. L’inrmière peut enseigner aux parents à reconnaître d’autres signes par lesquels le nourrisson leur répond, par exemple lorsqu’il cligne des paupières, qu’il devient plus ou moins actif, que son rythme respiratoire s’accélère ou ralentit quand ses parents se rapprochent, ou lorsqu’il émet des bruits de gorge en réponse à leurs paroles. Avec le temps, les parents apprennent que le nourrisson a sa façon bien à lui d’entrer en relation avec eux. Il faut les encourager à manifester leur affection au moyen de signes non visuels, notamment par la parole ou la lecture, les étreintes et les promenades avec l’enfant dans leurs bras.

Promouvoir le développement optimal de l’enfant La promotion du développement optimal de l’enfant repose sur la réadaptation dans un certain nombre de domaines importants. Il convient de mentionner, entre autres, l’apprentissage de l’autonomie et les techniques de communication appropriées pour favoriser l’indépendance. Bien que les inrmières ne participent pas directement à ce type de programmes, elles peuvent formuler des conseils et aider les familles à y accéder, et insister sur leur nécessité pour l’enfant.

ALERTE CLINIQUE

Il faut soupçonner la possibilité d’une décience visuelle si le nourrisson ne réagit pas à la lumière ou si les parents d’un enfant, quel que soit son âge, expriment une préoccupation à cet égard.

Encourager le développement et l’autonomie Les parents sont encouragés à exposer le nourrisson le plus rapidement possible au plus grand nombre d’expériences visu-motrices, par exemple en le faisant ramper ou en le plaçant en position assise, dans un siège pour bébé ou dans une balançoire, ce qui lui donne la possibilité de se tenir la tête droite, de s’asseoir sans soutien et de saisir des objets. Malgré sa décience visuelle, l’enfant peut devenir autonome dans tous les domaines qui concernent son indépendance. Les principes utilisés pour promouvoir l’autonomie sont les mêmes que chez les enfants dont la vision est normale, mais l’accent est principalement mis sur les signes non visuels. Par exemple, l’enfant peut avoir besoin d’aide pour s’habiller ; ses vêtements seront alors disposés pour en coordonner les styles, et des étiquettes en braille seront appliquées sur les vêtements pour indiquer les couleurs et les imprimés. L’enfant non-voyant doit aussi apprendre à se déplacer de façon autonome. Les deux principales techniques sont la méthode de percussion, c’està-dire l’utilisation d’une canne pour sonder l’environnement, se diriger et éviter les obstacles, et les guides, qu’il s’agisse de personnes humaines voyantes ou d’un chien-guide, comme ceux de la Fondation MIRA. Les enfants dont la vue est partielle peuvent bénécier de prothèses oculaires, comme le télescope monoculaire.

Chapitre 11

Le site Web de l’Association québécoise des parents d’enfants handicapés visuels répertorie les ressources utiles pour les parents au www.aqpehv.qc.ca.

La Fondation MIRA est la ressource en matière de chien-guide (www.mira.ca).

L’entreprise québécoise HumanWare (www. humanware.com) conçoit et distribue des produits électroniques et des logiciels qui favorisent une participation active et autonome en société pour les personnes ayant une décience visuelle.

Déciences intellectuelles et déciences sensorielles

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11

Choisir les jeux Plusieurs livres audio destinés aux lecteurs numériques de musique sont offerts sur le marché. L’Institut Nazareth et Louis-Braille (www.inlb.qc.ca), Vues et Voix (www.vuesetvoix. com) et le Service québécois du livre adapté de la Bibliothèque et des Archives nationales du Québec (www.banq.qc.ca/sqla) produisent et distribuent de tels documents en français.

Les enfants non-voyants n’apprennent pas automatiquement à jouer. Étant donné qu’ils ne peuvent pas imiter les autres ou explorer activement leur environnement comme le font les enfants voyants, ils dépendent beaucoup plus d’autrui pour une autre forme de stimulation et pour apprendre à jouer. Leurs jeux sont adaptés (gros caractères, fort contraste, etc.) (Fondations des Aveugles du Québec, n.d.). L’inrmière aide les parents à choisir les jeux appropriés, surtout ceux qui encouragent le développement du mouvement et de la motricité ne, et qui stimulent les sens de l’ouïe, du toucher et de l’odorat. Les jouets éducatifs sont particulièrement utiles, par exemple des poupées dont les vêtements sont munis de différents types de fermeture.

Favoriser la socialisation Les enfants non-voyants ont les mêmes besoins de socialisation que les enfants voyants. Étant donné qu’ils ont peu de difcultés à acquérir les habiletés verbales, ils peuvent communiquer avec leurs petits compagnons et participer à des activités appropriées. L’inrmière abordera avec les parents les possibilités de socialisation à l’extérieur de la maison, surtout par la fréquentation d’établissements préscolaires ordinaires. La tendance actuelle est à inclure ces enfants avec les enfants voyants par des mesures d’aide à l’intégration scolaire an de les aider à s’adapter au monde extérieur et d’accroître leur autonomie (ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur [MEES], 2017).

Permettre l’apprentissage scolaire

ALERTE CLINIQUE

Il faut exiger que les enfants qui jouent au football, au hockey ou au baseball portent un masque facial an de prévenir les traumas qui peuvent causer des lésions oculaires affectant la vue.

Ce qui apparaît comme le principal obstacle à l’apprentissage chez l’enfant non-voyant est sa dépendance totale vis-à-vis des signes non visuels. Bien que l’enfant puisse apprendre au moyen de cours magistraux, il est incapable de lire les mots écrits ou d’écrire sans l’aide d’éducateurs spécialisés. L’enfant doit donc avoir recours exclusivement au système braille, lequel fonctionne avec des points en relief symbolisant les chiffres et les lettres. L’enfant peut ensuite lire ces caractères du bout des doigts et écrire un message à l’aide d’un appareil de prise de notes en braille. Les livres audio représentent des sources importantes de matériel de lecture, en plus des livres en braille, qui ont cependant le désavantage d’être volumineux et encombrants. Par contre, il existe des numériseurs portatifs qui permettent aux non-voyants de lire du matériel en toute autonomie, sans devoir le faire transcrire en braille. Les technologies de l’information et de la communication ont également été adaptées aux besoins des non-voyants. Les téléphones intelligents munis de logiciels adaptés facilitent la communication des non-voyants avec les autres.

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Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

L’enfant partiellement voyant peut bénécier de prothèses visuelles spécialisées qui produisent une image rétinienne ampliée. Les principaux appareils reposent sur les principes d’accommodation (p. ex., ils rapprochent l’objet), des lentilles particulièrement puissantes, des loupes munies d’un manche ou sur pied, des télescopes, des systèmes de projection vidéo et l’impression en gros caractères. Il existe des appareils spéciaux pour grossir les caractères. Les enfants dont la vue est faible préfèrent souvent travailler de près sans leurs verres et compenser en rapprochant l’objet de leurs yeux. Cela peut être autorisé. Une exception sera faite pour l’enfant qui ne voit que d’un œil et qui doit toujours porter des verres de protection.

Promouvoir des mesures de prévention de la décience visuelle L’un des objectifs inrmiers essentiels consiste à prévenir la décience visuelle. Cela repose pour une bonne part sur les mêmes interventions que pour les déciences auditives : • Dépistage prénatal chez les femmes enceintes à risque, notamment chez celles ayant souffert de rubéole ou de syphilis, ou qui sont porteuses d’antécédents familiaux de troubles génétiques associés à la décience visuelle ; • Soins prénataux et périnataux adéquats pour prévenir la prématurité ; • Dépistage périodique chez tous les enfants, de la naissance jusqu’à l’âge préscolaire, pour tout signe de décience visuelle complète ou partielle d’ordre congénital ou pathologique causé par des erreurs de réfraction, le strabisme et d’autres maladies ; • Immunisation contre la rubéole chez tous les enfants ; • Conseils de sécurité au sujet des causes fréquentes de traumas oculaires et pratiques sécuritaires lorsque l’on travaille, que l’on manipule ou que l’on transporte des ciseaux, des couteaux ou des balles . Une fois un problème visuel détecté, l’inrmière a la responsabilité d’en prévenir l’aggravation en veillant à ce que le traitement correcteur soit appliqué. Pour l’enfant atteint de strabisme, cela signie souvent l’application d’un pansement occlusif sur l’œil le plus fort. Cette intervention est plus efcace durant les premières années préscolaires. En effet, il est plus difcile d’encourager les enfants d’âge scolaire à porter leur pansement occlusif en raison de la piètre acuité visuelle de l’œil découvert, qui est le plus faible, ce qui interfère avec le travail scolaire, sans compter que cet œil de pirate peut attirer l’attention de leurs compagnons. À l’école, il est préférable de les placer

judicieusement près du tableau ou de tout autre instrument visuel utilisé, et de leur laisser plus de temps pour lire ou terminer un devoir. Si le traitement de la maladie oculaire nécessite l’instillation de médicaments ophtalmiques, il faut en enseigner la technique adéquate à la famille 14 .

Favoriser le port de verres correcteurs L’inrmière doit aider l’enfant atteint d’une erreur de réfraction à s’adapter au port des verres correcteurs. Les jeunes enfants qui retirent souvent leurs lunettes bénécient de dispositifs qui font le tour des oreilles ou d’une bande élastique attachée aux montures pour tenir les verres en place. Lorsque les enfants s’habituent à mieux voir, ce qu’ils apprécient, ils ont tendance à garder leurs lunettes en place. Les verres ne devraient interférer avec aucune activité. Il existe des systèmes de protection spéciale utilisés pour les sports de contact an de prévenir les blessures accidentelles, et tous les verres correcteurs doivent être faits de verre sécuritaire, incassable. Souvent, les verres correcteurs améliorent l’acuité visuelle au point où les enfants peuvent participer encore mieux aux activités sportives. En soi, cela les motive considérablement à continuer de porter leurs verres.

Enseigner le port de lentilles cornéennes Les lentilles cornéennes sont une solution populaire, surtout chez les adolescents. Il en existe plusieurs types, par exemple les lentilles dures, y compris celles qui sont perméables aux gaz, et les lentilles souples pour un port quotidien ou prolongé. Les lentilles cornéennes offrent plusieurs avantages par rapport aux lunettes, par exemple une acuité visuelle plus grande, un champ de vision entièrement corrigé et une plus grande commodité (surtout avec les lentilles à port prolongé), en plus de ne pas être apparentes. Malheureusement, elles sont habituellement plus coûteuses et nécessitent beaucoup plus de soins que les lunettes, y compris l’apprentissage requis pour les mettre et les retirer. Si des lentilles cornéennes sont prescrites, l’inrmière peut enseigner aux parents et aux enfants plus âgés la manière de les entretenir.

Prévenir les traumas oculaires à long terme Étant donné que les traumas constituent la principale cause de décience visuelle, l’inrmière a l’importante responsabilité de prévenir toute autre blessure oculaire jusqu’à l’instauration d’un traitement spécique. Les principes majeurs à suivre lorsque l’inrmière soigne une blessure oculaire sont résumés dans le TABLEAU 11.6. Étant donné qu’il y a lieu de craindre la décience visuelle chez les enfants qui ont une grave blessure oculaire, l’inrmière doit demeurer avec l’enfant et sa famille pour les soutenir et les rassurer.

Prodiguer des soins à l’enfant durant une hospitalisation Étant donné que l’inrmière est plus susceptible de soigner un enfant hospitalisé pour des interventions relatives à une perte de vision temporaire, cette section porte sur l’inrmière plutôt que sur les besoins de l’enfant non-voyant. Les objectifs des soins inrmiers dans une situation comme dans l’autre sont : 1. de rassurer l’enfant et sa famille à chaque phase du traitement ;

14 La technique d’instillation de médicaments ophtalmiques et l’enseignement à l’enfant et aux parents à ce sujet sont abordés dans le chapitre 14, Techniques de soins.

2. d’orienter l’enfant dans son environnement ; 3. de procurer un environnement sécuritaire ; 4. d’encourager l’autonomie. Dans la mesure du possible, la même inrmière doit prendre soin de l’enfant pour assurer une approche cohérente.

Familiariser l’enfant à son environnement Lorsqu’un enfant voyant perd temporairement la vue, chaque aspect de son environnement peut devenir affolant et effrayant. Il doit se er à ses autres sens pour s’adapter à la décience visuelle sans pourtant bénécier d’une formation spéciale. L’inrmière joue un rôle majeur pour minimiser les effets de la perte temporaire de vision. Elle doit communiquer avec l’enfant en lui expliquant ce qui arrive et en soulignant les aspects de l’intervention qu’il peut ressentir ou entendre. Dès qu’elle entre dans la chambre de l’enfant, elle doit signaler sa présence en se nommant. Étant donné que les bruits inconnus peuvent être particulièrement terriants, elle doit les lui expliquer. Les parents sont encouragés à partager la chambre de leur enfant et à participer aux soins. Ils doivent apporter de la maison des objets familiers, comme une peluche ou une poupée, pour le rassurer. Dès que l’enfant peut sortir du lit, il faut l’orienter dans son environnement immédiat. S’il peut voir au moment de l’admission, il faudra proter de l’occasion pour lui présenter les principales caractéristiques de la pièce où il se trouve. Il faut encourager l’enfant à se déplacer les yeux fermés pour s’habituer à l’expérience.

11

La chambre doit être aménagée selon des principes de sécurité. Par exemple, une chaise ou un tabouret est placé à proximité du lit de l’enfant pour l’aider à y grimper et à en sortir. Il faut toujours garder les meubles au même endroit pour éviter les collisions et aviser le personnel de l’entretien ménager de maintenir la chambre en ordre. Si l’enfant a de la difculté à se déplacer en touchant les murs, une corde peut être tendue entre le lit et son point de destination, par exemple la salle de bain. Il faut prêter attention à certains détails, avoir par exemple des pantoues de la bonne taille ou une robe de chambre bien ajustée

Chapitre 11

Déciences intellectuelles et déciences sensorielles

461

qui ne traîne pas par terre, an de prévenir les chutes. Contrairement aux enfants non-voyants, ces enfants n’ont pas l’habitude de se déplacer avec une canne.

les parents qui souhaitent offrir un présent à leur enfant, il faut choisir des objets qui stimulent l’ouïe et le toucher, comme une radio, une boîte à musique ou une peluche.

Encourager l’autonomie de l’enfant

Favoriser l’adaptation à la vision

Il faut encourager l’enfant à acquérir plus d’autonomie, surtout si la perte visuelle risque de se prolonger, voire d’être irréversible. Par exemple, pendant le bain, l’inrmière prépare tout le nécessaire et encourage l’enfant à participer. À l’heure des repas, l’inrmière explique où se trouvent les aliments sur le plateau. Elle ouvre les contenants spéciaux, prépare les céréales ou les tartines, et encourage l’enfant à manger tout seul. Il faut féliciter l’enfant pour ses efforts de coopération et son autonomie, et souligner tous ses progrès, si minimes soient-ils, sur le chemin vers l’indépendance.

Planier des activités L’inrmière doit proposer des activités récréatives appropriées aux enfants. La planication en ce sens se fait, le cas échéant, avec un spécialiste de l’enfance (p. ex., un éducateur ou un orthopédagogue). Par exemple, s’ils aiment lire, ils souhaiteront peut-être qu’une histoire leur soit lue. S’ils préfèrent une activité manuelle, ils pourraient désirer jouer avec de la pâte à modeler ou avec des jeux de construction, ou palper différentes textures pour les identier. Pour ceux qui ont un tropplein d’énergie, des activités comme le tam-tam ou la batterie seraient tout indiquées. Les jeux de société et les jeux de cartes simples sont accessibles si un partenaire ou un adversaire voyant peuvent l’aider. Il faut remettre à ces enfants des jouets apportés de la maison avec lesquels ils peuvent s’amuser, puisque ces articles familiers sont plus faciles à manipuler que les nouveaux objets. Pour

11.2.3

Surdicécité

La surdicécité est une déficience sensorielle consistant en la perte combinée de la vue et de l’ouïe, un handicap qui toucherait 1 enfant canadien sur 10 000 (Association canadienne de la surdicécité, s.d.). Les déciences auditives et visuelles exercent un effet profond sur le développement de l’enfant. Elles interfèrent avec les étapes normales de leur croissance physique, intellectuelle et psychosociale. Bien que les enfants qui en souffrent parviennent souvent à franchir les étapes de leur développement moteur, cela se fait à un rythme plus lent. Ils apprennent à communiquer uniquement avec l’aide de spécialistes en la matière. L’une des méthodes utilisées pour enseigner à ces enfants est la dactylologie. Certains enfants sourds-aveugles qui ont une ouïe ou une vision résiduelles peuvent apprendre à parler. Dans la mesure du possible, le langage sera

462

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

Il arrive que des enfants non-voyants se présentent à l’hôpital pour des traitements visant à leur redonner la vue. Il s’agit bien sûr d’un événement extrêmement heureux qui nécessite néanmoins une intervention pour les aider à s’adapter à la vision. Ils ont besoin d’un moment pour prendre conscience de tout ce qu’ils voient. Il ne faut pas les bombarder de stimulus visuels. Ils peuvent avoir besoin de se concentrer sur le visage des gens qui les entourent ou sur leur propre visage pour s’acclimater. Ils éprouvent souvent l’envie de parler de ce qu’ils voient et de comparer ce qu’ils voient aux images mentales qu’ils s’en faisaient. Les enfants peuvent aussi traverser une période de dépression qu’il faut respecter et dont il faut s’occuper. Les enfants qui recouvrent la vue doivent aussi avoir du temps pour s’ajuster à leur capacité de participer à des activités qui leur étaient autrefois impossibles. Par exemple, ils pourraient préférer utiliser la lecture en braille plutôt que d’apprendre une nouvelle approche visuelle, parce qu’ils connaissent bien le système du toucher. Éventuellement, à mesure qu’ils apprennent à reconnaître les chiffres et les lettres, ils pourront intégrer ces nouvelles habiletés pour lire et écrire. Toutefois, les parents et les enseignants doivent faire attention de ne pas les bousculer tant qu’ils ne se sentent pas prêts. Cela s’applique aux relations interpersonnelles et aux activités physiques aussi bien qu’aux situations d’apprentissage.

encouragé, puisqu’il permet la communication avec autrui (Institut Nazareth et Louis-Braille, 2011). Les perspectives d’avenir des enfants sourdsaveugles sont imprévisibles. Cela dépend de la catégorie de la surdicécité : congénitale ou acquise. La surdicécité congénitale s’accompagne parfois d’autres problèmes physiques ou neurologiques qui diminuent encore le potentiel d’apprentissage de l’enfant. Le handicap peut être plus ou moins prononcé selon la surdicécité de l’enfant et selon l’activité (Association canadienne de la surdicécité, s.d.). Leur capacité d’apprentissage est grandement potentialisée par leurs progrès développementaux avant l’acquisition des déciences sensorielles. Bien que l’autonomie totale, y compris une formation professionnelle utile, soit l’objectif, certains enfants sourds-aveugles n’atteindront jamais ce niveau. Ils peuvent avoir

besoin de soins parentaux ou devoir vivre en résidence toute leur vie. L’inrmière qui travaille auprès de telles familles les aide à s’adapter en fonction des objectifs xés pour l’enfant, y compris des solutions de rechange possibles aux soins à domicile lorsque les parents avancent en âge.

11.3

Trouble du spectre de l’autisme

Le trouble du spectre de l’autisme (TSA) est un trouble neurodéveloppemental dont l’étiologie est inconnue. Le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-5) de l’APA a révisé la dénition du TSA en fonction de deux domaines du comportement, à savoir des décits relatifs à la communication et aux interactions sociales, et des modes restreints ou répétitifs de comportements, d’activités ou d’intérêts (APA, 2015 ; Brentani, de Paula, Bordini, et al., 2013 ; Lai, Lombardo et Baron-Cohen, 2014). De nos jours, le TSA est souvent diagnostiqué chez les trottineurs, car leur développement atypique se perçoit rapidement (Lai et al., 2014). L’estimation de la prévalence au Québec est de 1,4 % de la population ; au Canada, la prévalence serait de 1 personne sur 94, y compris les enfants et les adultes (Fédération québécoise de l’autisme, 2017b).

Étiologie La cause du TSA est inconnue. Les chercheurs examinent plusieurs théories, y compris un lien entre l’hérédité, la génétique, des problèmes médicaux, un dérèglement immunitaire ou un processus neuro-inammatoire, un stress oxydatif (dommage aux tissus cellulaires) et les facteurs environnementaux (Lai et al., 2014 ; Rossignol et Frye, 2014). Les personnes souffrant de TSA ont parfois des électroencéphalogrammes anormaux, des convulsions épileptiques, un retard du développement de la main dominante, une persistance des réflexes primitifs, des anomalies métaboliques (élévation de la sérotonine sanguine), une hypoplasie du vermis cérébelleux (partie du cerveau responsable de la régulation du mouvement et de certains aspects de la mémoire) et une hypertrophie anormale de la tête chez l’enfant (Bitton, Demos, Elkouvy et al., 2015 ; Stoodley, 2016). Les preuves solides du fondement génétique du TSA concordent avec un mode héréditaire récessif autosomique (Siu et Weksberg, 2017). De plus, le syndrome du X fragile est reconnu comme étant une des principales causes de l’autisme (Çaku, Seidah, Lortie et al., 2017). Un risque relativement élevé de récurrence du TSA est constaté dans les familles où un enfant est atteint (Chawarska, Shic, Macari, et al., 2014). Bien que plusieurs gènes

aient été suspectés comme facteurs étiologiques possibles des TSA, aucun n’a pu être spéciquement associé à ce trouble (Talkowski, Minikel et Gusella, 2014 ; Willsey et State, 2015) 9 . Le TSA est associé à un certain nombre de maladies comme les troubles épileptiques, les maladies auto-immunes, l’œsophagite, la gastrite, le reux, l’asthme, l’eczéma, les infections auriculaires et respiratoires, ainsi que les migraines (Autisme Canada, 2014).

9 Le lien infondé entre la vaccination et l’autisme est abordé dans le chapitre 9, Maladies infectieuses et immunisation.

Manifestations cliniques Des décits dans le développement des interactions sociales et de la communication sont des caractéristiques principales du TSA. Les parents de ces enfants ont rapporté que ces derniers démontrent peu d’intérêt à l’égard des interactions sociales (p. ex., un contact visuel anormal, une diminution de la réponse à son nom, une diminution de la capacité d’imitation, un comportement habituel répétitif) et qu’ils manifestent un retard global du développement moteur et verbal (Fédération québécoise de l’autisme, 2017a). Ils ont parfois des symptômes gastro-intestinaux importants : la constipation est fréquente et elle est parfois associée au mégarectum acquis (Peters, William, Gorrindo et al., 2014). Les enfants qui souffrent du TSA ne présentent pas toujours les mêmes manifestations ; celles-ci peuvent être légères, ne nécessitant qu’une supervision minime, mais elles peuvent être plus marquées, allant jusqu’à être accompagnées de comportements autodestructeurs. Malgré un handicap allant de relativement modéré à grave, certains enfants autistes (les autistes dits savants) excellent dans certains domaines particuliers, par exemple les arts, la musique, la mémoire, les mathématiques et les habiletés perceptuelles, comme la réalisation de cassetête (Masataka, 2017 ; Treffert et Rebedew, 2015). Les retards de la parole et du langage sont également fréquents chez les enfants atteints de TSA. Une évaluation immédiate de l’ouïe et du langage est recommandée pour tout enfant qui ne manifeste aucune habileté langagière comme le babillage ou les gestes à l’âge de 12 mois, l’énoncé de quelques mots à l’âge de 16 mois et la formulation de phrases de 2 mots à l’âge de 24 mois. Une détérioration subite du langage expressif existant constitue aussi un signal d’alarme et nécessite une évaluation plus approfondie (Fernell, Eriksson et Gillberg, 2013 ; National Autism Association, 2015).

Diagnostic Malheureusement, le diagnostic n’est souvent établi que de deux à trois ans après que les manifestations cliniques ont été initialement observées. Chapitre 11

Mégarectum acquis : Maladie de la fonction de réservoir du rectum qui peut entraîner son encombrement par un volume excessif de matières.

Le Collège des médecins du Québec (www.cmq.org) et l’Ordre des psychologues du Québec (www.ordrepsy.qc.ca) ont publié le document intitulé Les troubles du spectre de l’autisme, qui présente les lignes directrices pour l’évaluation clinique de ces troubles.

Pour des renseignements additionnels concernant les recherches sur l’autisme, il est possible de consulter le site Web d’Autisme Canada (https://autismcanada.org) ou celui de la Fédération québécoise de l’autisme (www.autisme.qc.ca) ; en outre, celle-ci propose des outils de dépistage.

Déciences intellectuelles et déciences sensorielles

463

11

Cependant, dans une récente étude rétrospective, la majorité des parents observe un développement atypique chez leur enfant avec un TSA avant l’âge de 24 mois (Lemcke, Juul, Parner et al., 2013). L’apparition du trouble du spectre de l’autisme est généralement observée avant l’âge de trois ans ENCADRÉ 11.4. En effet, les parents s’inquiètent parce que leur enfant n’a pas acquis les habiletés langagières et développementales attendues. Cependant, d’autres enfants ne reçoivent un diagnostic que plus tard durant leur parcours scolaire. Des décits peuvent être observés sur le plan de la communication, de la cognition, du comportement et des interactions sociales (APA, 2015).

Pronostic Une détection rapide du problème, une demande de consultation précoce pour un diagnostic et une intervention intensive aident à améliorer le pronostic chez les enfants souffrant de TSA (Sacrey, Bennett et Zwaigenbaum, 2015 ; Thomas, Spragins, Malzoum et al., 2016). Le TSA est généralement une condition gravement invalidante. Grâce à des interventions précoces et intensives, les manifestations cliniques associées à l’autisme peuvent être

grandement améliorées et, dans certains cas rapportés, les symptômes ont complètement été surmontés (Wodka, Mathy, et Kalb, 2013). Certains enfants nissent par atteindre l’autonomie, mais la majorité d’entre eux auront besoin de la supervision d’un adulte leur vie durant. L’aggravation des symptômes psychiatriques est observée chez environ la moitié des enfants au cours de l’adolescence, la détérioration ayant tendance à se poursuivre davantage chez les lles. Il est crucial de reconnaître sans délai les comportements associés à un TSA an d’appliquer les interventions appropriées et de faire participer la famille. Une accumulation croissante de données probantes démontre que les interventions des parents sont associées à une amélioration des résultats, mais d’autres recherches sont nécessaires dans ce domaine pour incorporer des mesures cohérentes, telles que des interventions et des encadrements, à l’approche thérapeutique (Bearss, Burrell, Stewart, et al., 2015 ; Brentani et al., 2013 ; Oono, Honey et McConachie, 2013). Le pronostic est plus favorable chez les enfants avec un niveau d’intelligence supérieur, une communication fonctionnelle et moins de troubles du comportement (Raviola, Trieu, DeMaso et al., 2016).

Critères diagnostics du DSM-5 ENCADRÉ 11.4

Trouble du spectre de l’autisme

A. Décits persistants de la communication et des interactions sociales observés dans des contextes variés. Ceux-ci peuvent se manifester par les éléments suivants, soit au cours de la période actuelle, soit dans les antécédents (les exemples sont illustratifs et non exhaustifs) : 1. Décits de la réciprocité sociale ou émotionnelle allant, par exemple, d’anomalies de l’approche sociale et d’une incapacité à la conversation bidirectionnelle normale, à des difcultés à partager les intérêts, les émotions et les affects, jusqu’à une incapacité d’initier des interactions sociales ou d’y répondre. 2. Décits des comportements de communication non verbaux utilisés au cours des interactions sociales, allant, par exemple, d’une intégration défectueuse entre la communication verbale et non verbale, à des anomalies du contact visuel et du langage du corps, à des décits dans la compréhension et l’utilisation des gestes, jusqu’à une absence totale d’expressions faciales et de communication non verbale. 3. Décits du développement, du maintien et de la compréhension des relations, allant, par exemple, de difcultés à ajuster le comportement à des contextes sociaux variés, à des difcultés à partager des jeux imaginatifs ou à se faire des amis, jusqu’à l’absence d’intérêt pour les pairs. Spécier la sévérité actuelle : La sévérité repose sur l’importance des décits de la communication sociale et des modes comportementaux restreints et répétitifs.

464

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

B. Caractère restreint et répétitif des comportements, des intérêts ou des activités, comme en témoignent au moins deux des éléments suivants soit au cours de la période actuelle soit dans les antécédents (les exemples sont illustratifs et non exhaustifs) : 1. Caractère stéréotypé ou répétitif des mouvements, de l’utilisation des objets ou du langage (p. ex., stéréotypies motrices simples, activités d’alignement des jouets ou de rotation des objets, écholalie, phrases idiosyncrasiques). 2. Intolérance au changement, adhésion inexible à des routines ou à des modes comportementaux verbaux ou non verbaux ritualisés (p. ex., détresse extrême provoquée par des changements mineurs, difculté à gérer les transitions, modes de pensée rigides, ritualisation des formules de salutation, nécessité de prendre le même chemin ou de manger les mêmes aliments tous les jours). 3. Intérêts extrêmement restreints et xes, anormaux soit dans leur intensité, soit dans leur but (p. ex., attachement à des objets insolites ou préoccupations à propos de ce type d’objets, intérêts excessivement circonscrits ou persévérants). 4. Hyper ou hyporéactivité aux stimulations sensorielles ou intérêt inhabituel pour les aspects sensoriels de l’environnement (p. ex., indifférence apparente à la douleur ou à la température, réactions négatives à des sons ou à des textures spéciques, actions de airer ou de toucher excessivement les objets, fascination visuelle pour les lumières ou les mouvements).

ENCADRÉ 11.4

Trouble du spectre de l’autisme(suite)

Spécier la sévérité actuelle : La sévérité repose sur l’importance des décits de la communication sociale et des modes comportementaux restreints et répétitifs. C. Les symptômes doivent être présents dès les étapes précoces du développement (mais ils ne sont pas nécessairement pleinement manifestes avant que les demandes sociales n’excèdent les capacités limitées de la personne, ou ils peuvent être masqués plus tard dans la vie par des stratégies apprises). D. Les symptômes occasionnent un retentissement cliniquement signicatif en termes de fonctionnement actuel social, scolaire/professionnel ou dans d’autres domaines importants. E. Ces troubles ne sont pas mieux expliqués par un handicap intellectuel (trouble du développement intellectuel) ou un retard global du développement. La décience intellectuelle et le trouble du spectre de l’autisme sont fréquemment associés. Pour permettre un diagnostic de comorbidité entre un trouble du spectre de l’autisme et un handicap intellectuel, l’altération

de la communication sociale doit être supérieure à ce qui serait attendu pour le niveau de développement général. N.B. : Les sujets ayant, selon le DSM-IV, un diagnostic bien établi de trouble autistique, de syndrome d’Asperger ou de trouble envahissant du développement non spécié doivent recevoir un diagnostic de trouble du spectre de l’autisme. Chez les sujets ayant des décits marqués de la communication sociale mais qui ne répondent pas aux autres critères du trouble autistique, l’existence d’un trouble de la communication sociale (pragmatique) doit être considérée. Spécier si : Avec ou sans décit intellectuel associé Avec ou sans altération du langage associée Associé à une pathologie médicale ou génétique connue ou à un facteur environnemental Associé à un autre trouble développemental, mental ou comportemental Avec catatonie

Source : Traduction française reproduite avec l’autorisation d’Elsevier Masson SAS. Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, Fifth Edition (Copyright 2013). American Psychiatric Association, DSM-5 – Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux. Traduction française par M.-A. Crocq, J.-D. Guel et al., Elsevier Masson SAS, Paris, 2015. All rights reserved.

11

Soins inrmiers TROUBLE DU SPECTRE DE L’AUTISME

L’intervention thérapeutique pour l’enfant souffrant de TSA relève d’un domaine spécialisé, et les professionnels qui interviennent auprès de cette clientèle possèdent une formation avancée. Même si le TSA est incurable, de nombreuses approches thérapeutiques sont utilisées. Les résultats les plus prometteurs sont ceux obtenus grâce à des programmes de modication du comportement très structurés et intensifs. En général, l’objectif du traitement est de promouvoir un renforcement positif, d’accroître l’éveil social aux autres, d’enseigner les habiletés de communication verbale et de réduire les comportements inacceptables. Fournir une routine structurée que l’enfant doit suivre est la clé de la prise en charge du TSA.

Soutenir la famille Le TSA, comme beaucoup d’autres conditions chroniques, affecte toute la famille et devient ainsi une préoccupation familiale 10 . L’inrmière peut contribuer à soulager la culpabilité et la honte souvent ressentie en soulignant les faits connus d’un point de vue biologique. Elle doit aider les parents à comprendre qu’ils ne sont pas responsables de la condition de l’enfant. Les parents ont besoin de l’aide d’experts tôt et il faut les diriger vers leur centre intégré de

santé et de services sociaux. La Fédération québécoise de l’autisme peut également les aider à trouver des ressources dans leur région, notamment les services de répit disponibles. Dans la mesure du possible, il faut encourager la famille à prendre soin de l’enfant à la maison. Grâce aux programmes de soutien aux familles, celles-ci arrivent souvent à fournir les soins à domicile et participent aux services éducatifs dont l’enfant a besoin. À mesure que l’enfant arrive à l’âge adulte et que les parents vieillissent, la famille peut avoir besoin d’aide, de répit ou d’un placement de l’enfant à long terme.

Prodiguer des soins à l’enfant durant une hospitalisation Lorsqu’un enfant atteint de TSA est hospitalisé, les parents jouent un rôle essentiel dans la planication des soins et, idéalement, ils doivent demeurer le plus possible avec l’enfant. L’infirmière doit reconnaître que les enfants atteints de TSA sont tous différents, et qu’ils auront besoin d’une évaluation et d’un traitement individualisés. Il est possible d’atténuer la perturbation causée par l’hospitalisation en réduisant les stimulus : prévoir une chambre individuelle, éviter les distractions auditives et visuelles externes, et encourager les parents à apporter à l’enfant les objets auxquels il est

Chapitre 11

10 Les soins inrmiers à l’enfant ayant des besoins de santé particuliers et à sa famille sont abordés dans le chapitre 10, Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie.

Déciences intellectuelles et déciences sensorielles

465

attaché. Étant donné que le contact physique dérange l’enfant souffrant de TSA, il pourrait être nécessaire de le prendre dans ses bras le moins possible et de réduire au minimum les contacts visuels pour éviter les crises comportementales. Les habitudes alimentaires des enfants atteints de TSA posent un problème particulier aux familles, car ceux-ci peuvent refuser de s’alimenter, porter des objets à leur bouche, avaler des objets non comestibles, se donner des haut-le-cœur pour ne pas avoir à manger, refuser d’avaler les

Analyse d’une situation de santé Emmanuel est âgé de huit mois et il est atteint du syndrome de Down. Ses parents l’amènent à la clinique sans rendez-vous de leur quartier, car leur ls semble évreux ; il a des sécrétions nasales abondantes et, d’après la mère, il a de

médicaments et renier ou lancer leurs aliments (Kral, Eriksen, Souders et al., 2013). Il faut initier lentement les enfants atteints de TSA à de nouvelles situations. Ainsi, les visites du personnel soignant doivent être de courte durée, dans la mesure du possible. Comme ces enfants ont de la difculté à organiser leur comportement et à réorienter leur énergie, il faut leur dire exactement quoi faire. La communication doit se faire en fonction du niveau de développement de l’enfant, de façon brève et concrète.

Jugement clinique la difculté à respirer et n’arrive pas à dormir. Ce ne serait pas la première fois qu’il présenterait ces symptômes. Vous procédez à l’évaluation initiale et à l’auscultation pulmonaire, car vous soupçonnez une infection des voies respiratoires.

Mise en œuvre de la démarche de soins

Collecte de données – Évaluation initiale – Analyse et interprétation 1. En lien avec le syndrome de Down, quelles caractéristiques du nez et de la cage thoracique d’Emmanuel devriez-vous observer ? 2. Pourquoi serait-il important de vérier la musculature de l’abdomen d’Emmanuel ? 3. Qu’est-ce qui expliquerait qu’Emmanuel contracte des infections respiratoires plus facilement qu’un autre enfant ? 4. Pourquoi Emmanuel est-il plus susceptible de contracter une infection des voies respiratoires supérieures ? SOLUTIONNAIRE

Vous vous informez du poids d’Emmanuel à la naissance.

5. Pourquoi cette question est-elle pertinente ?

466

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

Vous demandez également si l’enfant a déjà été traité pour une otite moyenne depuis sa naissance.

6. Qu’est-ce qui justie une telle question ?

Emmanuel a commencé à manger des aliments solides, mais il mange moins depuis quelques jours. Ses parents disent qu’il a des haut-le-cœur lorsqu’ils essaient de le nourrir.

Planication des interventions – Décisions inrmières 7. Que pouvez-vous suggérer aux parents pour faciliter l’alimentation d’Emmanuel ? 8. Que pouvez-vous également suggérer pour éviter qu’Emmanuel ait des haut-le-cœur ?

Emmanuel devra revenir à la clinique dans une semaine pour un suivi de son état de santé.

À quel problème intestinal Emmanuel est-il exposé en raison du fait qu’il est atteint du syndrome de Down ?

11

MAIS SI...

Évaluation des résultats – Évaluation en cours d’évolution 9. Nommez trois points à évaluer dans l’état de santé d’Emmanuel lors d’une visite ultérieure.

Chapitre 11

VU dans ce chapitre

Si Emmanuel était nourri au sein, pourquoi aurait-il de la difculté à téter ?

Déciences intellectuelles et déciences sensorielles

467

Chapitre

12

Enfant atteint de cancer Écrit par : Cheryl C. Rodgers, PhD, RN, CPNP, CPON Adapté par : Anne Choquette, inf., M. Sc., CPON

MOTS CLÉS

OBJECTIFS

Anémie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 483 Cancer pédiatrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . 470 Chimiothérapie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 474 Effet indésirable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 489 Greffe de cellules souches hématopoïétiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 478 Leucémie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 493 Lymphome . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 497 Modificateurs de la réponse biologique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 478 Radiothérapie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 476 Rétinoblastome . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 520 Rhabdomyosarcome . . . . . . . . . . . . . . . . 518 Théorie des deux coups . . . . . . . . . . . . . 471 Tumeur cérébrale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 502 Tumeur de Wilms . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 516 Tumeur osseuse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 513

Après avoir étudié ce chapitre, vous devriez être en mesure : • d’établir un lien entre la physiopathologie du cancer et ses manifestations cliniques ; • de nommer les principales manifestations cliniques d’un cancer chez l’enfant ; • de déterminer les principaux moyens diagnostiques de cancer pédiatrique ; • d’expliquer les traitements des maladies néoplasiques et leurs justifications ; • d’énumérer les principaux effets indésirables de la chimiothérapie et de la radiothérapie ; • d’expliquer les soins infirmiers à prodiguer pour pallier les effets indésirables des traitements antinéoplasiques ; • de distinguer les types de greffes de cellules souches hématopoïétiques ; • de justifier l’importance du soutien à apporter aux parents dont l’enfant est atteint de cancer.

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Guide d’études – SA10

468

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

Carte conceptuelle

Cette carte conceptuelle illustre schématiquement les principaux concepts décrits dans le présent chapitre. Sa lecture vous permettra d’avoir une vue d’ensemble des notions qui y sont présentées.

telles

par

telles

diagnostiqué par

12

dont

complications fréquentes

Enfant atteint de cancer

importance

traité par

complications fréquentes

Chapitre 12

Enfant atteint de cancer

469

12.1

Enfants atteints du cancer

Dans le domaine des soins inrmiers, il existe peu de situations plus difciles que le soin des enfants atteints du cancer. Malgré la hausse remarquable du taux de survie de ces enfants, les familles touchées ont des besoins immenses, puisqu’elles doivent composer avec une maladie physique grave et la peur que leur enfant ne guérisse pas. Dans son travail auprès de l’enfant et de sa famille, l’inrmière doit partir du principe voulant que la communication favorise la compréhension et aide à clarier la situation. En effet, la compréhension permet de réduire la peur liée à la maladie.

12.1.1

Épidémiologie

Le cancer pédiatrique est assez rare. En effet, il est peu fréquent et représente moins de 1 % de tous les nouveaux cas de cancer répertoriés au Canada. Chaque année, environ 900 cas sont diagnostiqués parmi les jeunes de 0 à 14 ans. Malgré cette incidence assez faible, les décès par cancer chez les enfants de moins de 15 ans représentent presque 0,2 % de tous les décès (pédiatriques et adultes) par cancer au Canada, ce qui fait qu’en 2012, le cancer était la principale cause de décès par maladie chez les enfants de moins de 15 ans (Société canadienne du cancer, 2017d).

Toutefois, les tendances associées à l’âge de l’enfant au moment du diagnostic varient selon le type de cancer. Ainsi, on trouve des plus hauts taux d’incidence de cas de leucémies et de tumeurs du SNC chez les enfants âgés de 1 à 4 ans, et les plus faibles dans le groupe des 10 à 14 ans. En ce qui concerne les lymphomes, les taux augmentent avec l’âge, c’est-à-dire que le taux d’incidence est environ 5 fois plus élévé chez les 10 à 14 ans que chez les enfants âgés de moins de 1 an. Les cas de neuroblastomes sont beaucoup plus communs chez les jeunes enfants de 1 à 4 ans. Enn, le taux d’incidence des sarcomes des tissus mous est à peu près le double durant la première année de vie (Ellison et Janz, 2015) FIGURE 12.1 . Heureusement, le taux de survie aux cancers pédiatriques s’améliore depuis quelques années ENCADRÉ 12.1.

En ce qui concerne les adolescents et les jeunes adultes (15 à 29 ans), le taux de nouveaux cancers représente environ 1,5 % de tous les nouveaux cas (pédiatriques et adultes). Pour ce groupe d’âge, le taux de décès correspond à 0,4 % de tous les cancers au Canada, ce qui représente environ 300 adolescents et jeunes adultes (Société canadienne du cancer, 2017d).

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les cancers chez les enfants diffèrent de ceux des adultes, notamment en ce qui concerne le siège anatomique et l’évolution de la maladie. Chez les enfants, les tumeurs ont des périodes de latence plus courtes et sont plus agressives et envahissantes que chez les adultes.

470

Partie 4

L’incidence des sous-types particuliers de cancers pédiatriques peut varier en fonction de l’âge, du sexe et de l’origine ethnique. Par exemple, l’incidence générale du cancer est plus élevée de 10 % chez les garçons que chez les lles (Ellison et Janz, 2015). Les cancers chez les enfants diffèrent de ceux des adultes, notamment en ce qui concerne le siège anatomique et l’évolution de la maladie. Les tumeurs chez les enfants ont des périodes de latence plus courtes et sont plus agressives et envahissantes que les tumeurs chez les adultes. En outre, elles sont souvent d’origine embryonnaire ou hématopoïétique, et les formes les plus fréquentes sont la leucémie, les lymphomes et les cancers du système nerveux central (SNC) (Société canadienne du cancer, 2017d). Durant la période couverte par les statistiques de la Société canadienne du cancer, le nombre de diagnostics de cancer chez les enfants de moins de 5 ans (238 cas par million, par année) était près du double de celui enregistré chez les enfants âgés de 5 à 14 ans (124 cas par million, par année) (Ellison et Janz, 2015).

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

* « N » correspond au nombre total de décès sur cinq ans (2008 à 2012)

dans chaque groupe d’âge.

FIGURE 12.1 Distribution des décès par certains cancers, selon le groupe d’âge, Canada, 2008 à 2012

ENCADRÉ 12.1

Taux de survie des enfants atteints du cancer

Les taux de survie des enfants atteints du cancer ont connu une augmentation considérable au cours des 50 dernières années. Plusieurs raisons expliquent cette amélioration, notamment le nombre croissant de parti­ cipations aux études cliniques, la mise en place de protocoles de traitements multimodaux, une meilleure utilisation des soins de soutien ainsi qu’une approche interdisciplinaire (Landier, 2012). Au cours des 30 dernières années, le taux de survie au cancer chez les enfants est passé de 71 % à la fin des années 1980 à 83 % en 2017 (Société canadienne du cancer, 2017d). Le taux de survie des adolescents a moins progressé que celui des plus jeunes. Les taux de survie qui ont connu la plus forte augmentation sont ceux des enfants touchés par la leucémie lympho­ blastique aiguë et les lymphomes. Un cancer pédia­ trique est généralement considéré comme guéri si tous les traitements ont été suivis, s’il n’y a plus de preuve clinique et radiologique de cancer, et si une période de 5 ans s’est écoulée depuis le diagnostic.

12.1.2

Étiologie

Lorsqu’un enfant reçoit un diagnostic de cancer, les premières questions que posent les parents sont souvent les suivantes : Comment notre enfant a-t-il contracté cette maladie ? et Avonsnous fait quelque chose qui a pu causer cette maladie ? De plus, les parents sont naturellement préoccupés par la possibilité que leurs autres enfants puissent avoir le cancer. D’importants progrès ont été accomplis dans la compréhension de la prolifération cellulaire, de la mort cellulaire programmée (apoptose), des gènes qui activent la croissance des tumeurs (oncogènes) et des gènes qui empêchent la croissance des tumeurs (gènes suppresseurs de tumeurs). On sait que le cancer découle de multiples événements génétiques et qu’il n’est pas nécessairement héréditaire. En fait, dans l’ensemble, l’incidence des cancers dus à l’hérédité directe est faible. Or, dans la plupart des cas, on ne connaît pas la cause exacte de l’apparition du cancer chez l’enfant. Il est important de rassurer les parents en leur précisant que le cancer n’est pas causé par quelque chose qu’ils ont fait ou qu’ils n’ont pas fait. Au début des années 1970, Alfred Knudson a formulé la théorie des deux coups. Cette explication de l’hérédité du cancer s’applique particulièrement pour le cas du rétinoblastome héréditaire. Un enfant peut hériter de sa mère ou de son père une copie altérée du gène du rétinoblastome (RB). Comme la plupart des gènes, le RB se trouve en

deux copies dans chaque cellule. Il s’agit d’un gène suppresseur de tumeur responsable de la régulation de la croissance cellulaire. Lorsqu’une seule des deux copies du gène disparaît – le premier coup –, la cellule reste normale. Toutefois, si la seconde copie disparaît – le second coup –, une prolifération anormale de cellules se produit, et un rétinoblastome se forme (Knudson, Hethcote et Brown, 1975). La prédisposition génétique au cancer la plus connue est probablement le syndrome de Li-Fraumeni, qui est principalement dû à la mutation constitutionnelle (dans toutes les cellules) du gène suppresseur de tumeur (Saletta, Pozza et Byrne, 2015 ; Schiffman, Geller, Mundt et al., 2013). Ce syndrome se caractérise par l’incidence précoce de tumeurs cérébrales, de cancers du sein préménopausiques, de sarcomes des tissus mous et d’ostéosarcomes, de leucémies et de lymphomes (Goudie et Malkin, 2016 ; Saletta et al., 2015 ; Schiffman et al., 2013). Les anomalies chromosomiques observées dans de nombreuses tumeurs pédiatriques malignes jouent un rôle important dans le développement de divers types de cancers. Ces anomalies peuvent se trouver uniquement dans la tumeur ou être présentes dans toutes les cellules. Dans ce dernier cas, il s’agit de mutations germinales. Les anomalies chromosomiques peuvent être dues à des translocations (une réorganisation du matériel entre deux chromosomes) ou à des nombres anormaux de chromosomes. Par exemple, de nombreuses translocations chromosomiques bien connues ont été observées chez des enfants leucémiques et dans certaines tumeurs solides. Parmi les autres syndromes génétiques pouvant affecter les gènes ou les chromosomes et prédisposer au cancer gurent entre autres l’anémie de Fanconi, le syndrome de Bloom, le syndrome de BeckwithWiedemann, la neurobromatose de type 1, l’ataxie télangiectasie et le syndrome de Klinefelter (Goudie et Malkin, 2016). Les enfants souffrant d’immunodécience, tels ceux atteints du syndrome de Wiskott-Aldrich ou du syndrome d’immunodécience acquise, ou encore ceux dont le système immunitaire est inhibé, par exemple après une transplantation, présentent un risque élevé de divers cancers. Chez certains enfants traités avec succès pour une tumeur maligne primaire, le risque accru de cancers secondaires est particulièrement préoccupant.

Facteurs de risque Les habitudes de vie sont les principaux facteurs qui augmentent le risque de cancer de l’adulte, mais elles ont peu ou pas d’effet sur le cancer de Chapitre 12

12

Tumeur solide : Excroissance de taille variable due à la mul­ tiplication excessive de cellules cancéreuses ou non. CE QU’IL FAUT RETENIR

Dans la plupart des cas, on ne connaît pas la cause exacte de l’apparition du cancer chez l’enfant. Il est important de rassurer les parents en leur précisant que le cancer n’est pas causé par quelque chose qu’ils ont ou n’ont pas fait.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les habitudes de vie sont les principaux facteurs qui augmentent le risque de cancer de l’adulte, mais elles ont peu ou pas d’effet sur le cancer de l’enfant.

Enfant atteint de cancer

471

éactivation des connaissances Outre l’usage du tabac, nommez deux autres facteurs de risque compor­ tementaux pouvant affecter la santé d’une personne.

l’enfant. Le rôle de l’environnement dans le développement du cancer pédiatrique est assez peu documenté. Cependant, certains facteurs de risque sont bien connus, notamment l’exposition aux rayonnements ionisants et aux substances cancérigènes, la thérapie immunosuppressive, les infections (telles que le virus d’Epstein-Barr), l’origine ethnique et les maladies génétiques (Agence de la santé publique du Canada, 2012 ; Goudie et Malkin, 2016).

Prévention CE QU’IL FAUT RETENIR

Les facteurs cancérigènes qui inuent sur les enfants sont peu connus. Il n’existe actuellement aucun moyen de prévention.

La connaissance des facteurs de risque qui augmentent la probabilité du cancer est une mesure possible de prévention, notamment pour les enfants à risque du syndrome de Li-Fraumeni (Goudie et Malkin, 2016). Malheureusement, les facteurs cancérigènes qui inuent sur les enfants sont peu connus. Il n’existe actuellement aucun moyen de prévention. Les professionnels de la santé peuvent toutefois jouer deux rôles dans ce domaine. Pre mièrement, ils peuvent contribuer à prévenir le cancer de l’adulte en sensibilisant les parents et les enfants aux dangers des substances cancérigènes connues, particulièrement aux effets de la cigarette et de l’exposition excessive au soleil. En effet, le cancer du poumon est la principale cause de décès dus au cancer chez l’adulte, et le mélanome malin est la principale cause de décès dus à des maladies de la peau. Par ailleurs, an de permettre la détection précoce d’autres types de cancers, les jeunes hommes devraient apprendre à effectuer l’autoexamen des testicules, et les adolescentes devraient apprendre à effectuer l’autoexamen des seins, en plus de passer des examens médicaux périodiques, notamment le test de Papanicolaou (test Pap).

ENCADRÉ 12.2

Principales manifestations cliniques du cancer pédiatrique

• Masse ou œdème inhabituel • Fatigue inexpliquée • Susceptibilité soudaine aux ecchymoses et aux saignements • Douleur locale persistante ou claudication • Fièvre ou maladie prolongée inexpliquée • Céphalées fréquentes souvent accompagnées de vomissements • Changements soudains des yeux ou de la vision • Perte de poids rapide excessive Source : Adapté de American Cancer Society (2016).

472

Partie 4

Deuxièmement, les professionnels de la santé doivent connaître les principales manifestations cliniques du cancer pédiatrique ENCADRÉ 12.2 . Malheureusement, la èvre et la douleur sont des manifestations de beaucoup de troubles infantiles courants et, à moins d’un indice de suspicion élevé, elles peuvent être attribuées à des affections mineures. Les autres manifestations cliniques du cancer pédiatrique sont subtiles et peuvent facilement passer inaperçues. Si les parents soupçonnent

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

une anomalie, leur inquiétude doit être prise au sérieux. Les meilleures armes contre toute forme de cancer sont la détection et le traitement précoces (Brodeur, Nichols, Plon et al., 2017 ; Centers for Disease Control and Prevention [CDC], 2017).

12.1.3

Diagnostic

L’évaluation d’un enfant que l’on croit atteint d’un cancer peut prendre plusieurs jours. Les manifestations cliniques précises dépendent du type de cancer et de la région touchée. Les composantes essentielles d’une évaluation globale d’un cancer pédiatrique peuvent être divisées en trois catégories, soit : 1. les procédures diagnostiques non invasives ; 2. les procédures diagnostiques invasives ; 3. l’imagerie médicale. Ces composantes sont présentées dans le TABLEAU 12.1.

Procédures diagnostiques non invasives Dans un premier temps, il faut procéder à l’anamnèse et à l’examen physique. Ceux-ci permettront de déterminer les évaluations nécessaires, notamment les analyses de laboratoire. Plusieurs analyses sont nécessaires an de préciser le diagnostic, de le conrmer, puis d’administrer un traitement approprié au cancer pédiatrique. Dans la majorité des cas, on effectue une formule sanguine complète, une analyse sérique, des explorations fonctionnelles du foie, des analyses de coagulation et une analyse d’urine lors de la première consultation. Par la suite, des formules sanguines complètes fréquentes permettent de surveiller les effets indésirables du traitement et, pour certains cancers hématologiques, l’efcacité du traitement. Les analyses biochimiques sanguines révèlent des informations importantes sur le fonctionnement des reins, du foie et des os, ainsi que sur l’équilibre électrolytique. Ces analyses aident à déterminer l’étendue de la maladie et à surveiller les effets indésirables du traitement.

Procédures diagnostiques invasives Ces examens sont effectués dans le but de déterminer la présence ou l’absence d’une tumeur, ou la réaction au traitement à cet endroit particulier. La ponction lombaire est un examen couramment effectué dans les cas de leucémies, de tumeurs cérébrales et d’autres cancers qui peuvent produire des métastases dans le SNC. La ponction lombaire est aussi utilisée pour administrer des médicaments par voie intrathécale à des enfants ayant divers types de cancers tels que la leucémie.

TABLEAU 12.1

Composantes de l’évaluation menant au diagnostic de cancer

INTERVENTIONS

PROCÉDURES D’ÉVALUATION

JUSTIFICATION

Procédures diagnostiques non invasives

• Anamnèse et examen physique

• Collecte des informations pour guider les évaluations nécessaires

• Analyses de laboratoire

• Évaluation de la moelle osseuse (p. ex., pour une leucémie, des lymphomes, un neuroblastome)

– Formule sanguine complète

• Évaluation de la réaction du corps au cancer ; compensation métabolique et fonction des organes (p. ex., pour le foie et les reins)

– Analyse d’urine – Analyse sérique et explorations fonctionnelles du foie

• Évaluation de la coagulation et de l’hémostase (p. ex., pour une infection, un trauma ou dans le cas de certaines leucémies)

– Analyses de coagulation

• Détermination de la présence de certaines tumeurs (p. ex., pour un hépatoblastome, des tumeurs des cellules germinales)

– Marqueurs de tumeurs – Immunophénotypage et cytologie

Procédures diagnostiques invasives

Imagerie diagnostique

• Évaluation de l’anormalité chromosomique (p. ex., pour des tumeurs solides et une leucémie)

• Ponction lombaire • Ponction de moelle osseuse

• Évaluation de la présence du cancer dans le liquide cérébrospinal (p. ex., pour une leucémie, un lymphome et des tumeurs cérébrales)

• Biopsie

• Évaluation de la présence des cellules de la leucémie et du lymphome

• Pathologie chirurgicale

• Établissement du type de cancer

• Radiographie pulmonaire

• Évaluation de la localisation de la tumeur, de la stadication et de l’étendue des métastases

• Tomodensitométrie • Imagerie par résonance magnétique • Tomographie par émission de positrons • Scintigraphie à la métaiodobenzylguanidine

Une ponction de moelle osseuse consiste à aspirer une petite quantité de moelle avec une aiguille de gros ou de petit calibre. La biopsie de moelle osseuse consiste à prélever une partie d’os avec un trocart. Une biopsie est nécessaire pour poser un diagnostic de cancer. En plus de déterminer le type de cancer dont souffre l’enfant, cet échantillon de tissu peut être soumis à divers examens biologiques qui aident à établir un pronostic et permettent aux fournisseurs de soins de santé d’adapter le traitement en fonction du groupe de risque. Par exemple, une biopsie de moelle osseuse permet de déterminer si l’enfant a une leucémie lymphoblastique aiguë ou une leucémie myéloblastique aiguë, en plus d’indiquer le soustype particulier de leucémie dont il souffre. Ces informations sont essentielles pour orienter l’intensité du traitement. De même, la biopsie d’un neuroblastome permet d’établir un diagnostic et d’évaluer l’amplication du gène N-myc dans la tumeur, ce qui permet également de déterminer le type de traitement nécessaire. En pédiatrie, ces examens sont effectués sous sédation et avec des analgésiques pour le contrôle de la douleur, ainsi que pour prévenir des

12

traumatismes psychologiques liés à ces examens multiples durant le cours des traitements.

Imagerie diagnostique L’imagerie diagnostique moderne a grandement amélioré la capacité de diagnostiquer correctement les cancers pédiatriques. Les méthodes d’imagerie les plus couramment employées sont entre autres la radiographie pulmonaire, la tomodensitométrie (TDM), l’imagerie par résonance magnétique (IRM), la tomographie par émission de positrons et la scintigraphie à la métaiodobenzylguanidine (MIBG), laquelle est de plus en plus utilisée pour diagnostiquer certains types de cancers pédiatriques tels que le neuroblastome et les tumeurs des tissus mous. La radiologie interventionnelle joue un rôle croissant dans le diagnostic et le traitement des cancers pédiatriques.

12.1.4

Approche thérapeutique

L’utilisation d’un traitement multimodal, qui comprend l’intervention chirurgicale, la chimiothérapie, la radiothérapie et les modicateurs de la réponse biologique, la participation de nombreux

Chapitre 12

Enfant atteint de cancer

473

Annexe 12.1W : Traitements expérimentaux.

enfants à des groupes ou à des protocoles d’essais cliniques ainsi que les améliorations apportées aux soins de soutien ont grandement accru le taux de survie des enfants atteints du cancer. Depuis quelques années, des traitements expérimentaux se sont ajoutés aux traitements principaux abordés dans la présente section . Les efforts actuels en matière de traitement visent l’augmentation du taux de survie des enfants ayant des tumeurs à risque élevé, la diminution des effets indésirables aigus et à long terme du traitement, ainsi que l’étude de la biologie de la maladie de manière à mieux connaître les différents degrés de risque de récurrence du cancer an d’offrir aux enfants atteints des traitements adaptés à leur degré de risque.

Intervention chirurgicale

CE QU’IL FAUT RETENIR

Le principal but de l’intervention chirurgicale, outre l’obtention de biopsies, est l’élimination de toute L’objectif principal de trace de la tumeur et le rétablissement du fonctionl’utilisation de la chimiothénement normal du corps. Elle a plus de succès rapie est de prévenir la lorsque la tumeur est encapsulée et locale (connée prolifération des cellules au lieu d’origine). L’intervention chirurgicale peut cancéreuses. aussi être utilisée comme soin palliatif dans le cas d’un cancer régional pour retirer des métastases situées dans une région adjacente au Guillaume, âgé de sept ans, est atteint d’une lieu d’origine, ou pour un tumeur cérébrale à un stade très avancé. Il a subi cancer avancé lorsque des une exérèse de la tumeur, mais des métastases se métastases se sont localisées sont répandues, et le pronostic est très sombre à sur des organes distants du court terme. Il reçoit des traitements de chimiothésite du cancer primaire. rapie par voie intraveineuse (I.V.). Quel est le but Puisque la majorité des cande ces traitements dans son cas ? cers pédiatriques réagis sent

Jugement

clinique

ENCADRÉ 12.3

Modalités d’administration de la chimiothérapie

TRAITEMENT MULTIMODAL

Chimiothérapie utilisée en combinaison avec d’autres types de traitements comme l’intervention chirurgicale, la radiothérapie, l’immunothérapie et la greffe de cellules souches hématopoïétiques. CHIMIOTHÉRAPIE NÉOADJUVANTE

Chimiothérapie administrée avant tout autre traitement an de réduire la taille de la tumeur (avant une intervention chirurgicale ou la radiothérapie). CHIMIOTHÉRAPIE ADJUVANTE

Chimiothérapie utilisée en présence d’une tumeur à haut risque de récidive ou de possibles métastases une fois que la tumeur

a été réséquée par intervention chirurgicale ou par l’administration de la radiothérapie. THÉRAPIE POUR LES SITES SANCTUAIRES

Chimiothérapie utilisée dans les cas où les risques de récidive sont élevés ou lorsque la chimiothérapie se rend difcilement à l’endroit à atteindre. La barrière hématoencéphalique est un exemple de site sanctuaire chez les enfants atteints de leucémie ; dans ces cas, on administre une chimiothérapie intrathécale pour prévenir ou guérir une atteinte du SNC. CHIMIOTHÉRAPIE PALLIATIVE

Chimiothérapie utilisée en n de vie dans un but non curatif ; elle est employée pour prolonger la vie ainsi que pour contrôler la douleur et la souffrance.

Source : Toomey, C. (2014). Chemotherapy. Dans N.E. Kline (dir.). Essentials of pediatric hematology/oncology nursing : A core curriculum (4e éd.). Glenview, IL : Association of Pediatric Hematology/Oncology Nurses. p. 113.

474

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

bien à la chimiothérapie, l’excision chirurgicale de diverses tumeurs se fait de manière plus modérée qu’auparavant an de préserver les fonctions corporelles et l’apparence esthétique. Par exemple, les enfants souffrant de certains types de cancers osseux, tels que l’ostéosarcome, sont traités avec succès par résection de la partie atteinte de l’os plutôt que par amputation du membre. En outre, l’accent est de plus en plus mis sur le traitement pharmacologique et la radiothérapie combinés après une intervention chirurgicale restreinte. Dans le cas des tumeurs cérébrales, le neurochirurgien peut avoir accès à une IRM peropératoire pendant l’opération (Mutchnick et Moriarty, 2014). Celle-ci permet de consulter des images précises du cerveau en temps réel durant l’intervention an de savoir immédiatement si la totalité de la tumeur a été enlevée. Si ce n’est pas le cas, il est possible de reprendre rapidement l’opération pour continuer la résection plutôt que de devoir effectuer une deuxième intervention.

Chimiothérapie La chimiothérapie peut être utilisée comme traitement principal ou adjuvant (complémentaire) à l’intervention chirurgicale ou à la radiothérapie. L’objectif principal de la chimiothérapie est d’empêcher les cellules cancéreuses de se diviser et de former des métastases, ou, en d’autres mots, de prévenir la prolifération des cellules cancéreuses. Malheureusement, en détruisant les cellules cancéreuses, la chimiothérapie peut aussi endommager les cellules saines et entraîner des effets indésirables. Les principales voies d’administration de la chimiothérapie en pédiatrie sont les voies orale, sous-cutanée, intraveineuse et intramusculaire ; le médecin peut également administrer la chimiothérapie par voie intrathécale (dans l’espace sous-arachnoïdien) (Toomey, 2014). Il existe plusieurs modalités de traitements en chimiothérapie ; elles sont présentées dans l’ENCADRÉ 12.3. La majorité des agents cytotoxiques agissent en perturbant le fonctionnement ou la production des acides nucléiques, c’est-à-dire l’acide désoxyribonucléique (ADN) et l’acide ribonucléique (ARN). Bien que plusieurs substances anticancéreuses permettent de traiter efcacement divers types de cancers, les taux de survie remarquables des personnes atteintes sont attribuables à l’amélioration des traitements pharmacologiques combinés. En effet, la combinaison des substances anticancéreuses permet la destruction optimale du cycle cellulaire tout en entraînant des effets toxiques minimaux et une résistance réduite des cellules cancéreuses aux substances utilisées.

Outre les combinaisons plus efcaces de médicaments, plusieurs progrès réalisés dans les techniques d’administration de la chimiothérapie permettent de donner un traitement intraveineux continu ou intermittent sans faire de multiples ponctions veineuses. Les dispositifs d’accès veineux (p. ex., un cathéter à chambre implantable) facilitent grandement l’administration sécuritaire et efcace des médicaments tout en limitant l’inconfort pour l’enfant 14 . De plus, les perfusions continues de courte et de longue durée sont effectuées à l’aide d’un pousseseringue ou d’une pompe volumétrique. Les agents cytotoxiques peuvent notamment être classés en fonction de leur principal mécanisme d’action ; ils sont présentés dans l’ENCADRÉ 12.4. L’infirmière qui travaille auprès d’enfants atteints de cancer doit connaître les actions et les effets indésirables de ces médicaments. Mal heureusement, la majorité de ces médicaments ne sont pas seulement toxiques pour les cellules cancéreuses, mais ils affectent aussi les autres cellules à prolifération rapide (telles que les cellules de la moelle osseuse, des cheveux et de la peau, ainsi que les cellules épithéliales du tube digestif). Les problèmes qu’entraîne la destruction de ces cellules normales nécessitent souvent plus de soins inrmiers que le cancer lui-même.

Précautions et complications relatives à l’administration et à la manipulation des agents cytotoxiques Seules les inrmières qui ont reçu la formation nécessaire peuvent administrer de la chimiothérapie. En effet, l’inrmière doit connaître les doses recommandées, les effets indésirables des médicaments prescrits ainsi que l’interprétation des protocoles utilisés en oncologie pédiatrique. De nombreux agents cytotoxiques sont vésicants (sclérosants) et peuvent gravement endommager les cellules s’ils s’inltrent dans les tissus environnants (extravasation), et ce, même en quantité inme. À cet effet, il existe des directives qui doivent être suivies méticuleusement an de prévenir les dommages aux tissus corporels (Belderson et Billett, 2017 ; Institut national d’excellence en santé et en services sociaux, 2014).

14 Les techniques d’administration des médicaments sont abordées dans le chapitre 14, Techniques de soins.

À l’extravasation s’ajoute l’anaphylaxie, une complication potentiellement fatale notamment causée par l’asparaginase-L, la bléomycine, le cisplatine et l’étoposide (VP-16). Les réactions d’hypersensibilité à ces agents cytotoxiques se caractérisent par l’urticaire, l’angiœdème (œdème de Quincke), des bouffées vasomotrices, des éruptions cutanées, des difcultés respiratoires, l’hypotension ainsi que des nausées ou des

12 ENCADRÉ 12.4

Classes d’agents cytotoxiques

Les agents cytotoxiques peuvent être classés en fonction de leur principal mécanisme d’action, de la structure de la molécule ou de l’action physiologique de l’agent.

la réplication de l’ADN et la transcription de l’ARN. La doxorubicine (Caelyx MD) et la daunomycine en sont des exemples.

AGENTS ALKYLANTS

Certains agents stéroïdiens comme les glucocorticoïdes sont utilisés en associa­ tion avec d’autres agents pour traiter les cancers issus du tissu lymphoïde tels les leucémies lymphocytaires aiguës et chroniques, la maladie de Hodgkin, les lymphomes non hodgkiniens et le myélome multiple. Ces agents pénètrent la mem­ brane cellulaire, puis se lient avec les récepteurs dans le cytoplasme. Ensuite, le complexe récepteur­stéroïde migre vers le noyau cellulaire, où il se lie à la chroma­ tine dans l’ADN, ce qui modie l’activité des gènes cibles. Dans la plupart des cas, l’activité du gène cible est augmentée ; cependant, dans certains cas, l’activité du gène cible est supprimée et, par conséquent, la synthèse de certaines protéines diminue. Administrés à haute dose, les glucocorticoïdes sont toxiques pour les tissus lymphoïdes, car ils provoquent une suppression de la mitose, une réduction des lymphocytes, la régression du tissu lymphatique et la mort cellulaire. La prednisone et la dexaméthasone en sont des exemples.

Les agents alkylants remplacent un atome d’hydrogène par un groupe alkyle dans une molécule. La combinaison irréversible des groupes alkyles avec des chaînes de nucléotides, particulièrement l’ADN, cause la croissance déséqui­ librée des constituants cellulaires non affectés, ce qui entraîne la mort de la cellule. La cyclophosphamide (ProcytoxMD), l’ifosfamide (IfexMD), la cisplatine et la dacarbazine sont des exemples d’agents alkylants. ANTIMÉTABOLITES

Les antimétabolites ressemblent aux éléments métaboliques essentiels néces­ saires à la croissance cellulaire, mais ils sont sufsamment altérés dans la structure moléculaire pour inhiber la synthèse de l’ADN ou de l’ARN. Leur effet maximal se manifeste dans les cellules qui produisent activement de l’ADN. Le méthotrexate et la mercaptopurine (Purinethol MD) sont des exemples d’antimétabolites. ALCALOÏDES VÉGÉTAUX

Les alcaloïdes végétaux arrêtent la métaphase cellulaire (une phase de la mitose) en se liant aux protéines microtubulaires nécessaires à la formation du fuseau. La vincristine et la vinblastine en sont des exemples. ANTIBIOTIQUES ANTITUMORAUX

Les antibiotiques antitumoraux sont des produits naturels qui entravent la division cellulaire en réagissant avec l’ADN d’une façon qui empêche

HORMONES

DIVERS

Un certain nombre d’agents ne sont pas classés en fonction des classications précédentes. Par exemple, l’asparaginase­L est une enzyme isolée à partir d’extraits de cultures des bactéries Escherichia coli ou Erwinia carotovora. Elle hydrolyse l’asparagine­L, un acide aminé, en acide aspartique­L, qui empêche les cellules de fabriquer les protéines nécessaires à la synthèse de l’ADN et de l’ARN. Puisque l’asparagine­L est synthétisée par des cellules normales, mais qu’elle doit être acheminée par voie exogène à certaines cellules leucémiques et lympha­ tiques, l’administration de l’asparaginase­L détruit la source exogène essentielle d’asparagine­L tout en préservant les cellules normales des effets nocifs.

Chapitre 12

Enfant atteint de cancer

475

vomissements . Les responsabilités de l’inrmière dans ce cas comprennent la prévention et la reconnaissance des réactions graves. L’inrmière qui soupçonne de telles réactions doit arrêter l’administration de l’agent cytotoxique et ALERTE CLINIQUE changer la perfusion intraveineuse pour Lors de l’administration d’agents cytotoxiques et immunologiques une solution saline ayant un potentiel anaphylactique connu, la pratique courante tout en surveillant les consiste à observer l’enfant pendant au moins une heure après la signes vitaux de l’enperfusion pour déceler des signes d’anaphylaxie (p. ex., des éruptions fant et ses réactions cutanées, de l’urticaire, de l’hypotension, une respiration sifante, subséquentes, en des nausées, des vomissements). Le matériel d’urgence (particulièreplus d’aviser immément le tensiomètre, le masque, l’oxygène, le ballon d’anesthésie et diatement le médecin l’appareil d’aspiration) et les médicaments d’urgence (notamment et d’être prête à admil’épinéphrine, des antihistaminiques, des corticostéroïdes et des nistrer les médicavasopresseurs) doivent être à portée de main. ments d’urgence. Aux nombreuses responsabilités de l’inrmière pendant l’administration d’une chimiothérapie s’ajoute celle de se protéger elle-même. En effet, les agents cytotoxiques peuvent présenter des risques pour la personne qui les manipule et pour l’enfant, mais le degré exact de risque est inconnu. L’Association paritaire pour la santé et la sécurité du travail du secteur affaires sociales (ASSTSAS) a émis des recommandations quant Marco est âgé de quatre ans. Il a été opéré pour à la manipulation des médiune tumeur de Wilms et reçoit maintenant de la caments de chimiothérapie, chimiothérapie (vincristine I.V.). Lors de l’administrarecommandations basées en tion de l’agent cytotoxique, une rougeur locale est partie sur celles émises par apparue au site d’injection. Quelle action prioritaire faut-il poser dans ce cas ? le National Institute for Occupational Safety and a) Aviser le médecin immédiatement. Health (NIOSH) (ASSTSAS, b) Cesser tout de suite l’administration. 2008 ; NIOSH, 2016). Les c) Administrer de l’hyaluronidase I.V. lignes directrices générales à ce sujet sont présentées dans d) Appliquer une compresse chaude. l’ENCADRÉ 12.5.

Jugement

clinique

Radiothérapie La radiothérapie est fréquemment utilisée dans le traitement du cancer pédiatrique, généralement en combinaison avec la chimiothérapie ou l’intervention chirurgicale. Elle peut être employée à des ns curatives ou palliatives an de réduire la taille de la tumeur et de soulager les symptômes. Des progrès récents dans ce domaine ont permis d’optimiser les effets bénéques de la radiothérapie et de réduire un grand nombre de ses effets indésirables, bien que de fortes doses de rayonnements entraînent de nombreux effets tardifs graves. Il est important que l’inrmière effectue une évaluation physiologique et psychologique complète de l’enfant avant d’entreprendre une radiothérapie. Les rayonnements ionisants ont au moins deux effets cytotoxiques. D’abord, ils endommagent la cytosine, la thymine et l’uracile, qui sont les bases pyrimidiques nécessaires à la synthèse des acides nucléiques. Ensuite, ils causent la cassure simple brin ou double brin des molécules d’ADN ou d’ARN. Or, la perturbation des fonctions cellulaires métaboliques et reproductives entraîne deux types de dommages : 1) les dommages létaux qui causent la mort de la cellule ; 2) les dommages sublétaux qui entraînent des lésions cellulaires pouvant ultérieurement être réparées. Un grand nombre d’effets indésirables aigus de la radiothérapie découlent des dommages létaux causés aux tissus radiosensibles, particulièrement aux cellules en prolifération, notamment celles de la moelle osseuse, du tube digestif et des follicules pileux. Les effets tardifs de la radiothérapie sont généralement dus à la mort cellulaire. Les réactions indésirables aiguës à la radiothérapie dépendent principalement de la région traitée. La radiothérapie corporelle totale, qui cause

Pratiques inrmières ENCADRÉ 12.5

Manipuler des agents cytotoxiques

• Faire preuve d’une grande prudence et utiliser une technique aseptique lors de la manipulation des agents cytotoxiques an de prévenir tout contact physique avec la substance et d’éviter les infections. • Effectuer la préparation pharmaceutique dans une pièce ventilée. • Administrer les agents cytotoxiques dans un environnement contrôlé, de préférence dans une pièce consacrée à cette n an de limiter la contamination. • Porter des gants et des vêtements protecteurs pour la chimiothérapie. Ceux-ci sont jetables, et il faut les éliminer dans des contenants spéciaux après chaque utilisation.

476

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

• Porter une protection faciale ou un masque et des lunettes de protection s’il y a un risque d’éclaboussure, et utiliser un respirateur s’il y a un risque d’inhalation. • Utiliser un tampon de gaze stérile lors de l’amorçage, de la connexion et de la déconnexion du cathéter intraveineux, de l’insertion des seringues dans les oles, de l’ouverture des ampoules de verre ou de toute autre procédure au cours de laquelle un agent cytotoxique peut s’écouler accidentellement. • Éliminer les aiguilles, les seringues, les tubulures intraveineuses et tout autre matériel contaminé dans un contenant étanche et résistant aux perforations, et les disposer dans les contenants spéciaux. Ne pas remettre le capuchon sur les aiguilles ou casser les aiguilles.

les réactions les plus graves, est employée en combinaison avec des chimiothérapies à doses élevées chez certains enfants en préparation de la greffe de cellules souches hématopoïétiques. La radiothérapie corporelle totale élimine aussi les cellules cancéreuses dans les sanctuaires qui sont plus réfractaires aux effets de la chimiothérapie, comme les testicules ou les cellules du cerveau (Norville et Staton, 2014). Le TABLEAU 12.2 résume les effets aigus de la radiothérapie et les interventions inrmières qui peuvent contribuer à réduire ou à prévenir ces effets.

TABLEAU 12.2

Un syndrome neurologique appelé syndrome de somnolence postradiothérapie peut survenir de 5 à 8 semaines après la radiothérapie du SNC et durer de 4 à 15 jours. Ce syndrome se caractérise par une somnolence avec ou sans èvre, l’anorexie ainsi que des nausées et des vomissements. Les parents doivent être avertis de ces manifestations cliniques possibles et encouragés à demander un examen médical si ces manifestations apparaissent, car la somnolence peut être un indicateur précoce de séquelles neurologiques à long terme après une radiothérapie crânienne.

Le document Guide de prévention. Manipulation sécuritaire des médicaments dangereux, publié par l’Association paritaire pour la santé et la sécurité du travail du secteur affaires sociales, est disponible au http:// asstsas.qc.ca.

Effets indésirables aigus de la radiothérapie

PARTIE DU CORPS

EFFETS

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES

Tube digestif

Nausées et vomissements

• Donner un antiémétique selon la posologie établie, jour et nuit. • Mesurer le volume des vomissements pour évaluer la déshydratation.

Anorexie

• Encourager l’ingestion des liquides et des aliments les mieux tolérés, généralement des aliments légers et mous, ainsi que les collations. • Surveiller le poids.

Ulcération des muqueuses

• Faire des gargarismes de bouche fréquents et assurer une bonne hygiène buccale pour prévenir la mucosite. • Encourager les aliments mous et non irritants (peu épicés), et éviter les agrumes ou les aliments acides.

Diarrhée

12

• Maîtriser au moyen d’antispasmodiques ou administrer des médicaments antidiarrhéiques, selon les recommandations de l’équipe de radiothérapie. • Surveiller les signes de déshydratation. • Offrir des bains de siège. • Utiliser des crèmes barrières. • Éviter les produits laitiers et la nourriture épicée.

Peau

Alopécie (en deux semaines ; les cheveux repoussent de trois à six mois plus tard)

• Suggérer le port d’une prothèse capillaire (perruque).

Desquamation sèche ou humide

• Ne pas appeler brûlures les changements de la peau (sous-entend un trop fort rayonnement).

• Souligner l’importance de l’hygiène du cuir chevelu, et le besoin de protéger la tête du soleil et du froid.

• Ne pas appliquer de lotion ni de crème sur la peau sans l’avis préalable de l’équipe de radiothérapie. • Laver quotidiennement la peau avec un peu de savon doux non parfumé. • Ne pas effacer les repères sur la peau destinés à l’équipe de radiothérapie. • Éviter l’exposition au soleil. • En cas de desquamation, consulter un spécialiste en soins des plaies.

Moelle osseuse

Myélosuppression

• Surveiller la présence de èvre (température supérieure à 38,3 °C). • Commencer les analyses de septicémie selon la prescription. • Administrer des antibiotiques selon la prescription. • Éviter les suppositoires et la mesure de température rectale. • Mettre en place les mesures de précaution relatives au saignement. • Mettre en place les mesures de protection selon les directives de l’équipe du contrôle des infections. • Surveiller les signes d’anémie.

Chapitre 12

Enfant atteint de cancer

477

TABLEAU 12.2

Effets indésirables aigus de la radiothérapie (suite)

PARTIE DU CORPS

EFFETS

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES

Tête

Nausées et vomissements (dus à la stimulation du centre du vomissement dans l’encéphale)

• Employer les mêmes interventions que pour le tube digestif.

Alopécie

• Employer les mêmes interventions que pour la peau.

Mucosite

• Encourager les soins dentaires réguliers et les traitements au uor selon les recommandations de l’équipe de dentisterie.

Effets potentiels : paro­ tidite ; mal de gorge ; perte du goût

• Administrer des analgésiques, au besoin, pour soulager la douleur.

Xérostomie (bouche sèche)

• Traiter la sécheresse buccale grave au moyen de l’hygiène buccale et d’un régime liquide.

Cystite (rare)

• Encourager l’ingestion abondante de liquide et les mictions fréquentes.

Vessie

• Évaluer l’hématurie par l’analyse d’urine ou de cultures, au besoin.

Modicateurs de la réponse biologique Les modicateurs de la réponse biologique sont des agents ou des interventions qui stimulent les mécanismes immunologiques an de provoquer une activité antitumorale directe ou de favoriser la croissance cellulaire, réduisant ainsi la toxicité hématologique causée par la chimiothérapie. Ces modicateurs, aussi appelés agents ciblés, sont au premier plan de la recherche clinique. Les principales classes de modicateurs de la réponse biologique sont les anticorps monoclonaux, les inhibiteurs de la tyrosine kinase, les cytokines, les inhibiteurs du point de contrôle immunitaire ainsi que les vaccins (Dansereau, 2014). Depuis quelques années, les efforts se concentrent aussi sur de nouveaux traitements de pointe en cours d’expérimentation, parmi lesquels gurent les modicateurs épigénétiques et les lymphocytes T porteurs de récepteurs antigéniques chimériques (Annesley et Brown, 2015).

La Société canadienne du cancer (www.cancer.ca) offre des ressources à propos de la greffe de cellules souches hématopoïétiques allogéniques.

478

Partie 4

Les anticorps monoclonaux sont fabriqués à l’aide d’un processus complexe qui permet de fusionner des cellules spéciales et de former un clone hybride, ou hybridome, lequel produit des anticorps capables de reconnaître un antigène particulier. Ces clones sont alors congelés, maintenus en culture ou cultivés sous forme de tumeurs chez des souris afin de produire de grandes quantités d’anticorps. Les anticorps monoclonaux ont plusieurs mécanismes d’action cytotoxique, mais leur principal effet s’exerce sur les petits inhibiteurs de molécules des protéines

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

de la surface cellulaire. Plusieurs anticorps monoclonaux existent, notamment le rituximab, qui est couramment utilisé et qui cible la protéine CD20, une protéine de surface des cellules bêta. Le rituximab est employé dans le traitement du lymphome non hodgkinien. D’autres agents ciblés, tels que les inhibiteurs de la tyrosine kinase, sont des médicaments qui empêchent l’action de la tyrosine kinase, une enzyme qui, dans certains cancers, est surexprimée. L’imatinib, le sunitinib et le sorafénib en sont des exemples (Dansereau, 2014 ; Fry, Sondel et Mackall, 2016 ; MacDonald, 2010). Parmi les modicateurs de la réponse biologique gurent aussi les cytokines, qui sont naturellement sécrétées par les cellules du système immunitaire et qui leur permettent de communiquer entre elles en participant notamment à l’activation de la réaction immunitaire. Cette classe inclut les interférons, les interleukines ainsi que les facteurs de stimulation des colonies (Dansereau, 2014).

Greffe de cellules souches hématopoïétiques La greffe de cellules souches hématopoïétiques est une autre méthode utilisée dans le traitement pour les maladies malignes (leucémies et tumeurs solides) et non malignes (anémie falciforme et maladies immunitaires). Les candidats à une greffe sont les enfants dont le cancer exige une chimiothérapie à doses élevées pour détruire complètement les cellules malades ou le remplacement de la moelle osseuse dysfonctionnelle par des cellules souches hématopoïetiques saines. Ces cellules

sont prélevées dans la moelle, le sang de cordon ou le sang périphérique. Le traitement de conditionnement consiste à effectuer une chimiothérapie à doses élevées ou une radiothérapie, ou les deux, an de débarrasser le corps des cellules malignes et d’inhiber le système immunitaire pour prévenir le rejet des cellules souches hématopoïétiques transplantées. Ensuite, par perfusion intraveineuse, on donne à l’enfant les cellules souches prélevées d’un membre de la famille (apparenté) ou d’un donneur volontaire (non apparenté). On parle alors d’une allogreffe (allogène). Pour une autogreffe, les cellules proviennent de l’enfant luimême (autologue). Les cellules souches hématopoïétiques transplantées produiront des cellules sanguines saines et fonctionnelles. Essentiellement, cela signie que le receveur accepte un nouvel organe producteur de sang.

Compatibilité du donneur Le processus de sélection du donneur et les complications potentielles de la greffe allogénique dépendent du système majeur d’histocompatibilité humain ou système HLA (human leukocyte antigen). Les antigènes A, B, C, D, DR et DQ sont certains des principaux antigènes d’histocompatibilité humains. Il existe une grande diversité de chacun de ces locus HLA. Par exemple, plus de 20 antigènes HLA-A et plus de 40 antigènes HLA-B peuvent être génétiquement transmis. Les gènes sont transmis sous forme d’une seule unité ou d’un haplotype. Un enfant hérite une unité de chacun de ses parents ; ainsi, l’enfant et chaque parent ont un haplotype en commun et un haplotype différent. Puisque les combinaisons possibles d’haplotypes parmi des frères et sœurs suivent les lois de la génétique mendélienne, deux frères ou sœurs ont une chance sur quatre d’avoir deux haplotypes identiques et d’avoir une correspondance exacte au locus HLA. La FIGURE 12.2 montre un exemple de transmission des antigènes leucocytaires humains d’un enfant malade. La compatibilité HLA joue un rôle important dans la prévention d’une complication grave, soit la réaction du greffon contre l’hôte (graft versus host). Puisque le système immunitaire de l’enfant receveur a été en grande partie inhibé, il est peu susceptible de rejeter la moelle osseuse reçue. Cependant, il est possible que les cellules du donneur puissent contenir des antigènes qui ne sont pas compatibles avec ceux du receveur, et qu’elles commencent à attaquer les cellules de l’organisme de celui-ci. Plus la compatibilité des systèmes HLA est grande, moins il y a de risques de réaction du greffon contre l’hôte. Toutefois, en raison de la présence d’antigènes d’histocompatibilité non déterminés, une telle réaction peut se produire même si la correspondance HLA est exacte (Gottschalk, Naik, Hegde et al., 2016).

FIGURE 12.2 Exemple de transmission génétique des antigènes leucocytaires humains – Les antigènes leucocytaires humains de l’enfant malade sont également ceux de la fratrie 4, ce qui offrirait une compatibilité pour la greffe.

12.1.5

Complications du traitement

Malgré les immenses progrès réalisés dans le traitement du cancer, ces succès ne sont pas sans conséquence. En effet, la chimiothérapie et la radiothérapie ont de nombreux effets indésirables. De plus, elles peuvent entraîner d’autres complications ou urgences oncologiques, moins courantes mais généralement plus graves, dont quelques-unes sont décrites ci-dessous.

12

Syndrome de lyse tumorale Le syndrome de lyse tumorale est une affection potentiellement mortelle qui peut se développer chez l’enfant souffrant d’un cancer en raison de la malignité de celui-ci ou de l’intensité du traitement. Il se caractérise par des anomalies métaboliques qui découlent directement de la libération rapide du contenu intracellulaire pendant la lyse, ou destruction, des cellules malignes. Cela se produit généralement chez l’enfant souffrant d’une leucémie lymphoblastique aiguë ou d’un lymphome non hodgkinien (spécialement de type Burkitt) pendant la période initiale du traitement, mais peut apparaître spontanément avant le début du traitement. Ce syndrome peut aussi toucher l’enfant qui a une grosse charge tumorale, qui est très sensible à la chimiothérapie ou qui présente un taux de prolifération rapide. Les anomalies métaboliques caractéristiques du syndrome de lyse tumorale sont entre autres l’hyperuricémie, l’hypocalcémie, l’hyperphosphatémie et l’hyperkaliémie. Dans les cas d’hyperuricémie, une cristallisation de l’acide urique peut se produire et causer une néphropathie obstructive, une lésion tubulaire, une insufsance rénale aiguë et la mort. L’hyperkaliémie causera des arythmies pouvant causer la mort (Li, Chung, Tam et al., 2015 ; Wilson et Secola, 2012) FIGURE 12.3.

Facteurs de risques Les facteurs de risque du syndrome de lyse tumorale incluent une leucocytémie élevée lors du Chapitre 12

Enfant atteint de cancer

479

FIGURE 12.3 Ensemble des manifestations cliniques caractéristiques d’un désordre métabolique comme l’hyperkaliémie, l’hyperphosphatémie et l’hypocalcémie

diagnostic, une forte charge tumorale, une sensibilité à la chimiothérapie et un taux de prolifération élevé. En plus des anomalies métaboliques déjà décrites, l’enfant peut éprouver de nombreuses manifestations cliniques, y compris une douleur au côté, de la léthargie, des nausées et des vomissements, des crampes musculaires, un prurit, de la tétanie et des convulsions.

Soins inrmiers Exsanguinotransfusion : Technique consistant à remplacer le sang circulant du malade par une quantité équivalente de sang provenant de donneurs compatibles. Aussi appelée transfusion d’échange.

480

Partie 4

Les soins et les traitements du syndrome de lyse tumorale comprennent le dépistage précoce des enfants à risque, ainsi que des mesures et des interventions prophylactiques. Les enfants à risque doivent subir des analyses biochimiques fréquentes et recevoir une hyperhydratation par perfusion intraveineuse. De plus, il faut surveiller leur pH urinaire et tenir un bilan de leurs ingesta et excreta. Des médicaments sont couramment utilisés dans le traitement de la lyse tumorale, notamment l’allopurinol, qui contribue à l’excrétion des métabolites de la purine, réduisant ainsi la production de l’acide urique. Toutefois, ce dernier ne peut pas éliminer les excès de l’acide urique (hyperuricémie) ou favoriser son élimination. Ainsi, pour diminuer rapidement le taux d’acide urique, on administre plutôt du rasburicase (Wilson et Secola, 2012 ; Zimner-Rapuch, Janus, Amet et al., 2013). Ce médicament convertit l’acide urique en allantoine, qui est plus soluble dans l’urine. Si le syndrome de lyse tumorale persiste,

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

l’hydratation intraveineuse doit continuer, et les anomalies métaboliques particulières doivent être traitées. D’autres interventions viseront à contrôler les autres anomalies métaboliques, comme l’hyperkaliémie, l’hyperphosphatémie et l’hypocalcémie, notamment en forçant la diurèse par l’administration de diurétiques qui favorisent l’élimination (Cairo, Coifer, Reiter et al., 2010). Enn, des exsanguinotransfusions sont parfois nécessaires pour réduire les effets métaboliques d’une lyse tumorale massive, particulièrement chez l’enfant présentant une forte charge tumorale.

Hyperleucocytose L’hyperleucocytose, qui se dénit comme une leucocytémie périphérique très supérieure à 10 × 109/L peut entraîner une obstruction capillaire, un micro-infarctus et un dysfonctionnement des organes. Au début, l’enfant peut être asymptomatique, mais il faut être à l’affût des signes d’anxiété et d’agitation, qui sont une des premières indications subtiles des changements cliniques. Puis, l’enfant subit fréquemment une détresse respiratoire et une cyanose. En outre, il présente des changements neurologiques, notamment une altération de la conscience, des perturbations visuelles, de l’agitation, de la confusion, de l’ataxie et du délire. Les soins et les traitements comprennent la cytoréduction (réduction de la tumeur) rapide au moyen d’une chimiothérapie,

l’hydratation, l’alcalinisation urinaire et l’administration d’allopurinol. Une leucophérèse ou une exsanguinotransfusion peuvent être nécessaires.

Syndrome de la veine cave supérieure Le syndrome de la veine cave supérieure est un groupe de symptômes qui se manifestent lorsque des lésions thoraciques étendues – particulièrement celles dues à la maladie de Hodgkin, au lymphome non hodgkinien, au neuroblastome thoracique, aux cellules germinales et à une thrombose due au cathéter central – exercent une compression de la veine cave supérieure et que le sang ne peut plus retourner au cœur normalement (Secola et Reid, 2014). Cela cause une augmentation de la pression dans les veines, ce qui provoque une accumulation de liquide ou un œdème des tissus avoisinants, entraînant une obstruction des voies respiratoires au niveau de la trachée et pouvant provoquer une insufsance respiratoire. Les signes cliniques se manifestent initialement par une cyanose du visage, du cou et de la partie supérieure du thorax, de l’œdème aux extrémités supérieures et une distension des veines du cou et du thorax FIGURE 12.4 . L’enfant peut être anxieux et avoir des difcultés respiratoires, de la sibilance ou une toux fréquente due à l’obstruction des voies respiratoires (Theis, 2014). Les soins et les traitements consistent à protéger les voies respiratoires et à soulager la détresse respiratoire. Un traitement doit être amorcé rapidement et soulagera généralement les symptômes.

Compression médullaire Différents cancers peuvent envahir ou toucher la moelle épinière, causant ainsi des symptômes aigus de compression médullaire. L’enfant atteint de tumeurs primaires au SNC peut avoir des tumeurs qui proviennent de la moelle épinière ou s’y propagent. D’autres tumeurs solides, comme le lymphome paraspinal, le neuroblastome ou le sarcome, peuvent produire des métastases à la moelle épinière et exercer une pression (Wilson et Secola, 2012). La douleur dorsale est une manifestation initiale courante de la compression médullaire, mais les autres signes possibles sont des changements sensoriels, une faiblesse des extrémités, la perte des fonctions vésicale et intestinale, et l’insufsance respiratoire. Un examen physique détaillé est essentiel à la détection précoce des symptômes, et l’IRM est la méthode diagnostique privilégiée (McCurdy et Shanholtz, 2012). Le traitement peut inclure l’administration de stéroïdes à fortes doses pour réduire l’œdème connexe et soulager les manifestations cliniques. Si indiqué, on peut aussi effectuer sans tarder une radiothérapie (rayonnement émergent) ou une laminectomie.

Choc septique Le choc septique est une urgence oncologique qui a une probabilité très élevée de survenir durant la période du traitement contre le cancer 16 . Une èvre chez l’enfant en période de neutropénie doit être considérée comme une urgence, puisqu’elle peut masquer une infection. En effet, c’est la cause principale de morbidité et de mortalité chez la population pédiatrique atteinte de cancer (Hakim et Gaur, 2011 ; Volpe, Harrison, Damian et al., 2012). Les enfants avec une numération absolue de neutrophiles (NAN) de moins de 0,1 × 109/ L ou en période FIGURE 12.4 Bébé au visage prolongée de neutropénie sont à très goné et présence de cyanose grand risque de contracter une infection bactérienne grave pouvant causer un choc 16 septique. D’autres facteurs de risque sont la malnutrition, la présence d’un cathéter central ainsi Le choc septique est que des altérations de la peau et des muqueuses de expliqué plus en détail la bouche, car elles sont une porte d’entrée pour dans le chapitre 16, les bactéries dans le sang,plus particulièrement les Troubles liés au système bactéries à Gram négatif entériques (p. ex., E. coli, cardiovasculaire. Enterobacter, Pseudomonas aeruginosa). En présence de ces manifestations cliniques, l’inrmière est responsable d’aviser le médecin et d’obtenir les hémocultures avant de commencer l’antibiothérapie. Les antibiotiques doivent être administrés le plus vite possible selon le protocole en place. En fonction de l’état de santé de l’enfant, d’autres analyses pourront être demandées, parmi lesquelles une analyse d’urine, une radiographie pulmonaire, des analyses sanguines et des cultures du site du cathéter central. La surveillance des signes vitaux est essentielle. Il faut noter que chez les enfants, les changements dans les signes vitaux sont toujours en décalage par rapport aux changements cliniques. Il faut donc rapporter tout changement à l’équipe médicale dans les plus brefs délais.

12

CE QU’IL FAUT RETENIR

Une èvre chez l’enfant en période de neutropénie doit être considérée comme une urgence, puisqu’elle peut masquer une infection.

Choc anaphylactique Les réactions d’hypersensibilité ou de choc anaphylactique peuvent se produire dans les minutes qui suivent l’administration d’agents cytotoxiques et de produits sanguins. Les agents cytotoxiques à haut risque sont notamment l’asparaginase-L, la bléomycine, le cisplatine et l’étoposide. Certains agents comme la PEG-asparaginase peuvent causer des réactions tardives. Les réactions anaphylactiques peuvent varier d’une simple urticaire à une réaction systémique TABLEAU 12.3. Les responsabilités de l’inrmière en présence d’un choc anaphylactique comprennent la préparation de la liste et le dosage des médicaments d’urgence selon le poids de l’enfant, ainsi que la Chapitre 12

Enfant atteint de cancer

481

TABLEAU 12.3

Réactions anaphylactiques par système

SYSTÈME

RÉACTIONS

Tégumentaire

• Œdème de Quincke • Rougeurs • Éruptions cutanées

Nerveux

• Anxiété • Agitation

Respiratoire

• Enrouement de la voix • Toux • Éternuements • Œdème laryngé avec dyspnée • Stridor • Cyanose

Cardiovasculaire

• Tachycardie • Hypotension • Diminution de la perfusion périphérique

Gastro-intestinal

• Nausées • Vomissements • Diarrhée

préparation de l’équipement d’urgence. De plus, elle doit pouvoir reconnaître les réactions mentionnées précédemment. L’inrmière qui soupçonne de telles réactions doit aviser le médecin, cesser l’administration du produit en cours de perfusion, rincer la tubulure intraveineuse, continuer la perfusion intraveineuse avec une solution saline et administrer les médicaments d’urgence en présence du médecin tout en surveillant les signes vitaux de l’enfant et ses réactions subséquentes. 21 La description complète du syndrome de sécrétion inappropriée de l’hormone antidiurétique est présen­ tée dans le chapitre 21, Troubles liés au système endocrinien.

Dans certains cas, une prémédication est nécessaire avant l’administration de certains agents ou de transfusions sanguines, surtout si l’enfant a eu des réactions auparavant. L’inrmière doit aviser l’enfant et sa famille des délais possibles de réactions anaphylactiques, notamment avec la PEG-asparaginase, et les informer quant aux interventions à effectuer à la maison si une réaction est suspectée.

Typhlite La typhlite (aussi appelée entérocolite neutropénique ou nécrosante) est une complication potentiellement grave de la neutropénie. Elle est caractérisée par une inammation du cæcum. Elle survient chez les enfants souffrant de neutropénie importante et atteints, entre autres, de leucémie myéloïde aiguë ou de leucémie lymphoblastique aiguë à haut risque.

482

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

Les bactéries qui envahissent la muqueuse intestinale peuvent causer une inammation et un épaississement de celle-ci, et même provoquer une perforation de la paroi intestinale. Les manifestations cliniques de la typhlite sont une èvre persistante, des nausées et des vomissements, de la diarrhée aqueuse et des douleurs abdominales intenses dans le quadrant inférieur droit de l’abdomen. Le traitement consiste en une prescription d’antibiotiques à large spectre ainsi qu’une alimentation parentérale pour mettre les intestins au repos et, si nécessaire, la pose d’une sonde gastrique. Des examens radiologiques permettent de suivre l’évolution du traitement. En cas de complications, il faut avoir recours à la chirurgie. Le facteur important pour le pronostic est la récupération des neutrophiles. Les interventions inrmières consistent à mesurer la circonférence abdominale, à vérier la présence de bruits intestinaux et à évaluer la douleur. Il est impératif de bien contrôler la douleur et de prodiguer les soins de la bouche et de la peau périanale. Enn, l’inrmière doit soutenir l’enfant et sa famille durant cette période très difcile.

Syndrome de sécrétion inappropriée d’hormone antidiurétique Certaines chimiothérapies (vincristine, cyclophosphamide, ifosfamide et cisplatine) peuvent causer le syndrome de sécrétion inappropriée d’hormone antidiurétique (ADH). L’ADH, qui est produite par l’hypothalamus, entraîne une rétention liquidienne qui cause une hyponatrémie et une diminution du débit urinaire. Les manifestations cliniques sont la fatigue, l’anorexie, la céphalée, les nausées, les vomissements, les crampes musculaires, une altération de l’état mental (léthargie, faiblesse, irritabilité, agitation, confusion, agressivité, délirium, désorientation, hallucinations), les convulsions et le coma. L’inrmière en oncologie doit être vigilante par rapport aux manifestations cliniques du syndrome de sécrétion inappropriée d’ADH (Castillo, Vincent et Justice, 2012) 21 .

Coagulation intravasculaire disséminée La coagulation intravasculaire disséminée est une conséquence secondaire de la septicémie à bactéries à Gram négatif chez les enfants atteints de cancer. Chez les enfants ayant nouvellement reçu un diagnostic de leucémie promyélocytaire aiguë, le neuroblastome et les maladies disséminées sont les plus susceptibles de développer une coagulation intravasculaire disséminée. Cette affection est un syndrome caractérisé dans un premier temps par l’activation de la cascade de coagulation, ce qui entraîne la formation de thrombus dans les petits et les moyens vaisseaux

sanguins, et obstrue l’alimentation sanguine aux différents organes. L’utilisation excessive des facteurs de coagulation occasionne ensuite des saignements généralisés. Ce syndrome se manifeste par des ecchymoses, des saignements, de la èvre, un essoufement, de la douleur ou de l’œdème aux bras et aux jambes, des caillots de sang, un ictère, une hypotension, de l’hypoxie et une insufsance organique (foie, cœur, SNC, reins et poumons) (Wada, Matsumoto et Yamashita, 2014).

TABLEAU 12.4 CONDITION

DÉFINITION

VALEURS

Neutropénie

Diminution du nombre de neutrophiles circulants

NAN (109 cellules/L) • 1-1,5 : risque léger d’infection • 0,5-0,9 : risque modéré d’infection • Moins de 0,5 : risque élevé d’infection grave

Thrombocytopénie

Aplasie médullaire L’aplasie médullaire résulte d’une atteinte au fonctionnement normal de la moelle osseuse en raison de la maladie, de la chimiothérapie ou de la radiothérapie (Wether et Watral, 2014). Après des traitements myélosuppressifs, trois conditions sont liées à l’aplasie médullaire : la neutropénie, la thrombocytopénie et l’anémie TABLEAU 12.4.

Valeurs pour les conditions liées à l’aplasie médullaire

Anémie

Diminution de la numération plaquettaire nécessaire à la coagulation

Plaquettes (109 cellules/L)

Diminution du nombre de globules rouges

Hémoglobine (g/L)

• 50-75 : risque de saignement léger • 20-49 : risque de saignement modéré • Moins de 20 : risque de saignement grave • 70 : seuil considéré pour une transfusion de globules rouges

Soins inrmiers CANCERS PÉDIATRIQUES

Détecter les manifestations cliniques du cancer pédiatrique La détection rapide des manifestations cliniques est essentielle au traitement précoce et à une guérison éventuelle. Les cancers pédiatriques sont souvent difciles à déceler. Il importe donc d’être attentif à la présence de manifestations cliniques inhabituelles persistantes. Cette section traite de certaines des manifestations cliniques les plus fréquentes du cancer pédiatrique. La douleur peut être une manifestation clinique initiale précoce ou tardive du cancer. Des renseignements détaillés concernant la manifestation de la douleur, les caractéristiques de la région touchée, l’intensité et les facteurs de soulagement de la douleur sont nécessaires. La douleur peut être généralisée ou locale. Par exemple, environ 20 % des enfants ayant une leucémie ressentent des douleurs aux os. La douleur, l’œdème et la sensibilité peuvent être des manifestations cliniques initiales de tumeurs solides. De plus, l’enfant qui a une tumeur solide a généralement une masse. Si l’enfant a une masse abdominale, il faut déterminer si elle est maligne, comme dans le cas d’une tumeur de Wilms ou d’un neuroblastome. La èvre est fréquente au cours de l’enfance et peut être due à de nombreuses maladies, y compris le cancer. La èvre d’un enfant atteint d’un cancer peut aussi être due à une infection. Un examen détaillé de la peau peut révéler des manifestations cliniques d’une faible numération plaquettaire. Des ecchymoses et des pétéchies sont le plus souvent

observées sur les extrémités du corps et sur les parties comprimées par les vêtements, par exemple à la ceinture. Un saignement spontané des gencives ou du nez peut se produire lorsque la numération plaquettaire est inférieure à 20 × 109/L. L’enfant atteint d’un cancer de la moelle osseuse est généralement pâle, présente des symptômes de léthargie, perd du poids et ressent un malaise généralisé. Ces symptômes peuvent être attribuables à l’anémie due au remplacement des cellules normales par des cellules malignes dans la moelle osseuse. L’inrmière doit évaluer les manifestations cliniques de l’anémie 18 .

12 18 Les différentes formes d’anémies sont abordées dans le chapitre 18, Troubles liés au système hématologique et immunitaire.

Des ganglions lymphatiques enés sont une autre manifestation clinique pédiatrique courante. Toutefois, des ganglions lymphatiques fermes et enés chez un enfant qui a de la èvre depuis plus d’une semaine, a perdu du poids récemment ou a une radiographie thoracique anormale peuvent indiquer une maladie grave et doivent faire l’objet d’une évaluation plus détaillée. La présence d’une leucocorie, à savoir un reet blanc dans l’œil plutôt que le réexe pupillaire rouge normal, est le signe classique d’un rétinoblastome. Également, le plissement, le strabisme ou l’enure des yeux peuvent indiquer d’autres tumeurs solides comme un rhabdomyosarcome de l’orbite oculaire. Les manifestations cliniques de l’enfant atteint d’une tumeur cérébrale dépendent de la région cérébrale touchée et de la progression de la tumeur. L’inrmière doit effectuer une évaluation neurologique détaillée pour déterminer la région exacte où se trouve la tumeur.

Chapitre 12

CE QU’IL FAUT RETENIR

La èvre d’un enfant atteint d’un cancer est due à une infection ou au cancer lui-même.

Enfant atteint de cancer

483

TABLEAU 12.5

Complications des effets indésirables liés au traitement

SYSTÈMES

COMPLICATIONS DES EFFETS INDÉSIRABLES

Hématologique et immunitaire

• Anémie

Traiter les effets indésirables

• Thrombocytopénie • Neutropénie • Risque d’infections bactériennes, opportunistes (pneumocystose) ou virales (varicelle pour les enfants qui ne l’ont pas contractée ou qui n’ont pas été vaccinés, ou zona)

Respiratoire

• Pneumonie

Cardiovasculaire

• Cardiomyopathie aiguë

Génito-urinaire

• Insufsance rénale

• Cystite hémorragique

Gastro-intestinal

• Altérations de l’appétit

• Constipation

• Mucosite

• Œsophagite

• Nausées

• Cellulite périanale

• Vomissements

• Hépatite

• Diarrhée

• Pancréatite

• Diabète insipide

• Hypertension intracrânienne

• Décits cognitifs et comportementaux

• Décits des nerfs crâniens

Nerveux 14

• Ototoxicité

• Fibrose pulmonaire

Soigner une infection

• Syndrome de la fosse postérieure

L’utilisation du cathéter Endocrinien • Altérations du fonctionnement des hormones veineux central est abordée Tégumentaire • Altérations de l’intégrité de la peau dans le chapitre 14, Techniques de soins.

Musculosquelettique et articulaire

• Limitations des mouvements

Neuromusculaire et musculaire

• Faiblesse musculaire

Les soins d’un enfant atteint d’un cancer ne se restreignent pas aux traitements visant à éliminer les cellules malignes. En effet, en raison du fragile équilibre entre l’élimination des cellules cancéreuses et la préservation des cellules fonctionnelles, des traitements de soutien sont souvent nécessaires pendant cette période durant laquelle les tissus corporels normaux subissent de graves dommages. Le risque de complications découlant du traitement est une préoccupation importante relative à l’enfant traité pour un cancer TABLEAU 12.5 .

Une inrmière qui soigne un enfant sous traitement de chimiothérapie doit savoir que celui-ci est plus vulnérable aux infections durant la période du nadir (le point le plus bas), soit de 10 à 14 jours après un traitement de chimiothérapie. L’inrmière qui soigne un enfant évreux doit connaître les manifestations cliniques du choc septique. L’enfant évreux dont la NAN est inférieure à 0,5 × 109/L présente les risques suivants ENCADRÉ 12.6 : • infection massive ; • malaise général ; • invasion par des organismes causant des infections secondaires. Les complications liées à la èvre et à l’infection sont les principales causes de morbidité et de mortalité chez la population oncologique pédiatrique (Vanderway, Vincent, Walsh et al., 2017 ; Volpe et al., 2012). Par conséquent, il faut examiner l’enfant évreux an de déceler des foyers potentiels d’infection, tels qu’un point

• Amputations

• Asymétrie

Pratiques inrmières ENCADRÉ 12.6

Calculer la numération absolue de neutrophiles

Déterminer la NAN à partir des valeurs relatives de la formule leucocytaire. La valeur absolue est plus précise et permet d’évaluer le niveau de neutropénie de l’enfant. 1. Additionner la valeur relative des neutrophiles segmentés et des neutrophiles non segmentés (bands ou stabs) de la formule leucocytaire. 2. Multiplier ce résultat par le nombre absolu de globules blancs (GB). Le résultat obtenu donne la NAN, ce qui permet de déterminer le niveau de neutropénie. Exemple : GB = 1,0 × 109/L (1 000/mm3) Neutrophiles segmentés = 8 %

484

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

Neutrophiles non segmentés = 6 % 1re étape : 8 % + 6 % = 14 % 2e étape : 0,14 × 1 000 GB = NAN 140/109/L • 1-1,5 : risque léger d’infection • 0,5-0,999 : risque modéré d’infection • Moins de 0,5 : risque élevé d’infection Dans cet exemple, la neutropénie sera qualiée de grave, car elle est inférieure à 0,5 × 109/L, ce qui fait que l’enfant court un risque élevé de contracter une infection.

d’injection, la région périanale, l’ulcération d’une muqueuse, une abrasion mineure ou une déchirure de la peau (p. ex., les cuticules autour des ongles). Bien que le corps puisse être incapable de produire une réaction inammatoire adéquate à l’infection et que les signes cliniques habituels d’infection puissent être partiels ou absents, l’enfant aura de la èvre. Il faut donc surveiller étroitement sa température. Pour déterminer la source de l’infection, l’équipe de soins doit faire des hémocultures, des analyses des selles, de l’urine et du nasopharynx, ainsi que des radiographies thoraciques. Lorsqu’une infection est soupçonnée, un traitement antibiotique intraveineux à large spectre doit être entrepris rapidement, avant même que l’organisme responsable soit déterminé, et il doit être poursuivi pendant une période de 7 à 10 jours. Si l’enfant n’a pas déjà un dispositif d’accès veineux, il faut prévoir l’installation d’un cathéter veineux central introduit par voie périphérique (CVCIVP) an d’éviter de multiples ponctions veineuses lors du traitement antibiotique. Les organismes suivants sont les plus létaux pour ces enfants : 1) les virus, particulièrement la varicelle, le zona, l’herpes simplex, le virus respiratoire syncytial, l’inuenza et le cytomégalovirus ; 2) le protozoaire Toxoplasma gondii ; 3) les champignons, spécialement le Pneumocystis jirovecii (auparavant appelé P. carinii) et le Candida albicans ; 4) les bactéries à Gram négatif telles que P. aeruginosa, E. coli et Klebsiella ; 5) les bactéries à Gram positif, particulièrement Staphylococcus et Enterococcus (Ardura et Koh, 2016). Un traitement préventif contre la pneumonie à Pneumocystis, tel que la combinaison de triméthoprime et de sulfaméthoxazole, est couramment donné à la plupart des enfants qui suivent un traitement contre le cancer (Ardura et Koh, 2016). Les facteurs de croissance de colonies de granulocytes (G-CSF) – une famille d’hormones glycoprotéiques qui régulent la reproduction, la maturation et le fonctionnement des globules – sont maintenant régulièrement utilisés comme mesures de prévention des effets indésirables d’une faible numération globulaire. Ils favorisent la prolifération des cellules souches et leur maturation plus rapide, ce qui leur permet d’entrer plus tôt dans le sang. Les G-CSF (filgrastim [NeupogenMD], peglgrastim [NeulastaMD]) favorisent également le développement granulocytaire et peuvent diminuer la durée de la neutropénie : cela réduit l’incidence et la durée de l’infection de l’enfant traité pour un cancer. Les G-CSF permettent également de réduire le

temps de rétablissement de la moelle osseuse après une greffe de cellules souches hématopoïétiques (Ardura et Koh, 2016). La prévention de l’infection reste une priorité après le congé de l’hôpital. Dans certains établissements, on permet aux enfants de retourner à l’école lorsque la NAN est supérieure à 0,5 × 10 9/L, alors que dans d’autres, on n’impose aucune restriction à l’enfant, peu importe la numération globulaire. Si la NAN descend sous les 0,5 × 10 9/L, on recommande à l’enfant d’éviter les endroits bondés tels que les centres commerciaux et le métro, par précaution. En tout temps, la famille doit être encouragée à bien se laver les mains pour éviter d’introduire des agents pathogènes dans le domicile.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les complications liées à la èvre et à l’infection sont les principales causes de morbidité et de morta­ lité chez la population oncologique pédiatrique.

Prévenir une hémorragie Avant l’avènement de la transfusion de plaquettes, l’hémorragie était la principale cause de décès des enfants ayant certains types de cancers. De nos jours, la plupart des épisodes de saignement peuvent être prévenus ou maîtrisés par l’administration judicieuse de concentrés de plaquettes ou de plasma qui contient les facteurs de coagulation II, V, VII, VIII et X, ainsi que du brinogène. Les hémorragies internes spontanées graves se produisent généralement lorsque la numération plaquettaire est de 5 × 10 9/L ou moins, mais cela varie (Wether et Watral, 2014).

12

L’objectif de la transfusion de plaquettes est de maintenir une numération plaquettaire pour éviter un saignement. La décision clinique de procéder à une transfusion de plaquettes dépend de plusieurs critères, parmi lesquels : • la durée de la période de récupération à la suite du traitement de chimiothérapie, • la présence d’une èvre ou de signes de saignements actifs avant une procédure invasive, • le recours à une greffe de cellules souches hématopoïétiques, et • la présence d’une tumeur cérébrale chez l’enfant (Barnard, Portwine et membres du groupe des lignes directrices du Réseau C17, 2010). L’épistaxis, les saignements de la gencive et la présence d’ecchymoses, causés par une production insufsante de plaquettes, sont les manifestations cliniques les plus communes. L’inrmière doit montrer aux parents et aux autres enfants de la famille comment arrêter le saignement du nez. En règle générale, cela consiste à appliquer une pression sur la région touchée pour arrêter le saignement et favoriser la formation d’un caillot. Une épreuve de compatibilité croisée des concentrés de plaquettes et du groupe sanguin

Chapitre 12

Enfant atteint de cancer

485

Jugement

clinique Henrik est âgé de 9 ans. Il reçoit des traitements de chimiothérapie en raison d’une leucémie lymphoblastique aiguë. Ses derniers signes vitaux sont les suivants : T° axillaire : 38,5 °C, fréquence cardiaque : 140 batt./min, fréquence respiratoire : 28 R/min, P.A. : 140/56 mm Hg, SpO2 : 91 %. Il reçoit de l’oxygène par lunette nasale à raison de 4 L/min. Actuellement, il est légèrement somnolent. À l’examen buccal, vous observez que sa langue est recouverte d’une plaque blanche et que la muqueuse est sèche et rouge. Sur quelle manifestation clinique devriez-vous intervenir prioritairement ? a) La pression artérielle élevée. b) La tachycardie. c) La polypnée. d) L’hyperthermie.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les nausées et les vomissements qui surviennent tout de suite après l’administration d’une chimiothérapie ou d’une radiothérapie crânienne ou abdominale peuvent être intenses.

n’est normalement pas nécessaire. Toutefois, puisque les plaquettes contiennent des composants d’antigènes particuliers semblables aux facteurs du groupe sanguin, l’enfant qui reçoit de multiples transfusions peut devenir sensibilisé à un groupe de plaquettes différent du sien. Une épreuve de compatibilité croisée des plaquettes et des composants sanguins du donneur doit alors être effectuée, si possible.

Pendant les saignements, les parents et l’enfant ont besoin d’un grand soutien émotionnel. La vue du sang qui coule est bouleversante. Les parents demandent alors souvent une transfusion de plaquettes, ne sachant pas qu’il faut d’abord tenter des mesures locales. L’inrmière peut calmer leurs inquiétudes en expliquant pourquoi il est préférable de retarder la transfusion de plaquettes jusqu’à ce que ce soit absolument nécessaire. L’enfant qui est à domicile et qui a une faible numération plaquettaire (généralement inférieure à 100 ×109/L) doit éviter les activités susceptibles de causer des blessures ou des saignements, notamment la bicyclette, la planche à roulettes, le patin à roulettes ou à roues alignées, l’ascension d’un arbre ou d’équipements de terrains de jeux, ainsi que les sports de contact tels que le football et le soccer. Lorsque sa numération plaquettaire augmente, ces restrictions peuvent être levées à la suite d’une évaluation clinique. De plus, l’enfant ne doit pas prendre d’acide acétylsalicylique ou de produits à base d’acide acétylsalicylique. En cas de douleurs légères ou de èvre, l’acétaminophène doit plutôt être utilisé.

Prévenir une anémie

5 Certaines de ces inter­ ventions sont présentées dans le chapitre 5, Éva­ luation et traitement de la douleur.

486

Partie 4

Le remplacement complet de la moelle osseuse par des cellules cancéreuses peut initialement causer une anémie importante. Pendant la thérapie d’induction, des transfusions sanguines avec des concentrés de globules rouges peuvent être nécessaires pour élever le taux d’hémoglobine à une valeur d’environ 100 g/L. Les précautions habituelles relatives à l’administration de transfusions sanguines chez l’enfant doivent être prises. L’anémie est aussi une conséquence de la myélosuppression d’origine pharmacologique. La production de globules rouges, bien qu’elle ne soit pas aussi gravement affectée que celle des leucocytes,

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

peut être retardée. Puisque les enfants résistent étonnamment bien à un faible taux d’hémoglobine, la meilleure approche consiste à les laisser déterminer leur degré d’activité sous la supervision raisonnable d’un adulte. Les parents doivent être à l’affût de manifestations cliniques comme la fatigue, l’essoufement, les céphalées, les étourdissements et le teint pâle, et aviser le personnel médical chargé du suivi de l’enfant, le cas échéant. Les parents devront peut-être avertir l’enseignant des limites physiques de leur enfant, particulièrement en ce qui a trait aux activités intenses.

Soulager les nausées et les vomissements Les nausées et les vomissements qui surviennent tout de suite après l’administration d’une chimiothérapie ou d’une radiothérapie crânienne ou abdominale peuvent être intenses. Les antagonistes du récepteur de la 5-hydroxytryptamine-3 (p. ex., l’ondansétron [Zofran MD], le granisétron) sont les antiémétiques de choix pour soulager les nausées et les vomissements causés par la chimiothérapie et la radiothérapie (Dupuis, Boodhan, Holdsworth et al., 2013). En comparaison des médicaments traditionnels, ces agents ont l’avantage de ne pas produire d’effets indésirables extrapyramidaux. De multiples études ont montré que l’ondansétron soulage efficacement les enfants qui suivent une chimiothérapie hautement émétique et qu’il est plus efcace s’il est pris en combinaison avec de la dexaméthasone (Dupuis et al., 2013). Pour les vomissements légers à modérés, des médicaments de type phénothiazine sont donnés. La prométhazine (Histantil MD), la chlorpérazine par voie orale, la métoclopramide (antagoniste de la dopamine) ou la triméthobenzamide peuvent s’avérer efcaces. Des cannabinoïdes synthétiques, tels que le nabilone, sont maintenant administrés aux enfants qui reçoivent une chimiothérapie. Le nabilone soulage les nausées et les vomissements, en plus de stimuler l’appétit (Feyer et Jordan, 2011). Le régime antiémétique le plus efcace consiste à administrer l’antiémétique avant le début de la chimiothérapie (de 30 minutes à 1 heure avant) et régulièrement (et non au besoin) pendant une période d’au moins 24 heures après la chimiothérapie. En plus de prévenir les nausées et les vomissements, ce régime empêche l’apparition de symptômes anticipatoires (la réponse conditionnée des nausées et des vomissements avant l’administration du médicament). D’autres interventions non pharmacologiques peuvent aider à maîtriser les nausées et les vomissements anticipatoires, ainsi que ceux qui surviennent après le traitement 5 . Dans certains cas, il peut aussi être

Maintenir un état nutritionnel adéquat La modication de l’alimentation est un effet indésirable commun du traitement. L’évaluation continue de l’état nutritionnel de l’enfant, de ses ingesta et de ses dépenses d’énergie doit être faite pendant toute la durée du traitement. La taille, le poids et la circonférence crânienne de l’enfant (pour les enfants de moins de trois ans) doivent être mesurés systématiquement lors des visites à l’hôpital ou à la clinique. Des analyses biochimiques telles la préalbumine sérique, la transferrine et l’albumine peuvent aider à évaluer l’état nutritionnel de certains enfants, mais cette évaluation ne doit pas être fondée sur une seule analyse (Ilhan, Sari, Yesil et al., 2015). Les interventions nutritionnelles auprès des enfants qui suivent un traitement contre le cancer sont établies à partir d’un plan de soins nutritionnels individualisé fondé sur des évaluations régulières. Le maintien d’un bon état nutritionnel est important, car un état nutritionnel décient peut réduire la tolérance au traitement, altérer le métabolisme des agents cytotoxiques, prolonger les épisodes de neutropénie et accroître le risque d’infection. La nutritionniste est généralement très impliquée dans les soins de l’enfant atteint de cancer et est une ressource importante pour outiller les familles durant cette période difficile. On la consulte notamment pour une perte de poids importante due aux symptômes gastro-intestinaux comme les vomissements et les diarrhées récurrentes. Les mesures de soutien nutritionnel incluent notamment des suppléments oraux à forte teneur en protéines et des aliments hypercaloriques. An d’augmenter l’apport calorique de l’enfant, on peut utiliser du lait entier, ajouter du tofu à la plupart de ses repas (teneur élevée en protéines) et lui servir des aliments riches en matières grasses plutôt que sans gras ou à teneur réduite en gras. D’autres façons d’augmenter son apport calorique consistent à cuisiner avec du beurre, à ajouter du sucre ou du fromage sur ses aliments, et à lui laisser à portée de main des collations riches en calories, telles que des mélanges de noix, du beurre d’arachide ou des fruits séchés. L’alimentation entérale ou l’hyperalimentation parentérale peuvent être nécessaires si l’enfant est incapable d’ingérer suffisamment de

calories pour prévenir la perte de poids 14 . En dépit de toutes ces méthodes, certains enfants ne mangent tout de même pas. Voici certaines des théories qui peuvent expliquer une anorexie persistante : 1. une conséquence physique non spécique due au cancer ; 2. une aversion conditionnée envers les aliments en raison des nausées et des vomissements subis pendant le traitement ;

clinique

Jugement

utile de donner le médicament antinéoplasique avec un léger sédatif à l’heure du coucher. Il semble que des médicaments cytotoxiques tels que le méthotrexate et la 6-mercaptopurine peuvent être mieux tolérés s’ils sont administrés le soir plutôt que le matin (Children’s Oncology Group, 2016 ; Schmiegelow, Nielsen, Frandsen et al., 2014).

Felipe est âgé de 14 ans. Il reçoit des traitements de chimiothérapie I.V. pour traiter un lymphome non hodgkinien. Vous constatez qu’il a des pétéchies sur les bras, les jambes et la muqueuse buccale, de même que des ecchymoses à divers stades de guérison. Quel résultat des analyses de laboratoire devriez-vous penser à vérier en lien avec les manifestations cliniques que Felipe présente ? a) L’hémoglobine. b) Les thrombocytes. c) La formule leucocytaire. d) La vitesse de sédimentation. MAIS SI...

Si Felipe était évreux, quel autre résultat des analyses de laboratoire faudrait-il alors vérier ?

3. une réaction au stress environnemental liée à l’alimentation ou à l’état de l’enfant ; 4. une conséquence de la dépression ;

5. un mécanisme de contrôle de l’enfant, à qui tellement de choses sont imposées. Lorsque la perte d’appétit et de poids persiste, l’inrmière doit évaluer la situation familiale an de déterminer si une de ces variables contribue au problème. Lorsque l’état de santé de l’enfant est jugé grave ou qu’il a du mal à s’alimenter, l’insertion d’un tube nasogastrique, pour le court terme, ou d’une gastrostomie, pour le long terme, est considérée.

Soigner l’ulcération des muqueuses Les dommages aux cellules de la muqueuse gastrointestinale, qui provoquent la formation d’ul cères le long du tube digestif, sont certains des effets indésirables les plus pénibles de plusieurs médicaments cytotoxiques. Les ulcères buccaux (stomatite) sont des zones douloureuses rouges et érodées à l’intérieur de la bouche ou du pharynx. Des lésions semblables peuvent s’étendre de l’œsophage jusqu’à la région rectale. Elles contribuent grandement à l’anorexie, puisqu’elles rendent l’alimentation très douloureuse 1 . Certaines interventions peuvent soulager l’enfant souffrant d’ulcères buccaux, entre autres une alimentation non irritante, humide et molle, servie froide ou à la température ambiante (Children’s Oncology Group, 2011) en évitant les aliments épicés et acides (Kline, 2014) et l’utilisation d’une brosse à dents à poils souples plutôt que standard (Hessigrave et Chordas, 2014). Les gargarismes fréquents avec de la chlorhexidine 2 ou avec une solution de bicarbonate de soude et de sel (5 mL de bicarbonate de soude et 2,5 mL de sel dans environ 1 L d’eau), l’utilisation de sucralfate ainsi que l’administration d’anesthésiques locaux sans

Chapitre 12

14 Ces interventions sont présentées plus en détail dans le chapitre 14, Techniques de soins.

PHARMACOVIGILANCE

1. La lidocaïne visqueuse n’est pas recommandée pour les jeunes enfants. Si elle est appliquée sur le pharynx, elle peut inhiber le réexe nauséeux et accroître le risque d’aspiration. De plus, un lien a été établi entre les convulsions et la lidocaïne visqueuse administrée par voie orale, fort probablement en raison de l’absorption rapide du produit dans le sang par les lésions orales (U.S. Food and Drug Administration, 2014). 2. Il n’est pas recommandé d’utiliser de la chlorhexidine pour la prévention ou le traitement de la mucosite. Son utilisation est suggérée en raison de son effet antiplaque seulement si la bouche de l’enfant est intacte ou chez un enfant avec une mauvaise hygiène buccale (Hessigrave et Chordas, 2014).

Enfant atteint de cancer

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12

Jugement

clinique Felipe pourrait-il pratiquer des sports comme la natation et le tennis ? Justiez votre réponse.

PHARMACOVIGILANCE

Éviter d’utiliser des écouvillons à la glycérine citronnée et du peroxyde d’hydrogène, qui assèchent la muqueuse. De plus, le citron peut être très irritant, particulièrement sur les tissus érodés.

alcool tels qu’une solution de diphenhydramine ou d’hydroxyde d’aluminium et de magnésium (AlmagelMD) (Miller, Donald et Hagemann, 2012), ou encore un mélange d’eau, de diphenhydramine, de bicarbonate de sodium et de nystatine (Magic Mouthwash MD) sont d’autres interventions qui peuvent soulager l’enfant. Même si les anesthésiques locaux s’avèrent efcaces dans le soulagement temporaire de la douleur, de nombreux enfants n’aiment pas leur goût et la sensation d’engourdissement qu’ils provoquent.

l’insertion de suppositoires sont toujours à éviter, car ils peuvent causer des saignements ou des lésions, et augmenter les risques d’infection chez les enfants en phase de thrombocytopénie ou de neutropénie (Landier, Adlard et Pursell, 2012). De plus, il existe des moyens de prévention tels qu’un changement de couches très fréquent ainsi que l’utilisation d’un protecteur cutané et de débarbouillettes plutôt que des lingettes pour nettoyer les fesses (Espirito Santo et Choquette, 2013, 2014).

Il est particulièrement difcile d’administrer des soins buccaux aux nourrissons et aux trottineurs. Une méthode satisfaisante de nettoyage des gencives consiste à enrouler un morceau de gaze autour d’un doigt, à la tremper dans de l’eau et à nettoyer les gencives, le palais et l’intérieur des joues avec celle-ci . Les enfants devraient effectuer leurs soins buccaux régulièrement avant et après toute alimentation, et aux deux à quatre heures an de débarrasser la surface de leurs muqueuses des restes de nourriture, qui offrent un excellent milieu de croissance aux bactéries et aux champignons.

Traiter les effets neurotoxiques

Dans le cas d’une stomatite, la difculté à s’alimenter est un problème majeur qui peut exiger une hospitalisation si l’enfant refuse de boire. L’enfant choisit généralement les aliments qu’il tolère le mieux. On peut souvent le convaincre de boire en lui suggérant d’utiliser une paille pour éviter la partie ulcérée de la muqueuse buccale. L’inrmière doit encourager les parents à ne pas faire pression sur l’enfant pour qu’il mange, car l’anorexie qui accompagne la stomatite est tout à fait justiée. De plus, puisqu’il s’agit d’une affection temporaire, l’enfant peut recommencer à manger normalement lorsque les ulcères guérissent. En règle générale, une ulcération grave de la muqueuse indique la nécessité de réduire la chimiothérapie jusqu’à ce qu’une guérison complète se produise, ce qui prend habituellement une semaine. Lorsqu’il est impossible de modier le traitement, par exemple lors d’une greffe de cellules souches hématopoïétiques, des analgésiques pour la douleur, tels que des opioïdes ou des antifongiques, peuvent être nécessaires durant le traitement. Si des ulcères se forment dans la région anale, une hygiène méticuleuse, des bains de siège tièdes après chaque selle ainsi que l’application d’un onguent occlusif sur la région ulcérée favorisent la cicatrisation. Des laxatifs émollients sont nécessaires pour prévenir la douleur. Les parents doivent noter la fréquence des selles, car l’enfant peut volontairement ne pas déféquer pour éviter la douleur. La mesure de la température rectale ainsi que

488

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

La vincristine et, dans une moindre mesure, la vinblastine peuvent avoir divers effets neurotoxiques, dont la perte profonde du réexe du tendon. Un des effets les plus courants est la constipation grave due à une innervation réduite des intestins. L’administration d’opioïdes peut aussi aggraver la constipation. L’infirmière doit demander aux parents de noter la fréquence des selles et d’informer le médecin de tout changement des habitudes fécales de l’enfant. L’activité physique et les laxatifs émollients aident à prévenir la constipation, mais des laxatifs tels que le polyéthylène glycol sont souvent nécessaires pour stimuler l’évacuation. Des modications alimentaires telles que l’ingestion accrue de bres peuvent s’avérer inefficaces, car cela provoque généralement une distension fécale et une gêne, sans produire la stimulation mécanique souhaitée. Le pied tombant ainsi que la faiblesse et l’engourdissement des extrémités sont d’autres effets neurotoxiques communs des traitements qui peuvent rendre difciles la marche ou la motricité ne des mains. L’inrmière doit surveiller l’apparition de ces problèmes et avertir les parents de ces effets indésirables possibles, qui sont réversibles lorsque l’administration du médicament est arrêtée. Le port de chaussures avec renfort ou l’utilisation d’une orthèse au lit aident à conserver un bon alignement des pieds. Si la faiblesse se manifeste lorsque l’enfant fréquente l’école, une modification temporaire des activités peut être nécessaire. Les parents doivent informer l’enseignant de la situation pour éviter des attentes irréalistes relativement aux capacités de l’enfant. La douleur intense des mâchoires est un autre effet neurotoxique des traitements. Des analgésiques peuvent aider à soulager la douleur. L’enfant peut éviter les mouvements de la mâchoire en ne parlant pas ou en ne mastiquant pas, bien que la mastication continue, par exemple d’une gomme à mâcher, puisse en fait réduire la douleur.

Prévenir les complications du système urinaire La cystite hémorragique stérile est un effet indésirable de l’irritation de la vessie, laquelle est causée par la chimiothérapie ou la radiothérapie . Voici quelques façons de la prévenir : 1. l’ingestion de liquide par voie orale ou l’administration de liquide par voie parentérale (au moins une fois et demie la quantité quotidienne recommandée de liquide [2 L/m2/jour]) ; 2. des mictions fréquentes dès que le besoin d’uriner se fait sentir, y compris juste avant d’aller au lit, la nuit et au lever ; 3. l’administration du médicament au début de la journée pour permettre l’ingestion sufsante de liquide et des mictions fréquentes ; 4. l’administration de mesna, un médicament qui protège de l’urotoxicité de la cyclophosphamide et de l’ifosfamide. Dans la plupart des cas, un soluté est administré par voie intraveineuse avant, pendant et après l’administration du médicament an d’assurer une hydratation adéquate et d’éviter ainsi à l’enfant de devoir boire de grandes quantités de liquide. Si l’administration orale de liquide est prescrite à domicile, la famille doit recevoir des consignes précises concernant la quantité exacte de liquide nécessaire à l’enfant.

Préparer l’enfant et la famille à l’alopécie L’alopécie, c’est-à-dire la perte des cheveux, est un effet indésirable de plusieurs médicaments cytotoxiques et de la radiothérapie crânienne ; dans certains cas s’ajoute la perte des cils, des sourcils, des poils des aisselles et du pubis (Children’s Oncology Group, 2011). Cependant, tous les enfants ne perdent pas leurs cheveux pendant un traitement ; chez certains, les cheveux s’amincissent plutôt que de tomber. Toutefois, la rétention de la chevelure est l’exception plutôt que la règle. Il est préférable d’en avertir l’enfant et les parents pour leur laisser le temps de se préparer à cet effet indésirable ENCADRÉ 12.7.

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 12.7

ALERTE CLINIQUE

Information sur l’alopécie

INFORMATION SUR L’ALOPÉCIE

La famille doit être informée du fait que les cheveux tombent en touffes, ce qui cause une calvitie irrégulière. Pour réduire le choc causé par la vue de grandes quan­ tités de cheveux dans le lit ou sur les vêtements, l’enfant peut porter un bonnet de chirurgie jetable qui recueillera les cheveux pendant la période la plus intense de chute de cheveux. Il peut aussi préférer se faire couper ou raser les cheveux. Il convient également de mentionner à la famille que les cheveux mettent normalement de trois à six mois à repousser. Ils n’ont toutefois pas la même couleur et la même texture qu’avant le traitement. Avant que l’enfant commence à perdre ses cheveux, l’inrmière peut lui suggérer de choisir une prothèse capillaire dont la coupe et la couleur sont semblables à celles de ses cheveux. Cela aidera l’enfant à s’adapter à la chute de ses cheveux. Encourager des discussions sur la modication de l’image corporelle est très important dans le processus de soutien de l’enfant et de sa famille. Si l’enfant décide de ne pas porter de perruque, il devra se protéger la tête du froid et du soleil par le port d’un chapeau ou d’un foulard. L’hygiène du cuir chevelu est également importante. Le cuir chevelu doit être lavé régulièrement, comme toute autre partie du corps.

En présence de manifestations cliniques de cystite, telles que la dysurie ou l’hématurie, un examen médical immédiat est nécessaire. La cystite hémorra­ gique exige un examen complet et une intervention immédiate.

12 CE QU’IL FAUT RETENIR

bien que l’abstention stricte de sel et d’aliments salés puisse contribuer à réduire l’accumulation de liquide. Il n’est pas rare que l’enfant se fasse taquiner par ses pairs. L’inrmière peut le rassurer en lui disant qu’après l’arrêt des médicaments, son visage reprendra une apparence normale. Le port de vêtements lâches, tels que des vêtements d’entraînement, peut aider à camouer le changement de poids.

L’alopécie est un effet indésirable de plusieurs médicaments cytotoxiques et de la radiothérapie crânienne ; dans certains cas s’ajoute la perte des cils, des sourcils, des poils des aisselles et du pubis.

Renseigner l’enfant et la famille sur les effets des stéroïdes Le traitement stéroïdien à court terme entraîne des changements physiques et des modications de l’image corporelle qui, même s’ils n’ont pas d’importance clinique, peuvent être extrêmement déstabilisants pour les autres enfants. Un de ces changements est l’apparence cushingoïde. Le visage de l’enfant devient rond et bouffi FIGURE 12.5. Contrairement à la perte des cheveux, ce changement évident peut difcilement être caché,

FIGURE 12.5 Photo d’une llette avant et après un traitement stéroïdien. Le visage de l’enfant devient rond et bouf, une apparence désignée comme cushingoïde.

Chapitre 12

Enfant atteint de cancer

489

L’enfant qui suit un traitement stéroïdien a l’air en bonne santé. Le visage rond, les joues rouges, les coussinets adipeux supraclaviculaires, l’abdomen protubérant et la rétention d’eau indiquent un gain de poids. Toutefois, la prise de poids réelle attribuable au gain de masse musculaire et de tissus sous-cutanés peut être faible. Par conséquent, la nutritionniste doit évaluer le gain de poids en observant les extrémités et en mesurant l’épaisseur du pli cutané et la circonférence des bras pendant la thérapie stéroïdienne an de déterminer si l’augmentation du poids est due à un apport alimentaire accru ou à une rétention liquidienne. Peu après le début du traitement stéroïdien, l’enfant peut avoir des sautes d’humeur, allant d’une sensation de bien-être et d’euphorie à l’irritabilité et à la dépression. Les parents qui ne sont pas avertis des changements provoqués par ces médicaments peuvent s’inquiéter inutilement. Aussi, la prise de stéroïdes peut augmenter l’appétit de l’enfant. Il est important d’encourager les parents à offrir des aliments sains et de limiter les aliments riches en gras et en sel. L’inrmière doit donc les informer de ces réactions possibles et les encourager à discuter de ces changements comportementaux entre eux et avec l’enfant.

Prodiguer des soins durant une greffe de cellules souches hématopoïétiques 10 Les soins à prodiguer à un enfant en n de vie sont abordés dans le chapitre 10, Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Après la greffe et avant que la nouvelle moelle commence à remplacer adéquatement les granu­ locytes, l’enfant est extrê­ mement vulnérable aux infections, et toute infection peut mettre sa vie en danger.

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Partie 4

En raison du conditionnement intensif utilisé pour détruire la moelle osseuse défaillante avant la greffe et des complications qui peuvent survenir pendant l’attente de la prise de greffe des cellules souches transplantées, l’enfant est généralement hospitalisé pendant plusieurs semaines. Il doit subir de nombreuses interventions telles que l’insertion d’un cathéter veineux central, l’administration d’une chimiothérapie et, dans certains cas, une radiothérapie intensive. De plus, des mesures strictes de précaution doivent être prises contre les infections. Après la greffe et avant que la nouvelle moelle commence à remplacer adéquatement les granulocytes, l’enfant est extrêmement vulnérable aux infections, et toute infection peut mettre sa vie en danger. De plus, l’enfant qui reçoit une greffe de cellules souches hématopoïétiques subit un grand nombre des effets indésirables déjà présentés dans cet ouvrage. La complication la plus courante des allogreffes est la réaction du greffon contre l’hôte, qui peut affecter la peau, le tube digestif et le foie. Les caractéristiques et la gravité des manifestations varient selon la région touchée. Une attention particulière est désormais accordée à la prévention de la réaction du greffon contre l’hôte, notamment

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

au moyen de diverses combinaisons d’agents immunosuppresseurs en raison de leurs actions (prévention de l’activation des cellules T ou élimination des cellules T matures provenant du donneur) et des stéroïdes (Gottschalk et al., 2016). Toutefois, ce traitement augmente davantage le risque d’infection de l’enfant déjà vulnérable. Tous les produits du sang doivent être irradiés an de réduire le plus possible l’introduction d’autres antigènes. Les lésions cutanées et la cicatrisation lente des plaies sont fréquentes chez l’enfant qui subit une greffe de cellules souches hématopoïétiques. Les interventions préventives visant à réduire la pression exercée sur les zones déclives de la peau comprennent l’utilisation d’une surface thérapeutique qui soulage ou réduit la pression, ainsi que des activités fréquentes. Les mesures favorisant la cicatrisation en cas de lésions sont notamment les bains fréquents de la région périanale, qui contribuent à diminuer les infections, ainsi que l’application de barrières cutanées protectrices telles que des pansements aux hydrocolloïdes ou des onguents occlusifs, en prenant bien garde toutefois de s’assurer qu’il n’y a pas de lésions cutanées. Durant toute la durée de cette longue épreuve, la famille est préoccupée par le succès de la greffe et les complications mortelles possibles. Par ailleurs, la récurrence de la maladie est malheureusement possible après la greffe. L’inrmière doit donc offrir des soins attentionnés et conserver une attitude encourageante au cours des nombreuses crises qui surviennent. Si la greffe échoue, les soins nécessaires à la famille sont les mêmes que ceux de toute famille dont l’enfant est atteint d’une affection potentiellement mortelle 10 .

Préparer l’enfant aux interventions Les enfants ont particulièrement besoin d’une préparation psychologique aux divers traitements, qui comprennent généralement l’intervention chirurgicale, les perfusions intraveineuses, la ponction de la moelle osseuse et la ponction lombaire. Les examens diagnostiques initialement effectués pour conrmer le diagnostic et ceux qui sont réalisés ultérieurement pour faire un suivi du traitement peuvent être une source de malaise et de stress pour l’enfant et sa famille. Même les méthodes non invasives telles que l’imagerie médicale et les radiographies sont effrayantes pour un jeune enfant. Un grand nombre de ces examens exigent que l’enfant reste absolument immobile pendant une longue période dans un espace restreint sans pouvoir communiquer, ou très peu, avec un

adulte en qui il a conance. C’est pourquoi il faut généralement mettre les nourrissons et les jeunes enfants sous sédation, et expliquer aux enfants plus âgés ce à quoi ils doivent s’attendre tout en leur rappelant en cours d’examen combien de temps encore ils doivent rester immobiles 13 . Lorsque c’est possible, on peut notamment permettre aux parents de rester près de l’enfant. An de réduire le degré de stress de l’enfant qui subit des examens répétés, il faut bien le préparer et lui offrir un grand soutien émotionnel. Dans de nombreux cas de cancers pédiatriques, l’examen de moelle osseuse et la ponction lombaire sont si couramment effectués que leur préparation doit faire l’objet d’une attention particulière FIGURE 12.6. Les professionnels de la santé qui travaillent auprès d’enfants atteints du cancer recommandent d’adapter le soutien à l’enfant en fonction de son stade de développement, et ce, en faisant appel à des approches non pharmacologiques autant que pharmacologiques. La sédation peut être nécessaire dans certains cas. Des anesthésiques topiques sont souvent utilisés localement avant des interventions invasives telles que la ponction veineuse, l’implantation d’un dispositif d’accès veineux, la ponction lombaire et l’injection sous-cutanée ou intramusculaire (Eche, 2014). L’injection intradermique locale de lidocaïne peut être utilisée comme anesthésique avant la ponction lombaire et l’examen de moelle osseuse. An de réduire la sensation de brûlure provoquée par la lidocaïne, il convient d’y ajouter du bicarbonate de soude. L’inltration plus profonde de lidocaïne tamponnée dans le muscle et le périoste de l’os réduit davantage la douleur provoquée par la pénétration de l’aiguille de ponction ou de biopsie de gros calibre.

Assurer le suivi après les interventions Peu de soins physiques sont nécessaires après ces interventions. Un petit bandage compressif est appliqué sur le point de ponction de la moelle osseuse et un bandage adhésif, sur le point de ponction lombaire. Aucune restriction d’activité n’est nécessaire après l’examen de moelle osseuse, bien que le point de ponction soit généralement douloureux et que l’enfant puisse préférer rester tranquille. Après une ponction lombaire, les recommandations varient. L’enfant est gardé en position couchée jusqu’à son réveil ou plus longtemps en présence de céphalée. L’administration d’un soluté peut être nécessaire pour éviter les maux de tête.

Gérer la douleur L’infirmière doit bien connaître la physiopathologie élémentaire de la douleur due au cancer et les effets indésirables des traitements. L’échelle analgésique à trois paliers de l’Organisation mondiale de la Santé doit être utilisée dans le traitement de la douleur de tout enfant souffrant du cancer (Wong, FIGURE 12.6 Un enfant atteint de leucémie Lau, Palozzi et al., 2012). subit une ponction de la moelle osseuse. L’infirmière doit également très bien connaître les analgésiques non opioïdes et opioïdes employés 13 dans le traitement de la douleur pédiatrique 5 . Les principes de pré­ Dans de nombreux centres d’oncologie pédiaparation de l’enfant aux trique, on fait appel à des équipes interdiscipliinterventions présentées naires qui agissent comme consultants et offrent dans le chapitre 13, une expertise en évaluation et en traitement de la Rôle de l’inrmière au douleur. L’inrmière assume généralement la fonccours de l’hospitalisation. tion de coordinatrice des soins, un rôle clé dans le traitement de la douleur causée par le cancer. Il faut parfois essayer plus d’un type de médicaments avant de trouver celui qui soulage adéquatement la douleur. Les anti-inammatoires non stéroïdiens, l’acétaminophène et la morphine sont couramment utilisés à cette n (Wong et al., 2012). Un dosage approprié est primordial. Les doses doivent être ajustées de manière à procurer une analgésie optimale et à minimiser les effets indésirables. Il est également possible d’envisager des stratégies non pharmacologiques, comme la distraction, la musique, etc.

5

12

Les médicaments ainsi que les approches pharmaco­ logiques et non pharmaco­ logiques sont abordées dans le chapitre 5, Éva­ luation et traitement de la douleur.

Comprendre les effets de la maladie sur la famille L’enfant atteint d’un cancer nécessite la même supervision médicale élémentaire que tout autre enfant. En raison des exigences immenses imposées à la famille, auxquelles s’ajoutent les préoccupations de la famille et du personnel médical concernant le cancer, les besoins normaux de l’enfant en matière de soins sont parfois négligés. En tant qu’inrmière, il est important de soutenir la famille durant cette période difcile. La maladie perturbe la routine familiale. L’enfant atteint d’un cancer reçoit beaucoup d’attention de la part des membres de sa famille et de ses amis. Cela peut être difcile à accepter pour ses frères et sœurs qui, selon leur âge, ne comprennent pas toujours ce qui se passe. Il est possible que des problèmes de discipline surviennent

Chapitre 12

L’association Leucan (www. leucan.qc.ca) et la Société canadienne du cancer (www. cancer.ca) sont des sources ables d’information sur les travaux de recherche comparant les méthodes expérimentales de traitement du cancer, les thérapies complémentaires et les méthodes de guérison.

Enfant atteint de cancer

491

9 La vaccination est abordée dans le chapitre 9, Maladies infectieuses et immunisation.

chez ces enfants. Il n’est pas évident pour un parent de savoir ce qui constitue un comportement raisonnable ou non de la part de leurs enfants en santé, ce qui peut entraîner chez lui des sentiments de culpabilité et d’impuissance. Le parent peut compenser sa peine en étant trop indulgent et permettre certains privilèges. Toutefois, le maintien des règles et des limites est important an d’apporter un sentiment de sécurité à l’enfant négligé. De plus, des recommandations peuvent être formulées de concert avec l’équipe psychosociale (travailleuse sociale, psychologue, etc.) pour faciliter cette période difcile pour la famille (Children’s Oncology).

Promouvoir les soins dentaires

CE QU’IL FAUT RETENIR

La radiothérapie peut retarder ou empêcher la croissance des dents permanentes.

La radiothérapie de la tête et du cou peut entraîner un certain nombre de complications tardives (Landier, Armenian, Meadows et al., 2016). Certaines sont irréversibles, notamment l’asymétrie faciale, mais celles touchant les dents et les gencives (p. ex., les caries, la parodontopathie) peuvent être réduites par une excellente hygiène orale, y compris l’utilisation de dentifrice enrichi de uor, de même que des examens et des nettoyages réguliers des dents. Par ailleurs, la radiothérapie peut retarder ou empêcher la croissance des dents permanentes (Effinger, Migliorati, Hudson et al., 2014). L’enfant doit être averti de cette possibilité et a besoin d’aide pour expliquer la situation aux autres enfants.

Offrir la vaccination ALERTE CLINIQUE

Les enfants qui ont été vaccinés deux semaines avant une chimiothérapie doivent être considérés comme étant non immunisés et doivent être revaccinés ou recevoir les vaccins à virus vivants environ six mois après la n de leur chimiothérapie (Cesaro, Giacchino, Fioredda et al., 2014). Dans la plupart des établissements, des lignes directrices particulières existent concernant la vaccination d’un enfant qui suit un traitement immunosuppresseur. L’inrmière doit connaître ces lignes directrices et en informer l’enfant et sa famille.

492

Partie 4

L’enfant qui suit des traitements de chimiothérapie contre le cancer ne doit recevoir aucun vaccin vivant atténué . Après l’administration d’un vaccin vivant de la poliomyélite, de la rougeole, de la rubéole et des oreillons, la réplication virale peut causer une maladie grave chez l’enfant immunodéprimé. Toutefois, il peut recevoir des vaccins inactivés. Ses frères et sœurs ainsi que les autres membres de sa famille peuvent recevoir le vaccin vivant contre la rougeole, les oreillons et la rubéole (ROR) ainsi que le vaccin contre la varicelle sans que cela représente un risque pour lui. Durant la saison de la grippe, on suggère la vaccination de la famille pour protéger l’enfant. Selon son état de santé et suivant l’avis de son oncologue, l’enfant immunodéprimé pourra aussi recevoir le vaccin antigrippal. En cas d’une épidémie de maladie infantile, particulièrement la varicelle, l’enfant doit être placé en isolement. S’il a été exposé au virus de la varicelle, l’immunoglobuline anti-varicellezona administrée dans les 96 heures peut favorablement modifier le cours de la maladie. Si

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

l’enfant contracte la varicelle, des agents antiviraux, tels que l’acyclovir, doivent lui être donnés. Sans traitement, la mort survient dans 7 à 20 % des cas en raison de la propagation de la maladie au foie, aux poumons et au SNC (Ardura et Koh, 2016) 9 .

Assurer l’éducation de la famille L’infirmière qui travaille auprès des enfants atteints d’un cancer joue un rôle de soutien important en aidant la famille à comprendre les divers traitements, à prévenir ou à gérer les effets indésirables ou toxiques de ces traitements, et à observer leurs effets tardifs. L’éducation fait partie intégrante du rôle de l’inrmière, particulièrement en ce qui a trait aux nouveaux traitements, aux essais cliniques et aux soins à domicile. L’anxiété provoquée par un diagnostic de cancer peut amener certaines familles à recourir à des méthodes de traitement non éprouvées. L’inrmière peut prévenir l’utilisation de remèdes non éprouvés et potentiellement dangereux en encourageant les familles à discuter ouvertement de leurs préoccupations et de leurs questions avec leur professionnel de la santé. Les directives relatives aux soins à domicile portent généralement sur l’horaire de la prise des médicaments, l’observation des effets indésirables ou toxiques qui nécessitent une évaluation plus approfondie, et les mesures de prévention ou de gestion de ces problèmes. Ces directives sont importantes ; leur non-respect peut entraîner de graves complications médicales ou, dans certains cas, être la cause d’une rechute. Il faut tout faire pour que la famille comprenne l’importance de ces directives et se conforme à l’horaire et aux mesures qui favorisent l’adhésion au traitement. L’inrmière doit également expliquer à la famille la manière d’entretenir les appareils et les dispositifs particuliers tels que les cathéters veineux centraux à chambre implantable, tunnellisés ou introduits par voie périphérique (CVCIVP).

Assurer la poursuite du traitement Les soins ne s’arrêtent pas une fois le traitement terminé. En raison de la meilleure compréhension des effets tardifs des traitements, l’inrmière joue un rôle de premier plan dans l’évaluation de l’enfant an de détecter des problèmes tels qu’un retard de croissance, l’apparition de tumeurs secondaires et des perturbations des différents systèmes corporels. La surveillance et la survivance, couplées à l’efcacité accrue des traitements, jouent un rôle crucial dans l’amélioration du taux de survie au

cancer (Ellison, De, Mery et al., 2009). La famille doit être consciente de l’importance d’une supervision médicale continue. Les autres professionnels de la santé qui s’occupent de l’enfant (p. ex., l’inrmière de l’école, l’omnipraticien, le pédiatre et le dentiste) doivent être informés de son diagnostic de cancer et des traitements reçus. Lorsque l’enfant atteindra l’âge adulte, il pourrait lui être utile de rencontrer un conseiller en génétique qui l’informera des cancers qui sont susceptibles d’être

12.2

Cancers des systèmes sanguin et lymphatique

12.2.1

Leucémies

héréditaires. En cas d’infertilité possible, il convient de discuter des méthodes de fertilité avec le garçon ou la lle pubère avant le début du traitement. Le Children’s Oncology Group (2013) a formulé des lignes directrices sur les soins de suivi à long terme des survivants du cancer pédiatrique. L’inrmière qui travaille auprès de ces enfants doit connaître ces lignes directrices et saisir toutes les occasions d’enseigner à l’enfant et à sa famille les soins continus nécessaires.

La leucémie est un terme général désignant un groupe d’affections malignes de la moelle osseuse et du système lymphatique. Il s’agit d’une maladie complexe d’hétérogénéité variable. Sa classication devient donc de plus en plus complexe, perfectionnée et essentielle, car la détermination des sous-types de leucémies a des conséquences thérapeutiques et pronostiques. Cette section présente un aperçu des principaux systèmes de classication couramment utilisés à cette n et un rappel du développement des cellules sanguines est proposé à la FIGURE 12.7. On reconnaît généralement deux formes de leucémies pédiatriques, soit la leucémie lymphoblastique aiguë (LLA) et la leucémie myéloblastique aiguë (LMA). On classie les leucémies selon deux critères importants, à savoir le début et le cours de la maladie, ainsi que la lignée cellulaire des cellules leucémiques (lymphoïdes ou myéloïdes) (Bertone, Landier et Yun, 2012 ; McCarthy, 2014).

Épidémiologie La LLA, qui est la forme la plus commune de cancer pédiatrique, touche annuellement de 2 à 5 enfants sur 100 000 (Rabin, Gramatges, Margolin et al., 2016). Elle apparaît le plus souvent vers l’âge de 2 à 5 ans. C’est l’un des cancers pédiatriques pour lesquels les taux de survie ont connu une amélioration spectaculaire. En effet, avant l’utilisation des agents antileucémiques en 1948, un enfant qui était atteint de la LLA vivait de 2 à 3 mois. Les taux actuels de survie à long terme sans récidive des enfants atteints de cette leucémie sont d’environ 80 % dans les grands centres de recherche. La LMA, qui représente 20 % de tous les cas de leucémies pédiatriques, touche chaque année 8 enfants sur un million (Arceci et Meshinchi, 2016). L’incidence de ce cancer est égale parmi les garçons et les lles, et le nombre de cas est plus

12

FIGURE 12.7

Développement des cellules sanguines

élevé au cours de la première année de vie. Les taux de survie généraux varient énormément en fonction du sexe, de l’origine ethnique et des caractéristiques constitutionnelles de la maladie (Arceci et Meshinchi, 2016).

Physiopathologie La leucémie est une prolifération excessive de globules blancs immatures qui se propagent de façon incontrôlable et prennent la place des cellules saines dans les tissus hématopoïétiques. Les cellules leucémiques, bien qu’elles ne forment pas une tumeur en tant que telle, afchent les propriétés néoplasiques des cancers solides. Ainsi, les manifestations pathologiques et cliniques de la maladie sont causées par l’inltration de cellules leucémiques non fonctionnelles dans n’importe quel tissu corporel et le remplacement du tissu par ces cellules. Les organes hautement vascularisés, tels que la rate et le foie, sont les plus durement touchés.

Chapitre 12

Enfant atteint de cancer

493

Pour comprendre la physiopathologie du processus leucémique, il est important de clarier deux conceptions erronées courantes. Premièrement, même si la leucémie se caractérise par la surproduction de globules blancs, les enfants atteints présentent généralement une leucocytémie faible. Les frottis de sang périphérique et, plus précisément, l’examen de moelle osseuse révèlent plutôt un nombre très élevé de cellules immatures, ou cellules blastiques. Deuxièmement, ces cellules immatures n’attaquent pas et ne détruisent pas délibérément les cellules sanguines ou les tissus vasculaires normaux. La destruction cellulaire se produit au cours du processus d’inltration des cellules leucémiques et de la concurrence subséquente pour l’obtention des éléments métaboliques.

Manifestations cliniques Cette partie traite plus en détail du processus pathologique et des manifestations cliniques connexes dans les organes les plus vulnérables du corps FIGURE 12.8.

FIGURE 12.8

494

Partie 4

Apparition de la maladie L’apparition de la leucémie peut être aiguë ou insidieuse. Dans la plupart des cas, l’enfant présente étonnamment peu de manifestations cliniques. Par exemple, la leucémie peut être diagnostiquée lorsqu’une infection mineure, telle qu’un rhume, ne guérit pas complètement. L’enfant est pâle, apathique, irritable, fébrile et anorexique. Les parents commencent généralement à soupçonner un problème sous-jacent quand ils observent une perte de poids, des pétéchies et des ecchymoses sans blessure apparente, et quand l’enfant se plaint continuellement de douleurs aux os et aux articulations. Dans d’autres cas, la leucémie est diagnostiquée après une longue période de manifestations cliniques ressemblant à des affections telles que l’arthrite rhumatoïde ou la mononucléose. Parfois, le diagnostic de leucémie est posé lors d’un événement complètement indépendant de la maladie, par exemple lors d’un examen médical régulier ou d’une blessure.

Principaux sites d’atteintes tissulaires causées par la leucémie

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

Dysfonctionnement de la moelle osseuse Dans tous les types de leucémies, les cellules en prolifération inhibent la production des éléments gurés du sang par la moelle osseuse en privant les cellules normales des éléments essentiels à leur métabolisme. Cela a trois conséquences principales, soit une anémie causée par la diminution des érythrocytes, une infection due à la neutropénie et des saignements attribuables à la production réduite de plaquettes. Les manifestations cliniques les plus courantes de la leucémie, qui résultent de l’inltration des cellules leucémiques dans la moelle osseuse, sont la èvre, la pâleur, la fatigue, l’anorexie et l’hémorragie (généralement des pétéchies), ainsi que des douleurs aux os et aux articulations. En présence de neutropénie, la ore bactérienne normale du corps peut se transformer en agents pathogènes envahissants. Toute lésion cutanée devient un foyer potentiel d’infection. Une vague douleur abdominale est souvent causée par l’inammation de la ore normale dans certaines parties de l’intestin. L’invasion de la moelle osseuse par des cellules leucémiques cause un affaiblissement graduel des os et une vulnérabilité aux fractures. À mesure que les cellules leucémiques envahissent le périoste, la pression croissante cause une douleur intense.

Perturbation des organes touchés La rate, le foie et les ganglions lymphatiques subissent une inltration marquée par les cellules leucémiques, un gonement et, nalement, une brose. L’hépatosplénomégalie est habituellement plus courante que la lymphadénopathie. Après la rate, le foie et les ganglions lymphatiques, c’est le SNC qui est le plus touché. Or, moins de 5 % des enfants ayant la LLA à cellules B et de 10 à 20 % de ceux ayant la LLA à cellules T subissent des dommages au SNC (Rabin et al., 2016). Le traitement intrathécal prophylactique du SNC a permis de réduire de façon spectaculaire l’incidence des rechutes dans le SNC de ces enfants. Les autres parties du corps qui peuvent être touchées sont les nerfs crâniens (le plus souvent le VII, ou nerf facial) et les nerfs rachidiens, particulièrement ceux du plexus lombosacré, de l’hypothalamus et du cervelet. Dans ces cas, les manifestations cliniques sont directement liées aux parties touchées. Par exemple, lors d’une invasion du plexus lombosacré par des cellules leucémiques, l’enfant ressent une faiblesse des extrémités inférieures ainsi qu’une douleur se propageant des jambes aux pieds, et il a de la difculté à uriner. Bien que ces signes puissent indiquer une tumeur cérébrale, l’absence de signes locaux mène souvent à la découverte d’atteintes du SNC. Les autres parties du corps qui peuvent

être envahies par des cellules leucémiques sont les reins, les testicules, la prostate, les ovaires, le tube digestif et les poumons.

Diagnostic La leucémie est généralement déduite de l’anamnèse, des manifestations physiques et d’un frottis sanguin périphérique contenant des leucocytes immatures, auxquels s’ajoute souvent une faible numération globulaire. L’anamnèse, en plus de révéler des informations médicales précieuses au sujet de l’évolution subséquente de la maladie, joue grandement sur la réaction émotionnelle des parents au diagnostic. La plupart du temps, le diagnostic est inattendu ; il prend une proportion catastrophique. Le diagnostic nal est fondé sur une ponction ou une biopsie de moelle osseuse. La moelle osseuse atteinte montre généralement une inltration de cellules blastiques. Lorsque le diagnostic est conrmé, une ponction lombaire est effectuée pour déterminer si le SNC est touché. Seul un petit nombre d’enfants ont des atteintes du SNC, et ils sont généralement asymptomatiques.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les manifestations clini­ ques les plus courantes de la leucémie sont la èvre, la pâleur, la fatigue, l’ano­ rexie et l’hémorragie (géné­ ralement des pétéchies), ainsi que des douleurs aux os et aux articulations.

Approche thérapeutique Le traitement de la LLA comprend l’administration d’agents cytotoxiques par voies intraveineuse et intrathécale. La radiothérapie est parfois utilisée pour traiter une leucémie résistante du SNC ou une récidive de la maladie dans les testicules. Le traitement de la leucémie comprend normalement les phases suivantes : 1) l’induction, qui vise la rémission complète ou l’élimination des cellules leucémiques ; 2) l’intensication ou la consolidation, qui a pour but de réduire davantage la charge tumorale totale ; 3) l’entretien, qui consiste à administrer une autre chimiothérapie an de maintenir la rémission. Bien que la combinaison de médicaments et l’utilisation de la radiothérapie puissent varier selon les centres d’oncologie pédiatrique, le pronostic, les facteurs de risque de l’enfant, le type de leucémie traitée et les principes généraux sont appliqués à chaque phase.

12

Le traitement de la LMA est moins long que celui de la LLA ; d’une durée d’environ six mois, il consiste en une période d’induction très intensive comprenant des doses très puissantes d’agents cytotoxiques. La greffe de cellules souches hématopoïétiques est recommandée si un donneur apparenté est trouvé. L’enfant est généralement hospitalisé pour plusieurs semaines en raison de son haut risque de septicémie. Des soins de soutien intenses sont nécessaires (Bertone et al., 2012 ; McCarthy, 2014).

Chapitre 12

Enfant atteint de cancer

495

Traitement d’induction Presque tout de suite après la conrmation du diagnostic, le traitement d’induction commence et dure de 4 à 5 semaines selon le protocole de traitement. Une rémission complète est déterminée par l’absence de manifestations cliniques de la maladie et par une proportion de cellules blastiques inférieure à 5 % dans la moelle osseuse (Rabin et al., 2016). Puisque de nombreux médicaments cytotoxiques causent également la myélosuppression des éléments normaux du sang, la période qui suit immédiatement la rémission peut être critique. Le corps est sans défense contre les organismes envahissants (particulièrement la ore bactérienne normale) et vulnérable aux hémorragies spontanées. C’est pourquoi un traitement de soutien est essentiel pendant cette période.

Traitement d’intensication ou de consolidation Le traitement d’intensication ou de consolidation permet de réduire davantage le nombre de cellules leucémiques dans le corps de l’enfant. Cette phase comprend l’administration périodique d’une chimiothérapie pendant les six premiers mois du traitement. Les agents précis utilisés dépendent du type de leucémie et des facteurs de risque de l’enfant.

Traitement d’entretien Le but du traitement d’entretien est de maintenir la rémission et de réduire davantage le nombre de cellules leucémiques dans le corps. Les traitements pharmacologiques combinés s’avèrent les plus efcaces pour maintenir la rémission et prévenir la résistance aux médicaments. Pendant le traitement d’entretien, une formule sanguine complète est effectuée chaque semaine ou chaque mois an d’évaluer la réaction de la moelle aux médicaments. En cas de myélosuppression grave ou d’effets indésirables toxiques, la thérapie est arrêtée temporairement ou la dose est réduite. La durée du traitement est fondée sur l’expérience clinique comparant les taux de survie en fonction de divers intervalles de temps et est établie de façon à prévenir les effets nocifs d’un traitement excessif. Même si le moment optimal d’arrêt du traitement n’est pas connu, la pratique courante consiste à poursuivre le traitement pendant une période de deux à trois ans. Après la n du traitement, tous les enfants doivent subir des examens médicaux réguliers visant à surveiller les rechutes et les séquelles à long terme du traitement.

Traitement prophylactique du système nerveux central Les enfants souffrant de leucémie présentent un risque d’invasion du SNC par les cellules leucémiques. C’est pourquoi un traitement prophylactique du SNC est administré à un grand nombre

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Enfant et famille ayant des besoins particuliers

d’entre eux. En raison des inquiétudes relatives aux effets tardifs de la radiothérapie crânienne et des tumeurs malignes secondaires, cette méthode de traitement est généralement réservée aux enfants à haut risque ou à ceux ayant une leucémie résistante du SNC.

Nouvelle induction après une rechute De nombreux enfants requièrent un traitement supplémentaire en cas de rechute, celle-ci étant caractérisée par la présence de cellules leucémiques dans la moelle osseuse. Bien qu’une rémission soit possible après plus d’une rechute, le pronostic devient de moins en moins favorable après chacune. Le testicule est une partie du corps qui est résistante à la chimiothérapie et est responsable des rechutes de leucémie. Un faible nombre de garçons subissent des rechutes pendant le traitement de maintien ou souffrent d’un cancer occulte après la n du traitement. Le traitement du cancer du testicule comprend la radiothérapie testiculaire unilatérale ou bilatérale et une chimiothérapie générale intensive (Kulkarni, Marwaha, Trehan et al., 2010 ; Rabin et al., 2016). Le SNC est également une région qui résiste à la chimiothérapie en raison de la barrière hématoencéphalique très efcace qui laisse passer très peu d’agents cytotoxiques. Le traitement des rechutes du SNC comprend l’irradiation craniospinale et une chimiothérapie intrathécale.

Greffe de cellules souches hématopoïétiques La greffe de cellules souches hématopoïétiques permet de traiter avec succès certains enfants souffrant de la LLA ou de la LMA. En général, cette greffe n’est pas recommandée aux enfants qui sont en première rémission d’une LLA en raison des excellents résultats possibles de la chimiothérapie. Elle est toutefois indiquée pour les enfants atteints d’une LLA qui sont à risque élevé ou qui ont une faible réaction initiale au traitement (Gottschalk et al., 2016). Dans le cas des enfants qui ont la LMA, en raison du pronostic moins favorable, la greffe peut être envisagée pendant la première rémission s’il y a un donneur adéquat (Gottschalk et al., 2016).

Pronostic Les facteurs pronostiques les plus importants dans la détermination des chances de survie à long terme de l’enfant atteint d’une LLA sont la leucocytémie initiale, l’âge au moment du diagnostic, la cytogénétique, le sous-type immunologique et le sexe. Les indicateurs favorables sont notamment une leucocytémie inférieure à 50 × 109/L, un âge de 1 à 10 ans, l’hyperdiploïdie, un sous-type immunologique de cellules pré-B précoces et

le sexe féminin. Dans le cas des enfants ayant la LMA, les facteurs pronostiques défavorables sont certaines anomalies chromosomiques (monosomie

5 ou 7), des réarrangements chromosomiques et une faible réaction initiale au traitement (Arceci et Meshinchi, 2016).

Soins inrmiers LEUCÉMIE

Les soins et les traitements inrmiers de l’enfant souffrant d’une leucémie dépendent directement du type de traitement. La myélosuppression, la toxicité des médicaments et l’inltration des cellules leucémiques entraînent des complications secondaires qui exigent des soins physiques de soutien. Cette partie est axée sur les interventions de soutien auprès de l’enfant et de sa famille.

Préparer l’enfant et sa famille aux interventions diagnostiques et thérapeutiques De la période précédant le diagnostic jusqu’à la n du traitement, l’enfant doit subir plusieurs examens, les plus invasifs étant la ponction ou la biopsie de la moelle osseuse ainsi que la ponction lombaire. Les prises de sang aux doigts et les ponctions veineuses effectuées à des ns d’analyses sanguines et de perfusion de médicaments sont des interventions courantes pendant plusieurs années après le diagnostic. Il faut donc expliquer à l’enfant le but de chaque intervention et ce à quoi il doit s’attendre 13 .

Un autre aspect du soutien émotionnel continu dépend du pronostic. La leucémie n’est pas toujours fatale, mais les statistiques actuelles sur cette maladie doivent être correctement interprétées. Près de 80 % des enfants ayant la LLA vivent 5 ans ou plus, mais ces estimations moyennes s’appliquent aux enfants à risque standard traités selon les protocoles les plus efcaces depuis le diagnostic. Le pronostic des enfants atteints d’une LLA à risque élevé ou très élevé peut être beaucoup moins favorable. Une partie de ceux qui survivent après un traitement discontinu auront une rechute. L’inrmière doit être consciente du fait que la famille a besoin d’une période d’adaptation pour bien comprendre les chances de survie de l’enfant. Lors du diagnostic initial ou d’une rechute, il peut être difcile pour les parents d’entendre les faits. L’inrmière qui travaille auprès des familles doit personnaliser ses interventions. La compréhension des besoins émotionnels de chaque membre de la famille ainsi que la prestation de soins physiques adéquats sont des éléments essentiels d’un soutien positif.

CE QU’IL FAUT RETENIR

La leucémie n’est pas toujours fatale.

13 La préparation aux inter­ ventions diagnostiques et thérapeutiques est abordée dans le chapitre 13, Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation.

Offrir un soutien émotionnel continu Les soins et les traitements inrmiers de l’enfant souffrant de leucémie dépendent des problèmes types auxquels la famille fait face pendant les différentes phases du traitement. Le rôle de l’inrmière en est un de soutien continu, d’orientation et de clarication. Les parents doivent être en mesure de reconnaître les symptômes qui nécessitent des soins médicaux. Bien que certaines des réactions présentées soient attendues, les parents doivent tout de même les rapporter au médecin, s’il y a lieu. En avertissant les parents des réactions possibles, l’inrmière leur permet également de s’y préparer. De plus, ils sont rassurés de savoir que ces réactions ne sont pas dues à la réapparition de cellules leucémiques FIGURE 12.9.

12.2.2

Lymphomes

Les lymphomes forment un groupe de cancers issus des systèmes lymphatique et hématopoïétique. Ils se divisent en deux types, soit le lymphome hodgkinien (LH), ou maladie de Hodgkin, et le lymphome non hodgkinien (LNH). Ceux-ci se

FIGURE 12.9 Il est normal que l’enfant atteint de cancer vive des épisodes de tristesse au cours de ses traitements.

subdivisent à leur tour selon le type de tissu touché et l’étendue du cancer (stade). Le LNH est plus commun que le LH chez les enfants. Bien que ce dernier soit extrêmement rare avant l’âge de 5 ans, il est particulièrement élevé parmi les jeunes de 15 à 19 ans, un groupe d’âge dans lequel sa fréquence est presque la même que celle de la leucémie.

Chapitre 12

Enfant atteint de cancer

497

12

Lymphome hodgkinien Le lymphome hodgkinien a affecté 180 enfants au Canada entre 2009 et 2013 (Société canadienne du cancer, 2017e). Ce cancer prend naissance dans le système lymphatique et touche principalement les ganglions lymphatiques. Dans la majorité des cas, la présence de cellules de Reed-Sternberg est une caractéristique du lymphome hodgkinien. De façon prévisible, il forme des métastases hors de ces ganglions et vers les régions extralymphatiques. Il est particulièrement présent dans la rate, le foie, la moelle osseuse, les poumons et le médiastin (c’est-à-dire l’ensemble des tissus et des organes qui séparent les poumons, y compris le cœur et ses vaisseaux, la trachée, l’œsophage, le thymus et les ganglions lymphatiques). Aucun tissu n’est à l’abri de ce cancer FIGURE 12.10. Le lymphome hodgkinien est classé en fonction de

quatre types histologiques, soit la prédominance lymphocytaire, la sclérose nodulaire, la cellularité mixte et la déplétion lymphocytaire. Selon les protocoles de traitement actuels, le stade histologique de la maladie a peu d’incidence sur le pronostic.

Stadication La détermination exacte du stade et de l’étendue de la maladie est essentielle à la mise en œuvre d’un protocole de traitement et à l’établissement d’un pronostic. Il existe plus d’un système de stadication. L’ENCADRÉ 12.8 et la FIGURE 12.11 présentent le système de classication Ann-Arbor, qui comprend quatre stades : les stades I et II sont localisés, alors que les stades III et IV sont considérés comme avancés (c’est-à-dire qu’ils sont plus étendus). Chaque stade est subdivisé en stades A, B, E ou S. Le stade A correspond à l’absence de manifestations cliniques générales. Le stade B désigne la présence de manifestations cliniques telles que des sueurs nocturnes, de la èvre (38 °C) ou une perte de poids de 10 % ou plus au cours des 6 mois précédents. Le stade E représente une atteinte extralymphatique au-delà des ganglions contigus touchés. Le stade S est utilisé lorsque la rate est touchée. Le sous-type B a un pronostic beaucoup moins favorable que les autres (Metzger, Krasin, Choi et al., 2016).

Manifestations cliniques

FIGURE 12.10 Principales régions de lymphadénopathie et d’atteinte des organes par le lymphome hodgkinien

ENCADRÉ 12.8

Stades du lymphome hodgkinien (classication Ann-Arbor)

STADE I

STADE III

Les lésions ne touchent qu’une seule région ganglionnaire ou une région extralymphatique additionnelle (stade I-E) comme le foie, les poumons, les reins ou les intestins.

Les lésions touchent les régions ganglionnaires des deux côtés du diaphragme et se sont répandues à une région extralymphatique (III-E) ou à la rate (III-S), ou à ces deux endroits (III-SE).

STADE II

Les lésions touchent deux régions ganglionnaires ou plus du même côté du diaphragme ou une région ou un organe extralymphatique (II-E) du même côté du diaphragme.

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Partie 4

STADE IV

Le cancer s’est métastasé de façon diffuse dans le corps vers une région extralymphatique ou plus avec ou sans atteinte des ganglions lymphatiques correspondants.

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

Le lymphome hodgkinien se caractérise par l’hypertrophie indolore des ganglions lymphatiques. Les manifestations cliniques les plus courantes sont des ganglions enés, fermes, indolores et mobiles dans la région supraclaviculaire ou cervicale. Chez les enfants, le ganglion sentinelle (ou ganglion de Troisier) situé près de la clavicule gauche peut être le premier à enfler FIGURE 12.12. L’œdème des ganglions axillaires et inguinaux est moins fréquent. Les autres manifestations cliniques de ce cancer dépendent de l’étendue de l’atteinte et de la région touchée. La lymphadénopathie médiastine peut causer une toux sèche persistante. Des ganglions rétropéritonéaux enés peuvent provoquer une douleur abdominale inexpliquée. Les symptômes généraux incluent une fièvre faible ou intermittente (fièvre de PelEbstein), l’anorexie, la nausée, la perte de poids, des sueurs nocturnes et du prurit. En général, ces symptômes indiquent une atteinte avancée des ganglions lymphatiques et des régions extralymphatiques.

Approche thérapeutique Les principales méthodes de traitement sont la chimiothérapie et la radiothérapie. Elles peuvent être utilisées seules ou ensemble en fonction du stade clinique établi. Le but est évidemment la guérison, mais un traitement intensif augmente les risques de complications pendant la période de rémission et peut gravement compromettre la qualité de vie. C’est pourquoi de nombreux scientiques cherchent des moyens de réduire les complications à long terme des traitements. Une des principales préoccupations soulevées par l’utilisation combinée de la radiothérapie et de la chimiothérapie porte sur les effets tardifs graves de ces traitements sur les enfants ayant un excellent pronostic. Selon l’étendue de l’atteinte, la radiothérapie peut être locale, étendue (régions touchées et ganglions adjacents) ou totale (système ganglionnaire axial entier). Le traitement du lymphome hodgkinien vise un haut taux de guérison avec un minimum d’effets indésirables. Avec les années, les doses de radiothérapie ont graduellement diminué ; lorsque c’est possible, elles sont omises (Landier et Rae, 2012). La chimiothérapie est la principale forme de traitement d’un cancer de stade IV, mais une radiothérapie locale peut être administrée aux tumeurs volumineuses. Les soins de suivi de l’enfant qui ne reçoit plus de traitement sont essentiels pour déceler une rechute et des tumeurs secondaires. L’enfant qui a subi une splénectomie par laparotomie doit recevoir un traitement antibiotique prophylactique pendant une période indéterminée. De plus, il est recommandé d’administrer des vaccins contre les pneumocoques et les méningocoques avant l’intevention chirurgicale.

12

FIGURE 12.11 Stadication Ann-Arbor du lymphome. Les lymphomes hodgkiniens sont divisés selon un système de classication de quatre stades.

Pronostic Le pronostic des enfants qui ont un lymphome hodgkinien s’est énormément amélioré, surtout grâce à la stadication systématique et à l’amélioration des protocoles de traitement. Le pronostic des enfants ayant un cancer localisé est excellent. Le taux de survie général des enfants ayant ce cancer peut atteindre 95 %, mais cela dépend des tissus touchés et du stade (Frew, Lewis et Lucraft, 2013). Et même dans les cas d’un cancer disséminé, la rémission à long terme est possible chez plus de la moitié des enfants. S’il y a une rechute, une rémission complète est possible chez 30 à 60 % des enfants qui subissent une greffe de cellules souches hématopoïétiques de type allogreffe autologue de moelle osseuse (Metzger et al., 2016).

FIGURE 12.12 sentinelle ené

Enfant avec le ganglion

Chapitre 12

Enfant atteint de cancer

499

Soins inrmiers LYMPHOME HODGKINIEN

Les soins et les traitements inrmiers comprennent la préparation aux interventions diagnostiques et chirurgicales, l’explication des effets indésirables du traitement ainsi que le soutien de l’enfant et de sa famille. Si l’enfant est hospitalisé parce qu’on soupçonne la présence d’un lymphome hodgkinien, une batterie d’examens diagnostiques doit être effectuée. Il faut expliquer à la famille la raison de chaque examen, car un grand nombre d’entre eux, notamment la ponction de moelle osseuse, sont invasifs.

Procéder à une évaluation initiale CE QU’IL FAUT RETENIR

La radiothérapie cause peu d’effets indésirables, si ce n’est parfois une légère réaction cutanée.

L’anamnèse ainsi que l’examen physique donnent souvent des indices importants de la maladie, par exemple la èvre, des sueurs nocturnes, la perte de poids ainsi que l’œdème des ganglions lymphatiques, de la rate ou du foie. Puisque de multiples organes peuvent être touchés, plusieurs examens sont nécessaires pour conrmer la présence du lymphome hodgkinien et évaluer l’étendue du cancer an de déterminer son stade exact. Les analyses suivantes sont entre autres nécessaires : une formule sanguine complète, la concentration d’acide urique, les tests de la fonction hépatique, la vitesse de sédimentation érythrocytaire ou l’épreuve de dépistage de la protéine C réactive, la phosphatase alcaline et l’analyse d’urine. Les examens radiologiques requis sont notamment une tomodensitométrie du cou, du thorax, de l’abdomen et du bassin, une scintigraphie au gallium ou une tomographie par émission de positrons (détection d’un cancer métastatique ou récurrent), une radiographie thoracique et, selon les indications cliniques, une radiographie osseuse (détection des métastases). Une biopsie des ganglions lymphatiques est essentielle pour établir un diagnostic histologique ainsi que le stade. La présence de cellules de ReedSternberg est considérée comme un diagnostic de lymphome hodgkinien, puisque ces cellules sont absentes des autres lymphomes. Elles peuvent toutefois être présentes dans le cas d’une mononucléose infectieuse. Généralement, une ponction ou une biopsie de la moelle osseuse est aussi effectuée.

Comprendre les effets indésirables du traitement Les réactions à la chimiothérapie varient en fonction des médicaments utilisés. Les effets indésirables les plus courants, tels que les nausées et les vomissements, les changements de l’image

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Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

corporelle, la neuropathie et l’ulcération des muqueuses, ont été présentés plus tôt dans ce chapitre. La radiothérapie cause peu d’effets indésirables, si ce n’est parfois une légère réaction cutanée. Dans le cas d’une radiothérapie externe au thorax et à l’abdomen, les nausées et les vomissements, la perte de poids et l’ulcération des muqueuses (œsophagite, ulcères gastriques) sont courants. Les interventions inrmières de soulagement associées à ces effets indésirables ont été présentées précédemment dans ce chapitre et sont résumées dans le TABLEAU 12.2. L’effet indésirable le plus courant d’une radiothérapie intensive est le malaise. Il peut être dû aux dommages de la glande thyroïde, qui causent l’hypothyroïdie. Le manque d’énergie est particulièrement difcile pour les adolescents, car il les empêche de suivre leurs amis. Il est important pour ces enfants de se coucher à des heures régulières et de s’accorder des périodes de repos périodiques, particulièrement pendant la chi miothérapie, lorsque la myélosuppression accroît le risque d’infection et d’affaiblissement. Avant le congé de l’hôpital, l’infirmière doit discuter d’un programme scolaire réaliste avec les parents et l’enfant. Si des modications sont nécessaires (p. ex., éviter l’éducation physique intense), il faut en discuter avec l’inrmière de l’école, ainsi que le personnel enseignant et la direction. Le suivi est essentiel au diagnostic précoce de l’hypothyroïdie et à l’instauration d’une thérapie de remplacement des hormones thyroïdiennes. Chez les adolescents, le risque élevé de stérilité lié à la radiothérapie et à la chimiothérapie est préoccupant. En effet, l’exposition des organes génitaux aux radiations et aux agents cytotoxiques, particulièrement les agents alkylants, peut provoquer l’infertilité. Les jeunes lles qui possèdent un plus grand nombre d’ovocytes sont plus susceptibles de conserver leur fonction ovarienne. Il est important d’offrir aux adolescents pubères l’occasion de consulter en clinique de fertilité pour leur permettre de discuter des options possibles an de préserver leur fertilité pour le futur, par exemple par la conservation d’ovules ou de sperme. Même si le fonctionnement sexuel n’est pas modié, l’apparition des caractères sexuels secondaires et des menstruations peut être retardée chez les enfants pubères. Les adolescents doivent être informés de ces effets indésirables dès le début du processus de diagnostic et de traitement. Le retard de la maturation sexuelle peut être un sujet extrêmement délicat et douloureux pour les adolescents.

Lymphome non hodgkinien Le LNH est un cancer hétérogène qui présente des caractéristiques morphologiques, cytochi­ miques et immunologiques d’une diversité com­ parable à celle de la leucémie, ce qui explique que les traitements pour les deux maladies soient similaires. Sa classication en trois types, soit le lymphome lymphoblastique, le lymphome de Burkitt ou non Burkitt et le lymphome à grandes cellules, est basée sur l’apparence histo­ logique (Lymphome Canada, 2017). D’un point de vue immunologique, ces cellules sont aussi classées en cellules T, en cellules B (p. ex., le lymphome de Burkitt) ou en cellules non T ou non B, qui ne présentent aucune propriété immu­ nologique particulière.

Stadication Le système de stadication clinique du LH s’avère peu utile pour établir les stades du LNH, bien que ce système ait été adapté au LNH et que d’autres systèmes aient été élaborés (Société canadienne du cancer, 2017b). Les éléments d’un pronostic favo­ rable sont le jeune âge, un stade peu avancé sans atteinte médiastinale, une faible charge tumorale et une bonne réaction au traitement initial (Allen, Kamdar, Bollard et al., 2016). L’ENCADRÉ 12.9 pré­ sente le système de stadication le plus communé­ ment utilisé.

ENCADRÉ 12.9

Stadication du lymphome non hodgkinien

STADE I

STADE III

Atteinte limitée à une région ganglionnaire ou à une seule région extralymphatique, mais pas au thorax ni à l’abdomen.

Tumeur des deux côtés de l’abdomen qui peut s’être propagée à une région voisine ou à un organe voisin des ganglions lymphatiques, à la rate ou aux deux.

STADE II

Atteinte de deux régions ganglionnaires ou d’une région ou un organe extralymphatique – en haut ou en bas du diaphragme –, mais pas dans le thorax.

STADE IV

Tumeur s’étant propagée dans un organe qui n’est pas immédiatement voisin d’un gan­ glion touché, ou tumeur s’étant propagée au SNC ou à la moelle osseuse.

Sources : Adapté de American Cancer Society (2017) ; Lahl (2014).

cycliques combinés et une chimiothérapie intrathécale. Ces traitements à agents multiples durent de 6 à 24 mois.

Pronostic Une chimiothérapie combinée intensive a une inci­ dence majeure sur le taux de survie des enfants atteints d’un LNH. Les programmes de traitement les plus efcaces permettent la guérison de 85 à 95 % des enfants ayant des atteintes limitées, et de 70 à 90 % de ceux ayant des atteintes étendues (Allen et al., 2016).

12

Manifestations cliniques Les manifestations cliniques dépendent de la région du corps touchée et de l’étendue de l’at­ teinte. Un grand nombre des manifestations du LH peuvent aussi être observées dans le cas du LNH, bien qu’un seul symptôme permette rarement de poser un diagnostic. Les métastases à la moelle osseuse ou au SNC peuvent plutôt provoquer des manifestations cliniques carac téristiques de la leucémie. Les tumeurs lym­ phoïdes qui compriment divers organes peuvent causer une obstruction intestinale ou respiratoire, une paralysie des nerfs crâniens ou une paralysie médullaire.

Approche thérapeutique Les protocoles actuels de traitement du LNH com­ prennent une chimiothérapie multiple. La radio­ thérapie sera utilisée en cas d’urgence s’il y a obstruction des voies respiratoires, des intestins ou de la moelle épinière. Elle servira également en cas de rechute ou pour les soins de confort en soins palliatifs. Comme dans le cas de la leucémie, les protocoles comprennent les phases d’induc­ tion, de consolidation et d’entretien, dont cer­ taines incluent une chimiothérapie intrathécale. Le traitement de l’enfant atteint d’un lymphome non lymphoblastique comprend des médicaments

Soins inrmiers LYMPHOME NON HODGKINIEN

Les soins et les traitements inrmiers de l’enfant souffrant d’un LNH sont semblables à ceux pré­ sentés dans l’encadré Soins inrmiers de la sec­ tion Lymphome hodgkinien. En raison du protocole de chimiothérapie intensive, les soins et les traitements doivent être principalement axés sur les effets indésirables des agents cytotoxiques. Puisque, dans la plupart des cas de LNH pédiatriques, le cancer est étendu au moment du diagnostic, une stadication hâtive est pri­ mordiale étant donné la nature invasive et la progression rapide du LNH. Les recommanda­ tions courantes à cet effet incluent une biopsie chirurgicale visant une conrmation histopa­ thologique du cancer au moyen d’un immuno­ phénotypage et d’une évaluation cytogénétique, une ponction de la moelle osseuse, des examens radiologiques, notamment une TDM des pou­ mons et des organes digestifs, ainsi qu’une ponction lombaire.

Chapitre 12

Enfant atteint de cancer

501

12.3

Tumeurs du système nerveux central

12.3.1

Tumeurs cérébrales

Les tumeurs cérébrales, aussi appelées tumeurs du SNC, sont les tumeurs solides les plus courantes chez les enfants. Elles représentent environ 19 % de tous les nouveaux cancers pédiatriques chez les enfants de 0 à 14 ans (Société canadienne du cancer, 2017d). La majorité des tumeurs sont A

B

B

FIGURE 12.13 Supratentorielles.

Localisation des tumeurs – A Infratentorielles.

FIGURE 12.14

502

Partie 4

Principales tumeurs cérébrales chez l’enfant

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

infratentorielles (sous la tente du cervelet), ce qui signie qu’elles touchent la partie postérieure de l’encéphale, principalement le cervelet ou le tronc cérébral. Cette répartition explique la fréquence des symptômes découlant d’une pression intracrânienne accrue. Les autres tumeurs, dites supratentorielles, touchent les structures du mésencéphale FIGURE 12.13. La FIGURE 12.14 illustre les principales tumeurs cérébrales pédiatriques. Puisque les néoplasmes peuvent se développer à partir de toute cellule intracrânienne, il est possible que des tumeurs se forment à partir des cellules gliales, des cellules nerveuses, du neuroépithélium, des nerfs crâniens, des vaisseaux sanguins, de l’épiphyse et de l’hypophyse. Dans chacune de ces structures, des cellules particulières peuvent servir à la classication histologique des principales tumeurs pédiatriques. Les astrocytes, des cellules constituant la majeure partie du tissu de soutien des neurones, peuvent former des astrocytomes, qui sont les tumeurs gliales les plus communes (Parsons, Pollack, Hass-Kogan et al., 2016). Une tumeur cérébrale peut être bénigne ou maligne, mais l’utilisation du terme bénigne pour désigner toute tumeur cérébrale lorsque l’inrmière est en communication avec l’enfant et sa famille doit se faire prudemment, compte tenu des fonctions vitales que commande le cerveau.

Manifestations cliniques Les manifestations cliniques d’une tumeur cérébrale dépendent directement de la région anatomique touchée et de la taille de la tumeur ainsi que de l’âge de l’enfant jusqu’à un certain point. Par exemple, chez le nourrisson dont les sutures crâniennes sont encore ouvertes, une fontanelle protubérante indique une hydrocéphalie. La mesure de la circonférence crânienne permet de détecter l’accroissement de la taille du crâne. Même chez les enfants plus âgés, les manifestations cliniques peuvent être non spéciques. Cependant, les manifestations cliniques les plus courantes des tumeurs cérébrales infratentorielles sont les céphalées, particulièrement au réveil, et des vomissements en jet qui n’ont pas de lien avec l’alimentation. Les tumeurs de cette région de l’encéphale nuisent souvent à la circulation

TABLEAU 12.6

du liquide cérébrospinal, ce qui entraîne une augmentation de la pression intracrânienne et les manifestations précédemment mentionnées. De plus, les enfants peuvent présenter des signes liés à la structure touchée. Les tumeurs du cervelet causent souvent un nystagmus, une ataxie, une dysarthrie et une dysmétrie. Les manifestations supratentorielles les plus courantes comprennent des convulsions, des changements de la personnalité ou du comportement, des perturbations visuelles et une hémiparésie. Les tumeurs touchant les structures du mésencéphale, y compris l’hypothalamus et l’épiphyse, peuvent causer des endocrinopathies telles que le diabète insipide, l’apparition tardive ou précoce de la puberté ou encore un retard de croissance. Le TABLEAU 12.6 présente les manifestations cliniques courantes des tumeurs cérébrales.

éactivation des connaissances Qu’est-ce qui caractérise un vomissement en jet ?

Manifestations cliniques des tumeurs cérébrales et leur évaluation

MANIFESTATIONS CLINIQUES

ÉVALUATION

Céphalée • Récurrente et progressive • Régions frontales et occipitales • Généralement sourde et pulsatile • Pire au lever ; diminution au cours de la journée • Intensication lorsque la tête est baissée ou lors d’un effort, par exemple durant la défécation, la toux et l’éternuement

• Noter la description, le lieu, la gravité et la durée de la douleur.

12

• Utiliser une échelle de la douleur pour évaluer la gravité de la douleur 5 .

5

• Noter les changements en fonction de la période du jour et de l’activité de l’enfant.

Les différents outils d’évaluation sont présentés dans le chapitre 5, Évaluation et traitement de la douleur.

• Observer les changements de comportement du nourrisson (p. ex., une irritabilité persistante, des pleurs, un balancement de la tête).

Vomissements • • • •

Avec ou sans nausées ou alimentation De plus en plus projetés en jet Pires le matin, au lever Soulagés par les mouvements et les changements de position

• Noter l’heure, la quantité et le lien avec l’alimentation, les nausées et l’activité.

Changements neuromusculaires • Maladresse ou manque de coordination • Manque d’équilibre (p. ex., se tient les jambes écartées, tombe, trébuche, heurte des objets) • Faible motricité ne • Faiblesse • Hyporéexie ou hyperréexie • Signe de Babinski positif • Spasticité • Paralysie

• Vérier la force musculaire, la démarche, la coordination et les réexes 4 .

4 Les différentes étapes de l’examen physique sont présentées dans le chapitre 4, Examen clinique : anamnèse et examen physique.

Chapitre 12

Enfant atteint de cancer

503

TABLEAU 12.6

Manifestations cliniques des tumeurs cérébrales et leur évaluation (suite)

MANIFESTATIONS CLINIQUES

ÉVALUATION

Changements comportementaux • • • • • • •

Irritabilité Appétit diminué Retard staturopondéral (de croissance) Fatigue (siestes fréquentes) Léthargie Coma Comportements étranges (p. ex., des yeux xes, des mouvements automatiques)

• Observer régulièrement le comportement. • Comparer les observations cliniques et les comptes rendus des parents sur les comportements normaux de l’enfant. • Surveiller la croissance et l’ingestion des aliments. • Surveiller l’activité et le sommeil.

Neuropathie des nerfs crâniens • Atteinte des nerfs crâniens (varient selon le lieu de la tumeur) • Manifestation clinique courante : tête inclinée • Troubles de la vision (p. ex., un nystagmus, une diplopie, un strabisme, une vision épisodiquement ombragée, un trouble du champ visuel)

• Évaluer les nerfs crâniens, particulièrement le VII (facial), le IX (glossopharyngien), le X (vague), le V (trijumeau, racines sensorielles) et le VI (nerf oculomoteur externe). • Évaluer l’acuité visuelle, la binocularité et la vision périphérique.

Perturbations des signes vitaux • Fréquences cardiaque et respiratoire diminuées • Pression artérielle augmentée • Pression différentielle réduite • Pression intracrânienne élevée

20

• Hypothermie ou hyperthermie 20

Autres manifestations cliniques

L’activité convulsive ainsi que la mesure de la pression intracrânienne sont abordées dans le chapitre 20, Troubles liés au système nerveux.

• • • • •

Convulsions Élargissement du crânea Fontanelle tendue et protubérante au repos a Rigidité de la nuque Œdème papillaire (œdème du nerf optique)

a Présent seulement

Le diagnostic d’une tumeur cérébrale est fondé sur les signes cliniques et l’imagerie diagnostique. Puisque les manifestations cliniques sont parfois vagues et peuvent facilement passer inaperçues, un haut degré de suspicion pendant la collecte de données favorise un diagnostic précoce. Divers examens peuvent servir à l’évaluation neurologique, mais l’examen diagnostique de référence est l’imagerie par résonance magnétique (IRM), car elle permet le diagnostic précoce des tumeurs cérébrales et l’évaluation de l’évolution de la tumeur pendant ou après le traitement. L’imagerie de diffusion, la spectroscopie et l’imagerie de perfusion sont d’autres techniques d’IRM utilisées pour déceler et diagnostiquer les tumeurs (Fleming et Chi, 2012). La TDM, qui permet la visualisation directe du parenchyme cérébral, des ventricules cérébraux Partie 4

• Noter l’activité convulsive 20 . • Mesurer la circonférence crânienne quotidiennement (nourrisson et enfant en bas âge). • Effectuer un examen du fond de l’œil si qualiée pour le faire.

chez le nourrisson et l’enfant en bas âge.

Diagnostic

504

• Mesurer fréquemment les signes vitaux et neurologiques. • Surveiller les fréquences cardiaque et respiratoire pendant une minute. • Noter la pression différentielle (différence entre la pression systolique et la pression diastolique).

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

ainsi que de l’espace sous-arachnoïdien environnant, est communément utilisée dans les cas urgents où l’on soupçonne une tumeur, mais pour lesquels on ne peut faire d’IRM. Les autres examens possibles sont l’IRM de la colonne vertébrale et l’électroencéphalographie. La ponction lombaire est dangereuse si la pression intracrânienne est élevée en raison de la possibilité de hernie du tronc cérébral après le relâchement soudain de la pression. Le diagnostic nal est basé sur l’analyse des tissus prélevés au cours d’une intervention chirurgicale. Des techniques spéciales sont parfois nécessaires à la détermination du type de cellules. La période d’attente est une source d’anxiété pour les membres de la famille qui connaissent le lien entre le type de cellules et le pronostic. Certaines tumeurs cérébrales sont situées à des endroits où il est impossible de faire une biopsie (p. ex., dans

le tronc cérébral). Dans ce cas, le diagnostic est fondé uniquement sur les résultats d’imagerie.

Approche thérapeutique Les tumeurs cérébrales sont classées par stade de I à IV selon leur degré de malignité, de dénition et d’inltration. Les stades I et II sont considérés comme des tumeurs bénignes, alors que les stades III et IV sont considérés comme des tumeurs malignes. La localisation de la tumeur dans le SNC est aussi très importante, puisqu’elle a un lien direct avec les manifestations ou les décits causés par la tumeur. La localisation aura aussi une incidence sur le choix et la réalisation possible (ou non) du traitement, ainsi que sur les séquelles laissées par celui-ci. Les tumeurs cérébrales des enfants sont différentes de celles des adultes. Leurs traitements sont aussi différents. Selon le type de tumeur, le traitement peut comprendre l’intervention chirurgicale, la chimiothérapie et la radiothérapie, utilisées seules ou combinées. L’intervention chirurgicale peut avoir divers objectifs, notamment obtenir un diagnostic pathologique pour choisir le traitement approprié, diminuer la pression induite par la tumeur sur les structures environnantes, atteindre une ablation complète qui signifie, pour certains types de tumeurs, une cure dénitive et, pour d’autres, une optimisation des traitements à venir. Divers progrès réalisés dans le domaine de la chirurgie, notamment la résonance magnétique peropératoire, permettent d’effectuer des biopsies et de réséquer des tumeurs dans des parties du corps où il était auparavant trop dangereux d’effectuer des interventions chirurgicales traditionnelles. Les progrès faits dans le domaine de l’imagerie médicale depuis quelques années ont grandement aidé à l’obtention de diagnostics plus précis et à un meilleur suivi des clients à court et à long terme. Le traitement par chimiothérapie est privilégié au cours des dernières années pour éviter la radiothérapie chez les enfants de moins de trois ans, car le cerveau se développe rapidement au cours de cette période (American Cancer Society, 2016). La chimiothérapie est aussi utilisée comme traitement d’appoint dans le cas de tumeurs résiduelles, non résécables ou récurrentes. Des agents hydrosolubles

sont capables de pénétrer la barrière hématoencéphalique et d’attaquer les cellules de la tumeur cérébrale (American Cancer Society, 2016). Les agents cytotoxiques les plus couramment utilisés sont le cisplatine, le carboplatine, la vincristine, la vinblastine, le cyclophosphamide, la lomustine, la carmustine, l’étoposide, l’ifosfamide et le topotécan. Ces trois modes de traitement entraînent divers problèmes qui sont aggravés par des effets tardifs graves. En effet, les interventions chirurgicales peuvent endommager des régions importantes du cerveau, particulièrement lors de la résection de tumeurs envahissantes. La radiothérapie a de graves effets à long terme, notamment la nécrose des tissus, des tumeurs secondaires, le dysfonctionnement endocrinien et des déciences comportementales ou intellectuelles. Les effets indésirables de la chimiothérapie comprennent, entre autres, l’alopécie, les ulcères buccaux, la perte d’appétit, les nausées et les vomissements, la diarrhée, l’augmentation du risque d’infections (leucopénie), les ecchymoses, les saignements (thrombocytopénie) et la fatigue. La protonthérapie, qui est maintenant utilisée dans le traitement des tumeurs cérébrales, offre un faisceau de radiation plus ciblé qui peut diminuer les effets indésirables (Fleming et Chi, 2012).

12

Pronostic Le pronostic de la tumeur cérébrale dépend du type de tumeur, de sa taille, de l’étendue de la maladie et de l’âge de l’enfant. Il est relativement sombre, surtout chez le nourrisson et le jeune enfant, en raison des effets indésirables tardifs graves du traitement. Toutefois, la recherche avance aussi à grands pas. La mise en commun des connaissances permet de mieux adapter les traitements pour obtenir un maximum d’efcacité tout en diminuant le plus possible les effets indésirables associés. Les progrès récents dans les techniques de chirurgie, l’utilisation de la résonance magnétique peropératoire ainsi que la recherche de nouveaux protocoles incluant l’administration de modicateurs d’agents biologiques contribuent à l’augmentation des taux de survie des enfants atteints de tumeurs cérébrales (Giordano, Samii, Lawson McLean et al., 2017 ; Wether et Watral, 2014).

Soins inrmiers TUMEURS CÉRÉBRALES

Peu importe le type de lésion intracrânienne, les soins et les traitements inrmiers de l’enfant atteint d’une tumeur cérébrale sont semblables. Puisqu’une tumeur cérébrale peut être fatale, il est vivement conseillé de faire appel aux interventions

psychologiques présentées dans le chapitre 10 et à celles traitées dans la présente section. Malgré la gravité de certaines tumeurs cérébrales, il est important de souligner que les thérapies nouvelles et émergentes donnent de l’espoir aux familles de nombreux enfants touchés par ce cancer.

Chapitre 12

Enfant atteint de cancer

505

Détecter les manifestations cliniques Lorsqu’un enfant est admis à l’hôpital en raison d’un dysfonctionnement neurologique, on soupçonne généralement la présence d’une tumeur cérébrale, même si le diagnostic n’est pas encore conrmé. L’établissement de données de référence qui permettront de comparer les changements survenus entre les phases préopératoire et postopératoire est une étape essentielle de la planication des soins et de la prévention des complications. Le TABLEAU 12.6 résume les manifestations cliniques courantes ainsi que les procédures d’évaluation permettant de documenter les changements importants de l’état de l’enfant.

Préparer la famille au diagnostic et aux interventions chirurgicales Un diagnostic possible de tumeur cérébrale provoque toujours une crise. Bien que la résection de certaines tumeurs donne de très bons résultats, le médecin peut rarement donner un pronostic dénitif avant l’intervention. Les parents, l’enfant et les autres membres de la famille ont donc besoin d’un soutien émotionnel considérable pour faire face aux interventions diagnostiques et à une craniotomie. La présence d’une tumeur cérébrale peut empêcher la circulation du liquide cérébrospinal et provoquer de l’hydrocéphalie. Un drain ventriculaire transitoire peut être nécessaire en phase postopératoire. Aussi, on peut avoir recours à une dérivation ventriculo-péritonéale avant la résection de la tumeur. Le mode de préparation de l’enfant aux examens diagnostiques dépend de son âge et de son expérience. Puisque la plupart des examens sont effectués avec des appareils à rayons X, ces interventions peuvent être familières à l’enfant. Lorsque la date de l’intervention chirurgicale est xée, il faut expliquer à l’enfant ce qui l’attend. Il peut être tentant de justier l’opération en mentionnant que la résection de la tumeur fera disparaître plusieurs symptômes, mais l’inrmière ne doit pas trop insister sur ce point. En effet, les céphalées et les manifestations cérébelleuses telles que l’ataxie peuvent s’aggraver plutôt que s’atténuer après l’intervention chirurgicale. De plus, il est possible que la vision ne s’améliore pas après l’opération. Dans le cas d’un gliome optique, l’enfant peut être aveugle d’un œil même si la tumeur a été complètement enlevée. Finalement, l’ablation chirurgicale de la masse peut être impossible, et le fonctionnement peut être perturbé temporairement ou en permanence après l’intervention. En étant honnête avant l’opération, il est généralement plus facile de l’être par la suite, car on n’a pas donné de faux espoirs. Il est préférable de transmettre une petite quantité d’information à la fois an de permettre à

506

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

l’enfant de poser des questions. Par exemple, certains enfants demandent ce qui arrivera s’il reste une partie de la tumeur après l’opération. Une réponse honnête consiste à dire que le médecin tentera de réduire la taille de la tumeur à l’aide de rayons X spéciaux et de médicaments. L’explication plus détaillée de la radiothérapie et de la chimiothérapie pourra être donnée ultérieurement, lorsqu’une décision aura été prise à ce sujet. Les cheveux sont généralement rasés dans la salle d’opération juste avant l’intervention chirurgicale ou parfois dans la chambre de l’enfant, souvent la veille de l’opération. Si l’enfant est éveillé au moment du rasage, une approche délicate et positive est indiquée. En permettant à l’enfant de se voir à diverses étapes du rasage, on l’aide à se préparer à son apparence nale. En général, on essaie de raser le minimum de cheveux. On conseille aux jeunes lles de se faire quelques tresses, de manière à faciliter l’entretien des cheveux après l’opération, puisqu’on ne peut pas les laver dans les jours suivants. Lorsque les cheveux de l’enfant sont rasés, on peut lui offrir une casquette ou un foulard. Il faut prendre toutes les mesures nécessaires pour respecter l’intimité de l’enfant pendant le rasage. Il faut également parler de la taille du pansement à l’enfant. En général, le pansement doit couvrir la totalité de la plaie, ce qui permet de la protéger et de la maintenir bien fermée. Le pansement de la région infratentorielle peut être xé à la partie supérieure arrière du crâne et au cou, ce qui lui donne une légère extension et le garde aligné, et prévient ainsi l’ouverture de la plaie. L’application d’un pansement semblable ou d’un « chapeau spécial » sur la tête d’une poupée est un moyen moins traumatisant de montrer à l’enfant l’apparence qu’il aura. Il faut également expliquer brièvement à l’enfant comment il se sentira et à quel endroit il sera après l’opération. Il devrait normalement être amené à une unité de soins intensifs pédiatriques qu’il peut visiter préalablement, selon la politique de l’hôpital. Il faut l’avertir qu’il sera peut-être somnolent pendant un certain temps après l’intervention et aura probablement mal à la tête, mais que cela ne devrait durer que quelques jours, et que des médicaments contre la douleur lui seront prescrits. Les mêmes explications doivent être données aux parents avant l’intervention chirurgicale, particulièrement en ce qui concerne les appareils particuliers utilisés dans l’unité de soins intensifs, les pansements et le comportement de l’enfant. Par exemple, ils doivent savoir que l’enfant sera peut-être léthargique pendant quelques jours après l’intervention. L’inrmière peut leur proposer de

réduire la fréquence de leurs visites pendant cette période an de se reposer et d’être en mesure de s’occuper de l’enfant quand il sera éveillé. L’infirmière doit participer aux rencontres préopératoires avec le médecin et les parents. Elle doit savoir quelle information a déjà été transmise aux parents an de leur fournir des précisions ou de leur offrir son soutien émotionnel, au besoin.

Prévenir les complications postopératoires Après l’intervention chirurgicale, le neurochirurgien donne des prescriptions précises concernant la mesure des signes vitaux et neurologiques, le positionnement de l’enfant, la régulation des liquides et l’administration des médicaments. Ces prescriptions varient quelque peu, selon le lieu de la craniotomie. Les principes généraux des soins nécessaires après une intervention chirurgicale dans la région infratentorielle ou supratentorielle sont présentés ci-dessous.

Mesurer les signes vitaux L’inrmière prend régulièrement les signes vitaux, y compris la pression artérielle et la pression différentielle (la différence entre les pressions systolique et diastolique), et elle doit les prendre plus souvent si elle remarque des changements. Elle doit immédiatement signaler au médecin toute variation soudaine. Il est particulièrement important de noter tout changement dans les signes vitaux qui survient pendant ou après les examens paracliniques. Au moment de prendre les signes vitaux, l’inrmière effectue également une évaluation neurologique habituelle et mesure le périmètre crânien du nourrisson et du trottineur une fois par jour. Les signes vitaux doivent être mesurés toutes les 15 ou 30 minutes jusqu’à ce que l’état de l’enfant soit stable. La mesure de la température est particulièrement importante en raison de l’hyperthermie découlant d’une intervention chirurgicale de l’hypothalamus ou du tronc cérébral et de certains types d’anesthésie générale. L’inrmière surveille les signes de céphalées, de vomissements et de toute activité convulsive chez l’enfant. Elle note la localisation, la gravité et la durée des céphalées, de même que leur rapport avec l’activité et le moment de la journée. Des comportements comme s’allonger, se détourner de la lumière ou refuser de jouer sont des indices de malaise chez l’enfant qui ne parle pas. L’inrmière vérie la démarche de l’enfant au moins une fois par jour. Elle note toujours si l’enfant incline la tête ou s’il a d’autres changements de posture. La présence d’un écoulement incolore doit être signalée immédiatement, car il s’agit fort probablement de liquide cérébrospinal qui s’écoule de la région de l’incision 1 . La mauvaise odeur du pansement peut être un signe d’infection. Il faut

rapporter cette observation et faire un prélèvement pour culture. Les types les plus probables d’infections sont la méningite et l’infection des voies respiratoires. La cause probable de la méningite est la contamination de la plaie. Le risque d’infection des voies respiratoires est élevé en raison de l’immobilité imposée, du danger d’aspiration et de la dépression possible du tronc cérébral. Les mesures préventives habituelles de respiration profonde (ou soufer pour faire des bulles chez les jeunes enfants de 3 à 5 ans) et de changement de position doivent être appliquées si elles sont autorisées. De plus, il faut effectuer des évaluations pulmonaires régulières visant à déceler des bruits fortuits ou toute région où les bruits respiratoires sont réduits ou absents.

Surveiller les signes neurologiques Dès que possible, l’inrmière doit commencer à évaluer les réexes, la force de préhension et le fonctionnement des nerfs crâniens. Après une intervention chirurgicale, la force musculaire est généralement réduite en raison d’une faiblesse généralisée, mais cela devrait s’améliorer chaque jour. Une intervention cérébelleuse peut aggraver considérablement l’ataxie, mais celle-ci diminuera peu à peu. L’œdème à proximité des nerfs crâniens peut inhiber des fonctions importantes telles que le réexe nauséeux, le clignement des yeux et la déglutition. L’évaluation neurologique exécutée selon les protocoles en place est une partie essentielle des soins. Elle comprend l’évaluation de la réponse pupillaire à la lumière, du degré de conscience, du cycle du sommeil et de la réponse à des stimulus 2 . L’enfant peut être comateux pendant quelques jours, mais dès qu’il reprend connaissance, il devrait être de plus en plus alerte. La régression à un état léthargique et irritable indique une pression croissante, possiblement causée par une méningite, une hémorragie ou de l’œdème.

12 CE QU’IL FAUT RETENIR

La mauvaise odeur du pansement peut être un signe d’infection.

Lorsque le jeune enfant est à nouveau alerte, une contention des bras peut être nécessaire pour protéger le pansement 3 . L’enfant qui était coopératif ALERTES CLINIQUES avant l’intervention doit également être étroitement sur1 Pour faire un suivi exact des écoulements, il faut veillé au début de la reprise de conscience, car la déso- encercler la région souillée avec un stylo et surveiller les rientation et l’agitation sont signes de saignement continu. communes à cette étape. La 2 Une réponse lente, une dilatation ou l’inégalité des contention des coudes est pupilles doivent être immédiatement signalées, car elles sufsante pour empêcher les peuvent indiquer une pression intracrânienne élevée et une mains d’atteindre la tête, hernie du tronc cérébral, lesquelles constituent une urgence mais d’autres contentions médicale. peuvent être nécessaires 3 L’utilisation de contentions doit absolument être pour protéger une ligne intraveineuse et maintenir effectuée selon le protocole en place dans l’établissement une position particulière. où travaille l’inrmière.

Chapitre 12

Enfant atteint de cancer

507

Surveiller le positionnement

ALERTE CLINIQUE

La position de Trendelenburg est contre­indiquée après une intervention chirurgicale des régions infratentorielle et supratentorielle, car elle accroît la pression intracrânienne et le risque d’hémorragie. Si un état de choc est imminent, il faut avertir le médecin immédiate­ ment avant d’abaisser la tête.

Un positionnement approprié après l’intervention chirurgicale est essentiel pour prévenir la pression sur la région opérée, réduire la pression intracrânienne et éviter l’aspiration. Si une grosse tumeur a été enlevée, l’enfant ne doit pas être placé sur le côté opéré, car le cerveau pourrait soudainement glisser dans la cavité, ce qui causerait des lésions aux vaisseaux sanguins, aux membranes et au cerveau lui-même. L’inrmière doit discuter de la position appropriée avec le neurochirurgien, y compris du degré de exion du cou. Les 24 à 48 heures qui suivent une intervention chirurgicale cérébrale sont critiques. Un positionnement restreint doit être indiqué sur une afche placée au-dessus de la tête du lit . Lorsque l’enfant est tourné, toutes les précautions nécessaires doivent être prises pour éviter les chocs ou le désalignement du corps, et pour ne pas exercer de tensions excessives sur les sutures. Deux inrmières sont nécessaires pour effectuer cette manipulation : l’une soutient la tête et l’autre, le corps. L’utilisation d’une alèse peut aider à tourner un enfant lourd.

Surveiller la régulation des liquides L’enfant qui a subi une craniotomie infratentorielle ne doit rien ingérer par la bouche pendant au moins 24 heures ou plus si son réexe nauséeux et sa déglutition sont inhibés, ou s’il est comateux. Si l’enfant a subi une intervention chirurgicale supratentorielle, il peut recommencer Bastien, âgé de six ans, a subi une craniotomie à s’alimenter dès qu’il est pour exérèse d’une tumeur cérébrale de type astro­ éveillé, ce qui prend parfois cytome. Il est revenu de la salle de réveil il y a une moins de 24 heures. Il doit heure. Il a un soluté à l’avant­bras droit. Vous toujours boire d’abord de l’eau observez qu’il porte parfois sa main gauche à son en raison du danger d’aspipansement à la tête. Devriez­vous immobiliser sa ration. Si l’enfant vomit, il main gauche à l’aide d’une contention ? faut arrêter l’ingestion des lia) Oui, pour éviter qu’il enlève volontairement quides. Le vomissement pose son pansement. un risque d’aspiration en b) Oui, car Bastien pourrait toucher la plaie plus d’accroître la pression chirurgicale. intracrânienne et le risque de c) Non, car il peut comprendre qu’il ne doit pas rupture de la suture. toucher son pansement. La perfusion de liquide d) Non, car il faut une prescription médicale pour intraveineux doit être pourune contention. suivie jusqu’à ce que l’ingestion de liquide oral soit bien tolérée. En raison de l’œdème cérébral postopératoire et du Vous observez que le pansement de Bastien est danger de pression intracrâsouillé. Quelle donnée prioritaire devez­vous nienne élevée, l’administrarecueillir en lien avec la tache sur le pansement ? tion des liquides doit être surveillée attentivement et a) La couleur de la partie souillée. doit généralement être inféb) L’odeur qui se dégage de la tache. rieure aux besoins liquidiens c) L’étendue de la partie souillée. d’entretien. Une solution d) L’endroit exact de la tache. hypertonique telle que le

Jugement

clinique

Jugement

clinique

508

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

mannitol peut être nécessaire pour éliminer l’excès de liquide. Ce type de médicament provoque une diurèse rapide. Après l’administration du médicament, il faut surveiller le débit urinaire an d’évaluer l’efcacité du médicament.

Soulager l’inconfort L’enfant peut avoir des maux de tête intenses qui sont en grande partie dus à l’œdème cérébral. Pour soulager les malaises qui en découlent, on peut offrir un environnement calme à éclairage tamisé, restreindre les visites, éviter tout choc (p. ex., heurter le lit) et prévenir l’augmentation de la pression intracrânienne. La façon la plus efcace de prévenir l’augmentation de la pression intracrânienne consiste à positionner adéquatement l’enfant et à l’empêcher de forcer, notamment pendant la toux, les vomissements et la défécation. L’utilisation d’opioïdes tels que la morphine pour soulager la douleur est controversée, car il semble que ces médicaments peuvent masquer les signes d’altération de la conscience ou de dépression respiratoire. Toutefois, les opioïdes en petite dose peuvent être nécessaires ; en cas de besoin pour soulager la douleur, la naloxone peut être utilisée pour renverser les effets secondaires comme la sédation ou la dépression respiratoire. L’acétaminophène est également un analgésique efcace. Peu importe le médicament utilisé, une dose adéquate et une administration régulière sont essentielles au soulagement optimal de la douleur. L’œdème cérébral peut grandement inhiber le réexe nauséeux, entraînant ainsi la nécessité de dégager les sécrétions orales par la succion. L’œdème facial peut également être présent, ce qui exige des soins oculaires si les paupières restent partiellement ouvertes. L’application de compresses de glace sur les yeux pendant de courtes périodes aide à réduire l’œdème. En outre, le clignement réduit des yeux rend la cornée vulnérable aux ulcères et aux abrasions. An de prévenir cette complication, il est important d’hydrater les yeux avec des gouttes de solution saline et de les couvrir de pansements oculaires.

Soutenir la famille L’enfant et sa famille qui reçoivent un diagnostic de tumeur cérébrale ont de grands besoins émotionnels, qui varient selon l’étendue de l’intervention chirurgicale prévue, les déciences neurologiques possibles, le pronostic et les autres traitements nécessaires. Très peu de réponses définitives peuvent leur être données avant l’intervention, mais le rapport du neurochirurgien présente des résultats importants allant d’un néoplasme complètement bénin qui a été enlevé à une tumeur très maligne et envahissante qui n’a été que partiellement réséquée. Dans ce dernier cas, même si les parents essaient

de se préparer à un diagnostic possiblement fatal, il est compréhensible que ce soit un choc pour eux.

Favoriser le retour à un fonctionnement optimal

Idéalement, l’inrmière qui participera aux soins continus de l’enfant doit être avec la famille lorsque le médecin annonce le pronostic et le plan de traitement. Quelles que soient les perspectives d’avenir, la pensée des parents doit être orientée vers le rétablissement de l’enfant et le retour à une vie normale qui lui permet de réaliser son plein potentiel. Il faut donner aux membres de la famille l’occasion d’exprimer leurs préoccupations et de poser des questions, et encourager les parents à verbaliser leurs sentiments au sujet du diagnostic.

Le but ultime du traitement est la guérison de l’enfant et son fonctionnement optimal. Dès que possible, l’enfant doit recommencer ses activités habituelles dans des limites acceptables, notamment retourner à l’école. La décision revient au neurochirurgien. L’inrmière de l’école et l’enseignant doivent discuter avec les parents de la restriction des activités telles que l’éducation physique et des réactions des camarades de classe à l’apparence de l’enfant.

Pendant cette période, l’inrmière doit également discuter avec les parents de ce qu’ils envisagent de dire à l’enfant. Si celui-ci a été préparé en toute honnêteté, comme cela a été mentionné ci-dessus, le diagnostic peut être présenté d’une manière semblable. Par exemple, on peut dire à l’enfant que le chirurgien a enlevé la majeure partie de la tumeur et que le reste sera traité avec des médicaments spéciaux et des rayons X. Pendant la période de rétablissement, l’enfant a besoin d’explications plus précises sur le traitement et les raisons des effets neurologiques résiduels tels que l’ataxie ou la cécité. La perte de cheveux est une source normale de préoccupation pour l’enfant, et la repousse peut être retardée, selon la durée du traitement. À cette étape, il est conseillé de présenter de nouveau l’idée d’une prothèse capillaire.

12.3.2

Neuroblastome

Le neuroblastome est la tumeur solide extracrânienne la plus commune chez l’enfant et le cancer le plus couramment diagnostiqué chez le nourrisson. Quelque 350 nouveaux cas de neuroblastome et autres tumeurs du système nerveux périphérique ont été diagnostiqués entre 2006 et 2010 au Canada (Société canadienne du cancer, 2017d). Environ 80 % des neuroblastomes apparaissent avant l’âge de 5 ans ; l’âge moyen au moment du diagnostic est de 2,5 ans (Société canadienne du cancer, 2017c). Cette tumeur se développe à partir des cellules de la crête neurale embryonnaire, lesquelles forment normalement les médullosurrénales et le système nerveux sympathique. Par conséquent, la majorité des tumeurs apparaissent dans les glandes surrénales ou la chaîne sympathique rétropéritonéale. Le siège primaire se trouve dans l’abdomen, et les autres régions touchées sont la tête, le cou, la poitrine et le bassin.

Manifestations cliniques Les manifestations cliniques du neuroblastome dépendent de la région touchée et du stade du cancer. Dans le cas de tumeurs abdominales, le signe le plus courant est la présence d’une masse ferme et

Le grand éventail de conséquences possibles d’une tumeur cérébrale n’est pas traité ici. L’étudiante doit plutôt se reporter à d’autres sections qui traitent des effets possibles, notamment celles portant sur la paralysie, les déciences visuelles ou l’inconscience, ou encore celles relatives à la dérivation ventriculaire, au trouble convulsif ou à la méningite. La progression de la tumeur peut entraîner de nombreux troubles physiques qui peuvent exiger des interventions additionnelles. Par exemple, si l’enfant vomit fréquemment, est anorexique et a des nausées, une alimentation par gavage grâce à la gastrostomie ou à l’alimentation parentérale peut être nécessaire. Dans ce cas, l’inrmière peut être chargée d’enseigner à la famille les soins appropriés à effectuer à domicile an de procurer à l’enfant la meilleure qualité de vie possible 13 .

13 La planication du congé postopératoire et les soins à domicile sont abordés dans le chapitre 13, Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation.

irrégulière non sensible qui franchit la ligne médiane de l’abdomen (contrairement à la tumeur de Wilms, qui se trouve généralement d’un seul côté). D’autres tumeurs primaires peuvent entraîner d’importants effets cliniques tels qu’une décience neurologique, une obstruction respiratoire due à la présence d’une masse thoracique ou divers degrés de paralysie en raison de la compression de la moelle épinière. Des métastases distantes causent fréquemment des ecchymoses supraorbitaires, de l’œdème périorbitaire et une proptose (exophtalmie) attribuable à l’invasion du tissu mou rétrobulbaire. La lymphadénopathie, l’hépatomégalie et des douleurs osseuses sont également présentes chez les enfants dont le cancer est disséminé. Les manifestations vagues de métastases répandues incluent la pâleur, la faiblesse, l’irritabilité, l’anorexie et la perte de poids.

Diagnostic Le diagnostic vise la localisation du foyer primaire et les régions de métastases. Une TDM de l’abdomen, du bassin ou de la poitrine est la méthode d’imagerie favorisée pour localiser la tumeur primaire. Une scintigraphie osseuse et une scintigraphie à la MIBG doivent être effectuées pour déceler la présence de Chapitre 12

Enfant atteint de cancer

509

12

métastases dans les os. Tous les enfants doivent subir un examen de la moelle osseuse au moyen de ponctions bilatérales et de biopsies. Les neuroblastomes, surtout ceux provenant des glandes surrénales ou d’une chaîne sympathique, excrètent de l’épinéphrine et de la norépinéphrine, deux hormones du groupe des catécholamines. L’excrétion urinaire de catécholamines est détectée chez environ 95 % des enfants qui présentent des tumeurs des surrénales ou d’une chaîne sympathique.

Stadication et pronostic Le neuroblastome est une tumeur dite silencieuse. Dans plus de 70 % des cas, le diagnostic est posé après la formation de métastases, au moment de l’apparition des premiers signes d’atteinte de sièges non primaires, généralement les ganglions lymphatiques, la moelle osseuse, le système squelettique ou le foie. Le stade de la maladie, l’âge de l’enfant ainsi que la biologie de la tumeur sont des facteurs importants pour évaluer le risque et le pronostic, ainsi que pour faire le bon choix de traitement. Les enfants ayant reçu un diagnostic de neuroblastome sont classés comme étant à bas risque, à risque modéré ou à haut risque selon ces trois facteurs (Wilson et Saggio, 2012). On utilise deux systèmes pour la stadication du neuroblastome. Le premier est le système international de stadication du neuroblastome. Ce système se base sur la quantité de tumeurs enlevées lors de l’intervention chirurgicale ENCADRÉ 12.10. L’autre est le système international de stadication par catégorie de risque du neuroblastome ENCADRÉ 12.11 . Ce système est semblable au premier, mais il n’utilise pas les résultats de

ENCADRÉ 12.10

Une stadication clinique exacte est importante pour l’établissement du traitement initial. Le but de l’intervention chirurgicale est d’enlever la plus grande partie possible de la tumeur et d’obtenir des biopsies. Aux stades I et II, la résection complète de la tumeur est l’idéal. Si la tumeur est grosse, la chimiothérapie est utilisée pour réduire la tumeur an d’optimiser les chances de résection totale (Shohet et Nuchtern, 2017). Aux stades III et IV, l’intervention chirurgicale ne vise généralement que le prélèvement de biopsies en raison de l’étendue des métastases. L’âge de l’enfant et la biologie de la tumeur sont des informations importantes pour l’établissement du traitement initial. Les traitements varient de l’observation active à l’intervention chirurgicale, ou à un traitement multimodal dans les cas de neuroblastomes à moyen et à haut risque. La chirurgie joue un rôle pivot dans le diagnostic, le traitement et la guérison du neuroblastome.

STADE I

STADE III

Tumeur locale qui est restreinte à la région d’origine et peut être complètement enlevée par chirurgie ; aucune tumeur microscopique dans les ganglions lymphatiques ipsilatéraux représentatifs (les ganglions qui sont liés à la tumeur pri­ maire et enlevés avec elle peuvent être atteints).

Tumeur ayant traversé la ligne médiane du corps et pouvant s’être propagée ou non aux ganglions lymphatiques régio­ naux ; ou tumeur unilatérale locale qui s’est propagée aux ganglions lymphatiques controlatéraux régionaux ; ou tumeur au centre du corps qui s’est propagée aux ganglions lympha­ tiques des deux côtés du corps.

Tumeur unilatérale qui ne peut être complètement enlevée par chirurgie ; aucune tumeur microscopique dans les ganglions lymphatiques ipsilatéraux représentatifs non adhérents et les ganglions lymphatiques controlatéraux.

STADE IV

STADE II-B

STADE IV-S

Tumeur unilatérale qui peut ou non être complètement enlevée par chirurgie ; atteinte des ganglions lymphatiques ipsilatéraux non adhérents ; aucune tumeur microscopique dans les ganglions lymphatiques controlatéraux enés.

Tumeur primaire locale (comme pour les stades I, II­A ou II­B) avec propagation limitée au foie, à la peau ou à la moelle osseuse, mais pas aux os. Ce stade est réservé aux enfants de moins de un an.

Sources : Adapté de D’Andrea (2014) ; Société canadienne du cancer (2017c).

Partie 4

Approche thérapeutique

Système international de stadication du neuroblastome

STADE II-A

510

l’intervention chirurgicale pour déterminer le stade. Il se base sur les résultats de l’imagerie, avant l’opération. En plus du stade de la maladie, il prend en compte l’âge de l’enfant au moment du diagnostic. Les enfants en bas âge (moins de un an) ont généralement un meilleur pronostic, et celui-ci s’aggrave avec l’âge. Enn, la biologie de la tumeur est également prise en compte. Ainsi, l’histologie de la tumeur (p. ex., l’amplication du gène Myc-N), la ploïdie et les changements sur le plan chromosomique sont des variables qui inuenceront le pronostic (Cohn, Pearson, London et al., 2009 ; D’Andrea, 2014).

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

Tumeur s’étant propagée à des ganglions lymphatiques dis­ tants et à d’autres parties éloignées du corps telles que les os, la moelle osseuse, le foie, la peau ou d’autres organes.

L’intervention chirurgicale seule est curative si la tumeur est localisée et qu’aucun facteur de risque n’est détecté. Dans le cas d’une tumeur plus volumineuse, une résection partielle est tentée, et il faut avoir recours à d’autres traitements. La chimiothérapie est l’élément essentiel du traitement d’un cancer localisé étendu ou d’un cancer disséminé. Les médicaments sont administrés selon diverses combinaisons en fonction de protocoles précis. De plus, le traitement myéloablatif de consolidation avec greffe de cellules souches hématopoïétiques de type autogreffe a amélioré les résultats des enfants atteints d’un cancer à risque élevé. L’emploi de la radiothérapie est restreint aux neuroblastomes à haut risque, car les cellules de ce cancer sont très sensibles à la radiation. Pour de meilleurs résultats, la radiothérapie est utilisée avant l’intervention chirurgicale, mais celle-ci peut aussi servir à réduire de façon rapide la taille de tumeurs qui causeraient des complications respiratoires ou cardiaques, ou des compressions de la moelle épinière. Elle sert également au soulagement des symptômes dans le cas du cancer avancé (D’Andrea, 2014). Le traitement myéloablatif de consolidation avec une greffe de cellules souches hématopoïétiques de type autogreffe est réservé aux enfants ayant un neuroblastome à haut risque. Historiquement, le traitement des enfants atteints d’un neuroblastome à haut risque obtenait de piètres résultats. Or, grâce aux avancements de la recherche, la survie de ces enfants s’est améliorée à près de 66 % (Yu, Gilman, Ozkaynak et al., 2010). Le traitement standard pour le neuroblastome à risque élevé consiste en la combinaison d’anticorps monoclonaux avec des facteurs de croissance granulocytaires, les interleukines et les acides 13-cis rétinoïques. Toutefois, ce traitement comporte plusieurs effets indésirables parmi lesquels la douleur, l’hyperperméabilité capillaire, l’hypotension et la réaction allergique, mais ces complications sont généralement prévisibles, et des traitements de soutien sont mis en place de façon proactive (Bartholomew, Washington, Bergeron et al., 2017).

ENCADRÉ 12.11

Système international de stadication par catégorie de risque du neuroblastome

STADE L1

éloignées de l’emplacement où la tumeur a pris naissance (métastases à distance).

Sans facteur de risque chirurgical, car la tumeur est localisée à une seule région du corps et n’a envahi aucune structure vitale.

STADE MS

Réservé aux enfants âgés de moins de 18 mois et pour lesquels la tumeur s’est propagée seulement à la peau, au foie ou à la moelle osseuse. Si la tumeur s’est propagée à la moelle osseuse, moins de 10 % des cellules dans la moelle sont cancéreuses. La scintigraphie à la MIBG indique que les os et la moelle osseuse ne sont pas touchés par le cancer.

STADE L2

Avec facteur de risque chirurgical, car la tumeur se trouve à 2 endroits différents et a envahi des structures vitales comme un organe. STADE M

Tumeur s’étant propagée à des parties du corps Source : Adapté de Société canadienne du cancer (2017c).

Pronostic Le pronostic du neuroblastome est généralement défavorable en raison du caractère envahissant de ce cancer. Les taux de survie sont inversement proportionnels à l’âge. Tous stades confondus, les taux de survie des enfants de moins de 1 an sont d’environ 80 %, et ceux des enfants de plus de 1 an sont inférieurs à 50 % (Brodeur, Hogarty, Bagatell et al., 2016). Cette différence marquée des taux de survie en fonction de l’âge est en partie attribuable à la plus grande proportion d’enfants en très bas âge ayant un cancer de stade I, II ou IV-S, et à la non-amplication du gène Myc-N.

12

Les nourrissons qui sont en rémission pendant 1 an après le traitement sont généralement guéris, mais des enfants plus vieux ont subi des rechutes plusieurs années après la n du traitement. La résection chirurgicale de la tumeur au stade I semble être curative dans plus de 90 % des cas (Brodeur et al., 2016). Le neuroblastome est une des rares tumeurs à subir une régression spontanée (particulièrement au stade IV-S), possiblement en raison de la maturité des cellules embryonnaires ou du développement d’un système immunitaire actif.

Soins inrmiers NEUROBLASTOME

Les soins inrmiers comprennent la préparation psychologique et physique au diagnostic et à une intervention chirurgicale, la prévention des complications postopératoires de l’intervention chirurgicale abdominale, thoracique ou crânienne, ainsi que l’explication de la chimiothérapie, de la radiothérapie et de leurs effets indésirables pour l’enfant et sa famille TABLEAUX 12.2 et 12.7.

Puisque le pronostic du neuroblastome est souvent défavorable, il convient d’évaluer les besoins de la famille en matière d’adaptation à cette maladie potentiellement mortelle et d’y répondre 10 . En raison du fort degré de métastases au moment du diagnostic, de nombreux parents se sentent coupables de ne pas avoir reconnu les signes du cancer plus tôt. Ils ont besoin d’une aide considérable pour gérer ces sentiments et les exprimer aux personnes appropriées.

Chapitre 12

10 Les manières d’aborder un diagnostic fatal avec l’enfant et sa famille sont abordées dans le chapitre 10, Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie.

Enfant atteint de cancer

511

TABLEAU 12.7

Exemples d’effets tardifs du traitement contre le cancer

EFFETS SUR LES SYSTÈMES CORPORELS ET MANIFESTATIONS CLINIQUES

MÉTHODE DE TRAITEMENT

• Système nerveux central – Leucoencéphalopathie (syndrome pouvant aller de la léthargie à la démence, aux convulsions, à la quadriplégie et à la mort)

• Méthotrexate, chimiothérapie intrathécale ou radiothérapie du SNC

– Microangiopathie minéralisante (céphalées, épilepsie partielle, incoordination, démarche anormale)

• Méthotrexate ou radiothérapie du SNC

– Neuropathie périphérique (pied tombant, sensation de picotement dans les mains ou les pieds, incoordination)

• Vincristine

– Accident vasculaire cérébral (AVC)

• Radiothérapie du SNC ou radiation pancorporelle

– Déciences cognitives (déclin de l’intelligence, de la mémoire, de l’attention et des aptitudes non verbales)

• Chimiothérapie intrathécale ou radiothérapie crânienne (particulièrement chez les moins de trois ans)

• Système cardiovasculaire – Cardiomyopathie (tachycardie, tachypnée, dyspnée, essoufement, œdème, palpitations) – Dommages péricardiques (épanchement pleural, cardiomégalie) • Système respiratoire – Pneumonite (dyspnée, toux sèche, èvre)

• Anthracyclines (doxorubicine et daunorubicine) ou radiothérapie du cœur • Fortes doses de cyclophosphamide • Radiothérapie du médiastin • Radiothérapie pulmonaire, agents alkylants, possiblement la bléomycine, la vinblastine et le cisplatine

– Fibrose pulmonaire (dyspnée, trouble ventilatoire restrictif, tolérance réduite à l’exercice) • Système gastro-intestinal – Entérite chronique (colique, douleur abdominale, vomissements, diarrhée, saignement)

• Radiographie abdominale, méthotrexate, cytosine arabinoside

• Fibrose hépatique (jaunisse, hépatomégalie)

• Méthotrexate, 6-mercaptopurine

• Système urinaire

• Cyclophosphamide, ifosfamide, radiothérapie

– Cystite hémorragique (hématurie microscopique à hémorragie macroscopique) – Fibrose de la vessie (capacité réduite de la vessie, reux urétéral)

• Cisplatine

– Nécrose tubulaire (clairance réduite de la créatinine) • Système endocrinien

21 Le dysfonctionnement thyroïdien est abordé dans le chapitre 21, Troubles liés au système endocrinien.

– Dysfonctionnement thyroïdien

21

• Système reproducteur – Dommages possibles aux gonades ; deux sexes touchés (puberté retardée, aménorrhée, nombre réduit de spermatozoïdes, concentration accrue des hormones folliculostimulante et lutéinisante, concentration réduite de la testostérone ou des œstrogènes)

• Radiothérapie de la thyroïde, de l’hypophyse, des testicules ou des ovaires • Agents alkylants • Radiothérapie de l’hypophyse, des testicules ou des ovaires

• Système musculosquelettique

512

Partie 4

– Retard de croissance (petite taille)

• Radiothérapie, stéroïdes à long terme

– Déformations vertébrales, scoliose, cyphose, croissance asymétrique, fractures pathologiques

• Radiothérapie

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

TABLEAU 12.7

Exemples d’effets tardifs du traitement contre le cancer (suite)

EFFETS SUR LES SYSTÈMES CORPORELS ET MANIFESTATIONS CLINIQUES

MÉTHODE DE TRAITEMENT

• Système immunitaire

• Splénectomie

– Asplénie (infection envahissante, èvre) • Organes sensoriels – Cataractes (opacité du cristallin)

• Radiothérapie crânienne, fortes doses de stéroïdes

– Audition (audition réduite, notamment perte des hautes fréquences)

• Cisplastine

• Tumeurs secondaires

• Radiothérapie, agents alkylants

– Tumeurs des os et des tissus mous – Leucémie (LLA, LMA) • Autres effets

• Radiothérapie des maxillaires et des mandibules

– Troubles dentaires – Nombre accru de caries, maladie parodontale, hypoplasie dentaire, hypodontie (développement retardé ou aucun développement des dents) Source : Children Oncology Group (©2013). Adaptation de Long-term follow-up guidelines for survivors of chilhood, adolescent, and young adult cancers. Version 4.0 – Octobre, 2013.

12

12.4

Tumeurs osseuses

12.4.1

Considérations générales

Les tumeurs osseuses, qui incluent l’ostéosarcome et le sarcome d’Ewing, représentent environ 4 % de tous les néoplasmes malins pédiatriques au Canada. L’ostéosarcome, qui est la tumeur osseuse la plus courante, touche environ 3,5 enfants sur 1 million chaque année au Canada, tandis que le sarcome d’Ewing touche annuellement 2,7 enfants sur 1 million parmi les jeunes de moins de 14 ans (Société canadienne du cancer, 2017d). Les jeunes de 15 ans forment le groupe d’âge le plus touché par les tumeurs osseuses pédiatriques, et celles-ci sont plus fréquentes chez les garçons, à raison de 59 % pour les adolescents par rapport à 41 % pour les adolescentes (National Cancer Institute, 2017).

Manifestations cliniques La plupart des tumeurs osseuses malignes causent une douleur locale dans la région affectée. La douleur peut être intense ou sourde et peut être attribuée à un trauma ou à une vague sensation de douleurs de croissance. La douleur est généralement soulagée par une position de exion, qui détend les muscles recouvrant le périoste étiré. Elle attire généralement l’attention lorsque l’enfant

boite, réduit ses activités physiques ou est incapable de tenir des objets lourds. Une masse palpable est également une manifestation courante des tumeurs osseuses, mais les symptômes généraux (p. ex., la èvre) et d’autres manifestations cliniques (p. ex., la compression de la moelle épinière et la détresse respiratoire) sont plus courantes chez les enfants qui ont un sarcome d’Ewing.

Diagnostic L’évaluation diagnostique commence par une anamnèse détaillée et un examen physique complet. Un des principaux objectifs est l’élimination de certaines causes telles qu’un trauma ou une infection. Il est essentiel de poser des questions précises sur la douleur an de déterminer la durée et le taux de croissance de la tumeur. L’examen physique est axé sur l’état fonctionnel de la région affectée, les signes d’inammation, la taille de la masse et tout signe d’une atteinte généralisée, par exemple l’anémie, la perte de poids et des infections fréquentes. Dans le cas du sarcome d’Ewing, le diagnostic nal est fondé sur des examens radiologiques, tels que des radiographies simples, une TDM ou une IRM du foyer primaire, une TDM thoracique, une scintigraphie osseuse visant à évaluer les métastases, et un examen de la moelle

Chapitre 12

Enfant atteint de cancer

513

osseuse. Une biopsie par ponction ou une biopsie chirurgicale est nécessaire pour établir le diagnostic. Le sarcome d’Ewing touche plus couramment le bassin, les os longs des extrémités inférieures et la paroi thoracique ; les radiographies montrent une atteinte de la diaphyse et un périoste détaché de l’os (triangle de Codman). Dans le cas de l’ostéosarcome, les lésions sont plus communément situées dans la région métaphysaire de l’os et touchent souvent les os longs comme le fémur, le tibia et l’humérus FIGURE 12.15. L’ossication radiale du tissu mou donne à la tumeur une apparence de rayons de soleil sur une radiographie simple (Adlard, Landier, Wilson et al., 2012).

