Pharmacologie des médicaments de la douleur, des pathologies inflammatoires, immunitaires et rhumatismales et de l'anesthésie 9782294766978, 9782294767463

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Pharmacologie des médicaments de la douleur, des pathologies inflammatoires, immunitaires et rhumatismales et de l'anesthésie
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Table of contents :
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Chapitre 1 - Médicaments de la douleur
Antalgiques non opioïdes
Principales molécules
Mécanisme d’action
Pharmacodynamie des effets utiles en clinique
Principales caractéristiques pharmacocinétiques
Absorption
Distribution
Métabolisme
Élimination
Sources de variabilité de la réponse
Interactions médicamenteuses
Réponse dans des situations pathologiques particulières
Réponse dans des situations physiologiques particulières
Effets indésirables
Contre-indications et précautions d’emploi
Rappels physiopathologiques et mode d’action
Médicaments existants
Propriétés pharmacologiques
Effets anti-inflammatoire, antalgique et antipyrétique
Effets gastro-intestinaux
Effets cardiovasculaires
Effets rénaux
Indications
Prévention des événements ischémiques artériels
Maladies musculosquelettiques
Douleur et fièvre
Formes locales
Pharmacocinétique
Contre-indications
Effets indésirables
Sources de variabilité de la réponse : interactions médicamenteuses
Surveillance des effets
Spécificité liée au terrain : grossesse
Documents de référence
Autres références
Antalgiques opioïdes
J. Wils, S. Cheriet-Wils, C. Boulay
Introduction
Physiopathologie de la douleur et les voies nociceptives (fig. 1.4)
Bases fondamentales et rationnel pharmacologique
Médicaments opioïdes
Classification des médicaments opioïdes
Médicaments opioïdes forts
Morphine
Autres médicaments opioïdes forts
Médicaments opioïdes faibles
Médicaments opioïdes agonistes partiels
Buprénorphine
Antagoniste
Nalbuphine
Naloxone
Pharmacocinétique utile en clinique
Absorption et distribution
Métabolisme (tableau 1.6)
Élimination
Interactions médicamenteuses
D’ordre pharmacocinétique
CYP2D6
UGT (UDP-glucuronosyltransférase)
Glycoprotéine P (P-gp)
D’ordre pharmacodynamique
Association à d’autres médicaments opioïdes agonistes
Médicaments avec des effets sérotoninergiques
Effets indésirables
Gastro-intestinaux
Respiratoires
Cardiovasculaires
Neuropsychiatriques
Urinaires
Prurit
Hyperalgésie induite par les médicaments opioïdes
Intoxications aux médicaments opioïdes
Syndrome sérotoninergique
Hypoglycémie
Règles générales de prescription (tableau 1.7)
Titration des médicaments opioïdes
Équivalence entre les médicaments antalgiques opioïdes (tableau 1.8)
Spécificités liées au terrain
Enfant
Insuffisants rénaux
Foetus et nouveau-né
Mésusage, abus et pharmacodépendance aux médicaments opioïdes
Documents de référence
Autres références
Chapitre 2 - Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales
Glucocorticoïdes
A. Petitcollin, B. Laviolle
Rappels physiologiques
Relation structure-activité et formulations
Puissance et équipotence des anti-inflammatoires stéroïdiens
Mécanisme d’action
Pharmacodynamie : effets utiles en cliniques
Principales caractéristiques pharmacocinétiques
Absorption
Distribution
Métabolisme
Excrétion
Pharmacocinétique des glucocorticoïdes inhalés et en pulvérisation nasale
Pharmacocinétique des dermocorticoïdes
Sources de variabilité de la réponse
Effets indésirables
Contre-indications
Sources de variabilité de la réponse : interactions médicamenteuses
Surveillance des effets
Posologie et mode d’administration
Détournement
Documents de référence
Médicaments spécifiques des maladies inflammatoires systémiques
M. Caucat, F. Despas
Principales molécules et mécanisme d’action des différentes molécules
Méthotrexate
Cyclophosphamide
Propriétés pharmacologiques
Principales caractéristiques pharmacocinétiques
Indications
Effets indésirables
Sources de variabilité de la réponse : interactions médicamenteuses
Spécificités liées au terrain : grossesse et allaitement
Contre-inications
Mécanisme d’action et indications des différents médicaments
Principales caractéristiques pharmacocinétiques
Effets indésirables
Source de variabilité de la réponse : interactions médicamenteuses
Spécificités liées au terrain : grossesse et allaitement
Contre-indications
Mécanisme d’action
Propriétés pharmacologiques
Indications
Principales caractéristiques pharmacocinétiques
Effets indésirables
Source de la variabilité de la réponse : interactions médicamenteuses
Spécificités liées au terrain : grossesse et allaitement
Contre-indications
Mécanisme d’action
Propriétés pharmacologiques
Principales caractéristiques pharmacocinétiques
Indications
Effets indésirables
Source de la variabilité de la réponse : interactions médicamenteuses
Spécificités liées au terrain : grossesse et allaitement
Contre-indications
Mécanisme d’action
Principales caractéristiques pharmacocinétiques
Indications
Effets indésirables
Sources de variabilité de la réponse : interactions médicamenteuses
Spécificités liées au terrain : grossesse et allaitement
Contre-indications
Documents de référence
Médicaments de la goutte
B. Revol, J.-L. Cracowski
Rappel physiopathologique
Principaux médicaments
Mécanismes d’action
Effets utiles en clinique
Médicaments de la crise
Hypouricémiants
Médicaments uricosuriques
Principales caractéristiques pharmacocinétiques
Sources de variabilité de la réponse
Colchicine
Canakinumab
Allopurinol
Fébuxostat
Probénécide
Spécificités liées au terrain
Colchicine
Allopurinol
Fébuxostat
Probénécide
Effets indésirables
Colchicine
Canakinumab
Allopurinol
Fébuxostat
Probénécide
Contre-indications
Surveillance des effets
Bénéfices
Risques
Documents de référence
Médicaments de l’ostéoporose
C. Khouri, J.-L. Cracowski
Rappel physiopathologique
Principales molécules
Mécanismes d’action des différentes molécules
Effets utiles en clinique
Principales caractéristiques pharmacocinétiques
Sources de variabilité de la réponse
Effets indésirables
Surveillance des effets
Calcium et vitamine D
M. Lepelley, J.-L. Cracowski
Rappel physiopathologique
Principales molécules
Mécanismes d’action des différentes molécules
Effets utiles en clinique
Principales caractéristiques pharmacocinétiques
Sources de variabilité de la réponse : interactions médicamenteuses
Spécificités liées au terrain
Grossesse, allaitement
Sujet âgé
Couleur de la peau
Effets indésirables
Contre-indications
Surveillance des effets
Documents de référence
Chapitre 3 - Médicaments du rejet de greffe
Rappels physiopathologiques
Les différents types de rejets
Les quatre signaux de la réaction immunitaire
Mécanisme d’action des immunosuppresseurs
Immunosuppresseurs chimiques
Inhibiteurs de la calcineurine
Glucocorticoïdes
Inhibiteurs de mTOR
Antimétabolites
Immunosuppresseurs biologiques
Protéine de fusion
Anticorps monoclonaux
Anticorps polyclonaux
Indications des immunosuppresseurs
Principales caractéristiques pharmacocinétiques
Sources de variabilité de la réponse
Effets indésirables
Contre-indications
Surveillance des effets
Documents de référence
Chapitre 4 - Anesthésiques généraux
Anesthésie générale
Pharmacocinétique
Anesthésiques inhalés
Desflurane
Sévoflurane
Protoxyde d’azote
Anesthésiques intraveineux
Propofol
Thiopental
Kétamine
Étomidate
Midazolam
Dexmédétomidine
Fentanyloïdes (fentanyl, alfentanil, sufentanil, rémifentanil)
Pharmacodynamie
Anesthésiques inhalés
Effets indésirables
Anesthésiques inhalés
Desflurane
Sévoflurane
Protoxyde d’azote
Principales indications (exemples)
Propofol
Étomidate
Thiopental
Kétamine
Midazolam
Curares
Curare dépolarisant
Curares non dépolarisants
Rocuronium
Atracurium/cisatracurium
Spécificités liées au terrain
Sujet âgé
Obèse
Insuffisant rénal chronique
Insuffisant hépatocellulaire
Documents de référence

Citation preview

Pharmacologie des médicaments de la douleur, des pathologies inflammatoires, immunitaires et rhumatismales et de l’anesthésie Société française de pharmacologie et de thérapeutique Collège national de pharmacologie médicale Coordonné par Pr. Jérémy Bellien

Elsevier Masson SAS, 65, rue Camille-Desmoulins, 92442 Issy-les-Moulineaux cedex, France Pharmacologie des médicaments de la douleur, des pathologies inflammatoires, immunitaires et rhumatismales et de l’anesthésie, par la Société française de pharmacologie et de thérapeutique et le Collège national de pharmacologie médicale. © 2020 Elsevier Masson SAS ISBN : 978-2-294-76697-8 e-ISBN : 978-2-294-76746-3 Tous droits réservés. Les praticiens et chercheurs doivent toujours se baser sur leur propre expérience et connaissances pour évaluer et utiliser toute information, méthodes, composés ou expériences décrits ici. Du fait de l’avancement rapide des sciences médicales, en particulier, une vérification indépendante des diagnostics et dosages des médicaments doit être effectuée. Dans toute la mesure permise par la loi, Elsevier, les auteurs, collaborateurs ou autres contributeurs déclinent toute responsabilité pour ce qui concerne la traduction ou pour tout préjudice et/ou dommages aux personnes ou aux biens, que cela résulte de la responsabilité du fait des produits, d’une négligence ou autre, ou de l’utilisation ou de l’application de toutes les méthodes, les produits, les instructions ou les idées contenus dans la présente publication. Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction par tous procédés, réservés pour tous pays. Toute reproduction ou représentation intégrale ou partielle, par quelque procédé que ce soit, des pages publiées dans le présent ouvrage, faite sans l’autorisation de l’éditeur est illicite et constitue une contrefaçon. Seules sont autorisées, d’une part, les reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, les courtes citations justifiées par le caractère scientifique ou d’information de l’œuvre dans laquelle elles sont incorporées (art. L. 122-4, L. 122-5 et L. 335-2 du Code de la propriété intellectuelle).

Les figures 2.11, 2.13, 2.14 et 3.1 ont été réalisées par Carole Fumat. Ce logo a pour objet d’alerter le lecteur sur la menace que représente pour l’avenir de l’écrit, tout particulièrement dans le domaine universitaire, le développement massif du « photocopillage ». Cette pratique qui s’est généralisée, notamment dans les établissements d’enseignement, provoque une baisse brutale des achats de livres, au point que la possibilité même pour les auteurs de créer des œuvres nouvelles et de les faire éditer correctement est aujourd’hui menacée. Nous rappelons donc que la reproduction et la vente sans autorisation, ainsi que le recel, sont passibles de poursuites. Les demandes d’autorisation de photocopier doivent être adressées à l’éditeur ou au Centre français d’exploitation du droit de copie : 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris. Tél. 01 44 07 47 70.

Les auteurs Ouvrage rédigé sous l’égide de la Société française de pharmacologie et de thérapeutique (SFPT) et du Collège national de pharmacologie médicale (CNPM).

Coordonnateur Bellien Jérémy, Pharm D, Ph D, PU-PH, Service de Pharmacologie, Unité INSERM U1096 Université de Rouen Normandie, CHU-Hôpitaux de Rouen.

Liste des collaborateurs Abbara Chadi, Pharm D, Ph D, PA, Service de Pharmacologie-Toxicologie et Pharmacovigilance, CHU d’Angers, Université d’Angers. Barau Caroline, Pharm D, Ph D, MCU-PH, INSERM U 955 et Plateforme de Ressources Biologiques, Faculté de Santé et APHP, Hôpitaux Universitaires Henri Mondor, Créteil. Boulay Charlène, Pharm D, PHC, Service de Pharmacologie, CHU-Hôpitaux de Rouen. Briet Marie, MD, Ph D, PU-PH, Service de Pharmacologie-Toxicologie et Pharmacovigilance, CHU d’Angers, Université d’Angers. Caucat Marie, Interne en Pharmacie, Pharmacologie Médicale et Clinique, Faculté de Médecine, CHU de Toulouse. Cazaubon Yoann, PharmD, PhD, PHC, Laboratoire de Pharmacologie et toxicologie, CHU de Reims. Cheriet-Wils Sarah, MD, Orthopédie/Traumatologie/Rhumatologie, CRMPR Les Herbiers, UGECAM Normandie, Bois-Guillaume.

Coffinet Julien, MD, CCA, Pôle URAD Urgences-Réanimation-Anesthésie-Douleur, CHU de Reims. Cracowski Jean-Luc, MD, Ph D, PU-PH, Centre Régional de Pharmacovigilance, Centre d’Evaluation et d’Information sur la Pharmacodépendance et d’Addictovigilance, Université de Grenoble Alpes. Despas Fabien, Pharm D, Ph D, MCU-PH, Pharmacologie Médicale et Clinique, Faculté de Médecine, CHU de Toulouse. Djerada Zoubir, PharmD, PhD, MCU-PH, Laboratoire de Pharmacologie et toxicologie, CHU de Reims. Feliu Catherine, PharmD, PhD, PHU, Laboratoire de Pharmacologie et toxicologie, CHU de Reims. Feliu Catherine, PharmD, PhD, PHU, Laboratoire de Pharmacologie et toxicologie, CHU de Reims. Ghaleh Bijan, Pharm D, Ph D, PU-PH, INSERM U 955 et Plateforme de Ressources Biologiques, Faculté de Santé et APHP, Hôpitaux Universitaires Henri Mondor, Créteil. Hulin Anne, Pharm D, Ph D, PH, Laboratoire de Pharmacologie, APHP, Hôpitaux Universitaires Henri Mondor, Créteil. Khouri Charles, Pharm D, Ph D, PH, Centre Régional de Pharmacovigilance de Grenoble, Université de Grenoble Alpes. Laviolle Bruno MD, Ph D, PU-PH, Service de pharmacologie clinique, CHU de Rennes, Université de Rennes 1. Lepelley Marion, Pharm D, PH, Centre Régional de Pharmacovigilance de Grenoble, Université de Grenoble Alpes.

VIII

Les auteurs

Malinovsky Jean-Marc, MD, Ph D, PU-PH, Pôle URAD Urgences-Réanimation-Anesthésie-Douleur, CHU de Reims. Petitcollin Antoine, Pharm D, Ph D, AHU, Service de pharmacologie, Centre d’investigation clinique Inserm 1414, CHU de Rennes, Université de Rennes 1. Poingt Emmanuelle, Interne en Pharmacie, Unité de Pharmacologie clinique, Inserm CIC 1406, Université de Grenoble Alpes, CHU de Grenoble Alpes. Pressiat Claire, Pharm D, Ph D, AHU, INSERM U 955 et Laboratoire de Pharmacologie, Faculté de Santé et APHP, Hôpitaux Universitaires Henri Mondor, Créteil.

Revol Bruno, Pharm D, PH, Centre Régional de Pharmacovigilance, Centre d’Evaluation et d’Information sur la Pharmacodépendance et d’Addictovigilance, Université de Grenoble Alpes. Roustit Matthieu, Pharm D, Ph D, MCU-PH, Unité de Pharmacologie clinique, Inserm CIC 1406, Université de Grenoble Alpes, CHU de. Grenoble Alpes. Wils Julien, MD, Ph D, MCU-PH, Service de Pharmacologie, Unité INSERM U1096, Université de Rouen Normandie, CHU-Hôpitaux de Rouen.

