Dictionnaire des régionalismes de Saint-Pierre et Miquelon [Reprint 2011 ed.] 9783110932942, 9783484560055

Cet ouvrage étudie les particularismes du français parlé dans les îles de Saint-Pierre et Miquelon. Au noyau primitif de

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French Pages 750 [756] Year 1992

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Polecaj historie

Dictionnaire des régionalismes de Saint-Pierre et Miquelon [Reprint 2011 ed.]
 9783110932942, 9783484560055

Table of contents :
Introduction
1 Situation géographique
2 Brève histoire
3 Situation linguistique actuelle
4 L’enquête
5 Particularismes linguistiques
6 Presentation du lexique
Lexique
Bibliographie
Index

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CANADIANA

ROMANICA

publies par Hans-Josef Niederehe et Lothar Wolf Volume 5

Patrice Brasseur Jean-Paul Chauveau

DICTIONNAIRE DES REGIONALISMES DE SAINT-PIERRE ET MIQUELON

Max Niemeyer Verlag Tübingen 1990

Cette etude a pu etre lancee en 1983, dans le cadre du GDR 9 du C.N.R.S. "Atlas linguistiques, parlers et cultures des regions de France", grace au Ministers de la Recherche et de 1'Industrie. Elle a ete soutenue par le Conseil general de Saint-Pierre-et-Miquelon, que nous tenons ä remercier particulierement. Nous la dedions aux habitants de Saint-Pierre et de Miquelon, dont l'accueil chaleureux a permis sa realisation dans les meilleures conditions.

Catalogage en publication de la Deutsche Bibliothek Brasseur, Patrice : Dictionnaire des rigionalismes de Saint-Pierre et Miquelon / Patrice Brasseur ; Jean-Paul Chauveau. - Tübingen : Niemeyer, 1990 (Canadiana Romanica ; Vol. 5) NE: Chauveau, Jean-Paul:; HST; GT ISBN 3-484-56005-3

ISSN 0933-2421

© Max Niemeyer Verlag GmbH & Co. KG, Tübingen 1990 Das Werk einschließlich aller seiner Teile ist urheberrechtlich geschützt. Jede Verwertung außerhalb der engen Grenzen des Urheberrechtsgesetzes ist ohne Zustimmung des Verlages unzulässig und strafbar. Das gilt insbesondere für Vervielfältigungen, Übersetzungen, Mikroverfilmungen und die Einspeicherung und Verarbeitung in elektronischen Systemen. Printed in Germany. Druck: Weihert-Druck GmbH, Darmstadt.

TABLE DES MATlfiRES

V

Introduction

1

1 Situation geographique

1

2 Breve histoire

2

3 Situation linguistique actuelle

5

4 L'enquete

12

5 Particularismes linguistiques

14

6 Presentation du lexique

24

Lexique

31

Bibliographie

723

Index

735

1 INTRODUCTION1

1 Situation geographique7

Les habitants de l'archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon se plaignent quelquefois d'etre meconnus de leurs ccmpatriotes. Bien peu de Franqais en effet sont capables de situer cette "ccrrmunaute territoriale" (selon le Statut de 1986) sur la carte du globe: il η'est pas rare que ceux qui la placent dans l'Atlantique en fassent un archipel antillais. Quant ä ses habitants, leur ncnibre et leur mode de vie sent le plus souvent insoupgonnes. En quelque sorte, l'archipel reste "ce pays des anbres" catme le qualifia Chateaubriand dans ses Msmoires d'Outre-Tanbe. Les lies de Saint-Pierre-et-Miquelon couvrent une superficie de 242 km2, dans l'Atlantique nord, ä la latitude de Nantes, mais ä plus de 4000 km de la metropole, ä pres de 1500 km au nord-est de New-York et seulement une vingtaine du sud de Terre-Neuve. La population actuelle est regroupee en deux agglomerations. Celle de Saint-Pierre, sur l'ile du mane nan, ccmprend environ 5600 habitants, tandis que la peculation de la cannune de Miquelon est d'environ 600 personnes. L'lle-aux-Marins, situee dans la rade de Saint-Pierre, η'est plus habitee que l'ete. L'ile de Saint-Pierre, de 8 km de longueur, se compose, ä l'ouest, d'une serie de collines d'environ 200 metres de hauteur, entaillees par des depressions occupees par des etangs et des tourbieres, tandis que le sud-est, tres bas, est couvert d'etangs et de marecages. Separee de celle-ci par un bras de mer large de 6 km, Miquelon s'etend sur plus de 30 km de long, depuis qu'au 18e siecle, une dune de sable de 12 km de long a joint ä l'ile de Miquelon proprement dite celle de Langlade. Cette demiere forme un plateau de 130 metres d'altitude moyenne qui eleve au-dessus de la mer des cotes abruptes qui ont dans certains endroits pres de cent metres de denivellation. L'agglomeration de Miquelon s'etend dans une plaine basse,

1

Le recent ouvrage d'O. Guyotjeannin ccmporte une bibliographie canplete^sur les lies. 2 Lesdonnees de cette partie sont anpruntees a A.L. Sanguin (article cite).

2 qui relie les hauteurs, d'un peu plus de 200 metres, de l'Ile ä celles du Cap au nord. C'est un climat de ja nordique qui regne sur l'archipel. La moyenne annuelle des temperatures est d'environ 6 degres centigrades. Le thermcmetre peut monter jusqu'ä 20 degres l'ete, mais descendre jusqu'ä moins 20 l'hiver. De decembre ä mars, la moyenne est inferieure ä zero. Les hivers sont certes moins rigoureux qu'au Canada ä cause de 1'influence oceanique, mais la tres forte humidite et la quasi-pernvanence du vent rendent le froid penible. Les chutes de neige, par la violence du vent, prennent facilement 1'aspect du blizzard. Le rechauffement de 1'atmosphere avec la belle saison provoque la formation de brouillaids persistants, en juin, juillet et aoüt. On ccmpte, en moyenne, 115 jours de brouillard par an, quelles que soient par ailleurs la duree et l'opacite de celui-ci. Un tel climat explique que la poussee vegetative ne carmence pas avant la fin mai ou le debut de juin et que la flore soit semblable ä celle du sud-ouest de Terre-Neuve ou de la Cote-Nord du Saint-Laurent au Quebec. Dans les endroits abrites de Langlade peuvent croitre des bosquets de coniferes. Le reste de 1'Archipel est couvert d'une vegetation rase ou d'une foret naine ccmposee d'arbres qui ne s'elevent guere ä plus d'un metre au-dessus du sol mais enchevetrent leur branches sur un diametre qui peut atteindre cinq metres. Le caractere accidente des lies et leur climat ne les predisposaient pas ä 1'agriculture. Mais leur position ä proximite des Bancs de Terre-Neuve, l'abri sür du port de Saint-Pierre, rarement pris par les glaces, et les facilites offertes par un certain ncmbre d'anses pour la mise ä l'eau des embarcations, en faisaient un endroit propioe ä la peche ä la morue, quoique la mer y soit peu hospitaliere: depuis 1816 on a enregistre plus de 650 naufrages de bateaux sur les cötes de 1'Archipel. Une telle situation peimet de ccmprendre que ces minuscules ilots rocheux aient ete inhabites avant l'arrivee des Europeens et que leur possession ait ete convoitee et disputee depuis.

2 Breve histoire3

Certainement connues plus t6t des marins europeens, les lies de Saint-Pierre-et-Miquelon furent officielloment decouvertes en 1520 par des Portugals. En 1536, Jacques Cartier en prit possession au ncm du 3 Cet historique resume ä grands traits une histoire tres ccnplexe dont on trouvera le detail dans les ouvrages d'E. Lauvrieret J. Chapelot et al., M. Poirier, J.-Y. Ribaud et Ch. de la Morandiere.

3 Roi de France. Elles ne constituerent tout d'abord que des havres saisonniers pour les pecheurs de morues venus des cotes de l'ouest de la France. Puis, ä partir du 17e siecle, des pecheurs tenterent de s1installer durablement ä Saint-Pierre. Mais les luttes entre Franqais et Anglais pour la possession de cette region rendaient precaires les etablissements. A plusieurs reprises 1'Archipel changea de mains. En 1713 le traite d'Utrecht l'attribua aux Anglais, ce qui entraina 1'emigration de la majeure partie de la population franqaise dans la partie de l'Acadie que la France avait pu conserver. Lors du naufrage de ses possessions americaines au milieu du 18e siecle, la France voulut au moins conserver un point d'appui pour sa flotte de peche dans l'une des regions les plus poissonneuses du globe. Au traite de Paris en 1763 eile abandonnait toute souverainete sur le Canada, mais recuperait l'archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon ainsi que le droit de peche exclusif sur la c6te occidentale de Terre-Neuve (le French shore). Les clauses du traite ne determinaient guere d'autres fonctions ä 1'Archipel que de servir d'abri aux marins frangais. La petite colonie que le roi γ envoya cette mane annee 1763 etait essentiellement camposee de refugies que les Anglais avaient chasses d'Acadie et qui avaient fini par aboutir en France. Rapidement vinrent les rejoindre d'autres Acadiens qui fuyaient la danination anglaise, au point que les lies ne purent suffire ä une telle surcharge de population. Lorsque les Anglais s'emparerent de nouveau de 1'Archipel, en 1778, c'est 1400 personnes qu'ils durent chasser vers la France pour pouvoir ä loisir detruire ccmpletement leurs installations. Le traite de Versailles rendit Saint-Pierre-et-Miquelon ä la France en 1783. II fallut choisir parmi les candidats au retour car, tout etant ä reconstruire, la reinstallation ne pouvait se faire que progressivement. Neanmoins une dizaine d'annees plus tard les lies abritaient environ 1500 habitants permanents, lorsqu'une nouvelle guerre eclata entre l'Angleterre et la France. L'Archipel en fut, carme la fois precedente, la premiere victime. Les Anglais le reconquirent en 1793 et la population dut ä nouveau abandonner ce qu'elle avait reconstruit dix ans plus tot. Apres un sejour, qui dura plusieurs annees pour certains, en Nouvelle-Ecosse, eile put reprendre le chanin de la France. Par le traite d'Amiens en 1802, l'Archipel redevint franqais, mais ses habitants ne purent le reoccuper car les Anglais 1'avaient repris presqu'aussitot. II fallut attendre le traite de Paris de 1815 pour que la retrocession des iles ne fut plus remise en question. En 1816, lors de la reprise de possession qui allait etre durable, il ne restait plus que des traces des anciennes installations. A nouveau tout etait ä refaire, mais la fin des hostilites entre la France et l'Angleterre allait permettre ä la petite canmunaute de se developper

4 tout au long du 19e siecle. Des 600 personnes qui la constituaient au depart, la population progressait continuellement jusqu'ä culminer ä 6842 personnes en 1902. Les lies vivent alors de la peche. c'est d'abord la petite peche cotiere que pratiquent les pecheurs locaux ä bord de leurs doris manoeuvres ä l'aviron par deux hcranes jusqu'au debut de ce siecle: en 1895, 520 doris sont imtiatricules dans 1'Archipel. Mais c'est aussi la grande peche, surtout pratiquee par les Terre-Neuvas venus de Metropole. Saint-Pierre est alors le point de passage oblige de la flotte franqaise de peche ä la morue des Bancs de Terre-Neuve. Au debut du 20e siecle, environ 240 navires metropolitains armes ä Fecamp, Granville, Cancale, Saint-Malo, Paimpol et La Rochelle, se rendent sur les Bancs et frequentent le port de Saint-Pierre pour se ravitailler, reparer leurs avaries, debarquer leur peche, ou hivemer. Le sechage des morues necessite une main-d'oeuvre saisonniere pour une bonne part venue de France. D'autre part, les lies etant depourvues des ressources necessaires ä une aussi intense activite, force est de recourir au Canada et ä Terre-Neuve pour 1'approvisionnemsnt en denrees alimentaires, bois de construction, charbon, petrole. Autour du port s'activent, aux cötes de la population locale, des gens venus des deux rives de l'Atlantique. Et ceux-ci ne font pas que passer. Attires par 1'activite econcmique de 1'Archipel ou la richesse de sa faune marine, ncmbre d'entre eux s'y etablissent, au point que l'on a pu dire que "la population des lies est d'abord basque, bretonne et normande avec une minorite acadienne qui a subi l1influence de son milieu"4. La Metropole γ envoie aussi des fonctionnaires, des militaires, le clerge et des religieux qui, s'ils n'y restent pas, ne sont pas sans influence. La modification des techniques de peche et des habitudes alimentaires au cours du 20e siecle a fait decliner 1'importance de ces echanges. Les chalutiers ä vapeur, puis ä moteur diesel, sont devenus de plus en plus autonomes et la morue salee a cesse d'etre un aliment courant. Les escales se sont faites moins frequentes et l'hivemage des Metropolitains a disparu avec les voiliers. Les 520 doris irrmatricules ä Saint-Pierre en 1895 ne sont plus que 288 en 1921. La Prohibition de l'alcool aux Etats-Unis reactive l'econarde pendant les annees 20 et 30. Saint-Pierre devient pendant quelques annees l'un des centres d'approvisionnement, parfaitement legal, des trafiquants d'alcool americains. Depuis cette haute epoque, la situation a bien change. La production de ressources alimentaires s'est profondement modifiee. Les quelques exploitations agricoles ont disparu; l'elevage et la culture sous 4 A.L. Sanguin, art.cit., p.221.

5 serre ne foumissent plus qu'un appoint. La peche artisanale en constante regression est relayee par une petite flottille de chalutiers modernes qui alimentent les entreprises de traitement du poisson. Si le port represente toujours le centre de l'activite econcmique, le tourisme se developpe et les services, au premier rang desquels 1'administration, foumissent la majeure partie des emplois. Malgre tout, l'activite n'a pas ete soutenue suffisairment pour provoquer 1'installation de nouveaux irrmigrants en ncmbre significatif au cours du 20e siecle. Au contraire, la croissance continue de la demographie naturelle provoque une emigration importante vers le Canada et la Metropole.

3 Situation Unguistique actuelle

On sait que certains habitants de 1'Archipel ont ou ont eu une langue matemelle autre que le franqais. Quelques cas exceptionnels mis ä part, les non-francophones d'education appartenaient ou appartiennent encore ä trois categories bien determinables. Les originaires de Terre-Neuve implantes ä SFM, de langue anglaise, ont appris notre langue dans 1'Archipel ou ils vivent desormais, eux et leurs descendants, en franqais. Les pecheurs venus de Basse-Bretagne ou du Pays basque parlaient leur vemaculaire mais connaissaient deja peu ou prou le franqais avant de s'installer ä SFM. Ceux qui etaient venus avec fenme et enfants ont continue apres leur arrivee ä pratiquer leur langue matemelle ä l'interieur du cercle de la famille et des amis, mais cette tradition η'est pas passee ä la generation suivante. D'autre part la pratique de 1'anglais est requise pour certaines relations econcniiques avec l'exterieur ou les contacts avec les touristes, mais cela ne conceme qu'une faible minorite. En fait, ä l'epoque actuelle, le franqais est non seulement la langue de cannunication usuelle dans l1 Archipel, mais aussi la langue matemelle de la quasi totalite de la population. Le franqais parle dans 1'Archipel est senti par ses habitants ccmroe bien distinct de celui des autres ccmnunautes francophones de l'Amerique du Nord. On plaisante ainsi la langue parlee par les Franco-Terreneuviens (de la presqu'ile occidentale de Port-au-Port, ä Terre-Neuve): "Iis ont des mots franqais et anglais melanges: et alors j'ai fait give up, je m'en suis revenu back".

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L'originalite de la langue parlee par les Acadiens est mise en evidence soit pour exprimer le plaisir qu'on eprouve ä 1'entendre ou la gene qu'elle provoque, selon les interlocuteurs: "lis ont un accent formidable. lis parlent le vieux /fräsä/, c'est du vieux franqas [...] On les canprend, mais y a quelques mots qui nous echappent, quoi, mais on a vite fait de les canprendre [...] lis nous canprennent bien eux, mais c'est du point de vue... L'accent est different pis y a des expressions qui sont pas du tout les märtes quoi, et pis ils ont une toumure de phrase qui est un peu differente de la notre quoi, mais c'est joli ä entendre hem! Moi j'aime bien, j'ai du plaisir. Ca vaut la peine, je sais pas c'est... J'ai du plaisir ä les entendre moi". "Iis ont un frangais... c'est assez difficile. Voyez-vous je ne peux pas beaucoup lui telephoner [a cette amie acadienne] parce que je ne la ccmprends pas bien au telephone, quoi hein! Parce que y a un accent quand matte, hein! Et encore c'est pas tellement marque que du cote d'Arichat, la, en Nouvelle-Ecosse. La aussi y a des Acadiens. Mais ils ont un franqais epouvantable qu'on ne peut pas canprendre. Vaut mieux parier anglais hein! On les canprend mieux quand ils parlent anglais! Ah oui moi je les ccmprend mieux quand ils parlent anglais! On affiche la mane attitude ä l'egard du quebecois. La difference linguistique, avant qu'on ne s'y habitue, entraine des difficultes passageres de comprehension: "Je suis arrive au Quebec, alors la c'etait tres tres difficile dans ce sens que au debut, dans les premiers jours c'etait tres difficile a canprendre. Maintenant on s'y fait vite. La certainement y avait une tres grande difference au point de vue expressions, au point de vue accent, au point de vue conversation". Ceux qui, ä la difference du locuteur precedent, η'ont eu que des contacts occasionnels avec les Quebecois, insistent beaucoup plus sur les difficultes de comprehension qui, dans certains cas, pourraient bloquer toute carrnunication: "Vous avez un Quebecois qui parle, vous n'allez pasle canprendre, vous avez de la misere* ä le canprendre. Premierement y a accent et puis ils ont... Y a le vieux franqais et pis ils melangent. Certains melangent des mots anglais. Alors ga fait un charabia". "En Acadie, la c'est quand mane carprehensible. Mais vous avez une region dans le Quebec qui s'appelle la Beauce, caime la region de France. Eh bien ces gens-lä j'avais de la misere a les canprendre. Υ avait un vieux qui etait avec moi -j'ai ete opere a Montreal- y a un vieux il etait ä cote de moi -on etait dans une chambre ä deux lits- eh bien il se disait frangais, il etait de la Beauce. Mais moi je disais: ecoute parle en anglais! £a le vexait! Enormanent! Mais je pouvais pas canprendre ce qu'il disait. Ah le bonharme quand je lui ait dit: parle-moi en anglais! Y a que carme 5a que je le ccmprenais".

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De tels propos ne font pas que constater des differences linguistiques, ils enonoent aussi des jugements de valeur, la plupart du temps depreciatifs. Ceux-ci impliquent chez leurs auteurs 1'assurance que leur propre parier constitue un point de reference ä partir duquel on peut mesurer la qualite des autres variantes. On pourrait croire que la securite linguistique des habitants de SEM tire sa force de leur conviction d'etre, vis-ä-vis des Canadiens francophones, doublement frangais, ä la fois par leur langue et par leur nationalste, puisqu'on confond generalement "frangais" et "francophone". Mais cette assurance ils l'expriment aussi bien ä l'egard de certains metropolitains: "Les gens de France ont toujours un accent different, surtout les gens des carnpagnes ä lyepoque [... ] Surtout les gars du Nord la, les gars qui viennent de Fecamp tout ga, ils avaient des sacres patois . Ce η'est done pas seulement par rapport ä leurs voisins d'Amerique du Nord qu'ils caracterisent leur propre fagon de parier, mais aussi par canparaison avec celles des marins-pecheurs venus des cotes de la Manche qu'ils ont rencontres soit dans le port soit sur les chalutiers. De ces multiples confrontations avec des variantes du frangais, ccrane avec la langue des fonetionnaires metropolitains nembreux dans les administrations, les habitants de 1'Archipel ont acquis le sentiment de parier un frangais qu'on pourrait qualifier de neutre, c'est-ä-dire depourvu de particularites distinetives. Aussi le projet d'une enquete sur une eventuelle specificite linguistique peut-il parfois provoquer 1'etonnement: "Vous trouvez qu'on a un accent ä Saint-Pierre?" S'il y a un particularisme linguistique, ce n'est pas un accent caracterisable qui le constitue, aussi bien autrefois qu'aujourd'hui: "Un Miquelonnais aurait ete en France, on n'aurait pas dit c'est un Miquelonnais ou un Saint-Pierrais [ä son langage]". "J'ai toujours partout oü je suis alle, j'ai toujours entendu les interlocuteurs auxquels je m'adressais dire que cn n'avait pas d'accent ici. Ou alors quelques-uns m'ont dit c'est un accent du Nord, c'est un accent qui s'apparenterait ä la region de Roubaix, Tourcoing, d1autres que ga ressemble au Val de Loire [rire]". La variete de tels rapprochements montre leur inadequation ä la realite. Ii n'y a pas d'accent proprement dit, mais on concede cependant des habitudes de parole particulieres:

8 "Carre vous, vous parlez pas carcne nous. Vous avez vu on parle tres vite, on mange souvent pas mal de mots et on s'apergoit bien en France . "On parle sans accent. Y a peut-etre une chose gu^on a [...1 On a tendance ä parier vite. C'est je crois peut-etre le seul grief qu'il y aurait contre la langue". Le Saint-Pierrais ou Miquelonnais qui ne veut pas se signaler par son langage n'a done qu'ä moderer le debit de ses paroles et rien de plus. Ce η'est pas la langue elle-meme qui est affectee par cette habitude. II est sans doute plus facile de remarquer les particularites des autres que les siennes. Aussi les Saint-Pierrais ne manquent-ils pas de signaler que les Miquelonnais ne parlent pas exactement ccrme eux et vice versa. Mais ce qui, par exesmple, est decrit carme typique de Miquelon, ce η'est ni des prononciations ni des mots ou toumures propres, mais la melodie de la phrase, et encore celle-ci est-elle renvoyee ä un passe revolu: "Les Miquelonnais parlaient peut-etre un peu en chantant, un peu, certains mots, oui certains mots. Mais qa s'arrete la". "Les Miquelonnais si vous voulez ils parlent un peu en chantant certains, certains, pas tous, pas dans les jeunes, mais dans les anciens, ah oui! J ai entendu toujours les vieux dire qu'ils faisaient une difference, iroi. Nous dans notre temps on faisait pas de cas". De mane que 1'elocution traditionnelle est du demaine du souvenir, le lexique particulier aux lies est sinon disparu du moins en voie de disparition. On l'evoque toujours au passe: "Saint-Pierre on avait desrootsque on n'entend pas en France". Ce lexique aurait meme subi la decadence des conditions professionelles qui en avaient provoque 1' apparition: "fa s'est perdu parce qu'on η'est plus marins. C'etait des expressions de marine les trois quarts". "Autrefois y avait le vocabulaire local, ccmprenez. Ben ecoutez les lies ne vivaient que de la peche, alors tout etait rattache ä la mer et les expressions". Son evolution est presentee ccrrme parallele, avec un certain decalage cependant, de celle qu'a suivie la population de 1'Archipel. Les irrmigrants venus s'y etablir au cours du 19e siecle apportaient chacun le particularisme lexical de leur province d'origine: "Anciennement c'etait des mots qui venaient de Bretagne, ou de Normandie, ou du Pays basque f...] Pis y avait un melange d'acadien, aussi un peu. Y a des mots acadiens certainement, ä Miquelon surtout".

9 Mais cette diversite originelle de la population, en mane temps qu'elle permettait ä quelques mots venus d'un peu partout de s'implanter dans les lies, obligeait les locuteurs ä abandonner l'essentiel des faqons de parier qu'ils pratiquaient avant leur arrivee. Pour eviter que les lies ne deviennent une nouvelle tour de Babel, chacun acceptait de renoncer au langage de ses origines: "Y a eu un melange, γ a eu du breton, γ avait du normand, y avait des souches anglaises aussi ici. Bon ben ils se sont habitues ä parier le franqais quoi. Mais alors, voyez alors,^ tandis qu'en France, bon ben si vous tcmbez dans une region oü c^est des Bretons, ben c'est des Bretons, bon ben y a pas de melange de Basques un peu. Tandis que lä y a eu tellement de melange que ils etaient obliges de prendre une langue carmune". Mais ce recours general et oblige au fran^ais ne s'est pas realise inmediatanent d'une faqon parfaite. Les premieres generations ont un peu tatonne, ce qui explique quelques imperfections, aujourd'hui eliminees: "Les anciens. mon pere tout ca, ils avaient des egressions, des mots qu ils deformaient beaucoup. Ah oui les anciens c'etait ca! Ils auraient su ecrire le mot, pis ils le deformaient ä leur fagon". "Ils savaient ecrire, mais pour dire en faire un vrai frangais, ils le savaient pas. Ils etaient quand mane capables de se debrouiller pour se faire canprendre". L'ecole a facilite cette appropriation du frangais, mais, ce faisant, eile accanplissait les vteux des habitants qui ne cherchaient nullement ä lui resister. Mane si le resultat auquel etaient parvenues les generations precedentes n'etait pas tout ä fait le "vrai frangais", on η'en etait pas tres eloigne: "En general les gens parlaient bien franqais". Tel est le discours qu'on tient couranroent sur l'histoire et la situation linguistiques de 1'Archipel. C'est le frangais catioun qui represente des l'origine son destin, et celui-ci s'est realise plus rapidement ici qu'ailleurs, ne laissant aux particularismes qu'une place de plus en plus residuelle. II est sur qu'un tel discours est tributaire de la position geographique des lies ä 4000 km environ de la Metropole, d'un cote, et ä quelques encablures de la cote canadienne anglophone, de 1'autre. Fermement attaches ä la nation franqaise, les habitants de Saint-Pierre-et-Miquelon n'hesitent pas ä se demarquer des francophones d'Amerique pour mettre 1'accent sur ce qui les rapproche de la Metropole. Cette volonte de minimiser le caractere

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regional de la langue parlee pourrait, ailleurs, etre interpretee simplement canme le souci de subordanner 1'appartenance regionale ä 1'integration dans 1'ensemble national. Mais, ici, on ne semble pas avoir de difficultes ä conjuguer 1'amour de sa petite patrie avec 1'attachement a la nation. Et valoriser tout ce qui relie ä 1'ensemble politique fran^ais ce η'est pas, ici, distendre les liens avec la carmunaute locale. Au contraire, se proclamer franqais, c'est dire en meme temps et inseparablement 1'amour de sa petite patrie, dans cette region du monde ou les Saint-Pierrais et Miquelonnais sont les seuls francophones qui soient restes de nationalste framjaise. Le "frangais de France" qu'ils veulent parier est l'un des facteurs importants de leur identite en Amerique du Nord, qui les distingue des Quebecois et des Acadiens. Qae le frangais carmun soit voulu et magnifie reellement, et non pas seulement dans le discours ä 1'usage d'etrangers ä la carmunaute locale, ne nous parait pas faire de doute. Mais cette attitude ne se fonde pas que sur un choix volontaire. Car ceux qui enumerent spontanement des particularismes linguistiques toujours en usage dans 1'Archipel peuvent etre caracterises de fagon assez precise. Ce sont des personnes qui ont passe une partie de leur vie hors des lies, que ce soit en Metropole ou au Canada, et qui exercent des professions ou la carmunication verbale joue un role preponderant, tels que les journalistes ou les enseignants. Eux n'hesitent pas ä dire qu'il y a dans 1'Archipel un accent caracteristique dont on ne peut pas simplement crediter ceux qui n'auraient beneficie que d'une courte scolarisation. Certains avouent parier eux-memes avec cet accent: "Je confonds Ivan et Yvon". Ou bien ils sont capables de decrire, par quelques exemples, les principaux elements qui constituent cet accent: "Par exemple le Saint-Pierrais ne fait absolumentjpas, enfin.il melange plutot toutes les nasales. Les /δ/, les /a/, les /a°/, tout 9a c'est la meme chose, tout ca c'est dans le mane sac et le premier qui sort ga γ est [rire]. C'est le premier qui sort. Y a les... un mot came, par exemple, encore si vous voulez, c'est /äköfer/. Et puis y avait ton /per/ et ta /mer/, etc." Pour prendre conscience des particularismes de son propre parier, il faut avoir ete confronte d'une fagon plus qu'episodique avec d'autres variantes linguistiques. Mais, dans le cas de Saint-Pierreet-Miquelon, il sanble qu'une attention presque professionnelle aux faits de langage soit necessaire pour, au-delä de la simple intuition, identifier les canposantes de 1'accent local. C'est plus le souci de depister les "deviances" par rapport ä la norme linguistique que la capacite d'analyse qui est requis. Car les traits specifiques de la

11 prononciation sont si peu evidents que les etrangers ä 1'Archipel non seulement ne les signalent pas, mais se plaisent parfois ä en souligner 1'absence, du moins oeux que des preoccupations linguistiques n'animent pas. Ainsi un fonctionnaire metropolitain qui romance ses souvenirs de Saint-Pierre fait-il dire aux habitants de Cherbourg qui voyaient debarquer le contingent de Saint-Pierre-et-Miquelon en 1914: "Caime ils parlent bien frangais, ils n'ont meme pas d'accent"5. Un tel jugement η'est pas isole. En voici un autre tout recent: "Ce petit archipel canpletement noye dans la maree anglo-saxonne conserve plus que jamais les traditions et coutumes metropolitaines ainsi que la purete de la langue. ce qui contraste grandement avec 1'accent acadien et queh^cois 6. En fait, co pourrait presque dire que les quelques traits qui particularisent la prononciation du frangais de St-Pierre-et-Miquelon ne sont sensibles qu'ä ceux qui les cherchent. Et ceci justifie bien la conviction generale qu'on y parle frangais et non pas le saintpierrais ou le miquelonnais. Car les unites lexicales inconnues des dictionnaires du frangais et qui, elles, au contraire, ne passent pas inapergues, ne suffisent pas ä conferer une identite ä la langue parlee dans 1'Archipel. Elles sont congues caime des variantes necessaires (les denominations des realites purement locales) ou bien plaisantes (les expressions imagees). Tout cela releve du langage que l'on parle lorsqu'on est entre gens du metier ou entre soi. C'est la part laissee volontiers ä la fantaisie verbale par la norme des dictionnaires. Qjand on joue avec la langue, la langue η'est pas en jeu: les Frangais si sourcilleux sur la purete de leur langue scot aussi de grands amateurs de jeux de mots, mane approximatifs. L·'affirmation actuelle selon laquelle c'est le "vrai frangais" qui est desormais parle dans 1'Archipel η'est sans doute pas un simple constat objectif, puisqu'elle contribue ä determiner 1'identite ccrrmunautaire des locuteurs. Elle ne releve cependant pas d'une illusion, car elle est fondee sur une same d'experiences. De multiples rencontres avec des francophones d'origines diverses, tant d'Europe que d'Amerique du Nord, ont permis aux habitants de verifier que leur fagon de parier ne possede pas une singularite telle qu'elle les obligerait a en changer pour se faire ccrnprendre. Leur sentiment se trouve conforte par 1'experience, rapidement faite par tout Metropolitäin nouveau venu dans 1*Archipel, qu'il peut y ccoverser sans difficulte avec tout le monde. Cette certitude partagee indique bien

5 P. Enim, qp.cit., p.183. 6 A.L. Sangum, art.cit., p.222.

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qu'il serait inadequat de qualifier de franqais regional la langue parlee ä SEM, outre que cette dencmination est critiquable pour elle-meme7. Les particularismes linguistiques restent malgre tout marginaux et leur frequence dans le discours est faible. De plus, le locuteur peut bien souvent, s'il le souhaite, se montrer independant ä leur egard en eliminant la plupart d'entre eux de son discours, de faqm permanente ou occasionnellement. Ces particularismes ne sent pas non plus solidaires entre eux: une egression locale peut tres bien s'employer "epuree" des marques de sa prononciation locale. Ce sont des unites qui oscillent entre le possible et le necessaire dans les usages linguistiques des locuteurs de 1'Archipel, mais de moins en moins pres du necessaire ä mesure que s1intensifient les relations avec la Metropole. Les nouveaux-venus ne se sentent obliges d'adopter le vocabulaire local que dans quelques cas; ceux qui le font plus volontiers entendent ainsi manifester une volonte d'integration ä la cannunaute locale. Quelles que soient les imperfections du terme8, on appelle regionalismes ces variantes du frangais qui ne sont susceptibles d'etre relevees que sur une partie limitee du danaine francophone et que ne retiennent pas les ouvrages qui codifient 1'usage normatif de la langue9. L·1etude qui suit est differentielle; elle ne rapporte done que les donnees qui singularisent les discours entendus a SEM. Les particularismes phonetiques et irorpho-syntaxiques sont beaucoup moins ncmbreux que ceux qui concement le lexique. Une liste de quelques traits en epuisera la matiere, alors que le lexique camportera plusieurs centaines d1unites.