12.4.2

Pronostic

Le traitement optimal de l’ostéosarcome comprend l’intervention chirurgicale et la chimiothérapie. L’approche chirurgicale consiste à effectuer une biopsie chirurgicale initiale, suivie du sauvetage ou de l’amputation du membre. Pour garantir l’élimination locale du cancer, il faut enlever toutes les tumeurs macroscopiques et microscopiques an d’obtenir une marge autour de la tumeur sans présence de cellules cancéreuses (Jackson, Bittman et Granowetter, 2016). Le sauvetage du membre, qui repose sur une intervention chirurgicale standard, consiste à enlever la tumeur primaire et à remplacer l’os touché par une prothèse (Gorlick, Janeway et Marina, 2016). Les enfants qui subissent une telle intervention reçoivent généralement une chimiothérapie préopératoire visant à réduire la taille de la tumeur et à faciliter l’intervention chirurgicale (Arndt, Rose, Folpe et al., 2012).

Une meilleure connaissance de la biologie de la croissance néoplasique a entraîné la mise en place d’un traitement plus intensif et a permis l’amélioration du pronostic. L’histoire naturelle de l’ostéosarcome et du sarcome d’Ewing indique que de multiples foyers sous-microscopiques de cancer métastatique sont présents au moment du diagnostic, malgré les preuves cliniques d’une atteinte strictement locale. Les poumons, des os distants et la moelle osseuse sont les parties du corps les plus touchées par la tumeur osseuse métastatique. Grâce aux traitements actuels, qui incluent l’intervention chirurgicale et la chimiothérapie dans le cas de l’ostéosarcome, et l’intervention chirurgicale, la radiothérapie et la chimiothérapie dans le cas du FIGURE 12.15 Le sarcome d’Ewing est une sarcome d’Ewing, la matumeur affectant les tissus mous de l’os au niveau de jorité des enfants ayant la diaphyse, tandis que l’ostéosarcome est une tumeur un cancer localisé peuvent caractérisée par la synthèse de tissus osseux et touchant principalement la partie métaphysaire des os longs. être guéris.

Ostéosarcome

L’ostéosarcome (ou sarcome ostéogène) se forme apparemment à partir du mésenchyme ostéoformateur, qui donne naissance à du tissu ostéoïde malin. La plupart des foyers tumoraux primaires se trouvent dans la région métaphysaire (partie élargie du corps de l’os, adjacente au cartilage de croissance épiphysaire) des os longs, particulièrement aux extrémités inférieures. Plus de la moitié des tumeurs se trouvent dans le fémur, surtout dans la partie distale, et le reste touche l’humérus, le tibia, le bassin, la mâchoire et les phalanges.

Approche thérapeutique

La chimiothérapie joue un rôle essentiel dans le traitement de l’ostéosarcome. Les agents antinéoplasiques peuvent être administrés seuls ou en combinaison, et employés avant et après la résection chirurgicale de la tumeur. En présence de métastases pulmonaires, la thoracotomie et la chimiothérapie peuvent prolonger la vie et même permettre la guérison. Ces méthodes combinées ont considérablement amélioré le pronostic de l’ostéosarcome, qui est de 75 % chez les enfants n’ayant pas de métastases (Arndt et al., 2012).

Soins inrmiers OSTÉOSARCOME

On peut obtenir des ressources et des informations sur les prothèses auprès de l’Association des amputés de guerre au www.amputesdeguerre.ca.

514

Partie 4

Les soins et les traitements inrmiers dépendent du type d’intervention chirurgicale effectué. La famille peut avoir plus de difculté à s’adapter à une amputation qu’à une intervention de sauvetage d’un membre. Dans les deux cas, la préparation de l’enfant et de la famille est primordiale. Les physiothérapeutes, les éducatrices en milieu de vie pédiatrique ainsi que les autres membres de

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

l’équipe interdisciplinaire sont très impliqués an d’aider l’enfant et la famille à s’adapter à une amputation. La franchise est essentielle pour obtenir la coopération et la conance de l’enfant. Le diagnostic de cancer ne doit pas être faussement présenté comme une infection. Pour aider l’enfant à accepter l’intervention chirurgicale, il faut l’avertir quelques jours à l’avance pour lui laisser le temps de rééchir au diagnostic ainsi qu’au traitement qui s’impose, et lui permettre de poser des questions.

Certains enfants posent beaucoup de questions sur la prothèse, les limites physiques qu’elle leur imposera et leurs possibilités de guérison. D’autres adoptent une attitude silencieuse ou calme qui trahit leur préoccupation et leur peur. Toute réaction doit être acceptée, puisqu’elle fait partie du processus de deuil causé par la perte. Si l’enfant souhaite avoir de l’information à ce sujet avant l’intervention, il peut être utile de lui présenter une personne amputée ou de lui montrer des photos de prothèses. L’inrmière doit toutefois prendre garde de ne pas submerger l’enfant d’information. Une bonne approche consiste à répondre aux questions, sans plus. Si l’enfant ne demande pas d’information additionnelle, l’inrmière peut manifester sa réceptivité à en parler. L’enfant doit aussi être informé de la nécessité d’une chimiothérapie et des effets indésirables de celle-ci avant l’intervention chirurgicale. Il faut éviter de lui donner trop de renseignements à la fois. Lors de la discussion sur la perte de cheveux, l’inrmière peut insister sur les stratégies d’adaptation telles que le port d’une prothèse capillaire. Les soins du membre amputé de l’enfant sont les mêmes que pour toute personne amputée. L’enfant reçoit généralement une prothèse temporaire tout de suite après l’intervention chirurgicale, ce qui lui permet de retrouver rapidement ses fonctions et favorise son adaptation psychologique. Une prothèse permanente est généralement installée dans les six à huit semaines suivantes. Pendant l’hospitalisation, l’enfant commence une physiothérapie au cours de laquelle il apprend à utiliser et à entretenir sa prothèse. La douleur fantôme du membre amputé, qui peut se manifester chez 60 à 80 % des clients ayant subi une amputation, est due à l’interruption de l’influx des nerfs sensoriels (Wolff, Vanduynhoven, van Kleef et al., 2011). Ce symptôme se caractérise par des sensations telles que des picotements et des démangeaisons et, plus fréquemment, des douleurs du membre amputé. Il faut mentionner à l’enfant et à sa famille que ces sensations sont réelles, et non imaginaires. Selon une revue systématique Cochrane, divers médicaments, comme la morphine, la gabapentine et la kétamine, sont utilisés pour soulager les

12.4.3

Sarcome d’Ewing

Le sarcome d’Ewing, qui est une tumeur neuroectodermique primitive de l’os, se forme dans la moelle osseuse plutôt que dans le tissu osseux. La tumeur se développe dans le corps des os longs et des os du tronc, le plus souvent dans le bassin,

douleurs fantômes, mais aucun n’offre un soulagement complet (Alviar, Hale et Dungca, 2011). La planication du congé doit commencer au début de la phase postopératoire. Une fois que l’enfant a commencé la physiothérapie, l’inrmière doit discuter avec le physiothérapeute et le médecin an d’évaluer si l’enfant est physiquement et émotionnellement prêt à retourner à l’école. C’est un moment opportun pour trouver les ressources communautaires, comprenant entre autres l’inrmière, les physiothérapeutes et les ergothérapeutes, qui s’occuperont des soins de l’enfant à domicile et procéderont à une évaluation de la maison pour les activités quotidiennes (p. ex., les escaliers, le bain). Il faut tout faire pour favoriser un retour à la normale et une reprise graduelle réaliste des activités. Les jeux de rôle peuvent s’avérer utiles pour aider l’enfant à se préparer à affronter les autres. Il faut également évaluer les obstacles, par exemple les escaliers, qui peuvent limiter l’accès à l’école et à la maison, car l’enfant aura peut-être besoin de se déplacer avec des béquilles ou un fauteuil roulant avant d’être complètement guéri et d’être à l’aise avec sa prothèse. L’inrmière peut encourager l’enfant à porter des vêtements qui cachent bien sa prothèse, notamment des pantalons ainsi que des chemises ou des gilets à manches longues. Les prothèses bien ajustées ont une apparence si naturelle que les lles peuvent généralement porter des bas de nylon très ns sans que la prothèse soit visible. L’inrmière peut aussi suggérer à l’enfant de porter des jeans et un t-shirt an de détourner l’attention de sa prothèse et de se concentrer plutôt sur son apparence habituelle. La famille et l’enfant ont besoin d’un grand soutien pour s’adapter non seulement à un diagnostic de maladie potentiellement mortelle, mais aussi à la modication de l’apparence et du fonctionnement. Puisque la perte d’un membre entraîne un processus de deuil, les personnes qui s’occupent de l’enfant doivent reconnaître que les réactions de colère et de dépression sont normales et nécessaires. Les parents ont souvent l’impression que la colère est dirigée contre eux parce qu’ils ont autorisé l’amputation (sauf dans le cas des adolescents qui ont pris part aux discussions préalables à l’amputation), ou ils voient la dépression comme un rejet. Ce ne sont pas des attaques personnelles de la part de l’enfant, mais bien des tentatives de gérer sa perte.

12

CE QU’IL FAUT RETENIR

Puisque la perte d’un membre entraîne un processus de deuil, les personnes qui s’occupent de l’enfant doivent reconnaître que les réactions de colère et de dépression sont normales et nécessaires.

le fémur, le tibia, le péroné, l’humérus, le cubitus, la vertèbre, l’omoplate, la côte et le crâne. Ce cancer touche presque exclusivement les personnes de moins de 30 ans et davantage les personnes blanches que d’autres origines ethniques (National Cancer Institute, 2017). On le confond parfois avec l’ostéosarcome FIGURE 12.15. Chapitre 12

Enfant atteint de cancer

515

Approche thérapeutique L’intervention chirurgicale de sauvetage d’un membre peut se pratiquer lorsque le cancer touche une extrémité, mais l’amputation sera envisagée si la radiothérapie montre que l’extrémité en

question n’est plus utile ou est déformée (p. ex., en raison du retard de croissance des jeunes enfants). Le traitement idéal dans la majorité des cas comprend une radiothérapie locale et une chimiothérapie.

Soins inrmiers SARCOME D’EWING

L’adaptation psychologique à un sarcome d’Ewing est généralement moins difcile que l’adaptation à un ostéosarcome, car le membre touché est souvent préservé. De nombreuses familles acceptent le diagnostic avec un certain soulagement, mais même lorsque le membre n’est pas amputé, l’intervention pourra limiter certains mouvements selon l’emplacement de la tumeur. Il faut tout de même les préparer aux divers examens diagnostiques, notamment la ponction de moelle osseuse et la biopsie chirurgicale, et leur donner des explications adéquates concernant le traitement. La radiothérapie cause souvent une desquamation cutanée sèche ou humide, suivie d’une hyperpigmentation. L’enfant doit porter des vêtements amples au-dessus de la région irradiée an d’éviter

12.5

Autres tumeurs solides

En plus des cancers déjà présentés dans cet ouvrage, plusieurs autres types de tumeurs solides peuvent affecter les enfants. La tumeur de Wilms, le rhabdomyosarcome et le rétinoblastome se caractérisent par un diagnostic généralement précoce, soit avant l’âge de cinq ans. En outre, la tumeur de Wilms et le rétinoblastome sont parmi les rares cancers à exister sous forme héréditaire et sous forme non héréditaire.

Partie 4

En matière d’adaptation aux effets de la chimiothérapie, l’enfant a les mêmes besoins que tout autre client atteint du cancer. Les agents cytotoxiques entraînent généralement la perte des cheveux, des nausées, des vomissements graves et une neuropathie périphérique, en plus d’avoir un effet cardiotoxique possible. Il faut tout faire pour concevoir un plan de traitement qui permet à l’enfant de reprendre le plus rapidement possible une vie et des activités normales.

l’abdomen. La masse est généralement ferme, insensible, profonde et située d’un seul côté du corps. Si elle se trouve du côté droit, il peut être difcile de la distinguer du foie bien que, contrairement à cet organe, elle ne bouge pas lors de la respiration. Les parents découvrent souvent la masse lorsqu’ils donnent le bain à l’enfant ou l’habillent.

La tumeur de Wilms, aussi appelée néphroblastome, est la tumeur des reins la plus commune chez les enfants (Davidoff, 2012). Elle touche environ 8 enfants de moins de 15 ans sur 1 million, ce qui équivaut à environ 650 nouveaux cas par année. Dans 75 % des cas, le diagnostic est posé avant l’âge de 5 ans, mais une incidence maximale est observée entre l’âge de 2 et 3 ans. Les tumeurs de Wilms ont une incidence familiale de 1 à 2 %, et 10 % sont associées à un syndrome congénital (Bajcˇiová, s.d. ; Constine, Frantz, Hayes-Jordan et al., 2017 ; Imbach, 2014).

Les autres manifestations cliniques, parmi lesquelles gure une douleur abdominale si la tumeur exerce une pression sur les nerfs et les organes avoisinants, découlent de la pression qu’exerce la masse tumorale, des modications métaboliques dues à la tumeur ou de la présence de métastases. Moins de 25 % des enfants atteints d’une tumeur de Wilms ont une hématurie. L’anémie, généralement due à une hémorragie dans la tumeur, entraîne la pâleur, l’anorexie et la léthargie. L’hypertension artérielle, causée par la sécrétion de quantités excessives de rénine par la tumeur, survient occasionnellement. Les autres effets de ce cancer incluent la perte de poids et la èvre. En présence de métastases, il peut y avoir des symptômes d’atteinte aux poumons, notamment de la dyspnée, de la toux, un essoufement et des douleurs à la poitrine.

Manifestations cliniques

Diagnostic

Le signe le plus courant est la présence d’un gonflement ou d’une masse indolore dans

Lorsqu’une tumeur de Wilms est soupçonnée chez un enfant, il faut mettre l’accent sur la présence

12.5.1

516

une irritation supplémentaire de la peau. En raison de la sensibilité accrue, il convient de protéger cette partie du corps du soleil et des changements soudains de température. L’enfant peut utiliser l’extrémité touchée selon sa tolérance. Le physiothérapeute peut préparer un programme d’exercices actifs qui permet à l’enfant de conserver un fonctionnement maximal.

Tumeur de Wilms

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

possible d’anomalies congénitales lors de l’anamnèse et de l’examen physique, par exemple des antécédents de cancer dans la famille, des signes de cancer tels que la perte de poids, l’œdème du foie et de la rate, des signes d’anémie et une lymphadénopathie. Les examens à effectuer sont les examens radiologiques tels que l’échographie, la TDM et l’IRM abdominales, la TDM thoracique an de détecter la présence de métastases dans les poumons ainsi qu’un examen Doppler de la veine cave inférieure. Les analyses de laboratoire doivent inclure une formule sanguine complète (présence possible d’une polycythémie si la tumeur sécrète une quantité excessive d’érythropoïétine) ainsi que des analyses biochimiques et d’urine. Il est essentiel d’effectuer des examens visant à montrer la relation entre la tumeur et le rein ipsilatéral, et la présence d’un rein qui fonctionne normalement du côté controlatéral.

Stadication La tumeur de Wilms se forme à partir d’un blastome métanéphrogène non différencié malin (un amas de cellules souches capables de donner naissance à une structure anormale). Elle touche un peu plus souvent le rein gauche, ce qui présente un avantage, puisque la manipulation et l’ablation de ce rein sont plus faciles lors d’une intervention chirurgicale. Bien que la tumeur puisse devenir grosse, elle reste encapsulée pendant une longue période (Société canadienne du cancer, 2017a) FIGURE 12.16. L’histologie des cellules tumorales est répartie en deux groupes, soit l’histologie favorable et l’histologie défavorable. Seulement 10 % des tumeurs de Wilms ont une histologie défavorable ; cela se traduit par un pronostic plus sombre et nécessite un protocole de traitement plus dynamique, peu importe le stade clinique de la tumeur (Davenport, Blanco et Sandler, 2012).

Approche thérapeutique Le traitement combiné comportant l’intervention chirurgicale et la chimiothérapie, avec ou sans radiothérapie, est fondé sur le stade clinique et l’histologie de la tumeur. Dans le cas d’un cancer ipsilatéral, une grande incision transabdominale qui donne une vue optimale de la cavité abdominale est pratiquée. La tumeur, le rein touché et la glande surrénale adjacente sont retirés. Toutes les précautions sont prises pour garder intacte la tumeur encapsulée, car sa rupture pourrait répandre les cellules cancéreuses dans l’abdomen, les vaisseaux lymphatiques et le sang. Un examen attentif du rein controlatéral permet de déceler toute atteinte ou tout dysfonctionnement. Les ganglions lymphatiques régionaux sont examinés,

FIGURE 12.16 Stadication de la tumeur de Wilms utilisée par le National Wilms Tumor Study Group. Stade 1 : La tumeur est encapsulée et connée au rein. Stade II : La tumeur a franchi la capsule rénale. Stade III : La tumeur s’étend au dehors de la capsule rénale pour envahir les structures environnantes. Stade IV : La tumeur s’étend au dehors de la capsule rénale pour envahir les structures environnantes ; présence de métastases hématogènes (Société canadienne du cancer, 2017a).

et une biopsie est effectuée, si nécessaire. Toute structure atteinte (telle qu’une partie du colon, du diaphragme ou de la veine cave) est retirée. Des agrafes métalliques placées autour du lieu de la tumeur offrent un marquage précis aux ns de la radiothérapie.

12

Si les deux reins sont touchés, l’enfant peut subir une chimiothérapie préopératoire visant à réduire la taille de la tumeur, ce qui augmente les chances de succès de l’intervention chirurgicale. Dans certains cas, une néphrectomie partielle est effectuée, suivie d’une autre chimiothérapie. Lorsque celle-ci n’est pas efcace, une néphrectomie bilatérale est réalisée ; la dialyse est alors obligatoire, et une greffe de rein est visée (Davenport et al., 2012). La radiothérapie postopératoire est indiquée pour les enfants qui ont des métastases, tandis que la chimiothérapie est indiquée pour tous les enfants. La durée du traitement varie de 6 à 15 mois.

Pronostic Parmi tous les enfants touchés par le cancer, ceux atteints d’une tumeur de Wilms présentent l’un des taux de survie les plus élevés. En outre, les enfants ayant une tumeur localisée ont 90 % plus de chances de guérison s’ils suivent un traitement combiné (Davenport et al., 2012). En cas de rechute, les chances de survie sans récidive sont plus élevées si l’histologie de la tumeur est favorable. La période et le lieu de la récurrence ne sont plus considérés comme des indicateurs de pronostic (Davidoff, 2012).

Chapitre 12

Enfant atteint de cancer

517

Soins inrmiers TUMEUR DE WILMS

éactivation des connaissances Dans quel ordre doit-on exécuter les techniques d’examen physique lors de l’examen de l’abdomen ?

Les soins et les traitements inrmiers de l’enfant atteint d’une tumeur de Wilms sont semblables à ceux des enfants atteints d’autres cancers nécessitant une intervention chirurgicale, une radiothérapie et une chimiothérapie. Toutefois, il existe certaines différences importantes entre les diverses phases des interventions inrmières.

Prodiguer les soins préopératoires Comme dans le cas de nombreux autres cancers, un diagnostic de tumeur de Wilms cause un choc. L’enfant ne montre souvent aucun signe physique d’atteinte grave autre que la présence d’une masse abdominale palpable. Puisque ce sont généralement les parents qui découvrent la masse, l’inrmière doit être sensible aux sentiments que provoque le diagnostic. Certains parents se félicitent d’avoir détecté la tumeur, mais d’autres se sentent coupables de ne pas l’avoir trouvée plus tôt ou sont en colère contre le médecin de ne pas l’avoir détectée lors d’examens antérieurs.

ALERTE CLINIQUE

Pour souligner le besoin de vigilance, il peut être nécessaire de placer une afche au-dessus du lit qui mentionne « Ne pas palper l’abdomen ». Il faut également faire attention de ne causer aucune lésion à la région de la tumeur lors du bain et des manipulations.

La phase préopératoire en est une de diagnostic rapide. L’intervention chirurgicale est généralement planiée dans un court délai suivant l’admission de l’enfant. C’est à l’inrmière qu’incombe la difcile tâche de préparer l’enfant et les parents aux multiples analyses de laboratoire et à l’intervention chirurgicale. En raison du peu de temps disponible, il faut donner des explications simples et les répéter souvent, en mettant l’accent sur ce que l’enfant expérimentera. En plus des observations préopératoires habituelles, la surveillance de la pression artérielle est nécessaire, puisque la production excessive de rénine peut causer de l’hypertension. Plusieurs consignes préopératoires doivent être respectées, la plus importante étant de ne pas palper la tumeur à moins que ce ne soit absolument nécessaire , car la manipulation de la masse peut provoquer la dissémination des cellules cancéreuses à des régions adjacentes et distantes du corps. Puisque la radiothérapie et la chimiothérapie commencent généralement tout de suite après

12.5.2

Rhabdomyosarcome

Le rhabdomyosarcome est le sarcome des tissus mous le plus commun chez les enfants. Il tire son nom de son ou de ses tissus d’origine ; par exemple, le préxe myo- signie « muscle » tandis que le préxe rhabdo- signie « strié ». Puisque les muscles

518

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

l’intervention chirurgicale, il faut expliquer aux parents ce à quoi ils peuvent s’attendre, par exemple les principaux bienfaits et les effets indésirables de ces traitements. Il faut toutefois choisir le moment opportun pour transmettre ces informations an de ne pas les submerger. Idéalement, l’inrmière doit assister à la rencontre entre le médecin et les parents an de répondre aux questions.

Prodiguer les soins postopératoires Malgré l’importante intervention chirurgicale que doivent subir les enfants ayant une tumeur de Wilms, la période de rétablissement est généralement rapide. Les principales responsabilités de l’inrmière sont les mêmes que celles qui suivent toute chirurgie abdominale. Puisque ces enfants présentent un risque d’obstruction intestinale due à la formation d’adhérences postchirurgicales ou aux effets indésirables de la chimiothérapie et de la radiothérapie, l’inrmière doit surveiller l’activité gastro-intestinale, notamment les selles, les bruits intestinaux, la distension et les vomissements. Elle doit aussi évaluer fréquemment la pression artérielle et surveiller tout signe d’infection, particulièrement pendant la chimiothérapie.

Soutenir la famille La phase postopératoire est souvent difcile pour les parents. La vue de leur enfant tout de suite après l’intervention chirurgicale cause un choc qui peut être leur première prise de conscience de la gravité de la situation. L’intervention permet de déterminer le stade et les caractéristiques de la tumeur. Le médecin en discute avec les parents. Il est important que l’inrmière assiste à cette conversation, car elle peut offrir une aide additionnelle et évaluer la compréhension des parents. Il faut donner aux enfants plus âgés l’occasion de faire face aux sentiments provoqués par les nombreuses interventions qu’ils ont subies dans une courte période. Le jeu thérapeutique peut aider les enfants de tous âges à compredre ce qu’ils ont traversé et à exprimer leurs sentiments.

striés (squelettiques) sont présents dans presque toutes les parties du corps, ce type de tumeur se forme à divers endroits du corps, les plus courants étant la tête et le cou, particulièrement l’orbite. Cette maladie affecte les enfants de tous les groupes d’âge, mais plus couramment ceux de neuf ans et

moins, et légèrement plus les garçons que les lles (Wexler, Skapek et Helman, 2016). Son incidence annuelle est d’environ 5,1 enfants sur 1 million (Société canadienne du cancer, 2017d). Le rhabdomyosarcome se forme à partir du mésenchyme embryonnaire et comprend trois soustypes ENCADRÉ 12.12. Ces néoplasmes malins se forment à partir des cellules mésenchymateuses non différenciées des muscles, des tendons, des bourses et des fascias, ou dans les tissus breux, conjonctifs, lymphatiques ou vasculaires.

Manifestations cliniques Les manifestations cliniques initiales dépendent du lieu de la tumeur et de la pression qu’elle exerce sur les organes adjacents. À certains endroits tels que l’orbite, les manifestations cliniques apparaissent tôt. À d’autres endroits, notamment lorsqu’elles touchent la région rétropéritonéale, les tumeurs causent des symptômes seulement quand elles sont assez grosses et compriment des organes adjacents. Malheureusement, plusieurs des manifestations cliniques du rhabdomyosarcome sont vagues et laissent souvent croire à une maladie infantile courante comme un mal d’oreilles ou un écoulement nasal. Il arrive souvent que le lieu de la tumeur primaire ne soit jamais déterminé.

Diagnostic L’évaluation diagnostique commence par une anamnèse et un examen physique détaillés. Des examens radiologiques visant à déterminer le lieu de la tumeur primaire doivent inclure la TDM et la tomographie par émission de positrons, ou l’IRM. L’évaluation des métastases doit comprendre une tomographie thoracique, une scintigraphie

FIGURE 12.17

osseuse ainsi que des ponctions et des biopsies bilatérales de la moelle osseuse. Lorsque la tu meur se trouve dans la région paraméningée, une ponction lombaire est effectuée an d’examiner le liquide cérébrospinal. Si possible, une biopsie exérèse ou une résection chirurgicale de la tumeur est faite pour conrmer le diagnostic.

ENCADRÉ 12.12

Sous-types du rhabdomyosarcome

Embryonnaire : Le plus commun ; touche plus fréquemment la tête, le cou, l’abdomen et le système génito-urinaire. Alvéolaire : Le plus commun après le sous-type embryonnaire ; touche plus souvent les tissus profonds des extrémités et du tronc. Polymorphe : Rare chez les enfants (forme adulte) ; touche le plus souvent les parties molles des extrémités et du tronc.

Stadication Une détermination consciencieuse du stade est essentielle à la planication du traitement et à l’établissement du pronostic. L’Intergroup Rhabdomyosarcoma Study Group (IRSG) a élaboré un système de stadication chirurgico-pathologique qui comprend quatre stades fondés sur l’atteinte FIGURE 12.17.

Approche thérapeutique Tous les rhabdomyosarcomes sont des tumeurs hautement malignes ayant un potentiel de métastases. C’est pourquoi le traitement combiné est recommandé pour tous les enfants. La résection complète de la tumeur primaire est préconisée, si possible. Toutefois, puisque la tumeur est chimiosensible, les traitements radicaux qui entraînent des mortalités élevées doivent être évités. Dans la majorité des cas, une biopsie est suivie d’une chimiothérapie ou d’une radiothérapie, ou de ces deux traitements.

12

Stadication du rhabdomyosarcome établie par l’Intergroup Rhabdomyosarcoma Study Group

Chapitre 12

Enfant atteint de cancer

519

Pronostic Grâce à l’utilisation du traitement multimodal actuel, le taux de survie des enfants ayant un cancer sans métastases est supérieur à 60 % ; en cas de diagnostic précoce, le taux de survie atteint 80 % (Davenport et al., 2012). S’il y a une rechute, le pronostic à long terme est toutefois défavorable.

Soins inrmiers RHABDOMYOSARCOME

10 Le soutien émotionnel à la famille en cas de pronostic défavorable est abordé dans le chapitre 10, Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie.

Les responsabilités inrmières sont les mêmes que pour les autres types de cancers, particulièrement les tumeurs solides traitées par chirurgie. Les objectifs sont notamment l’évaluation attentive visant à déceler des signes de tumeur, surtout lors de l’examen des enfants bien portants, la préparation de l’enfant et de la famille aux multiples examens diagnostiques et les soins de soutien à chaque étape du traitement combiné 10 .

12.5.3

Rétinoblastome

Le rétinoblastome, qui se forme dans la rétine, est la tumeur intraoculaire pédiatrique la plus commune (Dimaras, Kimani, Dimba et al., 2012). Au Canada, les plus récentes statistiques d’incidence et de mortalité chez les enfants âgés de 0 à 14 ans, soit celles de 2009 à 2013, indiquent que 130 enfants ont été diagnostiqués pendant cette période (SCC, 2017f). Le rétinoblastome a été la première maladie comportant une base de génétique dans la progression du cancer avec la mutation du gène RB1, qui a initialement été décrit comme un gène suppresseur de tumeur. La perte d’un allèle (chacune des différentes formes d’un même gène) du gène RB1 prédispose un enfant à contracter un cancer, et la perte de l’autre allèle des cellules de la rétine favorise l’apparition d’un rétinoblastome. Plus récemment, une seconde forme génétique a été dé couverte, soit celle avec l’amplication du gène N-myc (Thériault, Dimaras, Gallie et al., 2014).

FIGURE 12.18 Apparence blanchâtre de la pupille (appelée leucocorie ou œil de chat amaurotique) due au reet de la lumière sur une tumeur dans l’œil gauche

520

Partie 4

En général, le rétinoblastome se présente sous deux formes : héréditaire et non héréditaire (Dimaras et al., 2012). La forme héréditaire (ou familiale) est diagnostiquée lorsqu’un parent est

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

atteint de rétinoblastome et qu’il y a transmission du gène défectueux. Dans la forme non héréditaire (ou sporadique), il n’y a aucun antécédent familial ; le rétinoblastome survient au hasard dans le gène RB durant la réplication cellulaire. La forme héréditaire se caractérise par des tumeurs affectant soit un œil (unilatéral) dans 60 % des cas ou les deux yeux (bilatéral), tandis que la forme non héréditaire engendre des tumeurs unilatérales seulement. Tous les rétinoblastomes bilatéraux sont héréditaires et ont tendance à survenir en bas âge, alors que les rétinoblastomes unilatéraux héréditaires représentent un petit pourcentage du nombre total de rétinoblastomes (Thériault et al., 2014). Le rétinoblastome peut être causé par diverses modications du gène RB1, notamment une mutation somatique dans les cas non héréditaires, une mutation des cellules germinales dans les cas héréditaires ou une délétion du chromosome 13. Selon la théorie des deux coups, qui a été formulée pour expliquer les rétinoblastomes génétiques et sporadiques, deux événements mutagènes sont nécessaires pour provoquer la formation d’une tumeur. Les enfants qui ont certaines aberrations chromosomiques et un rétinoblastome présentent souvent un nombre élevé de déciences cognitives et de malformations congénitales, mais la grande majorité des enfants ayant un rétinoblastome ont apparemment une intelligence normale et des chromosomes normaux.

Manifestations cliniques Le rétinoblastome montre peu de signes évidents. Ce sont généralement les parents qui remarquent un reet blanchâtre, appelé leucocorie ou œil de chat amaurotique, dans la pupille de l’enfant FIGURE 12.18. Ce reet est renvoyé par la tumeur, qui est momentanément éclairée. Lorsqu’une tumeur se forme dans la région maculaire (située directement à l’arrière de la rétine lorsque l’œil regarde droit devant), un reet blanchâtre est parfois visible si la tumeur est petite. On peut l’observer lorsqu’une lumière brillante est dirigée vers l’enfant qui regarde droit devant. Souvent, les parents la découvrent accidentellement en prenant une photographie de l’enfant avec un ash. Si la tumeur se forme en périphérie de la rétine, elle doit atteindre une taille considérable avant que la lumière la frappe sufsamment pour créer un reet blanchâtre. Dans ce cas, elle est seulement visible lorsque l’enfant regarde dans certaines directions (de côté) ou si l’observateur se trouve à un angle oblique du visage de l’enfant et que celuici regarde droit devant. La nature éphémère de ce reet retarde souvent le diagnostic, car certains professionnels de la santé ne reconnaissent pas l’importance de l’observation des parents.

L’autre signe le plus courant du rétinoblastome est un strabisme causé par la difculté de l’œil touché à xer un point précis, particulièrement si la tumeur se développe dans la macula, une région du fond de l’œil où l’acuité visuelle est maximale. La cécité est généralement un signe tardif, mais elle n’est souvent pas évidente à détecter, à moins que les parents recherchent consciemment des comportements indiquant une perte de vision, par exemple un enfant qui se bute contre des objets, qui a un développement moteur lent ou qui se tourne la tête pour voir des objets situés latéralement à l’œil touché. L’hétérochromie (iris de différentes couleurs), le glaucome et la douleur sont d’autres manifestations cliniques de ce cancer.

Diagnostic Une anamnèse détaillée et la liste des symptômes oculaires sont essentielles. Si la présence d’un rétinoblastome est soupçonnée, l’enfant est dirigé vers un ophtalmologiste. Le diagnostic est généralement fondé sur une ophtalmoscopie indirecte, une échographie, une TDM et une IRM. Puisque les métastases sont rares au moment du diagnostic de ce cancer (Hurwitz, Shields, Shields et al., 2016), les interventions de stadication, telles que la ponction de moelle osseuse, la scintigraphie osseuse et la ponction lombaire, ne sont pas systématiquement effectuées.

Stadication La stadication d’un rétinoblastome est faite sous ophtalmoscopie indirecte avant l’intervention chirurgicale an de déterminer précisément la taille de la tumeur (mesurée en diamètres du disque) et la région touchée (selon une ligne imaginaire appelée équateur passant par le plan médian de l’œil) (Hurwitz et al., 2016). La stadication du rétinoblastome est essentielle an de classer la tumeur, d’établir le pronostic et de mettre au point le traitement qui sera proposé. Il existe principalement trois classications : la classication internationale du rétinoblastome intraoculaire, la classification de Reese-Ellsworth et la classication TNM. Le choix

de la stadication qui sera utilisée est effectué par l’équipe de traitement, formée notamment de l’oncologue pédiatrique et de l’ophtalmologue pé diatrique spécialisé dans le traitement du rétinoblastome.

Approche thérapeutique Le traitement du rétinoblastome est complexe. L’énucléation peut être pratiquée pour traiter un cancer avancé avec envahissement du nerf optique s’il n’y a aucun espoir de préserver la vue. La radiothérapie peut être utilisée lorsqu’il y a des ocons blanchâtres dans le vitré. La chimiothérapie est employée pour réduire la taille de la tumeur et permettre le traitement local tel que la curiethérapie par plaque (implantation chirurgicale d’une plaque d’iode 125 sur la sclérotique jusqu’à ce que la tumeur ait reçu une irradiation maximale), la photocoagulation (utilisation d’un rayon laser pour détruire les vaisseaux sanguins rétiniens qui alimentent la tumeur) et la cryothérapie (congélation de la tumeur, qui détruit la microcirculation vers la tumeur et les cellules elles-mêmes par formation de microcristaux). La chimiothérapie combinée à la radiothérapie ou encore la chimiothérapie à fortes doses combinée à un sauvetage par greffe de cellules souches hématopoïétiques de type autogreffe sont utilisées pour traiter le cancer métastatique (Hurwitz et al., 2016).

12

Pronostic Le taux de survie global après 10 ans est d’environ 90 % dans les cas de tumeurs unilatérales et bilatérales (Hurwitz et al., 2016). Le rétinoblastome est l’une des tumeurs qui peuvent régresser spontanément. L’apparition de tumeurs secondaires chez les survivants à long terme est une importante source de préoccupation. Les enfants ayant un rétinoblastome bilatéral (forme héréditaire) sont plus susceptibles d’être atteints de cancers secondaires que ceux ayant la forme unilatérale. Il semble que ces enfants soient prédisposés au cancer et que la radiothérapie augmente les risques de second cancer et de problèmes de croissance osseuse (American Cancer Society, 2015).

Soins inrmiers RÉTINOBLASTOME

Préparer l’enfant et sa famille au diagnostic et aux interventions thérapeutiques Puisque la tumeur est généralement diagnostiquée chez les nourrissons ou les enfants en très bas âge, la majeure partie de la préparation aux examens diagnostiques et aux traitements revient

aux parents. Une fois que le cancer est stadié, le médecin discute du traitement avec les parents. Dans la plupart des cas, l’énucléation peut être évitée. Si une énucléation est effectuée, il faut expliquer l’intervention et les avantages d’une prothèse aux parents. Pour les aider à mieux accepter l’intervention, l’inrmière peut leur montrer une photographie d’un enfant qui a un

Chapitre 12

Enfant atteint de cancer

521

œil articiel FIGURE 12.19. Bien que la pers­ pective de la perte de vision soit une source d’an­ xiété,la plupart des parents se rendent compte qu’ils n’ont pas d’autres choix. En soulignant le fait que l’autre œil conservera une vision normale et que l’œil touché est probablement déjà aveugle, on les aide généralement à accepter cette décience imposée. Les parents doivent être préparés à l’apparence du visage de leur enfant après l’intervention chirurgicale. L’enfant porte un cache­œil, et son visage peut être œdémateux et avoir des ecchy­ moses. Les parents craignent souvent de voir la région touchée par l’intervention, car ils imaginent une cavité dans le crâne. Cependant, les paupières sont généralement fermées, et la région n’a pas l’air enfoncée, car une sphère implantée lors de l’intervention chirurgicale maintient la forme de l’œil. L’implant est couvert d’une conjonctive qui, lorsque les paupières sont ouvertes, ressemble à la muqueuse de la bouche. Lorsque l’enfant reçoit sa prothèse oculaire, généralement dans les trois semaines suivant l’opération, son visage reprend son apparence normale.

Préparer l’enfant et sa famille aux soins à domicile Si l’enfant se remet bien de l’énucléation, il peut recevoir son congé de l’hôpital trois ou quatre jours après l’intervention. Les parents doivent recevoir des instructions relatives aux soins de la région opérée et à la préparation à tout autre traitement. Il faut leur donner l’occasion de voir l’orbite le plus tôt possible après l’opération. Le changement de pansement est un moment opportun pour le faire sans trop les bousculer. Il faut alors les encourager à participer aux changements de pansements. Les soins de l’orbite sont minimes et faciles. La plaie elle­même est propre et ne produit que peu ou pas d’écoulement. Si un onguent anti­ biotique est prescrit, il doit être appliqué en une mince ligne à la surface des tissus de l’orbite. Le pansement est une com­ presse oculaire qui doit être changée quo­ tidiennement. Lorsque l’orbite est complètement guérie, le pansement n’est plus nécessaire. Toutefois, pour diverses raisons, il est préférable que l’enfant conti­ nue de porter un cache­œil. En effet, puisque les nourrissons et les enfants en bas âge explorent leur environnement avec leurs mains, l’orbite non couverte est à por­ tée de leurs petits doigts explorateurs. Bien qu’il y ait peu de danger que l’enfant endommage son orbite, les parents sont rassurés de savoir celle­ci protégée. Le cache­œil contribue également à prévenir FIGURE 12.19 Un nourrisson avec une prothèse oculaire à l’œil gauche l’infection.

522

Partie 4

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

L’oculariste, qui fabrique et ajuste les prothèses oculaires, donne les instructions initiales relatives aux soins de la prothèse. Une fois en place, celle­ci n’a pas à être enlevée, sauf lorsqu’un nettoyage est nécessaire. Dans ce cas, il suft de tirer doucement sur la paupière inférieure, ce qui libère le bas de la prothèse, et d’appliquer une pression sur la pau­ pière supérieure. Le nettoyage se fait en plaçant la prothèse dans l’eau chaude et en la laissant tremper pendant quelques minutes. Il est plus facile de la réinsérer lorsqu’elle est mouillée. Pour la remettre en place, il faut garder les paupières ouvertes et, en tenant la prothèse dans la bonne position (une marque devrait indiquer le côté nasal), la pousser sous la paupière supérieure en laissant la paupière inférieure couvrir le bas du globe. Les mesures de sécurité sont importantes pour prévenir les dommages à l’œil sain et elles doivent être appliquées en tout temps. En outre, l’enfant doit éviter les sports de contact ou porter des lunettes de protection.

Soutenir la famille Le diagnostic de rétinoblastome soulève des préoc­ cupations particulières en plus de celles liées à tout type de cancer. Les parents qui ont des antécédents de rétinoblastome peuvent se sentir coupables d’avoir transmis ce défaut à leur enfant, surtout s’ils ont consciemment pris ce risque. D’un autre côté, lorsque les parents connaissent les probabilités de transmission et ont un enfant atteint, le traitement précoce donne de si bons résultats que l’adaptation parentale peut être rapide. Dans les familles où il n’y a pas d’antécédents de rétinoblastome, le diagnostic est un choc, souvent compliqué par le sentiment de culpabilité de ne pas l’avoir découvert plus tôt. Puisque les parents sont souvent les premiers à remarquer le reet blanchâtre dans l’œil, ils peuvent ressentir de la colère envers eux­mêmes ou d’autres personnes, particulièrement les professionnels de la santé, de n’avoir pas effectué plus tôt un examen plus approfondi. Il faut tenir compte de toutes ces variables dans les soins de soutien aux familles. Les caractéristiques héréditaires de ce cancer soulèvent d’autres préoccupations. L’une d’entre elles, très importante pour les parents, est le risque de rétinoblastome de leurs autres enfants et des futurs enfants de l’enfant atteint. Avec l’améliora­ tion du pronostic des enfants touchés par ce cancer, les consultations génétiques visant à prévenir la transmission de ce cancer prennent de plus en plus d’importance. Ces familles doivent être encouragées à demander des soins de suivi réguliers de l’enfant touché visant à détecter des tumeurs secondaires. De plus, les autres enfants des parents non touchés ainsi que les enfants des survivants de ce cancer devraient subir régulièrement une ophtalmoscopie visant à détecter un rétinoblastome à un stade précoce.

12.5.4

Tumeurs des cellules germinales

Les tumeurs des cellules germinales représentent environ 2 % de toutes les tumeurs des enfants de moins de 15 ans, mais constituent 14 % de toutes les tumeurs des jeunes âgés de 15 à 19 ans. Le tératome est le sous-type le plus courant de ce cancer chez les enfants (Frazier, Olson, Schneider et al., 2016). Les tumeurs ovariennes les plus communes

sont les tératomes kystiques matures, suivis des dysgerminomes et des tumeurs vitellines. Les tumeurs testiculaires les plus communes sont les tumeurs vitellines, suivies des tératomes. La plupart des enfants qui ont subi la résection chirurgicale d’un tératome ou d’une tumeur gonadique localisée peuvent faire l’objet d’un suivi, mais n’ont pas besoin de traitement ultérieur. Quant aux enfants ayant un cancer plus avancé, la chimiothérapie donne d’excellents résultats.

Soins inrmiers TUMEURS DES CELLULES GERMINALES

En complément des examens médicaux standard, tout adolescent doit savoir comment effectuer l’autoexamen des testicules an de se familiariser avec sa propre anatomie et de favoriser la détection précoce de toute anomalie. L’autoexamen doit idéalement être effectué 1 fois par mois, à partir du moment où le développement physique atteint le stade 3 de l’échelle de Tanner, en général vers l’âge de 13 ou 14 ans FIGURE 12.20. Chaque testicule doit être examiné individuellement, préférablement après un bain chaud ou une douche chaude (lorsque la peau du scrotum est détendue), en utilisant le pouce et les doigts des deux mains pour appliquer une pression légère, mais ferme. Un testicule normal est un organe

12.5.5

Tumeurs hépatiques

Les tumeurs hépatiques représentent 1 % de tous les cancers pédiatriques. Le sous-type histologique le plus courant est l’hépatoblastome (Agarwala, 2012). La résection chirurgicale constitue le traitement idéal de ces tumeurs, mais elle est généralement effectuée après l’administration d’une chimiothérapie an d’augmenter les chances de succès de l’intervention chirurgicale (Meyers, Trobaugh-Lotrario, Malogolowkin et al., 2016). La greffe du foie est souvent pratiquée lorsque les tumeurs ne peuvent être enlevées. Les taux de survie des enfants atteints d’un hépatoblastome peuvent atteindre 85 % grâce aux méthodes de traitement actuelles (Agarwala, 2012).

12.6

Survivants d’un cancer pédiatrique

Le taux de survie des enfants atteints d’un cancer a grandement augmenté au cours des 20 dernières années. Le taux de survie global après 5 ans était de 83 % au Canada entre les années 2004 et 2008 pour tous les cancers combinés chez les 0 à 14 ans. Généralement, la survie pour les cancers infantiles

ferme ayant un contour d’œuf lisse. L’épididyme, un renement palpable situé sur la partie supérieure du testicule, ne doit pas être pris pour une anomalie.

FIGURE 12.20 L’autoexamen des testicules est la meilleure stratégie de prévention du cancer des testicules.

donne des résultats moins précis, même si on comptabilise les données pour un plus grand nombre d’années (Société canadienne du cancer, 2017d). Le traitement énergique des cancers pédiatriques et l’avancement des recherches ont entraîné une augmentation remarquable des taux de survie. Toutefois, les programmes de traitement qui combinent l’intervention chirurgicale, la radiothérapie et la chimiothérapie ne sont pas sans complications. Certaines de celles-ci sont immédiates, par exemple la perte d’un membre lors d’une amputation chirurgicale. Cependant, les préoccupations actuelles portent sur les effets tardifs des traitements, notamment sur les changements néfastes découlant des méthodes de traitement, les interactions entre les méthodes de traitement, les caractéristiques individuelles de l’enfant et la réapparition possible du cancer des mois ou des années après le traitement. Puisqu’un nombre croissant d’enfants guérissent et survivent jusqu’à l’âge adulte, les effets tardifs des traitements sont de plus en plus documentés TABLEAU 12.7. Aucun organe ou presque n’est à l’abri, et presque tous les agents antinéoplasiques, particulièrement la radiothérapie, entraînent des effets nuisibles. Parmi les nombreux facteurs qui inuent sur le développement Chapitre 12

CE QU’IL FAUT RETENIR

Presque tous les agents antinéoplasiques, parti­ culièrement la radiothéra­ pie, entraînent des effets nuisibles.

Enfant atteint de cancer

523

12 12

des effets tardifs de la radiothérapie, certains des plus importants sont la dose cumulative totale administrée, l’âge de l’enfant (plus l’enfant est jeune, plus ses organes sont radiosensibles) et le lieu de la tumeur. Pour ces raisons, un suivi régulier après les traitements de l’enfant demeure crucial. La radiothérapie des os en croissance ou des glandes reproductives qui sont responsables de la production des hormones de croissance peut retarder ou freiner la croissance de l’enfant. L’inrmière doit évaluer la croissance en mesurant le poids et la taille de l’enfant à chaque visite. La radiothérapie et certains agents cytotoxiques peuvent causer un dysfonctionnement hormonal, réduire la fertilité et rendre les enfants stériles. La possibilité de dysfonctionnement gonadique dépend de l’âge et du sexe de l’enfant, du type et de la durée du traitement, ainsi que des doses totales administrées. L’inrmière doit d’abord évaluer précisément le développement sexuel de l’enfant à l’aide de l’échelle de Tanner.

anomalies. L’évaluation inclut l’observation attentive des os irradiés an de déceler tout défaut, par exemple une cyphoscoliose, des limites fonctionnelles et l’ostéoporose. L’enfant qui a subi une radiothérapie de la région mandibulaire présente un risque de carie dentaire, d’arrêt de la croissance dentaire et de calcification dentaire incomplète. Une évaluation attentive de l’enfant qui a subi une radiothérapie doit être effectuée à chaque visite.

La radiothérapie des os et des cartilages en développement peut provoquer de nombreuses

Les recherches à propos du concept de survivance démontrent que le retour à une certaine normalité est essentiel à la qualité de vie des survivants d’un cancer pédiatrique et doit être préparé en collaboration avec le personnel soignant. Par exemple, le retour en classe, parfois après une longue absence, représente un dé auquel l’enfant et l’adolescent pourront être confrontés. L’inrmière et les membres de l’équipe interdisciplinaire ont des rôles pivots an de préparer et de soutenir ces enfants et ces adolescents pour cette grande étape de leur développement psychosocial (Choquette, Rennick et Lee, 2016).

Analyse d’une situation de santé

Jugement clinique

Jérémie, un jeune garçon blanc âgé de 10 ans, est atteint de leucémie lymphoblastique aiguë. Il a reçu son diagnostic il y a quelques mois. Il est actuellement hospitalisé pour anémie. Les

derniers résultats sanguins sont les suivants : érythrocytes : 3,8 × 10 12 /L ; leucocytes : 4,2 × 109/L ; neutrophiles : 2,6 × 109/L cellules ; plaquettes : 170 × 109/L.

Mise en œuvre de la démarche de soins

Collecte des données – Évaluation initiale – Analyse et interprétation 1. Quel autre examen sanguin faut-il vérier en lien avec l’anémie de Jérémie ? 2. En tenant compte du résultat des leucocytes et des neutrophiles, déterminez à quel risque Jérémie est exposé. 3. Nommez une donnée subjective et une donnée objective à rechercher en lien avec l’état anémique de Jérémie. 4. Quelle manifestation clinique indiquerait qu’une infection complique l’état de santé de Jérémie ? 5. Jérémie devrait-il avoir des pétéchies ? Justiez votre réponse.

SOLUTIONNAIRE

524

Partie 4

Jérémie reçoit des traitements de chimiothérapie (cisplatine I.V.). Il reçoit de l’ondansétron I.V. avant ses traitements. Il dit qu’il n’a pas faim et, par conséquent, ne mange que le cinquième de ses repas. Ses parents insistent pour qu’il mange plus, mais sans succès.

Enfant et famille ayant des besoins particuliers

VU dans ce chapitre

6. Pourquoi Jérémie reçoit-il de l’ondansétron avant ses traitements de chimiothérapie ?

Planication des interventions – Décisions inrmières 7. Devriez-vous encourager les parents à réduire leur pression sur Jérémie pour qu’il mange plus ? Justiez votre réponse. Extrait de PTI CONSTATS DE L’ÉVALUATION Date

Heure



2018-05-28

08:30

2

Problème ou besoin prioritaire

Initiales

Perte d’appétit

RÉSOLU / SATISFAIT Date

Heure

Initiales

Professionnels / Services concernés

R.T.

SUIVI CLINIQUE Date

Heure



2018-05-28

08:30

2

Directive inrmière

Initiales

CESSÉE / RÉALISÉE Date

Heure

Initiales

Vos initiales

Rosie Trottier

Initiales

R.T.

Programme / Service

4e bloc D

Signature de l’inrmière

Votre signature

VU dans ce chapitre Pourquoi Jérémie doit-il être gardé en observation pendant une heure après l’administration d’un agent cytotoxique I.V. ?

VU dans ce chapitre

Vos initiales Signature de l’inrmière

Que faut-il surveiller surtout au site d’injection lors de l’administration de l’agent cytotoxique (cisplatine I.V.) ?

Initiales

Programme / Service

Vos e initiales 4 bloc D

8. Écrivez une directive inrmière s’adressant également au préposé aux bénéciaires et aux parents an d’assurer le suivi clinique du problème prioritaire inscrit au plan thérapeutique inrmier (PTI). 9. Le problème prioritaire de risque d’infection devrait-il apparaître dans le PTI de Jérémie ? Justiez votre réponse.

Jérémie a perdu ses cheveux. Il sait qu’il peut porter une prothèse capillaire, mais il hésite à le faire. « C’est la mode d’avoir le crâne rasé », dit-il. Quelle recommandation doit-il suivre cependant pour protéger sa tête ?

12 L’inrmière tient à ce que des soins buccaux soient régulièrement et méticuleusement faits à Jérémie, et que ce dernier adopte une excellente hygiène buccale.

VU dans ce chapitre

10. Qu’est-ce qui justie de tels soins ?

Évaluation des résultats – Évaluation en cours d’évolution 11. À la lumière des données de la mise en contexte, nommez trois points qui indiqueraient que l’état de santé de Jérémie s’améliore.

Chapitre 12

Quelle manifestation anaphylactique respiratoire exigerait une intervention rapide si elle survenait ?

Enfant atteint de cancer

525

Chapitre

13

Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation Écrit par : Tara Merck, CPNP Patricia McElfresh, MN, RN, PNP­BC Adapté par : Stéphanie Lepage, inf., M. Sc. inf.

MOTS CLÉS

OBJECTIFS

Activités récréatives . . . . . . . . . . . . . . . . . 540 Adhésion au traitement . . . . . . . . . . . . . . 549 Anesthésie chez l’enfant . . . . . . . . . . . . . 553 Angoisse de séparation . . . . . . . . . . . . . . 529 Délirium . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 531 Heures de sommeil . . . . . . . . . . . . . . . . . . 542 Planification du congé . . . . . . . . . . . . . . . 545 Préparation chirurgicale . . . . . . . . . . . . . 551 Préparation psychologique . . . . . . . . . . 546 Régression . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 529 Relation de confiance . . . . . . . . . . . . . . . 538 Service scolaire en milieu hospitalier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 542 Souffrance psychologique . . . . . . . . . . . 528

Après avoir étudié ce chapitre, vous devriez être en mesure :

Disponible sur

• de reconnaître les effets de l’hospitalisation chez l’enfant ; • de déterminer les agents stressants liés à la maladie et à l’hospita­ lisation pour l’enfant en fonction de son stade de développement ; • d’énumérer les effets positifs que peut avoir l’hospitalisation de l’enfant ; • d’expliquer les interventions infirmières visant à soutenir les parents, les frères et sœurs, et la famille durant la maladie et l’hospitalisation de l’enfant ; • de préciser la nature des interventions infirmières lorsque l’enfant est admis dans une unité spéciale comme le service des urgences ou l’unité des soins intensifs ; • d’énoncer les pratiques infirmières générales recommandées pour la préparation des enfants à des interventions comme une intervention chirurgicale ; • de suggérer des jeux appropriés au cours de différentes interventions thérapeutiques selon l’âge de l’enfant ; • de proposer des stratégies générales favorisant l’adhésion de l’enfant et des membres de sa famille aux traitements.

• À retenir • Carte conceptuelle • Solutionnaires

Guide d’études – SA11

526

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

Carte conceptuelle

Cette carte conceptuelle illustre schématiquement les principaux concepts décrits dans le présent chapitre. Sa lecture vous permettra d’avoir une vue d’ensemble des notions qui y sont présentées.

comme

comme

tient compte des Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation

interventions liées aux

incluent

incluent

13

incluent

incluent

Chapitre 13

Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation

527

13.1

Changements dans les soins pédiatriques

Les changements dans le système de santé au Canada, notamment le virage ambulatoire, ont modié le rôle attendu des parents à l’égard de leur enfant hospitalisé, de même que la vision des professionnels quant à la participation des parents. Dans les soins centrés sur la famille, l’implication des parents fait partie intégrante du plan de soins, ce qui constitue un facteur de diminution du stress pour leur enfant (van Dijk, 2017). La planication des soins pédiatriques doit aussi tenir compte de la tendance grandissante à effectuer des interventions et des suivis en dehors du milieu hospitalier grâce à la chirurgie d’un jour ou aux services de consultation externe, par exemple. Les soins tiennent également compte des modications dans l’état de la clientèle, notamment en ce qui concerne les éléments suivants (Société canadienne de pédiatrie [SCP], 2009) : • De plus en plus d’enfants survivent à une extrême prématurité ; CE QU’IL FAUT RETENIR

• Le nombre de maladies chroniques chez l’enfant augmente sans cesse (allergie, asthme) ;

La séparation, l’anxiété et la douleur gurent parmi les principaux agents stressants de l’hospitalisation

• Le taux d’embonpoint et d’obésité chez les enfants atteint des sommets jamais vus ;

Ces enfants requièrent des soins de plus en plus complexes qui entraînent des hospitalisations plus fréquentes (Riberdy, Tétreault et Desrosiers, 2013) ENCADRÉ 13.1.

CE QU’IL FAUT RETENIR

L’inrmière doit demeurer vigilante devant l’enfant qui accepte passivement tous les changements et toutes les demandes : il pourrait avoir besoin de plus de soutien que l’enfant contrariant.

ENCADRÉ 13.1

• Beaucoup d’enfants et d’adolescents reçoivent un diagnostic de trouble de santé mentale.

La clientèle pédiatrique représente moins de 5 % des hospitalisations au Canada (Institut canadien d’information sur la santé [ICIS], 2007). La durée moyenne des séjours est de 5,1 jours, ce qui est inférieur à la durée moyenne des hospitalisations chez l’adulte. Les hospitalisations pour des blessures liées aux sports ou à la pratique d’activités de loisir sont très fréquentes chez les enfants, principalement pour ceux âgés de 5 à 9 ans (Collaboration Atlantique pour la prévention des

Facteurs rendant l’enfant plus à risque d’hospitalisation

Le revenu ainsi que le milieu de vie sont à prendre en considération : • Les enfants et les adolescents des quartiers urbains où vivent des familles à faible revenu sont plus susceptibles d’être hospitalisés à la suite de blessures non intentionnelles que ceux des quartiers plus privilégiés.

• Les jeunes de 10 à 19 ans des quartiers aisés sont plus susceptibles d’être hospitalisés à la suite d’une blessure par heurt (blessure résultant de la pratique d’un sport, d’un objet lancé, d’un choc contre une personne ou un objet) que ceux des quartiers défavorisés.

Source : Adapté de Statistique Canada (2010).

528

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

blessures [CAPB], 2009 ; Yanchar, Warda et Fuselli, 2012). Les causes d’hospitalisation les plus fréquentes sont l’asthme, les troubles gastrointestinaux, les pneumonies et les bronchiolites (He, Xiao, Torrie et al., 2017). Comme chez les adultes, les enfants hospitalisés pour des soins en santé mentale représentent une faible proportion des hospitalisations (6 %). Toutefois, entre 2006 et 2016, les visites au service des urgences ont subi une hausse de 56 % et les hospitalisations ont augmenté de 47 % (ICIS, 2017).

13.2

Effets de l’hospitalisation sur l’enfant

13.2.1

Facteurs de risque liés au stress durant l’hospitalisation

L’hospitalisation peut avoir des effets psychologiques négatifs, particulièrement chez l’enfant de moins de cinq ans (Rennick, Dougherty, Chambers et al., 2014). L’enfant possède un nombre limité de mécanismes d’adaptation face aux agents stressants. Les réactions de l’enfant sont inuencées par son âge, son développement, ses compétences adaptatives innées ou acquises, son expérience antérieure de la maladie, de la séparation ou de l’hospitalisation, la gravité du diagnostic et le système de soutien auquel il a accès (Gomes, Fernandes et Nóbrega, 2016). Parce que le développement de son cerveau n’est pas encore achevé, le jeune enfant a de la difculté à bien gérer son stress. Il est fréquent de le voir mordre, taper ou de fuir lorsqu’il est contrarié. Les cellules cérébrales établissent peu à peu des connexions qui lui permettront de mieux contrôler ces pulsions primitives. Il sera de plus en plus apte à analyser ses émotions au lieu de les extérioriser (Black, Walker, Fernald et al., 2017). Des facteurs de risque rendent certains enfants plus vulnérables que d’autres aux stress de l’hospitalisation ENCADRÉ 13.2. L’enfant ressent plus ou moins fortement les effets du stress selon son âge au moment de l’hospitalisation, la durée ainsi que la raison de l’hospitalisation, et son tempérament. Les conséquences du stress peuvent apparaître à plus ou moins long terme. L’environnement de soins où est hospitalisé l’enfant (unité de soins intensifs pédiatriques ou unité standard) peut avoir une inuence sur la peur ou la souffrance psychologique que l’enfant éprouvera pendant son hospitalisation (Rennick, Dryden-Palmer, Stremler et al., 2017). Différentes caractéristiques font que certains enfants s’en sortent mieux que d’autres. Par exemple, un jeune enfant actif et doté d’une volonté forte aura tendance à mieux gérer son anxiété lorsqu’il est hospitalisé que les jeunes moins expressifs.

13.2.2

Effets néfastes

L’enfant peut réagir aux stress de l’hospitalisation avant l’admission, durant l’hospitalisation et après avoir reçu son congé ENCADRÉ 13.3. Cet épisode perturbe la vie de l’enfant et peut donc aussi nuire à son développement, quel que soit son âge. La régression est un phénomène souvent rencontré chez les enfants hospitalisés. La perte des fonctions corporelles provoquée par la maladie et les nombreux soins prédisposent l’enfant à retourner vers un stade de développement antérieur (Sreekantam et Wassmer, 2013).

ENCADRÉ 13.2

Facteurs de risque susceptibles d’accroître la vulnérabilité au stress lors de l’hospitalisation

• Changement dans le caractère de l’enfant • Âge (en particulier de six mois à cinq ans) • Sexe masculin • Niveau d’intelligence inférieur à la moyenne • Stress multiples et continuels dus, par exemple, à des hospitalisations fréquentes • Difcultés familiales concomitantes (p. ex., une séparation) (Amyot, Bernard-Bonnin et Papineau, 2004)

• Soutien parental pauvre (trouble de l’attachement) (Wise et Delahanty, 2017) • Enfant issu d’un milieu rural, qui sera peut-être moins familiarisé avec les grands centres hospitaliers urbains que les enfants citadins • Conception que l’enfant se fait de sa maladie

Modication du comportement face au stress L’impossibilité de maîtriser la situation accroît l’impression d’être menacé et peut avoir un effet sur les compétences d’adaptation de l’enfant. À l’hôpital, l’enfant est confronté à plusieurs circonstances qui réduisent son emprise sur la situation. Sans une bonne compréhension de la part de l’inrmière quant au type d’environnement favorisant une croissance optimale de l’enfant, l’expérience de l’hôpital peut ralentir temporairement le développement de l’enfant, voire le restreindre de façon plus permanente (Mari, Cascudo et Alchieri, 2016). Le comportement d’un enfant qui démontre des signes d’agitation, de détresse et de résistance envers le professionnel peut être la conséquence de procédures douloureuses ou répétitives dans le passé (Cohen, Blount, Chorney et al., 2017). En raison de leurs efforts pour devenir indépendants et productifs, les enfants d’âge scolaire, et notamment les adolescents, se montrent particulièrement vulnérables aux événements susceptibles de diminuer leur sentiment de maîtrise et de pouvoir. Chez eux, plusieurs éléments risquent d’engendrer le stress, certains agissant d’une façon plus prononcée : modication des rôles ; incapacité physique ; peur de la mort, de l’abandon ou d’une blessure permanente ; perte de l’acceptation des pairs ; manque de productivité ; et incapacité de s’adapter au stress conformément aux attentes culturelles perçues.

Angoisse de séparation Le lien de réciprocité qui unit l’enfant à son parent est appelé l’attachement parental. Grâce au sentiment de sécurité que ce dernier confère et qui s’appuie sur la présence du parent, l’enfant peut entrer en contact avec le monde qui l’entoure et, ainsi, commencer à le découvrir (phase d’exploration). Ce lien d’attachement a une inuence sur la réaction de l’enfant relativement à l’absence de ses parents. Ainsi, lorsqu’il perçoit une menace ou un danger, l’enfant compte habituellement sur

ENCADRÉ 13.3

Comportement posthospitalisation chez l’enfant

JEUNE ENFANT

• L’enfant maintient d’abord une certaine distance vis-à-vis de ses parents, cette conduite pouvant durer de quelques minutes (le plus souvent) à quelques semaines. • Cette attitude est fréquemment suivie de comportements de dépendance : – tendance à s’accrocher aux parents et opposition vigoureuse à toute séparation (angoisse de séparation) ; – agissements exigeant l’attention des parents. • Parmi les autres comportements problématiques se trouvent : – développement de nouvelles peurs (p. ex., des cauchemars) ;

– résistance à aller au lit, réveils durant la nuit et perturbation du sommeil ; – réserve, apathie et timidité ; – hyperactivité ; – crises ; – caprices alimentaires ; – attachement à une couverture ou à un jouet ; – régression, principalement dans les compétences nouvellement acquises.

13

ENFANT PLUS ÂGÉ

• Froideur émotionnelle, stoïcisme et impassibilité, suivis d’une dépendance intense et exigeante envers ses parents • Colère à l’égard de ses parents • Jalousie envers les autres (p. ex., envers ses frères et sœurs)

Sources : Adapté de Fortier, Del Rosario, Rosenbaum et al. (2010) ; Yuki et Daaboul (2011).

son parent pour lui venir en aide (Guerra, Williamson et Lucas-Molina, 2017). La maladie et l’hospitalisation étant perçues comme des menaces, l’enfant ressent un besoin accru d’un de ses parents pour être sécurisé.

Manifestations de l’angoisse de séparation selon l’âge Au moment de l’hospitalisation, le nourrisson ou le trottineur est totalement dépendant de l’adulte pour ses soins et pour sa survie. La séparation d’avec le parent pendant une période plus ou moins longue est inévitable durant l’hospitalisation. L’absence du parent, combinée à la présence des nombreux visages inconnus qui l’entourent, est susceptible d’engendrer une anxiété importante appelée l’angoisse de séparation TABLEAU 13.1. Chapitre 13

Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation

529

TABLEAU 13.1

Étapes de l’angoisse de séparation chez le nourrisson et le trottineur

PROTESTATION

DÉSESPOIR

DÉTACHEMENT

• L’enfant réagit avec agressivité à la séparation d’avec ses parents.

• Les pleurs cessent, et la dépression devient évidente. L’enfant est beaucoup moins actif, ne montre aucun intérêt pour ses jeux ou pour la nourriture, et se tient à l’écart des autres.

• Le détachement, parfois appelé déni, survient habituellement après une séparation prolongée d’avec les parents. Le déni est souvent précédé d’un lien d’attachement pauvre. Il est rarement observé chez l’enfant hospitalisé.

• Les comportements observés chez l’enfant sont les suivants :

• Les comportements observés chez l’enfant sont les suivants :

• L’enfant adopte les comportements suivants : – S’accroche au parent. – Émet des pleurs ou des cris. – Cherche des yeux ses parents. – Évite et refuse le contact avec les inconnus. – Refuse que quiconque s’occupe de lui.

– Demeure inactif.

– Semble s’être adapté à la perte.

– Manifeste une peine inconsolable.

– Se tient à l’écart des autres.

– Établit des relations supercielles avec les autres.

• Chez le trottineur, les comportements suivants peuvent aussi être observés : – Attaque verbalement les inconnus (p. ex., « Va-t’en ! »). – Attaque physiquement les inconnus (coups de pied, morsures, pincements). – Tente de s’échapper pour trouver le parent. – Tente de forcer physiquement le parent à rester. – Refuse d’exécuter les routines habituelles (p. ex., au moment des repas, au coucher ou pour faire sa toilette). • Ces comportements peuvent durer pendant des heures ou des jours. • La protestation, qui peut se manifester par des pleurs, par exemple, peut être continue et ne cesser qu’en raison de l’épuisement physique de l’enfant.

– Manifeste un état dépressif ou de la tristesse.

– Se montre de plus en plus égocentrique.

– Démontre un faible intérêt pour son environnement.

– Accorde une importance primordiale aux choses matérielles.

– Ne communique pas.

– Manifeste un intérêt accru pour son environnement.

– Régresse et adopte des comportements antérieurs (p. ex., suce son pouce, utilise une suce ou un biberon, a des épisodes d’énurésie). • La durée de ces comportements peut être variable. • L’état physique de l’enfant peut se détériorer en raison de son refus de manger, de boire ou de bouger.

– Entre en interaction avec des inconnus ou avec les soignants familiers. – S’intéresse à ce qui l’entoure. – Joue avec les autres. – Donne l’impression d’être heureux.

• L’approche d’un inconnu peut accroître la protestation. Source : Adapté de Papalia, Olds et Feldman (2010).

L’enfant peut avoir tendance à accorder une attention excessive à un objet transitionnel (DanionGrilliat et Bursztejn, 2011). À 18 mois, l’enfant tolère mieux l’absence, car il est capable de représentation mentale, mais il est encore vulnérable. À partir de 3 ans, il devrait être en mesure de faire face aux absences de ses parents, à moins que d’autres facteurs contriMauricio est âgé de deux ans et demi. Il est hospitalisé buent à exacerber son pour une bronchiolite. Au début de l’hospitalisation, il angoisse, par exemple pleurait dès que ses parents quittaient l’unité. Maintenant, leur absence prolongée, il ne pleure presque plus, et de moins en moins longtemps. la présence concomiIl ne semble pas intéressé par les jouets qui lui sont tante d’autres agents proposés. Il mange de moins en moins et recommence à stressants familiaux sucer son pouce, activité qu’il ne faisait plus depuis (divorce, deuil, conits) quelques semaines selon sa mère. D’après vos observaou certains traits de sa tions du comportement de Mauricio, laquelle est la plus personnalité (timidité, révélatrice de son désespoir lié à l’angoisse de séparation ? passivité). a) Il ne pleure presque plus, et moins longtemps. Même si la progresb) Il n’est pas intéressé par les jouets proposés. sion vers la phase du c) Il mange de moins en moins aux repas. détachement est assez rare, une phase de protesd) Il a recommencé à sucer son pouce. tation est fréquemment

Jugement

clinique

530

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

observée, même pour des séparations brèves d’avec l’un ou l’autre des parents. Si l’interprétation de la signication de chaque phase de comportement n’est pas adéquate, les membres de l’équipe soignante risquent d’étiqueter faussement un comportement comme étant positif ou négatif. Par exemple, ils peuvent considérer que les pleurs bruyants de la phase de protestation constituent un mauvais comportement, alors que l’enfant manifeste sa souffrance. Durant la phase tranquille et silencieuse du désespoir, les membres de l’équipe soignante peuvent penser que l’enfant est nalement en train d’accepter de s’installer dans son nouvel environnement FIGURE 13.1. Les conséquences de l’angoisse de séparation sont importantes. L’angoisse entrave le développement normal (diminution du jeu, baisse de la communication, difculté à dormir, troubles alimentaires) et peut causer des troubles affectifs ou comportementaux à l’âge adulte. Une persistance de l’angoisse de séparation au-delà de l’âge préscolaire est associée à un désordre comportemental et émotionnel qui nécessite une consultation avec un professionnel et un suivi médical

(Danion-Grilliat et Bursztejn, 2011 ; Organisation mondiale de la Santé, 2008). Bien que l’angoisse de séparation soit plus présente chez les enfants de zéro à trois ans, les enfants plus âgés peuvent aussi en souffrir. Selon l’âge, les manifestations diffèrent TABLEAU 13.2.

Rôle des parents face à l’angoisse de séparation Le rôle que jouent les parents auprès de l’enfant hospitalisé vivant de l’anxiété de séparation est primordial. Ainsi, leur présence est la bienvenue en tout temps dans la plupart des hôpitaux. Plusieurs centres hospitaliers fournissent des installations comme un fauteuil ou un lit pour au moins une personne par enfant, accordent des privilèges d’accès à la cuisinette de l’unité et mettent en place d’autres commodités permettant de faire en sorte que les parents (ou tout autre adulte signicatif) se sentent les bienvenus (Kuo, Houtrow, Arango et al., 2012). Toutefois, l’emploi du temps des parents peut empêcher la cohabitation avec leur enfant. Dans de tels cas, des stratégies visant à réduire au minimum les effets de la séparation doivent être mises en œuvre. Tout au long de l’hospitalisation, l’inrmière guide les parents dans leur compréhension du phénomène de la séparation et travaille avec eux an de démystier l’environnement hospitalier et de planier le retour de leur enfant à la vie normale TABLEAUX 13.1 et 13.2 . Les parents bien informés ont une meilleure compréhension des effets provoqués par leur absence et peuvent mieux gérer la façon d’annoncer leur départ. Ainsi,

TABLEAU 13.2

lorsque les parents doivent partir et que leur enfant est endormi, au lieu de s’éclipser, les parents peuvent penser à créer une afchette. Sur un côté, par exemple, un dessin pourrait représenter un téléphone et, sur l’autre, un hamburger. Avant de partir, ils placent l’afchette du côté approprié pour indiquer à l’enfant, à son réveil, qu’ils sont partis à l’extérieur pour téléphoner ou pour manger.

FIGURE 13.1 La phase de désespoir peut se manifester par l’attitude triste et solitaire de l’enfant.

Risques de délirium et syndrome de stress post-traumatique Délirium Les changements dans la routine peuvent entraîner des modications sur le plan neurocognitif. Les études récentes ont démontré que, dans la population pédiatrique, le délirium survenait chez 20 à 30 % des enfants, surtout chez ceux hospitalisés aux soins intensifs (Bettencourt et Mullen, 2017 ; Schieveld, Ista, Knoester et al., 2015). Ces taux varient en fonction de plusieurs facteurs, et les manifestations cliniques du délirium, souvent très subtiles, prennent plusieurs formes TABLEAU 13.3.

13

Caractéristiques et manifestations possibles de l’angoisse de séparation chez les enfants de 3 à 18 ans

ENFANT D’ÂGE PRÉSCOLAIRE (3-6 ANS)

ENFANT D’ÂGE SCOLAIRE (6-12 ANS)

ADOLESCENT (12-18 ANS)

• Peut tolérer de brèves périodes de séparation d’avec ses parents.

• Peut réagir à la séparation d’avec ses parents ou amis, à l’environnement peu ou pas familier, aux examens ou traitements, et à une perte du sentiment de maîtrise sur les décisions qui sont prises pour lui (Coyne, 2006).

• Peut avoir de la difculté à s’adapter ou, à l’inverse, considérer l’éloignement comme bienvenu.

• Peut développer une conance de substitution envers d’autres adultes signicatifs. • Peut manifester certains comportements typiques à cause du stress et de la maladie, et au cours de situations anxiogènes (refus de manger, difculté à dormir, pleurs silencieux, questionnement incessant sur le moment de la prochaine visite de ses parents, tendance à demeurer à l’écart). • Peut exprimer sa colère indirectement (bris de ses jouets, coups aux autres enfants, refus de coopérer). • Peut manifester un mutisme sélectif.

• Peut manifester un besoin accru de sécurité et de soutien parental, notamment lorsqu’il a rarement quitté la sécurité du domicile familial ou qu’il est en phase d’adaptation à l’école. • Peut s’ennuyer de sa routine habituelle ou s’inquiéter du retard qu’il aura pris sur ses compagnons de classe (même s’il n’aime pas l’école). • Peut ressentir de la solitude, de l’ennui, de l’isolement et faire une dépression. • Peut réagir davantage à la séparation qu’à la maladie, à son traitement ou au milieu hospitalier. • Peut vouloir atteindre l’indépendance (théorie psychosociale d’Erikson).

Chapitre 13

• Peut ressentir une détresse émotionnelle grave liée à la perte de contact avec son groupe de pairs (perte de statut au sein du groupe, incapacité à exercer son inuence ou son leadership sur le groupe, ou perte de son acceptation par le groupe). • Est conscient que les absences à l’intérieur d’un groupe de pairs sont mal tolérées (les membres du groupe continuent leurs activités ensemble et comblent rapidement le vide laissé par un membre absent). • Pourrait bénécier, durant la séparation d’avec son groupe habituel, d’une association avec d’autres groupes d’adolescents hospitalisés.

Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation

531

TABLEAU 13.3

Facteurs de risque et manifestations cliniques du délirium chez l’enfant hospitalisé

FACTEURS DE RISQUE

MANIFESTATIONS CLINIQUES SOUS-JACENTES

• Âge (plus fréquent chez les jeunes enfants) • Sévérité de la maladie

• Troubles cognitifs (p. ex., perte de mémoire à court terme, manque de concentration)

• Dose, fréquence et types de médication

• Troubles émotionnels (p. ex., irritabilité, peur)

• Outils invasifs de diagnostic

• Perception altérée (p. ex., hallucinations visuelles, auditives, olfactives)

• Situations hospitalières particulières (soins ambulatoires ou externes, mise en isolement, service des urgences, unité de soins intensifs pédiatriques) • Retard de développement • Épisodes précédents d’hospitalisation

L’emploi de médicaments n’a pas été, à ce jour, prouvé comme étant efcace dans le traitement du délirium chez les enfants. La pharmacologie peut toutefois être utile dans le traitement des manifestations cliniques. De plus, favoriser l’orientation dans les trois sphères, respecter une routine journuit et diminuer la surstimulation sont des exemples de traitements non pharmacologiques efcaces en pédiatrie (Bettencourt et Mullen, 2017).

Syndrome de stress post-traumatique Environ 80 % des enfants hospitalisés et leur famille vont vivre des réactions traumatiques à la suite d’une expérience vécue liée à la maladie, à une blessure ou à une procédure médicale douloureuse. Parmi ces cas, 20 à 30 % des parents et 15 à 25 % des enfants, des frères et des sœurs vont connaître un syndrome de stress post-traumatique pouvant affecter les activités de la vie quotidienne, l’adhésion au traitement et la récupération (Santiago, Ursano, Gray TABLEAU 13.4

Facteurs de risque de souffrir d’un syndrome de stress post-traumatique

ENFANT À RISQUE

PARENT À RISQUE

• A des réactions intenses au stress.

• A des réactions intenses au stress.

• A expérimenté plusieurs niveaux de douleur.

• A vécu des expériences traumatisantes dans le passé.

• A été exposé à des visions ou des soins terriants à l’hôpital.

• A des problèmes émotionnels ou psychologiques.

• A été séparé de ses parents.

• A un manque de soutien de la part de ses proches.

• A vécu des expériences traumatisantes dans le passé. • A des problèmes émotionnels ou de comportement.

• Vit d’autres événements stressants à la maison.

• A un manque de soutien de la part de ses proches. Source : Adapté de National Child Traumatic Stress Network (2004).

532

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

• Pensées altérées (p. ex., expression lente et laborieuse, passage du coq-à-l’âne) • Problèmes psychomoteurs (p. ex., agitation, manque de sommeil)

et al., 2013). Ainsi, la qualité des soins de l’inrmière visant à réduire les risques de stress posttraumatique est primordiale. Elle doit : • minimiser les procédures douloureuses et médicales traumatiques ; • détecter les enfants et les familles à risque de souffrir d’un syndrome de stress posttraumatique TABLEAU 13.4 ; • offrir du soutien pour prévenir les effets du stress.

13.2.3

Effets positifs

Même si l’hospitalisation est habituellement stressante pour l’enfant, elle peut aussi lui être salutaire. Le bénéce le plus évident est la guérison, mais les bienfaits psychologiques doivent être considérés et maximisés durant l’hospitalisation.

Occasion d’apprendre La maladie et l’hospitalisation représentent des occasions pour l’enfant et les autres membres de la famille de mieux se connaître mutuellement, de tisser des liens et d’en apprendre davantage sur leur corps, leur santé et les professions de la santé. En effet, pour certaines familles, le stress résultant de la maladie d’un enfant, de son hospitalisation ou de ces deux éléments peut mener à un renforcement des comportements adaptatifs de la famille et à l’émergence de nouvelles stratégies d’adaptation. L’hospitalisation est parfois une période durant laquelle les parents, les frères et les sœurs peuvent proter de moments de proximité avec leur enfant, leur frère ou leur sœur, moments parfois difciles à obtenir dans la vie quotidienne (Weller, Faulkner, Doyle et al., 2015).

Maîtrise de soi Vivre un combat contre la maladie ou connaître l’hospitalisation en parvenant à s’y adapter représente une expérience qui permet d’exercer sa

13.3.1

Réactions des parents

Les réactions des parents à la maladie de leur enfant dépendent d’une variété de facteurs ; il est toutefois impossible de prédire quels facteurs seront les plus susceptibles d’inuencer leur réponse ENCADRÉ 13.4 10 .

FIGURE 13.2 L’enfant qui a un handicap physique, ou qui est d’une manière ou d’une autre différent des autres enfants de son âge, peut trouver à l’hôpital un groupe de pairs prêts à l’accepter socialement.

maîtrise de soi. Le jeune enfant rencontre plusieurs occasions de mettre à l’épreuve ses peurs imaginaires en les confrontant aux peurs qu’il doit surmonter dans la réalité. Bien accompagné par des professionnels chevronnés, il prend conscience qu’il n’a pas été abandonné ni puni, et qu’il peut faire conance aux adultes. L’hospitalisation peut aussi offrir à l’enfant l’occasion de développer des stratégies de gestion du stress et d’accroître son sentiment de compétence dans sa capacité d’adaptation.

Occasion de socialiser L’hospitalisation peut devenir pour l’enfant une occasion spéciale de connaître l’acceptation sociale. L’enfant malade trouve à l’hôpital un entourage qui lui témoigne de la sympathie FIGURE 13.2 . Établir des relations avec des membres signicatifs de l’équipe de soins, comme le médecin, l’inrmière ou le travailleur social, peut améliorer grandement l’adaptation de l’enfant dans bien des domaines de sa vie. L’environnement hospitalier peut fournir à l’enfant et à sa famille de nouvelles expériences de socialisation susceptibles d’élargir leurs relations interpersonnelles. Ainsi, cette expérience peut amener les parents à faire la connaissance d’autres parents qui leur seront d’une aide précieuse dans le processus d’acceptation de la maladie.

13.3

Effets de l’hospitalisation sur la famille

La crise que constituent la maladie et l’hospitalisation d’un enfant affecte chaque membre de la famille.

Des caractéristiques communes peuvent être présentes chez les parents dont un enfant a été hospitalisé, comme un sentiment global d’impuissance, une remise en question des compétences du personnel, l’acceptation de la réalité de l’hospitalisation, le besoin d’une information fournie dans un langage accessible, la peur, l’adaptation à l’incertitude et l’espoir d’être rassurés par les soignants. Ce besoin qu’ont les parents d’être rassurés entraîne la nécessité, pour le personnel, de faire preuve de compassion, de donner aux parents l’occasion d’exprimer leurs inquiétudes par rapport à l’enfant et de leur permettre de participer à ses soins (Eichner et Johnson, 2012). La peur et la douleur de l’enfant, provoquées par l’hospitalisation et les gestes de soins, tendent à augmenter l’anxiété des parents. Cette anxiété les conduit parfois à des comportements inappropriés et les rend incapables de répondre aux besoins de leur enfant. Les modications des politiques hospitalières au cours des dernières années reètent un changement d’attitude envers les parents. En effet, les hôpitaux sont amenés à ne plus considérer les parents comme de simples visiteurs et à leur faire une place importante tout au long de l’hospitalisation de l’enfant. Il est reconnu que leur présence, en plus de fournir une réponse aux besoins de l’enfant, est un facteur important dans son rétablissement (Curtis, Foster, Mitchell et al., 2016). De nombreux hôpitaux ont conçu un système de soins centrés sur la famille. Cette philosophie de soins admet le rôle intégral de la famille dans la vie d’un enfant. Toutefois, certains parents peuvent subir un stress émotionnel nécessitant un répit temporaire. D’autres peuvent ressentir de l’anxiété à l’idée de devoir participer aux soins. Par ailleurs, certains parents peuvent sentir un

ENCADRÉ 13.4

10 Les réactions des parents à l’hospitalisation sont similaires à celles des parents dont un enfant a des besoins de santé particuliers. Ces réactions sont présentées plus en détail dans le chapitre 10, Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie.

CE QU’IL FAUT RETENIR

L’évaluation du niveau d’anxiété des parents permet d’orienter les interventions efcacement et de réduire les effets néfastes de ce stress. La collaboration avec la famille sera ainsi facilitée, car l’enfant sera aussi plus calme.

Facteurs ayant un effet sur les réactions des parents face à la maladie de leur enfant

• Gravité de la menace pour l’enfant • Expérience antérieure de la maladie ou de l’hospitalisation • Types d’interventions médicales nécessaires pour le diagnostic ou le traitement • Systèmes de soutien mis à leur disposition • Capacité de résilience

Chapitre 13

• Capacité d’adaptation exploitée antérieurement • Facteurs de stress additionnels au sein de la famille • Croyances culturelles et religieuses • Capacité de l’enfant à s’exprimer verbalement

Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation

533

13

CE QU’IL FAUT RETENIR

Outre les répercussions de la séparation sur les rôles de chacun au sein de la famille, la perte du rôle parental, du rôle de frère ou de sœur, ou encore du rôle de ls ou de lle affecte chaque membre de la famille d’une façon différente.

4 La collecte des données à l’aide des outils mnémotechniques PQRSTU et AMPLE est présentée en détail dans le chapitre 4, Examen clinique : anamnèse et examen physique.

grand besoin de contrôler tous les soins donnés à leur enfant. Cela peut se produire, par exemple, chez les parents dont l’enfant est trop jeune pour exprimer verbalement ses besoins, ou chez les parents faisant partie d’une minorité ethnique et devant s’accoutumer à un personnel hospitalier d’une autre identité culturelle.

13.3.2

Répercussions sur la fratrie

Les parents n’ont pas toujours conscience des répercussions qui perturbent la vie des frères et sœurs au cours de l’hospitalisation de l’enfant malade ; ils ignorent donc les bienfaits que pourraient apporter des interventions simples, comme de donner des explications claires sur la maladie et de s’assurer que les frères et sœurs restent autant que possible à la maison an de réduire ces effets au minimum. Les visites des frères et sœurs sont habituellement bénéques pour l’enfant hospitalisé, la fratrie et les parents, mais elles doivent faire l’objet d’une évaluation au cas par cas (Mathis, 2015). Les membres de la fratrie doivent être préparés à ces visites et recevoir de l’information appropriée à leur niveau de développement ; ils doivent aussi avoir la possibilité de poser des questions (Committee on Hospital Care and Child Life Council, 2014).

13.4

Interventions inrmières au cours de l’hospitalisation

13.4.1

Préparer l’enfant et sa famille à l’hospitalisation

An de prévenir ou, au moins, d’atténuer les problèmes psychologiques susceptibles de persister après l’hospitalisation, l’enfant et sa famille ont besoin du soutien de l’infirmière (Bhansali, Washofsky, Romrell et al., 2016 ; Rennick, Morin, Kim et al., 2004). La préparation à l’hospitalisation, c’est-à-dire aux diverses procédures qui l’entourent, puis à l’expérience de l’hôpital, fait partie des moyens pouvant atténuer les sentiments négatifs et la peur de l’enfant à l’égard de l’hospitalisation. Il importe de se rappeler que lorsque l’enfant n’a pas à affronter une peur paralysante, il est capable de rediriger ses énergies pour mieux faire face aux autres stress inévitables de l’hospitalisation. FIGURE 13.3 Au cours de l’admission, l’inrmière évalue l’état de l’enfant, mais aussi sa compréhension de l’expérience de l’hôpital.

534

Partie 5

L’inrmière analyse plusieurs facteurs pour décider du meilleur moment pour la préparation, plus particulièrement l’âge de l’enfant, la raison de son admission et les

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

antécédents d’hospitalisation. Dans la plupart des cas, comme lorsque survient une maladie aiguë et soudaine, il n’est pas possible de préparer l’enfant et la famille à l’hospitalisation. En dépit des circonstances, il faut se préoccuper d’expliquer à l’enfant et à sa famille les routines hospitalières et les règlements de l’unité, tenter d’évaluer leurs attentes et prévoir du temps pour répondre à leurs questions. Un effort de collaboration entre l’inrmière et les autres membres de l’équipe soignante contribue à assurer à l’enfant et à sa famille la meilleure expérience possible d’hospitalisation.

Procéder à l’entrevue d’admission La collecte des données au moment de l’admission consiste, pour l’inrmière, à colliger certains renseignements concernant l’enfant et sa famille, notamment les antécédents de santé, ce qui lui permet d’élaborer un plan de soins personnalisé 4 . Pour procéder de façon systématique, l’inrmière aborde tour à tour les différents modes fonctionnels de santé qui sont présentés dans le TABLEAU 13.5 . Les renseignements qu’elle recueille peuvent favoriser une meilleure compréhension des dynamiques familiales, contribuer à normaliser l’environnement hospitalier pour l’enfant et aider les membres du personnel à répondre aux besoins de l’enfant et de sa famille. La plupart des questions sont rédigées en fonction des réponses attendues de la part des parents. Selon l’âge de l’enfant, elles devraient être adressées directement à ce dernier, lorsque c’est approprié. Les questions concernant le mode fonctionnel « Perception et gestion de la santé » permettent d’acquérir une compréhension des réactions possibles de l’enfant à l’hospitalisation, en particulier en ce qui a trait à la séparation.

Préparer l’enfant le jour de son admission La préparation nécessaire à l’enfant le jour de son admission dépend du counseling préhospitalier qu’il a reçu précédemment. S’il a été préparé dans le cadre de procédures formalisées, il saura en général à quoi s’attendre concernant les interventions médicales initiales, les installations pour les enfants hospitalisés et le personnel inrmier. Cependant, le counseling préhospitalier n’élimine pas le besoin de soutien durant des interventions comme le prélèvement d’échantillons sanguins, les examens radiologiques ou l’examen physique. Par conséquent, l’assistance de l’inrmière durant la procédure d’admission a une importance décisive, même si l’enfant a été bien préparé pour cette expérience de l’hospitalisation (Aranha, Sams et Saldanha, 2017) FIGURE 13.3. Par ailleurs, consacrer ce temps à l’enfant donne à l’inrmière l’occasion d’évaluer la compréhension qu’a ce dernier des interventions à venir.

Collecte de données TABLEAU 13.5

Modes fonctionnels de santé : préparation à l’hospitalisation et au jour de l’admission

MODE FONCTIONNEL

QUESTIONS UTILES À POSER

Perception et gestion de la santé

• Pour les parents : – Quel est l’état de santé de votre enfant, généralement ? – Comment se sont déroulées ses hospitalisations précédentes ? – Avez-vous un médecin de famille ? – Pensez-vous que votre enfant est prédisposé aux accidents ? Si oui, expliquez. • Pour les enfants : – Pourquoi es-tu à l’hôpital ? – Peux-tu m’expliquer ce qui va se passer avant, pendant et après l’opération ou les tests ?

Gestion du stress

• Lorsqu’il est irrité ou fatigué, votre enfant réclame-t-il une personne ou un objet spécial ? • Si votre enfant a tendance à faire des crises, qu’est-ce qui les provoque et comment les désamorcez-vous ? • À qui votre enfant parle-t-il lorsque quelque chose l’inquiète ? • Comment votre enfant affronte-t-il les problèmes ou les déceptions ? • Y a-t-il eu de grands changements ou de gros problèmes dans votre famille récemment ? • Votre enfant a-t-il déjà eu des problèmes de drogue ou d’alcool, ou a-t-il déjà tenté de se suicider ?

Nutrition et métabolisme

• Quelles sont les heures de repas habituelles dans la famille ? • Quels sont les boissons, les collations et les aliments préférés de votre enfant ? • Quels aliments et boissons votre enfant déteste-t-il ? • Quelle est la quantité moyenne de nourriture ou la grosseur habituelle des portions qui lui sont servies ? • Votre enfant mange-t-il par lui-même, ou a-t-il besoin d’ustensiles ou d’appareils spéciaux (biberon, tasse, cuillère) ? • Comment votre enfant aime-t-il que la nourriture lui soit servie (réchauffée, froide, un aliment à la fois) ?

13

• Est-ce que le fait d’être malade a affecté l’appétit de votre enfant et, si oui, comment ? • Est-ce qu’un problème dentaire ou de gencives perturbe son alimentation ? Élimination

• Quelles sont les habitudes de votre enfant pour ses besoins personnels (porte des couches ; utilise les toilettes le jour seulement, ou le jour et la nuit ; se sert de la parole pour communiquer son besoin d’uriner ou de déféquer ; utilise un siège d’aisance pour enfants, utilise les toilettes ordinaires ; a d’autres routines) ? • À quelle fréquence votre enfant va-t-il à la selle ? • Avez-vous des sujets d’inquiétude concernant l’élimination (énurésie, constipation, diarrhée) ? • Avez-vous déjà remarqué si votre enfant transpire beaucoup ?

Activité et exercice

• Quel est l’horaire de votre enfant durant le jour (maternelle, garderie, école normale, activités parascolaires) ? • Quelles sont les activités favorites ou quels sont les jouets préférés de votre enfant ? • Quelles sont les émissions de télévision favorites de votre enfant ? • Votre enfant a-t-il une maladie ou une incapacité qui limite ses activités ? Si oui, comment ? • Quelles sont les habitudes de votre enfant pour le bain (horaire, bain ou douche, shampoing) ? • Votre enfant a-t-il besoin d’aide pour s’habiller ou faire sa toilette, par exemple, pour se peigner ? • Quelles sont les habitudes d’hygiène dentaire de votre enfant (brossage, soie dentaire, suppléments ou rinçages uorés, dentifrice préféré) ? • Quel est son horaire quotidien pour l’hygiène buccodentaire ? • Ces routines présentent-elles un problème quelconque (l’enfant n’aime pas se laver, se laver les cheveux ou se brosser les dents, ou il refuse de le faire) ? • Votre enfant a-t-il besoin d’appareils spéciaux dont l’utilisation nécessite une aide (lunettes, verres de contact, prothèse auditive, appareils orthodontiques, dispositifs d’élimination articielle, dispositifs orthopédiques) ?

Chapitre 13

Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation

535

TABLEAU 13.5

Modes fonctionnels de santé : préparation à l’hospitalisation et au jour de l’admission (suite)

MODE FONCTIONNEL

QUESTIONS UTILES À POSER

Autonomie

• L’inrmière peut utiliser les critères suivants pour évaluer le niveau d’autonomie des soins fonctionnels (p. ex., se nourrir, se laver, s’habiller ou aller aux toilettes) : – Procède à ses soins personnels de manière entièrement autonome. – A besoin d’utiliser un appareil ou un dispositif. – A besoin de l’aide ou de la supervision d’une autre personne. – A besoin de l’aide ou de lasupervision d’une autre personne, et doit utiliser un appareil ou un dispositif. – Est totalement dépendant et ne participe pas.

Sommeil et repos

• Quel est l’horaire de votre enfant pour les siestes et le coucher ? Quelle est la durée de ses siestes ? • Votre enfant a-t-il une routine spéciale avant d’aller dormir (biberon, verre d’eau, lecture d’un conte, veilleuse, couverture ou jouet favori, prières) ? • A-t-il une routine spéciale durant son sommeil, comme de s’éveiller pour aller aux toilettes ? • Dans quelle sorte de lit votre enfant a-t-il l’habitude de dormir ? • Est-ce que votre enfant dort avec quelqu’un (frère ou sœur, parent, autre personne) ou seul ? • Quelle est la position favorite de votre enfant pour dormir ? • A-t-il des problèmes de sommeil (endormissement, réveils nocturnes, cauchemars, somnambulisme) ? • A-t-il des problèmes pour se réveiller et se préparer le matin ?

Perception et concept de soi

• Comment décririez-vous votre enfant (p. ex., il est lent à s’adapter ; il s’installe facilement à son aise ; il est timide, amical, tranquille ; il parle beaucoup ; il est sérieux, enjoué, obstiné, facile à vivre) ? • Qu’est-ce qui peut susciter la colère, l’irritation, l’anxiété ou la tristesse chez votre enfant ? Qu’est-ce qui peut aider, dans ces cas-là ? • Quelles ont été les expériences de séparation vécues par votre enfant et comment réagit-il lorsqu’il est temporairement séparé de vous ? • Est-ce que votre enfant éprouve des peurs particulières (endroits, objets, animaux, personnes, situations) ? • Pensez-vous que la maladie de votre enfant a changé ce qu’il pense de lui-même (p. ex., se montre plus timide, semble gêné à cause de son apparence, est moins compétitif avec ses amis, reste davantage à la maison) ?

Rôle et relations sociales

• Est-ce que votre enfant a un surnom favori ? • Quels sont les noms des autres membres de la famille et des autres personnes qui vivent à la maison (parenté, amis, animaux de compagnie) ? • Qui prend habituellement soin de votre enfant durant le jour ? Et la nuit ? (En particulier, si c’est quelqu’un d’autre qu’un parent, comme une gardienne, un membre de la parenté, etc.) • Existe-t-il un contexte familial particulier (adoption, enfant en foyer d’accueil, beau-père ou belle-mère, divorce, famille monoparentale) ? • Y a-t-il eu des changements majeurs dans la famille récemment (décès, divorce, séparation, naissance d’un frère ou d’une sœur, perte d’emploi, difcultés nancières, retour au travail ou nouvelle carrière pour la mère, etc.) ? Veuillez décrire la réaction de votre enfant à cet événement. • Est-ce que votre enfant possède des objets sécurisants à la maison (suce, biberon, couverture, poupée ou animal en peluche) ? En avez-vous apporté à l’hôpital ? • Qui sont les compagnons de jeu de votre enfant ou de quels groupes sociaux se sent-il proche (pairs, enfants plus vieux ou plus jeunes, adultes, aucun) ? • Est-ce qu’en général les choses se passent bien pour votre enfant à l’école ou avec ses amis ? • Comment gérez-vous les problèmes de discipline à la maison ? Ces méthodes sont-elles toujours efcaces ? • Est-ce que votre enfant souffre d’un trouble qui interfère avec sa capacité à communiquer ? Si oui, comment est-il préférable de communiquer avec votre enfant ? • Quelles sont vos professions et quels sont vos horaires de travail ? • Est-ce que l’hospitalisation de votre enfant va avoir un effet sur les ressources nancières de votre famille ou sur les soins aux autres membres de la famille (p. ex., sur les autres enfants) ? • Qu’est-ce qui vous préoccupe concernant la maladie et l’hospitalisation de votre enfant ?

536

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

TABLEAU 13.5

Modes fonctionnels de santé : préparation à l’hospitalisation et au jour de l’admission (suite)

MODE FONCTIONNEL

QUESTIONS UTILES À POSER

Rôle et relations sociales (suite)

• Qui sera le plus souvent aux côtés de votre enfant durant son hospitalisation ? • Comment est-il possible de vous contacter, vous ou un autre membre de la famille proche, à l’extérieur de l’hôpital ? • Est-ce que des amis viendront visiter votre enfant à l’hôpital ?

Sexualité

• Pour les parents : – Est-ce que votre enfant a commencé sa puberté (développement des caractéristiques sexuelles physiques, menstruations) ? – Quel est le cycle menstruel de votre lle (fréquence, durée, importance du ux menstruel, symptômes associés) ? – Est-ce que vous ou votre enfant avez éprouvé des inquiétudes à ce sujet ? Comment avez-vous abordé la question de la sexualité avec votre enfant ? – Avez-vous besoin d’aide pour discuter de certains de ces sujets ? – Est-ce que la maladie de votre enfant affecte la façon dont il ou elle se sent en tant que garçon ou lle ? Si oui, comment ? – Avez-vous des préoccupations quant au comportement de votre enfant concernant la sexualité ou son besoin d’intimité ? • Pour les adolescents : – Parle-moi de ta vie sociale. – Qui sont tes amis les plus proches ? (Si une relation de caractère intime est évoquée, il est possible de poser des questions plus précises sur cette relation : combien de temps les deux adolescents passent-ils ensemble, est-ce qu’ils sont sérieux au sujet de cette relation, est-ce que la relation va dans le sens espéré par l’adolescent, etc.) – Quel est ton point de vue sur l’éducation sexuelle, sur l’importance d’avoir une relation privilégiée connue des autres, etc. ? (Ce type de questions permet d’aborder le sujet des relations amoureuses et sexuelles.) – Es-tu actif sexuellement ? (Cette question permet d’aborder l’utilisation d’une méthode contraceptive.)

Valeurs et croyances

• Quelles sont vos pratiques religieuses ou spirituelles ? • Quelle est l’importance de la religion ou de la spiritualité dans la vie de votre enfant ?

Cognition et perception

13

• Votre enfant a-t-il des problèmes auditifs ? • Est-ce que votre enfant a des problèmes de vision ? • Est-ce qu’il porte des verres correcteurs ou des lentilles cornéennes ? • Est-ce que votre enfant éprouve des difcultés d’apprentissage ? • Quel est le niveau scolaire de votre enfant ?

l’inrmière peut encourager la formation d’un groupe de soutien pour l’enfant. Trouver un compagnon de chambre compatible, par exemple, peut aider l’enfant à se faire un nouvel ami et à mieux se connaître.

clinique

Jugement

Lorsqu’un enfant est accueilli, l’inrmière suit plusieurs protocoles d’admission assez universels ENCADRÉ 13.5. L’attribution d’une chambre constitue une décision particulière en pédiatrie. Les considérations minimales à prendre en compte au moment d’assigner une chambre sont l’âge, le sexe, la nature de la maladie, la dimension de l’unité et le risque de contagion. Par exemple, le partage d’une chambre avec un enfant conné au lit en raison d’une traction peut être thérapeutique pour un autre enfant alité en raison d’une maladie grave. Regrouper les enfants d’un même groupe d’âge ou atteints de maladies semblables dans une même chambre peut se révéler avantageux pour les jeunes malades comme pour le personnel hospitalier dans l’organisation des soins, des repas ou des activités. Le regroupement par tranche d’âge, que s’efforcent de réaliser bien des hôpitaux, est particulièrement important pour les adolescents (SCP, 2008). Même si cela ne se produit pas toujours spontanément,

Procéder à l’examen physique Outre la collecte des données sur les antécédents au moment de l’admission, l’inrmière doit aussi effectuer un examen physique avant de planifier les soins. L ’examen p h ys i qu e Chapitre 13

Héloïse, une adolescente âgée de 15 ans, vient d’être opérée pour une appendicectomie. Pourquoi serait-il préférable qu’Héloïse partage sa chambre avec une lle de 12 ans ayant subi une réduction de fracture au fémur gauche plutôt qu’avec un garçon de 9 ans opéré lui aussi pour appendicectomie ? a) Le choix de la cohabitation est basé sur le regroupement par tranche d’âge. b) Elle pourrait plus facilement échanger avec une autre lle ayant été opérée, elle aussi. c) Héloïse discuterait plus facilement de préoccupations communes aux lles. d) On tente de placer ensemble les adolescents et les enfants d’âge prépubère selon le sexe.

Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation

537

Pratiques inrmières ENCADRÉ 13.5

Prendre en charge l’admission à l’hôpital

• Assigner une chambre en considérant l’âge développemental de l’enfant, la gravité du diagnostic, la contagiosité, la maladie et la durée prévue du séjour. • Préparer le ou les compagnons de chambre à l’arrivée du nouvel enfant. Dans le cas où les enfants sont trop jeunes pour bénécier de cette attention, préparer les parents. • Préparer la chambre de l’enfant. • Accueillir l’enfant et sa famille. • Mettre le bracelet d’identité au poignet ou à la cheville de l’enfant (poignet et cheville dans le cas des nourrissons). • Procéder à la collecte des données d’admission et à l’examen physique. • Prélever les échantillons nécessaires pour les analyses de laboratoire requises. • Présenter l’enfant et sa famille au compagnon de chambre et à ses parents

ALERTE CLINIQUE

Au moment de l’examen physique d’admission, il est important de ne pas dévêtir l’enfant avant qu’il se sente à l’aise dans son nouvel environnement. Une attitude trop expéditive peut être perturbatrice et nuire à l’établissement d’un lien de conance entre l’inrmière et l’enfant.

4 Plusieurs stratégies utiles à la communication avec l’adolescent sont présentées dans le chapitre 4, Examen clinique : anamnèse et examen physique.

538

Partie 5

si l’enfant partage sa chambre avec un autre enfant. • Expliquer les mécanismes de commande du lit, le fonctionnement de la cloche d’appel, les consignes d’utilisation du téléphone, etc. • Orienter l’enfant et la famille dans l’unité de soins et vers les autres services (cafétéria, salles de jeux, etc.). Mettre l’accent sur les zones donnant une image positive de l’unité pédiatrique. • Expliquer les règlements et les horaires de l’hôpital (p. ex., les heures de visite et celles des repas, certaines limitations), et la procédure de location (DVD, livres). • Remettre un document écrit résumant les informations importantes. Les parents, en état de stress au moment de l’admission, n’auront sans doute pas assimilé toutes les informations données par l’inrmière.

comporte des étapes précises à suivre, mais également des précautions à prendre pour favo­ riser son bon déroulement . L’inrmière doit tenir compte des renseignements qu’elle a recueil­ lis pour ensuite adapter la démarche de soins et le plan thérapeutique inrmier (PTI), puis communiquer ceux­ci aux autres membres du personnel.

13.4.2

Favoriser la gestion du stress

Soulager la douleur La prise en charge de la douleur est l’une des principales responsabilités qui incombent à l’in­ rmière au cours de l’hospitalisation et après une intervention chirurgicale. Il revient à l’inr­ mière d’évaluer régulièrement l’intensité de la douleur ressentie par l’enfant, de lui administrer l’analgésique nécessaire pour le soulager, de réé­ valuer l’efcacité du traitement et de l’inciter à coopérer aux soins postopératoires, qui pourront inclure la marche et des exercices de respiration profonde. Les analgésiques qui sont le plus souvent uti­ lisés sont ceux de la classe des opioïdes. Contrairement à l’administration d’analgésiques au besoin, l’administration systématique par voie intraveineuse selon un horaire bien précis, l’analgésie contrôlée par le patient (ACP) et les épidurales (en mode continu ou sous forme de

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

bolus) procurent une analgésie très satisfai­ sante chez les enfants qui ont subi une inter­ vention chirurgicale. Une recherche sur la douleur a permis de constater que parmi 3 822 enfants hospitalisés dans 8 hôpitaux pédiatriques canadiens, 78 % avaient eu au moins une expérience de douleur sur une période de 24 heures et que seulement le tiers de ces enfants avaient bénécié d’une interven­ tion contre la douleur (Stevens, Abbott, Yamada et al., 2011). Selon plusieurs études récentes, la plus grande cause de douleur exprimée par les enfants à la suite d’une hospitalisation est la douleur liée aux aiguilles. Certaines stratégies sont efcaces an de prévenir cette expérience douloureuse. La dis­ traction, le positionnement, le sucrose, l’allaite­ ment ainsi que l’utilisation de la crème anesthésiante sont fortement recommandés (Friedrichsdorf, Postier, Eull et al., 2015).

Établir une relation de conance avec l’enfant et ses parents L’enfant sera plus enclin à se montrer coopératif avec l’inrmière qui aura pris le temps de faire plus ample connaissance et d’établir une relation positive avec lui. Et si cette relation est basée sur la conance, il associera l’inrmière à des activi­ tés qui lui procurent davantage de plaisir et de bien­être que d’inconfort et de stress. Si l’inr­ mière aborde un enfant avec assurance et qu’elle lui fait sentir d’emblée qu’elle est convaincue d’être en mesure de gagner sa collaboration, leur interaction s’en trouvera facilitée. Les enfants sont capables de percevoir l’anxiété et l’hésitation chez les adultes, auquel cas ils se mettent à se débattre ou refusent d’obtempérer. Certes, l’inr­ mière n’arrivera pas toujours à prévenir de telles réactions, mais en adoptant une attitude conante et positive, elle réussira à sécuriser la plupart des enfants. Il importe de mentionner qu’il ne faut pré­ voir aucune intervention douloureuse au cours du premier entretien ; idéalement, il faut prendre le temps de faire connaissance avec l’enfant avant de passer à la description de l’in­ tervention prévue. La communication avec l’adolescent au cours des soins soulève des enjeux différents que l’inrmière se doit de connaître an d’établir une relation de conance avec lui 4 . L’hospitalisation est aussi un moment privi­ légié pour faire de l’enseignement. L’inrmière peut proter de ce moment pour valoriser la relation parent­enfant ; fournir de l’information sur les bonnes habitudes alimentaires, la disci­ pline et le développement normal de l’enfant ; ou se montrer attentive à toute autre préoccupa­ tion des parents.

13.4.3

Utiliser judicieusement la contention

Le recours à la contention (physique ou chimique) est susceptible de provoquer une détresse émotionnelle tant chez l’enfant que chez le parent, même si ces derniers y ont consenti. 1 . Selon la loi, l’utilisation de la contention doit rester exceptionnelle et servir uniquement lorsque cela permet d’éviter que la personne s’inige ou inige à autrui des blessures 14 . Quoique l’immobilisation temporaire puisse être nécessaire pour protéger l’intégrité physique et diminuer le risque de blessure (Linder, 2017), la plupart des restrictions physiques peuvent être évitées lorsque l’infirmière parvient à obtenir la coopération de l’enfant, le protégeant ainsi de conséquences psychologiques néfastes. Pour le jeune enfant, en particulier le nourrisson et le trottineur, préserver le contact parent-enfant est la meilleure méthode pour réduire le besoin de recourir à des dispositifs d’immobilisation (mitaines, planchette pour le bras pour protéger les intraveineuses, barrière de lit, etc.), et donc le stress qui en découle (Al-Abbass, Abdelkader, Shoqirat et al., 2016). Ainsi, l’examen physique peut être effectué presque entièrement pendant que l’enfant se trouve sur les genoux d’un parent, ce dernier l’entourant de ses bras pendant l’auscultation. Pour les procédures douloureuses, l’inrmière doit évaluer les préférences des parents : participer au soin, observer la manœuvre ou attendre en dehors de la pièce. Certains facteurs environnementaux peuvent également restreindre les mouvements. Garder l’enfant dans un berceau peut ne pas constituer une immobilisation concrète, mais cela limite certainement sa stimulation sensorielle. Augmenter sa mobilité en transportant l’enfant dans une poussette, un fauteuil roulant, un chariot ou une voiturette lui procure un sentiment de liberté. Il peut arriver que la restriction physique (p. ex., celle de l’enfant sous traction) ou l’isolement soit nécessaire en raison de l’état de santé. Garder au

repos un enfant normalement actif est difcile. Mettre l’accent sur des domaines où il peut continuer à exercer sa maîtrise et susciter son intérêt pour des activités tranquilles, notamment des passe-temps comme la construction de modèles réduits, le visionnement de vidéos appropriées pour son âge ou les jeux de société, l’aide à mieux s’adapter aux restrictions physiques.

13.4.4

Proposer des activités adaptées au stade de développement

La réduction au minimum de tout ce qui pourrait menacer le développement de l’enfant constitue un autre objectif des soins inrmiers à l’enfant hospitalisé. Bien des stratégies visant, par exemple, à atténuer l’angoisse de séparation ont été abordées jusqu’ici, et il se peut qu’elles soient sufsantes pour combler les besoins de l’enfant hospitalisé à court terme. Le risque de présenter un retard de développement ou même une régression est cependant plus élevé chez l’enfant qui vit une hospitalisation prolongée ou des hospitalisations répétées. Quoique la régression soit normale et prévisible dans tous les groupes d’âge, l’inrmière a la responsabilité d’encourager la croissance et le développement de l’enfant TABLEAU 13.6. Bien qu’elle dispose de peu de temps pour le jeu, elle doit être sensible à l’importance que cette activité revêt dans la vie de l’enfant et être en mesure d’y recourir judicieusement au moment des soins (Koukourikos, Tzeha, Pantelidou et al., 2015) ENCADRÉ 13.6. Lorsqu’elle fournit à l’enfant l’occasion de participer à des activités appropriées pour son âge en encourageant, par exemple, la poursuite des leçons scolaires durant l’hospitalisation, l’infirmière contribue à normaliser son environnement et à réduire ce qui peut interférer avec le stade du développement auquel il est parvenu.

CONSEIL CLINIQUE

Comme la respiration profonde est habituellement douloureuse après une intervention chirurgicale, l’inrmière doit veiller à ce que l’enfant reçoive des analgésiques. Elle peut aussi lui proposer de compresser le site opératoire thoracique ou abdominal en serrant contre lui un oreiller ou son animal en peluche préféré.

1 La notion de consentement est expliquée dans le chapitre 1, Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté.

13

14 Les différents types de contentions sont expliqués dans le chapitre 14, Techniques de soins.

Presque toutes les formes de jeu peuvent être utilisées pour distraire et amuser l’enfant, mais l’activité doit être sélectionnée en fonction de l’âge de ce dernier, de ses champs d’intérêt et de ses limitations. Par exemple, à 18 mois, le jeu du coucou aide l’enfant qui vient d’acquérir la notion de permanence de l’objet à Michaël est âgé de 10 mois. Il est hospitalisé pour prendre conscience que sa une bronchiolite, et son père est à son chevet. mère reviendra. Il est souvent Lorsque vous tentez de prendre l’enfant pour procépréférable de sélectionner der à une auscultation pulmonaire, il gesticule et des activités simples. L’enfant pleure. Quel serait le meilleur moyen à prendre malade n’a généralement pas pour favoriser la collaboration de l’enfant ? l’énergie et la concentration MAIS SI... nécessaires pour effectuer des activités plus exigeantes. Si Michaël était âgé de 14 mois, votre réponse D’autres considérations serait-elle la même ? influencent également le choix du type d’activité.

clinique

Jugement

L’inrmière doit aussi chercher à savoir si les parents préfèrent participer activement à l’intervention, jouer un simple rôle d’observateurs ou encore attendre dehors. De même, elle doit s’enquérir du souhait de l’enfant concernant la présence de ses parents à ses côtés ou non. Il est impératif de respecter la décision de l’enfant et celle des parents. Lorsque les parents désirent rester auprès de l’enfant, l’inrmière doit leur expliquer clairement l’intervention et leur indiquer comment ils peuvent contribuer à son bon déroulement. Si les parents préfèrent sortir de la pièce ou s’ils refusent de participer à l’intervention, l’inrmière doit respecter leur décision tout en les encourageant à ne pas trop s’éloigner pour qu’ils puissent rassurer l’enfant immédiatement après l’intervention.

Chapitre 13

Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation

539

TABLEAU 13.6

Exemples d’activités adaptées au stade de développement de l’enfant

ÂGE DE L’ENFANT

PARTICULARITÉS LIÉES AU DÉVELOPPEMENT

TYPE D’ACTIVITÉ ET DE JEU À PRIVILÉGIER

0-6 mois

Apprécie les couleurs vives et brillantes, et les différentes textures.

Hochets, mobiles, jeux de dentition, miroirs, jouets sonores, tapis d’éveil et jeux de stimulation tactile

6-18 mois

Développe une maîtrise de la préhension et un début de motricité.

Jouets à emboîter, à tirer ou de différentes textures, instruments de musique, ballon et livres d’images, cuillère, jeu de cache-cache, casse-tête en bois, marionnettes, bulles

18 mois-3 ans

Aime les jeux d’association et s’amuse à faire semblant.

Livres d’images, pâte à modeler, balle, livre à colorier avec crayons-feutres lavables, carré de sable, jeux d’eau

3-5 ans

Aime créer et s’inventer un monde.

Activités de bricolage (carton, ciseaux à bout rond, crayons et colle), pâte à modeler, tableau magnétique, bicyclette, déguisement, jeux d’imagination (ferme, garage, cuisinière), enregistrements et activités musicales, jeu « Jean dit », gros blocs de construction, casse-tête

6-12 ans

Manifeste un intérêt croissant pour les jeux compétitifs et coopératifs.

Jeux de société entre amis, jeux de cartes, tours de magie, collections d’objets, jeux de construction et lecture, jeux de mémoire, blocs de construction

13-19 ans

Apprécie les activités pour lesquelles il est entouré de ses pairs.

Discussion, écoute de musique, visionnement de lms, jeux vidéo

Source : Adapté de ChildFun (s.d.).

Il importe, par exemple, d’accorder une attention spéciale à l’enfant dont les mouvements sont limités ou dont l’un des membres est immobilisé, ou à celui qui se trouve en isolement.

13.4.5

Proposer des activités récréatives

De toutes les commodités offertes par l’hôpital, il est probable que la salle de jeux (ou la salle d’activités) est l’endroit le plus apaisant pour l’enfant FIGURE 13.4 . Les activités récréatives permettent à l’enfant de se distancier temporairement de sa maladie, de l’hospitalisation et des agents stressants qui y sont associés. La salle de jeu devrait constituer un refuge pour l’enfant et rester libre de toute intervention médicale ou infirmière (y compris l’administration de médicaments). Le risque de transmission d’une

540

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

FIGURE 13.4 Pour occuper son temps, l’enfant aime avoir des projets à réaliser avec d’autres enfants hospitalisés.

infection peut toutefois interférer avec la possibilité pour l’enfant d’avoir accès à des jouets fournis par l’hôpital ou d’aller dans une salle de jeux. Idéalement, pour répondre aux besoins particuliers des adolescents, il est préférable de mettre en place des unités spéciques, en retrait des unités pédiatriques générales, procurant une certaine intimité et rendant possibles une plus grande socialisation ainsi qu’un horaire approprié d’activités pour ce groupe d’âge (Blake, 2015). Par ailleurs, lorsque des adolescents doivent partager avec des enfants plus jeunes une pièce commune pour les activités, appeler la zone qu’ils occupent salle d’activités plutôt que salle de jeux la rend plus attrayante à leurs yeux et les incite davantage à s’y rendre pour se distraire. Lorsque l’hospitalisation est de longue durée, le jeune aime personnaliser sa chambre d’hôpital pour se sentir chez lui en décorant les murs d’afches et de cartes, en réaménageant la disposition des meubles lorsque c’est possible et en exposant une collection ou les œuvres qu’il a produites au cours d’une activité. Tous les jouets apportés à l’hôpital doivent être examinés an de vérier qu’ils sont sécuritaires. Les critères à considérer quant au type de jouet qu’il est préférable d’apporter sont la résistance de ses matériaux et son aspect sécuritaire pour l’enfant, son caractère peu bruyant, la facilité à le nettoyer et le nombre limité de pièces. Il est conseillé aux parents de placer une étiquette sur le jouet indiquant le nom de son propriétaire. L’enfant apprécie aussi les articles familiers provenant de la maison, en particulier des photographies, une radio, un jouet ou un jeu favori, de même que ses propres vêtements. Parmi les autres surprises que les proches peuvent apporter

Pratiques inrmières ENCADRÉ 13.6

Faciliter les interventions inrmières grâce à des activités ludiques

AUGMENTER L’APPORT EN LIQUIDE

• Laver les poupées ou les jouets.

• Préparer des sucettes glacées avec le jus préféré de l’enfant.

• Pendant les séances de bain ou d’immersion du membre dans l’eau, faire la lecture à l’enfant, chanter.

• Utiliser des petits gobelets pour les médicaments ; décorer les gobelets. • Créer une afche des progrès ; remettre des récompenses (autocollants) lorsque l’enfant boit la quantité xée à l’avance. PROPOSER DES EXERCICES RESPIRATOIRES

• Faire faire des bulles avec du liquide à bulles ; utiliser un vire-vent. • Organiser un concours pour savoir qui soufe le plus fort, par exemple sur des tampons d’ouate, des plumes, des balles de ping-pong, etc. • Demander d’aspirer du papier ou un tissu avec une paille pour les faire passer d’un contenant à un autre.

a

FACILITER LES INJECTIONS

• Laisser l’enfant manipuler la seringue, la ole et le tampon d’alcool ; le laisser administrer une injection à une poupée ou à une peluche. STIMULER LA MARCHE

• Donner à l’enfant quelque chose à pousser ou à tirer. • Danser avec lui sur de la musique.

STIMULER L’AMPLITUDE ARTICULAIRE

STIMULER L’ENFANT DURANT UNE PÉRIODE DE CONFINEMENT (TRACTION, ISOLEMENT EN RAISON D’UNE INFECTION)

• Toucher ou pousser des ballons tenus ou suspendus dans différentes positions. (Si l’enfant est en traction, accrocher le ballon sur un trapèze.)

• Utiliser un appareil radio, un lecteur DVD, des jeux électroniques et une télévision – inclus dans l’équipement de la plupart des chambres d’hôpital – pour distraire l’enfant.

• Jouer à « chatouille pieds » ; remuer les orteils sur demande. • Proposer à l’enfant de l’argile ou de la pâte à modeler pour qu’il se serve de ses doigts.

• Se servir d’un ordinateur avec accès à Internet pour offrir des distractions et des occasions d’apprendre, ou donner accès à des groupes de soutien en ligne.

FAVORISER LE TREMPAGE PAR IMMERSION D’UN MEMBRE OU DU CORPS (SOINS DE PLAIES, BRÛLURES)

• Connement au lit : déplacer le lit vers une salle de jeux, dans le couloir ou à l’extérieur.

• Encourager les jeux avec des jouets ou des objetsa (gobelets, seringues, porte-savons) dans l’eau.

• Isolement en raison d’une infection : s’assurer que l’enfant a un accès visuel et auditif à ce qui se passe à l’extérieur de sa chambre.

Les petits objets comme les billes ou les pièces d’un format réduit de même que les gants ou les ballons sont dangereux pour les jeunes enfants à cause du risque d’aspiration. Les produits en latex sont aussi associés à un risque de réaction allergique.

de la maison et que les enfants affectionnent particulièrement figurent les enregistrements audio ou sur DVD de membres de la famille lisant une histoire, chantant une chanson, récitant des prières avant le coucher, racontant les événements de la journée ou faisant une promenade parlante en parcourant la maison. Les enregistrements peuvent être écoutés ou visionnés dans les moments de solitude, comme au réveil ou avant le coucher.

que l’infirmière lui ait proposé un choix, puisqu’il est très probable que cet enfant n’a eu que peu de décisions à prendre ce jour-là.

Bien des enfants d’âge scolaire ont un objet particulier auquel ils se sont spécialement attachés au début de l’enfance. Ces objets chers ou transitoires peuvent les aider à se sentir plus à l’aise dans un environnement étranger. Jouer donne à l’enfant un sentiment de maîtrise sur son environnement, ce qu’il éprouve rarement à l’hôpital, où la plupart des décisions sont prises pour lui FIGURE 13.5 et ENCADRÉ 13.7. Même si un enfant refuse de participer à une activité donnée, il est tout de même important

ALERTE CLINIQUE

Pour des raisons de sécurité, seuls les ballons Mylarmd (métallisés et remplis d’hélium) sont autorisés dans les unités de pédiatrie. Les ballons en caoutchouc ou en latex peuvent causer le décès de l’enfant, qui est porté à mettre dans sa bouche les morceaux éclatés.

FIGURE 13.5 Les bénévoles, les éducateurs et les clowns assurent une présence divertissante pour nombre d’enfants. Chapitre 13

Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation

541

13

ENCADRÉ 13.7

Utilité du jeu pour l’enfant hospitalisé

• Fournit une distraction et entraîne la relaxation. • Aide l’enfant à se sentir plus en sécurité dans un environnement qui lui est étranger. • Renforce l’estime de soi. • Réduit le stress de la séparation, le sentiment d’ennui et l’anxiété. • Fournit un moyen de découvrir son corps, ses limites, et d’exprimer ses désirs ou ses frustrations. • Diminue la douleur et la peur liées aux procédures douloureuses.

• Encourage l’interaction et la socialisation. • Prépare l’enfant de façon efcace à une intervention. • Fournit un moyen d’exprimer ses idées et ses champs d’intérêt. • Favorise le développement global de l’enfant. • Constitue un moyen pour atteindre des objectifs thérapeutiques durant un traitement. • Place l’enfant dans un rôle actif tout en lui procurant l’occasion de faire des choix et d’exercer sa maîtrise sur son environnement.

Source : Adapté de Al-Yateem et Rossiter (2017).

13.4.6

Maintenir la routine de l’enfant

Établir un horaire Les modications de l’horaire quotidien et la perte des rituels sont des éléments particulièrement stressants pour le trottineur ou l’enfant d’âge préscolaire, et elles sont un aspect souvent négligé. Plusieurs enfants dorment moins longtemps à l’hôpital qu’à la maison, principalement à cause d’un endormissement retardé et de la n prématurée du sommeil en raison des routines hospitalières. Non seulement les heures de sommeil sont perturbées, mais la période de veille est parfois consacrée à des activités passives qui peuvent retarder l’endormissement. Une stratégie susceptible de réduire la perturbation de la routine de l’enfant consiste à établir un horaire quotidien et un horaire hebdomadaire. Cette méthode est surtout appropriée pour l’enfant d’âge scolaire ou l’adolescent qui n’est pas gravement malade et qui maîtrise le concept du temps. Cet emploi du temps doit intégrer la liste des activités quotidiennes de l’enfant de façon à inclure toutes les activités qui sont importantes à la fois pour lui et pour l’inrmière, comme les traitements, le travail scolaire, l’exercice et les passe-temps. Ensemble, l’inrmière, le parent et l’enfant peuvent donc planier par écrit un horaire quotidien ou hebdomadaire qui sera afché dans la chambre de l’enfant FIGURE 13.6. Une horloge devrait aussi être mise à la disposition de ce dernier.

Assurer le service scolaire en milieu hospitalier L’école fait partie intégrante du processus de développement de l’enfant d’âge scolaire et de

542

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

l’adolescent. En plus de contribuer au développement intellectuel de l’enfant, elle lui offre un milieu qui lui permet d’établir des relations avec ses pairs, favorisant ainsi l’acquisition de compétences sociales et un sentiment d’appartenance à un groupe. Or, l’hospitalisation, en particulier lorsqu’elle est de longue durée ou qu’elle est récurrente, prive l’enfant de ce milieu de vie et de ses avantages. C’est pourquoi, dans les unités de pédiatrie, des services éducatifs sont offerts durant la période scolaire. Les enfants des niveaux primaire et secondaire dont l’hospitalisation dure plus d’une semaine, ou qui est répétitive, peuvent se prévaloir de ce service gratuit. Le service scolaire en milieu hospitalier est planié en prenant en considération l’état de santé et le plan thérapeutique de l’enfant ou de l’adolescent : les rencontres avec un professeur durent de 30 à 60 minutes environ. Il faut obtenir au préalable l’autorisation des parents, puis communiquer avec un enseignant an d’offrir, selon le programme, des activités pédagogiques adaptées. Les parents peuvent aussi s’enquérir des travaux et des exercices faits dans la classe de l’enfant et les coner au professeur de l’hôpital. Ainsi, quand l’enfant ira mieux, le retour à la vie normale se fera plus facilement.

13.4.7

Favoriser l’expression des sentiments

Les enfants doivent pouvoir donner libre cours à leurs émotions et à leurs sentiments, et être en mesure d’exprimer, par exemple, la colère, l’anxiété, la peur ou la frustration. Il est tout à fait normal qu’un enfant décide de se rebeller parce qu’il est frustré ou parce qu’il cherche à fuir une situation stressante. À défaut d’avoir un vocabulaire exhaustif, l’enfant se sert principalement de son comportement à la fois comme moyen d’expression et comme mécanisme d’adaptation. Comme cela a été expliqué précédemment, le jeu peut offrir un bon

FIGURE 13.6 La structuration du temps est une stratégie efcace pour normaliser l’environnement hospitalier et accroître chez l’enfant le sentiment de maîtrise.

moyen pour dissiper tout malentendu et permettre à l’enfant de verbaliser ses sentiments avant ou après une intervention. La libération des tensions peut être facilitée en recourant à n’importe quelle activité, ou presque FIGURE 13.7. Chez le jeune enfant en soins ambulatoires, une activité faisant appel aux grands muscles, par exemple l’usage d’un tricycle ou d’une voiturette, sera particulièrement bénéque. Les jeux ou les activités consistant à cogner ou à lancer quelque chose sont aussi très utiles pour mieux surmonter une forte dose d’agressivité en toute sécurité. Les marionnettes, souvent utilisées pour la préparation de techniques invasives et pour l’éducation, sont un moyen de communication efcace avec les enfants. La plupart d’entre eux les perçoivent comme des pairs et tendent à communiquer immédiatement avec elles (Reid-Searl, Quinney, Dwyer et al., 2017). L’enfant conera à la marionnette des sentiments qu’il hésite à exprimer aux adultes.

13.4.8

Soutenir les membres de la famille

Soutenir les parents suppose d’avoir la volonté de rester à leurs côtés et d’écouter leurs messages verbaux et non verbaux (Hagvall, Ehnfors et Anderzén-Carlsson, 2016). L’inrmière ne donne pas toujours ce soutien de façon directe. Ainsi, elle peut offrir de rester avec l’enfant an de laisser aux parents du temps pour être seuls ; elle peut aussi discuter avec d’autres membres de la famille du besoin qu’ont les parents d’un répit additionnel. Souvent, la parenté et les amis veulent aider, mais ne savent pas comment. Suggérer différents moyens d’apporter une aide, comme le gardiennage, la préparation des repas, l’exécution de tâches telles que le lavage ou le transport des autres enfants à l’école, peut amener d’autres personnes à contribuer à réduire le fardeau des responsabilités des parents.

Écoute Une étude sur l’expérience vécue par les parents à la suite de l’hospitalisation de leur enfant fait

CONSEIL CLINIQUE

Les séances de jeu improvisées spontanément au chevet de l’enfant ne font pas perdre de temps à l’inrmière. En conservant dans sa poche de petits objets comme des autocollants, des marionnettes à doigts ou un petit acon de liquide à bulles, elle aura toujours à portée de main de quoi faire jouer l’enfant.

Spiritualité et culture Le soutien peut également provenir de la religion. Les parents qui ont de profondes convictions peuvent apprécier les conseils d’un membre de leur communauté religieuse. L’inrmière peut impliquer les membres du service spirituel et apporter son soutien aux parents en respectant le sens et la signication personnelle de leurs croyances Christian est âgé de trois ans. Vous devez effectuer (Nascimento, Alvarenga, une ponction capillaire à l’un de ses doigts, mais Caldeira et al., 2016). l’enfant crie et vous adresse des gros mots. Quelle Le soutien suppose l’acstratégie pouvez-vous utiliser an d’obtenir la ceptation des valeurs cultucollaboration de Christian avant d’effectuer relles, socioéconomiques et la ponction capillaire ? ethniques. Par exemple, divers groupes ethniques ont des dénitions différentes de ce que sont la santé 2 et la maladie. Pour certains, un trouble présentant Les enjeux découlant de peu de manifestations extérieures, comme le diala culture et l’importance bète, l’hypertension ou les problèmes cardiaques, qu’ils peuvent avoir dans n’est pas considéré comme une maladie. En conséles soins sont abordés dans quence, suivre le traitement prescrit peut être le chapitre 2, Inuences perçu comme n’étant pas nécessaire. L’inrmière socioculturelles sur les qui sait évaluer l’inuence de la culture est plus soins de santé. susceptible d’être en mesure d’intervenir de façon thérapeutique 2 .

clinique

Jugement

FIGURE 13.7 Dessiner et peindre sont d’excellents moyens d’expression.

ressortir le besoin qu’ont les familles de raconter leur histoire (Ha, 2007). Parmi les soins offerts pour leur enfant, ce dont elles sont le moins satisfaites est le manque d’écoute à leur égard. Quand l’occasion leur est donnée de s’exprimer, il est fréquent que les parents dévoilent leur sentiment de perte de maîtrise, de même que leur colère et leur culpabilité. Souvent, ils hésitent à admettre de tels sentiments, car ils s’attendent à ce que leur réaction soit désapprouvée par les autres. Le contact avec un groupe de soutien permanent peut être un moyen efcace pour aider les parents à partager leurs émotions et leurs inquiétudes en rapport avec l’hospitalisation de leur enfant (Hall, Ryan, Beatty et al., 2015).

Confort Une participation importante aux soins de leur enfant hospitalisé fait en sorte que les parents négligent parfois leurs propres besoins de sommeil, d’alimentation et de relaxation. Ils ne disposent souvent pour dormir que d’un fauteuil, et leur sommeil est interrompu par les interventions inrmières (Bloomberg, 2017). Toutefois, les nouvelles installations viennent répondre à ce besoin. Les chambres sont parfois plus adaptées au confort des parents grâce à la présence d’un lit, d’une toilette ou d’une douche. Lorsque l’inrmière parvient à rassurer les parents sur la présence vigilante du personnel soignant auprès de leur enfant, ceux-ci sont plus enclins à s’absenter pour de brèves périodes. An d’améliorer le confort des parents, Chapitre 13

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les familles considèrent souvent le manque d’écoute à leur égard comme la principale source d’insatisfaction dans les soins offerts lors de l’hospitalisation de leur enfant.

Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation

543

13

Jugement

clinique

il est possible de planier un horaire de visites alternées Julienne est âgée de 18 mois. Son père se prépare avec un autre membre de la à quitter l’unité de soins pédiatriques pour la famille. Certaines institutions soirée. Au moment de la séparation, la llette pédiatriques permettent aux s’accroche aux vêtements de son père et pleure parents de dormir dans une beaucoup. Serait-ce bon d’encourager le père à salle de l’unité où se trouve partir malgré les pleurs de son enfant ? Justiez leur enfant et, dans les nouvotre réponse. veaux établissements, les chambres sont même organisées de manière à permettre aux parents de s’y installer. Sinon, plusieurs hôpitaux ont des listes de lieux d’hébergement peu coûteux et situés à proximité, ce qui favorise les visites fréquentes tout en permettant aux parents de proter d’un endroit paisible pour dormir.

appel à l’aide et au soutien de parents dont les enfants antérieurement hospitalisés ont guéri. Même si chaque enfant réagit différemment à la maladie, aux traitements et aux soins, les discussions de groupe, en plus de permettre la libération des émotions, favorisent la compréhension et l’acceptation de la maladie (Hall et al., 2015).

Soutien psychologique

3. sur les réactions affectives probables des membres de la famille en réaction à la crise que constitue la maladie.

Les parents peuvent avoir besoin d’aide pour accepter leurs propres sentiments à l’égard de l’enfant malade. L’inrmière doit se préoccuper de leurs inquiétudes et les aider à explorer leurs sentiments ou à déterminer les raisons spéciques qui ont conduit à de tels sentiments. L’inrmière peut aussi réduire le fardeau psychologique des parents en mettant l’accent sur le fait que ces sentiments constituent une saine réponse au stress et qu’ils sont à la fois normaux et prévisibles (Foster, Young, Mitchell et al., 2017).

Besoins des frères et sœurs Les soins centrés sur la famille couvrent également les besoins des frères et sœurs. Le soutien peut concerner la préparation des frères et sœurs aux visites à l’hôpital ainsi que l’évaluation de leur adaptation en prévoyant, au besoin, des interventions appropriées ou une orientation vers les ressources nécessaires. L’inrmière doit aussi préparer les parents aux réactions des frères et sœurs, notamment à leur colère, à leur jalousie ou à leur ressentiment. Les frères et sœurs plus âgés peuvent nier avoir de telles réactions parce qu’elles provoquent chez eux des sentiments de culpabilité. Tout le monde a cependant besoin d’extérioriser ses émotions, et les sentiments réprimés peuvent refaire surface sous la forme de problèmes survenant à l’école ou avec des amis du même âge, ou encore par des maladies psychosomatiques ou des comportements délinquants (Lizasoain, 2015). CE QU’IL FAUT RETENIR

Bien des parents s’imaginent que l’enfant pleure pendant des heures après leur départ, alors qu’en réalité, après avoir pleuré quelques minutes, il peut se calmer lorsqu’il est réconforté.

544

Partie 5

Rencontre avec d’autres parents Au cours de l’hospitalisation, les parents peuvent être amenés à créer des liens avec un nouveau groupe social constitué d’autres parents rencontrant des problèmes similaires. Les parents ont plusieurs occasions de se côtoyer durant l’hospitalisation ou à la clinique (salles d’attente, corridors, etc.) et de discuter de la maladie et des traitements de leur enfant. L’inrmière peut aussi les diriger vers des groupes organisés ou faire

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

13.4.9

Fournir de l’information

Une autre intervention infirmière importante consiste à fournir aux familles de l’information : 1. sur la maladie, son traitement, son pronostic et sur les soins à domicile ; 2. sur les réactions psychologiques et physiques de l’enfant à la maladie et à l’hospitalisation ;

Réaction de l’enfant pendant et après l’hospitalisation Pour bien des familles, la maladie de l’enfant entraîne une première expérience de l’hôpital. Souvent, les parents ne sont pas préparés aux réactions de l’enfant, comme les comportements de séparation, la régression, l’agressivité et l’hostilité. Proposer de l’information sur ces réactions normales et prévisibles peut réduire l’anxiété des parents. L’inrmière doit demeurer consciente que bien des parents souffrent de l’hospitalisation de leur enfant, et que leur manque de familiarité avec les règles hospitalières a souvent pour effet d’amplier leur confusion et leur anxiété (Franck, Wray, Gay, et al., 2015). Les explications fournies aux parents doivent tenir compte de leur réalité. Il est aussi nécessaire d’aider les parents à comprendre la signication des comportements posthospitalisation de leur l’enfant malade an qu’ils soient en mesure de le soutenir et de tolérer des comportements inhabituels ou leur semblant exagérés ENCADRÉ 13.3. Les parents peuvent considérer, à tort, des réactions qui leur semblent inappropriées comme autant de preuves que l’enfant est trop gâté, et exiger une tout autre conduite à un moment où l’enfant réagit encore au stress de la maladie et de l’hospitalisation. Lorsque ces comportements, en particulier la demande constante d’attention, sont gérés de façon appropriée, la plupart des enfants les abandonnent et reviennent au niveau de fonctionnement qui était le leur avant la crise. L’inrmière peut convenir avec les parents d’un moment propice pour les contacter an de leur résumer la manière dont l’enfant a réagi après leur départ.

Communication avec les sœurs et frères La transmission d’informations aux frères et sœurs peut parfois être négligée, puisque certains parents

ou professionnels de la santé préfèrent ne pas partager des nouvelles graves ou stressantes qui pourraient les inquiéter. Toutefois, il a été démontré que les enfants de tous les groupes d’âge qui recevaient des explications sur la maladie en cours d’hospitalisation et sur le pronostic de leur frère ou de leur sœur, et ce, de façon constante, voyaient leur niveau d’anxiété diminuer (Kuo et Kent, 2017). Même si les mots exacts peuvent varier, les explications doivent répondre à des inquiétudes telles que les suivantes : 1) Est-ce que je vais être malade et devoir aller moi aussi à l’hôpital ? ; 2) Est-ce que je suis la cause de cette maladie (pour des raisons réalistes ou imaginaires) ? ; 3) Est-ce que mes parents vont m’abandonner si mon frère ou ma sœur ne guérit pas ? Si les parents ou l’infirmière répondent à ces trois questions, les craintes les plus fréquentes des frères et sœurs – maladie, sentiment de culpabilité et peur de l’abandon – seront réduites. Les parents doivent également rester conscients des effets de la maladie sur la famille et adopter des stratégies susceptibles de prévenir les changements négatifs. En gardant la famille bien informée, en communiquant le plus possible avec chacun de ses membres et en traitant tous les enfants également et aussi normalement qu’avant la maladie, ils contribueront à diminuer les effets négatifs de la maladie.

13.4.10 Planier le congé de l’hôpital et les soins à domicile Tout au long de l’hospitalisation, l’inrmière doit rester consciente de la nécessité d’une bonne planication du congé ainsi que des facteurs qui pourraient affecter la capacité de la famille à fournir les soins à domicile. Une collecte des données complète sur la famille et son environnement permet d’évaluer si les ressources psychologiques et matérielles lui seront sufsantes pour gérer les tâches qu’exigent les soins à domicile 1 . En plus de s’assurer que les ressources familiales sont adéquates, il est nécessaire d’examiner quels sont les services communautaires disponibles, notamment les services de répit et les groupes de soutien, pour avoir la certitude que les parents auront accès aux services de soutien appropriés. La collaboration avec les autres intervenants est parfois nécessaire an d’assurer la prestation de soins adéquats après l’hospitalisation (p. ex., l’établissement d’une diète spéciale, l’application d’une recommandation à la suite d’une intervention chirurgicale, la mise en place d’une surveillance, l’observation de signes de détérioration de l’état, les soins des plaies, etc.). Si l’enfant requiert des soins complexes, la planication du congé doit aussi se concentrer sur l’obtention de l’équipement approprié et sur la participation des professionnels de soins à

domicile. La planication du congé couvre également les traitements que les parents ou l’enfant devront poursuivre à la maison. La famille sur qui repose entièrement ou en partie la responsabilité des soins à domicile doit être formée an de pouvoir fournir les soins requis. Une période d’essai à l’hôpital durant laquelle les parents fournissent tous les soins à l’enfant est généralement bénéque. Même si l’état de l’enfant ne requiert pas de suivi à domicile, toutes les familles ont besoin de recevoir, avant le congé de l’hôpital, l’enseignement nécessaire à la bonne prise en charge des traitements, ainsi que des instructions écrites détaillées concernant les soins à domicile et comprenant le nom des personnes-ressources, les services et les numéros de téléphone à composer pour obtenir de l’aide (Leyenaar, O’Brien, Leslie et al., 2017). La communication entre l’inrmière qui gère la planication du congé et les personnes qui fournissent les soins de santé à domicile est essentielle an d’assurer une transition en douceur pour l’enfant et sa famille. L’inrmière met la famille en contact avec le centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) et le service de consultation externe, et lui fournit les références qui peuvent lui être utiles. Ces références font état des ressources du milieu et de l’aide que la famille est en mesure d’y trouver. Une visite ou un appel téléphonique de l’inrmière du CISSS chargée du suivi à domicile rassurera aussi les parents sur le fonctionnement de la prestation des soins à domicile. Il leur sera ainsi possible de recevoir de l’information dans un contexte d’apprentissage peut-être moins stressant que celui de l’hôpital. Au moment de transmettre un dossier à des services externes, il est essentiel de faire part aux personnes responsables du suivi des questions importantes entourant les besoins de l’enfant et de sa famille. Le résumé de la situation et de l’état de santé doit être concis, spécique et factuel. Il est primordial que l’inrmière respecte la Loi sur les services de santé et les services sociaux lorsqu’elle communique des renseignements à une tierce personne. « Le dossier d’un usager est condentiel et nul ne peut y avoir accès, si ce n’est avec le consentement de l’usager ou de la personne pouvant donner un consentement en son nom » (RLRQ, chapitre S-4.2, art. 19).

CONSEIL CLINIQUE

Si l’équipement utilisé pour les soins à domicile est différent de celui qui se trouve à l’hôpital, il devrait d’abord être livré à l’hôpital an de permettre à la famille d’apprendre à l’utiliser de façon appropriée avant le congé. Lorsque la famille maîtrise les procédures, l’enregistrement de sa performance sur vidéo permet qu’aucun des détails ne soit oublié. L’apprentissage par l’exemple ou l’imitation aide aussi les personnes analphabètes, ou celles qui ne parlent pas couramment le français ou l’anglais.

13

1 Les soins à domicile sont abordés dans le chapitre 1, Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté.

Dans le cas des personnes mineures de moins de 14 ans, le titulaire de l’autorité parentale peut donner son consentement au transfert de l’information. Le consentement à la communication de renseignements personnels doit aussi être obtenu lorsque d’autres professionnels du milieu de vie de l’enfant (éducatrice de la garderie, inrmière scolaire, physiothérapeute, psychologue, travailleur social) sont mis à contribution dans le plan de traitement. Chapitre 13

Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation

545

13.5

Jugement

clinique Mylène est âgée de huit ans. Elle subira demain une opération au genou. Tandis que vous la préparez pour son intervention, elle pose beaucoup de questions tout en collaborant activement. Comment expliquez-vous ses nombreuses questions ?

Interventions inrmières liées aux interventions diagnostiques et thérapeutiques

Les avancées technologiques ainsi que les nombreux changements dans le système de santé ont fait en sorte que plusieurs procédures et interventions pédiatriques sont pratiquées dans de nouveaux contextes. Ces procédures entraînent un niveau de stress et de douleur plus grand chez les enfants. La préparation psychologique à l’hospitalisation est donc aussi importante que la préparation physique.

13.5.1

Préparer l’enfant aux interventions

La préparation psychologique des enfants aux interventions médicales comporte de nombreux avantages : elle diminue leur anxiété, favorise leur coopération, renforce leur capacité d’adaptation en contribuant parfois à l’apprentissage de nouvelles techniques d’adaptation, et les aide à se sentir moins vulnérables dans une situation qui pourrait être stressante. En conséquence, nombre d’établissements hospitaliers ont mis en place des programmes éducatifs préparatoires à

l’hospitalisation. Ces programmes sont destinés à fournir aux enfants et à leurs proches de l’information sur l’intervention qui va être réalisée (souvent sous forme de brochures d’information ou d’applications Web telles que « Ma première chirurgie »). Ils donnent aussi une description sommaire des lieux et des services dans lesquels les enfants sont susceptibles de se rendre, et leur permettent de visiter ces lieux et de se familiariser avec l’équipement médical (Silva, Austregésilo, Ithamar et al., 2017). L’ENCADRÉ 13.8 présente les pratiques inrmières en vue de la préparation générale des enfants aux interventions, tandis que l’ENCADRÉ 13.9 propose des pratiques adaptées aux étapes de développement. Ces dernières prennent en compte les facultés cognitives des enfants et leurs besoins selon leur stade de développement. L’inrmière ne doit pas se fonder uniquement sur ces recommandations : elle doit aussi tenir compte du tempérament de l’enfant, de sa capacité d’adaptation et de son expérience. Selon la capacité d’adaptation de l’enfant, le rôle de l’inrmière peut consister simplement à consolider les techniques qu’il connaît déjà ou à expliquer plus longuement des techniques d’adaptation simples (relaxation, respiration, décompte, maintien d’un contact physique avec un adulte, chant).

Pratiques inrmières ENCADRÉ 13.8

Assurer la préparation générale de l’enfant aux interventions

• Préciser les détails de l’intervention particulière qui sera effectuée. • Baser les instructions sur l’âge développemental et les connaissances préalables. • Faire participer les parents à l’enseignement, s’ils le souhaitent, en particulier s’ils entendent contribuer aux soins. • Expliquer aux parents en quoi peut consister leur rôle de soutien pendant l’intervention : par exemple, se tenir près de la tête de l’enfant ou dans son champ de vision en lui parlant doucement.

restera intacte (p. ex., après une amygdalectomie, préciser que l’enfant pourra encore parler). • Évoquer les aspects sensoriels de l’intervention (ce que l’enfant sentira, verra, entendra, touchera et ressentira) et ce qu’il pourra faire pendant l’intervention (p. ex., rester allongé, compter les nuages, serrer une main, serrer une poupée).

• Prévoir des séances d’information courtes mais fréquentes pour éviter la surcharge d’information et permettre une rétroaction adéquate.

• Permettre à l’enfant de s’exercer à faire ce qui lui sera demandé avant les interventions qui impliquent sa coopération (p. ex., se retourner, prendre une inspiration profonde, effectuer un test de spirométrie qui stimule le mouvement respiratoire).

• Se servir des mots adéquats en tenant compte du niveau de compréhension de l’enfant et en optant pour des termes concrets plutôt qu’abstraits.

• Aborder l’information anxiogène en dernier lieu (p. ex., amorcer une intraveineuse).

• Éviter les mots et les phrases à double sens, et expliquer tous les mots inconnus.

• Se montrer honnête avec l’enfant en ce qui concerne les aspects déplaisants de l’intervention, en évitant de susciter des inquiétudes inutiles. Lorsque l’inrmière discute des aspects inconfortables d’une intervention, elle doit se rappeler que chaque personne réagit différemment.

• Utiliser des outils visuels pour décrire l’intervention. Par exemple, dessiner sommairement un garçon ou une lle en indiquant les parties du corps visées par l’intervention. Les modèles illustrés ne doivent pas être intimidants, mais ils doivent rester réalistes. • Insister sur le fait qu’aucune autre partie du corps ne sera touchée. • Si la partie du corps est associée à une fonction précise, souligner le changement qui résultera de l’intervention ou le fait que cette fonction

546

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

• Mettre l’accent sur la n de l’intervention et sur tous les événements agréables qui surviendront ensuite (p. ex., rentrer à la maison, voir ses parents). • Souligner les bienfaits de l’intervention (p. ex., « Une fois que tes amygdales seront guéries, tu n’auras plus mal à la gorge »). • Passer en revue ce que les parents et l’enfant ont compris.

Pratiques inrmières ENCADRÉ 13.9

Préparer l’enfant aux interventions selon son stade de développement

NOURRISSON : FAVORISER LA CONFIANCE ET LA PENSÉE SENSORIMOTRICE

Animisme

Attachement au parent

• Tenir les objets effrayants hors de la vue des jeunes enfants, car ceux-ci ont tendance à croire que les objets sont animés et qu’ils peuvent leur faire du mal.

• Laisser le parent prendre part à l’intervention s’il le souhaite. • Garder le parent dans le champ de vision de l’enfant.

Habiletés de langage limitées

• Placer un objet familier près de l’enfant (p. ex., une peluche) lorsque le parent n’est pas en mesure de rester avec le nourrisson.

• S’exprimer en utilisant des termes simples et peu nombreux que l’enfant connaît bien.

Anxiété à la vue d’un étranger • S’assurer que les soignants habituels effectuent l’intervention ou y assistent. • S’avancer de façon progressive vers l’enfant et d’une manière non menaçante. • Limiter le nombre de participants qui entrent dans la chambre pendant la procédure.

• Formuler une directive à la fois (p. ex., « Allonge-toi », puis « Tiens ma main »). • Recourir au jeu : par exemple, avant une intervention chirurgicale, faire une démonstration sur une poupée ou utiliser le dessin pour expliquer à l’enfant ce qui arrivera (Silva et al., 2017). Notion du temps limitée

Phase sensorimotrice de l’apprentissage

• Préparer l’enfant peu de temps avant l’intervention ou immédiatement avant qu’elle commence.

• Apaiser le stress du nourrisson et diminuer sa douleur par le contact physique, essentiel à son développement sensoriel :

• Limiter les sessions d’information à 5 à 10 minutes.

– Recourir, pendant l’intervention, à des tactiques sensorielles apaisantes (p. ex., le toucher, le masser, le bercer ou le promener, chanter une berceuse, parler doucement, offrir une suce).

• Avoir de l’équipement supplémentaire sur soi. • Aviser l’enfant lorsque l’intervention est sur le point de s’achever ou qu’elle est terminée.

– Utiliser des analgésiques (p. ex., un anesthésique topique, le sucrose 24 %, jusqu’à l’âge de 18 mois) pour soulager l’inconfort.

Promotion de l’autonomie

– Câliner et enlacer le nourrisson après une intervention stressante.

• Offrir à l’enfant l’occasion de participer aux soins et d’aider le personnel (p. ex., le faire appuyer sur les boutons du saturomètre, lui donner un pansement à tenir).

– Recommander l’allaitement à la mère. Meilleure maîtrise musculaire • S’attendre à ce que le nourrisson plus âgé résiste. • Recommander une position confortable. • Éloigner tout objet dangereux. Mimétisme • Montrer à l’enfant le geste qu’on lui demande de faire (p. ex., ouvrir la bouche). TROTTINEUR : FAVORISER LE SENS DE L’AUTONOMIE ET LA PENSÉE SENSORIMOTRICE PRÉOPÉRATIONNELLE

Utiliser les mesures suivantes, en plus des approches suggérées pour les nourrissons. Pensée égocentrique • Expliquer l’intervention en centrant l’information sur ce que l’enfant verra, entendra, goûtera, sentira et ressentira. • Aviser l’enfant qu’il pourra utiliser le moyen qui lui convient le mieux (parler, pleurer ou crier) pour faire connaître son inconfort. • Choisir un intervenant qui servira d’interlocuteur principal au cours de la procédure. Comportement négatif • S’attendre à ce que l’enfant résiste aux traitements ou même tente de s’échapper.

• Permettre des choix, dans la mesure du possible.

• Tenir compte du fait que les enfants peuvent associer des objets, des lieux ou des personnes à des expériences passées douloureuses et qu’ils pleureront et résisteront s’ils les voient. • Effectuer les interventions douloureuses ailleurs que dans leur chambre, et éviter de les faire dans un landau (ou un lit). • Utiliser, si possible, des interventions non invasives (médication per os, température axillaire). ENFANT D’ÂGE PRÉSCOLAIRE : FAVORISER L’INITIATIVE ET DÉSAMORCER L’ANGOISSE PRÉOPÉRATIONNELLE

Égocentrisme • Expliquer l’intervention en termes simples ayant un rapport avec ce que ressentira l’enfant (comme avec les enfants plus jeunes, souligner les aspects sensoriels). • Utiliser l’équipement réel ou une reproduction miniature pour donner des explications à l’enfant ou lui permettre de jouer avec. • Décrire l’intervention en termes neutres. Compétences verbales supérieures • Encourager l’enfant à verbaliser ses idées et ses sentiments.

• Utiliser une approche ferme et directe.

Notion du temps limitée et faible tolérance à la frustration

• Proposer deux options à l’enfant pour lui donner le sentiment de mieux maîtriser la situation et faciliter sa coopération.

• Utiliser les mêmes approches que celles employées avec les trottineurs, mais en planiant une séance d’apprentissage plus longue (de 10 à 15 minutes) ; répartir l’information sur plus d’une séance, si nécessaire.

• Maintenir une routine an que l’enfant se sente un peu comme à la maison.

13

Souvenir d’expériences passées

Chapitre 13

Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation

547

ENCADRÉ 13.9

Préparer l’enfant aux interventions selon son stade de développement (suite)

Maladie et hospitalisation considérées comme une punition

Établissement de relations avec ses pairs

• Expliquer la raison de chaque intervention : un enfant peut avoir du mal à comprendre qu’un médicament ayant un mauvais goût l’aidera à se sentir mieux.

• Respecter la vie privée de l’enfant de manière à protéger son estime de soi.

• Lors des interventions, favoriser la position assise, et non couchée.

ADOLESCENT : FAVORISER L’EXPRESSION DE L’IDENTITÉ ET DE LA PENSÉE ABSTRAITE

Animisme • Tenir l’équipement hors de la vue de l’enfant, sauf lorsque cet équipement est visible ou utilisé pendant l’intervention. • Démystier le fonctionnement des équipements peu familiers à l’enfant et familiariser ce dernier aux sons qu’ils produisent et qui sont susceptibles de l’effrayer. Crainte des lésions corporelles, des intrusions et de la castration • Indiquer le siège de l’intervention sur une poupée, sur un dessin ou sur l’enfant lui-même. • Spécier qu’aucune autre partie du corps ne sera touchée. • Utiliser, si possible, des interventions non invasives (médication per os, température axillaire). • Appliquer un pansement sur les sites de prélèvements. • Encourager la présence parentale. ENFANT D’ÂGE SCOLAIRE : FAVORISER LA PENSÉE INGÉNIEUSE ET CONCRÈTE

Habiletés de langage supérieures ; désir d’acquérir des connaissances • Expliquer les interventions en employant une terminologie scientique et médicale correcte. • Expliquer les raisons de l’intervention à l’aide de diagrammes simples ou de photographies.

Pensée et raisonnement de plus en plus abstraits • Discuter des raisons de l’hospitalisation. • Garder à l’esprit que l’adolescent peut avoir peur de la mort, de l’invalidité ou d’autres menaces quant à son intégrité physique. • L’encourager à poser des questions relatives à ses craintes et aux options qui s’offrent à lui. Conscience de soi prédominante • Insister sur tous les avantages physiques de l’intervention. • Expliquer les effets du traitement ou de la médication sur son corps. Souci du présent plus que de l’avenir • Expliquer les conséquences à long terme des interventions. Quête d’autonomie • Demander préalablement à l’adolescent s’il désire ou non la présence de ses parents pour les entretiens. • Entretenir la coopération de l’adolescent au traitement en le faisant participer aux décisions (p. ex., lui permettre de choisir l’heure ou la forme de sa médication). • Garder à l’esprit que l’adolescent peut avoir du mal à accepter de nouvelles gures d’autorité et qu’il est moins enclin à respecter les procédures à suivre.

• Discuter des raisons de l’intervention.

• Favoriser la plus grande indépendance possible en fonction de ses capacités et de ses limites.

• Permettre à l’enfant de manipuler l’équipement.

Importance de la vie privée et du respect de l’intégrité physique

• Permettre à l’enfant de poser ses questions avant ou après l’intervention.

• S’assurer que l’endroit prévu pour les entrevues protège la condentialité.

Meilleure notion du temps

• S’assurer de la présence d’une tierce personne lorsque l’examen des organes génitaux est fait par une personne du sexe opposé.

• Prévoir des séances d’apprentissage plus longues (environ 20 minutes). • Préparer l’enfant jusqu’à 1 journée avant la procédure an de permettre de comprendre l’information.

• Maintenir l’intimité (usage des rideaux lors des soins).

Meilleure maîtrise de soi • Obtenir la coopération de l’enfant.

• Rendre possibles des discussions avec d’autres adolescents appelés à subir la même intervention.

• Expliquer à l’enfant ce qui est attendu de lui.

Début de la sexualité

• Suggérer des techniques pour améliorer la maîtrise de l’enfant (respiration profonde, détente, décompte).

• Informer l’adolescent sur l’aspect héréditaire de sa maladie.

Établissement de relations avec les pairs et identité collective

• Impliquer l’enfant dans le processus décisionnel.

• S’assurer que le traitement n’entrave pas sa contraception, en vériant, par exemple, les effets possibles de la médication sur l’efcacité des contraceptifs oraux.

• Encourager la participation active de l’enfant (retrait des pansements, manipulation de l’équipement, ouverture des paquets).

• Poser des questions à l’adolescent sur ses besoins d’information concernant la sexualité, la contraception, la grossesse ou l’orientation sexuelle.

Volonté d’être absolument utile

548

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

Informer l’enfant plus âgé de ses droits durant son hospitalisation améliore sa compréhension du milieu hospitalier et peut contribuer à atténuer son sentiment d’impuissance. Après l’intervention, les enfants aiment bien recevoir des récompenses, comme une étoile, un autocollant ou une médaille du courage. Aussi, il est essentiel de dire à l’enfant que l’on sait qu’il a fait de son mieux et que, quelle que soit la façon dont il s’est comporté durant l’intervention, son comportement au cours de cette situation stressante n’est pas ce qui détermine sa valeur aux yeux d’autrui. En revoyant un enfant peu après une intervention, au cours d’une période de détente dénuée de stress, l’inrmière peut consolider la relation qu’elle a établie avec lui. En effet, l’enfant ne l’associera plus uniquement à des situations stressantes, mais il comprendra que c’est aussi une personne avec qui il peut vivre des expériences agréables.

13.5.2

Favoriser l’adhésion au traitement

L’adhésion au traitement également appelée observance thérapeutique, désigne le fait pour une personne de se conformer au traitement qui lui a été prescrit, qu’il s’agisse de respecter la posologie de ses médicaments ou de modier son mode de vie, notamment son régime alimentaire. Le taux d’adhésion au traitement est de 50 % en pédiatrie (Jafol, 2016). L’inrmière doit commencer par évaluer dans quelle mesure l’enfant est dèle à son traitement an de mettre au point des stratégies qui favoriseront une adhésion complète. En général, comme les enfants sont trop jeunes pour assumer

TABLEAU 13.7

l’entière responsabilité de leur prise en charge ou détenir une part de responsabilité dans celle-ci, ce sont les parents qui sont chargés des soins. Les connaissances et les attitudes de ces derniers ont une incidence importante sur l’adhésion au traitement de l’enfant. L’inrmière doit être attentive, par exemple, aux enfants plus âgés ou aux adolescents qui portent seuls la responsabilité de prendre leur médication, sans nécessairement connaître les conséquences s’ils ne respectent pas le plan de traitement (Alsous, 2017). Plusieurs facteurs inuent considérablement sur l’adhésion au traitement et doivent donc être pris en considération par l’inrmière lorsqu’elle établit des stratégies destinées à favoriser l’adhésion thérapeutique TABLEAU 13.7 (Chappell, 2015). Plus les facteurs pèsent dans la balance, plus l’adhésion au traitement risque d’en pâtir. Par exemple, les coûts élevés ainsi que la complexité des soins peuvent inuencer grandement l’adhésion. En cas de maladie chronique nécessitant plusieurs traitements et une réorganisation majeure du mode de vie, l’adhésion au traitement est rarement optimale.

CONSEIL CLINIQUE

Pour éviter tout retard au cours d’une intervention, l’inrmière veille à garder du matériel supplémentaire à portée de la main. Par exemple, si elle doit faire une injection ou une ponction veineuse à l’enfant, elle prend une plus grande quantité de ruban adhésif, de pansements et de tampons d’alcool que d’ordinaire, ainsi qu’une aiguille supplémentaire.

Appliquer des stratégies favorisant l’adhésion au traitement Les stratégies destinées à favoriser l’adhésion au traitement sont en fait des interventions qui incitent les familles à suivre le traitement prescrit (van Os, Troop, Sullivan et al., 2017). Ainsi, le soutien des membres de la famille, les efforts visant à rappeler à l’enfant ou à l’adolescent de prendre ses médicaments, l’établissement d’une bonne communication ainsi que les attentes nourries à l’égard de l’enfant ou de l’adolescent an

13

Facteurs ayant une inuence positive sur l’adhésion au traitement

FACTEURS LIÉS AU CLIENT

FACTEURS LIÉS À LA FAMILLE

FACTEURS LIÉS À L’ENVIRONNEMENT DE SOINS

FACTEURS LIÉ AU TRAITEMENT

• Âge permettant de comprendre l’utilité du traitement

• Participation des parents au plan de traitement

• Accessibilité aux soins et disponibilité des professionnels

• Coût peu élevé des soins

• Haute estime de soi

• Milieu familial équilibré procurant un bon soutien

• Caractère personnalisé des soins

• Image corporelle positive • Degré élevé d’autonomie (générant une meilleure maîtrise de soi) • Bon niveau littéraire

• Communication familiale efcace

• Interactions positives avec les professionnels de la santé

• Succès anticipé du traitement

• Continuité dans les soins

• Satisfaction à l’égard des soins prodigués

• Nombre de médicaments prescrits limité • Schéma thérapeutique simple • Perturbation minimale du mode de vie habituel • Courte durée du traitement • Bienfaits du traitement perceptibles

• Présence régulière et constante aux rendez-vous de suivi

• Effets indésirables tolérables

• Absence de barrières ou de croyances défavorables à l’égard des médicaments • Absence de comorbidités

Chapitre 13

Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation

549

CONSEIL CLINIQUE

Pour inciter un enfant à se soumettre à un protocole thérapeutique pendant une période déterminée, par exemple faire tremper son pied dans une solution, l’inrmière peut lui suggérer de le faire pendant qu’il regarde son émission de télévision préférée.

ALERTE CLINIQUE

Avant de proposer d’écraser un comprimé pour en faciliter l’absorption, il faut toujours vérier les modes d’administration prévus pour le médicament an de s’assurer qu’une telle solution est possible et sécuritaire.

qu’il termine son traitement sont des facteurs garantissant une meilleure adhésion au traitement (Lawrence, Miller et Flexner, 2017).

Appliquer des stratégies organisationnelles Les stratégies organisationnelles sont fondées sur le contexte de soins. Elles consistent, entre autres, à agir sur les facteurs qui favorisent l’adhésion au traitement. Il peut s’agir, par exemple, de désigner un professionnel de la santé de première ligne, faire appel à des alliés (professeur, adultes responsables), d’établir un agenda pour le suivi du traitement ou de réduire les coûts liés au traitement en prescrivant des versions génériques des médicaments. Il est également important d’atténuer les répercussions de la complexité du traitement sur la vie de la famille et de trouver des moyens mnémotechniques pour réduire au minimum les omissions (Jafol, 2016). Il est possible de se procurer certains gadgets ou d’imaginer certains outils pour favoriser l’adhésion : dosette, montre munie d’une alarme, tableau servant à noter la prise des médicaments ou à vérier que le traitement a été suivi jusqu’au bout, afchage de messages de rappel sur le réfrigérateur, emploi du temps incorporant le plan de traitement au quotidien (p. ex., les exercices de physiothérapie prévus après la toilette du soir). L’inrmière doit aussi vérier que l’horaire d’administration aux six à huit heures est réellement applicable. Cet horaire pourra être ajusté pour correspondre aux heures du coucher et du lever des parents, mais la répartition devra rester uniforme durant la journée.

Appliquer des stratégies éducatives CE QU’IL FAUT RETENIR

L’inrmière utilise généralement le principe du renforcement positif pour valider une conduite souhaitable.

Les stratégies éducatives visent à renseigner la famille sur le plan de traitement. L’enseignement permet aux enfants d’avoir une meilleure connaissance de leur maladie et, de ce fait, renforce considérablement leur adhésion au traitement (Alikari et Zyga, 2014). L’inrmière doit cependant afner cette stratégie et employer des techniques d’enseignement qui facilitent la compréhension et la mémorisation ENCADRÉ 13.10. Il est indispensable d’appuyer l’enseignement par une documentation appropriée. Les documents fournis par l’inrmière doivent être clairs et facilement compréhensibles pour une personne qui ne connaît pas le jargon médical. L’inrmière peut inviter des membres de la famille proche et de la famille élargie (p. ex., les grands-parents) à participer aux séances éducatives si elle considère que cela pourrait favoriser l’adhésion au traitement.

Appliquer des stratégies thérapeutiques Les stratégies thérapeutiques sont déployées en cas de refus de prendre les médicaments prescrits ou d’incapacité à le faire. Il arrive aussi que les proches de l’enfant aient du mal à se conformer au schéma thérapeutique. Parfois, ils se montrent incapables de lui administrer le médicament

550

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

convenablement, même s’ils se souviennent des instructions données et qu’ils les ont bien comprises. L’inrmière doit chercher à cerner les raisons pour lesquelles l’enfant refuse le traitement. Quand elle découvre, par exemple, qu’il ne parvient pas à avaler les comprimés, elle peut suggérer à la famille de les remplacer par une préparation liquide ou de les écraser .

Appliquer des stratégies comportementales Les stratégies comportementales visent à modier directement certaines attitudes. Plusieurs techniques permettant d’induire le comportement désiré se sont révélées efcaces chez l’enfant, notamment le renforcement positif pour souligner l’adhésion au traitement. Par exemple, un enfant peut être récompensé de ses efforts par une étoile ou un jeton lui donnant droit à un cadeau ou à un privilège quelconque. Cependant, il est parfois nécessaire d’appliquer des mesures disciplinaires pour favoriser l’adhésion d’un enfant à son traitement, comme abolir certains privilèges auxquels il a normalement droit, quand il est sufsamment grand. Une autre de ces stratégies consiste à établir un contrat qui prévoit un processus structuré au cours duquel le comportement désiré est clairement décrit, de même que les récompenses attribuées en cas d’amélioration ou les conséquences négatives en cas d’échec. Cette stratégie est généralement efficace avec les enfants plus âgés (Lawrence et al., 2017).

Évaluer l’adhésion au traitement S’il est utile de connaître les facteurs qui inuent sur l’adhésion au traitement, l’évaluation de cette adhésion doit également reposer sur des méthodes de mesure concrètes. Plusieurs méthodes existent, chacune comportant des avantages et des inconvénients. La stratégie d’évaluation la plus efcace consiste à combiner au moins deux des méthodes énumérées ci-après. • Appréciation de l’inrmière : cette méthode subjective peut donner des résultats inexacts, à moins que l’inrmière ne procède à une analyse critique de ses critères d’évaluation. • Évaluation faite par l’enfant lui-même ou par ses parents : il faut savoir que la plupart des gens surestiment leur adhésion au traitement, même lorsqu’ils tiennent compte de certaines omissions. • Observation directe : cette méthode est difcile à mettre en œuvre en milieu extrahospitalier sachant que, souvent, l’enfant et ses parents coopèrent mieux et se montrent plus assidus lorsqu’ils se savent surveillés. • Rendez-vous de suivi : le simple fait de se présenter aux rendez-vous de suivi est un signe indirect de délité au traitement.

• Évaluation de la réponse thérapeutique : rares sont les traitements dont les résultats peuvent être mesurés directement (p. ex., une baisse de la pression artérielle, une perte de poids). Si l’inrmière choisit cette méthode, elle pourra noter les résultats sur un graphique ou dans un tableau.

Pratiques inrmières ENCADRÉ 13.10

Expliquer le traitement à la famille

• Établir le premier contact de façon à réduire la peur et l’anxiété.

• Décompte des comprimés : comme son nom l’indique, cette méthode consiste à soustraire du nombre total des comprimés du acon le nombre de ceux qu’aurait dû absorber l’enfant. Le résultat doit correspondre à la quantité de comprimés qui restent dans le flacon. Cependant, il arrive que les parents oublient d’apporter le acon ou qu’ils enlèvent sciemment des comprimés pour induire l’inrmière en erreur et éviter d’être pris en défaut. Cette méthode ne peut évidemment pas être utilisée pour les préparations liquides. Il existe une variante qui repose sur l’utilisation de bouchons automatiques qui enregistrent le nombre d’ouvertures du acon.

• Évaluer l’état des connaissances des participants et leurs attentes à l’égard de la séance ; répondre à leurs préoccupations avant d’aborder l’enseignement prévu.

• Analyses de laboratoire : la mesure de la concentration plasmatique de certains médicaments (digoxine et phénytoïne) permet d’évaluer la quantité qui a été ingérée peu de temps auparavant. Cette méthode d’évaluation de l’adhésion au traitement présente plusieurs inconvénients : elle est coûteuse, et plusieurs facteurs risquent d’inuer sur les résultats, qui peuvent être faussés lorsque le dosage n’est pas effectué au mo ment opportun et qui ne reflètent que l’adhésion récente au traitement.

• Commencer par les points les plus importants.

13.6

13.6.1

Interventions inrmières liées aux interventions chirurgicales Préparer l’enfant à l’intervention chirurgicale

L’âge de l’enfant et le type d’intervention prévu sont des facteurs qui inuent fortement sur le choix du moment idéal pour commencer la préparation chirurgicale. En règle générale, plus l’enfant est jeune, plus la période entre la séance de préparation et l’intervention proprement dite doit être courte. Cela évite que l’enfant laisse libre cours à son imagination ou qu’il s’inquiète outre mesure. Comme l’enfant plus jeune peut se laisser aller à imaginer toutes sortes de choses, une préparation précédant de un ou deux jours son admission est sufsante. Cependant, en prévision d’une intervention d’une plus grande complexité, il peut être nécessaire d’accorder plus de temps à l’enfant pour lui permettre d’assimiler l’information. L’enfant de quatre à sept ans pourra être préparé environ une semaine avant

• Déterminer le mode d’apprentissage qui leur convient le mieux en cherchant à savoir, par exemple, s’ils préfèrent entrer dans les détails ou aller directement à l’essentiel. • Employer toute une gamme de stratégies et d’outils éducatifs (cours magistral, démonstration, vidéo, documentation). • Fournir des explications simples, courtes, concrètes et précises. • Segmenter l’information.

• Organiser le discours selon un plan structuré et faire des liens entre les divers points. Voici un exemple de plan bien structuré : « La séance d’aujourd’hui portera sur deux aspects du traitement. En premier lieu, nous nous pencherons sur l’administration du médicament. En second lieu, nous verrons quels sont les effets indésirables à surveiller. »

• Insister sur la nécessité de se conformer aux instructions fournies par l’équipe soignante et sur les bienfaits escomptés ; présenter les répercussions négatives de la non-adhésion au traitement, mais éviter les manœuvres d’intimidation. • Ne pas demander à l’enfant et aux parents s’ils ont bien compris, mais évaluer l’apprentissage en posant des questions précises sur l’information reçue. • Répéter l’information, s’il y a lieu. • Donner du renforcement verbal (p. ex., souligner les forces de l’enfant, l’encourager). • Faire en sorte que les séances éducatives se déroulent à des moments propices à l’apprentissage, c’est-à-dire aux moments où les membres de la famille sont le plus susceptibles d’emmagasiner de nouveaux éléments d’information (p. ex., lorsque l’un d’entre eux pose une question sur le traitement ou lorsque certains symptômes se manifestent). • Faire des démonstrations axées sur la pratique pour faciliter l’acquisition des compétences, puis inciter les participants à refaire les mêmes gestes pour évaluer ce qu’ils ont retenu et favoriser une bonne mémorisation.

l’intervention. De cette façon, il aura assez de temps pour assimiler l’information et poser des questions. La préparation et la durée de la séance seront établies en fonction de sa capacité d’attention ; habituellement, plus il est jeune, plus le programme devra être court. Il faut savoir que le comportement adopté par l’enfant pendant la rencontre varie sensiblement d’un enfant à l’autre. En effet, si certains n’hésitent pas à demander de l’information sur l’intervention qu’ils vont subir, d’autres préfèrent ne rien savoir. Les parents pourront aider l’inrmière à déterminer la quantité d’information à communiquer à leur enfant. De même, il est essentiel de demander aux enfants plus âgés quelle quantité de détails ils souhaitent recevoir. Les parents ont aussi besoin d’information à l’avance an d’aider leur enfant à se préparer pour l’intervention chirurgicale. La préparation favorise aussi la planication de la convalescence de l’enfant après l’intervention. En général, pour la préparation psychologique à l’intervention, l’inrmière utilise différentes Chapitre 13

CONSEIL CLINIQUE

L’inrmière peut montrer à l’enfant des photos d’autres enfants prises dans divers services de l’établissement (radiologie, bloc opératoire, etc.) pour lui donner une idée plus précise des instruments et des appareils qui pourraient être utilisés durant l’intervention.

Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation

551

13

stratégies d’enseignement selon l’âge de l’enfant et le matériel disponible (lms, livres, brochures, jeux, applications sur tablette électronique et visites guidées de l’hôpital) FIGURE 13.8 . Par exemple, pour se préparer au premier contact avec la salle d’opération, il existe de plus en plus de ressources numériques, comme l’application interactive « Ma première chirurgie », disponible en français depuis 2016. Cette application présente à l’enfant les différents intervenants qu’il renFIGURE 13.8 Jouer avec l’équipecontrera au cours de son opération. ment hospitalier permet à l’enfant d’extérioriser La méthode systématique qui ses craintes et ses préoccupations. consiste à préparer psychologiquement l’enfant en plusieurs séances, en répétant plusieurs fois les étapes du processus avec lui et en l’accompagnant à chacune de ces étapes, s’est révélée plus efcace qu’une séance de préparation unique ou que la méthode consistant à l’accompagner tout au long du processus sans aucune préparation préalable et sans répétitions.

TABLEAU 13.8

Exemples de termes non menaçants pour l’enfant

TERMES À ÉVITER

SUBSTITUTIONS SUGGÉRÉES

Piqûre, piqûre d’abeille, injection

Médicament sous la peau

Organe

Partie du corps

Test

Voir comment fonctionne ton coeur, tes reins, etc.

Incision

Ouverture spéciale

Œdème

Enure

Brancard, civière

Lit sur roulettes

Selle

Terme habituel de l’enfant

Colorant

Médicament spécial

Douleur

Faire mal, inconfort, « aïe », « bobo »

Endormir

Engourdir, donner sommeil

Couper, réparer

Arranger

Prendre ta température

Vérier la chaleur de ton corps

Prendre ta pression artérielle au bras

Vérier ta pression ; tenir ton bras

Endormir, anesthésie

Sommeil spécial

Cathéter

Tube

Moniteur

Écran de télévision

Électrodes

Autocollants, chatouilleurs

Prélèvement

Échantillon

552

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

L’approche optimale consiste à personnaliser le programme pour chaque enfant et pour chaque famille (Terry et Crego, 2016). Une étude sur la préparation à l’intervention chirurgicale révèle plusieurs éléments intéressants (Habre, 2007) : • Les parents retiennent mieux l’information transmise par écrit que l’information donnée sous une forme verbale seulement. • Dans une proportion de 56 %, les parents demandent que l’information leur soit donnée à l’aide d’un support audiovisuel (p. ex., un DVD de préparation chirurgicale). • Trois parents sur quatre mentionnent vouloir en savoir davantage sur l’opération de leur enfant et utilisent différents moyens pour obtenir une information supplémentaire (consultation d’un autre spécialiste, recherche sur Internet ou lecture d’ouvrages sur le sujet). Les jeunes enfants étant incapables de faire preuve d’abstraction, il est important que l’inrmière se serve de certains objets pour illustrer ses explications, de la même façon que pour la préparation aux interventions diagnostiques. En laissant un enfant manipuler les instruments qui seront utilisés pendant l’intervention (stéthoscope, sphygmomanomètre ou masque à oxygène), non seulement l’inrmière lui permet de se familiariser avec ces instruments, mais elle lui donne l’occasion de dissiper la crainte qu’ils peuvent susciter. Elle peut aussi présenter à l’enfant l’équipement en miniature (lit à roulettes, appareils radiographiques ou matériel de perfusion intraveineuse) pour lui décrire le déroulement de l’intervention dans un cadre sécurisant et le préparer à vivre des situations inconnues qui pourraient l’effrayer TABLEAU 13.8. Les outils éducatifs illustrés peuvent faciliter considérablement la préparation. Bien que la plupart des soins prodigués avant une intervention chirurgicale fassent partie de la routine, l’inrmière ne doit pas oublier qu’ils peuvent susciter une certaine anxiété chez l’enfant et chez ses parents. Par exemple, le simple fait de devoir porter une chemise d’hôpital sans sousvêtements ou sans bas de pyjama peut traumatiser un enfant. Par conséquent, l’inrmière peut laisser celui-ci garder ses sous-vêtements ou son bas de pyjama jusqu’au bloc opératoire et les lui enlever seulement après l’induction de l’anesthésie. Les étapes qui marquent le plus l’enfant sont le transport et l’arrivée au bloc opératoire, l’injection du sédatif ou l’induction de l’anesthésie par voie intraveineuse, le réveil, souvent caractérisé par la douleur, et l’impossibilité de manger ou de boire (Amin, Oragui, Khan et al., 2010). L’injection du sédatif et l’application du masque sur leur visage sont les étapes qui effraient le plus les enfants. Le consentement doit toujours être obtenu par les parents si l’enfant est âgé de moins de 14 ans, et

ce, toujours dans l’intérêt fondamental de l’enfant (Yentis, Hartle, Barker et al., 2017). Les limites de la consommation d’aliments et de liquides avant l’intervention an de réduire le risque d’aspiration au cours de l’anesthésie peuvent également poser problème. Il faut porter une attention particulière aux besoins liquidiens des nourrissons. Avant l’intervention, il faut éviter de les priver trop longtemps de liquide pour prévenir une déplétion glycogénique et une déshydratation TABLEAU 13.9. L’ingestion de liquides clairs deux heures avant une intervention chirurgicale n’augmente pas les risques d’aspiration peropératoire et postopératoire, mais diminue l’inconfort lié à l’impression de soif ou de faim ressentie par l’enfant (American Society of Anesthesiologists, 2017).

Administrer un sédatif avant l’intervention chirurgicale Les anesthésistes utilisent divers schémas thérapeutiques pour faciliter l’induction de l’anesthésie chez l’enfant, car il n’existe pas de consensus sur celui qui est optimal. L’administration préopératoire de médicaments vise plusieurs objectifs : 1) l’atténuation de l’anxiété ; 2) l’amnésie ; 3) la sédation ; 4) l’effet antiémétique ; 5) la réduction des sécrétions (Sheen, Chang et Ho, 2014). Le midazolam s’est révélé très efcace pour atteindre les trois premiers objectifs (Taketomo, 2016). En outre, le fait qu’il ait une courte durée d’action, qu’il soit associé à un faible risque de détresse respiratoire et que son début d’action soit prévisible explique sa popularité auprès des anesthésistes. Dans certains établissements hospitaliers, une présence parentale pour assister à l’induction de l’anesthésie est dorénavant encouragée FIGURE 13.9. Cette stratégie comporte certains

FIGURE 13.9 La présence des parents pendant l’induction de l’anesthésie peut calmer l’anxiété de l’enfant ainsi que la leur durant la phase préopératoire.

TABLEAU 13.9

Recommandations de jeûne visant à réduire le risque d’aspiration pulmonaire chez les enfantsa PÉRIODE DE JEÛNE MINIMALE (EN HEURES)b

SUBSTANCE CONSOMMÉE

Liquides clairsc

2

Lait maternel

4

Préparation commerciale pour nourrisson

6

Lait non humaind

6

Nourriture solidee

6

a

Ces recommandations s’appliquent aux enfants en bonne santé qui doivent subir des interventions électives. Le respect des lignes directrices ne garantit pas une vidange gastrique complète. b Les périodes à jeun indiquées dans le tableau s’appliquent à tous les âges. c Par exemple l’eau, les jus de fruits sans pulpe, les boissons gazeuses, le thé clair et le café noir. d Étant donné que le délai nécessaire pour la vidange gastrique du lait non humain est comparable à celui des solides, il faut tenir compte de la quantité qui a été ingérée pour calculer la durée adéquate de jeûne. e En général, un repas léger comprend des rôties et des liquides clairs. Les repas à base d’aliments frits ou gras et ceux composés de viande peuvent ralentir la vidange gastrique. Pour calculer la durée adéquate de jeûne, il faut tenir compte de la quantité et du type d’aliments consommés. Source : Adapté de American Society of Anesthesiologists (2017).

avantages : elle a notamment pour effet de réduire au minimum la nécessité d’avoir recours à un sédatif et de faciliter la séparation d’avec les parents, qui se fait bien souvent avec peine (Sadeghi, Tabari, Mahdavi et al., 2017). Les autres bienfaits possibles, à savoir l’atténuation de l’anxiété durant l’induction (p. ex., la diminution du risque de suspension volontaire de la respiration ou de laryngospasme), et les effets à plus long terme sur le comportement demeurent discutables. En collaboration avec les autres membres de l’équipe interdisciplinaire, comme les éducateurs spécialisés en milieu pédiatrique et les anesthésistes, les inrmières jouent un rôle crucial dans l’enseignement en période préopératoire. L’équipe doit s’assurer de bien informer les parents an qu’ils comprennent les étapes de l’anesthésie et qu’ils sachent à quoi s’attendre pour être en mesure de jouer un rôle de soutien auprès de leur enfant (Kar, Ganguly, DasGupta et al., 2015 ; Moore, Bennett, Dietrich et al., 2015). Au moment de l’induction, ce sont habituellement les éducateurs spécialisés qui accompagnent les familles tout au long du processus. Lorsque les parents refusent d’assister à l’induction ou que l’établissement ne leur permet pas de le faire, ils peuvent laisser à l’enfant l’un de ses objets préférés et revenir à son chevet le plus vite possible après l’intervention chirurgicale, idéalement dans la salle de réveil. Quel que soit leur degré de participation durant l’intervention, ils doivent être tenus au courant du déroulement des événements de façon régulière. Le personnel soignant doit enn leur préciser où et à quel moment ils pourront voir leur enfant une fois l’intervention terminée. Chapitre 13

Déplétion glycogénique : Diminution du taux de glucose dans l’organisme. Effet antiémétique : Qui prévient ou empêche les nausées et les vomissements.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les très jeunes enfants sont prédisposés à des complications pendant une intervention chirurgicale en raison de leur état physiologique encore immature.

Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation

553

13

Il est à noter que les enfants qui n’ont pas de douleur préopératoire, qui sont bien préparés psychologiquement à l’intervention chirurgicale qu’ils doivent subir et qui sont entourés de leurs parents peuvent se passer de sédatifs. D’ailleurs, la préparation préopératoire inclut rarement l’emploi d’un sédatif lorsque la période d’attente avant l’intervention est courte. ALERTE CLINIQUE

Il faut porter une attention immédiate à toute modication peropératoire des signes vitaux attribuable à une hyperthermie maligne peranesthésique, une forme de myopathie héréditaire mortelle.

En principe, pour induire une anesthésie chez un enfant, un anesthésique lui est administré à l’aide d’un masque pour inhalation en concomitance avec du monoxyde d’azote et de l’oxygène. Si l’enfant redoute ce mode d’induction de l’anesthésie, comme c’est parfois le cas, l’équipe soignante peut avoir recours à différentes méthodes pour apaiser ses craintes (Panella, 2016) : • masquer l’odeur nauséabonde des gaz anesthésiques en appliquant une substance à l’odeur agréable sur le masque ; • utiliser un masque en plastique transparent plutôt qu’un masque opaque noir, et l’approcher lentement de son visage ; • utiliser le tube proprement dit pour orienter les gaz vers le visage de l’enfant et n’utiliser le masque que lorsqu’il commence à s’assoupir ;

éactivation des connaissances Qu’est-ce qui caractérise l’acidose métabolique et l’acidose respiratoire ?

• lui permettre de s’asseoir plutôt que de rester allongé pendant l’induction ; • le laisser s’amuser à mettre un masque sur le visage d’une poupée ou d’un mannequin avant l’opération ; • permettre à un parent d’être présent au moment de l’induction.

13.6.2

éactivation des connaissances Qu’est-ce qui cause la pneumonie hypostatique ?

554

Partie 5

Procéder aux soins postopératoires

Il est nécessaire de procéder à certaines interventions et observations psychologiques et physiques pour prévenir ou réduire au minimum les effets indésirables de l’anesthésie et de l’intervention chirurgicale (Derieg, 2016) ENCADRÉ 13.11. Bien que la fréquence des complications postopératoires graves soit très faible chez les enfants en bonne santé, il est indispensable de surveiller en permanence la fonction cardiorespiratoire durant la phase qui suit immédiatement l’opération. En outre, il est crucial de maintenir la perméabilité des voies respiratoires ainsi qu’une ventilation pulmonaire maximale pour prévenir d’éventuelles complications liées à l’anesthésie telles que l’obstruction des voies respiratoires, la laryngite attribuable à l’intubation, le laryngospasme et le bronchospasme. La surveillance du taux de saturation en oxygène, l’administration d’oxygène, au besoin, ainsi que le maintien de la température corporelle normale et de l’équilibre liquidien et électrolytique

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

sont autant d’aspects importants de la prise en charge immédiate de l’enfant après l’intervention. Par ailleurs, il importe de surveiller en permanence les signes vitaux et d’interpréter chacun d’eux à la recherche d’éventuels effets indésirables de l’anesthésie, ou de possibles signes de choc ou de troubles respiratoires TABLEAU 13.10. L’hyperthermie maligne peranesthésique est une forme de myopathie héréditaire mortelle pouvant survenir en phase peropératoire (Nelson et Litman, 2014) . Certains agents anesthésiques comme la succinylcholine et l’halothane peuvent déclencher cette affection, qui se caractérise par une augmentation du métabolisme basal, une raideur musculaire et une élévation de la température corporelle chez les enfants qui y sont prédisposés. Parmi les premières manifestations cliniques de l’hyperthermie maligne peranesthésique figurent la tachycardie et la tachyarythmie, la tachypnée, l’hypercapnie ou hypercarbie, l’acidose métabolique et l’acidose respiratoire. Le risque d’hyperthermie maligne peranesthésique est particulièrement élevé chez les enfants qui ont des antécédents personnels ou familiaux d’hyperpyrexie peropératoire ou qui présentent certains troubles neuromusculaires. Cette maladie peut se déclarer chez les enfants qui ont déjà subi des interventions chirurgicales n’ayant entraîné aucun effet indésirable. Le traitement consiste à arrêter immédiatement l’intervention et l’administration de l’agent anesthésique en cause, à hyperventiler l’enfant avec de l’oxygène 100 % et à lui administrer du dantrolène sodique par voie intraveineuse. Il est aussi possible de lui administrer une perfusion de soluté refroidi, de l’envelopper dans une couverture réfrigérante, de lui faire un lavage gastrique à l’eau fraîche, de lui appliquer des sacs de glace sous les aisselles et aux aines et, ultimement, d’avoir recours à un dispositif de circulation extracorporelle pour abaisser sa température corporelle (Lerman, 2011). Cette complication est une condition justiant un transfert immédiat dans une unité de soins intensifs, où la stabilisation des signes vitaux et du métabolisme de l’enfant sera surveillée de près, de même qu’une éventuelle réapparition des manifestations cliniques. An de prévenir les infections respiratoires, qui peuvent être une complication résultant de l’intervention et de l’immobilité, l’inrmière doit s’employer à faciliter la ventilation pulmonaire et l’excrétion des sécrétions. Elle a recours, entre autres, à la spirométrie et aux techniques de toux assistée pour stimuler le mouvement et la capacité respiratoire de façon à prévenir une pneumonie hypostatique. Elle doit inciter l’enfant à changer de position fréquemment, minimalement toutes les deux heures.

Pratiques inrmières ENCADRÉ 13.11

Prodiguer les soins postopératoires

PRÉPARATION DE LA CHAMBRE

• Veiller à ce que la chambre de l’enfant soit prête :

• Inspecter la zone environnante du site opératoire pour vérier la présence d’écoulements sanguins.

– Faire le lit ou préparer le berceau.

• Rechercher des signes de saignement.

– Placer la pompe et le pied à perfusion, le dispositif de succion, les tubulures et le débitmètre à proximité du lit ou du berceau.

• Revoir les ordonnances du chirurgien après l’évaluation initiale ; vérier si les ordonnances rédigées avant l’opération (p. ex., les anticonvulsivants ou les médicaments contre les maladies cardiaques) ont été renouvelées et si les modes d’administration choisis sont acceptables, compte tenu de l’état de l’enfant (la voie orale pourrait être contre-indiquée).

SOINS POSTOPÉRATOIRES IMMÉDIATS

• Recueillir les valeurs initiales : – Évaluer l’état de conscience de l’enfant et son degré de sédation. – Prendre les signes vitaux et veiller à laisser le brassard de mesure de pression artérielle en place après l’avoir dégoné pour diminuer les manipulations auprès de l’enfant. • Augmenter la fréquence de la prise des signes vitaux s’il y a une quelconque variation des valeurs enregistrées pour déceler des signes de choc. • Inspecter la peau de l’enfant (couleur, chaleur, etc.). • Vérier si l’enfant ressent de la douleur. • Inspecter le pansement, s’il y a lieu : – S’il y a des traces de sang sur le pansement ou le plâtre, les délimiter au crayon en indiquant l’heure. – Si le pansement est défait, l’ajuster, mais ne pas l’enlever (le premier pansement doit être enlevé par le médecin).

TABLEAU 13.10

• Poursuivre l’évaluation des signes vitaux, l’observation des signes de saignements et le soulagement de la douleur. • Effectuer les prélèvements demandés et assurer le suivi des analyses de laboratoire. • Demeurer à l’affût des signes de déshydratation. • Examiner l’enfant pour déceler des signes de distension abdominale ou de distension vésicale. • Ausculter l’abdomen pour vérier la présence de bruits intestinaux (reprise du péristaltisme). • Détecter tout signe d’infection, notamment en inspectant la plaie : rougeur, œdème, chaleur, douleur et écoulement purulent.

13

• Aviser le médecin ou le chirurgien de toute anomalie.

Causes possibles des modications des signes vitaux postopératoires en pédiatrie

MODIFICATION

CAUSES POSSIBLES

COMMENTAIRES

• Diminution du débit cardiaque (état de choc)

• La fréquence cardiaque peut augmenter an de maintenir la circulation sanguine.

Fréquence cardiaque Augmentation

• Température élevée • Douleur • Détresse respiratoire (précoce) • Médication (atropine, épinéphrine, bronchodilatateur) Diminution

• Hypoxie

• Chez les jeunes enfants, la bradycardie est une complication plus inquiétante que la tachycardie.

• Stimulation du nerf vague • Augmentation de la pression intracrânienne • Détresse respiratoire (signe tardif) • Médication (bêtabloqueurs, anesthésiques)

Fréquence respiratoire Augmentation

• Détresse respiratoire

• L’organisme réagit à une détresse respiratoire principalement en augmentant sa fréquence respiratoire.

• Excès de volume hydrique

Chapitre 13

Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation

555

Causes possibles des modications des signes vitaux postopératoires en pédiatrie (suite)

TABLEAU 13.10 MODIFICATION

CAUSES POSSIBLES

COMMENTAIRES

• Hypothermie • Hyperthermie • Douleur Diminution

• Anesthésiques, analgésiques, opioïdes, sédatifs • Douleur

• La diminution de la fréquence respiratoire due aux analgésiques opioïdes peut augmenter le risque de détresse respiratoire et nécessite une intervention rapide an de ne pas dégénérer vers une bradycardie.

Pression artérielle Augmentation

• Augmentation du volume intravasculaire • Augmentation de la pression intracrânienne • Douleur

• L’augmentation de la pression artérielle est une complication grave chez les enfants prématurés, car elle augmente le risque d’hémorragie intraventriculaire.

• Médication (kétamine, épinéphrine) Diminution

• Diminution du volume intravasculaire • Agents anesthésiques vasodilatateurs (halothane, isourane) • Analgésiques opioïdes (morphine)

• La diminution de la pression artérielle est un signe d’un état de choc qui apparaît tardivement et qui est la conséquence d’une modication de l’élasticité et de la constriction des vaisseaux servant à maintenir le débit cardiaque.

Température Augmentation

• Infection • Causes environnementales (salle trop chaude, excès de couvertures)

Diminution

• La èvre associée à l’infection apparaît généralement plus tard que la èvre d’origine non infectieuse.

• Hyperthermie maligne

• L’absence de èvre ne permet pas d’exclure l’infection, en particulier chez les nouveau-nés.

• État de choc (signe tardif)

• L’hyperthermie maligne requiert un traitement immédiat.

• Agents anesthésiques vasodilatateurs (halothane, isourane)

• Les nouveau-nés sont particulièrement vulnérables à l’hypothermie, dont les conséquences peuvent être graves, voire mortelles.

• Relaxants musculaires • Causes environnementales (pièce trop froide) • Perfusion de liquides ou de sang froids Sources : Adapté de Bronicki et Chang (2011) ; Smith (1991).

13.7

Situations hospitalières particulières

13.7.1

Soins ambulatoires ou externes

Les besoins des enfants et des adolescents sont souvent complexes et exigent l’expertise de toute une équipe de professionnels. Pour améliorer l’accessibilité et la continuité des soins aux enfants, aux adolescents et à leurs familles, de nombreux

556

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

centres ambulatoires pédiatriques ou pédopsychiatriques ont vu le jour au Québec. Ces centres regroupent souvent des services de consultation externe et des services de médecine de jour pour cette clientèle, et réunissent donc différents professionnels dans un même lieu physique. Parmi les autres services externes permettant d’éviter l’hospitalisation se trouve l’unité de soins de jour, qui rend possible, par exemple, le changement d’un pansement ou l’administration d’antibiotiques intraveineux en externe. L’unité de chirurgie d’un jour, que l’enfant peut quitter après son réveil, sert quant à elle aux interventions

chirurgicales mineures ou aux interventions diagnostiques comme l’insertion d’un drain transtympanique, la réparation d’une hernie, d’une adénoïdectomie, d’une amygdalectomie, d’une cystoscopie ou d’une bronchoscopie. Les soins ambulatoires et les services externes fournissent les soins dont l’enfant a besoin tout en éliminant la nécessité d’une admission pour la nuit. Parmi les effets positifs des soins ambulatoires, il faut noter en particulier : • la réduction des agents stressants de l’hospitalisation, notamment la séparation d’avec la famille ; • la réduction du risque d’infection ; • la diminution des coûts de santé. Il est important de fournir des instructions explicites au moment du congé, après une intervention chirurgicale effectuée en externe ENCADRÉ 13.12. Les parents ont besoin de directives claires sur les manifestations cliniques de détérioration de l’état de santé de leur enfant ou d’apparition de complications, et de précisions sur le moment où il devient nécessaire d’appeler le médecin. Certains centres offrent un suivi systématique après l’intervention chirurgicale. L’appel téléphonique de suivi, effectué de 48 à 72 heures après le congé, permet à l’inrmière de vérier l’état de l’enfant. Il lui offre également l’occasion de passer en revue avec les parents l’information reçue avant le congé et de répondre à leurs questions.

13.7.2

Mise en isolement liée à la prévention des infections

Les chambres d’isolement destinées à la prévention des infections sont habituellement situées en retrait dans l’unité de pédiatrie. Le transfert ou l’admission dans ce type de chambre peut accroître les agents stressants typiquement associés à l’hospitalisation, car il en résulte une diminution des contacts sociaux, une perte de contrôle accrue et des modications additionnelles à l’environnement (privation sensorielle, étrange apparence des visiteurs qui doivent parfois porter une blouse, un masque et des gants de protection). L’orientation dans le temps et l’espace s’en trouve également affectée. Ces agents stressants sont ampliés par la compréhension limitée qu’a l’enfant de ce qu’est l’isolement. Le trottineur et l’enfant d’âge préscolaire ont du mal à comprendre les raisons du connement parce qu’ils ne peuvent pas saisir la relation de cause à effet entre les microbes et la maladie. L’enfant plus âgé comprend mieux la causalité, mais il a tout de même besoin d’information pour calmer son imaginaire ou désamorcer les malentendus.

CE QU’IL FAUT RETENIR

L’isolement peut être perçu comme une punition.

CONSEIL CLINIQUE

Il est possible de faire participer l’enfant en isolement à la mise en place des mesures de prévention en lui demandant, par exemple, de dessiner une afchette pour sa porte indiquant les précautions à prendre avant d’entrer dans la chambre.

Lorsqu’un enfant doit être placé en isolement, il est essentiel de le préparer. Avec un jeune enfant, la meilleure approche consiste en une explication simple, comme : « Tu as besoin d’être dans cette chambre pour pouvoir aller mieux ; c’est un endroit spécial pour faire

13

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 13.12

Congé d’un centre de soins ambulatoires

Avant que le congé soit accordé à l’enfant qui a reçu des soins dans un centre ambulatoire, l’inrmière doit : • Expliquer aux parents que toutes les instructions leur seront également remises par écrit pour qu’ils puissent s’y référer plus tard. Leur remettre les dépliants d’information préparés par le centre lorsqu’il y en a.

• Parler, si nécessaire, des nausées et des vomissements, en expliquant clairement ce qui est normal et ce qu’il faut faire lorsque le problème devient excessif (p. ex., « Jean peut avoir mal au cœur et vomir, c’est normal ; par contre, s’il vomit plus de trois fois, il faut téléphoner immédiatement à ce numéro »).

• Fournir une vue d’ensemble de l’évolution typique vers la guérison (schéma habituel du processus) (p. ex., « Marie va probablement dormir tout le reste de la journée et se sentir un peu fatiguée demain, mais elle sera capable de reprendre ses activités habituelles après-demain »).

• Préciser les mesures à prendre en cas de èvre ou en vue d’améliorer le confort de l’enfant, en expliquant quelle température est considérée comme normale et ce qu’il faut faire si elle grimpe au-delà de telle zone.

• Dénir quelles seront les activités permises à l’enfant (p. ex., se reposer au lit, prendre un bain) et ce qui lui sera interdit.

• Expliquer le type de douleur ou d’inconfort susceptible d’être ressenti par l’enfant en donnant des indications précises sur son intensité et sa localisation, et préciser la conduite à adopter si l’enfant éprouve des douleurs qui dépassent ce niveau ou si les interventions pour soulager la douleur ont échoué.

• Discuter des restrictions alimentaires en expliquant précisément, à l’aide d’exemples, ce qu’est un liquide clair ou ce que signie une diète entièrement liquide.

Chapitre 13

Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation

557

ENCADRÉ 13.12

Congé d’un centre de soins ambulatoires (suite)

• Dénir avec précision les modalités du soulagement de la douleur, y compris la posologie des médicaments à utiliser, la façon de les administrer et les effets indésirables. • Remettre aux membres de la famille une échelle de douleur à apporter à la maison et expliquer à ses membres son utilisation. • Enseigner aux parents des mesures non pharmacologiques appropriées pour accroître le confort (massage, bain, compresses froides ou chaudes) ou diverses autres stratégies (emmailloter l’enfant, le bercer). • Administrer à l’enfant tout médicament antidouleur prescrit avant son départ du centre ou de l’unité. • Fournir l’information sur chaque médicament que l’enfant aura à prendre à la maison : – Passer en revue les détails, y compris la posologie et le mode d’administration. – Faire une démonstration de la façon d’administrer les médicaments, au besoin (p. ex., comment extraire le suppositoire de son emballage et l’insérer). • Remettre les prescriptions médicales à la famille avant le congé. • Expliquer la marche à suivre pour renouveler les ordonnances.

Le triangle de l’évaluation pédiatrique est un outil qui permet à l’inrmière d’évaluer rapidement l’état de l’enfant (aspect général, respiration et circulation). Il est présenté dans Le triage à l’urgence : lignes directrices pour les inrmières au triage à l’urgence, disponible sur le site Web de l’Ordre des inrmières et inrmiers du Québec au www.oiiq.org.

• Vérier avec la famille et l’enfant s’ils ont d’autres questions, et y répondre avant leur départ. • Aider la famille à se préparer pour un transport sécuritaire vers la maison en offrant les suggestions suivantes : – Rappeler à la famille de boucler la ceinture de sécurité de l’enfant ou de le placer dans un siège d’auto pour enfant. – Encourager la présence d’une personne ayant pour seule responsabilité d’aider à assurer la sécurité et le confort de l’enfant durant son transport. – Parler des mesures que le chauffeur pourrait devoir prendre si cela est impossible (p. ex., prendre un chemin permettant de rouler moins vite et de s’arrêter en bordure de route si nécessaire). – Fournir un bassin ou un sac de plastique en cas de vomissement. – Avoir dans l’auto une couverture et un oreiller. – Utiliser une tasse avec couvercle et une paille pour que l’enfant boive des liquides, sauf dans les cas d’une intervention chirurgicale orofaciale, auquel cas la paille peut être contre-indiquée.

• Préciser quelles sont les complications pouvant survenir et les étapes à suivre, le cas échéant.

– Toujours utiliser les systèmes de retenue de sécurité de l’auto.

disparaître tous les microbes ». Montrer à l’enfant le masque, les gants et la blouse de protection, et l’encourager à les porter, à s’habiller avec ces accessoires an de réduire la peur qu’il pourrait ressentir à la vue des personnes ressemblant à des fantômes amenés à entrer dans sa chambre. Avant de pénétrer dans une chambre, l’inrmière et les autres membres du personnel doivent se présenter et laisser l’enfant voir leur visage avant de mettre un masque. De cette façon, l’enfant les associe à des expériences signicatives et acquiert un sentiment de familiarité dans un environnement par ailleurs étrange et solitaire.

Service des urgences

Selon les raisons de la consultation, l’admission à l’urgence peut représenter une expérience très

Partie 5

• Informer la famille si elle sera contactée pour un suivi au sujet de l’enfant (lorsque cette procédure est appliquée dans le centre), mais qu’il ne faut pas hésiter à appeler plus tôt si des inquiétudes surviennent avant ce moment.

• Enseigner les soins à effectuer durant la convalescence, et s’assurer que la famille possède tout l’équipement et le matériel dont elle aura besoin à la maison (p. ex., la gaze et le ruban adhésif pour refaire les pansements).

13.7.3

558

• Fournir des numéros de téléphone d’urgence que la famille pourra utiliser en cas de doute sur la conduite à suivre.

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

traumatisante pour l’enfant et pour ses parents. La déclaration soudaine de la maladie ou la survenue d’une blessure laisse peu de temps pour la préparation et les explications. Parfois, l’admission à l’urgence se complique d’une admission à l’unité des soins intensifs ou du besoin d’une intervention chirurgicale immédiate. Cependant, même dans les circonstances qui ne demandent qu’une visite externe à l’urgence, l’enfant est exposé à un environnement étrange et effrayant, et à des expériences qui peuvent susciter la peur ou causer de la douleur. La clientèle pédiatrique représente 22 % des visites à l’urgence. Ce sont le plus souvent les enfants de 5 à 18 ans qui y sont emmenés en consultation. Seulement 10 % des enfants reçus en consultation à l’urgence sont hospitalisés (ICIS, 2015).

Des collectes des données très exhaustives sont inappropriées dans les situations critiques. Le parent est habituellement le mieux placé pour décrire les changements de l’état de son enfant ou les modications de son comportement. Un travail de concert avec les parents permet une évaluation plus précise de l’enfant. Dans de tels cas, l’inrmière doit effectuer un triage rapide et adéquat, et compléter le processus de collecte de données lorsque l’état de l’enfant s’est stabilisé ENCADRÉ 13.13. Comme le service des urgences est en général un lieu où règne une certaine agitation, les interventions sont en général effectuées le plus rapidement possible afin de gagner du temps. Les quelques minutes additionnelles nécessaires pour permettre à l’enfant de participer contribuent parfois à épargner bien d’autres minutes de résistance inutile et de non-coopération durant les interventions subséquentes. Comme le counseling préparatoire pour une hospitalisation d’urgence est impossible, la mise en place d’une postvention comporte une valeur thérapeutique. Le processus de la postvention comprend l’évaluation des pensées et des sentiments de l’enfant concernant l’admission, et les interventions qui y ont été associées. L’inrmière s’appuie sur ce que l’enfant a déjà compris pour lui transmettre ensuite de l’information additionnelle.

fois pour l’enfant et pour ses parents FIGURE 13.10. Les agents stressants pour l’enfant et sa famille sont décrits dans le TABLEAU 13.11. Il est important que l’inrmière soit attentive au stress que vivent les parents. Cette attitude contribue à diminuer leur anxiété et a des répercussions positives sur leur perception de la situation. L’évaluation de leur degré de stress devrait être répétée périodiquement an de tenir compte de l’évolution de l’état de santé de l’enfant et des modications de leur perception dans le temps. La durée moyenne des hospitalisations chez les enfants admis dans une USIP est de 14 jours (Hagstrom, 2017). Les besoins psychologiques de la famille sont de la plus haute importance lorsqu’un enfant est admis à l’USIP. Les interventions décrites précédemment s’appliquent ici, mais des mesures additionnelles peuvent également être bénéfiques tant pour la famille que pour l’enfant ENCADRÉ 13.14.

Unité de soins intensifs pédiatriques

Les parents d’un enfant hospitalisé dans une USIP souhaitent que l’inrmière qui s’occupe de leur enfant le fasse en exprimant, par ses gestes, son intérêt pour lui, tout en étant sensible aux besoins de la famille. Ils désirent qu’elle parle à leur enfant ou qu’elle le touche comme ils le feraient eux-mêmes (Abuqamar, Arabiat et Holmes, 2016). Les comportements attentionnés de l’inrmière et l’affection qu’elle témoigne à l’enfant sont perçus comme des facteurs contribuant à réduire le stress.

L’admission dans une unité de soins intensifs pédiatriques (USIP) peut être traumatisante à la

Lorsque les parents rendent visite à leur enfant à l’USIP, ils ont besoin d’être préparés à

13.7.4

13

Pratiques inrmières ENCADRÉ 13.13

Prendre en charge l’admission dans une situation critique de santé

Les longues procédures préparatoires à l’admission sont souvent impossibles à appliquer et inappropriées dans les situations critiques de santé. Il faut donc : • Concentrer l’évaluation sur l’aspect général, la respiration et la circulation.

• Déterminer l’âge de l’enfant et faire preuve de juge­ ment quant à son âge de développement (si l’enfant est d’âge scolaire, demander le niveau scolaire atteint permettra une certaine évaluation de ses capacités intellectuelles).

• Donner à l’enfant l’occasion de participer à ses soins pour lui permettre de conserver un sentiment de maîtrise, sauf dans les cas d’extrême urgence.

• Recueillir de l’information sur l’état général de santé de l’enfant, tout problème susceptible d’interférer avec le traitement médical (p. ex., des allergies, une prise de médication) ainsi que ses antécédents d’hospitalisation.

• Employer le nom de l’enfant et non des termes comme chéri ou mon chou.

• Obtenir de l’information sur les manifestations cliniques auprès des parents et de l’enfant lui­même.

• Peser l’enfant dès que possible en vue du calcul des doses de médicaments.

Chapitre 13

Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation

559

l’apparence de leur enfant et de son environnement. Idéalement, l’inrmière devrait accompagner les parents au chevet de l’enfant an de leur présenter le matériel ainsi que les différents instruments et alarmes. L’écoute de leurs émotions permet d’établir une relation de conance et de diminuer leur stress ; les parents trouvent aussi des réponses à leurs questions. En dépit des stress normalement associés à l’admission à l’USIP, un sentiment spécial de sécurité se manifeste en raison du fait que l’enfant y est attentivement surveillé et qu’il y reçoit des soins personnalisés.

FIGURE 13.10 La nature et la gravité de la maladie ainsi que les circonstances entourant l’admission sont des agents stressants majeurs.

TABLEAU 13.11

Agents stressants pour l’enfant et pour sa famille à l’unité de soins intensifs pédiatriques

TYPE D’AGENT STRESSANT

MANIFESTATIONS

Physique

• Douleur et inconfort (injections, intubation, aspiration, changements de pansements, autres interventions invasives) • Immobilité (contention, repos au lit) • Manque de sommeil • Incapacité de manger ou de boire • Modication des habitudes relatives à l’élimination

Environnemental

• Environnement visuel non familier • Environnement sonore non familier : – Bruits produits par l’équipement (moniteurs, téléphone, appareil d’aspiration, nébulisateur) – Sons d’origine humaine (conversations, rires, pleurs, toux, gémissements, vomissements, bruits de pas) • Personnes non familières (professionnels de la santé, autres enfants hospitalisés, visiteurs) • Odeurs non familières et désagréables (alcool, solvant, odeurs corporelles) • Éclairage constant (perturbation des rythmes circadiens) • Activités en rapport avec d’autres enfants hospitalisés • Stress vécu par le personnel au cours de situations d’urgence

Psychologique

• Manque d’intimité • Incapacité à communiquer (lorsque l’enfant est intubé) • Connaissance et compréhension inadéquates de la situation • Inquiétude et incertitude devant la gravité de la maladie • Comportement parental (expression de l’inquiétude des parents)

Social

• Perturbation des relations interpersonnelles (en particulier avec la famille et les amis) • Inquiétudes concernant l’absence de l’école ou du travail • Privation du plaisir de jouer

Sources : Adapté de Hagstrom (2017) ; Rennick et al. (2014) ; Smith, Heey et Anand (2007).

560

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

Par conséquent, la planication de la transition dans une unité standard est essentielle et doit inclure : • l’assignation d’une inrmière attitrée à l’enfant dans l’unité standard (qui pourra expliquer à l’enfant et à sa famille que cette transition est positive, puisqu’elle signie une amélioration de l’état de santé) ;

• une explication des différences entre les deux unités et la raison pour laquelle l’enfant est transféré dans une unité où la surveillance de son état physique sera moins intense ; • le choix d’une chambre appropriée, située par exemple devant le poste de l’unité, et d’un compagnon de chambre avec lequel l’enfant aura certaines afnités.

Pratiques inrmières ENCADRÉ 13.14

Prendre en charge l’admission non prévue à l’unité de soins intensifs pédiatriques

• Aborder les modalités de l’admission non prévue à l’USIP avec l’enfant et ses parents en mettant l’accent principalement sur les aspects sensoriels de l’expérience et sur les préoccupations habituelles de la famille (personnes chargées des soins à l’enfant, horaire des visites, zone où la famille peut demeurer). • Préparer les parents quant à l’apparence de l’enfant ou à son comportement lorsqu’ils lui rendent visite pour la première fois à l’USIP : – Accompagner les parents au chevet de l’enfant pour leur fournir un soutien psychologique et répondre à leurs questions. – Préparer les frères et sœurs pour leur visite, et planier la durée de celle-ci ; surveiller leurs réactions pour leur éviter un choc trop important et an de mieux les soutenir. • Encourager les parents à demeurer avec l’enfant : – Fournir les horaires de visite par écrit aux membres de la famille. – Autoriser une certaine exibilité dans l’horaire pour s’adapter aux besoins des parents lorsque les heures de visite sont limitées. – Prêter attention aux besoins de la famille et suggérer des répits périodiques lorsque les heures de visite sont étendues. – Rassurer la famille en rappelant qu’il est possible d’appeler l’USIP en tout temps. • Encourager les parents à participer aux soins de l’enfant sans les submerger de responsabilités et dans les limites de leurs capacités et de leur volonté : – Aider l’enfant à prendre son bain ou à le faire manger. – Toucher l’enfant et lui parler. – Collaborer pendant les interventions. • Fournir de l’information au sujet de l’état de l’enfant dans un langage compréhensible : – Répéter l’information (l’anxiété diminue la concentration et la rétention de l’information).

• Parler à l’enfant au cours des interventions, même s’il est inconscient. • Évaluer et soulager la douleur régulièrement, en particulier lorsque l’enfant ne peut pas parler (dans le coma ou sous assistance respiratoire). • Établir une routine qui maintient une certaine similarité avec les événements quotidiens de la vie de l’enfant chaque fois que c’est possible : – Prévoir et regrouper les soins aux heures où l’enfant est habituellement éveillé. – Conserver un horaire régulier pour le coucher, ainsi que des moments tranquilles pendant lesquels la télévision et la radio sont éteintes ou que leur son est en sourdine. • Mettre en place des conditions propres à favoriser un bon sommeil : – Privilégier des activités favorisant le sommeil (musique douce, massage, etc.).

13

– Ouvrir et fermer les rideaux, et atténuer l’éclairage pour maintenir un cycle entre le jour et la nuit. – Tirer les rideaux autour du lit pour assurer l’intimité. – Respecter des cycles de sommeil ininterrompu (60 minutes pour un nourrisson, 90 minutes pour l’enfant plus âgé). – Soulager la douleur. – Aider l’enfant à déterminer le jour et l’heure ; prévoir une horloge et un calendrier que l’enfant plus âgé pourra observer facilement. • Planier dans l’horaire un moment où l’enfant sera laissé tranquille (durant la sieste ou la visite de la famille, pendant les périodes de jeu ou son émission favorite). • Fournir à l’enfant des occasions de jouer s’il est apte à le faire. • Réduire le degré de stimulation en provenance de l’environnement : – Éviter de parler ou de rire fort. – Maintenir le niveau sonore des équipements au minimum.

– Chercher à clarier ce qui est mal compris.

• Interrompre le fonctionnement des équipements autour du lit lorsqu’ils ne sont pas en usage (succion et oxygène).

– Donner de l’information à l’enfant et aux autres membres de la famille ; éventuellement, le faire en dehors de la chambre de l’enfant.

• Envoyer une carte à la famille en cas de décès (ce geste réconfortant est souvent apprécié).

Source : Adapté de Houle et Noiseux (2009).

Chapitre 13

Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation

561

Analyse d’une situation de santé Marc-André, âgé de 10 ans, a fait une chute en vélo tout-terrain il y a 1 heure. Il est actuellement au service des urgences avec ses deux parents. Il pleure et se plaint d’une douleur sous forme de brûlure à 8 sur 10 au quadrant inférieur droit de l’abdomen. Sa pression artérielle est de

Jugement clinique 130/90 mm Hg, sa fréquence cardiaque est de 100 batt./min, sa fréquence respiratoire est de 30 R/ min, sa température buccale est de 38,0 °C et sa saturation pulsatile en oxygène (SpO2) est à 96 %. L’abdomen est rougeâtre dans la partie inférieure droite, et l’enfant a quelques éraures sur les jambes.

Mise en œuvre de la démarche de soins

Collecte des données – Évaluation initiale – Analyse et interprétation 1. À qui devriez-vous poser vos questions pour commencer votre collecte des données initiales ? Justiez votre réponse. MAIS SI...

Si Marc-André souffrait d’un trouble décitaire de l’attention avec hyperactivité (TDAH), faudrait-il le questionner directement ? Justiez votre réponse. 2. Les parents de Marc-André s’inquiètent des valeurs de ses signes vitaux. Que devez-vous leur expliquer comme cause probable de la hausse des valeurs des signes vitaux de leur ls ? SOLUTIONNAIRE

Le médecin soupçonne que Marc-André a une perforation de l’intestin grêle et demande une échographie abdominale immédiatement. Si le diagnostic est conrmé, l’enfant devra subir une intervention chirurgicale réparatrice. Les parents vous posent plusieurs questions par rapport à l’examen et à l’éventuelle opération, et disent ne pas avoir bien compris les explications du médecin.

3. Qu’est-ce qui peut expliquer l’incompréhension des parents par rapport aux explications données par le médecin ? 4. Les parents de Marc-André sont très affectés par ce qui est arrivé à leur ls. Ils éprouvent de la nervosité et s’impatientent facilement lorsqu’on essaie de leur expliquer la suite de l’hospitalisation. Qu’est-ce qui peut expliquer leur réaction ?

Le résultat de l’échographie montre un léger épanchement sanguin dans la cavité abdominale ; Marc-André souffre d’une perforation intestinale. Il doit être dirigé rapidement en chirurgie pour une réparation par laparoscopie. Ses parents semblent être dépassés par le déroulement rapide des événements.

Planication des interventions – Décisions inrmières 5. Devriez-vous faire signer aux parents de Marc-André le consentement à l’intervention chirurgicale à ce moment-ci ? Justiez votre réponse.

562

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

Voici un extrait des notes d’évolution écrites dans le dossier de Marc-André : 2018-05-10 13:00 Les parents sont très inquiets au sujet de l’intervention que doit subir leur ls. Ils posent beaucoup de questions et disent qu’ils n’ont pas bien compris toutes les explications du médecin. Je réponds à leurs questions et leur réexplique ce qu’ils n’ont pas compris. Ils se disent rassurés par la suite. Permis opératoire signé.

6. Pourquoi cette note d’évolution est-elle inacceptable ?

Au retour de l’intervention, Marc-André a une sonde nasogastrique en drainage libre. Au premier jour postopératoire, la sonde nasogastrique peut être enlevée si elle n’est plus utile. Marc-André accuse toujours une douleur sous forme de brûlure à 4 sur 10 au quadrant inférieur droit chaque fois qu’il se mobilise. Il a reçu de la morphine par voie intraveineuse (I.V.) dans les 24 premières heures et peut recevoir de l’acétaminophène au besoin (p.r.n.) selon son poids.

7. La sonde nasogastrique peut être retirée. Les parents de Marc-André devraient-ils rester dans la chambre pour le rassurer au moment de l’intervention ? Justiez votre réponse. 8. Marc-André vous dit qu’il est incapable d’avaler les comprimés d’acétaminophène. Que pourriez-vous lui proposer alors ? 9. Après quelque temps, Marc-André se dit soulagé et demande à aller jouer dans la salle d’activités avec son compagnon de chambre du même âge. Devriez-vous lui permettre de s’y rendre ? Justiez votre réponse.

VU dans ce chapitre

Quelle activité pourriez-vous suggérer à Marc-André lorsqu’il se rend à la salle d’activités ?

Extrait de PTI CONSTATS DE L’ÉVALUATION Date

Heure



2018-05-10

15:30

2

Problème ou besoin prioritaire

Douleur aiguë à la mobilisation

Signature de l’inrmière

Initiales

Marjolaine Clément

M.C.

Programme / Service

Initiales

RÉSOLU / SATISFAIT Date

Heure

M.C.

Initiales

Professionnels / Services concernés

15:30

Signature de l’inrmière

Initiales

13 Extrait des notes d’évolution

Programme / Service

Chirurgie pédiatrique

10. Devriez-vous ajuster le plan thérapeutique inrmier (PTI) de Marc-André maintenant qu’il est soulagé de sa douleur ? Justiez votre réponse. 11. Les parents de Marc-André sont inquiets par rapport aux journées scolaires que leur ls manque. Que pouvezvous leur donner comme information à ce sujet ?

2018-05-10 15:30 Acc dler s rm d ûr à 4 r 10  quarnt nféier rt d ’bdme lrsq’  o.

Évaluation des résultats – Évaluation en cours d’évolution 12. Qu’est-ce qui pourrait laisser croire que l’hospitalisation de Marc-André n’est pas une expérience traumatisante pour lui et ses parents ?

Chapitre 13

Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation

563

Chapitre

14

Techniques de soins Écrit par : Terri L. Brown, MSN, RN, CPN Patricia M. Conlon, MS, APRN, CNS, CNP Adapté par : Stéphanie Lepage, inf., M. Sc. inf. Marie Antonacci, inf., B. Sc. (section 14.8.7, Réanimation cardiorespiratoire)

MOTS CLÉS

OBJECTIFS

Alimentation parentérale totale (APT) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 594 Atélectasie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 615 Contention . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 574 Déshydratation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 568 Étreinte thérapeutique . . . . . . . . . . . . . . . 578 Extravasation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 608 Fièvre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 569 Hyperpyrexie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 567 Hyperthermie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 569 Hypoxémie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 608 Hypoxie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 609 Infiltration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 608 Narcose au dioxyde de carbone . . . . . 609 Vésicant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 608

Après avoir étudié ce chapitre, vous devriez être en mesure :

Disponible sur • À retenir • Carte conceptuelle

• de décrire les procédures générales d’hygiène et de soins des enfants hospitalisés ; • de recourir à des techniques d’alimentation qui facilitent l’ingestion d’aliments et de liquides ; • de décrire les méthodes permettant de faire baisser la température d’un enfant souffrant de fièvre ou d’hyperthermie ; • d’effectuer un prélèvement d’échantillon selon la procédure propre à la clientèle pédiatrique ; • d’utiliser les méthodes sûres d’administration des médicaments par voies orale, parentérale, rectale, ophtalmique, auriculaire et nasale aux enfants ; • d’expliquer les responsabilités du personnel infirmier en matière de maintien de l’équilibre hydrique ; • d’effectuer les interventions adéquates de drainage bronchique postural et les soins liés à une trachéostomie ; • d’effectuer la réanimation cardiorespiratoire d’un enfant ; • de décrire les interventions requises pour l’administration d’une alimentation par sondes nasogastrique et nasojéjunale, par gastrostomie et par voie parentérale ; • de décrire les interventions requises pour l’administration d’un lavement et des soins liés à la stomie chez les enfants.

• Solutionnaires

Guide d’études – SA12

564

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

Cette carte conceptuelle illustre schématiquement les principaux concepts décrits dans le présent chapitre. Sa lecture vous permettra d’avoir une vue d’ensemble des notions qui y sont présentées.

dont

notamment

Techniques de soins

14

dont

dont

dont

dont

notamment

dont

dont

dont

dont

Carte conceptuelle

Chapitre 14

Techniques de soins

565

14.1

Hygiène

14.1.1

Soins de la peau

La peau de l’enfant subit d’innombrables changements entre l’étape du nouveau-né et l’âge de 18 ans (Schlüer, 2017). En milieu hospitalier, de nombreuses interventions risquent de provoquer des lésions cutanées, notamment le maintien d’un cathéter intraveineux (I.V.), le retrait d’un pansement, le repositionnement dans le lit, le changement des couches, l’application et le retrait d’électrodes, de même que le recours à des mesures de contention. Par conséquent, les soins de la peau ne peuvent se limiter à la toilette quotidienne ; ils doivent faire partie intégrante de chaque intervention inrmière ENCADRÉ 14.1.

14.1.2

Hygiène buccale

Il faut procéder à l’hygiène buccale quotidiennement, aussi bien à la maison qu’à l’hôpital. Un membre de la famille, le préposé aux bénéciaires ou l’inrmière doit prodiguer les soins buccaux aux nourrissons et aux enfants affaiblis. La plupart des enfants sont capables de se brosser eux-mêmes les dents, et il faut d’ailleurs les encourager à le

faire, mais certains ont besoin d’un peu d’aide ou ont tendance à oublier (American Academy of Pediatric Dentistry, 2014). Ainsi, l’inrmière doit parfois leur rappeler d’accomplir cette tâche et les aider, au besoin.

14.1.3

Bain

L’inrmière peut aider la famille à faire la toilette de la plupart des nourrissons et des enfants dans un bassin placé au chevet du lit, sur le lit ou dans la baignoire ou la douche, selon le cas. Elle peut utiliser la méthode des serviettes pour laver les nourrissons et les jeunes enfants alités : à l’aide de deux débarbouillettes trempées dans une solution savonneuse, puis dans une eau claire, l’inrmière lave délicatement le ventre du nourrisson placé sur une serviette, puis son dos. Si un pain de savon est utilisé, il est fortement conseillé de s’en débarrasser à la n du bain pour éviter la transmission d’éléments pathogènes présents dans les milieux hospitaliers (Marchaim, Taylor, Hayakawa et al., 2012). Les lingettes imbibées de gluconate de chlorhexidine employées pour les soins quotidiens des enfants séjournant aux soins intensifs semblent être une autre mesure efcace pour la prévention et le contrôle de la transmission

Techniques de soins ENCADRÉ 14.1

Procéder aux soins de la peau

• Garder la peau au sec et la protéger de l’excès d’humidité (p. ex., une incontinence urinaire ou fécale, un suintement des plaies, une transpiration excessive). • Utiliser un agent nettoyant doux comme un savon non alcalin ou un produit sans savon pour la toilette quotidienne. • Laver quotidiennement les yeux, la bouche, la région périnéale ou la région recouverte par les couches, selon le cas, ainsi que toutes les ulcérations cutanées. Garder les yeux propres, sans exsudat ; utiliser un coin de débarbouillette par œil. • Appliquer un produit hydratant pendant ou immédiatement après la toilette ; avant d’appliquer une nouvelle couche de crème, veiller à rincer la peau pour éliminer les résidus. • Éviter le plus possible d’utiliser des rubans ou des pansements adhésifs. Si la peau de l’enfant est très sensible, appliquer un protecteur cutané qui servira de barrière protectrice entre la peau et les rubans ou les pansements adhésifs. • Utiliser de l’eau ou un dissolvant d’adhésif pour enlever les rubans ou les pansements adhésifs, sauf si la peau de l’enfant est fragile. • Appliquer un pansement sur les abrasions. Ne pas toucher au pansement tant qu’il n’a pas commencé à se décoller, ou le garder en place de 5 à 7 jours avant de l’enlever. • Changer régulièrement les électrodes de place et inspecter soigneusement les régions de la peau qui sont en contact avec elles, minimalement toutes les 24 à 48 heures. Le fait d’appliquer un film protecteur

566

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

cutané sans alcool sous les électrodes permet de prévenir le décollement de l’épiderme au moment de leur retrait. • Éliminer les points de pression liés à l’équipement médical tels que les tubes de trachéostomie ou de gastrostomie, les fauteuils roulants et les attelles. • Lorsqu’un cathéter I.V. ou intra-artériel est mis en place sur la main ou le pied, s’assurer que l’ensemble de la main ou du pied est bien visible an de pouvoir détecter la présence d’œdème. • Utiliser une alèse pour déplacer l’enfant dans son lit ou le mettre sur une civière ; éviter de le faire glisser dans le lit en l’agrippant par les aisselles. • Repérer les enfants qui sont les plus susceptibles d’avoir des ulcérations cutanées. Utiliser des surfaces d’appui thérapeutiques (surmatelas, matelas dynamique à faible perte d’air, coussins en gel) destinées à réduire la pression ou à soulager les points de pression aux talons, aux coudes et aux régions occipitale et sacrale. • Utiliser des coussins et des oreillers pour favoriser une position neutre du corps. • Éviter de masser la peau rougie qui recouvre les saillies osseuses, car cela pourrait entraîner des lésions des tissus profonds ; veiller plutôt à diminuer la pression exercée sur ces régions. • Évaluer régulièrement l’état nutritionnel de l’enfant. Un enfant astreint à un régime nil per os (NPO), soit aucune ingestion par la bouche, et qui reçoit uniquement un soluté intraveineux pendant plusieurs jours, est susceptible de souffrir d’un déséquilibre nutritionnel qui risque de fragiliser sa peau. Il faut envisager l’alimentation entérale dans ce cas.

de micro-organismes multirésistants (Ortegón, Puentes-Herrera, Corrales et al., 2017 ; Unité d’évaluation des technologies et des modes d’intervention en santé [UETMIS] du CHU de QuébecUniversité Laval, 2017). Cette méthode n’est toutefois pas recommandée chez les enfants de moins de 28 jours, s’ils sont prématurés (Rupp, Huerta, Yu et al., 2013).

L’inrmière doit aider les enfants malades ou affaiblis ; cela dit, elle doit les encourager à participer le plus possible à leur toilette en veillant à ce qu’ils ne se surmènent pas pour autant. Ils prendront davantage d’initiatives à mesure qu’ils recouvreront leurs forces et leur endurance.

Si l’enfant ne peut pas rester assis, l’inrmière doit le soutenir en lui tenant la tête d’une main FIGURE 14.1. Si l’enfant n’a pas besoin d’aide pour rester assis dans la baignoire, elle doit le surveiller de près en tout temps. Elle placera un coussinet au fond de la baignoire pour l’empêcher de glisser ou de perdre l’équilibre.

Les cheveux d’un enfant doivent être démêlés et brossés au moins une fois par jour. Il faut coiffer l’enfant en pensant d’abord et avant tout au confort de celui-ci, et en respectant ses préférences. Dans le cas des procédures qui exigent de couper les cheveux de l’enfant, l’inrmière ne doit pas le faire sans l’autorisation de celui-ci ou de sa famille. Elle peut toutefois être obligée de lui couper quelques mèches pour exposer son crâne et faciliter la mise en place d’un cathéter I.V.

Pendant la toilette, il faut porter une attention particulière aux oreilles, au cou, au dos ainsi qu’aux régions génitale et périnéale. L’inrmière doit laver et sécher soigneusement la région génitale en insistant sur les replis de la peau. Chez les garçons non circoncis qui ont plus de trois ans, elle doit veiller à découvrir délicatement le gland, à le laver, puis à le recouvrir du prépuce. Si l’état du gland dénote une mauvaise hygiène (p. ex., une accumulation de smegma, une inammation), que le prépuce adhère au gland ou à la verge, ou encore que l’enfant souffre de phimosis 19 , elle doit lui enseigner la bonne technique. L’inrmière doit rappeler gentiment aux enfants plus vieux de laver leurs parties génitales, car ils ont tendance à les négliger pendant la toilette. Les enfants d’âge scolaire et les adolescents peuvent prendre une douche ou un bain. C’est à l’inrmière de décider dans quelle mesure elle doit les surveiller. Si certains sont capables de faire leur toilette seuls, d’autres auront besoin d’aide. Les enfants qui ont un décit cognitif, une limitation physique, un trouble psychotique ou un comportement suicidaire, ou ceux qui risquent de s’iniger des blessures, doivent faire l’objet d’une étroite surveillance.

FIGURE 14.1 Pendant le bain, l’inrmière doit soutenir la tête de l’enfant s’il est incapable de s’asseoir seul.

14.1.4

Hygiène capillaire

Si l’hospitalisation dure plusieurs jours, un préposé doit également laver les cheveux de l’enfant. Pour la plupart des enfants, un lavage des cheveux une ou deux fois par semaine suft, à moins que des lavages plus fréquents ne soient indiqués, par exemple en cas d’hyperpyrexie ou de diaphorèse. Comme les sécrétions de sébum sont plus importantes durant l’adolescence, la fréquence des soins capillaires et des shampoings doit être plus élevée que chez les jeunes enfants.

14.2

Alimentation

14.2.1

Perte d’appétit

Phimosis : Étroitesse de l’orice du prépuce qui empêche de découvrir le gland. 19 Le phimosis est notamment traité dans le chapitre 19, Troubles liés au système génito-urinaire.

14

Une perte d’appétit accompagne généralement la plupart des maladies de l’enfance. Comme les maladies aiguës sont en principe de courte durée, l’état nutritionnel s’en trouve rarement altéré. S’il faut obliger un enfant malade à manger, il risque d’avoir la nausée ou de vomir. Lorsque c’est possible, il peut être permis à l’enfant d’évaluer luimême ses besoins. Toutefois, l’alimentation est l’un des seuls aspects de sa vie qu’un enfant malade peut utiliser comme moyen de contrôle dans une situation qu’il ne maîtrise pas. Chez le nourrisson ou le trottineur, la perte d’appétit peut être liée à la tristesse provoquée par la séparation d’avec les parents. Forcer l’enfant à manger l’incitera à se rebeller. En cas d’affection aiguë, l’inrmière doit donc encourager les parents à ne pas forcer l’enfant à manger. Idéalement, elle doit inciter l’enfant à consommer des aliments très nutritifs, mais il préférera peutêtre des aliments qui ne lui apportent essentiellement que des calories vides ENCADRÉ 14.2. En général, les enfants ne se font pas prier pour consommer de la gelée, des potages clairs ou des consommés, des boissons gazeuses, des Chapitre 14

Techniques de soins

567

Pratiques inrmières ENCADRÉ 14.2

Surveiller l’alimentation de l’enfant malade

• Se renseigner sur les habitudes alimentaires de l’enfant de façon à reproduire le plus possible ce qui se passe à la maison à l’heure des repas. • Encourager les parents ou d’autres membres de la famille à nourrir l’enfant ou, à tout le moins, à être à ses côtés à l’heure des repas. • Faire en sorte que les repas soient des moments agréables ; s’abstenir d’effectuer des interventions immédiatement avant ou après ceux-ci ; veiller à ce que l’enfant soit reposé et qu’il n’éprouve aucune douleur. • Servir fréquemment à l’enfant des repas légers au lieu de lui donner trois repas copieux, ou lui servir trois repas par jour en lui donnant des collations nutritives entre ceux-ci. • Si l’enfant est très jeune, opter pour des aliments qu’il peut prendre avec les doigts (bouchées, croquettes, hors-d’œuvre, etc.).

• Opter pour des aliments dont raffolent la plupart des enfants (sandwich au beurre d’arachide et à la conture, macaroni au fromage, pizza, spaghetti, poulet frit, maïs et yogourt aux fruits). • Éviter les aliments très relevés, les plats qui ont une forte odeur et les mélanges, sauf si l’enfant a l’habitude d’en manger à la maison. • Opter pour des boissons dont raffolent la plupart des enfants (punch aux fruits, frappé aux fruits, sucette glacée, sorbet, crème glacée, lait, lait frappé, crème-dessert, gelée, potage clair et crème de légumes). • Servir à l’enfant des collations nutritives (crème-dessert ou yogourt glacé, crème glacée, biscuit à l’avoine ou au beurre d’arachide, chocolat chaud, fromage en tranches, légumes crus ou fruits frais, fruits secs et céréales). • Agrémenter les repas pour qu’ils soient plus appétissants.

• Permettre à l’enfant de participer à l’établissement du menu et à la préparation des repas, dans la mesure du possible.

– Adopter la formule pique-nique pour le dîner en mettant la nourriture dans un sac en papier.

• Servir à l’enfant de petites portions et présenter chaque plat séparément. Par exemple, lui servir de la soupe en entrée, puis un plat principal (viande, légumes et pommes de terre) et enn le dessert.

– Décorer le contenant du repas.

– Si l’enfant est très jeune, user de certains artices pour lui donner l’impression qu’il y a peu de nourriture dans son assiette (p. ex., couper de petits morceaux de viande ou plier les tranches de fromage en deux). – Demander à l’enfant s’il veut être resservi. • Veiller à ce que l’assiette de l’enfant contienne des aliments variés aux textures et aux couleurs différentes.

CE QU’IL FAUT RETENIR

L’inrmière doit être consciente du risque de déshydratation généralement associé à la èvre et à la perte d’appétit, surtout en présence de vomissements et de diarrhée.

Jugement

clinique

– Opter pour des pailles aux couleurs vives et aux formes inhabituelles. • Féliciter l’enfant s’il a mangé quelque chose. • S’abstenir de punir l’enfant en le privant de dessert ou en le mettant au lit s’il n’a pas mangé.

L’enfant recouvrera progressivement l’appétit à mesure que son état s’améliorera (Shaughnessy et Kirkland, 2016). L’inrmière peut servir des collations et des aliments nutritifs. Les parents peuvent aussi stimuler son appétit en lui apportant des plats faits à la maison, en particulier si leurs habitudes alimentaires diffèrent beaucoup des menus offerts à l’hôpital. S’il y a lieu, une nutritionniste pourra être consultée an de proposer d’autres choix alimentaires.

Jean-Simon est hospitalisé en pédiatrie pour une déshydratation secondaire à une gastroentérite. Il n’a plus de selles diarrhéiques depuis ce matin. Les précautions universelles sufsent-elles pour prévenir la transmission de la gastroentérite de Jean-Simon à d’autres enfants hospitalisés et au personnel ? Justiez votre réponse.

Partie 5

– Découper les sandwichs en bâtonnets.

sucettes glacées, des biscottes et des craquelins. Ces produits ne sont pas très nutritifs, mais ils permettent au moins aux enfants d’ingérer sufsamment de liquides et de calories.

La mère de Jean-Simon demande ce que signie le carton « Précautions liées au contact » afché sur la porte de la chambre de son garçon. Quelle explication faut-il lui donner à ce sujet ?

568

– Disposer des légumes en forme de visage ou de eur sur les hamburgers ou les sandwichs.

14.2.2

Déshydratation

L’infirmière doit être consciente du risque de déshydratation généralement associé à la èvre et à la perte d’appétit, surtout en présence de vomissements et de diarrhée. Pour prévenir la déshydratation, elle doit offrir régulièrement à l’enfant une petite quantité de liquide, particulièrement les

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

boissons qu’il aime bien, et lui donner des aliments salés qui stimulent la soif, si son état le permet. Si l’enfant a la diarrhée, l’inrmière doit éviter de lui donner des boissons ou des aliments ayant une forte teneur en sucre comme des boissons gazeuses, des gelées et des sucettes glacées, car ces derniers risquent d’aggraver son état par un effet osmotique. Par ailleurs, le fait de donner de l’eau ou du bouillon non dilué à un enfant pour combler des pertes liquidiennes excessives risque d’aggraver un déséquilibre électrolytique. Sauf lors de situations particulières (p. ex., un bébé qui doit boire absolument toutes les trois heures), il ne faut pas forcer l’enfant à boire ni le réveiller pour le faire boire. Forcer l’ingestion de liquides peut causer les mêmes problèmes que s’il s’agit d’aliments non désirés. En général, l’inrmière obtiendra de bien meilleurs résultats en se montrant persuasive et en proposant à l’enfant une boisson qu’il aime particulièrement. Elle peut aussi avoir recours au jeu pour l’inciter à boire.

14.2.3

Régime alimentaire particulier

Si un enfant doit respecter un régime alimentaire particulier, par exemple une diète liquide après une intervention chirurgicale ou en cas de diarrhée, il est essentiel que l’infirmière mesure

Les observations faites par l’inrmière lui permettent de planier des activités qui stimulent l’appétit de l’enfant (p. ex., l’enfant mange bien lorsqu’il est en compagnie d’autres enfants, mais il joue avec la nourriture quand il mange seul). Enn, l’hospitalisation est le moment idéal pour évaluer les connaissances des membres d’une famille en matière de nutrition et pour leur enseigner, au besoin, les principes d’une bonne alimentation ENCADRÉ 14.3.

