La Fortune de Karol: marché de la terre et liens personnels dans les Abruzzes au haut Moyen Âge 272830730X

Prenant place dans une étude plus large sur le fonctionnement du marché foncier durant le haut Moyen Âge et la formation

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La Fortune de Karol: marché de la terre et liens personnels dans les Abruzzes au haut Moyen Âge
 272830730X

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MARCHEDE LA TERREET LIENSPERSONNELS DANSLESABRUZZESAUHAUTMOYENÂGE

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Laurent

FKI.i,EK, Agnês GRAMAIN

et Florence 'BEBER

LA FO]RTUNE DE mROL MARCHÉ DE LA TERRE ET LIENS PERSONNELS

DANSLES ABRUZZESAU HAUTMOYEN AGE

Prenant plane dans une étude plus large

sur le foncLionnement du marchéfoncier durant le haut Moyen Âgeet la formation des prix et leur évolution sur le long ter me (850-1050), Z,a $oríulle de raro/ se concentre sur I'étude des relations person-

nelles dans lesquelles s'inscrivent la vente et I'achat, et vers la compréhension des dif-

férents cadres sociaux des transactions effectuées.

IJessentielde ce livre se construit autour d'un dossier à tous égards exceptionnel, peut-être même unique, celui des affaires de Karol fiasde Liutprand. ll s'agit d'un personnage qui a vécu dans les Abruzzes entre 840 et 870 environ et qui a laissé une trace

documentaire importante. Le dossier le concernant directement ou indirectement comporte une centaine d'actes de ventes, d'échanges,de notices de plaids qui éclairent non seulement la vie et la carriêre de ce personnage, mais aussi les communautés à I'intérieur

desquelles lui-même et ses des-

cendants ont vécu. En portant I'attention sur cet homme, sur ses parents, ses voisins et amas, on a pu reconstruire

les réseaux

d'un petit notable et le monde dans lequel

évoluent Karol et les membres de sa famille que I'on suit sur quatre générations Le triple point de vue de I'historien, de I'économiste et du sociologue permet de retrou ver le sens des stratégies fonciêres et fami-

liales de Karol et d'éclairer la rationalité de ses actions. Karol a cherché à s'élever et à enrichir sa lignée en se servant de sescapacités économiques, de sesréseaux et de ses

alliances. ll a échoué. C'est grâce à son échec et à I'intégration des maisonnées de ses enfants dans la dépendance de I'abbaye

de Casauria que ses archives naus ont été transmises : une vie réussie ne laisse pas de

tracei dans ce contexte.Le dossiernous informe, fínalement, sur les processus de

mobilité sociale et leurs limites dans le monde carolingien à un échelontrês peu éclairé par la documentation comme par

I'historiographie, celui de la notabilité rurale

ISSN 0223-5099 ISBN 2 7283-0730-X

COLLECTION DE L'ÉCOLE FRANÇAISE DE ROME 347

LAURENT FELLER, AGNÊS GliAMAIN ET FLORENCEWEBER

LAFORTUNEDEKAROL MARCHE DE LA TERRE ET LIENS PERSONNELSDANSLESABRUZZES AU HAUT MOYEN AGE

ÉCOLE FRANÇAISEDE ROME 2005

Feller, Laurent.1955haiit

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arché de la terre et bens personnels

ISBN 2-7283-0730-X

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AVERTISSEMENT

ançaise de Rome, ISSN 0223-5099; 347)

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dans les Abruzzes

assede Rome 2005er, Agnês Gramain et Florence Weber. -- Rime :

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Bibtiothêqtle de I'Écote française de Robe

Le texte que naus présentons a été élaboré dans le cadre d'un programme du LAMOP de Paris-l, UMR 8589, portant sur le marché de la terre au Moyen Âge, qui a donné lieu à deux réunions scientifiques, la premiêre en 1999 à la fondation des Treilles, à Tourtour dans le Var, la secondeen 2001 à Saint-Lambert-des-Bois en région pansienne. Lors de la rencontre de 1999, des introductions présentaient I'état de la réflexion desuns et desautres au moment de la réunion. On n'a pas cru bon de toucher à ces textes,publiés en dignesur le site du LAMOP (Université de Paris 1) : ils présentent en quelque sorte un intérêt archéo]ogiqueet proposent ]e cadre qui a, ensuite, guídé ]a collaboration de notre petit groupe de travail. En 1999,d'autre part, Agnês Gramain et Laurent Feller ont éla-

boré une analyseéconométrique ou utilisant les méthodesde I'économétrie - des documents du cartulaire de Saint-Clément de

Casauria. Celle-ci a été poursuivie et approfondie entre 1999 et 2001, en même temps que, avec Florence Weber cette bois,I'étude était dé. sormais dirigée vensle dossier des actes relatifs à Karol fíls de Liutprand et aux membres de sa famille. Cette secondepartie du travail a donné lieu à une communication à trois voix à Saint-Lambert. Les deux recherches, nécessairement complémentaires, ont été synthétiséesdans le texte que nous présentons. Bien évidemment, chacun a son champ de compétences propres

et I'a conservé.Un historien spécialistedu haut Moyen Âge,une

© - École

française

de Rime

ISSN 0223-5099 ISBN 2-7283-0730-X

- 2005

économiste spécialiste d'économétrie de la santé, une sociologue spécialiste d'ethnographie de la parenté contemporaine : nous avons fait teus trois le pari du travail collectif, ce qui n'allait pas de soi. Les intérêts scientifiques, les logiques propres de chacun de nos laboratoires, ce que ]'on pourrait appe]er aussi ]es intérêts de carriêre auraient plutât dü nous détoumer de I'entreprise. Elle a pourtant été passionnante et pour tous trois fortement dépaysante. Nutre objectif premier est scientifique. Chacun de nous a senti, à peu prós au même moment, que sa discipline, histoire, économie, sociologie, était incomplête si elle ne tenait pas compte des acquis des deux autres. Plus encore, nous partageons une conviction : pour améliorer la connaissancedes sociétéshumaines et de leur histoire,

LAFORTUNE DEKAROL

LAFORTUNE DEKAROL

2

il faut paire convergernos disciplines, constituer, au-delàdesspécialisations, une science sociale.Vieux projet porté d'abord par la philosophie, avec Comte et Maré, puis par la sociologie avec Durkheim et Weber et par I'histoire avec I'école des Annales, repris depuis vinga

ans par diversesbranches de la science économique. Vieux projet toujours d'actualité, rendu plus difflcile et plus urgent par les progrês de nos disciplines. 11n'y a rien là au fond que de três orthodoxe sinon de três banal. Les limites floues de I'actuei et de I'inactuel, la compréhension du présent par I'étude du passé, la connaissancedu passépar I'intelligence du présent : tout cela renvoie au programme de Marc Bloch et, par delà, à la nécessitéde réaffirmer I'unité profonde des sciences de I'hommei Paradoxalement,

nous sentons I'objectif aujourd'hui

à portée de

la main, à condition de ne pas oublier en route les acquis des périodes précédentes.

Notre tentative a été modestedans sa réalisation : un seul document, deux méthodescomplémentairesde traitement de ce document, s'appuyant sur I'acquis de la critique historique et la remettant parfois en cause. La tentative est cependant ambitieuse dans ses objectifs. Nous avons voulu montrer qu'une telle coopération était possible et nous espéronsqu'elle a été fructueuse. Nous offrons au lecteur, pas à pas, tous les moyens de contrâler les différentes étapes de notre entreprise. Nous ]ivrons ]e document, ]e codage, la modélisation statistique et les généalogies.Nous souhaitons être discutés et repris, persuadés que I'entreprise est reproductible et qu'elle será dé-

passée.Notre objectif est avant tout d'apporter un élément de réflexion qui prenhe sa place, par déHnition éphémêre, mais peut-être active, dans le dialogue dynamique qu'entretiennent nos disciplines. Un second enjeu de notre recherche a émergéchemin faisant, à notre grande surprise. Deux membres du groupe, Agnês Gramain et Florence Weber, sont spécialistesdu contemporain. Elles ont d'abord été attirées par le caractere exotique de la situation abruzzaise au IX' siêcle. Mais les questions soulevéespar la documentation faisaient écho à leurs propres incertitudes sur I'avenir. Elles ont découvert une étrange contemporanéité à I'histoire du Moyen Age. Cette sociétéinstable, cette période troublée, aux confins d'un empire fra-

gile; le poids des multiples dépendancesinterpersonnelles;la

complexité de la circulation monétaire; les bens entre statut social, appartenance ethnique et pouvoir politique; I'imbrication des mar-

l M. Bloch,

1964,P. 9-16.

