Dictionnaire des philosophes antiques, Tome 4: De Labeo a Ovidius [4, Dictionnaire philosophes antiq ed.] 2271063868, 9782271063861

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Dictionnaire des philosophes antiques, Tome 4: De Labeo a Ovidius [4, Dictionnaire philosophes antiq ed.]
 2271063868, 9782271063861

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DICTIONNAIRE

DES

PHILOSOPHES ANTIQUES

)

DICTIONNAIRE

DES

PHILOSOPHES

ANTIQUES

publié sous la direction de RICHARD GOULET Chercheur au CNRS

IV

de Labeo à Ovidius

CNRS EDITIONS 15, rue Malebranche - 75005 PARIS

DICTIONNAIRE

DES

PHILOSOPHES

ANTIQUES

publié sous la direction de RICHARD GOULET

Chercheur au CNRS

IV

de Labeo à Ovidius

XSCNRS EDITIONS

15 , rue Malebranche - 75

DICTIONNAIRE

DES PHILOSOPHES ANTIQUES

sous la direction de RICHARD GOULET

Déjà parus :

Volume I : d'Abam ( m )on à Axiothea , 1989. Volume II : de Babélyca d'Argos à Dyscolius, 1994. Volume III : d'Eccélos à Juvénal , 2000 . Supplément , 2003 .

En application du Code de la propriété intellectuelle , CNRS ÉDITIONS interdit toute reproduction intégrale ou partielle du présent ouvrage , sous réserve des exceptions légales .

© CNRS ÉDITIONS , Paris, 2005 ISBN 2-271-06386-8

AVANT -PROPOS

Ce nouveau tome contient environ 450 notices préparées par une cinquantaine de rédacteurs. Elles couvrent les lettres L à O. Quelques notices complémentaires pour les lettres A -J sont imprimées en fin de volume . La révision de l'ensemble a bénéficié de la collaboration de plusieurs collègues qui ont bien voulu relire des notices et proposer leurs remarques. Je dois remercier tout particulièrement Constantinos MACRIS qui a accepté d'enrichir plusieurs notices consacrées aux pythagoriciens à partir de la documentation prosopo graphique rassemblée dans sa thèse de doctorat sur le De vita pythagorica de Jamblique . Tiziano DORANDI a relu l'ensemble du manuscrit et a proposé d'utiles compléments bibliographiques . J'ai également bénéficié à plusieurs reprises des compétences bibliographiques de mes collègues de l'Année philologique , dirigée par Pierre - Paul CORSETTI. Maroun AOUAD a assuré l'identification et la normalisation des noms d'origine arabe dans l'index des noms propres . Enfin , comme pour les tomes antérieurs , la relecture attentive assurée par mon épouse, Marie - Odile GOULET -CAZÉ, a permis l'élimination de nombreuses coquilles et conféré à l'ensemble une plus grande cohérence . Un des rédacteurs de ce quatrième tome , Stéphane DIEBLER , nous a quittés prématurément. Son excellente connaissance des néoplatoniciens tardifs, notam ment de ceux qui sont mentionnés par la Vie d'Isidore de Damacius , à laquelle il consacrait ses recherches, nous manquera . Quant à Jean PÉPIN , disparu le 10 septembre 2005, qui a fondé et longtemps dirigé l'UPR 76 du C.N.R.S. , il fut l'un des principaux soutiens du projet initial de ce Dictionnaire des philosophes antiques , auquel il a personnellement participé en rédigeant plusieurs notices importantes. Quelques jours plus tard est décédée une autre collègue de cette même équipe de recherche, Janine BERTIER , qui avait rédigé une longue notice sur les Problemata aristotéliciens pour le Supplément. Que cette nouvelle étape d'une entreprise à laquelle ils ont beaucoup collaboré serve à perpétuer leur souvenir. Je remercie enfin les auteurs qui nous ont fait parvenir leurs ouvrages ou des tirés à part de leurs publications. Étant donné l'éclatement actuel de la biblio graphie scientifique en des revues et des recueils toujours plus nombreux , c'est pour eux une garantie supplémentaire de voir leurs études les plus récentes prises en compte dans les notices du Dictionnaire.

RICHARD GOULET.

Toute correspondance peut être adressée à Richard Goulet

4, rue de l'Abbaye

1

V

AUTEURS DES NOTICES DU TOME IV

Josèphe-Henriette ABRY

Université Jean Moulin Lyon III M 19.

Yasmina BENFERHAT

Université Nancy 2 L 62 ; 65 ; M 21 ; 22 ; 43 ; 49 ; O 36.

Emmanuel BERMON

Université Bordeaux III L 55 ; N 12 ; 14.

Alain BLANCHARD

Université de Paris IV ( Sorbonne ) M 102 .

István BODNÁR

Eötvös University , Budapest / Central European University , Budapest 0 10.

Véronique BOUDON -MILLOT

C.N.R.S. (Paris ) M 45 ; 111 ; 133 ; 134 ; N 52 ; O 40 .

Jean BOUFFARTIGUE

Université Paris X (Nanterre ) M 41 .

Luc BRISSON

C.N.R.S. ( Villejuif) L 63 ; 94 ; 100 ; 103 ; M 30 ; 75 ; 78 ; 126 ; 197 ; 0 34 ; 35 ; 41 .

Jacques BRUNSCHWIG

Université de Paris - I (Panthéon -Sorbonne) N 48 .

José María CAMACHO ROJO

Université de Grenade M 76.

Javier CAMPOS DAROCA

Université d'Almeria M 69 .

Bruno CENTRONE

Università di Pisa L 4 ; 5 ; 6 ; 8 ; 14 ; 20 ; 21 ; 25 ; 28 ; 30 ; 36 ; 41 ; 46 ; 49 ; 58 ; 85 ; 92 ; 93 ; 96 ; 104 ; M 15 : 77 ; 79 , 82 , 83 ; 92 ; 95 ; 123 ; 135 ; 141 ; 143 ; 166 ; 170 ; 171 ; 180 ; 182 ; 185 ; 186 ; 201 ; 202 ; 203 ; 204 ; N 2 ; 9 ; 11 ; 19 ; 50 ; 63 ; 67 ; 4 ; 5 ; 6 ; 7 ; 22 ; 32 .

Régine CHAMBERT

Professeur de Première Supérieure en langues anciennes L 54 ; 68 ; M 10 ; 28 ; 31 ; 32 .

8

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

Michael CHASE

C.N. R. S. (Villejuif) L 89 ; N 17 ; 65.

Filipe DELFIM SANTOS

Universidad Central de Venezuela, Caracas.

M 63. † Stéphane DIEBLER

École Normale Supérieure (Paris ). M 24 ; 29; 35 ; 74; 0 8 ; 20 ; 46 ; 47.

Tiziano DORANDI

C.N. R. S. (Villejuif) L 11 ; 19 ; 22 ; 29 ; 32 ; 33 ; 39 ; 40 ; 42 ; 43 ; 88 ; 98 ; M 1 ; 53 ; 86 ; 87 ; 110 ; 115 ; 117 ; 121 ; 137 , 148 ; 150 ; 152 , 153 , 154 , 155 ; 157 ; 173 ; 175 ; 176; 177 ; 193 ; N 22 ; 34 ; 54; 0 1 ; 2 ; 3 ; 11 ; 13 ; 18; 43.

Gilles DORIVAL

Université d'Aix -Marseille I - C.N.R.S. Institut Universitaire de France 0 42.

Michèle DUCOS

Université de Paris IV (Sorbonne ) L 1 ; 12 ; 24; 56 ; 59 ; 64 ; 67 ; 74; M 20; 27 ; 54 ; 71 ; 139 ; 196; N 20 ; 58 ; 0 30 ; 49.

Barbara FERRÉ

Agrégée de lettres classiques, docteur ès lettres

M 46 . Michel FERRÉ

Agrégé de lettres classiques, docteur ès lettres

M 46. Simone FOLLET

Université de Paris IV (Sorbonne) L 69, 70, 76; 79 ; 85a; M 40 ; 72 ; 80 .

Jean - Claude FREDOUILLE

Université de Paris IV (Sorbonne ) – Institut d'Études Augustiniennes (C.N.R.S. ) M 172.

Gad FREUDENTHAL

C.N. R. S. ( Villejuif) N 50.

Pedro Pablo FUENTES GONZÁLEZ

Université de Grenade L 66 ; M 9 ; 17 ; 76 ; 101 ; 120 ; 140 ; 151 ; 209 ; N 10; 13 ; 57 , 59 ; 66.

Richard GOULET

C.N.R.S. ( Villejuif) L 2 ; 10 ; 22 ; 34 ; 38 ; 44; 45 ; 47 ; 48 ; 51 ; 53 ; 60 ; 61 ; 75 ; 78 ; 80 ; 81 ; 82 ; 84; 86; 90 ; 95 ; 100 ; 101 ; M 2 ; 3 ; 7 ; 13 ; 14; 16 ; 18 ; 23 ; 23a; 26 ; 33 ; 34 ; 36; 37 ;

AUTEURS DES NOTICES

9

38 ; 39 ; 44; 47 , 50 ; 55 , 56 , 57 ; 64 ; 67 ; 71 ; 84 ; 85 ; 88 ; 96 ; 97 ; 98 ; 108 ; 112 , 113 ; 116 ; 118 ; 119 ; 124 ; 131 ; 136 ; 138 ; 144 ; 145 ; 146 , 147 , 149 ; 158 ; 159 , 160 ; 165 ; 167 ; 169 ; 174 ; 179 ; 181 ; 183 ; 184 ; 188 ; 194 ; 200 ; 206 ; 207 ; 210 ; N 1 ; 3 ; 4 ; 5 ; 6 ; 7 ; 8 ; 18 ; 21 ; 24 ; 25 ; 26 ; 30 ; 31 ; 32 ; 33 ; 35 ; 37 ; 39 ; 40 ; 42 ; 43 ; 49 ; 53 ; 55 ; 56 ; 64 ; 68 ; 69 ; 70 ; O 12 ; 19 ; 25 ; 26 ; 27 ; 28 ; 29 ; 33 ; 38 ; 40 ; 41 ; A 111a ; 219a; 329a ; 348a ; 502a; C 37a ; D illa ; G 2a; 15a; H 63a; 106a; J la. Marie-Odile GOULET - CAZÉ

C.N. R. S. ( Villejuif) L 9 ; 26 ; 102 ; M 52 ; 70 ; 89 ; 90 ; 93 ; 94 ; 104 ; 125 ; 129 ; 132 ; 142 ; 164; 178 ; 190 ; 198 , 199 , 208 ; 41 ; N 62 ; 0 9 , 23 , 24 , 48 .

† Christian GUÉRARD

C.N. R. S. ( Paris ) M 168 .

Ilsetraut HADOT

C.N.R.S. ( Paris) M 39.

Christiane INGREMEAU

Université du Mans L 7.

José KANY-TURPIN

Université de Paris XII - Val de Marne

L 73 . Juan Luis LÓPEZ CRUCES

Université d'Almeria M 69.

Sabine LUCIANI

Université de Montpellier III

M99. Concetta LUNA

Scuola Normale Superiore di Pisa L 72 .

Constantin MACRIS

Université de Patras (Grèce ) - Centre d'Etudes des Religions du Livre , Paris . L 33a ; 36 ; 85 ; 104; M 143 ; 170 ; 185 , 186 ; () 4 ; 5 ; 6 ; 22 ; 32 ; 37 .

Pierre MARAVAL

Université de Paris IV L 16 ; 44 ; 52 ; M 5 ; 6 ; 8 ; 59 ; 60 ; 66 ; N 23 ; 38 ; 021 ; 39.

Robert MULLER

Université de Nantes M 100 ; 127 ; 156 ; 205 .

Michel NARCY

C.N.R.S. (Villejuif) L 57 ; 87 ; M 162 .

Ana PALANCIUC

Doctorante ( Paris ) N 17 .

10

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

Carlo PERNIGOTTI

Scuola Normale Superiore di Pisa M 103 ; 192.

Laurent PERNOT

Université de Strasbourg II

M 105 . Bernadette PUECH

Université de Nancy 2 L 3 ; 13 ; 15 ; 17 ; 27 ; 35 ; 37 ; 50 ; 71 ; 77 ; 99 ; M 4; 11 ; 12 ; 25 ; 48 ; 58 ; 61 ; 65 ; 68 ; 73 ; 81 ; 91 ; 106 ; 109 ; 114 ; 122 ; 128 ; 161 ; 189 ; 191 ; 195 ; N 29 ; 36 ; 60 ; O 14 ; 31 ; 45 ; A 284 ; 428a; C 18a ; 225a ; H71a.

Marwan RASHED

C.N. R. S. ( Paris ) M 107.

Patrick ROBIANO

Professeur agrégé de lettres classiques L 23 ; 31 ; M 51 ; 62 ; 130 ; 187 ; N 61 .

Henri Dominique SAFFREY

C.N. R. S. (Paris ) M 42 ; N 27 ; 28 ; 44 ; 47 ; O 15 ; 16; 17 ; 44 .

Jean - Pierre SCHNEIDER

Université de Neuchâtel ( Suisse ) L 18 ; 83 ; 91 ; 97 ; N 15 ; 45 ; H 153a.

Stéphane TOULOUSE

École Normale Supérieure ( Paris ) .

N 16. Mauro ZONTA

Università degli Studi di Roma « La Sapienza » N 46 .

1

ABRÉVIATIONS!

I. Revues et périodiques

A & A

Antike und Abendland. Beiträge zum Verständnis der Griechen und Römer und ihres Nachlebens. Berlin.

A & R

Atene e Roma. Rassegna trimestrale dell'Associazione italiana di cultura classica. Firenze .

AA

Archäologischer Anzeiger. Berlin .

AAA

'Αρχαιολογικά Ανάλεκτα εξ Αθηνών. Αthenes.

AAAH

Acta ad Archaeologiam et Artium Historiam pertinentia. Institutum Romanum Norvegiae, Roma.

AAEEG

Annuaire de l'Association pour l'encouragement des études grecques en France. Paris.

AAHG

Anzeiger für die Altertumswissenschaft, hrsg. von der Öster reichischen Humanistischen Gesellschaft. Innsbruck.

AAntHung

Acta Antiqua Budapest.

Academiae

Scientiarum

Hungaricae .

ААР

Atti dell'Accademia Pontaniana . Napoli.

AAPal

Atti dell'Accademia di Scienze, Lettere e Arti di Palermo. Palermo.

AAPat

Atti e Memorie dell'Accademia Patavina di Scienze, Lettere ed Arti, Classe di Scienze morali, Lettere ed Arti. Padova.

AAT

Atti della Accademia delle Scienze di Torino, Classe di

AATC

Atti e Memorie dell'Accademia Toscana “ La Colombaria " . Firenze .

AAWG

Abhandlungen der Akademie der Wissenschaften in Göttingen. Philologisch -historische Klasse . Göttingen . 3 . Folge, 27 , 1942 - (Auparavant AGWG )

Scienze morali, storiche e filologiche. Torino.

1. Ces listes ont pour but de faciliter l'identification des sigles et des abréviations utilisés dans l'ouvrage. Il ne s'agit donc pas d'une bibliographie générale sur la philosophie antique. On n'y cherchera pas non plus une description bibliographique complète des périodiques et des collections qui y sont recensés. Les sigles adoptés sont le plus souvent ceux de l'Année philologique. On a retenu dans d'autres cas les usages établis dans les publications spécia lisées ( orientalisme, archéologie ). Nombre de revues ont connu des changements dans leur titre, leur sous-titre, leur système de tomaison et leur lieu de publication. Il nous était impossi ble de rendre compte de toutes ces variations. Certaines revues ont paru en plusieurs séries successives ayant chacune leur tomaison propre . Dans nos notices, nous n'avons pas précisé à quelle série correspondait la tomaison d'une référence lorsque la date de publication permettait facilement de la retrouver.

12

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

AAWMIGS

Abhandlungen der Akademie der Wissenschaften ( und der Literatur ), Mainz, Geistes- und sozialwissenschaftliche Klasse . Wiesbaden .

AAWMIL

Abhandlungen der Akademie der Wissenschaften (und der Literatur ), Mainz, Klasse der Literatur. Wiesbaden.

AB

Analecta Bollandiana. Société des Bollandistes, Bruxelles.

ABAW

Abhandlungen der Bayerischen (-1920 : Königl. Bayer.) Akademie der Wissenschaften , Philosophisch -historische Klasse. München .

ABG

Archiv für Begriffsgeschichte. Bausteine zu einem histo

ABSA

Annual of the British School at Athens. London .

Abstriran

Abstracta Iranica. Revue bibliographique pour le domaine irano - aryen publiée en Supplément à la revue Studia

rischen Wörterbuch der Philosophie. Bonn .

AC

Iranica . Institut français d'iranologie. Téhéran /Leiden. L'Antiquité Classique. Louvain - la -Neuve.

ACD

Acta Classica Universitatis Scientiarum Debreceniensis. Univ. Kossuth , Debrecen .

ACF

Annuaire du Collège de France. Paris.

AClass

Acta classica : verhandelinge van die Klassieke Vereniging van Suid -Afrik. Proceedings of the Classical Association of South Africa. Pretoria.

Acme

Acme . Annali della Facoltà di Filosofia e Lettere dell'Uni versità statale di Milano. Milano.

ActSemPhilolErl

Acta Seminarii Philologici Erlangensis. Erlangen , puis Leipzig

Adamantius

Adamantius. Notizario del Gruppo Italiano di Ricerca su « Origene e la tradizione alessandrina » . Pisa .

ADFF

Annali del Dipartimento di filosofia dell'Università di Firenze. Firenze.

ADMG

AE

Abhandlungen der Deutschen Morgenländischen Gesell schaft. Leipzig voir ArchEph .

AEAtl

Anuario de Estudios Atlánticos. Madrid /Las Palmas.

AEFUE

Anales de estudios filológicos de la Universidad de Extre madura . Cáceres.

Aegyptus

Aegyptus. Rivista italiana di egittologia e di papirologia. Milano.

AEHE, IVe sect.

Annuaire de l'École pratique des Hautes Études, Sciences historiques et philologiques. Paris.

AEHE , Ve sect.

Annuaire de l'École pratique des Hautes Études, Sciences religieuses. Paris.

ABRÉVIATIONS - REVUES ET PÉRIODIQUES Aesculape

13

Aesculape. Revue mensuelle illustrée des lettres et des arts dans leurs rapports avec les sciences et la médecine . Société internationale d'histoire de la médecine. Paris.

Aevum

Aevum . Rassegna di scienze storiche, linguistiche e filolo giche . Milano.

AFB

Anuari di filologia, Secció D : Studia Graeca et Latina . Barcelona.

AFLAix

Annales de la faculté des lettres et sciences humaines d'Aix . Gap .

AFLB

Annali della Facoltà di Lettere e Filosofia di Bari. Bari.

AFMC

Annali della Facoltà di Lettere e Filosofia della Università di Cagliari. Cagliari.

AFLL

Annali della Facoltà di Lettere di Lecce. Lecce.

AFLM

Annali della Facoltà di Lettere e Filosofia, Università di Macerata . Padova .

AFLN

Annali della Facoltà di Lettere e Filosofia della Università di Napoli. Napoli.

AFLNice

Annales de la Faculté des lettres et sciences humaines de Nice. Paris.

AFLP

Annali della Facoltà di Lettere e filosofia dell'Università degli studi di Padova. Firenze.

AFLS

Annali della Facoltà di Lettere et filosofia, Università di Siena. Fiesole.

AFMC

Annali della Facoltà di Magistero dell'Università di Cagliari. Cagliari.

AFP

Archivum Fratrum Praedicatorum . Paris.

AGM ( N )

Sudhoffs Archiv für Geschichte der Medizin und Natur wissenschaften. Wiesbaden .

AGPh

Archiv für Geschichte der Philosophie. Berlin.

AGWG

Abhandlungen der ( -1921 : Königl.) Gesellschaft der Wissenschaften zu Göttingen , ( à partir de 1893 :) Philolo gisch -historische Klasse. ( Berlin , puis ) Göttingen . 1 , 1838 / 1842 - 40 , 1894/1895 ; N.F. 1 , 1896/1897 - 25 , 1930/1931 ;

AHAW

Abhandlungen der Heidelberger Akademie der Wissen schaften , Philosophisch - historische Klasse. Heidelberg.

AHB

The Ancient History Bulletin . Alberta Department of Classics. Calgary .

AHES

Archive for History of Exact Sciences. Berlin .

AHMA

Archives d'Histoire doctrinale et littéraire du Moyen Âge . Paris.

3. Folge 1 , 1932 - 26, 1940. Pour la suite , voir AAWG .

14

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

AIHS

Archives Internationales d'Histoire des Sciences. Roma.

AIIS

Annali dell'Istituto Italiano per gli Studi Storici. Bologna.

AION ( filol)

Annali dell'Istituto Universitario Orientale di Napoli. Dipartimento di Studi del mondo classico e del Mediter

AIPho

Annuaire de l'Institut de Philologie et d'Histoire Orientales et Slaves de l'Université Libre de Bruxelles. Bruxelles.

AIV

Atti dell'Istituto Veneto di Scienze, Lettere ed Arti, Classe di Scienze morali e Lettere. Venezia.

raneao antico . Sezione filologico -letteraria. Napoli.

AJA

American Journal of Archaeology. New York.

AJAH

American Journal of Ancient History. Cambridge (Mass. ).

AJPM

American Journal of Philology. Baltimore .

AK

Antike Kunst, hrsg. von der Vereinigung der Freunde antiker Kunst in Basel. Olten .

AKG

Archiv für Kulturgeschichte. Berlin /Leipzig.

Akroterion

Akroterion . Quarterly for the Classics in South Africa. Dept. of Classics. Univ . of Stellenbosch .

Al -Andalus

Al- Andalus. Revista de las Escuelas de Estudios Arabes de Madrid y Granada. Madrid /Granada.

ALKGM

Archiv für Literatur- und Kirchengeschichte des Mittelalters mit Unterstützung der Görres -Gesellschaft. Freiburg im Br.

ALMA

Archivum Latinitatis Medii Aevi [Bulletin Du Cange ). Paris , puis Bruxelles.

Al-Mašriq

Al-Masriq. Revue catholique orientale bi-mensuelle. Sciences, lettres, arts. Beyrouth .

Al-muktataf

Al-muktataf. An Arabic scientific review . Le Caire.

Altertum

Das Altertum , hrsg. vom Zentralinstitut für Alte Geschichte und Archäologie der Deutschen Akademie der DDR . Berlin .

AltsprUnt

Der Altsprachliche Unterricht. Arbeitshefte zu seiner wissenschaftlichen Begründung und praktischen Gestalt. Stuttgart

AMal

Analecta Malacitana . Revista de la Sección de Filología de la Facultad de Filosofía y Letras. Malaga.

Ambix

Ambix . The Journal of the Society for the study of alchemy and early chemistry. Cambridge.

AN

Aquileia Nostra. Bollettino dell'Associazione nazionale per Aquileia. Aquileia.

Analysis

Analysis. London .

AnatAnt

Anatolia Antiqua. Recueil de travaux publiés par l'Institut français d'études anatoliennes Georges Dumézil, Istanbul. Istanbul/Paris.

-

ABRÉVIATIONS - REVUES ET PÉRIODIQUES

AncPhil

Ancient Philosophy. Pittsburgh .

15

AncSoc

Ancient Society. Louvain .

AncW

The Ancient World. Chicago.

Angelicum

Angelicum . Universitas a Sancto Thoma Aquinate in Urbe, Roma.

Annales E. S.C.

Annales ( Économie, Sociétés, Civilisations). Paris.

Annali

Annali dell'Istituto universitario orientale di Napoli.

AnnEpigr

L'Année Épigraphique. Paris.

AnnMedHist

Annals of Medical History. New York .

Anregung Antaios

Antaios. Stuttgart.

Antichthon

Antichthon . Journal of the Australian society for classical

AntikTanulm

studies. Sydney Antik Tanulmányok. Studia antiqua . Budapest.

Seminario di studi dell'Europa orientale . Pisa .

Anregung . Zeitschrift für Gymnasialpädagogik . München .

Antiquitas Antiquity

Antiquitas. Rivista trimestrale di antichità classica . Salerno.

AOMV

Annali dell'Ospedale Maria Vittoria di Torino . Torino.

APAW

Abhandlungen der ( -1870 : Königl.; 1871-1917 : Königl.

Antiquity . A quarterly review of archaeology . Newbury , Berks.

Preuß. ; 1918-44 : Preuß. ; puis :) Deutschen Akademie der Wissenschaften zu Berlin , Philosophisch -historische Klasse . Berlin.

Apeiron

Apeiron. Department of philosophy , University of Alberta, Canada.

APf

Archiv für Papyrusforschung und verwandte Gebiete . Leipzig Al- Qantara . Revista de estudios árabes. Madrid .

AQ Aquinas ARAA

Arabica

Aquinas. Pontificia Universita lateranense . Roma . Atti della Reale Accademia di Archeologia , Lettere e Belle Arti di Napoli. Napoli . Pour la suite , voir RAAN . Arabica . Revue d'études arabes. Leiden .

ARAM Periodical ARAM Periodical. ARAM society for Syro -Mesopotamian studies. Oxford . Araştırma Araştırma. Istanbul , ArchClass Archeologia Classica . Rivista della Scuola nazionale di

Archeologia, pubblicata a cura degli Istituti di Archeologia e Storia dell'arte greca e romana e di Etruscologia e antichità italiche dell'Università di Roma. Roma . ArchDelt

'Apxaloloyixòv Aɛatiov. Athènes .

Archeion Archeion . Archivio di storia della scienza . Roma.

16

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

ArchEph ArchGiurid

'Αρχαιολογική Εφημερίς (-1909 : 'Εφ. Noyixò étaipeta . Athènes . Archivio Giuridico. Pisa .

Αρχ.). 'Αρχαιο

ArchGlotutal Archivio Glottologico Italiano. Firenze .

ArchltalPsicol

Archivio italiano di psicologia generale e del lavoro . Torino.

Archivum

Archivum . Revista de la Facultad de Filología. Oviedo.

Archiv Philos

Archiv für Philosophie. Stuttgart.

ArchJuives

Archives Juives. Paris .

ArchOrient

Archiv Orientální. Praha.

ArchPhilos

Archives de Philosophie. Recherches et documentation . Paris .

ArchPhilosDroit

Archives de philosophie du droit. Paris.

Arctos

Arctos. Acta philologica Fennica, Helsinki .

Argumentation

Argumentation . An international journal on reasoning. Dordrecht.

ARID

Analecta Romana Instituti Danici. Odense.

ArtsAsiatiques

Arts Asiatiques. Paris.

ARW

Archiv für Religionswissenschaft. Leipzig /Berlin. Anatolian Studies . Journal of the British Institute of

AS

Archaeology at Ankara . London . ASAW

Abhandlungen der Sächsische Akademie der Wissenschaften zu Leipzig, Philologisch -Historische Klasse. Berlin .

AsiatStud

Asiatische Studien. Études Asiatiques. Berne .

ASNP

Annali della Scuola Normale Superiore di Pisa , Classe di Lettere e Filosofia. Pisa.

ASPH

Arabic Sciences and Philosophy. Cambridge.

Athena

'Αθηνά . Σύγγραμμα περιοδικόν της εν ÉnloTnuovixñs étalpeiaç. Athènes .

Athenaeum

Athenaeum . Studi periodici di Letteratura e Storia dell'Anti chità . Pavia .

Athenaion

AU AUG

Αθήναις

' Αθήναιον. Σύγγραμμα περιοδικών . Αthenes . Der altsprachliche Unterricht. Voir AltsprUnt. Annales de l'Université de Grenoble , Paris /Grenoble.

AugStud

Augustinian Studies . Augustinian Institute , Villanova University . Villanova, Pennsylvania,

Augustinus

Augustinus. Revista publicada por los Padres Agustinos recoletos. Madrid .

AUMur

Anales de la Universidad de Murcia (Letras ). Murcia .

ABRÉVIATIONS - REVUES ET PÉRIODIQUES

17

BA

Bollettino d'Arte del Ministero della Pubblica Istruzione . Roma,

BAB

Bulletin de la Classe des Lettres de l'Académie Royale de Belgique. Bruxelles.

BABesch

Bulletin Antieke Beschaving . Leiden .

BACILE

Bulletin semestriel de l'Association des classiques de l'Université de Liège . Stavelot.

BACTH

Bulletin Archéologique du Comité des Travaux Historiques. Ministère de l'Éducation nationale , Paris.

BAGB

Bulletin de l'Association Guillaume Budé. Paris .

BALAC

Bulletin d'ancienne littérature et d'archéologie chrétienne . Paris.

BAM

Bulletin d'Archéologie Marocaine. Casablanca. Boletín de la Academia Nacional de Letras. Montevideo.

BANL

BAR

Bulletin de l'Académie des sciences de l'U.R.S.S. Lenin grad, puis Moscou.

BAug

« Bulletin Augustinien » dans REAug.

BBG Blätter für das Bayerische Gymnasialschulwesen .München.

BCAI Bulletin critique des Annales Islamologiques, Supplément aux Annales Islamologiques. Institut français d'archéologie orientale . Le Caire.

BCH Bulletin de Correspondance Hellénique. Paris .

BCO

Bibliotheca Classica Orientalis. Dokumentation der alter tumswissenschaftlichen Literatur der Sowjetunion und der Länder der Volksdemokratien . Berlin .

BE « Bulletin épigraphique » dans REG .

BEO Bulletin d'Études Orientales, publié par l'Institut français de Damas. Beyrouth . Berytus

Berytus. Archaeological Studies published by the Museum of Archaeology of the American University of Beirut . Beirut.

Bessarione Bessarione. Pubblicazione periodica di studi orientali . Roma .

BFAUE Bulletin of the Faculty of Arts of University of Egypt. Le Caire.

BFCI Bollettino di Filologia Classica . Torino.

BHM Bulletin of the History of Medicine. Baltimore .

BHR Bibliothèque d'Humanisme et Renaissance : travaux et documents. Genève .

BIAO Bulletin de l'Institut français d'Archéologie Orientale. Le Caire.

18

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

BiblMath

Bibliotheca Mathematica. A series of monographs on pure and applied mathematics. Amsterdam .

BICS

Bulletin of the Institute of Classical Studies. University of London .

BIDR

Bullettino dell'Istituto di Diritto Romano . Milano .

BIEH

Boletín del Instituto de Estudios Helénicos. Barcelona.

BIE

Bulletin de l'Institut d'Égypte. Le Caire.

Bilychnis

Bilychnis. Roma.

BISI

Bullettino dell'Istituto Storico Italiano (puis : per il Medio evo ). Roma.

BJRL

Bulletin of the John Rylands Library. Manchester Bedi Karthlisa . Revue de kartvélologie (Études géorgiennes

BK

et caucasiennes ) . Destin de la Géorgie. Paris. Devenu , à partir de 1985 , Revue des études géorgiennes et cauca siennes. BLE

Bulletin de Littérature Ecclésiastique. Toulouse.

BLR

The Bodleian Library Record. Oxford .

BMAH

Bulletin des Musées royaux d'Art et d'Histoire. Bruxelles.

BMQ

British Museum Quarterly. London .

BO

Bibliotheca Orientalis, uitg . van het Nederlandsch Instituut voor het Nabije Oosten. Leiden .

BollClass

Bollettino dei classici, a cura del Comitato per la prepa razione dell'edizione nazionale dei classici greci e latini . Roma.

BollistFilolGreca

Bolletino dell' Istituto di filologia Greca. Università di Padova . Roma.

BollitStudOr

Bollettino Italiano degli Studii Orientali. Firenze.

BonnerJb

Bonner Jahrbücher des Rheinischen Landesmuseums in Bonn und des Vereins von Altertumsfreunden im Rhein lande. Köln .

Boreas

Boreas. Münstersche Beiträge zur Archäologie. Münster.

BPhW

Berliner Philologische Wochenschrift. Leipzig/ Berlin . ( Suite : PhW ).

BOR

British Quarterly Review . London.

BRGK

Bericht der Römisch -Germanischen

Kommission des

Deutschen Archäologischen Instituts. Berlin . BSOAS

Bulletin of the School of Oriental and African Studies. London .

BStudLat

Bollettino di Studi Latini. Periodico quadrimestrale d'infor mazione bibliografica. Napoli.

-

ABRÉVIATIONS - REVUES ET PÉRIODIQUES

BullGéod

19

Bulletin Géodésique. Official Journal of the International Association of Geodesy & International Union of Geodesy and Geophysics. Berlin .

BullHispan

Bulletin Hispanique. Faculté des Lettres et Sciences Humaines de l'Université de Bordeaux III .

BullPhilosMed

Bulletin de Philosophie Médiévale . Société internationale pour l'étude de la philosophie médiévale. Louvain .

BullScMath Bulletin des Sciences Mathématiques et astronomiques . Paris, réimpr. Amsterdam .

BWPr Winckelmannsprogramm der Archäologischen Gesellschaft zu Berlin . Berlin . Byrsa

Cahiers de Byrsa. Musée Lavigerie (Carthage, Tunisie ) . Paris .

Byzantion Byzantion . Revue internationale des études byzantines . Bruxelles. Byz )

Byzantinisch - neugriechische Jahrbücher. Athènes .

Byzs

Byzantinoslavica . Revue internationale des études byzan tines. Praha.

By Z

Byzantinische Zeitschrift. München .

C& M

Classica et Mediaevalia . Revue danoise d'histoire et de philologie publiée par la Société danoise pour les études anciennes et médiévales. København .

C& S Caesaraugusta

Caesarodunum

CahSWeil

Cultura e Scuola. Roma. Caesaraugusta. Arqueología, prehistoria, historia antigua. CSIC , Inst . Fernandino el Católico . Zaragoza . Caesarodunum . Institut d'études latines de l'Université de Tours. Cahiers Simone Weil. Revue trimestrielle publiée par l'Association pour l'étude de la pensée de Simone Weil . Paris.

CanJPhilos

Canadian Journal of Philosophy. Calgary ( Alberta ).

Cathedra Cathedra for the History of Eretz - Israel and its Yishuv . Jérusalem .

CB

The Classical Bulletin , Saint Louis .

CCC

Civiltà Classica e Cristiana . Genova .

CCM Cahiers de Civilisation Médiévale. Poitiers .

CE Chronique d'Égypte. Bruxelles.

CEA Cahiers des Études Anciennes . Montréal.

Centaurus Centaurus. International magazine of the history of mathe matics, science and technology. København.

20

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

CentrblBiblwes

Centralblatt für Bibliothekswesen ( devenu par la suite Zentralblatt für Bibliothekswesen ). Leipzig.

CF

Classical Folia . Studies in the christian perpetuation of the Classics. New York .

CFC ( G )

Cuadernos de Filología Clásica ( Estudios Griegos e indoeuropeos). Madrid.

CH

Church History. American Society of Church History, Chicago.

Chiron

Chiron . Mitteilungen der Kommission für alte Geschichte und Epigraphik des Deutschen Archäologischen Instituts. München .

CHM

Cahiers d'Histoire Mondiale. Paris /Neufchâtel.

CI

Classics Ireland . Dublin .

Ciceroniana

Ciceroniana . Rivista del Centro di studi ciceroniani, Firenze.

CIMA

Cahiers de l'Institut du Moyen Age grec et latin . København .

CISA

Contributi dell'Istituto di Storia antica dell'Università del Sacro Cuore , Milano .

CJ

The Classical Journal. Athens (Georgia ).

CIAnt

Classical Antiquity. Berkeley.

CollectFrancisc

Collectanea Franciscana. Roma.

CollectTheol

Collectanea Theologica Societatis theologorum Polonae cura edita. Varsovie.

Contributo

Contributo . Osservatorio astrofisico, Arcetri. Firenze.

CPh

Classical Philology. Chicago.

ce

Classical Quarterly. Oxford .

COR

Church Quarterly Review. London.

CR

Classical Review. Oxford .

CRAI

Comptes Rendus de l'Académie des Inscriptions et Belles Lettres. Paris.

CRASR

Comptes Rendus de l'Académie des Sciences de Russie . Leningrad.

CronErc

Cronache Ercolanesi. Bollettino del Centro internazionale per lo studio dei Papiri Ercolanesi. Napoli.

CrSt

Cristianesimo nella Storia . Ricerche storiche esegetiche

СТ

teologiche. Bologna. Les Cahiers de Tunisie. Tunis.

CuadFilos

Cuadernos de filosofía. Buenos Aires .

CW

Classical Weekly. New York .

ABRÉVIATIONS - REVUES ET PÉRIODIQUES

21

CWo

The Classical World . Pittsburgh ( Pennsylvania ).

DA

Dissertation Abstracts . International abstracts of disserta tions available in microfilm or as xerographic reproductions. Ann Arbor (Michigan ).

Dacia

Dacia . Revue d'archéologie et d'histoire ancienne. Bucarest.

DArch

Dialoghi di Archeologia . Roma.

DAWW

Denkschriften der Akademie der Wissenschaften in Wien . Wien.

DeutscheRschau

Deutsche Rundschau für Geographie und Statistik . Wien / Leipzig.

DGT

Drevnejsije Gosudarstva na territorii SSSR . Les États les plus importants sur le territoire de l'URSS. Matériaux et Recherches. Moskva .

DHA

Dialogues d'Histoire Ancienne. Paris.

Diadoche

AIAAOXH . Revista des Estudios de Filosofia Platonica y Cristiana. Instituto de Filosofia de la Universidad Católica de Chile in Santiago - Departamento de Filosofia de la Universidad Argentina John F. Kennedy .

Diálogos

Diálogos. Revista del Departamento de filosofía . Univer sidad de Puerto Rico.

Didaskalia

Didaskalia. Revista da Faculdade de teologia de Lisboa. Lisboa.

Dioniso

Dioniso . Rivista trimestrale di studi sul teatro antico. Siracusa.

Dionysius

Dionysius. Dalhousie University, Halifax , Nova Scotia.

Diotima

Diotima. Revue de recherche philosophique. Athènes . Divus Thomas. Piacenza.

DivThomp DLZ

Deutsche Literaturzeitung für Kritik der internationalen Wissenschaft. Berlin.

Dodone

Δωδώνη. Επιστημονική επετηρίς της Φιλοσοφικής Σχολής του Πανεπιστημίου Ιωαννίνων, Ioannina.

DOP

Dumbarton Oaks Papers. New York .

DR

Dublin Review. Dublin

DSTFM

Documenti e Studi sulla Tradizione Filosofica Medievale. Rivista della Società internazionale per lo studio del medioevo latino . Spoleto .

Durius

Durius. Boletin castellano de estudios clasicos. Valladolid .

EA

Epigraphica Anatolica. Zeitschrift für Epigraphik und historische Geographie Anatoliens. Bonn .

EEa

Estudios Eclesiásticos. Revista trimestral de investigación e información teológica. Madrid .

22 EEAth

EHBS

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES Επιστημονική Επετηρίς της φιλοσοφικής Σχολής του Πανεπιστημίου Αθηνών. Αthenes. Επετηρίς Εταιρείας Βυζαντινών Σπουδών . Αthenes.

EHR

English Historical Review . London.

Eikasmos

Eikasmos. Quaderni bolognesi di filologia classica. Bologna.

Eirene

Eirene. Studia Graeca et Latina. Praha.

Elenchos

Elenchos. Rivista di studi sul pensiero antico. Roma/Napoli.

EMC

Échos du Monde Classique. Classical News and Views. Calgary ( Alberta ).

Emerita

Emerita . Revista de Lingüística y Filología clásica. Madrid .

Enrahonar

Enrahonar. Quaderns de filosofia . Barcelona. Échos d'Orient. Paris.

EO

Eos

Eos . Commentarii Wrocław .

EPh

Études Philosophiques. Paris.

Societatis Philologae Polonorum.

Epigr Stud

Epigraphische Studien . Köln .

Epos

Epos. Revista de filología de la Universidad nacional de educación a distancia ( Facultad de filología ). Madrid .

Eranos

Eranos. Acta Philologica Suecana. Uppsala.

Erasmus

Erasmus. Speculum Scientiarum . Bulletin international de la science contemporaine. Wiesbaden .

EstudEccles

Estudios ecclesiasticos. Revista teologica de investigacion . Facultades de Teologia de la Compaña de Jésus en España, Madrid .

EstudFilos

Estudios Filosóficos. Instituto superior de filosofía. Valladolid .

Eunomia

Eunomia . Ephemeridis Listy filologické supplementum . Praha.

Expositor

The Expositor. London .

F& F

Forschung und Fortschritte . Korrespondenzblatt der deutschen Wissenschaft und Technik . Berlin .

Faventia

Faventia . Publicació del Departament de filologia clàssica de la Universitat autònoma de Barcelona. Barcelona .

Florllib

Florentia lliberritana . Revista de estudios de antigüedad clásica. Granada.

Fortunatae

Fortunatae. Revista Canaria de filología, cultura y humani dades clásicas. La Laguna (Canarias ).

FranciscStud

Franciscan Studies. A quarterly review . New York .

FT

Filosofia e Teologia. Napoli.

FZPhth

Freiburger Zeitschrift für Philosophie und Theologie. Freiburg in der Schweiz.

ABRÉVIATIONS - REVUES ET PÉRIODIQUES

23

G&R

Greece and Rome. Oxford .

GB

Grazer Beiträge. Zeitschrift für die klassische Altertums wissenschaft. Graz .

GCFI Gerion

Giornale Critico della Filosofia Italiana. Firenze. Gerion. Madrid .

GFF

Giornale Filologico Ferrarese. Ferrara .

GFRF

Giornale Ferrarese di Retorica e Filologia . Ferrara. ( Suite de GFF .)

GGA

Göttinger Gelehrte Anzeigen . Göttingen . Ce périodique interrompu en 1944 a paru de 1739 à 1752 sous le titre Göttingische Zeitung von gelehrten Sachen , de 1753 à 1801 sous le titre Göttingische Anzeigen von gelehrten Sachen.

GIF

Giornale Italiano di Filologia. Rivista trimestrale di cultura. Roma.

Glotta

Glotta . Zeitschrift für griechische und lateinische Sprache. Göttingen.

GM

Giornale di Metafisica. Genova.

Gnomon

Gnomon . Kritische Zeitschrift für die gesamte klassische Altertumswissenschaft. München .

GRBS

Greek, Roman and Byzantine Studies. Durham (N. C. ).

Gregorianum

Gregorianum . Commentarii de re theologica et philo sophica. Roma .

GSAI

Giornale della Società Asiatica Italiana . Roma.

GSLI

Giornale Storico della Letteratura Italiana . Torino .

Gymnasium

Gymnasium . Zeitschrift für Kultur der Antike und huma nistische Bildung . Heidelberg.

H & T

HAnt

History and Theory. Studies in the philosophy of history. Wesleyan University, Middletown, Conn. Hispania Antiqua. Colegio universitario de Alava .

Hebraica

Hebraica . A quarterly journal in the interest of Hebrew

HebrUCA

Hebrew Union College Annual, Cincinnati .

Helikon

Helikon . Rivista di tradizione e cultura classica. Roma.

Hellenica

Ελληνικά. Φιλολογικόν , ιστορικών και λαογραφικών περιοδικόν σύγγραμμα της Εταιρείας Μακεδονικών Enoudāv. Thessalonique.

Henoch

Henoch. Studi storicofilologici sull'ebraismo . Biblioteca Paul Kahle , Università di Torino , Istituto di orientalistica . Torino.

Hephaistos

Hephaistos. Kritische Zeitschrift zur Theorie und Praxis der

study. New Haven (Conn . ), puis Chicago.

Archäologie, Kunstwissenschaft und angrenzender Gebiete . Bremen .

24

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

Hermathena

Hermathena . Trinity College, Dublin .

Hermeneus

Hermeneus. Tijdschrift voor de antieke Cultuur. Culemborg.

Hermes

Hermes. Zeitschrift für klassische Philologie. Wiesbaden . Hesperia . Journal of the American school of classical

Hesperia

studies at Athens. Athens. Hespéris

Hespéris. Archives berbères et Bulletin de l'Institut des Hautes - Études Marocaines. Paris .

Hestia

' Eoria . Athènes.

Hippokrates

Hippokrates. Annales Societatis Historiae Medicinae Fennicae. Helsinki.

Hispanic Review

Hispanic Review . Philadelphia.

HistMath

Historia Mathematica. International Journal of History of Mathematics. New York London .

Historia

Historia . Zeitschrift für alte Geschichte . Wiesbaden.

HistSc

Historia Scientiarum . International Journal of the History of Science Society of Japan . Tokyo .

HJ

Historisches Jahrbuch . München .

Homine ( De )

De Homine. Roma.

Horos

" Ορος. " Ένα αρχαιογνωστικό περιοδικό. Αthenes .

HPBCD

Historisch -politische Deutschland . München.

Blätter für

das

Catholische

HPTh

History of Political Thought. Exeter.

HR

History of Religions. Chicago.

HSCP

voir HSPh .

HSF

Historische Sprachforschung (Historical Linguistics ) . Göttingen .

HSP

Harvard Studies in Classical Philology. Cambridge ( Mass . ).

HTER

Harvard Theological Review . Cambridge (Mass . ).

Hugoye

Hugoye : Journal of Syriac Studies. An electronic journal dedicated to the study of the Syriac tradition . Beth Mardutho : The Syriac Computing Institute . [ http ://syrcom,cua.edu / Hugoye/].

HZ

Historische Zeitschrift. München.

ICS

Illinois Classical Studies. University of Illinois , Chicago.

IEJ

Israel Exploration Journal. Jerusalem .

IJMES

International Journal of Middle East Studies. Cambridge.

IL

L'Information Littéraire. Paris.

Ilu

Ilu , revista de ciencias de las religiones. Madrid .

Index

Index . Quaderni camerti di studi romanistici. International Survey of Roman Law . Napoli.

ABRÉVIATIONS - REVUES ET PÉRIODIQUES

25

Ínsula

Ínsula. Revista de Letras y Ciencias Humanas. Madrid.

JOS

Israel Oriental Studies. Tel Aviv .

Iraq

Iraq, published by the British school of archaeology in Iraq. London.

Irénikon

Irénikon . Bulletin mensuel des moines de l'union des

Isis

Églises. Prieuré d'Amay sur Meuse . Isis. An international review devoted to the history of science and its cultural influences. Washington .

Isl

Der Islam . Berlin .

IsiCult

Islamic Culture . An English quarterly. Hyderabad.

IQ

The Islamic Quarterly. London .

Ítaca

Ítaca. Quaderns catalans de cultura classica . Barcelona . Italianistica. Rivista di letteratura italiana. Milano .

Italianistica Italica

Italica . Review of the American Association of teachers of Italian. Ann Arbor, Univ . of Michigan .

Jura

lura . Rivista internazionale di diritto romano e antico .

JA

Napoli. Journal Asiatique. Paris.

Janus

Janus. Revue internationale de l'histoire des sciences, de la médecine , de la pharmacie et de la technique . Amsterdam .

JAOS

Journal of the American Oriental Society. Baltimore .

JAW

Jahresbericht für die wissenschaft. Leipzig.

ЈБАС

Jahrbuch für Antike und Christentum . Münster.

JBM

Jahrbuch für das Bistum Mainz. Mainz .

JbPTh

Jahrbücher für Protestantische Theologie. Leipzig.

JCS

Journal of Classical Studies. The Journal of the classical society of Japan , Kyoto .

JDAI JDT

Jahrbuch des Deutschen Archäologischen Instituts. Berlin . Jahrbücher für deutsche Theologie. Stuttgart.

JEA

Journal of Egyptian Archaeology. London .

JECS

Journal of Early Christian Studies . Journal of the North American patristics society. Baltimore, MD. Jewish Quarterly Review . London /New York .

JewQRev

Fortschritte

der

Altertums

JHA

Journal for the History of Astronomy. Chalfont St. Giles , Bucks.

JHAS

Journal for the History of Arabic Science. Alep.

JHI

Journal of the History of Ideas . Ephrata , Penna & Philadelphia.

JHP

Journal of the History of Philosophy. Berkeley.

26

JJP

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES Journal of Juristic Papyrology. Warszawa.

JIS

Journal of Jewish Studies. Oxford.

JKPh

Jahrbücher für klassische Philologie. Leipzig. Le périodique s'est intitulé diversement à différentes périodes de son histoire, de 1826 à 1943 : Neue Jahrbücher für Philologie und Pädagogik, Neue Jahrbücher für das klassische Alter tum, Geschichte und deutsche Literatur und für Pädagogik, Neue Jahrbücher für Wissenschaft und Jugendbildung, Neue Jahrbücher für deutsche Wissenschaft, Neue Jarhbücher für Antike und deutsche Bildung.

JMT

Journal of music theory. A publication of the Yale school of music . Yale .

INES

Journal of Near Eastern Studies. Chicago.

ING

Jahrbuch für Numismatik und Geldgeschichte. Kallmünz.

JEAN

Jahreshefte des Österreichischen Archäologischen Instituts. Wien.

JÖB

Jahrbuch der Österreichischen Byzantinistik. Wien.

JEBG

Jahrbuch der Österreichischen Byzantinischen Gesellschaft. Wien .

JP

Journal of Philology. London /Cambridge.

JPakHS

Journal of the Pakistan Historical Society. Karachi.

JPh

Journal Philosophique. Centre de recherche philosophique Saint Thomas d'Aquin . Paris.

JPhilos

Journal of Philosophy. New York.

JR

Journal of Religion . Chicago .

JRA

Journal of Roman Archaeology. Ann Arbor ( Michigan ) .

JRAS

Journal of the Royal Asiatic Society. London.

JRS

Journal of Roman Studies. London .

JS

Journal des Savants. Paris.

JSAI

Jerusalem Studies in Arabic and Islam . Jerusalem .

JSJ

Journal for the Study of Judaism in the Persian , Hellenistic and Roman Period. Leiden .

JSJT

Jerusalem Studies in Jewish Thought. Jérusalem .

JSS

Journal of Semitic studies. Manchester.

JThS

Journal of Theological Studies. Oxford.

JWCI

Journal of the Warburg and Courtauld Institute. London . Kairos . Zeitschrift für Religionswissenschaft und Theologie.

Kairos

Salzburg Karthago Kentron

Karthago. Revue d'archéologie africaine. Paris. Kentron . Revue du monde antique et de psychologie historique. Université de Caen .

ABRÉVIATIONS - REVUES ET PÉRIODIQUES

KFLQ KIVF

27

Kentucky Foreign Language Quarterly. Lexington. Kölner Jahrbuch für Vor- und Frühgeschichte. Berlin .

Kleio

Kleio . Tijdschrift voor oude talen en antieke kultuur. Leuven .

Kléos Kleronomia

Kléos. Revista de filosofía antiga. Rio de Janeiro. Kleronomia . Thessalonique.

Klio

Klio . Beiträge zur alten Geschichte . Berlin .

Koinonia

Koivwvía . Organo dell'Associazione di Studi tardoantichi. Napoli.

Kokalos

Káxaroç. Studi pubbl . dall'Istituto di Storia antica dell ' Università di Palermo. Roma.

Ktèma

Ktèma. Civilisations de l'Orient, de la Grèce et de Rome antiques . Strasbourg, Centre de recherche sur le Proche Orient et la Grèce antique et Groupe de recherche d'histoire romaine.

Kyklos

Kyklos. Jahrbuch des Instituts für Geschichte der Medizin an der Universität Leipzig, puis : Jahrbuch für Geschichte und Philosophie der Medizin . Leipzig.

L & G

Latina et Graeca. Zagrev.

Lampas

Lampas. Tijdschrift voor Nederlandse classici. Muiderberg.

Latomus

Latomus. Revue d'études latines. Bruxelles.

LCM

Liverpool Classical Monthly. University of Liverpool , Department of Greek .

LD

Letras de Deusto . Bilbao.

LEC

Les Études Classiques. Namur.

Leonardo

Leonardo. Rassegna bibliografica. Milano .

Lexis

Lexis. Studien zur Sprachphilosophie. Sprachgeschichte und Begriffsforschung. Lahr im B.

LF

Listy Filologické. Praha.

Libyca

Libyca . Bulletin du Service des Antiquités ( Archéologie , Épigraphie ). Alger.

Litteris

Litteris. An international critical review of the humanities published by the New society of letters at Lund . Lund.

LNV

Litterae Numismaticae Vindobonenses. Wien .

Lustrum

Lustrum . Internationale Forschungsberichte aus dem Bereich des klassischen Altertums. Göttingen .

LS

Leipziger Studien . Leipzig.

LZB

Literarisches Zentralblatt für Deutschland. Leipzig.

M & H

Medievalia et Humanistica . An American Journal for the Middle Ages and Renaissance. Boulder (Colorado ).

28

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

Maia

Maia. Rivista di letterature classiche. Bologna .

MAIB

Memorie dell'Accademia ( delle Reale Academia ) delle Scienze dell'Istituto di Bologna. Classe di Scienze morali. Bologna

MaimonStud

Maimonidean Studies. New York.

MAL

Atti della ( -1946 : Reale ) Accademia ( depuis 1921 :) nazionale dei Lincei . Memorie della classe di scienze morali e storiche dell'Accademia dei Lincei, Roma.

MALKAW

Mededelingen der Koninklijke Nederlandse Akademie van Wetenschappen. Afdeling Letterkunde . Amsterdam .

Manuscripta MARS

Manuscripta. Saint-Louis (Missouri ). Mémoires de l'Académie Roumaine (Section scientifique ). Bucarest.

MAT

Memorie dell'Accademia delle Scienze di Torino. Classe di Scienze morali , storiche e filologiche, Torino

MCr

Museum Criticum . Quaderni dell'Istituto di filologia classica dell'Università di Bologna. Roma.

MD Materiali e Discussioni per l'analisi dei testi classici. Pisa . MDAFA

Mémoires de la Délégation Archéologique Française en Afghanistan. Paris.

MDAI ( A )

Mitteilungen des Deutschen Archäologischen Instituts ( Athenische Abteilung) . Berlin .

MDAI( T)

Mitteilungen des Deutschen Archäologischen Instituts (Abteilung Istanbul) . Tübingen . Mitteilungen des Deutschen Archäologischen Instituts

MDAI( M)

( Abteilung Madrid ). Mainz . MDAI( R )

Mitteilungen des Deutschen Archäologischen Instituts (Römische Abteilung). Mainz .

MEAH

Miscelánea de estudios árabes y hebraicos. Granada.

Meander

Meander. Revue de Warszawa.

MedHist

Medical History. Welcome Institute for the History of Medicine . London.

Mediaevalia

Mediaevalia . Textos e estudos. Fundação Eng . António de Almeida . Porto .

MediaevalStud

Mediaeval Studies. Institute of mediaeval studies . Toronto.

Medioevo

Medioevo . Rivista di storia della filosofia medievale . Padova.

MedLife

Medical Life. New York .

MedPhilosPolon

civilisation du

monde

antique .

Mediaevalia Philosophica Polonorum . Académie polonaise

des sciences . Institut de la philosophie et de sociologie .

ABRÉVIATIONS - REVUES ET PÉRIODIQUES

29

Département d'histoire de la philosophie médiévale en Pologne . Wroclaw .

MedWelt

Die Medizinische Welt. Berlin .

MEFR

Mélanges d'archéologie et d'histoire . École Française de Rome. Paris . Voir pour la suite MEFRA et MEFRM .

MEFRA

Mélanges d'archéologie et d'histoire de l'École Française de Rome . Rome .

MEFRM

Mélanges de l'École Française de Rome. Moyen Âge et temps modernes. Paris .

MemCentreJPal

Mémoires du Centre Jean Palerne. Saint - Étienne .

MemSocScBord

Mémoires de la Société des Sciences physiques et naturelles de Bordeaux. Bordeaux .

MH Museum Helveticum . Revue suisse pour l'étude de l'Anti quité classique. Bâle .

MHA

Memorias de Historia Antigua . Oviedo,

MHJ

Medizin-historisches Journal. Stuttgart.

Micrologus

Micrologus. Natura, scienze e società medievali . Rivista della Società Internazionale per lo Studio del Medio Evo Latino. Turnhout.

MIDEO

Mélanges de l'Institut Dominicain d'Études Orientales. Le Caire.

Mihr

Mihr. Téhéran .

Mind Mind . A quarterly review of psychology & philosophy . London.

Minerva Minerva. Revista de filologia clásica . Valladolid . MICEG Mitteilungen des Instituts für Österreichische Geschichts forschung . Wien .

MiscAcadBerlin

Miscellanea Berolinensia ad incrementum scientiarum ex scriptis Societati Regiae Scientiarum exhibitis edita . Berlin .

MME Manuscripts of the Middle East. A Journal devoted to the study of handwritten materials of the Middle East . Leiden .

Mnemosyne

Mnemosyne. Bibliotheca Classica Batava . Leiden .

MRS Mediaeval and Renaissance Studies. London .

MS The Modern Schoolmann . A quarterly journal of philosophy, Saint- Louis ( Missouri ) .

MSB MSLC

Marburger Sitzungsberichte. Marburg. Miscellanea di Studi di Letteratura Catania.

Cristiana antica .

MSMG Marburger Schriften zur Medizingeschichte. Frankfurt am Main /Bern .

MSR Mélanges de Science Religieuse. Lille .

30

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

MT

Museum Tusculanum . København .

Mundus

Mundus. Stuttgart.

MusB Muséon

Musée Belge. Revue de philologie classique. Louvain . Le Muséon . Revue d'études orientales. Louvain .

MUSJ

Mélanges de l'Université Saint- Joseph. Beyrouth.

MW

The Muslim world . A quarterly review of history, culture , religions and the Christian mission in Islamdom. Hartford (Conn . ) .

NAWG

Nachrichten von der Akademie der Wissenschaften in Göttingen , Philologisch - historische Klasse . Göttingen . (Avant 1941: NGG )

ND

Nuovo Didaskaleion . Catania.

NGG

Nachrichten von der Gesellschaft der Wissenschaften zu Göttingen . Philologisch - historische Klasse . Göttingen . (Pour la suite, voir NAWG ).

1894-1940 .

Nova Tellus

Nova Tellus. Anuario del Centro de Estudios clásicos . Mexico.

NR

Die Neue Rundschau. Frankfurt am Main.

NRFH

Nueva Revista de Filología Hispánica. México .

NRL

Nouvelles de la République des Lettres. Napoli.

NSchol

The New Scholasticism . Baltimore .

NT

Novum Testamentum . An international quarterly for New Testament and related studies . Leiden .

NTS

New Testament Studies. An international journal published quarterly under the auspices of Studiorum Novi Testamenti Societas. Cambridge.

NumChron

Numismatic Chronicle and journal of the Royal numismatic society. London.

Numen

Numen . International review for the history of religions. Leiden .

Numisma

Numisma. Revista de la Sociedad ibero -americana de Estu dios numismáticos. Madrid .

OC

Oriens Christianus . Hefte für die Kunde des christlichen Orients. Wiesbaden .

OCP

Orientalia Christiana Periodica . Roma.

OLP

Orientalia Lovaniensia Periodica . Louvain.

OLZ

Orientalistische Literaturzeitung. Berlin.

OM

Oriente Moderno. Roma.

Oriens

Oriens . Journal de la Société internationale d'études orien tales . Leiden .

--

ABRÉVIATIONS - REVUES ET PÉRIODIQUES

31

Orientalia

Orientalia . Commentarii periodici Pontificii Instituti Biblici . Roma .

ORom

Opuscula Romana . Annual of the Swedish Institute in Rome . Jonsered .

Orpheus

Orpheus. Rivista di umanità classica e cristiana. Catania.

OS

Orientalia suecana . Uppsala.

OSAPH

Oxford Studies in Ancient Philosophy. Oxford.

Osiris

Osiris . Studies on the history and philosophy of science and on the history of learning and culture ( puis : Commenta tiones de scientiarum et eruditionis historia rationeque ). Supplément de la revue Isis. Bruges. cf. PraktAkadAth .

PAA PAAAS

Proceedings of the American Academy of Arts and Sciences. Boston.

PAAJR Proceedings of the American Academy for Jewish Research . New York .

PACPhA

Proceedings of the American Catholic Philosophical Asso ciation. Washington .

PagStorMed Paideia

Pagine de Storia della Medizina . Roma . Paideia . Rivista letteraria di informazione bibliografica. Roma.

PalEQ

Palestine Exploration Fund. Quarterly statement. London .

Pallas Pallas. Revue interuniversitaire d'études antiques . Toulouse .

PAPS Proceedings of the American Philosophical Society . Philadelphia.

Parnassos Παρνασσός. Φιλολογικό περιοδικό. Αthenes .

Parousia Παρουσία .

Επιστημονικό περιοδικό του Συλλόγου

Διδακτικού Προσωπικού Φιλοσοφικής Σχολής Παν επιστημίου Αθηνών. Αthenes .

PAS Proceedings of the Aristotelian Society . London .

PBA Proceedings of the British Academy. Oxford .

PBSA Papers of the British School at Athens. London .

PBSR Papers of the British School at Rome. London .

PCPHS Proceedings of the Cambridge Philological Society. Cambridge .

Pensamiento Pensamiento . Revista de investigación e información filo sófica. Madrid .

Ph & Rh Philosophy and Rhetoric . University Park ( Pennsylvania ).

PhilolClass Philologia Classica. Saint-Pétersbourg.

32

Philologus PhilolRschau

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES Philologus. Zeitschrift für klassische Philologie. Berlin . Philologische Rundschau. Bremen .

PhilosAnt

Philosophie Antique . Problèmes , renaissances, usages . Villeneuve -d'Ascq.

PhilosJb

Philosophisches Jahrbuch. Auf Veranlassung und mit Unterstützung der Görres Gesellschaft herausgegeben ... Fulda.

Philosophia

Φιλοσοφία . Επετηρίς του Κέντρου ελληνικής φιλοσοφίας. Αthenes .

Philosophy

Philosophy. The journal of the Royal ( puis : British ) institute of philosophy. London .

Philos PhilosStud

Philosophical quarterly. Saint Andrews.

PhM Phoenix

Philosophische Monatshefte. Berlin /Leipzig /Heidelberg. The Phoenix. The Journal of the Classical association of Canada. Toronto .

ερεύνης

της

Philosophical studies. An international journal for philo sophy in the analytic tradition. Dordrecht.

PhR

Philosophical Review . New York .

Phronesis

Phronesis. A Journal for ancient philosophy. Assen .

PhStud

Philosophische Studien . Leipzig.

PhW

Philologische Wochenschrift. Leipzig. ( Suite de BPhW .)

Physis

Physis. Rivista di storia della scienza . Firenze.

PI

Le Parole e le Idee. Rivista internazionale di varia cultura . Napoli.

Platon

Πλάτων . Δελτίον της Εταιρείας Ελλήνων Φιλολόγων . Athènes .

POC

Proche - Orient Chrétien . Jérusalem .

Polemôn

Πολέμων. Αρχαιολογικών περιοδικόν. Αthenes. Parole de l'Orient. Université Saint-Esprit. Kaslik. La Parola del Passato . Rivista di studi antichi. Napoli.

POr PP PPol

Il Pensiero Politico . Rivista di storia delle idee politiche e sociali. Firenze .

PraktAkadAth

Πρακτικά της Ακαδημίας εν Αθήναις. Αthenes .

PraktArch Et

Πρακτικά της εν Αθήναις Αρχαιολογικής Εταιρείας . Athènes .

PRIA

Proceedings of the Royal Irish Academy. Dublin . Preussische Jahrbücher. Berlin .

Pr ) Prometheus

Prometheus . Rivista quadrimestrale di studi classici . Firenze .

Prudentia

Prudentia . A journal devoted to the intellectual history of the ancient world . Auckland .

ABRÉVIATIONS - REVUES ET PÉRIODIQUES

33

PSBA

Proceedings of the Society of Biblical Archaeology. London. Pour la suite , voir Journal of the Royal Asiatic Society.

Pyrenae

Pyrenae. Barcelona.

QFC

Quaderni di Filologia Classica dell'Università di Trieste , Istituto di Filol. class. Roma.

QFL

Quaderni di Filologia Latina. Firenze.

QIRAS

Quarterly Journal of the Royal Astronomical Society. London .

QJS

Quarterly Journal of Speech . New York .

QS

Quaderni di Storia . Rassegna di antichità redatta nell'Isti tuto di storia greca e romana dell'Università di Bari. Bari.

QSGN

Quellen und Studien zur Geschichte wissenschaften und der Medizin. Berlin.

QSIGM

der

Natur

Quellen und Studien zur Geschichte der Mathematik , Astro nomie und Physik. Berlin .

QuadArcheollib

Quaderni di Archeologia della Libia . Roma.

QuadAugRostagni Quaderni del Dipartimento di filologia, linguistica e tradizione classica Augusto Rostagni. Bologna.

QUCC

Quaderni Urbinati di Cultura Classica . Roma.

R& T

Recherches et Travaux. Angers.

RA

Revue Archéologique. Paris.

RAAN

Rendiconti dell'Accademia di Archeologia, Lettere e Belle Arti di Napoli. Napoli.

RABM

Revista de Archivos, Bibliotecas y Museos. Madrid .

RAS

Revue Africaine. Journal des travaux de la Société historique algérienne. Alger.

RAL

Atti della (-1946 : Reale ) Accademia (depuis 1921 :) nazio nale dei Lincei . Rendiconti della classe di scienze morali, storiche e filologiche dell'Accademia dei Lincei. Roma.

RAM

Revue d'Ascétique et de Mystique ( devenue en 1972 Revue d'Histoire de la Spiritualité ). Toulouse , puis Paris.

Ramus

Ramus . Critical studies in Greek and Roman literature . Victoria (Australia ).

RAN

Revue Archéologique de Narbonnaise. Paris.

RBen

Revue Bénédictine. Abbaye de Maredsous, Belgique .

RBi

Revue Biblique . Paris .

RBNum

Revue Belge de Numismatique. Bruxelles.

RBPH

Revue Belge de Philologie et d'Histoire. Mechelen .

RCCM

Rivista Critica di Clinica Medica . Firenze.

RCr

Revue Critique. Paris.

34

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

RDAC

Report of the Department of Antiquities, Cyprus. Nicosia.

REA

Revue des Études Anciennes. Talence .

REAug

Revue des Études Augustiniennes. Paris.

REByz

Revue des Études Byzantines. Paris.

REC

Revista de estudios clásicos. Mendoza, Argentina.

RecSR

Recherches de Science Religieuse . Paris.

REFM

Revista española de filosofía medieval. Sociedad de Filo sofía Medieval ( SOFIME ) . Zaragoza .

REG

Revue des Études Grecques . Paris.

REGC

Revue des Études Géorgiennes et Caucasiennes. Paris. Suite de Bedi Karthlisa . Revue de kartvélologie ( Études géor giennes et caucasiennes ) . Destin de la Géorgie, paru de 1948 à 1984 .

REISI

Revue des Études Islamiques. Paris .

REJ

Revue des Études Juives . Louvain .

REL

Revue des Études Latines. Paris .

RelStud

Religious Studies. Cambridge .

RenQ

Renaissance Quarterly . Renaissance Society of America . New York .

REPh

Revue de l'Enseignement Philosophique. Aurillac .

RESE

Revue des Études Sud -est - Européennes. Bucarest.

RevAcadArDamas Revue de l'Académie Arabe de Damas . Damas . RevFilos(Madrid )

Revista de Filosofía (Madrid ). Instituto de Filosofía Luis Vives . Madrid .

RevHist Philos

Revue d'Histoire de la Philosophie. Lille .

Revue

Revue. Informatique et statistiques dans les sciences humaines. Liège .

RevueMaritime

Revue Maritime . Informations, actualités , documentation maritime ( = Revue maritime et coloniale ). Paris.

RevUnivComplut

Revista de la Universidad Complutense. Madrid .

RevHisp Rhetorica

Revue Hispanique. Paris , puis New York . Rhetorica. A Journal of the History of Rhetoric . Berkeley .

RF

Rivista di Filosofia. Torino.

RFIC

Rivista di Filologia e di Istruzione Classica. Torino / Firenze/ Roma . De 1914 à 1949 a paru sous le titre de : Rivista di filologia classica .

REN

Rivista di Filosofia Neoscolastica. Milano .

RGI

Rivista Geographica Italiana . Firenze.

RHLL

Revista de Historia. La Laguna.

RUM

Rheinisches Museum für Philologie. Frankfurt am Main .

ABRÉVIATIONS - REVUES ET PÉRIODIQUES RHPR

Revue d'Histoire et de Philosophie Religieuses. Paris.

RHR RHT

Revue de l'Histoire des Religions. Paris. Revue d'Histoire des Textes. Paris.

35

Rickel

Ricerche Religiose. Rivista di studi storico - religiosi. Roma .

RIDA

Revue Internationale des Droits de l'Antiquité. Bruxelles.

RIGI

Rivista Indo -Greco - Italica di filologia, lingua, antichità . Napoli.

RIL

Rendiconti dell'Istituto Lombardo. Classe di lettere, scienze morali e storiche. Milano.

RIMA

Revue de l'Institut des Manuscrits Arabes. Le Caire.

Rinascimento

Rinascimento . Rivista dell'Istituto nazionale di studi sul Rinascimento . Firenze.

RIO

Revue Internationale d'Onomastique. Paris.

RIPh

Revue Internationale de Philosophie. Paris. Rivista di Archeologia . Roma.

RivArcheol RivBibl

Rivista Biblica . Organo dell'Associazione Biblica italiana . Roma/ Firenze .

RivCultClass Med

Rivista di Cultura Classica e Medioevale . Roma

RivStorMed

Rivista di Storia della Medicina . Roma.

RLComp

Revue de littérature comparée. Paris. Revue du Moyen Age Latin . Strasbourg.

RMAL RMetaph

Review of Metaphysics. A philosophical quarterly. New Haven .

RMM

Revue de Métaphysique et de Morale . Paris.

RNeosc

Revue Néoscolastique de philosophie publiée par la Société philosophique de Louvain . Louvain ( suite : RPHL ).

RN

Revue Numismatique. Paris.

RO

Rocznik Orientalistyczny. Polska Akademia Nauk , Komitet

ROC

Nauk Orientalistycznych. Warszawa. Revue de l'Orient Chrétien . Paris.

Romanitas

Romanitas. Revista de Cultura Romana ( Língua , Instituições e Direito ). Rio de Janeiro .

RPAA

Rendiconti della Pontificia Accademia di Archeologia . Roma.

Rph

Revue de Philologie, de littérature et d'histoire anciennes . Paris.

RPHA RPhilos

Revue de Philosophie Ancienne. Bruxelles.

RPHL

RPL

Revue Philosophique de la France et de l'étranger. Paris. Revue Philosophique de Louvain . Louvain . Res Publica Litterarum . Studies in the classical tradition . Lawrence.

36

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

RQA

Römische Quartalschrift für christliche Altertumskunde und für Kirchengeschichte. Freiburg im Breisgau.

RSA

Rivista Storica dell'Antichità . Bologna.

RSBN

Rivista di Studi Bizantini e Neoellenici. Roma .

RSC

Rivista di Studi Classici. Torino.

RSCF

Rassegna di Scienze Filosofiche. Napoli.

RSEL

Revista española de Lingüística. Madrid .

RSF

Rivista critica di Storia della Filosofia . Firenze .

RSLR

Rivista di Storia e Letteratura Religiosa. Firenze.

RSO

Rivista degli Studi Orientali. Roma.

RSPT

Revue des Sciences Philosophiques et Théologiques. Paris.

RSR

Revue des Sciences Religieuses. Strasbourg .

RT

Revue Thomiste . Toulouse .

RTAM

Recherches de Théologie Ancienne et Médiévale . Louvain .

RThPh

Revue de Théologie et de Philosophie. Lausanne.

RTSFR

Rivista Trimestrale di Studi Filosofici e Religiosi. Perugia.

RVF

Revista Venezolana di Filosofía. Caracas.

Saeculum

Saeculum . Jahrbuch für Universalgeschichte . Freiburg im Breisgau .

SAfrMed ] Salesianum

South African Medical Journal. Le Cap. Salesianum . Theologiae . Iuris canonici . Philosophiae . Paedagogiae . Roma.

SAWW

Sitzungsberichte der Österreischischen Akademie der Wissenschaften in Wien, Philosophisch - historische Klasse . Wien .

SBAW

Sitzungsberichte der Bayerischen Akademie der Wissen schaften , Philosophisch -historische Klasse . München .

ScCatt

La Scuola Cattolica. Rivista di scienze religiose. Milano.

Scholastik

Scholastik (devenue par la suite Theologie und Philosophie ). Freiburg im Breisgau.

SCI

Scripta Classica Israelica. Yearbook of the Israel Society for the promotion of classical studies . Jerusalem .

SCO

Studi Classici e Orientali. Pisa .

Scriptorium

Scriptorium . Revue internationale des études relatives aux manuscrits . Anvers /Amsterdam /Bruxelles.

ScrPhil

Scripta Philologa. Milano .

ScrTheol

Scripta Theologica. Cura Ordinum Theologorum Scandina vicorum edita. Lund .

SDHI

Studia et Documenta Historiae et luris. Roma.

ABRÉVIATIONS - REVUES ET PÉRIODIQUES

37

Sefarad

Sefarad. Revista de la Escuela de estudios hebráicos ( puis :

SEJG

Revista del Instituto Arias Montano de estudios hebraicos y Oriente próximo ). Madrid /Barcelona. Sacris Erudiri. Jaarboek voor Godsdienstwetenschappen .

SGM

Studien zur Geschichte der Medizin . Leipzig.

SHAW

Sitzungsberichte der Heidelberger Akademie der Wissen schaften, Philosophisch -historische Klasse . Heidelberg.

SHAW ( M )

Sitzungsberichte der Heidelberger Akademie der Wissen schaften , Math . -naturwiss. Klasse. Heidelberg.

SI

Studia Islamica. Paris.

SicGymn

Siculorum Gymnasium . Rassegna semestrale della Facoltà di lettere e filosofia dell'Università di Catania. Catania .

Steenbrugge.

SIFC

Studi Italiani di Filologia Classica. Firenze.

Sileno

Sileno. Rivista di studi classici e cristiani. Roma.

SMGB

Studien und Mitteilungen zur Geschichte des Benediktiner Ordens und seiner Zweige. Sankt Ottilien .

SO

Symbolae Osloenses, auspiciis Societatis Graeco - Latinae. Oslo.

Sokrates

Sokrates. Zeitschrift für das Gymnasialwesen. Berlin.

Sophia

Sophia. Rivista internazionale di fonti e studi di storia della filosofia. Roma/Napoli /Padova.

SPAW

Sitzungsberichte der ( -1944 : Preußischen, puis :) Deutschen Akademie der Wissenschaften zu Berlin , Philosophisch historische Klasse. Berlin .

Speculum

Speculum . A journal of mediaeval studies . Mediaeval Academy of America. Cambridge (Mass .).

Sph

Studies in Philology, Chapel Hill .

SPG

Studia Philosophica Gandansia. Gand.

SPhP

Symbolae Philologorum Posnanensium . Poznań.

SPhs

Studia Philologica Salmanticensia . Salamanca.

SR

Studies in Religion - Sciences Religieuses. Canadian Corpo ration for Studies in Religion /Corporation Canadienne des Sciences Religieuses. Waterloo, Ont .

SRen

Studies in the Renaissance . New York . (Cette revue a cessé de paraître avec le tome 21 en 1974 ; pour la suite voir RenQ . )

StudClas

Studii Clasice . Soc. de Studii clasice din RSR . Bucureşti.

StudFilos

Studi filosofici. Annali dell'Istituto orientale di Napoli . Napoli.

StudHistPhilSc

Studies in History and Philosophy of Science. Oxford /New York .

38

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

Studiran

Studia Iranica. Institut français d'iranologie de Téhéran . Paris/ Téhéran.

StudMed

Studi Medievali. Torino.

StudMedRenHist

Studies in Medieval and Renaissance History. New York.

StudPat

Studia Patavina . Rivista di scienze religiose. Padova.

StudUrb ( Ser. B)

Studi Urbinati di Storia , Filosofia e Letteratura . Urbino.

SyllClass

Syllecta Classica . University of Iowa.

Symposium

Symposium . Syracuse ( New York ).

Syria

Syria. Revue d'art oriental et d'archéologie. Paris.

TAPHA

Transactions and Proceedings of the American Philological Association . Lancaster (Pennsylvania ).

TAPHS

Transactions of the American Philosophical Society. Philadelphia (Pennsylvania ).

Taula

Taula . Cuaders de pensament . Universitat de les Illes Balears.

Temenos

Temenos. Studies in comparative religion presented by scholars in Denmark , Finland , Norway and Sweden . Helsinki.

TF

Tijdschrift voor Filosofie. Utrecht.

Th & G

Theologie und Glaube. Paderborn.

Th & Ph

Theologie und Philosophie. Freiburg im Breisgau.

Theoria

Theoria . A Swedish journal of philosophy . Stockholm .

ThLZ

Theologische Literaturzeitung. Berlin .

Thomist

The Thomist. A speculative quarterly of theology and philosophy... Baltimore .

ThQ

Theologische Quartalschrift. München .

ThR

Theologische Rundschau. Tübingen

ThStKr

Theologische Studien und Kritiken , Gotha .

ThZ

Theologische Zeitschrift. Basel .

TM

Travaux et mémoires. Paris .

Topoi Traditio

Tónoi. Orient-Occident. Lyon /Paris. Traditio. Studies in ancient and medieval history, thought and religion . New York.

TV

Teologia y Vida. Publicación de la Facultad de Sagrada teologia de la Universidad catolica de Chile . Santiago.

UCP

University of California Publications in Classical Philology. Berkeley CA.

Ur

Ur. Iraqi Cultural Center. London .

VChr

Vigiliae Christianae. A review of early christian life and language. Amsterdam .

-

ABRÉVIATIONS - REVUES ET PÉRIODIQUES

39

VDI

Вестник древней истории ( Vestnik Drevnej Istorii]. ). Revue d'Histoire ancienne. Moskva.

VerbDom

Verbum Domini. Commentarii de Re Biblica . Roma.

Verbum

Verbum . Revue de linguistique publiée par l'Université de Nancy II .

VetChr

Vetera Christianorum . Istituto di Letteratura cristiana antica. Bari.

Viator

Viator. Medieval and Renaissance studies . Berkeley.

Vichiana Vivarium

Vichiana. Rassegna di studi filologici e storici. Napoli. Vivarium . A journal for mediaeval philosophy and the intellectual life of the Middle Ages. Leiden .

VKF

Voprosy klassideskij Filologii. Moskva.

VL

Vita Latina. Avignon .

VLU

Vestnik Leningradskogo Universiteta /Filosofija. Leningrad.

VNGZ

Vierteljahrsschrift der Naturforschenden Gesellschaft in Zürich . Zürich .

WE

Wiener Eranos. Wien .

WJA

Würzburger Jahrbücher für die Altertumswissenschaft. Würzburg

WKPh

Wochenschrift für Klassische Philologie. Berlin .

WS

Wiener Studien . Zeitschrift für klassische Philologie und Patristik . Wien .

WZJena

Wissenschaftliche Zeitschrift der Friedrich - Schiller-Univer sität Jena, Gesellschafts- und sprachwissenschaftliche Reihe. Jena.

WZLeipzig

Wissenschaftliche Zeitschrift der K.- Marx - Universität Leipzig. Leipzig

WZRostock

Wissenschaftliche Zeitschrift der Universität Rostock . Gesellschafts- und sprachwissenschaftliche Reihe. Rostock .

YCIS

Yale Classical Studies. New Haven .

ZAS

Zeitschrift für Ägyptische Sprache und Altertumskunde. Berlin .

ZAnt

Živa Antika. Antiquité vivante. Skopje.

ZASS

Zeitschrift für Assyriologie und verwandte Gebiete. Leipzig Weimar /Berlin .

ZATW

Zeitschrift für die Alttestamentliche Wissenschaft. Berlin .

ZDA

Zeitschrift für deutsches Alterthum ( puis : und deutsche Literatur ). Leipzig puis Berlin .

ZDMG

Zeitschrift der Deutschen Morgenländischen Gesellschaft. Wiesbaden .

40

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

ZfP

Zeitschrift für Politik . Organ d. Hochschule für politische Wissenschaften München . Berlin.

ZGAIW

Zeitschrift für Geschichte der Arabisch - Islamischen Wissen schaften . Institut für Geschichte der Arabisch - Islamischen Wissenschaften an der Johann Wolfgang Goethe-Univer sität. Frankfurt am Main .

ZKG

Zeitschrift für Kirchengeschichte. Stuttgart.

ZKT ,

Zeitschrift für Katholische Theologie. Wien . Zeitschrift für Numismatik. Berlin .

ZN

ZNTW

Zeitschrift für Neutestamentliche Wissenschaft und die Kunde des Urchristentums. Berlin .

ZPE

Zeitschrift fürPapyrologie und Epigraphik . Bonn .

ZPhF

Zeitschrift für Philosophische Forschung. Meisenheim .

ZRG

Zeitschrift der Savigny -Stiftung für Rechtsgeschichte . Romanistische Abteilung. Wien .

ZSVG

Zeitschrift für Semitistik und verwandte Gebiete. Deutsche Morgenländische Gesellschaft. Leipzig.

ZWTh

Zeitschrift für die Wissenschaftliche Theologie. Iena.

-

ABRÉVIATIONS - OUVRAGES DE RÉFÉRENCE

41

II . Collections, dictionnaires et ouvrages de référence ACA

The Ancient Commentators on Aristotle, a series of english translations with introductions and indexes, London / Ithaca (N. Y. ) .

ACO

Acta Conciliorum Ecumenicorum, ed . E. Schwartz, Berlin 1914 - .

ANF

Ante - Nicene Fathers, Buffalo /New York .

ANL

Ante-Nicene Christian Library, Edinburgh 1864 - .

ANRW

Aufstieg und Niedergang der römischen Welt. Geschichte und Kultur Roms im Spiegel der neueren Forschung, Berlin .

AugLex

Augustinus -Lexikon , Basel 1986 - .

AvP

Altertümer von Pergamon , Berlin/Leipzig 1885 – .

BA

Coll . « Bibliothèque augustinienne » , Paris.

BBK

Friedrich Wilhelm Bautz et Traugott Bautz (édit . ) , Biogra phisch - Bibliographisches Kirchenlexikon , Hamm , Westf. , puis Herzberg 1970 - .

BEFAR Coll . « Bibliothèque des Écoles françaises d'Athènes et de Rome » , Paris .

BHG

Bibliotheca Hagiographica Graeca, 3e éd . , Bruxelles 1957 .

BMC

Catalogue of the Greek coins in the British museum , London 1873-1927 , réimpr. Bologna 1979 - .

BT Coll . « Bibliotheca Scriptorum Graecorum et Romanorum Teubneriana » , Leipzig /Stuttgart. BUL Biblioteca Universale Laterza, Roma/Bari.

CAG Commentaria in Aristotelem Graeca , edita consilio et auctoritate Academiae Litterarum Regiae Borussicae, Berlin 1891-1909.

CAGL Commentaria in Aristotelem Graeca : versiones Latinae temporis resuscitatarum litterarum , hrsg . von Charles [H.] Lohr.

Catholicisme Catholicisme, hier, aujourd'hui , demain . Encyclopédie publiée sous le patronage de l'Institut Catholique de Lille , Paris .

CCAG Coll . « Catalogus Codicum Astrologorum Graecorum » , t . I XII , Bruxelles 1898-1953 .

CCCM Coll . « Corpus Christianorum » , Series Continuatio Mediae valis , Turnhout 1971 - .

CCG Coll . « Corpus Christianorum » , Series Graeca , Turnhout 1977 -

42

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

CCL

Coll . « Corpus Christianorum » , Series Latina, Turnhout 1953- .

CFHB

Corpus Fontium Historiae Byzantinae consilio societatis internationalis studiis byzantinis provehendis destinatae editum.

CGFr

Comicorum Graecorum Fragmenta, ed . G. Kaibel, Berlin 1899.

CGL

Corpus Glossariorum Latinorum , a G. Loewe incohatum ed . G. Götz , Leipzig 1888-1923 , 7 vol . ; réimpr. Amsterdam 1964.

CIG

Corpus Inscriptionum Graecarum . 4 vol . , Berlin 1828-1859 .

CIL

Corpus Inscriptionum Latinarum , Berlin 1863- .

CLCAG

Coll . « Corpus Latinum Commentariorum in Aristotelem Graecorum » , Paris/Louvain . Supplementa, Paris, Louvain , Leiden .

CMAG

Coll . « Catalogue des Manuscrits Alchimiques Grecs » , Bruxelles 1924-1932 .

CMG

Coll . « Corpus Medicorum Graecorum » , Leipzig/Berlin 1908

CML

Coll . « Corpus Medicorum Latinorum » , Leipzig/Berlin 1915-1928 ; 1963

CPF

Corpus dei papiri filosofici greci e latini. Testi e lessico nei papiri di cultura greca e latina, Parte I : Autori Noti, vol . 1 * , Firenze 1989 ; 1 ** , Firenze 1992 ; 1 *** , Firenze 1999 ; Parte III : Commentari, 1995 ; vol. 4, 1-2 : Indici . Tavole , firenze 2002.

CPG

Clavis Patrum Graecorum , éd . M. Geerard , 5 vol . , Turnhout 1974-1987 .

CPGS

Clavis Patrum Graecorum - Supplementum , cura et studio M. Geerard et J. Noret, Turnhout 1998 .

CPL

Clavis Patrum Latinorum , éd . E. Dekkers ( 1961 ) , 2e éd . , Steenbrugge 1961 , XXVIII-640 . Coll . « California Studies in Classical Antiquity » , Berkeley .

CSCA CSCO

Corpus Scriptorum Christianorum Orientalium , ed . I. B. Chabot , I. Guidi (et alii) , Paris , Leipzig , Louvain , 1903 - .

CSEL

Coll . « Corpus Scriptorum Ecclesiasticorum Latinorum » , Wien 1866 - .

CSHB CUF

Corpus Scriptorum Historiae Byzantinae, Bonn 1828-1897.

DAGR

C. Daremberg et E. Saglio (édit. ) , Dictionnaire des Anti quités Grecques et Romaines, Paris 1877-1919 .

« Collection des Universités de France >>, Paris.

ABRÉVIATIONS - OUVRAGES DE RÉFÉRENCE

43

DCB

A Dictionary of Christian biography, literature, sects and doctrines, edited by W. Smith and H. Wace, London 1877 1887 , 4 vol . ; réimpr. New York 1984 .

DDG

H. Diels ( édit . ) , Doxographi Graeci collegit recensuit prolegomenis indicibusque instruxit H.D. , Berlin 1879 , réimpr. Berlin 1958 , X -854 p.

DECA

Dictionnaire encyclopédique du christianisme ancien , adapt. française sous la dir. de François Vial , Paris 1990 - ; édition italienne originale du DPAC .

Dessau

voir ILS.

DGRB

Dictionary of Greek and Roman Biography and mythology, edited by W. Smith , London 1853-1856, 3 vol .

DHGE

Dictionnaire d'Histoire et de Géographie Ecclésiastique, éd. A. Baudrillart, Paris 1912- .

DHI

Dictionary of the history of ideas : studies of selected pivotal ideas, edited by Philip P. Wiener, New York 1973-1974.

DK

Diels H. ( édit . ) , Die Fragmente der Vorsokratiker. Griechisch und Deutsch von H.D. ( 1903 ), 6. verbesserte Auflage, herausgegeben von W. Kranz , t . I , Zürich 1951 , XII- 504 p . ; t . II , Zürich 1952 , 428 p . ; t . III : Wortindex, Namen- und Stellenregister, Zürich 1952, 660 p.

DPAC

Angelo Di Berardino ( édit . ) , Dizionario patristico e di antichità cristiane , Casale Monferrato 1983-1988 , comprend : vol . 1 : A - F ; vol . 2 : G - Z ; vol . 3 : Atlante patristico, indici.

DPhA

Dictionnaire des Philosophes Antiques , publié sous la direction de R. Goulet, Paris 1989 - .

DSB

Dictionary of Scientific Biography, New York 1970-1980.

DSp

Dictionnaire de Spiritualité, éd. M. Viller, Paris 1932- .

DTC

Dictionnaire de Théologie Catholique, éd . A. Vacant, E. Mangenot et E. Amann , Paris 1903-1950 .

EAA

Enciclopedia dell'Arte Antica classica e orientale, Roma 1958-1984

EF

Encyclopédie de l'Islam . Nouvelle édition , Leiden /New York /Köln /Paris 1960- .

Enciran

Encyclopaedia iranica, London /Boston 1982- .

EncJud

Encyclopaedia Judaica, Jerusalem .

EPRO

Coll . « Études préliminaires aux religions orientales dans l’Empire romain » , Leiden 1961-1990 .

FAC

J.M. Edmonds ( édit. ), The Fragments of Attic Comedy, after Meineke, Bergk and Koch , augmented , newly edited with

44

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES their contexts , annotated and completely translated into English verse by J.M.E. , Leiden 1957-1961.

FD

Fouilles de Delphes, t. III : Épigraphie, Paris 1929 - .

FGrHist

F. Jacoby , Die Fragmente der griechischen Historiker, t. I III C 2 , Berlin/Leiden , 1923-1958 ; « vermehrte Neu drucke » , Leiden 1954- .

FHG

Fragmenta Historicorum Graecorum , edd . C. und Th . Muller, 5 vol . , Paris 1841-1870 .

FIRA

S. Riccobono, J. Baviera, V. Arangio - Ruiz et alii ( édit. ), Fontes Iuris Romani Anteiustiniani ( Leges, auctores, leges saeculares ), in usum scholarum [ 1908 ) , 2e éd . , Firenze 1940-1943, 3 vol .

FPhG

Fragmenta Philosophorum Graecorum , ed. F. W.A. Mullach , 3 vol . , Paris 1860-1881.

GAL , S. I , II , III

C. Brockelmann , Geschichte der Arabischen Litteratur, t. I, Weimar 1898 ; t. II , Berlin 1902 ; Suppl. I , II , III . Leiden 1937-1942 .

GAS

Geschichte des arabischen Schrifttums. Leiden 1967 - . Le t . XII : Mathematische Geographie und Kartographie im Islam und ihr Fortleben im Abenland : Kartenband von F. Sezgin, est paru en 2000.

GCS

Coll . « Die griechischen christlichen Schriftsteller der ersten (drei) Jahrhunderte » , Berlin 1897- .

GGLA

F. Susemihl , Geschichte der griechischen Litteratur in der Alexandrinerzeit, t . I , Leipzig 1891 , XV1-907 p . ; t. II , Leipzig 1892 , XVI-771 p .

GGM

Geographi Graeci Minores, ed . C. Muller. 2 vol . et 1 atlas , Paris 1855-1861 .

GGP, Antike2 / 1

Fr. Überweg , Grundriss der Geschichte der Philosophie, Völlig neubearbeitete Ausgabe, Die Philosophie der Antike, Band 2/1 : Sophistik, Sokrates - Sokratik, Mathematik, Medizin , von K. Döring , H. Flashar, G.B. Kerferd, C. Osing -Grote , H.-J. Washkies ; hrsg . von H. Flashar, Basel/ Stuttgart 1998 , XIV -540 p .

GGP, Antike3

Fr. Überweg , Grundriss der Geschichte der Philosophie, Völlig neubearbeitete Ausgabe, Die Philosophie der Antike, Band 3 : Ältere Akademie – Aristoteles – Peripatos, heraus gegeben von Hellmut Flashar, Basel/ Stuttgart 1983 , XXII 645 p .

GGP, Antike4

Fr. Überweg, Grundriss der Geschichte der Philosophie, Völlig neubearbeitete Ausgabe , Die Philosophie der Antike, Band 4 : Die hellenistische Philosophie, von M. Erler, H. Flashar, G. Gawlick , W. Görler und P. Steinmetz, hrsg.

ABRÉVIATIONS - OUVRAGES DE RÉFÉRENCE

45

von H. Flashar, Basel/Stuttgart 1994, XXVI - 1272 p . en deux volumes

GRF

Grammaticae Romanae Fragmenta, éd . H. Funaioli , coll . BT, t . I ( seul paru ), Leipzig 1907, XXXII -614 p .

HLL

Handbuch der lateinischen Literatur der Antike, heraus gegeben von R. Herzog ( † ) und P. L. Schmidt , coll . « Handbuch der Altertumswissenschaften » , München 1989 - Traduction française : NHLL = Nouvelle histoire de la littérature latine. Éd. française sous la dir. de G. Nauroy, Turnhout/Paris, 1993 - .

HWPh

J. Ritter et K. Gründer (édit . ) , Historisches Wörterbuch der Philosophie, völlig neubearb . Ausg . des Wörterbuchs der philosophischen Begriffe von R. Eisler, Basel/Stuttgart 1971 -

IBM

Ancient Greek Inscriptions in the British Museum , Oxford 1874-1916 , 4 vol . , index .

ID

Inscriptions de Délos, Paris 1926-1972 , 7 vol .

IG

Inscriptiones Graecae, consilio et auctoritate Academiae Litterarum (Regiae) Borussicae. Ed. maior, Berlin 1873 - .

IG ?

Inscriptiones Graecae, editio minor, Berlin 1913- .

IGR

Inscriptiones Graecae ad res Romanas pertinentes, ed . R. Cagnat, J. Toutain (et alii), Paris 1906-1927.

IGUR

L. Moretti (édit . ) , Inscriptiones Graecae Urbis Romae, coll . « Studi pubblicati dall'Istituto Italiano per la storia antica » 17 , 22 ( 1-2 ) , 28 , Roma 1968 , 1973 et 1979 .

IK

Coll . « Inschriften griechischen Städte Kleinasien » , Bonn .

ILS

H. Dessau (édit .), Inscriptiones Latinae Selectae, 3 tomes en 5 vol . , Berlin 1892-1916, réimpr. Berlin 1954-1955 .

KP

Der Kleine Pauly. Lexikon der Antike auf der Grundlage von Pauly's Realencyclopädie der classischen Altertums wissenschaft unter Mitwirkung zahlreicher Fachgelehrter bearbeitet und herausgegeben von K. Ziegler und W. Sontheimer, 5 vol . , Stuttgart 1964-1975 .

LAA

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Lexicon of Greek Personal Names, t. I : The Aegean islands, Cyprus, Cyrenaica , by P. M. Fraser et E. Matthews , Oxford

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DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES 1987 ; t. II : Attica , ed . by M. J. Osborne and S. G. Byrne, Oxford 1994 ; t. III A : The Peloponnese, Western Greece, Sicily and Magna Graecia , ed . by P. M. Fraser and E. Matthews, Oxford 1997 ; t. III B : Central Greece : From the Megarid to Thessaly, ed . by P. M. Fraser and E. Matthews, Oxford 2000 .

LIMC

Lexicon Iconographicum Mythologiae Classicae, Zürich / München 1981- .

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A Greek - English Lexicon , compiled by H. G. Liddell and R. Scott, revised and augmented throughout by H. S. Jones with the assistance of R. McKenzie , with a Supplement 1968 ( remplaçant les Addenda et corrigenda de la 9e éd. de 1940 ), Oxford 1968 ; nouvelle édition , « with a revised supplement 1996 » , Oxford 1996.

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Lexikon für Theologie und Kirche, Freiburg im Breisgau 1930-1938 , 2e éd . , 1957-1968 .

MAMA

Monumenta Asiae Minoris Antiquae , Manchester 1928 1956 .

MGH

Monumenta Germaniae historica inde ab anno Christi quingentesimo usque ad annum millesimum et quingen tesimum , ed . Societas aperiendis fontibus Germanicarum medii aevi , Hannover 1826- .

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T. Robert S. Broughton , The magistrates of the Roman republic, with the collab . of Marcia L. Patterson , coll . « Philological monographs/ American philological associa tion » 15 , 3 volumes : Vol . I : 509 B.C.- 100 B. C. ; Vol. II : 99 B.C. - 31 B.C .; Vol . III : Supplement, Atlanta (Georgia ) 1968-1986.

MVP

H. von Fritze , Die Münzen von Pergamon , Berlin 1910, 108 p.

NHLL

Voir HLL .

NP

Der Neue Pauly. Enzyklopädie der Antike, hrsg . von H. Cancik und H. Schneider, Stuttgart /Weimar 1996-2003.

OCD

The Oxford Classical Dictionary, edited by N.G.L. Hammond and H. H. Scullard , 2e éd . , Oxford 1970 ; 3e éd . by S. Hornblower and A. Spawforth , Oxford 1996 , LIV 1640 p.

OCT

Coll. « Oxford Classical Texts » . Oxford .

OGIS

Orientis Graeci Inscriptiones Selectae, ed . W. Dittenberger,

OPA

Coll . « Les œuvres de Philon d'Alexandrie » , Paris 1961- .

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ABRÉVIATIONS - OUVRAGES DE RÉFÉRENCE

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PA

J. Kirchner, Prosopographia Attica, t. I : Berlin 1901, VIII 603 p.; t. II : Berlin 1903, VIII-660 p.

PCBE

Prosopographie chrétienne du Bas -Empire. Tome 1 : A. Mandouze (édit . ) , Prosopographie de l'Afrique chrétienne ( 303-533 ), Paris 1982. Tome II : Ch . Pietri et Luce Pietri (édit. ) , Prosopographie de l'Italie chrétienne (313-604 ), 2 vol . , Rome 1999-2000, 2435 p.

PCG

R. Kassel et C. Austin (édit . ) , Poetae Comici Graeci. Berlin 1983- .

PG

Patrologiae cursus completus..., ed . J.-P. Migne , Series Graeca, 161 volumes, Paris 1857-1866 .

PGM

Papyri Graecae Magicae. Die griechischen Zauberpapyri, ed . K. Preisendanz, 2 vol . , Leipzig /Berlin 1928-1931 .

PIR

H.

Dessau ,

E. Klebs

et

P.

von

Rohden

( édit . ) ,

Prosopographia Imperii Romani saeculorum I, II, III, Berlin 1897-1898 .

PIR2

E. Groag , A. Stein et L. Petersen (édit . ) , Prosopographia Imperii Romani saeculorum I , II , III , editio secunda , Berlin 1933- .

PL

Patrologiae cursus completus..., ed . J.-P. Migne , Series Latina, 217 vol., Paris 1844-1855 .

PLRE

Prosopography of the Later Roman Empire, t . I ( 260-395 ) : A. H. M. Jones , J. R. Martindale & J. Morris ( édit . ) , Cambridge 1971 ; t . II ( 395-527 ) : J.R. Martindale ( édit . ) , Cambridge 1980 ; t . III a et b (527-641): J.R. Martindale ( édit . ) , Cambridge 1992 .

PO

Patrologia Orientalis, ed . R. Graffin et F. Nau , Paris 1903–.

PP

Prosopographia Ptolemaica.

PTS

Coll . « Patristische Texte und Studien » , Berlin 1963 -.

RAC

Reallexikon für Antike und Christentum , ed . T. Klauser , Leipzig 1941 , puis Stuttgart 1950

RE

Paulys Realencyclopädie der classischen Altertums wissenschaft. Neue Bearbeitung begonnen von G. Wissowa, fortgeführt von W. Kroll und K. Mittelhaus unter Mitwirkung zahlreicher Fachgenossen , Stuttgart /München 1893-1972 ; Register der Nachträge und Supplement von H. Gärtner und A. Wünsch , München 1980. Voir aussi RESuppl.

RECAM

Regional Epigraphic Catalogues of Asia Minor, II : St. Mitchell. The Ankara District, The Inscriptions of North Galatia . With the assistance of David French and Jean Greenhalgh , coll . « British Archaeological International Series » 135 , Oxford 1982 .

Reports,

48

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

R ( E )PTIK

Real- Encyclopädie für Protestantische Theologie und Kirche, 3e éd. , Leipzig 1896-1913 .

RESuppl.

Paulys Realencyclopädie der classischen

Altertums

wissenschaft, Neue Bearbeitung unter Mitwirkung zahl reicher Fachgenossen , Supplementbände I - XV , 1903-1978. RGG

Die Religion in Geschichte und Gegenwart, 3e éd ., Tübingen 1957-1965 .

RUSCH

Coll . « Rutgers University Studies in Classical Humanities» , New Brunswick (U.S. A . )/Oxford .

SC

Coll . « Sources chrétiennes » , Paris 1941 - .

SEG

Supplementum Epigraphicum Graecum , Leiden , puis Amsterdam 1923- .

SGLG

Sammlung Griechischer & Lateinischer Grammatiker, hrsg. von K. Alpers, H. Erbse , A. Kleinlogel , Berlin /New York 1974 - .

SIG

W. Dittenberger ( édit. ) , Sylloge Inscriptionum Graecarum , 4 vol. , Leipzig 1883 , 3e éd. Leipzig 1915-1924.

SPB

Coll . « Studia Patristica et Byzantina » , Ettal 1953 –

SR / SSR

Giannantoni G. (édit. ) , Socraticorum Reliquiae collegit , disposuit , apparatibus notisque instruxit G.G. , (Roma/ Napoli] 1983-1985 , 4 vol . L'ensemble a été repris et élargi dans Socratis et Socraticorum Reliquiae collegit, disposuit, apparatibus notisque instruxit Gabriele Giannantoni , coll . « Elenchos » 18 , Napoli 1990 , 4 vol. Les tomes I et II (XII 521 p. et XII-652 p. ) contiennent les textes, le tome III ( 301 p . ) un Conspectus librorum , un Index fontium et un Index nominum , le tome IV (XII - 609 p . ) le commentaire ( sous forme de 56 notes développées ).

ST

Coll . « Studi e Testi » , Cité du Vatican 1900 -

STB

Coll. « Studien und Texte zur Byzantinistik » , Frankfurt am Main /Berlin /Bern 1994 -

Suppl. Arist.

Supplementum Aristotelicum , editum consilio et auctoritate Academiae litterarum regiae Borussicae, 3 tomes en 2 vol . chacun, Berlin 1886-1893 .

Suppl. Hell.

Lloyd-Jones H. & Parsons P. (édit . ) , Supplementum Helle nisticum . Indices in hoc Supplementum necnon in Powellii Collectanea Alexandrina confecit H.-G. Nesselrath , coll . « Texte und Kommentare » 11 , Berlin 1983 , XXXII-863 p.

SVF

Stoicorum Veterum Fragmenta collegit Ioannes ab Arnim , t. I : Zeno et Zenonis discipuli, Leipzig 1905 ; t. II : Chry sippi fragmenta logica et physica, Leipzig 1903 ; t.III : Chrysippi fragmenta moralia. Fragmenta successorum

ABRÉVIATIONS - OUVRAGES DE RÉFÉRENCE Chrysippi, Leipzig Leipzig 1924 .

49

1903 ; t . IV : Indices, ed . M. Adler,

TAM

Tituli Asiae Minoris, Wien 1901 - .

TGF

Tragicorum Graecorum Fragmenta , vol . 1 , Editor Bruno Snell , editio correctior et addendis aucta curavit Richard Kannicht, Göttingen , 1986 .

TRE

Theologische Realenzyklopädie, Berlin 1976- .

TU

Coll . « Texte und Untersuchungen zur Geschichte der altchristlichen Literatur » , Leipzig /Berlin 1882- .

WdF

Coll . « Wege der Forschung » , Darmstadt.

50

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

III. Références complètes des études et éditions

citées de façon abrégée

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BURKERT W. , Lore and Science in Ancient Pythagoreanism , Cambridge ( Mass . ) 1972 ( trad . revue de Weisheit und Wissenschaft: Studien zu Pythagoras, Philolaos und Platon , Nürnberg 1962) . CASTNER C.J. , Prosopography of Roman Epicureans from the Second Century B.C. to the Second Century A.D. , coll . « Studien zur klassischen Philologie » 34 , Frankfurt am Main 1988 (2e éd . 1991 ) , XIX- 116 p. COURCELLE P. , Les Lettres grecques en Occident de Macrobe à Cassiodore , coll . BEFAR 159 , Nouvelle édition revue et augmentée , Paris 1948 , XVI 440 p . CRÖNERT W. , Kolotes und Menedemos. Texte und Untersuchungen zur Philosophen- und Literaturgeschichte. Mit einem Beitrag von P. Jouguet und P. Perdrizet und einer Lichtdrucktafel, coll . « Studien zur Palaeographie und Papyruskunde » 6, Leipzig 1906 , réimpr. Amsterdam 1965 , (11 ) -198 p. DAVIES J. K. , Athenian Propertied Families 600-300 B.C. , Oxford 1971 , XXXII 653 p . DEGRASSI A. , I fasti consulari dell'impero Romano dal 30 avanti Cristo al 613 dopo Cristo, coll . « Sussidi eruditi » 3 , Roma 1952 , XVIII- 289 p . DEICHGRÄBER K. , Die griechische Empirikerschule. Sammlung der Fragmente und Darstellung der Lehre, Berlin 1930 ; réimpr. (augmentée de notes complémentaires sur les fragments déjà publiés , ainsi que de nouveaux fragments et des extraits de la traduction anglaise par R. Walzer de la version arabe du traité Sur l'expérience médicale de Galien , p. 399-425 ) Zürich 1965 .

ABRÉVIATIONS - ÉTUDES ET ÉDITIONS

51

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DILLON J. et J. HERSHBELL (édit . ) , lamblichus, On the Pythagorean Way of Life . Text, translation , and notes, coll . « Texts and translations» 29, « Graeco Roman Religion Series » Literature, 1991, X-285 p.

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DÖRING K. , Die Megariker. Kommentierte Sammlung der Testimonien von K.D. , coll . « Studien zur antiken Philosophie » 2 , Amsterdam 1972 , XII 185 p . DORANDI T. (édit .), Filodemo, Storia dei filosofi ( . ) : Platone e l'Academia , coll . « La Scuola di Epicuro » 12 , Napoli 1991 , 293 p.

DORANDI T. ( édit .), Filodemo, Storia dei filosofi. La Stoà da Zenone a Panezio (PHerc. 1018 ) . Edizione , traduzione e commento a cura di T.D. , coll . « Philosophia Antiqua » 60 , Leiden 1993 , XVI - 189 p. DORANDI T. , Ricerche sulla cronologia dei filosofi ellenistici, coll . « Beiträge zur Altertumskunde » 19, Stuttgart 1991, XVI-92 p. DUDLEY D.R. , A History of Cynicism from Diogenes to the 6th Century A.D. , London 1937 , XIV -224 p.

DUMONT J.-P. ( édit.), Les Présocratiques. Édition établie par J.-P. Dumont avec la collaboration de D. Delattre et de J.-P. Poirier, coll . « Bibliothèque de la Pléiade » 345 , Paris 1988 , XXVIII - 1625 p. FERRARY J.-L. , Philhellénisme et impérialisme: aspects idéologiques de la conquête romaine du monde hellénistique, de la seconde guerre de Macé doine à la guerre contre Mithridate, coll. BEFAR 271 , Rome, Palais Farnèse, 1988, XVI-690 p.

FRASER P.M. , Ptolemaic Alexandria , Oxford 1972 , t. I : Text, XVI-812 p.; t. II : Notes, XIV - 1116 p . ; t. III : Indexes , 157 p. FREEMAN K. , The Pre - Socratic Philosophers. A Companion to Diels , Fragmente der Vorsokratiker, Oxford 1946, 2e éd. , Oxford 1966, XVI-486 p. FREEMAN K. , Ancilla to The Pre -Socratic Philosophers. A complete translation of the Fragments in Diels , Fragmente der Vorsokratiker, Oxford 1947 , « Sixth impression » 1971 , XII- 162 p. GAISER K. , Philodems Academica . Die Berichte über Platon und die alte Akademie in zwei herkulanensischen Papyri, coll . « Supplementum Plato nicum » 1 , Stuttgart /Bad Cannstatt 1988, 573 p. GARBARINO G. , Roma e la filosofia greca dalle origini alla fine del II secolo A.C. Raccolta di testi con introduzione e commento , coll . « Historica Politica Philosophica. Il Pensiero antico - Studi e testi » 6, Torino 1973 , t. I : Introduzione e testi, XXIII- 217 p .; t. II : Commento e indice, p. 218-642.

52

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

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GOULET - CAZÉ M. - 0 . et R. GOULET (édit . ) , Le Cynisme ancien et ses prolongements . Actes du Colloque international du CNRS ( Paris, 22-25 juillet 1991 ) , Paris 1993 , XII-612 p. GOULET-CAZÉ M.-O. ( édit . ) , Diogène Laërce. Vies et Doctrines des philosophes illustres. Traduction française sour la direction de Marie -Odile Goulet- Cazé. Introductions, traductions et notes de J.-F. Balaudé, L. Brisson , J. Brunschwig, T. Dorandi, M.-O. Goulet- Cazé, R. Goulet et M. Narcy, avec la collaboration de M. Patillon , coll . « La Pochothèque » , Paris , 2e éd . revue et corrigée 1999, 1398 p. GRIFFIN M. et J. BARNES, Philosophia Togata , < t. I> : Essays on Philosophy and Roman Society, Oxford 1989 ; t . II : Plato and Aristotle at Rome, Oxford 1997 , VIII- 300 p.

GUTHRIE W.K.C., A History of Greek Philosophy, t . I : The Earlier Pre socratics and the Pythagoreans, Cambridge 1962, XVI -539 p. ; t. II : The Presocratic tradition from Parmenides to Democritus, Cambridge 1965 , XX 554 p. ; t. III : The fifth -century enlightenment, Cambridge 1969, XVI -544 p.; t. IV : Plato . The man and his dialogues : Earlier period , Cambridge 1975 , XVIII-603 p .; t . V : The later Plato and the Academy, Cambridge 1978 , XVI 539 p . ; t . VI : Aristotle . An encounter, Cambridge 1981 , XVI-456 p . HERCHER R. , Epistolographi Graeci, recensuit, recognovit, adnotatione critica et indicibus instruxit R. H. , accedunt F. Boissonadii ad Synesium notae ineditae, Paris 1873 , réimpr. Amsterdam 1965 , LXXXVI - 843 p . HÜLSER K. , Die Fragmente zur Dialektik der Stoiker. Neue Sammlung der Texte mit deutschen Übersetzung und Kommentar, Stuttgart 1987 , 4 vol . , CII 403 p. (en pagination continue) . JUNQUA F. , Lettres de Cyniques. Étude des correspondances apocryphes de Diogène de Sinope et Cratès de Thèbes, Thèse de doctorat inédite, Université de Paris IV -Sorbonne, Paris 2000, 2 vol . (cette thèse offre le texte grec, une traduction française et un imporant commentaire d'ensemble des lettres de Diogène et Cratès avec une bibliographie substantielle ). KRUMBACHER K. , Geschichte der byzantinischen Literatur von Justinian bis zum Ende des oströmischen Reiches (527-1453) , coll . « Handbuch der klassischen Altertumswissenschaft » 9, 1 , 2e éd . , München 1897. LASSERRE F. , De Léodamas de Thasos à Philippe d'Oponte. Témoignages et Fragments. Édition, traduction et commentaire, coll . « La Scuola di Platone» 2 , Napoli 1987 , 696 p . LONGO AURICCHIO F. , Ermarco, Frammenti. Edizione, traduzione e commento , coll . « La Scuola di Epicuro » 6 - « Frammenti dei Katheghemones » 1 , Napoli 1988 , 196 p .

ABRÉVIATIONS - ÉTUDES ET ÉDITIONS

53

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Berkeley 1972, XIV - 247 p. MALHERBE A.J. , The Cynic Epistles. A Study Edition, coll . « Society of Biblical Literature. Sources for Biblical Study » 12 , Missoula ( Montana ) 1977 ( réimpr. Atlanta 1986) , 334 p . MEJER J. , Diogenes Laertius and his Hellenistic background, coll . « Hermes Einzelschriften >> 40 , Wiesbaden 1978 , X - 109 p . MEKLER S. (édit. ) , Academicorum Philosophorum Index Herculanensis, Berlin 1902, réimpr. Berlin 1958 , XXXVI- 135 p. MENSCHING E. , Favorin von Arelate. Der erste Teil der Fragmente. Memo rabilien und Omnigena Historia (ΑΠΟΜΝΗΜΟΝΕΥΜΑΤΑ und ΠΑΝΤΟΔΑΠΗ IETOPIA) , hrsg. v . E.M. , coll . « Texte und Kommentare » 3 , Berlin 1963 , XII 167 p.

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MULLER R. , Les Mégariques. Fragments et témoignages traduits et commentés par R.M. , coll . « Histoire des doctrines de l'Antiquité classique » 9 , Paris 1985 , 258 p.

MÜSELER Eike , Die Kynikerbriefe, t. II : Kritische Ausgabe mit deutscher Übersetzung, coll . « Studien zur Geschichte und Kultur des Altertums » , Neue Folge, 1. Reihe : Monographien , Paderborn 1994, 167 et 146 p . NAILS Debra, The people of Plato . A prosopography of Plato and other Socratics, Indianapolis 2002, XLVIII- 414 p .

NAVON R. (édit. ) , The Pythagorean writings. Hellenistic texts from the 1st Cent. B.C. - 3d Cent. A.D. On life, morality, knowledge, and the world . Comprising a selection of Neo -Pythagorean fragments, texts and testimonia of the Hellenistic period. Translated from the Greek and Latin by K. Guthrie and Th . Taylor. Edited , with an introduction to the Pythagorean writings by R. Navon. With a foreword by L. G. Westerink. Kew Gardens (N. Y. ) 1986. PAPE W. et BENSELER G. E. , Wörterbuch der griechischen Eigennamen, 3e éd . , Braunschweig 1863-1870 , 2 vol . , LII - 1710( [+ 2] ) p . (en pagination continue) . PEEK W. , Griechische Vers-Inschriften, t . I , Berlin 1955 , XXX -695 p. (GVI) ; Verzeichnis der Gedicht-Anfänge und vergleichende Übersicht zu den griechischen Vers-Inschriften I, hrsg . von W. Peek. Berlin 1957 , 43 p. POHLENZ M. , Die Stoa . Geschichte einer geistigen Bewegung, t. I ( 1943 ), « 3 . unveränderte Auflage » , Göttingen 1964, 490 p .; t . II : Erläuterungen ( 1949) , « 4. Auflage. Zitatkorrekturen , bibliographische Nachträge und ein Stellen register von H. T. Johann » , Göttingen 1972 , 336 p.

54

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

The Pythagorean Sourcebook and Library. An Anthology of ancient writings which relate to Pythagoras and Pythagorean Philosophy. Compiled and translated by K.S. Guthrie , with additional translations by T. Taylor and A. Fairbanks Jr. Introduced and edited by D.R. Fideler, with a foreword by Joscelyn Godwin , Grand Rapids 1987 . RICHTER G. M. A. , The Portraits of the Greeks . 1965 , 3 vol . , XIV - 337 p . (en pagination continue) et 2059 fig .; Supplement, London 1972, 24 p. RIGINOS A. Swift, Platonica. The anecdotes concerning the life and writings of Plato , coll . « Columbia Studies in the Classical Tradition » 3 , Leiden 1976, XII- 248 p.

SCATOZZA HÖRICHT L.A. , Il volto dei filosofi antichi , coll . « Archaia . Storia degli studi » 2 , Napoli 1986. SCHEFOLD K. , Die Bildnisse der antiken Dichtern , Redner und Denker, Basel 1943 ( 2e éd . Basel 1997 ) , 228 p. avec planches photographiques . SCHMID W. , Wilhelm von Christ's Geschichte der griechischen Literatur [GGL ), Zweiter Teil : Die nachklassische Periode der griechischen Literatur, Erste Hälfte : Von 320 vor Christus bis 100 nach Christus, coll . « Handbuch der Altertumswissenschaft» VII 2 , 1 , Sechste Auflage unter Mitwirkung von 0. Stählin , München 1920 , réimpr. 1959. SIRONEN E. , The Late Roman and Early Byzantine Inscriptions of Athens and Attica , Helsinki 1997 , 464 p .

SMITH M.F. (édit . ) , Diogenes of Oinoanda. The Epicurean Inscription . Edited with introduction , translation and notes , coll . « La Scuola di Epicuro » Suppl . 1 , Napoli 1993 , 660 p . , 18 planches photographiques . SUMNER G. V. , The Orators in Cicero's Brutus : Prosopography and Chrono logy, coll . « Phoenix. Supplementary volume » 11 , Toronto 1973 , X- 197 p. TEPEDINO GUERRA A. , Polieno . Frammenti. Edizione, traduzione e commento, coll . « La Scuola di Epicuro » 11 – « Frammenti dei Katheghemones » 2 , Napoli 1991 , 224 p. THESLEFF H. , The Pythagorean texts of the Hellenistic period, collected and edited by H.T. , coll . « Acta Academiae Aboensis - Ser. A – Humaniora » 30 , 1 , Åbo 1965 , VIII - 266 p.