14.3

Fièvre et hyperthermie

L’élévation de la température centrale, en général de la èvre et parfois de l’hyperthermie, est l’un des symptômes fréquemment observés chez les enfants malades et l’un de ceux qui inquiètent le plus les parents. C’est l’hypothalamus qui régule la température corporelle. Il agit comme un thermostat en maintenant la température corporelle entre 35,5 et 38,0 °C (Leduc et Woods, 2017) TABLEAU 14.1. La température dite normale est difcile à établir, puisqu’elle varie en fonction de l’heure de la journée (plus haute en n de journée et plus basse la nuit). Par ailleurs, on doit tenir compte de l’âge de l’enfant pour le choix de la méthode à privilégier pour la prise de la température TABLEAU 14.2. L’hyperthermie et la fièvre sont le résultat de l’augmentation de la température corporelle au-dessus de 38 °C, conséquence d’une élévation de la température centrale dans l’hypothalamus. Toutefois, il faut distinguer la èvre de l’hyperthermie. La èvre est une réponse immunitaire, la thermorégulation secondaire à un agent pyrogène (infectieux ou viral). C’est un moyen de défense de l’organisme. L’hyperthermie est une réaction à un environnement où la température ambiante est élevée, à un travail musculaire intense et à l’insufsance d’apports hydriques par la thermogenèse TABLEAU 14.3. La prise en charge de l’élévation de la température corporelle dépend de la nature de celle-ci,

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 14.3

Régime alimentaire

L’inrmière peut favoriser le respect du régime alimentaire en incitant les parents à : • noter dans un journal tout ce que l’enfant mange ; • utiliser une tasse graduée pour mesurer systématiquement la quantité de liquide et d’aliments donnée à l’enfant ;

à savoir la fièvre ou l’hyperthermie. Étant donné que la valeur de référence du thermostat hypothalamique demeure inchangée dans le cas de l’hyperthermie, mais qu’elle augmente dans le cas de la èvre, les stratégies employées pour abaisser la température corporelle ne sont pas les mêmes.

• comparer les apports alimentaires des repas an de déceler d’éventuels désé­ quilibres, par exemple une consommation insufsante de viande et de légumes ; • être attentif au comportement adopté par l’enfant au cours des repas, car celui­ci peut révéler certains facteurs qui inuent sur son appétit (fatigue, anxiété, stress).

clinique

Jugement

l’apport alimentaire et qu’elle évalue la capacité de l’enfant à passer à des aliments plus complexes. Quel que soit le type de régime alimentaire prescrit, une responsabilité importante de l’inrmière consiste à tenir un registre de la consommation alimentaire de l’enfant. Les descriptions doivent être dèles et détaillées ; l’inrmière écrira, par exemple, que l’enfant a consommé 125 mL de jus d’orange, une crêpe et 250 mL de lait. Elle ne doit pas se contenter de faire des remarques vagues telles que « A bien mangé » ou « N’a pas bien mangé ». Dans le même ordre d’idées, il est peu utile d’indiquer le pourcentage de nourriture consommée, sauf si la quantité de nourriture a été mesurée avant de servir l’enfant.

De quelle façon l’inrmière doit­elle exposer le tympan de Malec, un garçon de 6 ans, lors du contrôle de la tempé­ rature avec un thermomètre tympanique ? a) En tirant le pavillon de l’oreille vers le haut et l’arrière. b) En tirant le milieu du pavillon de l’oreille vers le bas et l’arrière. c) En insérant la lentille dans l’angle du conduit auditif. d) En insérant la lentille dans le conduit auditif et en effectuant des mouvements circulaires.

Chez un enfant qui se trouve dans un état critique, toute élévation de la température corporelle, qu’il s’agisse d’une èvre ou d’une hyperthermie, doit être prise en charge de manière énergique. Le métabolisme basal augmente de 13 % chaque fois que la température augmente de 1 °C, et il peut tripler, voire quintupler à cause des frissons (Potter et Perry, 2016). Or, toute augmentation du métabolisme basal rehausse les besoins en oxygène ainsi que les besoins liquidiens et caloriques, ce qui peut se révéler dangereux si les systèmes

TABLEAU 14.1

Températures normales

MÉTHODE

TEMPÉRATURES NORMALES

Rectale

36,6­38,0 °C

Tympanique

35,8­38,0 °C

Buccale

35,5­37,5 °C

Axillaire

36,5­37,5 °C

Source : Leduc et Woods (2017).

TABLEAU 14.2

Méthodes recommandées pour mesurer la température, selon l’âge

ÂGE

MÉTHODES RECOMMANDÉES

De la naissance à 2 ans

• Rectale (indiquée)

De 2 à 5 ans

• Rectale (indiquée)

• Axillaire (dépistage des enfants vulnérables) • Axillaire, tympanique (ou de l’artère temporale en milieu hospitalier)

Plus de 5 ans

• Buccale (dénitive) • Axillaire, tympanique (ou de l’artère temporale en milieu hospitalier)

Source : Leduc et Woods (2017).

Chapitre 14

Techniques de soins

569

14

PHARMACOVIGILANCE

L’acide acétylsalicylique ne devrait pas être utilisé chez les enfants qui ont la grippe ou la varicelle en raison du risque de provoquer un syndrome de Reye.

CE QU’IL FAUT RETENIR

La èvre d’origine virale n’augmente pas nécessairement la numération des globules blancs.

TABLEAU 14.3

cardiovasculaire ou nerveux sont atteints. Dans tous les cas d’élévation de la température, l’inrmière doit veiller à ce que l’enfant reçoive sufsamment de liquides. Si les besoins de celui-ci augmentent, il suft en principe de lui donner davantage de liquides.

14.3.1

Traitement de la èvre

La èvre étant occasionnée par une bactérie ou un virus, des antibiotiques ou des antiviraux sont parfois nécessaires. Chez l’enfant, la èvre étant généralement d’origine virale et de courte durée, elle a des conséquences modérées. La èvre d’origine virale n’augmente pas nécessairement la numération des globules blancs. Le but premier du traitement de la èvre est le soulagement du malaise qu’elle occasionne. Le traitement peut être

Différence entre èvre et hyperthermie FIÈVRE (OU PYREXIE)

HYPERTHERMIE

Dénition

État qui se manifeste lorsque les processus de perte de chaleur ne sont pas en mesure de s’adapter à la surproduction de chaleur, ce qui entraîne une température corporelle anormalement élevée.

Élévation de la température corporelle sans modication du seuil de température hypothalamique.

Thermorégulation

Augmentation du seuil de la thermorégulation

Surcharge des processus thermorégulateurs du corps

Causes

• Réponse immunitaire à un agent pyrogène (infectieux ou viral), à un allergène ou à certaines maladies auto-immunes ou tumorales

• Consécutive à des facteurs externes : – Coup de chaleur – Effets toxiques de l’aspirine – Augmentation du métabolisme en raison de convulsions ou d’une hyperthyroïdie • Incapacité de l’organisme à dissiper l’excès de chaleur (environnement chaud et humide)

Manifestations cliniques

• Peau froide et pâle

• Peau chaude et sèche

• Somnolence

• Faiblesse, fatigue généralisée

• Irritabilité

• Vertiges, étourdissements

• Frissons

• Nausées ou vomissements • Maux de tête

Approche thérapeutique

• Hydratation

• Minimum de vêtements

• Antipyrétique

• Circulation d’air accrue • Matelas hypothermique • Couverture ou compresses froides

Source : Potter et Perry (2016).

570

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

pharmacologique ou non pharmacologique. Le traitement par les antipyrétiques demeure l’intervention la plus efcace. L’inrmière doit proter de la présence des parents à l’hôpital pour leur enseigner à soulager la èvre de leur enfant à la maison ENCADRÉ 14.4.

Traitement pharmacologique La classe des antipyrétiques comprend l’acétaminophène (TylenolMD), l’acide acétylsalicylique (AspirinMD) et les anti-inammatoires non stéroïdiens (AINS) tel l’ibuprofène. L’acétaminophène est l’antipyrétique de prédilection. La dose recommandée est de 10 à 15 mg/kg/dose à donner toutes les 4 à 6 heures, pour un maximum de 65 mg/kg/ jour pour les nouveau-nés ou de 75 mg/kg/jour pour les enfants, soit un maximum de 5 doses en 24 heures. L’ibuprofène est le seul AINS en vente libre qui est indiqué pour le soulagement de la èvre, et ce, dès l’âge de 6 mois. La dose recommandée est de 10 mg/kg/dose toutes les 6 heures, pour un maximum de 4 doses en 24 heures (Chiappini, Bortone, Galli et al., 2017). L’atténuation de la èvre par les antipyrétiques dure en principe de 6 à 8 heures et elle est fonction de la dose prescrite. Étant donné que la température corporelle diminue durant la nuit, 3 ou 4 doses par jour sufsent pour calmer la èvre dans la plupart des cas. L’inrmière peut prendre la température de l’enfant 30 minutes après lui avoir administré un antipyrétique pour évaluer l’efcacité de ce dernier, mais il n’est pas nécessaire de la reprendre fréquemment par la suite (Jayawardena et Kellstein, 2016). Les sensations éprouvées par l’enfant sont le meilleur facteur à prendre en considération pour décider de poursuivre le traitement antipyrétique.

Mesures environnementales Pour soulager la èvre, l’inrmière peut avoir recours à des mesures environnementales telles que vêtir minimalement l’enfant, lui donner un bain tiède ou installer un ventilateur près de lui. Toutefois, ces mesures doivent être bien tolérées par l’enfant et ne pas provoquer de frissons. Ceuxci sont une manifestation de l’augmentation de la production de chaleur qui contribue à maintenir la nouvelle valeur de référence du thermostat hypothalamique. Ils augmentent les besoins métaboliques qui sont déjà plus élevés que la normale en raison de la èvre. Les méthodes environnementales ne sont pleinement efcaces pour diminuer la température qu’environ une heure après l’administration d’un antipyrétique. Elles ne permettent qu’une diminution temporaire de la température, puisqu’elles n’abaissent pas le seuil de température hypothalamique, ce que fait l’antipyrétique.

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 14.4

4

Fièvre : savoir la reconnaître et la traiter

L’inrmière peut montrer aux parents à prendre la température de leur enfant et à bien lire les résultats afchés sur le thermomètre 4 . Si l’emploi de l’acétaminophène ou de l’ibuprofène est indiqué, l’inrmière doit expliquer aux parents comment administrer ces antipyrétiques. Elle doit insister plus particulièrement sur la nécessité de respecter la dose prescrite et les intervalles entre chaque dose. L’inrmière doit s’assurer que les parents comprennent bien ce qu’ils doivent faire en cas d’urgence. Le parent doit se rendre chez le médecin rapidement si : • l’enfant a moins de 2 mois et a une température rectale de 38 °C et plus ;

ressemblent à des ecchymoses, une rigidité de la nuque, des vomissements persistants, un état de confusion ou un problème respiratoire. Le parent doit appeler le médecin si : • la èvre est entre 40 et 40,6 °C, particulièrement si l’enfant a moins de 2 ans ;

Les méthodes de prise de température et les différents types de thermomètres sont présentés dans le chapitre 4, Examen clinique : anamnèse et examen physique.

• l’enfant a de la èvre depuis plus de 24 heures sans cause possible ou sans signe d’infection ; • l’enfant a de la èvre depuis plus de 3 jours ; • l’enfant se plaint de sensations de brûlement ou de douleur lorsqu’il urine ; • l’enfant a des antécédents de convulsions fébriles ;

• la èvre est plus élevée que 40,6 °C ;

• la èvre est disparue et revient après 24 heures ;

• l’enfant présente une somnolence et une irritabilité persistantes, des éruptions cutanées bleutées qui

• l’état de l’enfant l’inquiète.

Source : Adapté de American Academy of Pediatrics (2016). Fever without Fear : Information for Parents. Repéré à www.healthychildren.org/English/ health-issues/conditions/fever/Pages/Fever-Without-Fear.aspx.

La èvre donne lieu à des convulsions chez 2 à 5 % des enfants, en particulier ceux âgés de 6 mois à 6 ans (Carapetian, Hageman, Lyons et al., 2015). S’il est vrai que, dans la plupart des cas, les convulsions fébriles ne se manifestent qu’une seule fois, certains facteurs individuels tels que l’apparition à un très jeune âge ou des antécédents familiaux de convulsions fébriles sont associés à des épisodes récurrents (Shinnar, Pellock, Berg et al., 2001 ; Whelan, Harmelink, Chou et al., 2017). Il n’y a guère de données probantes qui étayent l’emploi des antipyrétiques dans la prévention des convulsions fébriles. Lors de convulsions fébriles, l’inrmière doit essentiellement assurer la sécurité de l’enfant et le réconforter (Mewasingh, 2014). En cas de convulsions prolongées, le principal objectif du traitement consiste à interrompre les convulsions et, ce faisant, à prévenir les lésions cérébrales. Les convulsions qui durent plus de 5 à 10 minutes risquent de se prolonger pendant au moins 30 minutes. Il est donc essentiel d’agir rapidement an de les contrôler. Lorsqu’un enfant atteint de convulsions tonicocloniques (contractions et raidissements soudains des muscles) généralisées arrive au service des urgences, il faut entreprendre immédiatement un traitement de première ligne aux benzodiazépines (Friedman, 2016).

14.3.2

Traitement de l’hyperthermie

Les antipyrétiques n’ont aucun effet sur l’hyperthermie, puisque, dans ce cas, la valeur de

référence du thermostat hypothalamique demeure inchangée. L’inrmière doit donc opter pour des interventions non pharmacologiques an d’abaisser la température corporelle, notamment l’application de compresses froides sur la peau. Le sang ainsi refroidi qui circule dans les vaisseaux superciels atteint les organes et les tissus profonds, tandis que le sang chaud qui provient de ces derniers est refroidi à son tour lorsqu’il gagne les vaisseaux superciels. Ceux-ci se dilatent lorsque l’organisme tente d’évacuer la chaleur, ce qui facilite le processus de refroidissement du sang (Imeri, 2017). L’inrmière peut se servir d’outils spécialement conçus pour abaisser la température corporelle tels que les couvertures ou les matelas rafraîchissants. Elle doit les placer sur le lit et les recouvrir d’un drap ou d’une légère couverture. Elle doit prendre la température de l’enfant régulièrement pour déceler tout signe de refroidissement excessif. Un bain tiède peut au ssi s’avérer efcace pour contrer l’hyperthermie. Pour donner un bain tiède à un enfant, il vaut mieux commencer par remplir la baignoire d’eau à la température du corps, y asseoir l’enfant, puis y ajouter de l’eau froide pour que l’eau du bain atteigne graduellement la température

14

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les antipyrétiques n’ont aucun effet sur l’hyperthermie, puisque, dans ce cas, la valeur de référence du thermostat hypothalamique demeure inchangée.

clinique

Jugement

Convulsions

Alex, âgé de 11 ans, a de la èvre depuis 12 heures. Sa température ne diminue pas malgré l’administration d’un antipyrétique. Son poids est de 56 kg. Sa mère afrme qu’elle lui a administré 300 mg d’acétaminophène. Quelle est la dose d’acétaminophène recommandée pour Alex ? a) 500 mg.

b) 560 mg.

c) 840 mg.

d) 975 mg.

MAIS SI...

Si la concentration de la solution d’acétaminophène est de 160 mg/5 mL, quel volume d’acétaminophène (arrondi au mL) devez-vous préparer ?

Chapitre 14

Techniques de soins

571

désirée. De cette façon, l’enfant tolérera mieux la tiédeur de l’eau. En principe, il suft que la température de l’eau soit légèrement inférieure à la température corporelle de l’enfant, soit 1 °C de moins tout au plus, pour obtenir l’effet escompté. L’enfant doit rester assis dans le bain tiède durant 15 à 20 minutes pendant que l’inrmière ou le préposé aux soins utilisent une débarbouillette pour faire couler l’eau sur son torse et sur son dos, ou un pulvérisateur pour l’asperger délicatement. Une variante de cette méthode, la toilette à l’éponge, peut être réalisée au chevet de l’enfant. L’inrmière applique alors des débarbouillettes ou des serviettes froides et humides sur la peau de l’enfant, une région à la fois, pendant environ 20 minutes. Après le bain tiède ou la toilette à l’éponge, l’inrmière doit sécher délicatement l’enfant avec une serviette tout en activant sa circulation sanguine, puis lui mettre une chemise de nuit ou un pyjama léger, ou seulement une couche, et l’installer sur des draps secs. Elle doit reprendre sa température après 30 minutes. Le bain tiède ou la toilette à l’éponge doivent être interrompus si l’enfant a froid ou frissonne. En effet, en réaction au froid, il se produit une vasoconstriction qui réduit considérablement le volume sanguin à la surface de la peau et refoule le sang, essentiellement dans les viscères, où il est réchauffé, ce qui va à l’encontre de l’objectif de ces méthodes.

14.4

ALERTE CLINIQUE

An de minimiser les risques de chutes, l’inrmière ne doit jamais laisser sans surveillance sur une table d’examen, sur un pèse-personne ou dans une salle de soins un nourrisson, un enfant en bas âge ou un enfant qui est affaibli, paralysé ou agité, qui est désorienté, qui a été mis sous sédation ou qui est atteint d’un décit cognitif.

572

Partie 5

Sécurité

La sécurité est un aspect crucial de la prise en charge de tout enfant, et l’inrmière doit évaluer l’âge de développement de l’enfant hospitalisé pour mettre en place les mesures requises. En arrivant à l’hôpital, les jeunes enfants se retrouvent dans un nouvel environnement, bien différent de leur milieu habituel. Comme ils ne sont pas encore en âge de raisonner et qu’ils n’ont pas acquis la capacité d’abstraction, il est essentiel que les personnes qui interagissent avec eux, tout au long de l’hospitalisation, prennent les mesures nécessaires pour assurer leur protection. Les bracelets d’identité prennent toute leur importance avec les enfants, et ce, pour plusieurs raisons. Les nourrissons et les enfants qui sont inconscients ne peuvent dire comment ils s’appellent ni répondre quand l’inrmière les appelle par leur prénom. Les trottineurs confondent parfois leur prénom avec d’autres prénoms, et certains ne réagissent qu’à l’appel de leur surnom. Parfois, pour s’amuser, les enfants plus âgés changent de place avec d’autres enfants ou donnent un nom erroné à l’inrmière, ou encore ils font semblant de ne pas entendre quand elle

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

les appelle. Ce faisant, ils sont loin de se douter des graves répercussions que peuvent avoir de tels comportements. Toutes les mesures prises pour assurer la sécurité des adultes s’appliquent également aux enfants ; celles-ci sont détaillées dans l’ENCADRÉ 14.5.

14.4.1

Sécurité des jouets

Les jouets sont indispensables pour l’enfant. C’est à l’inrmière qu’il incombe d’évaluer la sécurité des jouets que les parents et les amis de la famille apportent à l’hôpital, en tenant compte de l’âge de l’enfant, de son état et du traitement qui lui est administré. Ainsi, il serait imprudent de donner des jouets électriques ou des jouets à friction à un enfant qui reçoit de l’oxygène, car la moindre étincelle pourrait provoquer une explosion. L’inrmière doit : • s’assurer que les jouets sont hypoallergéniques, lavables et incassables ; • vérier qu’ils ne comportent aucune pièce détachable assez petite pour que l’enfant puisse l’aspirer ou l’avaler ; • bannir tout jouet susceptible de blesser l’enfant de quelque manière que ce soit ; • faire passer le test de suffocation à tous les objets à la portée des enfants de moins de 3 ans, lequel consiste à passer l’objet par un cylindre dont le diamètre est équivalent à celui de la bouche de l’enfant (p. ex., un rouleau de papier hygiénique). Tout objet ou tout jouet capable de pénétrer dans le rouleau (objets d’un diamètre inférieur à 3 cm et balles d’un diamètre inférieur à 4,5 cm) comporte un risque d’étouffement pour l’enfant ; • interdire les ballons en latex, quel que soit l’âge de l’enfant. Un enfant dont le ballon a éclaté pourrait mettre un lambeau de latex dans sa bouche et l’avaler, puis s’étouffer si le morceau est impossible à déloger.

14.4.2

Prévention des chutes

L’inrmière doit évaluer si l’enfant est prédisposé aux chutes dès son admission et tout au long de son hospitalisation. S’il est établi qu’un enfant risque de tomber, elle doit mettre en place des moyens permettant de réduire ce risque ENCADRÉ 14.6 . C’est également l’inrmière qui est responsable de l’enseignement à donner à l’enfant, à sa famille et au reste du personnel an de réduire ce risque (Chu, 2017).

14.4.3

Transport du nourrisson et de l’enfant

La méthode de déplacement des enfants dépend de leur âge, de leur état et de leur destination. L’inrmière peut transporter les nourrissons et les

jeunes enfants dans ses bras sur de courtes distances à l’intérieur de la même unité, mais si les déplacements sont plus longs, elle doit effectuer le transfert dans le lit, le berceau ou une poussette.

ENCADRÉ 14.5

Les nourrissons peuvent être tenus ou transportés en position horizontale, le dos et les cuisses fermement soutenus par le bras de l’inrmière FIGURE 14.2B. Dans la position football, l’inrmière dépose le nourrisson sur son bras, la tête dans sa

Mesures de sécurité en fonction du milieu environnant

CHAMBRE

MOBILIER

• La chambre doit être bien éclairée.

• Le mobilier doit être stable et ne pas se renverser aisément.

• Le plancher doit être dégagé et sec pour prévenir les chutes.

• L’inrmière doit faire preuve de vigilance s’il y a un lit à commande électrique dans la chambre, car l’enfant pourrait se cacher dessous et être pris au piège si la commande de descente est activée.

• La douche ou la baignoire doivent être munies de tapis antidérapants. • Toutes les fenêtres doivent être sécurisées. • Les cordons qui permettent d’ouvrir et de fermer les stores et les rideaux doivent demeurer hors de la portée des enfants. Pour prévenir les étranglements, ceux qui sont munis d’un système de poulies sont à privilégier. APPAREILS ÉLECTRIQUES

• Les appareils électriques doivent être en bon état et ne doivent être utilisés que par des personnes expérimentées. • Ils ne doivent pas être situés à proximité d’une douche ou d’une baignoire, ni être mouillés.

• Les nourrissons et les trottineurs doivent être bien attachés lorsqu’ils sont assis dans un siège pour bébé, une chaise haute ou une poussette. • Les trotte-bébé, communément appelés trotteurs ou marchettes, sont à proscrire, car ils permettent aux nourrissons d’avoir accès à des objets dangereux et peuvent occasionner des blessures en se renversant. • Si l’enfant est capable de marcher, l’inrmière doit régler la hauteur du lit de telle sorte que l’enfant puisse en descendre facilement, et elle doit verrouiller le mécanisme de réglage.

OBJETS DANGEREUX

• L’inrmière doit toujours remonter les ridelles du berceau, enclencher le mécanisme de sécurité si elle quitte le chevet d’un jeune enfant, sauf s’il y a un autre adulte à ses côtés, et ce, que l’enfant soit capable ou non de descendre du berceau. Il en va de même lorsque l’enfant est hors du berceau, sinon il pourrait être tenté d’y grimper.

• Les membres du personnel hospitalier doivent porter une attention particulière à la manipulation et à la mise au rebut des petits objets tels que les capuchons des seringues et les gaines protectrices des aiguilles et thermomètres FIGURE A.

• Lorsque l’inrmière doit tourner le dos à un nourrisson ou à un enfant en bas âge qui est allongé dans un berceau dont les ridelles sont baissées, elle doit impérativement placer une main sur son dos ou son abdomen pour l’empêcher de rouler, de ramper ou de sauter du berceau FIGURE B.

BAIN

• Si un enfant est capable de sortir du berceau dans lequel il se trouve ou s’il fait mine de vouloir le faire, il est plus prudent de le mettre dans un berceau couvert.

• Les prises électriques doivent être situées à 1,5 m de terre et être recouvertes par des cache-prises pour prévenir les brûlures chez les jeunes enfants, qui pourraient y insérer des objets ou leurs doigts.

• L’inrmière doit toujours vérier soigneusement la température de l’eau du bain avant de mettre un enfant dans la baignoire. • Elle ne doit jamais laisser l’enfant qui prend son bain sans surveillance.

HÔPITAL

• Les nourrissons sont très vulnérables dans l’eau et ils sont susceptibles, comme certains enfants plus âgés, d’ouvrir le robinet d’eau chaude et de subir de graves brûlures.

• Tous les membres du personnel hospitalier doivent connaître le plan d’évacuation en cas d’incendie du service dans lequel ils se trouvent. Les ascenseurs et les escaliers doivent être sécuritaires.

A

L’inrmière doit jeter tout objet pointu dans un contenant biorisque qui n’est pas à la portée des enfants.

B

L’inrmière garde sa main en contact avec l’enfant lorsqu’elle se tourne.

Chapitre 14

Techniques de soins

573

14

Pratiques inrmières ENCADRÉ 14.6

Réduire le risque de chute des enfants hospitalisés

ÉVALUER LE RISQUE DE CHUTE EN FONCTION DES FACTEURS SUIVANTS

• Médicaments utilisés pour l’anesthésie ou la sédation : effets des analgésiques, entre autres ceux des opioïdes, en particulier chez les enfants qui n’en ont jamais pris, puisqu’il n’est pas possible de prévoir comment ils vont réagir. • Altération des facultés mentales : secondaire à des convulsions, à une tumeur au cerveau ou à la prise de certains médicaments. • Mobilité réduite : difculté de l’enfant à marcher pour diverses raisons : maturation inachevée en raison de l’âge de développement ; maladie affectant sa démarche ; port d’une sonde, d’un drain, d’un plâtre, d’une attelle ou d’un autre dispositif limitant ses mouvements ; en apprentissage pour se déplacer avec un accessoire ou un appareil fonctionnel, comme un déambulateur ou des béquilles. • Suites opératoires : risque d’hypotension ou de syncope attribuable à une importante perte sanguine, à une maladie cardiaque ou à un alitement prolongé. • Antécédents de chutes. • Milieu environnant : nourrissons et enfants en bas âge qui sont dans un berceau dont les ridelles sont abaissées ou qui sont installés sur le lit d’appoint utilisé par les membres de leur famille.

• Veiller à ce que tous les objets dont l’enfant a besoin soient à sa portée (verre d’eau, lunettes, mouchoirs, collations). • Ne jamais éteindre la lumière ; la tamiser pendant que l’enfant dort. • Actionner les freins du fauteuil roulant dans lequel l’enfant sera installé. FACILITER LES DÉPLACEMENTS

• Fournir à l’enfant une chemise d’hôpital qui est à sa taille et des chaussons antidérapants ; vérier que la chemise ou les lacets de la chemise ne traînent pas par terre lorsqu’il marche. • Débarrasser le plancher de tous les objets inutiles et veiller à le garder au sec. Si le plancher est mouillé, placer un signe « Attention, plancher mouillé ». • Veiller à ce que l’enfant porte ses lunettes en tout temps, s’il y a lieu. • Aider l’enfant à se déplacer, même s’il n’avait aucune difculté à marcher avant l’hospitalisation. • Si l’enfant est resté alité un certain temps, il doit prendre son temps pour sortir du lit : il doit s’asseoir un moment sur le rebord du lit avant de se mettre debout. • Lui faire porter un casque protecteur s’il risque de tomber en marchant. INFORMER LA FAMILLE DES RÈGLES SUIVANTES

METTRE EN PLACE DES SIGNES VISUELS INDIQUANT LE RISQUE DE CHUTE

• Ne jamais laisser un enfant à risque de chute se lever tout seul.

• Afcher un signe sur la porte de la chambre et au chevet de l’enfant.

• Aviser l’enfant et sa famille qu’il ne faut pas hésiter à appeler l’inrmière pour de l’aide.

• Mettre à l’enfant un bracelet spécial aux couleurs vives portant la mention « Risque de chute ». • Apposer un autocollant sur le dossier médical de l’enfant. • Consigner dans le dossier le fait que l’enfant est prédisposé aux chutes. SÉCURISER LA CHAMBRE ET LE MOBILIER

• Abaisser le lit le plus possible ; enclencher les freins et remonter les ridelles. • Laisser une cloche d’appel à la portée de l’enfant.

Jugement

clinique

574

Judy, âgée de trois ans, est de retour d’une tomodensitométrie pour évaluer une petite fracture peu visible à la radiographie. An d’assurer des images de qualité, le radiologiste lui a administré du midazolam (VersedMD) il y a deux heures. Devriez-vous prendre des mesures pour prévenir les chutes chez Judy ? Justiez votre réponse.

Partie 5

• Toujours remonter les ridelles du berceau ou du lit lorsque l’enfant y est. • Ne jamais laisser un nourrisson sur le lit d’appoint ; toujours le mettre dans le berceau et en remonter les ridelles. • Lorsque la dernière personne qui était aux côtés de l’enfant s’apprête à partir, elle doit en informer le personnel inrmier et vérier que l’enfant est bien installé dans le lit ou le berceau, que les ridelles sont remontées et que la cloche d’appel est à sa portée, s’il y a lieu.

main ou contre son avant-bras et le corps bien calé entre le coude et son corps FIGURE 14.2A. Ces deux positions permettent à l’inrmière de garder un bras libre. L’inrmière peut également tenir le nourrisson en position verticale, les fesses de l’enfant sur son avant-bras, et l’avant du corps contre sa poitrine, son autre bras soutenant la tête et les épaules au cas où le nourrisson bougerait brusquement FIGURE 14.2C . Les nourrissons plus âgés sont capables de tenir leur tête droite, mais ils peuvent tout de même avoir des mouvements inattendus. Les jeunes enfants peuvent être transportés dans un berceau, sur une civière, dans une poussette, dans un chariot dont les côtés sont surélevés ou dans un fauteuil roulant muni d’une ceinture de sécurité. Les civières doivent être équipées de ancs surélevés et d’une ceinture de sécurité, qui doivent dans les deux cas être xés pendant le transport. L’usage des fauteuils roulants ou des civières est sécuritaire pour les enfants plus âgés.

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

14.4.4

Mesures de contention

L’article 118.1 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux (LSSSS) (RLRQ, chapitre S-4.2, art. 118.1) régit l’utilisation exceptionnelle des mesures de contrôle que sont la contention, l’isolement et les substances chimiques. Cet article précise ce qui suit : La force, l’isolement, tout moyen mécanique ou toute substance chimique ne peuvent être utilisés, comme mesure de contrôle d’une personne dans une installation maintenue par un établissement, que pour l’empêcher de s’iniger ou d’iniger à autrui des lésions. L’utilisation d’une telle mesure doit être minimale et exceptionnelle et doit tenir compte de l’état physique et mental de la personne. Lorsqu’une mesure visée au premier alinéa est prise à l’égard d’une personne, elle doit faire l’objet d’une mention détaillée dans son dossier. Doivent notamment y être consignées une

A

B

FIGURE 14.2

C

Transport du nourrisson – A Position football. B Position horizontale. C Soutien du dos.

description des moyens utilisés, la période pendant laquelle ils ont été utilisés et une description du comportement qui a motivé la prise ou le maintien de cette mesure.

Ainsi, avant de recourir aux contentions, l’inrmière doit évaluer l’enfant pour déterminer si la nécessité d’une contention l’emporte sur le risque inhérent à son utilisation. Elle doit évaluer le développement de l’enfant, son état mental, le risque qu’il cause un préjudice physique à d’autres ou à lui-même, et tenir compte de sa sécurité. Si elle juge les mesures de contention nécessaires, elle doit obligatoirement obtenir le consentement libre et éclairé de l’enfant ou de la famille, sauf en situation d’urgence. En effet, la contention peut porter atteinte à la dignité et aux droits de l’enfant, et provoquer une souffrance psychologique ou physique, voire la mort. L’utilisation de la contention exige une surveillance déterminée selon l’état de santé et les comportements de l’enfant. Il faut d’abord envisager d’autres méthodes et noter la situation dans le dossier de l’enfant. Les enfants plus âgés ne requièrent d’habitude qu’une faible contention, voire aucune. Il suft généralement d’expliquer l’intervention à l’enfant, de l’y préparer, et de lui offrir du soutien et des conseils simples pendant l’intervention. La musique et la participation des parents peuvent servir de distraction lors de procédures. Si la contention s’avère nécessaire, l’inrmière choisira la méthode la moins restrictive, ce qui, le plus souvent, est possible grâce à la coopération de l’enfant TABLEAU 14.4. En fonction des actes réservés aux différentes professions, la décision d’utiliser des mesures de contention peut être prise par l’infirmière. Toutefois, celle-ci doit bien connaître les règles d’utilisation des contentions dans son établissement, car il s’agit d’une mesure exceptionnelle qui nécessite un suivi étroit. Si des normes ou un protocole exigent une immobilisation constante durant toute l’intervention ou tout le processus de soins postopératoires,

la contention est considérée comme un élément systématique des soins. Par exemple, l’utilisation postopératoire de manchons de contention ou d’une TABLEAU 14.4

Contention des enfants : méthodes allant de moins restrictives à plus restrictives

MÉTHODE OU DISPOSITIF DE CONTENTION

DEGRÉ DE CONTENTION FAIBLE

ÉLEVÉ

Membres Manches



Mitaines



Jersey tubulaire (stockinette)



Manchons pour les coudes

14



Planchette



Un ou deux membres



Trois ou quatre membres



Thorax et corps Ceintures, sangles de sécurité



Gilet de contention



Immobilisation en momie



Planche d’immobilisation de type papoose



Environnement Côtés de lit (ridelles)



Dessus de berceau



Isolement



Autre Substances chimiques



Source : Adapté de Selekman, J. et Snyder, B. (1996). Uses of and alternatives to restraints in pediatric settings, AACN Clin Issues 7 (4), 603-610, 1996.

Chapitre 14

Techniques de soins

575

planchette, après la réparation chirurgicale d’une fente labiale, peut être systématique et s’inscrire dans le protocole ou les normes de soins.

Types de contention

de la contention minimalement toutes les 8 heures. De ce fait, l’inrmière doit s’assurer de bien xer la contention et réévaluer la peau sous-jacente régulièrement an de déceler tout signe d’irritation ou d’altération de l’intégrité de la peau.

Contentions à des ns médicochirurgicales

Contentions à des ns comportementales

Certains actes médicochirurgicaux exigent de recourir à des dispositifs de contention, notamment dans le cas des enfants qui : • ont une canule pharyngée ou qui sont reliés à un équipement respiratoire d’appoint administrant de l’oxygène ; • sont porteurs de cathéters I.V., de sondes, de drains, de tubulures, de fils de moniteur cardiaque ; • ont des points de suture. Les risques possibles de la contention sont compensés par des soins plus sécuritaires. L’utilisation d’une contention à des ns médicochirurgicales peut répondre à l’une des raisons suivantes : • risque d’interruption du traitement qui maintient l’oxygénation ou qui garde les voies respiratoires libres ; • risque de danger en cas de retrait, de déplacement ou d’endommagement du cathéter I.V., de la sonde, du drain, de la tubulure, du l du moniteur cardiaque ou des sutures ;

Le ministère de la Santé et des Services sociaux (www.msss.gouv.qc.ca) a publié un document relatif à l’utilisation exceptionnelle de mesures de contrôle intitulé Cadre de référence pour l’élabo­ ration des protocoles d’applica­ tion des mesures de contrôle.

• confusion, agitation, inconscience ou insufsance développementale de l’enfant qui n’est pas en mesure de comprendre les demandes directes ou les directives qui lui sont adressées. L’emploi des contentions à des ns médicochirurgicales peut découler d’une ordonnance individuelle ou d’un protocole ; toutefois, l’application du protocole doit quand même être autorisée par une ordonnance individuelle. L’autorisation de l’usage continu des contentions doit être renouvelée quotidiennement. Les enfants doivent faire l’objet d’une surveillance toutes les 15 à 30 minutes, et d’une réévaluation de la nécessité

Techniques de soins ENCADRÉ 14.7

Mettre en place des contentions avec attaches

• Fixer la contention au cadre du lit ou du berceau, et non aux côtés de lit (ridelles).

• S’assurer que la contention ne se resserre pas lorsque l’enfant bouge.

• Laisser l’espace d’un doigt entre le dispositif utilisé et la peau pour assurer le confort de l’enfant tout en maintenant l’intégrité de la peau.

• Défaire les plis ou les renements de la contention.

• Si le dispositif ne comporte pas d’attaches à relâche rapide (clips) ou à velcro (contentions de poignets), faire des nœuds faciles à défaire.

• Placer les contentions des membres sous la taille ou le genou, ou de manière distale par rapport à un dispositif I.V.

576

Partie 5

• Installer le gilet de contention par-dessus un vêtement.

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

La mise en place de contentions à des ns comportementales (p. ex., si un enfant mord, crache, crie ou frappe les autres) se limite aux situations qui supposent un risque signicatif de préjudice physique, pour l’enfant ou pour d’autres personnes, compte tenu de paramètres comportementaux ou de l’inefcacité des interventions non physiques. Avant de recourir à une contention de ce type, l’inrmière doit évaluer l’état mental, comportemental et physique de l’enfant pour déterminer la cause du comportement susceptible de nuire à l’enfant lui-même ou à d’autres. Si des contentions comportementales sont indiquées, elle fera appel, le cas échéant, à la collaboration de l’enfant, des membres de sa famille et de l’équipe médicale. Les enfants soumis à des contentions comportementales doivent faire l’objet d’une observation constante et être évalués minimalement toutes les 15 minutes. Les composantes de l’évaluation incluent : • les signes de blessures associées à l’application de la contention ; • la nutrition et l’hydratation ; • la circulation et l’amplitude du mouvement des membres ; • les signes vitaux ; • l’hygiène et l’élimination ; • l’état physique et psychologique ; • le confort ; • la disposition en vue du retrait des contentions. L’inrmière s’appuiera sur son jugement clinique pour établir une routine d’examen de ces paramètres individuels, qui font tous partie des évaluations physiques systématiques toutes les 15 minutes.

Dispositifs et méthodes de contention Il existe divers dispositifs de contention. L’ENCADRÉ 14.7 explique comment installer ceux munis d’attaches.

Gilet de contention Un gilet de contention est parfois utilisé pour la sécurité de l’enfant qui doit être déplacé dans différents types de fauteuils. L’enfant porte le gilet, les attaches en arrière, pour l’empêcher de les toucher. Les longues bandes, xées à la plateforme de la chaise, permettent de tenir l’enfant en place. Le gilet de contention peut aussi servir à maintenir l’enfant dans une position horizontale.

Immobilisation en momie

Contention des bras et des jambes

Lorsqu’une contention à court terme est requise pour l’examen ou le traitement d’un nourrisson ou d’un jeune enfant, par exemple pour une ponction veineuse, un examen de la gorge ou l’alimentation par sonde, une planche d’immobilisation de type papoose munie de sangles FIGURE 14.3 ou une immobilisation en momie (emmaillotement) permet de maîtriser efcacement ses mouvements. Pour effectuer une immobilisation en momie, l’inrmière procédera comme suit :

Il existe plusieurs dispositifs de contention, notamment des contentions jetables pour les poignets et les chevilles FIGURE 14.5. Celles-ci doivent être adaptées à la taille de l’enfant et bien matelassées pour éviter toute pression ou constriction excessives, ou toute blessure tissulaire. Par ailleurs, l’infirmière prendra soin d’observer le membre régulièrement à la recherche de signes d’irritation ou de dommages à la circulation. Il ne faut jamais attacher les extrémités des dispositifs de contention aux côtés de lit (ridelles), car, en baissant l’un des côtés, il existe un risque de tirer sur le membre, ce qui pourrait blesser l’enfant ou lui faire mal.

• Déployer une couverture ou un drap sur le lit ou le berceau. • Plier un coin du drap vers le centre. • Placer le nourrisson sur la couverture, les épaules sous le pli et les pieds dirigés vers le coin opposé. • En tenant le bras droit du nourrisson le long de son corps, tirer fermement sur la partie droite de la couverture par-dessus l’épaule droite et la poitrine du nourrisson, et la xer sous la partie gauche du corps. • En tenant le bras gauche du nourrisson le long de son corps, plier la partie gauche de la couverture par-dessus l’épaule et la poitrine du nourrisson, et la fixer sous la partie droite du corps.

Contention des coudes Parfois, il faut empêcher l’enfant de se toucher la tête ou le visage, par exemple après une intervention chirurgicale réparatrice de la fente palatine, lorsqu’un dispositif de perfusion veineuse est en place ou pour prévenir les écorchures en cas de troubles cutanés. Il existe divers types de dispositifs de contention FIGURE 14.6 et des planchettes de différentes grandeurs que l’inrmière peut xer

FIGURE 14.3 Planche d’immobilisation de type papoose

• Ramener le coin inférieur de la couverture par-dessus l’enfant, puis replier le coin dans le dos de l’enfant FIGURE 14.4A. Pour l’examen pulmonaire, l’inrmière peut modier comme suit la technique d’immobilisation en momie : elle ramène le côté plié de la couverture par-dessus chaque bras et sous le dos, puis elle plie la partie libre de la couverture et la replie sous le thorax pour pouvoir visualiser le thorax et y accéder FIGURE 14.4B.

A

B

14

FIGURE 14.5 pour poignets

Sangles de contention

FIGURE 14.6 aux coudes

Manchons de contention

B

FIGURE 14.4 A Immobilisation en momie. Immobilisation en momie avec la poitrine découverte.

Chapitre 14

Techniques de soins

577

ALERTE CLINIQUE

Les dispositifs de contention faits maison, dont l’utilisation d’abaisse-langue pour immobiliser un bras, sont à proscrire.

avec des rubans adhésifs conçus pour la peau aux deux extrémités an d’empêcher l’enfant de plier son ou ses coudes .

Étreinte thérapeutique L’autre moyen de contention temporaire est l’étreinte thérapeutique. Cette mesure consiste à enlacer l’enfant ou un de ses membres pendant au plus 30 minutes de manière à restreindre son mouvement.

14.4.5 5 Les types d’anesthésie locale sont présentés dans le chapitre 5, Évaluation et traitement de la douleur.

Positionnement de l’enfant selon l’intervention

La coopération des nourrissons et des jeunes enfants peut être difcile. L’inrmière doit donc réduire au minimum leurs mouvements et leur inconfort en les positionnant adéquatement. Les enfants plus âgés ne requièrent peu ou pas de contention. Si l’inrmière prépare correctement l’enfant en lui expliquant l’intervention et lui offre

son soutien tout au long de la procédure, l’enfant sera capable de collaborer. En cas d’intervention douloureuse, l’infirmière doit éviter l’emploi d’une contention excessive et recourir plutôt à la médication appropriée 5 .

Ponction veineuse Les sites les plus courants de ponction veineuse sont les veines des bras, des mains et des pieds. Pour immobiliser le membre d’un nourrisson, l’inrmière demande au parent d’étreindre l’enfant soit dans ses bras, soit couché dans son berceau, et de lui parler pendant qu’elle fait la ponction veineuse. Pour immobiliser le membre d’un trottineur ou d’un enfant d’âge scolaire, l’inrmière : • dépose l’enfant sur les genoux du parent de manière à ce que l’enfant soit face à lui, ventre contre lui, les jambes écartées ; • place le membre de l’enfant sur une surface solide, comme une table de traitement ; • stabilise partiellement le membre sur lequel sera effectuée la prise de sang ; • demande au parent d’enlacer la partie supérieure du corps de l’enfant (étreinte thérapeutique) pour empêcher tout mouvement et d’immobiliser le point de la ponction veineuse avec un bras FIGURE 14.7. Ce type de contention rassure l’enfant en raison du contact corporel étroit avec le parent et il permet de maintenir un contact visuel.

PHARMACOVIGILANCE

Avant d’appliquer une crème anesthésique topique, vérier les contre-indications et les conseils d’utilisation.

Ponction lombaire FIGURE 14.7 L’étreinte thérapeutique permet de restreindre le mouvement de l’enfant sans recourir à des contentions physiques.

Techniques de soins ENCADRÉ 14.8

Préparer l’enfant pour une ponction lombaire et assurer son suivi

• Après avoir positionné l’enfant, appliquer une crème anesthésique topique sur le point de ponction au moins 60 minutes avant l’intervention . • Pour déterminer le point de ponction lombaire, le médecin trace une ligne imaginaire qui va de la crête iliaque postérieure, en passant par la colonne rachidienne, jusqu’à la crête iliaque controlatérale. La ligne traverse le point de ponction aux alentours de la vertèbre L4. • Le médecin insère l’aiguille et mesure la pression du liquide cérébrospinal, puis il prélève les échantillons de liquide.

578

Partie 5

• L’inrmière identie les échantillons selon l’ordre d’obtention et les envoie pour analyse. • L’inrmière prend les signes vitaux et assure la surveillance de l’enfant an de détecter toute modication de l’état de conscience, de l’activité motrice ou d’autres changements neurologiques. Une céphalée peut survenir à la suite d’une ponction lombaire en raison du changement de pression : elle sera plus intense en présence de changements de position brusques.

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

Lors d’une ponction lombaire chez les nourrissons et les enfants, le positionnement ressemble à celui utilisé pour l’adulte ENCADRÉ 14.8. En général, il est plus facile de maîtriser les enfants en position couchée sur le côté, la tête échie et les genoux repliés vers la poitrine. Même les enfants coopératifs doivent être tenus doucement pour prévenir tout trauma résultant d’un mouvement involontaire. Pendant la procédure, l’inrmière doit rassurer l’enfant an que ce dernier maintienne la position souhaitée. Pour positionner l’enfant en vue d’une ponction lombaire, l’inrmière procédera ainsi : • allonger l’enfant sur le côté, le dos près du bord de la table d’examen, du côté où s’effectuera l’intervention FIGURE 14.8 ; • envelopper ses jambes pour limiter leur mouvement ; • maintenir la colonne rachidienne de l’enfant en position échie en le tenant un bras derrière son cou et l’autre derrière ses cuisses. La position échie permet d’élargir les intervalles entre les vertèbres lombaires et de faciliter ainsi l’accès à l’espace du liquide cérébrospinal.

Si la ponction s’effectue par la crête iliaque postérieure, l’enfant est placé en décubitus ventral. Une couverture pliée ou un petit oreiller est parfois placé sous ses hanches pour faciliter le prélèvement de l’échantillon de moelle osseuse. Deux personnes doivent être prêtes à l’immobiliser ; l’une s’occupera de la partie supérieure du corps, et l’autre, des membres inférieurs.

14.5 FIGURE 14.8 L’enfant est allongé sur le côté avant une ponction lombaire.

Les enfants plus âgés sont parfois placés en position assise pendant l’intervention. Les fesses de l’enfant sont au bord de la table d’examen, et son cou est échi de manière à ce que son menton repose sur sa poitrine ou sur le bras de l’inrmière. Les bras et les jambes du nourrisson sont immobilisés par les mains de l’inrmière.

Prélèvement de moelle osseuse ou biopsie La position à adopter pour l’aspiration ou la biopsie de moelle osseuse dépend du site choisi. Chez les enfants, la crête iliaque postérieure ou antérieure est le site le plus souvent privilégié ; chez les nourrissons, le tibia facilite l’accès au point de ponction et la contention. Le sternum est généralement évité dans le cas des enfants, car l’os est plus fragile et il est voisin des organes vitaux. La position assise peut nuire à l’expansion de la poitrine et aux mouvements du diaphragme, provoquant ainsi l’effondrement de la trachée souple et pliable des nourrissons. L’inrmière doit donc prendre garde à ce que l’enfant n’éprouve pas de difculté à respirer.

Prélèvement d’échantillons

De nombreux prélèvements d’échantillons sont obtenus de la même façon chez l’enfant que chez l’adulte. Il faut se rappeler que les enfants en bas âge ne peuvent pas suivre les instructions de l’inrmière et n’ont pas le contrôle de leurs fonctions vitales. Les enfants plus vieux, quant à eux, seront capables de coopérer s’ils ont reçu des explications claires et précises. Quel que soit le type d’échantillon à prélever, il est essentiel de suivre les étapes décrites dans l’ENCADRÉ 14.9.

14.5.1

Échantillon d’urine

L’analyse d’urine est d’une grande sensibilité et permet le dépistage précoce d’une diversité de troubles métaboliques et d’affections de l’appareil urinaire. La qualité de ses résultats est en grande partie tributaire des conditions de prélèvement de l’échantillon. L’inrmière a un rôle important dans la collecte de l’échantillon d’urine.

14

Particularités selon l’âge Nourrissons et trottineurs portant une couche Pour les nourrissons et les trottineurs qui n’ont pas encore fait l’apprentissage de la propreté, des sacs spéciaux de prélèvement d’urine munis d’une bande adhésive entourant l’ouverture peuvent être

Techniques de soins ENCADRÉ 14.9

Prélever un échantillon

1. Rassembler le matériel nécessaire. 2. Remplir les requêtes d’analyse. 3. Vérier l’identité de l’enfant (double identication). 4. Procéder à l’hygiène des mains selon la politique de l’hôpital. 5. Expliquer la procédure à l’enfant ou aux parents s’il s’agit d’un enfant en bas âge. 6. Placer l’enfant dans une position sécuritaire, confortable et non traumatisante. 7. Nettoyer la région avec un agent antiseptique.

8. Faire le prélèvement. 9. Déposer l’échantillon dans un contenant approprié et bien identié. 10. Jeter les objets (aiguilles, lames, etc.) dans le récipient prévu à cet effet. 11. Nettoyer la peau. 12. Enlever les gants et procéder à l’hygiène des mains. 13. Féliciter l’enfant de sa participation. 14. Consigner les éléments importants de la procédure dans les notes d’évolution.

Chapitre 14

Techniques de soins

579

CONSEIL CLINIQUE

L’inrmière mouille l’abdomen à l’aide d’un tampon d’alcool et l’aère pour qu’il sèche ; l’effet refroidissant provoque souvent la miction dans les deux minutes qui suivent. Elle applique une pression sur la région suspubienne ou tapote les muscles parador­ saux (le long de la colonne rachidienne) pour évoquer le réexe de Perez. Chez les nourrissons de quatre à six mois, ce réexe provoque des pleurs, l’extension du dos, la exion des membres et la miction.

utilisés. Pour les nourrissons de faible poids à la naissance, il existe de petits sacs munis d’un adhésif doux pour la peau. Il existe également des sacs de prélèvement d’urine adaptés à l’anatomie. L’ENCADRÉ 14.10 explique la façon d’installer un sac de prélèvement. L’inrmière doit changer soigneusement la couche en s’assurant que le sac de prélèvement ne se décolle ou ne se déplace pas an de conserver l’échantillon, évitant ainsi les fuites. Pour faire une culture d’urine, l’inrmière désinfectera la zone urinaire avec une solution antimicrobienne et aura recours à une technique stérile, soit un cathétérisme urinaire ou une ponction suprapubienne faite par le médecin.

Enfants d’âge préscolaire et trottineurs Les enfants d’âge préscolaire et les trottineurs sont généralement incapables d’uriner sur demande. Il est souvent préférable de leur faire boire de l’eau ou leur boisson favorite, et d’attendre 30 minutes jusqu’à ce qu’ils aient envie d’uriner. Certains éprouveront des difcultés à uriner dans un contenant spécial. Les chaises d’aisance conviennent généralement. Les trottineurs qui ont été entraînés à la propreté tout récemment peuvent se montrer particulièrement réticents, car leurs parents leur

ont certainement reproché d’uriner là où il ne fallait pas. L’inrmière gagnera donc certainement à demander l’aide des parents.

Enfants d’âge scolaire et adolescents Les enfants d’âge scolaire peuvent utiliser un bassin hygiénique ou un urinal pour le prélèvement d’urine ; l’inrmière peut aussi leur faire conance et les laisser aller seuls à la salle de bains. Cependant, ils peuvent avoir des besoins spéciaux (utilisation d’un marchepied, présence parentale dans le cabinet de toilette). Lorsque l’inrmière répond aux besoins spéciaux de l’enfant, la relation de collaboration avec celui-ci et sa famille sera facilitée. Les enfants d’âge scolaire coopèrent, mais ils sont d’un naturel curieux. Ils veulent que l’infirmière leur explique tout ce qui se passe et ils s’informeront peut-être de ce que deviendra leur échantillon et de ce qu’on espère y découvrir. Les adolescents gênés peuvent être réticents à transporter un échantillon dans un couloir ou une salle d’attente. L’inrmière peut leur donner un sac en papier ou autre chose pour dissimuler le contenant d’urine. La présence de menstruations peut être embarrassante ou inquiétante pour les adolescentes ; il convient donc de leur demander si elles

Techniques de soins ENCADRÉ 14.10

Installer un sac de prélèvement d’urine

• Bien laver et sécher les parties génitales, le périnée et la peau avoisinante, car la bande adhésive ne collera pas à une surface cutanée humide, poudrée ou grasse. • Attacher d’abord le sac de prélèvement au périnée, en avançant ensuite vers la symphyse pubienne FIGURES A et B. Pour les lles, bien étirer le périnée pour xer le sac sur cette partie an d’assurer une adhésion étanche. Pour les garçons, le pénis, et parfois le scrotum, est placé dans le sac.

A

• Appliquer fermement la partie adhésive du sac contre la peau entourant la région génitale pour éviter les fuites. • Vérier souvent le sac et le retirer dès qu’un échantillon est visible, car un sac humide peut se détacher si l’enfant est actif. • Au besoin, pratiquer une petite incision dans la couche et en extraire le sac an de permettre le prélèvement d’urine et faciliter la vérication du contenu. B

Application d’un sac de prélèvement d’urine – A Chez un nourrisson de sexe féminin, la partie adhésive est appliquée d’abord sur le périnée découvert et séché. B Le sac adhère fermement autour de la région périnéale pour prévenir les fuites d’urine.

580

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

Méthode du mi-jet En général, les échantillons prélevés par la méthode du mi-jet le sont aux ns de culture après le nettoyage du méat urinaire et l’élimination des premiers millilitres d’urine avant le prélèvement (urines du milieu du jet). Chez les lles, le périnée est nettoyé à l’aide d’un tampon ouaté ou d’un tampon imbibé d’antiseptique, de l’avant vers l’arrière, au moins trois fois, chaque fois avec un nouveau tampon. Pour les garçons, l’extrémité du pénis est nettoyée. La région peut être nettoyée à l’aide d’eau stérile pour prévenir le contact accidentel de l’urine avec une solution antimicrobienne.

Prélèvement d’urine de 24 heures La collecte d’urine de 24 heures permet de recueillir toutes les urines sur une période de 24 heures an de faire le dosage de certains constituants chimiques présents dans les urines. Au début et à la n de la période de prélèvement, la vessie doit être vide.

Nourrissons et trottineurs Un sac de prélèvement sert à recueillir des échantillons chez les nourrissons ou les jeunes enfants. Si un sac destiné au prélèvement d’urine sur 24 heures est xé chez les nourrissons et les enfants, il doit être adapté. Le retrait fréquent et le remplacement des dispositifs adhésifs de prélèvement peuvent entraîner une irritation cutanée. L’application d’un lm protecteur protège la peau et favorise l’adhérence. Son emploi est contreindiqué pour les nourrissons nés avant terme ou en cas d’irritation cutanée. Les sacs de prélèvement en plastique munis de tubes de prélèvement sont idéaux lorsque le contenant doit être maintenu en place un certain temps. Ils peuvent être reliés à un dispositif de prélèvement ou vidés périodiquement par aspiration au moyen d’une seringue. En l’absence de tels dispositifs, l’inrmière peut utiliser un sac normal dans la partie supérieure duquel est insérée une sonde gastrique par un orice. Cependant, il faut soigneusement vider le sac dès que le nourrisson urine pour éviter les fuites ou des pertes d’urine. Une sonde vésicale peut également être placée pendant la période de prélèvement.

Enfants d’âge scolaire Pour commencer le prélèvement, l’infirmière demande à l’enfant d’uriner. Toute urine évacuée dans les 24 heures suivantes est conservée dans un contenant renfermant un agent de conservation ou mise sur de la glace. Vingt-quatre heures plus tard, l’infirmière redemande à l’enfant

d’uriner et ajoute l’échantillon au contenant ; tout est ensuite envoyé au laboratoire.

clinique

Jugement

ont leurs règles, et de retarder le prélèvement ou d’inscrire une note sur la requête d’analyse pour expliquer la présence de globules rouges.

Le médecin a demandé une collecte urinaire des 24 heures pour Laurie, une llette de 10 ans. Il est 7 h, et vous apportez le matériel nécessaire pour la collecte à la chambre de Laurie, puis vous lui expliquez la procédure. La llette urine dans la toilette à 7 h 20. Elle a d’autres mictions et recueille son urine à 9 h 30, 13 h et 15 h. À quelle heure la collecte urinaire des 24 heures a-t-elle commencé ?

Les enfants plus âgés recevront des directives particulières pour qu’ils avisent quelqu’un s’ils doivent uriner ou aller à la a) À 7 h 20. c) À 7 h 30. selle, de manière à ce b) À 9 h 30. d) À 8 h. que l’urine soit prélevée séparément sans être éliminée. Certains enfants d’âge scolaire plus âgés et les adolescents peuvent se charger eux-mêmes du prélèvement de leurs échantillons d’urine pendant 24 heures, de prendre note du volume d’urine éliminée et de transférer chaque miction dans le contenant de prélèvement adéquat.

Cathétérisme vésical et autres techniques Le cathétérisme de la vessie, une aspiration sus-pubienne, est utilisé pour obtenir un échantillon requis d’urgence, pour effectuer une culture d’urine ou lorsque l’enfant est incapable d’uriner ou de produire un échantillon adéquat. Le cathétérisme sert à prélever un échantillon d’urine stérile ; il est également utilisé si une obstruction urétrale ou une anurie due à une insufsance rénale empêchant l’enfant d’uriner sont soupçonnées MS 9.4 .

MS 9.4 « Cathétérisme vésical et installation d’une sonde vésicale à ballonnet », Méthodes de soins 1 (Lemire et Perreault, 2016a).

Pour préparer l’enfant au cathétérisme, l’inrmière lui explique comment détendre ses muscles pelviens. Elle demande aux trottineurs et aux enfants d’âge préscolaire de faire des bulles. La procédure de relaxation est répétée pendant l’insertion du cathéter. Si l’enfant contracte vigoureusement les muscles pelviens lorsque le cathéter atteint le sphincter strié (urètre proximal chez le garçon et urètre moyen chez la lle), il faut interrompre l’insertion du cathéter, mais sans le retirer ni le pousser.

14

Cette intervention provoque de l’inconfort et de l’anxiété chez les enfants et les adolescents. Ils peuvent avoir besoin de soutien. Même un adolescent pourrait souhaiter la présence d’un parent à ses côtés pendant l’intervention. Outre le traumatisme vécu par l’enfant, certains parents redoutent que l’intervention affecte la virginité de leur lle. L’inrmière peut leur expliquer l’anatomie génito-urinaire en leur présentant un dessin illustrant les ouvertures distinctes du vagin et de l’urètre, et leur préciser que le cathétérisme n’a aucune répercussion sur la virginité. Le cathétérisme vésical est une intervention stérile ; il est décrit dans l’ ENCADRÉ 14.11.

Chapitre 14

Techniques de soins

581

14.5.2

PHARMACOVIGILANCE

Échantillon de selles

En pédiatrie, les échantillons de selles servent souvent à détecter les parasites et autres microorganismes responsables des diarrhées, à évaluer la fonction gastro-intestinale et à vérier la présence de sang occulte dissimulé dans les selles. Il faut prélever des selles non contaminées par

Il faut déterminer si l’enfant souffre d’allergies à l’iode ou au latex avant d’utiliser ces produits pour insérer la sonde.

l’urine. Toutefois, cela est difcile dans le cas des enfants qui portent des couches, à moins de xer un sac de prélèvement d’urine. Les enfants qui ont acquis la propreté doivent d’abord uriner, tirer la chasse, puis utiliser un bassin placé sur le siège de toilette pour y faire leur selle. Celle-ci est ensuite recueillie pour analyse. Une

Techniques de soins ENCADRÉ 14.11

Procéder à un cathétérisme vésical

PRÉPARATION

• Rassembler et préparer le matériel. • Choisir la taille du cathéter en fonction du poids de l’enfant. Poids de l’enfant (kg)

Cathéter (Fr)

3-5

5-8

6-9

5-8

10-11

8-10

12-14

10

15-22

10-12

24-30

12

> 32

12-14

Source : Kopacˇ, M. (2013). Formula estimation of appropriate urinary catheter size in children. J Pediatr Intensive Care 2, 177-180. DOI 10.3233/PIC-13069 IOS Press.

• Dans le cas d’une sonde à ballonnet, remplir le ballonnet en y injectant de l’eau stérile an de vérier qu’il n’est pas défectueux. Une fois l’étanchéité vériée, retirer l’eau stérile. • Expliquer la procédure à l’enfant.

• Ne jamais forcer l’insertion d’un cathéter qui n’entre pas facilement dans le méat, surtout si l’enfant a subi une intervention chirurgicale correctrice. • Relier ensuite le cathéter à un système de drainage en circuit fermé. • Nettoyer le gland et le méat, et replacer le prépuce rétracté. Si du sang est observé pendant l’intervention, cesser l’opération et aviser le médecin. Pour une lle • Positionner l’enfant sur le dos avec les jambes écartées et les plantes des pieds jointes (position grenouille). • Placer un champ stérile sous les fesses de l’enfant et un champ stérile fenestré sur la région périnéale. • Utiliser la main non dominante pour séparer soigneusement les petites lèvres, en les tirant vers le haut de manière à voir le méat. • Désinfecter le méat de l’avant vers l’arrière trois fois avec, chaque fois, un écouvillon ou une nouvelle ouate imbibée de solution antiseptique . • Lubrier le cathéter et l’insérer doucement dans l’urètre jusqu’à ce que l’urine s’écoule, puis avancer le cathéter de 2,5 à 5 cm de plus, en respectant la profondeur d’insertion recommandée dans le tableau ci-dessous. • Relier ensuite le cathéter à un système de drainage en circuit fermé. • Nettoyer le méat et les lèvres. Si du sang est observé pendant l’intervention, cesser l’opération et aviser le médecin.

MÉTHODE

Pour un garçon

Filles

• Positionner l’enfant sur le dos avec les jambes allongées. • Placer un champ stérile sous les fesses de l’enfant et un champ stérile fenestré autour du pénis. • Tenir le pénis de la main non dominante en position perpendiculaire en rétractant le prépuce. • Avec la main stérile (dominante), désinfecter le gland et le méat trois fois avec, chaque fois, un autre écouvillon ou une nouvelle ouate imbibée d’une solution antiseptique . • Lubrier le cathéter et l’insérer dans l’urètre en étirant doucement le pénis et en le tenant à un angle de 90° par rapport au corps ; le cathéter peut rencontrer une certaine résistance s’il touche au sphincter externe de l’urètre. • Demander à l’enfant d’inspirer profondément pendant l’insertion du cathéter ; l’insérer à la profondeur recommandée dans le tableau ci-contre.

582

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

Garçons

Âge

Cathéter (Fr)

Profondeur d’insertion (cm)

Cathéter (Fr)

Profondeur d’insertion (cm)

Nouveau-né et prématuré

5-6

5

5-6

6

Nourrisson – 3 ans

5-8

5

5-8

6

4-8 ans

8

5-6

8

6-9

8 ans – prépuberté

10-12

6-8

8-10

10-15

Puberté

12-14

6-8

12-14

13-18

chaise d’aisance pourra aussi être utilisée en s’assurant de vider l’urine avant que l’enfant ne fasse une selle. Les échantillons de selles ne doivent pas être uniquement constitués de fragments ; ils doivent être assez substantiels pour permettre l’analyse. Ils sont placés dans un contenant adéquat fermé et identié. Si plusieurs échantillons sont nécessaires, les contenants sont identiés avec la date et l’heure du prélèvement, et conservés au réfrigérateur.

14.5.3

Échantillon de sang

Que l’échantillon de sang soit prélevé par l’inrmière ou par un autre professionnel, c’est l’inrmière qui est tenue de vérier que les échantillons sont recueillis à temps et de manière adéquate. La collecte, le transport et la conservation des échantillons peuvent inuencer les résultats des analyses.

Il existe diverses méthodes de prélèvement sanguin : veineux, artériel ou capillaire. Quelle que soit la méthode utilisée, la perte sanguine demeure un événement stressant pour les enfants, peu importe leur âge. L’inrmière doit donc leur permettre d’exprimer leurs inquiétudes et les rassurer en leur expliquant que leur organisme produit continuellement du sang et que leur corps ne risque pas d’en manquer. Les enfants redoutent également la douleur et l’inconfort associés aux ponctions veineuses artérielles ou capillaires. Le personnel inrmier doit donc prévoir des techniques de réduction de la douleur pour soulager cet inconfort ENCADRÉ 14.12. Enn, l’inrmière doit prélever rapidement les échantillons et appliquer une pression sur le point de ponction à l’aide d’une gaze sèche, jusqu’à l’arrêt du saignement. Si le prélèvement a été fait dans le bras, celui-ci doit être maintenu en position étendue, sans le échir, alors qu’une

ALERTE CLINIQUE

Pour les jeunes enfants ou ceux qui sont anémiques, il faut tenir un registre de la quantité de sang prélevé durant tout le traitement, puisque les pré­ lèvements fréquents peuvent faire diminuer rapidement le volume sanguin d’un enfant. Il est donc essentiel de coordon­ ner les divers prélèvements d’échantillons de sang.

Techniques de soins ENCADRÉ 14.12

Diminuer la douleur et l’anxiété lors de prélèvements sanguins

DIMINUER L’ANXIÉTÉ

• Dissimuler tout l’équipement avant usage.

de la lidocaïne, dont le délai d’application est inférieur, soit 30 minutes.

• Encourager les parents à être présents et à participer, s’ils le désirent.

UTILISER LA BONNE TECHNIQUE

• Immobiliser l’enfant uniquement si cela est requis pour effectuer l’interven­ tion sans danger ; recourir à l’étreinte thérapeutique.

• Laisser la peau préparée sécher complètement avant d’y introduire l’aiguille.

• Insister sur le fait que l’entrée du sang dans la seringue ou le tube n’est pas douloureuse.

• Utiliser l’aiguille du plus petit calibre (p. ex., de calibre 25) permettant un écoulement facile du sang.

• Rassurer les jeunes enfants en leur mentionnant qu’ils ne sont pas vidés de leur sang et qu’il leur en reste encore beaucoup.

• Pour éviter les tentatives d’insertion excessives, se limiter à 4 essais répartis entre 2 personnes pour effectuer la manœuvre (2 essais par personne) ; si l’insertion ne réussit pas après les 4 ponctions, utiliser d’autres techniques d’accès veineux comme un cathéter veineux central introduit par voie périphérique (CVCIVP) ; établir une procédure pour dépister les enfants dont l’accès veineux est difcile et prévoir les interventions qui s’imposent dans ce cas (p. ex., la personne la plus expérimentée effectue la première tentative).

UTILISER DES MÉTHODES NON PHARMACOLOGIQUES

• Distraire l’enfant en lui demandant de prendre une grande respiration au moment de l’insertion et du retrait de l’aiguille, d’expirer longuement, de soufer, de faire des bulles, de compter doucement, puis plus vite et plus fort (Olsen et Weinberg, 2017). • Avant et pendant l’insertion d’une lancette dans le talon d’un nouveau­né, placer le nouveau­né portant une couche contre le sein nu de sa mère, peau contre peau, pendant 10 à 15 minutes (Gray, Garza, Zageris et al., 2015). • Pendant le prélèvement, laisser le nourrisson sucer une tétine recouverte d’une solution de sucrose 24 % préparée. En l’absence d’une solution de sucrose prête, ajouter 15 mL de sucre dans 60 mL d’eau stérile. Utiliser cette solution pour enduire la suce ou en administrer 2 mL sur la langue du nouveau­né 2 minutes avant l’intervention.

14

• Appliquer une pression sur le point de ponction avec une compresse avant de retirer l’aiguille, an d’en faciliter le retrait et d’atténuer la douleur. Rassurer les jeunes enfants en les informant que leur sang ne va pas continuer de couler. PRÉLEVER PLUSIEURS ÉCHANTILLONS DE SANG

UTILISER DES MÉTHODES PHARMACOLOGIQUES

• Utiliser un dispositif de perfusion intermittente (canule sodique) pour pré­ lever d’autres échantillons ; envisager les tubulures de CVCIVP tôt, et non comme dernier recours.

• Appliquer une crème anesthésique topique de 30 à 60 minutes avant l’intervention, selon la marque (si le temps le permet), ou

• Coordonner les soins pour pouvoir effectuer plusieurs tests sur un seul échantillon de sang .

Chapitre 14

Techniques de soins

583

Jugement

clinique

pression dans le pli du coude est appliquée durant Juliette est une llette de 8 ans admise pour les quel ques minutes une anémie grave. Lors du contrôle des signes suivant la ponction veivitaux, vous obtenez les résultats suivants : neuse pour réduire les Pression artérielle (P.A.) : 100/60 mm Hg ecchymoses. L’infirmière Fréquence cardiaque (F.C.) : 96 batt./min doit recouvrir le point de Fréquence respiratoire (F.R.) : 28 R/min ponction d’un pansement Saturation pulsatile en oxygène (SpO2) : 99 % adhésif. L’application de compresses chaudes sur les Comment devez-vous interpréter la SpO2 de Juliette ? Justiez votre réponse. zones sujettes aux ecchymoses stimule la circulation, facilite l’élimination du sang extravasé et atténue la douleur.

Prélèvement veineux MS 5.3 « Ponction veineuse », Méthodes de soins 1 (Lemire et Perreault, 2016a).

MS 4.7 « Prélèvement sanguin par cathéter veineux central », Méthodes de soins 2 (Lemire et Perreault, 2016b).

CONSEIL CLINIQUE

Quinze secondes équivalent à chanter Bonne fête ! dans sa tête.

Les échantillons de sang veineux peuvent être prélevés par ponction veineuse MS 5.3 ou par aspiration à partir d’un dispositif d’accès périphérique ou central MS 4.7 . Le prélèvement d’échantillons de sang par un cathéter veineux périphérique est pratique et peut diminuer l’anxiété de l’enfant et l’inconfort lié à la procédure (Infusion Nurses Society, 2011). Bien que le cathéter veineux périphérique permette à l’enfant d’éviter d’autres ponctions veineuses, cette méthode d’aspiration du sang peut raccourcir la durée de vie du dispositif. Au moment de déterminer le site de perfusion I.V. pour le prélèvement d’un échantillon, il faut tenir compte du type de liquide perfusé. Par exemple, les résultats d’un test de glycémie seront faussés si l’échantillon a été prélevé avec un cathéter ayant déjà servi à administrer une solution contenant du glucose. Pour obtenir un échantillon de sang à partir d’un cathéter veineux périphérique lorsqu’une solution de perfusion peut interférer avec les résultats des tests, il faut procéder comme suit : • arrêter la perfusion ; • nettoyer le bouchon d’injection avec un agent antiseptique pendant 15 secondes et le laisser sécher pendant 30 secondes ; • aspirer une quantité de sang égale au volume de liquide dans le cathéter et le jeter, puis aspirer l’échantillon ; • une fois le prélèvement terminé, rincer le cathéter veineux avec une solution d’eau saline et rebrancher la perfusion.

FIGURE 14.9 Point de ponction (zone colorée et tachetée) sur la plante du pied du nourrisson

584

Partie 5

Dans le cas d’une culture de sang, le premier échantillon doit être utilisé, car les microorganismes sont plus susceptibles de s’accumuler dans le cathéter lui-même. Si le cathéter contient plusieurs lumières, c’est la lumière distale que l’on doit utiliser pour le prélèvement des échantillons de laboratoire.

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

Prélèvement artériel Les techniques non invasives comme la saturométrie sont à privilégier pour la surveillance de l’oxygénation. Toutefois, pour mesurer les gaz sanguins artériels et capillaires, il faut recourir à des échantillons de sang. Les pleurs, la crainte et l’agitation de l’enfant affectent aussi les valeurs des gaz sanguins ; il faut donc s’efforcer de réconforter l’enfant. Il est possible d’obtenir des échantillons de sang artériel par un cathéter installé dans l’artère radiale ou fémorale. Puisqu’il faut du sang non coagulé, des tubes de prélèvement avec héparine sont utilisés. Il faut aussi veiller à ce qu’aucune bulle d’air n’entre dans le tube, car la concentration de gaz sanguins s’en trouverait altérée. L’inrmière doit déposer l’échantillon dans de la glace pour réduire le métabolisme des cellules sanguines et s’assurer qu’il est envoyé au laboratoire dans les plus brefs délais.

Prélèvement capillaire Les prélèvements de sang capillaire sont courants pour la mesure des gaz sanguins. Ces résultats ne sont pas aussi précis que les valeurs artérielles pour la pression partielle en oxygène, mais ils donnent des valeurs satisfaisantes pour le pH, le dioxyde de carbone (CO 2 ) et le bicarbonate (HCO3). Ils permettent de mesurer les échanges pulmonaires et de détecter notamment une modication anormale des concentrations de CO2, de pH et de HCO3 dans le sang artériel allant vers les tissus. La ponction capillaire est particulièrement importante en pédiatrie, car elle permet de prélever de petites quantités de sang (Ordre professionnel des technologistes médicaux du Québec, 2011). Chez les nourrissons de moins de six mois, la piqûre au talon est une méthode courante de prélèvement d’échantillons. L’inrmière doit : • délimiter les bords du calcanéum en traçant une première ligne imaginaire partant d’un point situé entre le quatrième et le cinquième orteil en direction postérieure et se prolongeant parallèlement vers le côté latéral du talon ; une seconde ligne partant du milieu du gros orteil, en direction postérieure, parallèlement au côté médial du talon est ensuite tracée FIGURE 14.9 ; • réchauffer le talon pendant trois minutes ; • nettoyer le point de prélèvement avec de la chlorhexidine ; • immobiliser fermement le pied du nourrisson avec la main libre ; • effectuer le prélèvement à l’aide d’un dispositif à lancette automatique à moins de 2 mm de profondeur, sur la partie externe du talon (World Health Organization [WHO], 2010) ; ces dispositifs permettent de régler plus précisément la profondeur de la piqûre et sont moins

Techniques de soins ENCADRÉ 14.13

Prélever des sécrétions respiratoires

• Préparer tout le matériel avant le début de l’intervention.

ÉCOUVILLONNAGE RHINOPHARYNGÉ

• Allonger l’enfant sur le dos.

• Introduire un écouvillon dans une des narines de l’enfant et recueillir des cellules épithéliales du rhinopharynx ; insérer ensuite l’écouvillon dans le tube à culture.

ASPIRATION RHINOPHARYNGÉE

• Instiller de 1 à 3 mL de solution saline stérile normale dans une narine à l’aide d’une seringue stérile sans aiguille de 5 mL. • Aspirer le contenu avec un petit injecteur à poire ou la seringue de 5 mL, puis le placer dans un contenant stérile.

CULTURE DE GORGE

• Écouvillonner les amygdales et la partie postérieure du pharynx ; insérer ensuite l’écouvillon dans le tube à culture.

Source : Adapté de www.cdsjlabo.org/procedures-prelevement/prelevement-naso-pharynge-ecouvillonnage-aspiration/2014 ; www.chusj.org/getmedia/ 72731278-378a-4ce2-a777-b10ab120bd99/Prelevement_secretions_nasopharynges.pdf.aspx?ext=.pdf; 2009.

douloureux qu’une simple lancette (Vertanen, Fellman, Brommels et al., 2001). Les lames chirurgicales, quel qu’en soit le type, sont contre-indiquées. Chez les enfants de plus de six mois, les échantillons de sang capillaire sont prélevés par piqûre au doigt à l’aide d’une lancette.

Complications Les complications les plus graves associées à la ponction du talon chez le nouveau-né sont l’ostéochondrite nécrosante résultant de l’insertion de la lancette dans le calcanéum, l’infection ou l’abcès (Dhondt, 2010 ; WHO, 2010). Pour éviter l’os téochondrite, il faut avoir la bonne technique. Les traumas répétés sur la surface plantaire du talon peuvent causer une brose et une cicatrisation qui nuisent à la marche. An de les éviter, il est recomma ndé d’alterner les sites de ponction.

14.5.4

Échantillon de sécrétions des voies respiratoires

Le prélèvement d’expectorations ou d’écoulements du nez est parfois nécessaire pour le diagnostic des infections respiratoires, en particulier pour celui de la tuberculose et du virus respiratoire syncytial (VRS). Les nourrissons et les trottineurs ne sont pas en mesure d’obéir aux directives concernant la toux et nissent par avaler la moindre expectoration produite. Pour obtenir un échantillon satisfaisant, on peut utiliser un dispositif d’aspiration, comme un collecteur de mucus, si le cathéter est inséré dans la trachée et que le réexe de la toux est provoqué. Pour les enfants qui ont subi une trachéostomie, l’aspiration d’un échantillon des sécrétions de la trachée ou des grosses bronches est possible en reliant un dispositif de prélèvement à l’appareil d’aspiration, tel que cela est expliqué dans la section 14.8.6 de ce chapitre.

S’ils sont bien guidés, les enfants plus vieux et les adolescents sont capables de tousser et de fournir un échantillon de sécrétion. Il peut s’avérer utile de leur faire une démonstration de toux profonde. Pour les enfants plus jeunes, l’inrmière peut effectuer un prélèvement nasal selon diverses techniques ENCADRÉ 14.13.

14.6

Administration des médicaments

14.6.1

Calcul de la posologie

Selon la Loi sur les inrmières et les inrmiers (RLRQ, chapitre I-8), l’inrmière doit connaître les posologies des médicaments qu’elle administre aux enfants, de même que l’effet souhaité, les effets indésirables possibles et les signes de toxicité qui y sont associés. Il existe peu d’intervalles posologiques normalisés en pédiatrie. La plupart des médicaments sont préparés et emballés en fonction des doses moyennes pour adultes. Les médicaments, surtout ceux sous forme liquide, doivent donc être préparés selon les directives spécifiques des pharmacies d’hôpitaux pédiatriques.

14

Les facteurs liés à la croissance et à la maturation inuent beaucoup sur les capacités d’un enfant à métaboliser et à excréter des médicaments. L’immaturité ou des anomalies dans les processus d’absorption, de distribution, de biotransformation ou d’excrétion des médicaments peuvent modier de façon importante les effets d’un médicament. Les nouveau-nés et les nourrissons nés avant terme dont les systèmes enzymatiques du foie sont immatures (siège de dégradation de la plupart des médicaments et de détoxication), dont les concentrations plasmatiques des protéines de liaison aux médicaments sont inférieures à la normale ou dont la fonction rénale est Chapitre 14

Techniques de soins

585

PHARMACOVIGILANCE

Avant d’administrer le moindre médicament, l’inrmière doit vérier l’identité de l’enfant en la comparant à son bracelet d’identité. Si l’enfant est incapable de se nommer, elle demandera au parent le prénom et le nom de l’enfant ainsi que sa date de naissance, et elle vériera l’information sur le bracelet. Si le parent n’est pas présent, elle doit procéder à une double vérication de l’identité avec un autre intervenant.

immature (siège d’excrétion de la plupart des médicaments) sont particulièrement vulnérables aux effets néfastes des médicaments. Après la phase du nourrisson, beaucoup de médicaments sont métabolisés plus rapidement dans le foie, ce qui rend nécessaires des doses plus importantes ou une administration plus fréquente. Cela est d’une importance particulière pour la gestion de la douleur, car il peut être nécessaire d’augmenter la posologie d’un analgésique ou de raccourcir les intervalles entre l’administration de chaque dose (Nicolas, Bouzom, Huhues et al., 2017). En pédiatrie, la posologie d’un médicament se calcule à l’aide de différentes formules liées à l’âge, au poids et à la surface corporelle de l’enfant. L’inrmière doit maîtriser ces méthodes de calcul des posologies sécuritaires.

Méthodes de calcul MS 6.1 « Administration de médicaments par voie orale », Méthodes de soins 1 (Lemire et Perreault, 2016a).

La méthode la plus courante de détermination de la posologie repose sur une dose précise par kilogramme de poids corporel, par exemple 0,1 mg/kg. Elle se calcule selon la formule suivante : Dose (mg/kg) × poids (kg) = dose à administrer L’établissement d’un rapport proportionnel entre la surface corporelle (SC) et le poids corporel constitue une autre méthode de calcul de la posologie. Le rapport de la SC et du poids est inversement proportionnel à la taille ; par conséquent, un enfant plus petit, et dont le poids est inférieur à celui d’un enfant plus âgé ou d’un adulte, a une SC relativement plus grande que celle qui est prévue en fonction du poids. La détermination de la SC nécessite habituellement l’emploi d’une calculatrice électronique. La SC est estimée à partir de la taille et du poids de l’enfant selon la formule suivante (formule selon Mosteller) :

inrmière avant leur administration à l’enfant. C’est le cas pour les antiarythmiques, les anticoagulants, les agents de chimiothérapie, les électrolytes et l’insuline, mais aussi l’épinéphrine, les opioïdes et les sédatifs. Des erreurs d’emplacement du signe décimal peuvent se produire, entraînant une multiplication par au moins 10 fois la dose recommandée.

14.6.2

Administration par voie orale

L’administration des médicaments aux enfants par voie orale est privilégiée, car cette méthode est facile ENCADRÉ 14.14 . Toutefois, bien que certains jeunes enfants soient en mesure d’avaler ou de croquer les médicaments solides, ces formes pharmaceutiques ne sont pas recommandées dans leur cas en raison du danger d’aspiration MS 6.1 . Pour faciliter leur administration, la plupart des médicaments pédiatriques sont offerts en préparations liquides sucrées et colorées. Certains d’entre eux ont un arrière-goût un peu désagréable, mais la plupart des enfants avalent ces liquides en afchant peu de résistance. L’inrmière peut goûter une minuscule quantité de préparation orale pour vérier si celle-ci est plaisante ou amère. Il faut tenter de camouer cet arrière-goût désagréable dans la mesure du possible ENCADRÉ 14.15.

Préparation Les dispositifs qui permettent de mesurer les doses de médicaments ne sont pas toujours assez précis pour les petites quantités requises chez la clientèle pédiatrique. La cuillère à café est un outil de mesure imprécis, propice aux erreurs. Le dispositif d’administration MedibottleMD est plus efcace pour administrer des médicaments par voie orale aux nourrissons que les seringues (Purswani, Radhakrishnan, Irfan et al., 2009) FIGURE 14.10. Le compte-gouttes est aussi un outil de mesure imprécis du volume des liquides, qui entraîne des variations plus importantes encore que les cuillères à café ou les cuillères domestiques. Le volume d’une goutte varie en fonction de la

Vérication de la posologie La responsabilité juridique quant à l’administration de la posologie adéquate relève de l’inrmière. Si la dose prescrite dépasse l’intervalle habituel de posologie, ou si la voie d’administration n’est pas clairement indiquée, l’inrmière doit valider l’information auprès du médecin qui a écrit l’ordonnance avant de donner le médicament à l’enfant. Même s’il a été déterminé que la posologie convenait à un enfant en particulier, de nombreux médicaments restent dangereux ou mortels. Les règlements de la plupart des établissements exigent que les ordonnances et la préparation de certains médicaments soient revériées par une autre

586

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 14.14

Prise de médicaments solides par voie orale

Il faut montrer aux enfants qui doivent prendre beaucoup de médicaments par voie orale la manière d’avaler les comprimés ou les capsules. Pendant l’enseignement, l’inrmière doit expliquer clairement la technique et en faire la démonstration. Elle peut aussi faire du renforcement positif dans le but de faciliter l’apprentissage.

Pratiques inrmières ENCADRÉ 14.15

Administrer aux enfants des médicaments par voie orale

• Proposer à l’enfant une sucette glacée aromatisée ou un petit glaçon à sucer pour engourdir la langue avant l’administration du médicament.

• Offrir, en cas de nausée, une boisson gazeuse versée sur de la glace concassée avant ou juste après la prise du médicament.

• Mélanger le médicament avec une petite quantité (environ 5 mL) d’un aliment au goût sucré comme du miel (sauf chez les nourrissons en raison du risque de botulisme), de sirop aromatisé, de conture, de purée de fruits, de sorbet ou de glace ; éviter les aliments essentiels, car l’enfant pourrait les associer aux médicaments et refuser de les manger.

• Demander à l’enfant de se pincer le nez et de boire le médicament avec une paille si celui-ci a un goût déplaisant ; l’essentiel du goût est associé à l’odorat.

• Après que l’enfant a pris son médicament, lui proposer quelque chose qui chasse le goût du médicament comme de l’eau, du jus, une sucette glacée ou une barre de jus congelé.

• Utiliser une seringue sans aiguille ou un compte-gouttes (de 0,25 à 0,5 mL à la fois) pour faire s’écouler un médicament dans la bouche d’un nourrisson. • Utiliser une tétine ou une suce comme réservoir pour le médicament.

viscosité ou de l’épaisseur du liquide mesuré : les liquides visqueux produisent de plus grosses gouttes que les liquides plus uides (Peacock, Parnapy, Raynor et al., 2010). De nombreux médicaments sont offerts en capsules ou en comptegouttes. Ces dispositifs sont précis lorsqu’il s’agit de mesurer le médicament pour lequel ils ont été spéciquement conçus, mais ils ne sont pas ables pour mesurer d’autres liquides.

le comprimé est dissous dans 5 mL d’eau ou de liquide aromatisé, et 2,5 mL sont administrés.

Les outils les plus précis pour mesurer de petites quantités de médicaments sont les seringues jetables en plastique, en particulier les seringues à tuberculine, calibrées par paliers de 0,01 mL, et qui conviennent pour les volumes inférieurs à 1 mL. Ces seringues permettent une mesure able et une administration pratique 1 . Elles sont aussi sécuritaires pour les déplacements de l’inrmière.

• mettre le médicament dans une seringue sans aiguille ;

Il est difcile pour les jeunes enfants, et parfois pour les enfants plus âgés, d’avaler des comprimés ou des pilules. Comme de nombreux médicaments ne sont pas offerts en préparations pédiatriques, le comprimé doit être écrasé avant d’être administré aux enfants. Pour écraser les comprimés, des méthodes simples peuvent être employées. Il est à noter toutefois que tous les médicaments ne peuvent pas être écrasés (p. ex., les médicaments munis d’un revêtement entérique ou protecteur, ou les médicaments à libération prolongée). Certaines doses pédiatriques sont en réalité une fraction des médicaments destinées aux adultes. Cependant, seuls les comprimés avec une rainure visible peuvent être divisés en deux ou en quatre avec précision. Si le médicament est soluble, le comprimé ou le contenu d’une capsule peuvent être mélangés dans une petite quantité prémesurée de liquide. Par la suite, la portion de médicament qui convient est prélevée et administrée. Par exemple, si la moitié d’une dose est requise,

Administration Bien qu’il soit relativement facile d’administrer des liquides aux enfants, l’inrmière doit prendre les précautions suivantes pour prévenir l’aspiration :

• s’il s’agit d’un nourrisson, le tenir en position semi-inclinée ; • administrer lentement le médicament, en petites quantités, pour laisser à l’enfant le temps d’avaler au fur et à mesure (il est préférable de placer la seringue sur le côté de la langue du nourrisson).

FIGURE 14.10 Le dispositif MedibottleMD permet d’administrer des médicaments par voie orale aux nourrissons.

Il existe d’autres méthodes pratiques d’administration des médicaments liquides aux nourrissons, par exemple : • laisser le nourrisson sucer un médicament placé dans une tétine vide ; • appuyer une seringue contenant le médicament sur le côté de la bouche, parallèlement au mamelon, pendant l’allaitement 2 . Il ne faut pas ajouter le médicament à la formule, car il arrive que l’enfant refuse de terminer son biberon.

Résistance de la part de l’enfant Les nourrissons et les trottineurs qui refusent de coopérer ou qui résistent sans cesse malgré les explications et les encouragements devront être immobilisés ENCADRÉ 14.16. Si tel est le cas, il faut procéder rapidement et méticuleusement. L’inrmière doit demander à l’enfant pourquoi il résiste et lui expliquer que l’immobilisation n’est pas une punition. Le parent ou l’inrmière doit

Chapitre 14

ALERTES CLINIQUES 1 Il faut prendre soin de jeter la gaine protectrice en plastique qui recouvre parfois l’extrémité des seringues. Ces embouts sont assez petits pour être aspirés par les jeunes enfants. 2 Il faut enlever l’aiguille de la seringue à tuberculine avant d’administrer le médicament par voie orale.

Techniques de soins

587

14

Soutien inrmier ENCADRÉ 14.16

Solliciter la participation des parents

La plupart des parents ont déjà administré des médicaments à leur enfant et sont en mesure de dire quelle méthode fonctionne le mieux avec lui. C’est pourquoi il faut faire appel à leurs connaissances, validant du même coup le niveau de participation désiré dans les soins de leur enfant. Par exemple, lors d’une injection intraveineuse, certains parents veulent être présents an de tenir et de réconforter leur enfant, alors que d’autres préfèrent ne pas y assister. Parfois, an de diminuer l’expérience traumatique de l’enfant, l’inrmière préparera le médicament, mais demandera aux parents de l’administrer à l’enfant. L’inrmière peut alors superviser les parents pendant l’administration.

tenir l’enfant sur ses genoux, le bras droit de l’enfant derrière lui, en tenant fermement de sa main gauche le poignet gauche de l’enfant et xer bien la tête entre son bras et son corps. L’inrmière peut ensuite verser lentement le médicament dans la bouche de l’enfant FIGURE 14.11.

14.6.3

FIGURE 14.11 L’inrmière immobilise partiellement l’enfant pour faciliter l’administration du médicament par voie orale.

MS 6.11 « Administration des injections par voie intramusculaire », Méthodes de soins 1 (Lemire et Perreault, 2016a).

TABLEAU 14.5

Administration intramusculaire

Chez l’enfant, l’injection de médicaments dans le muscle demande plus de précautions que chez l’adulte quant au choix du site et à la profondeur d’insertion de l’aiguille, car la musculature pédiatrique est moins développée MS 6.11 . Cette voie est entre autres utilisée pour certains vaccins ou antibiotiques lorsqu’un accès intraveineux n’est pas disponible, ou en cas d’urgence pour l’administration d’épinéphrine ; elle est toutefois douloureuse.

Choix de la seringue et de l’aiguille Le volume de médicament prescrit aux nourrissons et la faible quantité de tissu pouvant recevoir une injection exigent l’emploi d’une seringue qui permet de mesurer des quantités inmes de solution, comme les seringues de 1 mL ou à faible capacité, par exemple celles de 0,5 mL. Ces seringues visent à réduire au minimum le risque d’administration accidentelle d’une quantité incorrecte de médicament en raison du volume nominal inutilisable, c’est-à-dire le volume

Choix d’une aiguille pour l’administration intramusculaire, selon l’âge

ÂGE

CALIBRE DE L’AIGUILLE

LONGUEUR DE L’AIGUILLE (CM)

Nourrissons et enfants

22-25

1,6-2,5

Adolescents

22-25

2,5-3,8

Source : ASPC (2016). Guide canadien d’immunisation : Partie 1 – Information clé sur l’immunisation. Repéré à www.canada.ca/fr/sante-publique/services/publications/vie-saine/guide-canadien-immunisation-partie-1information-cle-immunisation/page-8-methodes-administration-vaccins.html.

588

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

résiduel de liquide dans la seringue et l’aiguille après l’enfoncement complet du piston (Haute École de Santé Fribourg, 2013). Dans une seringue standard, il reste toujours au moins 0,2 mL de solution dans l’embout de la seringue et l’embase et la tige de l’aiguille ; ainsi, lorsque de très petites quantités de 2 médicaments sont mélangées dans la seringue, comme les composés d’insuline, le rapport des 2 médicaments peut être signicativement altéré. Les mesures et les précautions suivantes réduiront au minimum l’effet du volume nominal inutilisable : • S’il faut mélanger 2 médicaments dans une seringue, toujours les aspirer dans le même ordre pour maintenir un rapport constant entre eux. • Utiliser la même marque de seringue (le volume nominal inutilisable peut varier de façon importante d’une marque à l’autre). • Utiliser des seringues monopièces (aiguille reliée en permanence à la seringue). On doit également tenir compte du volume nominal inutilisable au moment de l’injection du médicament, car purger une seringue avec une bulle d’air en mettant 1 mL d’air dans la seringue ajoute une quantité additionnelle de médicament à la dose prescrite. En conséquence, il n’est pas recommandé de purger une seringue avec une bulle d’air, surtout lorsque le volume de médicament à administrer est inférieur à 1 mL. Les seringues sont calibrées de manière à libérer la dose prescrite de médicament, et la quantité de médicament restant dans l’aiguille et la seringue n’entre pas dans le calibrage du corps de la seringue. La longueur de l’aiguille doit être sufsante pour pénétrer le tissu sous-cutané et déposer le médicament dans le corps du muscle. Le calibre de l’aiguille doit être assez petit pour libérer le liquide sans danger (ASPC, 2016) TABLEAU 14.5. Celles dont le diamètre est plus important sont destinées aux médicaments visqueux et servent à prévenir la courbure accidentelle des aiguilles plus longues.

Choix du site d’administration En général, il est plus facile de choisir un site d’injection intramusculaire chez les enfants plus âgés et les adolescents que chez les nourrissons en raison de la musculature limitée et sous-développée de ces derniers TABLEAU 14.6. De plus, il est parfois difcile d’évaluer la quantité de liquide susceptible d’être administrée sans danger dans un seul point. En général, le volume maximal à administrer dans un seul point est de 1 mL chez les nourrissons. Il se peut toutefois que les muscles des petits nourrissons ne tolèrent pas un volume supérieur à 0,5 mL. Lorsque l’adolescent approche

de la taille adulte, des volumes avoisinant ceux des doses d’adultes peuvent être utilisés. Cependant, plus le volume de la solution est important, plus le muscle choisi pour l’injection doit être grand. Il faut éviter les nerfs et les vaisseaux sanguins majeurs. Le point d’injection à privilégier pour les nourrissons se trouve sur le muscle vaste externe, le muscle droit fémoral étant à éviter. Le siège ventroglutéal est relativement dépourvu de nerfs et de vaisseaux sanguins importants : il s’agit d’un muscle assez grand comprenant moins de tissu sous-cutané que le siège dorsal. Il offre des repères anatomiques bien dénis pour le choix d’un point d’injection sûr, il est moins douloureux que le muscle vaste externe et il est facile d’accès dans plusieurs positions. Les recherches de Cook et Murtagh (2006) et de Junqueira et ses collaborateurs (2010) sur les points d’injection intramusculaire en pédiatrie indiquent que le siège ventroglutéal n’a pas été associé à des complications, et qu’il s’agit du point à privilégier chez les enfants de tout âge. Le muscle deltoïde, un petit muscle situé près du nerf axillaire et du nerf radial, peut recevoir l’injection de petits volumes de liquide chez les enfants de 18 mois et plus. Il a pour avantages de provoquer moins de douleur et d’effets indésirables liés à l’injection que le muscle vaste externe, comme dans le TABLEAU 14.6

cas des immunisations (Nakajima, Mukai, Takaoka et al., 2017).

Complications Les injections intramusculaires entraînent rarement des inconvénients importants. Des incapacités graves peuvent toutefois se produire. L’emploi répété d’un même point d’injection a été associé à une brose du muscle avec contracture musculaire subséquente. Les injections proches des gros nerfs, comme le nerf sciatique, peuvent provoquer des incapacités permanentes, en particulier après l’administration de médicaments potentiellement neurotoxiques.

Contracture musculaire : Contraction pathologique entraînant la limitation ou l’arrêt du mouvement d’un muscle, à un degré et durant une période de temps variables.

Certains médicaments peuvent causer une irritation lorsqu’ils sont malencontreusement injectés dans le tissu sous-cutané, et non intramusculaire. L’injection en Z diminue ce risque. Elle est recommandée pour les nourrissons et les enfants plutôt que la méthode à bulle d’air. Pour réduire au minimum les traces de piqûre, l’aiguille peut aussi être changée pour une plus petite après le prélèvement du liquide de la ole. Parmi les difcultés inhérentes à l’administration de préparations opaques comme la pénicilline G (BicillinMD), il faut noter l’impossibilité de détecter l’aspiration de sang au fond de la seringue, ce qui augmente le risque d’injection dans un vaisseau sanguin.

Sites d’injection intramusculaire

EMPLACEMENT

14

DESCRIPTION

Muscle vaste externe • Palper pour trouver le grand trochanter et les articulations du genou ; diviser en tiers la distance verticale séparant ces deux repères ; faire l’injection dans le tiers moyen.

Insertion et taille de l’aiguille • Insertion de l’aiguille perpendiculairement au genou ou à la cuisse chez les nourrissons et les jeunes enfants, ou avec un léger angle vers la partie antérieure de la cuisse • Calibre 22-25 ; 1,6-2,5 cm Avantages • Grand muscle bien développé pouvant tolérer de grandes quantités de liquide (de 0,5 mL [nourrisson] à 2,0 mL [enfant]) • Facilement accessible si l’enfant est couché sur le dos ou sur le côté, ou s’il est assis Inconvénients • Thrombose de l’artère fémorale résultant de l’injection dans le milieu de la cuisse • Lésion du nerf sciatique si insertion d’une longue aiguille sur la face postérieure ou médiale d’un petit membre • Plus douloureux que l’injection dans les muscles deltoïde ou glutéal Clientèle • Enfants de tout âge, sauf pour le muscle droit fémoral, qui est à éviter chez les nourrissons ; privilégier alors le muscle vaste externe

Chapitre 14

Techniques de soins

589

TABLEAU 14.6

Sites d’injection intramusculaire (suite)

EMPLACEMENT

DESCRIPTION

Ventroglutéal • Palper pour trouver le grand trochanter, l’épine iliaque antérieure et supérieure (repérable lorsque la cuisse est échie à la hauteur de la hanche ; est située à 1-2 cm au-dessus du pli formé par l’aine) et la crête iliaque postérieure ; poser la paume de la main sur le grand trochanter, l’index au-dessus de l’épine iliaque antérieure et supérieure, et le majeur le long de la crête de l’os ilium en direction postérieure, le plus loin possible ; faire l’injection dans le centre de la gure en V formée par les doigts.

Insertion et taille de l’aiguille • Insertion de l’aiguille perpendiculairement au point, mais en formant un léger angle vers la crête iliaque • Calibre 22-25 ; 1,6-2,5 cma Avantages • Absence de nerfs et de structures vasculaires importants • Site facilement décelable par les repères osseux en saillie • Capacité de réception de grandes quantités de liquide (de 0,5 mL [nourrisson] à 2,0 mL [enfant]) • Site facilement accessible si l’enfant est couché sur le dos, à plat ventre ou sur le côté • Moins douloureux que l’injection dans le muscle vaste externe Inconvénient • Médicament dans la couche sous-cutanée plutôt que dans le compartiment intramusculaire Clientèle • Enfants de tout âge

Deltoïde • Repérer l’acromion ; faire l’injection uniquement dans le tiers supérieur du muscle qui prend naissance à environ 2 largeurs de doigt sous l’acromion.

Insertion et taille de l’aiguille • Insertion de l’aiguille perpendiculairement au point, mais en formant un léger angle vers l’épaule • Calibre 22-25 ; 1,6-2,5 cma Avantages • Meilleur taux d’absorption que les points glutéaux • Site facilement accessible • Moins douloureux et moins d’effets indésirables locaux liés aux vaccins que l’injection dans le muscle vaste externe Inconvénients • Petite masse musculaire ne pouvant tolérer que des quantités limitées de médicament (de 0,5 à 1,0 mL) • Petites marges d’innocuité avec risque de lésion du nerf radial et du nerf axillaire (non illustrés, sous le deltoïde à la tête de l’humérus) Clientèle • Enfants de 18 mois et plus

a Des

études ont démontré qu’une aiguille de 2,5 cm est requise pour une injection intramusculaire adéquate chez les nourrissons de 4 mois, et possiblement chez les nourrissons de seulement 2 mois (Hensel, Morson et Preuss, 2013).

590

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

Au moment d’injecter de tels médicaments, l’inrmière doit se montrer particulièrement prudente dans le choix du site d’injection. Une étude sur les techniques d’injection intramusculaire a révélé que plus l’angle d’insertion de l’aiguille est droit (p. ex., un angle de 90°), plus le risque de déplacement et de cisaillement des tissus est faible, ce qui atténue l’inconfort (Nakajima et al., 2017).

Précautions Les dangers possibles liés aux médicaments contenus dans des ampoules en verre incluent notamment la présence de particules de verre dans l’ampoule après son ouverture. Le médicament aspiré dans la seringue risque de contenir des particules de verre qui pourraient être injectées à l’enfant. Par mesure de précaution, il ne faut prélever les médicaments contenus dans des

ampoules en verre qu’au moyen d’une aiguille munie d’un ltre. Les enfants peuvent avoir des réactions imprévisibles. Même les enfants qui paraissent détendus ou qui sont immobilisés peuvent perdre la maîtrise d’eux-mêmes à cause du stress lié à l’intervention. Il est recommandé qu’une autre personne soit présente pour tenir l’enfant, au besoin. L’inrmière informe d’abord l’enfant qu’il recevra une injection, puis elle effectue l’intervention aussi rapidement que possible pour éviter de prolonger l’expérience stressante. Les interventions envahissantes, et les injections en particulier, provoquent de l’anxiété chez les nourrissons et les trottineurs. Comme les injections sont douloureuses, l’inrmière doit avoir une excellente technique d’injection et prendre des mesures de réduction de la douleur pour en atténuer les désagréments ENCADRÉ 14.17.

Techniques de soins ENCADRÉ 14.17

Administrer un médicament par voie intramusculaire

AVANT L’ADMINISTRATION DU MÉDICAMENT

• Prendre les précautions de sécurité propres à l’administration des médicaments (p. ex., les cinq premiers bons : bon médicament, bon client, bonne dose, bonne voie d’administration, bon moment). • Si le médicament est au réfrigérateur, le sortir à l’avance pour l’amener à la température ambiante.

• Appliquer une crème anesthésique sur le site d’injection de 30 à 60 minutes avant l’injection (selon le produit utilisé) ; la quantité et l’étendue de l’application dépendent de l’âge de l’enfant. Recouvrir le site enduit de crème d’un pansement transparent, qui sera retiré au moment de l’injection (Olsen et Weinberg, 2017). Participation de l’enfant

• Remplacer l’aiguille qui a servi à perforer le bouchon en caoutchouc de la ole par une nouvelle, du plus petit diamètre possible permettant l’écoulement libre du médicament dans le muscle. Si le médicament est en ampoule, se servir d’une aiguille munie d’un ltre pour le prélever an d’enlever toute particule de verre ; utiliser ensuite une nouvelle aiguille sans ltre ou canule pour l’injection.

• Expliquer brièvement à l’enfant ce qui va se produire et de quelle façon il peut aider.

• Choisir l’aiguille et la seringue en tenant compte de :

Diminution de la perception de la douleur

14

• Demander à l’enfant de vous avertir s’il ressent de la douleur. • Proposer à l’enfant de tenir un petit pansement adhésif et de le coller sur le point d’injection après l’administration.

– la masse musculaire de l’enfant ;

• Distraire l’enfant.

– la quantité de liquide à administrer (volume de la seringue) ;

• Donner à l’enfant un objet sur lequel il peut se concentrer, ou lui permettre de serrer sa main ou le côté du lit, de se pincer le nez, de fredonner une chanson, de compter.

– la viscosité du liquide à administrer (calibre de l’aiguille) ; – la profondeur de pénétration dans le tissu (longueur de l’aiguille). • Ne pas administrer, par site d’injection, un volume supérieur à 0,5 mL aux nourrissons et à 1 mL aux nourrissons plus âgés et aux trottineurs.

AU MOMENT DE L’ADMINISTRATION DU MÉDICAMENT

• Choisir un point d’injection où la peau ne présente ni irritation ni risque d’infection ; palper la région en essayant d’éviter les zones sensibles ou durcies. En cas d’injections multiples, procéder à une rotation des points d’injection.

• Exposer le point d’injection de manière à bien distinguer les repères anatomiques.

• Déterminer le point d’injection en s’assurant que le muscle est assez large pour recevoir ce volume et ce type de médicament : pour les nourrissons et les trottineurs, ou les enfants plus âgés ayant de l’atrophie musculaire, les points d’injection acceptables se situent dans le muscle vaste externe et le muscle ventroglutéal (les muscles dorsoglutéaux ne sont pas sufsamment développés pour constituer un point d’injection sûr) TABLEAU 14.6.

• Demander l’aide d’un autre adulte pour bien positionner l’enfant.

• Placer l’enfant en position couchée ou assise ; l’enfant ne doit pas rester debout, car : – il est plus difcile d’évaluer ainsi les repères anatomiques ; – l’enfant est plus difcile à positionner ; – l’enfant risque de s’évanouir et de tomber. • Enlever complètement la crème anesthésique à l’aide d’une compresse.

Chapitre 14

Techniques de soins

591

ENCADRÉ 14.17

Administrer un médicament par voie intramusculaire (suite)

• Au besoin, vaporiser un agent refroidissant (p. ex., du chlorure d’éthyle) sur le point d’injection de 10 à 15 secondes avant l’injection, ou déposer une compresse froide ou un glaçon enveloppé dans un tissu sur le point d’injec­ tion environ 1 minute avant l’injection, ou encore appliquer du froid sur le point controlatéral. • Saisir fermement le muscle entre le pouce et les doigts pour l’isoler et le stabiliser, et pour faciliter le dépôt du médicament dans la partie la plus profonde. Pour les enfants obèses, étirer la peau avec le pouce et l’index pour déplacer le tissu sous­cutané et saisir le muscle en profondeur de chaque côté. • Insérer l’aiguille rapidement, comme au lancer d’une échette, à un angle de 90°, sauf s’il y a contre­indication. • Employer la technique d’injection en Z ou à bulle d’air, selon le cas. • Éviter d’appuyer sur le piston pendant l’insertion de l’aiguille. • Procéder à l’injection dans un muscle détendu :

• Retirer doucement l’aiguille sans toucher au piston pour éviter de laisser des traces de médicament dans les tissus superciels. • Appliquer une pression ferme sur le site après l’injection. • Éviter de masser le point d’injection, car le massage peut endommager les tissus sous­jacents. • Placer un petit pansement adhésif sur le point d’injection ou demander à l’enfant de le faire ; dans le cas des jeunes enfants, dessiner un visage qui sourit ou un autre symbole amusant sur le pansement. • Jeter la seringue avec l’aiguille sans la recapuchonner dans un contenant biorisque. Les nouvelles aiguilles sont munies d’un système d’aiguille rétractable. Par mesure de sécurité et an d’éviter les piqûres accidentelles pour le personnel ou l’enfant, activer le mécanisme avant de jeter l’aiguille dans le contenant biorisque. • Noter l’heure de l’injection, le médicament, la dose et le site d’injection (le sixième « bon »).

– muscle ventroglutéal (placer l’enfant sur le côté, la cuisse échie devant la jambe) ;

• Surveiller les effets attendus et les effets indésirables (le septième « bon »).

– muscle vaste externe (l’enfant peut être allongé sur le dos, sur le côté ou être assis).

• Réconforter l’enfant et encourager les parents à le faire aussi. Féliciter l’enfant.

• Injecter lentement le médicament.

Réconfort de l’enfant

• Laisser l’enfant exprimer ses sentiments.

APRÈS L’ADMINISTRATION DU MÉDICAMENT

• Tenir fermement une compresse de gaze contre la peau près de l’aiguille au moment du retrait pour éviter de tirer sur les tissus.

CONSEIL CLINIQUE

Au besoin, l’inrmière doit apprendre les techniques d’injection sous­cutanée aux membres de la famille pour l’administration à domicile des médicaments comme l’insuline. Cet enseignement devrait faire partie de la préparation au congé de l’hôpital. MS 6.10 « Administration des injections par voie sous-cutanée », Méthodes de soins 1 (Lemire et Perreault, 2016a).

MS 6.12 « Administration des injections par voie intradermique », Méthodes de soins 1 (Lemire et Perreault, 2016a).

592

Partie 5

Les nourrissons offrent peu de résistance aux injections. Bien qu’ils se tortillent et qu’ils aient du mal à garder la même position, il est en général possible de les maîtriser sans difculté FIGURE 14.7. Si le médicament est administré la nuit, l’inrmière doit réveiller l’enfant. Même s’il peut sembler plus facile de surprendre un enfant qui dort, cette technique peut avoir pour effet de faire craindre à l’enfant de se rendormir. L’enfant d’abord réveillé sait que rien n’arrivera sans qu’il en soit prévenu.

14.6.4

Administration sous-cutanée et intradermique

De nombreux enfants reçoivent des injections sous-cutanées MS 6.10 et intradermiques MS 6.12 . L’administration de l’insuline, les traitements de remplacement hormonaux, la désensibilisation allergique et certains vaccins sont autant d’exemples d’injections sous-cutanées. Le test à la tuberculine, l’anesthésie locale et les tests allergiques sont des exemples courants d’injections intradermiques. Pour réduire au minimum la douleur associée à ces injections, il faut : • changer d’aiguille si elle a servi à perforer le bouchon en caoutchouc de la ole ;

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

• utiliser des aiguilles de calibre 26 à 30 uniquement pour injecter la solution et de petits volumes (jusqu’à 0,5 mL) ; • pour l’injection sous-cutanée, insérer l’aiguille à un angle de 90° ; chez les enfants avec peu de tissus sous-cutanés, certains professionnels de la santé insèrent l’aiguille à un angle de 45° (ASPC, 2016). Bien que les injections sous-cutanées puissent s’effectuer dans n’importe quel tissu sous-cutané, les points courants sont notamment le tiers central du côté latéral du bras, l’abdomen et le tiers central de la cuisse antérieure. Il semble qu’il n’y ait aucun avantage à procéder à une aspiration avant une injection sous-cutanée. D’ailleurs, l’aspiration n’est pas nécessaire pour l’administration d’insuline et n’est pas recommandée pour l’injection sous-cutanée de vaccins (Sepah, Samad, Altaf et al., 2017). C’est d’ailleurs pourquoi les dispositifs automatiques d’injection ne font pas d’aspiration avant l’injection. L’injection sous-cutanée peut être faite à partir d’un cathéter sous-cutané pour certains médicaments qui sont administrés à répétition, notamment l’héparine, l’interféron, l’insuline et le facteur de croissance de colonies de granulocytes,

ainsi que la morphine en soins palliatifs. Ce cathéter peut demeurer en place de trois à sept jours et permet alors l’injection du médicament dans le bouchon du dispositif. Lors d’une injection intradermique dans la face antérieure de l’avant-bras, l’inrmière, après l’administration, doit éviter le côté médial du bras où la peau est plus sensible.

14.6.5

Administration par voie intraveineuse

En pédiatrie, des traitements par voie I.V. sont souvent administrés MS sections 4 et 10 . Pour certains médicaments, il s’agit de la seule voie d’administration efficace. Cette méthode est employée pour les enfants : • dont la faculté d’absorption des médicaments est insufsante en raison d’une diarrhée, d’une déshydratation ou d’un état de choc ; • qui requièrent une concentration sérique élevée d’un médicament ; • qui ont contracté des infections résistantes dont le traitement nécessite l’administration d’un médicament par voie parentérale pendant une longue période ; • dont l’état de santé réclame un soulagement continu de la douleur ; • qui requièrent un traitement d’urgence. Il faut tenir compte de plusieurs facteurs relativement au médicament administré par voie I.V. Cette voie d’administration procure un effet quasi instantané, et il ne peut y avoir qu’un contrôle subséquent limité. La plupart des médicaments pouvant être administrés par voie I.V. exigent une dilution minimale précise ou un débit minimal précis ; beaucoup sont très irritants ou toxiques pour les tissus à l’extérieur du système vasculaire. De plus, avant toute perfusion I.V., l’inrmière doit vérier la perméabilité du point d’insertion. En plus des précautions que les inrmières sont tenues de prendre et des observations qu’elles doivent faire pour le traitement I.V., voici quelques paramètres à prendre en considération pour la préparation et l’administration des médicaments par voie I.V. aux nourrissons et aux enfants : • la quantité de médicament à administrer ; • la dilution minimale de médicament et l’éventualité que l’enfant doive conserver un apport hydrique limité ; • le type de solution dans laquelle le médicament est dilué ; • la durée pendant laquelle le médicament peut être administré sans danger ; • la vitesse de perfusion tolérée sans danger par l’enfant et les vaisseaux ;

• la capacité volumique des tubulures I.V. ; • la compatibilité de tous les médicaments administrés par voie intraveineuse à l’enfant ; • la compatibilité avec les liquides de perfusion. La perfusion convient aux enfants qui peuvent tolérer le liquide additionnel nécessaire à l’administration du médicament. Pour les nourrissons de faible poids, ou ceux dont l’apport hydrique est restreint ou qui ne tolèrent pas un taux élevé de liquide, des systèmes spéciaux d’administration comme des pousse-seringues sont utilisés.

ALERTE CLINIQUE

Ne jamais administrer de médicaments avec des produits sanguins.

Dispositif d’injection intermittente Le dispositif d’injection intermittente, aussi appelé dispositif de verrouillage périphérique ou canule sodique, est un substitut de la perfusion en continu employé lorsque l’accès prolongé à une veine est nécessaire, sans administration continue de liquide. Cette technique est employée le plus souvent pour la perfusion intermittente d’un médicament par voie veineuse périphérique. Pour cela, un cathéter court et exible est utilisé comme dispositif d’injection. Le cathéter est inséré par l’inrmière dans une région où se produiront le moins de mouvements possible, comme dans le pli de l’avant-bras. Il est xé comme n’importe quel dispositif de perfusion, mais l’embout est obstrué au moyen d’un bouchon ou d’un capuchon d’injection.

MS section 4 « Méthodes liées à la thérapie intraveineuse par voie centrale », Méthodes de soins 2 (Lemire et Perreault, 2016b).

MS section 10 « Méthodes liées aux thérapies intraveineuses », Méthodes de soins 1 (Lemire et Perreault, 2016a).

Le type de dispositif utilisé peut varier, et les soins et l’emploi du dispositif doivent être conformes au protocole de l’établissement ou de l’unité. Cependant, l’idée générale est la même. Le cathéter reste en place, puis est rincé avec une solution saline après la perfusion du médicament TABLEAU 14.7.

14

Cathéter veineux central Choix du cathéter Les cathéters veineux centraux sont optimaux pour la prise en charge des enfants atteints d’une maladie chronique requérant des prises de sang ou des médicaments à répétition, une chimiothérapie à long terme, une hyperalimentation ou une antibiothérapie fréquente. Ces enfants peuvent obtenir leur congé de l’hôpital en portant un dispositif d’injection intermittente an de continuer à recevoir des médicaments à leur domicile ; cette technique est généralement réservée à ceux qui ont besoin de médicaments à de courts intervalles. L’inrmière joue un très grand rôle au sein de l’équipe médicale dans le choix d’un cathéter veineux central. Elle participe à l’établissement des facteurs susceptibles d’inuer sur le choix du type de dispositif d’accès veineux central. Ces facteurs incluent la raison de l’installation du cathéter (diagnostic), la durée du traitement, le risque lié à sa mise en place pour l’enfant

Chapitre 14

CONSEIL CLINIQUE

Si le cathéter veineux central a été accidentellement retiré, il faut appliquer une pression sur le port d’entrée sur la veine, et non sur le port de sortie sur la peau, soit parfois 10 cm en amont du port de sortie, selon le cathéter utilisé.

Techniques de soins

593

Directives de rinçage des cathétersa

TABLEAU 14.7

NOUVEAU-NÉS ET NOURRISSONS

Cathéter de calibre ≤ 24 Cathéter périphérique

1-3 mL d’héparine après l’administration de médicaments ou toutes les 8 heures

Cathéter veineux central percutané

Concentration nale de 1 unité/mL d’héparine à 0,2-1 mL/h

Cathéter veineux central (CVC) implanté chirurgicalement de ≤ 5 Fr

1 unité/mL, 2 mL d’héparine pour vérier la perméabilité de la tubulure et entre des médicaments ou une alimentation parentérale totale (APT) compatible avérée, ou toutes les 8 heures

CVC implanté chirurgicalement de > 5 Fr

1 unité/mL, 3 mL d’héparine pour vérier la perméabilité de la tubulure et entre des médicaments ou une NPT compatible avérée, ou toutes les 8 heures

ENFANTS

Cathéter de calibre ≤ 24

Cathéter de calibre ≥ 24

Cathéter périphérique

1-3 mL de solution saline normale avant et après les médicaments ou toutes les 8 heures (enfant de plus de 1 an : toutes les 24 heures)

1-3 mL de solution saline normale après les médicaments ou toutes les 8 heures (enfant de plus de 1 an : toutes les 24 heures)

Cathéter mi-long

10 unités/mL, 3 mL d’héparine dans une seringue de 10 mL après l’administration de médicaments ou toutes les 8 heures

Cathéter veineux central percutané

10 unités/mL, 2 mL d’héparine dans une seringue de 10 mL après l’administration de médicaments ou quotidiennement, au moins toutes les 24 heures ; maximum 4 fois/jour

CVC implanté chirurgicalement

Intermittent : 10 unités/mL, 3 mL d’héparine après l’administration de médicaments, au moins toutes les 24 heures ; maximum de 4 fois/jour

Tubulure de surveillance continue de la pression artérielle et de la pression veineuse centrale

Concentration nale de 1 unité/mL d’héparine en perfusion continue à 1 mL/h

a Des

Dormant : 100 unités/mL, 3 mL d’héparine par moisb

erreurs associées à une mauvaise utilisation de l’héparine dans ce contexte ont déjà été fatales. moins de 6 mois : 10 unités/mL, 5 mL par mois ou 10 unités/mL, 5 mL par jour si le CVC est utilisé.

b Enfants de

et les ressources disponibles pour assister les membres de la famille dans son entretien. Les cathéters à court terme ou non tunnellisés servent aux soins aigus ou aux soins d’urgence, et ils sont utilisés dans les unités de soins intensifs. Ils sont faits de polyuréthane et sont installés dans les grosses veines comme les veines sous-clavière, fémorale ou jugulaire. ALERTES CLINIQUES Leur insertion s’effectue par une incision chirurgicale ou une incision 1 Il faut éviter d’utiliser des ciseaux à proximité percutanée. Il faut procéder à une des cathéters tunnellisés, des CVCIVP et des radiographie pulmonaire ou abdomitubulures I.V. périphériques. Si un cathéter est nale selon le site choisi pour vérier coupé accidentellement, on doit immédiatement l’emplacement de l’embout du cathéle clamper près du point de sortie de manière à ter avant d’administrer des liquides éviter une perte sanguine. Il existe des trousses ou des médicaments. de réparation qui permettent de conserver le cathéter et d’éviter une intervention chirurgicale Les CVCIVP peuvent être utilisés de remplacement du cathéter. pour les traitements à court ou à La plupart des CVCIVP ne sont pas xés par suture ; il faut donc se montrer vigilant pendant le changement de pansement. 2

594

Partie 5

moyen terme 1 . Ces cathéters, faits de silicone ou de polymère, sont mis en place par des inrmières ayant

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

reçu une formation spéciale, des médecins ou des radiologues interventionnels (Tomaszewski, Ferko, Hollmann et al., 2017). Le point d’insertion le plus courant se situe au-dessus de la zone antécubitale, dans les veines médiane, céphalique ou basilique FIGURE 14.12. Le cathéter est inséré avec ou sans guide métallique dans la veine cave supérieure 2 . Les CVCIVP peuvent être taillés avant d’être insérés, et introduits à mi-chemin entre le point d’insertion et l’aisselle, auquel cas ils peuvent être laissés en place de deux à quatre semaines. Comme la concentration élevée de glucose dans l’alimentation parentérale totale (APT) irrite les vaisseaux sanguins, la solution d’APT doit être perfusée par CVCIVP. La décision d’insérer un CVCIVP doit être prise avant d’effectuer plusieurs tentatives d’insertion par voie I.V. Lorsque les veines antécubitales ont été perforées plusieurs fois, elles ne conviennent plus pour ce type de cathéter. Ce cathéter entraîne moins de risques de complications que les autres dispositifs d’accès

veineux central (DAVC) ; il constitue donc un excellent choix pour de nombreux enfants. Les DAVC à long terme incluent les cathéters tunnellisés et les cathéters à chambres implantables TABLEAU 14.8. Ces dispositifs peuvent être munis d’une lumière simple, double ou triple FIGURE 14.13. Les cathéters à plusieurs lumières, ou multilumières, permettent d’administrer plus d’un traitement à la fois. Ils sont utilisés pour procéder à des prises de sang à répétition, pour administrer une APT ou des produits sanguins, pour perfuser de grandes quantités ou concentrations de liquides, pour administrer des médicaments ou des liquides incompatibles simultanément (par différentes lumières) et pour surveiller la pression veineuse centrale.

Soins de la voie centrale L’entretien du cathéter comprend les changements de pansements, le rinçage pour en maintenir la perméabilité et la prévention du détachement du dispositif en utilisant le pansement approprié. S’il s’agit d’un cathéter à

A

FIGURE 14.13 Enfant porteur d’un cathéter veineux central externe tunnellisé à deux lumières

chambre implantable, il faut le palper pour en CONSEIL CLINIQUE vérier la mise en place et la stabilité, nettoyer la peau au lieu de l’incision et n’utiliser que des Si aucun pansement n’est aiguilles de Huber à pointe coudée qui empêchent utilisé, une pochette cousue le carottage pour perforer le diaphragme de la à l’intérieur d’un t-shirt est chambre sur le dessus ou le côté, suivant le utile pour ranger le cathéter modèle FIGURE 14.14. Pour éviter toute infection, enroulé pendant que il faut employer une technique aseptique chaque l’enfant joue. fois que des dispositifs sont introduits dans la peau, par exemple pendant l’instillation d’héparine ou de solution saline pour prévenir la formation de caillots (Keller, Williams, Charles, âgé de neuf ans, est en rémission d’une Gavgani et al., 2017). Norleucémie lymphoblastique aiguë. Pour ses traitements malement, des intervalles prode chimiothérapie, le chirurgien lui a installé un catocolaires de remplacement théter à chambre implantable (de type Port-a-CathMD). de l’aiguille de Huber sont Il se présente au groupe de médecine familiale de son établis, soit entre cinq et sept quartier pour faire irriguer son cathéter, car il n’a plus jours. Les parents doivent de traitement. Vous procédez à l’intervention et également être informés observez un œdème spontané au moment de des soins à prodiguer à leur l’irrigation du point. Que devez-vous faire ? enfant ENCADRÉ 14.18 et ENCADRÉ 14.19.

clinique

Jugement

FIGURE 14.12 Points d’insertion et de sortie d’un cathéter veineux central

B

FIGURE 14.14 A Enfant portant une chambre implantable. B Section transversale d’une chambre implantable montrant l’accès à la chambre avec une aiguille de Huber. Chapitre 14

Techniques de soins

595

14

TABLEAU 14.8

Comparaison des dispositifs d’accès veineux central à long terme

DESCRIPTION

AVANTAGES

INCONVÉNIENTS

CONSIDÉRATIONS LIÉES AUX SOINS

• Administration de vésicants et de médicaments hautement concentrés

• Infection du site de ponction

• Courte durée : 3 semaines au maximum

• Mesure de la pression veineuse centrale

• Complications : pneumothorax, hémothorax, infection, thrombose, ponction artérielle, malposition

• Changer le pansement toutes les semaines.

• Risque d’infection omniprésent

• Rincer à l’héparine quotidiennement.

• Sports nautiques à proscrire en raison du risque d’infection

• Obturer avec une pince, sinon garder des pinces à portée de la main en tout temps.

Cathéter veineux central percutané (p. ex., Cook Turbo-FloMD)

• Hémodialyse • Fait en PVC ou en silicone.

• Thrombose de la veine

• N’a aucune valve antireux. • Comporte de 1 à 4 lumières. • Extrémité distale se situant au niveau du tiers inférieur de la veine cave supérieure. • Inséré dans la veine jugulaire interne, sousclavière, fémorale à l’aide d’un ultrason. Cathéter veineux central tunnellisé (p. ex., HickmanMD ou BroviacMD) • Réduit le risque de migration bactérienne une fois que le tissu adhère aux ballonnets. • Facilite l’autoadministration des perfusions. • Fait en silicone, radio-opaque, exible, avec des extrémités ouvertes.

• Ne nécessite pas d’intervention chirurgicale au moment du retrait.

• Comporte 1 ou 2 ballonnets DacronMD ou VitaCuffMD (matériel biosynthétique imprégné d’ions d’argent) sur le ou les cathéters qui favorisent la croissance tissulaire.

• Cathéter comportant des saillies vers l’extérieur du corps ; risque donc d’être endommagé par des outils pointus ou d’être tiré accidentellement • Effet négatif possible sur l’image corporelle • Entretien devant être fait par l’enfant ou sa famille

• Peut être pourvu de plus d’une lumière. • Cathéter introduit en formant un tunnel sous la peau du thorax, puis inséré dans une grosse veine située près de la clavicule jusqu’à la partie supérieure de l’oreillette droite du cœur.

• Garder le port de sortie sec. • Attendre que le tissu adhère aux ballonnets avant d’effectuer des procédures importantes. • Changer le pansement toutes les semaines.

Cathéter veineux central introduit par voie périphérique (p. ex., Power PiccMD)

• Flexible, en silicone, parfois radio-opaque, muni d’une extrémité fermée et d’une soupape à 2 voies à l’extrémité proximale. • Peut être pourvu d’une lumière ou plus. • Inséré dans une veine de la partie interne du coude ou dans la fémorale, jusqu’à la partie supérieure de l’oreillette droite.

596

Partie 5

• Réduit le temps et les coûts des soins d’entretien.

• Risque d’infection omniprésent

• Rincer à l’héparine quotidiennement.

• Comporte une soupape à 2 voies qui ne nécessite pas l’emploi d’une pince, évitant ainsi d’abîmer le cathéter.

• Cathéter comportant des saillies vers l’extérieur du corps ; risque donc d’être endommagé par des outils pointus ou d’être tiré accidentellement

• Garder le port de sortie sec.

• Est plus sécuritaire en raison du risque minime de reux de sang ou d’embolie gazeuse. • Est facile à utiliser pour l’autoadministration de perfusions I.V.

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

• Effet négatif possible sur l’image corporelle • Entretien devant être fait par l’enfant ou sa famille

• Changer le pansement toutes les semaines.

TABLEAU 14.8

Comparaison des dispositifs d’accès veineux central à long terme (suite)

DESCRIPTION

AVANTAGES

INCONVÉNIENTS

CONSIDÉRATIONS LIÉES AUX SOINS

Cathéter veineux central avec chambre implantable sous-cutanée (p. ex., Port-a-CathMD, Infuse-a-PortMD, MediportMD, NorportMD, GroshongMD) • Risque minime d’infection • Comme il est placé complètement sous la peau, faible risque de le tirer ou de l’endommager • Rinçage moins fréquent

• Comporte un dispositif composé d’un boîtier en titane, en acier inoxydable ou en plastique, muni d’une membrane gélatineuse (septum). • Introduit par la veine jugulaire ou sousclavière jusqu’à la veine cave supérieure et relié à une chambre implantée sous la peau sans accès visible à l’extérieur. • Requiert l’introduction d’une aiguille de Huber à pointe coudée à usage unique pour l’administration des médicaments et des solutions de prélèvements sanguins, et pour l’entretien.

• Peu de limites dans les activités physiques habituelles, y compris les sports nautiques, à l’exception des sports de contact • Pansement nécessaire uniquement pour protéger l’aiguille de Huber, qui n’est pas retirée

• L’accès à la chambre nécessite de percer la peau. • Est difcile à manipuler pour les perfusions autoadministrées. • Peut se déloger de la chambre, surtout si l’enfant joue avec. • Sports de contact généralement interdits. • Nécessite une intervention chirurgicale pour le retrait.

• Aucun effet négatif, ou très peu (petit renement sur la poitrine), sur l’apparence corporelle

• Rincer à l’héparine une fois par mois et après chaque perfusion qui maintient sa perméabilité (seul le GroshongMD nécessite une solution saline). • Appliquer un crème anesthésique localement au préalable pour réduire la douleur pendant l’insertion de l’aiguille. • Utiliser une aiguille spéciale, droite ou en angle, qui empêche le carottage (Huber) pour l’injection dans la chambre.

• Aucun entretien requis, donc moins coûteux pour la famille

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 14.18

Soins relatifs à la chambre implantable

Avant le congé de l’enfant de l’hôpital, l’inrmière doit informer l’enfant et les parents de la procédure de soins relatifs à la chambre implantable du CIV, y compris la préparation et l’injection du médicament prescrit, le rinçage des tubulures et le changement de pansement. Un dispositif protecteur peut être recommandé pour certains enfants actifs an de prévenir le délogement accidentel de l’aiguille. Beaucoup d’enfants s’occupent eux-mêmes de préparer et d’administrer les médicaments. À cette n, l’inrmière devra leur donner des instructions graduelles, verbales et écrites.

L’infection et l’occlusion des cathéters sont deux complications courantes liées aux CIV. L’inrmière devra s’assurer de communiquer cette information à l’enfant et à sa famille. Un traitement par des antibiotiques s’impose en cas d’infection et par un agent brinolytique, comme l’altéplase, en cas de caillots (Keller et al., 2017). La prévention des fuites nécessite l’usage d’une pince à bord lisse. Si le cathéter fuit, il faut le recouvrir de ruban adhésif près de l’écoulement et l’obturer avec une pince au-dessus du ruban adhésif. Il faut ensuite emmener l’enfant dès que possible chez le médecin pour prévenir une infection ou un caillot.

Pratique fondée sur des résultats probants ENCADRÉ 14.19

Soins à apporter aux ports des cathéters veineux centraux

QUESTIONS CLINIQUES

RÉSULTATS PROBANTS

• Le gluconate de chlorhexidine (GCH) est-il une solution antiseptique plus efcace que la povidone iodée (PI) dans la prévention des infections des ports de cathéters veineux centraux (CVC) et de la bactériémie chez les enfants porteurs de CVC ?

• Stratégies de recherche : les critères de sélection de la recherche comprenaient les publications de langue anglaise datant des 10 dernières années ainsi que des articles de recherche sur le soin des ports de CVC chez les nourrissons, les enfants et les adultes.

• En pédiatrie, quel est le meilleur protocole antiseptique à utiliser avant l’accès d’un CVC : PI, GCH ou alcool isopropylique ?

• Bases de données utilisées : Cochrane Collaboration, Joanna Briggs Institute, CINAHL, PubMed, National Guideline Clearinghouse, Institute for Healthcare Improvement, Centers for Disease Control and Prevention (CDC),

Chapitre 14

Techniques de soins

597

14

ENCADRÉ 14.19

Soins à apporter aux ports des cathéters veineux centraux (suite) RECOMMANDATIONS POUR LA PRATIQUE INFIRMIÈRE

Infusion Nurses Society, Oncology Nurses Society, MD Consult, BestBETs, TRIP Database Plus, Children’s Health Care Association, Worldviews on Evidence-Based Nursing, EBM/BMJ, RNAO.

• Il est conseillé de changer le pansement chaque semaine, d’utiliser un pansement transparent ou une gaze avec ruban adhésif avec un Biopatch MD.

ANALYSE CRITIQUE ET SYNTHÈSE DES DONNÉES

• D’après Miller et ses collaborateurs (2016), les enfants qui ont un Biopatch présentaient un risque signicativement inférieur de colonisation des CVC comparativement aux enfants portant un pansement transparent seulement. D’autres chercheurs n’ont pu établir une différence entre les deux méthodes (Hatler, Buckwald, Salas-Allison et al., 2009).

MD

• Des résultats probants clairs montrent que les pansements en éponge imprégnés de GCH ne devraient pas être utilisés pour les nouveau-nés de moins de 7 jours, ceux dont l’âge gestationnel est de 26 semaines ou ceux dont le poids est de 1 000 g ou moins (O’Grady, Alexander, Dellinger et al., 2002). L’application systématique d’un onguent antibiotique n’est pas recommandée à cause du risque d’infection fongique et de résistance aux antimicrobiens (Loewenthal, Dobson et Boyle, 2016). • Un autre examen systématique Cochrane a établi que la fréquence de changement du pansement (15 jours au lieu de 4 jours) n’avait pas d’incidence sur le taux d’infection lié au cathéter (Arora, Roberts, Eden et al., 2010). • Asepsie : D’après Carson (2004), la plupart des études permettent de conclure que le GCH est supérieur à la PI en ce qui a trait à la prévention de la colonisation microbienne du port d’insertion du cathéter et de l’embout du cathéter, et à la diminution du risque d’infection locale du port. Cependant, les données sont toujours contradictoires quant à l’efcacité du GCH par rapport à la PI en ce qui a trait à la prévention de la bactériémie liée aux CVC. D’après une méta-analyse de 8 études menée par Chaiyakunapruk et ses collaborateurs (2002), le GCH diminuait de 49 %, par rapport à la PI, le risque d’infections de la circulation sanguine liées aux cathéters.

14.6.6

MS section 8 « Méthodes liées à la fonction digestive », Méthodes de soins 1 (Lemire et Perreault, 2016a).

• De la chlorhexidine 2 % sera utilisée pour asepsie du port du cathéter ; la prudence est de mise avec les nourrissons prématurés et les nourrissons de faible poids à la naissance. Un pansement BiopatchMD sera employé autour du port du cathéter, sauf pendant les deux premières semaines de vie chez les nourrissons de faible poids à la naissance. RÉFÉRENCES

Arora, R.S., Roberts, R., Eden, T.O., et al. (2010). Intervention other than anticoagulants and systemic antibiotics for prevention of central venous catheterrelated infections in children with cancer. Cochrane Database Syst Rev, (12), CD007785. Carson, S. (2004). Chlorhexidine versus povidone-iodine for central venous catheter site care in children. J Pediatr Nurs, 19(1), 74-80. Chaiyakunapruk, N., Veenstra, D.L., Lipsky, B.A., et al. (2002). Chlorhexidine compared with povidone-iodine solution for vascular catheter-site care: A meta-analysis. Ann Intern Med, 136(11), 792-801. Hatler, C., Buckwald, L., Salas-Allison, Z., et al. (2009). Evaluating central venous catheter care in a pediatric intensive care unit. Am J Crit Care, 18(6), 514-520. Loewenthal, M., Dobson, P., et Boyle, M. (2016). Chlorhexidine 2% and choice of transparent dressing increase skin reactions at central venous catheter insertion sites. Am J Infect Control, 44(12), 1712-1714. Miller, K., Briody, C., Casey, D., et al. (2016). Using the comprehensive unitbased safety program model for sustained reduction in hospital infections. Am J Infect Control, 44(9), 969-976. O’Grady, N.P., Alexander, M., Dellinger, E.P., et al. (2002). Guidelines for the prevention of intravascular catheter-related infections. Centers for Disease Control and Prevention. MMWR Recomm Rep, 51(RR-10), 1-29.

Administration nasogastrique, orogastrique ou par la gastrostomie

Lorsqu’une sonde nasogastrique ou une gastrostomie a été mise en place chez un enfant, les médicaments à prise orale sont généralement administrés MS section 8 ENCADRÉ 14.20. par ce dispositif L’avantage de cette méthode est qu’il est possible d’administrer des médicaments de manière continue, sans avoir à convaincre l’enfant chaque fois. L’inconvénient est le risque d’obstruction ou d’occlusion de la sonde, en particulier si des solutions visqueuses sont administrées par des sondes gastriques de faible calibre. La mesure préventive la plus importante consiste à rincer adéquatement la sonde après l’instillation du médicament.

14.6.7

Administration par voie rectale

L’administration par voie rectale est moins able, mais elle est parfois utilisée lorsque la voie orale

598

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

est difficile d’accès ou contre-indiquée, par exemple lorsque les préparations à prise orale ne sufsent pas pour maîtriser des vomissements. L’acétaminophène, les sédatifs, les analgésiques (morphine) et les antiémétiques sont au nombre des médicaments offerts en suppositoires. La difculté inhérente à cette méthode est que l’absorption du médicament peut être retardée, diminuée ou empêchée par la présence de selles. Le médicament peut aussi être évacué parmi les selles. Parfois, la quantité de médicament prescrite est inférieure à la posologie offerte. La forme irrégulière de la plupart des suppositoires ne permet pas de les fractionner facilement, ce qui peut même s’avérer dangereux. S’il faut couper le suppositoire en deux, ce sera dans le sens de la longueur. Cependant, rien ne garantit que le médicament est dispersé de manière homogène dans tout l’excipient de la gelée de pétrole. Si le médicament est administré par lavement de rétention, l’inrmière procède de la même

Techniques de soins ENCADRÉ 14.20

Administrer des médicaments par voie nasogastrique ou orogastrique, ou par gastrostomie

• Utiliser, dans la mesure du possible, des préparations de médicament sous forme d’élixir ou de suspension, plutôt que de comprimé.

• Maintenir les médicaments à la température ambiante.

• Diluer les médicaments visqueux ou les sirops dans une petite quantité d’eau, si possible.

• Insérer la sonde nasogastrique ou orogastrique, ou s’assurer que la sonde déjà en place est bien positionnée.

• Pour l’administration des comprimés, écraser jusqu’à l’obtention d’une ne poudre et dissoudre le médicament dans une quantité prémesurée d’eau tiède.

• Si un gavage est en cours, rincer la sonde avec 5 mL d’eau avant l’adminis­ tration du médicament.

• Ne jamais écraser les comprimés ou les gélules entérosolubles ou à libé­ ration prolongée.

• Relier la seringue (à embout adaptable) remplie de médicament à la sonde et instiller le médicament.

• Éviter les médicaments gras, car ils ont tendance à adhérer aux parois. • Ne pas mélanger les médicaments avec les formules entérales, sauf en cas d’apport restreint en liquide. Si un médicament doit être ajouté à la formule entérale : – vérier auprès du pharmacien s’il est compatible ou dans un tableau de compatibilité ; – bien mélanger la préparation en surveillant les réactions physiques (p. ex., la séparation, la précipitation) ; – étiqueter le contenant de la préparation en inscrivant le nom du médi­ cament, la posologie, la date et l’heure du début de la perfusion.

façon que pour un suppositoire. Les médicaments administrés ainsi sont dilués dans la plus petite quantité possible de solution pour réduire au minimum le risque d’expulsion.

• Placer les médicaments dans un gobelet ou une seringue jaugés.

• Dès que la seringue est vide, verser de l’eau pour rincer la sonde. Évaluer la quantité d’eau nécessaire pour rincer complètement la sonde en faisant un test avec une seringue et une sonde nasogastrique ou orogastrique inuti lisée. Le volume de rinçage est habituellement égal à 1,5 fois ce volume. Dans le cas de certaines préparations pharmacolo ­ giques (p. ex., les suspensions), une plus grande quantité de liquide peut être requise. • Si plus d’un médicament est administré à la fois, rincer la sonde entre chaque médicament. • Après le rinçage, recommencer le gavage ou replacer le bouchon.

• Mettre des gants.

Les enfants plus âgés peuvent se contenter d’explications et de directives par l’inrmière. Bien que l’administration des médicaments par voie ophtalmique, auriculaire et nasale soit indolore, ceux-ci peuvent causer eux-mêmes des sensations déplaisantes qu’il est possible d’atténuer grâce à diverses techniques.

• Retirer le suppositoire de son emballage.

Administration par voie ophtalmique

• Lubrier le suppositoire avec une gelée hydrosoluble ou de l’eau tiède.

Pour instiller un médicament par voie ophtalmique MS 6.4 , l’inrmière procède comme suit :

• Écarter les fesses de l’enfant et insérer délicatement le suppositoire dans l’anus, la partie arrondie en premier, en le poussant avec l’index au-delà des sphincters rectaux ; les contractions inverses ou le gradient de pression du canal anal peuvent aider le suppositoire à glisser plus haut dans le canal.

• Placer l’enfant en position assise ou couchée sur le dos.

• Maintenir fermement les fesses de l’enfant pour détendre le sphincter anal jusqu’à ce que le besoin impérieux de rejeter le suppositoire disparaisse, soit entre 5 et 10 minutes.

• Appuyer la main qui tient le compte-gouttes sur la tête de l’enfant de manière à pouvoir suivre les mouvements de la tête et réduire ainsi le risque de blessure si l’enfant bouge, ou pour éviter que le médicament ne coule sur son visage FIGURE 14.15.

Pour administrer un suppositoire MS 6.6 , l’inrmière doit suivre les étapes suivantes :

14.6.8

Administration ophtalmique, auriculaire et nasale

Il y a peu de différences entre les enfants et les adultes relativement à l’administration ophtalmique, auriculaire ou nasale d’un médicament.

• Lui demander de regarder vers le haut. • Avec une main gantée, tirer la paupière inférieure vers le bas afin de former un sac conjonctival.

MS 6.6 « Administration de suppositoires rectaux », Méthodes de soins 1 (Lemire et Perreault, 2016a).

MS 6.4 « Administration de médicaments par voie ophtalmique », Méthodes de soins 1 (Lemire et Perreault, 2016a).

• Appliquer l’onguent ou la solution sans jamais toucher directement au globe oculaire. • Refermer soigneusement les paupières pour empêcher l’élimination du médicament.

Chapitre 14

Techniques de soins

599

14

• Pour déposer les gouttes profondément dans le conduit auditif sans contaminer l’embout du compte-gouttes, placer un spéculum auriculaire jetable dans le conduit, puis administrer les gouttes. • Après l’instillation, garder l’enfant allongé sur le côté non affecté pendant quelques minutes. • Masser doucement le tragus pour faciliter la pénétration des gouttes dans le conduit auditif.

FIGURE 14.15 ophtalmiques

Instillation de gouttes

• Demander à l’enfant de regarder dans toutes les directions pour favoriser la distribution uniforme de la préparation. • Essuyer l’excès de médicament en procédant du canthus interne vers l’extérieur pour prévenir toute contamination de l’œil controlatéral. MS 6.3 « Administration de médicaments par voie nasale », Méthodes de soins 1 (Lemire et Perreault, 2016a).

CE QU’IL FAUT RETENIR

Pour que chaque médicament puisse agir, l’onguent ophtalmique doit être appliqué trois minutes après les gouttes.

Il peut être difcile d’instiller des gouttes ophtalmiques dans l’œil des nourrissons, car leurs paupières sont souvent bien fermées. Une autre approche consiste à déposer les gouttes au point de jonction des deux paupières, près du nez. Le médicament s’accumule dans cette région et, lorsque le nourrisson ouvre les paupières, le médicament s’écoule dans la conjonctive. Dans le cas des jeunes enfants, l’inrmière peut jouer à un jeu, par exemple leur demander de fermer les yeux pendant qu’elle compte jusqu’à trois, puis de les ouvrir pour qu’elle puisse instiller rapidement les gouttes. Elle peut appliquer l’onguent en tirant doucement sur la paupière inférieure et en le déposant dans la partie inférieure du sac conjonctival. Si des gouttes ophtalmiques et un onguent sont prescrits en même temps, il faut d’abord administrer les gouttes, attendre trois minutes, puis appliquer l’onguent pour que chaque médicament puisse agir. Dans la mesure du possible, il faut administrer les onguents ophtalmiques avant le coucher ou la sieste, car l’enfant peut avoir temporairement la vision trouble.

• Placer un tampon en coton dans l’oreille pour empêcher le médicament de s’écouler à l’extérieur du conduit auditif, mais le mettre de manière à laisser un éventuel écoulement sortir de l’oreille. Pour éviter que le tampon n’absorbe le médicament instillé dans l’oreille, l’humidifier d’abord avec quelques gouttes de médicament.

Administration par voie nasale Les gouttes nasales sont instillées de la même manière que chez les adultes MS 6.3 . L’inrmière peut réduire au minimum les sensations déplaisantes associées aux gouttes nasales pharmacologiques si elle prend soin de positionner l’enfant de manière à ce que sa tête soit bien étendue au-dessus du bord du lit ou de l’oreiller FIGURE 14.16. Selon la taille du nourrisson, l’inrmière peut le positionner corps contre corps, dans la position football sur son bras, la tête posée et stabilisée entre son corps et son coude, les bras

Administration par voie auriculaire MS 6.2 « Administration de médicaments par voie auriculaire », Méthodes de soins 1 (Lemire et Perreault, 2016a).

Pour instiller un médicament par voie auriculaire MS 6.2 , l’inrmière procède comme suit : • Coucher l’enfant sur le dos ou sur le ventre, la tête tournée de façon à exposer l’oreille à traiter. • Enfants de moins de trois ans : redresser le conduit auditif externe en tirant doucement le pavillon de l’oreille vers le bas et l’arrière. • Enfants de plus de trois ans : tirer le pavillon vers le haut et l’arrière.

600

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

FIGURE 14.16 Positionnement adéquat pour l’instillation de gouttes nasales

14.6.9

Aérosolthérapie

L’aérosolthérapie est un moyen efcace de libérer un médicament directement dans les voies respiratoires. Cette voie d’administration permet d’éviter les effets indésirables systémiques de certains médicaments et de réduire la quantité de médicament qui est requise pour obtenir l’effet souhaité. Les bronchodilatateurs, les stéroïdes et les antibiotiques, en suspension sous forme de particules, peuvent être inhalés de manière à acheminer le médicament jusqu’aux petites voies respiratoires. L’aérosolthérapie est particulièrement difcile avec les enfants incapables de maîtriser leur fréquence et leur amplitude respiratoires. Les médicaments peuvent être administrés en aérosol, ou par un nébuliseur contenant de l’air ou de l’air enrichi d’oxygène. Dans les nébuliseurs portatifs, le médicament est atomisé et libéré dans un petit masque en plastique que l’enfant tient par-dessus le nez et la bouche FIGURE 14.17A. Pour éviter le dépôt de particules dans le nez et le pharynx, l’inrmière demande à l’enfant d’effectuer des respirations lentes et profondes par la bouche, qui doit rester ouverte pendant le traitement. Pour les traitements à domicile, il faut utiliser un compresseur d’air pour permettre à l’air de se mélanger au médicament an de l’administrer en nes gouttelettes. L’aérosol-doseur (ou inhalateur-doseur) est un appareil portatif autonome qui permet de libérer, sur une base intermittente, une quantité précise de médicament. Beaucoup de bronchodilatateurs sont offerts en aérosols-doseurs utilisables par les enfants asthmatiques. L’aérosol-doseur peut être muni d’un tube d’espacement (ou chambre d’inhalation) qui facilite la coordination entre la respiration et la libération de l’aérosol et qui permet aux particules en aérosol de rester plus longtemps en suspension FIGURE 14.17B. L’évaluation des bruits respiratoires et le travail respiratoire doivent s’effectuer avant et après les traitements. Les signes vitaux des enfants après l’intervention peuvent être plus élevés. L’inrmière doit prendre le temps de rassurer l’enfant an de permettre aux signes vitaux de se normaliser avant d’évaluer avec exactitude les variations des bruits respiratoires et le travail respiratoire.

14.6.10 Enseignement à la famille sur les soins à domicile En général, l’inrmière est chargée de préparer les membres de la famille à administrer des médicaments à domicile. Ils doivent comprendre pourquoi l’enfant reçoit le médicament et connaître ses effets éventuels, la quantité, la fréquence et la durée d’administration requises. L’inrmière doit prendre le temps Vous devez commencer un enseignement d’injection de les informer, sans se sous-cutanée d’insuline à Florence, âgée de 9 ans, chez presser, dans un cadre qui un diabète de type 1 a été tout récemment diagnostidétendu, de préférence qué. Nommez une façon d’aider Florence à maîtriser plus loin des zones occurapidement la technique d’injection. pées de l’unité ou du cabinet.

clinique

Jugement

et les mains de l’enfant maintenus immobiles par ses mains FIGURE 14.2. Après l’instillation des gouttes, l’enfant peut rester dans cette position pendant une minute pour permettre aux gouttes d’être absorbées. Les vaporisateurs nasaux sont insérés verticalement dans la narine selon un angle avec le nez permettant d’éviter un trauma de la cloison nasale et de diriger le médicament vers le cornet inférieur.

Les termes médicopharmaceutiques peuvent être difciles à comprendre, et l’inrmière doit vérier ce que l’enfant et sa famille ont compris de ses explications, et ce, de façon claire et détaillée. Il est important de vérier que ceux-ci disposent de moyens convenables pour mesurer les médicaments. Si le médicament est présenté dans un compte-gouttes, une seringue ou un gobelet en plastique, l’inrmière doit indiquer ou marquer sur le contenant la graduation correspondant à la dose prescrite, et leur montrer la manière d’aspirer la dose dans un compte-gouttes ou une seringue, de la mesurer et d’éliminer les bulles. Elle doit aussi demander aux parents de lui faire une démonstration pour vérifier leur technique. Une erreur de posologie pourrait être lourde de conséquence, notamment dans le cas de l’insuline ou de la digoxine, et lorsque l’administration est plus complexe, comme c’est le cas des injections parentérales. De plus, l’inrmière doit mentionner aux parents que certaines concentrations de médicament peuvent varier entre l’hôpital et la

A

éactivation des connaissances Quel conseil l’inrmière doit-elle donner aux parents d’un enfant utilisant un corticostéroïde en aérosol-doseur ?

CE QU’IL FAUT RETENIR

L’évaluation des bruits respiratoires et le travail respiratoire doivent s’effectuer avant et après les traitements.

B

FIGURE 14.17 Certains médicaments peuvent être administrés par aérosolthérapie à l’aide de divers dispositifs. A Nébuliseur portatif. B Aérosol-doseur muni d’un tube d’espacement. Chapitre 14

Techniques de soins

601

14

pharmacie de leur quartier. Par conséquent, les parents doivent s’assurer auprès de leur pharmacien qu’ils ont reçu la bonne dose de médicament. À domicile, certaines modications s’imposent souvent, car les parents ne disposent pas de l’équipement ou de l’assistance disponible à l’hôpital. Par exemple, ils peuvent avoir besoin d’aide pour trouver des méthodes qui leur permettent de tenir l’enfant tout en lui administrant le médicament en toute sécurité ENCADRÉ 14.21. CONSEIL CLINIQUE

Rappelez-vous que 1 g de couche mouillée équivaut à 1 mL d’urine.

L’inrmière explique aux parents l’intervalle d’administration du médicament. Par exemple, si un médicament est prescrit pour être pris avec des repas, le nombre de repas que la famille a l’habitude de servir affecte la quantité de médicament administrée à l’enfant. Lorsqu’un médicament doit être administré plusieurs fois par jour, l’inrmière

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 14.21

Conseils pour l’administration des médicaments par voie orale, ophtalmique, auriculaire et nasale

Pour atténuer les sensations déplaisantes pendant l’administration des médicaments : • Yeux : appliquer du doigt une pression sur le point lacrymal, sur le côté interne de la paupière, pendant une minute pour prévenir l’écoulement du médicament vers le rhinopharynx et la sensation du goût déplaisant du médicament.

l’enfant pour faciliter le passage du liquide par les voies nasales. Pour administrer un médicament par voie orale, nasale ou ophtalmique, recourir à la procédure suivante si une seule personne est disponible pour tenir l’enfant : • Allonger l’enfant sur le dos, sur une surface plane (lit, sofa, sol).

• Oreille : laisser les médicaments qui étaient conservés au réfrigérateur se réchauffer à la température ambiante avant de les instiller.

• S’asseoir en faisant face à l’enfant de manière à ce que sa tête soit entre les cuisses de la personne et que les bras de l’enfant soient sous ses jambes.

• Nez : positionner la tête de l’enfant en hyperextension pour prévenir toute sensation d’étranglement causée par l’écoulement accidentel du médicament dans la gorge plutôt que dans les voies nasales. Placer un petit oreiller sous les épaules de

• Placer les jambes par-dessus celles de l’enfant pour envelopper la partie inférieure de son corps, au besoin. Pour administrer un médicament par voie orale, placer un petit oreiller sous la tête de l’enfant pour réduire le risque d’aspiration.

Soutien inrmier ENCADRÉ 14.22

Communiquer autrement

Si les parents ont du mal à lire ou à comprendre le français, l’inrmière peut communiquer ses directives à l’aide de couleurs, en marquant, par exemple, chaque médicament d’une couleur qu’elle reproduira sur un calendrier ou sur une horloge dessinée pour déterminer les moments auxquels le médicament doit être administré. S’il faut utiliser un médicament liquide et une seringue, l’inrmière marquera de la même couleur l’endroit sur la seringue où le piston doit s’arrêter.

602

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

et les parents peuvent établir un calendrier qui convient à la routine familiale. Cet aspect est particulièrement important s’il faut administrer le médicament à intervalles égaux sur une période de 24 heures. Il faut établir un calendrier reposant sur des intervalles de 6 heures, en précisant le nombre de jours requis par la posologie thérapeutique prescrite. Il faut aussi effectuer des modications en fonction des habitudes de sommeil. Toutes les ordonnances de médicaments doivent être accompagnées de directives écrites ENCADRÉ 14.22.

14.7

Maintien de l’équilibre hydrique

14.7.1

Mesure de l’apport liquidien et du débit urinaire

Il est essentiel de mesurer avec exactitude les ingesta et les excreta pour déterminer l’équilibre hydrique de certains enfants, notamment ceux qui : • reçoivent un traitement I.V. ; • ont subi une intervention chirurgicale majeure ; • reçoivent un traitement diurétique ou des corticostéroïdes ; • présentent des brûlures thermiques ou des blessures graves ; • sont atteints de lésions ou d’une maladie rénale ; • font de l’insufsance cardiaque congestive ; • souffrent de déshydratation ; • sont atteints de diabète de type 1 ; • présentent de l’oligurie ; • montrent une détresse respiratoire ; • sont atteints d’une maladie pulmonaire chronique. L’inrmière doit effectuer les mesures de toutes les sources : urine, selles, vomissements, stules, liquide gastrique aspiré par voie nasale, sueurs et liquides drainés des plaies. L’inrmière est également chargée de noter avec précision ces ingesta et excreta. Il faut installer un dispositif collecteur aux nourrissons et aux jeunes enfants qui ne sont pas en mesure d’utiliser un bassin hygiénique, ainsi que ceux dont chaque miction est accompagnée de selles. Si les sacs collecteurs ne sont pas utilisés, il faut peser soigneusement les couches ou les compresses pour vérier la quantité de liquide éliminé, qu’il s’agisse de selles liquides, de vomissements ou d’autres matières. Le volume de liquide en millilitres est équivalent au poids du liquide en grammes. La densité, qui mesure l’osmolalité et permet d’analyser le degré d’hydratation, est déterminée à l’aide d’un réfractomètre ou de bandelettes urinaires réactives.

• l’impossibilité de distinguer les divers types d’élimination en raison de leur mélange ; • la perte d’urine ou de selles liquides par fuite ou évaporation (en particulier si le nourrisson est placé sur une table à infrarouges) ; • le liquide additionnel dans la couche (de type jetable superabsorbante) provenant de l’absorption de l’humidité atmosphérique (dans les couveuses à humidité élevée).

Besoins particuliers de l’enfant astreint à un statut nil per os Les nourrissons ou les enfants qui ne peuvent ou ne doivent ingérer aucun liquide par la bouche (nil per os [NPO]) ont des besoins particuliers. Pour s’assurer qu’ils ne reçoivent pas de liquide, l’inrmière peut placer un écriteau en évidence, à la porte de la chambre, au-dessus du lit ou sur les vêtements, pour informer les membres de la famille de ce statut NPO. Pour éviter que les enfants soient tentés de boire, il ne faut laisser aucun liquide à leur chevet. L’hygiène buccale, qui fait partie des soins hygiéniques courants, est particulièrement importante s’il est interdit d’ingérer un liquide. Chez les jeunes enfants qui ne peuvent pas se brosser les dents ou se rincer la bouche sans boire de liquide, l’inrmière peut nettoyer et humidier leur bouche et leurs dents en passant une gaze imbibée de solution saline.

supercielles du cuir chevelu n’ayant pas de valvules ; il est facile d’y insérer un cathéter. • Enfants qui apprennent à marcher ou qui marchent déjà : éviter les veines du pied.

clinique

Jugement

Parmi les inconvénients de la méthode de mesure du liquide par le poids de la couche, il faut noter :

Noémie, âge de 6 ans, est hospitalisée depuis quelques jours. Elle est en isolement préventif en raison de la diminution de ses leucocytes. Elle trouve pénible la restriction liquidienne et elle se plaint d’avoir la bouche sèche. Quelle intervention devriez­vous privilégier pour diminuer son inconfort ? a) Lui offrir régulièrement des glaçons dans un verre jetable.

b) Répartir en plusieurs doses la quantité totale de • Enfants plus âgés : liquide permise chaque jour. privilégier les veines supercielles c) La laisser sucer un bonbon dur ou mâcher de la gomme. de l’avant-bras pour d) Lui laisser choisir une boisson sucrée de son choix laisser les mains pour la réconforter. libres. L’enfant plus âgé peut participer au choix d’un site de perfusion et exercer ainsi un certain contrôle sur ses soins.

Lorsque l’inrmière est à la recherche d’une veine, il est préférable de commencer par le port le plus distal (le plus éloigné du cœur) et d’éviter la main dominante de l’enfant pour réduire l’incapacité liée à l’intervention. Il faut limiter le moins possible les mouvements de l’enfant : l’inrmière évitera l’articulation d’un membre, par exemple le pli du coude, comme site de perfusion. Un transilluminateur peut faciliter le repérage des veines pour l’installation d’un accès veineux FIGURE 14.19 . Les veines de petit calibre qui ne sont peut-être pas visibles ou palpables (surtout chez le nourrisson et le trottineur) sont souvent

CONSEIL CLINIQUE

Pour permettre à un enfant ayant le statut NPO d’avoir la bouche humide, l’inr­ mière peut lui donner des glaçons, si le médecin l’y autorise, ou vaporiser de l’eau dans sa bouche. Pour combler son besoin de sucer, le nourrisson peut recevoir une suce commerciale dont l’usage est sans danger.

Le dé est semblable pour l’enfant qui ne peut ingérer qu’une quantité limitée de liquide. La restriction liquidienne est d’ailleurs souvent plus pénible pour l’enfant que le statut NPO, quand il ne reçoit par ailleurs aucun liquide I.V. Pour s’assurer que l’enfant ne boit pas toute la quantité permise en début de journée, le volume quotidien alloué de liquides doit être réparti en intervalles périodiques pendant les heures de veille de l’enfant. Le fait de servir les liquides dans des petits contenants donne l’illusion que les portions sont plus grandes. Il ne faut pas laisser de liquide excédentaire au chevet de l’enfant.

14.7.2

14

Perfusion de soluté

Site de perfusion L’inrmière choisit le site de perfusion en fonction de l’accessibilité et de la commodité tout en tenant compte des besoins développementaux, cognitifs et ambulatoires de l’enfant. • Nourrissons : une veine supercielle de la main, du poignet, de l’avant-bras, du pied ou de la cheville est généralement le point le plus pratique et le plus facile à stabiliser FIGURE 14.18. • Nourrissons de moins de neuf mois, lorsque d’autres accès ont échoué : les veines

FIGURE 14.18 Sites de perfusion pour l’accès veineux chez les nourrissons Chapitre 14

Techniques de soins

603

de cheveux possible, directement au-dessus du point d’insertion et de la surface d’attache du cathéter.

FIGURE 14.19 Transilluminateur : diode électroluminescente (DEL) à faible chaleur sur la peau pour illuminer les veines – L’ouverture permet la canulation de la veine.

Syndrome des loges : Résultat d’une augmentation de la pres­ sion dans le compartiment (fascia) causée par l’augmenta­ tion du contenu ou la limitation de l’expansion du fascia, ce qui peut mener à une lésion nerveuse ou musculaire. Aussi appelé syndrome compartimental.

plus faciles à voir à l’aide d’un transilluminateur, se traduisant plus souvent par une installation réussie du cathéter I.V. dès la première ou la deuxième tentative. L’aide d’un assistant sera parfois nécessaire pour maintenir le dispositif en place pendant que l’inrmière recherche un accès intraveineux. Les dispositifs commerciaux ne provoquent aucune brûlure chez les nourrissons ou les enfants. Étant donné que les veines sont nettement plus visibles par transillumination, elles ont une apparence plus supercielle que dans la réalité. Pour obtenir des résultats optimaux, cette technique requiert de la pratique. Enn, l’utilisation d’ultrasons pour l’installation des intraveineuses est une méthode de plus en plus populaire (Witting, Moayedi, Dunning et al., 2017). Cette technique est plus efcace que la transillumination tout en réduisant le nombre de tentatives de ponctions en pédiatrie (Girgis, 2014).

Si la perfusion est effectuée dans une veine du cuir chevelu, il faudra couper les cheveux de la zone qui entoure le port d’accès pour mieux visualiser la veine et obtenir une surface lisse sur laquelle l’embout et la tubulure du cathéter seront xés avec du ruban adhésif. Les Hamid, âgé de 10 ans, doit recevoir de la vancomycine. parents pourront trouver Vous devez lui administrer une dose de 10 mg/kg. pénible qu’il faille couSachant qu’il pèse 27 kg et que la concentration de la per une partie des chevancomycine est de 500 mg/10 mL après la reconstitution, veux du nourrisson ; il quel volume de médicament devez­vous préparer ? faut donc leur faire savoir à quoi s’attendre a) 0,27 mL. c) 2,7 mL. et les rassurer en leur b) 0,54 mL. d) 5,4 mL. rappelant que les cheVous devez ensuite ajouter la dose à 100 mL de soluté veux repousseront rapicompatible, qu’il faut administrer en 60 minutes. À quel dement. L’infirmière débit devrez­vous programmer le perfuseur volumétrique ? veillera à les conserver, a) À 100 mL/h. c) À 154 mL/h. car il est fréquent que les parents veuillent les garb) À 105 mL/h. d) À 127 mL/h. der. Elle ôtera le moins

Jugement

clinique

604

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

Lors de situation d’urgence et à défaut de disposer d’un accès intravasculaire, le médecin insère une aiguille de gros calibre, par exemple une aiguille pour ponction de la moelle osseuse ou une aiguille pour injection intraosseuse dans la cavité médullaire d’un os long, le plus souvent le tibia proximal. Le rôle de l’inrmière est d’inspecter de près le tissu au lieu d’insertion pour vérier s’il y a enure, car un épanchement peut se dissimuler sous la jambe et le syndrome des loges (ou compartimental) peut survenir (Registered Nurses’ Association of Ontario [RNAO], 2005). Lors de l’arrêt de la perfusion intraosseuse et une fois l’aiguille retirée, il est impératif de faire une radiographie de la jambe dans laquelle l’aiguille était insérée pour s’assurer que l’os n’est pas fracturé.

Calibre du cathéter Pour la plupart des perfusions en pédiatrie, l’inrmière peut se servir d’un cathéter de calibre 24 à 22. Elle utilisera le cathéter du plus petit calibre et de la plus petite longueur convenant au traitement prescrit. La longueur du cathéter peut être directement liée à l’infection ou à la formation d’un embole ; plus le cathéter est court, moins le risque de complications est élevé (Weinstein, 2006 ; Zhang, Cao, Marsh et al., 2016). Le calibre du cathéter doit garantir un écoulement adéquat de solution perfusée dans la veine à l’intérieur de laquelle la canule est insérée tout en permettant un bon écoulement sanguin sur ses parois de manière à favoriser une bonne hémodilution de la solution perfusée. Si l’inrmière choisit dès le début du traitement le cathéter qui convient le mieux à l’enfant, les risques de complications liées au dispositif sont moindres. À mesure que la durée du traitement augmente, il faut envisager différents types de dispositifs de perfusion : cathéter périphérique court ou mi-long, cathéter périphérique introduit par voie centrale ou cathéter veineux central.

Cathéters de sécurité et dispositifs sans aiguille Les cathéters I.V. montés sur une aiguille sont associés à un risque élevé de transmission d’agents pathogènes à diffusion hématogène du fait de blessures par piqûres accidentelles. Les cathéters de sécurité permettent de prévenir les piqûres accidentelles grâce à des dispositifs I.V. recouvrant l’aiguille. Les systèmes I.V. sans aiguille sont conçus pour prévenir les piqûres accidentelles pendant l’administration I.V. de médicaments en bolus et de médicaments secondaires. Certains dispositifs sans aiguille peuvent être utilisés avec n’importe quelle tubulure, tandis que d’autres ne sont compatibles qu’avec des mécanismes d’administration en tièrement I.V. Les dispositifs

d’administration I.V. sans aiguille sont munis de cloisons déjà perforées auxquelles on accède par des canules en plastique pointues ou des systèmes de valvules ouvertes et fermées qui permettent la circulation d’un liquide lorsqu’elles sont activées par l’insertion d’une seringue. Les canules mousse en plastique et les ports d’injection Pre-SlitMD permettent d’éviter l’emploi d’aiguilles en acier et les ports d’injection classiques ; ils restent cependant utilisables avec des aiguilles hypodermiques, ce qui est un inconvénient, sauf en cas d’urgence. Les ports d’injection Pre-SlitMD sont reconnaissables par un anneau blanc entourant le port et signalant aux utilisateurs que le système est dépourvu d’aiguille. Ces ports sont accessibles aux seringues munies de canules mousse en plastique. Les systèmes qui verrouillent l’accès aux aiguilles sont plus sûrs, car ils empêchent la possibilité d’utiliser des aiguilles FIGURE 14.20. Une canule de fermeture à levier ou une canule de fermeture letée se xe à une tubulure I.V., à un port I.V. en Y ou à un dispositif de perfusion intermittente périphérique. Certaines seringues sont munies d’un perforateur bleu destiné aux oles monodoses. Le perforateur bleu restera dans la ole lors de l’insertion. Un adaptateur universel pour ole Pre-SlitMD permet aussi l’accès à des oles standard monodoses, auquel cas des canules à seringue sont employées pour accéder à l’adaptateur 1 .

Pompes à perfusion Il existe une variété de pompes utilisées pour presque toutes les perfusions en pédiatrie en vue d’administrer avec précision des médicaments et de réduire au minimum le risque de surcharge

circulatoire. Pour assurer une administration sécuritaire des médicaments, l’inrmière procédera ainsi : • Calculer le volume à perfuser pendant une heure. • Régler la vitesse de perfusion. • Au moins une fois par heure, vérifier que le taux souhaité est maintenu et contrôler l’intégrité du système et du site (absence de rougeur, d’œdème, d’inltration ou d’irritation). • S’assurer que la perfusion ne s’est pas interrompue.

ALERTES CLINIQUES 1 Des erreurs de connexion des tubulures peuvent provoquer le décès d’enfants. De nombreux systèmes I.V. sans aiguille permettent de raccorder d’autres types de tubulures, comme celles des canules artérielles ou de distribution d’oxygène, et d’instiller ainsi de l’air directement dans la tubulure I.V. Avant de raccorder une tubulure à un enfant, l’inrmière doit vérier l’ensemble du système en suivant toute la longueur de la tubulure, du point d’insertion jusqu’au sac ou à la seringue de solution pour s’assurer que le vide d’air a bien été fait et que l’intégrité du système est intacte. Elle doit également vérier le contenu de la solution, la concentration et l’aspect du produit avant son administration (Jeong, Jeon, Lee et al., 2017). 2 Pour évaluer l’assistance requise pour le maintien de la sécurité de l’enfant, il faut tenir compte de son âge, de son développement, de son statut neurologique et de la manière dont il réagit aux traitements douloureux. Le retrait manuel du ruban adhésif est la méthode à privilégier. Le ruban adhésif ne sera coupé que si cela est absolument nécessaire, à l’aide de ciseaux à pansement pour en faciliter le retrait. Avant de couper le ruban adhésif, l’inrmière doit : • vérier que tous les doigts sont visibles ; • ôter tout obstacle à la visibilité, p. ex. un revêtement protecteur ; • protéger la peau et les doigts de l’enfant en glissant un ou deux doigts entre le ruban adhésif et la peau de l’enfant de manière à éviter que les ciseaux le touchent ; • couper d’abord le ruban adhésif situé sur le côté médial, soit du côté du pouce.

Bien qu’elles soient pratiques et efficaces, les pompes à perfusion continue ne sont pas dépourvues de risque. Une trop grande conance en la précision d’une machine peut entraîner une perfusion excessive ou insufsante de liquide ; l’emploi de ces appareils suppose également une évaluation biannuelle scrupuleuse de la part des techniciens en bio-ingénierie. Une pression excessive peut s’accumuler si le débit de la machine est trop élevé par rapport au débit veineux, ou si le pompage continue lorsque l’aiguille est sortie de la lumière du vaisseau sanguin. Il est à noter que les inrmières doivent se requalier tous les deux ans pour pouvoir utiliser cette pompe.

14

Entretien du cathéter intraveineux périphérique L’inrmière doit assurer l’asepsie du site d’insertion du cathéter pour prévenir toute infection. Elle doit en outre vérier le site à chaque heure an de détecter tout signe d’inltration ou d’inammation. Par ailleurs, elle veillera à bien xer le cathéter et la tubulure de raccordement pour éviter qu’ils ne se déplacent accidentellement TABLEAU 14.9.

B

Retrait d’un cathéter intraveineux périphérique A

C

D

E

FIGURE 14.20 Systèmes d’accès I.V. InterlinkMD – A Seringue à perforateur bleu. B Port d’injection Pre-SlitMD (sans aiguille). C Seringue avec canule mousse en plastique. D Canule verrouillante à levier. E Canule verrouillante letée.

Quand vient le moment d’arrêter la perfusion, de nombreux enfants appréhendent l’idée du retrait du cathéter ENCADRÉ 14.23. L’inrmière veillera donc à bien leur expliquer le processus. Elle peut également les encourager à retirer ou à l’aider à retirer le ruban adhésif : cela leur procure un sentiment de contrôle et stimule leur coopération 2 . Chapitre 14

Techniques de soins

605

Le processus comprend les étapes suivantes :

• Ôter le ruban adhésif qui maintient le cathérer I.V. en place ; pour diminuer la douleur liée au retrait du ruban, utiliser des tampons d’alcool ou de chlorhexidine pour dissoudre les bandes

• Éteindre toutes les pompes. • Clamper la tubulure I.V.

Pratiques inrmières TABLEAU 14.9

Fixer et stabiliser le cathéter intraveineux périphérique

À FAIRE

À ÉVITER

Pansements et rubans adhésifs • Bien xer la pointe du cathéter au point de ponction à l’aide d’une pellicule transparente adhésive stérile ou d’un ruban adhésif transparent non allergène (Infusion Nurses Society, 2011) FIGURE A .

• Utiliser le moins de bande adhésive possible au point de ponction, sur 2,5 à 5 cm de peau environ, en aval du port, pour éviter l’obscurcissement du port d’insertion et permettre la détection rapide de toute inltration. • Ne pas appliquer de pansement ou de ruban adhésif sur les doigts ou les orteils, car cela pourrait empêcher la vérication de la circulation et l’évaluation des signes neuromusculaires.

A

• Ne jamais enrouler un membre avec du ruban adhésif en amont du site d’insertion pour éviter de provoquer un effet de garrot. ALERTE CLINIQUE

Il faut éviter les revêtements opaques, car ils empêchent d’évaluer le site. Accès au port • Assurer un accès facile au port I.V. pour ne pas gêner les évaluations fréquentes (toutes les heures).



Protection du port d’insertion • Utiliser des dispositifs de protection des ports d’accès de la taille appropriée (p. ex., I.V. HouseMD).

• Éviter tout mouvement de l’embout du cathéter au point d’insertion (manipulation mécanique).

• Appliquer un couvercle protecteur, au besoin, directement sur le port d’insertion du cathéter pour protéger le point de perfusion FIGURE B.

• Restreindre l’emploi de planches capitonnées ou des attelles pour immobiliser partiellement le site d’accès I.V., car, en plus d’être inconfortables, elles comportent de nombreux inconvénients. Entre autres, elles :

B

– provoquent une constriction du membre ; – excorient le tissu sous-jacent et favorisent une infection ; – causent la contracture d’une articulation, ce qui restreint son mouvement ; – exigent une surveillance accrue du site d’insertion et de l’intraveineuse. • Ne pas improviser de cupules en plastique coupées en deux, aux bords en zigzag et recouverts de bande adhésive, car elles peuvent blesser l’enfant. • Ne jamais immobiliser le pouce à cause du danger de contractures inhérent à la limitation ultérieure d’un mouvement. • Éviter l’emploi d’un rouleau de gaze, de pansements extensibles autoadhésifs et de pansements ACEMD, qui peuvent entraîner de la constriction et masquer les signes d’inltration (Infusion Nurses Society, 2011).

Tubulures • Au besoin, enrouler la tubulure de raccordement ou de rallonge en une masse assez petite pour tenir sous le couvercle protecteur et éviter ainsi d’accrocher accidentellement le cathéter. • Bien xer la tubulure I.V. pour empêcher les nourrissons et les enfants de s’étrangler, ou de tirer accidentellement sur le cathéter.

606

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique



adhésives, puis rincer la peau pour éviter toute irritation. Pour décoller les pansements transparents (p. ex., OpSiteMD, TegadermMD), tirer les deux bords opposés parallèlement à la peau.

• Exercer une pression ferme sur le site d’insertion à l’aide de la compresse pendant quelques minutes.

• Placer une compresse stérile sur le site.

• Placer un pansement sec (bande de pansement adhésif) sur le site.

• Retirer lentement le cathéter en le tenant parallèlement à la peau.

Complications

• Inspecter l’embout du cathéter pour vérier qu’il est intact et qu’aucune partie n’est restée dans la veine.

Quel que soit l’âge des enfants, les mêmes précautions s’imposent pour le maintien de l’asepsie, la prévention des infections et la surveillance de

Pratique fondée sur des résultats probants ENCADRÉ 14.23

Fréquence de remplacement des dispositifs d’administration intraveineuse

QUESTION CLINIQUE

Chez les enfants, les dispositifs d’administration I.V. doivent-ils être remplacés toutes les 24, 48, 72 ou 96 heures pour prévenir une infection, tout en limitant les coûts ? RÉSULTATS PROBANTS

• Stratégies de recherche : la recherche a été faite de façon à repérer uniquement des articles de recherche publiés en anglais au cours des 10 dernières années et portant sur la fréquence de remplacement des dispositifs d’administration I.V. • Bases de données utilisées : National Guideline Clearinghouse, Cochrane Collaboration, Joanna Briggs Institute, PubMed, Infusion Nurses Society, Oncology Nurses Society, MD Consult, BestBETs, TRIP Database Plus, PedsCCM, Worldviews on Evidence-Based Nursing, EBM/BMJ, RNAO. ANALYSE CRITIQUE ET SYNTHÈSE DES DONNÉES

• Une revue systématique Cochrane effectuée par Gillies et ses collaborateurs (2005) et corroborée par Jeong et ses collaborateurs (2017) a permis de déterminer l’intervalle optimal de remplacement systématique des dispositifs d’administration I.V. relativement à l’administration de solutions d’alimentation par soluté ou par voie parentérale. Les résultats des données se rapportant à 13 essais contrôlés à répartition aléatoire, ou quasi aléatoire, ont été regroupés pour comparer les différents intervalles de remplacement des dispositifs d’administration : toutes les 24 heures par rapport à 48 heures ou plus, toutes les 48 heures par rapport à 72 heures, et toutes les 72 heures par rapport à 96 heures. Les résultats n’ont pas démontré que les fréquences de remplacement des dispositifs d’administration I.V. inférieures à 96 heures réduisaient l’incidence des infections dans la circulation sanguine. Toutefois, les chercheurs maintiennent la recommandation de remplacer les dispositifs d’administration I.V. contenant du sang ou des produits sanguins et des lipides toutes les 24 heures. Aucune différence n’a été relevée entre les résultats des clients porteurs de cathéters centraux ou périphériques, ou encore entre ceux qui ont reçu ou non une alimentation parentérale.

• Les Centers for Disease Control and Prevention (Gorski, 2017 ; Infusion Nurses Society, 2011 ; O’Grady, Alexander, Burns et al., 2011) recommandent de remplacer les dispositifs d’administration I.V. de cristalloïdes dans un intervalle de 96 heures et 7 jours. Il n’y a pas de différence signicative entre les taux de phlébite lorsque les dispositifs d’administration sont laissés en place plus de 96 heures. Toutefois, les tubulures utilisées pour administrer du sang et des produits sanguins ou des émulsions de lipides doivent être remplacées dans les 24 heures suivant le début de la perfusion. Les tubulures d’administration de propofol doivent être changées toutes les 6 à 12 heures, avec le changement de la seringue.

PHARMACOVIGILANCE

Le propofol n’est pas recommandé chez les enfants pour la sédation en raison du risque d’acidose métabolique mortelle. Ce médicament doit servir seulement pour une anesthésie et un usage ponctuel pendant une très courte période, et il doit être administré par un professionnel qui a reçu la formation requise (American Society of Anesthesiologists, 2014).

RECOMMANDATIONS POUR LA PRATIQUE INFIRMIÈRE

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• Remplacer les dispositifs d’administration I.V. toutes les 96 heures. • Remplacer la tubulure utilisée pour les émulsions de lipides, le sang et les produits sanguins toutes les 24 heures. • Remplacer les tubulures de sang munies de ltres internes après administration de 2 unités ou après 4 heures, suivant le premier des 2 cas. RÉFÉRENCES

Gillies, D., O’Riordan, L., Wallen, M., et al. (2005). Optimal timing for intravenous administration set replacement. Cochrane Database Syst Rev, (4), CD003588. Gorski, L. (2017). The 2016 infusion therapy standards of practice. Home Healthc Now, 35(1), 10-18. Infusion Nurses Society (2011). Infusion nursing standards of practice. J Infus Nurs, 34(Suppl. 1), S63-S64. Jeong, I.S., Jeon, G.R., Lee, M.S., et al. (2017). Intravenous inltration risk by catheter dwell time among hospitalized children. J Pediatr Nurs, 32, 47-51. O’Grady, N., Alexander, M., Burns, L.A., et al. (2011). Guidelines for the prevention of intravascular catheterrelated infections. Clin Infect Dis, 52 (9), e162-e193.

Chapitre 14

Techniques de soins

607

ALERTES CLINIQUES 1 Si l’inrmière observe une inltration ou une extravasation – dont les signes incluent l’érythème, la douleur, l’œdème, la pâleur, une traînée sur la peau le long du trajet de la veine – et une zone foncée autour du point d’insertion, il faut immédiatement cesser la perfusion, retirer la tubulure I.V., surélever le membre, aviser le médecin et instaurer le traitement que celui-ci prescrit, dès que possible. 2 Les méthodes les plus efcaces de prévention de l’infection d’un site d’accès I.V. consistent à procéder à l’hygiène des mains entre chaque client, à porter des gants pour insérer un cathéter, et à bien vérier le port d’insertion et l’état du pansement. Si l’enfant et sa famille sont bien informés au sujet des manifestations cliniques de l’infection du port, ils contribueront à détecter rapidement les infections.

Hypoxémie : Décit de la pression partielle de l’oxygène dans le sang artériel (PaO2) et de la saturation pulsatile en oxygène (SpO2) dans le sang.

l’inltration. Cependant, l’inltration est plus difcile à détecter chez les nourrissons et les jeunes enfants que chez les adultes. La quantité accrue de graisse sous-cutanée et la quantité de ruban adhésif employée pour xer le cathéter masquent souvent les signes précoces d’inltration. Lorsque le liquide semble perfuser trop lentement ou que la perfusion s’interrompt, la cause de l’obstruction dans l’appareil sera généralement trouvée : entortillements, vis de serrage, soupape d’arrêt et interférence liée au positionnement (p. ex., un coude plié). Si tel n’est pas le cas, il faudra peut-être retirer doucement une partie du pansement pour bien voir le point de ponction veineuse. Les zones déclives, la paume des mains, la face inférieure des extrémités, l’occiput et l’arrière des oreilles sont notamment examinés. Dans la mesure du possible, la perfusion est implantée dans un bras ou une jambe qui ne porte pas de bracelet d’identité. Une perfusion placée de manière distale par rapport au bracelet peut entraîner des problèmes circulatoires graves, car celui-ci fait alors ofce de garrot empêchant le retour veineux adéquat. Pour vérier le débit de retour sanguin dans le cathéter, il faut retirer la tubulure de la pompe à perfusion et abaisser le sac au-dessous du niveau de point de perfusion. L’inrmière peut aussi effectuer cette opération à l’aide d’une seringue. Toute résistance du retour sanguin pendant le rinçage ou l’aspiration indique également que la perfusion a peut-être inltré les tissus avoisinants. Le retour sanguin, adéquat ou non, n’est pas toujours un indicateur d’inltration chez les petits nourrissons. Le rinçage du cathéter et la recherche d’un œdème, d’une rougeur ou d’une traînée le long du trajet d’une veine permettent d’évaluer l’état de la perfusion I.V. En pédiatrie, le traitement I.V. est difcile à maintenir en raison de facteurs mécaniques comme le traumatisme vasculaire associé au cathéter, le site d’insertion, la taille et la fragilité des vaisseaux, la pression de la pompe, le niveau d’activité de l’enfant, l’expérience de l’inrmière, la technique d’insertion, l’administration forcée de bolus de liquide et la perfusion d’irritants ou de vésicants à travers un petit vaisseau (Infusion Nurses Society, 2011 ; Jeong et al., 2017 ; Park, Jeong et Jun, 2016). Ces facteurs causent une infiltration et des lésions d’extravasation. L’inltration est dénie comme l’administration accidentelle d’une solution non vésicante ou d’un médicament dans les tissus avoisinants. L’extravasation est dénie comme l’administration accidentelle de solutions ou de médicaments vésicants dans les tissus avoisinants. Un vésicant ou un agent sclérosant entraîne des lésions cellulaires de divers degrés lorsqu’une quantité même inme touche les tissus avoisinants. Des lignes

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Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

directrices permettent de déterminer la gravité des lésions tissulaires en évaluant certaines caractéristiques comme le degré de rougeur, la pâleur, le degré d’œdème, la douleur, la qualité des pouls en aval de l’inltration, le remplissage capillaire, et la chaleur ou la fraîcheur de la région concernée (Gorski, 2017 ; Infusion Nurses Society, 2011). Le traitement de l’inltration ou de l’extravasation varie selon le type de médicament ou d’agent vésicant 1 . Certaines lignes directrices décrivent la séquence des interventions et le traitement précis de l’inltration ou de l’extravasation par des antidotes (Park et al., 2016 ; RNAO, 2008). Le plus souvent, des cathéters I.V. périphériques sont employés comme dispositifs intravasculaires. La phlébite, processus plutôt mécanique qu’infectieux, reste la principale complication inhérente à l’utilisation des cathéters veineux périphériques (O’Grady, Alexander et Burns, 2011) 2 .

14.8

Maintien de la fonction respiratoire

14.8.1

Oxygénothérapie

En cas d’hypoxémie, de l’oxygène peut être administré à l’aide d’un masque, d’une canule nasale ou d’un respirateur. L’oxygénothérapie est généralement administrée à l’hôpital, mais de plus en plus d’enfants la reçoivent à domicile. L’oxygène est administré au moyen d’une canule nasale, d’un masque nasal, d’un masque facial ou d’un tube endotrachéal FIGURE 14.21. L’oxygène humidié ne doit pas être soufé directement sur le visage. Pour les nourrissons plus âgés et les enfants coopératifs, l’inrmière peut utiliser une canule ou des lunettes nasales, qui peuvent libérer une concentration d’oxygène d’environ 50 %. Les enfants tolèrent mal le masque.

FIGURE 14.21 L’oxygène est administré à l’enfant à l’aide d’un tube endotrachéal.

Toxicité de l’oxygène L’exposition prolongée à des pressions élevées en oxygène peut endommager certains tissus et certaines fonctions de l’organisme. Les organes les plus vulnérables aux effets indésirables d’une oxygénation excessive sont la rétine du nourrisson très prématuré et les poumons des enfants de tout âge. La narcose au dioxyde de carbone due à l’oxygène est un danger physiologique de l’oxygénothérapie auquel sont exposés les enfants atteints d’une maladie pulmonaire chronique comme la brose kystique. Chez ces enfants, le centre respiratoire s’est adapté à des degrés toujours supérieurs de pression partielle du dioxyde de carbone dans le sang artériel (PaCO2), de sorte que l’hypoxie devient le stimulus le plus puissant pour la respiration. Lorsque la pression partielle de l’oxygène dans le sang artériel (PaO2) est élevée pendant l’administration d’oxygène, le stimulus hypoxique s’en va, ce qui cause une hypoventilation progressive et l’augmentation des taux de PaCO2 ; l’enfant devient alors rapidement inconscient. La narcose au dioxyde de carbone peut également résulter de l’administration d’une sédation à ces enfants.

Surveillance de l’oxygénothérapie Monitorage transcutané Le monitorage transcutané est une méthode non invasive qui permet une surveillance continue de la pression partielle en oxygène transcutané (tcPaO2) et, avec certains dispositifs, de la pression partielle en dioxyde de carbone transcutané (tcPaCO 2). Une électrode est placée sur la peau où son action chauffante crée une hyperémie qui rend la peau perméable à la diffusion du gaz, permettant ainsi la détection de la pression en oxygène. Le siège de l’électrode est changé toutes les trois ou quatre heures pour éviter toute brûlure de la peau, et l’appareil est recalibré à ce momentlà. Le monitorage transcutané est souvent utilisé dans les unités de néonatalogie, mais il arrive qu’il soit inapte à la mesure de la PaO2 chez les nourrissons dont la circulation locale est altérée, ou chez les nourrissons plus âgés qui ont la peau plus épaisse.

Saturométrie La saturométrie (aussi appelée oxymétrie pulsée ou sphygmo-oxymétrie) MS 4.4 est une méthode non invasive et continue de calcul du pourcentage de la saturation pulsatile en oxygène (SpO2) qui permet de guider l’oxygénothérapie. Un capteur composé d’une diode électroluminescente (DEL) et d’un photodétecteur est installé avec les deux éléments en opposition autour du pied, de la main, du doigt, de l’orteil ou du lobe de l’oreille, la DEL étant placée

au-dessus de l’ongle si le capteur est mis sur un doigt. Ce capteur mesure la quantité de chaque type de lumière absorbé par les hémoglobines fonctionnelles. L’hémoglobine saturée en oxygène (oxyhémoglobine) absorbe plus de lumière infrarouge que celle qui ne l’est pas (désoxyhémoglobine). Le débit sanguin pulsatile est le principal facteur physiologique à inuer sur la précision de la SpO2. Chez les nourrissons, l’inrmière doit repositionner la sonde au moins toutes les trois ou quatre heures pour prévenir une nécrose due à une circulation sanguine insufsante. Un repositionnement plus fréquent peut s’avérer nécessaire en cas de circulation sanguine insufsante et d’hypersensibilité de la peau. La saturométrie est insensible à l’hyperoxie, car la valeur de l’hémoglobine avoisine une saturation de 100 % pour toutes les lectures de PaO2 supérieures à environ 100 mm Hg. Cette situation est dangereuse chez les nourrissons nés avant terme et exposés de ce fait à un risque de rétinopathie. Les valeurs limites de saturométrie doivent donc se situer entre 90 à 95 % pour les nourrissons nés avant terme, et il faut disposer d’un protocole établi pour la diminution de la concentration d’oxygène lorsque les saturations sont élevées.

CONSEIL CLINIQUE

Oxygénothérapie chez le nourrisson : placer le capteur sur le gros orteil et attacher le l avec du ruban adhésif contre la plante du pied (ou un support qui s’attache avec un dispositif de fermeture autoadhésif). Au besoin, recouvrir le pied d’une chaussette, mais vérier souvent la couleur de la peau, la température et le pouls à cet endroit. Oxygénothérapie chez l’enfant : placer le capteur sur l’index et attacher le l avec du ruban adhésif sur le dos la main.

La saturométrie présente plusieurs avantages par rapport au monitorage transcutané : • Elle ne requiert pas de réchauffement de la peau, ce qui réduit le risque de brûlures. • Elle élimine le délai nécessaire pour l’étalonnage du transducteur. • Elle garantit des mesures précises, indépendamment de l’âge de l’enfant, des caractéristiques cutanées ou de la présence d’une maladie pulmonaire. Il est essentiel d’appliquer correctement le capteur pour obtenir des mesures précises de la saturation pulsatile du sang en oxygène FIGURE 14.22. Étant donné que le capteur doit reconnaître chaque pulsation pour calculer la SpO2, le mouvement peut créer une interférence . Certains appareils peuvent synchroniser la lecture de la SpO2 avec le battement cardiaque, ce qui réduit l’interférence due au mouvement. Les capteurs ne doivent pas être placés sur les membres qui servent à mesurer la pression artérielle ou ceux qui sont porteurs de cathéters artériels, car le débit sanguin pulsatile peut en être affecté. La lumière ambiante provenant des luminaires et de la photothérapie, la chaleur de haute intensité ou la lumière des tables à infrarouges peuvent interférer avec les lectures. Il faut donc recouvrir le capteur pour bloquer ces sources lumineuses. Les colorants I.V., les vernis à ongles, les ongles synthétiques non opaques et possiblement l’encre utilisée pour prendre les empreintes du pied peuvent

Chapitre 14

ALERTE CLINIQUE

14

Il est important de vérier la compatibilité des connecteurs du capteur et des saturomètres. Toute incompatibilité entre les ls peut produire une quantité considérable de chaleur à l’extrémité du capteur, ce qui provoquerait des brûlures au deuxième et au troisième degré. Des capteurs trop serrés peu­ vent également entraîner une nécrose due à une circulation sanguine insufsante. L’inr­ mière doit donc inspecter souvent la peau sous le capteur. MS 4.4 « Mesure de la saturation pulsatile en oxygène », Méthodes de soins 1 (Lemire et Perreault, 2016a).

Techniques de soins

609

La durée du traitement dépend de l’état et de la tolérance de l’enfant ; elle est généralement comprise entre 20 et 30 minutes. Les enfants plus âgés peuvent tolérer des périodes de traitement plus longues.

ALERTES CLINIQUES 1 Il ne faut pas mettre les nourrissons dans la position de Trendelenburg, car la régulation de leur débit sanguin vers la tête n’est pas autonome.

Positions de drainage Il faut positionner l’enfant de manière à tirer prot de la gravité, ce qui facilite l’élimination des sécrétions. Plusieurs positions facilitent le drainage des principaux lobes pulmonaires TABLEAU 14.10 ; il n’est pas nécessaire de toutes les utiliser à chaque séance.

La percussion est contre-indiquée si l’enfant souffre d’une hémorragie pulmonaire, d’une embolie pulmonaire, d’une néphropathie au stade terminal, d’une pression intracrânienne élevée ou d’une ostéogenèse imparfaite, ou s’il a des réserves cardiaques très faibles. 2

FIGURE 14.22 mètre sur le pied

Jugement

clinique William a 3 mois. Il est actuellement en observation en raison de difculté respiratoire à la suite d’une infection des voies respiratoires supérieures. Depuis son admission, son état s’est stabilisé, et sa SpO2 est maintenant à 98 %. Après le bain, l’alarme du moniteur retentit : sa SpO2 a diminué sous les 90 %. Vous constatez que William a les extrémités bleutées et froides. Vous replacez le capteur de saturation sur l’autre index de William. Ses signes vitaux sont les suivants : F.C. : 100 batt./min ; température rectale : 36,1 °C ; P.A. : 85/55 mm Hg ; F.R. : 34 R/min ; SpO2 : 88 % À la lumière de ces informations, comment faut-il interpréter la SpO2 de William ?

A

B

FIGURE 14.23 A Position du creux de la main pour la percussion. B Dispositif pour percussion chez un nourrisson.

610

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Capteur de saturo-

fausser les mesures de la SpO2. Il faut retirer les colorants ou, dans le cas des ongles en porcelaine, installer le capteur ailleurs. La couleur de la peau, son épaisseur ainsi que l’œdème n’affectent pas les lectures.

14.8.2 Drainage bronchique

Le drainage bronchique, ou drainage postural, est indiqué lorsqu’un excès de liquide ou de mucus s’accumule dans les bronches sans être éliminé par l’activité ciliaire physiologique et la toux. Il peut être efficace chez les enfants atteints d’une maladie pulmonaire chronique comme la brose kystique, caractérisée par la production d’un mucus épais. Le drainage postural, effectué 3 ou 4 fois par jour, est plus efcace lorsqu’il est pratiqué après une autre thérapie respiratoire comme un traitement par un bronchodilatateur ou l’administration d’un médicament en nébuliseur. Il faut habituellement procéder au drainage bronchique avant les repas, ou de 60 à 90 minutes après les repas, et au coucher, pour réduire au minimum le risque de vomissements.

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

Les nourrissons et les trottineurs peuvent être placés, à l’aide d’oreillers, sur les genoux et les jambes de l’inrmière ou du thérapeute. L’enfant d’âge préscolaire peut être placé sur un coussinet pour surélever ses genoux. Des modications doivent être apportées dans le cas des enfants pour lesquels le positionnement standard est contreindiqué, par exemple en raison de traumatismes à la tête, d’incisions chirurgicales, de brûlures ou de la présence d’un plâtre 1 .

14.8.3

Drainage postural avec percussion

Le drainage postural avec percussion (clapping), ou kinésithérapie de drainage, désigne habituellement une position de drainage postural combiné à des techniques adjuvantes censées favoriser l’élimination du mucus dans les voies respiratoires. Ces techniques incluent la percussion manuelle, la vibration et l’oppression thoracique, la toux, l’expiration forcée et les exercices respiratoires. Des dispositifs mécaniques sont aussi employés pour effectuer la kinésithérapie de drainage (p. ex., ThAIRapy VestMD). Les bienfaits du drainage postural combiné à l’expiration forcée sont avérés. Pendant le drainage, les respirateurs à régulation de pression nasaux, inspiratoires et non invasifs ont démontré une amélioration signicative du rendement des muscles respiratoires et une réduction de la désaturation en oxygène (Chuang, Chou, Lee et al., 2017 ; Vivre avec la brose kystique, 2018).

Percussion manuelle La technique la plus courante combinée au drainage postural est la percussion manuelle de la paroi thoracique 2 . L’enfant, vêtu d’un chandail léger, est placé en position de drainage postural. L’inrmière tapote doucement mais fermement la paroi thoracique avec le creux de la main FIGURE 14.23A. Il existe des dispositifs pour percuter de petites régions chez les nourrissons FIGURE 14.23B. Cette percussion doit produire un bruit creux, et non un claquement. L’intervention doit s’effectuer uniquement au-dessus de la cage thoracique et être indolore.

14.8.4

Aspiration des sécrétions nasopharyngées

L’aspiration vise à dégager les voies respiratoires supérieures des sécrétions que l’enfant est incapable d’évacuer par lui-même. Il faut se rappeler que cette procédure est une expérience TABLEAU 14.10 POSITION

traumatisante pour l’enfant. Elle peut aussi causer des lésions aux muqueuses des voies respiratoires, particulièrement chez les enfants dont le nombre de plaquettes est inférieur à 30 000 ou qui ont un problème de coagulation. La technique d’aspiration est décrite dans l’ENCADRÉ 14.24.

Positions de drainage bronchique pour les principaux lobes pulmonaires chez l’enfanta LOBE PULMONAIRE

POSITION

LOBE PULMONAIRE

Bronche apicale du lobe supérieur droit et gauche

Bronche dorsale du lobe supérieur droit et gauche

Bronches ventrales des deux lobes supérieurs

Partie supérieure des lobes inférieurs droits et gauche

Partie inférieure des deux lobes inférieurs

Bronches latérale du lobe inférieur droit ; la position obtenue en inversant l’image (partie droite vers le bas) permet de drainer la bronche latérale gauche

Bronche latérale du lobe inférieur gauche ; la position obtenue en inversant l’image (côté gauche vers le bas) permet de drainer la bronche latérale droite.

Bronches médiales et latérales du lobe moyen droit

Bronches lingulaires (supérieure et inférieure) du lobe supérieur gauche (homologue du lobe moyen droit)

a Pour chaque position, le modèle de l’arbre trachéobronchique est projeté à côté de l’enfant pour illustrer le drainage des bronches (bleu).

Sauf indication contraire, la plateforme de drainage est horizontale. Chapitre 14

Techniques de soins

611

14

Les indications de l’intubation sont :

Techniques de soins ENCADRÉ 14.24

Aspirer des sécrétions nasopharyngées

1. Choisir la taille du cathéter en fonction du diamètre de la narine de l’enfant ; le diamètre du cathéter ne doit pas dépasser 50 % du diamètre de la narine. 2. Positionner l’enfant en position confortable semiassise ou couchée. 3. Régler la pression d’aspiration de l’appareil selon l’âge de l’enfant :

MS 7.1 « Aspiration des sécrétions », Méthodes de soins 1 (Lemire et Perreault, 2016a).

Jugement

• possibilité d’apparition d’une obstruction partielle ou complète des voies respiratoires – effort respiratoire sans bruits respiratoires, traumatisme facial et lésions par inhalation ; • perte possible ou réelle de la protection des voies respiratoires, risque accru d’aspiration ; • anticipation du besoin d’une ventilation assistée liée à un traumatisme thoracique, à un choc, à une augmentation de la pression intracrânienne ;

Nourrisson

60-80

• hypoxémie malgré l’oxygénothérapie ;

Enfant de < 5 ans

80-100

• ventilation insufsante.

Enfant de > 5 ans

100-120

Intubation à séquence rapide

L’intubation à séquence rapide est effectuée couramment chez les enfants (et certains nouveau-nés) pour induire un état d’inconscience et de blocage neuromusculaire, évitant ainsi le recours à la ventilation en pression positive et les risques d’aspiration (Bottor, 2009). Autrefois, on utilisait des tubes endotrachéaux sans ballonnet chez les enfants âgés de moins de huit ans, mais il semble que l’utilisation de ces tubes n’entraîne pas une fréquence plus élevée des complications chez les jeunes enfants ; des Vous devez procéder à l’aspiration des sécrétions modèles de ballonnets d’Annabelle, âgée de quatre mois, aux ns d’analyses. plus récents semblent Quel moyen pouvez-vous prendre pour vous assurer que la diminuer certaines llette est sufsamment oxygénée pendant la procédure ? complications comme À quelle pression allez-vous régler l’appareil à succion le stridor et les lésions avant de procéder à l’aspiration des sécrétions ? de la muqueuse trachéale (Kuch, 2013 ; a) 60 à 80 mm Hg. c) 100 à 120 mm Hg. Taylor, Subaiya et b) 80 à 100 mm Hg. d) 100 à 150 mm Hg. Corsino, 2011). Partie 5

• augmentation importante du travail ventilatoire, utilisation des muscles accessoires ;

Pression (en mm Hg)

clinique

612

• obstruction des voies respiratoires supérieures ;

Âge de l’enfant

4. Mettre la visière et des gants stériles avant de commencer la procédure. 5. Sans aspirer, introduire de la main dominante le cathéter le long du plancher de la cavité nasale jusqu’au pharynx à une profondeur de 8 à 12 cm. S’il y a résistance au moment de l’introduction du cathéter, le retirer et l’insérer dans l’autre narine. 6. Aspirer pendant 5 secondes en retirant le cathéter. 7. Aspirer une petite quantité de solution de rinçage. 8. Répéter, au besoin, les étapes 5 à 7 MS 7.1 .

14.8.5

• détresse ou arrêt respiratoire, respiration agonique ou haletante, apnée ;

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

Cette procédure est effectuée par le médecin en collaboration avec une inhalothérapeute et une inrmière. Elle comprend diverses étapes qui sont décrites dans l’ENCADRÉ 14.25.

14.8.6

Ventilation assistée

Tube endotrachéal En général, un tube endotrachéal est utilisé en association avec la ventilation assistée ou pour les enfants qui ont une obstruction des voies respiratoires supérieures. L’intubation endotrachéale peut être effectuée par voie orale (orotrachéale) ou nasale (nasotrachéale). Bien qu’elle soit plus difcile à mettre en place, entre l’intubation orotrachéale et l’intubation nasotrachéale, cette dernière est à privilégier. Elle simplie l’hygiène buccale et se xe avec plus de stabilité, ce qui réduit la complication liée à l’érosion trachéenne et le danger d’extubation accidentelle. L’air ou le gaz administré directement dans la trachée doit être humidié. Les soins de routine à apporter à un enfant intubé sont les suivants : • Vérier le positionnement du tube après chaque déplacement de l’enfant et lorsqu’il est transféré dans un autre lit. • Vérier la position du tube au moins toutes les deux heures selon l’état de tolérance de l’enfant. • Appliquer une barrière cutanée protectrice à base d’hydrocolloïde pour protéger les joues. • Placer des coussins de gel sous les points d’appui, comme l’occiput, les talons, les coudes et les épaules. • Administrer des analgésiques et des sédatifs, au besoin. Si l’état d’un enfant intubé se détériore soudainement, il faut envisager diverses étiologies ENCADRÉ 14.26.

Techniques de soins ENCADRÉ 14.25

Procéder à une intubation

Avant l’intubation par l’inrmière ou l’inhalothérapeute • À l’aide d’un ballon ventilatoire de taille appropriée, préoxygéner l’enfant avec de l’oxygène pur.

• Surveiller tout changement de couleur sur le détecteur de pression télé­expiratoire en CO2 après au moins 3 à 6 respirations, ou vérier la forme de l’onde ou sa valeur par la capnographie en continu.

• Humidier l’air ou le gaz administré directement dans la trachée.

• Installer l’enfant pour procéder à une radiographie pulmonaire.

Pendant l’intubation par le médecin

Après l’intubation

• Surveiller continuellement le rythme cardiaque, la fréquence cardiaque et la saturation en oxygène.

• Appliquer une barrière cutanée protectrice et xer le tube endotrachéal à l’aide de ruban adhésif ou d’un dispositif de xation (fait par l’inhalo­ thérapeute).

• Vérier le positionnement du tube endotrachéal par au moins un signe clinique et en mesurant le volume de dioxyde de carbone en n d’expiration (fait par l’inhalothérapeute).

• Au besoin, installer une sonde nasogastrique. • Évaluer l’enfant :

Vérication du positionnement du tube endotrachéal • Visualiser l’expansion thoracique bilatérale. • Ausculter l’épigastre (absence de bruits respiratoires) et les deux pou­ mons dans la région axillaire (bruits respiratoires bilatéraux égaux et satisfaisants).

La pneumonie sous ventilation assistée est une complication qui peut être évitée en procédant à une hygiène efcace des mains, en portant des gants pour se protéger des sécrétions respiratoires et des objets contaminés, en utilisant des systèmes d’aspiration en circuit fermé, en prodiguant des soins buccaux réguliers et en surélevant la tête du lit à un minimum de 30 à 45° (à moins de contre-indications) (Centers for Disease Control and Prevention [CDC], 2012). Une alimentation par voie entérale est souvent administrée pour diminuer les risques de translocation bactérienne. L’inrmière évalue régulièrement la motilité intestinale de l’enfant (p. ex., en auscultant les bruits intestinaux et en mesurant le volume gastrique résiduel ou le volume abdominal) et ajuste le débit et le volume d’administration de l’alimentation entérale pour éviter toute régurgitation. Chez l’enfant à risque élevé (diminution du réexe pharyngé, vidange gastrique retardée, reux gastro-œsophagien, bronchospasme grave), on a souvent recours aux sondes d’alimentation postpyloriques (duodénale ou jéjunale). Pour éviter le mélange des sécrétions pendant l’aspiration, il faut aspirer les sécrétions de l’hypopharynx avant celles du tube endotrachéal, et ce, avant de repositionner le tube endotrachéal et avant de repositionner l’enfant. Il faut empêcher également l’eau qui s’accumule dans les conduits du ventilateur de pénétrer dans le tube endotrachéal ou le nébuliseur de médicaments en série sur la ligne inspiratoire. D’autres mesures pour prévenir la pneumonie sous ventilation assistée sont

ENCADRÉ 14.26

– surveiller la SpO2 et la pression expiratoire en CO2 ; – procéder à l’analyse périodique des gaz sanguins artériels.

DOPE : étiologies à envisager chez un enfant intubé

• Déplacement : le tube n’est pas dans la trachée ou s’est déplacé dans l’une des bronches (le plus souvent dans la bronche souche droite). • Obstruction : présence de sécrétions ou blocage du tube.

l’intubation orale et le changement des conduits du ventilateur seulement lorsqu’ils sont visiblement souillés (Kline-Tilford, Sorce, Levin et al., 2013).

Extubation

• Pneumothorax : traumatisme thoracique, barotraumatisme ou maladie pulmonaire restrictive. • Équipement : vérier le fonctionnement de la source d’oxygène, du ballon ventilatoire et du ventilateur.

clinique

Jugement

Complications

– observer la symétrie des mouvements du thorax, les bruits respiratoires bilaté­ raux égaux ou inchangés depuis la dernière évaluation, l’état de conscience, le remplissage capillaire et la coloration de la peau et les signes vitaux ;

Justin, âgé de 5 ans, a été amené en ambulance à la suite d’une chute à vélo durant laquelle il s’est fracturé 4 côtes du côté droit. Vous suspectez un pneumothorax. Quels signes devriez­vous rechercher ?

a) Une douleur en coup de poignard du côté droit L’inrmière évaluera tous accompagnée de èvre. les jours si l’enfant est prêt b) Une douleur costale et des ecchymoses à être extubé. Les signes multiples du côté droit. qu’un enfant est prêt à être c) Une hypersonorité à la percussion et une extubé sont l’amélioration absence de bruits respiratoires du côté droit. de l’affection sous-jacente, la stabilité hémodynamique d) Une matité franche à la percussion et une absence de bruits respiratoires du côté droit. et le soutien mécanique qui n’est plus nécessaire. Elle évalue l’état de conscience et vérie si l’enfant est en mesure de maintenir la perméabilité des voies respiratoires en mobilisant les sécrétions pulmonaires par une toux efcace. Il faut maintenir le statut NPO quatre heures avant l’extubation. Après l’extubation, l’infirmière Chapitre 14

Techniques de soins

613

14

surveille l’apparition de toute détresse respiratoire qui peut survenir dans les minutes ou les heures qui suivent. Les signes de détresse respiratoire après l’extubation sont le stridor, l’enrouement, l’augmentation du travail ventilatoire, l’instabilité des signes vitaux et la désaturation en oxygène.

Trachéostomie CONSEIL CLINIQUE

Avant d’extuber un enfant, penser au procédé mnémonique CALMS : C (central nervous system): système nerveux central (alerte ou à son niveau de conscience normale, respire par lui-même). A (airway) : voies aériennes (ouverte, non obstruée). L (lungs) : poumons (clairs et fonctionnels, maladie du parenchyme guérie). M (muscular strength) : force musculaire (tousse par lui-même, muscles respiratoires fonctionnels). S (secretions) : sécrétions (capable de dégager ses voies respiratoires).

La trachéotomie est l’ouverture de la trachée cervicale, suivie de la mise en place d’une canule ; l’intervention peut être effectuée d’urgence ou de façon élective, et peut être combinée à une ventilation assistée. La trachéostomie est l’orice permettant l’insertion de la canule dans la trachée. Les canules trachéales pédiatriques sont généralement faites en polychlorure de vinyle (PVC) ou en silicone FIGURE 14.24. L’angle de ces canules est plus aigu que celui des canules pour adultes. Les canules pour enfants s’assouplissent à la température corporelle pour épouser les formes de la trachée. En raison de leur petite taille, les canules pédiatriques destinées aux enfants de moins de 12 ans sont dépourvues de canule interne. Elles s’obstruent donc plus facilement, car la canule interne ne peut être changée plusieurs fois par jour. Toutefois, on peut en installer chez les enfants de plus de 12 ans qui ont beaucoup de sécrétions pour favoriser leur élimination.

Dans la mesure où il peut être impossible pour l’enfant de signaler qu’il a besoin d’aide, l’observation directe et l’utilisation des moniteurs respiratoire et cardiaque s’avèrent essentielles. L’échangeur d’humidité et de chaleur est aussi appelé nez articiel, car il remplit les fonctions de ltre, d’humidication et de réchauffement de l’air qui sont habituellement accomplies par le nez FIGURE 14.25. L’inrmière doit donc évaluer régulièrement la respiration (bruits et travail respiratoires), les signes vitaux ainsi que le type et la quantité de sécrétions. Des sécrétions teintées de sang sont souvent le signe d’un traumatisme de la carène lors de l’aspiration des sécrétions. Un écoulement de sang peut également être le signe d’une perforation du tronc artériel brachiocéphalique. Si tel est le cas, il faut en aviser immédiatement le médecin. En tout temps, des dispositifs et des accessoires doivent se trouver au chevet de l’enfant en cas d’urgence ENCADRÉ 14.27. Une source

Les enfants qui ont subi une trachéostomie doivent être surveillés de près de manière à dépister les complications telles que l’hémorragie, l’œdème, l’aspiration, la décanulation accidentelle, l’obstruction de la canule et l’entrée d’air libre dans la cavité pleurale. Les soins inrmiers consistent à : • maintenir la perméabilité des voies respiratoires ; • faciliter le retrait des sécrétions pulmonaires ; • administrer de l’air ou de l’oxygène humidié ; • nettoyer la stomie ; • surveiller la capacité de l’enfant à avaler ;

FIGURE 14.25 L’échangeur d’humidité et de chaleur, ou nez articiel, ltre, humidie et réchauffe l’air.

• donner de l’enseignement tout en prévenant les complications ; • prodiguer des soins cutanés quotidiens au pourtour de la trachéostomie.

A

B

FIGURE 14.24 Canules trachéales pédiatriques – A En PVC (ShileyMD). B En silicone (Bivona PortexMD).

614

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

ENCADRÉ 14.27

• • • • • • • • • • •

Matériel à garder au chevet de l’enfant ayant subi une trachéostomie

Cathéters d’aspiration Tubulures Appareil d’aspiration Gants stériles Solution physiologique ou eau stérile Gaze stérile pour essuyer les sécrétions Ciseaux 2 canules trachéales supplémentaires de même calibre Autre canule trachéale de calibre inférieur Obturateur (ou mandrin d’obturation) Collier ou attaches de trachéostomie

d’humidication est également indispensable, car les fonctions physiologiques d’humidication et de ltration des voies respiratoires ont été contournées.

Aspiration par la canule trachéale Les voies respiratoires doivent rester libres et être soumises à une aspiration fréquente pendant les premières heures suivant la trachéostomie pour en retirer les bouchons de mucus et les sécrétions excessives. La fréquence des aspirations dimi­ nuera graduellement aux cours des mois suivants, mais il faudra aspirer les sécrétions tant que la canule trachéale sera en place. L’aspiration doit être limitée à environ trois aspirations par période d’aspiration 1 . La saturométrie sert à surveiller l’aspiration et à prévenir l’hypoxie. L’aspiration

doit être effectuée selon une technique stérile ENCADRÉ 14.28 MS 2.2 . L’infection secondaire est une préoccupation majeure, car l’air entrant dans les voies respiratoires inférieures contourne les défenses naturelles présentes dans les voies respiratoires supérieures. Dans un système d’aspiration fermé, le cathéter d’aspiration est directement relié à la canule du respirateur. Ce système comporte plusieurs avan­ tages. Premièrement, il n’est pas nécessaire de débrancher l’enfant du respirateur, ce qui assure une meilleure oxygénation. Deuxièmement, le cathéter d’aspiration est enveloppé dans une gaine en plastique, ce qui réduit le risque que l’inrmière soit exposée aux sécrétions de l’enfant (Children’s Hospital of Eastern Ontario [CHEO], 2011).

Techniques de soins ENCADRÉ 14.28

Procéder à une aspiration trachéale

• Expliquer le déroulement de la procédure à l’enfant. • Choisir le cathéter le plus grand possible an de permettre une évacuation maximale des sécrétions, de prévenir l’atélectasie et de diminuer l’hypoxie résultant de l’intervention. Si le cathéter est trop large, il peut bloquer les voies respiratoires. • Verser de la solution de rinçage dans un contenant stérile. • Régler la pression d’aspiration de l’appareil selon l’âge de l’enfant. À moins que les sécrétions ne soient épaisses et tenaces, une pression située dans l’intervalle inférieur est recommandée. Pression d’aspiration recommandée Âge de l’enfant

Pression (en mm Hg)

Nourrisson

60-80

Enfant de 1-8 ans

80-120

Enfant de > 8 ans

120-150

• Mettre des gants stériles. • Tout en laissant le cathéter dans son emballage, le raccorder à la tubulure de l’appareil d’aspiration sans le contaminer. • De la main dominante, sortir le cathéter de son emballage en évitant de toucher aux 10 derniers centimètres. • Vérier la pression en bloquant l’orice avec le pouce et en aspirant un peu de solution de rinçage. • Si les sécrétions sont très sèches, instiller quelques gouttes de solution saline avant de commencer l’aspiration an de prévenir une irritation de la trachée due au manque d’humidité. • Sans aspirer, insérer le cathéter en veillant à ce qu’il ne dépasse pas l’extrémité de la canule (si les sécrétions ne sortent pas, l’insérer 0,5 cm de plus) FIGURE A. • De la main non dominante, bloquer l’orice du cathéter et aspirer pendant au plus 5 secondes chez les nourrissons et

les trottineurs, et 10 secondes chez les enfants plus âgés 2 tout en retirant le cathéter et en le faisant tourner entre le pouce et l’index de la main dominante FIGURE B. • Rincer le cathéter avec un peu de solution de rinçage. • Après chaque aspiration, laisser l’enfant se reposer de 30 à 60 secondes pour permettre à la saturation en oxygène de se normaliser ; recommencer ensuite la procédure jusqu’à ce que la trachée soit claire. A

B

Aspiration trachéale – Noter que le cathéter est inséré à peine au-delà de l’extrémité de la canule trachéale. A Aucune aspiration pendant l’insertion (orice ouvert). B Aspiration effectuée pendant le retrait (orice bloqué).

Chapitre 14

MS 2.2 « Aspiration des sécrétions par la canule trachéale », Méthodes de soins 2 (Lemire et Perreault, 2016b).

ALERTES CLINIQUES

L’aspiration doit se faire au minimum deux fois par jour, le matin et le soir, pour vérier la perméabilité de la canule. Sinon, il faut aspirer au besoin. Les signes d’obstruction partielle des voies respiratoires par le mucus incluent l’augmentation de la fréquence cardiaque, l’augmentation de l’effort respiratoire, la diminution de la saturation du sang artériel en oxygène (SaO2), la cyanose et l’augmentation de la pression inspiratoire positive dans le respirateur. 1

2 L’aspiration des sécrétions ne devrait pas prendre plus de 5 secondes pour le nourrisson et 10 secondes chez l’enfant. Un moyen simple pour limiter la durée de l’aspiration est de compter (mille et un, mille et deux, mille et trois, etc.). Une période d’aspiration prolongée risque d’obstruer les voies aériennes trop longtemps, augmentant ainsi les risques d’atélectasie. L’hypoxie peut être évitée par l’hyperventilation de l’enfant avec de l’oxygène à 100 % avant et après l’aspiration, en utilisant le ballon d’aspiration ou en augmentant la concentration d’oxygène du respirateur. L’utilisation d’un système clos d’aspiration permet également de ne pas interrompre l’apport d’oxygène.

Atélectasie : Affaissement des alvéoles qui empêche l’échange respiratoire normal d’oxygène et de dioxyde de carbone, et qui entraîne une hypoventilation du poumon réduisant le taux d’oxygène sanguin. Techniques de soins

615

14

Soins de routine MS 2.4 « Soins d’une trachéostomie », Méthodes de soins 2 (Lemire et Perreault, 2016b).

La stomie trachéale réclame des soins quotidiens MS 2.4 . La canule trachéale est maintenue en place avec des attaches à velcro pour trachéostomie faites d’une substance durable qui ne s’efloche pas. Ces attaches sont remplacées quotidiennement ou dès qu’elles sont souillées. Il est plus facile d’ajuster les attaches ou le collier et d’en assurer un port confortable si l’enfant est assis plutôt qu’étendu. Certaines se xent avec des dispositifs de fermeture autoadhésifs. Comme les attaches ou les colliers pour canule trachéale PoseyMD ou DaleMD, ces dispositifs sont faits d’un matériel doux, capitonné et légèrement extensible, très confortable. Ils sont faciles d’usage et ils maintiennent une meilleure intégrité cutanée. Les soins sont effectués comme suit : • Placer l’enfant en position confortable.

ALERTE CLINIQUE

Pendant le changement du collier ou des attaches, une seconde inrmière doit tenir la canule de trachéostomie an d’éviter son déplacement si l’enfant bouge brusquement.

participer à l’intervention pour faciliter le positionnement de l’enfant. La canule trachéale doit être remplacée avant les repas ou deux heures après le dernier repas. Les alimentations continues sont interrompues au moins une heure avant de remplacer une canule. Le remplacement de la canule se fait selon une technique stérile de la manière suivante : • Préparer la nouvelle canule : y insérer l’obturateur et xer l’attache en velcro dans une des fentes de la collerette. • Procéder à l’aspiration des sécrétions pour en réduire la quantité. • Placer une serviette roulée sous les épaules de l’enfant an que le cou soit en extension (tout en évitant l’hyperextension) pour amener la trachée vers l’avant.

• Observer des signes d’infection et de dégradation de la peau ; celle-ci doit être propre et sèche.

• Demander à un aidant de détacher les attaches à velcro et de retirer la canule de la stomie en suivant la courbe de la trachée.

• Retirer la compresse à drain souillée qui se trouve autour de la trachéostomie, le cas échéant.

• Visualiser la stomie tout en rapprochant la nouvelle canule près de la stomie.

• Nettoyer le pourtour de la stomie avec une tige montée légèrement imbibée de gluconate de chlorhexidine 2 % sans alcool en la passant sous l’ailette, en allant de la stomie vers l’extérieur. Jeter la tige montée et recommencer l’étape avec une nouvelle tige de l’autre côté. Recommencer l’étape jusqu’à ce que la peau sous les ailettes soit débarrassée des sécrétions. Laisser sécher environ 60 secondes et assécher avec une compresse stérile en commençant tout près de l’orice de la trachéostomie vers l’extérieur.

• Insérer le bout de la nouvelle canule dans la stomie, puis réaligner la canule pour suivre l’orientation normale de la trachée et continuer l’insertion d’un mouvement légèrement courbé vers l’arrière du cou.

• Au besoin, mettre une nouvelle compresse à drain sous la canule externe en dirigeant la partie ouverte vers le menton de l’enfant.

Après le remplacement de la canule, il faut vérier que la respiration est convenable, car il se peut que la canule ait été insérée dans le tissu mou entourant la trachée. Par conséquent, il faut surveiller attentivement les bruits et le travail respiratoires.

• Détacher les attaches en velcro du collier et le retirer . Laver le cou de l’enfant, puis bien l’assécher. Remettre un autre collier en insérant les attaches dans les fentes de la collerette de la canule. Serrer le collier sufsamment pour ne laisser que l’espace d’un petit doigt entre le cou et le collier lorsque la tête de l’enfant est droite FIGURE 14.26.

• Lorsque la canule est en place, retirer l’obturateur de la canule. • Fixer la seconde attache du collier dans l’autre fente. Serrer le collier sufsamment pour ne laisser que l’espace d’un petit doigt entre le cou et le collier.

Remplacement de la canule En général, les canules trachéales sont remplacées une fois par mois, sauf en cas d’infection, pour réduire au minimum la formation de tissu de granulation, soit un tissu rouge, granuleux et humide ayant l’aspect d’une framboise. C’est habituellement le chirurgien qui effectue le premier remplacement ; les remplacements subséquents relèvent de l’inrmière ou de l’inhalothérapeute. Si l’enfant reçoit son congé de l’hôpital avec la trachéostomie, ces remplacements sont effectués à domicile par le parent. Idéalement, deux aidants doivent

616

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

FIGURE 14.26 Les attaches du collier pour trachéostomie sont bien ajustées, mais permettent l’insertion d’un petit doigt.

Si l’enfant a besoin d’oxygène, l’administrer avec un système d’humidication pour prévenir la sécheresse de la muqueuse respiratoire. L’humidication de l’air ambiant pour une trachéostomie en place peut être intermittente si les sécrétions restent assez nes pour être expectorées ou aspirées à partir de la trachéostomie. L’humidication directe par un masque de trachéostomie peut être proposée pendant les siestes et la nuit de manière à ne pas déranger. Les humidicateurs ambiants sont également efcaces. Si une canule interne est utilisée, elle doit être changée matin et soir, ou dès qu’elle est obstruée. Il faut toujours avoir une canule interne supplémentaire (à usage unique ou réutilisable) au chevet de l’enfant pour pouvoir remplacer sans délai celle en usage, au besoin. Si la canule est réutilisable, elle est nettoyée et mise de côté en vue du prochain changement de canule. Souvent, la canule interne doit être trempée dans une solution de peroxyde d’hydrogène pour dissoudre les sécrétions séchées ; elle est ensuite rincée à l’eau stérile ou avec une solution saline, puis bien asséchée.

Soins d’urgence : occlusion de la canule et décanulation accidentelle L’occlusion de la canule trachéale met en danger la vie de l’enfant et l’expose à un plus grand risque que l’adulte en raison du petit diamètre de la canule . An de maintenir la canule perméable et d’éviter la formation de croûtes qui pourraient l’obstruer, l’inrmière doit aspirer les sécrétions et remplacer régulièrement la canule. La décanulation accidentelle rend également nécessaire le remplacement immédiat de la canule. La trachée de certains enfants est assez rigide, de sorte que les voies respiratoires restent partiellement ouvertes une fois que la canule a été retirée. Par contre, chez d’autres enfants dont le cartilage de la trachée est mal formé ou exible, le retrait de la canule cause un collapsus des voies respiratoires. Comme de nombreux nourrissons et enfants souffrant de problèmes des voies respiratoires supérieures disposent de peu de réserve aérienne, il faut insérer une plus petite canule si le remplacement de la canule délogée de la grandeur précédente est impossible. S’il n’y a aucun moyen de remplacer la canule dans l’orice de la stomie, il faut effectuer une intubation orale.

14.8.7

Réanimation cardiorespiratoire

L’arrêt cardiaque chez l’enfant est moins souvent d’origine cardiaque que la conséquence d’une hypoxémie secondaire prolongée résultant d’une oxygénation, d’une ventilation et d’une circulation inadéquates (choc). Parmi les causes d’arrêt cardiaque gurent les blessures, la suffocation (p. ex., par aspiration d’un corps étranger), l’inhalation de fumée ou l’infection. Chez le nourrisson,

le petit diamètre des voies respiratoires peut être bloqué par un mauvais positionnement avec le menton reposant sur le thorax, qui peut être facilement corrigé par un repositionnement du nourrisson de manière à ce que le menton soit relevé (sans hyperextension) an que les voies respiratoires retrouvent leur perméabilité. Cela est fréquent chez le nourrisson qui est mal positionné dans un siège pour bébé ou un siège d’auto pour enfant, avec dispositif de retenue et d’ancrage. L’arrêt respiratoire est associé à un meilleur taux de survie que l’arrêt cardiaque. Une fois que l’arrêt cardiaque survient, le taux de succès des efforts de réanimation est faible. L’apnée complète signale le besoin d’une action rapide et vigoureuse pour prévenir l’arrêt cardiaque. Dans une telle situation, l’inrmière doit agir immédiatement. À l’hôpital, l’équipement d’urgence doit être disponible et facilement accessible dans toutes les zones de soins. L’état de l’équipement d’urgence doit être vérifié au moins une fois par jour. Quelle que soit la cause de l’arrêt, les procédures de base sont effectuées et peuvent être légèrement adaptées en fonction de la taille de l’enfant. Le secouriste ou le premier répondant doit utiliser une barrière physique ou un masque doté d’une valve unidirectionnelle pour procéder à une réanimation bouche-à-bouche an de ne pas être exposé à une infection transmissible par le sang ou la salive. Tout secouriste susceptible d’avoir à effectuer une réanimation cardiorespiratoire (RCR) sur les lieux de travail ou en d’autres endroits en dehors de l’hôpital doit avoir accès à ce matériel. En dehors de l’hôpital, le premier geste à faire en cas d’urgence est d’évaluer rapidement l’étendue de toute blessure et de déterminer si l’enfant est conscient ou non. Un enfant qui lutte pour respirer, mais qui est conscient doit être transporté immédiatement vers une ressource dotée d’un équipement de pointe pour le maintien des fonctions vitales, et il doit être maintenu dans la position qui lui offre le plus de confort. Le transport par les services médicaux d’urgence (SMU) est fortement recommandé. Dans la plupart des grandes communautés, ces services peuvent amorcer le maintien des fonctions vitales sur place ou pendant le transport vers l’hôpital. L’enfant inconscient doit être traité avec précaution an de prévenir un traumatisme additionnel s’il a subi une blessure à la tête ou à la colonne vertébrale 24 . Les circonstances dans lesquelles l’enfant a été trouvé peuvent offrir des indices quant à la présence possible d’une blessure. Par exemple, un enfant qui a été projeté d’une bicyclette ou qui est tombé d’un arbre est plus susceptible d’avoir subi un traumatisme que l’enfant qui a été découvert dans son lit. Chapitre 14

ALERTE CLINIQUE

Une occlusion grave et poten­ tiellement fatale doit être sus­ pectée dès que l’enfant afche des signes de détresse respira­ toire et qu’il est impossible de faire passer un cathéter d’aspi­ ration à l’extrémité de la canule malgré plusieurs tentatives et l’instillation de solution saline. Cette situation exige un rempla­ cement immédiat de la canule.

24 Les lésions médullaires sont présentées dans le chapitre 24, Troubles liés aux systèmes neuromusculaire et musculaire.

Les points saillants des Lignes directrices 2016 en matière de réanimation cardiorespiratoire et de premiers soins peuvent être consultés sur le site de la Croix­ Rouge (www.croixrouge.ca).

Techniques de soins

617

14

Procédure de réanimation Les points suivants sont importants dans la RCR et les soins cardiovasculaires d’urgence. • La RCR est commencée avec les compressions thoraciques plutôt qu’avec les insufations (séquence C-A-B pour C [Chest compressions] compressions thoraciques ; A [Airway] voies aériennes ; B [Breathing] ventilations, plutôt que A-B-C) pour harmoniser la pratique RCR même si l’arrêt respiratoire devance l’arrêt cardiaque chez l’enfant. • Des modications sont apportées concernant la profondeur des compressions thoraciques an de permettre la réexpansion du thorax à sa position normale. • Le rythme de compression est entre 100 et 120 compressions par minute. • Les interruptions de compressions sont minimisées. • Chaque respiration doit durer environ 1 seconde. • Une moins grande importance est accordée à la vérication du pouls. L’évaluation du pouls et de la respiration est accomplie simultanément et en moins de 10 secondes. • L’utilisation d’un débrillateur chez le nourrisson est recommandée aussitôt qu’il est disponible. Le TABLEAU 14.11 permet de comparer les mesures de réanimation cardiovasculaire à prendre pour le nourrisson, l’enfant et l’adolescent, selon les dernières recommandations de la Fondation des maladies du cœur et de l’AVC du Canada. Si 2 secouristes sont présents, l’un des 2 doit commencer la RCR pendant que le second alerte les services médicaux d’urgence (SMU) en composant le 911 et se procure un défibrillateur externe automatisé (DEA). Chaque cycle consiste en 15 compressions thoraciques et 2 insufations, et la séquence commence par les compressions thoraciques. La RCR par 1 secouriste doit continuer à raison de 30 compressions et 2 insufations pour les enfants de tout âge, pour 5 cycles (environ 2 minutes) avant d’alerter les SMU. La RCR est poursuivie jusqu’à ce que les signes de réanimation apparaissent.

L’absence de pouls carotidien ou brachial constitue une indication sufsante qu’il faut continuer les compressions thoraciques. Si le pouls ne peut être détecté dans les 10 secondes, les secouristes doivent commencer la RCR (Fondation des maladies du cœur et de l’AVC du Canada, 2015). Les instructions aux secouristes n’ayant pas de formation dans le domaine des soins de santé n’incluent pas la vérication du pouls, mais plutôt la recherche de signes de circulation (p. ex., une respiration normale, une toux ou des mouvements d’air) en réponse aux insufations de sauvetage.

Compressions thoraciques Le but des compressions thoraciques externes est de maintenir la circulation sanguine dans le cerveau et les organes vitaux jusqu’à ce que les signes vitaux de l’enfant reviennent spontanément ou que les soins avancés de maintien des fonctions vitales puissent être obtenus. Il s’agit de veiller à pousser fort et vite à raison de 100 à 120 compressions par minute. Pour des compressions optimales, il est essentiel que la colonne vertébrale de l’enfant soit appuyée contre une surface ferme durant les compressions du sternum et que la pression sternale soit forte, mais non traumatique. Pour un nourrisson, la surface dure peut être la main ou l’avantbras du secouriste, la paume de la main soutenant le dos du nourrisson. La tête de l’enfant est positionnée pour une perméabilité optimale des voies respiratoires à l’aide de la manœuvre de renversement de la tête en arrière avec soulèvement du menton. Il est essentiel de prévenir l’hyperextension de la tête du nourrisson, car ceci tend à fermer sa trachée, qui est exible. Il est important de permettre la réexpansion du thorax après chaque compression.

Vérication du pouls La carotide est l’artère la plus centrale et la plus accessible chez un enfant de plus de un an. Cependant, le cou court et souvent gras de l’enfant rend le pouls carotidien difcile à palper. Par conséquent, il est préférable, chez le nourrisson, d’utiliser le pouls brachial, situé à l’intérieur du bras, à mi-chemin entre le coude et l’épaule FIGURE 14.27.

618

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

FIGURE 14.27 chez le nourrisson

Localisation du pouls brachial

Techniques de soins TABLEAU 14.11

Procéder à la réanimation cardiorespiratoire

ÉLÉMENTS

ADOLESCENTS ET ADULTES

ENFANTS (DE 1 AN À LA PUBERTÉ)

Sécurité du site

Vérier la sécurité des lieux pour les secouristes et la victime.

Identication de l’arrêt cardiaque

Vérier l’état de conscience :

NOURRISSONS (DE 1 MOIS À 1 AN)

• Absence de respiration ou respiration agonale uniquement (c.-à-d. absence de respiration normale) • Pas de pouls détecté en 10 secondes (On peut vérier simultanément la respiration et le pouls en moins de 10 secondes.)

Activation du système d’intervention d’urgence

Rapport compression/ ventilation sans intubation

• Secouriste seul, sans téléphone cellulaire : laisser la victime pour appeler les services médicaux d’urgence et obtenir un débrillateur externe automatisé (DEA) avant de commencer la RCR.

Perte de conscience devant témoin

• Ou, demander à quelqu’un de les appeler et commencer immédiatement la RCR ; utiliser un DEA dès qu’il est disponible.

• Laisser la victime pour appeler les services préhospitaliers d’urgence et obtenir un DEA.

1 ou 2 secouristes

1 secouriste

• 30:2

• 30:2

• Suivre les étapes pour adolescent et adulte indiquées à gauche. Perte de conscience sans témoin • Effectuer les compressions et les insufations pendant 2 minutes.

• Revenir auprès de l’enfant ou du nourrisson et reprendre la RCR ; utiliser un DEA dès qu’il est disponible.

2 secouristes ou plus • 15:2 Rapport compression/ ventilation avec intubation

• Compressions continues à une fréquence de 100 à 120/min

Fréquence des compressions

• 100 à 120 compressions/minute

Profondeur des compressions

• Au moins 5 cm

• 1 ventilation toutes les 6 secondes (10 ventilations/min)

• Inférieures à 6 cm

• Au moins 1/3 du diamètre antéropostérieur du thorax

• Au moins 1/3 du diamètre antéropostérieur du thorax

14

• Environ 4 cm

• Environ 5 cm Positionnement des mains

• Placer les 2 mains sur la moitié inférieure du sternum.

• Placer les 2 mains ou 1 main (optionnel pour les enfants très jeunes) sur la moitié inférieure du sternum.

1 secouriste • Placer 2 doigts au centre du thorax du nourrisson, juste sous la ligne intermammaire. 2 secouristes • Placer les 2 mains au centre du thorax de sorte que les pouces encerclent le thorax juste sous la ligne intermammaire.

Expansion thoracique

Permettre une réexpansion thoracique totale après chaque compression ; ne pas appuyer sur le thorax entre 2 compressions.

Interruptions

Limiter les interruptions à moins de 10 secondes pendant les compressions thoraciques.

Signes de réanimation

Pouls périphérique palpable, retour des pupilles à une taille normale, disparition des marbrures sur la peau et de la cyanose, et, possiblement, retour de la respiration spontanée

Source : Adapté de Fondation des maladies du cœur et de l’AVC du Canada (2015).

Chapitre 14

Techniques de soins

619

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les signes de réanimation incluent un pouls périphérique palpable, le retour des pupilles à une taille normale, la disparition des marbrures sur la peau et de la cyanose, et, possiblement, le retour de la respiration spontanée.

L’emplacement des doigts pour effectuer une compression sur un nourrisson se situe sur la moitié inférieure du sternum, juste sous l’intersection du sternum et d’une ligne imaginaire traversant les mamelons FIGURE 14.28. La compression sternale est appliquée à l’aide de 2 doigts sur le sternum exerçant une pression ferme vers le bas à une profondeur d’environ 4 cm. Lorsque 2 secouristes sont présents, la technique à 2 pouces peut être utilisée. Dans la technique à 2 pouces, un des secouristes place ses 2 pouces côte à côte sur la moitié inférieure du sternum du nourrisson ; les autres doigts encerclent la poitrine et soutiennent le dos. L’autre secouriste est alors responsable de donner les insufations. Chez l’enfant de 1 à 8 ans, les compressions sont appliquées sur la moitié inférieure du sternum. Pour une profondeur adéquate des compressions, la dépression doit être d’au moins un tiers du diamètre antéropostérieur du thorax (environ 5 cm). La pression est appliquée avec la paume de

FIGURE 14.28 Compressions thoraciques combinées avec l’insufation chez le nourrisson

A

La RCR par 1 secouriste doit continuer à raison de 30 compressions et de 2 insufations pour les enfants de tout âge, jusqu’à ce que les signes de réanimation apparaissent. Ces signes incluent des pouls périphériques palpables, le retour des pupilles à une taille normale, la disparition des marbrures sur la peau et de la cyanose, et, possiblement, le retour de la respiration spontanée. Lorsque 2 secouristes sont présents, ils doivent donner 15 compressions et 2 insufations chacun. La RCR débute par les compressions avant les insufations.

Perméabilité des voies respiratoires Pour une RCR efcace, la victime est placée sur le dos sur une surface ferme et plate, en utilisant les précautions appropriées. Avec la perte de conscience, la langue, qui est attachée à la mâchoire inférieure, relaxe et tombe vers l’arrière en obstruant les voies respiratoires. Deux manœuvres sont possibles pour rétablir la perméabilité des voies respiratoires. Le renversement de la tête en arrière s’effectue à l’aide d’une main placée sur le front de la victime, la paume de la main exerçant une pression ferme vers l’arrière pour que la tête se renverse. Les doigts de la main libre sont placés sous la portion osseuse de la mâchoire inférieure, près du menton, pour le soulever et le déplacer vers l’avant (soulèvement du menton). Cela soutient la mâchoire et aide à renverser la tête vers l’arrière FIGURE 14.30. La manœuvre de subluxation de la mâchoire inférieure n’est recommandée qu’aux professionnels de la santé. Elle est accomplie à l’aide des deux mains, qui saisissent la mâchoire inférieure de la victime de chaque côté, là où elle forme un

B

FIGURE 14.29 Compressions thoraciques chez l’enfant – A À une main pour l’enfant plus petit. B À deux mains pour l’enfant plus grand.

620

la main ou des 2 mains, selon la taille de l’enfant FIGURE 14.29 . La profondeur des compressions doit être adaptée à la taille de l’enfant. La localisation, le rythme et la profondeur des compressions chez les enfants de 8 ans et plus sont les mêmes que pour les adultes.

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

FIGURE 14.30 Ouverture des voies respiratoires à l’aide de la manœuvre de renversement de la tête en arrière avec soulèvement du menton et vérication de la respiration.

angle, pour ensuite la soulever en déplaçant la mandibule vers le haut et vers l’extérieur. Lorsqu’une blessure au cou est soupçonnée, la méthode de la subluxation de la mâchoire inférieure ne doit être effectuée que lorsque la colonne cervicale est complètement immobilisée. Une fois que la perméabilité des voies respiratoires a été rétablie après le retrait de tout corps étranger et des sécrétions, si nécessaire, et si l’enfant ne respire pas, il faut continuer de maintenir la perméabilité des voies respiratoires et commencer la respiration articielle.

Insufation d’air Pour ventiler les poumons d’un enfant de moins de un an (y compris un nouveau-né), le secouriste positionne sa bouche ou le ballon-masque de façon à couvrir la bouche et les narines de l’enfant FIGURE 14.31. Pour un enfant de plus de un an, la ventilation se fait par la bouche avec les narines pincées pour obtenir un contact hermétique. Le volume d’air des poumons d’un nourrisson est petit, et ses voies respiratoires sont considérablement plus petites, ce qui fait que leur résistance à la circulation d’air est potentiellement plus élevée que chez l’adulte. Le secouriste doit insuffler de petites bouffées d’air et vérier le soulèvement de la poitrine pour s’assurer d’éviter un surgonement. Un léger soulèvement de la poitrine est un indicateur sufsant que le gonement est adéquat. Si l’air entre librement et que la poitrine se soulève, il faut en déduire que les voies respiratoires sont perméables. Les insufations doivent être données lentement et avoir un volume sufsant pour produire un soulèvement de la poitrine.

Médicaments Les médicaments sont un complément important à la RCR, en particulier en cas d’arrêt cardiaque, et ils sont utilisés chez l’enfant durant et après la réanimation. Les médicaments sont utilisés pour :

• corriger l’hypoxémie ; • augmenter la pression de la perfusion durant les compressions thoraciques ; • stimuler une contraction spontanée ou plus forte du myocarde ; • accélérer le rythme cardiaque ; • corriger l’acidose métabolique ; • supprimer l’extrasystole ventriculaire TABLEAU 14.12. Il importe d’amorcer une perfusion I.V. avec un soluté approprié dès l’arrivée à l’hôpital ou durant le transport par les SMU 16 . Les médicaments sont toujours préparés selon le poids de l’enfant. Lorsque le poids est inconnu, soit sur la scène préhospitalière ou dans le milieu hospitalier, la bande pédiatrique de secours de Broselow MD peut être utilisée pour l’estimation rapide du poids selon la hauteur. Ce ruban à mesurer, avec un code couleur, indique la dose, la concentration et le volume des médicaments ainsi que l’équipement d’urgence nécessaire en fonction du poids de l’enfant pesant entre 3 et 36 kg. Pour l’administration de médicaments durant une RCR (ou un code), il faut rincer la tubulure ou le cathéter avec une solution saline entre chaque administration afin de prévenir les interactions pharmacologiques. Tous les médicaments, la posologie ainsi que l’heure et la voie d’administration doivent être documentés.