4 L'enquete

Le corpus presente dans ce glossaire a ete recueilli au cours d'enquetes que nous avons effectuees de 1983 ä 1986, tant ä Saint-

7 Cf. par exeirple J. Pohl, qp.cit., pp. 15-16; J.-CI. Boulanger, qp.cit.; G. Tuaillon, op.cit., pp.19-20; J.-Cl. Corbeil, art.cit., pp.31-44: C. Germi et V. Lucci, qp.cit.. p.17. 8 Cf. J.-Cl. Boulanger, art.cit., pp.125-146; A. Rey, La variation linguistique dans l'espace et les dicticnnaires, dans L. Boisvert et al., op.cit., pp. 29-30. 9 On trouvera la bibliographie ccxicemant ce sujet dans P. Rezeau, Bibliographie des regionalismes du francais et extraits d'un corpus d'exemples, op.cit., pp.11-13. Cette bibliographie reprend, avec mise a jour, les donnees qui avaient ete precedenment reunies, accarpagnees de caimentaires critiques, par G. Straka dans Ou en sent les etudes de frangais regicnaux, art.cit., pp.111-126.

13 Pierre qu'ä Miquelon. (Le parier des deux lies ne differe que pour peu de mots et nous avons toujours note cette distinction dans le texte). Nos temoins appartiennent ä diverses categories sociales et professionnelles. Sur 29 harcnes, 13 sont des pecheurs; les autres se repartissent ainsi: 1 off icier de marine, 2 agriculteurs, 2 ccnrnerqants, 2 artisans, 9 employes et fonctionnaires. 16 ferrmes ont egalement ete interxogees. Presque toutes etaient sans profession au mcment de 1'enquete, mais au moins 6 d'entre elles avaient ete employees dans leur jeunesse au travail du poisson. Nos temoins avaient pour la plupart plus de 60 ans et sont evidenment tous des autochtones. D'autre part, un grand ncmbre d1 habitants nous cot foumi, parfois involontairement, des attestations de regionalismes. Dans un premier temps, nous avons interviewe nos temoins de maniere tout ä fait informelle, en essayant d'aborder avec eux, dans des conversations souvent debridees, les aspects les plus divers de la vie locale. Cette etape a ete suffisarrment productrice de lexique pour que nous puissions envisager une recherche plus systematique. Car cette "peche aux regionalismes" etait aleatoire, tant ä cause des hasards de la conversation que de 1' auto-censure qu'exerqaient les Iiiens devant des etrangers. Dans la deuxieme partie de notre recherche sur le terrain, nous avons systematiquement propose a nos temoins les mots du corpus recueilli au cours des premieres enquetes, en leur demandant d'en preciser l'emploi. Grace ä la collaboration tres patiente de nos interlocuteurs et ä leur esprit d'a-propos, nous avons obtenu non seulement ce que nous cherchions, mais une foule de nouveaux regionalismes, qui apparaissaient au cours des entretiens. Le corpus augmentait ainsi sans cesse, car nous proposions chaque mot nouveau ä plusieurs perscnnes, le but etant la production de discours. Nous avons egalement elargi notre base de donnees grace ä la caipilation d'ouvrages d'Edgar Aubert de la Rue, du corpus saintpierrais recueilli par Felix Park pour sa these d'Universite acceptee ä Caen en 1984, du fascicule sur les oiseaux de st-Pierre-et-Miquelon de Roger Etcheberry et Michel Borotra, du lexique de Raymcnd Girardin figurant dans Au temps du pipette. Le travail de Marc Derible, publie en 1986, nous a egalement permis de recueillir quelques regionalismes· os lexique est venu cependant un peu tardivement, puisque nous achevicxis alors nos propres recherches sur le terrain. On trouvera dans tous ces ouvrages des mots et expressions que nous η'avons pas retenus, soit qu'ils ne nous aient pas sembles specifiques de SEM, soit que nous ne les ayons nous-manes jamais entendus. Bcxi ncmbre d'enquetes ont ete enregistrees. Ce scot 55 bandes magnetiques et 38 cassettes, qui representent au total 124 heures. Ces enregistranents sont pour la plupart d'excellente qualite acoustique, puisque nous avons utilise un magnetophone ä bandes Uher 4000 Report

14 IC equipe d'un micro Sennheiser et un magnetophone ä cassettes Panasonic RQ 342 avec micro exterieur de meme marque HP 3101E, ce materiel alliant la qualite au faible enccmbrement. Cette importante documentation, qui est un temoignage de la vitalite des particularismes du frangais des lies Saint-Pierre-et-Miquelon, pourra egalement servir de Support ä des etudes ethnographique et sociolinguistique. Bien que, dans tous les cas, nous ayons expressement demande ä nos temoins la permission de les enregistrer, nous ne pensans pas neoessaire de donner ici leur ncm. Iis exit ete des porte-paroles de l'identite collective; mais les exemples cites sous chaque entree peuvent parfois ccmporter un aspect personnel qu'ils souhaitent garder anonyme. Le respect de nos temoins ne doit pas les priver de notre reconnaissance et nous leur renouvelons nos remerciements. Sans eux cette contribution ä la connaissance du franqais d'Amerique aurait ete impossible.

5 Particularisnes linjiigtiijwg

A ) Particularismes

phonetiques

1) Les voyelles nasales [e] et [8] ne necessitent pas de remarque. Par contre la realisaticm de [ä] et [δ] est telle que les deux voyelles peuvent produire la meme impressiai auditive, e'est-adire celle d'une voyelle intermediaire entre les deux realisations canoniques du frangais: [a5], [o®]. Cela est sensible essentiellement en syllabe ouverte et surtout en position tonique: - [ta°] 'terps1, [va°] 'vent', [gra5] 'grand', [a5] 'an', [sa5] 'cent', [depleza5] 'deplaisant', [ota°] 'autant', [äfa5] 'enfant', [kapla5] 'capelan', [a°sye] 'ancien'. - [pasyo5] 'pension', [ploto5] 'peloton', [kano5] 5 5 [pötorso ] 'Pontorson', [mezo ] 'maison', [lo5] 'long'. Mais on peut parfois entendre fexmee:

'canon',

les manes articulations en syllabe

-[a°s] 'anse', [foät] 'fonte', [oäkl] 'cxicle'.

2) Le point d'articulation du a tend ä etre determine par la position de la voyelle dans le mot. Sauf environnement particulier, la

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voyelle s'articule generalement carme un [ä] mo ins anterieur que la voyelle franqaise correspondante et qui peut meme etre un a central. Mais en syllabe tonique libre c'est un [ä] nettement posterieur que l'on prononce dans tous les cas. Des oppositions caime celles qui sc«it encore courantes dans la moitie nord de la France entre [la] •la' et [la] 'las' sont ici impossibles: [ga] 'gars'/, [lä] 'la', [sä] 'qa', [ba] 'bas', [ta] 'tas', [plä] 'plat', [drä] 'drap', [gra] 'gras', [äea] 'achat', [dejä] 'dejä', [äpä] 'appat', [etä] 'etat', [solda] 'soldat', [kamera] 'camera', [alleluya] 'alleluia', [rezultä] 'resultat', [fäbyolä] 'Fabiola', [sertifika] 'certificat'. - Lorsque la penultieme contient eile aussi un a libre, celui-ci peut etre egalanent posterieur: [papa] 'papa1, [kanada] 'Canada', [pijama] 'pyjama', [malägä] ' (du) malaga'. - Si le a est suivi d'un r, et surtout si celui-ci forme entrave, la voyelle se ferme en [ae] et peut meme aller jusqu'ä [e]: [taer] 'tard', [kaert] 'carte', [laer] 'lard', [taert] 'tarte', [eka r] 'ecart' [cmaer] 'hcmard', [faer] 'phare', [raer] 'rare', [maer] 'mare'. e

[caeret] 'charrette', [maeren] 'marraine', [paere] 'parrain', [pa rä] 'parent', [maeri] 'mari', [maerye] 'marie', [paerol] 'parole', [kaeryer] 'carriere', [volotaerya] 'volontariat'. e

3) La graphie oi de 1' orthographe frangaise connait ici deux prononciations possibles: - En finale absolue tcnique, la prononciation [wa] est constante au point qu'une opposition distinctive entre moi et mois devient impossible: [inwa] 'moi', [kwa] 'quoi', [purkwa] 'pourquoi', [vwa] 'voix', [δ vwa] 'on voit', [dwa] 'doigt', [i dwa] 'ildoit', [fwa] 'fois', [on aperswa] 'on aperqmt', [rwa] 'roi', [krwa] 'croix', [drwa] 'droit', [ädrwa] 'endroit', [äplwa] 'emploi'. - Dans les autres positions, la prononciation oscille entre [wa], [wae] et [we]:

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[twat] 1boite', [mwan] 'moine', [äkrwar] 'accroire', [swaer] 'soir', [pwael, pwel] 'poele', [pwesö] 'poisson', [vwelä] 'voila', [vwer] 'voir', [ävwer] 'avoir', [sävwer] 'savoir', [vwetur] 'voiture', [i vwey] 'ils voient'. Mais [wa] est aussi possible, notarrment quand joue l'analogie avec des formes radicales ou la voyelle est en finale absolue: [drwat] 'droite', [krwazmä] 'croisement'. En syllabe pretonique libre on entend aussi la prononciation [wa]: [kwafe] 'coiffe', [pwaro] 'poireau'. Dans le cas de goärcn les deux prononciations scxit possibles: [gwaroa] et [gwairo3], ce qui sanblerait indiquer que, dans une telle position, le [wa] est une prononciation secondaire. La graphie -oy- se prononce [oy] ou [oy], qu'il s'agisse d'une ancienne diphtongue oi (moyen, noyade) ou non (boyau) au contact d'un yod: [moye] 'moyen', [noyad] 'noyade', [boyo] 'boyau'. 4) Au contact d'un r formant entrave, les voyelles de type e, ο, ό prennent le timbre ferme: - [er] 'air', [ter] 'terre', [mer] 'mere' ou 'mer', [per] 'pere', [äfer] 'affaire', [ger] 'guerre', [demye] 'dernier', [pyer] 'pierre'. - [spor] 'sport1, [nor] 'rrort', [nor] 'nord', [por] 'pore', [efor] 'effort', [deor] 'dehors'. - [ar] 'heure', [bar] 'beurre', [pecer] 'pecheur', [soer] 'soeur' [caser] 'chasseur', [motar] 'moteur', [dokter] 'docteur', [diktatoer] 'dictateur', [äyter] 'ailleurs'.

5) Une voyelle de type e se labialise frequenment au contact d'une consonne labiale ou labiodentale antecedente ou subsequente: [lev] 'levre', [bee] 'beche', [bet] 'bete', [i poez] 'il pese', [moeea] 'mechant', [aproemidi] ' apres-midi'.

17 6) A Saint-Pierre uniquenment, un [o] s'anteriorise en syllabe fermee jusqu'ä [cS]. L'etape intermediaire s'y entend aussi: [äkcer, kdr] 'encore1, [aldr] 'alors', [nds] 'notre' [po°rt] 'porte'.

'noce',

[niet, no°t]

7) Le -t final se maintient, dans les nans cannuns carme dans les nans propres, plus frequemment que dans la langue generale: [but] 'bout', [debut] 'debout', [kanot] 'canot', [biket] 'biquet', [perot] 'Perrot', [derwet] 'Derouet', [rwet] 'rouet1.

8) Un ancien [1] palatal devenu final est generalenent amui: [kadri] 'quadrille', [ti] 'tille (de bateau)' [epa5ti] 'epcxitille', [geni] 'guenille', [mani] 'manille' (jeu de cartes), [gri] 'grille'.

9) II η'est s'assourdissent:

pas rare qu'en finale absolue les conscnnes scxiores

[nec] 'neige', [obere] 'auberge', [bordac] 'bordage', 'rivage' [devis] 'devise1, [graf] 'grave', [rat] 'rade'.

[rivay]

10) En finale absolue les groupes consonantiques se sinplifient de fagcm plus frequente qu'en frangais parle: [cev] 'chevre', [tab] 'table', [sup] 'souple1, [pis] 'piste1, [lis] 'liste', [minis] 'ministre', [vas] 'vaste', [äp] 'apte1, [bas] 'basque'. La consonne restante peut alors s'assourdir: [kwif] 'cuivre', [epermeap] 'impermeable', [put] 'poudre'.

Les particularismes phonetiques releves ne representent que des realisations possibles, en concurrence avec les prononciations correspondantes du frangais "standard". Quoique frequents, ils ne salt constants ni chez tous les habitants ni dans le discours d'un metne locuteur. Leur apparition η'est pas strictement dependante de l'age ou

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de la situation sociale du locuteur ou des conditions d'enonciation. On peut les entendre dans la bouche des adolescents caime des gens äges, dans les conversations familieres catme lors de prises de parole en public, ä la radio ou ä la television. Leur absence chez certains locuteurs temoigne d'une sensibilite plus grande aux normes du franqais, acguise pendant une formation scolaire ou professionnelle longue en Metropole ou bien par des contacts Continus avec les Metropolitains. La resistance beaucoup plus forte de la distribution particuliere des deux a semble symptanatique. L'ecole n'a manifeste aucun empressement a diffuser une repartition qui est restee floue sur beaucoup de points: "c'est pour l'a que les divergences individuelles de prononciation ou les flottements sont le plus frequents"10. L'isolement de moins en moins grand de 1'Archipel vis-ä-vis de la Metropole entraine certainement une rroindre frequence d'apparition des particularismes phonetiques. Mais seule une etude sociolinguistique longue et delicate pourrait determiner avec precision les etapes de ce repli. II est clair que ces particularismes en voie de reduction sont la perpetuation d'un heritage linguistique. II est possible de rapprocher certains d'entre eux de caracteristiques des parlers acadiens. La velarisation de [ä] en [δ] est signalee caime une tendance evolutive ä 1' ceuvre dans le fran^ais populaire actuel, specialement dans la region parisienne11 oü eile est attestee depuis le 17e siecle12. Mais c'est d'un phencmene different qu'il s'agit ä SaintPierre-et-Miquelon puisqu'il affecte les deux nasales. Les etudes consacrees aux voyelles nasales en quebecois ne mentionnent rien de semblable13. Par contre, des realisations du meme ordre que celles de SEM sont notees caime caracteristiques des parlers acadiens: en syllabe tonique libre, "les realisations des voyelles nasales sont tres instables, au point que [ö] et [ä] ne s'y distinguent plus"14. Des notations [a°] et [ö] pour -an- ou bien [a°] et [ä] pour -απn'apparaissent que dans les parlers acadiens des Iles-de-la-Madeleine et des Provinces-Maritimes du Canada etudies dans 1'Atlas linguistique de 1 '22sfc du Canada (ALEC) pour les mots, banc, cormoran, goeland, manche, manchon, piochon, sillon, timon15. D'autre part, aussi bien en Acadie qu'au Quebec prevaut la regie qui impose que tout a se

10 M. Graiimont, op.cit., p.26. 11 B. Müller, op.cit., pp.65 et 246; Η. Walter, op.cit., p.53; E. et J. Bourciez, op.cit., p.64. 12 G. Straka, Sur la formation de la prononciation frangaise d'aujourd'hui, art.cit., pp.183-184. 13 R. Charbonneau. op.cit.; P. Leon, art.cit. 14 V. Lucci, op.cit., p.131 et surtout pp.67-70 ou le phencmene est etudie. 15 Cartes ALEC 126, 420, 721, 734, 738, 741, 767, 856, 891, 1122, 1482, 1505.

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realise ccnme un a posterieur en syllabe tonique libre, ccnme ä SEM16. Mais cette regle η'est pas d1application generale au Quebec lorsque le a est precede de [w] dans la graphie oi, a la difference des parlers acadiens17. Le a posterieur apparait surtout dans les donnees issues des parlers acadiens des Iles-de-la-Madeleine et des Provinces-Maritimes, quoique non exclusivement, pour les mots doigt, fois, roi, toi dans l'ALEC18. La conservation d'un -t final derriere voyelle est un phencmene repandu dans les parlers populaires du Canada, tant au Quebec qu'en Acadie19, ccnme l'indique la repartition des prononciations de debout ou lit dans l'ALEC20. Dans ces quelques cas, les particularismes phonetiques de Saint-Pierre-et-Miquelon ont des equivalents au Canada et principalement dans les parlers acadiens. Mais des phenomenes aussi caracteristiques du frangais du Canada que la palatalisation des occlusives velaires ou dentales, ou le relächement, dans certaines conditions, des voyelles les plus fermees n'apparaissent pas dans 1'Archipel. Les concordances phonetiques avec les parlers acadiens restent minimes, 1' uniformisation sur le modele de la prononciation en vigueur ä l'ecole et dans les moyens de catntunication audiovisuelle prevalent de plus en plus.

B) Particularismes morpho-syntaxiques L'institution scolaire considere la norme grairmaticale catme particulierement iirperative et les variantes par rapport ä celle-ci ccnme autant de "fautes". Aussi, sur ce plan, beaucoup plus qu'en ce qui conceme la prononciation et le lexique, 1'apparition de particularismes est-elle fonction du degre de formation scolaire atteint par le locuteur, de sa situation professionnelle et des conditions d'enonciation. Les fait mentionnes ci-dessous appartiennent au style familier de locuteurs qui n'eprouvent pas le besoin de surveiller leur expression. La plupart se retrouvent ailleurs dans des disoours de niveau catparable.

16 V. Lucci, op.cit., pp.60-64; D.C. Walker, op.cit., p.78; D. Dumas, art.cit. 17 J.-D. Gendron, art.cit., pp.82-83; D.C. Walker, op.cit., pp.88-92; V. Lucci, op.cit., pp.60-64; D. Dumas Le traitement de la prononciation dans les dictionnaires, dans L. Boisvert et al., op.cit., p.263. 18 Cartes 1046, 1155, 1727, 1728, 1745, 1746, 2194, 2274, 2310. 19 J.-D. Gendron, art.cit., pp.343-344. 20 Par exemple sur les cartes 128 et 1254.

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1) Substantifs

Les substantifs ant le mene genre qu'en franqais general; mais ceux qui carmencent par une voyelle sont generalanent faninins ä SIM. Les mots suivants ont ete entendus au feminin: argent, arrangement, arret, artisanat, asile, atelier, autanne, avion, engrais, escali espace, etang, ete, hiver, hotel, outil. "Quand cm a de 1'argent on ne la garde pas ici". Pour le ncmbre, les substantifs, singuliers de forme mais a valeur collective, sont consideres ccnme des pluriels pour les accords: "Tout le monde ont pas la sante de faire un metier". 2) Mjectifs demonstratifs L'adjectif demonstratif est forme de 1'article defini le, la, les antepose au substantif et des adverbes postposes ici, pour le proche, et lä pour le lointain. Ces formes nous semblent plus courantes ä Saint-Pierre qu'ä Miquelon. Elles ne sont pas toujours des equivalents exacts d'un demonstratif. Quelquefois la construction le ... ici a la valeur qu'on donnerait en frangais general ä le ... d'ici: "II est venu avec ses parents -il etait ne en France. Quand il a attrape* vingt ans, fallait qu'il fasse son service. Alors ccnme c etait des fonctionnaires assez hauts, avec 1'administrateur, enfin les autorites ici se sont arrangees ä lui faire faire son service ici ä la caserne des disciplinaires". "Les autorites ici" ce sont "les autorites d'ici", sans aucune des valeurs, ni deictique ni anaphorique, du demonstratif. Mais, tres souvent, ces formes fonctionnent carme d'authentiques adjectifs demonstratifs : "A l'lle [-aux-Marins] y a de la terre cultivable, mais c'etait pas un champ, c'etait peut-etre... y en avait qu'avaient peutetre pas la piece-ici [de la maison ou nous saimesl, c'est tout. Y avait de quoi mettre la salade et puis deux douzaines, deux trois douzaines de choux". "Y avait des maisons qu'avaient un petit couloir et puis deux ou trois Portes, une la, une la, une lä. Ben y avait quelquefois un calorifere entre les portes-la". "Y avait un mat de charge tres tres haut, parce que ä cette epoque si on voulait mettre un moteur ä bora d'un bateau, c'etait le mat-la, vous savez, qui servait".

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Qiand il n'y a pas d'opposition entre deux realites, l'une proche du locuteur et 1'autre eloignee, on prefere generalement les formes postposees en -la.

3) Adjectifs et proncms indefinis Les indefinis exprimant une quantite nulle aucun, personne, rien peuvent coexister dans la mane proposition avec un adverbe de negation: "lis n'auraient pas achete aucun vin franqais en France". "Heureusement qu'il y avait pas personne!" "On veut pas rien dire". "On n'a pas ä s'occuper de rien".

4) Proncms relatifs Devant un mot ä initiale vocalique la forme que du pronan relatif s'emploie aussi bien caime canplement d'ob jet direct que caime sujet du verbe de la relative. "Y en a qu'ont parti d'ici". "Y a eu un cyclone qu'a passe la". Cette forme que est 1'equivalent courant de dent: "Ces fameux petits camions que je vous parle". "L'hanme que vous etes sur la maison...".

5) Proncms personnels Le proncm sujet feminin de la troisieme personne du singulier se prononce [ä] devant conscraie et [al] devant voyelle. A la troisieme personne du pluriel, on ne distingue pas obligatoirement les genres des proncms sujets: ils peut representer des substantifs feminins: "Les jeunes filles ils venaient se louer pour leur pain". Ce proncm ne ccmporte pas obligatoirement non plus de marque de ncmbre devant un verbe ä initiale vocalique: [il ete] 'ils etaient', [il ale] 'ils allaient'.

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Le pronati en 'de cela', ccmplement de verbe ou locution verbale, peut s'cmettre. Voir, par exemple, cas, connaissance au glossaire.

6) Verbes - Les verbes de mouvement admettent l'auxiliaire avoir: "il a parti", "j'ai retoume", "9a a tcmbe". - On emploie plus courairment les formes d'indicatif que Celles du subjonctif pour les verbes du premier groupe dans les subordonnees dont le verbe est regulierement au subjonctif en frangais: "Fallait que chaque pecheur, apres sa poisson".

Campagne,

il

lavait

son

Lorsque le verbe de la principale est au conditionnel, on emploie le mane temps dans la completive: "Je voudrais bien qu'il viendrait". m'etonnerait s'il γ irait pas". - Le radical du conditionnel du verbe avoir est 'il aurait1.

ar- : il arait

- Le passe simple est inusite, sauf dans la locution il fut un temps ou 'il y eut une epoque ou'.

7) La phrase attributive L'attribut d'une phrase attributive peut, par expressivite, etre place en tete de phrase. Le reste de la proposition est alors joint par que: "Furieux qu1il etait!" "Rouge carme un hcmard qu'il etait! II avait honte!" Frequenment cette toumure est erployee par antiphrase (camne dans franqais general "c'est du joli!"). "Beau qu'il fait!" (= il fait mauvais temps). "Petit que c'est!" (= c'est grand).

le

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C) Particularismes lexicaux La norme lexicale est moins determinee que celles qui regissent la prononciation ou la graninaire, puisque les nanenclatures des dictionnaires ne sont pas uniformes et que η'importe quel quotidien contient des unites lexicales qui ne sont pas encore enregistrees dans les dictionnaires. Cependant c'est la variation lexicale qui est la plus evidente aux locuteurs, car, lorsque la difference linguistique est peu marquee, seuls les rrots inconnus ou les emplois originaux peuvent provoquer 1'incanprehension ou les malentendus entre des locuteurs originaires de milieux differents. Aussi est-ce la difference lexicale qui est d'abord citee lorsqu'il est question des particularismes linguistiques de 1'Archipel. Les locuteurs ont conscience de cette difference globalement, mais le degre de conscience varie selon les cas. Le regionalisme est quelquefois parfaitement identifie ccnme tel. Tous les chasseurs qui partent chasser le chevreuil doivent porter sur eux un permis de chasse au cerf de Virginie. Cette demiere dencmination η'est employee que par 1'administration. Aucun chasseur ne l'emploie, mais tous peuvent dire que le ncm du chevreuil est cerf de Virginie. On emploie le nan local d'un oiseau ou d'un poisson en sachant parfaitement que les savants leur donnent un autre nan: "La marache, j'ai oublie le vrai nan", dit un de nos terrains. Seuls ceux qui se sont interesses aux descriptions des naturalistes, dans l'exercice de leur profession, par leurs etudes ou en raison de leurs gouts personnels, connaissent les denaninations reconnues de la faune et de la flore. Mais tout le monde sait, ou au moins soupgonne, que les nans usites dans les lies ne le sont pas chez les naturalistes. Ce n'est pas non plus dans le dictionnaire qu'on ira chercher les expressions plaisantes pour qualifier le degre d'ivresse par exeitiple. Mais ces locutions appartiennent-elles ä 1'argot, au langage familier, ou bien sont-elles authentiquement locales et originales? Les locuteurs ne se posent pas de telles questions puisqu'ils ne les emploient que pour rire ou se moquer! On se doute bien aussi que les denominations des realites climatiques locales sont inconnues en Metropole. On prendra alors la precaution d'ajouter ä l'enonce, en guise d'avertissement ä l'etranger ä la carmunaute: "... carme on dit". A 1'interlocuteur d'en apprendre le sens, car on ne connait pas d'equivalent ä cette expression et on η'en cherchera pas. (Dans ce cas, est-ce le mot qui est regional ou bien la realite qu'il denarme?) De mane, par exemple, le vocahulaire qui decrit les operations de preparation de la morue est necessaire ä ceux dont c'est le metier. Son bien-fonde ne saurait etre mis en cause; c'est un lexique technique dont les professionnels ont la maitrise. Enfin, le caractere local du mot peut etre totalement

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insoupq»nne. Nos demandes de precisions provoquent ainsi parfois l'etonnement, et on ne manque pas alors de verifier dans un dictionnaire 1'absence surprenante d'un mot qu'on croyait "franqais". L'attitude envers les regionalismes depend done des cas et de la diversite des experiences faites par les locuteurs. Tel terme est d'usage quotidien, dans les conversations familieres carme dans les annonces publicitaires ä la radio, et chacun l'emploie, au point que les Metropolitains exit du prendre 1'habitude de l'utiliser. Et, ä 1'oppose, tel autre n'apparait plus que carme mot-souvenir dans les evocations du temps passe. Le corpus rassemble est done disponible ä des degres divers selon les cas, mais aussi selon les locuteurs. II est clair que le vocabulaire qui se rapporte aux pratiques desuetes est peu connu des plus jeunes ou que celui de la faune terrestre est surtout familier aux chasseurs, par exemple. II est vraisemblable qu'aucun locuteur ne dispose de la totalite des regionalismes recenses. Petit ä petit l'uniformisation linguistique progresse, meme si la volonte de manifester 1'appartenance ä la camtunaute au sein de laquelle αϊ a grandi reste toujours vivante.

6 Presentation du lexique

Le lexique qui forme la partie principale de ce travail ne pretend pas rassembler la totalite des particularismes audibles ä Saint-Pierre-et-Miquelon. L'experience montre en pareil danaine qu'aucune enquete, aussi minutieuse soit-elle, ne peut etre exhaustive. Chaque entretien, du premier au dernier, apportait sen lot d'unites nouvelles, mais leur ncmbre de plus en plus decroissant a mesure que progressait notre recherche risquait de rendre l'investissement disproportionne au rythme de la progression. Les quelque 1500 entrees que canporte le lexique, a defaut d'une exhaustivite impossible, donnent, pensons-nous, m e approximation satisfaisante de 1'ensemble des particularismes les plus disponibles actuellement dans 1'Archipel.

Choix des entrees

Le choix des entrees a ete effectue en fonction de criteres aussi rigoureux que possible, mais il canporte forcement une certaine part d'empirisme. En principe, nous n'avons retenu que les termes, atplois ou expressions qui ne scot consignes ni dans la deuxieme edition du Grand Robert de la langue frangaise ni dans les 13 volumes du Tresor

25 de la langue frangaise parus au mcment de la redaction ou, pour la partie encore inedite de cet ouvrage, dans le Grand Larousse de la langue frangaise. Cependant nous n'avons pas elimine de notre liste les unites dont ces dictionnaires qualifient 1'usage de regional ou d'archaique ou simplement de vieilli. Dans quelques rares cas, nous n'avons pas craint d'enregistrer des donnees signalees dans ces dictionnaires, mais qui nous semblent relever, aujourd'hui, de 1'usage litteraire plutot que de 1'usage oral courant. Le cas de figure inverse est illustre par des termes naguere encore desuets mais qui connaissent une reviviscence certaine en franqais dans 1'usage recent. Nous avons ainsi note fiable dont 1' emploi ä SIM η'est pas exactement hcmologue ä celui qu'on lui donne en frangais contarporain. Les termes techniques posaient un probleme plus epineux: lorsqu'une technique η'est pratiquee que dans une region determinee du danaine francophone, le vocabulaire qui s'y rapporte appartient-il au registre technique ou au registre regional? Nous avons retenu le vocabulaire qui a trait ä la peche ä la morue et ä la preparation de ce poisson, parce qu'il η'est pas entierement normalise en frangais technique et qu'ä Saint-Pierre-et-Miquelon il η'est pas connu des seuls pecheurs, sans nous dissimuler l'arbitraire relatif de ce parti-pris. De faqxxi comparable, les dictionnaires retiennent des denominations de realites d'outre-mer ä partir de 1'usage qu'en font les voyageurs ou les geographes. Nous avons releve ces termes dans la mesure ou ils appartiennent ä 1'usage courant dans 1'Archipel parce qu'ils y denanment des realites d'experience constante. Par contre, nous avons elimine les unites qui appartiennent au franqais argotique, pcpulaire ou familier dont l'emploi ne peut etre localise ä l'interieur de la Prance. Dans une perspective pan-francophone de telles donriees seraient sürement ä prendre en consideration. Mais, faute d'etudes signalant les donnees negatives dans les diverses parties du monde francophone et parce que les limites risquent d'etre irrpossibles ä tracer des qu'on s'engage dans cette voie, nous nous en scrmes abstenus. Nous avons cependant fait exception pour quelques termes ou expressions qui nous ont paru beneficier ici d'une meilleure integration au lexique camtun qu'ailleurs. C'est, entre autres, le cas d'expressions typiques de 1'argot de la marine mais dont les travailleurs de la mer η'ont pas 1' exclusivite dans 1'Archipel. En bref, dans les cas litigieux, nous avons prefere pecher par exces plutot que par defaut. On rencontrera dans les textes cites des emplois originaux qui ne donnent pourtant pas lieu ä une entree specifique. Chaque fois il s'agit d'atplois qui η'ont ete releves que chez un seul locuteur et dont on n'a trouve aucune mention dans la litterature specialisee. Iis ont ete ccnsideres catme des faits personnels.