Tableau synoptique Classe médicamenteuse

Médicaments

Grandes indications

Chapitre

Paracétamol

Antalgique, antipyrétique

Médicaments de la douleur

AINS

Aspirine

Antalgique, antipyrétique, antiagrégant plaquettaire

Médicaments de la douleur

AINS

Acide tiaprofénique Acéclofénac Alminoprofène Dexkétoprofène Diclofénac Étodolac Fénoprofène Flurbiprofène Ibuprofène Kétoprofène Nabumétone Naproxène Acide méfénamique Acide niflumique Morniflumate Célécoxib Étoricoxib Parécoxib Méloxicam Piroxicam Ténoxicam Indométacine Sulindac

Antalgiques, antipyrétiques, anti-inflammatoires

Médicaments de la douleur (+ goutte pour l’ibuprofène, le naproxène)

Opioïdes

Codéine Tramadol Fentanyl Hydromorphone Morphine Oxycodone

Antalgiques

Médicaments de la douleur (+ anesthésiques généraux)

Glucocorticoïdes

Hydrocortisone Cortisone Prednisone Prednisolone Méthylprednisolone Triamcinolone Bétaméthasone Dexaméthasone Béclométasone Budésonide Fluticasone Mométasone Ciclésonide

Anti-inflammatoires (et immunosuppresseurs utilisés dans la prévention du rejet de greffe)

Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales Médicaments du rejet de greffe



X 

Tableau synoptique

Classe médicamenteuse

Médicaments

Grandes indications Immunosuppresseurs utilisés dans la prise en charge de certaines maladies auto-immunes notamment la polyarthrite rhumatoïde

Chapitre

Antimétabolites

Méthotrexate

Agents alkylants

Cyclophosphamide

Immunosuppresseurs sélectifs

Léflunomide

Acide aminosalicylique et analogues

Sulfasalazine

Anti-inflammatoire utilisé dans la Médicaments des maladies prise en charge de la polyarthrite inflammatoires systémiques, rhumatoïde et de la maladie auto-immunes et rhumatismales de Crohn

Amino-4 quinoléines

Hydroxychloroquine

Anti-inflammatoire, antalgique utilisé dans la prise en charge de la polyarthrite rhumatoïde et certains lupus

Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales

Anticytokines

Adalimumab Golimumab Infliximab Étanercept Certolizumab pégol Abatacept Sarilumab Tocilizumab Anakinra Sécukinumab Ixékizumab Brodalumab Alemtuzumab Guselkumab Ustékinumab

Immunomodulateurs, anti-inflammatoires utilisés dans la prise en charge des maladies auto-immunes

Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales

Colchicine

Antigoutteux par un effet anti-inflammatoire

Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales

Canakinumab

Antigoutteux par un effet immunomodulateur et anti-inflammatoire

Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales

Inhibiteurs de la synthèse de l’acide urique

Allopurinol Fébuxostat

Antigoutteux

Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales

Uricosuriques

Probénécide Benzbromarone

Antigoutteux

Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales

Uricolytiques

Rasburicase

Antigoutteux

Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales

Biphosphonates

Acide alendronique Acide risédronique Acide zolendronique

Ostéoporose

Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales

Inhibiteurs du RANK ligand

Dénosumab

Ostéoporose

Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales

Modulateurs sélectifs des récepteurs aux œstrogènes (SERM)

Raloxifène Bazédoxifène

Ostéoporose et troubles climatériques

Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales

Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales





Classe médicamenteuse

Tableau synoptique XI

Médicaments

Grandes indications

Chapitre

Œstrogènes

Œstradiol et combinaisons

Ostéoporose et troubles climatériques

Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales

Analogues de la parathormone

Tériparatide

Ostéoporose

Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales

Sels de calcium

Calcium carbonate Calcium chlorure Calcium gluconate Calcium gluconolactate

Carences calciques

Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales

Vitamine D et analogues

Vitamine D2 ou ergocalciférol Vitamine D3 ou cholécalciférol Calcidiol Calcitriol ou 1,25-dihydroxycholécalciférol Alfacalcidol ou 1-hydroxycholécalciférol

Carences vitaminiques D, rachitisme ou hypoparathyroïdie

Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales

Inhibiteurs de la calcineurine

Ciclosporine Tacrolimus

Antimétabolites

Azathioprine Acide mycophénolique

Protéines de fusion

Bélatacept

Médicaments du rejet de greffe

Inhibiteurs de mTOR

Évérolimus Sirolimus

Immunosuppresseurs utilisés pour prévenir les rejets de greffe

Anticorps monoclonaux

Basiliximab

Anticorps polyclonaux

Sérum anti-lymphocytaire

Agents anesthésiques inhalés

Sévoflurane Desflurane Protoxyde d’azote

Anesthésie générale

Anesthésiques généraux

Anesthésiques intraveineux

Kétamine Midazolam Propofol Thiopental Dexmédétomidine Alfentanil Sufentanil Rémifentanil

Anesthésie générale

Anesthésiques généraux

Abréviations AcM ACTH ADCC AHAI AINOC

anticorps monoclonal adrenocorticotrophic hormone antibody-dependent cell-mediated cytotoxicity anémie hémolytique auto-immune anesthésie inhalée à objectif de concentration AINS anti-inflammatoire non stéroïdien AIS anti-inflammatoire stéroïdien AIVOC anesthésie intraveineuse à objectif de concentration ANI analgesia/nociception index ANSM Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé ATU autorisation temporaire d’utilisation AUC area under the curve AVC accident vasculaire cérébral BIS bispectral index ou index bispectral BPCO bronchopneumopathie chronique obstructive CAM concentration alvéolaire minimale CBG corticosteroid binding globulin CDC complement-dependent cytotoxicity CEIP centre d’évaluation et d’information sur la pharmacodépendance Cmax concentration maximale COX cyclo-oxygénase CRF corticotrophin releasing factor CRP C réactive protein ou protéine-C réactive DE dose efficace DFG débit de filtration glomérulaire DHFR dihydrofolate réductase DHODH dihydro-orotate déshydrogénase DL dose létale DRESS Drug rash with eosinophilia and systemic symptoms DS déviation standard EEG électroencéphalogramme EMA European Medicines Agency ou Agence européenne des médicaments GC glucocorticoïde FA fraction alvéolaire FDA Food and Drug Administration FGF fibroblast growth factor

Fi fraction inspirée G-CSF granulocyte colony stimulating factor GM-CSF granulocyte-macrophage colony-stimulating factor G6PD glucose-6-phosphate déshydrogénase GR glucocorticoid receptor GRE glucocorticoid response element HAS Haute Aurorité de santé HLA human leukocyte antigen ou antigène des leucocytes humains HSP heat shock protein HTA hypertension artérielle HTAP hypertension artérielle pulmonaire ICAM intercellular adhesion molecule IDM infarctus du myocarde IgG immunoglobuline de type G IM intramusculaire IMPDH inosine monophosphatase déshydrogénase INR international normalized ratio IPP inhibiteur de la pompe à protons IV intraveineuse LI libération immédiate LP libération prolongée MICI maladie inflammatoire chronique de l’intestin NAPQI N-acétyl-p-benzoquinone imine NFAT nuclear factor of activated T-cells NFS numération-formule sanguine NO monoxyde d’azote OAT organic anion transporter OPG ostéoprotégérine PDGF platelet-derived growth factor PEG polyéthylène glycol PGHS prostaglandine G/H synthase P-gp glycoprotéine P PLA2 phospholipase A2 POX peroxydase PR polyarthrite rhumatoïde PTH parathyroïd hormone ou hormone parathyroïdienne ou parathormone PTHrP parathormon related protein RANK receptor activator of nuclear factor-kB ligand

XIV

Abréviations

RCF reduced folate carrier RCH rectocolite chronique hémorragique RCP résumé des caractéristiques du produit RRA relative receptor affinity SC sous-cutané SEP sclérose en plaques SERM selective estrogen receptor modulator SFETD Société française d’évaluation et de traitement de la douleur SNC système nerveux central SNE système nerveux entérique SPA spondylarthrite ankylosante SSPI salle de surveillance post-interventionnelle

STP TCI TCR TLR Tmax TPMT TXA2 UGD UMP VCAM VEGF VIH

suivi thérapeutique pharmacologique target controlled infusion T cell receptor ou récepteur des cellules T toll like receptor temps d’atteinte de la concentration maximale thiopurine méthyltransférase thromboxane A2 ulcère gastroduodénal uridine monophosphate vascular cell adhesion molecule vascular endothelial growth factor virus de l’immunodéficience humaine

Chapitre 1 Médicaments de la douleur Antalgiques non opioïdes Paracétamol

les deux noms officiels du même composé, le Nacétyl-para-aminophénol (fig. 1.1). Plusieurs formulations sont disponibles incluant les comprimés effervescents ou non, gélules, poudres, solutions buvables, les suppositoires et les préparations intraveineuses.

M. Briet, C. Abbara Synthèse Le paracétamol est un antalgique non opiacé dérivé du para-aminophénol. Son mécanisme d’action n’est pas complètement établi. Le paracétamol agirait principalement en inhibant les cyclo-oxygénases. Il est antalgique et antipyrétique mais n’a pas (ou peu) de propriété anti-inflammatoire ou antiagrégante. Le paracétamol est principalement métabolisé par le foie par glucuro- et sulfoconjugaison. Une fraction minime est métabolisée en un composé hautement réactif le N-acétyl p-benzoquinone-imine (NAPQI) principalement par le CYP2E1. En situation de déficit en glutathion (septicémie, malnutrition, jeûne, amaigrisse­ ment  récent, éthylisme chronique, hépatite virale chronique, VIH, mucoviscidose, maladie de Gilbert), et/ou de surdosage, l’accumulation de NAPQI est responsable de la toxicité hépatique. Le paracétamol présente une balance bénéfice/risque excellente lors de son utilisation à dose thérapeutique adaptée à la situation clinique du patient. Il convient d’informer le patient de l’importance du respect de la posologie maximale, en le prévenant du risque de toxicité hépatique en cas de surdosage.

Principales molécules Le paracétamol (dénomination internationale utilisée en Europe) et l’acétaminophène (dénomination utilisée en Amérique du Nord) sont Pharmacologie des médicaments de la douleur © 2020 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mécanisme d’action Le paracétamol est un antalgique non opiacé, dérivé du para-aminophénol. Son mécanisme d’action antalgique et antipyrétique du paracétamol n’est pas complètement établi. Le paracétamol agirait principalement en inhibant les cyclo-oxygénases (COX). Les COX catalysent la conversion de l’acide arachidonique en prostanoïdes et autres médiateurs impliqués dans l’inflammation, la douleur et la régulation thermique. La COX-1 est exprimée constitutionnelle­ ment et intervient majoritairement dans des processus de régulation physiologique alors que la COX-2 est inductible et produit des prostaglandines dans des conditions d’infection et d’inflammation. Toutefois, la COX-2 est également exprimée de façon constitutive dans certaines cellules du rein et du système nerveux central. Les COX sont des enzymes bifonctionnelles avec une activité cyclo-oxygénase et une activité péroxydase. L’activité cyclo-oxygénase permet l’oxydation de l’acide arachidonique en prostaglandine G2 (PGG2). La PGG2 est secondairement métabolisée, par l’activité peroxydase, en PGH2 qui sera ensuite convertie en prostanoïdes. Le paracétamol agit principalement sur la COX-2. Toutefois, en présence de faibles taux d’acide arachidonique, le paracétamol exerce aussi une action inhibitrice sur la COX-1.

2

Pharmacologie des médicaments de la douleur

Fig. 1.1. Structure chimique du paracétamol. Le paracétamol a été découvert au cours de la recherche de dérivés de l’acétanilide qui auraient des propriétés antalgiques et antipyrétiques avec une toxicité moindre. Deux composés ont été identifiés, la phénacétine, retirée du marché en raison de sa toxicité rénale et le paracétamol. La commercialisation du paracétamol a débuté en 1955 aux États-Unis et deux ans plus tard en France.

Contrairement aux anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), le paracétamol n’a pas (ou peu) d’effet anti-inflammatoire. Ceci serait dû au fait que le paracétamol est un inhibiteur faible des COX en présence de concentrations élevées en peroxydes telles que retrouvées dans les lésions inflammatoires. L’action du paracétamol est à la fois centrale et périphérique. D’autres mécanismes d’action du paracétamol ont été évoqués. L’effet antalgique du paracétamol pourrait impliquer les voies sérotoninergiques descendantes. Les neurones sérotoninergiques sont majoritairement originaires des noyaux du raphé

situés dans le tronc cérébral et descendent dans le cordon spinal où ils forment des synapses avec les neurones afférents entrant dans la moelle épinière. Ces neurones exercent un effet inhibiteur sur le signal de douleur entrant avant qu’il ne soit transmis au système nerveux central. Le paracétamol n’a pas d’affinité pour les récepteurs de la sérotonine (5-HT) et n’interfère pas avec son système de recapture. Son implication dans ce système serait indirecte. Un autre mécanisme d’action impliquant les récepteurs cannabinoïdes CB1 est aussi évoqué. Le paracétamol ne se lie pas directement aux récepteurs cannabinoïdes mais activerait

le système endocannabinoïde indirectement soit en augmentant la synthèse d’endocannabinoïdes soit en agissant comme une prodrogue. D’autres mécanismes d’action impliquant le système cholinergique, noradrénergique, le glutamate, la substance P et le monoxyde d’azote (NO) ont été suggérés mais restent à confirmer.

Pharmacodynamie des effets utiles en clinique Le paracétamol est un antalgique de palier 1. Il a également un effet antipyrétique par action au niveau de l’hypothalamus. Le paracétamol n’a pas, ou peu, d’effet antiinflammatoire ou sur l’agrégation plaquettaire. C’est ce qui le distingue majoritairement des AINS.

Principales caractéristiques pharmacocinétiques Absorption • Après administration par voie orale, l’absorption est rapide et quasi totale au niveau de l’intestin grêle. Les concentrations plasmatiques maximales sont atteintes en moyenne entre 30 et 60 minutes après ingestion. La biodisponibilité du paracétamol est de 88 %. • La concentration maximale moyenne après administration d’une dose de paracétamol de 20  mg/kg par voie orale est de 20  µg/ml et le temps pour atteindre cette concentration maximale (Tmax) de 0,33 heure en moyenne. • Par voie rectale, l’absorption est plus lente et quasi-totale. Les concentrations plasmatiques maximales sont atteintes entre 2 à 3  heures après administration.

Distribution Le paracétamol est peu lié aux protéines plasmatiques. La distribution se fait rapidement dans tous les tissus. Le volume apparent de distribution de 0,8 l/kg.

Chapitre 1. Médicaments de la douleur 3

Le paracétamol traverse la barrière hématoencéphalique. Dans un modèle expérimental de rat, après administration de 0,6  mg de paracétamol par voie intraveineuse, les concentrations mesurées dans le cerveau sont égales à 10-20  % des concentrations plasmatiques.

Métabolisme Le paracétamol est métabolisé principalement au niveau du foie par glucuroconjugaison et par sulfoconjugaison. La sulfoconjugaison est saturable aux posologies supérieures aux doses thérapeutiques. Une fraction minime (5 à 8  %) est métabolisée par les cytochromes P450 (isoforme CYP2E1 majoritairement, et CYP1A2 et CYP3A4 accessoire­ ment).  Cette voie mène à la formation d’un composé électrophile hautement réactif et toxique : le N-acétyl p-benzoquinone-imine (NAPQI). Ce composé est rapidement détoxifié par le glutathion réduit et éliminé dans les urines après conjugaison à la cystéine et à l’acide mercaptopurique. Ce processus de détoxification est saturé en cas d’intoxication massive conduisant à l’augmentation de la concentration de ce métabolite toxique.

Élimination L’élimination est principalement urinaire majoritaire­ ment sous une forme glucoroconjuguée (60 à 80  %) et sulfoconjuguée (20 à 30  %). Moins de 5  % de la dose ingérée est éliminée sous forme inchangée. La demi-vie d’élimination est de 2 à 3 heures.

Sources de variabilité de la réponse Interactions médicamenteuses • Warfarine : le paracétamol augmenterait l’activité anticoagulante de la warfarine et des autres coumarines, en particulier en cas d’utilisation quotidienne prolongée (au moins 4 jours). Ceci justifie un contrôle rapproché de l’INR pendant le traitement par paracétamol et à l’arrêt.

4

Pharmacologie des médicaments de la douleur

• Médicaments interagissant avec la voie métabolique hépatique du paracétamol : – la rifampicine, les barbituriques, la carbamazépine, la phénytoïne, le phénobarbital, la primidone et le millepertuis peuvent augmenter la toxicité hépatique du paracétamol en raison d’une augmentation de la production de son métabolite hépatotoxique ; – le probénécide inhibe la conjugaison avec l’acide glucuronique réduisant ainsi d’un facteur deux la clairance du paracétamol ; – l’administration concomitante d’isoniazide augmente potentiellement la toxicité du paracétamol. • Flucloxacilline  : l’administration conjointe de flucloxacilline et de paracétamol expose à un risque d’acidose métabolique. Ceci est plus particulièrement observé chez les patients présentant un risque de déficit en glutathion.

Réponse dans des situations pathologiques particulières • Éthylisme chronique  : une augmentation du risque hépatique est observée en cas d’intoxication éthylique chronique. La consommation d’alcool est déconseillée pendant le traitement. Le risque est également majoré en cas de sevrage récent. • Hépatite virale aiguë : il n’est pas recommandé d’administrer du paracétamol dans cette situation clinique. • Insuffisance rénale chronique  : en raison de l’élimination rénale majoritaire, il est recommandé d’espacer les doses. L’intervalle entre deux prises doit être au minimum de 8 heures. • Risque de déficit en glutathion  : la posologie journalière ne doit pas dépasser 3 grammes par jour dans les situations de risque de déficit en glutathion (septicémie, malnutrition, jeûne, amaigrissement récent, éthylisme chronique, hépatite virale chronique, VIH, mucoviscidose, maladie de Gilbert).

Réponse dans des situations physiologiques particulières • Grossesse  : le paracétamol franchit la barrière placentaire mais n’a pas d’effet tératogène ni

fœtotoxique. Il peut être utilisé au cours de la grossesse. • Allaitement  : les quantités de paracétamol excrétées dans le lait maternel sont inférieures à 2 % de la dose ingérée. Le paracétamol peut être utilisé pendant l’allaitement.

Effets indésirables Le paracétamol présente une balance bénéfice/ risque excellente lors de son utilisation à dose thérapeutique. Le risque majeur se situe dans les situations de surdosage volontaire ou non avec la survenue d’une nécrose hépatique centrolobulaire potentiellement responsable d’une insuffisance hépatocellulaire. Comme précisé ci-dessus, le paracétamol est métabolisé au niveau hépatique principalement en métabolites inactifs éliminés par voie urinaire. Une faible fraction subit une Nhydroxylation pour former un métabolite toxique, le NAPQI. Cette fraction toxique est normalement rapidement inactivée par le glutathion réduit et éliminée par voie urinaire. En cas de surdosage ou de déplétion en glutathion, le NAPQI s’accumule et forme des liaisons covalentes avec les macromolécules hépatocytaires. Ceci conduit à des dommages structurels et métaboliques du foie. La phase initiale de l’intoxication au paracétamol est asymptomatique ou pauci-symptomatique avec des nausées, une anorexie et des douleurs abdominales. Une élévation des transaminases est observée au bout de quelques heures. L’évolution peut se faire vers l’insuffisance hépatocellulaire aiguë, le coma hépatique et le décès. La prise en charge se fait en service d’urgence, le plus précocement possible et s’appuie sur l’administration de charbon activé (au cours de la première heure) et de N-acétylcystéine. La paracétamolémie à la quatrième heure post-ingestion, quand l’heure d’administration est connue, permet l’ajustement du traitement par la N-acétylcystéine. Des cas d’acidose métabolique, soit lactique soit pyroglutamique, ont également été décrits. L’acidose pyroglutamique est plus particulièrement observée au cours des prises chroniques de paracétamol chez des patients de sexe féminin, et exposés aux facteurs de risque de déplétion en glutathion.



Chapitre 1. Médicaments de la douleur 5

La survenue d’une insuffisance rénale aiguë peut être observée. Trois mécanismes principaux ont été évoqués, une atteinte toxique par sollicitation du CYP2E1 rénal et l’accumulation de NAPQI, une atteinte rénale secondaire à l’atteinte hépatique dans un contexte de syndrome hépatorénal, et une atteinte de type immunoallergique. Les autres effets indésirables décrits, avec une fréquence exceptionnelle sont les suivants  : éruption cutanée, hypersensibilité, choc anaphylactique, œdème de Quincke, thrombopénie, leucopénie, agranulocytose, bronchospasme, syndrome de Kounis.