16 Les interventions inrmières nécessaires auprès d’un enfant en état de choc sont présentées dans le chapitre 16, Troubles liés au système cardiovasculaire.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Le soulèvement de la poitrine est un indicateur que le gonement est adéquat.

Obstruction des voies respiratoires Il faut tenter de désencombrer les voies respiratoires pour : 1) l’enfant chez qui l’aspiration d’un corps étranger a été observée ou est fortement soupçonnée ; et 2) l’enfant inconscient qui ne respire pas et dont les voies respiratoires restent obstruées en dépit des manœuvres habituelles effectuées pour les dégager. Lorsqu’une aspiration d’un corps étranger est soupçonnée chez l’enfant, il faut l’encourager à continuer de tousser tant que la toux demeure forte . Chez l’enfant conscient qui étouffe, il faut tenter de soulager l’obstruction uniquement :

14

ALERTE CLINIQUE

Chez le nourrisson et l’enfant de moins de huit ans, il faut éviter de fouiller la bouche à l’aveu­ glette avec un doigt.

• si l’enfant est incapable d’émettre des sons ; • si la toux devient inefcace ; • s’il y a une difculté respiratoire croissante accompagnée d’un stridor.

FIGURE 14.31 Bouche-à-bouche et insufation par le nez chez le nourrisson

L’enfant va le plus souvent s’étouffer avec de la nourriture ou un petit jouet au cours de l’inspiration ; par conséquent, le volume respiratoire ainsi que le volume de réserve expiratoire auquel il est additionné sont alors présents dans les poumons. Lorsqu’une pression est exercée sur le diaphragme par la manœuvre de Heimlich, cet air emprisonné expulse le bolus alimentaire avec une force considérable. L’enfant peut vomir après avoir

Chapitre 14

Techniques de soins

621

expulsé le corps étranger et devrait être positionné de façon à éviter tout risque d’aspiration. Une fois la respiration restaurée, l’enfant doit être examiné par un médecin pour déceler des complications. Si la victime respire ou recommence à avoir une respiration efcace après les interventions d’urgence, il faut la placer dans la position de sécurité qui consiste à tourner la victime sur le côté en

déplaçant la tête, les épaules et le torse simultanément. La jambe qui n’est pas en contact avec le sol peut être pliée et le genou avancé pour stabiliser l’enfant FIGURE 14.32. Si un traumatisme est soupçonné, l’enfant ne doit être déplacé d’aucune façon ni être placé dans la position de sécurité si la respiration artificielle ou la RCR sont nécessaires.

Pharmacothérapie TABLEAU 14.12

Médicaments utilisés pour la réanimation cardiopulmonaire pédiatrique

POSOLOGIE

ACTION

CARACTÉRISTIQUES

• Agoniste adrénergique

• Est le médicament le plus utile en cas d’arrêt cardiaque.

Épinéphrine • I.V./I.O. : 0,01 mg/kg (0,1 mL/kg d’une solution 1:10 000) ; dose peut être répétée q.3-5 min, au besoin • Si pas d’accès I.V. ou I.O. administrer une dose endotrachéale : 0,1 mg/kg (0,1 mL/kg d’une solution 1 :1000)

• Stimulation des récepteurs α-adrénergiques et ß-adrénergiques, en particulier ceux du cœur, des vaisseaux et des muscles lisses • Vasoconstriction augmentant la pression diastolique de l’aorte et la perfusion coronarienne • Augmentation de la contractilité cardiaque, de la fréquence cardiaque et de la conduction électrique du nœud auriculoventriculaire

• Disparaît rapidement de la circulation sanguine après l’injection (demi-vie d’élimination est de moins de 5 minutes). • Après l’administration par tube endotrachéal, rincer avec 5 mL de NaCl 0,9 %, suivis de 5 ventilations. • Peut produire une vasoconstriction rénale et une réduction de la formation d’urine.

Bicarbonate de sodium • I.V./I.O. : 1 mmol/kg/dose d’une solution de 1 mmol/mL (8,4 %)

• Agent alcalinisant (élévation du pH sanguin)

• L’administration de routine n’est plus recommandée. • Est utile dans certaines situations (p. ex., un arrêt cardiaque hyperkaliémique, acidose métabolique) ; perfuser lentement et seulement lorsque la ventilation est adéquate ; rincer avec une solution saline avant et après l’administration.

• Nouveau-né et enfants de moins de 2 ans : solution de 0,5 mmol/mL (4,2 %)

• Ne pas perfuser dans la même voie que les catécholamines et le calcium. Atropine • I.V./I.O. : 0,02 mg/kg/dose

• Anticholinergique parasympatholytique

• Est utilisée pour traiter la bradycardie.

• Dose minimale : 0,1 mg (pas de dose minimale pour nourrissons de < 5 kg) ; dose peut être répétée 1 fois après 3 à 5 min

• Augmentation de la fréquence cardiaque et de la vitesse de conduction au nœud auriculoventriculaire

• Toujours assurer une ventilation adéquate et surveiller la saturation pulsatile en oxygène.

• Nourrissons et enfants : maximum de 0,5 mg par dose ; adolescents : maximum de 1 mg par dose

• Diminution de la production de salive

• Produit une dilatation des pupilles, qui se contractent sous la lumière.

• Tube endotrachéal : 0,04-0,06 mg/kg/dose ; dose peut être répétée 1 fois, au besoin Chlorure de calcium 10 % • I.V./I.O. : 20 mg/kg (0,2 mL/kg de la solution 10 %)

• Remplacement électrolytique • Nécessaire pour le maintien d’une contractilité cardiaque normale

• Administration de routine est non recommandée, sauf en cas d’hypocalcémie, de surdose d’inhibiteurs calciques, d’une hyperkaliémie ou d’une hypermagnésémie. • Administrer lentement, dans une veine centrale ; très irritant pour les veines.

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Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

TABLEAU 14.12

Médicaments utilisés pour la réanimation cardiopulmonaire pédiatrique (suite)

POSOLOGIE

ACTION

CARACTÉRISTIQUES

• Agent antiarythmique

• Est recommandée comme premier choix pour une fibrillation ventriculaire ou une tachy cardie ventriculaire réfractaire à la défibrillation.

Amiodarone • I.V./I.O. : 5 mg/kg (maximum : 300 mg/dose) en 20-60 min (bolus administré plus rapidement pendant une brillation/tachycardie ventriculaire sans pouls) • Dose peut être répétée 2 fois jusqu’à un maximum de 15 mg/kg en 24 h • Possibilité de faire suivre d’une perfusion continue (5-15 mcg/kg/min)

• Inhibition de la stimulation adrénergique ; prolongation du potentiel d’action et de la période réfractaire des tissus myocardiques ; réduction de la conduction auriculoventriculaire et prolongation de l’hyporéactivité dans le nœud auriculoventriculaire et l’intervalle QT

• Est contre-indiquée en cas de grave dysfonction des nœuds sinoauriculaires, d’une bradycardie sinusale marquée ou d’un bloc auriculoventriculaire du 2e ou du 3e degré. • Éviter d’administrer avec un autre agent qui prolonge l’intervalle QT ; surveiller l’électrocardiogramme et la pression artérielle pendant l’administration.

Adénosine • I.V./I.O. : – Première dose : 0,1 mg/kg (maximum 6 mg) – Deuxième dose : 0,2 mg/kg (maximum 12 mg) • Bolus : rapide (sur 1-2 sec.), puis rinçage

• Agent antiarythmique, pour la tachycardie supraventriculaire • Bloc temporaire induit à travers le nœud auriculoventriculaire et interruption des circuits de réentrée • Très courte demi-vie (moins de 10 secondes)

• Administrer en bolus rapide dans le site I.V. le plus près du cœur ; faire suivre chaque bolus d’un rinçage avec 5-10 mL de solution saline. • Surveiller l’électrocardiogramme ; peut causer une bradycardie passagère.

Naloxone • I.V./I.O./I.M./S.C. : Intoxication/surdose : 0,1 mg/kg (max. : 2 mg par dose) q.2 à 3 min, répéter au besoin si la durée d’action de l’opioïde est plus longue que celle de la naloxone

• Renversement complet de l’effet des opioïdes • Renversement d’un arrêt respiratoire causé par l’administration d’une dose excessive d’opioïde • Durée d’action de 30 à 120 minutes, selon la voie d’administration

• Perfusion continue I.V. : 0,002-0,16 mcg/kg/h Dépression respiratoire: 1-5 mcg/kg q.2 à 3 min, au besoin

• Évaluer le niveau de douleur après l’administration, surtout en cas d’usage thérapeutique chronique, car une forte dose de naloxone annule les effets analgésiques des opioïdes. • Ne donner qu’un dixième de la dose à la fois, car son administration peut causer une élévation soudaine de la fréquence cardiaque ; chez les jeunes enfants, diluer la dose dans une seringue de 10 mL de solution saline et injectée en petites quantités jusqu’à l’obtention du résultat recherché.

Sulfate de magnésium • I.V./I.O. : 25-50 mg/kg en 10-20 min (administration la plus rapide possible dans les cas de torsades de pointe) • Maximum : 2 g/dose

• Inhibition des canaux calciques et relaxation des muscles lisses • Indiqué dans les cas d’hypomagnésémie documentée ou de torsades de pointe

• Le magnésium produit une vasodilatation et est associé à l’hypotension en cas d’administration rapide. • Avoir à portée de la main du gluconate de calcium (I.V.) comme antidote.

Perfusions (doses habituelles) Épinéphrine • I.V./I.O. : 0,05-1 mcg/kg/min

• Agoniste adrénergique • Stimulation des récepteurs α-adrénergiques et ß-adrénergiques, en particulier ceux du cœur, des vaisseaux et des muscles lisses

• Est titrée en fonction de l’effet hémodynamique désiré.

Chapitre 14

Techniques de soins

623

14

TABLEAU 14.12

Médicaments utilisés pour la réanimation cardiopulmonaire pédiatrique (suite)

POSOLOGIE

ACTION

CARACTÉRISTIQUES

• Agoniste adrénergique

• Est titrée en fonction de la réaction hémodynamique désirée.

Dopamine • I.V./I.O. : 1-20 mcg/kg/min

• Action sur les récepteurs dopaminergiques et sur les récepteurs α-adrénergiques et β-adrénergiques, ce qui entraîne une vasoconstriction • Augmentation du débit et du rythme cardiaques Dobutamine • Dose de charge : I.V./I.O. : 0,5-1 mcg/kg/min • Dose de maintien : 2-20 mcg/kg/min

• Agoniste adrénergique sélectif des récepteurs β-adrénergiques

• Est titrée en fonction de la réaction hémodynamique désirée.

• Augmentation de la contractilité et du rythme cardiaques

• Est peu vasoconstrictrice, même à dose élevée.

• Diminution de la résistance vasculaire périphérique Lidocaïne • Perfusion I.V. continue : 20-50 mcg/kg/min

• Agent antiarythmique • Augmentation du seuil de stimulation électrique du ventricule

• Utiliser la plus faible dose chez les enfants débrillés.

Chlorhydrate de lidocaïnea • Dose de charge: I.V./I.O. : 1 mg/kg/dose

• Agent antiarythmique

• Dose de maintien: I.V. 20-50 mcg/kg/min ; maximum 20 mcg/kg/min dans les cas de choc, maladie hépatique, arrêt cardiaque ou insufsance cardiaque

• Inhibition de la conduction nerveuse

• Est utilisé uniquement pour les arythmies ventriculaires.

I.V. : intraveineux I.O. : intra-osseux I.M. : intramusculaire S.C. : sous-cutané a Ces médicaments peuvent être administrés par le tube endotrachéal s’il n’est pas possible de les administrer par voie intraveineuse ; le taux d’absorption est inconnu. Sources : Adapté de de Caen, Berg, Chameides et al. (2015) ; Kleinman, Chameides, Schexnayder et al. (2010) ; Sorrentino (2005).

soutenue. Pour un soutien additionnel, appuyer le bras fermement sur sa cuisse.

FIGURE 14.32 Position de sécurité pour l’enfant après une urgence respiratoire

Nourrisson conscient Pour dégager une obstruction par un corps étranger chez le nourrisson, il est recommandé d’utiliser une combinaison de tapes dans le dos (sur la colonne vertébrale, entre les omoplates) et de poussées thoraciques (sur le sternum, au même endroit que pour les compressions thoraciques) en procédant comme suit : • Placer le nourrisson en position ventrale sur le bras, la tête plus basse que le tronc et bien

624

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

• Donner cinq tapes rapides et pénétrantes dans le dos, entre les omoplates du nourrisson, avec la paume de la main en exerçant moins de force que pour un adulte FIGURE 14.33A. • Après les tapes dans le dos, placer la main libre à plat sur le dos du nourrisson de façon à ce que ce dernier soit en sandwich entre les deux mains tout en s’assurant que le cou et le menton sont bien soutenus. • En maintenant la tête plus basse que le tronc, retourner le nourrisson et le placer sur le dos, sur la cuisse, et appliquer cinq poussées thoraciques, en succession rapide, au même endroit que les compressions thoraciques décrites pour la RCR FIGURE 14.33B. • Continuer l’alternance de tapes dans le dos et de poussées thoraciques jusqu’à ce que l’objet soit expulsé ou que le nourrisson perde conscience.

Enfant conscient Pour l’enfant de plus de un an, l’inrmière utilisera la technique suivante : • Se placer derrière l’enfant (que celui-ci soit debout ou assis). • Effectuer une série de poussées abdominales sous le diaphragme (manœuvre de Heimlich) tant que l’enfant est conscient an de créer une toux articielle qui force l’air – et en même temps le corps étranger – à sortir des voies respiratoires FIGURE 14.34. • Effectuer les poussées vers le haut sur la portion supérieure de l’abdomen en plaçant le poing juste sous la cage thoracique. Pour prévenir les dommages aux organes internes, ne pas toucher à l’appendice xiphoïde qui termine le sternum ni aux parties latérales inférieures des côtes. • Répéter les poussées en succession rapide jusqu’à ce que le corps étranger soit expulsé ou que l’enfant perde conscience.

Nourrisson ou enfant inconscient Lorsqu’un enfant s’étouffe et perd conscience, l’inrmière doit intervenir immédiatement, comme il est décrit ci-dessous : • Observer l’intérieur de la bouche de l’enfant en maintenant la langue et la mâchoire vers le bas à la recherche d’un corps étranger. • Le cas échéant, retirer le corps étranger en prenant soin de ne pas le pousser plus loin dans la trachée ; n’utiliser que le petit doigt, de préférence. • Si le corps étranger n’est pas visible, renverser la tête de l’enfant vers l’arrière en soulevant le menton d’une main et en appuyant sur le front avec l’autre main. • Pincer les narines avec la main qui repose sur le front ; dans le cas d’un nourrisson, il est possible de recouvrir la bouche et le nez.

A

• Pratiquer le bouche-à-bouche en effectuant une insufation lente. • Observer si la poitrine de l’enfant se soulève. • Si les voies respiratoires sont toujours obstruées, renverser la tête de nouveau et faites une autre insufation. • Si l’enfant ne respire toujours pas, procéder à la RCR. Après les compressions, et tout juste avant les insufations, il faut vérier, dans la bouche de l’enfant, la présence d’un corps étranger.

14.9

Alimentation de substitution

Certains enfants ne peuvent être nourris par voie orale, notamment ceux qui souffrent d’anomalies de la gorge, de l’œsophage ou de l’intestin, qui ont des problèmes de déglutition, qui sont très affaiblis, qui ont une détresse respiratoire ou qui sont inconscients. Ces enfants doivent être nourris par voie entérale, c’est-à-dire au moyen d’une sonde introduite par le nez (nasogastrique) ou par la bouche (orogastrique) jusqu’à l’estomac ou jusqu’au duodénum ou au jéjunum, ou par une sonde introduite directement dans l’estomac (gastrostomie) ou le jéjunum (jéjunostomie) ou la combinaison des deux (gastrojéjunostomie). Ce type d’alimentation entérale peut être continue ou intermittente.

14.9.1

éactivation des connaissances Quel est le signe universel de l’étouffement observable chez un enfant ou un adulte qui s’étouffe ?

14

Alimentation entérale

Les nourrissons et les enfants peuvent être nourris en toute sécurité au moyen d’une sonde introduite dans l’estomac par les narines ou par la bouche ENCADRÉ 14.29 et TABLEAU 14.13 .

B

FIGURE 14.33 Explusion d’un corps étranger chez le nourrisson – A Tapes dans le dos. B Poussées thoraciques.

FIGURE 14.34 Poussées abdominales pour un enfant debout an d’expulser un corps étranger

Chapitre 14

Techniques de soins

625

Techniques de soins ENCADRÉ 14.29

Insérer une sonde nasogastrique ou orogastrique chez l’enfant et administrer un gavage

PRÉPARATION

• Décrire l’intervention à l’enfant en adaptant son discours à l’âge de développement de celui-ci et expliquer en détail aux parents ce à quoi ils doivent s’attendre. • Au besoin, administrer un sédatif et un analgésique à l’enfant avant de poser la sonde. • Allonger l’enfant sur le dos, la tête légèrement penchée en arrière ou positionnée de façon à ce que son nez pointe vers le plafond. L’emmailloter, au besoin. • Choisir le type de sonde à utiliser (nasogastrique ou orogastrique) et son calibre. Comme les nourrissons respirent presque exclusivement par le nez, privilégier les sondes orogastriques pour atténuer la détresse qu’ils pourraient ressentir et stimuler la succion, surtout chez les prématurés en unité de néonatalogie. Âge et poids

Calibre de la sonde (Fr)

Prématurés de < 4 kg

4

Nouveau-nés de 4-10 kg

5-6

Nourrissons de > 10 kg

6-7

Enfants

7-8

Source : Hôpitaux universitaires de Genève (2013). Pose de sonde entérale chez l’enfant. Repéré à www.hug-ge.ch/procedures-de-soins/ pose-sondes-enterales-chez-enfant#cadr.

• Déterminer la longueur de la sonde à insérer dans le tube digestif en employant l’une des deux méthodes suivantes FIGURE 14.35A : – mesurer la distance entre le bout du nez et le lobe de l’oreille, et l’ajouter à celle entre le lobe et l’appendice xiphoïde ; – mesurer la distance entre le bout du nez et le lobe d’oreille, et l’ajouter à celle entre le lobe d’oreille et un point situé à mi-chemin entre l’appendice xiphoïde et l’ombilic. • Coller un bout de ruban adhésif hypoallergénique ou faire une marque à l’encre indélébile sur la sonde pour indiquer la longueur à insérer. • Lubrier la sonde avec de l’eau stérile ou un lubriant hydrosoluble et l’introduire dans l’estomac par la bouche ou par la narine jusqu’au ruban ou jusqu’à la marque FIGURE 14.35B. – Sonde nasogastrique: la faire glisser le long de la base de la cavité nasale en l’orientant directement vers l’occiput. Changer de narine à chaque changement de sonde. – Sonde orogastrique: la faire glisser dans le fond de la gorge. • Si l’enfant est capable de déglutir sur demande, lui faire avaler de l’eau à l’aide d’une paille pendant que le tube passe dans sa gorge. Insérer la sonde de 2,5 à 5 cm à chaque déglutition. • Immobiliser la sonde en la collant sur la joue de l’enfant avec du ruban adhésif (et non sur son front) an d’éviter toute traction sur la sonde qui pourrait irriter les narines. VÉRIFICATION DE LA POSITION DE LA SONDE

• Vérier la position de la sonde à la radiographie, si possible. Noter le pH et la couleur du liquide résiduel aspiré ENCADRÉ 14.30.

Partie 5

ADMINISTRATION DU GAVAGE

• Amener la préparation nutritive à la température ambiante ; ne pas la réchauffer au micro-ondes. • Avant chaque administration de gavage, vérier que la sonde est bien positionnée en comparant la longueur de la sonde externe à la longueur notée au cours de l’insertion et en notant le pH et la couleur du liquide résiduel aspiré. • Sauf indication contraire, réinjecter le liquide résiduel aspiré avant l’alimentation pour prévenir tout déséquilibre électrolytique : – Nourrissons : soustraire le volume de liquide aspiré du volume de préparation nutritive prescrit pour chaque gavage an de savoir quel volume de préparation administrer. Ainsi, si le nourrisson doit recevoir 30 mL de préparation et que 10 mL de liquide gastrique ont été aspirés avant l’alimentation, lui réinjecter les 10 mL aspirés et les 20 mL de préparation. – Enfants plus âgés : si le volume de liquide résiduel aspiré équivaut à plus du quart du volume administré pendant le gavage précédent, réinjecter le liquide aspiré et, de 30 à 60 minutes plus tard, vérier s’il a été digéré. Si le volume de liquide gastrique correspond à moins du quart du volume administré pendant le gavage précédent, alimenter l’enfant comme prévu. Si, par la suite, de bonnes quantités de liquide résiduel sont aspirées avant l’alimentation de l’enfant, en informer le médecin. • Verser la préparation dans la seringue raccordée à la sonde gastrique. • Pour commencer l’alimentation, pousser délicatement le piston, puis ôter ce dernier et laisser la préparation s’écouler dans l’estomac sous l’effet de la gravité. • Régler le débit en fonction du diamètre de la tubulure et de la hauteur du réservoir contenant la préparation nutritive en ajustant la hauteur de la seringue. Pour prévenir les nausées et la régurgitation, respecter les débits suivants : – Nouveau-nés prématurés et nourrissons chétifs : ne pas administrer plus de 5 mL toutes les 5 à 10 minutes. – Autres nourrissons et trottineurs : ne pas administrer plus de 10 mL par minute.

PROCÉDURE

626

• Pendant la pose initiale et avant chaque gavage, vérier que la sonde n’a pas bougé en mesurant la longueur de la partie externe de la sonde, soit de la bouche ou du nez de l’enfant jusqu’à son extrémité distale (Irving, Lyman, Northington et al., 2014).

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

• Une fois le gavage terminé (de 15 à 30 minutes), rincer la sonde avec de l’eau stérile ou à l’eau claire, selon l’état de l’enfant et les protocoles de l’établissement. • Si la sonde doit rester en place après l’administration du gavage, la reboucher ou refermer le bouchon pour ne pas perdre la préparation nutritive. S’il faut retirer la sonde, la pincer fermement pour empêcher l’évacuation de liquide durant le retrait, puis la retirer rapidement. • Après l’alimentation, allonger l’enfant sur le côté droit ou sur le ventre, la tête surélevée à un angle d’environ 30° par rapport au reste du corps, pendant au moins 1 heure, comme cela est habituellement fait pour les nourrissons, an de réduire au minimum le risque d’aspiration et de régurgitation. Si l’état de l’enfant le permet, lui faire faire un rot après l’avoir alimenté. DOCUMENTATION

• Consigner la date et l’heure de l’alimentation, la nature du liquide gastrique et le volume aspiré avant l’alimentation, le type de préparation nutritive utilisée et le volume administré. Préciser également dans quelle mesure l’enfant a toléré l’alimentation.

INCONVÉNIENTS

AVANTAGES

BUT

TABLEAU 14.13

Particularités des sondes nasogastriques et orogastriques

SONDE NASOGASTRIQUE DE LEVIN

SONDE NASOGASTRIQUE DE SALEM

SONDE OROGASTRIQUE

• Aspiration du contenu gastrique ou intestinal

• Aspiration du contenu gastrique

• Décompression et vidange de l’estomac

• Administration de gavage ou de médicaments

• Maintien du ux continu de l’air atmosphérique dans l’estomac

• Vérication de la présence de sang dans le contenu gastrique

Polychlorure de vinyle (PVC), polyéthylène

Polyuréthane, silicone

• Rigidité

• Réduction des risques d’aspiration

• Rigidité

• Souplesse

• Réduction des risques de sinusite

• Changement tous les mois • Source d’irritation

• Trop souple

• À changer chaque semaine

• Déplacement possible en cas de toux

• Perturbation possible de l’intégrité du sphincter œsophagien

• Restrictions quant aux choix des préparations nutritives

Chez les nourrissons de très faible poids à la naissance, l’inrmière peut se servir du poids comme point de référence an de déterminer la longueur du tube à utiliser.

Alimentation par gastrostomie

L’alimentation par gastrostomie est une variante de l’alimentation entérale par sonde gastrique. Elle est généralement réservée aux cas pour lesquels le passage d’une sonde par la bouche, le pharynx, A

• Source d’irritation

• Difculté d’insertion

Il est à noter que les sondes qui restent en place plus de 24 heures sont presque toujours introduites par le nez. L’inrmière doit immobiliser la sonde avec du ruban adhésif et la changer régulièrement ; la fréquence de substitution dépend de la politique de l’hôpital, des directives précises du médecin et de la sonde utilisée. L’inrmière doit procéder soigneusement à l’hygiène des mains durant l’intervention pour prévenir les contaminations bactériennes, en particulier si l’alimentation se fait en continu au goutte-à-goutte.

14.9.2

• Possibilité de commencer l’alimen­ tation entérale plus rapidement

l’œsophage et la jonction œsogastrique est contreindiqué ou impossible. C’est la voie privilégiée pour l’alimentation entérale prolongée ; ainsi, les irritations provoquées par le passage répété des sondes nasogastriques ou orogastriques sont évitées. La pose d’une sonde de gastrostomie peut être réalisée sous anesthésie générale ou par endoscopie percutanée ; il s’agit alors d’une gastrostomie percutanée endoscopique sous sédation et anesthésie locale. La sonde est introduite directement dans l’estomac, à travers la paroi abdominale, à michemin entre les extrémités de la grande courbure. Lorsque ce geste est réalisé durant une intervention chirurgicale, la sonde est xée à l’estomac par une suture en bourse. La paroi de l’estomac est solidarisée au péritoine au moyen de points d’ancrage en regard de la stomie. Pour ce type d’intervention, une sonde à ballonnet, une sonde dont l’embout distal est pourvu d’ailettes ou une sonde de Pezzer, dont l’embout distal rené ressemble à un champignon, peuvent être utilisées. Après l’opération, la pince de la sonde reste ouverte, et cette dernière

14

B

FIGURE 14.35 Alimentation par gavage– A Déterminer la longueur de la sonde. B Insérer la sonde. Chapitre 14

Techniques de soins

627

Pratique fondée sur des résultats probants ENCADRÉ 14.30

Évaluation de la mise en place des sondes nasogastriques et orogastriques en pédiatrie

QUESTION CLINIQUE

Comment évaluer la mise en place des sondes nasogastriques et orogastriques en pédiatrie ? RÉSULTATS PROBANTS

• Stratégies de recherche : la recherche a été faite de façon à repérer uniquement des articles de recherche publiés en anglais au cours des 10 dernières années et portant sur des populations d’enfants ou d’adultes et des comparaisons avec des méthodes de référence (radiographie). • Bases de données utilisées : PubMed, Cochrane Collaboration, MD Consult, Joanna Briggs Institute, National Guideline Clearinghouse, TRIP Database Plus, PedsCCM, BestBETs, Worldviews on Evidence-Based Nursing, EBM/BMJ. ANALYSE CRITIQUE ET SYNTHÈSE DES DONNÉES

• Deux études récentes effectuées auprès de clients adultes ont démontré la supériorité des tests du pH par rapport à l’auscultation pour conrmer la position adéquate d’une sonde nasogastrique (Tho, Mordif, Ang et al., 2011). • Peter et Gill (2009) ont évalué l’utilisation de 1 527 tests de pH chez 52 enfants australiens porteurs d’une sonde nasogastrique. Le test s’est avéré efcace à 84 % avec des résultats de pH de 5,5. Le test du pH peut cependant entraîner des erreurs chez des enfants en gavage continu ou qui reçoivent des médicaments antiacides (Fan, Tan et Ang, 2017). • D’autres chercheurs afrment par contre que le test du pH est un moyen able pour conrmer la position d’une sonde nasogastrique chez les enfants avec un pH de 4 et moins, et recommandent une radiographie si le pH est plus élevé que 4 (Gilbertson, Rogers et Ukoumunne, 2011). • L’utilisation de la radiographie assure le bon positionnement du tube après l’insertion du tube (Sanaie, Mahmoodpoor et Naja, 2017). • L’auscultation n’est pas une méthode able pour conrmer la mise en place d’une sonde, compte tenu de la similarité des bruits produits par l’air dans les bronches, l’œsophage ou l’espace pleural. RECOMMANDATIONS POUR LA PRATIQUE INFIRMIÈRE

• Le recours à la radiographie permet de conrmer la mise en place initiale. • Il faut noter le pH et la couleur de l’aspirat pendant la mise en place initiale. • Un pH de 5 ou moins permet de conclure que l’extrémité de la sonde est dans l’estomac.

• Un pH supérieur à 5 ne permet pas de déterminer avec abilité l’emplacement adéquat de l’extrémité distale de la sonde. Il peut indiquer une mise en place respiratoire ou œsophagienne, ou la présence de médicaments supprimant la sécrétion d’acide. • Si le pH est supérieur à 5, il faut évaluer la mise en place de la sonde par d’autres mesures. Si l’inrmière ne dispose pas des tests de la bilirubine et des enzymes, elle doit vérier la couleur de l’aspirat. Le contenu de l’estomac est transparent, beige ou brun clair ; sa teinte peut être dans des nuances de brun en présence de sang. Les sécrétions respiratoires peuvent avoir le même aspect. Le contenu intestinal est souvent coloré par la bile, dont la couleur est jaune clair à foncé ou brun verdâtre. Une radiographie peut également s’imposer. • Une modication du pH peut indiquer un déplacement de la sonde. L’inrmière vériera les marques externes et la longueur de la sonde pour s’assurer que celle-ci n’a pas bougé. En cas de doute quant à la position de la sonde, une radiographie s’impose. • L’inrmière peut vérier le pH et la couleur de l’aspirat avant d’administrer un médicament ou une alimentation. Si l’alimentation est continue, il est recommandé de vérier la mise en place de la sonde toutes les quatre heures. • Les facteurs de risque liés à la mise en place inadéquate d’une sonde sont les états comateux ou semi-comateux, les problèmes de déglutition, les haut-le-cœur ou les vomissements récurrents. RÉFÉRENCES Fan, E.M.P., Tan, S.B., et Ang, S.Y. (2017). Nasogastric tube placement conrmation: Where we are and where we should be heading. Proc Singapore Healthc, 26(3), 189-195. Gilbertson, H.R., Rogers, E.J., et Ukoumunne, O.C. (2011). Determination of a practice pH cutoff level for reliable conrmation of nasogastric tube placement. J Parenter Enteral Nutr, 35(4), 540-544. Peter, S., et Gill, F. (2009). Development of a clinical practice guideline for testing nasogastric tube placement. J Spec Pediatr Nurs, 14(1), 3-11. Sanaie, S., Mahmoodpoor, A., et Naja, M. (2017). Nasogastric tube insertion in anaesthetized patients: A comprehensive review. Anaesthesiol Intensive Ther, 49(1), 57-65. Tho, P.C., Mordif, S., Ang, E., et al. (2011). Implementation of the evidence review on best practice for conrming the correct placement of nasogastric tube in patients in an acute care hospital. Int J Evid Based Healthc, 9(1), 51-60.

est raccordée à une poche pour un drainage passif, sous l’effet de la gravité, d’au moins 24 heures.

Soins postopératoires Les soins postopératoires suivants visent à prévenir les infections et les irritations des stomies : • Laver la région péristomiale au moins une fois par jour ou aussi souvent que nécessaire an d’éliminer les sécrétions gastriques qui pourraient s’écouler de la stomie. • Une fois la stomie cicatrisée, nettoyer la région péristomiale et la maintenir au sec pour prévenir les excoriations et les infections.

628

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

• Au besoin, appliquer quotidiennement une pommade antibiotique sur la région péristomiale pour faciliter la cicatrisation et prévenir les infections. • Éviter de trop tirer sur le cathéter, sinon la stomie pourrait s’élargir, laissant ainsi passer les sucs gastriques, lesquels sont très irritants pour la peau. • Fixer la sonde à l’abdomen pour l’immobiliser en lui faisant faire une petite boucle à la sortie de la stomie pour réduire les tensions sur cette dernière. Le tissu de granulation qui se forme autour de la stomie n’est pas un signe d’infection FIGURE 14.36.

Quels que soient les liquides ou les solides instillés (eau, préparation nutritive ou aliments réduits en purée), la technique et le débit d’écoulement sont les mêmes. Il est possible d’utiliser une pompe mécanique pour réguler le volume administré et le débit. Après l’alimentation, l’inrmière doit : • positionner l’enfant sur le côté droit ou l’installer dans la position de Fowler ; • enlever la tubulure si l’enfant tolère les gavages intermittents (pas de vomissements) ;

FIGURE 14.36 de la stomie

Tissu de granulation sain autour

Cependant, s’il continue à se développer, l’humidité excessive qui accompagne ce processus pourrait irriter les régions avoisinantes.

Administration de la préparation nutritive La préparation nutritive est installée à l’autre extrémité de la tubulure, comme cela est fait pour une sonde de gastrostomie ordinaire. La tubulure de rallonge peut aussi comporter un deuxième orice destiné à l’administration des médicaments. Les orices destinés à l’alimentation et à l’administration des médicaments sont munis de bouchons. Certains boutons de gastrostomie (p. ex., MIC-KEYMD, BardMD) doivent être branchés à un tube qui permet la décompression gastrique, soit la vérication du contenu résiduel ou l’évacuation de l’air. Le bouton de gastrostomie présente de nombreux avantages en cas d’alimentation entérale prolongée TABLEAU 14.14 et FIGURE 14.37 .

TABLEAU 14.14

• utiliser, au besoin, une tubulure avec un embout-raccord en Y an de pouvoir procéder à la décompression gastrique durant et après l’alimentation ; • mesurer la portion externe de la sonde après l’insertion et la mesurer régulièrement si une sonde à ballonnet pour la gastrostomie est utilisée. Elle peut aussi laisser une marque distinctive sur la sonde, juste au-dessus de l’endroit où celle-ci pénètre dans la peau.

14 FIGURE 14.37 Enfant portant un bouton de gastrostomie de type MIC-KEYMD sur lequel sera xée la tubulure de rallonge

Avantages et inconvénients du bouton de gastrostomie

AVANTAGES

INCONVÉNIENTS

• Fait légèrement saillie à la surface de l’abdomen ; discret sous les vêtements.

• Ne peut être installé que sur une stomie qui est déjà bien cicatrisée.

• Petit bouton souple en silicone plus esthétique qu’un tube nasogastrique.

• Il arrive que la valve s’obstrue, et comme elle empêche l’évacuation de l’air, il peut être nécessaire de faire faire assez souvent des rots à l’enfant.

• Est plus facile d’entretien que les autres types de dispositifs. • Peut être immergé. • Permet à l’enfant de se sentir plus à l’aise et d’avoir une plus grande mobilité. • Grâce à la valve antireux à son extrémité proximale, le risque de reux est très faible et il n’est pas nécessaire de clamper la sonde avec une pince hémostatique.

• Certains modèles sont contraignants : la tubulure peut se détacher de l’orice de la sonde au moindre mouvement, à tel point que l’enfant doit rester presque immobile pendant l’alimentation. Toutefois, il existe d’autres modèles auxquels la tubulure de rallonge peut être solidement branchée.

Chapitre 14

Techniques de soins

629

La sonde de gastrotomie est enlevée lorsque l’enfant n’en a plus besoin ; en général, la peau cicatrise spontanément (rapprochement des berges de la plaie par contraction).

14.9.3

Alimentation par sonde nasoduodénale ou nasojéjunale

En cas de risque élevé de régurgitation ou d’aspiration chez les enfants qui souffrent de gastro­ parésie, qui sont sous ventilation assistée ou qui ont des lésions cérébrales, il peut être nécessaire d’introduire la sonde dans le duodénum ou dans le jéjunum. L’inrmière peut installer des sondes nasoduodénales ou nasojéjunales. Ces sondes sont toutefois difciles à mettre en place, et il arrive qu’elles se perforent et qu’elles doivent être réintroduites au moyen d’un stylet. Il faut toujours vérier, à l’aide d’une radiographie, que la sonde est bien placée. Les sondes de petit calibre s’obstruent aisément. L’inrmière doit rincer la sonde toutes les quatre heures ou à la fréquence prévue par l’établissement hospitalier, mais aussi après chaque alimentation ainsi qu’avant et après l’administration des médicaments. Pour que le passage des préparations ou des médicaments à travers la lumière de la sonde soit toujours optimal, il faut changer celle-ci tous les mois. L’alimentation devant être en continu, l’inrmière doit brancher la Carolane, âgée de huit ans, est porteuse d’une gastro­ sonde à une pompe stomie depuis deux mois avec gavage intermittent. Vous mécanique qui réglera lui rendez visite à domicile pour un suivi. La mère de le volume administré et Carolane vous informe que sa lle a un rhume et qu’elle le débit. Les bolus sont tousse depuis quelques jours. Vous lui demandez si la contre-indiqués. Si toux est exacerbée pendant ou après le gavage. Pourquoi l’enfant présente des cette question est­elle pertinente ? signes d’intolérance tels que des vomissements, l’inrmière doit soupçonner que la sonde s’est déplacée. Dans ce cas, elle doit interrompre l’alimentation et informer le médecin de la situation.

Jugement

clinique

14.9.4

MS 5.1 « Préparation et installation d’une perfusion d’acides aminés, de lipides et d’insuline », Méthodes de soins 2 (Lemire et Perreault, 2016b).

630

Partie 5

Alimentation parentérale totale

Lorsque l’alimentation entérale est impossible ou inadéquate, l’alimentation parentérale totale (APT) permet de combler la totalité des besoins nutritionnels d’un nourrisson ou d’un enfant MS 5.1 . L’APT est généralement indiquée en cas d’occlusions intestinales chroniques ou d’intestin trop court, ou encore de manière préventive après une intervention chirurgicale ou au cours d’une affection aiguë. L’APT consiste à administrer par perfusion I.V. des solutés glucidiques ; des émulsions lipidiques ; des solutions d’acides aminés, de vitamines et de minéraux très concentrées ; de l’eau ; des oligoéléments ; et d’autres

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

suppléments. La solution d’APT est préparée par la pharmacie dans des conditions stériles. Si plus d’une solution est utilisée, la solution d’acides aminés, de vitamines et de minéraux infusera en parallèle avec l’émulsion lipidique qui est installée avec un raccord en Y. Pendant l’alimentation parentérale, l’inrmière peut donner une suce à un nourrisson. La succion non nutritive présente plusieurs avantages, dont l’augmentation de la prise de poids et la diminution des pleurs. Cela dit, l’inrmière ne doit utiliser que des suces sécuritaires conçues spécialement pour ce type de succion an de réduire le risque d’aspiration. Il est déconseillé d’utiliser des tétines de fortune, par exemple celles des biberons.

Choix du site d’administration Les solutions d’APT sont très concentrées et doivent être injectées dans une veine de gros calibre dans laquelle la turbulence du sang est sufsante pour qu’elles puissent s’y diluer rapidement. Les veines choisies sont habituellement la veine cave supérieure ainsi que les veines brachiocéphaliques ou les veines sous-clavières (sur leur trajet intrathoracique), qui sont atteintes par les veines jugulaires interne et externe. Dans la plupart des cas, il faut éviter d’injecter les solutés glucidiques concentrés dans les veines périphériques de petit calibre, car ils sont très irritants. Cependant, l’emploi de préparations à base d’hydrolysats de protéines et de glucose, qui peuvent être injectées dans des veines périphériques, est de plus en plus fréquent, auquel cas l’émulsion lipidique (Intralipid MD) devient la principale source de calories. Généralement, un dispositif veineux central est utilisé pour l’alimentation prolongée. Lorsqu’elle prend soin d’un enfant sous APT, l’inrmière doit assumer les mêmes responsabilités que pour n’importe quel type de perfusion I.V., à savoir la prévention de la septicémie, la surveillance du débit de perfusion et l’évaluation de la tolérance de l’enfant. Elle doit également : • utiliser les ltres appropriés an d’éliminer toutes les particules ou les micro-organismes qui ont pu contaminer la solution d’APT ; • effectuer les examens généraux tels que la prise des signes vitaux, le bilan des ingesta et des excreta ainsi que les analyses de laboratoire an d’assurer un dépistage précoce des infections et des déséquilibres liquidien ou électrolytique ; • déceler le moindre signe d’hypokaliémie, d’hy­ ponatrémie, d’hyperkaliémie ou d’hypernatrémie chez l’enfant et, au besoin, administrer des suppléments de potassium et de chlorure de sodium en plus des préparations pour hyperalimentation.

De tels déséquilibres sont rarement observés, sauf chez les enfants ayant une atteinte rénale et ceux qui ont un trouble métabolique 19 ; • prévoir des interventions qui favoriseront le développement optimal de l’enfant, puisque l’APT de longue durée peut engendrer des retards moteurs et de langage.

Hyperglycémie ou hypoglycémie en lien avec l’alimentation parentérale totale Comme le débit de la perfusion est réglé par une pompe à perfusion, il demeure constant. L’inrmière ne doit ni l’augmenter ni le diminuer sans l’autorisation du médecin et de la nutritionniste, car elle risque de provoquer une hyperglycémie ou une hypoglycémie, selon le cas. En effet, les enfants sont exposés à un risque d’hyperglycémie un ou deux jours après le début de l’APT alors que leur organisme s’adapte à la forte teneur en glucose de la solution d’hyperalimentation. D’ailleurs, il peut être nécessaire de leur administrer de l’insuline pour faciliter l’adaptation à ce nouveau régime. Les cas d’hyperglycémie sont toutefois rares. Pour prévenir l’apparition d’une hypoglycémie après l’arrêt de l’hyperalimentation, il convient de diminuer progressivement le débit ou la concentration de la perfusion et, lorsqu’une infusion d’insuline a été nécessaire, de réduire également la quantité d’insuline administrée.

14.9.5

Enseignement à la famille sur les soins à domicile

Lorsqu’un enfant doit recevoir une alimentation entérale par sonde nasogastrique ou par gastrostomie, ou une APT prolongée, l’inrmière doit enseigner aux parents la technique appropriée. La famille doit aussi démontrer les techniques apprises an de prendre soin de leur enfant. Enn, l’inrmière devrait faire le lien entre les diverses ressources à l’externe et la famille pour favoriser leur retour à la maison.

TABLEAU 14.15

14.10

Élimination

19

14.10.1 Lavement En pédiatrie, une solution isotonique est utilisée pour le lavement. Il s’agit généralement de solution de phosphate pédiatrique ou de solution saline (Jacobson, 2010). L’eau n’est pas employée, car elle est hypotonique et peut causer un déplacement rapide du liquide ainsi qu’une surcharge hydrique. Le lavement Fleet MD (pour enfant ou pour adulte) n’est pas recommandé pour les enfants en raison de l’action drastique de ses ingrédients (biphosphate sodique et phosphate sodique). Les préparations commerciales pour lavements peuvent être dangereuses pour les enfants qui ont un mégacôlon et pour ceux qui sont déshydratés ou azotémiques (présence dans le sang de produits d’excrétion azotée comme l’urée et les urates). L’effet osmotique du lavement FleetMD peut causer une diarrhée susceptible de provoquer à son tour une acidose métabolique. Les autres complications possibles sont l’hyperphosphatémie extrême, l’hypertonie et l’hypocalcémie, qui peuvent entraîner une irritabilité neuromusculaire et un coma (Livingston, Shawyer, Rosenbaum et al., 2015 ; Walton, Thomas, Aly et al., 2000).

L’hypokaliémie, l’hypona­ trémie, l’hyperkaliémie, l’hypernatrémie ainsi que les interventions inrmières dans le contexte d’une insufsance rénale aiguë sont présentées dans le chapitre 19, Troubles liés au système génito-urinaire.

L’administration d’un lavement obéit essentiellement à la même procédure pour un nourrisson ou un enfant que pour un adulte, sauf en ce qui a trait au type et à la quantité de liquide administré et à la profondeur d’insertion de la sonde dans le rectum TABLEAU 14.15. On tiendra compte des considérations suivantes pour la clientèle pédiatrique.

14

• Un lavement est une intervention importune possiblement menaçante pour un enfant d’âge préscolaire ; il faut donc prendre le temps de bien expliquer ce en quoi elle consiste de manière à dissiper toutes les craintes.

Administration de lavements

ÂGE

QUANTITÉ (ML)

PROFONDEUR D’INSERTION (CM)

SOLUTION DE PHOSPHATE

Nourrisson





Lavement non recommandé

2-4 ans

240-360

5

4-10 ans

360-480

7,5

11 ans

480-720

10

6 mL/kg (jusqu’à 135 mL)

Chapitre 14

Techniques de soins

631

• Une seringue munie d’une tubulure en caoutchouc, un acon pour lavement ou un sac pour lavement sont utilisés. • Comme les nourrissons et les jeunes enfants ne sont pas en mesure de retenir la solution après son administration, il faut garder leurs fesses serrées pendant un certain temps pour que le liquide ne s’écoule pas. Les enfants plus âgés sont généralement capables de retenir la solution s’ils comprennent ce qu’il faut faire et si la rétention n’est pas trop longue. • Le lavement est administré et évacué pendant que l’enfant est en position couchée, si possible les fesses au-dessus d’un bassin hygiénique, la tête et le dos appuyés sur des oreillers. • Dans le cas des enfants non hospitalisés, il faut s’assurer que les toilettes sont libres avant le début de l’intervention. • Il faut surveiller l’enfant, puisque les lavements entraînent des risques de traumatisme mécanique de la paroi rectale, de distension abdominale, de vomissements, d’hyperphosphatémie et d’hypocalcémie. Il est de plus en plus courant d’administrer une préparation préopératoire intestinale par voie orale ou par sonde nasogastrique au lieu d’un lavement. La solution à base de polyéthylèneglycolélectrolytes (GoLYTELYMD) assure un rinçage mécanique de l’intestin sans être absorbée de façon notable, ce qui permet d’éviter tout risque de déséquilibre hydrique et électrolytique. La solution de citrate de magnésium est un autre purgatif efcace administré par voie orale.

14.10.2 Stomie CE QU’IL FAUT RETENIR

Chez les enfants porteurs de stomie, l’apprentissage de la propreté pour le contrôle de la vessie doit commencer au même âge que chez les autres enfants.

En pédiatrie, plusieurs problèmes médicaux peuvent rendre nécessaire une stomie. Les causes les plus fréquentes chez le nourrisson sont l’entérocolite nécrosante et l’imperforation de l’anus, et, plus rarement, la maladie de Hirschsprung. Chez le trottineur, les causes les plus fréquentes sont les maladies inammatoires de l’intestin, en particulier la maladie de Crohn (entérite locale), et les urétérostomies en cas d’anomalies de l’uretère distal ou de la vessie. Il existe des appareillages de stomie en une pièce ou en deux pièces munis d’une barrière cutanée hypoallergène qui maintient l’intégrité de la peau autour de l’orice de la stomie. Le sac doit

632

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

être sufsamment large pour contenir une quantité modérée de selles et de gaz intestinaux sans pour autant être trop grand, pour éviter d’incommoder l’enfant. L’inrmière stomothérapeute est un membre important de l’équipe de soins de santé, car elle est en mesure d’offrir des suggestions et de l’information sur les soins cutanés et les solutions de rechange en matière de sac de stomie.

Préparation préopératoire Les soins et la prise en charge des stomies chez l’enfant ne sont pas bien différents de ceux de l’adulte. L’inrmière doit préparer l’enfant à l’intervention et l’informer, lui et sa famille, des soins relatifs à la stomie en utilisant un langage simple et direct ENCADRÉ 14.31. Elle peut utiliser des illustrations ou des photos d’enfants ayant la même problématique (p. ex., le dessin d’un enfant ayant subi une stomie à l’abdomen, en expliquant qu’il s’agit d’une autre ouverture pour l’élimination des selles, ou tout autre terme dont se sert l’enfant). Une autre stratégie consiste à utiliser une poupée pour faire la démonstration du processus. Dans le cas des jeunes enfants, il faut s’assurer qu’ils ne peuvent pas retirer le sac. Les ensembles vestimentaires monopièces ne permettent pas à l’enfant de toucher au sac, et la taille ample de ce vêtement n’exerce aucune pression sur l’appareillage de stomie.

Participation de l’enfant aux soins Durant toute leur croissance, il faut encourager les enfants à prendre part aux soins de la stomie. Même les enfants d’âge préscolaire peuvent coopérer en tenant les accessoires, en éloignant les doublures de la couche du dispositif et en aidant à nettoyer la région de la stomie. L’apprentissage de la propreté pour le contrôle de la vessie doit commencer au même âge que chez les autres enfants. Les enfants plus âgés et les adolescents nissent par être entièrement responsables des soins de leur stomie. Pendant l’adolescence, les préoccupations liées à l’image corporelle et les répercussions de la stomie commencent à avoir une incidence sur l’intimité et la vie sexuelle. L’inrmière doit expliquer aux adolescents que la stomie ne doit pas interférer avec leurs activités et qu’ils peuvent choisir l’appareillage le mieux adapté à leurs besoins.

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 14.31

Soins à l’enfant ayant une stomie

Les enfants porteurs d’une stomie reçoivent presque toujours leur congé de l’hôpital alors qu’ils ont encore cette stomie. La préparation des membres de la famille doit donc commencer à l’hôpital dès que possible. L’inrmière doit indiquer à la famille : • comment appliquer l’appareillage pour stomie ; • comment se charger des soins cutanés ; • quelles mesures prendre en cas de problèmes cutanés ;

Soins de la stomie La protection de la peau entourant la stomie est un élément central des soins. Il est important que les appareillages soient bien adaptés pour prévenir la fuite du contenu du sac de stomie. Avant l’application de l’appareillage, la peau est préparée avec un scellant cutané qui doit sécher. Une pâte est ensuite appliquée autour de la base de la stomie ou derrière la rondelle cutanée. L’action combinée du scellant et de la pâte permet de prévenir la dégradation de la région entourant la stomie. Les soins cutanés des nourrissons qui ont subi une colostomie et qui ne portent pas de sac sont semblables à ceux que requiert un nourrisson auquel il faut changer les couches. Cependant, la peau entourant la stomie est protégée par une rondelle cutanée comme un pansement hydrocolloïdal ou une substance barrière (p. ex., un onguent à l’oxyde de zinc, de la pâte d’ihle ou un mélange d’onguent à l’oxyde de zinc et de

• quels vêtements devrait porter l’enfant pour ne pas nuire à la stomie ; • qu’il est important d’informer le médecin, le personnel inrmier et le stomothérapeute de tout signe de dégradation cutanée ou de complications de la stomie, par exemple la présence de selles d’apparence rubanée, une diarrhée excessive, un saignement, un prolapsus, ou le blocage des gaz intestinaux ou des selles.

poudre pour stomie [StomahesiveMD]). Un pansement de gaze peut être appliqué sur la stomie et la rondelle cutanée pour absorber la substance drainée. Si la peau devient inammée, dénudée ou infectée, les soins appropriés ressemblent à ceux prodigués en cas d’érythème fessier. L’onguent à l’oxyde de zinc ou une crème protectrice de type Proshield PlusMD contribue à protéger la peau saine, à guérir une peau excoriée et à réduire au minimum la douleur associée à la dégradation cutanée. L’agent dermoprotecteur adhère à la peau dénudée et suintante. L’onguent à l’oxyde de zinc peut être appliqué sur des agents antifongiques et antibactériens en cas d’infection. Un protecteur cutané non irritant est un scellant cutané ne contenant pas de base d’alcool qui peut être utilisé sur une peau lésée sans causer de brûlure.

14

Quelle que soit la procédure, il est opportun de divertir l’enfant avec des jouets, des chansons ou des lms pendant les soins.

Chapitre 14

Techniques de soins

633

Analyse d’une situation de santé Brigitte, âgée de 7 ans, est amenée au service des urgences pour de la èvre et une toux qui persiste depuis 48 heures. Elle est évreuse et refuse de jouer. Le diagnostic d’une pneumonie au lobe inférieur droit est rapidement émis par le médecin. Celui-ci prescrit de la céfotaxime (ClaforanMD) 1 g q.8 h I.V. à diluer dans 100 mL de soluté compatible et

Jugement clinique une perfusion de D 5 % NaCl 0,45 % à 60 mL/h. La llette pèse 23 kg. Après avoir effectué l’évaluation clinique de l’état respiratoire de Brigitte, vous procédez à l’installation d’un cathéter périphérique court. Brigitte pleure parce qu’elle a très peur des piqûres et tient à ce que sa mère soit près d’elle, sinon elle refuse de se faire piquer.

Mise en œuvre de la démarche de soins

Collecte des données – Évaluation initiale – Analyse et interprétation 1. Nommez deux comportements de Brigitte qui indiqueraient que la présence de sa mère est réconfortante. 2. Est-ce que la peur de Brigitte devrait être considérée comme un problème prioritaire à inclure dans le plan thérapeutique inrmier (PTI) ? Justiez votre réponse. SOLUTIONNAIRE

Vous avez effectué le prélèvement. Brigitte a pleuré au début, mais elle a bien collaboré. Pour la récompenser, sa mère lui a donné un jus de fruits que la llette s’empresse de boire. Vous désirez contrôler de nouveau la température de Brigitte.

3. Quelle méthode est à privilégier dans le cas de Brigitte ?

Vous vous interrogez sur le débit de la perfusion et consultez le tableau de référence produit par la pharmacie. POIDS

VOLUME À PERFUSER SUR 24 H

0-10 kg

100 mL/kg

11-20 kg

1 000 mL + 50 mL/kg

> 20 kg

1 500 mL + 20 mL/kg

Brigitte recevra le volume suivant : Soluté : 60 mL × 24 h = 1 440 mL Antibiotique : 100 mL × 3 = 300 mL Total : 1 440 mL + 300 mL = 1 740 mL Compte tenu de son poids et des informations contenues dans le tableau fourni par la pharmacie, Brigitte devrait recevoir un maximum de 1 560 mL de soluté : 1 500 mL + (3 × 20 mL) = 1 560 mL. Elle aura donc un bilan positif de 180 mL auquel il faudra ajouter les apports per os.

634

Partie 5

Soins inrmiers adaptés à la clientèle pédiatrique

4. À la lumière de vos calculs, quel problème potentiel serait-il justifié d’inscrire dans l’extrait du PTI de Brigitte ?

Extrait de PTI CONSTATS DE L’ÉVALUATION Date

Heure

2018-06-12 13 h 45



2

Signature de l’inrmière

Votre signature

Problème ou besoin prioritaire

Initiales

RÉSOLU / SATISFAIT Date

Heure

Initiales

Professionnels / Services concernés

Vos initiales

Initiales

Programme / Service

Signature de l’inrmière

Initiales

Programme / Service

Vos initiales Unité pédiatrique

Planication des interventions – Décisions inrmières 5. Nommez au moins trois interventions qui peuvent être faites an de diminuer la crainte de Brigitte. 6. Nommez au moins trois moyens susceptibles de détourner l’attention de Brigitte pendant la procédure. MAIS SI...

Si Brigitte était asthmatique, quelles autres manifestations cliniques devriez-vous rechercher lors de l’évaluation de Brigitte ? Indiquez-en au moins deux.

Brigitte est maintenant hospitalisée à l’unité de médecine. Son état s’améliore rapidement avec une antibiothérapie I.V. Elle tousse beaucoup moins et ne fait plus de èvre. Elle aura son congé dans 24 heures, mais elle devra continuer à prendre ses antibiotiques per os à la maison.

Planication des interventions – Décisions inrmières 7. Concernant la prise d’antibiotiques per os, nommez deux points importants à mentionner à Brigitte et à ses parents dans l’enseignement précédant le congé de l’hôpital.

Évaluation des résultats – Évaluation en cours d’évolution 8. Comme Brigitte tousse moins, nommez trois signes à réévaluer pour conrmer que son état respiratoire s’est amélioré.

Chapitre 14

VU dans ce chapitre

Brigitte n’aime pas prendre des comprimés, et sa mère anticipe que ce sera difcile de lui administrer l’antibiothérapie une fois qu’elles seront retournées à la maison. Indiquez deux moyens que vous pouvez lui donner pour faciliter la prise du médicament à la maison.

Techniques de soins

635

14

Chapitre

15

Troubles liés au système respiratoire

Écrit par : Patricia M. Conlon, MS, APRN, CNS, CNP Adapté et mis à jour par : Marie Antonacci, inf., B. Sc.

MOTS CLÉS

OBJECTIFS

Allergène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 690 Amygdalite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 650 Aspiration d’un corps étranger . . . . . . 679 Asthme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 690 Fibrose kystique (FK) . . . . . . . . . . . . . . . . . 710 Hygiène respiratoire . . . . . . . . . . . . . . . . . 643 Infection des voies respiratoires. . . . . 639 Insuffisance respiratoire . . . . . . . . . . . . . 720 Lésion par inhalation . . . . . . . . . . . . . . . . . 684 Myringotomie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 659 Otite moyenne (OM). . . . . . . . . . . . . . . . . . 656 Physiothérapie respiratoire . . . . . . . . . . 713 Pneumonie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 672 Syndrome du croup . . . . . . . . . . . . . . . . . . 661 Virus respiratoire syncytial (VRS) . . . . 639

Après avoir étudié ce chapitre, vous devriez être en mesure :

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Animations À retenir Carte conceptuelle Encadrés et tableaux Web Solutionnaires

Guide d’études, RE06, SA13, SA14

636

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

• d’énumérer les facteurs menant à une infection des voies respiratoires chez le nourrisson et le jeune enfant ; • de reconnaître les manifestations cliniques de diverses infections respiratoires chez le nourrisson et l’enfant, de prodiguer les soins nécessaires ; • de décrire les soins postopératoires pour un enfant ayant subi une amygdalectomie ; • de décrire les soins infirmiers prioritaires pour un enfant atteint d’une otite moyenne aiguë ; • de déterminer les critères d’hospitalisation pour les nourrissons et les jeunes enfants souffrant d’une bronchiolite ; • de reconnaître les syndromes du croup et de déterminer les principaux soins infirmiers à prodiguer ; • d’énumérer les principaux indices d’une insuffisance respiratoire imminente ; • de décrire les procédures d’urgence à utiliser en cas d’obstruction des voies respiratoires par un corps étranger chez le nourrisson et l’enfant ; • de distinguer les différents types de pneumonies et leurs caractéristiques ; • de décrire les diverses mesures thérapeutiques permettant de soulager les symptômes de l’asthme ; • d’élaborer un plan d’enseignement des soins et des traitements à domicile pour l’enfant asthmatique ; • de décrire les effets physiologiques de la fibrose kystique sur les systèmes gastro-intestinal et pulmonaire, ainsi que les moyens thérapeutiques de les traiter.

Carte conceptuelle

Cette carte conceptuelle illustre schématiquement les principaux concepts décrits dans le présent chapitre. Sa lecture vous permettra d’avoir une vue d’ensemble des notions qui y sont présentées.

constituent

touchent

touchent

incluent

causent

comprennent Troubles liés au système respiratoire

15

comprennent

par

incluent

soit

inclut

peut causer

requiert

Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

637

Rappel anatomique et particularités chez l’enfant

Système respiratoire

FIGURE 15.1 Les structures respiratoires de l’enfant sont plus petites, courtes, étroites et horizontales que celles de l’adulte. Ainsi, les infections se propagent aisément et augmentent rapidement les efforts respiratoires de l’enfant.

638

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

15.1

Caractéristiques des infections des voies respiratoires

Le nom de chaque infection respiratoire dépend de la région anatomique où elle se manifeste. Les voies respiratoires supérieures comprennent l’oropharynx, le rhinopharynx, le pharynx, le larynx et la partie supérieure de la trachée. Les voies respiratoires inférieures comprennent la partie inférieure de la trachée ; les bronches principales ou souches ; les bronches lobaires, segmentaires et lobulaires ; les bronchioles ; et les alvéoles pulmonaires. Dans ce chapitre, les infections de la trachée sont considérées comme faisant partie des troubles des voies respiratoires inférieures, tandis que les infections de l’épiglotte et du larynx sont classées parmi les syndromes du croup. Une infection respiratoire est cependant rarement circonscrite à une région anatomique distincte. Souvent, elle se propage d’une structure à l’autre en raison de la contiguïté de la muqueuse des parois des voies respiratoires. Par conséquent, les infections des voies respiratoires touchent plusieurs structures plutôt qu’une seule, quoique leurs effets puissent être prédominants dans une région donnée selon la maladie en cause.

15.1.1

Étiologie

Les infections des voies respiratoires sont responsables de la majorité des maladies aiguës chez l’enfant. L’étiologie et l’évolution de ces infections sont notamment inuencées par l’âge de l’enfant, ses conditions de vie, ses antécédents médicaux et les variations saisonnières.

Agents infectieux

coqueluche. Entre 3 et 6 mois, soit la période entre la disparition des anticorps maternels et la production d’anticorps par le nourrisson, le taux d’infection augmente ; il reste élevé entre 1 et 5 ans. Vers l’âge de 5 ans, les infections virales des voies respiratoires sont moins fréquentes, mais la prévalence des pneumonies dues au Mycoplasma pneumoniae et des infections à SBHGA s’accroît. La quantité de tissu lymphoïde augmente durant toute la période du milieu de l’enfance (de 6 à 11 ans), et l’exposition répétée aux micro-organismes améliore l’immunité de l’enfant à mesure qu’il grandit. Certains agents viraux peuvent provoquer une maladie grave des voies respiratoires inférieures ou le croup chez le nourrisson, mais seulement une affection bénigne chez les enfants plus âgés. La coqueluche, par exemple, engendre une trachéobronchite relativement inoffensive chez l’enfant, mais constitue une maladie grave si elle apparaît chez le nourrisson de moins de un an (Agence de la santé publique du Canada [ASPC], 2014a).

Taille Les différences anatomiques inuencent la réponse des voies respiratoires aux infections. Chez les jeunes enfants, les voies respiratoires ont un petit diamètre qui est susceptible de rétrécir considérablement si la muqueuse devient inammée et que la production de sécrétions augmente. La distance entre les diverses structures internes des voies respiratoires étant également plus courte chez le jeune enfant, les micro-organismes peuvent s’y propager plus rapidement, ce qui accroît l’étendue des zones qui sont affectées.

Résistance aux infections

Si une grande variété de micro-organismes infectieux peut affecter les voies respiratoires, la plupart des infections sont dues à des virus, notamment le virus respiratoire syncytial (VRS), les entérovirus non poliomyélitiques (les virus Coxsackie des groupes A et B), les adénovirus, les virus paragrippaux et les métapneumovirus humains (rhinovirus, coronavirus et bocavirus) 9 . Parmi les agents bactériens responsables des invasions primaires et secondaires, notons les streptocoques bêtahémolytiques du groupe A (SBHGA), les staphylocoques, l’Haemophilus influenzae, le Chlamydia trachomatis, le Bordetella pertussis, les mycoplasmes et les pneumocoques.

La capacité de résister aux pathogènes dépend de plusieurs facteurs. Une décience du système immunitaire entraîne un risque d’infection. La malnutrition, l’anémie et la fatigue réduisent également la résistance de l’enfant. Les allergies (p. ex., la rhinite allergique), la prématurité, la dysplasie bronchopulmonaire, l’asthme, une infection antérieure au VRS, les anomalies cardiaques entraînant une congestion pulmonaire et la brose kystique sont autant d’éléments susceptibles d’affaiblir les défenses des voies respiratoires et de prédisposer l’enfant à une infection. La fréquentation d’un milieu de garde et l’exposition à la fumée secondaire accroissent également la probabilité de contracter une infection.

Âge

Variations saisonnières

Le fait que les nourrissons en santé de moins de 3 mois et nés à terme aient un taux d’infection inférieur à celui des nourrissons plus âgés est généralement attribué à la fonction protectrice des anticorps maternels ; cependant, durant cette période, les nourrissons peuvent être sensibles à des infections spécifiques des voies respiratoires, notamment la

Les pathogènes respiratoires les plus communs se manifestent sous forme d’épidémies au cours de l’hiver et du printemps. Les infections à mycoplasme surviennent plus souvent en automne et au début de l’hiver. L’asthme dû à une infection (p. ex., la bronchite) survient plus fréquemment par temps froid, en hiver et au début du printemps – saison du VRS. Chapitre 15

15

9 Les modes de transmis­ sion des infections sont détaillés dans le chapitre 9, Maladies infectieuses et immunisation.

Troubles liés au système respiratoire

639

15.1.2

Manifestations cliniques

Les nourrissons et les jeunes enfants, en particulier ceux dont l’âge se situe entre six mois et trois ans, ont des réactions plus graves à une infection aiguë

des voies respiratoires que les enfants plus âgés. Le jeune enfant présente un certain nombre de manifestations cliniques généralisées, de même que des manifestations locales TABLEAU 15.1.

TABLEAU 15.1

Manifestations cliniques liées aux infections des voies respiratoires chez l’enfant de moins de 3 ans

MANIFESTATIONS

CARACTÉRISTIQUES

Fièvre

• • • •

Constitue souvent le premier signe d’infection. Peut être absente chez le nouveau-né tandis que les plus fortes èvres sont observées chez les enfants de 6 mois à 3 ans. Peut atteindre de 39,5 à 40,5 °C même pour une infection mineure ; dans certaines familles, la èvre a tendance à être élevée en cas d’infection. Peut rendre l’enfant amorphe, irritable, et provoquer une réduction de ses activités habituelles.

• Peut provoquer des convulsions fébriles. Alimentation déciente et anorexie

• • • •

Sont fréquentes chez les nourrissons pendant la période d’allaitement au sein ou au biberon. Constituent fréquemment le premier indice de l’existence d’une maladie de l’enfance. Persistent tout au long du stade fébrile de la maladie et souvent jusqu’à la convalescence. Sont une cause fréquente de déshydratation.

Vomissements

• • • •

Sont fréquents chez les jeunes enfants lorsqu’ils sont malades. Constituent un indice de l’apparition d’une infection. Peuvent précéder d’autres signes de plusieurs heures. Sont habituellement de courte durée, mais peuvent persister au cours de la maladie.

Diarrhée

• Est habituellement mineure et transitoire, mais peut s’aggraver. • Accompagne souvent les infections respiratoires virales. • Est une cause fréquente de déshydratation.

Douleur abdominale

• • • •

Obstruction nasale

• Peut interférer avec l’alimentation et la respiration du nourrisson (qui respire par le nez jusqu’à l’âge de 6 mois) ; les voies nasales du nourrisson étant très petites, l’œdème de la muqueuse et l’exsudation les bloquent aisément. • Peut contribuer au développement d’une otite moyenne ou d’une sinusite.

Écoulement nasal

• • • • •

Toux

• Est fréquente. • Peut n’être observable que durant la phase aiguë. • Peut persister plusieurs mois après une maladie.

Bruits respiratoires

• Sont associés aux maladies respiratoires : toux, enrouement, gémissement expiratoire (respiration gutturale), stridor, sibilance (wheezing). • Sont perceptibles (ou non) à l’auscultation : sibilance, crépitement pulmonaire, absence de bruits respiratoires (altération du mouvement de l’air).

Mal de gorge

• Est fréquent chez l’enfant plus âgé. • Peut n’être pas indiqué par le jeune enfant (incapable de décrire ses symptômes et donc de se plaindre même en cas d’inammation signicative). • Est souvent accompagné du refus d’avaler des liquides ou des aliments solides.

Méningisme

• Les signes méningitiques (sans méningite) suivants s’accompagnent d’une apparition soudaine de èvre et disparaissent avec la diminution de la èvre : céphalées, douleur et raideur dans le dos et le cou, signes de Kernig et de Brudzinski positifs (Jarvis, 2015).

640

Partie 6

Est fréquente. Est parfois impossible à distinguer de la douleur d’une appendicite. Peut être due à une adénite mésentérique. Peut être associée à des spasmes musculaires dus aux vomissements, particulièrement chez l’enfant nerveux et tendu.

Est fréquent. Peut être plutôt liquide et clair (rhinorrhée), ou épais et purulent. Varie selon le type d’infection et le stade d’évolution de l’infection. Est associé à un prurit. Peut irriter la lèvre supérieure et la peau entourant le nez.

Troubles liés aux systèmes

Soins Soinsinrmiers et traitements inrmiers INFECTIONS RESPIRATOIRES

Évaluer les manifestations cliniques Les mêmes directives s’appliquent à la collecte des données relatives au système respiratoire que pour l’examen des oreilles, du nez, de la bouche et de la gorge, du thorax et des poumons 4 . Les observations et les manifestations cliniques

présentées dans l’ENCADRÉ 15.1 doivent faire l’objet d’une attention soutenue. L’évaluation de la saturation en oxygène (ou saturométrie) doit faire partie de l’examen physique des enfants atteints d’infections des voies respiratoires. La démarche de soins auprès d’un enfant atteint d’une infection aiguë des voies respiratoires est décrite dans l’ENCADRÉ 15.2.

4 L’examen des oreilles, du nez, de la bouche, de la gorge, du thorax et des poumons est détaillé dans le chapitre 4, Examen clinique : anamnèse et examen physique.

Techniques de soins ENCADRÉ 15.1

Évaluer la fonction respiratoire

FRÉQUENCE

• Vérier, selon l’âge, si elle est normale, augmentée (tachypnée) ou diminuée (bradypnée).

• Noter si le rythme est régulier ou irrégulier ; s’il y a des pauses ou un arrêt (apnée) dans la respiration. • Noter le rapport inspiration-expiration (la valeur normale est 1:2).

• Observer la fréquence respiratoire durant 30 à 60 secondes.

AUTRES OBSERVATIONS

AMPLITUDE

• Signes probants d’infection

• Évaluer en fonction de l’amplitude de l’excursion thoracique et abdominale. • Noter les caractéristiques de l’amplitude : profondeur normale, trop supercielle (hypopnée), trop profonde (hyperpnée).

– Vérier si la température est élevée ou si les ganglions cervicaux sont enés. – Déterminer s’il y a inammation des muqueuses, ou des sécrétions purulentes dans le nez, les oreilles ou les poumons (expectoration). • Toux

AISANCE

– Observer et noter les caractéristiques et la fréquence de la toux.

• Degré d’aisance

– Noter quand elle apparaît (p. ex., diurne, nocturne, au lever), la nature de la toux (paroxystique avec ou sans sibilance, croupeuse ou rauque), l’association de la toux avec la déglutition ou une autre activité, la productivité de la toux (grasse ou sèche), la couleur et l’aspect de l’expectoration (claire, purulente, avec hémoptysie), les circonstances déclenchantes (effort, froid, exposition à un allergène).

– Évaluer le degré d’aisance de la respiration : sans effort, laborieuse (dyspnée), difcile dans la position assise ou debout, associée à du tirage intercostal ou sous-sternal (dépression inspiratoire des tissus mous par rapport aux structures cartilagineuses et osseuses du thorax), battement des ailes du nez, mouvements de montée et de descente de la tête (quand la région sous-occipitale est soutenue sur l’avant-bras de la personne soignante, inclinaison de la tête de l’enfant endormi vers l’avant de façon synchrone avec chaque inspiration), gémissements, sibilance ou stridor dû au rétrécissement des voies respiratoires au niveau de la trachée ou du larynx. • Respiration difcile – Observer la symétrie des mouvements respiratoires. – Noter les caractéristiques de la difculté à respirer : de façon continue ou intermittente, aggravation constante, apparition soudaine, au repos ou à l’effort, associée à de la sibilance ou à des gémissements, associée à la douleur. • Tirage – Noter la localisation du tirage (sous-costal, intercostal, sous-sternal, suprasternal, supraclaviculaire, généralisé). • Sibilance – Noter les caractéristiques des bruits respiratoires (sibilance expiratoire ou inspiratoire, son aigu ou musical, bruit prolongé, progression lente ou soudaine, associée à une respiration difcile). RYTHME

• Prêter attention à la variation de la fréquence et de la profondeur des respirations.

• Cyanose – Noter la répartition (périphérique, péribuccale, faciale, ou sur le tronc), le degré, la durée, l’association avec une activité. • Douleur thoracique – Noter l’emplacement et les circonstances : localisée ou généralisée, située à la base du cou ou à l’abdomen, vague ou aiguë, profonde ou superficielle, en association avec des respirations rapides et superficielles ou avec des gémissements ; la douleur peut être un symptôme chez les enfants plus âgés. • Mucus nasal – Prélever un échantillon ; l’enfant plus âgé peut fournir un échantillon lui-même en se mouchant ou en fournissant un échantillon d’expectoration après une toux, tandis que pour le jeune enfant il faudra procéder par aspiration nasale ou frotter un écouvillon sur la paroi nasale pour prélever un échantillon. – Noter le volume, la couleur, la viscosité et l’odeur. • Halitose (mauvaise haleine) – Noter la présence de l’halitose ; celle-ci peut être associée à certaines infections des voies respiratoires supérieures ; elle est plus fréquente chez les enfants qui respirent par la bouche.

Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

641

15

Mise en œuvre d’une démarche de soins ENCADRÉ 15.2

Infection aiguë des voies respiratoires

Collecte des données – Évaluation initiale Pour la collecte des données relatives au système respiratoire, suivre les directives concernant la collecte des données pour les oreilles, le nez, la bouche et la gorge, le thorax et les poumons. Les observations énumérées dans le TABLEAU 15.1 et les composantes présentées dans l’ENCADRÉ 15.1 doivent faire l’objet d’une attention spéciale. • Évaluer l’effort respiratoire (fréquence respiratoire, utilisation des muscles respiratoires accessoires, tirage, battement des ailes du nez). • Évaluer l’oxygénation (saturation en oxygène, couleur de la peau). • Mesurer la température corporelle. • Évaluer le niveau d’activité de l’enfant. • Évaluer le niveau de confort de l’enfant. Analyse et interprétation des données Les problèmes découlant de la situation de santé peuvent inclure : • Mode de respiration inefcace associé à un processus inammatoire • Dégagement inefcace des voies respiratoires associé à une obstruction mécanique, à une inammation ou à une augmentation des sécrétions • Risque d’infection associé à la présence de micro-organismes infectieux ou d’un milieu propice (mucus, expectoration) à la croissance d’agents infectieux • Intolérance à l’activité associée au processus inammatoire ou à un déséquilibre entre l’apport et la demande en oxygène

• Confort optimal de l’enfant • Respiration efcace • Apport liquidien et nutritionnel adéquats • Température normale Interventions inrmières De nombreuses stratégies d’intervention clinique pour l’atteinte des résultats escomptés sont présentées dans la présente section de ce chapitre. Évaluation des résultats – Évaluation en cours d’évolution L’efcacité des interventions cliniques se mesure grâce à une réévaluation et à une appréciation constantes des soins selon le plan de soins suivant : • Observer les mouvements du thorax et l’effort respiratoire de l’enfant. • Mesurer la fréquence respiratoire, la saturation en oxygène, la température, la pression artérielle et la fréquence cardiaque. • Observer le comportement et l’activité de l’enfant. • Rechercher les signes d’une hydratation adéquate (p. ex., la muqueuse de la bouche et une langue humide, les larmes, la souplesse de la peau au test du pli cutané, des urines claires, etc.). • Rechercher la présence de complications, telles que la déshydratation, la perte de poids ou la propagation de l’infection à d’autres régions du corps.

• Perturbation des dynamiques familiales en raison de la maladie de l’enfant

• Observer les autres membres de la famille et les personnes qui ont été en contact avec l’enfant an de déceler des signes d’infection.

Résultats escomptés La planication des soins est établie dans le but d’atteindre les résultats suivants :

• Observer le comportement de la famille, et s’enquérir auprès des membres de la famille de leurs inquiétudes et de leurs sentiments.

• Oxygénation adéquate • Élimination efcace des sécrétions

Surveiller les signes de détérioration respiratoire

et moins anxieux, ce qui l’aidera à se détendre et à réduire ses efforts respiratoires.

Plusieurs infections aiguës des voies respiratoires sont mineures et ne provoquent que peu de symptômes. Quoique l’enfant puisse ressentir de l’inconfort, avoir le nez congestionné et présenter une inammation des muqueuses, la détresse respiratoire est peu fréquente.

Soutenir la famille et enseigner les soins à domicile

Cependant, dans certains cas, l’enfant doit faire l’objet d’une étroite surveillance de la part des professionnels de la santé pour maintenir une oxygénation et un équilibre électrolytique adéquats. L’observation de signes cliniques de détérioration respiratoire requiert des interventions immédiates TABLEAU 15.2. L’hospitalisation peut provoquer de l’appréhension chez l’enfant ; les traitements et les tests peuvent être effrayants et lui causer du stress. Faire participer la famille aux soins et répondre à leurs questions peut rendre l’enfant plus à l’aise

642

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

Le jeune enfant souffrant d’une infection des voies respiratoires est irritable et difcile à réconforter ; en conséquence, la famille a besoin de soutien et d’encouragements, ainsi que de suggestions pratiques an, notamment, d’assurer son confort et lui donner ses médicaments. Dans les cas, plus fréquents, où l’hospitalisation n’est pas nécessaire, de même que pour les interventions à domicile à la suite d’une hospitalisation, le rôle de l’inrmière consiste donc principalement à appuyer la famille et à enseigner aux parents les diverses mesures de prévention et de réconfort. Les différents soins présentés jusqu’à la n de la section correspondent donc à l’enseignement des interventions familiales.

Les interventions à domicile sont généralement sufsantes pour soulager l’inconfort léger et diminuer l’effort respiratoire. Il est ainsi recommandé de maintenir un taux d’humidité de 35 à 50 % et une température de 19 ou 20 °C. Installer un hygromètre dans la chambre de l’enfant permet de vérier le taux d’humidité ; selon les besoins, un humidificateur ou un déshumidificateur peut être utilisé pour maintenir un taux adéquat. Ces mesures, en plus de favoriser le confort respiratoire, assainissent l’air et préviennent les infections oto-rhino- laryngologiques (ORL) (Association d’oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervicofaciale du Québec, 2017b).

Favoriser le repos L’activité de l’enfant présentant une maladie fébrile aiguë doit être limitée, ou encore l’enfant doit être gardé au lit, ce qui est généralement aisé lorsque la èvre est élevée, mais qui peut devenir problématique lorsque l’enfant commence à se sentir mieux. En fait, l’augmentation de son niveau d’activité constitue l’un des principaux signes que l’enfant prend du mieux ; cet état peut toutefois n’être que temporaire si une èvre élevée revient après quelques heures d’une activité accrue.

Soulager l’inconfort Les enfants de 3 ans et plus sont habituellement capables d’évacuer assez aisément leurs sécrétions nasales (Association d’oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale du Québec, 2017c). Pour les nourrissons de moins de 6 mois, qui respirent principalement par le nez, l’inrmière peut conseiller aux parents un aspirateur nasal pour nourrisson ou une poire d’aspiration, qui s’avèrent utiles pour retirer les sécrétions nasales, en particulier avant le coucher ou les boires FIGURE 15.2. Cette pratique, précédée de l’instillation de gouttes nasales salines, peut libérer les passages nasaux et faciliter l’alimentation. Ces gouttes salines peuvent être préparées à la maison. L’Association d’oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale du Québec (2017c) suggère de verser 5 mL de sel dans 750 mL d’eau, de faire bouillir pendant 10 minutes et de laisser refroidir à la température ambiante avant d’instiller les gouttes. La quantité de préparation non utilisée peut être conservée au réfrigérateur pendant un maximum de 7 jours. Les parents doivent recevoir des instructions précises sur la méthode d’administration des gouttes nasales. Les décongestionnants nasaux topiques en vente libre contenant du chlorhydrate d’oxymétazoline (p. ex., DrixoralMD ou DristanMD) ou de xylométazoline comme ingrédient unique ne sont

TABLEAU 15.2

Signes de détérioration respiratoire

SIGNES

INTERVENTION

• Augmentation de la détresse respiratoire

Aviser le médecin et l’inhalothérapeute, car l’enfant nécessite un traitement urgent et possiblement une admission à l’unité de soins intensifs pour une assistance respi­ ratoire non invasive (p. ex., lunette nasale à haut débit ou ventilation spontanée en pression positive continue).

• Tachypnée • Tachycardie • Aggravation de l’hypoxie • Diminution de la perfusion périphérique • Niveau de conscience réduit ; léthargie

pas recommandés pour les enfants âgés de moins de 12 ans sans prescription médicale (Santé Canada, 2014a). Pour les enfants auxquels un décongestionnant est prescrit, la posologie doit être respectée, et l’administration concomitante de médicaments contenant le même ingrédient médicinal doit être évitée an de prévenir des effets indésirables graves. Pour éviter une congestion récidivante, l’utilisation des gouttes nasales et du vaporisateur nasal ne doit pas dépasser 3 jours. Pour prévenir une contamination croisée avec les gouttes nasales, il faut tirer environ 0,25 mL de solution du vaporisateur nasal dans une seringue à tuberculine propre sans aiguille et l’injecter dans les narines de l’enfant. Des compresses hu mides froides procurent parfois du soulagement aux enfants présentant une adénopathie cervicale douloureuse.

Prévenir la transmission de l’infection Une bonne hygiène respiratoire devrait être enseignée à l’enfant et à la famille. L’hygiène respiratoire comprend : le fait de tousser et d’éternuer dans sa manche ou dans son coude ; l’utilisation de mouchoirs de papier et leur élimination de façon appropriée ; et l’hygiène des mains, qui est primordiale dans la prévention

FIGURE 15.2 Les parents peuvent utiliser un aspirateur nasal pour dégager les voies nasales du nourrisson.

Adénopathie cervicale : Inammation de un ou de plu­ sieurs ganglions lymphatiques situés dans le cou.

clinique

Jugement

Diminuer l’effort respiratoire

Marco, âgé de 18 mois, est hospitalisé pour une bronchiolite. Il est calme dans les bras de sa mère actuellement. Celle­ci appelle l’inrmière parce qu’elle trouve que son enfant a la peau chaude et qu’il tousse occasionnellement. Elle dit que Marco respire normalement, mais ajoute qu’il a des soubresauts respiratoires dans son sommeil. Que faudrait­il évaluer prio­ ritairement chez Marco à la suite des remarques de sa mère ? a) Le type de toux. b) Les paramètres respiratoires. c) La température. d) Le type de respiration.

Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

643

15

des infections des voies respiratoires. Il est souvent difcile pour les trottineurs de se rappeler qu’il faut se couvrir le nez et la bouche ; il est donc essentiel d’encourager ces jeunes enfants à se laver souvent les mains. L’enfant présentant une infection des voies respiratoires ne doit pas partager son verre, sa débarbouillette ou sa serviette pour les mains et le visage. Il doit également éviter de toucher ses yeux, son nez et sa bouche ou de les frotter. 17 La déshydratation est expliquée dans le chapitre 17, Troubles liés au système gastro-intestinal.

Lorsque c’est possible, l’enfant atteint devrait être séparé des autres enfants de façon à diminuer les contacts dès l’apparition du premier signe de maladie an de prévenir la transmission de l’infection. Il ne devrait pas fréquenter l’école ni le milieu de garde.

Abaisser la température corporelle

PHARMACOVIGILANCE

Si l’enfant présente une température très élevée, il importe de maîtriser la fièvre. Les parents doivent savoir comment prendre la température de l’enfant et comment lire le thermomètre avec précision. L’inrmière doit explorer le niveau de connaissances des parents et fournir cet enseignement au besoin.

Acétaminophène • Utiliser l’acétaminophène avec précaution pour les nourrissons de moins de 4 mois ou de 5,5 kg ayant une température rectale inférieure à 38,5 °C. Dans ce cas, il faut conseiller aux parents de consulter un médecin (Santé Canada, 2016a). • Mettre les parents en garde contre les remèdes combinés contre le rhume en vente libre, puisque ces produits contien­ nent souvent de l’acétaminophène. Pour éviter une surdose, calculer soigneusement l’apport total en acétaminophène provenant à la fois de celui donné séparément et de celui présent dans les médicaments combinés.

Si le médecin prescrit de l’acétaminophène ou de l’ibuprofène, il est essentiel d’expliquer aux parents l’importance de respecter rigoureusement la dose et la fréquence d’administration prescrites . Des boissons fraîches sont à privilégier pour abaisser la température et réduire les risques de déshydratation.

Encourager et évaluer l’hydratation CE QU’IL FAUT RETENIR

Forcer l’enfant malade à manger des aliments solides peut provoquer nausées et vomissements.

14 L’administration des médicaments est traitée dans le chapitre 14, Techniques de soins.

644

Partie 6

La déshydratation est une complication potentielle lorsque l’enfant présente une infection des voies respiratoires et qu’il est évreux ou anorexique, en particulier s’il y a vomissement ou diarrhée. Le nourrisson est particulièrement sujet à présenter un décit en liquides et en électrolytes lorsqu’il a une maladie respiratoire. En effet, celle-ci augmente la fréquence respiratoire, ce qui fait obstacle à un apport liquidien oral adéquat. De plus, la èvre accélère les pertes insensibles cutanées et respiratoires chez lui. Les sécrétions nasales peuvent également nuire à sa respiration, car elles bloquent les passages nasaux, qui sont étroits. Lorsque le nourrisson est allongé pour être nourri au biberon ou au sein, l’effort compensatoire de respiration par la bouche est interrompu, de sorte que sa consommation de liquides peut être réduite à cause des sécrétions.

Troubles liés aux systèmes

Il est possible d’encourager une consommation liquidienne adéquate en offrant à l’enfant à intervalles fréquents de petites quantités de ses boissons préférées (sous forme de liquides clairs ou de sucettes glacées sans sucre s’il y a vomissement). Les solutions de réhydratation orale telles que EnfalyteMD ou PedialyteMD peuvent convenir pour les nourrissons et Pedialyte ElectrolyteMD pour les enfants âgés de 2 ans et plus. Dans le cas d’une déshydratation minime chez un enfant âgé de 6 mois à 5 ans, un jus de pomme dilué est recommandé (Freedman, Willian, Boutis et al., 2016). Il faut éviter les liquides contenant de la caféine parce qu’ils peuvent avoir un effet diurétique et favoriser une perte liquidienne. Si le nourrisson est nourri au sein, l’allaitement doit continuer, car le lait maternel confère un certain degré de protection contre l’infection. Pour évaluer le niveau d’hydratation de leur enfant, il est conseillé aux parents d’observer la fréquence de la miction et d’aviser l’inrmière ou le médecin si elle semble insufsante 17 . Compter le nombre de couches mouillées dans une période de 24 heures constitue une méthode satisfaisante pour évaluer le débit urinaire chez le nourrisson et le trottineur. Pour évaluer le débit urinaire en milieu hospitalier, les couches sont pesées. Le débit urinaire doit être environ de 1 mL/kg/h chez l’enfant de moins de 30 kg et de 30 mL/h chez l’enfant de30 kg et plus.

Assurer la nutrition La perte d’appétit est caractéristique de l’enfant souffrant d’une infection aiguë. Dans la plupart des cas, il faut permettre à l’enfant de déterminer luimême ses besoins en nourriture. Certains enfants n’affichent aucune diminution de l’appétit, et d’autres acceptent bien certains aliments tels que la gélatine aux fruits, les sucettes glacées et la soupe. Forcer l’enfant malade à manger des aliments solides peut provoquer nausées et vomissements.

Administrer des antibiotiques En plus des antipyrétiques et des gouttes nasales, l’enfant peut avoir besoin d’antibiothérapie. Le cas échéant, les parents doivent comprendre l’importance de l’administration régulière et continue du médicament jusqu’à la n de la période prescrite, sans égard au fait que l’enfant a l’air malade ou pas. Les parents sont avertis de ne pas donner à l’enfant quelque médicament que ce soit qui n’ait pas été approuvé par le médecin et d’éviter de lui donner des antibiotiques restants d’une ordonnance pour une maladie antérieure ou pour un autre enfant. Administrer des antibiotiques non prescrits peut entraîner des effets et des réactions indésirables graves 14 PSTI 15.1.

Plan de soins et de traitements inrmiers PSTI 15.1

Enfant atteint d’une infection aiguë des voies respiratoires

PROBLÈME DÉCOULANT DE LA SITUATION DE SANTÉ

Mode respiratoire inefcace associé à un processus inammatoire

OBJECTIF

L’enfant aura une amplitude et une fréquence respiratoires normales.

RÉSULTATS ESCOMPTÉS

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES ET JUSTIFICATIONS

• Diminution des sécrétions

Soins respiratoires

• Absence d’utilisation des muscles accessoires

• Positionner l’enfant à un minimum de 30° an de permettre un accroissement de l’amplitude thoracique, de façon à obtenir une efcacité ventilatoire et une perméabilité des voies respiratoires optimales.

• Augmentation de l’amplitude pulmonaire

• Positionner l’enfant pour faciliter le drainage des sécrétions an de prévenir l’obstruction des voies respiratoires.

• Fréquence respiratoire appropriée en fonction de l’âge

• Aspirer les sécrétions des voies respiratoires (nez, trachée) avant les repas ou les boires, et au besoin, pour maintenir la perméabilité des voies respiratoires. • Effectuer des percussions thoraciques et de la physiothérapie respiratoire au besoin pour dégager les sécrétions. • Administrer les bronchodilatateurs et les anti-inammatoires prescrits au besoin, pour améliorer la ventilation et réduire l’inammation des voies respiratoires. • Fournir de l’oxygène selon les besoins pour améliorer l’oxygénation. • Surveiller les signes vitaux, incluant la saturation en oxygène, an de déceler tout changement dans l’état de l’enfant et de déterminer si d’autres interventions sont nécessaires.

PROBLÈME DÉCOULANT DE LA SITUATION DE SANTÉ

Dégagement inefcace des voies respiratoires associé à une obstruction mécanique, à une inammation ou à un accroissement des sécrétions

OBJECTIF

Les voies respiratoires de l’enfant resteront perméables.

RÉSULTATS ESCOMPTÉS

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES ET JUSTIFICATIONS

• Mouvements respiratoires réguliers et sans effort

Perméabilité des voies respiratoires

• Expectoration des sécrétions

• Effectuer une physiothérapie respiratoire pour dégager et évacuer les sécrétions.

• Positionner l’enfant de façon à faciliter le drainage des sécrétions et prévenir l’obstruction des voies respiratoires. • Aspirer les sécrétions respiratoires au besoin.

15

• Aider l’enfant à tousser (d’une façon appropriée à son stade de développement ou à son âge) pour maintenir l’intégrité des voies respiratoires. • Éviter de faire un examen de la gorge si une épiglottite est soupçonnée pour prévenir une obstruction des voies respiratoires. PROBLÈME DÉCOULANT DE LA SITUATION DE SANTÉ

Risque de surinfection et de sepsie associé à la présence d’un micro-organisme infectieux

OBJECTIF

L’enfant ne présentera aucune complication découlant de l’infection primaire.

RÉSULTATS ESCOMPTÉS

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES ET JUSTIFICATIONS

• Absence de nouveaux micro-organismes dans les sécrétions

Prévention des infections

• Absence d’hyperleucocytose (augmentation du nombre de globules blancs) à l’hémogramme

• Prélever les échantillons (sécrétions, tissus ou sang) pour identier le micro-organisme infectieux. • Appliquer les précautions requises contre la transmission de l’agent infectieux (port de l’équipement de protection individuelle, hygiène des mains) et contre la transmission par contact ou par voie aérienne (isolement gouttelettes-contact), si indiqué, pour diminuer la propagation du micro-organisme infectieux. • Encourager l’enfant et l’entourage familial à procéder à l’hygiène des mains fréquemment, et à éviter le contact des mains avec les yeux et la bouche pour prévenir la propagation de l’infection. • Enseigner à la famille et à l’enfant (en fonction de son âge) comment réduire la propagation des micro-organismes par la toux et les autres sécrétions (p. ex., en utilisant sa manche ou un mouchoir de papier pour tousser ou éternuer, et en jetant le mouchoir utilisé pour éviter les contaminations croisées).

Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

645

PSTI 15.1

Enfant atteint d’une infection aiguë des voies respiratoires (suite)

RÉSULTATS ESCOMPTÉS

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES ET JUSTIFICATIONS

• Absence de signes d’hypoxie tissulaire

Prévention des complications

• Maintien d’une oxygénation et d’une ventilation adéquates • Maintien d’une hémodynamie adéquate

• Procéder à l’aspiration des sécrétions à l’aide d’une technique et d’une sonde stérile pour prévenir la propagation du micro-organisme infectieux chez l’enfant et au sein de la famille. • Administrer au besoin un antipyrétique pour favoriser le confort en cas de èvre. • Surveiller et noter les manifestations cliniques de sepsie, tels que l’hypoxie, la déshydratation, une augmentation de l’effort et de la fréquence respiratoires, ainsi qu’une augmentation de la fréquence cardiaque, et, le cas échéant, modier rapidement le plan de traitement. • Assurer un apport nutritionnel et liquidien sufsant pour répondre aux besoins importants de l’organisme et soutenir le système immunitaire.

PROBLÈME DÉCOULANT DE LA SITUATION DE SANTÉ

Dynamique familiale perturbée en raison de la maladie et de l’hospitalisation

OBJECTIF

La famille démontrera une capacité d’adaptation à la maladie de l’enfant.

RÉSULTATS ESCOMPTÉS

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES ET JUSTIFICATIONS

• Maintien de la dynamique familiale

Soins à la famille

• Participation de tous les membres de la famille (selon leurs capacités)

• Permettre aux proches d’exprimer leurs inquiétudes et frustrations, évaluer les aspects conictuels et assurer un soutien.

• Centrer les soins sur la famille pour favoriser l’implication de la famille. • Permettre à la famille de demeurer avec l’enfant pour réduire les effets de la séparation. • Encourager le maintien des routines et rituels de la famille, autant que possible, pour faciliter l’adaptation. • Expliquer les procédures et le régime thérapeutique aux membres de la famille et les informer régulièrement de l’état de l’enfant pour faciliter les prises de décisions éclairées. • Encourager tous les membres de la famille à participer aux soins de l’enfant selon leurs capacités, pour promouvoir un sentiment de maîtrise concernant les soins. • Si nécessaire, diriger la famille vers des ressources offrant un soutien spécialisé (psychologique, nancier, etc.).

15.2 15.2.1

Infections des voies respiratoires supérieures

sinusite (Institut national d’excellence en santé et en services sociaux [INESSS], 2016b).

Rhinopharyngite aiguë

Le traitement de l’enfant atteint de rhinopharyngite se fait à la maison. Il n’existe aucun traitement spécifique ni aucun vaccin efficace. Un antipyrétique peut être prescrit en cas d’inconfort et de èvre légère. Il est recommandé de garder l’enfant au repos jusqu’à ce que la èvre ait disparu depuis au moins 24 heures. Il peut être bénéque pour certains enfants afigés d’un rhume d’augmenter leur consommation liquidienne orale pour produire un effet émollient sur les sécrétions et pour maintenir l’hydratation (Goldman, 2016). Il est possible de prescrire un décongestionnant vasoconstricteur aux enfants de 12 ans et plus dans le but de réduire l’œdème des voies nasales. Les décongestionnants agissent par vasoconstriction et sont habituellement plus efcaces lorsqu’ils sont appliqués localement, comme les gouttes nasales.

La rhinopharyngite aiguë, l’équivalent du rhume ordinaire, peut être causée par un rhinovirus, le VRS, un enterovirus (Meneghetti, 2017), un adénovirus, un virus de la grippe ou un virus paragrippal.

Manifestations cliniques Les manifestations cliniques sont plus graves chez le nourrisson et l’enfant que chez l’adulte. Son incidence est plus élevée chez l’enfant jusqu’à l’âge de six à sept ans que chez l’adulte (Mon partenaire santé, 2015). La èvre est fréquente chez le jeune enfant, tandis que l’enfant plus âgé présente une èvre légère qui apparaît tôt dans l’évolution de la maladie TABLEAU 15.3 . La rhinopharyngite peut parfois évoluer en otite moyenne aiguë, en bronchite ou en laryngite (Sciences et avenir, 2014) et plus rarement en

646

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

Approche thérapeutique

L’utilisation de médicament contre la toux et le rhume chez les enfants de moins de six ans est déconseillée par Santé Canada. De plus, il est recommandé de faire preuve de prudence lorsque ces médicaments sont utilisés chez les plus de six ans (Goldman, 2016). Il est possible de prescrire un antitussif contenant du dextrométhorphane à un adolescent qui présente des quintes de toux sèche. Les préparations contre la toux peuvent cependant avoir des effets indésirables tels que la confusion, l’hyperexcitabilité ou la sédation (Yang et So, 2014) ; en conséquence, les parents doivent surveiller attentivement l’apparition de ces effets indésirables chez leur enfant. Les antihistaminiques sont généralement inefcaces dans le traitement de la rhinopharyngite. Ces médicaments ont un faible effet atropinique qui assèche les sécrétions, mais ils peuvent causer de la somnolence ou, paradoxalement, avoir un effet stimulant sur l’enfant. Rien ne conrme l’utilité des expectorants. Les antibiotiques ne sont habituellement pas indiqués, car la plupart des infections sont virales. La Société canadienne de pédiatrie ne recommande pas l’administration des médicaments en vente libre aux enfants de moins de six ans à l’exception des antipyrétiques tels que l’acétaminophène (et l’ibuprofène pour l’enfant de plus de six mois) (Goldman, 2016).

Prévention La rhinopharyngite est si répandue dans la population en général qu’il est impossible de la prévenir. Les enfants y sont plus sujets en raison de

TABLEAU 15.3

Manifestations cliniques de la rhinopharyngite

ENFANT

ADOLESCENT

Rhinopharyngite • Fièvre (température rectale > 38,5 °C) Irritabilité, agitation

• Sécheresse et irritation du nez et de la gorge

• Perte d’appétit et diminution de l’apport liquidien

• Éternuements, frissonnements

• Éternuements

• Douleurs musculaires

• Congestion nasale ou rhinorrhée avec respiration buccale

• Toux (parfois)

• Vomissements ou diarrhée

• Léger mal de gorge

• Toux Signes présents à l’examen physique • Œdème et inammation de la muqueuse

• Œdème

Sources : Adapté de Collège français d’ORL et de chirurgie cervico-faciale (2014) ; Fleisher (2018) ; INESSS (2016c) ; Sciences et Avenir (2014).

l’immaturité de leur système immunitaire à l’égard de plusieurs virus ; ils peuvent donc contracter jusqu’à 8 à 10 rhumes chaque année avant l’âge de 2 ans (Société canadienne de pédiatrie [SCP], 2016). Les jeunes enfants ou les enfants présentant une diminution de l’immunité et une maladie respiratoire sont sujets à des complications graves telles que la pneumonie, de sorte qu’il faut tenter d’éviter qu’ils soient en contact avec des personnes ayant des manifestations cliniques de rhinopharyngite.

Soins inrmiers RHINOPHARYNGITE AIGUË

Le rhume est souvent le premier contact des parents avec la maladie chez leur nourrisson. La plus grande partie de l’inconfort est due à l’obstruction nasale, en particulier chez les jeunes nourrissons. Élever la tête du lit ou du matelas du berceau favorise l’écoulement des sécrétions. Pour les enfants de moins de trois ans ou incapables de se moucher efcacement, l’hygiène nasale (p. ex., l’instillation de gouttes nasales salines et l’aspiration des sécrétions à l’aide d’une poire d’aspiration) apporte un soulagement surtout avant l’allaitement et le coucher. Il est essentiel de maintenir un apport liquidien adéquat. Même si, généralement, il y a perte d’appétit pendant plusieurs jours, il est important d’offrir à l’enfant de petits repas nutritifs et ses boissons préférées pour prévenir la déshydratation. Les mains sont les vecteurs de contagion les plus fréquents de l’infection. Étant donné que la

15 rhinopharyngite se propage par les sécrétions, il faut enseigner l’hygiène respiratoire et l’hygiène des mains aux enfants pour prévenir et réduire la transmission de l’infection. Lorsque cela est possible, le contact entre une personne infectée et les nourrissons de moins de trois mois devrait être évité. Il s’agit d’un objectif difcile à atteindre au sein d’une famille, à l’école et dans le milieu de garde. Les membres de la famille qui souffrent d’un rhume devraient jeter leurs mouchoirs, et éviter de partager leurs serviettes, verres, plats ou ustensiles avec d’autres. Les jouets que l’enfant met dans sa bouche ne devraient pas être utilisés par d’autres enfants avant d’avoir été nettoyés. L’inrmière doit vérier auprès des parents si l’enfant a reçu tous les vaccins recommandés et peut leur offrir des conseils. Ces vaccins ne protègent pas contre le rhume, mais ils peuvent prévenir certaines complications, comme les infections bactériennes de l’oreille ou des poumons 9 .

Chapitre 15

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les enfants présentent plus souvent des rhinopharyngites que les adultes en raison de l’immaturité de leur système immunitaire à l’égard de plusieurs virus. Lorsque l’enfant fréquente un milieu de garde, son risque d’infection est plus élevé que s’il est gardé à la maison. 9 Le calendrier d’immunisation est présenté dans le chapitre 9, Maladies infec­ tieuses et immunisation.

Troubles liés au système respiratoire

647

Soutenir la famille

i

Le site Web Soins de nos enfants fournit de l’information sur la santé validée par des experts en pédiatrie du Canada. Son adresse est www. soinsdenosenfants.cps.ca.

Soutenir les parents et les rassurer constituent deux éléments importants des soins aux familles ayant un jeune enfant qui présente de façon récurrente des infections des voies respiratoires supérieures (IVRS). Comme elles sont fréquentes chez les enfants de moins de trois ans, il arrive que la famille ait l’impression d’être entraînée dans une chaîne sans n de maladies. Les parents ont besoin d’être rassurés sur le fait que les rhumes

fréquents sont une chose normale durant l’enfance et que, vers l’âge de cinq ans, l’immunité de leur enfant sera renforcée contre plusieurs virus. Lorsque l’enfant fréquente un milieu de garde, son risque d’infection est plus élevé que s’il est gardé à la maison. Les parents doivent savoir reconnaître les signes de complications respiratoires, et aviser un professionnel de la santé si une complication survient ou si l’état de l’enfant ne s’améliore pas après deux ou trois jours ENCADRÉ 15.3.

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 15.3

Signes précoces de complications d’infections respiratoires

Les parents doivent aviser le professionnel de la santé s’ils remarquent l’un ou l’autre des éléments suivant : • Tachypnée (plus de 50 à 60 R/min) • Difculté respiratoire • Sibilance • Toux qui persiste durant 2 jours ou plus • Toux aboyante

• Toux causant étouffement ou vomissements

• Pleurs

• Lèvres cyanosées

• Irritabilité croissante, avec ou sans èvre

• Fièvre supérieure à 38,5 °C

• Refus de prendre des liquides par voie orale et réduction des mictions

• Adénopathie cervicale • Écoulement nasal épais ou coloré (jaunâtre ou verdâtre) pendant plus de 10 jours

• Agitation et cycle du sommeil perturbé

• Signes d’une otalgie (tirage d’oreille, écoulement)

• Apathie ou somnolence

• Confusion • Yeux purulents ou collés au réveil

Source : Adapté de Société canadienne de pédiatrie (2016). Colds in children, Infectious Diseases & Immunization committee of the Canadian Pediatric Society. Repéré à www.caringforkids.cps. ca/handouts/colds_in_children.

15.2.2

Pharyngite

La pharyngite est un mal de gorge dont les causes sont soit virales, soit bactériennes FIGURE 15.3. De 80 à 90 % des cas de pharyngite aiguë sont d’origine virale. La pharyngite d’origine bactérienne la

plus commune est due à un streptocoque bêtahémolytique du groupe A (SBHGA). Celui-ci peut également causer une maladie cutanée telle que l’impétigo et la pyodermie (Shulman, Bisno, Clegg et al., 2012). L’enfant atteint par ce type d’IVRS (pharyngite streptococcique) court le risque de contracter un syndrome du choc toxique (Khan, 2017 ; Pichichero, 2017) et, dans les 10 jours suivants, un rhumatisme articulaire aigu, une maladie inammatoire du cœur, des articulations et du système nerveux central ou une glomérulonéphrite diffuse aiguë puis, dans les 18 jours suivants, une infection rénale aiguë. Ces affections secondaires, en particulier le rhumatisme articulaire aigu, peuvent causer des dommages permanents.

Manifestations cliniques

FIGURE 15.3 ou bactérienne

648

Partie 6

Inammation des amygdales causée par une infection virale

Troubles liés aux systèmes

L’infection à SBHGA provoque de 20 à 30 % des pharyngites bactériennes chez les enfants (INESSS, 2016c). Elle est en général une maladie relativement brève dont la gravité peut aller de subclinique (asymptomatique) à extrêmement virulente TABLEAU 15.4. L’apparition de la maladie est souvent abrupte et caractérisée par une pharyngite, une céphalée, de la fièvre et des douleurs

La période d’incubation est de 24 à 72 heures. Très contagieux, ce type d’infection se propage par les gouttelettes produites par les éternuements et la toux, ou par le contact avec les sécrétions nasales ou les infections de la peau (American Academy of Pediatrics [AAP], 2015b). Un enfant non traité demeure infectieux pendant la phase aiguë de la maladie, dont la durée est de 7 à 10 jours, ainsi que la semaine qui suit. Si des antibiotiques sont administrés, la période infectieuse est de 24 heures, et l’enfant peut alors réintégrer le milieu de garde ou l’école (AAP, 2015b).

Examens paracliniques Les examens paracliniques ne sont pas indiqués si les signes cliniques suggèrent fortement une étiologie virale (p. ex., une toux, une rhinorrhée, un enrouement, des ulcères buccaux). En absence de signes viraux, un prélèvement de gorge devrait être effectué et analysé an de déceler le SBHGA. La plupart des infections à streptocoque sont des maladies de courte durée ; comme la réaction des anticorps apparaît plus tard que les manifestations cliniques, les tests ne peuvent servir qu’à établir un diagnostic rétrospectivement. Dans une clinique ou un bureau médical, il est possible de déceler rapidement le SBHGA à l’aide d’une trousse diagnostique (test rapide de détection des antigènes). Étant donné que ces tests rapides sont hautement spéciques, il n’est généralement pas nécessaire de conrmer un résultat positif à l’aide d’un prélèvement de gorge. Cependant, comme le degré de sensibilité de ces trousses varie considérablement, il est recommandé de procéder à un prélèvement de gorge aux ns de conrmation pour les enfants âgés de trois ans et plus dont le résultat est négatif (Randel et Infectious Disease Society of America, 2013 ; Shulman et al., 2012).

TABLEAU 15.4

Manifestations cliniques de la pharyngite

ENFANT

ADOLESCENT

Pharyngite • Fièvre

• Fièvre (peut atteindre 40 °C)

• Dysphagie

• Malaise

• Céphalée

• Douleur abdominale

• Anorexie

• Anorexie

• Vomissements

• Mal de gorge modéré • Céphalée Signes présents à l’examen physique • Hyperémie des muqueuses de légère à modérée

• Pharynx inammé (coloration de rouge léger à rouge vif)

• Scarlatine

• Exsudat folliculaire souvent abondant qui s’étend et fusionne pour former une pseudomembrane sur les amygdales

• Hyperémie des amygdales et du pharynx, pouvant s’étendre jusqu’au voile du palais et à la luette

• Œdème et sensibilité des ganglions cervicaux Sources : Adapté de Collège français d’ORL et de chirurgie cervico-faciale (2014) ; Fleisher (2018) ; INESSS (2016c) ; Sciences et Avenir (2014).

Approche thérapeutique

clinique

En présence d’une infection streptococcique de la gorge, Simon est né en octobre, et il est âgé de 5 mois. les antibiotiques recommanSes parents l’ont amené au groupe de médecine dés sont la pénicilline V par familiale. Il a une température rectale de 39,8 oC et voie orale ou l’amoxicilline de la rhinorrhée claire. Il respire rapidement. C’est en suspension orale pour les la première fois que le petit Simon est malade. jeunes enfants (INESSS, 2016c ; Shulman et al., 2012). Trouvez quatre questions à poser aux parents au sujet Une dose sufsante de pénide l’environnement de Simon an de déterminer la cilline orale est prescrite cause de ses signes cliniques. pour 10 jours, an de maîtriQuelles autres manifestations cliniques serait-il ser les manifestations aiguës possible d’observer présentement chez Simon ? locales et d’éliminer tout a) Irritabilité, sommeil perturbé, anorexie. micro-organisme restant capable de déclencher les b) Bradycardie, constipation, céphalée. manifestations cliniques c) Léthargie, somnolence, cyanose. du rhumatisme articulaire d) Urine foncée, adénopathie axillaire, otalgie. aigu. La pénicilline n’empêche pas le développement d’une glomérulonéphrite diffuse aiguë chez l’enfant à risque, mais elle peut prévenir la propagation à d’autres membres de la famille d’une souche néphrogénique du SBHGA. La pénicilline provoque habituellement une réponse rapide, dans les 24 heures. Il peut être nécessaire de prélever un frottis de gorge de suivi chez l’enfant qui a des antécédents de rhumatisme articulaire aigu ou dont les manifestations cliniques persistent après un traitement complet aux antibiotiques.

Jugement

abdominales. Les amygdales et le pharynx peuvent présenter une inammation et être couverts d’un exsudat qui apparaît généralement vers le deuxième jour de la maladie. Il convient toutefois de soupçonner une infection à streptocoque chez les enfants de plus de 2 ans qui ont une pharyngite sans exsudat. La langue peut sembler inammée et rouge (langue framboisée), et l’enfant peut présenter une irritation cutanée érythémateuse caractéristique, de type papier émeri n, sur le tronc, les aisselles, les coudes et les aines ; la luette est inammée et rouge. L’adénopathie cervicale antérieure, présente dans environ 30 à 50 % des cas, survient habituellement tôt, et les ganglions sont souvent douloureux. La douleur peut être intense et rendre la déglutition difcile. Les manifestations cliniques disparaissent habituellement en 7 à 10 jours à moins qu’elles ne soient compliquées d’une sinusite ou d’un abcès péripharyngien, périamygdalien ou rétropharyngien (INESSS, 2016c).

La benzathine pénicilline G administrée en dose unique par voie I.M. peut être indiquée s’il y a risque que le traitement de 10 jours ne soit pas complété, mais comme il s’agit d’un traitement Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

649

15

douloureux, il n’est pas le premier choix pour les enfants. Pour l’enfant allergique à la pénicilline, les céphalosporines à spectre étroit de première génération (p. ex., la céphalexine) par voie orale sont indiquées. L’azythromycine et la

clarithromycine sont des macrolides qui peuvent être utilisés. Toutefois, la résistance aux macrolides est un problème au Canada (Santé Canada, 2014b, 2016b). La clindamycine peut aussi être employée pour traiter l’infection à SBHGA.

Soins inrmiers PHARYNGITE 14 L’administration de médica­ ments par voie intramuscu­ laire est expliquée dans le chapitre 14, Techniques de soins.

PHARMACOVIGILANCE

Crèmes anesthésiques Vérier les contre-indications et les conseils d’utilisation des crèmes anesthésiques topiques utilisées. Dysphagie : Trouble de la déglutition.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les amygdales sont en général beaucoup plus grosses chez l’enfant que chez l’adolescent ou l’adulte. Cette différence semble être un mécanisme de protection puisque les jeunes enfants sont particulièrement vulnérables aux infections des voies respiratoires.

650

Partie 6

En cas de pharyngite, l’inrmière prélève un frottis de gorge aux ns d’analyse. Elle enseigne aux parents comment administrer les antibiotiques et les analgésiques conformément à la prescription tout en mettant l’accent sur l’importance de compléter l’antibiothérapie. Si l’antibiotique doit être injecté, l’injection doit être profonde, dans une grande masse musculaire (p. ex., le muscle vaste externe [vastus lateralis] ou le quadrant supéroexterne du muscle fessier antérieur) 14 . Pour prévenir la douleur chez l’enfant, il est possible d’appliquer sur la peau une crème anesthésique .

que la douleur puisse interférer avec l’alimentation orale, il est important de s’assurer de maintenir un apport liquidien adéquat tout en évitant de forcer l’enfant à manger. Des boissons froides ou de la glace broyée sont généralement mieux acceptées que les aliments solides. L’inrmière conseille aux parents de remplacer la brosse à dents de l’enfant par une neuve après 24 heures d’antibiothérapie ; de bien laver les appareils orthodontiques ; d’empêcher les autres membres de la famille, en particulier s’ils sont immunodéprimés, de partager boissons ou aliments avec l’enfant malade et d’éviter tout contact rapproché avec lui.

La douleur pharyngée peut être très forte, provoquant ainsi une dysphagie. Des compresses froides sur le cou peuvent apporter du soulagement. Chez l’enfant coopératif, des gargarismes à l’eau salée peuvent minimiser la douleur dans la gorge. L’acétaminophène et l’ibuprofène peuvent réduire efcacement la douleur de la gorge ; la préparation liquide ou la forme croquable sont préférables en raison de la douleur associée à la déglutition. Bien

Si l’enfant continue d’avoir une èvre élevée qui ne répond pas aux antipyrétiques, que sa gorge est très douloureuse, qu’il refuse d’ingérer des liquides et qu’il a une apparence maladive (p. ex., de la léthargie, une mauvaise perfusion périphérique, une tachypnée, etc.) de 24 à 48 heures après avoir commencé l’antibiothérapie, il est recommandé de le faire examiner de façon plus approfondie par le médecin.

15.2.3

Ce sont elles qui sont enlevées au cours d’une adénoïdectomie. Les amygdales tubaires, qui se trouvent près de la partie postérieure de l’orice rhinopharyngien des trompes d’Eustache, ne font pas partie de l’anneau lymphatique de Waldeyer.

Amygdalite

Les amygdales, une masse de tissu lymphoïde de grosseur variable, sont situées dans la cavité pharyngienne. Elles jouent un rôle dans la formation des anticorps et contribuent à la réponse immunitaire active chez les enfants. Les amygdales combattent bactéries et virus, et peuvent elles-mêmes devenir infectées. Elles sont en général beaucoup plus grosses chez l’enfant que chez l’adolescent ou l’adulte. Cette différence semble être un mécanisme de protection puisque les jeunes enfants sont particulièrement vulnérables aux infections des voies respiratoires. Plusieurs paires d’amygdales forment un anneau de tissu lymphoïde connu sous le nom d’anneau lymphatique de Waldeyer, qui encercle les parties buccale et nasale du pharynx FIGURE 15.4. Les amygdales palatines, celles qui sont enlevées au cours d’une amygdalectomie, ont une de leurs surfaces habituellement visible à l’examen de la bouche. Les végétations adénoïdes, aussi connues sous le nom d’amygdales phary ngiennes, sont proches des narines et des trompes d’Eustache, ce qui est source de difculté en cas d’inammation.

Troubles liés aux systèmes

Une étude récente a permis de montrer qu’il n’y a aucune diminution immunitaire future chez l’enfant de trois ans et plus après une amygdalectomie et une adénoïdectomie (Association d’oto-rhinolaryngologie et de chirurgie cervico-faciale du Québec, 2017a).

Étiologie L’amygdalite est souvent associée à une pharyngite. L’agent causal peut être viral ou bactérien. En raison de l’abondance de tissu lymphoïde et de la fréquence des infections des voies respiratoires, l’amygdalite est une cause fréquente de maladie chez le jeune enfant.

Manifestations cliniques Les manifestations cliniques de l’amygdalite sont dues à une infection ou à une hypertrophie.

L’enfant présente fréquemment des symptômes d’infections récidivantes (maux de gorge), ainsi que des troubles de la respiration et de la déglutition dus à l’augmentation du volume des amygdales palatines, qui obstruent alors le passage de l’air et des aliments. Lorsque survient une hypertrophie des végétations adénoïdes, l’espace situé derrière les choanes (orices postérieurs des fosses nasales) est bloqué, ce qui rend difcile ou impossible le passage de l’air entre le nez et la gorge, avec pour résultat une respiration buccale, des ronements, des troubles du sommeil ou des pauses de la respiration, ou encore des apnées obstructives du sommeil. L’infection chronique peut affecter des structures voisines comme la trompe d’Eustache, ce qui peut mener à des infections fréquentes ou chroniques de l’oreille associées à de l’otalgie ainsi qu’à une perte de l’audition (Association d’oto-rhinolaryngologie et de chirurgie cervico-faciale du Québec, 2017a).

Approche thérapeutique Comme l’amygdalite est une affection qui évolue spontanément vers la guérison, le traitement de la pharyngite virale est symptomatique. En cas d’amygdalite exsudative fébrile, il est important de déterminer si l’infection est d’origine virale ou streptococcique. Des tests rapides effectués tôt permettent d’éviter l’administration inutile d’antibiotiques. Si le frottis de gorge révèle une infection à SBHGA, il faut traiter par antibiothérapie. L’amygdalectomie consiste en l’ablation chirurgicale des amygdales palatines, soit en retirant complètement les amygdales (dissections extracapsulaires) ou en réduisant leur volume par l’ablation des parties protubérantes (dissections intra-amygdales) ; il s’agit alors d’une amygdalectomie subtotale (Association d’oto-rhinolaryngologie et de chirurgie cervico-faciale du Québec, 2017a ; Isaacson, 2012). Les deux principales indications pour une amygdalectomie sont les pharyngites répétitives en dépit des traitements antibiotiques et les troubles respiratoires obstructifs du sommeil, alors que les indications absolues sont la malignité, l’abcès périamygdalien récidivant et l’obstruction des voies respiratoires (Canadian Society of Otolaryngology – Head and Neck Surgery, 2016 ; Provincial Council for Maternal and Child Health (PCMCH) et Ministry of Health and Long-term Care, 2013). Il se fait environ 17 400 amygdalectomies et adénoïdectomies chaque année au Québec (Association d’oto-rhinolaryngologie et de chirurgie cervico-faciale du Québec, 2017a). L’adénoïdectomie, soit l’ablation chirurgicale des végétations adénoïdes, est recommandée si elles sont hypertrophiées et obstruent la

FIGURE 15.4

Localisation des diverses masses lymphoïdes formant les amygdales

respiration par le nez ; et si l’enfant présente une adénoïdite ou une sinusite chroniques, une otite moyenne avec épanchement, une obstruction des voies respiratoires provoquant un trouble respiratoire du sommeil, ou une rhinorrhée récidivante (Paradise, 2017). Selon la Canadian Society of Otolaryngology – Head and Neck Surgery (2016), « sept infections ou plus des amygdales ou des végétations adénoïdes dans l’année ou plus de cinq infections par année dans les deux dernières années, ou encore plus de trois infections par année dans les trois dernières années en dépit d’un traitement médical adéquat » constituent une indication pour l’amygdalectomie ou l’adénoamygdalectomie, soit le retrait des amygdales et des adénoïdes lors d’une même opération (Gref, 2011). En l’absence de ces critères, une observation étroite avec documentation des épisodes d’amygdalite est recommandée pour éviter les interventions inutiles et permettre une évolution vers la guérison. Chez certains enfants, l’efcacité de l’amygdalectomie et de l’adénoïdectomie reste modeste et peut ne pas justier le risque chirurgical (Burton, Glasziou, Chong et al., 2014). Les contre-indications, pour l’amygdalectomie comme pour l’adénoïdectomie, sont : 1) une fente palatine, car les amygdales aident à réduire l’échappement de l’air durant l’élocution ; 2) une infection aiguë au moment de la chirurgie, car l’inammation locale des tissus accroît le risque d’hémorragie ; et 3), une dyscrasie ou une maladie généralisée non maîtrisée (Paradise, 2017).

Chapitre 15

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les deux principales indications pour une amygdalectomie sont les pharyngites répétitives (en dépit des traitements antibiotiques) et les troubles respiratoires. Les indications absolues sont la malignité, l’abcès périamygdalien récidivant et l’obstruction des voies respiratoires.

éactivation des connaissances Nommez quatre éléments à observer au cours de l’examen de la gorge.

Dyscrasie : Anomalie hématologique.

Troubles liés au système respiratoire

651

15

Soins inrmiers AMYGDALITE

13 La préparation de l’enfant aux interventions est expliquée dans le chapitre 13, Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation.

La plupart des adénoïdectomies, des amygdalectomies et des adénoamygdalectomies sont maintenant effectuées en externe ; les priorités des soins préopératoires et postopératoires restent cependant les mêmes. Les enfants de deux ans et moins qui présentent une comorbidité (p. ex., un syndrome d’apnées obstructives du sommeil, une anomalie cardiaque congénitale, une malformation craniofaciale, une anémie falciforme) requièrent une période d’observation prolongée, plus vigilante et, parfois, une admission à l’unité de soins intensifs pédiatriques en phase postopératoire (Isaacson, 2012 ; PCMCH, 2014). L’enfant a besoin de la même préparation psychologique et des mêmes soins physiques que pour n’importe quelle autre chirurgie 13 . Les deux prochaines sous-sections mettent l’accent sur les soins inrmiers postopératoires après une adénoamygdalectomie, mais l’inrmière peut s’y référer en cas d’ablation des végétations adénoïdes ou des amygdales palatines seulement (PCMCH, 2014).

Prodiguer les soins postopératoires D’une manière générale, les soins inrmiers postopératoires se résument à apporter du confort et du soutien à l’enfant et à sa famille, ainsi qu’à réduire les activités ou les interventions susceptibles de provoquer un saignement. À la suite de l’intervention chirurgicale, il est possible que l’enfant souffre de nausées, de vomissements, de douleur à la gorge ; qu’il ait un problème de déglutition ; qu’il soit déshydraté ; ou qu’il présente une otalgie réexe, un œdème pulmonaire postobstructif, une insufsance vélopharyngée ou une sténose nasopharyngée. Les complications sont plus fréquentes chez les enfants atteints de déformations craniofaciales, du syndrome de Down, de paralysie cérébrale, de problèmes cardiaques majeurs ou de diathèse hémorragique, et chez les enfants de moins de trois ans avec un diagnostic d’apnées obstructives du sommeil conrmée par polysomnographie (Tweedie, Bajaj, Ifeacho et al., 2012). Après la chirurgie, l’enfant est placé sur l’abdomen ou le côté jusqu’à ce qu’il soit pleinement réveillé, an de faciliter le drainage des sécrétions. Il faut éviter de faire des aspirations de routine, pour prévenir tout traumatisme de l’oropharynx. Une fois réveillé, l’enfant peut s’asseoir.

Évaluation des saignements Il est fréquent qu’il y ait des sécrétions, en particulier du sang séché résultant de la chirurgie. Du

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Partie 6

Troubles liés aux systèmes

sang brun foncé est habituellement présent dans les vomissements, dans le nez et entre les dents. Les parents qui ne s’y attendent pas en sont souvent effrayés à un moment où il est important qu’ils demeurent calmes et rassurants. Les sécrétions et les vomissements doivent être inspectés pour y déceler tout signe de saignement ; il est cependant normal de voir du mucus teinté de sang. Il faut expliquer à l’enfant qu’il ne doit pas tousser, se racler la gorge, se moucher et faire quoi que ce soit d’autre qui puisse aggraver l’état du site opératoire.

Médication La gorge est douloureuse, et l’enfant a besoin d’analgésiques pendant les premiers jours postopératoires. L’inconfort est souvent plus important le matin que le soir, indépendamment de l’administration régulière des analgésiques. Les analgésiques antipyrétiques tels que l’acétaminophène ou l’ibuprofène favorisent le confort et sont administrés de façon regulière. Il peut être nécessaire de les combiner avec des analgésiques opioïdes comme la morphine pour une meilleure gestion de la douleur an que l’enfant puisse boire. Dès que l’enfant est capable de boire et que la douleur est maîtrisée, l’inrmière peut administrer l’acétaminophène et l’ibuprofène par voie orale, en alternance selon la prescription. Des méthodes non pharmacologiques peuvent également être utilisées dans le soulagement de la douleur (p. ex., distraire l’enfant, appliquer des compresses humides au niveau du cou) (Soleymanifard, Khademolhoseyni et Nouri, 2014). Pour le traitement des nausées et vomissements, un antiémétique comme l’ondansétron (ZofranMD ) peut être administré après la chirurgie. Malgré la controverse liée à l’utilisation des anti-inammatoires non stéroïdiens (AINS) pour la gestion de la douleur en phase postopératoire, aucune augmentation signicative d’épisodes d’hémorragie n’a été démontrée. En fait, l’administration d’AINS permet de diminuer les nausées et vomissements (Lewis, Nicholson, Cardwell et al., 2013 ; PCMCH, 2014). La douleur diminue graduellement au cours des deux semaines postopératoires avec une augmentation de l’inconfort du troisième au cinquième jour, ce qui coïncide avec la phase inammatoire de la guérison maximale de la plaie (Isaacson, 2012).

Alimentation La consommation de nourriture et de boissons est restreinte jusqu’à ce que l’enfant soit pleinement éveillé et ne présente aucun signe d’hémorragie. Une diète liquide progressant vers une diète molle est préférable. Il est possible de lui

offrir de l’eau froide, de la glace concassée, des sucettes glacées aromatisées ou des jus de fruits non acides dilués (écarter les jus d’agrumes), mais il faut éviter les liquides rouges ou bruns pour pouvoir distinguer dans l’émèse le sang des liquides ingérés 1 . Par la suite, il est possible de se mettre à la consommation d’aliments mous, notamment la gélatine aux fruits, les fruits cuits, les sorbets et les pommes de terre pilées. La douleur postopératoire entraîne fréquemment une baisse de la consommation de liquides, de sorte que des mesures de maîtrise de la douleur adéquates s’avèrent nécessaires, car une hydratation insufsante est associée à une augmentation de la douleur (PCMCH, 2014). Dans les premières 24 heures, il faut éviter d’offrir des produits laitiers car ils stimulent la production de mucus et laissent dans la bouche et la gorge un voile qui peut amener l’enfant à se racler la gorge, augmentant les risques de déclencher un saignement (Royal Victoria Regional Health Centre, 2013 ; University of Texas Health, 2018).

Complications à surveiller Une hémorragie postopératoire est un événement peu fréquent (qui se produit chez 3 à 5 % des enfants), mais potentiel. L’inrmière observe l’enfant pour détecter des signes d’hémorragie : tachycardie, pâleur, raclement fréquent de la gorge ou déglutition fréquente chez un enfant plus jeune, et vomissement de sang rouge clair. L’agitation due à une hémorragie peut être difcile à distinguer d’un inconfort général postchirurgical. Une baisse de la pression artérielle est un signe tardif de choc. Il peut être nécessaire de retourner l’enfant à la salle d’opération pour procéder à la ligature chirurgicale d’un vaisseau sanguin.

15.2.4

Grippe

La grippe (ou inuenza) est une maladie respiratoire infectieuse. Trois virus de la famille des orthomyxovirus en sont responsables. Ces trois virus présentent des différences sur le plan antigénique : les types A et B causent des épidémies alors que le type C n’est pas signicatif d’un point de vue épidémiologique. La grippe se répand par contact direct d’une personne à l’autre, par contact indirect avec un article récemment contaminé par des sécrétions rhinopharyngiennes, ou par transmission par grosses gouttelettes en suspension dans l’air produites par la toux ou à la suite d’éternuements (Aoki, Allen, Stiver et al., 2013).

Épidémiologie La grippe n’affecte aucun groupe d’âge particulier, mais sa fréquence d’attaque est à son maximum

Une obstruction des voies respiratoires peut également survenir en raison d’un œdème ou de l’accumulation de sécrétions ; elle sera décelée par la présence de signes de détresse respiratoire tels qu’un stridor, la sialhorrée, l’agitation, une fréquence respiratoire accrue et une cyanose progressive. Après une adénoamygdalectomie, il est nécessaire d’avoir à portée de la main de l’oxygène et l’équipement d’aspiration.

ALERTES CLINIQUES 1 Surveiller la fréquence de la déglutition pendant le sommeil de l’enfant et avertir le chirurgien immédiatement si un saignement continu est soupçonné. Le signe précoce le plus évident d’une hémorragie est la déglutition fréquente sans raison apparente (l’enfant ravale continuellement le sang qui tombe goutte à goutte). 2 Une hémorragie secondaire peut survenir jusqu’à 10 jours après la chirurgie en raison du décollement des gales, qui fait partie du processus de guérison. Tout signe de saignement requiert une attention médicale immédiate.

Soutenir la famille et enseigner les soins à domicile Après une amygdalectomie, les instructions à fournir au moment du congé incluent : 1) éviter les aliments irritants (p. ex., des rôties, des craquelins ou des aliments acides) ou très assaisonnés ; 2) éviter de se gargariser ou de se brosser les dents trop vigoureusement ; 3) éviter de tousser, de se racler la gorge ou de se mettre des objets dans la bouche ; 4) utiliser un analgésique ; 5) limiter l’activité pour réduire le risque d’hémorragie ; et 6) retourner immédiatement au centre hospitalier s’il y a un saignement évident ou une hémorragie dans les 10 jours postopératoires 2 . Il est fréquent, pendant les quelques jours suivant une intervention chirurgicale, de noter une halitose (mauvaise haleine) de même qu’une otalgie bénigne et une légère èvre. Cependant, une otalgie, une èvre ou une toux intenses et persistantes exigent une évaluation médicale. La plupart des enfants sont prêts à reprendre leurs activités normales de 1 à 2 semaines après l’opération.

15

chez les jeunes enfants qui n’ont eu aucun contact antérieur avec une souche donnée. Les nourrissons de moins de 6 mois y sont très vulnérables ; ils cumulent les taux les plus élevés d’hospitalisation et de longs séjours à l’unité de soins intensifs, ainsi que de mortalité (Chaves, Perez, Farley et al., 2014). Les enfants âgés de 6 à 23 mois présentent eux aussi un risque élevé. Pour la saison 2016-2017, la proportion la plus importante des cas de grippe nécessitant une hospitalisation a été signalée chez les enfants canadiens âgés de 0 à 2 ans. Sur la population totale des enfants hospitalisés, près de 20 % ont été admis en unité de soins intensifs ; 27 % d’entre eux étaient âgés de 0 à 23 mois (ASPC, 2017). Au cours d’une épidémie, il semble que l’infection entre enfants d’âge scolaire soit une source importante de transmission au sein d’une communauté. La maladie est Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

653

plus fréquente en hiver. La période d’incubation est de 1 à 4 jours avec une moyenne de 2 jours, et les personnes atteintes sont plus contagieuses pendant les 24 heures qui précèdent et suivent l’apparition des symptômes.

Physiopathologie Le virus a une afnité spéciale avec les cellules épithéliales de la mu queuse des voies respiratoires, où il détruit l’épithélium cilié en provoquant une hyperplasie méta plasique de l’épithélium de la trachée et des bronches, avec œdème associé. Les alvéoles peuvent également devenir distendues par une membrane hyaline. Le virus peut être isolé à partir d’un prélèvement des sécrétions rhinopharyngiennes effectué tôt après l’apparition de l’infection. Les examens sérologiques permettent d’en déterminer le type grâce au test de xation du complément, et le sous-groupe, à l’aide du test d’inhibition de l’hémagglutination.

Manifestations cliniques Les manifestations de la grippe sont subcliniques, et peuvent être d’intensité faible, modérée ou grave. La plupart des personnes atteintes présentent un assèchement de la gorge et des muqueuses nasales ainsi qu’une tendance à

TABLEAU 15.5

Chez l’enfant, la grippe sans complication n’exige habituellement qu’un traitement symptomatique : de l’acétaminophène ou de l’ibuprofène pour la èvre et sufsamment de liquides pour maintenir l’hydratation. Les antibiotiques ne sont nécessaires que pour les complications bactériennes de la grippe. L’oseltamivir (TamiuMD) et le zanamivir (RelenzaMD) sont les 2 antiviraux dont l’utilisation

MANIFESTATIONS CLINIQUES COMMUNES

COMPLICATIONS

Manifestations soudaines

Complications pulmonaires

• Forte èvre

• Toux persistante pendant 1 à 2 semaines

• Toux sèche

• Pneumonie bactérienne (causée par le Streptococcus pneumoniae, le Staphylococcus aureus ou le streptocoque du groupe A), virale ou mixte

Autres manifestations • Céphalées • Frissons et tremblements • Fatigue • Perte d’appétit • Mal de gorge • Rhinite • Adénopathie cervicale Autres manifestations chez les jeunes enfants

• Bronchite • Laryngo-trachéo-bronchite (croup) Autres complications • Otite • Sinusite • Déshydratation (due aux vomissements ou à la diarrhée) • Fatigue qui persiste de une à deux semaines • Myosite aiguë (provoquant des maux de jambes ou de dos) • Myocardite • Péricardite

• Nausées

• Choc toxique (dû à une affection bactérienne secondaire)

• Vomissements

• Complications neurologiques (convulsions fébriles, encéphalite, syndrome de Guillain-Barré)

• Diarrhées • Conjonctivite

Sources : Adapté de Aoki et al. (2013) ; Brook (2017) ; SCP (2015b).

Partie 6

Approche thérapeutique

Manifestations cliniques et complications de la grippe chez les nourrissons et les enfants

• Douleurs musculaires

654

l’enrouement. Visage rouge, photophobie, myalgie, hyperesthésie, et parfois épuisement et manque d’énergie accompagnent l’apparition soudaine de èvre et de frissons. Selon une étude prospective pancanadienne, chez la plupart des enfants hospitalisés à cause de la grippe, la èvre, la toux, une rhinorrhée et une certaine détresse respiratoire comptent parmi les signes qui sont observés. Les nourrissons de moins de six mois ont moins tendance à tousser et sont moins sujets à la pneumonie que les nourrissons et les enfants plus âgés, mais ils sont plus susceptibles de présenter une rhinorrhée et une déshydratation. La présence d’un croup de la région sous-glottique est fréquente, en particulier chez les nourrissons. Les manifestations de la grippe durent de quatre à cinq jours et les complications peuvent être de plusieurs ordres TABLEAU 15.5.

Troubles liés aux systèmes

est approuvée au Canada chez les enfants pour le traitement et la prophylaxie de l’inuenza de types A et B ENCADRÉ 15.4. Les antiviraux utilisés pour le traitement de la grippe sont bénéfi ques surtout lorsqu’ils sont pris dans les 24 à 48 heures suivant l’apparition des manifestations cliniques. Le zanamivir a été approuvé pour traiter les manifestations cliniques de la grippe des types A et B chez les enfants de plus de sept ans. C’est un médicament en aérosol qui est administré à l’aide d’un inhalateur oral (DiskhalerMD) deux fois par jour pendant cinq jours. Il peut causer un bronchospasme et une réduction de la fonction pulmonaire chez les enfants souffrant d’une maladie sousjacente des voies respiratoires comme l’asthme ou d’une maladie pulmonaire obstructive chronique (Aoki et al., 2013). L’oseltamivir est un inhibiteur de la neuraminidase et est administré pour le traitement de l’inuenza de types A et B non compliqué chez les enfants de un an ou plus qui sont symptomatiques depuis moins de deux jours. Il est également utilisé pour la prévention chez les enfants qui sont en contact étroit avec une personne présentant les manifestations cliniques de grippe. L’oseltamivir est administré par voie orale deux fois par jour pendant cinq jours, et la dose est calculée en fonction du poids de l’enfant (Aoki et al., 2013 ; Association des pharmaciens du Canada [APhC], 2017).

Prévention La vaccination demeure le meilleur moyen de prévention FIGURE 15.5. Il existe deux types de vaccins contre la grippe : le vaccin antigrippal inactivé et le vaccin quadrivalent vivant atténué (VVAI). Les vaccins antigrippaux inactivés sont disponibles en préparation trivalente (VTI) ou quadrivalente (VAQ) (c’est-à-dire, qu’ils contiennent trois et quatre souches du virus respectivement) (ASPC, 2018). Le VTI est sûr et efcace dans la mesure où les antigènes présents dans le vaccin correspondent aux virus de grippe

ENCADRÉ 15.4

qui circulent. Le VVAI, par vaporisation nasale, a été approuvé et homologué pour l’administration aux enfants de deux ans et plus (ASPC, 2018). Cependant, cette préparation contient un virus vivant et ne devrait pas être utilisée chez les enfants qui sont immunodéprimés, qui ont des réactions anaphylactiques aux protéines d’œufs, qui présentent une affection respiratoire réactionnelle (p. ex., de l’asthme), qui reçoivent un traitement immunodépresseur, qui sont atteints d’une maladie respiratoire chronique ou qui ont des antécédents du syndrome de Guillain-Barré.

FIGURE 15.5 Le vaccin contre la grippe est le meilleur moyen de prévention.

La prévention pour les nourrissons de moins de six mois, très vulnérables à une grippe grave, pose problème, car l’immunogénicité du vaccin contre la grippe est faible chez ces enfants contrairement à ce qui est ob servé chez les enfants de plus de six mois. Deux stratégies sont donc recommandées pour réduire le risque de grippe saisonnière chez ces nourrissons vulnérables : 1) la vaccination de la famille, des gardiennes ou des éducatrices ; et 2) la vaccination de la femme enceinte (ASPC, 2015, 2016 ; SCP, 2015c). Pour les enfants plus âgés, la stratégie est différente. Les enfants de moins de neuf ans qui se font vacciner pour la première fois contre la grippe doivent recevoir deux doses du vaccin. La seconde dose doit être donnée un mois après la première. S’ils ont déjà été vaccinés contre la grippe, les enfants de moins de neuf ans n’ont besoin que d’une seule dose du vaccin. À partir de neuf ans, les enfants ne nécessitent qu’une seule dose même s’ils n’ont jamais été vaccinés contre la grippe auparavant, car leur système immunitaire est sufsamment mature pour produire assez d’anticorps an de les protéger (gouvernement du Québec, 2017).

15

Clientèle visée par le traitement antiviral précoce

Le traitement antiviral est commencé le plus tôt possible pour réduire le risque de complications (p. ex., la pneumonie, l’insufsance respiratoire et le décès) chez les enfants hospitalisés à cause de la grippe qui :

• sont atteints de maladies chroniques pulmonaires (y compris l’asthme), cardiovasculaire, rénale, hépatique, hématologique ou métabolique (y compris le diabète) ;

• ont une maladie sévère, complexe ou progressive ;

• sont âgés de moins de 19 ans et qui reçoivent une thérapie d’acide acétylsalicylique à long terme ;

• présentent un risque élevé de souffrir de complications secondaires à la grippe ; • sont âgés de moins de 2 ans ;

• sont issus des Premières Nations, Inuits ou Métis avec conrmation d’un diagnostic de grippe ;

• sont immunodéprimés ;

• sont obèses (indice de masse corporelle ≥ 35).

Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

655

Soins inrmiers d’infection bactérienne secondaire et devrait être signalée au médecin qui pourra prescrire une antibiothérapie. Les enfants hospitalisés chez qui la grippe saisonnière est soupçonnée ou conrmée devraient être soumis à des précautions contre la transmission par gouttelettes et par contact. Les parents qui consultent en milieu ambulatoire doivent être informés des manifestations cliniques qui requièrent une consultation avec le médecin.

GRIPPE

Les soins inrmiers associés à la grippe sont les mêmes que pour toute IVRS et comprennent la mise en œuvre de mesures pour soulager l’inconfort. Les complications liées à une infection secondaire constituent le plus grand danger pour l’enfant atteint. Une èvre prolongée ou une apparence de èvre au début de la convalescence est un signe

15.2.5

Otite moyenne

L’otite moyenne (OM) est l’une des maladies les plus répandues au début de l’enfance. Il existe trois principaux types d’otites : l’otite externe (OE), l’otite moyenne aiguë (OMA) et l’otite interne (ou labyrinthite) TABLEAU 15.6. TABLEAU 15.6

Dénition

L’OMA est le type d’otite qui touche le plus les nourrissons et les enfants. C’est une inammation infectieuse d’origine virale ou bactérienne de l’oreille moyenne ou du tympan FIGURE 15.6. Sa fréquence est à son maximum durant les mois d’hiver. La trompe d’Eustache, relativement ouverte

Résumé des principaux types d’otites OTITE EXTERNE (OE)

OTITE MOYENNE AIGUË (OMA)

OTITE INTERNE (LABYRINTHITE)

• Inammation du conduit auditif, avec un tympan normal même en présence de sécrétions

• Inammation infectieuse (virale ou bactérienne) de l’oreille moyenne ou de la caisse du tympan

• Inammation ou infection de l’oreille interne (derrière la fenêtre ovale qui sépare l’oreille moyenne), dans la partie profondément cachée de la mastoïde (rocher)

• Virale ou bactérienne

• Virale, inammatoire ou bactérienne (rare)

• Synonyme : otite du baigneur

Origine

• Bactérienne (fréquente)

• Découle fréquemment d’une rhinopharyngite. Âge

• Tout âge

• Très courantes chez les enfants jusqu’à l’âge de six ans ; rare chez les adultes

• Plus commune chez l’adulte

Prévention

• Pratiquer la baignade dans une eau propre.

• Appliquer les mesures nécessaires pour éviter la rhinopharyngite (assurer l’hygiène des mains, désinfecter les objets ou les jouets contaminés par un virus).

• Traiter de façon précoce et appropriée les otites moyennes aiguës ou chroniques.

• Egoutter les conduits auditifs en penchant la tête de l’enfant de chaque côté, puis éponger la partie externe des oreilles avec une serviette. • Eviter l’utilisation des cotonstiges. Progression

• Une douleur qui s’étend en profondeur vers le tympan ou la mastoïde permet de suspecter une OE maligne. • Une douleur intense avec de la èvre peut indiquer la présence d’un furoncle dans le conduit auditif.

• Appliquer les mesures nécessaires pour éviter le passage de la rhinopharyngite à l’otite moyenne aiguë (assurer l’hygiène nasale pour soigner le rhume, éviter l’exposition au tabagisme passif, enseigner à l’enfant à se moucher correctement et à couvrir sa bouche avec son bras quand il tousse). • Une OMA mal soignée peut s’aggraver et progresser vers : – une otite moyenne avec épanchement (OME) (tympan intact) ; – une otite moyenne avec tympan perforé : inammation ou infection de l’oreille moyenne avec perforation du tympan permettant l’écoulement de l’épanchement dans le conduit auditif (otorrhée) ; – un cholestéatome : invasion de la membrane tympanique, parfois sur les deux faces, par un tissu épithélial identique à la peau à la suite d’une OMA mal soignée.

Sources : Adapté de About Kids Health (2010) ; Van Den Abbeele, Dang, Dupont et al. (2013).

656

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

• En cas d’absence de traitement pharmacologique, une labyrinthite d’origine virale ou bactérienne peut dégénérer en une méningite, un abcès cérébral ou la surdité.

et horizontale chez le nourrisson et le jeune enfant, offre aux agents pathogènes un accès facile à l’oreille moyenne FIGURE 15.1. Dans bien des cas, les OMA d’origine virale ou bactérienne sont précédées d’une infection respiratoire virale. La plupart des épisodes d’OMA surviennent durant les 24 premiers mois de la vie, mais leur fréquence diminue avec l’âge, à l’exception d’une légère augmentation vers l’âge de 5 ou 6 ans, lorsque l’enfant commence à fréquenter l’école. L’OM est plutôt rare chez les enfants de plus de 7 ans (Le Saux, Robinson et Canadian Paediatric Society, 2016). On distingue trois types d’otite moyenne ENCADRÉ 15.5.

Étiologie

Un lien a été observé entre la prévalence de l’OMA et les méthodes utilisées pour l’alimentation du nourrisson. L’OMA est moins fréquente chez les nourrissons allaités comparativement à ceux qui reçoivent une préparation commerciale pour nourrissons. Les immunoglobulines A contenues dans le lait maternel protègent le nourrisson contre les virus respiratoires et les allergies, et limitent l’exposition des trompes d’Eustache et de la muqueuse de l’oreille moyenne aux pathogènes microbiens et aux protéines étrangères. Un reux de lait le long des trompes d’Eustache est moins susceptible de se produire chez le nourrisson allaité en raison de

ENCADRÉ 15.5

Types d’otite moyenne

• Otite moyenne (OM) : Inammation de l’oreille moyenne, sans référence à l’étiologie ni à la pathogenèse • Otite moyenne aiguë (OMA) : Inammation de la cavité de l’oreille moyenne (caisse du tympan) avec apparition rapide des manifestations cliniques d’une infection aiguë, soit la èvre et l’otalgie (douleur à l’oreille) • Otite moyenne avec épanchement (OME) : Présence de liquide derrière un tympan intact, sans infection, d’une durée de plus de trois semaines. Synonyme : otite séreuse ou otite séromuqueuse (OSM)

FIGURE 15.6

Anatomie de l’oreille (externe, moyenne et interne)

la position semi-verticale adoptée durant l’allaitement, comparativement à celle du nourrisson nourri au biberon. En plus d’offrir l’allaitement maternel jusqu’à l’âge de six mois, éradiquer le tabagisme à la maison, adopter une hygiène nasale adaptée à l’âge de l’enfant et suivre le programme de vaccination sont d’autres mesures préventives efcaces TABLEAU 15.7 (PasseportSanté.net, 2017).

Physiopathologie Les enfants sont plus prédisposés à l’OMA parce que leurs trompes d’Eustache sont plus courtes, sur un plan plus horizontal et plus susceptibles de subir une obstruction extrinsèque causée par une hypertrophie des végétations adénoïdes ou des tumeurs rhinopharyngiennes. Les infections virales et les allergies peuvent provoquer une inammation des trompes, qui peut par la suite causer une obstruction intrinsèque (Le Saux et al., 2016).

CE QU’IL FAUT RETENIR

Deux des facteurs de risque les plus fréquents de l’OM sont l’anatomie des trompes d’Eustache de l’enfant en bas âge et la fréquentation d’un milieu de garde en raison du risque accru d’infections virales.

L’oreille moyenne contient normalement une petite quantité de uide qui s’écoule de l’oreille à l’arrière de la gorge en passant par la trompe d’Eustache. L’obstruction mécanique ou fonctionnelle de la trompe d’Eustache peut entraîner une accumulation de sécrétions dans l’oreille moyenne. Anaïs Viau-Label, âgée de 15 ans, L’effondrement persistant de la trompe vient d’être admise à l’hôpital pour des durant la déglutition peut causer une manifestations respiratoires anormales obstruction fonctionnelle associée à qui semblent d’allure grippale. Quelle une diminution de la rigidité ou à une mesure prioritaire devra être prise pour éviter une contamination ? décience du mécanisme d’ouverture. L’obstruction de la trompe d’Eustache a) Protection aérienne seulement. provoque une pression d’air négab) Isolement gouttelettes-contact. tive dans l’oreille moyenne, ce qui y c) Protection de l’environnement. attire les bactéries du rhinopharynx, inhibe le drainage et produit un épand) Précautions de base seulement. chement transsudatif. Si le passage

clinique

Jugement

Les deux virus les plus susceptibles de provoquer une OMA sont le VRS et le virus de la grippe. Dans le cas d’une infection d’origine bactérienne, ce sont le S. pneumoniae, l’H. influenzae et le Moraxella catarrhalis qui sont les plus fréquemment responsables de l’OMA. L’étiologie de l’OMA non infectieuse est inconnue, quoique l’inammation puisse survenir en raison d’un blocage des trompes d’Eustache dû à l’inammation causée par une IVRS, une rhinite allergique ou une hypertrophie des végétations adénoïdes. L’OME est souvent le prolongement d’un épisode aigu.

Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

657

15

TABLEAU 15.7

Facteurs de risque de l’otite moyenne aiguë

FACTEURS GÉNÉTIQUES, ANATOMIQUES ET PATHOLOGIQUES

FACTEURS ENVIRONNEMENTAUX

• Garçons d’âge préscolaire

• Saison d’hiver (associé aux virus respiratoires)

• Jeune âge (surtout âgé de moins de 24 mois ; lié à l’anatomie des trompes d’Eustache et à de faibles taux de sécrétion d’immunoglobuline A)

• Enfants d’origine inuite

• Anomalies orofaciales (p. ex., la fente palatine) • Trisomie 21

• Fréquentation d’un milieu de garde (lié à une exposition aux infections virales) • Encombrement des maisons (présence d’autres enfants, surpeuplement) • Exposition à la fumée secondaire ou à un niveau de pollution élevé (risque accru d’un épanchement permanent de l’oreille moyenne, qui favorise la xation des pathogènes responsables de l’otite à l’épithélium de la caisse du tympan, prolonge la réponse inammatoire et obstrue le drainage par la trompe d’Eustache) • Non-allaitement, alimentation au biberon en position couchée

• Prématurité

• Non-respect des règles d’hygiène (mains, jouets, surfaces, etc.)

• Immunodécience • Antécédents familiaux d’OM (parents, frères et sœurs présentant des antécédents d’OME)

• Usage fréquent de suce après l’âge de 10 mois • Hospitalisation récente • Traitement antibiotique de moins de 1 mois

• Hypertrophie adénoïdienne

• Reux gastro-oesophagien

• Microdélétion 22q11 (syndrome de Shprintzen-Goldberg ou syndrome Di George)

• Statut socioéconomique de la famille • Colonisation bactérienne du rhinopharynx • Présence d’une infection virale des voies respiratoires supérieures

Sources : Adapté de INESSS (2016b) ; Le Saux et al. (2016).

n’est pas totalement obstrué, l’oreille moyenne peut être contaminée par du reux, une aspiration ou une insufation lorsque l’enfant pleure, éternue, se mouche ou déglutit en présence d’une congestion nasale.

Diagnostic Une évaluation soigneuse de la mobilité de la membrane tympanique à l’aide d’un otoscope est

essentielle pour distinguer l’OMA de l’OME. Dans l’OME, la membrane tympanique est immobile ou présente une décoloration orange. Les manifestations cliniques, la rapidité de l’apparition de l’otalgie et l’inspection visuelle de la membrane tympanique sont utiles pour établir le diagnostic (INESSS, 2016b ; Le Saux et al., 2016) TABLEAU 15.8.

Approche thérapeutique Antibiothérapie

TABLEAU 15.8

Manifestations cliniques de l’otite moyenne

OMA

OME

• Apparition à la suite d’une IVRS

• Perte d’acuité auditive • Difculté à communiquer (ne répond pas ou n’est pas attentif) • Possibilité d’une sensation de plénitude de l’oreille, d’acouphène ou de vertige • Retard d’apprentissage • Retard du développement du langage

• Apparition rapide d’otalgie • Possibilité de èvre • Possibilité d’otorrhée Nourrisson et trottineur

Enfant d’âge préscolaire

• Pleurs inexpliqués

• Pleurs ou verbalisation de l’inconfort

• Comportement difcile, agité et irritable surtout en position couchée • Tendance à frotter, à tenir ou à tirer l’oreille atteinte

• Irritabilité • Léthargie • Perte d’appétit

• Tendance à tourner la tête d’un côté et de l’autre • Perte d’appétit • Réconfort difcile

658

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

Le traitement antibiotique de l’OMA est l’approche thérapeutique la plus courante dans un environnement ambulatoire. Cependant, les préoccupations récentes au sujet du S. pneumoniae résistant aux antibiotiques et la surutilisation de l’antibiothérapie ont amené les autorités compétentes à recommander une utilisation prudente et judicieuse des antibiotiques pour le traitement de cette maladie. Selon la littérature actuelle, une attente vigilante, soit une observation durant une période de 24 à 48 heures, sans administration d’antibiotiques, de façon à voir s’il se produira une résolution spontanée, constitue un traitement sécuritaire et approprié de l’OMA chez le nourrisson de plus de 6 mois et chez l’enfant qui présente des signes légers, c’est-à-dire une èvre inférieure à 39 °C et l’absence d’une perforation tympanique sans anomalies craniofaciales (INESSS, 2016b ; Le Saux et al., 2016). Si l’attente vigilante est choisie, des conseils sont fournis aux parents concernant l’administration d’analgésiques (ibuprofène), le recours à une nouvelle consultation si l’état de

l’enfant ne s’améliore pas et l’exécution d’une prescription d’antibiotiques si nécessaire (prescription reportée). Cependant, l’approche de l’attente vigilante n’est pas recommandée pour les nourrissons de moins de 6 mois de même que pour les enfants de moins de 2 ans en cas d’otite bilatérale ou en présence de manifestations cliniques graves (apparence maladive, otalgie importante ou forte èvre de plus de 39 °C prise par voie orale) (INESSS, 2016b). Cette approche n’est pas recommandée également pour les enfants inuits, car ils présentent une fréquence élevée d’OM suppurative. Presque 20 % des enfants inuits du Nunavik ont une perte d’audition, cette proportion étant presque 10 fois plus élevée que chez les autres enfants au Québec. Les facteurs de risque liés aux conditions de vie qui contribuent au développement des infections respiratoires et à une augmentation de l’otite chez le jeune enfant inuit sont : 1. l’exposition à la fumée secondaire ; 2. les logements surpeuplés, mal ventilés, nécessitant des réparations (donc risque de moisissures et d’IVRS) ;

TABLEAU 15.9

Traitement de l’otite selon les manifestations cliniques et l’âge des enfants

MANIFESTATIONS CLINIQUES

ÂGE

TRAITEMENTa

De 3 mois à 2 ans

Amoxicilline 90 mg/kg/jour ÷ b.i.d. Durée : 10 jours

De 3 à 6 mois

• Option d’observation 48 heures ou

Sévère • Otalgie de modérée à grave de plus de 48 heures ou • Fièvre ≥ 39 °C ou • Perforation tympanique Non sévère • Otalgie légère de moins de 48 heures et

• Amoxicilline 90 mg/kg/jour ÷ b.i.d. Durée : 10 jours

• Fièvre < 39 °C et • Aucune perforation tympanique

De 7 mois à 2 ans

• Amoxicilline 90 mg/kg/jour ÷ b.i.d. Durée : de 5 à 7 jours

3. l’allaitement de courte durée ; 4. l’alimentation par biberon en position couchée ; 5. l’accès limité aux soins de santé (Kohen, Bougie et Guèvremont, 2015). Les évaluations des traitements de l’OMA ne permettent pas de prouver de façon précise que les antibiotiques améliorent les résultats chez les enfants de moins de deux ans présentant une OMA sans complication. De plus, tous les cas d’OMA chez les nourrissons de moins de trois mois doivent être traités aux antibiotiques en raison de l’immaturité du système immunitaire et du potentiel d’infection par des bactéries autres que les trois plus courantes chez les nourrissons plus âgés et les enfants présentant une OMA.

• Option d’observation 48 heures ou

a L’American

Academy of Pediatrics recommande un traitement antibiotique en cas d’otite bilatérale chez tous les enfants de moins de deux ans. De son côté, la Société canadienne de pédiatrie ne fait pas de distinction entre l’OMA unilatérale ou bilatérale. Source : Adapté de INESSS (2016b). Médicament antibiotique, Otite moyenne Aigüe (OMA) chez l’enfant de trois mois et plus. Repéré à www.inesss.qc.ca/leadmin/doc/CDM/UsageOptimal/Guides-serieI/INESSS-Antibio1-OtiteEnfant-fr_maj-mars16.pdf.

oral (Foxlee, Johansson, Wejfalk et al., 2006). Les antihistaminiques et les décongestionnants ne sont pas recommandés. Les gouttes antibiotiques pour l’oreille n’apportent rien au traitement de l’OMA.

Intervention chirurgicale

Soins de soutien

La myringotomie, une incision chirurgicale du tympan, peut être nécessaire pour soulager la douleur aiguë de l’OMA, pour drainer le liquide de l’oreille moyenne infectée en présence de complications telles qu’une mastoïdite, une labyrinthite ou une paralysie faciale, ou pour permettre au pus présent dans l’oreille moyenne de s’écouler dans le canal externe an d’effectuer un prélèvement. La myringotomie par laser peut être effectuée en consultation externe par un oto-rhino-laryngologiste (Yousaf, Malik et Haroon, 2016 ; Yousaf, Malik et Zada, 2014).

Traiter la èvre et la douleur fait partie des soins de soutien et du traitement symptomatique de l’OMA TABLEAU 15.9. Pour la èvre ou l’inconfort, il est possible d’administrer un analgésique antipyrétique comme l’acétaminophène ou l’ibuprofène. Le soulagement topique de la douleur par application externe de chaleur ou de froid est également recommandé, ou encore des gouttes auriculaires anesthésiques combinées à un analgésique

L’insertion d’un drain transtympanique et l’adénoïdectomie sont deux interventions chirurgicales qui peuvent être effectuées pour traiter l’OM récidivante. L’insertion d’un petit tube en plastique dans le tympan permet de drainer l’oreille, d’équilibrer la pression entre l’oreille moyenne et la cavité nasale en offrant une voie de sortie au liquide. Le tube réduit la fréquence des otites et améliore l’audition. Le tympan

Si l’on suspecte une méningite, une mastoïdite ou encore une toxicité ou une atteinte de l’état général, l’enfant doit être vu de toute urgence par un médecin (INESSS, 2016b ; SCP, 2016). Lorsque l’utilisation d’antibiotiques est préconisée et que l’enfant n’est pas allergique à la pénicilline, l’amoxicilline est le médicament oral le plus efcace contre le S. pneumoniae, même s’il est pénicillinorésistant.

15

Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

659

cicatrise, se referme naturellement et évacue le tube au bout de 6 à 12 mois (Rosenfeld, Schwartz, Pynnonen et al., 2013 ; Zakrzewski et Lee, 2013) FIGURE 15.7 . La myringotomie avec insertion de drain transtympanique doit être réservée, selon les lignes directrices actuelles, aux enfants souf frants des infections suivantes : • une OME récurrente ; • une OME chronique persistant pendant au moins 3 mois et présentant des difcultés d’audition ou autres manifestations cliniques telles qu’une gêne auriculaire, des troubles de l’équilibre, de mauvais résultats scolaires, des troubles du comportement, ou une réduction de la qualité de vie ; • toute OME, peu importe la durée, dans le cas d’enfants qui présentent un risque accru de troubles de la parole, du langage ou de l’apprentissage – tels que les enfants présentant un trouble du spectre autistique, une fente palatine, un trouble craniofacial et un syndrome de Down (Ndegwa, 2014).

FIGURE 15.7 En cicatrisant, le tympan évacue le drain.

Pour le traitement de l’otite, l’adénoïdectomie n’est effectuée que chez l’enfant ayant une OMA récidivante, une OME chronique avec obstruction postnasale, une adénoïdite ou une sinusite chronique.

Suivi L’OME est fréquemment associée à une perte légère ou modérée de l’audition ; en conséquence, un examen de l’audition devrait être effectué trois mois après l’épisode aigu d’OMA, si l’OME persiste trois mois ou plus, ou encore s’il y a évidence de retard d’apprentissage ou d’acquisition du langage. Des examens de suivi chez l’enfant atteint d’OME chronique doivent être effectués tous les trois à six mois jusqu’à ce que l’OME soit résolue, ou si une perte auditive signicative ou un défaut structurel de la membrane tympanique ou de l’oreille moyenne sont décelés (Rosenfeld et al., 2013). Il faut diriger l’enfant présentant une perte auditive vers un oto-rhino-laryngologiste et le faire évaluer en orthophonie au besoin.

Prévention Au Québec, une réduction des infections invasives à pneumocoque, ainsi qu’une prévention de l’OM sont observées dans tous les groupes d’âge et surtout chez les enfants âgés de moins de cinq ans depuis l’introduction, en 2004, de la vaccination avec le vaccin conjugué contre le pneumocoque. L’évaluation du vaccin contre la grippe dans la prévention de l’OMA chez le nourrisson et l’enfant a démontré au moins un épisode d’OMA de moins pendant six mois de suivi et une réduction de l’utilisation des antibiotiques chez les enfants vaccinés (Norhayati, Ho et Azman, 2015).

Soins inrmiers OTITE MOYENNE

Les objectifs inrmiers pour l’enfant souffrant d’une OM incluent d’assurer une évaluation précoce de l’otite, de soulager la douleur, de faciliter le drainage lorsque c’est possible, de prévenir les complications et la récurrence, ainsi que de soutenir et d’informer la famille.

Reconnaître les signes précoces La détection précoce d’un épanchement de l’oreille moyenne est essentielle pour prévenir les complications. Il est donc important d’examiner le nourrisson et l’enfant d’âge préscolaire pour en détecter la présence. De plus, tous les enfants d’âge scolaire, en particulier ceux qui connaissent des difcultés d’apprentissage, devraient aussi être examinés. S’il y a épanchement de l’oreille moyenne, il est conseillé de procéder à des évaluations audiologiques fréquentes, d’encourager le recours à une consultation médicale et d’informer les parents et les enfants.

660

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

Soulager la douleur et faciliter le drainage Les analgésiques, tels que l’acétaminophène et l’ibuprofène, sont utilisés pour soulager la douleur. Lorsque l’oreille présente un épanchement, le canal externe peut être nettoyé à l’aide d’une compresse. Si une mèche ou une compresse de gaze stérile légèrement enroulée a été placée dans l’oreille après une chirurgie, elle devrait être sufsamment lâche pour permettre le drainage du liquide ; autrement, l’infection pourrait s’étendre à l’apophyse mastoïde. À l’occasion, l’exsudat peut être si abondant que le pavillon de l’oreille et la peau entourant l’oreille deviennent excoriés. L’excoriation de la peau peut généralement être évitée par de fréquents nettoyages et l’application d’une barrière émolliente (p. ex., Proshield PlusMD) ou de gelée de pétrole (p. ex., VaselineMD).

Empêcher l’eau de pénétrer dans les oreilles La mèche doit rester sèche. Autant que possible, l’eau de bain et de shampooing ne doit pas

pénétrer dans l’oreille, car le savon réduit la surface de tension de l’eau et facilite la pénétration de l’eau à travers le drain. L’utilisation d’un bouchon d’oreille ne fait pas l’unanimité, car normalement, le drain transtympanique ne permet pas à l’eau de pénétrer dans l’oreille moyenne. L’utilisation de bouchons d’oreille n’est nécessaire, durant la première semaine postopératoire, qu’en cas d’otorrhée ou d’inconfort lorsque l’eau pénètre le canal, ou si l’enfant se baigne dans un lac ou a tendance à immerger la tête dans l’eau du bain (Rosenfeld et al., 2013). Les parents doivent savoir à quoi ressemble le drain (habituellement un petit tube de plastique en forme de bobine) pour pouvoir le reconnaître s’il tombe. Il convient aussi de les rassurer sur le fait que cette situation est assez courante et qu’une intervention

immédiate n’est pas nécessaire, tout en leur précisant qu’ils doivent quand même en aviser le médecin.

15.3

15.3.1

Syndromes du croup

Le terme général croup s’applique à un ensemble complexe de manifestations cliniques caractérisé par l’enrouement, une toux résonnante décrite comme rauque (croupeuse) ou aboyante, divers degrés de stridors inspiratoires et différents niveaux de détresse respiratoire due à un œdème ou à une obstruction dans la région du larynx. Les infections aiguës du larynx ont une prévalence accrue chez l’enfant de six mois à cinq ans, et le diamètre réduit de leurs voies respiratoires augmente le risque de rétrécissement important lorsqu’il y a inammation (Association d’oto-rhinolaryngologie et de chirurgie cervico-faciale du Québec, 2017d). Les syndromes du croup sont décrits en fonction de la principale région anatomique atteinte, soit l’épiglottite ou supraglottite, la laryngite, la laryngotrachéobronchite et la trachéite TABLEAU 15.10. Les syndromes du croup peuvent affecter le larynx, la trachée et les bronches FIGURE 15.1 . Cependant, la région laryngée domine souvent dans le portrait clinique en raison des effets graves sur la voix et la respiration. Avec les vastes programmes de vaccination visant à prévenir la grippe due à l’H. inuenzae de type B, la cause de la plupart des cas de croup au Canada et aux États-Unis est attribuée à des virus. Parmi les virus communs gurent le virus para-inuenza, le métapneumovirus humain, les virus de la grippe des types A et B, les adénovirus, le virus respiratoire syncytial (VRS) et le virus de la rougeole (Alberta Clinical Practice Guideline Working Group, 2008 ; Association pulmonaire du Canada, 2014c).

Prévenir les complications et la récurrence La prévention de la récurrence exige un enseignement adéquat au sujet de l’antibiothérapie. La douleur et la èvre disparaissent habituellement en 24 à 48 heures, mais l’inrmière doit insister sur l’importance de compléter le traitement prescrit. Les parents doivent savoir que les complications possibles de l’OM, comme la perte d’audition, peuvent être prévenues avec un traitement et un suivi adéquats. Les parents ont également besoin de conseils d’ordre préventif quant aux techniques permettant de réduire le risque d’OM, en particulier chez l’enfant de moins de deux ans.

Épiglottite aiguë

L’épiglottite aiguë, ou supraglottite aiguë, est une infection aiguë des voies respiratoires qui cause un processus inammatoire obstructif grave de l’épiglotte et des tissus adjacents, et qui constitue une urgence médicale exigeant des soins immédiats FIGURE 15.8. Le taux de mortalité associé à l’obstruction des voies respiratoires est de 5 à 10 % (ASPC, 2011a ; Udeani, 2016). L’épiglottite survient principalement chez les enfants de 2 à 8 ans, mais peut se manifester du début de l’enfance jusqu’à l’âge adulte (Woods, 2017). L’obstruction est supraglottique, par opposition à l’obstruction sousglottique de la laryngite.

15

Étiologie Le micro-organisme responsable était habituellement l’H. inuenzae de type B, mais depuis la mise en œuvre du programme de vaccination, il est moins fréquemment en cause (Udeani, 2016), et le taux d’épiglottite a diminué chez les enfants vaccinés. Les autres bactéries associées à l’épiglottite sont le S. pneumoniae, le S. aureus, l’H. inuenzae de type non-B, ainsi que les streptocoques A, B et C. Des causes non infectieuses ainsi que l’œdème angioneurotique et le traumatisme peuvent causer l’épiglottite (Udeani, 2016). La période d’incubation dure de deux à quatre jours. La laryngotrachéobronchite et l’épiglottite ne se présentent pas concurremment.

Manifestations cliniques L’épiglottite survient de façon soudaine et peut progresser rapidement vers une détresse respiratoire grave .

Chapitre 15

ALERTE CLINIQUE

Trois observations cliniques permettent de prédire une épiglottite : l’absence de toux spontanée, l’hypersialorrhée (salivation excessive) et l’agitation.

Troubles liés au système respiratoire

661

TABLEAU 15.10

Comparaison des syndromes du croup ÉPIGLOTTITE AIGUË

LARYNGOTRACHÉO­ BRONCHITE AIGUË (CROUP)

LARYNGITE SPASMODIQUE AIGUË (FAUX CROUP)

TRACHÉITE BACTÉRIENNE

Âge

• 2-8 ans

• 6 mois-3 ans

• < 5 ans

• 1 mois-6 ans

Agents étiologiques

• Bactériens courants

• Viraux

• Viraux avec composante allergique

• Bactériens avec composante allergique

– H. inuenzae de type B – Pneumocoque du groupe A – S. pneumoniae – S. aureus – Streptocoque bêtahémolytique – Streptocoque bêtahémolytique du groupe A et C

– Virus para-inuenza de type 1, 2 et 3

– Staphylococcus (plus fréquent)

– Virus inuenza de type A et B

– H. inuenzae de type B

– Métapneumovirus humain

– M. catarrhalis

– VRS

– Streptocoque bêtahémolytiques du groupe A (SBHGA)

– Adénovirus

– M. catarrhalis

– Entérovirus

– Haemophilus parainuenzae

– Rhinovirus

– Entérobactéries – S. pneumoniae

• Bactériens (plus rare)

– Pseudomonas aeruginosa

– M. pneumoniae

– Klebsiella

– Corynebacterium diphtheriae Apparition

• Apparition soudaine, pouvant mener rapidement à une obstruction des voies respiratoires

• Apparition graduelle, débute souvent par une rhinopharyngite

• Apparition soudaine la nuit

• Apparition aiguë ou subaiguë pouvant mener rapidement à une obstruction des voies respiratoires

• Symptômes apparaissant en soirée ou la nuit, et lorsque l’enfant est agité, avec amélioration le jour et récurrence des symptômes le soir Principales manifesta­ tions cliniques

• Dysphagie avec hypersialorrhée

• IVRS

• IVRS

• IVRS

• Stridor aggravé en décubitus dorsal

• Stridor inspiratoire

• Toux croupeuse

• Fièvre élevée (> 39 °C)

• Tirage sus-sternal

• Toux croupeuse, aboyante

• Absence de toux croupeuse ou d’autres symptômes d’une IVRS

• Toux rauque, croupeuse

• Stridor inspiratoire

• Enrouement

• Enrouement

• Sécrétions purulentes et abondantes

• Apparence maladive

• Dyspnée

• Dyspnée

• Fièvre élevée (> 39 °C)

• Pouls et respiration accélérés

• Agitation

• Position assise en tripode ou trépied

• Irritabilité

• Fièvre modérée ou subfébrile

• Voix étouffée

• Absence de réponse au traitement par épinéphrine nébulisée

• Fièvre légère (< 38 °C)

• Dyspnée

• Symptômes uctuant selon l’état de calme ou d’agitation de l’enfant, et s’améliorant souvent en route vers l’hôpital

• Agitation

• Absence de dysphagie Traitement

• Agitation • Symptômes réveillant l’enfant (pire la nuit), mais disparaissant le jour • Tendance à la récidive

• Urgence médicale

• Corticostéroïdes

• Corticostéroïdes

• Urgence médicale

• Protection des voies respiratoires (intubation)

• Épinéphrine nébulisée

• Épinéphrine nébulisée

• Hydratation par voie I.V.

• Protection des voies respiratoires (intubation)

• Hydratation par voie I.V.

• Oxygène humidié

• Antibiotiques

• Antibiotiques Sources : Adapté de Alberta Clinical Practice Guideline Working Group (2008) ; Meneghetti (2017) ; SCP (2014) ; Zoorob, Sidani et Murray (2011).

Partie 6

• Apparence maladive • Signes de détresse respiratoire (tirage, battement des ailes du nez, dyspnée, cyanose)

• Corticostéroïdes (controversé)

662

• Stridor inspiratoire

Troubles liés aux systèmes

• Hydratation par voie I.V.

L’enfant, habituellement asymptomatique au coucher, se réveille plus tard en se plaignant d’un mal de gorge et de douleur à la déglutition ; il a de la èvre et il est agité. Il adopte une position assise droite et inclinée vers l’avant, le menton tendu, la bouche ouverte, et présente une protrusion linguale (position en tripode) pour faciliter sa respiration. La sialorrhée est fréquente en raison de la dysphagie causée par l’inammation, de la douleur à la déglutition ou des sécrétions excessives. L’enfant est irritable, extrêmement agité, et il a une expression d’anxiété, d’appréhension et de peur. Sa voix n’est pas enrouée, mais est assourdie ou éteinte, avec un stridor à l’inspiration. Il peut y avoir tirage sus-sternal et sous-sternal. Il est rare que l’enfant lutte pour respirer ; une respiration lente et tranquille lui fournit un meilleur échange d’air. Le teint cireux dû à l’hypoxie bénigne peut progresser vers une cyanose franche. L’inspection minutieuse de la glotte montre une épiglotte caractéristique : enée, de couleur rouge cerise et œdématiée. Habituellement, cette inspection est effectuée dans la salle opératoire au moment de l’intubation endotrachéale. Un diagnostic provisoire d’épiglottite constitue une urgence. L’évolution de l’épiglottite peut être fulgurante, et l’obstruction respiratoire peut apparaître soudainement. L’obstruction progressive mène à l’hypoxie, à l’hypercapnie et à l’acidose, suivies d’une diminution du tonus musculaire et d’une baisse du niveau de conscience ; puis, lorsque l’obstruction devient plus ou moins complète, la mort survient plutôt soudainement.

Examens paracliniques L’examen de l’enfant chez qui une épiglottite est suspectée doit être effectué dans un contexte où l’équipement d’urgence pour les voies respiratoires est à portée de la main. Aucune intervention qui risque d’agiter l’enfant et de nuire à sa respiration ne doit être faite au service des urgences. L’enfant est admis directement à l’unité de soins intensifs pédiatriques (USIP) ou au bloc opératoire pour l’intubation endotrachéale. L’examen de la gorge avec un abaisse-langue est contre-indiqué, car cet examen pourrait provoquer une obstruction complète des voies respiratoires et un arrêt respiratoire. La radiographie est également contreindiquée (Abdallah, 2012), surtout si l’enfant souffre d’une détresse respiratoire aiguë ou s’il est agité. Sinon, une radiographie latérale du cou est accomplie à l’USIP à l’aide d’un appareil de radiologie portatif, et le jeune enfant reste assis sur les genoux de ses parents tout au long de la procédure. Il faut retarder toute autre intervention susceptible d’agiter davantage l’enfant, de rendre sa respiration plus difcile et de diminuer l’apport d’air dans ses poumons.

Approche thérapeutique Habituellement, lorsque l’enfant est atteint d’une épiglottite avec détresse respiratoire grave, l’intubation nasotrachéale ou la trachéotomie seront priorisées. Il est recommandé que l’intubation, la trachéotomie et toute autre procédure invasive, comme l’installation d’une perfusion intraveineuse (I.V.), soient effectuées dans un endroit où les interventions d’urgence pour le maintien de la perméabilité des voies respiratoires peuvent être exécutées facilement et rapidement 14 . Si nécessaire, l’oxygène est administré à l’aide d’un masque qui est soit maintenu près du FIGURE 15.8 L’épiglottite aiguë visage (blow-by) pour les enfants cause une inammation grave et obstructive qui plus jeunes, soit ajusté au visage nécessite des soins immédiats. pour les enfants plus âgés. Qu’il y ait ou non une voie respiratoire articielle, l’enfant doit être sous la surveillance intensive d’un personnel expérimenté. Lorsque l’épiglottite semble être d’origine bactérienne, l’enfant reçoit initialement des antibiotiques (ceftriaxone ou céphalosporine) par voie I.V., puis 14 par voie orale pour compléter un cycle de traitement de 7 à 10 jours. L’épinéphrine nébulisée, Les soins de trachéotomie les corticostéroïdes et les bêtaagonistes n’ont pas sont présentés dans le démontré leur efcacité dans la réduction de chapitre 14, Techniques l’œdème de l’épiglottite. En outre, l’utilisation de soins. de corticostéroïdes reste controversée (Gompf, 2017). Hypoxie : Diminution de la L’enure épiglottale diminue habituellement concentration d’oxygène dans après 24 heures d’antibiothérapie, et l’épiglotte les tissus à un niveau insufsant redevient presque normale le troisième jour. pour répondre aux besoins métaC’est en général à ce moment que l’enfant est boliques des tissus du corps. extubé.

Prévention Le vaccin contre les infections graves à H. inuenzae de type B (Hib) est un moyen efcace de prévention de l’épiglottite. Afin de protéger les enfants contre cette maladie, il est important de prévenir la propagation de l’infection, qui se transmet par les gouttelettes de salive et par le contact avec les sécrétions des muqueuses du nez et de la gorge durant la période de contagion. La transmission cesse 48 heures après le début d’une antibiothérapie adéquate. Lorsque l’Hib est diagnostiqué, un traitement de prophylaxie à la rifampine est prescrit pour tous les membres de la famille ayant un enfant de moins de 4 ans, un enfant de moins de 12 mois non vacciné contre l’Hib ou un enfant immunosupprimé, même s’il a été vacciné contre l’Hib (Gompf, 2017).

Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

663

15

Soins inrmiers ÉPIGLOTTITE AIGUË

L’épiglottite est une maladie grave et terriante pour l’enfant et sa famille. Il est important d’agir rapidement mais calmement, et de fournir du soutien sans faire augmenter l’anxiété. Il faut permettre à l’enfant de rester dans la position qui lui procure le plus de confort et de sécurité, et assurer aux parents que tout est mis en œuvre pour soulager leur enfant. Les interventions en cas d’épiglottite sont les mêmes que celles qui sont décrites plus loin pour la laryngotrachéobronchite. La surveillance continue de l’état respiratoire, y compris la saturation en oxygène et la gazométrie sanguine si l’enfant est intubé, constitue une partie importante des interventions inrmières, tout comme le maintien de la perfusion I.V.

éactivation des connaissances Nommez trois autres moyens de transmission des micro-organismes, autres que par contact direct et indirect.

15.3.2

Laryngite aiguë

La laryngite infectieuse aiguë est une maladie commune chez les enfants d’âge scolaire et les adolescents. Les nourrissons et les jeunes enfants souffrent plutôt de maladies plus généralisées, notamment la laryngotrachéobronchite. L’agent causal de la laryngite infectieuse aiguë est habituellement un virus, et le principal symptôme est

TABLEAU 15.11

Degrés de gravité du croup

DEGRÉ

CARACTÉRISTIQUES

Croup faible

• Toux aboyante occasionnelle • Absence de stridor au repos • Tirage suprasternal ou intercostal faible ou absent

Croup modéré

• Toux aboyante fréquente • Stridor facilement perceptible au repos • Tirage suprasternal et thoracique au repos, mais absence ou peu de détresse respiratoire ou d’agitation

Croup sévère

• Toux aboyante fréquente • Stridor inspiratoire évident et, parfois, expiratoire • Tirage thoracique marqué • Détresse respiratoire et agitation importantes

Insufsance respiratoire imminente

• Toux aboyante (souvent peu évidente) • Stridor audible au repos (parfois difcile à entendre) • Tirage thoracique (peut ne pas être marqué) • Léthargie ou niveau de conscience altéré • Apparence bleutée sans oxygénothérapie (signe fréquent)

Sources : Adapté de Alberta Clinical Practice Guideline Working Group (2008) ; Ortiz-Alvarez et CPS (2017).

664

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

l’enrouement, qui peut être accompagné d’autres symptômes des voies respiratoires supérieures (p. ex., une rhinite, un mal de gorge et une congestion nasale) ainsi que de manifestations généralisées (p. ex., de la èvre, des céphalées, une myalgie, un malaise). Les symptômes associés varient selon le virus en cause. Les adénovirus, les métapneumovirus humains et les virus de la grippe sont responsables des effets plus généralisés ; les virus para-inuenza, les rhinovirus et le VRS ont des effets plus bénins. Habituellement, la maladie évolue spontanément vers la guérison, sans séquelles à long terme. Le traitement est symptomatique avec des liquides et de l’air humidié PSTI 15.1.

15.3.3

Laryngotrachéobronchite aiguë

La laryngotrachéobronchite (LTB) aiguë, ou croup, est le syndrome du croup le plus fréquent qui affecte principalement les enfants de six mois à trois ans (Alberta Clinical Practice Guideline Working Group, 2008 ; Ortiz-Alvarez et Canadian Paediatric Society [CPS], 2017). La maladie est habituellement précédée d’une IVRS qui descend graduellement le long des structures adjacentes.

Manifestations cliniques La LTB se caractérise par l’apparition d’une èvre légère, et les parents mentionnent souvent que l’enfant est allé au lit pour se réveiller plus tard avec une toux rauque, aboyante et creuse. L’inammation de la muqueuse des parois du larynx et de la trachée entraîne un rétrécissement des voies respiratoires. Une fois que celles-ci sont obstruées de façon importante, l’enfant éprouve des difcultés inspiratoires, ce qui produit du tirage sus-sternal et un stridor inspiratoire caractéristiques. Les autres manifestations classiques incluent la toux et l’enrouement. La détresse respiratoire chez le nourrisson et le trottineur peut se manifester par un battement des ailes du nez, un tirage intercostal, une tachypnée et un stridor continu. L’enfant atteint de LTB est généralement un trottineur qui a une toux aboyante classique (comme un cri de phoque) et un stridor aigu après plusieurs jours de rhinite.

Approche thérapeutique Le principal objectif du traitement médical de la LTB est de maintenir la perméabilité des voies respiratoires et d’assurer un échange respiratoire adéquat. L’enfant avec un croup léger, soit sans stridor au repos, peut être traité à la maison. Il y a souvent résolution des symptômes en 48 heures, mais ils persistent parfois pendant 1 semaine. Il faut enseigner aux parents comment reconnaître les signes de détresse respiratoire et quand demander de l’aide professionnelle rapidement. L’enfant qui atteint un niveau de signes de gravité modérée doit être vu par un médecin TABLEAU 15.11.

L’épinéphrine nébulisée est utilisée chez les enfants ayant une détresse respiratoire modérée à grave, soit un stridor au repos, du tirage, de la difculté à respirer avec de l’agitation (OrtizAlvarez et CPS, 2017). Ses effets α-adrénergiques entraînent une vasoconstriction des muqueuses et une réduction subséquente de l’œdème sous-glottique. Une amélioration notable survient dans les 30 minutes suivant l’administration ; l’effet diminue après 2 heures (Bjornson et Johnson, 2013). Après l’administration de l’épinéphrine nébulisée, l’enfant doit rester en observation pendant 2 à 4 heures au cas où les symptômes aigus reviendraient, mais ce traitement n’exige pas nécessairement une hospitalisation. Les corticostéroïdes oraux sont indiqués dans le traitement de tout enfant avec un diagnostic de croup. Une amélioration des manifestations cliniques est notée après 2 ou 3 heures, et jusqu’à 24 à 48 heures après la première dose de dexaméthasone. La dexaméthasone est administrée par voie orale (elle se prépare en mélangeant la solution parentérale avec du sirop). Il a été démontré que chez l’enfant souffrant d’un croup léger, une dose unique de corticostéroïde par voie orale réduit le degré de gravité du croup, le

taux d’hospitalisation et le besoin de traitements multiples à l’épinéphrine nébulisée (Ortiz-Alvarez et CPS, 2017). La budésonide nébulisée peut être administrée dans les cas où : 1) l’enfant a des vomissements persistants ; 2) l’enfant est en détresse respiratoire grave. Elle peut être combinée avec l’épinéphrine et nébulisée simultanément. Les enfants ayant une détresse respiratoire grave ou une insufsance respiratoire imminente doivent être dirigés vers l’USIP lorsque la réponse clinique au traitement initial est médiocre ou non soutenue . Dans les cas graves de LTB, l’administration d’héliox, selon un mélange généralement composé de 70 % d’hélium et de 30 % d’oxygène, est parfois utilisée. Comme l’hélium a une densité moins élevée que l’air ambiant, son mélange avec l’oxygène en fait un gaz respirable qui réduit la turbulence du ot d’air dans les voies respiratoires, et peut contribuer à diminuer l’effort respiratoire et à éviter l’intubation. Il n’y a pas de résultats probants révélant que l’héliox est plus efcace que la coadministration d’une haute concentration d’oxygène avec de l’épinéphrine nébulisée (Moraa, Sturman, McGuire et al., 2013 ; OrtizAlvarez et CPS, 2017).

ALERTE CLINIQUE

Surveiller les signes précoces d’une obstruction imminente des voies respiratoires : • Tachycardie • Tachypnée • Tirage sous-sternal et intercostal • Battement des ailes du nez • Agitation Surveiller les indices d’une insufsance respiratoire imminente : • Altération du statut neurologique (p. ex., la fatigue et la léthargie) • Pâleur • Teint grisâtre • Tirage diminué • Diminution des sons respiratoires et du stridor

Soins inrmiers LARYNGOTRACHÉOBRONCHITE AIGUË

Évaluer et surveiller l’état respiratoire La principale responsabilité de l’inrmière dans les soins d’un enfant atteint de LTB est l’observation et l’évaluation de son état respiratoire. Pour ce faire, il est important de prendre en considération les éléments mentionnés dans les ENCADRÉS 15.1 et 15.2 et de procéder aux interventions inrmières détaillées dans le PSTI 15.1. L’évaluation clinique et la vérication des signes vitaux sont importantes pour déceler une insufsance respiratoire imminente. Il est essentiel de procurer à l’enfant le meilleur confort possible et d’éviter les interventions qui risquent de l’agiter. La saturométrie est utilisée pour surveiller l’état d’oxygénation et est indiquée pour les enfants présentant des signes de catégorie modérée à grave, ainsi que ceux en détresse respiratoire. Un dispositif servant à soufer l’oxygène proche du visage (blow-by) est indiqué en présence d’hypoxie (saturation en oxygène inférieure à 92 %). L’équipement d’intubation doit être immédiatement accessible et transporté avec l’enfant au

cours des déplacements vers d’autres lieux (p. ex., la radiologie, le bloc opératoire). Pour le nourrisson et l’enfant, tousser, avoir des spasmes laryngés et avoir besoin d’un traitement par voie I.V. sont autant de sources additionnelles de stress. L’enfant atteint de croup léger peut consommer les boissons qu’il désire, pourvu que son état respiratoire soit stable. Si l’enfant est incapable de prendre des liquides par voie orale, il peut être nécessaire de lui administrer un soluté par voie I.V., en plus des médicaments, comme la dexaméthasone, administrés par cette voie.

CE QU’IL FAUT RETENIR

L’intervention inrmière la plus importante dans le soin d’un enfant atteint de LTB est une observation vigilante et continue, ainsi qu’une évaluation précise de son état respiratoire.

Soutenir et informer la famille La progression rapide du croup, le son alarmant de la toux et le stridor, combinés au comportement anxieux de l’enfant et à son apparence maladive, s’avèrent une expérience terrifiante pour les parents. L’inrmière a un rôle très important dans le soutien et l’enseignement aux parents. Il est nécessaire de les rassurer quant à la progression de l’état de santé de leur enfant, de leur fournir des explications sur les traitements, et de les encourager à rester auprès de l’enfant pour le réconforter et diminuer son anxiété.

Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

665

15

15.3.4 CONSEIL CLINIQUE

Si l’enfant est assez âgé pour comprendre et collaborer, on peut lui enseigner comment adopter une position favo­ rable à l’expansion de la cage thoracique et prendre des respirations profondes facilitant l’expectoration des sécrétions. Celles­ci, qui sont particulièrement abondantes en présence d’une laryngotrachéobron­ chite, diminuent les échanges gazeux, favorisant l’appari­ tion de l’acidose respiratoire et de l’hypoxémie.

ALERTE CLINIQUE

L’acidose respiratoire est causée par une hypoventilation qui fait augmenter le niveau de dioxyde de carbone (CO2) sanguin et entraîne une baisse du pH. En cas de LTB, l’inr­ mière analyse les gaz sanguins artériels pour surveiller le pH plasmatique et la pression partielle du dioxyde de carbone dans le sang artériel (PaCO2) ; elle prévient le médecin si les valeurs du pH diminuent et que celles de la PaCO2 augmentent.

Laryngite spasmodique aiguë

La laryngite spasmodique aiguë, aussi appelée laryngite obstructive aiguë, faux croup ou croup nocturne, se distingue de la laryngite et de la LTB en ce qu’elle se caractérise par des attaques paroxystiques soudaines d’obstruction laryngée qui se produisent principalement la nuit. Les signes d’inammation sont absents ou légers, et il y a souvent eu des crises antérieures ayant duré de deux à cinq jours, suivies d’une guérison sans particularité notable. Cette maladie affecte habituellement les enfants âgés de moins de cinq ans (SCP, 2014). Certains enfants semblent y être prédisposés ; dans certains cas, la maladie peut comprendre une composante allergique.

Manifestations cliniques

Soins inrmiers LARYNGITE SPASMODIQUE AIGUË

Approche thérapeutique

L’enfant va au lit en bonne santé ou avec des symptômes respiratoires légers, mais se réveille soudainement avec une toux aboyante et métallique caractéristique, un enrouement et un stridor inspiratoire. Il est subfébrile ou a une èvre modérée. Il paraît anxieux, agité et effrayé, ce qui aggrave la dyspnée. L’attaque disparaît après quelques heures, et l’enfant semble aller mieux le lendemain.

Approche thérapeutique Le croup spasmodique évolue habituellement spontanément vers la guérison, et la plupart des enfants sont traités à la maison. Parfois, le spasme est soulagé par l’exposition soudaine à l’air froid, par exemple lorsque l’enfant est exposé à l’air extérieur pendant la nuit en se rendant à l’hôpital. L’enfant présentant des symptômes modérément graves peut être hospitalisé pour observation et suivre un traitement à l’épinéphrine nébulisée ainsi qu’une thérapie aux corticostéroïdes.

En cas de faux croup, il n’est pas nécessaire de suggérer aux parents de faire dormir l’enfant dans un air humidié à la vapeur froide, puisque ce traitement pour faire disparaître la toux n’a révélé aucun bienfait mesurable.

15.3.5

Trachéite bactérienne

La trachéite bactérienne, ou laryngotrachéite bactérienne ou laryngotrachéobronchite bactérienne, est une infection aiguë de la muqueuse de la Partie 6

Manifestations cliniques Plusieurs des manifestations de la trachéite bactérienne ressemblent à celles de la LTB, mais ne répondent pas à son traitement. Il y a présence d’antécédents d’IVRS avec une toux croupeuse, un stridor qui n’est pas soulagé par la position, une apparence maladive, l’absence de sialorrhée et une èvre élevée. Une des manifestations majeures de cette affection est la production de sécrétions trachéales épaisses, purulentes et abondantes qui entraînent une toux pouvant mener à l’épuisement et à un arrêt respiratoire. L’enfant atteint de cette maladie peut éventuellement souffrir d’une obstruction des voies respiratoires, d’une insufsance respiratoire, d’un syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) et d’un syndrome de défaillance multiviscérale qui sont susceptibles de mettre sa vie en danger. L’hypoxie et l’acidose respiratoire sont des conséquences de l’insufsance respiratoire. Lorsque l’enfant devient incapable d’inhaler un volume d’air sufsant, les symptômes d’hypoxie deviennent évidents. Une obstruction assez grave pour empêcher une ventilation sufsante cause aussi une augmentation du dioxyde de carbone sanguin, entraînant une acidose respiratoire .

Le rôle de l’inrmière est de surveiller l’état respiratoire de l’enfant, d’évaluer le besoin d’administrer les médicaments pour faciliter la respiration, de rassurer la famille et d’assurer le confort de l’enfant.

666

trachée supérieure dont les particularités sont à la fois celles du croup et de l’épiglottite. Les signes distinctifs de la trachéite bactérienne sont l’ulcération et la formation d’une pseudomembrane dans la trachée, l’exsudat mucopurulent et la desquamation de la muqueuse épithéliale qui mènent à une obstruction importante des voies aériennes (Kuo et Parikh, 2014). Elle constitue une urgence médicale qui exige des soins immédiats, car elle peut être une cause sérieuse et sufsamment grave d’obstruction des voies respiratoires pouvant entraîner un arrêt respiratoire. L’âge moyen des enfants atteints est de cinq ans. La majorité des cas sont dus à la surinfection d’une laryngite virale.

Troubles liés aux systèmes

Environ 80 % des enfants avec une trachéite bactérienne requièrent une intubation endotrachéale avec une ventilation mécanique (Kuo et Parikh, 2014). La trachéite bactérienne exige un traitement vigoureux avec des antipyrétiques et des antibiotiques.

Soins inrmiers TRACHÉITE BACTÉRIENNE

Lorsque l’enfant atteint d’une trachéite bactérienne n’est pas intubé, il doit être surveillé attentivement pour déceler une insufsance respiratoire imminente. La reconnaissance précoce est essentielle pour prévenir une obstruction fatale des voies respiratoires.

15.3.6

Trachéomalacie et bronchomalacie

La trachéomalacie et la bronchomalacie font référence à une faiblesse de la paroi de la trachée ou des bronches en raison d’une atteinte de l’intégrité cartilagineuse, d’une réduction ou d’une atrophie des bres élastiques de la membrane musculaire postérieure, ou d’une augmentation anormale de la pression transbronchique. La trachée et les bronches se relâchent et n’assurent pas une oxygénation sufsante. La trachéomalacie et la bronchomalacie peuvent être primaires (congénitales : de type I) ou secondaires (acquises : de type II et III) : • Type I : anomalies trachéales cartilagineuses d’origine congénitale ou intrinsèque, avec ou sans stule œsotrachéale ; • Type II : compression extrinsèque par des structures cardiovasculaires, des tumeurs, des adénopathies ou d’autres masses ; • Type III : maladie acquise à la suite d’une infection ou d’une inammation chronique, ou de cause iatrogène (Centre hospitalier universitaire vaudois, 2016).

Manifestations cliniques La trachéomalacie et la bronchomalacie se caractérisent par une toux chronique, rauque, aboyante,

une bronchiolite qui persiste, des infections respiratoires récidivantes ou une hyperréactivité bronchique, des difcultés d’alimentation, des régurgitations et un retard de croissance. Dans les cas plus graves, les pleurs et les efforts respiratoires s’accompagnent de dyspnée et d’un tirage, et d’épisodes de cyanose chez les nourrissons.

Approche thérapeutique FIGURE 15.9 Mode de respiration Un positionnement visant l’hyperextension de la tête et du cou assistée CPAP utilisé sur un enfant permet une atténuation des symptômes de la trachéomalacie ou de la bronchomalacie. Le traitement du reux gastro-œsophagien aide à diminuer l’inammation provoquée par la régurgitation des acides gastriques. Parfois, une assistance respiratoire non invasive spontanée à pression positive continue (CPAP) ou à deux niveaux (BiPAP) est nécessaire pour maintenir la perméabilité des voies respiratoires supérieures FIGURE 15.9 . Une chirurgie visant à corriger la compression externe est nécessaire lorsque des structures extrinsèques compriment la trachée ou les bronches.

Soins inrmiers TRACHÉOMALACIE ET BRONCHOMALACIE

Évaluer l’état respiratoire et informer la famille

Prodiguer les soins postopératoires

L’inrmière doit être vigilante dans son évaluation du nourrisson an de détecter les symptômes respiratoires. Elle doit enseigner aux parents la façon de positionner l’enfant pour minimiser la détresse respiratoire et les informer de l’importance de l’administration des antiacides. Elle doit expliquer aux parents que la trachéomalacie ou la bronchomalacie se résorbent habituellement après l’âge de 18 à 24 mois, avec la croissance de la trachée et le renforcement du cartilage (Kaneshiro, Zieve et Ogilvie, 2017).

Lorsqu’une intervention chirurgicale est nécessaire pour décompresser les voies respiratoires, l’inrmière doit prodiguer les soins postopératoires suivants : observation constante de l’état cardiorespiratoire, aspiration des sécrétions et dégagement des voies respiratoires, positionnement favorisant la perméabilité des voies respiratoires, administration d’antiacides et enseignement des soins aux parents pour le retour au domicile.

15.4

développé avant l’adolescence, les muscles lisses de ces structures constituent un élément majeur de la constriction des voies respiratoires, en particulier dans les bronchioles, la portion qui va des bronches aux alvéoles. Le TABLEAU 15.12 affiche une comparaison des caractéristiques principales de l’infection des bronches et des bronchioles.

Infections des voies respiratoires inférieures

Chez l’enfant, la portion réactionnelle des voies respiratoires inférieures inclut les bronches et les bronchioles. Comme le soutien cartilagineux des grandes voies respiratoires n’est pas pleinement

Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

15

667

TABLEAU 15.12

Comparaison des maladies affectant les bronches et les bronchioles

Description

BRONCHITE

BRONCHIOLITE

ASTHME

• Maladie inammatoire des grandes voies respiratoires, de la trachée et des bronches

• Maladie infectieuse des voies respiratoires inférieures la plus fréquente

• Habituellement en association avec une IVRS

• Obstruction bronchiolaire prédominante

• Réaction exagérée des bronches à un déclencheur comme une IVRS, des squames animales, l’air froid, l’exercice • Bronchospasme, exsudation et œdème des bronches

• Entité rarement isolée Groupe d’âge

• Quatre premières années de vie

• Habituellement les nourrissons de moins de 12 mois ; prévalence maximale vers l’âge de 3 à 6 mois

• De l’âge de 1 an jusqu’à l’adolescence ; généralement avant l’âge de 5 ansa

• Rare après l’âge de 2 ans Agents étiologiques

• Généralement virale • Possiblement d’autres agents (p. ex., des bactéries, des espèces fongiques, des allergènes, des irritants aéroportés)

• Virale avec prédominance du VRS ; également les rhinovirus, l’inuenza, le coronavirus, le métapneumovirus humain, l’adénovirus, les virus para-inuenza et le M. pneumoniae, co-infection (2 virus ou plus simultanément)

• Virale (p. ex., le VRS) chez le nourrisson, mais possiblement n’importe lequel de tout un éventail d’agents pathogènes responsables des IVRS

Principales manifestations cliniques

• Toux sèche, persistante (de 10 jours à 3 semaines), quinteuse (surtout nocturne), puis productive (expectorations claires, jaunâtres ou verdâtres) en 2 ou 3 jours

• Respiration laborieuse, toux, tachypnée, tirage et battement des ailes du nez, augmentation du mucus nasal, sibilance, alimentation déciente possible

• Sibilance, toux

Traitement

• Maintien de l’hydratation

• Oxygène d’appoint si la saturation ≤ à 90 %

• Bronchodilatateurs (optionnels) en cas de respirations sibilantes ou de râles b

• Aspiration des sécrétions

• Corticostéroïdes en inhalation, bronchodilatateurs, modicateurs des leucotriènes

a Sharma

• Apport liquidien adéquat (par voie I.V., orale ou nasogastrique)

• Maîtrise des allergènes et des agents déclencheurs

(2017b).

b PasseportSanté.net (2011).

15.4.1

Bronchite

La bronchite, parfois appelée trachéobronchite, est une inammation des grandes voies respiratoires, (la trachée et les bronches), fréquemment associée à une IVRS. Les agents viraux constituent la principale cause de cette maladie, quoique le M. pneumoniae en soit une cause fréquente chez l’enfant de plus de 6 ans. Une toux sèche, quinteuse et peu efcace, qui empire la nuit et devient productive après 2 ou 3 jours, caractérise cette maladie. La bronchite chronique est fréquemment associée à l’asthme, à la brose kystique et à l’aspiration d’un corps étranger, ou à l’exposition à un irritant des voies respiratoires (Carolan, 2016). La bronchite est une maladie bénigne qui évolue spontanément vers la guérison, en 10 à 14 jours, et qui n’exige qu’un traitement symptomatique, ce qui inclut les analgésiques et les antipyrétiques (Carolan, 2016). Les antitussifs peuvent interférer avec l’élimination des sécrétions. Les antibiotiques sont indiqués seulement lorsqu’il y a soupçon d’une surinfection bactérienne.

668

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

15.4.2

Bronchiolite

La bronchiolite est une infection virale aiguë qui envahit les bronchioles. L’infection survient principalement à l’automne et en hiver. À l’âge de 2 ans, la plupart des enfants ont été infectés au moins 1 fois. L’infection par le VRS est la cause la plus fréquente d’hospitalisation chez les enfants de moins de 1 an. De plus, des infections graves au VRS durant la première année de vie constituent un facteur de risque signicatif de voir apparaître une respiration sibilante ou de l’asthme avant l’âge de 6 ans (Johnson, 2012). Le VRS peut aussi affecter l’enfant de plus de 1 an qui souffre d’une maladie chronique ou sérieusement invalidante. Environ 1 % des enfants hospitalisés à cause d’une bronchiolite liée au VRS meurent, et le taux de mortalité est plus élevé chez les nourrissons et chez ceux qui sont atteints d’une maladie cardiorespiratoire ou neuromusculaire sous-jacente (Byington, Wilkes, Korgenski et al., 2014) ENCADRÉ 15.6. Quoique la plupart des cas de bronchiolite aient pour cause le VRS, des adénovirus, des rhinovirus, des virus

para-inuenza et le métapneumovirus humain peuvent également être responsables de la bronchiolite chez l’enfant.

ENCADRÉ 15.6

Physiopathologie

• Nourrissons de moins de 3 mois

• Enfants atteints du syndrome de Down

• Prématurés (moins de 35 semaines d’âge gestationnel)

• Enfants atteints de troubles neuromusculaires

Le VRS affecte les cellules épithéliales des petites voies respiratoires (bronchioles). L’épithélium bronchiolaire comprend des cellules ciliées, des cellules basales et des cellules sécrétoires non ciliées. En réponse à une agression toxique ou infectieuse, comme le VRS, l’épithélium sécrète des substances (chimiokines et cytokines) permettant d’amorcer la réaction inammatoire qui conduit : 1) à l’inammation et à un œdème de la sous-muqueuse ; 2) à la nécrose des cellules épithéliales des bronchioles ; 3) à l’hypersécrétion de mucus. L’œdème, les sécrétions et les débris de cellules nécrosées causent la formation de bouchons muqueux, l’hyperination et l’obstruction des bronchioles (Adam, Perotin, Lebargy et al., 2014). L’obstruction à des degrés variés des bronchioles mène à l’hyperination de certains lobes et de certains segments pulmonaires, ainsi qu’à l’atélectasie dans d’autres régions. À l’inspiration, la dilatation des voies bronchiques ouvre un espace sufsant pour que l’air puisse entrer, mais leur rétrécissement à l’expiration l’empêche de quitter les poumons. L’air se trouve ainsi emprisonné dans la zone située sous l’obstruction, ce qui cause progressivement une surination (emphysème).

• Enfants avec une maladie cardiaque ou pulmonaire importante sur le plan hémo­ dynamique pendant leurs 2 premières années de vie

Souvent, une rhinorrhée et de la èvre légère sont les premiers signes à se manifester TABLEAU 15.13. Il peut aussi y avoir apparition d’une otite moyenne et d’une conjonctivite. Les jeunes nourrissons de moins de trois mois peuvent subir des épisodes de pauses respiratoires ou de l’apnée comme premier signe (Drysdale, Green et Sande, 2016), ou des manifestations cliniques d’IVRS pendant plusieurs jours, ou encore aucun symptôme, sauf une légère léthargie, de l’irritabilité ou une alimentation insufsante. Une fois les voies respiratoires inférieures atteintes, les manifestations classiques comprennent des signes d’altération des échanges gazeux, une

PRÉMATURÉS ENTRE 33 ET 35 SEMAINES D’ÂGE GESTATIONNEL

• Naissance entre novembre et janvier

• Enfants immunodéprimés (p. ex., les greffés)

• Sexe masculin

• Nourrissons ayant une maladie pulmonaire chronique de la prématurité

• Faible poids à la naissance par rapport à l’âge gestationnel

• Enfants atteints de maladies pulmonaires symptomatiques non associées à la prématurité (p. ex., la brose kystique, les malformations pulmonaires, la pneumonie par aspiration récurrente)

• Fréquentation d’un milieu de garde par l’enfant ou sa fratrie

TABLEAU 15.13

• Présence d’au moins 2 fumeurs ou d’au moins 6 personnes dans la maison • Antécédent d’eczéma chez un membre de la famille immédiate

Progression des manifestations cliniques de la bronchiolite causée par le virus respiratoire syncytial

STADE

MANIFESTATIONS CLINIQUES

Début

• Rhinorrhée

Manifestations cliniques La bronchiolite survient habituellement à la suite d’une IVRS, après une période d’incubation d’environ deux à huit jours (WebMD, s.d.). Le simple rhume d’un adulte peut provoquer une bronchiolite chez l’enfant. L’évolution clinique se fait en deux temps. Dans un premier temps, il y a une progression de la phase inammatoire et, dans un second temps, il y a une apparition des sibilances et une augmentation des sécrétions. Les manifestations cliniques varient de légères à graves, avec une progression rapide de la maladie.

Facteurs de risque associés à de graves infections par le virus respiratoire syncytial

Progression

• Pharyngite

• Possibilité d’écoulement des yeux ou des oreilles

• Toux, éternuements

• Fièvre intermittente

• Sibilance

• Apnée (nourrisson de moins de 3 mois)

• Augmentation de la toux et de la sibilance

• Cyanose

15

• Râles

• Tachypnée et tirage Aggravation

• Tachypnée > à 70 R/min

• Tirage intercostal et sous­costal

• Léthargie

• Geignements

• Épisodes apnéiques

• Battements des ailes du nez

• Échanges gazeux décients ; bruits respiratoires diminués

sibilance, un tirage, des crépitements, de la dyspnée, de la tachypnée et une réduction des bruits respiratoires. Les nourrissons en détresse ou en insufsance respiratoires requièrent un traitement de soutien respiratoire tel que l’application de lunettes nasales humidiées à haut débit, une assistance respiratoire à pression positive continue (PPC ou CPAP) ou une assistance respiratoire à deux niveaux de pression (biniveau ou BiPAP), ou une intubation nasoendotrachéale temporaire.

Chapitre 15

Atélectasie : Affaissement des alvéoles pulmonaires qui empêche l’échange respiratoire normal d’oxygène et de dioxyde de carbone, et qui entraîne une hypoventilation du poumon, réduisant ainsi le taux d’oxy­ gène sanguin.

Troubles liés au système respiratoire

669

Diagnostic PHARMACOVIGILANCE

Le palivizumab sous forme de poudre lyophilisée doit être administré dans les six heures suivant sa reconstitution avec de l’eau stérile, car il ne contient aucun agent de conservation.

Jugement

clinique

Le diagnostic clinique de la bronchiolite se fonde sur l’anamnèse de la maladie et l’examen physique. Les écouvillons nasopharyngés et les autres prélèvements pour analyses de laboratoire ainsi que les radiographies pour diagnostiquer le VRS sont seulement requis lorsque la présentation clinique est atypique ou quand il est nécessaire de rassembler les enfants hospitalisés en cohorte (Friedman, Rieder, Walton et al., 2014) pour minimiser la propagation des infections nosocomiales (Drysdale et al., 2016).

Durant la période des fêtes, en état de panique, les parents de Jade arrivent vers 23 h à l’urgence avec leur nourrisson âgé de 6 mois. Ils disent que la petite semble chercher son air et qu’elle a une rhinorrhée depuis 48 heures. Jade a aussi du tirage intercostal et des bruits respiratoires audibles. Sa saturation est à 95 %, et sa température est normale. Le diagnostic de bronchiolite est posé. Jade devrait-elle être hospitalisée ? Justiez votre réponse.

ENCADRÉ 15.7

Approche thérapeutique La prise en charge de la bronchiolite est symptomatique. La plupart des enfants atteints de bronchiolite peuvent être soignés à domicile. L’hospitalisation est

Critères d’hospitalisation pour les enfants de moins de 2 ans avec bronchiolite

• Signes de détresse respiratoire grave : – Tirage sous-costal et intercostal – Geignement expiratoire – Tachypnée > 70 R/min – Apnée • Cyanose ou antécédents d’apnée

• Oxygénothérapie nécessaire pour maintenir la saturation en oxygène > 90 % • Déshydratation ou antécédents de consommation insufsante de liquides • Nourrisson très vulnérable à une grave maladie ENCADRÉ 15.6 • Famille incapable d’affronter la situation

Source : Adapté de Friedman et al. (2014).

ENCADRÉ 15.8

habituellement recommandée pour l’enfant ayant une détresse respiratoire, un besoin d’oxygène ou qui ne parvient pas à maintenir une hydratation adéquate ; d’autres facteurs d’hospitalisation sont présentés dans l’ENCADRÉ 15.7. Les soins cliniques en cas de bronchiolite reposent essentiellement sur les soins de soutien présentés dans la section Soins inrmiers. Chez l’enfant hospitalisé, ces soins incluent : • une surveillance étroite et régulière du fonctionnement du système respiratoire (selon l’état hémodynamique de l’enfant) ; • l’oxygénothérapie et une assistance respiratoire adaptée à l’état clinique ; • le maintien de la perméabilité des voies aériennes et la diminution des efforts respiratoires ; • une alimentation assistée pour maintenir l’hydratation ; • la prévention de la propagation du VRS.

Prévention Au Canada, le seul agent d’immunisation offert pour la prévention contre le VRS est le palivizumab (SynagisMD), un anticorps monoclonal administré mensuellement par injection intramusculaire (I.M.) pendant la période au cours de laquelle l’enfant est à risque élevé ENCADRÉ 15.8 . La prophylaxie pour le VRS doit être amorcée au début de la saison virale (novembre) et se terminer à la n de la saison (mars). Le palivizumab ne prévient pas complètement le VRS. Selon la Société canadienne de pédiatrie, il est important de prendre d’autres mesures préventives, notamment : éliminer l’exposition à la fumée secondaire du tabac ; limiter l’exposition à des endroits où la contagion est plus risquée, comme les garderies ou les centres commerciaux ; et avoir une bonne hygiène des mains.

Enfants à risque élevé de contracter le VRS où l’administration prophylactique de palivizumab (Synagismd) est indiqué

• Enfants âgés de 24 mois ou moins atteints d’une : – prématurité et d’une dysplasie bronchopulmonaire ; – cardiopathie congénitale ayant des conséquences hémodynamiques importantes, non opérée ou partiellement corrigée ; – cardiopathie non cyanogène ou cyanogène. • Nourrissons âgés de 6 mois ou moins au début de la saison du VRS : – nés à 35 semaines ou moins de gestation, autre facteur médical de risque que la prématurité et qui ne sont pas atteints d’une maladie pulmonaire chronique, d’une cardiopathie ou qui éprouvent un autre problème de santé ;

• Enfants atteints du syndrome de Down qui présentent au moins un facteur de risque (cardiopathie congénitale grave sur le plan hémodynamique, cardiopathie bénigne et âge gestationnel égal ou inférieur à 35 semaines). • Nourrissons des collectivités rurales éloignées ou isolées du Grand Nord, âgés de moins de 6 mois au début de la saison du VRS et : – nés à terme ; – nés avant 36 semaines d’âge gestationnel ; – atteints d’une cardiopathie importante.

– nés à 32 semaines ou moins de gestation, atteints d’une maladie pulmonaire chronique, de dysplasie bronchopulmonaire ou d’une cardiopathie ; – atteints d’une cardiopathie importante. Source : Adapté de INESSS (2016a). Effet du palivizurnab en prophylaxie sur la diminution des complications associées au VRS chez les enfants : Revue Systématique. Repéré à www.inesss.qc.ca/ nc/publications/publications/publication/effet-du-palivizumab-en-prophylaxie-sur-la-diminution-des-complications-associees-au-virus-respirat.html.

670

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

Soins inrmiers BRONCHIOLITE

Surveiller le fonctionnement respiratoire L’enfant atteint d’une bronchiolite requiert une surveillance étroite, vigilante et régulière du fonctionnement du système respiratoire PSTI 15.1. Le nourrisson souffrant d’une détresse respiratoire avec des signes d’efforts respiratoires marqués peut s’affaiblir et subir rapidement une insufsance respiratoire. Il est donc important de surveiller fréquemment son état hémodynamique soit de façon continue, si son état est sérieux, soit à des intervalles rapprochés. La surveillance de la saturation en oxygène et des valeurs gazométriques doit aussi guider le traitement médical et les interventions inrmières. L’oxygène est administré à des concentrations qui maintiendront le niveau de saturation à 90 % ou plus (Sakulchit et Goldman, 2016). Une assistance respiratoire non invasive ou une intubation endotrachéale avec ventilation mécanique peuvent être nécessaires pour soutenir l’enfant.

Assurer le maintien de la perméabilité des voies respiratoires L’enfant ayant des sécrétions nasales et pulmonaires abondantes bénéciera d’aspirations nasales ou nasopharyngées périodiques. L’évaluation de la saturation en oxygène pendant ces interventions est importante. Pour favoriser la respiration et permettre le drainage des sécrétions, l’enfant est installé en décubitus dorsal avec la tête en légère extension, et la tête de lit relevée à 30°. Le régime pharmacologique vise à réduire l’hypersonorité et l’inammation des voies respiratoires. L’inrmière est responsable d’évaluer, par l’examen clinique et l’auscultation, la réponse de l’enfant aux médicaments et de rapporter les traitements qui le soulagent. La nébulisation d’une solution saline hypertonique 3 % est bénéque, car elle peut augmenter la clairance mucociliaire, réhydrater la surface bronchiolaire, et diminuer les changements pathologiques et l’obstruction des voies respiratoires. Ce traitement semble plus protable aux enfants hospitalisés qu’à ceux traités en milieu ambulatoire ; il réduit la durée d’hospitalisation surtout chez les enfants présentant des symptômes moins sévères. (Grewal et Goldman, 2015). L’évaluation des bénéces est considérée en tenant compte des risques du traitement dans la gestion des soins de chaque enfant symptomatique. Lorsqu’un traitement usuel se révèle inefcace, certaines thérapies dont l’efcacité n’est pas démontrée

par des études peuvent être utilisées. Parmi ces traitements que l’inrmière doit connaître gurent : • l’efcacité des corticostéroïdes n’a été démontrée que lorsque la dexaméthasone par voie orale a été combinée à l’épinéphrine nébulisée ; l’administration combinée de ces deux médicaments a réduit le taux d’hospitalisation et la durée du séjour à l’hôpital et a favorisé un retour accéléré à une respiration et à une alimentation normales (Bawazeer, Aljeraisy, Albanyan, et al., 2014 ; Plint, Johnson, Patel, et al., 2009) ; • les antibiotiques ne sont pas recommandés pour une infection virale, sauf en présence d’une infection bactérienne coexistante telle que l’OM (Friedman et al., 2014) ; • l’administration d’héliox aux enfants souffrant d’une bronchiolite grave qui nécessite une hospitalisation aux soins intensif ne permet que de réduire la détresse respiratoire dans la première heure de traitement, mais n’a aucun effet sur la durée d’hospitalisation, ni sur la prévention de l’intubation ou l’instauration de la ventilation mécanique (Drysdale et al., 2016) ; • l’usage de bronchodilatateur n’est bénéque qu’à court terme, sans amélioration appréciable de l’état global de l’enfant, car la respiration sifante de la bronchiolite découle de l’obstruction et non de la contraction des voies respiratoires (Friedman et al., 2014) ; • la physiothérapie respiratoire (Ralston, Lieberthal, Meissner et al., 2014 ; Roqué i Figuls, Giné-Garriga, Granados Rugeles et al., 2016).

15

Favoriser l’alimentation La majorité des nourrissons guérissent rapidement de la bronchiolite et reprennent leurs activités quotidiennes normales, y compris l’absorption liquidienne nécessaire. Le nourrisson atteint par le VRS a souvent des sécrétions nasales abondantes, ce qui entrave la respiration et l’alimentation. Cela peut faire craindre que le nourrisson perde du poids ou cesse complètement de se nourrir au sein. Il convient d’encourager les mères à continuer d’allaiter le nourrisson ou, si l’allaitement est contre-indiqué en raison de la gravité de la maladie (p. ex., la tachypnée, la faiblesse ou la fatigue), à extraire leur lait et à le conserver de façon appropriée pour usage ultérieur. Lorsque l’alimentation orale est contre-indiquée, l’administration de liquides se fait par perfusion I.V. jusqu’à ce que le stade aigu de la maladie ait été franchi. Si l’enfant est intubé et stable, le gavage de lait maternel peut être commencé par voie entérale à la suite de la pose d’une sonde nasogastrique. Pour faciliter l’alimentation et le repos, il faut également

Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

671

enseigner aux parents l’hygiène nasale à respecter, notamment l’aspiration des sécrétions et l’utilisation des gouttes salines.

Prévenir la transmission du virus respiratoire syncytial Pour réduire le risque d’hospitalisation due au VRS, il est important de faire le dépistage des nourrissons à risque qui sont candidats pour recevoir le palivizumab ENCADRÉ 15.8. Le VRS est très contagieux et se transmet par les mains souillées, les sécrétions nasales, la salive, la toux, les éternuements et les objets contaminés. Il reste virulent pendant 25 minutes sur la peau contaminée et pendant 6 heures à température ambiante, et il imprègne les surfaces, les peluches, les jouets et tout objet dans l’environnement de l’enfant infecté (ASPC, 2011b ; Drysdale et al., 2016). Même après le rétablissement clinique, l’excrétion du VRS peut se prolonger parfois jusqu’à 4 semaines chez les enfants avec un système immunitaire affaibli (Centers for Disease Control and Prevention [CDC], 2017b). Ainsi, pour l’enfant hospitalisé, des mesures rigoureuses de prévention et de contrôle des infections, telles que le regroupement en cohorte, le suivi des règles visant à diminuer le risque de transmission croisée et l’application de normes d’hygiène, telles que procéder à l’hygiène des mains, ne pas toucher la muqueuse nasale ou la conjonctive et utiliser un équipement de protection individuelle à moins de 1 mètre de l’enfant, doivent être respectées pour éviter la contamination. Les procédures d’isolement visant à réduire le personnel hospitalier ainsi que le nombre de visiteurs et d’enfants non infectés entrant en contact

15.4.3

Pneumonies

La pneumonie, une inammation du parenchyme pulmonaire, est commune durant l’enfance, mais elle se produit plus fréquemment chez le nourrisson et l’enfant d’âge préscolaire (Le Saux, Robinson et SCP, 2015). Sur le plan clinique, la pneumonie peut se manifester soit comme une atteinte initiale, soit comme une complication d’une autre maladie. L’ENCADRÉ 15.9 présente les quatre types de pneumonie et leurs caractéristiques. Bien que la classication morphologique soit généralement utilisée, la classication la plus utile pour déterminer le type de pneumonie est basée sur l’agent étiologique, la maladie pouvant être d’origine virale, bactérienne ou mycoplasmique, ou encore être contractée par aspiration de substances étrangères. Le TABLEAU 15.14 permet une comparaison de plusieurs caractéristiques des pneumonies virales et bactériennes. La mycose profonde et l’atteinte par d’autres espèces fongiques peuvent aussi

672

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

avec l’enfant malade peuvent être bénéques. Dans la mesure du possible, les inrmières intervenant auprès d’enfants ayant contracté le VRS ne devraient pas entrer en contact avec des personnes considérées à haut risque (p. ex., les personnes immunodéprimées). Pour prévenir la transmission du VRS, la ribavirine, un agent antiviral et un analogue nucléosidique synthétique, est la seule thérapie spécique approuvée pour l’enfant hospitalisé avec une infection par le VRS. L’usage de ce médicament est cependant controversé en raison des préoccupations soulevées par son coût élevé, son mode d’administration en aérosol, ses effets toxiques potentiels pour le personnel de la santé qui y est exposé et les résultats contradictoires des essais portant sur son efcacité. Selon l’Agence de la santé publique du Canada, même si le VRS est sensible à la ribavirine, des études récentes suggèrent que l’utilisation de ce médicament ne procure aucun avantage signicatif (ASPC, 2011b).

Soutenir et informer la famille sur les soins à domicile Le caractère imprévisible de la réponse individuelle de chaque nourrisson à la maladie multiplie l’anxiété des parents. L’inrmière doit fournir de l’information concernant l’état de santé du nourrisson et de l’enseignement sur les mesures préventives. Les parents doivent savoir que leur nourrisson est susceptible de connaître d’autres épisodes de sibilance liés ou non à l’infection par le VRS ; ils peuvent cependant s’inquiéter en cas d’une nouvelle manifestation grave de cette maladie virale.

ENCADRÉ 15.9

Types de pneumonie

• Pneumonie lobaire : touche un lobe pulmonaire entier, ou une grande partie d’au moins un lobe pulmonaire. • Bronchopneumonie (pneumonie lobulaire) : commence dans les bronchioles terminales, où un bouchon muqueux purulent les obstrue pour former des plaques regroupées dans les lobules à proximité. • Pneumonie interstitielle : processus inammatoire plus ou moins conné à l’intérieur des parois alvéolaires (interstitium) et des tissus péribronchiques et interlobulaires. • Pneumonite : inammation aiguë localisée du poumon, sans la toxémie associée à la pneumonie lobaire.

TABLEAU 15.14

Pneumonies virales et bactériennes

PATHOGÈNES LES PLUS FRÉQUENTS SELON L’ÂGE

MANIFESTATIONS CLINIQUES

PHYSIOPATHOLOGIE, CONTAGIOSITÉ ET COMPLICATIONS

Nouveau-nés • Streptocoque du groupe B • H. inuenzae • Bactéries à Gram négatif Nourrissons et enfants d’âge préscolaire • VRS • Inuenza de type A et B • Para-inuenza • Métapneumovirus humain • Adénovirus • Bocavirus • Rhinovirus • Coronavirus • S. pneumoniae • B. pertussis • C. trachomatis Enfants d’âge scolaire et adolescents

• Fièvre élevée – apparition aiguë

Pneumonie virale Les virus provoquent typiquement une pneumonie interstitielle. Période d’incubation : de 1 à 10 jours selon chaque virus

• S. pneumoniae • M. pneumoniae • Chlamydophila • Staphylococcus pneumoniae • Streptococcus pyogenes (du groupe A)

• Toux avec ou sans expectorations blanches • Douleurs thoraciques

• Période de contagion : débute avant l’apparition des symptômes et dure pendant toute la maladie

• Dyspnée • Tachypnée – 0-2 mois : > 60 R/min – 2-12 mois : > 50 R/min – 1-5 ans : > 40 R/min – > 5 ans : > 20 R/min • Tirage (sous-costal, intercostal, sus-sternal) • Battements des ailes du nez • Saturation en oxygène < 90 % dans l’air ambiant • Pâleur, jusqu’à la cyanose (selon la gravité) • Apnée • Irritabilité, agitation, malaise, léthargie • Anorexie, vomissements, diarrhée, douleur abdominale • Bruits à l’auscultation : râles bronchiques ou crépitants, diminution des bruits respiratoires • Signes d’une consolidation pulmonaire (p. ex., matité à la percussion) • Observations radiographiques thoraciques : inltration diffuse ou parsemée avec distribution péribronchique

• Transmission des sécrétions respiratoires, par : – contact direct – contact indirect – projection de gouttelettes • Complications : – surinfection bactérienne – insufsance respiratoire Pneumonie bactérienne Elle se caractérise par une pleurésie (inammation de la plèvre), une inltration ou une destruction des tissus bronchopulmonaires et un exsudat riche en leucocytes et en brines dans les alvéoles et les bronches/bronchioles. Les bactéries sont souvent observées dans les espaces interstitiels, les alvéoles et les bronches/ bronchioles. • Période d’incubation : – selon l’agent causal – durée de quelques jours à quelques semaines • Période de contagion : diminue après 24 à 48 heures d’antibiothérapie • Complications de la pneumonie bactérienne : – fréquente lorsqu’il y a présence de maladie chronique

• Hib

Manifestations spéciques à une infection virale

• M. catarrhalis

• Rhinorrhée

• Mycobacterium tuberculosis (rarement)

• Sibilance expiratoire (wheezing)

– empyème

Manifestations spéciques à une infection bactérienne

– décès

• S. aureus résistant à la méthicilline et acquis en communauté (SARMAC) est une cause en émergence de pneumonies parfois graves

• Apparition abrupte, après quelques jours d’une IVRS • Sibilance expiratoire (wheezing) chez l’enfant de plus de 5 ans avec une infection à M. pneumoniae ou à C. pneumoniae • Frissons • Douleur thoracique s’étendant vers l’abdomen • Symptômes méningitiques (méningisme)

– septicémie

15

– abcès pulmonaire – pyopneumothorax ou pneumothorax sous tension • Complications de la pneumonie à M. pneumoniae : – malaises et céphalées d’une durée de 7 à 10 jours, suivis de èvre et de toux – épanchement pleural plus grave chez les enfants atteints de syndrome de Down ; d’immunosuppression ; d’une maladie cardiopulmonaire chronique – syndrome thoracique aigu chez l’enfant avec anémie falciforme

Sources : Adapté de Bradley, Byington, Shah et al. (2011) ; INESSS (2016d) ; Le Saux et al. (2015) ; MSSS (2015).

causer une pneumonie. Hémorragique, brineuse et nécrotique sont d’autres termes utilisés pour décrire les pneumonies. Les manifestations cliniques de la pneumonie varient en fonction de l’agent étiologique, de l’âge de l’enfant, des réactions de son organisme à

l’infection, de l’étendue des lésions, et du degré d’obstruction bronchique et bronchiolaire. Les antécédents cliniques, l’âge de l’enfant et sa santé générale dans le passé, ainsi que l’examen physique et les examens radiologiques et de laboratoire permettent de déterminer l’agent causal. Chapitre 15

Pyopneumothorax : Association d’un pyothorax (épanchement de pus) et d’un pneumothorax (épanchement d’air) dans la plèvre (membrane enveloppant les poumons).

Troubles liés au système respiratoire

673

Pneumonie virale La pneumonie virale, plus fréquente que la pneumonie d’origine bactérienne, se manifeste chez les enfants de tous âges, mais surtout chez ceux de moins de cinq ans (ministère de la Santé et des Services sociaux [MSSS], 2016), et elle est souvent associée aux IVRS virales. Les agents causals et les manifestations cliniques sont énumérés dans le TABLEAU 15.14 . Les symptômes de pneumonie virale peuvent être non spécifiques chez les nourrissons et les jeunes enfants. Le pronostic est généralement favorable, quoique les infections virales des voies respiratoires rendent l’enfant atteint plus vulnérable à une invasion bactérienne secondaire, surtout lorsque la muqueuse bronchique est dénudée.

Approche thérapeutique L’antibiothérapie devrait être réservée aux enfants chez qui la présence d’une infection bactérienne secondaire a été conrmée par des cultures. CE QU’IL FAUT RETENIR

La pneumonie bactérienne provoque plusieurs mani­ festations cliniques et donne à l’enfant un air maladif. Il arrive qu’elle soit confon­ due avec une appendicite, étant donné la douleur qui peut s’étendre à l’abdomen.

Sinon, le traitement repose principalement sur les soins de soutien visant à évaluer la fonction respiratoire ENCADRÉ 15.1 ainsi qu’à favoriser l’oxygénation et le confort grâce à des mesures comme l’administration d’oxygène, la physiothérapie respiratoire et le positionnement de l’enfant permettant le drainage des sécrétions et la diminution des efforts respiratoires PSTI 15.1. Il s’agit également d’assurer l’administration des antipyrétiques et des analgésiques pour traiter la èvre et soulager la douleur, de surveiller l’apport liquidien et de soutenir la famille.

Pneumonie primitive atypique éactivation des connaissances Nommez tous les moyens utilisés pour administrer de l’oxygène à une personne qui n’est pas intubée.

Empyème : Liquide pleural rendu purulent par une infection bactérienne.

674

Partie 6

La pneumonie primitive atypique est une pneumonie causée par des pathogènes autres que ceux qui gurent parmi les bactéries les plus communes à l’origine de la pneumonie et faisant couramment l’objet de cultures (p. ex., S. pneumoniae). Chez l’enfant de 5 à 15 ans, le M. pneumoniae et le Chlamydia pneumoniae sont les pathogènes des pneumonies atypiques les plus fréquemment acquises dans la communauté (Cardinale, Cappiello, Mastrototaro et al., 2013). Ces pneumonies surviennent durant les mois d’automne et d’hiver, et sont plus répandues dans les environnements populeux (p. ex., le milieu scolaire). La période d’incubation est de 1 à 4 semaines (CDC, 2016). Les enfants qui en sont les plus affectés guérissent de la maladie aiguë en 7 à 10 jours avec un traitement symptomatique suivi d’une semaine de convalescence. L’hospitalisation est rarement nécessaire. La pneumonie à Chlamydia, causée par C. trachomatis, peut survenir chez les nourrissons et apparaît généralement de 2 à 19 semaines après

Troubles liés aux systèmes

la naissance. À l’accouchement, le nourrisson contracte la bactérie à partir du tractus génital infecté de la mère. La pneumonie à Chlamydia est caractérisée par une toux persistante, une tachypnée et parfois des râles. Le traitement de choix consiste en l’administration d’azithromycine ou l’érythromycine par voie orale.

Pneumonie bactérienne La bactérie S. pneumoniae est le pathogène bactériologique le plus fréquemment responsable de la pneumonie acquise dans la communauté, tant chez l’enfant que chez l’adulte (Le Saux et al., 2015).

Manifestations cliniques Au-delà de la période néonatale, les pneumonies bactériennes afchent des caractéristiques cliniques particulières qui aident à les distinguer des autres formes de pneumonie. L’apparition de la maladie est subite et suit généralement une infection virale qui perturbe les mécanismes naturels de défense des voies respiratoires supérieures. Habituellement, l’enfant atteint d’une pneumonie bactérienne a une apparence maladive. En plus des manifestations cliniques communes à la pneumonie virale, la pneumonie bactérienne comporte fréquemment des frissons et des symptômes méningitiques (méningiome). La douleur thoracique peut s’étendre à l’abdomen et être confondue avec celle de l’appendicite.

Approche thérapeutique La plupart des enfants souffrant d’une pneumonie sans signes de gravité peuvent être traités à la maison si la maladie est conrmée et si le traitement est amorcé rapidement. L’antibiothérapie, le repos au lit, une consommation abondante de liquides et l’administration d’un antipyrétique pour la èvre constituent les principales mesures thérapeutiques. Un examen de suivi est recommandé pour les nourrissons et les trottineurs. L’hospitalisation est indiquée : 1. chez les nourrissons et les enfants présentant des manifestations cliniques de détresse respiratoire et d’hypoxémie, et qui nécessitent de l’oxygène pour maintenir une saturométrie supérieure à 90 % ; 2. en cas de pneumonie combinée à un épanchement pleural, ou empyème ; 3. chez l’enfant à l’apparence maladive ou léthargique ; 4. dans les situations où il y aurait une faible adhésion au traitement ; 5. chez les nourrissons de moins de 6 mois ; 6. chez le nourrisson de moins de 1 mois atteint d’une maladie chronique sous-jacente (p. ex., une maladie cardiaque congénitale ou la dysplasie bronchopulmonaire) ;

7. en présence d’un agent pathogène avec une virulence accrue (p. ex., une infection à S. aureus résistant à la méthicilline [SARM]) ; 8. en cas de déshydratation ; 9. en cas d’incapacité de s’alimenter ; 10. en cas d’antibiothérapie par voie parentérale en raison de la gravité de l’état de l’enfant (Bradley et al., 2011 ; Le Saux et al., 2015). Si du liquide purulent est aspiré, il est possible d’installer un système clos de drainage thoracique continu. Il est maintenu jusqu’à ce que le liquide drainé ne contienne plus de pathogènes, ce qui exige rarement plus de cinq à sept jours. Il peut être nécessaire, dans des cas extrêmement sérieux, d’effectuer une thoracotomie avec débridement du tissu pulmonaire infecté. Si l’empyème et le pneumothorax ont tendance à revenir, il est possible de procéder à une lobectomie partielle par thoracoscopie.

Pronostic Le pronostic en cas de pneumonie est généralement favorable, avec une guérison rapide si les symptômes sont reconnus tôt et traités rapidement. La durée des infections à streptocoque est variable, mais elles guérissent habituellement spontanément. Une pneumonie à staphylocoque dure en général plus longtemps.

Prévention Le vaccin conjugué contre le pneumocoque est indiqué pour tous les enfants de 2 mois à 4 ans, et pour ceux âgés de 5 à 17 ans qui ont une condition médicale qui augmente le risque d’une infection grave à pneumocoque (Portail santé mieux-être, 2017c). Des études ont démontré une diminution des pneumonies à pneumocoque chez les enfants qui avaient été vaccinés. La vaccination contre l’inuenza et la coqueluche est recommandée pour prévenir la pneumonie acquise en communauté, et les personnes de l’entourage devraient se faire vacciner contre l’inuenza (Bradley et al., 2011).

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les IVRS répétées et non guéries correctement peuvent favoriser l’apparition d’une allergie respiratoire et de l’asthme.

Soins inrmiers PNEUMONIE BACTÉRIENNE

Enseigner les soins à domicile Si l’enfant atteint d’une pneumonie bactérienne est traité à la maison, l’inrmière informe les parents concernant l’administration des antibiotiques et des antipyrétiques, l’évaluation de l’état respiratoire et l’apport liquidien par voie orale. Si l’enfant est malade, il se peut qu’il refuse les aliments solides ; il faut l’encourager à boire jusqu’à ce qu’il se sente sufsamment bien pour absorber des aliments solides. Il faut aussi rassurer les parents sur le fait que l’enfant retrouvera l’appétit une fois passée la phase aiguë de la maladie. La plupart des enfants malades ont tendance à vouloir gérer eux-mêmes leurs périodes d’activité et de repos ; il est bon d’encourager les parents à veiller à ce que l’enfant prenne un repos approprié et à décourager les activités vigoureuses jusqu’à ce que la èvre ait disparu depuis au moins 24 heures. En règle générale, le moment du retour à l’école ou à la garderie dépend du type de pneumonie, de la gravité de la maladie et de la recommandation du médecin. Il convient d’insister sur le fait que l’infection peut être transmise à d’autres enfants par un contact rapproché.

Prodiguer les soins à l’hôpital Évaluation de l’état respiratoire et de l’hydratation Les soins inrmiers de l’enfant hospitalisé avec une pneumonie sont principalement symptomatiques

et visent le soutien, mais ils nécessitent une évaluation complète de l’état respiratoire ENCADRÉ 15.1, une évaluation de l’hydratation et l’administration d’antibiotiques. Il peut être nécessaire de fournir de l’oxygène d’appoint à l’aide d’une lunette nasale ou d’un masque facial. Il faut évaluer souvent sa fréquence respiratoire et son état d’oxygénation, de même que ses signes vitaux, son degré de douleur, sa disposition générale et son niveau d’activité. Durant la phase aiguë, l’administration d’un soluté par voie I.V. prévient la déshydratation.

15

Prévention de la transmission Les politiques de l’hôpital dictent la mise en place de procédures d’isolement, mais il est recommandé d’instaurer initialement les mesures standard et les précautions de contact pour tout enfant atteint d’une IVRS, jusqu’à ce que la cause exacte de la maladie soit connue.

Traitement Les enfants sont généralement plus à l’aise en position semiassise, mais il faut leur permettre de choisir la meilleure position pour leur confort FIGURE 15.10. Se coucher sur le côté affecté FIGURE 15.10 La position semi(si la pneumonie est unilatérale) assise est plus confortable, car elle améliore soutient le thorax sur ce côté, ce l’expansion du diaphragme.

Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

675

qui réduit le frottement pleural, lequel est une source fréquente d’inconfort. La èvre peut être maîtrisée par le maintien d’un environnement frais et l’administration d’un antipyrétique. L’enfant en détresse respiratoire peut nécessiter une ventilation non invasive ou une intubation endotrachéale avec une ventilation mécanique.

13 L’angoisse de la séparation dans un contexte d’hos­ pitalisation est abordée dans le chapitre 13, Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation.

Il est possible de prescrire de la physiothérapie respiratoire ou des traitements aux bronchodilatateurs nébulisés selon l’état de l’enfant. Il est bénéque pour l’enfant avec une inuenza présumée ou conrmée d’être traité avec un antiviral (p. ex., l’oseltamivir, le zanamivir), car il a été

15.5

Physiopathologie

Chez l’enfant, et en particulier chez le nourrisson dont la toux est inefcace ou qui a de la difculté à évacuer les sécrétions, un nettoyage par aspiration doit être pratiqué pour le maintien de la perméabilité des voies respiratoires. Un appareil d’aspiration mécanique doit être à portée de main, au besoin. L’enfant plus âgé peut habituellement se charger d’éliminer ses sécrétions sans aide.

Autres infections des voies respiratoires

15.5.1

La coqueluche est traitée dans le chapitre 9, Maladies infectieuses et immunisation.

La coqueluche est une infection aiguë des voies respiratoires causée par la bactérie B. pertussis. Elle est hautement contagieuse et très dangereuse pour les jeunes nourrissons, pour qui les taux de morbidité et de mortalité sont plus élevés 9 .

15.5.2

Coqueluche

Tuberculose

La tuberculose est l’une des 10 premières causes de décès dans le monde. En 2015, 170 000 enfants dans le monde en sont décédés (Organisation mondiale de la Santé [OMS], 2017). Au Canada, le taux de la tuberculose (TB) active est parmi les plus bas du monde avec 1 600 nouveaux cas rapportés chaque année (gouvernement du Canada, 2016b) et le taux continue de diminuer. Les deux tiers des cas ont été constatés dans 3 provinces, soit la Colombie-Britannique, l’Ontario et le Québec, et touchent surtout les personnes nées à l’étranger ; le taux le plus élevé par 100 000 habitants est observé dans les territoires du Nord (Nunavut et Yukon) et affecte surtout les Autochtones (Indiens, Métis et Inuits) nés au Canada (Kitai et Demers, 2014).

Étiologie La tuberculose est causée par Mycobacterium tuberculosis, la forme humaine, et, dans une moindre mesure, par Mycobacterius bovis, la forme bovine transmise surtout par le lait non pasteurisé. Partie 6

Soutien et information L’enfant hospitalisé peut avoir des appréhensions, et les traitements, tout comme les examens, peuvent être terriants et générateurs de stress. Il est important d’encourager la famille à participer de façon appropriée aux soins et à poser des questions, au besoin. Permettre à l’enfant de s’adonner régulièrement à des activités comme un jeu tranquille peut contribuer à réduire l’anxiété due à l’hospitalisation et à la séparation de sa famille et de ses amis 13 . La réduction de l’anxiété et de l’appréhension de l’enfant soulage sa détresse psychologique, et un état plus calme amoindrit l’effort respiratoire. Faciliter les efforts respiratoires contribue à apaiser les craintes de l’enfant, et encourager la présence de la personne qui en prend soin lui procure une source de réconfort et de soutien.

9

676

démontré que les antiviraux peuvent prévenir les infections bactériennes secondaires (Le Saux et al., 2015).

Troubles liés aux systèmes

Le M. tuberculosis se transmet par l’inhalation de microgouttelettes contenant des bacilles qui peuvent facilement atteindre les alvéoles. Chez certains enfants, les bacilles sont éliminés par des mécanismes immunitaires innés et chez d’autres, les bacilles peuvent se multiplier et produire l’infection tuberculeuse latente (ITL). Près de 10 % des personnes infectées par le bacille tuberculeux risquent de contracter la maladie au cours de leur vie. En l’absence de traitement contre l’ITL, 5 % des personnes infectées subiront une première infection de TB active (la population plus à risque inclut les nourrissons, les jeunes enfants et les personnes immunodéprimées) ; un autre 5 % des personnes infectées auront une TB de réactivation plus tard (la population à risque élevé inclut les personnes immunodéprimées et celles qui sont infectées par le VIH) ; et 90 % des personnes infectées recevront un diagnostic d’ITL et n’auront pas la maladie (Kitai et Demers, 2014 ; OMS, 2017). Les nourrissons et les enfants de moins de 5 ans sont plus à risque que leur ITL progresse vers une tuberculose active et parfois grave. L’extension de la lésion initiale entraîne une destruction progressive des tissus pulmonaires ou des structures avoisinantes (p. ex., les bronches, la plèvre) à mesure qu’elle se répand, ou elle provoque l’apparition d’une pneumonie. L’érosion des vaisseaux sanguins par la lésion initiale peut entraîner une dissémination étendue du bacille de Koch vers des sites rapprochés ou distants (tuberculose miliaire).