26

Structure des articles La presentation des articles s'ecarte sur certains points de celle qui est habituelle, du fait qu'il s'agit d'un dictionnaire differentiel. - Graphie La graphie usuelle des mots frangais et anglais a generaleroent ete conservee, quitte ä signaler une prononciation particuliere21. Mais lorsque la prononciation correspond ä une graphie ancienne, abandonnee en frangais moderne, c'est celle-ci que nous avons preferee, ex. balier, capestan. Lorsque le particularisms phonetique affecte 1'initiale du mot, la graphie adoptee en tient canpte, ex. landain pour andain, lembardee pour embardee. Les mots pour lesquels il n'existe pas de tradition graphique ont ete ecrits en fonction des habitudes graphiques du frangais et de 1'etymologie que nous proposers. - Prononciation La prononciation η'est signalee que lorsque la graphie adoptee η'est pas suffisanment explicite ou pourrait induire en erreur ou encore lorsque des formes multiples ont ete recueillies. - Definition Les entrees scot moins definies que glosees. Sauf impossibilite, nous nous sarmes ccntentes de leur donner un equivalent en frangais courant ou bien tire des nomenclatures scientifiques en ce qui conceme la faune et la flore. - Exemples Les exemples ne sont pas seulement destines ä illustrer les entrees retenues. On pourra les estimer trop ncmbreux ou trcp prolixes, mais ces extraits, bien minces par rapport ä la masse des discours enregistres, exit un role important ä jouer. lis procurent les precisions souhaitables sur les realites, les pratiques, les usages ou les croyances qui donnent ä 1'Archipel et ä ses habitants leur originalste. Iis ont done souvent un caractere ethnographique. Plutot que de resumer en un discours distancie les elements necessaires ä la

21 La notation phonetique est Celles qu'utilisent ccmnunenient les auteurs des atlas linguistiques regionaux de France.

27 comprehension d'une simple phrase, nous avons prefere laisser la parole ä nos tenoins: ils apportent ainsi eux-memes, ä leur fa courir, descendre, traverser. Ici canine dans beaueoup de parlers, la repartitien des enplois entre les prepositions a. en, dans s'ecarte, sur quelques points, de 1'usage reconnu aujourd'hui en frangais. L'enploi de ä devant les nans de saisons autres que printenps, quoiqu'atteste, reste rare en franqais (TLF 1,12a et 7,1001a). L'enploi pour dans introduisant un carplement de lieu est un arcbaisme (TLF 1,10a et 22b). L'enploi entre des prencms pour exprimer la filiation est typique des parlers acadiens (Poirier). Celui de a devant tout, surtout suivi d'un substantif

32 ABAT

indiquant une periode de temps, est carniun au Canada (ALEC 2310; Poirier).^L'emploi de ä suivi d'un infinitif et equivalent ä en regissant un gerondif est atteste en francais du 16e siecle (G. Gougenheim, Grammire de la langue frangaise du 16e siecle, Paris, 1974, p. 216).

ABAT s.m. ou f. (plus rarement) Averse abondante. 1 "Y avait un ruisseau qui coulait la, pis quelquefois ben apres des gros abats de pluie cm faisait un barrage de bois, on mettait des cailloux pour ne pas que 9a coule trop. coulait ä cote du jardin". 2 "CXiand y a des gros abats de neige, ils travaillent jour et nuit a deblayer la neige". 3 "Une autre annee c'etait les sauterelles. J'ai vu les palissades et les murs de maison, ben vous n'avez pas... vous n'avez pas vu le jour ä travers, hein. C'etait ccnme si 9'avait ete tapisse. Υ en avait, y en aveiit, y en avait! Eh ben je sais pas. Soit disant que c'etait un... abat de sauterelles qu'avait... Et puis oette annee on n'en a pas eu". Le substantif abat pour une forte averse est typique de l'ouest de la France. En Normandie les expressions pluie d'abat, eau d'abat, la pluie tanbe d'abat (Alii 515 et 547) sont plus frequentes que le carpose abat d'eau. Ce dernier est caurant en Poitou, Aunis et Saintonge. Le Canada connait les deux types: abat d'eau et pluie d'abat (ALEC 1175; Poirier 12; FEW 24/1,18a ABBATTUERE).

ABGBDAGE s.m. ou £. Collision entre deux vehicules. 1 "Deux autos qui se rencontrent c'est un abordage". 2 "Y a souvent de 1'abordage". 3 "Une collision entre deux avions, un abordage, quoi". -> bumper. Extension d'emploi originale d'un mot du vocabulaire maritime (PEW 15/1,185a *BORD) qu'on rencontre aussi en Louisiane (Daigle: 'collision, wreck').

ABRAQUER 33 ABOKDER vb. tr. Heurter accidentellement avec un vehicule. 1 "Aborder les chevreuils*". 2 "Je me suis abordee avec X". önploi du verbe franqais. hors de contextes maritimes, connu au Canada (GPPC: Poirier), en Louisiane (Daigle) carme en Normandie (EEW 15/1, 185a BORD).

ABOUTIR vb. intr. Venir ä suppuration. "Si vous attrapez un furon* au poignet par exanple, il faut qu'il guerit, qu'il aboutit quoi!" Etaploi atteste au Canada (ALEC 2224) et en divers Dariers de France, qui parait suranne aujcxird'hui en frangais (FEW 15A,221a *BOTAN).

ABRAQUER [äbrake] vb. tr., EMBRAQUER [äbrake] (plus rare) 1. Raidir (un filin) en tirant ä soi. 1 "Quand il calmit [... ] faudrait abraquer le mou". 2 "Abraque! Alors vous tirez dessus". -> faire 5. 2. Tirer ä soi un cordage, un filet. 3 "Abraquer qa veut dire ramener ramener un filin par exenple vtxas savez, ramener un filin ou bien abraquer le filet, ou bien abraquer la bosse du doris*". -> dadin 5, pli. 3. (Au figure). Prendre pour soi. 4 "Une personne qu'ä 1'ambition* d'abraquer ceci cela".

34 ÄBRIER 5 "Qiand il a 1'occasion d'abraquer guelque chose". 6 "Tu paries s'il abraque! Le plus qu'il va pouvoir abraquer il va etre content!" -> mange-merde 1,2. Les dictionnaires recents enregistrent seulement embzaquer (Rob, GLLF) ou abraquer (TLF). Mime le TLF qui l'a adoptee considers la forme abraquer, la plus courante ä SEM, carme rare et vieillie (1,186b). L'emploi figure n'est pas Signale ailleurs (FEW 1,482a BRACA). Le verbe est atteste au sens d"Dbtenir' dans 1'argot de la marine (Esnault).

ABRIER [abriye] vb. tr. Abriter. "[Les piles* de irorue] c'etait bien abrie. Iis mettaient trois et* quatre couches de prelarts* dessus". Prononciation ancienne du verbe abriter restee courante au Canada francais (ALEC 142,617) et dans les parlers dialectaux de France (FEW 25/2, 55-56 AFRICAH&).

ACCOSTER vb. I - vb. tr. 1. S'approcher de. 1 "Le chevreuil* faut une balle pour... parce qu'ils ne pas l'accoster ä... ä vingt metres hein!" 2 "[Les godes*] quelquefois vous accostez ga tout pres".

peuvent

2. Approcher (quelque chose). 3 "Accoste ta chaise!" 4 "Le banc n'est pas accoste" [de la table]. 5 "On accostait les voitures ä 1*entree de decharger".

l'etable

pour les

ADGNNER 35 II - vb. intr. S'approcher de. 6 "La morue cherche la boette* et pis la boette accoste ä la terre et pis eile suit". Qnplois particuliers d'un mot du vocabulaire maritime (FEW 2/2, 1247-8 COSTA.) qui sent attestes dans la langue des marins (Sizaire p. 122).

ACOUSSER vb. tr.

Chasser, poursuivre. 1 2 3 4

"Acousse-le avec de la neige". "Acousser un chien ä coup de cailloux". "C'etait la grande folie acousser les godillons*". "Les gamins disaient: on va aller acousser les godillons* apres l'ecole. Y en a qui en tuaient vous savez, moi le premier, avec des pierres, quoi avec des cailloux".

Repräsentant du verbe acourser 'faire courir' atteste en ancien et moyen frangais, qui η'a de correspondent exact dans les parlers modernes jpour la prcncnciation et l'enploi qu'en Haute-Bretagne (FEW 2/2, 1577b CURSUS).

ADCXMER (S') vb. pr. 1. (Avec sujet anime). Survenir. 1 "Vous allez vous adonner juste pour la fete". 2 "Vous vous etes adonnes ensemble". 2. (Impersonnel). Arriver, se trouver. 3 "Quand il s'adonnait faisait 4 "£a s'adonnait que 9aqu'il caimengait lebeau". 26". 5 "C'est malheureux mais belee 1, bobsleigh 1, brassiere 1, chien 11, enroche 3, latte 1, raban 1. Get enploi non technique d'un mot du vocabulaire maritime est frequent aussi bien dans les parlers du Canada et de Louisiane que dans ceux de l'ouest de la France (FEW 15/1,2b 'AENMARREN).

ΑΜΒΓΠ0Κ s.f. Dans les expressions: 1. Avoir de 1 'ambition Avoir une volonte ardente et tenace. 1 "II a de 1'ambition pour la peche, pis il en peche de la morue hein!" 2 "Eaut avoir de 1'ambition!" [pour se faire missionnaire]. 3 "Je n'avais pas d'ambition pour l'ecole".

44

AMENER

2. Avoir chose.

1 'ambition

de

Vouloir fortement, souhaiter vivement quelque

4 "On a 1'ambition de prendre le plus de poisson possible". 5 "Celui qu'a l'anibition de dompter un chien, pis le teirps...". -> ahraquer 4, mange-merde 1. Bnplois du mot franqais clcnt les paralleles sont attestes au Canada (GPFC) cxume en Normandie et Picardie.

AMEMER vb. intr. Mettre le doris* ä flot. Syn.: devirer. "Vous amenez carme ga, puisque vous amenez de sens contraire he in. Vous virez* ccmme qa hein, alors vous amenez carme ga". [Vous toumez le cabestan en sens contraire]. -> larguer 1. anploi absolu d'un verbe du vocatulaire maritime generalement transitii (FEW 6/2,106-7 MDOVRE).

AMIGO s.m. Marin espagnol. 1 "Tiens voila les amigos qui sont au quai". 2 "lis soit toujours en train de dire amigo, ami. Alors ils les ont surnames les amigos". Biploi particulier d'un not espagnol.

ÄNE

45

MURAL· s.m. Pecheur qui a fait la meilleure saison de peche. Syn.: (le plus) grand, (le plus) haut. 1 "C'est lui cette annee, c'est lui l'amiral". 2 "L'amiral, celui qui est le plus haut* en peche*, celui qu'a pris le plus de poisson". 3 "C'est pas pareil un amiral et pis l'amiral un petit pecheur... il a moins de galons!" Emploi particulier du mot franqais, derive probablement de: amiral "premier arrive des bateaux qui vont ä Terre-Neuve" (FEW 19,4b AMIR). Celui-ci est atteste au moins depuis 1640 (La ^Morandiere 1,391)._ La transition entre les deux emplois a ete assuree par un autre, note en 1786: "[...] cn norme tous les soirs un amiral celui de tous qui a |j)eche le plus de morues dans la joumee." (cite par La iforandiere

ΑΜΕ s.m. ou f., XNGH s.m. Eglefin. 1 2 3 4 5

6 7 8 9

"Des fois vous voyiez le mcnde qui courait pour avoir un äne". "La peche aux anes [an]". "L'ancn sen nan c'est l'ane". "L'ancn c'est le poisson ä St-Pierre 9a11. "L'ancn, la, on a dit que e'etait le premier poisson que StPierre avait peche. Y a une marque le pouce et 1'index, sur le poissen de -chaque cote". "Une morue est beaucoup plus viandee* que l'äne". "C'est ä peu pres la morue, mais la chair est plutot plus rude. C'est pas un poisson qui est gras l'ancn". "Un ben bouillon d'ane, hein, c'est meilleur que la viande... une bonne äne". "Les änes meme, les anciens fallait pas leur presenter un... un anon sur la table, hein. Ah ben non! lis n'en mangeaient pas. Encore tout de suite* y en a qu'en mangent pas. Parce que... parce que c'est baveux. Mais la raie est baveuse aussi et on en mange quand meme".

-> arriver 3, viande 2.

46 ANGLAIS Le derive anon est une domination de l'eglefin attestee depuis l'ancien franqais et encore employee sur la cote nord de la Haute-Bretagne et en Normandie (Lepelley p. 82; Recher p. 445; FEW 1,154-5 ASINUS). Elle appartient au vocaEulaire des Terre-Neuvas (Yvon p. 144). L'emploi cfu terrae de base äne pour ce poisson est typique de Granville (Lepelley p. 82).

ANGUQS s.m., ANCZAISE s.f. Anglophone. 1 "Avant on pouvait avoir des dcmestiques de... de Terre-Neuve, des Anglais qu'on avait. Pis ils restaient ä la maison naturellement. Pis on les payait ä l'annee quoi. Mais apres on pouvait plus en avoir, ils nous avaient mis une taxe, et puis αϊ pouvait pas avoir perscnne de Saint-Pierre pour travailler parce que, la ferme, y a plus d'heures sv^pleraentaires que d'heures normales. C'etait tot le matin pis tard le soir". 2 "Les Anglais de Terre-Neuve par exerrple, les petits bateaux qui venaient pecher ici la, ils pechaient beaucoup ä la faux*". -> billet 2, can 2, cofiche 6, fort 2, gars 1, graine 2, qui 7, shortening 1, tick 2.

5,

jambonne

Cet emploi est considere ccmne un regiaialisme typique du franqais du Canada (Rob 1,371b). II est ici favorise par le fait que les TerreNeuviens ne sent devenus Canadiens qu'en 1949.

ANGLAIS DU Μ Α Κ Η έ loc. ncm. m. Pratique de 1'anglais süffisante pour se faire canprendre. "Je ne aennais pas beaucot^ d'anglais, mais j'ai pris quelques ΙθςχχΐΞ quand j'etais jeune, mais assez pour 1'anglais du marche, si vous voulez". Locution qui peirait originale.

AOUETTER 47 AKICHETTES s.f. pi. Raclures de bois pour allumer le feu. Syn.: dolichettes. 1 "Le matin, pour allumer le feu, ben vous mettez des anichettes en dessous, pis des morceaux plus gros au-dessus pis du charbon". 2 "Les anciens ils choisissaient du bois, le bois de cedre* en particulier, qui se taille bien au couteau quoi, et puis le soir, dans les moments de repit ou de mauvais temps, alors ils faisaient des anichettes pour le lendemain. Avec un couteau vous savez cxi faisait des... des ripes* qu'on appelle aussi hein, ccrane des pelures, des pelures d'oignon si vous voulez, pour allumer le poele". -> chacoter 2, ripailles 2. Type lexical original, dont la finale peut avoir ete influencee oar celle de son synonyme dolichette". Le point de depart pourrait etre un verbe atteste dans les parlers du sud-ouest du dicmaine d'oil anucher 'äncnner, bredasser , (FEW 1.155a ASINUS) qui aurait pris la mane gairme d'emplois que bredasser* 'parier de fa^on incoherente, faire de menues besognes1. Les anichettes seraient alors originellement des 'bagatelles'.

XNGN s.m. Eglefin. Voir ÄNE.

AOUETIBt [äwete] vb. tr. Fraj^er (une personne, un animal). Syn.: taouincer. 1 "Je vais prendre un fouet pis je vais t'aouetter". 2 "Un chien de mer qui est mechant, on 1' aouette csi le tue avant de le mettre dans 1'embarcation quoi".

48 APIOLER Ce verbe qui ne semble pas connu au Canada est atteste dans la region de St-Malo au sens de 'fouetter', de merne que le substantif _ [awe] 'correction' (ALBRAM pt 35). ainsi que pres de Pcntorson, a RozLandrieux: aouetter 'rouler a vivre allure; battre, frapper' (Le Souget, revue pcpulalre du Pays de Dol, 1987, p. 101).

APIOUR

vb. tr. [äpyole, apyile]

Attirer (le poisson). 1 "Ce qui les apiole, c'est les dechets d'appat qu'on jette ä la mer". 2 "Cti apiolait la morue avec du capelan ou de la boette*". 3 "Pour apioler l'encomet*, vous halez* vos lignes, laissez couler les turluttes*, hale et hale, et hale tout le temps". 4 "Par exemple pour les truites, jeter du riz par exanple, pcur apioler, pour faire venir les truites". 5 "Vous connaissez la coque*; cxi ecalait* la coque pour mettre la chair, le poisson* sur l'hameqxxi et la coquille on jette a la mer. Alors tous oes ecales* qui coulent doucement, on dit qa apiole le poisscxi, voyez-vous. Le poisson a ccnnaissance* de oes ecales qui coulent, alors 9a 1'attire, 9a apiole le poisson". -> deboettage. Le seul correspondent atteste de ce type lexical est le verbe de Cancale: apioler 'seduire en flattant1 (FEW, 8,415a PI-) qu'il faut mettre en rapport avec piole* 'banc de poissons'.

APIQUAGE s.m.

Hauteur de la toiture par rapport au niveau du satinet des mars. 1 "L'apiquage, ah oui! C'est la pente, la pente des chevrons par exemple. On dit -ils disaient par exemple- y a un peu plus d'apiquage, ou un peu moins d'apiquage". 2 "Plus c'est haut plus y a d'apiquage". -> pic (ä) 1.

APPARTEMENT

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Bnploi particulier de la langue de la marine, en liaison avec la valeur particuliere d'a pic ä SEM. II faut noter que le verbe apiquer s' enploie au Canada hors des contextes maritimes avec le sens de 'mettre dans une pes it ion qui se rapproche de la verticale1 (TLF 3,220a; PEW 8,451b PIKKARE).

AFOSmifR vb. tr. Vendre, faire payer au prix fort. "Tu paries il m'a apostille 9a". Htaploi metaphorique original juridique 'le fait de porter document1 (PEW 9,241a POST). de la marine au sens de: fliger une puniticn (Sizaire

d'un verbe qui signifie dans la langue une addition dans la marge ou le bas d un L'inteimediaire est l'emploi dans 1'argot noter le nan d'un suborclonne pour lui m pp. 72, 100, 105).

APBAKENCE S.f. Indication, probabilite dans le demaine meteorologique, dans 1'expression Υ a apparence de..., C'est apparence de... 1 2 3 4

"Y a apparence de beau pour demain". "C'est pas quand y a apparence de chaleur, d'orage?" "Y a apparence de vent de suet*". "Quand on les voit c'est apparence de pluie ς»" [les hirondelles].

-> marionnettes 2, mouton 1. Qnploi particulier qui continue le sens classique aujourd'hui vieilli en francais: 'qualite de ce qui est vraisemblable, possible, plausible' (PEW 25/2,24a APPARENTIA). Les Terres-Neuvas ont un enploi voisin: appazence 'signes apparents de presence de poisson' (Recher p. 445).

AEBAIOHlEliT S.m. ou f. Piece d'une maison.

50 AFPILOTER 1 2 3 4

"Une maison qui a huit appartements". "J'avais une autre appartement au bout pour recevoir". "Dans les appartements y avait 3 couchettes". "Et puis plus facile aussi pour faire des appartements au-dessus, pour faire des chambres au-dessus par exanple, qu'une toiture qu'etait ccrame qa!"

-> cheminee 4. Cet anploi atteste depuis le 17e siecle est encore usite dans les parlers de l'ouest de la France, notanment en Normandie et Bretagne, et aussi au Canada (TLF 3,274b; DFQ pp. 8-10; FEW 7,672b PARS).

AFTTLOTER vb. tr. ou intr. Mettre en tas. "Appiloter du bois ou de la morue. Dans le piles* de morue ben on appilotait".

temps

on

faisait

des

Ce derive de pilot 'tas' a ete releve dans les parlers acadiens (Massignon q. 322; Poirier p. 44). Seuls parmi les parlers frangais de France, ceux de Poitou et Saintonge le connaissent, ce qui confirms bien le caractere acadien du mot (FEW 8,475b et 477a PILA).

APFOINTIR vb. tr. Aiguiser, rendre pointu. 1 "Un morceau de bois appointi". 2 "Appointir une pointe". Appointu part, passe, cit.: fin 1. Les dictionnaires franjais enregistrent les deux verbes appointir et appointer sous la meme entree (TLF 3,306a; GLLF 209c) ou separement (Rob 1,472a). Le verbe appointir a ete retenu ici dans la mesure ou c'est la seule forme qui ait ete entendue ä SEM. Ii est d'ailleurs bien atteste dans les parlers du Canada (ALEC 566, 756, 802, 1016, 1288) et de Louisiane (Daigle), caime dans ceux de l'ouest de la France ou il est plus frequent qu' appointer (FEM 9,579-80 PÜNCTA). Le participe appointu, en tout cas, a une forme originale.

ARCASSINS 51 ΑΕΚ3ΚΓΒΙ vb. tr. (avec un canplement anime). Amener. "C'etait un petit bateau remorqueur qui nous apportait ä bord". Extension particuliere de 1'emploi d'un verbe du franqais general.

AHVOOiER vb. tr. Dans 1'expression Approcher la terre Naviguer en direction de la cote, ou Rapprocher la terre Revenir en direction de la cote. 1 "On rapetisse* d'eau, alors on approche la terre". 2 "Quelquefois on ecoute on entend le bruit de la mer dans les cailloux, on dit on approche la terre". -> rapetisser 3. Expression du langage maritime (TLF 3,333b).

ARCASSINS s.m. pi.

Cordages qui relient les mailles du filet aux ralingues. 1 [Pour les filets ä harengs, la belee*] "c'etait un filin qui etait ä peu pres gros ccnme le doigt ici la. Pis y avait des arcassins dessus, des morceaux tresses came ςa qui retenaient le filet, de place en place". 2 "Vous avez le filet de la senne qu'est surmonte sur une belee*, un filin. Alors... les arcassins qu'on appelait, ils prenaient sur la belee a* tous envircxi les... disons 15 cm, qui venaient chercher le fil de... de la senne, les mailles voyez-vous. Alors tout ga repete sur toute la longueur". Peut-etre derive du terme de marine arcasse au sens de "chacune des deux pieces qui supportent l'axe d'une poulie" (FEW 25/2,92b ARCA).

52 ARDOISES ARDOISES (Of-) loc. adv. A la fagon des ardoises sur un toit. "On arrime* le poisson tete et queue carme bailie 6, 1.

chesseuse, dossier 2, habitation 1, pignoche 3, tille

II Vb. pr. 1. S'appreter, s'habiller. -> poucher 1. 2. S1 installer, s'etablir. 7 "En plus des pecheurs de l'lle-aux-Marins, y avait les habitations* de la metrcpole qui s'etaient arrangees la". 8 "Y avait des Bretons qui etaient vraiment de souche bretonne qui se sont arranges la". Ces enplois sent devenus peu courants (FEW 15,244b HRING).

dans

1'usage

francais

actuel

A U U t interj. [aere] Caimanderaent pour faire reculer les bceufs. "Aux bceufs cxi disait arrer, pis e'est un mot... un mot basque probablement parce que e'etait des Basques qui avaient des boeufs. Quand cn voulait faire reculer les bceufs on disait... On les touchait* avec notre... notre diguet*, sur le nez. On les frappait naturellement pour les toucher pis on disait arrer". Pour faire reculer un attelaqe, 1'interjection du type arrier est bien attestee dans les parlers du Canada (ALEC 466), carme dans ceux de France (FEW 24/1,181b AD RETRO). La prononciation relevee a Miquelon, inattestee au Canada, ne manque pas de correspondants dans les parlers francais. Si par exemple dans 1 Ouest cai ne rencontre plus la forme [are] dans la langue des bouviers (ADO 114) eile y a ete relevee dans des eroplois ou le mot a perdu ä l'epoque modeme sa valeur etymologique. La forme de Miquelon peut tres bien representer un archaisms de ce genre.

54 ARRlfiRE AHRT6re

interj.

Canmandsnent pour faire reculer un cheval. Syn.: back. -> back 1,2. Cette forme est beaucoup plus rare au Canada que la forme arrie (ALEC 466). Caime arrex* existe aussi, arriere peut etre une refection.

ARRIMAGE s.m. ou f.

1. Action de mettre en tas. 1 "Dans le temps on parlait de 1' arrimage de la morue". 2 "Y avait deux sortes d'arrimages si vous voulez. Quand on faisait chesser* la morue, on faisait une arrime* de morue par example, sur tout un cote de... de la saline*, ccrrme ga., et pis on faisait des... des piles* de morue, des tas de morue sur la grave*, en raid, avec un done, une toiture si vous voulez, un done gu'on appelle qa. On le faisait en chapeau vous savez, pour que l'eau... tcmbe". 2. Tas. 3 "Des arrimages de cailloux pour marquer les..." [limites]. Bnplois particuliers du mot frangais, en relation avec ceux d'arrimer.

ARRIME s.f.

1. Tas de morues qui peut avoir plusieurs metres de long et mesurer jusqu'ä 1 m de large sur 1 m 50 de hauteur, qu'on fait dans la saline* . 1 "II est venu cuber 1'arrime". 2 "Chaque rangee ils remettent du sei. Alors 9a fait une arrime, quelquefois, plus haut que le frigidaire".

AKRIMER 55 3 "On la mettait jamais trop trop trop haute, parce que la celle du dessous aurait ete trop ecrasee. Alors on faisait des arrimes de 1 m, 1,20 m". -> attraper 3, arrimage 2, cageot 2, chesserie, paleter 1, prelart 1, relever 1,3, salange 1, saline 4. 2. Tas de foin au carre pour l'entreposer, le transporter. 4 "Des arrimes de foin" [dans un fenil]. 5 "Mettre le foin dans un grenier par exemple ou une grange eh bien on faisait une arrime oui. Catme qa c'etait plus facile vous savez pour le tasser". 6 "On arrimait* sur la voiture. On faisait une arrime de foin sur la voiture, ou mime dans 1'etable on faisait des arrimes de foin par... par carres". Le premier sens est courant chez les pecheurs de morue de la cote canadienne (ALEC 1435). Ce mot est aussi atteste au Canada pour des tas de bois (ALEC 1330a) de mate qu'ä Nantes pour des tas en longueur (FEW 16,721a RIMEN).

AKRIMER vb. tr. 1. Mettre en tas. 1 "On arrimait le poisson dans les salines* pis on salait". 2 [Le capelan] "c'est arrime en raid". 3 "On arrimait notre charbon". -> arrime 6, barroter 1,2, cabosser 1, emboucauter 2, relever 2. 2. Ranger, disposer en ordre. 4 "C'est mal arrime" [ä propos d'un jeu de cartes]. 5 "J1arrime les chaussures sous l'armoire". 6 "C'est mis en desordre. C'est mis... sans gout quoi, sans etre arrime". 7 [Les graves*] "c'etait pas des cailloux qui venaient du bord de mer. C'etait pas des cailloux rends. C'etait des cailloux brises vous savez un genre de caillasse, de la grosse caillasse. Y en avait epais catme ga. C'etait plus ou moins arrime. On arrivait a marcher la-dessus".

56

ARRISfe 8 "La morue etait arrimee, bien bien bien tres bien arrimee sur les graves*, pis quelquefois quand arrivait quatre heures le ocntremaitre disait: Vous allez carmencer ä brasseyer* la morue. La brasseyer c1etait la mettre, les superposer l'une sur 1'autre par dix, douze". 9 "C'est mieux arrime dans sa tete que dans la mienne!" -> ardoises, gabionner 5.

3. Disposer la matiere d'un ecrit, toumer. 10 "Carment qu'il m'avait arrime qa?" [dans une lettre]. Remarque: Les emplois franqais 'ranger une attacher un chargement' sont aussi connus.

cargaison',

ou

'caler,

L'emploi de ce verbe est localise depuis le moyen-franqais dans les dialectes de l'ouest de la France ou il reste cantonne generalement dans des contextes maritimes (FEW 16,721a RIMEN). L'integration du verbe au vocabulaire general, ainsi qu'ä SIM, est par contre bien attestee au Canada (ALEC 1435 mettre les morues en tas pour le salage, 1338 mettre les buches en tas reguliers, 1904 se preparer, etc.).

AHRISfc s.f. [aerize] Petit soufle de vent soudain.

Syn.: brisette. 1 "Par irement il fait tout calme pis y a des arrisees. On voit qa beaucoup sur* Langlade". 2 "Tout d'un coup il vient une petite arrisee pis la voile se genfle". 3 "Tout de suite* c'est pas une arrisee c'est un vrai coup de vent". -> brisette 1. Rem.: Risee est egalement employe. Ce substantif est atteste au Quebec (GPPC). Parallele du franqais risee, il a ete cree ä partir du verbe arriser qui a ooexiste avec riser de meme sens (FEW 16,708a RIF).

ARRIVER

57

ARRIVER vb. 1. Arriver

a.

(Avec sujet anime ou inanime suivi d'un infinitif. Equivaut ä une construction imperscnnelle en franqiais cciiiuun). 1 "Souvent le chat arrivait ä se lecher la patte". [= II arrivait au chat de...]. 2 "Les marmarelles* aussi, les marmarelles, ils sent rares, mais on arrive ä en prendre quand meme sur la ligne de main". 3 "Quelquefois parmi la morue on arrive quelquefois ä prendre un fletan aussi -c1 est pas tous les jours- quelquefois un anon*, un fletan et des balais*". 4 "J'ai toujours entendu dire moi les vieux que souvent le milieu du pain arrivait ä etre moisi" [sur les voiliers]. 5 "Quelquefois la tete [d'une meule de foin] arrivait ä s'en aller, mais e'est rare". 6 [Le chien* de mer] "g'avait un venin, oui ς» avait un venin et cn arrivait ä attraper des panaris". -> ecarter 4, loche 4, pore 1, pouffin 2. 2. Arriver de Parvenir a. 7 "Iis arrivent de prendre dans la... dans une nuit... 20 tonnes ou 30 tonnes de poisson". 8 "Mate que vous tirez tres tres tres fort vous arriverez toujours de le defaire tres bien" [le noeud d'anguille]. -> depaler 2, loup 1, rat 5. 3. Vb. pr. iirpers. Arriver, advenir. 9 "Quand je suis arrivee [qu'est-] ce qui s'est arrive? Vous m'avez saute le moteur de ma laveuse*, ga m'a coute mille francs". Constructions nan attestees en franqais moderne. L'emploi pronominal est courant en Bretagne remane et Normandie (FEW 25,326a *ARRIPARE).

58 ASILE ASÜ£ s.f. Ecole ratemelle. 1 "L'asile etait ouverte". 2 - T. "J'ai ete moi ä l'asile chez Mne Pinson". - E. "Vous avez ete ä l'asile?" [En riant]. - T. [Rires] J'ai ete ä l'asile! [Rires]. Je suis sortie peutetre que je vais aller ä 1'hospice, apres. [Rires]". [Jeu de mots sur les deux sens du mot asHe: hospice, ecole matemelle]. 3 "£a avait une saison la pour l'asile. Y avait une saison c'etait dans la saison de la peche hein, pour que les enfants soient a... 1'ecole, pour que les meres puissent aller euh... piquer* le poisson, s'occuper du poisson". Ehploi vieilli en frangais (TLF 3,640a).

ASPIRATION s.f. Starter d'une automobile. 1 "Mets 1'aspiration". 2 "Tire done 1'aspiration". Denomination particuliere, starter designant ä SEM le demarreur.