Contre-indications et précautions d’emploi Le paracétamol est contre-indiqué chez les patients présentant une hypersensibilité à cette molécule, et chez les patients présentant une insuffisance hépatocellulaire sévère. Le paracétamol est à utiliser avec précaution, sans dépasser 3 grammes par jour dans les situations suivantes  : poids   1 000 µg/j

Béclométasone 1 µm

100-200 µg/j

> 200-400 µg/j

> 400 µg/j

Budésonide

200-400 µg/j

400-800 µg/j

> 800 µg/j

Fluticasone

100-250 µg/j

250-500 µg/j

> 500 µg/j

Mométasone

100-200 µg/j

> 200-400 µg/j

> 400 µg/j

Ciclésonide

80-160 µg/j

> 160-320 µg/j

> 320 µg/j

Source : site du Collège national de pharmacologie médicale : Pharmacomédicale.org (pharmacomedicale.org/).

Chapitre 2. Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales 29

de la sécrétion d’IL-1ra (antagoniste du récepteur à l’IL-1). • La lipocortine 1 inhibe la phospholipase A2, à l’origine de la synthèse de l’acide arachidonique à partir des phospholipides membranaires. L’acide arachidonique est un précurseur des leucotriènes et des prostaglandines impliqués dans les processus inflammatoires. • Enfin, IkB est un facteur cytosolique séquestrant NFkB hors du noyau (voir infra). La liaison aux nGRE entraîne, entre autres : • une inhibition de la transcription de la cyclooxygénase de type  2 (COX-2), responsable de la synthèse des prostaglandines à partir de l’acide arachidonique ; • une réduction de la synthèse de nombreuses cytokines pro-inflammatoires  : IL-1, TNFα, IL-6, etc. ; • une inhibition de la synthèse des chimiokines et des molécules d’adhésion, qui résulte en une réduction du recrutement des cellules immunitaires et de leur infiltration dans les tissus. Les effets transcriptionnels indirects, qui n’impliquent pas la fixation du complexe GC-récepteur directement sur l’ADN, sont désignés sous le nom de trans-répression (par opposition aux effets transcriptionnels directs de cis-répression). La transrépression résulte d’interactions entre le complexe GC-récepteur et des facteurs de transcription nucléaires tels que NFkB ou AP-1. • NFkB régule la synthèse de nombreuses cytokines et est le principal responsable de l’activation des cellules phagocytaires, acteurs centraux de la réaction inflammatoire. Le complexe GCrécepteur inhibe l’action de NFkB en se fixant à la sous-unité p65, ce qui bloque les effets protranscriptionnels de NFkB. Les GC augmentent également par transactivation la synthèse de la protéine chaperonne de NFkB, appelée IkB. L’augmentation de la synthèse d’IkB empêche la translocation de NFkB dans le noyau. • La protéine activatrice 1 (AP-1) est responsable de la transcription de nombreux gènes impliqués dans la réaction immunitaire et l’inflammation, comme des cytokines et des facteurs de croissance. La transrépression de NFkB et d’AP-1 serait à l’origine de la plupart des effets thérapeutiques

des GC. L’action génomique des GC explique que leur effet soit prolongé dans le temps, mais ce mécanisme implique un délai d’action qui n’est pas observé en pratique. L’existence d’effets rapides démontre que les GC ont également des effets non génomiques, qui passeraient par la libération des protéines chaperonnes du GR, l’interaction avec des récepteurs membranaires spécifiques (mGR) et avec la membrane elle-même. Par exemple, à forte concentration, les CG s’intercalent dans la membrane cellulaire et perturbent les flux sodiques et calciques  ; de plus, ils perturbent la production d’ATP en provoquant une fuite de protons au niveau de la membrane mitochondriale. Ces effets expliqueraient une partie des effets immunosuppresseurs rapides observés suite à l’administration de fortes doses de GC.

Pharmacodynamie : effets utiles en cliniques Les trois principaux effets recherchés des GC en clinique sont : • les effets anti-inflammatoires. Les GC réduisent les signes cardinaux de l’inflammation (œdème, rougeur, douleur, chaleur). Ces effets découlent de la réduction de la perméabilité capillaire et de la synthèse des chimiokines et des molécules d’adhésion, qui réduisent l’infiltration tissulaire par les cellules immunitaires, et de l’inhibition de la synthèse de cytokines pro-inflammatoires en général. Selon les spécialités, la localisation de l’inflammation et son importance, on peut recourir à des traitements systémiques (administration per os ou parentérale) ou localisés (infiltrations articulaires, topiques cutanés, suppositoires, etc.). Les indications sont très nombreuses : infections (ORL, pneumopathies, méningites), inflammations nerveuses (paralysie a frigore), œdème cérébral, choc septique, maladies inflammatoires chroniques (MICI, SEP, PR, SPA, maladie de Horton, vascularites), arthrites inflammatoires, tendinites, bursites, talalgie, etc. ; • les effets antiallergiques. Les GC réduisent les symptômes liés à l’hypersensibilité. Ils sont indiqués en inhalation pour traiter le bronchospasme

30

Pharmacologie des médicaments de la douleur

et en traitement de fond de l’asthme sévère. Par voie systémique, on les utilise pour les atteintes généralisées (urticaire diffuse) ou le traitement de fond de l’asthme. Parfois, ils peuvent être utilisés en complément d’une thérapeutique d’urgence par adrénaline dans le choc anaphylactique et des antihistaminiques H1 dans l’œdème de Quincke. On les utilise également en topique pour les réactions d’hypersensibilité cutanée ; • les effets immunosuppresseurs. Ils découlent du blocage, à haute dose, de la synthèse des cytokines comme l’IL-1, l’IL-6 et le TNFα. Les indications sont partiellement redondantes avec celles des effets anti-inflammatoires lorsque l’inflammation est la conséquence d’une réaction auto-immune. Les principales indications sont la prévention et le traitement du rejet aigu suite à une transplantation et les maladies autoimmunes (AHAI, maladies inflammatoires chroniques, syndrome néphrotique, par exemple). D’autres effets sont recherchés dans des indications spécifiques : • les effets antiémétiques suite à une chimiothérapie anticancéreuse ; • en supplémentation dans la prévention de l’insuffisance surrénalienne (décroissance de corticothérapie au long cours, chirurgie) et dans l’hyperplasie des surrénales. Pour les traite­ ments substitutifs, l’utilisation de l’hormone naturelle (hydrocortisone) est indispensable ; • hypercalcémie lorsqu’elle est due à une hypervitaminose D ; • activation de la synthèse du surfactant pulmonaire chez le nouveau-né prématuré (traitement de la maladie des membranes hyalines) ; • traitement des cicatrices chéloïdes.

Principales caractéristiques pharmacocinétiques Absorption Par voie orale, les GC sont généralement bien absorbés quelle que soit leur formulation. La biodisponibilité est de l’ordre de 75 à 100 %. La glycoprotéine  P (P-gp) et d’autres transporteurs

seraient impliqués dans l’absorption intestinale des GC. Les esters sont rapidement hydrolysés dans le tube digestif, libérant la forme base (ou forme « alcool » en référence à la fonction hydroxyle en C21) qui est rapidement absorbée. Certaines formes chimiques, notamment les acétonides, ont une biodisponibilité faible (  20  mg/j. La liaison aux protéines passe de 95  % à 60-70  %, et le volume de distribution augmente en conséquence de 40 à 100 litres environ pour des doses quotidiennes jusqu’à 20  mg/j et à 100  mg/j respectivement. La demi-vie est allongée de 30 % environ, passant de 3 à 4 heures. Les autres GC sont liés à l’albumine, qui assure un transport de faible affinité mais de capacité élevée, non saturable. Globalement, la liaison à l’albumine des GC de synthèse est donc plus faible, de l’ordre de 75-85  %, contre 95  % de liaison à la

Chapitre 2. Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales 31

CBG pour l’hydrocortisone et la prednisolone. Le volume de distribution avoisine les 1-3 litres par kg de poids corporel.

Métabolisme Les GC sont fortement métabolisés dans les tissus en composés inactifs. Les réactions de phase I sont principalement des réductions de la double liaison en C4-C5 et des fonctions cétones en C3 et C20. Les hydroxylations en C2 et C6 sont possibles. Sur les dérivés synthétiques, la double liaison en C1-2, la présence d’un halogène en C9 (fluor sur les fluocorticoïdes comme la dexaméthasone ou la fluticasone, chlore sur la mométasone et la béclométasone), un groupement méthyle en C16, ou encore la formation d’un cycle en C16 et C17 (acétonide de triamcinolone, flunisolide, ciclésonide, budésonide, mométasone) retardent le métabolisme et prolongent la demi-vie (fig.  2.3). Certaines réactions de phase I sont catalysées par le CYP3A4, déterminant quelques interactions pharmacocinétiques décrites notamment pour la méthylprednisolone et la dexaméthasone (voir infra). Il existe également une réaction d’hydroxylation réversible en C11, qui permet de contrôler l’activité intracellulaire des GC. Cette réaction est réalisée par la 11β-hydroxystéroïde déshydrogénase (11βHSD). Deux versions de cette enzyme existent : • le type  1 (11β-HSD1), distribué de façon ubiquitaire dans les tissus cibles des GC, et fortement présent dans le foie, catalyse la réduction (formation d’un hydroxyle) en C11 qui permet la liaison au récepteur des GC  ; cette enzyme permet la conversion intracellulaire de la cortisone inactive en cortisol actif, et la transformation de la prednisone inactive en prednisolone ;

Fig. 2.3. Structure des principaux GC inhalés.

• le type 2 (11β-HSD2), présent surtout dans les tissus cibles de l’aldostérone, qui catalyse l’oxydation (formation d’une cétone) en C11 et inhibe ainsi la liaison des GC au récepteur des minéralocorticoïdes. Il permet de limiter l’action minéralocorticoïde du cortisol en favorisant la formation de cortisone. Une partie de l’activité minéralocorticoïde non désirée des GC pourrait provenir de la saturation de la 11β-HSD2  et/ou d’une affinité moindre envers certains GC de synthèse. Les réactions de phase  II sont principalement des glycuroconjugaisons, et marginalement des sulfoconjugaisons, qui permettent d’augmenter l’hydrosolubilité des métabolites.

Excrétion Par voie générale, une faible fraction de la dose est retrouvée sous forme inchangée dans les urines (1-20 %). L’élimination est principalement rénale, sous forme de métabolites. Il peut exister un cycle entérohépatique donnant lieu à un second pic plasmatique ; cela a été décrit avec la dexaméthasone par exemple. La demi-vie plasmatique est généralement faible, de 1 à 5 heures selon les molécules. Il existe cependant une dissociation entre la demi-vie plasmatique et la demi-vie biologique (durée des effets). La demi-vie biologique est plus longue que la demi-vie d’élimination plasmatique, car l’action génomique des GC entraîne des effets qui se prolongent au-delà de la disparition du GC de l’organisme (tableau 2.3). La durée des effets utiles en clinique peut être fortement prolongée, jusqu’à plusieurs semaines, par l’utilisation de formes retard (esters liposolubles administrés en IM ou en intra-articulaire par exemple).

32

Pharmacologie des médicaments de la douleur

Tableau 2.3. Demi-vie et durée d’action des principaux glucocorticoïdes. Glucocorticoïdes

Demi-vie plasmatique (min)

Demi-vie biologique (h)

Cortisol

90

10

Prednisone

200

18-36

Dexaméthasone

300

35-54

Triamcinolone



1 à 6 semaines

Source : site du Collège national de pharmacologie médicale : Pharmacomédicale. org (pharmacomedicale.org/).

Pharmacocinétique des glucocorticoïdes inhalés et en pulvérisation nasale Suite à l’inhalation, 10 à 60 % de la dose est déposée dans les poumons. Les GC se dissolvent dans le liquide bronchoalvéolaire et agissent directement sur les cellules pulmonaires, après hydrolyse des esters par les estérases pulmonaires et passage des membranes cellulaires. La biodisponibilité systémique résulte de deux phénomènes : • l’absorption in situ des AIS déposés dans le poumon ; • les 40-90 % de la dose administrée qui ne sont pas inhalés sont déposés dans l’oropharynx et

peuvent être avalés puis résorbés dans le tractus digestif. L’existence pour la plupart des corticoïdes inhalés d’un fort effet de premier passage hépatique fait que la biodisponibilité totale est faible. Pour les plus récents (mométasone et ciclésonide), la liaison aux protéines plasmatiques est très forte, et la fraction biologiquement active, capable de diffuser dans les cellules au niveau systémique est très faible. La combinaison d’une faible résorption pulmonaire et digestive et d’une forte liaison aux protéines plasmatiques permet de limiter les effets systémiques. Les prodrogues estérifiées en C21 sont avantageuses, car elles ne sont pas hydrolysées dans l’oropharynx et donc ne provoquent pas d’effets locaux (risque infectieux notamment) puisqu’elles restent inactives. L’activité des AIS inhalés est mesurée par leur affinité de liaison au récepteur des GC, comparativement à la dexaméthasone qui est prise comme étalon. On parle d’affinité relative de liaison ou RRA (relative receptor affinity). Le RAA de la dexaméthasone est de 100. Les principales propriétés pharmacocinétiques des GC inhalés sont résumées dans le tableau 2.4. L’élimination des GC inhalés se fait majoritairement dans les selles, sous forme de métabolites inactifs issus du métabolisme hépatique et de

Tableau 2.4. Principales propriétés pharmacocinétiques des glucocorticoïdes inhalés. Molécule

RRA

CL (l/h)

Vd (l)

LPP

t1/2 (h)

Forale ( % )

Finh ( % )

Flunisolide

180

58

96

80

1,5-1,6

20

39

Triamcinolone acétonide

164-233

37

103

71

1,5-2,0

23

22

Béclométasone dipropionate*

53

230

33-66

87

0,1-0,2

 20 mg/semaine

Déconseillée

Diminution de son élimination

MTX : méthotrexate ; DHFR : dihydrofolate réductase.

Chapitre 2. Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales 41

Il présente également des interactions pharmacocinétiques à cause de son métabolisme par certaines isoenzymes des CYP450. Les associations avec les inhibiteurs enzymatiques et inducteurs enzymatiques sont à prendre en compte puisqu’elles peuvent faire varier les concentrations en cyclophosphamide et majorer sa toxicité ou diminuer son efficacité.

Il existe aussi des contre-indications propres au méthotrexate et au cyclophosphamide, qui sont listées tableau 2.9. Tableau 2.9. Contre-indications à la prise de méthotrexate et de cyclophosphamide. Médicament Méthotrexate

– Insuffisance rénale et/ou atteinte hépatique sévères – En association avec le probénécide, le triméthoprime, la phénylbutazone, l’acide acétylsalicylique utilisé à doses antalgiques, antipyrétiques ou anti-inflammatoires lorsque le méthotrexate est utilisé à des doses supérieures à 20 mg/semaine – Insuffisance respiratoire chronique

Cyclophosphamide

– Insuffisance médullaire sévère – Infection urinaire aiguë, cystite hémorragique préexistante – Obstruction des voies urinaires

Spécificités liées au terrain : grossesse et allaitement Le cyclophosphamide et le méthotrexate sont tératogènes, et ils ont un potentiel mutagène et génotoxique. Les femmes ne doivent pas débuter de grossesse et les hommes ne doivent pas concevoir pendant le traitement par ces médicaments. Une contraception efficace est nécessaire pour les patients des deux sexes en période d’activité génitale, et chez les femmes en âge de procréer, l’absence de grossesse doit être vérifiée avant l’administration de cyclophosphamide ou de méthotrexate dans les indications non oncologiques. Le cyclophosphamide et le méthotrexate passent dans le lait maternel, et peuvent entraîner une toxicité chez le nouveau-né allaité. L’allaitement est donc contre-indiqué. Le cyclophosphamide peut être à l’origine d’une stérilité pour les deux sexes. Le méthotrexate peut diminuer la fertilité, mais ses effets semblent être réversibles après l’arrêt du traitement à faibles doses.

Contre-inications Le cyclophosphamide et le méthotrexate sont tous les deux contre-indiqués en cas d’hypersensibilité à la substance active ou à un excipient, en association au vaccin contre la fièvre jaune, en cas de grossesse et d’allaitement, et chez les femmes et hommes en âge de procréer et n’utilisant pas de méthode de contraception efficace.

Contre-indications

Anticytokines Synthèse Les anticytokines sont des médicaments de type anticorps ou bien fragments d’anticorps. Ils visent à capter les médiateurs libérés ou bien à antagoniser leurs récepteurs. En bloquant cette voie physiologique, l’engagement de la réponse immunitaire sera ainsi déprimé. Ils sont ainsi utilisés dans la prise en charge de nombreuses maladies auto-immunes.