La tuberculose extrapulmonaire peut affecter les ganglions lymphatiques, les reins et les os, et se manifeste comme une lymphadénite, une méningite, de l’ostéoarthrite ou une autre maladie. À l’exception de la méningite, le traitement pharmacologique de la tuberculose extrapulmonaire peut être le même que pour la tuberculose pulmonaire (Kitai et Demers, 2014 ; Kitai et Hui, 2016 ; Onyett, 2015).

Manifestations cliniques Les manifestations cliniques de la TB sont très variables selon l’âge et la progression de la maladie TABLEAU 15.15 . Les nourrissons peuvent être asymptomatiques ou présenter des symptômes non spéciques, ce qui rend le diagnostic difcile (Kitai et Demers, 2014).

Diagnostic Le diagnostic est établi à partir de l’examen physique, de l’anamnèse, des tests cutanés à la tuberculine ou du test de libération d’interféron-gamma, des examens radiologiques, des cultures bactériennes TABLEAU 15.15

ainsi que de l’analyse du liquide d’aspiration gastrique si l’enfant est incapable de produire des expectorations ou des expectorations provoquées.

Examens paracliniques Au Canada, le dépistage cible les enfants vulnérables à une infection par la TB ainsi que ceux qui risquent de voir leur état évoluer d’une ITL en TB active (Onyett, 2015). Le test cutané à la tuberculine (TCT) et le test de libération d’interféronFIGURE 15.11 gamma (TLIG) évaluent l’immu- la tuberculine nité à M. tuberculosis, mais aucun des deux tests ne permet de distinguer l’ITL de la TB active. Le TCT requiert l’administration intradermique de tuberculine. La création d’une papule visible est cruciale pour l’exactitude du test FIGURE 15.11 . Le TLIG est un prélèvement sanguin qui indique la réponse immunitaire au bacille de Koch.

Manifestations cliniques de la tuberculose

SELON L’ÂGE

SELON LE TYPE DE TUBERCULOSE

Nourrissons Plusieurs signes non spéciques :

TB pulmonaire Symptômes respiratoires (signes physiques souvent minimes par rapport aux anomalies observées à la radiographie pulmonaire) :

• Hépatosplénomégalie • Détresse respiratoire • Fièvre • Adénopathie • Ballonnement abdominal • Léthargie ou irritabilité Enfants de moins de cinq ans Avec contagion par un cas source conrmé dans son entourage :

• Toux • Expectorations • Parfois hémoptysie

• Tachypnée • Faible expansion du poumon du côté atteint

• Tuberculose révélée par une radiographie pulmonaire anormale

• Réduction des bruits respiratoires et des crépitements

Enfants d’âge scolaire et adolescents Manifestations cliniques d’une TB de l’adulte : Fièvrea

• Matité à la percussion TB active extrapulmonaire

• Sueurs nocturnesa

• Touche souvent les adolescents canadiens

• Perte de poidsa

• Tableau clinique variable selon la région extrapulmonaire atteinte (p. ex., les ganglions lymphatiques, le système nerveux central)

• Toux (absente ou progression lente, sur plusieurs semaines ou mois) avec ou sans hémoptysie • Douleur/serrement de la poitrine • Anorexie • Symptômes généralisés : faiblesse, pâleur, anémie • Malaise

15

• Radiographie pulmonaire : inltrats pouvant former des cavités et siégeant habituellement dans les lobes supérieurs

• Enfant pouvant être asymptomatique



Test cutané à

• Formes les plus mortelles de la maladie (affectent les jeunes enfants et les enfants immunodéprimés) : – TB miliaire/disséminée – TB du système nerveux central

a

Manifestations cliniques classiques. Source : Adapté de Kitai et Demers (2014). Chapitre 9 : La TB de l’enfant. Normes Canadiennes pour la lutte antituberculeuse (7e éd.). Repéré à www. phac-aspc.gc.ca/tbpc-latb/pubs/tb-canada-7/tb-standards-tb-normes-ch9-fra.php.

Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

677

Le ministère de la Santé et des Services sociaux fournit de l’information sur le dépistage de la tuberculose et le test cutané à la tuberculine au www.msss.gouv.qc.ca.

L’Agence de la santé publique du Canada a publié, en 2014, la 7e édition des Normes canadiennes pour la lutte antituberculeuse. Le document, qui fournit des conseils et des recommandations à jour sur le vaccin par le bacille de Calmette et Guérin, peut être consulté au www.phacaspc.gc.ca.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Le seul moyen existant de prévenir la tuberculose est d’éviter le contact avec le bacille de la tuberculose.

L’administration du TCT et l’interprétation des résultats doivent être effectuées par un médecin ou une inrmière spécialisé en pneumologie.

La vitamine B6 peut être prescrite dans le but de prévenir les neuropathies que peut causer l’isoniazide.

Le terme infection tuberculeuse latente est utilisé pour signier qu’il y a infection chez un enfant dont le TCT est positif, mais qui ne présente aucun signe physique de la maladie et dont les radiographies thoraciques sont normales. Le terme tuberculose active est utilisé lorsqu’un enfant a des symptômes cliniques causés par le M. tuberculosis décelables sur des radiographies. Un diagnostic d’ITL ou de TB active chez un enfant est un événement sentinelle qui indique habituellement qu’il y a eu transmission récente de M. tuberculosis et doit susciter la recherche du cas source et une déclaration aux autorités de la santé publique (Onyett, 2015).

Des interventions chirurgicales peuvent être requises pour extraire la source de l’infection dans les tissus inaccessibles à la pharmacothérapie ou détruits par la maladie.

Approche thérapeutique Au Québec, la tuberculose est une maladie à déclaration et à traitement obligatoires (Portail santé mieux-être, 2018). Le traitement médical de la TB active chez les enfants consiste en une nutrition adéquate, une pharmacothérapie, des mesures générales de soutien, la prévention d’une exposition à d’autres infections qui pourraient compromettre davantage le système immunitaire, la prévention contre une réinfection et parfois une intervention chirurgicale. Pour l’enfant atteint d’une ITL et d’une TB active, l’objectif sera de parvenir à stériliser la lésion tuberculeuse. La durée des protocoles de traitements varie de 6 à 12 mois (Onyett, 2015). La pharmacothérapie recommandée pour traiter une ITL et une TB active comprend une combinaison d’isoniazide, de rifampicine et de pyrazinamide, et l’éthambutol (thérapie sous observation directe).

Pronostic La plupart des enfants guérissent de la primoinfection de tuberculose, souvent sans savoir qu’ils ont été infectés. Cependant, les enfants très jeunes ont un taux supérieur de tuberculose miliaire. La tuberculose est une maladie grave durant les deux premières années de vie, au cours de l’adolescence et chez les enfants séropositifs. À l’exception des cas de méningite tuberculeuse, les enfants traités meurent rarement de la maladie. L’antibiothérapie a fait baisser le taux de mortalité et la contagion hématogène à partir des lésions initiales.

Prévention Bien qu’éviter le contact avec le bacille de la tuberculose représente la seule manière de prévenir la maladie, il est possible d’induire une immunité limitée en administrant le bacille de Calmette et Guérin (BCG), un vaccin vivant contenant des bacilles bovins à virulence réduite ou atténuée. Cependant, l’immunisation par le vaccin BCG est controversée et n’est recommandée que dans les pays en développement et les pays industrialisés où la prévalence de TB est très élevée. Il est administré au Nunavut en raison de la forte incidence de TB (Onyett, 2015).

Soins inrmiers TUBERCULOSE

L’enfant tuberculeux reçoit ses soins inrmiers en service ambulatoire, dans un service de consultation externe, à l’école ou dans les services de santé publique.

Prévenir la transmission

FIGURE 15.12 Le masque ltrant N95 doit être bien ajusté au visage.

678

Partie 6

La plupart des enfants ne sont pas contagieux et ne requièrent que des précautions standard. L’enfant qui ne tousse pas et dont le frottis d’expectoration est négatif peut être hospitalisé dans une chambre standard. Cependant, les précautions contre les risques de transmission par voie aéroportée ainsi qu’une chambre à pression négative

Troubles liés aux systèmes

sont exigées pour un enfant contagieux ou hospitalisé avec une TB active, ou si le parent qui est présent est contagieux. L’équipement de protection individuelle pour le personnel hospitalier doit inclure un masque ltrant N95 ajusté au visage pour tous les contacts avec ces enfants FIGURE 15.12.

Soutenir et informer la famille L’inrmière assume plusieurs rôles dans la gestion de cette maladie, ce qui inclut d’expliquer les procédures diagnostiques à l’enfant et à sa famille, de les assister au cours des examens radiologiques, de veiller à ce que l’administration et la lecture des tests cutanés soient faits par un

professionnel de la santé spécialisé, et d’obtenir des spécimens pour les analyses de laboratoire, au besoin 14 . L’enfant tuberculeux asymptomatique peut aller à l’école et à la garderie s’il reçoit une pharmacothérapie. Il peut reprendre ses activités normales aussitôt qu’une thérapie efcace a été instituée, que l’adhésion à la thérapie a été documentée et que les symptômes cliniques ont diminué. L’enfant recevant une pharmacothérapie contre la tuberculose peut recevoir les vaccins vivants appropriés pour son âge, y compris le vaccin contre la rougeole, à moins qu’il ne reçoive

15.6

Dysfonctionnement pulmonaire attribuable à des irritants non infectieux

15.6.1

Aspiration d’un corps étranger

Les jeunes enfants explorent la matière avec leur bouche et ils ont tendance à aspirer des corps étrangers. L’aspiration d’un corps étranger peut se produire à tout âge, mais 80 % des cas ont lieu chez les enfants de moins de 3 ans (Salih, Alfaki et Alam-Elhuda, 2016), avec un pic à 13 mois (Mnejja, Chakroun, Bougacha et al., 2012 ; Salih et al., 2016) 3 . La gravité du problème est déterminée selon la région où l’objet se loge, le type d’objet aspiré et l’étendue de l’obstruction. Une matière végétale sèche (p. ex., une graine, une noix, un morceau de carotte, un grain de maïs éclaté) qui ne se dissout pas et qui risque de goner si elle est mouillée peut provoquer un problème particulièrement ardu. La nature du corps étranger détermine le degré de la réponse inammatoire (Salih et al., 2016). Le taux élevé de gras que contiennent les croustilles et les arachides peut entraîner un risque accru de pneumonie lipoïde. Les aliments amusants (p. ex., les bonbons, les noix et les biscuits) sont les plus grands responsables d’étouffement et présentent un fort potentiel de risque. Des objets comme les billes de verre ou de plastique, les boutons, les piles boutons et les pièces de monnaie peuvent aussi être avalés. Des objets comme de petites piles au lithium ou au cadmium peuvent provoquer une corrosion de l’œsophage ou de la trachée. Certains aliments du groupe des féculents absorbent l’eau et peuvent transformer une

des doses élevées de corticostéroïdes, qu’il ne soit gravement malade ou qu’il présente des contreindications particulières contre la vaccination. L’enfant tuberculeux doit également bénécier d’une nutrition optimale et d’un repos adéquat.

14 Le prélèvement d’échan­ tillons de sécrétions respiratoires est expliqué dans le chapitre 14, Techniques de soins.

Il faut également expliquer aux parents que le succès de la thérapie dépend de l’adhésion au régime pharmacologique. La recherche de contacts connus, soit les personnes auprès de qui l’enfant aurait pu contracter la maladie et celles qui ont pu être exposées à l’enfant infecté, constituent des mesures de contrôle essentielles.

ob struction des voies respiratoires partielle en une obstruction complète. Cette situation requiert une intervention urgente pour prévenir l’asphyxie et le décès.

Diagnostic Un diagnostic d’aspiration d’un corps étranger peut être soupçonné à partir de l’histoire du cas et des signes physiques. L’introduction d’un corps étranger dans les voies respiratoires produit un syndrome de pénétration dans 70 % des cas, syndrome qui se manifeste par un accès brutal d’étouffement avec dyspnée, une sibilance, du tirage, un réexe nauséeux ou des quintes de toux coqueluchoïdes, une cyanose, puis le retour à une respiration normale (Arlaud et Dubus, 2017 ; Rossant-Lumbroso, Rossant et Cardenas, 2016). La période asymptomatique, qui débute avec le retour à une respiration normale, laisse souvent croire aux parents que l’enfant a réussi à désobstruer ses voies aériennes ou respiratoires, d’autant plus que près de la moitié de tous les enfants qui ingèrent un corps étranger peuvent être complètement asymptomatiques après le syndrome de pénétration. La réaction varie selon le type d’obstruction : • Une obstruction laryngotrachéale cause très fréquemment de la dyspnée, de la toux, un stridor et un enrouement en raison de la diminution de l’apport d’air. Il peut se produire une cyanose si l’obstruction s’aggrave. • Une obstruction bronchique produit habituellement de la toux (fréquemment paroxystique), une sibilance, des bruits respiratoires asymétriques, une réduction de l’apport d’air et de la dyspnée. • Une obstruction du larynx entraîne chez l’enfant une incapacité à parler ou à respirer. Lorsque

Chapitre 15

3 Les dangers d’aspiration d’un corps étranger chez le nourrisson sont abordés dans le chapitre 3, Croissance, développement et promotion de la santé.

15

CE QU’IL FAUT RETENIR

Un corps étranger sera rarement expulsé spon­ tanément simplement par la toux. La plupart du temps, il doit être enlevé à l’aide d’instruments endoscopiques.

Troubles liés au système respiratoire

679

l’obstruction progresse, le visage de l’enfant peut devenir blême et, si l’obstruction est totale, l’enfant peut sombrer dans l’inconscience et mourir d’asphyxie. Qu’il y ait eu initialement ou non syndrome de pénétration, si l’obstruction est partielle, des heures, des jours ou même des semaines peuvent passer sans manifestations cliniques. Puis, les symptômes secondaires vont dépendre de la région anatomique où l’objet s’est logé et vont habituellement être causés par une infection persistante des voies respiratoires située sous le site de l’obstruction. Les symptômes secondaires les plus fréquents incluent une réponse inammatoire, un œdème localisé et le bronchospasme (Salih et al., 2016).

14 La technique de dégagement des voies respiratoires est expliquée dans le chapitre 14, Techniques de soins.

Il faut également soupçonner l’aspiration d’un corps étranger en présence de lésions pulmonaires aiguës ou chroniques. Il arrive souvent qu’au moment où les symptômes secondaires apparaissent, les parents aient oublié l’épisode initial de toux et de réexe nauséeux. Par exemple, un Une mère anxieuse téléphone au service corps étranger logé dans une narine Info-Santé parce que Théo, son ls âgé de peut se manifester par un drainage un an, vient d’avaler une pièce de monnaie. purulent chronique et unilatéral qui Quelle devrait être la première question à ne s’améliore pas avec le temps lui poser? (Salih et al., 2016). a) Tousse-t-il ? c) Respire-t-il ?

Jugement

clinique

b) Parle-t-il ?

d) Gémit-il ?

La mère doit-elle appeler une ambulance? Justiez votre réponse. MAIS SI...

Avant d’appeler Info-Santé, que devraitelle faire si l’enfant ne respirait pas ?

Examens paracliniques

L’examen radiologique révèle les corps étrangers opaques, mais son utilité est limitée à la localisation des matières visibles aux rayons X. Il faut donc procéder à une bronchoscopie pour obtenir un diagnostic confirmant la présence d’un

corps étranger dans le larynx et la trachée. L’examen uoroscopique est précieux pour détecter un corps étranger dans les bronches. La bronchoscopie exible constitue l’examen de choix pour le diagnostic, et la bronchoscopie rigide pour l’extraction du corps étranger (Korlacki, Korecka et Dzielicki, 2011 ; Salih et al., 2016).

Approche thérapeutique L’aspiration d’un corps étranger peut provoquer une obstruction fatale, en particulier chez le nourrisson, puisque ses voies respiratoires ont un diamètre plus petit. Les recommandations actuelles pour le traitement d’urgence en cas d’étouffement chez l’enfant conscient comprennent les compressions abdominales pour les enfants de plus de un an, et cinq tapes dorsales ainsi que cinq compressions thoraciques en alternance pour les enfants de moins de un an 14 . L’utilisation d’instruments endoscopiques est généralement nécessaire pour enlever un corps étranger. L’endoscopie et la bronchoscopie exigent une sédation à l’aide d’un agent comme le propofol ou le midazolam administré par voie I.V., ou une anesthésie générale. La procédure est exécutée aussi rapidement que possible, car le processus inammatoire local progressif déclenché par le corps étranger nuit à la récupération (Korlacki et al., 2011 ; Ruiz, 2017). Une pneumonie chimique se développe rapidement et, dans le cas d’une matière végétale, cette dernière commence à macérer en quelques jours, ce qui la rend encore plus difcile à enlever. Après le retrait du corps étranger, l’enfant reste habituellement en observation en cas de complication comme l’œdème laryngé, et obtient son congé quelques heures plus tard si ses signes vitaux sont stables et que sa récupération est satisfaisante.

Soins inrmiers ASPIRATION D’UN CORPS ÉTRANGER

Évaluer l’état respiratoire ALERTE CLINIQUE

L’enfant en détresse grave : 1. ne peut pas parler ; 2. devient cyanosé ; 3. s’effondre. Ces trois signes indiquent que l’enfant est véritablement en train de s’étouffer, et cela exige une action immédiate. L’enfant peut mourir en quatre minutes.

680

Partie 6

En cas d’aspiration d’un corps étranger, l’observation de l’enfant et de son état respiratoire est importante. L’évaluation fréquente de la respiration et l’auscultation des poumons sont vitales, car le déplacement du corps étranger et l’œdème des voies respiratoires peuvent entraîner une diminution de l’entrée d’air, de la sibilance unilatérale avec logement dans une bronche souche et une détresse respiratoire . L’inrmière qui prend soin d’un enfant ayant aspiré un corps étranger doit reconnaître les signes d’une obstruction et prendre immédiatement des mesures pour la dégager. Toutes les

Troubles liés aux systèmes

personnes qui travaillent avec les enfants doivent être prêtes à réagir avec efcacité en cas d’aspiration d’un corps étranger, et l’inrmière se doit d’apprendre ces techniques et de les maintenir à jour.

Assurer la prévention L’inrmière est dans une position privilégiée pour enseigner la prévention. Les parents devraient être avertis des comportements dangereux que leur enfant risque d’imiter (p. ex., tenir entre leurs lèvres ou mettre dans leur bouche des corps étrangers comme des épingles, des clous et des cure-dents). L’inrmière doit aussi les informer des aliments à éviter avant l’âge de quatre ans ENCADRÉ 15.10.

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 15.10

Prévention de l’étouffement avec des aliments des enfants de moins de quatre ans

L’inrmière informe les parents des aliments qui sont à éviter. La plupart des aliments en cause sont petits, sphériques ou cylindriques, et s’adaptent aux contours des voies aériennes de l’enfant. • Bonbons durs, pastilles pour la toux • Gomme, jujubes et vitamines à croquer • Arachides et noix

• Poisson comportant des arêtes • Collations montées sur des cure-dents ou des brochettes • Maïs éclaté • Hot-dogs, saucisses : à couper dans le sens de la longueur • Raisins entiers : à couper dans le sens de longueur • Gros morceaux de fromage, de viande, de fruits ou légumes crus : à couper en morceaux ou à râper

• Graines de tournesol Sources : Adapté de AAP (2015a) ; Cyr et SCP (2012).

15.6.2

Pneumothorax

Étiologie et physiopathologie

le pneumothorax récidivant ou chronique. Le retour du poumon à la paroi est conrmé par la radiographie et par l’absence de bulles.

Le pneumothorax est un épanchement d’air dans la cavité pleurale qui crée un affaissement pulmonaire FIGURE 15.13. La gravité des symptômes dépend de l’étendue de l’affaissement pulmonaire, de sa vitesse d’accumulation, du niveau de tension dans l’espace intrapleural et de l’état clinique sous-jacent. Les pneumothorax sont classés comme suit : 1) spontané primitif ; 2) spontané secondaire ; 3) traumatique (y compris le pneumothorax sous tension) ; 4) iatrogénique. Leur prévalence est élevée chez les nouveau-nés et les adolescents, avec une prédominance chez les garçons (Janahi, 2016). L’étiologie varie selon l’âge .

Manifestations cliniques L’enfant atteint d’un pneumothorax peut être asymptomatique ou présenter avec une douleur thoracique brutale, une dyspnée, une gêne respiratoire limitant l’inspiration, une polypnée, une toux sèche et irritante, une diminution du murmure vésiculaire, une hypersonorité et une distension hémithoracique .

Approche thérapeutique La radiographie et la tomodensitométrie thoraciques jouent un rôle important dans le diagnostic du pneumothorax. Chez le nouveau-né, le test de la transillumination thoracique est utilisé en cas d’urgence. Divers traitements sont possibles : observation sous oxygénothérapie ; exsufation à l’aiguille ; insertion d’un drain thoracique ; et pleurodèse, pour

15

FIGURE 15.13

Pneumothorax

Encadré 15.1W : Étiologie des pneumothorax.

Soins inrmiers

Encadré 15.2W : Types de pneumothorax.

PNEUMOTHORAX

L’inrmière doit faire l’évaluation initiale et déterminer la gravité d’un pneumothorax. Lorsqu’un pneumothorax est diagnostiqué, elle procède aux soins, notamment : • administrer de l’oxygène ; • assister à l’évacuation d’air dans l’espace intrapleural ; • installer une voie veineuse ;

Chapitre 15

ALERTE CLINIQUE

Les signes suivants exigent une intervention d’urgence : détresse respiratoire, cyanose, transpiration, difculté à parler et changements dans les signes vitaux.

Troubles liés au système respiratoire

681

• effectuer des prélèvements sanguins ; • surveiller les signes vitaux ; • évaluer la saturation en oxygène et les bulles du drain ; • administrer des analgésiques pour soulager la douleur.

15.6.3

Pneumonie par aspiration

La pneumonie par aspiration se produit lorsqu’un aliment, des sécrétions, des vomissements, une matière inerte, un composé volatil ou un liquide pénètrent dans les poumons, où ils causent de l’inflammation et une pneumonie chimique. L’aspiration d’un liquide ou d’aliments est un danger qui guette particulièrement l’enfant qui a de la difculté à avaler ou qui est incapable d’avaler en raison d’une paralysie, d’une faiblesse, d’une invalidité, d’anomalies congénitales

ou de l’absence du réexe de toux, ou encore l’enfant qui est nourri de force, en particulier pendant qu’il pleure ou que sa respiration est rapide.

Manifestations cliniques Il peut être impossible de distinguer les signes cliniques d’une pneumonie par aspiration de ceux d’une autre forme de pneumonie bactérienne aiguë. Par exemple, si une matière végétale a été aspirée, les manifestations peuvent apparaître plusieurs semaines après l’événement. Les symptômes classiques incluent une augmentation de la toux ou de la èvre avec des expectorations malodorantes, une détérioration visible sur les radiographies thoraciques et divers autres signes indiquant que les voies respiratoires inférieures sont perturbées. Il est rare que l’aspiration cause une mort immédiate par asphyxie ; le plus souvent, la muqueuse irritée devient un site pour une infection bactérienne secondaire.

Soins inrmiers Le traitement de l’enfant souffrant d’une pneumonie par aspiration est le même que celui qui a été décrit pour l’enfant atteint d’une pneumonie ayant une autre cause. Cependant, les soins inrmiers seront principalement axés sur la prévention de l’aspiration. Il faut utiliser des techniques d’alimentation appropriées si l’enfant est faible, invalide ou non coopératif, et il faut mettre en place des mesures préventives contre l’aspiration de toute matière susceptible de pénétrer dans le rhinopharynx. Il faut vérier le placement des sondes nasogastriques utilisées pour l’alimentation avant

de commencer l’administration du gavage par bolus. Il est également important d’évaluer périodiquement l’alimentation continue par sonde nasogastrique pour vérier que la sonde est placée adéquatement. L’enfant qui présente un risque en raison de sa difculté à déglutir à cause d’une maladie, d’une invalidité physique, d’une anesthésie ou d’une sédation sera gardé nil per os (NPO ; rien par la bouche) jusqu’à ce qu’il puisse avaler efcacement les liquides tout en protégeant ses voies respiratoires. L’enfant qui risque de vomir sans être capable de protéger ses voies respiratoires doit être placé en position latérale de sécurité.

15.6.4

Physiopathologie

PNEUMONIE PAR ASPIRATION

Syndrome de détresse respiratoire aiguë ou lésion pulmonaire aiguë

Le syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) est une lésion pulmonaire inammatoire aiguë et diffuse. Il est causé par diverses étiologies pulmonaires et non pulmonaires (Purohit, 2016) telles qu’une sepsie, un trauma, une pneumonie virale, une embolie graisseuse, une surdose de drogue, des lésions de reperfusion après une transplantation pulmonaire, une inhalation de fumée et une quasinoyade. La moitié des SDRA sont secondaires à une pneumonie ou à un choc septique. Avant l’âge de un an, la cause la plus fréquente est l’infection par le VRS. Le SDRA est une maladie grave et potentiellement mortelle. L’enfant requiert une intubation endotrachéale et une ventilation mécanique (Purohit, 2016).

682

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

Le SDRA est la plus grave des maladies inammatoires causant une hypoxémie. La marque distinctive du SDRA est l’inammation pulmonaire aiguë avec la destruction, puis l’augmentation de la perméabilité de la membrane alvéolocapillaire menant à un œdème pulmonaire (au niveau interstitiel et alvéolaire), et provoquant une hypoxémie importante nécessitant une ventilation mécanique. La physiopathologie du SDRA se décrit en trois phases : 1. La phase inammatoire exsudative: la membrane alvéolo-capillaire subit des lésions et, avec la perméabilité croissante des capillaires pulmonaires, il en résulte un œdème interstitiel et une réduction de la production du surfactant.

2. La phase broproliférative avec production de collagène : il se produit une infiltration des alvéoles par des pneumocytes, de la brine, des dépôts de collagène et la formation d’une brose interstitielle et alvéolaire. Lorsque la ­ brose survient, la détresse respiratoire augmente, et la ventilation mécanique est nécessaire. 3. La phase de résolution avec récupération : l’œdème alvéolaire se résout et le processus inammatoire se termine. Si la lésion est grave, la réparation de la membrane alvéolocapillaire peut être désorganisée et insufsante, entraî­ nant une brose et une perte de la fonction pulmonaire. Pendant un SDRA, les poumons deviennent rigides en raison de l’inactivation du surfactant, la diffusion gazeuse diminue, puis suivent éven­ tuellement l’œdème de la muqueuse bronchiolaire de même que l’atélectasie congestive. L’effet net de ce processus est une réduction de la capacité fonctionnelle résiduelle, une hypertension pul­ monaire et une augmentation du shunt intrapulmonaire droit­gauche du ux sanguin pulmonaire (Im, Shi et Driscoll, 2016). La diminution de sur­ factant, l’atélectasie et les alvéoles remplies de liquide fournissent un excellent terrain pour la croissance bactérienne.

Manifestations cliniques Le SDRA se caractérise par une détresse respira­ toire et une hypoxémie avec des changements radiologiques qui surviennent dans les 72 heures à 7 jours après une blessure grave ou une inter­ vention chirurgicale, mais les premiers symp­ tômes apparaissent souvent après quelques heures. Les manifestations cliniques initiales sont une tachypnée, une dyspnée, des râles diffus, une hypoxémie, un accroissement de l’effort res­ piratoire, une cyanose et une diminution de la saturation en oxygène. La lésion pulmonaire aiguë peut entraîner tout un éventail de maladies inam­ matoires en réponse à un événement précipitant.

Diagnostic Un groupe d’experts en pédiatrie a établi une nomenclature pertinente pour les enfants atteints de SDRA et propose des recommandations pour la dénition, le diagnostic et l’approche clinique (Pediatric Acute Lung Injury Consensus Conference Group [PALICC], 2015). Les critères diagnostiques du SDRA chez l’enfant sont : • un début rapide aigu avec apparition de mani­ festations cliniques jusqu’à 7 jours suivant la lésion pulmonaire ; • un antécédent de maladie aiguë ou de blessure grave ; • une détresse respiratoire ou une insufsance respiratoire aiguë ;

• l’absence de signes d’une maladie cardiopulmo­ naire antérieure ; • des inltrations bilatérales diffuses révélées par la radiographie thoracique. Parfois, l’hypoxémie qui se développe ne répond pas à l’administration d’oxygène. L’hypoxémie est un critère diagnostique qui permet de distinguer le SDRA de la lésion pulmonaire aiguë. Chez les enfants intubés et qui sont sous ventilation méca­ nique, l’indice d’oxygène (oxygen index [OI]) est utilisé. Chez les enfants qui reçoivent une ventila­ tion non invasive (p. ex., CPAP ou BiPAP avec masque), on peut utiliser le ratio de la pression partielle de l’oxygène dans le sang artériel (PaO2) et le ratio de la fraction d’oxygène inspiré (FiO2), ou le ratio PaO2/FiO2, ou encore l’indice de satu­ ration de l’oxygène si la saturation en oxygène est disponible. Pour la lésion pulmonaire aiguë, le ratio est de 300 ou moins, tandis qu’il est de 200 ou moins pour le SDRA. Dans les 2 cas, la radiographie mon­ trera des signes d’inltrations alvéolaires bilaté­ rales sans pour autant qu’il y ait des signes d’insufsance cardiaque gauche.

Shunt intrapulmonaire : Dérivation de sang dans les capillaires pulmonaires sans qu’il participe aux échanges gazeux ; cette dérivation est observée lorsque les alvéoles se remplissent de liquide (p. ex., le SDRA, la pneumonie, l’œdème pulmonaire).

Approche thérapeutique Le traitement du SDRA comprend des mesures de soutien comme le maintien d’une oxygénation et d’une perfusion pulmonaire adéquates, le traite­ ment de l’infection ou de la cause précipitante, le maintien d’un débit cardiaque et d’un volume vas­ culaire adéquats, l’hydratation, un soutien nutri­ tionnel convenable, des soins pour assurer le confort, la prévention de complications comme l’ulcération gastro­intestinale et l’aspiration pulmo­ naire avec des manœuvres de recrutement alvéo­ laire, ainsi que le soutien psychologique. Le traitement indiqué vise à améliorer l’oxygénation. L’enfant peut d’ailleurs être placé en décubitus ven­ tral pour améliorer celle­ci. Le recours à l’intuba­ tion endotrachéale, à la ventilation spontanée en pression positive et à la ventilation à faible volume respiratoire peut être nécessaire pour augmenter la capacité fonctionnelle résiduelle, diminuer le shunt intrapulmonaire et réduire le uide pulmonaire an d’assurer un apport maximal en oxygène. Les autres interventions de soutien dans le trai­ tement du SDRA chez l’enfant comprennent l’uti­ lisation de stratégies de ventilation pour protéger les poumons, l’hypercapnie permissive, l’inhala­ tion de monoxyde d’azote, une ventilation oscil­ latoire à haute fréquence et un dispositif extracorporel de maintien des fonctions vitales (oxygénation par membrane extracorporelle [ECMO]). Il est important de prévenir les compli­ cations potentielles de la ventilation mécanique (p. ex., un barotrauma causé par une pression trop élevée) et de minimiser la fraction partielle Chapitre 15

15

Barotrauma : Lésion causée par une brusque variation de pression.

Troubles liés au système respiratoire

683

d’oxygène (FiO2) pour maintenir une saturation en oxygène entre 88 et 97 % (PALICC, 2015).

Pronostic En dépit des progrès actuels dans la compréhension et le traitement du SDRA et de la lésion pulmonaire aiguë, la mortalité infantile se situe toujours entre 14 % (à la suite d’un traumatisme grave) et 45 % (à

la suite d’une greffe de moelle osseuse) (LópezFernández, Azagra, de la Oliva et al., 2012). La maladie précipitante inuence le résultat, le pire pronostic étant associé à la sepsie non maîtrisée, à une greffe de moelle osseuse, au cancer et à une maladie multisystémique avec insufsance hépatique. Les enfants qui guérissent peuvent avoir une toux persistante et une dyspnée à l’effort.

Soins inrmiers SYNDROME DE DÉTRESSE RESPIRATOIRE AIGUË

Prodiguer des soins durant la phase aiguë

5 Les méthodes de réduction de la douleur sont présen­ tées dans le chapitre 5, Évaluation et traitement de la douleur.

L’enfant qui souffre d’un SDRA est admis aux soins intensifs durant la phase aiguë de la maladie. Les soins inrmiers comprennent autant une surveillance étroite du débit cardiaque, de la perfusion, de l’équilibre hydroélectrolytique et de la fonction rénale (débit urinaire) que l’évaluation de l’oxygénation et de l’état respiratoire. Les soins respiratoires incluent la ventilation mécanique, qui permet de suppléer la ventilation alvéolaire. La gazométrie sanguine ou la saturation en oxygène sont des outils importants pour l’évaluation ; la saturation en oxygène doit se situer entre 88 et 97 % sur une quantité minime d’oxygène. Une hypercapnie permissive associée à une acidose respiratoire est induite sur une période de plus de 2 heures. L’hypercapnie déplace la courbe de dissociation de l’hémoglobine vers la droite, et cela favorise le transport de l’oxygène aux tissus. Il est possible d’administrer un diurétique pour réduire l’œdème pulmonaire et un vasodilatateur pour abaisser l’hypertension pulmonaire. Le traitement de la douleur constitue un autre élément important dans les soins à l’enfant souffrant d’un SDRA 5 .

15.6.5

Lésion par inhalation de fumée

Certaines substances inhalées peuvent être toxiques. Ainsi, au cours d’un incendie, les décès sont principalement causés par une combustion incomplète de produits plutôt que par les blessures résultant des flammes. La gravité de la blessure ainsi causée dépend de divers éléments : la nature des substances produites par le matériel qui a brûlé, le fait que la victime ait été ou non connée dans un espace fermé et la durée de l’exposition à la fumée.

Étiologie et physiopathologie L’inhalation de fumée produit trois types de lésions : les lésions thermiques, les lésions chimiques ainsi que les lésions systémiques. L’évolution de l’atteinte se fait en trois stades distincts chez l’enfant souffrant d’une lésion par inhalation :

684

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

Les traitements inrmiers incluent également la surveillance des effets des nombreux solutés et des médicaments administrés par voie parentérale pour stabiliser l’enfant. La plupart des enfants ayant un SDRA exigent un monitorage hémodynamique invasif (à l’aide d’un cathéter veineux central, d’un cathéter artériel pour le prélèvement de gaz sanguins) pour la surveillance des changements de leur état hémodynamique. Les traitements inrmiers incluent également une observation attentive de l’état de la peau et la prévention des lésions de pression, de même que la mobilisation passive pour prévenir l’atrophie et les contractures musculaires. Il est par ailleurs souvent nécessaire d’apporter un soutien nutritionnel parentéral et entéral selon la durée de la phase aiguë de la maladie.

Soutenir la famille La détresse respiratoire est une situation terriante tant pour l’enfant que pour ses parents, et une attention portée à leurs besoins psychologiques est un élément important des soins inrmiers. Souvent, l’enfant est sous sédation durant la phase aiguë de la maladie, et le sevrage de la sédation exige une surveillance étroite an de réduire l’anxiété et d’assurer son confort. 1. Insufsance pulmonaire, habituellement durant les 12 premières heures ; 2. Œdème pulmonaire et œdème interstitiel, habituellement après 6 à 72 heures ; 3. Bronchopneumonie, habituellement après 72 heures, avec obstruction subséquente des voies respiratoires ou atélectasie.

Lésions thermiques Il s’agit de blessures causées par la chaleur aux voies respiratoires supérieures, suivies d’un œdème. La chaleur spécique de l’air est basse ; par conséquent, la blessure ne va pas plus loin que les voies respiratoires supérieures, car la fermeture réexe de la glotte empêche les voies respiratoires inférieures d’être atteintes.

Lésions chimiques Une blessure chimique survient en raison des gaz qui peuvent être produits durant la combustion

de matériaux tels que les vêtements, les meubles et les recouvrements de plancher. Les acides, les alcalis et leurs précurseurs qui se trouvent dans la fumée peuvent provoquer des brûlures chimiques de la muqueuse des voies respiratoires. Ces substances peuvent pénétrer profondément jusque dans les voies respiratoires inférieures, sous la forme de gaz insolubles. Les gaz solubles, eux, ont tendance à se dissoudre dans les voies respiratoires supérieures. Les matériaux synthétiques sont particulièrement toxiques et produisent des gaz tels que des oxydes de soufre et d’azote, de l’acétaldéhyde, du formaldéhyde, de l’acide cyanhydrique et du chlore. Les plastiques chauffés sont une source de vapeurs extrêmement toxiques. Les gaz irritants tels que l’oxyde nitreux ou le gaz carbonique se combinent avec l’eau dans les poumons pour former des acides corrosifs. Quant aux aldéhydes, ils provoquent une dénaturation des protéines, des dommages cellulaires et de l’œdème dans les tissus pulmonaires. Les brûlures chimiques aux voies respiratoires sont semblables aux brûlures de la peau, sauf qu’elles sont indolores parce que l’arbre trachéobronchique est relativement insensible à la douleur. L’inhalation de petites quantités d’irritants nocifs cause des dommages alvéolaires et bronchiolaires capables de provoquer une bronchiolite obstructive. Une exposition grave entraîne encore plus de blessures, y compris des dommages alvéolocapillaires avec hémorragie, une bronchiolite nécrosante, une inhibition de la sécrétion de surfactant et la formation de membranes hyalines, autant de manifestations du SDRA .

Lésions systémiques L’atteinte systémique est due à la présence de gaz qui ne sont pas toxiques pour les voies respiratoires (p. ex., le monoxyde de carbone, l’acide cyanhydrique), mais qui provoquent des lésions et entraînent la mort en interférant avec la respiration cellulaire ou en l’inhibant . Le monoxyde de carbone (CO) est responsable de plus de la moitié de toutes les inhalations fatales de poisons aux États-Unis. C’est un gaz sans odeur ni couleur dont l’afnité pour l’hémoglobine est de 200 à 250 fois supérieure à celle de l’oxygène. Lorsqu’il entre dans la circulation sanguine, le CO se combine immédiatement avec l’hémoglobine pour former la carboxyhémoglobine (COHb). Comme le COHb empêche le transport de l’oxygène par l’hémoglobine, l’hypoxie tissulaire atteint des niveaux dangereux. Le domicile est le lieu d’exposition au CO le plus fréquent (84 %) (MSSS, 2017). L’em poisonnement accidentel au CO résulte le plus souvent d’une exposition aux émanations

provenant d’un appareil de chauffage ou de la fumée émise au cours d’un incendie dans un bâtiment. Les véhicules récréatifs motorisés mal ventilés, des lampes ou des poêles au gaz mal utilisés ou mal entretenus, de même que la cuisson au barbecue dans un endroit mal aéré font également partie des causes fréquentes de ce type d’empoisonnement. Le CO est produit par la combustion incomplète du carbone ou de matériaux carbonés comme le bois ou le charbon de bois. Seul un avertisseur de monoxyde de carbone permet de détecter et de signaler la présence de CO (Portail santé mieux-être, 2017b).

Manifestations cliniques L’ENCADRÉ 15.11 présente les indices d’une blessure par inhalation. Ces manifestations sont généralement liées à une blessure par la chaleur ou à une blessure chimique et peuvent résulter en une obstruction des voies respiratoires. Les manifestations cliniques de l’empoisonnement au CO découlent de l’hypoxie tissulaire et varient en fonction du taux de COHb TABLEAU 15.16. Les brûlés qui sont victimes de lésions par inhalation de fumée ont une incidence de SDRA élevée, qui se manifeste environ cinq à sept jours après l’événement (Portail santé mieux être, 2016).

ALERTE CLINIQUE

Dans le cas d’une intoxication au monoxyde de carbone, la saturation du sang artériel en oxygène obtenue par saturo­ métrie reste normale, car cet appareil ne mesure que l’hémoglobine oxygénée et désoxygénée ; il ne mesure pas l’hémoglobine dysfonctionnelle comme l’HbC.

Approche thérapeutique Le traitement de l’enfant ayant inhalé de la fumée est en grande partie symptomatique. Le traitement le plus largement accepté consiste à administrer 100 % d’oxygène aussi rapidement que possible, et à surveiller les signes de détresse respiratoire et d’insufsance respiratoire imminentes. L’anamnèse, l’historique de l’événement et l’examen physique démontrant la présence des manifestations d’une blessure des voies respiratoires et une obstruction potentielle devraient inciter à une intubation endotrachéale précoce pour maintenir la perméabilité des voies respiratoires.

ENCADRÉ 15.11

Les 13 états pathologiques pour lesquels le traitement en chambre hyperbare a été approuvé sont énumérés dans une publication de Santé Canada, Oxygénothérapie hyperbare, accessible au www.canada.ca.

Indicateurs cliniques de lésions bronchiques potentielles causées par inhalation

• Brûlures au visage et à l’oropharynx • Roussissement des sourcils ou des vibrisses du nez • Changements de la voix

• Présomption d’une exposition à la fumée dans un espace clos • Léthargie, obnubilation, perte de conscience • Absence de réexes de toux (signe de lésions par inhalation importante)

• Bronchorrhée • Sibilance à l’auscultation • Expectorations charbonneuses

Sources : Adapté de Laffety (2017) ; Walker, Buehner, Wood et al. (2015).

Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

685

15

TABLEAU 15.16

Manifestations cliniques selon le degré d’intoxication au monoxyde de carbone

INTOXICATION LÉGÈRE

INTOXICATION PLUS IMPORTANTE

INTOXICATION GRAVE

• Céphalées

• Étourdissements

• Fatigue

• Fatigue

• Problèmes de coordination des mouvements ou paralysie musculaire

• Irritabilité

• Douleurs dans la poitrine

• Nausées

• Perturbations visuelles

• Vomissements

• Difcultés de concentration

• Manifestations neurologiques (confusion, hallu­ cinations, ataxie, perte de conscience et coma) • Peau et lèvres brillantes et rouge cerise • Pâleur et cyanose • Décès en quelques minutes

Séquelles apparaissant de 2 à 40 jours après l’intoxication (même si elle a été traitée) • Migraines chroniques

• Problèmes de mémoire et de personnalité

• Troubles neurologiques pouvant causer des problèmes de coordination des mouvements

• Changements dans l’humeur : irritabilité, agressivité verbale, violence

Sources : Adapté de CDC (2017a) ; gouvernement du Canada (2016a) ; Portail santé mieux être (2016).

Il faut mesurer les valeurs de référence de la gazométrie sanguine et le taux de de COHb. Il se peut que la PaO2 soit dans les limites de la normale, sauf s’il y a dépression respiratoire marquée. Si l’empoisonnement au CO se conrme, il faut continuer à donner 100 % d’oxygène jusqu’à ce que le taux de COHb retourne à un niveau non toxique, soit environ 10 %. Lorsque l’empoisonnement au CO est grave, l’enfant peut bénécier d’une oxygénothérapie hyperbare. Santé Canada a étudié les données scientiques relatives à la chambre hyperbare et autorise cette méthode comme traitement contre l’empoisonnement au CO (MSSS, 2017). La thérapie hyperbare envoie une concentration élevée d’oxygène rapidement et en profondeur dans les parties du corps affectées par le gaz. La détresse respiratoire peut survenir tôt pendant l’inhalation de fumée en raison de l’hypoxie, ou encore l’enfant qui respire bien à son admission à l’hôpital peut entrer soudainement en détresse respiratoire. Par conséquent, l’équipement d’intubation doit être immédiatement disponible. L’œdème passager des voies respiratoires peut se produire à n’importe quel niveau dans l’arbre trachéobronchique. L’évaluation et la localisation de l’obstruction doivent être effectuées avant que ne survienne une enure grave de la tête, du cou ou de l’oropharynx. L’intubation est nécessaire relativement tôt si : 1. des brûlures graves dans la région du nez, de la bouche et du visage augmentent le risque d’apparition d’un œdème et d’une obstruction dans l’oropharynx ; 2. l’œdème des cordes vocales cause une obstruction ;

686

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

3. l’enfant a de la difficulté à expectorer ses sécrétions ; 4. la détresse respiratoire progressive exige une ventilation articielle. La trachéotomie est controversée, mais plusieurs préfèrent cette procédure lorsque l’obstruction se situe au-dessus du larynx et réservent l’intubation endotrachéale pour les cas où les voies respiratoires sont en cause.

Soins inrmiers LÉSION PAR INHALATION DE FUMÉE

Les soins inrmiers pour l’enfant souffrant d’une blessure par inhalation sont les mêmes que pour tout enfant ayant une détresse respiratoire. Ils consistent à vérier fréquemment les signes vitaux et les autres mesures de la fonction respiratoire, ainsi qu’à observer attentivement et à préserver l’état pulmonaire. La physiothérapie respiratoire fait souvent partie de la thérapie, de même que la ventilation mécanique, si nécessaire. Les besoins liquidiens de l’enfant ayant subi une blessure par inhalation sont plus élevés. Le risque qu’apparaisse un œdème pulmonaire reste préoccupant, de sorte qu’il est essentiel de surveiller adéquatement l’apport et l’élimination de liquides. L’inrmière doit également s’occuper des besoins psychologiques de l’enfant terrié et des parents bouleversés. Les parents ont besoin d’être soutenus, rassurés et informés sur l’état de santé de leur enfant, de même que sur son traitement et ses progrès.

15.6.6

Exposition à la fumée secondaire

La fumée secondaire du tabac est constituée de plus de 7 000 produits chimiques et toxiques dont 70 sont reconnus comme étant cancérigènes (Association pulmonaire du Québec, 2016). Ces produits nocifs (p. ex., le goudron et la nicotine) y sont beaucoup plus concentrés et élevés que dans la fumée inhalée par les fumeurs. Les produits chimiques issus de la combustion du tabac s’inltrent dans les objets (p. ex., les vêtements, les tapis, les jouets, les meubles et les sièges des voitures). La concentration de particules provenant de la fumée de tabac est très élevée dans un espace restreint comme l’intérieur d’une voiture. Selon une enquête canadienne menée en 2012-2013 auprès d’élèves de 12 à 17 ans, 34 % des élèves québécois rapportaient avoir été exposés à la fumée de tabac dans une voiture au cours de la semaine précédente, comparativement à 17 % des jeunes de l’ensemble des autres provinces du Canada, où une interdiction de fumer dans une voiture en présence d’enfants était en vigueur (Institut national de santé publique du Québec [INSPQ], 2015). Le Québec est la dernière province à avoir adopté, en 2016, une interdiction de fumer dans les véhicules en présence d’enfants de moins de 16 ans. Les enfants exposés à la fumée de tabac (tabagisme dit passif ou environnemental) afchent un nombre plus élevé de maladies et de symptômes respiratoires (toux, expectorations, sibilance, etc.), de même qu’une plus faible performance aux épreuves fonctionnelles respiratoires. L’exposition de l’enfant à la fumée de tabac durant la période

prénatale ou postnatale est associée à un taux élevé de sibilance (de 30 à 70 %) et à de l’asthme (de 21 à 85 %) (Burke, Leonardi-Bee, Hashim et al., 2012). Chez les enfants asthmatiques, il existe une corrélation statistique entre le tabagisme parental et les épisodes d’exacerbation de l’asthme, les visites à l’urgence, l’utilisation de médicaments et un retard dans la guérison après une hospitalisation pour asthme aigu. Les enfants exposés à la fumée secondaire sont plus susceptibles d’avoir ou de voir s’aggraver des problèmes de santé, car ils aspirent plus d’air comparativement à leur poids corporel et absorbent donc davantage de fumée. Ils sont moins enclins à manifester leur inconfort ou à quitter l’endroit où la fumée les incommode. De plus, leur système immunitaire est moins développé. Aux États-Unis, l’utilisation des cigarettes électroniques (vapoteuses) chez les adolescents a triplé de 2011 à 2013 (Collaco, Drummond et McGrathMorrow, 2015). Bien qu’elles ne contiennent pas de fumée, elles exposent les personnes aux alentours à des émissions secondaires. Des études ont montré que les produits chimiques contenus dans les émissions contiennent du formaldéhyde, de l’acétaldéhyde, du benzène, des nitrosamines spéciques au tabac et d’autres toxines potentielles (American Lung Association, 2016). En plus, les cigarettes électroniques exposent les enfants à des risques d’intoxication par ingestion, inhalation et absorption par la peau ou les yeux de la nicotine liquide utilisée pour remplir les vapoteuses. Même en petite quantité, la nicotine liquide peut être toxique pour un jeune enfant qui en avale ou qui en reçoit sur la peau (SCP, 2015a).

CE QU’IL FAUT RETENIR

De nombreuses enquêtes indiquent que le tabagisme parental est une cause importante de morbidité chez l’enfant.

Pour plus d’information sur les effets de la fumée secondaire sur la santé des enfants et sur les moyens de réduire l’exposition des enfants à ce type de fumée, consultez le site Web de l’Association pulmonaire du Canada au www.poumon.ca.

CE QU’IL FAUT RETENIR

La nicotine inhalée entraîne la vasoconstriction périphérique et coronarienne, augmentant ainsi la pression artérielle et diminuant le débit sanguin vers les vaisseaux périphériques.

15

Soins inrmiers EXPOSITION À LA FUMÉE SECONDAIRE

L’inrmière peut fournir de l’information sur les dangers de l’exposition à la fumée secondaire dans ses interactions avec l’enfant et les membres de sa famille TABLEAU 15.17. Cette information est particulièrement importante lorsque l’enfant souffre d’une maladie respiratoire ou d’allergies. L’inrmière

a également un rôle important à jouer en fournissant aux parents des ressources éducatives accessibles sur les diverses méthodes permettant de cesser de fumer, y compris l’utilisation appropriée d’aides pharmacologiques. Dans les familles où les fumeurs refusent de cesser de fumer, il faut orienter ceux-ci de façon appropriée vers une réduction de la fumée dans l’environnement de l’enfant.

Enseignement à l’enfant et à ses proches TABLEAU 15.17

Effets néfastes de la fumée secondaire du tabac

EFFETS DURANT LA PÉRIODE PRÉNATALE

EFFETS DURANT LA PÉRIODE POSTNATALE

Dus à la nicotine : • Tachycardie • Ralentissement de la croissance des poumons et des voies respiratoires

Effets directs de l’exposition à la fumée durant l’enfance : • Augmentation de la fréquence de la toux • Augmentation de la fréquence de la sibilance respiratoire

Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

687

TABLEAU 15.17

Effets néfastes de la fumée secondaire du tabac (suite)

EFFETS DURANT LA PÉRIODE PRÉNATALE

EFFETS DURANT LA PÉRIODE POSTNATALE

Dus au monoxyde de carbone : • Réduction de l’apport d’oxygène • Diminution de la croissance fœtale (insufsance pondérale à la naissance) • Hypotrophie néonatale Risque plus élevé de : • Naissances prématurées • Fausses-couches • Naissances d’enfants mort-nés • Syndrome de mort subite du nourrisson, à la naissance

• Augmentation de la fréquence des OMA et des OME • Diminution de la capacité pulmonaire Risque plus élevé de : • Toux chronique et nocturne • Asthme, avec hausse du risque d’asthme précoce (avant trois ans) pour les enfants exposés à la fumée en période prénatale • Infections variées (bronchite, pneumonie, otite moyenne, etc.) • Allergies alimentaires • Psoriasis • Maladie cardiaque • Maladie pulmonaire chronique à l’âge adulte • Troubles d’apprentissage (lecture, mathématique) • Troubles de comportement • Propension marquée au tabagisme

Sources : Adapté de Association pulmonaire du Québec (2016) ; Portail santé mieux-être (2017a).

15.7

Dysfonctionnement respiratoire chronique

15.7.1

Troubles respiratoires obstructifs du sommeil

Selon le Collège des médecins du Québec (CMQ, 2014), entre 1 et 6 % des enfants sont atteints de troubles respiratoires obstructifs du sommeil (TROS), et plusieurs de ces problèmes passent inaperçus et demeurent non traités. Les TROS feraient partie d’un continuum de troubles respiratoires du sommeil qui incluent : 1. le syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS) ; 2. l’apnée centrale du sommeil ; 3. l’hypoventilation due à l’obésité, à une atteinte neuromusculaire ou à une malformation de la cage thoracique (CMQ, 2014).

Étiologie et physiopathologie L’incidence d’un syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS) affecte surtout les enfants âgés de 2 à 8 ans à une période durant laquelle l’hypertrophie adénotonsillaire est le plus souvent observée ; puis, il y a un deuxième pic chez les adolescents, souvent associé à l’obésité (Patino, Sadhasivam et Mahmoud, 2013). Le SAOS est déni comme un trouble du sommeil causé par des obstructions de courte durée des voies respiratoires supérieures entraînant un arrêt transitoire de la respiration (apnée) ou une réduction

688

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

importante du signal respiratoire (hypopnée) durant le sommeil, et pouvant provoquer un microéveil ou une désaturation associés à un effort respiratoire et à la présence fréquente de ronements sur les tracés de polysomnographie (CMQ, 2014) TABLEAU 15.18 . Trois composantes du SAOS sont connues : une hypoxie épisodique, une hypercapnie intermittente et une fragmentation du sommeil, et donc une mauvaise qualité du sommeil de l’enfant (Cataletto, Lipton et Murphy, 2017 ; Fondation Sommeil, s.d.).

Manifestations cliniques Les symptômes fréquents chez les enfants ayant reçu un diagnostic de SAOS comprennent le ronement nocturne, l’interruption ou la perturbation des phases du sommeil (fragmentation), la fatigue durant le jour, l’énurésie et les problèmes neurocognitifs (CMQ, 2014). Il est important de noter que le ronement simple, c’est-à-dire le ronement sans apnée obstructive ni réveils fréquents ou anomalies des échanges gazeux (présent chez presque 12 % des enfants) qui mène à une fragmentation du sommeil, est également associé à des troubles neurocognitifs et à une performance scolaire diminuée (CMQ, 2014) TABLEAU 15.19. Il est recommandé de consulter un otorhinolaryngologiste pour tout enfant de moins de 12 ans qui a un ronement chronique ou une congestion nasale nocturne (CMQ, 2014 ; ATS, 2017). S’il n’est pas traité, le TROS peut entraîner des complications comme un retard de croissance (perturbation du fonctionnement hormonal), un

TABLEAU 15.18

Facteurs de risque et maladies associées au développement du syndrome d’apnées obstructives du sommeil chez les enfants

FACTEURS DE RISQUE

MALADIES ASSOCIÉES

Hypertrophie des amygdales ou des végétations adénoïdes a Obésité (indice de masse corporelle et tour de taille élevés) Troubles métaboliques Troubles inammatoires Antécédents familiaux Anomalies nasales (sinusite ou rhinite chronique) Antécédent de prématurité Syndromes génétiques (trisomie 21, syndrome de Prader-Willi, syndrome de Pierre Robin) • Réponse/relâchement du tonus des muscles pharyngés (le relâchement cause une obstruction des voies respiratoires) • Enfant à la peau noire

• Facteurs anatomiques/anomalies craniofaciales ou du larynx (p. ex., la fente platine, la laryngomalacie) avec obstruction des voies respiratoires supérieures • Dysostose craniofaciale (syndrome de Crouzon et d’Apert) • Achondroplasie • Anémie falciforme • Mucopolysaccharidose • Trouble neuromusculaire • Microrétrognathie • Malformations de Chiari • Myéloméningocèle

• • • • • • • •

a Cause

la plus fréquente chez les enfants (CMQ, 2014). Sources : Adapté de Bhatt, Guleria et Kabra (2014) ; Cataletto et al. (2017) ; CMQ (2014).

TABLEAU 15.19

Manifestations cliniques du syndrome d’apnées obstructives du sommeil

SYMPTÔMES

SIGNES

• • • • • • • •

• • • • • • • • • •

• • • • • • •

Ronement, bruits respiratoires Étouffements nocturnes Pauses respiratoires durant le sommeil Efforts respiratoires durant le sommeil Sommeil avec hyperextension du cou ou en position assise Fatigue durant le jour, même après une nuit complète de sommeil Hypersomnie le jour Problèmes à l’école (troubles du comportement, hyperactivité, troubles d’apprentissage et de l’attention) Nycturie, énurésie Respiration buccale, sialorrhée, xérostomie Céphalées au réveil Diaphorèse nocturne Sommeil agité et microéveils Cauchemars Obstruction nasale (rhume, allergies, etc.)

Respiration buccale Obstruction nasale Amygdales volumineuses Adénoïdes volumineuses Dolichofaciès Faciès adénoïde Microrétrognathie Palais ogival Macroglossie Déformation thoracique avec côtes évasées en bouchon de champagne et diamètre antéropostérieur augmenté (Harrison’s sulcus) • Petite taille pour l’âge et le poids • Hypertension artérielle • Cœur pulmonaire

15

Sources : Adapté de American Thoracic Society (ATS) (2017) ; CMQ (2014). Apnée obstructive du sommeil et autres troubles respiratoires du sommeil : guide d’exercice du Collège des médecins du Québec.

cœur pulmonaire, une hypertension pulmonaire, des difcultés d’apprentissage, des problèmes de comportement et des troubles de l’humeur tels que la colère, l’agressivité et l’irritabilité, un trouble décitaire de l’attention avec hyperactivité ou même la mort (Fondation Sommeil, s.d.).

Diagnostic Le diagnostic de TROS chez les enfants est basé sur l’anamnèse, l’examen physique et les examens radiographiques (pour déterminer la grosseur des

végétations adénoïdes et des amygdales). Cependant, un test objectif est nécessaire pour appuyer et conrmer un diagnostic de SAOS. La saturation en oxygène nocturne est utilisée en raison de son accessibilité malgré sa faible sensibilité à ne détecter que les cas graves ; elle n’est pas un test recommandé à des ns diagnostiques. La polysomnographie (PSG) en laboratoire demeure la méthode privilégiée pour poser un diagnostic de SAOS chez l’enfant, surtout si l’étude de la saturation en oxygène nocturne est non concluante dans Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

689

FIGURE 15.14 La polysomnographie est un test able qui permet de poser un diagnostic de syndrome d’apnées obstructives du sommeil.

la population à haut risque (CMQ, 2014). La PSG est un test able effectué pendant une nuit de sommeil dans un laboratoire du sommeil FIGURE 15.14. La PSG à six canaux avec enregistrement vidéo et audio peut être effectuée chez les enfants de tout âge. La version simpliée de la PSG (par opposition à l’étude portant sur une nuit complète) peut aussi être utile, mais elle ne permet pas de déterminer la gravité du SAOS (Patino et al., 2013).

Approche thérapeutique

L’adénoamygdalectomie est fréquemment utilisée pour traiter le TROS chez l’enfant, dans la mesure où il y a signe évident d’une hypertrophie des amygdales et des végétations adénoïdes. Les complications de ces interventions chirurgicales ont été présentées dans la deuxième section de ce chapitre. Le recours aux méthodes de ventilation CPAP ou BiPAP peut être utile chez les enfants ayant un TROS qui persiste après l’intervention chirurgicale. La ventilation par CPAP est une thérapie non invasive qui associe la ventilation spontanée et une pression expiratoire positive (PEP) continue. Puisque l’enfant contrôle complètement sa ventilation, il faut le surveiller pour évaluer le niveau de pression requis et l’efcacité globale de la thérapie. L’enfant atteint d’un syndrome craniofacial comme les syndromes de Goldenhar, de Pierre Robin, d’Apert ou de Crouzon, lesquels provoquent une obstruction partielle ou complète des voies respiratoires supérieures, peut avoir besoin d’une intervention chirurgicale comme une trachéotomie ou une chirurgie de reconstruction faciale.

Soins inrmiers TROUBLES RESPIRATOIRES OBSTRUCTIFS DU SOMMEIL

CE QU’IL FAUT RETENIR

Le signe cardinal de l’obstruction des voies respiratoires chez les enfants d’âge pré­ scolaire est la respira­ tion sifante, souvent accompagnée de difcultés respiratoires et de toux.

690

Partie 6

Les soins inrmiers apportés à l’enfant affecté par un TROS comprennent la détection précoce par l’observation de l’architecture du sommeil et la participation active à la polysomnographie diagnostique lorsque l’enfant est admis. L’inrmière doit surveiller la respiration et la saturation en oxygène, surtout après l’administration d’une sédation et d’opioïdes en phase postopératoire qui peuvent compromettre l’état respiratoire de l’enfant ou pendant toute maladie qui peut temporairement augmenter la gravité des obstructions des voies respiratoires et de

Troubles liés aux systèmes

l’apnée (Létourneau et Champagne, 2015). Parmi les rôles inrmiers importants, il faut compter l’insertion de la sonde de pH dans l’œsophage, ainsi que la surveillance de la saturation en oxygène pendant le sommeil et de la réponse de l’enfant au traitement diagnostique. L’information donnée à la famille peut inclure des conseils sur l’alimentation, les programmes d’exercices et la gestion du poids, sur l’utilisation de l’équipement servant à la ventilation CPAP ou BiPAP, et sur les soins postopératoires à la suite d’une amygdalectomie ou d’une adénoïdectomie.

15.7.2

Asthme

L’asthme est un trouble inammatoire chronique des voies respiratoires caractérisé par des manifestations cliniques épisodiques ou persistantes, comme la dyspnée, la sibilance expiratoire, la production de mucus, l’oppression thoracique et la toux, qui varient dans le temps relativement à l’apparition, à la fréquence et à l’intensité, et qui s’aggravent souvent la nuit ou tôt le matin (Ducharme, Dell, Radhakrishnan et al., 2015 ; Global Initiative for Asthma [GINA], 2016). Les symptômes sont associés à un débit d’air expiratoire variable en raison de : 1) la bronchoconstriction (rétrécissement et raccourcissement des voies aériennes) ; 2) l’épaississement de la paroi des voies aériennes causé par l’inammation ; 3) l’augmentation du mucus. Lorsque l’asthme est bien contrôlé, ces symptômes sont moins fréquents et moins intenses. Les symptômes peuvent être déclenchés ou aggravés par des facteurs tels que les infections virales, les allergènes domestiques (p. ex., les acariens, les pollens, les cafards) et professionnels, l’exposition à la fumée du tabac, l’exercice physique, le stress et, chez certaines personnes, par certains médicaments (p. ex., les bêtabloquants, l’acide acétylsalicylique ou certains anti-inflammatoires non stéroïdiens). Une exacerbation, ou crise d’asthme, peut survenir même si l’enfant prend ses médicaments. Les enfants à haut risque et ceux dont l’asthme est mal contrôlé ont des exacerbations plus fréquentes et plus sérieuses pouvant être fatales (GINA, 2016). Les exacerbations d’asthme sont associées à une obstruction variable des voies respiratoires et à une restriction du passage de l’air due à l’hyperréactivité bronchique ou à un bronchospasme, à des bouchons muqueux et à une augmentation de l’inammation (GINA, 2016 ; Trent, Zimbro et Rutledge, 2015). Le signe cardinal de l’obstruction des voies respiratoires chez les enfants d’âge préscolaire est la respiration sifante, souvent accompagnée de difcultés respiratoires et de toux (Ducharme et al., 2015).

Épidémiologie La prévalence de l’asthme ainsi que les taux de morbidité et de mortalité associés à la maladie sont en hausse. L’asthme, qui représente la maladie chronique la plus fréquente chez l’enfant, affecte 8,5 % de la population canadienne de 12 ans et plus et 490 000 enfants âgés de 4 à 11 ans, soit 15,6 % des enfants dans ce groupe d’âge (Asthma Society of Canada [ASC], 2014). Au Québec, plus de 350 000 enfants souffrent d’asthme (Association pulmonaire du Québec, 2017). Ces hausses pourraient être attribuables à une augmentation de la pollution de l’air, à un accès décient aux soins médicaux, ou encore à une sous-évaluation diagnostique et à un traitement insufsant. La maîtrise inadéquate de l’asthme suggère que les directives ne sont pas encore pleinement intégrées dans la pratique clinique. L’exposition accrue aux allergènes chez les personnes atteintes d’affections atopiques, en particulier dans les grands centres urbains, le degré croissant de gravité de la maladie, l’abus de médicaments (toxicité) ainsi que des facteurs psychologiques tels que le déni et le refus d’accepter la maladie peuvent également être en cause.

TABLEAU 15.20

Quoique la maladie puisse survenir à tout âge, elle fait souvent son apparition avant l’âge de 6 ans (Ducharme et al., 2015). Les garçons sont affectés plus fréquemment que les lles jusqu’à l’adolescence, après quoi la tendance s’inverse (Lawson, Janssen, Bruner et al., 2014). Elle constitue la première cause d’absence scolaire et la troisième principale cause d’hospitalisation chez les enfants de moins de 15 ans (Trent et al., 2015).

CE QU’IL FAUT RETENIR

L’asthme est la maladie chronique la plus fréquente chez les enfants.

L’asthme est réparti en quatre stades de sévérité établis en fonction des indicateurs de gravité de la maladie. Ces catégories sont les suivantes : asthme intermittent ainsi qu’asthme persistant léger, modéré et grave. Les symptômes augmentent en nombre et en intensité selon le stade TABLEAU 15.20. Ce mode de classication a l’avantage de permettre d’appliquer les mesures thérapeutiques selon une approche progressive, soit le traitement pharmacologique, la maîtrise de l’environnement et les interventions éducatives nécessaires pour chacune des catégories (Liu, Covar, Spahn et al, 2016). Une nouvelle composante de la classication inclut pour chaque catégorie la notion d’invalidité et de risque ; ces catégories font ressortir la diversité des aspects de la maladie qu’il faut prendre en considération

Classication de la gravité de l’asthme chez les enfants de 0 à 11 ansa

INDICATEURS DE GRAVITÉ

ASTHME INTERMITTENT

ASTHME PERSISTANT

Stade 1

Stade 2 – Léger

Stade 3 ou 4 – Modéré

Stade 5 ou 6 – Grave

Symptômes diurnes

• < 2 jours par semaine

• > 2 jours par semaine, mais pas tous les jours

• Quotidiens

• Continus, tout au long de la journée

Symptômes nocturnes (réveils)

• Aucun (entre 0 et 4 ans)

• De 1 à 2 nuits par mois (entre 0 et 4 ans)

• De 3 à 4 nuits par mois (entre 0 et 4 ans)

• > 1 nuit par semaine (< 5 ans)

• < 2 nuits par mois (entre 5 et 11 ans)

• De 3 à 4 nuits par mois (entre 5 et 11 ans)

• > 1 nuit par semaine, mais pas toutes les nuits (entre 5 et 11 ans)

• Fréquents, souvent 7 nuits par semaine (entre 5 et 11 ans)

• ≥ 80 % de la valeur prévue

• ≥ 80 % de la valeur prévue

• De 60 à 80 % de la valeur prévue

• < 60 % de la valeur prévue

• Variabilitéb : < 20 %

• Variabilitéb : de 20 à 30 %

• Variabilitéb : > 30 %

• Variabilitéb : > 30 %

Volume expiratoire maximal à la première seconde (vems1)

• ≥ 80 % de la valeur prévue

• ≥ 80 % de la valeur prévue

• De 75 à 80 % de la valeur prévue

• < 75 % de la valeur prévue

Perturbation des activités normales

• Aucune

• Légère

• Modérée

• Extrême

Recours aux bêtaagonistes à courte durée d’action pour maîtriser les symptômes

• < 2 fois par semaine

• > 2 fois par semaine, mais pas quotidiennement

• Quotidiennement

• Plusieurs fois par jour

Débit expiratoire de pointe

15

a La

présence d’un indicateur clinique de gravité est sufsant pour classer un enfant dans l’une ou l’autre des catégories. Il faut attribuer à l’enfant le stade le plus grave dans lequel se trouve l’un ou l’autre des indicateurs. Les caractéristiques dans ce tableau sont générales et peuvent se recouper, car l’asthme est une maladie très variable. La classication d’un enfant peut évoluer dans le temps. Les facteurs de risque pour chaque catégorie ne sont pas présentés dans ce tableau. Le tableau original permet d’obtenir des données additionnelles sur la classication. Le traitement de l’asthme ne doit pas être fondé sur les seules données de ce tableau. b La variabilité est la variation de la valeur du débit expiratoire de pointe entre le matin et l’après-midi ou le soir. Sources : Adapté de National Heart, Lung, and Blood Institute (NHLBI) (1997) ; Pope, Sproule, Stewart et al. (2017) ; Sparks, La Shell, Cohen et al. (2015).

Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

691

Jugement

clinique Après plusieurs nuits de toux et de symptômes d’un rhume qui ne veut pas guérir, les parents de Thomas, âgé de quatre ans, consultent le médecin. Ce dernier leur annonce que leur enfant est probablement asthmatique, comme le reste de la famille. Quels sont les quatre indices sur lesquels le médecin fonde son diagnostic d’asthme pour Thomas ?

au moment de mesurer ses effets sur la qualité de vie et la capacité fonctionnelle, ainsi que le risque que surviennent des effets indésirables dans l’avenir.

Selon les lignes directrices (GINA, 2017b), l’évaluation de la gravité de l’asthme peut aussi être accomplie de façon rétrospective à partir du niveau de traitement nécessaire pour contrôler les symptômes, réduire les risques et prévenir les exacerbations FIGURE 15.18. L’asthme léger est contrôlé par le traitement de stade 1 ou 2 ; l’asthme grave nécessite un traitement de stade 4 ou 5 pour maîtriser les symptômes.

Étiologie Les études portant sur les enfants asthmatiques indiquent que les allergies inuencent à la fois la persistance et la gravité de la maladie. En fait, l’atopie, ou la prédisposition génétique au déclenchement d’une réaction aux allergènes aéroportés communs médiée par l’immunoglobuline E (IgE), est le plus important facteur prédisposant associé à l’apparition de l’asthme (Loutsios, Farahi, Porter et al., 2014). Même si les allergènes jouent un rôle important dans l’asthme, de 20 à 40 % des enfants asthmatiques ne présentent aucune manifestation clinique de maladie allergique. Outre les allergènes, d’autres conditions et substances peuvent agir comme déclencheurs ou constituer des facteurs aggravants de l’asthme ENCADRÉ 15.12. L’asthme est une maladie complexe impliquant des facteurs biochimiques, génétiques, immunologiques, environnementaux, infectieux, endocriniens et psychologiques. Des données probantes révèlent que les infections respiratoires d’origine virale, surtout le

ENCADRÉ 15.12

virus respiratoire syncytial, pourraient jouer un rôle majeur dans l’apparition et l’expression de l’asthme (Knudson et Varga, 2015).

Physiopathologie Dans l’asthme, l’inammation contribue à accroître l’hypersensibilité des voies respiratoires. Les mécanismes qui induisent l’inammation sont multiples. L’asthme résulte d’interactions complexes entre les cellules inflammatoires, les médiateurs et les cellules et tissus des voies respiratoires, en particulier les mastocytes, les éosinophiles et les lymphocytes T (Bidat, 2013a ; Liu et al., 2016). La reconnaissance du rôle de l’inammation a permis de comprendre le rôle clé des agents anti-inammatoires dans le traitement de la maladie. Parmi les autres manifestations importantes de l’asthme gurent le bronchospasme et l’obstruction. Les mécanismes responsables des symptômes obstructifs de l’asthme incluent : 1. la réaction inammatoire à des stimulus endogènes ou exogènes ; 2. l’œdème des voies respiratoires ainsi que la sécrétion et l’accumulation de mucus ; 3. le spasme des muscles lisses des bronches et des bronchioles qui crée une bronchoconstriction ; 4. le remodelage des voies respiratoires, qui provoque des dommages irréversibles FIGURE 15.15 (Ducharme et al., 2015 ; Liu et al., 2016). La bronchoconstriction est une réaction normale aux stimulus ; dans l’asthme, elle est anormalement exagérée et sérieuse, et elle altère la fonction respiratoire. Lorsque les muscles lisses qui entourent les voies respiratoires se contractent, ils entraînent un rétrécissement et un raccourcissement des voies respiratoires, ce qui accroît de façon importante la résistance de celles-ci à

Facteurs pouvant déclencher ou exacerber les manifestations cliniques de l’asthme

• Allergènes

• Infections virales (p. ex., un rhume)

– À l’extérieur : arbres, arbustes, mauvaises herbes, herbe, moisissures, pollen, pollution atmosphérique (ozone), spores

• Sensibilisation à un animal de compagnie (p. ex., un chat, un chien, un rongeur, un cheval)

– À l’intérieur : poussière ou acariens détriticoles, moisissures, antigènes spéciques de la coquerelle

• Médicaments : acide acétylsalicylique, anti-inammatoires non stéroïdiens, antibiotiques, bêtabloquants

• Irritants : fumée de tabac, fumée de bois, odeurs, vaporisateurs

• Émotions fortes : peur, colère, rire, pleurs, stress

• Exposition professionnelle à des produits chimiques • Exercice physique

• Problèmes de santé : reux gastro-œsophagien, stule trachéoœsophagienne

• Changements météorologiques ou de température

• Additifs alimentaires : sultes, glutamate monosodique

• Air froid

• Aliments : noix, lait ou autres produits laitiers

• Changements dans l’environnement, déménagement dans une nouvelle maison, fréquentation d’une nouvelle école, etc.

• Facteurs endocriniens : menstruations, grossesse, maladie thyroïdienne

692

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

A

B

FIGURE 15.15 Mécanismes obstructifs de l’asthme. Obstruction des voies aériennes causée par l’asthme – Poumon normal. B Asthme bronchique : mucus épais, œdème des muqueuses et spasme des muscles lisses provoquant une obstruction des petites voies aériennes ; la respiration devient laborieuse et l’expiration est difcile. A

l’écoulement de l’air. Le débit d’air dépend de facteurs comme le calibre de la lumière des voies respiratoires, le degré d’œdème de la paroi bronchique, la production de mucus, la contraction des muscles lisses et l’hypertrophie musculaire. Dans un cycle respiratoire normal, les bronches se dilatent et s’étirent à l’inspiration, puis se contractent et raccourcissent à l’expiration ; c’est pourquoi la difculté respiratoire est plus prononcée durant la phase expiratoire. La résistance accrue des voies respiratoires entraîne une expiration forcée à travers une lumière réduite. Le volume d’air emprisonné dans les poumons augmente à mesure que le fonctionnement des voies respiratoires est entravé en raison de l’occlusion des structures situées entre les alvéoles et les bronches lobaires. Cet emprisonnement des gaz force l’enfant à respirer en augmentant constamment le volume pulmonaire. En conséquence, l’enfant asthmatique lutte pour inspirer sufsamment d’air. Cet effort consenti pour respirer cause de la fatigue, réduit l’efcacité respiratoire et augmente la consommation d’oxygène. Lorsque le volume pulmonaire est plus élevé, l’inspiration entraîne une hyperination des alvéoles et réduit l’efcacité de la toux. À mesure que la gravité de l’obstruction s’accroît, il se produit une réduction de la ventilation alvéolaire qui se manifeste par la rétention du dioxyde de carbone, de l’hypoxémie, une acidose respiratoire et, éventuellement, une insuffisance respiratoire. L’inammation chronique peut également causer à l’architecture respiratoire des dommages

permanents (remodelage bronchique) qui ne peuvent être prévenus et qui ne répondent pas aux traitements actuels (Sferrazza Papa, Pellegrino et Pellegrino, 2014).

Manifestations cliniques Une exacerbation peut se produire graduellement ou survenir abruptement. L’âge de l’enfant est souvent un facteur signicatif, puisque la première crise se produit fréquemment avant l’âge de six ans, et que certains nourrissons ont déjà des manifestations cliniques. Chez le nourrisson, l’exacerbation survient généralement à la suite d’une infection respiratoire. Juste avant une crise, certains enfants subiront une démangeaison présymptomatique, notamment à l’avant du cou ou au haut du dos, surtout si l’exacerbation est associée à une allergie. Chez les jeunes enfants dont le signe initial est une toux ou qui ont des sibilances au cours d’une infection respiratoire, ces manifestations donnent souvent lieu à un diagnostic erroné de bronchite, de pneumonie ou d’infection respiratoire aiguë, se soldant par un traitement inefcace (GINA, 2017a) ENCADRÉ 15.13 .

ALERTE CLINIQUE

Un essoufement alors que le mouvement de l’air dans la poitrine est tellement restreint qu’il y a absence de bruits respiratoires et une augmentation soudaine de la fréquence respiratoire sont des signes inquiétants ; ils annoncent une insufsance ventilatoire et un arrêt respiratoire imminent.

Diagnostic Le diagnostic est principalement établi à partir des manifestations cliniques (sibilance, toux, dyspnée, symptômes nocturnes ou réveils nocturnes, tolérance à l’activité), des antécédents, de l’examen physique, de la réponse thérapeutique aux bronchodilatateurs (c’est-à-dire démontrant une obstruction réversible) et des mesures objectives obtenues par les épreuves fonctionnelles respiratoires et le débit expiratoire de pointe chez les enfants de six ans et plus. Les enfants de cinq ans

Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

693

15

ENCADRÉ 15.13

Manifestations cliniques de l’asthme

MANIFESTATIONS GÉNÉRALES

• Crépitements

Toux

• Sibilance inspiratoire et expiratoire généralisée, de plus en plus aiguë

• Quinteuse, paroxystique, irritante, non productive • Sibilante par la suite et produisant une expectoration spumeuse, translucide et gélatineuse

AVEC ÉPISODES RÉPÉTÉS

Autres manifestations respiratoires

• Épaules soulevées

• Soufe court

• Utilisation des muscles respiratoires accessoires

• Phase expiratoire prolongée

• Apparence du visage : os malaires aplatis, cernes sous les yeux, nez étroit, dents du maxillaire supérieur avancées

• Sibilance audible, expiratoire • Oreilles et joues pouvant devenir rouges • Coloration des lèvres rouge foncé • Progression vers une cyanose du lit des ongles et une cyanose péribuccale • Agitation • Inquiétude • Sudation de plus en plus importante • Position de l’enfant : assis droit, épaules recroquevillées, mains sur le lit ou la chaise, bras arc-boutés (position en tripode)

Quelle est la différence entre les exercices de spirométrie et les tests spirométriques ?

694

Partie 6

INDICATEURS DE LA GRAVITÉ DE L’OBSTRUCTION (ENFANT D’ÂGE SCOLAIRE ET ADOLESCENT)

Manifestations récurrentes d’obstruction variable des voies respiratoires • Dyspnée • Oppression thoracique • Sibilance ou toux • Aggravation des symptômes la nuit ou au petit matin

• Discours haletant composé de phrases courtes et entrecoupées

Manifestations d’obstruction bronchique grave

Examen de la poitrine

• Tachypnée

• Hypersonorité à la percussion

• Diminution du murmure vésiculaire

• Bruits respiratoires forts et gras

• Utilisation des muscles accessoires

• Sibilance à travers tout le champ pulmonaire

• Tirage intercostal ou sus-sternal

• Expiration prolongée

• Battement des ailes du nez

et moins peuvent manifester des symptômes respiratoires épisodiques (p. ex., une sibilance et de la toux) lorsqu’ils sont atteints d’infections virales et ils ont de la difculté à effectuer la technique d’expiration forcée qu’exige la spirométrie. Or, sans mesure objective de l’obstruction des voies aériennes, poser un diagnostic d’asthme chez les enfants d’âge préscolaire suscite la controverse (Ducharme et al., 2015 ; GINA, 2015). Pour cette raison, le diagnostic d’asthme chez ces jeunes enfants repose en grande partie sur les manifestations cliniques de détresse respiratoire et d’obstruction des voies respiratoires, sur leur fréquence d’apparition, sur l’examen physique et sur une évaluation clinique des antécédents familiaux TABLEAU 15.21.

éactivation des connaissances

• Thorax en tonneau

Épreuves fonctionnelles respiratoires Les épreuves fonctionnelles respiratoires (EFR) fournissent une méthode objective pour évaluer la présence et le degré d’une maladie pulmonaire, ainsi que la réponse à la thérapie. En général, la spirométrie peut donner des résultats ables lorsqu’elle est effectuée sur un enfant de six ans et

Troubles liés aux systèmes

• Sibilance

plus, et elle inclut soit le simple spiromètre mécanique classique souvent utilisé en clinique, dans les bureaux et à la maison, soit les versions récentes informatisées FIGURE 15.16. La Société canadienne de thoracologie recommande qu’un test spirométrique soit effectué au moment de la première évaluation de l’asthme, après le début du traitement et après la stabilisation des symptômes, puis au moins annuellement ou tous les deux ans pour évaluer l’état de la fonction respiratoire (Lougheed, Lemière, Dell et al., 2010 ; Rosen et Colin, 2018).

Mesure du débit expiratoire de pointe La mesure du débit expiratoire de pointe (DEP) constitue l’autre méthode objective pour poser un diagnostic et faire un suivi de l’asthme chez les enfants de six ans et plus. Deux valeurs peuvent être utilisées pour mesurer l’obstruction bronchique : le DEP et le volume expiratoire maximal à la première seconde (VEMS1), calculés en litres par minute. Le DEP correspond à la valeur maximale du ux expiratoire mesuré pendant 20 millisecondes durant un test d’expiration forcée à l’aide d’un débitmètre de pointe FIGURE 15.17. Le VEMS 1

TABLEAU 15.21

Signes d’asthme chez les enfants de cinq ans et moins

SIGNES

CARACTÉRISTIQUE SUGGÉRANT L’ASTHME

Toux

• Récurrente ou persistante ; peut être accrue la nuit ou accompagnée de sibilance et de dyspnée. • Se manifeste avec l’exercice, le rire, l’exposition à la fumée du tabac et en l’absence d’une infection respiratoire.

Sibilance

• Récurrente, pendant le sommeil ou déclenchée par un rhume d’origine virale, par l’exercice, le rire, les pleurs, l’exposition à la fumée du tabac ou la pollution de l’air.

Dyspnée

• Se manifeste avec le rhume, l’exercice, le rire ou les pleurs.

Activités réduites

• L’enfant ne court pas, ne joue pas et ne rit pas avec la même intensité que les autres enfants. • Il se fatigue plus facilement durant la marche et veut être pris dans les bras.

Antécédents familiaux

• Présence d’une maladie allergique (dermatite atopique ou rhinite). • Asthme dans la famille (parents ou frères et sœurs).

Epreuve thérapeutique avec faible dose de CSIa et de BACAb en inhalation. a CSI :

corticostéroïde en inhalation. Source : Adapté de GINA (2015).

• Amélioration clinique après deux à trois mois de traitement de contrôle et détérioration avec l’arrêt du traitement b BACA :

bêtaagoniste à courte action.

moins deux fois par jour. Une fois que sa meilleure performance personnelle a été établie, il est possible, à n’importe quel moment, de comparer le DEP courant à sa meilleure performance personnelle.

Tests de bronchoprovocation Dans les cas d’asthme allergique, le test de bronchoprovocation, soit l’exposition directe des muqueuses à un antigène soupçonné à des concentrations croissantes, aide à déceler les allergènes inhalés qui provoquent une hyperréactivité et une bronchoconstriction (Mottram, 2017). Le test de l’exposition à la méthacholine, à l’histamine ou à l’air froid ou sec peut également être effectué pour évaluer l’hypersensibilité ou l’hyperréactivité des voies respiratoires. FIGURE 15.16 Le spiromètre peut fournir des résultats ables lorsqu’il est utilisé pour évaluer l’enfant asthmatique de six ans et plus.

ainsi que la capacité vitale (CV) sont également mesurés à l’aide du débitmètre. Le rapport VEMS1/ CV mesure l’obstruction bronchique. La valeur des mesures du DEP dépend de l’effort fourni par l’enfant et d’une technique correcte d’utilisation du débitmètre (GINA, 2016). Typiquement, trois zones de mesure servent à interpréter le DEP . Chaque enfant doit établir sa meilleure performance personnelle. Cela se fait au cours d’une période de deux à trois semaines durant laquelle son asthme est stable. L’enfant enregistre son DEP au

Des exercices exigeants peuvent être utilisés pour vérier si l’enfant est atteint d’un bronchospasme induit par l’exercice, c’est-à-dire pour poser un diagnostic de l’asthme induit par l’exercice. Même si ces tests sont hautement spéciques et sensibles, ils comportent un risque de provoquer un épisode asthmatique ; ils doivent donc être effectués sous étroite surveillance dans une clinique ou un laboratoire qualié.

15

FIGURE 15.17 Débitmètre de pointe

Test cutané et analyses sanguines Il est recommandé que tous les enfants présentant des manifestations cliniques d’asthme durant toute l’année subissent des tests cutanés ou des analyses sanguines pour déterminer leur sensibilité aux allergènes apériodiques (p. ex., les acariens détriticoles, les chats, les chiens, les coquerelles, les moisissures et les champignons). Chapitre 15

Tableau 15.1W : Interprétation du débit expiratoire de pointe.

Troubles liés au système respiratoire

695

Le test cutané est utile pour déterminer les allergènes spéciques, et les résultats obtenus par la technique du test par injection intradermi ­ que offrent une meilleure corrélation avec les symptômes et la mesure du taux d’anticorps IgE spéciques que les tests sous­cutanés. La technique du RAST (radioallergosorbent test, ou dosage des IgE sériques spéciques) est un test sanguin qui aide à déceler les antigènes ali­ mentaires ; elle est souvent utile pour déterminer le traitement approprié. Récemment, le test de l’anticorps IgE spécique a été amélioré et est dis­ ponible sous le nom d’ImmunoCAP Specic IgE (Thermo Fisher Scientic, 2012). Il existe, en outre, d’autres tests importants parmi lesquels les analyses de laboratoire (hémogramme comprenant une formule leucocytaire). L’hémo­ gramme peut montrer une légère leucocytose durant un épisode d’asthme aigu, mais une élévation de plus de 12 000/mm3 de leucocytes ou un pour­ centage accru de granulocytes neutrophiles à noyau en bâtonnet (ou neutrophiles immatures) pourrait

être le signe d’une infection des voies respiratoires d’origine bactérienne. Par contre, une éosinophilie supérieure à 500/mm3 tend à signaler l’existence d’un trouble allergique ou inammatoire.

Radiographies thoraciques Les radiographies thoraciques ne sont pas des tests diagnostiques de routine, mais elles peuvent mon­ trer des inltrations et une hyperination pulmo­ naire, tandis que l’examen physique révèle une augmentation du diamètre antéropostérieur, ce qui peut suggérer un thorax en tonneau. Il est possible d’effectuer des tests diagnostiques additionnels afin de déceler des troubles comme le reflux gastro­œsophagien et de déterminer si ces derniers contribuent aux symptômes de l’asthme.

Approche thérapeutique Les objectifs principaux de l’approche thérapeu­ tique de l’asthme consistent à maîtriser la maladie ; à contrôler les symptômes ; à maintenir une fonction pulmonaire et un niveau d’activité normaux ; à réduire les risques d’exacerbations récidivantes ; à

A Enfants de plus de cinq ans

a

Ne pas utiliser chez les enfants âgés de moins de 12 ans. Chez les enfants de 6 à 11 ans, le traitement de stade 3 préféré est l’administration de CSI à dose moyenne. c L’association CSI/formotérol à faible dose est le traitement aigu des enfants à qui est prescrite l’association budésonide/formotérol à faible dose ou l’association béclométasone/formotérol à faible dose pour un traitement d’entretien ou un traitement aigu. d Le tiotropium administré par inhalateur est un traitement d’appoint pour les enfants ayant des antécédents d’exacerbations. Source : Adapté de GINA (2017b). b

696

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

B Enfants de cinq ans et moins

15

A

FIGURE 15.18 Approche par augmentation progressive du traitement de l’asthme – Enfants de plus de cinq ans. B Enfants de cinq ans et moins.

fournir une pharmacothérapie optimale avec un minimum d’effets indésirables ; à faciliter l’intégration sociale de l’enfant dans son milieu familial et communautaire, ainsi que dans les activités récréatives ou sportives ; et à promouvoir les autosoins. Les lignes directrices sur le traitement de

l’asthme du groupe multinational Global Initiative for Asthma (GINA) ont été révisées et comprennent un diagramme du continuum complet de l’approche thérapeutique de l’asthme pour les enfants de plus de cinq ans FIGURE 15.18A et un autre pour les enfants de cinq ans et moins FIGURE 15.18B. Ces Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

697

diagrammes mettent l’accent sur un cycle continu qui permet l’évaluation de l’asthme, l’ajustement du traitement et l’appréciation de la réponse. Ils permettent également de visualiser l’approche progressive pour l’ajustement du traitement selon les symptômes et le stade de gravité. Pour atteindre les objectifs d’une prise en charge efcace de l’asthme, il est nécessaire de respecter plusieurs principes de traitement (GINA, 2016).

fonction du stade de gravité de l’asthme, et l’ajustement du traitement repose sur l’évaluation de l’examen physique et sur la réponse au traitement. Il est essentiel de vérier, et de revérier occasionnellement, la technique d’utilisation du dispositif d’inhalation et d’apporter des correctifs, au besoin, pour assurer l’administration adéquate des médicaments.

Soins continus

Le traitement comprend l’enseignement à l’enfant et à sa famille pour permettre la prise en charge de l’asthme. Cela inclut l’enseignement sur l’asthme, la pharmacothérapie et l’importance de l’adhésion au traitement, la technique d’utilisation de l’inhalateur et la technique d’utilisation du débitmètre de pointe pour obtenir des mesures objectives an de surveiller la gravité de la maladie et de guider l’ajustement du traitement.

Une approche de soins continus avec des contrôles médicaux réguliers est nécessaire pour maîtriser les symptômes et prévenir les exacerbations. • La fréquence des contrôles médicaux dépend du niveau de traitement, du contrôle initial, de la réponse au traitement, de l’adhésion au traitement de l’enfant et de sa famille, des autosoins ainsi que du plan d’action. Pour évaluer efcacement le contrôle des symptômes chez les enfants d’âge préscolaire, il faut se baser sur le compte rendu et les observations des parents quant aux symptômes diurnes et nocturnes, la présence d’une limitation des activités et l’utilisation de médicament de secours. Ces renseignements permettent d’ajuster le traitement ; l’augmentation progressive du traitement se fait sur une période allant de une fois par jour à un ajustement tous les deux à trois mois ; dès qu’un bon niveau de contrôle des symptômes est atteint, le traitement est légèrement diminué pour maintenir un contrôle maximal des symptômes avec la dose de corticostéroïde en inhalation (CSI) la plus faible possible. • La prévention des exacerbations consiste à connaître les déclencheurs et les allergènes, à minimiser l’exposition à ces facteurs et à utiliser les médicaments de secours, au besoin. Il faut également s’assurer qu’un traitement en cas d’exacerbation est prescrit et écrit dans le plan d’action pour toute personne asthmatique. Le plan doit préciser les médicaments antiasthmatiques habituels de l’enfant, quand et comment augmenter les médicaments et commencer les corticoïdes oraux, et comment accéder aux soins médicaux ou d’urgence si le traitement n’a pas d’effet sur les symptômes. • Le traitement vise à contrôler les symptômes, ce qui inclut la réduction de l’inammation sous-jacente, de même que le soulagement et la prévention du rétrécissement symptomatique des voies respiratoires. Un traitement de contrôle quotidien est instauré aussitôt qu’un diagnostic d’asthme persistant est établi. La posologie est déterminée en

698

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

Enseignement à l’enfant et la famille

La discussion sur les thérapies et les stratégies non pharmacologiques pour maintenir de bonnes habitudes de vie inclut la promotion de l’exercice, le contrôle du poids et la cessation du tabagisme.

Maîtrise des allergènes Le traitement non pharmacologique de l’asthme vise à prévenir et à réduire l’exposition aux allergènes et aux irritants aéroportés qui sont inhalés. Les enfants asthmatiques et allergiques sont vulnérables non seulement aux symptômes allergiques habituels (p. ex., les larmoiements, le picotement des yeux, etc.), mais également à une exacerbation de leurs symptômes d’asthme. Les acariens détriticoles et les autres composants de la poussière, les squames d’animaux (p. ex., ceux des chats, des chiens, des hamsters) ainsi que les coquerelles et les souris qui peuvent se trouver dans le domicile d’enfants asthmatiques de quartiers urbains défavorisés sont fréquemment reconnus comme étant les agents causals chez les enfants allergiques. Les personnes allergiques aux animaux de compagnie devraient soigneusement évaluer si elles veulent les garder dans la maison. Les autres polluants incluent l’ozone, une matière provenant de la fumée de cigarette et des poêles à bois, ainsi que les pesticides, le plomb, les spores de moisissures, le dioxyde d’azote et l’anhydride sulfureux. Tous ces polluants semblent contribuer à la morbidité de l’asthme chez les enfants et devraient être évités ou réduits au minimum. L’exposition à la fumée maternelle in utero est un facteur contributif majeur dans l’apparition de l’asthme chez les nourrissons et les jeunes enfants (Zacharasiewicz, 2016). Le simple fait de retirer de l’environnement les allergènes ou les irritants en cause (p. ex., enlever les tapis de la maison pour un enfant sensible aux moisissures et aux particules de poussière) peut contribuer énormément à la prévention des

exacerbations d’asthme (Kanchongkittiphon, Gafn et Phipatanakul, 2014).

types de médicaments de contrôle les plus utilisés sont :

Pharmacothérapie

• les corticostéroïdes en inhalation (CSI)

Il est recommandé d’appliquer l’approche progressive pour l’ajustement des médicaments selon les symptômes de l’asthme qu’éprouve l’enfant. Il existe deux grandes catégories de médicaments contre l’asthme TABLEAU 15.22 : • les médicaments de contrôle (thérapie préventive), qui visent à enrayer la réaction inammatoire et à prévenir sa réapparition pour la maîtrise de l’asthme à long terme ; • les médicaments de secours, qui apportent un soulagement rapide pour le traitement des symptômes et des exacerbations (Association pulmonaire du Canada, 2014b). Les deux catégories de médicaments sont souvent utilisées en combinaison. Les médicaments de contrôle sont utilisés au quotidien, même en l’absence de symptômes, car leur action est lente et leur efcacité se manifeste à long terme. Ils ont pour action principale de réduire l’inammation et les mucosités des voies respiratoires. Les trois

;

• les bronchodilatateurs (agonistes des récepteurs β2-adrénergiques) à action prolongée ou bêtaagonistes à longue action (BALA) ;

Tableau 15.2W : Doses quotidiennes de corticoïdes inhalés selon les stades de l’asthme.

• les antagonistes des récepteurs des leucotriènes (ARLT). Les médicaments de secours administrés pour un soulagement rapide sont : • les bronchodilatateurs bêtaagonistes à courte action (BACA) ; • les anticholinergiques ; • les corticostéroïdes systémiques. Les bronchodilatateurs, qui relaxent les muscles lisses bronchiques et dilatent les voies respiratoires, incluent les bêtaagonistes, les méthylxanthines (p. ex., la théophylline) et les anticholinergiques, qui peuvent être utilisés à la fois pour un soulagement rapide et comme traitement à long terme. Plusieurs de ces médicaments sont administrés par inhalation à l’aide d’un nébuliseur ou d’un aérosol-doseur (inhalateur-doseur).

Pharmacothérapie TABLEAU 15.22

Médicaments pour le traitement de l’asthme

MÉDICAMENTS DE CONTRÔLE (THÉRAPIE PRÉVENTIVE)

• Utilisation quotidienne, même en l’absence de symptômes • Action anti-inammatoire ; traite les obstructions réversibles et l’hyperréactivité des voies aériennes (efcaces aussi pour réduire la fréquence et la gravité des exacerbations, ainsi que les mucosités dans les poumons)

• Action lente, efcacité à long terme (inefcaces pour soulager les symptômes de crise d’asthme)

15

• Administration par inhalation ou par voie orale ou parentérale • Administration efcace à la plus faible dose

Corticostéroïdes • Action : réduction de l’inammation des voies respiratoires

• Effets indésirables : toux, dysphonie et candidose buccopharyngée

Corticostéroïdes en inhalation (CSI)

Corticostéroïdes systémiques (voie orale) (CSO)

Combinaison d’un corticostéroïde et d’un bronchodilatateur bêtaagoniste à longue action en inhalation (CSI/BALA)

• Indication :

• Indications :

• Indications :

– Traitement de première intention pour la maîtrise de l’asthme chez l’enfant de tout âge, surtout pour l’asthme persistant. • Exemples : – Béclométhasone HFA (QvarMD) ; budésonide (PulmicortMD) ; uticasone (Floventmd) ; ciclésonide (AlvescoMD)

– Inammation des voies respiratoires et exacerbations de l’asthme, soulage rapidement une crise d’asthme. – Traitement de l’asthme persistant grave. – Le début d’action peut prendre jusqu’à 3 h ; le pic d’efcacité est atteint en 6 à 12 h. – Courte durée de prescription (de 3 à 10 jours) ; l’objectif est de maîtriser l’inammation.

– Traitement d’entretien et de secours chez l’enfant ≥ 12 ans lorsque la monothérapie par CSI ne maîtrise pas l’asthme. – Un dispositif d’inhalation qui contient les 2 médicaments est prescrit pour l’administration simultanée. • Exemple : – Budésonide/formotérol (SymbicortMD), Fluticasone/salmétérol (AdvairMD)

• Exemples : – Prednisone ; prednisolone (PediapredMD et DexaméthasoneMD)

Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

699

TABLEAU 15.22

Médicaments pour le traitement de l’asthme (suite)

Autres médicaments de contrôle Bronchodilatateurs bêtaagonistes à longue action (BALA) en inhalation

Antagonistes des récepteurs de leucotriènes (ARLT)

Anticorps monoclonaux antiimmunoglobuline E (IgE)

• Action :

• Action :

• Action : – Blocage de la xation des IgE sur les récepteurs des mastocytes, induisant une inhibition de l’inammation associée à l’asthme. • Effets indésirables : réactions anaphylactiques • Indications : – Traitement de l’asthme allergique persistant modéré ou grave chez l’enfant ≥ 12 ans. – À envisager seulement dans les cas d’asthme difcile à maîtriser conrmé par des mesures objectives (c.-à-d. l’allergie apériodique à un aéroallergène avec symptômes non maîtrisés, malgré un traitement par CSI à forte dose associé à au moins un médicament d’entretien supplémentaire, et taux sérique d’IgE entre 300 et 700 unités internationales/mL). • Exemple : – Omalizumab (XolairMD) – administré par voie sous-cutanée, 1 à 2 fois par mois, posologie établie selon le taux sérique d’IgE et le poids corporel, délai d’action : 12 semaines.

– Relaxation des muscles lisses bronchiques qui aide à prévenir les bronchospasmes ; stabilisation des mastocytes an de prévenir la libération des médiateurs. • Indications : – Traitement d’entretien de l’asthme ; ne traitent pas les symptômes aigus ou les exacerbations. – En combinaison avec un CSI si l’asthme est non maîtrisé avec les médicaments d’entretien ou si la gravité de la maladie nécessite deux médicaments d’entretien. – Ne jamais utiliser en monothérapie, toujours ajouter à un CSI. • Exemples : – Salmétérol (SereventMD) – utilisé q.12 h, enfants ≥ 12 ans ; formotérol (OxezeMD) enfants ≥ 6 ans

– Inhibition des effets inammatoires des leucotriènes (médiateurs de l’inammation qui causent l’hypersensibilité des voies respiratoires) sur les muscles lisses bronchiques, prévenant ainsi la bronchoconstriction et entraînant une diminution de la perméabilité vasculaire, de l’œdème des muqueuses et de la production de mucus. • Indications : – En prophylaxie ou comme traitement de l’asthme persistant léger. – Prévention des bronchospasmes induits par l’exercice. – En combinaison avec un CSI à dose moyenne en cas d’asthme non maîtrisé. – En monothérapie de deuxième intention chez les enfants ≥ 6 ans si : 1) l’adhésion au traitement au CSI est insufsante ; 2) la faible dose de CSI ne permet pas de maîtriser les symptômes ; 3) l’enfant est atteint d’une rhinite allergique bénigne. • Exemples : – AccolateMD – enfants ≥ 12 ans ; montélukast (SingulairMD) – enfants ≥ 12 mois

Source : Adapté de Lougheed et al. (2010) ; Taketomo, Hodding & Kraus (2008) MÉDICAMENTS DE SECOURS

Bronchodilatateurs bêtaagonistes à courte action (BACA) en inhalation

Combinaison d’un corticostéroïde en inhalation (CSI) et d’un bronchodilatateur à longue durée d’action (BALA)

Bronchodilatateurs anticholinergiques à action de courte durée

• Actions : – Relaxation des muscles lisses bronchiques qui aide à prévenir les bronchospasmes ; stabilisation des mastocytes an de prévenir la libération des médiateurs. – Effet de courte durée

• Indication :

• Action :

• Indications : – Traitement de secours en cas de symptômes aigus (toux, oppression thoracique, respiration sifante et essoufement) ; l’enfant doit toujours avoir accès au BACA. – Prévention des bronchospasmes induits par l’exercice. – Réduction des déclencheurs d’asthme (p. ex., l’exercice physique, l’air froid). – Ne pas dépasser 3 fois par semaine, si l’asthme est maîtrisé. • Exemples : – Salbutamol (VentolinMD, albuterol) ; terbutaline (BricanylMD) – enfants > 6 ans Sources : Adapté de APhC (2017) ; Lougheed et al. (2010).

700

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

– Peuvent être recommandés matin et soir comme médicaments d’entretien ainsi que pour l’utilisation en cas d’aggravation des symptômes. • Exemple : – Budésonide/formotérol (SymbicortMD) – approuvé comme médicament de secours.

– Blocage de l’action de l’acétylcholine aux sites parasympathiques des muscles lisses entraînant une bronchodilatation. • Effets indésirables : – Assèchement des sécrétions des voies respiratoires, stimulation cardiaque et du système nerveux central (SNC) • Indications : – Parfois utilisés en combinaison avec un BACA en milieu hospitalier lors d’exacerbation d’asthme grave. – Non recommandés pour soulager les exacerbations chez les enfants, mais peuvent être utilisés si les BACA provoquent des effets indésirables. • Exemples : – Ipratropium (AtroventMD)

Pour prévenir les infections buccales à levures, l’aérosol-doseur devrait toujours être rattaché à un tube d’espacement, ou chambre d’inhalation, pour l’administration d’un CSI. L’usage d’un tube d’espacement est également important pour l’enfant qui a de la difculté à coordonner ses mouvements ou à apprendre la bonne technique d’inhalation. Un masque ou un embout peut être ajouté au tube d’espacement muni d’un boîtier. Les inhalateurs à poudre sèche (p. ex., les inhalateurs DiskusMD et TurbuhalerMD) sont activés par le soufe, et doivent être inhalés aussi rapidement et profondément que possible pour être efcaces. Le DiskhalerMD et l’AerolizerMD sont semblables, mais dans le cas de l’AerolizerMD, le médicament doit être introduit dans l’inhalateur avant usage. L’utilisation du nébuliseur est indiquée pour le nourrisson et le trottineur. Lorsque la forme prémélangée n’est pas offerte, le médicament doit être combiné à une solution saline avant d’être nébulisé par une source d’air comprimé. L’enfant a pour instruction de respirer normalement, la bouche ouverte, pour ouvrir un chemin direct vers la trachée. Lorsque l’asthme n’est pas maîtrisé au moyen d’une faible dose de CSI chez les enfants de un à cinq ans ou s’il y a exacerbation, il faut accroître la dose de CSI et ajouter un BACA, au besoin ; une dose modérée de CSI est un indice pour consulter un pneumologue pédiatrique. Si l’asthme est intermittent et que les symptômes sont peu fréquents (huit jours et moins par mois) sans exacerbation, il peut être sufsant d’utiliser un BACA, au besoin, comme médicament de contrôle (Ducharme et al., 2015). La recommandation d’utiliser les corticostéroïdes comme thérapie de première intention chez les enfants de cinq ans et moins constitue un changement majeur gurant dans les directives de l’approche thérapeutique de l’asthme (Ducharme et al., 2015 ; GINA, 2015). Les études cliniques portant sur les corticostéroïdes ont en effet mis en évidence une amélioration signicative de tous les paramètres de mesure de l’asthme, y compris une diminution des symptômes, du nombre de visites à l’urgence et des besoins en médicaments chez les enfants de tous âges atteints d’asthme persistant modéré (Bekmezian, Fee et Weber, 2015). Selon les résultats d’études cliniques portant sur des enfants, l’utilisation de CSI, aux doses recommandées, ne produit pas d’effets importants à long terme sur la croissance ou la densité minérale osseuse, et les CSI n’entraînent pas de toxicité oculaire ni de suppression de l’axe hypophysosurrénalien (Hossny, Rosario, Lee et al., 2016 ; Liu et al., 2016). Cependant, les soignants de première ligne doivent exercer une surveillance fréquente de la croissance de l’enfant ou de l’adolescent qui prend des corticostéroïdes an d’évaluer leurs

effets généraux et de réduire la posologie ou de passer à un autre type de thérapie lorsque cela s’avère nécessaire. Chez les enfants d’âge préscolaire, l’utilisation de CSI aide à maîtriser les symptômes, mais ne prévient pas la progression vers l’asthme persistant. Les BALA sont des médicaments de contrôle, alors que les BACA sont des médicaments de secours . Le médicament inhalé a une action plus rapide que la forme de préparation orale ou parentérale, et il réduit également les effets systémiques indésirables comme l’irritabilité, les tremblements, la nervosité et l’insomnie. Les agents bêtaadrénergiques inhalés à action de courte durée ne doivent pas être pris plus de trois ou quatre fois par jour pour des symptômes aigus. Selon une étude menée auprès de 2 000 familles québécoises ayant un enfant atteint d’asthme, 13 % des parents ont eu recours à des approches complémentaires et parallèles en santé pour essayer de soulager leur enfant asthmatique : les plus communes sont les suppléments vitaminiques (24 %), l’homéopathie (18 %) et l’acupuncture (11 %). Le recours à ces approches en conjonction avec les autres thérapies doit être soigneusement évalué dans le traitement global de l’asthme. La posologie des médicaments prescrits doit être respectée (Sabourin, 2011).

CE QU’IL FAUT RETENIR

La pharmacothérapie vise à prévenir et à contrôler les symptômes de l’asthme, à réduire les épisodes d’exacerbation ainsi qu’à dégager les voies respiratoires.

PHARMACOVIGILANCE

Les BALA en inhalation (salmétérol) doivent être utilisés uniquement comme prescrit (habituellement toutes les 12 heures), sans augmentation de la fréquence. Ils ne sont pas conçus pour le soulagement des symptômes asthmatiques aigus, contrairement aux BACA, dont on peut augmenter la dose en cas d’exacerbation.

Exercice physique Le bronchospasme induit par l’exercice (BIE) est une obstruction aiguë et réversible des voies respiratoires qui évolue habituellement spontanément vers la guérison ; il se manifeste durant ou après une activité vigoureuse, atteint son apogée en 5 à 10 minutes après la n de l’exercice et cesse généralement de 20 à 30 minutes plus tard. La personne souffrant d’un BIE a le soufe court, tousse, ressent une douleur ou un serrement thoraciques, a de la sibilance et connaît des problèmes d’endurance lorsqu’elle fait de l’exercice (Association pulmonaire du Canada, 2014a). Il est important de suivre le plan d’action antiasthmatique et d’utiliser l’inhalateur de secours, au besoin. Le BIE est souvent un signe d’asthme non maîtrisé ; il est donc nécessaire de procéder à une épreuve d’effort en laboratoire pour établir le diagnostic.

15

Ce problème est rare dans les activités requérant de courtes poussées d’énergie (p. ex., le baseball, le sprint, la gymnastique, le ski) et il est plus fréquent au cours d’activités qui exigent de l’endurance (p. ex., le soccer, le basketball, la course de fond). La natation est bien tolérée par l’enfant qui a un BIE, car il respire de l’air pleinement saturé d’humidité. Cependant, certaines recherches établissent un lien entre le chlore et la recrudescence de l’asthme, notamment en raison Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

701

de la formation de chloramine résultant de l’interaction entre le chlore et la salive, l’urine, la transpiration et les huiles naturelles de la peau (Angione, McClenaghan et LaPlante, 2011). CE QU’IL FAUT RETENIR

Les enfants avec un diagnostic d’asthme sont à risque de souffrir d’obésité durant l’adolescence.

Par ailleurs, il arrive souvent que les parents et les enseignants déconseillent à l’enfant asthmatique de faire de l’exercice, ou que celui-ci tende à s’en abstenir, par crainte de provoquer une crise. Ainsi, le risque de souffrir d’obésité à l’adolescence est plus élevé (Chen, Salam, Alderete et al., 2017), ce qui peut nuire davantage à leur santé physique. L’exercice est plus avantageux que la sédentarité, et il est possible, pour la plupart des enfants asthmatiques, de participer aux activités scolaires et sportives comportant un niveau de difculté modéré, dans la mesure où leur asthme est maîtrisé. Il convient d’évaluer la participation au cas par cas. Une prophylaxie appropriée aux agents β-adrénergiques ou au cromoglycate disodique avant l’exercice permet habituellement une participation pleine et entière à un exercice vigoureux. L’entraînement physique vise à induire une relaxation physique et mentale, à corriger la posture, à renforcer la musculature respiratoire et à améliorer l’efcacité des modes de respiration.

Exercices de respiration

éactivation des connaissances Nommez deux types d’exercices respiratoires permettant à la personne de contrôler sa respiration.

ALERTE CLINIQUE

Toute crise d’asthme inhabituelle ou qui ne répond pas dans l’heure aux bêtaagonistes inhalés nécessite un avis médical.

702

Partie 6

Pour l’enfant motivé, les exercices respiratoires et la respiration contrôlée sont précieux pour prévenir l’hyperination et améliorer l’efcacité de la toux. Des études menées auprès d’adultes asthmatiques ont démontré que les exercices respiratoires amènent une réduction des symptômes de l’asthme et du nombre d’exacerbations rapportés, ainsi qu’une amélioration de la fonction pulmonaire et de la qualité de vie. Le recours à la physiothérapie respiratoire n’est cependant pas recommandé pendant une exacerbation aiguë, même sans complication (Freitas, Holloway, Bruno, et al., 2013 ; Larock et Bekkering, 2015).

mois, la quantité administrée est augmentée graduellement, jusqu’à ce qu’une dose d’entretien soit atteinte. La dose d’entretien est la dose maximale que l’enfant recevra mensuellement pour une durée de 3 à 5 ans. L’exposition graduelle et régulière à un allergène permet le développement d’une tolérance du système immunitaire et la diminution des manifestations cliniques d’allergies occasionnées par cet allergène (Hotte, 2016). Si aucun symptôme ne réapparaît, il est présumé que l’enfant a acquis l’immunité voulue ; si les symptômes réapparaissent, le traitement reprend. Le plus grand risque posé par ce traitement est la survenue d’une réaction allergique aiguë, la plupart du temps dans les 30 minutes qui suivent l’injection. À cause du risque de réaction anaphylactique, les injections d’immunothérapie ne doivent être administrées que lorsque les équipements et les médicaments de secours sont disponibles. L’Association des allergologues et immunologues du Québec (Hotte, 2016) recommande le recours à l’immunothérapie pour les asthmatiques dans les situations suivantes : • chez les enfants dont il est prouvé que leurs réactions sont essentiellement allergiques, quand un allergène dominant est bien identié (tests cutanés ou sanguins), et lorsque l’éviction de l’allergène est impossible ; • pour prévenir l’apparition de nouvelles allergies environnementales et la progression de la rhinite vers l’asthme ; • pour les enfants chez qui les manifestations allergiques ne sont pas contrôlées avec les médicaments et les mesures environnementales, ou encore pour ceux qui refusent de prendre leurs médicaments. L’immunothérapie est contre-indiquée chez les enfants :

Immunothérapie

• traités avec des médicaments bêtabloquants ;

L’immunothérapie, parfois appelée désensibilisation, est une option thérapeutique à considérer pour le traitement des allergies respiratoires (à différents pollens, aux acariens, à certaines moisissures, aux chats et aux hyménoptères) qui peuvent causer des symptômes d’asthme (Hotte, 2016). Les cas de rhinites, de toux spasmodique et d’asthme bénéficient le plus de l’immunothérapie. Cette approche est adaptée uniquement pour des symptômes importants liés à des allergènes environnementaux et n’est pas recommandée pour les allergènes pouvant être éliminés, comme les aliments, les médicaments et les animaux.

• atteints d’asthme grave ou non maîtrisé ;

L’immunothérapie consiste en l’administration sous-cutanée (injection) d’une petite quantité d’allergène, selon l’importance de la réaction cutanée. Chaque semaine et sur une période de plusieurs

Troubles liés aux systèmes

• atteints de maladies cardiovasculaires avec des comorbidités importantes.

Status asthmaticus Pour chaque enfant, un plan d’action antiasthmatique permet d’assurer le suivi en détaillant toutes les mesures thérapeutiques qui ont été essayées. L’enfant qui continue à manifester une détresse respiratoire en dépit de la mise en place de mesures thérapeutiques vigoureuses, comprenant l’usage de BACA et de corticostéroïdes oraux, a un status asthmaticus (ou asthme aigu grave) . Cet état peut se développer graduellement ou rapidement, et il coïncide souvent avec des complications comme une pneumonie ou un virus respiratoire qui peuvent inuencer la durée et le traitement de l’exacerbation.

Un enfant soupçonné d’avoir un status asthmaticus doit être transféré à l’unité de soins intensifs pédiatriques (USIP), surtout si son pronostic vital est menacé (c’est-à-dire si l’enfant est somnolent, désorienté, ou s’il a un thorax muet à l’auscultation) (GINA, 2016). Habituellement, l’enfant en status asthmaticus est admis à l’USIP pour être placé en observation attentive et sous surveillance cardiorespiratoire continue. Le traitement vise à améliorer la respiration, à réduire la résistance des voies respiratoires, à soulager le bronchospasme, à corriger la déshydratation et l’acidose, à dissiper l’anxiété de l’enfant et des parents devant la gravité de l’exacerbation, et à traiter toute infection concomitante. L’administration d’oxygène est recommandée, et le traitement doit assurer le maintien de la saturation en oxygène à un niveau supérieur à 93 %. Une vérication fréquente du pH du sang, de la gazométrie sanguine et de l’ionogramme sérique permet d’orienter les interventions visant à corriger la déshydratation, l’acidose, l’hypoxie et le déséquilibre électrolytique. Les BACA en inhalation sont recommandés pour tout enfant qui a un status asthmaticus. La thérapie initiale consiste habituellement en 3 traitements aux BACA à 20 ou 30 minutes d’intervalle, après quoi l’administration est continue. Un corticostéroïde systémique est également administré par voie orale ou parentérale pour réduire les effets de l’inammation. Il est possible d’ajouter un anticholinergique (p. ex., l’ipratropium) à la solution de BACA en inhalation, car il a été démontré que cette combinaison produit une bronchodilatation additionnelle chez les enfants souffrant d’une obstruction grave des voies respiratoires. Une perfusion I.V. sera installée pour le maintien de l’hydratation et l’administration des médicaments. Les autres traitements utilisés dans les crises d’asthme aiguës incluent le sulfate de magnésium, un puissant relaxant musculaire administré par voie I.V. dont l’action réduit l’inammation et améliore la fonction pulmonaire ainsi que le débit expiratoire de pointe. La kétamine, un anesthésique dissociatif, entraîne une relaxation des muscles lisses et réduit la résistance des voies respiratoires causée par le bronchospasme grave au cours d’un épisode d’asthme aigu (Goyal et Agrawal, 2013) ; elle peut être administrée comme complément à d’autres traitements mentionnés précédemment si l’enfant est intubé. La théophylline a été utilisée pendant des dizaines d’années pour soulager les symptômes de l’asthme et prévenir les crises. De nos jours, son usage se fait principalement à l’urgence ou à l’USIP, lorsque l’exacerbation ne répond pas à la thérapie maximale. Bien qu’il ne soit plus

recommandé dans les lignes directrices et que les études récentes n’ont montré aucune diminution notable de la durée de séjour dans l’USIP et aucune diminution importante du temps requis pour l’amélioration des symptômes, l’ajout de théophylline au régime pharmacologique pour le traitement du status asthmaticus reste une préférence clinique (Dalabih, Bondi, Harris et al., 2014). Étant donné que la marge thérapeutique de la théophylline est étroite, la posologie thérapeutique est déterminée grâce à l’analyse des taux sériques. Il ne faut utiliser des antibiotiques pour traiter les crises d’asthme aiguës qu’en présence d’une infection bactérienne résultant d’une autre condition comme la pneumonie ou la sinusite (Saadeh, 2017). Une composante clé de la prévention de la morbidité consiste à enseigner à l’enfant, aux parents, aux enseignants, aux entraîneurs et aux autres adultes dans l’entourage de l’enfant à reconnaître les signes d’une détérioration de l’état respiratoire, à utiliser avec efcacité les bons médicaments de secours et à demander les services de professionnels de la santé entraînés plutôt que d’attendre de voir si la crise se résorbera d’elle-même. L’enfant chez qui le status asthmaticus s’installe rapidement a besoin d’une assistance médicale professionnelle avant que son état ne se détériore jusqu’à l’insufsance respiratoire irréversible et, possiblement, jusqu’à la mort .

ALERTE CLINIQUE

S’il n’est pas traité, le status asthmaticus est une urgence médicale qui peut provoquer une insufsance respiratoire et même la mort.

Pronostic Chez certains enfants, les symptômes de l’asthme s’améliorent à la puberté, mais jusqu’aux deux tiers des enfants asthmatiques continuent d’avoir des symptômes durant la puberté et jusqu’à l’âge adulte FIGURE 15.19. Le pronostic pour la maîtrise ou la disparition des symptômes varie. Il est important de déterminer le type d’asthme dont souffre l’enfant de moins de six ans (intermittent ou persistant) pour formuler un pronostic.

15

• Le pronostic est plus favorable chez les enfants : – qui connaissent des crises transitoires peu fréquentes et associées aux infections respiratoires virales ; – qui ne présentent aucun symptôme entre les crises ; – qui n’ont pas d’atopie ou d’antécédents familiaux d’allergies. • Le pronostic est moins favorable chez les enfants : – qui sont atteints d’asthme persistant ; – qui ont des exacerbations associées à des infections respiratoires virales et à des allergènes ; Chapitre 15

FIGURE 15.19 Dans près de deux tiers des cas d’enfants asthmatiques, les symptômes persistent pendant la puberté et jusqu’à l’âge adulte.

Troubles liés au système respiratoire

703

– qui manifestent des symptômes entre les crises ; – qui ont un terrain atopique (eczéma, rhinite allergique) ainsi que des antécédents familiaux d’allergies. Les facteurs de risque de persistance des symptômes durant l’enfance (depuis le jeune âge) incluent : • l’atopie ; • le sexe masculin ; • l’exposition à la fumée secondaire (y compris in utero) et à des allergènes inhalés (acariens, squames d’animaux de compagnie) ;

chez l’adulte semble être associée à une réduction de la fonction pulmonaire. Les décès attribuables à l’asthme sont relativement peu fréquents, en particulier dans les groupes d’âge plus jeunes ; le taux de mortalité, au Canada, est en baisse constante. Au Canada, 20 enfants meurent chaque année de l’asthme et de ses conséquences (University of Ottawa, 2015). Les facteurs de risque concernant les décès dus à l’asthme incluent : • une apparition précoce de la maladie ; • des crises fréquentes ;

• des infections respiratoires fréquentes et le syndrome de détresse respiratoire aiguë au cours des premières années de vie ;

• une maladie difcile à traiter ;

• la présence d’antécédents familiaux d’allergies et d’asthme ;

• la non-adhésion au traitement (refus de prendre les médicaments) ;

• un faible poids à la naissance (ASPC, 2014a).

• une dépendance aux médicaments contre l’asthme ou une surconsommation pharmacologique ;

Beaucoup d’enfants qui voient les épisodes d’exacerbation disparaître en grandissant continuent de souffrir de toux et d’hyperréactivité des voies respiratoires une fois devenus adultes. De plus, l’hyperréactivité des voies respiratoires

• l’adolescence ; • des antécédents d’insufsance respiratoire ;

• la présence de stigmates physiques (thorax en tonneau, tirage intercostal) ; • des résultats anormaux aux épreuves fonctionnelles respiratoires.

Soins inrmiers ASTHME

Les soins inrmiers à prodiguer à l’enfant asthmatique incluent des mesures d’évaluation et de collecte des données, de l’enseignement et une prise en charge, autant pour les soins à long terme que pour les soins en phase aiguë. L’inrmière qui travaille auprès des enfants à domicile, à l’hôpital, à l’école, dans un service de consultation externe, dans une clinique de médecine familiale ou dans d’autres lieux communautaires joue un rôle essentiel auprès de l’enfant et de sa famille, qui doivent apprendre à vivre avec cette maladie. L’asthme peut être traité de façon à ne pas exiger d’hospitalisation ni interférer avec la vie familiale, les activités physiques ou la présence à l’école PSTI 15.2. À la suite de la conrmation du diagnostic, les parents et les membres de la famille qui s’occupent de l’enfant doivent recevoir un enseignement sur l’asthme. Le programme d’enseignement inclut l’information sur l’asthme, les médicaments et les techniques d’utilisation du dispositif d’inhalation, l’importance de l’adhésion au traitement, un plan d’action antiasthmatique écrit, l’autosurveillance et les contrôles médicaux réguliers (Ducharme et al., 2015 ; GINA, 2016). Un des axes principaux des soins inrmiers concerne le traitement en consultation externe par

704

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

la famille. Il faut enseigner aux parents comment éviter les allergènes, reconnaître et réagir aux symptômes de bronchospasme, maintenir un état de santé optimal, prévenir les complications et favoriser le maintien des activités familiales normales. L’inrmière doit déterminer quelles sont les croyances ou les pratiques culturelles ou ethniques susceptibles d’inuencer l’autosurveillance des symptômes et l’adhésion au traitement, et de nécessiter une modication des approches en matière d’enseignement an de répondre aux besoins de la famille.

Réaliser l’évaluation et la collecte des données Les soins inrmiers de l’enfant asthmatique commencent par une révision de ses antécédents de santé, de son environnement à la maison, à l’école et dans les lieux où il joue, ainsi que de l’attitude des parents et de l’enfant au sujet de son état. L’évaluation du système respiratoire, décrite en détail dans la première section Soins inrmiers du chapitre, doit être réalisée en même temps qu’un examen physique complet mettant l’accent sur le système respiratoire. Cet examen doit comporter les mêmes observations et techniques que

Plan de soins et de traitements inrmiers PSTI 15.2

Enfant asthmatique

PROBLÈME DÉCOULANT DE LA SITUATION DE SANTÉ

Prise en charge inefcace des exacerbations de l’asthme liée à un manque de connaissances

OBJECTIF

L’enfant aura une meilleure maîtrise de son asthme.

RÉSULTATS ESCOMPTÉS

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES ET JUSTIFICATIONS

• Absence de manifestations de l’exacerbation de l’asthme (p. ex., la sibilance respiratoire, une toux sèche, une respiration laborieuse, la dyspnée, le tirage intercostal, un serrement à la poitrine et un essoufement)

Enseignement et prévention

• Utilisation appropriée des traitements pharmacologiques • Mise en place de stratégies pour diminuer les facteurs déclencheurs

• Aider l’enfant et la famille à reconnaître et à éviter les facteurs déclencheurs de la crise d’asthme à la maison et à l’école (allergènes, irritants, changements de température, exercice, émotions, infections respiratoires, exposition à la fumée secondaire, animaux de compagnie) pour mieux prévenir les exacerbations de la maladie. • Aider l’enfant (selon son âge et son stade de développement) et la famille à reconnaître les signes précurseurs d’une crise d’asthme (utilisation du débitmètre de pointe) pour intervenir rapidement et diminuer les complications. • Donner à l’enfant et à la famille l’information sur l’utilisation des corticostéroïdes et des bronchodilatateurs en inhalation, et sur l’utilisation appropriée des médicaments de secours en cas d’exacerbation ; souligner l’importance d’avoir toujours accès à un bronchodilatateur à courte durée d’action pour maîtriser les symptômes, prévenir les exacerbations et limiter les effets indésirables des médicaments. • Enseigner à l’enfant la manière appropriée d’utiliser les dispositifs d’inhalation et le débitmètre de pointe, et vérier et corriger, si nécessaire, la technique d’inhalation à chaque visite pour améliorer l’aptitude de l’enfant à l’autosurveillance et aux autosoins. • Évaluer la maîtrise de l’asthme à chaque visite pour corriger ou renforcer les apprentissages, ou rechercher des facteurs aggravants (p. ex., la comorbidité).

PROBLÈME DÉCOULANT DE LA SITUATION DE SANTÉ

Dysfonctionnement familial en raison de la maladie chronique

OBJECTIF

L’enfant et tous les membres de la famille participeront, à leur façon, au traitement de la maladie.

RÉSULTATS ESCOMPTÉS

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES ET JUSTIFICATIONS

• Description de la maladie et de son traitement

• Fournir à la famille et à l’enfant (d’une façon appropriée à son âge) des explications au sujet de la maladie et de son traitement pour qu’ils soient adéquatement informés.

• Participation à l’élaboration d’un plan d’action qui tient compte de chaque membre de la famille

• Collaborer avec les membres de la famille à l’élaboration d’un plan d’action écrit pour le traitement de l’asthme an de susciter chez eux des attentes réalistes.

• Diminution des conits familiaux

• Discuter avec les membres de la famille des éléments qui contribuent et qui nuisent à l’efcacité du traitement de l’asthme pour promouvoir les autosoins et la maîtrise de l’asthme, et pour les aider à comprendre l’importance de leur rôle dans le traitement de la maladie. • Encourager la famille et l’enfant (d’une façon appropriée à son âge) à discuter des effets de la maladie sur le mode de vie familial pour les amener à prendre conscience de leur pouvoir et renforcer chez eux le sens de l’engagement, et pour leur fournir l’occasion de parler des sentiments qu’ils vivent et des dés que pose le fait d’avoir un enfant atteint d’une maladie chronique.

pour tout enfant 4 . Par ailleurs, l’inrmière note et évalue les caractéristiques physiques liées aux problèmes respiratoires chroniques, y compris la conguration du thorax (p. ex., un thorax en tonneau), la posture et le mode de respiration. Les facteurs déclencheurs de la crise ainsi que l’histoire de la crise actuelle et des crises antérieures fournissent des renseignements importants. L’inrmière collecte également les données concernant les répercussions de l’asthme sur les

activités quotidiennes de l’enfant et sur son identité personnelle, l’adhésion au traitement pharmacologique de l’enfant et de sa famille, ainsi que leurs objectifs personnels en ce qui a trait au traitement. La communication est un élément essentiel de cette collaboration, et les professionnels de la santé doivent constamment évaluer l’efcacité de leur communication avec l’enfant. Il faut également évaluer régulièrement la satisfaction de l’enfant et de la famille concernant la maîtrise de l’asthme et la qualité des soins. L’inrmière doit

Chapitre 15

4 La revue des systèmes à effectuer au moment de l’examen physique est présentée dans le chapitre 4, Examen clinique : anamnèse et examen physique.

Troubles liés au système respiratoire

705

15

PHARMACOVIGILANCE

Les parents ne devraient administrer de l’acide acétylsalicylique à un enfant asthmatique que suivant la recommandation d’un professionnel de la santé et sous sa supervision, puisque ce médicament peut causer une exacerbation de l’asthme. L’acétaminophène est sûr pour les enfants, ce qui en fait l’analgésique de choix.

aussi évaluer leur perception de la gravité de la maladie et le niveau de soutien social dont ils bénécient.

Informer la famille sur les moyens d’éviter les allergènes L’inrmière fournit des renseignements aux parents sur les moyens pour modier l’environnement de façon à réduire le contact de l’enfant avec le ou les allergènes en cause ENCADRÉ 15.14 . Elle met notamment en garde les parents contre le fait d’exposer l’enfant à des conditions climatiques extrêmes (p. ex., un froid excessif, le vent), à la fumée secondaire, aux aérosols et aux autres irritants. Les aliments connus pour provoquer des symptômes doivent être éliminés de l’alimentation. Environ 5 % des enfants asthmatiques ont une hypersensibilité à l’acide acétylsalicylique qui peut déclencher une exacerbation (Notrefamille. com, 2015 ; Ontario Lung Association, 2015) ; par conséquent, l’inrmière doit avertir les parents d’utiliser d’autres analgésiques antipyrétiques en

cas d’inconfort ou de èvre, et de respecter rigoureusement la dose et la fréquence d’administration prescrites . Même si l’acide acétylsalicylique est rarement administré aux enfants, les composés de salicylate sont présents dans d’autres médicaments communs, comme le Pepto-BismolMD utilisé pour le soulagement des diarrhées, ou l’AnacinMD, pour la douleur et la èvre. L’enfant souffrant d’asthme allergique induit par l’acide acétylsalicylique peut également être sensible aux AINS et à la tartrazine (colorant jaune n o 5, un colorant alimentaire commun).

Informer la famille sur les moyens de soulager le bronchospasme Signes précoces et observables Il faut enseigner aux parents et aux enfants plus âgés à reconnaître les signes précoces et les symptômes d’une exacerbation d’asthme imminente, de sorte qu’elle puisse être maîtrisée avant que les symptômes n’évoluent vers une détresse respiratoire. La plupart des enfants peuvent reconnaître

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 15.14

Maison et environnement à l’épreuve des allergies

• Maintenir le taux d’humidité entre 30 et 50 % ; utiliser un déshumidicateur ou un climatiseur, si possible ; s’assurer que le climatiseur reste propre et exempt de moisissures ; n’utiliser ni vaporisateur ni humidicateur. • Utiliser des taies d’oreiller hypoallergènes ; placer matelas, sommiers, couettes et édredons dans une housse dotée d’une fermeture à glissière et à l’épreuve des allergènes. • Utiliser des matelas en mousse de caoutchouc ou en Dacron MD ainsi que des couvertures en tissu synthétique. • Laver la literie tous les 7 à 10 jours à l’eau chaude (au moins 54,4 °C). • Ne pas utiliser de baldaquin au-dessus du lit ; l’enfant ne doit pas dormir dans le lit de dessous d’un lit à deux étages. • Ne rien entreposer sous le lit ; conserver les vêtements dans une garde-robe dont la porte reste fermée. Limiter l’encombrement et les bibelots qui accumulent la poussière. • Utiliser des toiles plutôt que des stores ou des draperies pour les fenêtres. • Retirer tous les tapis ou passer l’aspirateur 1 ou 2 fois par semaine et faire porter un masque à l’enfant pendant cette opération ; s’assurer que l’enfant reste hors de la pièce pendant que l’aspirateur est passé et 30 minutes après. • Nettoyer et épousseter souvent les surfaces.

• Utiliser des meubles faciles à nettoyer (bois, plastique, vinyle ou cuir) ; éviter les meubles en rotin ou en osier. • Limiter l’exposition de l’enfant aux animaux ; garder les animaux à fourrure hors de la chambre à coucher. • Changer les vêtements de l’enfant après qu’il a joué dehors ; lui laver les cheveux tous les soirs s’il séjourne dehors et que l’indice de pollen est élevé. • Garder l’enfant à l’intérieur pendant la tonte du gazon ou la taille des haies et des arbres. • Garder portes et fenêtres fermées durant la saison de pollen ; lorsqu’il fait très chaud, utiliser un climatiseur avec ltre, si possible, ou un puricateur d’air à haute efcacité (HEPA) an d’éliminer les allergènes contenus dans l’air. • Laver la douche et les rideaux de douche avec une solution de nettoyage qui contient 5 % de javellisant. • Limiter ou empêcher l’exposition de l’enfant à la fumée de tabac ou de bois ; interdire le tabagisme dans la maison. • Éviter les odeurs ou les vaporisateurs (p. ex., les parfums, les désodorisants pour la maison, la poussière de craie à l’école, la peinture fraîche, les solutions de nettoyage).

• Faire nettoyer chaque année les conduites d’air et de chauffage ; changer ou nettoyer les ltres tous les mois ; couvrir les bouches de chaleur avec un matériau ltrant (p. ex., de la gaze) pour prévenir la circulation de poussière, en particulier pendant les périodes de chauffage.

• Éviter de faire du sous-sol une aire de jeu s’il est humide et utiliser un déshumidicateur dans un sous-sol humide.

• Enlever de la chambre de l’enfant tout ce qui n’est pas nécessaire : meubles rembourrés, animaux en peluche, jouets, etc.

• S’assurer que la salle de bains est ventilée ou qu’elle est munie d’une fenêtre pour en chasser l’humidité.

706

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

• Réparer les robinets qui dégouttent et qui fuient ; sceller les ssures autour des armoires et des comptoirs.

les signes avant-coureurs bien avant une crise (environ six heures avant) et ils peuvent mettre en œuvre une thérapie préventive. L’enfant doit toujours avoir accès au médicament de secours (BACA). Les signes observables par les parents incluent : • la rhinorrhée ; • la toux ; • une température subfébrile ; • de l’irritabilité ; • des démangeaisons (particulièrement sur le devant du cou) ; • de l’apathie ; • de l’anxiété ; • une perturbation du sommeil ; • un malaise abdominal ou une perte d’appétit ; • des changements notables dans les mesures de la fonction pulmonaire, relevés à l’aide d’un débitmètre de pointe.

Utilisation du débitmètre de pointe La famille doit se procurer un débitmètre de pointe et apprendre à l’utiliser pour surveiller l’asthme de l’enfant . En général, les enfants de six ans et plus sont capables d’utiliser avec succès un débitmètre de pointe. Il est cependant nécessaire de superviser les jeunes enfants pendant qu’ils apprennent à l’employer et de vérier périodiquement le degré de maîtrise de leur technique. L’enfant doit toujours utiliser le même débitmètre et apporter le sien à chaque visite de suivi. Il est recommandé de toujours recourir à la même marque de débitmètre, car les valeurs obtenues peuvent varier considérablement d’une marque à l’autre, et de noter systématiquement les mesures relevées sur un carnet. Ces informations sur la fonction pulmonaire permettent au médecin d’ajuster la dose de médicaments. L’utilisation du débitmètre de pointe permet d’obtenir des données objectives sur l’évolution et la gravité de l’asthme, et peut contribuer à réduire les exacerbations (Bidat, 2013b). Le matériel qu’utilise l’enfant doit être gardé absolument propre an de réduire le risque d’une contamination bactérienne ou fongique.

Utilisation des dispositifs d’inhalation de médicaments L’enfant qui utilise un nébuliseur, un aérosol-doseur, un DiskusMD ou un TurbuhalerMD pour prendre ses médicaments doit apprendre à utiliser ces appareils correctement. Il est important de choisir l’appareil qui convient le mieux à l’âge de l’enfant, de vérier la technique d’utilisation, de corriger et de revérier régulièrement la technique pour garantir une utilisation efcace (GINA, 2016) FIGURE 15.20.

Le TABLEAU 15.23 précise les consignes à donner à la famille concernant l’utilisation d’un aérosol-doseur. Chez les enfants de un à trois ans et ceux qui sont incapables de manipuler l’aérosol-doseur ou de coordonner leur respiration, un tube d’espacement ainsi qu’un masque de la bonne dimension devraient être utilisés. Le tube d’espacement prévient également les infections à levures dans la bouche lorsque des corticostéroïdes sont inhalés à l’aide d’un aérosol-doseur. L’enfant et les parents ont également besoin d’être mis en garde au sujet des effets indésirables des médicaments FIGURE 15.20 Un enfant utilise prescrits et des dangers de l’utilisation un aérosol-doseur avec un tube d’espaceabusive des bêtaagonistes. Ils doivent ment et un masque facial. savoir qu’il est important d’administrer ces médicaments au besoin et avec préCE QU’IL FAUT RETENIR caution, et non comme substituts à l’élimination dans l’environnement d’un allergène déclencheur. L’aérosol-doseur vaporise Il faut avertir les parents de ne pas acheter de le médicament directement médicaments en vente libre, car ceux-ci risquent dans les voies respiratoires ; d’augmenter la dose d’une substance pharmacol’enfant doit apprendre à logique qui peut être toxique pour l’enfant. respirer lentement et pro-

Plan d’action

Le professionnel de la santé assurant le suivi de l’enfant doit fournir un plan d’action écrit qui comporte une stratégie quotidienne préventive visant la maîtrise de l’asthme, des indications quant à la manière et au moment d’ajuster la thérapie de secours et de contrôle en cas de perte de maîtrise, ainsi que des directives précises concernant le recours à une consultation médicale urgente (GINA, 2016). Les trois zones du débitmètre de pointe ainsi que les médicaments de contrôle et de secours à utiliser en cas d’exacerbation de l’asthme doivent également être inclus dans le plan. Celui-ci doit être consulté pour les prises de décisions concernant le traitement de l’asthme à la maison et à l’école. L’inrmière peut assister l’enfant et la famille qui préparent euxmêmes leur plan d’action écrit en insistant sur l’importance de leur collaboration pour assurer le succès de ce plan.

fondément pour permettre l’acheminement du médicament aux voies respiratoires plus étroites.

Encadré 15.3W : Utilisation d’un débitmètre de pointe.

La Société canadienne de l’asthme offre un exemple de plan d’action qui peut être consulté sur leur site Web au www.asthma.ca.

Prévention Les facteurs déclencheurs de l’asthme doivent être évités. Les aliments auxquels l’enfant est allergique doivent être éliminés de son régime alimentaire, et les parents doivent être avisés de l’importance de lire les étiquettes des collations et des aliments préparés pour vérifier s’ils contiennent des allergènes. L’enfant doit être protégé d’une infection des voies respiratoires susceptible de déclencher une exacerbation ou d’aggraver son état asthmatique, en

Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

707

15

Enseignement à l’enfant et ses proches TABLEAU 15.23

Utilisation d’un aérosol-doseura

ÉTAPES POUR LA VÉRIFICATION DE LA QUANTITÉ DE MÉDICAMENT DANS LE RÉSERVOIR

ÉTAPES POUR L’UTILISATION DE L’AÉROSOL-DOSEUR

1. Si le réservoir est neuf, il est plein. 2. Si le réservoir a été utilisé plusieurs fois, il se peut qu’il soit vide. (Vérier l’étiquette du produit pour voir combien d’inhalations un réservoir contient et la date d’expiration.) 3. La façon la plus précise de déterminer le nombre de doses qui restent dans un aérosol-doseur consiste à prendre en note chaque activation et à les compter au fur et à mesure. 4. Bien des inhalateurs à poudre sèche ont un dispositif pour compter les doses ou un indicateur de dose sur le réservoir an que l’utilisateur puisse déterminer quand le réservoir est vide.

1. 2. 3. 4.

Enlever le capuchon et tenir l’aérosol-doseur verticalement. Bien agiter l’aérosol-doseur. Pencher légèrement la tête vers l’arrière et expirer lentement. En maintenant l’aérosol-doseur bien droit en position verticale : • positionner l’embout à environ 3 ou 4 cm de la bouche ;

5.

6. 7. 8. 9.

• ou insérer l’embout dans un tube d’espacement (cette méthode est recommandée pour les jeunes enfants et pour ceux qui prennent des corticostéroïdes). Inspirer lentement, à environ un tiers de l’inspiration, appuyer fermement sur l’aérosol-doseur pour libérer le médicament (soit dans le tube d’espacement, soit dans la bouche), et continuer d’inspirer lentement (environ 3 à 5 secondes). Relâcher la pression sur le réservoir. Retenir son soufe pendant au moins 5 à 10 secondes pour permettre au médicament inhalé de se rendre profondément dans les poumons. Retirer l’aérosol-doseur et expirer lentement par le nez. Attendre 30 à 60 secondes entre 2 bouffées (si d’autres bouffées sont prescrites ou nécessaires). Pour réduire les risques d’apparition d’une candidose buccale locale et d’enrouement de la gorge, procéder à l’hygiène buccale (rincer la bouche avec de l’eau, boire de l’eau ou se brosser les dents) après l’inhalation de corticostéroïdes.

a Certains

inhalateurs à poudre sèche exigent une technique d’inhalation différente. Pour utiliser ces inhalateurs, il est important de fermer la bouche hermétiquement autour de l’embout et d’inhaler rapidement et profondément. Sources : Adapté de Association pulmonaire du Canada (2016) ; ATS (2014) ; NHLBI (2007).

particulier lorsqu’il s’agit d’un jeune enfant dont les voies respiratoires sont mécaniquement plus petites et plus sensibles. Il est recommandé que l’enfant souffrant d’asthme persistant reçoive le vaccin annuel contre la grippe (SCP, 2015c). Il faut enseigner à l’enfant les exercices respiratoires ainsi que la respiration contrôlée, et l’encourager à les pratiquer. L’inrmière doit fournir de l’information concernant les activités qui favorisent la respiration diaphragmatique, l’expansion des ancs et l’amélioration des mouvements de la cage thoracique. Des techniques de jeu peuvent être enseignées aux enfants plus jeunes an d’accroître leur temps d’expiration et d’augmenter leur pression expiratoire : soufer sur une table avec des boules de coton ou des balles de tennis de table, soufer sur un moulinet, soufer des bulles ou empêcher un papier-mouchoir de tomber en le soufant contre un mur.

Autonomie Les programmes d’autosurveillance et d’autosoins sont importants pour aider l’enfant et la famille à s’adapter à la maladie. La plupart des programmes d’autosoins pour les enfants asthmatiques transmettent plusieurs principes importants : 1. L’asthme est une maladie commune dont le soulagement repose sur la pharmacothérapie, la maîtrise de l’environnement, l’accès à de

708

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

l’information adéquate et l’acquisition des compétences appropriées pour l’application du traitement. 2. Il est beaucoup plus facile de prévenir que de traiter une exacerbation d’asthme, et l’adhésion au plan thérapeutique est nécessaire pour prévenir les exacerbations. 3. L’enfant asthmatique peut vivre une vie pleine et active. Les camps spécialisés pour enfants asthmatiques constituent pour l’enfant une occasion de s’adonner à des activités physiques tout en apprenant à connaître sa maladie dans un environnement contrôlé, avec des pairs et des professionnels de la santé. Il arrive souvent que les enfants asthmatiques qui participent à ces camps connaissent une amélioration de leurs compétences dans la gestion autonome de leur maladie.

Soigner une crise d’asthme aiguë L’enfant admis à l’hôpital pour une exacerbation d’asthme grave est malade, anxieux et ressent de l’inconfort. La progression ou la résorption du status asthmaticus est variable. Une observation et une évaluation constantes sont d’une grande importance. L’enfant qui reçoit un bêtaagoniste ou des

corticostéroïdes doit faire l’objet d’une surveillance attentive et continue visant à soulager la détresse respiratoire et à détecter tout signe d’effet indésirable ou de toxicité. Il faut souvent limiter la consommation orale de liquides durant la phase aiguë et maintenir une hydratation adéquate par un soluté I.V.

B

A

En cas d’exacerbation, il se peut que l’enfant assez âgé pour s’asseoir soit plus à l’aise debout, assis bien droit ou légèrement penché vers l’avant FIGURE 15.21. Si c’est possible, l’inrmière communique avec l’enfant de manière à ce qu’il puisse répondre en quelques mots seulement an d’éviter qu’il ne se fatigue en parlant, étant donné son état d’essoufement. L’enfant souffrant d’asthme aigu est craintif et anxieux. La présence calme et efcace d’une inrmière aide à le rassurer et à lui communiquer le fait qu’il est en sécurité et qu’il est pris en charge durant ce moment stressant FIGURE 15.22. Il est important d’expliquer à l’enfant qu’il ne sera pas laissé seul et que ses parents peuvent rester avec lui. Les parents ont besoin d’être rassurés et informés de l’état de santé de leur enfant ainsi que des traitements qu’il reçoit. Ils peuvent croire qu’ils ont d’une façon ou d’une autre contribué à l’état de l’enfant ou qu’ils auraient pu prévenir l’exacerbation. Le fait de les rassurer au sujet des efforts qu’ils ont déployés pour leur enfant et de leurs capacités parentales peut aider à soulager leur stress et, de ce fait, celui de l’enfant.

Soutenir l’enfant ou l’adolescent et la famille L’inrmière qui travaille avec l’enfant asthmatique peut offrir son soutien de manières variées. Il arrive souvent que l’enfant exprime sa frustration parce que ses exacerbations interfèrent avec ses activités quotidiennes et sa vie sociale. Il a besoin d’être informé sur ce qu’il faut faire pour prévenir une exacerbation d’asthme. Il a également besoin d’être rassuré par l’équipe soignante quant à sa capacité d’apprendre à maîtriser son asthme et à s’y adapter pour vivre une vie normale. Les facteurs psychologiques et émotionnels ont des répercussions importantes sur l’asthme et sur sa gravité . L’enfant qui vit une situation familiale perturbée (divorce, séparation, violence, conits concernant la garde des enfants) peut ne pas respecter sa pharmacothérapie quotidienne en plus de présenter un risque plus élevé de non-adhésion au traitement en raison de la négligence des adultes qui ont la responsabilité d’en prendre soin. Il arrive, dans certains cas, que l’adolescent soit responsable d’autres frères et sœurs, notamment dans les familles reconstituées, et qu’il néglige ses propres besoins en matière de santé. Il est approprié de guider l’enfant ou l’adolescent

FIGURE 15.21 A L’enfant asthmatique peut prendre un traitement en aérosol nébulisé avec un masque. B Il peut aussi utiliser un embout buccal.

vers le counseling dans les cas où sa vie peut être mise en danger ou lorsque le régime thérapeutique contre l’asthme est abandonné en raison de situations de crise dans sa vie. L’adolescent asthmatique qui éprouve de la difculté avec son identité personnelle et son image corporelle considère souvent la maladie comme une condition qui va disparaître, spécialement s’il y a de longs intervalles entre les épisodes symptomatiques. Il risque, pour cette raison, d’abandonner sa thérapie pharmacologique.

15

L’adaptation à court et à long terme de l’enfant à l’asthme dépend souvent FIGURE 15.22 L’inrmière joue de l’acceptation de la maladie par la un rôle de premier plan pour soulager l’anxiété famille. La tâche de vivre au quotidien et offrir du soutien à l’enfant hospitalisé pour avec l’enfant atteint repose sur la colune crise d’asthme. laboration de la famille entière. Parmi les éléments perturbateurs gurent les crises périodiques, la menace constante d’une crise qui exige la vigilance parentale, les nuits blanches et les visites fréquentes chez le médecin, à l’urgence ou à l’hôpital. À travers tous ces stress, les parents sont encouragés à favoriser une vie aussi normale ALERTE CLINIQUE que possible pour leur enfant. Des programmes psychoéducatifs qui comportent une thérapie Il est important de prêter familiale permettent un meilleur ajustement de attention à l’enfant et à l’adolesl’enfant à sa maladie et améliorent la perception cent qui montrent des signes de des parents de leur efcacité dans la gestion de dépression. Plusieurs adolesl’asthme. Une thérapie familiale peut également cents traversent une phase aider à améliorer l’état de l’enfant asthmatique. de non-adhésion à la thérapie.

Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

709

15.7.3

17 L’iléus méconial est aussi présenté dans le cha­ pitre 17, Troubles liés au système gastro-intestinal.

Fibrose kystique

La brose kystique (FK) est une maladie héréditaire récessive autosomique. L’enfant affecté hérite du gène défectueux des deux parents. Au Canada, environ 1 personne sur 25 est porteuse d’une version défectueuse du gène responsable (Fibrose kystique Canada, 2017e). Cette maladie multisystémique touche principalement les poumons et l’appareil digestif. La FK a des effets dévastateurs sur les poumons et provoque des troubles respiratoires dont la gravité augmente avec le temps. Dans l’appareil digestif, la FK rend très difciles la digestion des aliments ainsi que l’absorption des vitamines et des éléments nutritifs.

Épidémiologie Au Canada, 1 enfant sur 3 600 naît avec la FK. Environ 59,2 % des cas de FK sont diagnostiqués avant la première année de vie, et 90 % le sont au cours des 10 premières années. Les enfants atteints de cette maladie survivaient auparavant jusqu’à l’âge de la maternelle, alors que maintenant l’âge médian de la population atteinte est estimé à 52,1 ans ; actuellement, 60,5 % des Canadiens atteints de la FK ont 18 ans et plus (Fibrose kystique Canada, 2015, 2017e). Une étude a démontré que les enfants diagnostiqués avec la FK dès la naissance ont moins d’infections pulmonaires, une réduction dans le nombre d’hospitalisations et un meilleur état nutritionnel (Fibrose kystique Canada, 2016b).

Étiologie et physiopathologie Plusieurs éléments cliniques caractérisent la FK : augmentation de la viscosité des sécrétions des glandes muqueuses, élévation marquée des électrolytes de la sueur, augmentation de plusieurs composantes organiques et enzymatiques de la salive, et anomalies du fonctionnement du système nerveux autonome. Même si le sodium est aussi affecté que le chlorure, le défaut semble résulter principalement d’un mouvement anormal du chlorure. La protéine CFTR (cystic brosis transmembrane regulator) semble fonctionner comme un canal pour le chlorure. Chez l’enfant atteint de FK, la sécrétion pancréatique de bicarbonate et de chlorure est réduite, tandis que la teneur en sodium et en chlorure est plus élevée dans la salive et la sueur. Cette caractéristique constitue la base du test diagnostique de la sueur. Cette anomalie des électrolytes dans la sueur est présente dès la naissance et le demeure à vie, et elle n’est pas associée à la gravité de la maladie ni à l’ampleur des répercussions sur les autres organes. Le principal facteur, et celui qui est responsable de nombreuses manifestations cliniques de la maladie, est une obstruction mécanique causée

710

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

par une augmentation de la viscosité des sécrétions des glandes muqueuses FIGURE 15.23. Au lieu de former une sécrétion mince et uide, les glandes muqueuses sécrètent une mucoprotéine épaisse qui s’accumule et cause leur dilatation. Les petits passages dans les organes comme le pancréas et les bronchioles s’obstruent à mesure que les sécrétions précipitent ou coagulent pour former des concrétions dans les glandes et les canaux. La toute première manifestation postnatale de la FK est un iléus méconial chez le nouveau-né au cours duquel l’intestin grêle est bloqué par un méconium mucilagineux épais, pâteux et tenace 17 . Ces sécrétions épaisses bloquent les canaux pancréatiques, ce qui entraîne éventuellement une brose pancréatique. Parce qu’il empêche des enzymes pancréatiques essentielles d’atteindre le duodénum, ce blocage provoque une altération marquée de la digestion et de l’absorption des nutriments qui cause des selles volumineuses et spumeuses en raison des gras non digérés (stéatorrhée), et malodorantes en raison des protéines en putréfaction (azotorrhée). La fonction endocrine du pancréas reste souvent inchangée parce que les îlots de Langerhans sont normaux, quoique leur nombre puisse avoir diminué avec la progression de la fibrose pancréatique.

Complications Le diabète associé à la brose kystique est la complication endocrine la plus fréquente de la FK, touchant 9 % des enfants âgés de 5 à 9 ans, 26 % des jeunes de 10 à 20 ans, et plus de 50 % des personnes dans la trentaine (Brennan et Beynon, 2015). Cette complication se manifeste surtout lors du vieillissement, et 40 à 60 % des adultes brokystiques en sont atteints (Fibrose kystique Canada, 2017a). Le dépistage du diabète avec une épreuve d’hyperglycémie provoquée par voie orale (HPO) est recommandé annuellement pour tous les enfants atteints de FK à partir de l’âge de 10 ans. L’HPO détecte le diabète associé à la brose kystique avec une plus grande sensibilité que le test aléatoire de glucose ou d’hémoglobine A1c (HbA1c). Le traitement de première intention est l’insuline (Kim, 2016). Le diabète chez les personnes atteintes de FK se manifeste par des composantes du diabète du type 1 et du type 2, c’est-à-dire une insufsance d’insuline et une résistance à l’insuline. Le mucus épais et collant provoque des cicatrices dans le pancréas ; la cicatrisation empêche le pancréas de produire des quantités normales d’insuline (comme pour le diabète de type 1). En outre, comme pour le diabète de type 2, ces personnes peuvent ne pas répondre à l’insuline adéquatement, surtout lorsqu’elles sont malades, qu’elles prennent des

stéroïdes ou sont enceintes (Brunzell, Hardin et Kogler, 2015). Dans le foie, il est fréquent d’observer de la brose et une obstruction localisée des voies biliaires, dont l’ampleur progresse avec le temps. Les signes de maladie hépatique apparaissent généralement avant ou au moment de la puberté. La jaunisse ne se manifeste généralement pas chez les adolescents brokystiques (Fibrose kystique Canada, 2017d). Le prolapsus du rectum est une complication gastro-intestinale commune de la FK. Il survient chez le nourrisson et l’enfant, et il est associé à des selles abondantes et volumineuses, à la malnutrition et à une augmentation de la pression intra-abdominale secondaire à une toux paroxystique. L’enfant atteint, quel que soit son âge, est susceptible de souffrir d’une occlusion intestinale partielle ou complète causée par des matières fécales épaisses ou coincées, un état appelé syndrome d’occlusion intestinale distale. Presque tous les enfants atteints de FK subissent des complications pulmonaires, mais l’apparition et l’étendue de celles-ci sont variables. Les symptômes sont dus à la stagnation du mucus dans les voies respiratoires, laquelle produit un environnement favorable à la croissance et à la colonisation bactérienne menant à la destruction du tissu pulmonaire. Les sécrétions anormalement visqueuses et tenaces sont difciles à expectorer et obstruent graduellement les bronches et les bronchioles, produisant des zones éparses de bronchiectasie, d’atélectasie et d’hyperination. La fonction reproductrice est perturbée chez les personnes des deux sexes atteints de FK. Chez la femme, les trompes de Fallope et les ovaires sont normaux, mais la fertilité peut être inhibée par la présence d’une glaire cervicale hautement visqueuse qui complique le passage des spermatozoïdes et rend la fécondation plus difcile. Près de 95 % des hommes adultes sont stériles en raison du blocage du canal déférent, qui empêche le passage des spermatozoïdes (Fibrose kystique Canada, 2014). La croissance et le développement de l’enfant atteint d’une forme modérée à grave de la FK sont souvent entravés. La croissance physique peut être limitée en raison d’une moins grande absorption des nutriments, parmi lesquels les vitamines et les gras, d’une augmentation des besoins en oxygène pour la fonction pulmonaire et d’un retard de maturation osseuse. Le schéma habituel consiste en un retard de croissance (développement insufsant) associé à une perte de poids plus importante en dépit d’un appétit accru, ainsi qu’à une détérioration graduelle du système respiratoire.

FIGURE 15.23 dans la brose kystique

Divers effets d’un mauvais fonctionnement des glandes exocrines

Manifestations cliniques

15

Des taux constants anormalement élevés de sodium et de chlorure dans la sueur constituent une caractéristique propre à la FK. Les parents rapportent que leur enfant a un goût salé lorsqu’ils l’embrassent. Les manifestations cliniques de la FK sont énumérées dans le TABLEAU 15.24. L’iléus méconial, qui constitue la première manifestation postnatale de la FK chez le nouveau-né, est suivi de manifestations gastro-intestinales et pulmonaires pouvant varier selon la progression de la maladie.

Diagnostic Selon l’approche classique, le diagnostic de FK était fondé sur un résultat positif au test de la sueur, l’absence d’enzymes pancréatiques, des radiographies, la présence d’une maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC) et les antécédents familiaux. Des techniques diagnostiques permettent maintenant de diagnostiquer la FK tôt chez le

Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

711

TABLEAU 15.24

Manifestations cliniques de la brose kystique

ILÉUS MÉCONIAL

MANIFESTATIONS GASTRO-INTESTINALES

MANIFESTATIONS PULMONAIRES

• Vomissements

• Selles volumineuses, molles, spumeuses, très malodorantes

• Signes initiaux

• Incapacité à déféquer • Déshydratation rapide

• Appétit vorace (au début de la maladie) et perte d’appétit (progression de la maladie) • Perte de poids

– Toux paroxystique

• Retard de croissance

– Signes évidents d’emphysème obstructif et grappes d’atélectasie

• Distension abdominale • Extrémités maigres

– Thorax surgoné en forme de tonneau

• Signes de décience en vitamines liposolubles : A, D, E et K

– Cyanose

nourrisson, de sorte qu’il est possible de mettre en place des traitements pour améliorer ses chances globales de survie ainsi que sa qualité de vie. En plus du test de la sueur et des facteurs énumérés plus haut, le diagnostic peut être conrmé par l’un ou l’autre des moyens suivants : le dépistage néonatal, l’identification de gènes mutants dans l’acide désoxyribonucléique (ADN) et une mesure anormale de la différence de potentiel nasale.

Qu’est-ce qui différencie la bronchiectasie de l’atélectasie ?

712

Partie 6

Le test de la sueur (iontophorèse à la pilocarpine) consiste à stimuler la production de sueur en appliquant de la chaleur à l’aide d’un appareil spécial, à recueillir la sueur sur un papier buvard et à analyser le taux d’électrolytes . Aucune préparation n’est requise pour le test. Toutefois, il est déconseillé d’appliquer de la crème ou des lotions sur la peau dans les 24 heures qui précèdent le test. Deux échantillons distincts sont prélevés chaque fois an d’assurer la abilité du test. À partir de 6 mois, la teneur normale de chlorure dans la sueur est de moins de 40 mEq/L. Une concentration supérieure à 40 mEq/L suggère fortement la présence de FK chez le nourrisson de moins de 3 mois, et une valeur du chlorure supérieure à 60 mEq/L sur 2 échantillons conrme le diagnostic (Rock, Makholm et Eickhoff, 2014). Dans certaines situations, le test de la sueur peut être remplacé par une analyse de l’ADN. Les mutations du gène CFTR connues pour causer la FK permettent de prédire avec un haut degré de certitude la présence de la maladie ; cependant, plusieurs autres mutations peuvent également être présentes et détectées par une analyse de l’ADN. La radiographie pulmonaire peut, quant à elle, révéler une atélectasie en

Troubles liés aux systèmes

• Progression de la maladie

• Peau jaunâtre

• Anémie

éactivation des connaissances

– Toux sèche et non productive • Signes éventuels – Augmentation de la dyspnée

• Pertes tissulaires marquées

Encadré 15.4W : Test de la sueur – Valeurs de références.

– Sibilance

– Hippocratisme digital – Récurrence de bronchite et de bronchopneumonie

grappes caractéristique d’un emphysème obstructif. Les épreuves fonctionnelles respiratoires sont des indicateurs ables de la fonction pulmonaire et fournissent des preuves d’une fonction anormale et réduite des voies respiratoires. L’analyse des enzymes et celle du taux de gras dans les selles comptent parmi les autres outils diagnostiques. L’analyse des selles requiert un rapport exact de l’apport alimentaire sur une période de 72 heures et un échantillon prélevé durant ce temps. L’iléus méconial peut être diagnostiqué grâce à un examen radiologique qui comprend un lavement baryté.

Approche thérapeutique Jusqu’à présent, il n’existe aucun moyen de guérir la maladie, mais d’énormes progrès sont accomplis dans le domaine de la recherche et des traitements. L’amélioration de l’espérance de vie au cours des deux dernières décennies est attribuable en grande partie à l’antibiothérapie et à un traitement amélioré sur les plans nutritionnel et respiratoire. Les objectifs du traitement thérapeutique de la FK sont : 1. de prévenir ou de réduire les complications pulmonaires ; 2. d’assurer une nutrition adéquate pour la croissance ; 3. d’encourager une act i vi t é phys i que appropriée ; 4. de promouvoir une qualité de vie raisonnable pour l’enfant et sa famille ; 5. de prévenir une infection chronique aux Pseudomonas aeruginosa.

L’atteinte de ces objectifs de traitement exige une approche multidisciplinaire.

Traitement des problèmes pulmonaires L’approche thérapeutique de la FK en présence de problèmes pulmonaires vise la prévention et le traitement de l’infection pulmonaire par l’amélioration de la ventilation, l’évacuation des sécrétions mucopurulentes et l’administration d’agents antimicrobiens . Bien des enfants manifestent des symptômes respiratoires à partir de l’âge de trois ans. Chez l’enfant atteint de FK, la grande quantité de sécrétions visqueuses contribuent à augmenter le risque d’infections pulmonaires. Il est essentiel de soutenir les enfants et leurs familles an d’établir de saines habitudes de vie qui favorisent une nutrition optimale et la croissance, ainsi qu’un mode de vie actif pour promouvoir la santé pulmonaire. Il s’agit d’une phase cruciale de croissance et de développement. De plus, c’est une période qui comporte plusieurs dés pouvant entraver la prestation des soins ; par exemple, à cet âge, il peut être plus difcile d’obtenir l’adhésion de l’enfant aux thérapies (Lahiri, Hempstead, Brady et al., 2016). Les infections pulmonaires récidivantes provoquent les plus grands dommages aux petites voies respiratoires, ce qui entraîne une bronchiectasie. Les agents pathogènes les plus fréquemment responsables des infections pulmonaires sont notamment P. aeruginosa, Burkholderia cepacia, S. aureus, H. inuenzae, Escherichia coli et Klebsiella pneumoniae. Les enfants atteints de FK sont particulièrement vulnérables aux agents pathogènes P. aeruginosa et B. cepacia, et les infections à ces micro-organismes sont difciles à traiter. De plus, les enfants affectés par une colonisation chronique de ces micro-organismes ont un taux de survie moins élevé que ceux qui en sont exempts. Récemment, la colonisation et l’infection par S. aureus résistant à la méthicilline (SARM) se sont révélées des facteurs critiques dans l’infection pulmonaire et l’altération de la fonction pulmonaire. Les personnes atteintes par le SARM requièrent une hospitalisation prolongée, de multiples antibiothérapies et une surveillance des effets indésirables. Une étude a démontré l’importance d’inclure un traitement topique et des mesures de décolonisation de l’environnement, en plus d’antibiotiques systémiques pour prévenir la réinfection. D’autres recherches sont nécessaires pour déterminer le régime et la durée du traitement optimal pour éviter un nouveau diagnostic de SARM chez les personnes atteintes de FK (Vallières, Rendall, Moore et al., 2016). La colonisation fongique par Candida ou Aspergillus dans les voies respiratoires est également fréquente. Les mucolytiques, les bronchodilatateurs, les stéroïdes et les

antibiotiques sont utilisés pour traiter la maladie pulmonaire chez les personnes atteintes de FK (Sharma, 2017a).

Dégagement des voies respiratoires Le dégagement des voies respiratoires grâce à plusieurs techniques constitue un élément très important des soins. Effectué en moyenne deux fois par jour, au lever et en soirée, ou plus fréquemment si nécessaire, en particulier en présence d’une infection pulmonaire, ce traitement contribue à prévenir l’accumulation de mucus épais dans les poumons, à réduire le nombre d’infections pulmonaires et à améliorer la fonction pulmonaire chez les enfants atteints de fibrose kystique (Fibrose kystique Canada, 2017b). La physiothérapie respiratoire, aussi connue sous le nom de drainage postural avec percussions (clapping) 14 ou de kinésithérapie respiratoire, permet de drainer le mucus de différentes parties des poumons en plaçant l’enfant dans diverses positions. Des exercices de respiration profonde et d’expiration prolongée sont souvent ajoutés. Les normes de soins ont été modiées et recommandent dorénavant des positions dans lesquelles la tête n’est pas plus basse que le reste du corps (Fibrose kystique Canada, 2017b). Il a été observé que l’état des personnes atteintes de FK régresse lorsqu’il y a interruption des séances de physiothérapie respiratoire classique. Par conséquent, et même si cela monopolise une partie du temps de l’enfant et de la famille, elle demeure la pierre angulaire de la thérapie pulmonaire.

Le site Web de Fibrose kystique Canada (www.brosekystique. ca) donne accès à plusieurs ressources, offre de l’information et divers conseils pour les personnes atteintes de brose kystique.

ALERTE CLINIQUE

Les enfants atteints de FK sont vulnérables aux microbes, dont certains peuvent causer de graves infections en plus d’être difciles à détruire avec des antibiotiques. Il est donc très important d’empêcher leur propagation. 14 Le drainage postural avec percussions est expliqué dans le chapitre 14, Techniques de soins.

La combinaison des techniques de dégagement des voies respiratoires, la fréquence des traitements et l’horaire à suivre pour la prise de certains médicaments sont établis par une équipe interdisciplinaire. En matière de physiothérapie respiratoire, les principales techniques de dégagement des voies respiratoires, détaillées dans le TABLEAU 15.25.

15

Exercice physique L’exercice physique est un ajout thérapeutique important à la physiothérapie respiratoire quotidienne. Le but ultime de l’exercice est d’accroître l’excrétion de mucus, de ralentir le déclin de la fonction pulmonaire (par l’accroissement de la capacité pulmonaire vitale, l’augmentation de la circulation sanguine pulmonaire et le maintien en santé du tissu pulmonaire), d’améliorer la condition physique, et de procurer un sentiment de bien-être ainsi qu’une amélioration de l’estime de soi et de la qualité de vie. Les exercices cardiovasculaires, de renforcement et d’étirement forment les trois composantes d’un programme d’exercices équilibré. Il faut encourager tout exercice aérobique que l’enfant aime pratiquer.

Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

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TABLEAU 15.25

Techniques de dégagement des voies respiratoires chez l’enfant atteint de brose kystique

TECHNIQUE

DESCRIPTION

Cycle respiratoire actif

• Comprend un cycle de respiration contrôlée, des exercices d’expansion thoracique et la méthode d’expiration forcée ou prolongée. • Permet à l’air de pénétrer profondément dans les poumons, sous le mucus, qui sera ensuite expulsé lors de l’expiration prolongée.

Pression expiratoire positive (PEP)

• Respiration dans un masque ou un embout buccal relié à une valve antireux dotée d’une résistance. • Permet à la voie respiratoire, pendant l’exhalation, de rester ouverte en raison de la pression. • Force le mucus à remonter vers les voies respiratoires supérieures, d’où il sera expulsé.

Pression expiratoire positive (PEP) avec oscillations

• Respiration répétée dans un dispositif (FlutterMD, AcapellaMD, RC CornetMD ou QuakeMD) qui provoque une pression et des vibrations dans les voies respiratoires, aidant à éclaircir et à déloger le mucus FIGURE 15.24.

Dégagement des voies respira­ toires à l’aide d’un gilet

• Nouvelle technique qui consiste à utiliser un gilet doté d’un mécanisme qui produit des oscillations à haute fréquence sur la paroi thoracique.

Drainage autogène

• Se sert du ux expiratoire et de l’ajustement de la vitesse de l’expiration (d’un faible volume à un volume pulmonaire élevé). • Fait passer le mucus vers les voies respiratoires plus larges, d’où il peut être éliminé.

Source : Adapté de Fibrose kystique Canada (2017b). Introduction aux traitements. Repéré à www.brosekystique.ca/about­cf/vivre­avec­la­brose­kystique/introduction­aux­traitements.

Traitement par inhalation Les médicaments en aérosol ou nébulisés sont particulièrement efficaces, car ils peuvent s’inltrer profondément pour atteindre directement le tissu pulmonaire. Les bronchodilatateurs en inhalation ouvrent les bronches pour faciliter l’expectoration et sont administrés avant la physiothérapie respiratoire, lorsque l’enfant montre des signes d’une affection respiratoire réactionnelle ou de la sibilance. La DNase recombinante humaine, dont le nom générique est dornase alfa [PulmozymeMD], un médicament en aérosol qui réduit la viscosité du mucus et uidie les sécrétions bronchiques, est prescrite sur une base individuelle (Dentice et Elkins, 2016 ; Lahiri et al., 2016). Elle est bien tolérée et semble n’avoir aucun effet indésirable FIGURE 15.24 Dispositif majeur ; les réactions mineures sont une d’élimination du mucus FlutterMD altération de la voix et la laryngite. Ce médicament, administré quotidiennement à l’aide d’un nébuliseur avant ou après la physiothérapie respiratoire, a entraîné une amélioration des résultats de la spirométrie, des épreuves fonctionnelles respiratoires, des mesures de la dyspnée et de la sensation de bien-être. Des recherches démontrent que l’administration de 10 mL d’une solution saline hypertonique (entre 3 et 7 %) nébulisée 2 fois par jour réduit les épisodes d’infection pulmonaire, améliore la qualité de vie et diminue l’absentéisme scolaire (Reeves, Molloy, Pohl et al., 2012). L’horaire de la nébulisation par rapport aux techniques de dégagement des voies respiratoires

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Partie 6

Troubles liés aux systèmes

ne semble pas inuencer son efcacité (Elkins et Dentice, 2016).

Antibiothérapie Les infections pulmonaires sont traitées aussitôt qu’elles sont décelées. Chez les enfants atteints de FK, les manifestations cliniques caractéristiques d’une infection pulmonaire, soit la èvre, une tachypnée et une douleur thoracique, peuvent être absentes ; par conséquent, l’examen physique et une anamnèse minutieuse sont essentiels. L’anorexie, une perte de poids et une réduction de l’activité permettent au professionnel de la santé de soupçonner une infection pulmonaire justiant le recours à une antibiothérapie. Les antibiotiques en aérosol comme la tobramycine (TOBIMD), l’aztréonam et le Coly-MycinMD sont bénéques pour ceux qui ont de fréquentes exacerbations pulmonaires et peuvent être administrés en cycles de 2 ou 4 semaines pour prévenir la colonisation par P. aeruginosa (Quon, Gross et Ramsey, 2014). Il n’est pas rare que l’enfant atteint de FK et hospitalisé reçoive de façon concomitante jusqu’à 2 ou 3 antibiotiques ainsi qu’un antifongique pour le traitement des infections pulmonaires. Il est bénéque d’utiliser un bronchodilatateur (p. ex., le VentolinMD) lors du traitement par nébuliseur avec un antibiotique pour permettre un meilleur passage des médicaments dans les voies respiratoires et pour prévenir la bronchoconstriction provoquée par l’effet irritant des antibiotiques (Fournier, 2015). Les antibiotiques administrés à domicile par voie I.V. peuvent être une solution de rechange à l’hospitalisation. Un cathéter veineux central introduit par voie périphérique (CVCIVP) ou un cathéter à chambre implantable constituent des

options valables, car ils comportent un risque li­ mité de complications, réduisent les ponctions à l’aiguille pour les prélèvements sanguins et la perfusion d’antibiotiques, et permettent à l’enfant de continuer ses activités quotidiennes avec un minimum d’interruptions (Balaguer et González de Dios, 2015). Cependant, lorsque la fonction pulmonaire ne s’améliore pas à la suite de traite­ ments en consultation externe, l’hospitalisation peut être recommandée pour l’administration d’une antibiothérapie continue, des traitements de percussion et des techniques de dégagement des voies respiratoires vigoureuses.

Anti-inflammatoires Étant donné que les dom­ mages pulmonaires affectant les enfants atteints de FK semblent causés par le processus inam­ matoire qui entre en jeu en présence d’infections fréquentes, plusieurs études portant sur le recours aux corticostéroïdes ont été menées. Le traitement aux corticostéroïdes pendant des périodes prolongées a été associé à un retard de croissance (croissance linéaire), à des anomalies de la tolérance au glucose et à la formation de cataractes (Cheng, Ashby et Smyth, 2015). Les anti­inflammatoires comme l’ibuprofène prennent de plus en plus d’importance dans le traitement de la FK, mais il est essentiel d’exer­ cer une surveillance attentive en raison de leurs effets indésirables possibles (hémorragie digestive). Oxygénothérapie De l’oxygène est administré à l’enfant en crise aiguë, mais la prudence est de mise, car de nombreux enfants atteints de FK font de la rétention chronique de dioxyde de carbone, et l’utilisation non supervisée d’oxygène peut se révéler dommageable 14 . Il est possible que des kystes bronchiques et de l’emphysème appa­ raissent à la suite d’inammations et d’infections récidivantes. Ces kystes peuvent se rompre et pro­ voquer un pneumothorax 1 . Traitement d’une hémoptysie La présence de lets de sang dans l’expectoration est habituellement associée à une augmentation de l’infection pulmo­ naire et n’exige souvent aucun traitement spéci­ que. Cependant, une hémoptysie plus importante ou prolongée peut être fatale pour l’enfant 2 . Parfois, le saignement peut être maîtrisé par l’arrêt des anti­inammatoires non stéroïdiens, l’arrêt tem­ poraire de la physiothérapie respiratoire, une anti­ biothérapie par voie I.V., une transfusion de sang si les pertes sont élevées, l’administration de vasopressine (aussi appelée pitressine) ou l’admi­ nistration d’acide tranexamique et la correction de toute anomalie de la coagulation avec de la vita­ mine K ou du plasma frais congelé (Stillwell et Kupfer, 2017). Si l’hémoptysie persiste et que l’en­ fant est instable, l’embolisation artérielle bronchique est recommandée. Les cas graves

peuvent nécessiter une lobectomie pulmonaire en dernier recours (Stillwell et Kupfer, 2017). Une détérioration importante de la fonction pulmonaire suit une hémoptysie (Hurley, Bhatt et Smyth, 2011).

Traitement des polypes nasaux Les polypes nasaux touchent de 10 à 50 % des enfants atteints de FK. La cause exacte est inconnue, mais il est fort probable que les allergies et les infections qui provoquent une inammation sont des facteurs favorisant leur apparition. Le traitement des polypes nasaux consiste en l’administration de corticostéroïdes par voie intranasale, d’antihis­ taminiques oraux ou d’un décongestionnant. Si ces mesures s’avèrent inefcaces, une polypecto­ mie pourrait être nécessaire.

Traitement des problèmes gastro-intestinaux Suppléments d’enzymes pancréatiques et de vitamines Dans la FK, un mucus épais bloque le conduit pancréatique et empêche les enzymes digestives d’atteindre l’estomac et l’intestin grêle, ce qui entraîne des difcultés à digérer les aliments et à absorber les substances nutritives. Le principal traitement pour l’insuffisance pancréatique consiste à remplacer les enzymes pancréatiques, lesquelles sont administrées avec les repas et les collations afin de s’assurer qu’elles sont mélangées avec des aliments dans le duodénum. Sans enzymes pancréatiques, l’enfant peut éprou­ ver des douleurs abdominales, des atulences ainsi que des selles fréquentes et volumineuses (Katkin, Baker et Baker, 2017). Les produits gas­ trorésistants préviennent la neutralisation des enzymes par les sucs gastriques, de sorte que l’ac­ tivation enzymatique peut se produire dans l’en­ vironnement alcalin de l’intestin grêle. La quantité d’enzymes est ajustée selon la gravité de l’insuf­ sance, la réponse de l’enfant à l’enzyme, le taux de croissance de l’enfant, l’atteinte d’une fré­ quence de 1 à 2 selles par jour et le type de traite­ ment que préconise le médecin. Habituellement, de 1 à 5 capsules sont administrées par repas, et une plus petite quantité à la collation. Les capsules peuvent être avalées entières ou être ouvertes, et leur contenu peut être saupoudré sur une petite quantité de nourriture qui sera consommée au début du repas. Les enzymes pancréatiques doivent être prises dans les 30 minutes précédant la consommation d’aliments. Les dragées gastro­ résistantes ne doivent pas être mâchées ni écra­ sées, puisque la destruction de l’enrobage gastrorésistant peut causer la désactivation des enzymes et l’excoriation de la muqueuse buccale. La prudence est de mise avec la forme en poudre, car l’inhalation de la poudre peut causer un bron­ chospasme aigu. Les enzymes peuvent être mélangées avec les céréales ou les fruits (p. ex., la compote de pommes). Comme l’absorption des vitamines Chapitre 15

14 L’oxygénothérapie est expliquée dans le chapitre 14, Techniques de soins.

ALERTES CLINIQUES 1 Les signes d’un pneumo­ thorax ne sont habituellement pas spéciques ; ils incluent la tachypnée, la tachycardie, la dyspnée, la pâleur et la cyanose. Une baisse subtile de la saturation en oxygène (SpO2) peut constituer un signe précoce de pneumothorax. 2 Une hémoptysie supérieure à 240 mL/24 h ou une hémoptysie récurrente de 100 mL/jour pendant 3 jours consécutifs indique un événement poten­ tiellement fatal et exige une attention immédiate (Simon, 2017 ; Stillwell et Kupfer, 2017).

Hémoptysie : Présence de sang dans les sécrétions des voies respiratoires.

Troubles liés au système respiratoire

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15

Prolapsus rectal : Protrusion des membranes rectales internes. Chez les enfants atteints de mucoviscidose, elle provient d’une augmentation du volume des selles, d’une malnutrition et d’une augmentation de la pression intra-abdominale provoquée par la toux.

liposolubles est réduite, il faut administrer les formes hydrosolubles de ces vitamines (A, D, E et K) en même temps que les enzymes. Lorsque l’enfant mange des aliments à haute teneur en gras, il est préférable de lui donner plus d’enzymes.

Régime alimentaire et allaitement L’enfant atteint de FK a besoin d’un régime alimentaire bien équilibré, hypercalorique et à teneur élevée en protéines en raison de la diminution de l’absorption intestinale. De fait, il a souvent besoin de consommer jusqu’à 150 % de l’apport quotidien recommandé pour répondre à ses besoins de croissance et maintenir un poids santé (Lahiri et al., 2016). Les mères qui préfèrent allaiter devraient continuer à le faire, quand c’est possible, tout en donnant un supplément d’enzymes à l’enfant et, lorsque nécessaire, en ajoutant à ce régime une préparation lactée hypercalorique pour nourrissons. Pour le nourrisson non allaité, les préparations commerciales sont habituellement adéquates, bien qu’il arrive fréquemment qu’une préparation partiellement hydrolysée avec des triglycérides à chaîne moyenne (p. ex., Pregestimil MD, Alimentum MD) puisse être recommandée. Une croissance insufsante en dépit d’un soutien nutritionnel adéquat peut être un signe de détérioration de l’état pulmonaire. L’enfant atteint de FK peut traverser fréquemment des périodes d’anorexie en raison des quantités considérables de mucus produit et expectoré, d’une toux persistante, des effets des médicaments, de la fatigue et de perturbations du sommeil. Il peut recevoir une alimentation supplémentaire soit par voie parentérale, soit par nutrition entérale nocturne grâce à une sonde gastro-intestinale ou à une sonde de gastrostomie percutanée endoscopique an de lui permettre d’accumuler des réserves nutritionnelles s’il s’est avéré incapable de maintenir son poids dans le passé.

Syndrome d’occlusion distale de l’intestin : Obstruction des intestins par une accumulation de selles épaisses plus haut dans les intestins.

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Traitement du syndrome d’occlusion distale Le syndrome d’occlusion distale de l’intestin peut se produire à tout âge. La constipation est souvent le résultat d’une combinaison de malabsorption, que celle-ci relève d’un mauvais dosage d’enzymes pancréatiques ou du fait que l’enfant ne prend pas d’enzymes, d’une motilité intestinale réduite et de sécrétions intestinales anormalement visqueuses. Ces problèmes n’exigent habituellement pas d’intervention chirurgicale et peuvent être traités avec du GoLYTELYMD ou du ColyteMD (solutions osmotiques administrées par voie orale ou à l’aide d’une sonde nasogastrique), un autre laxatif, un émollient fécal ou du diatrizoate de méglumine (GastrogranMD) administré par voie rectale. Pour prévenir le syndrome d’occlusion distale de l’intestin, il est recommandé de manger des repas réguliers, de prendre ses enzymes et de boire beaucoup de liquides (Fibrose kystique Canada, 2017f).

Troubles liés aux systèmes

Traitement du prolapsus rectal Le prolapsus rectal se produit chez environ 10 à 20 % des enfants atteints de FK (Shalkow, 2016). Le premier épisode de prolapsus rectal est terriant tant pour les parents que pour l’enfant. Sa résorption exige habituellement une intervention immédiate, ce qui consiste à guider simplement le rectum vers sa position normale à l’aide d’un doigt recouvert d’un gant lubrié. Le traitement à long terme nécessite de tenter de réduire le volume des selles quotidiennes grâce à des enzymes de substitution. Traitement du reux gastro-œsophagien L’enfant atteint de FK éprouve souvent un reflux gastro-œsophagien (RGO) passager ou chronique qui doit être traité à l’aide d’un antagoniste approprié des récepteurs de l’histamine et avec un médicament prokinétique, des modications au régime alimentaire et le maintien de la position verticale après l’allaitement ou les repas. Une étude chez des patients atteints de FK a montré que le RGO était associé à une diminution de la fonction pulmonaire, à une acquisition plus précoce de P. aeruginosa et de S. aureus, à des exacerbations plus fréquentes et à des modications de l’inammation des voies respiratoires (Robinson et DiMango, 2014).

Traitement des problèmes endocriniens Maîtrise du diabète associé à la brose kystique Maîtriser le diabète associé à la FK est un élément crucial du traitement thérapeutique de l’enfant atteint de cette maladie. Ce type de diabète consiste en la combinaison d’une insulinorésistance et d’une insulinodécience associées à une homéostasie instable du glucose en présence d’un traitement pour une infection aiguë des poumons. L’enfant requiert donc une surveillance attentive de sa glycémie, le dosage trimestriel de l’hémoglobine glyquée (HbA1c), l’injection d’insuline, ainsi qu’un régime alimentaire et un programme d’exercices. L’enfant ayant la FK peut présenter un risque accru de problèmes de gestion du glucose en fonction de la réduction de l’absorption des nutriments, de l’anorexie et de la gravité de la maladie pulmonaire. La prévalence du diabète associé à la FK augmente avec l’âge, et les taux de morbidité et de mortalité parmi les enfants atteints sont supérieurs à ceux observés chez les enfants qui n’ont pas cette maladie. Des complications microvasculaires comme la rétinopathie et la néphropathie peuvent aussi survenir, mais la rétinopathie survient surtout après 12 à 15 ans de diabète (Ghaddhab, 2016). La cétoacidose est quant à elle rarement rapportée chez les enfants souffrant de diabète associé à la FK.

Santé osseuse La santé osseuse est une préoccupation chez les enfants atteints de FK. En raison de l’insufsance pancréatique et de la malabsorption de vitamine D (qui aide à l’absorption de

calcium), ainsi que de l’utilisation chronique de stéroïdes, ces enfants présentent un risque potentiel d’avoir une croissance osseuse qui n’est pas optimale. Au cours de l’évaluation de l’état de santé de l’enfant de huit ans et plus, il est important de vérier sa santé osseuse en procédant à une révision des antécédents médicaux ainsi qu’à une évaluation de la densité osseuse an de détecter et de prévenir l’ostéoporose et l’ostéopénie 23 . L’administration d’hormones de croissance (somatotrophine [Nutropin MD]) comme complément nutritionnel permet d’atteindre une croissance optimale (taille, poids et masse tissulaire). Par contre, aucune modication signicative de la qualité de vie, de l’état clinique ou des effets indésirables n’a été observée. D’autres essais aléatoires contrôlés évaluant le traitement à l’hormone de croissance sont nécessaires avant qu’une utilisation systématique soit recommandée (Thaker, Haagensen, Carter et al., 2015).

Pronostic Les transplantations pulmonaires, cardiaques, pancréatiques et hépatiques ont augmenté le taux de survie chez certaines personnes atteintes de FK. La transplantation cœur-poumons et pulmonaire bilatérale a été effectuée avec succès chez des enfants souffrant d’une maladie vasculaire pulmonaire avancée et d’hypoxie. Les obstacles à cette intervention sont liés aux problèmes de disponibilité des organes compatibles, aux complications chirurgicales, aux infections pulmonaires et à la récurrence de la

bronchiolite obstructive, ce qui réduit la fonction respiratoire du poumon transplanté. En dépit de progrès considérables et d’une récente poussée de nouvelles modalités de traitement, la FK reste une maladie progressive incurable. L’atteinte pulmonaire détermine ultimement le résultat pour la personne souffrant de la maladie, car la décience d’enzymes pancréatiques est moins problématique en présence d’une nutrition adéquate. Les approches pharmacothérapeutiques (p. ex., les antibiothérapies par inhalation et les agents améliorant les caractéristiques rhéologiques des sécrétions bronchiques) ainsi que les recherches et les développements sur les médicaments connus sous la catégorie de modulateurs de la protéine CFTR responsable de la FK, comme l’ORKAMBIMD (lumacaftor/ivacaftor), ont contribué à augmenter l’espérance de vie et la qualité de vie chez la population atteinte de brose kystique (Durupt, Nove Josserand et Durieu, 2014). L’ORKAMBI est un nouveau traitement ciblant la cause sous-jacente de la FK chez les porteurs de la mutation delta F508 du gène CFTR. Les données tirées d’essais cliniques ont montré que l’ORKAMBI pouvait améliorer la fonction des poumons et réduire le nombre d’exacerbations de la maladie pulmonaire qui entraînent l’hospitalisation (Fibrose kystique Canada, 2016a). Avec les avancées technologiques, parents et adolescents ont maintenant comme dé d’établir des objectifs pour l’avenir. Concurremment, ils font face à une morbidité accrue et à des taux plus élevés de complications associées à la FK avec le vieillissement.

23 L’ostéoporose et l’ostéopénie sont présentées dans le chapitre 23, Troubles liés aux systèmes musculo­ squelettique et articulaire.

Soins inrmiers FIBROSE KYSTIQUE

Réaliser les évaluations et la collecte des données L’évaluation de l’enfant atteint de FK exige des examens à la fois pulmonaires et gastro-intestinaux. Cette fois encore, l’évaluation pulmonaire est la même que celle décrite dans la première section Soins inrmiers du chapitre et qui est consacrée aux infections respiratoires ; une attention spéciale doit être portée aux bruits pulmonaires, à l’observation de la toux ainsi qu’aux signes évidents de réduction de l’activité ou de fatigue. L’évaluation gastrointestinale consiste principalement en l’observation de la fréquence et de la nature des selles, et de la distension abdominale. Il est également important d’être à l’affût de signes de retard de croissance (p. ex., la perte de poids, la fonte musculaire, la pâleur, l’anorexie, une réduction de l’activité par rapport à la norme de base). Il faut interroger les

15 membres de la famille pour déterminer les habitudes de l’enfant sur le plan de l’alimentation et de l’élimination, et pour vérier s’il a eu des infections fréquentes des voies respiratoires ou des obstructions intestinales lorsqu’il était nourrisson. L’inrmière évalue l’horaire de l’alimentation et de l’élimination fécale du nouveau-né pour y déceler un problème potentiel comme l’iléus méconial. Elle participe aussi aux tests diagnostiques comme le dépistage néonatal du trypsinogène immunoréactif, à l’analyse de l’ADN et au test de la sueur. An de rassurer les parents, elle doit leur fournir des explications détaillées sur la maladie, les implications pour leur famille et les meilleurs soins à prodiguer à leur enfant. Il est crucial d’obtenir la collaboration des parents dans le suivi des tests pour un diagnostic précoce, car le nouveau-né peut avoir besoin de plusieurs visites de suivi au

Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

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cours des premières semaines de vie si les résultats des tests initiaux ne sont pas concluants.

Prodiguer les soins à l’hôpital Prévention de la transmission La plupart des personnes atteintes de FK requièrent une hospitalisation pour le traitement d’une infection pulmonaire, d’un diabète non maîtrisé ou d’un problème médical concomitant qui ne peut pas être traité en externe. Par conséquent, lorsque l’enfant atteint de FK est hospitalisé, les pratiques de base quant à l’hygiène des mains doivent être mises en application pour réduire le risque de lui transmettre des micro-organismes, en particulier en présence du SARM. Les lignes directrices établies par la Fondation de la brose kystique recommandent que tout le personnel de la santé mette en œuvre les précautions contre la transmission par contact (c’est-à-dire le port de la blouse de protection et de gants) lorsqu’ils apportent des soins à toute personne atteinte de FK, peu importe ses résultats de cultures d’échantillons respiratoires, tant pour les clients ambulatoires que pour ceux hospitalisés (Saiman, Siegel, LiPuma et al., 2013).

Surveillance et soutien dans les traitements Lorsque l’enfant atteint de FK est hospitalisé pour un diagnostic ou pour le traitement de complications pulmonaires, l’aérosolthérapie, le drainage postural avec percussions et la physiothérapie respiratoire doivent être amorcées ou continuées. Souvent, c’est le physiothérapeute ou l’inhalothérapeute qui commence, supervise et fournit ces traitements ; cependant, il est de la responsabilité de l’inrmière de surveiller la tolérance de l’enfant à ces procédures et d’évaluer leur efcacité par rapport aux objectifs du traitement. L’inrmière peut parfois administrer l’aérosolthérapie, effectuer les techniques de dégagement des voies respiratoires, aider au moment des interventions visant à éliminer le mucus comme le port du gilet, et enseigner des exercices respiratoires. An d’assurer l’efcacité du traitement, la physiothérapie respiratoire ne doit pas être effectuée avant ou immédiatement après un repas.

FIGURE 15.25 L’inrmière doit encourager l’enfant atteint de brose kystique à suivre son traitement en lui offrant du réconfort et du soutien.

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Partie 6

Troubles liés aux systèmes

L’enfant ayant une détresse respiratoire légère ou modérée recevra de l’oxygène d’appoint, et il est nécessaire de réévaluer fréquemment sa tolérance à cette intervention. La saturation en oxygène, l’observation de la respiration, l’effort respiratoire et l’auscultation des poumons sont des données vitales.

Régime pharmacothérapeutique Un des dés de l’inrmière dans le soin de l’enfant atteint de FK consiste à encourager l’adhésion au régime pharmacothérapeutique, lequel exige souvent la prise d’un nombre considérable de médicaments, d’enzymes pancréatiques, de vitamines A, D, E et K, d’antifongiques oraux pour combattre la candidose, d’antihistaminiques, d’agents anti-inammatoires et d’antibiotiques oraux, ce qui peut submerger l’enfant. S’il s’ajoute à cela les multiples bronchodilatateurs en inhalation, les techniques de dégagement des voies respiratoires, les traitements en aérosol, la surveillance de la glycémie, l’administration d’insuline et de divers autres médicaments, ainsi qu’une production accrue de mucus durant la phase aiguë, il n’est pas rare que l’enfant oppose une résistance aux interventions thérapeutiques. Des encouragements attentionnés, du renforcement positif et une franche négociation peuvent être nécessaires pour obtenir sa coopération an d’assurer une adhésion rigoureuse au traitement FIGURE 15.25. Le sommeil de l’enfant est souvent perturbé par les routines hospitalières ; par conséquent, les soins inrmiers doivent être sufsamment exibles pour accorder à l’enfant des périodes de tranquillité sans que cela nuise aux soins vitaux. Dans certains cas, il peut être nécessaire de concevoir un calendrier d’événements quotidiens qui inclut l’administration de médicaments, les changements de pansements, la physiothérapie respiratoire et l’aérosolthérapie, en consultant les inrmières, le médecin, ainsi que l’enfant an qu’il sente qu’il a une participation active dans la planication de ses soins.

Régime alimentaire Le régime alimentaire de l’enfant atteint de FK constitue un autre dé. Une planication soigneuse avec une nutritionniste spécialisée, qui tient compte des préférences de l’enfant, peut aider à pallier la perte d’appétit et la perte de poids souvent associées à la maladie. Les enfants atteints de diabète associé à la FK ont besoin d’un régime alimentaire riche en calories, en protéines, en lipides et en sel pour aider à atteindre et à maintenir un poids corporel sain (De Rijcke, 2015). L’enfant qui en est aux premiers stades de la FK a souvent bon appétit. Avec l’infection et les problèmes pulmonaires grandissants, son appétit diminue ; stimuler un appétit défaillant devient un dé. L’enfant doit consommer davantage de calories pour couvrir les dépenses caloriques liées à ses efforts respiratoires (respirer, tousser) et pour combattre les infections, et il a besoin d’une alimentation riche en protéines. Lorsque l’apport alimentaire ne réussit plus à répondre à ses besoins de croissance, l’alimentation par voie entérale ou le recours aux suppléments alimentaires doit être envisagé (Fibrose kystique Canada, s.d., 2017c ;

L’enfant et les parents sont encouragés à percevoir cette thérapie comme une thérapie complémentaire pour maintenir une croissance optimale et prévenir une perte de poids excessive. L’enfant a besoin de soutien durant les nombreux traitements et tests qui sont effectués au cours d’une hospitalisation. La dépression, l’anxiété et une image corporelle perturbée peuvent être présentes. Les adolescents et les jeunes adultes peuvent être vulnérables à la dépression devant la réalité du pronostic et de la lourdeur des nombreuses difcultés à surmonter.

Prodiguer les soins à domicile La plupart des enfants et des adolescents atteints de FK peuvent être traités à domicile. Les soins ont pour objectif l’adaptation, la reprise des activités quotidiennes, y compris la fréquentation de l’école, et les interactions avec les pairs. La planication des soins doit être exible an de minimiser les perturbations des activités familiales. Les parents ont besoin de temps pour apprendre la façon d’utiliser l’équipement et pour résoudre les problèmes susceptibles de survenir au moment où ils ont à administrer la thérapie à domicile. Les nombreux aspects des soins à domicile pour un enfant atteint de FK sont similaires à ceux nécessaires pour d’autres enfants 1 .

Information sur le régime alimentaire L’enfant et sa famille peuvent avoir besoin d’information sur ce qu’est un régime alimentaire de choix comprenant des repas nutritifs (c’est-à-dire dont la teneur en gras sera tolérée et la teneur en protéines et en glucides, plus élevée) ainsi que sur l’administration d’enzymes pancréatiques avant les repas et les collations (De Rijcke, 2015). Les parents doivent aussi être à l’affût de toute perte de poids ou de tout plateau observé dans la cour-be de croissance qui sont associés à une perte d’appétit, ce qui pourrait indiquer une exacerbation pulmonaire.

Information sur les traitements à domicile et la médication L’un des aspects les plus importants de l’enseignement aux parents pour les soins à domicile consiste à leur montrer les techniques de dégagement des voies respiratoires et les exercices respiratoires. Le succès de tout plan thérapeutique dépend de l’exécution consciencieuse de ces traitements de façon régulière. La fréquence hebdomadaire des traitements est déterminée sur une base individuelle et, souvent, les parents apprennent rapidement à ajuster le nombre et l’intensité des traitements en fonction des besoins de leur enfant. Il se peut qu’une antibiothérapie par voie I.V. administrée à la maison soit prescrite en cas d’infection pulmonaire. Il est bon de favoriser les soins par voie I.V. à domicile pour une

famille compétente et bien disposée, car cela contribue à réduire la tension et suscite habituellement un sentiment d’appartenance chez les membres de la famille ; cette option dépend cependant d’un certain nombre de facteurs. Avec un appareillage d’accès veineux comme le cathéter veineux central introduit par voie périphérique ou le cathéter à chambre implantable, il est possible d’enseigner aux parents et à l’enfant la technique de l’administration I.V. La famille a aussi besoin d’information au sujet des médicaments et des effets indésirables qu’ils peuvent provoquer. Lorsque l’enfant reçoit de l’ibuprofène, la surveillance des effets indésirables potentiels comme l’irritation gastro-intestinale est essentielle. Certains antibiotiques nécessitent la vérication des taux sériques an de s’assurer d’une administration à des doses thérapeutiques. Si l’enfant est atteint de diabète associé à la FK, il est important de fournir de l’information sur les prélèvements des glycémies, l’insulinothérapie et le régime alimentaire. Un suivi avec un endocrinologue est recommandé. En plus de tous les vaccins de routine recommandés, l’enfant atteint de FK doit recevoir le vaccin antigrippal à partir de l’âge de six mois, qui sera suivi d’un rappel annuel (Lahiri et al., 2016). Des conseils d’ordre préventif portant sur les questions de discipline, sur la façon d’incorporer les divers aspects du plan thérapeutique dans l’environnement scolaire et sur le retard pubertaire constituent également des éléments importants pour la personne apportant les soins primaires à l’enfant. Pour la famille avec un enfant en phase terminale, une consultation en soins palliatifs est nécessaire pour un soutien en n de vie.

Offrir du soutien à la famille L’aspect le plus difcile dans les soins à la famille d’un enfant ou d’un adolescent atteint de la FK consiste à apporter un soutien approprié à l’enfant et aux membres de sa famille éprouvés sur le plan émotionnel. Les problèmes à long terme pour le nourrisson, l’enfant ou l’adolescent atteint de FK sont les mêmes que ceux qui surgissent dans toute maladie chronique. Tant l’enfant que la famille doivent effectuer des ajustements dont le succès dépend de leur capacité à s’adapter, de même qu’à leur accès à des services de soutien externes de qualité en quantité sufsante. Les efforts combinés d’une variété de professionnels de la santé sont essentiels, et c’est souvent l’inrmière qui évalue la situation à domicile, organise et coordonne ces services, et recueille les données nécessaires pour en évaluer l’efcacité. Le besoin permanent de traitements plusieurs fois par jour est extrêmement exigeant pour l’enfant et sa famille. Lorsque l’enfant est jeune, un membre de la famille doit effectuer les techniques

Chapitre 15

14 Les diverses voies d’administration entérales sont expliquées dans le chapitre 14, Techniques de soins.

1 Les enjeux et la mise en œuvre des soins à domicile sont présentés dans le chapitre 1, Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté.

Fibrose kystique Canada (www.brosekystique.ca) offre du soutien aux enfants et aux familles. Le site constitue une riche source d’information et propose des outils pratiques comme le Guide canadien sur la nutrition et la brose kystique, qui contient à la fois des renseignements et des recettes.

clinique

Jugement

Ruel, 2015) 14 . La sonde de gastrostomie percutanée réduit les restrictions de l’enfant et ne perturbe que très peu son image corporelle.

Alain, adolescent âgé de 15 ans, est atteint de brose kystique. Il est hospitalisé pour la troisième fois en 2 mois. Considérant son âge et son problème de santé, quelle raison peut expliquer qu’il soit hospitalisé aussi souvent ?

Troubles liés au système respiratoire

719

15

de dégagement des voies respiratoires, contre lesquelles l’enfant se rebiffe souvent, et le parent est alors forcé d’insister pour obtenir sa coopération. Le stress et l’anxiété associés à cette routine peuvent générer du ressentiment tant chez l’enfant que chez les autres membres de la famille. Lorsque cela est possible, il est bon que les parents bénécient de courtes périodes de répit. CE QU’IL FAUT RETENIR

Il faut encourager l’enfant ou l’adolescent atteint de FK à participer à des acti­ vités sportives dans la mesure où sa santé physique et pulmonaire le lui permet.

10 La prise de décision dans une situation de phase terminale et le processus de deuil sont expliqués dans le chapitre 10, Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie.

Encadré 15.5W : Fibrose kystique et soins en n de vie.

L’enfant ou l’adolescent atteint de FK peut éprouver du ressentiment à l’égard de la maladie, de sa routine thérapeutique incessante et des restrictions que cela impose nécessairement à ses activités et à ses relations. Les activités de l’enfant atteint de FK sont soit interrompues par les traitements, la prise de médicaments et les exigences du régime alimentaire, soit élaborées en fonction de ces contraintes, ce qui lui cause des désagréments et inuence sa qualité de vie. L’enfant doit être encouragé à aller à l’école et à se joindre à des groupes d’enfants de son âge an de lui assurer une vie aussi normale et productive que possible. Les sports constituent souvent une partie importante de la vie de l’enfant et de l’adolescent, et l’interaction avec les pairs offre de précieuses expériences de vie. Cependant, avec la progression de la maladie, l’état de stress de la famille risque de s’accroître, et l’enfant pourra éprouver de la colère et opposer une résistance au traitement. Il est important que l’inrmière reconnaisse qu’en raison de l’aggravation de la FK, les besoins de la famille peuvent changer et que les proches peuvent éprouver du chagrin. La famille doit être informée des ressources auxquelles elle peut avoir recours pour obtenir du counseling. L’enfant, pour sa part, a besoin d’être guidé dans des activités qui lui permettront d’exprimer sa colère, sa tristesse et sa peur, sans pour autant ressentir de culpabilité.

15.8

Physiopathologie

Insufsance respiratoire

1. lorsque l’effort respiratoire augmente, mais que les échanges gazeux restent près des normales ; 2. lorsque les pressions partielles des gaz du sang artériel (oxygène [PaO2] et dioxyde de carbone [PaCO2]) ne peuvent être maintenues, et qu’apparaissent une hypoxémie et une acidose secondaires à la rétention du dioxyde de carbone. Partie 6

À mesure que l’espérance de vie des enfants et des adolescents atteints de FK continue de progresser, les questions relatives au mariage, à la sexualité, à la maternité et aux choix de carrière deviennent plus pressantes. L’adolescent doit éventuellement être informé que les hommes atteints de FK sont souvent infertiles, et l’inrmière devrait lui expliquer la distinction entre infertilité et impuissance, car il peut s’attendre à avoir des relations sexuelles normales. L’adolescente, elle, aura la capacité de porter des enfants, mais elle doit être informée des effets délétères possibles du fardeau d’une grossesse sur le système respiratoire. Elle doit aussi savoir que ses enfants seront porteurs du gène de la FK. Elle peut avoir besoin de counseling quant à l’usage de contraceptifs oraux et aux autres options envisageables en matière de contraception (Dupuis, Duhamel et Gendron, 2011 ; Fibrose kystique Canada, 2018). Il faut encourager les jeunes à se xer des objectifs et à vivre une vie normale dans la mesure où la maladie le leur permet. Il est également bon d’encourager l’enfant atteint de FK à faire des projets pour sa vie en tant qu’adulte autonome. À partir du moment où l’enfant devient capable de prendre la responsabilité de ses propres soins, même partiellement (p. ex., les techniques de dégagement des voies respiratoires et la prise d’enzymes), il convient d’encourager sa responsabilisation et son autonomie. L’anticipation du deuil et divers autres aspects associés aux soins d’un enfant ayant une maladie en phase terminale font également partie des soins inrmiers. Par exemple, il est important de préparer l’enfant et les membres de la famille aux décisions et aux soins de n de vie . 10

L’insufsance respiratoire se dénit comme l’incapacité du système respiratoire à maintenir une oxygénation adéquate du sang, avec ou sans rétention de dioxyde de carbone. En général, l’insufsance respiratoire est divisée en deux types TABLEAU 15.26 selon la présence ou l’absence d’hypoventilation alvéolaire (hypercapnie) :

720

Collaborer à la transition vers l’âge adulte

Troubles liés aux systèmes

Ce processus implique un dysfonctionnement pulmonaire qui entraîne généralement une altération des échanges gazeux alvéolaires pouvant mener à l’hypoxémie ou à l’hypercapnie. L’insufsance respiratoire est la cause la plus fréquente d’un arrêt cardiopulmonaire chez l’enfant (Fondation des maladies du cœur et de l’AVC, 2016). L’arrêt respiratoire est la cessation de la respiration. L’apnée est la cessation de la respiration pendant plus de 20 secondes ou pendant une période plus courte lorsqu’elle est associée à de l’hypoxémie ou à une bradycardie (Hazinski, 2013). L’apnée peut être : • centrale, lorsque l’effort respiratoire et le ux d’air sont absents ; • obstructive, lorsque l’effort respiratoire est présent, mais que le ux d’air est absent ;

• mixte, lorsque les composantes centrale et obstructive sont toutes deux présentes. Un échange gazeux pulmonaire efcace exige des voies respiratoires perméables, une paroi thoracique et des poumons normaux, ainsi qu’une circulation pulmonaire adéquate. Tout ce qui peut affecter ces fonctions ou leurs interrelations est susceptible de compromettre la respiration. Le dysfonctionnement respiratoire peut survenir brusquement ou progressivement. L’insufsance respiratoire peut se produire sous forme d’une situation d’urgence ou être précédée d’une détérioration graduelle et progressive de la fonction respiratoire.

Manifestations cliniques

TABLEAU 15.26

Classication de l’insufsance respiratoirea

CATÉGORIE

TYPE 1

TYPE 2

Hypoxémie

PaO2 < 55 mm Hg en période néonatale ou PaO2 < 60 mm Hg au-delà de la période néonatale

PaO2 < 55 mm Hg en période néonatale ou PaO2 < 60 mm Hg au-delà de la période néonatale

Hypercapnie

Normale ou basse

Élevée (> 50 mm Hg)

a

Mesures en air ambiant (21 % d’oxygène). Source : Adapté de Vo et Kharasch (2014).

La plupart des manifestations cliniques ne sont pas spéciques et varient en fonction de la personne, du degré de gravité et de la durée de la perturbation de l’échange gazeux. Les signes d’insufsance respiratoire sont énumérés dans le TABLEAU 15.27.

TABLEAU 15.27

Diagnostic

Manifestations cliniques de l’insufsance respiratoire

SIGNES CARDINAUX

MANIFESTATIONS CLINIQUES PRÉCOCES, MAIS MOINS APPARENTES

SIGNES D’HYPOXIE PLUS GRAVES

• Agitation

• Céphalées

• Altération de la vision

• Tachypnée

• Altération de la profondeur et du mode de la respiration

• Somnolence

• Tachycardie • Diaphorèse

• Dyspnée à l’effort

• Coma

• Battement des ailes du nez

• Dyspnée

1. la présence ou des antécédents d’une maladie qui peuvent prédisposer à de l’insufsance respiratoire ;

• Tirage de la cage thoracique

• Dépression respiratoire

• Gémissement à l’expiration • Sibilance ou expiration prolongée

• Cyanose, périphérique ou centrale

2. l’observation de l’insufsance respiratoire ;

• Anorexie

• Bradycardie

3. la gazométrie du sang artériel et la mesure du pH sanguin.

• Augmentation des débits cardiaque et rénal

• Hypotension ou hypertension

Approche thérapeutique

• Hypertension

Le diagnostic d’insufsance respiratoire est établi à partir de l’obtention combinée de trois sources d’information :

Les interventions qui doivent être effectuées pour le traitement de l’insufsance respiratoire sont souvent impressionnantes, et elles exigent des compétences et des procédures d’urgence spéciales. S’il se produit un arrêt respiratoire, l’objectif premier est de reconnaître la situation et d’amorcer immédiatement les mesures de réanimation, comme le positionnement des voies respiratoires, l’administration d’oxygène, la ventilation à pression positive, les manœuvres de réanimation cardiorespiratoire (RCR), l’aspiration ou l’intubation endotrachéale 14 . Lorsqu’il ne s’agit pas d’un arrêt respiratoire, le soupçon d’une insufsance respiratoire se conrme par la collecte de données ; sa gravité peut être déterminée grâce à l’analyse de la gazométrie du sang artériel. Les interventions comme l’administration d’oxygène d’appoint, le positionnement corporel, la stimulation, l’aspiration, le recours aux méthodes de ventilation non invasives (CPAP, BiPAP) et l’intubation rapide peuvent pallier un arrêt respiratoire. Lorsque la gravité est déterminée, il faut procéder à un examen complet pour découvrir la cause sous-jacente du problème.

• Stupeur

• Symptômes relevant du SNC (diminution de l’efcacité, jugement altéré, anxiété, confusion, agitation, irritabilité, altération du niveau de conscience, variabilité de l’humeur)

Traiter un dysfonctionnement respiratoire exige des traitements à la fois spéciques et non spéciques. Les traitements spéciques visent à renverser les effets des facteurs causals. Les mesures non spéciques sont cependant nécessaires pour maintenir une oxygénation adéquate et améliorer l’élimination du dioxyde de carbone jusqu’à ce que les traitements spéciques entrent en action.

15

14 La réanimation cardiorespiratoire est présentée dans le chapitre 14, Techniques de soins.

Les raisons principales justiant le recours aux traitements non spéciques sont : 1. l’étiologie inconnue ; 2. l’absence de traitement spécique pour un problème connu ; 3. le manque de temps pour qu’entre en action un traitement spécique ; 4. le besoin de personnel ou d’équipement spécialisés pour un traitement spécique. Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

721

Le traitement consiste à : 1. maintenir la ventilation et à maximiser l’apport d’oxygène ; 2. corriger l’hypoxémie et l’hypercapnie ; 3. traiter la cause sous-jacente ;

4. réduire au minimum la défaillance des organes non pulmonaires ; 5. appliquer des mesures spéciques et non spéciques pour assurer un apport en oxygène ; 6. prévoir les complications possibles ; le monitorage de l’état de l’enfant est crucial.

Soins inrmiers INSUFFISANCE RESPIRATOIRE 10 La communication en cas de mort imminente est présentée dans le chapitre 10, Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie.

Lorsqu’un enfant a fait un arrêt respiratoire, l’inrmière doit reconnaître rapidement l’insufsance respiratoire, informer régulièrement les membres de la famille de l’état de santé de l’enfant et les aider à affronter cette expérience de mort imminente ou de décès effectif 10 . L’observation et le jugement de l’inrmière sont des éléments essentiels pour la reconnaissance et le traitement précoces de l’insufsance respiratoire. L’inrmière doit être capable d’évaluer la situation et d’amorcer en quelques instants les actions appropriées en se basant sur les signes d’insuffisance respiratoire présentés dans le TABLEAU 15.27. Savoir que leur enfant a besoin de RCR est une expérience terriante et souvent accablante pour les parents. L’incertitude quant à l’issue des interventions, qu’il s’agisse de mortalité ou de morbidité, est une préoccupation majeure. Traditionnellement, les membres de la famille n’avaient pas le droit d’être présents pendant les efforts de réanimation à l’urgence. Cependant, des études montrent que la

présence de membres de la famille durant une situation d’urgence évite que ceux-ci soient en colère d’avoir été séparés de l’enfant durant une crise, réduit leur anxiété, élimine leurs doutes concernant les interventions effectuées par le personnel soignant pour aider l’enfant et facilite le processus de deuil en cas de décès de l’enfant (Meert, Clark et Eggly, 2013 ; Michelson et Rothschild, 2015). Étant donné que de plus en plus d’établissements permettent la présence des parents durant une RCR, l’inrmière doit considérer les besoins, les peurs et les inquiétudes des membres de la famille au moment d’un arrêt respiratoire, et s’assurer que ces derniers ont le soutien d’un membre de l’équipe durant les interventions. Si la présence de la famille n’est pas permise, l’inrmière doit s’organiser pour que la famille soit constamment accompagnée pendant la réanimation. Lorsque la crise est terminée, que l’enfant soit remis ou décédé, la famille continue d’avoir besoin d’être soutenue et de recevoir l’information médicale complète sur les mesures qui ont été prises, sur le pronostic lorsque l’enfant a survécu et sur la cause du décès s’il est mort.

Jugement clinique

Analyse d’une situation de santé Jordan, âgé de 4 ans, arrive avec sa mère à l’urgence après une nuit passée à tousser, à subir une rhinorrhée jaunâtre et de la dyspnée avec des

expectorations abondantes. Sa température est normale. Sa saturation en oxygène est de 92 % à l’éveil. D’après la mère, cela dure depuis des semaines.

Mise en œuvre de la démarche de soins

Collecte des données – Évaluation initiale – Analyse et interprétation 1. À l’aide de la méthode PQRSTU, nommez au moins quatre autres données pertinentes à recueillir au moment de l’évaluation initiale de la condition de Jordan. 2. Quelles caractéristiques de la toux faut-il vérier ? 3. Pourquoi est-il approprié d’évaluer les ongles de Jordan ? 4. Quels examens paracliniques seront probablement prescrits pour déterminer le problème de Jordan ? Nommezen trois et justiez votre réponse. 5. Un débit expiratoire de pointe (DEP) serait-il requis pour Jordan ? Justiez votre réponse.

722

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

SOLUTIONNAIRE

Planication des interventions – Décisions inrmières 6. Quel problème prioritaire nécessiterait une surveillance clinique spécique immédiate pour Jordan ? Inscrivez votre réponse dans l’extrait du plan thérapeutique inrmier (PTI). Extrait de PTI CONSTATS DE L’ÉVALUATION Date

Heure



2018-04-09

09:00

1

Signature de l’inrmière

Problème ou besoin prioritaire

Initiales

Programme / Service

Après 24 heures, le diagnostic d’asthme avec sinusite est posé. Jordan présente maintenant du tirage sous-costal, la saturation en oxygène est de 96 % au repos, et sa dyspnée a disparu. Il reçoit des bronchodilatateurs en inhalation ainsi que de la cortisone. Son niveau d’activité est décuplé et, malgré la présence de sa mère, il n’arrive pas à s’endor-

Initiales

RÉSOLU / SATISFAIT Date

Signature de l’inrmière

Heure

Initiales

Initiales

Professionnels / Services concernés

Programme / Service

mir au moment de la sieste. Les tests se sont révélés normaux, sauf les tests d’allergies, qui ont démontré une sensibilité importante aux acariens, aux chats et aux bouleaux. La formule sanguine indique une élévation des lymphocytes. Jordan est placé dans une chambre d’isolement et s’ennuie, particulièrement de son petit hamster.

Collecte des données – Évaluation initiale – Analyse et interprétation

2018-04-09 09:00 Aiv à ’rgnc av s èr. D’ar cel-c, Jorda arai é l i à tor  aai  olm sa jaâr  d l icté à pirr. L èr   rr ds quan Jorda rt c tôm, as i u ç r ds d main. T 37,2 °C, SO2 92 %.

VU dans ce chapitre Quels bruits respiratoires devrait-on entendre à l’auscultation de Jordan ? MAIS SI...

7. Qu’est-ce qui peut expliquer le niveau d’énergie élevé de Jordan et sa difculté à s’endormir ?

Planication des interventions – Décisions inrmières 8. La mère de Jordan demande si son ls sera obligé de prendre des médicaments toute sa vie. Que faut-il lui répondre à ce sujet ? 9. Que devriez-vous suggérer à Jordan au sujet de son hamster à la maison ?

Extrait des notes d’évolution

Si Jordan présentait des signes d’obstruction bronchique sévère, qu’entendrait-on à l’auscultation pulmonaire alors ? Nommez trois autres manifestations cliniques objectives observables.

10. Serait-il approprié d’encourager Jordan à boire davantage ? Justiez votre réponse.

VU dans ce chapitre Pourquoi est-ce important de demander à la mère si elle a administré de l’AspirinMD à Jordan avant de l’amener à l’urgence ?

11. Que pourriez-vous faire pour occuper Jordan quand il s’ennuie ? 12. Sur quel point principal portera l’enseignement sur la prévention d’une crise d’asthme ?

Évaluation des résultats – Évaluation en cours d’évolution

VU dans ce chapitre

13. Ajustez l’extrait du PTI de Jordan d’après les données de l’évolution de sa condition.

Devrait-on utiliser un tube d’espacement avec l’aérosol-doseur pour administrer les bronchodilatateurs et la cortisone à Jordan ? Pourquoi ?

Chapitre 15

Troubles liés au système respiratoire

723

15

Chapitre

16

Troubles liés au système cardiovasculaire Écrit par : Amy Delaney, RN, MSN, CPNP-AC/P Annette L. Baker, RN, BSN, MSN, CPNP Heather Bastardi, MSN, BSN, PNP Patricia O’Brien, MSN, RN, CPNP-AC Adapté par : Marie Antonacci, inf., B. Sc.

MOTS CLÉS

OBJECTIFS

Anaphylaxie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 800 Cardiomyopathie acquise . . . . . . . . . . . . 728 Cardiopathie congénitale (CC) . . . . . . . 728 Cathétérisme cardiaque . . . . . . . . . . . . . 731 Dyslipidémie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 778 Endocardite infectieuse. . . . . . . . . . . . . . 773 État de choc . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 796 Hypertension artérielle (HTA) . . . . . . . . 790 Hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 785 Hypoxémie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 761 Insuffisance cardiaque congestive (ICC) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 750 Maladie de Kawasaki . . . . . . . . . . . . . . . . 793 Monitorage cardiaque . . . . . . . . . . . . . . . 729 Rhumatisme articulaire aigu (RAA) . . 776 Transplantation cardiaque . . . . . . . . . . . 788

Après avoir étudié ce chapitre, vous devriez être en mesure :

Disponible sur • Animations • À retenir • Carte conceptuelle • Solutionnaires

Guide d’études – SA15

724

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

• d’élaborer un plan de soins pour aider l’enfant qui doit subir une intervention diagnostique cardiaque ; • d’expliquer l’hémodynamique, les manifestations distinctives et l’approche thérapeutique liées à la cardiopathie congénitale ; • d’élaborer un plan de soins et de traitements infirmiers pour un enfant atteint d’insuffisance cardiaque congestive ; • de décrire les soins destinés à un enfant hypoxique ; • de décrire les soins destinés à un enfant atteint de malformation cardiaque et la réparation chirurgicale requise ; • d’analyser le rôle du personnel infirmier appelé à aider l’enfant et la famille à faire face à une cardiopathie congénitale ; • de distinguer les différents types de cardiopathies acquises, notamment l’endocardite infectieuse, les arythmies cardiaques et les cardiomyopathies ; • de distinguer une fièvre rhumatismale d’une cardiopathie rhumatismale ; • de reconnaître les signes de dyslipidémie et d’énumérer les critères de sélection des tests du dosage du cholestérol chez les enfants ; • de déterminer les modalités de l’évaluation et de l’approche thérapeutique de l’hypertension artérielle chez les enfants et les adolescents ; • d’élaborer un plan de soins destiné à un enfant atteint de la maladie de Kawasaki ; • de décrire le traitement d’urgence en cas d’état de choc.

Carte conceptuelle

conséquences cliniques

se manifeste par

dont

Troubles liés au système cardiovasculaire

16

possibilité de

pour de l’information sur

principaux examens cliniques à réaliser

principales manifestations cliniques à évaluer

dont

se manifeste par

incluent

incluent

Cette carte conceptuelle illustre schématiquement les principaux concepts décrits dans le présent chapitre. Sa lecture vous permettra d’avoir une vue d’ensemble des notions qui y sont présentées.

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

725

Rappel anatomique et particularités chez l’enfant

Système cardiovasculaire À la naissance, le système cardiovasculaire passe d’une circulation placentaire à une circulation autonome. La pression sanguine dans l’oreillette droite baisse, tandis que celle dans l’oreillette gauche augmente ; le canal artériel et le foramen ovale se ferment (respectivement vers la troisième semaine de vie et vers l’âge de quatre mois). Ces derniers étaient auparavant des raccourcis de la circulation placentaire (comme cela est expliqué dans la section 16.2.1 de ce chapitre). Les soufes qui s’entendent pendant les deux ou trois premiers jours après la naissance correspondent au ot de sang passant dans le foramen ovale avant que les pressions provoquent sa fermeture. Durant cette fermeture, des anomalies peuvent survenir. Si elles sont importantes, elles se manifestent par une cyanose. La peau et les muqueuses mal oxygénées prennent une coloration bleuâtre. Dans les cas graves, une intervention chirurgicale correctrice est nécessaire. Chez le nouveau-né, les bres cardiaques musculaires sont moins développées, ce qui restreint sa capacité fonctionnelle et rend son cœur sensible à la surcharge de volume ou de pression. La mauvaise compliance et la faible contractilité du ventricule gauche contribuent aussi à limiter la capacité du cœur à subir une surcharge de volume. Le cœur s’adapte et croît rapidement, au point où, en trois semaines, la compliance et la contractilité sont comparables à celles de l’adulte. C’est le

726

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

ventricule gauche qui croît le plus ; sa masse triple par rapport au ventricule droit. Le muscle cardiaque est mature vers l’âge de cinq ans, ce qui correspond à une augmentation substantielle du débit systolique. Contrairement au cœur de l’adulte, celui du nourrisson ne peut augmenter son débit cardiaque en accroissant son volume d’éjection. Pour ce faire, la fréquence cardiaque du nourrisson doit augmenter, car son cœur a peu de précharge en réserve. Les besoins en oxygénation du nourrisson étant beaucoup plus élevés que ceux de l’adulte, le cœur doit fonctionner à sa capacité maximale presque tout le temps. La fréquence cardiaque doit être élevée pour maintenir une oxygénation et un débit sanguin adéquats. La fréquence cardiaque à la naissance est de 100 à 180 battements par minute (batt./min). Elle se stabilise ensuite à environ 120 à 140 batt./min. La fréquence cardiaque du nourrisson varie en fonction de ses activités : 170 batt./min ou plus s’il est agité ou en pleurs, et de 100 à 110 batt./min quand il dort. Durant l’enfance, la fréquence cardiaque ralentit, mais elle demeure variable en fonction des activités. Quant à la pression artérielle, celle du nouveau-né est généralement de 75/45 mm Hg ; elle augmente graduellement pour atteindre environ 120/80 mm Hg à l’âge adulte. Au cours d’une période de stress ou d’une èvre, le nourrisson, tout comme l’enfant, peut présenter une tachycardie pour maintenir un débit cardiaque adéquat.

À la naissance, l’alimentation sanguine ombilicale cesse ; l’oxygénation est alors assurée par les poumons. L’ouverture des alvéoles pulmonaires entraîne une chute importante des résistances artérielles pulmonaires, créant une forte augmentation du débit sanguin pulmonaire et du retour veineux pulmonaire. Au moment du premier cri, les poumons se gonent d’air, et les vaisseaux pulmonaires se dilatent. La diminution subite de la résistance pulmonaire fait en sorte que le sang du cœur droit se dirige vers les poumons au lieu de passer par le canal artériel. Le ventricule droit est ainsi en lien avec la circulation pulmonaire, et le gauche, avec la circulation systémique. Le ventricule gauche est beaucoup plus musclé, puisque la circulation systémique fonctionne à des pressions beaucoup plus grandes que celles des poumons. C’est à l’âge de un an que la dimension du ventricule gauche atteint le double de celle du ventricule droit. Cette proportion reste identique chez l’adulte. Le cœur d’un enfant est environ de la taille de son poing.

Le cœur du nourrisson est positionné plus à l’horizontale que celui de l’adulte. Son apex est plus haut, au niveau du quatrième espace intercostal gauche, à l’intérieur de la ligne médioclaviculaire, position qu’il conserve jusqu’à l’âge de quatre ans. Entre quatre et six ans, le cœur se décale progressivement sur la ligne médioclaviculaire ; c’est à partir de sept ans qu’il se positionne dans le cinquième espace intercostal gauche, à droite de la ligne médioclaviculaire gauche (LMCG). Le cœur se situe alors dans le même axe que celui de l’adulte. La paroi thoracique du nourrisson est généralement mince, et le pouls apical est parfois visible. Les bruits du cœur d’un nourrisson semblent plus forts que ceux de l’adulte. Le B2 est plus aigu que le B1. Quelques heures après la naissance, il est possible d’entendre le dédoublement du B2 en n d’inspiration. Durant l’enfance, le B3 est souvent entendu. Il est protodiastolique à trois temps et se produit immédiatement à la suite du B2. Sa fréquence est basse, et le bruit est moins fort que le B2.

16

FIGURE 16.1 Puisque les besoins en oxygène et le métabolisme doublent à la naissance, la fréquence cardiaque du nouveau-né est élevée. Le muscle cardiaque du nourrisson est immature et vulnérable à l’insufsance cardiaque. Son plein développement survient vers l’âge de cinq ans. Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

727

16.1 CE QU’IL FAUT RETENIR

La consommation d’alcool ou de drogues illicites durant la grossesse augmente le risque de cardiopathie congénitale chez l’enfant.

Tératogène : Substance ou procédé qui provoquent des malformations fœtales lorsque la mère y est exposée au cours de la grossesse.

Troubles de la fonction cardiovasculaire

En pédiatrie, les troubles cardiovasculaires sont divisés en deux grands groupes : les cardiopathies congénitales et les cardiopathies acquises. Les cardiopathies congénitales (CC) sont essentiellement des malformations anatomiques présentes à la naissance, qui entraînent une dysfonction cardiaque. La prévalence des malformations cardiaques au Canada s’élève à 12 cas pour 1 000 naissances, dont environ 25 % ont une cardiopathie congénitale critique, c’est-à-dire une malformation nécessitant une intervention tôt après la naissance (Wong, Fournier, Fruitman et al., 2017). Les conséquences cliniques des malformations cardiaques relèvent de deux catégories : l’insufsance cardiaque congestive et l’hypoxémie. Les cardiopathies acquises comprennent les processus pathologiques ou les anomalies postérieures à la naissance. Ces cardiopathies, qui peuvent être observées en présence d’un cœur normal ou présentant des malformations, résultent de plusieurs

facteurs, dont l’infection, les réactions autoimmunes, les facteurs environnementaux et les tendances familiales. La FIGURE 16.2 illustre la circulation du ux sanguin dans le cœur.

16.1.1

Diagnostic

Anamnèse L’une des étapes primordiales de l’évaluation d’un nourrisson ou d’un enfant chez qui une cardiopathie est soupçonnée consiste à recueillir une anamnèse précise. Si certains parents expriment des préoccupations particulières (p. ex., un nourrisson qui éprouve des difcultés à être alimenté ou dont la respiration est rapide, ou un enfant de sept ans qui n’arrive pas à suivre le rythme imposé par ses camarades au soccer), d’autres ne se rendent pas compte que leur enfant a un problème de santé : ils pensent, par exemple, que leur enfant a toujours été prédisposé à être pâle et irritable. Pendant l’évaluation d’un nourrisson, il est essentiel d’explorer les antécédents médicaux et obstétricaux de la mère, et ce, pour plusieurs raisons. D’abord, le risque de cardiopathie est plus élevé chez les nourrissons dont la mère souffre d’une maladie chronique (diabète, lupus). Ensuite, certains médicaments, notamment la phénytoïne (DilantinMD), sont tératogènes. De plus, la consommation d’alcool ou de drogues illicites durant la grossesse augmente le risque de cardiopathie congénitale chez l’enfant. Les infections telles que la rubéole, qui surviennent en début de grossesse, peuvent, elles aussi, être à l’origine d’anomalies congénitales. Dans certains cas, les parents sans antécédents familiaux cardiaques ou sans histoire particulière de santé peuvent avoir des enfants avec des maladies cardiaques. Les nourrissons de faible poids à la naissance qui ont souffert d’un retard de croissance intra-utérin sont plus susceptibles que les autres d’être atteints d’une malformation cardiaque. Par ailleurs, il est important de relever dans le détail les antécédents familiaux du nourrisson ou de l’enfant. La fréquence des cardiopathies congénitales est plus élevée chez les enfants dont l’un des parents ou l’un des frères et sœurs est luimême atteint d’une malformation cardiaque. Certaines maladies, notamment le syndrome de Marfan, et certaines cardiomyopathies sont héréditaires. Une importante mortalité fœtale, des cas de mort subite du nourrisson et de mort subite chez l’adulte sont autant d’antécédents familiaux qui permettent de soupçonner une cardiopathie chez un enfant. Les cardiopathies congénitales sont observées dans de nombreux syndromes tels que les syndromes de Down et de Turner.

FIGURE 16.2 Représentation de la circulation pulmonaire et de la circulation systémique en série. Le cœur droit propulse le sang appauvri en oxygène vers les poumons, et le cœur gauche propulse le sang oxygéné vers les organes et les tissus du corps.

728

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

Examen physique L’examen physique d’un nourrisson ou d’un enfant chez qui une cardiopathie est soupçonnée

commence par une observation de son aspect général, laquelle est suivie d’observations plus approfondies. Les méthodes d’évaluation décrites dans le TABLEAU 16.1 viennent compléter celles de l’examen du thorax et du cœur 4 .

16.1.2

Examens paracliniques

Plusieurs tests, invasifs ou non, peuvent servir à diagnostiquer une maladie du cœur. Les outils diagnostiques les plus courants qui appellent une évaluation et des interventions inrmières sont décrits dans le TABLEAU 16.2.

Électrocardiographie L’électrocardiographie est une méthode d’exploration qui mesure l’activité électrique du cœur, laquelle est traduite par un afchage graphique et numérique du tracé nommé électrocardiogramme (ECG). Cet examen fournit entre autres des

TABLEAU 16.1

renseignements sur la fréquence et le rythme cardiaques, les anomalies du rythme et les changements ischémiques. Un ECG standard utilise 12 dérivations pour obtenir des vues différentes du cœur. Le monitorage de la fonction cardiaque par ECG prend environ 15 minutes, mais peut être plus long chez les nourrissons et les jeunes enfants qui deviennent parfois irritables durant le placement des électrodes. En pédiatrie, le monitorage cardiaque continu est commun pour les enfants atteints d’une cardiopathie. Au chevet, l’utilisation de trois ou de cinq dérivations offre de précieux renseignements sur la fréquence et le rythme cardiaques en temps réel. Toutefois, ce monitorage ne doit jamais remplacer l’évaluation directe et l’auscultation des bruits cardiaques. L’infirmière doit examiner l’enfant régulièrement et ne pas se er uniquement aux données fournies par le moniteur.

4 L’examen du thorax et du cœur est détaillé dans le chapitre 4, Examen clinique : anamnèse et examen physique.

éactivation des connaissances À quels endroits observet-on la cyanose centrale par rapport à la cyanose périphérique ?

Examen physique si une cardiopathie est soupçonnée

PARAMÈTRE

OBSERVATIONS

Inspection Coloration de la peau

• Vérier s’il y a présence de cyanose (coloration bleutée), laquelle est une caractéristique courante de la cardiopathie congénitale. • Vérier s’il y a présence de pâleur et de coloration grisâtre, puisqu’il s’agit de signes d’une circulation sanguine insufsante.

Respiration

• Vérier les manifestations d’une respiration eupnéique, ou la présence d’une dyspnée ou d’un tirage (sous-sternal, intercostal, sous-costal, sus-sternal, trachéal).

Thorax

• Inspecter les mouvements et la forme du thorax, puisque l’hypertrophie du cœur peut déformer la morphologie du thorax.

Pulsations inhabituelles

• Observer s’il y a présence de pulsations inhabituelles aux veines du cou (chez certains enfants).

Mains et membres inférieurs

• Observer la coloration, le retour capillaire, la présence d’œdème des membres inférieurs et la température des extrémités.

État nutritionnel

• Vérier la présence d’hippocratisme digital. Cette déformation provoque l’absence d’angle entre l’ongle et la phalange terminale, l’épaississement et l’élargissement des tissus, et les ongles bombés (Schwartz, 2017). C’est un phénomène observé chez les enfants hypoxiques chroniques. • Observer s’il y a un retard de croissance ou un gain pondéral insufsant, puisque ces signes peuvent être associés à une cardiopathie.

Palpationa Thorax

• Palper le thorax an de discerner la taille du cœur et d’autres caractéristiques (p. ex., des frémissements vibratoires) liées aux cardiopathies.

Abdomen

• Palper l’abdomen an de vérier s’il y a augmentation du volume du foie (hépatomégalie) ou de la rate (splénomégalie).

Pouls périphériques

• Observer s’il existe une dissociation entre la fréquence, la régularité et l’amplitude (force) des pulsations.

Auscultation Fréquence et rythme cardiaques

• Ausculter le cœur pendant une minute pour vérier si le rythme est régulier ou irrégulier, et si la fréquence cardiaque est élevée (tachycardie) ou basse (bradycardie).

Caractéristiques des bruits du cœur

• Vérier la présence de B1, B2, de bruits distincts surajoutés B3 ou B4, ainsi que la présence de soufes cardiaques.

a Puisque

la palpation est davantage utilisée par les médecins que par les inrmières, cette section n’est donc pas détaillée. En cas de problématique cardiaque, la palpation effectuée par les inrmières est souvent celle de l’abdomen, qui sert à évaluer la présence d’hépatomégalie.

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

729

16

CONSEIL CLINIQUE

Les électrodes employées pour le monitorage cardiaque sont souvent chromocodées : blanche pour la droite, verte (ou rouge) pour l’électrode de référence, et noire pour la gauche. Il faut toujours veiller à ce que ces électrodes soient disposées correctement.

TABLEAU 16.2

Le remplacement quotidien des électrodes favorise la conduction et prévient les irritations cutanées (Cvach, Biggs, Rothwell et al., 2013).

Échocardiographie Cet examen est l’un des tests les plus répandus pour visualiser l’anatomie du cœur et pour détecter des dysfonctions cardiaques chez l’enfant. Grâce aux récents progrès technologiques, il est souvent possible de conrmer le diagnostic sans recourir à un cathétérisme cardiaque, ou de poser un diagnostic prénatal de cardiopathie congénitale par échocardiographie fœtale. Selon l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC, 2013), près d’un tiers de toutes les cardiopathies congénitales et de 60 à

80 % des malformations cardiaques graves sont maintenant diagnostiquées avant la naissance. L’échocardiographie produit une image de l’anatomie du cœur en utilisant des ondes ultrasons. Cet examen, bien que non invasif, indolore et sans effet indésirable connu, peut être stressant pour l’enfant. Celui-ci doit être allongé calmement dans les positions échocardiographiques standard ; les pleurs, l’allaitement ou la station assise peuvent provoquer des erreurs ou des omissions diagnostiques. Il se peut donc que les nourrissons et les jeunes enfants aient besoin de soins de confort et d’un léger sédatif ; les enfants plus âgés gagneront à être psychologiquement préparés avant l’examen. Il est souvent pratique de les distraire en leur montrant un lm vidéo.

Examens paracliniques utilisés pour le diagnostic des malformations cardiovasculaires

EXAMEN

DESCRIPTION

Radiographie thoracique ou pulmonaire

Radiographie offrant des renseignements sur la taille du cœur et les autres structures thoraciques (poumons, côtes, diaphragme)

Électrocardiographie

Mesure graphique de l’activité électrique du cœur

• Monitorage Holter

• Surveillance continue du tracé électrocardiographique pendant au moins 24 heures pour évaluer les arythmies

Échocardiographie

Ultrasons employés pour évaluer la structure et le fonctionnement du cœur

• Échocardiographie transthoracique

• Sonde échographique placée sur la poitrine

– Échocardiographie tempsmouvement (TM)

– Tracé graphique unidimensionnel permettant de suivre le mouvement cardiaque (des valves mitrale et aortique et le mouvement de leurs feuillets) durant un cycle complet

– Échographie bidimensionnelle (2D)

– Clichés en temps réel ; aperçu transversal du cœur pour en déterminer les structures et l’anatomie

– Ultrasonographie Doppler, veineuse ou artérielle

– Méthode non invasive permettant de déceler les ux sanguins et les gradients de pression dans les structures cardiaques et vasculaires

• Échocardiographie fœtale

• Imagerie du cœur fœtal in utero entre 18 et 22 semaines de grossesse ; la sonde échographique est placée sur l’abdomen de la mère

• Échocardiographie transœsophagienne

• Introduction de la sonde échographique dans l’œsophage, derrière le cœur, pour obtenir des images plus détaillées des structures postérieures du cœur, ou lorsque les images obtenues à partir de la poitrine ne sont pas claires

Cathétérisme cardiaque

Examen d’imagerie médicale fait grâce à l’insertion d’un cathéter radio-opaque et d’un produit de contraste dans un vaisseau sanguin périphérique, lesquels sont acheminés vers le cœur pour mesurer les pressions et les taux d’oxygène dans les cavités cardiaques, et an de visualiser les structures et les ux sanguins dans le cœur

• Hémodynamique

• Mesure des pressions et des saturations en oxygène dans les cavités cardiaques

• Angiographie

• Exploration à l’aide d’un produit de contraste faisant ressortir la structure du cœur et l’organisation des ux sanguins

• Biopsie cardiaque

• Prélèvement de minuscules échantillons du myocarde fait avec un cathéter spécial an de procéder à un examen microscopique ; utilisée dans les cas d’infection, d’inammation ou de troubles de dysfonction du myocarde ; sert également pour évaluer un possible rejet à la suite d’une transplantation cardiaque

• Examen électrophysiologique

• Méthode invasive consistant à insérer des cathéters munis de minuscules électrodes servant à enregistrer l’activité électrique à l’intérieur du cœur ; permet de diagnostiquer les troubles du rythme cardiaque et de corriger les problèmes de conduction en détruisant la zone où prend naissance l’arythmie (ablation par cathéter)

Épreuve d’effort

Examen de la fréquence cardiaque, de la pression artérielle, du tracé électrocardiographique et de la consommation d’oxygène au repos et pendant un exercice progressif sur un tapis roulant ou une bicyclette

Imagerie par résonance magnétique (IRM)

Technique d’imagerie non invasive permettant d’évaluer l’anatomie vasculaire à l’extérieur du cœur (p. ex., une coarctation de l’aorte, des anneaux vasculaires) et d’estimer la masse ainsi que le volume ventriculaires ; l’emploi de l’IRM est de plus en plus répandu

730

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

Imagerie par résonance magnétique cardiaque L’imagerie par résonance magnétique (IRM) cardiaque utilise un puissant champ magnétique et des ondes de radiofréquence pour permettre de visualiser des images détaillées du cœur, de son fonctionnement, de ses valves et de ses principales veines et artères. Ainsi, le diagnostic et l’évaluation des malformations cardiaques, des maladies coronariennes et de l’insufsance cardiaque sont facilités (Institut de cardiologie de l’Université d’Ottawa, 2018).

Cathétérisme cardiaque Le cathétérisme cardiaque est une intervention diagnostique invasive au cours de laquelle un cathéter radio-opaque est inséré dans une cavité du cœur par l’intermédiaire d’un vaisseau périphérique. Généralement, le cathéter est introduit par une technique percutanée, en l’enlant à travers une aiguille de gros calibre insérée dans une veine. Le cathéter est guidé vers le cœur par uoroscopie. Une fois l’extrémité du cathéter chée dans une cavité cardiaque, une substance de contraste est injectée, et la dilution ainsi que la circulation de la substance sont photographiées (angiographie). Il existe différents usages du cathétérisme cardiaque : • Les cathétérismes à des ns de diagnostic visent à déceler les anomalies cardiaques, en particulier chez les nourrissons symptomatiques, avant une TABLEAU 16.3

réparation chirurgicale FIGURE 16.3 (Moustafa, Kolokythas, Charitakis et al., 2016). Ils peuvent être pratiqués de deux façons : les cathétérismes droits, dans lesquels le cathéter est introduit par une veine (généralement la veine fémorale) et enlé vers l’oreillette droite ; et les cathétérismes gauches, dans lesquels le cathéter est enlé par une artère (généralement l’artère fémorale) vers l’aorte, puis dans le cœur.

FIGURE 16.3 Le cathétérisme utilisé à des ns de diagnostic vise entre autres à déceler les anomalies cardiaques.

• Les cathétérismes interventionnels sont des procédures thérapeutiques permettant de refaçonner l’anatomie du cœur. Par exemple, ils permettent de dilater des valves ou des vaisseaux sténosés, ou de fermer des raccords anormaux grâce à un cathéter à ballonnet ou à un autre dispositif. Les cathétérismes cardiaques interventionnels, fréquemment pratiqués, sont présentés dans le TABLEAU 16.3 avec les diagnostics qui leur sont associés.