.4po/ogie tour

/';zisroíre OH méríer d';zfsfoden,

5' édition,

Paria

période contemporatne.

3

INTRODUCTION

À I'origine de la recherche présentéeici se trouve la question de la formation du prix de la terre au Moyen Âge. Existe-t-il alors un prix de marché indépendant des relations personnelles entre les partenaires de la transaction? Au contraire, les relations personnelles, dês qu'elles existent, jouent-elles un rale dana la formation des prix, voire interdisent-elles de parler de marché'? Dans ce domaine, une hypothêse fort ancienne consiste à opposer deux «mondes hostiles »2.celui du marché par essenceimpersonnel voire abstrait et ce lui de la chaleur ou de la violence des relations interpersonnelles. L'oeuvrede Polanyi reposait tout entiêre sur I'idée que la naissance, au XVlll' siêcle, de ]'économie de marché était concomitante de ]a naissance de la science économique. Elle a conduit à opposer un avant et un aprês I'avênement du marché, déniant toute légitimité à la science économique pour étudier ]es périodes anciennes ou ]es

lieux restéshors de la modemité oü la sphêreéconomique,d'aprês lui, est «encastrée» dans la société. Symétriquement, Polanyi déniait toute légitimité

aux autres sciences sociales pour analyser le t utaaomm ablmttnDMTaaõt.nü:w.rhihcl% tlürtoq&qpu$aú'&qndllbd

(deuxiême partia)

Fig. 1 - Le cartulaire de Casauria: structure générale.

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Fig. 2

Reproduction d'une pagedu manuscrit (fo1.33v')

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LAFORTUNE DEKAROL

immédiatement la fondation (ccz870-ca 880) et sur les décennies pour lesquelles les munímína sont particuliêrement nombreux, c'est-à-durepour les années 950-1050.Entre 890 et 950 se trouve une lacune documentaire tour à fait habituelle pour I'ltalie. Elle est liée à I'ampleur des troubles politiques et sociaux ayant alors frappé la péninsule. Cela fait que naus disposons de deux dossiers ou, si I'on préfêre, de deux sériesdistinctes. Les documents de la période 9501050,toutefois, se prêtent parfaitement à une étude de I'évolution chronologique

des prix (chapitre l).

L'échelle de temps retenue et le problême étudié, le fonctionnement formei du marché de la terre, laissait dans I'ombre un grand nombre de problêmes. Pour les traiter efficacement, c'est-à-dure pour traiter des questions d'histoire sociale liées aux cessions fonciêres,on a changé de focale et étudié le dossier três denseconcernant Karol fils de Liutprand (secondepartie). Aprêsavoir présentéle dossier (chapitre 2), on s'est intéressé aux aspects proprement

so-

ciaux des transactions portant sur la terre (chapitre 3), avant d'aborder la question des relations existant entre les stratégies familiales et les stratégies fonciêres (chapitre 4).

LE PRIX DE LA TERRE, IX'-XI' SIÊCLES

Nous sommesen présenced'une sourceunique qui nous permet d'envisagerI'étude de I'évolution du prix de la terre sur une longue période puisqu'elle contient I'enregistrement de plusieurs centaines de transactions fonciêres sur trois siêcles. Une forte majorité d'entre elles comporte les informations nécessairespour reconstituer un prix unitaire de la terre. Disposer d'une telle série doit permettre de s'interroger sur et de chercher les motins de cette évolution qui soient internes à la structure du marché et qui aillent donc au-delà d'un pur problême d'inflation. L'une des particularités du monastêre de Casauria réside en effet dans le mode de constitution de son patrimoine : aucune donation n'a été faite au monastêre lors de sa fondation et c'est par achat que le premier abbé Romain, a construit le patrimoine foncier du monastêre. Des sommes considérables ont ainsi été dépenséesen quelques années(entre 873 et 884) et sur un territoire três étroit. La fondation du monastêre s'est donc traduite par I'apparition soudaine sur le marché foncier d'un nouvel acteur doté de moyens à I'é vidence sans commune mesure avec ceux des autres opérateurs locaux. Le cartulaire qui comporte aussi bien les actes d'achats du mo-

nastêre que les actes d'achats effectués antérieurement par des laTcs sur les mêmes biens (ou partie d'entre eux) apporte une source d'informations précieuse pour s'interroger sur les transformations que cette nouvelle donne peut avoir provoquées, en particulier sur la structure et le fonctionnement du marché de la terre, et permet de comparer plusieurs types d'acheteurs três différents.

ORGANISATION DE LA DOCUMENTAT10N LES TRANSACTIONS FONCIÊRES AUTOUR DE SAN CLEMENTE A CASAURIA

(IX'-Xll'

SÍÜCI.ES) ET LUS UiAiS DE SOURCES

Du point de vue documentaire deux plages chronologiques doivent être distinguées, un IX' siêcle breu (850ca-900) et la période 950-1075. Les dossiers qui les informent ne sont pas tout à fait structurés de la même maniêre. Le IX' siêcle est caractérisé par une prédominance absolue des actes de vente sur les autres types de trans-

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LAFORTUNE DE KAROL

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LE PRIX DE LA TERREí IX'-XI' SIÊCLES

ferts fonciers, qu'il s'agissede ventes entre particuliers ou des acqui-

sitjons de Casauria,.tandis que ]a période 950-1075apparaít beaucoup paus n.ormale:.si I'on ose dire, puisque donation$ pré caíres et ventes s'y équilibrent à peu prós. Pour les actes du IX' siêcle. on distingue deux topes d'opérateurs fonciers. La premiêre partie du cartulaire regroupe des transactions entre personnes privées provenant de I'historique de propríété des teres achetéespar ]e monastêre, a]ors que ]a secondepartie ne comporte que des actes postérieurs à 873, date de la fondation de Casauria: oü le monastêre intervient justement comme acheteur. Les actes du IX' siêcle contenus dans la premiêre partie sont presque toujours antérieurs à 873 mais il existe probablement un lé. ger recouvrement des deux périodes impossible à mesurer du fait de I'imprécision des datations des actes de la premiêre partie. Pour ce qui est des actes des X'-XI' siêcles, ils concement tous des ventes entre personnespyvées provenant de I'historique de propriété des terresdonnéesin/7ne au monastêre. ' '''' Le Tableau l indique la répartition des transactions étudiées.

comté de Penne et ceux du comté de Chieti:. La raison de cette pré sentation est que, au IX' siêcle, le Pescarasemble avoir fonctionné comme une frontiêre. Le duché de Bénévent s'est en effet étendu jusqu'à ce fleuvejusqu'en 801.A cette date, Pépin opéra une rectification de frontiêre, déplaçantle conHn méridional du royaume d'ltalie d'environ 100 km et le plaçant sur le Trigno. Le Chiétin est alors une région en cours de peuplement et il n'était pas inintéressant de se demander si cela a eu une incidence sur la valeur des teues3 En croisant la plage chronologique et le type d'opérateur avec ce critêre de localisation assezgénéral, on obtient donc six catégories d'observations(voar

Tableau 2). Tableau 2

RÉPARTITION DE L'ENSEMBLE DES TRANSACTIONS DU CARTULAIRE SELON LA PERIODE ET LE TYPE D'OPÉRATEUR Période

Effectif Type de transaction

Tableau l A4unímína

REPARTITION DE L'ENSEMBLE DES TRANSACTIONS DU CARTULAIRE' SELON LA pÉRIODE ET LE TYPE D'OpÉRATEUR Période

[nstrumentaüum (achats du monastêre)

Total X'-XI' siêcles

/nsfrumenradum

Effectif (ventes entre particuliers)

IX' siêcle

IX' siêcle

(achats du monastêre) X'-XI. siêcles

279

Ventesentre particuliers

Ventes entre particuliers

Comté de Penne

25

81

22

35

104

223

Seuls]es actesmentionnant prix et surface sont utilisés ici

98

377

(ventes entre particuliers)

Comté de Chieti

Dans beaucoup de cas, I'acte offre une description incomplête de la transaction, le bien cédé étant seulement évalué, sans qu'au-

cune indication de surface ou d'éléments matériels ne soient Quoique les documents du cartulaire couvrent I'ensemble des Abruzzes, les données ne permettent d'isolei que deux pentes régions

qui se prêtent à une exploitation statistique propre : ]es comtésde Penne et de Chieti,.de part et d'autre du fleuve Pescara, dans la zone de piedmont et de bassescollines séparant la dorsale apennlne de la mer Adriatique. Les autres parties de la région sont beaucoup trop irréguliêrement