Mécanisme d’action et indications des différents médicaments Ces dernières années, beaucoup de médica­ ments biologiques spécifiquement dirigés contre des cytokines ou bien contre leurs récepteurs ont été développés. La plupart sont des anticorps monoclonaux (AcM) avec une indication dans une ou plusieurs pathologies auto-immunes. Les principaux sont présentés dans le tableau 2.10, ainsi que leur mécanisme d’action et leurs indications. Les anticorps monoclonaux possèdent pour la plupart une

Cibles

Médicament

Structure

AcM chimérique, IgG1

Idem Adalimumab

Idem Adalimumab

Protéine de fusion : récepteur p75 du TNF couplé au domaine Fc d’une IgG1 humaine

L’étanercept peut neutraliser le TNF libre ou membranaire. Comparativement aux autres anti-TNF, l’étanercept ne provoque pas de lyse des cellules produisant du TNF. Il inhibe également la lymphotoxine α, autre cytokine pro-inflammatoire

Polyarthrite rhumatoïde R, rhumatisme psoriasique, psoriasis, arthrite juvénile idiopathique, spondylarthrite axiale

Fragment Fab’ d’un anticorps humanisé couplé au polyéthylène glycol (PEG)

Le PEG augmente la demi-vie du fragment Fab’. Le certolizumab pégol fixe et neutralise le TNF soluble et transmembranaire. N’ayant pas de fragment Fc, il ne peut pas activer la CDC ni l’ADCC. La présence du PEG permet d’éviter le passage de la barrière placentaire et dans le lait maternel

Polyarthrite rhumatoïde, rhumatisme psoriasique, psoriasis, spondylarthrite axiale

Abatacept

Protéine de fusion composée du domaine extracellulaire de l’antigène 4 cytotoxique associé au lymphocyte T (CTLA-4) lié à une partie Fc modifiée d’IgG1

Abatacept est une protéine de fusion qui inhibe le signal de costimulation CD80/86 nécessaire à l’activation des lymphocytes T exprimant le CD28. Il inhibe donc l’activation des lymphocytes T, et diminue la synthèse de TNFα, d’IL-6, de récepteur soluble à l’IL-2

Polyarthrite rhumatoïde rhumatisme psoriasique, arthrite juvénile idiopathique

Sarilumab

AcM humain IgG1

Inhibe la transmission du signal médié par l’IL-6 : inhibition des effets de l’IL-6, notamment la migration et l’activation des cellules T, B, monocytes et ostéoclastes entraînant une inflammation et une érosion osseuse

Polyarthrite rhumatoïde

C’est un inhibiteur compétitif de la liaison de l’IL-1α et l’IL-1β au récepteur IL-1R qui va inhiber l’activité biologique de l’interleukine 1. L’IL-1 est une cytokine pro-inflammatoire majeure intervenant dans la médiation de nombreuses réponses cellulaires, notamment celles jouant un rôle important dans l’inflammation synoviale

Polyarthrite rhumatoïde

Étanercept

Certolizumab pégol

Tocilizumab

Anakinra

AcM humanisé IgG1 Protéine recombinante analogue de l’antagoniste endogène du récepteur à l’IL-1 (IL-1Ra)

Pharmacologie des médicaments de la douleur

Polyarthrite rhumatoïde, spondylarthrite ankylosante, Psoriasis, maladie de Crohn, rectocolite hémorragique, arthrite juvénile idiopathique

TNFα

Récepteur de l’IL-1

Indications

Empêche l’interaction du TNFα avec ses récepteurs p55 et p75 situés à la surface de la membrane cellulaire, qui aurait permis l’activation de la voie NF-kB avec synthèse de cytokines pro-inflammatoires. La cascade inflammatoire est ainsi bloquée : diminution de l’expression de molécules d’adhésion diminuant ainsi le processus de diapédèse, et de recrutements de macrophages, lymphocytes et neutrophiles

Infliximab

Récepteurs solubles et membranaires de l’IL-6

Mécanisme d’action

AcM humain IgG1, Adalimumab, golimumab

CD80/CD86

42

Tableau 2.10. Structures, mécanisme d’action et principales indications des anticytokines.

Polyarthrite rhumatoïde, arthrite juvénile idiopathique

x

Cibles

Médicament

Structure AcM humain, IgG1

IL-17A

Sécukinumab

IL-17A et IL-17F

Ixékizumab

CD52

IL-23

Sous-unité p40 commune à l’IL-12 et IL-23

Psoriasis, rhumatismes psoriasiques, spondylarthrite ankylosante

AcM humanisé, IgG1

L’alemtuzumab se lie à l’antigène CD52 présent en grandes quantités à la surface des LT et des LB. Il provoque ainsi une lyse des lymphocytes en exerçant de l’ADCC et de la CDC. Ainsi, une déplétion lymphocytaire survient, ce qui modifie le nombre de lymphocytes T régulateurs, T et B mémoires. Cette déplétion permettrait de réduire le risque des poussées

Sclérose en plaques

AcM humain, IgG1

L’IL-23, une cytokine régulatrice, agit sur la différentiation, l’expansion et la survie de certaines sous-populations de lymphocytes T et de certaines sous-populations de cellules de l’immunité innée, qui représentent des sources de cytokines effectrices, comprenant l’IL-17A, l’IL-17F et l’IL-22 impliquées dans l’inflammation. Le guselkumab inhibe la bioactivité de l’IL-23 en bloquant son interaction avec son récepteur. Ainsi, la production des cytokines pro-inflammatoires médiée par l’IL-23 est diminuée

Psoriasis

AcM humain, IgG1

L’IL-12 et l’IL-23 sont deux cytokines pro-inflammatoires dérégulées lors des épisodes psoriasiques. L’ustékinumab limite les effets pro-inflammatoires en inhibant leur interaction avec leur récepteur : diminution de l’activation des cellules NK et des LT

Psoriasis, maladie de Crohn

AcM humanisé, IgG4

Brodalumab

Alemtuzumab

Guselkumab

Ustékinumab

Indications

Le brodalumab bloque l’activité biologique de l’IL-17A, IL-17F et hétérodimère IL-17A/F. Le sécukinumab bloque celle de l’IL-17A et l’ixékizumab celle de l’IL-17A et de l’IL17-F. On a rapporté une augmentation des concentrations de cytokines de la famille IL-17 en cas de psoriasis, elles sont impliquées dans la pathogenèse du psoriasis en favorisant la prolifération et l’activation des kératinocytes. L’IL-17A, l’IL-17F et l’hétérodimère IL-17A/F ont des activités pléiotropiques, notamment l’induction de médiateurs pro-inflammatoires tels que l’IL-6, le GROα et le G-CSF dans les cellules épithéliales, endothéliales et les fibroblastes, qui favorisent l’inflammation tissulaire. L’inhibition induite par les anticorps monoclonaux normalise l’inflammation cutanée

AcM humain, IgG2 IL-17RA, sous-partie des récepteurs de l’IL-17

Mécanisme d’action

Psoriasis, rhumatismes psoriasiques Psoriasis

Chapitre 2. Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales 43

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Pharmacologie des médicaments de la douleur

région constante Fc humaine, effectrice pour des fonctions cellulaires telles la cytotoxicité dépendante des anticorps (ADCC) et/ou celle dépendante du complément (CDC). Ils possèdent également une région de reconnaissance antigénique Fab, dont la proportion en régions murines est variable  : pour les anciens AcM, elle est totale (infliximab, AcM chimérique), pour les plus récents elle est absente (adalimumab, AcM humain) et pour d’autres elle est partielle (tocilizumab, AcM humanisé).

Principales caractéristiques pharmacocinétiques Les données de pharmacocinétique des anticorps monoclonaux sont complexes et encore mal connues. Le devenir de l’AcM dans l’organisme dépend de sa distribution et de son élimination. Ces paramètres sont influencés par la structure de l’AcM (Fab ou présence d’une portion de Fc humaine), l’expression du récepteur néonatal de la portion Fc (FcRn) qui permet la protection des AcM, la fixation des AcM sur leur antigène cible… Leur élimination peut suivre une pharmacocinétique linéaire ou non. Au final, ces médicaments restent des protéines et sont métabolisés par hydrolyse peptidique, ce qui est peu susceptible de donner lieu à des interactions médicamenteuses d’ordre pharmacocinétique. Les demi-vies d’élimination plasmatique peuvent varier de 4-5  jours pour l’alemtuzumab à plus de 2  semaines pour l’ustékinumab. Elles conditionnent les schémas d’administration. L’anakinra présente une demi-vie d’élimination de 4 à 6 heures, avec une élimination principalement rénale.

Effets indésirables Tableau 2.11. Principaux effets indésirables des anticytokines. Médicament

Effets indésirables

Anti-TNFα (infliximab, étanercept, golimumab, adalimumab, certolizumab pégol)

– Effets liés à l’immunosuppression qu’ils induisent, communs aux autres immunodépresseurs : - diminution de la résistance aux infections, notamment pulmonaires et urinaires - risque d’infection généralisée suite à une vaccination par un vaccin vivant, et diminution de l’efficacité des vaccinations par diminution de la réponse en anticorps - augmentation de la fréquence des cancers, notamment des lymphomes - syndromes inflammatoires de reconstitution après arrêt brusque des immunodépresseurs – Troubles auto-immuns : anticorps anti-nucléaires et syndromes lupiques, aggravation de maladies démyélinisantes (sclérose en plaques, neuropathies optiques), maladies inflammatoires de l’intestin, psoriasis… – Insuffisance cardiaque – Atteintes hématologiques : agranulocytose, thrombocytopénies, anémies… – Réactions à l’injection : l’infliximab administré par voie intraveineuse est à l’origine de réactions aiguës pendant la perfusion (fièvre, prurit, hypo-/ hypertensions artérielles, douleurs thoraciques) et retardées plusieurs jours après (myalgies, arthralgies, fièvre) ; les autres anti-TNFα administrés par voie sous-cutanée causent des réactions aux sites d’injection – Troubles cardiovasculaires avec le golimumab via un effet dirigé contre le VEGF, avec un effet anti-angiogénique – Réactions d’hypersensibilité avec l’apparition d’anticorps anti-infliximab, anti-étanercept, anti-adalimumab… Ces anticorps apparaissent davantage avec les anticorps chimériques qui sont davantage immunogènes, et sont associés avec une augmentation de l’hypersensibilité et un échappement thérapeutique

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Chapitre 2. Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales 45

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Médicament Abatacept

Effets indésirables – Kératoconjonctivites – Psoriasis – Vascularites – + Effets communs aux immunodépresseurs : diminution de la résistance aux infections, risque accru de cancer,…

Tocilizumab, sarilumab

– Effets communs aux immunodépresseurs identiques à ceux des anti-TNFα – Atteintes hépatiques – Neutropénies, thrombocytopénies – Hémorragies digestives ; perforations digestives liées à des complications de diverticulites – Hypercholestérolémies

Anakinra

– Nausées, douleurs abdominales, diarrhées et céphalées – Diminution de la résistance aux infections – Atteintes hématologiques : neutropénies ; augmentation de la fréquence des lymphomes – Réactions aux sites d’injection : érythèmes, ecchymoses, douleurs ; hypersensibilités ; anticorps anti-anakinra

Sécukinumab, ixékinumab

– Effets communs aux immunodépresseurs identiques à ceux des anti-TNFα – Neutropénies – Exacerbations de maladie de Crohn ou de rectocolite hémorragique – Allergies dont anaphylaxie et angiœdèmes

Alemtuzumab

– Effets communs aux immunosuppresseurs identiques à ceux des anti-TNFα – Troubles auto-immuns : purpura thrombopénique, néphropathies, cytopénies, troubles thyroïdiens : hypothyroïdies, hyperthyroïdies, maladie de Basedow – Hypocalcémies – Anxiétés, dépression…

Ustékinumab

– Effets communs aux immunodépresseurs identiques à ceux des anti-TNFα – Allergies dont des réactions anaphylactiques graves – Troubles neuropsychiques : vertiges, céphalées, dépressions – Troubles cardiovasculaires dont des syndromes coronariens aigus (infarctus du myocarde) et des AVC…

Source de variabilité de la réponse : interactions médicamenteuses Comme vu précédemment, la pharmacocinétique des anticorps monoclonaux et des protéines de fusion n’est pas concernée par les cytochromes, il y a donc peu d’interactions d’ordre pharmacocinétique. Le tocilizumab et le sarilumab font exception : ils influencent l’activité des CYP450. En effet, les cytokines telle l’IL-6, diminuent l’activité des isoenzymes du cytochrome P450. Les deux anticorps restaurent l’activité des cytochromes, par leur effet inhibiteur de l’IL-6. À l’instauration ou à l’arrêt des deux anti-IL-6, les concentrations plasmatiques des médicaments à marge thérapeutique étroite métabolisés par les cytochromes (warfarine, théophylline…) sont modifiées  ; une surveillance accrue est donc recommandée. Les interactions d’ordre pharmacodynamique concernent essentiellement l’addition du risque immunodépresseur et le risque d’infection.

Spécificités liées au terrain : grossesse et allaitement Ces médicaments anticytokines sont récents et l’on ne dispose pas de recul suffisant concernant leur utilisation chez la femme enceinte. Aussi, le principe de précaution est appliqué : les femmes enceintes ne doivent être traitées qu’en cas de réelle nécessité. Une contraception est donc préconisée pendant la durée du traitement et jusqu’à 6 mois après l’arrêt du médicament (en fonction de la demi-vie). Les anticorps monoclonaux franchissent le filtre placentaire, comme les autres anticorps maternels, surtout au 3e  trimestre de grossesse. Les anti-TNFα peuvent donc affecter les réponses immunitaires normales du nouveau-né et induire une immunodépression à la naissance. Il est donc conseillé d’attendre environ 6  mois après

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Pharmacologie des médicaments de la douleur

la dernière exposition intra-utérine à un de ces médicaments, avant d’administrer un vaccin vivant au nouveau-né. Il est recommandé une surveillance rapprochée des paramètres thyroïdiens d’une femme enceinte traitée par alemtuzumab, par crainte des effets délétères sur le fœtus d’une hypothyroïdie non traitée (augmentation du risque de fausse couche, nanisme et retard mental). Concernant l’allaitement, là encore les données sont trop limitées. Les IgG1 et 2 sont naturellement excrétées dans le lait maternel, il est donc possible que les AcM le soient aussi. Par principe de précaution, l’allaitement n’est donc pas recommandé sauf si le bénéfice pour le nouveau-né est supérieur au risque induit par l’exposition au médicament.

Contre-indications Ces médicaments anticytokines ont peu de contre-indications, dont deux en commun  : hypersensibilité à la substance active ou à l’un des excipients et en cas d’une infection sévère et active. Concernant les anti-TNFα, ils sont également contre-indiqués chez les sujets souffrant d’insuffisance cardiaque modérée à sévère,

Fig. 2.7. Transformation du léflunomide en tériflunomide.

suite à des études montrant des effets délétères de l’infliximab chez ces patients. L’étanercept n’est pas concerné par cette contre-indication. L’anakinra expose à des atteintes hématologiques, notamment sur la lignée des neutrophiles  : il est donc contre-indiqué en cas de neutropénie préexistante. Le brodalumab ne doit pas être utilisé chez les sujets atteints de maladie de Crohn active et l’alemtuzumab chez les patients infectés par le VIH.

Léflunomide Synthèse Le léflunomide et son métabolite, le tériflunomide, bloquent la synthèse des constituants de l’ADN, cependant des voies alternes permettent de contrer ces effets aboutissant à des propriétés cytostatiques et non cytotoxiques comme observées avec d’autres médicaments anticancéreux au mécanisme d’action comparable.

Mécanisme d’action Les effets pharmacologiques du léflunomide sont principalement associés à son métabolite le tériflunomide (A771726) (fig.  2.7) qui inhibe la

Chapitre 2. Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales 47

dihydro-orotate déshydrogénase (DHODH). Cette enzyme est nécessaire pour la synthèse de novo d’uridine monophosphate (UMP), précurseur des nucléotides pyrimidiques dans les cellules en cours de division cellulaire (dont les lymphocytes activés). L’inhibition de la DHODH conduit à une diminution de la synthèse d’ADN et d’ARN, limitant ainsi la prolifération cellulaire. Cependant, le léflunomide a une action cytostatique et non pas cytotoxique car les lymphocytes au repos ainsi que de nombreux autres types cellulaires ont recours à une autre voie, dite voie de sauvetage, pour la synthèse des bases pyrimidiques. Expliquant ainsi un profil d’effets indésirables plus avantageux du léflunomide par rapport à d’autres médicaments de mécanisme d’action comparable et utilisés comme anticancéreux.

Propriétés pharmacologiques À posologie plus élevée, le léflunomide inhibe les protéines kinases responsables de la transduction du signal initial permettant le passage de la phase de repos G0 à la phase G1 du cycle cellulaire. Cependant, il est constaté des effets immunomodulateurs du léflunomide à des concentrations ne permettant que l’inhibition de la DHODH et pas des protéines kinases, mais le blocage de la synthèse de novo des bases pyrimidiques reste décrit comme le mécanisme d’action principal. D’autres mécanismes expliquant ses effets modulateurs ont été montrés  : l’inhibition de l’activation de NF-kB, de la production de radicaux oxygénés, de l’activation des cyclo-oxygénases, de la production des IgM et IgG.

Indications Du fait de ses propriétés immunosuppressives et anti-inflammatoires, le léflunomide présente une indication dans la prise en charge de la polyarthrite rhumatoïde en tant que traitement de fond, ainsi que dans le rhumatisme psoriasique actif. Il est prescrit en première intention lorsque

le méthotrexate est contre-indiqué, au même titre que la sulfasalazine.

Principales caractéristiques pharmacocinétiques Le léflunomide est rapidement transformé en un métabolite actif : le tériflunomide. Ce métabolite est responsable de la majeure partie de l’activité in vivo du léflunomide. La pharmacocinétique du léflunomide est linéaire pour les doses de charge et les posologies d’entretien. Les effets cliniques sont étroitement liés aux concentrations plasmatiques en tériflunomide. La biodisponibilité de ce médicament est d’environ 80  %, sans influence notable de l’alimentation. Le tériflunomide est fortement lié aux protéines (à l’albumine en particulier). Les voies de biotransformation du léflunomide et de son métabolite font intervenir les isoenzymes suivantes : CYP1A2, 2C19 et 3A4. Le métabolite actif présente une longue demi-vie estimée à 2  semaines avec la description d’un cycle entérohépatique. De ce fait, une dose de charge est réalisée (100  mg par jour pendant 3  jours) afin d’atteindre rapidement une concentration moyenne d’équilibre cible. Les métabolites inactifs sont retrouvés à proportions à peu près égales dans les fèces et dans l’urine.

Effets indésirables Les principaux effets indésirables du léflunomide sont ceux communs aux immunodépresseurs : diminution de la résistance aux infections ; diminution de l’efficacité des vaccinations par diminution de la réponse en anticorps et risque d’infection généralisée suite à une vaccination par un vaccin vivant  ; augmentation de la fréquence des cancers, notamment des lymphomes. Le léflunomide peut aussi être à l’origine d’autres effets potentiellement graves obligeant à une surveillance régulière des paramètres biologiques  : des leucopénies, agranulocytoses ainsi que des atteintes hépatiques. Le risque est majoré en

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Pharmacologie des médicaments de la douleur

cas d’administration récente ou concomitante de médicaments hépatotoxiques et hématotoxiques. Le léflunomide est aussi responsable d’effets plus communs comme des hypertensions artérielles, des troubles digestifs  ; ou d’effets plus rares et graves comme des réactions d’hypersensibilité, syndromes de Stevens-Johnson, érythèmes multiformes, syndromes de Lyell, vascularites  ; des pneumopathies interstitielles, des neuropathies périphériques… Lorsqu’un effet indésirable grave survient, même après l’arrêt du traitement par léflunomide, il est recommandé d’observer une période de washout afin de permettre l’élimination totale du tériflunomide de l’organisme. Le processus d’élimination peut être accéléré en administrant par voie orale du charbon activé ou de la cholestyramine afin de limiter le cycle entérohépatique observé pour ce médicament.