THESLEFF H. , An Introduction to the Pythagorean Writings of the Hellenistic Period , Åbo 1961. TRAVERSA A. ( édit . ) , Index Stoicorum Herculanensis, coll . « Università di Genova , Pubblicazioni dell'Istituto di Filologia Classica » 1 , [Firenze ] s.d. [ 1955 ? ] , XXIV - 119 p. VOGEL C. DE ( édit . ) , Greek Philosophy. A collection of texts selected and supplied with some notes and explanations, t . I : Thales to Plato , 3e éd. , Leiden 1963 , XII- 334 p. ; la réimpression de 1969 comporte un complément bibliographique, p. 335-337 ; t. II : Aristotle, the Early Peripatetic School and the Early Academy, 3e éd . , Leiden 1967 , VIII - 340 p . ; t. III : The Hellenistic Roman period, 2e éd . , Leiden 1964 , XVI-673 p.

ABRÉVIATIONS - ÉTUDES ET ÉDITIONS

55

ZELLER Ed ., Die Philosophie der Griechen in ihrer geschichtlichen Entwicklung dargestellt, t . III 1 : Die nacharistotelische Philosophie. Erste Hälfte. Fünfte Auflage. Manualdruck der vierten Auflage, hrsg . v . E. Wellmann , Leipzig 1923 , réimpr. Hildesheim 1963 .

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Avertissement

La transcription française des noms propres grecs et latins est toujours chose délicate . La tendance traditionnelle est de donner une forme française quand c'est possible et que le personnage est connu de cette façon , ce qui peut entraîner des problèmes d'ordre alphabétique. Fallait- il adopter Aischinès , Aeschines , Eschine ? Nous avons tenté de respecter dans pareil cas la forme la plus proche du grec, au moins dans l'intitulé de la notice , quitte à rappeler entre parenthèses la forme courante connue par le lecteur français et à utiliser cette dernière dans le corps de l'article. Nous avons également essayé de ne pas transcrire différem ment les homonymes qui se succèdent directement, mais il a semblé impossible d'appliquer des règles immuables . On rencontrera des Denys et des Dionysios . Les noms latins sont classés au cognomen , mais des renvois sont prévus pour les autres composantes importantes du nom . La liste finale des notices du présent tome devrait faciliter le repérage des différents noms . L'intitulé de chaque notice indique le numéro attribué par la Realencyclo paedie aux différents homonymes , accessoirement le numéro que le personnage concerné a reçu dans d'autres prosopographies ( PLRE , PIR ”, PA ) . On ne s'étonnera pas de trouver des indications comme RE : ou RESuppl. IV : ( sans chiffre arabe ), lorsque les articles de cette encyclopédie ne comportent pas de numéro . Quand l'article de la Realencyclopaedie n'offrait aucune information supplémentaire par rapport à ce que l'on peut lire dans notre notice , nous n'avons pas fourni une référence bibliographique complète : le renvoi initial suffira à rappeller qu'il existe un article consacré à ce philosophe . Une lettre ou un nom n'est ajouté au numéro d'homonymie que si la forme retenue par cette encyclopédie allemande ne correspond par à la forme française du nom (RE K 2 pour “ Callisthène” ). L'intitulé de chaque notice comprend également une datation au moins approximative du personnage . Dans l'indication des siècles , un petit a en exposant signale une date antérieure à l'ère chrétienne ( iVa signifie « IVe siècle avant Jésus -Christ » ) . La lettre p sert de même , mais seulement si nécessaire, à indiquer une date de notre ère. Dans ces indications chronologiques , les lettres D, M et F signifient " début ", “ milieu ” et “ fin ”. Pour simplifier le système de référence bibliographique à l'intérieur des notices, nous avons choisi de numéroter en chiffres gras les références succes sives et d'y renvoyer dans la suite de la notice . Par exemple , on trouvera 3 V. Brochard, Les sceptiques grecs, 2e éd . , Paris 1923 , p . 303 n . 2 , puis , plus loin dans la notice une simple référence à Brochard 3 , p . 300. Ce système n'a pas été employé pour les très courtes notices où il n'y avait pas de renvoi interne.

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DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

Les informations sont réparties sous un certain nombre de rubriques (mises en relief par l'emploi de caractères gras ou espacés) qui reviennent de notice en notice et facilitent la consultation de l'ouvrage . Par exemple : Chronologie, Bibliographies ( où sont signalées les bibliographies consacrées à ce philosophe et non pas les ouvrages comme tels ; à ne pas confondre avec Cf. ), Euvres conservées, Datation, Éditions et traductions, etc. Certaines notices très déve loppées peuvent comporter toute une hiérarchie de titres intermédiaires, ainsi qu'un sommaire initial. De façon générale , nous avons résisté à la tentation courante d'identifier les personnages homonymes. Même là où l'identification nous semblait probable, nous avons regroupé les informations en blocs distincts à l'intérieur de la notice . Le signe » renvoie aux notices déjà parues dans les tomes antérieurs du Dictionnaire. Il signifie que le personnage a fait l'objet d'une notice , mais nous ne l'avons pas employé pour les noms les plus importants qui reviennent sou vent . Il n'apparaît d'ailleurs qu'à la première occurrence d'un nom dans la notice . Une référence plus précise ( avec indication du nom de l'auteur de l'article ) est faite lorsque le contenu même de la notice est visé .

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1 LABEO ( M. ANTISTIUS-) RE 34 PIR ? A 760 Jurisconsulte romain .

19 - I

Études . 1 P. Jörs, art. « M. Antistius 34 Labeo » , RE I 2 , 1894 , col . 2548 2557 ; 2 F. Schulz , History of Roman Legal Science, Oxford 1946 ; 3 W. Kunkel , Herkunft und soziale Stellung der römischen Juristen , Weimar /Wien , 2e éd . 1967 , p. 33-34, 114 ; 4 R. A. Bauman , Lawyers and Politics in the Early Roman Empire. A study of relations between the Roman jurists and the emperors from Augustus to Hadrian, coll . « Münchener Beiträge zur Papyrusforschung und Antiken Rechtsgeschichte » 82 , München 1989, p . 25-56 . Fragments rassemblés par 5 F.P. Bremer, lurisprudentiae Antehadrianae quae supersunt, coll . BT, Leipzig 1898 , t . II , 1 , p . 9-261; 6 Ph . Huschke , Iurisprudentia Anteiustiniana, 6e éd . par E. Seckel et B. Kübler , coll . BT, Leipzig 1908, p. 55-61 , et 70. Lenel, Palingenesia Iuris Civilis, t. I , Leipzig 1960 , p. 502-558 . Né vers 50 et mort entre 10 et 21 , M. Antistius Labeo appartient à la période augustéenne ; il est le fils de M. Pacuvius Labeo , mort à Philippes en 42 en combattant dans les rangs des républicains ( Appien , Bell. Ciu . IV 135 ) . Sa carrière politique le conduisit jusqu'à la préture et il refusa le consulat offert par Auguste ( Tacite, Ann . III 75 , 2 ; Pomponius, Dig. I 2 , 2 , 47 ; voir la discussion dans 7 N. Horsfall, « Labeo and Capito » , Historia 23 , 1974 , p . 252-254 ; 8 J. Patricio , « Labeo : Zwei rechtshistorischen Episoden aus den Anfängen des Prinzipats » , ZRG 117 , 2000 , p . 432-444 ). Sur le plan politique, c'est un oppo sant au principat : son incorrupta libertas est souvent soulignée ( voir Tacite , loc. cit .; Suétone , Aug. 54 ; Aulu -Gelle XIII 12 , 1 ; Porphyrion , in Horat. Sat. I 3 , 82 ; 9 M. Bretone, Tecniche e ideologie dei giuristi romani, 2e éd , Napoli 1982 , p. 129-146 ) . Ses écrits, extrêmement nombreux , en font l'un des juristes les plus impor tants de son époque : commentaire de la loi des XII tables, commentaire de l'édit du préteur urbain , écrits sur le droit pontifical, recueils de responsa ... ; les inter prétations et les solutions nouvelles ne manquent pas dans ses écrits, et, dans son Manuel, Pomponius souligne les innovations de Labeo qu’il oppose au traditio nalisme de Capito (Dig . I 2, 2 , 47 ) . Il fut l'élève de Trebatius Testa, juriste célèbre, ami de Cicéron ; et il est à l'origine de l'école proculienne, l'une des deux écoles de juristes sous le principat (Pomponius, loc. cit . ) . La plupart des témoignages que nous possédons sur ce juriste insistent sur sa science et ses connaissances . Aulu - Gelle indique qu'à la science du droit , il ajoutait l'étude de la grammaire, de la dialectique et de la littérature archaïque ( XIII 10 , 1 ) ; de fait, Labeo se réfère très fréquemment à l'étymologie et à la grammaire pour interpréter les textes de droit et fonder ses responsa . Dans de

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nombreux articles, P. Stein a souligné la place de l'analogie dans son œuvre, tout en suggérant que c'est à partir de ses écrits que se développe la notion de regula iuris (10 « The relations between Grammar and Law in the Early Principate : the beginnings of analogy » , dans La critica del testo . Atti del secondo Congresso Internazionale della Società italiana di storia del diritto , Firenze 1971 , p. 757-769 ; 11 Id ., « Sabino contro Labeone : due tipi di pensiero giuridico romano » , BIDR 80, 1977 , p. 55-67 ; voir aussi 12 M. Schanz, « Die Analogisten und Anomalisten im römischen Recht » , Philologus 42 , 1884 , p . 309-318 ) ; il fait également apparaître la fréquence des références à la nature, la consuetudo et l'auctoritas dans les réponses du juriste. De nombreux travaux ont mis en lumière la culture philosophique de Labeo . Aulu-Gelle mentionne ses connaissances en matière de dialectique (XIII 10 , 1 ) . Les définitions des notions de contrat et d'obligation (Dig . L 16 , 19) supposent la connaissance d'Aristote ( 13 A. Schiavone , Giuristi e nobili nella Roma repubblicana. Il secolo della rivoluzione scientifica nel pensiero giuridico antico , Bari 1987 , p . 161-182 ; 14 A. Biscardi, « Quod Graeci synallagma uocent» , Labeo 29 , 1983 , p . 127-139 ; 15 Id. , « La cultura greca di Labeone » , RAL 9 , ser. 3 , 1992 , p . 113-122 ) . Labeo avait également écrit des IiOavá , traité dont le titre renvoie mani festement à la philosophie ( cependant 16 M. Talamanca , « I " pithana " di Labeone e la logica stoica » , lura 26 , 1975 , p . 1-40 , rattache le traité à la tradi tion casuistique de la jurisprudence romaine ). Dans ce recueil de cas probléma tiques et de solutions « probables » , l'on a vu quelquefois l'influence de Chry sippe ( PC 121 ] ( 17 B. Schmidlin , « Horoi, pithana und regulae. Zum Einfluß der Rhetorik und Dialektik auf die juristische Regelbildung » , ANRW II 15 , 1976 , p . 101-130 , p . 111-117 pour Labeo ), mais surtout les échos du probabi lisme académicien ( 18 M. Bretone, « Ricerche labeoniane: NOavá » , PP 28 , 1973 , p . 171-193 , et Bretone 9 , p. 147-172 ; Biscardi 15 ; en dernier lieu 19 A. Mantello, « De iurisconsultorum philosophia. Spunti e riflessione sulla giurisprudenza del primo principato » , SDHI 67 , 2001 , p . 1-58 , qui souligne nettement la différence avec la logique stoïcienne ). De façon générale, ces savants ont remarqué l'abondance des termes grecs chez ce juriste et la fréquence des définitions et d'interprétations supposant la lecture des philo sophes (par exemple , à propos de la notion d’iniuria, Bretone 9, p . 182-184 ) . Il est plus difficile de rattacher Labeo à une école philosophique ; les romanistes hésitent à formuler des conclusions précises sur ce point ( Mantello 19 , p . 44 45 ) ; mais la place faite à la dialectique et aux ridavá semble renvoyer à la tradition académicienne de la fin de la République et rend Labeo très proche de ces juristes formés à la philosophie comme Servius Sulpicius Rufus. MICHÈLE DUCOS .

2 LABEO (CORNELIUS -) RE C 168

MF III ?

Auteur d'ouvrages cherchant à harmoniser la religion romaine traditionnelle avec la démonologie orientale ; il s'intéressait également , peut- être dans une

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perspective néoplatonicienne, à la révélation des livres de la disciplina etrusca et aux oracles du sanctuaire d'Apollon à Claros. Fragments et témoignages. 1 G. Kettner, Cornelius Labeo. Ein Beitrag zur Quellenkritik des Arnobius , Progr. Pforta, Naumburg 1877 , p . 19-31 ; 2 J. Mülleneisen, De Cornelii Labeonis fragmentis, studiis, adsectatoribus, Diss . Marburgi Chatt . 1889. Ces deux recueils classiques qui ont conduit 3 A. J. Festugière, « La doctrine des “ Viri noui ” sur l'origine et le sort des âmes » ( 1940 ), repris dans Hermétisme et mystique païenne, Paris 1967 , p . 261-312 , notamment p . 298 , à parler d'un « mythe labéonien » , ont été remplacés par 4 P. Mastandrea, Un neoplatonico latino : Cornelio Labeone. Testimonianze e frammenti, coll . EPRO 77 , Leiden 1979 , XXX -259 p . (bibliographie , p. XII XXX ) , qui contient le texte et la traduction italienne des dix - huit fragments nominaux retenus, seule base légitime à partir de laquelle peuvent être repérés, « grâce à des rapprochements ponctuels de forme et/ou de contenu » ( p . 11 ) , d'autres passages influencés par Labeo. Mastandrea considère ainsi qu'Arnobe ( MA 418 ) a beaucoup utilisé Labeo, sans nommer ce contemporain bien connu . Plusieurs appendices examinent l'utilisation, envisagée par la Quellenforschung, de Labeo par des auteurs comme Firmicus Maternus ( F 12 ) , Martianus Capella ( 3 - M 46) , Ammien Marcellin ou les commentateurs de Virgile. Dans plusieurs témoignages, seul le nom de Labeo est donné , ce qui a parfois amené certains interprètes à envisager diverses confusions avec Antistius Labeo ( 2L 1 ) . Dans son compte rendu de l'ouvrage de Mastandrea, 5 J. Mansfeld, Mnemosyne 36, 1983 , p. 437-441, écrit : « As a philosopher, L(abeo) is unimportant; as a representative of the Roman Rezeption of Greek philosophy, in which capacity he is studied by Mastandrea, he is highly interesting » (p. 439 ). Selon Mansfeld, le néoplatonisme prêté à Labeo demande à être nuancé : « His main affinities are with such works of Porphyry as are close to Middle Platonism and the Latin authors quoted by L (abeo ) make him an important source for the Roman contribution to the philosophical koine of the first cent. BCE and CE » ( p. 440 ). Datation . Labeo a été diversement daté , de l'époque de César jusqu'à la fin du IVe siècle de notre ère. En conséquence , on l'a rattaché au stoïcisme tardif, au platonisme caractéristique de l'époque de Plutarque ou d’Apulée , ou bien encore au néoplatonisme de Porphyre ou de Jamblique (** I 3). On retiendra à tout le moins que Labeo rangeait Platon parmi les demi -dieux qu'il situait au -dessus des héros (Augustin , Cité de Dieu II 14, 2 = fr. 14 Mastandrea ; voir aussi ibid. , VIII 13 ) . Selon 6 B. Boehm , De Cornelii Labeonis aetate, Diss . Regimonti 1913 , Labeo aurait déjà été une source de Suétone . Mais cette datation haute était directement liée à des hypothèses relevant de la Quellenforschung. 7 P. Mastandrea, « Numenio 57 des Places e la cronologia di Cornelio Labeone » , AAPat 87 , 1974-1975 , p . 77-88 , et Mastandrea 4 , p . 193 , retient plutôt comme terminus post quem le fait que Labeo citait un passage de Numénius ( N 276) dont il situe la mort vers 200, et comme terminus ante quem le fait que l'Adversus Nationes d'Arnobe citait Labeo ( vers 300 ). Il insiste également sur les nombreux rapprochements qu'il est possible d'établir avec Porphyre dont l'activité principale se situait à Rome dans la seconde moitié du III° siècle . Bien que les éléments proprement philosophiques présents dans les

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fragments soient très limités , c'est dans la perspective idéologique du néoplato nisme que s'expliqueraient les tentatives de Labeo pour intégrer la religion ancestrale , romaine ou étrusque, dans la quête , d'inspiration universaliste et monothéiste , du salut de l'âme. (Euvres. ( 1 ) Fasti ( Macrobe , Saturnales I 16 , 29 , qui cite un premier livre ). Sept fragments chez Macrobe , Jean Lydus ( De mensibus) et Anastase le Sinaïte . Plusieurs développements littéraires communs à Macrobe et à Jean Lydus ( > L 89 ) laissent penser que l'influence de Cornelius Labeo s'étendait plus largement. Selon Mastandrea 4 , p . 72 , ces recherches d'antiquaire sur les anciennes traditions religieuses de Rome seraient inspirées par un souci apolo gétique influencé par le syncrétisme néoplatonicien . ( 2 ) De diis animalibus ( Servius, Aen . , III 168 ) . Les fragments nominaux se trouvent chez Augustin (Cité de Dieu ) et Servius, mais il semble qu'Arnobe ait largement mis à contribution Labeo dans son Adversus nationes. Cet ouvrage concernait les rites sacrificiels étrusques qui permettaient à l'âme d'accéder à la dignité de Lares. Mastandrea 4 , p. 108-113 , présente de nombreux parallèles suggérant que les syncrasies de divinités signalées dans l’Adversus nationes III 29-42 , de même que les sources anciennes alléguées , seraient empruntées à Labeo . Pour le chapitre III 40 , le rapprochement s'appuie sur deux fragments nominaux de Labeo ( fr. 12 a - b ) . Une autre section de l'apologie d'Arnobe où l'on a voulu retrouver l'influence de Labeo est le long développement sur les doctrines des Viri novi ( II 11-66) . Insistant sur le caractère unitaire de ces doctrines où se retrouvent « des éléments de la spiritualité gnostique , hermé tique , chaldaïque et iranienne » , Mastandrea 4 , p . 131-133 , préfère rapporter l'essentiel de cette section à Porphyre, comme le suggérait 8 P. Courcelle , « Les sages de Porphyre et les “ Viri noui” d'Arnobe » , REL 31 , 1953 , p. 257-271. Ce n'est guère que dans l'allusion aux rites étrusques de divinisation de l'âme ( II 62 ) , thème qui n'apparaît pas dans le reste du développement, que l'on pourrait reconnaître la marque de Labeo (Mastandrea 4 , p . 133 ) . Mansfeld 5 , p. 440, envisage pour sa part que ces éléments porphyriens indubitables aient tout de même été transmis à Arnobe par Labeo . Selon Augustin , Cité de Dieu IX 19 ( fr. 13 Mastandrea ), Labeo posait une équivalence entre les bons démons et les anges . Il distinguait (ibid. II 11 = fr . 15 Mastandrea ; voir encore VIII 13 = fr. 16) les dieux bons des dieux méchants d'après la diversité des cultes qu'il faut leur rendre : des sacrifices sanglants et des prières lugubres dans le second cas , des hommages joyeux et festifs dans le premier, fragment nominal qu'il faut rapprocher, selon Mastandrea 4 , p. 146, d'Arnobe VII 23 ou de Lactance, Inst. div . I 20 , 17 . ( 3 ) De oraculo Apollonis Clarii ( Macrobe , Saturnales I 18 , 21 ) . Le témoignage de Macrobe concerne l'identification de Dionysos -Liber avec le soleil . Mais c'est toute la section I 17-23 des Saturnales qui tente d'exposer la syncrasie fondamentale des plus grandes divinités gréco -romaines, mais aussi orientales, avec Hélios - Sol, qui pourrait remonter à Labeo . Des parallèles avec le

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De mensibus de Jean Lydus amènent Mastandrea 4 , p . 170-172 , à supposer une présence de Labeo à l'arrière -plan de cette entreprise. Labeo aurait fourni à Macrobe un syncrétisme solaire associant des éléments de la tradition stoïcienne latine ( Nigidius Figulus ( PN 58 ) , Varron , Cornificius [ » C 189 ] ... ) avec la tradition néoplatonicienne grecque ( Numénius (PN 66 ) , Plotin , Porphyre ... ). L'ouvrage de Labeo consistait probablement en un commentaire théologique ou philosophique d'un ensemble d'oracles de Claros. La similitude avec le traité de Porphyre, Sur la philosophie extraite des oracles est manifeste. Édition des fragments de cet ouvrage dans 9 G. Wolff ( édit . ) , Porphyrii De Philosophia ex oraculis haurienda librorum reliquiae, Berlin 1856, réimpr. Hildesheim 1962 , et dans 10 A. Smith (édit . ) , Porphyrii philosophi fragmenta , coll . BT, Leipzig 1993 , p. 351-407. Il est possible que certains oracles cités par Lactance ( Inst. div. 17 , 1 ) , mais aussi par Jean Lydus ( De mensibus II 5 ; comp . Eusèbe, Prép. évang. III 15 ) , aient été empruntés à Labeo . Voir Mastandrea 4, p . 159-169 . ( 4 ) Commentaire sur la Disciplina Etrusca en quinze livres ( Fulgence , Expositio sermonum antiquorum 4) . Labeo est également mentionné dans les sources de Jean Lydus , Tepi dloonuerőv ( De ostentis, chap . 3 ). Le témoignage de Fulgence ( fr. 9 ) suggère que Labeo prenait en considération l'haruspicine étrusque. Le fragment 8 , emprunté à Lydus , De ostentis 42 , doit peut-être être prolongé par les développements qui suivent sur l'interprétation des éclairs et de la foudre ( le passage est cité dans l'appendice XI de Mastandrea 4 , p . 216-222 , et commenté p . 78-88 ) . Un Liber fulguralis étrusque, du IVe ou 11 ° siècle av . J.-C. , aurait été traduit en latin et actualisé à la fin de l'époque républicaine dans les cercles aristocratiques de Nigidius Figulus et de Cicéron (> C 123 ) , puis adapté au contexte du bas - empire par Cornelius Labeo ( p . 87-88 ) . Labeo s'occupait probablement d'une troisième composante de la discipline étrusque , les libri rituales qui comprenaient notamment des libri Acherontici enseignant comment assurer par le sacrifice de certains animaux la divinisation des âmes et leur libération par rapport aux lois de la mortalité ( voir Arnobe , Adversus Nationes II 62 et Servius, Aen . I , p . 373 Thilo ) . Mastandrea 4 , p. 95-102 , traite de ce troisième thème dans le cadre du Commentaire sur la Disciplina Etrusca, mais comme le témoignage de Servius fait référence à l'ouvrage de Labeo De diis animalibus, on peut se demander si cet ouvrage ( 2 ) ne constituait pas une section du grand commentaire. 11 D.Briquel , « Cornelius Labeo : etruskische Tradition und heidnische Apologetik », dans L. Aigner-Foresti (édit . ) , Die Integration der Etrusker und das Weiterwirken etruskischen Kulturgutes im republikanischen und kaiserzeitlichen Rom , Wien 1998 , p. 345 356 ; 12 Id ., « Cornelius Labeo et la réaction païenne » , communication à la table ronde Les écrivains du lire siècle ap. J.-C. et l'Etrusca disciplina ( Paris, 1997 ) , dans La divination dans le monde étrusco-italique, 8 , 1999, p. 51-62 ; 13 Id . , Chrétiens et haruspices . La religion étrusque, dernier rempart du paganisme romain , Paris 1997 . Cf. 14 G. Wissowa, art. « Cornelius 168 Labeo » , RE IV 1 , 1900 , col . 1351 1355 .

RICHARD GOULET.

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LACHARÈS D'ATHÈNES

3 LACHARÈS D'ATHÈNES RE 3 = 4 PLRE II : 2

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V

Le sophiste Lacharès , fils de Lacharès et disciple d'un certain Héracléon d'Athènes ( apparemment absent de la RE et de la PLRE ), fut titulaire de la chaire de rhétorique d'Athènes où il eut notamment pour disciples Nicolas ( de Myre [ N 47 ] , qui avait accueilli Proclus à Athènes , selon Marinus, Proclus 10 ), ainsi que Eustèphius ( d'Aphrodisias) et Astérius. Il était en réalité, au jugement de Damascius ( Vie d'Isidore, fr. 140 , p . 121 , 1-8 Zintzen ) reproduit par la Souda ( A 165 Adler), davantage un philosophe qu’un sophiste : il faut entendre par là qu'il se distinguait par ses qualités morales plus que par son éloquence. À cette appréciation nuancée fait écho le poème gravé sur une stèle funéraire athénienne , où un certain Eustathe, apparemment le fils du sophiste, évoque les modèles de vertu qu'ont été pour lui son grand - père et son père, qui ont su « maintenir intacts et serrés les liens de la piété et du bien et se donner pour règles ces deux valeurs » ( IG II 11952 ; 1 B. Puech, Orateurs et sophistes grecs dans les inscriptions d'époque impériale, Paris 2002, n ° 147 , p. 324-326) ; la grande maladresse du poème paraît interdire de reconnaître en son auteur le rhéteur homonyme Eustathe (RE 17), commentateur d’Hermogène ( voir DPHA E 161 , p. 377 ) . Outre ce souvenir édifiant, Lacharès avait laissé aussi plusieurs manuels de rhétorique : un fragment de l'un d'eux a été conservé ( voir 2 H. Graeven , « Ein Fragment des Lachares » , Hermes 30 , 1895 , p. 289-313 ; traduction française dans 3 M. Patillon et L. Brisson , Longin , Fragments. Art rhétorique. Rufus, Art rhétorique, CUF , Paris 2001 , fr. 55 , p . 217-218 ; commentaire dans 4 I. Männlein -Robert, Longin, Philologe und Philosoph. Eine Interpretation der erhaltenen Zeugnisse, coll . « Beiträge zum Altertumskunde >> 143 , Leipzig /München 2001, p . 116-120 ) . Tous les titres mentionnés par la Souda ont trait à la rhétorique et non à la philosophie : des Dialexeis (Ala NÉEELS ) , un traité Sur le côlôn, le comma et la période ( ſlepi xólov xai κόμματος και περιόδου), des Morceaux choisis de rhetorique disposés selon un ordre alphabétique ( 'Exdoyàç ontopixdç xatà otoixelov ), ainsi qu'une Histoire (de la rhétorique ?) d'après Cornutus ( 'lotop av tv xatà KopvoŨ tov ). Selon Graeven 2 , qui ne donne cependant pas à l'appui de son hypothèse d'arguments décisifs, ce Cornutus pourrait être l'auteur du traité de rhétorique résumé par l'Anonymus Seguerianus. Voir l'édition récente de 5 M. Patillon (édit. ) , Anonyme de Séguier, Art du discours politique , CUF, Paris 2005 , notamment , sur Cornutus , p . LXXI - LXXIV . Voir aussi 6 P. P. Fuentes González, art. « Cornutus » , C 190 , DPLA II, 1994 , p. 470-471 . Le lexicographe situe l'acmè de Lacharès sous les règnes de Marcien (450 457 ) et Léon (457-474) , soit dans le troisième quart du Ve siècle . C'est au temps de ses études, dans les années 430 vraisemblablement, que doit se placer la conversation avec Proclus qu'évoque Marinus ( Proclus , 11 ) , beaucoup plus indulgent que Damascius pour le sophiste, dont le talent, selon lui , lui valait « autant d'admiration qu'à Homère son talent de poète » . Lacharès, qui « s'était entièrement imprégné des doctrines de la philosophie » , avait suivi en même temps que Proclus l'enseignement de Syrianus : voir à ce sujet les précisions de 7 H.-D. Saffrey et A - P. Segonds dans leur édition de la Vie de Proclus, CUF,

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LACTANCE

Paris 2001, n . 13 , p . 99-100. Damascius qui avait vu une statue de Lacharès, sans doute à Athènes, rapporte encore qu'en tant qu'homme aimé des dieux , il retrouva la vue après l'avoir perdue. BERNADETTE PUECH . 4 LACON DE SAMOS Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique , V. pyth. 36 , 267 ; p. 146, 2 Deubner. BRUNO CENTRONE . 5 LACRATÈS DE MÉTAPONTE Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique , V. pyth . 36 , 267 ; p . 144, 8 Deubner. [Sur ce type de nom, cf. Fr. Bechtel, Die historischen Personennamen , p. 258 et 279. C.M.)

BRUNO CENTRONE. 6 LACRITOS DE MÉTAPONTE Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique , V. pyth. 36, 267 ; p. 144, 6 Deubner. ( Sur ce type de nom, cf. Fr. Bechtel , Die historischen Personennamen , p. 265 et 279. C.M. )

BRUNO CENTRONE. 7 LACTANCE ( L. CAE[ CIJLIVS FIRMIANVS -) RE 1

III - IV

Les témoignages anciens sur la vie et l'euvre de Lactance ont été rassemblés dans Brandt -Laubmann 14 , t. 27 ( 1 ) , p. 161-167 ; et , avec ceux de l'auteur lui même, dans Wlosok 52 , p. 427 sq.; 431 ; 445 ; 455 ; 456 (24 textes ) . Voir ces références plus loin . Biographie. Comme en témoigne Jérôme ( Vir. ill. 80) , Lactance était originaire d'Afrique, où il fut le disciple d'Arnobe de Sicca, et commença très tôt une carrière d'écri vain . Sous l'empereur Dioclétien ( 284-305 ) , il fut appelé à Nicomédie pour y enseigner la rhétorique latine . Né païen (cf. Epit. 43 , 3 ) , il a peut- être été en contact avec le christianisme dès son séjour en Afrique, mais c'est sans doute à Nicomédie qu'il se convertit (Opif. 1 , 1 sq . ) . Il y séjournait en 303 , au début de la grande persécution ( Inst. V 2,2 -4 , 1 ; Mort. pers. 12 , 1 - 16, 3 ) , et c'est alors qu'il fut témoin de la lecture publique d'ouvrages de propagande anti-chré tienne , rédigés par deux philosophes . Le premier, décrit par Lactance ( Inst. V 2 , 3-11 ) comme un imposteur opportuniste, auteur de « trois livres contre la reli gion et le nom des chrétiens » , est généralement considéré comme un émule de Porphyre, non identifiable. Certains ont pensé qu'il pourrait s'agir de Porphyre lui-même, lequel aurait présenté, à Nicomédie, non son Karà Xplotav@ v, mais trois des livres de la Philosophie tirée des Oracles: cf. 1 P.F. Beatrice, « Antistes philosophiae. Ein christenfeindlicher Propagandist am Hofe Diokletians nach

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dem Zeugnis des Laktanz » , Augustinianum 33 , 1993, p . 31-47, et 2 E. De Palma Digeser, « Lactantius, Porphyry, and the debate over religious toleration » , JRS 88 , 1998 , p . 129-146 . Mais cette hypothèse demeure insuffisamment fondée : cf. 3 R. Goulet, « Hypothèses récentes sur le traité de Porphyre Contre les Chré tiens » , dans M. Narcy et É . Rebillard ( édit . ) , Hellénisme et christianisme, coll . « Mythes , Imaginaires, Religions » , Villeneuve d'Ascq 2004, p . 61-109 (pour l'Anonyme de Lactance, p. 100-104 ). Le second philosophe cité par Lactance ( Inst. V 2 , 12-3 , 26 ) est un haut fonctionnaire impliqué dans la campagne de persécution , et l'auteur de deux opuscules ( libellos) « intitulés Olandeiç ». Il s'agit de Sossianus Hiéroclès ( » H 125 ) , qui est nommé en Mort. pers . 16 , 4 ; c'est pour le réfuter qu'Eusébe de Césarée écrivit, en 312, son Contre Hiéroclès (cf. 4 M. Forrat et E. des Places (édit. ) , SC 333 , Paris 1987 ) . Le futur empereur Constantin se trouvait alors à la cour de Dioclétien , et c'est sans doute à Nicomédie que Lactance le rencontra ; il fut peut- être même son précepteur ( bibliographie sur les rapports entre Lactance et Constantin : cf. Wlosok 53 , p. 431 , et Digeser 55, p. 181-195 passim ). Après avoir abandonné sa charge d'enseignement, Lactance se consacra, comme écrivain , à la défense de la religion persécutée (Opif. 1 , 1 sq .; Inst. I 1 , 8 et 10 ) , et il connut une situa tion matérielle difficile (cf. Jérôme, Chronic, ad a . Abr. 2333 ; et, récemment, 5 D. Romano, « Lattanzio e la povertà » , dans Curiositas. Studi di cultura classica e medievale in onore di Ubaldo Pizzani, Perugia 2002, p . 231-238 ). Il semble être resté à Nicomédie , ou dans la région, jusqu'en 310 ou 313 . Pour la bibliographie de ce long débat, cf. Wlosok 53 , p . 430 ; et 6 E. De Palma Digeser, « Lactantius and the edict of Milan : does it determine his venue ? » , Studia Patristica 31 , Louvain 1997 , p . 287-295 . A en croire la mention de Jérôme ( extrema senectute ), Lactance devait avoir environ 65 ans lorsqu'il fut, à la cour de Trèves, le précepteur du fils aîné de Constantin , Crispus ( sans doute dès 315 ) . A la fin de sa vie , après avoir rédigé un Abrégé ( Epitome) de son æuvre maîtresse , il semble en avoir préparé une réédition, mais serait mort avant de l'avoir achevée ( sans doute vers 325 ) . C'est à elle qu'auraient été adjointes les deux dédicaces à l'Empereur, conservées par une partie de la tradition manuscrite , et qui renvoient à des événements de 324 : cf. Heck 45 , p . 138-170 , et Wlosok 53 , p . 430-431 ( état de la question ) . Selon 7 E. De Palma Digeser, « Lactantius and Constantine's letter to Arles : Dating the Divines Institutes » , JECS 2 , 1994 , p . 33-52 , ce sont plutôt des événements de 310 et 313 que reflèteraient ces dédicaces, mais le débat reste ouvert. Euvres . Le premier ouvrage en prose qui nous soit parvenu , a été rédigé par Lactance en 303 ou 304. L'Œuvre créatrice de Dieu ( De opificio Dei) est un court traité , protreptique et crypto -chrétien, écrit en un temps de persécution ( cf. chap. 1 et 20 ) , et sans doute remanié plus tard ( addition « dualiste » au chap . 19) . Relevant à la fois de la description scientifique ( anatomique) et de l'exposé philosophique, l'ouvrage offre une structure plus complexe qu'il n'y paraît d'abord : la description du corps humain ( chap. 5-15 ) commence avant la fin du débat avec les épicuriens sur la Providence créatrice (chap. 2-6) ; et l'inventaire de ce qui , dans l'homme , nous reste « obscur » (chap. 14

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18 ) ne s'achève pas avec le début de l'exposé sur l'âme (chap. 16-19) , mais avant la fin de celui- ci. Ce traité d'anthropologie, d'inspiration finaliste et tout imprégné de Cicéron ( livre II du De natura deorum ), est surtout original en ce qu'il s'adjoint un De anima. Son épilogue annonce une euvre beaucoup plus ample. Les Institutions divines, en sept livres, constituent l'euvre maîtresse de Lactance , par laquelle il entend répondre « définitivement » (uno semel impetu ) à tous les philosophes païens, ceux en particulier qui se déchaînent alors contre le christianisme. Une telle ambition témoigne du passage de l'apologétique tradi tionnelle à l'élaboration méthodique d'une doctrine chrétienne latine . Le titre même d'Institutions rappelle que cette réflexion s'enracine dans une double tradition païenne : rhétorique et juridique , en même temps qu'il souligne un projet de « formation religieuse » ( instituere = mettre debout). L'ouvrage com porte donc trois livres de critique du paganisme, auxquels succèdent trois autres, présentant le christianisme aux païens, et le fruit de ce cheminement fait l'objet du dernier livre . Mais , derrière cette apparente simplicité , on décèle une structure plus recherchée, où se répondent les livres I et VI , II et V , III et IV : cf. 8 C. Ingremeau, « Les Institutions divines de Lactance : une composition architecturale » , Vita Latina 132, 1993 , p. 33-40 . Le livre I (De falsa religione) comporte un long préambule, qui introduit à l'ensemble de l'auvre (chap. 1-7 ) : tout homme en quête de vérité rencontre d'emblée les deux grandes questions de l'existence ou non d'une Providence, et de l'unicité de Dieu. Puis les chap. 8 à 23 dénombrent les ridicules et les incohérences d'un polythéisme anthropomorphique, dont est proposée un explication évhémériste (ces dieux ne sont que d'anciens rois ou bienfaiteurs; l'apparition du polythéisme peut être datée). Le livre II (De origine erroris) poursuit, en s'attaquant au culte des idoles , à celui des éléments, à l'auctoritas de la tradition religieuse romaine . Ce n'est qu'au chap. 8 qu'est abordée « l'origine de l'erreur » : on trouve d'abord un développement sur les origines (chap. 8-13 ) , où alternent le récit (passages bibliques, poètes, Oracles sibyllins) et le débat philo sophique ( création de l'univers , de l'homme , complémentarité du bien et du mal ) . Puis les chap. 14 à 17 offrent un exposé démonologique : deuxième explication de l'apparition et des progrès du polythéisme, déchéance sacrilège de l'homme, dont la vocation est de s'élever (chap. 18). Le livre III (De falsa sapientia ) en vient à la philosophie, cet « amour de la sagesse » qui, au jugement de l'auteur, n'a jamais débouché sur la sagesse. Les chap. 3 à 16 présentent ladite philosophie en ses trois parties traditionnelles, mais en insistant sur l'affrontement entre les doctrines ( notamment sur la connaissance humaine ( scientia ou opinatio ? ) et sur le souverain bien ) . Les chap. 17 à 24 ne sont pas davantage un exposé purement didactique, dans leur présentation sélective de diverses écoles (épicuriens ; métemsomatose des pythagoriciens; stoïciens ; communisme platonicien ). Enfin , les chap. 25 à 29 concluent – non sans nuances – à l'échec des philosophes, qui n'ont pas su (et ne pouvaient, seuls ) poser les vraies questions. Le livre IV (De uera sapientia et religione) répond au précédent, car sagesse et religion ont été indûment séparées. Pour l'essentiel , les chap. 5 à 21 présentent un exposé de christo logie : de nature plus théologique d'abord ( la prolation du Verbe, puis l’Incarnation, dans le plan divin sur l'humanité ) ; plus proches des récits bibliques ensuite ( mais non sans choix délibérés) : du baptême du Christ à son Ascension . Après cet exposé, le débat d'idées reprend avec les païens : sur la grandeur divine , jusque dans la nécessaire incarnation d'un « Maître de justice et Guide de vérité » (chap. 22-26) ; sur l'unicité de Dieu (chap. 29). Un nouvel exposé démonologique est même introduit (chap. 27 ), et une mise en garde contre le danger d'hérésie (chap 30). Le livre V (De iustitia ) comporte un long préambule méthodologique, où est également annoncé le lien nécessaire entre justice et connaissance de Dieu (chap. 1-4 ). Suit une fresque

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de l'histoire de la Justice parmi les hommes (chap. 5-8) : de l'âge d'or des origines à l'appa rition du polythéisme et de l'injustice (la venue du Christ restaurant justice et culte de Dieu ). Après une évocation de la situation présente, à savoir les malheurs des justes (chap. 9-13 ), les chap. 14 à 18 engagent le débat avec l'académicien Carnéade, par Cicéron interposé (Rep. III ) . Après avoir opposé païens et chrétiens dans leur relation au divin (ch . 19-21 ), le livre s'achève avec un tableau de la patientia du juste (chap. 22-23 ). Le livre VI (De uero cultu) répond au livre I sur la « fausse religion » : un culte rendu à Dieu ne peut être que spirituel , et pratiquer ce culte, c'est pratiquer la vertu . Les chap. 3 à 9, après avoir repris l'allégorie des deux Voies, posent deux grandes questions: qu'est-ce que la vertu ? (définitions des principales écoles) ; et , s'il existe une loi divine, universelle, la vertu humaine peut-elle la rejoindre sans connaître Dieu ? Aux devoirs envers Dieu (religio), les chap. 10 à 13 adjoignent les devoirs envers les hommes (humanitas), et la notion de miseri cordia donne lieu à un débat sur les passions (chap. 14-19). Après le bon usage des affects , vient le bon usage des plaisirs des cinq sens ( chap. 20-23) ; et le livre s'achève sur le fonde ment de cette morale : la reconnaissance par l'homme de sa relation à Dieu (chap. 24-25 ). Le livre VII enfin (De uita beata ) traite du vrai « bonheur » , couronnement de toute la démarche ; or ce bonheur, fruit de la vertu , ne peut que la transcender et être l'immortalité. Livre des fins dernières, l'ouvrage fait place d'abord au débat avec les philosophes : sur l'éternité ou non de l'univers, le sens de la Création, l'immortalité ou non de l'âme (chap. 1 13 ) ; puis il présente une eschatologie millénariste, s'appuyant délibérément sur les Testimo nia diuina du paganisme (chap. 14-26). Le chap. 27 conclut l'ensemble de l'æuvre par une exhortation solennelle à la militia Dei. De ces Institutions divines, certains manuscrits offrent une version « courte » , d'autres une version « longue » . Outre les deux dédicaces à l'empereur Constan tin (aux livres I et VII) , la version « longue » comporte, aux livres II et VII , deux longs passages « dualistes » ( cf. Heck 45 , p . 24-115 ) , longtemps rejetés comme des interpolations, mais que l'on considère aujourd'hui comme des additions de l'auteur lui-même , en vue d'une réédition . Les æuvres postérieures aux Institu tions (Epitome et De ira Dei) témoignent en effet d'une certaine évolution de la pensée de Lactance. Cf. Ingremeau 23, p. 32-36 ; Wlosok 53, p . 445. L'Epitomé des Institutions divines n'est pas seulement un résumé de l'æuvre maîtresse, dépouillée de « nombreux arguments et exemples » ( praef. 3 ) . L'argu mentation y est plus concise et prend le pas sur le dialogue ; la disposition de la matière est assez souvent modifiée ( place du livre V notamment) ; de nouvelles références apparaissent et certaines idées ont évolué ( sens et origine du mal [chap. 24 ]; théorie des affects (chap. 56 ] ; critique de Platon (chap . 63-64 ]). Le traité intitulé La Colère de Dieu (De ira Dei) est la seule monographie antique sur le sujet qui nous soit parvenue . Il s'agit en effet d'un véritable para doxe au regard des philosophies gréco -latines, quasiment unanimes sur l'apa theia divine . Le débat avec les philosophes est donc accepté d'emblée . Débat sur la nature et les attributs de Dieu (chap. 1-6 ; 15-17 ) , et sur la colère humaine (chap. 17-18 ). Les doctrines subversives pour la religion (atomisme , athéismes ) sont enten dues et critiquées (chap. 8-11 ) , et le finalisme stoïcien est approuvé (chap. 13-15 ). Mais, pour la colère (qui même en l'homme peut être juste (ch . 21 ] ) , l'auteur entend montrer - contre les stoïciens – qu'elle est, en Dieu , non une passion mais un acte, complémentaire de sa patience : une manifestation du lien qui l'unit aux hommes (chap. 7 ; 14 ; 16-17 ; 19-20). Avant la paré nèse finale du chap. 24 , un épilogue apporte le témoignage des Oracula païens : Sibylles et Apollon de Milet (chap. 22-23 ) . Le pamphlet sur La mort des persécuteurs (De mortibus persecutorum ), qui décrit leur fin misérable comme la preuve éclatante de la justice divine , s'appuie

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à la fois sur la tradition romaine ( cf. Heck 52 , p . 30-41 ; 221-223 ) et sur la tradition juive ( cf. 9 J. Rougé , « Le De mortibus persecutorum , cinquième livre des Macchabées » , Studia Patristica 12 , 1975 , p. 135-143 ) . Commencée sans doute dès 313 , l'ouvre semble avoir été terminée à Trèves, au plus tard en 316 ; et son authenticité , longtemps contestée, s'est maintenant imposée : il s'agit du De persecutione mentionné par Jérôme. (État de ces questions : cf. Wlosok 53 , p. 450-451 ). Après une dédicace au confesseur Donatus et un bref retour sur les précédents persécu teurs des chrétiens (chap. 1-6), les chap. 7 à 23 présentent les premiers princes persécuteurs de la Tétrarchie, racontent le déroulement de la persécution à Nicomédie , puis la maladie et le déclin de Dioclétien , la terreur instaurée par Galère. Après un passage consacré aux événe ments en Occident (chap. 24-30 ), les chap. 31 à 49 décrivent la chute de Galère et sa mort atroce ( promulgation , en 311 , de l'édit de tolérance : chap. 34), puis ( après la mort de Dioclé tien , désespéré par les humiliations : chap. 42 ) celle de Maximin Daïa, le dernier despote persécuteur. Les chap. 50 à 52 , enfin, célèbrent le « triomphe de Dieu » . Le poème en distiques élégiaques intitulé L'Oiseau Phénix ( De aue phoenice) nous est parvenu séparément. Il n'est pas mentionné par Jérôme, et son attribu tion à Lactance ( bien qu'elle soit largement attestée dès Grégoire de Tours ) a longtemps fait l'objet de débats , ainsi que sa datation aujourd'hui encore ( cf. Wlosok 53 , p . 454, et Romano 6 , p. 235 ) . Le caractère crypto -chrétien du poème, qui reprend le mythe païen du Phénix et en suggère une lecture chrétienne, peut faire penser à une rédaction assez proche du De opificio Dei ; d'autre part, on y trouve bon nombre de thèmes développés dans les Institutions. Lactance semble avoir voulu donner ainsi un exemple de poésie chrétienne. Ce poème de 170 vers , de facture classicisante , est composé de trois parties d’égale longueur. La première est consacrée au sacerdoce du phénix (v. 1-58) : le bois sacré où il réside, puis ses activités quotidiennes de servant de Phébus . La seconde partie décrit son passage par la mort (v. 59-114) : le départ de l'oiseau après mille ans, son installation en Syrie sur un haut palmier, la préparation du nid -sépulcre et la mort du phénix , puis sa renaissance . La troisième partie évoque son apothéose ( v. 115-170) : envol et retour à la « cité du Soleil» ; description de l'oiseau - roi dans toute sa beauté ; son épiphanie en Égypte , enfin , suivie d'un éloge de sa vocation à l'immortalité.

Éditions d'ensemble. Editio princeps: 10 C. Sweynheim et A. Panmartz, Subiaco 1465 ( Inst ., Ira, Opif .). Première éd . avec comm .: 11 S. Betuleius , Basel 1563. Autres éd . importantes: 12 Ch.A. Heumann , Göttingen 1736 ; 13 J. L. Bünemann , Leipzig 1739 , 14 J. B. Le Brun et N. Lenglet -Dufresnoy, Paris 1748 ( éd . reprise dans PL VI - VII , 1844 ). Édition critique de référence : 15 S. Brandt et G. Laubmann , Opera omnia, CSEL 19 et 27 (4 vol . ) , Wien 1890 et 1893 , réimpr. New York 1965. 16 U. Boella, Firenze 1973 ( Inst., Opif ., Ira ). Éditions séparées avec traduction . Dans la collection Sources Chrétiennes, Paris : 17 M. Perrin , Opif ., SC 213-214 , 1974 ; 18 P. Monat , Inst. I , SC 326 , 1986 ; 19 Id . , Inst. II , SC 337 , 1987 ; 20 Id . , Inst. IV , SC 377 , 1992 ; 21 Id ., Inst. V , SC 204-205, 1973 ; 22 M. Perrin , Epit., SC 335 , 1987 ; 23 C. Ingremeau, Ira, SC 289 , 1982 ; 24 J. Moreau , Mort. pers., SC 39 ( 2 vol . ) , 1954. [ En préparation : Inst. III ( A. Goulon ) ; Inst. VI ( C. Ingremeau ) ; Inst. VII ( M. Perrin ) ]. Dans la Bibliotheca Teubneriana , Leipzig : 25 E. Heck et A. Wlosok , Epit ., 1994 , et 26 E. Heck et G. Schickler, trad ., 2001. ( En préparation : Inst. I à VII ( E. Heck et

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A. Wlosok ) ] . 27 H. Kraft et A. Wlosok , Ira , Darmstadt 1957, 2e éd . 1971 ; 28 F. Corsaro , Mort. pers ., Catania 1970 ; 29 J.L. Creed , Mort. pers ., Oxford 1984 ; 30 CI . T. Ariesan , Mort. pers ., Timişoara 2000 ; 31 E. Baehrens, Phoen . ( Poetae latini minores, t . III ) , Leipzig 1881 ; 32 M. Fitzpatrick, Phoen ., Phila delphia 1933 ; 33 A. Anglada Aufruns, Phoen ., Barcelona 1984. Traductions d'ensemble seules. Française : 34 J.A.C. Buchon , Choix de monuments primitifs de l'Église chrétienne, Paris 1837 , p. 469-745 ( sans l'Epit.) ( trad. anonyme du XVIIe s . , « belle infidèle » ). Allemande : 35 A. Hartl et A. Knappitsch ( Bibliothek der Kirchenväter 36) , München 1898 , 2e éd . 1919 . Italienne : 36 G. Mazzoni , Inst. (Classici Cristiani 61 et 63 ), Siena 1936-1937 . Anglaises : 37 W. Fletcher (The ante-Nicene Fathers 7 ) , New York 1871 , réimpr. 1975 ; 38 M. F. McDonald ( The Fathers of the Church 49 et 54 ) , Washington 1964-1965, réimpr. 1981 ; 39 A. Bowen et P. Garnsey, Liverpool 2003 (Inst.). Concordance . 40 Thesaurus Lactantii , series A , curante CETEDOC , Turnhout 1998 ( à partir de la Concordance globale, établie à l'Univ . Libre de Bruxelles, par D. de Decker, 1976 ) Études générales. 41 R. Pichon , Lactance. Étude sur le mouvement philo sophique et religieux sous le règne de Constantin , Paris 1901 ; 42 A. Wlosok , Laktanz und die philosophische Gnosis. Untersuchungen zu Geschichte und Terminologie der gnostischen Erlösungsvorstellung, Heidelberg 1960 ; 43 M. Spanneut, Tertullien et les premiers moralistes africains, Paris 1969 ( sur Lactance , p. 125-180 ) ; 44 V. Loi, Lattanzio nella storia del linguaggio e del pensiero teologico preniceno , Zürich 1970 ; 45 E. Heck , Die dualistischen Zusätze und die Kaiseranreden bei Lactantius, Heidelberg 1972 ; 46 J. Fontaine et M. Perrin ( édit. ) , Lactance et son temps. Recherches actuelles, Paris 1978 ; 47 F. Amarelli, Vetustas – Innouatio . Un'antitesi apparente nella legislazione di Costantino , Napoli 1978 ( sur Lactance et Constantin , p . 47-145 ) ; 48 R. M. Ogilvie , The Library of Lactantius, Oxford 1978 ; 49 M. Perrin , L'Homme antique et chrétien . L'anthropologie de Lactance , Paris 1981 ; 50 P. Monat , Lactance et la Bible. Une propédeutique latine à la lecture de la Bible dans l'Occident constantinien , 2 vol . , Paris 1982 ; 51 A. Bender, Die natürliche Gotteserkenntnis bei Laktanz und seinen apologetischen Vorgängern , Frankfurt am Main 1983 ; 52 E. Heck , MH OEOMAXEIN oder : Die Bestrafung des Gottesverächters, Frankfurt am Main 1987 ( sur Lactance , p . 186-228 ) ; 53 A. Wlosok, « Laktanz » ( § 570 ) , dans HLL , V , 1989 , p . 375-404 ; traduction française : NHLL, V , 1993 , p . 426-459 ; 54 W. Winger, Personalität durch Humanität. Das ethikgeschichtliche Profil christlicher Handlungslehre bei Laktanz, 2 vol . , Frankfurt am Main 1999 ; 55 E. De Palma Digeser, The making of Christian Empire. Lactantius and Rome, Ithaca /London 2000 ; 56 P. Pistol , L. Cae( ci) lius Firmianus Lactantius, scriitor creştin şi umanist paideic , Rm. Vâlcea 2000 . Bibliographie . Outre Wlosok 53 ( bibliographie très détaillée , pour les publications antérieures à 1989 ) , cf. Winger 54, p. 625-690 .

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Euvres perdues. Parmi les ouvrages énumérés par Jérôme ( Vir . ill. 80), certains ne nous sont pas parvenus ( cf. Brandt -Laubmann 15 , CSEL 27 ( 1 ) , p . 155-158 , fr. 1-7 , et Wlosok 53 , p . 455-456 ) : un Symposium , cuvre de jeunesse écrite en Afrique ; un Hodoeporicum en hexamètres, décrivant le voyage d'Afrique à Nicomédie ; un Grammaticus ; deux livres Ad Asclepiadem ( dédicataire mentionné et cité en Inst. 7 , 4 , 17 ) ; tout un corpus de Lettres : à Probus (4 livres ), à Severus ( 2 livres ), à Démétrianus [ le dédicataire d'Opif .] ( 2 livres). Quant au fr. De motibus animi, il provient sans doute du recueil de Lettres ou de l'Ad Asclepiadem . Euvres annonçées, mais apparemment non publiées : un Contra omnes haereses ( cf. Inst. IV 30, 14 ; Ira 2 , 6) ; un Contra Iudaeos ( cf. Inst. VII 1 , 26) . Euvre jugée non authentique : le Carmen de passione Domini (Brandt Laubmann 15, CSEL 27 [ 1 ] , p. 148-151 ) . Influence et réception . La célèbre phrase de Jérôme (Ep. LVIII 10 , 2 ) : Vtinam tam nostra adfirmare potuisset, quam facile aliena destruxit ! ( écho d'une formule cicéronienne , deux fois citée par Lactance ) est en réalité un premier hommage rendu au « Cicéron chrétien » ( cf. Wlosok 53 , p . 457 n . 31 ) . L'ouvre de Lactance a été largement utilisée par les auteurs ultérieurs de l'Antiquité tardive (Lucifer de Cagliari, Prudence, Zénon de Vérone, Sedulius Scotus, Isidore de Séville ) : cf. Brandt- Laubmann 15 , CSEL 27 ( 2 ) , p . 269-278 : Index expilatorum et testium . L'enthousiasme des humanistes est bien attesté : cf. notamment Pétrarque (exundans lacteo torrente Lactantius ), et Pic de la Mirandole ( généralement considéré comme l'auteur de la formule Cicero christianus ) . La dénonciation des faiblesses théologiques de l'æuvre (déjà présente chez Jérôme) donna lieu à de vives controverses , puis certaines éditions comportèrent des mises en garde , avec renvoi au Décret du pape Gélase ( cf. PL VI , col . 62-94). Bibliographie sur divers aspects de la réception dans Wlosok 53 , p . 458-459 . CHRISTIANE INGREMEAU . 8 LACYDAS DE MÉTAPONTE Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique, V. pyth . 36 , 267 ; p. 144 , 7 Deubner. [ En réalité ce nom résulte d'une correction proposée par K. Keil , Analecta epigraphica et onomatologica , Leipzig 1862 , p. 228 et adoptée par L. Deubner. Le Laurentianus qui a transmis le texte du traité porte Aax dac, nom qui n'avait posé problème ni à A. Nauck, dans C.M. ] son édition de 1884, ni à H. Diels ( DK 58 A, t . I , p. 446, 20 ). BRUNO CENTRONE .

9 LACYDÈS Personnage fictif, destinataire de la Lettre pseudépigraphe 23 de Diogène de Sinope ( D 147 ) [ = SSR V B 553 ] ( éd . avec trad. latine dans 1 R. Hercher, Epistolographi graeci, p . 240-241 ; éd . avec trad . allemande dans 2 Eike Müseler, Die Kynikerbriefe, t. II , p. 26-27 ; reprise du texte de Hercher et trad . anglaise par B. Fiore dans 3 A.J. Malherbe, The Cynic Epistles, p . 116-117 ;

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trad . française dans 4 G. Rombi et D. Deleule , Les Cyniques grecs. Lettres de Diogène et Cratès, coll . « Les philosophiques » , Paris 1998 , p . 49 ) . Il est question également de Lacydès dans la Lettre pseudépigraphe 37 de Diogène (Hercher 1 , p. 251-252 ; Müseler 2 , p. 58-61 ; Malherbe 3 , p. 154-159 ; Rombi et Deleule 4 , p . 72-76 = SSR V B 567) adressée à Monime . Sur la Lettre 23 , voir 5 F. Junqua, Lettres de Cyniques, t. I , p . 84-85 ; t. II , p . 452 , 514 et 566, et sur la Lettre 37 voir t. I , p . 129-135 ; t . II , p. 472-474 et 578-580 .

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Études . 6 V. E. Emeljanow , The Letters of Diogenes , Ph.D. , Stanford University , 1968 ( Ann Arbor, Michigan : Classical University Microfilms, 1974 ) , p . 84 et 128 pour la lettre 23 et p . 179-190 , notamment p. 180 pour la Lettre 37 ( compléments à la bibliographie fournie par Emeljanow dans Malherbe 3 , p . 20-21 , et Junqua 5 , t . II , p . 652-674 ) ; 7 G. Giannantoni , SSR, t . IV , 1990 , Note 53 , p. 551-553 . Pour la Lettre 37 , voir aussi 8 W. Capelle , De Cynicorum epistulis, Diss . Göttingen 1896 , 62 p. (Lettres de Diogène , p . 5-48 , et Lettres de Cratès , p . 49-62 ) , notamment p. 31-39 (en outre il signale , p . 7 n . 1 , que les lettres 23 et 37 ne sont pas du même auteur) ; 9 R. Nihard, « Les lettres de Diogène à Monime et la confrontation des topoi» , RPh 38 , 1914 , p. 259-271 , notamment p. 259-266. Lettre 23 à Lacydès. Junqua 5 , t . I , p . 84-85 , signale que dans la plupart des manuscrits la Lettre 23 est adressée à ’Alegávôow - ce qui n'a pas de sens vu le contenu de cette lettre où Diogène vient d'apprendre par Lacydès qu'Alexandre souhaite le rencontrer (Ευαγγελίζη μοι βασιλέα Μακεδόνων σπουδάζειν nepì tņu Obav ñuñv , « Tu m'annonces cette bonne nouvelle que le roi des Macédoniens désire vivement nous voir » ) , - et que seul le Palatinus gr. 398 , le plus ancien manuscrit des Lettres ( IX° s . ) , porte l'adresse : Aloyévns Aaxúdą yaipeiv, tandis que le Laurentianus 86.8 (XVe s . ) a la leçon ' Avtinátpw . Cette leçon pourrait être due à une correction ultérieure, car Antipater (RE 12 ) appar tenait à l'entourage d'Alexandre ; cet officier de Philippe devint en effet général sous Alexandre et , après la mort du jeune souverain , gouverneur de Macédoine . Après avoir précisé que Lacydès a raison de dire, en parlant d'Alexandre , « le roi des Macédoniens » , car lui -même, Diogène , n'admet aucun roi, le philosophe transmet au souverain par l'intermédiaire de Lacydès le message suivant : « Si Alexandre veut prendre part à mon mode de vie et à mes paroles, dis-lui qu'il y a aussi loin d'Athènes en Macédoine que de Macédoine à Athènes » , voulant signifier ainsi qu'il ne voyait pas pourquoi ce serait lui plutôt qu'Alexandre qui se déplacerait ( cf. Diogène Laërce VI 60 : « Un jour qu'Alexandre se tenait auprès de lui et disait : “ Moi, je suis Alexandre le grand Roi ” , Diogène dit : " et moi , je suis Diogène le Chien !" » ). Le mot de Diogène dans la Lettre 23 devait appartenir à tout un lot de chries qui circulaient sur la rencontre entre Diogène et Alexandre ( cf. SSR V B 31-49 , et t . IV , Note 43 , p . 443-451 : « Diogene e Alessandro Magno » ) , parmi lesquelles le célèbre « ôte - toi de mon soleil >> ( = SSR V B 33 ) . Le bon mot de la Lettre 23 n'est pas signalé dans SSR V B 31 49 ; il faut ajouter à cette collection le parallèle : Basile de Césarée, Lettre 9,3 A Maxime philosophe, dans Y. Courtonne ( édit . ) , Lettres de Basile, t . I , CUF , Paris 1957 , p . 39. Basile invite le philosophe cynique Maxime Héron ( > * M 70 ) à

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lui rendre visite : « Ne va pas nous dire, toi aussi , le mot de Diogène à Alexan dre, qu'il y a aussi loin de chez vous ici que d'ici chez vous » . Sur le thème de la rencontre entre Diogène et Alexandre , voir 10 M. Buora, « L'incontro tra Alessandro e Diogene: tradizione e significato » , AIV 132 , 1973/1974, p . 243 264. Aucun Lacydès n'est connu dans l'entourage d'Alexandre et le personnage est sans doute fictif. Nihard 9 , p. 260 n . 6, se demande cependant s'il ne faut pas l'identifier « avec le père de ce tyran Mégapenthès que met en scène Lucien imitant Ménippe dans son Katánovc 8 , et sur lequel nous ne possédons pas d'autre renseignement » . De son côté Junqua 5 , t. I , p. 85 , propose une interpré tation possible de l'adresse à Lacydès : « À l'origine de cette adresse se trouve , croyons -nous, une confusion. D'après Diogène Laërce, le successeur d'Arcésilas L 11 ) , fils d'Alexandre, originaire de à la tête de l'Académie était “ Lacydès ( Cyrène" ( D.L. IV 59) . Une anecdote est rapportée à son sujet : " Comme le roi Attale voulait le faire venir auprès de lui , il aurait répondu que les statues doivent se regarder de loin ” ( D.L. IV 60 ). L'anecdote n'est pas sans rappeler la réponse de Diogène que doit transmettre le Lacydès de la lettre à Alexandre . Le mot de Diogene : ιδείν δε τον εμόν τύπον μηδείς ως ξένον βουλέσθω ( « je refuse que quiconque veuille voir ma figure comme celle d'un étranger » , trad . Junqua ) , présente une utilisation métaphorique de túnoç qu'on peut comparer à celle que fait de eixóv le Lacydès académicien. On peut formuler l'hypothèse que la lettre ait été, soit au stade même de sa conception , soit au cours de sa transmission , contaminée d'une manière quelconque par cette tradition sur l'académicien Lacydès, qui aurait ainsi été promu intermédiaire entre Diogène et Alexandre et destinataire de cette lettre, en partie à cause du nom de son père, en partie à cause de son bon mot , parallèle à celui de Diogène (ou peut-être même à l'origine de ce dernier) » . Pour une interprétation un peu différente de la phrase qui comporte TÚTOS, voir Rombi et Deleule 4, p. 49 : « J'interdis à quiconque de venir voir comme une curiosité l'énergumène que je suis » . Lettre 37 A Monime. Dans cette lettre, Diogène présente Lacydès comme l’hôte chez qui il descend à Rhodes (on remarquera que le Lacydès académicien est originaire, lui , de Cyrène ). Mais la maison de Lacydès avec son mobilier luxueux , décrit avec précision dans la lettre , avec ses serviteurs, est en tous points opposée à la conception rude et frugale du mode de vie diogénien. Aussi le philosophe en profite -t -il pour rappeler combien le chemin qui mène au bonheur est difficile ; lui-même a pu le parcourir parce qu'il s'est préalablement entraîné aux côtés d'Antisthène ( 2 * A 211 ) qui lui a appris à s'exercer à manger et à boire frugalement. La description du mode de vie du Lacydès de la Lettre 37 ne s'harmonise pas très bien avec ce qu'on sait de l'académicien qui , selon la tradition , était pauvre (D. L. IV 59 ; Philodème , Acad. hist. XXI , p. 156, 194 et 244 Dorandi) et avare ( D.L. IV 59 ; voir T. Dorandi , n . 1 , p . 532 , dans Diogène Laërce, Vies et doctrines des philosophes illustres, coll . « Classiques modernes » , Paris 1999 ).

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10 LACYDÈS Péripatéticien. Élien , De nat. anim . VII 41 ( = Lacydès F 10 b Mette ): « Le philosophe péripatéticien Lacydès possédait une oie qui était une vraie mer veille : elle aimait passionnément son maître, allant au même pas que lui quand il marchait, s'arrêtant quand il s'asseyait , et ne le quittant pas un instant. Lors qu'elle mourut , Lacydès l'ensevelit avec les plus grands égards , comme s'il enterrait un fils ou un frère » ( trad . A. Zucker, Élien , La personnalité des animaux. Livres I à IX , coll . « La Roue à Livres » , Paris 2001, p. 198 ). Athénée , Deipnosophistes XIII , 606 c ( = Lacydès F 10 c Mette) , raconte de même cet attachement de l'oie pour « le philosophe Lacydès » dont elle était proprement amoureuse , en citant Hermias de Samos ( » H 82 ) , fils d'Hermodore . Selon Pline, Hist. Nat. X 51 (= Lacydès F 10 a Mette ), « une oie se tint constamment aux côtés du philosophe Lacydès , sans jamais le quitter, ni en public , ni aux bains , ni le jour, ni la nuit » ( trad. E. de Saint Denis, CUF , Paris 1961 , p. 45-46) . Comme Élien est le seul à faire de ce Lacydès un péripatécien , il est possible qu'il s'agisse en réalité du philosophe académicien mieux connu ( » L 11 ) . E. de Saint Denis ( p . 122 ) croit devoir distinguer les deux homonymes . W. Capelle, art. « Lakydes » , RE XII 1 , 1924 , col . 532 , s'est demandé si l'information ne provenait pas d'Hermippe ( H 86) . RICHARD GOULET. 11 LACYDÈS DE CYRÈNE RE

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Académicien , originaire de Cyrène , successeur d'Arcesilas en tant que scholarque de l'Académie ( D.L. IV 59-61 = T 1a 1-30 Mette ). Témoignages et fragments. 1 H. J. Mette , « Weitere Akademiker heute : Von Lakydes bis zu Kleitomachos » Lustrum 27 , 1985 , p. 39-51 . Cf. 2 W. Capelle , art. « Lakydes » , RE XII 1 , 1924 , col . 530-534 ; 3 T. Dorandi ( édit . ) , Filodemo : Platone e l'Academia , p . 62-65 ; 4 W. Görler, GGP Antike 4, 2 , p. 830-834 et 846. Son père s'appelait Alexandre . Il fut disciple d'Arcesilas (

A 302 ) , donna

des cours à l'Académie du vivant de son maître, et compta parmi ses élèves Chrysippe ( 2 - C 121 ] ( D.L. VII 183 = T la 38-40 Mette ) . Lacydès obtint la direction de l'Académie à la mort d'Arcesilas, en 241/0 . Il tenait école dans le « Lacydeum » , un jardin construit dans l'Académie par le roi Attale I er (Görler 4, p . 832 ) . Selon Diogène Laërce ( IV 60 ), Lacydès « fut le seul, de mémoire d'homme , à avoir transmis la direction de l'école de son vivant: à Téléclès et Évandre de Phocée ( » E 65 ) » . L'information est fausse : Carnéade aussi fut contraint d'abandonner la direction de l'Académie à cause de son mauvais état de santé . La chronologie de Lacydès demeure incertaine. On ne connaît pas l'année de sa naissance . Diogène Laërce ( IV 61 ) rapporte qu'il conduisit l'école pendant vingt - six ans . Le témoignage d'Apollodore (FGrHist 244 F 47 ap . Philod ., Acad . hist . , col . XXVII 1-7 = T 2a 1-7 Mette ) concernant l'année où mourut Lacydès est riche en détails , mais d'interprétation difficile. J'accepte maintenant (contrairement à ce que j'avais supposé dans mon article

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5 T. Dorandi, « Per la cronologia di Lacide » , RhM 133 , 1990 , p . 93-96 , repris dans Cronologia , p. 7-10) les résultats auxquels est parvenu Görler (4 , p. 830 831 ) . Dans ce passage d'Apollodore, on peut lire que Lacydès abandonna la direction de l'Académie au bout de dix-huit ans ; ayant vécu encore dix -huit autres années, il mourut sous l'archontat de Callistrate ( 208/7 ) ( selon certains anonymes , il serait cependant mort sous l'archontat de Pantiadès, en 20776 ) ; pendant les dix dernières années de sa vie , il fut malade. Lacydès mourut donc en 207 . Si l'on en croit le témoignage de Diogène Laërce ( IV 59 ) , Lacydès était un homme sérieux et entouré d'admirateurs ; zélé dès sa jeunesse , mais pauvre, il dut son ascension au caractère aimable de sa conversation . Son unique défaut était l'avarice : chaque fois qu'il prenait quelque chose dans son garde -manger, il refermait la porte en y apposant son sceau , puis jetait l'anneau à l'intérieur par une fente afin d'éviter qu'on ne le vole . Ses serviteurs s'aperçurent du procédé: ils brisaient régulièrement le sceau , emportaient ce qu'ils voulaient , refermaient la porte en apposant le même sceau et remettaient l'anneau dans la pièce par la même fente sans jamais être découverts. On retrouve chez Philodème le thème de la pauvreté ( Philod ., Acad. hist. , col . XXI 1-3 = T 2b 3-4 Mette ) . Le subterfuge des serviteurs revient, avec maints détails, chez Numénius (ap. Eus . , P.E. XIV 7 , 1-15 = fr. 26 Des Places = T 3 Mette) . La source de cet épisode pourrait être une comédie d'époque hellénistique ( cf. 6 R. Hirzel, « Ein unbeach tetes Komödienfragment » , Hermes 18 , 1883 , p . 1-16 , et 7 I. Gallo , Teatro ellenistico minore, Roma 1981 , p . 58-62 ) . Nous ne connaissons rien des écrits de Lacydès et très peu de sa pensée (Görler 4, p. 832-834). Diogène Laërce ( IV 59 ; cf. I 14 et 19) le présente comme initiateur de la Nouvelle Académie , tandis que Philodème (Acad. hist., col . XXI 37-42 = T 2b 6-8 Mette ) parle de l'Académie Moyenne . Philodème (Acad. hist., col . MNO = T 2b 9-34 Mette ) conserve une longue liste de disciples de Lacydès et donne des renseignements utiles , tirés de la Chronologie d'Apollodore ( FGrHist 244 F 47 ap . Philod . , Acad . hist . , col . XXVII 1-7 = T 2a 7-31 Mette) , concernant les successeurs et les disciples immédiats du philosophe : Paséas , Thrasys , Téléclès , Euandre (» E 65 ) , Aristippe ( A 357 ) , Agamestor ( > A 29 ) , trois Eubulos ( » E 73 , 76-77 ) et Moschion (

M 193 ) . TIZIANO DORANDI.

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Études. 1 F. Münzer , art. « C. Laelius Sapiens » , RE XII 1 , 1924 , col . 404 410 . Fragments des discours dans 2 E. Malcovati , ORF , « Corpus scriptorum Latinorum Paravianum , Torino 1953 , nº 20 , p . 115-122 ; Fils d'un homo nouus lui - même proche de Scipion l'Africain , C. Laelius, l'ami de Scipion Émilien, est plus âgé que lui (Cic ., Rep . I 12, 18 ; Lael. 15 ) : sa date de naissance n'est pas connue , mais doit donc être située avant 1854, vers 190 peut-être.

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Les débuts de sa carrière politique nous échappent; en 147-146 il est légat de Scipion et participe en 146 à la destruction de Carthage (Rep . II 40 , 67 ) . Il est préteur en 145 ; au cours de cette année , il prononce un discours contre le projet de loi proposé par le tribun C. Licinius Crassus qui aurait fait choisir les mem bres des collèges sacerdotaux par le peuple dans les comices, remplaçant ainsi la cooptation par l'élection ; la rogatio fut repoussée et le discours de Laelius sur les collèges resta célèbre; Cicéron y fait référence à plusieurs reprises et laisse voir que l'orateur n'avait pas seulement traité des collèges, mais de la religion (Brut. 83 , 295 ; Lael. 25 , 96 ; Nat. deor. III , 5 , et III , 43 ; Rep. VI, 2, 6 ; ORF 12 16 ; voir 3 E. Rawson , « Scipio , Laelius , Furius and the Ancestral Religion » , JRS 63 , 1973 , p. 161-174, qui suggère que Laelius était augure dès cette date ). En 144º, en tant que gouverneur de l'Espagne citérieure (4 T.C. Brennan , « Notes on Praetors in Spain in the Mid - Second Century B.C. » Emerita 63 , 1995 , p. 47-76) , il mena des campagnes contre le chef lusitanien Viriathus qu'il aurait « brisé et affaibli » selon Cicéron ( Off. II 11 , 40 , Brut . 21 , 84) , mais Cicéron est le seul à mentionner cette victoire (dont Appien ne dit rien) , peut être d'après une tradition familiale qu'il connaît (selon 5 A. Dyck , A commen tary on Cicero De officiis, University of Michigan Press, 1996 , p. 419-420 ). En 142 , sous la censure de Scipion, il se présente au consulat mais il échoue , trahi par Q. Pompeius Nepos qui se prétendait son ami et celui de Scipion ( Lael. 21 , 77 ; Tusc . V 19 , 54 ; Plutarque, Apophtegmata Scip. min . 8 ) . Laelius est élu au consulat l'année suivante et exerce cette magistrature en 140 avec Q. Seruilius Caepio ( Brut. 43 , 161 ) . C'est peut-être à ce moment qu'il devient augure . Faut-il placer vers cette époque, à la sortie du consulat, un discours « prononcé pour sa propre défense devant le peuple » (pro se ad populum ), discours dont quelques fragments figurent dans Festus (Malcovati 2 , 17-19 ) ? Il s'agit de répondre à une accusation devant le peuple, mais les fragments concernent des opérations militaires et semblent renvoyer à la préture en Espagne, plutôt qu'au consulat pendant lequel Laelius est resté en Italie ( voir Malcovati 2 , p . 119 ) . Plutarque évoque aussi un projet de loi concernant la question agraire : « Caius Laelius , l'ami de Scipion , essaya de redresser la situation , mais s'étant heurté à l'oppo sition des puissants, il craignit le tumulte et renonça à son projet, ce qui lui valut le surnom de Sage ou de Prudent... » (Tib. Gracchus 8 , 5 ) . Ce projet que Plutarque est seul à mentionner, a suscité bien des discussions, car son contenu est très imprécis et sa date nous échappe ; l'hypothèse d'un projet associé à un tribunat de la plèbe en 151a ( formulée par 6 L. Ross Taylor, « Forerunners of the Gracchi » , JRS 52 , 1962 , p. 19-27 ) est peu convaincante ; A. Astin (7 Scipio Aemilianus , Oxford 1967 , p. 307-310) semble considérer comme plus probable l'année du consulat, pour un projet qui ne dépassa sans doute pas le stade d'une discussion au sénat. La carrière politique de Laelius s'arrête après 140, mais il continue à intervenir dans la vie de la cité : en 1384, il défend les publicains impliqués dans le massacre de la forêt de la Sila ( Brut. 22 , 85-86 ) ; en 132 , il fait partie du consilium des deux consuls T. Popilius Laenas et P. Rupilius (Lael. 11 , 37 ; Val . Max IV 7 , 1 ) et participe sans doute aux interrogatoires des partisans de Tiberius Gracchus ; en 131 , il combat la rogatio du tribun C. Papirius Carbo, qui

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permettait de réélire un tribun de la plèbe, autant de fois qu'il le voudrait ( Liv . , Per. LIX 9 ) . Le projet, auquel s'était opposé Scipion Émilien , mais qui avait été soutenu par C. Gracchus, fut repoussé. Avec les optimates, Laelius se présente comme l'adversaire des mesures risquant de porter atteinte à l'équilibre de la cité. Enfin , en 129a, il rédigea l'éloge funèbre de Scipion Émilien , qui fut prononcé par Q. Fabius Maximus Allobrogicus (Cicéron, Mur. 75 ; Schol . Bob . in Mil., p. 118 , 11 Stangl , où est citée la fin de la laudatio ; dans le De orat. II 341 , la mention de Tubero est considérée comme erronée ). Laelius meurt vers 128. Il eut deux filles dont l'une épousa C. Fannius, et l'autre Q. Mucius Scaevola , l'augure ( Lael. 1 , 4) . C. Laelius fut un orateur renommé (Brut . 21 , 83 ) : Cicéron rappelle les nombreuses causes qu'il a plaidées (Rep. III 30 , 42) ; ses discours furent publiés ( Brut. 21 , 82 ; 24,94 ; Rep . VI 2 , 6) et restèrent célèbres dans l'Antiquité. Certes, Cicéron fait ressortir l'archaïsme du discours sur les collèges (où le choix d'une langue archaïque était sans doute volontaire , selon Rawson 3 ) , mais il souligne par ailleurs la pureté de sa langue et les qualités de son style: élégance, grâce et douceur ( Brut. 23 , 89 ; 73 , 258 ; 86, 295 ; De orat. III 7 , 28 ; III 12 , 45 ) . L'intérêt de Laelius pour la littérature n'était pas moins grand : il faut rappe ler ses liens d'amitié avec Térence (Lael. 24, 89) ; et une rumeur persistante faisait de Laelius - ou de Scipion Émilien - l'auteur véritable des comédies ; selon Cicéron (Ad Att. VII 3 , 10) , « on croyait les pièces de Térence écrites par C. Laelius à cause de la pureté de leur langue » (cf. Suet . , Vita Ter ., éd. A. Rostagni, Torino 1964, p. 36-37 ; Quint. X 1,99 ). Cornélius Nepos ( *** N 20 ) indiquait expressément que Laelius avait participé à la rédaction de l'Heauton timoroumenos ( Vit. Ter ., p. 36-37 ) . Térence lui- même fait allusion à de grands protecteurs dans le prologue des Adelphes : « Pour ce que disent ces gens malveillants, que des personnages éminents assistent notre auteur et ne cessent d'écrire en collaboration avec lui ... , lui il estime que c'est le plus grand des compliments » ( Prooim . 16-21 ; et aussi dans Heaut. 22-24) . Térence se trouvait ainsi associé au cercle des Scipions . Mais déjà des érudits antiques au temps d'Auguste , Fenestella et le grammairien Santra, avaient mis en doute cette collaboration ( Vita Ter ., p. 30 et 36-37 ) ; les savants contemporains ( voir la discussion et la bibliographie dans 8 E. Gruen , Culture and National Identity in republican Rome, London 1992, p. 198-202 ) ont souligné les difficultés d'une telle attribution : Térence est d'une génération antérieure ; en 160 , au moment où sont représentés les Adelphes, Laelius et Scipion Émilien sont des jeunes gens et n'ont pas l'expérience politique et militaire qui permettrait de les considérer comme des homines nobiles ayant rendu service dans la guerre ou dans les affaires. D'autres noms ont été proposés; il reste que les liens de Térence avec Scipion Émilien ne sont pas à nier, puisque les Adelphes furent représentés aux jeux funèbres en l'honneur de Paul Émile , en 160 . Les liens d'amitié entre Laelius et Scipion Émilien sont bien connus et fréquemment mentionnés chez les auteurs anciens . Dans l'œuvre cicéronienne leurs deux noms sont très souvent associés, mais on peut également citer Horace ( Sat. II 1 , 71-74) . Cicéron en a fait une amitié exemplaire dans le De amicitia

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( voir DPha Suppl., p. 663-665 ; 9 G. Garbarino, Roma e la filosofia greca , p . 426) ; Laelius est un membre important du « cercle de Scipion » avec d'autres hommes de sa génération comme L. Furius Philus ( MF 26 ] (Lael. 19, 69 ; De orat. II 37 , 154 ) ; il partageait l'intérêt de Scipion pour la culture grecque et la philosophie . Il fut en contact avec le stoïcien Panétius de Rhodes , proche de Scipion Émilien (Fin . IV 9, 23 ; Mur. 31 , 66) ; cette familiarité est rappelée à plusieurs reprises par Cicéron : Scipion et ses amis « eurent toujours auprès d'eux les plus savants d'entre les Grecs » ( De orat. II 37 , 154) ; ils « allièrent à la tradition nationale et ancestrale, la science étrangère, d'origine socratique » (Rep. III 3 , 5 ) . Avec Scipion, Laelius avait écouté les trois philosophes venus à Rome comme ambassadeurs en 155a : Carnéade ( 2C 42) , Critolaos ( C 219 ) , Diogène de Babylonie > D 146 ] (De orat. II 37 , 155 ; Tusc . IV 3 , 5 ; Fin . II 8 , 24 ; IV 9 , 23 ) , puis rencontré Panétius . Mais Cicéron ne le mentionne pas parmi les stoïciens comme Fannius ( > + F 6) , Tubero ou Rutilius Rufus (Garbarino 9, p. 426) . Dans le De amicitia , si Fannius propose une définition inspirée du stoï cisme de la « sagesse » de son beau - père ( Lael. 2, 7 ) , Laelius lui -même distingue la sagesse des philosophes, inaccessible aux mortels, et la qualité d'homme de bien , car il entend envisager « la pratique et la vie de tous les jours » (5 , 18 ; cf. Off. III 4, 16) . Laelius avait reçu le surnom de sapiens: ce cognomen figure déjà chez Lucilius où Laelius est présenté comme un homme de morale ( 1235-1237 M = H 30 Charpin : Lucilius ... sophos ille) . C. Gracchus semble déjà y avoir fait allusion dans un discours en faveur du projet de Papirius Carbo (Charisius, Gramm . Lat. I , 196 = ORF, p . 179 ) . Cicéron en fait état à plusieurs reprises (Lael. 1 , 1 ; 2 , 6 ; Fin . II 8 , 24 ; Mur. 31 , 66) pour affirmer que Laelius par son caractère , par ses goûts et sa culture est un « sage » . La « sapientia » de Laelius est donc mise en relation avec son intérêt pour la philosophie et l'oppose aux autres romains qui doivent ce surnom à leur science juridique ou à leur habileté ( Lael. 2 , 6) . Plutarque au contraire explique ce surnom par la conduite prudente et avisée de Laelius, au moment où il retira son projet de loi agraire : « ce qui lui valut le surnom de Sage ou de Prudent (le mot sapiens ayant, je crois, ce double sens ) » (Tib . Gracchus 8 , 5 ) . Il est difficile de penser que ce seul épisode ( fort mal connu) ait été à l'origine de ce surnom ( Münzer 1 , col . 407 ; Astin 7 ) . Mais il montre comment cet adjectif est susceptible d'une double interprétation : habileté , expérience ou sagesse ( voir 10 G. Garbarino , « Evoluzione semantica dei termini sapiens e sapientia nei secoli III e II a. C. » , AAT, 1965-1966, p. 253 284 ; 11 E.L. Wheeler, « Sapiens and stratagems: the neglected meaning of a Cognomen » , Historia 37 , 1988 , p . 166-195 ). E. Wheeler insiste sur l'habileté politique de Laelius ( p . 195 ) . Mais Garbarino 9 , p . 428-429 , montre que la sagesse de ce personnage n'est pas uniquement une création cicéronienne, mais provient d'une tradition qui s'est formée assez tôt , comme l'indiquent le témoignage de Lucilius et le fragment de C. Gracchus, peut-être même dans son entourage et conclut que le cognomen devait refléter les qualités intellectuelles et morales de Laelius.

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LAMISCUS DE TARENTE

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Cicéron a particulièrement insisté sur ce point; Laelius est remarquable par sa culture et aussi par sa personnalité : il souligne sa douceur et son affabilité ( Mur. 31 , 66 ) ou sa mesure ( Arch. 7 , 16) , son égalité de caractère (Off. I 26, 90 ) ; son souci des affaires politiques apparaît fréquemment. Sans doute ce portrait comporte - t- il une part d'idéalisation (Garbarino 9 , p. 428 ) , mais il n'est donc pas surprenant que Cicéron ait donné une place importante à ce personnage dans ses dialogues philosophiques: Laelius intervient dans le De re publica. Il a même une place capitale dans le livre III où il répond à Philus et fonde la justice sur la loi de la nature, qui est recta ratio ( voir 12 J.-L. Ferrary , « Le discours de Laelius dans le troisième livre du De re publica de Cicéron » , MEFRA, 86 , 1974 , p. 745-771 ) ; il est présent dans le De senectute et , dans le De amicitia , il est le personnage essentiel. MICHÈLE DUCOS. I

13 LAETUS (OFELLIUS - ) PIR ' O 78

A. Le platonicien Ofellius Laetus est connu par deux épigrammes, l'une d'Athènes et l'autre d'Éphèse, qui ont en commun , à une variante près, un même distique : « si l'âme , selon la doctrine de Pythagore, passe en un autre corps, en toi , Laetus, c'est Platon qui se révèle et vit à nouveau » . L'inscription du Parthenon ( IG II 3816 ) , où le distique trouve plus naturellement sa place, est certainement antérieure : elle avait été rédigée à l'occasion d'une cérémonie pour laquelle Laetus, en tant que théologue ( sur cette fonction, voir Bull. Épigr. 1981 , 481 ) , avait composé un hymne . L'inscription d'Éphèse ( I. Ephesos 3901 , publiée d'abord et analysée par J. Nollé , ZPE 41 , 1981 , p . 197-206 ) le désigne comme philosophe platonicien et cite de mémoire , un peu inexactement ( « qui est sauvé » au lieu de « qui se révèle » ) , le distique final du Parthenon. Elle permet, d'après des critères paléographiques, de dater l'activité de Laetus du jer siècle de notre ère.

B. Le personnage est très probablement identique à l'auteur Laitos , cité à deux reprises par Plutarque dans son traité Sur les causes physiques ( 911 F, 913 F) , en des termes qui suggèrent qu'il avait pu l'entendre personnellement. Le lien de parenté posé par G. W. Bowersock , GRBS 23 , 1981 , p . 275-279 , avec le procurateur d'Épire A. Ofellius Macedo reste purement hypothétique. Le philosophe appartenait bien plus probablement à la famille des Ofellii d'Éphèse , attestée dès l'époque augustéenne (1. Ephesos 402, 407 et 3092 ) . Cf. B. Puech , « Prosopographie des amis de Plutarque » , ANRW II 33 , 6 , 1992, p. 48-56. BERNADETTE PUECH . 14 LAMISCUS DE TARENTE RE

Iva

Personnage mentionné dans la Lettre VII de Platon ( 350 b ) . Platon raconte dans ce passage que se trouvant en danger de mort, du fait que Denys lui était devenu hostile , il fit part à Archytas et à ses autres amis de Tarente de la situation dans laquelle il se trouvait. Ceux -ci envoyèrent alors à Syracuse un

80

LAMISCUS DE TARENTE

L 14

navire à trente rames avec un certain Lamiscus qui devait intercéder en faveur de Platon auprès de Denys. Lamiscus est également mentionné dans la lettre , conservée par Diogène Laërce III 21-22 ( 1 R. Hercher, Epistolographi graeci, p . 132 = 2 H. Thesleff, The Pythagorean Texts, p . 45 , 20-30 ) , qu'Archytas aurait envoyée à Denys à cette même occasion , ainsi que dans celle envoyée par Archytas à Platon , également conservée par Diogène Laërce VIII 80 (Hercher 1 , p . 132 = Thesleff 2 , p . 46 , 1-7 ) . Sur cette correspondance, voir 3 R. Harder ( édit . ) , Ocellus Lucanus . Text und Kommentar, coll . « Neue philologische Untersuchungen » 1 , Berlin 1926 , réimpr. Dublin 1966 , p . 39-48 , et 4 H. Thesleff, « Okkelos, Archytas and Plato » , Eranos 60 , 1962 , p . 8-36..

On peut supposer que Lamiscus faisait partie du cercle pythagoricien de Tarente. Il faut le distinguer du Lamiscus de Samos mentionné avec Mélissus par Palaephatus, De incredibilibus P. 13 (DK 20 B 11 ) . Voir 5 W. Capelle, art. « Lamiskos aus Tarent » , RE XII 1 , 1924, col . 564-565. BRUNO CENTRONE. 15 LAMPON

DM II ?

Comme beaucoup d'hommes de lettres, le philosophe Lampon a laissé sa signature à Thèbes dans la tombe dite « de Memnon » ( tombeau de Ramsès VI ; J. Baillet , Tombeaux, n° 1548 ) , qu'il avait visitée en compagnie d'un Aelius Dionysios , peut-être le pensionnaire du Musée d'Alexandrie connu sous ce nom ( 3 - D 178 ) ; il se peut qu'il y soit venu une autre fois avec un certain Statius (J. Baillet , Tombeaux, n ° 1548 ) . Il paraît douteux qu'il puisse être identique, comme le proposait J. Baillet, à l'homonyme connu de Galien ( Topiques I 1 et III 3 ), qui était médecin à Péluse (RE 5 ) . Cette inscription est également mentionnée par A. Calderini, « Arti liberali in documenti dell'Egitto romano » , dans Studi in onore di Ugo Enrico Paoli, Firenze 1956, p. 155 . BERNADETTE PUECH .

IV

16 LAMPRIAS D'ARGOS PLREI:

Philosophe d'Argos cité avec son compatriote Diogène ( » D 140 ) dans une lettre de l'empereur Julien (Epist. 198 b -c - Bidez la tient pour d'authenticité douteuse ). Ce document dit qu'ils ne le cèdent, pour la philosophie, à aucun de leurs contemporains, mais il exalte surtout leur activité au service de leur cité ( orateurs, hommes politiques , ambassadeurs ), démontrant ainsi « l'erreur de l'opinion qui représente ses adeptes de la philosophie ) comme des gens inutiles aux cités » . PIERRE MARAVAL. 17 LAMPRIAS DE CHÉRONÉE RE 4 PIR ' L 80

I -II

Le frère aîné de Plutarque, qui avait reçu le nom de son grand -père, avait été aussi son condisciple au temps de leurs études auprès d'Ammonios (De E delphico) [ > A 138 ) . Le De defectu oraculorum et le De facie, ainsi que les Propos de Table ( I 8 ; II 2 et 10 ; IV 4-5 ; VII 5 et 10 ; VIII 6 ; IX ) le montrent

L 21

LASTHÉNEIA D'ARCADIE

81

fidèlement présent auprès de son frère, avec une exubérance enjouée, à diverses époques et en divers lieux, notamment, assez souvent, à Delphes. Il n'est donc pas impossible qu'il soit identique , comme on l'a depuis longtemps supposé, avec l'homonyme archonte à Delphes vers la fin du règne de Trajan ( voir G. Daux , Chronologie delphique, Paris 1943 , P 17 , p. 93 ). Cf. K. Ziegler, art. « Plutarchos » 2 , RE XXI 1 , 1951 , col . 645-646 . BERNADETTE PUECH . 18 LAMPROS D’ÉRYTHRÉE L'un des maîtres ( ?) d'Aristoxène de Tarente (

Iva A 417 ) .

La seule mention de ce personnage figure dans la Souda (s.v. 'AplotóČEVOÇ A 3927 = 1 F. Wehrli , Aristoxenos, coll . « Die Schule des Aristoteles » 2 , 2e éd . Basel/ Stuttgart 1968 , fr. 1 ). Mentionné aux côtés du père d'Aristoxène qualifié de uovolxóc, Lampros est certainement compris par l'auteur de la notice comme maitre de musique ('Αριστόξενος , υιός Μνησ ου , του και Σπινθάρου , μουσικού ( ... ) ακουστής του τε πατρός και Λάμπρου του Ερυθρα ου: « Aristoxène, fils de Mnésias , fils lui-même de Spintharos, musicien ( ... ) élève de son père et de Lampros d’Érythrée » ) . Cf. 2 DPhA , t. I , A 417 , p . 591 ( il y a erreur sur l'ethnique de Lampros: remplacer Érétrie par Érythrée, en lonie ) . Il y a peut- être confusion avec le célèbre musicien homonyme du ve s. av . J.-C. (RE 2 ) , dont on ne connaît d'ailleurs pas l'ethnique ( cf. Wehrli 1 , p . 47-48, et fr. 76) . JEAN -PIERRE SCHNEIDER . 19 LAODAMAS

F III

Stoïcien inconnu , disciple de Chrysippe ( Philod ., Stoic. hist. , col . XLVII 3 = SVF II 12 ) . Chrysippe lui avait dédié deux ouvrages , un de contenu logique : Tepà èxOéoewV Tipos Aaodáuavta a ', Sur les ecthèses, à Laodamas (D. L. VII 196 ) , et un de contenu éthique : Iepi tõv oủx ópowç tots oporç å tiheyo μένων πρός Λαοδάμαντα ζ ' , Sur les objections qui sont faites a tort aux « Définitions » , à Laodamas ( D. L. VII 199 ). TIZIANO DORANDI. 20 LAPHAON DE MÉTAPONTE Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique, V. pyth. 36, 267 ; p. 144, 3 Deubner. (Ce nom ne semble pas poser de problème. Notons pourtant les conjectures Aad wv et Ayaaopwv, proposées respectivement par Obrecht et Reinesius ( et signalées dans l'apparat C.M. ] critique de l'édition de A. Nauck , Saint-Pétersbourg, 1884, ad loc .). BRUNO CENTRONE . 21 LASTHÉNEIA D'ARCADIE RE 1

MIVa

Pythagoricienne dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique, V. pyth. 36 , 267 p. 147 , 2 Deubner. En Diogène Laërce III 46 ( = Dicéarque, fr. 44 Wehrli ) , est mentionnée Lasthéneia de Mantinée en Arcadie ( L 22 ) qui fut, comme Axiothée de Phlionte ( A 517 ) , élève de Platon . En D.L. IV 2 , ces deux femmes sont

82

LASTHÉNEIA D'ARCADIE

L 21

présentées comme des disciples de Speusippe. Selon 1 F. Wehrli, Dikaiarchos, coll . « Die Schule des Aristoteles » 1 , Basel/Stuttgart 19672, p. 55 , la Lasthéneia pythagoricienne est la même personne que mentionne Diogène Laërce et , puisque l'idée de disciples féminins est inconciliable avec l'eros platonicien , il doit s'agir d'une appropriation de la part de l'Académie de deux personnages originairement liés au pythagorisme . Contre cette position , voir 2 A. Swift Riginos , Platonica , p . 183-184 . En IV 2 , est citée une lettre de Denys à Speusippe dans laquelle est mentionnée une uaOntp ç arcadienne ; il doit s'agir de Lasthéneia. Voir Athénée , VII , 279 e -f. Les témoignages sont rassemblés dans 3 T. Dorandi, « Assiotea e Lastenia : due donne all'Accademia » , AATC 54 , 1989, p. 51-66 . BRUNO CENTRONE. 22 LASTHÉNEIA DE MANTINÉE RE 2

Iva

Témoignages et fragments. 1 T. Dorandi, « Assiotea e Lastenia : due donne all’Academia » , AATC 54, 1989, p. 51-66 . Une des deux femmes mentionnées en D. L. III 46 (= T 1 ) dans la liste des disciples de Platon . Avec sa collègue Axiothéa de Phlionte ( > A 517 ) , elle est également présentée en D. L. IV 2 ( = T 9 ) comme disciple de Speusippe . Diogene Laerce les designe a cet endroit comme αι Πλάτωνος μαθήτριαι , les disciples féminins de Platon . Bien que Phlionte et Mantinée soient toutes deux situées en Arcadie , la uaOntpic d'Arcadie à laquelle fait allusion la lettre pseudépigraphe de Denys le Tyran citée ensuite par Diogène n'est pas Axiothéa , mais Lasthéneia , comme le montre le rapprochement avec Athénée VII , 279 ef (= T 10 ) , qui cite sans doute le même document. Axiothéa et Lasthéneia sont encore mentionnées dans Anon . , Proleg. in Plat. philosophiam 4 , 25-26, p. 11 Westerink (T 6 : τούτω δ ' εφοίτησαν ου μόνον άνδρες αλλά και γυναίκες , Δεξιθέα τε ή εκ Φλιούντος και Λασθένεια ή εξ Αρκαδίας), et chez Clement d'Alexandrie, Strom . IV 19 , 122, 2 ; p. 302 , 13-14 Stählin (= T 4 ). On retrouve peut-être une allusion aux deux académiciennes dans Philodème, Acad. hist. , col . VI 26-27 : yu ] vaixes ( ovveo ] xól [2a0a ] v [ v] ảydpeiai [ êoon ] tı ( = T 7 ) . Sur ce passage, voir 1 Dorandi , p . 54-55 . Voir aussi Apulée , De Platone I 4 (= T 3 : Multi auditorum eius utriusque sexus in philosophia floruerunt) et Olympiodore, in Alcib. , § 2 , 147-149 Westerink (= T 5 : norous δε πάνυ πρός μάθησιν έφείλκετο και άνδρας και γυναίκας ανδρεία σχήματι παρασκευάζων ακροάσθαι αυτού )).. Selon Wehrli ( commentaire du fr. 44 de Dicéarque, p . 33 ) , la présence de Lasthénéia d'Arcadie ( » L 21 ) dans le Catalogue des anciens Pythagoriciens transmis par Jamblique , V. pyth. 36, 267 (= T 13 ) prouverait que la tradition a transposé dans l'Académie deux personnages originellement rattachés au pytha gorisme . A. S. Riginos , Platonica, p . 183-184 , croit au contraire que leur ratta chement à Platon est la donnée originelle. C'est peut-être Axiothéa qu'il faut reconnaître sous les traits d'une jeune fille , non nommée , qui aurait été l'élève de Platon , puis , après la mort de ce dernier,

L 24

83

LATERANUS (Q. PLAUTIUS -)

de Speusippe et de Ménédème d'Érétrie ( » M 116 ) , dans un fragment biographique contenu dans POxy. 3656 , publié par 3 P.J. Parsons , dans Helen M. Cockle ( édit .), The Oxyrhynchus Papyri, t. LII , London 1984 , p . 47-50 . Le papyrus cite comme sources Hippobote (** H 148 ) , Hiéronymos de Rhodes ( * H 129 ] ( Év Tŷ Nepi ouvoxñs ) et un “ Aristophane le Péripatéticien ” [PA 404 ) ( Év tÕ Nepi áruniac ). Voir 4 M. Gigante, « Accessione Ippobotea » , PP 220 , 1985 , p . 69 ) ; 5 Id ., « Biografia e dossografia in Diogene Laerzio » , Elenchos 7 , 1987 , p . 59-62 ( il s'agirait plutôt de Lasthéneia et derrière Aristo phane se cacherait Aristoxène ( > A 417 ] ) . RICHARD GOULET et TIZIANO DORANDI .

23 LASTHÉNÈS DE BITHYNIE

I

D'après Philostrate , V. Apoll. V 38 , Lasthénès d'Apamée , en Bithynie , qui D 166) s'engagea dans l'armée . Comme avait philosophé avec Dion de Pruse ( ilsouhaitait retourner à la philosophie , il obtint son congé grâce à une faveur que Vespasien accorda à Dion . PATRICK ROBIANO.

I

24 LATERANUS (Q. PLAUTIUS -) RE L 42 PIR P 468

Q. ( ?) Plautius Lateranus , est exclu du sénat en 48 sous le règne de Claude , ayant été accusé d'adultère avec Messaline (Tacite , Ann . XI 30 et 36) . Au début du règne de Néron (en 54 ou 55 ) , il est réintégré dans le sénat par l'empereur (Tacite , Ann. XIII 11 , 2) . En 64 , alors qu'il est consul désigné, il entre dans la conjuration menée par C. Calpurnius Piso pour renverser Néron par « amour du bien public » (amore rei publicae, Ann . XV 49 , 3 ) , apportant la violence de sa haine . C'est lui qui devait attaquer Néron le premier et le jeter à terre , car il avait « l'âme ferme et le corps vigoureux » ( Ann . XV 53 , 2 ) . En 65 , après la découverte de la conjuration, il fait partie des premiers condamnés à mort. C'est le tribun Statius Proxumus qui l'exécute (Ann . XV 60, 1 ) . La mort de Latéranus, brièvement indiquée chez Tacite , est mentionnée de façon plus détaillée par Épictète (Entretiens 1 1 , 19-20) : Latéranus est un exemple de courage devant la mort, tendant la tête une seconde fois, car le bourreau n'avait pas réussi à le décapiter d'un seul coup. Lateranus n'est nulle part présenté explicitement comme un disciple des philosophes. Néanmoins, Tacite mentionne sa force d'âme (Ann . XV 60 , 1 plenus constantii silentii) en usant de l'adjectif constans. Le fait qu'il soit choisi comme un exemple de fermeté par Épictète peut laisser également penser que Latéranus était proche des stoïciens. Cf. M. Hoffmann, art. « Q. Plautius Lateranus » 42 , RE XXI 1 , 1951 , col . 30 . Juvénal mentionne également un Latéranus qui fut consul ( VIII 143 ) , mais les commentateurs (cf. E. Courtney, A Commentary on the Satires of Juvenal, London 1980, et J. Ferguson, A Prosopography of the poems of Juvenal, coll . « Latomus » 200 , Bruxelles 1987 ) soulignent qu'il ne saurait s'agir du même personnage.

MICHÈLE DUCOS.

LÉANAX DE SYBARIS

84

L 25

25 LÉANAX DE SYBARIS Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique , V. pyth. 36, 267 ; p . 145 , 1 Deubner. [En réalité ce nom est une conjecture de K. Keil ( ZATW 1852 , p. 259) pour le Aeávať du Laurentianus qui a transmis le texte du traité de Jamblique Sur le mode de vie pythagoricien, mais elle semble s'imposer : voilà pourquoi elle fut adoptée aussi bien par les deux derniers éditeurs du traité, A. Nauck et L. Deubner, que par H. Diels (DK 58 A, t. I, p. 446 , 31 ). C.M.) Sur ce type de nom, cf. Fr. Bechtel, Die historischen Personennamen , p. 279 . BRUNO CENTRONE. 26 LÉCYTHION

MII

Personnage, peut- être fictif, des Fugitifs de Lucien . Le nom « Lécythion >> a-t - il une signification particulière ? Il est apparemement formé sur Anxudos qui , comme son homologue latin ampulla , désigne au sens propre une burette à huile , une fiole à parfum ou une fiole à onguent, et au sens figuré l'emphase . Le nom propre fait peut- être allusion au style ampoulé du personnage, à moins qu'il ne veuille souligner chez celui -ci une pomme d’Adam proéminente, sens que le mot peut avoir également ( cf. Liddell - Scott , qui renvoie à un passage de l'historien Cléarque [ fr. 72 , t . II , p . 302 Müller] ) . « Philosophie » , un des personnages du dialogue , se plaint des mauvais traite ments que lui font subir des gens qui se prétendent philosophes et qui se mettent sous le patronage d'Antisthène (2+ A 211 ) , Diogène ( 2 - D 147 ) et Cratès ( ** C 205 ) - les grands noms du cynisme -, mais qui , en réalité, font semblant d'être philosophes afin d'échapper à leur condition d'esclaves . Devant l'émotion que manifeste Philosophie , Zeus, son père, demande à Héraclès et à Hermès de descendre avec elle sur terre pour exterminer ces « chiens » . Ils arrivent alors dans une ville de Thrace , Philippopolis , où ils rencontrent des hommes à la recherche de trois esclaves fugitifs accompagnés d'une femme que ceux -ci ont réduite en esclavage. Ces esclaves en fuite font partie précisément des gens dont se plaint Philosophie . Il s'agit de Cantharos [ PC 37a ) ( $ 28) , Lécythion et Myropnous [ - M 208 ) ( $ 32 ) . Lécythion joue les philosophes (xal Anxvdiwv piłoOopei ), provoquant ainsi les railleries de son ancien maître ( § 32) . Lorsque Philosophie demande à Hermès de prononcer un jugement, celui -ci ordonne à Lécythion et à Myropnous de retourner chez leurs maîtres et de continuer à apprendre leur précédent métier qui , dans le cas de Lécythion, consistait à laver le linge sale . Mais auparavant l'un et l'autre seront fouettés avec de la mauve ( § 33 ] (si l'on adopte la correction uaotlywDévte proposée par De Jong , alors que les manuscrits ont ugotiywdévta , auquel cas seul Myropnous aurait droit au fouet).

MARIE -ODILE GOULET -CAZÉ .

27 LEITÈ (AURELIA -)

F III

Évergète de la cité de Paros, dont elle avait notamment, en tant que gymna siarque, fait restaurer l'un des gymnases , épouse d'un grand -prêtre municipal du culte impérial, Aurelia Leitè est honorée par sa patrie pour ses vertus familiales

L 29

LÉODAMAS DE THASOS

85

et son dévouement à la patrie . Mais c'est le titre de « philosophe » qui ouvre l'énumération de ses qualités , dans l'inscription en prose rédigée par la cité comme dans le distique élégiaque que son époux avait fait graver au - dessus ( IG XII, 5 , 292) . Le monument date de l'époque des tétrarques. BERNADETTE PUECH .

28 LÉOCRITOS DE CARTHAGE Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique , V. pyth . 36 , 267 ; p . 145 , 3 Deubner. [Au lieu du Aeóxpitoç des mss, le dernier éditeur du traité de Jamblique Sur le mode de vie pythagoricien, L. Deubner, écrit Deuxpitos, suivant en cela L. Dindorf, Thesaurus Graecae linguae , s . v . , et K. Keil , Analecta epigraphica et onomatologica, Leipzig 1862, p. 230 ; cf. O. Masson , « Sur quelques noms de philosophes grecs : à propos du Dictionnaire des philosophes antiques, vol. II », RPh 68 , 1994, p. 237 = Id ., Onomastica graeca selecta , vol . 3 , Genève 2000 , p. 224 ; dans le comm. ad loc. de son édition , A. Nauck avait jugé lui aussi « vitiosam » la forme transmise, mais il ne l'a pas corrigée. La conjecture KreóxpITOS, proposée comme une alternative par Keil ( loc. cit. ), est incertaine. Il est également diffici lement acceptable de suivre Fr. Beckmann , De Pythagoreorum reliquiis, Diss. Berlin 1844, vol . 1 , p. 3 ( cf. Nauck , apparatus ad loc .), qui proposait d'identifier ce AEGxpitoç au Cartha ginois Tɛūxpoç, dont Diogène Laërce nous dit (VIII 82) , qu'Archytas “ l'architecte” le citait, dans son traité Sur la mécanique, comme ayant été son maître. Cet Archytas serait un homo nyme du fameux pythagoricien, selon Diogène Laërce , ou identique à lui selon P. Kingsley, « From Pythagoras to the Turba philosophorum : Egypt and Pythagorean tradition » , JWI 57, C.M. ) 1994, p. 1-13 , aux p. 4-5 ( voir notamment la p. 5 , avec les n. 27-28).

BRUNO CENTRONE . 29 LÉODAMAS DE THASOS RESuppl. VII : 3 Académicien , disciple de Platon .

Iva

Témoignages et fragments. 1 F. Lasserre (édit. ) , De Léodamas de Thasos à Philippe d'Oponte. Témoignages et fragments, Napoli 1987 , p . 41-46 , 237-242 , 445-459 . Léodamas, originaire de Thasos, celèbre mathématicien . Il naquit entre 420 et 415 et se fit connaître comme mathématicien vers 390 au plus tôt (Lasserre 1 , p . 445 ). A une époque impossible à déterminer, il vint à Athènes où il suivit l'enseignement de Platon . On ne peut déterminer la durée de son séjour à l'Académie, ni la nature de son activité aux côtés de Platon. Lasserre 1 , p. 445 et 451-458 , propose d'attribuer à Léodamas l'exemple d'analyse géométrique développé dans le Ménon de Platon ( 86 e - 87 b = D 2 ). Son activité de mathé maticien est connue par d'autres brefs témoignages selon lesquels Platon aurait fait de Léodamas l'initiateur de la méthode de l'analyse ( D la-c . Voir aussi D * 3 , un passage de Papp . , Coll. math. VII 2 , dont le noyau peut remonter à Léodamas ). A Léodamas est adressée la onzième Lettre du corpus Platonicum . L'auteur de cette lettre, faussement attribuée à Platon , s'adresse à Léodamas à l'occasion de la fondation de Crénidès, colonie établie par Thasos vers 360 dans les envi rons du mont Pangée. Léodamas n'ayant pu se rendre à Athènes pour consulter Platon, il prie le philosophe de venir chez lui ou d'envoyer Socrate le Jeune .

86

LÉODAMAS DE THASOS

L 29

Platon répond de façon négative : non seulement il renonce à venir et à envoyer Socrate, mais il exprime aussi ses doutes sur la possibilité de doter la nouvelle colonie d'une bonne législation . Cf. 2 K. von Fritz, art. « Leodamas » 3 , RESuppl. VII , 1940, col . 371-373 . TIZIANO DORANDI. 30 LÉON

VI- Va

Un des trois dédicataires, avec Brotinos ( -B 61 ) et Bathyll( a ) os ( ** B 22 ) , d'un traité d'Alcméon de Crotone ( ** A 98 ) . Voir Diogène Laërce VIII 83 ( DK 24 B 1 ) . Il faut sans doute l'identifier avec un Léon de Métaponte ( » L 33a) qui figure dans le catalogue des pythagoriciens de Jamblique (V. Pyth. 36, 267 , p. 144 , 2 Deubner). BRUNO CENTRONE . 31 LÉON

DM IVS

Memnon , FHG III 527 , évoque la participation de Léon et d'Euxénon ( » E 179) au complot fomenté par le platonicien Chion d'Héraclée ( C 110) contre le tyran Cléarque ( + C 140 ). PATRICK ROBIANO . 32 LÉON RESuppl. VI : 25

Iva

Académicien , disciple de Platon . Témoignages et fragments. 1 F. Lasserre ( édit .), De Léodamas de Thasos à Philippe d'Oponte. Témoignages et fragments , Napoli 1987 , p. 79-83 , 291-300 , 513-519 . Les quelques renseignements qu'on possède sur Léon dérivent du Commen taire aux Éléments d'Euclide de Proclus ( T 1 ) . A partir de ce témoignage , on peut fixer la date de sa naissance entre 405 et 395 , et déterminer son appar tenance à l'Académie de Platon. Léon aurait élaboré un recueil de touyela qui serait le deuxième ouvrage de ce type après celui d'Hippocrate de Chios ( » H 151 ) et avant celui d'Euclide (E 80 ). Proclus souligne l'intérêt particulier que Léon avait montré pour les problè mes à diorismes ( D 1 ) . Lasserre 1 , p . 515-518 , a recueilli plusieurs passages des Éléments d’Euclide ( D 2-8 ) qui pourraient remonter à l'euvre homonyme de Léon . On a aussi supposé que ce même Léon serait l'auteur du dialogue pseudo platonicien intitulé Alcyon, mais la question n'a pas reçu de réponse univoque ( cf. Lasserre 1 , p. 518-519, et 2 A. Carlini, CPF I 1 ** 64, 1 ( ?) , p. 463-466 ). TIZIANO DORANDI. 33 LÉON DE BYZANCE RE 23

Iva

Académicien, disciple de Platon . Cf. 1 A. Wörle, Die politische Tätigkeit der Schüler Platons, Darmstadt 1981 , p . 124-127 ; 2 K. Trampedach , Platon, die Akademie und die zeit genössische Politik, Stuttgart 1994 , p. 97-100 .

L 34

LÉON DE NARBONNE

87

Léon , originaire de Byzance , vint à Athènes dès son jeune âge pour fréquenter l'Académie de Platon ( Philostr. , Vit. Soph. I 2) ; là, il connut Phocion et devint son ami ( Plut . , Vit. Phocionis 14 , 7 ; Vit. Nic . 22 , 3 ) . La Souda (s. v. Abwv : A265 , t. III , p. 247 , 27 - 248 , 13 Adler) rapporte que, selon certains auteurs , Léon aurait été un philosophe péripatéticien, disciple à Athènes d'Aristote (mais il est probable que dans la notice de la Souda le philosophe ait été confondu avec un historien homonyme ( au sujet de celui -ci , voir plus bas ] ) . Léon occupa dans sa ville natale une importante position politique et fut envoyé comme ambassadeur à Athènes pour demander une aide contre le roi Philippe II de Macédoine ( Philostrate et la Souda ). On peut dater l'ambassade de Léon à Athènes de l'année 340. Léon mourut au plus tard en 336. La Souda conserve plusieurs titres d'œuvres attribuées à Léon : Tà xarà Φίλιππον και το Βυζάντιον βιβλίοις ζ', Τευθραντικόν, Περί Βησαίου , Τον ιερόν πόλεμον , Περί στάσεων , Τα κατ ’ 'Αλέξανδρος. Des raisons d'ordre chronologique portent à enlever à ce philosophe la paternité de certaines de ces euvres ( Τα κατά Φίλιππον και το Βυζάντιον βιβλίοις ζ ' , Τον ιερόν πόλεμον, Τα κατ ’ Αλέξανδρον) . Elles ont été correctement attribuées a un historien homonyme ( FGrHist 132) auquel il faut aussi rapporter le renseigne ment de la Souda selon lequel Léon se serait donné la mort de sa propre main (cf. le commentaire de 3 F. Jacoby à FGrHist 132 , vol . II B , p . 444-445 , et 4 R. Bux , art. « Leon » 23 , RE XII 2 , 1925 , col. 2009-2010 ). On serait tenté d'identifier les deux personnage, « Mais il n'y a pas d'indice qui permet de transformer la possibilité d'une identification avec le mathématicien en une probabilité (Lasserre 1 , p. 514). TIZIANO DORANDI. 33a LÉON DE MÉTAPONTE

VI- Va

Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue des pythagoriciens de Jamblique (V. Pyth. 36, 267 , p. 144, 2 Deubner ). Ce nom était plus que banal dans l'Antiquité , mais ce Léon de Métaponte est probablement à identifier au Léon [ 2L 30] ( sans autre précision ) qui , avec les pythagoriciens Brotinos (-B 61 ) et Bathyll ( a )os ( ** B 22 ) , est l'un des trois destinataires d'un traité d'Alcméon de Crotone ( > A 98 ) ( lui aussi pythagoricien selon les Anciens ) ; voir Diogène Laërce VIII 83 ( DK 24 B 1 ) . Le fait qu'un autre Métapontin, Brontinos ( dont le nom figure en tête de la liste des Métapontins dans le catalogue de Jamblique ) , soit évoqué à côté de Léon dans la dédicace de ce traité rend cette identification encore plus plausible . CONSTANTINOS MACRIS . 34 LÉON DE NARBONNE RE 5 RESuppl. VIII 7f PLRE II : 5

MF V

Ami de Sidoine Apollinaire qui , dans la lettre dédicatoire de l'Épithalame philosophique composé pour les noces de Polémius [RE 5 ] et d'Aranéola (RE) avant 460 , se réclame de ce vir spectabilis, ainsi que de ses amis platoniciens ( complatonici) Magnus (= + M 13 ) et Domnulus (2D 220) , pour affirmer que « la musique et l'astronomie (astrologia ), branches de la philosophie qui viennent après l'arithmétique, ne peuvent en aucune façon être rendues intelligibles » sans

LÉON DE NARBONNE

88

L 34

des termes grecs comme « centre , proportion , intervalles, inclinaisons et segments » (Carm . XIV , epist. , § 2 ). Cf. 1 A. Loyen, Sidoine Apollinaire et l'esprit précieux aux derniers jours de l'Empire, « Collection d'études latines – Série scientifique » 20, Paris 1943 , XXVIII- 191 p. , notamment p. 82-83 ; 2 K. F. Stroheker, Der senatorische Adel im spätantiken Gallien , Tübingen 1948 , réimpr. Darmstadt 1970 , 140 p . , Anhang : Prosopographie zum senatorischen Adel im spätantiken Gallien , p . 137-227 , n° 212 , p. 187 . Sidoine présente Léon comme un poète savant ( Epist. VIII 3 , 3 ; IX 13 , 2 , v . 20 ; IX 15 , 1 , v . 19-20 [ en 480-481 ] ; Carm . IX 314) , supérieur à Horace (Carm . XXIII 450-452 [ en 478-480 ]), un historien , supérieur à Tacite ( Epist. IV 22 , 2-3 ( en 476-477 ] ) , un juriste, commentateur de la Loi des XII Tables , supérieur à Appius Claudius (Carm . XXIII 446-449 ), et un orateur éloquent ( Epist. VIII 3 , 3 ; voir aussi Ennodius, Vita Epiphanii 85 ) . Il comptait Fronton (

F 19 ) parmi ses ancêtres ( Epist. VIII 3 , 3 ) .