ASSU&L'IK s.f. Coup de vent de sud-est ou sinplement coup de vent (sans precision). 1 "Une assuetie seche e'est toujours les mares vents pendant huit ou dix jours, vous savez exxrme les vents de suet* ici". 2 "Sur la fin quand 1'assuetie finit, la vous avez quelquefois de la pluie". 3 "Dans le livre, je me suis toujours demande ou Monsieur de la Rue a entendu ς», parce que quand il fait dire que le vent est passe au sud-est, ben une assuetie qu'ils appellent, moi j'ai jamais entendu 9a. Ou alors le vent s'est anordi ou des trues ccrane arriver 3, carrelet 3, grey-sole 1, turbot 2. Denomination metaphorique fondee sur la forme du poisson. Des metaphores semblables font de baled, le nam franqais de la queue d'un oiseau ou de 1'extremite de la queue d'un chien ou bien, dans quelques parlers de l'Ouest, de la langue (fEW 1,232b 'BANATEjO). C'est d'ailleurs de cette region que parait provenir le mot car balai, ccnme nam de poisson, est atteste chez les Terre-Neuvas (Yvon p. 146) et il a ete note pour le carrelet, pres de Saint-Malo (ALHRAM pt 13, enq. inedites).

BAIA1K±E s.f. Qiantite deposee sur la balance. Cit.: emboucauter 2. Derive de balance.

BftLOON s.m. Galerie decouverte sur la facade de la maison a laquelle cxi accede par des marches ä partir de la rue. "Je crois pas qu'ils ait le escalier seulement qu'ils ont".

baleen,

non je crois que c'est un

Un tel emploi a pu se develcpper a partir de celui de la marine: 'galerie elevee sur le devant de certains vaisseaux' (FEW 15/1,39a *BALKD).

70 BALIER BALIER vb. tr.

Balayer. 1 "Fallait qa'il arrivait le premier ä balier le... le plancher" [ä propos de l'hcnme de peine]. 2 "Faut-il balier la place*?". Etorme courante pour 'balayer1 encore au 18e siecle en frangais, toujours attestee dans les parlers dialectaux de l'Ouest et repandue au Canada (ALEC 281; FEW 1,232-3 "BANATDO) et en Louisiane (Daigle).

BAUJE S.f.

Dans les locutions nominales: - Balle de laine, balle de coton. 1. Pelote de laine, de coton. 2. Gros nuage. Syn.: ballots (-de laine, -de coton), bcnhcrrmes. 1 "Les balles de coton qu'on disait. £a c'est les gros bonhcmnes* qui montent lä, ä* 11autanne". 2 "Dans* 1'autanne vous voyez des balles de coton ou bien des balles de laine. £a ga donne des gros grains* ga!" - Balle de foin Botte de foin presse. 3 "Dans les premieres annees que j'etais ä la ferme lä-bas on faisait des balles de foin pour vendre. On avait une presse en bois. C'etait un carre* qu'etait assez long, qu'etait haut ccnme ga, et pis cn remplissait 9a de foin, et pis vous mettez bien plein. On mettait... αϊ fermait un panneau... Y avait des tiges de fer qu'on mettait pour... Et puis y avait deux palans avec du filin naturellement qu'etait ä 1'autre bout, et pis au bout y avait un treuil. Alors on toumait le treuil et au fur et ä mesure... les palans venaient venaient venaient et pis quand arrivait... c'etait bien serre, on ouvrait le true et pis la balle de foin etait faite. Avant de la lächer on passait deux fils de fer, pis la on la serrait".

BANC 71 -> emballer 2, landain 2. Emplois metaphorigues qui ne sent pas sans precedent: balle de coton 'nuage blanc et leger, dans les regions tropicales' est atteste au 19e siecle par les dictionnaires franqais (FEW 15/1,40b "ΒΑΓΙΑ).

BALLOT s.m. Dans les locutions ncminales: 1. Ballot de bois Paquet de madriers attache avec du feuillard. 1 "C'etait un bateau qui avait perdu sa pontee de ballots de bois". 2. Ballot de foin Balle de foin. 2 "Les ballots de foin qui venaient du Canada mais a l'ile ils faisaient des ballots de foin avec de la ligne*". 3. Ballots de laine, ballots de coton, Gros nuages. Syn.: balles (-de laine, -de coton), benhenmes. 3 "On voyait les gros nuages blancs, on disait qa: les gros ballots de laine qui s'en viennent. Alors, quand ils scxit blancs, ccmtie qa, 9a va. Mais quand ils sont noirs, e'est la qu'on va avoir canme en appelle, une saute de vent ou bien un grain*". 4 "V'la les gros ballots de coton qui catmencent ä monter". Bmglois specifiques

d'un mot du franqais general

(FEW 15/1,40b

BANC s.m. Dans la locution Banc de neige (Miquelon) Congere. Ce ocrtpose est d'emploi courant au Canada 114).

(ALEC 1215; Massignon q.

72

BANNIR

Β Α Μ Π Η vb. 1. vb. tr. Annancer publiquement. 1 "Dans le temps y avait le pere X... il passait son tambour pis pan pan pan pan pan. Y avait pas de radio ä* ce temps-la. Alors cxi disait il a banni qa...". 2 "Iis vont bannir ga ä tout le monde". 2. vb. intr. Eciire les annonoes publiques. 3 "Avec un tambour! Il allait bannir, dans les quartiers". Ce verbe atteste depuis l'ancien frangais a disparu de la langue litteraire aux 17e et 18e siecles. II est reste vivant dans les parlers regionaux, specialement de l'ouest de la France, mais ne sei±)le pas ccnnu au Canada (EEW 15/1,48a *BAN).

BANQUAIS [bake] I Adj.: Relatif au banc de Terre-Neuve. Dans la loc. ncm. m. Biscuit banguais. 1 "Les biscuits banquais, c'etait des tablettes de biscuit qui faisaient peut-etre vingt centimetres au c a m e [...] C'etait epais, c'etait dur". II S.m. 1. Bateau qui fait la peche sur les bancs de Terre-Neuve. 2 "Les Banquais arrivaient au printemps. En general ils arrivaient au printemps de bonne heure". 3 "Mon pere il a beaucoup travaille ä greer les Banquais". 2. Pecheur sur les bancs de Terre-Neuve. 4 "Les Metropolis ins en cas* qu'ils pechaient, on les appelait les Banquais, mais pas les St-Pierrais". 5 "Iis lavaient leur linge la eux autres, les Banquais, oui ils lavaient leur linge la. A ce mcment-lä y avait des bateaux c'est pas catme maintenant".

BARAOÜIS 73 -> bigomeau 2. Adjectif derive de bene, atteste depuis la premiere moitie du 19e siecle pour qualifier les marins qui faisaient la peche sur les bancs de Terre-Neuve (FEW 15/1,62 'BANK).

BANQUISE S.f. Iceberg. Syn.:

glaces.

1 "Parce qu'on a vu des glaces* rentrer ici, des banquises [...] Mais qa. e'est pas des banquises, ga a gele ici, sur place, c'est la mer qu'a gele". 2 "Quand le golfe va debloquer tout ga on pourrait voir des banquises par ici". Bnploi metonymique d'un mot qui, en frangais general, designe le plus souvent le banc de glace qui borne le rivage des regions polaires. L'ALEC presente trois attestations eparses de banquise 'glagon sur les rivieres' (q. 1248), dont l'une des Iles-de-la-Madeleine (EEW 15/1,62b 'BANK)

BARACHOIS s.m.

Anse presque entierement fermee par un banc de sable. 1 "lie barachois du Goulet c'est tres dangereux, y a une barre ä passer. Alors on profite du beau tatps pour aller*". 2 "Le grand barachois de... Langlade du Goulet; c'est la qu'on va pour pecher des coques* et des moules". 3 "Y a un etang ou c'est tout pres qu'en appelle le petit barachois de... le petit barachois de la Pointe-Blanche, un petit machin on peut rentrer dedans, mais faut pas aller par la c'est mauvais". -> alouette 6, claver 3, oourlieu 2, declaver 1, deranger 1, glaces 4, grand-grand-pere 4, mer 1, outarde 1, pailleule 5, pare 10, perdre 1, taud 3. Atteste pour la premiere fois ä pre^os de St-Pierre en 1662 sous la forme Barachoa (La Morandiere 1.418 et 424) c'est un mot du vocaiulaire colonial frangais des i7e et 18e siecles, toujours enploye au

74

ΒΆΚΒέ

Canada, essentiellement sur la cote de l'Atlantique (ALEC 1369 le barachois ou lagune ä 11 embouchure d'un cours d'eau), ou ä la Reunion. Ce mot remonte plutot au basque barratxoa 'la petite barre' qu'au portugais barra chao 'barre plate' (Voir aussi P. Brasseur, Quelques aspects de la tcponymie des lies Saint-Pierre-et-Miquelon, p. 542).

ΒΑΚΒέ [barbe, barbe] s.m. 1. Dard de 1' hameqxxi. 1 [Pour degotter* la morue] "faut chavirer* l'hameqxxi ä 1'oppose quoi [...] pour que le barbe soit ä 1'oppose quoi". 2 "Quand le poisson est dessus, ben il peut se debattre, he in, c'est le barbe qui tient, qui empeche de decrocher". 2. Epinoche (Miquelon). Syn.: etrangle. 3 "Le barbe, les gens appelaient qa etrangle*-de-chat". Ce substantif represente une forme1 moderne de l'ancien francais barbel 'pointe, dent («Tun obiet barbele) qui ne survit que dans les derives barbele, barbelure en frangais. Mais il est encore connu, avec ^la meme valeur qu'a SEM, dans la region de Saint-Malo (ALHRAM damees manuscrites; FEW 1,244D BARBA).

BARBICHE s.f. 1. Tentacules de l'encomet. Cit.: capote 1,2. 2. Barbillon d'un poisson. Cit.: morue barbue 2. Ehplois metaphoriques originaux (JEW 1,244b BARBA).

BARDEAUTER 75 BAKDEMJ s.m. 1. Petite planche rectangulaire avec laquelle on recouvre le toit cxi les rnurs d'une maison. 1 "Les habitations, les etables, les salines*, c'etait uniquement du bardeau de bois, du bardeau de cedre* [...]. ?a vient du Canada... meme sur les toits. Y a eu du bardeau metallique. Certains en avaient, pas beaucoup. C'est des feuilles de metal galvanise. Naturellement 9a tenait le coup aussi, mais ä la longue, qa rouillait". -> (s')eclier. Rem. Les bardeaux, came les clabords*, sont de plus en plus supplantes par des revetements de matiere synthetigue. - Bardeau-feutre teinte.

[bardo fit] Revetanent synthetique goudronne et

2 "Maintenant c'est moderne, y a beaucoup de bardeau-feutre". -> delivrer 3, feutre 1,2, pignoche 2. 2. Demiere couche de morue sur une pile, mise le dos en l'air. Cit.: paleter 2. Mot du franca is technique qui fait partie du vocabulaire carmun ä St-Pierre-et-Miquelon caime au Canada. Le compose bardeau-feutre est une creation locale, semble-t-il (FEW 19,24 BARDA'A).

BAKDQUJTCR vb. Revetir de bardeaux de bois le toit ou lesrnursd'une maison. 1. Vb. tr. 1 "Bardeauter une maison".

76 BARGAIN 2. Qnploi absolu. 2 "Qjand ils ont bardeaute avec ces choses-la, ben, ils mettent... du... coaltar". 3 "On a bardeaute en 34, pis vous pouvez regarder il est tout neuf hein, alors que leurs clabords*, en fer blanc j'appelle ga moi, eh ben ils sont tout rouilles".

C'est l'un des differents derives de bardeau attestes au Canada francophone: bardotter, bardocher, bardoler, bazdoser, bardoiser ( 11 couvrir en bardeaux de bois; PEW 19,24 BARDA'A).

BARGAIN

[bargen] s.m.

Soldes. 1 "Iis pourraient faire des bargains toutes les semaines". 2 "(Jaand un magasin peut pas vendre sa merchandise, ils donnent ga au bargain". 3 "J'ai eu ma peinture au bargain". -> chiquette 1. Bnprunt ä 1'anglais bargain atteste egalement au Quebec (ALEC 2310), ccrme dans les lies anglo-normandes, plutot que survivance du moyenfranqais baxgaing 'action de marchander (FEW 15/1,190a BORGANJAN).

BAKU. EE PAIN loc.ncm.m. Unite de mesure correspondent ä 74 pains. 1 "Apres y a eu les bons de pain. Sur le ben e'etait marque... le nan du foumisseur, pis bon pour un kilo cinq cents de pain, pour un kilo. A ce moment la, on prenait un baril de pain qu'on disait, un baril, un baril de pain... Ce qui etait ccnsidere avec la barrique, un fut, un baril de farine, on tirait, ils retirciient 74 pains je crois. Quelqu'un allait* il demandait les bons il payait les bons, ses bens de pain vous savez, pis il versait la senme pour 74 pains qu'ils faisaient payer. C'etait plus facile voyez-vous quand... Pour envoyer les enfants au pain, ils leur donnaient un bon au lieu de donner de 1'argent".

BARRAGE 77 2 "Pour le pain c'etait pareil, c'etait un baril de pain. Ben dame on faisait un mois ou, ς» dependait de la famille. On les prenait ä credit, parce que les credits ä ce mctnent-lä c'etait le fleau". Locution originale.

BASQUE s.f. Appellation meliorative d'un bateau. 1 "Royale, c'est une belle barque" [a propos d'un catamaran]. 2 "Tiens voilä une belle barque qui rentre" [d'une goelette]. 3 "T'as une belle barque, la" [en parlant d'un doris*]. Ehiploi particulier du mot franqais courant dans la langue des marins (Sizaire pp. 27,158).

BARRAGE [barae] s.m. Cloture de bois, palissade. 1 "Je vois pas bien l'utilite de faire un barrage autour d'une maiscn". 2 "La cxi faisait un barrage pour pas qu'ils [les animaux] aillent de 1'autre cote". 3 "Les bateaux japonais surtout ils faisaient des barrages sur les bateaux, eh bien pour le poisson. Iis avaient, ils ramenaient du bois et -puis quand ils η'en avaient plus besoin, ils le jetaient ä la mer. [...] Iis mettaient des planches pour separer le poisson et puis l'espacer, laisser un espace entre, entre la cloison du bateau, la coque du bateau. £a faisait passer l'air autour". -> opposer 1. Derive de barrer qui prend assez rarement ailleurs le sens de cloture. Au Quebec, on prefere en general un autre derive: barzure; mais barrage y est aussi atteste (ALEC 386 cloison entre deux stalles; 1009 cloture qui divise un lot sur la largeur; FEW 1,259a *BARRA).

78 BARKER BARRöl [baere] vb. tr. 1. Fermer (une porte) a cle. 1 "J'ai pas barre la porte". 2. Enclore. 2 "lis sont obliges de tirer les lices* c'est barre". 3 "Et puis... c'etait barre pour mettre nos betes* du cote de... dans la plaine lä, aupres du cote de chez Delamaire la". -> aller 7. Ce verbe s'emploie en divers parlers de France pour 'verrouiller' et plus rarement pour 'ferner ä cle' (FEW 1,257 *BARRA). La situation est comparable au Quebec et en Acadie (ALEC 49 verrouiller; 56 ferner a clef) ou l'antcnyme debarrer est peu concurrence pour 'ouvrir une porte fermee ä clef1 (ALEC 93), de mane qu'en Louisiane: bazrer 'fer1 mer ä cle (Ditchy).

BAREDT [baro] s.m. Solive, chevron. 1 "Pour soutenir la toiture, il faut bien qu'y a des barrots". 2 [Les epontilles*] "c'est pour tenir les barrots". 3 "Aujourd'hui en a des maiscxis, vous voyez, c'est plafcxine sous barrots, puis y a des planchers au-dessus". 4 [Aux cartes] "y en a qui voulaient pas jouer dans le sens des barrots y en a qui jouaient en travers ou d'autres qui voulaient jouer dans le sens des barrots, pour avoir de la chance au jeu". 5 "Les filieres ils appelaient ga des barrots". -> barroter 1,2, epcntille 1,2, epcxitiller 2, serre 4. Ehploi particulier du terme de marine: barrot 'poutrelle qui un navire soutient les pants' (FEW 1,256 *BARRA).

dans

BAS 79 BARROIER vb.tr. ου intr. Ranger la morue sechee sous le plancher (dans la cale d'un navire surtout). 1 "Nous on barrotait: on avait 13, 14 ans on montait pour arrimer* le poisson sous les barrots*". 2 "On barrote la morue, sur un navire. On arrime* le poisson et pis on met ga entre les barrots*, partout, pour ne pas perdre de place". 3 "Dans les entrepots, quand on arrivait ä une certaine hauteur en dessous de la toiture hein, on disait barroter jusqu'ä la toiture quoi". Derive du precedent, enregistre par les dictionnaires du franqais, mais uniquement en emploi transitif (JEW 1,256b *BARRA).

BAS adv.

Dans les locutions: 1. Bas les feux! Ordre d1 extinction des feux. 1 "On faisait le feu jusqu'ä dix heures du soir, mais quand on allait se coucher, bas les feux, hein!" 2. A bas A terre. 2 "Y en a au moins quinze qui vont rester ä bas" [= qui ne vont pas pouvoir embarquer]. 3. En bas. - Tcniber en bas Tauber en ruines. 3 "La maison eile va tamber en bas". - Mettre en bas Inf liger une suspension, dans les sports. 4 "II a ete mis en bas jusqu'ä la fin de la saiscn". 5 "Iis lui avaient mis deux ans en bas".

80 BAS-FOND 4. En bas de Sous. -> tille 2. La premiere locution est une expression vieillie du vocabulaire de la marine (TLF 4,222b). La deuxieme est egalement vieillie en francais general mais eile se maintient dans certains parlers de France (FEW 1,275a BASSUS) et d'Acadie (ALEC 404, 511, 2310). La locution mettre en bas a un correspondent en Bretagne rcmane: "Beaucoup avaient quitte leur chantier sans demander la permission au contremaitre, et ils risquaient de recevoir leur canpte en rentrant, ou d'avoir des heures en £as" (L. Guilloux, p. 56).

BAS-KDD s.m. Filin de calibre superieur ä l'orin qui se fixe ä la base du mouillage. 1 "C'est ce qu'on met sur l'ancre. Dans le temps on avait ga on faisait des bas-fonds c'est plus gros que l'orin quoi. Pour pas que ga se mange au fond. Maintenant ils mettent des bas-fonds en filin mixte... Y a des fils dedans quoi. Et c'est rroins dangereux [...] On met trois quatre brasses de plus gros orin quoi". 2 "£a raguait * d'un cote et de 1'autre avec le vent quoi. Alors pour ne pas perdre le grappin on consolidait ga. avec un bas-fond, quatre, cinq brasses, cinq, six brasses". -> ralinguer 1. Emploi particulier du substantif carpose bas-faid qui η'est pas atteste avec ce sens en franqais (FEW 3,872b HINDUS).

BASSE s.f. Rocher qui se decouvre ä maree basse. Syn.: batture. (Synonyme, mais pas pour tous les locuteurs). 1 "Une basse ou une batture* c'est pareil". 2 "Quand y a de la mer, la basse on dit qu'elle crache". 3 "Une batture* c'est un caillou* qui decouvre et pis une basse ga ne decouvre pas".

BATTERIE 81 4 "On ccntoume une basse caime 9a, et co passe entre... deux battures*, puis arrive au plain* la batture du large eile vient echaler* le long de l'embarcation". -> batture 3, couple 6, crocher 11, deranger 4. Mot du lexique maritime qui n'a pas toujours le sens exact du mot franqais: 'banc de roches ou de corail, situe a faible profondeur, mais^cjue l'eau ne decouvre pas ä maree basse1 (Rob). (Voir FEW 1,274b

BAXABDEAIJ s.m. Coffrage. -> renforcir 1. Qiploi du terme de marine atteste depuis le milieu du 18e siecle bataideau 'caisson en bois calfate gu'on applique ä la cogue d'un navire afin de la mettre ä sec et de la radouber' (TLF 4,265a; Rob 1,884b; FEW 1,276b *BASTARDUS).

BATTERIE s.f. 1. Pile electrique. 1 "£a marche langtemps sans changer la batterie". Qnprunt semantique ä 1'anglais battery 'pile; batterie1. 2. En batterie loc. adj. Attitude de la morue ä la poursuite du capeIan. 2 "C^iand le capelan autcmatiquement etait sur l'eau, ben la morue se melangeait avec ce petit poisscxi-la, pis can la voyait mettre la queue en dehors et pis se mettre en batterie. Elle... eile battait l'eau. Alors on voyait les frimas*, alors elle etait en batterie [. -. ] Elles se mettent en batterie dans le poisson, dans les petits poissons, pour les etourdir. Pis quand ils sent etourdis, elles mangent".

82

BATTRE 3 "Quand eile est en batterie, eile est dans le capelan. Le capelan est toujours ä flot*, lui [...] Elle saute dedans pis avec sa queue, floe, floe... eile les tue, eile les assarme pis eile les bouffe". 4 "J'en ai vu carme ga an disait en batterie dans* la dune* la, toute la dime lä, eh bien elle venait s'echouer. On la pechait de terre avec, avec une gaffe ou bien... une ligne*, une ficelle quoi".

Locution originale.

BATTOE [bat] vb. tr. Dans la locution Battre un chemin Fouler le sol pour tracer un chemin. 1 "C'est un chemin de terre qu'il faut gu'il soit bien battu avant que l'on mette du bitume". 2 "Alors fallait passer avec les traines* et, quand vous avez passe cinq six fois avec les traineaux ben vous avez battu le chemin, bon ben le chemin etait plus dur". L1expression battre un chemin est tres frequente au Canada pour "ouvrir les chemins, l'hiver" (ALEC 1075). flnploi particulier a 1 une locution francaise qui ne survit que dans 1' expression marcher hors des sentiers battus (EEW 1,296b BAITUEEE).

ΒΑΠΤΙΚΕ s.f. Banc de rochers qui decouvrent ä itaree basse. Syn.: basse. 1 "Entre les rochers-lä y a des rochers plus bas, αϊ appelle 9a des battures, des rochers plus bas que les autres quoi, des battures. Y a des battures au large, y a des battures carme ga ä terre qui avancent dans la mer". 2 "Quand vous arrivez au rivage c'est la qu'y a des battures". 3 "Carme il fallait qu'ils fassent le tour ä cause des battures, vous savez, des basses*..." 4 "Vous savez vous avez des battures, oü ils vont ä la chasse [...] quelquefois qa glisse. Celui qui se fout ä l'eau il est foutu".

BAZAR 83 5 "On a pris de la morue dans les battures, la". 6 "lis bouffent qa sur les battures au plain*". -> basse 1,3,4. Mot du francais maritime, aujourd'hui inusite en France, inais qui dengrme au Quebec, tout le long des rives du Saint-Laurent, "de chaque cote du fleuve, (une) partie couverte ä maree haute, decouverte a maree basse" (ALEC 1362) et en Acadie "un banc de sable" (Massignco q. 25; FEW 1,291b BAITUERE).

BAVER vb. intr. Parier vite et de fagon peu canprehensible. 1 "C'est pas parier que tu fais c'est baver". 2 "Me bave pas dans les oreilles". Au Qiebec et en Acadie on emploie plutot le derive bavasser pour 'causer' (ALEC 2238) ou 'parier ä tort et ä travers' (ALEC 2241); mais baver 'bavarder', courant en franqais au 16e siecle, s'est maintenu dans les parlers regionaux de France (JEW 1,194b *BABA) et en argot.

BÄVCUX s.m. Bavaid, personne qui parle vite. "C'est un veritable bavoux on ne ccnprend rien". Derive du precedent, avec un suffixe d'adjectif typique, entre autres, des parlers de l'ouest de la France et aussi atteste en Acadie (Massigncxi, p. 746).

BAZAR s.m.

1. Marche au poisson. 1 "On appelait le bazar a Saint-Pierre l'endroit ou l'on vendait le poisson aux particuliers".

84 BAZAKDIER 2. Dans 1'expression Faire le bazar Vendre son poisson ou tion au "bazar" ou de porte en porte.

sa produc-

2 "N'importe qui faisait le bazar. Maintenant ils n'ont pas le droit quoi. Y en a qu'un qui fait le bazar. II... paie une patente. Tandis que dans le temps y avait cinq ou six pecheurs avec des tables ä vendre le poisson". 3 "Y en a qui font 9a ils font le bazar ils vont avec la morue dans leur auto pis: tiens voulez-vous une morue?". 4 "Mon pere faisait le bazar, le bazar de legumes hein!" Bnplois specifiques son, Le Texique

du franijais bazar (FEW 19,33a BAZAR). V. Chauden-

du parier Creole de la Reunion,

p. 181.

BAZARDIER s.m. Pecheur qui fait

le

bazar*.

"Les gens qui passaient sur le quai, allaient diers, pis leur achetaient leurs morues". Derive specifique Creole

du precedent.

de la Reunion,

trouver

V. Chaudenson, Le lexique

les bazardu parier

p. 181.

BBOJ, BEXiLE adj. antepose Quelconque. (S'esnploie au faninin caime au masculin dans ce sens). "Et une belle nuit ils se sont sauves". -> joumee 3. Extension d'un errploi du frangais general.

nfo"··'J.TT· s.m. ou f. Jouet d'enfant. (S'applique surtout aux petits jouets). 1 "Tiens ramasse dene tes bebelles".

EEC-JAUNE

85

2 "Va t-en chercher ton bebelle, viens!" 3 "T'as un tas de bebelles et pis tu ne joues pas avec". Denomination tres ccrrmune au Quebec et en Acadie pour ' jouet' (ALEC 2028) ainsi gu'en Louisiane (Daigle) et plus rare pour 'bagatelles, menus omements de toilette (ALEC 1970). Le mot correspondent dans les parlers de France actuels ccmporte la forme masculine du suffixe: bebe, bebiau (FEW 1,304a BEB).

BBC s.m. 1. Baiser. 1 "Tiens viens t'en tu vas faire un bee ä maman!" Terme tres ccmmm au Quebec et en Acadie pour un 'baiser' (ALEC 1830), mais aussi 9a et la dans les parlers regionaux de France (FEW 1,305a HECCUS). 2. Ampoule electrique. 2 3 4 5

"Un bee electrique". "Un bee de 8, un bee de 16". "Mon bee est foutu". "En me couchant j'eteignais, voir".

je

fermais

mon

bee pour ne pas

Extension semantique du mot franqais bee 'partie d'une larrpe surtout a^^z^ou a lieu la ccmbustion; par ext. larrpe' (TLF 4,337a; FEW 1,310b

HBC-JHUNE [bejon] s.m. Macreuse a bee jaune, Melanitta nigra. 1 "Le bee-jaune... ga vient en mer le soir soit que ga soit en drive*, soit quelquefois ils sont sur les rochers et puis on les tue ä la passe*, caime ä Savoyard y a une passe la, ou bien alors avec des statues*". 2 "Le bee-jaune est tres bon [... ] II est noir avec un peu les ailes ici un peu bleues, pis le dessous carme ga e'est gris, pis

86

HEC-LARGE il a, il a le bee [1 be] jaune [en riant]. II a la moitie du bee jaune". 3 "Les gibiers* aussi, les bees-jaunes par exemple, ils connaissaient 9a le sifflet, hein. On sifflait naturellement, avec... avec les levres [...] Qa les attirait". 4 "C'est dans le genre du bee-jaune: eile est ä peu pres de la metre grandeur". -> bee-large 2,3.

Denomination descriptive employee 1490; FEW 1,390a BECCUS).

egalement en Nouvelle-Eeosse (ALEC

BEC-IARGE [belärj] s.m. Macreuse ä ailes blanches, Melanitta

deglandl.

1 "Le vrai ηατι c'est la nacreuse mais nous par* la mode des anciens cxi dit le bee-large". 2 "Le bee-large c'est ä peu pres le genre du bee-jaune* mais, 5a a du blanc sur les ailes et pis ς» a le bee rouge plutot quoi". 3 "Le bee-large est un peu plus gros que le bee-jaune". 4 "C'est plus sec que la moyac*, le bee-large". Denomination descriptive canposee localement sur le modele de la cedente: bee-jaune.

pre-

BBC-SCIE [beksi] s.m. Harle. 1 "Le bec-scie c'est un oiseau de mer et de terre hein, il fait les deux lui". 2 "C'est rare si vous tuez un bec-scie pose, c'est rare! C'est farouche... Quand ils plongeaient on courait ä la plonge pis quand il arrivait on criait quoi, pour qu'il prenne le vol". 3 "C'est un gibier* qui plonge pour attraper le poisscn avec sen bee, et pis, son bec-scie, il l'emiettait si vous voulez, il l'ecrasait plus ou moins".

B6L6E

87

-> feu 1, cacaoui 1, lourde 1, tuffe 2. La forme retenue le plus souvent par les dictionnaires du francais est bec-en-scie. Celle de SEM est d emploi quasi general au Canada (ALEC 1492; FEW 1,309a HECCUS).

E&XUX s.m. Begue. "II begue*; ils appelaient ga un begoux". Derive de beguer* atteste en Acadie (Massignon q. 1488) carme dans les parlers de l'ouest de la France (PEW 15/1, 86a BEGGEN). inais auquel on prefere, au Quebec, la forme parallele begueux (ALEC 2i07).

BEGUER vb. intr. Begayer. "Quand il chante il begue pas mais quand il veut parier plus il fait pap pap..."

vite

Verbe atteste depuis 11ancien francais et dent begayer est un.derive. II est encore frequent dans les parlers dialectaux die France," notamment de l'Ouest. et dans les parlers canadiens (ALEC 2108; EEW 15/1,86a 'BEGGEN), de mane qu'en Louisiane (Ditchy).

Β & έ ε (EE ΡΠ£Γ) s.f. ReLLingue d'un filet de peche (surtout la ralingue tains ne distinguent pas belee de ralingue.

superieure).

Cer-

1 "Une belee de filet, ou sont tous les lieges* amarres* pour tenir le filet a flot*..." 2 "Pour senner le lanqxxi par exeirple, senner le lanqxxi, faut les giandes sennes avec une belee, une belee ä chaque bout". 3 "Les mailies du chalut sent pris dessus, e'est qa qui s'appelle une belee".

88

H£DOT 4 " ... Pour que la maille, suivant cattne le filet est tendu par la belee, puisse se deplacer sur ces pattes-la". 5 "&iand on monte un filet, on ccnmence avec un fil sur la belee". -> arcassins 3, ralingue 2.

Mot du lexigue de la peche atteste sur la cote du Canada: belee s.m. 'ralingue inferieure d'un filet de peche' (ALEC 1399) et glose^ differenment par Littre: belee s.f. corde aisposee de maniere ä porter entre deux eaux les hameqxxis dont eile est g a m i e 1 .

ΗέΤΟΙΓ [belo] s.m. Bee verseur ou goulot d'un recipient. 1 "[Le canard d'usage medical] e'est carme une theiere au hein. Vous avez le... le belot guoi qu'on appelle de la..." 2 "Le belot de la bouteille". 3 "Le belot de la cruche".

bout

Cette forme originale se rattache de fagon assez claire au mot normand hero 'tuyau servant ä depoter le cidre', 'tube qui sert ä transvaser un liquide' (PEW 1,349a BIEERE), 'trou du pressoir' (Alii 265). Le semantisme est le mane dans les deux cas et l'ecbange des deux consonnes liquides est un phencmene qui η'est pas rare.

Bruant des neiges, Plectrophenax

nivalis.

1 "Le beneri e'est un petit oiseau tres joli. II a le fend blanc et pis toutes les plumes de couleur". 2 "Mane dans l'hiver ce qu'on appelle ici le beneri -e'est 1'oiseau des neiges qu'en appelle au Canada- eh ben d'ailleurs ς» vit tres lcngtanps en cage [... ] Y a certains qui sifflent aussi bien ccnme* les serins". 3 "Le beneri e'est un petit oiseau, plus petit qu'un merle*. C'est blanc. £a vient en general ä 1'entree de l'hiver. J'ai vu meme en prendre souvent quand on etait gamins. Qa vit bien dans les maisons. On les prenait avec des lagons* et pis cri les nettait dans les maisons dans une cage et pis ga vit tres longtenps".