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- documentée' ,.,

"' '''----'' " -l' spourpouvoirdonnerlieuàuneanalyse

statistique, même élémentaire. Pour chacune des trois catégories de transactions déjà envisagées,nous avons donc distingué les actesdu

donnés. Les données exploitables quantitativement pour étudier le prix de la teme ne constituent dono qu'une partie de I'ensemble des

700 actes de vente du cartulaire. On remarque immédiatement que le critêre retenu est plus ou moins sélectif selon les catégories d'observations: alors que I'on conservela totalité des actes des X'-XI' siêcles, on perd environ la moitié des achats opérés par le monastêre lors de sa fondation et prós des deux tiers des actes de ventes entre particuliers antérieurs à 873. 2Dans les tableaux suivants. les résultats tOtRuxrenvoient à I'ensemble des actes et ne sont donc pas égaux à la somme des deux séries des comtés de Penne

la secPar convention.fon appellera la premiêre partie du cartulaire À4anímína et

et de Chieti. 3L. Feller, Zzs 4bruzzesmédíéva/es...,p. 342-349. Les tableaux que I'on trouvera ci-aprês ont été, pour la plupart, publiés dans cet ouvrage, p. 388 et suiv.

3

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LAFORTUNE DEKAROL LE PRIX DE LA TERRE, ]X'-Xl- SIÊCLES

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LE MOUVEMENT DU PRIX DE VENTE DE LA TERRE

ENTRE LE IX.e ET LE X.Ie SIÊCLE: UNE APPROCHEARITHMÉTIQUE

À ce stade, quelques définitions s'imposent pour assurer la clarté de I'exposé. La /erra in curve désigne de la terre enclose. ll s'agit en

général de terrains sur lesquels se trouvent les maisons. C(Iões-ci sont toutefois dissociéesde la terre qui les porte dans teus les actes. Propriété du sol et propriété .du bati peuvent être disjointes. ll n'y a rien là de três étonnantjuridiquement parlant. L'un despoints à vérifier est celui de la valeur comparée des maisons et de la terre. Les

maisons ont-elles une valeur particuliêre due au prix de leur construction comme à I'ensemble des valeurs pouvant s'accrocher à elles, ou bien ne valent-elles rien? Sont-elles des «maisons pour rien )}? La vigne, enfin, est décrite d'une façon particuliêre, puisque sa surface n'est pas directement donnée dans une unité de surface géométrique, mais en nombre de sous. Nous verrons plus bas les raisons d'un te] systême.

Les actes transmis pour les X' et XI' siêcles sont, pour leur part:.beaucoup .moins riches de données. lls sont surtout paus stan-

dardisés,ce qui aboutit à la disparition de la plupart des données autres que la surface et le prix. Passéela période de la fondation. I'insfrumen/arfam est pauvre en actes de vente. Les mouvements fonciers enregistrés par .le cartulaire sont alors de deux types. D'a-

bord, à.partir de 950 environ,les terres sont mobi]iséesdans ]e cadre de I'ambitieuse

est le bénéficiaire de donations en grand nombre. Comme on pouvait s'y attendre, d'ailleurs, la donation devient le mode normal d'acquisition des teres, rendant plus difficile I'interprétation de la

:tcluts de Casauria entre 873 et 889 (donnéescumutées)

Chieti Total

des abbés.

ACTES DU CARTULATREDE CASAURIA AU IX' SIÊCLE

1118sous 233seus 1351sous

Penne

d'«incastellamento»

D'autre part, à partir des années 1020, et jusque vers 1050, Casauria

Prix

Comté

politique

Tableau 3

Surface de ferra

In curto

33 muids 22 muids 55 muids

Nombre de

Surface de

maisons

terre arable

13

668 muids 444 muids 1112 muids

2 15

Surface de vigne

Prix

252 sous 246 sous 498 sous

1114seus 855 sous 1969sous

politique fonciêre de I'établissement. L'analyse de ces mouvements

ne nous entraínerait pas vraiment hors de notre sujet mais nous contraindrait à.en étendre de façon considérab]e ]a définition puis qu il faudrait alors analyser le marché des contrats agraires et, par voie de conséquence,celui de la rente : nous nous en tiendrons aux seuls actes d'achat-vente. Pour la période postérieure à 950, ceux-ci sont exclusivement contenus dans les manímína. La modification du mode d'obtention des terres a évidemment modifié la structure même des archives. les acquisitions d'exploitations entiêres étant désormais exceptionnelles - et donc les transferts de chartriers des Iates au monastêre ne se produisant pausguêre. Ce sont les laTcsqui décident, même s'ils sont p.arfois sollicités, de ce qu'ils vont donner, et non les abbésqui choisissent ce qu'ils vont acheter (Tableau 4).

Ces ventes présentent des caractéristiquesparticuliêres. D'abord, le rapport r les sne parle ici que de mesures de valeurs, quelle que soft I'espace choisie

entre acheteurs et vendeurs s'approche de ] : au-

tant d'acheteurs que de vendeurs, ou peu s'en faut. La perception que nous avons des échangesest celle d'un jeu à somme nulie oü personne, sauf le monastêre, n'accumule. En réalité, il y a sans

30

LAFORTUNE DE KAROL

LE PRIX DE LA TERRE, IX'-XI. SIÊCLES

doute des phénomênes comparables à ceux du IX' siêcle, des politiques d'achat menées sur le moyen ou le long terme par les acteurs

économiques,mais il est extrêmementPareà ce moment que ]'on donne une exploitation entiêre ou que I'on se sépare d'un coup de ]'intégralité de son patrimoine. ]] ne peut donc pas y avoir d aussi beaux dossiers qu'au IX' siêcle, chaque acteur n'apparaissant au mieux et sauf exception - que deux fois et deux fois seulement.la premtêre en tant qu'acheteur et la secondeen tant que donateur. et cela dans le cas le plus favorable, celui d'une vente suivie de prós par une donation,.comme si ]'on achetait pour donner, ou que l on donnait quelque chosequi aurait été acheté pour cela par un ascendant ou un parent. Force est de constater que, dans la plupart des cas, on ne peut pas reconstituer I'histoire de la parcelle et que I'on se trouve dans I'impossíbilité d'établir un lien entre un donateur. un acheteur et un vendeur se succédant dans la propríété d'une parcelle.

31

face et le prix, sauf lorsqu'il s'agit de três grossesaffaires, incluant des éléments difficiles à évaluer (un casfrum) ou immatériels (des droits

viés à ]a possession du cczsfrum) : dans ces cas-là. on est

contraint de laisser I'acte de câté, parce que ce n'est plus seulement

la terre qui est vendue. Les détails concrets les plus nombreux sont donc foumis par les actes les plus anciens. Ce sont également les plus gênants, parce que la valeur de chacun des éléments énumérés dana I'acte et concourant à la détermination du montant de la transaction n'est pas connue. La mise en relation de plusieurs actes particuliers laisse penser que les maisons ne valent rien et que leur présence ou leur absence n'a qu'une influence marginale sur le prix de ventes. En revanche, la présence ou I'absence d'enclos (ren'a in car/e) ou de vigne est susceptible de provoquer des distorsions. L'enclos a de fortes chances d'être valorisé, parce qu'il délimite la terre que I'on travaille le plus et le mieux et qui, de ce fait, rapporte davantage. On peut en premiêre

approximation décider de traiter la lema ín cur/e comme de la Tableau

4

LES TRANSACTIONSFONCTÊRESAUX X'-XI. SIÊCLES DANS LES COMTÉS DE PENNE ET DE CHIETls Période

Nombre d'actes Surfaceséchangées (valeur cumulêe)

Prix en seus (valeur cumulée)

925-949 950-974 975-999 1000-1024 1025-1049

simple teme arable, parce que les superfícies en cause sont peu importantes dans les ventes faisant mention de terre arable et de terre enclose et que, donc, les risques de perturber le calcul semblent limités

La vigne, d'autre part, est três difficile à évaluer convenablement dans le contexte du IX' siêcle. Les actes ne donnent en effet jamais directement une mesure de superfície en muids, ]orsqu'il s'agit d'une terre plantée en vigne. Leurs auteurs préfêrent lui attribuer une valeur monétaire, estimée en sous ou en tiers de sous (rrenzis), et estimer combien de ceps chaque sou représente. Une vente type se pré sente de la sortes : l:go ra/zs, vendo rlbz ra/l, vznean7 mean72de frernzssí