• Les examens électrophysiologiques consistent en l’insertion de cathéters munis de minuscules électrodes qui enregistrent les battements du cœur directement à partir du système de conduction. Ils servent à évaluer les arythmies et, parfois, à détruire les foyers de conduction accessoires à l’origine de certaines tachyarythmies (appelées ablations).

Cathétérismes cardiaques interventionnels

TYPES DE PROCÉDURE ET TECHNIQUES

INDICATIONS

Dilatation des valves cardiaques, des artères ou des veines qui présentent des sténoses

16

Valvuloplastie percutanée Introduction d’une sonde à ballonnet dans le cœur. À la hauteur de la valve, le ballonnet est goné deux à trois fois pour distendre la valve, puis il est retiré. L’efcacité de la dilatation est déterminée en réinjectant du produit de contraste et en mesurant les pressions. Le but est d’ouvrir sufsamment la valve et d’améliorer le fonctionnement du ventricule sous-jacent.

• Sténose valvulaire pulmonaire • Sténose valvulaire aortique • Sténose mitrale rhumatique

Angioplastie percutanée A. Angioplastie sans pose d’endoprothèse vasculaire Une fois la sténose bien imagée par injection du produit de contraste, un ballonnet est introduit jusqu’à la sténose, goné et dégoné contre la paroi artérielle à plusieurs reprises, puis retiré. L’efcacité de la dilatation est déterminée en mesurant les variations de pression et en réinjectant du produit de contraste an de visualiser le résultat obtenu.

• Sténose d’une branche de l’artère pulmonaire

B. Angioplastie avec pose d’une endoprothèse vasculaire Si la dilatation d’un vaisseau est inefcace, une endoprothèse vasculaire (stent) peut être implantée (un petit treillis fait de métaux précieux, par exemple du platine). Elle est placée sur un cathéter autour d’un ballonnet et est introduite dans la région du rétrécissement. Le ballonnet est goné, ce qui permet d’appliquer la prothèse vasculaire contre la paroi et de maintenir la lumière du vaisseau largement ouverte. Le ballonnet est dégoné et retiré, laissant la prothèse vasculaire en place. Cette procédure est davantage utilisée chez les enfants plus âgés, car ces prothèses ne grandissent pas avec l’enfant.

• Sténose de l’artère pulmonaire

Chapitre 16

• Coarctation récurrente de l’aorte

• Coarctation de l’aorte chez les adolescents

Troubles liés au système cardiovasculaire

731

TABLEAU 16.3

Cathétérismes cardiaques interventionnels (suite)

TYPES DE PROCÉDURE ET TECHNIQUES

INDICATIONS

Création d’orices dans le cœur

Atrioseptostomie par ballonnet (manœuvre de Rashkind) Certaines malformations cardiaques requièrent l’élargissement de la communication entre les oreillettes pour permettre la libre circulation du sang. Un ballonnet est introduit, puis goné dans l’oreillette gauche. Il est ensuite tiré, tout en restant goné, vers l’oreillette droite. Cela déchire la paroi entre les oreillettes et agrandit l’ouverture.

• Transposition des gros vaisseaux • Atrésie de la valve tricuspide • Certaines malformations univentriculaires complexes

Septostomie au couteau Lorsque l’enfant est plus grand, il est en général impossible de déchirer la paroi avec un ballonnet ; il faut alors utiliser un couteau.

• Transposition des gros vaisseaux • Atrésie de la valve tricuspide • Certaines malformations univentriculaires complexes

Ouverture par ponction transseptale ou par des sondes à radiofréquence Lorsqu’il n’existe pas d’orice, il est possible d’en créer un grâce à des aiguilles de ponction transseptale ou à des sondes à radiofréquence qui émettent de la chaleur, ce qui brûle un trou dans la paroi.

• Atrésie de la valve pulmonaire

Fermeture de communications anormales Les communications larges ou celles qui interfèrent avec le bon fonctionnement du cœur doivent être fermées soit par un cathétérisme cardiaque, lorsque c’est possible, soit par une intervention chirurgicale.

Embolisation percutanée du canal artériel, de stules ou de collatérales à l’aide de ressorts métalliques Lorsque le canal artériel, la stule ou les collatérales veineuses ou artérielles sont relativement petits, des petits ressorts (coils) en métal non oxydable ou en platine sont utilisés pour les obturer. Les bres synthétiques qui recouvrent les ressorts favorisent la formation d’un caillot, permettant ainsi l’occlusion du vaisseau. Un cathéter est introduit dans l’aorte où un produit de contraste est injecté, permettant de visualiser la localisation, la forme et la taille du canal. Puis, un cathéter contenant le ressort est introduit, et ce dernier est déployé dans le canal artériel, dépassant légèrement dans l’artère pulmonaire et l’aorte an d’assurer sa stabilité.

• Persistance du canal artériel (< 2,5 mm) • Collatérales artérielles ou stules artérioveineuses

Dispositif d’occlusion Lorsque le canal artériel ou les collatérales sont larges, un dispositif d’occlusion (p. ex., le duct occluder), c’est-à-dire une sorte de bouchon que l’on applique dans le canal, est utilisé.

• Persistance du canal artériel (> 2,5 mm) • Collatérales artérielles ou stules artérioveineuses

Fermeture par un dispositif transcathéter

Dispositif de fermeture d’une communication interauriculaire AmplatzerMD Une prothèse à double ombrelle est introduite dans un n tuyau qui sera placé dans l’oreillette gauche. La première ombrelle est déployée, puis lorsqu’elle est bien placée contre la paroi entre les oreillettes, la seconde est déployée. Leur positionnement est contrôlé par radiographie (scopie), mais également par échocardiographie transœsophagienne.

• Communication interauriculaire (CIA) • Fenestration (ou communication) créée durant l’opération de Fontan

Dispositifs de fermeture pour communication interventriculaire (CIV) Actuellement en essais cliniques. Ablation par cathéter du foyer d’arythmie Les tachyarythmies sont provoquées par des circuits électriques anormaux dans le cœur. Lorsque les médicaments ne sufsent pas à les contrôler, elles doivent être traitées grâce à une ablation par cathéter. L’ablation consiste à détruire les cellules électriques responsables des tachyarythmies à l’aide d’un cathéter d’ablation par radiofréquence (la chaleur brûle la zone) ou par cryothérapie (le froid détruit la zone).

• Certaines tachyarythmies (pulsations cardiaques rapides et anormales)

Sources : Adapté de Ali et Sisi (2016) ; Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux [CIUSSS] de l’Estrie – CHUS (2015) ; Feltes, Bacha, Beekman et al. (2011) ; Hamilton, Johnston, Morgan et al. (2009) ; Nos enfants cardiaques (2018) ; Polat et Türkmen (2016) ; Rome et Kreutzer (2004) ; Tadros et Asgar (2016).

732

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

Soins inrmiers Le cathétérisme cardiaque est désormais une intervention diagnostique de routine qui peut aussi s’effectuer en consultation externe. Cependant, il n’est pas dénué de risques, surtout pour les nouveaunés, les nourrissons ou les enfants gravement malades. Les complications possibles liées à cette intervention incluent l’hémorragie aiguë au site d’insertion, qui est plus probable pendant les cathétérismes interventionnels en raison du diamètre des cathéters utilisés ; la èvre ; les nausées ; les vomissements ; la perte de pouls dans le membre ayant servi de point d’accès au cathétérisme, laquelle est généralement transitoire et causée par un caillot, un hématome ou un saignement au site d’insertion, ou une déchirure de l’intima ; les arythmies transitoires, généralement causées par le cathéter ; et le risque anaphylactique (Kumar, Joshi et Madhu, 2014). L’accident vasculaire cérébral (AVC), les convulsions, le pneumothorax, l’insufsance rénale causée par le produit de contraste chez certains enfants à risque, la perforation du myocarde ou de l’artère pulmonaire, la tamponnade ainsi que le décès sont des complications rares .

Prodiguer les soins avant l’intervention L’inrmière doit procéder à une évaluation complète de l’enfant pour que l’intervention soit réalisée de façon sécuritaire et an de réduire au minimum les complications. Elle doit mesurer avec précision sa taille, puisque ce paramètre détermine le choix du cathéter, et son poids. Certains produits de contraste étant à base d’iode, elle doit aussi recueillir les antécédents de réaction allergique. Elle doit porter une attention particulière aux manifestations cliniques d’infection. En effet, la présence d’un grave érythème fessier peut justier l’annulation de l’intervention si un abord fémoral était prévu. Étant donné que la surveillance du pouls pédieux et du pouls tibial postérieur est essentielle après le cathétérisme, l’inrmière doit les prendre et marquer l’endroit où elle les a perçus avant l’intervention. Elle doit soigneusement noter la présence et la qualité de ces pouls des deux côtés. De plus, elle doit mesurer la saturation en oxygène initiale chez l’enfant présentant une cyanose. L’âge de l’enfant, la nature de sa malformation cardiaque, son état de santé et le type de cathétérisme prévu sont autant de facteurs qui orientent le choix de la voie d’administration et du sédatif. Dans certains cas, il est nécessaire de réaliser l’intervention sous anesthésie générale.

L’enfant doit être astreint à un régime nil per os (NPO : aucune ingestion par la bouche) au moins quatre à six heures avant l’intervention, conformément aux lignes directrices de l’établissement. Il peut être nécessaire de lui administrer une perfusion intraveineuse de solutions nutritives pour prévenir l’hypoglycémie. En cas de polycythémie, l’administration d’une perfusion intraveineuse peut prévenir la déshydratation et diminuer le risque de thrombose.

Préparer l’enfant et ses proches en vue de l’intervention

Polycythémie : Augmentation anormale du nombre de globules rouges de l’organisme ; aussi appelée polyglobulie. Tamponnade : Épanchement de liquide (généralement du sang) dans le sac péricardique qui comprime le cœur, l’empêchant ainsi de se remplir pendant la diastole.

La préparation de l’enfant et de ses proches à ALERTE CLINIQUE l’intervention est une responsabilité partagée par tous les membres de l’équipe de soins. La prépaLa tamponnade cardiaque est ration doit être adaptée à l’âge de l’enfant. une urgence médicochirurgiL’inrmière rend service aux enfants d’âge scocale. Ses manifestations laire et aux adolescents en leur décrivant la salle cliniques sont la tachycardie de cathétérisme et en leur expliquant le dérouinitiale, la dyspnée, l’hypotenlement de l’intervention, notamment ce qu’ils sion artérielle, le pincement de sont susceptibles de voir, d’entendre et de resla pression artérielle différensentir. Il peut être bénéfique d’illustrer ces tielle et le pouls paradoxal explications avec des outils prévus à cet effet (Kerbaul et Michelet, 2013). (livres d’images, lms vidéo) ou d’organiser une visite guidée de la salle de cathétérisme avant l’intervention. Les Marco est âgé de un mois. Comme ses extrémités enfants plus âgés et les adosont cyanosées, le pédiatre soupçonne une cardiolescents peuvent apporter pathie congénitale et suggère aux parents de conleur lecteur de musique porsulter un cardiologue qui envisagera peut-être un table pour se distraire durant cathétérisme cardiaque. Quel est le but de cette le cathétérisme. Il est imporintervention dans le cas de Marco ? tant que les parents entendent Marco a passé un cathétérisme cardiaque. Vous ne les mêmes explications que percevez plus les pouls pédieux et tibial postérieur leur enfant. De plus, l’inrdroit alors que vous les perceviez avant. Est-ce mière devra leur indiquer la normal ? Justiez votre réponse. durée de l’intervention, l’état a) Oui, car c’est dû à la présence du cathéter de l’enfant après l’interveninséré pendant l’examen. tion et les soins qui sont habituellement fournis à ce b) Oui, car un caillot, un hématome ou une moment. La préparation de déchirure de l’intima peuvent être en cause. l’enfant et de la famille aux c) Non, car on devrait toujours percevoir les pouls interventions invasives est pédieux et tibial postérieur. détaillée plus loin. d) Non, car les pouls périphériques devraient être faibles, mais perceptibles. Prodiguer les soins après

clinique

Jugement

CATHÉTÉRISME CARDIAQUE

l’intervention

Après l’intervention, l’enfant est conduit en salle de réveil, dans sa chambre d’hôpital ou, à l’occasion, à l’unité de soins intensifs. Au cours des premières heures de convalescence, il est branché à un moniteur cardiaque et à un saturomètre (ou oxymètre de pouls). La surveillance des paramètres du TABLEAU 16.4 sert à déceler les complications possibles.

Chapitre 16

Saturomètre : Instrument permettant de mesurer la saturation (ou la concentration) en oxygène dans les capillaires sanguins.

Troubles liés au système cardiovasculaire

733

16

Jugement

clinique La jambe droite de Marco est de plus en plus froide et pâle. Devriez-vous vous inquiéter de ce changement ? Justiez votre réponse. a) Oui, car ce changement peut signier qu’il y a une obstruction artérielle. b) Oui, car la circulation a été momentanément interrompue pendant l’examen. c) Non, car c’est normal en raison de l’insertion du cathéter dans un gros vaisseau. d) Non, tant qu’il n’y a pas de cyanose observable du pied droit.

TABLEAU 16.4

Pour faciliter la cicatrisation du vaisseau cathétérisé, l’enfant doit rester alité en gardant la jambe ou le bras bien allongé de quatre à six heures pour un cathétérisme veineux, ou de six à huit heures pour un cathétérisme artériel. En général, l’enfant ne ressentira qu’un léger inconfort au site d’insertion, qui devra être protégé an de prévenir

les infections. Si l’enfant porte des couches, l’inrmière peut recouvrir le pansement d’une pellicule adhésive transparente en plastique qu’elle collera à la peau. Elle doit malgré tout continuer à surveiller le point d’insertion à la recherche d’éventuels saignements ENCADRÉ 16.1. Le retour à l’alimentation normale se fera graduellement en commençant par des liquides et en progressant vers d’autres types d’aliments, selon l’état de l’enfant. Le produit de contraste étant éliminé par la diurèse (ou débit urinaire), il sera important d’encourager l’enfant à boire et à uriner.

Paramètres à surveiller et complications à la suite d’un cathétérisme cardiaque

PARAMÈTRES

SURVEILLANCE

COMPLICATIONS POSSIBLES

SIGNES NEUROVASCULAIRES

• Vérier la coloration, la chaleur, la mobilité et la sensibilité (CCMS) du membre touché.

• Une extrémité froide ou pâle peut indiquer une obstruction artérielle.

POULS PÉRIPHÉRIQUE

• Vérier l’égalité et la symétrie du pouls, surtout en aval du site de cathétérisme.

• Il se peut que le pouls distal par rapport au site soit plus faible pendant les premières heures suivant le cathétérisme, mais son amplitude devrait graduellement augmenter.

SIGNES VITAUX

• Relever les signes vitaux toutes les 15 minutes pendant la première heure, en surveillant attentivement la fréquence cardiaque, qui doit être mesurée pendant 1 minute entière.

• Cela permet de percevoir une arythmie ou une complication.

PRESSION ARTÉRIELLE (P.A.)

• Vérier surtout pour déceler une hypotension.

• Peut indiquer une hémorragie due à une perforation cardiaque ou à un saignement au site du cathétérisme initial. • Une hypotension avec bradycardie est un signe d’hémorragie rétropéritonéale.

SITES D’INSERTION

• Rechercher la présence de signes de saignement ou la formation d’un hématome aux sites d’insertion . • Évaluer les douleurs abdominales, les douleurs à l’aine et les maux de dos ipsilatéraux au site d’insertion.

• Un hématome, un caillot ou une déchirure de l’intima peuvent causer une absence transitoire des pouls périphériques distaux. • Les hématomes rétropéritonéaux sont ipsilatéraux au site d’insertion, de sorte que la douleur du même côté du site d’accès nécessite des examens plus approfondis.

ALERTE CLINIQUE

En cas de saignement, une pression continue directe doit être appliquée à 2,5 cm audessus du site d’insertion du cathéter. APPORT LIQUIDIEN

• Assurer une hydratation adéquate par voie intraveineuse (I.V.) ou orale (P.O.).

• La perte sanguine pendant le cathétérisme, le statut NPO et les effets diurétiques des substances radio-opaques utilisées pendant l’intervention exposent l’enfant à un risque d’hypovolémie et de déshydratation.

GLYCÉMIE

• Vérier la glycémie, surtout chez les nourrissons qui doivent recevoir des liquides à base de dextrose par voie I.V.

• Le stress lié à l’intervention, le statut NPO et la perfusion intraveineuse peuvent altérer le taux de glycémie. Chez le nouveau-né ayant une faible réserve de glucose, l’exposition prolongée à la température ambiante froide de la salle d’intervention peut causer un stress froid et entraîner une hypoglycémie. Une hypoglycémie grave ou prolongée peut causer des convulsions.

734

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 16.1

Prise en charge après un cathétérisme cardiaque

L’enseignement après un cathétérisme cardiaque devrait porter sur les aspects suivants : • Retirer le pansement compressif le lendemain du cathétérisme. Garder le site recouvert d’un pansement adhésif pendant plusieurs jours. • Tenir le site d’insertion du cathéter propre et sec. Éviter les bains pendant plusieurs jours ; les douches sont permises. • Éviter les activités physiques intenses et l’éducation physique pendant une semaine, ou selon les recommandations du médecin ; l’enfant peut cependant aller à l’école.

• Vérier la présence de signes d’infection (rougeur, œdème, écoulement, saignement, chaleur au site du cathétérisme, èvre) ; en aviser le médecin. • Indiquer que l’enfant peut reprendre son alimentation habituelle sans restrictions. • Donner de l’acétaminophène ou de l’ibuprofène en cas de douleur. • Informer l’enfant ou la famille de la date et de l’heure du rendez-vous de suivi.

Sources : Adapté de Ben-Joseph (2016) ; Great Ormond Street Hospital (2013) ; Miro et Langevin (2018) ; The Royal Children’s Hospital Melbourne (2017).

16.2

Cardiopathies congénitales

risque de cardiopathie congénitale chez ses frères et sœurs suivants est de 10 % (Park, 2014).

L’incidence des cardiopathies congénitales mineures ou majeures chez les enfants est estimée à 12 cas pour 1 000 naissances au Canada (Wong et al., 2017).

Les malformations cardiaques sont souvent associées à des anomalies chromosomiques (p. ex., le syndrome de Down [trisomie 21] et les trisomies 13 et 18), à des syndromes ou à des anomalies congénitales touchant d’autres systèmes de l’organisme. Au cours de la dernière décennie, des recherches sur la cartographie génique ont permis de détecter une délétion d’une partie du chromosome 22 (locus 22q11) chez la majorité des enfants atteints du syndrome de Di George, du syndrome vélocardiofacial et du syndrome de dysmorphie faciale avec cardiopathie conotroncale. Les caractéristiques de ces syndromes incluent des anomalies cardiaques congénitales, des anomalies du palais mou, une dysmorphie du visage ainsi que des retards de langage et de développement. Les anomalies immunologiques légères des lymphocytes T, l’absence ou l’hypoplasie du thymus, et les anomalies parathyroïdiennes entraînant une hypocalcémie sont présentes avec le syndrome de Di George. Les malformations cardiaques (de 74 à 80 % des cas) souvent associées à une délétion d’une partie du chromosome 22 (locus 22q11) sont des malformations conotroncales (p. ex., l’interruption de l’arc aortique, le tronc artériel commun, la tétralogie de Fallot et la communication interventriculaire avec malalignement postérieur) (Bawle, 2017). La présentation clinique du syndrome de Di George varie : certains enfants sont peu affectés, alors que d’autres en présentent toutes les caractéristiques. Le syndrome de Noonan (anomalies de la valve pulmonaire et cardiomyopathie), le syndrome de Williams (sténose pulmonaire et aortique) et le syndrome de Holt-Oram (communication interauriculaire) sont d’autres syndromes associés à des malformations cardiaques.

Pendant la première année de vie, en plus de la prématurité, la cardiopathie congénitale est une cause importante de morbidité et de mortalité infantiles. Bien qu’il existe plus de 35 malformations cardiaques bien répertoriées, la plus courante est la communication interventriculaire ENCADRÉ 16.2.

16.2.1

Étiologie

La cause exacte de la plupart des anomalies cardiaques congénitales est inconnue, comme l’indique le rapport émanant du Système canadien de surveillance périnatale (ASPC, 2013). Elles seraient dues en majorité à plusieurs facteurs innés, soit un amalgame complexe de facteurs génétiques et environnementaux. Les nombreuses découvertes en biologie moléculaire ainsi que le projet du génome humain favoriseront la compréhension des causes génétiques des cardiopathies congénitales (Huang, Xue, Wang et al., 2016). Certains facteurs de risque augmentent la fréquence des cardiopathies congénitales. Les facteurs maternels incluent les maladies chroniques comme le diabète ou une phénylcétonurie mal maîtrisée, la consommation d’alcool et l’exposition à des toxines environnementales ou à des infections. Lorsqu’un enfant est affecté, le risque de récurrence chez les frères et sœurs est d’environ 3 %, et le risque est plus élevé lorsqu’un parent est affecté. Si un enfant est atteint d’un syndrome d’hypoplasie du cœur gauche, le

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

16

735

16.2.2

Physiopathologie

Modication de la circulation à la naissance Pendant la vie fœtale, le sang qui transporte l’oxygène et les éléments nutritifs en provenance du placenta entre dans le système fœtal par la grosse veine ombilicale. Le sang oxygéné pénètre dans le cœur par la veine cave inférieure. Comme la pression du sang introduit dans l’oreillette droite est élevée, le sang est dirigé vers l’arrière, où il traverse le foramen ovale pour se rendre dans l’oreillette gauche. Ainsi, le sang plus oxygéné entre dans l’oreillette et le ventricule gauches pour être pompé vers l’aorte, en direction de la tête et des membres supérieurs. Le sang provenant de la tête et des membres supérieurs, qui passe dans l’oreillette droite à partir de la veine cave supérieure, est dirigé à travers la valve tricuspide pour entrer dans le ventricule droit. De là, le sang est pompé dans l’artère pulmonaire et dévié en grande partie vers l’aorte descendante par le canal artériel. Seule une petite quantité de sang entre dans les poumons non fonctionnels du fœtus ou en sort FIGURE 16.4A. Avant la naissance, la résistance vasculaire pulmonaire élevée due aux poumons fœtaux affais sés fait augmenter la pression dans le côté droit du cœur et dans les artères pulmonaires. Parallèlement, la circulation placentaire libre et

A

le canal artériel diminuent la résistance vasculaire dans le reste de l’appareil vasculaire fœtal. L’interruption du débit sanguin placentaire par le sectionnement du cordon ombilical et l’expansion des poumons à la naissance provoquent des changements hémodynamiques soudains et marqués du système vasculaire fœtal FIGURE 16.4B. Dès la première respiration, les poumons prennent de l’expansion, et le taux accru d’oxygène entraîne une vasodilatation pulmonaire. Les pressions pulmonaires commencent à diminuer à mesure que les pressions systémiques augmentent après le retrait du placenta. Normalement, le foramen ovale se ferme lorsque la pression de l’oreillette gauche excède celle de l’oreillette droite. Le canal artériel commence à se fermer lorsque la concentration d’oxygène dans le sang augmente ou que d’autres facteurs interviennent, notamment la diminution du niveau sanguin de prostaglandine.

Modications hémodynamiques Pour comprendre la physiologie des malformations cardiaques, il faut cerner le rôle des gradients de pression, du débit et de la résistance dans la circulation. Comme tous les liquides, le sang s’écoule d’une zone de pression élevée vers une zone de pression inférieure, en empruntant le chemin de moindre résistance en réponse à l’action de pompage du

B

FIGURE 16.4 Altérations de la circulation à la naissance – A Circulation prénatale. B Circulation postnatale. Les èches indiquent la direction de l’écoulement sanguin. Quatre veines pulmonaires entrent dans l’oreillette gauche, mais, par souci de simplicité, ce diagramme n’en montre que deux. OD, oreillette droite ; OG, oreillette gauche ; VD, ventricule droit ; VG, ventricule gauche.

736

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

cœur. En général, plus le gradient de pression est élevé, plus le débit est accru ; plus la résistance est grande, plus le débit est faible. Normalement, la pression dans le côté droit du cœur est inférieure à celle qui s’exerce dans le côté gauche, et la résistance de la circulation pulmonaire est plus basse que celle de la circulation systémique. Les pressions sont équivalentes dans les vaisseaux qui entrent dans ces cavités ou qui en sortent. Par conséquent, s’il existe une communication anormale entre les cavités du cœur (p. ex., une communication interventriculaire), le sang s’écoule forcément d’une zone de pression supérieure (côté gauche) vers une zone de pression inférieure (côté droit). C’est ce qu’on appelle le shunt gauche-droite. Les malformations responsables de la cyanose peuvent résulter d’une variation de la pression entraînant une déviation du sang de la droite vers la gauche du cœur (shunt droite-gauche) soit parce que la résistance vasculaire pulmonaire est plus élevée, soit à cause d’une obstruction du débit sanguin à travers la valve et l’artère pulmonaire. La cyanose peut aussi être attribuable à l’absence anormale de cloisonnement entre certaines cavités du cœur ou des grosses artères, ce qui permet au sang oxygéné et au sang désoxygéné de se mélanger, comme dans le cas du tronc artériel commun.

16.2.3

Classication des malformations cardiaques

Les malformations cardiaques peuvent être classées en fonction de différents critères. Autrefois, le principal critère de classication retenu était un signe clinique, la cyanose. C’est de cette façon

qu’étaient distinguées les malformations cardiaques non cyanogènes des malformations cardiaques cyanogènes (maladies bleues). Ce système de classication s’est toutefois révélé problématique dans la pratique, puisque les enfants porteurs d’une malformation non cyanogène peuvent avoir une cyanose, et que ceux porteurs d’une malformation cyanogène peuvent avoir une couleur de peau normale et présenter des signes cliniques d’insufsance cardiaque. Il existe un autre système de classication, plus pratique, qui se fonde sur des paramètres hémodynamiques, c’est-à-dire sur les caractéristiques physiques de la circulation sanguine : 1) augmentation du débit pulmonaire ; 2) diminution du débit pulmonaire ; 3) obstruction de la voie d’éjection ventriculaire ; 4) mélange des deux circulations (mélange de sang oxygéné et de sang appauvri en oxygène dans le cœur ou dans les gros vaisseaux). La FIGURE 16.5 permet de comparer les deux types de malformations. Selon le système de classication hémodynamique, les manifestations cliniques de chaque type de malformation sont uniformes et prévisibles. Les malformations caractérisées par le passage du sang du cœur gauche, zone de haute pression, au cœur droit, zone de faible pression (shunt gauche-droite), provoquent une augmentation du débit pulmonaire et entraînent une insufsance cardiaque. Comme leur nom l’indique, les malformations obstructives sont la conséquence d’une obstruction d’une voie d’éjection ventriculaire : une obstruction de la voie d’éjection ventriculaire gauche évolue vers une insufsance cardiaque, alors qu’une obstruction complète de la voie d’éjection ventriculaire droite

16

FIGURE 16.5 Système de classication hémodynamique : comparaison des malformations cardiaques non cyanogènes et des malformations cardiaques cyanogènes

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

737

se traduit par une cyanose. Les malformations qui entraînent une diminution du débit pulmonaire se manifestent par une cyanose. Les manifestations cliniques des malformations dans lesquelles il y a mélange de sang oxygéné et de sang appauvri en oxygène varient selon les proportions du mélange et le débit pulmonaire ; dans ces cas, une hypoxémie (accompagnée ou non d’une cyanose) et une insufsance cardiaque concomitantes sont habituellement observées. Les ENCADRÉS 16.2 , 16.3 , 16.4 et 16.5 , de même que les sections qui suivent, présentent les stratégies de prise en charge thérapeutique des malformations cardiaques les plus fréquentes, qui ont été regroupées selon le système de classication hémodynamique.

FIGURE 16.6 Anomalies hémodynamiques (shunt gauche-droite) avec augmentation du débit sanguin pulmonaire

ENCADRÉ 16.2

L’issue du traitement chirurgical des malformations cardiaques modérées ou graves est variable. Un certain nombre de facteurs de risque sont associés à une hausse de la morbidité et de la mortalité : prématurité ou faible poids à la naissance, syndrome génétique, concomitance de plusieurs malformations cardiaques, présence d’autres anomalies congénitales et âge au moment de l’intervention chirurgicale (le risque est très élevé chez les nouveau-nés). Afin de représenter adéquate ment les taux de mortalité associés aux traitements actuels, des données multicentriques sont recueillies dans une banque de données entretenue par la Society of Thoracic Surgeons (Jacobs, Mayer, Marvoudis et al., 2016). Le taux de mortalité enregistré dans un établissement donné peut être plus élevé ou plus faible que celui qui gure dans cette base de données. En général, les résultats des interventions chirurgicales correctrices réalisées chez

Description Présence d’un orice dans le septum qui sépare normalement les deux oreillettes, permettant au sang oxygéné de s’écouler de l’oreillette gauche vers l’oreillette droite. Les trois formes de communication interauriculaires les plus communes sont : • Ostium primum (CIA basse) : L’orice est situé dans la partie inférieure du septum ; cette forme de CIA peut être associée à des anomalies de la valve mitrale. • Ostium secundum (persistance du foramen ovale) : L’orice se situe dans le centre du septum. • Sinus venosus (CIA haute) : L’orice se situe près de la jonction entre la veine

Partie 6

Malformations entraînant une augmentation du débit pulmonaire Les malformations cardiaques entraînant une augmentation du débit pulmonaire sont caractérisées par l’existence d’un orice ou d’un canal entre les cavités du cœur (auriculaire ou ventriculaire) ou entre les gros vaisseaux, ce qui permet au sang de passer d’un milieu de haute pression (cœur gauche) à un milieu de faible pression (cœur droit) FIGURE 16.6 . Ce passage du sang du cœur gauche au cœur droit accroît le débit sanguin dans la circulation pulmonaire au détriment de la circulation systémique. Les enfants affectés présenteront des manifestations cliniques de congestion vasculaire pulmonaire, d’hypertension artérielle pulmonaire et d’insuffisance cardiaque. Les malformations typiques de cette catégorie sont la communication interauriculaire, la communication interventriculaire et la persistance du canal artériel ENCADRÉ 16.2.

Malformations entraînant une augmentation du débit pulmonaire

COMMUNICATION INTERAURICULAIRE (CIA)

738

les enfants nés avec une malformation cardiaque n’ont cessé de s’améliorer au cours des 10 dernières années : les taux de mortalité associés à de nombreuses malformations cardiaques graves sont aujourd’hui inférieurs à 10 %, et la fréquence des complications de même que la durée de l’hospitalisation ont diminué. L’amélioration de la santé et la diminution du taux de mortalité due aux anomalies cardiovasculaires congénitales chez les enfants se sont toutefois traduites par une augmentation notable du nombre d’adultes atteints d’une cardiopathie congénitale, ce qui ajoute à la complexité de la gestion de leurs soins (Mozaffarian, Benjamin, Go et al., 2015).

Troubles liés aux systèmes

cave supérieure et l’oreillette droite ; cette forme de CIA se caractérise par des embranchements anormaux de une ou de plusieurs veines pulmonaires à la veine cave (anomalie partielle du retour veineux pulmonaire). Physiopathologie Étant donné que la pression qui règne dans l’oreillette gauche est légèrement supérieure à celle de l’oreillette droite, le sang oxygéné de l’oreillette gauche passe à l’oreillette droite, ce qui accroît le volume de sang qui circule dans le cœur droit et dans le système pulmonaire. Le débit du shunt peut être important, puisque la résistance vasculaire pul­ monaire est faible et que l’oreillette droite peut se dilater davantage que l’oreillette gauche, un facteur qui contribue à réduire la résistance au ux sanguin entre les oreillettes. L’oreillette et le ventricule droits nissent par s’hypertrophier, mais une insuf­ sance cardiaque dans les cas de CIA non compliquée est rarement observée. Si la malformation n’est pas corrigée, ce n’est que vers l’âge de 20 à 30 ans que ses effets sur le système vasculaire pulmonaire (p. ex., des manifesta­ tions de l’hypertension artérielle pulmonaire) se font sentir (Park, 2014).

ENCADRÉ 16.2

Malformations entraînant une augmentation du débit pulmonaire (suite)

Manifestations cliniques

COMMUNICATION INTERVENTRICULAIRE (CIV)

• Silencieuse, dans bien des cas ; peut toutefois évoluer vers une insufsance cardiaque

Description Présence d’un orice dans le septum qui sépare normalement les deux ventricules. Il existe quatre formes de CIV, les deux formes les plus communes étant les CIV périmembraneuses et les CIV musculaires. Les CIV peuvent être classées en fonction de leur localisation :

• À l’auscultation, perception possible d’un soufe systolique caractéris tique associé à un dédoublement xe de B2 ; soufe diastolique parfois entendu • Prédisposition aux arythmies auriculaires (probablement attribuables à l’hypertrophie auriculaire et à l’étirement des bres de conduction), aux maladies vasculaires pulmonaires obstructives (en raison du débit pulmonaire accru) et, à long terme, aux embolies Traitement chirurgical Lorsque la communication est modérée ou large, la fermeture de l’orice se fait à l’aide d’une pièce (pièce péricardique ou pièce synthétique en Dacron MD). En principe, cette intervention à cœur ouvert sous circulation extracorporelle (CEC) est réalisée avant que l’enfant soit en âge d’aller à l’école. En cas de sinus venosus, il faut également corriger le retour veineux pulmonaire anormal en anastomosant les veines pulmonaires à l’oreillette gauche à l’aide d’une cloison. La correction d’un ostium primum peut également nécessiter une valvuloplastie mitrale ou, rarement, un remplacement de la valve mitrale. Traitement non chirurgical (fermeture percutanée) Dans le cas de l’ostium secundum, la fermeture percutanée par cathétérisme cardiaque interventionnel est de plus en plus utilisée, d’autant plus qu’elle peut être réalisée en chirurgie d’un jour TABLEAU 16.3. La plupart du temps, une prothèse à double ombrelle (AmplatzerMD) est posée. Cette technique est tout particulièrement indiquée lorsque la communication est de petite taille (entre 5 et 32 mm) et qu’il y a au moins 4 mm de tissu sur ses bords pour que les ombrelles puissent y être xées ; les communications larges aux contours irréguliers et sans rebords nécessitent un traitement chirurgical. La fermeture par cathétérisme donne des résultats semblables à ceux de l’intervention chirurgicale chez les enfants sélectionnés adéquatement, et elle a l’avantage de diminuer le séjour hospitalier et de réduire les risques de complications. L’enfant reçoit de l’acide acétylsalicylique à faible dose pendant six mois après l’intervention (Vick et Bezold, 2016). PHARMACOVIGILANCE

Cesser l’acide acétylsalicylique et contacter le médecin si l’enfant a un rhume ou de la èvre, est exposé à la varicelle ou commence à faire facilement des ecchymoses. Pronostic Chez plus de 80 % des nourrissons qui présentent une CIA mesurant de 3 à 8 mm, la communication se referme de façon spontanée avant l’âge de 18 mois. Donc, à moins que le nourrisson ne présente des manifestations cliniques précoces nécessitant une intervention invasive, un traitement médical et un suivi peuvent être adéquats pour permettre la possibilité d’une fermeture spontanée (Park, 2014). Une fermeture spontanée après l’âge de 4 ans est moins fréquente. Moins de 5 % des enfants présentent un shunt résiduel 1 an après une fermeture par cathétérisme cardiaque interventionnel. La mortalité opératoire est très faible (inférieure à 0,5 %) (Park, 2014).

• CIV périmembraneuses : Siègent dans la partie haute du septum (80 % des cas). • CIV musculaires : Se situent dans la partie basse du septum. La taille des CIV est variable : les communications les plus petites sont de la taille d’un trou d’épingle, et les plus larges sont caractérisées par l’absence totale de septum interventriculaire, résultant en un ventricule unique, ou cœur univentriculaire. Les CIV sont fréquemment associées à d’autres malformations cardiaques (sténose pulmonaire, transposition des gros vaisseaux, tétralogie de Fallot, persistance du canal artériel, canal atrioventriculaire complet, malformations auriculaires et coarctation de l’aorte). La CIV isolée représente 10 % des malformations cardiaques. La fermeture est spontanée dans de nombreux cas (de 20 à 60 %) et s’effectue au cours de la première année de vie lorsque la communication est petite ou modérée. Une CIV induit un shunt gauche-droite. Physiopathologie Étant donné que la pression qui règne dans le ventricule gauche est supérieure à celle dans le ventricule droit, et que la résistance vasculaire pulmonaire est plus basse que la résistance artérielle systémique, le sang emprunte la CIV pour se jeter dans l’artère pulmonaire. L’augmentation de volume sanguin amené aux poumons entraîne progressivement une hypertension artérielle pulmonaire et une plus grande résistance vasculaire pulmonaire, ce qui a pour effet d’augmenter la pression dans le ventricule droit, qui nit par s’hypertrophier. Lorsque la surcharge ventriculaire droite n’est plus compensée par la dilatation du ventricule, l’oreillette droite se dilate à son tour. Manifestations cliniques • Insufsance cardiaque fréquente chez les nourrissons de plus de 2 mois avec une CIV de taille moyenne à large (Park, 2014) • À l’auscultation, soufe holosystolique intense perçu surtout au bord gauche du sternum • Prédisposition aux endocardites infectieuses et aux maladies vasculaires pulmonaires obstructives, comme cela est expliqué dans la section 16.5.1 de ce chapitre. Traitement chirurgical • Fermeture complète sous CEC (traitement de prédilection) : Les petites communications sont fermées par sutures directes. Quant aux communications larges, elles sont habituellement obturées par une pièce en Dacron MD suturée à leurs bords. L’approche chirurgicale se fait générale ment en passant par l’oreillette droite et la valve tricuspide. Les complications postopératoires incluent la CIV résiduelle et des troubles de la conduction.

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

739

16

ENCADRÉ 16.2

Malformations entraînant une augmentation du débit pulmonaire (suite)

• Intervention palliative : Le cerclage de l’artère pulmonaire, c’est-à-dire la pose d’un manchon tissulaire enserrant le tronc de l’artère pulmonaire principale an de réduire le débit pulmonaire, peut être pratiqué chez les nourrissons porteurs de CIV musculaires multiples qui ne sont pas opérables ou dont l’anatomie est complexe. Traitement non chirurgical (fermeture percutanée) La fermeture chirurgicale est souvent le premier choix. La fermeture percutanée des CIV par cathétérisme cardiaque interventionnel se pratique dans certains centres hospitaliers dans des cas précis (p. ex., en présence d’une CIV résiduelle chez l’enfant déjà opéré ou en cas de CIV difcilement accessible par le chirurgien). En raison de l’interférence du dispositif avec le système de conduction et du taux élevé de bloc atrioventriculaire complet précoce ou tardif, certains pays ont cessé de pratiquer cette procédure, alors que d’autres continuent de faire des essais cliniques (Fulton et Saleeb, 2016 ; Ovaert, Kammache, Bonello et al., 2011; Polat et Türkmen, 2016). Pronostic Les risques auxquels est exposé l’enfant dépendent du nombre de CIV, de leur localisation et de la présence ou non d’autres malformations cardiaques. Les CIV périmembraneuses isolées sont associées à une mortalité faible (inférieure à 1 %), alors que les CIV musculaires multiples, celles présentes chez les nourrissons de moins de 2 mois et celles associées à d’autres malformations, sont à plus haut risque (Park, 2014). CANAL ATRIOVENTRICULAIRE COMPLET (CAVC)

Description Fusion incomplète des bourgeons endocardiques. Le CAVC est caractérisé par la présence d’un ostium primum (CIA basse), qui est en continuité avec une CIV haute, et de ssures dans les valves mitrale et tricuspide, qui forment un large orice atrioventriculaire commun permettant au sang de circuler entre les quatre cavités du cœur. L’orientation et le trajet de la circulation dépendent des résistances vasculaires pulmonaire et systémique, des pres sions qui règnent dans les ventricules gauche et droit, et de la compliance des cavités cardiaques. Le CAVC est la malformation cardiaque la plus courante chez les enfants atteints du syndrome de Down. Physiopathologie Les troubles hémodynamiques dépendent de la gravité de la malformation et du degré de résistance vasculaire pulmonaire. Comme cette résistance est élevée peu après la naissance, le shunt gauche-droite est relativement peu important. Cependant, lorsque cette résistance décroît, le shunt s’intensie et augmente le débit pulmonaire. La congestion vasculaire pulmonaire qui en résulte prédispose l’enfant à l’insufsance cardiaque. Manifestations cliniques • Signes d’insufsance cardiaque de modérée à grave • Soufe systolique intense à l’auscultation

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Partie 6

Troubles liés aux systèmes

• Dans certains cas, cyanose discrète qui s’accentue lorsque l’enfant pleure • Risque élevé de maladie vasculaire pulmonaire obstructive Traitement chirurgical • Intervention palliative : Un cerclage de l’artère pulmonaire est parfois réalisé chez les nourrissons qui ont de graves symptômes. • Correction chirurgicale complète : Une réparation complète durant l’enfance est fréquente. En raison de la large CIV, l’intervention est faite dans les six premiers mois de vie. Elle consiste en la fermeture de la CIV et de la CIA au moyen de une ou de deux pièces, et en une valvuloplastie (suture de la ssure mitrale ou confection de deux valves auriculoventriculaires). Les complications postopératoires comprennent le bloc atrioventriculaire cardiaque, l’insufsance cardiaque, la régurgitation mitrale, les arythmies et l’hypertension artérielle pulmonaire. Pronostic La mortalité opératoire est de 3 à 10 %. Les facteurs qui augmentent le risque chirurgical sont le jeune âge, le reux grave de la valve atrioventriculaire, l’hypoplasie du ventricule gauche, la résistance vasculaire pulmonaire élevée et xe, et la présence de symptômes préopératoires (Park, 2014). Il est possible qu’une régurgitation mitrale survienne par la suite et qu’il faille alors procéder au remplacement de la valve mitrale. PERSISTANCE DU CANAL ARTÉRIEL (PCA)

Description Échec de la fermeture du canal artériel qui relie l’aorte descendante à l’artère pulmonaire durant la vie fœtale. Le fait que le canal artériel reste ouvert permet au sang de circuler de l’aorte (haute pression) à l’artère pulmonaire (basse pression), entraînant un shunt gauche-droit. Physiopathologie Les répercussions hémodynamiques de la PCA varient en fonction du diamètre du canal et du degré de résistance vasculaire pulmonaire. À la naissance, les résistances vasculaires pulmonaire et systémique sont à peu près égales, si bien que les résistances opposées au ux sanguin dans l’aorte et dans l’artère pulmonaire sont équivalentes. Lorsque la pression systémique devient supérieure à la pression pulmonaire, une partie du sang qui circule dans l’aorte emprunte le canal artériel pour déboucher dans l’artère pulmonaire (shunt gauche-droite). Le surplus de sang provenant de l’aorte repasse dans les poumons et est réacheminé vers l’oreillette gauche, puis vers le ventricule gauche. Ce shunt gauche-droite provoque donc une surcharge du cœur gauche, une augmentation de la congestion vasculaire pulmonaire et, possiblement, une hausse de la résistance vasculaire pulmonaire ; il peut entraîner une augmentation de la pression intraventriculaire droite et une hypertrophie du ventricule droit. Manifestations cliniques • Peut être silencieuse ou se manifester par des signes d’insufsance cardiaque • À l’auscultation, perception d’un soufe continu caractéristique rappelant un bruit de machine • Pouls bondissant en raison d’une augmentation de la pression différentielle attribuable au passage du sang de l’aorte vers l’artère pulmonaire • Risque d’endocardite infectieuse et de maladie vasculaire pulmonaire obstructive à long terme en raison de l’hyperdébit pulmonaire constant qu’elle entraîne

ENCADRÉ 16.2

Malformations entraînant une augmentation du débit pulmonaire (suite)

Pharmacothérapie L’administration d’indométacine par voie I.V. (un inhibiteur de la synthèse des prostaglandines) ou d’ibuprofène par voie orale ou I.V. provoque la fermeture du canal artériel chez les prématurés et certains nouveau-nés (Pacici, 2016).

Traitement non chirurgical (embolisation percutanée) Dans de nombreux centres hospitaliers, une embolisation percutanée du canal artériel est réalisée à l’aide de ressorts métalliques (coils) ou d’une fermeture par dispositif d’occlusion en salle de cathétérisme. Cela dit, le traitement chirurgical reste de mise pour les prématurés et les jeunes nourrissons, car le calibre de leurs artères fémorales est trop petit pour effectuer une procédure percutanée, ou pour ceux dont le canal artériel est trop large ou inhabituel.

Traitement chirurgical La section ou la ligature du canal artériel est réalisée par thoracotomie gauche. Une autre technique, la thoracoscopie assistée par vidéo, a récemment vu le jour. Elle consiste à agrafer le canal artériel par voie endoscopique. Cette technique, qui permet de s’affranchir de la thoracotomie et qui réduit donc la durée de la convalescence, n’est employée que dans quelques centres hospitaliers.

Pronostic Les traitements chirurgical et non chirurgical ne comportent qu’un faible risque et sont associés à une mortalité de 0 %. Toutefois, chez les grands prématurés, la fermeture du canal artériel est associée à une mortalité plus élevée (de 0 à 3 %) en raison des autres problèmes médicaux qui affectent cette clientèle. Les complications sont rares, mais elles peuvent inclure une paralysie des cordes vocales causée par des blessures au nerf laryngé, une paralysie de l’hémidiaphragme gauche ou une lésion du canal thoracique (Park, 2014).

Dans le cas des malformations obstructives, la sténose, c’est-à-dire le rétrécissement du calibre d’une structure anatomique, fait obstacle au passage du sang expulsé par un ventricule. La pression dans le ventricule et dans l’artère en amont de l’obstruction augmente, alors que la pression qui règne dans la région située en aval de l’obstruction diminue. Sur le plan anatomique, la principale conséquence de la sténose aortique est l’hypertrophie de la paroi du ventricule gauche, qui conduit progressivement à une hausse de la pression télédiastolique, et donc à une hypertension artérielle ainsi qu’à une hypertension veineuse pulmonaire.

une surcharge de pression dans le ventricule et par une diminution du débit cardiaque ; sur le plan clinique, elles se caractérisent par des signes d’insuffisance cardiaque. Les enfants porteurs d’une légère malformation obstructive peuvent ne présenter aucun symptôme. Dans de rares cas, comme dans celui d’une sténose pulmonaire grave, une hypoxémie peut être présente.

clinique

Jugement

Malformations obstructives

Justin est né à terme il y a 1 mois. Il a une coarctation de l’aorte, et sa pression artérielle est à 120/80 mm Hg. Qu’est-ce qui peut expliquer la valeur de la pression artérielle de Justin ?

16

Cette hypertrophie ventriculaire entrave par ailleurs la circulation dans les artères coronaires et peut causer un infarctus du myocarde ou une fibrose des muscles papillaires du ventricule gauche, laquelle provoque une insufsance mitrale. Le rétrécissement se situe habituellement à proximité de la valve, entre le ventricule et l’artère FIGURE 16.7, et, selon le cas, il est question de sténose valvulaire (rétrécissement de la valve ellemême), de sténose sous-valvulaire (rétrécissement situé en dessous de la valve) ou de sténose supravalvulaire (rétrécissement du calibre de l’artère, au-dessus de la valve). La coarctation de l’aorte, la sténose aortique et la sténose pulmonaire sont les principales malformations obstructives ENCADRÉ 16.3. Sur le plan hémodynamique, elles se caractérisent par

FIGURE 16.7 Sténose pulmonaire – L’obs­ truction à l’éjection du ventricule peut se produire dans la valve, sous la valve (sous­valvulaire) ou au­dessus de la valve (supravalvulaire). Ao, aorte ; AP, artère pulmonaire.

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

741

ENCADRÉ 16.3

Malformations obstructives

COARCTATION DE L’AORTE

Description Rétrécissement congénital du calibre de la lumière de l’aorte. Le rétrécissement est le plus souvent localisé dans l’aorte thoracique, près d’où était le canal artériel. Physiopathologie Le rétrécissement de l’aorte a pour effet d’augmenter la pression en amont (hyper­ tension artérielle dans la tête et les mem­ bres supérieurs) et de diminuer la pression en aval (diminution de la pression de per­ fusion du corps et des membres inférieurs). Manifestations cliniques • Variables en raison de la position, du degré et de l’étendue du segment rétréci : hypertension, pouls bondissants aux bras, affaiblissement, voire abolition des pouls fémoraux, diminution de la température des membres inférieurs et hypotension de ces derniers • Chez le nourrisson, signes d’insufsance cardiaque parfois présents ; en cas de coarctation à un stade critique, détérioration rapide possible de l’état hémodynamique provoquant une acidose grave, une hypotension, un choc et un collapsus cardiovasculaire ; pour les nourrissons, ventilation articielle et administration d’un traitement inotrope souvent nécessaires avant l’inter­ vention chirurgicale • Chez les enfants plus âgés, présence d’étourdissements, de céphalées, d’évanouissements et d’épistaxis • Prédisposition aux risques suivants : hypertension artérielle, dissection aortique, anévrisme aortique et AVC Traitement chirurgical La correction chirurgicale est le traitement de prédilection chez les nourrissons ayant moins de six mois, chez ceux qui ont une sténose d’un long segment aortique ou ceux ayant une anatomie complexe, mais elle peut également être utilisée dans tous les autres cas. Elle consiste à pratiquer une anastomose termino-terminale de l’aorte après résection de la portion sténosée, ou à élargir la partie rétrécie de l’aorte par une prothèse synthétique ou une portion de l’artère sous­clavière. Elle est réalisée par thoracotomie et, étant donné que la malformation ne se situe pas dans le cœur ou le péricarde, il n’est pas nécessaire de mettre l’enfant sous circulation extracorporelle. L’hypertension postopératoire est traitée à l’aide d’une infusion de nitroprussiate de sodium, d’esmolol ou de milrinone, suivie de médicaments oraux tels que les inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (p. ex., le captopril ou l’énalapril) ou les bêtabloqueurs. Traitement non chirurgical (angioplastie percutanée) L’angioplastie avec sonde à ballonnet est le traitement de premier recours chez les enfants et les adolescents. Chez l’adolescent, une endoprothèse est insérée dans l’aorte pour que celle­ci reste béante. Bien que le succès et la sécurité de l’angioplastie chez les nourrissons soient reconnus, des taux de récurrence élevés ont été décrits juste quelques mois après la procédure. La récurrence est plus faible chez les adolescents et les adultes. À long terme, cependant, la comparaison directe de l’intervention chirurgicale et de l’intervention par angioplastie avec sonde à ballonnet chez les adolescents et les adultes démontre des taux de récidive plus élevés et la formation d’un anévrisme pour l’angioplastie. Ces résultats suggèrent que pour la coarctation discrète, il est

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Partie 6

Troubles liés aux systèmes

raisonnable de poursuivre avec l’angioplastie pour les enfants plus âgés, mais que, chez les nourrissons (surtout ceux âgés de moins de un mois), on ne doit envisager cette procédure que comme une étape temporaire avant une éven­ tuelle réparation chirurgicale (Agarwala, Bacha, Cao et al., 2016 ; Vergales, Gangemi, Rhueban et al., 2013). Pronostic Le taux de mortalité des enfants atteints d’une coarctation de l’aorte isolée est inférieur à 5 % ; le risque de décès est plus élevé chez les nourrissons porteurs d’autres malformations cardiaques complexes (Park, 2014). L’hypertension résiduelle permanente qui peut persister après la correction chirurgicale de la coarctation de l’aorte semble être liée à l’âge auquel cette intervention est effectuée. Pour prévenir l’hypertension au repos et l’hyperten­ sion d’effort qui peuvent survenir après l’intervention, il est recommandé de réaliser cette dernière au cours des deux premières années de vie. Le risque de récurrence à long terme de la coarctation de l’aorte est compris entre 15 et 30 % chez les nourrissons qui subissent une correction chirurgicale (Agarwala et al., 2016). Les techniques d’angioplastie percutanée par sonde à ballonnet se sont révélées efcaces pour corriger les gradients de coarctation résiduels qui persistent à la suite de l’intervention chirurgicale. STÉNOSE AORTIQUE

Description Rétrécissement de la valve aor­ tique qui fait obstacle à l’éjection du sang du ventricule gauche et qui entraîne une diminution du débit cardiaque, une hypertrophie ventriculaire gauche et une congestion vasculaire pulmonaire. Elle peut être congénitale ou acquise. On en distingue trois formes : • Sténose valvulaire aortique : La plus fréquente ; elle est provo­ quée par une bicuspidie ou une monocuspidie (fusion des trois cuspides). • Sténose sous­valvulaire : Elle est caractérisée par la présence d’une membrane breuse au­dessous des cuspides de la valve aortique qui, elle, est normale. • Sténose supravalvulaire : Elle est moins fréquente. La sténose valvulaire aortique est une malformation grave, et ce, pour plu ­ sieurs raisons : 1) l’obstruction est généralement évolutive ; 2) les brusques épisodes d’ischémie myocardique et la diminution du débit cardiaque qu’elle entraîne peuvent provoquer une mort subite ; 3) la valve reconstruite par valvuloplastie est presque toujours imparfaite. C’est l’une des seules malformations cardiaques pour lesquelles il peut être nécessaire de limiter les activités physiques intenses an de ménager la fonction cardiaque. Physiopathologie Le rétrécissement de la voie d’éjection aortique fait obstacle à l’éjection ventriculaire gauche. La surcharge imposée au ventricule gauche conduit à son hypertrophie. L’installation d’une insufsance ventriculaire entraîne une augmentation de la pression intra­auriculaire gauche, et donc de la pression dans les veines pulmonaires, ce qui aboutit à une congestion vasculaire pulmonaire, ou œdème pulmonaire.

ENCADRÉ 16.3

Malformations obstructives (suite)

Manifestations cliniques • Nouveau-nés atteints d’une sténose aortique grave : diminution du débit cardiaque entraînant un pouls faible, de l’hypotension, de la tachycardie et des difcultés d’alimentation • Enfants : intolérance à l’effort, douleurs thoraciques et étourdissements en station debout prolongée ; à l’auscultation, soufe systolique d’éjection parfois présent • Nourrissons et enfants : risque d’endocardite infectieuse, d’insufsance coronarienne et de dysfonctionnement ventriculaire STÉNOSE VALVULAIRE AORTIQUE

Traitement chirurgical Chez les enfants ayant une sténose aortique isolée, la réparation de la valve par commissurotomie (ou valvulotomie percutanée) est préférable au remplacement valvulaire aortique. En cas d’insufsance aortique (ou régurgitation de la valve aortique), la valve doit être remplacée. Les options chirurgicales incluent le remplacement de la racine de la valve aortique par une valve mécanique ou une prothèse biologique (bioprothèse) provenant : • d’une xénogreffe : tissu animal (valve porcine ou péricarde bovin) ; • d’une homogreffe : tissu cardiaque humain prélevé sur un donneur ; • d’une autogreffe : tissu prélevé du patient lui-même. L’autogreffe correspond à la procédure de Ross, qui consiste en la substitution de la valve aortique par la valve pulmonaire de l’enfant ; la valve pulmonaire est ensuite remplacée par celle d’un donneur (homogreffe pulmonaire). Dans un premier temps, l’intervention de Norwood pourra être pratiquée chez les nouveau-nés ayant une sténose aortique grave et dont le cœur gauche n’est pas sufsamment développé (hypoplasie du cœur gauche ENCADRÉ 16.5). Traitement non chirurgical (valvuloplastie percutanée) La valvuloplastie (dilatation par sonde à ballonnet) réalisée en salle de cathétérisme est désormais le traitement de première intention. Pronostic • Valvuloplastie percutanée Les complications potentielles de la valvuloplastie sont les suivantes : insufsance ou régurgitation aortiques, rupture des cuspides, abolition du pouls dans le membre à l’intérieur duquel le cathéter a été introduit et perforation de la valve mitrale ou du ventricule gauche (Park, 2014). Le taux de mortalité chez les nouveau-nés très malades ayant une sténose aortique grave a diminué à environ 10 %, comparativement à 40 et 50 % dans le passé. • Valvulotomie À la suite de la valvulotomie aortique (incision de la valve aortique), 15 % des enfants souffrent de régurgitation aortique modérée à grave qui s’installe soit immédiatement après l’intervention, soit progressivement. Cette intervention de première intention demeure une intervention palliative en raison du taux élevé (40 à 50 % des cas) de resténose ou de régurgitation aortique, d’où la nécessité de procéder à une intervention chirurgicale dans les 5 à 10 ans qui suivent (Alsou, 2014 ; Brown, 2017; Park, 2014). • Remplacement valvulaire La complexité du remplacement valvulaire est attribuable à plusieurs facteurs : âge et grandeur de l’enfant, longévité de la prothèse et, par conséquent, son éventuel remplacement, nécessité d’administrer un anticoagulant et risque de

thromboembolie. Le choix de l’intervention est fonction des caractéristiques cardiaques et vasculaires, et des pathologies associées de l’enfant. Le taux de mortalité après la procédure de Ross et la procédure de Ross-Konno est inférieur à 5 % (Park, 2014). La mortalité chez les nourrissons à la suite d’un remplacement valvulaire se situe entre 15 et 50 % (Sharabiani, Dorobantu, Mahani et al., 2016). Les risques de réintervention et de mortalité sont plus élevés chez les jeunes enfants, surtout ceux âgés de moins de 1 an, qui ont eu besoin d’une procédure de Ross avec homogreffe pulmonaire ou d’un remplacement valvulaire par valve mécanique. STÉNOSE AORTIQUE SOUS-VALVULAIRE

Traitement chirurgical L’intervention consiste à inciser la membrane sous-aortique ou l’anneau bromusculaire en cause. Si l’obstruction a entraîné un rétrécissement de la voie d’éjection ventriculaire gauche et une hypoplasie de l’anneau aortique, il peut être nécessaire d’élargir cette voie d’éjection et l’anneau aortique à l’aide d’une pièce, et de remplacer la valve aortique selon le procédé de Konno. La présence d’une régurgitation aortique importante est considérée comme une indication pour l’intervention chirurgicale. Une régurgitation aortique importante survient fréquemment à la suite d’une résection efcace de l’obstruction et de multiples tentatives de dilatation par sonde à ballonnet. Pronostic Le risque de mort subite chez les enfants non traités varie de 2 à 10 %. Dans les grands centres hospitaliers, la mortalité associée au traitement chirurgical des sténoses sous-valvulaires est inférieure à 1 %. Toutefois, de 10 à 50 % des cas présentent des resténoses sous-valvulaires qui commandent une nouvelle intervention chirurgicale dans les 10 ans suivant la première opération (Schneider, 2015). STÉNOSE PULMONAIRE

Description Rétrécissement siégeant à la racine de l’artère pulmonaire. Cet obstacle à l’écoulement du sang entraîne une hypertrophie du ventricule droit et une diminution du débit pulmonaire. L’obstacle à l’écoulement du sang peut se produire à différents niveaux :

16

• Sténose valvulaire pulmonaire ; • Sténose sous-valvulaire (ou infundibulaire) ; • Sténose supravalvulaire, sur le tronc de l’artère pulmonaire au-dessus de la valve ; • Sténose périphérique des branches pulmonaires. Physiopathologie Le ventricule droit s’hypertrophie pour vaincre l’obstacle à l’éjection du sang. Lorsqu’une insufsance ventriculaire droite s’installe, la pression augmente dans l’oreillette droite, ce qui peut entraîner la réouverture du foramen ovale, un shunt du sang appauvri en oxygène vers l’oreillette gauche et une cyanose systémique. Lorsque la sténose pulmonaire est grave, elle peut évoluer vers une insufsance cardiaque droite et une congestion veineuse systémique. En l’absence de traitement rapide, elle peut entraîner le décès de l’enfant. Forme extrême de sténose pulmonaire, l’atrésie pulmonaire se caractérise par une obstruction complète de l’artère pulmonaire associée à l’hypoplasie du

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

743

Malformations obstructives (suite)

ventricule droit (de taille réduite) et à l’hypertrophie (épaississement) d’une paroi ventriculaire. S’il n’y a pas de communication interventriculaire, le sang est dirigé de l’oreillette droite vers l’oreillette gauche par le foramen ovale ou par la présence d’une autre anomalie cardiaque (p. ex., la communication interauricu laire). La circulation pulmonaire dépend donc de la présence du canal artériel. La sténose pulmonaire peut être associée à une autre malformation, notamment à la persistance du canal artériel, qui permet l’écoulement du sang de l’aorte vers l’artère pulmonaire jusqu’aux poumons et qui compense ainsi en partie ses effets obstructifs. Manifestations cliniques • Peut être silencieuse, ou entraîner une cyanose discrète ou une insufsance cardiaque droite chez certains nourrissons • En cas de sténose serrée, accentuation des symptômes ; les nourrissons naissant avec une sténose très serrée présentent une cyanose dès la naissance • Survie en fonction du maintien de la perméabilité du canal artériel par l’administration de prostaglandine E 1 (alprostadil) permettant de fournir un ux sanguin pulmonaire adéquat • À l’auscultation, soufe d’éjection systolique intense pouvant être perçu au bord supérieur gauche du sternum • Chez les enfants très malades, soufe faible en raison de la diminution du débit cardiaque et du shunt droite-gauche • Cardiomégalie visible sur les radiographies • Risque d’endocardite infectieuse Traitement non chirurgical Dès que le nouveau-né ayant une sténose très serrée est stable sur un plan hémodynamique (maintien du ux sanguin pulmonaire par perfusion de prostaglandine E1), une valvu loplastie par ballonnet ou une valvulotomie chirurgicale doit être effectuée. La valvuloplastie par ballonnet est la procédure de choix, car elle est aussi efcace que la correction chirurgicale tout en étant moins invasive. Cependant, si la valvuloplastie par ballonnet échoue, une intervention chirurgicale urgente est nécessaire (Peng et Perry, 2017).

L’angioplastie par ballonnet pour dilater l’artère pulmonaire (sténose supravalvulaire ou sténose périphérique des branches pulmonaires) se fait en salle de cathétérisme. Comme le montre la gure ci-contre, la sonde est insérée par la valve pulmonaire jusque dans l’artère pulmonaire. Lorsqu’elle atteint la section rétrécie de l’artère, le ballonnet est goné puis dégoné pour élargir le vaisseau. Très efcace, l’angioplastie n’entraîne que peu de complications. Elle est devenue le traitement de prédilection des sténoses pulmonaires légères, d’autant plus qu’elle peut être réalisée sans danger chez le nouveau-né. Traitement chirurgical La valvulotomie chirurgicale est souvent nécessaire pour les enfants chez qui la valve pulmonaire est dysplasique (ou dysmorphique) et qui ont un anneau valvulaire ou une artère pulmonaire principale hypoplasique (de taille réduite), et chez les enfants ayant une sténose pulmonaire sous-valvulaire (Peng et Perry, 2017). Chez le nourrisson, une valvulotomie par voie transventriculaire à cœur fermé (technique de Brock) est pratiquée, et chez l’enfant, une valvulotomie pulmonaire sous CEC. Pronostic Les complications de la valvuloplastie par ballonnet sont extrêmement rares, à l’exception de la régurgitation pulmonaire qui survient chez 10 à 40 % des enfants, à un degré variable (Park, 2014). Certains problèmes peuvent toutefois survenir à long terme (resténose, incompétence ou régurgitation valvulaire). Les risques associés aux traitements chirurgical et non chirurgical sont faibles ; en général, le taux de mortalité chirurgicale est inférieur à 1 %, sauf chez les nouveau-nés gravement malades, pour lesquels il s’élève à 10 % (Park, 2014).

Malformations entraînant une diminution du débit pulmonaire

FIGURE 16.8 Anomalies hémodynamiques (shunt droite-gauche) avec diminution du débit sanguin pulmonaire

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Partie 6

Les malformations cardiaques entraînant une diminution ou une obstruction du débit pulmonaire se caractérisent par un défaut anatomique (CIA ou CIV) entre la partie droite et la partie gauche du cœur FIGURE 16.8. Étant donné que le sang sort difcilement de la partie droite du cœur par l’artère pulmonaire, la pression dans le côté droit augmente et dépasse la pression dans le côté gauche. Cela entraîne un shunt droite-gauche à travers la CIA ou la CIV (qui court-circuite la circulation pulmonaire) se soldant par un mélange de sang désaturé (appauvri en oxygène) et de sang oxygéné dans la circulation systémique. Sur le plan clinique, les enfants atteints sont hypoxémiques et présentent habituellement les signes d’une cyanose à un degré variable selon la

Troubles liés aux systèmes

proportion de sang désaturé qui est dirigée vers la circulation systémique. La tétralogie de Fallot et l’atrésie tricuspidienne sont les malformations les plus courantes de cette catégorie ENCADRÉ 16.4.

clinique

Jugement

ENCADRÉ 16.3

Coralie est âgée de deux mois. Elle est née avec une tétralogie de Fallot. Le pédiatre a jugé qu’un traitement chirurgical n’était pas urgent. Cependant, les parents s’inquiètent, car ils craignent pour la vie de leur enfant. Quelle observation prioritaire justierait qu’une correction chirurgicale complète soit devancée ? a) Un battement des ailes du nez. b) Une tachycardie persistante. c) Une augmentation de la pression artérielle. d) Une accentuation de la cyanose.

ENCADRÉ 16.4

Malformations entraînant une diminution du débit pulmonaire

TÉTRALOGIE DE FALLOT

Description La plus commune parmi les lésions cyanogènes, la tétralogie de Fallot représente 10 % des cas de cardiopathies congénitales (Bhimji, 2017). La forme classique associe quatre malformations : 1. Large CIV ; 2. Sténose pulmonaire infundibulaire ; 3. Dextroposition de l’aorte (chevauchement de l’aorte sur le septum interventriculaire) ; 4. Hypertrophie ventriculaire droite. Physiopathologie Les répercussions hémodynamiques varient considérablement d’un cas à l’autre et dépendent essentiellement du degré de sténose pulmonaire, de la largeur de la CIV et des résistances vasculaires pulmonaire et systémique. Comme la CIV est généralement large, les pressions qui règnent dans les deux ventricules sont équivalentes. L’orientation du shunt dépend donc de la différence qui existe entre les résistances vasculaires pulmonaire et systé­ mique. Si la résistance vasculaire pulmonaire est plus élevée que la résistance vasculaire systémique, le shunt est de droite à gauche (cyanogène) ; dans le cas contraire, si la résistance vasculaire systémique est plus élevée que la résistance vasculaire pulmonaire, le shunt est de gauche à droite (non cyanogène). La sténose pulmonaire entraîne une diminution du débit pulmo­ naire, et donc une diminution du volume de sang oxygéné acheminé vers le cœur gauche. Selon la position de l’aorte, il se peut que le sang des deux ventricules atteigne la circulation systémique. Manifestations cliniques • Dans certains cas, cyanose parfois prononcée à la naissance, alors que dans d’autres cas, cyanose discrète, mais s’accentuant durant la première année de vie, à mesure que la sténose pulmonaire se resserre • À l’auscultation, perception d’un soufe systolique caractéristique d’intensité modérée • Nourrisson pouvant être en proie à des accès de cyanose et des malaises anoxiques (détaillés plus loin) • Malaises anoxiques survenant lorsque les besoins en oxygène de l’orga­ nisme sont supérieurs à l’apport en oxygène, notamment durant les pleurs ou après les repas • Malaises anoxiques pouvant causer des embolies, convulsions, syncopes (perte de conscience) ou mort subite Traitement chirurgical • Anastomose palliative systémo­pulmonaire : Chez les nourrissons qui ne peuvent subir une intervention chirurgicale correctrice (p. ex., en présence d’artères pulmonaires de petite taille), une anastomose palliative est pratiquée an d’augmenter le débit pulmonaire et la saturation en oxygène du sang artériel. L’anastomose de Blalock­Taussig modiée est la technique privilégiée TABLEAU 16.11. Cependant, en général, cette intervention

peut entraîner une distorsion de l’artère pulmonaire. La correction chirurgi­ cale complète suivra quelques mois après l’anastomose. • Correction chirurgicale complète : La correction élective de la tétralogie de Fallot est habituellement effectuée au cours de la première année de vie. Cette intervention est indiquée en cas d’accentuation de la cyanose et de malaises anoxiques. Elle consiste à refermer la CIV, à réséquer les tissus responsables de la sténose infundibulaire et à élargir la voie d’éjection ventriculaire droite au moyen d’une pièce péricardique. Dans certains cas, la pièce s’étend au­delà de l’anneau pulmonaire (pièce transannulaire), si bien que la valve pulmonaire devient incompétente. La correction nécessite une sternotomie médiane et se fait sous CEC. Pronostic La mortalité opératoire associée à l’anastomose de Blalock­Taussig modiée est de moins de 1 % ; celle associée à la correction complète de la tétralogie de Fallot est inférieure à 3 %. Les enfants âgés de moins de 3 mois et ceux âgés de plus de 4 ans, ainsi que ceux présentant une hypoplasie grave de l’anneau pulmonaire et du tronc pulmonaire, des CIV multiples et des collatérales aortopulmonaires, présentent un risque plus élevé de mortalité (Park, 2014). Le perfectionnement des techniques employées a contribué à réduire la fréquence des arythmies et des morts subites. Les cas de bloc cardiaque sont rares. La mort subite attribuable aux arythmies ventriculaires a été signalée chez 1 à 5 % des enfants à un stade avancé de la vie (vers l’âge de 20 à 30 ans) où le dysfonctionnement ventriculaire pourrait être en cause (Bhimji, 2017). Une insufsance cardiaque peut s’installer après l’intervention. ATRÉSIE TRICUSPIDIENNE Description L’atrésie tricuspidienne se produit dans 1 à 3 % des cas de cardiopathies congénitales (Park, 2014). La valve tricuspide ne s’est pas bien développée (hypoplasie ou atrésie) et il n’y a pas de voie de communication entre l’oreillette droite et le ventricule droit. L’atrésie tricuspidienne est souvent associée à une sténose pulmonaire, à une hypoplasie de l’artère pulmonaire et du ventricule droit, et à une transposition des gros vaisseaux.

16

Physiopathologie À la naissance, la persistance du foramen ovale (ou une autre forme de CIA) est essentielle pour que le sang puisse circuler de l’oreillette droite vers l’oreillette gauche, puis du ventricule gauche au ventricule droit si une CIV existe. La CIV permet en outre à un faible volume de sang de pénétrer dans le ventricule droit pour être éjecté dans l’artère pulmonaire et atteindre les poumons. En l’absence d’un CIV, la persistance du canal artériel permet au sang d’emprunter l’artère pulmonaire pour rejoindre les poumons, où il sera oxygéné. Le sang oxygéné et le sang désaturé se mélangent complètement dans le cœur gauche, ce qui entraîne une désaturation en oxygène dans la circulation systémique. Manifestations cliniques • Cyanose habituellement observée durant la période néonatale • Nourrissons pouvant présenter de la tachycardie et être dyspnéiques • Symptômes d’hypoxémie chronique et hippocratisme digital chez les enfants plus âgés

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

745

ENCADRÉ 16.4

Malformations entraînant une diminution du débit pulmonaire (suite)

Approche thérapeutique Il faut administrer au nourrisson, dont le débit pulmonaire dépend de la persistance du canal artériel, une perfusion continue de prostaglandine E 1 à raison de 0,05 à 0,1 mcg/kg/min dans l’attente de l’intervention chirurgicale. Traitement chirurgical À la naissance, lorsque la CIA est petite, une atrioseptostomie est pratiquée par cathétérisme cardiaque interventionnel TABLEAU 16.3. Dans certains cas, le débit pulmonaire devient excessif, et il faut alors procéder au cerclage de l’artère pulmonaire an de réduire le volume de sang qui arrive aux poumons. Les interventions chirurgicales qui suivent font partie des trois stades pour en arriver à la dernière intervention chirurgicale, qui est l’opération de Fontan : • Stade I – Anastomose palliative systémo-pulmonaire. – Les deux principales sont l’anastomose de Blalock-Taussig modiée et l’anastomose centrale qui permettent d’accroître le débit pulmonaire durant la période néonatale lorsque la résistance vasculaire pulmonaire est normalement plus élevée, car la pompe ventriculaire gauche éjecte le sang dans l’aorte, vers la circulation systémique et dans la circulation pulmonaire (en traversant l’anastomose) TABLEAU 16.11. • Stade II : Un pontage cavopulmonaire bidirectionnel (procédure de Glenn), aussi appelé hémi-Fontan, est effectué quand l’enfant a entre 4 et 9 mois, lorsque la résistance vasculaire pulmonaire est normalisée, car le débit pulmonaire est produit par ux passif, ce qui permet un drainage direct de la veine cave supérieure à l’artère pulmonaire droite. La fonction ventriculaire de l’enfant doit être normale et sa résistance vasculaire pulmonaire doit être faible pour que l’intervention soit efcace. Les nourrissons qui ont subi un pontage cavopulmonaire bidirectionnel sont encore cyanosés, car le retour veineux de la veine cave inférieure se mélange avec le retour veineux pulmonaire. Généralement, la saturation est d’environ 85 % immédiatement après l’intervention chirurgicale (Ramaswamy, 2016).

– Tunnel latéral intracardiaque : Un tunnel, incorporé dans une petite portion de la paroi auriculaire latérale, permet de rediriger le sang veineux systémique de la veine cave inférieure vers la veine cave supérieure, qui est déjà anastomosée à l’artère pulmonaire par le pontage cavopulmonaire bidirectionnel. – Conduit extracardiaque : C’est la procédure la plus récente. Un tube prothétique est utilisé pour connecter l’artère pulmonaire à la veine cave inférieure. Cette opération a pour avantages de diminuer la pression dans l’oreillette et d’éviter d’inciser l’oreillette droite, et donc de diminuer les risques de lésion du nœud sinusal ainsi que l’incidence des arythmies postopératoires. Une ouverture (fenêtre) est souvent pratiquée dans la paroi du chenal intraauriculaire. La fenêtre intra-auriculaire est vitale, car elle permet un shunt droitgauche ainsi que le maintien d’un débit cardiaque, malgré le sang désaturé, en cas de uctuations hémodynamiques transitoires (p. ex., une dysfonction du ventricule ou une augmentation soudaine de la résistance vasculaire pulmonaire), ce qui a pour effet de diminuer le débit pulmonaire, et donc de diminuer le retour de sang oxygéné au cœur gauche. Pronostic La mortalité opératoire à la suite du pontage cavopulmonaire bidirectionnel (procédure de Glenn) se situe entre 5 et 10 %. Celle observée après l’intervention de Fontan est de moins de 3 % (Park, 2014) ; elle est toutefois plus élevée lorsque la malformation est complexe et qu’il existe d’autres facteurs de risque. Le taux de survie est de 74 % lors du suivi de 10 ans (Pundi, Johnson, Dearani et al., 2015). Au nombre des complications postopératoires gurent les arythmies, l’hypertension veineuse systémique, les épanchements pleural et péricardique, et le dysfonctionnement ventriculaire. Les problèmes qui peuvent survenir à long terme sont une entéropathie exsudative, des arythmies auriculaires, un dysfonctionnement ventriculaire tardif et un retard de développement (Pundi et al., 2015).

• Stade III – Intervention de Fontan : L’intervention de Fontan vise à séparer le sang oxygéné du sang appauvri en oxygène dans le cœur et à réduire la surcharge volumique imposée au ventricule. Elle consiste à anastomoser un chenal intra-auriculaire (latéral) ou extracardiaque à l’artère pulmonaire pour que le sang veineux systémique (provenant de la veine cave inférieure) court-circuite la pompe ventriculaire et atteigne directement les poumons. La circulation pulmonaire devient passive (c’est-à-dire qu’elle n’utilise pas une pompe ventriculaire). Elle laisse cependant les stigmates anatomiques de la malformation et ne permet pas de normaliser les paramètres hémodynamiques. Il s’agit de la dernière étape de la correction chirurgicale de nombreuses malformations complexes caractérisées par un seul ventricule fonctionnel, comprenant l’hypoplasie du cœur gauche (Park, 2014). Il existe plusieurs types d’intervention de Fontan (Roch, 2014) : – Connexion atriopulmonaire : Intervention de Fontan originale qui consiste à faire une anastomose atriopulmonaire.

Malformations mixtes De nombreuses malformations cardiaques complexes relèvent de la catégorie des malformations mixtes, car la survie de l’enfant pendant la période postnatale dépend du mélange du sang issu de la circulation pulmonaire avec le sang de la circulation systémique dans les cavités du cœur ENCADRÉ 16.5. Sur le plan hémodynamique, le débit sanguin

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Partie 6

Troubles liés aux systèmes

systémique entièrement saturé en oxygène se mêle au débit sanguin pulmonaire appauvri en oxygène, entraînant une désaturation relative de la circulation sanguine systémique. Une congestion pulmonaire se produit du fait des différences de pression artérielle pulmonaire et de pression aortique en faveur du débit sanguin pulmonaire. Le débit cardiaque diminue à cause de la charge volumique

sur le ventricule. Le degré de désaturation (bien que la cyanose ne soit pas toujours apparente) et les signes d’insufsance cardiaque congestive varient chez les enfants ayant une malformation cardiaque mixte. Certaines malformations, comme la transposition des gros vaisseaux, provoquent

ENCADRÉ 16.5

une cyanose grave pendant les premiers jours de vie, puis une insufsance cardiaque congestive. D’autres, comme le tronc artériel commun, entraînent une insufsance cardiaque congestive grave pendant les premières semaines de vie et une légère désaturation.

Malformations caractérisées par un mélange du sang oxygéné et du sang appauvri en oxygène

TRANSPOSITION DES GROS VAISSEAUX (TGV)

Description La TGV représente de 5 à 7 % des cas de cardiopathies congénitales (Charpie, 2017). Elle est une inversion (transposition) des vaisseaux sortant du cœur : l’artère pul­ monaire naît du ventricule gauche, alors que l’aorte est issue du ventricule droit, sans aucune communication entre la circulation pulmonaire et la circulation systémique. Physiopathologie L’aorte sort du ventricule droit et transporte du sang appauvri en oxygène vers le corps et les artères coronaires, et l’artère pulmonaire surgit du ventricule gauche et transporte du sang oxygéné vers les poumons. La survie n’est possible que s’il existe d’autres malformations concomitantes, notamment la PCA ou des communications auriculaire ou ventriculaire, qui permettent au sang de se mélanger. La malformation la plus souvent associée à la transposition des gros vaisseaux est la persistance du foramen ovale. Le canal artériel est lui aussi perméable à la naissance, mais il se ferme à la n de la période néonatale dans la plupart des cas. La TGV peut aussi être associée à une CIV. La présence de la CIV permet au sang de se mélanger et de s’écouler du ventricule droit vers le ventricule gauche durant la phase diastolique (et ainsi d’atteindre la circulation pulmonaire) et de s’écouler du ventricule gauche vers le ventricule droit durant la phase systolique (et ainsi d’atteindre la circulation systémique). L’augmentation du débit pulmonaire lorsqu’il y a diminution de la résistance vasculaire pulmonaire et de la pression dans le ventricule gauche accroît le risque d’insufsance cardiaque. Manifestations cliniques • Variables, en fonction de la nature et de la taille des malformations associées à la TGV • Cyanose intense et diminution de la fonction cardiaque observables à la naissance lorsque la communication entre le cœur gauche et le cœur droit est minime • Chez le nourrisson, cyanose plus discrète lorsque la CIA ou la CIV sont larges, ou lorsque le canal artériel demeure perméable, mais présence de symptômes d’insufsance cardiaque • À l’auscultation, soufes perceptibles variables selon la nature des malformations • Habituellement, cardiomégalie devenant évidente quelques semaines après la naissance Approche thérapeutique L’administration par voie intraveineuse de prostaglandine E 1 au nourrisson permet de maintenir la perméabilité du canal artériel en vue d’accroître

temporairement le mélange des deux circulations dans le cœur et d’atteindre une saturation en oxygène de 75 %, ou pour maintenir le débit cardiaque. Une atrioseptostomie au ballonnet de Rashkind par cathétérisme cardiaque inter­ ventionnel ou par repérage échocardiographique est pratiquée pour accroître le mélange des deux circulations. Traitement chirurgical • Permutation vasculaire (ou switch artériel, ou correction artérielle de transposition des gros vaisseaux) : Privilégiée au cours des premières semaines de la vie, cette correction anatomique à l’étage artériel consiste à disséquer transversalement l’artère pulmonaire et l’aorte quelques millimètres au­dessus de leurs valves respectives, puis à anastomoser l’artère pulmonaire à la portion proximale de l’aorte, c’est­à­dire juste au­dessus de la valve aortique, puis à anastomoser l’aorte ascendante à la portion proximale de l’artère pulmonaire. Il faut ensuite repositionner les artères coronaires : elles sont transposées de la portion proximale de l’aorte à la portion proximale de l’artère pulmonaire de façon à créer une nouvelle aorte. La réimplantation des coronaires est indispensable à la survie du nourrisson. Il faut veiller à ne créer aucune torsion ni aucun pli au moment de ce geste chirurgical an que le cœur reçoive sufsamment d’oxygène. L’avantage de la correction anatomique à l’étage artériel est qu’elle permet de normaliser la circulation sanguine, en ce sens que le ventricule gauche peut jouer son rôle de pompe de la circulation systémique. Elle peut toutefois se compliquer d’un rétrécissement des gros vaisseaux près des anastomoses et d’une insufsance coronaire. • Confection de chenaux à l’étage auriculaire : Cette intervention est rarement pratiquée, mais il faut savoir que bon nombre d’adolescents et d’adultes sont en vie aujourd’hui grâce à des interventions curatives à l’étage auri­ culaire qui ont été effectuées il y a plus d’une vingtaine d’années. Il s’agit de confectionner des chenaux qui permettront d’amener le sang des veines caves vers la valve mitrale, et le sang des veines pulmonaires vers la valve tricuspide au moyen de lambeaux du septum auriculaire (intervention de Senning) ou d’une matière prosthétique (intervention de Mustard). L’inconvénient de ces interventions est que le ventricule droit continue de jouer le rôle de pompe de la circulation systémique et qu’elles sont asso­ ciées à une insufsance ventriculaire droite et à des arythmies tardives. Elles peuvent en outre entraîner les complications suivantes : anomalies du rythme sinusal, fuites des chenaux et dysfonction ventriculaire. • Intervention de Rastelli : Il s’agit du traitement chirurgical de prédilection des TGV associées à une CIV et à une sténose pulmonaire grave. L’interven­ tion consiste à cloisonner la CIV avec une pièce de manière à ce que le sang du ventricule gauche soit dirigé vers l’aorte, puis à installer un conduit ou une homogreffe valvée reliant directement le ventricule droit et l’artère pulmonaire pour normaliser la circulation sanguine. Malheureusement, il faut changer le conduit à plusieurs reprises selon la croissance de l’enfant. Pronostic La mortalité chirurgicale à la suite d’une intervention de Rastelli se situe entre 10 et 29 %. Celle observée à la suite de la permutation vasculaire chez les nouveau­nés atteints de TGV avec septum interventriculaire intact est d’environ 6 % (Park, 2014).

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

747

16

ENCADRÉ 16.5

Malformations caractérisées par un mélange du sang oxygéné et du sang appauvri en oxygène (suite)

Le traitement chirurgical peut favoriser à long terme une sténose suprapulmonaire ainsi qu’une dilatation de la nouvelle aorte et une régurgitation aortique. La survie à long terme et sans arythmie est excellente (environ 97 % à 25 ans), et la mortalité tardive est principalement due à une mort subite et à un infarctus du myocarde (Charpie, 2017).

s’il y a obstacle au drainage des veines pulmonaires, le retour veineux diminue, la pression augmente dans les veines pulmonaires, un œdème pulmonaire interstitiel se forme et une insufsance cardiaque nit par s’installer. Le RVPAT infracardiaque est souvent associé à un obstacle au drainage des veines pulmonaires et il doit donc être traité en urgence.

RETOUR VEINEUX PULMONAIRE ANORMAL TOTAL (RVPAT)

Manifestations cliniques

Description Cardiopathie congénitale rare caractérisée par l’absence de communication anatomique entre les quatre veines pulmonaires et l’oreillette gauche. Les veines pulmonaires se jettent anormalement soit dans l’oreillette droite, soit dans une des veines qui débouchent dans l’oreillette droite (p. ex., la veine cave supérieure). L’oreillette droite reçoit alors un mélange de sang des deux circulations, qui bifurque vers l’oreillette gauche par une CIA et se déverse ainsi dans la circulation systémique. Le shunt droite-gauche interauriculaire est obligatoire pour le maintien de la circulation systémique. Les RVPAT, aussi appelés anomalies des veines pulmonaires, sont classés en fonction de la variation anatomique du drainage veineux pulmonaire par rapport au cœur.

• Cyanose apparaissant très tôt chez la plupart des nourrissons

• RVPAT supracardiaque : Le collecteur des veines pulmonaires se draine au-dessus du diaphragme et s’abouche dans la veine cave supérieure, la veine brachiocéphalique ou la veine azygos.

Traitement chirurgical La correction chirurgicale du RVPAT est réalisée très tôt chez le nourrisson. La technique employée varie selon le type de RVPAT. Toutefois, en règle générale, le collecteur des veines pulmonaires est anastomosé à la face postérieure de l’oreillette gauche, et la CIA est fermée. Le RVPAT intracardiaque est le plus facile à corriger. La correction chirurgicale peut se compliquer d’une réobstruction des veines pulmonaires, d’une hémorragie, d’arythmies (en particulier d’un bloc cardiaque), d’une hypertension artérielle pulmonaire et d’une persistance de l’insufsance cardiaque.

• RVPAT intracardiaque : Le collecteur des veines pulmonaires se draine directement dans l’oreillette droite ou le sinus coronaire. • RVPAT infracardiaque : Le collecteur des veines pulmonaires se draine au-dessous du diaphragme et s’abouche dans la veine cave inférieure ou dans la veine porte ; il s’agit de la forme la plus grave.

• Intensité inversement liée au débit pulmonaire : plus le débit pulmonaire est important, plus la cyanose est discrète • RVPAT non obstructifs pouvant demeurer muets jusqu’à ce que la résistance vasculaire pulmonaire commence à diminuer durant la période néonatale, un phénomène provoquant une augmentation du débit pulmonaire et donnant lieu à une insufsance cardiaque • Cyanose accentuée si le RVPAT s’obstrue, c’est-à-dire s’il y a obstruction des veines pulmonaires • Détérioration rapide de l’état du nourrisson à la suite de l’obstruction ; mort possible par insufsance cardiaque sans intervention chirurgicale

Pronostic La mortalité se situe entre 5 et 10 % chez les nourrissons sans obstruction, et elle peut s’élever à 20 % chez les nourrissons ayant la forme infracardiaque (Park, 2014). TRONC ARTÉRIEL COMMUN

Physiopathologie L’oreillette droite reçoit tout le sang qui devrait se déverser normalement dans l’oreillette gauche. Par conséquent, le cœur droit s’hypertrophie, alors que le cœur gauche, en particulier l’oreillette gauche, demeure peu volumineux. Le RVPAT est généralement associé à une persistance du foramen ovale ou à une autre forme de CIA qui permettent au sang veineux périphérique de passer de l’oreillette droite, où règne une forte pression, à l’oreillette et au ventricule gauches. La saturation du sang en oxygène est donc la même dans les cavités cardiaques, et elle nit aussi par être la même partout dans la circulation systémique. Lorsque le débit pulmonaire est important, le retour veineux pulmonaire est lui aussi important, et le volume de sang saturé en oxygène est relativement élevé. Par contre,

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Partie 6

Troubles liés aux systèmes

Description Malformation caractérisée par la persistance du tronc artériel primitif qui, au lieu de se cloisonner et de produire l’artère pulmonaire et l’aorte, donne naissance à un tronc artériel unique à la base du cœur, à cheval sur les deux ventricules. Le mélange des deux circulations dans ce tronc commun entraîne une diminution de la saturation du sang en oxygène et une hypoxémie. Le sang mêlé expulsé hors du cœur chemine plus volontiers vers les artères pulmonaires dans lesquelles règne une faible résistance, si bien que le débit pulmonaire augmente, alors que le débit diminue dans la circulation systémique. Le tronc artériel commun peut être associé aux malformations suivantes (Soriano et Fulton, 2016) : • Anomalies de l’arc aortique (interruption ou hypoplasie) ; • CIV ; • Anomalies des artères coronaires ou du système de conduction.

ENCADRÉ 16.5

Malformations caractérisées par un mélange du sang oxygéné et du sang appauvri en oxygène (suite)

Il existe trois types de tronc artériel commun : • Type I : Un tronc pulmonaire simple naît près de la base du tronc commun et se divise en deux branches pulmonaires, gauche et droite. • Type II : Les artères pulmonaires gauche et droite se détachent du tronc com­ mun par des orices postérieurs assez proches l’un de l’autre et situés à la même hauteur. • Type III : Les deux branches pulmonaires naissent de part et d’autre du tronc commun. Physiopathologie Le sang expulsé par le ventricule gauche et celui expulsé par le ventricule droit entrent dans le tronc commun où ils se mélangent. La répartition du sang mêlé entre la circulation systémique et la circulation pulmonaire dépend des résistances vasculaires pulmonaire et systémique. Le débit pulmonaire résulte du calibre des artères pulmonaires et de la résistance vasculaire pulmonaire. En général, la résistance vasculaire pulmonaire est plus faible que la résistance vasculaire systémique, de sorte que le sang mêlé se dirige surtout vers les poumons. Une hypertension artérielle pulmonaire et une maladie vasculaire pulmonaire s’instal­ lent très tôt chez les enfants qui naissent avec un tronc artériel commun. Manifestations cliniques • Insufsance cardiaque modérée ou grave, cyanose d’intensité variable, intolérance à l’effort et retard de croissance chez la plupart des nourrissons • À l’auscultation, perception d’un soufe holosystolique au bord gauche du sternum et d’un soufe diastolique en cas de régurgitation • Délétions du locus 22q11 du chromosome 22 chez environ 30 à 35 % des nourrissons qui naissent avec cette malformation (p. ex., le syndrome de Di George) (Park, 2014) Traitement chirurgical La correction chirurgicale du tronc artériel commun doit être réalisée au cours des premières semaines de vie. Elle consiste à fermer la CIV pour que le sang expulsé par le ventricule gauche gagne le tronc artériel commun, et à séparer les branches pulmonaires de l’aorte pour les anastomoser au ventricule droit au moyen d’une homogreffe (procédure de Rastelli). Les homogreffes (traitées avec antibiotiques et cryopréservation) sont préférées aux prothèses en matière synthétique pour rétablir la continuité entre le ventricule droit et le tronc pulmonaire, puisqu’elles sont plus souples, et donc plus faciles à manier durant l’intervention ; elles sont également moins susceptibles que ces derniers de s’obstruer. Les complications postopéra­ toires incluent la persistance de l’insufsance cardiaque, l’hémorragie, l’hyperten ­ sion artérielle pulmonaire, les arythmies et la CIV résiduelle. Pronostic Le taux de mortalité se situe entre 10 et 30 %. Étant donné que les homogreffes et les prothèses ne croissent pas avec le cœur, puisqu’elles ne sont pas constituées de tissus vivants, et que leur calibre peut rétrécir à la suite d’une calcication de leur paroi, il est nécessaire de les changer à une ou à plusieurs reprises durant l’enfance. HYPOPLASIE DU CŒUR GAUCHE

Description Développement insufsant du cœur gauche se traduisant par une hypoplasie du ventricule gauche et une atrésie ou une sténose grave aortique ou mitrale, une hypoplasie de l’aorte ascendante et de l’arc aortique, et la présence du foramen ovale ou d’une CIA. Physiopathologie Grâce à une CIA ou à la persistance du foramen ovale, le sang saturé en oxygène de l’oreillette gauche peut se mélanger avec le sang appauvri en oxygène de

l’oreillette droite ; il peut alors atteindre le ventricule droit et, nalement, l’artère pulmonaire. De là, une partie du sang est achemi­ née vers les poumons, et le reste passe par le canal artériel pour gagner l’aorte, puis la circulation systé­ mique. Le débit pulmonaire et le débit dans la circula­ tion systémique dépendent des résistances vasculaires pulmonaire et systémique. Les artères coronaires et cérébrales reçoivent un ux sanguin rétrograde provenant de l’aorte ascendante hypoplasique. Manifestations cliniques • Présence d’une cyanose discrète et de signes d’insufsance cardiaque jusqu’à la fermeture du canal artériel • Détérioration progressive de l’état du nourrisson : accentuation de la cyanose et diminution du débit cardiaque aboutissant à un collapsus cardiovasculaire • En l’absence de traitement, le diagnostic est fatal (Rathod, 2018) • Association à des syndromes génétiques dans 10 % des cas (p. ex., le syndrome de Turner, la trisomie 18) (Park, 2014) Approche thérapeutique Avant l’intervention chirurgicale, il faut stabiliser l’état du nourrisson en le plaçant sous assistance respiratoire et en lui administrant un traitement inotrope. Il faut en outre lui administrer une perfusion de prostaglandine E 1 pour retarder la fermeture du canal artériel et maintenir une circulation systémique et un débit cardiaque adéquats. Traitement chirurgical La correction se divise en plusieurs étapes ou stades. • Stade I : L’intervention de Norwood. Elle consiste à sectionner le tronc de l’artère pulmonaire, à anastomoser ce tronc à l’aorte, à agrandir l’aorte par une homogreffe de façon à créer une nouvelle aorte, à détourner le sang pour accroître le débit pulmonaire, habituellement grâce à une anastomose systémo­pulmonaire (Blalock­Taussig modiée ou shunt central) et à créer une large CIA. Les complications postopératoires possibles incluent un déséquilibre entre le débit pulmonaire et le débit systémique lié aux variations des résis­ tances relatives, l’hémorragie, la diminution du débit cardiaque et la persistance de l’insufsance cardiaque. Au lieu de pratiquer l’anastomose de Blalock­Taussig modiée ou un shunt central, deux types de procédures sont possibles : – L’intervention de Norwood avec modication de Sano : Procédure modiée qui consiste à implanter une homogreffe reliant le ventricule droit à l’artère pulmonaire (intervention de Sano) pour accroître le débit pulmonaire. – La stratégie hybride : Alternative à l’intervention de Norwood associant intervention chirurgicale et cathétérisme. Elle est pratiquée dans quelques centres hospitaliers, et son but est de reporter l’intervention de Norwood au­delà de la période néonatale an d’améliorer les résultats et le pronostic neurologique. Cette procédure combine l’implantation d’une endoprothèse (stent) dans le canal artériel par voie percutanée, le cerclage chirurgical des artères pulmonaires pour réduire le ux sanguin pulmonaire et

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

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16

ENCADRÉ 16.5

Malformations caractérisées par un mélange du sang oxygéné et du sang appauvri en oxygène (suite)

l’élargissement d’une communication interauriculaire (par atrioseptostomie) pour améliorer le mélange du sang (Chenu, Mandache, Luciano et al., 2014). • Stade II : Un pontage cavopulmonaire bidirectionnel (procédure de Glenn) ou un hémi-Fontan FIGURE 16.12. L’intervention vise à anastomoser la veine cave supérieure à l’artère pulmonaire droite, à ligaturer l’anastomose de Blalock Taussig, le shunt central ou l’intervention de Sano an que le sang court-circuite l’oreillette droite et qu’il gagne directement les poumons. Elle est en principe réalisée quand le nourrisson est âgé de trois à six mois pour atténuer la cyanose et la surcharge volumique imposée au ventricule droit. • Stade III : Une intervention de Fontan ENCADRÉ 16.4. Transplantation cardiaque L’autre option thérapeutique est la transplantation cardiaque, qui doit être réalisée au cours de la période néonatale. Toutefois, elle présente un certain

Hépatosplénomégalie : Augmentation de volume du foie et de la rate observable dans des maladies comme le lupus érythémateux disséminé, l’arthrite chronique juvénile ou l’amylose.

TABLEAU 16.5

nombre d’inconvénients : pénurie de donneurs néonataux, risque de rejet, problèmes à long terme associés à l’immunosuppression et risque d’infection. La transplantation cardiaque est détaillée plus loin. Pronostic Le taux de mortalité associée à l’intervention de Norwood varie entre 10 et 30 %. En raison de l’utilisation croissante de cette procédure, certains centres tertiaires ont signalé une amélioration des taux de survie précoces à près de 90 % (Rathod, 2018). Les problèmes qui peuvent survenir à long terme après la correction chirurgicale sont la détérioration de la fonction ventriculaire, la régurgitation tricuspidienne, les sténoses récurrentes de l’arc aortique, les arythmies et le retard de développement. Il y a un risque de décès entre les différentes étapes de la correction chirurgicale. La mortalité associée aux deux dernières interventions (celle de Sano et le pontage cavopulmonaire bidirectionnel) est inférieure à 5 %.

16.3

Conséquences cliniques de la cardiopathie congénitale

16.3.1

Insufsance cardiaque congestive

L’insufsance cardiaque congestive (ICC) désigne l’incapacité du cœur à pomper une quantité

Principales causes d’insufsance cardiaque chez les enfants

CARDIOPATHIES CONGÉNITALES (CC)

CARDIOMYOPATHIES

CC avec surcharge en volume, CC à shunt gauche-droit

Cardiomyopathies primaires

• Communication interventriculaire

• Cardiomyopathie hypertrophique

• Canal artériel persistant

• Cardiomyopathie restrictive

• Canal atrioventriculaire

• Dysplasie arythmogène du ventricule droit

• Tronc artériel commun

• Cardiomyopathie de non-compaction

• Fenêtre aortopulmonaire

Cardiomyopathies secondaires

• Communication interauriculaire (rarement)

• Myocardite

Insufsance valvulaire • Insufsance valvulaire aortique ou mitrale CC avec surcharge en pression • Sténose valvulaire, sous ou supravalvulaire aortique • Coarctation de l’aorte

• Cardiomyopathie dilatée idiopathique

• Maladie de Kawasaki • Infarctus du myocarde • Arythmie (tachyarythmie ou bradyarythmie) • Anémie • Septicémie • Hypothyroïdie • Insufsance rénale • Hypertension artérielle • Maladie métabolique (pompe, mitochondriopathie) • Traitement de chimiothérapie par anthracyclines • Dystrophies musculaires

Source : Bressieux-Degueldre et Sekarski (2015). Insufsance cardiaque chez l’enfant ; reconnaitre et diagnostiquer. Paediatrica. (2015) ; 26 (1) : 12-14. Repéré à www.swiss-paediatrics.org/sites/default/les/12-14_1.pdf.

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Partie 6

Troubles liés aux systèmes

adéquate de sang vers la circulation systémique à des pressions de remplissage normales, pour répondre aux demandes métaboliques de l’organisme. Chez l’enfant, l’ICC survient généralement à la suite de malformations structurelles (p. ex., des communications interventriculaires avec shunt gauche-droite) qui entraînent une augmentation de la pression et du volume sanguins dans le cœur. Elle peut également résulter d’un dysfonctionnement du myocarde qui provoque une contractilité ventriculaire amoindrie. Cet état peut coïncider avec une cardiomyopathie, des arythmies ou des déséquilibres électrolytiques importants. L’ICC peut aussi être la conséquence des efforts excessifs fournis par un muscle cardiaque normal, par exemple en cas de septicémie ou d’anémie grave. Les causes principales d’insufsance cardiaque chez l’enfant sont présentées dans le TABLEAU 16.5.

Physiopathologie L’insufsance cardiaque est généralement classée en deux catégories : l’insufsance droite et l’insufsance gauche. Dans le cas de l’insufsance droite, le ventricule droit n’est pas en mesure de pomper le sang efcacement vers l’artère pulmonaire, ce qui entraîne une augmentation de la pression dans l’oreillette droite et la circulation veineuse systémique. L’hypertension veineuse systémique provoque une hépatosplénomégalie et parfois un œdème. Dans le cas de l’insufsance gauche, le ventricule gauche est incapable de pomper le sang dans la circulation systémique, ce qui entraîne une augmentation de la pression dans l’oreillette gauche et les veines pulmonaires. Les capillaires pulmonaires se remplissent de sang, les pressions pulmonaires augmentent et un œdème pulmonaire s’ensuit. Bien que chaque type d’insufsance cardiaque produise des manifestations cliniques différentes, il est rare d’observer sur le plan clinique uniquement

Lorsque les malformations responsables de l’ICC ne sont pas corrigées, des lésions se produisent dans le muscle cardiaque. Malgré les mécanismes compensatoires, le cœur n’est pas en mesure de maintenir un débit cardiaque adéquat. La diminution du débit sanguin vers les reins continue de stimuler la réabsorption du sodium et de l’eau, conduisant ainsi à une surcharge liquidienne, à l’augmentation de l’effort du cœur ainsi qu’à une congestion des circulations pulmonaire et systémique FIGURE 16.9.

Manifestations cliniques Les manifestations cliniques de l’ICC se répartissent en trois groupes : 1) une dysfonction du myocarde ; 2) une congestion pulmonaire ; 3) une congestion veineuse systémique TABLEAU 16.6 . Étant donné que ces variations hémodynamiques sont de causes différentes et qu’elles ne se produisent pas en même temps, les manifestations

cliniques peuvent varier chez les enfants. La classication de Ross sert à évaluer la gravité de l’insuffisance cardiaque chez le nourrisson et l’enfant TABLEAU 16.7. Les critères employés dans cette classication sont basés sur l’examen clinique ainsi que sur l’anamnèse (avec la présence de difcultés alimentaires, de troubles de la croissance et d’intolérance à l’effort) (Bressieux-Degueldre et Sekarski, 2015).

clinique

Jugement

une insufsance droite ou gauche chez l’enfant. Étant donné que chaque côté du cœur dépend du bon fonctionnement de son vis-à-vis, l’insufsance d’une cavité cardiaque entraîne un changement réciproque dans la cavité controlatérale.

Julia, âgée de deux ans, souffre d’une insufsance cardiaque congestive gauche à la suite d’une septicémie secondaire à une ostéomyélite. Pourquoi est-elle sujette à faire des œdèmes pulmonaires fréquents ? MAIS SI...

Si Julia souffrait d’insufsance cardiaque droite, serait-elle également sujette aux oedèmes pulmonaires ? Justiez votre réponse.

Diagnostic Le diagnostic de l’ICC est établi en fonction des manifestations cliniques comme la tachypnée et la tachycardie au repos, la dyspnée, le tirage, l’intolérance à l’effort (surtout pendant l’alimentation chez les nourrissons), le gain pondéral dû à la rétention de liquides et l’hépatomégalie.

16

FIGURE 16.9

Physiopathologie de l’insufsance cardiaque congestive Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

751

Les examens suivants permettent de conrmer le diagnostic. • La radiographie pulmonaire révèle une car­ diomégalie, une surcharge vasculaire pulmo­ naire, un œdème pulmonaire ou un épanchement pleural. La présence de cardiomégalie sur la radiographie pulmonaire est un indicateur de mauvais pronostic chez les enfants atteints de cardiomyopathie dilatée (Jayaprasad, 2016).

TABLEAU 16.6

Manifestations cliniques de l’insufsance cardiaque congestive

TYPES D’INSUFFISANCE

MANIFESTATIONS CLINIQUES

Dysfonction du myocarde

• Tachycardie

• Agitation

• Diaphorèse

• Pâleur

• ↓ diurèse

• Extrémités pâles, froides

• Fatigue

• Pouls périphériques faibles

• Faiblesse

Congestion pulmonaire

Congestion veineuse systémique

• Anorexie, refus alimentaire, vomissements, régurgitations

• ↓ pression artérielle

• Tachypnée

• Orthopnée

• Dyspnée

• Toux, raucité de la voix

• Tirage (nourrissons)

• Cyanose

• Battement des ailes du nez

• Respiration sifante

• Intolérance à l’effort

• Geignement expiratoire

• Gain pondéral

• Ascite

• Hépatomégalie

• Distension des veines du cou

• Œdème périphérique, surtout périorbitaire

TABLEAU 16.7

• Bruit de galop • Cardiomégalie

Classication de Ross modiée de l’insufsance cardiaque

CLASSE

NOURRISSONS

ENFANTS ET ADOLESCENTS

I

• Asymptomatique

Asymptomatique

II

• Tachypnée ou diaphorèse légère durant les repas

Dyspnée modérée à l’effort

III

• Tachypnée et diaphorèse marquée aux repas

Dyspnée au moindre effort

• Difcultés de la prise alimentaire, repas prolongés • Cassure de la courbe pondérale IV

752

• Tachypnée, tirage, geignement et diaphorèse au repos

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

_

• L’ECG montre une hypertrophie ventriculaire et des troubles du rythme. L’ECG est parti­ culièrement utile pour le diagnostic de la cardiomyopathie rythmique (ou la tachycar­ diomyopathie) comme cause d’insuffisance cardiaque. • Un échocardiogramme permet de déterminer la cause de l’ICC, soit une malformation cardiaque ou une dysfonction ventriculaire. La fonction systolique ventriculaire gauche peut être éva­ luée et quantifiée à l’aide de l’échocardio­ gramme qui permet l’estimation de la fraction d’éjection ventriculaire gauche (FEVG). La FEVG est l’expression numérique du fonction­ nement du ventricule gauche. Elle est fréquem­ ment utilisée pour suivre l’évolution des maladies cardiovasculaires et l’effet thérapeu­ tique du traitement. • La mesure du biomarqueur cardiaque, le peptide natriurétique de type B (PNB), permet d’évaluer la fonction ventriculaire. Le PNB est un peptide synthétisé par les myocytes des ventricules en réponse à une augmentation de stress méca­ nique myocardique. Son élévation dans le sang reète le degré d’insufsance cardiaque et per­ met la distinction entre la dyspnée d’origine respiratoire ou cardiaque chez l’enfant et le nouveau­né (Jayaprasad, 2016). • La mesure sérique de l’antistreptolysine O (anti­ corps présent dans le sang à la suite d’une infec­ tion aiguë par un streptocoque) et des protéines C réactives (protéines synthétisées à la suite d’une agression d’origine virale, bactérienne ou auto­immune) est indiquée lorsqu’on suspecte que l’insufsance cardiaque est associée à une èvre rhumatismale aiguë (qui se manifeste habituellement chez les enfants âgés de 5 à 15 ans) ou à une réactivation d’une cardiopathie rhumatismale chronique.

Approche thérapeutique Les objectifs du traitement de l’ICC sont les suivants : 1. Améliorer la fonction cardiaque (augmenter la contractilité et diminuer la postcharge). 2. Éliminer le liquide et le sodium excédentaires (diminuer la précharge). 3. Diminuer les efforts fournis par le cœur. 4. Améliorer l’oxygénation des tissus et diminuer la consommation d’oxygène. Chez la plupart des nourrissons ayant reçu un diagnostic d’ICC, la cause est une cardiopathie congénitale. L’état des nourrissons est d’abord sta­ bilisé par un traitement médical, et une réparation chirurgicale est ensuite envisagée. Chez les enfants qui viennent de recevoir un diagnostic d’ICC, la

cause peut se rapporter à l’aggravation de la fonction ventriculaire après une réparation cardiaque antérieure, à une cardiomyopathie, à une arythmie ou à d’autres facteurs. En plus de prendre en charge l’ICC, il faut en traiter, si possible, la cause sous-jacente.

Amélioration de la fonction cardiaque L’efcacité du myocarde est améliorée grâce à l’administration de trois groupes de médicaments : 1. les glucosides digitaliques, qui améliorent la contractilité ; 2. les inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine, qui diminuent la postcharge du cœur et facilitent son action ; 3. les bêtabloquants, qui diminuent la fréquence cardiaque et la pression artérielle, et créent la vasodilatation. Les bienfaits du traitement avec un glucoside digitalique sont l’augmentation du débit cardiaque, la diminution de la taille du cœur, la réduction de la pression veineuse et la résorption de l’œdème. En pédiatrie, la digoxine est utilisée presque exclusivement en raison de son court délai d’action. Elle est offerte en élixir (50 mcg/ mL) pour administration par voie orale, et la dose est calculée en microgrammes (1 000 mcg = 1 mg). Le traitement consiste à administrer une posologie de digitalisation par voie orale ou intraveineuse en doses fractionnées pendant 24 heures pour produire des effets optimaux sur le cœur ; puis, une posologie d’entretien est administrée par voie orale 2 fois par jour à intervalle de 12 heures pour maintenir les taux sanguins thérapeutiques du médicament. Durant la phase de digitalisation, l’état de l’enfant est surveillé sur l’ECG pour s’assurer d’avoir obtenu les effets souhaités (prolongation de l’intervalle PR et réduction de la fréquence ventriculaire) et pour détecter tout effet indésirable, en particulier les arythmies. Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IECA) sont une nouvelle classe de médicaments employés dans le traitement de l’ICC . Comme leur nom l’indique, ces médicaments inhibent la fonction normale du système rénine-angiotensine du rein. Ils bloquent la conversion de l’angiotensine I en angiotensine II, de sorte qu’il y a vasodilatation au lieu de vasoconstriction. La vasodilatation entraîne une diminution de la résistance vasculaire pulmonaire et systémique, une réduction de la pression artérielle et de la postcharge, et une diminution de la sécrétion de l’aldostérone. Les médicaments régulièrement utilisés en pédiatrie sont le captopril, l’énalapril et le lisinopril. Les principaux effets indésirables des IECA sont l’hypotension, la toux et la dysfonction rénale.

Le carvédilol, un bêtabloquant, est le dernier médicament qui vient s’ajouter au traitement de certains enfants atteints d’ICC chronique. Il bloque les récepteurs alpha-adrénergiques et bêta-adrénergiques, diminuant ainsi la fréquence cardiaque et la pression artérielle par vasodilatation. Il a été démontré que ce médicament réduit la morbidité et la mortalité chez certains adultes atteints d’insufsance cardiaque. Une revue de quelques études pédiatriques suggère que l’administration de bêtabloquants serait bénéque à un groupe spécique d’enfants souffrant d’insufsance cardiaque ; d’autres études sont toutefois nécessaires pour établir des lignes directrices sur leur utilisation (Alabed, Sabouni, Al Dakhoul et al., 2016). Leurs effets indésirables incluent les étourdissements, la fatigue, l’hypotension et la bradycardie. L’entraînement biventriculaire, aussi appelé thérapie de resynchronisation cardiaque, peut s’avérer un traitement prometteur pour les enfants atteints de dysfonction ventriculaire grave. La resynchronisation est effectuée à l’aide d’un stimulateur cardiaque (pacemaker) programmé pour stimuler la conduction ventriculaire dans le but d’optimiser la fonction contractile du myocarde (McCanta et Perry, 2016).

Élimination du liquide et du sodium excédentaire Le traitement inclut des diurétiques, une restriction sodique et parfois une restriction liquidienne. Les diurétiques sont au cœur du traitement visant à éliminer l’excès d’eau et de sel an de prévenir une nouvelle accumulation. Le TABLEAU 16.8 énumère les agents les plus utilisés. Étant donné que le furosémide et l’hydrochlorothiazide sont des diurétiques hypokaliémiants, ils sont fréquemment prescrits avec la spirolactone (un épargneur potassique), mais il peut être nécessaire de prescrire des suppléments de potassium et de recommander à l’enfant et à ses parents des aliments riches en cet électrolyte 19 . La restriction liquidienne peut s’avérer nécessaire aux stades aigus de l’ICC, et elle doit être calculée scrupuleusement pour éviter de déshydrater l’enfant, surtout en cas de cardiopathie congénitale cyanogène et de polycythémie importante. Elle est rarement requise pour les nourrissons, car l’ICC rend l’alimentation si problématique qu’il leur est déjà difcile d’absorber des liquides d’appoint. Les régimes hyposodiques sont moins indiqués chez les enfants que chez les adultes pour maîtriser une ICC, compte tenu des risques d’effets négatifs sur l’appétit. Lorsqu’il faut limiter l’apport en sodium, le sel de table et les aliments très salés sont à éviter.

Chapitre 16

19 L’hypokaliémie, qui peut être liée à l’administration de diurétiques, est dénie dans le chapitre 19, Troubles liés au système génito-urinaire.

16

PHARMACOVIGILANCE

Les suppléments de potas­ sium sont généralement recommandés pour les enfants qui prennent des diurétiques. Cependant, ils peuvent être superus chez ceux qui prennent simultanément des inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine, puisque ceux­ci bloquent l’action de l’aldostérone, ce qui peut entraîner une hyperkaliémie.

Troubles liés au système cardiovasculaire

753

Pharmacothérapie TABLEAU 16.8

Diurétiques employés dans le traitement de l’insufsance cardiaque congestive

MODE D’ACTION

PARTICULARITÉS

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES

• Diurétique de choix pour le traitement de l’œdème associé à l’insufsance cardiaque congestive grave

• Commencer à mesurer le débit urinaire dès l’administration du médicament.

Furosémide (LasixMD) Inhibe la réabsorption du sodium et de l’eau dans la branche ascendante de l’anse de Henle ainsi que dans le tubule rénal proximal et distal.

• Surveiller la déshydratation résultant d’une diurèse importante. • Surveiller les effets indésirables.

• Excrétion du chlorure et du potassium (hypokaliémie induite par le furosémide pouvant précipiter la toxicité liée à la digoxine)

– Nausée et vomissements

– Ototoxicité (acouphène, surdité)

– Diarrhée

– Dermatite

– Hypokaliémie, hyponatrémie et autres déséquilibres électrolytiques

– Hypotension orthostatique

– Hypotension orthostatique • Encourager l’enfant à consommer des aliments riches en potassium ou à prendre des suppléments de potassium, au besoin. • Surveiller les électrolytes et l’équilibre acidobasique pendant le traitement à long terme. • Surveiller les signes de toxicité liée à la digoxine (anomalies à l’ECG pouvant mener à des arythmies potentiellement fatales).

Hydrochlorothiazide Agit directement sur les tubules distaux pour inhiber l’absorption de sodium, provoquant une augmentation de l’excrétion de sodium et d’eau, ainsi que de potassium, d’ions hydrogène, de magnésium, de phosphate, de calcium et de bicarbonate.

• Effet diurétique modéré

• Surveiller les effets indésirables.

• Usage moins fréquent ; souvent utilisé en combinaison avec d’autres diurétiques

– Nausée

– Crampes musculaires

– Faiblesse

– Éruptions cutanées

– Étourdissements

– Hypokaliémie

– Paresthésie

– Acidose

• Hypokaliémie et acidose en présence de doses importantes

• Encourager l’enfant à consommer des aliments riches en potassium ou à prendre des suppléments de potassium.

• Diurétique faible

• Surveiller les effets indésirables.

Spironolactone (AldactoneMD) Antagoniste des récepteurs de l’aldostérone dans les tubules distaux, provoquant l’excrétion du chlorure, du sodium et de l’eau, tout en conservant le potassium.

• Épargneur potassique ; souvent utilisée avec des thiazides ou le furosémide • Mal absorbée à partir du tractus gastro-intestinal

– Éruption cutanée

– Somnolence

– Gynécomastie (hypertrophie mammaire chez le garçon pubère et l’homme âgé)

– Hyperkaliémie

• Ne pas offrir de suppléments de potassium

– Ataxie .

• Effet maximal obtenu après plusieurs jours

PHARMACOVIGILANCE

La diminution des taux sériques de potassium intensie les effets de la digitaline, ce qui augmente le risque de toxicité liée à la digoxine. Il faut donc surveiller étroitement les taux sériques de potassium.

754

Partie 6

Diminution des efforts fournis par le cœur Les efforts imposés au cœur sont réduits lorsque les besoins métaboliques sont maintenus au minimum. Pour y arriver, il faut limiter l’activité physique (alitement), normaliser la température corporelle, traiter toute infection, réduire l’effort respiratoire (position semi-Fowler) et administrer un sédatif à l’enfant irritable.

Troubles liés aux systèmes

Amélioration de l’oxygénation des tissus Toutes ces mesures sont destinées à augmenter l’oxygénation des tissus soit en améliorant la fonction cardiaque, soit en diminuant les demandes tissulaires en oxygène. De plus, l’administration d’oxygène d’appoint humidié peut augmenter la quantité d’oxygène disponible durant l’inspiration. Ce traitement est particulièrement utile pour les enfants atteints d’un œdème pulmonaire,

L’administration d’oxygène se fait au moyen d’une lunette nasale, d’un masque nasal ou facial, ou d’un tube endotrachéal. Les lunettes nasales conviennent parfaitement à l’administration d’oxygène à long terme, car elles permettent à l’enfant de bouger, de manger et de boire facilement. Il faut recourir à l’humidication à vapeur pour compenser l’effet asséchant de l’oxygène.

clinique

Jugement

d’infections des voies respiratoires récurrentes ainsi que d’une résistance vasculaire pulmonaire accrue, puisque l’oxygène est un vasodilatateur qui diminue la résistance vasculaire pulmonaire .

ALERTE CLINIQUE

Vous procédez à l’administration de digoxine à Julia. En lien avec ce médicament, pour quelles raisons le médecin prescrit­il un dosage de potassium sérique chaque jour pendant trois jours consécutifs ? MAIS SI...

Si le taux de potassium dans le sang demeure insufsant, quel sera l’effet sur le cœur de Julia?

Le traitement à l’oxygène nécessite une ordonnance. Exceptionnellement, quand l’état hémodynamique des enfants est complexe, l’oxy­ gène peut être nuisible.

Soins inrmiers INSUFFISANCE CARDIAQUE CONGESTIVE

Améliorer la fonction cardiaque

Les nourrissons ou les enfants atteints d’insufsance cardiaque congestive peuvent être dans un état grave qui nécessite parfois une hospitalisation à l’unité de soins intensifs, jusqu’à l’atténuation des symptômes. L’inrmière doit exploiter au mieux son expertise pour réduire les efforts que doit fournir le myocarde défaillant. Elle doit également soutenir l’enfant et ses proches qui vivent des moments difciles. Bien que les objectifs des soins inrmiers soient les mêmes, les interventions peuvent varier en fonction de l’âge de l’enfant ENCADRÉ 16.6.

La responsabilité de l’inrmière en lien avec l’administration de digoxine est de calculer et de respecter la posologie adéquate, de surveiller les signes de toxicité et d’informer les parents sur l’administration des médicaments à domicile. Le pouls apical doit toujours être vérié avant d’administrer la dose de digoxine. En règle générale, le médicament n’est pas administré si la fréquence cardiaque est inférieure à 90-110 batt./min chez les nourrissons et les jeunes enfants, ou inférieure à 70 batt./min chez les enfants plus âgés (chez

CE QU’IL FAUT RETENIR

Le pouls apical doit toujours être vérié avant d’administrer la digoxine.

Mise en œuvre d’une démarche de soins ENCADRÉ 16.6

Insufsance cardiaque congestive

COLLECTE DES DONNÉES – ÉVALUATION INITIALE

• Débit cardiaque normal

L’inrmière vérie la présence de manifestations cliniques d’insufsance cardiaque congestive chez les enfants atteints de malformations cardiaques ou soupçonnés de l’être TABLEAU 16.6 et PSTI 16.1.

• Diminution des efforts fournis par le cœur

ANALYSE ET INTERPRÉTATION DES DONNÉES

• Soutien et information pour l’enfant et sa famille

Après une évaluation approfondie, plusieurs problèmes découlant de la situation de santé deviennent évidents et peuvent inclure PSTI 16.1 :

• Absence de signes d’excès de liquide INTERVENTIONS INFIRMIÈRES

• Excès de volume liquidien lié à l’œdème causé par l’insufsance cardiaque congestive

De nombreuses stratégies d’interventions sont présentées dans la section Soins inrmiers.

• Risque d’infection lié à l’atténuation des défenses de l’organisme et à la congestion pulmonaire

ÉVALUATION DES RÉSULTATS – ÉVALUATION EN COURS D’ÉVOLUTION

• Déséquilibre nutritionnel causé par un apport nutritif inférieur aux besoins de l’organisme, compte tenu de la détresse respiratoire et des difcultés alimentaires • Bouleversement des processus familiaux en raison de la maladie qui menace la vie de l’enfant

16

• Amélioration de la fonction respiratoire

L’efcacité des interventions cliniques auprès de l’enfant atteint d’une ICC et de sa famille repose sur des examens continus et l’évaluation des soins en fonction des lignes directrices suivantes : • Noter les signes vitaux, la couleur et la perfusion tissulaire de l’enfant, ainsi que son statut liquidien. • Évaluer le niveau d’activité et surveiller les signes de fatigue.

• Intolérance à l’effort du fait de la détresse respiratoire et de la fatigue

• Noter l’apport nutritionnel et les comportements liés à l’alimentation.

RÉSULTATS ESCOMPTÉS

• Surveiller les ingesta et les excreta, et noter le poids.

La planication des soins vise l’atteinte des résultats suivants :

• Observer les comportements de la famille.

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

755

éactivation des connaissances Comment reconnaît-on un pouls décitaire ?

PHARMACOVIGILANCE

La digoxine est un médicament potentiellement dangereux en raison de la marge étroite d’innocuité des doses thérapeutiques, toxiques et létales. L’inrmière doit donc rester très vigilante lorsqu’elle recherche les signes de toxicité après l’administration de la digoxine.

l’adulte, la valeur seuil est de 60 batt./min). Cependant, comme la fréquence cardiaque varie entre des enfants de groupes d’âge différents, l’ordonnance écrite doit préciser à quelle fréquence cardiaque le médicament ne doit pas être administré. L’inrmière doit aussi faire preuve de jugement dans l’évaluation de la fréquence cardiaque ; si elle est signicativement inférieure à la dernière valeur mesurée, il faut aviser le médecin avant de donner le médicament.

Étant donné que la toxicité à la digoxine peut résulter d’un surdosage accidentel, il faut être extrêmement prudent dans le calcul de la posologie et la mesure des doses. Lorsqu’elle convertit les milligrammes en microgrammes, puis en millilitres, l’inrmière doit vérier attentivement la place de la virgule décimale, car une erreur peut entraîner une différence considérable dans la posologie. Par exemple, 0,1 mg correspond à une posologie 10 fois supérieure à 0,01 mg.

L’inrmière doit ausculter le cœur et évaluer le pouls radial pendant une minute entière pour déceler une éventuelle différence de fréquence, car un pouls décitaire est parfois observé en cas de diminution du débit cardiaque. La fréquence, calculée à l’aide du pouls radial, pourrait être inférieure à celle prise à l’aide du pouls mesuré au choc de pointe. Lorsque la surveillance cardiaque se fait au moyen d’un ECG, l’inrmière imprimera le tracé et l’insérera au dossier de l’enfant, permettant ainsi l’analyse de la fréquence et du rythme cardiaques, et la découverte d’éventuelles anomalies telles qu’un allongement de l’intervalle PR (supérieur à 50 % par rapport à l’enregistrement effectué avant l’instauration d’un traitement digitalique) ou une arythmie.

Les mêmes principes seront expliqués aux parents avant le congé de l’hôpital, bien que la dose adéquate en millilitres soit généralement précisée sur le contenant du médicament, ce qui réduit le risque d’erreurs de calcul. L’inrmière doit observer le parent mesurer le médicament dans une seringue de 1 mL et lui montrer la marque formée par le ménisque de liquide que l’œil peut observer. L’ ENCADRÉ 16.7 énumère d’autres directives d’administration de la digoxine.

La digoxine est un médicament potentiellement dangereux en raison de la marge étroite d’innocuité des doses thérapeutiques, toxiques et létales . De nombreuses réactions toxiques sont des prolongements de ses effets thérapeutiques. L’inrmière doit donc rester très vigilante lorsqu’elle recherche les signes de toxicité après l’administration de la digoxine TABLEAU 16.9. TABLEAU 16.9

Les parents doivent également être informés des signes de toxicité. Suivant la préférence de chaque médecin, ils peuvent être invités à mesurer la fréquence cardiaque de l’enfant avant l’administration du médicament. Dans le cadre du plan d’enseignement, les parents ou un autre aidant principal doivent faire la démonstration de la technique qu’ils auront apprise. Il est important d’évaluer leur niveau d’anxiété lorsqu’ils mesurent la fréquence cardiaque, car toute inquiétude excessive concernant celle-ci risque de leur faire retarder inutilement l’administration du médicament.

Toxicité liée à la digoxine chez les enfants

Signes de toxicité SYSTÈME CARDIAQUE

SYSTÈME GASTRO-INTESTINAL

SYSTÈME OCULAIRE

• Bradycardie

• Nausées

• Arythmies – surtout des perturbations de la conduction ou des tachyarythmies supraventriculaires (p. ex., une tachycardie auriculaire avec ou sans blocage, et une tachycardie de jonction)

• Vomissements

• Changements de vision (vision trouble)

• Anorexie

Niveau sérique de digoxine Supérieur à 3 nmol/L Causes associées à un risque élevé de toxicité

756

Partie 6

• Faible poids

• Hypokaliémie

• Insufsance rénale

• Hypercalcémie

Troubles liés aux systèmes

• Hypomagnésémie

Surveiller la réduction de la postcharge Dans le cas des enfants qui reçoivent des inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IECA) pour la réduction de la postcharge, l’inrmière doit mesurer attentivement la pression artérielle avant et après l’administration d’une dose, observer si des signes d’hypotension apparaissent et aviser le médecin si la pression artérielle est faible. Comme de nombreux médicaments ont des effets pouvant favoriser une dysfonction rénale, il faut mesurer scrupuleusement les taux sériques d’électrolytes (surtout le potassium et le sodium) et la fonction rénale des enfants qui prennent plusieurs diurétiques et un IECA.

Favoriser la réduction des efforts cardiaques Un nourrisson porteur d’une malformation cardiaque doit se reposer et emmagasiner sufsamment d’énergie pour s’alimenter. Par conséquent, l’infirmière doit regrouper s es interventions de façon à ne pas interrompre son sommeil. Elle doit encourager les parents à rester à son chevet, dans la mesure du possible, pour le tenir, le bercer et le câliner, car ces activités favorisent un sommeil profond. An d’éviter de le perturber, elle ne lui donnera son bain et ne changera sa literie que lorsque cela est vraiment nécessaire. En outre, elle fera coïncider la prise des repas avec les périodes d’éveil pour

respecter son cycle éveil-sommeil. Plutôt que d’attendre qu’il se mette à pleurer, elle le nourrira aux premiers signes indiquant qu’il a faim (succion des poings), puisque le stress occasionné par les pleurs épuise le peu de ressources énergétiques dont il dispose. Étant donné que les nourrissons atteints d’insufsance cardiaque se fatiguent facilement, à tel point qu’ils s’endorment parfois pendant les repas, il peut être utile de réduire la quantité de lait qui leur est donnée et de les alimenter toutes les trois heures. Une alimentation entérale peut aussi être nécessaire an de combler leurs besoins nutritionnels tout en leur permettant de se reposer sufsamment PSTI 16.1. L’inrmière doit tout mettre en œuvre pour réduire au minimum le degré de stress de l’enfant. L’enfant plus âgé bénéciera d’explications quant à ce qu’il lui arrive pour apaiser ses craintes en lien avec sa maladie et les traitements qui s’imposent (surveillance de la fonction cardiaque, oxygénothérapie et administration de médicaments). Elle l’aidera en lui décrivant le programme de la journée, en le préparant aux divers examens et interventions prévus, en lui faisant faire des activités paisibles et en prévoyant des périodes de repos adéquates. Il est à noter que certains nourrissons et certains enfants doivent être mis sous sédation durant la phase aiguë de leur maladie pour qu’ils puissent diminuer leurs efforts cardiaques.

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 16.7

Administration de la digoxine

L’enseignement devrait porter sur les aspects suivants : • Administrer la digoxine à intervalles réguliers, généralement toutes les 12 heures, par exemple à 8 h et à 20 h. • Administrer soigneusement le médicament en le dirigeant lentement sur le côté et vers l’arrière de la bouche. • Ne pas mélanger le médicament avec des aliments ou d’autres liquides, car il sera difcile d’évaluer la quantité prise en cas de refus de l’enfant.

16

• Lorsque l’enfant vomit, ne pas administrer une deuxième dose. • Lorsque plus de 2 doses consécutives ont été omises, aviser le médecin ou un autre professionnel de la santé. • Communiquer avec le médecin en présence de vomissements fréquents, d’une alimentation insufsante ou d’une diminution de la fréquence cardiaque, car il peut s’agir de signes de toxicité.

• Donner de l’eau à l’enfant ayant des dents après administration du médicament ; dans la mesure du possible, lui brosser les dents pour prévenir les caries, puisque le liquide est sucré.

• Lorsque l’enfant tombe malade, aviser immédiatement le médecin ou d’autres professionnels de la santé.

• Lorsqu’une dose est omise, ne pas en administrer une autre ou augmenter la dose suivante. Respecter le même horaire d’administration du médicament.

• En cas de surdosage accidentel de la digoxine, communiquer immédiatement avec le centre antipoison le plus proche.

• Conserver la digoxine dans un endroit sûr, de préférence dans une armoire verrouillée.

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

757

Plan de soins et de traitements inrmiers PSTI 16.1

Enfant atteint d’insufsance cardiaque congestive

PROBLÈME DÉCOULANT DE LA SITUATION DE SANTÉ

Diminution du débit cardiaque liée à une malformation structurelle, à une dysfonction cardiaque ou à une altération de l’hémodynamique

OBJECTIF

L’enfant maintiendra une perfusion tissulaire optimale.

RÉSULTATS ESCOMPTÉS

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES ET JUSTIFICATIONS

• Fréquence et rythme cardiaques, fréquence respiratoire et pression artérielle dans les normales attendues (en fonction de l’âge et de l’état cardiaque)

Soins cardiaques

• Peau tiède, pouls périphériques forts et égaux, remplissage capillaire ≤ 2 sec.

• Surveiller et noter tout effet indésirable ou toute manifestation clinique de toxicité et intervenir rapidement.

• Absence de distension des veines du cou et d’œdème

• Mesurer et noter, toutes les 2 à 4 heures et au besoin, la fréquence et la régularité du rythme cardiaque, la fréquence respiratoire, la pression artérielle, le statut physique de l’enfant et tout signe pouvant indiquer une diminution du débit cardiaque. • Noter avec précision les ingesta et les excreta pour reconnaître la rétention liquidienne engendrée par l’ICC et la réponse aux médicaments.

• Débit urinaire adéquat

• Peser l’enfant ou le nourrisson sur le même pèse-personne, aux mêmes heures de la journée, et comparer les résultats avec les valeurs pondérales antérieures pour évaluer la rétention liquidienne.

• Gain pondéral adéquat selon l’âge et la courbe de croissance normalisée

• Surélever la tête de lit à un angle de 30 à 45° pour faciliter l’expansion pulmonaire.

• Enfant ou sa famille en mesure de décrire les caractéristiques d’une baisse de débit cardiaque

• Proposer fréquemment de petites quantités d’aliments au nourrisson ou à l’enfant selon sa tolérance pour prévenir la fatigue durant l’alimentation tout en assurant une nutrition adéquate. • Planier les soins inrmiers de manière à permettre à l’enfant ou au nourrisson d’avoir des périodes de repos sans interruption pour diminuer l’intolérance à l’effort. Enseignement – Surveillance cardiaque • Informer l’enfant et la famille sur les caractéristiques de l’ICC an de leur enseigner des mesures qui améliorent la fonction cardiaque et diminuent les efforts cardiaques.

PROBLÈME DÉCOULANT DE LA SITUATION DE SANTÉ

Respiration inefcace en raison de la congestion pulmonaire et de la diminution du débit cardiaque

OBJECTIF

L’enfant aura une respiration efcace.

RÉSULTATS ESCOMPTÉS

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES ET JUSTIFICATIONS

• Fréquence et amplitude respiratoires, et mesures de la saturométrie dans les normales attendues

Soins respiratoires

• Bruits respiratoires bilatéraux clairs et égaux • Teint rosé • Absence de battement des ailes du nez, de rétractions, de toux et de mouvements ondulatoires de la tête • Tolérance aux activités correspondant à l’âge de l’enfant • Enfant ou sa famille en mesure de décrire les caractéristiques d’une respiration inadéquate • Enfant ou sa famille en mesure d’amorcer des interventions facilitant la respiration (p. ex., le positionnement, l’oxygène) • Recours à des services d’urgence, lorsque c’est approprié

758

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

• Évaluer et noter la fréquence respiratoire, les bruits respiratoires et toutes les manifestations cliniques de respiration inefcace toutes les 2 à 4 heures et au besoin pour évaluer les variations de l’état respiratoire susceptibles d’indiquer une aggravation de l’ICC. • Administrer de l’oxygène humidié en quantité adéquate et par le dispositif approprié an de minimiser les efforts respiratoires. • Surélever la tête de lit levée à un angle de 30 à 45° pour favoriser l’expansion pulmonaire et maintenir la perméabilité des voies respiratoires. • Évaluer la quantité et les caractéristiques des sécrétions, et la capacité de l’enfant à expectorer, pour évaluer la nécessité de procéder à une aspiration. • Évaluer la saturation en oxygène toutes les 2 à 4 heures et au besoin pour évaluer l’efcacité des échanges gazeux. Enseignement – Respiration • Informer l’enfant et la famille des caractéristiques d’une respiration inefcace pour qu’ils interviennent de façon proactive.

Pour prévenir les ulcérations cutanées associées à l’œdème, l’inrmière doit changer l’enfant de position toutes les deux heures (le changer de côté s’il est en position semi-Fowler) et l’installer sur une surface thérapeutique destinée à minimiser les points de pression. En outre, elle doit inspecter la peau, en particulier celle qui recouvre le sacrum et l’occiput, à la recherche d’un érythème causé par la pression.

Atténuer la détresse respiratoire Un positionnement adéquat et l’administration d’oxygène contribuent à atténuer la détresse respiratoire. Les respirations doivent être comptées pendant une minute entière au repos. Une évaluation attentive permet de déceler tout signe d’exacerbation de la détresse respiratoire pouvant indiquer une aggravation de l’ICC, et ces signes doivent être signalés. Le positionnement des nourrissons doit favoriser une expansion pulmonaire maximale ; il faut les asseoir sur un siège pour nourrisson ou surélever la tête de lit pour les tenir à un angle entre 30 et 45°. Les enfants préfèrent dormir en s’appuyant sur plusieurs oreillers et rester dans une position semi-Fowler ou une posi tion de Fowler élevée durant les heures de veille. Il est fréquent d’administrer au nourrisson ou à l’enfant un supplément d’oxygène humidié. Il est important d’évaluer la réaction de l’enfant à l’oxygénothérapie en notant sa fréquence respiratoire, l’aisance de la respiration, la coloration

de sa peau et, surtout, la saturation en oxygène.

clinique

Jugement

L’inrmière doit surveiller de près la température de l’enfant, car les besoins en oxygène peuvent augmenter en cas d’hyperthermie ou d’hypothermie. Elle doit en outre signaler au médecin les poussées de èvre, puisqu’il faut traiter toute infection rapidement. Il est essentiel de maintenir une température corporelle normale chez les enfants et les nourrissons, puisqu’ils ont tendance à avoir une diaphorèse importante et à perdre de la chaleur (évaporation). Le nourrisson de moins de 3 mois a une régulation thermique moins efcace que celle des enfants et des adultes. Une baisse de température ambiante qui cause une diminution de la température corporelle entre 36 et 36,4 °C (hypothermie légère) entraînera une vasoconstriction périphérique, une hypotension artérielle, une tachycardie et une augmentation de la thermogenèse de l’organisme. Ces réactions augmentent l’activité cardiaque ainsi que les besoins du cœur en oxygène (ministère des Solidarités et de la Santé, 2018).

Louis-Xavier, âgé de trois ans, reçoit du furosémide Les infections des voies res(LasixMD) pour le traitement d’une insufsance carpiratoires peuvent exacerber diaque congestive. An d’évaluer les bienfaits de l’ICC et doivent être traitées ce médicament sur Louis-Xavier, quels sont les adéquatement et, dans la quatre éléments sanguins qui doivent être mesure du possible, prévemesurés ? nues. L’enfant doit donc être Outre les éléments sanguins, quels autres moyens tenu à l’écart des personnes pourriez-vous prendre pour évaluer la réponse au atteintes d’une infection des traitement du furosémide chez Louis-Xavier ? voies respiratoires. Par conséNommez-en deux. quent, s’il doit partager sa chambre avec une autre personne, il faut s’assurer que celle-ci n’est pas porCE QU’IL FAUT RETENIR teuse d’une telle infection. Pour l’enfant plus âgé, an d’assurer la quiétude de l’environnement, il Les infections des voies convient de choisir un partenaire de chambre respiratoires peuvent relativement calme qui, lui aussi, doit être alité. exacerber l’ICC et doivent Une hygiène rigoureuse des mains est de mise être traitées adéquatement avant et après avoir prodigué des soins à tout et, dans la mesure du enfant hospitalisé. L’utilisation d’antibiotiques possible, prévenues. peut être nécessaire pour lutter contre une infection des voies respiratoires. L’inrmière veille à ce que le médicament soit administré à des intervalles égaux dans un horaire de 24 heures pour maintenir des taux thérapeutiques sériques d’antibiotiques.

Maintenir le statut nutritionnel L’une des complexités des soins inrmiers est de répondre aux besoins nutritionnels des nourrissons atteints d’ICC ou de malformations cardiaques graves. Le métabolisme basal de ces nourrissons est plus élevé en raison de l’affaiblissement de la fonction cardiaque et de l’augmentation des fréquences cardiaque et respiratoire. Leurs besoins caloriques dépassent grandement ceux de la moyenne des nourrissons, mais la fatigue les empêche d’absorber un nombre sufsant de calories . C’est pourquoi l’inrmière doit augmenter la densité calorique de la préparation alimentaire du nourrisson.

éactivation des connaissances Qu’est-ce que le métabolisme basal ?

16 Annexe 6.1W : Apports nutritionnels de référence.

Lorsqu’ils s’alimentent, les nourrissons atteints d’ICC s’épuisent autant qu’un adulte faisant de l’exercice, et ils n’ont souvent pas l’énergie ou la réserve cardiaque nécessaire pour fournir des efforts supplémentaires. Les repas prolongés (plus de 30 minutes), les quantités diminuées, le refus alimentaire, l’irritabilité, la diaphorèse et la tachypnée lors des tétées sont des manifestations cliniques fréquentes que l’inrmière doit surveiller pour dépister une aggravation de l’insufsance cardiaque (Bressieux-Degueldre et Sekarski, 2015).

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

759

Le nourrisson doit être bien reposé avant chaque repas et nourri peu après le réveil pour éviter qu’il ne dépense trop d’énergie en pleurant. L’horaire de repas toutes les 3 heures convient à la plupart des nourrissons. L’horaire alimentaire doit être adapté aux besoins de chaque enfant. Pour les nourrissons atteints d’une maladie cardiaque grave, l’objectif alimentaire correspond à 150 mL/kg/jour et à au moins 120 kcal/kg/jour (Jayaprasad, 2016). Une suce dans laquelle sera pratiquée une incision pour agrandir l’ouverture minimisera la dépense énergétique requise pour la succion du nourrisson pendant son alimentation. Il doit bénécier d’un soutien adéquat et être nourri en position semi-verticale. Il est possible que le nourrisson ait besoin d’un repos fréquent et qu’il faille l’encourager à sucer en lui tapotant les joues et la mâchoire. En général, il est raisonnable d’alimenter un nourrisson en 30 minutes. Plus de temps risquerait d’épuiser le nourrisson et de réduire l’intervalle entre chaque repas. Les nourrissons qui éprouvent des difcultés liées à l’alimentation doivent souvent être nourris avec une sonde nasogastrique pour compléter leur apport oral et veiller à ce qu’ils reçoivent une quantité sufsante de calories. S’ils sont très stressés et fatigués, en détresse respiratoire ou s’ils afchent une tachypnée, l’alimentation par voie orale est interrompue, et ils seront nourris exclusivement par voie nasogastrique. Habituellement, la nutrition entérale est une mesure temporaire, en attendant que l’état de santé du nourrisson s’améliore et que ses besoins nutritionnels soient comblés par voie orale. La pose d’une sonde de gastrostomie peut être nécessaire pour nourrir adéquatement certains nourrissons atteints d’ICC grave, de reux gastro-œsophagien ou de décits neurologiques importants.

CONSEIL CLINIQUE

Les diurétiques doivent être administrés en début de journée aux enfants qui ont appris la propreté an d’éviter qu’ils n’urinent pendant la nuit.

760

Partie 6

La densité calorique des formules alimentaires est augmentée en les concentrant, puis en ajoutant un polymère de glucose, une huile contenant des triglycérides à chaîne moyenne, ou de l’huile de maïs. Les formules pour nourrisson fournissent 0,67 kcal/mL, et l’ajout d’additifs peut optimiser les calories jusqu’à 1 kcal/mL. Ainsi, le nourrisson peut recevoir davantage de calories pour un volume inférieur de formule. La densité calorique du mélange doit être graduellement augmentée de 2 kcal pour chaque 30 mL par jour an de prévenir la diarrhée ou l’intolérance à la formule. Pour les mères qui allaitent, il leur est suggéré d’alterner l’allaitement avec des formules riches en calories. Certaines mères préfèrent augmenter l’apport calorique en ajoutant au lait

Troubles liés aux systèmes

maternel une formule pour nourrisson comme SimilacMD, Enfamil MD ou de l’huile de maïs. Un dispositif d’aide à l’allaitement peut également être utile. Une nutritionniste, en collaboration avec les autres membres de l’équipe soignante, planie et prescrit un plan diététique qui convient spécifiquement aux besoins du nourrisson. L’inrmière doit rappeler ces consignes aux parents.

Favoriser l’élimination des liquides Lorsque des diurétiques sont administrés, l’inrmière doit noter les ingesta et excreta, et mesurer le poids corporel de l’enfant à la même heure chaque jour pour évaluer les bienfaits du médicament. Compte tenu du risque de déshydratation et de déséquilibre électrolytique (perte de sodium, de potassium, de chlorure et de bicarbonate) lié à une diurèse abondante, l’inrmière doit surveiller la présence de complications ou de manifestations cliniques évoquant des réactions aux médicaments. Lorsque les diurétiques utilisés favorisent l’élimination du potassium, l’inrmière encourage l’enfant à consommer des aliments riches en potassium comme les bananes, les oranges, les grains entiers, les légumineuses et les légumes verts feuillus, et elle donne les suppléments prescrits. Les taux sériques de potassium doivent être mesurés régulièrement. Il est rare d’avoir à imposer une restriction de liquide aux nourrissons qui ont déjà du mal à s’alimenter. Cependant, dans cette éventualité, l’inrmière planie des horaires journaliers d’apport de liquides, dont la plupart doivent être absorbés pendant les heures de veille. Les trottineurs et les enfants d’âge préscolaire reçoivent de petites quantités de liquide dans de petits gobelets qui auront ainsi l’air d’être pleins. Les enfants plus âgés peuvent être mis à contribution en leur demandant de rapporter la quantité de liquide qu’ils consomment. En cas de restriction sodique, l’inrmière discute des sources alimentaires de sodium avec la famille et la prie de ne pas apporter de gâteries contenant du sel. L’apport de sodium normal est de 2 à 3 mEq/kg/jour (Jayaprasad, 2016). Au moment des repas, le plateau de l’enfant est vérié an de s’assurer qu’il reçoit l’alimentation adéquate.

Soutenir l’enfant et sa famille L’insufsance cardiaque est une complication grave des maladies cardiovasculaires. En général, les parents et les enfants plus âgés comprennent bien la gravité de cette affection. Puisque le stress

accroît la charge de travail du cœur, l’inrmière doit s’efforcer en priorité d’atténuer l’anxiété de l’enfant en le préparant aux diverses interventions qu’il devra subir. Elle doit également informer régulièrement les parents de l’évolution de l’état de santé de leur enfant et les rassurer constamment sur le fait que l’équipe de soins met tout en œuvre pour le traiter. L’inrmière doit présenter aux proches les médicaments à administrer à l’enfant et leur préciser les signes d’aggravation de l’insufsance cardiaque qui doivent les inciter à consulter un médecin, notamment une augmentation de la transpiration, une diminution de la fréquence des mictions (réduction du nombre de couches mouillées ou de l’utilisation des toilettes) ou des difcultés d’alimentation. Elle

16.3.2

Hypoxémie

L’hypoxémie désigne une diminution de la teneur en oxygène du sang artériel ou une pression partielle de l’oxygène dans le sang artériel (PaO2) inférieure à la normale, qui se traduit par un abaissement de la saturation artérielle ou de la PaO 2. L’hypoxie est une réduction de l’oxygénation tissulaire résultant d’une saturation en oxygène et d’une PaO2 faibles, qui nuit aux processus cellulaires. La cyanose correspond à la coloration bleutée des muqueuses, de la peau et du lit des ongles de l’enfant dont la saturation en oxygène est faible. Elle découle de la présence d’hémoglobine désoxygénée, c’est-à-dire de l’hémoglobine qui n’est pas liée à l’oxygène, à une concentration de 50 g/L dans le sang. Elle est généralement apparente lorsque les saturations artérielles en oxygène sont comprises entre 80 et 85 %. La détermination de la cyanose est subjective. Elle varie selon le pigment cutané, la qualité de la lumière, la couleur de la pièce ou les vêtements de l’enfant. La cyanose n’est pas forcément un signe d’hypoxémie artérielle, puisque la saturation en oxygène et la quantité d’hémoglobine circulante entrent toutes deux en jeu. En effet, il arrive que des enfants atteints d’anémie grave ne présentent pas de signes de cyanose malgré une hypoxémie notable, car le taux d’hémoglobine peut être trop faible pour produire la coloration bleutée caractéristique. Par contre, les enfants ayant une polycythémie peuvent présenter les signes d’une cyanose même si la PaO2 est quasi normale. Les malformations cardiaques qui provoquent une hypoxémie et une cyanose résultent d’un sang veineux désaturé (sang bleu) entrant dans la circulation systémique sans passer par les poumons (p. ex., un shunt droite-gauche).

doit prendre toutes les mesures nécessaires pour optimiser l’adhésion des membres de la famille au traitement pharmacologique. Il s’agit notamment de simplier le plus possible le traitement, et de les aider à adapter l’horaire d’administration à leurs habitudes de vie (en évitant tout particulièrement l’administration nocturne) et à utiliser des tableaux ou des aides visuelles comme moyens mnémotechniques 14 . Il est essentiel de leur remettre des instructions écrites sur l’administration de la digoxine ENCADRÉ 16.7 et de l’information sur les signes d’intoxication. Si l’insufsance cardiaque est la phase terminale d’une cardiopathie congénitale grave, l’inrmière doit traiter l’enfant comme tous les enfants qui sont en phase terminale 10 .

14 Les stratégies d’enseignement à la famille concernant l’administration des médicaments à domicile sont présentées dans le chapitre 14, Techniques de soins.

10 Les soins à donner à un enfant en phase terminale sont décrits dans le chapitre 10, Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie.

Manifestations cliniques Avec le temps, deux changements physiologiques se produisent dans l’organisme en réaction à l’hypoxémie chronique : la polycythémie et l’hippocratisme digital. La polycythémie se développe en réponse à une hypoxémie chronique, ce qui stimule la production d’érythropoïétine par les reins et déclenche, par la suite, une augmentation de la production de globules rouges. La capacité de transport de l’oxygène est ainsi augmentée. Cependant, l’anémie est possible s’il n’y a plus de fer disponible pour la formation de l’hémoglobine. La polycythémie augmente la viscosité du sang et modie les facteurs de la coagulation. Les enfants ayant un hématocrite supérieur à 60 ou 65 % ont un risque accru de thrombose, d’accidents vasculaires cérébraux, d’infarctus du myocarde et de thrombose veineuse profonde (Nagalla, 2017) et peuvent avoir diverses manifestations cliniques, notamment :

16

• une altération de l’état d’éveil ; • des étourdissements ; • des maux de tête ; • une intolérance à l’effort. L’hippocratisme digital, caractérisé par un épaississement et un aplatissement de l’extrémité des doigts et des orteils, peut résulter de l’hypoxémie tissulaire chronique et de la polycythémie FIGURE 16.10 . Il se peut que les nourrissons atteints d’hypoxémie légère ne montrent aucune manifestation clinique excepté la cyanose, et que leur croissance et leur développement soient quasi normaux. Ceux atteints d’hypoxémie plus grave peuvent éprouver une

Chapitre 16

FIGURE 16.10 Hippocratisme digital

Troubles liés au système cardiovasculaire

761

fatigue pendant les repas, avoir un gain pondéral insufsant et souffrir de tachypnée et de dyspnée. L’hypoxémie grave entraînant une hypoxie tissulaire se traduit par une détérioration clinique et des signes de défaillance circulatoire. Hyperpnée : Accélération du rythme de la respiration et augmentation de l’amplitude des mouvements respiratoires. Spasme infundibulaire : Obstruction en forme d’entonnoir de la voie de sortie du ventricule droit.

Les malaises anoxiques, également désignées par les expressions enfants bleus, crises de cyanose prononcée ou crises tétralogiques en raison du fait qu’elles sont souvent associées à la tétralogie de Fallot, peuvent survenir chez tout enfant dont la malformation cardiaque provoque une obstruction du débit sanguin pulmonaire et une communication interventriculaire. Le nourrisson risque de devenir subitement cyanotique et de souffrir d’hyperpnée en raison d’un spasme infundibulaire soudain qui diminue le débit sanguin pulmonaire et augmente le shunt droitegauche (mécanisme déclencheur suggéré de la tétralogie de Fallot). Les crises, qui sont rares avant l’âge de deux mois, se produisent généralement pendant la première année de vie. Elles sont plus courantes le matin et peuvent suivre un repas, des pleurs, une défécation ou des interventions stressantes. Dans la mesure où l’hypoxémie grave entraîne une hypoxie cérébrale, les malaises anoxiques nécessitent une évaluation et un traitement rapides pour prévenir les lésions cérébrales ou même la mort.

Diagnostic La cyanose chez le nouveau-né peut résulter d’une maladie cardiaque, pulmonaire, métabolique ou hématologique, bien que les causes cardiaques et pulmonaires surviennent le plus souvent. Génupectorale : Se dit de la position sur le dos ou contre l’épaule d’un adulte avec les cuisses repliées sur l’abdomen ; position accroupie dans le cas des enfants qui peuvent se tenir debout.

Pour distinguer les 2 causes, il est utile de faire passer un test d’hyperoxie au nourrisson. Celui-ci est placé dans un environnement où l’oxygène est à 100 % et dans lequel les paramètres sanguins sont surveillés. Une PaO2 de 100 mmHg ou plus suggère une maladie pulmonaire, alors qu’une PaO2 inférieure à 100 mmHg annonce une maladie cardiaque (Park, 2014). L’anamnèse, une radiographie thoracique et, surtout, un échocardiogramme contribuent au diagnostic de la cardiopathie cyanogène. La cyanose persistante due à des anomalies cardiaques cyanogènes expose l’enfant à des risques de complications neurologiques importantes. L’accident vasculaire cérébral, l’abcès cérébral et les retards développementaux, surtout moteur et cognitif, peuvent résulter d’une hypoxie chronique.

Approche thérapeutique FIGURE 16.11 Nourrisson tenu en position génupectorale

762

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

En général, les nouveau-nés présentent les signes d’une cyanose

dans les premiers jours de vie, lorsque le canal artériel qu’empruntait le débit sanguin pulmonaire commence à se fermer. La prostaglandine E1, qui permet la vasodilatation et la relaxation des muscles lisses, et qui augmente ainsi la dilatation et la perméabilité du canal artériel, est administrée par voie intraveineuse pour rétablir le débit sanguin pulmonaire. L’emploi des prostaglandines a permis de sauver la vie de nourrissons souffrant de malformations cardiaques dépendantes de la persistance du canal artériel. Ainsi, le rétablissement du débit pulmonaire et l’oxygénation qu’il produit permettent de stabiliser l’état du nourrisson et de procéder à une évaluation complète avant d’instituer d’autres thérapies. L’administration d’un supplément d’oxygène aux nourrissons dépendants de la persistance du canal artériel pour maintenir le débit pulmonaire est déconseillée, car elle favorise la fermeture du canal artériel. Les malaises anoxiques surviennent brusquement ; il est donc essentiel de les détecter et de les traiter rapidement. En milieu hospitalier, ils sont souvent observés pendant les prises de sang ou l’insertion d’une voie I.V., lorsque l’enfant est très agité ou après un cathétérisme cardiaque. Ils se caractérisent par une obstruction aiguë et complète de l’infundibulum (la voie d’éjection sous-pulmonaire) qui interrompt partiellement ou complètement le passage du sang dans les artères pulmonaires et accentue le passage de sang désaturé (shunt droite-gauche à travers une communication intracardiaque) vers l’aorte. Les enfants deviennent gravement cyanosés, et si le malaise persiste, il peut s’ensuivre une hypotonie, une perte de connaissance et une mort subite (Kecir, 2014). La morphine, administrée par voie intraveineuse, aide à diminuer le spasme infundibulaire. Il faut placer l’enfant en position génupectorale pour augmenter la résistance vasculaire systémique et favoriser le retour veineux systémique, ce qui permettra d’augmenter le shunt intracardiaque gauche-droite à travers la CIV FIGURE 16.11. La prise en charge des crises de cyanose paroxystique est détaillée dans le TABLEAU 16.10. Elle se base sur le positionnement de l’enfant et sur l’administration d’oxygène et de médicaments tels que la morphine. La survenue d’une crise indique la nécessité d’un traitement chirurgical aussi rapidement que possible. Dans le cas des nourrissons atteints de malformations ne pouvant être complètement corrigées, une intervention chirurgicale visant la création d’une anastomose systémopulmonaire permettra d’augmenter le débit sanguin vers les poumons. Le TABLEAU 16.11 et la FIGURE 16.12 décrivent les anastomoses les plus communes.

Technique de soins TABLEAU 16.10

Traiter des accès de cyanose paroxystique (malaises anoxiques)

INTERVENTIONS

JUSTIFICATIONS

Donner les premiers soins Arrêter le stimulus déclencheur.

• Prévient l’exacerbation du malaise anoxique.

Adopter une approche calme et réconfortante.

• Rassure l’enfant et ses proches.

Placer le nourrisson en position génupectorale.

• Augmente la résistance vasculaire systémique et améliore le débit sanguin pulmonaire.

Administrer de l’oxygène 100 % avec un nébuliseur.

• Favorise la vasodilatation pulmonaire et améliore le débit pulmonaire.

Aviser le médecin.

• Constitue une situation d’urgence, car le malaise menace le pronostic vital.

• Diminue l’agitation de l’enfant et prévient l’exacerbation du malaise anoxique. • Augmente le retour veineux au cœur (précharge) et la postcharge systémique.

• Des interventions additionnelles sont requises an d’améliorer le débit pulmonaire et l’oxygénation, de corriger l’acidose métabolique, de prévenir les complications neurologiques et de diminuer le risque de mort subite. Administrer les médicaments et solutés selon l’ordonnance Solutés isotoniques ou albumine 5 % par voie I.V., au besoin

• Assure l’expansion vasculaire.

Morphine par voie I.V. (à privilégier), I.M. ou S.C.

• Produit un effet sédatif ; diminue l’agitation ; diminue la sécrétion des catécholamines.

• Optimise la précharge. • Diminue l’hyperpnée. • Réduit le spasme infundibulaire

Bicarbonate de sodium par voie I.V.

• Traite et corrige l’acidose métabolique.

Propranolol (bêtabloquant) par voie I.V.

• Relaxe le spasme de l’infundibulum du ventricule droit. • Prévient la survenue de malaises anoxiques en attendant une intervention chirurgicale correctrice ultérieure.

Kétamine par voie I.V. ou I.M.

• Produit un effet sédatif. • Augmente la résistance vasculaire systémique.

Phényléphrine par voie I.V.

• Augmente la résistance vasculaire systémique, et donc favorise le débit pulmonaire.

16

Si le malaise persiste Procéder à l’intubation et assurer l’assistance respiratoire.

• Stabilise les voies aériennes et minimise les efforts respiratoires.

Préparer l’enfant pour une intervention chirurgicale urgente.

• Maintient les fonctions vitales.

TABLEAU 16.11

• Minimise les complications et augmente la probabilité de survie.

Anastomoses chirurgicales des malformations cardiaques chez les enfants

DESCRIPTION

COMMENTAIRES

Anastomose (ou shunt) de Blalock-Taussig modiée (palliative, systémopulmonaire) De l’artère sous-clavière à l’artère pulmonaire, avec un greffon en Gore-TexMD ou en ImpraMD

• Elle crée une déviation d’une partie du ux sanguin aortique vers la circulation pulmonaire, ce qui entraîne une amélioration de l’oxygénation du sang et une diminution de la cyanose. • Le débit de l’anastomose est parfois excessif, nécessitant l’administration de diurétiques. • L’acide acétylsalicylique est généralement prescrit à la suite de l’intervention chirurgicale, car il y a un risque de thrombose. • L’anastomose est facile à ligaturer au moment de la correction dénitive. • La taille de l’anastomose est xe : elle peut devenir trop petite lorsque l’enfant grandit.

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

763

TABLEAU 16.11

Anastomoses chirurgicales des malformations cardiaques chez les enfants (suite)

DESCRIPTION

COMMENTAIRES

Anastomose (ou shunt) centrale De l’aorte ascendante à l’artère pulmonaire princi­ pale, avec un greffon en Gore­TexMD

• Elle est employée lorsque l’anastomose de Blalock­Taussig modiée ne peut l’être. • La longueur de l’anastomose agit de manière à restreindre le débit sanguin ; il y a risque de symptômes d’insufsance cardiaque congestive ; un traitement diurétique est parfois nécessaire. • L’anastomose est facile à insérer et à retirer au moment de la prochaine étape chirurgicale. • L’acide acétylsalicylique est généralement prescrit à la suite de l’intervention chirurgicale, car il y a un risque de thrombose.

Anastomose (ou shunt) de Sano Du ventricule droit à l’artère pulmonaire, avec un greffon en Gore­TexMD

• Elle est pratiquée au lieu de l’anastomose de Blalock­Taussig modiée ou de l’anastomose centrale dans la procédure de Norwood. • Elle prévient la fuite diastolique (du débit sanguin systémique vers les artères pulmonaires) et, par conséquent, l’hypo­ perfusion coronaire. • Elle permet un ux pulsé dans l’artère pulmonaire et une pression diastolique normale dans l’aorte et, par conséquent, une perfusion coronaire normale.

Anastomose ou pontage cavopulmonaire bidirectionnelle de Glenn (hémi-Fontan) De la veine cave supérieure à l’artère pulmonaire droite et déconnexion de la veine cave supérieure de l’oreil­ lette droite ; il y a ligature de l’anastomose de Blalock­ Taussig modiée ; elle permet de dévier le débit sanguin vers les deux pou­ mons (bidirectionnelle)

• Cette intervention fait ofce d’anastomose secondaire ; elle est souvent utilisée à la deuxième étape de la correction (lorsqu’un seul ventricule est fonctionnel et que le ux sanguin pulmonaire est insufsant), en attendant une intervention de Fontan. • Elle peut faire partie d’une future intervention de Fontan modiée. • La veine cave inférieure reste connectée à l’oreillette droite, créant un shunt droite­gauche qui entraîne une saturation en oxygène de 75 à 80 % ; il y a diminution de la cyanose grave. • Elle diminue la surcharge volumique qui s’exerce sur les ventricules. • Elle comporte un risque d’épisodes emboliques (malformation caractérisée par un mélange des circulations) ; l’acide acétylsalicylique est souvent prescrit. • Des stules artérioveineuses pulmonaires peuvent se produire des mois ou des années plus tard et provoquer une désaturation (complication rare).

Il faut hydrater convenablement le nourrisson ou l’enfant cyanosé pour maintenir la valeur de l’hématocrite et la viscosité sanguine dans les

limites acceptables an de réduire le risque d’AVC. Les èvres doivent être évaluées, car une bactériémie peut induire une endocardite infectieuse, comme cela est expliqué dans la section 16.5.1 de ce chapitre. L’anémie doit être surveillée chez le nourrisson, compte tenu du risque d’AVC et de la diminution de la capacité du sang artériel à transporter l’oxygène qu’elle provoque. Un supplément de fer et une transfusion sanguine peuvent être nécessaires.

FIGURE 16.12

764

Partie 6

Diagramme schématique des anastomoses extracardiaques

Troubles liés aux systèmes

Les infections des voies respiratoires ou la diminution de la fonction pulmonaire, quelle qu’en soit la cause, sont susceptibles d’aggraver l’hypoxémie chez l’enfant cyanosé. L’hygiène pulmonaire intensive, la kinésithérapie de drainage, l’antibiothérapie et l’oxygéno­ thérapie pour améliorer la saturation artérielle sont des interventions importantes en cas d’hypoxémie.

Soins inrmiers HYPOXÉMIE

L’aspect général des nourrissons et des enfants qui ont une cyanose prononcée entraîne des problèmes d’image corporelle et d’adaptation. La coloration bleutée de leurs lèvres et de leurs ongles est un signe agrant de leur cardiopathie qui, sans cela, passerait probablement inaperçue. L’hippocratisme digital observé chez les enfants plus âgés et le fait qu’ils accusent un retard staturopondéral témoignent, eux aussi, de la gravité de l’atteinte cardiaque. Les adolescents sont tout particulièrement préoccupés par leur apparence. C’est pourquoi de nombreux enfants atteints de cardiopathie congénitale diront qu’ils veulent être opérés pour avoir une couleur normale. Il n’est donc pas surprenant qu’ils observent avec un plaisir et un enthousiasme non dissimulés leurs ongles tout roses après l’intervention. Bien des parents sont effrayés par la coloration bleutée de leur enfant, car la cyanose est généralement associée au manque d’oxygène et aux maladies graves. Ils doivent également composer avec les commentaires que leur entourage et même des inconnus peuvent faire sur la couleur de leur enfant. L’inrmière doit répondre à leurs questions et apaiser leurs craintes avec calme et empathie, tout en soulignant les aspects positifs de la croissance et du développement de leur enfant. Elle doit par ailleurs leur donner de l’information sur le traitement des malaises anoxiques. Chez les enfants hypoxémiques, il faut prévenir la déshydratation, car elle augmente le risque d’AVC, et surveiller soigneusement le statut

liquidien en mesurant exactement les ingesta, les excreta et le poids de façon quotidienne. L’apport liquidien quotidien doit répondre aux exigences minimales, et les liquides d’appoint doivent être aisément accessibles. Une nutrition entérale par gavage ou une hydratation par voie I.V. sera nécessaire pour les enfants qui ne sont pas en mesure de s’alimenter par voie orale. La èvre, les vomissements et la diarrhée peuvent provoquer la déshydratation et exiger un traitement rapide. Les parents doivent être avisés de l’importance d’assurer un apport liquidien sufsant et des mesures à prendre pour prévenir la déshydratation. Ils doivent disposer chez eux d’une solution électrolytique à administrer par voie orale au cas où le nourrisson ne tolérerait pas sa formule habituelle. Le médecin doit être avisé en cas de èvre, de vomissements, de diarrhées ou d’autres problèmes. Les mesures préventives et l’évaluation rigoureuse de l’infection respiratoire sont des composantes importantes des soins inrmiers. Toute défaillance de la fonction pulmonaire augmente l’hypoxémie du nourrisson. Il est important de procéder à une hygiène rigoureuse des mains et d’isoler l’enfant des personnes atteintes d’une infection apparente des voies respiratoires. Les mesures requises incluent l’hygiène pulmonaire intensive, le traitement par des antibiotiques ou des agents antiviraux, au besoin, et l’administration d’oxygène d’appoint pour diminuer l’hypoxémie. Les nourrissons peuvent avoir besoin d’une nutrition entérale par gavage ou d’une hydratation par voie parentérale si la détresse respiratoire empêche l’alimentation par voie orale.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Bien des parents sont effrayés par la coloration bleutée de leur enfant, car la cyanose est généralement associée au manque d’oxygène et aux maladies graves.

16

16.4

Interventions inrmières en cas de cardiopathie congénitale

Lorsque l’enfant naît avec une malformation cardiaque importante, les parents sont soumis à d’immenses stress psychologique et physique pour s’ajuster aux besoins particuliers que cela suppose. La section suivante concerne : • la famille d’un nourrisson qui présente une malformation cardiaque grave et qui a besoin de soins à domicile avant la réparation ; • la préparation et les soins requis par l’enfant et sa famille en cas d’interventions invasives (cathétérisme et intervention chirurgicale). Les soins et les traitements inrmiers destinés à l’enfant atteint d’une malformation cardiaque commencent dès que le diagnostic est pressenti.

Le diagnostic prénatal des anomalies cardiaques congénitales est de plus en plus fréquent. Plus que jamais, les inrmières sont tenues de conseiller et de soutenir les familles qui se préparent à la naissance d’un nourrisson atteint de telles malformations.

16.4.1

Soutien à la famille pour l’adaptation à une affection cardiaque

Lorsqu’ils apprennent que leur enfant est porteur d’une malformation cardiaque, les parents sont d’abord sous le choc, puis ils sont pris d’une terrible angoisse à l’idée qu’il risque de mourir. Il leur faut du temps pour pouvoir faire le deuil de l’enfant en santé qu’ils espéraient avant d’être capables de comprendre la signication de la malformation. Malheureusement, les contraintes imposées par le traitement ne leur donnent pas le Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

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13 D’autres mesures sus­ ceptibles de favoriser la création d’un lien d’attache­ ment entre le nouveau­né hospitalisé et ses parents sont présentées dans le chapitre 13, Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation.

10 Les conséquences de la maladie chronique de l’enfant sur la famille, notamment les problèmes familiaux, sont détaillées dans le chapitre 10, Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie.

La Fondation québécoise pour les enfants malades du cœur (http://en-coeur.org) a participé à la publication de plusieurs documents destinés aux enfants cardiaques et à leur famille.

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Partie 6

temps de s’ajuster, puisqu’ils doivent immédiatement consentir aux différents examens paracliniques et thérapeutiques. L’inrmière joue donc un rôle crucial en leur apportant son soutien durant ces moments de chagrin, en évaluant leur niveau de compréhension de l’information reçue, en leur fournissant des explications additionnelles lorsque cela s’avère nécessaire et en faisant part de leur réaction aux autres membres de l’équipe de soins. Les nouveau-nés qui sont dans un état critique sont généralement hospitalisés. L’inrmière doit favoriser le développement du lien d’attachement entre les parents et leur nourrisson en les encourageant à le tenir, à le toucher et à le regarder, tout en prévoyant sufsamment de moments intimes au cours desquels ils peuvent rester seuls avec lui 13 . Les répercussions qu’un diagnostic de cardiopathie congénitale peut avoir sur une famille sont complexes. Aucun membre de la famille ne sera épargné, quelles que soient les mesures d’adaptation qui auront été prises. En général, la mère ne se sent pas à la hauteur en raison de la complexité des soins qui doivent être prodigués au nourrisson. Elle se sent souvent épuisée et stressée, car elle doit s’occuper non seulement du nourrisson malade, mais aussi du reste de la famille. Quant au père et aux autres enfants, ils peuvent se sentir délaissés et nourrir un certain ressentiment à l’égard de l’enfant malade, comme c’est le cas dans toutes les familles dont l’un des membres souffre d’une maladie chronique 10 . En outre, les parents redoutent de laisser l’enfant malade aux bons soins d’une tierce personne. Malheureusement, ce faisant, ils s’enferment tous les deux (surtout la mère) dans un mode de fonctionnement axé essentiellement sur la prise en charge de l’enfant, et ils ne s’accordent jamais une minute de repos. Certes, leurs craintes sont justiées, mais ils peuvent les apaiser en apprenant graduellement à un proche ou à un voisin en qui ils ont conance à prendre soin de l’enfant en leur absence. Par ailleurs, les parents ont parfois de la difculté à discipliner l’enfant ou à lui xer des limites claires. Pour pallier ce problème, ils peuvent avoir recours à certaines techniques de modication du comportement comme l’attribution de récompenses (possibilité de pratiquer une activité qu’il aime) ou le renforcement social (approbation). Toutefois, ces techniques sont surtout efcaces lorsqu’elles sont employées avant que l’enfant n’ait appris à régner sur la vie de famille. Pour prévenir les problèmes à long terme, il faut que l’inrmière évoque avec les parents la nécessité de discipliner l’enfant dès son jeune âge. La création d’un lien de dépendance excessive entre l’enfant et ses parents représente un autre

Troubles liés aux systèmes

problème qui risque de se poser au sein de la famille. Bien souvent, cette dépendance de l’enfant s’installe parce que les parents craignent son décès. Les parents doivent prendre conscience des effets négatifs de la dépendance et de la surprotection de l’enfant à long terme, et l’inrmière peut les aider à adopter des stratégies qui optimiseront son développement. Les parents ont besoin de voir ce que leur enfant peut faire pour éviter de se concentrer sur ses limites physiques et d’entretenir une relation de dépendance avec lui. L’enfant, quant à lui, a besoin d’interagir avec ses pairs et de mener une vie sociale normale. Il faut s’abstenir de l’empêcher de jouer avec d’autres enfants sous prétexte qu’il ne doit pas se surmener. Les enfants sont capables de limiter eux-mêmes leurs activités lorsqu’ils peuvent aller à leur propre rythme. Un diagnostic de cardiopathie congénitale peut plonger la famille dans une période de crise prolongée. Il arrive fréquemment que les personnes qui aident la famille ne mesurent pas à quel point le fardeau perpétuel imposé par la prise en charge de l’enfant peut être accablant (épuisement physique, coût nancier, bouleversements émotionnels, peur de la mort et inquiétude pour le futur de l’enfant). Malgré la stabilisation de l’état de l’enfant ou la correction de la malformation, la famille peut devoir ajuster son mode de vie. La rencontre d’autres familles ayant un enfant atteint d’une malformation similaire peut aider l’enfant et ses proches à composer avec les contraintes quotidiennes auxquelles ils sont soumis. Il est important de réaliser toutefois que l’information provenant d’autres parents ne s’applique pas forcément à leur situation.

16.4.2

Information à la famille sur la maladie

Lorsque les parents sont prêts à en apprendre davantage sur la maladie cardiaque de leur enfant, il est important de leur fournir des explications qui correspondent à leur niveau de compréhension. Une description générale des structures du cœur et de leur fonction aide souvent les parents à mieux comprendre la malformation cardiaque de leur enfant. L’utilisation de schémas simples, de photos ou d’un modèle réduit du cœur permet de mieux visualiser le cœur et la malformation congénitale. Les parents apprécient recevoir de l’information écrite spécique de l’état cardiaque de leur enfant. Par ailleurs, un glossaire des termes courants peut s’avérer utile. Les parents doivent également être renseignés sur le pronostic et les options thérapeutiques. Les professionnels de la santé devraient proter des rencontres ultérieures pour évaluer la compréhension des parents relativement à l’anomalie cardiaque et pour clarier l’information, au besoin.

La famille doit également recevoir de l’information sur les médicaments et un mode de vie sain pour le maintien d’une bonne santé. En effet, les médicaments jouent un rôle central dans l’approche thérapeutique de certaines maladies cardiaques comme les arythmies ou l’ICC grave ; il en va de même des anticoagulants dans le cas des anastomoses avec prothèses synthétiques et valves articielles, et des médicaments antirejet après une transplantation cardiaque. Certains enfants doivent prendre quotidiennement plusieurs médicaments durant toute leur vie. De nombreux médicaments sont potentiellement dangereux s’ils ne sont pas pris de la façon prescrite, et ils doivent faire l’objet d’une supervision étroite. Les parents seront informés précisément sur l’administration adéquate des médicaments et sur l’importance de les conserver en lieu sûr pour éviter une ingestion accidentelle. Les familles ont de plus en plus recours à Internet comme source d’information. Elles y trouvent également du soutien en prenant contact avec d’autres parents. Il est donc important qu’elles réalisent que tous les sites Web n’offrent pas toujours des renseignements exacts sur le plan médical, et que l’information issue d’autres parents ne s’applique pas forcément à leur propre situation. Certains enfants atteints de malformations cardiaques rares ou complexes requièrent des plans thérapeutiques personnalisés, de sorte que l’information générale disponible sur Internet ou dans les livres ne s’applique pas dans leur cas. Les parents doivent solliciter l’avis de l’équipe soignante, en particulier celui du cardiologue, sur l’information qu’ils tiennent d’autres sources. L’information communiquée à l’enfant doit être adapté à son niveau cognitif. Les enfants d’âge préscolaire doivent recevoir une information élémentaire sur leur expérience future plutôt qu’en

clinique

apprendre davantage sur leur état physiologique actuel. Les Philippe, qui est âgé de deux mois, est atteint enfants d’âge scolaire se satisd’insufsance cardiaque congestive. Ses parents font d’explications concrètes n’ont pas très bien compris les explications don­ sur la malformation. Il est nées par le médecin. Nommez deux moyens qui important d’inclure les enfants pourraient les aider à comprendre le problème à partir de cet âge dans leurs cardiaque de leur ls. propres soins de santé et de les éduquer sur leur état afin d’améliorer leur prise en charge et leur responsabilisation (Mickley, Burkhart et Sigler, 2013).

Jugement

Les parents doivent connaître les manifestations cliniques de la maladie cardiaque de leur enfant aussi bien que les signes d’aggravation de l’état clinique, et savoir quand il convient de communiquer avec le médecin TABLEAU 16.6 . Ceux d’enfants atteints de cyanose doivent obtenir de l’information sur la prise en charge liquidienne et les malaises anoxiques (crises de cyanose prononcée). Les parents doivent avoir par écrit, sur une feuille qu’ils gardent avec eux, les renseignements concernant leur enfant : le diagnostic, les traitements importants comme les interventions chirurgicales, les allergies, les autres problèmes de santé, les médicaments actuels et les coordonnées des professionnels de la santé impliqués pour les cas d’urgence. Ils veilleront à transmettre ces renseignements aux autres adultes dans l’entourage de l’enfant, comme les enseignants, les gardiens ou les employés de la garderie.

Quant aux préadolescents et aux adolescents, ils entendent recevoir une description plus détaillée de la manière dont la malformation affecte leur cœur. Les enfants de tout âge ont besoin d’exprimer leurs sentiments par rapport au diagnostic.

16.4.3

Soutien à la famille pour gérer la maladie à domicile

Interaction avec la famille L’équipe soignante doit établir une relation de conance avec les parents an de pouvoir travailler ensemble et leur offrir le soutien dont ils ont besoin. Il ne faut pas oublier que ce sont les parents qui gèrent l’état de santé de leur enfant au quotidien, et que l’hospitalisation ne survient qu’occasionnellement 1 . Ils surveillent l’état de leur enfant, administrent les médicaments et les traitements, emmènent leur enfant aux rendez-vous, traitent avec différents membres de l’équipe soignante et les avisent des moin dres problèmes. Le partenariat entre les parents et l’équipe soignante doit être fondé sur une relation de conance et de respect mutuels. Il est essentiel qu’il y ait une bonne communication entre la famille, l’équipe de cardiologie, les médecins de première ligne et aussi avec les autres professionnels de la santé impliqués. À me sure que les enfants approchent de l’adolescence, ils commencent à contribuer davantage à la prise en charge de leur maladie et à prendre des décisions concernant leurs soins.

1 Le suivi quotidien des soins à domicile est traité dans le chapitre 1, Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté.

16

Activités physiques Le niveau d’activité physique de l’enfant est une autre source de préoccupations pour les parents. Les restrictions d’activités sont superues pour la plupart des enfants, et la meilleure approche consiste à traiter ceux-ci normalement et à leur permettre de limiter eux-mêmes leurs activités selon leur tolérance. Les activités à proscrire sont essentiellement les sports exténuants et de compétition chez les enfants souffrant de pathologies cardiaques particulières. La promotion de l’activité physique peut aider l’enfant souffrant de cardiopathie congénitale à maintenir un poids santé en favorisant un développement normal, à accroitre son estime de

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

767

soi, à aider à l’acceptation par ses pairs et à améliorer sa qualité de vie ainsi que ses habiletés motrices. Le dé pour les cliniciens est d’équilibrer l’activité physique quotidienne de routine et de limiter l’inactivité chez les enfants souffrant de cardiopathie congénitale tout en minimisant les risques potentiels de l’exercice. En conséquence, l’équipe soignante doit adapter ses recommandations pour chaque enfant en fonction d’une évaluation de l’activité physique et en surveillant l’effet de l’activité physique sur son état clinique (de Ferranti et Krieger, 2017). Le cardiologue de l’enfant est le mieux placé pour discuter des restrictions en matière d’activités et d’exercice.

Alimentation

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les enfants atteints de malformations cardiaques graves sont souvent anorexiques. Les encourager à manger peut s’avérer extrêmement difcile.

Les nourrissons et les enfants atteints d’une insufsance cardiaque congestive (ICC) doivent recevoir une bonne nutrition. L’allaitement maternel devrait être possible chez la plupart de ces nouveaunés. Toutefois, il est particulièrement difcile d’assurer une nutrition adéquate aux nourrissons atteints d’ICC ou d’anomalies congénitales complexes, compte tenu de leurs besoins caloriques élevés et de leur incapacité à téter efcacement en raison de la fatigue et de la tachypnée. Les interventions importantes consistent à enseigner aux parents des méthodes d’alimentation qui diminuent l’effort du nourrisson et à leur expliquer comment fortier les formules pour qu’elles soient riches en calories. Les enfants atteints de malformations cardiaques graves sont souvent anorexiques. Les encourager à manger peut s’avérer extrêmement difcile. En général, il est utile de consulter une nutritionniste. L’enfant doit avoir le choix de plusieurs aliments très nutritifs.

Hygiène dentaire Les soins dentaires sont un aspect important de la santé de l’enfant atteint d’une cardiopathie congénitale. Une mauvaise hygiène dentaire augmente le risque d’endocardite infectieuse chez cette clientèle. Les enfants doivent donc subir un examen dentaire 2 fois par an (à partir de l’âge de 12 mois). Les lignes directrices pour la prophylaxie des endocardites infectieuses (bactériennes) chez les enfants atteints de cardiopathies congénitales spéciques et pour des procédures spéciques sont révisées régulièrement par l’American Heart Association (Boyle, Kelly, Reynolds et al., 2015) (voir la section 16.5.1 et le TABLEAU 16.13). 9

Immunisation

La vaccination des enfants ayant une maladie chro­ nique est détaillée dans le chapitre 9. Maladies infec­ tieuses et immunisation.

Les nourrissons atteints d’une cardiopathie doivent recevoir leurs vaccins, conformément aux lignes directrices courantes. Les calendriers de vaccination doivent parfois être modiés en présence de maladies aiguës ou d’interventions chirurgicales 9 . Les vaccins ne sont généralement pas recommandés

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Partie 6

Troubles liés aux systèmes

dans les trois à quatre semaines immédiatement avant ou après une procédure ou une intervention chirurgicale, car ils peuvent causer de la èvre ainsi qu’un malaise général pouvant conduire à l’annulation de la procédure ou inquiéter l’équipe médicale au sujet de complications infectieuses postopératoires. Les nourrissons et les enfants âgés de moins de deux ans qui souffrent de malformations cardiaques non réparées, de lésions cyanogènes, d’une hypertension pulmonaire ou qui sont nés prématurément doivent recevoir le médicament contre le virus respiratoire syncytial (VRS) mensuellement pendant la saison de prévalence de ce virus (de novembre à avril en Amérique du Nord) (Robinson et Le Saux, 2015).

Retards développementaux Les nourrissons et les enfants qui souffrent d’une cardiopathie grave sont exposés à un risque de retards développementaux. Plusieurs facteurs peuvent inuer sur les issues neurodéveloppementales, notamment la génétique (anomalies chromosomiques et microdélétions), le contexte familial (quotient intellectuel [QI] et statut socioéconomique des parents) ainsi que des facteurs préopératoires (prématurité, hypoxémie, état de choc), intraopératoires (circulation extracorporelle, arrêt circulatoire hypothermique profond) et postopératoires (instabilité hémodynamique, hypoxie, acidose, arrêt cardiaque, AVC, épisodes ischémiques). Les efforts récents visant à limiter la durée de l’arrêt circulatoire hypothermique profond et à garantir une meilleure neuroprotection durant l’intervention chirurgicale du nourrisson donneront sûrement lieu à des améliorations futures. « [L]a littérature des dernières décennies a permis de mettre en évidence des retards développementaux fréquents […], notamment sur le plan du fonctionnement intellectuel global, de la motricité ne et grossière, du langage [particulièrement sur le plan expressif], de la mémoire, de l’attention et des fonctions exécutives. […] Il apparaît aussi que les retards neurodéveloppementaux sont plus fréquents chez les enfants atteints de CC [cyanogènes], comparativement aux enfants atteints de CC [acyanogènes] » (Fourdain, Poirier, Gallagher et al., 2016, p. 16).

Les problèmes neurologiques graves comme la paralysie cérébrale, l’épilepsie et le retard mental sont rares.

16.4.4

Préparation de l’enfant et de la famille aux interventions invasives

Les objectifs de la préparation à l’intervention chirurgicale sont les suivants : atténuer l’anxiété de l’enfant, l’inciter à se montrer coopératif,

améliorer la convalescence, créer une relation de conance avec le personnel soignant, et faciliter à long terme les adaptations comportementales et émotionnelles (American Heart Association [AHA], 2018). L’âge de développement cognitif de l’enfant, les expériences qu’il a vécues à l’hôpital, son tempérament et les mécanismes d’adaptation qu’il emploie, de même que le moment idéal pour commencer la préparation et solliciter la participation des parents, sont autant de facteurs clés à prendre en considération. Les stratégies de préparation les plus efcaces s’articulent autour de deux axes : l’information et l’apprentissage des techniques d’adaptation, notamment les exercices de respiration consciente, l’utilisation de sources de distraction, la visualisation et les autres interventions comportementales. La plupart du temps, lorsque la correction chirurgicale ou le cathétérisme cardiaque ne sont pas urgents, l’enfant subit les évaluations préopératoires en consultation externe. Il est hospitalisé le matin même de l’intervention. La préparation psychologique à l’intervention se fait en consultation externe ou à domicile. Les parents doivent prendre part aux séances de préparation pour soutenir leur enfant et s’informer du déroulement de l’intervention. L’inrmière peut avoir recours à diverses techniques d’enseignement préopératoires : explications verbales et écrites, utilisation de livres d’images ou de lms vidéo, visites guidées de l’unité de soins intensifs et de l’hôpital. La visite guidée de l’unité de soins intensifs peut parfois accroître l’anxiété de certains enfants, en particulier ceux qui sont en bas âge, qui ont déjà été hospitalisés ou qui sont très anxieux (AHA, 2018). Par conséquent, il faut veiller à ce que l’enfant ne soit pas exposé à ce qui pourrait l’effrayer. La préparation doit notamment être adaptée au type d’intervention prévue et porter sur ce que l’enfant ou l’adolescent est susceptible de voir (moniteurs, grand nombre de professionnels de la santé et d’appareils), d’entendre (bips, alarmes, voix) ou de ressentir (inconfort, soif, contact des cathéters, des pansements et du ruban adhésif). L’inrmière doit passer en revue avec lui les instruments qui lui sont familiers (brassard pneumatique, stéthoscope ou capteur du saturomètre) et

lui décrire les instruments et les appareils qu’il ne connaît pas (moniteurs, cathéters intraveineux, masques à oxygène). Elle doit aussi mettre l’accent sur les aménagements qui ont été faits pour accroître le confort (chaises pour les parents et téléviseurs) et inclure de l’information sur la convalescence et le retour à la maison. Elle doit limiter ses explications en tenant compte de leur capacité à assimiler ce qui leur est présenté et inciter l’enfant et ses parents à poser des questions. Comme bon nombre des jeunes qui recevront un sédatif avant le cathétérisme cardiaque ou un analgésique opioïde après l’intervention chirurgicale ne garderont qu’un vague souvenir de l’intervention, il n’est pas nécessaire de leur fournir des explications détaillées sur tout le matériel utilisé ou tous les gestes qui seront posés. En outre, une partie de la préparation doit être consacrée aux stratégies que l’enfant peut employer pour vivre au mieux cette expérience. Par exemple, le fait de permettre à un enfant en bas âge de garder son jouet en peluche préféré ou un objet qui l’apaise contribue à atténuer son anxiété. Dans le même ordre d’idée, l’enfant plus âgé pourra se distraire en apportant son lecteur de musique pour écouter ses chansons préférées en salle de cathétérisme. Après l’intervention chirurgicale, l’inrmière devra rappeler à l’enfant l’importance de la marche, de la toux, de la respiration profonde, de la consommation de liquides et de l’alimentation, et lui décrire les méthodes de gestion de la douleur ainsi que la surveillance de routine. Elle doit revoir avec l’enfant les stratégies d’adaptation simples qui l’aideront à supporter les interventions douloureuses. Il s’agit en fait de techniques de distraction comme le fait de compter, de faire des bulles, de chanter ou de raconter une histoire. En principe, il faut commencer à préparer l’enfant la veille de l’intervention pour lui donner sufsamment le temps de poser des questions et éviter du même coup qu’il se laisse emporter par son imagination. L’inrmière doit rassurer l’enfant en lui précisant que ses parents pourront l’accompagner jusqu’à l’entrée du bloc opératoire et qu’ils pourront être à son chevet quand il se réveillera 13 .

16 13 Différentes stratégies de préparation aux interventions chirurgicales sont expliquées dans le chapitre 13, Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation.

Soins inrmiers PRODIGUER LES SOINS POSTOPÉRATOIRES

Les soins postopératoires immédiats sont généralement prodigués dans les unités de soins intensifs par des inrmières spécialement formées. De nombreuses interventions, comme l’observation

des fonctions vitales et la surveillance de la pression artérielle et de la pression veineuse centrale, requièrent une formation avancée. Le TABLEAU 16.12 présente certaines complications possibles après une intervention chirurgicale cardiaque.

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

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TABLEAU 16.12

Complications de l’intervention chirurgicale cardiaque

TYPE DE COMPLICATIONS

CAUSES ET TRAITEMENTS

Neurologiques

• Convulsions : évaluation, médicaments antiépileptiques • Accident vasculaire cérébral, œdème cérébral, décits neurologiques : évaluation et traitement ; en présence d’un shunt résiduel droitegauche, munir les accès I.V. de ltres de 0,2 micron, au besoin

Respiratoires

• Atélectasie : kinésithérapie de drainage, toux, respiration profonde, mobilisation • Œdème pulmonaire : diurétiques • Épanchements pleuraux : diurétiques, drainage possible par drain thoracique • Pneumothorax : drainage possible par drain thoracique

Cardiaques

• Insufsance cardiaque : digoxine, diurétiques • Faible débit cardiaque : agents inotropes intraveineux • Arythmies : détermination du type, pharmacothérapie, stimulation cardiaque possible, cardioversion • Tamponnade : péricardiocentèse

Hématologiques

• Anémie : suppléments de fer, transfusion possible • Hémorragie postopératoire – Initialement, facteurs de la coagulation, produits sanguins – Intervention chirurgicale exploratoire pouvant s’avérer nécessaire pour localiser le foyer hémorragique et le ligaturer

Infectieuses

• Plaies, pneumonie, otite moyenne et septicémie : antibiotiques

Autres

• Syndrome postpéricardiotomie (syndrome évreux, leucocytose, frottement péricardique, épanchements péricardique et pleural, léthargie apparente entre 7 et 21 jours après une intervention chirurgicale cardiaque ; causes virales ou auto-immunes possibles) : antipyrétiques, diurétiques, anti-inammatoires

ALERTE CLINIQUE

Un shunt intracardiaque droitegauche augmente le risque d’embolie gazeuse. An de réduire ce risque, l’inrmière doit : • munir les accès I.V. de ltres ; • vérier les tubulures et les raccords ; • évacuer toute bulle d’air. Atélectasie : Affaissement des alvéoles pulmonaires qui empêche l’échange respiratoire normal d’oxygène et de dioxyde de carbone, et qui entraîne une hypoventilation du poumon, réduisant ainsi le taux d’oxygène sanguin.

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Partie 6

Surveiller les signes vitaux L’inrmière vérie régulièrement les signes vitaux (p. ex., la fréquence et le rythme cardiaques, la pression artérielle, la température) et la saturation en oxygène jusqu’à ce que l’état de l’enfant se stabilise. Elle compte la fréquence cardiaque et les respirations pendant une minute et compare ces valeurs avec celles du moniteur ECG. Elle s’assure ainsi que les données fournies par le moniteur cardiaque sont exactes. Normalement, la fréquence cardiaque augmente après une intervention chirurgicale. L’ECG en continu lui permet également de détecter rapidement la présence d’arythmies ou de troubles de la conduction an de réagir promptement et d’aviser le médecin. Le comportement de l’enfant (agitation, pleurs) peut inuencer les résultats obtenus. Les arythmies postopératoires peuvent

Troubles liés aux systèmes

résulter de l’anesthésie, d’un déséquilibre acidobasique et électrolytique, d’une hypoxie, de l’intervention chirurgicale ou d’un traumatisme des voies de conduction. Les variations de température sont une caractéristique de la phase postopératoire immédiate. L’hypothermie est typique juste après une intervention chirurgicale en raison de l’hypothermie induite pendant l’intervention, des effets de l’anesthésie et des pertes de chaleur corporelle dans un environnement plus frais. Durant cette période, il est important de réchauffer l’enfant an de le maintenir à une température normale et de prévenir toute perte additionnelle de chaleur. Les nourrissons sont placés sous des lampes à chaleur rayonnante. Pendant les 24 à 48 heures suivantes, la température corporelle peut augmenter jusqu’à 37,7 °C, ou légèrement plus en cas de réaction inammatoire ou de traumatisme tissulaire. Une fois cette période écoulée, toute augmentation de la température est vraisemblablement le signe d’une infection et exige une évaluation immédiate pour en déterminer la cause probable. Après une intervention chirurgicale à cœur ouvert, il est courant de procéder à un monitorage intra-artériel de la pression artérielle : un cathéter est habituellement inséré dans l’artère radiale, et l’autre extrémité est reliée à un dispositif de monitorage électronique donnant un tracé continu de la pression artérielle. Le cathéter est maintenu avec une perfusion de solution saline héparinée pour prévenir la formation d’un caillot. Le cathéter pour mesurer la pression veineuse centrale est généralement introduit dans un gros vaisseau du cou. Parfois, des cathéters de monitorage intracardiaque sont placés pendant l’opération dans l’oreillette droite, l’oreillette gauche ou l’artère pulmonaire pour permettre de mesurer la pression à l’intérieur des cavités du cœur et celle de la circulation pulmonaire. Ces cathéters fournissent des renseignements vitaux sur le statut volumique, le débit cardiaque et la fonction ventriculaire. L’inrmière doit relever les données toutes les heures et s’assurer de leur régularité. Elle doit aviser immédiatement le médecin en cas de changements soudains.

Surveiller l’état respiratoire En général, il faut recourir à une ventilation mécanique pour les nourrissons pendant la phase postopératoire immédiate. Il faut ausculter les poumons pour évaluer les bruits respiratoires au moins toutes les heures. La diminution ou la disparition des bruits peut indiquer une zone d’atélectasie, un épanchement pleural ou un pneumothorax ; cette situation nécessite alors une évaluation plus approfondie. L’extubation se fait dès que possible,

lorsque l’état hémodynamique de l’enfant est stabilisé. Les enfants, en particulier ceux qui ne requièrent pas de circulation extracorporelle, peuvent être extubés en salle d’opération ou pendant les premières heures suivant l’intervention chirurgicale. L’aspiration en système clos permet de retirer les sécrétions pulmonaires tout en maintenant la ventilation. L’aspiration ne s’effectue qu’au besoin et prudemment, de manière à éviter la stimulation vagale (qui peut déclencher des arythmies cardiaques) et un laryngospasme, surtout chez les nourrissons 1 . L’aspiration doit être intermittente et ne pas durer plus de cinq secondes à la fois an de prévenir l’épuisement des réserves d’oxygène. Le moniteur ECG est surveillé après l’aspiration pour détecter les changements de rythme ou de fréquence, et particulièrement la bradycardie. L’enfant doit toujours être positionné de manière à faire face à l’inrmière pour qu’elle puisse évaluer son teint et sa tolérance à l’intervention. Lorsque le sevrage de l’aide respiratoire mécanique et l’extubation sont complétés, l’oxygène humidié est administré au moyen d’un masque ou d’une lunette nasale an de prévenir l’assèchement des muqueuses. L’enfant est encouragé à se repositionner et à respirer profondément au moins une fois par heure. L’administration d’analgésiques et l’utilisation de techniques visant l’immobilisation de la région chirurgicale favoriseront une meilleure expansion pulmonaire en minimisant la douleur. Les drains thoraciques, mis sous aspiration et insérés dans l’espace pleural ou médiastinal pendant ou immédiatement après l’intervention chirurgicale, servent également à promouvoir une expansion pulmonaire optimale en évacuant les liquides ou l’air qui pourraient s’y accumuler. L’inrmière vérie chaque heure la couleur et la quantité de liquide drainé ; il est sanglant juste après l’intervention et il devient progressivement séreux par la suite. Le drainage est plus volumineux dans les 12 à 24 premières heures, et il dépend de la complexité de l’intervention de chirurgie cardiaque 2 . En général, les drains thoraciques sont retirés entre le premier et le troisième jour suivant l’opération. Il s’agit d’une expérience douloureuse et effrayante. Avant l’intervention, il faut administrer des analgésiques comme la morphine, souvent combinée au midazolam. Il faut avertir les enfants plus âgés qu’ils ressentiront une douleur vive et passagère. Une fois les points de suture retirés, le drain est enlevé rapidement à la n d’une inspiration complète pour prévenir l’entrée d’air dans la cavité pleurale. Puis, la suture en bourse (effectuée au moment de l’insertion des drains) est

resserrée pour refermer adéquatement l’ouverture. Un pansement recouvert de gelée de pétrole est ensuite appliqué sur la plaie et xé sur la peau aux quatre côtés avec du ruban adhésif de manière à ce que le tout soit hermétique. Il doit rester en place un ou deux jours. Les bruits respiratoires doivent être vériés pour détecter le moindre pneumothorax. Une radiographie pulmonaire faite à la suite du retrait du drain permet de s’assurer qu’il n’y a pas eu formation d’un pneumothorax pendant le retrait.

ALERTES CLINIQUES 1 Durant l’aspiration, l’inrmière surveille toutes les manifestations de détresse respiratoire comme la tachypnée, l’agitation et l’utilisation des muscles respiratoires accessoires.

2 L’écoulement d’un drain thoracique de plus de 3 mL/kg/h pendant plus de 3 heures consécutives ou de 5 à 10 mL/kg en 1 heure est excessif et peut indiquer une hémorragie postopératoire. Il faut en aviser le chirurgien immédiatement, car une reprise chirurgicale peut être nécessaire si l’enfant ne répond pas au traitement médical ou si l’écoulement du Mesurer les ingesta drain thoracique s’arrête soudainement. De et les excreta L’inrmière doit calculer avec préci- plus, la tamponnade cardiaque peut survenir rapidement et menacer le pronostic vital. sion les apports et les éliminations de liquides. Les apports sont essen- 3 Les signes d’insufsance rénale sont tiellement constitués de liquides la diminution du débit urinaire (inférieure à administrés par voie I.V., mais l’in- 1 mL/kg/h) et l’augmentation des taux d’azote rmière doit également relever la uréique sanguin et de créatinine sérique. quantité de liquide utilisée pour rincer les tubulures artérielles et de pression veineuse centrale, ou celle des liquides dans lesquels sont dilués les médicaments. Chaque heure, elle note les liquides éliminés tels que l’urine (une sonde urinaire est généralement insérée et reliée à un dispositif collecteur fermé), le liquide des drains thoracique et celui des sondes nasogastriques, et le volume de sang prélevé pour les analyses. L’insufsance rénale est un risque lié aux périodes transitoires de faible débit cardiaque 3 .

Les restrictions liquidiennes ont pour but de prévenir l’hypervolémie pendant la phase postopératoire immédiate, car un surplus de liquide augmente les efforts fournis par le myocarde et prédispose l’enfant à l’insufsance cardiaque. Pour surveiller la rétention liquidienne, l’enfant est pesé quotidiennement sur le même pèsepersonne, à peu près au même moment de la journée, pour éviter les erreurs de mesure. En général, l’enfant ne peut rien recevoir par la bouche pendant les 24 premières heures après l’intervention. Si une sonde endotrachéale est en place et que l’enfant est intubé pour une période prolongée, les liquides peuvent être administrés par sonde nasogastrique. La restriction hydrique peut être nécessaire même lorsque les liquides par voie orale sont permis. L’inrmière calcule la répartition des liquides administrés sur une période de 24 heures en tenant compte du poids préopératoire de l’enfant et de ses habitudes de consommation. Les liquides doivent être administrés surtout pendant les périodes d’éveil et d’activités maximales de l’enfant.

Chapitre 16

CE QU’IL FAUT RETENIR

Pour surveiller la rétention liquidienne, l’enfant est pesé quotidiennement sur le même pèse-personne, à peu près au même moment de la journée, pour éviter les erreurs de mesure.

CE QU’IL FAUT RETENIR

La restriction hydrique peut être nécessaire même lorsque l’ingestion des liquides est permise.

Troubles liés au système cardiovasculaire

771

16

Fournir des périodes de repos et favoriser le retour à l’activité Après une intervention chirurgicale cardiaque, l’enfant doit se reposer pour diminuer les efforts cardiaques et favoriser sa guérison. Au début de son quart de travail, l’inrmière doit planier ses interventions an d’assurer à l’enfant des périodes de repos. Les parents doivent être informés de l’horaire des interventions pour qu’ils soient présents aux moments les plus opportuns, par exemple après une période de repos, quand aucun traitement particulier n’est prévu.

5 Les techniques non pharmacologiques pour diminuer la douleur sont abordées dans le chapitre 5, Évaluation et traitement de la douleur.

Il faut prévoir un horaire progressif de reprise des activités et de mobilisation qui tient compte des habitudes préopératoires de l’enfant ainsi que de ses capacités cardiovasculaire et pulmonaire postopératoires. La mobilisation commence dès que possible, souvent le deuxième jour postopératoire, après le retrait des drains thoraciques, des cathéters artériels et de l’équipement d’assistance respiratoire. Des précautions (p. ex., le serrement d’un coussin contre la poitrine) sont prises pour éviter les tensions dans la région de la cage thoracique, qui est instable. Au début, l’enfant reçoit de l’aide pour s’asseoir au bord du lit, les jambes pendantes. Puis, il est soutenu pour se mettre debout et ensuite pour s’asseoir sur une chaise. La fréquence cardiaque et les respirations sont surveillées pour évaluer le degré d’effort cardiaque qu’exige chaque activité. La tachycardie, la dyspnée, la cyanose, la désaturation, la fatigue progressive et les arythmies indiquent qu’il faut limiter toute dépense énergétique ultérieure.

Soulager la douleur

FIGURE 16.13 Sternotomie médiane, l’une des incisions pratiquées pour l’intervention chirurgicale cardiaque

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Partie 6

Troubles liés aux systèmes

L’intervention chirurgicale cardiaque est une opération douloureuse. Plusieurs incisions peuvent être effectuées dans le cadre d’une telle opération. La plus courante est la sternotomie médiane, pratiquée verticalement le long du sternum à partir du centre du thorax FIGURE 16.13. Même si elle est bien tolérée, un certain inconfort peut être présent durant la marche et la toux. Les incisions par thoracotomie (partant sous le bras et allant jusqu’à l’arrière de l’omoplate) sont habituellement plus douloureuses, car elles transpercent le tissu musculaire ; il faut donc établir un

plan de prise en charge plus énergique de la douleur et administrer des médicaments de façon régulière pendant plusieurs jours pour favoriser le repos, le lever du lit et l’hygiène pulmonaire de l’enfant. Durant la phase postopératoire immédiate, la plupart des enfants reçoivent des analgésiques (morphine ou fentanyl) par voie intraveineuse pour maîtriser la douleur. L’analgésie contrôlée par le patient est une méthode efcace et souvent utilisée lorsque les enfants sont en âge de comprendre son fonctionnement. Les antiinammatoires non stéroïdiens comme le kétorolac (ToradolMD) peuvent être administrés par voie intraveineuse pour mieux gérer la douleur. Lorsqu’une ventilation mécanique est nécessaire, des agents paralysants peuvent être combinés aux analgésiques dans le cas des enfants agités ou dont l’état hémodynamique est instable. Après l’extubation et le retrait des cathéters et des sondes, la douleur peut être gérée adéquatement par l’administration de médicaments comme l’ibuprofène ou l’acétaminophène par voie orale. L’acétaminophène seul procure un soulagement adéquat de la douleur chez la plupart des enfants qui reçoivent leur congé de l’hôpital. Outre la pharmacologie destinée à la maîtrise de la douleur, il est indispensable de recourir à des techniques favorisant la mobilisation pour réduire au minimum l’inconfort lié aux interventions, par exemple en utilisant un oreiller ferme ou en plaçant la peluche préférée de l’enfant contre l’incision thoracique durant le mouvement. Il est également important d’effectuer les traitements postopératoires après l’administration de l’analgésique, idéalement au moment de l’effet maximal du médicament. Les mesures non pharmacologiques servent à atténuer la perception de la douleur, et les parents sont encouragés à réconforter leur enfant autant que possible 5 .

Offrir du réconfort et du soutien Après l’intervention chirurgicale, il peut arriver que les enfants soient déprimés. Ce phénomène est attribuable à l’anxiété préopératoire, au stress psychologique et physiologique postopératoire, et à une stimulation sensorielle excessive. En général, l’état de l’enfant s’améliore lorsqu’il quitte l’unité de soins intensifs. Il se peut également que les enfants soient en colère et que la réaction à la douleur physique et à la perte de contrôle liées à l’intervention chirurgicale et aux traitements se manifeste par un refus de coopérer après l’opération. Il faut leur donner l’occasion d’exprimer leurs sentiments, que ce soit verbalement ou par des activités. Il est courant d’observer une régression comportementale chez

les enfants soumis au stress de l’opération et de l’hospitalisation. Les enfants peuvent aussi exprimer des sentiments de colère ou de rejet envers les parents. L’inrmière offrira son soutien aux parents en étant disponible pour les écouter, les informer et leur fournir des explications concernant toutes les interventions. Les premiers jours suivant l’opération sont particulièrement éprouvants, car les parents voient leur enfant souffrir et réalisent les risques inhérents à l’intervention chirurgicale. Ils

16.4.5

Congé de l’hôpital et soins à domicile

Idéalement, la planication du congé commence dès l’admission pour l’intervention chirurgicale cardiaque et comprend une évaluation de la réaction des parents à l’état de santé de l’enfant. Les nouveau-nés doivent subir des tests de dépistage (p. ex., un bilan métabolique, un test d’hypothyroïdie et de phénylcétonurie, des tests auditifs) et ils auront éventuellement besoin de vaccins avant leur congé ainsi que d’un siège d’auto sécuritaire (Société canadienne de pédiatrie, 2014). Les membres de la famille devront recevoir des directives verbales et écrites sur les médicaments, la nutrition, les restrictions d’activités, l’endocardite infectieuse subaiguë, le retour en classe, les soins de la plaie et les manifestations cliniques d’infection ou de complication ENCADRÉ 16.8 . L’orientation des parents vers des organismes communautaires peut être utile dans leur transition entre l’hôpital et le domicile ; les directives données pourront ainsi être renforcées. Les parents doivent également recevoir des consignes claires quant à l’importance de contacter un médecin en cas de complications ainsi que les coordonnées des médecins disponibles en cas d’urgence. Les suivis avec le cardiologue et le médecin de soins primaires doivent être planiés avant le congé de l’hôpital. Les parents se verront remettre un sommaire de l’hospitalisation comprenant les problématiques de santé de leur enfant et ses médicaments, Le port d’un bracelet ou d’une chaîne mentionnant les problèmes médicaux, comme les dispositifs de MedicAlert MD, est indiqué pour les enfants porteurs d’un stimulateur cardiaque, pour ceux qui ont reçu une greffe du cœur ainsi que pour ceux auxquels un traitement anticoagulant ou des médicaments antiarythmiques sont administrés. Malgré les progrès considérables réalisés dans les interventions chirurgicales correctrices des malformations cardiaques, un grand nombre d’affections complexes ne peuvent être entièrement

sont souvent dépassés par l’environnement physique de l’unité de soins intensifs et se sentent inutiles d’être de si peu de secours à leur enfant. L’inrmière peut aider à apaiser de tels sentiments en incluant les parents dans les activités de soins, de réconfort et de jeu, en les informant de l’état de santé de leur enfant, et en restant sensible à leurs besoins affectifs et physiques. Elle doit leur rappeler que leur présence auprès de l’enfant est importante pour que ce dernier se sente plus en sécurité, même s’ils ne prodiguent aucun soin physique.

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 16.8

Congé et suivi à la suite d’une intervention chirurgicale cardiaque

L’enseignement à l’enfant et à ses proches sur le congé et le suivi à la suite d’une intervention chirurgicale cardiaque devrait porter sur les aspects suivants : • Information sur les médicaments • Restrictions d’activités

• Prophylaxie de l’endocardite infectieuse • Rendez-vous de suivi (cardiologue, pédiatre) • Organismes communautaires, au besoin (visite du personnel inrmier, intervention précoce liée au développement)

• Régime alimentaire et nutrition

• Manifestations cliniques de problèmes postopératoires à signaler au médecin

• Soins des plaies (pansements, retrait des sutures, bain)

• Récapitulatif concernant la malformation cardiaque et la réparation chirurgicale

réparées. Pour beaucoup d’enfants, des interventions répétées s’imposent pour remplacer des conduits ou des greffons, ou pour pallier les complications comme la resténose. Le pronostic à long terme est donc incertain, et le rétablissement complet n’est pas toujours possible. Pour ces familles, le suivi médical et le soutien émotionnel constant sont essentiels. L’inrmière fera souvent ofce de professionnelle de la santé primaire privilégiée et, le cas échéant, de ressource pour les orientations.

16.5

Cardiopathies acquises

16.5.1

Endocardite infectieuse

16

L’endocardite infectieuse, aussi appelée endocardite bactérienne, endocardite lente ou endocardite subaiguë, est une infection des valves et de la tunique interne du cœur. Même si elle est rare chez l’enfant, elle afche un taux de mortalité de l’ordre de 20 à 25 % (Bragg et Alvarez, 2014). Bien qu’elle puisse survenir sans cardiopathie sousjacente, elle résulte le plus souvent d’une bactériémie chez l’enfant atteint d’une cardiopathie Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

773

congénitale ou acquise. Elle touche particulièrement les enfants qui présentent des anomalies valvulaires, qui sont porteurs de valves prosthétiques, de dispositifs intracardiaques ou d’anastomoses, qui ont subi une intervention chirurgicale cardiaque récente avec cathéters invasifs, ou qui sont atteints d’une cardiopathie rhumatismale affectant les valves. Au Québec, les enfants de 0 à 18 ans les plus susceptibles de contracter une endocardite infectieuse sont ceux qui souffrent de cardiopathies congénitales cyanogènes, de malformation du canal atrioventriculaire ou de lésions du côté gauche du cœur, ainsi que les enfants qui ont subi une intervention chirurgicale cardiaque dans les 6 derniers mois et qui sont âgés de moins de 3 ans (O’Brien, 2017). Son incidence a augmenté chez les enfants sans anomalie cardiaque, possiblement en raison de l’utilisation de cathéters veineux centraux pour traiter d’autres affections graves (Bragg et Alvarez, 2014).

Physiopathologie Des micro-organismes peuvent entrer dans la circulation à partir de n’importe quel foyer d’infection localisé. Autrefois, l’endocardite était surtout associée aux interventions invasives, mais elle résulte probablement de l’exposition à une bactériémie contractée au cours d’activités de la vie courante. L’endocardite peut aussi survenir après des interventions comme un nettoyage dentaire ; après une intervention chirurgicale cardiaque, surtout si du matériel synthétique est utilisé (valves, plaques de matières prosthétiques, conduits) ; ou après l’utilisation de cathéters veineux centraux de longue durée. L’agent le plus souvent en cause est Streptococcus viridans ; viennent ensuite Staphylococcus aureus, les bactéries à Gram négatif et les champignons comme Candida albicans. La surface endocardique est initialement blessée par des forces de cisaillement associées à un ux sanguin turbulent chez les enfants atteints de cardiopathie congénitale ou chez les enfants sans cardiopathie congénitale avec des cathéters veineux centraux permanents. Sur la région endothéliale lésée, la brine, les plaquettes et parfois les globules rouges sont déposés et forment initialement un thrombus non infecté. La bactériémie transitoire (qui se produit chez les enfants normaux) ou la fongémie provient d’une perturbation des surfaces muqueuses de l’hôte (p. ex., l’oropharynx, qui est fortement colonisé par une microore). Les agents pathogènes microbiens adhèrent à l’endocarde lésé et au thrombus. Le dépôt subséquent de brine et de plaquettes sur la végétation infectée produit une gaine protectrice qui isole les organismes de défenses de l’hôte et qui permet une prolifération rapide de l’agent infectieux (Bragg et Alvarez, 2014).

774

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

La lésion risque d’envahir les tissus adjacents comme les valves aortique et mitrale, ou de se détacher et de provoquer une embolie ailleurs, en particulier dans la rate, les reins et le système nerveux central.

Diagnostic Le diagnostic de l’endocardite infectieuse est établi à partir des manifestations cliniques présentées dans l’ENCADRÉ 16.9. Les critères de diagnostic les plus couramment utilisés sont les critères de Duke modiés, qui présentent des critères majeurs et mineurs de l’endocardite infectieuse (Baltimore, Gewitz, Baddour et al., 2015 ; Park, 2014). Le diagnostic dénitif dépend de la croissance et du type d’agent causal dans le sang. En moyenne, 3 hémocultures sont prélevées par ponction veineuse périphérique, lorsque c’est possible, et échelonnées sur 24 à 72 heures. De préférence, les prélèvements sont effectués au moment d’une poussée de èvre ou d’un frisson. Plusieurs résultats d’analyses de laboratoire peuvent évoquer une endocardite infectieuse, notamment des modications à l’ECG (prolongation de l’intervalle PR), des signes radiographiques de cardiomégalie, l’anémie, l’augmentation de la vitesse de sédimentation globulaire, la leucocytose et l’hématurie microscopique. La présence de végétations sur la valve et la dysfonction valvulaire sont souvent apparentes à l’échocardiographie.

Approche thérapeutique Le traitement de l’endocardite doit être instauré immédiatement ; il consiste à administrer des doses élevées d’antibiotiques par voie intraveineuse pendant deux à huit semaines. Des hémocultures doivent être effectuées périodiquement pour évaluer la réponse à l’antibiothérapie. La fonction cardiaque est surveillée périodiquement par échocardiogramme. Une intervention chirurgicale peut être indiquée en cas d’état hémodynamique compromis causé par une destruction valvulaire ou en présence de végétations volumineuses avec potentiel embolique (Bragg et Alvarez, 2014). À des ns de prévention, un traitement antibiotique prophylactique est administré une heure avant les interventions qui comportent un risque élevé d’entrée de micro-organismes chez les enfants très vulnérables à l’infection. Les lignes directrices n’imposent la prophylaxie que pour les enfants qui sont les plus susceptibles d’avoir un pronostic désastreux en cas d’endocardite TABLEAU 16.13. Les médicaments de choix pour la prophylaxie incluent l’amoxicilline, l’ampicilline, la clindamycine, la céfalexine, le céfadroxil, l’azithromycine et la clarithromycine.

ENCADRÉ 16.9

Manifestations cliniques de l’endocardite infectieuse

• Apparition généralement insidieuse

– Hémorragies linéaires sous l’ongle (nes lignes noires)

• Fièvre inexpliquée (de faible degré et intermittente)

– Lésions de Janeway (petites plaques rouges indolores sur la paume des mains et la plante des pieds)

• Anorexie

– Pétéchies sur les muqueuses buccales, la peau et la sclère (partie blanche de l’œil)

• Malaise • Perte pondérale • Signes caractéristiques de la formation d’une embolie extracardiaque

• Signes éventuels – Insufsance cardiaque congestive – Arythmies cardiaques

– Nodules d’Osler (nodules rouges, douloureux, intradermiques, sur la pulpe des phalanges)

TABLEAU 16.13

– Nouveau soufe cardiaque ou modication d’un soufe cardiaque antérieur

Recommandations pour l’antibioprophylaxie de l’endocardite infectieuse

CONDITIONS CARDIAQUES ASSOCIÉES À UN RISQUE ÉLEVÉ

TYPES D’INTERVENTIONS NÉCESSITANT UNE ANTIBIOPROPHYLAXIE

• Remplacement d’une valve cardiaque avec une valve ou un matériel prothétique

• Chirurgie cardiaque ou vasculaire

• Antécédent d’endocardite infectieuse • Cardiopathie congénitale – Cardiopathie cyanogène congénitale non réparée, y compris les anastomoses (shunts) palliatives et les conduits – Pendant les six premiers mois postréparation (intervention chirurgicale ou cathétérisme interventionnel) complète d’une cardiopathie congénitale avec matériel prothétique en place – Postréparation incomplète (avec anomalie résiduelle) d’une cardiopathie congénitale avec du matériel prothétique en place • Enfant avec transplantation cardiaque ayant contracté une valvulo­ pathie cardiaque

• Procédures au tractus respiratoire qui impliquent une incision ou une biopsie de la muqueuse respiratoire (amygdalectomie, adénoïdectomie, etc.) • Procédures dentaires qui impliquent : – la manipulation des tissus gingivaux ou de la région périapicale des dents (y compris des formes de nettoyage dentaire professionnel) – une perforation de la muqueuse buccale (p. ex., une extraction)

16

Soins inrmiers ENDOCARDITE INFECTIEUSE

Idéalement, l’objectif des soins inrmiers est d’expliquer aux parents d’enfants à risque élevé les manifestations cliniques de l’endocardite et, dans certains cas, le bien-fondé de l’antibiothérapie prophylactique avant des interventions comme des soins dentaires. Le dentiste de la famille doit être avisé du diagnostic cardiaque de l’enfant par mesure de précaution additionnelle pour veiller à ce qu’il reçoive un traitement préventif. La prophylaxie de l’endocardite infectieuse est maintenant réservée aux enfants exposés à un risque très élevé. Compte tenu des nouvelles lignes

directrices, un grand nombre d’enfants qui correspondaient autrefois aux critères de la prophylaxie n’en auront plus besoin (Park, 2014 ; Windle, 2018). Il est important que tous les enfants atteints d’une cardiopathie congénitale ou acquise maintiennent une hygiène buccale optimale pour réduire le risque de bactériémie liée à une infection buccale. Les parents doivent rester extrêmement vigilants à l’égard des infections possibles. Sans les alarmer outre mesure, l’inrmière insistera pour qu’ils signalent à leur médecin la moindre èvre, perte pondérale ou modication comportementale

Chapitre 16

CE QU’IL FAUT RETENIR

Il est important que tous les enfants atteints d’une cardiopathie congénitale ou acquise maintiennent une hygiène buccale optimale pour réduire le risque de bactériémie liée à une infection buccale.

Troubles liés au système cardiovasculaire

775

inexpliquées de l’enfant (p. ex., une léthargie, un malaise, une anorexie). Le diagnostic et le traitement précoces sont primordiaux pour prévenir les lésions cardiaques, les complications emboliques et la croissance de micro-organismes résistants. Le traitement de l’endocardite implique l’administration d’une pharmacothérapie à long terme par voie parentérale. Dans de nombreux cas, les antibiotiques par voie intraveineuse peuvent être donnés à domicile sous la supervision d’une inrmière, du moins pendant une partie du traitement. Pendant cette période, les objectifs des soins inrmiers se rapportent à :

16.5.2

Rhumatisme articulaire aigu

Épidémiologie Le rhumatisme articulaire aigu (RAA) est une maladie inammatoire résultant d’une réponse immunitaire anormale, consécutive à une pharyngite à streptocoque bêtahémolytique du groupe A (GABHS) chez un hôte vulnérable (Zühlke et Karthikeyan, 2013). Il survient principalement chez les enfants de 5 à 15 ans, alors qu’il est rare chez les adultes. C’est une maladie spon tanément résolutive qui affecte les articulations, la peau, le cerveau, les surfaces séreuses et le cœur. La complication la plus importante liée au RAA est l’atteinte des valves cardiaques, appelée rhumatisme cardiaque. La valve mitrale est la plus souvent touchée (Park, 2014). Cette affection reste un problème dévastateur dans les pays en voie de développement, où le RAA et le rhumatisme cardiaque sont les principales causes d’insufsance cardiaque chez les jeunes (Gewitz, Baltimore, Tani et al., 2015 ; Sika-Paotonu, Beaton, Raghu et al., 2017). Dans les pays industrialisés, le RAA et le rhumatisme cardiaque sont devenus rares. Pourtant, chez les Premières Nations de la région de Sioux Lookout, dans le nord-ouest de l’Ontario, son incidence est d’environ 75 fois celle de la population générale. Entre 2013 et 2015, 8 cas de RAA (dont l’âge moyen est de 9,4 ans) ont été conrmés dans la population des Premières Nations ; 2 des enfants sont décédés, et 5 des survivants ont contracté une maladie cardiaque rhumatismale avec des troubles valvulaires modérés à graves (Gordon, Kirlew, Schreiber et al., 2015).

Étiologie Certaines données probantes conrment une corrélation entre une infection des voies respiratoires supérieures par la pharyngite à GABHS et

776

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

• la préparation de l’enfant à la perfusion I.V., généralement avec un dispositif de perfusion intermittente, et plusieurs ponctions veineuses pour les hémocultures ; • la surveillance des effets indésirables des antibiotiques, surtout l’inammation au site d’injection et le long de la veine ponctionnée ; • la surveillance des complications, y compris l’embolie et l’ICC ; • l’éducation des parents quant à l’importance des visites de suivi pour les évaluations cardiaques, le monitorage échocardiographique et les hémocultures.

l’apparition subséquente du RAA (généralement après deux à six semaines). Le RAA résulte d’une réponse immunitaire exagérée contre les bactéries chez un hôte sensible (Park, 2014). Dans presque tous les cas de RAA, une infection antérieure par le GABHS peut être établie et sera conrmée par des analyses de laboratoire indiquant une augmentation des titres d’anticorps. La prévention ou le traitement de l’infection par le GABHS peut empêcher le RAA.

Diagnostic Le diagnostic de RAA repose sur un ensemble de lignes directrices qui ont été recommandées et révisées par l’American Heart Association en 2015 et qui sont connues sous le nom de critères de Jones modiés. Ces critères stipulent que la présence de deux manifestations majeures ou de une manifestation majeure et de deux mineures (comme la èvre et l’arthralgie), en plus de données conrmant une affection streptococcique récente, indique une probabilité élevée de RAA TABLEAU 16.14. Les enfants soupçonnés d’avoir contracté un RAA doivent subir un test de dépistage des anticorps streptococciques. Le test le plus fiable et le plus normalisé est un test de détection des titres élevés ou croissants d’antistreptolysine O (ASLO) présents chez 80 % des personnes atteintes de RAA. D’autres titres d’anticorps antistreptococciques peuvent être soumis au test de dépistage si les titres ASLO sont négatifs. Les réactifs de la phase aiguë, par exemple la protéine C réactive et la vitesse de sédimentation érythrocytaire, sont habituellement élevés. Les échocardiogrammes et les échocardiographies jouent un rôle important dans le diag nostic de rhumatisme cardiaque et pour la surveillance de la détérioration de la fonction valvulaire.

Pour conrmer le diagnostic de RAA, il doit y avoir conrmation d’une infection préalable par un GABHS et, en plus, la présence de deux manifestations majeures ou de une manifestation majeure et de deux manifestations mineures. Les manifestations majeures sont celles qui sont les plus fréquemment associées au RAA, alors que les manifestations mineures sont celles qui peuvent conrmer le diagnostic.

Approche thérapeutique La pharyngite à streptocoque bêtahémolytique du groupe A exige un diagnostic et une antibiothérapie précoces an de prévenir le développement du RAA et, par conséquent, celui des maladies cardiaques rhumatismales. L’antibiotique de choix est la pénicilline ou, dans le cas des enfants allergiques à la pénicilline, l’érythromycine. Pour être efcace et prévenir le RAA, l’antibiothérapie doit commencer dans les neuf jours qui suivent l’apparition de la pharyngite (Zühlke et Karthikeyan, 2013). En effet, le traitement est recommandé même si les cultures de la gorge sont négatives an d’éradiquer les streptocoques susceptibles de persister dans les voies respiratoires supérieures (Steer et Gibofsky, 2017). Les objectifs de la prise en charge médicale du RAA sont :

TABLEAU 16.14

Manifestations cliniques d’une crise initiale de rhumatisme articulaire aigu (critères de Jones)

MANIFESTATIONS MAJEURES

Cardite (clinique ou subclinique) • Nouveaux soufes cardiaques ou modication des soufes cardiaques préexistants • Tachycardie démesurée par rapport au degré de èvre • Cardiomégalie • Changements touchant les valves mitrale ou aortique sur l’échocardiographie • Assourdissement des bruits du cœur • Frottement péricardique • Douleur thoracique Polyarthrite • Œdème, chaleur, rougeur, douleur à une ou plusieurs articulations, souvent migratoire • Après un ou deux jours, affecte une ou plusieurs grosses articulations (genoux, chevilles, coudes, poignets) Érythème • Macules érythémateuses, ondulantes, aux bords bien dénis, et dont le centre est clair • Érythème transitoire, non prurigineux • Affecte le tronc et les membres (surfaces internes) Chorée (chorée de Sydenham [danse de Saint-Guy])

1. l’éradication des streptocoques hémo lytiques ;

• Mouvements brusques et irréguliers des membres, sans but précis

2. la prévention des lésions cardiaques permanentes ;

• Troubles du langage

3. la prise en charge des autres symptômes ;

• Faiblesse musculaire (peut être profonde)

4. la prévention des récurrences. L’administration de salicylés permettra de maîtriser le processus inammatoire, en particulier dans les articulations, et de réduire la èvre et l’inconfort. L’alitement est recommandé durant la phase fébrile aiguë, puis des activités tranquilles peuvent être effectuées à mesure que les symptômes disparaissent. Les enfants qui ont eu un épisode de RAA et qui contractent une pharyngite à streptocoque bêtahémolytique du groupe A subséquente risquent fortement une atteinte récurrente de RAA. La maladie cardiaque rhumatismale devient plus grave avec chaque récurrence. Ainsi, la méthode la plus efcace pour limiter la progression et la gravité de la maladie cardiaque rhumatismale est la prévention de la pharyngite récurrente. Le traitement de celle-ci doit débuter après le traitement aigu. L’antibiothérapie avec administration tous les 28 jours ou tous les 21 jours (pour les enfants à risque élevé) de pénicilline G benzathine par voie intramusculaire s’est révélée cliniquement efcace et rentable (Steer et Gibofsky, 2017). La thérapie alternative comprend des doses orales de pénicilline ou d’érythromycine 2 fois par jour, ou

• Grimaces involontaires • Labilité émotionnelle • Mouvements musculaires exagérés par l’anxiété et les tentatives de motricité ne ; soulagés par le repos Nodules sous-cutanés • Œdème non douloureux

16

• Siège situé au-dessus des saillies osseuses • Persistance un certain temps, puis disparition graduelle MANIFESTATIONS MINEURES ET RÉSULTATS DES ANALYSES DE LABORATOIRE

• Fièvre • Intervalle PR prolongé sur l’ECG • Arthralgie • Vitesse de sédimentation érythrocytaire élevée • Taux élevé des réactifs de la phase aiguë (protéine C réactive) PREUVE D’UNE INFECTION PRÉALABLE PAR UN STREPTOCOQUE BÊTAHÉMOLYTIQUE DU GROUPE A

• Résultat positif d’une culture de la gorge ou d’un test de détection rapide des antigènes streptococciques • Titre élevé ou croissant de l’anticorps antistreptococcique (p. ex., antistreptolysine O) Source : Adapté de Gewitz, M.H., Baltimore, R.S., Tani, L.Y et al. (2015). Revision of the Jones Criteria for the Diagnosis of Acute Rheumatic Fever in the Era of Doppler Echocardiography. A Scientic Statement from the American Heart Association. Circulation, 19 mai 2015.

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

777

une dose quotidienne de sulfadiazine. La durée de la prophylaxie secondaire est basée sur la présence d’une maladie cardiaque résiduelle. Si le RAA se produit sans cardite, la prophylaxie est recommandée pendant 5 ans ou jusqu’à l’âge de 18 ans. Chez les enfants atteints de cardite, la prophylaxie est recommandée pendant 10 ans ou jusqu’à l’âge de 21 ans (Steer et Gibofsky, 2017). Les enfants qui ont connu des épisodes aigus de RAA sont susceptibles de présenter des

récurrences pendant le reste de leur vie et doivent faire l’objet d’un suivi médical pendant au moins cinq ans. Les enfants et les familles doivent savoir qu’il est primordial de poursuivre l’antibiothérapie prophylactique en cas de soins dentaires, d’infection et d’interventions invasives. La gestion d’une maladie cardiaque rhumatismale peut impliquer une réparation chirurgicale ou un remplacement valvulaire.

Soins inrmiers

Dans la mesure où l’adhésion au plan thérapeutique est une préoccupation importante durant la pharmacothérapie à long terme, tous les efforts doivent être consentis pour l’encourager 13 . Lorsque l’adhésion est insufsante, des injections mensuelles peuvent être substituées à l’administration quotidienne d’antibiotiques par voie orale ; les enfants doivent être préparés à cette intervention souvent redoutée.

L’une des manifestations les plus troublantes et les plus frustrantes de la maladie est la chorée. Elle apparaît graduellement et survient parfois des semaines, voire des mois après la maladie ; elle se déclare parfois chez les enfants qui n’ont pas reçu de diagnostic de RAA. La chorée peut être prise à tort pour de la nervosité, de la maladresse, des changements comportementaux, de l’inattention ou des problèmes d’apprentissage. Elle est généralement une source de grande frustration pour l’enfant, car les mouvements, l’incoordination et la faiblesse qu’elle suscite limitent considérablement ses capacités physiques. Il est primordial d’informer les parents et les enseignants de la nature involontaire et brusque des mouvements, et du caractère transitoire de la chorée et de toutes ses manifestations.

Les interventions de l’inrmière sont principalement axées sur le repos et une alimentation appropriée, ainsi que sur la prise en charge des symptômes cardiaques. En général, à la n du stade fébrile, les enfants sont en mesure de reprendre un niveau d’activité modéré et retrouvent l’appétit. En cas de cardite, il faut s’assurer que la famille est au fait des restrictions d’activités et qu’elle reçoit l’aide nécessaire pour choisir des activités moins exténuantes pour l’enfant.

L’inrmière intervient également au stade de la prévention, essentiellement pour détecter la maladie chez les enfants d’âge scolaire qui souffrent de maux de gorge dus au streptocoque bêtahémolytique du groupe A. Cela requiert parfois de participer activement à des programmes de dépistage par prélèvement de cultures de la gorge, ou d’orienter les enfants en vue d’un test de dépistage d’une éventuelle infection par un streptocoque.

16.5.3

l’athérosclérose (plaques grasses adhérant aux artères), qui nit par provoquer des coronaropathies (maladies coronariennes), une cause importante de morbidité et de mortalité chez la population adulte. Une phase présymptomatique de l’athérosclérose peut débuter pendant l’enfance. La cardiologie préventive se consacre au dépistage et à la prise en charge des taux de lipides pendant l’enfance. L’objectif est de repérer les enfants à risque élevé et d’intervenir tôt.

RHUMATISME ARTICULAIRE AIGU Chorée : Syndrome associé à une hypotonie et à une incoordination motrice, et caractérisé par l’existence de mouvements unilatéraux (hémichorée) ou bilatéraux anormaux involontaires, spontanés, brusques et brefs, irréguliers et de plus ou moins grande amplitude.

13 Les stratégies d’adhésion au traitement sont expli­ quées dans le chapi­ tre 13, Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation.

Les objectifs des soins inrmiers pour l’enfant atteint de RAA sont les suivants : 1) encourager l’adhésion aux thérapies pharmacologiques ; 2) favoriser le rétablissement ; 3) offrir du soutien émotionnel ; 4) prévenir les récurrences de la maladie.

Dyslipidémie

La dyslipidémie est un terme générique dénissant des taux excessifs de lipides (substances grasses et pseudo-grasses) dans le sang, alors que l’hypercholestérolémie désigne un taux excessif de cholestérol dans le sang. Le terme dyslipidémie s’applique à toutes les anomalies du métabolisme lipidique, y compris les faibles taux de lipoprotéines de haute densité, ou bon cholestérol, les taux élevés de lipoprotéines de basse densité, ou mauvais cholestérol, et les triglycérides élevés (de Ferranti et Newburger, 2018). Les taux élevés de lipides ou de cholestérol jouent un rôle majeur dans la production de

778

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

Le cholestérol est un élément du complexe lipoprotéique du plasma essentiel au métabolisme cellulaire. Les triglycérides, des gras naturellement synthétisés à partir des glucides, servent

quant à eux de source d’énergie. Ces deux lipides importants sont transportés sur les lipoprotéines, à savoir une combinaison de lipides et de protéines qui comprend : • Les lipoprotéines de basse densité (LDL), qui contiennent de faibles concentrations de triglycérides, des taux élevés de cholestérol et des taux moyens de protéines. Elles sont le principal transporteur du cholestérol vers les cellules. Celles-ci utilisent le cholestérol pour la synthèse des membranes et la production de stéroïdes. Un taux élevé de LDL dans la circulation est un facteur de risque élevé de maladies cardiovasculaires. • Les lipoprotéines de haute densité (HDL), qui contiennent de très faibles concentrations de triglycérides, relativement peu de cholestérol et des taux élevés de protéines. Elles transportent le cholestérol libre vers le foie, où il est excrété dans la bile. Les taux élevés de HDL sont réputés protéger contre les maladies cardiovasculaires. • Les lipoprotéines de très basse densité (VLDL), qui contiennent de faibles concentrations de protéines, des taux élevés de triglycérides et des taux moyens de lipides apoprotéines, de cholestérol libre et de phospholipides. La source principale d’énergie stockée dans le corps est sous forme de triglycérides.

Diagnostic et examens paracliniques La dyslipidémie peut être attribuable à des facteurs génétiques (homozygote ou hétérozygote familial), au mode de vie, ou aux deux, ou encore être causée par des troubles secondaires tels que l’hypothyroïdie. Le diagnostic de dyslipidémie repose sur les résultats sanguins d’un bilan lipidique complet, prélevé après un jeûne de 12 heures. Un dosage de la thyréostimuline servira à exclure l’hypothyroïdie comme cause d’hypercholestérolémie secondaire. Chez les enfants qui font de l’embonpoint, la glycémie est mesurée à jeun pour évaluer le risque du syndrome métabolique, qui consiste en un ensemble de plusieurs manifestations cliniques liées à un risque cardiovasculaire élevé chez les adultes. De plus, une forte èvre pouvant inuer sur les valeurs lipidiques, il faut éviter de mesurer les taux de cholestérol si un enfant a eu de la èvre au cours des 3 dernières semaines. Les prélèvements sanguins doivent être effectués après que l’enfant est resté assis pendant 5 minutes et immédiatement après l’application du garrot pour éviter que la station debout et la stase veineuse n’affectent les résultats. Le TABLEAU 16.15 énumère les valeurs diagnostiques pour les taux de cholestérol et de triglycérides.

TABLEAU 16.15

Valeurs de référence pour le cholestérol et les triglycérides

LIPIDES

NORMALES (mmol / L)

LIMITES (mmol / L)

CRITIQUES (mmol / L)

Cholestérol total

< 4,4

4,4-5,1

≥ 5,2

Cholestérol LDL

< 2,8

2,8-3,3

≥ 3,4

Cholestérol HDL

> 1,16

1,03-1,16

< 1,03

Triglycérides 0-9 ans 10-19 ans

< 0,85 1,12 ≥ 1,47

Source : Adapté de National Heart, Lung, and Blood Institute (NHLBI) (2012).

En raison de l’augmentation de la prévalence de l’obésité chez les jeunes de 2 à 19 ans, qui est passée de 13,9 % en 1999-2000 à 18,5 % en 2015-2016 (Centers for Disease Control and Prevention [CDC], 2017), le National Heart, Lung, and Blood Institute des États-Unis recommande un dépistage universel pour tous les enfants âgés de 9 à 11 ans, puis un autre entre 17 et 21 ans. En outre, on préconise toujours le dépistage sélectif du bilan lipidique pour les enfants de plus de 2 ans dont un parent au premier degré est atteint de dyslipidémie ou d’une maladie cardiovasculaire, ainsi que pour les enfants ayant des facteurs de risque coronariens individuels (NHLBI, 2012). Bien que le dépistage de l’hypercholestérolémie chez les enfants prête à controverse, l’objectif de cette approche est de traiter les enfants atteints plus tôt an de diminuer les facteurs de risque coronariens.

Approche thérapeutique 16

Le traitement de la dyslipidémie comprend, d’une part, des mesures non pharmacologiques qui ont trait au mode de vie (régime alimentaire, activité physique et perte de poids) et, d’autre part, la pharmacothérapie (principalement avec les statines).

Traitement non pharmacologique La modication du mode de vie est presque toujours la principale approche thérapeutique ENCADRÉ 16.10. Les recherches conrment les bienfaits de l’alimentation faible en gras saturés. Actuellement, la diète de type méditerranéen, à base de grains entiers, de fruits et de légumes, est privilégiée. Elle incorpore aussi des gras mono-insaturés comme les huiles d’olive et de canola, les noix, les avocats et le poisson, lesquels ont des effets bénéques sur les taux de cholestérol HDL. Les enfants qui ont des taux de triglycérides élevés, en particulier ceux dont la courbe taille-poids se situe entre le

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

779

Enseignement à l’enfant et à ses proches ENCADRÉ 16.10

Habitudes de vie et alimentation des enfants de 2 ans et plus atteints de dyslipidémie

L’inrmière doit s’assurer que l’enfant et sa famille comprennent et suivent au mieux les recommandations suivantes.

• Favoriser les gras mono-insaturés.

Tous les enfants et adolescents

Enfants ayant des triglycérides ou un cholestérol non HDL élevés

• Faire 1 heure d’activité physique modérée à vigoureuse au moins 5 jours par semaine.

• Consommer des aliments contenant moins de 200 mg/jour de cholestérol.

• Diminuer l’apport de sucres simples.

• Passer moins de 2 heures par jour devant un écran.

– Éviter les boissons sucrées ; les remplacer par de l’eau.

• Éviter la fumée de cigarette, y compris la fumée secondaire.

– Limiter la quantité de jus naturellement sucré à 120 mL par jour.

• Adopter un régime alimentaire varié, riche en fruits, en légumes, en grains entiers, en viandes maigres et en poissons. • Consulter une nutritionniste pour des conseils personnalisés. Enfants ayant un cholestérol LDL élevé • Limiter les calories totales provenant de matières grasses à 25 à 30 % par jour. • Consommer moins de 7 % de gras saturés (de 12 à 15 g) par jour. • Éviter les gras trans.

• Limiter les calories totales provenant de matières grasses à 25 à 30 %. • Consommer moins de 7 % de gras saturés (de 12 à 15 g) par jour. • Consommer 20 % de gras mono-insaturés (effet bénéque sur le cholestérol HDL) et de gras polyinsaturés. – Privilégier l’huile d’olive, l’huile de canola, les avocats, les noix et le poisson. • Éviter les gras trans. • Augmenter la consommation de poisson pour accroître la quantité d’acides gras alphalinoléniques (oméga-3).

Source : Adapté de Rohrs, H.J. (2015). Pediatric Lipid Disorders in Clinical Practice Treatment & Management. Repéré à https://emedicine.medscape. com/article/1825087-treatment.

85e et le 95e centile (Chaire de recherche sur l’obésité de l’Université Laval, 2018), devraient recevoir des conseils ciblés d’une nutritionniste visant un régime glycémique faible. Une séance d’exercice aérobique quotidienne d’au moins 60 minutes, 5 fois par semaine, est également recommandée pour tous les enfants. Enn, les enfants et les parents doivent être informés des effets néfastes du tabagisme sur la santé.

Traitement pharmacologique La décision d’administrer des médicaments hypolipémiants dépend du type et de la gravité de la dyslipidémie, et de la présence d’autres facteurs de risque de maladies cardiovasculaires. Les enfants se voient assigner un niveau de risque Angélique, âgée de neuf ans, est atteinte de dyslien fonction de leur maladie et pidémie, comme son père. Quels aliments pouvezdes objectifs à atteindre vous lui proposer pour diminuer son taux de LDL ? TABLEAU 16.16. a) L’huile de palme et de la margarine hydrogénée. Les enfants atteints d’hyb) L’huile de coco et des viandes maigres. percholestérolémie grave et c) L’huile d’olive et du thon ou des sardines. qui ne répondent pas aux modications alimentaires d) L’huile d’arachide et du beurre non salé. peuvent avoir besoin d’une

Jugement

clinique

780

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

pharmacothérapie. Elle est recommandée pour les enfants âgés de plus de 10 ans dont le taux de cholestérol LDL est supérieur à 4,9 mmol/L en l’absence d’autres facteurs de risque, ou pour ceux dont le taux est supérieur à 4,1 mmol/L lorsque 2 autres facteurs de risque sont présents ou en présence d’antécédents familiaux de maladie cardiaque précoce chez un parent du premier degré. Chez les jeunes qui présentent des facteurs de risque individuels élevés (diabète, maladies rénales chroniques, maladie de Kawasaki avec anévrisme ou transplantation cardiaque), le seuil pour la pharmacopée est plus faible et peut être considéré lorsque les valeurs du cholestérol LDL sont supérieures à 3,4 mmol/L. Les lignes directrices sur le traitement des anomalies lipidiques chez les enfants recommandent l’administration de statines si la pharmacothérapie est indiquée à la suite de la modication des habitudes de vie (NHBLI, 2012). Les statines permettent de diminuer les taux de cholestérol LDL et les triglycérides et d’augmenter les taux de cholestérol HDL. Elles agissent en inhibant l’enzyme nécessaire à la synthèse du cholestérol. Les statines fonctionnent mieux lorsqu’elles sont prises en soirée.