BERDASSER 89 Denomination connue, au Canada, seulement aux Iles-de-la-Madeleine, sur la Cote-Nord et en Gaspesie, sous les formes beneri, boneri, bcnari (ALEC 1547; Poirier s.v. bonneri). II y est egalanent atteste, sans localisation, sous la graphie benarl pour le "roitelet de Caroline". En France ce substantif. sous les formes benari, benarric, benourit. η'est un nan vivant de 1'ortolan que dans les parlers du sud de la France auxquels les dictionnaires francais l'ont parfois emprunte (FEW 21,228a; Holland, Faune 2(202 et 197). Une _Variante rotable b i n e r i ( l ) pour le "bruant" a ete relevee au 18e siecle dans a region orleanaise (FEW ibid.). De fagon claire c'est un mot d'origine acadienne ä SEM.

?

BÖJICASSER, b£nICASER vb. tr. Refaire un tas, relever* la morue. 1 "De la morue qui est sec pis mouillee en-dessous, alors vous la benicasez. Alors ä ce mcment-la, la seche vient par en-dessous pis 1'humide par dessus. Ccrtme 9a ga. resseche apres". 2 " ... Pour ne pas la quitter* trop longtemps en piles*, la benicaser quoi. Tout la redefaire et... la mettre ä chesser*". 3 "Benicasser la morue, on faisait ga dans les magasins*". -> chesserie. Le seul equivalent de ce verbe dans les parlers frangais a ete releve dans un glossaire manuscrit des parlers des cStes-du-Nord, en Bretagne, qui date de la fin du 19e siecle: "Benigaser v.a. Terme de marine. 1. Les patrons d'une flottille de bateaux pecheurs benigasent (arretent entre eux les differentes dispositions ä prendre pour la peche). 2. Quand le poisson est eitpile, on le benigase (change de place) afin qu'il ne s'echauffe pas".

BERDASSER [bferdase], [bardase] vb. intr. 1. Parier de fagon incoherente. 1 "II proncnoe des paroles plus ou mo ins bien suivies quoi, il berdasse, il berdasse qu'on dit [...] Il prtxionce pas de phrases ä se suivre vous savez, pas correctes, pas de cohesion dans sa conversation".

90

BERDASSIER

2. Efeire de menues besognes. 2 "II fait toutes sortes de petits travaux vous savez qui η'cot aucun sens, oui: on dit il beidasse". 3. S'agiter. 3 "Berdasser c'est bouger, oui bouger sur une chaise, ou bien tracassier*".

etre

Veite d'emploi courant dans les parlers du Canada et de Louis iane caime dans l'ouest de la France, depuis la Haute-Bretagne jusgu'en Saintcnge, et dans la vallee de la Loire (FEW 1,540b BRITTOS). Au Canada et en Louisiane il s' emploie pour qualifier essentiellement l'activite (ALEC 278, 1840; Massignon q. 1219; Ditchy), de meme que dans les parlers situes au sud de la Loire. C'est ä cet ensemble qu il faut rattacher les enplois 2 et 3 de SEM. Le premier emploi, par contre, correspond ä ceux des parlers de Bretagne, Maine et Anjou gui n'utilisent le verbe que pour qualifier de fagon pejorative des discours. Mais carme cette demiere valeur est etymologique -le mot est de la famille de bredoulller- il peut s'agir a SEM d un emploi ancien devenu archaique dans les parlers du Canada tout autant que d'un emprunt plus recent aux parlers de Haute-Bretagne. Les deuxprononciation de SEM sont attestees au Canada, alors que celle en /bar-/ est rare dans les parlers du nord-ouest de la France.

BERDASSIER, -l£RE [bardasye, -yer] adj. Remuant, agite (d'un etre humain). Syn.: tracassier. 1 "Elle est berdassiere, elle tient pas en place". 2 "Ah il est berdassier cet enfant-la!" Derive de la meme famille que le verbe precedent, comparable pour la forme et pour 1'emploi ä ceux du Canada et de Louisiane (ALEC 278, 1840, 2272; Ditchy).

HHfl»llinfB [berduy, bferduy] s.f. Boule de pate Miquelon. Syn.: doballe.

cuite

ä

la vapeur. Specialite culinaire attrituee ä

BÖETS BASQUES 91 1 " - Tiens Marie! - Qu'est-ce que tu veux? - J'ai deux oeufs! - Qu'est-ce que tu vas faire avec qa? - Ben je voudrais bien que tu me ferais des berdouilles". [Dialogue fictif dans un recit]. 2 "lis sont malins les Miquelonnais ils appellent 9a autrement les berdouilles: c'est des doballes*". - Specialement Mangeurs de berdouilles, suman donne aux Miquelonnais, qui constitue le principal sujet de moquerie des Saint-Pierrais ä leur egard. Les Miquelonnais tendent ä preferer 1' emploi du synonyme doballe. 3 "Les Saint-Pierrais appelaient les Miquelonnais mangeurs de berdouilles, les doballes* ou des grand-peres si vous voulez". -> drache 5. Type lexical qui ne paralt connu que dans l'lle-du-Cap-Breton, aux Iles-de-la-Madeleine et sur la Cote-Nord au Quebec (ALEC 238 j Massignon q. ^ 1343). La denomination la plus courante au Quebec est grand^pere. C est un emploi typique des parlers acadiens qui se relie peut-etre, en raison de la forme des boules de pate, au substantif feminin atteste ca et la en France, et notanment en Anjou et Touraine: berdouille 'ventre, bedaine' (Davau; FEW 1,422a *BOD et 1,540 BRITTOS) .

h6rETS BASQUES s.m.pl.

Gros flocons de neige. Syn.: plumes d'oie (Miquelon). 1 "Les berets basques, c'est ce qu'on appelait la grosse neige, les gros flocons. On appelait ga des berets basques, je sais pas pourquoi". 2 "A cote d'une petite neige fine en est oblige de faire la difference. On dit... des berets basques". 3 "[Au moment des caimunions] il tembait de la neige, des gros berets basques". 4 "Quand il tcmbe des berets basques, on dit on va en avoir une pile* quoi hein!" -> fleur 1,2. Elrploi metaphorique original, motive par la grosseur des flocons.

92 BERRY HERR? [beri] s.m. Airelle vigne du Mont-Ida, Vaccinium

Vitis-Idaea.

1 "Des berrys c'est des graines*, des graines rouges. C'est gros came des pieces de chapelet la si vous voulez. C'est tres ben. On fait de la confiture". 2 "Le berry est rouge clair tandis que la graine*... caime vous dites la c'est rouge" [ä propos de la penme* de pre]. 3 "Vous n'avez qu'ä aller chercher un paquet de graines* chez X [nan d'un camerqant] c'est marque berry dessus ga vient du Canada, c'est marque berry". 4 "On appelle 9a des berrys. Iis faisaient de la teinture avec qa en Angleterre". -> graine 3, pcrme de pre 3. Bnprunt ä 1'anglais qui η'est atteste sous cette forme que dans quelques points acadiens de la Cote-Nord, du Nouveau-Brunswick, de Nouvelle-Ecosse et des Iles-de-la-Madeleine (ALEC 1652).

Η&ΓΕ s.f. 1. Bovin. 1 "Malgre qa les chevaux ils trouvaient bien le moyen de passer ä la nage plus loin, mais enfin. [Rire]. Pas les betes, les vaches, mais les chevaux ils y allaient". 2 "[Les veaux] ils tetaient la bete, pendant un mois hein, ils tetaient... la mere pendant un mois. Pis des qu'ils avaient un mois, ς» faisait des veaux de je sais pas moi 70, 80 kilos, pis cxi les vendait, en les vendait ä Saint-Pierre". 3 "Man pere et ceux de Savoyard... ils ant retire la bete du bourbier". 4 "On avait besoin d'une bete fallait la tuer ben on la tuait. Pis apres qa quand je suis venu ici, ben y en avait pas tellement que qa leur disait pas grand-chose de tuer des betes". -> barrer 3, couple 2, dalle 3, echapper, enfoui 2, engotte 3, entre 7, faucher, fraise 2, jacotard 2,3, geint 1, middling 1, opposer 1, pare 2, part (de foin), tape 1, tirer 2.

BEUGLOUX

93

- Specialement Bete ä tuer Bete de boucherie. Cet snploi de bete est connu au Quebec et en Acadie (ALEC 473; Massignon q. 821). Une restriction d'enploi du mot ccrnparable existe aussi en France (EEW 1,340b BESTIA). 2. Bete ä morue loc. nan. f. Insecte non identifie. 5 "C'est une grosse bete noire la bete ä morue, assez degueulasse. C'est une grosse bete noire pis 9a pue quand cm ecrase 9a [...] C'est tout en longueur". 6 "Le poisson etait tranche* sur le rivage, vous savez. Alors naturellement 9a donnait beaucoup de debris, si vous voulez. Alors les betes ä morue se ramassaient* lä autour, autour des etals* des pecheurs partout par la. Les betes ä morue, on n'aime pas 9a, c'est degoutant [...] C'a un vol tres lourd, vous savez. On entend, on entend une bete a morue quand eile vient se poser, la 9a dcnne un choc". 7 "Les betes ä morue c'est mechant 9a aussi". Canpose original.

BEUGLOUX [beglu] s.m. Come de brume faite dans un coquillage. Syn.: borgot. 1 "C'est un come* ä gaz qu'on a, qu'ils ait maintenant, caime un petit extincteur pis on pese* dessus pis y a un come, un come ä gaz. Mais des beugloux y en a... On est deux ou trois qui en ont encore". 2 "Les gens attendaient toujours la demiere minute pour comer* parce que, vous savez, celui qui le voyait venir sur lui, il attrapait le beugloux lä, et bou... ou... out! Il se deportait soit sur un cote ou sur un autre s'ils 1' entendaient alors 9a pouvait quelquefois faire faire un accident ä un autre qui se trouvait dans un autre alignement". Type lexical original, correspondent au fran5ais beugleur et derive de beugler au moyen d'un suffixe d' agent caracteristique des parlers de l'ouest de la France (FEW 1,594a BUCULUS).

94 BICHE BICHE S.f. Jeu d1enfant. 1. La biche a cacher Le jeu de cache-cache. 1 "On s'amusait ä la biche souvent, la biche ä cacher. La biche c'est un jeu, on se cachait [...] Y avait une equipe qui devait decouvrir 1'autre". -> branler 6. 2. La biche ä courir Jeu de poursuite. 2 "Pis la biche ä courir, c'est courir, tout le temps, la biche ä courir. Vous venez sur quelqu'un pis vous lui tapez dessus pis vous courez. Alors il faut qu'il vous rattrape". Bnploi metaphorique du nan de 1'animal (FEW 1,340 BESTIA) atteste en Nantais (ALBRAM enq. ined.).

egalement

BICOBNOT Voir BIGOHNEAU.

ΒΠΜΤΟΤ adv. Presque. 1 "lis la donnent bientot la morue". 2 "On dirait bientot une epee" [le "dard" de l'espadon]. -> balai 3. Elrploi du franqais bientot, qui derive d'expressions telles que voilä bientot une heure... et qui est courant dans les parlers de l'ouest de la France (ALBRAM 567; FEW 13/2, 120b TOSTUS).

BIGAILLE 95 ΒΐέΚΕ [byer] s.f. 1. Boisscn fermentee faite ä la maison specialement branches de spruce*. (On dit aussi biere de spruce).

ä partir de

1 "On fait de la biere de spruce*, de la biere de genievre*, de la biere de houblon, un peu de tout". 2 "On mettait le spruce* ä bouillir 9a bouillait pendant trois heures pis apzes qa on mettait de la melasse pis de la cassonade tout 9a ensemble pis ga bouillait, de la biere de spruce". 3 "Dans toutes les families y avait le baril de biere". 4 "Dans les bals par exemple, on servait pas de boissons caime maintenant. On faisait un baril de biere pour le bal". -> bruyere 3, epinette 1, flip 1,2, genievre 2,3, spruce 1,3. Specialisation de sens, frequente aussi au Quebec et en . Acadie 254; FEW 15/1, 104 BIER). 2. Biere anglalse Biere nan dcmestique, germee et de houblon.

fabriquee

(ALEC

ä partir d'orge

5 "Y en a qui boivent facilement deux litres de biere, anglaise".

la biere

6 "La biere anglaise c'est la biere ccrrme... qui vient en caisses". Denanination originale.

BIGAHZ£ s.f. 1. Argent. 1 "II a de la bigaille dans l'armoire". 2. Du jeu, aux cartes.

96

BIGORNEAU 2 "Quand on joue aux cartes on joue ä l'aluette*, alors on dit: - as-tu de la bigaille? ou bien - qu'est-ce que t'as dans ton jeu toi? - ben moi j'ai un petit peu de bigaille".

L'emploi pour 1'argent est apparente ä celui qu'a le mot en argot: 'menue monnaie' (TLF 3,493a; Rod 1,982a; Esnault 58a). Tandis que bigaille est un regionalisme des cotes de l'Atlantique pour "ä l'aluette ensemble des cartes de force faible ou moyenne" (Rezeau 60a; FEW 22/1.188a). C'est une Variante, ä consonnes sonores, de piquaille 'monnaie , ccnnu de quelques parlers de France, notarrment en Nantais, et qui est une formation regressive ä partir de picaillon beaucoup plus repandu (FEW 8,470a *PIKKARE).

BIGOSWEAU, BICCHNOT, BIGABNOT S.m. Buccin (coquillage). Syn.: bulot, coucou. 1 "Vous allez en rencontrer un il va dire je m'en vais aux coucous* pis 1'autre va dire je m'en vais aux bigomeaux pis ils pechent les deux mimes". 2 "Iis boettaient* leurs lignes avec des bigomeaux, les Banquais*". 3 "Les bigomeaux c'est plus gros [que les vignettes*]; c'est gros carme ga... Flaut les faire cuire et pis faut mettre ga ä macerer dans l'huile et du vinaigre pour que 5a mollisse un peu. Le haut, la tete surtout c'est dur". 4 "C'etait un bioomot, mais enorme quoi" [ä propos de la c o m e de brume]. -> bulot 2, collerette 5, coucou 1,2,5. Au Canada, ce type lexical ne s1applique pas au buccin mais ä l'escargot (ALEC 1551, aux Iles-de-la-Madeleine, 'colimagon') ou aux bigorneaux (ALEC 1418). Α SEM, le mot a vraisemblablement ete emprunte recenment au franqais, ou il designe la littorine (a^elee^ ici vignette'). Pour cette raiscxi, 1'incertitude phonetique tat temoignent les diverses formes relevees η'est pas d'origine etymologique. (Voir aussi P. Brasseur: "Synonymie et usage dans le rrangais de St-Pierre-et-Miquelcxi", ä paraitre dans les Actes du XVIlie Ccngxes international de linguistique et philologie rcmanes).

BINGLE 97 BTTJFT s.m. [bilifct, bilets] au singulier, [bil&ts] au pluriel. Rondin. 1 "Les martyrs*, les... les Anglais* ben avant qu'ils passent Canadians la, les martyrs ils venaient avec des... des chiottes de doris*, ils s'en venaient avec des billets lä. Iis avaient des cercles de... des cercles de barils, et puis ils mettaient ga, ils enfongaient bien serre, ils mettaient ga sur leur dos pis ils allaient de porte en porte demander si on voulait acheter des billets". 2 "Ils venaient vendre ce qu'on appelait des billets [...] Ils coupaient des morceaux de bois de buches de cette longueur-la pis ils les cassaient pis ils mettaient ga dans des ronds en cercles vides de... des tcnneaux lä, les manes cerceaux que pour les tonneaux, la, pis ils coingaient ga dur". -> galloper 1, scallop 3. Emprunt ä 1'anglais billet 'buche, rondin'.

BINGLE [begl, beg] s.m. 1. Sorte de jeu de base-ball. 1 "Iis jouaient au pipet* et puis ä bingle". 2 "C'est un peu le base-ball canadien, bingle, avec des choquettes*". -> bordee 1. 2. Le baton qui sert de batte pour ce jeu. 3 "Vous avez votre bingle dans votre main, pis y a un gars qui est lä-bas, pis il jette la balle, pis vous tapez sur la balle. Elle s'en va pis vous avez le copain qui court apres la balle. Alors vous, vous devez courir sur un but, vous. Alors si vous arrivez au but ä temps avant qu'il attrape la balle, vous etes bon. Mais si un des gars attrape la balle et la lanoe sur vous vcus etes pris". Peut-etre de 1'anglais to bang 'f rapper violenment'.

98 BINGO BINQO [bingo] s.m. Jeu de loto qui se pratique lors de reunions d'associations. 1 "Iis faisaient soit une partie de nain jaune, une partie de loto lä. (Ja ne se joue plus beaucoup non plus eh ben maintenant y a le bingo..." 2 "II est marque bingo dessus ς» vient du Canada". -> quine 2. Bnprunt ä 1'anglais independairment de celui fait plus recenment en France metropolitaine.

BIQUET [biket] ([t] final prononce seulement en fin de syntagme), BIQUOT [biko] s.m., BIQUETTE s.f. 1. Chevreau. 1 "On mangeait le biquet qu'on appelait ga, le petit de la chevre". 2 "Un biquet c'est... le fils d'une chevre". 3 "Y avait les biquots, c'est ce qu'on appelait les petits de la chevre". 4 "On en avait dans le temps ici la, c'est des petits biquets quoi. Alors quand ils naissent, les premiers mois, an dit ion biquot". 2. Terme d1affection ä un enfant. 5 "Mon petit biquet". 6 "Man petit biquot". Mot du franqais familier seien une prononciation traditionnelle dans certains parlers de l'Ouest ou avec un autre suffixe (FEW 1,358b •BIK).

BISBISE [bisbiz] s.f. Dans la locution verbale Etre en bisbise Etre en chicane. "Iis s'accordent pas trop... ils sont en bisbise".

BLACKER

99

Ponte particuliere da franqais familier bisbille (FEW 1,580 BSB). qui n'a pas l'acception speciale du Louisianais bizbiz 'debauche (Ditchy 51)7

BISOUQUETTE s.f. Organe sexuel masculin. Variante de 1'argot bistoquette, de rnerne sens (FEW 15/1,99a BESTECKEN). influencee par les formes du type biser. pour baiser, caracteristiques des parlers de l'ouest de la France et, de la, du fran parti 2, toto. Emprunt ä une expression anglaise qui η'est pas 1'equivalent courant de broyer du 1noir: to have the blues, mais une egression comparable ä oelle1 de l argot americain: black dog 'melancolie, tristesse, cafard .

BUCKER [bloke] Dans les locutions Blacker les yeux Mettre les yeux au beurre noir, Avoir les yeux blackes avoir les yeux au beurre noir. 1 "II m'a blacke l'oeil".

100

BLACK ΕΧΕ

2 "Ah oui y en a qu'ont eu les yeux blackes neige".

avec

une

pelote*

de

Expression tiree de 1'anglais black-eye 'oeil au beurre noir'.

B U C K EXE [bläk äy] s.m. Oeil au beurre noir. "Qjelqu'un qui passe et pis qui re fort 2, graine 3. Ce type lexical est le nan general dans les parlers du Canada de l'airelle ä feuilles etroites (ALEC 1653). Les deux prononciations entendues a SEM sont connues< entre autres, au Canada ou la forme bleuet demine aujourd'hui a l'ecrit plus encore gu'a l'oral. Ce type est eqalement connu en Normandie (AIJN 467*), Lorraine et Franche-Cante (FEW 15/1,148b *BLAO) pour l'espece de myrtilles la plus repandue en France, Vaccinium Myrtillus. Mais son emploi ä SFM s'inscrit beaucoup plus evidenment dans une tiBdition canadienne qui remonte au 16e siecle, d'abord sous la forme blue, puis bluet et enfin bleuet, cette demiere forme etant due ä 1* influence secondaire de l'adjectif bleu (cf. M. Juneau, Quebecois bleuet, frangais berlue, meme souche. RLiK 50, 133-7. qui fait ranonter ce nan ä une base pre-rcmane bulluca 'prunelle ).

102 BLOND BLOND s.m. Rebond. [La balle] " e i l e a f a i t un blond". Derive du verbe blondir, identique pour l a forme ä blon 'bond', de Mens en Belgique, sans q u ' i l y a i t sans doute de rapport entre les deux (FEW 1,429b 'BCMBITIRE).

BLONEE s . f . Fiancee, amie. 1 "Sa bonne amie, sa blonde, sa poule h e i n . . . " [Blonde est plus neutre que poule qui peut etre pejoratif ]. 2 "Toutes les amies i c i , toutes les jeunes f i l l e s , e ' e s t une blonde". 3 "On d i t toujours sa blonde, merne s i e l l e e s t brune!" -> ä 6, brousse 3. Substantif atteste ga et la dans le demaine d ' o i l , mais rare dans l'Ouest. Par ccntre i l est connu de tous les parlers du Canada et en Louisiane (ALEC 1879; DFQ 26-9; Ditchy; FEW 15/1,170b *HLUNDA).

HLONDIK vb. intr. Rebcndir. 1 " J ' a i jete ma balle mais e l l e a . . . e l l e a blondi dans l e carreau". l e Zaspiak-bat [v. Saspi*] l a , ben 2 "Une balle vous avez v u . . . quand l a balle, vous jetez l a balle par terre p i s e l l e remonte, on d i t e l l e blondit quoi". Forme originelle de bondir.

BOBSLEIGH

103

BLOT [bio] s.m. Billot de bois. 1 "En general un blot γ a 33 cm sur, sur chaque face". 2 "Un blot c'est oe qu'on appelle un moroeau de bois de carre, pis d'une certaine longueur. On le trouvait souvent souvent au plain*. Plus maintenant mais avant c'etait pas rare, hein. On disait: tiens on a trouve dix blots, on a trouve quinze blots!" 3 "Quelquefois vous allez sur le rivage pis vous sauvez* un blot, un gros morceau de bois". 4 "Y a deux ou trois qui cnt dit y a qu'ä mettre deux blots dessous". -> bois 1, maree 8. Variante du mot bloc 'billot' disparue du frangais regionaux, particulierement ceux de Normandie

sauf (FEW

des parlers 15/1,163-164

BLUFF s.m. Poker (jeu de cartes). 1 "Le bluff c'est des cartes ä jouer ä 1'argent". 2 "Celui-la qui joue au bluff, il dit j'arrete je suis rinsque*". Anglicisms catmun dans le Canada francophone (ALEC 2077).

BGBSUEHSi [bosle] s.f. Jeu qui consiste ä faire glisser plusieurs luges accrochees aux autres. 1 "Y avait trois traines* amarrees* ensemble pis bobsleigh". 2 "lis vent ä la bobsleigh ä trois quatre dedans".

les

unes

on allait en

Ehprunt ä 1'anglais, d'usage plus courant au Quebec et en Acadie jpour une "voiture d'hiver a deux trains" (ALEC 1095) que pour un "traineau Mouet)" (ALEC 1103). Le genre feminin η'est pas atteste dans les dennees de l'ALEC (FEW 18,29b BOBSLEIGH).

104 BOETTE BOETTE [bwet, bwat] s.f. Homophone de holte. Derives: boetter, deboetter, deboettage. 1. Appat pour attirer le poisson. 1 "On allait ä la boette le soir ou bien le matin de bonne heure". 2 "L1 encomet *, qa, c'etait une boette. Personne n'achetait 9a". -> apioler 2, collerette 4, coguille Saint-Jacques 3, deboettage, dorissee 4, fois 4, rat 5, taud 3, tille 2. 2. Animal marin servant d'appat (encomet, capelan essentiellement). 3 "Le poisson suit la boette". 4 "Qjand la boette arrive pour venir ä Saint-Pierre..." -> accoster 6, cul 8, dadin 2, gode 4, jus d'encomet 3, mise 1. La definition des dictionnaires frangais 'appat utilise pour la peche en mer' (TLF 4,622b;^ Rob 2,44b) indique implicitement que seuls utilisent ce mot les pecheurs des cotes, sans preciser qu'il ne s'agit que des cotes de l'ouest de la France. Car c est un terme du vocabuIaire des pecheurs francais de la Manche et de 1'Atiantique emprunte au 17e siecle au breton (FEW 20,5b BOUED). Les pecheurs de morue de ces regions l'ont repandu sur toute la cote canaoienne (ALEC 1384) tres tot, puisqu'il est present dans les parlers louisianais (Ditchy).

Β0ΕΤΤΠΙ [bwate] vb. 1. Vb. tr. Pourvoir d'appat. 1 On etait associe ä quatre ambarcations, pour faire la senne, pour boetter les bateaux quand ils venaient". 2 "Nous dans la joumee on boettait un couple de bateaux eux autres aussi". -> bigomeau 2, bulot 1, degrat 2, tentis 1,3.

collerette

5, coucou 1, decareter 1,2,

BOEUFS

105

2. Vb. pr. Se pourvoir d'appat. 3 "Qiand on etait arrive ä pouvoir faisait* onze heures et* minuit".

se

boetter

quelquefois

il

Derive de boette ignore des dictionnaires fran^ais ä la difference du mot de base et usite dans les memes regions que ce dernier aussi bien en Franc» qu'au Canada (ALEC 1386 "appater un hamegon"; FEW 20,5b) et en Louisiane (Ditchy). L'emploi au reflechi semble propre a

BOEUF GRAS [b4 gra] s.m. Bffiuf que l'on pramenait mardi-gras.

traditionnellement dans les rues le jour du

1 "Pour mardi-gras quoi ils deguisaient un bteuf, et pis les gens se deguisaient avec quoi. Iis prcmenaient le bteuf gras quoi". 2 "Iis l'habillaient le kxeuf gras ils lui mettaient un beau rideau, pis des fleurs... deguise en mardi-gras*. Je ne sais pas s'ils ne lui mettaient pas une figure de masque!" Les dictionnaires enregistrent ce compose qui η'est en usage que la ou la ccutume, ou scxi souvenir, s'est maintenue (TLF 4,623a; Rob 2,44a).

BOEUFS s.m.pi. Chalutiers qui pechent en couple en tirant le mane chalut. "Ils pechent a deux. Ils ont un grand chalut, ils exit chacun un bout de chalut. Alors ils appellent qa des baufs, ga e'est des chalutiers, y a que les Espagnols qui font 9a. Et pis ils sont ecartes ä un mille l'un de 1'autre. C'est mane dangereux a travailler avec eux dans la brume". Abrege du compose bateau-bauf enregistre pour cette technique de peche (TLF 4,623a).

106

BOGUI

BOGUI [bugi, buki] s.m. Chariot ä deux frigorifique.

roues

pour

transporter

le poisson dans 1' entrepot

"A l'epoque-la quand on livrait ä la SPEC boguis de rnorues".

il

fallait

rouler

les

Sans doute emprunt ä 1'anglais buggy 'voiture legere ä deux roues' independamment de celui atteste au Canada: boghei voiture d'ete ä quatre roues' (ALEC 1107), en Louisiane: boghei 'buggy' (Daigle), et en France: boghei 'petit cabriolet decouvert' (EEW 18,37a BUGGY).

BOIIZR [boylfcr] s.m. Reserve d'eau chaude. 1 "On met un Serpentin dans le foumeau, et pis on chauffe le boiler". 2 "Tout de suite* [...] on a de l'eau bouillante, m i s dans le temps fallait acbeter un boiler et, sur le poele ils mettaient des tuyaux qui correspondaient au boiler". 3 "Pensez-vous qu'elle avait catme 9a brule sur le boiler!" 4 "Elle est arrivee ici eile dit ä men frere: - Monsieur eile dit il tembe de la pluie chez nous. - La pluie! qu'il dit. Catment 9a se fait? La toiture etait toute neuve. Elle dit: il tembe de la pluie, ben l'eau tcnibe partout. II a ete voir. C'etait le boiler qu1etait perce. Dans un etat! Dans un etat! Ben eile s'etait pas rendu ccmpte que le boiler y avait un tout petit trou. Dame ga giclait partout!" -> gallon. runt ä 1'anglais egalement atteste au Canada francophone (ALEC 170,

BOIS s.m. I - s.m.pi. Morceaux de bois qui foment Abreviation de bois de saillage*.

l'echouage*

d'un

doris*.

BOIS 107 -> depausser 4, echouage 3, lice 4,5, ramasser 3, vireva 2. II - Dans les locutions nominales: 1. Bois a feu Bois de chauffage. 1 "Iis sauvaient* des blots* bois ä feu avec".

au plain*

et pis ils faisaient du

2. Bois de corde Bois de chauffage livre en cordes. 2 "Ici vous avez cinq ou six boulangeries, ils chauffaient tout avec le bois de corde". 3 "On cassait emboucauter 2, long courrier 1. Mot enregistre par tous les dictionnaires modernes mais qui ne plus de I'usage contemporain.

releve

BOÜCHON s.m. 1. Variante du jeu de billard (avec un bouchon ä renverser). 1 "S'ils ne pouvaient pas jouer ä la relle* dehors, ils jouaient au bouchon". 2 "Et puis l'apres-midi, il va faire une partie de bouchco au Joinville". Denomination parallele au jeu de bouchon enregistre par les dictionnaires mais qui s'applique ä un jeu de palets (FEW 15/l/201b *BOSK). 2. Fusible ayant la forme d'un petit bouchon. 3 "Les bouchons avaient saute". Denaoination par analogie de forme, appuyee sans doute par l'emploi dans la langue technique de bouc&n-fusible d'une chaudiere (Rob 2,96a).

BOQEREUIL Voir BOUVREUIL.

Βοαέε s.f. Dans les expressicxis Etre au vent de sa bouee, etre au (ou en) devant de sa bouee Etre tire d'embarras, etre dans une situation prospere.

BOUITiTife

117

1 "Maintenant ben, il a plus besoin de s'en faire il est au vent de sa bouee". 2 "Il a arrete de travailler, il est au devant de sa bouee". L1 expression etie au vent de sa bouee a ete enregistree par certains dictionnaires franqais du 19e siecle avec la metre valeur. La seule attestation localisee provient de Cancale dans le FEW (15/1,83a •BftUKN), mais elle est bien attestee en Acadie (Poirier 95), carme dans la langue des marins (Sizaire p. 104).

BOUFFIE s.f. Bulle. 1 "Ceux qui font des bouffies avec la gaime*-la, qui font gonfler la garme-la..." 2 "On faisait des bouffies avec du savon la, des bouffies qui ircntent partout en l'air la". 3 "Si vous voulez mettre du sucre dans quelque chose, on dit: ben attends que ga fasse des bouffies!" Ce type lexical a ete releve ca et la a travers tout le Canada avec le meme eiriploi qu'ä SEM (ALEC 302, 982, 991, 2310) C'est un mot qui n'est connu. dans la France d'oil, que dans 1'Quest, depuis la Bretagne iusqu en Aunis, ou il designe plutot une vessie de pore ou une anpoule (FEW 1,596b BUFF-). La presence du mot a SEM s'inscrit dene mieux dans im cadre canadien.

B 0 u m & s.f. I- Touffe de vegetaux. 1. Touffe d'arfares. 1 "Les bouillees ici c'est pas bien haut". 2 "A Langlade y a des grandes bouillees". 3 "Quelquefois on va ä la chasse aux lapins*. On dit ben on a fait la bouillee-la mais y a du monde dans 1'autre. Alors on va aller dans 1'autre bouillee quoi". 4 "[Les rames*] c'est des arbustes que y a entre les bouillees de bois".

118 BOUILLIR 2. Bouillee de graines* Endroit oü abondent les baies sauvages. Syn.: niche 1°, platier 3°. 5 "La y a une belle bouillee, un platier* caime on dit un beau platier de graines ou une bouillee de graines". II- Amas, concentration. 6 "J'ai vu dire y a une bouillee de truites la". 7 "Une belle bouillee de piquets*, une belle bouillee de lices*". Type lexical frequent en Acadie qui n'apparait au Quebec que sur la Cote-Nord (ALEC 1250 "touffe d'arbustes"). II est aussi atteste en Louisiane pour une 'reunion de drageons partant d'une meme souche1 (Ditchy). En France, seuls les parlers de l'Ouest le connaissent, et plus precisement ceux du Sud-Ouest (FEW 1,346b *BETW- et 21,45a). Ce type lexical est done caracteristique des parlers acadiens. (V. Brasseur, Quelques aspects de la toponymie des lies Saint-Pierreet-Miquelcn, pp. 544-545).