Que tirei de ces indications? Une premiêre approche simple à mestre en oeuvrepermet d'établir desprix moyens par unité de surface selon les périodes considérées. Les actes du IX' siêcle doivent encore une fois être mis à part ils constituent une série à eux seuls.Les renseignementsqu'ils fournissent sont plus riches et pausdiversifiés que ceux des actes du XI' siêcle. Ces demiers, en effet, ne mentionnent jamais que la sur-

düo et vatesquindecim, per tremissem vatesquinquaginta. La mesure de la vigne est ici de deux tiers de sous et 15 ceps, chaque tiers de sou représentant 50 pieds de vigne. Le systême est três souple et convient admirablement à la description des pentes superfícies. Le problême vient naturellement de ce que le sou de vigne estalors une unité de superfície, non une unité monétaire. Assimiler les deux constitue une approximation méthodologique tentante. S'agit-il d'une erreur? ll est difficile d'y ré

pondre dans un premier temps. Mais il est sür que la correspon-

$Les chiffres diffêrent de ce que I'on trouve dans L. Feller, l,es Abruzzes médíéva/es..., p. 390 oü I'on avait décidé arbitrairement d'attribuer aux maisons une valeur de deux seus. On trouve 32 maisons dana des actes de vente de la premiêre 5L. Feller, Zes .4bnl/zzes méd éva/es.

P. 394.

partie du cartulaire et 15 dans la seconde 7 Cf. dossier. n' 47.

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LAFORTUNE DEKAROL

LE PRIX DE LA TERRE, IX'-XI. SIÊCLES

dance apparaít ftéquemment, faisant se recouvrir valeur monétaire et valeur de superfície du soua Moyennant ces trois approximations9, i.e. en négligeant les maisons, en assimilant la /ena ín cur/e à de la terre arable et en défalquant le prix de la vigne, on obtient les résultats indiqués au Tableau 5.

Tableau 6

33

PRIX MOYEN DU MUID DE TERRE'ARABLE AUX X' ET XI' SIÊCLES Péríode

Prix moven

du muid

925-949

950 974 Tableau 5 PRIX MOYEN DU MUTD DE TERRE ARABLE AU IX' STÉCLE

Total

d'aprês les nzu?zfnzina (avant 873) Comté

Prix moyen du muid (en seus)

Penne

1,48

Chieti

1,63

Total

1,5]

d'aprês I'irzsfrumelz/aNuI Comté

Là aussi, les conclusions sont, à premiêre vue, nettes et simples. Une phase haussiêre débute dans le second quart du X' siêcle. Elle se poursuit jusqu'au deuxiême quart du XI'. Le prix de I'unité de surface considérées'effrite alors, puisqu'il rejoint pour la période 10251050,les niveaux atteints en 975-1000.Un point intéressant est que

z (aprês 873)

Prix moyen du muid

Penne

le nombre de transactionss'effondrelittéralement entre la période 1000-1025 et la plane 1025-1050 (Tableau 4).

(en seus)

Aprês I'interruption documentaire de la période 900-950,

1,23

Chieti Total

1,31

1,26

Le commentaire que I'on fait immédiatement est évident : les prix moyens de ]'unité de surface sont orientés à la baisse, résultat compatible avec I'hypothêse selon daquelle le monastêre de Casauria serait en situation d'acheteur monopolistique sur le marché foncier local à la fin du IX' síêcle(voar section suivante). Les actes du X' et du XI' siêcle constituent, pour leur pari, une

véritable série qu'il est possible d'étudier par tranches chronologiques. ll est possible de les décrire de la sorte, toujours en suivant une logique arithmétique

HL. Feller,

975-999 1000-1024 1025-1049 1050-1075

(Tableau 6).

Z,es .4brzlzzes médfét,a/es. .., p. 344, ]e tab]eau

] lbis

montre

les oc.

currences oü ce recoupement se produit. Elles sont assez nombreuses pour que I'on discute de I'opportunité de paire adhérer la valeur du sou-monnaie à celle'du sou-surface.

9Le recours à des techniques de modé]isation dont ]es résultats sonoprésen tés plus loin dans ce chapitre permet d'éviter d'avoir à paireceshypothêsesa priori, voire de les vérifier a pos/erfod

commune à I'ensemble de la documentation italienne, les transactions fonciêres sont de nouveau documentées à partir de la décennie 950-960. Dans un premier temps, i] s'agit essentiellement de précaires, concédéescontre de forts droits d'entrée en tenure : leur existencemême montre que la france la pausaiséede la paysanneriea pu épargner durant la premiêre moitié du X' siêcle. Les transactions entre laTcsportant sur des terres sont nombreuses à partir de la dé cennie 970. Elles montrent I'effet sur le niveau des prix de la phase de croissance. La hausse lente et réguliêre que I'on observe est, somme toute, attendue. En revanche, la baisse des prix à partir de 1025 jointe à la diminution du nombre de documents disponibles renforce I'idée de difficultés : la question devient alors de savoir si celles-ci ont accompagné des transformations sociales d'importance, soft qu'ellesles aient provoquées,soft que, à la faveur de problêmes économiquesgraves,des «ajustementsstructurels» se soient produits qui auraient débouchésur le renforcement des structures seigneuriales. Le double phénomêne de baisse du nombre des transactions et de baisse concomitante des prix est encore plus spectaculaire si I'on observe les transactions portant sur de pentes surfaces, c'est-à-dure sur des surfacesinférieures à 20 muids. Celles-ci marquent de façon beaucoup plus nette les oscillations que I'on vient de décrire. L'essentiel de notre documentation exploitable, au demeurant, concerne

34

LAFORTUNE DE KAROL

LE PRIX DE LA TERRE, IX'-XI. SIÊCLES

ce type de transactions (294 actes sur 327). Autrement dit, la statistique décrit presque exclusivement le comportement des pentes surfaces. Celles-ci sont à la bois extrêmement valorisées lors du mouve ment de hausse de la période 950-1025et subissent une baissetrês marquée aprês ]025 (Tableau 7). Cette baisse est de longue durée.

L'ÉVOLUTION DU PRIX DE LA TERRE ENTRE LE IX.e ET LE XIe SIÊCLE

Tableau 7 TmsACTioNS DES x'-xl. SIÉCLES PORTANT SUR DES SUPERFÍCIES INFÉRIEURES À 20 MUIDS Période

uriaces ecnangee échangées Nombre d'acres Surfaces (valeur

cumulée)

Prix en sons (valeur cumulée)

35

IJNE APPROCHE ÉCONOMÉTRIQUEiZ

Ces comptages et calculs élémentaires donnent une idée générale de I'évolution des prix des biens fonciers entre IX' et XI' siêcles. lls reposent cependant sur une approche três globale et peuvent donc être avantageusementcomplétés par une approche économé-

trique qui ne nécessitepas les mêmeshypothêsesa príod et s'ac-

Prix moyen

du muid

925-949

compagne d'un raisonnement {qui permet d'isoler et de quantiHer les différentes composantes du prix de vente des biens fonciers.

950-974 975-999 1000-1024

Moáélisation

10251049

L'approche économétrique a été menée à partir des mêmes don-

1050-1075

nées que I'approchearithmétique amputéestoutefois de quelques transactions exceptionnellesi3qui se prêtent mal à I'analyse statis-

Total

Les observations sont cette boistout à fait compatibles avec I'idée d'une crise, même si elles ne sul:Hsentsans doute pas à elles seules à en démontrer I'existence. L'effondrement du nombre de transactions accompagnant une baissedes prix unitaires conduit à

envisagerde sérieusesdifficultés que la chronologie de I'histoire économique et sociale de I'Occident permet d'envisager. Sans entrer dans un débat qui pourrait être infini, on peut voar là la traduction locale d'une crise sociale décelée en Catalogne au même moment mais dont les signes ont pu être trouvés dans I'ensemble des pays du

bassinoccidentalde la Méditerranéeto. En ltalie du Nord, par exemple, la dépression des prix fonciers a également pu être observée à Bergame avec une chronologie identique : il ne s'agit donc pas d'une affaire totalement isolée ni spécifique aux Abruzzes ou provoquée par un biais documentaireli

tíque. Les données ainsi sélectionnées ont été analysées à I'ande de modêles réduits simplest4. L'équation retenue's pour rendre compte de la formation du prix est assez intuitive'' : elle suppose que le prix

global de vente d'un bien foncier, noté P par la suite, s'obtient en ajoutant les prix de vente de chacunede ses composantes(terre arable, remaín cur/e, vigne et autres éléments divers), les prix élémentaires des composantes s'obtenant eux-mêmes en fonction d'un

2On raisonne dana cette partie uniquement en valeurs nominales, et non pas en valeurs réelles. On admet d'autre part qu'un mujd équivaut à 0,3 ha 13Les transactions extrêmes ont été exclues de la base de données pour le traitement

économétrique.