Chez les jeunes, la plus faible dose possible doit être administrée. An d’assurer un suivi rapproché, les analyses de sang doivent comprendre un bilan lipidique à jeun, des tests de la fonction hépatique et la mesure du taux de créatinine kinase. Ces analyses doivent être effectuées quatre semaines après le début du traitement, puis à des intervalles de six mois, ou lorsque la posologie est changée. Les enfants et leurs parents doivent être avisés des effets indésirables des statines, notamment ceux plus rares, mais potentiellement graves, comme la rhabdomyolyse. Les enfants doivent cesser de prendre le médicament et communiquer avec leur médecin s’ils constatent une urine foncée ou de nouvelles douleurs musculaires. Enn, comme les statines sont dangereuses pendant la grossesse, les adolescentes sexuellement actives doivent recourir à des mesures contraceptives adéquates. Des études à court terme ont démontré que le prol d’innocuité des statines chez les enfants était semblable à celui chez les adultes (McCrindle, Urbina, Dennison et al., 2007). L’ézétimibe est parfois administré en combinaison avec les statines pour abaisser davantage le taux de cholestérol LDL, car il aide à réduire la réabsorption du cholestérol provenant de l’intestin.

TABLEAU 16.16

Les résines échangeuses d’anions dotées d’une puissante afnité pour les sels biliaires constituent une autre classe de médicaments indiquée pour le traitement des enfants. La cholestyramine (Olestyr MD) et le colestipol (ColestidMD) se présentent tous deux sous forme de poudre à mélanger à de l’eau ou à du jus. Cette classe agit en liant les acides biliaires dans la lumière intestinale et permet l’abaissement du cholestérol LDL ; toutefois, elle est accompagnée, de façon transitoire, d’une élévation des triglycérides. Ces résines n’étant pas absorbées par l’intestin, elles ne produisent donc pas de toxicité générale et sont sans danger pour les enfants. Malheureusement, beaucoup d’entre eux ne tolèrent pas le médicament en raison de son goût, de sa consistance grumeleuse et de ses effets indésirables, dont les plus fréquents sont la constipation, la douleur abdominale, le ballonnement gastro-intestinal, les atulences et les nausées. Il n’est pas courant d’utiliser des médicaments pour abaisser les valeurs de triglycérides, à moins qu’elles ne soient notablement élevées (supérieures à 5,6 mmol/L). Le cas échéant, les bres, qui diminuent la production de triglycérides, peuvent être considérées.

Rhabdomyolyse : Destruction du tissu musculaire strié, entraînant la libération dans le sang de myoglobine (pigment musculaire toxique).

Facteurs de risque associés à la dyslipidémie

FACTEURS DE RISQUE ÉLEVÉ

FACTEURS DE RISQUE MODÉRÉ

FACTEURS DE RISQUE CARDIOVASCULAIRES/ COMORBIDITÉS

• Hypertension artérielle nécessitant un traitement

• Hypertension artérielle ne nécessitant pas de médicaments

• Tabagisme et exposition à la fumée secondaire

• Embonpoint – se situe entre le 85e et le 95e centile sur la courbe taille-poids

• Antécédents familiaux de maladie cardiovasculaire précoce (infarctus du myocarde, angine, pontage coronarien) chez un parent au premier degré (homme de ≤ 55 ans ; femme de ≤ 65 ans)

• Obésité – se situe au courbe taille-poids

95e centile ou

plus de la

• Cholestérol HDL inférieur à 1 mmol/L

Conditions de risque élevé

Conditions de risque modéré

• Diabète de types 1 ou 2

• Maladie inammatoire chronique

• Insufsance rénale chronique ou terminale/ après la transplantation rénale

• Infection par le virus de l’immunodécience humaine

• Post-transplantation cardiaque

• Syndrome néphrotique

• Maladie de Kawasaki avec anévrisme coronaire

• Maladie de Kawasaki sans anévrisme coronaire

Sources : Adapté de Barrat (2017) ; Chaire de recherche sur l’obésité de l’Université Laval (2018) ; de Ferranti et Newburger (2018) ; NHLBI (2012) ; Zachariah et Johnson (2014).

Soins inrmiers DYSLIPIDÉMIE

Recueillir les données pertinentes Les inrmières jouent un rôle important dans le dépistage des enfants atteints de dyslipidémie ainsi que dans l’enseignement et le soutien à

leur prodiguer. Lorsqu’un enfant est orienté vers une clinique de traitement des dyslipidémies, il est essentiel que la famille soit bien préparée à la première visite. En général, les parents doivent tenir un carnet alimentaire pour l’enfant avant cette visite. Il arrive qu’ils doivent remplir

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

781

16

un questionnaire sur les habitudes alimentaires de l’enfant de l’année précédente. Il faut rappeler aux familles que l’enfant doit être à jeun pendant les 12 heures qui précèdent le test de dépistage. Il est important de planier l’analyse de sang tôt le matin et de prévoir un repas juste après. Durant la visite, l’inrmière doit noter tous les antécédents familiaux, notamment l’état de santé du père et de la mère, et celui de tous les parents du premier degré. Elle doit poser des questions précises sur les maladies du cœur, l’hypertension artérielle, les AVC, les décès subits, la dyslipidémie, le diabète et les anomalies endocriniennes.

Renseigner la famille sur la dyslipidémie et les facteurs prédisposants L’inrmière doit fournir aux parents et à l’enfant de l’information sur le cholestérol et la dyslipidémie. Cette documentation doit inclure une introduction sommaire sur les différentes catégories de lipoprotéines comme le cholestérol, les HDL, les LDL et les triglycérides. Il faut également passer en revue les facteurs de risque comportementaux liés aux maladies cardiaques comme le tabagisme et le manque d’exercice. Pour que la prise en charge soit efcace, les parents doivent comprendre la justication des interventions alimentaires ou pharmacologiques. L’essentiel est de prévenir toute maladie cardiovasculaire.

Favoriser de saines habitudes de vie Un régime alimentaire strict peut donner lieu à un besoin de contrôle et à une grande source de stress pour beaucoup de familles. Les enfants ne doivent pas être considérés comme des malades. Il faut mettre l’accent sur les aspects positifs d’une

16.5.4

Arythmies cardiaques

Étiologie Les arythmies, ou anomalies du rythme cardiaque, peuvent apparaître chez des enfants dont la structure du cœur est normale, accompagner certaines malformations cardiaques ou toucher des enfants dont les malformations cardiaques ont fait l’objet d’une réparation chirurgicale. Les arythmies se produisent aussi chez les enfants atteints d’une cardiomyopathie ou d’une tumeur cardiaque. Elles peuvent survenir à la suite de déséquilibres métaboliques et électrolytiques. Elles sont classées de plusieurs façons, notamment selon les caractéristiques de la fréquence cardiaque (bradycardie ou tachycardie), ou en fonction de leur origine (dans les oreillettes ou les ventricules). Certaines arythmies sont bien

782

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

alimentation saine, de la pratique régulière d’activités physiques et de l’abstinence tabagique. Il faut inciter toute la famille à adopter des modications alimentaires de base de manière à ce que l’enfant affecté ne soit pas mis à l’écart. On doit aussi tenir compte des différences culturelles et personnaliser les recommandations. Il faut insister sur les substitutions plutôt que sur les éliminations. Les outils visuels (p. ex., des tubes à spécimen pour illustrer la quantité de lipides dans un hot-dog) sont utiles, surtout pour les enfants. Les régimes doivent être exibles et conçus sur mesure par une nutritionniste. Les parents sont encouragés à participer à des séances d’information sur l’alimentation, à poser des questions et à faire part de leurs idées et de leurs expériences. Il n’est pas rare que les parents se sentent coupables du fait de la composante héréditaire de la dyslipidémie. Ils peuvent vivre comme un échec le fait que l’alimentation seule n’ait pas entraîné de différence notable dans le bilan lipidique de leur enfant. Il faut les rassurer en leur rappelant que la seule approche alimentaire est souvent insufsante, surtout dans le cas où les taux de cholestérol sont élevés.

Expliquer la pharmacothérapie Les parents d’enfants qui requièrent une pharmacothérapie doivent comprendre l’objectif, la posologie et les effets indésirables possibles des divers médicaments. Les horaires pharmacologiques doivent rester exibles et ne pas interférer avec les activités quotidiennes de l’enfant. L’inrmière peut effectuer des appels téléphoniques de suivi entre les visites pour permettre aux parents de discuter de leurs inquiétudes et de poser toute autre question.

tolérées et se résolvent spontanément, alors que d’autres peuvent entraîner une diminution du débit cardiaque et d’autres symptômes. Enn, certaines arythmies peuvent provoquer une mort subite. Leur traitement dépend de leur cause et de leur gravité. Dans la dernière décennie, bien des progrès ont été accomplis dans le diagnostic et le traitement des arythmies en pédiatrie. Les progrès technologiques ont permis d’améliorer le diagnostic, de mettre au point des techniques d’ablation et d’élargir les fonctions des stimulateurs cardiaques. De nouveaux médicaments antiarythmiques se sont avérés efcaces et sans danger pour les enfants. L’ablation par radiofréquence a permis de guérir certaines arythmies. L’électrophysiologie pédiatrique est devenue un domaine très spécialisé. Les sections suivantes ont trait aux examens

paracliniques et, de façon générale, à la bradycardie la plus répandue, à savoir le bloc auriculoventriculaire complet, et à la tachycardie la plus courante, soit la tachycardie supraventriculaire, qui nécessitent toutes les deux un traitement chez les enfants.

Évaluation initiale L’inrmière doit bien connaître les valeurs normales de la fréquence cardiaque pour un groupe d’âge donné C . Sa première responsabilité est de reconnaître une fréquence ou un rythme cardiaques anormaux. Lorsqu’une arythmie est soupçonnée, elle doit mesurer la fréquence apicale pendant une minute entière et la comparer avec la fréquence radiale, laquelle peut être inférieure, car les battements apicaux ne se ressentent pas tous aux extrémités. Des fréquences cardiaques toujours élevées ou faibles doivent être considérées comme suspectes. L’enfant doit être branché à un moniteur cardiaque capable d’enregistrer le tracé électrocardiographique. Un ECG à 12 dérivations fournit plus de renseignements qu’un moniteur, et il doit être effectué dès que possible FIGURE 16.14 .

Diagnostic L’élément clé pour effectuer le diagnostic d’arythmie est l’ECG, y compris le monitorage Holter pendant au moins 24 heures. L’examen élec trophysiologique par cathétérisme cardiaque permet de déceler les troubles de la conduction et d’administrer immédiatement les médicaments susceptibles de maîtriser l’arythmie. L’autre intervention possible est l’enregistrement électrophysiologique transœsophagien. Une sonde munie d’une électrode est insérée vers la partie inférieure de l’œsophage et, une fois placée en un point proximal par rapport au cœur, elle sert à stimuler et à enregistrer les arythmies.

FIGURE 16.14 L’ECG à 12 dérivations fournit plus de renseignements qu’un moniteur.

Les arythmies peuvent être classées ainsi, suivant différents critères, notamment leur effet sur la fréquence et le rythme cardiaques. • Bradyarythmie : Fréquence cardiaque anormalement basse, liée à une anomalie physiologique ou pathologique, sinusale ou nodale, ou due à un bloc auriculoventriculaire. • Tachyarythmie : Fréquence cardiaque anormalement élevée pouvant toucher l’oreillette (auriculaire) ou le ventricule. • Trouble de la conduction : Fréquence cardiaque anormalement élevée ou diminuée avec un rythme irrégulier, liée à une anomalie de transmission de l’inux nerveux au cœur.

Bradyarythmies

C Les valeurs normales en fonction de l’âge de l’enfant sont présentées dans l’annexe C, Valeurs normales des signes vitaux.

Il existe deux principaux mécanismes et sites pour le développement de la bradyarythmie : 1. Bradycardie sinusale : Dans le nœud sinusal, le taux de dépolarisation est sous les valeurs normales de fréquence cardiaque les plus faibles établies pour l’âge. 2. Bloc auriculoventriculaire : La conduction de l’impulsion électrique est ralentie ou bloquée dans le nœud auriculoventriculaire (AV) ou dans le faisceau de His (Zimmerman, 2016). Chez les enfants, la bradycardie sinusale peut être causée par le système nerveux autonome, comme dans le cas du réexe vagal, ou en réponse à l’hypoxie et à l’hypotension. Les bradycardies sinusales surviennent aussi après certaines réparations chirurgicales cardiaques complexes nécessitant d’importantes lignes de suture dans les oreillettes, comme c’est le cas dans les réparations par cloisonnement auriculaire (opérations de Mustard et de Senning) ou l’opération de Fontan.

16

Le bloc auriculoventriculaire (bloc AV) complet, aussi appelé bloc du cœur complet, peut être congénital ou acquis. Le bloc AV congénital (diagnostiqué in utero, à la naissance ou dans le premier mois de la vie) est rare et il est observé chez les enfants atteints d’une anomalie anatomique (ou bloc AV malformatif) du système de conduction ou d’un passage transplacentaire d’anticorps maternels qui induisent une myocardite fœtale, puis une brose du tissu de conduction (appelée bloc immunologique) (Baruteau, Pass, Thambo et al., 2016). La cause d’un bloc AV acquis de l’enfant peut être postopératoire, toxique, infectieuse ou inflammatoire. Les blocs AV survenus à la suite de la réparation chirurgicale d’une malformation cardiaque sont généralement liés à un œdème autour du système de conduction et se résolvent sans traitement. Pendant une intervention chirurgicale, des ls épicardiques temporaires sont implantés chez la

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

783

plupart des enfants, permettant ainsi de stimuler temporairement le myocarde en cas de trouble rythmique. Plusieurs jours après l’intervention, les ls sont retirés en les tirant lentement et graduellement vers le bas à partir du point d’insertion.

Approche thérapeutique

CONSEIL CLINIQUE

An de lui permettre de participer à ses soins, l’enfant assez âgé peut mesurer son pouls et apprendre le fonction­ nement du stimulateur cardiaque.

Certains enfants auront peut-être besoin d’un stimulateur cardiaque permanent. Cet appareil supplée à la fonction de conduction du cœur ou la facilite. La mise en place d’un stimulateur cardiaque, en salle d’opération ou éventuellement dans une salle de cathétérisme, est une intervention qui présente généralement peu de risques. Le stimulateur est composé de deux parties : les électrodes et le générateur d’impulsions (comprend une pile et un circuit électronique). Les électrodes sont des ls exibles isolés qui conduisent les impulsions électriques du générateur vers le cœur. Il existe deux types d’électrodes :

transveineuse et épicardique. Une fois les électrodes reliées au cœur, une petite incision permet d’aménager une poche sous le muscle pour y déposer le stimulateur et le mettre à l’abri. Pendant la phase de rétablissement, la surveillance continue par ECG est indispensable pour évaluer le fonctionnement du stimulateur cardiaque. L’inrmière doit connaître la fréquence programmée et les variations individuelles prévues du stimulateur. Le site d’insertion du stimulateur cardiaque doit être surveillé pour détecter tout signe d’infection. Des analgésiques sont administrés pour enrayer la douleur. Les fonctions des stimulateurs cardiaques sont devenues plus sophistiquées, et certains modèles peuvent modier la fréquence cardiaque en fonction des efforts fournis pendant certaines activités, ou être programmés pour produire un entraînement électrosystolique rapide ou une cardioversion.

Soins inrmiers STIMULATEUR CARDIAQUE

14 La procédure de réanimation cardiorespiratoire est expliquée dans le chapitre 14, Techniques de soins.

Au moment du congé d’un enfant à qui on a implanté un stimulateur cardiaque, l’inrmière informe les parents sur les manifestations cliniques d’infection, les soins généraux de la plaie et les restrictions en matière d’activités. Les parents et les enfants, si ces derniers sont en âge de comprendre, peuvent apprendre à mesurer le pouls et être informés sur les paramètres préréglés du stimulateur. Lorsque la fréquence du stimulateur cardiaque est préréglée pour maintenir une fréquence minimum de 80 batt./min, par exemple, alors que la fréquence cardiaque de l’enfant n’est en fait que de 68 batt./min, le fonctionnement du stimulateur doit être vérifié.

Tachyarythmies Les cas de tachycardie sinusale (fréquence cardiaque anormalement élevée) résultant d’une èvre, de l’anxiété, d’une douleur, de l’anémie, de la déshydratation ou d’un autre facteur nécessitant l’augmentation du débit cardiaque doivent être exclus avant de diagnostiquer une fréquence cardiaque élevée comme étant pathologique. La tachycardie supraventriculaire (TSV), la tachyarythmie la plus courante chez les enfants, désigne une fréquence cardiaque élevée de 220 à 280 batt./ min chez le nourrisson, et de 180 à 240 batt./min chez l’enfant et l’adolescent, avec un rythme cardiaque régulier (Dubin, 2018). Son origine se situe au nœud des oreillettes (sinusale) ou au nœud auriculoventriculaire. Son apparition est souvent soudaine, et sa durée est variable (en moyenne,

784

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

L’inrmière transmet également aux parents des directives sur la transmission des tracés d’ECG par téléphone. Le suivi du fonctionnement du stimulateur cardiaque et de la charge restante de la pile peut également s’effectuer par transmission téléphonique. Étant donné sa durée de vie limitée, la pile du stimulateur devra être remplacée périodiquement. Les enfants qui ont un stimulateur cardiaque doivent porter un bracelet ou un pendentif d’alerte médicale en tout temps, et leurs parents doivent avoir en leur possession un document spéciant les caractéristiques du stimulateur pour les cas d’urgence. Il est important que les parents soient formés sur la procédure de réanimation cardiorespiratoire (RCR) 14 .

de 10 à 15 minutes) ; le rythme peut ralentir abruptement et se convertir en rythme sinusal normal. La TSV peut survenir à tout âge, mais elle apparait plus fréquemment durant la première année de vie, chez l’enfant de 6 à 8 ans et chez l’adolescent. Chez les nourrissons et les jeunes enfants, les manifestations cliniques incluent une alimentation insuffisante, une irritabilité extrême et une pâleur. Elles peuvent aussi inclure des palpitations, des étourdissements, de la fatigue, une douleur thoracique et une diaphorèse. Si la TSV persiste, des signes d’ICC peuvent se manifester. Dans une analyse rétrospective portant sur des nourrissons de moins de 1 an atteints de TSV, aucun de ceux ayant une TSV de moins de 24 heures n’a manifesté d’insuffisance

cardiaque. Cependant, l’insuffisance cardiaque était présente chez 19 % et 50 % des nourrissons atteints de TSV pendant 24 à 36 heures, ou pendant plus de 48 heures, respectivement (Dubin, 2018).

refroidir un cathéter à des températures sous le point de congélation, ce qui détruit le tissu ciblé en le congelant.

Approche thérapeutique

La torsade de pointes, qui est associée à l’allongement de l’intervalle QT corrigé pour la fréquence cardiaque (QTc), constitue une autre forme de tachyarythmie ventriculaire. Elle est facilement décelable sur un ECG. Cette tachyarythmie nécessite une intervention rapide pour éviter une mort subite. L’allongement de l’intervalle QT peut être héréditaire ou acquis. Le syndrome du QT long congénital peut se présenter sous plusieurs formes. Le syndrome du QT acquis est causé par certains médicaments tels que le cisapride, la dompéridone, la rispéridone, des antiarythmiques (amiodarone, procainamide, sotalol), des antifongiques (uconazole, voriconazole) et les déséquilibres électrolytiques (l’hypokaliémie et l’hypomagnésémie précipitent la torsade de pointes) (Dave, 2017). Il est donc important que l’inrmière soit en mesure de reconnaître l’allongement de l’intervalle QT sur le tracé de l’ECG et qu’elle connaisse les médicaments qui peuvent le causer an d’intervenir rapidement pour prévenir un arrêt cardiaque (Tisdale, 2016).

Le traitement de la TSV dépend de l’ampleur du préjudice qu’entraîne l’arythmie.

Manœuvres vagales Dans certains cas, des manœuvres vagales comme l’application de glace sur le visage du nourrisson ou la manœuvre de Valsalva que l’enfant plus âgé peut faire (p. ex., expirer la gorge fermée) peuvent faire cesser la TSV. Le sac de glace, auquel de l’eau est ajoutée pour augmenter la surface de contact sur le visage, est appliqué en couvrant la bouche et le nez pendant 15 à 30 secondes (Dubin, 2018). Les manoeuvres vagales doivent se dérouler sous surveillance avec moniteur cardiaque. Traitement pharmacologique Si les manœuvres vagales sont infructueuses ou si l’état hémodynamique de l’enfant est instable, l’adénosine, un médicament qui provoque un bloc AV transitoire, sera administrée. Compte tenu de sa très courte demi-vie, l’adénosine doit être injectée rapidement dans une voie veineuse la plus proximale du cœur et être suivie immédiatement par un bolus rapide de solution saline. Si le traitement échoue ou si le débit cardiaque est compromis, il faut recourir à l’entraînement électrosystolique rapide par voie œsophagienne ou à la cardioversion synchronisée (administration d’une décharge électrique au cœur pendant un complexe QRS) à l’unité de soins intensifs. La sédation est requise pour les deux interventions. La cardioversion ne doit jamais être effectuée si l’enfant est conscient. Le traitement pharmacologique à plus long terme inclut la digoxine, possiblement le propranolol (Inderal-laMD), le sotalol ou l’amiodarone pour la TSV grave ou récurrente (Dubin, 2018 ; Maltret et Lacotte, 2012). Ablation L’ablation par radiofréquence est devenue le traitement de première intention de certains types de TSV. Le but de l’ablation est de détruire les cellules électriques responsables de l’arythmie et de rétablir ainsi un rythme cardiaque normal. L’intervention commence par la cartographie du système de conduction an de conrmer l’emplacement du foyer arythmique. Un cathéter administrant le courant de radiofréquence est dirigé vers le foyer, puis cette zone est cautérisée de manière à détruire le tissu ciblé. Ces interventions durent souvent entre six et huit heures, et elles exigent une sédation ou une anesthésie générale. La préparation est la même que pour un cathétérisme cardiaque. Une autre procédure, la cryoablation, est également employée dans le traitement de la TSV. L’oxyde nitreux liquide est utilisé pour

Syndrome du QT long congénital

éactivation des connaissances Qu’est-ce que la demi-vie d’un médicament ?

Soins inrmiers TACHYARYTHMIES

L’essentiel des soins inrmiers liés à la TSV consiste à informer la famille des manifestations cliniques de cette affection et de sa prise en charge. La TSV est appelée à réapparaître malgré le traitement. L’inrmière apprendra aux parents à prendre le pouls radial pendant une minute entière. Si un médicament a été prescrit, l’inrmière leur donnera des directives ayant trait à la posologie et à l’importance d’administrer la dose précise aux intervalles indiqués.

16.5.5

16

Hypertension artérielle pulmonaire

L’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) primitive désigne un groupe d’affections rares entraînant une augmentation de la pression artérielle pulmonaire systolique au-dessus de 25 mm Hg au repos après la période néonatale (Berger, 2017 ; Mullen et Kulik, 2017). Ces affections sont mal comprises et, jusqu’à tout récemment, il n’existait pas de traitement hormis les soins de soutien. L’HTAP est une maladie évolutive mortelle incurable. Il peut être difcile de la Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

785

diagnostiquer aux stades initiaux. Lorsque les enfants deviennent symptomatiques et qu’un diagnostic est prononcé, il arrive souvent que la maladie évolue vite, que le traitement échoue et que le décès se produise après quelques années. Depuis peu, le processus pathologique, les liens génétiques, le diagnostic et le traitement de cette maladie sont mieux compris, ce qui pourrait améliorer la prise en charge ainsi que la qualité et l’espérance de vie des enfants atteints (Austin et Loyd, 2014). L’HTAP affecte les petites artères pulmonaires ; elle se caractérise par un rétrécissement vasculaire qui entraîne une augmentation de la résistance vasculaire pulmonaire. Les raisons qui font que certains enfants contractent la maladie alors que d’autres ne la contractent pas ne sont pas claires. L’HTAP peut avoir beaucoup de causes possibles. Les causes cardiaques concernent essentiellement les enfants chez lesquels un shunt gauche-droite important produit un débit sanguin pulmonaire accru. Si ces anomalies ne sont pas réparées tôt, le débit pulmonaire élevé entraîne des changements dans les vaisseaux artériels pulmonaires, qui perdent leur élasticité. Les autres causes de l’HTAP incluent les maladies pulmonaires hypoxiques, les maladies thromboemboliques responsables d’une obstruction vasculaire pulmonaire, les maladies vasculaires liées au collagène et l’exposition à des substances toxiques. De nombreux enfants sont atteints d’une HTAP primitive ou idiopathique sans en présenter de cause identiable.

Manifestations cliniques Ischémie : Diminution ou arrêt de la circulation artérielle dans une région plus ou moins étendue d’un organe ou d’un tissu.

Les manifestations cliniques de l’HTAP incluent la dyspnée à l’effort, la douleur thoracique et la syncope. La dyspnée, le symptôme le plus courant, est causée par le transport inadéquat de l’oxygène. La douleur thoracique découle d’une ischémie coronarienne au ventricule droit due à l’hypertrophie massive. La syncope est attribuable à un débit cardiaque limité et à la diminution consécutive du débit sanguin cérébral. La dysfonction du cœur droit évolue graduellement et, lorsque les symptômes de congestion veineuse et d’œdème sont manifestes, le pronostic est médiocre.

Approche thérapeutique Bien qu’il n’y ait aucune cure connue pour l’HTAP, plusieurs traitements se sont avérés prometteurs en ce qui a trait au ralentissement de l’évolution de la maladie et à l’amélioration de la qualité de vie. En général, il faut éviter les situations de nature à exacerber la maladie et à provoquer l’hypoxie, comme l’exercice et les hautes altitudes. L’oxygénothérapie, surtout la nuit lorsque l’enfant dort, est une pratique courante pour soulager l’hypoxie. Les enfants sont susceptibles de souffrir de

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Partie 6

Troubles liés aux systèmes

thromboembolies, lesquelles peuvent causer une embolie pulmonaire ; une anticoagulothérapie à la warfarine (CoumadinMD) leur est souvent prescrite. Un traitement vasodilatateur qui détend les muscles lisses des vaisseaux et réduit la pression artérielle pulmonaire peut prolonger l’espérance de vie des enfants atteints d’HTAP. En cas d’hypertension pulmonaire très grave, l’enfant est pris en charge avec une assistance respiratoire et l’administration d’oxyde nitrique par inhalation. Dans les cas moins graves, l’administration de médicaments par voie orale est privilégiée. Les inhibiteurs des phosphodiestérases de type 5 comme le sildénal ont démontré une amélioration de la saturation en oxyhémoglobine et une tolérance à l’exercice sans effets indésirables importants. Chez certains enfants qui ont une vasoconstriction prédominante répondant au test de vasodilatation lors du cathétérisme cardiaque, les inhibiteurs calciques par voie orale se sont révélés bénéques. Chez les enfants qui ne répondent pas au test de vasodilatation, le bosentan, un antagoniste des récepteurs de l’endothéline, peut être utilisé soit en tant que traitement individuel, soit comme adjuvant d’un autre médicament. Il peut être administré avec la prostacycline. L’administration continue de prostacycline par voie intraveineuse a montré une certaine efcacité chez les enfants qui n’ont pas répondu au traitement par voie orale. La demi-vie de la prostacycline étant très courte, l’interruption de l’infusion intraveineuse peut causer une aggravation de l’hypertension artérielle pulmonaire, et potentiellement la mort. Dans des cas limités, le tréprostinil, un analogue de la prostacycline, administré par voie souscutanée à l’aide d’un système de mini-pompe, a été utilisé. Ce traitement très coûteux est débuté à l’hôpital, puis continué à domicile (Vorhies et Ivy, 2014). La greffe du poumon est généralement la dernière option pour ceux qui souffrent d’hypertension pulmonaire et qui ne répondent pas aux médicaments. Parmi les enfants ayant reçu une greffe, ceux qui sont atteints d’hypertension pulmonaire ont un taux de mortalité plus élevé que les autres (Andersen, Schultz, Nyholm et al., 2016). La prise en charge de l’HTAP continue d’évoluer à mesure que de nouvelles recherches sont effectuées et que les thérapies sont évaluées.

16.5.6

Cardiomyopathie

La cardiomyopathie désigne une anomalie du myocarde qui nuit à la capacité contractile du muscle cardiaque. Les cardiomyopathies sont relativement rares chez les enfants, mais elles sont

néanmoins une cause importante d’insufsance cardiaque. Les facteurs étiologiques possibles incluent : • des causes familiales ou génétiques ; • l’infection ; • des états de carence ; • des anomalies métaboliques ; • des maladies vasculaires liées au collagène. Chez les enfants, la plupart des cardiomyopathies sont considérées comme primitives ou idiopathiques, c’est-à-dire que la cause en est inconnue et que la dysfonction cardiaque n’est pas associée à une maladie généralisée. Lorsqu’une maladie cause un dysfonctionnement cardiaque, on se réfère à une cardiomyopathie secondaire. Les causes connues de cardiomyopathies secondaires sont la toxicité aux anthracyclines (agents antinéoplasiques comme la doxorubicine et la daunomycine), l’hémochromatose (mise en réserve excessive du fer), la dystrophie musculaire de Duchenne, la maladie de Kawasaki, les maladies du collagène et la dysfonction thyroïdienne. Les cardiomyopathies peuvent être classées en quatre grandes catégories cliniques, selon le type d’anomalie structurelle et de dysfonction présent : la cardiomyopathie dilatée (58 % des cas), hypertrophique (30 %) ou restrictive (5 %), ou la dysplasie ventriculaire droite arythmogène (4 %) (Centre national de référence des maladies cardiaques héréditaires, 2011 ; Kantor, Loughleed, Dancea et al., 2013). • La cardiomyopathie dilatée se caractérise par une dilatation ventriculaire et une contractilité très diminuée entraînant des manifestations cliniques d’insufsance cardiaque. Il s’agit du type de cardiomyopathie la plus courante chez les enfants. Sa cause est souvent inconnue. Les résultats cliniques sont l’ICC avec tachycardie, la dyspnée, l’hépatosplénomégalie, la fatigue et le retard de croissance. Des arythmies peuvent être observées et s’avérer plus difciles à maîtriser lorsque l’insuffisance cardiaque s’aggrave. • La cardiomyopathie hypertrophique se caractérise par une augmentation de la masse du muscle cardiaque sans augmentation de la taille de la cavité du cœur. Elle affecte généralement le ventricule gauche et est accompagnée d’une anomalie du remplissage diastolique. Dans la plupart des cas, il s’agit d’une anomalie génétique dominante autosomique familiale. C’est aussi probablement la maladie cardiovasculaire transmissible génétiquement la plus répandue (Jefferies, Ryan et Maron, 2016). L’expression de la maladie sur le plan clinique

varie considérablement. Les manifestations cliniques apparaissent d’ordinaire pendant la période d’âge scolaire ou l’adolescence, et elles peuvent inclure la douleur thoracique angineuse, les arythmies et la syncope. La mort subite est possible. Le nourrisson atteint présente des manifestations cliniques d’insufsance cardiaque et un mauvais pronostic. L’échocardiogramme est particulièrement utile : il révèle une hypertrophie asymétrique septale et une augmentation de l’épaisseur de la paroi ventriculaire gauche, avec une petite cavité ventriculaire gauche. • La cardiomyopathie restrictive, rare chez l’enfant, désigne une restriction du remplissage ventriculaire résultant d’une maladie endocardique ou myocardique, ou des deux. Elle se caractérise par une dysfonction diastolique et l’absence de dilatation ventriculaire, ou une hypertrophie. Des manifestations cliniques d’insufsance cardiaque diastolique comme l’orthopnée, la toux, la douleur thoracique ou la syncope sont présentes. Une progression vers l’insufsance ventriculaire droite, accompagnée d’une congestion veineuse hépatique ou une ascite due à l’hypertension de l’oreillette gauche et à l’hypertension pulmonaire de longue date, pourrait éventuellement être observée. La mort subite est fréquente (Kantor et al., 2013 ; Sorajja et Hoit, 2017). • La dysplasie ventriculaire droite arythmogène (DVDA) se caractérise par des arythmies ventriculaires pouvant entraîner le décès. Elle est une cause majeure de mort subite chez les jeunes et les athlètes. Sa prévalence varie de 1 cas sur 2 500 personnes à 1 cas sur 5 000 personnes. La DVDA se caractérise également par le remplacement des cellules musculaires du ventricule droit par des cellules adipeuses, ce qui peut provoquer un anévrisme du ventricule droit. Parmi les manifestations cliniques de la DVDA gurent une phase subclinique asymptomatique avec, comme première manifestation, une brillation ventriculaire ; une instabilité électrique avec des palpitations et des syncopes causées par des tachyarythmies se produisant dans le ventricule droit ; une insufsance ventriculaire droite très grave qui nécessite parfois une transplantation.

16

Approche thérapeutique Le traitement de la cardiomyopathie vise autant que possible à en corriger la cause sous-jacente. Cependant, pour la plupart des enfants qui en sont atteints, cela n’est pas possible, et le traitement sert alors à gérer l’insufsance cardiaque congestive et les arythmies. La digoxine, les diurétiques et l’utilisation énergique d’agents destinés à réduire la postcharge se sont révélés utiles dans

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

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la prise en charge des manifestations cliniques des personnes atteintes de cardiomyopathie dilatée. Les lignes directrices concernant la pratique sur la prise en charge de l’insufsance cardiaque en pédiatrie ont récemment été réitérées ; elles présentent une analyse détaillée des traitements disponibles (Kantor et al., 2013 ; Rossano et Shaddy, 2014). La digoxine et les agents inotropes sont généralement sans utilité dans le traitement des autres formes de cardiomyopathie, car l’augmentation de la force de contraction peut exacerber l’obstruction musculaire et nuire à l’éjection ventriculaire. Les bêtabloquants comme le propranolol ou les inhibiteurs calciques comme le vérapamil (IsoptinMD ) ont été employés pour réduire l’obstruction du débit ventriculaire gauche et améliorer le remplissage diastolique chez les personnes atteintes de cardiomyopathie hypertrophique. 1 La notion de consentement éclairé est abordée dans le chapitre 1, Rôle de l’inrmière auprès de l’enfant, de la famille et de la communauté.

Le suivi scrupuleux et le traitement des arythmies sont essentiels. L’installation d’un débrillateur cardiaque implantable doit être envisagée pour les enfants présentant un risque de mort subite élevé en raison d’arythmies ventriculaires. Des anticoagulants peuvent être administrés pour réduire le risque de thromboembolie, une complication inhérente à une circulation stagnante dans le cœur. En cas d’aggravation de l’insufsance cardiaque et de signes de débit sanguin insufsant, l’utilisation de médicaments inotropes ou de vasodilatateurs par voie intraveineuse peut s’imposer. Les enfants gravement malades requièrent parfois un soutien respiratoire, une supplémentation en oxygène ou des médicaments par voie intraveineuse. Les enfants qui progressent vers l’insufsance cardiaque grave et qui ne répondent pas à une thérapie médicale ou pharmacologique peuvent nécessiter une assistance circulatoire mécanique. Cette assistance peut être sous forme de système de circulation extracorporelle périphérique accessible au lit de l’enfant, comme l’oxygénation par membrane extracorporelle (de l’anglais extracorporeal membrane oxygenation [ECMO]) ou un dispositif d’assistance ventriculaire (DAV) (monoventriculaire ou biventriculaire). Un DAV est utilisé en attendant la guérison ou la transplantation cardiaque (Rossano et Jang, 2015).

Soins inrmiers

10 Les soins prodigués aux enfants en phase termi­ nale sont détaillés dans le chapitre 10, Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en n de vie.

788

Partie 6

CARDIOMYOPATHIE

Compte tenu du faible pronostic pour beaucoup d’enfants atteints de cardiomyopathie, les soins inrmiers sont équivalents à ceux que requiert tout enfant atteint d’une maladie qui met sa vie en danger 10 . L’un des ajustements les plus

Troubles liés aux systèmes

difciles qui s’imposent à l’enfant (surtout au jeune enfant normalement actif atteint d’une cardiomyopathie hypertrophique) est de réaliser que son état de santé se détériore et qu’il est obligé de limiter ses activités. L’enfant doit prendre part aux décisions touchant ses activités ; il doit pouvoir discuter de ses sentiments, surtout si la maladie suit un cours progressivement mortel. Lorsque les manifestations cliniques de l’ICC ou de l’arythmie sont présentes, les interventions inrmières sont les mêmes que pour l’insufsance cardiaque congestive. Lorsqu’une transplantation cardiaque est envisagée, les besoins de l’enfant et de la famille en ce qui a trait à la préparation psychologique et les soins postopératoires sont énormes. L’inrmière joue un rôle important en ce qui concerne l’évaluation de la famille quant à sa compréhension de l’intervention et de ses répercussions à long terme. Elle doit informer correctement les enfants d’âge scolaire et les adolescents de manière à ce qu’ils puissent prendre part au consentement pour l’intervention 1 .

16.6

Transplantation cardiaque

16.6.1

Étiologie et physiopathologie

La transplantation cardiaque est devenue l’une des options thérapeutiques pour traiter les nourrissons et les enfants dont l’insufsance cardiaque s’aggrave et dont l’espérance de vie est menacée malgré une prise en charge médicale et chirurgicale optimale. La transplantation cardiaque est indiquée en cas de cardiomyopathie et de cardiopathie congénitale en phase terminale. Elle est aussi envisagée dans le cas d’une malformation cardiaque complexe comme l’hypoplasie du cœur gauche, dont le traitement chirurgical classique est associé à un fort taux de mortalité. La transplantation cardiaque peut être orthotopique ou hétérotopique : • La transplantation cardiaque orthotopique consiste en une cardiectomie suivie de l’implantation d’un greffon provenant d’un donneur victime d’une mort cérébrale qui jouissait d’une bonne santé cardiaque. Donneur et receveur doivent avoir le même poids pour la concordance morphologique, et leurs groupes sanguins doivent être compatibles. • La transplantation cardiaque hétérotopique consiste quant à elle à mettre en parallèle le cœur du receveur (il n’y a donc pas de cardiectomie) avec un greffon qui servira de pompe auxiliaire. Elle est rarement pratiquée chez les enfants.

Entre 2006 et 2015, 244 transplantations cardiaques pédiatriques ont été réalisées au Canada (à l’exclusion du Québec) ; le groupe de receveurs était composé de nourrissons de moins de 1 an (36,9 %), d’enfants de 1 à 10 ans (32,8 %) et d’adolescents de 11 à 17 ans (30,3 %) (Institut canadien d’information sur la santé [ICIS], 2017). En 2013, l’International Society for Heart and Lung Transplant (ISHLT) rapportait dans son registre international sur la répartition des transplantations cardiaques pédiatriques que, sur les 565 enfants ayant subi une transplantation cardiaque, environ 25 % étaient des nourrissons (Dipchand, Kirk, Edwards et al., 2013). Les causes principales de la transplantation étaient les cardiopathies congénitales chez le nourrisson, dont 70 % avec une physiologie univentriculaire, et la cardiomyopathie chez les enfants âgés de 11 à 17 ans (ICIS, 2017 ; Schweiger, Stiasny, Dave et al., 2015).

Évaluation Avant la transplantation, il faut évaluer soigneusement la fonction cardiaque du receveur an de déterminer s’il n’y a pas d’autres options médicales ou chirurgicales qui permettraient de l’améliorer. Il faut aussi procéder à l’exploration fonctionnelle des autres systèmes de l’organisme an de déceler des dysfonctionnements qui pourraient contre-indiquer la transplantation ou accroître les risques qui lui sont associés. De plus, il faut effectuer une évaluation psychosociale de l’enfant et de sa famille an de connaître le fonctionnement familial et son système de soutien, et pour vérier sa capacité à se conformer au traitement médical complexe qui sera instauré après la transplantation. Dans la mesure du possible, la famille recevra des services de soutien pour l’aider à prendre soin de l’enfant. L’adolescent et sa famille doivent recevoir sufsamment d’information sur les risques et les bienfaits associés à l’intervention pour qu’ils puissent prendre une décision éclairée. Les enfants qui doivent subir une transplantation cardiaque sont inscrits sur la liste de transplantation cardiaque canadienne, qui classe les receveurs potentiels selon leur statut clinique. Celui-ci est établi en fonction de l’urgence de l’intervention, du plus urgent (statut 4) au moins urgent (statut 1). Il existe six statuts cliniques : 4, 4S, 3.5, 3, 2, 1 (Société canadienne du sang, 2017 ; Transplant Québec, 2017).

16.6.2

Pronostic

La transplantation cardiaque dans la population pédiatrique est encore confrontée à de plus grandes difcultés que chez les adultes en raison d’une plus grande pénurie de donneurs ou de difcultés techniques imposées par certaines malformations congénitales. Les risques de décès en phase préopératoire, peropératoire et postopératoire sont

multiples. La mortalité pendant l’attente pour la transplantation cardiaque pédiatrique est d’environ 17 à 23 % après 6 mois chez le groupe à risque plus élevé, notamment le nourrisson. Parmi les facteurs associés à la mortalité pendant l’attente gurent le besoin d’une oxygénation par membrane extracorporelle ou de ventilation mécanique, un statut clinique 4, un diagnostic de cardiopathie congénitale (avec ou sans intervention chirurgicale), le besoin de dialyse et un poids de moins de 3 kg (Thrush et Hoffman, 2014). Un temps prolongé d’ischémie (de plus de 3 à 4 heures) du donneur augmente le risque de mortalité dans les 30 premiers jours, surtout chez les enfants de plus de 10 ans (Azeka, Jatene, Tanaka et al., 2014 ; Thrush et Hoffman, 2014). Chez tous les receveurs, adultes et enfants, le taux de survie dans les 3 mois à 1 an suivant la transplantation est d’environ 90 %, et il s’élève à 87 % après 3 ans (ICIS, 2017). Malgré une mortalité supérieure la première année, le nourrisson a une survie plus longue comparativement aux autres groupes d’âge avec 19,7 ans pour les nourrissons, 16,8 ans pour les enfants de 1 à 5 ans, 14,5 ans pour les enfants de 6 à 10 ans, et 16,1 ans pour les adolescents de 11 à 17 ans (Schweiger et al., 2015).

16.6.3

Complications

Le rejet est l’une des principales complications post-transplantation limitant la survie à long terme du greffon, et elle peut se produire à tout moment après la transplantation. L’incidence et la prévalence du rejet ont diminué au cours des années, mais le rejet aigu demeure un événement grave qui représente 5 % des décès, même 10 ans après la transplantation (Schweiger et al., 2015). Le traitement du rejet dans la première année suivant la transplantation est associé à une diminution de la survie à long terme et la retransplantation est un facteur de risque de mortalité, avec 58 % de survie à 5 ans (Schweiger et al., 2015).

16

Chez les enfants plus âgés, la biopsie endomyocardique permet de diagnostiquer la gravité du rejet et de guider le traitement. Chez les nourrissons et les enfants d’âge préscolaire, des échocardiographies régulières permettent d’éviter la biopsie, qui est un examen invasif. Après la transplantation, l’enfant doit suivre un traitement immunosuppresseur à vie. Malheureusement, ce type de traitement entraîne de nombreux effets indésirables systémiques. La trithérapie, composée d’un inhibiteur de la calcineurine (cyclosporine ou tacrolimus), d’un stéroïde (prednisone) et d’azathioprine ou de mofétilmycophénolate, est le traitement immunosuppresseur le plus couramment prescrit aux enfants. La dose de stéroïdes est diminuée progressivement au cours de la première année de traitement, et même arrêtée chez certains (Azeka et al., 2014). Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

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Des renseignements destinés aux donneurs et aux receveurs d’organes et à leur famille ainsi que des outils pratiques pour les professionnels de la santé (formulaires, protocoles, directives et statistiques) sont offerts sur le site Web de Transplant Québec (www. transplantquebec.ca).

Le risque d’infection est toujours présent. Les complications à long terme susceptibles de limiter la survie incluent le rejet chronique, qui provoque une maladie coronaire du greffon (ou une coronaropathie), l’insufsance rénale et l’hypertension liées à l’administration de cyclosporine, le syndrome lymphoprolifératif et l’infection. La maladie coronaire du greffon, qui se caractérise par une obstruction progressive et diffuse de la lumière des artères coronaires, est une complication qui survient à moyen et à long terme et qui constitue la principale cause de décès (Iserin, 2013 ; Wilhelm, 2015). Le ratio pondéral donneur-receveur est un

facteur important. Si le donneur pèse plus que trois fois le poids du receveur, celui-ci peut développer un syndrome caractérisé par une hypertension artérielle et par une pression intracrânienne élevée en raison de l’augmentation du volume dû au débit cardiaque élevé du greffon (Azeka et al., 2014). À court terme, après une greffe réussie, les enfants peuvent s’adonner pleinement aux activités convenant à leur âge et paraissent bien s’adapter à leur nouveau mode de vie. La transplantation n’est pas une guérison en soi, puisque les enfants doivent subir toute leur vie les conséquences de l’immunosuppression chronique.

Soins inrmiers TRANSPLANTATION CARDIAQUE

Dans le cas d’un enfant qui a subi une transplantation cardiaque, la réussite des soins exige expertise et engagement de la part des nombreux membres de l’équipe de soins. Les inrmières jouent un rôle central dans l’évaluation, la coordination des soins, le soutien psychosocial et l’enseignement à l’enfant et à sa famille. Les receveurs doivent faire l’objet d’un suivi méticuleux de manière à détecter les signes de rejet, d’infection et d’effets indésirables des immunosuppresseurs. Il faut également évaluer le bien-être psychosocial de l’enfant et de la famille pour dépister les problèmes liés à l’augmentation du stress familial, à la dépression, à la consommation de substances

16.7

Troubles de la fonction vasculaire

Plusieurs problèmes vasculaires peuvent survenir en présence d’un trouble cardiaque ou à la suite d’une intervention chirurgicale cardiaque. TABLEAU 16.17

Classication de l’hypertension artérielle selon le centile de mesure de la pression artérielle PRESSION ARTÉRIELLE SYSTOLIQUE OU DIASTOLIQUE

Normale

< 90e

Préhypertension

90e au < 95e, ou si la P.A. dépasse 120/80 mm Hg même si ce résultat est plus bas que celui du 90e ou du 95e

HTA de stade 1

P.A. comprise entre les 95e et 99e inclusivement : le résultat ne dépasse pas celui du 99e par plus de 5 mm Hg

HTA de stade 2

P.A. de plus de 5 mm Hg au-dessus de la valeur du 99e

Sources : Adapté de Lemay et al. (2015) ; NHLBI (2005).

790

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

illicites et aux difficultés scolaires. La nonadhésion au traitement médical intense, surtout durant l’adolescence, peut entraîner de graves complications médicales et être mortelle. Les 6 à 12 premiers mois après la greffe sont les plus intenses, car le risque de complications y est maximal, et l’enfant et sa famille doivent s’adapter à un nouveau mode de vie. L’équipe de soins surveille étroitement les enfants au moyen de fréquentes visites médicales et d’analyses de laboratoire régulières. Les soins sont généralement répartis entre les prestataires de soins locaux et le centre de greffe. De nombreux enfants sont en mesure de reprendre l’école et les autres activités propres à leur âge dans les 2 ou 3 mois qui suivent la greffe.

16.7.1

Hypertension artérielle

L’hypertension artérielle (HTA) se dénit comme une augmentation constante de la pression artérielle systolique (P.A.S.) ou de la pression artérielle diastolique (P.A.D.) supérieure ou égale au 95e centile selon l’âge, le sexe et la taille (Lemay, Germain, Fournier et al., 2015) au-delà des valeurs considérées comme les limites supérieures à la normale. Elle relève de deux grandes catégories : • l’hypertension essentielle (aucune cause identiable) ; • l’hypertension secondaire (résultant d’une cause identiable). La classication de l’hypertension artérielle inclut la préhypertension, l’hypertension de stade 1 et l’hypertension de stade 2 TABLEAU 16.17 . Le TABLEAU 16.18 présente les causes fréquentes selon l’âge.

Étiologie La plupart des cas d’hypertension observés chez les jeunes enfants sont causés par une anomalie

TABLEAU 16.18

Causes fréquentes d’hypertension artérielle

ÂGE

CAUSES

Nouveau-né

• Sténose d’une artère rénale • Maladie rénale congénitale • Coarctation de l’aorte • Bronchodysplasie pulmonaire

1 mois-1 an

• Coarctation de l’aorte • Maladie rénovasculaire • Maladie rénale

1-6 ans

• Maladie rénovasculaire • Maladie rénale • Hypertension artérielle essentielle

6-12 ans

• Maladie rénovasculaire • Maladie rénale • Hypertension artérielle essentielle • Coarctation de l’aorte • Endocrinopathie

12-18 ans

• Maladie rénovasculaire • Maladie rénale • Hypertension artérielle essentielle • Hypertension artérielle iatrogène • Coarctation de l’aorte • Endocrinopathie

structurelle ou un processus pathologique sousjacent, mais cette idée est remise en question par des programmes de dépistage menés auprès d’enfants relativement en bonne santé. Les causes de l’hypertension essentielle sont inconnues, mais certaines données pointent vers des facteurs génétiques et environnementaux. Dans une étude multigénérationnelle, il a été démontré que le risque d’hypertension est multiplié par 2,0 chez les participants avec un

TABLEAU 16.19

pa rent ayant eu une hypertension artérielle à début précoce (c.-à-d. à moins de 55 ans), par 3,5 si les 2 parents sont en cause (Niiranen, McCabe, Larson et al., 2017). Elle est également plus élevée chez les Noirs que chez les Blancs ; chez eux, la maladie se déclare aussi plus tôt, elle est souvent plus grave et entraîne un décès à un plus jeune âge. Les facteurs environnementaux qui contribuent au risque d’hypertension incluent l’obésité, la consommation de sel, le tabagisme et le stress. Ces dernières années, cette affection a suscité beaucoup d’intérêt en ce qui a trait aux adolescents et aux enfants, car elle est souvent associée à l’épidémie d’obésité.

The fourth report on the Diagnosis, Evaluation, and Treatment of High Blood Pressure in Children and Adolescents fournit des renseignements détaillés sur les recommandations en matière de détection, d’évaluation et de traitement pour les jeunes personnes hypertendues (National Heart, Lung, and Blood Institute, 2005).

La principale cause de l’hypertension secondaire est la maladie rénale ; viennent ensuite certains troubles cardiovasculaires, endocriniens et neurologiques. En règle générale, plus l’enfant est jeune, plus l’hypertension est grave, et plus elle est susceptible d’être secondaire.

Diagnostic Puisque le nombre d’enfants et d’adolescents hypertendus ou potentiellement hypertendus augmente, la mesure de la P.A. doit entrer systématiquement dans l’examen annuel des enfants en bonne santé de plus de trois ans (Mattoo, 2018). Il faut également effectuer une lecture de la P.A. des enfants de moins de trois ans dont la famille est exposée à un risque élevé, ou qui présentent des facteurs de risque individuels comme une cardiopathie congénitale, une néphropathie, des tumeurs malignes, une greffe, certains problèmes neurologiques ou des maladies systémiques connues pour causer l’hypertension. Bien que les manifestations cliniques liées à l’hypertension dépendent beaucoup de sa cause sous-jacente, certaines observations peuvent fournir à l’inrmière des indices d’une P.A. élevée TABLEAU 16.19. Chez les nourrissons et les très jeunes enfants qui ne peuvent pas communiquer leurs symptômes, l’observation de certains comportements offre des indications, mais les modications de comportements peuvent ne survenir que lorsque les complications sont présentes.

16

Manifestations cliniques de l’hypertension artérielle

GROUPE D’ÂGE

MANIFESTATIONS CLINIQUES

Nourrisson, trottineur et enfant d’âge préscolaire

• Irritabilité

Enfant d’âge scolaire et adolescent

• Céphalées fréquentes

• Réveils nocturnes avec des cris

• Cognements ou frottements de la tête (manifestations de céphalées, car le jeune enfant ne peut s’exprimer clairement) • Troubles de la vision

• Étourdissements

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

791

C Les données normatives de diagnostic de l’hyper­ tension chez les enfants sont présentées dans l’annexe C, Valeurs nor­ males des signes vitaux.

Il n’existe pas de valeurs limites établies pour diagnostiquer l’hypertension en pédiatrie. Avant de poser le diagnostic, il faut mesurer la P.A. au moins trois fois à différents moments C . Un monitorage ambulatoire de la pression artérielle ou une mesure de la pression artérielle à domicile peut être nécessaire en cas d’hypertension causée par le syndrome du sarrau blanc. Ce syndrome désigne une haute pression artérielle bénigne provoquée par le stress dû au fait d’être en présence d’un membre du personnel médical (Lemay et al., 2015). Un examen attentif des antécédents médicaux et familiaux permettra de dépister les facteurs de risque associés à l’hypertension et aux maladies cardiovasculaires touchant les autres membres de la famille. Pour les enfants soupçonnés d’être hypertendus, les analyses de laboratoire initiales doivent inclure une analyse d’urine, des examens de la fonction rénale comme les taux sanguins de créatinine et d’azote uréique, un bilan lipidique, une formule sanguine complète et les taux d’électrolytes. Selon la gravité de l’hypertension, d’autres examens paracliniques peuvent être indiqués, notamment une échographie rénale pour mesurer la taille des reins, un examen du débit de sang au doppler pour déceler une cause d’origine rénale, un électrocardiogramme et un échocardiogramme pour évaluer la présence de lésions dans les organes cibles, comme l’hypertrophie ventriculaire gauche, et un examen de la rétine.

Approche thérapeutique Le traitement de l’hypertension secondaire dépend du diagnostic et du traitement de la cause

sous-jacente. Lorsqu’une correction chirurgicale est possible, la nature de l’affection, le type d’intervention chirurgicale et l’âge de l’enfant sont alors des considérations importantes. Les enfants et les adolescents dont la P.A. reste constamment élevée sans cause connue (hypertension essentielle), et ceux atteints d’une hypertension secondaire impossible à corriger chirurgicalement peuvent être traités par une combinaison d’interventions non pharmacologiques et pharmacologiques. Des modications au régime alimentaire et au mode de vie sont cruciales pour maîtriser l’hypertension, tant chez les enfants que chez les adultes. Les mesures non pharmacologiques comme la maîtrise du poids chez les enfants qui ont de l’embonpoint, l’augmentation de l’activité physique, la restriction de l’apport sodique et la prévention du stress et du tabagisme devraient être instaurées en premier, sauf dans les cas graves où il est essentiel d’instaurer un traitement pharmacologique. La pharmacothérapie doit être utilisée prudemment chez les enfants dont la P.A. très élevée est réfractaire aux thérapies non pharmacologiques. Le traitement doit être instauré avec un seul médicament, et l’ajout de médicaments supplémentaires ne sera considéré que si la P.A. ne peut être contrôlée. Les antihypertenseurs oraux administrés aux enfants incluent les bêtabloquants, les inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine, les inhibiteurs calciques, les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine et les diurétiques. Les objectifs sont de produire pendant toute la journée un état normotendu et d’éviter les effets indésirables des médicaments.

Soins inrmiers MESURE DE LA PRESSION ARTÉRIELLE 4 La technique pour mesurer la pression artérielle est traitée dans le chapitre 4, Examen clinique : anamnèse et examen physique.

La mesure de la P.A. doit toujours faire partie intégrante de l’examen de routine des enfants âgés de plus de trois ans et des enfants âgés de moins de trois ans considérés comme étant à risque élevé d’hypertension 4 . Le counseling et l’orientation des enfants affectés constituent un défi pour l’infirmière. L’enseignement doit viser la compréhension de l’hypertension et de ses conséquences pendant toute la vie pour favoriser l’adhésion aux thérapies non pharmacologiques et pharmacologiques par l’enfant et la famille. La mesure de la P.A. à domicile peut faciliter la surveillance chez les jeunes atteints d’hypertension chronique ; elle permet aussi de suivre l’efcacité du traitement. L’inrmière peut montrer à un proche comment mesurer la P.A. avec précision et noter les résultats obtenus, diminuant

792

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

ainsi les visites médicales. Cette personne doit comprendre quand il convient d’aviser un professionnel de la santé des résultats de P.A. élevée. L’inrmière en santé scolaire sera souvent une ressource précieuse pour le suivi de la P.A. L’inrmière joue un rôle important dans l’évaluation de chaque famille et la transmission de renseignements précis sur les modes d’intervention non pharmacologiques comme la diète, la perte pondérale, l’abandon du tabagisme et les programmes d’exercice. Lorsqu’un suivi diététique important est requis, l’enfant doit être orienté vers une nutritionniste spécialisée en pédiatrie. Les programmes d’exercice doivent être adaptés à chacun. Les enfants d’âge scolaire et les adolescents préfèrent généralement les sports aux séances d’entraînement personnalisées, qu’ils considèrent comme une corvée et non comme une activité amusante. Lorsqu’il est possible d’encourager des amis ou des membres de la famille à

contribuer à l’une des stratégies de prise en charge, l’adhésion au traitement par l’enfant n’en sera que meilleure. Les jeunes lles hypertendues doivent éviter les contraceptifs oraux, car ils font augmenter la pression artérielle. Il faut néanmoins leur suggérer d’autres options avant l’arrêt de cette méthode contraceptive 8 . Lorsqu’une pharmacothérapie est prescrite, l’inrmière doit informer la famille des raisons du traitement, de son mode d’action et des effets indésirables possibles. Les directives générales concernant les médicaments antihypertenseurs incluent :

16.7.2

Maladie de Kawasaki

La maladie de Kawasaki, ou syndrome adénocutanéomuqueux ou lymphocutanéomuqueux, est une vasculite systémique aiguë de cause inconnue. Près de 75 % des cas concernent des enfants de moins de 5 ans, la fréquence maximale se rapportant aux trottineurs. La maladie aiguë est spontanément résolutive. Toutefois, en l’absence de traitement, environ 25 % des enfants touchés nissent par être atteints d’un anévrisme des artères coronaires (McCrindle, Rowley, Newburger et al., 2017). Les nourrissons de moins de 1 an sont les plus gravement affectés par la maladie de Kawasaki et les plus sujets aux lésions cardiaques, bien qu’une incidence accrue ait également été signalée chez les enfants plus âgés en raison d’un diagnostic tardif. La cause de la maladie de Kawasaki est inconnue. Même si la maladie ne se transmet pas par contact d’une personne à une autre, plusieurs facteurs laissent entrevoir des causes infectieuses, possiblement chez un hôte avec prédisposition génétique. La maladie se manifeste souvent dans le contexte d’éclosions géographiques ou saisonnières ; la plupart des cas sont signalés vers la n de l’hiver et le début du printemps (Dietz, van Stijn, Burgner et al., 2017 ; McCrindle et al., 2017).

Physiopathologie Le principal foyer visé par la maladie de Kawasaki est le système cardiovasculaire. Durant le stade initial, une inammation importante des artérioles, des veinules et des capillaires survient. Des lésions segmentaires des artères musculaires de calibre moyen peuvent se produire, principalement dans les artères coronaires, ce qui entraîne la formation d’anévrismes chez certains enfants.

Manifestations cliniques Étant donné qu’il n’existe pas de test diagnostique précis pour la maladie de Kawasaki, le diagnostic

• Se lever doucement d’une position horizontale et éviter les changements brusques de position. • Prendre le médicament de la manière prescrite. • Maintenir une hydratation adéquate. • Aviser le médecin en cas d’effets indésirables désagréables, mais ne pas interrompre le traitement. • Éviter l’alcool et respecter la diète prescrite. L’inrmière insistera sur la nécessité du suivi, d’autant plus que le traitement antihypertenseur peut être parfois interrompu sans danger si la P.A. reste maîtrisée au l du temps.

est établi à partir des manifestations cliniques et des résultats des analyses de laboratoire ENCADRÉ 16.11. Ces critères font ofce de lignes directrices. Il est important de noter que de nombreux enfants atteints de la maladie de Kawasaki ne correspondent pas aux critères diagnostiques standard, et que les manifestations cliniques peuvent ne pas être toutes présentes chez le nourrisson. Il est donc nécessaire d’envisager la maladie de Kawasaki pour tout nourrisson ou tout enfant présentant une augmentation prolongée de la température qui ne répond pas aux antibiotiques et qui n’est attribuable à aucune autre cause.

8 Les méthodes de contra­ ception sont détaillées dans le chapitre 8, Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent.

Vasculite systémique aiguë : Groupe de maladies caractérisées par une inammation et une nécrose des parois vasculaires des artères et des veines.

La maladie de Kawasaki se manifeste en trois phases : aiguë, subaiguë et de convalescence. • La phase aiguë commence par l’apparition brusque d’une èvre élevée sur laquelle les antibiotiques et les antipyrétiques sont sans effet. L’enfant présente ensuite d’autres symptômes diagnostiques. Pendant cette période, il est, de façon générale, extrêmement irritable.

16

• La phase subaiguë commence lorsque la èvre tombe et elle dure jusqu’à ce que tous les signes cliniques de la maladie de Kawasaki aient disparu. Pendant cette phase, l’enfant est à très haut risque de subir un anévrisme de l’artère coronaire. Les échocardiogrammes permettront de suivre l’état du myocarde et de l’artère coronaire. L’irritabilité de l’enfant persiste durant cette phase. • Pendant la phase de convalescence, tous les signes cliniques de la maladie de Kawasaki se sont résolus, mais les résultats des analyses de laboratoire ne se sont pas normalisés. Cette phase s’achève lorsque toutes ces valeurs deviennent normales (de six à huit semaines après l’épisode de fièvre). À la fin de la convalescence, l’enfant a retrouvé son tempérament, son niveau d’énergie et son appétit habituels. Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

793

ENCADRÉ 16.11

Critères diagnostiques de la maladie de Kawasaki

Pour poser un diagnostic de maladie de Kawasaki, il faut constater que l’enfant est évreux pendant plus de cinq jours et qu’il présente quatre des cinq critères cliniques suivants (le diagnostic peut être établi le quatrième jour par un clini­ cien expérimenté si l’enfant répond à tous les critères)a : 1. Changements touchant les membres : durant la phase aiguë, œdème et érythème de la peau des mains et de la plante des pieds ; pendant la phase sous­aiguë, desquamation autour des ongles des mains et des pieds a La

1 Les manifestations cliniques de l’infarctus aigu du myocarde chez les enfants incluent la douleur abdominale, les vomis­ sements, l’agitation, les pleurs inconsolables, la pâleur, l’état de choc ainsi qu’une douleur ou une pression thoracique. 2 L’utilisation concomitante d’ibuprofène et d’acide acétylsalicylique est à éviter, car l’ibuprofène antagonise les effets antiplaquettaires de celui­ci.

Les échocardiogrammes permettent une évaluation précise de la dilatation de l’artère coronaire ; ils sont utilisés pour surveiller les dimensions de cette artère, la fonction myocardique et la fonction valvulaire. Un échocardiogramme initial, obtenu au moment du diagnostic, est utilisé pour la comparaison des études futures, qui sont répétées une semaine après le diagnostic, puis après quatre à six semaines. Des échocardiogrammes supplémentaires devraient être effectués aussi souvent que deux fois par semaine dans les situations où un enfant a une dilatation de l’artère coronaire ou une formation évidente d’anévrisme, ou lorsque la réponse au traitement est incomplète.

Complications Les complications à long terme liées à la maladie de Kawasaki incluent les anévrismes de l’artère coronaire et la perturbation du débit sanguin. Lorsqu’un anévrisme s’est formé, le risque accru d’infarctus du myocarde peut résulter d’une occlusion thrombotique d’un anévrisme coronaire. Avec le temps, alors que le vaisseau lésé cherche à guérir, l’anévrisme peut rétrécir et provoquer une ischémie du myocarde 1 .

Approche thérapeutique Le traitement actuel de la maladie de Kawasaki inclut l’administration d’une dose élevée de gammaglobulines par voie intraveineuse avec un traitement salicylé. Il a été démontré que les gammaglobulines réduisent efcacement l’incidence des anomalies coronariennes à environ 4 % lorsqu’elles sont administrées dans les 10 premiers jours suivant l’apparition de la maladie (McCrindle et al., 2017). Une seule perfusion substantielle de 2 g/kg en 10 à 12 heures est recommandée. Le traitement de gammaglobulines par voie intraveineuse est répété pour les enfants dont

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Partie 6

3. Changements touchant les muqueuses buccales : érythème des lèvres, rougeur oropharyngée ou langue framboisée (exposition des grosses papilles) 4. Éruption polymorphe 5. Adénopathie cervicale (ganglion lymphatique supérieur à 1,5 cm)

maladie de Kawasaki peut être diagnostiquée en se basant sur moins de critères cliniques lorsque des lésions de l’artère coronaire sont observées.

Examens paracliniques

ALERTES CLINIQUES

2. Rougeur (inammation) conjonctivale bilatérale sans exsudation

Troubles liés aux systèmes

la èvre persiste ou pour ceux ayant une dilatation de l’artère coronaire après le traitement. L’acide acétylsalicylique est administré initialement à une dose anti-inammatoire (de 80 à 100 mg/kg/jour divisés en 4 doses données toutes les 6 heures) pour maîtriser la èvre et les manifestations cliniques de l’inammation. Une fois la èvre disparue, l’acide acétylsalicylique est continué à dose antiplaquettaire (de 3 à 5 mg/ kg/jour). Les enfants qui ne présentent pas de signes échocardiographiques d’anomalies coronariennes recevront de l’acide acétylsalicylique à faible dose jusqu’à ce que la numération plaquettaire se normalise (en 6 à 8 semaines). Si l’enfant présente des anomalies coronariennes, le traitement salicylé est administré indéfiniment 2 . Un traitement anticoagulant additionnel (p. ex., le clopidogrel [Plavix MD ], l’énoxaparine [Lovenox MD ] ou la warfarine [Coumadin MD]) peut être indiqué pour les enfants ayant des anévrismes de vaisseaux de calibre moyen ou des anévrismes géants de l’artère coronaire.

Pronostic La plupart des enfants atteints de la maladie de Kawasaki se rétablissent complètement après le traitement. Le pronostic à long terme pour les enfants sans anévrisme est excellent. Le suivi de cette population pendant 40 ans n’a pas démontré une augmentation de maladies cardiaques précoces chez celle-ci. La morbidité et la mortalité touchent les enfants dont les anévrismes sont les plus volumineux (anévrismes géants supérieurs à 8 mm). Dans moins de 0,17 % des cas, le décès survient de 15 à 45 jours après l’apparition de la èvre, mais à un stade tardif, le décès résulte généralement d’une ischémie du myocarde attribuable à la thrombose coronarienne ou, avec le temps, d’un foisonnement de cicatrices et d’une sténose proximale ou distale à l’anévrisme coronarien (McCrindle et al., 2017).

Suivi à long terme La fréquence et le type de suivi sont basés sur la présence ou l’absence d’une atteinte coronarienne. Dans le but de maintenir les artères coronaires des enfants atteints de la maladie de Kawasaki aussi saines que possible, il est recommandé de suivre les directives nationales, qui recommandent le dépistage de la présence de facteurs de risque coronariens à mesure qu’ils vieillissent. Il faudrait également analyser leurs taux de cholestérol pendant les examens de routine, mesurer régulièrement leur pression artérielle et proposer un mode de vie sain pour le cœur, comprenant de l’exercice, un régime alimentaire équilibré et une abstinence tabagique.

Chez les enfants atteints d’anévrisme, le suivi doit être centré sur la prévention et la détection précoce de l’ischémie coronarienne. Les modalités non invasives de l’imagerie coronarienne, telles que l’échocardiographie, l’ECG et les tests de stress pour évaluer l’ischémie réversible, sont utilisées le plus fréquemment possible avec d’autres formes d’imagerie telles que l’angiographie par tomodensitométrie cardiaque, l’IRM et le cathétérisme cardiaque. En plus d’une surveillance régulière, les enfants atteints d’anévrisme coronarien peuvent avoir besoin d’une thérapie antiplaquettaire ou d’une anticoagulation à long terme, et d’une thérapie bêtabloquante ou autre, en fonction de la gravité ou de l’atteinte coronarienne.

Soins inrmiers MALADIE DE KAWASAKI

Surveiller l’évolution de la maladie Durant la phase initiale de la maladie de Kawasaki, l’inrmière doit surveiller attentivement l’état cardiaque de l’enfant. Elle note les ingesta, les excreta et le poids quotidien de l’enfant. Même si celui-ci peut être réticent à se nourrir, et donc être partiellement déshydraté, il faut soigneusement lui administrer des liquides, car la myocardite est courante. L’enfant est évalué fréquemment pour rechercher des manifestations cliniques d’insufsance cardiaque congestive, notamment la diminution de la diurèse, le bruit de galop (bruit additionnel du cœur), la tachycardie et la détresse respiratoire.

ont besoin d’un environnement calme et propice au repos. L’inrmière doit assister les parents qui s’efforcent de réconforter un enfant souvent inconsolable. Ils doivent parfois s’éloigner quelque temps, auquel cas l’inrmière offrira, par ses soins, du répit à la famille. Les parents doivent comprendre que l’irritabilité est le signe caractéristique de la maladie de Kawasaki et qu’ils ne doivent pas se sentir coupables ou embarrassés par le comportement de leur enfant.

Fournir les instructions relatives au congé

La plupart des soins inrmiers sont axés sur le soulagement des manifestations cliniques. L’application de lotions non parfumées, ainsi que le port de vêtements doux et amples sont efcaces pour réduire au minimum l’inconfort cutané. Pendant la phase aiguë, les soins buccaux, notamment l’application d’un onguent lubriant sur les lèvres, sont importants pour soulager l’inammation des muqueuses. Une diète liquide et molle peut être proposée à l’enfant.

Les parents doivent recevoir des renseignements précis sur l’évolution de la maladie de Kawasaki, notamment en ce qui a trait à l’importance du suivi et aux situations qu’ils doivent communiquer au médecin de leur enfant. L’irritabilité de celui-ci peut persister jusqu’à deux mois après l’apparition des symptômes. La desquamation des mains et des pieds est indolore et se produit surtout la deuxième et la troisième semaine. L’arthrite, qui touche surtout les grandes articulations supportant le poids, peut durer plusieurs semaines. En général, les enfants éprouvent une plus grande raideur le matin, durant les temps froids ou après les siestes. Les exercices de mobilité passive dans le bain permettent souvent d’augmenter la exibilité. L’administration de tout vaccin vivant (p. ex., le vaccin contre la rougeole, la rubéole et les oreillons, et celui contre la varicelle) doit être reportée jusqu’à 11 mois après l’administration des gammaglobulines, car l’organisme n’est pas en mesure de produire des quantités sufsantes d’anticorps (McCrindle et al., 2017). La décision d’administrer le vaccin contre la varicelle alors que l’enfant reçoit un traitement à l’acide acétylsalicylique dépend de chaque médecin.

L’irritabilité de l’enfant représente sans doute le problème le plus difcile. Les enfants concernés

Tous les parents d’enfants atteints de la maladie de Kawasaki doivent connaître le risque, faible

L’administration de gammaglobulines doit être conforme aux lignes directrices se rapportant à tout produit sanguin et s’accompagner d’une surveillance régulière des signes vitaux. L’inrmière doit être à l’affût de l’apparition de réactions allergiques. L’état cardiaque doit être étroitement suivi, compte tenu du volume considérable de solutions administrées aux enfants atteints de myocardite et de la diminution de la fonction ventriculaire gauche.

Soulager les manifestations cliniques

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

16

795

mais réel, d’infarctus du myocarde, de même que les manifestations cliniques d’ischémie cardiaque. En général, au moment du congé de l’hôpital, les conséquences cardiaques sont encore inconnues, car les vaisseaux n’atteignent leur diamètre maximal que de quatre à six semaines après l’apparition

de la maladie de Kawasaki. La température doit être surveillée après le congé de l’hôpital, jusqu’à ce que l’enfant soit afébrile pendant plusieurs jours. Les parents d’enfants touchés par des séquelles coronariennes graves doivent recevoir un cours de réanimation cardiorespiratoire.

16.7.3

Lorsque la perfusion sanguine est altérée, les réserves d’oxygène dans les cellules des tissus s’amenuisent, ce qui favorise un métabolisme anaérobique produisant l’acidose lactique. L’acidose impose un fardeau additionnel aux poumons, qui s’efforcent de la contrer en augmentant la fréquence respiratoire pour éliminer l’excès de dioxyde de carbone. Une vasoconstriction prolongée suscite la fatigue et l’atonie des artérioles périphériques, et donc la dilatation des vaisseaux. La constriction des veinules, qui sont moins sensibles aux substances vasodilatatrices, persiste un certain temps, ce qui entraîne une stase massive de sang dans le lit des capillaires et des veinules, et épuise davantage le volume sanguin.

État de choc

L’état de choc, ou défaillance circulatoire, est un syndrome clinique complexe caractérisé par une perfusion tissulaire insufsante pour répondre aux demandes métaboliques de l’organisme, ce qui entraîne une dysfonction cellulaire, puis une insufsance multiorganique. Chez les enfants, la défaillance circulatoire résulte de l’hypovolémie, d’une altération de la résistance vasculaire périphérique ou d’une défaillance de la pompe cardiaque. Bien que les causes de l’état de choc puissent être différentes, les conséquences physiologiques sont les mêmes : hypotension, hy po xie tissulaire et acidose métabolique. Le TABLEAU 16.20 énumère les divers types d’états de choc.

Physiopathologie Chez un enfant en bonne santé, le système circulatoire transporte l’oxygène et les substrats métaboliques vers les tissus de l’organisme, qui ont un besoin constant de ces matières essentielles. Le débit cardiaque et la distribution vers les différents tissus de l’organisme peuvent changer rapidement par l’effet intrinsèque (myocardique et intravasculaire) ou extrinsèque (neuronal) des mécanismes de contrôle. En cas d’état de choc, ces mécanismes sont altérés ou entravés.

ALERTE CLINIQUE

Les manifestations cliniques précoces de l’état de choc incluent l’appréhension, l’irritabilité, une P.A. normale, une diminution de la pression différentielle (différence entre les P.A. systolique et diastolique), la soif, la pâleur, la diminution du débit urinaire, une tachycardie légère inexpliquée et une diminution de la perfusion des mains et des pieds.

796

Partie 6

La diminution du débit sanguin, comme dans l’état de choc hypovolémique, réduit le retour du sang veineux vers le cœur, diminue la pression veineuse centrale et le débit cardiaque, et entraîne l’hypotension. Les centres vasomoteurs du bulbe rachidien reçoivent des signaux qui déclenchent une augmentation compensatoire de la force et de la fréquence de la contraction cardiaque, et une constriction des artérioles et des veines, ce qui augmente la résistance vasculaire périphérique. Parallèlement, la baisse du volume sanguin entraîne la libération de quantités importantes de catécholamines, d’hormone antidiurétique, d’adrénocorticostéroïdes et d’aldostérone pour conserver les liquides de l’organisme. Ainsi, le débit sanguin vers la peau, les reins, les muscles et les viscères décroît, puisqu’il est dérivé vers le cerveau et le cœur. Par conséquent, la peau devient froide et moite, le remplissage capillaire est prolongé, et le taux de ltration glomérulaire ainsi que le débit urinaire diminuent signicativement.

Troubles liés aux systèmes

Diagnostic et manifestations cliniques Il est possible d’établir la cause de l’état de choc à partir de l’anamnèse et de l’examen physique. La gravité de l’état de choc est déterminée par les mesures des signes vitaux, notamment celles de la pression veineuse centrale et du temps de remplissage capillaire. L’état de choc peut être considéré comme une forme de compensation de la défaillance circulatoire. Compte tenu de sa nature évolutive, le choc peut être divisé en trois stades, ou phases de gravité (selon l’effet sur la P.A.) : 1. Le choc compensé : La fonction des organes vitaux est maintenue par des mécanismes compensatoires intrinsèques ; en général, le débit sanguin est normal ou élevé, mais inégal ou inadéquatement distribué dans la microcirculation . 2. Le choc décompensé ou hypotensif : La fonction du système cardiovasculaire diminue graduellement jusqu’à ce que le débit sanguin de la microcirculation devienne inadéquat malgré les mécanismes de compensation. Les résultats de la défaillance circulatoire progressent au-delà des mécanismes de compensation, qui sont l’hypoxie tissulaire, l’acidose métabolique et le dysfonctionnement de tous les organes. 3. Le choc irréversible, ou terminal : Les lésions des organes vitaux comme le cœur ou le cerveau sont d’une telle ampleur que tout l’organisme est perturbé, quelle que soit l’intervention thérapeutique. Le décès survient même si les paramètres cardiovasculaires se normalisent par l’effet d’un traitement.

TABLEAU 16.20

Types d’états de choc

TYPE DE CHOC

PHYSIOPATHOLOGIE

ÉTIOLOGIE

Choc hypovolémique

• ↓ volume vasculaire

• Perte sanguine (choc hémorragique) : traumatisme, saignement gastro-intestinal, hémorragie intracrânienne

• ↓ retour veineux au cœur • ↓ pression artérielle • ↑ temps de remplissage capillaire • ↓ pression veineuse centrale

Choc distributif

• ↓ résistance vasculaire périphérique • Perfusion tissulaire signicativement inadéquate

Choc cardiogénique

• Perte plasmatique : augmentation de la perméabilité des capillaires liée à la septicémie et à l’acidose, hypoprotéinémie, brûlures, péritonite • Perte de liquide extracellulaire : vomissements, diarrhée, diurèse glycosurique, insolation • Anaphylaxie (choc anaphylactique) : allergie ou hypersensibilité extrême à une substance étrangère

• ↑ capacité et stase veineuse

• Septicémie (choc septique, choc bactériémique, choc endotoxique) : septicémie irrépressible et toxines bactériennes circulantes

• ↓ importante du débit sanguin revenant vers le cœur

• Perte du contrôle neuronal (choc neurogénique) : interruption de la transmission neuronale (traumatisme de la moelle épinière)

• ↓ débit cardiaque

• Dépression de la fonction du myocarde et dilatation périphérique : exposition à un anesthésique ou ingestion de barbituriques, de tranquillisants, d’opioïdes, d’antihypertenseurs ou de bloquants ganglionnaires

• ↓ débit cardiaque

• Phase postopératoire d’une intervention chirurgicale pour réparation d’une cardiopathie congénitale

• ↑ résistance vasculaire périphérique

• Insufsance primaire de la pompe cardiaque : myocardite, traumatisme du myocarde, troubles biochimiques, insufsance cardiaque

• Congestion veineuse pulmonaire

• Arythmies : tachycardie supraventriculaire, bloc auriculoventriculaire et arythmies ventriculaires ; consécutives à une myocardite ou à des anomalies biochimiques Choc obstructif

• ↓ débit cardiaque • ↓ perfusion tissulaire • ↑ résistance vasculaire périphérique • ↑ postcharge

• Tamponnade cardiaque, effusion péricardique : ↓ remplissage ventriculaire, ↓ volume d’éjection et ↓ débit cardiaque causés par l’accumulation de liquide dans l’espace péricardique ; augmentation de pression et compression du cœur • Pneumothorax sous tension : accumulation d’air sous pression dans l’espace pleural provoquant une compression du poumon ; déplacement du médiastin vers le côté opposé, causant une diminution du retour veineux au cœur ; insufsance respiratoire • Fermeture du canal artériel chez les enfants avec des cardiopathies congénitales obstructives du cœur gauche • Embolie pulmonaire : obstruction partielle ou totale de l’artère pulmonaire ou de ses branches (p. ex., par un caillot) qui provoque une non-concordance entre la ventilation et la perfusion, une hypoxémie, une augmentation de la résistance vasculaire pulmonaire menant à une insufsance cardiaque droite, une diminution du remplissage du ventricule gauche et une diminution du débit cardiaque

À tous les stades, les principaux signes distinctifs de l’état de choc sont observés relativement : • au degré de tachycardie et de perfusion sanguine aux extrémités ; • au niveau de l’état de conscience ; • à la pression artérielle TABLEAU 16.21. D’autres signes ou altérations peuvent s’ajouter à ces caractéristiques plus universelles, suivant le type et la cause de l’état de choc. Dans un premier temps, les mécanismes de compensation de l’enfant sont efcaces ; les signes initiaux sont donc subtils. À mesure que l’état de choc progresse, les signes deviennent plus manifestes et trahissent une décompensation précoce. Pendant la phase initiale d’un choc septique, il y a des frissons, de la èvre, une vasodilatation

ainsi qu’une augmentation du débit cardiaque qui entraîne un réchauffement et une rougeur de la peau (choc hyperdynamique, ou choc chaud). La coagulation intravasculaire disséminée, qui survient ultérieurement, assombrit le pronostic ; il s’agit d’une complication hématologique majeure inhérente à l’état de choc septique 18 . Le choc anaphylactique est souvent accompagné d’une urticaire et d’un angiœdème (œdème de Quincke) qui menacent le pronostic vital lorsque les voies respiratoires sont touchées.

16

18 La coagulation intravas­ culaire disséminée est abordée en détail dans le chapitre 18, Troubles liés au système hématologique et immunitaire.

Examens paracliniques Les analyses de laboratoire destinées à faciliter l’évaluation de l’état de choc incluent les mesures des gaz sanguins et du pH, et parfois des tests de Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

797

Pétéchies : Petites hémorragies supercielles de la peau qui apparaissent sous forme de minuscules taches rouges ou violacées (inférieures à 4 mm).

la fonction hépatique. Les tests de coagulation sont effectués en cas de signes d’hémorragie comme le suintement d’un foyer de ponction veineuse, le saignement d’un orice ou les pétéchies. Les cultures de sang et d’autres foyers (p. ex., urine, bronches, sites d’infection) sont indiquées s’il y a des raisons de soupçonner une septicémie. Les tests de la fonction rénale doivent être évalués si une insufsance rénale est manifeste.

Approche thérapeutique Le traitement de l’état de choc consiste en trois interventions majeures : 1. l’assistance respiratoire ; 2. l’administration de liquides ; 3. l’amélioration de l’activité de la pompe cardiaque (soutien cardiovasculaire). CE QU’IL FAUT RETENIR

Le traitement de l’état de choc consiste prioritairement à dégager les voies aériennes supérieures, à administrer de l’oxygène et des liquides, et à soutenir la fonction cardiovasculaire.

La priorité est de dégager les voies aériennes supérieures et d’administrer de l’oxygène. Une fois les voies aériennes redevenues perméables, la stabilisation circulatoire devient la préoccupation majeure. L’établissement d’un accès I.V. adéquat, idéalement avec des cathéters centraux à plusieurs lumières, est essentiel pour administrer des liquides et des médicaments. Une intervention rapide est cruciale pour un meilleur résultat clinique.

Assistance respiratoire et administration de liquides Le poumon est l’organe le plus sensible à l’état de choc. En effet, la diminution de la distribution du débit sanguin vers les muscles respiratoires et l’augmentation du travail respiratoire peuvent rapidement entraîner une défaillance respiratoire. Les enfants gravement malades ne sont pas en

TABLEAU 16.21

798

Partie 6

mesure de maintenir un dégagement adéquat des voies respiratoires. An de reposer les poumons et d’améliorer la ventilation, une intubation endotrachéale permet une ventilation à pression positive. L’administration d’oxygène d’appoint doit toujours être effectuée dès que possible. Les gaz sanguins et le pH doivent faire l’objet d’un suivi fréquent et régulier. L’augmentation du volume de liquide pulmonaire extravasculaire due à l’œdème contribue à l’apparition de complications respiratoires. Le traitement vise à maintenir des valeurs normales de gaz sanguins artériels, un équilibre acidobasique et une circulation adéquate. Dès que l’état hémodynamique sera stabilisé, l’administration de diurétiques permettra d’éliminer les liquides et d’en prévenir l’accumulation.

Soutien cardiovasculaire Dans la plupart des cas, le rétablissement rapide du volume intravasculaire suft à réanimer l’enfant en état de choc. Les liquides choisis sont une solution cristalloïde isotonique (solution saline 0,9 % ou de lactate Ringer) au départ, puis des colloïdes comme l’albumine. L’augmentation de la P.A. et la réduction de la fréquence cardiaque indiquent que la réanimation a réussi ; l’augmentation du débit cardiaque permet ensuite d’améliorer la circulation capillaire et la couleur de la peau. Les mesures de la pression veineuse centrale et de la pression de l’oreillette droite servent à orienter le traitement liquidien ; les mesures du débit urinaire sont des indicateurs importants d’une circulation adéquate. La correction de l’acidose, de l’hypoxémie, de l’hypoglycémie, de l’hypothermie et de tout trouble métabolique est impérative.

Manifestations cliniques de l’état de choc selon le stade

CHOC COMPENSÉ

CHOC DÉCOMPENSÉ

CHOC IRRÉVERSIBLE, OU TERMINAL

• Appréhension

• Confusion et somnolence

• Pouls liforme, faible ou absent

• Irritabilité

• Tachycardie

• Hypotension

• Tachycardie inexpliquée

• Tachypnée

• Pression artérielle normale

• Acidose métabolique modérée

• Respiration de Cheyne-Stokes, pause respiratoire ou apnée

• ↓ pression différentielle

• Oligurie

• Anurie

• Soif

• Extrémités froides, pâles et moites

• Stupeur ou coma

• Pâleur

• ↓ turgescence cutanée

• ↓ débit urinaire

• ↑ temps de remplissage capillaire

• ↓ perfusion sanguine aux extrémités

• Pouls périphériques faibles ou absents

Troubles liés aux systèmes

Un soutien pharmacologique temporaire peut s’avérer nécessaire pour augmenter la contractilité myocardique, inverser une acidose métabolique ou respiratoire, et maintenir la pression artérielle. Les principaux agents servant à améliorer le débit cardiaque et la circulation sont les catécholamines comme la dopamine ou l’épinéphrine (AdrenalinMD). Les vasodilatateurs parfois utilisés incluent le nitroprussiate de sodium (NiprideMD) ou la milrinone. La prise en charge d’un état de choc vise l’amélioration du débit cardiaque an de répondre aux besoins en oxygène et aux demandes métaboliques de l’organisme, permettant ainsi de soutenir le fonctionnement des organes et de prévenir une progression vers l’arrêt cardiaque (AHA, 2015).

Complications Les complications liées à l’état de choc impliquent d’autres dangers. L’hypoperfusion

du système nerveux central peut causer un œdème cérébral, un infarctus cortical ou une hémorragie intraventriculaire. L’hypoperfusion rénale provoque une ischémie des reins avec risque de nécrose tubulaire ou glomérulaire, et une thrombose des veines rénales. La diminution du débit sanguin vers les poumons peut nuire à la sécrétion du surfactant pulmonaire et entraîner un syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) caractérisé par une congestion pulmonaire soudaine et de l’atélectasie avec formation d’une membrane hyaline 15 . Le risque d’hémorragie et de perforation du tractus gastro-intestinal est toujours présent après une ischémie splanchnique et une né crose de la muqueuse intestinale. Les complications méta boliques liées au choc peuvent inclure l’hypoglycémie, l’hypocalcémie et d’autres déséquilibres électrolytiques.

15 Le syndrome de détresse respiratoire aiguë est expli­ qué dans le chapitre 15, Troubles liés au système respiratoire.

Splanchnique : Qui appartient ou qui se rapporte aux viscères.

Soins inrmiers ÉTAT DE CHOC

Prodiguer les soins d’urgence L’enfant en état de choc doit être mis en observation et recevoir des soins intensifs. La démarche de soins initiale consiste à assurer une oxygénation tissulaire adéquate pour améliorer la perfusion des organes. L’infirmière doit pouvoir administrer de l’oxygène par la voie qui convient, et prêter assistance au médecin pendant les interventions d’intubation et de ventilation. Parmi les autres interventions et opérations réclamant une attention immédiate, il convient de mentionner la mise en place d’un accès veineux de gros calibre ; la pesée de l’enfant ou l’estimation du poids si la pesée n’est pas possible à cause de l’état de choc ; la prise des signes vitaux initiaux, des gaz sanguins et d’autres paramètres ; l’installation d’une sonde vésicale à ballonnet ; et l’administration des médicaments suivant les indications. La meilleure position pour l’enfant consiste à l’allonger, les jambes surélevées. Les responsabilités de l’inrmière incluent la surveillance des ingesta et des excreta, de la perfusion I.V. et des signes vitaux (y compris la pression veineuse centrale), ainsi que l’évaluation régulière des systèmes en général. Les médicaments administrés par voie I.V. sont ajustés en fonction des réactions de l’enfant ; les signes

vitaux sont mesurés toutes les 15 minutes pendant les périodes critiques, puis toutes les heures, et ensuite au besoin. L’inrmière mesure le débit urinaire chaque heure ; les taux de gaz sanguins, d’hématocrite, de pH et d’électrolytes servent souvent à évaluer l’état de l’enfant et l’efcacité du traitement. L’inrmière installe un moniteur cardiaque, qu’elle surveille continuellement. Dans les stades initiaux d’un choc aigu, il faudra souvent plus d’une inrmière pour prendre en charge toutes les interventions à faire en même temps TABLEAU 16.22.

16

Soutenir la famille Pendant toutes ces interventions intenses, il ne faut pas négliger le soutien à la famille. Une personne désignée doit se charger de communiquer régulièrement avec elle pour la tenir informée du déroulement des événements et de tout progrès éventuel. Idéalement, quelqu’un doit rester auprès des parents an de servir de liaison entre eux et l’équipe des soins intensifs. Cependant, ce n’est pas toujours possible dans ces situations critiques. Dès que possible, la famille doit être en mesure de voir l’enfant. Au besoin, on fera appel à un membre de l’équipe multidisciplinaire (p. ex., un travailleur social ou un agent pastoral) pour offrir du réconfort et du soutien à la famille.

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

799

Techniques de soins TABLEAU 16.22

Intervenir en situation d’état de choc

ASSISTANCE RESPIRATOIRE

ADMINISTRATION DE LIQUIDES

SOUTIEN CARDIOVASCULAIRE

SOUTIEN GÉNÉRAL

MESURES ADDITIONNELLES

• Dégager les voies aériennes ; préparer l’enfant pour l’intubation.

• Assurer un accès vasculaire (intraveineux ; intraosseux en cas d’urgence).

• Administrer des vaso­ presseurs, surtout l’épi­ néphrine, par voie I.V. (posologie : 0,01 mg/kg ou 0,1 mL/kg de solu­ tion 1:10 000).

• Effectuer un monitorage non invasif continuel (ECG, P.A., saturométrie).

• Choc septique – Administrer des antibiotiques à large spectre par voie I.V.

• Administrer de l’oxygène 100 % par masque.

• Rétablir le volume de liquide selon l’ordonnance (pour la réanimation, le volume initial de cristalloïde iso­ tonique [solution saline 0,9 % ou de lactate Ringer] est de 20 mL/kg adminis­ trés en 5 à 20 minutes) ; répéter au besoin jusqu’à un total de 60 mL/kg.

• Répéter, au besoin, toutes les 3 à 5 minutes pour les enfants en arrêt cardiaque.

• Choc cardiogénique – Adminis­ trer de plus petits volumes (5 à 10 mL/kg) en 10 à 20 minutes.

• Maintenir l’enfant au chaud et dans le calme. • Corriger les déséquilibres métaboliques (p. ex., l’hypoglycémie, l’hypo­ calcémie, l’hyperkalié­ mie, l’acidose [lactique] métabolique).

• Anaphylaxie – Retirer l’allergène, lorsque c’est pos­ sible ; administrer de l’épinéphrine et des cortico­ stéroïdes par voie I.M., selon l’ordonnance.

Source : American Heart Association (2015). Pediatric Advanced Life support (PALS) Provider Manual.

16.7.4

Anaphylaxie

L’anaphylaxie est un syndrome clinique aigu résultant de l’effet d’un allergène chez un enfant déjà hypersensible à cet agent. Lorsque l’allergène entre dans la circulation, les anticorps IgE déclenchent une réaction de défense et la libération de substances inammatoires, comme l’histamine, qui provoquent une réaction anaphylactique localisée (par ex., de la bronchoconstriction, de l’urticaire) ou généralisée. La réaction anaphylactitique généralisée, ou choc anaphylactique, engendre une vasodilatation et une augmentation de la perméabilité capillaire, ce qui provoque de l’hypotension, de l’œdème, la perte de connaissance et un collapsus cardiovasculaire. Les réactions graves surviennent immédiatement ; elles menacent souvent le pronostic vital et affectent généralement plusieurs systèmes, principalement les systèmes cardiovasculaire, respiratoire, gastro-intestinal et tégumentaire. Le mode d’exposition à l’allergène peut être par ingestion, par inhalation, par contact cutané ou par injection. Les allergènes souvent associés à l’anaphylaxie chez les enfants incluent les médicaments (p. ex., des antibiotiques, des agents chimiothérapeutiques, une solution de contraste radiologique), le latex, les aliments (surtout les arachides et le poisson), le venin d’abeille ou de serpent, et les agents biologiques (antisérum, enzymes, hormones, produits sanguins) (Linzer, 2016).

Manifestations cliniques L’apparition des manifestations cliniques de l’anaphylaxie se produit généralement dans les

800

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

secondes ou les minutes qui suivent l’exposition à l’allergène, et la rapidité de la réaction est directement liée à son intensité : plus la réaction est soudaine, plus elle est grave. Elle peut aussi être précédée de symptômes de malaise, d’agitation, d’irritabilité, d’anxiété intense, de céphalée, d’étourdissements, de paresthésie et de désorientation. L’enfant peut perdre connaissance. Les signes cutanés d’hyperémie et d’urticaire sont des indicateurs précoces courants, et ils sont suivis de l’angiœdème, plus apparent aux paupières, aux lèvres, à la langue, aux mains, aux pieds et aux parties génitales. Une constriction bronchiolaire peut survenir ensuite, causant un rétrécissement des voies respiratoires avec stridor et sibilances ; un œdème pulmonaire et une hémorragie sont également possibles. L’œdème laryngé avec obstruction grave des voies aériennes supérieures peut menacer la vie de l’enfant : il demande donc une intervention rapide. L’état de choc résulte d’une vasodilatation induite par des médiateurs de l’inammation. Cette vasodilatation augmente la perméabilité capillaire, entraînant également une fuite de liquide intravasculaire dans l’espace interstitiel. Une hypotension soudaine et une altération du débit cardiaque en découlent et se traduisent par une perfusion insufsante.

Approche thérapeutique L’issue positive des réactions anaphylactiques dépend de la rapidité de leur détection et de la mise en place d’un traitement. Les objectifs de l’approche thérapeutique sont d’assurer la

respiration, de rétablir une circulation adéquate et de prévenir la prolongation de l’exposition à l’allergène en déterminant, dans la mesure du possible, la cause de la réaction an de l’éviter. Une réaction légère sans signe de détresse respiratoire ou d’altération cardiovasculaire peut être traitée en administrant par voie intramusculaire des antihistaminiques comme de la diphenhydramine (BenadrylMD) et de l’épinéphrine. Une détresse modérée ou grave constitue une urgence susceptible de menacer la vie de l’enfant. Le dégagement des voies aériennes est une priorité, comme pour tous les types d’états de choc. L’épinéphrine est administrée par voie intramusculaire (ou sous forme auto-injectable intramusculaire) comme traitement antihistaminique ainsi que pour soutenir le système cardiovasculaire et augmenter la P.A. Une deuxième dose ou une infusion d’épinéphrine peut être nécessaire après 10 à 15 minutes d’anaphylaxie

grave ; souvent, une infusion à faible dose (< 0,05 mcg/kg/min) est efcace. L’administration des liquides cristalloïde isotonique (solution saline 0,9 % ou de lactate Ringer) visera le rétablissement de la volémie. L’utilisation de vasopresseurs peut être requis pour améliorer le débit cardiaque (AHA, 2015). Il peut être nécessaire d’administrer le salbutamol par nébulisation pour soulager le bronchospasme. La prévention de la réaction est préférable. Pour ce faire, il faut dépister les enfants à risque an d’éviter de les exposer à l’allergène auquel ils sont sensibles. Il faut donc connaître : 1) leurs antécédents de réactions allergiques à un allergène précis ; 2) les antécédents d’atopie ; 3) les antécédents de réactions graves parmi les membres de la famille immédiate ; 4) leur réaction aux tests cutanés, même si ces tests ne peuvent être faits pour tous les allergènes. Dans certains cas, la désensibilisation est recommandée.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Une détresse modérée ou grave constitue une urgence susceptible de menacer la vie de l’enfant.

Atopie : Tendance héréditaire à présenter des réactions d’hypersensibilité immédiate (p. ex., de l’asthme allergique ou du rhume des foins) ou d’autres réactions allergiques à des allergènes.

Soins inrmiers ANAPHYLAXIE

Lorsqu’elle soupçonne une réaction anaphylactique, l’inrmière doit intervenir immédiatement et préparer l’enfant en vue du traitement médical. À moins d’être contre-indiquée par l’hypotension, la ventilation est assurée en surélevant la tête de l’enfant pour faciliter la respiration et administrer l’oxygène. Lorsque l’enfant ne respire pas, la réanimation cardiorespiratoire doit être commencée, et les services médicaux d’urgence doivent être appelés. Lorsque la cause de la réaction est connue, des mesures sont prises pour restreindre la propagation de la substance allergène. Une perfusion I.V. est installée immédiatement. Les médicaments d’urgence sont administrés par voie intraveineuse lorsque cela est possible ; de l’épinéphrine peut également être injectée par voie intramusculaire TABLEAU 16.22 . Les signes vitaux et le débit urinaire sont surveillés fréquemment. Les médicaments prescrits sont administrés en évaluant régulièrement leur efcacité et en surveillant les effets indésirables possibles ou la surcharge liquidienne. Il est important d’observer l’enfant an de déceler et de traiter les manifestations

16.7.5

Choc septique

Le choc septique fait partie d’un continuum physiopathologique allant de l’infection localisée à la bactériémie, au syndrome de réponse inammatoire

cliniques de la phase tardive, lesquelles peuvent survenir dans 25 à 30 % des cas plusieurs heures après la phase aiguë (AHA, 2015). Pour prévenir une réaction anaphylactique, les parents doivent systématiquement être interrogés pour savoir si l’enfant a déjà eu des réactions allergiques à des aliments, au latex, à des médicaments et à certains agents environnementaux. Le cas échéant, ces antécédents sont inscrits bien en évidence dans le dossier de l’enfant. Il est important de noter spéciquement l’allergène précis ainsi que le type et la gravité de la réaction. Les parents sont une excellente source de renseignements, surtout lorsque l’enfant a eu une réaction importante à une substance. Les médicaments concernés et ceux qui s’y apparentent (p. ex., la pénicilline, la nafcilline) , ainsi que les autres articles qui ont déjà provoqué une réaction (p. ex., le latex), ne doivent jamais être utilisés. Lorsque l’enfant est allergique au venin d’insecte, la famille doit se procurer une trousse d’urgence qui doit accompagner l’enfant en tout temps. L’infirmière enseigne aux parents et à l’enfant, s’il est en âge de comprendre, à se servir du matériel. L’enfant doit porter en tout temps un bracelet ou un pendentif d’alerte médicale.

PHARMACOVIGILANCE

L’allergie à la pénicilline est associée à une éruption cutanée immédiate (dans l’heure qui suit l’administration) ou accélérée (de 1 à 72 heures après l’admi­ nistration) se présentant sous forme d’urticaire ou de mani­ festations cliniques plus graves comme l’œdème laryngé et le choc anaphylactique.

systémique, à la septicémie, au choc septique avec défaillance multiorganique et au décès. Un diagnostic précoce et une intervention rapide pour endiguer cette cascade évolutive améliorent la survie.

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

801

16

Normalement, une infection provoque une réaction inammatoire locale, qui entraîne une vasodilatation, une augmentation de la perméabilité capillaire et, éventuellement, l’élimination de l’agent infectieux. Lorsqu’il y a activation et libération des médiateurs de l’inammation dans la circulation systémique de manière généralisée, le processus est appelé syndrome de réponse inammatoire systémique (SRIS). Le SRIS peut résulter de causes infectieuses et non infectieuses (p. ex., un traumatisme, des brûlures). On appelle septicémie le SRIS causé par une infection. La septicémie implique un dysfonctionnement organique qui survient lorsque l’organisme réagit de manière exagérée à une infection (Singer,

ENCADRÉ 16.12

Dénitions : bactériémie, SRIS, infection, septicémie et septicémie grave

INFECTION

bactériémie est responsable d’infections ou d’une septicémie, ou les deux.

• Envahissement de l’organisme par un agent pathogène :

• Diagnostic reposant sur une hémoculture positive.

– infection soupçonnée : syndrome clinique supposant une probabilité élevée d’infection ; – infection conrmée : diagnostic établi par des résultats positifs de cultures. • Les signes d’infection incluent des résultats positifs à l’examen physique, aux examens d’imagerie médicale ou à des analyses de laboratoire (p. ex., des globules blancs dans un liquide corporel normalement stérile), un viscère perforé, une pneumonie conrmée par radiographie, une éruption pétéchiale ou purpurique, ou un purpura fulminans. BACTÉRIÉMIE

• Présence de bactéries viables dans la circulation sanguine. • Peut être asymptomatique ou symptomatique ; la plupart du temps, un petit nombre de bactéries est présent, et elles sont éliminées par l’organisme sans provoquer de symptômes. Occasionnellement, la

TABLEAU 16.23

Deutschman, Seymour et al., 2016). Cette réponse systémique de l’organisme à l’infection entraîne des lésions tissulaires et organiques pouvant devenir mortelles (Organisation mondiale de la Santé, 2017). La septicémie, qui touche autant les nouveaunés, les enfants que les adultes, peut évoluer vers une septicémie grave et un choc septique. L’état de choc septique se dénit comme une septicémie accompa gnée d’une dysfonction de certains organes, d’une hypotension et d’un apport insufsant d’oxygène pour répondre au besoin de l’organisme. L’ENCADRÉ 16.12 présente les différences entre la bactériémie, le SRIS, l’infection, la septicémie et la septicémie grave, et le TABLEAU 16.23, les critères diagnostiques du SRIS.

SYNDROME DE RÉPONSE INFLAMMATOIRE SYSTÉMIQUE (SRIS)

• Activation et libération des médiateurs de l’inammation dans la circulation systémique de manière généralisée. • Peut résulter de causes infectieuses et non infectieuses (p. ex., un traumatisme, des brûlures). • Critères diagnostiques énumérés dans le TABLEAU 16.23. SEPTICÉMIE

• SRIS concomitant ou consécutif à une infection soupçonnée ou diagnostiquée. SEPTICÉMIE GRAVE

• Septicémie accompagnée d’une défaillance cardiovasculaire ou d’un syndrome de détresse respiratoire aiguë ; ou dysfonction d’au moins deux autres organes.

Critères diagnostiques du syndrome de réponse inammatoire systémique

Le SRIS est caractérisé par la présence d’au moins deux des signes suivants, dont l’un doit être une anomalie de la température ou du nombre de leucocytes. TEMPÉRATURE

> 38,5 °C ou < 36 °C

802

Partie 6

FRÉQUENCE CARDIAQUE

LEUCOCYTES

> 12 000/mm3 ou < 4 000/mm3 ou > 10 % de neutrophiles immatures (ne résultant pas d’une leucopénie due à la chimiothérapie)

Troubles liés aux systèmes

Tachycardie

Bradycardie (enfants de moins de 1 an)

> 2 écarts types pour l’âge ou augmentation inexpliquée et persistante sur une période de 30 minutes à 4 heures (sans stimulus externes comme la prise de médicaments à long terme ou la douleur)

< au 10e centile selon l’âge ou diminution inexpliquée et persistante sur une période de 30 minutes (sans stimulus externe comme la stimulation vagale, la prise de bêtabloquants ou une cardiopathie congénitale)

FRÉQUENCE RESPIRATOIRE

> 2 écarts types pour l’âge ou nécessité de ventilation mécanique pour un processus pulmonaire aigu, non lié à une maladie neuromusculaire sousjacente ou à une anesthésie générale

Manifestations cliniques Le TABLEAU 16.24 présente les signes vitaux et les valeurs des résultats des analyses de laboratoire qui dénotent un choc septique en pédiatrie, en fonction de l’âge.

Malgré la diminution du taux de mortalité, l’incidence de la septicémie chez les adultes et les enfants est de 20 à 30 % dans les pays occidentaux et continue à augmenter (Institut canadien pour la sécurité des patients, 2016). L’augmentation pourrait être attribuable à la hausse du nombre d’enfants immunodéprimés, au recours plus fréquent aux dispositifs invasifs chez les enfants gravement malades, à la détection accrue de ce diagnostic et au nombre croissant de microorganismes résistants.

La plupart des effets physiologiques de l’état de choc septique résultent d’une réponse immunitaire exagérée qui déclenche plus de 30 médiateurs différents. L’état de choc septique comprend 3 stades qui représentent un continuum de gravité. Le TABLEAU 16.25 présente les manifestations cliniques associées à chaque stade. L’enfant a de meilleures chances de survie au stade initial, alors que le troisième stade comporte un taux élevé de mortalité.

TABLEAU 16.24

Signes vitaux et résultats d’analyses de laboratoire selon l’âge, en situation de choc septiquea

GROUPE D’ÂGE

FRÉQUENCE CARDIAQUE (BATT./MIN)

FRÉQUENCE RESPIRATOIRE (R/min)

NOMBRE DE LEUCOCYTES (LEUCOCYTES 103/mm3)

PRESSION ARTÉRIELLE SYSTOLIQUE (mm Hg)

Tachycardie

Bradycardie

Naissance-1 semaine

> 180

< 100

> 50

> 34

< 59

1 semaine-1 mois

> 180

< 100

> 40

> 19,5 ou < 5

< 79

1 mois-1 an

> 180

< 90

> 34

> 17,5 ou < 5

< 75

2-5 ans

> 140

< 60

> 22

> 15,5 ou < 6

< 74

6-12 ans

> 130

< 50

> 18

> 13,5 ou < 4,5

< 83

13-18 ans

> 110

< 50

> 14

> 11 ou < 4,5

< 90

a Les

valeurs inférieures de la fréquence cardiaque, du nombre de leucocytes et de la pression artérielle systolique correspondent au 5e centile, alors que les valeurs supérieures de la fréquence cardiaque, de la fréquence respiratoire ou du nombre de leucocytes correspondent au 95e centile.

Sources : Adapté de Pomerantz et Weiss (2016) ; Zimmerman (2016).

16 TABLEAU 16.25

Manifestations cliniques selon le stade du choc septique

STADE INITIAL : HYPERDYNAMIQUE (choc chaud, ou hyperdynamique compensé)

STADE 2 : NORMODYNAMIQUE (choc froid, ou hypodynamique décompensé)

STADE 3 : HYPODYNAMIQUE (choc froid)

• Frissons

• Durée de quelques heures

• Signes de décompensation circulatoire

• Fièvre

• Peau froide

• Manifestations de collapsus circulatoire

• Vasodilatation avec augmentation du débit cardiaque

• Pouls et P.A. normaux

• Anomalies du tonus vasculaire causant une hyperémie et une chaleur cutanées

• Baisse du débit urinaire

• Détérioration de la fonction cardiovasculaire même avec un traitement intensif

• Déclin de l’état mental

• Hypothermie

• P.A. normale

• Extrémités froides

• Débit urinaire normal

• Pouls faible • Hypotension • Oligurie ou anurie • Léthargie grave ou coma • Défaillance de multiples organes (fréquente)

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

803

Approche thérapeutique

16.7.6

La prise en charge du choc septique inclut des mesures consistant à rétablir la stabilité hémodynamique, à assurer une oxygénation adéquate des tissus et à administrer des antimicrobiens dans la première heure de consultation pour traiter le micro-organisme infectieux. Comme avec d’autres types de choc, la stabilité hémodynamique est obtenue par la restauration du volume liquidien et l’administration d’agents inotropes, au besoin. Une administration adéquate d’oxygène nécessite souvent l’intubation et l’assistance respiratoire, l’utilisation d’oxygène d’appoint ainsi que la diminution du travail respiratoire par la sédation et la paralysie. Le choc septique active les protéines du système de complément qui favorisent l’agrégation des granulocytes dans les poumons. Les granulocytes peuvent libérer des substances chimiques qui provoquent des lésions pulmonaires directes dans l’endothélium des capillaires pulmonaires. Ce phénomène est à l’origine de la fuite du liquide vers les alvéoles, ce qui entraîne un œdème interstitiel et alvéolaire. La coagulation intravasculaire disséminée et le dysfonctionnement de multiples organes peuvent également se produire : ils réclament une reconnaissance et une prise en charge immédiates.

Le syndrome de choc toxique (S.C.T.) est une forme particulière de choc septique, relativement rare, provoqué par la libération de toxines produites par certaines souches de bactéries entrant dans la circulation sanguine. Les bactéries responsables sont le staphylocoque et le streptocoque du groupe A.

De nouveaux traitements sont mis au point pour modier la réponse immunitaire de l’hôte en bloquant différents médiateurs de manière à interrompre la cascade inammatoire. La détection rapide des symptômes de l’état de choc septique est cruciale pour la survie de l’enfant. Une grande vigilance s’impose pour tous les enfants gravement malades dont le risque de septicémie est élevé en raison des nombreux dispositifs invasifs, de l’apport nutritionnel inadéquat et de l’affaiblissement de la fonction immunitaire. Des altérations subtiles de la perfusion tissulaire, de même qu’une tachypnée et une tachycardie inexpliquées, sont souvent des signes avantcoureurs. La détection de l’agent infectieux et le traitement rapide sont également déterminants pour la survie de l’enfant. Il faut administrer des antibiotiques à large spectre et éliminer si possible le foyer d’infection (p. ex., drainer les abcès, retirer les sondes vésicales à ballonnet). Les enfants en état de choc septique doivent être admis à l’unité de soins intensifs pour bénécier d’un monitorage continu et d’un soutien cardiorespiratoire sophistiqué. La collaboration pluridisciplinaire est essentielle à la prise en charge de ces enfants gravement malades.

804

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

Syndrome de choc toxique

Décrit pour la première fois en 1978, le S.C.T. peut provoquer une défaillance aiguë de plusieurs organes ; ses manifestations cliniques ressemblent à celles du choc septique. Le S.C.T. est devenu notoire en 1980 en raison du lien frappant entre la maladie et l’utilisation de tampons hygiéniques, en particulier de type superabsorbant (Chu, 2017). Une vaste campagne d’information sur les dangers de l’utilisation prolongée des tampons hygiéniques et la modification de la composition chimique de ceux-ci ont permis de réduire considérablement l’incidence du S.C.T. chez les femmes ayant leurs règles. Toutefois, 50 % des cas ne sont pas associés aux menstruations et, parmi ceux-ci, environ 25 % affectent les hommes, les femmes âgées et les enfants (Venkataraman, 2017). Les femmes qui ont des antécédents de colonisation vaginale au staphylocoque et qui portent des tampons ou d’autres dispositifs (p. ex., des éponges contraceptives, des diaphragmes) dans le vagin sont les plus à risque de syndrome de choc toxique staphylococcique. Les facteurs de risque de ce syndrome du groupe A incluent les traumatismes mineurs, les interventions chirurgicales, les infections virales (p. ex., la varicelle) et l’utilisation d’anti-inammatoires non stéroïdiens (Bush, 2018).

Diagnostic Le diagnostic de S.C.T. repose sur les critères établis par les Centers for Disease Control and Prevention TABLEAU 16.26 . Des antécédents d’utilisation de tampons hygiéniques contribuent au diagnostic. Des analyses de laboratoire comme les cultures de sang, de cellules du vagin ou du col de l’utérus, ou de tout écoulement, peuvent également être effectuées.

Approche thérapeutique La prise en charge du S.C.T. est la même que pour l’état de choc, quelle qu’en soit la cause : elle va des soins de soutien, dans les cas légers, à une hospitalisation et à une admission à l’unité de soins intensifs dans les cas graves. En général, des antibiotiques sont administrés par voie parentérale.

TABLEAU 16.26

Critères diagnostiques du syndrome de choc toxique

Syndrome de choc toxique (S.C.T.) probable ou conrmé • S.C.T. probable : présence de 4 des 5 manifestations cliniques et des valeurs anormales aux analyses de laboratoire ci-dessous. • S.C.T. conrmé : présence des 5 manifestations cliniques et des valeurs anormales aux analyses de laboratoire ci-dessous. Manifestations cliniques • Fièvre de 38,9 °C ou plus • Érythrodermie maculaire diffuse • Desquamation de la paume des mains et de la plante des pieds, 1 ou 2 semaines après l’apparition de la maladie • Hypotension dénie par une pression artérielle systolique de 90 mm Hg ou moins chez l’adulte et inférieure au 5 e centile pour les enfants de moins de 16 ans • Altération du fonctionnement d’au moins 3 des systèmes organiques suivants : système gastro-intestinal, musculaire, rénal, hépatique, hématologique, muqueuses membranaires ou système nerveux central Valeurs anormales aux analyses de laboratoire • Résultat positif aux tests de culture de sang ou du liquide cérébrospinal positif pour le staphylocoque • Résultat négatif aux tests sérologiques pour la èvre pourprée des montagnes Rocheuses, la leptospirose ou la rougeole Sources : Adapté de CDC (2011) ; Tong (2018).

Soins inrmiers SYNDROME DE CHOC TOXIQUE

Étant donné que la maladie est relativement rare, les soins inrmiers sont principalement axés sur la prévention. Le lien entre la maladie et l’utilisation de tampons hygiéniques sera le fondement des séances d’information. La mesure préventive la plus sûre consiste à éviter d’utiliser des tampons hygiéniques, même si cette approche est sans doute irrecevable pour la plupart des adolescentes, qui préfèrent la liberté, le confort et la discrétion des tampons.

L’inrmière peut indiquer aux adolescentes qui se servent de tampons hygiéniques des précautions d’hygiène générale, comme procéder à l’hygiène des mains et insérer soigneusement le tampon de manière à éviter toute écorchure vaginale. L’emploi des tampons doit varier et alterner avec celui des serviettes hygiéniques, par exemple en utilisant les serviettes durant la nuit et en journée lorsque l’adolescente est à la maison et que l’écoulement est léger. L’inrmière peut conseiller aux jeunes lles de ne pas se servir de tampons superabsorbants et de ne pas laisser un tampon en place plus de quatre ou six heures.

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

16

805

Analyse d’une situation de santé Sandrine, âgée de six mois, est amenée à l’hôpital pour une difculté respiratoire. Ses parents précisent que depuis deux semaines, elle est plus irritable et qu’elle se fatigue rapidement, surtout pendant les boires. La mère de

Jugement clinique Sandrine s’est inquiétée en raison de l’apparition plus prononcée d’une dyspnée au repas de midi. Vous procédez à une évaluation de l’état clinique pulmonaire du nourrisson.

Mise en œuvre de la démarche de soins

Collecte des données – Évaluation initiale – Analyse et interprétation 1. Nommez au moins cinq éléments à vérifier au moment de l’inspection de l’appareil respiratoire de Sandrine. 2. En plus des éléments objectifs à évaluer qui ont été déterminés à la question précédente, quelle autre évaluation devrait être faite ?

SOLUTIONNAIRE

Sandrine est amenée en radiologie pour une radiographie pulmonaire. La radiographie démontre une cardiomégalie et la présence d’inltrats pulmonaires interstitiels. Le médecin diagnostique de l’insufsance cardiaque congestive

(ICC). À l’examen clinique, Sandrine a une tachypnée à 38 R/min, du tirage intercostal et sous-costal, ainsi que des battements des ailes du nez. Des crépitants sont audibles à l’auscultation aux bases pulmonaires bilatérales.

3. Nommez quatre autres signes à vérier chez Sandrine en lien avec une congestion pulmonaire. MAIS SI...

Si Sandrine montrait des signes de congestion veineuse générale, que pourriez-vous observer relativement aux veines du cou ? 4. Qu’est-ce qui explique la présence des crépitants ?

L’état de Sandrine correspond aux manifestations cliniques d’une pneumonie, mais, curieusement, sans èvre.

5. Qu’est-ce qui pourrait expliquer l’absence de èvre chez Sandrine ?

VU dans ce chapitre

Dans l’insufsance cardiaque congestive, quelle est la caractéristique principale des pouls périphériques ?

Le médecin soupçonne que Sandrine est atteinte de cardiopathie congénitale. Il demande un ECG à 12 dérivations.

Puisque le diagnostic d’ICC est conrmé, pendant combien de temps faut-il calculer les pouls apical et radial de Sandrine ? Justiez votre réponse.

6. Que devrait révéler l’ECG de Sandrine en lien avec une cardiopathie congénitale et une insufsance cardiaque congestive ?

806

Partie 6

Le médecin prescrit de la digoxine à Sandrine pour traiter l’insufsance cardiaque congestive.

Troubles liés aux systèmes

VU dans ce chapitre

7. Dans quel but ce médicament est-il prescrit à Sandrine ?

Planication des interventions – Décisions inrmières Voici un extrait du plan thérapeutique inrmier (PTI) élaboré an d’assurer un suivi optimal chez Sandrine.

Extrait de PTI CONSTATS DE L’ÉVALUATION Date

Heure



2018-05-30

13:15

2

Problème ou besoin prioritaire

Signes d’insufsance cardiaque congestive

Initiales

RÉSOLU / SATISFAIT Date

Heure

Initiales

Professionnels / Services concernés

C.D.

Pourquoi administre-t-on de l’oxygène humidié à un enfant atteint d’ICC ? Pourquoi est-ce important d’évaluer régulièrement la fréquence respiratoire, les bruits respiratoires et tout signe de respiration inefcace ?

SUIVI CLINIQUE Date

Heure



2018-05-30

13:15

2

Directive inrmière

Évaluer l’état pulmonaire.

Signature de l’inrmière

Claudie Dubé

Initiales

Initiales

C.D.

CESSÉE / RÉALISÉE Date

Heure

Initiales

C.D. Programme / Service

Signature de l’inrmière

Initiales

Programme / Service

Service des urgences

8. Est-ce que la directive émise pour assurer le suivi clinique du problème prioritaire est adéquate ? Justiez votre réponse. 9. Nommez deux interventions à effectuer pour diminuer la souffrance respiratoire de Sandrine. 10. Vous expliquez aux parents qu’il est nécessaire de réduire les efforts de Sandrine, surtout pendant les repas. Qu’est-ce qui justie une telle précaution ? 11. Nommez trois recommandations à faire aux parents an de réduire au minimum les efforts fournis par le cœur de Sandrine. MAIS SI...

Si Sandrine vomissait à plusieurs reprises dans la même journée, devriez-vous aviser le médecin ? Justiez votre réponse.

La dernière lecture des pulsations de Sandrine indique 108 batt./min, alors qu’auparavant, elle était de 166 batt./min. La prochaine dose de digoxine doit être administrée dans 2 heures.

12. Sandrine devrait-elle recevoir sa prochaine dose de digoxine ? Justiez votre réponse.

16

Sandrine devra continuer à prendre de la digoxine à la maison.

13. Indiquez au moins six points importants à enseigner aux parents concernant l’administration de la digoxine.

À la suite des traitements pharmacologiques, l’état de santé de Sandrine s’améliore. Elle est plus calme, et les symptômes présents à son arrivée à l’hôpital s’estompent.

Évaluation des résultats – Évaluation en cours d’évolution 14. Nommez au moins quatre points qu’il faut continuer de surveiller pour assurer le suivi clinique de Sandrine.

Chapitre 16

Troubles liés au système cardiovasculaire

807

Chapitre

17

Troubles liés au système gastro-intestinal Écrit par : Cheryl C. Rodgers, PhD, RN, CPNP, CPON Kristina D. Wilson, PhD, CCC-SLP Adapté par : Dalila Benhaberou-Brun, B. Sc. inf., B. Sc., M. Sc. Marie-Andrée Latrémouille, inF., B. Sc. N.

MOTS CLÉS

OBJECTIFS

Appendicite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 842 Constipation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 833 Déséquilibre acidobasique. . . . . . . . . . . 815 Déséquilibre hydroélectrolytique . . . . 815 Déshydratation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 812 Diarrhée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 822 Douleur abdominale fonctionnelle . . . 841 Fente labiale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 860 Fente palatine. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 860 Hépatite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 853 Hernie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 870 Maladie cœliaque. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 880 Maladie inflammatoire de l’intestin (MII) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 847 Reflux gastro-œsophagien (RGO) . . . . 839 Solution de réhydratation orale (SRO). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 829 Sténose hypertrophique du pylore . . . 872 Ulcère gastroduodénal . . . . . . . . . . . . . . 851

Après avoir étudié ce chapitre, vous devriez être en mesure :

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Animation À retenir Carte conceptuelle Solutionnaire

Guide d’études – SA16, RE07

808

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

• de décrire les facteurs qui empêchent les nourrissons de s’adapter à une perte ou à un gain de liquide ; • d’énumérer les manifestations cliniques de la déshydratation aiguë ; • d’élaborer un plan de soins infirmiers pour un enfant hospitalisé souffrant d’une diarrhée aiguë ; • de comparer les maladies inflammatoires du tractus gastro-intestinal ; • de décrire les soins infirmiers pour l’enfant atteint d’hépatite ; • de concevoir une stratégie d’enseignement des soins périopératoires destinée aux parents de l’enfant ayant une fente labiale ou palatine ; • d’élaborer un plan de soins et de traitements infirmiers pour l’enfant atteint de troubles obstructifs ; • de déterminer les thérapies nutritionnelles destinées à l’enfant atteint d’un syndrome de malabsorption.

Carte conceptuelle

Cette carte conceptuelle illustre schématiquement les principaux concepts décrits dans le présent chapitre. Sa lecture vous permettra d’avoir une vue d’ensemble des notions qui y sont présentées.

causée par

causée par causés par

peut être

souvent causée par

peuvent être

sont

traitée par d’origine dont

Troubles liés au système gastro-intestinal

dont

dont

comprennent

17 dont

dont

dont

dont

dont

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

809

Rappel anatomique et particularités chez l’enfant

Système gastro-intestinal Chez le nouveau-né, la langue occupe tout l’espace de la cavité orale. Pendant la tétée, le larynx s’élève pour que le lait passe directement dans le pharynx, permettant à la fois au nouveau-né de se nourrir et de respirer. Le contrôle volontaire de la déglutition commence vers 6 semaines. Au cours de la première année, le tiers postérieur de la langue commence à descendre pour devenir, vers l’âge de 4 ans, la paroi antérieure du pharynx. Le palais mou a un axe horizontal, et le palais dur est large et plat. Les glandes salivaires sont présentes à la naissance, mais elles sécrètent peu de salive. C’est à l’âge de 3 mois que la salivation commence ; le nourrisson apprendra à avaler sa salive en quelques mois. La salivation s’active davantage à la poussée des premières dents en raison de l’excitation du nerf trijumeau ou des récepteurs nociceptifs (de la douleur). Absente à la naissance, la glande parotide se développe intensément à partir de 3 ou 4 mois.

Toutes les dents amorcent leur développement in utero. Les 20 dents temporaires poussent entre l’âge de 6 et 30 mois. Elles commencent à tomber vers 6 ans et sont remplacées progressivement par les dents permanentes jusqu’à l’âge de 12 ans. L’adulte compte 32 dents. Les dents de sa gesse, les dernières à pousser, font leur apparition vers la n de l’adolescence ou au début de la vingtaine. Le pharynx du nouveau-né est plus large et plus bas que celui de l’adulte. Il mesure environ 40 mm de longueur, soit le tiers de la longueur du pharynx d’un adulte. L’œsophage d’un nouveau-né est étroit et mesure entre 8 et 10 cm. Il se situe environ 2 vertèbres plus haut que celui de l’adulte. Il propulse le bol alimentaire vers l’estomac avec autant d’efficacité que chez l’adulte.

FIGURE 17.1 À la naissance, le système digestif du nouveau-né est immature, car, in utero, le placenta lui fournissait les nutriments nécessaires et éliminait ses déchets. C’est vers l’âge de deux ans que le système digestif est complètement fonctionnel.

810

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

À la naissance, l’estomac, très petit, se trouve sous le foie. Lorsque le nouveauné commence à boire, le volume de l’estomac quintuple, et la sécrétion d’acide gastrique débute. La capacité de l’estomac du nouveau-né est restreinte (10 à 20 mL). C’est pourquoi celui-ci boit de petites quantités, fréquemment. Cette capacité augmente rapidement, pour atteindre 100 mL à un mois et 1,5 L à l’âge adulte. Quand le nouveau-né est couché, le fundus se trouve plus bas que le pylore. Le sphincter œsophagien inférieur est immature, causant des reux gastro-œsophagiens fréquents jusqu’à l’âge de 4 mois, mais qui cessent entre 6 et 12 mois. Chez le trottineur, le contenu de l’estomac peut se vider en 2 ou 3 heures. Ce processus est plus lent chez l’adulte. Dès l’âge de 2 ans, le système digestif est mature, et la taille de l’estomac permet au trottineur de manger 3 repas par jour.

Chez le nouveau-né, le foie occupe un espace proportionnellement plus important que chez l’adulte. Le rebord inférieur du lobe droit peut être palpé à environ 0,5 à 2,5 cm en dessous du rebord costal et se trouve tout près de la crête iliaque. Le lobe gauche peut aller jusqu’à la paroi latérale de l’abdomen. Le foie du nouveau-né est immature. Après quelques semaines, il est capable de conjuguer la bilirubine et de l’excréter dans la bile. Toutefois, ce n’est que vers 1 an qu’il forme des protéines plasmatiques et de cétones, et qu’il effectue la désamination, le stockage des vitamines et la gluconéogenèse. La vésicule biliaire a une forme cylindrique chez le nouveau-né. À partir de l’âge de deux ans, elle fonctionne comme celle de l’adulte. Le canal biliaire est comparativement plus long chez l’enfant que chez l’adulte.

Avant l’âge de 4 à 6 mois, le pancréas déverse dans le duodénum une quantité d’enzymes (amylase, lipase et protéases inactives) trop faible pour contribuer à une digestion adéquate, ce qui engendre souvent une distension abdominale et des atulences. À la naissance, les plis de l’intestin grêle sont moins nombreux et moins marqués que ceux des adultes. Les bres musculaires du gros intestin du nouveau-né sont immatures. Les côlons ascendant et descendant sont courts, alors que le côlon transverse est long. La muqueuse est très lisse. Les haustrations apparaissent dans les 6 premiers mois de vie. La nourriture transite très rapidement dans les intestins, qui ont une faible capacité d’absorption. Conséquemment, les selles sont molles. Chez les adultes, le processus est plus lent et l’absorption est plus grande, ce qui rend les selles dures. Le nourrisson n’a aucun contrôle volontaire de sonsphincter anal externe tant que la moelle épinière n’est pas complètement myélinisée. La défécation est donc réexe. Vers l’âge de 2 ans, le trottineur peut faire l’apprentissage de la propreté.

17

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

811

17.1 CE QU’IL FAUT RETENIR

Tout dysfonctionnement gastro-intestinal entraînant des pertes hydriques importantes risque de causer un état de déshydratation qui, chez l’enfant, peut compromettre sa survie.

Les fonctions de l’appareil digestif et son impressionnante supercie en font l’une des principales zones d’échange entre l’organisme et le milieu extérieur. Les maladies inammatoires et les problèmes de malabsorption, notamment, entravent le fonctionnement de ce système. L’examen clinique permet d’observer les différentes manifestations cliniques spéciques des atteintes gastro-intestinales (GI). Tout dysfonctionnement GI entraînant des pertes hydriques importantes risque de causer un état de déshydratation qui, chez l’enfant, peut compromettre sa survie ; il est donc essentiel d’y remédier rapidement.

17.1.1 éactivation des connaissances Quelle est la différence entre une perte liquidienne sensible et une perte liquidienne insensible ? Donnez un exemple pour chaque cas.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les nourrissons et les jeunes enfants ont des besoins plus élevés en eau et sont plus vulnérables aux modications de l’équilibre hydrique et électrolytique que les enfants plus âgés et les adultes.

éactivation des connaissances Qu’est-ce que le métabolisme basal ?

812

Partie 6

Principaux troubles gastro-intestinaux

Déshydratation

compartiment extracellulaire (CEC). Le CEC constitue plus de la moitié du volume corporel total en eau à la naissance, et sa teneur relative en sodium et en chlorure extracellulaires est plus élevée (Koyfman, 2017). À la naissance, le nouveau-né perd une quantité importante de liquide et en conserve davantage dans le CEC comparativement à l’adulte, et ce, jusqu’à l’âge de deux ans environ. Ce phénomène favorise des pertes d’eau plus substantielles et plus rapides pendant cette période. Les pertes de liquide occasionnent des décits compartimentaux qui se manifestent pendant toute la durée de la déshydratation. En général, près de 60 % du liquide perdu provient du CEC, alors que le reste émane du compartiment intracellulaire (CIC). La quantité de liquide perdu par le CEC augmente en présence d’une maladie aiguë et elle diminue en cas de perte chronique.

La déshydratation désigne un trouble courant de l’organisme qui survient lorsque l’élimination liquidienne totale dépasse l’apport liquidien total, quelle qu’en soit la cause (Greenbaum, 2016). La déshydratation peut résulter de plusieurs maladies qui entraînent des pertes liquidiennes insensibles (aussi appelées pertes liquidiennes insidieuses) par la peau et les voies respiratoires, ou une excrétion accrue par les reins ou le tractus GI. Si la déshydratation peut découler d’un apport liquidien oral insufsant, en particulier quand les températures environnantes sont élevées, elle est le plus souvent causée par des pertes anormales, comme celles liées aux vomissements ou à la diarrhée, qui ne peuvent être que partiellement compensées par un apport oral.

Les pertes de liquide varient en fonction de l’âge et elles sont réparties en trois catégories : insensible, urinaire et fécale. Environ deux tiers des pertes insensibles s’opèrent par la peau ; le tiers restant est évacué par les voies respiratoires. La chaleur, l’humidité, la température corporelle et la fréquence respiratoire inuent sur la perte insensible. Les nourrissons et les enfants sont plus sujets que les adultes aux èvres élevées. Pour chaque augmentation de 1 degré de température au-dessus de 37,2 °C, la èvre amplie la perte d’eau insensible d’environ 7 mL/kg/24 h. La èvre et une surface corporelle élevée par rapport au volume corporel sont des facteurs qui contribuent à exacerber les pertes insensibles de liquide, en particulier chez les nourrissons et les trottineurs.

Un état de déshydratation peut également se manifester rapidement dans les cas suivants : diaphorèse et fièvre ; acidocétose diabétique ; certaines maladies rénales et anomalies cardiaques ; administration de certains médicaments (diurétiques et stéroïdes) ; traumatismes (intervention chirurgicale majeure, brûlures et autres lésions importantes).

Surface corporelle

Équilibre hydrique chez le nourrisson Les nourrissons et les jeunes enfants ont des besoins plus élevés en eau et sont plus vulnérables aux modications de l’équilibre hydrique et électrolytique que les enfants plus âgés et les adultes. En raison de leur taille, les nourrissons ont un apport et une élimination hydriques plus importants. Ils sont donc sujets à des déséquilibres hydriques et électrolytiques plus fréquents et plus rapides, et leur capacité d’adaptation est moindre lorsque ces modications surviennent. La répartition des liquides chez le nourrisson diffère de celle de l’adulte, principalement en raison de la proportion plus importante du

Troubles liés aux systèmes

La surface corporelle du nourrisson occasionne une plus grande perte de liquide par la transpiration cutanée. On estime en effet que la perte liquidienne par rapport à la surface corporelle d’un nouveau-né prématuré est cinq fois plus élevée, et celle d’un nouveau-né est deux ou trois fois plus élevée que celle d’un enfant plus âgé ou d’un adulte. La longueur proportionnellement supérieure du tractus GI pendant le début de l’enfance est un autre facteur de perte hydrique, en particulier après une diarrhée (Koyfman, 2017).

Taux métabolique basal Le taux métabolique basal des nourrissons et des enfants est supérieur an de soutenir la croissance. Pendant l’enfance, le taux métabolique dépasse amplement celui de l’adulte, car la surface corporelle est plus importante par rapport à la masse de tissu actif. La production de déchets métaboliques à excréter par les reins est donc plus élevée. Tout état activant le métabolisme augmente la production de chaleur, la perte insensible de liquide et les besoins hydriques pour l’excrétion.

Fonction rénale

Déshydratation isotonique

À la naissance, la fonction rénale est immature : les reins ne sont donc pas en mesure d’excréter une quantité sufsante de déchets produits par le métabolisme. Sur le plan de l’équilibre hydrique, il convient de noter que les reins du nourrisson ne peuvent ni concentrer ni diluer l’urine, ni conserver ni excréter du sodium, ni acidifier l’urine. Comparativement aux enfants plus âgés, les nourrissons s’adaptent plus difcilement à de grandes quantités d’eau sans ions libres, et ils sont plus susceptibles de se déshydrater s’ils reçoivent des formules concentrées, ou de faire de la rétention liquidienne excessive s’ils reçoivent trop d’eau ou du lait dilué.

La déshydratation isotonique est la principale forme de déshydratation en pédiatrie. Elle survient lorsque le déficit électrolytique et le déficit hydrique sont presque équivalents en proportion. Elle peut être due à des vomissements, à une diarrhée ou à des saignements, ou une combinaison de ces facteurs. Les quantités d’eau et de sel perdues sont presque égales. Les pertes de liquide observables ne sont pas toujours isotoniques, car d’autres pertes interviennent, mais la somme de toutes les pertes est isotonique. Il n’existe pas de force osmotique entre le CIC et le CEC ; le CEC subit donc la perte principale. Cet état réduit de façon importante le volume plasmatique et le volume de sang en circulation, ce qui affecte la peau, les muscles et les reins. L’enfant atteint d’une déshydratation isotonique afche des symptômes caractéristiques du choc hypovolémique. L’état de choc est la menace la plus sérieuse pour le pronostic vital. La concentration plasmatique de sodium reste dans les limites normales, soit entre 135 et 145 mEq/L.

Besoins liquidiens Il faut tenir compte des besoins accrus en eau et en électrolytes chez le nourrisson en raison de sa capacité limitée de rétention et d’excrétion des électrolytes en solution hydrique. Les échanges quotidiens du CEC sont beaucoup plus importants chez le nourrisson que chez l’enfant plus âgé, limitant ainsi ses réserves de volume hydrique en cas de déshydratation. Les besoins liquidiens dépendent également de l’état d’hydratation, de la taille de l’enfant, des facteurs environnementaux et de la présence d’une maladie sous-jacente. Le remplacement liquidien est calculé en fonction du poids de l’enfant ENCADRÉ 17.1.

Manifestations cliniques des différents types de déshydratation Pour comprendre la physiopathologie de la déshydratation, il faut savoir que la répartition de l’eau entre le CEC et le CIC dépend du transport actif du potassium et du sodium à l’extérieur des cellules grâce à des processus énergivores. Le sodium est le principal soluté du CEC et le facteur déterminant du volume du CEC. Le potassium est essentiellement intracellulaire. Lorsque le volume du CEC diminue du fait d’une déshydratation aiguë, la teneur totale en sodium dans l’organisme décroît presque toujours elle aussi, quelles que soient les concentrations sériques de sodium. C’est pourquoi le remplacement du volume hydrique doit s’accompagner d’une recharge sodique. En cas de diarrhée, l’épuisement des réserves de sodium survient de deux façons : hors de l’organisme par les selles, et vers le CIC pour remplacer le potassium et maintenir l’équilibre électrolytique. La déshydratation est classée, suivant l’osmolalité, en trois catégories qui dépendent principalement de la concentration sérique de sodium :

Déshydratation hypotonique La déshydratation hypotonique survient lorsque le décit électrolytique dépasse le décit hydrique, ce qui produit un sérum hypotonique. Elle peut être causée par des vomissements, une diarrhée, des saignements GI ou l’administration de

Osmolalité : Mesure du nombre d’osmoles (Osm), c’està-dire du nombre de molécules dissoutes dans un kilogramme de solution ou dans un litre de liquide.

Pratiques inrmières ENCADRÉ 17.1

Calculer les besoins liquidiens quotidiens de l’enfant

POIDS DE L’ENFANT a

VOLUME LIQUIDIEN À REMPLACER PAR PÉRIODE DE 24 HEURES

> 10 kg

100 mL/kg

11-20 kg

1 000 mL + 50 mL/kg pour chaque kilogramme > 10 kg

> 20 kg

1 500 mL + 20 mL/kg pour chaque kilogramme > 20 kg

1. Mesurer le poids de l’enfant en kilogrammes. 2. Calculer le volume liquidien à administrer par jour selon le tableau ci-dessus. 3. Diviser la quantité totale par 24 pour obtenir le taux en millilitres par heure. a Excluant

le nouveau-né. Source : Turgeon, Hervouet-Zeiber, Ovetchkine et al. (2015).

TABLEAU 17.1

Types de déshydratation en fonction de la natrémie

TYPE DE DÉSHYDRATATION

NATRÉMIE (TAUX DE SODIUM)

• isotonique (ou isonatrémique) ;

Isotonique (ou isonatrémique)

135-145 mmol/L

• hypotonique (ou hyponatrémique) ;

Hypotonique (ou hyponatrémique)

< 135 mmol/L

Hypertonique (ou hypernatrémique)

> 145 mmol/L

• hypertonique

(ou

TABLEAUX 17.1 et 17.2.

hypernatrémique)

17

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

813

TABLEAU 17.2

Manifestations cliniques de la déshydratation

MANIFESTATION CLINIQUE

ISOTONIQUE (DÉFICIT EN EAU ET EN SODIUM)

HYPOTONIQUE (DÉFICIT EN SODIUM SUPÉRIEUR AU DÉFICIT EN EAU)

HYPERTONIQUE (DÉFICIT EN EAU SUPÉRIEUR AU DÉFICIT EN SODIUM)

Couleur

Grise

Grise

Grise

Température

Froide

Froide

Froide ou chaude

Turgescence

Faible

Très faible

Moyenne

Texture

Sèche

Moite

Épaissie, molle, mais élastique

Muqueuses

Sèches

Légèrement humides

Desséchées

Larmes et salivation

Absentes

Absentes

Absentes

Globes oculaires

Enfoncés

Enfoncés

Enfoncés

Fontanelles

Enfoncées

Enfoncées

Enfoncées

Température corporelle

Sous la normale ou élevée

Sous la normale ou élevée

Sous la normale ou élevée

Pouls

Rapide

Très rapide

Modérément rapide

Respiration

Rapide

Rapide

Rapide

Comportement

D’irritable à léthargique

Léthargique ou comateux ; convulsions

Léthargie marquée et hyperirritabilité extrême à la stimulation

Peau

diurétiques. Dans la mesure où le CIC est plus concentré que le CEC en cas de déshydratation hypotonique, l’eau se déplace du CEC vers le CIC pour établir un équilibre osmotique. Ce mouveLes manifestations cliniques ment favorise davantage la perte de volume du ainsi que les soins et les CEC, ce qui provoque souvent un état de choc. traitements inrmiers en cas Étant donné que la perte proportionnelle du d’hyponatrémie sont étudiés volume du CEC est plus importante en cas de désdans le chapitre 17 du manuel hydratation hypotonique, les signes physiques de Lewis, S.L., Dirksen, S.R., tendent à être plus graves (hypotension, léthargie, Heitkemper, M.M., et al. coma), malgré des pertes hydriques plus faibles (2016). Médecine Chirurgie. qu’en cas de déshydratation isotonique ou hy Montréal : Chenelière pertonique. La concentration plasmatique de Éducation. sodium est inférieure à 135 mEq/L. Cette hypotonie est liée au syndrome de sécrétion inappropriée en hormone antidiurétique Zachary, âgé de deux ans, est amené au service (SIADH) et est le plus soudes urgences pour convulsions et léthargie. Au vent causée par un excès cours de l’évaluation initiale, vous découvrez que d’eau que par un décit en sa mère diluait la solution de gavage avec deux sodium (Thomas, 2017). fois moins d’eau que ce qui était prévu dans la Déshydratation hypertonique recette originale. La densité urinaire est à 1 039. La déshydratation hypertoUn ionogramme est effectué sur Zachary. Quel résultat anticipez-vous ? nique est généralement due à une perte proportionnellea) Une hyponatrémie. ment supérieure d’eau ou à b) Une hypernatrémie. un apport accru en électroc) Une hypokaliémie. lytes. La fièvre en est la cause la plus courante, surd) Une hyperkaliémie. tout si elle s’accompagne

Jugement

clinique

814

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

d’une diminution des apports hydriques. L’hyperglycémie est une autre cause de déshydratation hypertonique, et elle est associée à une hyponatrémie. Ce type de déshydratation est le plus dangereux et il nécessite un traitement liquidien plus précis. La diarrhée hypertonique peut survenir chez les nourrissons qui reçoivent oralement des liquides contenant des quantités importantes d’ions ou chez les enfants auxquels une alimentation à teneur élevée en protéines est administrée par sonde nasogastrique, exposant ainsi les reins à une charge excessive d’ions. En cas de déshydratation hypertonique, le liquide passe du CIC, à l’intérieur duquel sa concentration est inférieure, vers le CEC. La concentration plasmatique de sodium est supérieure à 145 mEq/L. Dans la mesure où le volume du CEC est proportionnellement supérieur, la déshydratation hypertonique correspond à un degré plus élevé de perte hydrique en présence de signes physiques d’intensité équivalente. Le risque d’état de choc est moindre, mais les troubles neurologiques, y compris les altérations de l’état de conscience, l’incapacité à se concentrer, la léthargie, l’augmentation du tonus musculaire avec hyperréexie et l’hyperirritabilité aux stimulus, sont plus probables. Les changements cérébraux sont graves et peuvent entraîner des lésions permanentes.

Diagnostic Il faut déterminer le type et le degré de déshydratation pour établir un plan thérapeutique efcace. Le degré de déshydratation peut être exprimé en pourcentage : moins de 5 % (léger) ; de 5 à 9 % (modéré) ; ou 10 % et plus (grave) (Société canadienne de pédiatrie [SCP], 2016c). L’eau représente de 60 à 70 % du poids du nourrisson. Cependant, le tissu adipeux contient peu d’eau, et il varie beaucoup d’un nourrisson ou d’un enfant à l’autre. Il est possible d’évaluer plus précisément la déshydratation en mesurant la perte aiguë (en 48 heures ou moins) en millilitres par kilogramme de poids corporel. Par exemple, chez l’enfant, une perte de 50 mL/kg est considérée comme légère, alors qu’une perte de 150 mL/kg équivaut à une déshydratation grave (American Heart Association [AHA], 2011). Le poids est le principal déterminant du pourcentage de perte totale de liquide corporel chez les nourrissons et les jeunes enfants. Cependant, il arrive souvent que le poids de l’enfant avant la maladie soit inconnu. Les autres facteurs prédictifs de la perte de liquide incluent l’évolution de l’état de conscience (de l’irritabilité à la léthargie), la réaction aux stimulus, la fréquence des mictions, la prolongation du temps de remplissage capillaire, l’augmentation de la fréquence cardiaque, l’enfoncement des yeux dans les orbites ou l’enfoncement des fontanelles, la diminution de l’élasticité ainsi que la formation d’un pli cutané FIGURE 17.2. L’utilisation de plusieurs facteurs prédictifs permet d’augmenter la précision de l’évaluation du décit hydrique ; des études antérieures rapportent également un degré assez élevé de concordance entre des observateurs expérimentés évaluant le niveau de déshydratation. Des signes cliniques de déshydratation apparaissent lorsque le décit hydrique est inférieur à 5 %. La présence de l’un des signes suivants – remplissage capillaire supérieur à 2 secondes, absence de larmes, sécheresse des muqueuses et aspect général maladif – permet de prévoir un décit d’au moins 5 % (AHA, 2011). L’état de choc, la tachycardie et une pression artérielle très basse sont autant de caractéristiques courantes d’un épuisement grave des réserves du volume du CEC.

Déséquilibres hydroélectrolytiques et acidobasiques Les différents types de déshydratation peuvent entraîner des déséquilibres hydroélectrolytiques et acidobasiques. Les électrolytes (sodium, potassium, calcium, etc.) et l’eau contenus dans les cellules étant indispensables au fonctionnement du corps humain, tout déséquilibre hydroélectrolytique peut entraîner des troubles plus ou moins graves ou être causé par ceux-ci, mettant parfois en jeu le pronostic vital.

FIGURE 17.2 L’enfant souffrant d’une déshydratation modérée à grave présente généralement un pli cutané persistant.

Les déséquilibres acidobasiques mettent en cause les acides et les bases. Le pH artériel doit être maintenu entre 7,35 et 7,45 pour garantir l’équilibre acidobasique de l’organisme B . Pour ce faire, l’organisme utilise trois mécanismes : le système tampon, le système respiratoire et le système rénal.

CE QU’IL FAUT RETENIR

L’eau représente de 60 à 70 % du poids du nourrisson. B

Évaluation Tout au long de la collecte des données, l’inrmière doit exercer son jugement clinique an de déceler un déséquilibre hydroélectrolytique ou acidobasique, et ce, en utilisant les informations provenant : • de l’examen physique ; • de l’entrevue menée auprès de l’enfant et des parents ;

Les valeurs normales en fonction de l’âge de l’enfant sont présentées dans l’annexe B, Valeurs normales des résultats d’analyses de laboratoire courantes.

• des examens paracliniques pratiqués, des signes vitaux et des bilans sanguins, notamment. Avant d’intervenir, elle doit être attentive à tous les éléments qui permettent de reconnaître et d’évaluer correctement un déséquilibre TABLEAUX 17.3 et 17.4. L’inrmière ne doit pas uniquement se er aux résultats des analyses de laboratoire pour évaluer un déséquilibre ; elle doit plutôt les considérer en fonction de l’ensemble du tableau clinique. Par exemple, en cas de troubles GI, l’évaluation des pertes (vomissements, diarrhées), des signes vitaux (pouls, pression artérielle), des manifestations physiques (yeux enfoncés, pli cutané, orientation dans les trois sphères) et des niveaux de kaliémie et de natrémie est à prendre en compte pour déceler un déséquilibre hydroélectrolytique potentiellement grave. En cas de troubles respiratoires, les résultats des gaz sanguins artériels sont tout aussi importants que la saturation en oxygène, la diaphorèse ou la tachycardie, car ils permettent de reconnaître une alcalose ou une acidose respiratoire 15 . Chapitre 17

17

15 L’acidose respiratoire est dénie dans le chapitre 15, Troubles liés au système respiratoire.

Troubles liés au système gastro-intestinal

815

TABLEAU 17.3

Principaux déséquilibres hydroélectrolytiques

DÉSÉQUILIBRE HYDROÉLECTROLYTIQUE

PRINCIPAL ÉLECTROLYTE

VALEURS NORMALESa

CAUSES

MANIFESTATIONS CLINIQUES

Hypernatrémie

Sodium (Na)

134-146 mEq/L

• Déshydratation (liée à des pertes digestives, à une diaphorèse, à une baisse de l’apport hydrique)

• Soif

• Diabète Hyponatrémie

• Faiblesse musculaire • Convulsions • Coma

• Hyperhydratation

• Irritabilité

• Décit de l’apport en Na

• Tachycardie • Nausées • Vomissements

Hyperkaliémie

Potassium (K)

3,2-5,7 mEq/L

• Excès de l’apport en K

• Irritabilité

• Hémolyse

• Anxiété • Paresthésie • Crampes abdominales

Hypokaliémie

Hyperphosphatémie

Phosphore (P)

1,28-1,92 mmol/L

• Pertes digestives et rénales

• Faiblesse musculaire

• Hyperglycémie

• Crampes

• Décit de l’apport en K

• Diminution des réexes

• Insufsance rénale chronique

• Troubles musculaires

• Hypoparathyroïdie

• Tétanie

• Excès de vitamine D Hypophosphatémie

• Insufsance rénale

• Troubles cardiaques

• Hyperparathyroïdie • Rachitisme Hypercalcémie

Calcium (Ca)

Ca ionisé : 1,15-1,38 mmol/L Ca total : 2,0-2,62 mmol/L

Hypocalcémie

• Hyperthyroïdie

• Léthargie

• Hyperparathyroïdie

• Faiblesse

• Immobilisation prolongée

• Confusion

• Intoxication à la vitamine D

• Stupeur

• Hypoparathyroïdie

• Dépression

• Insufsance rénale chronique

• Tétanie

• Diarrhée

• Crampes musculaires

• Pancréatite aiguë Hypermagnésémie

Magnésium (Mg)

0,6-1,15 mmol/L

• Insufsance rénale et surrénalienne

• Léthargie

• Excès de Mg

• Nausées

• Somnolence • Vomissements

Hypomagnésémie

• Pertes digestives et urinaires

• Confusion

• Hyperaldostéronisme

• Réexes ostéotendineux exagérés • Convulsions

a Les

valeurs normales en fonction de l’âge de l’enfant sont présentées dans l’annexe B, Valeurs normales des résultats d’analyses de laboratoire courantes.

816

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

TABLEAU 17.4

Principaux déséquilibres acidobasiques

DÉSÉQUILIBRE ACIDOBASIQUE

ANALYSES DE LABORATOIRE

CAUSES

MANIFESTATIONS CLINIQUES

Acidose métabolique

pH et bicarbonates (HCO3) diminués

• Diarrhée

• Hyperventilation

• Insufsance rénale

• Nausées

• Malnutrition

• Vomissements • Hyperkaliémie

Acidose respiratoire

Alcalose métabolique

pH diminué et pression partielle du dioxyde de carbone dans le sang artériel (PaCO2) augmentée

• Maladies pulmonaires (maladie pulmonaire obstructive chronique [MPOC], pneumonie)

• Diaphorèse

• Faiblesse des muscles respiratoires

• Agitation

pH augmenté et HCO3 élevés

• Pertes gastriques de chlore

• Hypoventilation

• Diurétiques

• Hypokaliémie

• Tachycardie

• Surdosage pharmacologique • Hypoventilation

• Convulsions • Tétanie • Paresthésie • Arythmies Alcalose respiratoire

pH augmenté et PaCO2 diminuée

• Anxiété

• Torpeur

• Hyperventilation

• Étourdissements • Tétanie • Crampes • Arythmies

Soins inrmiers Les observations et les interventions de l’inrmière sont essentielles pour la détection et la prise en charge thérapeutique de la déshydratation. Diverses circonstances peuvent provoquer des pertes hydriques chez les nourrissons, dont l’état peut évoluer rapidement. L’une des principales responsabilités qui incombent à l’inrmière est de déceler les moindres signes de déshydratation. L’inrmière doit commencer par une observation de l’aspect général, puis progresser vers une inspection plus spécique des manifestations cliniques TABLEAU 17.5.

Soigner les déséquilibres hydriques et électrolytiques Les déséquilibres entraînés par la déshydratation doivent être détectés rapidement par l’inrmière, qui doit comprendre la cause et les mécanismes de ces perturbations TABLEAU 17.6.

Mesurer les ingesta et les excreta Il est essentiel de faire un bilan des ingesta et des excreta en mesurant avec précision l’apport

liquidien par voies orale et parentérale, et les pertes liquidiennes telles que l’urine, les selles, les vomissements, l’exsudat provenant de stules, le drainage d’une sonde nasogastrique, la transpiration et le suintement des plaies.

clinique

Jugement

DÉSHYDRATATION

• Urine : fréquence, volume, couleur et consistance (à la pesée des couches, environ chaque gramme de couche mouillée équivaut à 1 mL d’urine) ; • Selles : fréquence, volume et consistance ; • Vomissements : fréquence, volume et type ;

Marie-Soleil, âgée de cinq ans, buvait et mangeait seule jusqu’à tout récemment. Elle était en mesure d’exprimer ses besoins. La llette est atteinte d’une maladie neurodégénérative, et son état s’est gravement détérioré au cours des deux derniers mois. Elle ne communique plus d’aucune façon et elle s’étouffe durant l’alimentation. Elle habite avec sa mère et son frère. Elle a été admise à l’hôpital pour déshydratation grave. Qu’est-ce qui peut avoir provoqué l’état de déshydratation de Marie-Soleil ? a) L’évolution de sa maladie. b) Le fait qu’elle s’étouffe en mangeant. c) L’incapacité à manger seule. d) L’incapacité à dire qu’elle a soif.

• Transpiration : estimation possible en fonction de la fréquence de remplacement des vêtements et de la literie.

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

817

17

Évaluation clinique du degré de déshydratationa

TABLEAU 17.5

DEGRÉ DE DÉSHYDRATATION MANIFESTATION CLINIQUE

LÉGER

MODÉRÉ

GRAVE

• Nourrissons

• 3-5 %

• 6-9 %

• > 10 %

• Enfants

• 3-4 %

• 6-8 %

• 10 %

Fréquence cardiaque

Normale

Légèrement supérieure

Très élevée

Fréquence respiratoire

Normale

Tachypnée légère (rapide)

Hyperpnée

Pression artérielle

Normale

De normale à orthostatique

D’orthostatique à choc

Fréquence des mictions

Légère diminution

Diminution

Diminution marquée ou absence

Comportement

Normal

Irritabilité

De l’hyperirritabilité jusqu’au coma

Soif

Légère

Modérée

Intense

Muqueusesb

Normales

Sèches

Desséchées

Larmes

Présentes

Moins abondantes, yeux enfoncés

Absentes, yeux très enfoncés

Fontanelle antérieure

Normale

De normale à enfoncée

Enfoncée

Veine jugulaire externe

Visible en supination

Invisible

Invisible

Remplissage capillaire

> 2 sec.

2-4 sec.

> 4 sec.

Densité relative de l’urine

> 1 020 kg/m3

> 1 020 kg/m3 ; oligurie

Oligurie ou anurie

Perte pondérale

a Ces

signes ne sont pas tous présents en même temps. signes sont moins visibles lorsque les enfants sont atteints d’une hypernatrémie. Source : Adapté de Jospe, N. et Forbes, G. (1996). Fluids and electrolytes – clinical aspects. Pediatr Rev, 17 (11), 395-403 et Steiner, M.J., DeWalt, D.A., et Byerley, J.S. (2004). Is this child dehydrated ? JAMA, 291(22), 2746-2754. b Ces

TABLEAU 17.6

Perturbations de l’équilibre hydrique et électrolytique

MÉCANISMES ET CAUSES

MANIFESTATIONS CLINIQUES

SOINS INFIRMIERS

• Associées à la perte d’eau :

• Administrer des liquides par voie intraveineuse (I.V.) à une concentration saline appropriée.

Décit en sodium (hyponatrémie) • • • • • • • • • • • • •

818

Suivi prolongé d’un régime pauvre en sodium Diminution de l’apport en sodium Fièvre Transpiration excessive Augmentation de l’apport d’eau sans électrolytes Tachypnée (nourrissons) Fibrose kystique Brûlures et plaies Vomissements, diarrhée, aspiration nasogastrique, stules Insufsance surrénalienne Néphropathie Acidocétose diabétique Malnutrition

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

– mêmes que celles liées au décit en eau : déshydratation, faiblesse, étourdissements, nausées, crampes abdominales, appréhension – légère : apathie, faiblesse, nausées, pouls faible – modérée : hypotension, léthargie • Résultats d’analyses de laboratoire : – concentration du sodium < 130 mEq/L (peut être normale s’il y a perte de volume) – densité de l’urine variant en fonction de la présence d’un décit ou d’un excès en eau

• Mesurer les ingesta et les excreta.

TABLEAU 17.6

Perturbations de l’équilibre hydrique et électrolytique (suite)

MÉCANISMES ET CAUSES

MANIFESTATIONS CLINIQUES

SOINS INFIRMIERS

• Apport élevé en sel : par voie entérale ou I.V.

• Soif intense

• Néphropathie

• Sécheresse ou viscosité des muqueuses

• Administrer des liquides par voie I.V. selon l’ordonnance.

• Fièvre

• Rougeur de la peau

• Mesurer les ingesta et les excreta.

• Ingestion insufsante de lait maternel chez le nouveau-né (hypernatrémie par déshydratation)

• Élévation possible de la température

• Vérier les résultats des analyses de laboratoire.

• Augmentation de la perte insensible en eau :

• Oligurie

Excès en sodium (hypernatrémie)

• Enrouement

• Surveiller l’état neurologique.

– élévation de la température

• Nausées et vomissements

– augmentation de l’humidité

• Évolution possible vers un état de désorientation, des convulsions, des contractions musculaires, une raideur de la nuque, une léthargie au repos, une hyperirritabilité à la stimulation

– hyperventilation – diabète insipide – hyperglycémie

• S’assurer d’une ingestion sufsante de lait maternel et apporter une aide en allaitement à la mère et son enfant avant leur sortie de l’hôpital.

• Résultats d’analyses de laboratoire : – concentration sérique de sodium ≥ 150 mEq/L – augmentation du volume plasmatique – alcalose

Décit en eau • Incapacité d’absorber ou de réabsorber l’eau • Arrêt complet ou soudain d’apport hydrique ou diminution prolongée de l’apport hydrique :

• Manifestations cliniques dépendant en partie de la proportion d’électrolytes éliminés avec l’eau

• Remplacer les pertes hydriques proportionnellement à la diminution du volume des liquides.

– négligence d’ingestion par l’enfant ou par le proche aidant : confus, psychotique, inconscient ou sans défense

• Soif

• Assurer le maintien des liquides et des électrolytes.

• Variabilité de la température : élévation (infection)

• Déterminer et corriger la cause de la perte hydrique.

– pertes GI : vomissements, diarrhée, aspiration nasogastrique, stules

• Sécheresse de la peau et des muqueuses

• Mesurer les ingesta et les excreta.

• Diminution de la turgescence cutanée

• Prendre les signes vitaux.

• Perturbation de la chimie des liquides corporels : sécrétion inappropriée d’hormone antidiurétique (ADH)

• Mauvaise irrigation sanguine (pouls faible, temps de remplissage capillaire prolongé)

• Vérier la densité de l’urine.

• Élimination excessive par les reins : glycosurie (diabète)

• Perte pondérale

• Vérier les électrolytes sériques.

• Fatigue

• Pertes par la peau ou les poumons : – diaphorèse ou évaporation excessive : états fébriles, hyperventilation, élévation de la température ambiante, augmentation de l’activité (métabolisme basal) – atteinte de l’intégrité de la peau : transsudat des plaies – hémorragie • Causes iatrogènes : – surutilisation des diurétiques – réhydratation périopératoire inadéquate – utilisation d’une table à infrarouges ou de la photothérapie

• Peser régulièrement l’enfant.

17

• Diminution de la diurèse • Irritabilité et léthargie • Tachycardie • Tachypnée • Altération de l’état de conscience, désorientation • Résultats d’analyses de laboratoire : – élévation de la densité de l’urine – élévation du taux d’hématocrite – variabilité des électrolytes sériques – diminution de la concentration sérique de bicarbonates (HCO3) – variabilité du volume d’urine – augmentation de l’azote uréique du sang – augmentation de l’osmolalité sérique

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

819

TABLEAU 17.6

Perturbations de l’équilibre hydrique et électrolytique (suite)

MÉCANISMES ET CAUSES

MANIFESTATIONS CLINIQUES

SOINS INFIRMIERS

• Œdème :

• Limiter l’apport hydrique.

Excès en eau • Apport d’eau supérieur à l’élimination : – consommation excessive par voie orale

– généralisé

• Administrer des diurétiques.

– hyperhydratation hypotonique

– pulmonaire (râles humides ou crépitants)

• Prendre les signes vitaux.

– lavements à l’eau pure

– interstitiel (surtout dans les tissus conjonctifs lâches)

• Procéder à l’examen des signes neurologiques, au besoin.

• Incapacité à éliminer l’eau en présence d’une consommation normale :

• Élévation de la pression veineuse centrale

– néphropathie

• Hépatomégalie

– syndrome de sécrétion inappropriée d’hormone antidiurétique

• Pouls bondissant et lent

– insufsance cardiaque

• Léthargie

– malnutrition

• Augmentation de la pression du liquide cérébrospinal

• Gain pondéral

• Déterminer et traiter la cause de la surcharge hydrique. • Analyser les concentrations sériques des électrolytes. • Appliquer des précautions relatives aux convulsions.

• Manifestations du système nerveux central (SNC) (convulsions, coma) • Résultats d’analyses de laboratoire : – diminution de la densité de l’urine – diminution des électrolytes sériques – diminution du taux d’hématocrite – variabilité du volume d’urine Décit en potassium (hypokaliémie) • Inanition • Affections cliniques liées à un mauvais apport alimentaire

• Faiblesse musculaire, crampes, raideurs, paralysie et hyporéexie • Hypotension

• Surveiller les signes vitaux et l’ECG. • Administrer des suppléments de potassium ; vérier que le débit urinaire est sufsant avant de les administrer.

• Malabsorption

• Arythmie cardiaque, bruit de galop

• Absence de potassium dans le soluté I.V.

• Tachycardie ou bradycardie

• Pertes GI : diarrhée, vomissements, stules, aspiration nasogastrique

• Iléus ou occlusion intestinale

• Diurèse

• Irritabilité

• Administration de diurétiques

• Fatigue

• Dans le cas d’une prise orale, proposer des liquides et des aliments à haute teneur en potassium.

• Administration de corticostéroïdes

• Résultats d’analyses de laboratoire :

• Évaluer le bilan de l’équilibre acidobasique.

• Phase diurétique du syndrome néphrotique • Phase de cicatrisation des brûlures • Néphrite avec perte de potassium • Diurèse hyperglycémique (p. ex., diabète) • Paralysie périodique familiale • Administration I.V. d’insuline dans les cas d’acidocétose diabétique • Alcalose

820

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

• Apathie, somnolence

– diminution de la concentration sérique de potassium ≤ 3,5 mEq/L – électrocardiogramme (ECG) anormal : encoche ou aplatissement de l’onde T, dépression du segment ST, extrasystoles ventriculaires

• Administrer le potassium lentement si la voie I.V. est utilisée ; toujours surveiller l’ECG lorsque le potassium est administré en bolus.

TABLEAU 17.6

Perturbations de l’équilibre hydrique et électrolytique (suite)

MÉCANISMES ET CAUSES

MANIFESTATIONS CLINIQUES

SOINS INFIRMIERS

• Néphropathie

• Faiblesse musculaire, paralysie asque

• Surveiller les signes vitaux, y compris l’ECG.

• Insufsance rénale

• Contractions musculaires

• Insufsance surrénalienne (maladie d’Addison)

• Hyperréexie

• Administrer une résine échangeuse d’ions, si prescrite.

• Associé à l’acidose métabolique

• Bradycardie

• Administration I.V. trop rapide de chlorure de potassium

• Fibrillation ventriculaire et arrêt cardiaque

• Transfusion de sang moins frais

• Apnée : arrêt respiratoire

• Lésions par écrasement

• Résultats d’analyses de laboratoire :

Excès en potassium (hyperkaliémie)

• Brûlures

• Oligurie

• Hémolyse

– augmentation de la concentration sérique de potassium ≥ 5,5 mEq/L

• Déshydratation

– variabilité du volume d’urine

• Diurétiques d’épargne potassique

– aplatissement de l’onde P à l’ECG, onde T pointue, élargissement du complexe QRS, allongement de l’intervalle PR

• Augmentation de l’apport en potassium (p. ex., des succédanés du sel)

17.1.2

Œdème

L’œdème peut être localisé sur une petite ou une grande surface corporelle, ou il peut être généralisé. L’épanchement important et généralisé d’un grand volume de liquide dans tous les tissus de l’organisme se nomme anasarque. Outre l’œdème interstitiel expliqué ci-dessous, il existe plusieurs types d’œdème : • œdème périphérique ou enure palpable localisée ou généralisée de l’espace interstitiel ; • ascite ou épanchement de liquide dans la cavité abdominale (généralement associée à des anomalies rénales ou hépatiques) ; • œdème pulmonaire, qui survient en présence d’une augmentation du volume interstitiel ; • œdème cérébral, qui est une forme d’œdème particulièrement grave causée par un traumatisme, une infection ou d’autres facteurs étiologiques, dont une surcharge vasculaire ou une négligence dans l’administration I.V. de solutions hypotoniques ; • gain liquidien global, observé surtout chez les enfants atteints d’une néphropathie (Valentini, 2018).

Œdème interstitiel Le liquide intracellulaire se trouve dans les cellules, tandis que le liquide extracellulaire, à l’extérieur des cellules, comprend le liquide interstitiel et la lymphe. Quand le liquide extracellulaire est en excès à la suite d’une rétention ou d’une

• Administrer des liquides par voie I.V. selon l’ordonnance. • Administrer de l’insuline par voie I.V. (si prescrite) pour faciliter la migration du potassium vers l’intérieur des cellules. • Surveiller la concentration sérique du potassium. • Évaluer le bilan de l’équilibre acidobasique.

consommation excessive de liquides, les échanges entre le liquide extracellulaire et intracellulaire sont perturbés, et il se produit un phénomène d’accumulation ou d’inltration dans l’espace interstitiel nommé œdème interstitiel. Cette inltration est causée par des insufsances cardiaques, pulmonaires ou hépatiques, et elle est également présente en cas d’affections rénales graves ENCADRÉ 17.2.

Œdème généralisé L’œdème généralisé découlant de l’un ou l’autre des types d’œdème mentionnés ci-dessus se manifeste par une enflure des membres, du visage, du périnée et du torse. La disparition des plis cutanés normaux peut être observée. La pesée quotidienne est importante, car il s’agit d’un indicateur plus sensible du gain ou de la perte hydrique. Des variations dans la mesure du volume de l’abdomen peuvent aussi être un signe d’œdème chez l’enfant. La gravité de l’œdème peut être évaluée en pressant un doigt sur la peau contre une saillie osseuse pendant cinq secondes, puis en relâchant la pression. La profondeur de l’empreinte – ou godet – laissée par le doigt détermine le degré de l’œdème. FIGURE 17.3. Le principal objectif de la prise en charge de l’œdème est de traiter le processus morbide sous-jacent. Toutefois, un aspect essentiel de la prise en charge de toute surcharge liquidienne est la détection précoce, et l’inrmière y joue un rôle crucial. Chapitre 17

CE QU’IL FAUT RETENIR

En cas d’œdème, la pesée quotidienne est importante, car il s’agit d’un indicateur plus sensible du gain ou de la perte hydrique.

Troubles liés au système gastro-intestinal

821

17

Pratiques inrmières ENCADRÉ 17.2

Évaluer et traiter l’œdème interstitiel

Évaluation

• Palper les pouls périphériques.

• Considérer que toute augmentation de volume d’une partie du corps ne correspond pas nécessairement à un œdème.

• Peser l’enfant pour évaluer la rétention liquidienne.

• Localiser l’œdème : forme et partie du corps touchée, latéralité, symétrie.

• Faire les prélèvements sanguins prescrits (sodium, albumine, protéines, etc.).

• Inspecter l’apparence de la peau : coloration, pigmentation, présence d’inammation, altération de la circulation veineuse.

Interventions

• En cas d’œdème pulmonaire, surveiller la fréquence respiratoire (tachypnée), les mouvements de la cage thoracique ainsi que la coloration de la peau (cyanose), et mesurer la saturation en oxygène ; l’auscultation des poumons au stéthoscope permet de détecter les crépitations.

• Appliquer le bandage ou les bas compressifs prescrits.

• Mesurer l’œdème : noter la circonférence du membre atteint ainsi que le volume de l’œdème, et mentionner s’il est localisé ou diffus. • Évaluer l’évolution dans le temps : dessiner le contour au feutre pour pouvoir faire une comparaison ultérieure. • Évaluer l’œdème selon le moment de la journée (œdème cyclique) ou la position de l’enfant (œdème déclive). • Évaluer la sensibilité, la température, la fermeté (prise du godet) et la mobilité du membre touché.

• Surélever le membre atteint pour rétablir le retour veineux. • Prodiguer des soins cutanés pour prévenir l’altération de la peau. • Limiter la position debout prolongée si l’œdème est localisé dans les membres inférieurs. • Alterner les positions pour prévenir les lésions de pression. • Administrer les médicaments prescrits (diurétiques). • Limiter les apports liquidiens ou les ajuster selon les résultats des analyses sanguines. • Traiter la cause sous-jacente. • Signaler au médecin tout changement ou toute évolution.

Les troubles diarrhéiques peuvent résulter d’une atteinte de l’estomac et des intestins (gastroentérite), de l’intestin grêle (entérite), du côlon (colite), ou du côlon et de l’intestin grêle (entérocolite). La diarrhée peut être aiguë ou chronique .

Diarrhée aiguë

FIGURE 17.3

Évaluation de l’œdème en fonction de la profondeur du godet

17.1.3 ALERTE CLINIQUE

L’inrmière doit être attentive à tout signe de déshydratation. Si la diarrhée persiste plus de deux ou trois jours et que l’enfant montre des signes de déshydratation (p. ex., une léthargie, des cernes autour des yeux, etc.), elle doit le signaler immédiatement au médecin.

822

Partie 6

Diarrhée

La diarrhée est une manifestation découlant d’un dysfonctionnement en rapport avec la digestion, l’absorption et la sécrétion. Elle est causée par une anomalie du transport intestinal de l’eau et des électrolytes. À l’échelle mondiale, le nombre annuel d’épisodes de diarrhée chez l’enfant est estimé à 1,7 milliard ; la diarrhée est la cause du décès de 525 000 enfants de moins de 5 ans annuellement (Organisation mondiale de la Santé [OMS], 2017). Près de 11 % de tous les décès d’enfants vivant dans des pays en voie de développement sont liés à la diarrhée (OMS, 2013). La plupart des enfants des pays industrialisés atteints d’une gastroentérite présentent des formes légères de diarrhée. Au Canada, les chiffres indiquent quelque 220 000 hospitalisations par an pour traiter la déshydratation qui en découle (SCP, 2016c).

Troubles liés aux systèmes

La diarrhée aiguë est une cause importante de maladie chez les enfants de moins de 5 ans. Elle se dénit comme une augmentation soudaine de la fréquence des selles et une modication de leur consistance, et elle est souvent attribuable à la présence d’un agent infectieux dans le tractus GI. La diarrhée peut être associée à des infections des voies respiratoires supérieures ou des voies urinaires, à une antibiothérapie ou à la prise de laxatifs. En général, la diarrhée aiguë est spontanément résolutive et dure moins de 14 jours ; elle disparaît sans traitement particulier en l’absence de déshydratation. La diarrhée infectieuse aiguë (gastroentérite infectieuse) est provoquée par différents agents pathogènes viraux, bactériens et parasitaires TABLEAUX 17.7 et 17.8.

Diarrhée chronique La diarrhée chronique se dénit par une augmentation de la fréquence des selles ayant une teneur élevée en eau pour une période de plus de 14 jours. Ses causes les plus fréquentes sont les affections chroniques telles que les syndromes de malabsorption, une maladie inammatoire de l’intestin, une immunodécience, une allergie alimentaire, une intolérance au lactose et une diarrhée chronique non spécique ou découlant d’un traitement inadéquat d’une diarrhée aiguë.

TABLEAU 17.7

Causes infectieuses fréquentes de la diarrhée aiguë

DESCRIPTION

TRANSMISSION / INVASION

MANIFESTATIONS CLINIQUES

COMMENTAIRES

• Transmission par voie fécale-orale

• Vomissements suivis de selles aqueuses

• Cause importante d’infections nosocomiales

• Fièvre de légère à modérée

• Cause la plus courante de diarrhée chez les enfants de moins de 5 ans ; vulnérabilité accrue des nourrissons de 6 à 12 mois

Virus Rotavirus (SCP, 2017b) • Incubation : 48 heures • Diagnostic : examen immunoenzymatique • Sept groupes (A-G) : réplication de la plupart des virus du groupe A dans les cellules épithéliales des villosités matures de l’intestin grêle provoquant : – un déséquilibre entre l’absorption et les sécrétions de liquide dans l’intestin

• Diminution de la èvre et des vomissements généralement en 2 jours, mais persistance de la diarrhée de 5 à 7 jours

– une malabsorption des glucides complexes

• Forme généralement plus légère chez les enfants de plus de 3 ans ; enfants de tous âges affectés • Risque plus élevé de complications chez les enfants immunodéprimés • Incidence maximale pendant les mois d’hiver

Norovirus (Agence de la santé publique du Canada [ASPC], 2012a ; Rosenberg, 2016) • Incidence : de 300 à 400 cas annuels au Canada pour tous les groupes d’âge (ASPC, 2012a)

• Transmission par voie fécale-orale ; eau contaminée

• Incubation : de 12 à 48 heures

• Crampes abdominales, nausées, vomissements, malaise, èvre peu élevée, diarrhée sans trace de sang

• Diagnostic : examen immunoenzymatique

• Durée : de 2 à 3 jours

• Affection des cellules épithéliales des villosités de l’intestin grêle provoquant :

• Ressemblance des symptômes avec ceux d’une intoxication alimentaire, avec prédominance des nausées

– un déséquilibre entre l’absorption et les sécrétions de liquide dans l’intestin – une malabsorption des glucides complexes

• Pathologie analogue à celle des rotavirus • Enfants de tous âges affectés • Plusieurs souches identiées comme étant à l’origine d’une éclosion (p. ex., Norwalk, Sapporo, Snow Mountain, Montgomery)

Bactéries Groupe Salmonella (non typhoïdien) (ASPC, 2017a) • De 6 000 à 12 000 cas par année • Incubation : de 6 à 72 heures • Diagnostic : coloration de Gram, culture de selles • Bâtonnets à Gram négatif, non encapsulés et non sporulants

• Chez les enfants, infection liée aux animaux domestiques (p. ex., les chiens, les chats, les hamsters, les tortues) • Transmission tant qu’il y a excrétion de micro-organismes • Généralement, transmission d’une personne à l’autre, mais aussi par la viande et la volaille mal cuites (près de la moitié des cas causés par la volaille et les produits de la volaille) • Invasion de la muqueuse de l’intestin grêle et du gros intestin ; œdème de la lamina pro­ pria (couche de tissu faisant partie de la muqueuse intestinale) ; inammation aiguë et focale avec perturbation de la muqueuse et microabcès

• Nausées, vomissements, douleur abdominale, colique, diarrhée sanglante, èvre ; manifestations variables (de légères à graves) • Céphalées et manifestations cérébrales possibles (p. ex., de la somnolence, de la confusion, du méningisme, des convulsions) • Pour les nourrissons, possibilité de ne pas présenter de èvre ni d’apparence toxique • Possibilité d’une méningite et d’une septicémie menaçant la vie

• Incidence maximale pendant les mois chauds : de juillet à août • Éclosion d’origine alimentaire courante

17

• En général, excrétion du virus pendant une durée moyenne de 5 semaines ; certains cas rapportés jusqu’à 1 an • Antibiothérapie non recommandée dans les cas sans complications • Agents ralentissant le transit intestinal non indiqués, car risque de prolongation de l’état de porteur • Diminution de l’incidence au cours des 10 dernières années

• Nausées et vomissements de courte durée ; persistance de la diarrhée jusqu’à 2 à 3 semaines

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

823

TABLEAU 17.7

Causes infectieuses fréquentes de la diarrhée aiguë (suite)

DESCRIPTION

TRANSMISSION / INVASION

MANIFESTATIONS CLINIQUES

COMMENTAIRES

• Diarrhée causée par les souches E. coli (production d’une entérotoxine, d’une adhérence ou d’une invasion [E. coli produisant des entérotoxines, E. coli entérohémorragique, E. coli entéroagrégant])

• Diarrhée aqueuse pendant 1 à 2 jours, puis crampes abdominales graves et diarrhée sanglante

• Agent pathogène d’origine alimentaire

• Possibilité d’évolution vers un syndrome hémolytique et urémique

• Incidence maximale pendant l’été

Escherichia coli (ASPC, 2011b) • Incidence : environ 474 cas annuels pour tous les groupes d’âge (ASPC, 2017b) • Incubation : de 3 à 4 jours, selon la souche • Diagnostic : gélose sorbitol MacConkey (SMAC), agar-agar positif pour le sang ; leucocytes fécaux absents ou rares

• Cause d’épidémies dans les pouponnières

• Bactérie souvent associée à la diarrhée du voyageur • Traitement symptomatique • Possibilité d’aggravation du cours de l’infection par les antibiotiques • Agents ralentissant le transit intestinal et analgésiques opioïdes non indiqués

Entérocolite à Yersinia • Répandue dans le monde, mais moins fréquente dans les pays tropicaux ; au Québec, de 2010 à 2014, en moyenne 137 cas ont été déclarés chaque année (ministère de la Santé et des Services sociaux [MSSS], 2016d)

• Transmission par les animaux domestiques et les aliments

• Diarrhée muqueuse, parfois sanglante ; douleur abdominale évoquant une appendicite ; èvre, vomissements

• Pathologie mal comprise ; peut être due à la production d’entérotoxines • Incidence plus fréquente pendant les mois d’hiver • En général, cours clinique de l’infection non altéré par les antibiotiques dans les cas sans complications ; antibiothérapie administrée pour les infections avec complications et pour les enfants immunodéprimés

• Incubation : selon la souche, de 1 à 3 semaines • Diagnostic : culture de selles, test ELISA (Enzyme-Linked ImmunoSorbent Assay) • Leucocytose ; vitesse de sédimentation globulaire augmentée Campylobacter jejuni (ASPC, 2011a) • Répandu dans le monde entier (ASPC, 2011a) • Incidence : de 35,2 à 49,69 cas par 100 000 personnes selon les régions au Canada (Kaakoush, Castaño-Rodríguez, Mitchell et al., 2015) • Incubation : de 1 à 7 jours • Possibilité d’une maladie liée à la quantité de bactéries • Diagnostic : culture des selles, parfois hémoculture • Souvent présent dans le tractus GI d’animaux domestiques ou sauvages • Bacilles microaérophiles, mobiles, à Gram négatif • Infection plus fréquente chez les enfants de moins de 5 ans et chez les jeunes adultes (de 15 à 29 ans) que chez les autres groupes d’âge (ASPC, 2011a)

• Transmission par voie fécale-orale

• Fièvre, douleur abdominale, vomissements

• Chez l’humain, infections liées à la consommation d’eau ou d’aliments contaminés, notamment la viande mal cuite, surtout le poulet

• Diarrhée parfois sanglante, profuse, nauséabonde

• Transmission par les animaux domestiques contaminés (p. ex., les chiens, les chats, les hamsters)

• Sur le plan clinique, ressemblance de l’infection avec celle par Salmonella

• Infection mal comprise, parfois liée à : – l’adhérence de toxines à la muqueuse intestinale – l’invasion de la muqueuse de l’iléon terminal et du côlon – la translocation (qui permet aux micro-organismes de pénétrer la muqueuse et de se répliquer dans la lamina propria) • Pics à répartition bimodale : nourrissons de moins de 1 an affectés, puis autre pic entre l’âge de 15 et 29 ans • État de porteur des bactéries non prolongé par les antibiotiques (possibilité d’éliminer le microorganisme plus rapidement) • Médicament de choix : érythromycine • Agents ralentissant le transit intestinal non recommandés (tendent à prolonger les symptômes)

824

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

TABLEAU 17.7

Causes infectieuses fréquentes de la diarrhée aiguë (suite)

DESCRIPTION

TRANSMISSION / INVASION

MANIFESTATIONS CLINIQUES

COMMENTAIRES

Clostridium difcile (Institut national d’excellence en santé et en services sociaux, 2017 ; SCP, 2017a) • Incidence : de 15 à 63 % des nouveau-nés, de 3 à 33 % des nourrissons et des trottineurs de moins de 2 ans ; jusqu’à 8,3 % des enfants de plus de 2 ans sont porteurs asymptomatiques (Kim, Shaklee, Smathers et al., 2012)

• Bactérie associée à une altération de la ore intestinale physiologique causée par les antibiotiques

• Le plus souvent, diarrhée légère durant quelques jours ; parfois, diarrhée et maladie prolongées

• Transmission par voie fécale-orale

• Possibilité d’une colite pseudomembraneuse

• Répandu dans le monde entier

• Autres populations à risque : enfants immunosupprimés (oncologie, maladie inammatoire de l’intestin)

• Fièvre élevée, leucocytose et hypoalbuminémie chez certains enfants extrêmement malades

• Diagnostic : détection de la toxine de C. difcile dans une culture de selles • Maladie bénigne au Canada

• Manifestations cliniques plus graves chez les adultes que chez les enfants

• Bacilles à Gram positif anaérobiques ; possibilité de production de spores

• Production de 2 toxines importantes (A et B) • Toxines liées aux récepteurs à la surface des entérocytes, nuisant ainsi à la perméabilité membranaire et à la synthèse des protéines, et entraînant une cytotoxicité directe • Enfant infecté en milieu hospitalier habituellement placé en isolement strict (chambre individuelle et équipement de protection) pour éviter la contamination • Traitement à base d’antibiotiques pour les enfants dont les manifestations cliniques varient de légères à modérées : métronidazole ; enfants n’ayant pas répondu au traitement précédent : vancomycine • Souches résistantes parfois observées • Récidives courantes

Staphylococcus (ASPC, 2011c) • Répandu dans le monde entier • Incubation : généralement courte, de 1 à 8 heures • Diagnostic : micro-organisme décelé dans les aliments, le sang, le pus et les sécrétions

• Transmission par des aliments mal cuits ou mal réfrigérés • Invasion directe des tissus et production de la toxine

• Bactérie à Gram positif, non mobile, aérobique ou anaérobique facultative

• Variabilité du tableau clinique selon le point d’entrée

• Infection spontanément résolutive • Traitement symptomatique

• Dans les cas d’intoxication alimentaire, diarrhée abondante, nausées et vomissements

17

Groupes Shigella • Cause courante de diarrhée au Canada (ASPC, 2013b) • Incubation : 1 à 7 jours • Diagnostic : culture de selles avec beaucoup de leucocytes polymorphonucléaires • Bactéries anaérobiques non mobiles à Gram négatif

• Entérotoxines envahissant l’épithélium affecté d’ulcérations supercielles de la muqueuse

• Apparence maladive de l’enfant • Premières manifestations cliniques : èvre, fatigue et anorexie • Crampes abdominales douloureuses précédant une diarrhée liquide ou sanglante • Résorbtion des manifestations cliniques en 5 à 10 jours • Persistance des manifestations cliniques aiguës pendant au moins 1 semaine

Chapitre 17

• Pour la plupart des cas, enfants de moins de 9 ans ; dans près d’un tiers des cas, enfants âgés de 1 à 4 semaines • Diminution de la durée de la maladie et du taux de mortalité par une antibiothérapie adéquate • Risque de déshydratation dans tous les cas • Médicaments antidiarrhéiques non recommandés (prédisposition du sujet à un mégacôlon toxique)

Troubles liés au système gastro-intestinal

825

TABLEAU 17.8

Causes infectieuses moins fréquentes de la diarrhée aiguë

DESCRIPTION

TRANSMISSION / INVASION

MANIFESTATIONS CLINIQUES

COMMENTAIRES

• Mode de transmission le plus courant : ingestion d’aliments et d’eau contaminés avec des selles humaines

• Fièvre entérique : syndrome systémique

• Incidence beaucoup plus faible dans les pays développés ; environ 25 cas entre 2009 et 2014 au Québec (MSSS, 2016c) ; la plupart des cas résultent de l’importation de bacilles typhiques des régions endémiques et d’une transmission par des personnes ayant voyagé hors du pays

Groupe Salmonella typhi • Cas sporadiques en Amérique du Nord (ASPC, 2017a) • Incubation : habituellement de 7 à 14 jours, mais parfois de 3 à 30 jours, selon la taille de l’inoculum • Diagnostic : hémocultures positives ; cultures des selles et de l’urine parfois positives • Stade avancé : culture positive de moelle osseuse

• Transmission congénitale et intrapartum possible • Invasion dans le sang ; après l’ingestion, le micro-organisme se détache des microvillosités des bordures en brosse de l’iléon, et les bactéries envahissent l’épithélium intestinal par les plaques de Peyer ; le micro-organisme est ensuite transporté vers les ganglions lymphatiques intestinaux, il entre dans la circulation sanguine par les canaux thoraciques et se rend dans les cellules réticuloendothéliales par la circulation, causant une bactériémie

• Importance des manifestations chez les très jeunes enfants (nourrissons) • Douleur abdominale, diarrhée, nausées, vomissements, èvre élevée, léthargie

• Traitement par antibiothérapie • Trois vaccins utilisés contre cette bactérie

Vibrio cholerae • Rare au Canada ; surtout en Afrique et dans le continent indien (ASPC, 2010a)

• Transmission par voie orale par les aliments ou l’eau contaminés

• Incubation : 1 à 3 jours

• En cas de survie à l’environnement acide de l’estomac, mutation de la bactérie vers l’intestin grêle, adhésion à sa muqueuse et production de toxines

• Diagnostic : culture de selles • Bacilles à Gram négatif, mobiles, courbés, vivant dans les réserves d’eau salée

• Apparition soudaine ; vomissements, diarrhée liquide sans crampes ni ténesme

• Traitement primordial : la réhydratation

• Possibilité de déshydratation rapide

• Aucun vaccin à l’heure actuelle

• Transmissible par des produits alimentaires contaminés

• Tableau clinique lié à l’âge et à la souche du botulisme

• Bactérie parfois contractée en raison de l’infection d’une plaie

• GI : douleur abdominale, crampes et diarrhée

• Autres souches : enfants présentant des difcultés respiratoires, des manifestations cliniques liées du SNC

• Antibiothérapie pouvant écourter la diarrhée

Clostridium botulinum • Rare au Canada (Agence canadienne d’inspection des aliments, 2013) • Période d’incubation : 12 à 26 heures (intervalle : 6 heures à 8 jours) • Bacilles à Gram positif, anaérobiques, producteurs de spores

• Botulisme dû au couplage de la toxine à la jonction neuromusculaire

• Détection de la toxine par une hémoculture et une culture de selles envoyées à un laboratoire spécialisé (généralement un du ministère de la Santé et des Services sociaux)

826

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

• Principal traitement : soins de soutien et neutralisation de la toxine

La diarrhée rebelle du nourrisson est un syndrome qui se manifeste pendant les premiers mois de vie, qui persiste plus de 2 semaines en l’absence de micro-organismes pathogènes décelables et qui est réfractaire au traitement. La cause la plus commune est une diarrhée infectieuse aiguë traitée de façon inadéquate.

Diarrhée chronique non spécique La diarrhée chronique non spécique, aussi appelée côlon irritable de l’enfance et diarrhée du trottineur, est une cause courante de diarrhée chronique chez les enfants âgés de six mois à cinq ans environ. Ce type de diarrhée, dont la durée est de plus de deux semaines, fait en sorte que ces enfants ont des selles molles qui contiennent souvent des particules alimentaires non digérées. La croissance des enfants atteints de diarrhée chronique non spécique est normale ; ils ne présentent aucun signe de malnutrition, de sang dans les selles ou d’infection entérique. Des intolérances et des excès alimentaires ont été associés à la diarrhée chronique. La consommation exagérée de jus et d’édulcorants articiels comme le sorbitol, une substance présente dans plusieurs aliments et boissons du commerce (boissons gazeuses, boissons aux fruits, bonbons, etc.), peut y contribuer.

Étiologie La plupart des micro-organismes pathogènes à l’origine de la diarrhée se répandent par voie fécale-orale, par de l’eau ou des aliments contaminés, ou par contact étroit d’une personne à l’autre (p. ex., dans les milieux de garde). L’absence d’eau propre, le surpeuplement, la mauvaise hygiène, les décits nutritionnels et l’insalubrité sont les principaux facteurs de risque, surtout dans les cas dus à des micro-organismes pathogènes bactériens ou parasitaires. L’augmentation de la fréquence et de la gravité des maladies diarrhéiques chez les nourrissons est également due aux particularités développementales liées au très jeune âge, qui rendent ceux-ci plus sensibles aux agents pathogènes. Ainsi, le système immunitaire, n’ayant pas encore été exposé à de nombreux micro-organismes pathogènes, ne possède pas les anticorps pour protéger le nourrisson. À l’échelle mondiale, les causes les plus courantes de la gastroentérite aiguë sont les agents infectieux : les virus, les bactéries et les parasites. Dans les pays industrialisés, les virus, particulièrement le rotavirus, sont responsables de la majorité des diarrhées infectieuses (OMS, 2013).

Rotavirus Le rotavirus, la principale cause de gastroentérites graves chez les enfants, est un micro-organisme pathogène nosocomial répandu qui nécessite une hospitalisation chez 1 enfant sur 62 (SCP, 2017b). La maladie à rotavirus est plus grave chez les enfants de 3 à 24 mois. Les enfants de moins de 3 mois sont relativement protégés de la maladie par les anticorps maternels qui leur ont été transmis par l’allaitement, ainsi que par la vaccination, qui est recommandée pour tous les nourrissons, sauf ceux qui sont immunosupprimés ou qui ont des antécédents de maladies qui les prédisposent à une invagination (SCP, 2017b). On sait que les enfants immunosupprimés sont plus vulnérables à une gastroentérite à rotavirus grave, prolongée ou même fatale. La mortalité causée par le rotavirus demeure extrêmement rare (SCP, 2017b).

Bactéries Salmonella, Shigella et Campylobacter sont les micro-organismes bactériens les plus souvent isolés. La bactérie Salmonella est plus fréquente chez les nourrissons, alors que Giardia et Shigella affectent plus souvent les trottineurs. L’infection à Shigella, ou shigellose, touche environ 800 personnes chaque année au Canada (ASPC, 2013b). L’infection à Campylobacter est plus répandue chez les enfants de moins de 5 ans (ASPC, 2012b). L’infection par des parasites comme Giardia entraîne souvent des épidémies chez les jeunes enfants placés en garderie. La giardiase est une maladie à déclaration obligatoire (MADO) (MSSS, 2015) 9 .

9 Les différents types de maladies susceptibles d’être transmises en service de garde sont présentés dans le chapitre 9, Maladies infectieuses et immunisation.

L’administration d’antibiotiques est fréquemment associée à une diarrhée, car ces agents modient la ore physiologique de l’intestin, favorisant ainsi une surcroissance d’autres bactéries comme Clostridium difcile. Les cas déclarés de diarrhées associées au C. difcile (DACD) nosocomiales ont diminué d’environ 22 % entre 2011 et 2016 (Institut national de santé publique du Québec, 2016).

17

Physiopathologie La pathogenèse de la diarrhée dépend de l’action du micro-organisme : soit il reste attaché à la surface cellulaire et il produit des toxines sécrétoires (diarrhée non invasive, qui produit des toxines, de type non inammatoire), soit il pénètre la muqueuse (diarrhée invasive ou systémique). La diarrhée non inammatoire est la forme la plus courante : elle résulte de l’action d’entérotoxines libérées après la liaison d’un micro-organisme pathogène à la

Chapitre 17

CE QU’IL FAUT RETENIR

À l’échelle mondiale, les causes les plus courantes de la gastroentérite aiguë sont les agents infectieux : les virus, les bactéries et les parasites.

Troubles liés au système gastro-intestinal

827

Jugement

clinique Marianne a 11 ans et elle vient d’être admise à l’unité de soins pédiatriques pour diarrhées rebelles avec présence de sang. Au cours de votre collecte des données, vous apprenez que Marianne a reçu des tortues pour son anniversaire. Vous vous empressez de communiquer cette information à l’équipe médicale. Pour quelle raison avisez-vous l’équipe médicale de cette donnée ?

muqueuse (Giannattasio, Guarino et Lo Vecchio, 2016). Les troubles physiologiques les plus préoccupants et immédiats dus à une maladie diarrhéique grave sont : • la déshydratation ; • le déséquilibre acidobasique avec acidose ;

• l’état de choc qui survient lorsque la déshydratation évolue au point d’affecter gravement l’état circulatoire.

Diagnostic L’examen de l’enfant souffrant d’une gastroentérite aiguë commence par une anamnèse minutieuse visant à découvrir la cause possible de la diarrhée, l’évaluation de la gravité des manifestations cliniques et du risque de complications, et la collecte d’information sur les manifestations cliniques courantes susceptibles d’indiquer d’autres maladies traitables à l’origine de la diarrhée. L’anamnèse doit inclure des questions sur les voyages récents, l’exposition à des sources d’eau potable ou de lavage non traitée, le contact avec des animaux domestiques ou sauvages, la fréquentation d’une garderie, un traitement par antibiotiques ou un changement de diète récents. Les questions doivent aussi porter sur la présence possible d’autres manifestations comme la èvre et les vomissements, la fréquence et l’apparence des selles (p. ex., aqueuses ou sanguines), l’excrétion urinaire, les habitudes alimentaires et l’absorption récente d’aliments. Les analyses de laboratoire approfondies ne sont pas nécessaires dans le cas d’enfants affectés par une diarrhée sans complications et sans signes de déshydratation, car la plupart des maladies diarrhéiques se résolvent spontanément. Elles sont cependant indiquées pour les enfants qui souffrent d’une déshydratation grave et qui reçoivent un traitement par voie intraveineuse FIGURE 17.4.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les nourrissons et les enfants qui souffrent d’une diarrhée aiguë et de déshydratation doivent recevoir avant tout une solution de réhydratation orale.

828

Partie 6

Les selles liquides et explosives indiquent une intolérance au glucose ; les selles nauséabondes, graisseuses et volumineuses signalent une malabsorption des lipides. La diarrhée survenant à la suite de l’introduction dans l’alimentation du lait de vache, des fruits ou des céréales peut être liée à un décit enzymatique ou à une intolérance protéique. La présence de neutrophiles ou de globules rouges dans les selles signale une gastroentérite bactérienne ou une maladie inammatoire de l’intestin. La présence d’éosinophiles indique une intolérance aux protéines ou une infection

Troubles liés aux systèmes

parasitaire. Les cultures de selles ne sont recommandées qu’en présence de sang, de mucus ou de leucocytes polymorphonucléaires dans les selles, de manifestations cliniques graves, d’un voyage récent dans un pays en voie de développement ou d’une suspicion d’un agent pathogène précis. La présence de sang apparent ou occulte dans les selles annonce des micro-organismes pathogènes comme Shigella, Campylobacter ou des souches hémorragiques d’E. coli. Un examen immunoenzymatique permet de conrmer la présence du rotavirus ou de Giardia. S’il y a administration récente d’une antibiothérapie, les selles doivent être soumises au test de dépistage de la toxine de C. difficile. Lorsque les résultats des tests de cultures bactériennes et virales sont négatifs et que la diarrhée persiste plus de quelques jours, il faut procéder à un examen parasitologique des selles. Un pH inférieur à 6 et la présence de substances réductrices dans un échantillon de selles peuvent indiquer une malabsorption des glucides ou une décience secondaire en lactase. L’analyse des taux d’électrolytes dans les selles peut contribuer au dépistage d’une diarrhée sécrétoire. Si une déshydratation est soupçonnée, il faut mesurer la densité urinaire. L’enfant appelé à être hospitalisé doit être soumis à une formule sanguine complète (FSC) et à la mesure du taux sérique d’électrolytes, de créatinine et d’azote uréique du sang. En cas de diarrhée aiguë, les taux d’hémoglobine, d’hématocrite, de créatinine et d’azote uréique du sang sont généralement élevés et doivent être ramenés à la normale par une réhydratation.

Approche thérapeutique Les principaux objectifs de la prise en charge d’une diarrhée aiguë sont l’évaluation du déséquilibre liquidien et électrolytique, la réhydratation, le traitement liquidien d’entretien et la réintroduction d’une alimentation adéquate. Les nourrissons et les enfants qui souffrent d’une diarrhée aiguë et de

FIGURE 17.4 La réhydratation par voie intraveineuse peut être nécessaire dans les cas de déshydratation grave.

Après la réhydratation, pendant la thérapie liquidienne d’entretien, il est possible d’utiliser une SRO en alternance avec une solution de liquide à faible teneur en sodium comme l’eau, le lait maternel, une formule sans lactose ou une formule de lactose à demi diluée. Il est possible d’administrer une SRO aux enfants plus âgés tout en poursuivant l’alimentation habituelle. Les pertes continues de selles doivent être remplacées par une SRO selon le ratio 1:1. Si le

volume des selles est inconnu, il faut administrer environ 10 mL/kg de SRO pour chaque selle diarrhéique.

clinique

Jugement

déshydratation doivent recevoir avant tout une solution de réhydratation orale (SRO). La SRO est un des plus éminents progrès des soins médicaux dans le monde entier. Elle est plus efcace, moins dangereuse, moins douloureuse et moins coûteuse qu’une réhydratation I.V. La Société canadienne de pédiatrie, l’Organisation mondiale de la Santé et les Centers for Disease Control and Prevention recommandent tous la SRO comme traitement de choix pour la plupart des cas de déshydratation due à la diarrhée (SCP, 2016c), sauf en cas de déshydratation grave. Les SRO stimulent et favorisent la réabsorption du sodium et de l’eau. Des études révèlent que ces solutions diminuent beaucoup les vomissements, la perte volumique liée à la diarrhée et la durée de la maladie. Les SRO, y compris les SRO à osmolalité réduite, sont commercialisées en Amérique du Nord sous forme de solutions préparées qui parviennent à traiter la majorité des cas de déshydratation chez les nourrissons. La FIGURE 17.5 présente la procédure de réhydratation recommandée par la Société canadienne de pédiatrie en fonction du degré de déshydratation.

Maya, âgée de quatre ans, a accompagné ses parents il y a un mois dans plusieurs pays d’Afrique. Depuis son retour, elle a des selles diarrhéiques. Les cultures de selles sont négatives, de même que les tests virologiques. Quelle autre analyse serait-il pertinent d’effectuer sur les selles de Maya ?

Les SRO sont utiles dans la plupart des cas de déshydratation et a) Recherche de sang occulte. elles peuvent être utilib) Recherche de parasites. sées même s’il y a des vomissements. Pour les c) Recherche de graisses fécales. cas les moins graves, d) Recherche de C. difcile. une étude canadienne a démontré que l’utilisation initiale de jus de pomme dilué, suivie de la boisson préférée de l’enfant, était sufsamment efcace pour traiter la déshydratation (Freedman, L’Agence de la santé publique Willan, Boutis et al., 2016). Un enfant qui souffre du Canada propose plusieurs de vomissements plus intenses doit recevoir une recommandations pour l’admipetite quantité de SRO à des intervalles fréquents. nistration d’une solution de réhyDans le cas des jeunes enfants, un liquide peut dratation orale aux nourrissons, être administré toutes les 1 à 5 minutes avec une aux enfants de moins de deux cuillère ou une petite seringue en paliers de 5 à ans et aux enfants plus âgés. 10 mL. Il est également possible d’administrer une Ces recommandations SRO à l’aide d’une sonde nasogastrique ou d’une peuvent être consultées au gastrostomie. Les nourrissons qui ne présentent www.phac-aspc.gc.ca. pas de signes cliniques de déshydratation ne requièrent pas de SRO. Ils doivent toutefois recevoir les mêmes liquides recommandés aux nourrissons qui présentent des signes de déshydratation pendant la phase d’entretien et pour le remplacement des pertes liquidiennes qui s’opèrent par les selles. L’emploi de probiotiques réduirait le risque

17

FIGURE 17.5

Algorithme du traitement de la gastroentérite aiguë chez l’enfant

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

829

ALERTE CLINIQUE

Les boissons gazeuses sucrées et la gélatine ne doivent pas être administrées, car elles sont riches en glucides, contiennent peu d’électrolytes et ont une osmolalité élevée. Les bouillons de poulet ou de bœuf doivent être évités, car ils contiennent trop de sodium et une quantité inadéquate de glucides. Le régime BRATT (Bananes, Riz, compote de pommes [Applesauce], biscottes [Toast] et Thé) est contre-indiqué pour l’enfant, car sa valeur nutritionnelle (calories et protéines) est limitée (Guandalini, 2017a), sauf en phase de transition (24 heures) et à court terme.

de diarrhée associée aux antibiotiques chez les enfants âgés de 1 à 18 mois (Johnston, Goldenberg et Parkin, 2016).

Réintroduction d’aliments La réintroduction rapide des nutriments est souhaitable et de plus en plus admise. L’alimentation continue ou la réintroduction rapide de l’alimentation habituelle n’a pas d’effets indésirables et diminue en fait l’intensité ainsi que la durée de la maladie ; elle favorise davantage le gain pondéral qu’une réintroduction graduelle des aliments (SCP, 2016c). Les nourrissons allaités au lait maternel ou non devraient continuer de prendre du lait, et une SRO peut être utilisée pour remplacer les pertes continues. Il est possible de proposer une alimentation normale à base de lait aux enfants plus âgés après la réhydratation. Il n’est pas contre-indiqué de continuer à donner des aliments mous ou en purée aux trottineurs. Une alimentation comprenant des aliments facilement digestibles, notamment les céréales, les légumes cuits et les viandes, convient à l’enfant plus âgé .

Déshydratation grave

CE QU’IL FAUT RETENIR

La plupart des diarrhées d’origine bactérienne sont spontanément résolutives, et la diarrhée disparaît souvent avant que le microorganisme en cause ne soit détecté.

En cas de déshydratation grave et d’état de choc, il faut administrer des liquides I.V. dès que l’enfant n’est plus en mesure de consommer des quantités sufsantes de liquides et d’électrolytes pour compenser les pertes physiologiques quotidiennes en cours, les décits antérieurs et les pertes anormales en cours (Toaimah et Mohammad, 2016). Les enfants qui requièrent habituellement des liquides I.V. sont ceux qui souffrent d’une déshydratation grave ou de vomissements incontrôlables, qui sont incapables de boire, quelle qu’en soit la raison (p. ex., une fatigue extrême, un coma), ou qui souffrent d’une distension gastrique grave.

TABLEAU 17.9

La solution I.V. est prescrite en fonction des renseignements disponibles sur le type et la cause probable de la déshydratation ; il s’agit en général d’une solution saline contenant du dextrose 5 % dilué dans l’eau. Le bicarbonate de sodium n’est ajouté que dans le cas d’une acidose importante associée à une déshydratation grave (AHA, 2011). Bien que la phase initiale du remplacement des liquides soit rapide en cas de déshydratation isotonique et hypotonique, le remplacement rapide des liquides est contre-indiqué en cas de déshydratation hypertonique en raison du risque d’intoxication à l’eau, en particulier pour les cellules cérébrales (risque d’œdème cérébral). Les solutions de remplacement par voie orale ou entérique sont préférables, mais, dans certaines situations telles qu’une détresse respiratoire, une perfusion intraveineuse est nécessaire TABLEAU 17.9.

Poursuite des traitements après la réhydratation Lorsque les effets les plus graves de la déshydratation sont maîtrisés, les mesures diagnostiques et thérapeutiques précises pour traiter la cause de la diarrhée doivent être amorcées. Une dose d’ondansétron par voie orale est efcace pour réduire la fréquence des vomissements (SCP, 2016a). De plus, à l’urgence, l’administration de liquides I.V. est prescrite chez les nourrissons et les enfants de 6 mois à 12 ans qui souffrent d’une déshydratation légère à modérée ou qui n’ont pas réagi à un essai de réhydratation orale (SCP, 2016c). Le recours aux antibiotiques pour les enfants atteints d’une gastroentérite aiguë prête à controverse. Ces médicaments peuvent effectivement écourter certains épisodes de diarrhée, comme ceux dont sont responsables les bactéries du genre Shigella. Cependant, la plupart des diarrhées d’origine bactérienne sont spontanément résolutives, et la diarrhée disparaît souvent avant que le microorganisme en cause ne soit détecté.

Solutions intraveineuses de remplacement

CONDITIONS

SOLUTION I.V. DE REMPLACEMENT

JUSTIFICATIONS

Statut NPO Polyurie Diarrhée Réhydratation

D5 ½ NS + 20 mEq/L KCl ou D5 NS + 20 mEq/L KCl

Remplacement d’électrolytes Prévention de l’hypoglycémie Prévention de l’hypokaliémie

Perte gastrique

NS + 10 mEq/L KCl

Remplacement de Na, H+, Cl−, K+

Déshydratation

NS

Réhydratation

Réanimation

NS

Remplacement du volume vasculaire

Source : Adapté de www.rch.org.au/clinicalguide/guideline_index/Intravenous_Fluids/ ; Somers, M.J. (2018). Maintenance Fluid Therapy in Children. UpToDate.com ; Alexander, S.R., Baum, M.G. Fluid and Electrolyte Therapy in Children. Repéré à www.med.stanford.edu/content/dam/sm/ pednephrology/.../FluidElectrolyteTherapy.doc et NSW Government Health. (2015). Standards for Paediatric Intravenous Fluids : NSW Health (2e ed.). Document numéro GL2015_008. Repéré à www1.health.nsw.gov.au/pds/ActivePDSDocuments/GL2015_008.pdf.

830

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

Deux vaccins sont disponibles au Canada. Le vaccin pentavalent oral à virus vivant contre le rotavirus (RotaTeqMD) a été commercialisé en 2006. Le vaccin oral à rotavirus humain vivant atténué (RotarixMD) a été homologué en 2008 (SCP, 2017b). Les nourrissons devraient recevoir trois doses du vaccin oral RotaTeqMD : à deux mois, à quatre mois

et à six mois. Deux doses de RotarixMD, à au moins quatre semaines d’intervalle, procureront une immunité protectrice durant la période à risque de complications (ASPC, 2018 ; MSSS, 2016b).

clinique

Jugement

Prévention

Aurélie est âgée de deux ans. En soirée, sa mère téléphone au service Info-Santé et rapporte que sa lle a fait quatre selles liquides depuis le matin. Elle demande si elle doit aller au service des urgences. Formulez trois questions utiles pour évaluer la situation d’Aurélie, qui vous permettront de conseiller adéquatement la mère.

Soins inrmiers DIARRHÉE

La plupart du temps, la prise en charge de la diarrhée aiguë se fait à domicile. Parce que le pronostic vital peut être menacé, surtout chez les très jeunes enfants, l’inrmière explique aux parents comment évaluer la gravité de la diarrhée et en prévenir les complications comme la déshydratation. Elle leur enseigne à évaluer la déshydra tation, notamment en comptant le nombre de couches souillées ou de mictions, à mesurer la quantité de liquide ingérée par l’enfant, et à évaluer la fréquence et le volume des selles. Il importe également qu’elle leur fournisse de l’information sur la réhydratation par voie orale, en particulier sur l’administration de solutions permettant d’assurer le maintien de l’équilibre liquidien, et sur la nécessité de combler les pertes hydriques. Les SRO doivent être administrées souvent et en faible quantité. Elles ne sont pas contre-indiquées en cas de vomissements, à moins que ceux-ci ne soient violents. Par ailleurs, il est essentiel que l’inrmière renseigne les parents au sujet de la reprise d’une alimentation normale et qu’elle leur explique que le volume des selles peut augmenter légèrement à ce moment, de même que pendant l’administration continue de SRO visant à combler les pertes fécales. Il convient de souligner que les bienfaits de cette méthode, à savoir l’obtention de meilleurs résultats nutritionnels et une réduction du risque de complications et de la durée de la diarrhée par rapport aux autres méthodes, l’emportent sur les inconvénients, en l’occurrence l’augmentation de la fréquence des selles. Enn, l’inrmière doit veiller à répondre aux préoccupations des parents pour qu’ils se conforment au plan de traitement.

Prodiguer des soins durant l’hospitalisation À l’hôpital, l’inrmière doit peser avec précision l’enfant qui est affecté par une diarrhée aiguë et qui souffre de déshydratation, et surveiller étroitement les pertes ainsi que les apports liquidiens ENCADRÉ 17.3. L’enfant peut être mis sous réhydratation intraveineuse et astreint à un régime

NPO pendant 12 à 48 heures. C’est à l’inrmière qu’il incombe de surveiller la perfusion intraveineuse : elle doit vérier que la concentration en électrolytes de la solution administrée et le débit de perfusion sont adéquats, et que le site d’injection est fonctionnel. Il est important de mesurer avec précision les excreta an de savoir si le débit de la circulation rénale est sufsamment important pour ajouter du potassium à la perfusion intraveineuse. L’inrmière est chargée d’examiner les selles et de prélever des échantillons à des ns d’analyses de laboratoire. Elle doit prendre les précautions qui s’imposent pendant le prélèvement et le transport des échantillons fécaux an de prévenir la propagation des infections. Elle peut se servir d’un abaisse-langue propre pour prélever les échantillons destinés aux analyses de laboratoire ou pour les mettre en culture. Elle devra par ailleurs éviter de prendre la température de l’enfant par voie rectale, car l’insertion du thermomètre stimule la motilité intestinale et augmente du même CONSEIL CLINIQUE coup la fréquence des selles. La prise de la température par voie buccale Pour réduire le risque d’infection par des ou axillaire est recommandée. Étant bactéries transmissibles par des aliments, donné que les selles diarrhéiques il faut encourager les parents à : irritent beaucoup la peau, l’inrmière veillera tout particulièrement • congeler ou à réfrigérer rapidement à protéger la région recouverte par la viande hachée et tout autre aliment les couches afin de prévenir les périssable ; excoriations. • ne jamais décongeler un aliment sur

Enseigner les soins à l’enfant et à la famille L’infirmière doit tenir les parents informés de l’évolution de l’état de santé de leur enfant et leur expliquer la nécessité de procéder à l’hygiène des mains fréquemment et soigneusement. De plus, elle doit insister sur la mise au rebut appropriée des couches ainsi que sur la bonne façon de disposer de la literie et des vêtements souillés.

Chapitre 17

le comptoir et à ne pas le laisser hors du réfrigérateur pendant plus de deux heures ; • procéder à l’hygiène des mains et à nettoyer les couverts ainsi que les surfaces avec de l’eau chaude savonneuse après tout contact avec de la viande crue ; • bien cuire la viande hachée jusqu’à ce que celle-ci devienne brune ou grise à l’intérieur, ou que la température interne atteigne 71 °C.

Troubles liés au système gastro-intestinal

831

17

Mise en œuvre d’une démarche de soins ENCADRÉ 17.3

Diarrhée

COLLECTE DES DONNÉES – ÉVALUATION INITIALE

RÉSULTATS ESCOMPTÉS

L’inrmière observe l’apparence générale et le comportement de l’enfant. Elle évalue la déshydratation en vériant, par exemple, si le débit urinaire a diminué ; s’il y a eu une perte pondérale ; si les muqueuses sont sèches ; si la turgescence cutanée est faible ; si les fontanelles sont enfoncées ; et si la peau est pâle, froide ou sèche. Dans les cas graves de déshydratation, l’augmentation du pouls et de la respiration, la diminution de la pression artérielle et le prolongement du temps de remplissage capillaire (supérieur à 2 sec.) peuvent indiquer un état de choc imminent. L’anamnèse permet de repérer les agents causaux probables, comme l’introduction d’un nouvel aliment, l’exposition à des agents infectieux, un voyage dans une région à risque élevé, le contact avec des aliments susceptibles d’avoir été contaminés et le contact avec des animaux domestiques qui sont des sources connues d’infection entérique. L’examen des antécédents allergiques, pharmacologiques et alimentaires peut révéler des allergies alimentaires, l’utilisation de laxatifs ou d’antibiotiques, ou des excès de sources de sorbitol et de fructose, comme le jus de pomme.

La planication des soins est établie dans le but d’atteindre les résultats suivants :

ANALYSE ET INTERPRÉTATION DES DONNÉES

Les problèmes découlant de la situation de santé peuvent inclure :

• Surveiller les pertes de liquide en mesurant attentivement les ingesta et les excreta, et en notant quotidiennement le poids de l’enfant.

• Décit du volume de liquide lié à des pertes diarrhéiques (GI) ou à un apport inadéquat

• Surveiller la consommation d’aliments, en particulier en ce qui a trait aux calories.

• Risque d’infection lié à des micro-organismes envahissant le tractus GI

• Surveiller les manifestations cliniques de complications liées à une maladie sous-jacente ou à un traitement.

• Atteinte de l’intégrité cutanée liée à une irritation causée par des selles fréquentes et molles

• Observer la famille et l’interroger de manière à déterminer l’ampleur et l’efcacité des soins.

Toutes les personnes appelées à prendre soin de l’enfant doivent connaître les zones dites propres et les zones dites souillées, en particulier à l’hôpital, où les lavabos des chambres sont utilisés à diverses fins. Les couches et la literie souillées doivent être jetées dans des conteneurs situés à proximité du lit.

832

Partie 6

• Maintien d’une hydratation adéquate pour l’âge de l’enfant • Maintien d’une nutrition adéquate pour l’âge de l’enfant • Absence de transmission de l’infection à d’autres personnes si un agent infectieux est en cause • Soutien et information adéquats offerts aux parents, surtout en ce qui a trait aux soins à domicile INTERVENTIONS INFIRMIÈRES

De nombreuses stratégies d’intervention se trouvent dans la présente section. ÉVALUATION DES RÉSULTATS – ÉVALUATION EN COURS D’ÉVOLUTION

L’efcacité des interventions inrmières pour l’enfant atteint de diarrhée et sa famille peut être évaluée en fonction des pratiques inrmières suivantes :

préventives comme l’hygiène personnelle, les moyens d’éviter la contamination de l’approvisionnement en eau et la diligence dans la préparation des aliments.

Prévenir la diarrhée

Un souci méticuleux de l’hygiène périanale, l’élimination des couches souillées, l’hygiène adéquate des mains et l’isolement des personnes infectées permettent aussi de réduire au minimum le risque de transmission d’une infection.

La meilleure intervention contre la diarrhée est la prévention. La voie fécale-orale permet la propagation de la plupart des infections ; il faut informer les parents au sujet des mesures

Les parents doivent obtenir de l’information sur la prévention de la diarrhée en voyage. L’inrmière les mettra en garde de ne pas administrer à leur enfant des médicaments destinés

Troubles liés aux systèmes

17.1.4

Constipation

La constipation se dénit comme une modication de la fréquence, de la consistance, du volume ou de la facilité d’élimination des selles. Il peut également s’agir d’une douleur pendant l’élimination des selles, alors souvent tachées de sang, ou d’un problème de rétention des selles, avec ou sans souillure, même si la fréquence hebdomadaire d’élimination des selles est supérieure à trois occurrences (SCP, 2016b). Toutefois, la fréquence des selles n’est pas considérée comme un critère diagnostique, car elle varie beaucoup selon les enfants. Il est question de constipation opiniâtre lorsque les défécations sont séparées d’intervalles extrêmement longs. La constipation accompagnée de souillures fécales est appelée encoprésie. Ce problème touche de 1,5 à 7,5 % des enfants âgés de 6 à 12 ans au Canada (Bernard-Bonnin, 2010 ; Lachapelle, 2011) 8 . La constipation peut découler de plusieurs troubles organiques ou systémiques. Les troubles structurels de l’intestin, comme les rétrécissements, l’anus ectopique et la maladie de Hirschsprung (qui sera abordée plus loin dans ce chapitre), peuvent en être responsables. Les troubles systémiques associés à la constipation incluent l’hypothyroïdie, l’hypercalcémie résultant d’une hyperparathyroïdie ou d’un excès de vitamine D, et une intoxication chronique au plomb. La constipation peut être l’effet de médicaments comme les antiacides, les diurétiques, les antiépileptiques, les antihistaminiques, les analgésiques opioïdes et les suppléments de fer. Les lésions médullaires peuvent être associées à une perte du tonus et de sensation au rectum. Les enfants qui en sont affectés tendent à souffrir d’une rétention fécale chronique et d’une incontinence par regorgement.

FIGURE 17.6 An d’éviter de boire de l’eau contaminée en voyage, il est recommandé que les enfants boivent de l’eau embouteillée avec une paille.

clinique

La majorité des enfants souffrent d’une constipation Laurie, âgée de 8 ans, est hospitalisée pour une idiopathique ou fonctionnelle pneumonie avec empyème. Elle a un drain thoraquand aucune cause souscique depuis 5 jours et elle se mobilise très peu. jacente n’est déterminée. La Elle prend 7,5 mg de morphine per os toutes les constipation chronique peut 4 heures depuis les 3 derniers jours. L’inrmière être due à des facteurs environde jour a inscrit au plan thérapeutique inrmier nementaux ou psychosociaux, (PTI) le problème suivant : «Risque d’altération ou à une combinaison des de la fonction intestinale. » Sur quelles données deux. Une maladie transitoire, l’inrmière s’appuie-t-elle pour formuler ce constat ? la rétention ou l’évitement de la selle après des expériences douloureuses de défécation ainsi qu’une alimentation renfermant peu de bres et de liquides sont autant de facteurs susceptibles d’être à l’origine de la constipation.

Jugement

aux adultes pour la prévention de la diarrhée du voyageur. En attendant que des vaccins ou d’autres mesures prophylactiques pour les enfants soient homologués, la meilleure disposition à prendre, durant des voyages dans des régions où l’eau risque d’être contaminée, est de ne laisser les enfants boire que de l’eau embouteillée et des boissons gazeuses FIGURE 17.6. Il faut éviter l’eau du robinet, les glaçons, les produits laitiers non pasteurisés, les légumes crus, les fruits non pelés, les viandes et les fruits de mer (Gouvernement du Canada, 2016).

L’immobilité prolongée ou une diminution importante des mouvements contribue au ralentissement du péristaltisme intestinal. De ce fait, un retard dans l’évacuation des selles peut en découler, de même que de la constipation. C’est la raison pour laquelle on encourage le lever précoce et la mobilisation après une intervention chirurgicale sous anesthésie générale.

8 L’encoprésie est traitée dans le chapitre 8, Problèmes de santé de l’enfant d’âge scolaire et de l’adolescent.

17

Période néonatale Normalement, le nouveau-né élimine sa première selle de méconium dans les 24 à 36 heures suivant la naissance. Tout nouveau-né qui n’évacue pas de méconium doit être soumis à un examen visant à détecter des signes d’atrésie ou de rétrécissement de l’intestin, de maladie de Hirschsprung, d’hypothyroïdie, de bouchons de méconium ou d’iléus méconial.

Méconium : Matières visqueuses brunâtres ou verdâtres constituées de cellules épithéliales, de mucus et de bile contenus dans l’intestin du fœtus, qui constituent les premières selles du nouveau-né.

Les bouchons de méconium surviennent lorsque la teneur en eau du méconium est faible ; ils sont généralement évacués après un examen du toucher rectal, mais ils peuvent nécessiter des irrigations avec une solution hypertonique ou une solution de contraste.

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

833

L’iléus méconial, une manifestation initiale de la brose kystique, est l’obstruction de la lumière de la partie distale de l’intestin grêle par du méconium anormal. Le traitement est le même qu’en cas de bouchon de méconium ; une intervention chirurgicale rapide peut s’imposer pour évacuer le contenu de l’intestin grêle (Duo, Combet et De Queiroz Siqueira, 2014 ; Irish, 2015).

Nourrisson CE QU’IL FAUT RETENIR

Chez le nourrisson, la constipation est souvent liée aux pratiques alimentaires. Elle est moins fréquente chez les nourrissons allaités, qui ont des selles plus molles que celles des nourrissons alimentés à l’aide d’une préparation commerciale.

La constipation, fréquente chez le nourrisson, peut avoir des causes organiques qu’il est important de distinguer des causes de la constipation fonctionnelle. Chez le nourrisson, la constipation est souvent liée aux pratiques alimentaires. Elle est moins fréquente chez les nourrissons allaités, qui ont des selles plus molles que celles des nourrissons alimentés à l’aide d’une préparation commerciale. Les nourrissons exclusivement allaités peuvent également produire moins de selles du fait d’une consommation du lait maternel, plus complet, qui laisse peu de résidus. Lorsque la constipation résulte du remplacement du lait humain ou du lait de vache modié par du lait de vache entier, de simples mesures comme l’ajout ou l’augmentation de la quantité de céréales, de légumes et de fruits dans l’alimentation du nourrisson sufsent généralement à corriger le problème. Lorsqu’un nourrisson élimine des selles dures qui provoquent une ssure anale, la douleur liée à la défécation peut entraîner de la rétention.

Trottineur et enfant d’âges préscolaire et scolaire Au début de l’enfance, la plupart des cas de constipation sont dus à des changements environnementaux ou au développement normal,

alors que l’enfant commence à maîtriser ses fonctions corporelles. Un enfant qui a déjà ressenti de l’inconfort pendant l’élimination des selles peut délibérément essayer de les retenir. Avec le temps, le rectum s’adapte à l’accumulation des selles, ce qui atténue le besoin d’élimination. Lorsque le contenu de l’intestin nit par être évacué, les selles accumulées sortent douloureusement, ce qui renforce l’enfant dans son désir de les retenir. Chez les enfants d’âge scolaire, la constipation peut être un problème courant ou il peut s’agir d’un premier épisode. À cet âge, la constipation est souvent due à des changements environnementaux, au stress et à des modications des habitudes d’élimination. Un nouvel épisode de constipation en début de scolarité résulte souvent de la crainte de devoir utiliser les toilettes de l’école, dont le manque d’intimité est bien connu. Aussi, le départ hâtif pour l’école immédiatement après le déjeuner peut nuire à l’élimination des selles. La prise en charge de la constipation simple consiste à instaurer un plan favorisant l’élimination régulière des selles. Il s’agira parfois simplement de modifier l’alimentation afin d’y incorporer davantage de bres et de liquide, de limiter les aliments qui constipent (riz blanc, fromage, bananes) pendant les épisodes de constipation, d’encourager la mobilisation autant que possible et d’établir une routine d’élimination régulière des selles. Lorsque la constipation s’accompagne de manifestations cliniques telles que des vomissements, une distension abdominale, de la douleur ou un retard de croissance, des examens plus approfondis s’imposent.

Soins inrmiers CONSTIPATION

La constipation est un problème qui tend à se répéter. En effet, comme cela a déjà été mentionné, si un enfant éprouve de la difculté ou de la gêne à évacuer ses selles, il aura tendance à se retenir, ce qui créera un cercle vicieux. L’évaluation de l’inrmière vise, dans un premier temps, à recueillir des renseignements sur le transit intestinal, l’alimentation, les événements associés à l’apparition de la constipation, les médicaments ou les autres substances pris par l’enfant, et les caractéristiques des selles : leur consistance, leur couleur, leur fréquence, etc. Si la constipation n’est causée par

834

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

aucune affection particulière, le rôle de l’inrmière consiste essentiellement à informer les parents concernant l’élimination normale, et à traiter l’enfant. Elle peut les conseiller sur les types d’aliments qui favorisent le transit intestinal ENCADRÉ 17.4. Elle doit aussi discuter avec eux de leur attitude et de leurs attentes à l’égard des habitudes de défécation de l’enfant. Si la constipation persiste malgré les mesures hygiénodiététiques mises en place, une intervention plus énergique peut être nécessaire. Il faut savoir faire la distinction entre un épisode de constipation aiguë et une constipation

fonctionnelle chronique, laquelle peut être la conséquence d’une tendance à retenir les selles. Comme l’ampoule rectale nit par s’élargir avec ENCADRÉ 17.4

le temps, certaines complications telles que la formation d’un fécalome et l’encoprésie peuvent survenir.

Aliments riches en bres

PAIN ET GRAINS

LÉGUMES

• Pain ou céréales à grains entiers

• Légumes crus, notamment le brocoli, les choux, les carottes, le chou-eur, le céleri, la laitue et les épinards

• Crêpes, gaufres et mufns aux fruits ou au son • Riz non rafné (brun) FRUITS

• Fruits crus, surtout ceux qui ont une peau ou des pépins, autres que la banane mûre ou l’avocat mûr • Raisins secs, pruneaux ou autres fruits secs

17.1.5

Vomissements

Le vomissement désigne le rejet brutal par la bouche du contenu de l’estomac. Il s’agit d’un processus bien précis, complexe et coordonné, sous le contrôle du système nerveux central. Le réexe émétique est composé de trois phases : 1. la nausée ; 2. le haut-le-cœur ; 3. l’expulsion rétrograde énergique du contenu de l’estomac. Les vomissements peuvent être divisés en deux catégories : bilieux et non bilieux. Il est normal que tout vomissement soit accompagné d’une petite quantité de reux provenant du petit intestin. Dans le cas des vomissements non bilieux, la majorité de la bile s’écoule dans les parties plus distales de l’intestin. En cas d’obstruction, un vomissement non bilieux indique une obstruction plus proximale. Le vomissement bilieux implique un trouble de la motilité ou un blocage physique distal. Les causes des vomissements non bilieux sont infectieuses, inammatoires, métaboliques ou endocriniennes, neurologiques et psychologiques, ou elles peuvent être liées à des lésions d’obstruction. Les causes des vomissements bilieux incluent l’atrésie et le rétrécissement de l’intestin, la dystopie par non-rotation (malrotation) avec ou sans volvulus, l’occlusion intestinale, les invaginations, la duplication intestinale, les masses, la hernie inguinale irréductible et l’appendicite. Les vomissements peuvent aussi coïncider avec d’autres complications comme les maladies infectieuses aiguës, l’augmentation de la pression intracrânienne, des ingestions toxiques, les intolérances et les allergies alimentaires, une obstruction mécanique du tractus GI, des troubles

• Légumes cuits, notamment les asperges, les choux de Bruxelles, le maïs, les pommes de terre, la rhubarbe, les courges, les haricots et les navets, ainsi que ceux énumérés précédemment DIVERS

• Noix, graines, légumineuses, maïs éclaté

métaboliques et des problèmes psychogènes. Les vomissements, courants pendant l’enfance et spontanément résolutifs, ne réclament pas de traitement précis. Cependant, des complications comme la déshydratation et les déséquilibres électrolytiques, la malnutrition, l’aspiration et le syndrome de Mallory-Weiss, soit de petites déchirures de la muqueuse œsophagienne distale, sont possibles (Boschee et Lewis, 2014 ; Di Lorenzo, 2018).

clinique

Jugement

• Son

Vous administrez de la morphine 8 mg I.V. toutes les 4 heures p.r.n. à Joey, âgé de 10 ans, pour des douleurs associées à l’anémie falciforme. Il n’y a aucune histoire de vomissements au dossier, mais le médecin a prescrit du dimenhydrinate 50 mg I.V. p.r.n. (GravolMD) toutes les 4 à 6 heures. Pour quelle raison le médecin peut-il avoir prescrit ce médicament ? a) Pour prévenir un effet indésirable de la morphine. b) Pour potentialiser l’effet de la morphine. c) Pour accélérer l’action de l’analgésique. d) Pour promouvoir un effet de somnolence.

Approche thérapeutique La prise en charge est axée sur la détection et le traitement de la cause des vomissements, et sur la prévention des complications liées à la perte de liquide. Il faut administrer des liquides de la même manière qu’en cas de diarrhée et qui ont une composition électrolytique similaire à celle utilisée dans ce cas. Même si la plupart des enfants réagissent à ces mesures, l’administration d’antiémétiques peut parfois s’avérer nécessaire. Les antiémétiques comme l’ondansétron (ZofranMD) bloquent les récepteurs de la zone de déclenchement des chimiorécepteurs ; d’autres antiémétiques comme la métoclopramide (MetoclopramideMD) stimulent le péristaltisme gastroduodénal ; certains autres comme la prométhazine occupent de manière concurrentielle les sites des récepteurs H1. L’administration d’une dose adéquate de dimenhydrinate (GravolMD) avant un voyage est recommandée chez les enfants sujets au mal des transports.

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

17

835

Soins inrmiers VOMISSEMENTS

Le rôle de l’inrmière consiste principalement à observer les vomissements, à faire état des manifestations cliniques qui y sont associées et à mettre en œuvre les mesures nécessaires pour y remédier. L’évaluation exacte de la nature des vomissements, de leur aspect, de la quantité, de la fréquence et des comportements qui y sont associés facilitera l’établissement du diagnostic.

CE QU’IL FAUT RETENIR

La soif demeure l’indicateur le plus sensible des besoins liquidiens d’un enfant.

Les interventions inrmières dépendent de la cause des vomissements. Lorsque les vomissements sont causés par une méthode d’alimentation inadéquate, il suft généralement d’enseigner aux parents celle qui convient pour régler le problème. Lorsqu’une évaluation radiologique révèle que la cause des vomissements est une occlusion, il faut que l’enfant cesse de manger. Il faut insérer un tube nasogastrique et le placer sous succion. Des liquides intraveineux seront perfusés an de corriger le déséquilibre électrolytique (Société nationale française de gastro-entérologie [SNFGE], 2015). Enn, lorsque les vomissements sont liés à une infection concomitante, à des excès alimentaires ou à des facteurs émotionnels, l’inrmière doit maintenir l’hydratation et prévenir la déshydratation. La soif demeure l’indicateur le plus sensible des besoins liquidiens d’un enfant. Si l’enfant est éveillé, il sera possible de rétablir

17.2

Troubles de la motilité

17.2.1

Maladie de Hirschsprung

La maladie de Hirschsprung, également appelée mégacôlon congénital aganglionnaire, est une obstruction mécanique cauA B sée par une dyskinésie de l’intestin, qui survient tôt après la naissance FIGURE 17.7. Elle est responsable d’environ un quart de tous les cas d’obstruction néonatale, mais n’est susceptible d’être diagnostiquée que lorsque le nourrisson est âgé de quelques mois ou durant les 2 premières années de l’enfance (Neville, 2016). Son incidence annuelle est de 1 naissance sur FIGURE 17.7 A Côlon normal. B Côlon 5 000 (Orphanet, 2012). atteint de la maladie de Hirschsprung. Elle est 4 fois plus

836

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

l’équilibre hydrique et électrolytique de manière satisfaisante en lui donnant une solution contenant des sucres et des électrolytes selon la tolérance. Il est essentiel que la solution de réhydratation contienne des sucres pour éviter que l’organisme se mette à dégrader des protéines et que les réserves de glycogène s’épuisent, ce qui pourrait mener à une cétose. Il est préférable que les apports alimentaires et liquidiens soient donnés en petites quantités et plus fréquemment. Une fois que les vomissements ont cessé, l’inrmière n’est plus tenue de limiter la consommation de liquide de l’enfant, et celui-ci peut reprendre progressivement une alimentation normale. Un nourrisson ou un enfant qui vomit doit être allongé sur le côté ou installé en position semiallongée pour prévenir toute aspiration, et l’inrmière doit le surveiller en vue de déceler d’éventuels signes de déshydratation. Elle doit insister sur la nécessité pour l’enfant de se rincer la bouche avec un rince-bouche aromatisé ou de se brosser les dents après les vomissements, d’une part parce que ceux-ci contiennent de l’acide chlorhydrique qui peut endommager l’émail par son contact et, d’autre part, parce que ce sont de bons moyens de se rafraîchir l’haleine. L’inrmière devra surveiller de près le bilan hydroélectrolytique de l’enfant de façon à prévenir les déséquilibres.

fréquente chez les garçons que chez les lles (Neville, 2016). La maladie de Hirschsprung est une anomalie congénitale isolée, mais elle a déjà été associée à d’autres syndromes, notamment au syndrome de Down.

Physiopathologie La maladie de Hirschsprung est un trouble développemental du système nerveux entérique caractérisé par l’absence de ganglions nerveux périphériques dans la couche musculaire de l’intestin (plexus d’Auerbach) et une hypertrophie des faisceaux de bres nerveuses. La longueur de l’intestin distal aganglionique dépend du moment de l’arrêt de la migration craniocaudale des cellules ganglionnaires. L’intestin aganglionnaire se distingue par une contraction chronique qui inhibe le péristaltisme de l’intestin affecté et provoque une obstruction intestinale fonctionnelle (Neville, 2016). La distension et l’ischémie intestinales peuvent aussi résulter d’une distension de la paroi intestinale, qui favorise l’entérocolite, une inammation de l’intestin grêle et du côlon. L’entérocolite est

caractérisée par de la èvre, une distension abdominale et une diarrhée potentiellement grave qui peuvent entraîner une déshydratation ou une septicémie menaçant le pronostic vital (Neville, 2016).

ENCADRÉ 17.5

Diagnostic

Manifestations cliniques de la maladie de Hirschsprung

NOUVEAU-NÉ

• Signes d’entérocolite

• Pas d’élimination du méconium dans les 24 à 36 heures suivant la naissance

• Diarrhée explosive

• Refus de s’alimenter

• Apparence très maladive

• Fièvre

La plupart des enfants atteints de la maladie de Hirschsprung reçoivent un diagnostic pendant leurs premiers mois de vie. Les manifestations cliniques varient suivant l’âge de l’enfant et lorsque des complications comme l’entérocolite apparaissent ENCADRÉ 17.5 . Habituellement, le nourrisson affecté souffre d’une distension abdominale, d’une intolérance alimentaire avec vomissements de bile et d’un retard d’élimination du méconium. Généralement, près de la moitié des nouveaunés atteints de la maladie de Hirschsprung ont un retard d’évacuation du méconium (plus de 36 heures de vie) (Neville, 2016). Les radiographies, le lavement baryté sans préparation préalable et les examens manométriques anorectaux facilitent le diagnostic différentiel. La maladie de Hirschsprung est confirmée par une biopsie de l’épaisseur complète du rectum attestant l’absence de cellules ganglionnaires dans les plexus myentérique et sous-muqueux (plexus d’Auerbach).

innervé (Neville, 2016). L’intervention correctrice complète se fait par la suite. La technique de l’abaissement endorectal de Parks ou de Soave, l’une des interventions les plus courantes, revient à tirer le côlon sain à travers le manchon de la musculeuse rectale ayant subi une résection de la muqueuse aganglionnaire. En général, la stomie est fermée pendant l’intervention d’abaissement FIGURE 17.8.

Approche thérapeutique

Pronostic

Le traitement de la maladie de Hirschsprung repose essentiellement sur une intervention chirurgicale visant à retirer la partie aganglionnaire de l’intestin pour soulager l’obstruction, et à rétablir la motilité et la fonction intestinales physiologiques du sphincter anal interne. Dans la plupart des cas, une intervention en deux temps est nécessaire. Premièrement, une stomie temporaire est pratiquée près du segment aganglionnaire pour soulager l’obstruction et normaliser la taille de l’intestin dilaté et non

La plupart des enfants atteints de la maladie de Hirschsprung requièrent une intervention chirurgicale, car un traitement pharmacologique n’est généralement pas suffisant pour la traiter. Lorsque l’état de l’enfant est stabilisé avec des liquides et des électrolytes de remplacement, il est parfois nécessaire d’effectuer, au besoin, une colostomie temporaire ; le taux de réussite est élevé, et le pronostic généralement bon, puisque la plupart des enfants redeviennent continents (Neville, 2016).

A

• Vomissements bilieux

TROTTINEUR ET ENFANT D’ÂGE PRÉSCOLAIRE

• Distension abdominale

• Constipation chronique

NOURRISSON

• Selles torsadées, nauséabondes

• Retard prononcé de la croissance

• Distension abdominale

• Constipation

• Péristaltisme visible

• Distension abdominale

• Masse fécale aisément palpable

• Épisodes de diarrhées et de vomissements

• Aspect anémique, sous-alimenté

B

17

C

FIGURE 17.8 Intervention de Parks ou de Soave – A Le rectum, siège de la stule rectovaginale, est laissé en place. B Le rectum est sectionné en amont de la stule. C Le côlon est abaissé à travers le moignon rectal restant et débarrassé au préalable de sa muqueuse.

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

837

Soins inrmiers MALADIE DE HIRSCHSPRUNG

Le rôle joué par l’inrmière dans le traitement de la maladie de Hirschsprung dépend de l’âge de l’enfant et de l’approche thérapeutique retenue. Si la maladie est diagnostiquée au cours de la période néonatale, les principaux objectifs de l’inrmière seront les suivants : 1. aider les parents à accepter que leur nouveau-né soit porteur d’une malformation ; 2. favoriser l’attachement entre les parents et le nouveau-né ; 3. les préparer aux interventions médicales et chirurgicales ; 4. les aider à prendre soin de la colostomie à domicile.

Prodiguer les soins préopératoires Les soins préopératoires de la chirurgie correctrice varient selon l’âge et l’état de santé de l’enfant. Si ce dernier souffre de malnutrition, il conviendra d’attendre que son état physique se soit amélioré avant de procéder à une intervention chirurgicale. Pour ce faire, il sufra en principe de lui administrer un traitement symptomatique (lavements et alimentation hypercalorique, hyperprotéique et pauvre en bres). En cas de malnutrition grave, il faudra avoir recours à l’alimentation parentérale totale (APT).

13 Les soins postopératoires à prodiguer à l’enfant sont présentés dans le cha­ pitre 13, Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation.

Autrement, la préparation physique est la même que celle prévue pour n’importe quelle autre intervention chirurgicale. Aucune mesure additionnelle n’est nécessaire chez le nouveau-né, puisque ses intestins sont stériles. Par contre, chez l’enfant, la préparation à la résection du segment colique atteint consiste à lui faire des lavements évacuateurs salins répétés et à lui administrer des antibiotiques par voie orale ou systémique, ou à instiller une solution antibiotique dans la lumière du côlon par lavement en vue d’affaiblir la ore bactérienne. L’entérocolite est la complication la plus grave de la maladie de Hirschsprung. Les soins préopératoires d’urgence comprennent les éléments suivants : la surveillance régulière des signes vitaux, notamment de la pression artérielle, en vue de déceler d’éventuels signes de choc ; la surveillance de la réhydratation et du remplacement des électrolytes ; l’administration des perfusions de plasma ou d’autres dérivés du sang ; et l’observation des manifestations cliniques de perforation de l’intestin telles que la èvre, l’augmentation de la distension abdominale, les vomissements, l’augmentation de la sensibilité de l’abdomen, l’irritabilité, la dyspnée et la cyanose. Comme une distension progressive de l’abdomen est un signe à prendre au sérieux, l’inrmière

838

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

doit mesurer la circonférence de l’abdomen de l’enfant avec un ruban à mesurer en papier au niveau de l’ombilic ou de la partie la plus proéminente de l’abdomen. Elle doit marquer au crayon l’endroit où elle a pris la première mesure an d’y comparer les données subséquentes. En regroupant la mesure de la circonférence de l’abdomen et la prise des signes vitaux, et en laissant le ruban à mesurer sous l’enfant, elle limitera les sources de stress inutiles. Une annotation rigoureuse des données recueillies lui permettra de détecter toute variation. Il faut se baser sur l’âge de l’enfant pour déterminer le type et la durée de la préparation psychologique à la colostomie. Si l’enfant n’est pas encore d’âge scolaire, l’inrmière lui décrira l’intervention en utilisant des termes concrets et des supports visuels. Elle devra fournir ses explications en considérant la réceptivité de l’enfant et le moment le plus propice pour minimiser l’anxiété et la confusion. Pour les parents et l’enfant en âge de comprendre, l’inrmière doit insister sur le fait que la colostomie sera temporaire, à moins que le segment réséqué ne soit si long qu’il faille procéder à une iléostomie permanente. La plupart du temps, la longueur du segment de côlon à exciser est déterminée avant l’intervention chirurgicale. L’inrmière doit se rappeler que toute nouvelle intervention chirurgicale, même si celle-ci vise à fermer la colostomie, peut être une nouvelle source de stress pour l’enfant et ses parents.