BOUILLIR

vb.intr.

Grouiller. "ς& bouille sur l'eau les truites la dans l'etang". Une semblable evolution semantique est attestee au Quebec (ALEC 1406 "banc de poissons", pt 141: "ca bouillait de poisscxis"), en Acadie: bouillerΛfoisexmer, fourmiller' (Poirier) et en Louisiane, ou Daigle glose bouillir 'to teem, to abound , caime dans quelques parlers de Noimandie (a Guemesey, FEW 1,619a BULLIRE) et de Bretagne (ALBRAM pt 9)·

BGUUOKJQI vb.tr.

1. Petrir, presser entre ses mains (avec un complement anime). 1 "Ne le boulange pas caime ga tu vas lui faire mal!" 2. Balloter (des personnes). Cit.: bord 3.

BOUIiETTE DE M3RUE 119 EJmplois metapboriques de boulanger 'petrir la pate a pain' parfois enregistres clans les dictionnaires (TLF 4,789a) mais qui restent peu courants (FEW 15/1,177a *ΒΟΙΙΑ).

BOUL£ S.f. Sucrerie de melasse. Syn.: rcmeguin. 1 "Des boules ou des romequins* 9a se vendait. C'est des vieilles qui s'amusaient ä faire qa, soit avec de la casscnade ou avec du sucre blanc". 2 "Y a la boule de rcmsquin*, y a la boule que l'on fait avec du sucre d'orge. Les enfants sont enrages pour manger 5a. Et souvent on leur dome rapport* aux vers". 3 "Apres la grand-messe c'etait la foule, on allait chez la mere Lecocq acheter des boules, cinq pour un sou". Denomination d'apres la forme donnee ä cette friandise.

ΒΟϋΙΕΠΈ EE MORUE loc.ncm.f. Boulette de morue hachee. 1 "Ah ben vous pouvez faire des boulettes de viande! Vous pouvez faire des boulettes de morue". 2 "Vous prenez une morue, vous la passez au moulin, vous mettez de l'ail, des oigncxis, des poireaux, du persil tout ce qu'on peut mettre de bon, du sei, du poivre. Et on roule qa dans la farine qa fait une boulette". 3 "lis en vendent des boulettes de morue maintenant". Denaninaticn descriptive d'une preparation culinaire locale.

120 BOUQUET DE SAINT-ANTOINE BOUQUET EE SAINT-ANTOINE loc.ncm.m. Plante, Epilabium angustifolium. Bouquet signifie originale.

'fleur'

dans

bon ncmbre de parlers d'oil. Locution

BOURBON s.m. Sorte de tacn. 1 "II est dur ä tuer et pis si il vous pique, vous aurez le bras ccnme qa hein. Maudite* saloperie de bourbon!" 2 "Les bourbons ils sent pas carmodes. e'est maudit* hein". 3 "Chaque fois qu'il attrape un bourbon il lui suce le... derriere" [pour le miel]. -> carnage. Prononciation particuliere de bourdon (FEW 1,632a *BURD-).

BOURQQT s.m. Voir BORGOT.

BOUHTiTWBlIK s.f. Le fait de bourlinguer*. Cit.: bourlinguer 3.

BOUSQUER

121

BOURLmGUER v b . i n t r . T r a v a i l l e r durement. Syn.:

torcher.

1 "Bourlinguer dur". 2 "Ben j e b o u r l i n g u e moi [ . . . ] J e f a i s d e t o u t " . s'amuser. 3 " - B o u r l i n g u e r dans c e temps-la. qa v o u l a i t p a s d i r e a v a i t m i s u n c o u p , £ a c ' etait la - £ a v o u l a i t d i r e ? -Qu'cm e n bourlingue*, hein!" Mot d u v o c a b u l a i r e m a r i t i m e q u i a p r i s d e s a c c e p t i o n s d i v e r s e s d a n s frangais familier.

le

Muuiaqj.-QIFIjrf: s . m . Nourriture g r o s s i e r e qui r a s s a s i e

rapidement.

Ganpose s p e c i f i q u e d e f o r m a t i o n c o m p a r a b l e ä c e l l e d e c o m p o s e s a t t e s t e s d a n s l e s p a r l e r s f r a n g a i s : bourre-chr&tien 'gateau indigeste' ou bourre-coguins ' h a r i c o t s ' (FEW 1 , 6 4 2 a BURRA).

BOURRIN s . m . Chose d e p e u d e v a l e u r . "Des m a u d i t s * v i e u x b o u r r i n s d e f i l m s " (= d e t r e s v i e u x f i l m s ) . B n p l o i p a r t i c u l i e r du (FEW 1 , 6 3 6 a BURRICUS).

francais

argotique

bourrin

'mauvais c h e v a l '

BOUSQUER v b . t r . Mettre l e s e i ( l e charbcn, l a t e r r e . . . ) en hauteur p o s s i b l e .

tas

sur

la

plus

grande

1 "Vous l e b o u s q u e z p o u r a v o i r p l u s d e p l a c e d a n s l e m a g a s i n * " .

122 BOUT 2 "Bousquer le charbon dans un coin". Verbe sans doute a rapprocher de bousquer 'faire des travaux qui η'exigent que de la force corporelle' ä Nantes, 'faire travailler malqre lui un matelot paresseux' dans 1'argot de marine (PEW 1,650a *BUSCA), 'travailler d'ahan' en Anjou, bosquler 'pousser, serrer de pres' en Normandie (PEW 18,34b BÜX) et les derives bousqueur 'ouvrier employe ä rerauer des fardeaux' ä Nantes (Littre) 'travailleur infatigable' en Louisiane (Ditchy), ainsi que les croisements bouscogner Jxjusser et repousser' en Haute-Bretagne (FEW 15/1,233a B02EN; 2,1532b CuNEUS), bousculer 'pousser en tous sens, culbuter' (FEW 2,1519b CULUS), etc. Le sens particulier du verbe ä SFM est peut-etre a relier ä celui du substantir acadien bouscueil 'gros amas die glace' (Poirier; ALEC 1229; Massigncn q. 133).

BOUT [but] s.m. Espace de temps. 1 "Y a un maudit* bout" [= il y a tres longtemps]. 2 "On a reste ä trois pendant un bout". En plus de celle-ci, le mot bout a les mimes acceptions qu'en franca is, mais cn articule le -t quand il se trouve en finale de syntagme. Cette prcncnciaticn est courante au Quebec et en Acadie, ainsi qu'en Louisiane (Daigle). La valeur tenporelle n'y semble cependant connue que dans des locutions substantives ccnme un bout de temps (ALEC 1730) ainsi qu'en frangais carmun.

BOUTIQUE (EE-) loc.adj. Du caimerce, qui s'achete dans un magasin. "C'est de boutique qa devrait etre bon". Locution specifique.

BCJUVREUIL, BOUDREUIL s.m. Gros-bec des pins, Pinicola enucleator. Ehploi et prononciation particuliers du substantif du frangais carmun.

BOYAU

123

BGKAHD [boyaer] s.m. Bard, civiere utilisee pour transporter les morues. 1 "Le boyard c'etait une civiere avec guatre pieds". 2 "Quand on arrive de peche on jette le poisson dans le boyard cu ben sur le galet". 3 "II y avait un grand boyard qu'on met le poisson dedans, ou on pique* le poisson dedans. On vide la tripaille*, et pis vous avez le petit boyard qu'on porte quand la morue est tranchee*. On la met dedans, pas egouttee, pis on la porte pour la saler". -> chavirer 7, etal 4, piquer 1. Type lexical le plus souvent atteste sous la forme bayard. La forme boyar^est^courante pour un bard en Acadie (Poirier; Massignon q. 609 "civiere ä bras") et en Saintonge. Elle est egalement attestee au Quebec (ALEC 1134, 1397, 1897, 2310), tandis que les parlers de Bretagne et de Normandie l'ignorent (FEW 1,207b BAJULUS; 1,617b *BULLI).

BOXAHD£E [boyarde] s.F.

Contenu du boyard*. "Aussitot que y avait une boyardee de tranchee*, ben salait".

la

fenme

la

Derive du precedent atteste au Canada (RLiR 44,315a).

BOYAXJ [boyo] s.m. Boyau. 1 "(Des baranetres) j'ai toujours connu. Vous savez c'etait-il que le simple boyau de chat avec un petit bonhcrrme pis une bonne fenme. Vous en avez vu? se toume 9a. C'est parce que soidisant c'est un boyau de chat. Quand il prend de l'humidite, il doit retrecir ou... fa faisait eviter*. Υ en a beaucoup qu'en faisaient eux-memes".

124 BRAI 2 "Vous avez le roti vous avez les cotelettes, vous avez... les gigots, vous avez... vous avez le foie, vous avez la tete pour faire du pate. Et puis les boyaux vous pouvez faire du boudin, de la saucisse, la... la louquinque*". -> louquinque 4. Prononciation traditionelle attestee dans un seul point quebecois par la liste 579 de l'ALEC, mais encore frequente dans les parlers regionaux de France (ALF 167).

BRAI [bre] s.f. Brai, sorte de goudron. 1 "C'est un genre de coaltar aussi c'est de la brai qu'ils faisaient fcndre ils mettaient sur les joints de la sole". 2 "De la brai elle est dure tandis que le coaltar ςβ. fond". 3 "Caime le premier f rigorif ique... vous aviez les murs en ciment. Apres ils mettaient de la planche pis apres ς» ils mettaient du liege et pis apres ga ils mettaient de la brai qui etait chauffee pis c'etait catine peint tout le long". -> carme 2. Qnploi feminin BRAEEA).

original

d'un substantif

franqais

(FEW 15/1,235

BRAZES s.f.pi. Pantalon. 1 "Tu perds tes braies". 2 "T'as de belles braies". Cette ancienne denomination des culottes ne s'emploie plus en francais d'auiourd'hui que dans des contextes historiographiques (TLF 4,882-3; Rob 2,151a). Elle ne semble pas signalee au Canada. Par contre elle a ete relevee dans certains parlers dialectaux de France jusqu'a l'epoque contenporaine (FEW 1,478-9 BRACA). C'est reste le ncm usuel du talcn dans les parlers du Cotentin, des lies anglo-normandes et de cote nord de la Haute-Bretagne, et nulle part ailleurs dans la France d'oil (ALF 373), ce qui situe bien l'origine de ce mot a SFM.

BRANLER 125 BRAMI^E S.f. 1. Le fait de subir en mer un coup de vent, specialement dans 1'express icxi attraper (ou avoir) une branlee 'subir un coup de vent'. 1 "J'en ai attrape une branlee pour venir ä Saint-Pierre!" 2 "lis risquent bien d'avoir une branlee". 2. Travail dur et penible, specialement dans 1'expression attraper une branlee 'faire un travail penible'. Syn.: corvee. 3 "J'en ai attrape une sapree* branlee ä monter ga". 4 "J'avais attrape une corvee* formidable, une branlee caime on dit ä Saint-Pierre". 5 "lis voulaient dire une corvee*, ils disaient une branlee". 3. Grande quantite. 6 "tfiie branlee d'oiseaux". 7 "II en avait une branlee" [d'enfants]. 4. Correction. 8 "Je vais te foutre une maudit* branlee, tu vas voir un peu!" -> maudit 7. Acceptions ^particulieres d'un mot du franqais ccmnun, la premiere etant donnee par le Robert catroe usitee dans le langage familier de la marine: branlee 'coup de vent difficile ä etaler'.

HKANLER vb.tr. 1. Etapper. 1 "Rentre, je vais te branler la gueule!" 2. Inf liger une puniticn, une amende. 2 "Tu vas te faire branler".

126

BRANU3CHER

3. Prendre (tuer) ä la chasse, ä la peche. 3 "Je l'ai branle au vol" [a propos d'un faisan]. 4 " va-t-il? -£a irait mieux si j1avais branle un faisan". 5 "Branler un cerf". 6 "Alors le poisson peut pas sortir apres, il est branle quoi!" -> trappe 2. 4. Attraper (au figure). 7 "Si on est cinq, hein, la demiere eile est branlee" de la biche*]. 8 "Je pense ä moi-mame: ma fille t'es branlee!"

[au jeu

5. Voler. 9 "Le jour du quatorze juillet j'ai ete branlee". 10 "lis m'ont branle men porte-feuille". Bnplois particuliers d'un verbe franqais.

BRAHEOCHER

vb.intr.

Branler. Cit.: dessouquer 2. Derive de branler ncn1 atteste dans les demnees dialectales du JEW (15/1,247-250 BRAND). D autre part l'emploi reste distinct de oelui de l'argot oontenporain, d'ailleurs assez rare (TLF 4,901b; Rob 2,158a). II peut s'agir ä SEM d'une derivaticxi autochtone sur le modele de pignocher*, vivocher*. V. aussi le normand locher, de mane sens.

BRAS s.m.

Manchcn (de charrue). "C'est-a-dire que la charrue, cxi avait deux sortes. C'etait une charrue avec un soc, le versant*, avec deux bras qu'etaient pris dessus en V".

BRASSifeRE

127

Qnploi issu de oelui de bras pour 'brancard', note φ et lä dans les parlers frangais (FEW 1,485a BRACHIUM). Dans 1'Quest, on en trouve quelques exsnples en Haute-Bretaqne et en Poitou, tandis que les parlers normands l'ignorent (ALO 144*, A m 47). Quoique rare, oet emploi a ete releve au Canada, notanment aux Iles-aie-la-Madeleine et en Nouvelle-Ecosse (ALEC 721; Massignon q. 724).

HRASSEXER vb. tr. ou intr. [braseye] Bassembler la morue par petits tas, avant de les porter ä la pile*. 1 "Le maitre de grave* disait: ben, on va carmencer a re-brasseyer -c' est peut-etre pas tout ä fait le mot bien-. Alors on mettait toute la morue l'une par-dessus... 5 ou 6 monies qa donnait de l'espaoe pis, quand tout etait brasseye, on charroyait* ς», on mettait ga sur les bras pis on portait aux types qui faisaient des piles* de irorues". 2 "Brasseyer c'est faire des tas, des tas ou bien des paquets de... de morue par exemple, par lots, par lots de... huit ä dix morues. C'est plus facile pour charger". -> arrimer 8, charroyer 2, pile 1. Verbe qui, en franqais moderne, η'a que le sens de 'brasser les vergues'. Dans quelques parlers de Bretagne rcmane on 1' emploie pour 'rassembler des javelles pour en faire une gerbe' (FEW 1,487a BRACCHIIM), ce qui est assez proche de l'enploi qui en est fait a SEM; mais ce mot a sen correspondent exact dans les parlers acadiens: brasseyer 'transporter ä bras'; brasseyer la morue (Poirier; Massignon q. 613 "ramasser les morues le soir, par crainte de la rosee").

BRASSIÖIE S.f. Bande de tissu doit les pecheurs s'entouraient les poignets. 1 "On mettait des brassieres, des bandes, avec une attache sur la main. Les marins amarraient* qa la. Vous savez avec les manches, les paletots caoutchoutes, vous savez, c'etait assez dur, alors qa vous abimait un peu ici la. Certains, qa formait des boutons. Alors pour eviter tout qa ils se faisaient, les femes faisaient des bandes. Alors le pecheur le matin prenait sa bande qu'etait bien seche, pis il faisait le tour et au bout y

128 BREECHES avait un galon. Alors le galon vous faisiez un tour pis un noeud ou une boucle, im ä chaque bras pour se proteger ä seule fin* que ga, 9a vous lime pas le... le bras, la peau". 2 "Nous ä I'lle [-aux-Marins] on disait pas des brassieres... αϊ disait pas des brassieres, nous on disait des poignets. Des poignets vous savez c'etait des morceaux de chiffons qu'on avait des morceaux de tissu usage pour ne pas que paquer 2.

BROUILDGN

131

2. Brache ä cheveux Epingle ä cheveux. 2 "Apporte-moi des broches ä cheveux si tu vas ä*la ville". L'emploi de brocbe pour une aiguille ä tricoter est frequent dans les parlers regionaux de France (FEW 1,544b EROCCUS); il est general au Qiuebec et en Acadie (ALEC 324) ou brache ä cheveux est egalement connu (ALEC 544; Poirier; Boudreau).

BEDUIIIABE s.m. Eirmelement. 1 "Y a brouillage et brouillage". 2 "Y a du brouillage dans ma laine". Derive de *BROD).

brouiller, rare

en

frangais

avec ce sens (PEW 15/1,295b

HROUnJUON s.m. Brouilleraent dans une ligne, une pelote de laine, ... Syn.: tete de negre. 1 "Un brouillon de lignes". 2 "Y a du brouillon dans les lignes". 3 "Ben un brouillon faut le defaire hein! C'est pas du rigolo. Et pourtant je ne veux pas casser ma laine ni rron fil. Je le debrouille". -> Scilade 2, tete de negre 1. Brouillon est atteste en moyen-frangais avec le sens de 'chose emmelee, melange confus'. Mais l'emploi de SEM doit plutot etre une evolution specifique de brouillon sous 1'influence de brouiller 'meler' (FEW 15/1,296a *EROD).

132 BROUSSE HROUSSE s.f. Sapin baumier, Abies balsamea. 1 "Iis allaient couper des brousses a'la montagne*". 2 "Pour Noel vous allez chercher une brousse, pour faire un arbre pour mettre dans la maison". 3 "Vous pouvez aller dans les brousses avec votre blonde*!" -> ramasser 8. Au Qiebec et en Acadie brousses dencrrme ga et lä des broussailles (ALEC 1291). C'est aussi le sens que le mot a conserve depuis l'ancien rranqais dans beaucoup de parlers regionaux de France, surtout de l'Ouest (FEW 1,572 *ERUSCIA). I,'application de ce substantif au sapin baumier s'exjplique par le fait qu'a SFM ces arbustes ne depassent quere la taille des arbustes et qu'ils poussent en buissons serres. (V. aussi Brasseur, Quelques aspects de la toponymie des lies SaintPierre-et-Miquelcn, pp. 547-8).

HROUSSfc s.f. Banc de poissons (surtout de capelans). Syn.: mouvee, piole. 1 "La broussee frayer la sur 2 "Du rivage on Tiens y a une 3 "Quand il y a

de capelans qui vient sur vous eile vient pour le galet". voit le capelan qui vient, on voit la couleur. broussee de capelans!" une broussee de morues ..."

-> mouvee 2, piole 4. Type lexical qui est peut-etre un emploi metaphorique de broussee atteste au sens de 'taufre de broussailles, hallier' dans les parlers de 1'ouest de la France (EEW 1,572b *BRUSCIA). La seule autre attestation disponible de ce type: "une broussaie de capelan" a ete relevee sous la plume d'un Granvillais en 1786 (La Moranaiere 1,184).

BROUXKBD [brutaer] s.m. Bttuf d'un an a 18 mois.

BRUITEUX 1 2 3 4

133

"C'etait ces broutaxds-la qui grossissaient pour l'annee d'apres". "Ii avait une douzaine de broutards la dans un pare*". "II avait assaime un broutard dans la nuit". "J'ai carmence ä entendre parier de broutard moi avec le veterinaire".

Les dictionnaires du frangais η'cnt enregistre que recenment broutard 'veau qu'en laisse brouter (au lieu de le nourrir au lait)' (Robert). II est atteste depuis plus langtemps dans les parlers regicnaux surtout de l'ouest de la Francs (FEW 15/1,314a *BiRUST).

HHUfiSE [bruer], [bruer] s.f. Camarine noire, Enpetium nigrum. 1 "Yen a beaucoup qui ramassent la bruere". 2 "Avant on allait chercher de la bruere pour la mettre au sec. On la mettait dans des sacs pour allumer le feu le lendemain matin". 3 "Y en a qui font de la biere* avec la bruere". Denomination independante de celles utilisees au Canada pour la camarine noire (ALEC 1649). Bnploi particulier dü ä la ressesmblance de cette plante avec la bruyere proprement dite. La proncnciatian de SEM ne senible pas connue des parlers canadiens. Elle η est pas rare dans ceux de France, surtout si l'on γ adjoint la Variante apparentee beruere. En tout cas la meme forme qu'a SEM a ete relevee dans l'Ouest, par example, dans les lies anglo-normandes et la region de Saint-Malo (ALN 463; ALBRAM 224; ALF 183; FEW 1,558a BRÜCUS).

BRUITEUX [brwitde], [brutd], [briti] s.m. Davier, roulette placee filin de mouillage.

sur

l'etrave

qui

facilite

l'abraquage

du

1 "Le bruiteux est tout ä fait ä l'avant, sur 1' extremite de l'etrave [...] C'est un petit rouleau sur une monture en metal, qui permet de prendre le... filin du mouillage quand il faut tirer le grappin [... ] On passe le filin dans une petite coupee... une petite coupee vous savez qui tient le filin ä l'interieur du petit rouleau et puis on n'a qu'ä tirer et qa toume sur une monture en fer".

134

BRQL£

2 "On [kapl] [= Capelle] ga par-dessus le bruiteux". Substantif original, semble-t-il, peut-etre derive de bruit.

BR0i£ adj. Carpletement ivre. "Y en avait toujours un ou deux gu'etaient brules". Les egressions brule ccnme une vache, brule-mort, brüle-mort-ivre expriment des degres plus fort de l'ivresse. Brule s' emploie au Quebec pour dire ' extenue de fatigue'; brule-mort est aussi atteste (ALEC 2266). Dans divers parlers de Normandie, Bretagne, Maine et Anjou, brüle soul est connu au sens de 'carpletement ivre' (PEW 14,78a USTULARE), de mare que se bruler 's'enivrer* en Ille-et-Vilaine {FEM 14,77a).

BHODOT s.m. Simulie, petit insecte, ä Miguelon. "Les petits [moustiques] on appelle 9a des, les brulots [...] des petits noirs et 9a vous rentre dans les cheveux 9a vous rentre dans les oreilles ga vous rentre dans le nez, ga vous rentre partout". Nan general, au Quebec et en Acadie, de cet insecte (ALEC 1568).

BEBME s.f. Brouillard epais. On η' enploie pas le mot brouillard sauf dans le bulletin meteorologique radiophonique ou l'on parle occasicnnellement d'un banc de brouillard. 1 "Quand la brume est partie, on se pronene". -> rapetisser d'eau 3.

BRUME

135

Specialement dans les composes: - Banc de brume. 2 " Y a u n banc de brume sur Saint-Pierre". - Brune blanche Brume legere sous laquelle le soleil apparait. 3 "Avec de la brume blanche vous pouvez secher du linge de la brume pissouse vous pouvez pas".

mais

avec

- Brume de capelan. 4 "De la brume blanche, quand la brume taribe on disait que c'est de la brume de capelan, c'est un diton*. Y avait souvent de la brume pis y avait pas de capelan" [rires]. - Brume de mam is Brume matinale, qui se dissipe vite. - Brume masquee, Brume pochee ou Brune noire Brume opaque. 5 "Les avians si ils arrivent ici y a de la brume masquee ben... ils peuvent pas se poser. Parce que c'est de la brume, qu'on voit pas a... deux trois metres ä dix metres ou quinze metres". 6 "Quand la brume est pochee pis qu'il bruine dur..." - Brume pissouse Brume acccmpagnee de bruine. 7 "Nous en appelait ga la brume pissouse, mouille, la". 8 "Qa bruine dur, ä la brume pissouse".

la petite brume qui

-> mouillasse 1. L'emploi de brume ä SIM est celui de la langue de la marine: "Alors qu'en marine brume peut designer un brouillard epais, le mot brume, dans la langue courante, evogue plutot une apparence visuelle assez legere, un voile de brouillard peu epais" (Rob 2,211b). C'est aussi l'enploi gui est general au Canada (ALEC 1182). Les divers^ composes sont originaux. Leur nanbre s' explique sans doute par la frequence de la brume a SEM.

136

BU

BU part. adj. Ivre. 1 "Bon sang que j'etais bu! Je pouvais plus bouger!" 2 "Uh hcmme qui est bu, il raconte toujours la raeme chose". Εϊηρίοΐ atteste en divers parlers regionaux de France, notairment en Nonrandie (FEW 1,348b BIBEKE). de meme qu'en Acadie: bu 'en boisson mais non axnpletement ivre1 (Poirier) et en Louisiane (Ditchy), ou encore dans le parier des marins (Sizaire p. 100).

BUE s.f. Broc ä lait du fermier ou petit broc ä lait du client. "Quand ils tiraient* les vaches ils mettaient le lait dans la bue. Quand on allait chercher le lait, y avait des petites bues aussi". Type lexical surtout en usage dans les dialectes de l'Ouest ou il designe une cruche le plus souvent. Le seul exemple comparable, dans les donnees du PEW, ä celui de SIM est la forme de Samt-Malo: bu 'vase en fer, dans lequel les laitieres apportent le lait en ville' (PEW 15/2,7 *BUKA).

BULOT s.m. 1. Buccin (coquillage). Syn.: coucou,

bigomeau.

1 "Iis pechaient des bulots: ils mettaient des casiers. Pis ils boettaient* leurs lignes de fend avec 9a". 2 "Les bulots e'est un petit coquillage, le bigomeau* disens. Oui le bulot, le... le coucou*, qu'on appelle coucou aussi, le bigomeau qu'est une grosse vignette* quoi. Elle est un peu differente. C'est un peu different mais e'est un coquillage de ce genre. II est plus rond, plus gros que le bigomeau". -> bulotier 2, coucou 6.

BLMPER 2. (Employe generalement poque contemporaine.

137

sans article). Mannequin du camaval, ä l'e-

3 "Bulot, ici, c'est un gros coquillage. C'est l'embleme du camaval ici. Le soir [de Mardi-Gras], ä six heures, six heures et demie, on brule Bulot". 4 "Au lieu d'etre le bulot came ils font maintenant la ben c'etait un pantin quoi. Pis ils brülaient le mardi-gras*". 5 "?a a catmence une annee y a eu bulot un bulot deux pis maintenant qa continue". -> mardi-gras 2. Type lexical qui η'est atteste ailleurs que sur les cotes de la Manche,du Havre ä Dieppe^ et iusque dans la Sarnie, ainsi qu'ä Granville ou il est isole (Enquetes lnedites de 1'Atlas des cotes) de meme qu'a^Saint-Malo (ALBRAM enq. inedites), et, de maniere encore plus isolee en Bretagne oeltique, pres de Paimpol (Le Berre 2,231) et ä Hbuat, sur l'Atlantique (Jorion p. 193). Ce mot appartient au vocabulaire des Terre-Neuvas. (Voir P. Brasseur: "Synonymie et usage dans le francais de vSt-Pierre-et-Miquelon", ä paraitre dans les Actes du XVIIIe Caigres international die linguistique et Philologie rananes-, FEW 1,594a BUCULUS; 17,626b WULLOK; 21,266a).

BOLCHTER s.m. Pecheur terre-neuvas specialise dans la peche aux bulots*. 1 "Y avait les bulotiers, la, ils en pechaient des dorissees* [de bulots4]". 2 "A bord de chaque bateau y avait deux doris* qui pechaient les bulots*. Ils les appelaient les bulotiers. Alors c'etait des gars du jour qu'ils arrivaient sur les Bancs, le voilier etait eux ils avaient des... des paniers, qu'ils allaient mouiller sur les hauts-fonds* quoi". Derive du precedent, egalement connu en Normandie (Lepelley p. 34).

BIMPQt [bcmpcer] s.m. Pare-chocs.

138 BUN "Si y a u n abordage*, c'est le bumper qui porte plutöt". Anglicisms employe egalement au Canada (DLQ).

BUN [ban], [bins] s.f. Patisserie en boule canposee de farine, beurre, cuite au four.

sei, parfois

sucre,

1 "Dans le temps tous les foyers faisaient qa pour collationner*. £a coutait meilleur marche que le pain. Vous mangiez des buns pour collationner. Alors vous aviez la bun sans sucre aussi, parce qu'y a des gens qui n'aiment pas le sucre". 2 "En general la bun elle est sucree". Anglicisms atteste egalement au Canada (ALEC 234).

BOS [b4s], [bos] s.m. Autobus. 1 "Plus maintenant, m i s y a eu des bus. Quand on voulait aller quelque part, le bus passait eh bien, on faisait signe ccrane qa pis on embarquait*, on montait dans le bus. Et ou on voulait descendre, on lui tapait sur l'epaule, on descendait". 2 "Maintenant y a un bus pour conduire les enfants, et les personnes ägees". -> enibarquer 5, prof iter 2. Ehprunt ä 1'anglais independent de celui fait par la France metropolitaine.

BUT s.m. Dans les expressions: 1. Perdce le but Perdre la position de lanceur au jeu de pipet*.

BUTTE 139 1 [Au pipet*] "celui qui l'attrapait, celui qui l'avait lance perdait le but. Et c'etait ainsi de suite. Et puis apres 9a on faisait le tourniquet. On le mettait ä taper sur le bout caime ga. Pis fallait... le toucher carme une balle... deux ou trois fois de suite quoi. Si on le manquait on perdait le but". 2. Tirer les buts Tirer les camps. 2 "Avant on tirait les buts. Pour tirer les buts on se passait, ä deux, la... la canne* quoi si vous voulez, un manche ä balai. C'etait trois coups. Vous le passez, vous me le repassez et moi je, c'etait la troisieme fois. Alors apres on prenait main sur main caime qa, vous savez, ä partir du milieu. Alors celui qui arrivait le demier ccrtme fale 2, hivemage, paille-en-cul 1,2, pigeon 1. Type lexical caracteristique du Canada francophone. Les formes avec t ou k final sont surtout acadiennes (AIJEC 1489). On considere ce mot came un emprunt a une langue amerindienne (Massignon q. 435) ou came une cnanatopee (FEW 21,244b CANARD).

CACHALOT s.m. 1. Globicephale, grand dauphin ä tete globuleuse (et non pas cachalot). Cit.: Souffleur 1. 2. Pecheur de grande reputation. 1 "On va pas dire e'est un bon pecheur on va dire e'est un cachalot 5a. Parce que, d'apres les vieux les cachalots... mangeaient la morue". 2 "Si vous voyez un cachalot vous aurez des explications". 3 "Beau temps pour les cachalots mais pas pour les puces de mer!" [Metaphore signifiant que s'il fait mauvais temps seuls les pecheurs les plus achames sortent]. Le second sens correspond ä celui qui est atteste dans 1'argot de la marine des la fin du 19e siecle: cachalot 'ben marin' (Esnault 100b).

CAPOUILLEUX 143 CADAVRE [kadav] s.m. Etre humain de forte stature. 1 "C'est un maudit* cadavre". 2 "Tu paries pas d'un cadavre que c'est!" Emploi de cadavre qui correspond pair 'un haime grand et maigre' (ALEC regionaux de France ou il designe le de grande taille (FEW 2,23a CADAVER). 18e siecle.

ä celui qui a ete note au Canada 2176), ccmme en divers parlers corps d'un hcrrme vivant, souvent Cet emploi est atteste depuis le

CAKXJUJJER vb.intr.

1. Farfouiller. 1 "II cafouille dans les tiroirs". 2 "Dans la radio quelquefois, vous voulez la reparer, vous cafouillez la-dedans..." 2. Bafouiller. 3 "II cafouille il sait pas parier". Mot de la langue familiere qui η'est pas atteste avant la fin du^ 19e siecle et qui s'applique le plus souvent ä une action desordcxmee et inefficace. Le sens ae 'farfouiller' est originel en Picardie et Haute-Normandie (FEW 2,670a 'BODICULARE). L'arploi pour 'bafouiller' est recent et typique du parier populaire de la region parisienne (TLF 4,1155a; FEW 2,670b).