Source de la variabilité de la réponse : interactions médicamenteuses Des interactions pharmacodynamiques peuvent survenir lors d’une administration récente ou concomitante de produits connus pour des effets hépatotoxiques ou hématotoxiques. Une surveillance des enzymes hépatiques et des paramètres hématologiques est recommandée. L’association aux vaccins vivants atténués est déconseillée à cause du risque d’infection généralisée, favorisé par l’immunosuppression des patients. Le léflunomide et le tériflunomide sont à risque d’interactions d’ordre pharmacocinétique, avec notamment des effets inhibiteurs des CYP2C8/9 et des transporteurs OAT3, BRCP et OATP1B1/ b3 et des effets inducteurs des CYP1A2. Une surveillance est donc nécessaire lors de l’association aux cosubstrats de ces enzymes. Concernant les effets des autres médicaments sur le léflunomide, la colestyramine et le charbon activé entraînent une baisse rapide et significative des concentrations plasmatiques du médicament et de son métabolite. Par contre, l’association avec des inhibiteurs enzymatiques ne semble pas

avoir d’impact significatif sur les taux de tériflunomide.

Spécificités liées au terrain : grossesse et allaitement Le tériflunomide est tératogène chez les rats et les lapins et pourrait entraîner des lésions fatales chez le fœtus humain. Il est donc contre-indiqué chez les femmes enceintes. Les femmes en âge de procréer doivent utiliser une méthode de contraception fiable pendant le traitement et jusqu’à la diminution des concentrations plasmatiques audessous de 0,02 mg/l. Il est nécessaire d’observer une période de washout jusqu’à 2  ans du fait de la longue demi-vie du métabolite. Afin de réduire cette période, il est possible d’administrer du charbon activé ou bien de la cholestyramine. Avant d’initier un traitement par léflunomide, il est nécessaire de s’assurer de l’absence de grossesse en cours. Lors des études chez l’animal, il a été montré que le léflunomide ou ses métabolites sont excrétés dans le lait maternel. Par conséquent, les femmes ne doivent pas allaiter lorsqu’elles sont traitées par le léflunomide.

Contre-indications Ce médicament est contre-indiqué dans les situations suivantes : • hypersensibilité au léflunomide ou tériflunomide (en particulier, en cas d’antécédent de syndrome de Stevens-Johnson, syndrome de Lyell ou érythème polymorphe) ; • immunodéficience grave, et infections graves ; • insuffisance hépatique, et insuffisance rénale modérée à sévère ; hypoprotéinémie sévère car le tériflunomide est fortement lié aux protéines, ce qui risque d’augmenter les concentrations plasmatiques ; • hommes susceptibles de procréer n’utilisant pas de méthode contraceptive mécanique à cause du risque tératogène (via le sperme)  ; et femmes enceintes ou en âge de procréer n’utilisant pas de méthode contraceptive fiable.

Chapitre 2. Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales 49

Fig. 2.8. Structure de la chloroquine et de l’hydroxychoroquine.

Hydroxychloroquine Synthèse L’hydroxychloroquine se concentre dans les lysosomes des cellules immunitaires limitant leurs capacités métaboliques. Ce médicament lipophile présente une demivie très conséquente de plusieurs dizaines de jours assurant une exposition prolongée avec une imprégnation stable dans le temps mais qui peut devenir délicat de prise en charge, lors de survenue d’effets indésirables. Il est utilisé dans la prise en charge de la polyarthrite rhumatoïde et certaines formes de lupus. L’hydroxychloroquine est un analogue hydroxylé de la chloroquine (fig.  2.8), médicament initialement utilisé comme antipaludéen.

Propriétés pharmacologiques L’hydroxychloroquine diffère de la chloroquine par un groupement hydroxyl, lui conférant une action anti-inflammatoire et antalgique. En effet, ce médicament bloque les voies proinflammatoires et diminue la sécrétion de TNFα et d’IL-6 par les monocytes. De plus, l’hydroxychloroquine exerce un effet inhibiteur sur les toll like receptors (TLR), empêchant les lymphocytes T de reconnaître les autoantigènes et bloquant ainsi la production d’autoanticorps par les lymphocytes  B. Ces actions sont liées à l’inhibition des lysosomes des cellules immunitaires.

Mécanisme d’action L’hydroxychloroquine est un médicament lipophile avec un tropisme pour les lysosomes, où il s’accumule sous forme basique. Les hautes concentrations en hydroxychloroquine provoquent l’alcalinisation des lysosomes, induisant leur vacuolisation et l’inhibition de leurs fonctions notamment sur les voies métaboliques et immunitaires.

Principales caractéristiques pharmacocinétiques Par voie orale, l’hydroxychloroquine est rapide­ ment absorbée dans le tractus digestif avec une bonne biodisponibilité, d’environ 75  %. Sa liaison aux protéines plasmatiques est de

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Pharmacologie des médicaments de la douleur

l’ordre de 50 % ; elle a un grand volume de distribution car elle se concentre et s’accumule dans certains tissus et organes. Elle subit une métabolisation hépatique via les cytochromes P450 puis une glucuroconjugaison et ses métabolites sont principalement excrétés par voie urinaire. La demivie d’élimination est longue à cause de l’importante distribution tissulaire : entre 40 et 60 jours.

Indications L’hydroxychloroquine présente une indication dans le traitement symptomatique d’action lente de la polyarthrite rhumatoïde, ainsi que pour certains types de lupus : • lupus érythémateux discoïdes ; • lupus érythémateux subaigus ; • traitement d’appoint ou prévention des rechutes des lupus systémiques.

Effets indésirables Les effets indésirables les plus communs de l’hydroxychloroquine sont les céphalées, les troubles digestifs tels que nausées, vomissements, diarrhées, les convulsions, les hypoglycémies, les acouphènes et les vertiges… D’autres effets sont plus caractéristiques : • des troubles visuels regroupant les kératopathies, dépôts cornéens, troubles de l’accommodation et autres rétinopathies pouvant être graves ; • des cardiomyopathies avec des troubles de la conduction ; • des troubles psychiques : épisodes psychotiques, agitations ; • des atteintes hématologiques : agranulocytoses, aplasies, thrombopénies.

Source de la variabilité de la réponse : interactions médicamenteuses L’hydroxychloroquine expose davantage à des troubles du rythme ventriculaire quand elle

est associée avec un autre médicament arythmogène qui expose notamment à des torsades de pointe. Pour cette raison, elle est contre-indiquée avec le citalopram, l’escitalopram, l’hydroxyzine, la dompéridone et la pipéraquine. Elle est aussi déconseillée avec les médicaments connus pour allonger l’intervalle QT comme les antidépresseurs tricycliques, les antipsychotiques, certains antiarythmiques… Des précautions sont donc à prendre en cas d’association avec les médicaments abaissant le seuil épileptogène, car associés à une majoration du risque de convulsions, ainsi qu’avec les médicaments hypoglycémiants. Les interactions d’ordre pharmacocinétique ne sont pas connues comme cliniquement significatives, sauf avec la cimétidine qui ralentit l’élimination de l’hydroxychloroquine et expose à un risque de surdosage.

Spécificités liées au terrain : grossesse et allaitement L’hydroxychloroquine est potentiellement génotoxique (risque retrouvé avec la chloroquine). Par précaution, une contraception efficace est recommandée chez les hommes et femmes en âge de procréer pendant le traitement et jusqu’à 8 mois après l’arrêt du médicament. Les études chez l’animal avec la chloroquine ont montré une reprotoxicité (morts fœtales et malformations), mais les données chez l’homme sont limitées et n’ont pas mis en évidence de risque. Cependant, le passage de l’hydroxychloroquine au travers du placenta a été démontré avec des niveaux équivalents de concentrations entre le compartiment maternel et le compartiment fœtal. L’hydroxychloroquine ne doit donc pas être utilisée au cours de la grossesse à moins que la situation clinique ne rende indispensable la poursuite du traitement, au vu de la balance bénéfice/ risque. En cas d’administration prolongée pendant la grossesse, le fœtus devra être surveillé en prenant en compte le profil d’effets indésirables, notamment ophtalmologiques.

Chapitre 2. Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales 51

Du fait du passage de l’hydroxychloroquine dans le lait maternel et de ses effets indésirables, l’allaitement est contre-indiqué chez les patientes traitées par ce médicament.

Contre-indications Ce médicament est contre-indiqué dans les situations suivantes : • hypersensibilité à la substance active ; • rétinopathies ; • allaitement ; • en association avec le citalopram, l’escitalopram, la dompéridone et la pipéraquine en raison du risque majoré de troubles du rythme ventriculaire, notamment de torsades de pointe. D’autres situations nécessitent des précautions d’emploi : • insuffisance rénale ou insuffisance hépatique (une adaptation posologique est nécessaire) ; • psoriasis (risque d’aggravation des lésions) ; • porphyrie, déficit en G6PD (risque d’hémolyse) car appartient à la classe des amino-4quinoléines.

Sulfasalazine Synthèse Ce médicament présente des mécanismes d’action complexes et complémentaires, à la fois avec la molécule administrée mais également par les métabolites produits, notamment avec la flore saprophyte.

Mécanisme d’action La sulfasalazine est un dérivé diazoïque (fig.  2.9) qui est hydrolysé dans le côlon en acide 5-aminosalicylique (5-ASA) et en sulfapyridine principe actif porteur d’un groupement sulfamide. La sulfasalazine présente une activité inhibitrice sur la production d’IL-1 et de TNFα, sur la voie des lipo-oxygénases, sur le NF-kB et elle est décrite comme piégeant les radicaux libres. Les mécanismes d’action précis à

Fig. 2.9. Structure chimique de la sulfasalazine.

l’origine de ces effets anti-inflammatoires ne sont pas encore clairement élucidés. Le 5-ASA semble être le principal responsable des effets pharmacologiques locaux  dans la maladie de Crohn et dans la rectocolite hémorragique, puisqu’il est peu absorbé au niveau de la muqueuse du côlon. Dans la polyarthrite rhumatoïde, c’est la sulfasalazine, et notamment la sulfapyridine qui exerce des effets bénéfiques. Elle exerce une action anti-inflammatoire et probablement également immunodépressive.

Principales caractéristiques pharmacocinétiques Après administration par voie orale, environ 30  % de la sulfasalazine est absorbée au niveau de l’intestin grêle. Les deux tiers restants de la dose parviennent jusqu’au côlon, où le médica­ ment est clivé par les bactéries intestinales au niveau du pont azoïque. Ce clivage libère deux molécules  : l’acide 5-aminosalicylique (5-ASA) et la sulfapyridine (sulfamide protecteur du 5-ASA au niveau intestinal), qui sont soumises à deux voies de métabolisation différentes. Le 5-ASA n’est que faiblement absorbé par le côlon et est excrété en grande partie dans les selles. A contrario, la sulfapyridine est rapidement absorbée par la paroi colique et est soumise à de nombreuses réactions hépatiques, en particulier une acétylation, avant d’être éliminée dans les urines. De ce fait, le phénotype acétyleur du patient détermine les taux plasmatiques en sulfapyridine et est associé à la probabilité de survenue d’effets indésirables.

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Pharmacologie des médicaments de la douleur

Indications Initialement, la sulfasalazine a été développée pour traiter la polyarthrite rhumatoïde. Actuellement, elle est indiquée en tant que traitement de fond de première intention, lorsque le méthotrexate est contre-indiqué (au même titre que le léflunomide). Elle est également utilisée dans la rectocolite chronique hémorragique (RCH) et dans la maladie de Crohn dans sa forme colique.

Effets indésirables Les effets indésirables de la sulfasalazine sont liés principalement au groupement sulfamide de la sulfapyridine et sont donc ceux communs aux médicaments de cette «  classe chimique  ». Les effets indésirables classiquement imputables aux sulfamides sont les hypersensibilités ; l’hématotoxicité : anémie macrocytaire par carence en folates (inhibition de leur absorption) ou hémolytique (notamment si déficit en G6PD), agranulocytose voire aplasie ; troubles digestifs ; acouphènes, vertiges ; céphalées et fièvre ; lupus induit ; atteintes hépatiques ; atteintes rénales pouvant aller jusqu’à la névrite tubulo-interstitielle… Certains d’entre eux sont dose-dépendants, tels que les nausées, maux de tête et fatigue, et peuvent donc être atténués par une baisse de la posologie. Une surveillance des paramètres hématologiques, hépatiques et rénaux est recommandée afin de déceler une perturbation, et il doit être conseillé aux patients de boire suffisamment.

Sources de variabilité de la réponse : interactions médicamenteuses Concernant les interactions d’ordre pharmacocinétique (bien que le mécanisme ne soit pas élucidé), l’association de la sulfasalazine avec la digoxine expose à un risque de diminution de la digoxinémie (jusqu’à 50 %). Une surveillance clinique, des ECG, éventuellement une surveillance des taux plasmatiques du digitalique sont nécessaires, et une adaptation de posologie peut être envisagée.

Pour les interactions pharmacodynamiques, l’effet myélosuppresseur de l’azathioprine ou de la mercaptopurine risque d’être majoré par la sulfasalazine à cause d’un effet inhibiteur d’un dérivé du 5-ASA sur le métabolisme hépatique de ces deux principes actifs.

Spécificités liées au terrain : grossesse et allaitement Aucun effet tératogène n’a été mis en évidence, mais la sulfasalazine par voie orale inhibe l’absorption et le métabolisme de l’acide folique et peut entraîner des carences. Le risque de malformation du tube neural chez les fœtus exposés pendant la grossesse ne peut pas être exclu, donc la sulfasalazine est à éviter autant que possible pendant la grossesse. De plus, il existe un risque d’hémolyse si le fœtus présente un déficit en G6PD et est exposé. La sulfapyridine, métabolite sulfamidé de la sulfasalazine, passe dans le lait maternel. L’allaitement est contre-indiqué si la mère ou l’enfant a un déficit en G6PD, et chez le nouveau-né de moins d’un mois à cause du risque d’ictère nucléaire.

Contre-indications La sulfasalazine est contre-indiquée en cas d’hypersensibilité aux sulfamides et aux salicylés à cause du risque d’allergies croisées. Ce médicament est également à proscrire chez les patients ayant un déficit en G6PD ou une porphyrie, ainsi que chez les prématurés et nouveau-nés du fait de leur immaturité enzymatique, afin d’éviter le déclenchement d’une hémolyse. Les patients qui développent une nouvelle infection pendant le traitement par la sulfasalazine doivent être étroitement suivis. Documents de référence Goodman and Gilman’s. The pharmacological basis of therapeutics. New York: Mc Graw Hill Education. Résumé des caractéristiques des produits par le biais du répertoire des médicaments de l’ANSM (https:// ansm.sante.fr/Services/Repertoire-des-medicaments). Revue Prescrire (https://www.prescrire.org/fr/Summary. aspx).

Chapitre 2. Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales 53

Médicaments de la goutte B. Revol, J.-L. Cracowski Synthèse Ces médicaments sont utilisés dans le traitement de la crise de goutte, la prévention de sa récidive et des complications articulaires et rénales. Le traitement repose principalement sur deux classes thérapeutiques : – les médicaments de la crise de goutte. Le traitement consiste en la prescription le plus tôt possible de colchicine et/ou AINS. La colchicine expose à des effets indésirables dose-dépendants parfois graves, les posologies devant être adaptées chez le sujet âgé, l’insuffisant rénal ou hépatique. L’association de la colchicine est contre-indiquée avec des inhibiteurs puissants du cytochrome P450 3A4  et/ ou de la P-gp. Les AINS ont une efficacité similaire, ils sont prescrits avec précaution en particulier chez les personnes âgées. Colchicine et AINS sont contre-indiqués en cas d’insuffisance rénale sévère. En dernière intention le canakinumab, un immunodépresseur, expose à des infections parfois graves et à des réactions d’hypersensibilité ; – les hypouricémiants  : l’allopurinol et le fébuxostat inhibent la synthèse d’acide urique. Ils sont indiqués en cas d’accès goutteux récidivant, de tophus, d’arthropathie goutteuse ou de lithiases rénales. Ces inhibiteurs de la xanthine oxydase peuvent être responsables de crises aiguës d’arthrite goutteuse en début de traitement. L’allopurinol est le traitement de première intention. L’augmentation des doses est progressive et la posologie doit être adaptée à la clairance rénale. L’allopurinol est la première cause de toxidermies bulleuses graves en Europe et l’un des premiers pourvoyeurs de syndromes DRESS dans le monde.