Étant donné la distribution

des surfaces vendues.

d'une part, et des prix de vente, de I'autre, nous avons conservé pour la suite de I'analise les transactions portant sur des surfaces inférieures à 100muids de berre arable ou 20 muids de /en'a in curve et ne comportant aucun élément bati important (type casfrum).

+Malgré le caractere exceptionnel de la base de données.constituée, il.sem-

blait difficile d'estimei un modêlestructurel distinguant courbe d'offre et de de} P. Bonnassie, l.a Catalogue dt{ milieu dü X- à {a Üíndu XI' siàcle. Croissance ef mtlfaflons

d'ur?e sociéfé,

Toulouse,

1975-1976;

Id., Dzí R;zór?e à /a Ga/íce

.' ge17êse

mande faute de dispuser de variables spéciHquesde I'oH'e ou de la demande sur-

tout danales fichiers assezsuccinctsdu XI' siêcle.

3t modalités du regime féodal, duns Structures féodaleset féodatisme dons I'Oc-

15On note en majuscule les informations données dans les actes et en minus-

cident méditewanéen Q(-Xlll- siêcles). Bitans et perspectivas de recherches. Acres

cules celles qui nous manquent et que nous cherchons à inférer à partir de nutre

:lu coltoque de Robe, 10-13 octobre 1978, nome, \98ü (Cotlection de I'École française de Nome, 44), p. 17-55 [repris dans Id., ],es socfé/és de /'an mí/. Un nzonde

curve et du ceps de vigne...

enfie deus ages, Bruxelles, 2001 (Bib/íof;zêquedzi ÀÍoyen .4ge,] 8), p. 361-388] ]. 3amut, Bergamo 568-1098). Storia {stituzionale. ed economia di üna ciffà

lombarda ne//'a/fo medíoevo,Bergame, ]980 (1'' éd. all. Wiesbaden, 1979); L. Feller, Z.es .4brzdzzes médíéva/es. .. , p

407.

base de données: le prix moyen du muid de terre arable, du muíd de rema fn ' La principale

simplification

opérée consiste à supposer que l.es prix .des

différentes composantes sont indépendants les uns des autres. Ainsi le prix d'un muid de terre arable est supposéconstant que I'on vende uniquement de la terre arab[e ou qu'on ]ui adjoigne de ]a vigne, un enclos ou encore une maison.

36

LAFORTUNE

DE KAROL

prix unitaire (prix d'un muid, prix d'un cep,prix desautreséléments

LE PR[X DE LA TORRE, ]X'-Xl- SIÊCLES

37

Retation entre les deu)c méthodes

de la vente") et de la quantité de bientB. (1)



TA

P= a + p.. "TA + p...+TIC + p.+V + pb+B

surface de terre arable;

p.. : prix de I'unité de terre arable(muid)

TIC surface de fen'a ín curve; p.i. : prix de I'unité de ferra ín curro(muid) V surface de vigne; p. : prix de I'unité de vigne(cep) B présence d'éléments autres pb : prix de I'élément autre

Afin de permettreque le prix unitaire varie selonla quantité venduei9, nous avons ajouté un derme quadratique:' pour chaque type de terrain. L'équation linéaire estimée:' est donc de la forme (2)

P = a + b.+TA+ b:*TA: + c.+TIC + c:f'TICZ + d.+V + d:*VZ + f+B +e

Cette équation est évidemment un objet théorique qui permet de résumer une information multiple et n'a aucunement vocation à dé-

crire le modede calcul du prix effectivementutilisé par I'un ou I'autre desprotagonistesdu dossier. Le príncipe heuristique de cette méthode réside dans la confrontation d'un grand nombre d'observations de même nature, ici des transactions, et dans la mise en évidence de régularités. Ainsi, les différents prix unitaires nous sont a püoü inconnus, puisqu'ils ne sont jamais mentionnés dans les actes. Mais la confrontation d'un grand nombre de transactions pour lesquels nous connaissons les surfaces vendues et le prix global permet

de déterminer le prix unitaire le plus probable pour chaque type de bien. Cette équation a été estimée séparément pour chacune des six catégories de ventes distinguées plus haut, ce qui permet d'obtenir des prix unitaires différents selon la période, le type d'opérateur et la localisation des biens vendus. 7Les autres éléments sont traités ici de maniêre extrêmement simple. On distingue uniquement la présence ou I'absence d'éléments. Autrement dit, la

quantité d'élémentsne peut être que 0 ou 1. Cette modélisation un peu íruste a surtout pour objectif de neutralíser le surcoüt moyen lié à la présenced'autres

éléments divers dans la vente. BLa constante qui apparaít dans I'équation peut être interprétée comme un coüt d'entrée dans la transaction.

i9Même sans goüt particulier pour I'anachronisme,on ne peut s'empêcher de penser que le prix moyen du m2 ou de I'hectare est différent que I'on vende un studio ou un appartement de quatre piêces, un jardin ou un ensemblede champs.

zoL'insertion d'un terme quadratique revient à autoriser des inflexions. En effet, si P = a':S + b*SZ(oü P désignele prix global et S la surface),alors le prix unitaire(P/S) vaut a+bS. Quand b est positif, le prix unitaire augmenteaves la surface alors qu'il diminue quand la surface augmente si b est négatif.

2'Pour pausd'information sur le rale de la composantealéatoire 8 et ce

qu'elle représenteon peut se repórter à n'importe quemmanuel d'introduction à I'économétrie. Voar par exemple R. Bourbonnais, Economéfde. À4anue/er exercíces corHgés, Paras, 2002.

Avant de présenter les résultats obtenus, il convient de souligner ici en quels points cette approche se distingue de celle présentée à la section précédente. ll est illusoire d'espérer trouver une valeur des paramêtres, c'est-à-dire un niveau des prix unitaíres p-,, pti« .p«et pb, telle que I'équatíon (1) ci-dessus «tombe juste» pour chaque transac-

tion. Celasupposeraitnon seulementque tous les prix de vente aient été calculés avec la même procédure de calcul et les mêmes niveaux de prix, mais en plus qu'aucune erreur de calcul n'ait été falte alors et que naus ayons été capables onze siêcles plus.tard de choisif a ;)nod ]a bonne équation, c'est-à-dire le bon. mode de calcul. À

moins de croire aux miracles,il faut accepterd'abaissersesprétentions, ce que I'on peut paire de deux maniêres. La méthode utilisée dais la premiêre sectionrevient à conserverI'idée d'un calcul exact (approche arithmétique) et donc à paire des hypothêses pour suppri-

mer des paramêtresinconnus et n'en garder qu'un seul sur les quatre. Supposer que ]e prix de la fen'a ín cur/e est le même que celui de la terre arable a supprímé un premier paramêtre. Supposer que le sou servant à «mesurer» la surface de vigne conespond au sou ser-

vant d'unité de valeur en a supprimé un deuxiême.Enfin, suppo?er que les maisons ne valent rien en a supprimé un troisiême. Avec les notations utilisées ici, ces hypothêsesreviennent à imposer les trois contraintes suivantes p..=pti., p«:l et pb=o. La relation (1) devient alors : P = p., *(TA+ TIC) + V (oü la vigne est mesurée en sous). Dês

lors on peut calculer le prix du muid dans chaque transaction, puas

déterminerun prix moyendu muid. La deuxiême technique proposée relêve d'un autre choix : elle est multi-dimensionnelle mais stochastique. Cela signiHe qu'elle permet de ne pas faire d'hypothêse a pdorf sur la valeur des.paramêtres et de les conserver tous en tant qu'inconnues, mais qu'elle repose sur une hypothêse d'approximation du calcul (transcrite via le terme d'erreur ej.'On supposeen effet que le prix global de vente.n'est pas exacte ment égal au résultat de I'équation (1), et que la différence qui existe entre 11; deux (notée e) prend une valeur variable au hasard des transactions, potentiellement três importante dans certains cas. Et c'est sur la répartition des valeurs prises par cette différence que I'on pose des contraintes a pdod, comme, par exemple, que l.équation sousestime le prix de vente effectif aussi souvent qu'elle le surestime. Résultats d'estimation