Il fut le conseiller du roi wisigoth Euric [ 466-484 ) à Toulouse (Epist. IV 22 , 3 ) et celui de son fils Alaric II [ 484-507 ] . Grégoire de Tours rapporte qu'il perdit la vue après avoir supprimé, de façon sacrilège, les parties hautes de la basilique Saint- Félix à Narbonne, parce qu'elles cachaient la vue de la belle plaine de la Livière ( Liguria ) au roi Alaric dans son palais (Grégoire de Tours, In gloriam martyrum 91 , p. 549, 26-31 Arndt-Krusch ). Pour Grégoire de Tours ( PL 71 ), voir 3 W. Arndt et B. Krusch, MGH (Scr. Rer. Mer . ) I, 1884-1885 ; traduction anglaise par R. Van Dam, Gregory of Tours : Glory of the Martyrs, coll. « Translated texts for historians - Latin Series » 3 , Liverpool 1988. Pour Ennodius, voir 4 W. Hartel, coll . CSEL VI , Wien 1882 ; 5 F. Vogel , MGH ( Auctores Antiquissimi) VII , Berlin 1885 . Léon, proposa à Sidoine , devenu évêque , de rédiger un traité d'histoire , sans doute pour raconter le règne d'Euric, mais ce dernier refusa (Epist. IV 22 , datée de 476-477 ) . Il avait auparavant obtenu la libération de Sidoine , emprisonné dans la forteresse de Livia , près de Carcassonne, après avoir animé la défense de Clermont contre Euric ( Epist. VIII 3 , 1-2 , datée de 476-477 ). À la demande de Léon, Sidoine travailla, au cours de cette relégation à Livia et après son retour à Clermont, sur la Vie d'Apollonius ( * A 284 ) le Pytha goricien (VIII 3 , 1 ) . On a beaucoup discuté de la nature de ce travail ( traduction en latin ? copie du texte grec ? ) . Voir 6 A. Loyen , Sidoine Apollinaire, t . III : Lettres (Livres VI- IX ), CUF, Paris 1970 , Note 5 , p. 196-197 , et 7 S. Pricoco , « Studi su Sidonio Apollinare » , ND 15 , 1965 , p . 69-150 , notamment p . 71-98 ; publié également dans Studi su Sidonio Apollinare, Catania 1965 , 82 p. Dans sa lettre , Sidoine présente son ouvrage comme un livre ( librum , § 2) racontant la vie (historiam , § 4 ) d'Apollonius . L'ouvrage était fondé non pas sur l'æuvre (grecque ) de Philostrate , ni sur la version ( grecque ou latine ) de Virius Nicoma chus Flavianus senior ( 2 N 49 ) [ RE 14 ) , mais sur une version faite par Tascius Victorianus à partir de Nicomachus. On a donc affaire à quatre euvres littéraires différentes dont on ne connaît pas toujours le caractère ni même la langue : l'original grec de Philostrate , puis les ouvrages de Nicomachus, de Tascius Victorianus et de Sidoine Apollinaire . Les termes employés par Sidoine

L 34

LÉON DE NARBONNE

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(exscribere, schedium , exemplar, translatio ) ne fournissent pas d'indication précise et ils sont généralement tirés du côté de l'interprétation soutenue par les commentateurs. Sous l'influence de l'éditeur anglais W.B. Anderson, A. Loyen a finalement considéré que tous ces travaux étaient des versions grecques. Cette hypothèse reste improbable. Le travail de Nicomachus (mort en 394 ) était plutôt, comme le comprenaient Courcelle et Labriolle, une traduction latine destinée à célébrer, dans une perspective antichrétienne, un des héros de la philosophie " hellène" le plus souvent mis à profit. Apollonius avait été utilisé par le gouverneur Hiéroclès ( » H 125 ) et peut-être déjà par Porphyre comme un idéal païen du sage. C'est peut-être cette traduction latine de Nicomachus qui amenait au début du IVe siècle des païens comme Volusianus à opposer aux miracles du Christ les exploits d'Apollonius ou d'Apulée, maîtres dans les arts de la magie ( cf. Augustin , Epist. 136, 1 : lettre de Marcellinus à Augustin ; 102 , 32 : lettre à Deogratias ). Or, ce n'est pas cette version qu'a mise à profit Sidoine, mais une version intermédiaire effectuée par Tascius Victorianus ( PLRE II : 2 ) , clarissime dont on sait par ailleurs qu'il édita les dix premiers livres de Tite - Live ( » L 59) et les dédia à Symmaque . Cette dédicace et cette activité éditoriale amènent à penser que cette nouvelle version restait inspirée par le point de vue de l'aristo cratie païenne de Rome et qu'elle représentait tout simplement aux yeux de Sidoine un texte plus fiable. Reste alors à établir l'apport de Sidoine lui - même . Que l'exemplar ( $ 1 ) qu'il a préparé pour Léon se soit réduit à une simple copie ou transcription, sous prétexte qu'en Epist. XI 16 , 2 ou 7 , 1 , translator désigne le copiste , est improbable : la copie de manuscrits est une tâche qu'un sénateur pouvait confier à un serviteur. Sidoine présente d'ailleurs son travail comme long et difficile et, ne fût-ce que par modestie d'auteur, il le tient pour précipité, abrupt et même barbare ( opica ... translatio ). Ces qualificatifs littéraires ne sauraient convenir à une simple copie de manuscrit. Il est frappant de constater que Sidoine , dans la suite de la lettre, considère Apollonius comme un modèle philosophique tout à fait acceptable pour un lecteur chrétien : si Léon voyage avec le citoyen de Tyane « tantôt vers le Caucase et l'Indus , tantôt chez les gymnosophistes d'Éthiopie ou les brahmanes de l'Inde » , il découvrira un homme semblable à lui sur un très grand nombre de points, « soit dit avec toute la déférence due à la foi catholique » ( trad . Loyen ) . On peut donc imaginer que Sidoine a volontairement produit une version plus neutre que celles de Nicoma que ou de Tascius Victorianus, atténuant la part de miracles et de magie dans la biographie d'Apollonius au profit d'une image plus pythagoricienne , offrant ainsi un portrait philosophique d'Apollonius dépouillé de tout trait susceptible de heurter les chrétiens. Il laisse plus loin entendre que la vie d'Apollonius se prête à une mise en parallèle avec celle de Léon , son commenditaire. Il est donc possible tible de prison ... on aurait

qu'il ait adapté la vie d'Apollonius dans un sens idéologique suscep plaire à son bienfaiteur, qui venait d'ailleurs de le faire sortir de En tenant compte de l'intérêt porté par l'auteur et par Léon à la poésie, pu également supposer que Sidoine avait mis cette vie d'Apollonius en

vers, mais aucun détail dans le texte de la lettre ne le suggère. RICHARD GOULET.

90

LÉON DE NICOPOLIS

L 35 III

35 LÉON (P. MEMMIUS -) DE NICOPOLIS

Une inscription copiée par Cyriaque d’Ancône à Iannina (BCH 1 , 1877 , p. 294 ) fait connaître un philosophe P. Memmius Léon , agonothète des Actia lors de la soixante -huitième célébration de ces concours . Si la lecture de Cyriaque est exacte, l'activité de ce philosophe se place dans le deuxième et le troisième quarts du III° siècle , car les Actia , dont la première célébration doit dater de 27a, étaient un concours pentétérique ( voir L. Moretti, Iscrizioni agonistiche greche, Roma 1953 , p . 205-206 , et Dion Cassius LI 1 ). BERNADETTE PUECH .

36 LÉON DE PHLIONTE RE 8

F VIa

Cicéron , Tusc. V 3 , 8 , raconte , d'après Héraclide le Pontique ( fr. 87 Wehrli ) , une anecdote relative à Pythagore, inventeur du terme “ philosophie ” : Pythagore ayant rencontré à Phlionte Léon, prince de la cité ( princeps ), qui désirait savoir ce que signifiait le nom de " philosophe”, déclara ne connaître aucune science (ars ), mais être " philosophe" , puis développa la métaphore de la vie comme une foire (mercatum ), où certains viennent pour faire du commerce, d'autres pour participer aux compétitions sportives, d'autres encore pour être seulement des spectateurs : ces derniers sont les amoureux de la sagesse , c'est - à -dire les philosophes . Diogène Laërce I 12 rapporte sous une forme plus concentrée la même anecdote , mais met à profit, à côté d'Héraclide, une autre source selon laquelle Léon était tyran de Sicyone (où est censée se situer la rencontre entre les deux hommes ). Cette source est Sosicrate dans ses Successions ( cf. Diogène Laërce VIII 8 = fr. 17 Giannattasio Andria ). Le plus ancien témoin de la tradition qui faisait de Pythagore le premier à s'être désigné comme " philosophe " et l’eúpers de la notion même de “ philo sophie" et de l'activité philosophante est l'académico -péripatéticien Héraclide le Pontique ( PH 60 ] ( fr. 87-88 Wehrli ) . Au sujet de l'historicité de l'anecdote , les chercheurs modernes sont partagés entre ceux qui voient dans cette tradition une projection sur Pythagore de conceptions platoniciennes ( 1 W. Burkert, « Platon oder Pythagoras ? Zum Ursprung des Wortes “ Philosophie ” » , Hermes 88 , 1960, p. 159-177 ; 2 H.B. Gottschalk , Heraclides of Pontus, Oxford 1980 , p . 23-36 ; 3 L. Brisson , « Mythe , écriture, philosophie » , dans J.-F. Mattéi [édit . ) , La Naissance de la raison en Grèce, Paris 1990 , p . 56-57 ) et ceux qui , avec diffé rents degrés d'adhésion , croient en son authenticité ( 4 R. Joly , Le thème philo sophique des genres de vie dans l'antiquité classique, Bruxelles 1956, p . 43-52 ; 5 Id ., « Platon ou Pythagore ? Héraclide Pontique , fr. 87-88 Wehrli » , dans Hommages à Marie Delcourt, Bruxelles 1970 , p . 136-148 [ = Id . , Glane de philosophie antique : scripta minora, Bruxelles 1994 , p. 15-31 ] ; 6 C. de Vogel , Pythagoras and early Pythagoreanism : an interpretation of neglected evidence on the philosopher Pythagoras, Assen 1966 , p . 15 et 96-102 ; 7 M. Dixsaut , Le naturel philosophe: essai sur les dialogues de Platon ( 1985 ) , Paris 19942, p. 43 sq . et 367 sq .; 8 L. Zhmud , Wissenschaft, Philosophie und Religion im früher Pythagoreismus , Berlin 1997 , p . 290-292). Tout dernièrement, C. Riedweg a repris à nouveaux frais l'examen de ce dossier complexe , en essayant d'isoler,

L 39

LÉONTEUS DE CYRÈNE

91

sous les couches interprétatives successives, un " noyau dur” fondamentalement authentique ; voir 9 Pythagoras. Leben - Lehre - Nachwirkung. Eine Einführung, München 2002 , p . 120-128 ; 10 Id ., « Zum Ursprung des Wortes “ Philosophie " oder Pythagoras von Samos als Wortschöpfer», dans A. Bierl , A. Schmitt et A. Willi (édit. ) , Antike Literatur in neuer Deutung. Festschrift für J. Latacz, München /Leipzig 2004, p. 147-181 (avec bibliographie complète ). Il reste que les termes φιλοσοφία / φιλόσοφος semblent avoir eu au départ une signification plus large, et que leurs premiers emplois " techniques " attestés ne datent que du dernier tiers du ve s . av . J.-C. ( cf. 11 A. Laks, « “ Philosophes Présocratiques” : remarques sur la construction d'une catégorie de l'historio graphie philosophique » , dans A. Laks et Cl . Louguet (édit. ], Qu'est-ce que la philosophie présocratique ? / What is Presocratic philosophy ? , Villeneuve d'Ascq 2002, p . 17-38 , aux p . 29-30 et 31 sq . ) . D'autre part, et en dépit de la propension du pythagorisme à créer des néologismes et à donner à des mots déjà existants un sens nouveau ou plus restreint, " technique" ( cf. de Vogel 6 , p. 218 220 ; Zhmud 8 , p. 293 ) , le Pythagore – " inventeur" de la philosophie fait partie d'une longue série de “ rp@TOL kúpera " , que les anciens Grecs avaient si obsessionnellement recherchés , sans hésiter parfois à les “ inventer” , en faisant subir aux textes mythologiques , aux traditions orales ou aux témoignages historiques des distorsions et des extrapolations de toutes sortes ; cf. 12 Ad . Kleingünther, Ipôroç kúpetńs : Untersuchungen zur Geschichte einer Fragestellung, Leipzig 1933 ; 13 Kl . Thraede, art. « Erfinder II ( geistes geschichtlich) » , RAC V , 1962 , col . 1191-1278 . BRUNO CENTRONE ET CONSTANTINOS MACRIS .

II

37 LÉON DE STRATONICÉE

Léon Thrason , fils d’Hiéroclès, appartenait à une famille d'évergètes de Stratonicée ; il fut grand - prêtre municipal des empereurs et prêtre de Zeus Chrysaorieus. Comme son frère Thrason Léon , il était encore adolescent lorqu'il fut qualifié de philosophe dans le décret de Stratonicée honorant son père, sous le règne d'Antonin (IK 22 , 1 , 1028 ; voir L. Robert, BCH 102 , 1978 , n . 57 p . 402 = Documents d'Asie Mineure, Athènes 1987 , p. 98 ) . BERNADETTE PUECH . 38 LÉONIDÈS DE RHODES RE 3

Ia

Stoïcien mentionné, à la suite de Panétius , Stratoclès et Andronicus (** A 181 ) , comme philosophe célèbre de Rhodes par Strabon XIV 13 , 655 C. RICHARD GOULET. LÉONIDÈS + HÉRACLAMON LÉONIDÈS (M. EUSTORGIUS -) (H 42] 39 LÉONTEUS DE CYRÈNE RE 3

FIIa

Académicien inconnu , disciple de Lacydès ( PL 11 ] ( Philod ., Acad. hist ., col . M 11 = Lacyd . T 26 11 Mette ) . 1 W. Crönert, Kolotes und Menedemos, p. 78 n . 389 , avait suggéré, à tort, de l'identifier avec le Léontichus ( » connu par Philod ., Acad. hist ., col . N 19 ( = Lacyd. T 26 34 Mette ).

L 42)

92

LÉONTEUS DE CYRÈNE

L 39

Cf. 2 W. Capelle , « Leonteus » 3 , RE XII 2 , 1925 , col . 2040 , et 3 T. Dorandi (édit. ), Filodemo : Platone e l'Academia, p. 67 n. 225 . TIZIANO DORANDI. 40 LÉONTEUS DE LAMPSAQUE RE 2

IV /IIIa

Léonteus, originaire de Lampsaque , disciple d'Épicure ( Plut . , Adv. Col. 1108 e ) . Il avait épousé Thémista , et de leur union naquit un fils qui fut appelé Épicure ( » E 34 ) . Léonteus et son épouse avaient connu Épicure lors de son séjour à Lampsaque. En s'installant à Athènes, en 307/6, Épicure avait laissé à Lampsaque une communauté philosophique dont faisaient aussi partie Léonteus et Thémista . Cf. 1 A. Angeli , « Verso un'edizione dei frammenti di Leonteo di Lampsaco » , dans M. Capasso , G. Messeri et R. Pintaudi (édit. ) , Miscellanea Papyrologica, Firenze 1990 , p. 59-69 ; 2 C. Militello (édit. ) , Filodemo, Memorie epicuree ( PHerc. 1418 e 310), Napoli 1997 , p. 47-49 . On conserve deux fragments de lettres adressées par Épicure à Léonteus et à Thémista sous l'archontat de Philippe en 292/1 ( fr. 50 et 97 Arrighetti) et une autre adressée au seul Léonteus sous l'archontat de Ourias en 281/0 ( fr. 68 Arrighetti ). Léonteus est cité aussi dans la Lettre aux amis résidant à Lampsaque d'Épicure (Philod ., Pragm ., PHerc. 1418 , col . VII Militello ). On ne connaît rien de précis sur la vie privée et la pensée de Léonteus. Selon Angeli 1 , une large section des Pragmateiai de Philodème ( PHerc. 1418 , col . VII -XVIII Militello) conserverait le reste d'une « biographie » de Léonteus composée à partir de la correspondance de ce dernier et celle de Thémista avec leur maître Épicure. Si l'on accepte cette hypothèse, Léonteus a joué un rôle important dans la grave dispute entre Épicure et Timocratès, le frère de Métro dore (des doutes ont été soulevés par Militello 2, p. 47-49). En ce qui concerne la pensée philosophique de Léonteus, elle ne devait pas s'éloigner des principes fondamentaux du maître du Jardin . TIZIANO DORANDI. 41 LÉONTEUS DE TARENTE Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique , V. pyth. 36, 267 ; p . 144, 16 Deubner. C.M. ) [Sur ce type de nom, cf. Fr. Bechtel , Die historischen Personennamen , p. 277 . BRUNO CENTRONE . 42 LÉONTICHUS Académicien inconnu , disciple de Lacydès [ PL 11 ) (Philod ., Acad . hist . , col . N 19 = Lacyd . T 2b 34 Mette ) . 1 W. Crönert, Kolotes und Menedemos, p . 78 n . 389, avait suggeré , à tort, de l'identifier avec le Léonteus de Cyrène (PL 39) connu par Philod . , Acad. hist. , col . M 11 ( Lacyd. T 26 11 Mette) . Cf. 2 W. Capelle , « Leonteus » 3 , RE XII 2 , 1925 , col . 2040, et 3 T. Dorandi (édit . ) , Filodemo : Platone e l'Academia , p. 67 n . 225 . TIZIANO DORANDI.

--

LÉONTIUS

L 44 43 LÉONTION D'ATHÈNES RE 1 Elle fut, avec Mammarion (

93 IV / III

M 16 ) , Nicidion ( » N 40 ), Hédéia ( » H 14 ) et

Érôtion ( 2 - E 55 ) , l'une des courtisanes du jardin d'épicure ( ** E 36) à Athènes, et probablement la plus connue ( cf. D.L. X 6-7 , et Philod ., Ad contub ., col . VI 8 20 Angeli. Cf. 1 M. Capasso, « Un albero per Leonzio » , dans F. De Martino ( édit.), Rose di Pieria , Bari 1991, p. 279-311 . D'autres passages sont rassemblés et discutés par Capasso 1. Elle fut la maîtresse de Métrodore ( D.L. X 6 = test . 8 Körte ) et d’Épicure ( D. L. X 4 ) . Sa rivale était Glycère selon Athénée XIII , 585 d . Épicure lui adressa plusieurs lettres ; un extrait nous en est transmis par Diogène Laërce ( X 5 = fr. 143 Us . ) . Cicéron ( De nat. deor. I 33 , 93 = Zén . Sid. , fr. 9 Angeli -Colaizzo ; voir aussi Plin . , Nat. hist. , praef. 28-29 ) rappelle que Léontion avait osé écrire un ouvrage contre Théophraste ( cf. Capasso 1 , p . 303-311 ) . Alciphron (Epist. II 2 , 10 = fr. 143 Us . ) conserve une lettre de Léontion à Lamia, la courtisane aimée de Démétrios Poliorcète (H. Usener, Epicurea, Lipsiae 1887 , p. 147 , suppose que la source d'Alciphron était une lettre d'Épicure à Léontion ) . Pline l'Ancien énumère deux portraits de Léontion , auvres, l'un du peintre Aristide de Thèbes dit le Jeune (Nat. hist. XXXV 99 ) , et l'autre de Théorus (Nat. hist. XXXV 144 ) ; dans ce second tableau elle était représentée « en méditation » (cogitantem ). Sur ces portraits, voir A. Reinach , Textes grecs et latins relatifs à l'histoire de la peinture ancienne (Recueil Milliet), publiés, traduits et commentés sous le patronage de l'Association des études grecques. Avant- propos de S. Reinach . Introduction et notes par Agnès Rouveret, coll . « Deucalion » , Paris 1985, texte n° 347 et p. 275-276 n . 5 . TIZIANO DORANDI. 44 LÉONTIUS RESuppl. VIII : 23 PLRE II : 6

DV

Léontius, « sophiste d'Athènes » , est surtout connu pour être le père d'Athé naïs , la future impératrice Eudocia, épouse de Théodose II ; il avait instruit sa fille et lui avait fait faire toutes sortes d'études (Socrate, Hist. eccl. VII , XXI , 8 ) . Olympiodore rapporte qu'il fit accéder Léontius à la chaire des sophistes d'Athènes , dont ce dernier ne voulait pas (cf. Photius, Bibliothèque, cod . 80 , 60b ). D'autres versions du roman d'Athénaïs , font de Léontius un riche philosophe athénien qui aurait instruit sa fille dans la philosophie (Jean Malalas XIV , 353 , 10 ; 354, 17-18 ; 355 , 1 = PG 97 , 527 sqq .; Cedrenus, Compendium Historiarum , CSHB 4 ( 1838 ) , I , p . 590 , 9 = PG 121 , 641 ; Zonaras, Epitomae Historiarum , CSHB 46 [ 1847 ) , XIII 22 , t. III , p . 101 , 3 Pinder = PG 134, 1185 ) , ou donnent pour père à la jeune fille un autre philosophe du nom d'Héraclite [ H 63a ) . Voir également la Chronique de Jean de Nikiou , LXXXIV 26-32 ( p . 93-95 Charles 1916 ; p . 337 Zotenberg 1883 ) . Cf. F. Gregorovius, Athenais, Geschichte einer byzantinischen Kaiserin , 1 re éd . Leipzig 1882, 3e éd. , Leipzig 1892 , XII -279 p . ; 0. Seeck et L. Cohn , art. « Eudokia » 1 , RE VI 1 , 1907 , col . 906-913 ; H. Schlange - Schöningen , Kaisertum und Bildungswesen im spätantiken Konstantinopel, coll . « Historia Einzelschriften » 94, Stuttgart 1995, p . 85 . PIERRE MARAVAL et RICHARD GOULET.

94

45 LÉÔPHANÈS RE

LÉOPHANÈS

L 45 va ?

Naturaliste présocratique. Selon Aristote , Génération des animaux IV 1 , 765 a 22-25 , pour expliquer la différentiation des sexes Léophanès disait « qu'en se liant le testicule droit ou gauche , on produit par la copulation dans un cas un mâle , dans l'autre une femelle. » Il faut bien comprendre que c'est le testicule droit - le gauche étant lié - qui produit le mâle , comme le montrent le passage d'Hippocrate cité plus loin et les remarques d'Aristote dans les lignes qui suivent : il trouve une justification partielle à la relation établie entre le mâle et la droite dans le fait que « la partie droite du corps est plus chaude que la gauche » (765 b 1 ). Plus haut, Aristote avait déjà dit que selon Anaxagore et d'autres naturalistes (physiologues ) , « le mâle vient de droite , la femelle de gauche » , faisant vraisem blablement référence au testicule droit et au testicule gauche (763 b 32 ) . Aristote critique de telles conceptions chez des gens qui « partent de conjectures pour inventer ce qui doit se passer et préjugent les faits avant de les avoir vus se réaliser » (trad. P. Louis) . Dans son chapitre intitulé « Comment sont engendrés mâles et femelles » ( V 7 ) , le Pseudo - Plutarque, Résumé des opinions des philo sophes, 605 E , rapporte que « selon Léophanès qui est mentionné par Aristote, le sperme provient tantôt du testicule droit, tantôt du testicule gauche » ( trad. Lachenaud ). Son nom apparaît entre ceux d'Anaxagore (» A 158 ) et Parménide d'une part, de Leucippe ( » L 51 ) et Démocrite ( ** D 70 ) d'autre part. Chez Stobée, le chapitre correspondant ( I 42 , 5 ) , tiré d'Aétius , n'est pas conservé ( Voir DDG , p . 420 , 1 ) . Mais le nom apparaît dans la liste des philosophes cités par Stobée conservée par Photius, Bibl . cod. 167 , p. 114 b Bekker (t. II , p . 156 , 8 Henry ). On trouve une théorie semblable à celle de Léophanès dans le corpus hippocratique, De superfetatione 31 (éd. Littré , t . VIII , 1853 , p. 500-501 ) : « Si l'homme veut engendrer un garçon, il a des rapports avec sa femme à la fin des règles ou quand elles viennent de cesser : il enfonce autant qu'il peut, jusqu'à l'éjaculation ; si une fille, il a des rapports au plus fort des règles ou du moins coulant encore; il se liera le testicule droit autant qu'il pourra le supporter. Pour un garçon, il se liera le testicule gauche » ( trad. Littré ). "Orav Boúantai apoev φυτεύειν, των επιμην ων απολαγόντων ή εκλελοιπότων μγνυσθαι' και ώθέειν ώς μάλιστα έως αν εκμια νηται όταν δε θήλυ βούληται γενέσθαι, όταν πλείστα επιμήνια έη τη γυναικί, και έτι δ ' εόντων, τον δε όρχιν τον δεξιόν αποδήσαι ώς αν μάλιστα και ανέχεσθαι δύνηται· επήν δε άρσεν βούληται φυτεύειν, τον αριστερόν αποδήσαι. La pratique est encore mentionnée au Moyen Âge par Gilles de Rome ( voir 1 M. A. Hewson, Giles of Rome and the medieval theory of conception. A study of the “ De formatione corporis humani in utero " , coll. « University of London historical studies » 38, London 1975 , p. 184. En 1891 , Mrs Ida Ellis écrivait encore dans son ouvrage 2 Essentials of Conception and how to prevent it, Batley 1891 (cité par 3 R. Pearsall, The worm in the bud, Harmondsworth 1971 , p. 303 ) : « It is the male who can progenate a male or a female child at will , by putting an elastic band round the testicle not required. The semen from the right testicle progenates male, whilst that from the left female children ; men who have only one testicle can only beget one gender, but sometimes they do not descend , remaining in the body, in which case a child of either gender may appear » . Plus généralement, sur les problèmes liés à la latéralité (gauche droite ) dans le monde grec, voir 4 G. E.R. Lloyd , « Right and left in Greek philosophy » , JHS 82 , 1962 , p. 56-66, repris avec des modifications dans R. Needham (édit . ), Right and left : Essays on dual symbolic classification , Chicago 1973 , p. 167-186, surtout p. 171-173 et p. 182 n . 20 ; 5 Id ., Polarity and analogy. Two types of argumentation in early Greek thought. London 1966, p. 50 n . 2 et p. 73 .

L 47

LÉPIDUS D'AMASTRÉE

95

Théophraste , De causis plantarum II 4 , 12 , rapporte pour sa part que Léophanès recommandait en agriculture une terre noire (ueạáyyeloc) propre à absorber la pluie et à supporter la sécheresse. Cette opinion se retrouve , sans le nom de Léophanès, dans les Geoponica II 9 , 1 . Cf. 6 W. Kroll, art. « Leophanes » , RE XII 2 , 1925 , col . 2057, qui renvoie à 7 M. Wellmann , « Die Georgika des Democritos » , APAW 4 , 1921 , 58 p. , pour une influence éventuelle de Léophanès sur Bolos “ Démocrite " ( voir p. 44 , fr. 9 de Bolos ) . Voir 8 Jean Letrouit, notice « Bolos de Mendès » , B 53 , DPLA II , 1994 , p. 133-134 . RICHARD GOULET. 46 LÉOPHRON DE CROTONE Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique , V. pyth . 36 , 267 ; p . 143 , 22 Deubner. (Cette forme du nom (1ɛoppuv ) paraissait une « vitiosa scriptura » aux philologues , depuis Casaubon et jusqu'à Keil et Nauck. K. Keil ( Analecta epigraphica et onomatologica, Leipzig 1862 , p. 228) avait proposé de corriger en Aeúdpov ( ou Neodpwv) ( cf. l'attitude méfiante de Casaubon à propos du Aeoopwv d'Athénée I , 3 e, employé pour désigner le fils d'Anaxilaos de Rhégium). A. Nauck enregistra la correction de Keil avec approbation dans l'apparat critique de son édition du traité de Jamblique Sur le mode de vie pythagoricien (ad loc .), en se plaignant même que Bekker ne l'ait pas adoptée dans son édition de la Souda, s . v. ’AOńvalos, mais il choisit finalement d'éditer le texte tel qu'il a été transmis. L. Deubner a fait de même , mais en s'appuyant sur une documentation épigraphique très solide : un Aeoopwv Metanovtīvoc est en effet attesté dans une inscription ( voir IG 1215 , avec Fr. Bechtel, « Die Personennamen im vierten Bande der Inscriptiones Graecae » , dans Genethliakon für Carl Robert, Berlin 1910, p. 69-70 ). Un certain Léophron ( visiblement de Métaponte , lui aussi ) est donné également comme père de Théanô par la Souda, s. v. Oeavó 1 (Metanovt vn ), 83 , t. II , p. 688 , 14 sq. Adler – où toutefois la graphie transmise par les mss est Aesopwv: il pourrait s'agir de la même personne. Remarquons que tous les noms C.M. ) attestés proviennent de l'Italie du Sud (Crotone, Rhégium , Métaponte ). BRUNO CENTRONE . 47 LÉPIDUS D’AMASTRÉE RE 3 PIRC 910

MII

Alexandre d'Abonotique ( ** A 110 ) craignait toùç nepì Aénidov parce qu'ils étaient hostiles aux oracles divinatoires et il refusait de faire fonctionner l'oracle qu'il avait institué au profit des citoyens d'Amastrée ( Lucien , Alexandre 25 ) . Cette attitude d'esprit chez Lépidus et un certain nombre de ses concitoyens semble liée à une profession d'épicurisme , car Lucien illustre par l'exemple de ce rationaliste le mépris qu'Épicure ( ~ - E 36 ) lui- même manifestait à l'égard des oracles. Alexandre essaya également de détourner un certain Sacerdos de Tion en Paphlagonie (Τιανού ανθρώπου) de Lapidus dont il était l'έταίρος , grace a un faux -oracle (ibid. 43 ) . A nouveau cette attitude d'Alexandre est mise en rapport avec la crainte qu'il éprouvait devant Épicure, őç tiva åvtitexvov xai đuti σοφιστής της μαγγανείας αυτού . On pourrait cependant hesiter a faire de Sacerdos lui- même un épicurien et , malgré le terme étapos , un disciple de Lépidus, car chez lui Lucien trouva une inscription gravée en lettres d'or rappor tant le dialogue qu'il tint avec Glycon , le serpent divinatoire d'Alexandre . A

LÉPIDUS D'AMASTRÉE

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moins que Sacerdos ait précisément montré cette inscription à Lucien dans le but de décrier les oracles, car les questions soumises à Glycon peuvent être compri ses comme une tentative pour obtenir de l'oracle des réponses compromettantes. Une identification est possible avec T. Claudius ( RE 205 ) Lepidus, honoré par une inscription d'Amastrée (CIG III 4149 = IGR III 88 ) comme grand- prêtre du Pont et ÉALOTÁrng de sa cité d'Amastrée. Dans une autre inscription honorant sa fille Claudia Lepida ( CIG III 4150) , on apprend le nom de son épouse Claudia Marcianè et celui de son gendre L. Vidius Euphrôn. Ces inscriptions ont été récemment rééditées par 1 C. Marek, Stadt, Ära und Territorium in Pontus- Bithynia und Nord -Galatia , coll . « Istanbuler Forschungen » 39 , Tübingen 1993, Amastris n° 12 (p. 162) et 13. Il est également possible que le Lepidus de Lucien soit le père ou le fils de ce Claudius Lepidus. Voir aussi 2 U. Victor, Lukian von Samosata, Alexandros oder der Lügenprophet. Eingeleitet, herausgegeben , übersetzt und erklärt von U. V., coll . « Religions in the Graeco -Roman World » 132, Leiden 1997 , p. 151 . RICHARD GOULET.

48 LEPTINÈS

III

Dedicataire du Περί της χρήσεως του λόγου προς Λεπτίνης (Sur l'usage C 121 ) , selon de la raison [ Hadot ] ou du discours (Cherniss ]) de Chrysippe ( la liste de Diogène Laërce VII 202. Un tel ouvrage ne peut guère avoir été dédié qu'à un disciple ou à un collègue au sein de l'école stoïcienne. Comme l'ouvrage est répertorié dans une section de l'éthique intitulée Sur la raison commune et les arts et vertus qui se constituent à partir d'elle ( ſlepi Tòv XOLVÒV AóYou xa các kx Toũroo JootƠ Toucvac xéxvac xai đoftác), 1 D. Babut, dans D. Babut et M. Casevitz (édit. ), Plutarque, Euvres morales, t . XV , 1 re partie : Traité 70 Sur les contradictions stoïciennes, CUF, Paris 2004, p . 134 n . 77 , préfère traduire logos dans le titre par raison, plutôt que par discours. Trois fragments de ce traité sont conservés par Plutarque, De Stoicorum repugnantibus 9, 1035 e ( SVF II 53 , numéroté par erreur 50) , 10 , 1036 f (SVF II 271 ) et 1037 b (SVF II 129) ; peut -être faut-il y rattacher également un autre passage en 1035 f, selon Babut 1 , p. 134 n . 77. Selon 2 D. Babut, Plutarque et le stoïcisme , Paris 1969 , p . 33 n . 5 et p . 228 , ces citations proviendraient d'une connaissance de première main de l'ouvrage de Chrysippe. Absent de la RE. RICHARD GOULET.

49 LEPTINÈS DE SYRACUSE Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique, V. pyth . 36, 267 ; p . 146, 1 Deubner. BRUNO CENTRONE. 50 LESBONAX DE MYTILÈNE RE 1 PIR L 160

Iາ

Quelles que soient les incertitudes qui demeurent quant à la généalogie de la famille de Mytilène dont furent issus le philosophe Lesbonax et les rhéteurs Potamon et Lesbonax ( voir G. Labarre , Les cités de Lesbos aux époques hellénistique et impériale, Lyon 1996 , p . 145-147 ) , les diverses reconstitutions s'accordent cependant à admettre que le philosophe , bienfaiteur de sa patrie ,

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LEUCIPPE

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était le père du célèbre Potamon. C'est en effet, à l'évidence , le même person nage qui est désigné par des monnaies de la cité comme Lesbonax le philosophe (BMC Lesbos, p. 73 ) ; qui est mentionné , pour avoir « été lui aussi un bien faiteur » , en tant que père du personnage honoré, dans l'inscription de la statue élevée à Potamon par le koinon de Lesbos ( G. Labarre , ibid. , nº 22 ; règne d'Auguste ) ; et qui est qualifié, comme Potamon , de bienfaiteur et appelé « Lesbonax le philosophe » dans une inscription en l'honneur d'une de ses descendantes (G. Labarre, n° 49 ; me siècle ) . Son activité se situe donc au jer siècle avant notre ère et il ne peut en aucun cas être identique au rhéteur homonyme , qui n'a pu commencer sa carrière avant le dernier quart du jer siècle de notre ère, car Lucien ( De saltatione , 69) le présente comme un élève de Timocratès d'Héraclée . BERNADETTE PUECH . 51 LEUCIPPE RE 13 DK 67

Mya

Philosophe presocratique, fondateur de l'atomisme . Il est rattaché à Élée , Abdère ou Milet et présenté comme auditeur de Zénon d'Élée (Diogène Laërce IX 30 = A 1 DK ) et maître de Démocrite d'Abdère D 70 ] (Diogène Laërce I 15 et IX 34 ; voir aussi A 2 , A 4 et A 5 DK ) . Aristote associe régulièrement Leucippe à son disciple Démocrite ( A 6 et 7 DK ) , mais ne semble pas recon naître un lien avec Zénon . Épicure et Hermarque auraient tout simplement contesté l'existence de ce philosophe (Diogène Laërce X 13 = A 2 DK) , peut être dans une tentative pour accentuer l'absolue originalité de l'atomisme épicu rien . Leucippe est un des chaînons de la succession de philosophes présocra tiques transmise par Eusébe de Césarée , Préparation évangélique XIV 17 , 10 . Voir la notice « Nessas de Chios » . D'assez substantielles doxographies sont conservées par Aristote et ses commentateurs , ainsi que par Aétius et Diogène Laërce IX 30-33 ( A 1 DK ) , lequel distingue entre une présentation separatwdws et une présentation énì μέρους .. Deux traités sont attribués à Leucippe. D'après Diogène Laërce XI 45 , qui cite Théophraste, il serait l'auteur véritable du Grand système du monde (Méyaç diáxoouoc) transmis parmi les æuvres de Démocrite . Aétius ( B 2 ) cite un extrait d'un autre traité, Sur l'intellect ( ſlepi voû) . Fragments et témoignages. 1 DK 67 , t. II , p. 70-81 (avec Nachtrag, p . 422) . Voir aussi 2 G.S. Kirk et J. E. Raven , The Presocratic Philosophers. A critical history with a selection of texts, Cambridge 1957 , chap . XVII , p . 400-426 ( Leucippus of Miletus and Democritus of Abdera ), nouvelle édition avec M. Schofield , Cambridge 1983 ; traduction française : 3 G. S. Kirk, J. E. Raven et M. Schofield , Les philosophes présocratiques. Une histoire critique avec un choix de textes, coll . « Vestigia » 16, Fribourg/Paris 1995, chap. XV , p . 433-465. Nouvelle édition commentée : 4C.C.W.Taylor , The Atomists. Leucippus and Democritus . Fragments . A text and translation with a commentary, coll . « Phoenix Supplementary volumes » 36 , Toronto 1999 , notamment p. 2-3 et 53 54.

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LEUCIPPE

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Traductions. Française : 5 Dumont, Présocratiques, p . 729-746 ( traduction ) et 1453-1460 ( notes ) . Anglaise : 6 K. Freeman , Ancilla to Pre -Socratic Philo sophers. A complete translation of the Fragments in Diels, “ Fragmente der Vorsokratiker ", Oxford 1971 , p . 90-91. Italienne : 7 V.E. Alfieri (édit . ) , Gli Atomisti. Frammenti e testimonianze. Traduzione e note , coll . « Filosofi antichi e medievali . Collana di testi e di traduzioni » , Bari 1936 , p . 1-39 , traduction reprise dans 8 G. Giannantoni et alii, I presocratici : testimonianze e frammenti, 1re éd . : coll . « Filosofi antichi e medievali » , Bari 1969 , réimpr.: coll . « Biblio teca Universale Laterza » Bari 1981 et 1983 , t. II , p. 643-662. Espagnole : 9 M. I. Santa Cruz de Prunes et N. L. Cordero dans C. Eggers Lan et alii ( édit. ), Los filósofos presocráticos. Introducciones, traducciones y notas, coll . « Biblio teca clásica Gredos » 28 , Madrid 1980 , t . III , p . 139-422 . Allemandes : 10 F. Jürß, R. Müller et E.G. Schmidt (édit. ) , Griechische Atomisten. Texte und Kommentare zum materialistischen Denken der Antike . Aus dem Grieschichen und Lateinischen übersetzt und herausgegeben, coll . « Reclam Bibliothek » 409, Leipzig 1977 , 4° éd. 1991 , p . 14-19 ( Einleitung ) , p. 99-202 ( Leukippos und Demokrit) ; p. 453-499 (Anmerkungen) ; 11 J. Mansfeld (édit. ) , Die Vorsokra tiker. Auswahl der Fragmente, Übersetzung und Erläuterungen, coll. « Univer sal - Bibliothek » 10344, Stuttgart 1987 , p. 556-579. Cf. 12 Lucia Orelli , La pienezza del vuoto : meccanismi del divenire fra embriologia e cosmogonia nell'ambito dell'atomismo antico, coll . « Le rane » 19 , Bari 1996, 270 p. Bibliographie . 13 L. Paquet, M. Roussel et Y. Lafrance , Les Présocratiques. Bibliographie analytique ( 1879-1980) , t . II : D'Alcméon aux auteurs de la Collection hippocratique, Montréal/Paris , p. 234-237 . RICHARD GOULET. 52 LIBANIUS RE PLREI : 3

IV

Né en 314 à Antioche dans une famille curiale, il est saisi à quinze ans « d'un violent amour de la rhétorique » ( Or . I 5 ) et consacre les cinq années qui suivent à se former auprès d'un simple grammatiste en apprenant par cæur les euvres des anciens. Il quitte Antioche en 336 , étudie la rhétorique à Athènes , puis de 339 à 349 il exerce le métier de sophiste à Constantinople , Nicée, et surtout Nicomédie ( 344-349 ) , à nouveau à Constantinople de 349 à 353. Il devient ensuite « sophiste de la ville » d'Antioche, où il réside jusqu'à sa mort en 393 , enseignant la rhétorique à des générations d'étudiants ( cf. 1 P. Petit , Les étudiants de Libanius, Paris 1956) , tout en jouant par moments un certain rôle politique, que le titre de préfet du prétoire honoraire reconnaîtra en 393 . Il reste de lui 64 discours , 51 déclamations , des exercices (npoyuu váguara ) , des introductions aux discours de Démosthène , 1544 lettres; il ne reste rien de ses poèmes (ed. 2 R. Förster, 12 vol . , Leipzig 1903-1927 ; nouvelle édition des Discours de 3 J. Martin et P. Petit, CUF, Paris 1979- ) . Ses discours sont de genres très divers : éloges , oraisons funèbres , discours politiques ; plusieurs traitent de problèmes d'éducation , de problèmes locaux, voire de problèmes personnels. Le discours 30 prend la défense des temples et manifeste

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LIBANIUS

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avec d'autres (ceux qui concernent l'empereur Julien ) l'attachement - pourtant sans fanatisme – de Libanios à la religion traditionnelle. Libanios est- il un philosophe ? Il a certes des relations avec les philosophes de son temps, dont la plupart relèvent de la mouvance néoplatonicienne , mais on sait qu'il manifestait une certaine réserve envers les conseillers de Julien , néoplatoniciens amateurs de théurgie. C'est bien davantage un sophiste , pour qui l'éloquence rhétorique est la valeur suprême , qui inspire jusqu'à sa manière de penser et de vivre . Parmi les nombreux auteurs qu'il cite , Platon tient une place honorable (après Demosthène toutefois ), mais il est davantage utilisé pour ses images et pour de belles formules que pour ses idées . Les conceptions du monde et de l'existence de Libanios sont celles que transmettaient les écrits qui sont à la base de la paideia antique et que le professeur qu'il est a parfaitement intério isée 4.Schuer, tradition helléniguchezLibanus, Par184 ). [ Dans son Discours autobiographique ( § 131 ) , Libanius se flatte d'avoir été considéré par l'Empereur Julien comme un rhéteur par ses discours , mais Comme un philosophe par ses actes (ο δε δοκείς μοι, φησ ν, εις μεν ρήτορας κατά τους λόγους τελεϊν , από δε των έργων εν φιλοσόφους γεγράφθαι ). Voir la note de Petit 3 , p. 244-245 . Sur les rapports entre le sophiste et l'Empe reur, voir l'étude récente de H.-U. Wiemer, Libanios und Julian . Studien zum Verhältnis von Rhetorik und Politik im vierten Jahrhundert n . Chr . , coll . « Vestigia. Beiträge zur alten Geschichte » 46 , München 1995 , X11-408 p .

R. G. ) Édition critique complète. 5 R. Foerster et E. Richsteig (édit . ) , Libanii Opera, coll . BT, Leipzig 1903-1927 , en 12 volumes , réimpr. 1963 . I. Orationes I-XI ; II . Orationes XII - XXV ; III . Orationes XXVI - L ; IV . Orationes LI LXIV ; V. Declamationes 1-XII ; VI . Declamationes XIII - XXX ; accedit Gregorii Cyprii adversus Corinthiorum declamationem libanianam antilogia ; VII . Declamationes XXXI -LI ; accedit Gregorii Cyprii adversus Avari declamationem libanianam antilogia ; VIII . Progym nasmata. Argumenta orationum demosthenicarum ; IX . Characteres epistolici, prolegomena ad epistulas. X. Epistulae 1-839 . XI . Epistulae 840-1544 una cum pseudepigraphis et Basilii cum Libanio commercio epistolico. Fragmenta . Cf. 6 A. J. Festugière , Antioche païenne et chrétienne. Libanius, Chrysostome et les moines de Syrie, coll . BEFAR 194 , Paris 1959 , chap . III : « Libanius éduca teur à Antioche » ( p. 91-139 ) ; chap . IV : « Quelques élèves de Libanius » ( p. 141 17.Fauscher , swege der Forschung621 Darmstadt 983,200rprétudes present107981, suivies d'une bibliographie pour la période 1954-1981). Bibliographie. P.-L. Malosse , « Orientation bibliographique sur Libanios » , Pallas0,202,251-257 Concordance. 8 Une imposante concordance de l'æuvre de Libanios est en cours de publication en plusieurs volumes par G. Fatouros , T. Krischer et Najok édit. , concordantain bnum ,c.ph - mega Reh Lexika, Indizes , Konkordanzen zur klass. Philologie » 50 , Hildesheim 1987- .

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LIBANIUS

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Prosopographie. 9 O. Seeck , Die Briefe des Libanius, coll. TU , N.F. , XV 1 2 , Leipzig 1906 , réimpr. Hildesheim 1966 ; 10 P. Petit, Les étudiants de Libanius, Paris 1956.

PIERRE MARAVAL. 53 LIBANIUS PLREI : 3

MIV

Pythagoricien , homonyme de Libanius , qui lui adresse une lettre ( Epist. 460 de 355-356) et fait allusion à lui sans le nommer dans une autre ( Epist. 1496, de 365 ) . Cette seconde lettre est adressée à un ancien rhéteur, Léontius ( PLREI:9 ), promu à un haut poste en province ( gouverneur de Galatie en 364-365 ) sous Julien . Libanius intercède en faveur d'un certain Meilichios dans une affaire juridique ( peut -être un conflit relatif à une liturgie municipale) qui l'opposait à son propre frère Sapricius ( les deux noms semblent absents de la PLRE ). Meili chios était au service de ce Libanius pythagoricien ( qui est seulement mentionné comme un homonyme du sophiste d'Antioche). Comme Meilichios résidait à l'époque à Antioche, le pythagoricien devait être établi lui aussi dans cette ville. Dans la première lettre, antérieure d'une dizaine d'années , Libanius mani feste déjà son admiration pour le philosophe : « Tu as bien agi en te taisant quand c'était préférable et en parlant ( maintenant ) qu'il est mieux ( de le faire ) et en introduisant dans la vie les beautés de Pythagore. Pour ma part, je t'aimais auparavant , je t'aime maintenant et , si un jour je te vois , je tiendrai cette vision comme la plus grande des chances . » Cf. O. Seeck , Die Briefe des Libanius zeitlich geordnet, coll . TU , N. F. , XV 1-2 , Leipzig 1906 , p. 198 (Libanius II ) . RICHARD GOULET. 54 LIBERALIS (AEBUTIUS -) RE Aebutius 16

I

Stoïcien , peut-être identifiable au centurion Q. Aebutius Liberalis (CIL III , suppl . 9973 ) ; ami de Sénèque dans les dernières années de la vie du philosophe, il est le dédicataire du De beneficiis, où son nom apparaît à plusieurs reprises, notamment en V 1 , 3 , où Sénèque fait son éloge et le qualifie de « nature d'élite portée à la bienfaisance » (homini natura optimo et ad beneficia propenso ), VI 1 , 1 ; 12 , 1 ; 42 , 1. Établi à Rome mais originaire de Lyon , il est très affecté par l'incendie qui , en une nuit , détruit entièrement sa ville natale en août 64 , très peu de temps après celui qui a ravagé Rome . Dans la lettre 91 , Sénèque , relatant l'événement et exposant la douleur de son ami , loue la fermeté d'âme dont fait preuve d'ordinaire Libéralis, adepte de la praemeditatio malorum ( 91 , 1 ) , face aux maux qui l'affectent lui -même (aduersus sua firmum et erectum , 91 , 3 ) , mais explique son désarroi devant ce malheur public par l'ampleur et la soudai neté de la catastrophe tout autant que par son caractère inouï ( tam inopinatum malum et paene inauditum , 91 , 1). Les développements qui suivent constituent de véritables thèmes de consolation et reflètent les paroles de réconfort adressées à Libéralis (Haec ergo atque eiusmodi solacia admoueo Liberali nostro, 91 , 13 ) : précarité de toutes les choses humaines, nécessité de prévoir l'imprévisible (Ideo nihil nobis improuisum esse debet, 91 , 4) , cruauté et ingéniosité de la Fortune

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LICENTIUS DE THAGASTE

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qui s'abat sur les réalisations les plus brillantes (91 , 4) et s'acharne à trouver toujours des voies nouvelles pour nous atteindre (Non una uia semper, ne trita quidem incurrit, 91 , 5 ) , mais pourtant obligation de se soumettre au destin et aux lois qui régissent l'existence et l'univers. Tels sont les thèmes stoïciens exposés dans cette lettre à l'intention de Liberalis à la suite de ce gigantesque incendie ( cf. A. Vitti , « Seneca ep. 91 : Liberale e l'incendio di Lione » , Paideia 52 , 1997, p . 397-406 ). Libéralis était sans doute un riche chevalier ( De benef. V 1 , 3 , V 2 , VII 12,5 ; Dessau 5953 , 5953 a ), peut- être jurisconsulte (De benef. VI 5 , 4 ; 4,4 ; 8 , 2-4 ), un lettré, féru de subtilités dialectiques, qui partage avec Lucilius ( » L 68 ) les leçons et l'amitié de Sénèque. Déjà avancé dans la sagesse en 64 ( lettre 91 , 1 ), il peut, grâce à ses richesses et sans la moindre ostentation , mettre en pratique les maximes de la bienfaisance stoïcienne et , par ses probables fonctions de jurisconsulte, contribuer peut- être à les faire pénétrer dans le droit romain ( voir l'introduction de F. Préchac à l'édition du De beneficiis, tome 1 , CUF , Paris 1926, 7e éd. 1972 , p . XL , XLI ) . Cf. P. von Rohden , art. « Aebutius » 16, REI 1 , 1893 , col . 443.

RÉGINE CHAMBERT.

55 LICENTIUS DE THAGASTE RE :

FIV

Concitoyen et élève de saint Augustin (** A 508 ) , Licentius prit part à la retraite de Cassiciacum en 386. Il est l'un des interlocuteurs du Contra Acade micos , du De beata vita et du De ordine. Il est aussi lui-même l'auteur d'un poème adressé à Augustin , Carmen Licentii ad Augustinum praeceptorem , qui est un témoignage et une source de renseignements précieux sur l'activité d'Augustin au temps de sa conversion. 1. PROSOPOGRAPHIE Indications bibliographiques. 1 G. Bardy, « Un élève de Saint Augustin : Licentius » , L'Année théologique augustinienne 14 , 1954 , p . 55-79 ; 2 S. Battaglia , « Piramo e Tisbe in una pagina di Sant'Agostino » , Filologia e Letteratura 9 , 1963 , p. 114-122 ; 3 P.S. Cary, « What Licentius learned : a narrative reading of the Cassiciacum dialogues » , AugStud 29 , 1998 , p. 141-163 ; 4 A. K. Clarke, « Claudian and the Augustinian circle of Milan » , Augustinus 13/49-52 , 1968 , p . 125-133 ; 5 Id ., « Licentius , Carmen ad Augustinum 11. 45 sqq . , and the Easter Vigil » , Studia patristica , 8 , coll . « Texte und Unter suchungen » 93 , Berlin 1966, p. 171-175 ; 6 G. Finaert, « Le “ disciple ” de ces dialogues » , La Musique, BA 7 , Paris 1947 , « Note complémentaire 1 » , p. 483 484 ; 7 I. Hadot, Arts libéraux et philosophie dans la pensée antique , coll . « Études Augustiniennes » , Paris 1984, p. 176-187 ( « Le poème de Licentius à Augustin : peut- il nous renseigner sur les “ Disciplinarum libri ” de Varron ? » ) ; 8 A. Mandouze (édit . ) , Prosopographie chrétienne du Bas - Empire, vol . 1 : Afrique ( 303-533 ), Paris 1982, p . 640-642 ; 9 U. Pizzani, « Schema agostiniano e schema varroniano della disciplina grammaticale » , dans Studi su Varrone, sulla retorica, storiografia e poesia latina. Scritti in onore di B. Riposati, Rieti/

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Milano , 1979 , p. 397-411 ; 10 Id. , « Il Carmen Licentii ad Augustinum e i Disciplinarum libri di Varrone reatino » , dans Thesauramata Philologica Iosepho Orozio Reta obltata = Helmantica 133-135 , 1993 , p . 497-515 ; 11 Id ., « Presenze classiche nel “ Carmen Licentii ad Augustinum ” » dans M. Salvadore (édit. ) , La poesia tardoantica e medievale. Atti del I Convegno Internazionale di Studi : Macerata , 4-5 maggio 1998 , Alessandria 2001, p . 185 115 ; 12 D. Romano , « Licenzio poeta. Sulla posizione di Agostino verso la poesia » , ND 11 , 1961 , p. 1-22 ; 13 A. Solignac, « Doxographies et manuels dans la formation philosophique de saint Augustin » , Recherches Augustiniennes 1 , 1958 , p . 113-148 . Licentius est le fils de Romanianus , le mécène d'Augustin et le dédicataire du Contra Academicos et plus tard du De vera religione. Confié par son père à Augustin et bien qu'il fût longtemps resté sans goût pour les études (De ord . I 6, 16 ) , il participa activement aux dialogues de Cassiciacum . Ses interventions révèlent, selon G. Bardy, « le type achevé du garçon ouvert, ardent, enthousiaste, épris d'admirations successives pour tout ce qu'il trouve beau et généreux, pour la philosophie aussi bien que pour la poésie, capable de se passionner à la vue d'un combat de coqs comme au spectacle d'un ver coupé en morceaux » (Bardy 1 , p. 55 ) . Deux traits le caractérisent par rapport aux autres participants : sa sympathie pour les académiciens et sa passion pour la poésie. Dans le Contra Academicos , il demande que lui soit exposée toute la doctrine de l'Académie ( Contra Acad. II 4 , 10) et il s'en fait l ' « avocat » (Cont. Acad. II 7 , 18 ) notamment contre Tryge tius , l'autre élève d'Augustin . Dans le De beata vita, il refuse d'abandonner les académiciens et résiste à l'argument d'Augustin selon lequel ceux -ci ne peuvent pas avoir part à la sagesse ( De beat. vit. 2 , 15 ) . Sa conviction selon laquelle rien n'arrive en -dehors de l'ordre, formulée et défendue dans le De ordine (I 3 , 9 ) , est cependant ironiquement saluée par Trygetius comme une prise de distance par rapport au scepticisme. Licentius s'est d'autre part soudainement enflammé pour la poésie en lisant l'Énéide (Cont. Acad . II 4, 10 ; De ord. I 2 , 5 ) . Non content de citer Virgile et Térence dans la discussion (Cont. Acad . I 5 , 14 ; De ord. I 3 , 9) , il entreprend de chanter les amours malheureuses de Pyrame et de Thisbé (De ord. I 3 , 8 ) ( sur cet épisode, cf. Battaglia 2) . Craignant que cette passion ne le détourne de la sagesse ( Cont. Acad. III 1,1 ; De ord . I 3 , 8 ) , Augustin l'enjoint de revenir à l'« école » de la philosophie et le rappelle à la lecture de l'Hortensius (Cont. Acad. III 4, 7 ) . Le goût de Licentius pour la poésie va peut-être de pair chez lui avec la capacité à s'enthousiasmer, notamment pour la sagesse ( De beat. vit. 4, 27 ) ou pour l'ordre (De ord. I 5 , 14 ; I 6, 16 sq . ) , qui l'emporte chez lui sur la faculté de définir (Cont. Acad. I 4 , 10 ; De ord. I 10 , 28 ; II 2 , 4) et de s'exprimer avec précision (De ord. I 7 , 18 ; II 7 , 20) . Une conversion semble pourtant s'opérer en lui . Il déclare avoir tout à coup ( subito ) moins d'entrain pour la poésie, reconnaît « que la philosophie est plus belle que Thisbé et que Pyrame » (De ord. I 8 , 21 ) et rend grâce au Christ ( ibid . I 8 , 23 ) . Augustin juge cependant prudent de l'engager à poursuivre son poème,

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dans l'idée que le bon usage des disciplines libérales affermit la recherche du bonheur, et lui suggère même une finale ( De ord. I 8 , 24 ) . Les progrès de Licentius durent être assez nets pour qu'Augustin ait jugé qu'il était parvenu au ceur de la philosophie (De ord. I 6 , 16 ) et qu'il pouvait être présenté comme un modèle à son père Romanianus ( Acad . I 1,4 ) . Licentius a- t - il persévéré dans cette voie ? Resté en Italie après le retour d'Augustin en Afrique, il lui envoya en 395 un poème (apud Aug. , Epist. 26) . Il fait part de sa difficulté à lire sans l'aide de son maître un ouvrage de Varron , évoque le souvenir de Cassiciacum ( vv . 53 sq . ) et demande à Augustin son De musica . « Son poème traduit plus le désarroi de qui a perdu un guide bien aimé que la ferme résolution de s'en tenir à une voie clairement reconnue » (Mandouze 8, p . 642 ). La réponse d'Augustin exprime sa crainte que son élève ne se laisse « entra ver par les choses mortelles » (Epist. 26, 2) ; que ne met- il pas de l'ordre dans sa vie, que n'obéit -il pas aux lois de Dieu , alors qu'il s'empresserait de corriger ses vers s'ils allaient à l'encontre des règles de l'art poétique (Epist. 26, 4) ! Augustin cite la parole du Christ appelant tous ceux qui peinent à prendre sur eux son joug (Mt 11 , 28 ) et exhorte Licentius à changer de vie ( Epist. 26 , 5 ) . Enfin , il l'envoie en Campanie pour s'instruire auprès de Paulin. Dans une lettre adressée par l'intermédiaire de Romanianus, Augustin recommande personnelle ment Licentius à Paulin , afin que l'ivraie qui germe en lui se change en blé ( Epist. 27 , 6 ) et il joint à sa lettre le poème de Licentius et la réponse qu'il lui a donnée. Augustin réitère plus tard sa demande d'intervention de Paulin auprès de son élève (Epist. 31 , 7 ) . Paulin rédige alors une lettre adressée à Romanianus puis directement à Licentius ( Paulin, Epist. 8 = Epist. 32 de la correspondance d'Augustin ) . Aux avertissements d'Augustin , il joint les siens. Craignant toute fois d'avoir tenu un discours trop sévère , il évoque le goût de Licentius pour la poésie et lui confie qu'à son âge , il l'a lui aussi aimée . Il poursuit sa lettre en vers, le mettant en garde contre les séductions de Rome et les dangers d'une carrière militaire, le prie de le recevoir pour père et conclut que « la vraie vie , c'est de vivre pour Dieu » (uiua est uiuere uita deo ) (Epist. 32 , 5 ) . Il faut enfin noter de façon marginale que certains manuscrits , même très anciens, du De musica donnent le nom de Licentius au disciple qui s'entretient avec le maître ( cf. Finaert 6, p . 483).

2. LE POÈME DE LICENTIUS Éditions. 14 J.C. Wernsdorf, Poetae Latini Minores 4.2 , Altenburg 1785 ; 15 A. Goldbacher , « Carmen Licentii ad Augustinum praeceptorem » , dans S. Aurelii Augustini, Epistulae 1-30, coll . CSEL 34/1 , Wien 1896 , p . 89-95 ; 16 M. Zelzner, « De carmine Licentii ad Augustinum » , Diss . Breslau, Arnsberg 1915 ; 17 D. Shanzer, « " Arcanum Varronis iter " : Licentius's Verse Epistle to Augustine » , RÉAug 37 , 1991 , p . 110-143 ( avec trad . anglaise ) ; 18 M. Cutino, Licentii Carmen ad Augustinum . Introduzione, testo , traduzione e commento , Catania , Centro di Studi sull'antico cristianesimo, Università di Catania, 2000 ;

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19 K.-D. Daur , Ep . XXVI ( 2 ) , dans Sancti Aurelii Augustini, Epistulae I - LV , coll . CC 31 , Turnhout 2004 , p . 78-83 . Le modèle de ce poème de cent cinquante - quatre vers est la fin de la quatriè me Géorgique de Virgile. D'un point de vue littéraire, le Carmen ad Augustinum se caractérise par son abondant recours à l'allégorisation et aux ornatus géogra phiques , inspirés de Solin et vraisemblablement d'Avienus (> A 515 ) . Tout en étant resté marginal , il fut peut-être connu de Claudien (cf. Clarke 4 et 5 ) et Boèce ( » B 41 ) reprit certaines expressions des premiers vers dans sa Conso lation de la Philosophie (cf. Shanzer 17, p . 143 ) . Une étude attentive du poème de Licentius permet de mettre en évidence de nombreux parallèles avec les dialogues de Cassiciacum , que Licentius semble avoir lus ( cf. Shanzer 17 , p . 124-133 ). Parmi les diverses sources du poème, qui ont été précisément étudiées ( cf. Cutino 18 ) , les vingt- quatre premiers vers , qui portent sur Varron , sont particulièrement importants. Il est difficile d'identifier avec certitude l'ouvrage auquel Licentius fait allusion et dans lequel il doit être question de musique mais aussi de géométrie et d'astronomie . Le fait qu'Au gustin ait mis ses élèves en contact avec les æuvres de Varron confirme cepen dant l'influence de cet auteur sur les Disciplinarum libri entrepris par Augustin dans le temps où il allait recevoir le baptême (Retract. I 6) et dont la composi tion resta inachevée . Aimé Solignac , qui a traduit la première partie du poème, formule ce jugement, qui garde toute sa valeur : « Ce document peu utilisé four nit en sa brièveté sur le contenu des traités varroniens consacrés aux sciences mathématiques des indications précieuses dont l'importance s'accroît encore par comparaison avec d'autres écrits connus et certainement inspirés de Varron . La théorie des nombres s'y trouvait exposée selon une mentalité pythagoricienne et s'amplifiait en considérations subtiles sur les sphères célestes et l'harmonie de leurs mouvements . La géométrie , selon l'esprit platonicien du livre VII de la République, considérait l'étude des figures concrètes comme une manuduction à la contemplation des figures idéales " dessinées sans poussière " ( On trouve cependant dans Wernsdorf 14 et dans Shanzer 17 la leçon “in pulvere" (sine codd . ) à la place de “ sine pulvere" dans les vers “ inde figurarum posit sine pulvere formas / posco amens aliasque graves offendo tenebras” ) . C'est là un point qui mérite d'être souligné : le mouvement dialectique qui , dans les livres composés par Augustin , entendait conduire “ du corporel à l’incorporel” ne relève donc pas d'une intention personnelle, comme on le croit généralement, mais vient de Varron lui - même » ( Solignac 13 , p . 122 ) . Cette interprétation paraît confirmée par un passage de Claudien Mamert ( C 132 ) selon lequel Varron cherche à « tirer l'âme du visible à l'invisible , du localisé au non localisé, du corporel à l'incorporel, et à rendre puissante cette âme qui s'est dispersée dans les corps, c'est - à -dire dans ce qui est contraire à sa nature » (De statu animae, II 9, cité et traduit par Solignac, p . 122 n . 26 ) . La thèse de l'influence de Varron sur le projet encyclopédique d'Augustin fut contestée par I. Hadot. Selon elle , l'entreprise reposait sur des idées néoplatoni ciennes , qui constituent la source principale du traité sur les arts libéraux du livre II du De ordine ( Hadot 7 , p . 101 sq. ) . Dans cette perspective, l'auteur tente

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de montrer que le livre que Licentius a essayé de lire est une cuvre de Varron qui traitait seulement de musique , « cuvre dont on ne peut savoir ni si elle était composée d'un ou de plusieurs volumes, ni si , oui ou non , elle faisait partie des Disciplinarum libri » ( ibid. , p. 185 ) . L'étude de I. Hadot eut « une importance décisive pour rouvrir une question qui semblait désormais s'être figée dans la communis opinio de la dérivation de l'encyclopédie augustinienne à partir de celle de Varron » (Cutino 18 , p . 29 ) . Reprenant l'examen de cette question , D. Shanzer « réitère la conclusion que le livre difficile de Varron avait tout au moins pour matière la musique , la géométrie et l'astronomie et qu'il ne consistait pas seulement dans un traité de musique » ( Shanzer 17 , p. 138 ) . Les travaux d’U . Pizzani confirment d'autre part que Licentius se réfère aux « Disciplinarum libri » de Varron , et plus précisément à la section consacrée aux sciences mathématiques du futur « quadriuium » ( cf. Pizzani 10 et plus généra lement, sur le lien entre Augustin et Varron, Pizzani 9) . EMMANUEL BERMON . LICINIUS

CRASSUS (L. LICINIUS -) (C 198]

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Ia

Cet esclave de l'acteur Ésope est mentionné par Cicéron dans une lettre à son frère Quintus ( I 2 , 14) , datée de 59a, qui constitue l'unique témoignage à son sujet. Après s'être enfui, il a séjourné à Athènes chez le philosophe épicurien Patron , en se faisant passer pour un homme libre. Il se rend ensuite en Asie où Platon de Sardes, un autre épicurien, le fait arrêter et emprisonner à Éphèse. Cicéron écrit alors à son frère pour qu'il assure le retour de l'esclave auprès de son maître. Ces indications montrent donc clairement les liens de Licinus avec les milieux épicuriens. Cf. F. Münzer, art. « Licinus » 3 , RE XIII 1 , 1926, col. 502-503 . MICHÈLE DUCOS . 57 LICYMNIOS DE CHIOS RE

va

Le nom de Licymnios apparaît trois fois dans le livre III de la Rhétorique d'Aristote (1405 b 6-8 , 1413 b 12-14, 1414 b 15-18 ) ; dans la deuxième de ces occurrences, le Licymnios dont il s'agit est rangé parmi les auteurs de dithy rambes , alors que dans la troisième il s'agit de l'auteur d'un manuel de rhétorique. On considère cependant depuis 1 L. Spengel, Evvaywyn TÉXVWV sive Artium scriptores ab initio usque ad editos Aristotelis De rhetorica libros, Stuttgart 1828 ( réimpr. Osnabrück 1974 ) , p . 91 , qu'il s'agit d'un seul et même personnage. Spengel 1 , suivi par 2 E.M. Cope, « On the Sophistical Rhetoric » , The Journal of Classical and Sacred Philology, 3 , 1857, p. 253-288 , cit. p. 255 , fonde cette identification sur le reproche même fait par Aristote (Rhet. III 13 , 1414 b 15-18 ) au Licymnios auteur d'une Techné, d'avoir créé des termes métaphoriques et poétiques pour désigner certaines parties d'un discours : cela dénoterait chez le théoricien de la rhétorique une inclination pour la poésie qui rend tout à fait plausible qu'il soit en même temps auteur de dithyrambes. On connaît d'ailleurs, ajoutent Spengel 1 et Cope 2, d'autres exemples de poètes ayant touché à la rhétorique, tels Empédocle ( » E 19) ou Événos de Paros. Même si elle n'est parfois adoptée

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qu'avec réserves (voir récemment 3 GGP, Antike 2/1, p. 44 ), cette identification n'a jamais été réellement remise en question. part l'origine mentionnée par Athénée ( XIII , 603 D ), à savoir l'île de Chios, on ne connaît rien de la biographie de Licymnios. Denys d'Halicarnasse (Lysias, II 3 , 4 ) le compte , avec Polos, parmi les ouvovoLaota de Gorgias (2G 28 ) , terme qui , depuis Xenophon (Mémorables, I 6, 1 ), sert à désigner les disciples d'un maître . La Souda , s.v. Nos, indique que Polos fut son maître . Hermias d'Alexandrie, dans son commentaire du Phèdre de Platon (p. 239, 12 Couvreur), ainsi qu'une scholie se rapportant à un passage de ce dialogue (p. 87 Greene, ad Phaedrum 267 c 2 ) donnent au contraire Licymnios pour le maître de Polos , à qui il aurait enseigné la division des noms en « propres, composés, apparentés, appositions, et beaucoup d'autres » . Selon Cope 2, p. 255 , le rapport de maître à élève entre Licymnios et Polos ne serait que le fruit d'une déduction à partir du passage même que commentent Hermias et le scholiaste : Tà de Πώλου πώς φράσωμεν αυ μουσεία λόγων [... ] ονομάτων τε Λικυμν ων [Λικυμνε ων Spengel ] & εκε νω εδωρήσατο προς το ησιν ευεπε ας; ( « Et, de Polos , comment expliquerons - nous les recueils d'expressions et de termes licymniens qu'il lui offrit (scil. à Licymnios) à cause de la ſou : à titre de] composition d'un Art de bien dire ? » ) . Suivant la façon dont on comprend à la fin de cette phrase la préposition npóc , on attribue à Licymnios ou à Polos l'etene a dont il est question . Aristote (Rhet . III 13 , 1414 b 15-18 ) lui attribue une Techné (manuel de rhétorique ), et Athénée (loc. cit. ) , des Dithyrambes d'Argynnos. Selon Aristote ( loc. cit.), Licymnios usait dans sa Techné d'une terminologie « vide et dépourvue de sens » , faute, semble - t- il, d'affecter un nom à une espèce ou à une différence. Les exemples allégués par Aristote sont énoúpwolç ( hapax que l'on interprète comme « coup de vent favorable » ) , ånonlávnoug ( « divagation » ) et őçol ( « rameaux » ou « næuds » ), métaphores dont la signification proprement rhétorique reste incertaine. Se fondant sur les explications d'un commentateur anonyme du XIIe siècle ( CAG XXI 2, p. 227 , 34 sqq. Rabe ), Spengel 1 , p. 90 , a proposé une correction selon laquelle « Licymnios appelle énoúpwoic la répétition (énavárnouc), et la digression (únorávnouc), rameaux ( oCouc)». À quoi Cope 2, p . 257 , objecte qu'on ne voit guère comment la métaphore d'un « vent favorable » peut exprimer l'idée d'une répétition, et préfère comprendre, comme l'anonyme , qu'elle désigne plutôt les moyens auxiliaires dont peut user l'orateur pour renforcer sa cause. En tant qu'auteur de dithyrambes, Licymnios est rangé par Aristote (Rhet. III 12 , 1413 b 12-14 ) parmi les poètes « dont les euvres se prêtent à la lecture » ( åvayvuotixo ) . Aristote le cite également pour avoir dit que c'est dans le son ou dans le sens que réside la beauté d'un mot (Rhet. III 2, 1405 b 6-8 ) . Éditions . Les fragments concernant la rhétorique sont rassemblés dans 3 L. Radermacher (édit . ) , Artium scriptores. Reste der voraristotelischen Rhetorik , Wien 1951 , p . 117-119 ; les fragments poétiques, dans 4 D. L. Page ( édit . ) , Poetae melici graeci, Oxford 1962 , fr. 768-773 , auxquels il faut ajouter 5 A. Henrichs , « Ein neues Likymniosfragment bei Philodem » , ZPE 57 , 1984, p. 53-57 .

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Études. Cope 2 , p. 255-257 . 6 K. Aulitzky, « Likymnios von Chios » , RE XIII 1 , 1926 , col. 541 ; 7 E. Robbins, « Likymnios [2 ] » , NP VII 1999, col. 190. MICHEL NARCY 58 LINUS DE THÈBES RE 1 Poète mythologique et cosmologue , cité dans le Répertoire des philosophes d'Hippobote (Diogène Laërce I 42 = fr. 6 Gigante ). Ses fragments sont rassem blés dans 1 M. L. West, The Orphic Poems, Oxford 1983 , p. 56-67. Diogène Laërce I 4 , qui dépend probablement de l'ouvrage Sur les poètes de Lobon d'Argos [ PL 60 ] ( cf. I 34 et I 112 ; Suppl. Hell. fr. 504-526 ), lui attribue « une Cosmogonie, le parcours du soleil et de la lune , ainsi que les origines des animaux et des fruits » , dont il cite le premier vers, disant qu'il fut un temps où toutes les choses étaient ensemble . ( Sur les informations tirées de Lobon , voir 2 Valentina Garulli, Il Nepi nointāv di Lobone di Argo, coll . « Eikasmos » 10, Bologna 2004 , 220 p. ) La même idée se retrouve dans un fragment de treize lignes cité par Stobée I 10 , 5 , tiré de A vou éx tõv ſlepi púoewÇ xóquov (de Linus Sur la nature du cosmos) . La thèse qu'il expose , selon laquelle toutes les choses sont une , est mentionnée comme une doctrine de Linus et de Pythagore par Damascius, De princ . , fol. 25 bis , 27 (t. I , p . 67 , 14 et 72 , 13 Westerink Combès ; I 45 , 12 ; 48 , 13 Ruelle) . Le terminus ante quem de la composition du poème est l'année 150 av . J.-C. ( utilisation par Diogène de Babylonie [ D 146 ) : West 58 ) . Le Pseudo - Jamblique , Theol. arithm ., p. 67 , 2 De Falco , cite, du second livre d'un discours théologique de Linus le théologien adressé à Hyménaeus, un extrait où l'on parle des quatre éléments , tenus ensemble par trois médiétés ( cf. Macrobe, in Somn. Scip. I 6 , 36-39 : les médiétés sont Necessitas, Harmonia et Oboedientia ). Selon West 1 , p . 59 , il s'agit du poème sur la nature du cosmos . Stobée III 1 , 70 , cite dix autres vers du ſlepì púoewÇ xóquov , qui proviennent cependant, selon West 1 , d'un poème différent. A Linus les pythagoriciens attribuaient des vers qui étaient probablement en réalité de leur composition ; c'est ce qu'affime Jamblique, V. pyth. 28 , 139 , p . 7 , 7-10 Deubner, qui cite deux de ces vers : « il faut tout espérer, puisque rien n'est inespéré ; il est facile au dieu de faire toutes choses , il n'est rien qui ne se puisse accomplir » . Les deux vers sont cités par Stobée IV 46 , 1 sous le lemme: du poète Linus. Pausanias VIII 18 , 1 connaît des ouvrages de poésie attribués à Linus, qu'il considère comme inauthentiques. La Souda parle d'un Linus qui fut philosophe chez les Thébains ( A 572 , t , III , p . 273 , 17 Adler) . BRUNO CENTRONE .

59 LIVIUS ( TITUS ) RE 9 Historien romain .

Ia /I

Éditions. CUF : l'édition est en cours depuis 1 J. Bayet et G. Baillet, Tite - Live Histoire Romaine, Livre 1, Paris, 1re éd. , 1940 ; pour les fragments, 2 P. Jal, Tite -Live,

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LIVIUS ( TITUS)

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Histoire romaine, Livre XLV . Fragments, Paris 1979 ; pour les Periochae 3 P. Jal , Abrégés des livres de l'histoire romaine de Tite - Live, 2 vol., Paris 1984 . OCT : 4 R.M. Ogilvie, t . I , Titi Livi ab urbe condita libri 1 - V , Oxford 1974 ; 5 R. S. Conway , C.F. Walters , t. II , libri VI- X , 1919 ; 6 t. III , libri XXI - XXV , Oxford , 1929 ; 7 R.S. Conway , S.K. Johnson , t . IV , Libri XXVI-XXX , 1935 ; 8 A.H. Mc Donald , t . V , Libri XXXI-XXXV, 1965 ; 9 P. G. Walsh , t . VI , Libri XXXVI - XL, 1999. BT : 10 W. Weissenborn - M . Müller, W. Heraeus Livius Ab Vrbe condita libri I - X , Leipzig , 1887-1908 ; 11 T. A. Dorey XXI-XXII, Leipzig 1971 ; 12 libri XXIII - XXV, Leipzig 1976 ; 13 P. G. Walsh , libri XXVI- XXVII, Leipzig 1982 ; 14 libri XXVIII-XXX , Leipzig 1986 ; 15 J. Briscoe, libri XXXI- XL , Stuttgart 1991; 16 Libri XLI-XLV, Stuttgart 1986. Éditions commentées. 17 W. Weissenborn , H. J. Müller, Titi Livi ab Urbe Condita libri, Weidmann , Berlin 1880 , 10 vol . réimpr. 18 R.M. Ogilvie, A Commentary on Livy, Books 1-5, Oxford, 1965 , 3e éd .; 19 S.P. Oakley, A Commentary on Livy, Books VI- X, Vol . I , Introduction and Book VI, Oxford, 1997 (copieuse introduction ) Vol . II , Books VII and VIII, Oxford 1998 ; 20 J. Briscoe, A Commentary on Livy, Books XXXI- XXXIII, Oxford, 1993 ; 21 A Commentary on Livy, Books XXXIV -XXXVII, Oxford 1981 . Concordance . 22 D. W. Packard, A concordance to Livy, 4 vol . , Cambridge, Mass. 1968 . Bibliographies . 23 W. Kissel , « Livius 1933-1978 : Eine Gesamtbiblio graphie » , ANRW II 30, 2, 1982 , p. 899-997 ; 24 J.E. Phillips, « Current Research on Livy's First Decade : 1959-1979 » , ANRW II 30, 2 , 1982 , p . 998-1057. Études. 25 J.-E. Bernard, Le portrait chez Tite -Live. Essai sur une écriture de l'histoire romaine, coll . « Latomus » 253 Bruxelles 2000 , 482 p .; 26 H. Bornecque, Tite - Live, Paris 1933 , 216 p. ; 27 E. Burck (édit. ) Wege zu Livius, 2e éd . , Darmstadt 1977 , VIII-544 p. ; 28 J.D. Chaplin, Livy's Exemplary History, Oxford 2000 , 245 p . ; 29 A. Feldherr, Spectacle and Society in Livy's History, University of California Press, Berkeley/ Los Angeles/London 1998 , 251 p . ; 30 M. Jaeger, Livy's written Rome, University of Michigan Press, Ann Arbor 1997 , 205 p. ; 31 A. Klotz, art. « T. Livius » , RE XIII 1 , 1926, col. 816 853 ; 32 T.J. Luce, Livy : the composition of his History, Princeton 1977 , 322 p.; 33 G. B. Miles, Livy. Reconstructing Early Rome, Cornell University Press, Ithaca/London 1995 , 251 p . ; 34 P. G. Walsh , Livy, his historical aims and methods, Cambridge 1961 , 301 p.

Biographie. Nous savons peu de choses sur la vie de Tite-Live . Né en 59a ( selon la chronique de Jérôme, Ad Eus . Chron . an . 1858 ) ou 64a ( selon 35 R. Syme , « Livy and Augustus» , HSP , 64, 1959 , p . 27-87 ; Walsh 34 , p. 2 ) , il est originaire de Padoue et a reçu (à Rome ? à Padoue ? selon Walsh 34, p . 3 ) la formation littéraire et rhétorique qui était celle du jeune Romain . Il ne s'est pas tourné vers une carrière politique ou militaire, mais s'est consacré à la littérature et l'histoire en partageant son temps entre Rome et Padoue . La rédaction de son cuvre historique commença avec le début du principat entre 27a et 25a ( mais la discussion n'est pas close sur ce point; Syme 35, p . 42-50, suggère une date

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LIVIUS (TITUS)

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proche de 31 ; 36 T.J. Luce, « The Dating's of Livy First Decade » , TAPHA 96 , 1965 , p. 209-240, une première publication antérieure à 27 ) . Ses liens avec Auguste et sa famille sont connus (Liv . IV 20, 7 où est citée l'opinion d'Auguste sur A. Cornelius Cossus; Tac . Ann . IV 34 ) ; il poussa l'empereur Claude, dans son adolescence, à écrire un récit historique ( Suétone, Claud. 41 , 1 ) . Il meurt en 17 , au début du règne de Tibère ( Jérôme, Ad Eus . Chron . an . 2033 ) . Son Histoire romaine (Ab Urbe condita libri) retraçait l'histoire de Rome depuis les origines et la fondation jusqu'à son époque. Elle comptait cent quarante -deux livres et s'arrêtait à la mort de Drusus en 9a ; mais l'œuvre ne nous est pas parvenue dans sa totalité . Subsistent les livres 1 à X (des origines à 293 ), XXI à XLV (de la seconde guerre punique au triomphe de Paul- Émile en 1679 après sa victoire de Pydna ). Des autres livres nous ne possédons que des abrégés (periochae) et quelques fragments (dont la mort de Cicéron , passage transmis par Sénèque le Père). L'ouvre était précédée d'une préface que nous avons conservée , où Tite - Live exposait ses choix et sa conception de l'histoire . Cette æuvre pose de nombreux problèmes concernant l'identification des sources et leur utilisation : l'enquête a été menée systématiquement pour les rapports de Tite-Live et de Polybe (37 F. W. Walbank, A Historical Commentary on Polybius, Oxford , t . I , 1957 , XXVIII -776 p. , t . II , 1967 , XV- 682 p . , t . III , 1979 , XXI- 834 p . ; 38 Id . , Polybius, Berkeley /Los Angeles/London 1972 , ix - 201 p .; 39 H. Tränkle, Livius und Polybius, Basel/Stuttgart 1977 , 254 p . ) pour les annalistes ou Caton ; une seconde question concerne les liens de Tite -Live avec la politique et l'idéologie augustéenne . Il convient enfin de s'interroger sur la conception livienne de l'histoire. Nous savons philosophiques « dialogues que (dialogos quos

par Sénèque ( Epist. 100, 9 ) que Tite - Live avait écrit des traités (ex professo philosophiam continentes libros ) et aussi des l'on peut rattacher tout autant à la philosophie qu'à l'histoire » non magis philosophiae adnumerare possis quam historiae ).

Cette indication fait apparaître l'importance de la philosophie pour l'historien ; les « dialogues philosophiques et historiques » laissent penser à une « mise en æuvre de l'histoire en un sens philosophique » ( Bayet 1 , « Tite - Live et son @uvre » , Introduction , p . X ) et sont à rapprocher du De re publica de Cicéron : Tite - Live aurait « traité sous forme de dialogues de problèmes de philosophie historique » ( Bayet 1 , ibid .). Certes, dans son histoire romaine , il s'efface derrière son æuvre en s'inter disant les digressions et les commentaires personnels, mais cela n'exclut pas une réelle présence de la philosophie . L'influence du stoïcisme a souvent été mise en avant (40 P.G. Walsh , « Livy and stoicism » , AJPh 79, 1958 , p. 355-375 ) : on la trouverait dans une conception du destin ( cf. 41 I. Kajanto, God and Fate in Livy, Turku 1957 , 100 p. ) suggérant une puissance active travaillant à un but déterminé, la grandeur de Rome ; ou encore dans les expressions où l'historien souligne la force inexorable du destin ( VIII 7 , 8 : inexsuperabilis uis fati; XXV 6 , 6 : fato cuius lege immobilis rerum humanarum ordo seritur) . A ce détermi nisme il faut ajouter le rôle de la fortuna. Mais ce déterminisme n'a rien d'absolu ; si le destin de Rome est fixé dans ses grandes lignes , dans sa réali

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sation , il comporte des erreurs ou des retours en arrière montrant que les individus ont leur rôle à jouer. L'historien ne semble donc pas reprendre la conception stoïcienne du destin . Pour ce qui est de la religion, il refuse la « négligence envers les dieux » ( XLIII 13 , 1 ) et les systèmes philosophiques qui les éliminent ( X 40 , 10 ) ; la valeur politique de la religion ne lui échappe pas, comme l'indique son interpré tation de l'action religieuse de Numa (I 19 , 4) et toute l'æuvre montre l'impor tance de la pietas ; mais, en même temps , Tite -Live fait apparaître les excès de la superstition ; il souligne la crédulité de ceux qui ajoutent trop rapidement foi aux prodiges ( XXI 62 , 1 ; XXIV 10, 6 ) ; il se défie des légendes trop merveilleuses, des faits trop miraculeux : au moment de la prise de Véies , il refuse de se pro noncer sur des faits trop extraordinaires : « dans des faits si anciens, je serais satisfait si le vraisemblable était tenu pour vrai ; quant à ces contes plus confor mes à la mise en scène théâtrale, amie du merveilleux, qu'à la vérité historique, ils ne valent la peine ni d'être confirmés ni d'être réfutés » ( V 21 , 9 ) . Il existe bien d'autres exemples de ce « rationalisme sceptique » pour reprendre l'expres sion de Jean Bayet (42 D. S. Levene, Religion in Livy, coll . « Mnemosyne » 127 , Leiden 1993 , XI - 257 p . ) où l'on voit souvent l'influence du scepticisme de l'Académie ( voir 43 J.-M. André , Le siècle d'Auguste , Paris 1974 , p . 147 , qui rapproche du De natura deorum ). D'une manière générale, l'utilisation des sources révèle la même tendance : dans son récit, Tite - Live reprend souvent les faits sans les confirmer ni les infirmer; au mieux , il indique quelques divergences entre ses sources. Il accepte une tradition qui a pour elle l'accord du grand nombre . Cette attitude suppose toute une réflexion sur le vrai et le vraisemblable ( sur ce probabilisme, voir André 43, p. 148 ) . Tite - Live est particulièrement attentif au rôle des hommes : « ce qu'il faut selon moi , étudier avec toute l'ardeur et l'attention dont on est capable , c'est la vie et les meurs d'autrefois, ce sont les grands hommes et la politique intérieure et extérieure qui ont agrandi l'empire » (Praef. 9) . L'histoire est pour lui source d'exempla : « on y trouve pour son bien et celui de son pays des modèles à suivre ; on y trouve des actions honteuses tant par leurs causes et leurs consé quences qu'il faut suivre » (Praef. 10 ; voir Chaplin 28 ) . Ainsi s'expliquent l'attention portée aux vertus et aux vices des individus et l'accent mis sur la morale dans les conduites humaines . Tite-Live fait place à des vertus (qui sont aussi des valeurs romaines) : uirtus, pietas, fides, clementia (Walsh 34 , p . 66-67 ; Bernard 25 , p . 270-280 ; 44 T.J. Moore, Artistry and Ideology : Livy's Vocabu lary of Virtue, Frankfurt 1989 , qui constitue avant tout une étude du vocabulaire, sans analyse des questions philosophiques) . Il faut enfin souligner la place que Tite-Live fait aux sentiments , aux passions et à la psychologie (45 M. Ducos , « Les passions, les hommes et l'histoire dans l'æuvre de Tite Live » , REL 65 , 1987 , p. 132-147 ) : elle s'insère dans une réflexion sur la causalité historique où de « petites causes » peuvent entraîner de grands bouleversements ; elle révèle aussi une conception de l'âme humaine qui associe un élément irrationnel et un élément rationnel (consilium ) capable de modérer et d'ordonner ces élans. Un tel dualisme éloigne Tite-Live de l'ancien stoïcisme pour le rapprocher de la tradition académique et de Cicéron ( Ducos 45 , p. 144 ). Il faut considérer que l'æuvre livienne révèle l'influence de l'Académie : le scepti

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LOBON D'ARGOS

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cisme, la recherche du probable dans l'exposé des faits, la représentation de l'âme humaine conduisent à cette conclusion. Elle trouve une confirmation dans les nombreux parallèles qu'il est possible de tracer avec l'œuvre de Cicéron : la réflexion sur la cité et le pouvoir renvoient souvent à la philosophie politique et juridique cicéronienne , bien que cet aspect n'ait pas suffisamment retenu l'attention .

MICHÈLE DUCOS . 60 LOBON D'ARGOS RE

?

Auteur d'un ouvrage intitulé Sur les poètes ( ſlepi pointāv ) dans lequel il parlait des ( Sept) Sages de la Grèce et peut -être de quelques philosophes poètes comme Empédocle et Xénophane. Éditions des fragments. 1 W. Crönert, « De Lobone Argivo » , dans XAPITEE Friedrich Leo zum 60. Geburtstag dargebracht», Berlin 1911 , p. 123 145 ; nouvelle édition plus restrictive par 2 Valentina Garulli, Il Tepi nointāv di Lobone di Argo, coll . « Eikasmos » 10, Bologna 2004, 220 p. (où l'on retrouvera également toute l'histoire de la recherche antérieure : p. 13-42 ) . Pour les pièces poétiques, voir également 3 H. Lloyd -Jones et P. Parsons, Supplementum Hellenisticum , coll . « Texte und Kommentare >> 11 , Berlin 1983 , nºs 502-526 , p . 251-257 ; pour les " chants" 4 E. Pellizer et G. Tedeschi , « Sei carmi conviviali attribuiti ai sette sapienti » , dans K. Fabian , E. Pellizer et G. Tedeschi ( édit . ) , OINHPA TEYXH . Studi triestini di poesia conviviale, Alessandria 1991 , p . 187 210 ( antérieurement publié dans QFC 3 , 1981 , p . 5-24 ) ; Cf. 5 W. Kroll, art. « Lobon von Argos » , RE XIII 1 , 1926 , col . 931-933 ; 6 R. Goulet, « Les références chez Diogène Laërce : Sources ou autorités ? » ( 1997 ) , repris dans Études sur les Vies de philosophes, p . 79-96 , notamment p. 92-94 ; 7 Id . , Diogène Laërce, Vies et doctrines des philosophes illustres. Traduction française sous la direction de M.-O. Goulet -Cazé, Paris 1999, p. 58 60 . Le titre de l'ouvrage n'est cité explicitement que dans la vie d'Épiménide de Diogène Laërce ( I 111-112 = fr. 8 Garulli) où un détail d'ordre biographique est précédé d'une liste d'écrits du Sage en vers et en prose , mais Lobon est égale ment mentionné dans la vie de Thalès ( I 34-35 = fr. 1 Garulli). Dans ce passage de D. L. I 34, 8 V. Garulli, « Talete di Mileto fra Timone e Lobone (Diog. Laert. I 34 )», Eikasmos 15 , 2004, p. 261-271 , propose une reconstitution intéressante du texte en respectant la leçon du manuscrit de Naples (B , mais aussi P avant correction ) et la version latine du Pseudo- Walter Burley (αστρονομήματα corrigé dans P ' en αστρονόμημα. τά ) . II faudrait lire le vers de Timon de Phlionte de la façon suivante : οίόν θ' επτά Θάλητα σοφών σοφόν κάστρονομούντα > , puis la phrase relative a Lobon : αστρονομήματα δε γεγραμ μένα υπ' αυτού φησι Λόβων ο Αργείος είς έπη τε νειν διακόσια κτλ. Sur B , voir 9 T. Dorandi, « Remarques sur le Neapolitanus III B 29 (B ) et sur la composition des Vies des philosophes de Diogène Laërce » , RHT 32, 2002 , p. 1-23 ; sur la traduction latine du Pseudo Burley qui dépend sans doute de B , voir 10 Id ., « La versio latina antiqua di Diogene Laerzio e la sua recezione nel Medioevo occidentale : il Compendium moralium notabilium di Geremia da Montagnone et il Liber de vita et moribus philosophorum dello ps. Burleo » , DSTFM 10, 1999, p. 371-396 .

En D. L. I 34 , la succession de trois infinitifs ( TE VELV ... Éniyeypápeal... elval) suggère que Lobon avait fourni à Diogène , à propos de Thalès, trois informations : (a) le nombre de vers (Énn ) attribués à Thalès, (b ) un distique écrit

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LOBON D'ARGOS

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sur sa statue ou son image ( Énì tñs eixovoc ) , ( c ) quelques vers tirés des " chants ” ( symposiaques ) qu'il avait composés. Ces trois informations ont été considérées par les éditeurs comme des sigilla Lobonis permettant de retrouver sa trace ailleurs chez Diogène Laërce, mais aussi chez d'autres auteurs. Diogène Laërce signale en effet, à propos de plusieurs des Sept Sages canoniques, mais aussi des autres Sages dont il parle (en plus de Thalès I 34 , Solon I 61 , Chilon I 68 , Pittacos I 79, Bias I 85 , Cléobule I 89 , Périandre I 97 , Anacharsis I 101 , Épiménide I 111 ) , de même qu'à propos d'Empédocle ( VIII 77 ) et Xénophane ( IX 20 ), ( a) des titres d'ouvrages poétiques ou du moins le genre littéraire dans lequel ils se sont illustrés, toujours en précisant le nombre de vers en chiffres ronds : 200 , 5000 , 200, 600 , 2000 , 3000 , 2000, 800 , 5000 , 6500 , 4000, 5000 , 600, 2000. Les vies des trois premiers Sages comprennent (b ) la citation d'un distique élégiaque inscrit sur leur portrait (Thalès I 34, Solon I 62 , Chilon I 73 ). Diogène cite de même les inscriptions funéraires ( également un distique ) qui figuraient sur la tombe de cinq Sages (Thalès I 39 , Pittacos I 79 , Bias I 85 , Cléobule 1 93 , Périandre I 96) . Garulli 2, p. 8 , regroupe ces deux types différents d'inscriptions sous un même thème : « Versi presentati come incisi su un monumento » . Enfin les vies des six premiers Sages contiennent (c) les citations des chants attribués à chacun ( Thalès I 35 , Solon I 61 , Chilon I 71 , Pittacos I 78, Bias I 85 et Cléobule I 92 ) . Selon Garulli 2 , p . 135-139, il s'agirait de skolia gnomiques pouvant remonter au Ve siècle av. J.-C. et empruntés par Lobon à un Banquet des Sept Sages perdu . Sur ce matériel , on se reportera à l'édition critique de Pellizer et Tedeschi 4. L'homogénéité du matériel relevant de ces trois topiques dans l'ouvrage de Diogène Laërce permet donc de rattacher ces différentes informations à l'ouvrage de Lobon d'Argos . Une analyse métrique, stylistique et thématique approfondie des distiques ainsi regroupés et la prise en compte de la tradition de la poésie épigrammatique littéraire et épigraphique amène Garulli 5 , p. 70-103 , à établir l'homogénéité littéraire et le caractère livresque de ces épigrammes et à en attribuer la composition à un unique poète qui pourrait, selon elle , être Lobon lui - même . Elle considère en revanche que les " chants" également cités par Lobon seraient, eux , des skolia symposiaques du Ve siècle avant J.-C. Selon Garulli 2 , p . 147-148 , l'ouvrage de Lobon s'inscrirait dans une tradi tion principalement péripatéticienne d'intérêt pour les Sept Sages , dont dépen daient également les Vies des Sept Sages d'Hermippe de Smyrne ( H 86) . Cette tradition pinacographique et biographique développée à Alexandrie se retrou verait chez Lobon, mais dépourvue de rigueur scientifique, dans le cadre d'une littérature de divertissement ( ibid. , p. 149-162 ) . « Il milieu più probabile in cui collocare il lepì trointõv pare , in conclusione, quel settore della biografia di consumo di ispirazione peripatetica, sul quale si fa sentire l'influenza del feno meno pinacografico callimacheo, ma che da questo resta relativamente distante , in quanto sostanzialmente estraneo ai suoi principi metodologici e alla sua destinazione scientifica » (Garulli 2, p. 161-162 ) . RICHARD GOULET.

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LONGINUS (C. CASSIUS -)

61 LONGINIANUS RE 2 PLRE II :

mort en 408

Correspondant d'Augustin (Epist. 233-235 [ PL 33 ) , après 395 ) . Il se présente comme un prêtre païen ( cf. Epist. 234, 1 : a pagano homine ; Epist. 234 , 2 : ut mea expetunt sacerdotia ) et expose sur Dieu , le Christ, le bonheur ou le salut un point de vue néoplatonicien qui s'appuie sur les enseignement de Socrate , mais aussi d'Orphée, de Tagès, lequel aurait révélé aux Étrusques la science des haruspices ( sur Tages , voir Cicéron , De divinatione II 50 ) et du Trismégiste , formulés avant même que l'Europe, l'Asie ou l'Afrique ne reçoivent leur nom ( Epist. 234, 1 ) . On trouve le texte latin et une traduction italienne annotée de ces trois lettres dans Sant'Agostino, Le Lettere, t . III : < Lettere > 185-270 . Testo latino dell'edizione Maurina confrontato con il Corpus Scriptorum Ecclesiasti corum Latinorum . Traduzione et note di L. Carrozzi, Roma 1974 , p. 742-755 . Dans sa réponse à Longinianus (Epist. 235 , 2 ) , Augustin essaie de montrer que la perfection morale qui mérite l'approbation divine rend inutile les rites ancestraux de purification recommandés par son correspondant. A. Chastagnol, Les Fastes de la Préfecture de Rome au Bas-Empire, Paris 1962 , p. 255 257 ( reprenant une suggestion de Lenain de Tillemont), a identifié le Longinianus d'Augustin à Fl. Macrobius Longinianus qui fut Préfet du prétoire des Gaules (en 402), puis d'Italie au début du ve siècle. Ce Longinianus, qui fut tué en 408 , fut également un correspondant de Symmaque (Epist. VII 93-101 ). Voir l'éd. de J.-P. Callu , Symmaque, Lettres, tome III (Livres VI-VIII ), CUF, Paris 1995 , p. 92-97 . Pour la carrière de ce haut- fonctionnaire, voir la notice de la PLRE II et celle de la PCBE II , 2000 , t. II, p. 1310-1311 . Cf. P. Mastandrea, « Il Dossier Longiniano nell'epistolario di sant'Agostino (epist . 233-235 ) » , StudPat 25 , 1978 , p . 523-540 . RICHARD GOULET. 62 LONGINUS ( C. CASSIUS-) RE 59

7-42a

Sa carrière débuta par des exploits militaires ( voir 1 M. Dettenhofer, Perdita luventus. Zwischen den Generationen von Caesar und Augustus, München 1992 , p . 123-127 ) : questeur en Syrie sous Crassus, il commandait une aile de l'armée romaine à Carrhes en 53 (MRR , 2, p. 229) . Proquesteur en Syrie en 52-51 , il se battit avec succès contre les Parthes (MRR , 2, p . 237 et 242. Cf. Att. V 18 , 1 ; Fam . XV 14, 2-4 ; surtout Fam . II 10 , 2 et Att. V 20 , 3 ) . De retour à Rome , il se signala par son opposition à César : tribun de la plèbe en 49 (MRR , 2 , p. 259 et 2 E. S. Gruen , The Last Generation of the Roman Republic, Berkeley 1974 , p. 182 ) , il embrassa le parti de Pompée dès le début de la guerre civile ( cf. Att. VII 21 qui rapporte la mission de Cassius à Capoue auprès des consuls et Att. VII 23 , 1 ). Cassius fut préfet de la flotte pompéienne en 49-48 (MRR , 2, p. 270 et 283 ) , étant plus particulièrement chargé de l'escadre syrienne ( Caes., Bell. Ciu . III 5 , 3 ) . Il appartenait en fait au camp des Optimates ralliés à Pompée contre César et s'était manifesté dans sa jeunesse par son opposition à Sylla. Ses alliances familiales sont conformes à ces choix : il épousa une des Iunia, Tertia, ce qui le rapprocha de Brutus avant même le moment où ce dernier devint le chef des Optimates. Peu après Pharsale, et sans connaître alors la défaite de son camp, Cassius fit une opération contre la flotte césarienne basée en Sicile ( cf. Caes., Bell. Ciu . III 101 ) . Il se replia ensuite à Rhodes avec d'autres

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pompéiens, puis pensa se diriger vers Alexandrie ( cf. Cic . , Att. XI 13 , 1 et Att . XI 15 ) . Après la défaite des pompéiens, César fit de Cassius un de ses lieute nants ( voir MRR , 2, p. 290 et 300, cf. Cic . , Fam . VI 6, 10 ) en 47-46, sans le rallier pour autant à sa cause, puisqu'il fit partie du petit nombre qui refusa de voter les décrets en l'honneur de César (cf. D.C. , 44, 7 ) . 3 F.X. Ryan , « Die Ädilität des Attentäters Cassius » , Arctos 33 , 1999, p . 145-154, considère à partir d'une allusion de Plutarque ( cf. Plut . , Brut. 8 , 6) qu'il fut édile curule en 47 ou édile en 46. On le retrouve en compagnie de Dolabella auprès de Cicéron ( cf. Fam . VII 33 , 2) , à Rome en 46. Il ne fit pas la campagne d'Espagne, restant à Brindes ( cf. Cic . , Fam . XV 17,4 ) . César lui accorda la préture pérégrine en 44 (cf. MRR , 2 , p. 320 ) , et le fit nommer consul désigné avec Brutus pour l'année 41 . Les motifs que pouvait avoir Cassius d'assassiner César sont sans conteste difficiles à éclaircir. On a dit la violence du personnage ( cf. Cic . , Att. XV 11 , 2), les blessures d'amour-propre devant la préférence de César pour Brutus, ce qui constituait un frein à sa carrière. On peut également penser qu'une fois écartée la menace que représentait Cn . Pompée , la dictature de César était redevenue insupportable à Cassius. Il est considéré comme la tête du complot des Ides de mars ( cf. Suét . , Caes. 80 ; Plut . , Brut . 8-10 et App . , Bell. Ciu . II 113 ) , auquel il aurait fait participer Brutus ( voir 4 R. Étienne , Les Ides de mars , Paris 1973 , p . 156-157 ) . Après les Ides de mars , Cassius apparut encore une fois comme le plus énergique des deux « Libérateurs » , comme le montre le compte rendu du conseil de conspirateurs du six juin 44 réunissant Cicéron, les deux tyrannicides, leurs épouses respectives et Servilia ( cf. Cic . , Att. XV 11 , 1 ) . Cette lettre offre un portrait pris sur le vif de Cassius: un homme orgueilleux refusant la charge de l'annone en Sicile vue comme une atteinte à sa dignitas et préparant déjà la guerre. Les mots qu'il emploie renvoient à sa condition de nobilis et à son rang dans l'État, ce qui confirme d'une certaine manière l'importance que dut avoir le fait de ne pas obtenir la préture urbaine. Il partit au début de l'année 43 pour reconstituer une armée en Syrie (cf. Fam . XII 4 , 2 ; Fam . XII 5 , 1 ; Fam . XII 11 et ad Brut. II 3 , 3 ) . Il se désigna alors comme proconsul, sans avoir aucun titre officiel au début malgré les efforts de Cicéron ( cf. ad Br. II 4 , 2 et la 11 ° Philippique, voir MRR , 2 , p. 343-344 et 360 ) : son commandement fut légalisé en avril 43. Actif en Syrie et en Palestine en 43 42 , il combattit Dolabella ( cf. Fam . XII 15 , 6-7 et Fam . XII 12 ) au printemps 43 et songea à occuper l'Égypte, mais Brutus le fit venir à Smyrne pour se préparer à combattre Antoine et le jeune César. Il se suicida en 42 à Philippes après le premier engagement ( voir 5 F. Hinard , « Suicide et “belle mort" à la fin de la République » , dans Good Deaths, Bad Deaths . Death , Dying and Burial in the Ancient World, colloque Londres 7-9 juillet 2003, à paraître prochainement dans BICS). Son épicurisme est attesté par quatre lettres de 46-45 (Fam . XV 17 ; XV 18 ; XV 16 et XV 19, voir 6 C.J. Castner , Prosopography, p . 24-31 ) . Il semble que Cassius soit devenu épicurien en 48 ou 47 , soit après Pharsale , et sous l'influence des césariens ( cf. Fam . XV 16 , 3 et Fam .

XV 19 , 3 , voir

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7 M. Rambaud , « César et l'Épicurisme d'après les Commentaires » , Actes du VIII° Congrès de l'Association Guillaume Budé, Paris 1969 , p . 411-435 ) . Le passage suivant de Cicéron est important : « en effet, si tu t'indignes et si tu le prends mal , j'en dirai davantage et je réclamerai que tu sois rétabli dans la doctrine d'où tu as été déloge " par la force armée " . En ce cas , l'interdit n'ajoute pas " avant un délai d'un an " ! En conséquence , même s'il y a déjà deux ou trois ans que , cédant aux appâts de la Volupté , tu as signifié le divorce à la vertu , nous aurons encore pleine liberté d'agir » (Fam . XV 16) . L'opposition entre la uirtus et la uoluptas est assez transparente : la uoluptas désigne bien évidemment l'épicurisme, mais la uirtus pourrait être interprétée comme une qualité stoï cienne ou académicienne. Néanmoins , Cicéron semble s'inspirer ici de la fable de Prodicos que les stoïciens ont plus tard reprise à leur compte , ce qui laisserait pencher la balance du côté de la Stoa ( voir aussi Cic . , Fin . III 29 ) . La réponse de Cassius paraît ne laisser aucun doute sur sa préférence passée pour le stoïcisme (voir 8 D. Sedley , « The Ethics of Brutus and Cassius » , JRS 87 , 1997 , p. 41-53 ) : Difficilest enim persuadere hominibus το καλόν δ ' αυτό αιρετόν esse ; ηδονήν uero et å rapat av uirtute, iustitia, tớ xałợ parari et uerum et probabile est ; ipse enim Epicurus, a quo omnes Catii ( > C 56 ) et Amafinii [ > A 130 ), mali uerborum interpretes, proficiscuntur, dicit : " oux fotiv ndéwç ävev toŨ xalos xal oixa wç bñv. " Ces expressions sont à mettre en parallèle avec l'exposé de Caton dans le De finibus. Au to zaróv correspond l'honestum en latin , dont Caton dit qu'il est à rechercher pour lui - même , cf. Cic . , Fin . III 36 : Omne autem quod honestum sit id esse propter se expetendum , commune nobis est cum multorum aliorum philosophorum sententiis . Ensuite , on doit souligner le fait que Cassius se réfère directement aux textes d'Épicure , en particulier au début dela Maxime Capitale V : Ουκ έστιν ηδέως ζήν άνευ του φρονίμως και καλώς και δικαίως , «ουδε φρονίμως και καλώς και δικαίως > άνευ του ήδέως. ότω δε τούτο μη υπάρχει εξ ου ζην φρονίμως , και καλώς και δικαίως υπάρχει, ουκ έστι τούτον ήδέως ζην . Mais il ne retient en fait du texte grec que ce qu'il veut bien en retenir : l’adverbe opoviuwç est oublié, ne sont gardés que les deux adverbes qui font manifestement référence à l'ensei gnement platonicien . Or, c'est en cela que réside le caractère provocateur de cette maxime qui met sur un même plan le plaisir et les vertus platoniciennes, au moyen d'une argumentation serrée : un système de deux propositions parallèles avec renversement de l'ordre des termes. Comment interpréter alors l'épicurisme de Cassius ? Castner 6 , fidèle à son parti pris initial, se refuse à voir dans cette adhésion autre chose qu’un snobisme propre aux Romains cultivés de cette époque . Ce faisant, elle évacue le problème, sans tenter de le résoudre. 9 M. Dettenhofer, « Cicero und C. Cassius Longinus: politische Korrespondanz ein Jahr vor Caesars Ermordung » , Historia 39, 1990, p. 249-256, et 1 , p . 219-222 , a proposé de comprendre ces lettres comme des messages codés : sous couvert de traiter de l'adhésion de Cassius à l'épicurisme , Cicéron discuterait en fait du ralliement de Cassius à César . Mais cette vision des choses ne s'accorde pas avec la suite de la lettre de Cicéron qui fait allusion à la conduite de Cassius qui demeura hostile au dictateur. La lettre

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de Cassius est, elle aussi , très claire : César demeure à ses yeux un dominus ( Fam . XV 19 , 4 ) . Le dominus est celui qui exerce un pouvoir absolu , tyran ou roi, et fait donc obstacle à la libertas. Cassius utilisa une expression tout aussi dure après les Ides de mars : nequissimus (cf. Fam . XII 2 , 1 ) . 10 A. Momigliano, « Epicureans in Revolt » (recension de l'ouvrage de B. Farrington : Science and Politics in the Ancient World ), JRS 31 , 1941 , p. 149-157 , surtout p. 151 , a consi déré que cette attitude en faveur de la libertas était le produit des convictions épicuriennes de Cassius , mais ce faisant il ignore la continuité de pensée de Cassius : avant et après son adhésion, il reste un nobilis soucieux de sa dignitas et un adversaire de César. D'autre part, il est évident que les épicuriens romains ont fait des choix politiques très différents, ce qui interdit de fixer comme programme politique à ce courant philosophique la défense de la libertas plutôt qu'autre chose . Par conséquent , il n'y a aucune raison de nier ou d'ignorer l'épicurisme de Cassius : il était probablement un épicurien sincère. La correspondance de Cicéron révèle surtout une sorte de synthèse entre épicurisme et stoïcisme assez représentative d'une période où les Romains cherchent dans la philosophie une ligne de conduite par temps de tempête : ils ne trouvent en réalité dans les diffé rentes écoles philosophiques grecques que leurs propres idées confortées par une connaissance non pas superficielle mais peut -être biaisée de leurs doctrines. Cassius est, comme nombre de ses contemporains, un adhérent sincère de la philosophie grecque , en l'occurrence de l'épicurisme, mais un adhérent romain . L’épicurisme de Cassius est attesté également chez Plutarque ( cf. Brut. 36 37) tout d'abord au sujet d'un rêve fait par Brutus dont son compagnon conteste le caractère divin et ominatoire : la critique des rêves est une constante chez les épicuriens (voir 11 P. Kragelund, « Dreams, Religion and Politics in Republican Rome » , Historia 50 , 2001 , p . 53-95 , et 12 J.J. O'Hara, « Somnia ficta in Lucretius and Lucilius » , CQ 37 , 1987 , p . 517-519) . Les deux autres références sont intéressantes dans la mesure où elles confirment cette adhésion à l'épicu risme, mais, comme l'a fort bien montré Castner 6 ( voir p. 29) , sont encore plus marquées par la volonté de Plutarque de polémiquer contre le Jardin : le malheu reux Cassius manque de renoncer à ses idées philosophiques devant l'accumu lation d'omina défavorables (cf. Brut. 39) avant la bataille de Philippes , et en appelle aux mânes de Pompée au moment du meurtre de César ( cf. Caes. 66) . Pour la postérité, Cassius fut associé à Brutus ( voir 13 E. Rawson, « Cassius and Brutus : the Memory of the Liberators » , dans I.S. Moxon et alii (édit. ] , Past Perspectives. Studies in Greek and Roman Historical Writing, Cambridge 1986, p. 101-119 ) , mais se retrouva dans son ombre, pour ainsi dire, puisqu'il n'existe presque pas de biographie de ce personnage en dehors de Dettenhofer 1 . YASMINA BENFERHAT. 63 LONGINUS ( CASSIUS-) RE : PIR - C 500 PLRE I: 2

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Philosophe platonicien . Selon la Souda, s.v. “ Fronton ” , 0735 , par sa mère Frontonis, seur du rhéteur Fronton d'Émèse ( à ne pas confondre , comme le fait la Souda, avec le rhéteur

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célèbre M. Cornelius Fronton , maître de Marc Aurèle, » F 19 ) , Cassius Longin était d'origine syrienne. On ne sait rien de son père , mais le nomen Cassius, qui n'est indiqué que par la Souda, associé au cognomen Longinus, est attesté plu sieurs fois au jer siècle apr. J. -C .; c'est déjà le nom du “ césaricide” C. Cassius Longinus au premier siècle avant. J.-C. (** L 62 ) . Sa naissance peut être placée, non sans quelque imprécision, dans la première décennie du me siècle avec un terminus post quem en 200 et un terminus ante quem en 213 . On ne considère plus Longin comme l'auteur du traité Sur le sublime. Dans le manuscrit le plus ancien , le Parisinus graecus 2036 ( Xe siècle ), on trouve pour ce traité le titre suivant Διονυσ ου Λογγ νου περί ύψους. Pourtant sur le premier folio de ce manuscrit , on trouve un index des Problèmes aristotéliciens, et, à la suite de cet index , on lit AloVVO OU Ñ Aoyy vou qui doit logiquement renvoyer au traité nepi úpouç. A partir de cette nouvelle indication, on a pensé, avec beaucoup de vraisemblance , qu’un copiste qui avait trouvé un traité anonyme nepi őYouç, aura tenté de l'attribuer à l'un des deux principaux rhéteurs qu'il connaissait Denys d'Halicarnasse et Cassius Longin (sur cette question, voir 1 D. Marin , « L'anonimato del Saggio sul Sublime nella tradizione di codici » , Ann . della Fac. di Lett. e Filos. dell'Univ. di Bari 1, 1954, p. 101 sq. ) Or ni l'un ni l'autre de ces rhéteurs ne peut être l'auteur de ce traité. Denys d'Halicarnasse y est critiqué et Cassius Longin a vécu bien après la composition de ce nepi účovç. Voici les indices qui appuient cette conclusion : ( 1 ) Le traité commence par une polémique dirigée contre Cécilius de Kalé Akté, dont les vues étaient très proches de celles de Denys d'Halicarnasse . ( 2) On y trouve plusieurs remarques critiques à l'égard de Denys d'Halicarnasse lui même. ( 3) Aucun des auteurs cités n'appartient à une époque post-augustéenne. (4) On ne trouve aucune référence à l'éruption du Vésuve en 79 comme exemple de catastrophe naturelle. ( 5 ) On trouve des similitudes frappantes avec certains passages chez Philon d'Alexandrie , ce qui pourrait indiquer que l'auteur faisait partie de ce milieu judéo-hellénique ou qu'il connaissait bien ce milieu. Témoignages et fragments. Ils ont été rassemblés par 2 Michel Patillon et Luc Brisson (édit. ) , Longin , Fragments. Art rhétorique, texte établi et traduit par M.P. et L.B., CUF, Paris 2001, p. 1-234 . Ce matériel avait déjà été traduit dans 3 L. Brisson et M. Patillon , « Longinus Platonicus Philosophus et Philologus » , ANRW II 36 , 7 , 1994, p. 5214-5299 (1. Longinus Philosophus ), et la suite 4 en II 34 , 4 , 1998, p. 3023-3108 ( 11. Longinus Philologus). Pour les fragments philo sophiques, voir aussi 5 Irmgard Männlein -Robert, Longin , Philologe und Philo soph . Eine Interpretation der erhaltenen Zeugnisse, coll . « Beiträge zum Altertumskunde » 143 , Leipzig /München 2001 ( ne tient pas compte du Longin rhéteur) . Pour une table des concordances entre les différents recueils de fragments, voir Patillon et Brisson 2, p. 382-383. Pour les témoignages biographiques et l'Odaynat, voir aussi 6 J. Radicke , Die Fragmente der griechischen Historiker continued, t . IV A : Biography, fasc . 7 : Imperial and undated authors, Leiden 1999 , n ° 1091 , p . 326-339 ( texte , traduction anglaise et commentaire, avec une bibliographie, p. 338-339). Cf. 7 K. Aulitzky, art. « Longinos » , RE XIII 2 , 1927 , col . col . 1401-1423. L'étude de 8 D. Ruhnken ( sous le nom de Petrus Ioannes Schardam ), « Disser tatio philologica de vita et scriptis Longini» ( 1776 ) , parue dans B. Weiske

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(édit . ) , Dionysii Longini de sublimitate, Leipzig 1809, p . LXIX - CVI, reste utile . Sur les auvres de Longin , voir p. C -CVI. Selon le témoignage même de Longin , un grand nombre de voyages accom plis dans sa jeunesse lui ont permis de faire la rencontre des “nombreux philo sophes ” qui vivaient à cette époque et de suivre leurs leçons . Il a été en O 41 ) particulier l'élève d'Ammonius (** A 140 ) et d'Origène le Platonicien ( avant les années 232-233 . Dans un fragment du traité Contre les Chrétiens ( fr. 39 Harnack ) conservé dans l'Histoire ecclésiastique d'Eusébe de Césarée (VI 19 , 8 ), Porphyre rapportait qu'Origène le Chrétien avait comme auteurs préférés Platon , Numénius , Cronius, Apollophane, Longin , Modératus, Nicomaque, certains pythagoriciens, Chérémon le Stoïcien et Cornutus... Le nom de Longin parmi ces philosophes a paru étonnant. Cette liste a sans doute été établie à partir des Stromates d'Origène, car, selon Jérôme (Dial. contra Pelag. 1 , PL XXIII, 518 a), Origène s'y efforçait de montrer l'accord du dogme chrétien avec l'enseignement de Platon, d'Aristote, de Numénius et de Cornutus ... Or, cette ouvre fut écrite, selon Eusèbe, avant qu'Origène ne quitte définitivement Alexandrie en 232 ( Hist. eccl. VI 24 , 3). Il semble donc difficile qu'à cette époque Origène ait pu citer Longin , dont on date la naissance vers 213 – en vérité parce qu'il a enseigné à Porphyre qui lui- même est né en 234. On a donc proposé de lire le nom d'Albinus à la place de Longin (cf. 9 K. O. Weber, Origenes der Neuplatoniker, coll. « Zetemata » 27 , München 1962, p. 36 n. 1 ) . 10 R. Goulet, « Porphyre, Ammonius, les deux Origène et les autres... » ( 1977) , repris dans Études sur les vies de philosophes, p. 287-288, explique plutôt l'apparition du nom de Longin par la confusion que Porphyre aurait faite , au moment de la composition du traité Contre les chrétiens, entre Origène le Chrétien et Origène le Néoplatonicien , maître et ami de Longin. Le témoignage de Porphyre confirme en tout cas l'importance de Longin au IIIe siècle, ainsi que le souligne Männlein -Robert 5, p. 233-236 ( fr. 12). On peut penser que , dans les années 230 , Longin se trouvait à Athènes et que c'est au cours de cette décennie qu'il ouvrit son école . 11 H. Dörrie , art. « Longinos » , KP III , 1969 , col . 731-732, considère qu'il a pu détenir l'une des deux chaires officielles de philosophie platonicienne à Athènes . Radicke 6 , p. 336 , en déduit un peu facilement qu'il était alors « head of the ACADEMY » . Le séjour de Porphyre auprès de lui semble devoir être situé entre 253 Porphyre avait alors une vingtaine d'années - et 263 , date de l'arrivée de Porphyre à Rome. C'est donc dans cet intervalle qu'il faut aussi placer le ban quet donné par Longin pour fêter l'anniversaire de Platon ( fr. 10 ) . Si on en croit Eunape, « Longin , à cette époque, était une bibliothèque vivante, un “ Musée ” ambulant ; et on s'en remettait à lui de porter un jugement sur les auteurs anciens >> ( fr. 5 ). Esprit universel, il enseignait non seulement la grammaire et la rhétorique, mais aussi la philosophie : « Auprès de Longin, Porphyre atteignit à la plus haute culture , et comme son maître il s'éleva à une connaissance parfaite pour tout ce qui touche à la grammaire et à la rhétorique ; mais il ne se porta pas exclusivement à ce genre d'étude, puisqu'il s'imprégna de tous les domaines de la philosophie » (fr. 5 ). Le témoignage d’Eunape se trouve corroboré par deux documents : la préface que donne Longin à son livre Sur la fin ( fr. 4), et la description faite par Porphyre dans ses Auditions publiques sur la littérature ( fr. 10). Reprenons par le détail ces deux textes. Dans la préface de son livre Sur la fin citée par Porphyre au chapitre 20 de sa Vie de Plotin , apparaissent trois types de classification. Le premier est d'ordre chronologique et il permet à Longin d'opposer le grand nombre des philosophes qu'il connut dans sa jeunesse à la rareté de ceux qui sont en activité lorsqu'il rédige son Sur la fin entre 265 et 268. Le second propose une répartition des philosophes cités en trois Écoles : platoniciens , stoïciens et péripatéticiens. Mais c'est sur le troisième qu'insiste Longin, comme “ critique ” ; ce troisième

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type de classification distingue entre les philosophes qui ont écrit et ceux qui ne l'ont pas fait (V.P. 20, 25-29). Voici donc une liste des philosophes cités, où interviennent les deux derniers types de classification : Platoniciens - qui ont écrit : Euclide ( » E 81b ), Démocrite ( =-D 71 ) , Proclinus (de Troade ), Plotin et Gentilianus Amélius ( » A 136), qui enseignent à Rome; - qui n'ont pas écrit : Ammonius ( A 140) , Origène (2O 41 ) , Théodote et Eubule (PE 74 ), ces deux derniers diadoques à Athènes. Stoïciens - qui ont écrit : Thémistocle, Phoibion, Annius (* A 187 ) et Médius ( > ^ M 75 ), ce dernier étant opposé à Longin sur la question des parties de l'âme dans un fragment conservé par Proclus ( fr. 21 ) ; - qui n'ont pas écrit : Herminus (» H 83 ), Lysimaque ( ~ * L 100 ), Athénée ( ** A 478) et Musonius ( 2 + M 197 ) (à Athènes).