Rappel physiopathologique La goutte est une arthropathie microcristalline évoluant par poussées. Elle résulte de la précipitation de cristaux d’urate de sodium dans les tissus, responsables d’une réponse inflammatoire. L’acide urique provient des apports alimentaires et du métabolisme des bases puriques (catabolite terminal). Deux tiers de l’acide urique sont éliminés

par voie rénale (excrétion tubulaire proximale, contrebalancé par un système de réabsorption) et le tiers restant par voie digestive. Les accès goutteux sont le reflet clinique d’un déséquilibre entre la production d’acide urique et son élimination rénale. Chez la plupart des patients atteints, l’hyperuricémie est due à un défaut d’élimination plutôt qu’à un excès d’apport ou de production. La régulation rénale de l’urate dépend de nombreux transporteurs anioniques de la famille des OAT (organic anion transporters) comme URAT1, du transporteur Glut9, du transporteur ABCG2 (ATP-binding cassette family G2) et des cotransporteurs sodium-phosphate (NTP) 1 et 4. Des polymorphismes des gènes codant ces différentes protéines ont été associés à la maladie. Le risque de goutte augmente avec le degré et la durée de l’hyperuricémie. La plupart des patients avec un excès d’acide urique ne présentent toutefois pas de crise de goutte. A contrario, l’uricémie peut être normale chez certains patients pendant la crise. Les cristaux d’urate se forment préférentiellement dans des conditions froides ou acides et l’interrogatoire retrouve parfois un facteur déclenchant  : déshydratation, excès alimentaire ou alcoolique, microtraumatismes répétés, surmenage, effort musculaire intensif, exposition au froid ou à l’humidité, infection, prise de médicaments hyper- ou hypouricémiants, intervention chirurgicale. Les cristaux d’acide urique en excès sont d’abord phagocytés par les synoviocytes qui produisent des prostaglandines, des enzymes lysosomiales et des cytokines dont IL-1β et TNFα. Les polynucléaires migrent alors dans l’espace articulaire et amplifient le processus inflammatoire. La goutte aiguë provoque généralement une monoarthrite distale douloureuse (en particulier au niveau de l’articulation métatarso-phalangienne du gros orteil), pouvant aller jusqu’à la destruction de l’articulation. Des dépôts sous-cutanés de cristaux d’acide urique, les tophus, sont parfois visibles et palpables autour des articulations affectées. Les reins peuvent être altérés par des dépôts tissulaires d’urate (néphropathie goutteuse) ou par des lithiases urinaires (coliques néphrétiques). Le tableau clinique habituel est celui d’un adulte d’âge moyen, classiquement «  bon

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Pharmacologie des médicaments de la douleur

vivant », réveillé en pleine nuit par une douleur violente exacerbée par le moindre contact, interdisant tout mouvement. Les prodromes locaux comme une gêne de l’articulation, ou des signes généraux sont inconstants. L’utilisation du score ACR-Eular 2015, associant des signes cliniques (localisation de l’arthrite, caractéristiques de la douleur, durée de l’épisode, présence ou non de tophus) et l’uricémie, permet de retenir à bon escient un diagnostic de goutte. À l’échographie, des images dites en double contour sur le cartilage de l’articulation atteinte sont en faveur d’une crise de goutte. La répétition des crises altère peu à peu l’articulation. L’arthropathie uratique, ou arthropathie goutteuse, n’apparaît que plusieurs années après le premier accès goutteux. Elle se traduit radiologiquement par un pincement de l’interligne articulaire, des lacunes des extrémités osseuses et parfois une ostéophytose. La goutte touche 1 à 3  % de la population adulte des pays occidentaux, avec un sex-ratio de 7 à 9 hommes pour 1 femme. Les crises sont rares avant l’âge de 30  ans chez les hommes et le pic d’incidence maximale se situe entre 50 et 60 ans. Chez la femme, la maladie est rare avant l’âge de 50 ans. Le traitement optimal de la goutte associe des mesures hygiénodiététiques, pharmacologiques, la prise en charge des comorbidités et du risque cardiovasculaire fréquemment associés (insuffisance rénale, maladie coronarienne, insuffisance cardiaque, AVC, artériopathie périphérique, obésité, dyslipidémie, hypertension, diabète, tabagisme). Il est recommandé de maigrir progressivement (entre 5 et 15 %) en cas de surpoids ou d’obésité, de pratiquer un exercice physique régulier adapté à l’état de santé, de réduire la consommation d’alcool et d’adopter un régime pauvre en purines. Certains aliments sont donc déconseillés : un régime riche en purines animales multiplie par cinq le risque de crise de goutte (viande rouge, abats mais aussi certains poissons, tels que hareng ou anchois et les fruits de mer). La quantité de viande doit être limitée à 150  g par jour pour les patients non traités par inhibiteurs de la synthèse d’acide urique. La bière est également très riche en purines, même lorsqu’elle

est sans alcool. Au contraire, les laitages appauvris en graisses (lait écrémé) favorisent l’élimination de l’acide urique par les reins. La consommation de cerises présente aussi cet avantage. Enfin, la consommation de café et de vitamine  C (en l’absence de contre-indication) aurait un effet hypouricémiant.

Principaux médicaments Les médicaments de la goutte sont utilisés dans le traitement de la crise de goutte, la prévention de sa récidive et des complications éventuelles. Le traitement repose sur deux principales classes pharmacologiques, les médicaments de la crise et les hypouricémiants (tableau  2.12). Les uricosuriques sont très peu utilisés en France, et les uricolytiques sont réservés à une indication précise.

Mécanismes d’action • Le colchique (Colchicum autumnale), connu des Grecs pour sa toxicité, est utilisé dans l’empire byzantin dès le Ve  siècle pour le traitement de la goutte. Il faudra néanmoins attendre le XIXe  siècle pour que les chimistes parviennent à cristalliser la colchicine (Laborde et Houdé, 1884), soixante ans de plus pour établir sa formule (Dewar, 1945) et une vingtaine d’années encore pour qu’une première synthèse soit publiée (Woodward, 1963). La colchicine est un alcaloïde extrait du colchique, qui bloque la mitose au stade de la métaphase en empêchant la formation du fuseau mitotique. Elle agit à différents niveaux : – la colchicine diminue le pH local et la production d’acide lactique, responsable de la précipitation des cristaux d’urate ; – elle inhibe la phagocytose des cristaux d’urate par les leucocytes. En effet, elle se lie aux dimères de tubuline, empêchant ainsi la formation des microtubules indispensables à la phagocytose, à la dégranulation et au déplacement des leucocytes ;

Chapitre 2. Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales 55 Tableau 2.12. Médicaments commercialisés pour la prise en charge de la goutte. DCI

Classe

Voie d’utilisation

Nom de spécialité

Médicaments de la crise Colchicine Opocalcium®, Colchimax®*

Colchicine

Antigoutteux, anti-inflammatoire

Orale

Ibuprofène, naproxène

Anti-inflammatoire non stéroïdien

Orale

Canakinumab

Inhibiteur d’interleukine

Sous-cutanée

Ilaris®

Allopurinol

Inhibiteur de la synthèse de l’acide urique

Orale

Zyloric®

Fébuxostat

Inhibiteur de la synthèse de l’acide urique

Orale

Adenuric®

Hypouricémiants

Médicaments uricosuriques Probénécide

Uricosurique

Orale

Probenecid Biokanol® (remplace le Bénémide® depuis l’arrêt de sa commercialisation)

Benzbromarone**

Uricosurique

Orale

Desuric® (ATU)

Médicament uricolytique Rasburicase*** *

Uricolytique

Fasturtec®

Colchimax®

La spécialité est à éviter en raison de la présence de poudre d’opium et de tiémonium qui masquent les diarrhées, un des premiers signes de surdosage parfois mortel de la colchicine. ** La benzbromarone est uniquement disponible en France dans le cadre d’une autorisation temporaire d’utilisation (ATU) nominative. De rares cas d’atteintes hépatiques cytolytiques graves, d’évolution fatale ou ayant nécessité une transplantation hépatique, ont en effet conduit à l’arrêt de la commercialisation de ce médicament en avril 2003. *** La rasburicase est utilisée pour prévenir le risque d’insuffisance rénale aiguë chez les patients présentant un risque d’hyperuricémie aiguë, en particulier chez les patients atteints d’une hémopathie maligne avec masse tumorale élevée, présentant un risque important de lyse tumorale rapide lors de l’initiation de la chimiothérapie. La rasburicase et pour mémoire la pégloticase sont des uricases recombinantes. Ces enzymes catabolisent l’acide urique en allantoïne, une substance hydrosoluble éliminée par le rein.

– elle permet également de diminuer la production de certains médiateurs de l’inflammation  : leucotriènes, IL-1β, ainsi que certains médiateurs responsables du chimiotactisme des cellules immunitaires. • Par leur action inhibitrice des cyclo-oxygénases, les anti-inflammatoires non stéroïdiens inhibent la transformation de l’acide arachidonique en prostaglandines ou thromboxanes. L’effet des traitements est ici lié à l’atténuation des phénomènes inflammatoires impliquant les prostaglandines (vasodilatation, œdème, douleur). • Les cristaux d’urate de sodium sont responsables de relargage d’IL-1β. Le canakinumab est un anticorps monoclonal humain dirigé contre l’IL-1β, empêchant son interaction avec le récepteur de l’IL-1. Le blocage de cette interaction permet de réduire l’adhésion et le chimiotactisme des leucocytes. • L’allopurinol et le fébuxostat sont des inhibiteurs puissants de la xanthine oxydase

(fig. 2.10), donc de la synthèse d’acide urique. Ils agissent de façon puissante, en deux semaines. L’allopurinol, un médicament développé dans les années 1950 pour potentialiser l’action de certains médicaments anticancéreux, est un analogue structural de l’hypoxanthine, biotransformé en un métabolite actif, l’oxypurinol (également appelé alloxanthine), de demi-vie d’élimination plus longue, responsable de la majorité des effets thérapeutiques. L’allopurinol et le fébuxostat sont des inhibiteurs puissants car d’une part ils agissent à deux étapes de la synthèse d’acide urique et d’autre part ils favorisent un rétrocontrôle négatif en amont sur une enzyme clé dans la synthèse des purines. • Le probénécide est un uricosurique, c’est-à-dire qu’il augmente la sécrétion urinaire d’acide urique. Il inhibe les transporteurs responsables de la réabsorption de l’acide urique au niveau du tubule proximal (OAT1 et OAT3, transporteurs des anions organiques).

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Pharmacologie des médicaments de la douleur

Fig. 2.10. Mécanisme d’action des inhibiteurs de xanthine oxydase.

Effets utiles en clinique Médicaments de la crise Le traitement de l’accès goutteux doit être débuté le plus tôt possible. Les dernières recommandations de l’EULAR proposent en première intention l’usage de la colchicine, d’un AINS ou de corticoïdes. Il n’y a, dans les essais contrôlés, aucune évidence de la supériorité d’une des attitudes. La colchicine peut également être associée à un AINS ou à un corticoïde par voie orale. Il n’y a pas de durée optimale recommandée, la posologie des traitements symptomatiques devant être progressivement diminuée jusqu’à guérison de l’accès mais maintenue 3 à 6  mois en prévention de récidive sous traitement hypouricémiant. La dose initiale de colchicine est de 1 à 1,5 mg le premier jour en une ou deux prises, suivie d’une dose de 0,5  mg 1 à 2  fois par jour. La dose maximale de colchicine par prise est de 1 mg. En cas de prise en charge précoce (jusqu’à

36  heures), la dose journalière ne doit pas dépasser 2 mg. La posologie de 3 mg par jour représente la dose à ne jamais dépasser et doit être réservée à la prise en charge tardive d’un accès aigu, pour le premier jour de traitement uniquement. Chez les patients âgés, insuffisants rénaux ou hépatiques, il faut commencer le traitement à une dose réduite de 0,5 mg par jour pour limiter le risque de toxicité. Les effets de la colchicine surviennent en 12 à 24 heures, et ne modifient ni le métabolisme ni l’excrétion de l’acide urique. La colchicine est également le traitement de référence de la prise en charge de la péricardite aiguë idiopathique en association à un anti-inflammatoire non stéroïdien. Dans ce cadre, elle est administrée pendant 3 mois à des doses inférieures à celles de la goutte : 0,5 mg/j de colchicine si le poids est inférieur à 70 kilos, 0,5  mg deux fois/j pour un poids supérieur à 70 kg. Les différents AINS (ibuprofène, kétoprofène, naproxène, acéclofénac, diclofénac,

Chapitre 2. Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales 57

piroxicam ou coxibs) ont une efficacité similaire dans la crise de goutte. Ils sont prescrits avec précaution, en raison de leur toxicité rénale en particulier chez les personnes âgées. L’aspirine et les autres salicylés sont à écarter dans la crise de goutte, car ils diminuent l’élimination rénale de l’acide urique. L’ibuprofène et le naproxène sont les AINS dont la balance bénéfice/risque semble la plus favorable. Chez les adultes, l’ibuprofène par voie orale est à prendre à la dose de 200 à 400 mg par prise, environ toutes les 6 à 8  heures sans dépasser 1  200  mg par jour, en adaptant la posologie en fonction de l’intensité des symptômes. Au-delà de 1 200 mg par jour, la balance bénéfice/risque est défavorable en raison notamment d’un risque cardiovasculaire accru. Dans la crise de goutte, la dose initiale de naproxène est de 750 mg lors de la première prise, suivie de prises de 250  mg toutes les 8 heures. Les corticoïdes par voie orale ont une efficacité comparable pour soulager la douleur d’une crise de goutte, mais sont des traitements de deuxième ou troisième intention. La prednisolone à raison de 30  mg par jour pendant 5  jours est une alternative, tout comme la ponction-infiltration articulaire de corticoïdes. Le canakinumab dispose d’une AMM dans la crise d’arthrite goutteuse en cas de contreindication, intolérance ou échec des AINS, de la colchicine et d’utilisation inappropriée des corticoïdes. Son délai d’action est rapide, avec une amélioration clinique des symptômes dans les 24  heures suivant l’administration et une normalisation des biomarqueurs de l’inflammation. Le canakinumab est un traitement de dernière intention qui ne doit être utilisé que chez les seuls patients ayant des crises de goutte fréquentes (au moins 3  crises au cours des 12  mois précédents), et après appréciation du besoin thérapeutique réel (avis de la Commission de la transparence de la HAS, avril 2014 et juin 2015). En effet, son niveau de preuve d’efficacité est faible et il augmente le risque d’infection. Par ailleurs, les effets indésirables

observés dans les autres indications du canakinumab (neutropénies, thrombopénies, tumeurs malignes, vertiges) sont à surveiller et il ne doit pas être administré au cours d’une infection évolutive.

Hypouricémiants Les inhibiteurs de la synthèse d’acide urique préviennent la récidive des accès goutteux. Leur efficacité est rapide, liée à la dose avec une baisse de l’uricémie et de l’uraturie dès 24 à 48 heures. Il n’y a pas d’effet d’échappement lors d’un traitement continu. Ils sont indiqués en cas d’accès goutteux récidivant (au moins 2 fois par an), de tophus, d’arthropathie goutteuse ou de lithiases rénales. Cependant, ce traitement de fond est également recommandé après la première crise de goutte dans les cas suivants : patient âgé de moins de 40 ans, uricémie très élevée, pathologies cardiovasculaires ou insuffisance rénale associées. Ce traitement doit être institué de préférence à distance d’un accès aigu du fait du risque de récidive lié à la mobilisation des urates tissulaires, à la dose la plus faible possible, puis augmenté progressivement jusqu’à obtention de l’uricémie cible ( 4 g/j) a une action uricosurique, tandis qu’à des doses plus faibles, elle a une action hyperuricémique. L’interaction est décrite pour des doses d’aspirine inférieures ou égales à 3 g/j dans le cas de la benzbromarone. Elle n’est pas documentée pour les doses antiagrégantes d’aspirine

• Grossesse  : les données publiées chez les femmes enceintes et traitées par colchicine (le plus souvent de la conception à l’accouchement) sont très nombreuses et rassurantes. Lorsque l’état de santé de la mère le justifie, la colchicine peut être poursuivie pendant la grossesse. En cas de traitement poursuivi jusqu’à l’accouchement, il convient de préférer une spécialité sans tiémonium (atropinique pouvant favoriser la survenue d’un iléus méconial). À noter  : une élévation de l’acide urique est fréquemment observée au cours des toxémies gravidiques mais ne nécessite pas de traitement spécifique. • Allaitement : la quantité de colchicine ingérée via le lait est importante, l’enfant reçoit jusqu’à 10 % de la dose maternelle (en mg/kg). Le pic de colchicine dans le lait semble se situer 1 à 2 heures après la prise et la concentration dans le lait diminuerait très fortement 7 à 11 heures après la prise. Parmi plus de 150 enfants allaités dont la mère a été traitée par colchicine, aucun événement particulier n’a été signalé à ce jour. De plus, il semble que les femmes traitées par colchicine soient habituellement autorisées à allaiter, en particulier dans les pays où la maladie périodique a une forte prévalence. Au vu de ces éléments, l’allaitement est possible chez une femme traitée par colchicine seule (sans opium [morphinique], ni tiémonium [atropinique]), quel que soit l’âge de l’enfant. On peut proposer de prendre le traitement juste avant la tétée du soir. Ainsi l’intervalle jusqu’à la tétée suivante s’allongera au fur et à mesure que l’enfant commencera à faire ses nuits. En cas de diarrhée chez l’enfant, réévaluer la poursuite de l’allaitement. En raison d’interactions médicamenteuses potentielles, il est déconseillé d’administrer des macrolides aux enfants allaités dont la mère reçoit de la colchicine. • Sujet âgé (> 75 ans) : dans le traitement de la crise, ne pas dépasser 2 mg en plusieurs prises le 1er jour. Il est recommandé de réduire la posologie à 0,5 mg en cas de diarrhées. La posologie en prévention de récidive est de 0,5 mg/j.

Chapitre 2. Médicaments des maladies inflammatoires systémiques, auto-immunes et rhumatismales 61

• En cas d’insuffisance rénale et/ou d’insuffisance hépatique, une diminution de la posologie est recommandée et une attention particulière doit être portée. La surveillance repose d’abord sur l’apparition d’effets indésirables dose-dépendants. Il est également recommandé, au cours du premier mois de traitement, d’effectuer une NFS, une numération des plaquettes et de réévaluer la clairance de la créatinine. Dans la littérature, des schémas d’adaptation posologique selon la fonction rénale sont proposés. Cependant, aucune étude avec un suivi au long cours n’a validé l’efficacité et la tolérance de tels schémas.

Allopurinol • Grossesse  : l’allopurinol est déconseillé et si une grossesse débute pendant le traitement, il convient, par prudence, de proposer une surveillance échographique orientée sur la face (chez la souris, l’allopurinol à dose élevée induit notamment des fentes palatines). • Allaitement  : l’allopurinol et l’oxypurinol, son métabolite actif, sont excrétés dans le lait maternel. Il n’existe aucune donnée concernant les effets sur le bébé allaité, l’allopurinol est donc déconseillé pendant l’allaitement. • Insuffisance rénale : la demi-vie d’élimination de l’oxypurinol est significativement augmentée chez le patient insuffisant rénal. La fréquence des effets indésirables est elle aussi augmentée chez ce type de patient. La posologie doit donc être adaptée en fonction de la clairance de la créatinine (Clcr), selon le protocole suivant (tableau 2.19).