En ce qui concerne les transactions du IX' siêcle enregistrées

dans les man míncz(transactionsentre particuliers antérieuresà

38

LAFORTUNE DE KAROL

873), les modêles22estimés sont de qualité moyenne, puisqu'ils expliquent 60% de la variance du prix de vente pour le comté de Chieti et 40% de la variance pour le comté de Penne (voir Tableau 10,p. 46, en fin de chapitre). En ce qui concerne les transactions du IX' siêcle postérieures

à 873 (achats du monastêre

39

LE PRIX DE LA TERRE, IX'-XI. SIÊCLES

de Casauria),

le petit

nombre de données rend les résultats d'estimation assezinstables lorsque I'on considere les deux comtés séparément (voar Tableau ll, p. .47, en fin de chapitre). Enfín, pour la derniêre catégorie de ventes,

Si I'on se focalise sur le prix de la terre arable, I'hétérogénéité des équations obtenues est p]us nuancée qu'i] n'y paraít à premiêre La représentation graphique (voir Graphiques l et 2 ci-desSous):spermet de s'en convaincre. Ces graphiques montrent comment le prix moyen simulé:' du muid de teme arable varie en fonc

11

PHx moyen du muid

celles des X:-XI' siêcles, la qualité des régressions est três fluctuante

selon les quarts de siêclez3.Les modêles obtenus paraissent aussi três diHérents d'un quart de siêcle à I'autre (voir Tableaux 12 et 13 p. 50 et p-.51{ en fín.de chapitre). Seule homogénéité apparente pour les X' XI' siêcles : la présencede vigne n'apparaítjamais de maniêre significative sans que I'on puisse dure si cette absence de significativité statistique correspond à un phénomêneréel ou à un défaut d'informatjon. En effet, les modêles estimés à partir des actes antérieurs qui donnent une description assezprécise des biens vendus montrent que la surface de teme arable n'est pas la seule caractéristique qui explique le prix de vente. Ainsi, dans les ventes du IX' siêcle. le nombre de ceps de vigne (pour le comté de Chieti) ou la quantité de remain caf'fe (pour le comté de Penne) participent aussi à la détermination du prix. Le prix d'un ceps de vigne supplémentaire dans les ventes entre particuliers est de 0.025 sous dans le comté de Chieti ott. autrement dit, on peut acheter environ 40 ceps supplémentairesavec un sou. La vigne apparaít aussi déterminante dans le calcul du prix de vente global payé par le monastêre à la fin du IX' siêcle dans le comté de Penne : le prix unitaire du cep semble assezrobuste. environ 0.01 .cep quel que soft le modêle, soft l sou les cent ceps de vigne. Quand au prix d'un muid supplémentaire de terre arable. il est sensiblement différent du prix d'un muid supplémentaire de rema ín curve.Ainsi, pour les ventesentre particuliers dans le comté de Pende. le prix du premier muid de ferra ín onde atteint 13.16sous alors qu'il est de 2.22 sous pour la teme arable:' (Tableau 10). '

surfbce vendue

--+e"--avant873/CF 1000-1025/CF

----- 873-889/CF -----

1025-1050/CF

----

975-1000/CF

-+--- 1050-1075/CF

Graphique 1 - Évolution du prix moyensimulé par muid de terre arable en fonction de la surface totale vendue, selon les différentes périodes, dans le Comté de Chieti.

par ailleurs),le prix globaldevientp'=a+2.26'(S+.1):0.04'(S+l):: La différence donne le prix du muid supplémentaire soft 2.26-0.04(2S+l). Pour S=O,on obtient

le prix du premier muíd. Le raisonnement est jdentique pour l.aferra.Ín curve. 2zSeules les variables explicatives statistiquement signifícatives ont été

25Cesreprésentations ont le mérite d'être d'une lecture moins ande, mais en

conservées dana les modêles (à I'exception de la constante qui a été gardée de ma-

contre partie, elles ne rendent compte que d'une information partjelle. Les gra-

niêre systématique)

23AFin de ne pas perdoe trop de degrés de liberté, nous avons estimé un seus

modêle pour I'ensemble du XI'' siêcle, mais en estimant des coef6cients spécifiques à chaque quart de siêcle pour mesurer I'impact de la surface de terre sur le

p.rix.de vente global. Cela équivaut à estimer un modêle pour chaque quart de

siêcle en imposant que la constante du modêle (i.e. le coüt d'entrée ãans'la transaction) soft identique sur I'ensemble de la période, ainsi que I'impact de la présencede vigne 24Soft S le nombre de muids.vendus, le prix global de vente P est donné par I'équation : P= a+2.26S-0.04S:.Si I'on vend un muid de plus (toutes choses égales

phiques suivants ne reflêtent en effet que I'influence de la quanLité de terre arable

sur le prix de vence,pour des biens ne comportant ni vigne, ni terre enclose,ni

aucun autre élément. zóll s'agit bien d'un prix simulé, c'est-à-dire calculé à partir de I'équation du modêle. Ainsi, par exemple, pour la période 975-999 dans ]e comté de.Penne. ]e

pnx moyen d'un muid de terre est calculé selon I'équation p(S)=(6,8.+ 5,63S -0,05S2)/S(voar Tableau 13 en fin de chapitre). ll convient dor! de prendre garde qu'un tel calcul reste faisable pour des surfaces qui peuven1lle cas.échéant, ne pas exister dans la base de données. La mention .«/CF»signífie que la constante

de I'équation a été prise en compte pour la simulation

40

LE PRIX DE LA TERRE, IX'-XI' SIECLES

LAFORTUNE DE KAROL

41

variationdu prix du muid à surfacedonnéed'unepari, la varia-

pnx moyen

du muid

tion de la superfíciedes terres venduesd'autre part. Les courbes

montrentsimultanément une augmentation du prix du muid au

cours du temps, à surface donnée et une baisse du prix du muid lorsque la surface vendue augmente, à période donnée. Au couro du IX' siêcle, la baisse apparente du prix du muid calculé aves la premiêre méthode s'expliquepar I'augmentation de la superfície moyenne des terres vendues; cette augmentation a induit une

baissedu prix du muid qui fait plus quecompenserla haussedu prix de la terre, à surface donnée, pendant cette périodez7.En re vanche, lorsqu'on compare le IX' avec le XI' siêcle, on observe

cettebois-ciune haussedu prix du muid pour les surfaceseffec

tivement vendues.Cette hausseprovient pour partie d'une hausse générale du prix de la terre mais aussi de la diminution des surfaces en jeu dans les transactions étudiées; nous avons en effet à paire aux X'-XI' siêcles à des transactions portant principalement sur des parcelles et non plus sur des exploitations, comme ce pou0

---+(--avant 873 [000-1025/CF

Graphique 2

--'--873 -

2

890/CF

14

16

18

20

surfàce vendue

---a---975-1000

1025-1050/CF

Évolution du prix moyen simulé par muid de berrearable en

fonction de la surface totale vendue, selon les différentes périodes, dans le Comté

de Penne.

tion de la surface vendue et I'évolution de cette relation entre prix unitaire moyen et surface vendue au cours du temps. Une lecture verticale du graphique permet d'apprécier, pour une superfície donnée, les variations enregistrées tout au long de la période par le prix moyen du muid de terre calculé à partir des modêles estimés. Tout d'abord, quelle que soft la période, le prix du muid dépend de la surface vendue : le prix du muid est moins élevé lorsqu'on achête de grandes surfaces. En revanche, le prix de la terre 'augmente assezréguliêrement au cours du temps, puisque, pour une surfacedonnée,le prix estimé pour la période d'avant 87i est infé rieur au prix estimé pour les achats de Casauria postérieurs à 873. qui est lui-même ínférieur aux prix des X'-XI' siêcles. À premiêre vue, ces résultats diffêrent de ceux obtenus par la premiêre méthode employée.En effet, la méthode arithmétique fait apparaítre que le prix du muid baisse de 1,63 seus à 1,31 sous au cours du IX' siêcle.

puis s'élêvejusqu'à 3,31 sous au début du XI' siêcle. Cette incohérence n'est en fait qu'apparente. En eEet, I'évolution du prix du muid pour les teareseffectivement venduescombine deux effets : la

vait être le cas au IX' siêcle.