CATOUXLLBUX adj.

Incertain (du temps). "Un temps cafouilleux". Derive du precedent.

144 CAGEOT CAGEOT s.m.

Caisse de bois plein dans laquelle on salait la morue. 1 "C'etait des cageots. C'etait carme des caissons*, oui c'etait carre. C'etait haut carme qa" [1 metre environ]. 2 "Y avait des cageots, en mettait la pignoche* dans le trou. Pis on mettait la morue dans le cageot pis on salait. On laissait 5a jusqu'ä tant que le cageot soit plein. Pis quand il etait plein, on retirait la pignoche pis alors la saumure partait et pis apres quand la saumure etait partie, on relevait* la morue on la mettait en arrime*". 3 "Les haimes etaient partis ä la peche pis fallait vider les cageots pour leur faire de la place quand ils arrivaient". -> relever 4. Cageot ne s' emploie en frangais que pour des caisses en bois ä claire-voie. L emploi de SIM est ä rattacher de facon evidente ä celui releve par les dictionnaires tout au long du 19e siecle: 'petit cuvier ou l'on met les foies de morue pour en extraire 1'huiW (TLF 5,1a: FEW 2,553a CAVEA) et qui est le seul example atteste dans lequel cageot designe un recipient en bois plein. Cet emploi date du 18® siecle; il a ete releve en 1786 (La Morandiere 1,182).

CAGOU [kagu] s.m. Dans 1'expression Faire

le

cagou

Etre dolent.

1 "Toi tu fais le cagou tu vas etre malade demain!" 2 "Vous voyez quand on allait apprendre ä coudre, y avait toujours une qui faisait le cagou. Alors une bonne joumee*: -t'as pas une aiguille j'ai oublie mes aiguilles...". 3 "Il fait le cagou il η'est pas bien, il η'est pas bien smart* quoi". Cette expressicxi a ete notee egalement aux Iles-de-la-Madeleine: faire le cago faire le paresseux' (ALEC 2183 "etre malade"), de meme qu'en Louisiane: cagou mome, triste, pensif' (Ditchy), out of sorts, indisposed, somewhat sick' (Daigle). Elle doit etre formee ä partir de cagot (ou cagou) bien atteste. qui, du sens de 'lepreux' en moyenfrangais, a pris diverses valeurs en frangais modeme ou dans les parlers regionaux telles qu'hypocrite, soumois, chagrin (FEW 2,19b CACAEE). La dispersion des attestations semble d'origine acadienne en Amerique.

CAISSE

145

CAMJCJU s.m. 1. H o t rocheux, rocher. 1 "Je ccnnais un caillou, le Gros-Nez... C'est derriere l'lle-auxMarins". 2 "Y a des cailloux au milieu de la mer. Alors guelquefois il vous sanble qu'il ne doit pas etre gros. Mais le caillou qui montre sa tete, ben il est quatre fois plus gros en-dedans. C'est pourquoi y a des bateaux quelquefois qui s'echouent". -> basse 3, droit 2, echouerie 2, mer 3, par 4, pouffin 2, rapetisser d'eau 1, ras 3, taouincer 2. 2. L'ile de Saint-Pierre. 3 "Je suis revenu dans mon caillou". 4 "Maudit* trou maudit caillou!" 5 "Qui c'est qu'a pu chier ce maudit* caillou-la?" [en parlant de Saint-Pierre]. -> chenaler 2. La premiere acception est enregistree par les dictionnaires caime un enploi familier du vocabulaire de la marine (TLF 5,13a; Rob 2.271b). Elle est aussi attestee au Quebec (ALEC 1368 "rochers ä fleur d eau"). La seccxide est aussi usitee familieranent pour denatmer des iles frangaises d'outre-mer ccnme la Nouvelle-Caledonie.

CAISSE s.f. Prison. 1 "II est sorti de caisse". 2 "lis l'ont mis ä la caisse". Ehploi metaphorique qui peut etre une creation locale (cf. caff rer en francais) ou venir de 1'argot militaire caisse 'salle de police' (Rob 2,273a; FEW 2,313a CAPSA).

146 CAISSON CAISSON s.m. Caisse. Cit.: cageot 1, capot, chafaud 3. Emjsloi qui derive de ceux qu'a ce mot dans la langue de la marine (Rob

CKUOUINE (-DE VENT) Ξ.f. Coup de vent. "Carment est-ce qu'il a dit X... aussi qu'on disait 1'autre jour? Caiment est-ce qu'il m'a dit ς& quand il faisait du gros* vent? Une calaouine, une calaouine de vent, une calaouine de vent de suet* ou une calaouine de vent de suroit. Qa se dit aussi une calaouine de vent. C'est un gros vent, c'est une grosse... une grosse mer si vous voulez pis beaucoup de vent". A rapprocher de piouine, de ouiner? L'etymologie populaire un anglicisne: gale of wind.

en fait

CALCULOT s.m. Oiseau, macareux arctique, Fratercula arctica, adulte. 1 "Y a un gibier* qu'a le gros nez, nous on appelle brisette 1. Brploi adjectival du substantif franqais calme ' irtmobilite de la mer1.

CAMBUSE s.f.

Debarras, arriere-boutique, chaufferie. 1 "C'est surtout les carmerces qu'ont des cambuses, parce qu'ils vendent des vins ils vendent un tas de choses". 2 "Allez ä la cambuse vous allez trouver ga, du bon rhum et du bon vin". 3 "Chez nous on appelait 9a toujours la cambuse. C'etait le depot des boisscais, du baril des futs de rhum, de tout quoi". Ce mot qui, originellement, designait le magasin du bord dans la langue des marins, s'est ensuite applique ä divers batiments en relation avec 1'alimentation dans la langue familiere de France came du Canada (GPPC; FEW 16,292 CABUSE).

CAMION s.m.

1. Charrette ä deux roues. 2. Remorque. 3. Benne d'un camion. 1 "Plein le camion du truck*". 2 "ΙΛι camion c'est la benne de la... pas pour pour les charrettes non, mais pour une voiture, un... Maintenant c'est le camion, mais jusque la c'etait plutot un truck*, le mot anglais". L'enploi de camion pour differents types de chariots aete courant en franqais et dans les parlers regicnaux de France jusqu'ä l'arrivee

150 CAN de la traction automobile (FEW 23,68-9). Ces sens persistent ä SIM du fait que camion 'gros vehicule automobile pour le transport des marchandises1 s'y denatme le plus souvent truck.

CAN [ken] s.f.

Boite en fer, gamelle. 1 "lis venaient tous les midis avec leur can" [a la soupe populaire]. 2 "Quand les gens faisaient la peche, parce qu'au lieu d'avoir une gibeciere, ils avaient pris modele sur les Anglais* [...] C'etait une boite, une caisse en bois, une petite caisse en bois qui contenait la nourriture de la joumee, avec un couvercle en bois, une toile ciree enfin quelque chose d'etanche pour ne pas que la nourriture prenne l'humidite. Qa c'etait un mot encore derive de 1'anglais, une can". Bnprunt a 1'anglais can 'bidon, broc, pot pour liquides; boite de conserves' egalement atteste au Canada (ALEC 335 "bidon de lait").

CANAL s.m.

Petit ruisseau faisant carmuniquer deux etangs. 1 "Si vous avez un etang pis plus loin qu'il y a une petite rigole eh ben on dit le Canal de la Vigie ou de ceci ou de cela". 2 "Dans ce canal-la, ben y avait des truites* qui venaient du... de 1'etang au-dessus". 3 "Caime ä Savoyard y a un canal ccnme 9a qui vient et puis il traverse la route. Y a beaucoup de truites* mais c'est defendu de pecher la-dedans". Get emploi correspond moins ä 1'usage contenporain du francais qu'a un plus ancien ou le mot pouvait s'appliquer ä des conduits d eau de tres raible calibre (PEW 2,169b CANALIS). Cet usage est encore bien represente au Canada, et particulierement dans les parlers acadiens, ou canal s'applique ä divers fosses ou rigoles (ALEC 32, 742, 745, 746, 747, 1021) et mime ä un 'petit ruisseau1 dans un point de Gaspesie et aux lies-de-la-Madeleine ΤALEC 751). L'emploi de SEM ne s'ecarte guere de ceux-ci. Le meme type lexical est atteste pour une rigole dans les parlers des lies anglo-normandes et du Cotentin, mais avec une prononciaticn differente (Alii 518*).

CANE DE ROCHE 151 CANARD s.m.

Element de base de divers canposes designant des oiseaux palmipedes: 1. Canard de Miquelon, Clangala hyesnalis. Syn.: cacaoui. 2. Canard des bois Canard huppe, Aix sponsa. 1 "Quand il fait beau le canard des bois il vient au lac". 2 "Le canard des bois tous ceux en general qui en exit tue, ils les ant fait, rendu au Canada pour les faire empailler". 3. Canard gris Canard pilet, Anas acuta. 3 "Y a le canard noir pis le canard gris e'est tout ce qu'on voit ici en general". 4. Canard noir: non identifie. Composes descriptifs originaux, sauf canard de Miquelon qui a ete enregistre par les dictionnaires des la fin du 18e siecle (FEW 20,72a MQUEDCN).

CANE DE ROCHE S.f. Canard arlequin, Histrianicus histrianicus. 1 "Depuis quelques annees on voit les canards-pilets et des sarcelles, et puis y a un... qu'on appelle les canes de roche aussi". 2 "La cane de roche e'est rare aussi. Pour dire j'en ai tue -plusieurs- mais [...] on n'en voit plus hein". 3 "La premiere fois que j'en ai tue un ä Savoyard, e'etait un male. Je le connaissais pas non plus, et pis y a un vieux il m'a dit e'est un male de cane de roche". Compose original.

152 CANI CANI adj. Oii a caimence ä pourrir (du bois). 1 "Du bois qu'est presque pourri, admettons, c'est cani quoi". 2 "J'ai sauve* un morceau de bois mais j'ai pas eu de chance je croyais qu'il etait bon, pis total il est cani". 3 "Le morceau il etait beau, d'apparence. Seuleraent quand il etait scie il etait cani, il etait pas bon". Un adjectif^formellenent identique s' emploie des deux cotes de 1Άtlantique, ä travers tout le Canada d'une part, et en Normandie d1 autre part, d'ou le mot est d'ailleurs originaire, pour 'moisi' (ALEC 187; FEW 2,238a CANUS). Cette valeur correspond parfaitement^a 1'etymon qui signifie 'devenu blanc'. L'emploi de SIM s'accorde plutot avec un example cite par le DBQ 44b s.v. cani 'attaque par la moisissure, altere par 1'humidite' ou avec le verbe cannir qui, en Louisiane, "se eilt du bois qui caimence a pourrir" (Ditchy 68)( de mime qu^avec celui de l'adjectif recueilli dans la region de Saint-Malo: decompose" pour du bois (ALHRAM 322). Celui-ci represente les termes de la marine cani 'piece de bois qui se pourrit et qu'il faut mettre au rebut', atteste depuis la fin du 18e siecle, et cani 'qui commence a pcurrir (du bois)', atteste depuis la premiere moitie du 19e siecle (BeW 2,190b CÄNINUS).

CAHIQUE s.f. Bille. 1 "Y avait des caniques en terre, y en avait en verre, y avait toutes les couleurs, des belles". 2 "lis font un carre pis au milieu y a un trou. Alors ils envoient leurs caniques [... ] Fallait etre assez adroit pour foutre la canique dans le trou". 3 "Y en a pas un qu'avait foutu une canique dans le trou". 4 "Il doit avoir un pcnniier ä Mirande je crois, oui. Tout le monde sait pas ou il est, hein. Pis encore... les pcmmes vous savez, pour dire que c'est un pcnmier, quoi, parce que 9a vient gros ccimie, un peu plus gros que les caniques si vous voulez". Type lexical enprunte au neerlandais qui est atteste en Wallonie, le lcxig des cotes die la Manche et au Pays basque, mais aussi en Acadie (Massigncxi q. 1847 "grosse bille"; FEW 16,338 KNIKKER) et en Louisiane (Ditchy 67; Daigle).

CAOUENNE 153 CA1ME s.f.

Baton utilise pour lancer le pipet*. 1 "Vous posez la canne a travers le trou". 2 "Vous avez tant de cannes pour le delivrer". 3 "Avec votre canne vous tapez dessus pis vous 1'envoyez loin". -> but 2, delivre, pipet 1,2. Eitploi particulier d'un mot du franqais general.

CANOT [kanot] s.m. Canot. 1 "Moi je veux pas aller au canot. Parce que si vous vous penchez ccrtme 9a, on a l'idee qu'il a plutot la tendance de chavirer". 2 "C'est pas fait pareil que le doris*. Le canot est en general est plutot pointu sur les deux bouts". -> yole 1. La prononciation avec maintien du -t final est celle des marins (Rob 2,322b). mais elle est aussi attestee dans plusieurs points acadiens (ALEC 1377).

CAOUQME [kawen] s.f. 1. Tres grosse morue. 1 2 3 4

"Une caouenne de morue". "J'en ai pris une caouenne". "Tu paries d'une caouenne!" "La caouenne eile est embarquee ä l'aide d'une gaffe".

2. Tres grosse fennte. 5 "Une caouenne de bonne fenme".

154 CAP Un nan de poisson formellement semblable est atteste ä Saint-Vaast, un port du Nord-Cotentin: cahouene 'saurel ( t r a c h u r u s trachurus)' (Lepelley p. 89) qui represente dans ce parier un emploi figure de la forme locale de charogne. II serait curieux qu'une forme si etroitement localisee ait pu se diffuser aussi largement. On preferera voir dans la caouenne die SIM et Saint-Malo (ALBRAM donnees inedites) le metre mot, avec un emploi metonymique, que cavoine atteste dans la langue des Terre-Neuvas: "cavoine ca veut dire abondance de poisson" (Yvon p. 137; cf. encore ibid. p. 157; Vercel, Jean Villemeur, p. 136). Et ce dernier doit etre une forme normande pour l'endroit poissonneux 1 caime l'ancien frangais cavaine 'trou servant de retraite ΤFEW 2,559a CAVUS) ou bien bordelaise telle que: La Teste caouene sillon que forme la mer dans les fonds sableux' (FEW 2,558b).

CAP

1. S.m. Colline de l'interieur de l'ile, non littorale. 1 "öiand vous allez ä* la montagne* vous passez dans les coulines* entre deux caps". 2 "C'est une butte* qui a, un monticule, ä Langlade, la, boise, ou on a ete lä. Ben ils appellent qa le Cap-Corbeau. Mais c'est... ä l'interieur des terres". -> par 2. Qnploi particulier. 2. S.f. Direction ä suivre par un bateau. 3 "On rattrape bien la cap carme ga". Chanqement de genre d'un mot du vocabulaire maritime, sans doute sous 1 1 influence de cape*.

CAFE s.f.

Dans 1'expression Etre

a la

cape

ou Etre

en cape

Etre mal portant.

"II est un petit peu ä la cape, il est pas trop costaud, carme moi maintenant". Etaploi metaphorique d'une locution technique de la marine.

CAPELCNAIS 155 CAFEIASE s.m.

Reccuvremsnt. "Y a trois capelages sur un bardeau". Derive du verbe capeler (sens 2).

CtBESJER vb.tr. 1. Fixer au-dessus. 1 "Y a le manifold* qui est capele sur le moteur". -> tille 3. 2. Coiffer, couvrir. 2 "Le premier oourlieu* qu'on tuait, ben on levait* la peau. On prenait un morceau de bois, avec un... Pis on capelait la peau par-dessus le morceau de bois. £a faisait le oourlieu presque vivant avec une grande pointe". -> collier. Extensions d'emploi d'un verbe de la marine qu'on applique seulement seien les dictiannaires, aux filins, aux vetements et aux vagues (Rol 2,330a; TLF 5,136; Έ m 2,293a CÄPPELLUS).

CAFQOAIS, CAFHXNIER s.m. Capelanier, specialiste de la peche au capelan. 1 "Des anciens, ä l'lle-aux-Marins y en avait qui faisaient leur ljateau, des chlotps*. Y a un mat. Et puis... ils allaient a Langlade pecher du capelan. C'etait les capelonais qu'on appelait 9a, e'est les gens qui faisaient le capelan". 2 "Y avait des capeloniers ici".

156 CAPESTAN Capelcnals est derive de capelan avec un autre suffixe que le synonyme enregistre par les dicticnnaires: capelanier, sur le modele de banquais par rapport a banquier. Capelonier est une proncriciat ion particuliere d'un mot qui a disparu des dictionnaires du 20e siecle avec ce metier (iEW 2,286b CAPPELEA).

CAPESTAN [kapestä] s.m. Cabestan. 1 2 3 4

"Dans le temps y avait des capestans ä vireva*". "Tiens le capestan je vais pousser le doris*!" "Avec un capestan ä toumer, ben c'etait mieux". "... Mettre la beirre dans la meche du capestan".

-> chavirer 7, lice 5. Prononciaticxi de cabestan attestee chez Rabelais et encore signalee au 19e siecle: "La forme cabestan a prevalu; il y a cependant encore des matelots qui disent capestan et capestran, et qui disent bien sans s'en douter, et quoiqu'cn s'en moque" (Jal 405a). Les prononciations canadiennes sont plutot du type cabestran (ALEC 710,1321).

CAPETAINE [kapten] s.m. Capitaine (de bateau). 1 "Qa depend des capetaines aussi hein ils sent tout a fait durs! Poisscn poisson poisson!" 2 "II etait capetaine, e'est-a-dire il etait capetaine de peche". 3 "Quani il a vu 9a, le capetaine a ete pris de panique". -> bolee 4. Prononciation egalement attestee dans certains milieux maritimes (TLF 5,139b; PEW 2,256a CÄPITÄNEÜS).

CAPOTE 157 CAFGN adj. Peureux, lache. 1 "Alors quand on 6tait gamins aussi, un differend entre deux gamins, on ccnmenqait pas ä se bagarrer directement. On se mettait un petit morceau de bois sur l'epaule. Alors on disait: - tiens si t'es pas lache, enleve-le! Alors celui qui l'enlevait aussitot [rire] avec une main il enlevait le morceau pis il tapait dans la gueule de 1'autre [...] Un petit morceau de bois, hein, un petit bout de bois grand caime carcasse 2. Derive original de carcasse.

CARET s.m.

Rectangle de bois pour ennouler la ligne. "Vous filez vous filez forcement la ligne s'en va ä perpete. Vous etes rendu au bout de votre caret cinquante brasses de lignes, pis en rien de tanps". -> allonger 3, piece de ligne 1, ramasser. Type lexical atteste sur la Cote-Nord, au Quebec (ALEC 1382) ainsi qunaux Iles-de-la-Madeleine (Geistdoerfer p. 137), et qui doit representer un emploi particulier du mot franqais caret ' devidoir de cordier' enregistre par les dictionnaires depuis le 19e siecle (EEW 2,434b CAKRUS).

CARRIER vb.tr.

Enrouler la ligne sur le caret*. 1 "lis caretaient ga, parce que moi je les ai vus careter une piece* de ligne. Autrefois, ils etalaient qa ä l'lle [-auxMarins], ils les mettaient canne qa dans la route et pis, ils les caretaient". 2 "Carete 5a on en a assez!" -Etaploi absolu: 3 "Quand on dit on va careter eh ben c'est que la peche la joumee est finie. On carete".

CAENAVAL

161

4 "Quand o n r e g a r d a i t l ' h e u r e e t p i s q u ' o n d i s a i t : - t i e n s o n n ' a r r i v e r a pas avant l a n u i t i l e s t temps qu'on p a r t e pour a l l e r ä l a maison; a l o r s on c a r e t a i t " . Derive du p r e c e d e n t .

CARGUER(SE-) v b . p r c n . Se f a i r e

valoir.

" I I se cargue, i l pense se trouver

bien".

L'empliji metaphorigue de ce verbe de l a langue maritime e s t bien a t t e s t e e n A c a d i e p a r P o i r i e r : "Nous n o u s c a r g u o n s ^ s u r n o t r e c h a i s e , l o r s q u e n o u s l a r e n v o y o n s e n a r r i e r e ; n o u s a l i e n s mane j u s q u ' a c a r g u e r u n e c h a i s e e l l e - m s n e . Voyez conme i l s e c a r g u e e n m a r c h a n t f Ce m a i e s t trop^cargue. il t c m b e r a " . (V. a u s s i B o u d r e a u : ' s e r e d r e s s e r t avec exageraticn'; Massignon q. 1770). I I e s t a u s s i connu e n Louisiane: se carguer ' f a i r e l e crane, l e beau; s e donner du t e n ' (Ditchy).

CARUMS s . m . Bruit. "Un b o u r b o n * q u i f a i s a i t u n m a u d i t * -> sapre

carnage".

2.

Carriage a u s e n s d e ' t a p a g e ' e s t a t t e s t e c a e t l a ä t r a v e r s l e Canada e t p a r t i c u l i e r e m e n t e n A c a d i e (ALEC 1 8 4 0 " f a i r e d u t a p a g e " ; Massignon q . 1 8 0 1 " t a p a g e " ) d e mane q u ' e n L o u i s i a n e (Ditchy; Daigle). Cette acception a e t e assez rarement e n r e g i s t r e e dans l e s p a r l e r s regionaux d e F r a n c e (PEW 2 , 3 8 5 b CARD).

CAENAVAL s . m . 1. Soiree t r a v e s t i e a l a

patinoire.

1 "Y a v a i t les camavals, a u m o i n s t r o i s p a r h i v e r [ . . . ] Vous n'avez pas l e d r o i t d ' a l l e r sur l a glace sans e t r e t r a v e s t i " .

162 CARRE 2 "II va y avoir un grand camaval c'est ä qui avait la plus belle toilette, le plus beau deguisement". 3 "A partir du 6 janvier jusqu'ä Mardi-gras, ils faisaient des soirees, des camavals. C'etait des soirees-camavals ils se deguisaient pis ils allaient sur le rink* faire du patinage en rneme temps". 2. Bonhamte-caznaval s.m. Mannequin de Mardi-gras. Syn.: mardi-gras,

bonhcnme

mardi-gras.

4 "Y avait des gars qu'avaient ete pendre le mannequin-la, le bonhaime-camaval". finplois particuliers d'un mot du franqais general (FEW 2,390b CARO).

CARRE [kar] s.f. Coin d'une rue (Saint-Pierre). 1 "CH criait: "gare ä la carre!" £a veut dire si il venait des gens, ils savaient qu'il y avait des luges qui descendaient". 2 "A la carre d1Air-Saint-Pierre". 3 "A Saint-Pierre on va vous dire en toumant ä la carre. Jamais ä Miquelon on n'a dit qa!" -> virer 1. Substantif atteste depuis l'ancien franqais qui ne subsiste en francais modeme que dans quelques emplois techniques mais survit dans beauootp de parlers regionaux de France pour dencrrmer un angle saillant. un coin. II est reste d'usage courant en Basse-Normandie, tandis qu'il ne semble pas connu au Canada (FEW 2,1392-3 QUADRARE).

εΑΚβέ s.m. 1. Assemblage de planches ou de madriers de forme carree (Miquelon). Syn.: carree.

CAKREAU

163

1 "Par le fait on peut appeler 9a un pare* si vous voulez. C'est un carre quoi, c'est une cabane si vous voulez. Et pis on appelle ς» oui le pare* ä charbon". -> carree 4, dalle 3. Les parlers de France ne semblent pas avoir developpe cette accept ion (FEW 2,1398-9 QUADRATUS), au contraire des parlers frangais du Canada (ALEC 2 "carre de la maison". 33 "margelle du puits". 116 "caveau ä legumes", 387 "stalle", etc.) et de Louisiane: "cnarpente qui forme la dimension du corps d'une maison" (Ditchy). La seule difference semble etre gu^a Miquelon le mot a une valeur plus generale, moins^attachee ä des referents particuliers que dans les autres parlers d'Amerique. 2. Carre de toilette loc. la toilette.

nan. m. Petit carre de tissu utilise pour

2 "Y a le gant mais y a le carre de toilette aussi... des carres pour se laver... Les carres noi je les aime pas, mais y en a qui se servent que de 9a. Moi j'aime mieux les gants [...] Je ne sais pas content qu'ils appellent 9a sur les catalogues. Ben c'est un carre, un carre de toilette". Denomination descriptive d'un objet peu repandu en France a la difference du Canada, et qui n'a gu'un rapport d'hanonymie avec le carre de toilette qui designait au 19e siecle un coffret pour objets de toilette (TLF 5, 234a). 3. Carre de beurre loc. ncm. m. Plaquette de beurre. Syn.: pain de beurre. 3 "Voulez-vous me donner deux carres de beurre?" Compose original.

CARRBttJ s.m. Plat-bord (du doris*). Syn.: listen. 1 "£a les carreaux ce sont les listons* qu'en dit, qui forment la liste*, le liston tout ä fait en haut, le long du bordage, le rebord de 1' embarcation [... ] Autcmatiquement y a un chaque cote. C'est une couronne hein, c'est une couronne qui entoure le

164 CARRJ-E haut de l'aribarcation, qui e s t l a r g e . . . disons... 8 cm, sur t c u t e . . . de l'avant ä l ' a r r i e r e . £a renforcit* l e rebord du... de l'embarcation". 2 "Vous pouvez pas charger ä ras* le carreau avec l a morue carme vous pouvez f a i r e avec l'encomet*". -> chanteau 2, liston 2, ras 1, tapin 2, t i l l e 2. Type lexical atteste depuis l e moyen-francais, qui designe depuis^ l e l/e siecle l e 'bordage superieur α'une petite embarcaticn non pcntee', mais qui a disparu des dictionnaires modernes (FEW 2,1404a QUADRUS).

CMBfe [Jcare], [kare] s . f . 1. Assamblage de planches ou de madriers de forme carree ou laire.

rectangu-

Syn.: earne. 1 "Le pare en bois [pour les bebes], e ' e s t pas ccmne qa maintenant i l s'en f a i t en p l a s t i c et tout. Nous e ' e t a i t en bois, avec... C'etait une carree qaoi a v e c . . . C'etait du p e t i t bois. Pis on mettait qa ccrnne 9a c ' e t a i t pas pliant". -> matoque 3, vigneau 1. 2. Cadre de bois, particulierement celui plancher. Syn.: enrayuze,

qui

sert

de support ä un

serre.

2 "La carree e ' e s t ce qui f a i t l e tour de la raison. Vous aviez -nous on appelle 9a caime qa- l a carree du haut l a carree du bas". 3 "Avant on f a i s a i t la carree avec des coupes ä queue d'arcode. P i s . . . les lamboumes* etaient aussi ä queue d'arende. Tandis que tout de suite* y a plus tout qa". 4 " I c i [= ä Miquelcxi] e ' e s t un carre* tandis qu'a St-Pierre e ' e s t la carree". 5 "Les carrees e ' e s t ce qu'en met par-dessus, apres... Pour mettre sur les cotes, pour mettre les bardeaux* tout qa e ' e s t des carrees. On met une carree par-dessus la serre*".

CARRELET 165 -> lamboume. 3. Cadre (surtout de bois) pose sur une tcmbe. 6 "Autrefois ils mettaient ga. Les gens η' avaient pas les moyens de faire des tanbeaux, ils mettaient une carree". 7 "Ou le mort est enterre y a le tertre. Vous mettez la carree dessus. Alors on mettait de la terre f raiche par-dessus ga et... dans cette terre f raiche on met des fleurs". 8 "Je vais peindre ma carree au cimetiere". 9 "Quelquefois ils ont herite pis ils paient rien. Alors la carree en bois reste la. Mais en general ici maintenant ils font des carxees en ciment quoi. Ils font une tcmbe en ciment apres". 4. Carree die porte Encadranent de porte. 10 "Pour le faire entrer il a fallu dementer la carree de porte". Substantif enregistre par les dictionnaires franqais pour un 'cadre de ciel de lit1, mais qui a re banquais 4, delivrer 4, reserve 1, seille 3. Cette locution est consideree caime vieillie et eile est normalement suivie du subjcnctif (TLF 5,257b; Rob 2{383b). La forme en cas ou est plutot une refection moderne sur le modele d'au cas ou qu'une survivance (FEW 2,480b CASUS).

CAS£E s.f. Grande guantite. "Y en a des casees de chats". Derive original de case.

CASTILLE 167 CASH [ke?] adv. Dans 1'expression Bayer cash Payer ccmptant. 1 "Les pieds-rouges* payaient cash". 2 "T'es enmerdante t'es toujours en train de payer cash, toi". Bnprunt ä l1 anglais fait de fagon independante, canne le montre la prcnonciaticn.

CASSEH3LE s.f. 1. Constellation (Miquelon): la Grande Ourse? 1 "Et la casserole vous connaissez pas 9a? La casserole qu'ils appelaient 9a! Υ a quatre etoiles la avec une plus loin. £a se trouve dans l'est. lis appelaient ga la casserole [...] C'est un groupe d1etoiles qui se trouve dans l'est ici, oui. Qa represente une casserole vraiment oui. Y a quatre... quatre etoiles catme 5a quoi. Y en a une plus loin. £a fait ccrtme la queue de casserole". Ce type lexical est l'une des denominations descriptives telles que le cnaudron, la poele ä grande queue, le plat ä queue, etc. connues dans les parlers du Quebec et de l^Acadle pour la Grande Ourse (ALEC 1151; Massignon q. 49). 2. Dans les expressions Avoir la casserole Etre plaque (par see fiance, sa fiancee), Foutre la casserole (a quelqu'un) Le plaquer (sen fiance, sa fiancee). 2 "II a eu la casserole". 3 "Elle lui a foutu la casserole". L' expression originale avoir la casserole est probablement formee par un jeu de mots ä partir de casser et ajoute un nouvel exarple aux enplois pejoratifs de casserole en frangais.

CASTTU£ [kasti], [kasti] ou [kastiy] s.f. 1. Groseille ä graces.

168 CATIN 1 "fa vient sur une petite arbre ccmtie ga; ga se met souvent au long des palissades: c'est des petites castilles. C'est rouge, mais vous en faites de la liqueur. C'est bon la liqueur de castilles". 2 "Je me souviens dans le temps, moi, y en avait des castilles dans le... dans le jardin de l'ecole, ä l'ecole, dans le jardin des Freies [...] Y en avait dans le jardin de Mirande aussi, parce que les vieux quand ils exit abandonne la ferme, on allait en manger, des groseilles aussi". 2. Castilles

noires

Cassis.

3 "Y en avait un il avait des castilles tout le long de son jardin. C'est des castilles noires qu'il avait la. Iis font de la confiture avec 9a". 3. Testicule. Cit.: affranchir. Inconnu au Canada francophone, ce substantif designe les groseilles ä grappes dans une region die 1'ouest de la France bien circonscrite, depuis 1'extreme sud de la Normandie jusqu'en Poitou (EEW 2,462b CASSIA). L'enploi pour testicule est original.

C A H N s.f.

1. Paime qui fait les gros travaux de menage. 1 "On va prendre une catin pour faire qa". 2 "Tu me prends pour une catin!" 2. Poupee. 3 "Ramasse ta catin!" 3. Pansament ä un doigt. 4 "Celui qu'avait un panaris -un pecheur enfin qu'avait un pansement- ben on disait il a une catin". Brplois anciens de catin, diminutif de Catherine, disparus dans le franqais litteraire. Mais catin est reste courant au Canada francophone pour une poupee (Boudreau; GPPC) et en Louisiane (Ditchy), de

CENT

169

mime q u ' e n d e ncmbreux p a r l e r s r e q i o n a u x d e F r a n c e notairment d e l ' O u e s t (FEW 2 , 5 0 3 b CAIHARINA). L'earrploi m e t a p h o r i q u e p o u r un p a n s e ment e s t repandu ä t r a v e r s t o u t l e Canada (ALEC Z226; . M a s s i g n c n q . 1534). I I e s t egalement r e p r e s e n t e dans l e s p a r l e r s d ' o i l s i t u e s au s u d a e l a L o i r e (FEW i b i d e m ) e t en Normandie (ALN e n q u e t e s inedites). V o i r DPQ 4 8 - 5 4 .