• Insuffisance hépatique  : des doses réduites doivent être utilisées et il est recommandé de contrôler périodiquement la fonction hépatique.

Fébuxostat • Grossesse : les études chez l’animal n’ont pas montré d’effet délétère embryonnaire ou fœtal. Néanmoins, en l’absence de données cliniques, le fébuxostat ne doit pas être utilisé. • Allaitement  : un risque pour le nourrisson allaité ne peut être exclu, le fébuxostat ne doit donc pas être utilisé chez la femme qui allaite. • Insuffisant rénal : il n’est pas nécessaire d’adapter la posologie du fébuxostat chez le patient insuffisant rénal ayant un DFG >  30  ml/ min. En revanche, une modification des paramètres pharmacocinétiques a été rapportée chez 7  patients insuffisants rénaux sévères (15-30 ml/min). Les auteurs de la publication recommandent de ne pas réduire la posologie du médicament du fait de la bonne tolérance clinique à la dose journalière de 80  mg. Par ailleurs, des données d’efficacité et de tolérance ont été rapportées chez des patients insuffisants rénaux stades 4 traités par fébuxostat à la posologie de 40 à 120 mg/j. Si nécessaire, il semble donc raisonnable de débuter le traitement chez ces patients à la posologie de 80  mg/j et d’ajuster les doses suivantes en fonction de la tolérance et de l’efficacité clinique. • Insuffisant hépatique : la dose recommandée est de 80  mg/j chez les patients présentant une insuffisance hépatique légère (classe  A de Child-Pugh). L’expérience clinique est limitée

Tableau 2.19. Dose maximale d’allopurinol à utiliser selon la clairance de créatinine du patient. Clairance de la créatinine

Dose maximale préconisée

80  alfentanil (15 ×)

––



+





––

––

++  : stimulation décrite et reconnue ; +  : stimulation probable ; – – : inhibition décrite et reconnue ; – : inhibition probable. Trame = médicaments inhalés ; sans trame = médicaments administrés par voie IV.

Tableau 4.2. Principaux effets à considérer dans le maniement des anesthésiques. Agents Sévoflurane

Cardiovasculaire ↓ des résistances vasculaires périphériques : ↓ de la pression artérielle moyenne

Desflurane

↓ des résistances vasculaires périphériques : ↓ de la pression artérielle moyenne associée à une ↑ de la fréquence cardiaque

Protoxyde d’azote

Pas d’effet cardiovasculaire

Thiopental

Vasodilatation des vaisseaux Périphériques : ↓ du retour veineux au niveau de l’oreillette droite Hypotension artérielle associée à une ↑ de la fréquence cardiaque : le débit cardiaque est maintenu par mise en jeu du système baroréflexe Peu d’effets cardiovasculaires comparé aux autres agents, ↓ légère de la pression artérielle sans modification de la fréquence cardiaque ni du débit cardiaque, excellente tolérance hémodynamique

Étomidate

Effets sur les différents systèmes Respiratoire Cérébral Dépression respiratoire ↑ du débit sanguin cérébral en raison ↓ du volume courant due à une d’une ↓ plus importante des résistances action directe sur les centres vasculaires que de la pression artérielle respiratoires du tronc cérébral moyenne ↑ de la fréquence respiratoire, effet ↓ de la consommation cérébrale en bronchodilatateur oxygène Dépression respiratoire ↑ du débit sanguin cérébral en raison ↓ du volume courant due à une d’une ↓ plus importante des résistances action directe sur les centres vasculaires que de la pression artérielle respiratoires du tronc cérébral moyenne ↑ de la fréquence respiratoire ↓ de la consommation cérébrale en Effet bronchodilatateur oxygène Effet irritatif sur les voies aériennes lorsqu’il est utilisé pour l’induction de l’anesthésie comme seul agent ↓ de la ventilation (volume courant), ↑ du débit sanguin cérébral, associée associée à une ↑ du rythme à une ↑ de la consommation cérébrale respiratoire en oxygène et à une ↑ de la pression intracrânienne Dépression respiratoire : dépression Vasoconstriction cérébrale associée de la ventilation, ↑ du volume à une ↓ du flux sanguin cérébral, de courant suivie d’une apnée la consommation en oxygène et de la Risque de laryngospasme ou de pression intracrânienne bronchospasme si une stimulation Tracé EEG : présence de silences des voies aériennes supérieures électriques survient Dépression respiratoire modérée ↓ du débit sanguin cérébral et de la Toux, hoquet pression intracrânienne À faible dose : possible activation de foyers épileptogènes préexistants À plus fortes doses : anticonvulsivant (tracé EEG équivalent à celui du thiopental)

x

x

Agents Propofol

Midazolam

Kétamine

Dexmédétomidine

Fentanyloïdes (fentanyl, alfentanil, sufentanil, rémifentanil)

Chapitre 4. Anesthésiques généraux 93

Effets sur les différents systèmes Cardiovasculaire Respiratoire Cérébral Effet hypotenseur par vasodilatation Dépression respiratoire ↓ du débit sanguin cérébral, de la périphérique Apnée transitoire au pic d’action consommation en oxygène et de la pression intracrânienne La perte de conscience est rapide et brève, et proportionnelle à la vitesse d’injection Effets pro- et antiépileptiques Hypotension artérielle associée à Dépression respiratoire ↓ du flux sanguin cérébral, de la une ↑ de la fréquence cardiaque consommation en oxygène et de la pression intracrânienne Action sympathomimétique centrale Bronchodilatation ↑ du débit sanguin cérébral, de la et inhibition de la recapture des Conservation des réflexes consommation en oxygène catécholamines : ↑ de la pression oropharyngés ↑ de la pression intracrânienne : artérielle, du débit cardiaque et de contre-indication dans les traumatismes la fréquence cardiaque crâniens Hypotension et bradycardie lors de la perfusion Hypertension transitoire lors de l’administration de la dose de charge (liée aux effets vasoconstricteurs périphériques initiaux) ↓ de la fréquence cardiaque et ↓ de la fréquence respiratoire pression artérielle moyenne

d’une intubation orotrachéale et la réalisation de nombreux gestes chirurgicaux. Pour chacune de ces familles, plusieurs molécules peuvent être utilisées (fig.  4.1). Le médecin anesthésiste-réanimateur bénéficie en ce sens d’un large panel pharmacologique. La sélection des molécules sera essentiellement fonction de leurs propriétés pharmacocinétiques et des comorbidités du patient, conditionnant le délai d’action, la durée d’action et leurs effets indésirables (tableaux 4.3, 4.4 et 4.5).

Pharmacocinétique Anesthésiques inhalés Une grande variété de gaz et de liquides volatils peut induire une anesthésie. Les anesthésiques par inhalation varient également considérablement dans leurs propriétés physiques. Le tableau  4.3 répertorie les propriétés physiques importantes des agents d’inhalation en usage clinique. Ces propriétés sont importantes car elles régissent la

pharmacocinétique des agents d’inhalation. Le profil idéal d’un anesthésique inhalé est de produire une induction rapide de l’anesthésie et une récupération rapide après arrêt de l’administration. Le fait que les anesthésiques volatils halogénés se comportent comme des gaz plutôt que comme des liquides, engendre une complexité dans l’analyse pharmacocinétique concernant leur absorption et leur distribution. Leur administration sous forme de gaz ne peut se faire que par le passage de la forme liquide à gazeuse par le biais d’un vaporisateur (fig. 4.2). Il est indispensable de comprendre que les anesthésiques inhalés se distribuent entre les différentes phases (gaz/sang) de manière à atteindre un état d’équilibre entre les pressions partielles du gaz (P) et les concentrations tissulaires. Un paramètre important impactant la distribution des anesthésiques volatils et donc les concentrations est le coefficient de partage (ou solubilité). Dans le cas d’un gaz, le coefficient de partage se définit comme le ratio de la quantité de gaz dans les deux phases à une température donnée. Les coefficients de partage, sang/gaz,

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Pharmacologie des médicaments de la douleur

Fig. 4.2. Association entre les paramètres d’administration et les effets au niveau des organes cibles.

cerveau/sang et graisse/sang, sont indiqués dans le tableau  4.3. Hormis le protoxyde d’azote, les coefficients de partage des anesthésiques inhalés montrent une très grande solubilité dans les graisses témoignant d’une forte distribution dans ce type de tissu. C’est donc la solubilité de l’anesthésique inhalé qui va principalement impacter le ratio des concentrations alvéolaires (FA) sur les concentrations inspirées (Fi) en combinaison à la durée d’administration. La concentration ou fraction alvéolaire (FA) d’un anesthésique inhalé est dépendante de la quantité de gaz entrant et du débit de gaz sortant. Cependant, en fonction de la solubilité de l’agent inhalé dans le sang, une distribution plus ou moins rapide vers les tissus permettra à la FA de tendre rapidement vers la Fi donc l’état d’équilibre. Pour les anesthésiques inhalés qui ne sont pas très solubles dans le sang ou les tissus (par exemple, N2O), l’équilibre est rapidement atteint. A contrario, lorsque l’agent anesthésique utilisé se distribue fortement dans les tissus graisseux,

l’équilibre peut prendre plusieurs heures avant d’être atteint. Cela est causé par le fait que la graisse représente un compartiment profond très important pour les anesthésiques inhalés qui sera remplit lentement du fait d’une vascularisation très limitée combinée à un flux sanguin plutôt médiocre pour ces tissus. Lorsque le coefficient de partage graisse/sang est très élevé, cela présuppose donc que l’équilibre sera atteint difficilement. Finalement, lorsque les différents types tissulaires sont saturés, le ratio Fa/Fi tend vers 1. Un paramètre important en anesthésiologie des agents inhalés est la rapidité avec laquelle est induite l’anesthésie. L’anesthésie est effective quand la pression partielle de l’anesthésique dans le cerveau est supérieure ou égale à la concentration alvéolaire minimale (CAM). L’anesthésie est donc atteinte rapidement dès que Pcerveau ≥ CAM. Pour les anesthésiques ayant un coefficient de partage élevé dans le sang et autres tissus, la Palvéolaire augmentera plus lentement. Il est possible de contourner cette limitation, et



Chapitre 4. Anesthésiques généraux 95

Tableau 4.3. Propriétés des agents anesthésiques inhalés. Agents volatils

CAM (%)

CAMréveil (%)

Coefficient de partage à 37 °C Sang/gaz

Cerveau/sang

Graisse/sang

Métabolisation (%)

Sévoflurane

2

0,6

0,65

1,7

48

3

Desflurane

6

2,4

0,45

1,3

27

0,02

Protoxyde d’azote

105

60

0,47

1,1

2,3

0,004

La CAM est exprimée en pourcentage d’une atmosphère pour les agents inhalés. CAM : concentration alvéolaire minimale.

ainsi d’induire efficacement l’anesthésie, en délivrant des pressions partielles inspirées plus élevées (augmentation de la ventilation). L’élimination des anesthésiques inhalés est, pour simplifier, le processus inverse de l’absorption. Pour les anesthésiques ayant une faible solubilité, la récupération sera donc rapide, quelle que soit la durée d’administration. Pour ceux qui ont une grande solubilité dans le sang et autres tissus, la récupération sera fonction de la durée d’administration. Cela est la conséquence d’une accumulation des anesthésiques dans le réservoir graisseux qui empêchera les pressions partielles du sang (et donc alvéolaires) de chuter rapidement. Les patients se réveilleront pour une Palvéolaire   1,5, une élévation extrême de la PaCO2 sera observée avec pour conséquence une induction chez le patient d’une apnée potentielle. Outre le fait que le desflurane soit un bronchodilatateur, il est également un puissant irritant des voies respiratoires pouvant provoquer une toux, un laryngospasme ou une sécrétion excessive de

100

Pharmacologie des médicaments de la douleur

mucus. De ce fait, il n’est pas utilisé pour l’induction de l’anesthésie. • Système nerveux. Une augmentation de la pression intracrânienne peut survenir. Cela peut être prévenu par hyperventilation. • Rein et foie. Ni néphrotoxicité ni hépatotoxicité n’ont été rapportée. En effet, cela correspond à une métabolisation hépatique négligeable. Sévoflurane • Système cardiovasculaire. Tout comme les autres anesthésiques inhalés halogénés, le sévoflurane induit une hypotension concentrationdépendante. Celle-ci est initialement causée par une vasodilation systémique. On observe aussi une baisse du débit cardiaque concentrationdépendante. À la différence du desflurane, il n’y a pas de tachycardie réflexe faisant suite à l’hypotension, ce qui en fait un agent de premier choix, notamment chez les patients sujets à l’ischémie myocardique. • Système respiratoire. De la même manière qu’avec le desflurane, le sévoflurane présente les mêmes modifications concentration-dépendantes sur le volume courant et donc induit une augmentation de la fréquence respiratoire. L’augmentation de la fréquence respiratoire ne compense pas la diminution du volume courant. Cela induit une réduction du volume minute et donc une augmentation de la PaCO2. Le point important reste le fait qu’il ne soit pas irritant pour l’arbre bronchique et qu’il soit le bronchodilatateur le plus efficace parmi les anesthésiques inhalés. • Système nerveux. La survenue d’une hypertension intracrânienne peut être prévenue par une hyperventilation. • Rein. Il existe une controverse autour du composé A  : produit de dégradation issu de l’interaction entre le sévoflurane et la chaux sodée (absorbant du CO2). Malgré des preuves biochimiques de lésions rénales rapportées chez des volontaires humains, aucune grande étude clinique n’a fait état d’une augmentation d’insuffisance rénale induite. La recommandation actuelle est de l’administrer avec des débits

de gaz frais d’au moins 2 l/min pour minimiser l’accumulation du composé A. • Foie. Le sévoflurane n’est pas connu pour être hépatotoxique ou entraîner des altérations de la fonction hépatique Protoxyde d’azote • Système cardiovasculaire. In vitro, le protoxyde d’azote a un effet inotrope négatif sur le myocarde. Cependant, des effets dépresseurs sur la fonction cardiaque ne sont pas observés in vivo en raison des effets stimulants sur le système nerveux sympathique. Lorsqu’il est coadministré avec un anesthésique halogéné, il produit une augmentation de la fréquence cardiaque et du débit cardiaque. Au contraire, s’il est administré avec un opioïde, il diminue généralement la pression artérielle et le débit cardiaque. Pour les patients souffrant d’HTAP, l’effet du N2O sur l’augmentation de la résistance vasculaire pulmonaire peut être amplifié. Ce médicament n’est normalement pas utilisé chez ces patients. • Système respiratoire. Le protoxyde d’azote provoque une augmentation modeste de la fréquence respiratoire et une diminution du volume courant chez les patients respirant sans assistance ventilatoire n’impliquant aucun impact sur la ventilation minute ni sur la PaCO2. Il est à noter que même des concentrations faibles de N2O peuvent diminuer la réponse ventilatoire à l’hypoxie. Une surveillance de SaO2 est donc nécessaire pour les patients ayant reçu du N2O, pendant et après son administration. • Système nerveux. Lorsqu’il est administré seul, il peut augmenter significativement le débit sanguin rénal et la pression intracrânienne. En coadministration avec des anesthésiques intraveineux, l’augmentation du débit sanguin cérébral est atténuée voire abolie. Lorsqu’il est associé à un anesthésique halogéné, son effet vasodilatateur sur le système vasculaire cérébral est légèrement réduit. • Rein et foie. Le protoxyde d’azote n’est pas connu pour perturber la fonction rénale et hépatique, ni pour être néphrotoxique ou hépatotoxique.