Pour le comté de Penne, les résultats sont encore plus complexes, car les courbes sont moins bien ordonnées dans le temps et ne traduisent donc pasde tendancelongue à I'augmentation (ou à

la diminution) desprix. Quoi qu'il en soft les résultats sont qualitativement similaires à ceux du comté de Chieti. Cesrésultats soulignent I'intérêt de la modélisation par régression linéaire et du raisonnement «à surface donnée» : ceci permet en effet de s'abstraire, autant que possible, des particularités de la documentation et des différences dans les types de biens fonciers saisis par celle-ci aux différentes périodes. L'ABBÉ ROMAIN : UN ACHETEURATYPIQUE

Cette méthode a cependant elle aussi ses limites : outre les risques classiques du raisonnement, toutes choses égales par ailleurs, qui sépareabstraitement deseffets souvent inséparables dans la réalité, les modêles estimés ne rendent pas assezcompte de la nature de la terre faisant I'objet d'une transaction. Centréssur la notion de surface, ils ne permettent pas de voar si ce qui est vendu est une simple parcelle ou bien une exploitation déjà constituée ou en-

27Raisonner par catégorie de surface aurait permis de neutraliser I'effet lié à I'augmentation de la surface moyenne vendue. Un tel raisonnement ne pouvait

endant être mis en auvre faute d'effectif suffisant dans chaque catégorie de

surface

42

LAFORTUNEDE

core si la vente a une signification autre que patrimoniale, notamment si elle est I'índice de I'existence d'un lien de clientêle. Afin de réintégrer ces éléments dans I'analyse de maniêre simple, nous avons considéré la composition des biens vendus et nous avons isolé les achats réalisés par le monastêre des transac. bons entre particuliers pour la période entourant la fondation de Casauria (ca 850-ca 880). Cette approche complémentaire permet de s'interroger sur le rale joué par le monastêreet son premier abbé, Romain, sur le marché foncier. Intervient-il sur le même marché que les autres propriétaires, autrement dit, achête-t-il le même type de biens fonciers? Son apparition sur le marché foncier régional modifie-t-e]]e ]e mode de formation des prix? Les moyens dont il disposelui confêrent-ils une position de demandeur monopolistique dont il pounait profiter pour obtenir des prix moins élevés?Là encore, I'approche statistique manque sans doute de finesse mais fournit, somme toute, des éléments positifs pour répondre à ces questions

ftéquence cumulée

loo%

1 50%

A - .Ü - .Ü

,.h » + = '# A

o%

Natura des biens achetés

Lorsque I'on compare les biens fonciers achetés par le monastêre de Casauria et ceux achetéspar des particujiers, on constate immédiatement que les achats réalisés au moment de la fondation du monastêrepar I'abbé Romain portent sur des surfacesplus importantes. Ce changement est manifeste lorsque I'on considere la fonction de répartition des surfaces de terres arables vendues par période. En ce qui concerne le comté de Pende, parmi les ventes entre particuliers dont nous avons]a trace au ]X' siêc]e,]a moitié des transactions concerne des surfaces inférieures à l muid, et moins d'une sur cinq concerne une surface supérieure à 5 muids. Pour les ventes au monastêre, la répartition est três différente : la médiane se situe au-delà de 5 muids et les deux demiers déciles sont au-delà de 15 muids. À la fin du X' siêcle,on retrouve un profil similaire à celui du premier graphique avec une vente sur deux concernant une surface inférieure à 1,5muid, et une sur cinq concemant une surface supérieure à 6 muids. Ce profil est aussi valable pour les périodes postérieures. Pour le comté de Chieti, les transformations sont moins tranchées, mais comparables. La distinction entre les ventes entre laícs et les ventes au monastêre durant le IX' siêcle est encore plus frappante. Mais, au X]' siêc]e, ]es pentes surfaces ne redeviennent jamais aussi fréquentesque durant le IX'. La médiane oscille entre 2 et 5 muids alors qu'elle était de l muid au IX' et de ll muids dans les ventes à Casauria (voar Graphique 3).

43

LEPRIX DELA TERRA,IX-Xl-SIECLES

KAROL

A

2

0

3

4

5

6

7

8

9

10 ll

12 13 14 15 16surfaccdctcrrc arable vendue

--+-- Achats de Casauria (Pende)

A - Achais de Casauria (Chieti)

--+-- Achais de particuliers (Penne)

+- Achats de particuliers (Chieti)

Graphique

3

Répartition des transactions en fonction de la surface de terre vendue, selon le lieu et I'acheteur, IX' siêcle.

Les achats

de Romain

portent

non

seulement

sur de paus

grandes surfaces de terre, mais aussi sur des biens fonciers plus composites. En eüet, avant I'implantation de Casauria (avant 873), dans le comté de Penne comme dans celui de Chieti(voar Tableau 8), I'essentiel des transactions porte sur des surfaces de berre arable uniquement (environ 50%). On note aussi un pourcentage non négligeable (environ 15%) de ventes de vignes seules ou de ventes mixtes (terre arable + vigne). En revanche, dans les achats de Casauria aprês 873 (voir tab]eau 9), ]es parcelles de terre arabje ne représentent plus que 25% des transactions, soit environ deux fois moins que dans les transactions entre particuliers de la période immédiatement antérieure. L'évolution est identique pour les ventes de vignes simples et ce sont les ventes complexes qui deviennent les plus fréquentes : les ventes conjointes de terre arable et de vigne concement une transaction sur deux et prós d'une transaction sur cinq porte sur un ensemble de terre arable, vigne et fen'a írz cur/e. Aprês 950, les mentions

de vigne disparaissentpratiquement des données.On disposeen général d'une information de prix et d'une information de surface sans

11

44

LAFORTUNE DEKAROL

LE PRIX DE LA TERRE, IX'-XI' SIÊCLES

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autre précision. Difficile de dire si les vignes ne se vendent plus ou si I'hétérogénéité des cultures vendues devient sana intérêt.'Quoi qu'il en soitl les achats réalisés par I'abbé Romain semblent poster sur des

avant. Qu'achêteen effet I'abbé Romain?Construisantson patri-

biens fonciers beaucoup paus complexes: il s'intéresse'sans nul doute d'abord à des exploitations déjà constituées.

être immédiatement rémunéré, afin que la communauté puisse

Tableau

8

RÉpARTITION DES TRANSACTIONS SELON LA NATURE DES BIENS VENDUS AU TX' STÊCLED'APRÊS LES MUN/M/NA (ventes entre particuliers avant 873) (surfaces < 100 muids) Comté de Chieti

Composition du bien

Comté de Penne

Pourcentage

Terre seule

49%

Vigne seule

14% 4% 21%

Terra in curve seule Terre + vigne

52% 16% 4% 16%

Teme + lema í z cafre

1%

Terça ín Gaffe + vigne

3%

4%

Terre + rema fn cilrre + vigne

8%

4%

4%

Les catégories les plus représentées apparaissent en gras. Tableau

9

REPARTITION DES TjiANSACTIONS SELON LA SATURE DES (ventes au monastêre de Casauría aprês 873) (surfaces < 100 muids) Casauria

(55)

Penne (34)

Chietin

(18)

Errectirl Pourcentage Ten'e seule Vigne seule

Terre + ferra ín cur/e

25% 5% o% 51% o%

Terre + /en'a ín carfe+ vigne

18%

Zen'a í?zGaffe seule Terre + vigne

21% 9% o% 50% o% 21%

vivre. L'abbaye en effet, bien que dotée avec des teares fiscales, n'est pas construite sur une propriété impériale préexistante. En conséquence, I'abbé a probablement choisi comme cibles les exploitations toutes constituées et déjà en ordre de marche. Les parcelles isolées ne I'intéressent donc pas. D'autre part, on se trouve sans doute à la fin d'un cycle de concentration fonciêre qui pourrait bien être le signe d'une crise de la paysannerie parcellaire. Celle-ci semble en effet en cours d'appauvrissementrapide au ]X' siêclez8.Le monastêre, intervenant à la fín de cette phase, en recueillerait les flruits, en trou-

vant sur place des exploitations déjà consolidéesqu'il ne s'agissait plus que d'acquérir. Dans cette hypothêse, on admet que les parcelles isolées ou les micro-exploitations difflcilement viables ont dé. jà été absorbées par les ensembles fonciers les plus dynamiques. La

question devient alors de savoir pourquoi leurs propriétaires ont vendu ces terres, en tout ou en partie. Un achetetlr monopotistique?