CAVAI£ [ k a v a l ]

s.f.

C a r t e o o r r e s p o n d a n t ä l a darae d a n s l e j e u d ' a l u e t t e . " L a dame ä c h e v a l c ' e s t l a

cavale".

C ' e s t egalement l e nan de c e t t e c a r t e s u r l e s c o t e s f r a n c a i s e s 91b).

(Rezeau

CfiUMK s . m .

Arbre, Thuya

occidentalis.

C i t . : a n i c h e t t e s 2, bardeau 1, s t a t u e 1. Dencminaticxi c a n a d i e n n e d ' u n a r b r e d e l ' A m e r i q u e du Nord (Rob 2 , 4 2 2 a ; ALEC 1 6 4 6 ; M a s s i g n o n q . 1 4 7 ) .

CHfT s . m . Cent l i v r e s e n p o i d s . " E l l e s p e s a i e n t p a s un c e n t . E l l e s s ' e t c i i e n t p e s e e s , elles fais a i e n t p a s un c e n t c h a c u n e , chaque bonne fenme. Y e n a une q u i p e s a i t 40 k i l o s , 1 ' a u t r e 46 j e s a i s p a s q u o i . . . " L ' e m p l o i s u b s t a n t i v a l p o u r un q u i n t a l e s t c o n s i d e r s c a m e v i e i l l i en f r a n q a i s (TLF 5 . 3 8 3 b ; Rob 2 , 4 3 5 a ) , e t c e l u i p o u r une c e n t a i n e d e l i v r e s l ' e t a i t d e j a p o u r l e L a r o u s s e du 1 9 e s i e c l e ( 3 , 7 1 6 a ; FEW 2 , 5 8 9 b CENTUM).

170 CEPENDANT QUE CKttHDANT QUE loc.conj. Tant que. "... Cependant que c'est bien sec". locution aujourd'hui vieillie qui ne s'emploie ailleurs que dans des usages tres litteraires (Rob 2,442a).

CERNE s.m. Halo autour de la lune ou du soleil. "Y a un oerne ä la lune il va faire mauvais temps demain!" lies dictionnaires franqais enregistrent cet emploi de ceme, mais halo est beaucoup plus frequent. En revanche ceme est bien atteste ccrrme la denomination courante du halo lunaire dans certains parlers du Canada (ALEC 1157) et de l'ouest de la France (FEW 2,701a CIRCINUS).

CQarä part.adj. Entoure d'un halo (en parlant du soleil ou de la lune). 1 "Le soleil etait ceme, c'est signe de mauvais tanps". 2 "La lune est cemee". Qnploi lie ä celui de ceme (FEW 2,701a CIRCINUS), qui a ete releve ä travers tout le Canada (ALEC 1146, 1157: Massignon q. 55) et qui n'est pas rare en France, notarrment dans les parlers de l'Ouest (ALBRAM510; AIM 534*).

CETTE-lA pron.dem. Celle-la. "Cette-la c'est men frere qui l'a construit". de pronan demonstratif courant dans les parlers regionaux de ice et atteste au Canada (GPPC; FEW 4,821a ISTE).

CHAPÄUD

171

ernannt vb.tr. Tailler (du bois) avec un couteau. 1 "Les vieux etaient forts la-dessus, assis sur le... pres du rivage, les salines*, sur des bancs pis avec leur couteau ben on disait ils chacotent du bois". 2 "Chacoter du bois pour faire des anichettes*". Ce verbe n'a ete releve au Canada que dans les parlers acadiens: sur la Cote-Nord, la Baie des Chaleurs, dans les lies d'Anticosti, de-laMadeleine et du-Prince-Bdouard, au Nouveau-Brunswick et en NouvelleEoosse (ALEC 2051 "tailler un bout de bois avec un canif, une hache"; Massignon q. 335 "tailler un morceau de bois"). L'attestation du mime verbe en Louisiane est une autre preuve de son caractere acadien (Ditchy; Daigle). Enfin, en France, mis ä part quelques releves dans le departement de la Marne, toutes les attestations proviennent de Touraine, Poitou et Saintonge (ADO 224; FEW 13/2,356b Ί58ΑΚ-).

CHMWJD [cafo] ou CHAUFAUD [pofo] s.m. Plate-forme en bois ou l'on debarque le poisson. 1 "On piquait* le poisson sur le chafaud pis on mettait traineau 2.

Les parlers du Canada iqnorent ce type lexical pour denarmer cet element du traineau (ALEC 1093 "poteaux a chaque bout des scrrmiers du bobsleigh"). L'emploi de SEM derive prabablement de ceux que peut avoir le mot dans la lanque de la marine ou il s' applique a divers etais verticaux (FEW 2,181a CANDELABRUM).

CHAOTEMJ s.m. Chaque planche externe de la sole d'un doris. 1 "Le chanteau e'est de chaque cote de la sole. £a prend sur le bas-borde". 2 "Ccnroe les carreaux*, autcmatiquement e'est le liston* de... qui fait le haut pour renforcir* l'embarcation, un chaque cote [...] £a fait partie de la sole du doris*. C'est les planches du rebord, quoi. C'est les premieres planches de chaque c6te, quoi, une de chaque cote, la premiere, qu'on appelle le chanteau" . 3 "Au lieu de changer la sole cn change juste le chanteau. C'est plutot qa qui esquinte le plus vite parce que c'est sur le rebord du doris*". Ce type lexical est bien atteste en France et au Canada mais avec d'autres artplois que celui de SEM. Celui-ci doit etre apparente aux enplois techniques^ tels que 'petite douve qui termine le fend d'un tonneau' enregistre par les dicticnnaires du francais, ou bien 'arceau de la chaise berqante' repandu au Quebec (ALEC 123; EEW 2,230a CAN1HJS).

CHARRETIER

175

CHAQUE adj.Ind. Bnploye pour chacun dans 1' expression Chaque son tour.

tour A

chacun

son

L'enploi de chaque pour 'chacun1 est atteste depuis le 18e siecle dans certaines constructions (TLF 5,532b; FEW 2,482b CATA). Celui de SEM η'en est qu'une extension, carme celles qui sont courantes au Qiebec (HLiR 43,420) et en Acadie (Poirier).

CHARBCMIETTE s.f. 1. Braise eteinte. 1 "Quand vous nettoyez votre poele il y a de la charbonnette. Vous la ramassez, parce que la charbonnette vous aide ä faire du feu". 2 "Iis jetaient ς» dans la bailie*: c'etait de la charbonnette". 2. Charten de bois. 3 "lis mettent qa pour faire des brochettes, la charbonnette". 4 "On allait en chercher a la boulangerie. Parce que ä ce mcment-la ils chauffaient les fours au bois, et puis c'etait le residu dans le... le charbon de bois si vous voulez. On appelait qa la charbonnette . Mime [...] les vieilles, mettaient 5a dans un sac dans la lessiveuse pour faire blanchir le linge... Parce que dans le... dans cette charbonnette y a beaucoup de potasse lä-dedans". En frangais la charbonnette designe le bois prepare pour faire du charbon de bois. Les esnplois de SEM doivent plutSt deriver des anplois normands de charbonnette pour le petit charbon, la braise (FEW 2,355a CARBO).

CHABRETIQt s.m. Camionneur. Syn.: charrol. "Maintenant on dit un charretier, hein. Mais lä, 9a dit, y a encore qui disent des camionneurs".

176 CHARREITE -> charroi. Ii s'agit probablemsnt d'un emprunt au frangais du Canada: charretier 'camionneur' (FEW 2,432b CARRUS).

CHARRETTE [caeret] s.f. Petit chariot ä deux roues qui etait traine par des chiens. 1 "Y avait une essieu au milieu de la charrette, pis une roue de chaque cote. C'etait equilibre. Alors la-dessus ils mettaient deux brancards, avec un collier dessus et si vous avez deux chiens et* trois chiens, alors la vous mettiez une ligne* sur le cote, qui allait rejoindre 1'autre collier et pis on remettait un autre collier vous aviez trois colliers ccrrme 9a". 2 "Pis tout le morde avait des petites charrettes". 3 "Cn montait dans la charrette. Oh oui on marchait pas ä cote!" 4 "Si on avait ete chercher du charbon au quai par exeitple on n'embarquait* pas dessus hein on poussait plutot sur la charrette pour les aider ä ce mcment-la". 5 "Quand j' etais ä Savoyard que je venais porter mon lait en ville avec la charrette..." -> traine 3. Ce type de chariot porte souvent le merae ncni au Canada "voiture ä laquelle on attelle un chien").

(ALEC 661a

CHARROI s.m. Camicnneur. Syn.: charretier. "Ii dit: - je vais chercher un charroi pour faire empörter du sable. Et c'est un charretier*. II sait bien que c'est un charretier mais il appelle 9a un charroi". Qnploi original peut-etre issu de celui qui est atteste depcis 1672 chiez les pecheurs de morue pour une forte chaloupe de transport (La Morandiere 1,90-91, 171 et 478).

CHASSEUR 177 CHARRGKER vb. tr. Charrier. 1 "II va arriver un manent ou y en aura plus he in [des phoques]; ils charroient ga ä pleins bateaux, partout hein!" 2 "Qiand tout etait brasseye*, on charroyait ga". -> brasseyer 1. Verbe ccnsidere aujourd'hui cxxtme vieilli ou regional (Robert 2,511b).

C3ÄSSE (EN-) loc.adj. En chaleur, d'une femelle (chienne, chatte, vache...)• Syn.: en salson. Expression enregistree seulement depuis une cinquantaine d'annees par les dictionnaires, nais bien ijxplantee a travers tout le Canada (ALEC 498, 536, 592. 652, 664) et les parlers regionaux de Nomandie et des provinces voisines (FEW 2,327b 'CAPTIARE).

CHASSE—FAREIUf s.f. Plante, salsepareille. Prononciation typique des parlers frangais du Canada (Massignon q. 200; ALEC 1625), mais qui n'a pas ete relevee dans les parlers de France (FEW 21,18lb).

QOVSSEUR [cas6r] s.m. Batiment qui ravitaillait les bateaux de peche et transportait le poisscn. "Les chasseurs c'est les goelettes qui faisaient pas la peche, mais qui transportaient la marchandise et le poisson sale, le sei et tout 9a".

178 CHSSSIS

Eitploi de chasseur parfois enregistre dans les dictionnaires (Robert 2,517a), aujourd'hui desuet (FEW 2,327b "CAPTIARE).

CHÄSSIS s.m. Fenetre. [Le chien] "il aboyait jusqu'ä tant qu'elle regardait a chassis".

travers le

-> frimas 2. En franqais general, chassis ne s'applique qu'ä 1'encadrement de bois de la fenetre (TLF 5,590a; Rob 2,517). Les parlers picards utilisent le mane type lexical pour la fenetre, mais sous la forme [Aasi]. L'emploi de SEM n'a de correspondent identique qu'au Canada et en Louisiane ou chassis designe de facon usuelle la fenetre (ALEC 23; BEW 2,311a CAPSA).

CHAT [ea], [ea] interj. Cri pousse pour chasser un chat. 1 "Quelquefois moi je dis "chat" mais c'est rare". 2 "Dans le temps tous les vieux la ils disaient "chat" et canprenait hein".

le chat

Interjection en usage ä travers tout le Canada francophone (ALEC 672 "cri pour chasser un chat") et attestee en Louisiane (Pitchy; Daigle). Uh tel usage η'est Signale en France que dans les Vosges (FEW 2,515a CAITUS), mais il existe aussi ailleurs, par exenple dans le Maine (ALBRÄM enquetes inedites).

CHAT (IE MQt) s.m. Poisson, anarrhique, Anarrhicas lupus, Anarrhicas minor. 1 "On peche le chat de 2 "Le chien* qa pique.

des chats, hein! Le chat de mer qui porte sen nan, mer on en peche". il a deux dards sur le dos. C'est meroe tres dangereux, Et le chat de mer c'est pas pareil. Le chat de mer on

CHATTE 179 en mange quand mane [... ] mais ga mord tres dur. On lui met un baton dans la gueule, les dents rentrent dans le baton". 3 "La morue meme qu'elle a l'hameqon tout ä fait loin dans la gorge, on peut y mettre la main. Meme ä l'etat bien vivante on peut mettre la main dans la gueule, dans les dents, 9a a pas d'importance. Tout au moins ga egratigne un petit peu, mais enfin nous on fait le metier on a 1'habitude. Mais alors si vous mettiez dans la gueule du chat, il vous coupait, je crois, les quatre doigts ensemble, hein! Ah il vous aurait coupe les quatre doigts! Ah ben c'est ben siitple, du reste! C'est du... c'est de dela* que doit venir le ncm, parce que ses dents c'est exactement les dents du chat". -> loche 4, loup 1. Denomination de l'anarrhique attestee en Acadie (Massignon q. 523) et sur la Cote-Nord au Quebec (ALEC 1425), employee en franqais depuis le 17e siecle pour divers poissens (raw 2,518b CATTUS), mais dlsparue des dicticnnaires modernes. Aux Iles-ae-la-Madeleine, le chat de mer designe un autre poisson, Macrozoarces americanus (Geistdoerfer p.

CHAT-HUANT [cauä], [cawä] s.m. Oiseau, harfang des neiges, Nyctea scandiaca. 1 "Le chat-huant aussi qu'on appelle, c'est... c'est ccmme une tete de chat, c'est blanc". 2 "La chouette, c'est la fumelle* du chat-huant". 3 "Quand on voyait un chat-huant dans le debut de 1'hiver on disait on va avoir un hiver tres dur". Denomination particuliere d'unrapacesouvent appele hibou blanc dans les parlers franqais du Canada (AlfC 1511) ou chat-huant est plutot reserve ä un autre rapace: le grand-due de Virginie (ALEC 1511).

CHASTE s.f. Sorte de grappin qui sert ä recuperer des engins de peche perdus au food.

180 CHAITEFELOUSE 1 "Une chatte c'est une espece de petit grappin, ou plusieurs petits grappins ensemble. Et puis quand vous avez perdu quelque chose, en mer, vous avez des alignements pour dire c'est par ici qu'on a perdu qa. Vous jetez 9a ä l'eau pis vous trainez 5a jusqu'a* tant que vous relevez ce que vous avez perdu, quelquefois des lignes de fond". 2 "Vous essayez de pecher ce que vous avez perdu avec 9a. C'est ce qu'on appelle une chatte". Emploi technique enregistre par certains dictionnaires (Littre; TLF 5,595b), qualifie de vieux (Rob 2,519b), et egalement connu au Canada (GPPC; PEW 2,519b CAITUS).

CHATTEHjOUSE [catpeluz], [capluz] s.f. Chenille. "J'ai entendu parier de 9a oui. Les chattepelouses on appelait 9a des... des chenilles. J'ai vu, j'en ai vu oui. Chattepelouses oui chattepelouses j'ai entendu parier de 9a". Ce type lexical, qui signifie litteralement 'chatte poilue', ,est atteste depuis le 14e siecle, mais il ne semble pas etre passe au Canada (AIEC 1561). En France, son aire d'emploi ne depasse guere les limites de ,1a Normandie et de la Haute-Bretagne. Mais les prcxionciaticns re levees ä SEM sent plus typiques des parlers de Haute-Bretagne (ALF 267; FEH 2,518 CÄTTUS) que de ceux de Nbrmandie (ÄLN 665).

CHATTER vb.tr. Fcuiller le fend de la mer avec une chatte*. "Pour chatter quelque chose, si vous avez perdu quelque chose, ils chattaient. Nous on s'en servait jamais". Derive de chatte* qui ne semble employe qu'au Canada (GPPC; FEW 2,519b CAITUS).

CHAUDlfiRE

181

CHAUDIÄRE [codyer] s.f. I - Recipient de metal destine aux usages danestigues. 1. Marmite, chaudron. 1 "Chez nous on avait la grosse chaudiere dans la cheminee". -> cooler 1, genievre 3, poutine 1. 2. Fait-tout. 2 "Une chaudiere ä soupe". -> fricot 3. 3. Casserole. 3 "Vous avez une chaudiere d'eau bouillante". 4 "£a a brule c'est parce que ma chaudiere doit etre trop vieille". II - Contenu du recipient. Syn.: chaudieree. 5 "Mettre une chaudiere d'eau ä chauffer". - Specialement Entretenir la chaudiere Faire bouillir la marmite. 6 "Le gibier* on le vendait au fur et ä mesure qu'on le tuait. On en gardait pour la chaudiere. Enfin on gardait qa pour la chaudiere [... ] pour entretenir la chaudiere". 7 "lis tuaient le gibier* [... ] fa entretenait la chaudiere". Ce substantif designe generalement en frantyais des recipients de plus grande dimension que ceux utilises pour la cuisine. Sen acception la plus repandue au Canada est celle de seau (ALEC 523). inconnue ä SEM. Mais des aeeeptions plus proches du point de depart etymologique sont attestees: 'marmite' (ALEC 90), ' chaudron' Τ ALEC 89) en NouvelleEcosse et ä l'Ile-du-Prince-Bdouard, de mane qu'en Louisiane (Ditchy; Daigle). D'ailleurs, au Quebec mane, les attestations du 18e siecle ne correspondent pas ä 1'ermploi actuel (cf. Juneau, Contribution a l'histoire de la prcncnciaticn frangaise au Quebec, p. 74) et 1'expression moderne faire^chaudiere ensemble 'se marier' (FEW 2,75b CALDARIA) semble bien etre formee a partir de chaudiere 'recipient de cuisine*. La presence de cet enploi ä SFM peut encQre avoir ete favorisee ^>ar influence des parlers des marins des cotes de la Manche ou ^ chaudiere designe une marmite (Recher p. 44), un chaudron (Alii enq. inedites) ou une cocote en fente (ALBRAM pt 35).

182 CHALJDIiSRfe (»UDI£r& s.f. Contenu d'une chaudiere*. Syn.: chaudiere 2.

"On rauet encore une chaudieree d'eau a bouillir". -> couler 1. Derive du precedent.

CHNJENID Voir CHAEAUD.

CHAUFEEKEFEE s.f. Cbauffage d'une autarbbile. 1 "Quand il fait tres froid ils mettent leur chaufferette en marche". 2 "Mets done la chaufferette!" Qnploi Signale carme un regionalisme du Canada par les dictionnaires modernes (TLF 5,619b; Robert 2,528b).

CHVUSSGN s.m. Penrne legere. "Τα vas pas retoumer putain caime t'es? Ah maudit* chausson!" Qnploi argotique moderne (fEW 2,72a CALCEUS).

CHAVIRER 183 CHAVikkk vb.tr.

1. Toumer sens dessus dessous. 1 "Cn mettait la peau chaviree en 1'air". 2 "Amener un prelart* ou bien chavirer un doris* et pis le couvrir pour se mettre ä l'abri". -> barbe 1, enroche 2, pailleule 3, paleter 1, raban 3. 2. Ehploi absolu: becher, labourer la terre. 3 "On defonce deux ou trois coups de beche carme ga pour faire un trou pis on fait un sillon. Alors c'est moins dur ä chavirer". 4 "On avait une charrue, une petite charrue avec deux brancards je me souviens, et puis on menait qa avec des beufs. On chavirait et puis on mettait l'engrais dans le sillon et puis on mettait nos pannes de terre". 3. Basculer un chargement, le contenu d'un recipient. 5 "Tu viendras m1 aider a chavirer 9a". 6 "On defaisait un fond [du baril] pis... on chavirait les foies dedans pis l'huile se faisait ccnme ga". 7 "La c'est des cailloux tout autour. On pouvait pas aller avec une brouette, c'etait avec le boyard*. Au-dessus du capestan* on chavirait le goänon et puis apres on prenait la brouette pour aller porter 5a... ä l'eglise pour dire en haut* quoi". -> collerette 2,3. -Qnploi absolu: 8 "Les camions ä bascule, ils chavirent". -> emboucauter 2. 4. Verser, repandre (un liquide). 9 "II a pris de 1'essence. II a chavire 1'essence dans l'eau. Pis c'est carme 9a que le requin est parti". -> dresser 4.

184

CHEMIN6E

5. Renverser par megarde. 10 "Chavirer sa biere". [= Renverser son verre de biere]. 11 "Quelquefois on allait avec un pot, pis en revenant on chavirait le lait [rire]. Qa arrivait". 6. Vb. pron. Se renverser. 12 "Y en avait quelquefois qui se chaviraient ä force de gigoter. lis chaviraient sens dessus dessous. C'etait qa c'etait une balangoire" [pour les bebes]. L'emploi transitif de chavirer pour 'renverser, retoumer, bousculer' est generalement donne ccmme typique du langage de la marine (TLF 5,631b). Ce verbe est atteste au Canada et specialement en Acadie pour 'renverser (un plat par exenple)' (ALEC 183: Massignon q. 1237). Quelques 1points de1 la Coce-Nord au Quebec errploient chavirer la terre pour labourer (ALEC 729, 740). Les valeurs du verbe ä SFM ne doivent dene pas representer des aeveloppements recents ä partir de ses emplois dans la marine (FEW 14,395b VIBRARE).

CHHUNfe s.f. Dans les locutions nam. Cheminee prussienne, Fhusse cheminee Cheminee carportant un foyer a decouvert. 1 "Y a des cheminees prussiennes ä Saint-Pierre, des fausses cheminees qu'on appelle". 2 "Nous les cheminees prussiennes on appelle ς» des fausses cheminees. C'est des grandes cheminees ou on brüle du bois". 3 "Dans le temps ils appelaient qa une fausse cheminee maintenant y a prussienne, y a... y a canadienne, y a hollandaise y a tout ce que vous voulez maintenant". 4 "Une cheminee prussienne, en mane temps le soir ben qa vous chauffe et pis 9a eclaire l'appartement*". Bnploi tout ä fait particulier de 1'expression cheminee a la prussienne, ou cheminee prussienne, encore dans les dictionnaires et qui desiqne depuis le debut du 19e siecle un foyer en tole qu'on adaptait ä 1'Interieur d'une cheminee ordinaire (FEW 16,649b PREUSSEN). Ce genre de dispositif a du etre frequent dans les maisons de bois de SEM au point que la denomination de ce genre de cheminee est devenue celle de toute cheminee ouverte.

CHENALER

185

CHEMISE S.f. Dans les acmposes: 1. Chemise de peau Maillot de corps. 1 "Maintenant oil ne dit plus une chemise de peau, on dit un tricot de corps". 2 "Tous les sous-vetements, les calegons et les chemises de peau en laine..." 2. Chemise de dessus Chemise, l'entend aujourd'hui.

partie

de 1'habiliment telle qu'on

3 "La chemise de peau c'etait la chemise qu'etait directement sur la peau, pis alors la chemise ccnme vous avez la par-dessus c'etait la chemise de dessus". 3. Chemise de laine Pull-over, specialement pull marin, avec col. Extensions d'emploi dent la dezniere a ete notee dans la region de Saint-Malo: chanise de laine 'gilet de laine' (at.hram eng. inedites).

CHEHAI£R vb.tr. Manauvrer, au propre ccnme au figure. 1 "Attention chenale bien toujours'". 2 "Quand vous etes sur un bateau, ben faut bien chenaler pour pas... pour eviter des cailloux* tout ga ou bien ccnme vous faut bien chenaler pour demander des questions et tout qa. la". 3 "Si vous descendez dans un... dans un escalier si vous voulez, pis que 1'escalier est etroit, eh bien vous elites faut bien chenaler ici, faut bien suivre 1'escalier pour descendre". 4 "Feiut bien chenaler pour... avec son argent si vous voulez pour la manager quoi". Qnploi la fin 2,168b rable:

particulier d'un verbe de la langue de la marine atteste depuis du 17e siecle: chenaler 'naviguer en suivant le chenal' (FEW CANALIS). Les parlers acadiens connaissent un enploi cctnpachenaler 'eviter les ecueils' (Poirier p. 133).

186 CHESSAGE (MESSAGE [cesaj] s.m. Claycnnage sur lequel on fait secher le capelan. "En remontant, on avait un magasin*, la, qui nous servait ä mettre les chessages de capelan". Derive de chesser.

(SIESSER [cese] vb.tr. et intr. Secher. 1 [La morue] "quand il fallait la chesser eh ben ils nous prevenaient a* l'autcmne". 2 [Le capelan] "il chessait sur les galets et pis ces oiseaux-la en mangeaient, les pieds-rouges*". 3 "Iis sent venus 1*autre jour pour chesser un petit manteau, d'enfant". 4 "Les carottes, on les arrachait ä la main hein, pis... la carotte on la cassait pis on la mettait... on la mettait sur le terrain ä chesser la". -> arrimage 2, benicasser 2, ampatter 1, pile 4, reduit 2, revirer 1, ripe 1, soleil 3, statue 1, tabac de montagne, vigneaux 4. La metathese des consonnes du verbe secher est attestee dans certains parlers regionaux de France (FEW 11 reduit 3, vigneaux 3. Derive de chesser.

CHESTERETHi) [pestafil] s.m.

Divan, "Il s'est paye un beau chesterfield". Etoprunt ä 1' anglais egalement atteste au Quebec (ALEC 65, 129, 1880).

188 CHEVEU CHEVEU s.m. Dans les egressions: 1. Avoir des dettes par-dessus les cheveux Avoir tellement de dettes gu'on est incapable de s'en liberer. 1 "On peut plus s'en retirer guand on en a par-dessus les cheveux". 2 "II n'en manque pas ici qu'ont des dettes par-dessus les cheveux". 2. Avoir par-dessus les cheveux de... Et re excede par... 3 "J1en ai par-dessus les cheveux de toi". Expressions ^originales paralleles de celle du franqais avoir pardessus la tete de...

CHEVREUIL s.m.

Cerf de Virginie. 1 "Des premiers chevreuils qu'ils exit mis ä Miguelen, ils s'en allaient sur le bout de la Pointe et pis il les perdait de vue dans le large qu'il m'a dit". 2 "J'ai vu un chevreuil en mer, il etait ä deux milles de terre [... ] un gros male avec des grandes comes". 3 "Moi j'ai jamais ete ä la chasse au chevreuil, pour la bonne raison que j'aurais jamais voulu tirer la-dessus. J'etais au Grand Baracbois. Et y en a un qui est venu me trouver. On lui donnait ä manger la, dans nos mains. Je vais pas tirer sur un machin ccnme 9a". -> aborder 1, accoster 1. Biploi d'un mot du franqais general qui est typique du Canada ou c'est le seul nem employe pour designer cet animal (Massignon q. 367; ALEC

CHICOT

189

CHEZ-EUX, CHE-TOI, CHEZ-IXIZ, ... S.m. Chez-soi, dcmicile. 1 "lis n'avaient pas de chez-eux". 2 "Je ne t'aiderai pas ä rentier chez toi, parce que de chez-toi". 3 "Elle est partie ä son chez-elle".

tu

n'as

pas

Selon le TLF (5,695a), le carpose admet tous les pronons accentues, mais seuls chez-moi et chez-soi sont d'usage courant.

CHIASSOUX adj. 1. Peureux. 1 "Les Italiens sont chiassoux". 2 "Oh c'est pas lui qui va aller la parce qu'il est trop pour 5a".

chiassoux

2. Chassieux. 3 "T'as les yeux chiassoux". Ce derive original, au suffixe bien typique, est forme ä partir de deux valeurs de chdhsse. L'enploi pour 'peur est atteste en argot depuis la fin du 19e siecle (TLF 5,696b), oelui pour 'chassie' a ete presque exclusivement releve dans les parlers de 1 ouest de la France (FEW 2,17b CACAHE).

CHICOT s.m. Founeau de plume (Saint-Pierce). Syn.:

aosseau.

Sans doute emploi particulier de chicot 'reste du tronc ou d'une branche d'un arbre coupe ou arrache; reste d'une dent cassee ou cariee' (FEW 13/2, 367-8 TS8IKK-). Un emploi semblable est atteste dans un parier quebecois: arracher les chicots de plime (pt 109, AI£C 618 "(la poule) se nettoie avec son bee").

190 CHIEN CHD9I s.m.

Dans les lex:, ncm.: 1. Chien-ä-lapin, chien-lapin Chien eleve pour la chasse aux lapins*. 1 "Les chiens-lapins ils ont des grandes oreilles. Qa defonce* ga!" 2 "C'etait leur instinct caime le chien-lapin lä e'est de ccurir apres le, e'est le chien courant. Le chien d'arret e'est de s'arreter". 3 "Jusque dans les annees cinguante y avait pas un chien-lapin ä Miguelon. Non y avait certaines gens qui mettaient des collets pour le lapin*, pas beaucoup. Pis, e'est venu 9a caime... avec un gendarme qu'est venu ä Miquelon qui s'appelait X, qu'a canmence ä faire la chasse, cette chasse-la, qu'avait un chien. Pis apres e'est devenu courant, tres courant parce que tout de suite* presque tout le monde fait la chasse au lapin". 4 "On etait oblige d'appeler les chiens-a-lapins pour ne pas qu'ils sautent dessus". 2. Chien-a-perdrix Chien eleve pour la chasse ä la perdrix*. 5 "Les chiens-a-perdrix e'est les chiens qui vont... les chiens d1 arret-la qui vont chercher de la perdrix*".

Des denominations canparables de races de chiens sont attestees au Quebec^ chien-a-lievre, chien-a-perdrix, chlen-a-chevreuil fALBC 6 Chien-a-lapin peut^aussi representer un caique de 1 anglicisme rattoit-houhd releve dans un point de Nouvelle-Ecosse. 3. Chien de mer Poisson, Squalus acanthias. 6 "Le chien de mer, il a deux... II a deux epines dorsales, meme qui sont meme dangereux parce qu'il faut pas se piquer". 7 "Eux les chiens de mer on etait anbete la. C'est pas mechant mais c'est dangereux avec les dards qu'ils exit sur le..." 8 "Les chiens de mer j'aime pas beaucoup ces oiseaux-la". -> broc 3, chat 2, piole 2. Type lexical atteste en frangais depuis le 13e siecle, touiours enregistre dans les dicticnnaires en concurrence avec aiguillat mais usuel en Acadie (Massignon q. 495; ALEC 1424b) carme en Normandie (FEW 2/1,194a CÄNIS).

CHIGNON 191 5. Chien de filet Flotteur de filet. Syn.: flotte, liege. 9 "Des boules en liege ou en plastique quoi: des chiens de filet". 10 "On faisait des bouts de rondin qu'on taillait en biais, on perqait un trou dedans pis on faisait... des chiens quoi". 11 "On taille un morceau de bois, cn met un... de l'orin dedans pis on l'amarre* sur le... pour tenir le filet ä flot*: un chien de filet". Remarque: Flotte designe n'importe quel flotteur, chien specialament le flotteur de bois. Metaphors originale.

ΟΠΕΤέ adj. Chiffonne. "[...] pour qu'il ne soit pas trap chiffe". Ce derive de chiffe 'chiffon' est surtout atteste dans les parlers dialectaux de Haute-Bretagne et du Maine, et semble incoonu au Canada (PEW 16,319a CHIP).

CHIGNON s.m. Partie du corps d'un poisson proche de la tete. Syn.: collet, ozeilles 2. 1 "Au lieu qu'on dise le cou c'est le chignon" [de la morue]. 2 "Le chignon c'est le collet* ici la voyez-vous ou est la tete la he in. Quand vous ouvrez ccrrme 9a 9a fait ς» et pis la y a le chignon. Le chignon il faut qu'il soit bien sale, parce que s'il est pas sale, s'il y a pas assez de sei, eh bien les mouches vont dessus. Et autrement du moment qu'il y a une mouche y a un asticot, y a un ver. Alors lä apres les vers se mettent dans le... dans le chignon. Alors qa dome que...