Péripatéticiens - qui a écrit : Héliodore d'Alexandrie ( » » H 29) ; - qui n'ont pas écrit : Ammonius (=A 139b) et Ptolémée. Sur ces vingt philosophes, la plupart sont inconnus ou très peu connus ; d'où l'intérêt de ce témoignage pour se faire une idée de l'état de la philosophie dans la première moitié du lije siècle . La richesse de ce témoignage montre bien que , dès son plus jeune âge, Longin fut initié aux doctrines des trois grandes écoles philosophiques : platonicienne, stoïcienne et péripaté ticienne. Cela dit, en précisant que c'est auprès d'Ammonius et Origène qu'il étudia le plus longtemps, Longin revendique son appartenance au courant platonicien,qui était alors forte ment teinté de pythagorisme, comme il en témoigne lui-même ( V.P. 20, 71-76). Il est dès lors surprenant que Longin ait défendu une doctrine qui s'apparentait plus à celle de médio -plato niciens comme Alcinoos (2A 92) et Atticus ( > A 507 ) qu'à celle de Numénius ( 2 « N 66 ). La relation de la discussion qui intervint à la fin du banquet offert à Athènes à l'occasion de l'anniversaire de Platon (Tà Matávela ) présente autant, sinon plus , d'intérêt. Non seule ment plusieurs sommités athéniennes dans des domaines divers y sont nommées , mais on y évoque aussi un très grand nombre d'auteurs anciens . Bref, c'est une image du milieu intellectuel athénien et des auteurs qu'on y lisait que nous offre ce témoignage. Assistent à ce banquet, dont Porphyre, en tant que disciple de Longin semble-t- il , est l'un des convives, Nicagoras et Major, des rhéteurs connus, Apollonius le grammairien, Démétrius le géomètre (3 - D 140 ), Prosénès, un philosophe péripatéticien, de même que Calliétès ( ** C 20 ), Caystros et Maxime, personnages inconnus par ailleurs. Une discussion s'élève entre certains des assistants , qui porte sur le plagiat. Au cours de cette seule conversation , les noms de 40 auteurs ou personnages connus et les titres de 30 ouvrages sont mentionnés. L'étalage de ses connaissances devait faire partie de la règle du jeu ; il n'en reste pas moins que l'on se trouvait entre érudits partageant un idéal de culture encyclopédique, si l'on en juge d'après les genres ( poésie, discours oratoire , histoire, philo sophie) auxquels ressortissent les ouvrages dont les titres sont cités. On trouvera un classement des auteurs et des æuvres mentionnés dans ce long fragment dans Brisson et Patillon 2, p. 9-10, et 4, p. 5223-5225 . Pour se faire une idée de la culture de Longin , il faudrait à ces noms, mentionnés dans le cadre d'une seule discussion , en ajouter plusieurs autres, mentionnés dans les fragments littéraires notamment. C'est dans ce climat intellectuel et dans cet entourage culturel que Porphyre étudia à Athènes. Il serait intéressant de savoir si Longin dirigeait bien une

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école , et si oui , de quel genre d'institution il s'agissait . Malheureusement, Porphyre n'est pas aussi explicite sur l'expérience qui fut la sienne auprès de Longin que sur celle qu'il décrit dans la Vie de Plotin . Le seul point de repère que nous ayons sur le sujet est le témoignage de Porphyre rapporté par Eusébe ( fr. 10) . Il semble bien qu'on puisse parler d'une école de Longin , comme on peut parler d'une école de Plotin. Comme dans l'école de Plotin à Rome ( V.P.2, 39-43 ; 15 , 1-6 ) , dans celle de Longin à Athènes on fêtait l'anniversaire de Platon en organisant un repas en commun qui , par les discussions et les décla mations qui y prenaient place , s'apparentait au Banquet de Platon . Au banquet offert par Longin , se trouvaient deux autres maîtres de Porphyre : le grammairien Apollonius ( fr. 10, n . 7 , p. 295 ) et le géomètre Démétrius (fr. 10, n . 8 , p. 295 ). Dès lors , on peut se demander si cet Apollonius et ce Démétrius n'enseignaient pas dans le cadre de l'école de Longin. Longin , qui aurait été secondé par une équipe de spécialistes, s'y serait contenté de donner un enseignement supérieur en grammaire, en rhétorique et en philosophie ( cf. le témoignage d'Eunape, fr. 5 ). Cela dit, si on en croit Jean de Sicile ( fr. 56) , Longin aurait été tellement absorbé par son enseignement qu'il n'aurait pas eu le temps de composer des æuvres littéraires. La chose expliquerait qu'on ne connaisse de lui qu'une seule euvre de ce genre, un discours intitulé Odeynat, sur lequel nous revenons ci-après. D'autre part, le Cléodamos ( > * C 157, où l'on corrigera “Porphyre” en “ Longin ” ) auquel Longin dédie son ouvrage Sur l'impulsion ( Ilepi opuñs), conjointement avec Porphyre, et l'Anatolius ( ** A 157a) auquel Porphyre dédie ses Questions homériques pourraient bien avoir été des condisciples de Porphyre chez Longin ; peut-être en va-t-il de même pour l'Antonius de Rhodes (** A 225 ) avec qui Porphyre arriva à Rome (V.P. 4, 2). On notera enfin que, s'il faut en croire Eunape, c'est Longin qui donna à Porphyre, qui s'appelait originellement Malchos, le nom sous lequel il allait être connu dans l'histoire ( V.P. 17,10-15 ) . On remar quera toutefois que Longin lui-même, dédia son traité Sur l'impulsion à Malkos ( V.P. 17, 12 ) et que , dans la préface de son traité Sur la fin , il désigne son ancien élève , devenu disciple de Plotin à Rome, sous le nom de Basileus de Tyr ( V.P. 20, 91 ), nom également employé par Amélius dans une lettre ( V.P. 17 , 16) et dont il attribue l'invention à ce dernier ( ibid ., 17, 14 15 ). Sur la valeur du témoignage d'Eunape sur ce point et plusieurs autres , voir 12 R. Goulet, « Variations romanesques sur la mélancolie de Porphyre » , Hermes 110, 1982, p. 446 , repris dans Études sur les Vies de philosophes, p. 363-364. La dernière question que l'on se pose relativement à l'enseignement de Longin peut être ainsi formulée : Quand Longin quitta -t -il Athènes pour apporter son soutien à Zénobie ? Pour répondre à cette question , nous ne disposons que de deux indices. En 267 ap. J.-C. , Athènes fut attaquée et prise par les Goths ; elle se releva difficilement des destructions qui lui furent alors infligées. Cette année -là, Odeynat, qui avait été nommé dux en 262 par Gallien pour avoir défendu avec loyauté la cause romaine, est assassiné avec son fils aîné, probablement victime d'un complot domestique, alors même qu'il marchait contre les Goths ; par suite , on peut penser que l'Odeynat de Longin était un éloge funèbre, Zénobie ayant voulu , en l'honneur d'Odeynat , imiter Artémise, qui avait institué un concours d'éloquence pour chanter les louanges de son époux défunt à l'occasion de l'inauguration du Mausolée (cf. fr. 10, n . 3 , p. 296-297). Bref, c'est en 267 que Longin aurait quitté Athènes pour la cour de la reine Zénobie ; après y avoir prononcé son Odeynat, il aurait décidé de demeurer à Palmyre. Selon 13 Anna Sadurska , « Cassius Longinus w Palmyrze : fakty, legendy, hipotezy » [Cassius Longinus in Palmyra : facts, legends, hypotheses),Archeologia 43 , 1992, p. 129-130 [ rés. en angl . p. 151 ) , Longin aurait déjà été invité par Odeynat pour servir de précepteur à ses fils, mais par suite de la mort prématurée du souverain il serait devenu conseiller de Zénobie.

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Par suite, on peut supposer que si , entre 270 et 272 , Longin se trouve à Tyr, en Phénicie, d'où il fait parvenir à Porphyre une lettre que ce dernier cite dans sa Vie de Plotin ( 19, 7-41, cf. fr. 11 ), c'est qu'il accompagne la reine Zénobie dans ses déplacements ou qu'il agit en son nom comme ambassadeur auprès des Phéniciens. A la même époque, en 268 , Amélius quitta Plotin dont il avait suivi l'enseignement pendant vingt-quatre ans (V.P. 3 , 41-42 ) et partit à Apamée en Syrie où il se trouvait en 270 lors de la mort de Plotin ( ibid ., 2 , 32-33 ). Dans une lettre qu'il envoya, après 268, depuis la Phénicie, à Porphyre, alors retiré en Sicile et qu'il souhaiterait faire venir auprès de lui , Longin mentionne les copies des æuvres de Plotin qu'Amélius lui aurait fournies ( ibid ., 19, 22 ). Il est impossible de savoir quelles raisons ont pu pousser Longin à apporter son soutien aux velléités d'indépendance de Zénobie, reine de Palmyre, ne fût-ce que par sa présence à la cour. La même incertitude subsiste quant aux relations de Zénobie avec l'évêque d'Antioche, Paul de Samosate , qui eut un destin parallèle à celui de Longin , lequel dut le connaître : simple calcul politique, atti rance de la reine pour le christianisme ou penchant pour la spéculation intellec tuelle ou religieuse ? Quoi qu'il en soit , lorsque, à la fin de 271 , la reine Zénobie est faite prison nière par les troupes de l'empereur Aurélien et que Palmyre capitule , le sort de Longin se trouve scellé . Suivi de son armée et des prisonniers qu'il a faits à Palmyre, Aurélien reprend la route d'Antioche, au début de l'été 272 probable ment. Il s'arrête à Émèse , où il met en jugement Zénobie et les principaux chefs du parti de l'indépendance. Résistant aux pressions exercées par ses hommes , il épargne Zénobie, mais fait exécuter un certain nombre des membres de l'entou rage de la reine, dont Longin , à la fin de 272 ou au début de 273. Selon l'Histoire Auguste ( fr. 12 ) , Aurélien se vengeait ainsi de l'insolence de la réponse de Zénobie à la lettre qu'il lui avait parvenir, et dont il rendait Longin responsable. Selon Zosime ( fr. 13 ) en revanche, c'est Zénobie qui s'excusa sur la faiblesse de son sexe auprès de l'empereur, et qui rejeta la faute sur ses conseillers ; il est impossible de prendre parti pour l'une ou l'autre de ces opinions qui ne doivent se fonder sur aucune information concrète. Et Zosime de conclure : « Ayant été convaincu , Longin fut condamné à la mort qu'il souffrit avec une fermeté qui consola même ceux qui déploraient son malheur » ( fr. 6b ) . Ainsi se terminait la vie d'un platonicien , qui , comme Platon ( cf. Lettre VII ) , mais de façon beaucoup plus tragique, avait voulu avoir une action politique , ne fût- ce qu'au titre de conseiller. [ 14 Paul Kalligas, « Traces of Longinus ' library in Eusebius ' “ Praeparatio euangelica ” » , CQ 51, 2001 , p. 584-598 , a récemment cherché à démontrer que plusieurs textes néoplato niciens (notamment de Plotin , de Porphyre et de Longin lui-même) avaient été connus par Eusèbe grâce à la communication par l'empereur Constantin de la bibliothèque de Longin confisquée par Aurélien. Ce n'est pas au philosophe et critique Longin, mais à un rhéteur homonyme qu'il faut rapporter une inscription sur l'architrave du tombeau du σοφιστής Λονγείνος, πολλών € ủepyérns près de Göynük au nord - est d’Ankara ( 15 L. et J. Robert, Bull. Épigr. 1979, R.G. ] n° 546 ). Longin était -il véritablement un philosophe , ou doit -on le considérer comme un critique littéraire qui s'intéressa à la philosophie en amateur ? [ Alors que Porphyre, l'Histoire auguste, Eusébe, Syrianus , Proclus et Stobée présentent clairement Longin comme un philosophe et uniquement comme un philosophe, la tradition le désigne régulièrement comme " critique”, “ philologue” et “ rhéteur ”. La première désignation

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repose sur le témoignage d'Eunape qui voit en Longin un successeur de Denys (d'Halicar nasse) de Carie (fr. 5 ) . Porphyre déjà considérait Longin comme « le plus grand critique de notre époque » (xpLTIXÓTATOS, V.P.20 , 1-2 ), qualificatif repris par Jérôme ( fr. 8 : criticum ... Longinum censoremque Romanae facundiae et fr. 9), Proclus ( fr. 24, 25 ), Sopater ( fr. 52 ), Théophylacte ( fr. 9), Photius ( fr. 51 ), Psellus ( fr. 49, xpitixótatoç comme chez Porphyre) et la Souda ( fr. 3 ). Le titre de philologue, employé occasionnellement par Psellus ( fr. 37b) et le commentateur anonyme sur Hermogène ( fr. 44 ), peut remonter au bon mot de Plotin dans la Vie de Plotin ( 14, 18-20 = fr. 7 ) , mais est confirmé par les différents titres attestés des écrits de Longin. Quant à celui de rhéteur, il apparaît surtout dans la Souda (fr. 2 ), chez Psellus ( fr. 49) et dans des traités de rhétorique tardifs ( fr. 54). Si l'examen des témoignages confirme la compatibilité des qualificatifs de philosophe, de philologue et de critique, on doit en revanche constater que le titre de rhéteur se rattache à une tradition littéraire distincte et pourrait avoir été tiré de l'existence de traités théoriques de Longin consacrés à la rhétorique. Que des philosophes de son époque aient écrit de tels traités ne fait pas de doute, mais ils ne se posaient pas en rhéteurs pour autant. L'attribution au philo sophe Longin de ces écrits rhétoriques n'a pas été remise en cause par les spécialistes, mais il pourrait être de bonne méthode de ne pas amalgamer les diverses traditions qui nous R.G. ) renseignent sur la production littéraire de " Longin ".

La postérité a surtout retenu de Longin l'homme de lettres qu'il a été , et , par deux fois , la Souda ( fr. 2 et 3 ) oublie sa qualité de philosophe et ne parle que de Longin le critique. Il en va de même pour Eunape ( fr. 5 ) , saint Jérôme ( fr. 8 ), Théophylacte ( fr. 9 ) . Libanius encore fait allusion à un discours littéraire , l'Odeynat ( fr. 16) . Du commentaire de Longin sur le Timée de Platon , la tradi tion n'a retenu que ses jugements sur le préambule, jugements essentiellement d'ordre littéraire ( fr. 24-37 ) . Est -ce à dire que ce sont les seuls qui aient été jugés dignes de mention ? Cela rejoindrait alors le jugement de Plotin ( fr. 7) : « Longin est assurément quelqu'un qui s'intéresse à la littérature, mais absolument pas à la philosophie » (φιλόλογος μεν ο Λογγίνος , φιλόσοφος δε ουδαμώς). Sur cette formule qu'exploitera Proclus ( fr. 33 , li . 7-8 ) , voir 10 J. Pépin , « Philólogos/ Philosophos ( V.P. 14, 18-20 ) » , dans PVP, t. II , p . 477-501 . Tout cela toutefois est affaire de choix et d'appréciation et ne supprime pas le fait que Longin a été aussi un philosophe. Dans la notice qui lui est personnellement consacrée , la Souda le connaît d'abord comme tel : « Longin , Cassius , philosophe , le maître du philosophe Porphyre, érudit et critique » ( fr. 1 ) . Lui-même évoque ses études en philosophie auprès des philosophes les plus renommés de son époque et notamment auprès d'Ammonius ( Saccas ), qui fut aussi le maître d'Origène ( le Platonicien ) et de Plotin ( fr. 4 ) . C'est d'ailleurs chez lui , raconte Eunape ( fr. 5 ) , que Porphyre reçut sa formation philosophique , ce qui l'amena à déclencher dès son arrivée dans l'école de Plotin , une polémique sur la situation de l'Intelligible par rapport à l'Intellect ( fr. 7 ) . Longin du reste prit position sur divers sujets philosophiques dans une série d'ouvrages : Sur les principes ( fr. 7 ) , Sur la fin ( fr. 4 ) , Sur l'impulsion ( fr. 6 ) . Il écrivit aussi contre le traité de Plotin Sur les formes, dans le cadre de la polémique concernant la place de l'Intelligible par rapport à l’Intellect ( fr. 17 ; cf. 18 ) , et un ouvrage contre l'écrit d'Amélius intitulé Le problème de la justice selon Platon ( fr. 4 ) . On sait aussi qu'il a commenté , au moins partiellement, le Timée ( fr. 24-37 ) , le Phédon ( fr. 38 ) , le Parménide ( fr. 39-40 ) et le Phèdre ( fr. 41 ) .

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Sur les différents témoignages concernant les problèmes liés à la théorie des idées chez Longin , voir 11 M. Frede, « La teoría de las ideas de Longino », Méthexis 3 , 1990 , p. 85-98. Ces témoignages permettent de se faire une idée des orientations philosophi ques de Longin, des points de doctrine qu'il soutenait et de ceux auxquels il s'opposait. En particulier il s'est intéressé à Plotin au point de faire collection de tous ses écrits, qu'il lisait et commentait, comme en fait foi la lettre qu'il adressa à Porphyre aux alentours de 270 ( fr. 11 ) . Comme le fait apparaître la Préface qu'il donna à son traité Sur la fin ( fr. 4 ) , il portait un jugement non seulement sur le style de Plotin, mais aussi sur sa doctrine. Et la connaissance qu'il avait de l'ensemble des philosophes de l'époque donne un poids certain à son jugement. Il serait bon de se débarrasser d'un préjugé imposé par l'histoire et renforcé par notre façon de considérer la pratique sérieuse de la philosophie comme exclusive de toute autre activité. Et plus précisément on peut dire que Longin était bien un plaócopos IatwvLxOG, aux deux sens où l'on entendait l'expression à l'époque : quelqu'un qui acceptait la doctrine de Platon , quelqu'un qui commentait les œuvres de Platon . Voilà en tout cas ce que montrent bien ses ouvrages et sa doctrine philosophiques. Euvres. Ce que nous connaissons de son æuvre abondante se partage entre les travaux philosophiques et les travaux philologiques . Plusieurs sont connus par la liste fournie par la Souda ( fr. 1 ) , d'autres par la Vie de Plotin ( voir 16 R. Goulet, « Liste des auteurs et des ouvrages cités ou mentionnés dans la Vie de Plotin » , PVP I , p . 44 ( nºs 35-42) ], d'autres également par des témoins plus tardifs (Eusébe, Libanius, Proclus, Lacharès, Stobée, Commentateurs d'Hermo gène, Jean de Sicile , Psellus ) , d'autres enfin par la tradition directe. Sur ces différents ouvrages, voir Radicke 6, p . 333-335 .

I. Les ouvrages philosophiques comprennent - des traités : ( 1 ) Sur les principes ( Ilepì đpxõv, apud Porphyre, V.P. 14, 18) , ( 2 ) Sur la fin . Contre Plotin et Gentilianus Amélius ( Ilepi térovç. Mpoç Mwtīvov xal levtllavov 'Aué lov, apud Porphyre, V.P. 20 , 14-15 ) , ( 3 ) Sur l'impulsion ( Ilepi opuñs, apud Porphyre, V.P. 17 , 10-11 ), (4) Sur la vie selon la nature ( Ilepi toŨ xatà Dúolv Blov , Souda) ; - des écrits polémiques : (5 ) Réfutation de la Madivwdía de Porphyre, qui contenait une critique du traité de Plotin Hepi tõv ideāv (apud Porphyre , V.P. 20, 89.95-96) , ( 6 ) Réponse à la lettre d'Amélius (Ilpos tnv 'Aueríov čalotoańv , apud Porphyre, V.P. 20, 97-98 ) , (7 ) Réfutation d'un ouvrage d'Amélius Sur la justice selon Platon ( Ilepi tñs xatà Mátwva Olxalooúvns, apud Porphyre, V.P. 20 , 89) ,

( 8 ) Réfutation de la conception stoïcienne de l'âme ( npòs Tv Tõv Eroïxwv nepi puxñs dóbav åvt ponous, apud Eusèbe de Césarée, Prép. évang . X 3 ) [ fr. 20 ) ;

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- des commentaires sur les dialogues de Platon : ( 9 ) Commentaire sur le ' Timée ' ( dont on trouve de nombreux fragments chez Proclus ( fr. 24-37 ) , où Longin est souvent mis en rapport avec Origène le Plato nicien , les deux étant probablement connus à travers le commentaire intermé diaire de Porphyre ), ( 10 ) Commentaire sur le ‘ Phédon ' (cf. fr. 38], ( 11 ) Commentaire sur le 'Parménide' ( cf. fr. 39-40 ), ( 12) Commentaire sur le ‘ Phèdre ' (cf. fr. 41 ) .

II . Les ouvrages philologiques comprennent - des écrits de critique littéraire et textuelle : ( 13 ) Entretiens philologiques (Dióżoyou ouiríai) [ fr. 55 ; cf. 50, et aussi 55 60 ? ), ( 14) Difficultés relatives à Homère ( ° Antopńuata 'Ounpixá ), ( 15 ) Questions sur Homère avec leur solution , en deux livres ( Tlpoßanuara “ Ομήρου και λύσεις ένα βιβλίοις β ') , ( 16 ) L'admirateur des anciens ( ' O diapxaños , sous-ent . Nóyos, apud Porphyre, V.P. 14, 19), ( 17 ) Récits qui transgressent l'histoire et que les grammairiens présentent comme historiques (Τίνα παρά ιστορίας οι γραμματικοί ως ιστορικά εξηγούνται), ),

( 18) Homère est- il un philosophe ? ( Eỉ piłócopos " Ounpos;), ( 19 ) Sur les expressions qui présentent plusieurs significations chez Homère ( Περί των παρ ' “ Ομήρω πολλά σημαινουσών λέξεων ) ; - des écrits grammaticaux, de métrique et de lexicographie : ( 20 ) Commentaire au Manuel de métrique d'Héphestion, dont un long frag ment est conservé ( fr. 42 , voir aussi fr. 45 ?] , ( 21 ) Explication d'expressions attiques ( 'Attix @ V RÉEEWV ExôÓDELC ), ( 22 ) Expressions utilisées par Antimaque et par Héracléon (AÉFelç ’Avtl μάχου και Ηρακλέωνος).

III . Les écrits rhétoriques comprennent ( 23 ) un Art rhétorique (Téxvn öntopixń ) , conservé en tradition directe [fr. 48 ) , ( 24 ) et divers extraits (fr. 50 ) ; Voir aussi l'édition du Nepì intopixñs de Psellus , profondément influencé par la rhétorique de Longin : 17 P. Gautier, « Michel Psellos et la rhétorique de Longin », Prometheus 3 , 1977 , p. 193-203 . IV . On connaît encore de lui un discours , ( 25 ) l'Odeynat ( Odeivalo ),

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peut-être des ( 26 ) Chroniques ( Xpovexá, cf. FGrHist 259) ( 27 ) et des lettres (voir fr. 11 ) . [D'après la version arménienne de la Chronique d'Eusébe de Césarée, l'historien indiquait comme l'une de ses sources pour la période romaine les dix-huit livres de Cassius Longinus qui couvraient 228 Olympiades ( p. 125, 15-16 Karst = FGrHist 259 T 1 ), où Jacoby a corrigé en 228 le chiffre de 138 donné par Karst ou 128 édité par Aucher. Si ce chiffre est exact, cet ouvrage historique devait donc s'arrêter en 133-136 de notre ère . L'attribution à Longin a cependant été contestée. Radicke 6, p. 334-335 , signale également que Longin est mentionné parmi un groupe d'auteurs ayant écrit des ouvrages ɛpi łOvixõu dans le Parisinus Coisl. 387. R. G. ) Longin est un platonicien, même s'il s'inspire parfois d'Aristote et même s'il subit l'influence du stoïcisme. Comme platonicien , Longin adopte une ligne d'interprétation qui s'apparente à celle que défendent des médio- platoniciens comme Plutarque, Alcinoos ( > A 92 ) et Atticus (* A 507 ) . Fidèle à cette ligne d'interprétation , il soutient que les Intelligibles se trouvent hors de l'Intellect et plus précisément sous lui ; cette position, qui l'amène à s'opposer à Numénius et au néoplatonisme naissant , qui devait tant à Numénius (-N 66 ) , explique la négligence dans laquelle le tint l'École d'Athènes, qui rendit ainsi inéluctable la désaffection pour la part philosophique de son œuvre . Mais ce qui caractérise le plus Longin philosophe, c'est sa liberté de pensée. A la différence des médio-platoniciens , il ne considère pas Platon comme un " dieu " auquel on ne peut adresser aucune critique. Et, s'opposant en cela aux néoplatoniciens, il refuse d'enfermer tous les savoirs dans un système méta physique qui s'apparentera de plus en plus à une véritable théologie . Avec lui , c'est une certaine conception de la philosophie comme savoir suprême, mais non englobant qui disparut pour un long moment. Sur la critique du style de Platon par Longin, voir 18 F. Walsdorff, Die antiken Urteile über Platons Stil, coll. « Klassisch - Philologische Studien » 1 , Bonn 1927, p. 51-98 . LUC BRISSON. LONGUS + CORNIFICIUS LONGUS (C 189] 64 LUCANUS (M. ANNAEUS ) RE Annaeus 9

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Éditions. a ) Texte : 1 A. E. Housman , M. Annaei Lucani Belli ciuilis libri decem , Oxford 1926 ; 2 D.R. Shackleton-Bailey , M. Annaei Lucani De bello ciuili, coll . BT, Stuttgart/Leipzig, 2e éd . 1997 . b) Texte et traduction : 3 A. Bourgery, Lucain , La guerre civile (La Pharsale ) Livres 1 - V , CUF, Paris 1927 ; 4 A. Bourgery et M. Ponchont, Lucain , La guerre civile (La Pharsale ) Livres VI -X , CUF, Paris 1930 , 6e éd. , revue par P. Jal , 1993 ; 5 J. Soubiran , Lucain , La guerre civile ( VI 333 - X 546 ) , Toulouse 1998 . c ) Scholies : 6 Scholia in Lucanum I Commenta Bernensia ed . H. Usener, Leipzig 1869 ; 7 Adnotationes super Lucanum ed . J. Endt, Stuttgart 1909. Index et Concordances. 8 S.J. Deferrari, M. W. Fanning , A. S. Sullivan , A Concordance of Lucan , Washington 1940 ; 9 M. Wacht , Concordantia in

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Lucanum , coll . « Alpha- Omega. Reihe A , Lexika, Indizes , Konkordanzen zur klassischen Philologie » , Hildesheim 1992. Bibliographies. 10 W. Rutz, « Lucan , 1943-1963 » , Lustrum 9, 1964 , p. 243 334 ; 10, 1965, p. 246-256 (Nachtrag ) ; 11 Id ., « Lucan 1963-1983 » , Lustrum 26, 1984 , p. 105-204 ; 27 , 1985 , p. 149-166 ; 12 Id ., « Lucans Pharsalia im Lichte der neuesten Forschung » , ANRW II 32 , 3 , 1985 , p. 1457-1515 ; avec le complément de H. Tuitje, ibid ., p. 1516-1537 . Études. 13 F. Marx , art. « M. Annaeus 9 Lucanus » , RE I 2 , 1894, col . 2226 2236 ; 14 R. Pichon , Les sources de Lucain , Paris 1912 , 279 p. ; 15 J. Brisset, Les idées politiques de Lucain , Paris 1964, 236 p. ; 16 D. Gagliardi, Lucano , poeta della libertà , 2e éd . , Napoli 1976 , 190 p . ; 17 Lucain , coll . « Entretiens sur l'Antiquité Classique » 15 , Genève -Vandoeuvres 1970 , 342 p. ; 18 F. Ahl , Lucan . An Introduction, Ithaca /London 1975 , 379 p .; 19 E. Narducci, La providenza crudele . Lucano e la destruzione dei miti augustei, Pisa 1979 , 170 p. ; 20 A. Loupiac, La poétique des éléments dans la Pharsale de Lucain , coll. « Latomus » 241, Bruxelles 1998 , 235 p .; 21 P. Esposito et L. Nicastri ( édit.), Interpretare Lucano, Napoli 1999 , 504 p . ; 22 E. Narducci, Lucano. Un'epica contro l'impero . Interpretazione della « Pharsalia » , Bari 2002, 523 p. Biographie. La vie de Lucain est connue par des témoignages d'auteurs anciens: Martial, Stace, Tacite et Dion Cassius, et par des vies anonymes : l'une provient de Suétone , la seconde d'un commentateur nommé Vacca et la troisième semble dériver de Suétone ( voir 23 C. Hosius, M. Annaei Lucani Belli Ciuilis, Leipzig 1913 ) . Neveu du philosophe Sénèque, né à Cordoue en 39, Lucain se forme à Rome, où il est, comme le poète Perse , l'élève du stoïcien Cornutus ( 2 * C 190 ). Très tôt , il commence à écrire des poèmes et ses dons le font remarquer de Néron : il devient un de ses familiers, membre de sa cohors amicorum. En 60, il obtient un premier prix aux Neronia , les concours poétiques. L'empereur lui fit accorder la questure en 62 et l'augurat. Mais les relations se dégradent; en 64 , Lucain quitte la cour ; peu après, compromis dans la conjuration de Pison , il doit se donner la mort en 65 (Tacite , Ann . XV 49 , 2 ; 70 , 1 ) . Les causes de cette disgrâce sont discutées : rivalité littéraire et jalousie de l'empereur ? perte de l'influence de Sénèque ? (cf. Ahl 18, Appendice, p. 333-353 ) . Lucain avait composé de très nombreuses æuvres dont seuls les titres nous sont parvenus . Dans son poème sur l'anniversaire de Lucain ( Genethliacon Lucani, Silu . II , 7 , 54-72 ) , Stace mentionne un poème sur la guerre de Troie, une descente aux Enfers ( Catachtonion ) , un Orphée, un éloge de Néron , un De incendio Urbis ; il faudrait y ajouter une tragédie sur Médée , inachevée , un famosum carmen contre Néron , selon les vies antiques. Seule son épopée sur la guerre civile de 49 av . J.-C. , opposant Pompée et César , a subsisté . Les premiers livres furent édités du vivant de Lucain , les autres parurent après sa mort. L'æuvre avait pour titre De bello ciuili ( la guerre civile ) titre figurant dans les manuscrits ; l'appellation courante de Pharsale est fondée sur quelques vers du livre IX 984-986 : « ... aussi longtemps que dureront

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les honneurs du poète de Smyrne (c'est - à -dire Homère ), les siècles à venir nous liront toi (César ) et moi ; notre Pharsale vivra et aucun siècle ne nous condam nera à l'oubli » . Mais Pharsalia désigne ici la bataille de Pharsale, gagnée par César et chantée par Lucain (Ahl 18 , p . 326-332 ) ; il ne s'agit pas du titre du poème. L'épopée de Lucain se compose de dix chants, qui retracent les causes de la guerre et le passage du Rubicon par César (livre I ) , les débuts de la guerre, la bataille de Pharsale ( livre VII ) la mort de Pompée en Égypte ( livre VIII ) , puis la marche de Caton en Libye et l'arrivée de César à Alexandrie. Dans son état actuel, le poème est inachevé et les commentateurs ( voir Ahl 18 , p. 307-326) s'interrogent pour savoir jusqu'à quel terme Lucain comptait mener son récit: mort de Caton en 46 ou assassinat de César ? La première hypothèse est souvent retenue et supposait une épopée en 12 chants, comme l'Énéide de Virgile . Mais Lucain choisit d'écrire une épopée historique, bien différente du poème virgilien ( voir par exemple 24 P. Grimal, « Le poète et l'histoire » dans Lucain 17 , p . 51 106 ; pour les sources voir le détail dans Pichon 14). Élève de Cornutus, neveu de Sénèque, Lucain a eu des contacts étroits avec la philosophie stoïcienne . Les critiques ont donc souvent cherché les échos du stoïcisme dans son épopée. Les convictions politiques du poète le rendent proche de l'opposition stoïcienne. Certes, l'éloge de Néron qui ouvre le poème a suscité bien des discussions ( voir par exemple 25 P. Grimal, « L'éloge de Néron au début de la Pharsale est - il ironique ?» , REL 38 , 1960 , p. 296-305 ) ; mais dans le reste du poème, Lucain affirme son refus de la tyrannie ( VIII 494 : « la vertu et le pouvoir suprême ne s'accordent pas » ) et fait l'éloge d'une liberté qui disparaît après la victoire de César. En évoquant les conséquences de la bataille dans le chant VII , il déclare que « la Liberté s'est retirée au -delà du Tigre et du Rhin » et a fui l'Italie ( VII 433 ) ; ou encore annonce : « les deux adversaires que nous avons toujours, ce sont la Liberté et César » (VII 695-696) . Caton d'Utique est sans cesse présenté comme le défenseur de la liberté ( voir infra ) prêt à tout pour assurer sa sauvegarde ( II 301-303 ) . L'assassinat de César est annoncé dans une apostrophe à Brutus ( VII 590-596 ): « qu'il vive et, pour tomber victime de Brutus, qu'il soit roi » . A plusieurs reprises, le poète ne ménage pas ses critiques envers César, considéré comme un tyran , envers le régime impérial et envers Néron lui -même ( cf. Brisset 15 , Gagliardi 16 , Narducci 22 , p 7-13 et 16-17 ) Lucain qui a participé à la conjuration de Pison , se trouve ainsi proche d'une opposition stoïcienne, qui faisait de la libertas le principe de sa conduite. La conception du monde et de la nature est aussi celle d'un stoïcien. Lucain reprend la physique et la cosmologie du Portique, sa conception de l'univers : position de la terre soutenue par l’air (V 94) , nature des astres... ( voir 26 H.-A. Schotes , Stoische Physik, Psychologie und Theologie bei Lucan , Bonn 1969 , 233 p. , qui donne une analyse détaillée de ces questions ) . À plusieurs reprises, il est rappelé que l'univers doit disparaître dans un embrasement général, confor mément à la théorie stoïcienne ( 1 72-80 ; II 289-292 ; V 181 ; VII 134-137 ; VII 812-815 ) . Pour 27 M. Lapidge , « Lucan's Imagery of Cosmic Dissolution » ,

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Hermes 107 , 1979 , p . 344-370 , de telles connaissances proviendraient de Cornutus et de Sénèque ; il montre surtout comment la guerre civile est à plusieurs reprises comparée à cette destruction de l'univers ( voir en particulier I 72-80) . Il faut noter enfin le rôle que jouent les éléments et la nature dans le poème ( voir l'étude menée par Loupiac 20 ). L'âme divine est répandue dans le monde : « la divinité n'a pas d'autre demeure que la terre , la mer, l'air, le ciel et la vertu . Jupiter est tout ce que nous voyons , tout ce qui se meut » ( IX 579-580 ; cf. Sénèque , ad Helu . 8 , 3 ; Nat. Quaest. II 45 ) . Cette conviction , jointe à la nature du sujet, explique que les dieux de la mythologie ou du panthéon romain n'apparaissent pas dans le poème ; ils constituent une foule collective et anonyme , mentionnée sous les noms de dei, superi, numina ... ( voir 28 H. Le Bonniec , « Lucain et la religion » , dans Lucain 17 , p. 162-195 ) . La divinité suprême , parens rerum , a donné forme à la matière et « fixé pour l'éternité les causes par lesquelles elle assujettit toutes choses , se soumettant elle-même à cette loi » ( II 7-10 ; cf. Sénèque , Prou. 5 , 8 ) . Lucain affirme ainsi l'existence d'un destin immuable , enchaînement de causes et de lois ( 29 M. Billerbeck, « Stoicismus in der römischen Epik neronischer und flavischer Zeit » , ANRW II 32 , 5 , 1986 , p. 3116-3151 , pour Lucain , p . 3121 3126 ; 30 M. Lapidge , « Stoic cosmology and Roman literature, First to Third Centuries A. D. » , ANRW II 36 , 3 , 1989 , p. 1379-1429) . Les dieux , le destin et la fortune se confondent d'ailleurs dans l'épopée (31 W.-H. Friedrich , « Cato, Caesar and Fortuna bei Lucan » , Hermes 73 , 1938 , p. 391-421 ). C'est précisément cette représentation du destin qui a suscité de nombreuses discussions : Lucain souligne souvent la cruauté des destins et des dieux ( III 448-449 ; IV 808-809 ) ; il mentionne « l'enchaînement jaloux des destins » ( I 70) parmi les causes de la guerre civile ; Pompée ressent la perfidie des dieux et les destins qui lui sont contraires ( VII 85-86 ) . De telles exclamations s'accordent mal avec la représentation stoïcienne de la divinité; cette conception pessimiste d'une « providence cruelle » se trouve en opposition avec la théorie stoïcienne de la Providence . Ces affirmations ont été interprétées de façon contradictoire : ou bien elles sont dépourvues de portée véritable ; mais leur fréquence et leur violence doivent tout de même retenir l'attention , ou bien il faut considérer Lucain comme « un stoïcien qui a perdu la foi » selon l'expression employée par 32 0. S. Due , « Lucain et la philosophie » , dans Lucain 17 , p . 203-224 . L'inter prétation proposée par Narducci 19 , p . 69 , et 22 , p. 155-164, paraît plus riche : Lucain se ferait l'écho des débats sur le providentialisme qui avaient lieu au sein même de l'école , comme le montre l'œuvre de Sénèque (Epist. 16 , 4 ) , en utili sant les objections qui pouvaient lui être faites, sans ajouter la réfutation qui pouvait en être apportée ; le récit de la guerre civile , récit d'une destruction, se prêtait facilement à de telles interprétations; la puissance d'évocation et le style même de Lucain contribuent à leur donner tout leur relief. Le portrait des principaux personnages doit aussi retenir l'attention. César est caractérisé par sa violence et sa volonté de domination , Lucain insiste sur son furor et sa soif de sang , qui le rendent monstrueux. Pompée semble d'abord un homme vieillissant et fragile, mais au cours du poème, il acquiert une grandeur

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certaine. Au moment de sa défaite, lorsqu'il quitte le champ de bataille , Lucain insiste sur sa maîtrise de lui -même : sa douleur est vénérable et majestueuse, il ne se laisse dominer ni par les succès , ni par les revers ( VII 680-684 ) et il garde une grande âme pour les destins suprêmes ( VII 679 ; 33 M. Rambaud , « L'apologie de Pompée par Lucain au livre VII de la Pharsale » , REL 33 , 1955 , p. 278-296 , et Narducci 22, p. 318-322, qui signale de nombreux parallèles avec Sénèque et le De officiis de Cicéron ). Par cette évolution vers la sagesse , Pompée a souvent été considéré par les critiques comme un proficiens, l'un de ces hommes en marche vers la sagesse décrits par Sénèque ( voir 34 B. Marti, « The meaning of Pharsalia » , AJPh 66 , 1945 p. 352-376 ; 35 D. B. George, « The meaning of the Pharsalia revisited » , dans C. Deroux (édit. ), Studies in Latin Literature and Roman History, t . VI , coll . « Latomus » 217 , Bruxelles 1992 , p . 362-389) . Lucain insiste en outre sur son courage face à la mort (Narducci 22 , p . 332-335 ) et sur une felicitas que nul ne peut désormais lui enlever. Enfin , le poète décrit l'apothéose de Pompée : son âme s'élève jusqu'à la zone sublunaire où vivent les « mânes semi -divins » et contemple les astres et les planètes ( IX 1-15 ). Narducci 22 , p. 336, qui analyse cette immortalité astrale promise aux grands hommes , établit un parallèle avec Manilius 2 - M 19 ] ( Astronomica I 778 ) et Sénèque. Enfin , Lucain n'a pas seulement fait de Caton d'Utique ( 3C59 ) le héros de la liberté mais l'image même du sage ( 36 D. B. George, « Lucan's Cato and Stoic Attitudes to the Republic » , ClasAnt 10 , 1991 , p . 237-258 ; 37 E. Narducci, « Catone in Lucano (e alcune interpretazioni recenti) » , Athenaeum 89 , 2001, p. 171-186) . Sa conduite est conforme aux impératifs du stoïcisme: « suivre la nature , sacrifier sa vie à la patrie, se croire né non pour soi , mais pour l'univers » ( II 382-383 ) ; il est aussi « adorateur de la justice , observateur d'une honnêteté rigide, vertueux dans l'intérêt de tous » ( II 389-390 ). Il est considéré comme le « véritable père de la patrie » , le seul qui mériterait d'être un dieu ( IX 601). La présentation de son engagement dans la guerre civile a pu paraître surprenante ; dans la longue discussion qu'il a avec Brutus, le poète lui prête les paroles suivantes : « Nous avouons , Brutus, que la guerre civile est le plus grand des sacrilèges, mais là où les destins l'entraînent, la vertu suivra sans trouble ; ce sera le crime des dieux d'avoir fait de moi aussi un coupable » ( II 286-288 ) . Caton choisit d'obéir aux destins qui entraînent sa patrie dans la guerre civile ( 38 P. Grimal, « Quelques aspects du stoïcisme de Lucain dans la Pharsale » , BAB 1983 , p . 401-416 ). Il reste fidèle à lui-même en choisissant la liberté contre la tyrannie, en s'engageant pour la cité, même pour une cause qu'il sait perdue. Dans ce débat concernant l'engagement du sage , que la confrontation avec Sénèque ( Epist. 14, 12 ; Prou . 2 , 9) peut éclairer ( Ahl 18 , p . 240-247 ; Narducci 22 , p . 368-389 ) , Lucain montre comment la uirtus du sage l'égale aux dieux . C'est aussi en ce sens qu'il faut comprendre le vers célèbre: uictrix causa deis placuit sed uicta Catoni ( 1 128 ) .

MICHÈLE DUCOS .

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LUCCEIUS (L.-)

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Homme politique et historien romain . Ce personnage ( 1 F. Münzer , art. « Lucceius » 6 , RE XIII 2 , 1927 , col . 1554-1559) est à la fois bien et mal connu du fait de la présence de plusieurs homonymes parmi les correspondants de Cicéron : un Cn . Lucceius , un L. Lucceius M. f. et L. Lucceius Q. f. ( cf. 2 D.R. Shackleton -Bailey, Onomasticon to Cicero's Letters, Stuttgart 1995, p. 64 ). On a essayé de distinguer l'historien de l'ami de Pompée ( cf. 3 W.C. Mc Dermott, « De Lucceis » , Hermes 97 , 1969, p . 233-246 ). Il appartenait à une famille très riche (Suétone, César 19) et sans doute de rang sénatorial puisqu’un L. Lucceius M. f. était legatus en 92 ( CIL 1² 663). La date de sa préture est problématique: on considère le plus souvent que Lucceius fut préteur urbain en 67 sur la base d'un passage de Dion Cassius ( XXXVI 41,1 ) mais un L. Lucceius Q. f. se fit accusateur de Catilina en 64, or ce genre d'action est plutôt à placer en début de carrière à Rome et d'autre part le passage de Dion Cassius est sujet à controverse : on lit parfois Lucullus à la place de Lucceius . Selon certains ( 4 J. M. David et M. Dondin , « Conduites symboliques et comportements exemplaires de Lucullus , Acilius Glabrio et Papirius Carbo » , MEFRA 92 , 1980 , p. 201), Lucceius aurait donc été préteur en 62 seulement. Quoi qu'il en soit , il conclut ensuite un accord avec César pour les élections au consulat en 60 ( Suétone , César 19 , 1 , et 5 B.A. Marshall et G.R. Stanton , « The Coalition between Pompeius and Crassus » , Historia 24 , 1975 , p . 205-219, en particulier p. 215-218 ) , mais c'est M. Calpurnius Bibulus, le candidat des Optimates, qui l'emporta (6 E. S. Gruen , The Last Generation of the Roman Republic, Berkeley 1974 , p . 141-142 ) . Cet échec semble avoir détourné Lucceius de la politi que pour préférer la composition d'ouvrages historiques avec une brillante répu tation (Cicéron , Pro Caelio XXII 54 ) . Il fut mêlé à un scandale en 56 : il avait accueilli chez lui le philosophe alexandrin Dion ( -D 162 ) , venu en ambassade à Rome ( 7 E. Rawson , Intellectual Life in the Late Roman Republic, Baltimore 1985 , p. 15-16 ) . La guerre civile le vit rejoindre le camp de Pompée (Cicéron, Att . IX 1 , 3 ) jusqu'à la mort de ce dernier : il faisait partie de ses proches ( César, Bell. ciu . III XVIII , 3 et Cicéron , Att. IX 1 , 3 et Att. IX 11 , 3 ) . Il fut peut- être une victime de la proscription de 43 : en effet, F. Münzer 1 a suggéré une correction dans le récit d'Appien (Bell. ciu . IV 26 , 109 ) qui fait de L. Lucceius un proscrit. 8 F. Hinard , Les proscriptions de la Rome républicaine, Rome 1985 , n ° 82 , p. 488-490 , a admis cette possibilité: il est vrai qu'étant à la fois très riche et ancien Pompéien, Lucceius avait toutes les chances de se retrouver proscrit. L. Lucceius apparaît comme un homme très cultivé , qui commença une histoire de Rome réputée, mais qu'il n'acheva jamais ( cf. 9 H. Bardon, La litté rature latine inconnue, Paris 1952, p. 263 sqq . ) : il avait en chantier une étude de la Guerre Sociale et une autre sur la guerre civile entre Marius et Sylla (Cicéron , Fam . V 12 , 2 ). 10 W.S. Anderson, Pompey, his Friends and the Literature of the First Century B.C. , Berkeley 1963 , en particulier p . 32-33 , suggère que cette æuvre historique a favorisé Pompée. Cicéron avait demandé à Lucceius une monographie sur son retour d'exil ( Fam . V 12 , 4 ) en 55 avec l'aide d'Atticus, dans une lettre fameuse (cf. 11 J. Hall , « Cicero to Lucceius ( Fam . 5.12 ) in its

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Social Context : ualde bella ? » , CPh 93 , 1998 , p . 308-321 ) . Mais sans succès , apparemment. Lucceius a parfois été vu comme un épicurien ( 12 C. Castner, Prosopography, p. 86-87 ) , à cause de sa lettre de consolation à Cicéron après la mort de Tullia (13 N. DeWitt, « Epicurean Contubernium » , TAPHA 67 , 1936 , p. 55-63 , p. 60 surtout) et d'autre part pour sa manière d'écrire l'histoire , sans montrer de partialité et en usant de franchise (Fam . V 12 , 4 : si liberius, ut consuesti ). De même , son caractère imperturbable n'est pas sans faire penser à l'ataraxia chère aux épicuriens ( Cicéron, Fam . V 13 ) . Malheureusement, quand bien même il serait très intéressant de mettre en lumière une manière épicu rienne d'écrire l'histoire ou , si l'on préfère, une influence de la philosophie épicurienne sur la rédaction de l'histoire à Rome , la prudence invite à conclure à l'absence de toute preuve décisive de l'épicurisme de Lucceius . YASMINA BENFERHAT. 66 LUCIEN DE SAMOSATE RE PIR2 L 370

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Littérateur et penseur grec du IIe siècle ap . J.-C. , dont on a conservé un grand nombre d'écrits satiriques qui souvent prennent en compte les idées et les représentants des écoles philosophiques mystiques et dogmatiques (pythago risme , platonisme , aristotélisme et notamment stoïcisme ), ainsi que , de façon générale, la figure des faux philosophes . Les sympathies de sa propre pensée se partagent entre l'épicurisme , le scepticisme et surtout le cynisme . La plus grande partie de ce qu'on peut reconstituer au sujet de sa formation , de sa pensée et de sa vie provient de ses propres écrits.. A. Bibliographie générale ( sélective)

Principales éditions d'ensemble : Éditions historiques. 1 J. Lascaris ( édit . ) , AouxiavoŬ Eauooaréwç Alároyou, Florentiae 1496 (editio princeps ) ; 2 T. Hemsterhuys & J. F. Reitz ( édit . ) , Luciani Samosatensis Opera, cum nova versione T. Hemsterhusii et I. M. Gesneri, Graecis scholiis ac notis omnium proximae editionis commentatorum , additis I. Brodaei , I. lensii , L. Kusteri , L. Bossi, H. Vitringae, I. De La Faye , E. Leedes, aliisque ineditis , ac praecipue M. Solani & 1. M. Gesneri , cuius priorem partem summo studio curavit et illustravit T. Hemsterhusius, ceteras inde partes ordinavit notasque suas adiecit I. F. Reitzius ... , 3 vol . , Amstelodami 1743 (t.I : LXXII-882 p. ; t. II : 953 p. ; t. III : 860 p. ( p. 674-692 : Epigrammata ; p. 693-707 : deux dialogues en latin faussement attribués à Lucien : Palinurus, Virtus dea ; p . 708-733 : « De aetate et auctore dialogi Lucianei qui Philopatris inscribitur disputatio » , par J. M. Gesner ; p.734-850 : « Index » ; 850-860 : « Addenda et corrigenda » ] ) ; 3 C. Jacobitz ( édit . ) , Luciani Samosatensis Opera, ex recognitione C. J. , 4 vol . , Lipsiae 1836-1841 , réimpr. Hildesheim 1966 (editio maior ; première édition critique au sens moderne ; l'ordre des écrits se fonde sur la recension B, qui est celui de la vulgata, correspondant à l'editio princeps et à l'édition de Hemsterhuys & Reitz 2 ; le t . IV contient les textes en vers et les scholies , ainsi qu'un riche index ) ; 4 W. Dindorf (édit. ) , Luciani Samosatensis Opera , ex recensione G. D. , Graece et Latine, cum indicibus, Parisiis 1867 , 2e édit . , avec plusieurs réimpr. ( VIII- 849 p. , elle contient les écrits de la vulgata , avec une traduction latine fondée sur celle de Gesner ; p . 808-814 : « Epigrammata » ; édition jugée médiocre et arbitraire ; dans cette deuxième édition l'auteur tient sans doute compte de celle qu'il avait publiée à Leipzig en 1858 ) ; 5 C. Jacobitz ( édit. ), Luciani Samosatensis Opera, ex recognitione C.J. , coll . BT, 3 vol . , Lipsiae 1852-1853 , réimpr. 1969-1970 (par W.Haase ] (editio minor ; t . I : XVI-410 p . ; t . II : XV1-421 ; t . III : XX 516 p. , index p . 471-516 ) ; 6 F. Fritzschius ( édit . ) , Lucianus Samosatensis, F. F. recensuit ,

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3 vol . , Rostochii 1860 (t. I 1 : XVI - 152 p. ), 1862 ( vol . I 2 : X - 212 p. ), 1863 (t. II 1 : XIV - 250 ), 1869 ( t. II 2 : XLIV - 271 p. ), 1874 (t. III 1 : XLII -226 p. ) , 1882 (t. III 2 : CXX - 162 p. ) ; 7 N. Nilén (édit. ) , Lucianus, edidit N.N. , coll . BT, Leipzig 1906 (t. I 1 : Libelli I-XIV, LXXV 208 + 72 * p. ) , 1923 ( t . I 2 : Libelli XV-XIX , p. 209-328 ; l'ordre des écrits se fonde sur la recension y, considérée comme présentant l ' « antiquus ordo » et adoptée depuis Nilén par la plupart des éditeurs ; cette édition, la première vraiment systématique, est restée inachevée). Éditions (achevées ) de référence courante. 8 A. M. Harmon , K. Kilburn & M.D. Macleod ( édit .), Lucian, with an English transl., 8 vol . , coll . LCL, London Cambridge ( Mass . ) 1913-1967 : t. I- V (Harmon ) 1913-1936 , t. VI ( Kilburn) 1959 , t . VII - VIII ( Macleod ) 1961-1967 ; 9 M.D. Macleod ( édit . ) , Luciani Opera , recognovit brevique adnotatione critica instruxit M.D. M. , 4 vol . , coll . OCT, Oxonii 1972-1987 (contient tout le corpus, avec plusieurs apocryphes ). Projets en cours ( par ordre chronologique de la première parution ). 10 J. Alsina ( édit . ) , Luciano , Obras, t . I : El sueño, Diálogos de los dioses, Diálogos marinos, texto rev. y trad ., « Colección hispánica de autores griegos y latinos » , Barcelona 1962 , réimpr. « Colección de autores griegos y latinos » , Madrid 1992 , XCVI- 104 p. doubles ; 11 I d . (édit . ) , Luciano, Obras, t . II : Diálogos de los muertos, El aficionado a las mentiras, Sobre la muerte de Peregrino, texto rev . y trad., « Colección hispánica de autores griegos y latinos » , Barcelona 1966, réimpr. « Colección de autores griegos y latinos » , Madrid 1992 , 149 p . doubles ; 12 M. Jufresa, F. Mestre & P. Gómez (édit . ) , t. III : Fálaris 1-2, Proemio : Dioniso, Proemio : Heracles, Acerca del ámbar o De los cisnes, Encomio de la mosca , Encomio de la patria, Sobre por qué no hay que dar crédito sin más a la calumnia , Dos veces acusado, El tiranicida, El hijo repudiado, Toxaris o la amistad, Sobre las dipsadas, Sobre un error cometido al saludar, Harmónides, El escita o el cónsul, « Colección de autores griegos y latinos » , Madrid 2000 , XXXVIII -285 p . doubles ; 13 M. Jufresa (édit . ), Llucià, Obres , t. I : Diàlegs dels déus, Diàlegs marins, text rev. , introd. i versiò , « Col·lecció Catalana dels Clàssics Grecs i Llatins » 161 , Barcelona 1965 , 117 p .; 14 Ead. & F. Mestre (édit . ) , Llucià, Obres, t. II : Nigri, Demònax, Subhasta de vides, Anacarsis, Menip, text rev ., introd . i versió , « Col·lecció Catalana dels Clàssics Grecs i Llatins » 261 , Barcelona 1990 , 132 p . ; 15 J. Bompaire ( édit. ), Lucien , Euvres, texte établi et trad ., 3 vol . parus, CUF, Paris 1993 , réimpr. 2003, CLXIV -270 p. doubles ( t. I : opuscules 1-10) ; 1998 , réimpr. 2003, XII -362 p . doubles (t . II : opuscules 11-20 ) , 2003, XIII-668 p . doubles ( t. III : opuscules 21-25 ; il s'agit du projet le plus ambitieux du point de vue textuel). Pour suivre de façon exhaustive l'évolution des éditions d'ensemble de Lucien , cf. Bompaire 15 , t. I , CXXIII-CXXXVIII , avec de très riches notices et de très utiles commen taires critiques . Sur la tradition manuscrite , ibid. , p . LI-CXXII . Cf. 16 T. Grigoriadu, « Situa ción actual de Luciano de Samosata en las bibliotecas españolas (manuscritos, incunables e impresos de los siglos XIII-XVII ) » , CFC (G ) 13 , 2003, p. 239-272. Éditions partielles (commentées). 17 J. Schwartz ( édit . ) , Lucien de Samosate, Philopseudès et De morte Peregrini, avec introd . et comm. , coll . « Publications de la Faculté des Lettres de l'Université de Strasbourg. Textes d'étude» 12 , Paris 1951 , réimpr. 1963, 115 p . ( texte grec , sans apparat critique , établi à l'aide des apparats critiques des éditions antérieures) ; 18 K. Mras (édit . ) , Die Hauptwerke des Lukian, griechisch und deutsch , hrsg. und übers. von K. M. , coll . « Tusculum- Bücherei » , Gernsbach 1954, 555 p. ; 19 F. Ollier ( édit. ), Lucien, Histoire Vraie, édit. , introd. et comm. , coll . « Érasme. Collection de textes

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grecs commentés » , Paris 1962 , 110 p. ( le texte grec suivi est généralement celui de de l'édition de Nilén ; l'apparat critique simplifie celui de cet éditeur) ; 20 T. Beaupère (édit. ), Lucien , Philosophes à l'encan, 2 vol . , Paris 1967 (t. I : 59 p.: introd., p. 1-24 ; texte et trad ., p. 25-59; t. II : comm. 148 p. ) ; 21 E. Steindl (édit. ) , Luciani Scytarum colloquia quae inscribuntur Toxaris, Scytha, Anacharsis, cum scholiis, edidit E. S. , coll . BT, Leipzig 1970, XIV -88 p .;22 G. Husson (édit. ), Lucien , Le navire ou les souhaits, 2 vol . , Paris 1970 (t. I : introd ., texte et trad ., XIV -73 p.; t. II : comm. , 102 p. ) ; 22 bis R. Romano (édit. ), Pseudo Luciano : Timarione, testo critico , introd ., trad ., comm. e lessico, coll . « Byzantina et neo Hellenica Neapolitana » 2, Napoli 1974, 197 p. ; 23 H. Homeyer (édit. ) , Lukian, Wie man Geschichte schreiben soll, Griechisch und Deutsch, hrsg ., übers. und erläut. , München 1975 , 312 p. (p. 9-92 : « Einleitung » ; p. 93-165 : « Text und Übersetzung » ; p. 167-284 : « Erklärun gen ») ; 24 V. Longo (édit . ), Dialoghi di Luciano, a cura di V. L. , coll . « Classici greci » , 3 vol . , Torino 1976, réimpr. 1986 (t. I : 847 p.: introd., p . 1-41; « nota biografica », p. 43-46 ; « nota bibliografica », p. 47-55 ; « nota critica » , p. 57-70), 1986 ( t. II : 911 p.: « nota biblio grafica » , p. 7-8 ; « nota critica » , p. 9-30), 1993 (t. III : 739 p.: « premesa » , p. 9 ; « nota biblio grafica » , p. 11 ; « nota critica » , p. 13-3 ; le texte grec , traduit en italien avec des notes, est fondé sur l'editio minor de Jacobitz 5 , mais pour les vol . II et II l'édition de Macleod 9 a été aussi utilisée ; l'ordre des écrits est aussi celui de Jacobitz , fondé sur la recension B ; t. 1 : 1-22 ; t. II : 23-46 ; t. III : 47-80 ; entreprise en cours ) ; 25 H. W. Attridge & R.A. Oden (édit. ) , De Dea Syria, ed . and transl., coll « Society of Biblical Literature Texts and Translations » 9, « Graeco -Roman Religion Series » 1 , Missoula (MT) 1976, V11-61 p.; 26 J. Coenen (édit. ) , Lukian, Zeus Tragodos : Überlieferungsgeschichte, Text und Komm ., coll . « Beiträge zur klassischen Philologie » 88, Meisenheim am Glan 1977 , 153 p. ; 27 A. von Schirnding ( édit.), Lukian, Charon oder die Betrachtung der Welt, griech.-dt., mit Einl . , Übers. & Anm ., coll. « Deutscher Taschenbuch -Verlag » , München 1977 , réimpr. coll . « Textura » 25 , Ebenhausen bei München 1984, 83 p. ; 28 V. Andò (édit. ) , Luciano, Il Lutto, a cura di V. A. , coll . « Hermes » 11 , Palermo 1984, 181 p. ; 29 C. Magueijo , Luciano, Hermotimo ou As escolas filosóficas, pref., trad . e notas, « Clássicos Inquérito » 16, Lisboa 1986, 136 p. (texte grec en face ); 30 M. D. Macleod , Lucian , a selection, ed ., transl. & comm. , coll . « Classical texts » , Warminster 1991, IV -316 p. (comprend : Somn., Dear. Iud ., Deor. conc ., Pisc., Nec., Peregr ., Sacr ., Zeur ., Hist. co .) ; 31 M. R. Pierro, Luciano, Contro un bibliomane ignorante, a cura di M.R.P. ( trad ., texte grec en face) ; con una nota di L. Canfora ; trad . latina di T. Hemsterhuys & I. M. Gesner, coll . « La città antica » 22, Palermo 1994, 111 p. ; 32 M. Matteuzzi, Luciano, Racconti fantastici, nuova ediz. , introd. di F. Barberis, trad. e note di M. M. , coll. « I grandi libri Garzanti » 571 , Milano 1995 , XLII -385 p. (trad, ital. à partir de l'édition de Macleod 9, avec le texte grec en face, de Nav., Icar., Pisc. , Philops., Timo, Vera hist. ) ; 33 U. Victor (édit. ), Lukian von Samosata, Alexandros oder der Lügenprophet, eingel . , hrsg. und erklärt, coll. « Religions in the Graeco -Roman world » 132 , Leiden /New York 1997 , VIII- 180 p.; 33 bis 0. Flores Júnior, « Luciano, O Cínico, tradução e notas » , Kléos 1 , 1997 , p. 254-275 ( texte grec de Macleod 9 en face ) ; 34 M. Billerbeck & Chr. Zubler, unter der Mitarbeit von S. Marchitelli & M. Somazzi (édit. ), Das Lob der Fliege von Lukian bis L. B. Alberti, Gattungsgeschichte, Texte, Übersetzungen und Kommentar, coll . « Sapheneia » 5 , Bern 2000 , p. 57-115 ( « Lukian, “Lob der Fliege” » , texte grec et trad. allemande du Muscae encomium : p. 58-71 ; comm . : p. 73-115 ; le texte grec , avec apparat critique , est fondé sur celui des éditions de Macleod 9 et de Bompaire 15 ; on a collationné aussi plusieurs manuscrits, ainsi que l'editio princeps ); 35 M. Ebner, H. Gzella, H.-G. Nesselrath & E. Ribbat, Lukian , PLOPEVÕETG Ô åniotwv, Die Lügenfreunde oder : Der Ungläubige, eingeleitet, übersetzt und mit interpretierenden Essays versehen , coll . « SAPERE » 3 , Darmstadt 2001 ( 214 p.; texte, trad . et notes par M. Ebner & H. Gzella, p. 62-134 ; le texte grec est celui de l'édition de Macleod 9 revu par 36 H.-G. Nesselrath dans son c.r. des t. I-II de cette édition dans Gnomon 56, 1984, p. 557-609) ; 37 J. L. Lightfoot (édit. ) , Lucian , On the Syrian goddess, ed. with introd ., transl., and comm ., Oxford /New York 2003, XX -606 p. ; 38 M. T. Amado Rodríguez, Luciano de Samosata , Diálogos de deuses ; Diálogos de prostitutas, trad. (avec texte grec en face ), coll . « Clásicos en galego » 21 , Santiago de Compostela / Vigo 2002, 247 p. Cf. Bompaire 15, t. I, p. CXXXIX -CXLII.

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Traductions sans texte grec. 39 T. More , Translations from Lucian , ed . by C.R. Thompson , coll . « The Yale edition of the complete works of St. Thomas More » III 1 , New Haven 1974 , LXXII- 218 p . ; 40 F. Herrera Maldonado , Luciano español : dialogos morales, utiles por sus documentos, trad . castellana del licenciado D. F. de H. M. , Madrid 1621 ( 17962); 41 N. Perrot d'Ablancourt, Lucien , de la traduction de N. P. , Sr. D’A. , nouvelle édit. , reveuë et corrigée, 2 vol . , Paris 1664 ; 42 T. Francklin , The works of Lucian, from the Greek, London 1780, 2 vol. ; 43 J. Reuchlin , Lukians zwöltes Totengespräch in deutscher Sprache ( 1945) ; mit einer übertr. aus dem Griechischen von C. M. Wieland ( 1788 ) ; hrsg. von W. Knellessen , Böblingen -Hulb 1995 , 31 p. ; 44 C. M. Wieland, Lukian : Werke in drei Bänden , aus dem Griech . Übersetzt, hrsg . von J. Werner & H. Greiner -Mai, coll . « Bibliothek der Antike . Griechische Reihe » , Berlin 1974 ( la première édit. de la trad. de Wieland date de 1788-1789 : Leipzig, 6 vol . ) ; 45 H. W. Fowler & F. G. Fowler, The works of Lucian of Samosata, complete with exceptions ... , transl . , 4 vol . , Oxford 1905 ; 46 É. Chambry, Lucien, Euvres complètes, 3 vol . , Paris 1933-1934 ; 47 L. Vilela, Luciano, A Deusa Síria, trad . e notas , Lisboa 1939 , 73 p. ; 48 M. Meunier, Lucien de Samosate, La déese Syrienne, trad . nouv . avec prol . et notes , Paris 1947 , réimpr. 1980, 141 p. ; 49 A. Tovar, Luciano, nueva versión directa, coll . « Clásicos Labor » 7 , Barcelona 1949 , 307 p .; 50 Id. , Luciano de Samosata, Lucio o El asno, trad . , pról. y notas ; xilografías orig . de J. Granyer, coll . « Selección de narraciones breves » 1 , Barcelona 1950 , 103 p .; 51 $ . Tuscano, Luciano, Dialoghi degli dèi, Dialoghi marini, Dialoghi dei morti, trad. e note, Milano 1962 , 207 p. ; 52 F. García Yagüe , Luciano de Samosata, Diálogo de los muertos, Diálogo de los dioses, Diálogo de los dioses marinos, trad., pról. y notas, coll . « Biblioteca de iniciación al Humanismo » , Madrid 1963 , 186 p. ; 53 B.P. Reardon , Lucian , selected works, transl . , with an introd . and notes , coll . « The Library of liberal arts » 161 , New York 1965 , XXXV -276 p. ; 54 F. García Yagüe , Luciano de Samosata, Diálogos de las cortesanas, nota prelim ., trad . y notas , coll . « Biblioteca de iniciación al Humanismo » , Madrid 1972, 88 p.; 55 J. Alsina Clota & E. Vintró, Luciano de Samosata, Historia verdadera, Prometeo o El Cáucaso, Timón o El misántropo, Diálogo de las hetairas, coll . « Maldoror » 24 , Barcelona 1974, 162 p. ; 56 F. García Yagüe , Luciano de Samosata, Diálogos de tendencia cínica, coll . « Biblioteca de la literatura y el pensamiento hispánicos » 12 , Madrid 1976, 295 p. ; 57 H. L. Levy , Lucian, seventy dialogues, introd . & comm. , coll . « American Philological Association Series of Classical Texts » , Norman 1976 , XXV-316 p . ; 58 A. Espinosa Alarcón, Luciano, Obras , t . I , introd . general por J. Alsina Clota, trad. y notas por A.E. A. , coll . « Biblioteca clásica Gredos » 42 , Madrid 1981 , 502 p. ; 59 J. L. Navarro González, Luciano, Obras, t. II , trad . y notas , coll . « Biblioteca clásica Gredos » 113 , Madrid 1988 , 471 p . ; 60 M. C. Puche López , Pseudo -Luciano, Lucio o El asno, introd . , trad . y notas, coll . « Textos de creación literaria » 11 , Murcia 1988 , 87 p. ; 61 C. Ferretto & M. Matteuzzi , Luciano di Samosata, Il negromante ; L'Alessandro o il falso profeta, trad . , introd. e comm. di C. F. (Il negromante) & M. M. (L'Alessandro ), coll . « Nuova Atlantide. Sez. I classici del pensiero magico esoterico e simbolico » , Genova 1988 , 209 p. ; 62 A. da Costa Ramalho, Diálogos dos mortos, introd . versão & notas, coll . « Textos cláss . 31 , Coimbra 1989 , 116 p. ; 63 J. Zaragoza Botella, Luciano, Obras, t. III , trad. y notas , coll . « Biblioteca clásica Gredos » 138 , Madrid 1990, 526 p . ; 64 J. L. Navarro González, Luciano, Obras, t . IV , trad. y notas , coll . « Biblioteca clásica Gredos » 172 , Madrid 1994, 494 p.; 65 J.-P. Dumont, Lucien, Hermotime ou comment choisir sa philosophie, présent. et trad . , coll . « Perspectives critiques » , Paris 1993 , 208 p. ( trad. établie sur le texte de Dindorf 4 ) ; 66 P. Maréchaux , Lucien de Samosate, Amours, trad. et présent., coll . « Retours aux grands textes. Domaine grec » , Paris 1993 , 171 p. (contient Les amours, le Toxaris et les Dialogues des courtisanes ); 67 E. Pellizer & A. Sirugo, Luciano, Dialoghi delle cortigiane, introd . e trad . di E. P ; comm . di A. S. , coll . « Il convivio : collana di classici greci e latini » , Venezia 1995 , 194 p . ; 68 C. Magueijo, Luciano, O mentiroso ou o incrédulo, trad . , introd . e notas, coll . « Mare nostrum . Clássicos » 4 , Lisboa 1995 , 75 p.; 69 0. Zink , Lucien, Philosophes à vendre ; suivi de Le pêcheur ou Les ressuscités, trad . , présent. et notes , coll . « Le livre de poche » 13991 , Paris 1996, 123 p . ; 70 C. García Gual , J. Curbera , M. del Barrio & J. Bergua, Luciano de Samosata, Relatos fantásticos : Relatos verídicos,Ícaromenipo o Menipo en los cielos, Cuentistas o El descreído, El gallo, Lucio o El asno, introd . de C.G. G. , trad . y notas de C. G. G (Rel. ver. ), J. C. ( Ícar. y Cuent . ), M. del B.

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( El gallo) & J. B. (Lucio) , coll . « Biblioteca temática » 8211 , Madrid 1998 , 223 p.; 71 V. Castro Rodríguez, Luciano de Samosata, El sueño de Luciano, Diálogos de los muertos, Madrid 2003, 59 p. ; 72 G. Lacaze , Lucien, Histoires vraies et autres æuvres ; préf. de P. Demont ; introd ., trad. nouv. et notes de G. L. , coll . « Le livre de poche » 16117 , Paris 2003, 317 p. (contient aussi Somn ., Tim ., Im ., Icar ., Philops., Peregr., Deor. conc .). Cf. Bompaire 15, t . I , p. CXLIII-CLI . Cf. 73 L. de Faveri, Le traduzioni di Luciano in Italia nel XV et XVI secolo , coll. « Lexis research tools » 4, Amsterdam 2002, XVIII- 40 p. Anthologies. 74 L. Gil , J. Zaragoza & J. Gil , Antología de Luciano, selección de textos, com. y notas de L. G. , con la colab. de J.Z. & J. G. , coll . « Clásicos Emerita » , Madrid 1970, XIX - 300 p. ( une excellente sélection de textes présentés suivant un scheme analytique très complet de la vie, de l’æuvre et de la pensée de Lucien ) ; 75 K. Sidwell , Lucian, selections, ed . with notes & vocab ., Bristol 1986, VI - 145 p. Scholies. 76 H. Rabe (édit . ) , Scholia in Lucianum, coll . BT, Lipsiae 1906 ; réimpr. Stutgardiae 1971 , X -336 p . ( cf. Bompaire 15 , p. CLI-CLVI). Lexique. 77 C.C. Reitz, Index verborum ac phrasium Luciani, sive Lexicon Lucianeum, Ad editiones omnes , maxime novissimam Wetstenianam, concina tum a C. C. R. , Trajecti ad Rhenum 1746 , XVI - 503 p ( = t . IV de l'édit . Hemsterhuys & Reitz 2) . Bibliographie. 78 V. Fumarola, « La più recente critica su Luciano » , A & R 9 , 1964 , p . 97-107 ; 79 J. L. Brandão , « Um século de bibliografia luciânica : a história de uma polêmica » , Classica : revista brasileira de estudos classicos ( São Paulo ) 5-6 , 1992-1993 , p. 243-253 ; 80 M.D. Macleod , « Lucianic Studies since 1930 » , with an Appendix : « Recent Work (1930-1990 ) on some Byzantine imitations ofLucian » ( by B. Baldwin ) , ANRW II 34 , 2 , 1994, p . 1362-1421 . Études d'orientation . 81 W. Christ - W . Schmid - O . Stählin , Geschichte der griechischen Literatur, t . II 2 , coll . « Handbuch der Altertumswissenschaft >> VII 2 , 2 , München 19246 , p . 710-745 ; 82 R. Helm , art. « Lukianos» , RE XIII 2 , 1927 , col . 1725-1777 ; 83 N. Festa , art. « Luciano di Samosata » , Enciclopedia italiana XXI , 1933 , p . 582-584 ; 84 J. Schwartz , Biographie de Lucien de Samosate, coll . « Latomus » 83 , Bruxelles/Berchem 1965 , 160 p . ; 85 G. W. Bowersock , Greek sophists in the Roman Empire, Oxford 1969 , p . 114-116 ; 86 L. Petersen , PIR2 V 2 , 1970 , L 370 , p. 97 sq .; 87 B. Baldwin , Studies in Lucian, Toronto 1973 , XV - 123 p. ; 88 J. A. Hall, Lucian's satire, coll . « Mono graphs in classical studies » , New York 1981 , XII -675 p. ; 89 C.P. Jones, Culture and society in Lucian, Cambridge (Mass .)/London 1986, XIV - 195 p . ; 90 H.-G. Nesselrath , art. « Lukianos von Samosata » , NP VII , 1999 , col . 493-501 ; 91 Id ., « Lukian : Leben und Werk » , dans Ebner, Gzella, Nesselrath & Ribbat 35 , p. 11 31 ; 92 W.M. Edwards, R. Browning & G. Anderson , art. « Lucian » , OCD3 , 1996 , p . 886-887 .

B. Biographie Sources. Les critiques ont été toujours étonnés du fait qu'un auteur comme Lucien, qui devait vraisemblablement être bien connu à son époque ne se trouve pratiquement pas mentionné chez ses contemporains. Le silence de Philostrate dans ses Vies des sophistes semble particulièrement choquant, même si celui -ci a pu considérer à juste titre que Lucien n'était pas un sophiste au sens pur du terme ( cf. Alsina Clota, dans Espinosa Alarcón 58 , t . I , p . 23 ) . En tout cas , ce

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silence n'est pas absolu , si on tient compte de la traduction arabe du commen taire de Galien sur les épidémies d'Hippocrate (II 6, 29 ) , où il est question d'un Lucien qu'il faut sans doute identifier avec notre auteur (même si Galien ne l'a pas connu personnellement ) , comme l'a démontré de façon convaincante 93 G. Strohmaier , « Übersehenes zur Biographie Lukians » , Philologus 120 , 1976 , p . 117-122 . En effet, afin d'illustrer l'idée selon laquelle certains érudits malveillants ont introduit dans les écrits d'Hippocrate des expressions difficiles avec l'intention de mettre en évidence l'ignorance des « sophistes » contemporains , Galien mentionne « un contemporain à nous du nom de Lucien » comme l'auteur d'un livre où il aurait attribué à Héraclite des expressions rares et obscures n'ayant aucun sens mais qui seraient passées comme des expressions authentiques de ce philosophe , si bien qu'elles auraient fait l'objet d'un commentaire explicatif de la part d'un philosophe contemporain . Le but de Lucien serait de discréditer certains sophistes ou grammairiens incompétents qui s'obstinaient à expliquer des expressions inventées par Lucien lui-même. Strohmaier met en évidence l'importance de cet unique témoignage fourni par un contemporain de Lucien : ce témoignage montre un Lucien tout à fait prêt à se faire des ennemis , ce qui s'accorderait bien à ce qu'on connaît de lui à travers ses propres écrits ; et il expliquerait, d'après Strohmaier 93 , le fait que des auteurs comme Philostrate ne l'aient pas mentionné dans leurs écrits , même pas pour le critiquer, afin de ne pas contribuer en quoi que ce soit à perpétuer sa mémoire. En effet, le plus probable c'est que Philostrate ne lui pardonnait pas ses attaques virulentes contre bon nombre de sophistes ( cf. Bompaire 15 , t . I , p . XXXVI ) . Et ce point de vue d'un Lucien s'étant fait une foule d'ennemis a été repris et développé par 94 M. D. Macleod , « Lucian's activities as a uloarátwv » , Philologus 123 , 1979 , p. 326-328 . Il va sans dire en tout cas que l'esprit caustique et polémique représentait sans doute un trait capital et déterminant non seulement de l'auvre mais aussi de la personnalité de Lucien . Sur Lucien et son emploi péjoratif du terme « sophiste » , cf. aussi 95 P. Gómez Carló, « Sofistas, según Luciano » , dans J.-M. Nieto Ibáñez (édit. ) , Lógos Hellenikós : homenaje al Profesor Gaspar Morocho Gayo, León 2003 , p. 277-284 (t . I) : « El sofista tanto si es un héroe, como un filósofo o una divinidad ... , es siempre acusado de hombre vacío , farsante, fatuo, adulador, engañador, sensible a cualquier lisonja , cuya única habilidad consiste en el dominio de la palabra hueca orientado , en términos generales , sólo al aplauso fácil o a la captación y seducción del público » (p. 284). Après Galien , il faut attendre , du côté des chrétiens, Lactance ( » L 7 ) ( III/IV ), Inst. div . I 9 , col . 159 b , qui cite le nom de Lucien à propos du manque de respect de celui -ci à l'égard des hommes et des dieux ; et, du côté des païens, Eunape de Sardes ( IV/ v ; ” E 121 ) , qui , tout en considérant que Lucien , de façon générale , a mis tous ses efforts à provoquer le rire , met à part sa Vie de Démonax, avec un très petit nombre d'autres écrits qu'il ne précise pas , comme des écrits où les desseins de l'auteur auraient été , en revanche, purement sérieux ( V. Soph. II 1 , 9 , p. 454 Giangrande : AouxlavÒç dè ó éx Eauooátwv , åvre σπουδαίος ες το γελασθήναι , Δημώνακτος φιλοσόφου κατά εκείνους τους

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χρόνους βίον ανέγραψεν, εν εκείνω τε τα βιβλία και άλλοις ελαχίστοις διά όλου σπουδάσας).).

Déjà dans le monde byzantin , Photius (IX) cite et commente souvent les écrits de Lucien ( cf. Bibl. cod. 128 sq . etc. ) , comme un siècle plus tard l'auteur de la Souda , dont il faut mentionner notamment la notice s.v. Aouxlavóc ( A 683 ; t. III , p. 283 , 2-12 Adler) , bien que la valeur de celle-ci soit sans doute diminuée par une erreur évidente sur sa chronologie ( cf. infra ), mais surtout par les juge ments et les renseignements légendaires et hostiles issus sans doute du christia nisme byzantin : « Lucien de Samosate, surnommé le blasphème ou le diffamant, mais qu'il faudrait plutôt appeler l'athée, puisque les légendes sur les dieux se trouvent ridiculisées dans ses dialogues. Il est né et mort sous le règne de l'empereur Trajan. Il fut d'abord avocat à Antioche de Syrie, mais, après avoir échoué dans cette profession , il se mit à écrire des conférences et il en composa d'innombrables. On dit qu'il est mort en proie à des chiens, pour s'être enragé contre la véritable foi. En effet, dans sa Vie de Pérégrinus, il s'en prend au christianisme, et, le grand infâme, il blasphème contre le Christ lui-même, ce pourquoi il paie dans le présent suffisam ment une expiation pour sa rage, et il sera dans l'avenir l'héritier du feu éternel en compagnie de Satanas. » Devant cette situation, si on veut essayer de dégager d'une façon plus précise et plus sûre la personnalité , la vie et la chronologie de Lucien , il faut finalement toujours avoir recours aux écrits de Lucien lui-même à la recherche de possibles références autobiographiques , qu'il faut, bien sûr, analyser aussi avec un grand soin , étant donné le caractère essentiellement et profondément fictif de sa production littéraire . En effet, comme le remarque F. Barberis dans Matteuzzi 32 , p. IX , l'autobiographie n'est chez Lucien qu'un instrument occasionnel , un matériel qui se trouve sans doute toujours refaçonné, souvent d'un point de vue ironique. Date de naissance . La considération de certaines allusions historiques que l'on trouve dans les écrits de Lucien empêche d'accepter l'affirmation de la Souda ( cf. supra ) selon laquelle Lucien serait né et mort sous le règne de Trajan (98-117) . En effet, Lucien a sans doute survécu à Marc Aurèle ( † 180 ; cf. Alex. 48 ), et sa date de naissance doit être placée soit à la fin du règne de Trajan, soit au début de celui d'Hadrien ( 117-138 ) . La fixation de cette date dépend notam ment de la date de la soi-disant renonciation de Lucien à la sophistique qui est intervenue alors qu'il avait à peu près 40 ans ( cf. Bis acc . 32 ; Pisc . 29 ; Herm . 13 ) : les critiques ont placé ce floruit vers l'an 165 , qui coïncide avec la date des Jeux Olympiques à la fin desquels le philosophe cynique pythagorisant Péré grinus Proteus s'immola par le feu ( cf. Jérôme, Chron . d'Eusèbe, p . 204 , 24 Helm ) . En effet, on sait que l'un des dialogues que Lucien composa dans la quarantaine, concrètement Les fugitifs, où il fait une critique du cynisme dirigée contre un cynique anonyme ( surnommé Cantharus [ PC 37a) , « scarabée » ) , qui était un disciple de Pérégrinus, a été écrit après la mort de ce dernier (cf. Fug. 1 3 ) . Cela permettrait donc de dater la naissance de Lucien ca 125 : Jones 89, p . 8 , 167 sq . et Nesselrath 91 , p . 12 , proposent: entre 115 et 125 ; en revanche , Bompaire 15 , t . I , p. XII n . 5 , à la suite de Christ-Schmid - Stählin 81 , p . 711 n . 2 ,

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715 , circonscrit le choix plutôt entre 115 et 120, alors que Schwartz 84 , p. 14, proposait 119 et même un peu plus haut ( cf. infra ). Patrie. L'ensemble de la tradition ( cf. aussi Hist. co . 24) est unanime sur le fait que Lucien est né à Samosate (aujourd'hui Samsat en Turquie ), ville placée sur l'embouchure de l'Euphrate , dans la région orientale de la province romaine de Syrie, appelée Commagène. Puisqu'il y existait une communauté culturelle grecque et syro -araméenne très importante, on a imaginé d'ordinaire que sa langue maternelle était l'araméen , et qu'il a pu apprendre le grec déjà dans sa patrie comme sa deuxième langue ( cf. Nesselrath 91 , p. 12 ; Bompaire 15 , t. I , p . XII n . 6 ) . En fait, il se présente plusieurs fois lui -même dans ses écrits comme un Syrien qui a reçu la formation grecque comme un étranger ( cf. Pisc . 19 ; Bis acc. 14 , 25 , 30, 34 ; Adv. ind. 19 ; Scyth. 9). Il évoque même le temps où , jeune garçon, il était ßápßapov šti tnv pwvv (Bis acc. 27 ) . En principe, il n'y a donc pas de raison de douter qu'il était d'origine étrangère, plus concrètement syrienne , qu'il avait appris la langue (et la culture) grecque comme un étranger et qu'il avait même toujours gardé un certain accent étranger. Qui plus est , le regard curieux et pénétrant, toujours critique et paradoxal qui préside à son æuvre semble s'accorder aussi très bien à cette origine étrangère. Cependant, l'idée qu'il était d'origine sémite n'a pas fait l'unanimité (cf. 96 E. Braun, Lukian, « Unter doppelter Anklage » : ein Kommentar, coll . « Studien zur klassischen Philologie » 85 , Frankfurt am Main 1994, p. 326). D'après Festa 83, p. 582, les passages cités plus haut dans lesquels Lucien évoque une jeunesse où il parlait encore une langue étrangère et où il se présente volontiers comme un Syrien n'impliquent pas nécessairement qu'il n'était pas en réalité grec d'origine : « Vogliono sapere troppo quelli che attraverso certi caratteri della sua produzione letteraria credono di scoprire in lui le note della razza semitica » . Cf. aussi F. Barberis dans Matteuzzi 32 , p. IX : « ... rimane incerta una delle questioni più curiose della vita di Luciano, se cioè la sua lingua madre fosse il greco o il siriaco ; il suo frequente ricordare di essere stato Bápßapov Éti TNU Owvñv potrebbe indicare una originaria totale ignoranza del greco ma anche , più semplicemente , un'intonazione o un accento straniero conservatosi nella pronuncia ». Bien sûr, l'acceptation d'une origine purement sémitique pour Lucien n'a rien à voir avec certains jugements d'ordre plus ou moins raciste présents dans la critique, tout à fait rejetables et sans fondement (cf. infra, C) . Pour le dire avec Lucien lui - même , l'important n'est nullement l'origine que l'on a eue mais l'éducation et les valeurs que l'on a reçues ( cf. Pisc. 19 ) . Son nom dérive du praenomen latin « Lucius » : dans les écrits de l'auteur, il apparaît le plus souvent hellénisé comme Aouxlavós, mais quelquefois aussi comme Auxīvoç. Si Lucien était un sémite , on ignorerait son nom authentique , au contraire, par exemple , de ce qui arrive pour le cas de Porphyre : le nom sémite de celui -ci était Malchos/Malkos , dont la traduction en grec serait « Basileus» ( c'est ainsi que l'appelait Longin ( · L 63 ] ) , tandis que « Porphy rios » pourrait être un surnom . Si , comme le préférait Festa 83 , Lucien était de naissance un gréco -romain résident à Samosate , son nom pourrait faire penser assez facilement à un affranchi romain . En tout cas , il provenait sans doute d'une famille plutôt modeste, qui ne possédait pas au départ la citoyenneté romaine , mais pouvait lui procurer quand même une certaine formation , et par la suite une meilleure position. Lucien lui

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même nous permet de reconstituer quelques moments décisifs de ce processus de formation, et de sa carrière en général, s'il faut faire confiance à nouveau aux données autobiographiques qu'il insère dans ses écrits. Tout d'abord, grâce à l'écrit qui se présente comme le plus strictement « auto biographique » , Le songe ou la vie de Lucien, on connaît un épisode déterminant de son adolescence qui devait finalement ouvrir pour lui d'une façon presque miraculeuse , par l'intermédiaire d'un songe , le chemin pour obtenir une meilleure éducation que celle à laquelle il était en principe destiné. Lucien raconte comment, lorsqu'il termina l'école ( arrivé donc à l'âge de 14 ans), son père, en accord avec d'autres membres de la famille, décida qu'il devait se mettre à l'appren tissage d'un métier artisanal, qui lui permettrait de contribuer rapidement à la modeste économie familiale, plutôt que de poursuivre des études exigeant beaucoup trop de temps et d'argent; et l'on décida concrètement qu'il devait apprendre le métier de sculpteur, puisqu'il pouvait accomplir cet apprentissage auprès de son oncle maternel, un sculpteur de prestige, et puisque l'enfant semblait, par ailleurs, montrer lui -même un talent naturel pour cet art. Cependant, le jeune Lucien quitta son oncle le premier jour, afin d'échapper au châtiment pour avoir brisé par négligence une planche de marbre. De retour chez lui , et après avoir été consolé par son père , Lucien fait un rêve, où deux femmes se présentent devant lui , qui tentent chacune de s'approprier sa volonté par tous les moyens : d'une part, la Sculpture, d'aspect rude et sale ; de l'autre, l'Éducation (Paideia ), élégante et bien habillée. Après avoir écouté les arguments de celle - ci, qui lui promet le plus grand succès et la plus grande réputation, Lucien décide de l'accompagner, rejetant l'autre femme. Lucien raconte ce songe adolescent à ses compatriotes beaucoup plus tard , après avoir réalisé des voyages qui lui ont permis d'obtenir de l'éducation , et parallèlement passablement de succès ( cf. infra ). Se présentant comme un exemple à suivre pour les jeunes de famille modeste possédant des dispositions naturelles pour l'activité intellectuelle , il les incite à échapper eux aussi à la pauvreté et au travail manuel. En ce qui concerne le talent naturel de Lucien pour la sculpture évoqué dans le Songe, on a voulu reconnaître dans les nombreuses descriptions d’æuvres d'art ( ekphraseis ) que l'on trouve tout au long de ses ouvrages une preuve de sa vive sensibilité artistique, même si son éducation technique semble se révéler plutôt insuffisante : cf. 97 A. Le Morvan , « La description artistique chez Lucien » , REG 45 , 1932, p. 380-390 ; Gil 74, p. 5 . Grâce à d'autres écrits , on peut préciser davantage le parcours suivi par Lucien . On le trouve tout d'abord en lonie , fréquentant les grands centres de l'époque pour l'apprentissage de la rhétorique, à l'école des sophistes ( cf. Bis acc. 27 ) . On a imaginé qu'il a pu , en même temps qu'Aelius Aristide, entendre le grand Polémon à Smyrne, à la fin du règne d'Hadrien ( † 138), et qu'il a pu entendre également en Ionie Hérode Atticus, entre 131 et 136, s'il est né en 115 ( cf. 98 A. Boulanger, Aelius Aristide et la Sophistique dans la province d'Asie au IIe siècle de notre ère, Paris 1923 , p . 117 ; 99 Id ., « Lucien et Aelius Aristide » , RPh 47 , 1923 , p. 144-151 ; Christ-Schmid - Stählin 81 , p . 711 n. 2 ; Bompaire 15 , t. I , p . XIII et n . 7) . D'après la Souda ( cf. supra ), il exerça comme avocat à Antioche, mais sans le moindre succès . Il devait avoir alors environ 28 ans ( ca 153 ). Quant à la ville d'Antioche, elle était à l'époque un grand centre culturel, où païens et chrétiens se rencontraient dans l'étude, et c'est là vrai semblablement que Lucien est entré pour la première fois en contact avec le monde chrétien ( cf. Alsina Clota, dans Espinosa Alarcón 58 , t . I , p . 25 ).

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Après l'échec dans la profession d'avocat, il s'adonna, comme le dit la Souda, à l'activité de conférencier. En tant que sophiste itinérant, se rendant de ville en ville pour faire des exposés sur tous les sujets, ses tournées le conduisirent en Italie et en Gaule, où il bénéficia de la sorte d'une grande célébrité et d'une bonne situation financière ( cf. Bis acc. 27 ) . Du point de vue de la forme, si on envisage Lucien dans le cadre du mouvement de ce qu'on appelle depuis Philostrate « Seconde sophistique » , il se montre partisan de la sobriété dans l’éloquence ( « atticisme » , bien que celui-ci soit pratiqué sans affectation ), contre les excès d'une partie considérable des orateurs contemporains (« asia nisme » ; cf. Electr . 6 ; pour sa langue , cf. 99 bis R.J. Deferrari, Lucian's Atticism : the morphology of the verb, Princeton/London 1916 , réimpr. Amsterdam 1969 , IX - 85 p . ) . En Gaule , il est probable qu'il est même arrivé à exercer une fonction publique en tant que professeur de rhétorique (dans une chaire municipale ), recevant un salaire élevé pour ses services , comparable à celui des sophistes ( cf. Apol. 15 ) . À Rome , à l'occasion d'une visite chez l'oculiste (sans doute purement fictive et symbolique ), il rencontra ( ca 159 ?) le philosophe Nigrinus (= N 59) , dont l'entretien l'aurait tellement impressionné, qu'il affirme, dans le dialogue qu'il consacre à ce personnage ( fictif ?) , s'être converti à la philosophie grâce à lui . Lorsqu'il raconta plus tard cet épisode, il avait probablement environ 40 ans (ca 160 ), et il était installé à Athènes, dont il admirait passionnément entre autres la vie intellectuelle ( cf. Nigr. 17 ). C'est sans doute en hommage au peuple athénien , qui l'a si bien accueilli , qu'il écrit cet éloge enthousiaste , en même temps qu'il fait la censure de la vie romaine . Ce séjour athénien , qui fut sans doute assez long et qui lui permit de compléter excellemment sa formation hellénique , était marqué apparemment par sa renonciation au métier de sophiste en faveur de la philosophie , bien que l'existence d'une période philosophique au sens strict chez Lucien soit tout à fait problématique ( cf. infra, C) . En tout cas , il est évident que Lucien va désormais accentuer sa vision satirique et sceptique du monde et de la philosophie , à travers une attitude critique représentée par excellence dans son Hermotime ou sur les sectes , qui peut être daté de l'époque où l'auteur se trouvait dans la quarantaine (cf. Herm . 13 ) . Quant à sa vision de Rome, les avis sont partagés sur l'attitude réelle de Lucien : certains critiques ont eu tendance à le présenter comme un ennemi des Romains, mais d'autres lui ont attribué plutôt une attitude discrète et prudente ( cf. infra ). En 161/162 , il se trouvait probablement à nouveau dans la partie orientale de l'Empire : c'était le début de la guerre contre les Parthes, et il revint alors à Samosate (c'est sans doute alors qu'il écrivit pour ses compatriotes Le songe ; cf. supra ). La situation délicate de sa patrie Samosate comme ville frontière dut le convaincre de faire sortir de la ses parents ( τον πατέρα και τους εμούς ) et de les amener jusqu'à la côte plus sûre de l'Asie Mineure , concrètement à Amastrée ( cf. Alex. 55 sq. ), et il arriva lui aussi à Abonotique , entre autres, où il rencontra le prophète Alexandros , à ses yeux un pur charlatan ( A 110 ) . La date de ce voyage était placée d'ordinaire en 164/165 ( cf. Schwartz 84 , p . 19 ; Petersen 86 , p . 98 ; Hall 88 , p . 20-29 ; Jones 89 , p . 17 sq . [ cf. en revanche

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100 Id ., « Lucian and the Bacchants of Pontus » , EMC 34 , 1990 , p. 53-63 , notamment p . 62 n . 43 ) ; Bompaire 15 , t . I , p. XIII ) , mais d'autres critiques ont incliné récemment pour la date indiquée plus haut, 161/162 (cf. 101 C. Marek , « Katalog der Inschriften im Museum von Amasra » , EA 6 , 1985 , p. 133-155 , notamment p . 148 sq .; 102 S. Swain , Hellenism and Empire : language, classi cism and power in the Greek world AD 50-250, Oxford 1996 , p . 324-326 ; 103 J.-J. Flinterman , « The date of Lucian's visit to Abonuteichos » , ZPE 119 , 1997 , p. 280-282 ; Nesselrath 91 , p . 13 ) . Ensuite (en 163/164 ), Lucien revient encore une fois à Antioche en Syrie, où il écrit un certain nombre d'ouvrages (Sur la danse, Les portraits, Défense des portraits, et peut- être aussi Comment il faut écrire l'histoire ) pour se ménager la faveur de l'empereur romain Lucius Verus ( qui règne à côté de Marc Aurèle) et sa maîtresse Pantheia, lesquels séjournent dans cette ville en 163-166 à l'occa sion de la guerre contre les Parthes ( sur les rapports entre Lucien et L. Verus, cf. 104 C.P. Jones , « Two enemies of Lucian , GRBS 13 , 1972 , p . 475-487 , notamment p. 484 sqq.). Mais en 165 Lucien se trouve à nouveau en Grèce, à Olympie , où il est témoin direct du suicide déjà évoqué du philosophe Pérégri nus ( cf. Peregr. 35 ; Pseudol. 7 ). D'après 105 J. Alföldi, Konsulat und Senatorenstand, Bonn 1977 , p. 238 sq. , le gouver neur de Syrie amateur de philosophie qui accorda son pardon au philosophe Pérégrinus lorsque celui-ci fut emprisonné en Palestine en raison de son appartenance au milieu chrétien ( Peregr. 14) , doit être identifié avec Arrien de Nicomédie ( * A 425 ) , qui aurait été gouver neur de Syrie ca 138-141 . Cette hypothèse a été reprise par 106 M.C. Macleod, « Lucian's relationship to Arrian » , Philologus 131 , 1987, p. 257-264, entre autres raisons du fait que l'existence de gouverneurs ayant eu un intérêt pour la philosophie ne paraît pas avoir été très commune. Par ailleurs, Lucien aurait passé sous silence le nom d'Arrien afin de ne pas l'impliquer directement dans un écrit qui était une critique du philosophe en question . Macleod soutient en effet que Lucien éprouvait de l'admiration pour Arrien et qu'il est possibleque celui -ci ait été son bienfaiteur ( sur le rapport entre Lucien et Arrien, cf. aussi 107 G. Wirth , « Anmerkungen zur Arrianbiographie ; Appian - Arrian – Lukian » , Historia 13, 1964, p. 209-245 ). Comme nous l'avons vu plus haut, on possède par ailleurs des indices du fait que Lucien a séjourné longuement à Athènes pendant ces années 160 et les années 170. En effet, il affirme qu'il a été longtemps disciple du philosophe cynique Démonax , qui habitait dans cette ville ( cf. Dem . 1 ) . Par ailleurs , à l'époque où Lucien écrivit le Nigrinus, il est évident qu'il avait déjà fréquenté la Grèce à plusieurs reprises, notamment Athènes ( cf. supra ), dont il connaissait très bien l'histoire et les institutions classiques , qu'il présente toutefois le plus souvent en les contaminant avec des éléments de sa propre époque ( cf. 108 J. Delz, Lukians Kenntnis der athenischen Antiquitäten, Inaug . -Diss . , Freiburg in der Schweiz 1950, VIII - 193 p. ) . En fait, comme le remarque Nesselrath 91 , p . 14, le cadre d'un grand nombre d'écrits de Lucien se situe dans cette ville : outre la Vie de Démonax, Zeus tragédien, Les sectes à l'encan, Le pêcheur ou les ressuscités, La double accusation ou les tribunaux, Le navire ou les souhaits, Anacharsis ou des exercices du corps, L'eunuque . Et l'on a suggéré aussi qu'Athènes pouvait être le contexte de l'anecdote de Galien ( cf. supra ) selon laquelle Lucien aurait mystifié par un pastiche d'Héraclite grammairiens et

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philosophes (cf. Jones 89, p . 19 ; Nesselrath 91 , p . 14 ; Bompaire 15 , t. I , p . XIV sq .). Il s'était fait sans doute pas mal d'ennemis , mais aussi quelques alliés, entre autres dans les « réseaux » épicuriens (cf. Bompaire 15 , t. I , p. XV ). Les critiques ont essayé d'identifier les ennemis réels qui pouvaient se trouver derrière les personnages anonymes attaqués dans les écrits de Lucien . Ainsi , Jones 104, p. 475-487, à travers notamment le témoignage des Vies des sophistes de Philostrate, défend l'identification des personnages attaqués dans le Lexiphanès (un individu qui est possédé par une passion pour les mots obscurs ou inventés) et Le pseudologiste ou sur le mot apophras, avec Philagrus de Cilicie et Hadrien de Tyr respectivement ( cf. aussi Strohmaier 93, p. 119). 109 G. Russo, « Per un'identificazione del maestro dei retori di Luciano » , Sileno 23 , 1997 , p . 211-223 , propose d'identifier aussi avec Hadrien de Tyr le personnage critiqué par Lucien dans Le maître de rhétorique (cf. en revanche 110 J. Gil , « Lucianea » , Habis 10-11 , 1979-1980, p. 87 104, pour qui l'orateur vaniteux , efféminé et peu scrupuleux décrit dans ce dernier ouvrage est Apulée ( + * A 294] ; d'autres critiques ont pensé à Pollux : cf. Petersen 86, p. 98). Lorsqu'il était déjà plus ou moins âgé ( cf. infra ), Lucien quitta à nouveau Athènes pour aller occuper un poste important dans l'administration de l'Égypte. Cet épisode nous est connu principalement par son Apologie, où l'auteur se justifie d'avoir abandonné son habituelle indépendance personnelle en acceptant un tel emploi public , contre ceux qui l'accusent d'hypocrisie et d'inconstance, puisqu'il avait auparavant écrit contre les gens qui se mettent aux gages des riches (Sur ceux qui sont aux gages des grands). Sans cacher l'argument de sa vieillesse et de son infirmité ainsi que sa volonté d'échapper à la pauvreté, il allègue notamment ( cf. Apol . 9-14 ) son admiration pour la valeur et l'intelligence de la personne ( le préfet, l'empereur ?) au service de laquelle il est fier de se trouver (την σύνεσιν και ανδρείαν και μεγαλόνοιαν του ανδρός θαυμάσας εθελήσαι κοινωνήσαι πράξεων των τοιούτω) , ainsi que sa fidelite a l'égard de cette personne , puisque l'auteur se déclare aussi son ami ( vi äv ärro ες δέον αυτό χρώτο , ή φίλους συμπονών προς τα βέλτιστα καν τω μέσω υπαίθριος πείραν αυτού διδους όπως έχει πίστεως και σπουδής και ɛúvolaç npòc tà éyxexelplouéva ); il allègue , par ailleurs, qu'il est un fonctionnaire public , qui se trouve au service de l'État et non d’un riche particulier, ce qui est tout à fait différent. Lucien lui - même décrit les fonctions qu'il est en train d'occuper dans l'administration de l'Égypte (cf. Apol. 12 ) : introduire les causes et leur assigner le rang convenable , rédiger des procès- verbaux (útrouvnuata ) de tout ce qui a été fait et dit, diriger les plaidoyers des avocats, conserver les décrets du préfet ( τάς του άρχοντος γνώσεις ) dela fagon la plus claire et la plus fidele possible et les déposer aux archives publiques . Cependant, l'identification précise de ce poste n'est pas sûre ( cf. Hall 88 , p . 7 n . 13 [p . 440 sq.); Jones 89, p. 20 sq .). A ce sujet, il faut citer tout d'abord 111 H.G. Pflaum , « Lucien de Samosate , archistrator praefecti Aegypti, d'après une inscription de Césarée de Mauretanie » , MEFRA 17 , 1959, p. 281-286 ; repris dans Afrique romaine : scripta varia, t. I , Paris 1978 , p. 155-160. En effet, à partir du POxy. II 294, où il est question de la clientèle de l'archistator Apollonius de 22 ap . J.-C., Pflaum déduit que c'est ce poste qu'il faut lire entre les lignes de Lucien, lequel aurait évité, en bon écrivain , d’employer le terme technique. Par ailleurs, à partir d'une inscription de Césarée , Pflaum déduit que ce poste de åpxlotpárop (archistrator praefecti Aegypti), sorte d'huissier en chef, était intégré dans la carrière procuratorienne équestre : ce poste sexagénaire ( comportant un salaire annuel de 60.000 sesterces) était occupé normalement après trois militiae equestres.

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Schwartz 84 , p. 12, considère que la personne dont Lucien , dans sa défense, parle avec admiration afin de justifier son acceptation du poste, fier de se trouver à son service, n'est pas l'empereur mais plus concrètement le préfet d'Égypte, et il identifie celui-ci avec C. Calvisius Statianus « qui , à partir d'un moment donné se plaçant entre 161 et 169 ap. J.-C. , est attesté comme ab epistulis Latinis à Rome et dont la carrière se termina brutalement, dans l'été 175 ap. J.-C. avec l'échec de la révolte d'Avidius Cassius. On sait par Dion Cassius (LXXI 28 , 3 4) que Marc Aurèle se contenta d'envoyer Statianus dans une île, sans le priver de ses biens, et qu'il laissa libres tous ceux qui avaient été avec lui ... Lucien retourna alors à Athènes pour reprendre son activité littéraire » ( cf. aussi Petersen 86 , p. 98 ; Bompaire 15 , t. I , p. XV ) . Par ailleurs, Lucien aurait obtenu le poste, d'après Schwartz 84 , p. 14, grâce à des appuis élevés dans les milieux littéraires proches de la cour impériale : « Un échange de correspondance entre Fronton et Marc Aurèle nous apprend qu'Hérode Atticus fut élevé chez un Calvisius, grand père de Marc Aurèle . Ainsi , a priori, Lucien peut avoir été également aidé par Fronton et par Hérode Atticus, qui moururent, tous deux , quelques années plus tard après des périodes d'amitié et de brouille ; son entrée dans l'ordre équestre paraît alors moins extraordinaire » ). En réalité, tous ces détails ainsi que la fonction exacte de Lucien restent douteux . Ainsi 112 J. van der Leest, « Lucian in Egypt » , GRBS 25 , 1985 , p. 75-82, considère qu'il aurait eu le poste de εισαγωγεύς , non pas celui de άρχιστράτορ , ni celui de υπομνηματογράφος , qu'avait repris Jones 104 , p. 486 n . 58 , à partir de Philon, In Flacc. 131, et par ailleurs il reprend l'identification commune du poste avant le travail de Pflaum 111 ( cf. aussi 113 J. F. Gilliam , « Ala Agrippiana and archistator » , CPh 56, 1961 , p. 100-103, notamment p. 103 ). Puisque Lucien se présente lui - même à l'époque de ces fonctions en Égypte comme ayant déjà un pied dans la barque de Charon ( uovovovxì tòv Étepov Tóða Év TV Tropoukiw ) et se trouvant dans la dernière limite de la vieillesse , deja presque au - dela du seuil de la mort ( εν γήρα δε υστάτη και σχεδόν ήδη ÚTIÈp tov oỦdòv ; cf. Apol . 1 et 4) , on date d'ordinaire l'épisode dans les dernières années de sa vie , vers 180 ( cf. Bowersock 85 , p. 114 sq. n . 6 ; Jones 89, p . 168 ; Id . 104 , p . 487 n . 59) . Cependant, si on accepte la reconstitution de Schwartz 84 , p . 11-13 , et si l'on pense que la carrière de Calvisius Statianus s'interrompt en 175 après l'échec de la révolte d'Avidius Cassius , on doit conclure qu'il faudrait déplacer la datation du poste de Lucien vers l'an 171 , puisque le départ de Calvisius Statianus pour la préfecture d'Égypte n'est attesté qu'à partir du 24 février 170 : il aurait donc passé dans son poste égyptien environ 5 ans. Les arguments de Schwartz 84 n'ont pas convaincu les critiques anglo- saxons cités plus haut , pour qui l'empereur qui nomma Lucien dans le poste égyptien aurait été Commode, monté sur le trône en 180. Jones 104, p . 486 sq . , va même jusqu'à suggérer que le rapport étroit que Lucien avait entretenu avec l'empereur L. Verus dut, après la mort de celui -ci en 169 , se tourner contre lui , et que son caractère l'aurait par ailleurs empêché d'essayer de trouver la faveur de Marc Aurèle . D'après lui , cela n'aurait été possible qu'avec son successeur, qui était un esprit tout à fait différent. Mais la reconstitution de Schwartz 84 a été reprise par Bompaire 15 , t . I , p. 15 , et nous pensons aussi qu'elle peut être défendue comme vraisemblable . On pourrait interpréter comme hyperboliques et même ironiques les indications de Lucien sur son extrême vieillesse lorsqu'il avait accepté ce poste ( dans le même sens que son allusion à la pauvreté ). Par ailleurs, dans un passage de son écrit Sur une faute commise en saluant ( $ 1 ), que l'on date ordinairement du temps de son fonctionnariat en Égypte , Lucien se qualifie lui -même de rpeoßúrns ávúp , ce qui le placerait au maximum autour de l'âge de 60 ans (cf. Schwartz 84, p. 14).

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Puisque, selon la distribution hippocratique des âges de l'homme, on est npeoßúrns de 49 à 56 ans, Schwartz 84, ibid. , argumente : « Au printemps 175 , date de la révolte d'Avidius Cassius et terminus ante quem pour le Laps. sal. , Lucien avait donc 49 ans au moins ; il était né , certainement, avant le printemps 126 p .C. » . Schwartz en arrive même à considérer que cette date de naissance peut être repoussée jusqu'au printemps 119 « et même un peu plus haut » (cf. aussi Bompaire 15, t. I, p. XII ). Lucien serait donc rentré à Athènes en 175. Apparemment, il aurait repris son activité comme sophiste conférencier, probablement itinérant: plusieurs préludes ou avant- propos rhétoriques ( Tipolarial) qui servaient à introduire des causeries devant un vaste publique , comme l'Héraclès et le Bacchus, datent sans doute de cette période ( cf. Schwartz 84 , p . 14 sq . ) . Dans un passage (Herc. 7 ) , Lucien affirme avoir passé beaucoup de temps sans prononcer de conférences, et il insiste sur le fait qu'il se trouve déjà dans une vieillesse avancée (cf. aussi Bacch . 6 ) , ce qui ne l'empêche pas de se sentir, la barbe grisonnante, dans la plénitude de son éloquence ( cf. Herc . 8 ; son enthousiasme pour son activité de conférencier était sans doute chez lui très fort depuis sa jeunesse : cf. Dips. 9). Il est possible qu'il se soit marié à une époque plus ou moins avancée de sa vie , puisqu'il parle d'un fils encore impubère (xouidñ véoc ) dans l’Eunuchus. Étant donné que cet ouvrage doit être daté après 176 , puisqu'on y presuppose l'existence des chaires impériales de philosophie à Athènes créées par Marc Aurèle cette année -là ( cf. Dion Cassius LII 31 , 3 ), le terminus post quem pour la naissance de cet enfant devrait se placer vers 165 (cf. Schwartz 84 , p. 20 ). Il ne faut pas oublier par ailleurs que Lucien , lorsqu'il fait sortir sa famille de Samo sate ( cf. supra ), parle non seulement de son père mais aussi de toùç čuoús, sans qu'il soit possible , bien sûr, de préciser qui il inclut dans cette expression . On ignore le lieu et la date précise de sa mort, mais elle serait survenue, selon l'opinion générale, sous Commode : peu après 180 ( cf. Bompaire 15 , t . I , p . XV ) ou même à la fin des années 180 ou au début des années 190 ( cf. Nesselrath 91 , p . 15 ). L'affirmation de la Souda selon laquelle il serait mort ( sous Trajan, ce qui est tout à fait erroné) déchiré par les chiens ne mérite sans doute aucune créance. Comme on peut le déduire du passage même du lexique ( cf. supra ), cela n'est sans doute qu'une invention des auteurs byzantins, qui auraient voulu appliquer une espèce de châtiment à la mémoire de Lucien , pour s'être attaqué, dans son écrit Sur la mort de Pérégrinus, au christianisme, et avoir blasphémé contre le Christ lui-même . Nesselrath 91 , p. 15 , suggère que cette légende sur la mort de Lucien a pu être tirée d'un passage de Sur la mort de Pérégrinus ( § 2), où l'auteur affirme qu'il a été sur le point d'être déchiré par la foule furibonde des cyniques présents au moment de l'auto- immolation de Pérégrinus. Nous pouvons ajouter aussi que Lucien avait utilisé ailleurs l'image de la morsure des chiens enragés ( cf. Nigr. 38 ; Philops. 40 ). Sur Lucien et le christianisme, cf. infra.