BTENSVENDus AU TX' SiÊCLED'APRÊsL'/NsmuMEN7HR/UM

Composition du bien

moine et le faisant en un laps de temps extrêmement breu, le monastêre a intérêt à acquérir des revenus : I'investissement consenti doit

28% o% o%

56% o% 17%

Les catégories ]es plus représentées apparaissent en Eras.

À la vue de ces tableaux et graphiques, il semble bien que, lors-

qu'i] constitue son patrimoine au IX' siêcle,le monastêrede Casau. ria fassepreuve d'un comportement d'achat assezdifférent de celui des autres opérateurs antérieurs ou postérieurs. Si une interprétatlon en teimes de construction des exploitations vient asseznaturellement à I'esprit, ces chiffres à eux seuls ne suffisent pas à I'é tayer. Le raisonnementhistorique permet cependantd'aller paus

La lecture des résultats présentésjusqu'ici appelle immédiatement une nouvelle question : le monastêre de Casauria achête-t-il simplement une plus grande quantité de terre et des exploitations plus composites à chaque transaction, mais au même prix que les acheteurs laTcs,ou bien profite-t-il d'une position de monopsone qui lui permet d'acheter à bas prix? Dans le document étudié, I'abbé Romain est le seusacheteur perceptible dans la période qui suit immédiatement la fondation du monastêre.Cependant,on est ici probablement confronté à un biais documentaire. Par construction du document, les transactions 'ayant pas débouché sur une cession à Casauria ne nous sont pas connues. Or I'intense activíté du monastêre sur le marché foncier est concentrée sur une période courte, entre 873 et 889. De ce fait, les transactions entre particuliers postérieures à 873 nous échappent presque mécaniquement. Cela ne veut pas durequ'il n'y en ait pas eu. Dureque le monastêre est en position de monopole d'achat est donc sans doute quelque peu exagéré. Cela dit, il n'est pas excessif de pen-

ser que I'ampleur des moyens financiers mis en oeuvre,de même que I'importance accordéepar I'empereur à la région comme au monastêre, ont entraíné une réorganisation du marché de la terre. Casau28C'est I'hypothêse formulée P. 201-209.

dans L. Feller, l,es ,4bruzzes médiéva/es

Tableau ll

ria s'est retrouvé dans une situation de /eczders/zzp social et économique vers qual tendaient les acheteurs qui I'avaient précédémais qu'ils n'avaient pas atteinte, simplement parce qu'ils n'avaient pas des moyens de même ampleur.

DÉTERMINANTS DU PRIX DE VENTE DES BIENS FONCIERS AU IX' SIÊCLE D'APRÊSL'/NS7RUMEN7XR/UM (aprês 873) (surfaces >, comme si le mariage n'avait pas eu lieu. Loup est en position de force vis-à-vis de sa belle-fille, purement et simplement spoliée de sesbiens propres. On peut supposer que celle-ci vit des revenus de I'exploitation des Karolides.

rapports de force entre les familles des deux conjoints et les

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Karol

Acte 91 ROMAIN

Graphique 12c

Une veuve indépendante ou comment les Karolides perdent le controle sur la «morgengabe» d'Ameperga.

Au contraire. dans le second acte, c'est une des brus de Karol, Arneperga, la veuve du frêre décédé, Aiolf, qui est I'actrice principale. Veuve depuis moins de deux ans, elle a quitté I'exploitation oü travaillent son fils Agelpert et ses beaux-frêres et s'est remariée à un certain Walecisi. C'est avec le consentement de ce dernier qu'elle vend elle-même la «Morgengabe» qu'elle a reçue de son premier ma-

ri Aiolf. Contrairementau bien de lamtruda, récupérépar son beaupêre, le bien d'Arneperga est donc définitivement perdu pour les Karolides. Certes,Karol et Aiolf sont morts, Arnepergaest remariée. ll

faut pourtant souligner que ses nouveauxbens conjugaux pêsent plus lourd que la présence de son fias Agelpert dans I'exploitation des Karolides. On sait que le pêxed'Arneperga, le scu/daslus Adoin, était à I'origine en position de force par rapport à Karol. ll semble que les descendants de Karol paient, aprês sa mort, sa stratégie matrimoniale hypergamique. Pour rendre compte du devenir opposé de la «Morgengabe» dana ces deux cas, il a faliu paire intervenir,

contours de I'exploitation agricole, autrement dit de la «maisonnée ), (groupe familial défini non par la propriété ni par les relations structurales de parenté mais par la production en commun et la «parenté pratique»). La vente par Loup du bien de sa bru lamtruda est un índice de la faiblesse relative de lamtruda dans la maisonnée des Hls de Karol à laquelle elle appartient. La vente par Arneperga de son

propre bien, sansconsidération de son origine, est un índice de sa force relative mais aussi de son appartenance à une autre maisonnée, celle de son second mari. Du coup, il est permis de revenir sur le premier cas étudié ici, celui du bien vendu par Stefania «avec son maré et son beau-pare)>.On peut considérer que la présence dans I'acte des trois personnagesest un índice de leur appartenance à une même maisonnéequi, peut-être sans disparaítre, a cesséd'être propriétaire pour passer sous la coupe d'un tiers, Fermoso, avant d'être «cédée»par ce demier à Sisenand, en même temps que la propriété des terres. Comparaison entre te mariage de Maiolfet celui d'Aiotf

(2)

(3)

119

classiquement, les décês,

Revenonsen arriêre pour comparer plus systématiquement les deux mariages intervenus entre deux fias de Karol et deux héritiêres d'Adoin (sa fille et sa pente-filme). Pour comprendre les devenirs différents des maisonnéesqui en sont issues, il nous faut observei en détai[ [es transactions fonciêres ]iées à ces deux mariages, qui interviennent à des moments différents. ll ne s'agit plus d'observer les transactions qui. intervenant entre deux familles en cours d'alliance, préparent un mariage (voir p. 104 et Graphique 11, p. 105), mais celles par lesquelles s'efectue au moins partiellement la transmission du patrimoine foncier, de I'exploitation agricole et du pouvoir entre deux générations.Cestransactions font intervenir directement

un pareet sonfils ou sabru, ou un pare et safille ou son gendre. Nobre dossier nous en donne plusieurs exemples. Ainsi, Loup vend contre un bceufsa /en'a ín cur/e à sa fille déjà mariée''. Maiepert fils de Pierre vend terre et vigne en indivision à ses deux filles encore célibataires semble-t-il, Magetruda et Teudiperga, contre la somme assez importante de dix sous'2. Nous analyserons ici en détail trois actes entre Adoinides et Karolides. Dans le premier, Adoin vend une parcelle de terre à son gendre Maiolf contre un sou en argentó3.Les deux autres rêglent les relations entre Jean, ses héritiers et son gendre.DansI'un, Jeanfiasd'Adoin vend tour son bien si-

les remariages et la présenced'enfants du mariage, mais aussi les ólAnte 46. Voargraphique 11,p. 105 óz Acte

" que miai pertinet de ipso morgincap latltírude tluru mea.

40

õl Ante 76.

120

LAFORTUNE DE KAROL

HISTOIRE DE LA LIGNÉE ET DEVENIR DES MAISONNÉES

121

tué à villa Casule, la contrepartie valant vingt sous, en indivision à sa fille Arneperga, à son fils. Adelpert et à un troisiême personnage ap-

''a

C N

pelé Jean (peut-être le fils d'Adelpert?)'4. Dans I'autre. Aiolf fias de Karol vend la moitié de sesbiens à villa Casuleà Jean fils d'Adoin. peut-être pas encore.son beau-pêxe(aucune indication de parenté n'étant mentionnée dans I'acte), contre une paire de boeufsós. C'est ici que la typologie des transactions fondée sur la mesure des terres et sur I'évaluation de la contrepartie peut montrer sa fécondité. Commençons par les relations entre Adoin et son gendre Maiolf (voarGraphique 13,p. 121).Celui-ci, le fila aíné de Karol. se made le premier, en 850. Comme d'habitude, nous n'avons pas trace des transferts gracieux, légaux ou coutumiers, qui sont intervenus au moment du mariage : peut-être un héritage anticipé des biens de

0 0 a d ''a

Q. ''a

0 0 ..a

N

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femme non nommée. La parenté est déjà'mentionnée lorsqu'Adoin vend une terre à Maiolf, «[son] gendre»ió.]] s'agit d'une transaction

=

la riviêre

Arollo

et la terre

0

0 n. d d a 0 cn

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de