Prodiguer les soins postopératoires Les soins postopératoires sont les mêmes que ceux prodigués après n’importe quelle autre chirurgie abdominale 13 . Lorsqu’une colostomie est nécessaire pendant la chirurgie correctrice, les soins de la stomie constituent une des principales tâches de l’inrmière. Pour éviter que la plaie abdominale soit contaminée par l’urine du nourrisson, les rebords de la couche doivent être refermés sous le pansement. L’utilisation d’un cathéter urinaire (sonde à ballonnet) dans la phase postopératoire immédiate protège la plaie abdominale de l’urine.

Préparer le congé Après l’intervention chirurgicale, l’inrmière doit enseigner aux parents les soins de la stomie, et l’enfant peut même y participer. Certains centres hospitaliers et certaines communautés proposent les services d’un stomothérapeute aux familles pour les aider à organiser les soins à domicile. Si les parents ont besoin d’une aide nancière ou de soutien psychologique, il faut les diriger vers un travailleur social, une agence de soins de santé à domicile ou une inrmière de santé publique an d’assurer la continuité des soins.

Reux gastro-œsophagien

Le reux gastro-œsophagien (RGO) fonctionnel désigne le passage physiologique du contenu de l’estomac vers l’œsophage. Il peut survenir à tout moment de la journée, le plus souvent après les repas et durant la nuit. Il est important de distinguer le RGO fonctionnel du RGO pathologique (North American Society for Pediatric Gas troenterology, Hepatology, and Nutrition et European Society for Pediatric Gastroenterology, Hepatology, and Nutrition, 2009). Le reux pathologique est associé à des manifestations cliniques ou à des lésions tissulaires résultant du RGO fonctionnel. Les régurgitations se résolvent spontanément, comme l’indique leur pourcentage qui chute vers l’âge de 1 an (Khan et Orenstein, 2016). Le RGO devient pathologique lorsque des complications comme le retard de croissance, des saignements ou une dysphagie apparaissent. Le RGO pathologique est associé à la pneumonie et à des symptômes respiratoires comme l’apnée, le bronchospasme et le laryngospasme ENCADRÉ 17.6 (Nobile, Noviello, Cobellis et al., 2015). Les brûlures d’estomac sont fréquentes chez les enfants qui sont en mesure de les décrire. Certaines affections prédisposent les enfants au RGO pathologique, notamment les lésions neurologiques, la hernie hiatale, l’atrésie œsophagienne corrigée et l’obésité morbide (Singhal et Khaitan, 2014).

Physiopathologie Bien que le RGO ait une pathogenèse qui dépende de plusieurs facteurs, sa principale cause est sans doute liée à une relaxation transitoire insufsante du sphincter œsophagien inférieur (Schwartz, 2017 ; SNFGE, 2015). Les facteurs qui augmentent la pression abdominale comme la toux, les éternuements, la scoliose et les excès alimentaires peuvent contribuer au RGO pathologique. Les manifestations cliniques œsophagiennes sont dues à l’inammation provoquée par l’acide gastrique qui fait l’objet du reux, alors qu’une maladie réactive des voies aériennes peut résulter d’une stimulation des réexes respiratoires par le reux d’acide. Le syndrome de Sandifer, une affection rare touchant généralement les jeunes enfants, est caractérisé par un étirement et des torticolis répétitifs de la tête et du cou, qu’il est possible de confondre avec une convulsion. Il correspond probablement à une réaction neuromusculaire physiologique visant à empêcher le reux d’acide d’atteindre la partie supérieure de l’œsophage (Wirth, Bonnemains, Auger et al., 2016).

Diagnostic L’anamnèse et l’examen physique sufsent généralement pour diagnostiquer de façon certaine le RGO. Cependant, des séries de radiographies du tractus GI supérieur peuvent servir à détecter la

ENCADRÉ 17.6

Manifestations cliniques et complications liées au reux gastro-œsophagien

NOURRISSON

• Douleur abdominale

• Reux, régurgitations, vomissements (parfois brutaux)

• Douleur thoracique non cardiaque

• Refus de se nourrir

• Dysphagie

• Pleurs excessifs, irritabilité, cambrure du dos, raideur

• Asthme nocturne

• Toux chronique

• Pneumonie récurrente

• Perte pondérale, retard de croissance prononcé

COMPLICATIONS

• Problèmes respiratoires (toux, respiration sifante, stridor, soulèvement de l’estomac, étouffement pendant l’alimentation) • Hématémèse

• Générales : retard de croissance • Œsophagiennes : œsophagite, sténose de l’œsophage (syndrome de Barrett), dysphagie

ENFANT

• Respiratoires : laryngite, apnée, pneumonie par aspiration et récurrente, syndrome de Sandifer

• Brûlures d’estomac

• Hématémèse, anémie

• Apnée ou épisode menaçant la vie

Sources : Adapté de Lightdale et Gremse (2013) ; Roy (2014).

présence d’anomalies anatomiques telles qu’un rétrécissement du pylore, une dystopie par nonrotation (malrotation de l’intestin), un pancréas annulaire, une hernie hiatale ou un rétréJerrika, âgée de quatre mois, doit subir un test de cissement de l’œsophage. La pHmétrie (surveillance du pH intraœsophagien) surveillance du pH intraœsopour conrmer un diagnostic de RGO. Vous appelez phagien pendant 24 heures est la mère pour l’aviser de cesser d’administrer les la méthode privilégiée pour le médicaments antireux quelques jours avant le diagnostic du RGO (SNFGE, test. Pour quelle raison devez-vous donner cette 2015). L’endoscopie avec biopconsigne à la mère ? sie peut également s’avérer a) Il faut suivre précisément le protocole utile pour évaluer la présence préparatoire à ce test. et la gravité d’une œsophagite, d’un rétrécissement ou d’un b) Les médicaments sont incompatibles avec œsophage de Barrett, de même la procédure diagnostique. que pour exclure d’autres c) Les symptômes du RGO doivent être exacerbés troubles comme la maladie de pendant la durée du test. Crohn. La scintigraphie avec d) Les médicaments soulagent le RGO, ce qui ingestion d’une substance de fausserait le résultat du test. contraste radioactive permet d’évaluer la vidange gastrique. Elle sert à différencier l’aspiration du contenu gastrique causée par un reux de l’aspiration résultant d’une coordination insufsante des muscles oropharyngés.

clinique

Jugement

17.2.2

Approche thérapeutique La prise en charge thérapeutique du RGO dépend de la gravité de l’affection. Chez le nourrisson qui grandit bien et qui ne présente aucune complication respiratoire, aucun traitement n’est nécessaire. L’abstinence de certains aliments qui exacerbent le reux d’acide (p. ex., les agrumes, les tomates, la menthe poivrée, les aliments épicés ou frits), les Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

839

17

Jugement

clinique Justine, âgée de deux mois, souffre de RGO. Vous devez lui administrer du lansoprazole (PrevacidMD) 30 minutes avant le boire. Pourquoi ce délai est-il nécessaire entre la prise du médicament et le boire ?

modications des habitudes de vie de l’enfant (p. ex., une gestion du poids, lorsque c’est indiqué ; des petits repas plus fréquents) et l’utilisation de certaines techniques alimentaires chez les nourrissons (p. ex., un épaississement de la nourriture, un positionnement vertical) peuvent atténuer les manifestations cliniques légères du RGO. L’épaississement des boires n’agit pas sur le degré d’acidité (pH) à l’examen intraœsophagien de 24 heures, mais il peut amenuiser la fréquence des épisodes de vomissements. L’épaississement des liquides avec des céréales de riz peut être recommandé, principalement chez les nourrissons dont le poids est sous la normale à cause du RGO. L’alimentation constante par sonde nasogastrique peut s’avérer nécessaire pour le nourrisson souffrant d’un reux grave et d’un retard de croissance, en attendant l’intervention chirurgicale. Une méta-analyse menée par une équipe canadienne reconnaît que le fait d’épaissir les aliments (5 mL de céréales par 30 mL de préparation) aide à réduire les régurgitations visibles de RGO chez les enfants de moins de 2 ans, mais ne diminue pas les épisodes de reux. Toutefois, toujours selon la même étude, l’élévation de la tête de lit n’aurait aucun effet et ne serait donc pas justifiée (Roy, 2014).

FIGURE 17.9 Sutures de la fundoplicature autour de la musculature de l’œsophage

La pharmacothérapie peut intervenir dans le traitement des nourrissons et

des enfants atteints de RGO pathologique. Les antagonistes des récepteurs H2 (ranitidine [ZantacMD] ou famotidine [PepcidMD]) sont utilisés en première ligne pour réduire la sécrétion d’acide chlorhydrique gastrique. Toutefois, les inhibiteurs de la pompe à protons (ésoméprazole [NexiumMD], lansoprazole [PrevacidMD], oméprazole [LosecMD], pantoprazole [PantolocMD] et rabéprazole [ParietMD]) contrôlent l’acidité plus efcacement et peuvent également entraîner une augmentation du tonus du sphincter œsophagien inférieur. Le recours aux médicaments prokinétiques (p. ex., la dompéridone) est surtout indiqué en présence de complications pulmonaires. Toutefois, les agents prokinétiques ayant démontré une certaine efcacité ont des effets indésirables touchant les systèmes nerveux et cardiaque, et ils demandent une analyse plus rigoureuse avant que ce traitement soit institué (électroencéphalographie [EEG] initiale, puis q.6 mois) (Roy, 2014 ; Vandenplas, Rudolph, Di Lorenzo et al., 2009).

Traitement chirurgical Le traitement chirurgical du RGO est réservé aux enfants qui présentent de graves complications telles que les pneumonies d’aspiration récurrentes, l’apnée, l’œsophagite grave ou le retard de croissance, et pour les enfants qui ne répondent pas au traitement médical. La fundoplicature de Nissen est l’intervention chirurgicale la plus courante FIGURE 17.9 (Glen, Chassé, Doyle et al., 2014). Elle consiste à faire passer la grosse tubérosité de l’estomac derrière l’œsophage de manière à encercler la partie distale de l’œsophage. L’intervention par laparoscopie est devenue le traitement de choix chez la population pédiatrique (Rothenberg, 2013). Parmi les complications inhérentes à la fundoplicature se trouvent la dysphagie, le syndrome de gaz et ballonnements et le syndrome de chasse (Glen et al., 2014 ; Pacilli, Eaton, McHoney et al., 2014).

Soins inrmiers REFLUX GASTRO-ŒSOPHAGIEN

Les soins inrmiers relatifs au RGO consistent à : 1. dépister les enfants qui ont des manifestations cliniques de RGO ; 2. enseigner aux parents les différents aspects des soins à domicile, notamment l’alimentation et l’administration des médicaments ; 3. fournir, s’il y a lieu, des soins à l’enfant qui doit subir une intervention chirurgicale. Dès le début du traitement, l’inrmière doit rassurer les parents en leur expliquant que le RGO disparaît avec le temps chez la plupart des

840

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

nourrissons et des enfants. En accompagnant les parents et en les rassurant, elle les incite à opérer les changements nécessaires. Il n’est pas prouvé que les modications des habitudes de vie procurent effectivement des bienfaits additionnels aux enfants qui suivent un traitement pharmacologique ; il n’en demeure pas moins que certains changements dans le mode de vie peuvent être utiles. Pour aider les parents à s’adapter au fait que leur enfant régurgite fréquemment, l’inrmière peut leur proposer des mesures simples telles que l’utilisation d’un bavoir ou d’un linge supplémentaire pour protéger les vêtements durant et après les repas.

L’inrmière doit en outre informer les enfants plus âgés et les adolescents que la caféine, le chocolat et les plats épicés peuvent affaiblir le sphincter œsophagien inférieur et aggraver du même coup leurs symptômes. Il convient de pré­ ciser en outre que l’exposition à la fumée du tabac et la consommation d’alcool ont été asso­ ciées au RGO. Étant donné que l’obésité accroît la pression abdominale, la perte de poids peut contribuer à atténuer les manifestations cli­ niques chez les enfants obèses.

Enseigner le traitement pharmacologique aux parents

17.3

entièrement connue, la plupart des chercheurs s’accordent pour dire que des causes multifac­ torielles et une interaction cerveau­intestins in­ terviennent dans le processus pathologique (Venkatesan, 2017).

Troubles liés aux douleurs abdominales fonctionnelles

Les troubles liés aux douleurs abdominales fonc­ tionnelles incluent la douleur abdominale fonctionnelle, le syndrome du côlon irritable, le syndrome de l’intestin irritable et la migraine abdominale. La douleur abdominale fonctionnelle est une douleur abdominale quasi continue se manifestant surtout chez des enfants de 4 à 6 ans et de 9 à 11 ans (Brown, Beattie et Tighe, 2016). Cette douleur peut être accompagnée d’étourdis­ sements, de céphalées, de ballonnements, de nau­ sées et de vomissements. Le syndrome du côlon irritable n’est pas une maladie, mais désigne plutôt une douleur abdominale associée à la défécation (Hôpital pour enfants de Toronto, 2012). Le sys­ tème digestif semble normal, mais les enfants peuvent souffrir d’une diarrhée, d’une constipa­ tion, d’une défécation impérieuse ; présenter du mucus dans les selles ou être contraints à des efforts de défécation intenses et prolongés ; ou res­ sentir une impression d’élimination incomplète. La migraine abdominale est caractérisée par des épisodes discrets et paroxysmiques de douleur abdominale intense et de vomissements entre des périodes durant lesquelles l’état de l’enfant est tout à fait normal (Venkatesan, 2017). L’enfant peut être atteint d’une migraine avec aura et photophobie.

17.3.1

Étiologie

La cause de la migraine abdominale n’est pas connue (Venkatesan, 2017). Par ailleurs, une pré­ valence plus élevée de ces troubles chez les membres de la famille immédiate de la personne concernée a été constatée (Lagman­Bartolome et Lay, 2015).

17.3.2

Physiopathologie

Bien que la pathogenèse des troubles liés aux dou­ leurs abdominales fonctionnelles ne soit pas

Lorsqu’un traitement pharmacologique s’impose, il convient d’expliquer aux parents les médicaments prescrits et leurs effets indésirables possibles. Les médicaments prokinétiques, qui stimulent la motri­ cité digestive, doivent être administrés avant les repas. L’administration des médicaments contrôlant l’acidité doit s’effectuer selon un horaire précis et régulier tout en tenant compte des directives médi­ cales an d’assurer une protection optimale.

17.3.3

Diagnostic

Il est possible d’exclure les causes organiques des douleurs abdominales à l’aide d’examens paracli­ niques de dépistage comme la FSC, la vitesse de sédimentation globulaire (VSG), le taux des trans­ aminases hépatiques, les anticorps cœliaques, l’analyse de l’urine et l’inspection des selles à la recherche de sang et de parasites (Venkatesan, 2017).

17.3.4

Approche thérapeutique

Le soulagement des manifestations cliniques est le principal objectif du traitement des enfants souffrant de troubles liés aux douleurs abdomi­ nales fonctionnelles, car il est souvent impossible d’enrayer complètement la douleur. Il est pos­ sible de la calmer par les méthodes suivantes : 1. en évitant les aliments irritants comme le cho­ colat, le fromage ou encore le glutamate ;

17

2. en favorisant la relaxation ; 3. en employant des anticholinergiques, des antidépresseurs tricycliques, des inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine ou des modulateurs des récepteurs de la sérotonine ; 4. en encourageant le soutien familial (Venkatesan, 2017). L’action d’un relaxant des muscles lisses peut soulager les enfants souffrant de douleur abdominale fonctionnelle. La douleur des enfants atteints du syndrome du côlon irritable avec constipation dominante peut être apaisée par la consommation de plus de bres et de laxatifs, au besoin ; ceux qui souffrent de syndrome du côlon irritable avec diarrhée dominante peuvent obtenir les mêmes résultats en consommant plus de bres et en prenant un antidiarrhéique, au besoin. Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

841

Soins inrmiers TROUBLES LIÉS AUX DOULEURS ABDOMINALES FONCTIONNELLES CE QU’IL FAUT RETENIR

Il est important de donner foi aux manifestations cliniques de l’enfant en afrmant que la douleur est réelle et qu’elle n’existe pas seulement dans sa tête.

Il est important de donner foi aux manifestations cliniques de l’enfant en afrmant que la douleur est réelle et qu’elle n’existe pas seulement dans sa tête. En dehors des médicaments, les enfants qui souffrent de troubles liés aux douleurs abdominales fonctionnelles peuvent tirer profit de méthodes de relaxation. Les objectifs sont de restaurer l’état fonctionnel de l’enfant ainsi que de lui permettre d’aller à l’école et de se livrer à des activités parascolaires.

Soulager la douleur abdominale fonctionnelle Le soulagement de la douleur abdominale fonctionnelle exige une approche pluridisciplinaire (van Tilburg, Chitkara, Palsson et al., 2009). Le traitement des douleurs abdominales récurrentes doit être individualisé an de correspondre aux causes de la douleur et aux besoins psychosociaux de l’enfant et de la famille. La compréhension des caractéristiques de l’enfant (anxiété, santé physique, tempérament, capacités d’adaptation, expérience, réponses apprises, dépression), de son incapacité (fréquentation scolaire, activité avec la famille, interaction sociale, comportement douloureux), des facteurs environnementaux (attitudes et modèles comportementaux de la famille, milieu scolaire, communauté, amitiés) et du stimulus douloureux (maladie, blessure, stress) est importante pour planier les stratégies de traitement (Brown et al., 2016). Le plan de traitement comprend un suivi régulier à des intervalles de trois à quatre mois, une liste des manifestations cliniques nécessitant une consultation plus rapidement et des techniques de gestion comportementale de la douleur. L’objectif est de diminuer les répercussions de la douleur sur les activités de l’enfant et sur la vie de la famille (Collins et Weisman, 2003 ; Levy et van Tilburg, 2012).

17.4

Troubles inammatoires

17.4.1

Appendicite aiguë

L’appendicite aiguë, une inammation de l’appendice vermiculaire, est la cause la plus courante des interventions chirurgicales abdominales d’urgence pendant l’enfance. Elle affecte de 18 à 29 enfants sur 10 000 ; l’affection est rare chez les nourrissons (Alder, 2017 ; Kim, Butterworth et Goldman, 2016). L’appendicite survient plus souvent dans les pays industrialisés (Alder, 2017). En général, le

842

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

La gestion du stress et les stratégies cognitivocomportementales sont des avenues intéressantes pour traiter ce type de douleur. Les thérapies comportementales combinées à un traitement pharmacologique réduisent les manifestations cliniques de douleur et l’incapacité, et améliorent la qualité de vie (Chiou et Nurko, 2010 ; HuertasCeballos, Logan, Bennett et al., 2008 ; Rutten, Korterink, Venmans et al., 2015). La formation des parents vise à leur apprendre à reconnaître les situations qui provoquent les douleurs abdominales, à renforcer la relaxation et à insister sur les habiletés d’adaptation à enseigner aux enfants pour gérer la douleur. Le traitement peut consister en plusieurs séances pendant un à six mois, et il comprend diverses composantes comme la surveillance des symptômes, la formation à la relaxation, l’augmentation des bres dans la diète et les exigences relatives à la fréquentation scolaire. Les taux de réponse sont une disparition des douleurs abdominales dans 25 % des cas et une amélioration des symptômes dans 56 à 75 % des cas (Collins et Weisman, 2003). Une étude réalisée par van Tilburg et ses collaborateurs (2009) a démontré que l’utilisation d’un protocole d’imagerie guidée à la maison sous forme audiovidéo combinée à une thérapie pharmacologique avait également un effet positif sur la réduction de la douleur, de l’incapacité et de la fréquence des visites médicales, ainsi que sur l’amélioration de la qualité de la vie des enfants atteints de douleurs abdominales récurrentes. Les effets du traitement ont été maintenus pour une durée de six mois. Cependant, ces thérapies sont actuellement peu disponibles, car elles sont coûteuses, elles exigent un investissement considérable de temps, tant de la part du parent que de l’enfant (le travail et les absences scolaires pour des visites médicales multiples), et elles nécessitent une équipe pluridisciplinaire bien formée (van Tilburg et al., 2009).

premier signe clinique de l’appendicite est une douleur périombilicale suivie de nausées, d’une douleur au quadrant inférieur droit, puis des manifestations cliniques de vomissements et de èvre apparaissent (Alder, 2017). La perforation de l’appendice peut se produire dans les 48 heures environ après la manifestation initiale de douleur chez un enfant de moins de 6 ans (Alder, 2017). À la première consultation, près d’un tiers de tous les cas ont un appendice déjà perforé. Les complications liées à la perforation de l’appendice incluent l’abcès majeur, le phlegmon, une stule entérocutanée, la péritonite et une obstruction intestinale partielle.

Étiologie La cause de l’appendicite est une obstruction de la lumière de l’appendice, généralement accompagnée d’une concrétion fécale, soit un stercolithe. L’enure des tissus lymphoïdes, souvent consécutive à une infection virale, peut également obstruer l’appendice (Alder, 2017).

Physiopathologie Une obstruction aiguë de l’appendice bloque l’écoulement des sécrétions muqueuses de telle sorte qu’une pression s’accumule dans la lumière, ce qui a pour effet de comprimer les vaisseaux sanguins. L’ischémie qui en résulte est suivie d’une ulcération de la paroi épithéliale et d’une invasion bactérienne. La nécrose subséquente entraîne une perforation ou une rupture avec contamination fécale et bactérienne de la cavité péritonéale (Alder, 2017). L’inammation qui s’ensuit se propage rapidement dans tout l’abdomen (péritonite), en particulier chez les jeunes enfants qui ne sont pas en mesure d’indiquer l’endroit précis où ils éprouvent de la douleur. L’inammation péritonéale évolutive déclenche une occlusion intestinale fonctionnelle de l’intestin grêle (iléus), car les réexes GI intenses inhibent considérablement la motilité intestinale. Étant donné que le péritoine représente une partie importante de la surface corporelle totale, la perte du liquide extracellulaire vers la cavité péritonéale provoque un déséquilibre électrolytique et un choc hypovolémique.

Diagnostic Le diagnostic de l’appendicite n’est pas toujours facile à établir parce que les manifestations cliniques sont non spéciques (Alder, 2017). Ainsi, la èvre, les vomissements, la douleur abdominale et l’augmentation de la numération globulaire sont associés à l’appendicite, mais ils se produisent également dans les cas de syndrome du côlon irritable, de maladie inammatoire pelvienne, de gastroentérite, d’infection des voies urinaires, de pneumonie du lobe inférieur droit, de diverticule de Meckel et d’invagination. Les manifestations cliniques prolongées et le diagnostic tardif sont fréquents dans le cas des jeunes enfants, chez qui le risque de perforation est maximal du fait de leur incapacité à verbaliser leurs plaintes. Le diagnostic repose essentiellement sur l’anamnèse et l’examen physique ENCADRÉ 17.7. Le foyer douloureux le plus intense peut être le point de McBurney, situé au tiers externe d’une ligne entre l’ombilic et l’épine iliaque antérosupérieure FIGURE 17.10. La douleur provoquée à la détente brusque de la paroi abdominale après palpation n’est pas un signe able ; de plus, elle est extrêmement pénible pour l’enfant. L’irradiation douloureuse, induite par une légère

percussion autour du périmètre de l’abdomen, indique une irritation péritonéale. Le mouvement, par exemple un cahot en automobile ou en civière roulante, intensie la douleur. Les analyses de laboratoire comprennent d’habitude une FSC, une analyse d’urine pour exclure une infection des voies urinaires et, chez les adolescentes, un dosage de la gonadotrophine chorionique humaine (pour exclure une grossesse ectopique). L’augmentation de la numération des globules blancs au-dessus de 10 000/mm 3 et la hausse du taux de protéine C réactive sont courantes, mais elles ne se rapportent pas spéciquement pour autant à une appendicite. L’augmentation du pourcentage des granulocytes neutrophiles non segmentés à noyau incurvé (souvent appelée déviation vers la gauche) peut indiquer un processus inammatoire. Le taux de protéine C réactive est un réactif de la phase aiguë qui augmente dans les 12 heures suivant l’infection. La tomodensitométrie et l’échographie sont toutes deux utilisées pour le diagnostic de l’appendicite. La tomodensitométrie semble préférée en raison de sa précision de 97 % pour le diagnostic de l’appendicite (Alder, 2017).

Approche thérapeutique Le traitement habituel de l’appendicite inclut la réhydratation, l’administration d’antibiotiques et l’ablation chirurgicale de l’appendice (appendicectomie). Généralement, l’intervention chirurgicale par laparoscopie pour traiter une appendicite aiguë avec perforation est préférable, puisqu’elle réduit le temps opératoire et le séjour hospitalier, diminue les complications, facilite la guérison et donne de meilleurs résultats d’un point de vue esthétique (Ruffolo, Fiorot, Pagura et al., 2013).

ENCADRÉ 17.7

17 FIGURE 17.10 du point de McBurney

Localisation anatomique

Manifestations cliniques de l’appendicite aiguë

• Douleur au quadrant inférieur droit de l’abdomen

• Constipation ou diarrhée

• Fièvre

• Tachycardie, respiration supercielle rapide

• Abdomen rigide

• Anorexie

• Diminution ou absence des bruits intestinaux

• Pâleur

• Vomissements, généralement après l’apparition de la douleur

• Irritabilité

Chapitre 17

• Léthargie • Posture courbée

Troubles liés au système gastro-intestinal

843

Traitement de la péritonite Le traitement d’une péritonite due à une appendicite perforante commence souvent par l’administration préopératoire de liquides, ALERTE CLINIQUE d’électrolytes et d’antibiotiques systémiques par voie I.V., et par une aspiration nasogastrique, puisque l’enfant Outre la èvre, les signes d’une péritonite doit rester à jeun avant l’intervention incluent le soulagement rapide de la douleur chirurgicale . Les soins postopéraaprès la perforation, l’intensication subséquente toires comprennent la perfusion de de la douleur, généralement diffuse et accompaliquides par voie I.V., l’administration gnée d’une défense musculaire rigide à l’abdomen, continue d’antibiotiques et l’aspirala distension abdominale évolutive, la tachycardie, tion nasogastrique pour décompresune respiration supercielle rapide, la pâleur, les frissons et l’irritabilité. ser l’abdomen jusqu’au rétablissement

de l’activité intestinale. Parfois, les chirurgiens referment la plaie après l’irrigation de la cavité péritonéale, ou la laissent ouverte (fermeture tardive) pour prévenir l’infection. Un drain de Penrose facilite le drainage transpéritonéal.

Pronostic Les complications sont rares après une appendicectomie simple. Le taux de mortalité des suites d’une appendicite perforante a considérablement diminué, passant d’une mort quasi certaine il y a un siècle à 1 % ou moins actuellement (Alder, 2017). La détection rapide de l’affection est essentielle pour prévenir les complications.

Soins inrmiers 5 Des méthodes visant à mesurer les divers degrés de douleur sont présentées dans le chapitre 5, Évaluation et traitement de la douleur.

Comme la douleur abdominale est la plainte la plus récurrente chez l’enfant qui souffre d’appendicite, il est important d’en évaluer l’intensité 5 .

L’un des facteurs d’estimation les plus ables est le degré de modication du comportement. L’enfant plus jeune, qui ne parle pas encore, adoptera une position rigide et xe en s’allongeant sur le côté, les genoux échis contre l’abdomen, avec une diminution notable de l’amplitude du mouvement de la hanche droite. L’enfant plus âgé se comportera éventuellement de la même manière, tout en se plaignant ALERTE CLINIQUE d’une douleur abdominale. Toutefois, il sera toujours en Lorsqu’une appendicite est soupçonnée, l’administration de mesure d’indiquer l’endroit laxatifs ou de lavements ainsi que l’application de chaleur où la douleur est plus intense sur la région douloureuse sont formellement contrepar rapport aux autres indiquées, puisqu’elles stimulent la motilité intestinale endroits . et augmentent le risque de perforation.

Prodiguer les soins postopératoires Les soins postopératoires en cas d’appendicite non perforante sont les mêmes que pour la plupart des interventions abdominales. Pour l’enfant qui souffre d’une appendicite perforante et d’une péritonite, les soins sont plus complexes, et la phase de rétablissement est considérablement plus longue (en général, de 7 à 10 jours d’hospitalisation). Les interventions infirmières consistent à administrer des perfusions de liquides par voie I.V., à maintenir le statut NPO, et à décompresser l’abdomen de manière constante et intermittente avec une sonde nasogastrique, jusqu’à l’apparition d’un signe d’activité intestinale. L’évaluation inrmière comprend la surveillance des bruits intestinaux et des autres signes d’activité intestinale comme l’élimination

844

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

des selles. La gestion du traitement par voie I.V. est la même que pour n’importe quel enfant qui reçoit des liquides et des antibiotiques par voie parentérale. Pendant l’intervention chirurgicale, il est courant de poser un drain dans la plaie ; il est essentiel d’utiliser un pansement adéquat et de donner des soins cutanés an de prévenir l’excoriation de la région entourant le foyer chirurgical. Les soins de la plaie peuvent inclure l’irrigation avec une solution antibactérienne. La prise en charge de la douleur liée à l’incision, les changements de pansements et les irrigations constituent l’essentiel des soins destinés à l’enfant. Les soins psychologiques de l’enfant et des parents sont les mêmes que dans les autres situations d’urgence. Les parents et les enfants plus âgés doivent pouvoir exprimer leurs sentiments et leurs préoccupations relativement aux événements qui entourent la maladie et l’hospitalisation. L’inrmière peut fournir de l’information et assurer un soutien psychosocial à l’enfant et à sa famille an de les aider à faire face à la situation, et à atténuer ainsi leur anxiété PSTI 17.1.

clinique

Jugement

APPENDICITE AIGUË

Vous recevez Juliette, âgée de 10 ans, qui est admise à l’hôpital pour une appendicite. Elle est sur la liste des urgences pour une appendicectomie. Au cours de votre tournée, vous trouvez Juliette plus souffrante ; elle présente de la tachypnée et souffre d’une douleur intense à la palpation. Sa température buccale s’élève à 39,8 °C. Que soupçonnez-vous ? a) Un début de septicémie. b) Une rupture de l’appendice. c) Une colite ascendante. d) Un hyperpéristaltisme.

Plan de soins et de traitements inrmiers PSTI 17.1

Enfant ayant une appendicite

PROBLÈME DÉCOULANT DE LA SITUATION DE SANTÉ

Douleur aiguë liée à l’appendice enammé

DONNÉES JUSTIFICATIVES

• Pleurs

• Nausée et vomissement

• Défense musculaire de l’abdomen

• Fièvre

• Limitation volontaire des mouvements

• Tachycardie

• Prostration

• Douleur modérée : diffuse ou localisée au quadrant inférieur droit

• Refus de boire ou de manger OBJECTIF

L’enfant ne ressentira aucune douleur, ou l’intensité de la douleur sera ramenée à un degré acceptable pour lui.

RÉSULTATS ESCOMPTÉS

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES ET JUSTIFICATIONS

• Niveau de confort acceptable ou absence de douleur

• Laisser l’enfant choisir la position qui lui convient le mieux (généralement, les jambes échies) an qu’il soit plus à l’aise.

• Douleur maîtrisée

• Proposer de tenir un petit oreiller sur l’abdomen an de l’immobiliser.

• Diminution des effets perturbateurs de la douleur

• Évaluer régulièrement la douleur et administrer un analgésique selon l’ordonnance pour soulager la douleur. • Utiliser d’autres moyens, notamment la distraction ou le jeu, pour enrayer la douleur. • Impliquer la famille dans la gestion de la douleur an de diminuer l’anxiété de l’enfant.

PROBLÈME DÉCOULANT DE LA SITUATION DE SANTÉ

Risque d’hypovolémie associé à une alimentation et à une hydratation réduites, ainsi qu’à des vomissements

DONNÉES JUSTIFICATIVES

• Assèchement des muqueuses

• Pouls liforme rapide, tachypnée

• Perte de la turgescence cutanée

• Léthargie

• Enfoncement des yeux et des fontanelles OBJECTIF

L’enfant présentera les signes d’une hydratation adéquate.

RÉSULTATS ESCOMPTÉS

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES ET JUSTIFICATIONS

• Atteinte de l’équilibre électrolytique et acidobasique

• Maintenir le statut NPO an de réduire les pertes dues aux vomissements et de diminuer la distension abdominale.

• Équilibre du bilan des ingesta et des excreta

• Mesurer les ingesta et les excreta pour évaluer l’efcacité des interventions.

PROBLÈME DÉCOULANT DE LA SITUATION DE SANTÉ

Risque de convalescence prolongée lié à l’absence de motilité intestinale

DONNÉES JUSTIFICATIVES

• Distension abdominale

• Sensibilité de l’abdomen à la palpation

• Nausées et vomissements

• Absence de selles

• Administrer par voie I.V. les liquides et les électrolytes, selon l’ordonnance, pour assurer la réhydratation.

17

• Absence de bruits intestinaux OBJECTIF

L’enfant ne subira pas de conséquences désagréables découlant du rétablissement tardif de la motilité intestinale.

RÉSULTAT ESCOMPTÉ

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES ET JUSTIFICATIONS

• Absence de distension abdominale, de vomissements ou de malaise abdominal

• Maintenir le statut NPO au début de la phase postopératoire an de prévenir la distension abdominale et les vomissements. • Maintenir la décompression par sonde nasogastrique pour reposer l’intestin jusqu’au rétablissement de la motilité. • Vérier la présence du péristaltisme en palpant l’abdomen à la recherche d’une distension ou d’une sensibilité à la palpation, et surveiller la présence de bruits intestinaux. • Surveiller l’émission de atulences et de selles pour être à l’affût d’un indicateur de la motilité intestinale.

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

845

17.4.2

Diverticule de Meckel

Le diverticule de Meckel est un vestige du canal omphalomésentérique fœtal qui relie la vésicule ombilicale à l’intestin moyen de l’embryon pendant la vie fœtale. Normalement, cette structure disparaît entre la cinquième et la septième semaine de gestation, lorsque le placenta remplace la vésicule ombilicale comme source de nutrition du fœtus (Rabinowitz, 2017). La persistance du diverticule peut créer une stule omphalomésentérique, c’est-à-dire une bande breuse reliant l’intestin grêle à l’ombilic, communément appelée diverticule de Meckel FIGURE 17.11 . Le diverticule de Meckel est un véritable diverticule, car il provient du bord antimésentérique de l’intestin grêle. Il contient toutes les couches de la paroi intestinale et il assure son propre approvisionnement en sang venu de l’artère vitelline. Le diverticule est généralement situé entre 40 et 60 cm de la valvule iléocæcale, et sa longueur moyenne est comprise entre 1 et 10 cm.

FIGURE 17.11 de Meckel

Diverticule

Le diverticule de Meckel est la malformation congénitale la plus courante du tractus GI : il affecte moins de 4 % de la population (Rabinowitz, 2017). Il touche aussi bien les garçons que les lles, mais la fréquence des complications est de 3 à 4 fois plus élevée chez les garçons (Rabinowitz, 2017).

Physiopathologie Les complications symptomatiques du diverticule de Meckel sont l’ulcération, l’hémorragie, l’invagination, l’obstruction intestinale et la perforation ; l’hémorragie est le problème le plus répandu en pédiatrie (Rabinowitz, 2017). La muqueuse gastrique est le tissu ectopique le plus souvent présent dans le diverticule de Meckel. L’hémorragie est provoquée par une ulcération ou une perforation gastroduodénale en raison de la sécrétion d’acide gastrique non tamponné.

Diagnostic L’enfant est souvent asymptomatique. En général, le diagnostic de diverticule de Meckel repose sur l’anamnèse, l’examen physique et un examen radiographique spécialisé. Dans le cas où l’enfant se présente avec des complications, le tableau clinique le plus courant inclut un saignement rectal indolore, une douleur abdominale, des signes d’obstruction intestinale ou, plus rarement, une perforation ENCADRÉ 17.8. Le saignement, qui peut être léger ou abondant, survient souvent sous forme de selles rouge

846

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

foncé ou ayant un aspect de gelée de groseille ; le saignement peut être assez important pour provoquer une hypotension. La scintigraphie de Meckel, une scintigraphie au pertechnétate de technétium 99 m, permet de détecter la présence de muqueuse gastrique avec une sensibilité de 94 % et une spécicité de 97 %, selon une étude rétrospective menée chez des enfants entre 1993 et 2011. Les analyses de sang servent à dépister les troubles hémorragiques et l’anémie (Itriyeva, Harris, Rocker et al., 2015 ; Rabinowitz, 2017).

Approche thérapeutique Le traitement standard consiste en l’ablation chirurgicale du diverticule, habituellement par laparoscopie. Lorsqu’une hémorragie grave augmente le risque chirurgical, les interventions visant à corriger le choc hypovolémique, comme l’administration d’oxygène et de liquides par voie I.V. ou la transfusion de sang, peuvent s’imposer. Lorsque l’obstruction intestinale est présente, des mesures préopératoires adéquates doivent être prises pour corriger les déséquilibres électrolytiques et prévenir une distension abdominale.

Pronostic Lorsque la maladie est diagnostiquée et traitée à temps, le rétablissement complet est probable. Le taux de mortalité liée aux cas de diverticules de Meckel traités se situe aux alentours de 1 %. Pour les diverticules de Meckel non traités, les taux de mortalité et les taux de complications inhérentes (comprenant l’hémorragie GI et l’obstruction intestinale) sont estimés à 12 % (Rabinowitz, 2017).

ENCADRÉ 17.8

Manifestations cliniques du diverticule de Meckel

DOULEUR ABDOMINALE

• Comparable à celle de l’appendicite • Parfois vague et récurrente SELLES SANGLANTESa

• Indolores (premier signe clinique) • Rouge vif ou foncé avec mucus (selles d’aspect dit en gelée de groseille) • Parfois douloureuses (chez les nourrissons) SYMPTÔMES OCCASIONNELS

• Anémie grave • État de choc a Il s’agit souvent d’un signe révélateur.

Soins inrmiers DIVERTICULE DE MECKEL

Les objectifs des soins inrmiers en cas de diverticule de Meckel sont similaires à ceux déployés pour un enfant qui subit une intervention chirurgicale. Comme l’apparition de cette maladie est souvent rapide, les parents requièrent un soutien psychologique. L’hémorragie intestinale massive qui peut accompagner le diverticule de Meckel est traumatisante tant pour l’enfant que pour ses parents, et elle peut avoir des répercussions importantes sur leur réaction émotionnelle à l’hospitalisation et à l’intervention chirurgicale. Les démarches préopératoires suivantes se rapportent spéciquement à une hémorragie intestinale : 1. prendre fréquemment les signes vitaux et la pression artérielle pour détecter un état de choc ; 2. garder l’enfant alité ; 3. noter la quantité approximative de sang éliminé par les selles. S’il n’y a pas d’hémorragie apparente, l’inrmière effectue des analyses pour rechercher du sang occulte dans les selles. Après l’opération, l’enfant doit recevoir des liquides par voie I.V., et avoir une sonde nasogastrique pour la décompression et l’évacuation du contenu de l’estomac.

17.4.3

Maladies inammatoires de l’intestin

Les maladies inammatoires de l’intestin (MII) désignent deux formes d’inammation intestinale chronique : la colite ulcéreuse et la maladie de Crohn (Hôpital pour enfants de Toronto, 2012, 2013). Bien qu’elles aient des caractéristiques épidémiologiques, immunologiques et cliniques communes, il y a entre elles d’importantes différences. Ces maladies se caractérisent par des manifestations cliniques GI, des réactions extraintestinales et inammatoires systémiques, de même que des exacerbations et des rémissions sans résolution complète. Le retard de croissance, particulièrement fréquent dans les cas de la maladie de Crohn, est un problème majeur qui ne concerne que la population pédiatrique. La maladie de Crohn est plus invalidante ; elle suppose des complications plus graves, et son traitement médical et chirurgical est moins efcace que celui

de la colite ulcéreuse. Dans la mesure où la colite ulcéreuse est connée au côlon, elle peut théoriquement être guérie par une colectomie (Rosen, Dhawan et Saeed, 2015). Au cours des dernières années, l’incidence de la maladie de Crohn a augmenté, alors que celle de la colite ulcéreuse est restée stable chez les enfants au Canada (Benchimol, Bernstein, Bitton et al., 2017). Le nombre de cas de maladie de Crohn est d’environ 10 pour 100 000 personnes chez les 0 à 16 ans au Québec (entre 1999 et 2010), une des incidences les plus élevées au monde. Une étude québécoise précise une incidence de 17,4 cas pour 100 000 enfants par année pour la maladie de Crohn, et 10,1 cas pour la colite ulcéreuse (Bitton, Vutcovici, Patenaude et al., 2014). En 2012, au Canada, on estimait à 5 900 le nombre d’enfants de moins de 18 ans atteints de MII (Rocchi, Benchimol, Bernstein et al., 2012).

Étiologie Malgré des décennies de recherche, la cause des MII n’est toujours pas bien comprise. Ces maladies ne peuvent pas encore être guéries ; il n’existe que des traitements de soutien (Fondation canadienne de la santé digestive, 2018a). Des facteurs environnementaux peuvent intervenir dans l’apparition des MII. L’apparition de la maladie de Crohn est conditionnée par des facteurs génétiques. L’inuence de la génétique paraît moindre dans le cas de la colite ulcéreuse que dans celui de la maladie de Crohn (Fondation canadienne de la santé digestive, 2018b). L’allaitement diminue le risque de maladie de Crohn, alors que la diarrhée infantile semble la favoriser (Fondation canadienne de la santé digestive, 2018b ; Fondation québécoise de la maladie cœliaque, 2015).

éactivation des connaissances Nommez les deux examens servant à détecter la présence de sang occulte dans les selles.

CE QU’IL FAUT RETENIR

L’allaitement diminue le risque de maladie de Crohn, alors que la diarrhée infan­ tile semble la favoriser.

Physiopathologie de la colite ulcéreuse Dans la colite ulcéreuse, l’inammation est limitée au côlon et au rectum ; le côlon distal et le rectum sont les plus affectés. L’inammation touche la muqueuse et la sous-muqueuse des segments continus le long de l’intestin, et elle s’accompagne de divers degrés d’ulcération, de saignement et d’œdème. Les manifestations cliniques de la maladie peuvent être légères, modérées ou graves, selon l’étendue de l’inammation de la muqueuse et des symptômes systémiques. Les enfants atteints de colite ulcéreuse souffrent généralement de diarrhée, de saignement rectal et de douleur abdominale, souvent associés à un ténesme et à une défécation impérieuse (Kelsen, 2017). L’épaississement de la paroi intestinale et la brose sont inhabituels, mais une maladie de longue date peut entraîner des sténoses et une diminution de la longueur du côlon. Les manifestations extraintestinales sont plus rares en cas de colite ulcéreuse

Chapitre 17

17

Ténesme : Tension douloureuse dans l’anus ou la vessie avec envies continuelles et inutiles de déféquer ou d’uriner.

Troubles liés au système gastro-intestinal

847

que de maladie de Crohn. Le mégacôlon toxique est la forme la plus dangereuse de la colite grave.

Physiopathologie de la maladie de Crohn Le processus inammatoire chronique de la maladie de Crohn peut toucher n’importe quelle partie du tractus GI entre la bouche et l’anus, mais concerne le plus souvent l’iléon terminal. La maladie affecte toutes les couches de la paroi intestinale (elle est transmurale) de manière segmentaire, c’està-dire que les régions de muqueuse affectée sont séparées par des régions de muqueuse intacte (distribution discontinue des lésions) (Grossman, 2017). Les manifestations cliniques les plus courantes sont la douleur abdominale, la diarrhée et la diminution de l’appétit, entraînant une perte pondérale. La maladie de Crohn provoque une maladie périanale se manifestant notamment par des acrochordons, des stules et des abcès. Elle est souvent accompagnée de èvre, d’un retard de croissance, d’une perte de poids importante (Rowe, 2017) et d’un retard du développement sexuel (Groupe de recherche MII de McGill, s.d.). Les symptômes GI légers, la croissance insufsante et les manifestations extra-intestinales peuvent persister plusieurs années avant que les manifestations cliniques GI évidentes n’apparaissent. L’inammation peut provoquer des ulcérations, une brose, des adhérences, un affermissement de la paroi intestinale, la formation de sténoses et des stules dans d’autres boucles de l’intestin, la vessie, le vagin ou la peau.

Diagnostic Le diagnostic de la colite ulcéreuse ou de la maladie de Crohn repose sur l’anamnèse, l’examen

TABLEAU 17.10

Manifestations cliniques des maladies inammatoires de l’intestin

CARACTÉRISTIQUE

COLITE ULCÉREUSE

MALADIE DE CROHN

Anorexie

Légère ou modérée

Parfois grave

Diarrhée

Souvent grave

De modérée à grave

Douleur

Moins fréquente

Courante

Douleur articulaire

Légère ou modérée

De légère à modérée

Éruptions cutanées

Légères

Légères

Fistules et rétrécissements

Rares

Courants

Lésions anales et périanales

Rares

Courantes

Perte pondérale

Modérée

Parfois grave

Retard de croissance

Généralement léger

Parfois grave

Saignement rectal

Courant

Rare

Source : Adapté de Aziz, Moin, Majeed et al. (2017).

848

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

physique, l’évaluation des résultats des analyses de laboratoire et d’autres examens paracliniques TABLEAU 17.10. La classication de Montréal des MII classe la maladie de Crohn selon l’âge, la localisation et le type (Baillie et Smith, 2015). Les analyses de laboratoire incluent une FSC pour évaluer l’anémie ainsi que la mesure du taux de protéine C réactive ou une mesure de la VSG pour évaluer la réaction systémique au processus inammatoire. Les taux de protéines totales, d’albumine, de fer, de zinc, de magnésium, de vitamine B12 et de vitamines liposolubles risquent d’être faibles chez les enfants atteints de la maladie de Crohn. Il faut procéder à une analyse des selles à la recherche de sang, de calprotectine fécale et de micro-organismes infectieux (El-Matary, Abej, Deora et al., 2017). Le bilan des marqueurs sérologiques, notamment la recherche d’anticorps ANCA et ASCA, est remis en question pour diagnostiquer une MII et distinguer la maladie de Crohn de la colite ulcéreuse (Mosli, Al Beshir, Al-Judaibi et al., 2014). En pédiatrie, l’entérographie par résonance magnétique se révèle supérieure à l’échographie ; elle constitue la modalité de choix qui permettra de déterminer la présence, le siège et l’étendue de la maladie chez les enfants atteints de la maladie de Crohn, avec une spécicité de 100 % et une sensibilité de 75 % (Tsai, Marine, Wanner et al., 2017). L’endoscopie permet de visualiser directement la surface du tractus GI de manière à évaluer l’étendue de l’inammation et à conrmer le diagnostic (Conrad et Rosh, 2017). Jusqu’à récemment, les examens employés étaient l’entéro-scanner et le transit du grêle baryté, mais ils ont été remplacés par une série de radiographies du tractus GI supérieur avec une entéro-IRM, car il n’y a aucune irradiation en imagerie par résonance magnétique (IRM). Cet examen permet de déterminer la présence, le siège et l’étendue de la maladie chez les enfants atteints de la maladie de Crohn, surtout en ce qui concerne l’intestin grêle et l’épaississement de la paroi digestive. L’endoscopie et la coloscopie supérieures avec biopsies font partie intégrante du diagnostic des MII. L’endoscopie permet de visualiser directement la surface du tractus GI de manière à évaluer l’étendue de l’inammation et du rétrécissement. La tomodensitométrie (TDM) en urgence, la résonance magnétique périanale et l’échographie peuvent également servir à détecter une inammation de la paroi intestinale, des abcès intra-abdominaux et des stules. Les lésions associées à la maladie de Crohn peuvent transpercer les parois de l’intestin grêle et du côlon, créant des faisceaux appelés stules entre l’intestin et les structures adjacentes comme la vessie, l’anus, le vagin ou la peau (Däbritz, Gerner, Enninger et al., 2017).

Approche thérapeutique Les objectifs du traitement des MII sont les suivants : 1. maîtriser le processus inflammatoire pour atténuer ou éliminer les manifestations cliniques ; 2. obtenir une rémission à long terme ; 3. favoriser une croissance et un développement normaux ; 4. permettre un mode de vie aussi normal que possible. Le traitement est personnalisé, et il dépend du type et de la gravité de la maladie, de son siège et de la réponse aux soins.

Traitement pharmacologique L’objectif des médicaments utilisés en MII est d’abord de réduire l’inammation, d’induire une rémission des symptômes aigus, puis de la maintenir dans le temps. Plusieurs classes de médicaments sont utilisées : les aminosalicylés, les corticostéroïdes, les immunomodulateurs, les agents biologiques et les antibiotiques (Crohn et Colite Canada, 2016 ; Sandhu, Fell, Beattie et al., 2010). Les aminosalicylés (aussi appelés 5-aminosalicylés ou 5-ASA) sont efcaces pour l’induction et le maintien d’une rémission dans les cas légers ou modérés de colite ulcéreuse. La mésalamine et la sulfasalazine sont les deux agents dans cette classe pharmacologique. Ces médicaments atténuent l’inammation en inhibant la synthèse de la prostaglandine. Les 5-AAS permettent d’obtenir une rémission dans les cas légers de maladie de Crohn. La mésalamine en suppositoire ou en solution de lavement sert à traiter la colite du côlon descendant. La mésalamine par voie orale (PentasaMD, AsacolMD) est privilégiée plutôt que la sulfasalazine, car les effets indésirables tels que les céphalées, les nausées, les vomissements, la neutropénie et l’oligospermie sont moindres. Les corticostéroïdes comme la prednisone et la prednisolone sont indiqués pour le traitement d’induction chez les enfants atteints de colite ulcéreuse ou de maladie de Crohn modérée ou grave. En cas d’épisodes aigus, il est possible d’administrer par voie I.V. des doses élevées de corticostéroïdes, qui seront diminuées progressivement après une réponse clinique. Le budésonide, un corticostéroïde oral à libération retardée, est indiqué pour la colite de l’iléon et du côlon ascendant ; le budésonide est assorti de moins d’effets indésirables que la prednisone et la prednisolone (Lahad et Weiss, 2015). Le traitement stéroïdien rectal, soit les lavements et les préparations de mousse rectale (p. ex., l’hydrocortisone en mousse rectale [CortifoamMD]), est généralement bien toléré (Christophi, Rengarajan et Ciorba, 2016).

Les immunomodulateurs comme le méthotrexate, l’azathioprine et son métabolite ainsi que la 6-mercaptopurine (6-MP) sont employés pour maintenir une rémission chez les enfants atteints d’une MII et pour le traitement des stules chroniques. Ces agents agissent en modulant la réponse immunitaire des enfants atteints. Leurs effets indésirables incluent l’infection, la pancréatite, l’hépatite, la toxicité de la moelle osseuse, l’arthralgie et les tumeurs malignes (Rosen et al., 2015). La FSC et la formule leucocytaire des enfants qui reçoivent des immunomodulateurs doivent faire l’objet d’un suivi régulier de manière à évaluer les modications relatives à la suppression de leur système immunitaire, car un grand nombre d’effets indésirables peuvent être évités ou pris en charge par une réduction de dose ou l’arrêt de la pharmacothérapie. Les antibiotiques comme le métronidazole et la ciprooxacine peuvent servir de traitement adjuvant pour les complications comme les maladies périanales ou la surcroissance bactérienne dans l’intestin grêle liée à la maladie de Crohn. Le métronidazole peut causer beaucoup de nausées ainsi qu’un goût métallique dans la bouche. La ciprooxacine est habituellement réservée aux adolescents, compte tenu des effets indésirables possibles aux articulations chez les enfants. Les agents biologiques tels que l’iniximab (RemicadeMD ou son biosimilaire InectraMD) ou l’adalimumab (HumiraMD) sont habituellement utilisés en dernière ligne en cas d’échec des traitements classiques.

Soutien nutritionnel Le soutien nutritionnel est un aspect capital du traitement des MII. Le retard de croissance est une complication grave commune, en particulier dans le contexte de la maladie de Crohn. Il se caractérise par une perte pondérale, une altération de la composition corporelle ainsi qu’une taille et une maturation sexuelle insufsantes. La malnutrition, qui entraîne un retard de croissance, se rapporte à de nombreux facteurs. Elle résulte d’un apport alimentaire inadéquat, de pertes GI excessives, d’une malabsorption, d’une interaction médicamentsnutriments et d’une augmentation des besoins nutritionnels. L’apport alimentaire inadéquat est une conséquence de l’anorexie et d’une recrudescence des épisodes d’activités pathologiques. La diminution de l’absorption des nutriments (incluant les protéines, les électrolytes et les minéraux) découle d’une inammation intestinale et de la diarrhée. Le saignement rectal causé par l’inflammation entraîne souvent de l’anémie. La malabsorption des glucides, du lactose, des lipides, des vitamines et des minéraux, notamment de la vitamine B12 et de l’acide folique, résulte de l’activité de la maladie, de l’administration de médicaments et de la résection de l’iléon terminal. Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

17

849

Enn, l’inammation, la èvre, les stules et les périodes de croissance rapide comme l’adolescence entraînent une augmentation des besoins nutritionnels.

alors en en diminuant la posologie. Une alimentation élémentaire est sans danger et peut constituer un traitement primaire efficace chez les personnes atteintes de la maladie de Crohn.

Les objectifs du soutien nutritionnel sont les suivants :

L’alimentation parentérale totale améliore également l’état nutritionnel des enfants atteints d’une MII et souffrant d’une obstruction intestinale. Le soutien nutritionnel est moins susceptible d’induire une rémission de la colite ulcéreuse que de la maladie de Crohn. Cependant, l’amélioration du statut nutritionnel est déterminante pour prévenir la détérioration de l’état de santé de l’enfant et préparer ce dernier à l’intervention chirurgicale.

1. obtenir une rémission ; 2. corriger les décits nutritionnels et remplacer les pertes courantes ; 2. fournir les réserves d’énergie et de protéines nécessaires à la guérison ; 3. procurer des nutriments adéquats pour faciliter une croissance normale (Ruemmele, Veres, Kolho et al., 2014 ; Van Limbergen, Haskett, Grifths et al., 2015). L’organisme Crohn et Colite Canada (http://crohnetcolite.ca) présente divers documents pour apprendre autant aux adultes qu’aux plus jeunes comment gérer activement leur maladie.

L’Association d’iléostomie et de colostomie de Montréal (www.aicm-montreal.org) fournit du soutien aux familles dont un membre a subi une stomie.

Le soutien nutritionnel consiste en une alimentation entérale et parentérale. Pour les enfants dont les manifestations cliniques n’empêchent pas un apport convenable par voie orale, une alimentation bien équilibrée, riche en protéines et en calories, est recommandée. Chez les enfants, la nutrition entérale serait une solution de rechange à la corticothérapie et réduirait les risques de rechute (Haskey et Gibson, 2017). La prise de suppléments de multivitamines, de fer et d’acide folique (pour minimiser les effets indésirables du méthotrexate et de la sulfasalazine) est recommandée (Ruemmele et al., 2014). Des formules entérales spéciales, administrées par la bouche ou par perfusion nasogastrique continue, souvent la nuit, pourront être nécessaires. Les formules élémentaires sont complètement absorbées dans l’intestin grêle et ne laissent presque aucun résidu. Une alimentation exclusivement constituée de formules élémentaires améliore non seulement le statut nutritionnel, mais elle induit aussi une rémission de la maladie sans qu’il soit nécessaire de recourir aux stéroïdes, ou

Traitement chirurgical L’intervention chirurgicale est indiquée en cas de colite ulcéreuse lorsque les traitements médicaux et nutritionnels ne permettent pas d’éviter les complications. Les options chirurgicales incluent la colectomie subtotale et l’iléostomie, qui laisse un moignon rectal en cul-de-sac (Baillie et Smith, 2015 ; Rosen et al., 2015) FIGURE 17.12. Dans une étude menée en Ontario, le nombre d’interventions chirurgicales pour la maladie de Crohn, et non pour la colite ulcéreuse, a diminué depuis l’introduction des immunomodulateurs (Benchimol, Guttmann, Rabeneck et al., 2011). Dans de nombreux cas, la colite ulcéreuse peut être guérie par colectomie totale. Une poche en guise de réservoir en forme de J ou de S est alors créée pour améliorer la continence postopératoire. L’abaissement iléoanal permet de préserver la voie normale de défécation. L’intervention chirurgicale peut être nécessaire pour les enfants atteints de maladie de Crohn lorsqu’il est impossible de maîtriser les complications par le traitement médical et nutritionnel. Des résections segmentaires de l’intestin sont effectuées en cas d’obstruction de l’intestin grêle, de sténoses ou de stules. La résection colique partielle n’est pas curative, et la maladie réapparaît souvent.

Pronostic

FIGURE 17.12 L’une des interventions chirurgicales indiquées en cas de colite ulcéreuse est l’iléostomie.

850

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

Le pronostic global des enfants opérés est excellent. Leur qualité de vie est similaire à celle de la population générale (Rosen et al., 2015). En raison de la condition chronique de la MII, l’apparition d’un cancer colorectal est une complication possible à long terme. Dans le cas de la colite ulcéreuse, la fréquence cumulative du cancer colorectal serait de 13 cas pour 1 000 personnes selon une métaanalyse européenne (Castaño-Milla, Chaparro et Gisbert, 2014). Aux ns de surveillance, il conviendra de procéder à des coloscopies et à plusieurs biopsies environ 7 à 10 ans après le diagnostic de la colite ulcéreuse ou de la maladie de Crohn, et ce, chaque année ou tous les 2 ans (Rosen et al., 2015). L’ablation du côlon touché prévient l’apparition du cancer colorectal. Dans le cas de la maladie de Crohn, l’ablation chirurgicale du côlon affecté n’empêche cependant pas le cancer d’apparaître dans une autre partie du tractus GI.

Soins inrmiers Dans le contexte de la prise en charge des MII, les considérations relatives aux soins inrmiers vont au-delà de la période immédiate d’hospitalisation. Les interventions consistent à conseiller les familles en ce qui a trait à : 1. la prise en charge de l’alimentation ; 2. la manière de remédier aux facteurs qui augmentent le stress et l’instabilité émotionnelle ; 3. la manière de s’ajuster à une maladie qui oscille entre rémissions et exacerbations ; 4. l’importance de se préparer à l’éventualité d’une intervention chirurgicale de dérivation intestinale.

Promouvoir le soutien nutritionnel Dans la mesure où le soutien nutritionnel est un aspect central du traitement, il est souvent difcile d’encourager un enfant anorexique à consommer des quantités sufsantes d’aliments. Certaines interventions utiles consistent à faire participer l’enfant à la planication des repas ; à l’inciter à prendre des petits repas ou des goûters fréquents plutôt que trois gros repas par jour ; à servir les repas à l’heure de la prise des médicaments, notamment lorsque la diarrhée, la douleur buccale et les spasmes intestinaux sont maîtrisés ; enn, à préparer des aliments riches en protéines et en calories comme le lait de poule, les laits frappés, les potages crémeux, les poudings ou les crèmes (si l’enfant tolère le lactose). L’apparition d’une stomatite aphteuse peut compliquer davantage le respect des consignes alimentaires. Les soins buccaux avant les repas et la consommation d’aliments peu relevés permettent de soulager l’inconfort lié aux ulcérations buccales. Lorsqu’une alimentation par sonde nasogastrique ou une alimentation parentérale totale sont indiquées, le personnel inrmier joue un rôle important en expliquant l’objectif et les issues prévues de ce traitement. L’inrmière doit prendre connaissance des craintes de l’enfant et des membres de sa famille, et leur allouer assez de temps pour qu’ils acquièrent les capacités requises pour poursuivre le traitement à domicile, le cas échéant.

17.4.4

Ulcère gastroduodénal

L’ulcère gostroduodénal est une maladie chronique qui touche l’estomac ou le duodénum. Les ulcères sont décrits ainsi : gastriques ou duodénaux, et primaires ou secondaires. Un ulcère gastrique

L’enfant et sa famille doivent bien comprendre l’importance que revêt la poursuite de la pharmacothérapie malgré la rémission des manifestations cliniques. En effet, la non-adhésion au traitement pharmacologique peut entraîner une exacerbation de la maladie, ce qui est malheureusement possible, même si l’enfant et la famille observent le régime thérapeutique, et il leur sera difcile d’y faire face.

Soutenir l’enfant et sa famille L’inrmière doit prêter attention aux composantes émotionnelles de la maladie et envisager toute source de stress. Le stress et l’instabilité émotionnelle peuvent avoir des conséquences néfastes directes sur les manifestations cliniques (motilité, dysfonction immunologique) ou indirectes (rechute, non-adhésion) (Sajadinejad, Asgari, Molavi et al., 2012). Elle est généralement en mesure d’aider les enfants à s’ajuster aux problèmes de retard de croissance ou de maturation sexuelle, aux restrictions alimentaires, au sentiment d’être différents ou maladifs, à l’incapacité de rivaliser avec les autres et à la nécessité de s’absenter de l’école pendant les exacerbations de la maladie 10 .

10 Les stratégies inrmières visant à aider l’enfant à s’adapter aux répercussions liées à la maladie sont présentées dans le chapitre 10, Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en de n de vie.

Enseigner les soins à long terme à l’enfant et à la famille Si une colectomie-iléostomie permanente est nécessaire, l’inrmière peut enseigner à l’enfant et à la famille les soins qui y sont liés. Elle doit également faire valoir les aspects positifs Alicia est une adolescente de 13 ans. Elle a souffert de l’intervention chirurgicale, d’épisodes de diarrhée grave, d’anorexie importante et qui permet notamment une de douleurs abdominales. Un diagnostic de maladie de croissance et un dévelopCrohn a été posé, et Alicia est maintenant hospitalisée pement sexuel accélérés, un pour un traitement aux corticostéroïdes et une alimen­ rétablissement permanent, tation parentérale. Alicia aurait­elle pu présenter des l’élimination du risque de cansaignements rectaux comme manifestation de la cer du côlon dans les cas de maladie de Crohn ? Justiez votre réponse. colite ulcéreuse, et qui rend possible une vie normale mala) Oui, car les saignements rectaux sont toujours gré la dérivation intestinale. un indice de cette maladie. Présenter aux enfants et aux b) Oui, car ils sont révélateurs de la gravité de parents d’autres enfants qui l’atteinte intestinale du côlon. ont subi une stomie, surtout si c) Non, car les saignements rectaux sont plutôt ce sont des enfants du même rares en cas de maladie de Crohn. âge, peut être un moyen efcace d’aider la famille à accepd) Non, mais ils pourraient indiquer une complica­ ter la situation. tion affectant la muqueuse intestinale.

clinique

Jugement

MALADIES INFLAMMATOIRES DE L’INTESTIN

affecte la muqueuse de l’estomac ; un ulcère duodénal touche le pylore ou le duodénum (Blanchard et Czinn, 2016). La plupart des ulcères primaires apparaissent en l’absence de facteurs prédisposants (gastrites et ulcères idiopathiques causés par

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

851

17

la bactérie Helicobacter pylori), tendent à être chroniques et se situent plus fréquemment dans le duodénum. Les ulcères secondaires (causés par des médicaments) et les ulcères de stress sont, eux, généralement aigus et gastriques. La maladie est relativement rare chez les enfants, avec une incidence de 24 cas pour 100 000 enfants annuellement (Fashner et Gitu, 2015).

Étiologie La cause exacte de l’ulcère gastroduodénal est inconnue, bien que des facteurs infectieux, génétiques et environnementaux jouent un rôle important. Il existe un lien signicatif entre la bactérie H. pylori et les ulcères. En effet, il est avéré que la bactérie H. pylori, microaérophile, à Gram négatif, à croissance lente, en spirale et agellée, colonise la muqueuse gastrique d’environ la moitié de la population mondiale. Environ 50 % des enfants seraient porteurs de la bactérie dans les pays industrialisés (Gold, Gilger et Czinn, 2014). La bactérie H. pylori peut provoquer des ulcères en affaiblissant la fonction de barrière de la muqueuse gastrique, ce qui permet à l’acide d’endommager la muqueuse. La bactérie serait acquise par voie fécale-orale, et cette hypothèse est corroborée par la présence de bactéries H. pylori viables dans les selles. Certains médicaments contribuent à la formation d’ulcères (Guariso et Gasparetto, 2012). Les aliments épicés ne causent pas d’ulcères

ENCADRÉ 17.9

Caractéristiques des ulcères gastroduodénaux

NOURRISSON ET TROTTINEUR

• Plus sujet à un ulcère secondaire siégeant aussi bien dans l’estomac que dans le duodénum • Ulcères primaires moins fréquents et siégeant d’habitude dans l’estomac • Ulcères coïncidant généralement avec une maladie, une intervention chirurgicale ou un traumatisme • Hématémèse, méléna ou perforation ENFANT ÂGÉ DE DEUX À CINQ ANS

• • • •

Ulcères primaires ou secondaires Ulcères siégeant dans l’estomac autant que dans le duodénum Perforation plus probable dans les cas d’ulcères secondaires Manifestations cliniques : Douleur périombilicale, alimentation insufsante, vomissements, irritabilité, réveil nocturne, hématémèse, méléna

ENFANT ÂGÉ DE SIX ANS ET PLUS

• • • • • •

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En général, ulcères primaires siégeant dans le duodénum Ulcères ressemblant davantage à ceux des adultes Risque plus élevé de récurrence Souvent en présence de la bactérie H. pylori Douleur épigastrique ou douleur abdominale vague Réveil nocturne, hématémèse, méléna et anémie possibles

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

gastroduodénaux, mais peuvent exacerber un ulcère existant. Certaines situations stressantes, telles qu’un état de choc, une septicémie, un traumatisme ou une maladie chronique, peuvent provoquer des ulcères gastriques aigus. L’obésité est souvent associée à la présence d’ulcères gastroduodénaux (Guariso et Gasparetto, 2012).

Physiopathologie La maladie ulcéreuse gastroduodénale est très probablement due à un déséquilibre entre les facteurs destructeurs (les cytotoxiques) et défenseurs (les cytoprotecteurs) du tractus GI. Les mécanismes toxiques incluent l’acide, la pepsine, des médicaments comme l’aspirine et les antiinammatoires non stéroïdiens (AINS), les acides biliaires et l’infection à H. pylori. Les facteurs défensifs sont notamment la couche de mucus, la sécrétion locale de bicarbonate, le renouvellement des cellules épithéliales et le débit sanguin dans la muqueuse. Les prostaglandines interviennent dans les mécanismes de défense de la muqueuse, car elles stimulent la sécrétion de mucus et d’agents alcalins. Le principal mécanisme préventif contre l’apparition de l’ulcère gastroduodénal est la sécrétion de mucus par les glandes épithéliales et muqueuses de tout l’estomac. La couche épaisse de mucus sert à diffuser l’acide de la lumière de l’estomac vers la surface muqueuse, ce qui protège l’épithélium gastrique (Anand, 2017).

Syndrome de Zollinger-Ellison Le syndrome de Zollinger-Ellison peut se manifester chez les enfants atteints d’ulcères multiples, étendus ou récurrents. Ce syndrome se caracté rise par une hypersécrétion d’acide gastrique, un ulcère irréductible et une malabsorption intestinale causée par une tumeur qui sécrète de la gastrine dans le pancréas (Blanchard et Czinn, 2016).

Diagnostic Le diagnostic d’ulcère gastroduodénal est fondé sur l’anamnèse, l’examen physique et les examens paracliniques. L’anamnèse doit être centrée sur les manifestations comme la douleur abdominale épigastrique, la douleur nocturne, la régurgitation, les brûlures d’estomac, la perte pondérale, l’hématémèse et le méléna ENCADRÉ 17.9. L’objectif principal est de déterminer la cause de l’ulcère gastroduodénal, et pas seulement la présence d’une infection à H. pylori. L’anamnèse doit inclure des questions visant à savoir si la personne a déjà pris des substances susceptibles d’entraîner cette affection, comme les AINS et les corticostéroïdes. Les analyses de laboratoire peuvent inclure une FSC pour détecter l’anémie, la recherche du sang occulte dans les selles, les tests de la fonction hépatique, la vitesse de sédimentation ou le taux de protéine C

réactive pour déceler les MII ; le taux d’amylase et de lipase est aussi mesuré pour détecter une pancréatite, et le taux d’acide gastrique, pour analyser l’hypersécrétion. Il est possible d’effectuer un test respiratoire au lactose pour établir l’intolérance à cette substance. Il n’est pas recommandé de rechercher la bactérie H. pylori chez les enfants présentant des signes de douleur abdominale fonctionnelle (Koletzko, Jones, Goodman et al., 2011). Les méthodes diagnostiques doivent préférablement être non invasives. Si l’on cherche à déterminer la présence de la bactérie H. pylori, il est préférable de procéder à un test respiratoire à l’urée C, qui est une méthode able pour mesurer la colonisation bactérienne de la muqueuse gastrique et pour dépister H. pylori. Chez les enfants, une analyse de sang visant à détecter l’antigène de ce micro-organisme ne constitue pas une méthode able, contrairement aux analyses chez l’adulte (Fashner et Gitu, 2015). Les tests des antigènes polyclonaux et monoclonaux des selles sont une méthode précise et non invasive servant à diagnostiquer initialement l’infection à H. pylori et à conrmer son éradication après le traitement (Fashner et Gitu, 2015).

Approche thérapeutique Les principaux objectifs du traitement des enfants atteints d’un ulcère gastroduodénal sont de soulager l’inconfort, d’accélérer la guérison, et de prévenir les complications et la récurrence. Le traitement, essentiellement pharmacologique, consiste à administrer des médicaments pour traiter l’infection à H. pylori (si elle est établie) et à réduire ou neutraliser la sécrétion d’acide gastrique. Les inhibiteurs de la pompe à protons comme l’oméprazole et le lansoprazole agissent en inhibant la pompe à hydrogène des cellules pariétales, bloquant ainsi la production d’acide. Leur emploi est fréquent dans le traitement des ulcères en pédiatrie. Ils semblent bien tolérés et sont rarement assortis d’effets indésirables tels qu’une céphalée, une diarrhée, des nausées et des vomissements (Department of Health & Human Services et Centers for Medicare & Medicaid Services, 2013 ; Smith, Israel, Schreiber et al., 2013). Une trithérapie est recommandée comme régime thérapeutique de première intention contre l’infection à H. pylori (Koletzko et al., 2011) : elle se compose d’un inhibiteur de la pompe à protons et de deux antibiotiques, habituellement l’amoxicilline et le métronidazole, ou l’amoxicilline et la clarithromycine. Ce traitement d’association, pris pendant 7 à 14 jours, vise une efcacité de 90 % dans l’éradication de la bactérie H. pylori. Malheureusement, ce taux avoisine plutôt les 65 %, ce qui s’explique par la résistance aux antibiotiques. Comme solution de rechange

au traitement de première intention, il est possible d’utiliser une autre séquence comme une bithérapie (inhibiteur de la pompe à protons et amoxicilline) pendant 5 jours, suivie par une trithérapie pour 1 semaine (Koletzko et al., 2011). Une thérapie à base de bismuth peut aussi être proposée. Combiné à la trithérapie, le bismuth serait efficace contre l’infection à H. pylori. L’utilisation des sels de bismuth en pédiatrie suscite toutefois quelques inquiétudes en raison du risque d’effets indésirables, incluant le goût métallique, qui affectent l’adhésion au traitement (Koletzko et al., 2011). Un test non invasif de suivi est préconisé dans les 4 à 8 semaines suivant le traitement.

Pronostic Le pronostic à long terme de l’ulcère gastroduodénal varie. De nombreux ulcères guérissent après un traitement médical, mais les ulcères gastroduodénaux primaires sont souvent récurrents. Les complications comme les hémorragies gastrointestinales peuvent survenir et persister pendant la vie adulte.

Soins inrmiers ULCÈRE GASTRODUODÉNAL

Le principal objectif des soins inrmiers est de favoriser la guérison de l’ulcère gastroduodénal par l’adhésion au traitement pharmacologique. Si l’emploi d’un analgésique ou d’un antipyrétique est requis, il convient d’administrer de l’acétaminophène, mais pas d’aspirine ni d’AINS. Dans le cas des enfants non hospitalisés atteints d’une maladie chronique, il faut considérer le rôle du stress dans l’apparition des ulcères. Chez les enfants, les ulcères résultent souvent d’autres affections, de sorte que l’inrmière doit connaître les conditions familiales et environnementales susceptibles d’aggraver ou de déclencher les ulcères. Les enfants gagneraient à recevoir un counseling psychologique et à apprendre des méthodes pour faire face au stress de manière constructive.

17.5

Troubles hépatiques

17.5.1

Hépatite

17

Étiologie L’hépatite est une inammation aiguë ou chronique du foie qui peut avoir plusieurs causes distinctes, par exemple un virus, une réaction à une

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

853

éactivation des connaissances Qu’est-ce qui caractérise la période d’incubation d’une infection ?

substance chimique ou à un médicament, ou d’autres maladies. Les causes non virales de l’hépatite incluent l’hépatite auto-immune, la maladie de Wilson, le décit en alpha 1-antitrypsine et la stéatohépatite. La majorité des cas d’hépatite virale sont causés par le virus de :

• l’hépatite G (VHG).

• l’hépatite A (VHA) ;

L’infection par le VHA affecte les personnes de tous âges, mais l’incidence est maximale chez les enfants d’âge préscolaire jusqu’à ceux âgés de moins de 15 ans. Les enfants peuvent être une source d’infection du VHA pour l’adulte, par exemple par l’exposition dans des milieux de

• l’hépatite B (VHB) ; • l’hépatite C (VHC) ; • l’hépatite D (VHD) ; • l’hépatite E (VHE) ;

TABLEAU 17.11

Au Canada, les hépatites A, B et C sont les infections les plus fréquentes (ASPC, 2015b). TABLEAU 17.11.

Hépatite A

Comparaison des hépatites de type A, B et C

CARACTÉRISTIQUES

TYPE A

TYPE B

TYPE C

Période d’incubation

De 15 à 50 jours, moyenne de 25 à 30 jours

De 45 à 160 jours, moyenne de 50 jours

De 2 semaines à 6 mois, moyenne de 6 à 7 semaines

Période de contagion

• Deux semaines avant l’apparition des manifestations cliniques ; se termine 2 semaines après leur disparition (Centre canadien d’hygiène et de sécurité au travail, 2017)

• Période variable : présence du virus dans le sang ou d’autres liquides corporels jusqu’à la n de la période d’incubation et pendant le stade aigu de la maladie

• Contagion possible avant l’apparition des manifestations cliniques • Persistance possible de l’état de porteur pendant des années

• Persistance possible de l’état de porteur pendant des années, voire à vie Mode de transmission

• Voie principale : fécale-orale

• Voie principale : parentérale

• Voie principale : parentérale

• Voie moins fréquente parentérale

• Voie moins fréquente : orale, sexuelle, par tout liquide corporel

• Propagation possible par voie non parentérale

• Transfert périnatal : sang transplacentaire (dernier trimestre), durant l’accouchement ou l’allaitement, surtout en présence de ssures aux mamelons de la mère Manifestations cliniques Apparition

Généralement rapide, aiguë

Insidieuse

Insidieuse

Fièvre

Courante et précoce

Moins fréquente

Moins fréquente

Anorexie

Courante

De légère à modérée

De légère à modérée

Nausées et vomissements

Courants

Possibles

De légers à modérés

Éruption cutanée

Rare

Courante

Possible

Arthralgie

Rare

Courante

Rare

Prurit

Rare

Possible

Possible

Ictère

Présent (nombreux cas anictériques)

Présent

Présent

Immunité

Présente après une crise ; pas de croisement avec le type B ou C

Présente après une crise ; pas de croisement avec le type A ou C

Présente après une crise ; pas de croisement avec le type A ou B

État de porteur

Non

Oui

Oui

Infection chronique

Non

Oui

Oui

854

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

TABLEAU 17.11 CARACTÉRISTIQUES

Comparaison des hépatites de type A, B et C (suite) TYPE A

TYPE B

TYPE C

• Immunité passive

• Immunité passive

• Ne s’applique pas

• Traitement réussi, en particulier au début de la période d’incubation et en cas de coïncidence avec une prophylaxie de préexposition

• Bienfaits variables ; résultats non probants

Vaccin anti-VHA

• Deux vaccins inactivés homologués pour les enfants de 2 à 18 ans : HavrixMD et VaqtaMD ; administrés en 2 doses à un intervalle de 6 à 12 mois

• Ne s’applique pas

• Ne s’applique pas

Immunoglobulines anti-VHB (IgHB)

• Aucun avantage

• Immunité passive

• Aucun avantage

Vaccin anti-VHB

• Aucun avantage

• Protection postexposition possible si administration immédiatement après une exposition certaine

• Aucun avantage

Prophylaxie Immunoglobulines (Ig)

• Immunité active • Vaccination universelle recommandée pour tous les nouveau-nés Pronostic Mortalité

De 0,1 à 0,2 %

garde. Habituellement, la maladie liée au VHA chez les enfants est bénigne. Le virus se transmet par les excréments (SCP, 2015). La maladie est souvent anictérique (absence d’ictère) et infraclinique. Des enfants infectés qui ne présentent aucune manifestation clinique peuvent donc transmettre le virus. La période d’incubation est d’environ 3 semaines. L’infection par le VHA peut être grave chez les enfants atteints de troubles immunodécitaires. Quoique certains cas puissent se prolonger, le pronostic est excellent. Trois vaccins existent au Canada, AvaximMD, HavrixMD et VaqtaMD et ils sont administrés en préexposition, en 2 doses (ASPC, 2016b). Ils préviennent la maladie dans 95 à 100 % des cas (MSSS, 2017).

Hépatite B Les zones de prévalence élevée du VHB se situent en Afrique et en Asie ; le Canada est considéré comme une zone de faible prévalence. La transmission s’opère habituellement par voie parentérale, par l’exposition au sang, aux sécrétions ou aux liquides corporels contaminés (ASPC, 2014). Les infections résultant de transfusions sanguines ont diminué avec l’apparition des méthodes de dépistage des produits sanguins. Les autres

De 0,5 à 2 % dans les cas sans complications ; peut être plus élevée dans les cas avec complications

De 1 à 2 % dans les cas sans complications ; peut être plus élevée dans les cas avec complications

modalités d’infection incluent les transplantations d’organes, les contacts physiques intimes, la transmission d’une mère à son nourrisson ainsi que les éclaboussures de liquide contaminé dans la bouche ou les yeux. Les adultes dont la profession suppose une exposition au sang ou à des produits sanguins, comme les professionnels de la santé, sont soumis à un plus grand risque d’infection et ils doivent recevoir le vaccin contre le VHB.

17

Dans le cas des enfants, la plupart des infections par le VHB sont acquises pendant la période périnatale. Les nourrissons atteints d’une infection par le VHB ont au moins 90 % plus de risques d’en être des porteurs chroniques (MSSS, 2016a). La période d’incubation du VHB est comprise entre 45 et 160 jours. L’infection par le VHB touche les enfants et les adolescents qui appartiennent aux groupes à risque élevé suivants : • les enfants d’âge préscolaire dans des zones endémiques ; • les adolescents qui consomment abusivement de la drogue par voie I.V. ou qui ont des contacts sexuels non protégés avec des partenaires infectés ; Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

855

• les enfants et les adolescents hémophiles, ceux qui ont reçu plusieurs transfusions avant avril 2003 ou qui résident en institution (HémaQuébec, 2014). L’hépatite B est une maladie à déclaration obligatoire (MADO) (MSSS, 2016a).

d’incubation varie de deux à neuf semaines. La maladie est rare chez les enfants et elle n’entraîne pas de maladies chroniques du foie ; il ne s’agit donc pas d’une infection chronique, et il n’existe pas d’état de porteur du VHE. La maladie est très rare au Canada (ASPC, 2010b).

Hépatite C

Hépatite G

Le nombre de personnes infectées par le VHC au Canada est estimé entre 220 000 et 245 000 (CATIE, 2017). Environ 5 % des mères infectées de façon chronique par le VHC transmettent le virus à leur nouveau-né (SCP, 2016d). Les autres voies possibles d’infection sont l’exposition percutanée après une transfusion de sang ou de produits sanguins, la transplantation d’organes ou de tissus, ou le partage de seringues usagées. Le risque d’infection par le VHC lié à une transfusion est faible, mais l’utilisation de drogues injectables est une source courante d’infection. La Société canadienne de pédiatrie (SCP, 2016d) ne recommande le test de dépistage du VHC que chez les femmes considérées comme étant à risque, soit celles qui : • présentent un taux élevé d’aminotransférase dont la cause est inconnue ; • ont reçu des produits sanguins : – avant 1990 dans les pays industrialisés ; – en tout temps dans les pays en voie de développement ; • s’injectent ou se sont injecté de la drogue ; • ont reçu une greffe d’organe ou de tissu. Le cours clinique de l’infection par le VHC est variable. La période d’incubation moyenne est de six à sept semaines, et l’intervalle peut aller de deux semaines à six mois. L’infection aiguë ou chronique par le VHC ne produit que des manifestations cliniques légères non spéciques, voire aucune manifestation (CATIE, 2017).

Hépatite D Le VHD est une cause importante de maladie hépatique aiguë et chronique. C’est un virus sans acide ribonucléique (ARN) qui dépend de la présence du VHB (ASPC, 2015a). L’infection par le VHD concerne principalement les personnes hémophiles et les utilisateurs de drogues injectables. La période d’incubation de ce virus varie de deux à huit semaines. Les formes aiguë et chronique sont plus graves que l’infection par le VHB et peuvent provoquer une cirrhose. Le test de dépistage de l’infection par le VHD est recommandé pour les enfants atteints d’une infection par le VHB, d’une maladie grave du foie ou d’une exacerbation aiguë d’une maladie du foie jusque-là stable.

Hépatite E L’infection par le VHE s’effectue par voie entérale. La transmission peut s’opérer par voie fécaleorale ou par de l’eau contaminée. La période

856

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

Le VHG est un virus à diffusion hématogène qui peut aussi se transmettre par l’entremise d’une transplantation d’organe. Les groupes à risque élevé incluent les receveurs de greffe, les utilisateurs de drogues injectables et les personnes infectées par le VHC. Les porteurs du virus sont souvent asymptomatiques, et la plupart des infections sont chroniques (ASPC, 2015b). La durée de la période d’incubation est inconnue.

Physiopathologie Les changements pathologiques liés à l’hépatite concernent surtout les cellules parenchymateuses du foie et se manifestent par divers degrés d’enure, une inltration des cellules du foie par des cellules mononucléaires, une dégénérescence subséquente, une nécrose et une brose. L’hépatite peut être spontanément résolutive et se solder par une régénérescence complète des cellules du foie sans cicatrisation. Cependant, l’hépatite fulminante, qui se caractérise par une évolution grave et aiguë de la maladie ainsi qu’une destruction massive du foie, entraîne une insufsance hépatique et la mort en une ou deux semaines. L’hépatite subaiguë ou chronique active se caractérise par une destruction progressive du foie, une régénérescence incertaine, une cicatrisation et un risque de cirrhose.

Manifestations cliniques La phase anictérique initiale dure généralement de cinq à sept jours ; elle est souvent confondue avec la grippe. Les manifestations cliniques incluent la nausée, les vomissements, une anorexie extrême, un malaise, une grande fatigabilité, une arthralgie, des éruptions cutanées, une fièvre légère ou modérée, et une douleur abdominale dans les quadrants épigastrique ou supérieur droit. L’urine foncée est un signe clinique de la phase ictérique. La jaunisse, aussi appelée ictère, peut s’accompagner d’un prurit incommodant, mais elle épargne beaucoup d’enfants atteints d’une hépatite virale aiguë.

Diagnostic En ce qui a trait à une éventuelle exposition à un virus de l’hépatite, le diagnostic est fondé sur l’anamnèse. L’examen physique et les marqueurs sérologiques comme les anticorps ou les antigènes signalent une infection active par l’hépatite A, B ou C, ou une infection antérieure. Dans la mesure où la réserve fonctionnelle du foie est importante,

les anomalies des analyses de laboratoire peuvent être le seul indicateur d’une hépatite. Cependant, l’élévation des tests de la fonction hépatique n’est pas spécique au diagnostic de l’hépatite virale. Bien que les taux sériques d’aspartate et d’alanine aminotransférases (AST et ALT) soient très élevés en cas d’hépatite virale, cette hausse peut aussi être due à d’autres maladies ou affections. Les taux de bilirubine sérique culminent de 5 à 10 jours après l’apparition d’un ictère clinique. Lorsque l’hépatite est grave, les taux d’albumine diminuent, et le temps de Quick augmente. Le diagnostic de l’hépatite virale repose sur la présence de marqueurs viraux spéciques (Samji, 2017). Le diagnostic de l’infection aiguë par le VHA est fondé sur la présence d’immunoglobulines anti-VHA (immunoglobuline M [IgM]) dans le sérum. Le diagnostic du VHB dépend de la présence d’antigènes de surface du virus de l’hépatite B (AgHBs) ou de celle d’IgM dirigées contre l’antigène nucléocapsidique du VHB (anti-HBc). L’infection chronique au VHB se caractérise par la persistance d’AgHBs et de marqueurs de l’ADN du VHB. Le diagnostic de l’infection par le VHC repose sur la détection d’anticorps anti-VHC et la conrmation par réaction en chaîne de la polymérase de l’ARN de l’hépatite C. Il faut tenir compte de la durée pendant laquelle les anticorps maternels sont présents chez les nourrissons dont la mère est porteuse du VHC, et effectuer un test de dépistage lorsque l’enfant a plus de 12 mois. Cependant, un programme de dépistage systématique n’est pas recommandé, contrairement au VHB. Les directives actuelles préconisent de faire examiner les enfants infectés par le VHC à des intervalles réguliers pour surveiller une éventuelle hépatite chronique (SCP, 2016d). La plupart des enfants ne présentent aucun symptôme d’infection, mais ils révèlent des signes d’hépatite chronique par une biopsie du foie. Les taux d’enzymes hépatiques pourront alterner entre des valeurs normales et des valeurs élevées. Les examens d’imagerie ne sont pas requis pour établir le diagnostic, mais plutôt pour établir un diagnostic différentiel favorisant les maladies de la vésicule biliaire, l’obstruction biliaire ou encore l’abcès hépatique (Samji, 2017). Enn, la biopsie du foie permet d’évaluer la gravité de la maladie.

Approche thérapeutique Il existe peu d’options thérapeutiques contre les hépatites virales. Les objectifs de la prise en charge incluent la détection précoce, le dépistage de la maladie chronique du foie, le soutien et le suivi, ainsi que la prévention de la propagation de la maladie. L’infection par le VHA est une maladie aiguë qui se résorbe par des soins de soutien et la gestion

des manifestations cliniques (SCP, 2015). Tous les enfants atteints d’une infection par le VHB chronique n’ont pas besoin d’être traités (ASPC, 2013c). Le traitement de l’infection par le VHB vise à gérer la charge virale an de prévenir toute atteinte hépatique et les complications associées. L’interféron pégylé, une forme récente d’interféron, constitue le traitement de première intention de l’infection par le VHB (ASPC, 2013c ; Cofn, Fung et Ma, 2012). L’hospitalisation est un autre aspect important de la prise en charge thérapeutique des hépatites : elle s’impose en cas de coagulopathie ou d’hépatite fulminante.

Prévention L’hygiène adéquate des mains et les précautions classiques d’isolement peuvent empêcher la propagation de l’hépatite. L’usage prophylactique courant d’immunoglobulines (Ig) prévient efcacement l’infection par le VHA avant l’exposition, par exemple avant un voyage prévu dans des zones où ce virus est répandu, ou après l’exposition au virus, au début de la période d’incubation. L’immunoglobuline contre l’hépatite B (IgHB) est efcace dans la prévention de l’infection par le VHB après l’exposition. L’Ig et l’IgHB doivent être administrées moins de deux semaines après l’exposition. Des vaccins combinés ont été mis au point pour prévenir l’infection par le VHA et le VHB. Les programmes de vaccination varient selon la province. Au Québec, le vaccin est offert à tous les enfants de 4e année du primaire âgés de 10 à 11 ans (MSSS, 2017). L’Enquête nationale sur la couverture vaccinale des enfants (ENCVE) a révélé que 90 % des enfants âgés de 17 ans étaient vaccinés contre l’hépatite B (ASPC, 2016a). Il n’existe pas d’immunisation active contre le VHC. Il est possible d’éviter l’infection par le VHD en se protégeant de l’infection par le VHB.

17

Pronostic Pour les enfants atteints d’une hépatite, le pronostic varie en fonction du type de virus. En général, le VHA entraîne une maladie légère et brève, sans état de porteur. Le VHB provoque un large spectre de maladies aiguës et chroniques. Environ 10 % de ceux qui contractent une cirrhose à la suite d’une hépatite B chronique sont atteints d’un carcinome hépatocellulaire ; une proportion plus faible décède d’une insuffisance hépatique fulminante (Bennett, 2017a). Le VHC provoque une hépatite aiguë qui évolue en maladie chronique et entraîne des complications comme la cirrhose ou le carcinome hépatocellulaire (Bennett, 2017b).

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

857

Soins inrmiers HÉPATITE

Les objectifs des soins inrmiers dépendent de la gravité de l’hépatite, du traitement médical ainsi que des facteurs qui inuencent le contrôle et la Procéder à l’hygiène des mains transmission de la maladie. Les enfants atteints est la principale mesure de d’une hépatite virale bénigne peuvent souvent receréduction du risque de voir des soins à domicile, et l’inrmière sera restransmission de l’hépatite. ponsable de leur expliquer le traitement et les mesures destinées à juguler l’infection. Lorsque les parents requièrent plus d’assistance pour suivre le traiAminata, qui a deux ans, est une enfant à la peau tement, une consultation noire. Elle est admise pour une exacerbation de en soins inrmiers commul’hépatite B, et vous devez évaluer la gravité de son nautaires pourra les aider. ictère. Comment procéderez-vous ? L’infection par le VHB ou le a) En examinant les lits unguéaux. VHC est une maladie chronique qui exige une prise en b) En regardant la couleur des gencives. charge et un suivi réguliers. c) En inspectant la sclérotique. De nombreuses collectivités d) En observant la paume des mains. disposent de cliniques multidisciplinaires consacrées au MAIS SI... traitement de ces maladies. Si Aminata était atteinte d’hépatite A, faudrait-il CE QU’IL FAUT RETENIR

Jugement

clinique

procéder de la même façon pour évaluer l’ictère ? Justiez votre réponse.

17.5.2

Une diète bien équilibrée et un horaire réaliste de repos

Cirrhose

La cirrhose, une lésion irréversible du foie, est rare en pédiatrie. Elle est l’aboutissement de nombreuses maladies chroniques du foie comme l’atrésie des voies biliaires et l’hépatite chronique ; elle peut mettre jusqu’à 30 ans pour se développer (CATIE, 2015). Elle peut également être provoquée par des facteurs infectieux, auto-immuns ou toxiques, et des maladies chroniques comme l’hémophilie et la brose kystique.

Manifestations cliniques Chez les enfants, les manifestations cliniques de la cirrhose sont semblables à celles d’autres troubles hépatiques chroniques : ictère, retard de croissance, anorexie, faiblesse musculaire et léthargie. De l’ascite, un œdème, une hémorragie GI, de l’anémie et une douleur abdominale peuvent survenir lorsque le débit sanguin intrahépatique est altéré. La pression qu’exercent l’hépatosplénomégalie et l’ascite contre le diaphragme peut entraver la fonction pulmonaire. La dyspnée et la cyanose sont possibles, surtout pendant l’effort. Des shunts artérioveineux intrapulmonaires peuvent apparaître et entraîner l’hypoxémie. Pour nir, il est possible d’observer des angiomes stellaires et une saillie des vaisseaux sanguins sur la partie supérieure du torse.

858

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

et d’activités, ajustés selon l’état de l’enfant, sont préconisés (Bennett, 2017a). Une semaine après l’apparition de l’ictère, le VHA n’est plus infectieux et l’enfant peut se sentir sufsamment bien pour reprendre l’école. L’inrmière doit aviser les parents des risques potentiels concernant l’administration de tout médicament à l’enfant, car les posologies normales de nombreux médicaments peuvent devenir dangereuses du fait de l’incapacité du foie à les détoxiquer et à les excréter. Procéder à l’hygiène des mains est la principale mesure de réduction du risque de transmission de l’infection. L’inrmière doit expliquer aux parents et aux enfants le mécanisme de propagation du VHA, par voie fécale-orale, et du VHB, par voie parentérale. Les inrmières qui s’occupent d’adolescents atteints d’une infection par le VHB qui ont des antécédents conrmés ou soupçonnés de consommation de drogues doivent les aider à prendre conscience des dangers de la consommation abusive de ces substances. Elles insisteront sur le fait que l’hépatite se transmet par voie parentérale et elles encourageront ces jeunes à rechercher du counseling dans le cadre d’un programme destiné aux toxicomanes.

Approche thérapeutique Le traitement de la cirrhose vise à : 1. traiter les causes ; 2. atténuer les manifestations cliniques ; 3. prendre en charge les complications spéciques (CATIE, 2015). Le seul traitement qui a raison d’une maladie hépatique au stade terminal ou d’une insufsance hépatique est la greffe de foie. Pour évaluer sa pertinence et en établir le moment opportun, il conviendra de procéder à un examen attentif de l’état de l’enfant et de sa qualité de vie.

Maladie du foie en phase terminale Dans bien des cas, l’enfant atteint d’une maladie du foie et sa famille doivent faire face à une évolution incertaine de la maladie. Il se peut que le seul espoir d’une survie à long terme soit une greffe de foie. Elle peut s’avérer un succès, mais la période d’attente peut être longue, car il y a beaucoup plus d’enfants en attente d’un organe qu’il y a de donneurs. L’intervention n’est réalisée que dans certains centres hospitaliers, qui souvent sont loin de la résidence familiale. L’inrmière doit reconnaître les facteurs de stress propres à l’adaptation à la maladie du foie en phase terminale et à l’attente de la greffe, et aider la famille à

les surmonter. L’aide de travailleurs sociaux et le soutien d’autres parents peuvent être bénéques.

Pronostic La greffe hépatique a révolutionné le traitement de la cirrhose, puisqu’elle pallie l’échec d’autres mesures médicales et chirurgicales destinées à prévenir ou à traiter la maladie. La greffe a considérablement amélioré le pronostic pour des enfants atteints de cirrhose. Il est possible de recevoir une partie du lobe gauche du foie (30 %) d’un donneur adulte décédé ou d’un donneur vivant (Transplant Québec, 2013). Au Canada, en 2014, 59 jeunes âgés de moins de 17 ans ont été greffés (Institut canadien d’information sur la santé, 2016). Actuellement, le taux de survie 1 an après une greffe hépatique varie de 81 à 87 % selon la pathologie qui a nécessité la greffe (Kim, Fenton, Kappel et al., 2014 ; Squires, Ng, Romero et al., 2014). De plus en plus de receveurs de greffe vivent plus de 20 ans après l’opération. Cette espérance de vie croissante s’explique par les progrès des techniques chirurgicales, l’amélioration des soins périopératoires et l’efcacité des médicaments antirejet (Kim, Lake, Smith et al., 2015).

Soins inrmiers CIRRHOSE

Les soins inrmiers de l’enfant qui souffre d’une cirrhose dépendent de la cause de la maladie, de la gravité des complications et du pronostic. Sauf en cas de greffe hépatique réussie, le pronostic vital est médiocre. Les soins inrmiers sont les mêmes que pour tout enfant atteint d’une maladie potentiellement mortelle 10 . En général, les complications rendent l’hospitalisation nécessaire.

au-dessus de la porta hepatis (Hassan et Balistreri, 2016). Plusieurs enfants naissent à terme et semblent en bonne santé à leur naissance. L’ictère est la manifestation initiale la plus courante de l’atrésie des voies biliaires qui apparaît entre la troisième et la sixième semaine de vie. Il indique une cholestase, c’est-à-dire une accumulation de composés qui ne peuvent être excrétés en raison de l’occlusion ou de l’obstruction de l’arbre biliaire ; il est visible dès que la concentration de bilirubine sérique totale atteint 85 µmol/L. L’hyperbilirubinémie directe se manifeste d’abord après la résolution de l’ictère physiologique. L’ictère est souvent associé à des selles pâles et à une urine foncée. L’examen histologique révèle des reliquats de canal biliaire et un processus inammatoire évolutif. Une hépatomégalie est présente tôt dans la maladie, et le foie est ferme à la palpation (Moreira, Cabral, Cowles et al., 2012 ; Wang, 2015).

Manifestations cliniques Plusieurs signes cliniques peuvent indiquer l’atrésie des voies biliaires ENCADRÉ 17.10.

Diagnostic Le diagnostic précoce est essentiel pour la survie de l’enfant atteint d’atrésie des voies biliaires. Les nourrissons qui subissent une intervention chirurgicale durant les 30 premiers jours de vie ont une survie à 10 ans de 50 % ; après 90 jours, la survie est de moins de 20 % (Registre canadien d’atrésie des voies biliaires, 2014). En général, le nourrisson se développe bien, paraît en bonne santé et n’a qu’un très léger ictère durant les six à huit premières semaines (Hassan et Balistreri, 2016), mais il nit rapidement par présenter un retard développemental. Les analyses de sang doivent inclure une FSC ainsi que les taux

10 Les soins à donner à un enfant atteint d’une maladie potentiellement mortelle sont présentés dans le chapitre 10, Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en de n de vie.

17

17.5.3

Atrésie des voies biliaires

L’atrésie des voies biliaires est une affection rare du nouveau-né impliquant un processus inammatoire destructeur et idiopathique responsable d’une fibrose et d’une oblitération de l’arbre biliaire. Au Canada, l’atrésie des voies biliaires touche 1 naissance sur 19 000, ce qui correspond à une vingtaine de nouveaux cas par an (Registre canadien d’atrésie des voies biliaires, 2014).

Étiologie et physiopathologie La cause exacte de l’atrésie des voies biliaires est inconnue, et cette affection ne peut pas être détectée in utero ou dans les premières semaines de vie. La majorité des cas (85 %) présentent une oblitération complète de l’arbre biliaire au niveau et

ENCADRÉ 17.10

Manifestations cliniques de l’atrésie des voies biliaires extrahépatiques

• Ictère – Première manifestation et caractéristique la plus frappante de la maladie – Présence initiale dans la sclère

• Possibilité d’une manifestation ultérieure de splénomégalie • Métabolisme insufsant des lipides entraînant : – Un gain pondéral inférieur

– Non apparent jusqu’à deux ou trois semaines de vie

– Un retard prononcé de la croissance

• Urines foncées

• Prurit

• Selles plus légères que prévu, blanches ou de coloration brun clair

• Irritabilité ; réconfort plus difcile du nourrisson

• Hépatomégalie et distension abdominale courantes

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

859

d’électrolytes, de bilirubine et d’enzymes hépatiques. D’autres analyses comme le taux d’alpha 1-antitrypsine, la sérologie TORCH (toxoplasmose, other [gonorrhée, hépatite B, syphilis, virus varicelle-zona, parvovirus B19, VIH], rubéole, cytomégalovirus et herpes simplex), les tests sérologiques hépatiques, le taux d’alphafœtoprotéines, la détection du cytomégalovirus urinaire et un test de la sueur sont indiqués pour exclure d’autres maladies responsables d’une cholestase persistante et d’un ictère. L’échographie abdominale permet d’examiner le foie et le système biliaire. La scintigraphie hépatobiliaire sert à conrmer la perméabilité des voies biliaires, mais elle ne permet pas de poser un diagnostic avec certitude. La cholangiopancréatographie rétrograde endoscopique s’effectue chez les très jeunes nourrissons. La précision diagnostique de cette intervention, réalisée sous anesthésie générale, est de 80 %. La biopsie percutanée du foie est très able si les échantillons proviennent de plusieurs zones portales. Le diagnostic dénitif de l’atrésie des voies biliaires est établi durant une laparotomie chirurgicale et une cholangiographie peropératoire.

Approche thérapeutique La Fondation canadienne du foie (www.liver.ca/fr) offre du soutien et des ressources aux familles.

CE QU’IL FAUT RETENIR

La fente labiale et la fente palatine sont les malformations de la tête et du cou les plus courantes.

860

Partie 6

Le traitement de premier recours de l’atrésie des voies biliaires est l’hépatoportoentérostomie (intervention de Kasaï), qui consiste à anastomoser un segment de l’intestin sur le pourtour de la plaque hilaire du foie après résection du vestige biliaire. Lorsqu’elle est pratiquée avant la dixième semaine de vie, cette intervention permet le rétablissement du ux biliaire vers l’intestin dans environ 80 à 90 % des cas (Registre canadien d’atrésie des voies biliaires, 2014). Il faut savoir cependant qu’une cirrhose évolutive, qui commande une transplantation hépatique, est observée malgré tout chez de nombreux enfants. Une antibioprophylaxie est parfois administrée après l’intervention an de réduire au minimum le risque de cholangite ascendante. La prise en charge médicale consiste essentiellement en des soins de soutien. Il s’agira notamment d’un soutien nutritionnel au moyen de formules pour nourrissons contenant des triglycérides à chaînes moyennes et des acides gras essentiels. Il convient également d’administrer des suppléments de vitamines liposolubles, des multivitamines et des minéraux, y compris du fer, du zinc et du sélénium. Un soutien nutritionnel énergique, avec administration continue par sonde ou par alimentation parentérale totale, est indiqué en cas de retard développemental de modéré à grave. La solution entérale doit avoir une faible teneur en sodium. L’acide ursodésoxycholique sert à traiter le prurit et l’hypercholestérolémie.

Pronostic L’atrésie des voies biliaires non traitée entraîne une cirrhose évolutive et le décès chez la plupart

Troubles liés aux systèmes

des enfants vers l’âge de deux ans. L’intervention de Kasaï améliore le pronostic, mais elle n’est pas curative. Le drainage biliaire est souvent possible si l’intervention chirurgicale a lieu avant la destruction des voies biliaires intrahépatiques. La survie à long terme d’enfants ayant subi l’intervention de Kasaï a été rapportée ; cependant, même lorsque le drainage biliaire est mené à bien, de nombreux enfants nissent par être atteints d’insufsance hépatique. Les progrès des techniques chirurgicales et le recours aux immunosuppresseurs ainsi qu’aux antifongiques ont favorisé la réussite des greffes. Le principal obstacle continue d’être le nombre insufsant de donneurs de foie. Les greffes plus petites, la division du greffon pour deux receveurs, la retransplantation et la sensibilisation du public amélioreront peut-être l’accessibilité des organes de donneurs (CHU Sainte-Justine, 2013).

Soins inrmiers ATRÉSIE DES VOIES BILIAIRES

Les soins de l’enfant atteint d’une atrésie des voies biliaires se rapportent notamment au soutien familial avant, pendant et après les interventions chirurgicales, et à la transmission d’informations concernant le plan thérapeutique. Les soins inrmiers consécutifs à une hépatoportoentérostomie ressemblent à ceux qu’implique une intervention chirurgicale abdominale majeure. Il faut informer les membres de la famille des exigences inhérentes à l’administration adéquate des médicaments et au traitement nutritionnel, notamment en ce qui a trait aux formules spéciales, aux suppléments de vitamines et de minéraux, à l’alimentation par sonde ou parentérale. Il est souvent possible de soulager le prurit par la pharmacothérapie ou des soins d’agrément comme des bains. Les enfants et leur famille ont également besoin d’un soutien psychosocial. L’incertitude du pronostic, l’inconfort et le délai d’attente avant une greffe occasionnent du stress.

17.6

Anomalies structurales

17.6.1

Fente labiale et fente palatine

La fente labiale, communément appelée becde-lièvre, et la fente palatine sont des malformations faciales qui surviennent durant le développement embryonnaire. Ce sont les malformations de la tête et du cou les plus courantes. Elles sont concomitantes la plupart du temps, mais elles peuvent aussi être isolées. La fente labiale est la conséquence de

l’absence de fusion du bourgeon maxillaire et du processus nasal médian, alors que la fente palatine est une division de la ligne médiane du palais observée lorsque les processus palatins ne s’unissent pas. Il en existe différentes catégories : fente labiale, fente labiopalatine et fente palatine. La gravité de la fente labiale est variable : cette malformation va de la simple entaille à la fente complète, qui s’étend jusqu’à la base du nez FIGURE 17.13. La fente labiale peut être unilatérale ou bilatérale. Elle peut aussi être associée à des déformations dentaires. La fente palatine isolée se situe sur la ligne médiane du palais, et peut affecter le palais mou et le palais dur. Lorsque la fente palatine est associée à une fente labiale, elle peut se situer sur la ligne médiane et s’étendre jusqu’au palais mou d’un côté ou de l’autre, ou des deux côtés de cette ligne. Au Canada, les fentes labiopalatines représentent 16,3 cas pour 10 000 naissances, avec une variation de 15 à 18,2 selon les années (ASPC, 2013a).

Étiologie La fente labiopalatine peut être une malformation isolée ou s’inscrire dans le tableau clinique d’un syndrome défini. Il faut distinguer les fentes labiales, qu’elles soient isolées ou associées à une fente palatine, des fentes palatines isolées. Une fente du palais secondaire isolée est plus susceptible d’être associée à un syndrome qu’une fente labiale isolée ou associée à une fente palatine. Les fentes labiales et les fentes palatines peuvent être causées par l’exposition de l’embryon A

à des substances tératogènes comme l’alcool, les anticonvulsivants, les stéroïdes et les rétinoïdes. La prise d’acide folique avant la conception semblerait diminuer les risques de fente palatine pour le fœtus, même si les données probantes sont moins nombreuses que pour les anomalies du tube neural (ASPC, 2013a ; Société des obstétriciens et gynécologues du Canada, 2015). Une récente méta-analyse a établi une association entre le tabagisme maternel durant la grossesse et la fente labiopalatine chez les nouveau-nés (Xuan, Zhongpeng, Yanjun et al., 2016).

Physiopathologie Les fentes labiales et palatines sont attribuables à des anomalies de la migration cellulaire qui empêchent les processus maxillaires et prémaxillaires de fusionner entre la troisième et la douzième semaine du développement embryonnaire. Bien qu’ils soient souvent associés, ces deux types de malformations sont distincts, puisqu’ils surviennent à des étapes différentes du développement embryonnaire (ASPC, 2013a). La convergence de la lèvre supérieure sur la ligne médiane est complète entre la septième et la onzième semaine de la vie embryonnaire, alors que la fusion du palais secondaire, des palais mou et dur, survient plus tard, entre la septième et la douzième semaine. Les processus palatins sont séparés par la langue pendant un court laps de temps tandis qu’ils migrent vers un plan horizontal. Normalement, ils s’unissent après l’abaissement de la langue ; cela dit, si la migration est retardée B

17

C

D

FIGURE 17.13 Divers types de fentes labiopalatines à la naissance – A Entaille dans le vermillon de la lèvre. B Fente labiopalatine unilatérale. C Fente labiopalatine bilatérale. D Fente palatine. Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

861

ou si la langue ne descend pas à temps, le développement se poursuit sans qu’ils soient parvenus à s’unir.

Diagnostic Les fentes labiopalatines ne sont pas détectées avant la naissance (ASPC, 2013a). Le diagnostic prénatal par échographie fœtale pourrait être amélioré. Grâce à la technique 2D associée à la technique 3D, la nature de la fente labiopalatine serait déterminée correctement dans la majorité des cas ; les anomalies associées aux fentes doivent toujours être recherchées parce qu’elles ont une conséquence sur le pronostic fœtal (Guyot, Soupre, Vasquez et al., 2013).

CE QU’IL FAUT RETENIR

Selon sa gravité, la fente palatine peut avoir une incidence plus ou moins grande sur l’alimentation du nourrisson, même si celui-ci n’a aucune difculté à avaler.

FIGURE 17.14

Qu’elle soit isolée ou associée à une fente palatine, la fente labiale est visible à la naissance. Elle suscite d’ailleurs de vives réactions chez les parents. La fente palatine, pour sa part, est moins évidente et peut même passer inaperçue tant qu’une évaluation complète de la bouche du nouveau-né n’aura pas été effectuée. En passant un doigt ganté directement contre le palais, il est possible de diagnostiquer cette malformation. Une fente du palais dur est une ouverture continue entre la bouche et les fosses nasales. Selon sa gravité, la fente palatine peut avoir une incidence plus ou moins grande sur l’alimentation du nourrisson, même si celui-ci n’a aucune difculté à avaler. L’enfant étant incapable de générer la

Procédé de Tennison-Randall

pression négative nécessaire pour créer une aspiration de liquide dans la cavité buccale, l’alimentation est compromise (Association canadienne des spécialistes en chirurgie buccale et maxillofaciale [ACSCBMF], 2018).

Approche thérapeutique La prise en charge thérapeutique nécessite des efforts coordonnés de tous les membres de l’équipe de soins multidisciplinaires : pédiatrie, chirurgie esthétique et maxillo-faciale, orthodontie, dentisterie, génétique, otorhinolaryngologie, orthophonie, audiologie, soins inrmiers, psychologie et service social (Tolarova, 2018). Elle est axée sur la fermeture de la ou des fentes, la prévention des complications, et la facilitation de la croissance et du développement du nourrisson. Plusieurs chirurgiens se basent sur la règle des trois 10 pour pratiquer la chirurgie : poids de 10 livres, 10 g/dL (100 g/L) d’hémoglobine, 10 semaines de vie (Tolarova, 2018). Toutefois, le nourrisson ne doit souffrir d’aucune infection buccale, respiratoire ou généralisée pour être opéré. Dans les cas de fente labiopalatine, le palais est généralement refermé en premier, sinon il y aurait un risque de nuire aux résultats de la réparation labiale.

Correction chirurgicale de la fente labiale (chéiloplastie) Le traitement de la fente labiale consiste en une intervention chirurgicale (chéiloplastie) qui se déroule vers l’âge de deux ou trois mois environ. Elle ne nécessite pas d’interventions ultérieures, à moins qu’il ne soit nécessaire de corriger la cicatrice (ACSCBMF, 2018). Pour effectuer une chéiloplastie, les deux techniques les plus souvent employées sont la plastie en Z selon le procédé de Tennison-Randall, qui fait appel à un lambeau de peau triangulaire FIGURE 17.14, et la technique de Millard, qui fait appel à un lambeau en C, d’avancement et de rotation FIGURE 17.15. Bien souvent, les chirurgiens combineront les deux techniques pour répondre aux besoins particuliers du nouveau-né.

Correction chirurgicale de la fente palatine (palatoplastie) Auparavant, la chéiloplastie était pratiquée en premier, et il fallait attendre que l’enfant soit plus âgé pour réaliser la palatoplastie, qui consiste à réparer le palais, étant donné que celui-ci subit certains changements physiologiques au cours de la croissance. Il subsiste encore des controverses quant au moment idéal pour réaliser la palatoplastie (Shi et Losee, 2015). La plupart des chirurgiens préfèrent corriger la malformation avant que l’enfant manifeste des problèmes de langage. FIGURE 17.15

862

Partie 6

Technique de Millard

Troubles liés aux systèmes

La réparation du palais nécessite plusieurs incisions aux abords du palais et l’approximation des

portions séparées du palais en plusieurs couches ; une des couches forme la muqueuse nasale, la couche moyenne contient les muscles du palais, alors que la dernière couche constitue la voûte de la bouche (Larowe, 2013) FIGURE 17.16.

Pronostic L’amélioration des techniques chirurgicales a permis de réduire au minimum le risque de rétraction de la cicatrice. En l’absence d’infection ou de traumatisme, la cicatrice qui se forme est presque imperceptible. Cela dit, il est difcile d’obtenir des résultats esthétiques optimaux lorsque la malformation est très grave, et il peut être nécessaire de procéder à une révision chirurgicale ultérieurement. Même lorsque la fente labiopalatine est bien refermée, la plupart des enfants sont affectés par des troubles de langage qui nécessitent l’intervention d’un orthophoniste. Ces troubles sont imputables à un dysfonctionnement des muscles du palais mou et du nasopharynx, à un mauvais alignement des dents et à une perte d’audition, à divers degrés. Des troubles de l’audition sont même observés chez des nouveau-nés ayant une fente palatine (Tan, Hee, Yeoh et al., 2014). Par ailleurs, commencés durant l’enfance, des traitements orthodontiques et prosthodontiques peuvent être prolongés jusqu’à l’âge adulte pour corriger les malpositions dentaires et celles des arcades maxillaires (Shetye, 2016). Les problèmes à long terme sont liés à l’adaptation sociale et affective de l’enfant, qui se fera d’autant mieux que la prise en charge des

FIGURE 17.16

Étapes de la palatoplastie

problèmes physiques aura été efcace. Cela dit, la gravité du handicap résiduel n’est pas directement liée à une adaptation satisfaisante. Ces malformations physiques peuvent ternir l’image de soi, et les troubles de la parole peuvent faire obstacle à la communication et aux interactions sociales.

Soins inrmiers FENTE LABIALE ET FENTE PALATINE

Faciliter l’alimentation

Les principales difcultés rencontrées par l’inrmière qui prend soin d’un nourrisson ayant une fente labiopalatine sont liées à l’alimentation de celui-ci et à la réaction des parents par rapport à sa malformation. Les malformations faciales troublent particulièrement les parents. L’inrmière doit veiller aux besoins physiques du nourrisson, mais également aux besoins émotionnels des parents. Dans sa manière de prendre soin de l’enfant et de le tenir, elle doit démontrer aux parents combien il est précieux 10 .

L’alimentation des nourrissons qui ont une fente labiale ou palatine est une tâche délicate pour l’inrmière et pour les parents. Les retards de croissance ont été attribués aux difcultés à alimenter ces nourrissons en phase préopératoire. Après la correction chirurgicale, la plupart des nourrissons nés avec une fente labiale ou palatine isolée qui n’était associée à aucun syndrome prennent du poids ou nissent par rattraper complètement leur retard staturopondéral. La mère doit commencer à alimenter le nourrisson le plus tôt possible. Elle pourra ainsi déterminer la méthode d’alimentation la mieux adaptée à son enfant.

10

Bon nombre de nourrissons ayant une fente labiopalatine peuvent être allaités (Alperovich, Frey, Sheyte et al., 2017). Toutefois, il est plus difcile d’allaiter ou d’alimenter au biberon les nourrissons qui ont une fente labiale ou palatine, car ils ne sont pas capables de téter correctement ; cela leur prend

Il est plus difcile d’allaiter ou d’alimenter au biberon les nourrissons qui ont une fente labiale ou palatine, car ils ne sont pas capables de téter correctement.

Tout au long du traitement, les parents doivent être informés des problèmes immédiats et à long terme associés aux fentes palatines, car il est important qu’ils comprennent que la prise en charge s’étend au-delà de la correction chirurgicale. Ils doivent bénécier du soutien d’une équipe multidisciplinaire spécialisée en fente palatine, lorsque c’est possible.

Chapitre 17

17

Les interventions visant à aider les parents à accepter leur enfant porteur d’une malformation sont présentées dans le chapitre 10, Qualité de vie de l’enfant atteint d’une maladie chronique ou d’un handicap, ou en de n de vie. CE QU’IL FAUT RETENIR

Troubles liés au système gastro-intestinal

863

donc plus de temps. Plus précisément, pendant l’allaitement, ils n’arrivent pas à comprimer l’aréole à cause de leur malformation, et le lait maternel s’écoule par la fente jusque dans le nez. La mère doit stabiliser son mamelon assez loin dans la cavité buccale pour que les mouvements de la langue sufsent à faciliter l’expression du lait. Comme le nourrisson est bien souvent incapable de téter, et donc de stimuler le réexe d’éjection du lait, il peut être utile d’employer un tire-lait avant l’allaitement. La meilleure façon de tenir le nourrisson durant l’allaitement est de le garder assis et de maintenir sa tête droite avec la main ou de la placer dans le creux du bras (Burca, Gephart, Miller et al., 2016). Pour les bébés qui ne sont pas allaités directement au sein, il faudra veiller à placer la tétine verticalement de façon à ce que le nourrisson puisse arrêter ou provoquer l’écoulement du lait selon qu’il la bloque ou non avec sa langue. Le nourrisson fait beaucoup de bruit en buvant, et les parents pourraient avoir peur qu’il ne s’étouffe. Comme ces nourrissons avalent beaucoup d’air en buvant, il faut leur faire faire leur rot fréquemment (Wiet, 2017).

Partie 6

Prodiguer les soins postopératoires à la suite de la chéiloplastie

Prodiguer les soins préopératoires

Les soins postopératoires consistent essentiellement à protéger le champ opératoire. Aucune tension ne doit être exercée sur les sutures pendant les mouvements faciaux, notamment ceux qui accompagnent les pleurs. Immédiatement après l’intervention, des manchons de contention seront installés à la hauteur des coudes pour empêcher le nourrisson de frotter ou de défaire les sutures. Il est recommandé d’épingler les manchons à ses vêtements pour les maintenir en place. Outre les manchons de contention, il faut faire porter une camisole aux nourrissons qui sont capables de basculer sur le ventre, en particulier s’ils ont subi une chéiloplastie, car ils pourraient frotter leur visage sur les draps. Il est important d’ôter régulièrement les manchons de contention, un manchon à la fois, pour faire travailler les muscles des bras, libérer un peu le nourrisson, déceler tout signe d’irritation et favoriser les contacts physiques, notamment les câlins. Par ailleurs, il est conseillé d’asseoir de temps en temps le nourrisson dans un siège pour bébé pour qu’il change de position et qu’il voie son environnement. Enn, il faut veiller à lui procurer une analgésie adéquate pour calmer au mieux la douleur postopératoire ainsi que pour prévenir l’agitation et les pleurs.

En prévision de l’intervention chirurgicale, il convient d’apprendre aux parents à habituer le nourrisson aux contraintes auxquelles il sera soumis durant la phase postopératoire, en particulier lorsque l’intervention est retardée de plusieurs mois. Par exemple, il faudra absolument qu’il reste allongé sur le dos ou sur le côté après l’intervention. La plupart des nourrissons tolèrent sans problème ces positions, puisqu’ils ont l’habitude de dormir sur le dos. En outre, il peut être bon de lui faire porter régulièrement des manchons de contention avant l’hospitalisation et de l’alimenter suivant la technique qui sera utilisée après celle-ci (alimentation à la seringue) FIGURE 17.17.

Lorsque le nourrisson se sera complètement remis de l’anesthésie, il sera possible de lui donner des liquides clairs, puis il faudra recommencer à l’alimenter normalement dès que possible. Il faudra nettoyer soigneusement la suture avec un coton-tige trempé dans une solution saline de façon à éliminer des résidus de lait ou tout suintement sérosanguin. Le médecin peut prescrire l’application d’une ne couche de pommade antibiotique sur la suture après chaque nettoyage. Il est indispensable de prendre le plus grand soin des sutures, car toute inammation ou infection pourrait entraver la cicatrisation et gâcher les résultats esthétiques escomptés. Par ailleurs, il

Si un nourrisson ayant une fente labiale ou palatine a de la difculté à boire, il sera possible d’avoir recours à une seringue à ampoule ou à une grosse seringue raccordée à une tubulure souple en caoutchouc, deux dispositifs efcaces et sans danger. La tubulure doit être sufsamment longue pour arriver au fond de la bouche du nourrisson. Ainsi, le lait est déposé directement à l’arrière de la langue, ce qui limite le risque de régurgitation par le nez, et il est possible de régler le débit du lait en appuyant sur l’ampoule ou la seringue ellemême, selon le cas. Dans certains cas, un tube nasogastrique pourra être utilisé (Paes, de Vries, Penris et al., 2016). Parfois, l’alimentation à la cuillère convient le mieux, auquel cas il est possible d’épaissir le lait en y ajoutant des céréales. Après l’alimentation, il faut donner de l’eau au nourrisson pour lui rincer la bouche.

864

FIGURE 17.17 À la suite d’une chéiloplastie, des manchons de contention sont installés à la hauteur des coudes pour éviter que le nourrisson ne frotte ou défasse les sutures.

Troubles liés aux systèmes

Prodiguer les soins postopératoires à la suite de la palatoplastie Il est permis, immédiatement après l’intervention, de coucher sur le ventre un nourrisson qui a subi une palatoplastie. Le nourrisson pourra recommencer à être alimenté normalement peu après l’opération . Un pansement buccal peut recouvrir le palais après la palatoplastie, et il peut généralement être enlevé deux ou trois jours après l’intervention chirurgicale. À l’occasion, le nourrisson peut éprouver des difcultés respiratoires après l’intervention, car le trajet suivi par l’air dans les voies respiratoires supérieures n’est plus le même après la fermeture de la fente. Il doit alors apprendre à respirer par le nez. Ces difcultés peuvent être quelque peu frustrantes, mais il suft, dans la majorité des cas, de positionner le nourrisson et de le tenir correctement pour y remédier. Il est recommandé aux parents de continuer à

utiliser les manchons de contention à domicile jusqu’à ce que le palais du nourrisson soit complètement guéri, ce qui prend habituellement de quatre à six semaines, en leur précisant toutefois de les enlever régulièrement, un à la fois, pour que le bébé puisse faire travailler les muscles de ses bras.

clinique

Jugement

faudra aspirer délicatement les sécrétions buccales et nasopharyngées pour éviter que le nourrisson s’étouffe et que surviennent des complications respiratoires. Durant la période qui suit immédiatement l’intervention, il peut être utile de le tenir à la verticale ou de le mettre assis, en particulier s’il a de la difculté à évacuer les sécrétions (Wiet, 2017).

Vous donnez le boire de Ludovic, âgé de cinq mois, atteint d’une fente palatine. Il est hospitalisé pour une bronchiolite. En buvant, Ludovic s’est étouffé ; il présente des signes de cyanose péribuccale. Nommez au moins deux données objectives à évaluer en lien avec l’étouffement de Ludovic.

L’inrmière est chargée d’évaluer l’intensité de la douleur postopératoire ressentie par le nourrisson ou l’enfant. Au début, le médecin prescrit un analgésique opioïde, qui sera remplacé par de l’acétaminophène, administré au besoin.

Enseigner les soins postopératoires aux parents Au moment du congé de l’hôpital, l’inrmière conseillera aux parents de donner à l’enfant uniquement des aliments mous ou en purée, jusqu’à ce que le chirurgien autorise la reprise d’une alimentation normale. Elle leur recommandera également de veiller à ce que l’enfant ne consomme aucun aliment dur, puisque ces aliments pourraient blesser son palais en voie de cicatrisation ENCADRÉ 17.11.

ALERTE CLINIQUE

Il faut éviter l’utilisation de la succion ou l’introduction d’ob­ jets tels qu’un abaisse­langue, un thermomètre, une suce, une cuillère ou une paille dans la bouche du nourrisson qui vient de subir une palatoplastie an de prévenir les blessures et de favoriser la cicatrisation.

Mise en œuvre d’une démarche de soins ENCADRÉ 17.11

Fente labiale ou fente palatine

COLLECTE DES DONNÉES – ÉVALUATION INITIALE

RÉSULTATS ESCOMPTÉS

L’anomalie labiale est visible à la naissance, et son évaluation consiste à en décrire le siège et l’étendue ; la fente palatine est examinée lorsque l’enfant pleure. La fente palatine sans fente labiale est détectée durant l’examen du nouveau­né par palpation du palais avec un doigt recouvert d’un gant. La naissance d’un enfant atteint d’un handicap esthétique et fonctionnel est un événement particulièrement traumatisant pour la famille. En conséquence, les soins et les traitements inrmiers doivent aussi être axés sur la réaction émotionnelle de la famille.

Les objectifs des soins se rapportent aux soins préopératoires, aux soins postopératoires à court terme et à la prise en charge à long terme. Pour le nourrisson et la famille, la planication des soins est établie dans le but d’atteindre les résultats suivants :

ANALYSE ET INTERPRÉTATION DES DONNÉES

• Nutrition optimale du nourrisson

Les problèmes découlant de la situation de santé peuvent inclure :

• Préparation du nourrisson en vue de l’intervention chirurgicale

• Problème de nutrition : apport inférieur aux besoins de l’organisme dû à l’anomalie physique ou aux suites opératoires

Soins postopératoires

• Risque de modication du rôle parental lorsqu’il y a présence d’une anomalie physique très visible chez le nourrisson • Risque de traumatisme du site chirurgical en raison de l’intervention chirurgicale et d’une dysfonction de la déglutition

17

Soins préopératoires • Capacité de faire face au choc d’avoir donné naissance à un nourrisson atteint d’une anomalie

• Aucun traumatisme et peu de douleur, voire aucune, à la suite de la chirurgie • Nutrition optimale du nourrisson • Aucune complication après l’intervention chirurgicale

• Douleur liée à l’intervention chirurgicale

• Soutien adéquat offert au nourrisson et à sa famille

• Bouleversement des processus familiaux dû à l’anomalie physique du nourrisson et à son hospitalisation

• Préparation adéquate de la famille pour prodiguer les soins à domicile et répondre aux besoins à long terme.

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

865

ENCADRÉ 17.11

Fente labiale ou fente palatine (suite)

INTERVENTIONS INFIRMIÈRES

• Observer le nourrisson pendant qu’il est alimenté.

De nombreuses stratégies d’intervention sont proposées dans la section précédente.

• Remplir la liste de vérications préopératoires.

ÉVALUATION DES RÉSULTATS – ÉVALUATION EN COURS D’ÉVOLUTION

• Inspecter le site opératoire, y compris le dispositif protecteur, à la recherche de signes d’infection, de saignement, de formation d’une escarre ou d’irritation.

L’efcacité des interventions inrmières pour le nourrisson ayant une fente palatine et sa famille peut être évaluée en fonction des pratiques inrmières suivantes : Soins préopératoires • Vérier que les membres de la famille comprennent bien les explications, et qu’ils expriment leurs sentiments et leurs préoccupations en lien avec l’anomalie, avec toute intervention chirurgicale prévue et au regard de leurs interactions avec le nourrisson.

Soins postopératoires

• Vérier la présence d’indicateurs comportementaux et physiologiques de douleur et de réponse aux analgésiques. • Observer le nourrisson pendant l’alimentation, mesurer les ingesta et les excreta, et noter quotidiennement le poids du nourrisson. • Observer la famille et l’interroger pour s’assurer de sa compréhension et an de connaître ses inquiétudes au sujet du nourrisson, notamment en ce qui concerne les besoins à long terme.

Planier et effectuer le suivi des soins à domicile Les enfants qui ont subi une chéiloplastie ou une palatoplastie devront recevoir divers types de soins durant leur convalescence. Les professionnels de la santé doivent accompagner et encourager les proches, et les conseiller sur la meilleure façon d’optimiser l’issue de l’intervention. La plupart du temps, les résultats de l’intervention sont satisfaisants grâce aux efforts déployés

17.6.2

Atrésie de l’œsophage avec stule trachéo-œsophagienne

L’atrésie de l’œsophage avec fistule trachéoœsophagienne désigne une malformation rare due à l’échec de la séparation de l’œsophage et de la trachée lors de la quatrième semaine de gestation (CHU Sainte-Justine, 2014). Elle peut se produire

A

B

C

conjointement par les proches et l’équipe de soins. En effet, de nombreux enfants opérés ont une lèvre supérieure d’apparence normale qui fonctionne bien. Les parents doivent comprendre l’objectif du traitement, ainsi que la fonction et l’entretien de tous les dispositifs ou appareils qu’ils seront appelés à utiliser. En outre, ils doivent être conscients de la nécessité d’inculquer à l’enfant de bonnes règles d’hygiène buccodentaire.

séparément ou en même temps FIGURE 17.18. Son issue est mortelle en l’absence de diagnostic et de traitement précoces.

Étiologie L’atrésie de l’œsophage, avec ou sans fistule trachéo-œsophagienne concomitante, est la malformation œsophagienne la plus courante : elle

D

E

FIGURE 17.18 Cinq types les plus courants d’atrésie de l’œsophage et de stule trachéo-œsophagienne – Type A, forme isolée, pas de stule, 10 % des cas. B Type B, avec stule proximale (œsophage supérieur), moins de 1 % des cas. C Type C, avec stule distale (œsophage inférieur), 85 % des cas. D Type D, avec stule distale et proximale, moins de 1 % des cas. E Type E, avec stule en H (œsophage en continuité), 4 % des cas. A

866

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

concerne environ 1 nouvelle naissance sur 3 000 ou 4 500 (Saxena, 2017a). Son incidence paraît équivalente chez les 2 sexes, mais le poids à la naissance de la plupart des nouveau-nés affectés est signicativement inférieur à la moyenne ; la fréquence des naissances prématurées dans les cas d’atrésie est exceptionnellement élevée. Près du tiers des nouveau-nés atteints de ces anomalies auraient une mère ayant des antécédents de polyhydramnios (Saxena, 2017a). L’atrésie de l’œsophage avec stule trachéo-œsophagienne coïncide souvent avec des syndromes VATER ou VACTERL, signiant des anomalies : Vertébrales Anorectales Cardiovasculaires Trachéo-oEsophagiennes Rénales et Limb (malformations des membres) L’atrésie de l’œsophage avec stule trachéoœsophagienne s’accompagne généralement d’anomalies cardiaques et rénales.

Physiopathologie La cause de l’atrésie de l’œsophage avec stule trachéo-œsophagienne est inconnue. Dans sa forme la plus répandue, soit dans 85 % des cas, le segment proximal de l’œsophage se termine en cul-de-sac, alors que le segment distal est relié à la trachée ou aux bronches souches par une courte stule à la bifurcation ou dans la région voisine FIGURE 17.18C. La deuxième forme la plus courante, soit environ 10 % des cas, est celle où l’on trouve un cul-de-sac à chaque extrémité, bien séparé de la trachée et sans communication avec elle FIGURE 17.18A. Moins souvent (4 %), une trachée et un œsophage autrement normaux sont reliés par une stule commune FIGURE 17.18E. Dans certaines anomalies extrêmement rares, la stule vient de la trachée et se dirige vers le segment supérieur de l’œsophage (moins de 1 %) FIGURE 17.18B ou vers les 2 segments, supérieur et inférieur, de l’œsophage (moins de 1 %) FIGURE 17.18D (Saxena, 2017a).

cul-de-sac (Saxena, 2017a). Il arrive que les stules ne soient pas perméables, ce qui complique les examens paracliniques. La présence de gaz dans l’estomac ou l’intestin grêle indique une fistule trachéo-œsophagienne concomitante.

Approche thérapeutique L’atrésie de l’oesophage représente une urgence chirurgicale. Le traitement inclut le maintien des voies respiratoires ouvertes, la prévention de la pneumonie, la décompression de la poche gastrique ou du cul-de-sac et la réparation chirurgicale de l’anomalie. Si une atrésie de l’œsophage avec stule trachéo-œsophagienne est soupçonnée, il faut cesser immédiatement l’alimentation du nourrisson par voie orale et commencer à lui administrer des liquides par voie I.V., en le mettant dans la position la moins susceptible de provoquer l’aspiration des sécrétions buccales ou gastriques (Saxena, 2017a). L’élimination des sécrétions de la bouche et du cul-de-sac œsophagien supérieur exige une aspiration fréquente ou continue. Étant donné que la pneumonie par aspiration est presque inévitable et qu’elle survient tôt, il est commun d’instaurer une antibiothérapie à large spectre. La correction chirurgicale primaire consiste en une thoracotomie avec division et ligature de la stule trachéo-œsophagienne, et anastomose terminolatérale de l’œsophage. Elle peut s’effectuer en une seule opération ou se dérouler en au moins deux étapes. Dans le cas des nourrissons prématurés atteints de plusieurs anomalies ou dont l’état de santé est médiocre, une intervention en plusieurs étapes est privilégiée et elle est accompagnée de mesures palliatives comme la gastrostomie, la ligature de la stule trachéo-œsophagienne et le drainage constant du cul-de-sac œsophagien. Il faut attendre généralement plusieurs semaines, voire quelques mois, avant de réaliser l’anastomose œsophagienne, une fois que le cul-de-sac œsophagien supérieur s’est allongé. Il sera possible de recourir ultérieurement à d’autres techniques chirurgicales pour faciliter l’allongement

La cyanose est généralement causée par un laryngospasme déclenché par l’excédent de salive dans le larynx en provenance du cul-de-sac œsophagien proximal. Elle disparaît normalement après l’élimination des sécrétions par aspiration de l’oropharynx.

ENCADRÉ 17.12

Diagnostic

• Toux

Le type exact d’anomalie est établi grâce aux examens radiologiques, bien que le diagnostic repose sur les manifestations cliniques (principalement la toux, l’étouffement et la cyanose) ENCADRÉ 17.12. Les échographies cardiaques et rénales, ainsi que les radiographies pulmonaires, servent à conrmer certaines anomalies et la perméabilité des voies œsophagiennes, ou la présence et le niveau d’un

• Étouffements

17

Manifestations cliniques de la stule trachéoœsophagienne

• Cyanose • Apnée • Aggravation de la détresse respiratoire après l’alimentation • Distension abdominale

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

867

de l’œsophage. S’il n’est toujours pas possible de procéder à l’anastomose œsophagienne, une œsophagostomie cervicale pour permettre le drainage de la salive et une gastrostomie peuvent être pratiquées (Kovesi, 2017). La longueur insufsante des 2 segments de l’œsophage peut rendre l’anastomose primaire impossible. Dans ces cas, le segment œsophagien manquant est remplacé par interposition d’un segment du côlon ou d’une sonde gastrique. L’intubation endotrachéale peut s’avérer nécessaire, car de 10 à 20 % des nourrissons présentent également une trachéomalacie, c’est-à-dire un problème respiratoire caractérisé par une faiblesse de la paroi trachéale qui survient lorsque la trachée est comprimée par un cul-de-sac proximal dilaté au début de la vie fœtale ou lorsque son développement normal est entravé par une perte de pression intratrachéale (Kovesi, 2017).

Les complications possibles d’une réparation primaire incluent la fuite anastomotique, les rétrécissements résultant d’une tension ou d’une ischémie ainsi que les troubles de la motilité œsophagienne qui provoquent une dysphagie et le RGO.

Pronostic Le pronostic est lié au poids à la naissance, à la présence d’anomalies congénitales et à l’âge de l’enfant au moment du diagnostic. Le taux de survie avoisine les 100 % chez les nouveau-nés à terme sans détresse respiratoire grave et sans autres anomalies. Les statistiques présentées par les directives cliniques indiquent que plus de 90 % des personnes opérées vivent au-delà de 60 ans (Krishnan, Mousa, Dall’Oglio et al., 2016). Même si le niveau de preuve est bas, il est recommandé de prévenir les risques de malnutrition à long terme (Krishnan et al., 2016).

Soins inrmiers ATRÉSIE DE L’ŒSOPHAGE AVEC FISTULE TRACHÉO-ŒSOPHAGIENNE

ALERTE CLINIQUE

Tout nourrisson qui a une quantité excessive de salive écumeuse dans la bouche, des difcultés liées aux sécrétions et des épisodes inexpliqués de cyanose doit être soumis à un examen de dépistage de l’atrésie de l’œsophage avec stule trachéo-œsophagienne et dirigé immédiatement vers un spécialiste.

Le personnel inrmier est au premier plan pour reconnaître les manifestations cliniques de l’atrésie de l’œsophage avec stule trachéo-œsophagienne qui survient immédiatement après la naissance. Idéalement, le diagnostic doit être établi avant la naissance, mais il arrive que ce ne soit pas le cas. Lorsque le nouveau-né s’alimente, il avale normalement, mais il tousse parfois soudainement et se débat. Du liquide est alors aspiré ou remonte par le nez et la bouche. Une gastrostomie provisoire sera pratiquée pour nourrir le nouveau-né directement par l’estomac. Dès qu’une fistule trachéo-œsophagienne est soupçonnée, il faut le signaler immédiatement. Le nouveau-né est placé dans un incubateur ou sous des lampes chauffantes, et de l’oxygène lui est administré pour soulager la détresse respiratoire. Il est conseillé de le coucher sur le dos, la tête élevée à un angle d’au moins 30°, car cette position réduit au minimum le reflux de sécrétions gastriques vers la partie distale de l’œsophage, en direction de la trachée et des bronches .

Assurer l’apport nutritionnel de l’enfant en minimisant les risques d’aspiration Il est impératif d’éliminer définitivement la source d’aspiration. Aucun liquide ne doit être administré par voie orale, et il faut répondre aux besoins en liquide du nourrisson par voie parentérale ou par gastrostomie. En attendant l’intervention chirurgicale, le cul-de-sac doit rester vide

868

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

par l’aspiration intermittente grâce à une sonde naso-œsophagienne qui rejoint l’extrémité du culde-sac. Cette sonde doit être surveillée, car elle tend à s’obstruer de mucus. En général, elle doit être remplacée quotidiennement. Si une réparation chirurgicale en plusieurs étapes est effectuée, il faut insérer une sonde de gastrostomie gardée ouverte pour permettre à l’air qui est entré dans l’estomac par la stule d’en ressortir, et réduire ainsi au minimum le danger de régurgitation du contenu gastrique dans la trachée. Le drainage de la sonde s’effectue par gravité ; en raison de la communication entre la trachée et l’œsophage, placer la sonde sous succion dévierait l’air des poumons vers l’estomac et provoquerait une détresse respiratoire grave. Pour le nourrisson atteint d’une stule trachéo-œsophagienne distale, l’alimentation par sonde de gastrostomie et les irrigations de liquide sont contre-indiquées avant l’intervention chirurgicale. Les soins et les traitements inrmiers incluent l’évaluation respiratoire, la gestion des voies respiratoires, la thermorégulation, la prise en charge liquidienne et électrolytique, et un éventuel soutien nutritionnel.

Prodiguer les soins postopératoires Les soins postopératoires liés à la correction d’une atrésie de l’œsophage avec fistule trachéoœsophagienne sont essentiellement les mêmes pour tous les nouveau-nés à risque élevé. Le nouveauné doit être réchauffé sous les lampes chauffantes, et la sonde de gastrostomie est soumise au drainage par gravité jusqu’à ce que le nouveau-né puisse s’alimenter. La sonde est ensuite remontée

et xée à un point au-dessus de l’estomac pour permettre aux sécrétions gastriques de descendre dans le duodénum, et à l’air avalé de sortir par la sonde ouverte. L’aspiration de la trachée ne doit s’effectuer qu’avec une extrême prudence et au moyen d’un cathéter prémesuré pour éviter d’endommager la ligne de suture. Selon la tolérance, il est possible d’instaurer une nutrition par gastrostomie et de la maintenir jusqu’à la guérison de l’anastomose œsophagienne. Avant d’introduire une nutrition par voie orale et de retirer la sonde thoracique, il faut procéder à un examen de contraste ou à une œsophagographie pour vérier l’intégrité de l’anastomose œsophagienne.

Assurer l’alimentation postopératoire Il faut superviser soigneusement la première tentative de nutrition par voie orale pour veiller à ce que le nourrisson avale sans s’étouffer. Les premières tentatives d’alimentation par voie orale se font avec de l’eau stérile, suivie de petites quantités de lait. En attendant que le nourrisson puisse ingérer une quantité sufsante d’aliments par la bouche, la nutrition par gastrostomie ou par voie parentérale peut compléter l’alimentation par voie orale. En général, les nourrissons ne reçoivent pas leur congé de l’hôpital avant de pouvoir prendre des liquides par la bouche ou avant que la sonde de gastrostomie ait été retirée. Cependant, le nourrisson qui subit une intervention chirurgicale palliative recevra son congé même si la sonde de gastrostomie est encore en place.

Éviter les complications Les complications touchant les voies respiratoires supérieures menacent le pronostic vital, tant pendant la phase préopératoire que pendant la phase postopératoire. Outre la pneumonie, le danger de détresse respiratoire résultant d’une atélectasie, d’un pneumothorax et d’un œdème laryngé est constant. Toute difculté respiratoire persistant après le retrait des sécrétions doit être signalée immédiatement au chirurgien. Il faut vérier la présence de fuites anastomotiques, dénotées par un drainage purulent de la sonde thoracique, l’augmentation du nombre de globules blancs et l’instabilité de la température chez le nourrisson.

reçoivent pas de stimulation buccale ont de la difculté à s’alimenter par la bouche après l’intervention chirurgicale correctrice, et ils peuvent souffrir d’une hypersensibilité orale et d’une aversion pour les aliments. Après la réparation, il faut leur apprendre patiemment et méthodiquement la manière de consommer des aliments par la bouche et de les avaler FIGURE 17.19. L’orientation vers un programme pluridisciplinaire d’apprentissage des comportements alimentaires s’impose souvent.

Soutenir les parents Comme dans le cas de toute anomalie congénitale, les parents doivent recevoir du soutien pour s’ajuster à la maladie de l’enfant. Certaines de leurs difcultés sont liées au transfert immédiat du nouveau-né malade à l’unité de soins intensifs et à la longue hospitalisation. Il conviendra d’inciter les parents à rendre visite au nouveau-né, à prendre part aux soins dans la mesure du possible et à exprimer leurs émotions concernant l’état du nouveau-né an de faciliter le processus d’attachement. L’inrmière de l’unité de soins intensifs doit veiller à ce que les parents soient bien informés des progrès du nouveau-né.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Il faut superviser soigneusement la première tentative de nutrition par voie orale pour veiller à ce que le nourrisson avale sans s’étouffer.

Enseigner les soins à domicile à la famille Pour préparer les parents au congé de l’hôpital, il faut leur transmettre l’information dont ils auront besoin à domicile. L’inrmière enseigne aux parents à surveiller les comportements qui trahissent le besoin que les sécrétions soient aspirées, et à reconnaître les signes de détresse respiratoire et de constriction de l’œsophage, comme une alimentation insufsante, une dysphagie, une salivation excessive et une régurgitation d’aliments non digérés. La planication du congé implique également l’acquisition de l’équipement nécessaire et la prestation de services de soins inrmiers à domicile.

L’Association québécoise de l’atrésie de l’œsophage (http:// aqao.org/fr) offre soutien et information aux familles.

17

Encourager la stimulation orale L’utilisation d’une suce permettra au nourrisson nécessitant un remplacement œsophagien de satisfaire son réexe de succion. De petites quantités de liquide données par voie orale, et qui seront éliminées par l’œsophagostomie, permettront au nourrisson d’acquérir la coordination nécessaire pour sucer. La stimulation orale et sensorimotrice aidera à développer les réexes buccaux an de prévenir l’aversion aux aliments. En effet, les nourrissons qui observent un régime NPO longtemps ou qui ne

FIGURE 17.19 Après la réparation chirurgicale de l’atrésie de l’œsophage avec stule trachéoœsophagienne, les parents enseigneront à l’enfant la façon de consommer des aliments par la bouche et de les avaler.

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

869

17.6.3

19 La hernie inguinale est présentée dans le chapitre 19, Troubles liés au système génito-urinaire.

TABLEAU 17.12

17.7

Hernies

Une hernie désigne la saillie anormale d’une partie d’un organe ou de plusieurs organes à travers une ouverture. Le danger lié à la hernie a trait à la compression de l’organe en saillie à travers l’ouverture au point où la circulation en est altérée, ou à l’empiètement des organes sur d’autres structures pouvant nuire à leur fonction (Hebra, 2017). Une hernie qui ne se résorbe pas aisément est appelée hernie irréductible. Une hernie étranglée se caractérise par la détérioration de l’approvisionnement sanguin vers l’organe hernié. Les hernies donnant matière à préoccupation sont celles qui font saillie à travers le diaphragme, la paroi abdominale ou le canal inguinal TABLEAU 17.12 19 .

Troubles obstructifs

L’obstruction du tractus GI se produit lorsqu’une constriction, une occlusion de la lumière ou une altération du péristaltisme, appelée iléus paralytique, font obstacle au cheminement des nutriments et des sécrétions. Elle peut être congénitale ou acquise. De nombreux types d’obstructions congénitales, notamment l’atrésie, l’imperforation de l’anus, le bouchon de méconium et l’iléus méconial, apparaissent généralement pendant la période néonatale. D’autres types d’obstructions congénitales, comme la malrotation, la maladie de Hirschsprung, le volvulus, la hernie irréductible et le diverticule de Meckel, surviennent après les premières semaines de vie. Les obstructions

Hernies

TYPE ET MANIFESTATIONS

ÉVALUATION INITIALE

TRAITEMENTS ET SOINS INFIRMIERS

• Manifestations cliniques : détresse respiratoire de légère à grave dans les heures suivant la naissance ; tachypnée, cyanose, dyspnée, absence de bruits respiratoires dans les zones touchées ; perfusion circulatoire diminuée ; signes possibles de l’état de choc, acidose grave

• Traitement

Diaphragmatique • Saillie des organes abdominaux à travers une ouverture dans le diaphragme

• Diagnostic : suggéré par les manifestations cliniques et conrmé par radiographie ; type de hernie souvent diagnostiqué dès la 25e semaine de gestation

– Administration d’un traitement de soutien pour le soulagement de la détresse respiratoire et la correction de l’acidose ; possibilité d’avoir recours à l’intubation endotrachéale, à la décompression GI et à l’oxygénation par membrane extracorporelle – Administration des antibiotiques prophylactiques – Réduction chirurgicale de la hernie et réparation de l’anomalie • Soins inrmiers préopératoires – Réduction de la stimulation : interventions sur l’environnement et planication de soins regroupés – Détection rapide, réanimation et stabilisation – Maintien de l’aspiration, de l’oxygène et des liquides intraveineux – Maintien d’une position élevée pour la tête – Administration de médicaments • Soins inrmiers postopératoires – Soins de routine postopératoires et observations – Soulagement de la douleur et réconfort – Soutien offert à la famille, car il s’agit d’une maladie critique

Hiatale • Glissement : saillie d’une structure abdominale (généralement l’estomac) par l’orice œsophagien

• Manifestations cliniques : dysphagie, retard marqué de croissance, vomissements, contorsions du cou, problèmes respiratoires fréquents et inexpliqués, saignements ; type de hernie généralement associé à un RGO ; possibilité de volvulus et d’obstruction gastrique • Diagnostic : établi au moyen de la uoroscopie

• Traitement – Prise en charge des symptômes du RGO ; bon positionnement de l’enfant, traitement pharmacologique et prise en charge alimentaire – Intervention chirurgicale nécessaire en présence d’un RGO entraînant des complications malgré le traitement médical • Soins inrmiers – Surveillance attentive des signes importants – Soins postopératoires de routine

870

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

TABLEAU 17.12

Hernies (suite)

TYPE ET MANIFESTATIONS

ÉVALUATION INITIALE

TRAITEMENTS ET SOINS INFIRMIERS

• Détection par auscultation et palpation de l’abdomen

• Traitement

Abdominale • Ombilicale : faiblesse de la paroi abdominale autour de l’ombilic ; fermeture incomplète de la paroi abdominale permettant au contenu de l’intestin de faire saillie vers l’ouverture

• Incidence élevée chez les nourrissons noirs prématurés • En général, fermeture spontanée entre l’âge de 1 et 2 ans

– Aucun traitement nécessaire pour les petites anomalies – Réparation chirurgicale si persistance de la hernie jusqu’à l’âge de 4 à 6 ans, ou en présence d’une anomalie supérieure à 1,5 à 2 cm à l’âge de 2 ans – Attention immédiate requise pour la hernie étranglée • Soins inrmiers – Pas de remèdes maison (p. ex., des sangles, des pièces de monnaie) – Réconfort offert aux parents

• Omphalocèle : saillie des viscères intra-abdominaux dans la base du cordon ombilical ; sac recouvert de péritoine sans peau

• Détection par auscultation • Vérication de la présence d’autres malformations

• Laparoschisis (gastroschisis) : saillie du contenu intra-abdominal à travers l’orice anormal de la paroi abdominale en position latérale par rapport à l’ombilic ; sac péritonéal toujours absent

• Traitement – Réparation chirurgicale de l’anomalie – Préopératoire › En cas de lésions importantes, réduction graduelle du contenu abdominal › Administration d’antibiotiques prophylactiques • Soins inrmiers préopératoires – Hydratation continuelle du sac ou des viscères avec des tampons imbibés de solution saline – Utilisation de lampes chauffantes – Soins de routine requis pour une tubulure I.V. – Aspiration nasogastrique – Statut NPO

Sources : Adapté de Bowling, Hart, Cox et al. (2017) ; Di Cesare (2014) ; Kohn, Price, DeMeester et al. (2013) ; Kumar (2015) ; Mack et Rogdo (2016) ; McHoney (2015).

intestinales de causes acquises, notamment l’invagination, la sténose du pylore et les tumeurs, peuvent se manifester chez les nourrissons ou les

enfants. Quelles qu’en soient les causes, les obstructions intestinales se caractérisent par des manifestations cliniques similaires ENCADRÉ 17.13.

17 ENCADRÉ 17.13

Manifestations cliniques de l’obstruction intestinale mécanique ou paralytique

• Douleur abdominale colique : due au péristaltisme agissant pour surmonter l’obstruction

• Abdomen rigide et ventre de bois : dus à l’augmentation de la distension

• Distension abdominale : due à l’accumulation de gaz et de liquide en amont de l’obstruction

• Bruits intestinaux : diminution graduelle et disparition

• Vomissements : souvent le premier signe d’une obstruction supérieure ; signe tardif d’une obstruction inférieure (peuvent être bilieux ou fécaloïdes) • Constipation et constipation opiniâtre : premiers signes d’obstruction du tractus GI inférieur ; signes tardifs des obstructions du tractus GI supérieur • Déshydratation : due aux pertes de quantités importantes de liquide et d’électrolytes dans l’intestin

• Détresse respiratoire : survenue en présence d’un enfoncement du diaphragme dans la cavité pleurale • État de choc : dû à la diminution du volume plasmatique résultant de la perte de liquide et d’électrolytes de la circulation sanguine vers la lumière intestinale • Septicémie : résultat d’une prolifération bactérienne dans le sang

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

871

17.7.1

Les manifestations cliniques et l’évaluation de l’alcalose métabolique sont expliquées dans le chapitre 17 du manuel de Lewis, S.L., Dirksen, S.R., Heitkemper, M.M., et al. (2016). Médecine Chirurgie. Montréal : Chenelière Éducation.

Sténose hypertrophique du pylore

La sténose hypertrophique du pylore résulte de l’épaississement du muscle circonférentiel du sphincter pylorique, qui entraîne une élongation et un rétrécissement du canal pylorique. Ce phénomène provoque l’occlusion de l’orice de sortie et un mécanisme de compensation impliquant une dilatation, une hypertrophie et un hyperpéristaltisme de l’estomac. Cette affection apparaît généralement dans les 2 à 5 premières semaines de vie et induit des vomissements non bilieux en jet, une déshydratation, une alcalose métabolique et un retard très prononcé de la croissance. Sa cause exacte est inconnue (Hunter et Liacouras, 2016). Une étude canadienne indique que la fréquence de cette affection était de 124 cas pour 100 000 naissances vivantes entre 1987 et 2009 (Lisonkova et Joseph, 2014). Cette affection touche plus souvent les garçons que les lles, dans un ratio de 4,5 garçons pour 1 lle (Lisonkova et Joseph, 2014). Il semble qu’une prédisposition génétique intervienne, puisque le risque de sténose hypertrophique du pylore est plus élevé pour les frères et sœurs, ou les enfants des personnes affectées. La maladie est plus répandue chez les enfants nés à terme que chez les prématurés ; elle est moins souvent observée chez les nourrissons noirs et asiatiques que chez les nourrissons blancs.

Physiopathologie Le muscle circulaire du pylore s’épaissit sous l’effet d’une hypertrophie (augmentation de la taille) et d’une hyperplasie (augmentation de la masse), ce qui entraîne un rétrécissement important du canal pylorique entre l’estomac et le duodénum, et l’occlusion partielle de la lumière FIGURE 17.20A. Avec le temps, l’inammation et l’œdème réduisent encore la taille de l’ouverture, jusqu’à l’occlusion complète. La sténose pylorique n’est pas un trouble congénital. Dans la plupart des cas, la sténose hypertrophique du pylore est une lésion isolée, mais elle peut s’accompagner d’une malrotation intestinale, d’une atrésie œsophagienne et duodénale, ou d’anomalies anorectales.

calme et que les muscles abdominaux sont détendus. Les vomissements surviennent d’ordinaire de 30 à 60 minutes après l’alimentation et se présentent en jet à mesure que l’occlusion évolue. Le contenu expulsé est d’apparence non bilieuse et consiste généralement en lait caillé. Il est fréquent que les nourrissons affectés se déshydratent et deviennent léthargiques, et qu’ils paraissent considérablement sous-alimentés (Subramaniam, 2017). Si l’anamnèse et les signes physiques ne permettent pas d’établir un diagnostic concluant, le recours à une échographie permettra de déceler une masse allongée, en forme de saucisse, et un canal pylorique étiré. Si l’échographie ne révèle pas d’hypertrophie du pylore, il est alors possible d’effectuer une radiographie du tractus GI supérieur pour exclure les autres causes de vomissements. Les résultats des analyses de laboratoire reètent les altérations métaboliques que provoque l’épuisement substantiel des réserves de liquide et d’électrolytes lié au caractère important et durable des vomissements (Feliz, Holub, Azarakhsh et al., 2017). Une diminution des taux sériques de sodium et de potassium peut être observée, quoiqu’elle puisse être masquée par une hémoconcentration due à la réduction du liquide extracellulaire. La diminution des taux sériques de chlorure ainsi que l’augmentation du pH et du bicarbonate, reétant la teneur en dioxyde de carbone et qui sont des caractéristiques de l’alcalose métabolique, sont d’une plus grande A

B

Diagnostic Le diagnostic de la sténose hypertrophique du pylore peut être envisagé pour les très jeunes nourrissons qui paraissent alertes, mais qui ne prennent pas de poids, de même que pour ceux qui présentent des antécédents de vomissements après les repas. L’évaluation consiste à observer les comportements alimentaires et à rechercher d’autres manifestations cliniques caractéristiques ENCADRÉ 17.14. La sténose hypertrophique du pylore est souvent diagnostiquée après l’anamnèse et l’examen physique. Une masse en forme d’olive dans la partie supérieure de l’abdomen est facilement palpable lorsque l’estomac est vide, que le nourrisson est

872

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

FIGURE 17.20 Sténose hypertrophique du pylore – A L’hypertrophie de la zone musculaire supprime presque complètement le canal pylorique. B La division chirurgicale longitudinale du muscle jusqu’à la sousmuqueuse permet d’ouvrir le passage.

utilité diagnostique . Le taux d’azote uréique du sang est élevé en cas de déshydratation.

Approche thérapeutique Le traitement chirurgical standard de la sténose pylorique est la pylorotomie. L’intervention consiste en une laparotomie, c’est-à-dire une incision dans le quadrant supérieur droit, puis en une incision longitudinale à travers les bres musculaires circulaires du pylore, à l’exception de la sous-muqueuse FIGURE 17.20B. Le taux de réussite de l’intervention est élevé lorsque les déséquilibres liquidien et électrolytique des nourrissons sont corrigés dans le cadre de leur préparation préopératoire. L’alimentation reprend généralement de quatre à huit heures après l’opération (Subramaniam, 2017). Il convient de commencer par administrer

ENCADRÉ 17.14

régulièrement de petites quantités d’eau contenant du glucose ou des solutions d’électrolytes, puis du lait maternel, suivant la tolérance du nourrisson. La laparoscopie est une autre intervention possible pour les nourrissons atteints d’une sténose hypertrophique du pylore. La petite incision pratiquée au moyen du laparoscope implique une durée chirurgicale moins longue ainsi qu’une reprise de l’alimentation et un congé plus rapides.

Pronostic La plupart des nourrissons se rétablissent complètement et promptement après une pylorotomie (Subramaniam, 2017). Les complications postopératoires incluent l’obstruction pylorique persistante et la déhiscence de la plaie. Certains nourrissons souffrent également de RGO.

ALERTE CLINIQUE

L’alcalose métabolique peut s’accompagner d’une hypoka­ liémie et d’une hyponatrémie, et entraîner des troubles du rythme cardiaque. L’inrmière doit y être attentive. Elle vérie la natrémie et les taux sériques de potassium, administre du chlorure de sodium (NaCl) ou du chlorure de potassium (KCl), lorsque cela est prescrit, et surveille le rythme cardiaque. Déhiscence : Rupture sponta­ née de la ligne de suture d’une plaie.

Manifestations cliniques de la sténose hypertrophique du pylore

• Vomissements en jet – Expulsion à une distance d’environ 1 à 1,2 m en décubitus latéral, et à au moins 0,3 m en décubitus dorsal – Généralement, se produit peu après l’alimentation, mais parfois après plusieurs heures – Survenue après chaque alimentation ou sur une base intermittente – Vomissements non bilieux parfois teintés de sang

• Aucun signe de douleur ou de gêne, à l’exception d’une faim chronique • Perte pondérale • Signes de déshydratation • Distension de l’abdomen supérieur • Tumeur en forme d’olive aisément palpable dans l’épigastre, juste à droite de l’ombilic • Ondes péristaltiques gastriques visibles se déplaçant de gauche à droite à travers l’épigastre

• Grande faim et tétée avide ; empressement à se nourrir de nouveau après les vomissements

Soins inrmiers STÉNOSE HYPERTROPHIQUE DU PYLORE

Prodiguer les soins préopératoires Avant une pylorotomie, le plus impératif est de réhydrater l’enfant et de rétablir l’équilibre électrolytique. En général, les nourrissons ne sont pas alimentés par voie orale et reçoivent des liquides par voie I.V. avec du glucose et des électrolytes, suivant les résultats des analyses de laboratoire concernant les taux sériques d’électrolytes. Il est important de surveiller étroitement la perfusion intraveineuse et de mesurer avec diligence les ingesta et les excreta, de même que la densité relative de l’urine. Il convient également d’observer et de noter avec précision les vomissements ainsi que la fréquence et l’aspect des selles.

17

Il faut aussi vérier les signes vitaux, surtout lorsqu’ils sont susceptibles d’indiquer des déséquilibres liquidiens et électrolytiques. Les nourrissons qui présentent ces déséquilibres sont sujets à l’alcalose métabolique du fait de la perte des ions hydrogène et de l’épuisement des réserves de potassium, de sodium et de chlorure. Il faut examiner la peau et les muqueuses, et noter quotidiennement le poids, notamment en pesant les couches mouillées et en notant le nombre de selles, pour suivre les variations de l’état d’hydratation et du gain ou de la perte hydrique. S’il est nécessaire de procéder à une décompression de l’estomac et à un lavage gastrique avant l’opération, l’inrmière doit veiller à ce que la sonde soit perméable et qu’elle fonctionne correctement an de mesurer et de consigner le type et la quantité de drainage. Les nourrissons qui

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

873

reçoivent des liquides par voie I.V. ou qui sont porteurs d’une sonde nasogastrique pour le drainage continu doivent être observés an de prévenir le déplacement du cathéter ou de la sonde. Chez les nourrissons déshydratés, les soins hygiéniques généraux sont essentiels, de même que l’examen attentif de la peau et de la bouche. Il en va de même pour la lutte contre les infections, car les nourrissons dont l’état nutritionnel est insufsant y sont plus vulnérables. L’inrmière doit encourager et favoriser la participation des parents aux soins de l’enfant.

Prodiguer les soins postopératoires Des vomissements postopératoires peuvent survenir, et la plupart des nourrissons, même ceux pour qui la pylorotomie a réussi, en souffrent durant les 24 à 48 premières heures en raison de l’œdème chirurgical. Il convient d’administrer des liquides par voie I.V. jusqu’à ce que le nourrisson en retienne des quantités adéquates. L’inrmière continue de relever les signes physiques, de surveiller les liquides par voie I.V., d’observer attentivement le nourrisson, et de noter les ingesta et les excreta. Elle doit également surveiller les signes de douleur et administrer des analgésiques, au besoin. La sonde nasogastrique peut être maintenue pendant un certain temps après l’opération.

17.7.2

Invagination

L’invagination est la cause la plus courante d’obstruction intestinale aiguë chez les enfants de moins de 5 ans. Son incidence est maximale entre l’âge de 3 et 9 mois (Kennedy et Liacouras, 2016). L’invagination touche davantage les garçons que les lles, et constitue une urgence médicale. Même si près de 3 % des enfants concernés peuvent présenter des lésions intestinales précises, la cause en est généralement inconnue. Plus de 90 % des cas d’invagination ne sont pas liés à un point pathologique principal comme un polype, un lymphome ou un diverticule de Meckel. Les cas idiopathiques résultent vraisemblablement d’une hypertrophie des tissus lymphoïdes intestinaux après une infection virale.

En général, l’alimentation est instaurée peu après l’intervention chirurgicale, en commençant par des liquides clairs contenant du glucose et des électrolytes, puis du lait, suivant la tolérance de l’enfant à ceux-ci. Il faut les proposer graduellement, en petites quantités et à des intervalles rapprochés, selon l’ordonnance du médecin. L’observation et l’annotation de l’alimentation et des réactions du nourrisson sont une partie essentielle des soins postopératoires. En général, il est nécessaire de maintenir la tête dans une position d’élévation de 30 à 45° après l’opération. Les soins se rapportant au site opératoire consistent à surveiller l’apparition d’un écoulement ou de signes d’inammation ; les soins liés à l’incision relèvent des directives du chirurgien.

Encourager les parents à prendre part aux soins L’inrmière encourage les parents à rester auprès de leur enfant et à prendre part aux soins. Les vomissements en jet sont susceptibles de les effrayer et de les amener à penser qu’ils ont commis une erreur ou que l’intervention chirurgicale n’a pas réussi. La plupart des parents ont besoin d’être soutenus et rassurés sur le fait que ce problème découle d’un état structurel et qu’il ne concerne en rien leurs habiletés parentales.

des selles en gelée de groseille. Le siège le plus courant de l’invagination est la valvule iléocolique, qui peut être observée quand l’iléon pénètre dans le cæcum et le côlon FIGURE 17.21. Il est également

Physiopathologie ALERTE CLINIQUE

L’invagination peut mettre la vie des enfants en danger. L’inrmière doit donc connaître les tableaux cliniques de cette affection, observer très attentivement les enfants qui en souffrent et les orienter en vue d’autres examens.

874

Partie 6

L’invagination désigne la pénétration d’un segment de l’intestin dans un autre segment immédiatement voisin, à la façon d’un doigt de gant retourné, tirant en même temps le mésentère. Une congestion lymphatique et veineuse ainsi que l’œdème de la paroi intestinale peuvent provoquer une obstruction de l’intestin et entraîner un infarctus ainsi qu’une perforation de la paroi intestinale (Kennedy et Liacouras, 2016) . La turgescence des veines se traduit également par une fuite de sang et de mucus dans la lumière intestinale, entraînant l’apparence classique

Troubles liés aux systèmes

FIGURE 17.21

Invagination iléocolique

possible de distinguer l’invagination iléo-iléale, soit une partie de l’iléon qui pénètre dans une autre section de l’iléon, et l’invagination colocolique, soit un segment du côlon qui pénètre dans un autre, en général dans l’angle droit ou dans l’angle gauche du côlon, ou dans un segment du côlon transverse.

Diagnostic Les manifestations cliniques de l’invagination sont présentées à l’ENCADRÉ 17.15. L’anamnèse oriente souvent le diagnostic d’invagination, et ce dernier pourra être conrmé à l’échographie. Un examen rectal révèle la présence de mucus, de selles ayant l’apparence de gelée, de sang et parfois une invagination basse (Irish, 2017). Une méta-analyse a démontré une augmentation du risque d’invagination 7 jours suivant la vaccination contre le rotavirus, spéciquement après le premier vaccin (Kassim et Eslick, 2017).

Approche thérapeutique Le traitement conservateur de l’invagination comprend le lavement (Irish, 2017). Il y a récurrence de l’invagination après un traitement conservateur chez 1 enfant sur 10 environ ; aucun facteur de risque prévisible de récurrence n’a été déterminé. Avant la réduction hydrostatique, il est possible d’administrer des liquides par voie I.V., et de procéder à une décompression nasogastrique et à une

ENCADRÉ 17.15

Manifestations cliniques de l’invagination

• Douleur abdominale aiguë soudaine

• Vomissements

• Cris de l’enfant et repli de ses genoux vers la poitrine

• Léthargie

• Apparence normale et bien portante de l’enfant entre les épisodes de douleur

• Masse en forme de saucisse palpable dans le quadrant supérieur droit

• Élimination de selles rouges, soit des selles mélangées à du sang et à du mucus, ayant un aspect de gelée de groseille

• Quadrant inférieur droit vide

• Abdomen distendu, sensible à la palpation

• Éventualité de èvre, de prostration et d’autres signes de péritonite

antibiothérapie. Si ces interventions échouent, l’état de l’enfant peut nécessiter une intervention chirurgicale consistant à réduire manuellement la pénétration et à réséquer tout segment intestinal non viable, si cela est indiqué.

Pronostic La réduction non opératoire de l’invagination réussit dans la plupart des cas et peut se pratiquer à l’urgence (Irish, 2017). L’intervention chirurgicale s’impose lorsque le lavement avec contraste est infructueux ou que l’enfant est instable, ou s’il souffre d’une péritonite ou d’une perforation intestinale. Si le diagnostic et le traitement sont prompts, les complications graves et mortelles sont rares.

Soins inrmiers INVAGINATION

Prodiguer les soins préopératoires

L’inrmière peut contribuer à établir le diagnostic d’invagination en se rapportant à la description des manifestations physiques et des comportements de l’enfant donnée par les parents. Il arrive souvent que ceux-ci soient les premiers à remarquer que quelque chose de grave se produit. Une douleur abdominale colique intense accompagnée de vomissements est un signe révélateur d’invagination chez l’enfant.

Les soins physiques de l’enfant atteint d’une invagination sont les mêmes que pour tout enfant qui va subir une intervention chirurgicale abdominale. Même si l’intervention non chirurgicale réussit, les interventions préopératoires habituelles sont de rigueur, comme le maintien du statut NPO, les analyses de laboratoire de routine, soit la FSC et l’analyse d’urine, l’obtention du consentement signé des parents et la sédation préanesthésique. Si l’enfant présente des signes de déséquilibre électrolytique, une hémorragie ou une péritonite, d’autres préparations peuvent s’avérer nécessaires, comme le rééquilibrage liquidien, la transfusion de sang entier ou de plasma, et l’aspiration du contenu de l’estomac par sonde nasogastrique. Avant l’intervention, l’inrmière examine systématiquement les selles .

Dès qu’une invagination est diagnostiquée, l’inrmière prépare l’enfant à l’intervention et répond aux questions des parents selon qu’une technique non chirurgicale de réduction hydrostatique ou qu’une éventuelle intervention chirurgicale a été choisie (Gilmore, Reed et Tenenbein, 2011). Il est important d’expliquer le phénomène de l’invagination. À cette n, le plus simple est de retourner un doigt de gant ou de se servir d’une tige télescopique. Le principe de la réduction par pression hydrostatique peut être illustré en remplissant le gant d’eau de manière à repousser le doigt jusqu’à ce qu’il soit complètement redressé.

17 ALERTE CLINIQUE

L’élimination de selles de couleur brune normale indique généralement que l’invagination a été réduite. L’inrmière doit immédiatement le signaler au médecin, qui peut choisir de revoir le diagnostic et le traitement médical.

Prodiguer les soins postopératoires Les soins postopératoires incluent la prise des signes vitaux, les soins relatifs aux sutures et au pansement, et la surveillance des bruits intestinaux. Après une réduction spontanée ou

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

875

Jugement

clinique

hydrostatique, l’infirmière surveille l’élimination de la Vous effectuez votre évaluation initiale auprès de substance de contraste hydroDanilo, âgé de sept ans, qui est hospitalisé pour soluble, le cas échéant, et les rectorragie. Il doit subir un examen, car le médecin habitudes d’élimination, car soupçonne une invagination intestinale. Vous indiune nouvelle invagination est quez dans le PTI la directive inrmière suivante : possible. Les enfants peuvent « Évaluer par inf. l’aspect de chaque selle, la être hospitalisés ou suivis en présence de sang, la quantité et l’odeur. » Votre consultation externe. Une directive est-elle pertinente ? Justiez votre réponse. récurrence de l’invagination est traitée par les techniques de réduction conservatrices déjà mentionnées, mais la laparotomie peut être envisagée en cas de récurrences multiples.

Soutenir les parents Étant donné que l’hospitalisation en cas d’intervention chirurgicale peut être l’occasion de la

17.7.3

Malrotation de l’intestin et volvulus

La malrotation est une rotation anormale de l’intestin autour de l’artère mésentérique supérieure pendant le développement embryonnaire (Bensard, 2017) FIGURE 17.22. La malrotation peut se manifester in utero ou rester asymptomatique pendant toute la vie. Les nourrissons affectés peuvent souffrir de vomissements bilieux intermittents, d’une douleur abdominale récurrente, d’une distension ou de saignements GI inférieurs. La malrotation est le type le plus grave d’obstruction intestinale, car si l’intestin subit un volvulus complet, c’est-à-dire s’il se tord autour de lui-même, l’approvisionnement

première séparation entre l’enfant et ses parents, il est important de préserver le lien familial en encourageant les parents à partager la chambre de l’enfant ou à prolonger leur visite. Il peut s’agir pour eux d’une première expérience d’hospitalisation ; ils doivent donc être préparés aux interventions comme les traitements par voie I.V., la prise fréquente des signes vitaux, le changement des pansements et le maintien du statut NPO. La rapidité de l’apparition, du diagnostic et du traitement de la maladie peut avoir laissé les parents abasourdis ou dans un état de choc. Il se peut qu’ils posent, voire qu’ils répètent plusieurs fois certaines questions. Lorsque l’inrmière comprend les particularités de cette situation, les réactions des parents sont vraisemblablement mieux comprises et acceptées.

insufsant en sang peut provoquer une nécrose intestinale, une péritonite, une perforation, voire le décès de l’enfant. Le taux de mortalité varie entre 0 et 14 % (Bensard, 2017).

Diagnostic Il est impératif que la malrotation et le volvulus soient diagnostiqués rapidement, et que le traitement chirurgical soit instauré dès que possible. Une série de radiographies du tractus GI supérieur est le moyen le plus sûr de diagnostiquer cette affection (Bensard, 2017).

Approche thérapeutique L’intervention chirurgicale est indiquée pour l’ablation de la zone affectée. Compte tenu de l’ampleur de certaines lésions, la malabsorption par résection intestinale étendue est une complication postopératoire possible.

Soins inrmiers MALROTATION DE L’INTESTIN ET VOLVULUS

En cas d’intervention chirurgicale pour corriger une malrotation ou un volvulus, les soins postopératoires sont les mêmes que pour un enfant souffrant d’une obstruction intestinale. Ils sont semblables à ceux que reçoit l’enfant ayant subi une intervention chirurgicale abdominale.

17.7.4 FIGURE 17.22 avec volvulus

876

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

Intestin en rotation anormale

Malformations anorectales

L’expression malformations anorectales englobe diverses malformations des organes pelviens et des voies génitales et urinaires qui comptent parmi les anomalies congénitales les plus courantes,

puisque leur fréquence est d’environ 1 cas pour 5 000 naissances (Rosen, 2016). Durant le développement embryonnaire, c’est une structure appelée cloaque qui donne naissance à l’anus et au rectum. Ces malformations anorectales peuvent être isolées ou, au contraire, être associées au syndrome VATER ou VACTERL. En fait, la fusion des plis du septum urorectal (éperon périnéal) divise le cloaque en rectum (partie caudale) et en sinus urogénital primitif (partie ventrale). Ce cloisonnement s’achève à la septième semaine de gestation. Le stade de développement atteint par ces différentes structures embryonnaires va déterminer le type de malformation anorectale. Sont regroupés sous l’appellation imperforation de l’anus divers types de malformations caractérisées par l’absence d’orice anal. Dans de nombreux cas, une stule fait communiquer la partie distale du rectum avec le périnée et l’appareil génito-urinaire. La persistance du cloaque est une malformation anorectale complexe essentiellement féminine, qui se caractérise par le fait que le rectum, le vagin et l’urètre sont dans une cavité unique, et que leur contenu se déverse dans un canal qui suit le trajet normal de l’urètre et qui débouche dans le périnée (VanderBrink et Reddy, 2016). L’extrophie du cloaque est une malformation rare et grave, caractérisée par une extériorisation de la vessie et du côlon qui traversent la paroi abdominale. Bien souvent, comme les organes génitaux sont indifférenciés, il faut avoir recours à des analyses génétiques pour déterminer le sexe du nouveau-né. Cette malformation frappe presque exclusivement les lles. La vessie est séparée en deux par le cæcum. Cette malformation peut s’accompagner d’une omphalocèle, d’une imperforation de l’anus et, parfois, d’une anomalie du tube neural. Grâce au perfectionnement des techniques chirurgicales, le taux de survie des nourrissons atteints d’une extrophie du cloaque avoisine les 100 % (Vliet, Roelofs, Rassouli-Kirchmeier et al., 2015). Les malformations anorectales sont regroupées en fonction de divers critères. Ainsi, elles peuvent être classées selon le sexe et selon qu’elles sont associées ou non à d’autres anomalies des organes génito-urinaires ou pelviens. Il est possible de déterminer jusqu’à quel point le rectum est descendu en se basant sur la position relative du segment terminal du côlon et du faisceau puborectal du muscle élévateur de l’anus. Les malformations anorectales sont également classées en fonction de leur position : haute ou basse. Environ la moitié des nouveau-nés qui naissent avec de telles malformations ont aussi des problèmes urinaires FIGURE 17.23.

Diagnostic La plupart des malformations anorectales font l’objet d’un dépistage systématique au moment de l’examen néonatal (O’Connor Guardino et Pieper, 2013). La sténose anale, elle, peut passer inaperçue et n’être diagnostiquée par le médecin qu’après la période néonatale (après 31 jours) (Statovci, Grajçevci, Berisha et al., 2015). En général, les motifs de consultation sont les suivants : difculté à évacuer les selles, distension abdominale et selles nes rappelant des lambeaux de tissu. L’échographie de l’abdomen, l’IRM et le tomodensitogramme sont utilisés an de déceler la présence d’autres malformations concomitantes (Rosen, 2016). En outre, il est recommandé de soumettre le nouveau-né qui présente une malformation haute à une pyélographie intraveineuse couplée à une cysto-urétrographie mictionnelle en vue de déceler d’éventuelles anomalies des voies urinaires. Des examens plus poussés devront être pratiqués en présence de certaines manifestations cliniques, notamment une infection des voies urinaires. Lorsqu’il semble que la malformation fait partie du tableau clinique d’un syndrome quelconque, il faut aussi procéder à une évaluation cardiaque et réaliser des radiographies de la colonne vertébrale.

Approche thérapeutique En principe, la sténose anale est traitée en effectuant des dilatations manuelles (Blumetti, 2017). Le médecin entreprend le traitement curatif avant d’en coner la responsabilité à l’inrmière, qui va effectuer les dilatations régulièrement durant l’hospitalisation et enseigner la technique aux parents pour qu’ils puissent poursuivre le traitement à domicile. Les stules périnéales sont corrigées par anoplastie durant la période néonatale. L’orice est placé au centre du sphincter externe, puis il est élargi par dilatations manuelles. Lorsque la malformation est plus complexe, il faut habituellement pratiquer une colostomie, et la correction chirurgicale est effectuée au cours de la première année de vie (Rosen, 2016).

17

Pronostic Les facteurs qui inuencent le pronostic à long terme sont la nature de la malformation, l’anatomie du sacrum et l’état des muscles. En général, le pronostic en matière de continence est meilleur si : 1. le pli interfessier est profond ; 2. les deux paumes de fesses sont bien formées et que le nourrisson possède un orice anal ; 3. le périnée est plat et qu’il n’y a pas de pli interfessier en raison de troubles neurologiques concomitants. Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

877

FIGURE 17.23

Classication des malformations anorectales

Il est primordial que le sphincter anal interne fonctionne correctement pour que le nourrisson devienne continent, ce qui est le cas pour 75 % des enfants opérés (Rosen, 2016). En l’absence de ce muscle, l’enfant devra suivre un programme de rééducation intestinale pour arriver à un degré

de continence fécale acceptable. Le traitement chirurgical peut entraîner un certain nombre de complications : rétrécissements anaux, stules recto-urinaires récurrentes, prolapsus des muqueuses et constipation.

Soins inrmiers MALFORMATIONS ANORECTALES

La principale responsabilité de l’inrmière est le dépistage des malformations anorectales qui pourraient passer inaperçues. Si le nourrisson a une fossette anale peu développée, une stule génitourinaire ou des anomalies vertébrales, c’est qu’il

878

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

souffre peut-être d’une malformation haute. Lorsqu’un nouveau-né n’évacue pas de méconium au cours des 24 heures qui suivent sa naissance, l’inrmière doit procéder à un examen physique poussé. Par ailleurs, si elle remarque que le méconium est évacué par un autre orice que l’anus, elle doit en informer le pédiatre. Les soins

Prodiguer les soins postopératoires Après une anorectoplastie, les soins inrmiers ont pour but de favoriser la cicatrisation du site opératoire tout en prévenant les infections et les complications. Il s’agit notamment de prendre le plus grand soin de la région périnéale et de nettoyer soigneusement la région anale pour qu’elle reste propre. Un drain temporaire recouvert d’un pansement peut être utilisé initialement an de gérer le passage continu de selles. Les pommades protectrices, comme celles contenant de l’oxyde de zinc, aideront à minimiser les irritations causées par les selles molles et fréquentes. Les positions à privilégier pour atténuer les tensions sur les sutures de la région périnéale sont le décubitus latéral avec surélévation des hanches, et le décubitus dorsal avec surélévation et exion des jambes de façon à ce qu’elles forment un angle de 90° avec le tronc. L’inrmière peut aussi devoir se charger de la décompression abdominale avec une sonde nasogastrique ou de l’alimentation parentérale par voie intraveineuse. Le nourrisson pourra être alimenté lorsque son péristaltisme intestinal sera rétabli. Si le nourrisson a subi une colostomie, l’inrmière sera chargée de changer régulièrement les pansements, de protéger la peau par des soins méticuleux et d’appareiller correctement la stomie.

Assurer le suivi à long terme de l’enfant Il est indispensable de suivre à long terme les enfants qui ont des malformations anorectales

17.8

Syndromes de malabsorption

La diarrhée chronique et la difculté d’absorption des nutriments sont caractéristiques des syndromes de malabsorption. Chez les enfants, le retard très prononcé de la croissance est une complication importante liée à ces syndromes. La plupart des cas sont classés en fonction du siège de l’anomalie anatomique ou biochimique présumée. Les anomalies digestives sont des affections qui se caractérisent par la diminution ou l’absence des enzymes nécessaires à la digestion, par exemple : 1. la brose kystique, qui est notamment caractérisée par l’absence d’enzymes pancréatiques ; 2. les maladies biliaires ou hépatiques, qui désignent une altération de l’écoulement de la bile ;

clinique

hautes. Il est très rare que les enfants nés avec une malforYu Wang, âgé de deux mois, a subi une intervenmation anorectale soient tion chirurgicale en raison d’une sténose anale, continents à l’âge habituel, et celle-ci a bien fonctionné. Il a eu plusieurs soit vers deux ou trois ans. complications de son état de santé avant son Après l’intervention, il est opération et il a dû être alimenté par alimentation important de prévenir la parentérale totale depuis sa naissance. Ses constipation, et l’allaitement parents sont impatients de le faire boire. Que faut-il attendre avant de faire boire Yu ? maternel est recommandé. Lorsque l’enfant est nourri a) La reprise du péristaltisme. avec une préparation lactée b) La prescription du médecin. à base de lait de vache, un c) Le retour de la déglutition. laxatif pourra être prescrit. d) La première selle postchirurgie. La continence intestinale, l’adoption de nouvelles habitudes alimentaires et l’administration de CE QU’IL FAUT RETENIR laxatifs émollients ou de bres sont des aspects importants du maintien des fonctions intestiAprès une anorectoplastie, nales. La fonction intestinale optimale peut ne il faut prendre soin de la survenir qu’à la n de l’enfance ou au début de région périnéale et nettoyer l’adolescence. Pendant ce long processus, il est soigneusement la région anale pour qu’elle reste primordial de soutenir et de rassurer continuelpropre. lement l’enfant jusqu’à ce qu’il ait acquis une capacité fonctionnelle normale.

Jugement

préopératoires comprennent l’évaluation diagnostique, la décompression GI et l’administration d’une perfusion intraveineuse de liquides.

Par ailleurs, il faut montrer aux parents comment prendre soin de la région périnéale et de la plaie ou de la stomie, selon le cas. Chez certains nourrissons, il peut être nécessaire de procéder à des dilatations anales manuelles. Enn, il faut conseiller aux parents d’observer les caractéristiques de l’évacuation des selles et d’informer le médecin s’ils observent un rétrécissement anal ou d’autres complications.

3. l’alactasie, relevant d’une intolérance congénitale ou secondaire au lactose.

17

Les anomalies de l’absorption sont des affections qui se caractérisent par une altération du système de transport de la muqueuse intestinale. Elles peuvent résulter d’une anomalie primitive, par exemple la maladie cœliaque, ou d’une maladie inammatoire de l’intestin susceptible d’entraîner une malabsorption du fait de l’accélération de la motilité intestinale, comme une colite ulcéreuse. Les troubles obstructifs, tels qu’une maladie de Hirschsprung, provoquent également une malabsorption secondaire par l’effet de l’entérocolite. Les anomalies anatomiques comme la résection étendue de l’intestin ou la malabsorption par résection intestinale étendue affectent la digestion en diminuant la durée du transit intestinal des nutriments en raison de la surface d’absorption restreinte de la muqueuse intestinale.

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

879

17.8.1

Maladie cœliaque

La maladie cœliaque, aussi appelée entéropathie chronique liée à une intolérance au gluten, est une entéropathie à médiation immunitaire de l’intestin grêle proximal déclenchée par une réaction immunitaire inadéquate après la consommation de gluten et de protéines apparentées au gluten. Le gluten est une protéine présente dans le blé, mais aussi dans l’orge, le seigle et l’avoine. La maladie cœliaque compte parmi les troubles à vie les plus courants et affecte environ 1 % de la population générale (Canadian Celiac Association, 2016 ; Santé Canada, 2017). Au Québec, cette maladie touche 82 000 personnes (Fondation québécoise de la maladie cœliaque, 2015). Il s’agit de la deuxième cause de malabsorption en pédiatrie après la brose kystique. La cause exacte de la maladie cœliaque est inconnue, mais il semble y avoir une prédisposition innée inuencée par des facteurs environnementaux, tels que le stress ainsi que les infections virales et bactériennes (Guandalini, 2017b ; Sarno, Discepolo, Trocone et al., 2015). L’expression maladie cœliaque s’emploie souvent pour décrire un syndrome répondant à quatre caractéristiques : 1. la stéatorrhée, soit des selles graisseuses, nauséabondes, mousseuses, volumineuses ; 2. la sous-alimentation générale ;

FIGURE 17.24

880

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

3. la distension abdominale ; 4. les décits secondaires en vitamines.

Physiopathologie La prédisposition génétique est un facteur essentiel dans l’apparition de la maladie cœliaque. Les récepteurs membranaires participant à la présentation préférentielle des antigènes aux lymphocytes T CD4+ jouent un rôle central dans la réponse immunitaire caractéristique de la maladie cœliaque. Une fois la réaction inflammatoire activée par le gluten, les lymphocytes T CD4+ produisent des cytokines qui contribuent probablement aux lésions intestinales. Les lésions se caractérisent par une inltration de la lamina propria, une hyperplasie des cryptes ainsi qu’une atrophie et un aplatissement des villosités. La malabsorption survient lorsque l’atrophie touche suffisamment de villosités. La FIGURE 17.24 détaille la physiopathologie de la maladie cœliaque dans l’intestin.

Diagnostic Les symptômes classiques de la maladie cœliaque sont des manifestations GI qui apparaissent généralement plusieurs mois après l’introduction dans la diète de grains contenant du gluten, ce qui survient d’habitude entre l’âge de six mois et deux ans ENCADRÉ 17.16.

Physiopathologie de la maladie cœliaque

ENCADRÉ 17.16

Manifestations cliniques de la maladie cœliaque

TROUBLES DE L’ABSORPTION DES LIPIDES

CHANGEMENTS COMPORTEMENTAUX

• Stéatorrhée (selles trop abondantes, pâles, graisseuses, écumeuses)

• Irritabilité

• Selles extrêmement nauséabondes TROUBLES DE L’ABSORPTION DES NUTRIMENTS

• Malnutrition • Atrophie musculaire (surtout des jambes et des fesses) • Anémie • Anorexie • Distension abdominale

• Absence de coopération • Apathie CRISE CŒLIAQUEa

• Épisodes aigus et graves de diarrhée profuse et de vomissements • Facteurs déclenchants – Infections, surtout GI – Épuisement prolongé des réserves liquidiennes et électrolytiques – Trouble affectif

a Chez

les très jeunes enfants.

La première étape consiste à pratiquer des tests sérologiques (anticorps anti-transglutaminase [anti-tTG-IgA] et/ou anti-endomysium) pour dépister les enfants à risque, et le diagnostic est conrmé par la biopsie pendant que l’enfant consomme encore du gluten (Canadian Celiac Association, 2016 ; Guandalini, 2017b). Lorsque non traitée, la maladie cœliaque peut aboutir à une crise cœliaque se caractérisant par une distension abdominale, une diarrhée explosive et une déshydratation avec déséquilibre électrolytique entraînant un choc hypotensif et une léthargie. Le diagnostic de la maladie cœliaque repose sur au moins quatre biopsies duodénales conrmant des modications caractéristiques d’une inammation de la muqueuse, une hyperplasie des cryptes et une atrophie des villosités (Guandalini, 2017b). Parmi les tests sérologiques de la maladie cœliaque, il convient de mentionner les anticorps recherchés qui interviennent dans les tests de dépistage destinés à la famille immédiate des enfants qui ont la maladie cœliaque et à ceux qui sont atteints de troubles associés comme le diabète de type 1, la thyroïdite, l’arthrite, la cirrhose biliaire primaire, le syndrome de Down, le syndrome de Turner, le syndrome de Williams et l’ostéopénie ou l’ostéoporose.

Approche thérapeutique Le traitement de la maladie cœliaque est essentiellement diététique. Bien que l’alimentation

recommandée soit dite sans gluten, elle est plus exactement à faible teneur en gluten, car il est impossible d’éliminer toutes les sources de cette protéine. Étant donné que le gluten se retrouve principalement dans les grains de blé et de seigle, mais également en petites quantités dans l’orge et l’avoine, il faut proscrire ces quatre grains de l’alimentation. Le maïs et le riz font ofce de substituts. Un jour ou deux après le changement de diète, la plupart des enfants atteints de la maladie cœliaque montrent une réponse favorable, notamment un gain pondéral et un meilleur appétit. La résolution de la diarrhée et de la stéatorrhée est l’affaire de quelques semaines.

Plusieurs organismes et ressources sont en mesure d’aider les familles à faire face à la maladie cœliaque. La Fondation québécoise de la maladie cœliaque (www.fqmc.org) offre aux familles du soutien et des conseils diététiques.

Les enfants atteints d’une maladie cœliaque non traitée peuvent présenter une intolérance concomitante au lactose, compte tenu des lésions de la muqueuse intestinale qui se rétablissent généralement avec l’élimination du gluten et la guérison intestinale. Les décits nutritionnels spéciques sont traités par des suppléments adéquats comme les vitamines, le fer et les calories.

17

Pronostic La maladie cœliaque est considérée comme une maladie chronique. Les symptômes les plus graves apparaissent d’ordinaire au début de l’enfance et se poursuivent à l’âge adulte. L’élimination stricte du gluten alimentaire prévient les manifestations cliniques et peut réduire au minimum le risque de lymphome, qui est la complication la plus grave de la maladie (Guandalini, 2017b).

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

881

Soins inrmiers MALADIE CŒLIAQUE

L’essentiel des soins et des traitements inrmiers de la maladie cœliaque est axé sur le respect d’un régime alimentaire sans gluten FIGURE 17.25. L’inrmière doit consacrer tout le temps nécessaire pour expliquer à l’enfant et aux parents le processus pathologique, le rôle précis du gluten dans l’aggravation de la maladie et les aliments à éviter. Une alimentation sans lactose, qui réduit la consommation des produits laitiers, peut s’imposer initialement. Il est particulièrement difcile de suivre ce régime indéniment alors que l’enfant ne présente aucune manifestation clinique et que des écarts ponctuels ne lui occasionnent aucun problème. Cependant, il semble que la plupart des enfants qui n’observent pas leur régime nissent par connaître une récidive de la maladie, et possiblement un retard de croissance, de l’anémie ou une ostéomalacie. Ils s’exposent également au risque de lymphomes malins de l’intestin grêle ou d’autres tumeurs malignes GI.

contenant du gluten de l’alimentation du nourrisson ou du jeune enfant, mais il peut être plus compliqué de surveiller la diète de l’enfant d’âge scolaire ou de l’adolescent. Les aliments souvent préférés des enfants, comme les hot dogs, la pizza et les pâtes, donnent lieu aux principaux écarts. En général, la prise en charge implique une alimentation riche en calories et en protéines, qui comprend des glucides simples comme les fruits et les légumes, mais peu de matières grasses. Dans un premier temps, il se peut que l’intestin soit enammé à cause du processus pathologique : il faut donc éviter les aliments riches en fibres comme les noix, les raisins, les légumes crus et les fruits crus non pelés en attendant que l’inammation disparaisse.

Enseigner la nutrition adéquate Quoique les céréales et les produits de boulangerie soient la principale source de gluten, des grains sont souvent ajoutés aux aliments préparés comme agents épaississants ou de remplissage. Par ailleurs, de nombreux aliments sont enrichis de gluten à titre de protéine végétale hydrolysée. L’inrmière recommandera aux parents de lire attentivement toute la liste des ingrédients sur les étiquettes pour éviter les sources cachées de gluten. Il est facile d’éliminer bien des aliments

17.8.2

Malabsorption par résection intestinale

La malabsorption par résection intestinale est un trouble de malabsorption résultant d’une diminution de la surface muqueuse, généralement consécutive à une résection importante de l’intestin grêle (Cuffari, 2016). Les causes les plus courantes de malabsorption par résection intestinale en pédiatrie sont les anomalies congénitales, comme l’atrésie du jéjunum et de l’iléon, le laparoschisis, l’ischémie, notamment l’entérocolite nécrosante, et le traumatisme ou les lésions vasculaires, comme le volvulus. Les autres causes incluent le volvulus à l’origine d’une résection grave, la maladie de Hirschsprung sur un long segment d’intestin et l’omphalocèle. Les enfants souffrent notamment de diarrhées,

882

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

FIGURE 17.25 Quelques exemples d’aliments sans gluten pouvant être consommés par les enfants atteints de maladie cœliaque.

de vomissements, de ballonnements et de reux GI (Cuffari, 2016).

Approche thérapeutique Les objectifs du traitement de la malabsorption par résection intestinale sont les suivants : 1. préserver autant de volume d’intestin que possible durant l’intervention chirurgicale ; 2. maintenir le statut nutritionnel, la croissance et le développement de l’enfant durant le processus d’adaptation intestinale ; 3. stimuler l’adaptation intestinale par l’alimentation entérale ; 4. réduire au minimum les complications liées au processus pathologique et au traitement. Les soins à long terme sont axés sur le soutien nutritionnel. Les bres et les aliments contenant

du sucre concentré peuvent aggraver la diarrhée et l’irritation intestinale (The Ohio State University Medical Center, 2011).

Nutrition Durant la phase initiale du traitement, l’alimentation parentérale totale est la principale source nutritionnelle. La deuxième phase correspond à l’introduction de l’alimentation entérale, en général dès que possible après l’intervention chirurgicale. L’alimentation entérale est administrée le plus souvent en continu au moyen d’une sonde nasogastrique ou par gastrostomie. À mesure que l’alimentation entérale progresse, il est possible de diminuer la quantité de solution d’alimentation parentérale totale en ce qui a trait aux calories, à la quantité de liquide et au nombre total d’heures de perfusion par jour. La dernière phase du soutien nutritionnel est celle au cours de laquelle la croissance et le développement sont maintenus exclusivement par alimentation entérale. L’interruption de l’alimentation parentérale totale comporte un risque de décit nutritionnel dû à la malabsorption des vitamines liposolubles, soit A, D, E et K, et à la persistance de minéraux à l’état de trace, soit le fer, le sélénium et le zinc. Il faut mesurer les taux sériques de vitamines et de minéraux ; la prise de suppléments de vitamines et de minéraux par voie entérale peut aussi s’avérer nécessaire.

Traitement pharmacologique Des agents pharmacologiques ont été employés pour réduire les pertes sécrétoires. Certains antagonistes H2, les inhibiteurs de la pompe à protons et l’octréotide inhibent la sécrétion gastrique ou pancréatique. La cholestyramine est souvent prescrite pour atténuer la diarrhée liée à la malabsorption des sels biliaires. Des facteurs de croissance ont aussi été utilisés pour accélérer l’adaptation de l’intestin et favoriser la croissance de la muqueuse, mais seulement dans un contexte expérimental. La malabsorption par résection intestinale et l’alimentation parentérale totale à long terme impliquent de nombreuses complications de nature infectieuse, métabolique ou technique. Une septicémie par cathéter peut se produire si le dispositif n’a pas fait l’objet de soins appropriés. Le tractus GI peut être une des sources possibles de colonisation microbienne du cathéter. L’atrophie intestinale peut augmenter la perméabilité de l’intestin aux bactéries. L’absence de foyers adéquats pour l’entrée des tubulures centrales peut devenir un problème important pour l’enfant qui requiert une alimentation parentérale totale à long terme. La dysfonction hépatique, l’hépatomégalie avec anomalies des tests de la

fonction hépatique et une cholestase peuvent également se produire. La surcroissance bactérienne est probable en cas de valvule iléocæcale absente, ou de stase due à une obstruction partielle ou à un segment dilaté d’intestin dont le péristaltisme est insufsant. L’administration par alternance des cycles d’antibiotiques à large spectre est utilisée pour contenir la surcroissance bactérienne, et réduire le risque de translocation bactérienne et d’infections ultérieures d’un cathéter veineux central (Cuffari, 2016). Les autres complications liées à la surcroissance bactérienne et à la malabsorption incluent l’acidose métabolique et l’hypersécrétion gastrique.

Traitement chirurgical De nombreuses interventions chirurgicales, notamment celles qui visent les valvules intestinales, l’entéroplastie avec modelage ou l’entéroplastie d’élargissement, l’allongement intestinal et les segments interposés, ont été pratiquées pour ralentir le transit intestinal, réduire la surcroissance bactérienne ou augmenter la surface muqueuse. La transplantation intestinale a été réalisée avec succès en pédiatrie. Seuls les enfants entièrement dépendants de l’alimentation parentérale totale ou qui présentent des complications graves ayant trait à l’alimentation parentérale à long terme sont des candidats à la transplantation.

Pronostic Le pronostic pour les nourrissons atteints de malabsorption par résection intestinale s’est amélioré depuis plus d’une vingtaine d’années grâce aux progrès de l’alimentation parentérale totale et à une meilleure compréhension de l’importance de la nutrition intraluminale. L’avancée des techniques chirurgicales pour la prise en charge des problèmes liés au traitement et la découverte de médicaments immunosuppresseurs plus spéciques pour la transplantation ont contribué à l’amélioration des soins. Le pronostic dépend notamment de la longueur de l’intestin grêle résiduel. La préservation de l’iléon terminal et de la valvule iléocæcale inue sur l’absorption des liquides et des nutriments, et permet a priori d’éviter des problèmes de prolifération bactérienne en empêchant l’entrée des bactéries du côlon dans l’intestin grêle. Les nourrissons et les enfants atteints de malabsorption par résection intestinale peuvent mourir des suites de problèmes liés ou dus à l’alimentation parentérale totale, par exemple une septicémie fulminante ou une insufsance hépatique grave (Cuffari, 2016).

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

17

883

13 Les interventions inrmières à offrir aux proches dont l’enfant doit séjourner à l’hôpital sont présentées dans le chapitre 13, Rôle de l’inrmière au cours de l’hospitalisation.

3 Les mesures préventives contre les chutes et les accidents de voiture sont abordées dans le chapitre 3, Croissance, développement et promotion de la santé.

ALERTE CLINIQUE

La maltraitance doit être suspectée lorsque le contexte du traumatisme abdominal n’est pas clair (Maguire, Upadhyaya, Evans et al., 2013).

Les traumatismes abdominaux sont détaillés dans le cha­ pitre 57 du manuel de Lewis, S.L., Dirksen, S.R., Heitkemper, M.M., et al. (2016). Médecine Chirurgie. Montréal : Chenelière Éducation.

884

Partie 6

Soins inrmiers

ENCADRÉ 17.17

MALABSORPTION PAR RÉSECTION INTESTINALE

• Douleur

Les éléments les plus importants des soins inrmiers relatifs à la malabsorption par résection intestinale sont l’administration et le suivi de la thérapie nutritionnelle. Durant l’alimentation parentérale totale, des mesures doivent être prises an de réduire au minimum le risque de complications liées au dispositif d’accès veineux central, par exemple des infections, des occlusions, un délogement ou un retrait accidentel du cathéter. Les soins relatifs aux sondes d’alimentation entérale et la surveillance de la tolérance à l’égard de ce procédé font également partie des responsabilités importantes de l’inrmière. Si une alimentation parentérale à long terme s’impose, il est impératif que l’inrmière prépare rapidement la famille en vue des soins à domicile, de manière à prévenir une hospitalisation de longue durée et des problèmes ultérieurs comme la dysfonction familiale et les retards développementaux. Nombreux sont les nourrissons et les enfants qui peuvent très bien recevoir une nutrition entérale et parentérale à domicile lorsque la famille est bien préparée et qu’elle dispose de services de soutien adéquats. Le suivi effectué par l’entremise d’un service de soutien nutritionnel pluridisciplinaire est essentiel. L’inrmière joue un rôle actif et primordial dans le succès des programmes de nutrition à domicile (Cuffari, 2016). Des services de perfusion à domicile offrent de l’équipement portatif qui peut assurer à l’enfant et à la famille un mode de vie plus normal. Si l’hospitalisation est prolongée, les besoins développementaux et affectifs de l’enfant doivent être comblés. Cela suppose souvent une planication particulière de la part de la famille pour s’habituer et s’adapter aux routines de l’hôpital 13 .

17.9

Traumatisme abdominal

17.9.1

Étiologie et physiopathologie

Il est reconnu que les traumatismes abdominaux surviennent principalement au cours de chutes ou d’accidents de la route qui peuvent avoir des

Troubles liés aux systèmes

Manifestations cliniques du traumatisme abdominal

• Défense et distension abdominale • Diminution ou absence des bruits intestinaux • Nausées • Vomissements • Ecchymoses • Contusions • Abrasions • Hématurie • Signes de choc hypovolémique (hypotension, tachycar­ die, tachypnée, diminution de l’état de conscience)

conséquences extrêmement graves, allant jusqu’au décès 3 . En pédiatrie, le traumatisme abdominal se place en troisième position comme localisation de blessure, après les traumatismes à la tête et aux membres, et constitue la première cause de mortalité et de morbidité (Saxena, 2017b). Il faut savoir qu’en dehors des cas évidents très graves de choc, certains enfants se présentent à l’hôpital plusieurs heures, voire plusieurs jours après le traumatisme abdominal avec des signes différés, qu’il ne faut pas négliger pour autant ENCADRÉ 17.17. La conduite à adopter dépend de la localisation et de la nature des lésions : • Lésions des viscères pleins (rate, foie, pancréas et rein) ; • Lésions des viscères creux (estomac, duodénum, vésicule biliaire, intestin grêle, côlon et rectum, vessie) ; • Lésions du diaphragme. Les viscères pleins peuvent avoir été lacérés ou écrasés (p. ex., l’éclatement de la rate). Les viscères creux peuvent avoir été perforés, provoquant une hémorragie abdominale, un épanchement de leur contenu et une péritonite. Lorsque le diaphragme est atteint ou que l’enfant présente des fractures des côtes, des problèmes respiratoires peuvent survenir. Enn, la vessie et les reins, même s’ils ne font pas partie du système GI, peuvent avoir été perforés ou rompus. L’enfant blessé à l’abdomen est habituellement conduit au service des urgences de l’hôpital, où il est immédiatement pris en charge (Saxena, 2017b) ENCADRÉ 17.18.

Selon la gravité de l’atteinte des viscères, la principale complication à prévenir est le choc hypovolémique entraîné par l’hémorragie ou la perforation abdominale.

17.9.2

Approche thérapeutique

En cas de traumatisme abdominal soupçonné, les examens paracliniques (échographie, radiographie abdominale, radiographie pulmonaire, TDM) permettront de déterminer la nature des lésions des organes internes et d’orienter le traitement subséquent (Saxena, 2017b).

chirurgicale, l’enfant sera tenu au repos et évitera les sports de contact ou les activités qui demandent une grande dépense d’énergie.

Pratiques inrmières ENCADRÉ 17.18

Procéder aux soins d’urgence en cas de traumatisme abdominal

• Dégager les voies respiratoires.

En cas d’atteinte des organes pleins et creux dans un contexte instable, l’enfant sera immédiatement pris en charge en urgence au bloc opératoire pour pratiquer une hémostase ou un drainage des liquides épanchés. Selon son état volémique, l’enfant sera transfusé et transféré à l’unité des soins intensifs ou en unité chirurgicale selon son atteinte. L’inrmière doit préparer de son mieux l’enfant et sa famille, compte tenu du peu de temps et du caractère urgent de la situation.

• Administrer de l’oxygène, au besoin.

Pronostic

• Insérer une sonde urinaire, s’il n’y a pas d’atteinte rénale ou vésicale.

Le pronostic dépend de la gravité et de la localisation des lésions. Habituellement, les organes pleins atteints guérissent spontanément, et l’alimentation sera reprise dans les jours qui suivent. Dans les semaines suivant l’intervention

• Établir et maintenir la ou les voies veineuses pour la perfusion de liquides de remplacement et des produits sanguins, au besoin.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Selon la gravité de l’atteinte des viscères, la principale complication à prévenir est le choc hypovolémique entraîné par l’hémorragie ou la perforation abdominale.

• Prélever les échantillons sanguins et urinaires. • Déshabiller l’enfant avec précaution pour détecter la présence d’autres lésions. • S’il y a un objet contondant ou tranchant dans l’abdomen, le laisser en place et le recouvrir d’un pansement. • Insérer une sonde nasogastrique, si cela est prescrit.

• Conrmer les circonstances exactes de l’accident. • Vérier l’heure du dernier repas. Source : Adapté de St-Vil (2012).

Soins inrmiers TRAUMATISME ABDOMINAL

S’il est conscient, l’enfant atteint d’un traumatisme abdominal pourra avoir peur ou être anxieux. Il faudra veiller à expliquer avec des mots simples, adaptés à son âge, ce qui se passe autour de lui. Si les parents sont présents, l’inrmière consacrera quelques minutes pour leur expliquer les interventions. L’enfant doit être maintenu à jeun et au chaud. L’inrmière administre les médicaments prescrits pour maîtriser la douleur. Elle prélève les échantillons de sang pour les analyses suivantes : hémogramme (hémoglobine, hématocrite, globules rouges), tests de coagulation (plaquettes, temps de prothrombine, rapport international normalisé), gazométrie du sang artériel, groupe sanguin et rhésus, électrolytes, enzymes pancréatiques et hépatiques, urée, créatinine, analyse d’urine.

Les enfants atteints d’un traumatisme abdominal doivent être surveillés de façon continue. Une fois les premiers examens pratiqués, l’inrmière surveille les éléments suivants : • Signes vitaux : pouls, pression artérielle, température ;

17

• Signes neurologiques : score sur l’échelle de coma de Glasgow ; • État respiratoire : fréquence respiratoire, saturation en oxygène (O2) ; • Degré et localisation de la douleur ; • Signes GI : nausées, vomissements ; • Drainage de la sonde nasogastrique : apparence, quantité de liquide drainé ; • Diurèse : quantité d’urine.

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

885

Analyse d’une situation de santé Zoé, âgée de 8 mois, est hospitalisée pour diarrhées et vomissements. Sa mère l’a amenée à l’hôpital, car la llette refuse de boire depuis 3 h la nuit dernière. Il est 13 h, et vous procédez à son admission à l’unité de soins. Vous avez pris les signes vitaux et obtenu les résultats suivants :

Jugement clinique • Pouls : 140 batt./min • Respiration : 36 R/min • Pression artérielle : 60/32 mm Hg • Température axillaire : 38,3 °C • Saturation : 99 % Vous pesez Zoé : elle pèse 7,6 kg.

Mise en œuvre de la démarche de soins

Collecte des données – Évaluation initiale – Analyse et interprétation 1. Vous procédez au reste de l’examen physique de Zoé. Nommez au moins six données objectives à recueillir au cours de votre examen. 2. Deux données objectives de la mise en contexte peuvent être associées à un état de déshydratation. Lesquelles ?

SOLUTIONNAIRE

3. Nommez une donnée objective de la mise en contexte qui pourrait exacerber l’état de déshydratation de Zoé. 4. Vous indiquez, dans le PTI, de peser Zoé die. Quels sont les trois points à respecter pour obtenir une donnée able à la pesée ? Justiez-les. 5. Vous désirez vérier la densité urinaire de Zoé. Comment procéderez-vous, étant donné que Zoé porte une couche ? 6. Vous désirez obtenir des données subjectives en lien avec la diarrhée et les vomissements de Zoé. Formulez au moins deux questions que vous pourriez poser aux parents pour connaître la source possible de contamination.

Vous avez reçu les résultats des analyses de laboratoire faites depuis l’admission de Zoé.

VU dans ce chapitre

Sachant que Zoé pèse 7,6 kg, la quantité de soluté à recevoir pour 24 h est-elle adéquate ? Justiez votre réponse.

Si Zoé pesait 11,3 kg, quelle quantité de soluté devraitelle alors recevoir pour une période de 24 h ? À quel débit/heure faudraitil alors ajuster le soluté ?

Partie 6

FSC : érythrocytes : 4,8 × 1012/L ; leucocytes : 19,8 × 109/L ; plaquettes : 402 × 109/L Hématocrite : 0,39 ; virologie sur selles : rotavirus positif Zoé reçoit une perfusion intraveineuse de dextrose 5 % Nacl 0,9 % + KCl 40 mEq/L à 32 mL/h.

7. Pourquoi Zoé ne reçoit-elle pas d’antibiotiques pour éliminer les micro-organismes pathogènes ?

MAIS SI...

886

Ionogramme : potassium : 2,8 mEq/L ; sodium : 140 mmol/L

Voici un extrait des notes d’évolution inscrites au dossier de Zoé à son admission : 2018-05-27 13:00 D’après la mère, Zoé refuse de boire et aurait vomi à 3 reprises depuis 3 h cette nuit. Elle aurait fait 4 selles jusqu’à maintenant et n’a pas uriné. Zoé pleure, elle a la peau sèche. Temps de remplissage capillaire vérié. 8. Trouvez les quatre éléments de cette note qui ne sont pas sufsamment détaillés et énumérez les éléments à préciser.

Troubles liés aux systèmes

VUdans ce chapitre

Planication des interventions – Décisions inrmières 9. Zoé a vomi pour la dernière fois il y a quatre heures. Est-il nécessaire de commencer l’administration P.O. de solution de réhydratation, étant donné que son soluté répond à ses besoins liquidiens ? Justiez votre réponse.

Extrait de PTI

Zoé pourrait-elle recommencer à manger les aliments que ses parents lui donnaient à la maison ? Justiez votre réponse.

CONSTATS DE L’ÉVALUATION Date

Heure



2018-05-28

09:00

2

Problème ou besoin prioritaire

Refuse la SRO.

Initiales

RÉSOLU / SATISFAIT Date

Heure

Initiales

Professionnels / Services concernés

J.B.

SUIVI CLINIQUE Date

Heure



2018-05-28

09:00

2

Directive inrmière

Offrir 30 mL de bouillon de poulet du commerce toutes les 15 minutes.

Signature de l’inrmière

Julie Boulanger

Initiales

Initiales

J.B.

Programme / Service

CESSÉE / RÉALISÉE Date

Heure

Initiales

J.B.

Signature de l’inrmière

Initiales

Programme / Service

7e bloc 6

10. Zoé refuse d’avaler la solution de réhydratation. Ses parents afrment qu’elle n’en aime pas le goût et qu’ils ont essayé toutes les marques. Vous avez trouvé une solution qui fonctionne pour hydrater Zoé et vous l’avez consignée au PTI. Cette directive inrmière est-elle acceptable ? Justiez votre réponse. 11. Vous avez noté une leucocytose chez Zoé. Devez-vous inscrire ce problème dans le PTI ? Justiez votre réponse.

Zoé se porte de mieux en mieux et peut cesser de recevoir son soluté. Les résultats de ses analyses de laboratoire reviennent à la normale. Durant l’hospitalisation, vous avez constaté que les parents croient qu’il faut garder un enfant à jeun pendant une gastroentérite. Vous décidez de faire un enseignement sur les soins à apporter durant une gastroentérite.

12. Qu’est-ce qui justie un tel enseignement ?

Évaluation des résultats – Évaluation en cours d’évolution

17

13. À la lumière des données de la mise en contexte, nommez trois points qui indiqueraient que l’état de santé de Zoé s’améliore.

Chapitre 17

Troubles liés au système gastro-intestinal

887

Chapitre

18

Troubles liés aux systèmes hématologique et immunitaire Écrit par : Rosalind Bryant, PhD, RN, PPCNP-BC Adapté et mis à jour par : Pierre Verret, inf., M. Sc., CSIO(C)

MOTS CLÉS

OBJECTIFS

Anémie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 894 Aphérèse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 924 Autosome . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 899 Coagulopathie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 914 Élément figuré du sang . . . . . . . . . . . . . . 907 Facteur de coagulation . . . . . . . . . . . . . . 909 Formule sanguine complète (FSC) . . . 892 Hémoglobinopathie . . . . . . . . . . . . . . . . . . 898 Hémophilie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 909 Hémostase . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 909 Infection par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) . . 916 Lymphocyte T . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 908 Médicament antirétroviral . . . . . . . . . . . 917 Transfusion sanguine . . . . . . . . . . . . . . . . 921

Après avoir étudié ce chapitre, vous devriez être en mesure :

Disponible sur • À retenir • Carte conceptuelle • Solutionnaires

Guide d’études – RE08

888

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

• de distinguer les diverses catégories d’anémie ; • de décrire les méthodes de prévention de l’anémie ferriprive et les soins pédiatriques associés ; • de distinguer la physiopathologie de l’anémie falciforme et de la β-thalassémie, ainsi que les soins infirmiers associés ; • de décrire les mécanismes de transmission de l’hémophilie et les soins infirmiers pour traiter l’hémophilie en pédiatrie ; • de comparer la physiopathologie et l’approche thérapeutique des troubles immunodéficitaires ; • d’énoncer les précautions à prendre et les responsabilités du personnel infirmier pendant une transfusion sanguine.

Carte conceptuelle

incluent

Cette carte conceptuelle illustre schématiquement les principaux concepts décrits dans le présent chapitre. Sa lecture vous permettra d’avoir une vue d’ensemble des notions qui y sont présentées.

incluent

incluent

incluent

dont

comprennent traités par

18

Troubles liés aux systèmes hématologique et immunitaire

Chapitre 18

Troubles liés aux systèmes hématologique et immunitaire

889

Rappel anatomique et particularités chez l’enfant

Systèmes hématologique et immunitaire FIGURE 18.1 Le système immunitaire parvient à maturité à l’âge de 6 ans. À cet âge, la résistance aux maladies et aux infections est plus efcace. L’enfant est alors moins souvent malade. Dès la naissance, les mécanismes de défense internes non spéciques comme la èvre et l’inammation sont fonctionnels. En revanche, les mécanismes de défense spéciques sont immatures. Entre 0 et 6 ans, l’enfant constitue sa mémoire immunologique. À la naissance, les lymphocytes B et T sont exclusivement naïfs et, progressivement, ils se convertissent en lymphocytes mémoire. L’exposition initiale à un antigène spécique active les lymphocytes, et ces derniers se répliquent. Les lymphocytes T se dirigent vers le foyer de l’infection. Les lymphocytes B se transforment en plasmocytes qui libèrent des anticorps, lesquels voyageront par le sang jusqu’au foyer de l’infection. Ce processus prend de 3 à 6 jours. Lors d’une exposition subséquente à ce même antigène, une réponse immunitaire est déclenchée dans les 24 heures.

Les tissus lymphoïdes de l’enfant dans lesquels séjournent notamment les lymphocytes T et B sont plus volumineux que ceux de l’adulte. Ainsi, dès la naissance, le thymus est volumineux. Il participe à la formation et à la maturation des lymphocytes T jusqu’au moment où le système immunitaire est bien établi. À la puberté, la taille du thymus diminue, et le tissu dont il est constitué est progressivement remplacé par du tissu adipeux (Le rôle du thymus dans le système endocrinien est présenté à la gure 21.1.). Larate ltre les antigènes voyageants dans la circulation sanguine et s’active lors d’une infection systémique (notamment une septicémie). La rate retient les érythrocytes dysfonctionnels et abrite une quantité importante de phagocytes qui ltrent le sang. Ce dernier rôle est plus important chez l’enfant qu’à l’âge adulte. Chez le jeune enfant, une splénomégalie peut être présente lors

890

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

d’épisodes viraux. Quant aux amygdales, elles ne sont que des bourgeons à la naissance. Elles se développent pour réagir aux agents infectieux comme première ligne de défense et contiennent les cellules immunitaires essen­ tielles pour réagir aux micro­organismes constamment présents. À l’âge scolaire, les amygdales et les végétations adénoïdes sont de taille similaire à celle de l’adulte. Vers l’âge de 8 ou 9 ans, leur volume a doublé par rapport à celle d’un adulte, puis il diminue pendant l’adolescence (La gure 15.1 pré­ sente le rôle des amygdales dans le système respiratoire.). Lesganglions lymphatiques sont les premiers défenseurs contre les infections, en plus de produire des lymphocytes et des anticorps. Ces tissus lymphoïdes existent en petite quantité chez le nouveau­né. Les ganglions cervicaux se développent au cours de la première année de vie.

À l’accouchement, le système sanguin du nouveau-né devient autonome et l’hyperglobulie fœtale prend n, ce qui engendre des changements, notamment dans les concentrations d’érythrocytes (globules rouges) et d’hémoglobine. Ces taux diminuent de la naissance à 2 ou 3 mois environ, pour ensuite augmenter progressivement. À l’adolescence, les concentrations sont similaires à celles des adultes. Les concentrations d’érythrocytes sont légèrement plus élevées chez les adolescents que chez les adolescentes. Les érythrocytes ont une longévité de 60 à 80 jours chez le nouveau-né, et de 120 jours chez l’enfant. Bien que le nombre de leucocytes soit le plus élevé à la naissance, ceux-ci sont soit immatures, soit naïfs. Chez le nouveau-né, le nombre delymphocytes T qui circulent dans le sang est supérieur à celui de l’adulte. Il diminue à partir de la première semaine de vie, puis reste légèrement supérieur pour atteindre, dès l’âge de 6 ans, les valeurs observées chez l’adulte. Une partie des anticorps (immunoglobulines G et A) d’origine maternelle protègent le

nourrisson. Ce phénomène au cours duquel les anticorps maternels diminuent et les anticorps du nourrisson se développent s’appelle hypogammaglobulinémie physiologique ou transitoire. Il survient entre le 3e et le 5e mois de vie, et se résout complètement entre l’âge de 2 et 5 ans. À la naissance, les risques associés au saignement sont plus grands, car la coagulation n’est pas complètement fonctionnelle. L’activité de plusieurs facteurs de coagulation dépendant de la vitamine K est beaucoup plus basse comparativement à celle des adultes. La concentration plasmatique des protéines anticoagulantes est environ 50 % plus basse, et les thrombocytes (plaquettes) sont moins fonctionnels, bien que leur nombre soit similaire à celui des adultes. Pour cette raison, une injection de vitamine K est administrée de manière préventive aux nouveau-nés. Chez le jeune enfant, l’hématopoïèse (production de cellules sanguines) a lieu dans la plupart des os, alors que chez l’adulte, elle se fait principalement dans la moelle osseuse des vertèbres, du sternum, des côtes et des os longs.

FIGURE 18.2 Le système sanguin devient autonome à la naissance. Les principaux éléments gurés du sang sont présents, mais à des concentrations différentes de celles de l’adulte, et ils ont besoin de se développer TABLEAU 18.1. Chapitre 18

Troubles liés aux systèmes hématologique et immunitaire

891

18

18.1

C Les valeurs normales en fonction de l’âge du client sont présentées dans l’annexe C, Valeurs normales des signes vitaux.

Évaluation des fonctions hématologique et immunitaire

Plusieurs tests et examens peuvent servir à évaluer les fonctions hématologique et immunitaire an de déterminer la cause d’un trouble. La description suivante se limite au groupe de tests le plus courant et l’un des plus utiles : la formule sanguine complète (FSC). Les évaluations menant au diagnostic de chacun des troubles hématologiques et immunitaires sont présentées tout au long de ce chapitre. Il est important que l’inrmière connaisse bien la signification des résultats d’une FSC TABLEAU 18.1 et reconnaisse les valeurs normales en fonction de l’âge de l’enfant C . Comme c’est le cas de tout problème de santé, une entrevue et un examen physique sont essentiels pour détecter un trouble hématologique ou immunitaire. Souvent, l’inrmière est la première personne à soupçonner un problème à partir des renseignements ainsi obtenus. Par exemple, les

TABLEAU 18.1

commentaires des parents concernant le manque d’énergie de l’enfant, les notes d’un journal alimentaire indiquant des sources insufsantes de fer, des infections fréquentes et des saignements difciles à maîtriser sont des indices qui évoquent des troubles hématologiques fréquents. Un examen physique minutieux, particulièrement de la peau, à la recherche d’une pâleur, de pétéchies ou d’ecchymoses, peut révéler un dysfonctionnement hématologique mineur ou grave. L’inrmière doit connaître les manifestations cliniques des maladies du sang pour pouvoir reconnaître les symptômes de ces affections, établir un constat et formuler ses directives.

18.2

Troubles hématologiques

Les troubles hématologiques les plus fréquents sont l’anémie ferriprive, l’anémie falciforme, la β-thalassémie, l’anémie aplasique et l’hémophilie.

Tests inclus dans la formule sanguine complète

TEST

VALEURS MOYENNES NORMALES (0-18 ANS)

DESCRIPTION

Numération des globules rouges (GR)

3,2-6,6 × 1012/L

• Correspond au nombre de GR/L de sang. • Est une estimation indirecte de la teneur en hémoglobine du sang. • Reète la fonctionnalité de la moelle osseuse.

Mesure de l’hémoglobine (Hb)

95-195 g/L

Mesure de l’hématocrite (Ht)

0,28-0,58 L/L

• Correspond à la quantité d’Hb exprimée en g/L du sang total. • La teneur totale de l’Hb dans le sang dépend essentiellement du nombre de GR circulants, mais également de la quantité d’Hb dans chaque cellule. • Correspond à la proportion des GR/volume de sang. • Représente environ 3 fois la teneur en Hb. • Est une mesure indirecte de la teneur en Hb.

Volume globulaire moyen (VGM)

70-123 fL

Teneur corpusculaire moyenne en hémoglobine (TCMH) ou teneur globulaire moyenne en hémoglobine (TGMH)

23-40 pg/GR

• Correspond au volume moyen (taille moyenne) d’un seul GR. • Les valeurs du VGM sont exprimées en femtolitres (fL) ou en micromètres cubes (μm 3). • Correspond à la quantité moyenne d’hémoglobine contenue dans une hématie. Le calcul de la TCMH consiste à diviser la concentration d’hémoglobine exprimée par litre de sang par le nombre de globules rouges par litre de sang. • La TCMH dépend des quantités précises de GR, ce qui n’est pas le cas de la CCMH ; par conséquent, la TCMH est souvent plus able que la CCMH. • Les valeurs de la TCMH sont exprimées en picogrammes (pg) ou en micro-microgrammes (μmcg).

Concentration corpusculaire moyenne en hémoglobine (CCMH) ou concentration globulaire moyenne en hémoglobine (CGMH)

892

Partie 6

280-360 Hb g/L de GR

Troubles liés aux systèmes

• Correspond à la concentration moyenne d’hémoglobine dans un globule rouge. Le calcul de la CCMH consiste à diviser la concentration d’hémoglobine exprimée par litre de sang par la valeur de l’hématocrite. • Les valeurs de la CCMH sont exprimées en Hb g/L de GR.

TABLEAU 18.1

Tests inclus dans la formule sanguine complète (suite)

TEST

VALEURS MOYENNES NORMALES (0-18 ANS)

DESCRIPTION

Indice de distribution érythrocytaire (IDR) ou distribution volumétrique érythrocytaire (DVE)

12,7-16 cV

• Correspond au coefcient de variation de la taille des GR. • Illustre l’hétérogénéité des GR. • Permet de différencier certains types d’anémie.

Numération des réticulocytes

20-120 × 109/L

• Fournit un indice de la production de GR matures par la moelle osseuse. – Une numération inférieure indique une dépression de la fonction de la moelle osseuse. – Une numération accrue indique une érythrogenèse en réponse à un certain stimulus. • Permet de distinguer le caractère régénératif ou arégénératif d’une anémie. • Est une estimation indirecte de l’anémie hypochrome. • Lorsque la numération réticulocytaire est extrêmement élevée, d’autres formes de GR immatures (normoblastes, ou même érythroblastes) peuvent être présentes. • Cette numération est généralement élevée chez les enfants atteints d’anémie hémolytique chronique.

Numération des globules blancs (GB)

4,5-34,0 × 109/L

Formule leucocytaire

Voir numération des :

• Correspond au nombre de GB/L de sang. • Le nombre total de GB est normalement moins important que la formule leucocytaire.

• neutrophiles ; • neutrophiles non segmentés ; • éosinophiles ;

• Consiste en l’examen et la détermination de la quantité des différents types de GB dans le sang périphérique. • Les valeurs sont souvent exprimées en pourcentage et en nombre absolu. Pour obtenir le nombre absolu d’un type de GB, il faut multiplier son pourcentage par le nombre total de GB.

• basophiles ; • lymphocytes ; • monocytes. Numération des neutrophiles (polynucléaires)

55-70 % 2,5-8 × 103/mm3

• Correspond au pourcentage de neutrophiles/L de sang. Peut aussi être indiqué en nombre absolu. • Principale défense contre les infections bactériennes ; ils peuvent phagocyter et tuer les bactéries. • Indique la capacité de l’organisme à faire face à des infections bactériennes. • L’activité et la mort des neutrophiles produisent une grande quantité de pus dont les constituants sont variés.

Numération des granulocytes neutrophiles non segmentés (stabs ou bands)

0,00-1,00 × 109/L

Numération des éosinophiles

0-0,5 × 109/L

• Correspond au nombre absolu de neutrophiles immatures/L de sang.

18

• Leur nombre augmente en cas d’infection bactérienne. • Le nom provient des caractéristiques de ces cellules qui se colorent en présence d’éosine. • Leur nombre augmente en cas de réactions allergiques, de maladies parasitaires ou de certains néoplasmes.

Numération des basophiles

0-0,22 × 109/L

• Le nom provient de leur afnité avec les colorants basiques qui leur donnent une couleur bleue caractéristique. • Contiennent de l’histamine et de l’héparine. • Jouent un rôle de prévention dans la formation de caillots dans les vaisseaux sanguins. • Seraient à l’origine du débit sanguin accru en présence de tissus lésés et empêchent une coagulation excessive. • Sont responsables des réponses allergiques et inammatoires en libérant de l’histamine.

Chapitre 18

Troubles liés aux systèmes hématologique et immunitaire

893

TABLEAU 18.1

Tests inclus dans la formule sanguine complète (suite)

TEST

VALEURS MOYENNES NORMALES (0-18 ANS)

DESCRIPTION

Numération des lymphocytes

0,8-13 × 109/L

• Participent à la production d’anticorps et à l’hypersensibilité retardée.

Numération des monocytes

0,08-1 × 109/L

• Participent, avec les neutrophiles, à la lutte contre les virus et les parasites bactériens. Leur durée de vie est cependant plus longue que celle des neutrophiles. • Également nommés macrophages lorsqu’ils migrent hors du ux sanguin vers les tissus.

9

Numération plaquettaire

Frottis de sang périphérique coloré

150-475 × 10 /L 150-300 × 109/L nouveau-né (0-28 jours)

• Correspond au nombre de plaquettes/L de sang.

S.O.

• Consiste en une estimation visuelle de la quantité d’Hb dans les hématies, ainsi que de la taille, de la morphologie et de la structure générale des GR.

• Les plaquettes sont des fragments cellulaires nécessaires pour la coagulation.

• Les diverses propriétés de coloration des structures des GR peuvent indiquer des formes immatures d’érythrocytes. • Le frottis met en évidence une variation de la taille et de la morphologie des GR : microcytose, macrocytose, poïkilocytose (morphologies variables).

18.2.1

Troubles liés aux globules rouges

Anémie

CE QU’IL FAUT RETENIR

L’anémie est le trouble hématologique le plus fréquent durant le début et au cours de l’enfance.

Le terme anémie décrit un trouble hématologique caractérisé par une quantité de globules rouges (GR) ou une concentration d’hémoglobine (Hb) inférieure aux valeurs normales en fonction de l’âge. Cette situation diminue la capacité du sang à transporter de l’oxygène en quantité sufsante vers les tissus. L’anémie est le trouble hématologique le plus fréquent durant le début et au cours de l’enfance. Ce n’est pas une maladie en soi, mais une indication ou une manifestation d’un processus pathologique sous-jacent.

Classication Les anémies sont classées en fonction : 1) de leur cause ou de leur physiologie, se traduisant par une diminution du nombre d’érythrocytes (GR) ou du taux d’Hb ; 2) de la morphologie, des modications caractéristiques de la taille, de la forme ou de la couleur des GR ENCADRÉ 18.1. Bien que la classication morphologique soit plus utile pour l’analyse de l’anémie en laboratoire, l’approche étiologique permet d’orienter la planication des soins infirmiers. Par exemple, si l’anémie est accompagnée d’une concentration inférieure d’Hb, elle peut être causée par un épuisement des réserves de fer alimentaire, et la principale intervention consiste à rétablir ces réserves. La FIGURE 18.3 présente une classication des anémies.

Conséquences de l’anémie ENCADRÉ 18.1

Morphologie des globules rouges

TAILLE (GROSSEUR DES CELLULES) Variation de la taille des GR (anisocytose) • Normocytes (cellules de taille normale) • Microcytes (cellules de plus petite taille que la normale) • Macrocytes (cellules de taille supérieure à la normale) MORPHOLOGIE (FORME DES CELLULES) Variation de la forme des GR (poïkilocytose) • Sphérocytes (globules biconvexes ou sphériques)

894

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

• Drépanocytes (cellules falciformes) • Nombreuses autres cellules de forme irrégulière COULEUR (CARACTÉRISTIQUES DE LA COLORATION CELLULAIRE) Variation de la concentration en Hb dans les GR • Normochrome (quantité sufsante ou normale d’Hb par GR) • Hypochrome (quantité inférieure d’Hb par GR) • Hyperchrome (quantité accrue d’Hb par GR)

La principale conséquence physiologique de l’anémie est une diminution de la capacité de transport de l’oxygène du sang, laquelle entraîne une réduction de la quantité d’oxygène disponible pour les cellules. Lorsque l’anémie apparaît lentement, l’enfant s’adapte habituellement à la baisse des taux d’Hb (Inoue, 2015). Les effets de l’anémie sur le système circulatoire peuvent être sérieux. Étant donné que la viscosité du sang dépend presque totalement de la concentration de GR, l’hémodilution causée par une anémie grave diminue la résistance périphérique, ce qui augmente la quantité de sang retournant vers le cœur. La circulation et la turbulence accrues dans le cœur peuvent produire un soufe

Classication des anémies

cardiaque. À cause de la surcharge circulatoire importante imposée au cœur pendant un effort, une infection ou un stress émotionnel, une insufsance cardiaque peut survenir. Les enfants semblent avoir une capacité remarquable à bien fonctionner malgré de faibles taux d’Hb. La cyanose, qui résulte de la présence d’Hb désoxygénée dans le sang artériel, passe généralement inaperçue. Le retard de croissance, qui résulte d’un métabolisme cellulaire plus lent et d’une anorexie concomitante, est une observation courante dans les cas d’anémie chronique grave, et s’accompagne souvent d’un retard de la maturation sexuelle chez les enfants plus âgés.

Diagnostic En général, une anémie est suspectée sur la base des renseignements obtenus au cours de l’entrevue et de l’examen physique, tels que le manque d’énergie, la fatigabilité et la pâleur ; mais à moins que l’anémie soit grave, le premier indice peut être les modications de la FSC, comme une diminution des taux de GR, des taux d’Hb et de la valeur de l’hématocrite (Ht) FIGURE 18.3. L’anémie se produit lorsque la concentration d’hémoglobine se situe à moins de 2 écarts-types (−2ÉT) de la moyenne de distribution d’hémoglobine au sein d’une population autrement normale du même âge

et du même sexe. En général, l’anémie se dénit par un taux d’Hb inférieur à 110 g/L (Kawsari, Zlotkin, Parkin et al., 2011) ; cette valeur arbitraire ne convient toutefois pas à tous les enfants, car les taux d’Hb varient selon l’âge (valeurs normales selon l’âge indiquées dans l’annexe C). D’autres tests spéciques à des types précis d’anémie servent à en déterminer la cause sousjacente. Ils sont présentés dans le contexte de chaque anémie décrite dans ce chapitre.

Cyanose : Coloration bleutée de la peau, du lit unguéal et des muqueuses, causée par la présence d’hémoglobine désaturée dans les capillaires ; elle constitue un signe tardif d’hypoxie.

Approche thérapeutique Le premier objectif thérapeutique est d’inverser l’anémie en traitant la cause sous-jacente et de combler tout décit du sang en composants sanguins ou en substances dont le sang a besoin pour un fonctionnement normal. Ainsi, après une hémorragie, le sang ou les cellules sanguines sont remplacés ; dans les cas d’anémie nutritionnelle, les lacunes spéciques sont corrigées. Chez les enfants atteints d’anémie grave, les soins de soutien comprennent l’oxygénothérapie, l’alitement et le remplacement du volume intravas culaire par des liquides intraveineux. Le pronostic de l’anémie dépend de la correction de sa cause.

Chapitre 18

18

clinique

Jugement

FIGURE 18.3

Martin est âgé de quatre ans. Il souffre d’anémie. Sa mère, qui l’accompagne à la clinique de médecine familiale, vous dit que son ls est très fatigué. Comment pouvez-vous évaluer le degré de fatigue de Martin ?

Troubles liés aux systèmes hématologique et immunitaire

895

Soins inrmiers ANÉMIE

Reconnaître les manifestations cliniques de l’anémie ALERTE CLINIQUE

Les signes d’un effort trop exigeant à éviter comprennent la tachycardie, les palpitations, la tachypnée, la dyspnée, les essoufements, l’hyperpnée, le manque de soufe, les étourdissements, la sensation de tête légère, la diaphorèse et la décoloration de la peau. L’enfant a l’air fatigué (posture d’affaissement des membres ; mouvements lents et forcés ; incapacité à tolérer une activité additionnelle ; difculté à téter chez les nourrissons).

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les enfants atteints d’anémie sont sujets aux infections, car l’hypoxie tissulaire provoque un dysfonctionnement cellulaire qui affaiblit la défense du corps.

L’évaluation de l’anémie comprend des techniques de base applicables à n’importe quelle condition. L’âge de l’enfant fournit un indice sur l’étiologie possible de l’anémie. Par exemple, une anémie ferriprive survient plus souvent chez les jeunes enfants âgés de 12 à 36 mois et pendant les poussées de croissance à l’adolescence. L’origine ethnique de l’enfant est également signicative. Par exemple, les anémies liées à des taux anormaux d’Hb concernent particulièrement les Asiatiques originaires du Sud-Est et les personnes d’ascendance africaine ou méditerranéenne. Ces groupes d’individus peuvent souffrir d’un décit génétique en lactase après le début de l’enfance. Ces personnes sont incapables de tolérer le lactose dans l’alimentation, ce qui cause une irritation dans les intestins et provoque parfois des pertes sanguines chroniques. Une entrevue minutieuse aide à déterminer la cause d’une anémie. Par exemple, une déclaration telle que « Mon enfant boit beaucoup de lait » est une découverte fréquente chez les enfants atteints d’anémie ferriprive. Un épisode de diarrhée peut avoir précipité une intolérance temporaire au lactose chez un jeune enfant. Une recherche de sang occulte dans les selles peut mettre en évidence des saignements intestinaux chroniques qui résultent d’une décience en lactase primaire ou secondaire. Il est également important de comprendre l’importance de diverses analyses de sang TABLEAU 18.1 et annexe C.

Préparer l’enfant et la famille aux analyses de laboratoire éactivation des connaissances Nommez tous les éléments de la chaîne de l’infection.

14 Les prises d’échantillons de sang sont expliquées dans le chapitre 14, Techniques de soins.

Habituellement, plusieurs analyses de sang sont prescrites par l’équipe médicale lorsqu’une anémie est soupçonnée, mais puisque ces analyses sont généralement réalisées de manière séquentielle plutôt que ponctuelle, l’enfant est alors soumis à plusieurs ponctions capillaires, au doigt ou au talon, ou à plusieurs ponctions veineuses. Souvent, les techniciens de laboratoire ne sont pas conscients du traumatisme lié aux ponctions répétées chez un enfant. Cependant, ces interventions invasives ne doivent pas forcément être douloureuses 14 . Par exemple, l’application topique d’une crème anesthésiante avant l’insertion d’une aiguille permet d’éliminer la douleur. Par conséquent, l’inrmière est responsable de préparer l’enfant et la famille aux différentes analyses :

896

Partie 6

Troubles liés aux systèmes

• en expliquant la signication de chaque test, notamment en indiquant les raisons pour lesquelles les tests ne sont pas tous effectués en même temps ; • en encourageant les parents ou une autre personne à être présents avec l’enfant pendant l’intervention ; • en permettant à l’enfant de jouer avec l’équipement sur une poupée ou à participer à l’intervention en soi (p. ex., en lui demandant de nettoyer son doigt avec un tampon d’alcool) (da Silva, Pizzoli, Amorim et al., 2016).

Réduire les demandes excédentaires en oxygène Étant donné que le processus pathologique de base de l’anémie est une diminution de la capacité de transport de l’oxygène, une responsabilité importante du personnel infirmier est d’évaluer le niveau d’énergie de l’enfant et de réduire au minimum les demandes excédentaires en oxygène. L’inrmière évalue le niveau de tolérance de l’enfant en ce qui a trait aux activités de la vie quotidienne et au jeu ; elle effectue des ajustements pour favoriser un maximum d’autonomie en matière de soins de santé sans que cela exige trop d’efforts . Pendant les périodes de repos, l’inrmière mesure les signes vitaux et observe le comportement de l’enfant pour établir les dépenses énergétiques de base en l’absence d’effort. Pendant les périodes d’activité, elle effectue de nouveau ces mesures et ces observations pour les comparer avec les valeurs au repos.

Prévenir les complications Les enfants atteints d’anémie sont sujets aux infections, car l’hypoxie tissulaire provoque un dysfonctionnement cellulaire qui affaiblit la défense du corps. Étant donné que ces enfants sont sensibles aux infections, l’inrmière doit prendre toutes les précautions possibles pour prévenir leur exposition à des agents infectieux. Parmi celles-ci, les précautions habituelles s’imposent, comme l’hygiène minutieuse des mains, la sélection d’une salle adéquate dans une zone non infectieuse, l’interdiction de visite par des personnes ou des membres du personnel hospitalier atteints d’une infection active et le maintien d’une nutrition adéquate. L’inrmière vérie également la présence de signes d’infection, en particulier l’augmentation de la température et la leucocytose. Cependant, un nombre plus élevé de globules blancs se produit parfois dans l’anémie sans présence d’une infection systémique ou locale.

Anémie ferriprive L’anémie liée à un apport inadéquat en fer alimentaire est un trouble hématologique causé par une carence nutritionnelle. Les enfants de 6 à 36 mois présentent un risque d’anémie plus élevé lorsque le lait de vache devient la base de leur alimentation (Eussen, Alles, Uijterschout et al., 2015). La prévalence de l’anémie ferriprive chez les enfants canadiens est généralement faible (de 3,5 à 10,5 %). En revanche, celle des populations autochtones est très élevée (de 14 à 50 %) (Kawsari et al., 2011). Les enfants nés avant terme sont particulièrement exposés au risque d’anémie, étant donné leur approvisionnement fœtal moindre en fer et leur croissance rapide. Les adolescents présentent eux aussi un risque d’anémie en raison de leur taux de croissance rapide associé à de mauvaises habitudes alimentaires, de l’obésité, des menstruations et des exercices intenses.

Physiopathologie L’anémie ferriprive peut être causée par plusieurs facteurs qui diminuent l’approvisionnement en fer, nuisent à l’absorption du fer, augmentent les besoins de l’organisme en fer ou affectent la synthèse de l’Hb. Bien que les manifestations cliniques et l’évaluation initiale soient similaires quelle que soit la cause de l’anémie, l’approche thérapeutique de même que les traitements et les soins inrmiers dépendent de l’origine précise de la carence en fer. Cette section porte uniquement sur l’an