C. Euvre et pensée Études d'ensemble . 114 M. Croiset, Essai sur la vie et les cuvres de Lucien, Paris 1882 , IV - 406 p . ; 115 R. Helm , Lucian und Menipp, Leipzig /Berlin 1906 , réimpr. Hildesheim 1967 , 392 p.; 116 F.G. Allinson , Lucian : satirist and artist, coll . « Our debt to Greece and Rome » , New York 1927 ( Boston 1926) , réimpr. 1987 IX - 204 p . ; 117 J.J. Chapman , Lucian , Plato and Greek morals, Boston/

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hipocentauro : literatura, sociedade e discurso ficcional em Luciano de Samó sata , « Coleção Humanitas » 59 , Belo Horizonte 2001, 369 p . ; 146 I. Gassino , « Voir et savoir : les difficultés de la connaissance chez Lucien » , dans L. Villard (édit. ) , Couleurs et vision dans l'Antiquité classique, Rouen 2002, p . 167-177 . Études sur une partie de la production. 147 M. Caster, Études sur “ Alexandre ou le faux prophète ” de Lucien , Thèse Paris 1938 , réimpr. New York /London 1987 , 103 p.; 148 G. Avenarius, Lukians Schrift zur Geschichtsschreibung, Meisenheim 1956, 183 p.; 149 R. A. Oden , Studies in Lucian's “ De Syria dea” , coll . « Harvard Semitic Monographs » 15 , Missoula, Montana 1977, X - 181 p. ; 150 G. Anderson , « Lucian's Nigrinus : the problem of form » , GRBS 19 , 1978 , p . 367-374 ; 151 H. Cancik , « Bios und Logos : Formen geschichtliche Untersuchungen zu Lukians Leben des Demonax » , dans ld . (édit.), Markus Philologie : historische, literargeschichtliche und stilistische Untersuchungen zum 2. Evangelium , coll . « Wiss. Unters. zum N. T.» 33 , Tübingen 1984, p. 115-130 ; 152 H.-G. Nesselrath , Lukians Parasitendialog, coll. « Untersuchungen zur antiken Literatur und Geschichte » 22 , Berlin 1985 , X1-559 p. ; 153 J. B. Itzkowitz, Prolegomena to a new text of Lucian's, “ Vitarum Auctio " and “ Piscator ”, coll . « Spudasmata » , Hildesheim 1986, 465 p.; 154 H.-G. Nesselrath , « Utopie -Parodie in Lukians Wahren Geschichten » , dans W. Ax & R. E. Glei (édit. ), Literaturparodie in Antike und Mittelalter, coll. « Bochumer altertums wissenschaftliches Colloquium » 15 , Trier 1993 , p . 41-56 ; Braun 96 , 431 p.; 155 A. Georgiadou & D. H. J. Larmour, « Lucian and historiography : De historia conscribenda and Verae historiae » , ANRW II 34, 2 , 1994, p. 1448-1509 ; 156 M. Weissenberger, Literatur theorie bei Lukian : Untersuchungen zum Dialog "Lexiphanes” , coll . « Beiträge zur Altertumskunde » 64, Stuttgart 1996, 297 p. ; 157 U. Rütten , Phantasie und Lachkultur : Lukians “Wahre Geschichten ”, coll . « Classica Monacensia » 16 , Tübingen 1997 , 142 p.; 158 M. García Valdés , « Estudio crítico -textual de Adversus indoctum de Luciano » , Emerita 65 , 1997 , p. 65-75 ; 159 R. I. Pervo, « With Lucian : who needs friends ? Friends in the Toxaris » , dans J. T. Fitzgerald (édit. ), Greco- Roman perspectives on friendship, coll. « Resources for Biblical study. Society of Biblical Literature » 34, Atlanta 1997 , p. 163-180 ; 160 A. Georgiadou & D.H.J. Larmour, Lucian's science fiction novel “True Histories " : interpretation and commentary, coll . « Mnemosyne Suppl . » 179, Leiden 1998, 254 p.; 161 P. Grösslein , Untersuchungen zum “ Juppiter confutatus " Lukians, coll . « Studien zur klassischen Philologie » 111 , Bern / Frankfurt am Main 1998 , VIII- 114 p . ; 162 P. von Möllendorff, Auf der Suche nach der verlogenen Wahrheit : Lukians « Wahre Geschichte », coll . « Classica Monacensia » 21 , Tübingen 2000 , X11-622 p. ; 163 M. García Valdés, « Algunas consideraciones sobre Pluto de Aristófanes y Timón o el Misantropo de Luciano » , Archivum 46-47, 2000 , p. 191-209 ; 164 Ph . Wälchli , Studien zu den literarischen Beziehun gen zwischen Plutarch und Lukian : ausgehend von Plutarch , “ De genio Socratis " und Lukian, “ Philopseudeis” , coll . « Beiträge zur Altertumskunde » 203, München 2003, 245 p.; 165 A. Bartley, « The implications of the reception of Thucydides within Lucian's Vera historia » ,Hermes 131 , 2003, p. 222-234 ; 166 A. Billault, « Comment Lucien écrit l'histoire : La déesse syrienne » , dans G. Lachenaud & D. Longrée (édit. ) , Grecs et Romains aux prises avec l'histoire : représentations, récits et idéologie coll . « Histoire » , Rennes 2003, t. II, p. 425-436 ; 167 S. Pozzi , « Sull'attendibilità del narratore nell’Alexander di Luciano » , Prometheus 29, 2003, p. 129-150 ; 168 Id ., « Sull'attendibilità del narratore nell'Alexander di Luciano II » , Prometheus 29, 2003 , p. 241-258 ; 169 0. Overwien , « Zwei literarisch philosophische Vorbilder für Lukian und seinen Demonax » , Gymnasium 110, 2003, p. 533 550 ; 170 M. Roussel , « Voyages extra -terrestres chez Lucien » , dans H. Duchêne (édit. ) , Voyageurs et Antiquité classique, coll. « Écritures », Dijon 2003, p. 100-109. Le corpus des ouvrages attribués à Lucien qui nous sont parvenus comprend 86 titres ( cf. la liste dans Bompaire 15 , t . I , p . XLII - XLIX , avec la traduction que nous adoptons dans cette notice ) , dont il faut cependant écarter l'authenticité d'une partie. Loin de l'hypercritique du XXe siècle qui avait mis en question comme douteux un grand nombre d'écrits, on peut s'accorder aujourd'hui sur le

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caractère apocryphe d'un petit nombre d'ouvrages : le Néron ou le percement de l'Isthme, le Philopatris ( le patriote ) ou l'homme qui s'instruit et le Charidèmos ou sur la beauté, auxquels on ajoute aussi L'alcyon ou sur les métamorphoses, Les longues vies, l'Ocypous ou l'homme au pied léger, Le Cynique, Les amours et Le soleciste ou le pseudo - sophiste ( cf. Christ - Schmid - Stählin 81 , p. 738 , et Bompaire 15 , t . I , p . XVI sq . , pour un aperçu sur cette question ) . En ce qui concerne les 53 épigrammes mises sous son nom , la question de l'authenticité n'est pas tranchée ( cf. à nouveau Bompaire 15 , t . I , p . XVIII ) . Cela dit , la production littéraire de Lucien reste énormément abondante et très variée. Par ailleurs , l'établisement de la chronologie de l'ensemble n'étant pas possible, il faut se contenter de certains points de repères qui concernent notam ment les æuvres de la maturité et dont nous avons déjà employé une partie à propos de la vie de Lucien ( cf. supra , A ; pour un aperçu sur les discussions autour de la chronologie , cf. Macleod 80 , p . 1379-1384 , et Bompaire 15 , t . I , p. XVII - XIX ). On a tendance en tout cas à la diviser en deux grandes périodes, dont la première comprend notamment les ouvrages ayant un caractère rhétorico -épidictique ( Le fils déshérité, Le tyrannicide, le Phalaris, À propos de l'ambre ou des cygnes, Sur les dipsades, Hippias ou les bains, Éloge de la patrie, Éloge de la mouche), mais sans oublier que ce genre d'ouvrages revient aussi dans la deuxième période ( la Salle , le Zeuxis , l'Hérodote ou Aétion , l'Héraclès, le Scythe , le Dionysos , le Jugement des voyelles). Quant à cette deuxième période, plus complexe (cf. par exemple Korus 134 ) , elle s'ouvrirait avec le soi -disant abandon de la part de Lucien du métier de sophiste ca 160 ( cf. supra, A ), et on y place entre autres tous les dialogues , qui sont par ailleurs très variés par la forme et par le contenu , même si les éditeurs et les traducteurs ont souvent l'habitude de les regrouper : comme le remarque Bompaire 15 , t . I , p . XIX - XXV , dans ce groupe il faut distinguer entre le vrai dialogue philo sophique à la manière platonicienne , comme l'Hermotimos ou sur les sectes, l'Anacharsis ou des exercices du corps , et Le parasite ou que le métier de parasite est un art ; les dialogues plus rhétoriques , comme le Nigrinos , Les portraits et la Défense des portraits ; les dialogues qu'on a l'habitude d'appeler «ménippées » , tels notamment la Nécyomancie ou Ménippe, l'Icaroménippe ou le voyage aérien, et le Charon ou les contemplateurs, auxquels on peut rattacher aussi le banquet ou les lapithes, Le navire ou les souhaits, les Saturnales, Le coq ou le songe, le Zeus confondu, Les fugitifs, le Timon ou le misanthrope, La double accusation, Les sectes à l'encan , Le pêcheur ; et les petits dialogues plus proches du mime , comme les Dialogues des dieux, les Dialogues marins , les Dialogues des courtisanes ( les Dialogues des morts marqueraient , d'après Bompaire 15 , t. I , p . XXIV , une transition entre la série précédente de dialogues et ces petits dialogues ) . Le reste de la production de Lucien comprend (cf. Bompaire 15, t. I. , p. XXV -XXVIII ) : des « æuvres morales» , comme Qu'il ne faut pas croire légèrement à la calomnie , Sur le deuil, Sur les sacrifices, qu'on appelle souvent « diatribes » philosophiques ou même cyniques ( pour cette notion » E 33 , p. 123 sq . ) ; des lettres d'un genre très varié , comme Sur ceux qui sont aux gages des grands, l’Apologie, souvent des invectives, comme Le maître

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de rhétorique, Contre un bibliomane ignorant, Le pseudologiste ou sur le mot « apophras » , d'autres ayant un caractère biographique, comme Sur la mort de Péregrinus, adressée au philosophe Cronius ( C 223 ) , et Sur l’Alexandre ou le faux prophète, adressée à l'épicurien Celse ( = ^ C 68 ) ; des traités didactiques, tels que Comment il faut écrire l'histoire ( critique des historiens ridicules de la guerre parthique ), Sur l'astrologie, et Sur la déesse syrienne ; une espèce de mémoire, la Vie de Démonax ; et un roman parodique, les Histoires vraies, satire des romans et récits fabuleux. En ce qui concerne le roman picaresque de l'âne, il peut s'agir , comme le remarque Bompaire 15 , t . I , p. XXVIII , du résumé satirique et développé des Métamorphoses perdues de Lucius de Patras , à moins qu'il ne faille adopter l'hypothèse selon laquelle Lucius ne serait que Lucien lui même , dont l'æuvre primitive serait perdue ( cf. ibid . n . 45 , pour la bibliographie sur ce sujet, ainsi que sur l'hypothèse selon laquelle Lucius ne serait qu'Apulée écrivant en grec , et sur l'hypothèse courante selon laquelle « Lucius » est la source commune de Lucien et d’Apulée ) . Il est intéressant ici en particulier de se demander si cette production littéraire permet de parler d'une pensée , sinon d'une philosophie au sens strict, de l'auteur. Autrement dit , il s'agit d'aborder deux questions intimement ratta chées : d'une part, Lucien était- il bien un vrai penseur, ou n'était- il qu'un simple littérateur- sophiste , ce qui équivaut à s'interroger sur la portée intellectuelle de son cuvre ; d'autre part, était- il un satiriste -moraliste engagé , ou bien un pur comique , ce qui équivaut à s'interroger sur son sérieux à l'égard de ce qu'il satirise , ainsi que , de façon générale , à l'égard de la réalité contemporaine, dans la mesure où on peut accepter que celle-ci se trouve présente dans son æuvre. Malgré le silence que la postérité la plus immédiate a gardé sur Lucien , on constate déjà dans l'Antiquité une reconnaissance, bien que partielle, de la valeur de son æuvre : ainsi , Eunape (cf. supra, A ) , tout en partant de l'affirma tion que Lucien s'appliquait notamment à provoquer le rire, ne peut pas renoncer à découvrir aussi chez lui quelquefois l'auteur sérieux , comme dans la Vie de Démonax . C'est notamment à partir de l'époque byzantine que l'on a eu tendance à voir chez Lucien ce côté moraliste, comme plus tard à l'époque humaniste , ainsi qu'au XVIII et au XIXe siècles . A la fin du XIXe siècle on peut citer par exemple 171 C. Martha, Les moralistes sous l'empire romain : philo sophes et poètes, Paris 1865 , réimpr. 1907, VIII -479 p. , où Lucien apparaît comme le dernier grand moraliste de la décadence ( chap . sur « Le scepticisme religieux et philosophique : Lucien » , p. 413-477 ) , et Croiset 114. A leur tour, d'autres critiques de la fin du XIXe et une partie de ceux du XX ° siècle ont eu tendance d'ordinaire à radicaliser les interprétations dans un sens ou dans l'autre, et parallèlement à considérer la vision d'un Lucien artiste léger et celle d'un Lucien penseur engagé comme s'excluant l'une l'autre. On peut trouver un aperçu historique de la question chez Jones 89, p. 1-5 (cf. aussi Alsina Clota , dans Espinosa Alarcón 58 , t . I , p . 46-54 , et Bompaire 15 , t . I , p . XXXIII XXXVI ) . Jones 89 , p . 1 sq . , fait commencer la critique moderne de Lucien avec 172 J. Bernays , Lucian und die Kyniker, Berlin 1879 , 110 p . , lequel , tout en exaltant Peregrinus et les

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cyniques pour leur monothéisme, leur autarcie et leur courage, réserve pour Lucien la consi dération d'un imitateur des classiques non exempt de vigueur et de grâce , mais nihiliste : Lucien ne comprend rien à Pérégrinus, ni au cynisme ni en général à son époque. La suite de la lecture de Lucien comme un pur écrivain sans le moindre intérêt intellectuel , qui plus est comme un esprit oriental sans profondeur ni personnalité, se trouve chez 173 E. Norden , Die antike Kunstprosa vom Vi. Jahrhundert v. Chr. bis in die Zeit der Renaissance, Leipzig 1898 , réimpr. Darmstadt 1981 , p. 394, ainsi que chez son collègue à Berlin 174 U. von Wilamowitz Möllendorff, Die griechische Literatur des Altertums, coll . « Die Kultur der Gegenwart » I 8 (= Die griechische und lateinische Literatur und Sprache ), Berlin/Leipzig 1905, p. 172-174, qui le qualifie de « feuilletoniste » ( cf. aussi Christ-Schmid-Stählin 81 , p. 740 ), c'est- à -dire de journaliste, qui n'a pas des idées propres (ce jugement ne fut pas changé dans la « 3. , stark verb. und verm . Aufl. » , Leipzig/ Berlin 1912 , p. 247-249 ; cf. 175 Id . , Der Glaube der Hellenen ( 1932 ) , t. II , Darmstadt 19552 , réimpr. 1984, p. 502-504 , où Lucien est qualifié de « sépulcre blanchi » ). Ce point de vue , qui est souvent rattaché sans doute à un certain anti sémitisme philologique ( cf. aussi 176 H. W.L. Hime , Lucian, the Syrian satirist, London/New York 1900, 95 p. ), fut ensuite développé par l'un des assistants de Wilamowitz à Berlin , Helm 115 , qui non seulement refusait à Lucien toute profondeur intellectuelle ( le considérant comme un nihiliste manquant de sérieux , un Syrien irresponsable ), mais qui lui refusait égale ment toute originalité littéraire : à ses yeux, Lucien se serait borné à plagier partout le cynique Ménippe ( » M 129 ] (un autre oriental), et ce en outre maladroitement. Depuis 177 B. P. McCarthy, « Lucian and Menippus » , YCIS 4, 1934 , p. 3-55 , on a pu démontrer le caractère insoutenable de cette thèse de Lucien - Ménippe : Lucien n'est pas un Ménippe révisé ; il a pu emprunter ailleurs les motifs et les types dits « ménippéens » . Par conséquent, les critiques qui par la suite se sont concentrés notamment sur le côté littéraire de l'euvre de Lucien (comme l'avait fait déjà auparavant Croiset 114 dans son chapitre « Lucien écrivain ») lui reconnurent davantage de qualités comme auteur, en même temps qu'ils affir mèrent l'importance et même l'originalité de son imitation . En revanche, ils se refusent eux aussi à lui accorder une pensée au sens propre, ou au moins à considérer que cet aspect mérite une considération particulière ; ils l'abordent comme un simple phénomène littéraire (Lucien n'aurait donc produit que littérature de littérature ). Dans ce domaine, la contribution la plus précieuse et qui a eu le plus d'influence a été celle de Bompaire 122, avec son ouvrage monumental placé sous le titre de « Lucien écrivain , imitation et création » , qui rappelle sans doute celui du chapitre de Croiset 114. Mais il faut citer d'abord Caster 119 , où , d'après Jones 89 , p . 4 , la lecture des Allemands ( Helm 115 ) se trouverait déjà nuancée par celle des Français (Croiset 114) : « For Caster as for Helm Lucian is still a Syrian , but compensates for his feelings of cultural inferiority by transforming himself into a Greek of Attic refinement » (cf. par exemple Caster 119, p . 368 sq. ). En ce qui concerne l'ouvrage que Caster a produit l’année suivante sur l’Alexandre et à propos de son affirmation ( Caster 147 , p. 91 ) selon laquelle l'ouvrage en question « contains truth only insofar as a work of polemic is obliged sometimes to coincide with the facts » , Jones 89, ibid ., affirme aussi la similarité curieuse entre cette lecture et celle de Bernays 171 sur Pérégrinus.

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En ce qui concerne Bompaire 122 , le point de départ de ce travail est l'idée qu'il faut se borner à interpréter l'æuvre de Lucien dans le cadre des tendances propres de la Seconde sophistique , « qui propose avec vigueur une relecture et une reconstruction du monde par le moyen de la rhétorique » ( Id . 15 , t. I , p . XXXII) . De la sorte , Lucien aurait réalisé sa création littéraire par le moyen de l'imitation ou Mimesis : « C'est dans l'appropriation du patrimoine littéraire et artistique que notre auteur donne le meilleur de lui-même: appropriation qui se manifeste dès le stade rhétorique et devient métamorphose au stade suivant » (Bompaire 122 , p. 742) . Qui plus est, l'originalité de Lucien consisterait justement à imiter. S'il y a autre chose chez lui , par exemple une critique de l'actualité contemporaine , c'est purement gratuit ou secondaire: « La dose d'actualité varie selon les cas ... Mais nulle part elle ne parvient à faire perdre à la satire son allure d'exercice gratuit rejoignant le plus souvent l'époque par le seul effet du hasard et sans cesser d'être anachronique » (p. 491 ). Voici, enfin , un résumé de la position de Bompaire 122 , p. 743 sq. , sur la question : « On penserait que la critique moderne a définitivement renoncé à faire état d'un Lucien penseur, apôtre et même martyr de la

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pensée , ou inversement à attaquer la mémoire de ce vil flatteur. Il n'en est rien . Et ce pro blème secondaire , posé, il faut le reconnaître, à la suite de la tradition byzantine et humaniste qui a été surtout sensible à la signification philosophique de l'æuvre de Lucien , continue à masquer le véritable : celui de sa signification littéraire » ( cf. c.r. de 178 J. Delz, Gnomon 32, 1960 , 756-761 ) . Plus tard, à la suite de Bompaire 122 , Reardon 125 , p. 39, poursuit: « Le grave débat sur la philosophie de Lucien , qui occupa si longtemps l'attention, est, non certes définitivement terminé, mais en train de s'apaiser du moins ; Lucien n'a pas de philosophie, et voilà tout. Mais ses sujets littéraires, eux , en ont, et la société contemporaine, elle aussi , en a. Lucien n'est pas livresque au point de ne parler que de ce qui n'existe plus de son temps - plutôt , sa représentation de son époque n'est que partielle, sa mimésis est une mimesis indirecte , il imite les livres qui imitent la vie plus qu'il n'imite la vie directement lui-même » . Bref, Lucien n'était pas pour lui un « penseur » (p. 157 ), même pas un « demi-philosophe comme Plutarque ( p. 164 ). A l'extrême opposé de ceux qui considèrent Lucien comme un homme de lettres, se sont placés d'autres critiques qui le considèrent comme un véritable homme de son temps . Les représentants de cette interprétation ouvertement et radicalement philosophico- idéologique de Lucien au XXe siècle se trouvent notamment dans la critique anglo-saxonne et italienne : ainsi Chapman 117 , où Lucien apparaît comme un penseur supérieur à ses yeux à Platon ; Gallavotti 118 , où il apparaît comme un « apôtre, héros, martyr » de la pensée rationnelle ( cf. p. 211 ) , comme un philosophe authentiquement converti ( cf. aussi 179 Id., « Il “ Nigrino ” di Luciano » , A & R 11 , 1930 , p. 252-263 ) ; Peretti 120, où il apparaît comme un intellectuel activiste antiromain ; Quacquarelli 121 , où il est présenté comme un philosophe sincèrement converti qui ne raille jamais la philosophie mais seulement les faux philosophes , si bien que les critiques devraient s'occuper surtout de l'étude de la pensée dans son æuvre, tandis que l'étude de l'humour serait plutôt gênante à ce sujet ( cf. p. 18, 29 , 57 ) ; Baldwin 123, 87, qui va même jusqu'à proposer une interprétation marxiste de Lucien, qui serait un intellectuel très préoccupé par la société de son temps, en particulier par les pauvres (cette image d’un Lucien proto -socialiste avait déjà été défendue entre autres par Chapman 117 ; contre cette inter prétation, cf. 180 J. Bompaire , « Travaux récents sur Lucien » , REG 88 , 1975 , p. 224-229). La conversion de Lucien (cf. supra , B ), défendue comme authentique par Gallavotti 118 ou Quacquarelli 121, a été d'ordinaire envisagée par les critiques avec soupçon, comme ironique (cf. 181 R. Venchi , La presunta conversione di Luciano , Roma 1934 , 78 p.; 182 V. Fumarola , « Conversione e satira antiromana nel “ Nigrino ” di Luciano » , PP 6, 1951 , p. 182-207 ; Bompaire 122 , p. 510 sq.; Gil 74, p . 25 sq .; F. Barberis, dans Matteuzzi 32 , p. X ). Cf. 183 J. Schwartz , « La “ conversion ” de Lucien de Samosate » , AC 33 , 1964, p. 384 400 . Quant à l'idée d'un Lucien conspirateur de la résistance politico -sociale contre Rome, esprit profondément et violement inspiré de sentiments anti -romains (anti - impérialistes ), idée défendue vivement par Peretti 120, elle doit être rejetée, comme le remarque Bompaire 122 : « A l'époque de Lucien le thème anti -romain est sans doute d'actualité pour les écrivains hellènes , surtout pour ceux qui se piquent de la philosophie ... » (p. 500 ) ; Lucien « se contentait de reprendre des tableaux pittoresques et du reste non dépourvus de signification morale , qu’une tradition livresque de plusieurs siècles ou de plusieurs lustres, selon les cas, aurait minutieusement mis au point » ( p. 510 ; contre la thèse d'un Lucien ennemi du pouvoir romain, cf. aussi Fumarola 182 , et Bowersock 86 , p . 115 ) . Pour sa part, 184 M.Dubuisson, « Lucien et Rome » , AncSoc 15-17 , 1984-1986 , p. 185-207 , estime qu'une enquête fondée sur un relevé exhaustif des allusions à Rome dans l'euvre de Lucien permet de conclure que, dans l'ensemble favorable aux Romains, l'auteur s'abstient soigneusement de toute critique à leur égard. C'est qu'il était trop conscient de tout ce qu'il devait à l'ordre romain pour songer à s'en faire l'adversaire et le détracteur. L'hypothèse de Peretti 120 a été toutefois reprise de façon décidée par 185 J. L. Brandão, « La morsure du chien : philosophie et politique dans le Nigrinus de Lucien » , dans P. Lévêque, J. A. Dabdad Trabulsi & S. Carvalho ( édit . ) , Recherches brésiliennes : archéo logie, histoire ancienne et anthropologie, coll . « Annales littéraires de l'Université de Besançon » 527 , « Centre de recherches d'histoire ancienne » 130, Paris 1994, p. 79-93 : « ... le

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Nigrinus est vraiment le plus frappant pamphlet contre Rome que la Grèce subjuguée a produit. Il importe peu si Nigrinus a existé vraiment , si le rendez- vous avec Lucien est biographique, etc. Ce qui importe est l'intention de discuter la situation de la Grèce et de tout ce qu'elle représente en face du pouvoir de Rome » (p . 83 ) ... « le Nigrinus est blâme de Rome, plus qu'éloge d'Athènes ou de la philosophie » ( p. 90 ). Brandão 185, p. 86, reconnaît que l'époque des Antonins a vu sur le trône des empereurs philohelléniques et même , avec Marc Aurèle, un roi -philosophe. Mais ilconsidère que Lucien se serait opposé justement à la prétention de cet empereur de concilier Grèce et Rome dans un idéal de culture gréco -latine à travers un discours stoïcien, puisque c'était surtout dans les cercles stoïciens que s'élaboraient les arguments de justification du pouvoir impérial. Quant à la conversion à la philosophie, il précise (p. 86 sq . ) : « Je prends mes distances envers tous ceux qui ont traité le Nigrinus comme un récit concernant une authentique conversion de la rhétorique à la philosophie, où la satire contre Rome aurait une fonction circonstancielle . En effet, on ne parle point , dans le dialogue, d'abandon de la rhétorique , comme dans Bis accusatus , mais d'abandon de " ce que le vulgaire tient pour des biens” : “ la richesse, la gloire ...” » ) . Une position tout à fait contraire (que nous ne pouvons pas non plus partager) est celle de 186 J. A. Francis, « Lucian : ascetics as enemies of culture » , dans Id. , Subversive virtue : asceticism and authority in the second -century pagan world , University Park ( PA ) 1995 , p. 53-81 ( chap. III ) , qui , loin de présenter Lucien comme un satiriste social subversif, va jusqu'à le présenter comme un allié très étroit de Marc Aurèle . Devant le dilemme Lucien littérateur ou Lucien penseur, Lucien homme de lettres ou homme de son temps, l'attitude la plus prudente ( et la plus intéressante aussi ) est donc aujourd'hui de s'efforcer à concilier les deux points de vue , littéraire et idéologique. En fait, comme Bompaire 15 , t . I , p . XXXII , l'a reconnu récemment , « les deux interprétations ont leur valeur et ne s'excluent pas , mais tout est question de proportion entre les parts faites à chacune » . Cette position beaucoup plus équilibrée serait , d'après Jones 89, p . 5 , la plus caractéristique de la critique anglo -saxonne : Jones cite entre autres Fowler & Fowler 45 , Allinson 116 et Hall 88, et on peut ajouter aussi à cette liste , outre Jones 89 lui -même , les nombreux travaux d'Anderson ( 126 , 128, 129 , 130 , 131 , 132 , 139 ), qui insistent sur la capacité de Lucien de manipuler et de rendre efficaces le matériel et les techniques sophistiques ; ou ceux de Branham ( 133 , 135 ) , qui interprète et analyse le comique chez Lucien comme un instrument d'action morale ( pour un aperçu sur la bibliographie concernant le orovdaloyéolov, ou style mi- sérieux, mi-comique , cf. 187 P.P. Fuentes González , Les diatribes de Télès : Introduc tion, texte revu et commentaire des fragments, avec en appendice une traduction espagnole, coll . « Histoire des doctrines de l'Antiquité classique » 23 , Paris 1998 , p. 77 sq . ) . Par ailleurs , cette position semble en fait aujourd'hui la plus partagée, et en tout cas elle n'est pas réservée à la critique anglo - saxonne : cf. par exemple Ureña Bracero 140 , Montanari 141 , Camerotto 143 , Brandão 145 ( cf. Id. 137, Id. 144 ). Ni activiste révolutionnaire ou socialiste avant la lettre , ni non plus homme de lettres pur, Lucien se révèle dans son œuvre un artiste qui se meut toujours dans une longue et riche tradition littéraire , dont il refaçonne ou altère librement les matériaux suivant ses propres desseins non seulement littéraires mais aussi idéologiques : d'une façon ou d'une autre , à un degré plus ou moins grand , son æuvre représente aussi sa propre pensée, son attitude personnelle à l'égard de la réalité comtemporaine . Dans cette tâche , il s'est servi par excellence de l'instrument littéraire qu'il a créé quand il était environ dans la quarantaine , en

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mélangeant, comme il l'explique lui-même (Bis acc . 33 ) , le genre du dialogue proprement dit ( philosophique ) avec la comédie , plus concrètement avec « la raillerie , l'iambe , le cynisme , Eupolis et Aristophane ... et même un certain Ménippe » (trad. É. Chambry ): il s'agit de ce qu'on a appelé le « dialogue comique » , un mélange que Lucien compare à un hippocentaure. Comme le remarque Bompaire 15, t. I , p. XXI , cette « synthèse » va bien au -delà de la tradi tion ménippéenne, et elle peut être considérée comme l'euvre de Lucien . L'une des activités favorites de Lucien était sans doute de démasquer l'imposture et l'ignorance partout où elle pouvait se trouver, et cela était sans doute un trait fondamental de sa personnalité, qui semble très bien décrit dans l'anecdote de Galien sur Lucien se plaisant à mystifier les savants contem porains ( cf. supra, B ) . Dans les écrits qui nous sont parvenus, il s'applique aussi à critiquer les représentants d'autres professions plus ou moins comparables à la sienne propre : les historiens qui , alors qu'ils devraient rechercher uniquement la vérité des faits, négligent ou falsifient celle -ci au bénéfice des intérêts des puissants (cf. Hist. co . , V.H.) ; les orateurs qui , loin de suivre l'exemple d'un Démosthène , prononcent des discours qui n'ont rien à voir avec la réalité (cf. Rh. pr. ) . Comme le remarque Brandão 144 et 145 , seuls les poètes, qui ne doivent rechercher que le beau , bénéficieraient selon lui de la liberté pure . Quant aux philosophes, Lucien s'applique aussi à critiquer et démasquer les philosophes ignorants et pathétiques, comme le pythagoricien cynicisant Péré grinus Proteus ( cf. Peregr .), les philosophes solennels et dogmatiques, comme le platonicien ( fictif) Ion ( cf. Symp. 7 ; » I 19 ) , les stoïciens également dogmati ques ( cf. passim ), les pythagoriciens révérencieux et mystiques ( cf. Vit. auct . 2 6 , Gall . 18 ) , les faux philosophes dont les actes ne s'accordent pas à leurs paroles, tel le charlatan Alexandre d'Abonotique ( cf. Alex.; > A 110 ) ; ceux qui s'adonnent au luxe et aux plaisirs matériels , comme le péripatéticien ( fictif) Cléodème (cf. Symp. 37 ; ™ C 159) ; mais Lucien fait de même l'éloge d'autres représentants de la philosophie , comme le platonicien Nigrinus ( cf. Nigr., N 59) et le cynique Démonax (cf. Dem ., D 74) : cf. 188 D. Clay, « Lucian of Samosata : four philosophical lives (Nigrinus, Demonax , Peregrinus, Alexander Pseudomantis ) » , ANRW II 36 , 5 , 1992 , p . 3406-3450 . Et en général, même si on considère que l'épisode de sa renonciation à la sophistique et sa conversion à la philosophie ne doivent pas être pris à la lettre , il faut accepter l'évidence que Lucien possédait une formation notable dans le domaine de la philosophie et qu'il s'y prononce souvent dans un sens ou un autre . Comme le remarque Brandão ( cf. 188 bis J. L. Brandão, « A sombra do asno : a filosofia e os filósofos em Luciano de Samosata » , Kléos 1 , 1997, p . 231-252 ) , ce sont en fin de compte les faux philosophes que Lucien raille , ceux qui n'accordent pas leur vie et leur doctrine , ceux qui s'occupent en réalité de sujets trompeurs et inutiles , comme les gens qui « combattent pour l'ombre de l'âne » (Herm . 71 ) , ceux aussi qui tombent dans le bavardage et la rhétorique vide , très à la mode à son époque. Cf. 189 I. Bruns, « Lucian's philosophische Satiren » , RAM 43 , 1888 , p . 86 103 , 161-196 ; 190 Id. , « Lucian und Oenomaos » , RHM 44, 1889 , p . 374-396 ; 190 bis K. Praechter, « Zur Frage nach Lukians philosophischen Quellen » ,

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AGPh 11 , 1898 , p. 505-516 ; 191 B. Schwartz, Lukians Verhältniss zum Skepti cismus, Diss. Königsberg, Tilsitt 1914, 128 p.; 192 W.H. Tackaberry , Lucian's relation to Plato and the post -aristotelian philosophers, coll . « University of Toronto Studies , Philological Series >> 9 , Toronto 1930 , 92 p . ; 193 H.M. Hornsby, « The cynicism of Peregrinus Proteus » , Hermathena 48 , 1933 , p . 65 84 , réimpr. dans M. Billerbeck (édit. ) , Die Kyniker in der modernen Forschung : Aufsätze mit Einführung und Bibliographie , coll . « Bochumer Studien zur Philosophie » 15 , Amsterdam 1991 , p . 167-181 ; 194 F. García Yagüe, Los filósofos cínicos en la obra de Luciano de Samosata, Cuenca 1958 ; 195 M.D. Macleod, « Lucian's knowledge of Theophrastus » , Mnemosyne 27 , 1974, p. 75 76 ; 196 B. Baldwin , « Lucian and Theophrastus » , Mnemosyne 30 , 1977 , p. 174 176 ; 197 P. Innocenti, « Luciano di Samosata e l'epicureismo » , RSF 33 , 1978 , p. 30-53 ; 198 T. Joly , « Lucien de Samosate » , dans G. Viré (édit. ), Grec et latin en 1980. Études et documents dédiés à Edmond Liénard, Bruxelles 1980 , p. 47

62 ; 199 J.-M. André , « Les écoles philosophiques aux deux premiers siècles de l'Empire » , ANRW II 36 , 1 , 1987 , p . 5-77 , notamment p . 51-74 ; 200 M.-O. Goulet - Cazé, « Le cynisme à l'époque impériale » , ANRW II 36 , 4 , 1990 , p . 2720-2833 , notamment p . 2763-2768 ; 201 H.-G. Nesselrath , « Kaiserlicher Skeptizismus in platonischem Gewand : Lukians “ Hermotimos” » , ANRW II 36, 5 , 1992 , p. 3451-3482 ; 202 Id ., « Lucien et le cynisme » , AC 67 , 1998 , p . 121 135 ; 203 Id . , « Lukian und die antike Philosophie » , dans Ebner, Gzella, Nesselrath & Ribbat 35 , p . 135-152 (= « Essays I » ) ; 203 bis 0. Flores Júnior, « Em torno d'O Cínico : nota sobre as relações de Luciano com o cinismo , Kléos 2-3 , 1998-1999 , p. 122-133 . Mais peut- on parler d'une affiliation philosophique pour Lucien ? En effet, les critiques ont essayé de situer Lucien au sein des écoles philosophiques de son temps . Évidemment , dogmatique envers ( cf. Bompaire 15 , t. I , ( ce qui ne l'empêche

on a tout d'abord laissé de côté les écoles de teneur lesquelles Lucien fait preuve d'une hostilité tenace p. XXXIII sq .; Nesselrath 203, p. 144 sq .) : le pythagorisme pas cependant de louer Pythagore lui-même : cf. Alex. 4),

l'Académie ( son portrait de Nigrinus n'a en réalité rien de proprement plato nicien) , le Péripatos et notamment la Stoa, sa bête noire privilégiée, pour le dire avec Joly 198 , p . 53 ( il n'est pas étonnant que la seule exception ici soit Épictète, » E 33 ; cf. Adv. ind. 13 ; pour Arrien ( cf. Alex . 2 ], cf. supra, B ) . En revanche, on a souvent rattaché Lucien à l'épicurisme ( Caster 119 , Schwartz 183, Id . 84, p. 145 sqq. , Innocenti 197 ), au scepticisme (Schwartz 191 , Joly 198 ) et notamment au cynisme (Bernays 172 , Bruns 189 , Helm 115 , Hornsby 193). Bien sûr, ces sympathies ne l'empêchent pas non plus , le cas écheant, de prendre aussi comme objets de ses railleries cyniques et épicuriens ( cf. Vit. auct.). Les sympathies de Lucien pour l'épicurisme ont été relevées surtout dans le Zeus tragédien et dans le Zeus confondu, et on peut rappeler aussi que l'Alexandre ( écrit après 180 ) est adressé à l'épicurien Celse . On a pensé que celui- ci était vraisemblablement l'auteur du Discours véritable, écrit antichrétien réfuté par Origène ( » C68) , si bien que l'on a même suggéré que cet épicurien était la source d'après laquelle Lucien décrit la secte chrétienne dans le

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Pérégrinus ( cf. Bompaire 15, t. I , p. XXXIV n . 59) . Cependant, il faut dire à ce sujet que certains interprètes considèrent l'auteur du Discours véritable plutôt comme un platonicien ( C 70) . Par ailleurs , Nesselrath 203 , p . 146 n . 22 , mentionne aussi Le parasite ou que le métier de parasite est un art 11 comme une preuve du fait que Lucien connaît très bien la doctrine d'Épicure ( cf. aussi Id . 152 , p. 311-314). Cela dit, comme le remarque Joly 198, p. 53 : « En réalité, Lucien est d'accord avec l'épicurisme sur certains points seulement : le rejet de la Providence, la sociabilité, la douceur de vivre épicuriennes. Mais nulle part Lucien ne prend parti pour la métaphysique des atomes et du vide , dont il se moque à l'occasion, encore moins pour la théologie épicurienne, qui lui paraît au moins aussi farfelue que les autres. Lucien n'est certainement pas épicurien » . Du Jardin , il a dû aimer notamment la sobriété de son rationalisme. Dans ce sens, Innocenti 197 avait déjà signalé que Lucien était peu attiré par le côté cosmologique et systématique de cette école philosophique, et qu'il s'intéressait exclusivement à son aspect humanitaire et utopique. En ce qui concerne le scepticisme , il faut signaler tout d'abord , avec Nesselrath 203, p. 149 , que Lucien ne distingue pas entre la tradition pyrrho nienne et la tradition académicienne issue d'Arcésilas ( 3 A 302 ) . Il exprime notamment ses sympathies pour les sceptiques dans l'Hermotimos, ce qui nous situe déjà dans sa période de maturité, vers les 40 ans . Dans ce dialogue , le stoïcien fictif Hermotime ( » H 98 ) est finalement convaincu par son ami Lycinus ( Lucien ) de la nécessité d'abandonner toute étude philosophique et de mener tout simplement la vie d'un homme ordinaire (XOLVÒS Bios ; cf. Herm . 84 ) . Or, il faut à nouveau reconnaître, avec Joly 198 , p. 53 , que Lucien « est un sceptique qui rejette tout dogmatisme avec une verve très personnelle de polé miste, de satirique, d'artiste » et « n'expose pas techniquement et sèchement le scepticisme comme le fait Sextus Empiricus » ( cf. aussi Nesselrath 203, p . 151 ) . Joly 198 , ibid. , considère que Lucien n'est pas plus cynique qu'épicurien , « en dépit de son cycle ménippéen » : « Lucien , homme de la paideia, a horreur des hippies de son temps, de l'excès sauvage , du cabotinage. Le Peregrinus est l'occasion d'un déchaînement des cyniques contre lui » . Joly , qui penche de toute évidence pour l'attitude sceptique chez Lucien , passe un peu sous silence le fait que Lucien « apprécie une certaine critique cynique , la liberté, la parrhe sia, un renoncement mesuré » ( ibid . ), ce qui fait référence à ses sympathies pour le cynisme « modéré » de Démonax. En revanche, Nesselrath 202 ( cf. Id . 203, p . 151 sq . ) , met beaucoup plus en relief à juste titre ces sympathies cyniques chez Lucien , car , bien au -delà de tous les exemples négatifs de cyniques qu'il fustige tout au long de son æuvre du fait qu'ils ne sont en réalité que de faux philosophes , le portrait de Démonax s'élève comme une image positive qui ne trouve peut -être pas de parallèle chez Lucien : « Ainsi le Démonax décrit sinon un cynique , du moins un comportement cynisant qui est évidemment au goût de Lucien » ( Nesselrath 202 , p. 132 ) . Il ne s'agit pas ici d'un cynique fanatique ( comme Pérégrinus ), mais, comme le résume fort bien Nesselrath 203, p. 151 sq . , d'un philosophe qui mène la vie d'un homme ordinaire (XOLVO, Bíoc) en compagnie de son prochain et qui essaye de corriger les défauts de celui -ci par le

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moyen d'un discours sincère et d'une réprobation aimable , ne s'occupant nulle ment de spéculations qui n'ont rien à voir avec la vie de tous les jours, c'est- à dire avec la morale, qui ne refuse pas de voir aussi éventuellement les aspects positifs des autres positions philosophiques , et qui , surtout, met toujours en accord sa vie et sa doctrine. Rappelons aussi que Jones 89, p. 95-98 , à partir des nombreuses similitudes qu'il relève entre le personnage de Démonax et le portrait que Lucien fait ailleurs de lui - même , va jusqu'à considérer la Vie de Démonax comme « a kind of indirect autobiography » ( p. 98 ) . Et il est signi ficatif que l'autre personnage que Lucien exclut de la médiocrité de son temps et qu'il présente comme modèle de perfection, physique et intellectuelle , soit , à côté de Démonax , le cynique Sostratos, surnommé « Héraclès » ( »A 35 ) , auquel il avait consacré aussi une biographie , laquelle ne nous est pas parvenue (cf. Dem . 1 ). Enfin , sur la question du credo philosophique de Lucien, la conclusion que Nesselrath 203 , p . 151 , présente, après sa description de la philosophie de Démonax , nous semble la plus juste : « Dies ist die Art von Philosophie , die Lukian augenscheinlich schätzte , und bei der es ihm auch kaum darauf ankam , ob er sie bei Skeptikern, Kynikern oder Epikureern fand ; bei Pythagoreern , Platonikern , Peripatetikern und vor allem Stoikern hat er sie dagegen in der Regel nich vermutet » . Attitude envers la religion , la magie et d'autres superstitions Cf. 204 P. de Labriolle , « Lucien et les chrétiens » , Humanités : revue d'enseignement secondaire et d'éducation (Paris) 5 , 1929, p. 148-153 ( cf. 205 Id ., La réaction païenne : étude sur la polémique antichrétienne du jer au V pe siècle, Paris 1934 , réimpr. 1950 , 519 p. , notamment p. 85 , 97-108, 111 sq. ) ; 206 P. Riesler, « Lucian von Samosata und die Heilige Schrift » , ThQ 6, 1933 , p. 64-72 ; 207 C. Curti, « Luciano e i cristiani » , MSLC 10, 1954, p. 86 109 ; 208 G. Bagnani , « Peregrinus Proteus and the Christians » , Historia 4 , 1955 , p. 107-112 ; 209 H. D. Betz , « Lukian von Samosata und das Christentum » , NT 3 , 1959, p . 226-237 ; 210 Id. , Lukian von Samosata und das Neue Testament : religionsgeschichtliche und parä netische Parallelen : ein Beitrag zum Corpus Hellenisticum Novi Testamenti, coll . « Texte und Untersuchungen zur Geschichte der altchristlichen Literatur » 76, Berlin 1961 , XIV -287 p.; 211 E. R. Dodds, Pagan and Christian in an age of anxiety : some aspects of religious experience from Marcus Aurelius to Constantine, Cambridge 1965 , réimpr. 1990, XII - 144 p. , notamment p. 59-63 ; 212 F. Guillén Preckler, « Testimonio de Luciano sobre los cristianos » , Helmantica 26 , 1975 , p . 249-257 ; 213 M. Ebner , « Neutestamentliche Wunder- und Erscheinungsgeschichten auf dem Prüfstand skeptischer Kritik » , dans Ebner, Gzella , Nesselrath & Ribbat 35 , p. 167-182 ( = « Essays III » ) ; 214 H.-G. Nesselrath , « Lukian und die Magie » , dans Ebner, Gzella , Nesselrath & Ribbat 35, p. 153-166 (= « Essays II » ). Dans le dessein de compléter davantage le profil de Lucien en tant que penseur, nous nous intéresserons maintenant à son attitude à l'égard des croyances religieuses de son époque. A ce sujet, Bompaire 15 , t. I , p. XXXV , comme une partie de la critique, à la suite de Caster 119, considère que Lucien est « un médiocre témoin de la pensée religieuse de son temps , qu'il s'agisse du christianisme , de la démonologie , des cultes à mystères, du syncrétisme » . Cependant, même si Caster avait sans doute raison de signaler en général la pauvreté spéculative de Lucien , lequel s'intéresse jamais à des questions purement théoriques, cela ne rend pas nécessairement médiocre son témoignage. En matière de religion, Bompaire 15 a sans doute raison lui aussi de dire que

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Lucien n'est pas un novateur : « Il reprend contre les insuffisances du poly théisme gréco-romain les thèmes déjà courants depuis Épicure; sur ce terrain rebattu il se rencontre souvent avec les apologistes chrétiens » (ibid. ) . En revan che , nous estimons moins juste son affirmation que Lucien « n'a pas eu conscience de l'importance des courants religieux et mystiques de son époque » , et qu ' « il emprunte au général et au typique, même quand il écrit un pamphlet comme Alexandre ou le faux prophète » . En effet, Lucien devait avoir acquis, à travers ses nombreux voyages d'un bout à l'autre de l'Empire, une assez bonne connaissance directe de la réalité religieuse de son temps , à laquelle il n'est nullement resté indifférent. Des écrits comme l'Alexandre ou le faux prophète ou Sur la mort de Pérégrinus montrent bien qu'il a participé à sa manière au débat religieux de son époque (cf. Zaragoza Botella 63 , t . III , p . 250 ) , une époque qui , par ailleurs , n'était pas très portée à la spéculation théorétique. Certes, si le point de vue de Lucien n'est pas spéculatif, c'est parce qu'il n'a jamais été intéressé par les doctrines elles-mêmes mais par la façon dont elles se manifestent et agissent dans l'existence humaine. Et là, Lucien était un très bon observateur qu'on ne doit en rien négliger. A une époque fortement dominée par les éléments irrationnels (superstition, théosophie , mysticisme, magie ), son témoignage est celui de l'un de rares représentants du rationalisme hellénique, et , dans ce contexte , on peut comprendre qu'il adopte presque toujours une atti tude tranchante , en condamnant tout ce qui sent la religion. Dans une série d’écrits , Lucien dirige son côté satirique et blasphématoire contre les anciennes divinités de la Grèce, mais aussi contre les nouveaux cultes : Dialogues des dieux, Dialogues marins, Assemblée des dieux, Zeus confondu, Zeus tragédien. Dans Sur les sacri fices, il s'attaque à l'un des moments essentiels de la liturgie païenne, et dans Sur le deuil il ridiculise les croyances communes à propos de l'au -delà, ainsi que les pratiques funéraires les plus habituelles . Par ailleurs, dans Les amis du mensonge ou l'incrédule, il réserve un espace important aux croyances pseudo - religieuses qui sont le résultat notamment des influences provenant de l'Orient : on y trouve une grande variété d'anecdotes et des récits fantastiques concernant des actes de sorcellerie ou de magie, de soi-disant guérisons ou miracles, qui en outre n'ont pas comme protagonistes des hommes sans formation, mais entre autres des méde cins prestigieux et des philosophes ; les interlocuteurs du dialogue s'efforcent de résister à tous ces récits à l'aide de la vérité et de la raison . Et rappelons aussi l'Alexandre, où Lucien décrit à son ami Celse la vie et les « miracles » d'un faux prophète qui , avec sa charlatanerie et ses trucs vulgaires de prestidigitateur, est suivi par une foule de crédules. La même crédulité est aussi ridiculisée dans le récit concernant un autre charlatan fanatique, Pérégrinus : Sur la mort de Pérégrinus. C'est dans ce récit ( cf. Peregr. 11-13 ) que Lucien fait apparaître avec beaucoup de détails les chrétiens ( mentionnés en passant dans l'Alex. 25 ) , car Pérégrinus aurait appartenu à leur secte avant de devenir cynique . Comme le résume Zaragoza Botella 63 , t. III , p. 249, Lucien s'intéresse aux chrétiens en qui il voit principalement des niais victimes de Pérégrinus, mais la connaissance qu'il en démontre paraît étonnamment précise sur certains points, même si elle reste toujours, bien sûr, limitée à la perspective hellénique : « Tenía noticias de Jesús de Nazaret y de su crucifixión, del amor fraterno de los cristianos y de la importancia de sus “ libros sagrados”. Lo que dice de la ayuda manifiesta que prestaban a sus hermanos encar celados y de la comunicación entre las iglesias de Asia y Siria está ilustrado exactamente por textos como las Cartas de San Ignacio y las Actas de los mártires de Lyon. El detalle de que a Peregrino se le dé el título de “nuevo Sócrates ” es especialmente llamativo, pues aunque se ha creído que era un simple cliché , debe más bien equipararse a los pasajes de los apologistas en los que la muerte de Sócrates prefigura la persecución de Jesús y de sus discípulos . Sin embargo , Luciano ve el cristianismo con ojos griegos y tiene algunos conceptos equivocados:

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el fundador introdujo una “ nueva forma de iniciación " y Peregrino no es simplemente un “ profeta " sino un “ tiasarca ” y “ convocante ” , títulos que no existen en el cristianismo primi tivo. En esta obra y en el Alejandro, que también menciona a los cristianos, es mucho menos hostil a su credo que alguno de sus contemporáneos, como Frontón , y su información es relativamente completa ». En réalité, comme le remarque Guillén Preckler 212, p. 256 sq. , l'hypothèse que Lucien ait eu une connaissance directe de la littérature chrétienne primitive ne semble pas envisageable : « ... es indudable que Luciano tuvo un cierto conocimiento del cristianismo que situamos a nivel de costumbres y de algunas afirmaciones doctrinales básicas ... Creemos, sin embargo, que a diferencia de otros paganos de su tiempo, no tuvo un conocimiento directo de los documentos cristianos, y que, en general, desconoció la terminología propiamente cristiana en su originalidad. De ahí que a través de su lenguaje, Luciano tienda a asimilar el cristianismo a otros grupos religiosos existentes en aquel tiempo . No hay en él sombra de discernimiento de los grupos disidentes, como gnósticos ... » . Guillén Preckler se range ainsi à l'avis de P. de Labriolle 205, p. 108 , selon lequel le christianisme n'est pour Lucien qu'une folie en plus à ajouter à la liste interminable des sottises humaines , mais une folie qu'il a trouvée pratiquement inoffensive. Cela dit, il ne faut pas oublier que parmi les caractéristiques que Lucien attribue aux chrétiens on trouve leur attitude hostile à l'égard de l'autorité, à côté de leur détermination pour le martyre, de leur courage devant la torture et la mort ( cf. Peregr. 13 ; Dodds 211 , p. 62 , 132 ). Par ailleurs, même si Lucien n'a pas connu directement les textes chrétiens, il faut noter le nombre de parallèles narratifs intéressants concernant la religion et la morale que l'on a pu signaler entre Lucien et le Nouveau Testament : cf. Betz 210 ; Ebner 213. Il faut examiner finalement deux ouvrages qui ont fait quelque difficulté : Sur l'astrologie, et Sur la déesse syrienne. En ce qui concerne le premier traité, certains critiques estiment que cette défense de l'astrologie de la part de Lucien n'est pas acceptable , si bien qu'ils le considèrent comme apocryphe. Cependant, Hall 88 , p. 381-388 , en défend à juste titre l'authenticité : en fait, il s'agit d'un éloge feint de l'astrologie judiciaire, mis dans la bouche d'un personnage ancien et vénérable qui utilise le dialecte ionien (il s'agit vraisemblablement de Démocrite , auteur, d'après Cicéron, De div. I 42, d'un traité sur la divination ). Malgré les moments comiques occasionnels, cet ouvrage doit être interprété, plutôt que comme une satire ou une parodie, comme un exercice littéraire sophistique , tout comme le Phalaris A et B. Quant au traité Sur la déesse syrienne, écrit également en dialecte ionien , certains auteurs (par exemple, Caster 119) n'admettent pas non plus son authenticité : ils estiment qu’un esprit sceptique et ironiste comme celui de Lucien ne pouvait pas avoir décrit avec tellement de crédulité des faits et des coutumes qui auraient dû bien plutôt stimuler sa satire . Cependant, nous nous rangeons pareillement à l'avis de ceux qui , comme Meunier 48, p. 15 sq. , défendent l'authenticité de cet ouvrage : « La “ crédulité ” qui s'y montre et la “minutieuse exactitude” qui en fait l'intérêt et le prix, s'expliquent par le fait que Lucien visite une ville et décrit un temple et des solennités qui lui remettent en mémoire des impressions de jeunesse ou d'enfance ... Les impressions d'enfance se gravent par des détails d'une minutie rigoureuse, et le rappel des émotions premières, même si l'on n'a plus la foi qui les donna, se fait sans ironie ... » . Enfin, si Lucien emploie non pas le dialecte attique qui lui était familier, mais le dialecte ionien , c'est parce qu'il s'agit du dialecte dont Hérodote s'était servi pour raconter ses Histoires ( ibid .). En ce qui concerne les cultes , les temples et les dieux de Syrie, Lucien nous a légué ici un document aussi rare et précieux que l'est, pour la religion et la théologie de l'Égypte, le traité Sur Isis et Osiris de Plutarque (p . 11 sq. ). Influence . Cf. 215 P. Schulze , Lucian in der Literatur und Kunst der Renaissance (= Bericht über das Schuljahr Ostern 1905/1906 . Herzogliches Friedrichsgymnasium in Dessau ), Dessau 1906, 19 p.; 216 N. Caccia, Note sulla fortuna di Luciano nel Rinascimento : le versioni e i dialoghi satirici di Erasmo da Rotterdam e di Utr. Hutten, Milano 1915-1916 ; 217 K. Mengis, Die schriftstellerische Technik im Sophistenmahl des Athenaios, coll. « Studien zur Geschichte und Kultur des Altertums » 10, 5 , Paderborn 1920, réimpr. New York 1997 , 139 p . , notamment p. 95 sq.; 218 L. Schenk , Lukian und die französische Literatur im Zeitalter der

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Aufklärung, Diss . München 1931 , 154 p. ; 219 J. Mesk , « Libanios und der Timon des Lukians » , PhW 1932, p. 1107-1110 ; 220 O.G. Green, « Notes on the Lucianesque dialogues of Bartolomé Leonardo de Argensola », Hispanic Review 3 , 1935 , p. 275-294 ; 221 L.R. Lind, « Lucian and Fielding » , CW 29, 1935-1936 , p . 84-86 ; 222 M. Bataillon , Érasme et l'Espagne : recherches sur l'histoire spirituelle du xvie siècle, coll.« Bibliothèque de l'école des hautes études hispaniques » 21 , Paris 1937 , LIX - 903 p. ( cf. la nouv . éd . en trois vol . : texte établi par D. Devoto ; édit. par C. Amiel, coll . « Travaux d'humanisme et Renaissance » 250 , Genève 1991 , le vol . I étant la réimpr. de la 1 re édit. ) ; 223 M. Morreale, « Imitación de Luciano y sátira social en el cuarto canto del El Crotalón », BullHispan 53, 1951 , p. 301-317 ; 224 Ead ., « Luciano y las invectivas antiescolásticas en El Scholastico y en El Crotalón », BullHispan 64, 1952, p. 370-385 ; 225 Ead ., « Luciano y El Crotalón : la visión del más allá », BullHispan i 66 , 1954, p. 388-395 ; 226 A. Vives Coll , « Algunos contactos entre Quevedo y Luciano » , Helmantica 5 , 1954, p. 193-208 ; 227 M. Morreale, « Luciano y Quevedo : la Humanidad condenada » , Revista de literatura ( Madrid ) 8 , 1955 , p . 213-227 ; 228 S. E Howell , « Lucian in El Crotalón » , KFLQ 2 , 1955 , p. 97-103 ; 229 A. Vives Coll , Luciano de Samosata en España, 1500-1700, Valladolid 1959, 210 p. ; 230 Id ., « Luciano de Samosata, enjuiciado por españoles ( 1500-1700 ) » , dans Actas del III Congreso español de estudios clásicos (Madrid , 28 de marzo 1 abril de 1966 ), t. II , Madrid 1968, p. 186-191 ; 231 C. Robinson , Lucian and his influence in Europe, coll . « Classical life and letters », London/Chapel Hill 1979 , VII - 248 p. ; 232 M. O. Zappala, « Cervantes and Lucian » , Symposium 33 , 1979 , p. 75-82 ; 233 B. Baldwin , « Lucian and Europa : variations on a theme» , Acta Classica 23 , 1980, p. 115-119 ; 234 E. Mattioli , Luciano e l'Umanesimo, coll. « Istituto italiano per gli studi storici » 31 , Napoli 1980, 210 p.; 235 M. O. Zappala , « Luciano español» , Nueva revista de filología hispánica [ Méjico ] 31 , 1982 , p . 25-43 ; 236 C.-A. Mayer, Lucien de Samosate et la Renaissance française, coll . « La Renaissance française » 3 , Genève 1984, 252 p. ; 237 C. Lauvergnat -Gagnière, Lucien de Samosate et le lucinianisme en France au XVIe siècle : athéisme et polémique, coll . « Travaux d'Humanisme & Renaissance » 227 , Genève 1988 , X1-434 p. (append. sur les édit. et trad. de Lucien imprimées aux XV-XVIe siècles) ; 238 E.J. de S. Rego, O calundu e a panaceia : Machado de Assis, a satira menipeia e a tradicao lucianica , coll . « Imagens do tempo » , Rio de Janeiro 1989, 234 p.; 239 M. O. Zappala, Lucian of Samosata in the Two Hesperias : an essay in literary and cultural translation , coll . « Scripta Humanistica » 65, Potomac , Md. 1990 , IX - 380 p . ; 240 J.-M. Camacho Rojo & J.-M. García González, « La literatura griega en la obra en prosa de Francisco de Quevedo », Florllib 4-5 , 1993-1994, p. 109-124 ; 241 H.-G. Nesselrath , « Menippeisches in der Spätantike : von Lukian zu Julians Caesares und zu Claudian In Rufinum » , MH 51 , 1994, p. 30-44 ; 242 D. Marsh , Lucian and the Latins : humor and humanism in the early Renaissance, coll. « Recentiores : Later Latin texts and contexts » , Ann Arbor 1998, XII -232 p. ; 243 R. Romano, Silêncio e ruído : a sátira em Denis Diderot, coll . « Repertórios » , Campinas (Brésil) 1996, 201 p. ; 244 E. Ribbat, « “ Die ich rief, die Geister...” : zur späten Wirkung einer Zaubergeschichte Lukians» , dans Ebner, Gzella, Nesselrath & Ribbat 35 , p . 183-194 ( = « Essays IV » ) ; 245 D. Baumbach , Lukian in Deutschland : eine forschungs- und rezeptionsgeschichtliche Analyse von Humanismus bis zur Gegenwart, coll . « Beihefte zu Poetica » 25 , München 2002, 320 p. ; 246 M. García Valdés, « Reminiscencias de Timón de Luciano en La Hora de todos y la Fortuna con seso de Quevedo » , dans J.-M. Nieto Ibáñez (édit. ), Lógos Hellenikós : homenaje al Profesor Gaspar Morocho Gayo, León 2003, p. 707-719 (t. II ). Pour un aperçu sur ce sujet nous renvoyons à Alsina Clota, dans Espinosa Alarcón 58 , t. I, p. 55-66 ( cf. Id . [édit . ] 10, t. I , p. LXVIII - LXXV ), Nesselrath 90 , col . 500 sq.; et Bompaire 15, t. I , p. XXXVI- XXXIX ( cf. aussi F. Barberis dans Matteuzzi 32, p. XXXIV -XXXVII , où on évoque la perspective critique de M. Bachtin , qui va au-delà de l'influence littéraire au sens strict). Sur leséditions et les traductions, cf. supra , A. L'œuvre de Lucien a très bien résisté à l'espèce de damnatio memoriae dont elle semble avoir été l'objet « officiellement » ( comme le dit Bompaire 15 , t . I , p . XXXVI ) dans l'Antiquité , à commencer par Philostrate ( cf. supra , A ) . En effet, elle a été sans doute imitée par les épistolographes Alciphron et Aristénète , et

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par les romanciers , et ne semble pas avoir été indifférente à Athénée, à Libanius ( né aussi en Syrie ) ou à Julien . Sa fortune au Moyen Âge fut beaucoup plus grande, notamment dans la littérature byzantine de teneur édifiante ou satirique, malgré la condamnation de la Souda et le mépris aussi des scholiastes, à la suite d'Aréthas. Bompaire 15 , t . I , p. XXXVII , le résume très bien : « Les grand écri vains de Byzance le citent, l'imitent, sans parler des travaux que lui a consacrés précisément Aréthas, évêque de Césarée au début du Xe siècle et source des principales scholies. Photios, Psellos, Tzetzès, Théodore Prodromos, Nicéphore Grégoras le pratiquent. De nombreux écrits anonymes le démarquent: outre le Philopatris... inséré dans la collection des æuvres de Lucien , mentionnons le Timarion (XII ° s. ) et le Mazaris ( XVe s . ), dialogues infernaux ; on imite même les apocryphes anciens, tels les Amours ou le Charidèmos (cf. le dialogue Her mippos du XIV ° s. , anonyme et non pas l'euvre de Jean Katrarios) ». Quant on arrive à la Renaissance, l'influence de Lucien devient de plus en plus grande. C'est le début de ce que l'on a appelé le « lucianisme » moderne , lequel, à la Renaissance, s'identifie notamment avec l ' « érasmisme » , un mouve ment de pensée inspiré d'Érasme de Rotterdam ( ca 1466-1536 ) et marqué entre autres par l'ironie à l'égard des excès , des préjugés et des superstitions, mouve ment qui s'est répandu en Europe et a été très important notamment en Espagne. C'est alors qu'on insiste sur le côté philosophique de Lucien et que celui -ci devient l'un des auteurs favoris. Comme le remarque Bompaire 15 , t . I , p. XXXVIII, une fois que Lucien est diffusé en traduction latine par de nombreux humanistes, « en premier lieu par Le Pogge , Guarino de Vérone, Aurispa au Xve siècle , puis par Thomas More, Érasme, Mélanchthon , Robert Estienne » , il est traduit dans les diverses langues européennes, et un grand nombre d'auteurs s'inspirent de lui par la suite dans leurs propres créations. Voici un choix illustratif correspondant aux xve /xvile siècles : Leone Battista Alberti ( 1404-1472 ), le « nouveau Lucien » , dans Intercoenales, Apologhi et Momo ; Érasme, dans Moriae encomiun , Colloquia familiaria ou Querella pacis ; Rabelais ( ca 1494-1553 ), dans La vie très horrifique du grand Gargantua, père de Pantagruel ( cf. Luc . , V.H. et Nav.); Matteo Maria Boiardo (ca 1440-1494 ), dans Timone ; Niccolò Machiavelli ( 1469-1527 ) , dans Asino d'oro ; Ulrich de Hutten ( 1488-1523 ) , dans Phalarismus et Arminius ; Hans Sachs ( 1494 1576), dans Charon mit den abgeschiedenen Geistern (cf. Luc . , D. mort. X ) et dans Clinias und Agatokles (cf. Luc. , Tox .) ; Alfonso de Valdés (ca 1490-1532 ), dans Diálogo de Mercurio y Carón ; Juan Luis Vives ( 1492-1540) , dans De Europae dissidiis et bello turcico ; Bonaventure des Périers (ca 1510-1544 ), dans Cymbalum Mundi ; Cristóbal de Villalón (ca 1505-1581 ) , dans El Scholastico, ainsi que le Crotalón , s'il faut bien lui attribuer cet anonyme , ce qui n'est pas sûr ; Miguel de Cervantes ( 1547-1616 ), notamment dans El coloquio de los perros y El licenciado Vidriera ; Mateo Alemán ( 1547-ca 1615 ), un « autre Lucien » ( au dire de Baltasar Gracián ), dans son roman picaresque Guzmán de Alfarache, atalaya de la vida humana ; Luis Vélez de Guevara ( 1579-1644 ), dans El diablo cojuelo ; Francisco de Quevedo (1580-1645 ), le « Lucien espagnol » déjà de son vivant, dans Sueños ( cf. Luc . , Somn ., D. mort. , Nec., Char ., Icar ., Tim ., D. meretr. ) et La hora de todos y la Fortuna con seso ( cf. Luc . , Tim . ); Saavedra Fajardo ( 1584-1648 ), dans Diálogo entre Mercurio y Luciano y República literaria ; Savinien Cyrano de Bergerac ( 1619-1655 ), dans Histoire comique d'un voyage à la lune ( cf. Luc. , V.H.). Il n'est pas étonnant que le « lucianisme » ait été aussi très important au siècle des Lumières, où il prend notamment la forme du « voltairianisme » , que repré sentent par excellence la libre -pensée et l'esprit sarcastique et démolisseur de

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Voltaire ( 1694-1778). Lucien lui-même a été considéré par la critique moderne comme le Voltaire de l'Antiquité ( cf. 247 É. Egger, « Parallèle de Lucien et de Voltaire » , dans Mémoires de littérature ancienne, Paris 1862 , p . 473 sqq . ) . On reconnaît l'influence de Lucien entre autres chez François de Salignac de la Mothe Fénelon ( 1651-1715 ) et Bernard de Fontenelle ( 1657-1757 ) , auteurs chacun d'un ouvrage intitulé Dialogues des morts ; chez Jonathan Swift ( 1667 1745 ), dans ses Gulliver's Travels ; chez Henry Fielding ( 1707-1754 ), dans Tom Jones ( 1749) ; chez Christoph Martin Wieland ( 1733-1813 ) , dans Neue Götter gespräche ( 1791 ) ; et bien sûr , chez Voltaire, dans le Micromégas ( 1752 ) et le Candide ( 1758 ) . Ajoutons aussi Le neveu de Rameau de Denis Diderot ( composé en 1769 et publié de façon posthume en 1830 ) . En ce qui concerne l'Espagne , cf. 248 A. Vives Coll , « Luciano en el siglo XVIII español » , dans J. V. Bañuls Oller, J. Sánchez Méndez & J. Sanmartín Sáez (édit. ) , Literatura iberoamericana y tradición clásica, Barcelona /Valencia 1999, p. 481-485 . Au XIXe siècle, on peut signaler que l'euvre de Lucien a influencé Johann W. Goethe ( 1749-1832 ; cf. Ribbat 244 ), Giacomo Leopardi ( 1798-1837 ) , dans ses Dialogues, Juan de Valera ( 1824-1905 ), dans Asclepigenia ( 1878 ) , ou Joaquim M. Machado de Assis ( 1839-1908 ; cf. Rego 238) . Cf. aussi 249 R. Rojo, « El espejo selenita y el Aleph de Borges» ,dans M. C. Álvarez Morán & R.M. Iglesias Montiel (édit. ) , Contemporaneidad de los clásicos : la tradición grecolatina ante el siglo XXI ( La Habana , 1-5 de diciembre de 1998 ), Murcia 1998 , p. 145 148 ; 250 M. G. Barandica de Yaya, « ¿ Pueden morir los dioses ? Algunas respuestas, desde Luciano hasta Torrente Ballester » , REC 30, 2001, p. 13-26. PEDRO PABLO FUENTES GONZÁLEZ. 67 LUCILIUS ( C.-) RE 4

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Poète satirique romain . Éditions. 1 F. Marx ( édit. ), C. Lucilii Carminum Reliquiae, 2 vol., Leipzig, 1904-1905 ; 2 N. Terzaghi (édit . ) , C. Lucilii Saturarum Reliquiae, Firenze 1934 ; 3 E. H. Warmington (édit. ) , Remains of Old Latin, t. III , Lucilius and the Twelve 19613 ; Tables , coll . LCL, London/Cambridge ( Mass . ) 1938 , 19572, 4 W. Krenkel, Lucilius. Satiren . Lateinisch und Deutsch, 2 vol . , Leiden 1970 ; 5 F. Charpin , Lucilius Satires, CUF, Paris, t. I , 1978 ; t. II , 1979 ; t. III , 1991. Index et Concordances. 6 L. Berkowitz et Th . Brunner, Index Lucilianus, Hildesheim 1968 ; 7 Anna Chahoud, C. Lucilii reliquiarum Concordantia, coll . « Alpha-Omega . Reihe A , Lexika, Indizes , Konkordanzen zur klassischen Philologie » 185 , Hildesheim 1998 , 368 p . Bibliographie jusqu'en 1970. 8 J. Christes, « Lucilius. Eine Bericht über die Forschung seit F. Marx ( 1904/5 ) » , ANRW I 2 , 1972 , p. 1182-1239.. Études. 9 A. Kappelmacher, art. « Lucilius » , RE XIII , 2 , 1927 , col . 1617 1637 ; 10 C. Cichorius, Untersuchungen zu Lucilius, Berlin 1908, réimpr. Berlin 1964 (ouvrage qui reste fondamental) ; 11 I. Mariotti , Studi Luciliani, Firenze 1960 ; 12 J. Christes, Der frühe Lucilius . Rekonstruktion und Interpretation des XXVI. Buches sowie von Teilen des XXX Buches , Heidelberg 1971 ; 13 B. Zucchelli , L'independenza di Lucilio , coll . « Univ. di Parma, Pubblicazioni

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dell'Istituto di Lingua e Lettere » 3 , Firenze 1977 , p . 81-141 ; 14 J. Christes , « Lucilius » , dans J. Adamietz ( édit . ) , Die römische Satire, Darmstadt 1986 , p. 57-122 ; 15 G. Manuwald (édit. ) , Der Satiriker Lucilius und seine Zeit, coll . « Zetemata » 110, München 2001 (recueil d'études). Biographie . Les données exactes sont difficiles à préciser ( voir 16 W. Krenkel, « Zur Biographie des Lucilius » , ANRW I 2 , 1972 , p. 1240-1259 ; 17 E. Gruen , « Lucilius and the contemporary scene » , dans Culture and National Identity in Republican Rome, London 1992, p. 272-317 ) . Selon saint Jérôme ( Chron. Ol . 160, 2) Lucilius serait né en 148 a et mort en 1024. Cette indication est toutefois peu compatible avec les indications que nous possédons par ailleurs : Lucilius avait accompagné Scipion Émilien dans son expédition contre Numance en 134 (Vell . Pat . II 9 , 4) ; il aurait alors été âgé de quatorze ans, si l'on se fie aux indications de saint Jérôme, ce qui paraît très surprenant (cette chronologie est toutefois admise par 18 Geraldine Herbert - Brown, « Jerome's dates for Gaius Lucilius , satyrarum scriptor » , CQ 49 , 1999, p. 535 543 ) . Il est difficile d'accepter la familiarité et l'amitié qui existaient entre Scipion Émilien et un poète, qui serait alors plus jeune de trente-sept ans. Aussi bien des savants ont- ils pensé à une erreur provenant d'une confusion entre les consuls de 148a ( Sp. Postumius Albinus et L. Calpurnius Piso) et ceux de 180a (A. Postumius Albinus et C. Calpurnius Piso) . Sur cette question , voir Charpin 5 , p. 1 n . 4 , qui, à la suite de Krenkel 16 , considère comme plus plausible une naissance en 180. Cette dernière date a suscité des réserves ( voir la discussion dans Gruen 17 , p. 275-276) , mais a été adoptée par de nombreux critiques. Lucilius mourut en 102 à Naples, et la cité lui accorda des funérailles publiques . Originaire de Suessa Aurunca en Campanie , Lucilius appartient à une famille de rang sénatorial ( 19 W. J. Raschke , « Arma pro amico . Lucilian Satire at the Crisis of the Roman Republic » , Hermes 115 , 1987 , p . 299-318 ) ; lui - même faisait partie de l'ordre équestre, mais il évita de s'engager dans une carrière politique, refusa même d'exercer une charge de publicain ( 671-672 M , 675 M = XXVI 31-32 Charpin ) et se borna à administrer ses immenses propriétés de Campanie et de Sicile . Bien des fragments font d'ailleurs allusion au monde de la campagne (Charpin 5 , p . 11 ; Gruen 17 , p . 279 ) . Lucilius possédait en outre des richesses considérables. Ses liens d'amitié avec Scipion Émilien et son cercle sont souvent mention nés par les auteurs anciens (cf. Horace, Sat. II 1 , 71-74 ; Ps.- Acron, Ad Horat. Sat. II 1 , 71 ) ; Lucilius accompagna Scipion Émilien dans son expédition contre Numance ; dans ses satires, il évoque cet ami à plusieurs reprises ( 1138-1142 M = H 82 Charpin ); il mentionnait la mort de Scipion ( 1093 M = XXX 8 Charpin ) et défendait sa mémoire en critiquant ses ennemis ( 1098 M = XXX 101 Charpin ). Il est sûr qu'il fut un proche de Scipion Émilien et de Laelius ( L 12 ) . Euvres. Lucilius est considéré comme le créateur de la satire : les fragments de ses poèmes sont nombreux ; dans les éditions actuelles, ils sont regroupés en 30 livres : les livres 1 à 20 contiennent des fragments en hexamètres dactyliques ; les livres 22-25 , des distiques élégiaques ; les livres 26 à 30 des mètres variés.

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Ce classement métrique ne reflète évidemment pas la chronologie de la publi cation ; elle est extrêmement difficile à préciser. Il est en général admis que les livres 26-30 sont les plus anciens et les premiers publiés, sans doute vers 131-129 ; les livres 1 à 21 sont postérieurs, composés entre 125-107 , publiés en 105 , les livres 22 à 25 auraient fait l'objet d'une publication posthume. Ces Satires contiennent de vigoureuses critiques contre des hommes politi ques de l'époque de Lucilius (outre Gruen 17 , et Raschke 19, voir 20 E. Lefèvre, « Lucilius und die Politik » , dans Manuwald 15 , p . 139-149 , et 21 E. Olshausen, « Lucilius und seine Zeit » , dans Manuwald 15 p. 166-176) ; Lucilius attaquait aussi le goût des richesses, le développement du luxe et des banquets pour faire apparaître le déclin des meurs . En même temps, le poète avait fait place à des réflexions sur le genre et la nature de la satire , définie comme sermo et ludus ( 22 U. W. Scholz, « Die sermones des Lucilius » , dans M. Braun , A. Haltenhoff F.H. Mutschler ( édit. ), Moribus antiquis res stat Romana. Römische Werte und römische Literatur im 3 und 2 Jh . v. Chr., München /Leipzig 2000 , p. 217 234 ; pour l'esthétique, voir 23 M. Puelma- Piwonka, Lucilius und Kallimachos. Zur Geschichte einer Gattung der hellenistisch -römischen Poesie, Frankfurt 1949 ; 24 W. Krenkel, « Zur literarischen Kritik bei Lucilius » , WZRostock 7 , 1957/1958 , Gesellschaft und Sprachwissenschaftliche Reihe p. 249-282 , réimpr dans D. Korzeniewski (édit. ) , Die römische Satire, Darmstadt 1970 , p. 161-266 , et 25 S. Koster, « Lucilius und die Literarkritik » , dans Manuwald 15 , p . 121 131 ) . La place de la philosophie n'est pas moins importante dans son cuvre ( elle est longuement analysée par 26 G. Garbarino , Roma e la filosofia greca , t. II , p. 484-537. Nous savons même par Cicéron, Acad. pr. II 102 , que Clitomaque ( MC 149 ) , le scholarque de la Nouvelle Académie , lui avait dédié un ouvrage dans lequel il traitait de la doctrine de la connaissance et de la réalité des sensations et où il exposait la doctrine du probable élaborée par son maître Carnéade ( » C 42 ) . Pour expliquer la rencontre entre les deux hommes , il est admis que le poète aurait séjourné à Athènes dans sa jeunesse (Garbarino 26, p . 486-487 ) , hypothèse que confirment le grand nombre de mots grecs présents dans les Satires et la connaissance des usages athéniens. Sur les mots grecs, voir Mariotti 11 ; 27 Th . Baier, « Lucilius und die griechischen Wörter » , dans Manuwald 15, p. 37-50. Plusieurs fragments contiennent des références précises à la philosophie : Socrate ( 832 M = XXIX 66 Charpin ; 709-710 M = XXVII 22 Charpin ), Aristippe [ 2A 356 ] ( 742 M = XXVIII 7 Charpin ), Carnéade ( 31 M = I 17 Charpin ) sont mentionnés . Le livre XXVIII décrivait un banquet où étaient passés en revue les différents systèmes philosophiques : l'épicurisme avec ses atomes ( 753 M = XXVIII 15 Charpin ), le stoïcisme, l'Académie ( 754 M = XXVIII 13 Charpin ). On en déduit une connaissance directe des écoles philo sophiques . Un des paradoxes stoïciens, concernant le sage , est raillé ( 1255-1256 M = H 32 Charpin ). Lucilius soulignait l'erreur des hommes , incapables de reconnaître les vrais biens ; il évoquait aussi les rapports du corps et de l'âme ( 635-636 M = XXVI 64 Charpin ; 638-639 M = XXVI 65-66 Charpin ) et

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renvoyait à la doctrine des quatre éléments primordiaux (784 M = XXVIII 29 Charpin ). Le fragment sur la vertu . Le fragment le plus important et le plus souvent commenté a pour sujet la uirtus ( 1326-1338 M = H 23 Charpin , transmis par Lactance , Diu . Inst. VI 5 , 2 ) . Un certain Albinus y est interpellé ( > A 81 ) . Cf. 28 W. Görler, « Zum virtus- Fragment des Lucilius ( 1326-1338 M ) und zur Geschichte der stoïschen Güterlehre » , Hermes 112 , 1984 , p . 445-468, qui étudie longuement la notion d'aç a et le stoïcisme du II° siècle ( Diogène de Babylonie ( 2D 145 ] , Antipatros de Tarse [ > A 205 ] ) ; 29 W.J. Raschke , « The virtue of Lucilius » , Latomus 49 , 1990 , p. 352. Lucilius en mentionne différents aspects : attribuer leur vrai prix aux choses ; connaître ce qui est juste , ce qui est utile , ce qui est honorable ( rectum , utile, honestum ) ; défendre les hommes de bien et les bonnes meurs ; « placer en premier l'intérêt de la patrie, ensuite celui de nos parents , en troisième et dernier lieu , le nôtre » . Cette dernière indication a conduit plusieurs commentateurs à affirmer que Lucilius reproduisait la tradition romaine de la uirtus et les problèmes du second siècle ( Raschke 29 ; Scholz 22 ) . Mais les échos de la philosophie ne sont pas moins importants : le poète souligne la nécessité de distinguer les faux biens des biens véritables , et donc de donner leur véritable valeur aux choses ; cette affirmation renvoie à la notion d’åě a dans la morale stoïcienne ( Garbarino 26 , p . 524 ; Görler 28 ) . La comparaison avec le De officiis de Cicéron montre que le lien qui est établi entre rectum , utile, honestum dans ce passage , provient de Panétius (Garbarino 26 , p . 523 ; Puelma- Piwonka 23 , p . 40 ). Lucilius ne fait donc pas seulement preuve d'un intérêt évident pour la philosophie , il apparaît proche de Panétius et des idées développées dans l'entourage de Scipion Émilien . MICHÈLE DUCOS . 68 LUCILIUS IUNIOR (GAIUS -) RE 26 PIR2 L 388

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Né probablement vers l'an 5 ( la date de sa mort est inconnue ) , ami et correspondant de Sénèque , son aîné de quelques années ( lettre 26, 7 : iuuenior es) , dédicataire du De prouidentia et des Questions Naturelles et destinataire des Lettres dites Lettres à Lucilius. Attaché à la Campanie, en particulier à Naples et à Pompéi où il avait passé sa jeunesse (lettre 53 , 1 : Parthenope tua , et 70, 1 : tuos Pompeios), bien que d'origine modeste , il parvint à devenir chevalier et géra des milices équestres avant d'obtenir une procuratèle en Sicile vers 63-64, la seule apparemment, malgré ce qu'avaient cru certains ( notamment 1 L. Delatte, « Lucilius, l'ami de Sénèque » , LEC 4 , 1935 , p . 367-385 et 546 590 ), qu'il ait exercée : 2 A. Vassileiou , « Les voyages de Lucilius d'après Sénèque, Ep. 31 , 9 » , REL 49 , 1972 , p . 217-227 , et 3 P. Grimal, « Lucilius en Sicile » , dans ou as rápiv. Miscellanea in onore di E. Manni, Roma 1979 , p. 1175-1187 . Fidèle et courageux en amitié – ses liens avec Sénèque étaient anciens et profonds ( lettres 49 , 1 et 55 , 10-11 ) - , il fut inquiété en 39 par Messaline et Narcisse, lors du bannissement en Corse du philosophe , compromis dans une affaire d'adultère avec Julia Livilla, et au moment de la mise à mort par Caligula de Gétulicus accusé de conspiration (Nat. Quaest. IV , préface 1 et

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14-18 ). Il fut sans doute aussi compromis dans les complots contre Néron ( à plusieurs reprises il fait part de menaces et de ses craintes d'être soumis à la question : lettres 24 , 11 ; 29 , 9 ; 42 , 5 et 103 , 1-2 ) et victime de la disgrâce commune qui frappa tous les parents et amis de Sénèque lors de la conjuration de Pison ( Tacite, Annales XV 71 ) . Possédant des dons littéraires affirmés ( la lettre 100 nous révèle ses goûts et points de vue en ce domaine , notamment sa prédilection pour un style brillant n'excluant pas rigueur et pureté ), Lucilius était aussi philosophe et poète. Il nous reste de ses écrits quelques fragments, essentiellement quatre vers transmis par Sénèque ( lettres 8 , 10 et 24 , 21 , Nat. Quaest. II 1 , 1 ) et exprimant des sentences morales. Certains lui ont parfois attribué le poème pseudo - virgilien intitulé L'Etna ; mais, malgré sa prédilection pour la poésie scientifique et son admi ration pour Lucrèce, et bien qu'il se soit intéressé à l'Etna au point d'envisager d'en faire l'ascension pour élucider son mystère, Lucilius ne semble pas avoir eu l'intention de consacrer au volcan un poème entier ; ce qu'il projetait, c'était d'écrire un ouvrage d'ensemble sur la Sicile incluant une description de l'Etna ( lettre 79 , 2-10) : sur ce difficile problème d'attribution , voir 4 L. Duret, « Dans l'ombre des plus grands: II . Poètes et prosateurs mal connus de la latinité d'argent» , ANRW II 32 , 5 , 1986 , p . 3181-3187 , 5 F.R.D. Goodyear, « The Aetna ' : Thought, Antecedents, and Style » , ANRW II 32 , 1 , 1984, p. 344-363, et 6 M. Lapidge , « Stoic Cosmology and Roman Literature, First to Third Centuries A. D. » , ANRW II 36 , 3 , 1989 , p. 1379-1429 ( p . 1409-1411 , The ' Aetna ' ) . D'autre part, rien ne permet d'identifier Lucilius au poète Lucillius (Aov x Mioc) , auteur d'épigrammes satiriques sur les athlètes figurant dans l'Antho logie Palatine. Enfin , la lettre 45 fait état d'un ouvrage philosophique composé par Lucilius dont Sénèque loue l'inspiration et le style , mais qui ne nous est pas parvenu . Pour nous , le plus important demeure le rôle qu'a joué Lucilius , comme interlocuteur privilégié de Sénèque , dans l'élaboration des Lettres, et la part qu'il a prise dans les dernières orientations du philosophe . Il semble en effet, contrairement à ce qui est parfois avancé , qu'il s'agisse là d'un véritable échange épistolaire et non d'une correspondance fictive ( cf. 7 K. Abel, « Das Problem der Faktizität der senecanischen Korrespondenz » , Hermes 109 , 1981 , p . 472-499) , même si , très vite , Sénèque a songé à la publier et si les lettres deviennent de plus en plus longues – au point de constituer parfois de brefs traités -, au fur et à mesure que Lucilius progresse dans la sagesse et que ses questions se font de plus en plus exigeantes et profondes. Cette correspondance tente même de résoudre les problèmes que posent en voyage la direction de conscience , le dialogue intellectuel et moral que les deux hommes s'obstinent à entretenir malgré la distance et les retards du courrier: 8 R. Chambert, Rome : le mouvement et l'ancrage. Morale et philosophie du voyage au début du Principat, coll . « Latomus» 288 , Bruxelles 2005, p. 175-183 . Les 124 lettres que nous possédons ( deux livres mentionnés par Aulu-Gelle ont été perdus ) retracent la révolution morale , la véritable crise de conscience qui conduit Lucilius , soutenu par les conseils fervents de son ami , à se retirer du monde , renoncer à

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ses charges et à ses ambitions pour se vouer à la vie philosophique. Son nom reste donc définitivement attaché à l'histoire de cette difficile conversion, non exempte de doutes et de rechutes, et à ce long travail de parénèse entrepris par Sénèque (meum opus es, lui dit le philosophe dans la lettre 34, 2). Se pose enfin le problème de l'appartenance philosophique de Lucilius . Certains ont voulu voir en lui un épicurien désireux de se tourner vers le stoï cisme ; mais les nombreuses références à Épicure qui émaillent les lettres ne constituent pas nécessairement une preuve de cette allégeance : elles reflètent aussi l'intérêt que Sénèque lui -même porte à la pensée du Jardin et son souci de réhabiliter la doctrine : cf. 9 J.-M. André, « Sénèque et l'épicurisme : ultime position » , Actes du Vijème Congrès de l'Ass. G. Budé, Paris 1969, p. 469-480, et, 10 Id ., « Les écoles philosophiques aux deux premiers siècles de l'Empire » , ANRW II 36 , 1 , 1987 , p. 8-77 (p. 29-32 sur Lucilius ) . Il convient surtout, semble - t-il, de voir en Lucilius un homme soucieux de parvenir à la sagesse et au bonheur, en se libérant des charges publiques, en se détachant des richesses et des honneurs, et en se consacrant à l'étude et à la réflexion . Comme le De otio, les Lettres posent le problème de l'action et de l'engagement, lesquels ne sont pas incompatibles avec la retraite, car celle-ci permet une autre forme d'action, utile à un plus grand nombre (cf. 11 J.-M. André, Recherches sur l'otium romain , Paris 1962 , en particulier p . 27-81 : « Otium, retraite et conversion à la sagesse chez Sénèque. L'évolution des dialogues aux lettres » ) . S'appuyant sur les préceptes stoïciens, mais pratiquant la parrhesia épicurienne, Sénèque ne ménage pas son ami, n'hésitant pas à lui montrer ses faiblesses, à critiquer ses erreurs ( irrésolution , attachement excessif à l'argent, voyages inconsidérés ), pour l'engager toujours plus loin dans la voie de la sagesse, l'iter ad sapientiam , dans la connaissance de soi et de la nature . Lucilius est donc le héros de cette aventure spirituelle unique , dans laquelle la philosophie, conçue comme un véritable art de vivre , permet seule d'atteindre l'équilibre et la tranquillité, Sénèque trouvant dans cette noble tâche de guide et de soutien la justification de sa propre retraite , effective depuis 62 (cf. 12 P. Grimal , Sénèque ou la conscience de l'Empire, Paris 1978 , 2ème éd. 1991 , p. 219-233 ) . Cf. 13 W. Kroll, art. « Lucilius » 26, RE XIII 2 , 1927 , col . 1645 .

RÉGINE CHAMBERT . LUCILIUS + BALBUS (L. LUCILIUS -) [B7] LUCILIUS

BALBUS (Q. LUCILIUS -) [B 8]

69 LUCIUS RE Lukios 2

FI - DII

Disciple de Musonius Rufus ( > * M 199 ) , stoïcien . Cf. 1 K. von Fritz, art. « Musonius » 1 , RE XVI 1 , 1933 , col . 895-896 . Selon Stobée, Anth . II 15 , 46 , t. II , p . 193-194 Wachsmuth , qui nous a conservé vingt et un Entretiens de Musonius Rufus, l'un au moins de ces Entretiens (V ) aurait été publié par un certain Lucius , disciple du philosophe ; il est intitulé chez Stobae Λυκ ου εκ των Μουσων ου . Meme si son nom n'est pas cité pour les autres, les éditeurs considèrent souvent que tous les Entretiens

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reproduits par Stobée ont été notés par Lucius . La banalité du nom interdit d'identifier ce dernier; on sait seulement qu'il est resté auprès de Musonius Rufus pendant une bonne partie de sa carrière, à Rome, à Gyaros et peut-être en Syrie . Une allusion ( VIII 5 ) à l'époque où existaient encore en Syrie des rois vassaux de Rome a permis de dater la rédaction des Entretiens d'après 106 apr. J.-C. Pour la contribution de Lucius à la survie des écrits de Musonius , voir l'introduction de 2 Cora E. Lutz , « Musonius Rufus, the Roman Socrates » , YCIS 10, 1947 , p . 1-30 . Il se peut qu'il ait conservé surtout ce qui relevait de la morale pratique. Une sentence attribuée à Lucius dans le Gnomologium Vaticanum (Vaticanus gr. 1144 ) doit être en réalité de Musonius Rufus: voir Lutz 2, p. 8 n. 18 . SIMONE FOLLET. 70 LUCIUS RE Lukios 3 PIR2 L 402

M IIP

Ami d'Hérode Atticus . Connu seulement par Philostrate, Vies de sophistes, II 1 , 8-9 (t. II , p. 64 , 20 65 , 27 Kayser) , ce philosophe ami d'Hérode Atticus , disciple de Musonius de Tyr, était célèbre pour la grâce de ses propos et la justesse de ses reparties. Il critiqua notamment les manifestations exagérées de deuil d'Hérode à la mort de Regilla , en 160 ou 161 , et obtint par la raillerie ce qu'il n'avait pu obtenir par l'exhortation . Il rappelait qu'il avait lui -même entendu à Olympie Hérode louer la juste mesure devant les Grecs assemblés ; il disait avoir beaucoup appris en entendant son maître Musonius développer ce thème et l'avoir lui-même déve loppé . Lucius , à Rome , raillait aussi l'empereur Marc Aurèle ( 2 - M 39 ) qui , vieillissant, allait encore suivre les leçons du philosophe Sextus de Chéronée , alors que son roi Alexandre avait déjà conquis le monde à trente -trois ans ( l'expression « mon roi » employée à propos d'Alexandre pourrait laisser supposer qu'il était d'origine macédonienne ) . Rien n'autorise à l'identifier aux autres Lucius contemporains connus ( + L 69 , 71-72 ) , non plus qu'au Aulu - Gelle , Nuits attiques, XIX d'Hérode à la mort d'un « enfant s'agit d'un des tpóøquoi d'Hérode ,

philosophe anonyme , stoïcien , qui , selon 12 , aurait critiqué la douleur excessive aimé» – l'expression laisse supposer qu'il non d’un de ses fils. SIMONE FOLLET.

71 LUCIUS RE Lukios 4 ( Aɛúxlog ? )

I-II

Philosophe néopythagoricien, originaire d'Étrurie , élève de Modératus de Gadès ( M 186 ) . Plutarque le fait intervenir dans les Quaest. Conv. VIII 7 et 8 , et dans le De facie. Il avait fait sa connaissance à Rome , à l'occasion d'un dîner donné par son ami Sextius Sylla , à la fin du 1er siècle au plus tôt ( Quaest. Conv. VIII 7 ) . BERNADETTE PUECH .

1

L 72 72 LUCIUS RE 1

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II ?

Philosophe, probablement platonicien, auteur d'un ouvrage polémique contre les Catégories d'Aristote. Études d'orientation . 1 K. Praechter, « Nikostratos der Platoniker » , Hermes 57 , 1922 , p . 481-517 , repris dans Kleine Schriften, hrsg . von H. Dörrie, Hildesheim /New York 1973 , p . 101-137 ; 2 W. Capelle, art. « Lukios » 1 , RE XIII 2 , 1927 , col . 1791-1797 ; 3 K. von Fritz, art. « Nikostratos » 26, RE XVII 1 , 1936 , col . 547-551 ; 4 P. Moraux , Der Aristotelismus bei den Griechen von Andronikos bis Alexander von Aphrodisias, t . II , Berlin /New York 1984 , p . 528 563 ; 5 H.B. Gottschalk , « The earliest Aristotelian commentators » , dans R. Sorabji (édit. ) , Aristotle Transformed. The ancient commentators and their influence, London 1990 , p . 55-81 ; 6 Simplicius, Commentaire sur les Caté gories , fasc . I , Traduction de Ph . Hoffmann, commentaire et notes à la traduc tion par I. Hadot, coll . « Philosophia antiqua » 50 , Leiden 1990 ; 7 Simplicius, Commentaire sur les Catégories, fasc . III , Traduction de Ph . Hoffmann , commentaire et notes à la traduction par C. Luna , coll . « Philosophia antiqua » 51 , Leiden 1990 ; 8 J. Mansfeld , Heresiography in Context. Hippolytus' Elenchos as a Source for Greek Philosophy, coll . « Philosophia antiqua » 56 , Leiden 1992 ; 9 H. Dörrie et M. Baltes , Der Platonismus in der Antike, t . III : Der Platonismus im 2. und 3. Jahrhundert nach Christus, Stuttgart /Bad Cannstatt 1993 ; 10 Simplicius, Commentaire sur les Catégories. Chapitres 2-4 , Traduction par Ph. Hoffmann , commentaire par C. Luna, coll . « Anagôgê » , Paris 2001 ; 11 A. Gioè, Filosofi medioplatonici del II secolo d. C. Testimonianze e frammenti. Gaio , Albino, Lucio, Nicostrato , Tauro, Severo , Arpocrazione, coll . « Elenchos » 36 , Napoli 2002 ; 12 R. Chiaradonna, Sostanza, movimento , analogia. Plotino critico di Aristotele, coll . « Elenchos » 37 , Napoli 2002. Chronologie. La seule donnée chronologique sûre est fournie par Simplicius dans le proème de son commentaire sur les Catégories, où il déclare que Lucius est antérieur à Nicostrate » N 55 ] (in Cat., CAG VIII , 1907, p . 1 , 18-22 Kalbfleisch , texte cité infra, p. 171 = T 1 ) . Or, Nicostrate , philosophe plato nicien d'Athènes , est mentionné dans un décret honorifique de Delphes qui est datable peu avant 163 après J.-C. (SIG II , n° 868 ; cf. Praechter 1 , p . 101-104 [481-484 ); Dörrie -Baltes 9, Baustein 75b , comm . p . 144-145 ). Un terminus ante quem pour l'ouvrage de Nicostrate est constitué par Atticus ( > -A 507 ) , car une des apories de Nicostrate a été reprise par Atticus (cf. Simplicius , in Cat., p. 30, 16-17 = Atticus , fr. 41 des Places, CUF, Paris 1977 ) . Puisque le floruit d'Atticus est placé en 176, Lucius doit être antérieur à cette date. On ne dispose pas , en revanche, d'un terminus post quem . Capelle 2 , col . 1793-1794 , pense pouvoir le fixer sur la base d'un passage de Simplicius concernant la division de la catégorie de la qualité : Αίτιώνται (scil. οι περί τον Λούκιον και Νικόστρα τον ) δε και το εις δύο γενέσθαι την διαίρεσιν έδει γάρ μετά τον αριθμόν και το μέγεθος τρίτον είδος τάττειν το βάρος ή την ροπήν , ώς ' Αρχύτας και ως ύστερον 'Αθηνόδωρος έταξεν και Πτολεμαίος και μαθηματικός ( in Cat . , p . 128 , 5-8 (= F 6 ] ) . Selon Capelle , puisque la réponse à l'aporie ne commence qu'après la citation de Ptolémée ( árrà öntéov oti xt2 . ) , cette

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citation appartient à la formulation de l'aporie de Lucius. Celui-ci aurait donc connu un ouvrage de Ptolémée où il était question du poids, très probablement le Tepi potõv , ouvrage perdu, cité par Simplicius, in De caelo , CAG VII , 1894, p . 710 , 14-16 Heiberg ( = Claudii Ptolemaei Opera quae extant omnia , ed. J.L. Heiberg, t. II , Leipzig 1903, p . 265 , fr. 1 ; cf. Th . Heath , A History ofGreek Mathematics, t . II , Oxford 1921 , réimpr. 1965 , p . 295 ) . Selon Praechter 1 , p . 129 ( 509 ) , n . 1 , la possibilité demeure ouverte que la citation du Ps .- Archytas ( A 323 ) , d'Athénodore ( > A 497 ) et de Ptolémée soit une addition de Simplicius . Cette possibilité est exclue par Capelle 2, col . 1794-1795 ( ayant pris connaissance de l'étude de Praechter après avoir rédigé son article, Capelle en donne un résumé aux col . 1794-1797 ; il accepte toutes les conclusions de Praechter, mais demeure fidèle à son interprétation de ce passage de Simplicius) . Moraux 4 , p. 546 n . 82 , pense que la question ne peut pas être tranchée : « Eine sichere Entscheidung scheint kaum möglich zu sein. Für die Chronologie wäre sie ohnehin kaum ergiebig, da Ptolemaios ' nepì potāv nicht datierbar ist» . A notre avis , l'hypothèse qu’un ouvrage scientifique de haut niveau tel que devait l'être le lepi portõv de Ptolémée , puisse avoir déjà été utilisé par ses contemporains dans le cadre de l'exégèse aristotélicienne, est fort invraisem blable, d'autant plus que Ptolémée semble avoir été pratiquement inconnu au II siècle ( dans le prologue à son commentaire des Harmoniques de Ptolémée , Porphyre affirme, par exemple , que cet ouvrage n'a jamais été commenté , p . 3 , 16-18 Düring, et l'on ne connaît aucune citation de Ptolémée au II ° siècle) . Il est plus probable que la citation du Ps.- Archytas, d'Athénodore et de Ptolémée a été ajoutée non pas par Simplicius , comme le pensait Praechter, mais par sa source , le commentaire de Jamblique , qui , à son tour , dépend du commentaire de Porphyre. En effet, dans la discussion de cette aporie , Simplicius cite explici tement Jamblique (» I 3 ] ( p. 128 , 20 - 129 , 7 ) qui avait accepté la solution du Ps . - Archytas ( p . 128 , 16-19 ) et rejeté celle de Cornutus ( » C 190 ) et de Porphyre ( p . 129 , 1-4 ) . La référence à Athénodore et à Ptolémée, ainsi qu'à Cornutus, peut donc être due à Porphyre. En tout cas , elle ne lui est pas antérieure . Cette citation de Ptolémée ne peut donc pas constituer un terminus post quem pour l'ouvrage de Lucius . Rien donc ne nous permet de dater de façon certaine l'ouvrage de Lucius du IIe siècle de notre ère . Il faut aussi remarquer que les citations d'Athénodore de Tarse ( Simpl . , p . 129 , 7 ) et de Cornutus ( Simpl . , p . 129 , 1 ) ne fournissent pas un point de repère chrono logique : Lucius peut avoir repris une aporie d'Athénodore ( per s . avant J.-C. , > A 497 , p . 657 sub F ) et la réponse de Cornutus ( 1er s . après J.-C. ) se rapporte sans aucun doute à l'aporie d'Athénodore , et non pas à celle de Lucius ( Cornutus avait écrit en effet un ouvrage intitule Πρός ' Αθηνόδωρον και ’ AplototéAnv : » C 190 , p . 467-468 ; cf. Moraux 4 , p . 593 et n . 4 ; Simplicius 10 , p . 43 , n . 3 et p . 605 ). La référence au Ps. -Archytas et à Ptolémée est restée dans la formulation de l'aporie chez Élias, in Cat., CAG XVIII 1 , 1900 , p. 185 , 10-11 Busse , où le nom d'Athénodore a été remplace par celui de Platon : τρίτον εί τούτων εστί μόνων γένος ή και της ροπής , ώς φησι Πλάτων και Αρχύτας και Πτολεμαίος ο αστρονόμος . Puisqu'il faut exclure qu’Élias ait eu accès à l'ouvrage de Lucius et qu'il est tout à fait improbable qu'il cite les

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commentaires de Porphyre ou de Simplicius de première main (ce serait un cas tout à fait isolé ), on envisagera plutôt l'hypothèse d'une tradition d'école. Aucun indice ne permet d'identifier notre Lucius à l'un ou à l'autre des deux philosophes de même nom : l'élève de Musonius Rufus ( RE Lukios 2 ) qui a recueilli les propos de son maître ( cf. C. Musonius Rufus , Reliquiae , éd . O. Hense , Leipzig 1905 , réimpr. 1990 , p . XIII - XVII ) et le philosophe ami du mécène et rhéteur athénien Hérode Atticus ( 101-177 après J.-C. ) dont parle Philostrate , Vitae soph. II 1 , p. 64, 20 - 65 , 27 Kayser (RE Lukios 3 ) . Transmission du texte. Bien que tous les fragments de Lucius soient conservés dans le commentaire de Simplicius sur les Catégories, Simplicius ne semble pas avoir connu directement les ouvrages de Lucius et de Nicostrate. Le plus probable est qu'il les ait connus par l'intermédiaire des commentaires ( perdus) de Porphyre A Gédalios et de Jamblique qui , à son tour, utilisait le commentaire de Porphyre. En effet, les citations des apories de Lucius et /ou de Nicostrate sont souvent suivies, chez Simplicius, par la solution de Porphyre ou de Jamblique : cf. Simpl . , in Cat., p. 21 , 2-5 (Porph . ), p. 29 , 24-29 ( Porph .), p. 30, 16-23 (Porph .), p. 48 , 1-11 ( Porph .), p. 128 , 5 - 129, 2 ( Porph . et Jambl . ) , p. 231 , 20-27 (Jambl . ) , p . 268 , 19-22 (Jambl . ) , p . 368 , 12 - 369 , 14 ( Jambl . ) , p. 381 , 23 (Jambl . ) , p. 414 , 26-34 (Porph . ). En d'autres cas , des parallèles littéraux entre le commentaire de Simplicius et celui de Dexippe ( CAG IV 2 , 1888, A. Busse) confirment que Simplicius tire ses citations de Lucius et/ou Nicostrate du commentaire de Porphyre A Gédalios, soit directement soit par l'intermédiaire de celui de Jamblique : Simpl . , in Cat., p . 26 , 22-28 = Dex ., in Cat ., p . 19 , 20-26 (cf. Simplicius 7 , p. 131 ) ; Simpl . , in Cat., p . 64, 13-18 = Dex ., in Cat., p. 32 , 10-16 ( cf. Simplicius 10, p . 839 ) ; Simpl . , in Cat., p. 75 , 12-22 = Dex., in Cat ., p. 42, 18-31 ( cf. ibid. , p. 846-847 ; attribution de l'aporie à Lucius , Nicostrate et Plotin chez Simpl . , p . 73 , 27-28 ) ; Simpl . , in Cat., p. 76 , 13-17 et 77 , 3-11 = Dex ., in Cat., p . 40 , 13-18 et 41 , 5-16 . Puisque le commentaire de Dexippe est mutilé de la fin ( il s'arrête au chap. 6 , 4 b 23 ) , aucune comparaison avec le commentaire de Simplicius n'est possible pour la partie perdue. Si Simplicius n'a pas connu directement l'ouvrage de Nicostrate qui reprenait les apories de Lucius, on peut aussi penser que Porphyre n'a connu les apories de Lucius que par l'intermédiaire de Nicostrate. En outre , si , à en croire Simplicius, in Cat., p . 2 , 5-8 , Porphyre avait réfuté toutes les apories soulevées contre les Catégories, Simplicius semble avoir opéré un choix parmi les apories transmises par Porphyre. En effet, alors que , comme le dit Simplicius, in Cat ., p. 1 , 20 , Lucius et Nicostrate avaient écrit « des objections à presque toutes les affir mations » des Catégories ( cf. aussi Simpl . , p. 62 , 29 ) , le commentaire de Simplicius ne restitue que des apories concernant quelques passages du texte aristotélicien (on ne dispose d'aucun critère sûr pour attribuer à Lucius ou à Nicostrate telle ou telle parmi les apories anonymes transmises par Simplicius, pace J. Dillon , The Middle Platonists, p. 235 ) . Caractéristiques de l'ouvrage. Comme Simplicius le dit dans le proème de son commentaire sur les Catégories, les ouvrages de Lucius et de Nicostrate avaient un caractère résolument polémique : « D'autres ont préféré écrire seule

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ment des apories contre ce que dit Aristote : c'est ce qu'a fait Lucius et, après lui , Nicostrate, qui s'est fondé sur l'ouvrage de Lucius ; ils n'ont eu pour ambition que de présenter des objections à presque toutes les affirmations du livre, et cela sans circonspection, mais bien plutôt avec une violence impudente » ( άλλοις δε ήρεσεν απορίας μόνας γράψαι προς τα λεγόμενα , όπερ Λούκιός τε πεποίηκε και μετ ' αυτόν Νικόστρατος τα του Λουκίου υπο βαλλόμενος , σχεδόν τι προς πάντα τα ειρημένα κατά το βιβλίον ενστάσεις κομίζειν φιλοτιμούμενοι, και ουδε ευλαβώς , αλλά καταφορικώς μάλλον xaì åmpu plaxótwç, Simpl . , p. 1 , 18-22 ; Simplicius 6 , p. 4-5 , trad. légèrement modifiée ; Dörrie - Baltes 9 , Baustein 86.4 , comm . p . 258-260 ; Gioè 11 , p . 129 134) . En effet, les verbes par lesquels Simplicius introduit le plus souvent les apories de Lucius et de Nicostrate sont éyxanetv (p. 29 , 24 ; 58 , 15 ; 125 , 16 ; 127 , 30 ; 156, 17 ; 368 , 12 ; 428 , 3 ), ånopetv (p. 21 , 2 ; 26, 21 ; 30, 16 ; 48 , 1 ; 73, 27 ; 76 , 13 ) et aitão oal ( p. 128 , 5 ; 231 , 20 ; 388 , 4 ; 406 , 6 ; 410, 25 ; 411 , 6 ) . Le caractère parfois sophistique de ces apories est souligné par Praechter 1 , p. 117 [ 497 ] , qui parle d'une « Opposition um der Opposition willen » . Il s'agis sait donc plutôt d'un recueil d'apories de valeur inégale et d'origine diverse que d'un véritable commentaire. La nature composite de ce recueil, dans lequel se trouvaient des éléments platoniciens ( cf. infra, F 3 et 7 ) et stoïciens ( cf. infra, F2 ), explique la difficulté à classer Lucius dans le panorama des écoles philo sophiques ( cf. von Fritz 3, col. 550-551 ; Dörrie -Baltes 9, p. 258) . Le fait que son ouvrage ait été utilisé par le platonicien Nicostrate et qu'un certain nombre de ses apories aient été reprises par Plotin (de façon anonyme ) , amène à considérer l'appartenance de Lucius à l'école académicienne comme probable. D'autre part, la survie de certaines apories de Lucius chez Plotin témoigne de leur valeur philosophique et de leur importance dans l'histoire de l'exégèse aristotélicienne ( mise en évidence par Praechter 1 , p. 131-137 ( 511-517 ) ; révision partielle de la reconstruction de Praechter chez Chiaradonna 12 , p . 42-54 , qui souligne l'origi nalité de Plotin par rapport à ses sources). Une difficulté supplémentaire pour saisir le caractère de l'ouvrage de Lucius consiste en ce qu'il est pratiquement impossible de le distinguer de celui de Nicostrate . En effet, Simplicius cite tantôt les deux auteurs ensemble sans préciser la contribution de chacun d'entre eux à la formulation de l'aporie ( oi nepi töv Aoúxlov xai ( Tòv ) Nixóotpatov : cf. Simpl . , in Cat., p . 62 , 28-29 ; 73 , 27-28 ; 127 , 30 ) , tantôt Lucius seul ( toujours comme oi nepi töv Aoúxlov, cf. p. 48 , 1 ; 64, 18 ; 125 , 15-16 ; 156, 17 ; jamais comme (ó ) Aoúxloc) , tantôt Nicostrate seul (oi nepì tòv Nixóotpatov , cf. p . 21 , 2 ; 26, 22 ; 29 , 24-25 ; 58 , 15 ; 64 , 13-14 ; 76 , 14 ; 257 , 33 ; 268 , 19 ; (ó) Nixóotpatoç , cf. p. 30, 16 ; 231 , 20 ; 368 , 12 ; 381 , 23 ; 385 , 10 ; 388 , 4 ; 390 , 15 ; 402, 12 ; 406 , 6 ; 410, 25 ; 414 , 27 ; 428 , 3 ; 429 , 13 ) . On notera que la dernière citation de Lucius se trouve à la p. 156 , 17 (Cat. 7 ) : ensuite son nom disparaît et Simplicius ne cite plus que Nicostrate . Il est vrai que , comme le remarque Praechter 1 , p. 122 ( 502 ) , n . 2 , ces différentes attributions ( tantôt Lucius , tantôt Nicostrate , tantôt les deux ensemble ) ne peuvent pas être interprétées de manière trop stricte , en ce sens que les apories attribuées à un seul des deux auteurs ne se seraient pas trouvées

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chez l'autre, alors que les apories attribuées aux deux auteurs à la fois leur auraient été communes. Cela dit , la disparition soudaine du nom de Lucius semble suggérer que sa critique s'arrêtait au début du chapitre 7 et que les apories suivantes furent ajoutées par Nicostrate (cf. von Fritz 3 , col . 550 ; Gottschalk 5 , p. 80 ) . En l'absence d'une explication certaine de cet état des choses, il est prudent d'assigner à Lucius seulement les apories qui lui sont attri buées explicitement, que son nom apparaisse seul ou qu'il soit accompagné de celui de Nicostrate . Témoignages et fragments. Le commentaire de Simplicius sur les Catégo ries restitue deux témoignages concernant Lucius et sept fragments de son ouvrage .

( T 1 ) Simpl . , in Cat., proème, p . 1 , 18-22 ( = 1 T Gioè ). Lucius et, sur la base de son ouvrage , Nicostrate ont soulevé des apories contre presque tout ce qu'Aristote affirme dans les Catégories ( voir supra , p . 167 ) . (T 2 ) Simpl. , in Cat., p. 62, 28-30 (Cat. 4, 1 b 25-2 a 4) (= 3 T Gioè ]. Lucius et Nicostrate ont soulevé des apories contre la liste des catégories ( cf. Simplicius 10, p . 599-619 ; Gioè 11 , p . 138-139 ) . ( F 1 ) Simpl . , in Cat ., p. 48 , 1-11 (Cat. 2 , 1 a 24-25 ) (= 2 F Gioè ]. Aporie de Lucius à propos des propriétés constitutives de l'essence : la définition de ce qui est en un sujet proposée par Aristote, à savoir « Par “inhérent à un sujet” , je veux dire ce qui , sans se trouver en quelque chose à titre de partie , ne peut exister à part de la chose où il est » ( trad. R. Bodéüs, CUF, Paris 2001, p. 3 ) , ne comprend pas les propriétés constitutives de l'essence , c'est -à -dire les propriétés qui font intrinsèquement partie du sujet auquel elles appartiennent ( cf. Mansfeld 8 , p. 120-121 ; Simplicius 10, p. 225-256 ; Gioè 11 , p . 134-138 ; Chiaradonna 12, p. 67-77 ) . ( F 2) Simpl . , in Cat ., p. 64, 18-19 (Cat. 4 , 1 b 25-2 a 4) ( = 4 T Gioè ]. Aporie de Lucius concernant la liste aristotélicienne des dix catégories : la liste est insuffisante parce qu'elle ne comprend pas les conjonctions ( cf. Simplicius 10, p . 655-660 ). Selon Praechter 1 , p . 129 (509) ( cf. aussi Moraux 4, p . 542 et n . 63 ) , il faut aussi attribuer à Lucius les deux apories suivantes ( Simpl . , in Cat., p. 64 , 29 et p. 65 , 2-3 ) concernant le classement des articles, des négations , des privations, des flexions et des formes indéterminées ( cf. Simplicius 10, p. 660 673 ). L'attribution à Lucius de l'aporie sur les articles (p . 64, 29) pourrait être suggérée par la formule d'introduction : ÉMIENTOūOLV dè xai , qui semble reprendre paolv oi nepì tòv Noúxlov ( p . 64, 18 ) introduisant l'aporie sur les conjonctions. En revanche, aucun indice ne permet d'attribuer à Lucius l’aporie sur les négations , les privations, les flexions et les formes indéterminées ( p. 65 , 2-3 ) . L'inspiration grammaticale commune à ces apories ne constitue pas un critère suffisant pour les attribuer en bloc à Lucius , car des apories d'inspiration grammaticale visant à démontrer l'insuffisance de la liste aristotélicienne des dix catégories avaient aussi été formulées par d'autres auteurs , tels que les stoïciens Athénodore de Tarse et Cornutus (cf. Simplicius 10 , p . 604-610 ; Gioè 11 , p . 139-141 ).

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( F 3 ) Simpl . , in Cat., p . 73 , 15-28 ( Cat. 4, 1 b 25-2 a 4 ) (= 5 T Gioè ). Aporie sur l'universalité des catégories, attribuée à Lucius , Nicostrate et Plotin ( cf. Simplicius 10, p. 750-789 ; Chiaradonna 12, p. 96-104 ). Cette aporie semble témoigner de l'appartenance de Lucius et de Nicostrate à l'école platonicienne (cf. Praechter 1 , p . 120-121 (500-501 ); Moraux 4, p . 542 ; Gioè 11 , p. 141-145 ). ( F 4) Simpl . , in Cat., p. 125 , 13-16 ( Cat. 6 , 4 b 23-24) (= 6 T Gioè ). Aporie de Lucius visant la division aristotélicienne de la quantité: le corps, qui est une substance , a été classé par Aristote dans la catégorie de la quantité. La réponse de Simplicius se fonde sur la distinction de deux significations du terme « corps » : en tant que tridimensionnel et mesurable, le corps est une quantité, en tant que substrat numériquement un et identique , capable de recevoir les contraires, le corps est une substance. Même distinction chez Ammonius, in Cat. , CAG IV 4 , 1895 , p. 58 , 7-9 Busse , hors du contexte de cette aporie. La même aporie , anonyme , se lit chez Philopon, in Cat., CAG XIII 1 , 1898 , p. 88 , 3-10 Busse , et chez Olympiodore, in Cat ., CAG XII 1 , 1902, p . 83 , 36-84 , 3 Busse . Alors que Philopon propose la même solution que Simplicius , Olympio dore distingue entre corps naturel et corps mathématique : le corps naturel , tridimensionnel , se range sous la substance , le corps mathématique sous la quantité . Puisque la distinction entre corps naturel et corps mathématique se lit aussi chez Simplicius, in Cat., p. 124, 28-125 , 2 , où elle est attribuée à Herminus ( » H 83 ) , Moraux 4 , p . 545 , relie ce passage de Simplicius à l'aporie de Lucius concernant le classement du corps et affirme qu'Herminus connaissait l'ouvrage de Lucius . A notre avis , puisque l'aporie à laquelle répond Herminus vise un autre passage de Cat. 6, à savoir 5 a 4-6, où Aristote affirme que « dans le cas du corps aussi , on peut saisir une borne commune , ligne ou surface, avec laquelle les parties du corps sont en contact » ( trad. R. Bodéüs, p . 21 ) , il semble plus prudent de distinguer les deux apories et de renoncer à établir un rapport entre Herminus et Lucius. Voir Gioè 11 , p. 145-147 . ( F 5 ) Simpl . , in Cat., p. 127 , 30-33 ( Cat. 6, 4 b 23-24 ) ( = 7 T Gioè ]. Aporie attribuée à Lucius et à Nicostrate, toujours à propos de la division de la quantité: la quantité continue qui , d'après Aristote, constitue une des deux espèces de la quantité , n'est pas un nogóv , mais un anaíxov (doté d'une certaine grandeur); il aurait donc fallu diviser la quantité en nogóv ( nombre ) et anaíxov ( ligne , surface, corps, temps , lieu ) , et appeler le genre commun à ces deux espèces ou bien nogóv ( par homonymie ) ou bien par un autre nom . La réponse de Simpli cius ( p . 127 , 33-128 , 4 ) consiste à reconnaître que le continu est souvent un anaixov et non pas un nodóv ; mais puisqu'il y a de nombreuses exceptions ( l'eau et le temps , tout en étant continus , ne sont pas dits « grands » , mais « beaucoup » ) , Aristote a eu raison de ne pas faire du nooóv et du anaixov deux catégories distinctes , et de diviser la catégorie de la quantité en discrète et continue . Cette aporie n'est discutée par aucun autre commentateur. Voir Moraux 4, p . 545-546 ; Gioè 11 , p. 147-148 . ( F 6 ) Simpl . , in Cat ., p . 128 , 5-8 (Cat . 6 , 4 b 23-24 ) ( = 7 T Gioè ). L'attribution à Lucius et à Nicostrate ne fait pas de doute , car l'aporie est introduite par Αίτιώνται δε και , qui fait pendant a Έγκαλούσιν δε οι περί τον

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Λούκιον και Νικόστρατον τη διαιρέσει πρώτον μεν κτλ. ( p . 127 , 30-31 = F 5 ) . Il s'agit, encore une fois, d'une aporie visant la division de la quantité : selon Lucius et Nicostrate, la division aristotélicienne qui ne mentionne que la quantité discrète (nombre et discours) et la quantité continue ( ligne , surface, corps, temps, lieu ) , est insuffisante, car elle aurait dû aussi comprendre le poids (ponń, Bápos ). La discussion de cette aporie chez Simplicius , p. 128 , 8 - 129, 6, atteste l'utilisation des commentaires de Porphyre et de Jamblique et permet de reconstruire l'histoire de la question comme suit : l'aporie avait été probable ment formulée par Athénodore de Tarse ( p . 128 , 7 ) auquel avait répondu Cornutus (p. 129 , 1 ) affirmant que le poids n'est pas une quantité , mais une qualité. Le Ps.- Archytas ( p. 128 , 16-19 ) avait soutenu la tripartition de la quan tité (cf. Th. Szlezák, Pseudo- Archytas, Über die Kategorien, coll . « Peripatoi » 4, Berlin /New York 1972 , p. 120-121 ; voir aussi l'Introduction, p. 15-16) ; alors que Porphyre s'était rangé du côté de Cornutus ( p. 129 , 1 ) , Jamblique s'était rallié au Ps.-Archytas ( p. 128 , 20-129 , 1 ; cf. B. Dalsgaard Larsen , Jamblique de Chalcis exégète et philosophe, Aarhus 1972 , fr. 36 , comm . p. 263-264 ), recon naissant ainsi le bien - fondé de l'aporie et repoussant la solution de Cornutus et de Porphyre ( p. 129 , 1-6). Simplicius semble pencher plutôt pour la solution du Ps.-Archytas (p . 128 , 16-19 ). Cette aporie est aussi discutée par Ammonius, in Cat . , p . 55 , 4-10 ( voir aussi la rédaction du ms . F, dans l'apparat critique) , Olympiodore, in Cat., p. 82 , 33 - 83 , 3 , et Élias, in Cat., p. 186 , 20-32. La solu tion de Cornutus- Porphyre ( le poids est une qualité) est reprise par Ammonius ( rédaction F), alors que chez Olympiodore, p . 82 , 38 - 83 , 2 et Élias, p . 186 , 20 32 , on trouve une solution différente , selon laquelle le poids n'est pas une quan tité , mais une propriété ( nádoc) de la quantité . Les commentateurs alexandrins ne semblent pas avoir connu la solution du Ps .-Archytas -Jamblique. Voir Moraux 4 , p. 546 ; Gioè 11 , p. 148-150 . ( F 7 ) Simpl . , in Cat., p. 156, 14-23 ( Cat. 7) (= 8 T Gioè ). Aporie préliminaire de Lucius concernant la place de la relation. Si le sujet de paolv ( ligne 20) est toujours oi tepi tov Aoúxlov ( ligne 17 ) (Moraux 4 , p. 547 et n . 89 , hésite ) , l'aporie de Lucius comprenait deux points : ( a ) Aristote aurait dû placer la relation après la qualité, et non pas avant, car il y a plus d'affinité entre la qualité et la substance qu'entre la relation et la substance ( p. 156 , 14-20 ) ; ( b) la qualité doit suivre la quantité, parce que la quantité, ainsi que la substance , se range parmi les réalités καθ ' αυτό , alors que la qualité se range plutot parmi les réalités npòç Étepov ( p. 156, 20-23 ) . L'argument ( b) , fondé sur la dichotomie académicienne xao'aútá /mpoc ärra (cf. Mansfeld 8, p . 59-62 ; Simplicius 10, p. 132-140) , confirme l'hypothèse que Lucius était un platonicien . Puisque Porphyre, in Cat ., CAG IV 1 , 1887 , p . 111 , 6-15 Busse , justifie la succession aristotélicienne ( quantité, relation, qualité ), on peut penser qu'il avait répondu à l'aporie de Lucius dans son commentaire A Gédalios. Même justification chez Dex ., in Cat., p. 64 , 13-65 , 13 (contre le Ps.-Archytas et Plotin ) ; Amm. , in Cat., p. 66 , 7-14 ; Philopon, in Cat ., p . 102 , 16-29 ; Olymp. , in Cat., p . 97 , 7-27 ; Élias, in Cat., p. 201 , 18-202, 8. En revanche, l'objection de Lucius est accueillie par Simplicius sur la base du Ps.-Archytas ( Simpl . , p. 156, 25-27 = 24 , 3-5 Szlezák ).