Chapitre 4. Anesthésiques généraux 101

Tableau 4.5. Principaux effets indésirables des agents anesthésiques généraux. Agents

Principaux effets indésirables

Sévoflurane/ desflurane

- Agitation, confusion, somnolence, sensation vertigineuse, convulsion, hypertension intracrânienne - Bradycardie, tachycardie (sauf sévoflurane), bloc auriculoventriculaire, arythmie cardiaque, hypotension, hypertension - Dépression respiratoire, laryngospasme, bronchospasme. Dépression cardiorespiratoire concentration-dépendante - Nausées, vomissement. Hépatites postopératoires - Néphrotoxicité de l’éther vinylique (métabolite) lors d’une anesthésie longue avec un débit de gaz frais réduit (sévoflurane) - Hyperthermie maligne (tachycardie, acidose mixte, rigidité musculaire, rhabdomyolyse entraînant une insuffisance rénale associée à une hyperkaliémie)

Protoxyde d’azote

- Sensation vertigineuse, maux de tête, augmentation de la pression intracrânienne - Dépression respiratoire (chez les jeunes enfants) - Hypoxie de diffusion à la fin d’une anesthésie (par dilution de l’oxygène, liée à sa faible solubilité dans le sang) : prévenue par une augmentation de la fraction inspirée d’oxygène (FIO2) - Cas décrits de décès par asphyxie due à un manque d’oxygène - Expositions prolongées : carence en vitamine B12 (troubles neurologiques, anémie), troubles de la fertilité, suspicion d’augmentation d’avortements spontanés, et d’effets tératogènes (déconseillé chez la femme enceinte)

Thiopental

- Réactions allergiques, bronchospasme et laryngospasme - Hypoventilation avec apnée de courte durée, hoquet, toux - Nausées et vomissements - Euphorie - Douleur à l’injection et risque de thrombophlébite - Hypokaliémie, hyperkaliémie

Étomidate

- Myoclonie à l’induction de l’anesthésie - Inhibition de la sécrétion de cortisol - Douleur à l’injection et risque de thrombophlébite

Propofol

- Douleur à l’injection, céphalée au réveil - Euphorie, vertiges, mouvements épileptiformes - Bradycardie et tachycardie, hypotension - Apnée transitoire, toux, hoquet, dépression respiratoire dose-dépendante - Syndrome de la perfusion du propofol - Abus et dépendance au propofol, le plus souvent par des professionnels de la santé

Midazolam

- Confusion, agitation, agressivité (réaction paradoxale, personnes âgées, enfants) - Mouvements involontaires - Sédation prolongée, amnésie prolongée, somnolence - Bradycardie, arrêt cardiaque - Dépression respiratoire, apnée, laryngospasme, hoquet - Dépendance, syndrome de sevrage

Kétamine

– Effets hallucinogènes, anxiété, dysphorie – Mouvements toniques, augmentation de la pression intracrânienne – Augmentation de la fréquence cardiaque et de la pression artérielle – Dépression respiratoire, laryngospasme

Dexmédétomidine

- Troubles de la glycémie - Agitation, hallucinations - Bradycardie, ischémie myocardique, hypotension, hypertension - Syndrome de sevrage

Fentanyloïdes - Rigidité musculaire, myosis, constipation, rétention urinaire (fentanyl, alfentanil, - Nausées, vomissements, prurit, spasme du sphincter d’Oddi sufentanil, - Dépression respiratoire (en cas de surdosage) rémifentanil)

102

Pharmacologie des médicaments de la douleur

Source de la variabilité de la réponse : interactions médicamenteuses Tableau 4.6. Principales interactions médicamenteuses. Agents

Interactions médicamenteuses pharmacocinétiques et pharmacodynamiques

Sévoflurane/ Desflurane

+ protoxyde d’azote : CAM du sévoflurane diminuée + benzodiazépines et opiacés : diminution de la CAM du sévoflurane + bêtabloquant : renforcement de l’effet inotrope, chronotrope et dromotrope négatif + adrénaline : effet arythmogène + médicaments sympathomimétiques indirects (amphétamines, éphédrine) : hypertension aiguë + vérapamil : trouble de la conduction auriculoventriculaire + millepertuis : hypotension sévère et un réveil retardé + curare : potentialisation du bloc neuromusculaire + inducteurs de CYP2E1 (isoniazide, alcool) : augmentation du métabolisme du sévoflurane et hausse possible des concentrations plasmatiques en fluor + Isoniazide : potentialisation de l’effet hépatotoxique de l’isoniazide

Protoxyde d’azote

+ gaz ophtalmiques (SF6, C3F8, C2F6) : complications postopératoires graves entraînant une augmentation de la pression intraoculaire aux effets délétères : contre-indication + médicaments à action centrale (opiacés, benzodiazépines) : potentialisation des effets hypnotiques + médicaments interférant avec le métabolisme de la vitamine B12 et/ou des folates : potentialisation de l’inactivation de la vitamine B12 par le protoxyde d’azote

Thiopental

+ médicaments dépresseurs du SNC (opiacés, benzodiazépines) : potentialisation des effets dépresseurs, dépression respiratoire + médicaments se liant aux protéines plasmatiques : augmentation de l’effet du thiopental Attention : le thiopental est un inducteur enzymatique (réduction de l’efficacité des anticoagulants oraux, contraceptifs oraux et corticoïdes) Incompatibilité médicamenteuse : ne pas mélanger avec d’autres substances dans les solutions pour injection. Pas d’administration concomitante

Étomidate

+ médicaments à action centrale (opiacés, benzodiazépines, alcool, neuroleptiques) : potentialisation des effets hypnotiques et majoration de la dépression centrale (notamment respiratoire) + alfentanyl : diminution de la demi-vie terminale de l’étomidate + fentanyl IV : diminution de la clairance plasmatique et du volume de distribution de l’étomidate. Diminuer la posologie en étomidate en cas de coadministration + vérapamil : majoration de l’effet hypotenseur et trouble de la conduction auriculo-ventriculaire + IMAO : interrompre le traitement 2 semaines avant la chirurgie

Propofol

+ rifampicine : cas d’hypotension profonde suite à l’induction de l’anesthésie au propofol chez les patients traités par la rifampicine + benzodiazépines, parasympatholytiques ou anesthésiques volatils : allongement de la durée de l’anesthésie et diminution de la fréquence respiratoire + médicaments dépresseurs du SNC (opiacés, benzodiazépines) : potentialisation des effets dépresseurs, sédatifs et majoration des risques de dépression respiratoire + médicaments de prémédication, anesthésiques volatils ou analgésiques : potentialisation de l’anesthésie et des effets indésirables cardiovasculaires + fentanyl : potentialisation des effets dépresseurs et sédatifs + suxaméthonium ou néostigmine : bradycardie, arrêt cardiaque + valproate : en cas d’administration concomitante, la dose de propofol doit être réduite

Midazolam

+ inhibiteurs du CYP 3A4 : antifongiques azolés, macrolides, inhibiteurs des protéases mais aussi les inhibiteurs calciques, fentanyl, propofol, aprépitant, atorvastatine : augmentation des concentrations plasmatiques en midazolam + inducteurs du CYP3A4 : rifampicine, carbamazépine, phénytoïne, millepertuis : réduction de l’exposition au midazolam + médicaments sédatifs (benzodiazépines, opioïdes) : augmentation du risque de sédation, de dépression respiratoire, de coma et de décès : effet dépresseur cumulatif sur le système nerveux central

x

x

Agents

Chapitre 4. Anesthésiques généraux 103

Interactions médicamenteuses pharmacocinétiques et pharmacodynamiques

Kétamine

+ barbituriques ou opiacés : phase de récupération prolongée + atracurium : potentialise le blocage neuromusculaire (dépression respiratoire avec apnée) + anesthésiques halogénés : - augmente la demi-vie d’élimination de la kétamine : retarde la phase de récupération - augmente le risque de bradycardie, d’hypotension ou de réduction du débit cardiaque + thiopental : la kétamine peut antagoniser l’effet hypnotique du thiopental + hormones thyroïdiennes ou sympathicomimétiques : risque d’hypertension artérielle et une tachycardie + hypotenseurs : risque majoré d’hypotension + théophylline : abaissement du seuil épileptogène

Dexmédétomidine

+ anesthésiques, sédatifs, hypnotiques et opioïdes : potentialisation des effets sédatifs, anesthésiques et cardiorespiratoires + inhibiteurs CYP 2B6 et inducteurs CYP1A2, 2B6, 2C8, 2C9 et 3A4 : potentielles interactions observées in vitro + bêtabloquants : possible majoration des effets hypotenseurs et bradycardisants

Fentanyloïdes (fentanyl, alfentanil, sufentanil, rémifentanil)

+ morphiniques agonistes-antagonistes : nalbuphine, buprénorphine, pentazocine : diminution de l’effet antalgique par blocage compétitif des récepteurs + naltrexone : diminution de l’effet antalgique + alcool : majoration de l’effet sédatif des analgésiques morphiniques + anticonvulsivants inducteurs enzymatiques (carbamazépine, phénobarbital, fosphénytoïne, phénytoïne, primidone) ou rifampicine (inducteur puissant du CYP3A4) : diminution des effets antalgiques + crizotinib majoration de la toxicité du fentanyl par diminution de son métabolisme et/ou augmentation de sa biodisponibilité + inhibiteurs puissants du CYP3A4, macrolides, antifongiques azolés, inhibiteurs de protéases sauf rémifentanil pour les interactions pharmacocinétiques car son métabolisme n’est pas dépendant des cytochromes P450 hépatique : augmentation des effets antalgiques, risque de dépression respiratoire grave

Principales indications (exemples) Propofol Le propofol est actuellement l’agent hypnotique intraveineux le plus largement utilisé au bloc opératoire. Son délai et sa courte durée d’action justifient l’attrait des anesthésistes pour cette drogue. Il permet en effet un contrôle facile du niveau d’anesthésie et un réveil généralement rapide. Son utilisation doit être prudente sur terrain fragile (sujets âgés, cardiopathie sous-jacente) en raison d’une hypotension artérielle dose-dépendante multifactorielle attendue : baisse des résistances vasculaires systémiques, baisse de la précharge cardiaque ralentissement de la fréquence cardiaque par inhibition du baroréflexe aboutissant à une baisse du débit cardiaque. Il est indiqué en induction et entretien en anesthésie et en réanimation, induction et entretien de l’anesthésie sous AIVOC, sédation au cours d’actes sous anesthésie locale ou locorégionale.

Étomidate L’étomidate est l’agent hypnotique intraveineux recommandé lors d’inductions anesthésiques pour patients à risque cardiovasculaire et/ou en situation d’instabilité hémodynamique.

Thiopental • Induction en séquence rapide. • Induction et entretien en cas : – d’état de mal épileptique réfractaire (objectif EEG : burst suppression) ; – d’hypertension intracrânienne réfractaire.

Kétamine • Induction en cas d’état de choc. • Induction et entretien si : – grand brûlé ; – asthme aigu grave.

104

Pharmacologie des médicaments de la douleur

Midazolam • Prémédication. • Sédation longue durée en réanimation.

Curares Curare dépolarisant La succinylcholine est le seul représentant de la famille des curares dépolarisants. C’est un agoniste non compétitif des récepteurs à l’acétylcholine. Sa fixation au récepteur post-synaptique entraîne l’ouverture prolongée du canal ionique sodique et une dépolarisation de la plaque motrice, provoquant des fasciculations transitoires descendantes caractéristiques. Ses propriétés physicochimiques font de la succinylcholine le curare de choix des inductions en séquence rapide (estomac plein à risque d’inhalation). En effet, le délai d’action est estimé à 30-60 secondes et la durée d’action à 5 à 10 minutes. Le métabolisme est assuré par les pseudo-cholinestérases plasmatiques et l’élimination est urinaire. Ses contre-indications sont multiples : hypersensibilité, antécédents d’hyperthermie maligne, déficit en pseudo-cholinestérases, situations favorisant la up-régulation du récepteur (alitement prolongé, syndrome de dénervation supérieur à 48  heures), risque d’hyperkaliémie. Notez qu’aucune molécule ne permet l’antagonisation de la succinylcholine.

Curares non dépolarisants Les curares non dépolarisants sont des antagonistes compétitifs des récepteurs à l’acétylcholine. Leurs fixations sur une des deux sous-unités α des récepteurs à l’acétylcholine entraînent un blocage du même récepteur en position fermé. On considère que l’occupation d’au moins 75  % de ces récepteurs permet une baisse de la force musculaire et que l’occupation de plus de 92  % de ces récepteurs provoque un blocage complet. On distingue les curares de type aminostéroïdes dont le principal représentant est le rocuronium (l’utilisation du pancuronium et

du vécuronium étant devenue obsolète) et ceux du type benzylisoquinoline davantage utilisés au bloc opératoire  : atracurium, cisatracurium et mivacurium. L’ensemble de ces curares sont antagonisables par la néostigmine qui est un inhibiteur de l’acétylcholinestérase plasmatique. Sa liaison avec l’enzyme empêche son activité d’hydrolyse, potentialisant ainsi la concentration d’acétylcholine dans la fente synaptique. Par un effet compétitif, le curare non dépolarisant est délogé des récepteurs à l’acétylcholine, réduisant alors l’effet de myorelaxation. Rocuronium Le rocuronium est un curare non dépolarisant type aminostéroïde. Son délai d’action rapide (1 minute) dose-dépendante justifie son utilisation en cas de contre-indication à la succinylcholine. L’autre intérêt de cette molécule est la réversibilité de ses effets quelle que soit la profondeur du bloc musculaire par le sugammadex (agent encapsulant). En ce sens, le rocuronium pourrait être privilégié en cas d’intubation jugée difficile voire impossible. Le métabolisme de cette molécule est assuré par le foie. Atracurium/cisatracurium L’atracurium et le cisatracurium sont des curares non dépolarisants type benzylisoquinoline. L’élimination de ces deux molécules est assurée par la voie de Hoffman essentiellement mais aussi par des estérases non spécifiques. L’élimination étant indépendante du foie et du rein ; leur utilisation est donc possible chez l’insuffisant rénal et hépatique. Le choix initial du curare tient compte essentiellement de deux critères : le délai d’installation et la durée d’action. Les patients dits «  estomac plein  » sont à risque d’inhalation bronchique lors de l’induction anesthésique. Sont concernés le patient polytraumatisé, les troubles de conscience, la pathologie abdominale aiguë ou chronique, l’obèse, le reflux gastro-œsophagien symptomatique, la hernie hiatale, la gastroparésie diabétique et la femme enceinte (> 20 SA). Afin de réduire l’incidence de cette complication, il est recommandé de réaliser une séquence d’induction

«  rapide  » afin de sécuriser sans délai les voies aériennes supérieures. Cette séquence fait intervenir un hypnotique IV à délai d’action court (étomidate, propofol, kétamine) et un curare d’action rapide (succinylcholine, rocuronium). La succinylcholine est le curare de choix pour cette indication  : curarisation rapide (< 1 minute) et durée d’action brève permettant la reprise rapide de la ventilation spontanée en cas de difficulté d’intubation. En cas de contre-indication à la succinylcholine, le rocuronium à une dose supérieure ou égale à 1 mg/kg constitue l’alternative. À cette posologie, la durée d’action est prolongée, supérieure à 90 minutes. En l’absence d’estomac plein, il convient d’utiliser un curare d’action plus ou moins longue, en tenant compte de la durée prévisible de la chirurgie : atracurium, cisatracurium, rocuronium (durée d’action intermédiaire) et mivacurium (durée d’action courte). La curarisation peut être prolongée au moyen d’injections répétées ou d’une perfusion continue. L’atracurium et le cisatracurium sont les curares de choix lors d’une insuffisance rénale ou d’une insuffisance hépatocellulaire. Le mivacurium est à quant à lui à privilégier lors d’actes courts (20 à 30 minutes). Quel que soit le curare utilisé, il est recommandé de monitorer la profondeur de curarisation afin de s’affranchir d’une curarisation résiduelle au réveil du patient.

Spécificités liées au terrain Quelle que soit l’anesthésie pratiquée, le médecin anesthésiste-réanimateur doit faire preuve de bon sens et choisir les drogues d’anesthésie en tenant compte des propriétés pharmacocinétiques de chacune d’elles (liposolubilité, pourcentage de fixation aux protéines plasmatiques, métabolisme, élimination), du terrain, et des éventuelles interactions (voir tableau 4.6).

Sujet âgé Le vieillissement de la population est responsable d’une augmentation inéluctable du nombre

Chapitre 4. Anesthésiques généraux 105

d’actes anesthésiques chez le sujet âgé. Le vieillissement physiologique est variable d’un individu à l’autre. L’âge chronologique n’est donc pas toujours un bon indice de l’âge physiologique. Classiquement, on note une fragilisation physiologique, une polypathologie et une polymédication chez le sujet âgé ; lesquelles ont une influence sur la pharmacocinétique et la pharmacodynamie des agents anesthésiques ainsi qu’une probabilité élevée d’interactions médicamenteuses (pharmacocinétiques et pharmacodynamiques). Le vieillissement s’accompagne d’une diminution de la masse maigre et de l’eau corporelle totale au profit du tissu adipeux. Les agents très liposolubles ont donc un plus grand volume de distribution à l’équilibre, ce qui tend à abaisser leur concentration plasmatique, allonger leur demi-vie et retarder leur élimination. A contrario, on note une diminution du volume de distribution des agents hydrophiles. Le volume du compartiment central est également diminué de 20 à 30 %, ceci se traduisant par une concentration plasmatique initiale plus élevée pour une même dose. Chez ces mêmes patients, la diminution des protéines plasmatique associée aux interactions médicamenteuses, participent à l’augmentation de la fraction libre du médicament. Le métabolisme hépatique est altéré par le vieillissement : baisse de la masse et du débit sanguin hépatiques avec altération des réactions de phase I (pas d’effet sur les réactions de phase II). Aussi, on décrit une réduction du débit de filtration glomérulaire, limitant les capacités d’élimination rénale des médicaments et de leurs métabolites. Comme il y a une augmentation de la sensibilité et de la réponse pharmacologiques concomitamment à une diminution des capacités des systèmes de compensation, les besoins en agents anesthésiques chez les personnes âgées sont réduits. La concentration alvéolaire minimale des agents volatils décroît d’ailleurs linéairement avec l’âge. Le bon sens préconise une titration des agents anesthésiques, une réduction des posologies et une augmentation de l’intervalle d’administration. Un monitorage strict est nécessaire avec surveillance de la profondeur d’anesthésie (BIS) et plus que jamais des effets hémodynamiques induits.

106

Pharmacologie des médicaments de la douleur

Obèse Les agents anesthésiques agissent par définition au niveau du système nerveux central. Le passage de la barrière hématoencéphalique suppose un degré de lipophilie suffisant pour atteindre le site d’action cérébral. L’évolution des concentrations au site d’action dépend à chaque instant de la diffusion au système nerveux central, de la distribution, elle-même fonction du débit de perfusion d’organes, des capacités de métabolisation et d’élimination. La physiopathologie complexe de l’obèse est susceptible d’influencer chacune des étapes. Lors d’une injection intraveineuse, seule une infime fraction de la dose circulante diffuse au niveau du système nerveux central. De plus, seule la fraction libre est diffusible. Chez l’obèse, l’alpha-1-glycoprotéine est souvent augmentée  ; résultant en une diminution de la fraction libre du médicament, avec pour conséquences un retard de diffusion au site d’action et d’apparition des effets. Le métabolisme hépatique est rarement altéré par l’existence d’une stéatose hépatique (fréquente chez l’obèse) ; l’effet d’une diminution de l’activité enzymatique hépatique étant limité par l’augmentation du débit sanguin porte. En outre, l’augmentation du débit cardiaque global entraîne une élévation du débit de filtration glomérulaire (augmentation du débit sanguin rénal) sans réelle influence sur les agents anesthésiques, pour la plupart métabolisés par le foie. Les modifications des volumes de distribution induites par l’obésité sont multifactorielles. Une augmentation de la masse grasse, supérieure à celle de la masse maigre est attendue. D’autre part, on note une augmentation du volume du compartiment central. La distribution des agents dans le tissu adipeux dépend de leur liposolubilité (caractérisé par le coefficient P de partage octanol/eau). Les agents très lipophiles sont stockés dans le compartiment adipeux de volume augmenté. À l’inverse, les agents hydrophiles ont un petit volume de distribution, puisque distribués dans une masse maigre proportionnellement plus faible chez l’obèse. Ces modifications pharmacocinétiques conduisent à privilégier des agents peu liposolubles. L’administration en AIVOC est intéressante mais sa

validation est limitée aux IMC