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La présence du Ps.-Archytas suggère que l'aporie avait aussi été discutée par Jamblique. Voir Moraux 4 , p . 547 ; Gioè 11 , p . 150-153 ; sur la question de l'ordre des catégories chez les commentateurs néoplatoniciens, cf. C. Luna, « La relation chez Simplicius » , dans I. Hadot (édit. ) , Simplicius. Sa vie, son æuvre, sa survie, Actes du colloque international de Paris ( 28 sept. - 1 er octobre 1985 ), coll. « Peripatoi » 15 , Berlin /New York 1987 , p . 113-147 , en part. p. 131-136. CONCETTA LUNA. 73 LUCRETIUS CARUS ( T.-) RE 17

Ia

Auteur du De rerum natura ( abrégé DRN ), poème en six chants exposant la doctrine d'Épicure ( » E 36 ) . La bibliographie la plus récente est due à 1 Michael Erler, GGP Antike 4, 1994, p. 383-481. La présente notice présentera de préférence les ouvrages postérieurs à 1992 , date à laquelle s'arrête la bibliographie commentée de Michael Erler. Biographie. La source principale est un passage de la Chronique de saint Jérôme, rédigée entre 325 et 378 : Titus Lucretius poeta nascitur, postea amatorio poculo in furorem uersus, cum aliquot libros per interualla insaniae conscripsisset, quos postea Cicero emendauit, propria se manu interfecit, anno aetatis XLIV . Dans la plupart des manuscrits de cette Chronique, la naissance est consignée à l'année 1923 d'Abraham (= 94 avant notre ère ), mais, dans certains, l'année mentionnée correspond à 96 ou à 93. Selon la date adoptée pour sa naissance, le poète serait donc mort en 51/50, 53/52 ou 50/49. Le grammairien Donat (IVe siècle) , dans sa Vie de Virgile, affirme que la mort de Lucrèce coïncide avec le dix-septième anniversaire de Virgile, date à laquelle celui -ci revêtit la toge virile. Comme Donat fait naître Virgile en 70 , cela donnerait la date de 53 pour la mort de Lucrèce, de 97 pour sa naissance ; mais Donat se trompe en ajoutant que les consuls étaient alors Pompée et Crassus: ils furent consuls en 55. Selon cette donnée, Lucrèce serait donc mort en 55 , ce qui reporte sa naissance à 99. Une note d'un manuscrit du ixe ou Xe siècle (Monacensis 14429) fixe en 97 la naissance de Lucrèce. On trouvera une discussion de ces dates notamment dans 2 A. Rostagni, « Ricerche di biografia lucreziana, I : La cronologia » , RFIC 65 , 1937 , p. 25-31 , 3 U. Pizzani , Il problema del testo e della composizione del DRN di Lucrezio , Roma 1959 , p . 38 , et 4 R. Scarcia, G. D'Anna et E. Paratore , Ricerche di biografia lucreziana , Roma 1964. Quant au contenu de la notice de Saint Jérôme sur Lucrèce, il a paru suspect à la plupart des éditeurs et exégètes récents. Sa source demeure inconnue , bien que l'on ait souvent avancé le De poetis de Suétone ( cf. la discussion dans Pizzani 3, p. 13 sq. ) . Alfred Ernout, dans la préface de son édition du DRN , Paris 1920 , l'a rejetée avec vigueur comme la plupart des critiques : « La folie, le suicide ont dû être des châtiments inventés par l'imagination populaire pour punir l'impie qui refusait de croire à la survie de l'âme et à l'influence des dieux comme au pouvoir des prêtres. Quelle ironique revanche de montrer Lucrèce, qui a tant mis en garde contre l'amour, victime à son tour de l'amour [ ... ] » . On retrouve souvent la même force de conviction chez ceux qui rejettent la notice en fonction de divers critères non dénués de subjectivité: personnalité du poète

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induite à partir de l'auvre , réaction supposée à certaines de ses thèses, vraisem blance de la notice elle -même. Selon K. Ziegler, « Der Tod des Lucretius » , Hermes 71 , 1936, p . 421-440 , la réputation de folie a pu s'ancrer dans une conception déformée de l'inspiration : la création poétique suppose en effet, selon une tradition largement divulguée dans l'Antiquité, une part d'exaltation et de “folie” ; c'est en ce sens que le poète latin Stace pouvait parler du furor arduus de Lucrèce. Il est d'autre part étrange que le suicide ne soit mentionné par aucun des auteurs antérieurs , en particulier Lactance . Plus radicalement , 5 L.P. Wilkinson, « Lucretius and the Love- Philtre » , CR , 1949, p. 47-48 , a développé une hypothèse émise par J. Jessen dès 1869, selon laquelle Lucrèce avait été confondu avec Lucullus ( ~ L 74 ) , qui mourut en 56 , après avoir, assurait - on , bu un philtre d'amour - Wilkinson suggère que la possible abrévia tion des deux noms, Lucullus et Lucretius, en Luc . a entraîné l'erreur. Cepen dant tous ces arguments n'ont pas paru décisifs et certains exégètes : ainsi 6 L. Perelli, Lucrezio poeta dell'angoscia , Firenze 1969, et 7 D.B. Gain , « The Life and Death of Lucretius » , Latomus 27 , 1969, p. 545-553 , ont continué à soutenir la véracité de la notice de Saint Jérôme, en alléguant notamment le fait que le poème témoignerait d'un déséquilibre psychique (sur ce point contestable , voir aussi infra ). La vie de Lucrèce ne manque du moins pas à la règle des biographies anciennes qui procèdent le plus souvent d'une fascination envers l'auteur, surtout lorsqu'il est poète ; voir 8 Chr. Hunzinger, « Miracles et mer veilles dans les vies des poètes anciens » , dans 9 S. Dubel et S. Rabau ( édit. ) , Fictions d'auteur ? Le discours biographique sur l'auteur de l'Antiquité à nos jours, Paris 2001, p . 47-62 . Chez les modernes, des biographies imaginaires de Lucrèce sont nées d'une projection romanesque de la notice suspecte de saint Jérôme sur certains passages du DRN censés refléter la psychologie du poète : interprétés subrepticement en fonction de la mince notice, ils servirent à leur tour à en développer la trame dramatique. Voir 10 L. Canali , Nei pleniluni sereni : autobiobiografia immaginaria di Tito Lucrezio Caro, Milano 1995 , trad. fr. par D. Colomar, Aux pleines lunes tranquilles, Paris 1997. Dans « Lucrèce , poète » , une des Vies imaginaires de Marcel Schwob, 1896, la tentative de capter la vie d'un poète au miroir de son æuvre peut apparaître comme la quête impossible du ressort de la création poétique (J. Kany - Turpin, dans Dubel et Rabau 9, p. 163-165 ) . Reste l'allusion à Cicéron contenue dans la notice ; sur ce point, la critique est plus encline à accepter le témoignage de saint Jérôme, mais comprend diverse ment le rôle de Cicéron, défini par le verbe emendauit. Quelques commenta teurs, dont C. Bailey , considèrent que Cicéron donna des conseils littéraires à Lucrèce pour corriger, « amender » son manuscrit ; ils s'appuient sur un passage d'une notice manuscrite découverte dans une édition vénitienne de Lucrèce et désignée sous le nom de Vita Borgiana ( d'après Girolamo Borgia, qui , en 1502 , avait ajouté de sa main la notice ): Cum T. Pomponio Attico, Cicerone, Marco Bruto et C. Cassio coniunctissime uixit. Ciceroni uero recentia ostendebat carmina, eius limam secutus a quo inter legendum aliquando admonitus ut in translationibus seruaret uerecundiam , ex quibus duo potissimum loci referuntur,

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Neptuni lacunas et caeli cauernas . Mais l'authenticité de l'ensemble de la notice , qui comporte bien des invraisemblances , fut contestée , dès après sa publication en 1894 , notamment par 11 J. Woltjer, « Studia Lucretiana », Mnemosyne, n . s . 23 , 1895 , p. 222-223 , qui y vit une invention d'humaniste ; voir contra 12 A. Rostagni , Svetonio, De poetis e biografi minori, Torino 1944, p . 153 , dont les arguments ont été critiqués à leur tour par 13 F. Giancotti, dans son édition Lucrezio , La natura , introd . , testo criticamente riv . , trad . e commento di F.G. , Milano 1994 , p . XXI - XXII . 14 P. Boyancé , Lucrèce et

>

l'épicurisme, Paris 1963 , p. 23 , considère le passage se référant à Cicéron comme « une historiette » , inventée à partir d'une interprétation fautive du terme emendauit utilisé par saint Jérôme: Donat emploie le terme dans le cas de L. Varius Rufus et P. Tucca, qui éditèrent l'Énéide. Si l'on s'en tient à saint Jérôme , Cicéron serait donc bien l'éditeur de Lucrèce, celui qui diffusa son manuscrit après sa mort ; cf. 15 E. Paratore « Emendo in Suetonio, Donato e S. Girolamo » , dans 16 R. Scarcia, G. D'Anna et E. Paratore, Ricerche di biografia lucreziana , Roma 1964 , p . 135-159 , et 17 G. D'Anna, « Il lemma ieronimiano su Lucrezio e la cronologia del poeta » , dans Scarcia et alii 16 p. 97-134. Cicéron, qui attaque souvent les thèses épicuriennes dans ses traités philosophiques , ne cite jamais le poème de Lucrèce , mais deux lignes d'une lettre à son frère Quintus ( C 125 ) datée de février 54 attestent qu'il connaît son cuvre : Lucreti poemata , ut scribis, ita sunt multis luminibus ingeni , multae tamen artis (Ad Quint. fr ., II 9 , 3 ) . Le sens de poemata a été discuté, cf. Pizzani 3 , p. 38 , selon qui le terme s'applique à l’æuvre entière , et 18 D. F. Sutton « Lucreti poemata once again » , RSC 19 , 1971 , p . 289-298 . 19 L. Canfora, Vita di Lucrezio, Palermo 1993 , p . 69-98, a traqué des allusions au DRN dans l'æuvre de Cicéron, mais , malgré son ingéniosité , cette méthode ne peut aboutir à des résultats certains. Faute de pouvoir éclairer les circonstances de la vie du poète, on tenta de préciser le cadre de celle-ci d'après les descriptions du DRN, qui donnent une place importante à Rome ( voir 20 T. Mantero , L'ansieta di Lucrezio e il

.

problema dell'inculturazione dell'umanità nel DRN , Genova 1976) , ainsi que son appartenance sociale : si la thèse soutenue par 21 J. Mewaldt, art . « T. Lucre tius Carus » 17 , RE XIII 2 , 1927 , col . 1660 , selon laquelle Lucrèce était un affranchi, paraît ne plus trouver de défenseur, sa connaissance de la vie politique et du droit , sa culture philosophique , ne suffisent pas à prouver qu'il appartenait à la branche patricienne de l'illustre gens Lucretia , l'une des plus anciennes de Rome , thèse qui paraît cependant la plus vraisemblable ( cf. 22 A. Ernout, Lucrèce , Bruxelles 1947 , p . 7 ) . On a aussi pensé que Lucrèce était chevalier, hypothèse qui a surtout en sa faveur le fait que l'épicurisme recrutait le plus souvent ses adeptes parmi cette classe , cf. 23 A. D. Winspear, Lucretius and scientific thought, Montréal 1963 , p . 29 sq ., et 24 L.R. Taylor, « Republican and Augustean Writers enrolled in the Equestrian Centuries » , TAPA 99 , 1968 , p. 469-496. Le dédicataire du DRN est identifié à Caius Memmius [

M 99 ] ( cf. 25 F.

Münzer, art. « Memmius » 1-14, RE XV 1 , 1931 , p. 602-621), orateur de talent et

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personnalité politique ambitieuse , qui , après avoir été longtemps du parti de Pompée, se rallia à César ; deux poètes, Catulle et Helvius Cinna, l'accompa gnèrent en Bithynie , dont il fut gouverneur en 57. Il écrivit des poèmes éroti ques , aujourd'hui perdus. On ignore les véritables raisons pour lesquelles ce Memmius est le dédicataire du poème de Lucrèce, bien que différentes hypo thèses aient été avancées ( cf. Erler 1 , p. 400 ). Rien n'atteste que ce personnage ait jamais eu quelque intérêt pour la philosophie épicurienne. Son projet de bâtir un édifice sur les ruines de la maison d'Épicure à Athènes, où il vivait en exil , à la suite de sa condamnation en 52 pour brigue lors de sa candidature au consulat en 54, souleva l'indignation des fidèles du Jardin à Athènes. Cicéron , sur la demande de son ami épicurien Atticus ( > A 505 ) , intervint auprès de Memmius pour lui demander de renoncer à son projet. La diplomatie qu'il déploie dans sa lettre à Memmius (Ad Fam . XIII 1 ) suggère que cet étrange « promoteur » n'avait même aucune sympathie pour les épicuriens, tant Cicéron affiche de mépris pour les vestiges sacrés : « je ne sais quels petits murets » et tient à souligner qu'Atticus, étant « très cultivé » , ne fait pas partie de ces sectateurs d'Épicure, auxquels il se réfère avec une certaine ironie. En outre Memmius, apparemment peu enclin à la philosophie , aimait la littérature grecque, non les lettres latines (Cicéron, Brutus 247 ) . On trouvera une présentation fort équitable de Memmius par Boyancé 14 , p. 26-32 , fait assez rare pour être signalé , tant l'ignorance des liens que Lucrèce entretenait avec ce « Morny » romain , jointe à l'incertitude sur sa vie, a nourri d'élucubrations (ainsi, la conduite de Memmius , lors de sa campagne électorale pour le consulat en 54 , serait à l'origine du suicide de Lucrèce, selon 26 P. Brind’Amour, « La mort de Lucrèce » , dans Jacqueline Bibauw (édit . ) Hommages à Marcel Renard, t. I , coll . « Latomus >> 101 , Bruxelles 1969, p. 153-161 ) , et de discours moralisateurs . Tendant à sortir de ces impasses, la recherche actuelle s'est davantage inté ressée à la question des relations de Lucrèce avec les milieux philosophiques , surtout épicuriens. Deux thèses s'affrontent: 27 K. Kleve, « Lucretius and Philo demus » , dans 28 K. A. Algra, M. H. Koenen et P.H. Schrijvers (édit. ) , Lucretius and his Intellectual Background , Amsterdam 1997 , p . 49-66 , a soutenu que Lucrèce faisait partie du cercle de Philodème, mais 28 bis T. Dorandi, « Lucrèce et les Épicuriens de Campanie » , ibid . , p . 35-48, n'a pu trouver aucun indice d'une relation de Lucrèce avec quelque philosophe épicurien que ce soit . En l'absence de témoignage externe irrefutable, l'interprétation du DRN demeure le seul critère pour évaluer l'intérêt que prit Lucrèce aux débats philosophiques de son temps ( cf. infra ). Manuscrits. Transmission du texte. Les plus anciens manuscrits sur lesquels reposent les éditions modernes du DRN sont les manuscrits Vossianus Lat. F 30 et Voss. Lat. Q. 94 , habituellement appelés d'après leur forme respecti vement O (Oblongus) et Q (Quadratus ). Ils sont aujourd'hui conservés à Leyde. Ils ont été aussi édités à Leyde, respectivement en 1908 et 1913 , sous la forme de fac - similés par É . Châtelain , qui en propose également une analyse. Tous les deux sont en minuscules carolingiennes et datent du IXe siècle . O fut écrit à la cour de Charlemagne au début du ixe siècle et corrigé par un contemporain ,

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surnommé ensuite corrector Saxonicus, mais identifié à l'érudit irlandais Dungal . Q fut écrit un peu plus tard dans le nord -est de la France. Il existe en outre des fragments, formant en tout dix-huit feuillets, d'un manuscrit – ou peut être deux manuscrits – du IXe siècle . Huit feuillets sont conservés à Copenhague (G ) et dix à Vienne ( V et U ) . Tous ces manuscrits procèdent d'un même archétype écrit en lettres minuscules sur des pages comportant vingt- six lignes . Certaines fautes récurrentes suggèrent que cet archétype est une copie d'un manuscrit en minuscules, qui lui-même dériverait d'un manuscrit du IVe ou du Ve siècle , en capitales ( sur “ l'archétype " cf. 29 K. Lachmann, In T. Lucretii Cari DRN libros commentarius, Berlin 1850, p . 3-11 , p . 49, p . 71-72, 118 , 318-319) . Un humaniste italien , Le Pogge, découvrit en 1417 ( ou au début de 1418 ) , durant le concile de Constance (dans une localité assez éloignée, qu'il ne précise pas) , un manuscrit de Lucrèce ( II ) ; ce manuscrit n'est pas autrement connu , mais Le Pogge en envoya une copie ( nt ) - aujourd'hui disparue – à Niccolò Niccoli pour la faire transcrire . Le manuscrit de Florence appelé L ( codex Laurentianus 35.30 ) en est sans doute la transcription directe . La copie du manuscrit découvert par Le Pogge et ce manuscrit L donnèrent lieu à une cinquantaine de copies , les manuscrits “ italiens”. On considère aujourd'hui que Il dérive de 0 , cf. 30 K. Müller, « De codicum Lucretii Italicorum origine » , MH 30, 1973 , p. 166-178, reproduit dans son édition du DRN , Zürich 1975 , p . 297 319 , ou même que ce manuscrit copié par Le Pogge n'est autre que O ( 31 G.F. Cini , « La posizione degli “ Italici” nello stemma lucreziano » , AATC 41 , 1976, p. 163-169, que je n'ai pu consulter). Bien que la valeur textuelle des manuscrits " italiens " soit de ce fait mineure , leur intérêt est défendu par 32 E. Flores, Le scoperte di Poggio e il testo di Lucrezio , Napoli 1980 , qui conteste du reste certaines des conclusions de K. Müller. Le manuscrit Q porte d'intéressantes corrections du XVe siècle . La tradition textuelle du DRN est résumée par 33 L. D. Reynolds , dans L. D. Reynolds (édit . ) , Texts and Transmission : a Survey of the Latin Classics (Mélanges R. Mynors ), Oxford 1983 , p. 218-222 ; cf. aussi 34 M.D. Reeve , « The Italian tradition of Lucretius » , IMU , 23 , 1980, p. 27-48 . 35 K. Kleve , « Lucretius in Herculanum » , CronErc 19 , 1989 , p. 5-12 , a publié seize fragments d'un papyrus de la bibliothèque d'Herculanum ; bien qu'ils fussent réduits à quelques mots, voire à quelques lettres, il a cru y recon naître des fragments de vers de Lucrèce . Cependant 36 M. Capasso, « Filodemo e Lucrezio . Due intellettuali nel patriai tempus iniquum » , dans 37 Annick Monet (édit. ) , Le jardin romain . Épicurisme et poésie à Rome. Mélanges offerts à Mayotte Bollack, coll . « UL3 - Travaux et recherches » , Lille 2003, p . 77-107 , a contesté cette identification . Voir aussi la réponse de 38 D. Delattre , « Présence ou absence d'une copie du De rerum natura à Herculanum » , dans Monet 37 , p . 109-116 . Titre. Il n'est pas certain que De rerum natura soit le titre original ni même que l'æuvre de Lucrèce ait comporté originellement un titre . La première mention De rerum natura n'apparaît dans le Codex Oblongus qu'à la fin du premier chant . Le Codex Quadratus mentionne De physica rerum origine et

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effectu, qui ne peut être tenu pour le titre original , mais apparaît comme une description tardive de son contenu . État du texte : Le texte des manuscrits qui nous sont parvenus comporte de

nombreuses lacunes ; seules quelques - unes sont marquées par des blancs , les autres se manifestent par l'incohérence des développements. L'ordre de certains vers ou de certains ensembles de vers paraît avoir été interverti. Beaucoup de mots ne s'inscrivent pas de manière compréhensible dans les phrases ; quelques uns mêmes ne sont pas identifiables en latin ; des phrases entières paraissaient corrompues ou interpolées, plusieurs vers sont faux ou incomplets . Cet état défectueux, auquel les éditeurs et les philologues tentèrent de remédier, peut résulter d'accidents matériels survenus au cours de la transmission du texte et ne constitue pas en soi un indice de l'état original du poème. Cependant le DRN semble porter certaines marques d'inachèvement . Ainsi , il manque un exposé sur la nature des dieux , annoncé en V 155. Ou bien encore les vers 45-53 du chant IV présentent ce chant comme la suite du chant II et les vers 45 à 48 sont presque identiques aux vers 45-48 qui figurent dans l'introduction du chant III : selon une hypothèse formulée par 39 J. Mewaldt , « Eine Dublette in Buch IV des Lucrez » , Hermes 43 , 1908 , p. 286-295 , Lucrèce a inversé l'ordre des chants III et IV , mais n'a pu achever la révision de son æuvre et supprimer les vers 45 53 du chant IV , l'interpolation d'un copiste étant peu probable en ce cas (cf. contra Lachmann 29 p . 215 , et 40 G. Müller, « Die Problematik des Lukrez textes seit Lachmann , 2 » , Philologus 103 , 1959, p. 66 sq . ; mais que Lucrèce ait d'abord pensé traiter le thème du chant IV avant celui du chant III est d'autant plus vraisemblable que tel était l'ordre adopté par Épicure dans la Lettre à Hérodote et probablement dans le lepì qúoewç , cf. 41 D. Sedley , Lucretius and the transformation of Greek wisdom, Cambridge 1998 , p . 137-138 ) . Certaines particularités de la composition ont été également invoquées comme indices de l'inachèvement du poème (sujet débattu par 42 M. Bollack, La raison de Lucrèce . Constitution d'une poétique philosophique avec un essai d'interpré tation de la critique lucrétienne, Paris 1978 p . 80 sq . ) . La question des répéti tions et des doublets , nombreux dans le DRN , divise les exégètes . On les a considérés, au moins pour une part, comme des interpolations ( 43 G. Müller, « Die Problematik des Lukreztextes seit Lachmann , 1 » , Philologus 102 , 1958 , p. 247-283 ) ou , jugement qui tend à l'emporter aujourd'hui, comme relevant d'un procédé littéraire, cf. 44 W.B. Ingalls , « Repetition in Lucretius » , Phoenix 25 , 1971 , p . 227-236 , qui compare avec le style épique d'Ennius ; 45 J. Bollack , « Lukrez und Empedokles » , NR 70 , 1959, p . 656-686 , a proposé une compa raison avec Empédocle . Éditions, commentaires et traductions. Pour une bibliographie complète des éditions et traductions, cf. 46 C. Gordon , A Bibliography of Lucretius , London 1962 , qui comporte aussi une description de ces ouvrages. L'édition princeps parut à Brescia ca 1473 (Thoma Ferando auctore ). Elle fut suivie d'une édition à Vérone en 1486 , puis d'une autre à Venise en 1495 . Trois exemplaires de cette édition portent des corrections de Pontano de la main de copistes ; l'un d'entre eux , aujourd'hui à Munich , comporte aussi des correc

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tions manuscrites empruntées à Marulle. En 1500, parut à Venise la première édition Aldine due à Avancius ( 2e éd . 1515 par Navagero ). La première édition Juntine ( P. Candido ) , parue à Florence ( 1512-1513 ) , utilise notamment les corrections du grand humaniste Marulle, ami de l'éditeur Pietro Candido. En France, la première édition , parue à Paris en 1514, reproduit l'édition bolognaise annotée de Baptista Pius ( 1511 ) ; le commentaire latin est confus et violemment hostile aux thèses épicuriennes . La première édition critique importante de Lucrèce est celle de Lambin , professeur de littérature grecque au Collège Royal , achevée en 1563 , parue en 1564 à Paris. Lambin a notamment mis à profit la collation que Turnèbe venait de faire du manuscrit de l'abbaye Saint -Bertin à Saint-Omer, le fameux manuscrit aujourd'hui appelé Quadratus ( Q ) . Le commentaire latin éclaire certaines difficultés du texte , mais lui oppose surtout les théories aristotéliciennes ; dans sa préface latine , Lambin juge la philosophie du De rerum natura « délirante et sur bien des points impie » , mais il admire le sensualisme de Lucrèce et son style . Il y eut trois rééditions (Paris 1565 et 1570 ; Francfort 1583 ) . En 1565/66 , parut à Anvers , l'édition commen tée de Gifanius ( 2e éd . Leyde 1595 ) , en 1662 , à Saumur , celle de Tanneguy Lefevre. Notons la première édition de Lucrèce In usum Delphini par Du Fay , à Paris en 1680 : Du Fay ne semble pas avoir consulté d'édition antérieure à celle de Lambin , mais sa traduction ( interpretatio ) mot à mot en prose latine du poème de Lucrèce demeure une curiosité. L'édition commentée de Creech parut à Oxford en 1695 , celle de Havercamp, également commentée, à Leyde en 1725 , celle de Wakefield , à Londres en 1796. En 1850 , paraît à Berlin l'édition magistrale de K. Lachmann, qui établit les

1 principes de l'établissement critique du texte et proposa une histoire de sa transmission , remontant jusqu'au fameux archetypon dont il donna des caracté ristiques majeures ( voir supra ) ; on a cependant parfois reproché à Lachmann d'avoir proposé trop de corrections en fonction d'une recension matérielle reléguant au second plan l'évaluation par le sens ; cf. 47 S. Timpanaro, La genesi del metodo del Lachmann, Firenze 1963 , Padova 1981 , éd . corrigée et complétée en 1990, et 48 G. P. Goold , « A lost Manuscript of Lucretius » , AClass 1 , 1958 p . 21-30 , qui apporta des modifications à la reconstruction de l'archétype par Lachmann . J. Bernays donna en 1852 la première édition Teubner à Leipzig, sans apparat critique (cf. 49 M. Bollack, « Jacob Bernays ou l'abandon du commentaire » , dans 50 J. Glucker et A. Laks [ édit . ) , Jacob Bernays, un philologue allemand, Lille 1996, p . 31-43 , qui compare sa méthode à celle de Lachmann ) . La recherche philologique continua à la suite de Lachmann d'améliorer l'établissement du texte ( cf. Müller 40 , p . 247-283 , et Müller 43, p. 53-86) et d'importants commentaires exégétiques accompagnèrent souvent les éditions critiques . Ainsi , pour ne citer que quelques -unes des plus célèbres, parurent en 1864, à Londres, l'édition commentée de H. A. J. Munro (édit . revue , 1886 ) ; en 1896-1898 , à Turin , celle de C. Giussani ( réimpr. New - York /London 1980) ; en 1900 , à Oxford , la première édition de C. Bailey ; en 1907, à New York , celle de Merrill avec commentaire ( 2e éd . 1917 , Berkeley , sans commentaire ) ; en 1920 , à Paris, l'édition d'A . Ernout, suivie en 1925-1928 du

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commentaire d'A . Ernout et L. Robin ( 2e éd . 1962 ) ; en 1947 , à Oxford , l'édition , avec traduction et commentaire de C. Bailey, 2e éd . 1950. L'édition Teubner de J. Bernays fut remplacée en 1894 par celle de A. Brieger, à son tour remplacée en 1934 par celle de J. Martin ( nombreuses rééditions) ; l'édition Loeb ( avec traduction ) de W.H. D. Rouse parut en 1924 à Londres ( nouvelle version par M.F. Smith en 1975 , 2e éd. revue 1982 , 3 ° 1992) ; traduction par M.F. Smith , Indianapolis 2001). K. Büchner donna une édition en 1966 à Wiesbaden , K. Müller en 1975 à Zürich , A. G. Calvo en 1997 à Zamora ( sur cette édition “excentrique” cf. c.r. de M.F. Smith, Prometheus, 26 , 2000 , p. 233 240 ). Éditions de chants particuliers avec commentaires : chant I : C. Pascal, Roma 1904 , Torino 1928 ( revue par L. Castiglioni ) , J.D. Duff, Cambridge 1923 , P. M. Brown, Bristol 1984 ; chant III : Heinze , Leipzig 1897 , J. D. Duff, Cambridge 1903, Krokiewicz, Lublin 1921 , E.J. Kenney , Cambridge 1971 , P. Michael Brown, Warminster 1997 ; chant IV : J. Godwin ; chant V , C.D.N. Costa , Oxford 1984 ; chant VI : A. Barigazzi , Torino 1946 , J. Godwin , Warminster 1991. Cf. aussi le commentaire de 51 D. Fowler, Lucretius on Atomic Motion . A Commentary on DRN , II, 1-332, Oxford 2002, et celui de 52 R. D. Brown, Lucretius on Love and Sex. A Commentary on DRN IV , 1030 1287 with Prolegomena , Text and Translation, Leiden 1987 . Commentaires non assortis du texte : chant 53 A. Gigandet, Lucrèce. Atomes, mouve ments . Physique et éthique, Paris 2001 ; chant III , 54 P.-F. Moreau, Lucrèce . L'âme, Paris 2002. La première traduction française attestée de l'ensemble du DRN est due à l'abbé de Marolles, Paris 1650. La traduction anglaise versifiée de T. Creech parut à Oxford en 1682 , celle de A. Marchetti en vers italiens parut à Londres en 1717 (elle fut achevée en 1669 , mais se heurta aux autorités religieuses de Florence, cf. C. Gordon p. 194-200 ). M. La Grange , ami du baron d'Holbach , donna une traduction , Paris 1768 , J.-B.-S. de Pongerville, une traduction complète en alexandrins, Paris 1828 (chant V en 1818 ) , Sully Prudhomme, Paris 1869 , traduisit le premier chant en alexandrins. La traduction de C. Bailey parut à Oxford en 1900 , celle d'A . Ernout à Paris en 1920 , la traduction versifiée allemande de H. Diels à Berlin en 1923-1924 . Depuis les années 50, de nom breuses traductions ont paru, parmi lesquelles celles de K. Büchner, Zürich 1956 , J. Martin , Berlin 1972 , L. Canali , Milano 1990 ; J. Kany - Turpin, Paris 1993 , 2ème édit . 1997 , en prose rythmée ; F. Giancotti, Milano 1994 , en prose rythmée ; A. G. Calvo, 1997 , en prose rythmée espagnole ; Ch . Guittard , Paris 2000 ; B. Pautrat, Paris 2002, en alexandrins non rimés . Concordances : 55 J. Paulson , Index Lucretianus, Göteborg 1926, réimpr. Darmstadt 1961 ; 56 L. Roberts, A concordance of Lucretius, Berkeley 1968 , 2e éd . 1977 ; 57 S. Govaerts, Lucrèce, DRN . Index verborum , listes de fréquen ces , relevés grammaticaux , Lüttich 1986 ; 58 M. Wacht , Concordantia in Lucretium , Hildesheim 1990 . Bibliographies. En dehors des bibliographies déjà mentionnées de Gordon 46 et de Erler 1 ( où l'on trouvera une liste des bibliographies précédentes,

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p . 386) , cf. 59 P. Grimal, « L'épicurisme romain » , Actes du VIII congrès de l'association Guillaume Budé, Paris 1968 , p. 139-168 , 60 A. Dalzell, « A biblio graphy of work on Lucretius, 1945-1972 » , CWo 66 , 1973 , p. 389-427, et 67 , 1974 , p . 65-112 , 61 C. Di Giovine , « Lucrezio » , dans Syzetesis. Studi M. Gigante, Napoli 1983 , t . II , p . 649-677. Analyse. Le De rerum natura comporte à l'état actuel quelque 7 400 vers, distribués en six chants. Dans la présentation qui suit, la référence aux vers reproduit la numérotation de l'édition d'A. Ernout. Chant I. Après un hymne à Vénus, un éloge d'Épicure, suivi d'une critique de la religion, Lucrèce présente la mission qu'il s'est fixée : vaincre les terreurs de l'âme, qui font obstacle au bonheur, en révélant, à la suite d'Épicure, la nature de toutes choses. Il démontre ensuite à partir du visible l'existence des deux principes de l'univers , l'atome et le vide, définit la constitution de l'atome , puis réfute la conception de la matière des philosophes présocra tiques, Héraclite , Empédocle et Anaxagore. Après une apologie de la forme poétique adoptée pour transmettre la doctrine ardue d'Épicure, le premier chant s'achève par la démonstration de l'infinité de l'univers et la réfutation du géocentrisme (il manque quelques vers ). Chant II : après un préambule sur la sagesse et la présentation de ce chant consacré aux constituants de la matière, les atomes, Lucrèce explique le mouvement et la vitesse de ces atomes, puis, après une brève réfutation de la providence divine, leur poids et leur déviation minimale, garante du mouvement des êtres animés et de la libre volonté humaine. Il précise ensuite les autres propriétés des atomes. Il révèle enfin une « découverte inouïe » , la pluralité des mondes dans l'univers infini. Les dieux ne gouvernent pas notre monde et son destin est de périr, comme tout être naturel. Chant III : après un hymne à la gloire d'Épicure et une introduction ( 31-93 ), ce chant établit la nature atomique de l'âme, principe de la sensation et du mouvement, ainsi que de l'esprit, siège de l'intelligence (94-287 ), puis en présente les conséquences, étayées par de nombreuses preuves sensibles : caractères innés, naissance et mortalité de l'esprit et de l'âme, qui se développent et souffrent avec le corps, impossibilité de survie et de migration des âmes ( 288-829 ). La mort enfin n'est rien pour nous, puisque notre sensibilité cesse avec elle (830 869). Il est donc vain de pleurer sur un mort ou sur la mort et la nature même , dans une prosopopée célèbre, invective l'homme qui se lamente de mourir (870-977). Les enfers sont une projection de nos peurs dans cette vie (979-1024). Une critique de l'insatisfaction et du « mal de vivre » clôt ce chant. Chant IV : après une apologie du poème identique, à quelques mots près, à celle du chant III ( 1-25 ), et une introduction (26-45 ) , Lucrèce démontre à partir de certains phénomènes visibles l'existence d'images s'échappant constamment des choses et volant en tous sens ( 46 109 ). Les images sont des pellicules d'atomes ( 110-142), qui se forment et se déplacent avec une extrême rapidité ( 143-217 ) . L'afflux des images que tous les corps envoient ( 218-229) explique les caractères de la perception, distance etc. ( 230-268 ), la réflexion des miroirs (269 323 ), les divers phénomènes de la vision ( 324-378 ) et ce que nous appelons les illusions d'optique (379-468) . Les sens ne sont pas trompeurs, c'est notre esprit qui porte un jugement faux (469-521 ). Toutes les autres perceptions sensorielles proviennent également des atomes (522-672). Certains assemblages d'atomes expliquent certaines répulsions (673-721 ). La vision de l'esprit est due à des images extrêmement subtiles qui frappent directement notre esprit, dans la vie éveillée comme dans le rêve ( 722-823 ) . L'explication téléologique des organes des sens est erronée (824-857 ) . La faim et la soif (858-876) , la marche et le mouve ment ( 877-906 ) le sommeil et le rêve (907-1029 ) s'expliquent par des processus mécaniques. Les rêves érotiques des adolescents introduisent enfin un long développement sur l'amour ( 1030-1208 ), suivi d'une explication du rôle des semences mâles et femelles dans la ressem blance des enfants avec l'un ou l'autre des parents ( 1209-1232), dans la stérilité et la fécondité ( 1233-1277) . Épilogue sur l'amour ( 1278-1287). Chant V : après un éloge d’Épicure et une introduction à ce chant consacré au monde et à l'histoire de l'humanité, Lucrèce affirme d'emblée la mortalité du monde (91-121 ) . Loin

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d'être un dieu immortel, le monde ne possède pas même la sensibilité ( 122-145) ; les dieux , de nature intangible, sont étrangers au monde ( 146-155 ) ; il est absurde de penser qu'ils aient pu vouloir créer le monde , même pour notre bénéfice ( 156-180 ) . Les dieux ne pouvaient imagi ner un modèle du monde avant sa création, laquelle résulte de la rencontre des atomes ( 181 194 ). Enfin certains caractères du monde et ses défauts confirment qu'il a eu un commen cement et aura une fin (195-415 ). Dans la deuxième partie de ce chant, Lucrèce décrit la naissance du monde, (416-508 ), puis il explique son fonctionnement: mouvements des astres, équilibre de la terre au centre de notre monde, grandeur du soleil et de la lune, chaleur et lumière, cours relatifs du soleil , de la lune et des autres astres (509-649) ; il propose enfin plusieurs explications à la succession et à l'inégalité des nuits et des jours, aux phases de la lune et aux éclipses (650-770). La dernière partie présente l'histoire de l'humanité : la terre , après d'autres productions ( 771-804 ), fit naître les premiers hommes (805-836), ainsi que des monstres ( 837-854) qui disparurent, comme certaines espèces ( 855-877 ) ; mais les centaures et autres animaux fabuleux jamais n'existèrent (878-924). Après avoir mené une vie sauvage (925-1010) , les hommes s'adoucirent progressivement ( 1011-1027 ) et acquirent le langage (1058-1090 ), puis, par une suite d'essais et d'erreurs, ils firent les différentes découvertes qui les conduisirent à l'état civilisé. Après une diatribe contre l'ambition et la soif des richesses, qui entraînent les guerres, le chant s'achève sur les progrès de l'humanité. Chant VI : il traite essentiellement de ce que les Anciens appelaient la météorologie. Après un éloge d'Athènes, célébrée notamment comme la patrie d'Épicure, qui découvrit le remède au malheur humain , et une introduction montrant la peur qu'engendre l'ignorance de la cause des phénomènes évoqués dans ce chant , Lucrèce explique successivement le tonnerre , l'éclair et la foudre , la trombe marine, les nuages et les divers phénomènes atmosphériques, les séismes, la régulation de la mer, l'Etna, les crues du Nil , les Avernes, les puits et fontaines, les sources incendiaires, l'aimant. Il annexe enfin à la météorologie les épidémies sans doute parce qu'elles sont véhiculées par l'air. Le chant se termine par le récit de la peste d'Athènes . Sources philosophiques ; fidélité à la doctrine d'Épicure. Au début du chant III, Lucrèce affirme qu'il suit Épicure et imprime ses pas dans les traces des siens. « Comme les abeilles dans les vallons en fleurs » , il a « butiné » dans les papiers, chartae , d'Épicure « toutes ses paroles d'or » . Ces métaphores ont été diversement interprétées, mais , de toute manière , elles ne permettent pas de décider si l'oeuvre d'Épicure est l'unique source du DRN ni, le cas échéant, de préciser quels écrits ont directement servi à Lucrèce, parmi l'immense produc tion du maître. Depuis la fin du XIXe siècle , des exégètes ont passé au crible l'ensemble du DRN et scruté les textes d'auteurs grecs et latins pour tenter, en découvrant d'éventuels parallèles , de résoudre le problème des sources , parti culièrement épineux dans l'hypothèse d'autres modèles que l'æuvre d'Épicure, puisque Lucrèce ne nomme que quatre autres philosophes ( dans l'ordre de leur apparition dans le poème: Héraclite, Empédocle, Anaxagore, Démocrite ), tous présocratiques et donc connus d'Épicure. 62 J. Woltjer, Lucretii philosophia cum fontibus comparata , Groningen 1877 , réimpr . New - York/ London 1987 , affirma dans son « épilogue » que les écrits d'Épicure constituaient l'unique source de Lucrèce ( p . 183 ) . Cette opinion fut contestée notamment par 63 H. Usener, Epicurea, Leipzig 1887 , réimpr. Roma 1963 , et par 64 W. Lück , Die Quellenfrage im 5. und 6. Buch des Lukrez , Breslau 1932 , selon qui des épicuriens récents, tels Zénon de Sidon et Phèdre , exercèrent une influence sur Lucrèce . Dans son grand commentaire, 65 C. Giussani , Torino 1896-1898 ( réimpr. New York London 1980 ) avait souligné que certaines polémiques paraissaient dirigées contre les stoïciens. Cette opinion , généralement admise ,

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fut combattue par 66 D.J. Furley, « Lucretius and the Stoics » , BICS, 13 , 1966, p . 13-33 , repris dans Cosmic problems. Essays on Greek and Roman philosophy of nature , Cambridge 1989 , p . 183-205 : Lucrèce , à la suite d'Épicure, ne tiendrait pas compte de leurs arguments. L'analyse minutieuse de 67 J. Schmidt, Lukrez , der Kepos und die Stoiker. Quellen und Untersuchungen zu DRN , Marburg 1975 , tendit au contraire à prouver, à partir d'une confrontation avec des textes d'autres auteurs , que certains passages du DRN s'inspiraient de la polémique anti - stoïcienne développée par les épicuriens récents, notamment à la suite des néo - académiciens qui leur fournissaient des arguments contre le providentialisme stoïcien . P.H. Schrijvers soutint aussi l'influence d'auteurs récents dans plusieurs articles réédités dans 68 P. H. Schrijvers, Lucrèce et les sciences de la vie , Leiden 1999 , en particulier: « Le sommeil ( DRN IV 907 961 ) » , p . 119-145 ( = Études sur l'Épicurisme antique, Cahier de Philologie I , Lille , 1976 , p . 231-259 ) et « Lucrèce et les sceptiques » (DRN IV 387-461 ) , p. 167-182 ( = La langue latine, langue de la philosophie, « Coll . de l'École fr. Rome » 161 , Rome 1992 , p . 125-140 ) ; cf. aussi , parmi de nombreuses études suggérant différentes sources , 69 K. Kleve , « The philosophical polemics in Lucretius. A study in the history of Epicurean criticism » , dans 70 O. Gigon ( édit . ) Lucrèce, coll . « Entretiens sur l'antiquité classique » 24 , Vandæuvres Genève 1978 , p . 39-75 ; 71 D. Clay , Lucretius and Epicurus, Ithaca/London 1983 , p . 13 sq . , 72 A. Debru, « L'air nocif chez Lucrèce : causalité naturelle et paradigme du poison » , dans Maladies et malades dans les textes latins antiques et médiévaux, coll . « Latomus » 242 , Bruxelles 1998 , p . 95-104 . Selon 73 W. Rösler, « Lukrez und die Vorsokratiker. Doxographische Probleme im 1 . Buch von DRN » , Hermes 101 , 1973 , p . 43-64 , repris dans 74 C.J. Classen (édit. ) , Probleme der Lukrezforschung, Hildelsheim /New - York 1986 , p . 57-63 , Lucrèce a pu avoir recours à une doxographie pour présenter au chant I les thèses adverses des présocratiques, en particulier celle d'Héraclite . Enfin , grâce à divers rapprochements, notamment avec certains textes des Tusculanes de Cicéron , 75 J. Mansfeld , « Doxography and Dialectic . The Sitz im Leben of the Placita » , ANRW II 36 , 4 , 1990 , p. 3026-3229 , a établi pour d'autres passages du DRN l'utilisation de doxographies, dont la date ne peut cependant guère être précisée ( p . 3183 ) . Voir aussi 76 D. T. Runia , « Lucretius and Doxography » , dans Algra et alii 28 , p . 93-104 , où l'on trouvera d'autres indications sur les influences philosophiques possibles par le biais de doxographies postérieures à Épicure . Bref, 77 P.H. Schrijvers , « Die Traumtheorie. DRN, IV , 962-1036 » , Mnemosyne 33 , 1980 , p. 128 ( repris dans Schrijvers 68, p . 146 ) , pouvait à juste titre déclarer que la recherche actuelle sur Lucrèce se caractérisait par l'effon drement de la thèse traditionnelle de son isolement intellectuel, souvent arbitrai rement articulée sur le rejet de la paideia par Épicure. Cependant le débat a été relancé par D. Sedley . A partir d'une reconstruction du contenu des quinze premiers livres du ſlepì qúoewÇ (p. 109-126) fondée sur l'analyse minutieuse des fragments des livres II , XI , XIV et XV conservés parmi les papyri d'Herculanum , deux citations des livres XII et XIII ( p . 100 ), et , pour les autres livres, sur l'ordre des développements de la Lettre à Hérodote – la correspon

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dance attestée entre l'ordre des thèmes de cette Lettre et celui des livres fragmentairement conservés étant étendue aux livres perdus -, Sedley arrivait à la conclusion que , hormis quelques transpositions, le DRN reproduisait générale ment la disposition argumentative de ces quinze livres et que le ſlepi púoewÇ représentait l'unique source de Lucrèce. 78 K. A. Algra, dans son compte rendu de l'ouvrage de Sedley 41 , Phronesis , 44 , 1999, p. 157 , objectait que la reconstruction de Sedley laissait ouverte une autre hypothèse : l'utilisation d'un des résumés d'Épicure , lesquels adoptaient probablement, comme la Lettre à Hérodote, l'ordre du Mepì qúoewç : un des candidats serait la Merárn nitouń, hypothèse déjà rejetée par D. Sedley ( 41 , p. 141-142 ) . La comparaison entre le chant I et les livres I et II du ſlepì qúoewÇ (41 , p. 186-193 ) montre que Lucrèce suit strictement le plan d'Épicure dans la première partie (jusqu'au vers 635 ) et que , dans la deuxième, il a transposé des arguments des livres XIV et XV contre les présocratiques. Si la comparaison avec le Tepi púoewç est nécessairement plus hypothétique pour la suite du DRN , notamment après le chant II , lorsque la définition des principes est achevée, puisque le contenu des livres III à XIII du grand traité d'Épicure est reconstruit essentiellement d'après la Lettre à Hérodote, une correspondance entre le lepi púoewç et le DRN est clairement dessinée ( cf. le schéma dans Sedley 41 , p. 136) , ce qui constitue un progrès important. Cependant certains développements de Lucrèce n'ont pas de parallèles et , à l'inverse , d'importants fragments du livre XXV d'Épicure (cf. 79 S. Laursen , « Epicurus on nature Book XXV » , CronErc 18 , 1988 , p. 7 19 ; 80 ld ., « The Early Parts of Epicurus, On nature , 25th Book » , CronErc 25 , 1995, p. 5-119 ; 81 Id ., « The Later Parts of Epicurus, On nature, 25th Book » , CronErc 27 , 1998 , p. 5-82) traitent de thèmes absents de la Lettre à Hérodote , mais qui se retrouvent dans le DRN ( la volonté , au chant II , la formation de la pensée, au chant IV ), ce qui semble prouver, comme le reconnaît du reste D. Sedley, que Lucrèce a puisé dans ce livre, mais aussi conforte l'hypothèse qu'il a pu « butiner » parmi l'euvre d'Épicure, comme il l'affirme au début du chant III , tout en suivant généralement le plan de son argumentation . Une thèse subsidiaire de ce livre est que Lucrèce ignore les découvertes et débats postérieurs à Épicure et qu'il ne tient même aucun compte des arguments des stoïciens ( cf. Furley 66 ) . En réponse à ce point , 82 C. Lévy , « Lucrèce et les Stoïciens » , dans 83 R. Poignault ( édit . ) , Présence de Lucrèce , coll . « Caesaro dunum » 32 bis , Tours 1999 , p. 87-98 ) , tend à montrer au contraire que « le stoïcisme platonisant ou platonisé du jer siècle av . J.-C. est très présent dans la polémique lucrétienne » . Ajoutons que dans un fragment de Diogène d'Oinoanda découvert récemment ( NF 127. II édité par 84 M.F. Smith , AS 48 , 1998 , p. 133 ) , les stoïciens sont nommément cités dans une polémique contre le providen tialisme dont on trouve un parallèle dans DRN V , 165-173 . La question complexe du rapport de Lucrèce au stoïcisme a été formulée par 85 A. A. Long, « Lucretius On Nature and the Epicurean Self » , dans Algra et alii 28 , p . 132 139 , sur une base plus large que celle qu'offre une critique purement textuelle. Il apporte des éléments de réponse, en évitant ce qui constitua parfois un des écueils de la Quellenforschung, la quête exclusive des parallèles . Bollack 42 ,

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p . 111 sq. , avait dénoncé les excès de cette méthode , qui auraient conduit à manquer la poétique de Lucrèce ( sur la poétique, voir infra ). La fidélité que Lucrèce affiche à l'égard de la doctrine d'Épicure n'exclut pas la possibilité d'erreurs ou de déformations. Certains infléchissements apparais sent , surtout dans le traitement de la religion. Selon Lucrèce , elle opprime les hommes , et la violence de ses attaques , qui visent aussi les cultes , contraste avec le ton mesuré d'Épicure, partisan du maintien des pratiques traditionnelles ; cf. 86 I. Dionigi , « Lucr. 5 , 1198-1203 e P. Oxy . 215 Col. I , 7-29 : L'epicurismo e la venerazione degli dei » , SIFC, n . s . 48 , 1976 , p . 118-139 , et 87 K. Summers, « Lucretius and the Epicurean Tradition of Piety » , CPh 90 , 1995 , p. 32-57 . ( Sur la théologie épicurienne, abordée singulièrement par Lucrèce, cf. 88 J. Purinton , « Epicurus on the Nature of the Gods » , OSAPh 21 , 2001, p. 181-231 ) . Cepen dant les exégètes du DRN n'y ont pas relevé d'erreurs majeures d'interprétation de la doctrine d'Épicure et , lorsque le texte de Lucrèce constitue notre source principale , on s'accorde à en reconnaître l'acuité philosophique , comme dans le cas de la déclinaison des atomes qui a suscité de nombreuses études , cf. par exemple 89 D.J. Furley , Two studies on Greek atomists, Princeton 1967 , p. 169 237 , 90 J. Saunders , « Free will and the atomic swerve in Lucretius » , SO 59 , 1984 , p . 37-59 , et 91 J. S. Purinton , « Epicurus on " free volition ” and the atomic swerve » , Phronesis 44 , 1999 , p . 252-299 . 92 S. Bobzien , « Did Epicurus discover the Free Will Problem ? » , OSAPh 19 , 2000, p . 287-337 , étudiant à son tour le rapport très discuté entre la déclinaison et la liberté examine notamment l'argumentation du Livre XXV d’Épicure et le texte de Lucrèce (II 251-293 ) . La comparaison montre la clarté et la densité des arguments de Lucrèce, mais aussi la vertu pédagogique de ses illustrations , face à la prose particulièrement absconse des fragments de ce livre XXV , selon l'avis même de leur éditeur, S. Laursen . Sur l'argumentation de Lucrèce , 93 N. Vidale , Affermando negando. Gli argomenti ipotetici con conseguente falso nel DRN, Bologna 2000. Certains concepts d'Épicure acquièrent une valeur différente, souvent une plus grande extension , du fait de leur traduction en latin et de leur utilisation dans le cadre de la poésie ; cf. l'étude magistrale de 94 K. Sallmann : « Studien zum philosophischen Naturbegriff der Römer mit besonderer Berücksichtigung des Lukrez » , ABG 7 , 1962 , p . 140-284 . La comparaison avec d'autres écrivains épicuriens de langue grecque éclaire le vocabulaire philosophique de Lucrèce : cf. à propos de notities, le parallèle fourni par Diogène d'Oinoanda , dans Smith 84 , p . 146. Surtout, la confrontation de certains passages de Lucrèce avec les fragments du lepì qúoewç désormais facilitée par la publication de ces derniers dans les Cronache Ercolanesi, permettra progressivement de mieux évaluer non seulement les simplifications mais aussi les développements qu'entraîne la traduction d'un « sujet obscur >> en lucida carmina ( IV 8-9 ) . Ainsi , l'emploi emphatique de libera ( II 256 ) n'a- t - il pas largement contribué à renouveler l'évaluation de ce que l'on appelle, d'un terme calqué sur le latin , la « volonté >> par rapport à la tradition ancienne , épicurienne comprise ( voir Laursen 79-81 ) ? Peut -être certaines spécificités de la culture latine infléchissent- elles parfois le discours de Lucrèce, cf. 95 J. Kany - Turpin, « D'un corps autre. Un point de vue

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latin dans le DRN ? » dans 96 P. Moreau (édit. ) Corps romains, Grenoble 2002, p. 267-285. Enfin , la relation de disciple à maître que Lucrèce entretient avec Épicure entraîne paradoxalement une transformation formelle de la doctrine, comme l'a bien montré 97 J. Brunschwig, « Lucrèce » , dans D. Huisman ( édit . ), Dictionnaire des philosophes, Paris 1984, t. II , p . 1642 : « À défendre et illustrer cette doctrine qui l'a sauvé, il met une âpreté nouvelle, une logique entêtée , une sombre ardeur. À l'argumentation paisible, souvent abstraite et prosaïque de son maître , il substitue la violence polémique et la poésie visionnaire [ ... ] » . Lucrèce rend ainsi plus stimulante , mais aussi plus accessible, la quête philosophique dans laquelle il engage son lecteur dans l'espoir de le convertir à la doctrine salvatrice . En témoignent les ouvrages d'ensemble consacrés au DRN qui signalent sa portée humaniste exceptionnelle , par exemple Boyancé 14 , 98 M. Conche, Lucrèce et l'expérience, Paris 1967, nouvelle édition Villers -sur Mer 1981 ; 99 E.J. Kenney, Lucretius, Oxford 1977 ; 2nd ed . with Addenda by M.R. Gale, Oxford 1995 ; Clay 71 ; 100 I. Dionigi , Le parole e le cose , Bologna 1986 ; 101 F. Giancotti, Religio, Natura Voluptas, Studi su Lucrezio , Bologna 1989 ; 102 J. Salem , La mort n'est rien pour nous. Lucrèce et l'éthique, Paris 1990. Sur l'intention thérapeutique de Lucrèce , cf. 103 M. Nussbaum , The Therapy of Desire. Theory and Practice in hellenistic Ethics, Princeton 1994 , p . 140-279 ; 104 M. Erler, « Physics and Therapy . Meditative elements in Lucretius' DRN » , dans Algra et alii 28 , p . 79-92 , et plus généralement sur sa conception de l'homme, cf. 105 D. Konstan , Some aspects of Epicurean psycho logy, Leiden 1973, et 106 J. Pigeaud, « La physiologie de Lucrèce » , REL 58 , 1980, p. 176-200. S'ils sont unanimes à reconnaître l'originalité de la présenta tion de Lucrèce, les critiques ne remettent généralement pas en cause la fidélité du DRN au contenu épistémologique de la doctrine épicurienne , tel qu'il est habituellement compris. Signalons la lecture originale de 107 M. Serres, La naissance de la physique dans le texte de Lucrèce . Fleuves et turbulences, Paris 1977 : il interprète la physique du DRN dans le cadre d'une mécanique des fluides, dont la théorie fut exposée scientifiquement par Archimède, mais dont l'ébauche se trouverait déjà chez Démocrite. L'application de cette mécanique à la physique épicurienne a été critiquée par 108 D. Parrochia, Météores. Essai sur le ciel et la terre , Champ - Vallon 1997 , p. 61-68 , mais le livre de Serres montre en tout cas l'importance que Lucrèce a donnée aux tourbillons, flux et mouvements aux dépens de la stabilité . Peut - être ce caractère est- il à rattacher davantage à la poétique de Lucrèce ( voir infra) qu'à une théorie physique , même implicite. Philosophie et poésie. Très longtemps, contenu théorique et poésie ont été évalués séparément, d'abord pour des raisons doctrinales, la philosophie du DRN étant souvent contestée, alors que l'imagination poétique de Lucrèce susci tait généralement l'admiration , même chez les plus violents détracteurs de ses thèses, les auteurs chrétiens, par exemple Lactance, qui reprit un bon nombre de ses comparaisons et métaphores, cf. 109 A. Goulon « Quelle connaissance Lactance avait - il du DRN ? » dans Poignault 83 , p. 217-257 , et 110 J. Kany Turpin, « Lactance, un critique mésestimé de l'épicurisme » , dans 111 M. Erler

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( édit. ) , Epicurismus in der späten Republik und der Kaiserzeit, coll . Pha 11 , Stuttgart 2000 , p. 218-230. Cette séparation , qui naquit d'un parti pris idéolo gique , fut en quelque sorte dialectisée pour devenir une caractéristique du génie de Lucrèce dans 112 M. Patin , « L'antilucrèce chez Lucrèce » , dans ses Études sur la poésie latine, Paris 1868 , p . 117-137 . La thèse majeure de ce chapitre, reproduisant la leçon d'ouverture d'un cours de 1859, est que Lucrèce « peut se transposer passagèrement dans un ordre d'idées et de sentiments auxquels sa philosophie est hostile » . Cette « heureuse imagination » contribuerait puissam ment à la poésie visionnaire de Lucrèce, mais aurait cet effet involontaire de persuader le lecteur de la justesse de thèses contraires à la doctrine épicurienne, par exemple l'immortalité de l'âme. Dans 113 Le Poème de Lucrèce , Paris 1869, qui allie jusqu'à la caricature une critique doctrinale, fondée sur un point de vue chrétien , et un enthousiasme parfois lyrique pour la « force du génie » ( p. 188 ), J. Martha risqua une interprétation psychologique, bien résumée par cette formule de conclusion : « La vraie réfutation de la doctrine qui prêche la volupté est la tristesse de son plus grand interprète » . Franchissant le dernier pas , le docteur 114 [ B.-J. ) Logre, L'anxiété de Lucrèce, Paris 1946, projeta sur la personnalité de Lucrèce l'interprétation dualiste de son æuvre qui perdurait et qu'il aggrava d'un diagnostic psychiatrique : Lucrèce devenait un « maniaco dépressif » . La thèse de l'anxiété de Lucrèce trouva des défenseurs, tels 115 R. Waltz, « Lucrèce dans Lucrèce » , Lettre d'humanité 12, 1953 , p. 45 , et Perelli 6. 116 F. Giancotti, dans L'ottimismo relativo nel DRN di Lucrezio , Torino 1960, 2e édit. 1970 , repris dans Giancotti 101 , p . 355-534 , la réfuta en dégageant la perspective d'ensemble dans laquelle s'inscrivaient les passages supposés manifester une contradiction inhérente à l'æuvre ou à la psychologie de Lucrèce . Les exégètes récents du DRN ont délaissé l'approche psychologique , jugée obsolète, et tentent de montrer l'imbrication de la philosophie, de la poésie et de la rhétorique dans le DRN. Un des initiateurs de cette démarche fut 117 P.H. Schrijvers dans Horror ac divina voluptas. Études sur la poétique et la poésie de Lucrèce, Amsterdam 1970 : il a exposé méthodiquement la poétique explicite et implicite de Lucrèce et, en réévaluant la critique de la poésie par Épicure, éclairé l'initiative de son disciple latin . Voir aussi 118 G. Arrighetti, « Lucrèce dans l'histoire de l'Épicurisme. Quelques réflexions » , dans Algra et alii 28, p. 21-34. L'adoption par Lucrèce de certains procédés poétiques soulève cependant certains problèmes: ainsi , alors qu’Épicure rejetait fermement les mythes, Lucrèce a souvent recours à des figures mythiques , répertoriées et analysées par 119 E. Ackermann, Lukrez und der Mythos, coll . « Palingenesia » 12 , Wiesbaden 1974 , selon qui elles paraissent exercer parfois une fascination sur Lucrèce . Après avoir rappelé dans quel courant philosophique et littéraire s'inscrit le recours à la mythologie chez Lucrèce, 120 M. Gale , Myth and Poetry in Lucretius, Cambridge 1994 , montre comment celui-ci élabore une théorie de son origine et de sa signification . Pour 121 A. Gigandet, Fama deum . Lucrèce et les raisons du mythe, Paris 1998 , l'utilisation des mythes dans le DRN relève d'une critique systématique de la croyance, dont Lucrèce démonterait progressivement les ressorts (c.r. par 122 F. Giancotti, Gnomon 74 , 2002, p. 126-132 ) . Le livre

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de Gigandet et , dans une moindre mesure , celui de Gale sont caractéristiques de la tendance actuelle à rattacher à une « poétique philosophique » les analyses de Lucrèce. Dans ce domaine, l'ouvrage pionnier fut en France celui de Bollack 42. Ce coura nouveau d'interprétation du DRN se trouve notamment illustré par 123 Claude Gaudin, Lucrèce, la lecture des choses, La Versanne 1999. Selon cet auteur, tout le DRN peut se lire comme une Odyssée allant des principes invisibles jusqu'aux plus grands objets du monde , le sixième chant produisant une « épiphanie » de l'univers . Et puisque la réalité ultime des choses n'est devenue « visible , donc pensable » que par la parole qui la manifeste et qui traduit cet « avènement de la sensibilité » (p. 243 ) , C. Gaudin révèle dans le DRN une poétique s'apparentant par bien des aspects à celle des présocratiques. 124 Ch . Segal, Lucretius on Death and Anxiety, Poetry and Philosophy in DRN , Princeton 1990 , proposa une lecture poético -philosophique de nombreux textes versés autrefois au dossier de « l'anxiété » de Lucrèce ; il défendit la thèse d'une tension entre émotion et objectivité, poésie et raison dans le DRN ( c . r. par 125 A.A.Long, AncPhil, 12 , 1992 , p. 493-499) ; prenant également en compte une poétique, 126 D. Clay , « The source of Lucretius' inspiration » , dans 127 J. Bollack et A. Laks ( édit. ), Études sur l'épicurisme antique, coll . « Cahiers de philologie » 1 , Lille 1976 , p. 207-227 ; 128 S. Luciani , L'éclair immobile dans la plaine, philosophie et poétique du temps chez Lucrèce , coll . « Biblio thèque d'études classiques » 21 , Louvain /Paris 2000 . Souvent étudiée exclusivement en référence à l'art de Lucrèce, l'analogie constitue aussi un instrument heuristique puisque l'épicurisme fonde la décou verte sur l'inférence, qui permet une « projection de l'esprit » au -delà de la réalité sensible. Dans 129 « Le regard sur l'invisible » , dans Gigon 70 , p . 77-114 , repris dans Schrijvers 68 , p. 183-213 , P.H. Schrijvers montre la fécondité du raisonnement par analogie et de sa « forme la plus concise » , la description métaphorique. Voir aussi 130 A. Schiesaro , Simulacrum et imago. Gli argo menti analogici nel DRN , Pisa 1990. Il arrive cependant que l'inférence soit fausse , même selon la physique épicurienne, par exemple quand Lucrèce ima gine que « la muraille du monde » , l'éther, s'est formée comme , à partir des exhalaisons de la terre humide, un nuage vient à se former dans une aube d'été, cf. 131 J. Kany -Turpin « Nature et cosmologie dans les livres V et VI du DRN » , dans 132 C. Lévy (édit. ) , Le concept de nature à Rome. La physique, Paris 1996, p. 236-237. Parfois aussi le principe d'identité poétique s'impose à la place de la similitude scientifiquement requise, cf. 133 P. Malville , « Le discours poétique en philosophie » , dans Encyclopédie philosophique universelle, vol. I, L'univers philosophique, Paris 1989 , p. 864. Ces sortes de comparaisons contribuent à déplacer l'intérêt des lecteurs vers un autre ordre que celui des processus physi ques qu'elles sont censées directement expliquer . Ainsi , selon 134 J.I. Porter, « Lucretius and the Poetics of void » , dans Monet 37 , p. 197-226 , la macro structure du DRN qui mène de l'atome au monde ne doit pas masquer une poétique sublime révélant progressivement la véritable nature du vide. Maints débats actuels sur la portée de certains textes montrent l'importance que revêt désormais, sans doute sous l'influence des théories actuelles de la poétique, la

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prise en compte d'un signifiant pour l'évaluation du DRN. Un thème privilégié de ces débats est la peste d'Athènes qui clôt le chant VI ( cf. Salem 102, p. 223 246 ) . Certains y voient l'épilogue absolument rationnel du poème, comme 135 H. S. Commager Jr. , « Lucretius' interpretation of the Plague » , HSPh 62, 1957, p . 105-118 , tandis que Segal affirme: « The plague acts out , on a gigantic scale, this metaphor of the 'corrupted vessel ' that taints whatever material triumphs we attain » ( 124 , p . 237 ) . 136 J.L. Penwill, « The ending of sense : death as closure in Lucretius book 6 » , Ramus 25 , 1996 , p . 146-169, en propose une lecture tragique. Cf. aussi les nombreuses interprétations qu'a suscitées l'hymne inaugural à Vénus (résumé de l'immense bibliographie dans Salem 102, p. 19-33 ; parmi les interprétations récentes , 137 A. Deremetz , Le miroir des muses. Poétique de la réflexivité, Villeneuve d'Asq 1995 , p. 239-254, et Sedley 41 , p . 1-34 ) . La pertinence de certaines métaphores dans le cadre de la doctrine épicurienne a été discutée, cf. 138 G. Droz - Vincent, « Les foedera naturae chez Lucrèce » , dans Lévy 132 , p . 191-212 ; 139 A. Gigandet « Natura gubernans (Lucrèce, V , 77 ) » , dans Lévy 132, p. 213-226 ; 140 W. Görler, « Storing up Past Pleasures. The Soul-Vessel Metaphor in Lucretius and his Greek Models » , dans Algra et alii 28 , p . 193-207 , et plus généralement 141 D. Clay , « An anatomy of Lucretian metaphor » , dans 142 G. Giannantoni et M. Gigante ( édit . ) , Epicurismo greco e romano, coll . « Elenchos » 25 , 2 , Napoli 1996, t . II , p. 779 793. Quelques passages du DRN paraissent relever de la seule imagination poétique, voir par exemple 143 W. Spoerri « Crescebant uteri terram radicibus apti. À propos de la zoogonie de Lucrèce, ( DRN , V , 791. sqq .) » , dans D. Knoepfler et alii ( édit . ) , Nomen latinum (Mélanges André Schneider ), coll . « Recueil de travaux publiés par la Faculté des Lettres de l'Université de Neuchâtel » 44, Neuchâtel/Genève 1997 , p . 55-82 . La vocation de ce dictionnaire ne laisse guère de place à une présentation d'ouvrages consacrés à l'art de Lucrèce. Soulignons cependant l'intérêt particu lier accordé récemment au rôle de la rhétorique dans la transmission de la doctrine, cf. 144 C.J. Classen , « Poetry and Rhetoric in Lucretius » , TAPHA , 99, 1968 , p . 77-118 = Classen 74 , p. 331-373 , 145 E. Asmis , « Rhetoric and reason in Lucretius » , AJPh , 104 , 1983 , p . 36-66 , et 146 B.P. Wallach , Lucretius and the diatribe against the fear of death , DRN , 830-1094 , coll . « Mnemosyne Suppl . »> 40, Leiden 1976. Sur la poésie didactique, cf. 147 B. Effe, Dichtung und Lehre. Untersuchungen zur Typologie des antiken Lehrgedichts, München 1977 ; 148 A. Dalzell, The Criticism of Didactic Poetry. Essays on Lucretius, Virgil and Ovid , Toronto 1996 ; 149 C. Atherton (édit. ) , Form and Content in Didactic Poetry, Proceedings of the 5th Nottingham Classical Literature Symposium , Nottingham /Bari, 1997. Deremetz 137 , p . 239-286 , a abordé la question du statut générique du DRN dans la tradition de G. Genette, selon un point de vue « auctorial » , de manière à montrer l ' « opération dynamique » par laquelle Lucrèce, en transformant certains modèles (notamment Ennius) , constitue une épopée nouvelle . G.B. Conte a mis en évidence le rôle du sublime , dans 150 son introduction à la traduction de L. Canali , Milano 1990 , p . 7-56, et dans 151 Generi e lettori. Lucrezio , l'elegia d'amore , l'enciclopedia di Plinio ,

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LUCULLUS (LUCIUS LICINUS -)

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Milano 1991. Sur l'art de Lucrèce, voir 152 D. West , The Imagery and Poetry of Lucretius, Edinburgh , 1969 , 2e édit. Bristol 1994 ; 153 J.M.Snyders , Puns and poetry in Lucretius ' DRN, Amsterdam 1980. Signalons enfin les recherches récentes sur les théories poétiques de l'épicurien Philodème , notamment 154 D. Obbink ( édit. ) , Philodemus and Poetry. Poetic Theory and Practice in Lucretius, Philodemus and Horace, New York /Oxford 1995 . La critique a cru reconnaître de nombreuses influences ou réminiscences littéraires dans le DRN ; cf. les commentaires déjà cités , en particulier celui de R. D. Brown et , parmi les diverses études , 155 E. J. Kenney , « Doctus Lucre tius » , Mnemosyne 23 , 1970 , p . 366-392 = Classen 74 , p . 237-265 , J. Soubiran (édit . ) , Cicéron Aratea , fragments poétiques, CUF, Paris 1972 , p . 74-77 . Empé docle et Ennius , mentionnés dans le DRN , ont le plus sûrement influencé le style de Lucrèce , mais , dans le cas d'Empédocle , les critiques se sont surtout intéressés à la réception de sa doctrine , cf. 156 W. Kranz , « Lukrez und Empedokles » , Philologus 96 , 1944, p . 68-107 ; voir l'abondante bibliographie commentée de Spoerri 143, p . 57 n . 5 et p . 75-82 . On trouvera des comparaisons formelles chez les éditeurs et commentateurs d'Empédocle (cf. E. Bignone , D. O'Brien , J. Bollack ) ; voir aussi Sedley 41 , p. 1-34 ( notamment pour l'hymne

1

i

à Vénus ) . Les fragments d'Empédocle récemment publiés par 157 A. Martin et O. Primavesi, L'Empédocle de Strasbourg, Berlin/New York 1999 , attestent également certaines formations composées et expressions semblables , ce qui conforte l'hypothèse selon laquelle Lucrèce avait une connaissance directe de l’æuvre d'Empédocle ( contra Rösler 73 , p . 62 ) . Sur le rapport avec Ennius , cf. 158 W.A. Merrill, « Parallelisms and coincidences in Lucretius and Ennius » , UCP 3/4, 1918 , p. 249-264. Sur la métrique de Lucrèce, proche, par bien des aspects , de celle d'Ennius , et sur sa prosodie, cf. 159 W.A. Merrill, « The Lucretian hexameter » , UCP 5/12 , 1922 , p. 253-286 , et 160 Id ., « The characteristics of Lucretius ' verse and lucubrationes lucretianae» , UCP 8/7 , 1924 , p . 221-267 ; 161 C. Dubois , La métrique de Lucrèce comparée à celle de ses prédécesseurs, Ennius et Lucilius et Lucrèce, poète dactylique, Strasbourg 1935 ; 162 C. Bailey , Oxford 1947 , 2e éd . 1950, t . I , p . 109-132 ; 163 J. I. Cekalova , « Le problème de la forme métrique du DRN de Lucrèce » , PhilolClass 1 , 1977 , p . 134-137 ; 164 A. Pierrard , « Éléments matrices de la poésie didactique de Lucrèce » , Latomus 61 , 2002, p. 589-607.

JOSÉ KANY-TURPIN .

74 LUCULLUS ( LUCIUS LICINUS -) RE 104 + Lic . 30

ја

Études. 1 F. Münzer, RE XIII 1 , 1926 , col. 376-414 ; 2 J. Van Ooteghem , Lucius Licinius Lucullus, Bruxelles 1959 , 235 p. ; 3 A. Keaveney , Lucullus . A Life, London 1992 , 275 p. Testimonia . Cicéron , Lucullus ( Academica Priora II) ( voir DPHA t . II , notice C 123,p. 377-382) ; Plutarque , Vie de Lucullus, dans Plutarque, Vies, t . VII , éd. R. Flacelière et E. Chambry, CUF, Paris 1972 , p. 43-125 .

192

LUCULLUS (LUCIUS LICINUS -)

L 74

Biographie. L. Licinius Lucullus né sans doute en 117a (ou 118 selon Keaveney 3 , p . 3 ) appartient à une famille de la nobilitas ; son grand -père, L. Licinius Lucullus fut consul en 151a ; son père, préteur en 104, propréteur de Sicile en 103 , ne réussit pas à mettre fin à une révolte d'esclaves et fut accusé à son retour à Rome en 102 par Servilius l'augure; il dut s'exiler. Très jeunes, Lucullus et son frère Marcus attaquèrent ensemble Servilius, l'accusateur de leur père ( Plutarque, Luc . 1 , 2-3 ; Cicéron Acad. Pr. II 1 , 1 ; Prou . cons. 22 , Off. II 14, 50 ; Diod. Sic . XXXVI 9 , 1 ) . La date de ce procès est discutée, mais il faut penser que les deux frères venaient tout juste de prendre la toge virile , ce qui situerait le procès au tout début des années 90 (Keaveney 3 , p . 6 et 208 n . 14). Lucullus s'illustre ensuite pendant la guerre sociale ( 91-89 ) : il est tribun militaire en 89a et se trouve dans l'état-major de Sylla ; après la guerre , il commence une carrière politique en exerçant la questure en 879. Il accompagne alors Sylla qui mène la guerre contre Mithridate en Grèce et en Asie ; Lucullus y reste pendant plusieurs années, en tant que proquesteur, menant diverses opéra tions ; il est envoyé dans le bassin méditerranéen avec la mission de constituer une flotte ; en 864 il se trouve à Alexandrie où il rencontre Antiochus d’Ascalon [ » A 200 ] ( voir infra ) et il reste en Orient pendant que Sylla regagne Rome en 83 et exerce ensuite la dictature. C'est seulement en 80 que Lucullus est de retour à Rome ; en 79, il exerce les fonctions d'édile en même temps que son frère. Les deux hommes donnèrent des jeux magnifiques ( Cicéron , Off. II 57 ) . L'année suivante , il est préteur, puis propréteur chargé de la province d'Afrique ( Cicéron, Acad. Pr. II 1 , 1 ) . En 74, il est élu au consulat avec M. Aurelius Cotta. A cette date les hostilités reprennent avec Mithridate, le roi du Pont: le roi de Bithynie Nicomède avait légué son royaume à Rome , mais Mithridate l'annexe. Au cours de l'été, Aurelius Cotta et Lucullus sont envoyés comme proconsuls pour mener les opérations contre Mithridate. Lucullus resta plusieurs années en Orient et remporta de nombreuses victoires sur le roi du Pont : en 73 , il se rend maître de la Bithynie et du Pont et poursuit Mithridate , qui s'enfuit en Arménie (été 72 ) . La campagne se prolonge en 71 ; en 69 , il entreprend la conquête de l'Arménie et s'empare de Tigrano certe . L'année suivante, Lucullus continue les opérations en Arménie, mais ses troupes refusent de poursuivre leur marche et il regagne la région du Tigre. C'est là en 67 qu'il apprend que le sénat l'a remplacé dans son commandement, tandis que Mithridate reprend les hostilités et la reconquête de son royaume. C'est Pompée qui , ayant reçu les pleins pouvoirs en 66 , réussit à vaincre le roi du Pont. Lucullus regagna Rome en 66, mais dut attendre trois années avant de pou voir célébrer un triomphe (Cicéron, Acad. Pr. II 1 , 3 ) . Pendant quelques années, il semble encore intéressé par la vie politique: Cicéron ( ibid .) indique qu'il le conseilla dans « les circonstances les plus graves » ( c'est -à -dire en 63 ) , une lettre (Ad. Att. XII 21 , 1 ) mentionne sa présence au sénat lors de la fameuse séance du 5 décembre où les sénateurs débattent du sort des complices de Catilina. Son opposition aux projets des triumvirs semble avoir été vigoureuse ( Keaveney 3, p . 162 ) et il se retira sans doute de la vie politique vers 59a ou 58 ( 4 Th . P.

L 74

LUCULLUS (LUCIUS LICINUS -)

193

Hillmann , « When did Lucullus retire ? » , Historia 42 , 1993 , p . 211-218 ) . Il mourut fin 57 ou début 56 et reçut des funérailles publiques . La conduite de Lucullus pendant sa retraite a été longuement décrite par les auteurs anciens ( voir notamment Plutarque, Luc. 39-41). Il est l'image de ces Romains oisifs menant une vie de luxe et de divertissement, organisant des repas somptueux , aménageant luxueusement ses villas et ses jardins ; mais Plutarque et Cicéron font aussi apparaître la culture de Lucullus (Acad. Pr. II 1,1 ; Luc . 1,5 8 ) . Il aurait écrit en grec l'histoire de la guerre sociale (Plutarque, Luc . 1 , 7-8 ; Ad Att. I 19 , 10 ; cf. Peter, HRR I , P. CCLXXXI- CCLXXXII ) . Ses liens avec le poète Archias sont connus (Cicéron, Pro Archia 3 , 5-6) ; ce dernier accompagna même Lucullus en Asie lors de la guerre contre Mithridate et entreprit de célébrer en grec les campagnes de son patron (Pro Archia 9 , 21 ; Ad Att. I 16, 15 ) . Dans sa villa de Tusculum, Lucullus possédait une riche bibliothèque ( voir 5 T. Keith Dix , « The library of Lucullus » , Athenaeum 88 , 2000 , p. 441-464 ), longuement décrite par Plutarque (Luc. 42, 1-3 ) , évoquée par Cicéron ( Fin . III 2 , 7 - 3 , 10 ) ; cette bibliothèque est d'ailleurs le cadre de la discussion avec Caton qui occupe les livres III et IV de ce traité . Cicéron , plus attentif au contenu qu'au décor, mentionne des ouvrages stoïciens que lit Caton , tandis que lui-même recherche des traités d'Aristote ( commentarii Aristotelii ). Ces deux indications laissent penser à une bibliothèque riche en œuvres philosophiques , même si elle contenait aussi des æuvres littéraires. L'intérêt pour les cuvres philosophiques ne surprend pas étant donné les liens qui existèrent entre Lucullus et Antiochus d'Ascalon . La rencontre est ancienne et eut lieu lors de la venue de Lucullus dans le monde grec en 87a ( cf. 6 J. Glucker, Antiochus , p. 20-21 et n . 22 ) ; Lucullus évoque lui - même la présence d'Antiochus à ses côtés lors de son séjour à Alexandrie, alors qu'il était proquesteur ( Acad. Pr. II 2 , 4 ; pour la question du Sosus, voir DPHA I , A 200 , p. 217 , et II , C 123 , p. 378 ). Le philosophe resta avec lui pendant sa questure et l'accompagna aussi pendant la guerre contre Mithridate ; il assista à la bataille de Tigranocerte en 69a ( Plutarque, Luc. 28 , 8 ). Si l'on en croit Plutarque et Cicéron, les liens entre Antiochus et Lucullus s'expliquent par l'intérêt de ce dernier pour la philosophie ; selon Cicéron, « Lucullus s'appliquait à toutes sortes d'études littéraires et surtout à la philosophie, avec plus d'ardeur que ne le pensaient ceux qui ne le connaissaient pas » (Acad. Pr . II 2 , 4 ) . Plutarque déclare qu'il employait tous ses loisirs à l'étude de la philosophie ( 1,6) . Glucker 6 , p. 26-27 , suggère toutefois qu'Antiochus était là pour guider Lucullus dans le monde grec et lui servir d'intermédiaire dans ses activités politiques et militaires. « Lucullus le philosophe est une création de Cicéron » . 7 J. Barnes , « Antiochus of Ascalon » , dans M. Griffin et J. Barnes (édit . ) , Philosophia Togata, t . I , p . 50-96 , se montre plus nuancé et admet que les conseils d'Antiochus n'étaient pas simplement politiques mais aussi philosophiques ( p . 57 et 60-61 ). Mais il est vraisemblable que la culture philosophique de Lucullus n'était pas aussi vaste, ni son intérêt aussi vif, que le laisse croire Cicéron dans le Lucullus. Lucullus était en effet l'un des interlocuteurs de ce dialogue, chargé d'exposer la théorie de la connaissance formulée par Antiochus d'Ascalon . Il intervenait

L 74

LUCULLUS (LUCIUS LICINUS --)

194

aussi dans l’Hortensius. Mais la place importante qui lui avait été confiée, ne s'accordait peut-être pas avec la véritable personnalité de Lucullus. C'est ce qui explique la double version des Académiques ( voir DPhA II , C 123 , p. 377 ) : Cicéron renonce à attribuer un rôle à Catulus , Lucullus et Hortensius ; « cette distribution m'a paru peu pertinente car leur manque non pas de culture (NATALÒEVO Q ) mais de compétence (åtplø a) sur ces questions était notoire » (Ad Att. XIII 16, 1 ) . MICHÈLE DUCOS.

M III

75 LUPERCUS DE BÉRYTE RE 5 PIR2 L 418 PLRE 1 : 1

« Grammairien , ayant vécu peu avant le règne de l'empereur Claude II » (268 270 ) , auteur de plusieurs ouvrages signalés par la Souda A 691 ( t . III , p. 285 , 25-29 Adler) , notamment un ſlepì toŨ napà Mátovi åłextPUÓvoc, Sur le coq mentionné chez Platon ( à la fin du Phédon 118 a , sans doute , où Socrate prononce comme dernières paroles : « Criton , nous devons un coq à Asclépios » ). Sur les diverses interprétations de ce passage , voir 1 M. Dixsaut, coll . GF 489 , Paris 1991 , p . 408-409. Voir aussi 2 F. Orth , art. « Huhn » , RE VIII 2 , 1913 , col . 2519-2536, notamment col . 2533. Cf. 3 A. Franke, art. « Lupercus » 5 , RE XIII 2 , 1927 , col . 1839-1841 . RICHARD GOULET.

FII - D III

76 LUPUS

Platonicien de Rome . D'après une épigramme gravée sur un autel trouvé à Rome près de la via Cassia, Arria la platonicienne ( A 23 , où l'on ajoutera une référence à cette épigramme ) a consacré un autel après la guérison miraculeuse de Lupus, son « compagnon » - sans doute platonicien lui aussi : voir les éditions de 1 G. Cordiano et G. L. Gregori , « Iscrizioni e materiali marmorei da Roma nella collezione di Carlo Borra a Trevignano Romano » , Bullettino comunale archeo logico di Roma 95 , 1993 , p . 153-157 (Bulletin épigraphique 1997 , 24) , et de 2 K. J. Rigsby , « A Roman Epigram for Asclepius » , ZPE 134 , 2001, p . 107-108 ( Bulletin épigraphique 2003, 59) . Le texte , mieux établi et interprété, comprend quatre trimètres ïambiques : Ένταύθ ' ακέσατο Λούπο [ v ] εν λυγράι φθόηι

χειμώνι Παιάν Θύβρ [ ις εκατόν ήμασιν . Βωμόν δ ' εδε ματ’ 'Αρρα Πλατωνική, τιμώσ ' εταίρονχ ειλεουμένη θεόν .. « Ici le guérisseur du Tibre ( Asclepios) a guéri Lupus d'une terrible phtisie , en hiver , en cent jours ; Arria la platonicienne a fait construire un autel pour honorer son compagnon et rendre le dieu propice . » Lupus ne paraît pas connu par ailleurs . SIMONE FOLLET.

1

LYCOMÈDE

L 80

195 FI

77 LUPUS ( P. CORNELIUS- ) DE NICOPOLIS

P. Cornelius Lupus fut délégué de Nicopolis à l'Amphictionie delphique, comme l'avaient été auparavant deux de ses parents ( FD III , 4, 114) . Il était actif vers la fin du 1° siècle si l'archonte du décret qui lui accorde le droit de cité à Delphes (FD III 4 , 115 ) est bien identique à l'homonyme qui fut bouleute en 79/80 (FD III 4 , 34) . La cité de Delphes honorait en lui à la fois l'amphiction et le philosophe. BERNADETTE PUECH .

II

78 LURIUS CAMINUS (LÔREIOS CAMEINOS)

Dans une lettre conservée dans un papyrus du II° siècle de notre ère ( PHamb I 37 , r), Lôreios Caminos écrit à Claudius Antoninus ( 2A 219a) en évoquant sa xałoxayal a et ses meurs , qui sont celles d'un " authentique philosophe ". Lôreios reconnaît avoir reçu de lui une formation comme il n'en a reçue d'aucun autre philosophe. Il salue pour terminer les enfants du philosophe : Chairas et Antoninus . Cf. P. M. Meyer, Griechische Papyrusurkunden der Hamburger Staats- und Universitätsbibliothek , t . I , Berlin 1911-1924 , réimpr. Milano 1973 , p. 154-155. RICHARD GOULET. LUTATIUS

AMPHION (LUTATIUS -) (A 147]

LUTATIUS

CATULUS (Q. LUTATIUS -) [C 60)

79 LYCANDROS DE NICÉE

F II - DI

Stoïcien. Dans un passage récemment retrouvé de ses Bithyniaka, Arrien de Nicomédie ( > A 425, p . 601) mentionne plusieurs philosophes stoïciens de Nicée : Apollos ( A 293 ) , disciple d'Apollonios de Ptolémaïs ( > A 282) , qui a succédé à Athènes à Dardanos ( ** D 22 ) , Lycon ( > L 85a) et Lycandros. R. Merkelbach , qui a publié ce fragment dans « Nikaia die Rankenreiche ( EAIKOPH ) : ein über sehenes Fragment aus Arrians Bithyniaka » , Epigraphica Anatolica 5 , 1985 , p . 1-3 , a retrouvé ce Lycandros, avec un certain Dèmètrios ( D 50 ) , apparem ment comme disciple de Panaitios (mort vers 110a) dans l’Index Stoic . Herc., col . 75 , 4-6 ( p . 124 Dorandi , qui a lu Ạýxavộpoç éx BļQU [ ví ] aç , là où A. Traversa écrivait (Ní]xav [Oploc). Pour plus de détails, voir les notices citées supra . SIMONE FOLLET.

80 LYCOMÈDE

F IIIa

Péripatéticien, un des dix yvápnuou auxquels Lycon ( L 83 ) , mort vers 225 , légua le Péripatos dans son testament et confia la charge de choisir un nouveau scholarque ( Diogène Laërce V 70 ) . RICHARD GOULET.

LYCON

196

L 81

81 LYCON

F III

Neveu du péripatéticien Lycon de Troade (

L 83 ) et son héritier.

Le testament de Lycon [Lycon I ] , mentionne au moins deux Lycon . Les deux principaux héritiers de ce que possédait le philosophe “ à la maison" (en Troade ? ) sont des “ frères " : Astyanax et Lycon ( D. L. V 69) ( Lycon II ) . Il ne faut pas en effet traduire totç å enpotc par “ ses” frères, comme le comprend Hicks , car sinon le philosophe et son frère héritier s'appelleraient tous deux Lycon. Que deux frères aient porté le même nom est difficilement imaginable. Lycon Il n'est donc pas le frère de Lycon I. Il est plutôt le frère d'Astyanax. Le lien de parenté avec Lycon I n'apparaîtra que plus tard . Astyanax était déjà le nom du père de Lycon I (V 65 ) . Les biens que Lycon possède à Athènes et à Égine sont légués à Lycon ( III) , « parce qu'il porte mon nom et parce qu'il a partagé avec moi une longue période à mon entière satisfaction, comme il était juste que le fît celui qui tenait la place d'un fils » (trad. Narcy ). On peut imaginer qu'il s'agit toujours de Lycon II , le neveu de prédilection, qui serait ainsi d'une génération plus jeune que le scholarque. Quant au péripatos, Lycon le lègue à dix disciples parmi lesquels figurent deux Lycon ( Lycon IV et Lycon V ] ! Le dernier est en fait Lycon, « son neveu >> ( Tộ ảdenoi Q ) ( Lycon V ] . Ce Lycon V pourrait très bien être Lycon II . Astyanax et Lycon II - III - V seraient ainsi deux neveux du scholarque Lycon I. L'aîné porterait ainsi le nom de son grand -père, c'est - à - dire le nom du père de Lycon I ( et de leur propre père, déjà mort apparemment). Reste donc dans le testament un second Lycon IV , irréductible au neveu de Lycon ( II , III , V ) (celui de la notice suivante ). Ces liens de parenté ont amené T. Dorandi à corriger (à la suite de Pomtow , GGA 17 , 1913 , p. 169 n . 1 ) en V 69 roîç đồeapolç en ade $ < l8 > oic: « à mes neveux » , dans l'édition du passage qu'il a publiée dans W.W. Fortenbaugh et St. A. White (édit. ), Lyco of Troas and Hieronymus of Rhodes. Text, translation and discussion, coll . RUSCH 12 , New Brunswick/ London 2004. Sans être absolument indispensable, cette conjecture est fort séduisante. Dans la suite du testament , certaines responsabilités sont confiées à " Lycon " [ Lycon VI ) . Il doit distribuer des biens que le scholarque possède en ville ( i.e. à Athènes) et à Égine . Il s'agit manifestement du légataire déjà mentionné des biens situés à Athènes et à Égine . Il devra s'occuper de Micros et de Charès, etc. C'est lui qui doit choisir l'emplacement du tombeau ( Lycon VI = Lycon III ) . La seule certitude est qu'il faut distinguer dans ce testament, en plus du scholarque, au moins deux Lycon , tous les deux membres du collectif des disciples et que l'un des deux est un neveu de Lycon de Troade.

Astyanax I Lycon I

Astyanax II

X

1 Lycon II III V VI ( ? ) RICHARD GOULET.

L 83

LYCON D'ALEXANDRIE

197

82 LYCON

F III

L 83 ) avec neuf Péripatéticien, héritier du péripatos de Lycon de Troade ( L 81 ) , selon le autres disciples, dont un autre Lycon , neveu du scholarque ( testament de Lycon conservé par Diogène Laërce V 70. Ce collectif de disciples devait se charger de choisir un nouveau scholarque. Voir la notice précédente. RICHARD GOULET. 83 LYCON D'ALEXANDRIE ( ?) DE TROADE RE 14

ca 300 - ca 226

Successeur de Straton de Lampsaque à la tête du Péripatos à Athènes. Témoignages et fragments. 1 F. Wehrli, Lykon und Ariston von Keos, coll . « Die Schule des Aristoteles » 6 , 2e éd . , Basel /Stuttgart 1968. On peut main tenant se référer à une nouvelle édition des fragments, avec traduction anglaise : 2 P. Stork , W.W. Fortenbaugh, J. M. van Ophuijsen, T. Dorandi, « Lyco of Troas . The sources , text and translation » , dans 3 W. W. Fortenbaugh and St. A. White (édit. ) , Lyco of Troas and Hieronymus of Rhodes. Text, translation and discussion, coll . RUSCH 12 , New Brunswick /London 2004, p . 1-78 ( on trouvera , p. 68 , une table des correspondances avec l'édition Wehrli 1 ) . Cf. 4 W. Capelle, art. « Lykon » 14 , RE XIII 2 , 1927 , col . 2303-2308 ; 5 F. Wehrli , GGP, Antike 3 , p. 576-577 ; 6 U. von Wilamowitz -Moellendorff, Antigonos von Karystos, coll. « Philologische Untersuchungen >> 4 , Berlin 1881 , p. 78-85 et 286 ; 7 P. Moraux , Der Aristotelismus, t. I ; 8 T. Dorandi, Crono logia , p . 68-69 ; 9 K. O. Brink , art. « Peripatos » , RESuppl. VII , col . 923 sqq . ( col . 932-933 sur Lycon) ; 10 F. Lefèvre, Corpus des Inscriptions de Delphes, t . IV : « Documents Amphictioniques » , Paris 2002, n° 63 ; 11 T. Dorandi, chap. « Chronology » , dans K. Algra, J. Barnes, J. Mansfeld et M. Schofield (édit . ) , The Cambridge History of Hellenistic Philosophy, Cambridge 1999 , p . 31-54 ; 12 M. Ricl , The Inscriptions of Alexandreia Troas, coll . IGSK 53 , Bonn 1997 ; 13 Ch . Habicht, Athènes hellénistique. Histoire de la cité d'Alexandre le Grand à Marc Antoine, trad. M. et D. Knoepfler, Paris 2000 ; 14 Antigone de Caryste, Fragments , texte établi et traduit par T. Dorandi , CUF , Paris , 1999 ; 15 H. B. Gottschalk , « Notes on the wills of the Peripatetic scholarchs » , Hermes 100 , 1972 , p. 314-342 ; 16 J.P. Lynch , Aristotle's School. A history of a Greek educational institution , Berkeley/Los Angeles/London 1972 ; 17 P. Moraux , « Diogène Laërce et le Peripatos » , Elenchos 7 , 1986 ( « Diogene Laerzio storico del pensiero antico » ), p . 247-294 ; 18 M.G. Sollenberger, « The lives of the Peripatetics: An analysis of the contents and structure of Diogenes Laertius' Vitae philosophorum book 5 » , dans ANRW II 36 , 6 , 1992 , p. 3793-3879 . Biographies anciennes. Antigone de Caryste ( > A 193 ; cf. Dorandi 14 , fr. 23-24 , et p . LXIII-LXVI ; cf. Lynch 16 , p . 112-113 ) et Hermippe de Smyrne ( » H 86 ; Hermippe fr. 57 [ Wehrli ] ) avaient écrit l'un et l'autre un B os de Lycon . De son côté , Diogène Laërce consacre un chapitre à Lycon ( V 65-74 ) , s'appuyant, entre autres, sur Antigone et sans doute aussi sur Hermippe ; le testament de Lycon, transmis par Diogène ( V 69-74 ; Wehrli 1 , fr. 15 ) semble extrait des ß ou de philosophes, ou d'une collection de testaments, du successeur

198

LYCON D'ALEXANDRIE

L 83

probable de Lycon , Ariston de Céos ( > A 396 ; cf. P. Moraux , Les listes anciennes des ouvrages d'Aristote, Louvain 1951 , p. 243-245 ; Sollenberger 18, p . 3860-3861, pense que ce testament provient d'Hermippe ). Biographie. Lycon, fils d'Astyanax (Wehrli 1 , fr. 2 et 14 ) , était originaire de la Troade ( Wehrli 1 fr. 1 ; 2 , 28 ) . Il y a de bonnes chances pour que nous connaissions aussi sa cité d'origine : Alexandrie en Troade ( fondée par Antigone le Borgne, par synécisme, sous le nom d'Antigoneia peu après 306 et rebaptisée Alexandrie par Lysimaque peu après 301 ; c'est sans doute la plus grande cité de Troade, cf. L. Robert, Monnaies antiques en Troade, coll. « Hautes études numismatiques » 1 , Genève/Paris 1966 , p. 41 ) ; en effet, un décret honorifique de Delphes ( 244/ 3-239/8 selon Lefèvre 10 , p . 24 ) , mentionnant les marques d'honneurs que Lycon a obtenues de l'Amphictionie delphique pour sa constante bienveillance et sa générosité à l'égard d'Apollon et de son sanctuaire , désigne notre philosophe en ces termes : Aúxwv ’Aotvávax [toç ca 12-15 | ÉJE Aion doc ; les éditeurs de ce texte ont comblé la lacune de diverses manières, mais toujours, au moins , avec l'ethnique 'Alexavopeús (depuis SIG t. I , n° 461 [Pomtow ] ; cf. Lefèvre 10 , p . 178 , qui reprend la lecture proposée en 1929 par E. Bourguet dans FD III 1 , p . 142-143 ; Ricl 12 , p . 250 ) . Les dates extrêmes de sa vie peuvent être reconstruites à partir des quelques données fournies par la tradition : Lycon est mort à l'âge de 74 ans ( Wehrli 1 , fr. 16 ) ; il succéda à Straton en 270/69 ou 269/8 ( 127 € olympiade ) et demeura à la tête de l'École pendant 44 ans ( Wehrli 1 , fr. 5 = Straton , fr. 9 [ Wehrli ] ) . Il est donc né en 300/299 ou 299/8 et meurt en 226/5 ou 225/4 (Dorandi 11 , p. 36 ; Sollenberger 18 , p. 3844 ). Il appartient à une famille aisée, ce dont témoigne son style de vie, ses intérêts commerciaux et l'importance de ses biens ( cf. son testament, Wehrli 1 , fr. 15 ) . Dans sa jeunesse , il s'est adonné à diverses activités athlétiques ( Wehrli 1 , fr. 7 et 8 ; cf. Dorandi 14 , p . LXV - LXVI ) . Ses activités politiques, comme conseiller et bienfaiteur des Athéniens ( Wehrli 1 , fr. 12 ) , sont confir mées par une inscription d'Athènes ( Wehrli 1 , fr. 13 = SIG3 n° 491 = SEG XXXII , 1982 , n ° 118 ; cf. SEG XLVI , 1996 , n ° 138 qui renvoie à 19 H. Sonnabend , Die Freundschaften der Gelehrten und die zwischenstaatliche Politik im klassischen und hellenistischen Griechenland, coll . « Altertums wissenschaftliche Texte und Studien » 30 , Hildesheim 1996 , p . 272-274 ; Habicht 13 , p . 443 n . 47 ) , où l'on apprend qu'il avait versé à la cité, en guise de contribution volontaire ( én dooL ) à une souscription publique , 200 drachmes dans une situation politique délicate ( « pour le salut de la cité et la protection du pays » ) ; Lycon y est mentionné comme Aúxwv pióco (doc ); pour la date , cf. Habicht 13 , p . 181 : " printemps 247 ( ?)" ( cf. aussi Sollenberger 18, p. 3823 3824). De ses maîtres, en dehors du Péripatos, nous ne connaissons qu’un nom , celui du “dialecticien" (o dla extixóc) mal connu Panthoïdès ( D.L. V 68 = Wehrli 1 , fr. 3 ; cf. R. Muller , Les Mégariques, fr. 145-146 et p. 161 [commentaire) ; K. Döring, Die Megariker, n ° 145 , commentaire p. 139 ; l'information de D.L. est mal intégrée dans le contexte et laisse supposer une addition, cf. Moraux 17 , p . 257 ) . Quoi qu'il en soit , selon les témoignages conservés sur Lycon , la

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fréquentation d'un dialecticien n'a pas laissé de traces ni dans son enseignement ni dans ses æuvres. Par le testament de Straton de Lampsaque ( D.L. V 62 = Wehrli 1 , fr. 4 ; cf. aussi fr. 2 ) nous apprenons que Straton laissait l'école ( Tv Dlatpißýv ) à Lycon « puisque , parmi les autres (disciples), les uns étaient trop âgés, les autres occupés (aoxool ) » ; cf. Gottschalk 15 , p. 320-321 . Sur le testament conservé de Lycon , on consultera , en plus des notes de Wehrli 1 au fr. 15 , Gottschalk 15 , p . 314-342 ( sur Lycon , p . 321 et passim ) ; Sollenberger 18, p. 3870-3872 ; Lynch 16 , p. 81 et 125 n . 27 ; von Wilamowitz Moellendorff 6, p . 286 ( sur le sort de la bibliothèque de Lycon ). Euvres. Nous ne connaissons aucun titre d'ouvrages . Par le testament, nous apprenons que Lycon laissait deux catégories d'ouvrages : les ouvrages " déjà lus ” (tà åvey wouéva ; il s'agit sans doute d'ouvrages de Lycon donnés en lecture publique , comme l'indiquent Moraux 7 , p. 17 , et Gottschalk 15 , p. 319) et les textes “ non encore publiés ” ( tà ávéxôota ). Brink 9, p . 933 , a supposé que le long fragment, le seul , conservé en latin par P. Rutilius Lupus ( Wehrli 1 , fr. 26 ) , pourrait provenir d'un lepi uéons (Sur l'ivresse ), par analogie avec les titres similaires rapportés à d'autres péripatéticiens ( Aristote, Théophraste, Chamaileon [ » C93 ) , Hiéronymos (PH 129 ) ; cf. F. Wehrli , GGP, Antike 3 , p . 495 , à propos du De ebrietate de Théophraste ); il s'agit en fait du “ portrait moral" ( xapaxmployóg) haut en couleurs du comportement habituel de l'ivro gne ( pour le texte, corrompu en certains endroits , il faut se reporter à l'édition de 20 Ed. Brooks Jr. ( édit. ), P. Rutilii Lupi, De figuris sententiarum et elocutionis, ed . with prolegomena and commentary by Ed. B. , coll . « Mnemosyne, Supple mentum » 11 , Leiden 1970 , p . 32 ( texte) et p . 86-89 [commentaire philo logique ] ) . Ce fragment laisse entrevoir les qualités du style de Lycon ( la " richesse ” de son style (cf. Wehrli 1 , fr. 17 : Lyco oratione locuples note Cicéron , De Fin . V 5 , 13 ) ; cependant, le jeu de mot selon lequel Aúxwv était surnommé lúxwv (Le Doux ] vise la douceur de son élocution, en opposition explicite à son écriture (Wehrli 1 fr. 18 ] ) . Sur ce fragment, cf. Fortenbaugh , « Lyco ppaotixóc : Comments on ten texts » , dans Fortenbaugh et White 3 , p . 411-441, en particulier, p . 434-439 . Les quelques autres témoignages sur Lycon indiquent des intérêts pédagogiques et moraux . L'affirmation selon laquelle la fin dernière recherchée, le témoc, était pour lui “ la joie véritable de l'âme ” ( mv å nevnu yapàv tñs puxñs, Wehrli 1 , fr. 20) nous est transmise sans les raisons qui la justifient ; on serait tenté de rattacher à cette thèse sa conception du chagrin ( aegritudo, Cic . , Tusc. III 77 = Wehrli 1 , fr. 19 ) : cet état psychique n'est pas provoqué par des "maux de l'âme" (animi malis ), mais par des “ désagréments provenant de la fortune et du corps ” (fortunae et corporis incommodis) et ne constituerait donc pas un obstacle sérieux à la joie véri table ” . Sur ce témoignage, cf. St. A. White , « Lyco dans Hieronymus on the good life » , dans Fortenbaugh et White 3 , p . 389-409 , en particulier, p . 390-394 . Plutarque ( De audiendis poetis 14 e , Wehrli 1 , Ariston , fr. 33 ) mentionne d'Ariston de Céos (3A 396) un Aúxwv ( un dialogue ? , cf. Wehrli 1 , p . 66 [l'ethnique fait défaut ]) associé à l'Abaris d'Héraclide le Pontique ( » H 60 ) ; si

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l'on accepte le texte édité par Wehrli (justifié en Wehrli 1 , p. 66) , on y verra un ouvrage développant des théories relatives aux âmes, mêlées de mythes ( tà nepi tāv puxây dóyuata HeueLYMÉva uvoodoy a ) , dont sont censés s'enthou siasmer les très jeunes gens, à côté des fables d'Esope et des résumés d'euvres poétiques ( A. Philippon , dans Plutarque, Euvres morales, t . I , 1re partie , CUF, Paris 1987 , adopte la lecture critiquée par Wehrli , comme par Fortenbaugh et alii, dans Fortenbaugh et White 3 , nº 23 ) . Des travaux portant sur les sciences naturelles sont mal attestés (Wehrli 1 , fr. 28 et 30). L'activité de Lycon s'oriente nettement vers la pédagogie, en s'appuyant sur la rhétorique et la prédication morale. Le jugement de Cicéron (Wehrli 1 , fr. 17 ) selon lequel Lycon s'exprimait en un style riche, mais avec une certaine pau vreté de contenu semble confirmé par les maigres témoignages que l'Antiquité nous a laissés. À partir de lui on constate une certaine décadence scientifique de l’école péripatéticienne ( cf. la célèbre formule de Wilamowitz , sans doute excessive , selon laquelle, avec Lycon , commence pour deux siècles un « Toten schlaf der aristotelischen Philosophie » , Wilamowitz -Moellendorff 6, p. 83 ) . Iconographie. G. M. A. Richter, The Portraits of the Greeks, t. II , p . 178 et les figures 1031-1036 . JEAN -PIERRE SCHNEIDER . 84 LYCON DE BITHYNIE

FIIa

Stoïcien , mentionné comme disciple de Panétius de Rhodes (mort vers 1104) dans l’Index Stoic. Herc ., col . 76 , 1 ( p. 124 Dorandi). Il pourrait s'agir du L 85a) . stoïcien Lycon de Nicée ( RICHARD GOULET. 85 LYCON D’IASOS, OU DE TARENTE RE 15 Dans le catalogue de Jamblique ( V. pyth . 36 , 267 , p. 144 , 12 Deubner) figure un Lycon parmi les pythagoriciens de Tarente. Témoignages. 1 J. Radicke, FGrHist Contin . 1110 (“ Lycon /Lycus of lasus” ), vol . IV.A. 7 , p . 432-439 (édition , trad . angl . & comm . ). Voir avant lui 2 DK 57 ; 3 M. Timpanaro Cardini, I Pitagorici. Testimonianze e frammenti, t. II, Firenze 1962, p. 440-443 ; 4 H. Thesleff, The Pythagorean texts, p. 109 , 17 - 110 , 13 . Pour des commentaires, voir 5 Fr. Susemihl , GGLA , vol . II , p . 330-331 et 691-692 ; 6 W. Capelle, art. « Lykon » 15 , RE XIII 2, 1927 , col . 2308-2309; 7 W. Burkert, Lore and science , p. 204 , avec les n . 65-66 ; 8 L. Zhmud , Wissenschaft, Philosophie und Religion im frühen Pythagoreismus, Berlin 1997, p. 74 ( traitant notamment de la datation de Lycon) . Ce n'est que le catalogue de Jamblique qui fait état d'un Lycon originaire de Tarente, mais nous pensons que l'on pourrait reconnaître en lui sans trop de peine le pythagoricien du IVe s . av . J.-C. Lycon ( sans autre précision ) , dont parlent le péripatéticien du II° s. ap. J.-C. Aristoclès de Messine ( fr. 2 dans : 9 H. Heiland , Aristoclis Messeni reliquiae , Gießen 1925 , p. 38 , et dans 10 M. L. Chiesara (édit . ) , Aristocles of Messene. Testimonies and fragments,

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Oxford 2001 = Eusébe, Praep. evang . XV 2 , 8-9 ) et Diogène Laërce ( V 16 et 69 ). Ces témoignages nous permettent de découvrir en Lycon l'un des premiers détracteurs (Plaßaróvtec) d'Aristote, un « colporteur d'anecdotes malveillan tes» à son sujet, d'anecdotes qui consisteraient toutefois en « un usage calom nieux d'informations authentiques » ( 11 M. Narcy, dans M.-O. Goulet - Cazé ( dir. ) , Diogène Laërce . Vies et doctrines des philosophes illustres, Paris 1999, p . 571 , n . 3 , et p. 629, n . 5 ) . Plus intéressant encore , ce qui est visé par ces anecdotes, c'est le mode de vie extravagant et luxueux du Stagirite, qui se permettait de se baigner dans une baignoire d'huile chaude (preuve de sa mollesse ) puis de vendre le produit utilisé (avarice ) ; de voyager en portant avec lui ses 74 assiettes de bronze (l'abondance de sa vaisselle étant considérée comme une preuve de sa gourmandise ); enfin d'offrir à son épouse décédée un sacrifice comparable à ceux que les Athéniens offraient à Déméter (cf. aussi Aristippe [2ºA 356) , Sur la sensualité ( tpuoń) des Anciens, livre I , ap . Diog . L. V 3-4 ), ce qui est non seulement excessif, mais carrément une úßpıç à l'égard des dieux . Le mode de vie d'Aristote semble avoir choqué beaucoup de ses contemporains, comme en témoignent les anecdotes qu'aurait rassemblées, apparemment pour les réfuter, le même Aristoclès de Messine ( 2 * A 369 ) , et qu'Eusébe a reproduites avec délectation dans sa Préparation évangélique, XV 2 (pour une collection complète des anecdotes illustrant le mode de vie du Stagirite, voir 12 I. Düring , Aristotle in the ancient biographical tradition , Göteborg 1957 , réimpr. New York 1987 ; pour un aperçu synthétique et un commentaire, voir déjà 13 E. Zeller, Die Philosophie der Griechen, II 2 , p. 42 44 ). Mais un tel mode de vie extravagant et luxueux aurait sans doute “ révolté ” n'importe quel pythagoricien vertueux prônant une vie simple ( ou du moins exempte de tpuoń ) , frugale et sans excès, notamment en matière d'offrandes aux dieux . Avançant encore d'un pas, Burkert 7 voyait en ce Lycon plus précisément un "acousmatique” cynicisant dont l'idéal , se dessinant en creux à travers ce qu'il reproche à Aristote , se rapprocherait de l'autosuffisance des cyniques ; dans cette hypothèse, le fait qu'Aristoclès introduit Lycon non pas comme un pytha goricien tout court, mais comme quelqu'un qui se proclamait et s'auto définissait simplement comme tel – formulation qui nie en réalité l'authenticité de son pythagorisme – serait à mettre en parallèle avec l'attitude réservée de Timée de Tauroménium vis - à-vis d'un autre pythagoricien cynicisant, Diodore d'Aspendos ( + * D 128 ) , et révélerait dans quel discrédit seraient tombés les continuateurs de la tendance “ acousmatique ” de la secte au IVe s. av . J.-C. , à une époque où les “mathématiciens” s'attribuaient de plus en plus le monopole de la “ vraie" identité pythagoricienne. La préoccupation de Lycon pour la rectitude du mode de vie serait encore plus évidente si l'on reconnaît en lui Lycon d’Iasos ( inconnu par ailleurs) dont Athénée ( X , 418 e ) nous apprend qu'il était l'auteur d'un ouvrage Sur le mode de vie pythagoricien ( les mss portent Tepi Tuổayope ou tout court, mais l'addition < ß ov > de Kaibel semble tout à fait plausible – elle est acceptée également par Diels 2 , Burkert 7 et Radicke 1 dans leurs commentaires ). Là

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Lycon évoquait la modération du régime de Pythagore, qui « consommait une quantité modérée de nourriture » (NetP tpoon éxpñro ). Pace Capelle 6, cette extension du noyau initial d'informations relatives à Lycon nous semble tout à fait légitime , dans la mesure où Lycon d’lasos peut très bien avoir quitté sa patrie pour rejoindre une communauté pythagoricienne en Italie méridionale en l'occurrence à Tarente ( c'est ce que pense Narcy 11 , p. 629 n . 5 in fine ). Radicke 1 ( p . 437 ) , qui , après Burkert 7 , succombe à la tentation d'une telle identification , spécule que « in some part of his Pythagorean life, Lſycon ) contrasted Aristotle's decadence with Pythagoras' modesty » , quoiqu'il envisage également la possibilité que ces remarques stigmatisant Aristote soient reprises « from some other philosophical pamphlet or from a treatise on luxury » . Il n'y a rien d'improbable en soi à ce que ce même Lycon se soit occupé de médecine/ pharmaceutique et de botanique ( comme beaucoup d'autres pythago riciens ; cf. en dernier lieu Zhmud 8 , p. 226-257 ) , et plus particulièrement des vertus diurétiques et anaphrodisiaques d'une espèce de laitue appelée Boún hev poc ou Op dat, selon le témoignage d'Athénée II , 69 e . Cette laitue à feuilles larges qui affaiblit la puissance de procréation avait en effet attiré l'attention des savants de la secte, soucieux de restreindre le désir sexuel, et s'est vue justement désignée par eux comme eủvovyetov (ou kůvoûyoc, « eunuque » ) – nom révé lateur de ses qualités ; voir Pline , Histoire naturelle XIX 127 , et Géoponiques XII 13 , 1-2 , avec le commentaire de 14 M. Detienne, Les jardins d’Adonis : la mythologie des aromates en Grèce ( 1972) , Paris 19893 , p. 227-241 ( le chap. inti tulé « La laitue de Pythagore » ) . Mais , comme le remarquait Burkert 7, il ne peut pas y avoir de certitude quant à l'attribution de ces données botaniques : en effet, des deux sources qui en parlent, la première, Antigonos ( cité par la scholie au v . 585 des Thériaques de Nicandre , p. 46, 23 Keil ; pour les variantes de la tradi tion manuscrite, voir l'apparat critique de Keil ad loc .), évoque le nom de Lycon sans autre précision, tandis que la tradition manuscrite de la seconde , à savoir Athénée , mentionne un certain "Ibuxos ó Mudayópeloç, inconnu par ailleurs, dont le nom , paléographiquement , se corrige plus naturellement en ' Ixxoç ( pythagoricien tarentin bien connu , " I 11 ) , ou , à la limite , en Aúxos, qu'en Λύκων .. La correction « Iccos » a été proposée par 15 P. Maas, art. « Ibykos » 2, RE IX 1 , 1914, col. 818. On pourrait ajouter à l'appui de ce rapprochement un argument secondaire : l'origine commune, tarentine, du pythagoricien Iccos et d'Héraclide [~ H 58 ] ( la source d'Athénée) . La correction « Lycos » a été proposée par Valckenaer et retenue par Diels 2 ( avec un point d'interrogation ), Gulick (éditeur d'Athénée pour la LCL) et Radicke . Burkert 7 signalait l'existence de deux médecins nommés Lycos que l'on pourrait reconnaître dans le texte d'Athénée. Radicke 1 , p. 437-438 , quant à lui , y verrait le médecin du jer s. av. J.-C. Lycos de Naples ( ** L 88 ), qui serait désigné comme pythagoricien par suite d'une corruption : « possi bly an Ιπποκράτειος became a Πυθαγόρειος under the influence of the following Πυθαγο pe wv » ( mot utilisé à propos de l'origine de l'emploi , indubitablement pythagoricien, du terme eůvoûxos pour désigner cette fameuse laitue ). Partant de ces indications, 16 H. Thesleff, Introduction, p . 114 , attribuait à Lycon un ouvrage Sur les plantes, de datation incertaine. Signalons enfin que dans sa collection de fragments des historiens grecs 17 K. Müller, Fragmenta historicorum Graecorum , vol . II , p. 370 , reconnaissait

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encore le pythagoricien Lycon derrière la leçon corrompue AeŪxos des mss de la Vie de Pythagore de Porphyre ( V. Pyth. 5 , p . 38 , 9-15 Des Places - passage qui fait état de la diapwv a des sources au sujet de la patrie et de la citoyenneté de Pythagore ). F. Jacoby a aussi été tenté de le faire, et , plus récemment, J. Radicke a finalement inclus le passage en question parmi les fragments de son auteur factice “ Lycon /Lycos", bien que seulement « as a starting point for discussion ». Nous croyons néanmoins , avec Burkert et Radicke , que l'attri bution explicite de ce passage au livre IV d'un ouvrage intitulé Histoires nous invite à y reconnaître sans hésitation l'historien de la Grande Grèce Lycos de Rhegium (floruit ca 290 ) , et cela moyennant une correction beaucoup plus simple et naturelle ( AɛŪxos + Aúxoc) . Voir 18 F. Jacoby, FGrHist 570 F 15 ( fr. classé dubium ) , avec le comm . ad loc. ( III b , p . 601 ) ; 19 E. Des Places , n. complémentaire 2 de la p. 38 de son édition de la Vie de Pythagore, reportée à la p. 151 ; Radicke 1 , p. 436-437 , avec les n . 11-12 ; 20 C. Macris ( introd ., texte grec, trad . grec moderne & n . ), loppúpiog. Ivoarópov ß oç, coll . « 'Yotepn apxalótnta » 6, Athènes 2001, n . 20 , aux p . 172-173 . Burkert 7 évoque un argument supplémentaire : « considering his interest in miracles, asceticism and the like ( cf. FGrHist 570 F 5 , 6 et 7 ) , (Lycus ) must have mentioned Pytha goras ». Sur Lycos de Rhégium, voir 21 l'art. « Lykos » 50 de la RE, signé par R.Laqueur, ainsi que 18 F. Jacoby , FGrHist_570, avec le commentaire correspondant, vol. III b, p . 597 sq. BRUNO CENTRONE et CONSTANTINOS MACRIS . 85a LYCON DE NICÉE

F II - DI

Stoïcien. Dans un passage récemment retrouvé de ses Bithyniaka , Arrien de Nicomédie ( ** A 425 , p. 601) mentionne plusieurs philosophes stoïciens de Nicée : Apollos (** A 293 ) , disciple d'Apollonios de Ptolémaïs ( > A 282 ) , qui a succédé à Athènes à Dardanos ( > D 22 ) , Lycon et Lycandros ( ~ L 79 ) . Voir R. Merkelbach , qui a publié ce fragment dans « Nikaia die Rankenreiche (EAIKDPH ): ein übersehenes Fragment aus Arrians Bithyniaka» , Epigraphica Anatolica 5 , 1985 , p . 1-3. Il pourrait s'agir du stoïcien Lycon de Bithynie ( L 84 ). Pour plus de détails, voir les notices citées supra.

SIMONE FOLLET. 86 LYCOPHRON RESuppl. XIV “ Lykophron ” 10

IVa ?

Notre unique source d'information à propos de Lycophron est Aristote , qui le mentionne à plusieurs reprises et lui attribue une fois l'épithète « le sophiste » ( Pol. III 9, 1280 b 10 = 83 , 3 DK ) . Dans la littérature secondaire, il n'a pris rang que tardivement parmi les sophistes . Le premier article qui lui est consacré est celui de 1 J. Vahlen , « Der Sophist Lykophron » , RhM 21 , 1866, p . 143-146 , article repris dans ses Gesammelte philologische Schriften, Leipzig / Berlin 1923 , I , p. 156-158 ; les fragments qui nous en sont transmis par Aristote ne sont rassemblés que dans la sixième édition de 2 DK ( 1952 ) ; il n'apparaît dans la RE

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LYCOPHRON

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que dans un volume supplémentaire en 1974 ( 3 H. Hofmann, art. « Lykophron der Sophist » 10, RESuppl. XIV , 1974 , col . 265-272) . En aucune des occurrences où Aristote cite Lycophron il ne mentionne le nom d'un ouvrage dont celui-ci serait l'auteur, ce qui fait qu'on ne sait s'il cite un écrit ou des paroles rapportées. 4 R.G. Boehnecke, Demosthenes, Lykurgos, Hyperides und ihr Zeitalter, mit Benutzung der neuesten Entdeckungen , vor nehmlich griechischer Inschriften , I , Berlin 1864, p. 35 sqq . a soutenu pour ce motif que le Lycophron auquel Aristote, en Rhet. III 3 , 1405 b 36, 1406 a 6 (83 , 5 DK) , emprunte des exemples de « froideur » du style n'était autre que le tyran du même nom mentionné plus loin (Rhet. III 9 , 1410 a 18) . Cette thèse suscita en réponse l'article de Vahlen 1 qui , tout en répertoriant pour la première fois l'ensemble des fragments transmis par Aristote , s'appuya sur le commentaire par le Ps . - Alexandre de l'un des passages concernés ( Soph . El. 15 , 174 b 30-33 = 83, 6 DK ) pour montrer que l'on avait affaire à un sophiste, identifiable avec celui mentionné dans la Politique , et que l'on n'avait donc pas besoin de faire du tyran Lycophron l'auteur auquel Aristote emprunte des exemples de « froideus >> en Rhet . III 9. En Soph. El. 174 b 30-33 , Aristote explique qu ' « il faut parfois s'attaquer à autre chose que ce qui est dit en l'extrapolant (Èxeīvo éxraßóvtac) , si l'on ne peut traiter le thème proposé : c'est ce que fit Lycophron quand il se vit proposer de prononcer un éloge de la lyre » : selon le Ps .- Alexandre ( Soph. El. 118 , 30-119, 3 ), Lycophron , jouant sur une homo nymie, fit l'éloge de la constellation de la Lyre au lieu de l'instrument de musique . L'argu ment de Vahlen 1 est que ce Lycophron fait montre ainsi de son talent dans la spécialité sophistique de l'éloge paradoxal. Du fait qu'en Rhet. III 9 Lycophron est cité en même temps que Gorgias et Alcidamas , ce qui porte à conclure qu'il est , comme ce dernier, un élève de Gorgias ; du fait également que la deuxième Lettre de Platon ( 314 d 1 ) men tionne un Lycophron séjournant à la cour de Denys II , on situe son activité dans la première moitié du IVa. Sur la base de formules citées par Aristote (Pol. III 9 , 1280 b 10 = 83 , 3 DK : « la loi est un garant réciproque des droits (ou : la caution que se donnent mutuellement les justes : eyyunts årańãous tõv dina wv) , mais elle n'est pas en mesure de rendre les citoyens bons et justes » ; lepi eủyeve aç , fr. 1 Ross = 83 , 4 DK : la noblesse est « quelque chose d'entièrement vide » , dont la « dignité ( tò oeuvóv ] » ne réside que « dans le discours » ) , on attribue à Lycophron une conception conventionnaliste de la loi . Aristote lui attribue également une définition de la science comme « interaction (ouvovo a ) du savoir et de l'âme» (Metaph. H 6 , 1045 b 9-11 = 83 , 1 DK ) , ainsi que la suppression du mot « est » pour éviter de rendre l'un multiple ( Phys. I , 2 , 185 b 27-31 ). On pourrait être tenté , sur la base de ce dernier témoignage, de rapprocher Lycophron d’Antisthène ( ** A 211 ) ou des mégariques. 5 R. Muller, Les Mégariques, p. 172-173 , fait cependant observer que « Socrate blanc » est , pour les mégariques , aussi inacceptable que « Socrate est blanc » . Éditions. 2 DK 83 ; 6 M. Untersteiner, Sofisti. Testimonianze e frammenti, fasc . secondo, Gorgia, Licofrone e Prodico, Firenze 1961 , p. 150-155 .

L 89

LYDUS (IOHANNES -)

205

Études d'ensemble. 7 W. Nestle , Vom Mythos zum Logos, 2 ° éd . Stuttgart 1942, réimpr. 1975 , p. 343-345 ; Hofmann 3 ; 8 M. Untersteiner, 1 sofisti, 2e éd . Milano 1967 (réimpr . Milano 1996 ; trad . fr. Paris 1993 ) , ch . XVIII § 6 ; 9 W.K.C. Guthrie, A History of Greek Philosophy, t. III, p . 139-145 ; 10 GGP, Antike 2/1 , p. 52-53 . Études particulières. 11 G. Avezzù , « Note in margine ad Aristotele , Retorica III 3 » , BollistFilolGreca 2 , 1975 , p . 7-33 ; 12 R.G. Mulgan , « Lyco phron and Greek theories of social contract » , JHI 40, 1979 , p . 121-128 . MICHEL NARCY .

87 LYCOPHRON RESuppl. VIII : 7b

IV /IIIa

Épicurien inconnu destinataire d'une lettre de Léonteus ( Plut . , Adv. Col.

1

1108 e = p. 175 adn. 7 Us . = fr. 138 Arrighetti) dans laquelle il est question de l'admiration d'Épicure pour Démocrite ( - + D 70 ) et sa doctrine ( cf. M. Gigante , Scetticismo e Epicureismo, Napoli 1981 , p . 52 ) . TIZIANO DORANDI.

88 LYCOS DE NAPLES RE 51

ra

Médecin empirique . Il apparaît dans une liste de médecins empiriques chez Galien , De methodo medendi, t. X , p . 143 , 1 Kühn ( fr. 32 E Deichgräber ), après Ménodote ( M 133 ) , Sérapion , Théodas , Glaucias ( > 618 ), Apollonios ( ** A 270/271 ? ) , Calliclès , Diodore et Héraclide ( ~ H 58 ) . Il était utilisé par Pline dans les livres XX -XXVII de son Histoire naturelle ( cf. I 20-27 ) [ fr. 256 Deichgräber ). Les témoignages ont été rassemblés par 1 K. Deichgräber, Die griechische Empirikerschule , n° 9 , fr. 256-265 , p . 204-205 ; voir également , en tant que commentateur d'Hippocrate , fr. 315-316 , p . 223 (où est signalé un 'Eenyntixóc (aóyos) sur le llepi tónWV TÕv xarà avopwnov 14 , d'Hippocrate ( VI , 306 , 9 Littré ]). Dans deux autres passages , on ne peut pas savoir si le Lycos mentionné est bien Lycos de Naples ( p . 409, 39 et 411 , 15 Deichgräber) . Voir sur ce médecin, Deichgräber 1 , p. 261 . Cf. 2 E. Kind , art. « Aúxoç ó Neanoritng» 51 , RE XIII 2 , 1927 , col . 2407 2408.

RICHARD GOULET.

89 LYDUS ( IOHANNES - ) RE 7 RESuppl. XII PLRE II loannes Lydus 75

VI

Antiquaire byzantin . Éditions. 1 C. Wachmsuth , loannis Laurentii Lydi Liber de ostentis , Leipzig 1863 , 2e éd . ibid ., 1897 ; 2 R. Wünsch , loannis Lydi Liber de mensibus , coll . BT , Leipzig 1898 , réimpr. Stuttgart 1967 ; 3 R. Wünsch , Joannis Lydi De magistratibus populi romani libri tres, coll . BT, Leipzig 1903 ; 4 A.C. Bandy , On powers of the magistracies of the Roman state. Critical text , transl . , comm . & indices by B. A. C. , Philadelphia 1983 ; 5 T. F. Carney ( trad . ) , On the magistracies of the Roman constitution , Sydney 1965 .

206

LYDUS ( IOHANNES -)

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Études d'orientation . 6 A. Klotz , art. « Ioannes Laurentius Lydus » , RE XII 2 , 1927 , col . 2210-2217 ; 7 T. F. Carney, art. « Lydos » , RESuppl. XII , 1970 , col . 521-523 ; 8 J. Caimi , Burocrazia e diritto nel De magistratibus di Giovanni Lido, coll . « Univ . di Genova Fond. A. Poggi » 16, Milano 1984 ; 9 M. Maas, John Lydus and the Roman past. Antiquarianism and politics in the age of Justinian , London 1992 ; 10 E. Stein , Histoire du Bas - Empire, t. II , 1949, réimpr. Amsterdam 1968 ; 11 W. Schmid et O. Stählin , Handbuch der klassischen Altertumswissenschaft, VII : Geschichte der griechischen Literatur, 2 : Die nachklassische Periode der griechischen Literatur, t. 2 : Von 100 bis 530 nach Christus, 6e éd . , München 1924 , p. 1040-1044 . Biographie. Le nom de Laurentius qui lui est parfois ajouté était celui de son père (PLRE II : 6 ) et non de Lydus lui-même (Photius, Bibl. cod. 180, p. 125 a Bekker = t. II, p. 187 , 20 Henry ). Né en 490 apr. J.-C. à Philadelphie sur le Tmolus, le jeune Ioannes effectue des études brillantes et précoces: à l'âge de 14 ans il aurait déjà été connu comme « lettré » ( « litteratus » , De mag . III 67 ) . Il suit à Athènes les leçons de philosophie platonicienne et aristotélicienne dispensées par Agapius (2A 31 ; cf. 12 A. Kaldellis , « The religion of loannes Lydos » , Phoenix 57 , 2003, p. 300-316 , notamment 305-306 ), lui-même élève de Proclus et de Marinus ( M 42) ; aussi remarque -t -il non sans fierté qu'à son époque, sa ville natale Philadelphie était connue auprès des élèves néoplatoniciens de Proclus comme « la petite Athènes » (De mens . IV 58 , p . 113 , 6 Wünsch ) . Embauché par le préfet du prétoire d'Orient Zoticus, lui aussi originaire de Lydie, sous le règne d'Anastase en 511 comme tachygraphe à la Préfecture du prétoire, Iohannes restera dans la fonction publique pendant plus de 40 ans. Grâce à l'intervention de son cousin Ammien (PLRE II :) et de Zoticus, il se marie de manière avantageuse , mais son épouse meurt jeune (De mens . IV 88). Sous la protection de Zoticus , Jean commence sa carrière de manière brillante , accumulant les charges honorifiques, notamment celle, précoce, de chartularius en chef ; mais après la retraite de son protecteur en 512 il doit quitter le palais et se contenter du poste d'exceptor à la préfecture. Peut-être en 517 sous le préfet Sergius, il atteint le poste de chartularius du scrinium , puis , peut-être au début du règne de Justinien , il est nommé parmi les Augustales ( cf. 13 A.H. M. Jones, The later Roman Empire, 284-602. A social, economic, and administrative survey , 2 vol . , Baltimore 1986, t. II , p . 588 ) , poste qui lui laisse davantage de temps pour se consacrer aux lettres. Le païen Phocas (PLRE II : 5 , p. 881-882), dont Lydus loue la magnanimité et l'érudition, et dont il attribue la nomination à la Providence divine ( cf. Kaldellis 12, p. 303-304), est nommé Préfet du prétoire d'Orient en 532 en remplacement de Jean de Cappadoce ; bien que rapidement remplacé à nouveau par le Cappadocien, Phocas, désormais iudex pedaneus à Constantinople, prendra la relève comme protecteur de Lydus jusqu'en 545-546 , date où il se donnera la mort face à la vague de persécution anti- païenne lancée par Justinien. Grâce à ses connaissances de l'histoire romaine et de la langue latine (mais cf. Wachsmuth 1 , p. XXXIX , qui traite Lydus de « homo Latini sermonis misere gnarus » ; 14 M. Dubuisson , « Jean le Lydien et le latin : les limites d'une

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compétence » , Serta Leodiensia secunda : mélanges publiés par les Classiques de Liège à l'occasion du 175 ° anniversaire de l'Université, Liège 1992, p. 123 131 ), Lydus attire sur soi l'attention de l'Empereur, qui l'invite à prononcer un panegyrique devant une ambassade d'aristocrates romains ( 15 T. Wallinga , « The date of Joannes Lydus ' De magistratibus » , RIDA 3 ° série , 39 , 1992 , p. 358-380, notamment 360 ) et le prie de rédiger l'histoire de la guerre contre les Perses ( De mag . III 28 ) , laquelle, après la victoire de Justinien à Dara en 530, s'était conclue par le traité signé au printemps de 532 (Procope, B.P. I 22 , 17 ) . L'empereur envoie au Préfet du prétoire d'Orient une lettre pleine d'éloges pour Lydus (De mag. IV 29 ) , à la suite de laquelle celui -ci se voit nommer, peut-être en 543 , sous le praefectus urbis Constantinopoleos Gabriel ( PLRE III A : 1 , p. 498 ) auquel il dédiera aussi bien son De mensibus que son De ostentis , à l'une des chaires professorales de Constantinople , poste qu'il occupera sans avoir à démissionner de son poste à la préfecture du prétoire (De mag . III 29 ; Wallinga 15). Lydus prend sa retraite de la fonction publique en 551-552 , en recevant entre autres le titre de comes primi ordinis, pour se consacrer cette fois totale ment aux lettres. Il meurt à un moment indéterminé, mais vraisemblablement avant le mois de novembre 565 ( Wallinga 15 , p . 360 ). Sur la carrière de Jean Lydus à Constantinople , voir également 16 H. Schlange - Schöningen , Kaisertum und Bildungswesen im spätantiken Konstantinopel, coll . « Historia - Einzelschriften » 94 , Stuttgart 1995 , p . 135 138 Euvres. Déjà avant sa retraite ( Wallinga 15 ) , Lydus aura commencé à travailler sur les trois ouvrages qui nous ont été au moins partiellement transmis : le De ostentis, le De magistratibus, et le De mensibus . Il était en outre l'auteur de poésies, d'un panegyrique du Préfet Zoticus et d'un autre , déjà évoqué plus haut, de Justinien , ainsi que d'une histoire des campagnes de celui -ci contre les Perses , dont nous avons aussi parlé . Ces écrits ne nous sont pas parvenus . Le premier ouvrage rédigé par Lydus est vraisembablement le De mensibus, cité dans ses autres ouvrages , qu'il a peut-être commencé en 540 à Chypre ; il ne nous est transmis que dans un état fragmentaire. L'auteur y présente des maté riaux concernant le calendrier et les fêtes romaines depuis l'époque des Rois . L'état lacunaire du livre I ne permet plus d'en reconstituer la suite des idées avec certitude; cependant, il y était question vraisemblablement des premiers décomptes des années des premiers habitants de l'Italie , sous le règne de Saturne, inventeur de l'année ; des influences exercées sur les Italiens par les peuples lydo - étrusque et grec , et surtout des institutions de Numa. Le livre II du De mensibus traite de la journée (ſlepì ñuépac ) , le livre III du mois ( Ilepi unvós) ; enfin , le livre IV présente un calendrier qui parcourt les mois un à un à partir de janvier et est pourvu de notices d'ordre astrologique, astronomique , et antiquaire. Le De ostentis , lui aussi lacunaire au début , commence par une histoire de la divination chez les Romains ( chap . 1-10 ) . La suite est constituée par une série d'essais traitant de divers sujets : il y est question des comètes ( d'après Campestris ou Campester), aux chap . 11-15 ; de la lune , aux chap . 16-20 ; du

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tonnerre , aux chap. 21-26, exposition suivie par les « brontoscopies » de Nigidius Figulus ( > N 58 ) aux chap . 27-38 (cf. 17 C. Ampolo, « Lotte sociali in Italia centrale : un documento controverso : il calendario brontoscopico attribuito a Nigidio Figulo » , Opus 9-10, 1990-1991, p. 185-197 ) et de Fontéius ( chap. 39 41 ) . Après un bref chapitre d'observations sur la lune par Labéon (PL 2 ] ( chap . 42 ) , on passe à l'étude des éclairs ( chap. 43-46 ), suivie par un calendrier fulminaire, lui aussi peut - être dû au même Labéon (chap. 47-52 ) . On passe ensuite aux tremblements de terre ( chap . 53-54 ) , avec le seismologium de Vicellius , ( chap. 53-58 ) . L'ouvrage se termine ( chap. 59-70 ) par la citation du calendrier populaire pré -julien attribué à Clodius Tuscus ( il a été édité par 18 L. Bianchi , « Der Kalendar des sogenannten Clodius Tuscus » , SHAW 1913 , 3. Abt . ) , suivie d'une discussion de l'ethnographie astrologique tirée de la Tetrabiblos de Ptolémée ( II 2 ) , et une brève conclusion ( chap. 71 ). Finalement, le De magistratibus , seul ouvrage de Lydus à être traduit dans une langue moderne ( cf. Bandy 4 ; Carney 5 ) que l'auteur a peut- être commencé au mois de décembre 554 ( De mag. I 2 ; mais cf. Caimi 8, p . 111-124, qui doute que Lydus ait rédigé quoi que ce soit après 552 ; Wallinga 15 ) , se veut une histoire des institutions administratives romaines : le livre I en décrit le déve loppement au cours de la préhistoire, de l'époque des Rois et de la République, tandis que les livres II - III proposent une esquisse de l'évolution de l'institution de la Préfecture prétorienne, depuis ses origines sous Auguste jusqu'à l'époque de l'auteur. La conclusion de l'ouvrage , gravement endommagée , offre un tableau du déclin de l'Empire, qu'Anastase essaya en vain de freiner, mais qui ne fut sauvé que grâce à l'intervention providentielle de Justinien , ó návrwv βασιλέων αγρυπνότατος ( III 55 ) . La critique s'est montrée sévère à l'égard de Jean Lydus . Pour Schmid Stählin 11 , p . 1043, ses écrits représenteraient « le nadir de l'art dans la littéra ture grecque » , et témoigneraient d'un auteur qui est « complètement incapable de distinguer l'important de ce qui manque d'importance » . En effet, on a sou vent reproché à Lydus le manque d'acribie de ses renseignements ( Bandy 4 , p . XXXIII-XXXV et n . 2 ; Wallinga 15 , qui montre les erreurs chronologiques de Lydus dans le De mag . ). Cependant, il ne faut pas oublier que nous ne possédons que les débris de l'activité littéraire de Lydus ; il s'agit , selon Kaldellis 12 , p . 301 , de « fragments résumés par un éditeur byzantin , dont l'ordre n'est souvent pas clair » . Les trois éditions des ouvrages de Lydus , parues il y a environ un siècle , seraient à reprendre ; c'est surtout le cas pour le De mensibus . En effet, des recherches postérieures à l'édition de Wünsch ( 19 R. Schoene, « Ein Fragment des Joh . Laurentius Lydus bei Anastasius Sinaita » , dans Festschrift zu 0. Hirschfeld , Berlin 1903, p. 327-329 ; 20 F. Cumont, « Lydus et Anastase le Sinaïte » , BZ 30 , 1929-1930 , p. 31-34 ; cf. 21 P. Mastandrea, Un neoplatonico latino, Cornelio Labeone : testimonianze e frammenti, coll . EPRO 77 , Leiden 1979 , p . 67 sqq . ) ont montré que l'ouvrage du moine byzantin Anastase le Sinaïte ( VIIe siècle ) dans son ouvrage intitulé Anagogicarum contemplationum in Hexaemeron libri XII, qui n'est conservé qu'en traduction latine (PG LXXXIX , col . 851-1078 ), préserve de longs extraits du De mensibus

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dont le texte est supérieur à celui de l'édition Wünsch, lequel ne connaissait qu'un texte dont l'archétype ne représentait qu'un compendium de l'ouvrage originel, contaminé par des interpolations dues à des scribes ou à des lecteurs anciens ( cf. 22 F. Boertzler, « Zum Texte des Johannes Laurentius Lydus “De mensibus” » , Philologus 77 , 1921 , p. 364-367). Le texte du De ostentis , pour sa part, serait vraisemblablement à améliorer grâce , entre autres, aux acquis du grand projet sur le Corpus codicum astrologorum Graecorum ( cf. Mastandrea 21 , p. 76) . Quoi qu'il en soit , la valeur de Lydus du point de vue de l'histoire de la philosophie consiste surtout dans les citations qu'il fait de textes philosophiques ( cf. Maas 9, p. 97-104 ). Or on y trouve, bien entendu , surtout dans le De mensi bus , de nombreuses citations de Platon, d'Aristote et des Présocratiques (Parmé nide, Philolaus, Thalès, Anaximène, Anaxagore, Anaximandre , Héraclite ). Mais on trouve aussi bon nombre de philosophes platoniciens plus proches de l'époque de Lydus : Numénius (appelé, de façon intéressante , « le Romain » , De mens . IV 80 = Numénius , fr. 57 des Places ) , Plotin , Porphyre, Jamblique , l'empereur Julien (cf. 23 C. Sequi , « Lido e Giuliano l’Apostata », CCC 14 , 1993, p. 171-177 ) , Ammonius , Syrianus, Proclus (appelé « le diadoque » , mais aussi « le grand » (ToŨ < ueyásov Ipóxlov, De mens . IV 154 ) . Assez souvent, Lydus est seul à nous transmettre des fragments de l'ouvrage en question , comme dans le cas des Commentaires sur les Oracles Chaldaïques de Porphyre (De mens . IV 53 ) ou de Jamblique (ibid. , IV 159) . Comme l'a montré in extenso Mastandrea 21 , non seulement le De mensibus de Lydus , mais aussi le De ostentis constituent l'une de nos principales sources pour la reconstitution de l'euvre perdue du mystérieux Cornélius Labéon ( L 2) , dont cet historien fait un élève de Porphyre, et qui est par conséquent à dater au tournant des III - IVe siècles . Labéon serait donc la source à travers laquelle Lydus connaît nombre des obscurs auteurs de tendance philosophico antiquaire qu'il cite dans ses ouvrages , par exemple Fontéius, Nigidius Figulus ( P + N 58 ) , Cornificius Longus ( MC 189) , Granius Flaccus , Verrius Flaccus , Gavius Bassus , etc. , et même peut- être des auteurs mieux connus , comme Porphyre lui-même. On a longtemps soutenu que Lydus était un chrétien , malgré l'absence pres que complète dans ce qui reste de son œuvre d'allusions au Christ, à l'Église , ou à la doctrine chrétienne. Cependant, Kaldellis 12 a récemment mis en avant des arguments convaincants à l'appui de son hypothèse selon laquelle Lydos était en réalité païen . En effet, même si , à l'époque de Lydus , la victoire du christia nisme était devenue inéluctable , il restait, même en plein vie siècle, un certain nombre de païens irréductibles et Lydus était en contact amical avec plusieurs d'entre eux , que ce soit l'école de Proclus, à travers Agapius , ou le préfet Phocas. Les goûts littéraires et philosophiques de Lydus témoignent de préfé rences qui s'inscrivent tout à fait dans la ligne des intellectuels qui luttaient pour la sauvegarde des traditions ancestrales et contre la nouvelle religion chrétienne devenue presque toute -puissante : en philosophie, il accorde sa préférence au néoplatonisme théurgique de Jamblique et de ses successeurs ; pour la culture

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générale , il a recours aux mêmes sources antiquaires que le Macrobe ( M9) des Saturnales . Selon toute vraisemblance , donc , Lydus est à ranger dans le même camp que des figures réfractaires de l'antiquité tardive comme Procope et Zosime ; on est même allé jusqu'à supposer (Maas 9, p . 97-104 ) qu'il a pu être influencé par les doctrines des derniers philosophes néoplatoniciens d'Athènes, Simplicius et Damascius ( D3, p. 541-593 ) , dont on sait la résistance farouche qu'ils ont menée contre l'Église victorieuse. Cependant, que Lydus ait ou n'ait pas été en contact avec ces derniers représentants de l'École d'Athènes, il aura très vraisemblablement partagé leur Weltanschauung, et nous pouvons faire nôtre l'évaluation finale de Kaldellis 12 , p . 314 : « oracles, omens , astrology and Platonic metaphysics ... would seem to be the religion of loannes Lydos » . MICHAEL CHASE .

90 LYNCEUS

FI

Poète, ami de Properce, qui le présente dans ses Élégies II 34 , 23-32 , comme un rival ayant tenté de séduire sa maîtresse. Ce poète sévère ( v . 44 : dure poeta ) semble avoir puisé sa sagesse dans « les livres socratiques » et se proposer de chanter « les voies de l'univers » ( rerum ... vias). On apprend plus loin qu'il était également l'auteur de tragédies ( v. 41: desine et Aeschyleo componere uerba coturno ) . Le nom est vraisemblablement un pseudonyme . 1 J.-P. Boucher , « L'œuvre de L. Varius Rufus d'après Properce II , 34 » , REAnc 60, 1958 , p. 307 322 , a suggéré qu'il pourrait s'agir de L. Varius Rufus, l'ami de Virgile. Cette suggestion n'est pas retenue par 2 L. Richardson Jr. , Propertius, Elegies I - IV , edited, with introduction and commentary, University of Oklahoma Press, 1977,

p. 312 . RICHARD GOULET.

91 LYNCEUS DE SAMOS RE 6

IV - III

Élève de Théophraste, poète comique , auteur d'ouvrages littéraires et épisto lographe. Cf. 1 A. Körte , art. « Lynkeus » 6 , RE XIII 2 , 1927 , col . 2472-2473 ; 2 F. Wehrli , GGP, Antike 3 , p . 557 ; 3 W. Spoerri, art. « Douris de Samos » , D 226 , DPhA, t. II , p . 899-900 (avec une bibliographie ) ; 4 PCG, t. V , 1986, p . 616-617 ; 5 A. Dalby , « The curriculum vitae of Duris of Samos » , CQ 41 , 1991 , p . 539-541 ; 6 Id . , Siren feasts. A history of food and gastronomy in Greece, London /New York 1996 ( cf. l'Index, s. v. “ Lynceus ”, p. 293 ). La Souda ( s. v . AuyxEÚc, A776) nous donne l'essentiel des renseignements qui nous sont parvenus sur Lyncée : Λυγκεύς, Σάμιος, γραμματικός, Θεο φράστου γνώριμος , αδελφός Δούριδος του ιστοριογράφου, του και τυραν νήσαντος Σάμου . Σύγχρονος δε γέγονεν ο Λυγκεύς Μενάνδρου του κωμι XOỏ xal ávteTEDE Eato xwuwå aç xai év xnge ( « Lyncée de Samos, lettré, élève de Théophraste et frère de l'historien Douris ( > D 226 ) qui fut aussi tyran de Samos . Lyncée fut le contemporain du poète comique Ménandre , concourut avec lui avec des comédies et remporta la victoire » ) .

L 91

LYNCEUS DE SAMOS

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Qu'il compte parmi les nombreux auditeurs de Théophraste , Athénée aussi l'affirme ( III , 100 e ; IV , 128 a ; 130 d ) . Euvres. Il n'existe pas de recueil des témoignages et des fragments de Lyncée. Les fragments conservés de ses ouvrages se trouvent chez Athénée ( Dalby 5 , p. 541 , n . 15 ) . 1. Comédies. Athénée ( IV , 131 f - 132 b) a conservé 22 vers d'une comédie intitulée Kévtaupoc (Le Centaure ). Pour l'édition de ce fragment, cf. PCG 4. 2. 'Anouvnuoveúuata ( Souvenirs, Ath. VI , 248 d -e ; X , 434 d ; XIII, 583 f) ou å opéyuata (Apophtegmes ou Bons mots , Ath . VI , 245 a et d ) . Il s'agit d'un recueil de répliques spirituelles mettant en scène des courtisanes, des parasites ou des noceurs ( Athénée a conservé une dizaine de fragments ). 3. Hɛpè Mɛvávopov (Sur Ménandre ). L'ouvrage devait comporter au moins deux livres ( Ath . VI , 242 b-c ) . Il a dû paraître après la mort de Ménandre ( 292/1). La nature du contenu nous échappe. 4. Téxvn opwintixeń [opwvixń Körte 1 doit être une coquille ) ( L'art de faire son marché ). Ce traité était adressé à quelqu'un qui trouvait difficile d'acheter des poissons au marché ( Ath . VI , 228 c ; VII , 313 f). 5. Lettres. Athénée cite un grand nombre d'extraits de lettres de Lyncée. La plupart traitait de gastronomie . Il connaît un recueil de lettres provenant de la correspondance entre Lyncée et le macédonien Hippolochos intitulé AEltvn Tlxaì ÉTlotoa (Lettres sur les banquets, IV , 128a) , où les deux auteurs s'échangeaient les descriptions des banquets auxquels ils participaient (Hippo lochos ( » H 153a] , inconnu par ailleurs, figure aussi parmi les élèves de Théo phraste dans 7 W.W. Fortenbaugh et alii (édit . ) , Theophrastus of Eresus. Sources for his life, writings, thought and influence, coll. « Philosophia antiqua » 54 , 1-2, Leiden 1992, t. I, p. 68-69 ; cette filiation est fondée sur un retour à la leçon des manuscrits : cf. Dalby 5 ) . C'est peut -être à ce recueil qu'appartient la lettre citée par Plutarque, décrivant un repas offert par la flûtiste et courtisane Lamia à son amant Démétrius Poliorcète (Plut. , Demetr. 27 , 3 ) . Des Lettres de Lyncée sont aussi mentionnées dans le Lexique des dix orateurs d'Harpocration d'Alexandrie (s.v. 'Toúpaloi). Parmi les autres lettres citées par Athénée , un certain nombre porte le nom du destinataire : Diagoras ( Tloos Alayópav ( il ne peut s'agir de D 91 ) III , 109 d-e ; VII , 285 e - f, etc.) ; Apollodore (ſoos ’AnoModwpov IX, 401 f -402 a) ; le poète comique Posidippe ( Iloòc TÒV xwuixòv Iloge OLTTOV XIV , 652 c -d) . On voit donc , de ce qui subsiste de son œuvre , que le seul lien de Lyncée avec la philosophie est dans son passage par l'école de Théophraste. Et Körte 1 , col. 2473, concluait à juste titre son article de la RE en ces termes : « Lynkeus ist für uns ein Hauptvertreter des bis zum äussersten Raffinement gesteigerten Genusslebens der frühhellenistischen Zeit » . ( Signalons sur les témoignages et les fragments relatifs à la vie et l'ouvre de Lyncée l'étude récente de M. Ornaghi, « Linceo di Samo in Ateneo e Ateneo in " Suda " : casi di amplificazione della tradizione indiretta » , QuadAug Rostagni 2004, p. 49-79.

R.G. ) JEAN - PIERRE SCHNEIDER .

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LYRAMNOS DU PONT

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92 LYRAMNOS DU PONT Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique, V. pyth . 36, 267 ; p. 146, 16 Deubner. BRUNO CENTRONE .

93 LYSIADÈS DE CATANE Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique, V. pyth . 36 , 267 ; p. 146, 12 Deubner.

BRUNO CENTRONE. 94 LYSIAS RE 13

FV-D IV

Orateur attique et familier de Socrate . On ne prendra pas en considération l'activité de logographe de Lysias ni ses discours perdus ou conservés. Une Vie de Lysias est conservée dans les Vies des dix orateurs du Pseudo - Plutarque. Dans le Contre Ératosthène ( XII ) Lysias raconte l'histoire de sa famille. C'est à la demande de Périclès que Céphale ( B + C 79) , un Syracusain, était venu s'établir en Attique ; il y vécut les 30 dernières années de sa vie. Sa richesse provenait d'une fabrique d'armes attenant à la maison familiale. Si on retranche 30 ans à la date supposée de l'entretien de la République (entre 420 et 415 av. J.-C. ) , cela nous ramène à une période qui se situe entre 450 et 445 av . J.-C. , dates qui constituent le point de référence autour duquel s'ordonnent les autres dates intéressant la vie de Lysias. Céphale était orignaire de Syracuse. Par suite ni lui ni ses fils n'étaient citoyens athéniens ; ils étaient métèques . Ils n'avaient le droit ni de posséder de la terre, ni de servir dans l'armée , ni de voter à l'Assemblée du peuple, ni de prendre la parole au tribunal. Voilà pourquoi Lysias choisit de devenir logographe , c'est - à - dire un "avocat" qui écrit des discours qui seront lus devant le tribunal par l'une des parties. Lysias naquit après l'arrivée de Céphale en Attique , soit après 450 ou 445 av. J.-C. Vers 430, Lysias se rendit avec ses deux frères à Thourioi, une colonie fondée en 446/445 par Athènes ; les plans de la ville avaient été dessinés par Hippodamos de Milet et les lois avaient été rédigées par Protagoras ( Phèdre 267 c) . Lysias devint citoyen de Thourioi et suivit dans cette cité l'enseignement rhétorique de Tisias ( Phèdre 267 a) et de Nicias . Mais par suite de tensions entre Athènes et sa colonie , il dut revenir à Athènes vers 420. Dans le Phèdre , dont l'action dramatique se situe entre 418 et 416 av . J.-C. , Lysias est présenté comme un maître de rhétorique qui compose des discours qu'il donne en exemple à ses étudiants ( Phèdre 227 a , 228 a, b et 272 c ) et comme un " avocat " qui écrit des discours pour les parties lors d'un procès au tribunal (Phèdre 257 c ) . Trente - deux de ces plaidoyers nous sont parvenus. Lorsque les Trente s'emparèrent du pouvoir, Lysias sauva sa vie en offrant de l'argent à celui qui était venu l'arrêter ; mais son frère Polémarque fut condamné à boire la ciguë . Les biens de la famille furent confisqués, dont trois maison , une importante somme d'argent, 120 esclaves , et 700 boucliers. Après les événements drama

L 94

LYSIAS

213

tiques de 404, Lysias trouva refuge à Mégare, où il aurait aidé les démocrates dirigés par Thrasybule à reprendre le pouvoir à Athènes , en recrutant des mercenaires et en fournissant armes et argent. En reconnaissance de ses services, Thrasybule fit voter un décret qui devait accorder le droit de cité à tous les non Athéniens qui avaient aidé les bannis . Mais Archinos intenta un procès en illégalité, et le décret fut rapporté. C'est en 403 que Lysias plaida, probablement sans succès, contre Ératosthène, qui avait fait périr son frère Polémarque, et c'est en 388 probablement, qu'il prononça le Discours Olympique ( XXXIII ) , dans lequel il s'en prenait violemment aux tyrans, dont Denys I de Syracuse . On peut placer sa mort vers 379 av . J.-C. Le dialogue platonicien qui porte son nom s'ouvre sur une scène où Phèdre, qui vient de quitter Lysias , auprès de qui il apprend la rhétorique, consent à répéter à Socrate un discours composé par Lysias, et qu'il a appris par cæur. Et le Phèdre se termine sur quelques mots de Socrate qui demande à Phèdre de rapporter à son maître les propos qui viennent d'être tenus . On a vu plus haut que Lysias est le fils de Céphale et le frère de Polémarque. Et, comme c'est dans la maison de Céphale au Pirée que se déroule l'entretien que rapporte la République, toute la famille s'y trouve réunie autour de Socrate ( Rép. I , 328b) ; sont aussi présents Thrasymaque de Chalcédoine ( voir Phèdre 367c) , Charman tidès de Péanée, Clitophon ( 24C 175 ) , le fils d’Aristonyme, et les deux frères de Platon , Glaucon ( P - G 21 ) et Adimante ( > A 23 ). Céphale est assis sur un siège et porte une couronne, car il s'occupe d'offrir un sacrifice domestique. Il repro che aimablement à Socrate la rareté de ses visites. Ce dernier qui trouve Céphale vieilli ramène la conversation au thème de la vieillesse . Céphale ne trouve pas que la vieillesse soit si dure à supporter. Socrate rétorque alors que c'est la richesse qui pourrait expliquer cette égalité d'humeur. Suivant Céphale, la richesse n'est bonne qu'aux sages , qu'elle délivre de la crainte de l'au - delà , en donnant le sentiment d'avoir acquitté ses dettes à l'égard des dieux et des hommes, ce en quoi consiste la justice . C'est ainsi que se trouve lancée la discussion sur la justice . Céphale qui retourne à son sacrifice laisse son fils Polémarque " héritier du discours” (Rép. I , 331 d) . Lysias joue donc un rôle implicite, mais important, dans la République et dans le Phèdre, qui fait qu'on peut le considérer comme l'un des membres de l'entourage de Socrate. Une Apologie de Socrate est attribuée à Lysias par une scholie sur Apol. 18 b (Avo aç év Ewrpátovç ånooy ạ ) . Voir également Diogène Laërce II 40. Sur cette cuvre perdue, voir L. Rossetti , « Alla ricerca dei logoi sokratikoi perduti, II - III » , RSC 23 , 1975 , p. 87-99 et 361-381 . Cf. W. Plöbst , art. « Lysias » 13 , RE XIII 2 , 1927 , col . 2533-2543 ; Debra Nails , The people of Plato , s.v. Lysias, 190-194 + stemma ; J.K. Davies , Athenian Propertied Families, C 9 ; T.C. Loening, « The autobiographical speeches of Lysias and the biographical tradition » , Hermes 109 , 1981 , p. 280 294 ; U. Schindel, « Untersuchungen zur Biographie des Redners Lysias » , RhM 110, 1967, p. 32-52. LUC BRISSON .

LYSIAS DE TARSE

214

L 95

95 LYSIAS DE TARSE absent dans la RE Philosophe épicurien » , ancien prêtre « porte - couronne » du culte d'Héra clès , qui devint tyran à Tarse . Il est mentionné par Athénée V , 215 b - c parmi oi ånò Qiaogopiac otpatnyol. Après avoir décrit sa tenue vestimentaire, Athénée précise qu'il distribua les biens des riches aux pauvres et fit assassiner beaucoup de ceux qui refusaient de donner leurs biens .

RICHARD GOULET. 96 LYSIBIOS DE TARENTE Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique , V. pyth . 36 , 267 ; p. 144 , 15 Deubner. [Ce nom est recueilli par Fr. Bechtel, Die historischen Personennamen , p. 290. C.M. ) BRUNO CENTRONE .

97 LYSIMAQUE RE 18

III

Élève de Théophraste. Le nom de ce personnage n'est connu que par Athénée ( VI 60 , 252 c ) : 'Αττάλου δε του βασιλέως εγένετο κόλαξ και διδάσκαλος Λυσ μαχος,, δν

Καλλ μαχος μέν Θεοδώρειον αναγράφει, “Έρμιππος δ ' εν τοις Θεοφράστου μαθηταίς καταλέγει . Ούτος δ' ο ανήρ και περί της Αττάλου παιδε ας συγγέγραφε β βλους πάσαν κολακε αν εμφαινούσας ( « Le roi Attale eut comme flatteur et comme maître Lysimaque que Callimaque catalogue comme élève de Théodore, alors qu'Hermippe le range parmi les élèves de Théophraste. Cet homme composa aussi des livres Sur l'éducation d'Attale, où figure toute sorte de flatteries » ) . Callimaque de Cyrène ( P + C 22) avait sans doute fait figurer Lysimaque dans son i va des philosophes ( fr. 438 Pfeiffer). Qu'il l'ait caractérisé comme disci ple de Théodore de Cyrène dit l'Athée ( avant 335 - après 260) – à Athènes à l'époque de Démétrius de Phalère ( D 54) ou à Alexandrie ? - , n'exclut pas que Lysimaque ait aussi fréquenté le Péripatos sous la direction de Théophraste (il figure dans la liste des élèves de Théophraste dans W.W. Fortenbaugh et alii ( édit . ) , Theophrastus of Eresus . Sources for his life , writings, thought and influence, coll . « Philosophia antiqua » 54 , 1-2 , Leiden 1992, t. I , nº 18 , 11 , p . 68 ; les auteurs donnent comme dates pour Théophraste 372/1 ou 37170 288/7 ou 287/6 ) . Comme disciple de Callimaque, Hermippe ( > H 86) connais sait les a vaxes de son maître . Cf. 1 F. Wehrli, Hermippos der Kallimacheer, coll . « Die Schule des Aristoteles » Supplementband I , Basel /Stuttgart 1974, fr. 56, et commentaire , p. 79 (Hermippe n'a pas consacré de biographie à Lysi maque , mais l'a nommé avec d'autres élèves de Théophraste ) . Voir aussi J. Bollansée et alii, Die Fragmente der griechischen Historiker continued, IV : Biography and antiquarian literature, IVA : Biography, fasc. 3 : Hermippos of Smyrna, Leiden 1999 , n ° 1026 , fr. 38 , commentaire p . 350-354 . Pour des raisons chronologiques, Pfeiffer ( commentaire au fr. 438 ) et Wehrli ( 1 , p . 79 ) pensent que l'introduction de Lysimaque dans les at vaxes est posté rieure à la mort de Callimaque ( 240 ).

L 100

LYSIMAQUE

215

Le panégyrique d'Attale n'a pu être composé qu'après l'accession au trône du roi de Pergame, Attale 1er ( 241-197 ) , ce qui s'accorde difficilement avec les témoignages sur ses maîtres ( Wehrli 1 , p . 79 , envisage , sans précision, une confusion ; pour ce qui est du rapport entre Lysimaque et Théodore, on pourrait envisager une confusion avec le roi Lysimaque, dont la relation avec Théodore est bien attestée (SR / SSR. t . I , IV H nº 7 ; 8 ; 9 ; 13 ] ) . Cf. FGrHist II B 170 T 1 et SR / SSR . t . I , IV H nº 27 . JEAN - PIERRE SCHNEIDER .

98 LYSIMAQUE

Ia

Académicien par ailleurs inconnu ( Philod ., Acad. hist., col . XXXIV 14 = A 200) ou de Philon Antioch. T 3 , 7 Mette ) , disciple d'Antiochus d’Ascalon ( de Larisse ( selon l'hypothèse de E. Puglia, ZPE 130 , 2000 , p. 17-28 ) . TIZIANO DORANDI.

99 LYSIMAQUE

III ? IV ?

Un personnage de ce nom faisait partie des nombreux platoniciens qui ont laissé leur signature dans le tombeau de Ramsès VI à Thèbes ( J. Baillet , Tombeaux , n° 1281 ) : Avo uaxoç TatwvLXÒÇ Dióoodos. On a supposé qu'il pouvait être identique à l'homonyme que Porphyre (Vie de Plotin 3 , 42-43 ) désigne comme le premier maître d'Amélius : voir L. Brisson , dans L. Brisson et alii , Porphyre, Vie de Plotin , t . I , Paris 1982 , p . 95. Cependant, le nom est courant et le maître d'Amélius était considéré par Longin (Porphyre, Vie de Plotin 20 , 47 ) comme un stoïcien . Le pélerin de la Vallée des Rois est donc vraisemblablement un homonyme , peut-être sensiblement postérieur, car bon nombre de signatures platoniciennes de ce tombeau pourraient dater du ive siècle ( voir infra , la notice sur Nicagoras, N 29 ) . Cette inscription est également mentionnée par A. Calderini , « Arti liberali in documenti dell'Egitto romano », dans Studiin onore di Ugo Enrico Paoli, Firenze 1956, p. 155 . BERNADETTE PUECH. 100 LYSIMAQUE RESuppl. XV : 16a et 16b

DM III

Philosophe stoïcien . A. Lysimaque avait été le maître d'Amélius ( » A 136 ) avant que ce dernier ne devienne l'élève de Plotin à Rome en la troisième année de Philippe l'Arabe, soit en 246 (Porphyre, Vita Plotini 3 , 42-43). Il est possible que ce soit déjà auprès de ce maître qu'Amélius s'illustra en recopiant et apprenant par cour la quasi totalité des écrits de Numénius ( • N 66 ] ( ibid ., 3 , 43-45 ). B. Dans la préface de son livre Sur la fin , écrit vers 265 ( Vita Plotini 20 , 47 ) , Longin L 63 ] ( frag. 4 Brisson - Patillon ) associe Lysimaque à Herminos ( » H 84 ) comme deux stoïciens contemporains qui se consacrèrent à la forma tion de leurs disciples, sans se soucier d'exposer leurs doctrines par écrit. On identifie généralement le maître d'Amélius et le stoïcien dont parle Longin. Porphyre en tout cas n'essaie pas de les distinguer l'un de l'autre. Un rapprochement a également été envisagé avec le platonicien ( » L 99 ) dont le

216

LYSIMAQUE

L 100

nom apparaît dans un tombeau de la vallée des rois en Égypte (voir L. Brisson, PVP I , p. 96, et la notice précédente ), mais on ne peut le faire qu'en supposant que Lysimaque , comme le philosophe Tryphon ( Vita Plotini 17 , 3 ) , ami d'Amé lius , était « stoïcien et platonicien » . LUC BRISSON et RICHARD GOULET.

101 LYSIMAQUE RESuppl. XV : 16C D'après Thémistius , De virtute, texte syriaque et traduction latine de R. Mach , dans G. Downey et A.F. Norman, Themistii Orationes, coll . BT, t . III , Leipzig 1974, p. 66-69, ce Lysimaque, persécuté par un « tyran » qui ne suppor tait pas ses critiques, fut relégué dans une forteresse (castellum) construite par les Romains aux frontières de l'Empire dans le Pont . Un jour qu'il se promenait en dehors des remparts, il se retrouva entre deux tribus barbares qui étaient sur le point d'engager le combat avec fantassins et cavaliers . Vêtu de l'habit du philosophe (pallium ), avec son bâton à la main , il s'avança courageusement entre les lignes , joyeux et calme. Par des gestes de la main , il apaisa la colère des belligérants qui cessèrent le combat sans avoir versé de sang et se séparèrent après avoir conclu un traité. On trouve un traduction allemande du traité dans J. Gildemeister et F. Bücheler, « Themistios Nepì đperñc » , RhMus 27 , 1882 , p . 438-462 , notam ment p. 460-461. Bücheler ( p. 460 n . 1 ) voit dans ce Lysimaque un philosophe du IIIe siècle de notre ère et envisage une identification avec l'homonyme de la Vie de Plotin par Porphyre ( L 100 ). Mais il rappelle aussi deux vers d'Aristo phane (La Paix, ν. 991-992 : λύσον δε μάχας και κορκορυγάς, |ίνα Λυσι Máxnv de xanõuev, Fais cesser batailles et tumultes, que nous puissions t'appeler Lysimachè ( trad. H. Van Daele] ) qui pourraientt suggérer que le nom a été choisi à cause de son étymologie . Cf. E. Fischer, art. « Lysimachos » 16c, RE XV , 1978 , col . 128-129. RICHARD GOULET. 102 LYSIS Destinataire, sans doute fictif, de la Lettre pseudépigraphe 10 de Cratès de Thèbes ( P + C 205 ) ( SSR V H 97 ) . Édtion avec trad. latine dans 1 R. Hercher, Epistolographi graeci, p . 209 ; éd. avec trad . allemande dans 2 Eike Müseler , Die Kynikerbriefe, t . II , p . 88 ; trad . anglaise par R.F. Hock dans 3 A.J. Malherbe, The Cynic Epistles, p. 60-63 ; trad. française dans 4 G. Rombi et D. Deleule , Les Cyniques grecs. Lettres de Diogène et Cratès, coll . « Les philosophiques » , Paris 1998 , p . 14-16 . Voir aussi 5 F. Junqua , Lettres de Cynique, t. I , p. 113 ; t. II , p. 489, 540-541 et p. 601. Sur les Lettres pseudépigraphes de Cratès , voir 6 J. F. Marcks , Symbola critica ad epistolographos graecos, Diss . Bonn 1883 ; 7 A. Olivieri, « Le epistole del Pseudo-Cratete . Hercher 208-217 » , RFIC 27 , 1899 , p. 406-421; 8 W. Capelle , De Cynicorum epistulis, Diss . Göttingen 1896 , p . 49-62 ; 9 G. Giannantoni, SSR , t . IV , 1990 , Note 54, p. 578-579 .

L 103

LYSIS D'AIXONÉ

217

Cratès a appris que depuis la bataille d'Érétrie Lysis passait son temps à s'enivrer. Il l'invite donc à fréquenter des hommes qui font usage du vin avec retenue et à les imiter. Le personnage est sans doute fictif, mais on peut se demander d'où l'auteur de la lettre a pu tirer son nom. Junqua 5 , t. II , p. 113 , qui essaie d'identifier ce Lysis, suggère trois pistes possibles: ( 1 ) Celui du dialogue de Platon qui porte son nom ( L 103 ) . Mais de quelle bataille d'Érétrie s'agit il ? Il propose la défaite athénienne de 411 ( cf. Thucydide VIII 95 ) , ce qui signifierait un anachronisme évident, mais pas impossible dans le contexte de ces lettres pseudépigraphes. ( 2 ) Un pythagoricien de Tarente ( > * L 104) dont une lettre A Hipparque est conservée dans le corpus des lettres des pythagoriciens (Lettre 3 , p. 601 Hercher = Lettre 2 , p. 154-159 Städele ; Diogène Laërce VIII 42 cite les dernières lignes de cette lettre qu'il dit adressée à Hippase) et dans la Vie de Pythagore de Jamblique , 75-78 . Sur la lettre de Lysis à Hipparque, voir 10 A. Städele, Die Briefe des Pythagoras und der Pythagoreer, coll. « Beiträge zur klassischen Philologie » 115 , Meisenheim am Glan 1980 , p . 203-251 . ( 3 ) Lysis a enfin pu être confondu dans l'écriture onciale avec Lysias [RE 7 ] ( AYCIAI JAYCIAI) , l'un des généraux athéniens qui prit part à la bataille des Arginuses en 406 (Xénophon, Helléniques I 6, 30 ; 1 7 , 2 ) , ce qui ne règle pas davantage le problème de la chronologie. Plaide en faveur d'une telle confusion le fait que les deux premières lignes de la lettre se retrouvent dans un fragment d'une lettre d’Alciphron ( fr. 1 , p. 94 Hercher) dont le destinataire est Avola , mais dont le nom de l'expéditeur a disparu .

MARIE-ODILE GOULET -CAZÉ. 103 LYSIS D'AIXONÉ RE 3 PA 9574

ya

En dehors du Lysis de Platon , nos seules sources pour la connaissance de ce personnage sont un bref passage de Diogène Laërce ( II 29) , qui est en fait une allusion au Lysis, et une pierre tombale du IVe siècle av . J.-C. ( voir R. S. Stroud, « The Gravestone of Socrates' Friend, Lysis » , Hesperia 53 , 1984 , p. 355-360 ) qui porte le nom de “ Lysis ” (IG II 7045, li . 5 : SEG 29 , 203 ; 34 , 109 ) . Lysis qui est du dème d'Aixoné est le fils de Démocrate , peut-être celui qui , aux alentours de 430, fut l'amant d'Alcibiade ( Plutarque, Alcibiade 3 , 1 ) et le petit -fils d'un Lysis (205 c) qui faisait remonter sa famille aux amours de Zeus avec la fille du fondateur de leur dème (pour un stemma hypothétique , voir Debra Nails , The People of Plato , s.v. « Lysis I » et « Lysis II » ). Lors de l'entretien avec Socrate rapporté dans le Lysis, Lysis est un jeune adolescent qui n'a pas encore atteint l'âge auquel un jeune devient son propre maître et où il n'est plus accompagné d'un pédagogue ( Lysis 208 c) ; il doit avoir aux alentours de 16 ans . Avec Ménexène (2M 126 ) , il serait l'un des plus jeunes interlocuteurs de Socrate . Jeune, beau , timide et modeste, Lysis , à différence de Ménexène qui est présenté comme un " éristique ”, paraît pourvu d'excellentes dispositions pour la philo sophie ; ces dispositions rapidement perçues par Socrate (207 a) seront confir mées par la suite dans le cours de la discussion ( 213 d, 222 a) . LUC BRISSON.

218

LYSIS DE TARENTE

104 LYSIS DE TARENTE RE 2

L 104 va

Témoignages : Les témoignages relatifs à Lysis sont réunis (de manière trop sélective , réléguant à de sèches références , en tant que « romanhaft », tout ce qui est tardif) sous le n° 46 DK ( cf. 1 M. Timpanaro Cardini , 1 Pitagorici. Testimo nianze e frammenti, coll . « Biblioteca di studi superiori » 28 , Firenze 1962 , t. II, n ° 20 , p . 258-261 ) . Pour une collection plus complète , suivie des fragments ( apocryphes) attribués à Lysis , voir 2 H. A. Brown , Philosophorum Pytha goreorum collectionis specimen, Diss . Chicago 1941 , p . 76-87 , et surtout 3 H. Thesleff, The Pythagorean Text, p. 110 , 14 - 115 , 8 . Cf. 4 A. Delatte , Études sur la littérature pythagoricienne , Paris 1915 , p. 90 sq .; 5 W. Burkert, « Hellenistische Pseudopythagorica » , Philologus 105 , 1961 , p . 16-43 , en partic . p . 17-28 , à la p . 17 n . 3 ; 6 Id . , Lore and science , p . 115-117 ; 7 K. von Fritz , art. « Pythagoras 1 B : Pythagoreer, Pythagoreismus bis zum Ende des 4. Jahrhunderts v . Chr. » , RE XXIV 1 , 1963 , col . 215 ; 8 A. Städele ( éd . , trad . all . & comm . ) , Die Briefe des Pythagoras und der Pythagoreer, coll . « Beiträge zur klassischen Philologie » 115 , Meisenheim am Glan 1980, p . 212 213 , avec la n . 27 . Lysis figure dans le catalogue de Jamblique ( V. pyth . 36 , 267 , p. 144, 15 Deubner) parmi les pythagoriciens de Tarente.

! Chez Jamblique , V. pyth. 23 , 104 , p . 60, 1-5 Deubner, Lysis est considéré comme l'un des plus anciens pythagoriciens (naraióratoi), à côté de Philolaos, Eurytos, Charondas, Zaleukos , Brysôn , Archytas “ l'ancien ”, Aristaios, Empé docle , Zamolxis , Épiménide , Milon , Leucippos , Alcméon , Hippasos , Thyma ridas ( assemblage hétéroclite s'il en est , qui , a priori , n'inspire aucune confiance quant à l'exactitude du renseignement transmis ). Tout comme ceux - là, Lysis se serait mis dans sa jeunesse ( véoc ) à l'écoute de l'enseignement d'un Pythagore déjà vieux (rpeobúms).

4 Chez Jamblique , V. pyth . 35 , 249-250 , p . 134 , 4-9 Deubner, et Porphyre , V. Pyth . 55 , lequel cite comme source d'information Néanthe ( » N 10) , il est dit qu'Archippos ( * A 321 ) et Lysis , alors les plus jeunes et les plus robustes , échappèrent au grand incendie qui causa la disparition des pythagoriciens de Crotone . Lysis retourna en Grèce à Thèbes ( et auparavant en Achaïe dans le Péloponnèse selon Jamblique ) , où il fut le maître d'Épaminondas ( > · E 26 ) ( qui l'appelait son “ père ", selon Jamblique ) . Sur les problèmes relatifs à la chronologie de Lysis et d'Épaminondas, voir 9 A. Delatte , Essai sur la politique pythagoricienne, Liège /Paris 1922 , p . 208 n . 3 , qui renvoie à 10 E. Zeller , Philos. der Gr. I , 1 , p. 334 n . 2 , selon qui la naissance d'Épaminondas se situerait vers 420-418 , celle de Lysis vers 470-468 , l'incendie de Crotone entre 450 et 440 , et aux conclusions opposées de 11 G. Unger, « Zur Geschichte der Pythagoreier » , SBAW, 1883 , p . 140-192 , notamment p . 166 sqq .: Épaminondas serait né vers 430-427 , Lysis vers 490 et l'incendie aurait eu lieu vers 470. Voir également 12 K. von Fritz , Pythagorean politics in Southern Italy : an analysis of the sources , New York 1940, p. 78-79 ; 13 E. L. Minar ( Jr. ) , Early Pythagorean politics in practice and theory,

L 104

LYSIS DE TARENTE

219

Baltimore 1942, réimpr. New York 1979 , p . 92 ; 14 B.L. van der Waerden . Die Pythagoreer. Religiöse Bruderschaft und Schule der Wissenschaft, Zürich / München 1979, p. 220 et 269. En V. pyth. 30 , 185 , p . 102 , 24 - 103 , 16 Deubner, Lysis est le protagoniste d'une anecdote illustrant le respect des engagements qui caractérisait les pytha goriciens. Selon Schol. in Plat. Phaed . 61 E ( = 44 1 a DK ) , Lysis aurait été le maître de Philolaos . Porphyre ( V. Pyth . 57-58 ) ajoute que Lysis et Archippos et d'autres survi vants sauvegardèrent de rares " étincelles ", obscures et de compréhension diffi cile , de la philosopie pythagoricienne ; ceux - ci vivaient de façon dispersée et solitaire, mais , pour éviter que le nom de la philosophie ne disparaisse totale ment , ils composèrent certains mémoires sommaires (únouvňuata nepa halbàn ) dans lesquels ils recueillirent les écrits des anciens et leurs propres souvenirs ; ils les confièrent ensuite à leurs enfants ou à leurs femmes, en leur demandant de ne les communiquer à quiconque n'appartenant pas à leur maison . Chez Plutarque, De genio Socratis 583 a, Théanor raconte que les survivants de la catastrophe furent Philolaos et Lysis ; pendant longtemps nul ne sut où était

1

passé Lysis , jusqu'à ce que Gorgias ( > G 28 ) rapporte à Arcésos ( > A 303 ) qu'il avait rencontré Lysis à Thèbes ; Arcésos décida de faire revenir Lysis en Italie , s'il était encore vivant , ou de ramener ses restes s'il était mort, mais il ne réussit pas à mener son projet à terme ; le démon de Lysis annonça par la suite aux pythagoriciens d'Italie que Lysis était mort et d'autres personnes bien informées racontèrent que Lysis avait fini ses jours après avoir passé sa vieillesse dans une famille pauvre, où il avait fait l'objet de soins attentifs et avait été considéré comme le “ père” des fils de Polymnis; Lysis avait été également dignement honoré par eux après sa mort. Si le récit de Plutarque est digne de foi d'un point de vue chronologique , Lysis serait mort à Thèbes peu avant 379/8 av . J.-C. , année où se situe l'événement raconté par Caphisias dans le De genio Socratis ; il faudrait alors lui supposer une extraordinaire longévité , qui n'est pas du tout impossible selon 15 E. des Places ( édit . ) , Porphyre , Vie de Pythagore, CUF, Paris 1982 , p. 63 n . 1. Voir également la note de 16 A. Corlu (édit . ) , Plutarque. Le démon de Socrate, coll . « Études et commentaires » 73 , Paris 1970 , p . 189 190 n . 62 . Selon Diogène Laërce VIII 7 , la paternité d'un ( des ) ouvrage( s ) (apocryphes) attribués à Pythagore revient en réalité à Lysis . Une lettre du pseudo- Lysis à Hipparchos ( 2 - H 140 ) est conservée en deux versions différentes : ( a) Jamblique , V. pyth. 17 , 75-78 , p . 42 , 23 - 45 , 16 Deubner; ( b) R. Hercher, Epistolographi graeci, Paris 1873 , p. 601-603: édition avec traduction allemande en regard et commentaire dans Städele 8, p . 154-159 ; 203-251. La lettre est reproduite également par Brown 2 , p . 58-61 , avec un apparat indiquant les parallèles et la bibliographie secondaire à ne pas ignorer (curieusement, dans ce recueil la lettre figure sous le nom d'Hipparchos, avec un renvoi interne au nom de Lysis , p. 83 , nº 20 ) . Sur cette lettre , voir également

220

LYSIS DE TARENTE

L 104

17 A. Delatte , « La lettre de Lysis à Hipparque» , RPh 35 , 1911 , p. 255-275 [ = dans Delatte 4 , p. 83-106) , avec les remarques critiques de 18 W. Theiler, Gnomon 2 , 1926, p. 149 ; étude encore utile pour les éléments de commentaire qu'elle comporte, mais complètement dépassée dans ses conclusions générales après l'examen minutieux et les remarques critiques de Burkert 5. Burkert a fait une démonstration remarquable de l'habileté avec laquelle Jamblique avait décomposé la lettre telle qu'elle était transmise par la tradition pour présenter les thèmes abordés dans un ordre tout à fait différent, tandis que Städele, avec des arguments convaincants , situerait le remaniement à une époque antérieure à Jamblique , en proposant comme suspect principal Nicomaque (** N 50 ) . Voir encore, dans une perspective similaire , 19 L. Zhmud , Wissenschaft, Philosophie und Religion im frühen Pythagoreismus, Berlin 1997 , p . 102-104 . Dans la version abrégée conservée par Diogène Laërce VIII 42 , le destinataire est Hippasos ( H 144 ). Dans cette lettre , il est reproché à Hipparque d'avoir divul gué les doctrines pythagoriciennes à des non-initiés après avoir expérimenté les raffinements de la vie sicilienne ; il est invité à changer d'attitude, sous peine d'être considéré comme mort. Cf.Clément, Strom . V 57 , 3 , p. 364, 27-29 Stählin (et les remarques de 20 M. Tardieu, « La lettre à Hipparque et les réminiscences pythagoriciennes de Clément d'Alexandrie » , VChr 28 , 1974, p. 241-247, et de 21 A. Le Boulluec , dans son édition de Stromates V, coll . SC 278-279, t . II , Paris 1981 , p. 210-211 ) ; Synésius , Epist. 143 ; la lettre est datée du III ° s . av. J.-C. par Burkert 5, du fer-11 ° s . de notre ère par Städele 8. BRUNO CENTRONE et CONSTANTINOS MACRIS .

M

1 MAC

MIIa

Vestiges d'un nom propre dans une liste de disciples de Carneade ( 2C 42 . Philod ., Acad . hist., col. XXIII 17 ) . TIZIANO DORANDI. 2 MACARIUS DE MAGNÉSIE RE 3

FIV

Sous le titre obscur 'Αποκριτικός ή Μονογενής ont été conservés de cet auteur les cinq journées d'un débat oratoire public entre un adversaire païen jamais nommé, mais qualifié une fois de « philologue » ( 240, 4 ) , et l'auteur, assisté par un certain Théosthène, également dédicataire de l'ouvrage. Le récit de chaque journée de débat regroupe deux ou trois séries d'objections, soulevées à la suite par le païen à propos de passages des Évangiles , des Actes ou des Épîtres de saint Paul , contre le comportement des héros du christianisme ( le Christ, Pierre, Paul) ou contre des points de la doctrine chrétienne ( incarnation, résurrection des corps, eschatologie) , auxquelles correspondent autant d'inter ventions de la part du chrétien. Éditions. Editio princeps: 1 Ch. Blondel (et P. Foucart] (édit . ) , MAKAPIOY ΜΑΓΝΗΤΟΣ , Αποκριτικός ή Μονογενής . Macarii Magnetis quae supersunt ex inedito codice edidit C. Blondel, Paris 1876 , VIII- 232 p . Nouvelle édition , comprenant des fragments absents de l'édition Blondel : 2 Macarios de Magnésie, Le Monogénès. Introduction générale, édition critique, traduction française et commentaire par Richard Goulet , coll . « Textes et traditions » 7 , Paris 2003, 2 vol . de 390 p. et 454 p. TOME I : Introduction. I : Présentation de l'æuvre . II : Histoire de la recherche sur Macarios. III : Le titre . IV : L'auteur était-il évêque de Magnésie en 403 ? V : Localisation géographique. VI : Datation de l'ouvrage. VII : La source païenne des objections. VIII : Ana lyse littéraire de la source païenne. IX : Le plan des objections. X : Le texte biblique des objections. XI : La datation des objections. XII : L'attitude de l'adversaire. XIII : Identification de la source païenne. XIV : L'apologétique de Macarios . XV : La rhétorique de Macarios. XVI : La théologie de Macarios. XVII : La transmission du texte. Bibliographie. Annexe 1 : Typologie sommaire des xepárala du Monogénès. Annexe 2 : Rapprochements avec Celse, Porphyre, Julien et l'Adversaire païen de Grégoire de Nysse. Annexe 3 : Comparaison du texte des citations scripturaires communes. Annexe 4 : Comparaison entre le vocabulaire de l'adversaire du Monogénès et celui de Porphyre. Lexique des mots grecs. Lexique des extraits en latin . TOME II : Monogénès : texte grec et traduction française. Homélies sur la Genèse. Dubia . Appendice exégétique. Index locorum . Table de correspondance entre les Objections et les Réponses. Traduction française. Goulet 2, t. II , p. 2-376. Traductions ( partielles ). Allemandes : 3 J. A. Wagenmann, « Porphyrius und die Fragmente eines Ungenannten in der athenischen Makariushandschrift » , JDT 23 , 1878 , p. 269-314 ; 4 A. von Harnack, Kritik des Neuen Testaments von

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einem griechischen Philosophen des 3. Jahrhunderts. Die im “ Apocriticus ” des Macarius Magnes enthaltene Streitschrift, coll . « Texte und Untersuchungen >> 37 , 4 , Leipzig 1911 , 150 p . Anglaise : 5 T.W. Crafer, The “ Apocriticus ” of Macarius Magnes, coll . « Translations of Christian Literature » , Series 1, Greek Texts , London 1919 , 169 p . Italienne : 6 F. Corsaro , Le Questiones nell ' “ Apocritico " di Macario di Magnesia. Testo con trad . e introd. crit. di F. Corsaro, paru dans les Miscellanea di Studi di letteratura cristiana antica du Centro di Studi sull'antico cristianesimo de l'Université de Catane 17 , 1967, 111 p . Lexique. Goulet 2 , t. I , p. 305-380 ( sur trois colonnes) . Bibliographie. Goulet 2 , t.I , p . 251-259 . Cf. 7 G. Bardy, art. « Macaire Magnès » , DTC 9 , 1927 , col . 1456-1459 ; 8 Id ., « Les Objections d'un philosophe païen d'après l’Apocriticus de Macaire de Magnésie » , BALAC 3 , 1913 , p . 95-111 ; 9 P. F. Beatrice , « Traces du texte occidental chez le païen de Macaire Magnès » , dans D.C. Parker et C.B. Amphoux ( édit . ) , Codex Bezae. Studies from the Lunel Colloquium 1994, coll . « New Testament Tools and Studies » 22 , Leiden 1996 , p . 317-326 ; 10 F. Corsaro, « L'Apocritico di Macario di Magnesia e le Sacre Scritture » , ND 7 , 1957 , p . 1-24 ; 11 Id ., « Una nuova interpretazione del titolo dell ' Apologia di Macario di Magnesia » , dans les Mélanges N. I. Herescu, Acta Philologia III , Roma 1964 , p . 115-118 ; 12 Id ., « Chi era l'ignoto obiettore di Macario di Magnesia ? » , dans Philologica christiana. Silloge di studi sull'antico cristianesimo, Catania 1973 , p . 75-101 ; 13 Id ., « La reazione pagana nel IV secolo e l'Apocritico di Macario di Magnesia » , QC 6 , 1984 , p . 173-195 ; 14 T. W. Crafer, « Macarius Magnesius , a neglected Apologist » , JTHS 8 , 1906 1907 , p. 401-423 et 546-571 ; 15 H. Doerries, art. « Makarios Magnes » , RE XIV , 1928 , col . 627-628 ; 16 L. Duchesne , De Macario Magnete et scriptis eius, Paris 1877 , 45 p. ; 17 M. Featherstone , « Opening scenes of the Second Icono clasm : Nicephorus's Critique of the citations from Macarius Magnes » , REByz 60 , 2002 , p . 65-112 ( édition critique et traduction anglaise de l’Epikrisis de Nicéphore de Constantinople ) ; 18 P. Frassinetti , « Sull'autore delle Questioni pagane conservate nell ' Apocritico di Macario di Magnesia » , ND 3 , 1949 , p. 41

56 ; 19 H. Hauschildt , De Porphyrio philosopho Macarii Magnetis apologetae Christiani Apokritikon auctore ( Diss . Heidelberg ) , Bonn 1907 , 67 p .; 20 C. J. Larrain , « Macarius Magnes , ANOKPITIKOE IPOE EAAHNAE . Ein bislang unbeachtetes Exzerpt » , Traditio 57 , 2002 , p . 85-127 ( une doxographie dans un manuscrit de Florence qui n'a en réalité rien à voir avec Macarios ); 21 G. Mercati , « Per l'Apocritico di Macario Magnete . Una tavola dei capi dei libri I , II e III » , dans Nuove note di letteratura biblica e cristiana antica, coll . « Studi e Testi » 95 , Roma 1941 , p . 49-71 ( important pour la reconstitution des objections perdues des deux premiers livres) ; 22 W. Moeller, c.r. de Blondel et Duchesne , TLZ 19 , 1877 , p . 521-526 ; 23 J. Palm , « Textkritische zum Apokritikos des Makarios Magnes » , dans Scripta Minora , coll . « Regiae Socie tatis humaniorum Litterarum Ludensis . Humanistiska Vetenskapssamfundet » I , fasc. 4 , Lund 1959-1960 , 50 p . ( fondamental pour l'établissement du texte ) ;

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24 G. Salmon , art. « Macarius Magnes » , DCB III , 1882 , col . 766-771 ; 25 G. Schalkhausser, Zu den Schriften des Makarios von Magnesia , coll . « Texte und Untersuchungen » 31 , 3 , Leipzig 1907, 218 p. ( l'étude la plus importante pour l'histoire du texte de Macarios, y compris pour ses homélies perdues sur la Genèse ); 26 R. Waelkens, L'Économie, thème apologétique et principe hermé neutique dans l ' " Apocriticos " de Macarios Magnès, coll . « Recueil de travaux d'histoire et de philologie de l'Université de Louvain » , vie série, fascicule 4 , Louvain , 1974 , 322 p . ; 27 Th. Zahn , « Zu Makarius von Magnesia » , ZKG 2 , 1878 , p. 450-459 . Histoire du texte . On ne connaissait de l'ouvrage que des extraits , grâce à des citations du patriarche Nicéphore de Constantinople dans un traité dirigé contre les Iconoclastes au IXe siècle (récemment réédité par Featherstone 17 ) ou à celles de Francesco Torres ( Turrianus) au XVI °, jusqu'à ce qu'un manuscrit soit découvert en 1867. Édité en 1876 par Charles Blondel, il a disparu mysté rieusement peu après. Ce manuscrit était incomplet : il commençait au milieu d'un chapitre du livre II ( II 7 de l'édition Blondel ) et s'achevait vers la fin du livre IV . D'autres manuscrits ont été vus par Janos Lascaris en 1491-1492 à Corigliano ( Terra d'Otranto ) et à l'abbaye de Monte Sardo . Les restes d'une table des matières des trois premiers livres dans le Vaticanus graecus 1650 , publiés par Mercati 21 en 1941 nous fournissent les thèmes des objections de la partie perdue des deux premiers livres. Sur l'histoire du texte , voir l'étude fondamentale de Schalkhausser 25, ainsi que Goulet 2, t. I , p. 232-250. L'auteur. On ne sait rien de l'auteur à part les informations que l'on peut déduire de la lecture de son ouvrage . On a hésité sur son nom ( Macarios de Magnésie ou " le bienheureux Magnès " ), on l'a situé au début du IVe siècle ou bien un siècle plus tard au début du ve, on l'a localisé en Mésopotamie, en Syrie ou en Asie mineure. Un examen de l'ensemble des passages pertinents invite toutefois à rattacher l'auteur à l'Asie mineure et à dater l'ouvrage vers 375 . L'adversaire fait référence à plus de 300 années écoulées depuis le Christ et à 300 ans depuis saint Paul, ce qui implique à tout le moins une datation posté rieure à 350. La théologie de Macarios oriente elle aussi vers une telle datation : sa conception trinitaire ( une ousia , trois hypostases), proche de la formule du Concile de Constantinople en 381 , de même que sa christologie du type Verbe Chair ( fréquente à l'époque d'Athanase , mais condamnée sous sa forme apolli nariste au même Concile ) peuvent s'expliquer au mieux dans les années 370 375. Il en va de même d'une allusion au développement de la vie monastique dans la région d'Antioche. Ces conclusions conduisent à identifier l'auteur avec un évêque du nom de Macarios de Magnésie qui fut l'adversaire de Jean Chrysostome au Synode du Chêne en 403. Analyse littéraire de la source païenne. Tout porte à penser que le débat oratoire relaté par Macarios est fictif et on a depuis longtemps vu dans les objections de l'adversaire les fragments d'un ouvrage anti -chrétien. A ce titre les objections ont fait l'objet d'éditions et de traductions séparées et elles ont donné lieu à de nombreuses tentatives d'identification. Une analyse littéraire systéma tique du texte de ces objections dans le cadre du débat oratoire permet toutefois

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MACARIUS DE MAGNÉSIE

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d'établir qu'elles ne sont en aucune façon des extraits textuels d'un ouvrage païen , mais qu'elles ont été rédigées par Macarios lui-même. On isole en effet des formules caractéristiques communes aux objections et aux réponses (Goulet 2 , t . I , p . 80-82 ) , des thèmes littéraires et un vocabulaire commun ( ibid. , p. 83 85 ) , qui interdisent de voir dans ces objections des fragments de quelque texte que ce soit . Et ce rôle de Macarios ne se limite pas à la mise en forme stylisti que , puisque dans un cas au moins , à propos de la notion de Toute -Puissance divine ( ibid ., p . 88-89) , c'est le fond même de l'argumentation qui porte la trace d'une intervention du chrétien . Ce style caractéristique de Macarios se retrouve également dans bon nombre des élaborations rhétoriques qui interviennent dans le discours de l'adversaire . La source païenne des objections. Et pourtant une étude du rapport dialecti que entre les objections et les réponses montre que Macarios n'a pas inventé de toutes pièces ces attaques. Si Macarios avait inventé les objections, on constate rait logiquement une parfaite correspondance entre ces objections et les réponses , les premières étant formulées de façon à recevoir la réponse la plus adéquate . Objections et réponses devraient s'inscrire à tout le moins dans la même perspective. Or, Macarios passe systématiquement à côté des objections, il néglige la pointe philosophique d'arguments attestés par ailleurs dans la litté rature antichrétienne, il laisse sans réponse certains éléments de l'objection, tandis qu'il se livre à des développements que n'appelaient pas les objections de l'adversaire ( ibid ., p . 71-73 ) . L'adaptation de ce matériel païen originel dans le cadre de la relation d'un débat oratoire récent rend l'identification de la source païenne des objections fort délicate. De nombreux rapprochements se laissent établir avec la critique de Celse ( H + C 70 ) , du gouverneur Hiéroclès ( P H 125 ) , de l'empereur Julien ( ~+ 46 ) ou de l'adversaire anonyme de Grégoire de Nysse dans son Discours catéchétique. Mais c'est avec les vestiges du traité de Porphyre de Tyr Contre les Chrétiens que les objections présentent les parallèles les plus étroits. Voir les tableaux synoptiques fournis par Goulet 2 , t . I , Annexe 2 , p . 261-291 . On ne peut donc pas reprocher à 28 A. von Harnack , Porphyrius, Gegen die Christen 15 Bücher. Zeugnisse, Fragmente und Referate, dans APAW , Jahrgang 1916, Nr 1 , Berlin 1916 , 116 p . , d'avoir inclus , non sans des réserves trop souvent oubliées par les utilisateurs de son recueil, les objections de Macarios dans sa reconstitution du Contra Christianos.

1

RICHARD GOULET. 1 3 MACEDO RE 2

II

Philosophe , homme de bien et ami d'Aulu -Gelle ( A 509 ) : vir bonus, familiaris meus (Nuits Attiques XIII 8 , 4-5 ) . Il voulait que fût écrit au -dessus des portes de tous les temples un vers de Pacuvius : Ego odi homines ignava opera et philosopha sententia , « Je hais quant à moi les hommes sans force pour agir, philosophes en idée » ( fr. 348 Ribbeck ? = 8 D'Anna ) . Jouan - Van Looy tradui sent : « Je hais les hommes qui s'adonnent à une activité paresseuse et aux discours philosophiques . » « Il disait que rien ne pouvait se faire de plus indigne

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MACÉDONIUS DE CYR

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et de plus intolérable que des hommes incapables et lâches, couverts d'une barbe et d'un manteau grec, tournant la morale et les acquis de la philosophie en recettes de langue et de mots , et dénonçant les vices avec la plus grande éloquence alors qu'ils regorgent eux mêmes de vices encastrés sous leur peau » ( trad. Marache ). Pour le vers de Pacuvius, voir R. Kannicht, (édit . ), Tragicorum Graecorum Fragmenta , t . V , 1 : Euripides, Göttingen 2004, p . 278 (vii b 5 ), et Fr. Jouan et H. Van Looy, Euripide, t. VIII : Fragments, 1 re partie : Aigeus- Autolykos, CUF, Paris 1998 , p. 275 ( * 8 ) . Le vers , tiré de l'Antiope de Pacuvius, semble inspiré d'un vers de l'Alexandros d’Euripide (fr. 61 Kannicht = Alex. 15 Jouan -Van Looy ): ULOW Oopov l óvt ' Év NóYoLoiv, ÉG 8' övnouv oŮ Oopóv, « Je déteste celui qui possède l'art de la parole sans l'art de se rendre utile » ( trad. Jouan - Van Looy ). Sur l'attitude d'Euripide à l'égard de l'éloquence pervertie, voir F. Jouan , « Euripide et la rhétorique » , LEC 52 , 1984, p. 3-13 , notamment p. 7-9. G. Garbarino, Roma e la filosofia greca, t. I , p. 175 , n° 432 , et t. II, p. 601, rattache le vers à une pièce , inspirée de l'Antiope d'Euripide, où s'opposaient les frères Zéthos et Amphion dont les modes de vie étaient fort différents. RICHARD GOULET. 4 MACEDO (C. CALPURNIUS COLLEGA-) PLRE 1 : 2

IV

Le rhéteur et philosophe Collega Macedo, mort à trente ans, appartenait à une famille aisée et cultivée d'Antioche de Pisidie . Son épitaphe (SEG 37 , 1302 ; B. Puech , Orateurs et sophistes grecs dans les inscriptions d'époque impériale, Paris 2002, n ° 69, p . 178-180 ) indique qu'il était aussi premier médecin de sa cité et précise qu'il professait la doctrine « de Socrate et de Platon » . C.P. Jones, « A Family of Pisidian Antioch » , Phoenix 36 , 1982 , p . 264-271, a établi que l'évocation de la mort du philosophe qui , « en vertu de la divine providence et avec l’escorte des saints anges, a quitté le monde des hommes pour le ciel ... et s'est dépouillé de son habit de glaise » , s'inscrit parfaitement dans une perspec tive néoplatonicienne et n'implique aucune référence au christianisme. Voir sur ce problème F.R. Trombley, Hellenic religion and christianization c . 370-29, coll . « Religions in the Graeco -Roman world » 115 , 1 , Second edition , Leiden 1995, t. I, p. 172-174. BERNADETTE PUECH . 5 MACEDONIUS PLREI: 1

IV

Destinataire de lettres de Jamblique qui traitent, l'une des êtres issus de l'Un ( Stobée , Anthol . , I 5 , 17 , t . I , p. 80-81 Wachsmuth ) , l'autre du destin ( II 8 , 43 , t. II, p. 173 Wachsmuth ), l'autre de la concorde (duovola ) ( II 33 , 15 , t. II , p. 257 Wachsmuth ). Sans doute un de ses disciples. PIERRE MARAVAL. 6 MACÉDONIUS DE CYR RE 5 PLREI: 4

IV

Macédonius, fils de Pélagius de Cyr, consulaire de Syrie , fut en 365 l'élève de Libanius ( Ep. 1071 , 1073 , 1074 Förster) , qui en 388 l'appelle philosophe . Curiale de sa cité , il fit partie des ambassadeurs de celle -ci en 388 ( Ep. 791-793 ) et encore en 393 ( Ep. 1071 , 1074) . PIERRE MARAVAL .

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MAC ( H )ARIUS

7 MAC (H )ARIUS PLRE II : 1 PCBE II 2 s.v. Macharius 2

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Chrétien de Rome , sans doute de rang sénatorial ( vir fide, eruditione , nobilitate iuxta clarus ), connu comme le commenditaire de plusieurs traductions latines de textes d'Origène effectuées par Rufin d'Aquilée. Cf. 1 G. Bardy, Recherches sur l'histoire du texte et des versions latines du “De Principiis ” d'Origène. Thèse complémentaire de l'Université de Paris, Lille 1923 , XII-218 p. , p. 90-92 ; 2 PCBE, p. 1346-1347 (où sont examinées les différentes identifications possibles avec des homonymes de l'époque). Voir également dans le même ouvrage la notice « Tyrannius Rufinus 3 » , p . 1925 1940. Selon l'Apologie de Rufin I 11 ( éd. 3 M. Simonetti, coll . CC 20 , 1961 , p . 44 45 ) , alors que Macarius avait en mains des opuscules contre le destin ou l'astrologie ( cum opuscula adversum fatum vel mathesin habeat in manibus) , sans doute parce qu'il entendait les réfuter, il se sentait incapable de maîtriser certains aspects de la question . Au cours d'un songe , il vit un navire qui en abordant au port apportait la solution à tous ses problèmes. A son réveil, il comprit que ce rêve prémonitoire correspondait au retour à Rome de Rufin en 397, après un séjour de près de 25 ans en Orient. C'est donc à son intention et à sa demande pressante que Rufin traduisit le premier livre de l'Apologie pour Origène de Pamphile de Césarée et qu'il composa un opuscule ( libellus) Sur la falsification des livres d'Origène. Voir l'édition récente de 4 René Amacker et Éric Junod (édit. ), Pampile et Eusébe de Césarée, Apologie pour Origène ( CPL 197 ), suivi de Rufin d'Aquilée , Sur la falsification des livres d'Origène ( CPL 198a) . Texte critique, traduction et notes, t. I, coll . SC 464, Paris 2002, notam ment p . 22 , 1-3 et 282 , 4. Rufin traduisit également le Tepl åpxõv d'Origène (398 ) . Dans les préfaces aux livres I et III de ce traité, il évoque son commen ditaire sous la désignation de « saint frère Macarius » . Macarius est également mentionné par Gennade , De viris illustribus 28 , comme un moine (monachus) qui écrivit à Rome un ouvrage contre les astro logues pour lequel il rechercha le concours de textes grecs ( « Macarius alter monachus scripsit in urbe Roma adversum mathematicos in quo labore orien talium quaesivit solatia scripturarum » ). Bardy 1 , p. 91 , doute cependant que ce Macarius ait été moine. « En composant un ouvrage sur le Fatum , (Macaire) suivait une des plus anciennes traditions de l'apologétique chrétienne : on attribue à Minucius Felix (-* M 172) un écrit De fato ; et à la fin du IVe siècle Nicetas de Remesiana écrivait Adversus genethlialogiam ; l'Ambrosiaster consacrait une des Questions sur l'Ancien et le Nouveau Testaments à réfuter les astrologues, tandis qu'en Orient Diodore de Tarse rédigeait un très important ouvrage nepi kiuapuévnc et que presque tous les auteurs chrétiens trouvaient l'occasion de s'occuper de tels problèmes. » (Bardy 1 , p. 91 ) RICHARD GOULET. 8 MACRINE RE9

IV

Macrine, issue d'une famille aisée et cultivée (son père était rhéteur à Néo césarée du Pont ) , est la seur aînée des évêques Basile de Césarée (ca 330-378 ) et Grégoire de Nysse ( ca 340 - ap . 390 ) . La biographie que celui -ci lui a

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MACROBIUS ( AMBROSIUS THEODOSIUS -)

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consacrée présente son choix et son mode de vie comme ceux d'une philosophe , se situant en cela dans la tradition qui voit dans le christianisme la véritable philosophie. En fait, ce choix est celui d'une vie de type monastique , mais ses valeurs sont présentées par Grégoire dans un vocabulaire qui emprunte large ment à la tradition philosophique ( stoïcienne et platonicienne ) . D'autre part, dans un ouvrage censé rapporter les derniers entretiens de Grégoire avec sa sæur, le Dialogue sur l'âme et la résurrection , l'auteur lui fait jouer le rôle de maîtresse spirituelle, qui instruit son frère sur les réalités incorporelles - d'où le titre de Phédon chrétien souvent donné à cet ouvrage. Cf. P. Maraval ( édit. ), Grégoire de Nysse, Vie de sainte Macrine, coll . SC , Paris 1971 , p. 90-103. PIERRE MARAVAL. 9 MACROBIUS (AMBROSIUS THEODOSIUS –) RE 7 PLRE II : 1 ?

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Haut fonctionnaire romain (d'origine provinciale ) et érudit latin, dont l'æuvre est conçue comme une sorte d'encyclopédie pratique: les monumentales Satur nalia , dont quelques parties sont perdues, sont un dialogue sous la forme d'un banquet; les Commentarii in Somnium Scipionis, un commentaire d'orientation néoplatonicienne sur le Songe de Scipion de Cicéron ; et le De uerborum Graeci et Latini differentiis uel societatibus, un traité grammatical dont on ne conserve que des fragments. Grâce notamment au Commentaire, Macrobe est considéré comme l'un des plus grands auteurs de l'Antiquité tardive : ardent admirateur de Virgile, il est lié à la dernière renaissance des lettres païennes à Rome. Éditions. 1 J. Willis (édit . ) , Ambrosii Theodosii Macrobii Saturnalia , apparatu critico instruxit, In Somnium Scipionis commentarios selecta varietate lectionis ornavit I. W. , editio correctior editionis secunda ( MCXLXX ) cum addendis et corrigendis, coll . BT, Stuttgart 1994 , 468 p. ( t . I ) ; 2 Id. (édit . ) , Ambrosii Theodosii Macrobii Commentarii in Somnium Scipionis, edidit I. W. , editio stereotypa editionis secundae (MCXLXX ) , coll . BT, Stuttgart 1994 , 253 p. ( t. II ) ; 3 M. Armisen -Marchetti (édit . ) , Macrobe, Commentaire au Songe de Scipion, texte établi , trad . et comm . , 2 vol . parus, CUF, Paris 2001, CV - 200 p. doubles ( t. I : Livre I ) ; 2003, XXIV-320 p. doubles ( t . II : Livre II ) ; 4 P. de Paolis

(édit . ) , Macrobii Theodosii De uerborum Graeci et Latini differentiis uel societatibus excerpta, a cura di P. de P. , coll . « Testi grammaticali latini » 1 , Urbino 1990 , LXV- 198 p. Tradition manuscrite et gloses. 5 A. La Penna , « Studi sulla tradizione dei Saturnali di Macrobio » , ASNP 2e s . , 22 , 1953 , p . 225-250 ; 6 B.C. Barker Benfield , The manuscripts of Macrobius' Commentary on the Somnium Scipio nis, Diss . University of Oxford 1975 ( 1976) , 2 vol . , IV -464 p. ; 7 P. de Paolis , « Alcuni problemi di tradizione manoscritta dei Commentarii in Somnium Scipionis di Macrobio » , Sileno 8 , 1982 , p . 83-101 ; 8 A. White (édit . ) , Glosses composed before the twelfth century in manuscripts of Macrobius ' commentary on Cicero's Somnium Scipionis, Diss. University of Oxford 1982 , 2 vol . , XXIII 403 p . ; 9 B. Eastwood , « Manuscripts of Macrobius, Commentarii in Somnium Scipionis, before 1500 » , Manuscripta 38 , 1994 , p. 138-155 ; 10 M. J. Carton ,

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Three unstudied manuscripts of Macrobius’ Saturnalia , Ann Arbor, Mich. (micr .) 1996 , V - 208 p . ; 11 A. Arweiler, « Zu Text und Überlieferung einer gekürzten Fassung von Macrobius Saturnalia I , 12 , 2 - I , 15 , 20 » , ZPE 131 , 2000 , p . 45-57 ; 12 I. Caiazzo (édit. ) , Lectures médiévales de Macrobe : les « Glosae colonienses super Macrobium », étude et édition par I.C. , coll. « Études de philosophie médiévale » 83 , Paris 2002, 352 p . ( cf. 13 Ead ., « Le glose a Macrobio del codice Vaticano Lat. 3874 : un testimone delle formae natiuae nel secolo XII» , AHMA 64 , 1997 , p. 213-324) ; Armisen -Marchetti 3 , t. I, p. LXXII LXXXVII. Traductions. 14 A. Megas (édit. ) , Maximus Planudes, Macrobii Commen tariorum in « Somnium Scipionis » libri duo in linguam Graecam translati, accedit iuxtappositus eiusdem Macrobii textus latinus , primus edidit A.M. , Thessalonicae 1995 , LX -204 p. (le texte latin est celui de la deuxième édition de Willis 2) ; 15 C. de Rosoy , Euvres de Macrobe, trad. par C. de R. , 2 vol . , Paris 1827 ( « Traité sur la difference et la concordance des verbes grecs et latins » trad. par A. Mottet : t . II , p . 359-439) ; 16 A.J. Mahul, Macrobe, Euvres complètes..., « Collection des auteurs latins » , avec la trad . en franç. publiée sous la direction de D. Nisard , Paris 1845 , p. 1-471 (notice sur Macrobe, p. 1-8 ; cf. 17 Macrobe, Commentaire du songe de Scipion, tiré de la “ République " de Cicéron, trad . par D. Nisard ( sic ), « Collection Sebastiani » , Milano 1979, 232 p. ) ; 18 H. Descamps, N.-A. Dubois, L. d'Anguen & A. Ubicini Martelli, Euvres de Macrobe, 3 vol . , trad. nouv . , Paris 1845-1847 ; 19 H. Bornecque & F. Richard, Macrobe, Les Saturnales, t. I : Livres I - III, trad. nouv . avec introd . et notes par H.B .; t. II : Livres IV - VII, trad. nouv . avec introd. et notes par F. R. , coll. « Classiques Garnier » , Paris 1937 , IV-422 p. et II-468 p. ; 20 W.H. Stahl, Macrobius, Commentary on the Dream of Scipio, transl. with an introd . and notes , coll . « Records of Civilization . Sources and Studies » 48 , New York / London 1952 , réimpr. 1990 , XI -278 p . ; 21 P.V. Davies , Macrobius, The Saturnalia, transl. with introd . & notes, coll . « Records of Civilization . Sources & Studies » 79 , New York 1969 , X1-560 p . ; 22 N. Marinone , Macrobio, I Saturnali. Introd ., testo & trad., coll. « Classici UTET. Classici latini » 20, 2a ed . riv . , Torino 1977 , 947 p . (trad . avec le texte latin en face ) ; 23 L. Scarpa, Macrobii Ambrosii Theodosii Commentariorum in Somnium Scipionis libri duo, introd., testo, trad. e note, coll . « Bibl . di cultura » , Padova 1981 , 572 p. (texte latin de l'édition Willis 2 ) ; 24 M. Regali , Macrobio , Commento al Somnium Scipionis, Libro 1, introd ., testo, trad . e comm . , coll . « Bibl . di studi antichi » 37 , Pisa 1983 , 430 p. ( texte latin de l'édition Willis 2) ; 25 Id . (édit . ), Commento al Somnium Scipionis, Libro II, introd., testo , trad. & comm . , coll . « Bibl . di studi antichi» 58 , Pisa 1990, 233 p. (texte latin de l'édition Willis 2) ; 26 C. Guittard, Macrobe, Les Saturnales, Livres 1-111, introd ., trad. et notes, coll. « La roue à livres » , Paris 1997 , XXX - 364 p . Bibliographie. 27 P. de Paolis, « Macrobio 1934-1984 » , Lustrum 28-29, 1986-1987 , p . 107-254 ; 28 Id ., « Macrobio 1934-1984. Addendum ad Lustrum 28-29 ( 1986-1987 ) » , Lustrum 30, 1988 , p. 7-9 ; 29 L. Fiocchi, « Rassegna di studi macrobiani ( 1969-1979 ) » , BStudLat 12 , 1982 , p. 34-85 .

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Lexique. 30 M.C. Granados Fernández , Léxico de Macrobio, Madrid 1980, 8 vol. Concordance. 31 R. M. Marina Sáez & J.F. Mesa Sanz (édit. ) , Concordantia Macrobiana : a concordance to the Saturnalia of Ambrosius Theodosius Macro bius , prepared by R. M.M.S. & J.F.M. S. , coll . « Alpha - Omega . Reihe A : Lexica, Indizes , Konkordanzen zur klassischen Philologie » 163 , Hildesheim 1997, 3 vol, VIII-1329 p. Notices. 32 P. Wessner, art. « Macrobius » 7 , RE XIV 1 , 1928 , col . 170-198 ; 33 R. Herzog, art. « Macrobius » 1 , KP III 1969, col . 857 sq .; 34 P. Kroh , art. « Macrobius » , LAA, p. 389-390 ; 35 W. H. Stahl, art. « Macrobius, Ambrosius Theodosius » , DSB IX , 1974, p. 1 sq.; 36 B. Heinz , « Macrobius » , MLAA 1997 , p. 432-433 ; 37 J. Flamant, art. « Macrobius » 1 , NP VII, 1999, col . 627-630. Autres études. 38 A. Mahul , Dissertation historique, littéraire et biblio graphique, sur la vie et les ouvrages de Macrobe, Paris 1817 , 58 p .; 39 G. Boissier, La fin du paganisme : études sur les dernières luttes religieuses en Occident à la fin du IVe siècle, 2 vol . , Paris 1891 ; 40 M. Schedler, Beiträge zur Philosophie des Macrobius, Münster i . Westf. 1913 , 34 p.; 41 T. Whittaker, Macrobius or philosophy, science and letters in the year 400, Cambridge 1923 ; 42 P. Courcelle , Les lettres grecques , p . 3-36 ( « L'Hellénisme païen : Macrobe » ) ; 43 W. H. Stahl , « Astronomy and geography in Macrobius » , TPAPA 73 , 1942 , p. 232-258 ; 44 A. Cameron, « The date and identity of Macrobius » , JRS 56 , 1966 , p . 25-38 ; 45 Id . , « Macrobius , Avienus and Avianus » , CQ 17 , 1967 , p . 385-399 ; 46 N. Marinone, « Per la cronologia di Servio » ,AAT 104 , 1969-1970, p. 181-211 , repris dans Id . , Analecta graeco latina, Bologna 1990, p . 265-286 ; 47 M. Bevilacqua, Introduzione a Macrobio , « Collezione di studi e testi » 17 , Lecce 1973 , 201 p .; 48 J. Flamant, Macrobe et le néo-platonisme latin à la fin du IVe siècle , coll . ÉPRO 58 , Leiden 1977 , XXXI 737 p .; 49 Id ., « Éléments gnostiques dans l’æuvre de Macrobe » , dans R. van den Broek & M. J. Vermaseren (édit . ) , Studies in gnosticism and Hellenistic religions presented to Gilles Quispel on the occasion of his 65th birthday, coll . ÉPRO 91 , Leiden 1981 , p . 131-142 ; 50 C. Garrido López , La lengua de Macrobio , Thèse Madrid 1984, XI -383 p. ; 51 J. Flamant , « Macrobe : une langue philosophique ? » , dans La langue latine, langue de la philosophie, Actes du colloque organisé par l'École française de Rome avec le concours de l'Univer sité de Rome «La Sapienza » ( Rome , 17-19 mai 1990 ), « Collection de l'École française de Rome » 161 , Rome 1992 , p. 218-232 ; 52 P. de Paolis, « Il Somnium Scipionis nel linguaggio filosofico di Macrobio » , ibid. , p . 233-244 ; Armisen Marchetti 3, t. I , p. VII- LXXII ( un excellent état de l'ensemble des questions concernant la figure et l'æuvre de Macrobe, qui nous sera ici énormément utile ; cf. aussi Guittard 26 , p. IX -XI ). Données biographiques. Comme le remarque Armisen - Marchetti 3 , t . I , p. VII, de Macrobe, tout prête à discussion , à commencer par son nom . Les trois noms que l'on trouve dans la majorité des manuscrits ( Macrobius Ambrosius Theodosius) sont souvent réduits dans d'autres manuscrits à deux ( Macrobius Ambrosius ), ou à un seul (Macrobius ). Cameron 44 , en partant de l'idée qu'au

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Bas-Empire le dernier des noms d'un personnage était toujours son nom d'usage, défendait l'hypothèse selon laquelle le nom d'usage de Macrobe devait être à son époque Theodosius. Cependant, on n'a pas vraiment de preuve de ce fait. Par ailleurs , comme le note Flamant 48 , p. 91-95 , le seul nom qui ne fait jamais défaut dans nos manuscrits est celui de Macrobius. En l'absence donc d'une preuve contraire et sur la foi de la tradition, il faut conclure avec Armisen Marchetti 3, t. I , p. X , que le nom le plus usuel de notre auteur était Macrobius, ce qui n'empêche pas qu'il ait pu être désigné aussi sous le nom de Theodosius ( il est possible , dans ces conditions , que Macrobe soit à identifier avec le Theodosius auquel le poète Avianus dédie ses fables ). En ce qui concerne le lieu d'origine, on sait que Macrobe n'était pas natif de Rome parce qu'il dit de lui-même dans les Saturnales I, praef. 11 , qu'il est né « sous un autre ciel » . A cela s'ajoute le fait qu'il s'excuse modestement tout de suite après ( praef. 12 ) pour son style dépourvu de l'elegantia naturelle d'un vrai Romain . Cette origine étrangère s'accorde avec l'identification de notre Macrobe avec le Theodosius auquel Avianus dédie son livre de fables, puis qu'on sait que celui-ci n'était pas romain . En effet, Avianus dans sa préface adresse comme compliment à Macrobe la déclaration qu'il l'emporte à la fois sur les Athéniens par son érudition grecque et sur les Romains par la latinité de sa langue . Cette dernière partie du compliment n'aurait sans doute de sens que si elle s'adressait à quelqu'un qui n'est pas romain. A son tour, la première partie du compliment semble écarter la possibilité que la langue maternelle de Macrobe ait été le grec, puisque , comme le remarque Armisen -Marchetti 3 , t. I, p. XI , pourquoi Avianus admirerait -il un Grec pour son érudition grecque ? Par ailleurs, Macrobe préfère citer les auteurs grecs en latin , et il le fait souvent avec des erreurs ; en outre, il se montre très familier et très attaché à la littérature latine . Armisen -Marchetti 3 , ibid ., remarque enfin le caractère invraisemblable du fait qu'un néoplatonicien dont la langue maternelle aurait été le grec eût choisi pour traiter des questions philosophiques une autre langue que le grec. Il semble donc préférable de se ranger à l'hypothèse communément reçue qui fait de Macrobe un provincial né en dehors des milieux aristocratiques de Rome et de ce fait dépourvu de la pureté naturelle par laquelle s'exprime un natif de la Ville. On a proposé comme localisation possible de sa patrie l'Afrique, l'Italie du Sud ou l'Espagne ( cf. Flamant 48, p . 94 ). Quant à l'activité publique de Macrobe, on sait qu'il a accompli une carrière de haut fonctionnaire . Le titre de « uir clarissimus et illustris » qu'il reçoit dans l'incipit et l'explicit de nos manuscrits indique d'une part qu'il appartenait au rang sénatorial ( « clarissimus » ) et qu'il a accédé aux plus hautes fonctions au service de l'État ( « illustris » ). Comme le remarque Armisen -Marchetti 3 , t. I , p . XII , cette indication d'illustris dans nos manuscrits n'implique pas que Macrobe ait accédé à ces fonctions avant ou pendant la composition de son @uvre littéraire, puisque les manuscrits peuvent faire état d'une dignité à laquelle il a pu accéder seulement par la suite , ou bien il a pu la recevoir à titre honorifique à la fin de sa carrière consulaire. Cela dit , pour essayer de préciser cette carrière et sa chronologie on a eu recours au Codex Theodosianus, où l'on

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trouve mentionnés , sous le même nom de Macrobius, deux personnages susceptibles d'être identifiés avec notre Macrobe : un vicaire des Espagnes en 399-400 (cf. Codex XVI 10, 15 , VIII 5 , 61 ) , et un proconsul d’Afrique en 410 ( cf. Codex XI 28 , 6 ; PLRE II , p . 698 = Macrobius 1 ) ; et, sous le seul nom de Theodosius, un préfet du prétoire en Italie en 430 ( cf. Codex XII 6 , 33 ) . Un troisième Macrobius cité dans le Codex VI 8 , 1 , comme praepositus sacri cubiculi à Constantinople en 422 ( cf. PLRE II , p. 698 sq. = Macrobius 2) , semble tout à fait impossible à identifier avec notre Macrobe non seulement du fait qu'il s'agit ici d'un titre qui concerne la cour impériale d'Orient, mais aussi du fait que la charge en question était attribuée à un eunuque ( bien sûr chrétien , ayant la pleine confiance de l'empereur), ce qui semble incompatible avec notre moins un fils (cf. infra ). Macrobe, dont on connaît Depuis la contribution de 53 A. Chastagnol , « Les Espagnols dans l'aristo cratie gouvernamentale à l'époque de Théodose » , dans Empereurs romains d'Espagne. Actes du colloque international du C.N.R.S. organisé par A. Piganiol & H. Terrasse, Madrid-Italica, 31 mars - 6 avril 1964, coll . « Colloques interna tionaux du C.N.R.S. Sciences humaines » , Paris 1965 , p. 269-292 , on sait qu'il ne faut pas identifier les personnages appelés Macrobius dans le Codex avec un seul, comme on le faisait alors : d'après la chronologie traditionnelle ( cf. par exemple Courcelle 42 , p. 3) , Macrobe serait né en 350-360, aurait été uicarius Hispaniarum en 399-400 et proconsul d'Afrique en 410. D'après Chastagnol , il s'agit en réalité de personnages distincts, et il faudrait identifier notre Macrobe seulement au proconsul d’Afrique. A ce sujet, Armisen -Marchetti 3 , t . I, p. XIII sq. , reconnaît que le vicaire est un candidat peu probable , entre autres parce que le vicariat à lui seul ne conférait pas le titre d'illustris . En revanche , le proconsul, proposé aussi par Flamant 48 , p. 122 sq . , lui semble un candidat plausible . Armisen -Marchetti considère en tout cas qu'il ne faut pas écarter sans plus l'hypothèse de Cameron 44 , selon laquelle c'est le préfet du prétoire appelé Theodosius qu'il faudrait identifier avec notre Macrobe, même si l'opinion de Cameron selon laquelle celui-ci n'aurait été connu par ses contemporains que sous le nom de Theodosius n'est pas à partager. Cette dernière identification remonte à 54 S. Mazzarino, « La politica religiosa di Stilicone » , RIL 71 , 1938 , p. 235-262 , notamment p. 255-258 ; et elle fut reprise aussi par Marinone 20 , p. 14-27 . De là résulterait une chronologie plus basse, selon laquelle Macrobe serait né vers 385-390 . Comme on peut le voir, aucune certitude ne peut être alléguée ni sur l'iden tification ni sur la chronologie que l'on puisse en faire dériver. Dans ce sens, Armisen -Marchetti 3, t. I, p. XIV, rappelle finalement que le Codex ne nous a pas été transmis dans son intégralité , et que , par conséquent, notre Macrobe pourrait aussi figurer dans la partie non conservée . Enfin , on peut aujourd'hui affirmer sans hésitation que Macrobe était un païen . Si , comme le remarque Armisen -Marchetti 3 , t. I , p. XVIII, on pense que le christianisme était en son temps la religion et le système de pensée triom phants , il n'est sans doute pas sans signification que Macrobe n'y fasse pas la moindre allusion dans son æuvre . L'idée d'un Macrobe chrétien remonte sans

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doute à son identificacion traditionnelle avec les Macrobius cités dans le Code Théodosien et confondus en un seul personnage, qui aurait détenu entre autres une fonction religieuse à côté de l'empereur, ce qui , comme on a dit plus haut, semble tout à fait à écarter. Bevilacqua 47 , p. 23-32 , voulait voir en Macrobe un chrétien dont le caractère hypo thétiquement tiède expliquerait le fait qu'il ne parle pas du christianisme, tout en restant attaché à la culture romaine traditionnelle. Cette hypothèse a été convenablement contestée par Armisen -Marchetti 3, ibid .: celle-ci fait appel au paganisme de Macrobe démontré par exemple par le long exposé de théologie solaire dans les Saturnales I 17-23, prononcé par un personnage du dialogue qui est sans doute le porte-parole de l'auteur ; elle mentionne aussi l'exposé de la doctrine tout à fait néoplatonicienne des trois hypostases développée dans le Commentaire au Songe de Scipion I 14, 5-7 , ou le traité sur l'âme, son origine astrale et sa descente sur terre , avec le traité sur l'emplacement des enfers (ibid. I 8, 1 - 14, 20 ; II 12-16). Voici la conclusion bien claire d'Armisen -Marchetti 3, t. I, p. XIX : « Le silence dans lequel Macrobe tient le christianisme est un silence de dédain , un silence polémique, non le silence d'une âme tiède. Tiède, Macrobe ne l'est pas, bien au contraire . Mais son enthousiasme et sa vénération ... vont aux vérités de Plotin et de Porphyre, non à celles du Christ. » Cela dit, certains critiques ont relevé, aussi bien dans le Commentaire au Songe de Scipion que dans les Saturnales, des parallèles textuels ou diverses allusions à l'Ancien comme au Nouveau Testament : cf. 55 P. W. van der Horst, « Macrobius and the New Testament: a contribution to the Corpus Hellenisticum », NT 15 , 1973 , p. 220-232 ; 56 M. C. Granados Fernández, « ¿Mateo Evangelista en Macrobio, Sat. II , 4, 11 ? » , Emerita 49, 1981 , p. 361 363 ; 57 Ead ., « Macrobio y la Biblia » , Emerita 53, 1985 , p. 115-125 . nom des dédicataires que Macrobe avait choisis pour (Eu e . On connaît

les trois ouvrages que lui attribue la tradition : pour le traité De differentiis, Symmaque, le plus célèbre orateur romain de son temps, consul en 391 ; pour les Saturnales et le Commentaire , son propre fils, lequel est appelé dans nos manuscrits tantôt Eustathius , tantôt Eustachius ( 2E 158 ) , mais vraisembla blement il s'appelait plutôt Eustathius ( cf. Armisen -Marchetti 3 , t. I , p . XV) . Celui -ci a été identifié avec le Plotinus Eustathius , préfet de Rome en 461 , mentionné dans une inscription napolitaine (CIL X 8072 , 4 ; cf. PLRE II , p. 435 = Plotinus Eustathius 13 : Cameron 44 , p. 37 ; Flamant 48 , p. 131 sq . ) . Dans la souscription d'une série de manuscrits du Commentaire, on trouve aussi men tion de deux personnages associés à cet ouvrage en tant que réviseurs : d'un côté, l'arrière -petit- fils de Symmaque ; et, de l'autre , un certain Macrobius Plotinus Eudoxius ( 2 - E 102) , uir clarissimus, identifié unanimement comme le petit - fils de notre auteur (cf. PLRE II , p. 413 = Macrobius Plotinus Eudoxius 7 ) . Ce deuxième réviseur serait donc le fils de Plotinus Eustathius, si l'identification de celui -ci avec le fils de Macrobe est correcte. Comme le remarque Armisen Marchetti 3, t. I , p. XVI , cette filiation se trouve appuyée par la découverte d'une inscription, provenant probablement du Forum Romanum , sur laquelle on lit le nom de « Fl [auius ) Macrobius Pl [otinus ) [ E ]ustathius, u( ir) ( c (larissimus )...] » , et publiée par 58 S. Panciera, « Iscrizioni senatorie di Roma e dintorni », dans Tituli, IV & V, Atti del Colloquio internazionale AIEGL su Epigrafia e ordine senatorio , Roma, 14-20 maggio 1981 , Roma 1982 , t. I , p. 658-660. L'éditeur suggère une reconstitution qui paraît vraisemblable à Armisen -Marchetti 3 , ibid.: « Macrobius se serait appelé Flavius Macrobius Ambrosius Theodosius ; son fils serait le Flavius Macrobius Plotinus Eustathius de l'inscription , préfet de

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la Ville ; son petit-fils, cité dans la souscription du commentaire, se nommerait quant à lui Flavius Macrobius Plotinus Eudoxius » . L'analyse des dédicaces que Macrobius écrit pour son fils Eustathe dans les Saturnales et dans le Commentaire permet d'établir une datation relative de ces deux ouvrages. En effet, on a considéré que la longue dédicace des Saturnales, praef. 1-2 , révèle comme destinataire un jeune adolescent qui devrait encore fréquenter l'école du grammaticus , et avoir donc entre douze et quinze ans ; alors que la dédicace du Commentaire I 1 , 1 , ne convient pas à un enfant (ni à un homme mûr non plus) , mais plutôt à un jeune homme qui serait en âge de terminer sa formation scolaire par la philosophie , ayant environ vingt ans . De là résulte que la composition des Saturnales pourrait avoir précédé celle du Commentaire de cinq à dix ans (cf. entre autres Flamant 48 , p. 87-91 ; Regali 24, p. 10 sq. ) . Cependant, comme le remarque Armisen -Marchetti 3, t. I , p. XVII, « ni les Saturnales ni le Commentaire ne se laissent dater avec certitude, malgré l'ingéniosité dont ont fait preuve divers savants dans l'exploitation des critères internes et externes » . Voici , comme le résume Armisen -Marchetti 3, ibid ., l'état actuel de la critique, qui se rattache, bien sûr, à la discussion que nous avons rapportée plus haut sur l'identité de Macrobe : les datations hautes, qui rendent le Commentaire antérieur à l'an 400 (cf. par exemple Courcelle 42, p. 3 ) , tendent à être abandonnées, tandis que les datations basses , qui sont les plus prudentes, s'accordent pour en juger la composition postérieure à 430 , celle des Saturnales étant par conséquent, selon ce que nous avons dit plus haut, antérieure de quel ques années (cf. Cameron 44 ; Marinone 46 ; Flamant 48 , p . 80 sq. ) . Armisen Marchetti 3 , t. I, p. XVIII , même si elle insiste sur son caractère tout à fait hypo thétique , penche pour cette datation plus basse , qui coïnciderait avec l'identifi cation de Plotinus Eustathius comme fils et dédicataire de Macrobe : s'il était préfet de Rome en 461 , il pouvait avoir eu vingt ans , l'âge qui semble convenir au dédicataire du Commentaire, dans les années 420-430. Pour sa part, la datation de la composition du traité grammatical Sur les diffé rences et les ressemblances entre les verbes grec et latin varie aussi selon qu'on suit la chronologie traditionnelle, ou bien la chronologie plus basse de Cameron ou Marinone liée à l'identification de Macrobe avec le préfet du prétoire en 430 : dans le premier cas, on l'a datée entre 395 et 400 ; dans le deuxième cas , vers 420-425, ce qui pourrait expliquer l'absence dans ce cas du titre uir illustris dans la tradition, puisque l'auteur n'aurait accédé à ses hautes fonctions qu'en 430 (cf. Guittard 26 , p. XI ). La composition de cet ouvrage aurait donc précédé celle des Saturnales de plus d'une décennie. Un même caractère et un même dessein pédagogique président à l'ensemble de l'ouvre de Macrobe. En fait, elle couvre plus ou moins l'ensemble des disciplines encyclopédiques ( les sept arts libéraux) connu au Moyen Âge comme le triuium (grammaire, rhétorique, dialectique-logique) et le quadriuium (arith métique, musique , géométrie, astronomie -cosmologie ), et fondé sur les études qui étaient déjà suivies dans l'Antiquité.

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SUR LES DIFFÉRENCES ET LES RESSEMBLANCES ENTRE LES VERBES GREC ET LATIN Cf. Wessner 32 , col . 174 ; 59 J. Fontaine , Isidore de Séville et la culture classique dans l'Espagne wisigothique, deuxième édition revue et corrigée , Paris 1983 , t . I, p . 38-40 ; Flamant 48, p. 233-252 ; Id. 37 , p. 630 . L'ouvrage que Macrobe consacre à la première discipline du triuium n'est pas une grammaire usuelle , mais un traité conçu d'un point de vue bien précis. Comme le résume Guittard 26 , p. XII : « Macrobe, qui n'est pas un grammairien de profession, s'intéresse à une seule des trois parties du discours , le verbe, dont il étudie les sept accidents (personne, nombre, figure, conjugaison, temps , qua lité , genre ). L'originalité de Macrobe est de recourir à la catégorie de la diffé rence et de fonder son étude sur le parallélisme entre les deux systèmes verbaux pour chacun des accidents étudiés . Le prédicat de différence utilisé par les rhéteurs est une notion dialectique , employée chez les grammairiens seulement pour l'étude du sens des mots . Macrobe s'inspire, pour la science grecque, d'Apollonios Dyscole , créateur de la syntaxe grecque à l'époque d'Hadrien , ainsi que de Claude Didyme, qui composa, sous Auguste, un traité d'analogie » . LES SATURNALES Cf. 60 A. Santoro , Esegeti virgiliani antichi (Donato -Macrobio - Servio ), Bari 1945 , 134 p . ; 61 N. Marinone , Elio Donato , Macrobio e Servio : commentatori di Vergilio, Vercelli 1946 , 104 p.; 62 M. Broye, « La compilation dans les Saturnales de Macrobe» , REL 26, 1949 , p. 68-69 ; 63 A. S. Benjamin , An histo rical commentary on the second book of Macrobius ' Saturnalia, Diss . University of Pennsylvania, ( Philadephia ) 1955 , XI - 178 p. ( micr. ) ; 64 E. Türk, Macrobius und die Quellen seiner " Saturnalien" , Diss . Freiburg i . Br. 1962 ; 65 Id ., « Les Saturnales de Macrobe source de Servius Danielis » , REL 41 , 1963 , p . 327-349 ; 66 J. Flamant, « La technique du banquet dans les Saturnales de Macrobe » , REL 46, 1968 , p. 303-319 ; 67 M.D. Gallardo López, El género simposíaco hasta las " Saturnales " de Macrobio , coll . « Extractos de Tesis Doctorales » 72 , Madrid 1973 , 37 p. ; 68 A. Pieri, Lucrezio in Macrobio : adatta menti al testo virgiliano, coll . « Biblioteca di cultura contemporanea » 126, Messina/Firenze 1977 , 273 p . ; 69 R. Kaster « Macrobius and Servius. Verecundia and the grammarian's function » , HSPh 84 , 1980, p . 219-262 ; 70 P. de Paolis , « Les Saturnales de Macrobe et l'idéalisation du saeculum Praetextati » , LEC 55 , 1987 , p . 291-300 ; 71 E. Syska , Studien zur Theologie im ersten Buch der Saturnalien des Ambrosius Theodosius Macrobius, coll . « Beiträge zur Altertumskunde » 44, Stuttgart 1993 , XI-280 p. ; 72 C. Granados Fernández , « Etimologías macrobianas para una teología solar » , dans J. L. Vidal & A. Alvar Ezquerra ( édit. ), IX congreso español de estudios clásicos (Madrid, 27 al 30 de septiembre de 1995), t. V : Literatura latina, Madrid 1998 , p. 111 116 ; 73 E. Cabella, « Varianti omeriche e citazioni mnemoniche nei Saturnalia di Macrobio » , Athenaeum 86, 1998, p. 505-517 .

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Comme l'auteur l'explique dans la préface adressée à son fils Eustathe , il veut offrir à celui -ci dans ses Saturnales comme une réserve du savoir des anciens, où il a rassemblé des matériaux très divers tirés de son propre bagage scientifique, reproduits plus ou moins fidèlement, mais toujours organisés sous une forme littéraire . Les métaphores que Macrobe utilise pour exprimer son propre travail comme auteur ( le travail des abeilles ; la digestion des aliments ; la préparation des parfums; la formation d'un chæur) font bien référence à sa volonté de créer un ensemble bien structuré. Le corpus des connaissances transmises par Macrobe dans les Saturnales appartient pour l'essentiel aux disci plines du triuium , notamment la grammaire et la rhétorique, bien qu'on y trouve aussi quelque fois d'autres connaissances de type astronomique ou physique qui relèvent plutôt du quadriuium . Comme le remarque Guittard 26 , p. XIV , les Saturnales expriment l'amour de Macrobe pour l'Antiquité romaine et son attachement au paganisme traditionnel. Le genre littéraire qu'il a choisi pour véhicule de tout ce savoir païen est celui du banquet, qui se présente ici sous la fiction suivante : à la veille de la fête religieuse des Saturnales ( le 16 décembre) , se réunissent chez l'aristocrate Prétextatus les plus hauts représentants de la noblesse romaine païenne du Ive siècle en compagnie d'autres savants, et ils consacrent ce soir et toute la durée de la fête, c'est - à -dire les trois jours suivants (où ils se réunissent aussi chez deux autres convives qui s'invitent réciproquement) « à de doctes discussions sur les arts libéraux » (cf. Sat. I 1 ) . Pendant ces trois jours , l'auteur applique le principe de réserver les sujets sérieux et graves pour les séances du matin, et de passer dès l'après-midi à d'autres sujets ayant un caractère plus charmant ou comique . Ce mélange du sérieux et du comique faisait effectivement partie des règles du genre littéraire choisi . Les personnages qui prennent part au dialogue sont au nombre de douze , nombre symbolique résultant de l'addition au nombre des Muses de celui des Grâces (cf. Sat. I 7 , 12 sq . ) . Ils ne sont pas toujours ensemble dans le banquet , et l'auteur reconnaît ( ibid . I 5 ) s'être permis la licence, courante aussi par ailleurs dans le genre littéraire du banquet, d'y faire participer certains personnages qui auraient été en réalité trop jeunes pour fréquenter la génération de Prétextatus. La plupart des interlocuteurs sont des Romains, mais il y a trois Grecs et un Égyptien. L'entretien est censé avoir eu lieu en 384, l'année de la préfecture du prétoire de Prétextatus en Illyrie , Italie et Afrique, et aussi celle de sa mort. Comme introduction aux anecdotes et aux entretiens de ce long banquet, Macrobe a recours à une autre fiction, en suivant encore l'usage typique dans ce genre littéraire et en s'inspirant sans doute plus ou moins du Banquet de Platon (cf. Flamant 66 ; Id . 48, p . 172-232 ) : peu après le banquet , à l'occasion d'une autre fête , un personnage appelé Décius Albinus, appartenant à la même famille que deux des invités au banquet, interroge sur l'origine et le déroulement de celui -ci un autre personnage, Rufius Postumianus. Mais le rapport de ce dernier n'est pas de première main : il avait bien été invité au banquet, mais , ne pouvant pas y assister, c'est un autre personnage, le rhéteur Eusèbe , qui fut invité à sa place ; c'est donc celui- ci qui le lendemain du banquet (en compagnie de ses

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propres disciples) en fait le récit à Postumianus dans la maison de celui -ci : pour ce qu'il a vécu directement, il dit avoir pris des notes ; pour les discussions de la veille , auxquelles il n'avait pas participé, il dit en avoir eu connaissance par le compte rendu d'un autre convive, Aviénus ( = A 515 ), le poète « traducteur >> d'Aratus. Tout au long des Saturnales, qui comportent sept livres, les discussions s'organisent à chaque fois autour des trois personnage plus importants : outre Prétextatus, Symmaque , l'orateur et haut fonctionnaire que nous avons déjà mentionné , et Nicomaque Flavien ( N 49) , un autre haut fonctionnaire de l'époque. Prétextatus est l'hôte de la veille et du premier jour du banquet ( livres I- II ) ; Nicomaque Flavien en est celui du deuxième (livre III ) , et Symmaque du troisième (livres IV -VII) . C'est dans cette dernière partie que nos lacunes dans le texte transmis sont les plus nombreuses. Le sujet principal du livre I est le calendrier, à commencer par une histoire des Saturnales, dont Prétextatus est le grand spécialiste, comme en général de l'histoire du calendrier romain et des questions religieuses (il fait des recherches en particulier sur la science religieuse de Virgile ). Comme le remarque Guittard 26 , p. XV , « il apparaît surtout comme le représentant des conceptions syncrétistes et orientalisantes face au traditionalisme » . Il faut signaler son exposé sur Apollon et la théologie solaire (I 17-23 ). A la fin de ce livre, tous les convives font l'éloge général de Virgile, une figure qui présidera à la plupart des livres suivants. La science de Virgile (maintenant philosophie, astronomie, droit) est développée, avec des lacunes dans nos manuscrits, dans les livres II et III. Les chapitres du livre III sur la science pontificale de Virgile se rapprochent du Servius de Daniel, qui remonte au commentaire de Donat (cf. Türk 65). Les livres IV-VII ( troisième jour) tournent autour de l'art oratoire (comme il convient à l'hôte de ce jour, Symmaque) et de la poétique virgilienne . A la fin de chaque jour, on s'occupe de sujets moins sérieux, à la manière d'interludes : plaisanteries et bons mots célè bres, le vin et les plaisirs ( fin du premier jour) ; le luxe et le raffinement des anciens, les variétés des fruits ( fin du deuxième jour) ; la conversation des convives et les propos de tables : alimentation , digestion , mécanisme de la vision ( fin du troisième jour) . Pour la structure complète de l'ouvrage , avec l'indication précise des lacunes, nous renvoyons à Guittard 26 , p. XXIX sq. Les « professionnels » du dialogue, comme les appelle Guittard 26 , p. XVII, sont, d'un côté, deux personnages d'origine grecque : le philosophe Eustathe (»E 159) et le rhéteur Eusébe ; de l'autre, trois personnages qui arrivent sans avoir été invités : un autre grec, Disarius, qui était à l'époque le médecin le plus prestigieux à Rome (I 7, 3 ) ; le cynique d'origine égyp tienne Horus ( > * H 169), et un personnage effronté et désagréable du nom d'Évangelus, qui arrive en compagnie de ces derniers. Comme le remarque Guittard 26 , ibid ., Eustathe, connaisseur avisé des trois écoles philosophiques (académicienne, stoïcienne, péripatéti cienne ) est un technicien de la philosophie plus qu'un véritable philosophe : « La lacune du début du livre III nous prive de son développement sur les connaissances de Virgile en astronomie et en philosophie et sa dette envers les Grecs » . Guittard 26 , ibid ., se range à l'avis de Flamant 48, p . 69, entre autres, selon lequel l'identification de ce personnage avec le philosophe néoplatonicien Eustathe de Cappadoce proposée par 74 L. von Jan , Macrobii Ambrosii Theodosii opera quae supersunt ( 1848-1852 ), t. I, p. XXX, reste très hypothétique et même très improbable ( E 159, 75 S. Gersh , DPhA, t. III , p. 368 ; E 161 , 76 R. Goulet, DPhA , t . III , p. 378 ). Horus est le même personnage qui apparaît dans la correspondance de Libanius et de Symmaque ( *** H 169) . Comme Macrobe y fait aussi allusion (I 7 , 3 ), il s'était tourné vers la philosophie cynique après avoir remporté les jeux olympiques d'Antioche en 364. Évangelus, en revanche, reste à nouveau énigmatique : Jan 74 avait avancé l'hypothèse selon laquelle il s'agirait d'un chrétien que Macrobe aurait représenté à ce point odieux pour discréditer la nouvelle religion ; cette hypothèse fut retenue, avec des réserves, par Courcelle 42 , p. 7 sq .; mais elle fut déjà ouvertement rejetée par Boissier 39, t. II, p. 207 n. 2, et plus

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tard par Flamant 48 , p. 74 sq . (cf. aussi Guittard 26 , p. XVIII, pour qui on pourrait identifier Évangelus avec un personnage cité par Symmaque dans une lettre adressée à ses enfants vers 397 : cf. Lettres VI 7). Pour la réfutation de l'interprétation des Saturnales comme instrument de propagande politique et religieuse antichrétienne, nous renvoyons aussi à de Paolis 70. Celui-ci nie que les Saturnales, dont la composition peut être datée des environs de 430 ( cf. supra ), doivent être placées à l'origine du mouvement païen qui utilisait la culture classique comme une arme contre le christianisme, puisque ce mouvement date de la fin du IVe siècle. D'après de Paolis, l'æuvre révèle tout simplement l'idéalisation du saeculum Praetextati, survenue grâce à des représentants marquants de l'aristocratie et de la culture romaine. COMMENTAIRE AU SONGE DE SCIPION Cf. 77 K. Mras, « Macrobius ' Kommentar zu Ciceros Somnium : ein Beitrag zur Geistesgeschichte des 5. Jahrhunderts n . Chr. » , SPAW 6 , 1933 , p. 232-288 ; 78 P. Henry, Plotin et l'Occident : Firmicus Maternus, Marius Victorinus, saint Augustin et Macrobe, coll . « Spicilegium Sacrum Lovaniense . Études et Documents » 15 , Louvain 1934 , 291 p.; 79 P. Boyancé, Études sur le Songe de Scipion : essais d'histoire et de psychologie religieuses, coll. « Bibliothèques des Universités du Midi » 20 , Paris 1936, 192 p. ; 80 A. J. Festugière, « Les thèmes du Songe de Scipion » , Eranos 44 , 1946 , p. 370-388 ; 81 C. Sanz, El primer mapa del mundo con la representación de los dos hemisferios concebido por Macrobio : estudio crítico y bibliográfico de su evolución, coll . « Publicaciones de la Real Sociedad Geográfica . Serie B » 455 , Madrid 1966 , 85 p .; 82 W. Gundel & H.G. Gundel , Astrologumena. Die astrologische Literatur in der Antike und ihre Geschichte, coll . « Sudhoffs Archiv » 6, Wiesbaden 1966, p . 124 , 295 , 307 , 318 ; 83 A. Setaioli , « L'esegesi omerica nel commento di Macrobio al Somnium Scipionis » , SIFC 38 , 1966 , p. 154-198 ; 84 H. de Ley , « Le traité sur l'emplacement des Enfers chez Macrobe» , AC 36, 1967 , p . 190 208 ; 85 M.A. Elferink , La descente de l'âme d'après Macrobe, coll . « Philo sophia Antiqua » 16, Leiden 1968 , VI -69 p. ; 86 C. Zintzen , « Römisches und Neuplatonisches bei Macrobius: Bemerkungen zur Tohltixn åpetń im Comm. in Somn . Scip. 1,8 » , dans P. Steinmetz (édit . ) , Politeia und Res Publica : Beiträge zum Verständnis von Politik, Recht und Staat in der Antike, dem Andenken Rudolf Starks gewidmet, coll . « Palingenesia, Monogr. & Texte zur klass . Altertumswiss. » 4, Wiesbaden 1969 , p. 357-376 ; 87 H. de Ley, Macro bius and Numenius: a study of Macrobius, In Somn . I, c. 12, coll . « Latomus » 125 , Bruxelles 1972 , 75 p . ; 88 O. Neugebauer, A history of ancient mathe matical astronomy, In three parts with 9 plates and 619 figures, coll . « Studies in the history of mathematics and physical sciences » 1 , Berlin , Heidelberg/New York 1975 , t . II , p . 618 , 650 , 661 , 695 , 1029 sq . , t . III , p . 1084 sq . ; 89 K. Büchner, Somnium Scipionis : Quellen, Gestalt, Sinn , coll . « Hermes. Einzelschriften » 36, Wiesbaden 1976, X - 120 p . ; 90 M. Regali , « La quadripar tizione delle virtù nei Commentarii di Macrobio » , A & R 25 , 1980, p. 166-172 ; 91 I. P. Culianu , « Ordine e disordine delle sfere . Macrob . In S. Scip . I 12, 13 14 , p . 50 , 11-24 Willis » , Aevum 55 , 1981 , p. 96-110 ; 92 S. Gersh , Middle Platonism and Neoplatonism : the Latin tradition, Notre Dame ( Ind . ) 1986, t. I , p. 502-522 ; 93 M. Cristiani , « Sogni privati e sogni pubblici : Macrobio e il

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platonismo politico » , StudStor 27 , 1986, p . 685-699 ; 94 M. di Pasquale Barbanti , Macrobio : etica e psicologia nei « Commentarii in Somnium Scipio nis » , Catania 1988 , 214 p. ; Armisen -Marchetti 3, t. I , p. XIX-XXIV . L'ouvrage comporte deux livres , ce pourquoi l'auteur parle plutôt de « commentaires » . On est ici maintenant devant un genre littéraire différent, celui du commentaire philosophique . En effet, comme le remarque Armisen Marchetti 3 , t. I , p. XXIII , même si celui -ci n'est pas identifié par les anciens comme un genre littéraire au plein sens du terme, on ne peut pas nier qu'il respecte un certain nombre d'habitudes. La méthode n'est pas toujours la même et la caractéristique principale du genre est la liberté quasi infinie du commen tateur. La méthode de Macrobe est de suivre l'ordre de l'æuvre qu'il commente , mais de n'en prendre que des morceaux choisis . Enfin , le point de vue philosophique à partir duquel Macrobe fait son commentaire est celui de l'école néoplatonicienne. L'ouvrage commenté , le Songe de Scipion de Cicéron , n'était pas un texte indépendant mais la conclusion de la République de cet auteur, concrètement les paragraphes 9 à 29 , du livre VI (MC 123 , DPA, Suppl. I , p. 680-687 ) . Ces paragraphes portent le titre Somnium Scipionis non seulement dans les manuscrits de Macrobe , mais aussi dans ceux d'un autre commentateur connu, Favonius Eulogius (VP ; » F 9) . Même si on ne peut pas écarter la possibilité que le texte en question ait été l'objet d'une édition indépendante dans l'Antiquité avant de devenir l'objet de commentaires, on n'a de témoignage en ce sens qu'à partir de Macrobe . C'est grâce notamment à celui -ci que le Songe a bénéficié d'une tradition beaucoup plus favorable que le reste de la République, déchiffrée péniblement par le biais d'un palimpseste au début du XIXe siècle . Enfin , comme Macrobe l'explique (Somn. I 2) , il s'agit d'une « fiction littéraire » (fabula ) sous la forme d'un dialogue. Voici le contenu du Songe , tel que le résume parfaitement Armisen -Marchetti 3 , t. I, p. XXV : « Le principal personnage du dialogue,Scipion Émilien , raconte le songe inoubliable qu'il a fait vingt ans plus tôt, en 149 av. J.-C. , alors que, jeune commandant de légion, il était venu en Afrique pour participer à la troisième guerre punique. Accueilli par le vieux roi Massinissa, il avait passé la soirée à l'écouter évoquer le souvenir de son aïeul d'adoption, Scipion l'Africain . Et, une fois couché, il avait rêvé qu'il s'élevait dans les régions célestes, où l'accueillaient précisément l'Africain et Paul Émile. Ceux-ci lui faisaient voir le ciel , les astres et la terre, lui expliquaient les admirables mécanismes du cosmos ; et, tout en l'assurant de l'immortalité des âmes , ils lui révélaient qu'après leur mort les âmes des hommes politi ques méritants s'élevaient au ciel , où les attendait dans la Voie lactée une béatitude éternelle ». Comme l'avaient déjà remarqué les anciens (Macrobe, Comm . I 1 , 2 , par exemple), Cicéron y imitait sans doute le mythe d'Er par lequel Platon concluait sa propre République ( cf. Armisen -Marchetti 3 , t . I, p. XXVIII-XXX ) . A ce sujet, comme le remarque Armisen -Marchetti 3 , ibid. , il faut tenir compte des diffé rences très importantes entre les idéologies des deux récits : chez Cicéron , on trouve non seulement des éléments pythagorico -platoniciens (idéalistes ), mais aussi stoïciens (matérialistes ) ; Cicéron et Platon adoptent des hypothèses scien tifiques ( astronomiques, géographiques) inconciliables, que Macrobe cependant s'efforce toujours de concilier ; le mythe d'Er platonicien est universaliste,

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puisqu'il a comme protagoniste un homme quelconque, tandis que le protago niste du songe de Cicéron est un héros national et la destinée de l'immortalité astrale est réservée notamment à ces hommes d'action ayant exercé les vertus concrètes de justice et de piété à l'égard de la cité ; enfin , la récompense de ceux - ci est éternelle, non soumise , comme dans le mythe d’Er, à un cycle de réincarnations. Ce que fera donc Macrobe dans son commentaire c'est essayer de concilier une fois de plus la culture grecque et la culture latine . D'après Regali 90, c'est ce que Macrobe fait lorsqu'il veut associer les vertus politiques aux autres vertus qu'il distingue (Comm . I 8 ) , à savoir les vertus purificatrices, les vertus d'une âme déjà purifiée, et les vertus exemplaires : en ce qui concerne les vertus poli tiques, Macrobe met l'accent sur la terminologie latine, tandis que , pour ce qui est des trois autres types de vertus, il insiste sur le schéma néoplatonicien . Cristiani 93 , avait montré aussi que Macrobe , en créant une continuité idéale qui va de Platon à Cicéron, défend les vertus politiques cicéroniennes comme seule garantie d'un destin heureux de l'âme. Comme le remarque Armisen -Marchetti 3 , t. I , p. XLII , on peut interpréter en principe le Commentaire comme une introduction à chacune des matières du quadriuium , vu la diversité des disciplines qu'y sont abordées : « A côté de considérations strictement philosophiques, au sens étroit du terme, figurent de copieux exposés sur l'arithmétique, l'astronomie , la musique et la géographie, dont la somme fait la partie centrale du Commentaire » . L'arithmétique est traitée dans Comm . 1 5 sq.: il n'y est pas question de mathématiques au sens propre , mais de ce que les modernes appellent « arithmologie » , c'est- à -dire une mystique des nombres, d'inspiration néopythagoricienne, comme celle qui avait été cultivée par Théon de Smyrne et Nicomaque de Gérase (** N 50) aux deux premiers siècles de notre ère, et qui allait l'être si souvent dans le milieu néoplatonicien des IVe et Ve siècles. Macrobe expose , par exemple , les vertus mystiques du huit (I 5 , 15-18 ) et du sept (I 6) . L'arithmétique ouvre la voie plus tard à l'astronomie, qui domine toute la fin du livre I (chap. 14, 21 – 23, 13). Cette discipline revient dans le livre II mêlée à la musique (II 1-8 ) ou à la géographie ( II 11 ). L'exposé macrobien du cosmos, fondé sur la représentation de Cicéron (Rép . VI 16-17), comporte les cercles célestes ( I 15 ), la sphère céleste ( I 16), les sphères planétaires ( I 17-19), le soleil ( 1 20), le zodiaque ( I 21 ), la Terre (1 22), les ceintures célestes (II 7-8 ) et la définition de la Grande Année ( li 11). La considération de la musique ouvre le livre II à partir du passage célèbre du Songe sur la musique des sphères (Rép. VI 18 ) : Macrobe raconte (chap. 1 4) la découverte attribuée à Pythagore des rapports constituant l'harmonie musicale ( II 1 , 8 13 ), les applique à la création de l'âme du Monde dans le Timée de Platon ( II 2), et finit par la démontration de l'existence de la musique des sphères et la description de son mécanisme . La suite du livre porte sur la géographie ( II 5-9) et se fonde sur Rép. VI 20-21 et 23 : l'auteur définit les ceintures terrestres et les zones climatiques, les quatre mondes habités et l'Océan qui les isole. De ce point de vue , le commentaire s'inscrit (cf. Flamant 48 , p . 305 sq .; Scarpa 23 , p. 21 sq . ) dans le mouvement encyclopédique auquel appartient l'ouvrage monumental de Martianus Capella, Les Noces de Mercure et de Philologie , qui date plus ou moins de la même époque (** M 46) . Cela dit, comme le remarque Armisen -Marchetti 3, t. I , p. XLVI ( cf. Regali 25, p. 9), cette interprétation encyclopédiste ne peut pas rendre compte de tout ce qu'est le Commentaire : « Tout d'abord , l'exposé des disciplines du quadriuium n'occupe

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qu'une partie de l'æuvre de Macrobe. Le début et la fin du Commentaire, soient les chapitres I , 7-14 et II , 12-17 , qui traitent de morale et de métaphysique, y sont étrangers. Quant à la position centrale des sections " scientifiques" au sein du Commentaire , elle ne traduit aucune prééminence, puisque le plan de l'ouvrage ne résulte pas d'une décision autonome , mais ne fait que se régler sur la progression du texte cicéronien ... Macrobe s'est assurément proposé de jeter un coup d'æil panoramique sur les disciplines scientifiques en se guidant sur le découpage en vigueur à son époque, mais la clé de son æuvre est à chercher ailleurs » . Armisen -Marchetti 3 , ibid ., trouve cette clé dans les dernières lignes du commentaire, où l'auteur célèbre la perfection du Songe du fait qu'il embrasse les trois parties de la philosophie : la morale, la physique et la logique. La hiérarchie de celles-ci serait organisée chez Macrobe selon la progression néoplatonicienne remontant à Porphyre ( cf. 95 P. Hadot, « La division des parties de la philosophie dans l'Antiquité » , MH 36, 1979 , p. 201-223 ) , selon laquelle l'éthique s'occuperait de la purification initiale de l'âme, la physique aboutirait à la recherche des réalités incorporelles, et la métaphysique ou théo logie assurerait la contemplation de Dieu (chez les néoplatoniciens la logique devient une contemplation de la vérité transcendante ). Armisen -Marchetti 3, t. I , p. XLVIII , cite à ce sujet notamment Comm . II 17 , 16. Macrobe aurait transferé à son Commentaire la même organisation qui conférait au Songe sa perfection: « Le propositum et le fil directeur du Commentaire consistent à faire parcourir au lecteur l'ensemble du champ de la philosophie tout en l'entraînant dans un cheminement spirituel ascendant, conformément à la pratique des écoles néo platoniciennes » (p. XLIX ). Parmi les contenus plus strictement philosophiques, nous rappelons les exposés déjà men tionnés sur la doctrine néoplatonicienne des trois hypostases (cf. Commentaire I 14, 5-7), ou le traité sur l'âme, comportant les traités sur les vertus, sur l'origine astrale de l'âme et sa descente sur terre, ainsi que sur l'emplacement des enfers et sur le suicide (ibid. I 8, 1 – 14, 20 ; cf. II 12-16, sur l'immortalité de l'âme) . Pour l'influence de Porphyre sur Macrobe, cf. aussi 96 A. R. Sodano, « Porfirio commentatore di Platone » , dans Porphyre, coll. « Entre tiens sur l'Antiquité classique » 12 , Vandæuvres -Genève 1966 , p. 193-228 , notamment p. 198-217 (cf. infra ). Selon cette interprétation d'Armisen -Marchetti 3, Macrobe n'aurait pas eu conscience d'avoir pris le texte du Songe comme un simple prétexte, mais il aurait été persuadé que Cicéron pouvait être envisagé comme le Platon latin : son Songe serait le pendant du mythe d’Er, comme sa République le serait de celle de Platon (cf. Armisen -Marchetti 3 , t. I , p . L ) . Enfin , Virgile serait aussi pour Macrobe le pendant latin d'Homère . Ce syncrétisme ne serait pas propre à Macrobe, mais il serait caractéristique du néoplatonisme postérieur à Plotin : « La diversité des systèmes philosophiques et l'évolution de la connaissance scientifique sont des notions étrangères à Macrobe et aux Neoplatoniciens de son époque, convaincus que la Vérité est une , absolue et connue de tout temps. Elle a été révélée depuis la plus haute antiquité à certains hommes de génie, qu'ils l'expriment de façon allégorique , comme Homère et Virgile, ou sur le mode dialectique, comme Platon ou Cicéron » ( ibid ., p. LI sq .).

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Pour un aperçu sur les sources philosophiques et scientifiques de Macrobe nous renvoyons à Armisen -Marchetti 3, t. I, p. LIV-LXVI . Nous nous bornons ici à mentionner les sources principales en ce qui concerne la tradition philo sophique . Macrobe se range en général dans la tradition platonicienne : outre Platon - a-t-il lu ou non directement ses textes ? -, il cite d'abord Plotin, qu'il met sur le même plan que Platon ( cf. Comm . I 8,5 ) , et l'utilise par exemple à propos de la classification des vertus ( ibid . ), contre l'idée du suicide raisonnable ( I 13 , 9-20) , sur le mouvement du ciel ( I 17 , 8-11 ), sur les présages (I 19 , 27) , etc. En réalité, comme le suggère Armisen -Marchetti 3, t. I, p. LVIII , Macrobe ne se sert pas toujours directement de Plotin , mais semble préférer plutôt la para phrase porphyrienne, quand elle existait . En fait, on s'accorde généralement pour voir en Porphyre la source principale de Macrobe (cf. par exemple Mras 77 ; Flamant 48 , et , de façon générale , la bibliographie citée par Armisen Marchetti 3 , t. I , p. LIV n. 126) . Comme le dit Guittard 26 , p. XIII , Macrobe explique Cicéron à la lumière du Timée de Platon et analyse le Songe à travers le Commentaire de Porphyre au Timée platonicien . Dans le cas de Porphyre, Armisen -Marchetti 3 , t. I , p. LIX , incline toujours pour une lecture directe de Macrobe : « Si Macrobe n'avait pas lu Porphyre, il faudrait une source inter médiaire, dont l'existence purement hypothétique fait encore plus de difficulté » . C'est à juste titre que l'hypothèse de 97 H. Linke , « Über Macrobius' Kommentar zu Ciceros Somnium Scipionis » , Philologische Abhandlungen, M. Hertz zum 70. Geburtstag, Berlin 1888 , p. 240-256 , selon laquelle Macrobe se serait borné à reproduire fidèlement et sans la moindre autonomie un prétendu commentaire latin ( contemporain) au Songe de Scipion, a été abandonnée aujourd'hui. Postérité. 98 M. Schedler, Die Philosophie des Macrobius und ihr Einfluss auf die Wissenschaft des christlichen Mittelalters, coll . « Beiträge zur Geschichte der Philosophie und Theologie des Mittelalters » 13 , 1 , Münster 1916, XII- 162 P. ; 99 M. D. McGaha, « Macrobius and Cervantes» , RLComp 53 , 1979, p. 462 470 ; 100 V. I. Ukolova, « Macrobe et son rôle dans la genèse de la culture médiévale » (en russe ), dans Les Balkans dans le contexte de la Méditerranée. Problèmes de la reconstitution des langues et des cultures, Moscow 1986, p. 73 74 ; 101 Id ., « Macrobe dans la culture médiévale » (en russe ), Srednije veka 52, 1989, p . 173-192 ; 102 C. Zintzen , « Bemerkungen zur Nachwirkung des Macrobius in Mittelalter und Renaissance » , dans M. Wissemann (édit. ) , Roma renascens : Beiträge zur Spätantike und Rezeptionsgeschichte. Ilona Opelt von ihren Freunden und Schülern zum 9.7.1988 in Verehrung gewidmet, Frankfurt am Main 1988 , p. 415-439 ; 103 D. Desrosiers - Bonin , « Le Songe de Scipion et le Commentaire de Macrobe à la Renaissance » , dans Le Songe à la Renaissance, Saint-Étienne 1990 , p. 71-81 ; 104 A. Hüttig , Macrobius im Mittelalter : ein Beitrag zur Rezeptionsgeschichte der " Commentarii in Somnium Scipionis ", coll . « Freiburger Beiträge zur mittelalterlichen Geschichte » 2, Frankfurt am Main 1990, 198 p. ; 105 M. Huglio, « La réception de Calcidius et des Commentarii de Macrobe à l'époque carolingienne » , Scriptorium 44 , 1990, p. 1-20 ; Armisen -Marchetti 3, t. I, p. LXVI- LXXII ( pour un rapport détaillé centré sur le Commentaire ) ; 106 D.F. Kelly , The conspiracy of allusion : description, rewriting, and authorship from Macrobius to medieval

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romance, coll . « Studies in the history of Christian thought » , Leiden 1999 , XIV 313 p. ; 107 C. Meyer, « La théorie des symphoniae selon Macrobe et sa diffusion » , Scriptorium 53 , 1999, p. 82-107 . Cf. aussi supra , la section portant sur la tradition manuscrite et les gloses, en début de la notice. Comme le dit Guittard 26 , p . XXV : « En interprétant Cicéron à travers le platonisme et Virgile à travers Homère, en passant en revue les disciplines de l'Enkyklios païdeia, en faisant revivre le passé de Rome , Macrobe a transmis, à son fils Eustathius d'abord , à la postérité ensuite , un héritage précieux, le legs d'un passé dont il redoutait la disparition. Par sa passion d'antiquaire érudit, par son amour de la Rome antique, Macrobe se situe dans la grande tradition qui va de Varron à Isidore de Séville en passant par Aulu-Gelle » . L'aperçu de Flamant 37 , p. 629 sq. , sur la postérité de Macrobe met suffisam ment en relief l'importance énorme de cet auteur : On trouve son æuvre men tionnée pour la première fois chez deux auteurs du ve-vie siècles : Boèce, in Isagogen Porphyrii commenta , p. 31 Brandt ( = ^ B 41 ) , et Cassiodore , Expos. ps . VIII 10, p. 96 Adriaen ( 2C 52 ) . La plupart de nos manuscrits remontent à l'époque carolingienne, et sont recopiés dans les siècles suivants. Macrobe, à côté du commentateur de Platon Calcidius ( 3C 12) , représente l'un des auteurs les plus lus au Moyen Âge : il est utilisé entre autres par Jean Scot Érigène (IXe siècle ) , par les platoniciens de l'école de Chartres ( fondée au Xe siècle , fl. XIIe siècle) , par Pierre Abélard (XIe siècle) et Thomas d'Aquin ( XIII° siècle ) . Flamant remarque le fait paradoxal que l'æuvre de ce païen désireux de tourner les yeux vers le passé qui était Macrobe ait bénéficié d'une si grande faveur au Moyen Âge chrétien. A la Renaissance , par ailleurs, on a publié une trentaine d'incunables de Macrobe, mais l'intérêt pour l'æuvre de celui-ci a commencé à décliner par la suite , pour disparaître pratiquement à l'époque des Lumières. Comme le remarque Stahl 35, p. 1 , c'est notamment à Macrobe (et à Martianus Capella ) qu'on doit la diffusion au Moyen Âge de la théorie de Cratès de Mallos ( 2 - C 203 ), selon laquelle la terre est divisée par deux anneaux océaniques en quatre zones habitées, l'æcou mène des Grecs ne représentant que le quart de l'espace émergé ; on lui doit aussi la diffusion de la mesure de la circonférence de la terre adoptée par Ératosthène ( ** E 52). Ces deux conceptions dominèrent au Moyen Âge la pensée scientifique dans le domaine de la géogra phie. PEDRO PABLO FUENTES GONZÁLEZ. MACROBIUS → EUDOXIUS (MACROBIUS PLOTINUS -) (E 102] 10 MAECENAS (GAIUS CILNIUS -) RE 6

ja

Né à Arretium en Étrurie ( la date exacte est inconnue, sans doute aux envi rons des années 704) et mort en 8a, Mécène était de rang équestre, mais issu d'une illustre famille de la noblesse étrusque ( le gentilice Cilnius est celui de sa famille maternelle), sans doute d'ascendance royale (cf. Horace , Odes III 29, 1 : Tyrrhena regum progenies, et Properce, Élégies III 9 , 1 : Maecenas, eques Etrusco de sanguine regum ) : les Cilnii ont régné à Arezzo au IVe siècle av . J.-C. Le premier citoyen romain connu portant le nom de Mécène est un chevalier cité par Cicéron dans le Pro Cluentio ( 56) : il s'agit d'un défenseur du peuple

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MAECENAS (GAIUS CILNIUS -)

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romain - père ou grand -père ( ? ) de Mécène - qui aurait contribué à réprimer la conjuration de M. Livius Drusus en 91 a. Très tôt, Mécène a joué un rôle de premier plan , aux côtés d'Agrippa, auprès d'Octave : sous des dehors ( faussement ?) nonchalants et en dépit de ses excen tricités , il fait preuve d'une efficacité et d'un sens politique remarquables: nommé préfet de Rome et de toute l'Italie en 36, lors de la guerre de Sicile contre Sextus Pompée , il use de ses exceptionnels talents de diplomate et de conciliateur lors de diverses négociations, notamment en 37 , entre Octave et Antoine (cf. Horace, Satires I 5 , 29 , qui relate le « voyage à Brindes » ) . Devenu conseiller intime du prince et exerçant le gouvernement en l'absence d'Auguste , il refusa toujours les dignités officielles, se contentant de son rang de chevalier, malgré les immenses pouvoirs politiques et administratifs qu'il détenait sur toute l'Italie : voir 1 J.-M. André, Le siècle d'Auguste, Paris 1974, p . 28-31 . Après avoir été longtemps « l'éminence grise » de l'empereur et lui avoir rendu de précieux services en déjouant à plusieurs reprises complots et conspirations, notamment celle de Lépide en 31 après la victoire d'Actium, malgré sa fidélité et son extrême vigilance , il tombe dans une demi-disgrâce dont on ignore les causes exactes , peut-être d'ordre privé ( sa femme Terentia, avec laquelle il formait un couple orageux, était la maîtresse de l'empereur), mais conserve sa fortune (dont une luxueuse demeure entourée de jardins sur l'Esquilin ) et l'amitié d'Auguste . Outre son rôle politique majeur dans la mise en place du principat - il était partisan d'une monarchie tempérée et semble avoir été influencé dans sa pensée politique par Philodème de Gadara, le maître de l'épicurisme campanien , voir 2 J.-M. André, Mécène. Essai de biographie spirituelle, Paris 1967, p. 82 -, Mécène contribua grandement à l'éclat littéraire du siècle d'Auguste en décelant et en protégeant les plus grands génies de son temps , au nombre desquels Virgile, Horace et Properce. Sans être un « ministre de la propagande » , il trou vait dans les poètes admis dans son cercle et bénéficiant de son aide un puissant soutien au régime et à l'ouvre de restauration morale entreprise par Auguste : voir 3 B. Gold ( édit.), Literary Patronage in Greece and Rome, Austin 1982, p. 3-27 et 115-172. Lui-même se piquait de littérature et a écrit plusieurs ouvra ges en prose et en vers dont il nous reste quelques fragments : épigrammes, dialogues, un Banquet, un Prométhée (tragédie ) et un De cultu suo , fragments cités par 4 R. Avallone, Mecenate, Napoli 1963 , et par André 2. Beaucoup, dont Sénèque ( lettres 19, 9 et 114, 4-8 ) – qui ne le ménage pas et le qualifie de discinctus ( lettre 114 , 4) , « sans ceinture » , signe évident de mollesse et de meurs relâchées et Quintilien (IX 4, 28 ) , ont critiqué son style précieux et maniéré : voir 5 A. Setaioli , « Séneca, Epicuro y Mecenas » , dans Séneca, Dos Mil Años Despues, Actas del Congreso Internacional Conmemorativo del Bimilenario de sa Nacimiento , Cordoba 1997 , p . 563-576, 6 R. Avallone , « Mecenate : uomo, scrittore , inspiratore » , RSA 25 , 1995 , p. 133-141 , et 7 G. Lieberg, « Mecenate letterato » , BStudLat 26, 1996, p. 9-18 . En ce qui concerne les orientations philosophiques de Mécène , son épicu risme n'a guère été mis en doute , bien que les interprétations divergent quant à

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MAECENAS (GAIUS CILNIUS -)

M 10

la nature exacte de celui-ci . J.-M. André 2, p. 15-61 , en propose une étude nuan cée et penche pour un épicurisme « romain » , à tendance hédoniste, en accord avec celui des cercles de Campanie qu'il avait fréquentés, et qui n'interdit ni la poésie, ni l'action politique ; s'il ne faut pas s'attendre à retrouver chez lui la doctrine pure et austère de Lucrèce, il souligne « la complicité épicurienne » , 2, p. 22-26 et 131-132 , qui lie Mécène au Virgile des Géorgiques, poème dont il a encouragé la composition . J.-M. André s'appuie sur l'étude des fragments, en dépit de leur caractère très parcellaire, pour tenter de cerner plus précisément ses conceptions : 8 Id ., « Mécène écrivain » , ANRW II 30, 3 , 1983, p. 1765-1785, en particulier p. 1770-1775 : « Les Fragments, miroir d'une âme... » . 9 J. Ferguson « Epicureanism under the Roman Empire » , ANRW II 36, 4, 1990 , p. 2263- 2265, ne met pas non plus en doute l'authenticité de cet épicurisme et, malgré le goût des plaisirs et du luxe dont Mécène a toujours ouvertement fait preuve, se refuse à y voir un simple épicurisme sociologique : son amitié pour Horace (cf. Satires II 6 , Odes II 29, III 16, IV 11 et Épodes I), qu'il avait rencontré en 39 à l'insti gation de Virgile, atteste la force de ses liens avec la doctrine du Jardin , de même que son indifférence à la sépulture ( cf. le vers cité par Sénèque dans la lettre 92, 35 : nec tumulo curo : sepelit natura relictos), son humanité et sa modération (c'est lui qui , à plusieurs reprises, a incité Auguste à la clémence ). Personnalité complexe et originale, intelligence hors du commun, Mécène a suscité beaucoup d'analyses et d'interrogations. Pour un bilan plus détaillé de ces études, voir 10 W. Evenepoel, « Maecenas : a survey of recent literature » , AncSoc 21 , 1990 , p. 99-117 , et 11 L. Graverini, « Un secolo di studi su Mece nate » , RSA 27 , 1997 , p. 231-289 ( bibliographie sur le personnage, son cercle, ses rapports avec l'épicurisme, sa production poétique, et sur les élégies qui lui ont été dédiées, les Elegiae in Maecenatem ). Cf. 12 A. Kappelmacher, art. « Maecenas » 6, RE XIV 1 , 1928 , col. 207-229 . RÉGINE CHAMBERT. 11 MAGNILLA D'APOLLONIA

ép. imp.

Magnilla, qui porte le titre de philosophe dans une inscription d'Apollonia de Mysie (IGR 4 125 ) était aussi femme et fille de philosophes ; pas plus que son père Magnus ( ** M 12) et que son mari Mènios ( ** M 128 ) , elle ne semble connue par ailleurs. BERNADETTE PUECH . 12 MAGNUS D'APOLLONIA

ép. imp.

Ce philosophe d'Apollonia de Mysie n'est connu que par l'inscription de la statue de sa fille Magnilla [ PM 11 ) ( IGR IV 125 ) . BERNADETTE PUECH . 13 MAGNUS DE NARBONNE RE 20 PLRE II : 2

MF V

Ami de Sidoine Apollinaire qui , dans la lettre dédicatoire de l'Épithalame philosophique composé pour les noces de Polémius [ RE 5 ; PLRE II : 2 ) et d'Aranéola (RE ; PLRE II : ) , avant 460, se réclame de ce consul honoraire, ainsi

M15

MALIÔN DE DARDANOS

245

que de Domnulus ( 2D 220) et de Léon ( L 34), pour affirmer que « la musique et l'astronomie (astrologia ), branches de la philosophie qui viennent après l'arithmétique, ne peuvent en aucune façon être rendues intelligibles » sans des termes grecs comme « centre, proportion, intervalles, inclinaisons et segments » ( Carm . XIV 2 ) . Sa bibliothèque est évoquée par Sidoine ( Carm . XXIV 90-94 ). Magnus était le père d'Aranéola . Pour un stemma de toute cette famille , voir PLRE II , stemma 15 (p. 1318) . Il fut Préfet du prétoire des Gaules en 458-459 et consul en 460. Il est mentionné plusieurs fois dans les lettres et les poèmes de Sidoine (Carm . V 558-561 ; XV 150-157 ; XXIII 455-463 ; Epist. I 11 , 10-11 ). Cf. K. F. Stroheker , Der senatorische Adel im spätantiken Gallien , Tübingen 1948 , réimpr. Darmstadt 1970 , 140 p . , Anhang : Prosopographie zum senato rischen Adel im spätantiken Gallien, p. 137-27 , nº 232 , p. 190 ; R.S. Bagnall , A. Cameron , S. R. Schwartz , K.A. Worp, Consuls of the Later Roman Empire, coll . « Philological monographs of the American philological association » 36 , Atlanta (Georgia) 1987, p. 454-455 . RICHARD GOULET. 14 MAGNUS LE GÉOMÈTRE Ses vues sur la République de Platon , qui “paraphrasaient" celles de Nicolaos ( 2 ° N 44 ), sont rapportées par Proclus dans son propre Commentaire sur le discours des Muses dans la République ( 13e dissertation ), II , p . 25 , 27 - 26, 14 Kroll ("Ότι και Νικόλαος και Μάγνος ο γεωμέτρης τα Νικολάου παρα φράζων δόξαν την αυτήν έσχον...).. Leur interprétation est proposée après celles de Cronius ( C 223 ), de Démétrius le géomètre ( D 61 ), maître de Porphyre, de Sosigène, maître d'Alexandre d’Aphrodise (* A 112), et de Dercylide (-D 87), ce qui ne permet de déduire aucune datation . Absent de la RE, à moins qu'il ne faille envisager un rapprochement avec le mathé maticien Magnès connu par Eutocius (in Archim ., p. 258 , 28 Heiberg ) ou le géomètre Theudios de Magnésie mentionné par Proclus ( in Euclid . p. 67 Friedlein ). Cf. L. Orinsky, art. « Magnes » 4, RESuppl. VI, 1935 , col. 237. RICHARD GOULET.

15 MALIÔN DE DARDANOS Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique , V. pyth. 36, 267 ; p. 145 , 13 Deubner. [Le dernier éditeur du traité de Jamblique Sur le mode de vie pythagoricien, L. Deubner, a établi, avec des arguments solides, qu'il ne faut pas lire ici, avec A. Nauck, Aapdaveús, Mariwv (séparés par une virgule ), comme étant les deux derniers noms de la liste des Lucaniens qui précède, mais y voir plutôt un cas à part d'un seul Aapdavevç ( ethnique désignant un citoyen originaire de Dardanos (cité située près de l’Hellespont]), qui serait appelé Mariwv; voir Bemerkungen zum Text der " Vita Pythagorae" des lamblichos, Berlin 1935 , p. 76 = SPAW 1935 / 19, p. 685 = ld. ( éd . O. Deubner ), Kleine Schriften zur klassischen Altertumskunde, Königstein / Ts. 1982, p. 544 ). On ne sait strictement rien sur ce personnage . C.M. )

BRUNO CENTRONE . MAMERTUS

CLAUDIANUS MAMERTUS (C 132]

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MAMMARION

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IV-III

16 MAMMARION

Comme Hédeia ( 2 - H 14) , Érotion ( »E 55) et Nicidion (> * N 40 ), hétaïre du Jardin d'épicure selon un témoignage hostile , mais sans doute véridique sur ce point , rapporté par Diogène Laërce X 7. Sur les hétaïres du Jardin , voir DPHA III , 2000 , p. 169. Comme ceux d'Hédeia, de Nicidion et de Boïdion, son nom apparaît sur des inscriptions du IVe siècle à Athènes. Voir C.J. Castner, « Epicu rean hetairai as dedicants to helping deities ? » , GRBS 23 , 1982 , p. 51-57 . Absente de la RE. RICHARD GOULET .

17 MANAICHMOS D’ALOPÉCONNÈSE RE 2 Philosophe platonicien originaire de la Thrace , pratiquement inconnu . Cf. 1 M. Baltes & M.-L. Lakmann , art. « Manaichmos » , NP VII , 1999, col . 788 ; 2 H. Dörrie & M. Baltes (édit. ) , Der Platonismus im 2. und 3 . Jahrhundert nach Christus : Bausteine 73-100 : Text, Übersetzung, Kommentar, coll . « Der Platonismus in der Antike » 3 , Stuttgart /Bad Cannstatt 1993 , p. 46-47 et 203 n . 4 . La Souda , s.v. Mávalxuoc (M 140 ), t. II , p. 317 , 32 - 318 , 2 Adler = test. Dörrie & Baltes, C 4 n° 80, 13 , p. 46-47 (comment. p. 203 n . 4) , mentionne un Manechme d'Alopéconnèse ( 'AlwnEXOVVÝoloC ) ou, selon d'autres, de Procon nèse ( Ilpotxovvolos ) comme philosophe platonicien qui aurait écrit des æuvres philosophiques ( Éypade piógopa ) , et un commentaire sur la Républi que de Platon , en trois livres (siç tàç Mátwvoç Moditelaç Bißala y) . Alopé connèse était une ville dans la Chersonnèse de Thrace ; Proconnèse ( l'île de Marmara) était dans la Propontide ( mer de Marmara ), à peu de distance d'Alopéconnèse. Manechme n'est pas mentionné ailleurs (à l'exception de la pseudo - Eudocie ( » E 96 ), qui suit ici sans doute la Souda ). En effet, c'est à tort que 3 K. Fiehn, art. « Menaichmos » 2, RE XV 2 , 1932 , col. 699-700, notamment col. 700 , voulait l'identifier avec le Ménechme cité par l'Anonyme de Ménage (Gilles Ménage, 1613-1692) à propos d'un titre de la liste des écrits d'Aristote dans D.L. V 26 ( cf. 4 H. G. Hübner (édit. ) , De vitis, dogmatis et apophthegmatis clarorum philo sophorum libri decem , t. III : Commentarii, t. I, Leipzig 1830, réimpr. Hildesheim /New York 1981 , t. I, p. 610) : selon Ménage (dont le catalogue anonyme remonterait à Hesychius de Milet ( 2H 113 , p. 679] ) , l'ouvrage Vainqueurs aux Jeux Olympiques I d'Aristote l'aurait emporté sur celui de Ménechme (sur le même sujet) : Mudiovizas Bibliov a ' , Év MÉvaixMov Évíxnoe ( > * A 414 H 123 ). Mais du fait qu'on ne possède pas d'autre attestation de ce renseignement, Fiehn 3, ibid. , conclut que le passage est corrompu (cf. infra ). Il juge aussi que le Ménechme en question ne peut être autre que Ménechme de Sicyone, l'historien d'Alexandre ( cf. 5 R. Laqueur, art. « Menaichmos » 1 , RE XV 2, 1932, col. 698-699 ), dont le NUOLYÓS (scil. Nóyoc ), un ouvrage historique nepì ávóvwv, aurait été, d'après l'hypothèse de 6 V. Rose, Aristoteles Pseudepigraphus, Lipsiae 1863, réimpr. Hildesheim /New York 1971 , p. 547 , faussement introduit dans D.L. V 26 comme un ouvrage d’Aristote en connexion avec le livre sur les Jeux Pythiques de celui-ci, qui suit dans la liste. Considérant que l'expression Év ~ MÉvaixuov Évíxnoe que l'on trouve dans l’Anonyme de Ménage n'a pas de sens, il suggere qu'il faudrait y lire plutot quelque chose comme πυθικόν δν ένιοι Μεναίχμου (είναι φασι ?). Il va sans dire qu'une telle reconstitution semble bien trop osée . Plus récemment, 7 I. Düring (édit. ) , Aristotle in the ancient biographical tradition, Göteborg 1957 , réimpr.

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MANAICHMOS D’ALOPÉCONNÈSE

247

coll. « Greek & Roman Philosophy » 13 , New York 1987 , p. 86 , en plus de suggérer ( app . crit.) simplement de lire llvlovix v au lieu de Ilvēlovíxac, considère ( p. 90) en faveur du témoignage sur Ménechme qu'il s'agit bien d'une glose ancienne , probablement une note faite par le libraire qui dressa le Pinar originaire : « This is the book by which he [ scil. Aristote) defeated the corresponding book of Menaechmus » . Par ailleurs , Fiehn 3 , ibid. , suggère que le Ménechme que l'on trouve mentionné chez Photius, Bibl. cod. 167 p. 114 b 8 , pourraît s'identifier également avec le platonicien. Mais comme dans ce passage on ne trouve qu'un nom dans une liste de philosophes, cette hypo thèse se révèle également trop douteuse (cf. Baltes & Lakmann 1 ). Quant à l'identification du philosophe platonicien avec l'historien de Sicyone , elle semble manifestement à écarter , indépendamment du fait que l'identification de l'historien avec le personnage cité par Ménage paraît vraisemblable (cf. aussi à ce sujet 8 C. & T. Müller, FHG , t . II , p. 182 ; 9 F. Susemihl , GGLA, t. I , p. 532 ; 10 S. Hornblower, art. « Menaechmus » 1 , OCD3 1996, p. 956 ). Les critiques actuels considèrent également que le Manechme d'Alopéconnèse philosophe platonicien de la Souda ne doit pas non plus être confondu avec le mathématicien Ménechme (> M 150) ami de Platon et disciple d'Eudoxe de Cnide ( lequel enseigna un temps à Cyzique, non loin d'Alopéconnèse ; »» E 98 , p. 296 ) . Cette identification remonte à 11 T.-H. Martin (édit. ), Theonis Smyrnaei Platonici liber de astronomia, cum Sereni fragmento ..., Textum primus edidit, latine vertit, descriptionibus geometricis, dissertatione et notis illustravit T. H. M. , Paris 1849 , réimpr. Groningen 1971 , p. 59-60, et elle a été reprise par 12 F. Lasserre (édit. ), De Léodamas de Thasos à Philippe d'Oponte : témoignages et fragments, coll . « La Scuola di Platone » 2 , Napoli 1987 , p. 546 sq. (cf. T2 , p. 117 Lasserre ; aussi 13 G. J. Allman , Greek geometry from Thales to Euclid, coll . « Dublin University Press series » , Dublin/ London 1889, réimpr. coll . « History of Ideas in Ancient Greece » , New York 1976, p. 153 ; 14 1. Bulmer-Thomas , art. « Menaechmus » , DSB IX , 1974 , p . 268-277 , notamment p . 269) . Or, comme le remarquent Dörrie & Baltes 2 , p . 203 n . 4 ( cf. Baltes & Lakmann 1 ) , les arguments principaux contre cette identification sont: (a ) que le Manaichmos de la Souda est présenté comme philosophe platonicien ; ( b ) que , d'après la Souda, il a écrit seulement des pinóoopa , non pas des uaOnuatixá. Il faut rappeller que 15 M. C. P. Schmidt , >> 106, Hildesheim 1990, 502 p . ; 9 P.J. del Real Francia ( édit . ) , Lexicon Mani lianum , coll . « Alpha-Omega , Reihe A , Lexica, Indizes , Konkordanzen zur klassischen Philologie » 193 , Hildesheim 1998 , V - 583 p . Sur la transmission et l'histoire du texte , voir 10 Anna Maranini, Filologia fantastica. Manilio e i suoi " Astronomica " , Bologna 1994 , 476 p . Études d'orientation et bibliographie : 11 C. Salemme , Introduzione agli Astronomica di Manilio, Napoli 1983 ' , rapide mais essentiel , fournit à la fois une présentation philosophique et littéraire , accompagnée d'une bibliographie critique presque exhaustive de la philologie conduite pendant un siècle ; la seconde édition ( 2000 ') cependant ne s'enrichit que d'une mise à jour non criti que et non exhaustive de la bibliographie la plus récente. Les travaux les plus nombreux et les plus importants ont porté sur l'astrologie : sur les sources, le système exposé par Manilius et la mise en ouvre poétique, il faut se référer à 12 W. Hübner, Die Eigenschaften der Tierkreiszeichen in der Antike . Ihre Darstellung und Verwendung unter besonderer Berücksichtigung des Manilius, Wiesbaden 1982 ; 13 Id ., « Manilius als Astrologe und Dichter » , ANRW II 32 , 1 , 1984, p. 126-320. Curieusement, les questions que posent les Astronomiques dans l'histoire des idées et de la philosophie sont rarement traitées ou évoquées . Que le poème porte l'empreinte du stoïcisme est communément admis : à la bibliographie donnée par Salemme 11 , p. 158 , on peut ajouter, pour mémoire, 14 C. Huit, « Le stoïcisme dans Manilius » , L'Instruction publique, 1884 , p. 130-132 et 143-145 ; 15 G. Lanson, De Manilio poeta ejusque ingenio, Thèse, Paris 1887 , p . 29-53 . L'attention a généralement porté sur la source philosophique , longtemps identifiée à Posidonius: cf. Salemme 11 , p . 158. Seules deux thèses (dactylo graphiées) ont tenté une amorce de synthèse : 16 F.-F. Lühr, Ratio und Fatum , Dichtung und Lehre bei Manilius, Diss . Frankfurt 1969, et 17 A. Reeh, Interpre tationen zu den Astronomica des Manilius, mit besondere Berücksichtigung der philosophischen Partien , Diss . Marburg 1973 . Intérêt philosophique. L'importance des Astronomiques tient à plusieurs raisons : ( 1 ) La date. Le poème tel qu'il se présente est le premier exposé d'astrologie qui nous soit parvenu sous une forme cohérente , sinon complète ( il manque

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MANILIUS

M 19

notamment un ou plusieurs chapitres sur les planètes ) . Il marque le début d'une production considérable et méconnue d'écrits divers : manuels, traités ou poèmes qui foisonnent à partir du début de notre ère , cf. 18 W. et H. G. Gundel , Astrologumena. Die astrologische Literatur in der Antike und ihre Geschichte, Wiesbaden 1966 ( sur Manilius, p . 141-146 ) . À travers cette littérature ( si l'on peut employer le terme , 19 R. Turcan , « Littérature astrologique et astrologie littéraire dans l'Antiquité classique » , Latomus, 27 , 1968 , p. 392-405 , C.-r. de 18 ) transparaît l'emprise des dogmes astraux sur la vie , la pensée ou les religions du monde gréco- romain . Or, les Astronomiques contiennent en quelque sorte en germe les idées et les croyances qui vont fleurir dans les siècles suivants, dans la vie des individus comme dans les spéculations philosophiques .

DI

( 2 ) Le genre littéraire: grâce à son poème didactique, l'auteur se donne pour mission de transmettre une science , la connaissance du destin dont dépendent les vies des hommes . L'enseignement de l'astrologie ( apprendre à lire les décrets des astres ) est inséparable d'une démarche philosophique et religieuse, 20 A.J. Festugière, La Révélation d'Hermès Trismégiste, t . II : Le dieu cosmi que , p. 233. De ce point de vue , les Astronomiques soutiennent la comparaison avec les Géorgiques : au poème de la terre , dans lequel les préceptes de l'agriculture sont l'occasion d'une réflexion sur l'homme, sur les lois qui le lient à la terre et sur les enseignements moraux et sociaux qu'il en tire, répond le poème du ciel , où l'apprentissage d'une technique ( savoir déchiffrer la trame des étoiles ) suppose nécessairement de découvrir le lien qui unit l'homme au ciel . Dans les deux cas la structure est comparable : la transmission d'une technique est encadrée par une réflexion philosophique contenue essentiellement dans les prooemia et les épilogues . Il s'agit donc bien d'un poème didactique muni d'un encadrement philosophique et non pas d'un poème philosophique ( De Fato ou Les Destinées... ) illustré par l'astrologie . Pourtant, plutôt qu'avec les Géorgi ques, c'est avec le De rerum natura que les Astronomica ont été comparés le plus souvent tant l’antithèse poème stoïcien / poème épicurien est séduisante . ( 3 ) Sa place à l'intérieur du stoïcisme. Bien que l'auteur ne se réclame pas explicitement du Portique, son orientation philosophique ne fait aucun doute. D'abord, de façon négative , à travers les passages polémiques : les seules attaques du poème sont clairement dirigées contre l'épicurisme dont Manilius souligne les absurdités en matière de cosmologie , sur l'origine du monde ( I 128 131 ) , sur le mouvement des astres ( I 182-189 ) ; dans l'attaque la plus vigoureuse ( I 483-531 ) , au hasard des atomes qui s'agrègent ou se dispersent il oppose, à l'aide d'une marqueterie de termes empruntés à Lucrèce , sa propre vision d'un univers où tout est mouvement , ordre et régularité , où tout est dieu , 21 J.-H. Abry, « Les Astronomiques de Manilius » , dans R. Poignault (édit. ) , Présence de Lucrèce , Tours 1999 , p. 111-128 . En revanche , les points de doctrine que développe l'auteur, notamment dans le chant 1 , véritable exposé de cosmologie, relèvent des certitudes scientifiques communes à la plupart des écoles , qu'il s'agisse de la sphéricité du monde , clos par le ciel au-delà duquel il n'y a rien ( 1 534-536 ) , de la position de la terre, au milieu et au bas de l'univers , dont la sphéricité est prouvée par le mouvement

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des planètes, par les éclipses de lune et par les variations des apparences célestes ( I 173-235 ) ; mais la physique est aussi une théologie nettement stoïcienne : ce monde, dans lequel tous les mouvements s'opèrent selon un ordre et une régula rité parfaites ( I 473-531 ) , est un être vivant , un organisme gigantesque ( II 66 corpus animale ), gouverné par la providence qui assure la cohésion de toutes les parties; animé par un souffle qui parcourt chaque membre , obéissant à une raison universelle, il est dieu lui-même ( II 60-69). Sur la pensée et le vocabulaire stoïcien de Manilius , cf. 22 M. Lapidge , « Lucan's imagery of cosmic dissolution » , Hermes 107 , 1979 ( sur Manilius p. 355-357 ) ; 23 Id ., « A Stoic Metaphor in Late Latin Poetry : the Binding of the Cosmos » , Latomus 29, 1980 , p. 817-837 ; 24 Id ., « Stoic Cosmology and Roman Literature, First to Third Century A.D. » , ANRW , II 36 , 3 , 1989 ( sur Manilius, p . 1393-1397 ) . De même la diakosmèsis des éléments reflète la doctrine stoïcienne selon 25 G. Luck, « A Stoic Cosmogony in Manilius ( I 149-172 ) » , dans E. Lucchesi et H. D. Saffrey (édit. ) , Mémorial A.-J. Festugière, coll . « Cahiers d'orientalisme » 10 , Genève 1984 , p . 27-32. Tout aussi stoïcienne est l'anthropologie développée à deux reprises (II 105 108 et IV 896-910) : l'homme se distingue des autres espèces animales par la parole et par l'exercice de la raison qui l'apparente à la raison universelle ; formé à l'image du monde à partir des quatre éléments, il est le microcosme image du macrocosme, le rejeton modelé à l'image de la divinité . C'est pourquoi il a pu sortir progressivement de son état premier de grossièreté, ses capacités inven tives se sont peu à peu développées au service de la communauté pour créer les techniques , outils de la civilisation ( I 79-105 ) . De même, la structure sociale de l'État est calquée sur la cité céleste et les classes à Rome reproduisent la hiérar chie céleste des étoiles ( V 734-742 ) , 26 J.-H. Abry, « Les catalogues d'étoiles : de l'astronomie descriptive à la République céleste » , Actes du XXVIII Congrès A.P.L.A.E.S. , Saint- Étienne, 1995 , p. 77-95 . À côté de la doctrine ainsi résumée rapidement, d'autres traits, déjà caracté ristiques du stoïcisme impérial, apparaissent dans les Astronomica. D'abord l'insertion de développements scientifiques importants mais qui relèvent, à l'époque, de la culture générale plus que d'une information neuve et poussée : rompant avec le modèle que sont les phénomènes d'Aratos ( > A 298 ) , Manilius consacre un chapitre entier ( 1 561-683 ) aux différents cercles qui for ment les coordonnées célestes ( cercles parallèles, obliques ou droits) et terrestres (horizon et méridien ) ; les variations corrélatives des apparences célestes et du temps selon les latitudes terrestres, des régions équatoriales au pôle, font l'objet d'un long excursus ( III 301-384 ) destiné à illustrer les difficultés du calcul de l'horoscope ; enfin la chorographie zodiacale du chant IV est précédée d'une présentation de l'oikoumène qui est la première description complète de l'orbis terrarum qui nous soit parvenue en langue latine, 27 J.-H. Abry , « Une carte du monde à l'époque d'Auguste , Manilius , Astronomiques , IV , 585-817 » , dans A. Bonnafé , J.-C. Delcourt et B. Helly (édit. ) , L'espace et ses représentations, coll . « Travaux de la Maison de l'Orient Méditerranéen >> 32 , Lyon 2000, p . 83 112. Si l'on excepte la carte du monde, les notions de cosmologie et d'astro

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nomie mathématique exposées aux chants I et III offrent des similitudes impor tantes de contenu et de forme avec les paragraphes correspondants de la Théorie élémentaire de Cléomède ( C 162 ), elles proviennent de toute évidence de la même origine et servent à la même fin : utiliser une information scientifique, sérieuse mais scolaire et vulgarisée, la culture astronomique élémentaire connue d'un public honnêtement cultivé , dans l'esprit des Introductions. Ensuite, le refus de prendre position sur des points controversés de cosmolo gie : rien sur l’ekpurosis et , pour les questions trop incertaines, des doxogra phies : I 122-146 : l'origine de l'univers (avec un scepticisme affiché en conclu sion , 146 quod latet) ; 1 716-761 : la Voie Lactée ; 1 813-875 : les comètes . Mais le rappel du dissensus des physiciens est surtout tactique : il permet de mieux souligner le consensus entre les écoles de philosophie à propos de la diakosmèsis ( I 147-170 ) ou de mettre fortement en lumière l'explication que privilégie Manilius ( la Voie Lactée , séjour des âmes qui ont bien mérité : souvenir du Songe de Scipion ; les comètes , signes envoyés par la divinité ). Ou encore des emprunts à d'autres écoles , notamment au platonisme pour ce qui concerne la destinée de l'âme , évoquée de façon bien rapide , I 758-761 et IV 886-887 , 28 J.-H. Abry, « Genitique accedimus astris ... Un point de vue stoïcien sur les origines de l'homme » , dans J.-M. Galy et A. Thivel ( édit .), Les Origines de l'homme d'après les Anciens, coll. « Publications de la Faculté des Lettres de Nice >> 46 , Nice 1998 , p. 182-196, trahissent l'éclectisme . Enfin , certains thèmes de la pensée stoïcienne subissent des inflexions sensi bles : si l'ordre du ciel , immuable et éternel, est évoqué à plusieurs reprises, l'émerveillement devant la beauté du monde fait place à une sorte de mélancolie face aux changements et aux mutations qui affectent la terre ( I 507-517 ; IV 821 839) ; et le pessimisme, l'amertume violente éclatent face à la haine, aux guerres, au désordre et au mal trop souvent répandus dans les vies des hommes (II 579 607 ; 635-641) ; or les vicissitudes que nous attribuons aux caprices de la Fortune viennent de l'influence des astres ( IV 69-85 ; 91-105 ) . Reste une question essentielle, la place réservée à l'astrologie à l'intérieur du stoïcisme et la façon dont Manilius traite la question du destin. L'idée que le stoïcisme , seul parmi les écoles de philosophie , a intégré l'astrologie parmi les arts divinatoires et qu'il y eut une « alliance naturelle» entre les deux a été maintes fois répétée depuis 29 A. Bouché -Leclercq, L'astro logie grecque , Paris 18991 , p . 24 ; Posidonius aurait fortement contribué à l'adoption de cette forme de mantique venue d'Orient et les Astronomiques porteraient la marque de sa pensée. Cependant la démonstration n'a jamais été véritablement faite , faute de points de repère historiques précis marquant l'acclimatation de l'astrologie dans le monde hellénistique et son introduction dans le stoïcisme, cf. la mise au point très juste de 30 A. A. Long, « Astrology: arguments pro and contra » , dans J. Barnes et alii (édit . ) , Science and Specula tion, Studies in Hellenistic Theory and practice, Cambridge /Paris 1982, p . 165 192 , suivie par 31 A.M. Ioppolo , « L'astrologia nello stoicismo antico » , dans G. Giannantoni et M. Vegetti ( édit. ) , La Scienza ellenistica , coll . « Elenchos » 9, Napoli 1984 , p . 75-91 ( sans référence aux Astronomiques) ; mêmes conclusions

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prudentes de 32 G. Giannantoni, « Criticò Carneade l'astrologia stoica ? » , Elenchos 15 , 1994, p. 201-218. Or, s'il est un texte qui permet de jeter quelque clarté sur la place que le stoïcisme a pu faire à l'astrologie, ce sont bien les Astronomiques, rarement examinés pourtant, et sévèrement jugés : « here we have ' hard ' astrology with a veneer of philosophy » (Long 30 , p. 187 ) . Il faut se contenter de signaler ici quelques idées : L'auteur distingue fortement les autres arts divinatoires ( I 91-95 ; IV 911 914) autorisés et couramment pratiqués, de l'astrologie dont la fin est d'une tout autre nature . De fait, les Astronomiques ne proposent pas de connaître l'avenir réservé à chacun (mariage, maladies, épreuves, date ou genre de mort ), prédic tions que les clients attendent généralement des astrologues ; tout au plus la connaissance des caractéristiques des signes du zodiaque permet-elle de savoir ( chants IV et V ) quels seront les goûts (studia ) , les aptitudes ( artes ) ou les dispositions morales des individus (mores) , ce qui était précisément la concep tion de Diogène de Babylonie [ PD 146] ( Cicéron, Div. II 90 ). Comment les astres exercent-ils leur action sur les hommes ? La démonstra tion , banale , ( II 82-104 : action du soleil sur les saisons , action de la lune sur les marées et les coquillages, et, d'une façon générale , sur le comportement des animaux ) use des mêmes arguments que Cicéron (Div. , II 33 et 98 ) ; elle a de bonnes chances de venir de Posidonius ( F 106 E.-K. ) et se résume à l'affirma tion du lien , de la sympathie qui unit l'homme au ciel . Cette action s'exerce de façon mécanique et totale : les astres , êtres animés, déterminent absolument les vies des hommes et les destinées des peuples (ut vitas ac fata ministrent / gentibus ac proprios per singula corpora mores , II 85 86 ) et rien n'échappe à ce fatalisme absolu : fata regunt orbem ( II 14 ) ; « Sirius fait les guerres et ramène la paix ... de son visage il gouverne le monde » (I 405 406 ), le Bélier donnera (dabit) des âmes portées aux rapines (IV 508 ) , l'Épi engendre ( ingenerat, V 272) agriculteurs, meuniers et boulangers, il fera ( faciet) les décorateurs ... Cependant, la pensée n'est pas très cohérente et la « hard astrology » (Long 30) n’exclut pas une doctrine plus « soft » lorsque le poète fait appel à d'autres sources : les comètes sont les signes que la divinité envoie aux hommes ( I 874-875 ) . À cette exception près, l'être humain est pris dans un déterminisme implacable, il vit les dispositions bonnes ou mauvaises qu'il tient des astres, condamné à faire le mal s'il naît sous une mauvaise étoile , sans pou voir échapper à son destin funeste : « détestons plus encore les individus pervers, nés pour commettre des fautes et pour être châtiés » , comme les plantes véné neuses doivent être détruites même si elles n'ont pas choisi de porter le poison (IV 110-117). Puisque la volonté est impuissante , que faut-il attendre de la connaissance des astres, est -elle seulement utile si le destin est inévitable ? Le prooemium et l'épilogue du chant IV , particulièrement dramatiques, donnent la réponse qui est d'ordre moins philosophique que religieux : seule , la certitude du déterminisme absolu délivre l'homme des angoisses qui sont les siennes et le conduit, plutôt qu'à une forme d'ataraxie, d'acceptation ou d'adhésion au destin , au désir de connaître plus profondément la divinité présente dans toutes les parties du

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monde , donc en l'homme même . Ce désir passionné de connaissance, qui prend véritablement la forme d'une quête religieuse ( quod quaeris deus est, IV 390) est la fin à laquelle tend l'homme à travers l'astrologie. Les hymnes à la divinité du monde ( 1 247-254 ; II 60-66 ) font place au chant IV à un dialogue presque mystique entre l'homme qui doute de ses forces face aux difficultés de la connaissance et un dieu qui sollicite le regard, qui se cache et se révèle à la fois afin que l'homme prenne la pleine conscience de sa nature . Là encore une étude attentive des idées et du vocabulaire peut saisir dans les Astronomiques l'amorce de l'Hermétisme philosophique. JOSÈPHE -HENRIETTE ABRY. MANIPPOS + MARSIPOS (M 44 ] 20 MANILIUS VOPISCUS (P.-) RE 31 PIR2 M 107

I

Études : 1 M. Fluss , art. « P. Manilius Vospiscus » 31 , RE XIV 1 , 1928 , col . 1143-1144 ; 2 C. Castner, Prosopography, p. 38-39 . Le nom même de P. Manilius Vopiscus n'est nulle part attesté dans sa totalité ; Stace mentionne un Manilius Vopiscus ( Silu . I , prooem . 34 ) et le prénom est restitué à partir d'une inscription de Tibur, concernant son fils P. Manilius P. filius Vopiscus (CIL XIV 4242 = Dessau 1044 ). Il est sans doute le fils du consul suffect de 60 ( Sénèque , Quaest . Nat. VII 28 , 2 ) et le père de P. Manilius Vopiscus , consul en 114. Lui - même ne semble pas avoir fait de carrière politique ; ou peut-être faut- il penser à une carrière commencée sous Vespasien et arrêtée sous Domitien ( 3 A. Hardie , Statius and the « Silvae » : Poets, Patrons and Epideixis in the graeco - roman world , Liverpool 1983 , p. 68 69 ) . Nous ne connaissons ce personnage que par Stace. Le poète consacre une de ses Silves ( 1 3 ) à la description de la villa possédée par Manilius Vopiscus à Tibur. Il décrit la beauté du cadre et la richesse de la demeure . Dans cette retraite , Vopiscus composait des poèmes ( I 3 , 22-23 ; 99-104 ) et l'épître dédica toire présente Vopiscus comme un « homme d'une très grande science et qui plus que tout autre défend contre l'abandon les lettres déjà presque en fuite » ( Silu . I , prooem . 26-27 ) . Manilius Vopiscus est en général considéré comme un épicurien ( Fluss 1 ; Castner 2 ; Hardie 3 , p . 176-179 ) . Certes, cette appartenance n'est nulle part mentionnée explicitement dans la Silve 1 3 , mais elle est indiquée implicitement à travers les thèmes développés et le vocabulaire utilisé. Le poète évoque en ces termes la sagesse du propriétaire : « Évidemment c'est ici que ta sagesse médite des questions de poids ; c'est ici que se retirent un repos fécond, une vertu profonde à l'air serein , une élégance de bon ton et un bien - être qui ignore le luxe ; le vieillard de Gargettos lui-même aurait quitté Athènes et choisi ce séjour en abandonnant son jardin » ( I 3 , 90-94 ). Le repos, la serénité , la vertu ainsi que l'allusion à Épicure composent un ensemble qui révèle clairement l'épicurisme de Manilius Vopiscus . Des études plus poussées (Hardie 3 , Castner 2 ) ont fait apparaître d'autres échos épicuriens , accentuant le parallèle avec les thèmes et

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IF. M

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MANLIUS TORQUATUS (L. -)

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les vers lucrétiens: insistance sur le repos et la uoluptas, allusions au début du livre II du De rerum natura . Il paraît difficile de croire à une suite de lieux communs .

MICHÈLE DUCOS. 21 MANLIUS TORQUATUS ( L. -) RE 79

1a

Homme politique romain issu d'une célèbre gens et ami de Cicéron , père du préteur homonyme de 49 ( M 22 ) . On admet qu'il est né vers 108 ( cf. 1 F. Münzer, art. « Manlius » 79 , RE XIV 1 , 1928 , col . 1199-1203 ). En ce qui concerne les débuts de sa carrière, on l'identifie souvent ( cf. 2 T.R.S Broughton , « L. Manlius Torquatus and the Governors of Asia » , AJPh , 111 , 1990 , p. 72-74) avec le personnage dont le nom , L. Manli(us) proq(uaestore ), est présent sur des monnaies d'or et d'argent qui datent des environs de 84 et qui ont été trouvées dans la région de l'Orient romain . Ce personnage était égale ment avec Sylla à la bataille de la Porta Collina. Préteur en 68 , il gouverna ensuite la province d'Asie selon Münzer 1 , mais Broughton 2 pense qu'il fut simplement legat de Pompée lors de la guerre contre les pirates. L'épouse de Torquatus était originaire du Picenum ( Pro Sulla 25 ) , territoire acquis à Pompée : 3 G. V. Sumner, « The Consular Elections of 66 BC » , Phoenix 19 , 1965 , p. 226-231 , y voit la possibilité d'un lien supplémen taire avec Pompée. Les Manlii Torquati n'étaient plus au faîte de leur puissance depuis plusieurs générations quand L. Manlius Torquatus se présenta aux élec tions pour le consulat en 66, avec L. Aurelius Cotta : son propre père n'avait pas dépassé la questure, semble-t- il ( cf. 4 J. F. Mitchell , « The Torquati» , Historia 15 , 1966 , p . 23-31 ) . Ce furent P. Cornelius Sulla , le fils du dictateur , et P. Autronius Paetus qui remportèrent les élections , mais les deux perdants leur intentèrent un procès – le fils de Manlius Torquatus fut un des accusateurs - et remportèrent les élections de remplacement. L. Manlius Torquatus fut donc consul en 65 ( Cicéron , Att. XII 21 , 1 et Cornelius Nepos, Atticus 3 , 5 ) , une année marquée par plusieurs prodiges (Cicéron, Catilinaire III 19 et De diuinatione II 21 ) : il passe pour une des victimes désignées de la « première conjuration » de Catilina, mais cette conjuration n'a peut-être jamais existé et d'ailleurs L. Manlius Torquatus défendit Catilina en procès peu après (Cicéron , Pro Sulla 81 ) . Il fut ensuite proconsul en Macédoine et Cicéron proposa qu'on lui accorde le triomphe ( In Pisonem 44 ). Fin 63 , il était de retour à Rome et participa aux délibérations du sénat au sujet de la conjuration de Catilina. En 58 , il s'efforça d'intercéder en faveur de Cicéron auprès du consul Pison (Cicéron , In Pisonem 77-78 ) , en vain , mais ce fut l'occasion d'une inimitié solide avec Pison qu'il attaqua au sénat à son retour de proconsulat en Macédoine (Cicéron, In Pisonem 47 et 92 ) . On sait d'après une allusion de Cicéron ( De finibus II 62 ) qu'il est mort avant 50. Il fit ses études avec Cicéron , Atticus et Marius le fils ( Cornelius Nepos , Atticus 1 , 4) et a séjourné à Athènes , peut -être en accompagnant Sylla en 86 : Torquatus évoque en effet une statue de Chrysippe au Céramique dans le De finibus ( I 39 ) . Il était bon orateur (Cicéron , Brutus 239 : elegans in dicendo, in

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MANLIUS TORQUATUS (L. -)

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existimando admodum prudens). Son intérêt pour la philosophie nous est révélé essentiellement par un passage du De finibus ( Fin . I 39 ) : il apparaît probable que Torquatus avait une préférence pour les épicuriens. Il se moque gentiment des stoïciens en montrant sa connaissance des deux doctrines : facete et urbane Stoicos irridente. YASMINA BENFERHAT.

22 MANLIUS TORQUATUS (L.-) RE 80

87 ? /47

Homme politique romain préteur en 49, fils du consul homonyme de 65 ( 2 + M 21 ) . Ce jeune homme brillant, issu d'une famille patricienne illustre , est né entre 90 et 85 (cf. 1 F. Münzer, art. « Manlius » 80, RE XIV 1 , 1928 , col . 1203 1207 ) . Il entra dans la vie politique par un coup d'éclat en 66 en accusant de brigue P. Cornelius Sylla qui avait été élu consul cette année - là aux dépens de Torquatus père et qui perdit à la suite de ce procès son titre (sur le rôle exact de Torquatus, cf. 2 M. C. Alexander, « The Role of Torquatus the Younger in the ambitus Prosecution of Sulla in 66 B.C. , and Cicero De Finibus 2.62 » , CPh 94, 1999 , p . 65-69) . Lui -même devint triumuir monetalis en 65 (MRR II 445 ) et quindecemuir. Il semble avoir fait partie des proches de Cicéron au moment de sa préture et de son consulat (Pro Sulla 34) . De fait, en 63 , alors qu'il était Princeps iuentutis, il fut actif contre la conjuration de Catilina ( Cicéron , Pro Sulla 34) . En 62 , il attaqua de nouveau Sylla en procès en l'accusant d'avoir voulu tuer son père lors de la « première conjuration » de Catilina en 65 (cf 3 R. Syme , Salluste , traduction française, Paris 1982 , p . 81-87 ) et en 63 . Cicéron qui se chargea de la défense de P. Cornelius Sylla laisse de Torquatus un portrait de jeune homme bouillant et orgueilleux dans le Pro Sulla ( cf. 4 J. Kaussen , « De Cicerone et Torquato Epicureo » , dans Festschrift Schöne , Kiel 1903, p . 1-10 , en particulier p . 3-5 ) . En 54, Torquatus voulut intenter un procès à Gabinius , que les Optimates détestaient, mais ce furent finalement P. Cornelius Sylla et G. Memmius qui furent chargés de cette tâche ( Att. IV 18 , 3 et Q. Fr. III 3 , 2 ) . En 49, alors qu'il était préteur (Cicéron , De finibus II 74) , il prit le parti de Pompée comme beaucoup d'Optimates ( Cicéron , Att. VII 23 , 1 , une lettre écrite en février 49 ). Placé à Albe avec six cohortes, il quitta cette position fin février pour suivre Pompée à Brindes, mais il vit en cours de route ses troupes se rallier à César (César, Bellum ciuile I 24 ). Torquatus rejoignit ensuite Pompée en Grèce ( Att. IX 8 , 1 ) : chargé de la défense de la ville d'Oricum sur la côte épirote, il dut la livrer à César qui le laissa partir ( Bellum ciuile III 11 ) . Après Pharsale, on retrouve Torquatus en Afrique avec l'état-major pompéien : il participa à la guerre contre César. Alors qu'il tentait de rejoindre l'Espagne par mer avec d'autres chefs pompéiens en avril 46 après Thapsus, il trouva la mort dans le port d'Hippone où se trouvait la flotte césarienne de Sittius (Bellum Africum XCVI et Orose VI 16 , 5 ) . Torquatus avait fait de brillantes études , il était très cultivé (Brutus 265 ) et poète à l'occasion ( Pline , Epist. V 3 , 5 ) . Était- il lié à Catulle ? Ce dernier composa vers 60 un poème, le carmen 61 , pour les noces d’un Manlius qu'on a

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MARCELLA

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coutume d'identifier comme le préteur de 49 ( cf. 5 C.J. Fordyce, Catullus, Oxford 1961 , p. 237 ) . L'identité de son épouse pose problème: elle est appelée une fois Junia, une fois Aurunculeia. Torquatus est le porte -parole des épicuriens dans le De finibus ( cf. 6 C. Castner , Prosopography , p. 40-42, et 7 M. Rambaud, « César et l'épicurisme d'après les Commentaires » , Actes du VIIIe Congrès de l'Association G. Budé (Paris, 5-10 avril 1968 ) , Paris 1970 , p. 411-435 ). Son épicurisme apparaît parfaitement orthodoxe tout en arrivant à justifier des attitudes traditionnelles à Rome , comme l'a souligné Rambaud 7 (en particulier p. 416 sqq. et 433-434 ). YASMINA BENFERHAT. 23 MARAS DE BÉROÉ RE « Mara » 16 PLRE II :

FV

Un bon païen, mais pas nécessairement un philosophe , connu par les fragments de la Vie d'Isidore de Damascius . Il était, avec les « philosophes » Hilarios d'Antioche ( » H 132 ) et Domninos ( de Larissa ) (PD 219 ] l'un des trois seuls hommes raisonnables (ué TPLOL) que prétendait avoir rencontrés le philosophe Asclépiodote d'Alexandrie (> A 453 ) au cours d'un voyage effectué pour étudier les meurs humaines ( fr. * 221 , p. 185 , 15-20 Zintzen = Souda s.v. Métploi , t . III , p . 378 , 4-10 Adler ). La justice inégalée de Maras le faisait surnommer “Aristide ” . D'après un autre fragment ( fr. * 226 , p. 189 , 8-23 Zintzen = Souda s.v. Mápaç, t. III , p. 322 , 20 - 323 , 3 Adler) , il était extrêmement riche, mais il utilisait cette fortune comme un instrument de justice et de philanthropie, subvenant aux besoins des nécessiteux et déployant ses bienfaits au profit de sa cité . Cette justice “ proverbiale ” ne se bornait pas à ne pas causer de dommage à autrui, mais devait s'exprimer dans un évergétisme infatigable. RICHARD GOULET. 23a MARCELLA RE 2 PLRE I : 1

F III

Cette riche veuve, mère de cinq filles et de deux garçons, épousa en secondes noces le philosophe Porphyre, qui lui adressa, «au seuil de la vieillesse » (chap. 1 , p. 104, 12 Des Places ), sa Lettre à Marcella, au cours d'un voyage entrepris, après seulement dix mois de vie commune (chap. 4 , p. 106 , 23 Des Places ), parce que « le besoin des Hellènes se faisait pressant et que les dieux joignaient leurs instances aux leurs » (chap. 4 , p. 106, 15-16 Des Places). Derrière cette formule mystérieuse, les historiens (par exemple H. M. Chadwick , The Sentences of Sextus. A Contribution to the history of early Christian ethics, Cambridge 1959, p. 142-143 ; voir également H. Whittaker, « The purpose of Porphyry's Letter to Marcella » , SO 76, 2001, p. 150-168 ) ont parfois imaginé que le philo sophe avait été appelé en Orient par l'Empereur Dioclétien pour participer à la préparation de la grande persécution contre les chrétiens ( 303 ). Qu'un philosophe romain comme Porphyre ait pu participer à un tel colloque est possible, mais , si l'on en croit Lactance, De mortibus persecutorum 11 , 3 et 6, après des conciliabules secrets auxquels Dioclétien et Galère, pendant tout l'hiver, ne laissèrent participer personne d'autre, le conseil officiel ne regroupa que « quelques juges et quelques militaires » . Voir R. Goulet , « Hypothèses récentes sur le traité de Porphyre Contre les chrétiens » , dans M. Narcy et É. Rebillard ( édit.), Hellénisme et christianisme, Villeneuve d'Ascq 2004, p. 101 .

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MARCELLA

M 23a

Au début de sa lettre, Porphyre justifie ce mariage qui suscita la calomnie de la part des concitoyens de Marcella et fit craindre au philosophe de devoir affronter la mort (chap. 1 , p. 104, 18 - 105 , 3 Des Places), par l'unique intention de prêter secours à la veuve d'un ami et à ses enfants et par le caractère de cette femme qui manifestait une « aptitude naturelle pour la droite philosophie » ( chap. 3 , p. 105 , 20-21 Des Places ) . Ce trait est encore rappelé par Cyrille d'Alexan drie, Adv. Iulianum VI 209 A (PG 76, col. 820 B ) . Eunape, Vies de philosophes et de sophistes IV 2, 5, p. 10, 1-6 Giangrande, ne parle que de cinq enfants. R. J. Penella, Greek philosophers and sophists in the Fourth century A. D. Studies in Eunapius of Sardis , coll . ARCA, 28 , (Leeds) 1990 , p. 29-30, considère qu'Eunape a pu prendre en compte uniquement les cinq enfants ou les cinq filles qui avaient encore besoin d'une protection maternelle, les autres étant, selon Porphyre (chap. 1 , p. 104 , 3 Des Places), déjà en âge de se marier. On retrouve la même erreur dans la Théosophie de Tübingen LXXXV ; cf. H. Erbse (éd Theosophorum Graecorum Fragmenta , coll . BT, Stuttgart /Leipzig 1995 , $ 85 , p. 54-55 , li. 697-699. Le mariage avec la « riche » Marcella, « déjà sur ses vieux jours et de race hébraïque », y est expliqué par l'amour de Porphyre pour les richesses. Dans sa Vie d'Isidore ( fr. 115 Zintzen , conservé dans la Souda, s.v. Oéwv, 209, t . II , p. 702 , 26-27 Adler ; voir aussi E 1868 , t . II , p . 323 , 2-3 ), Damascius présentait le sophiste Théon comme un descendant de la sainte Marcella (γεγονώς από της ιεράς Μαρκέλλης τό γε ανέκαθεν ) . D. Wyttenbarch (Annotatio in Eunapium , t. II de l'édition d'Eunape par Boissonade , Amsterdam 1822 , p. 43 ) a supposé que Marcella était la fille d'un disciple de Plotin à Rome, le sénateur Marcellus Orrontius (> M 30 ) . RICHARD GOULET. 24 MARCELLINUS RE 25 PLRE II : 6

MV (mort en 468 )

Homme politique, général et protecteur de philosophes. Il joua un rôle décisif dans l'histoire de l'Empire d'Occident dans les années qui suivent la mort de Valentinien III . Né sans doute dans le premier quart du Ve siècle et ami d'Aetius , il est établi en Dalmatie lors de l'assassinat de ce dernier par Valen tinien III le 21 septembre 454, et se rebelle alors avec succès contre l'autorité de l'empereur d'Occident: la nature et l'efficacité de cette rébellion ont fait penser qu'il disposait d'un commandement militaire , sans doute le titre de comes rei militaris, une position vraisemblablement obtenue par l'entremise d'Aetius . Il devient alors un dynaste puissant et entièrement indépendant. Sources. Sur sa rébellion et son amitié avec Aetius : Procope, Bellum Vandalicum I 6, 7-8, p. 336-337 Haury (qui lui donne le nom de Marcellianos ). Sur son pouvoir autonome en Dalmatie : Souda, s.v. Mapxentivos ( = M 202 ) , t . III , p. 325 Adler = Damascius , Vie d'Isidore, fr. 155-159 , p. 131-133 Zintzen [ 1 C. Zintzen (édit. ) , Damascii Vitae Isidori reli quiae , edidit adnotationibusque instruxit C. Z. , coll . « Bibliotheca Graeca et Latina supple toria » 1 , Hildesheim 1967), fr. 69 A et D, p . 180 Athanassiadi ( 2 P. Athanassiadi (édit. ), Damascius. The Philosophical History. Text with translation and notes by P.A. , Athènes 1999 ) ; Photius , Bibliothèque 242 , § 91 = Damascius, Vie d'Isidore, fr. 91 , p. 132 Zintzen, fr. 69 D, p. 180 Athanassiadi. Cf. 3 E. Stein , Geschichte des spätrömischen Reiches I , Wien 1928, p. 518-519 ( = 4 Id ., Histoire du Bas- Empire I , édition française par J.-R. Palanque , 3 vol ., Paris/ Bruxelles/ Amsterdam 1959 , p. 349 ]; 5 A. H. M. Jones , The Later Roman Empire 284-002, 3 vol. , Oxford 1964, p. 241. L'association entre Aetius et Marcellinus est peut- être encore renforcée

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MARCELLINUS

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par le fait que le mot prêté par Damascius à Genséric lors de l'assassinat de Marcellinus ( « Les Romains se sont servide leur bras gauche pour se couper le bras droit » , cf. infra ) est mis dans la bouche d'un Romain anonyme à l'occasion du meurtre d'Aetius par Procope, Bellum Vandalicum 1 4 , 28 , p. 328-329 Haury. Après la chute de l'empereur Avitus ( octobre 456) , une conjuration de nota bles gaulois ( coniuratio Marcelliniana ) aurait cherché à lui faire accorder la dignité impériale en Occident . L'identité entre ce Marcellinus et le nôtre, acceptée par la plupart, est cependant remise en doute par certains. Source. Sidoine Apollinaire, Lettres I 11 , 6 (à Montius) [ 6 A. Loyen (édit . ) , Sidoine Apollinaire II. Lettres, Paris 1970, p. 36) . Cf., pour l'identification des deux Marcellinus : 7 A. Loyen , Sidoine Apollinaire I. Poèmes, Paris 1960, p. XIII, et 8 Id . , Recherches historiques sur les Panegyriques de Sidoine Apollinaire, coll . « Bibliothèque de l'École des Hautes Études. Sciences historiques et philo logiques » 285 , aris 1942 , p. 60 ; Stein 3 , p. 552 [= 4 , p. 373 ] ; 9 P. Courcelle, Histoire littéraire des grandes invasions germaniques , 3e édition , Paris 1964, p. 168. Des doutes sont cependant formulés par 10 O. M. Dalton , The Letters of Sidonius II , Oxford 1915 , p. 221 , et 11 C.E.Stevens, Sidonius Apollinaris and his Age, Oxford 1933, p. 42. L'empereur Majorien (457-461 ) obtient cependant sa soumission et l'envoie garder la Sicile contre les attaques vandales , pendant qu'il prépare une offensive par l'Espagne . Marcellinus s'y rend avec des troupes abondantes, notamment des mercenaires “ scythes ” ( des Huns , pense - t -on généralement, mais R.C. Blockley estime que ce pouvaient être des Goths) . C'est alors (ou peut-être plus tard en 464-465) qu'il remporte une victoire sur les Vandales en Sicile et les en chasse . Après l'assassinat de Majorien ( août 461 ) et lorsque Ricimer crée Libius Sévère empereur ( fin 461), il semble que Marcellinus, toujours présent en Sicile , ait ( comme l'empereur d'Orient , Aegidius et Nepotianus) refusé de reconnaître ce dernier. Ricimer aurait alors corrompu ses troupes, qui le désertent, et l'aurait ainsi contraint à regagner la Dalmatie , où il retrouve sa position de dynaste autonome, peut-être comme magister militum Dalmatiae. Sources. Sur ses troupes, sa rivalité avec Ricimer et les circonstances de son retrait de Sicile : Priscus, fr. 29 ( 12 C. Müller, FHG IV , Paris 1892 , p. 103-104) = fr. 38 Blockley ( 13 R.C. Blockley, The Fragmentary Classicizing Historians of the Later Roman Empire. Eunapius, Olympiodorus, Priscus and Malchus II, coll . ARCA 10, Liverpool 1983 , p. 340 342) = 14 C. de Boor, Excerpta de legationibus I , Berlin 1903, p. 152-153 . Sur sa victoire sur les Vandales : cf. infra . Cf. Stein 3 , p. 561-564 (= 4 , p. 379-381 ] ; Jones 5 , p. 242 ; 15 J. Harries, Sidonius Apollinaris and the Fall of Rome AD 407-485, Oxford 1994, p. 83 , 96 . Entre 461 et 465 , le développement de sa puissance en Dalmatie et son hostilité pour Libius Sévère et Ricimer font craindre une aggression en Italie. La cour de Rome demande à l'empereur d'Orient d'intercéder et, au terme d'une ambassade conduite auprès de Marcellinus par Phylarque, il accepte de ne pas attaquer l'Italie. Peut-être intervient -il à cette époque pour chasser les Vandales de Sicile ( cf. supra ). Sources. Sur l'intercession de Léon ſer : Priscus fr. 30 ( Müller 12, IV , p. 104 ) = fr. 39 Blockley ( Blockley 13, p. 342) = de Boor 14, p. 585. Sur son intervention en Sicile : Hydace , Chronique 227 (16 Th . Mommsen [édit . ) , Chronica Minora sæc. IV. V. VI. VII ., t . II , dans Monumenta Germaniae Historica. Auctores Antiquissimi XI , Berlin 1894 , p . 33 = 17 A. Tranoy , [ édit . ) , Hydace , Chronique , éd . , trad . et comm . , 2 vol . , coll . SC 218 et 219 , Paris 1974, p. 170 ) ; Consularia Constantinopolitana s.a. 464, 3 (édit. Mommsen 16, p. 247 ).

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MARCELLINUS

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Cf. Stein 3, p. 572-573 [= 4 , p. 387 ) ; Jones 5, p. 242. En 466-467 , lorsque l'empereur Léon Ier envoie Anthémius assumer la pourpre en Occident, il fait partie de l'escorte chargée d'accompagner ce dernier de Constantinople à Rome . Il reçoit vers cette époque le titre de patrice en Occident . Il est prévu qu'il reçoive le commandement des troupes occidentales lors de la grande expédition préparée contre les Vandales. De plus, sa présence à Rome auprès du nouvel empereur est censée faire contrepoids à l'influence de Ricimer et garantir le pouvoir du nouvel empereur. Sources. Sur l’escorte d'Anthémius : Hydace, Chronique 234, p. 34 Mommsen = p. 172 Tranoy. Sur son patriciat: Marcellinus, Chronique s.a. 468 et s.a. 474, 2 (édit. Mommsen 16, p. 90 et 91 ) ; Jordanès, Getica 239 ( 18 Th . Mommsen (édit.), Jordanis Romana et Getica , dans Monumenta Germaniae Historica. Auctores Antiquissimi V 1 , Berlin 1882 , p . 119 = 19 F. Giunta et A. Grillone [ édit. ], Iordanis De origine artibusque Getarum , coll. « Fonti per la Storia d'Italia » 117 , Roma 1991, p. 98 ). Sur son envoi par Léon Ier pour la guerre vandale : Procope, Bellum Vandalicum I 6, 7-8 , p. 336-337 Haury. Cf. Stein 3, p. 573-575 (= 4, p. 388-389) ; Harries 15, p. 142. En 468 , lors de la grande expédition contre les Vandales, il a le commande ment des troupes occidentales, l'armée orientale étant confiée à Basiliscus . Au printemps 468 , il reprend la Sardaigne, puis passe en Sicile . Après le désastre naval et la fuite de Basiliscus , il reçoit, semble - t - il le commandement de l'ensemble des troupes, mais il est assassiné en Sicile en août 468 , sans doute à l'instigation de Ricimer. Sources. Hydace, Chronique 247 , p. 35 Mommsen = p. 176 Tranoy ; Marcellinus, Chronique s.a. 468, p. 90 Mommsen ; Cassiodore, Chronique s.a. 1284/468 (édit. Mommsen 16, p. 158 ) ; Fasti Vindobonenses priores § 601, s.a. 468 (édit. 20 Th . Mommsen , Chronica Minora... I, dans Monumenta Germaniae Historica. Auctores antiquissimi IX , Berlin 1892, p. 247) ; Paschale Campanum s.a. 468 (édit. Mommsen 20 , p . 305) ; Procope, Bellum Vandalicum 1 6, 7-8, p. 336-337 Haury, 16 ,25 ,p. 339 Haury. La parole prêtée à Genséric sur sa mort (cf. supra ) : Photius, Bibliothèque 242, § 91 (21 R. Henry, Photius, Bibliothèque, t. VI , Paris 1971, p. 27 ) = Damascius , Vie d'Isidore fr. 91 , p. 132 Zintzen = fr. 69D, p. 180 Athanassiadi. Cf. Stein 3, p. 577-578 [= 4, p. 390-391 ). Le fils de sa seur, Julius Nepos, qui lui aurait alors succédé en Dalmatie , probablement comme magister militum, accédera à l'Empire en Occident pour un bref règne en 474-475 . Sources. Marcellinus, Chronique s.a. 474, 2 , p. 91 Mommsen ; Jordanès, Getica 239, p. 119 Mommsen = p. 98 Giunta /Grillone. Cf. Stein 3, p. 552 [= 4, p. 362 ) ; Jones 5, p. 244. Marcellinus était païen , doué pour les prédictions, et patron de la culture , au témoignage de Damascius notamment, dans la Vie d'Isidore. Dans son entou rage se trouvait le philosophe Saloustios . Dans l'ensemble , il semble que Damascius ait vu en lui une figure d'homme politique talentueux , susceptible de favoriser la cause païenne, telle que le patrice Sévère, consul en Occident pour 470 , également dans l'entourage de l'empereur Anthémius. Peut-être un certain nombre d'anecdotes consacrées à la Sicile dans la Vie d'Isidore sont-elles des souvenirs rapportés par Saloustios de son séjour auprès de ce personnage ( cf. notamment la psychomachie décrite dans le fr. 63 , p . 92 Zintzen , fr. 50 , p . 142 Athanassiadi ) . Toujours est-il que Damascius , comme plusieurs de ses

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contemporains, ne tarit pas d'éloges sur les qualités politiques et militaires de ce personnage . Sources. Son paganisme : Marcellinus, Chronique s.a. 468 , p. 90 Mommsen ; Photius , Bibliothèque 242, § 91 = Damascius , Vie d'Isidore fr. 91 , p. 132 Zintzen, fr. 69 D, p. 180 Athanassiadi ; Souda, s.v. flotóms (II 1652), t. IV , p. 136 Adler = Damascius , Vie d'Isidore fr. * 157, p. 133 Zintzen, fr. 69E, p. 180 Athanassiadi . Fréquentation de Saloustios : Souda, M202 = Damascius , Vie d'Isidore fr. 159 , p. 133 Zintzen , fr. 69D, p. 180 Athanassiadi . Appréciation générale sur le personnage : Souda , M 202 = Damascius, Vie d'Isidore, fr. * 155 et 158, p. 131-133 Zintzen, fr. 69A , p . 180 Athanassiadi ; Souda , s.v. ejorarús (E 3748 ), t. II p. 473 Adler = Damascius , Vie d'Isidore fr. * 157 , p. 133 Zintzen , fr. 69 C , p . 180 Athanassiadi ; Photius , Bibliothèque 242 , § 91 = Damascius , Vie d'Isidore fr. 90 , p. 130 Zintzen, fr. 69B , p. 180 Athanassiadi. Cf. 22 K. Praechter, art. « Salustios » = « Sallustius » 39, RE I A 2, 1920, col . 1967-1970. STÉPHANE DIEBLER ( † ).

25 MARCELLINUS ( COELIUS - ) Marcellinus était à Éphèse l'élève du platonicien Secundinus de Tralles , auquel il éleva une statue ( 1. Ephesos 498 ) . D'après l'écriture , ses études doivent se placer dans le courant du II ° siècle de notre ère.

BERNADETTE PUECH . 26 MARCELLUS ( MARCUS CLAUDIUS -) RE Claudius 227

F II -DI

Il est mentionné par L. Licinus Crassus ( C 198 ) dans le premier livre du De oratore de Cicéron ( 1 57 ) , dont la situation dramatique peut-être fixée en 914, comme édile curule organisant des jeux à Rome au moment de l'entretien (mais les mots nunc aedilis curulus est pourraient être une glose et sont imprimés entre crochets par Cobt, Kayser et Wilkins ; voir l'édition commentée de ce dernier, Oxford 1892, réimpr. Darmstadt 1990 , p. 112 , et l'editio minor, coll . « Oxford Classical Texts » , Oxford 1902 ) . Il aurait accompagné Crassus lors de son passage à Athènes , au retour de sa questure en Asie . Il soutenait Crassus qui prenait parti contre les philosophes académiciens , stoïciens et péripatéticiens qui s'accordaient à exclure l'orateur du gouvernement des cités pour le confiner dans les tribunaux et les débats de la place publique ( I 46) . F. Münzer, art. « M. Claudius 227 Marcellus» , RE III 2 , 1899 , col . 2760 , et E. Narducci , Marco Tullio Cicerone, Dell'oratore con un sagio introduttivo. Testo latino a fronte, coll . « I classici della BUR » L 930, Milano 1994, p . 158 n . 39, rapprochent ce personnage d'un Marcellus qui s'opposa à une injustice du préteur Caius Verres, d'après Actio in C. Verrem secunda I 135 , 144 et 153. D'après H. de la Ville de Mirmont (CUF, 4e éd. , Paris 1984 ) , cet adversaire de Verrès aurait été légat de Marius dans la guerre contre les Cimbres en 102. Il aurait capitulé dans la ville samnite d’Aesernia pendant la guerre contre les Marses en 90 (Tite -Live, Epit. LXXIII. En 81 , il faisait partie du consilium de C. Aquilius , dans le procès de P. Quinctius. Il n'est pas sûr que ces différents passages concernent le même personnage. RICHARD GOULET. 27 MARCELLUS ( MARCUS CLAUDIUS - ) RE 229

ia

M. Claudius Marcellus fut questeur en 654 avec Caton d'Utique [MC 59 ) (Plutarque, Cato min. 18 , 3 ) ; en 63 , il apporta son appui à Cicéron au moment de la conjuration de Catilina ( Cic . , Cat. I 21 ; Plut . , Cic. 15 , 1 ) ; il est édile avant

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MARCELLUS (MARCUS CLAUDIUS -)

56, préteur en 54 et parvient au consulat en 51 avec Ser. Sulpicius Rufus ( Cic. , Fam . XII 15 , 2 ) . Vivement opposé à César, il voulut l'empêcher de briguer un second consulat ( Appien , Bell . Ciu . II 25 ; Plut., Caes. 29 ) . Dès son entrée en charge, il demanda que l'on nommât un successeur à César avant l'expiration de son commandement , étant donné que la guerre était achevée ( Suétone , Diu . Iul. 28 , 2 ) , et que son armée fût licenciée , tout en refusant à César le droit de se présenter au consulat en son absence ; il voulut aussi supprimer le droit de cité que César avait accordé aux colons de Nouum Comum (Cic . , Att. V 11 , 2 ). Malgré les efforts de Marcellus, la question du remplacement de César fut ajour née ; le 29 septembre 51 , le sénat décida que la question des provinces ne pour rait être posée au sénat avant le 1er mars 50 ( voir le texte du sénatus-consulte et le détail des faits dans la lettre que M. Caelius Rufus adresse à Cicéron, Fam . VIII 8 , 5 ) . Mais la fin de l'année se passa dans l'inaction . En janvier 49 , Marcellus chercha à retarder le début du conflit en demandant au sénat de ne pas se prononcer sur la guerre avant d'avoir levé des troupes (César, Bell. Ciu. I 2 , 2 ; Cic . , Fam . IV 7 , 2 ; IV 9 , 3 ) . Il suivit Pompée, pendant la guerre civile , mais sans enthousiasme ( Att. IX 1 , 4) . Après Pharsale, il se retira à Mytilène , dans l'île de Lesbos. En août 46 , Cicéron lui adresse trois lettres ( Fam . IV 7 ; IV 8 ; IV 9) et l'invite avec insistance à chercher à obtenir le pardon de César pour pouvoir rentrer en Italie . Il lui est acquis en octobre 46, au cours d'une séance mémorable : César accepte la demande de tout le sénat (Cic . , Fam . IV 4,3 ; VI 6, 10 ; pour la date de cette réunion voir les remarques de J. Beaujeu, dans son éd . de la Correspondance, t. VII , CUF, Paris 1980 , p. 307-309 ) et Cicéron prononce sur le champ un discours pour remercier César : le Pro Marcello. Toutefois Marcellus ne se hâta pas de regagner l'Italie : c'est seulement en mai 45 qu'il se décide ; il fait halte à Athènes ; le 26 mai , il est frappé d'un coup de poignard par P. Magius Cilo et meurt dans la nuit, tandis que Magius se suicide ( voir le récit de Ser. Sulpicius Rufus, Fam . IV 12 ; Val . Max . , IX 11 , 4) . Les causes de ce meurtre ne sont pas connues : Cicéron souligne l'accès de folie ( furor) de Magius (Att. XIII 10 , 3 ) , tout en précisant qu'il a reçu une lettre de Brutus où il tente de disculper César ( ibid .) ; Valère -Maxime parle de jalousie. Marcellus était un orateur célèbre : en 56 , il défend Milon accusé de ui par Clodius (Cic . , Quint. fr. II 3 , 1 ) ; en 54 , M. Aemilius Scaurus , accusé de concussion ; en 52 , il défend à nouveau Milon accusé de ui par L. Domitius Ahenobarbus et de ambitu par A. Manlius Torquatus ( Asconius , Milon ., p. 30 , 34 ) . Cicéron fait dire à Brutus (Brut. 71 , 250 ) qu ' « il ne lui manque aucune des qualités de l'orateur » (cf. Quintilien X 1 , 38 ; Dion Cassius XL 58 , 3 ) . C'est dans le même passage qu'est soulignée sa force d'âme devant l'exil : « Il se console par la conscience du devoir accompli » . Brutus , qui l'avait rencontré à Mytilène , ajoute qu'il a repris ses études passées et qu'il était ce jour « pourvu de toutes les connaissances grâce à un maître très savant, Cratippe » . La rencontre de Brutus et de Marcellus à Mitylène est également mentionnée par Sénèque qui précise que Brutus l'avait indiquée dans son traité De uirtute (Helu . 9 , 6). Cicéron a rappelé à plusieurs reprises dans ses lettres la sagesse de Marcellus: « tout le monde juge ton attitude digne d'un sage » ( Fam . IV 7 , 3 ) ; il fait

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MARCELLUS ( MARCUS CLAUDIUS - )

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ressortir l'intérêt de Marcellus pour la philosophie : Cratippe de Pergame ( * C 208 ) est certes devenu péripatéticien d'académicien qu'il était , mais aucune précision n'est donnée sur ce point . Marcellus semble surtout proche de l'Académie ; à sa mort, Ser. Sulpicius Rufus le fit ensevelir à Athènes dans « le gymnase le plus célèbre au monde , l'Académie » ( Fam . IV 12 , 3 ; voir J. Glucker , Antiochus , p . 244 , selon lequel ce choix est seulement fondé sur la célébrité du lieu ) . Cf. F. Münzer, art. « M. Claudius 229 Marcellus » , RE III 2 , 1899, col . 2760 2764.

MICHÈLE DUCOS . 28 MARCELLUS ( MARCUS CLAUDIUS - ) RE Claudius 230

43-23

Fils d'Octavie , sæur d'Auguste, et de C. Claudius Marcellus, consul en 50 av . J.-C. , descendant probable de M. Claudius Marcellus , le vainqueur de Syracuse en 211 av. J.-C. Auguste, son oncle , qui l'aimait particulièrement, l'adopte en 25 av . J.-C. et lui donne sa fille Julie en mariage ; songeant à faire de lui son héritier, il lui accorde des dispenses pour accélérer sa carrière et lui permettre de briguer le consulat bien avant l'âge légal . Alors que , déjà édile curule , il était promis au plus brillant avenir ( Properce , Élégies III 18 ) , un mal soudain l'emporte en quelques jours malgré les soins que lui prodigue le célèbre médecin Antonius Musa . Sa mort donna lieu à un deuil public et plongea dans une douleur extrême Octavie et Auguste . Virgile a immortalisé Marcellus au chant VI de l'Énéide ( v . 860-886 ) par l'évocation particulièrement pathétique de son destin tragique qui clôt la revue des héros, en écho au cortège de ses funérailles où figurait l'immense lignée de ses prestigieux ancêtres, et en hommage à la mission dévolue à Énée : voir Fl . Dupont et J.-P. Néraudau , « Marcellus dans le chant VI de l'Énéide » , REL 48 1970 , p . 259-279 . Sa mère Octavie , femme de grande vertu et d'une haute intelligence , avait pris grand soin de son éducation, notamment dans le domaine philosophique : Marcellus en effet avait été l'élève de Nestor de Tarse ( » N 26 ] ( Strabon XIV , 675 C. , cf. J. Glucker, Antiochus , p. 122-123 ) , qui , avant de prendre la tête du gouvernement de sa ville natale , avait suivi les leçons de l'Académie , de même qu'Athénodore ( > A 497 ) , son prédécesseur au gouvernement de Tarse , qui lui -même avait été le précepteur d'Auguste. Dans la Consolation à Marcia ( II ) , Sénèque , tout en déplorant le deuil excessif observé par Octavie , fait de Marcellus un éloge appuyé , où l'on peut voir le fruit des leçons reçues : il vante non seulement sa vive intelligence ( adulescentem animo alacrem ), mais également une sagesse et une tempérance exceptionnelles pour son âge et pour son rang (frugalitatis continentiaeque in illis aut annis aut opibus non mediocriter admirandae ), une capacité au travail et un éloignement des plaisirs susceptibles de lui permettre d'assumer la charge immense qu'Auguste s'apprêtait à lui léguer ( patientem laborum , uoluptatibus alienum , quantumcumque imponere illi auunculus [ ... ] uoluisset laturum ). Cf. A. Gaheis, art. « Claudius » 230 , RE III 2 , 1899 , col . 2764-2770 .

RÉGINE CHAMBERT.

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MARCELLUS DE DAMAS

29 MARCELLUS DE DAMAS PLRE II : 3

M 29

MV

Ce sophiste ou ce philosophe , originaire de Damas (concitoyen de Damascius) et élève ( Étalpos) du sophiste Eunoios d'Émèse, n'est connu que par une phrase de la Vie d'Isidore de Damascius , qui l'inclut dans une liste de trois individus doués d'une capacité de mémoire impressionnante, mais peu créatifs. Il aurait connu les huit livres de l'Histoire de Thucydide par cæur, sans avoir pour autant rien composé d'extraordinaire de ce fait. L'anecdote a été transmise à Damascius par le philosophe Saloustios , qui avait également été l'élève d'Eunoios à Émèse, ce qui permet de dater ce personnage du milieu , plutôt que de la fin du Ve siècle . Il n'est pas sûr qu'il soit devenu le collègue d'Eunoios , et ait été sophiste à Émèse , contrairement à ce que pense P. Athanassiadi, le terme Étalpos pouvant désigner aussi bien un élève qu'un collègue. Source . Souda, s.v. Earoúotioc ( E 62 ) , t . IV , p . 315-316 Adler = Damascius , Vie d'Isidore fr. 138 , p. 117 Zintzen [ 1 C. Zintzen (édit.), Damascii Vitae Isidori reliquiae, edidit adnotationibusque instruxit C. Z. , coll . « Bibliotheca Graeca et Latina suppletoria » 1 , Hildesheim 1967 ) , fr. 60 , p. 168 Athanassiadi [ 2 P. Athanassiadi (édit. ), Damascius. The Philosophical History, text with translation and notes, Athènes 1999) : « (Saloustios) rappor tait que notre concitoyen Marcellus également, élève d'Eunoios, avait appris par cæur les huit livres de l'Histoire de Thucydide, sans pour autant rien dire qui valût d'être écouté. » Cf. Sur la mémorisation de grands textes classiques comme principe fondamental de l'éducation , spécialement oratoire, dans l'Antiquité, 3 H. I. Marrou, Histoire de l'éducation dans l'Antiquité, Paris 1948 (6e édition 1965 ) et surtout, bien que pour une période antérieure, 4 S. F. Bonner, Education in Ancient Rome. From the elder Cato to the younger Pliny, London 1977. Sur le rôle joué par l'étude de Thucydide dans la formation sophistique , vue comme initiation faisant suite aux mystères de Démosthène, cf. en particulier Marcellinus, Vie de Thucydide 1 ( dans 5 H. Stuart Jones et J. E. Powell , [édit. ), Thucydidis Historiae, Oxford 1942, t. I ). Sur la remise en question de ce principe par Damascius, et la fonction de pamphlet pédagogique qui traverse la Vie d'Isidore, cf. 6 S. Diebler, « Cursus et court- circuit. Program mes et problèmes de l'enseignement de la philosophie dans l'Antiquité tardive » , Littératures classiques 37, automne 1999, p. 33-43. STÉPHANE DIEBLER († ). 30 MARCELLUS ORRONTIUS RESuppl. XV : 9a

M III

A. L'un des sénateurs romains qui s'adonnaient à la philosophie dans l'école de Plotin à Rome au milieu du IIIe siècle de notre ère ( Porphyre, Vita Plotini 7, 29-31 ) . Sont également mentionnés Sabinillus et Rogatianus . Sur la graphie 'Opovtios ou 'Oppovtios, voir PVP II, p. 126. Si on accepte la première leçon, on peut penser que ce Marcellus était d'origine syrienne (en raison de la référence à l'Oronte ). La seconde leçon pourrait être une translittération en grec d'Arruntius, nom d'origine étrusque. B. Un Marcellus apparaît comme dédicataire dans la préface du traité Sur la fin, écrit vers 265 par Longin (» L 63 ) (Vita Plotini 20, 47 = frag. 4 Brisson Patillon ). A. Alföldi, « Die Vorherrschaft der Pannonier im Römerreiche und die Reaktion des Hellentums unter Gallienus » , dans 25 Jahre Röm . -Germ . Kommis sion , Berlin /Leipzig 1929 , p . 27 n . 153 , repris dans Studien zur Geschichte der Weltkrise des 3. Jahrhunderts nach Christus, Darmstadt 1967, p . 256 n . 153 , a proposé d'identifier les deux homonymes.

M31

MARCIA

265

D. Wyttenbarch (Annotatio in Eunapium , t. II de l'édition d'Eunape par Boissonade , Amsterdam 1822 , p. 43 ) a avancé l'hypothèse suivant laquelle Marcellus pourrait avoir été le père de la Marcella ( M 23a ) qu'épousa Porphyre. Cette hypothèse est cependant rejetée par J. Bidez (Vie de Porphyre, Gand 1913 , réimpr. Hildesheim 1964, p. 113 n . 2 ). LUC BRISSON . MARCELLUS

NONIUS MARCELLUS [N 65 ) IP

31 MARCIA RE 116

Fille du sénateur A. Cremutius Cordus et dédicataire de la Consolation que Sénèque a rédigée à son intention trois ans après la mort de son fils Metilius, jeune homme précoce et accompli , disparu prématurément (Ad Marciam XXIII 3-5 ) . C'est par cette Consolation , sans doute composée entre 37 et 41 ap. J.-C. (le plus ancien des écrits de Sénèque qui nous soit parvenu ), que nous disposons de quelques informations sur la vie et la personnalité de cette femme hors du commun , que le philosophe présente comme étrangère à « la faiblesse d'âme de son sexe » ( infirmitas muliebris , I 1 ) . Il évoque en particulier « la vigueur éprouvée de son âme » (exploratum iam robur animi , I 1 ) et le courage qu'elle montra lors de la mort héroïque de son père , historien victime de Séjan et condamné pour son indépendance d'esprit et ses convictions républicaines ( XXII 4-5 : cf. Tacite, Annales IV 34 ) . Sachant sa fin inéluctable , Cremutius Cordus se laissa en effet mourir de faim plutôt que d'attendre la sentence . Marcia, après avoir tout tenté pour empêcher son père de se donner la mort, s'y résigna pourtant lorsqu'elle comprit que c'était là le seul moyen pour lui d'échapper à la servitude et aux sbires de Séjan, non sans laisser couler ouverte ment ses pleurs, malgré les risques encourus , sous Tibère, par une telle attitude , « à une époque où c'était faire preuve d'un grand dévouement envers les siens que de ne pas être criminel envers eux » ( illo saeculo , quo magna pietas erat nihil impie facere, I 2 ; voir sur ce point 0. Zwierlein , « Unterdrückte Klagen beim Tod des Pompeius ( Lucan 7, 43) und des Cremutius Cordius ( Sen. Cons. Marc. 1 , 2 ) » , Hermes 118 , 1990 , p. 184-191 ) . C'est aussi grâce à elle que les æuvres de son père, brûlées par les soins des édiles sur décret du Sénat en 25 , furent restituées au public : Marcia obtint en effet de Caligula (Suétone , Cal. 16) l'autorisation de publier une version expurgée des livres de Cremutius ( auteur notamment d'une histoire des guerres civiles) , dont aucun ne nous est parvenu (Ad Marciam I 3-4 et Quintilien , Inst. Orat. X 1 , 104) . Amie très proche de Livie ( IV 2 ) , l'épouse d'Auguste , Marcia semble avoir en tout point partagé le savoir et les convictions de son père (studia, hereditarium et paternum bonum , I 6) ; en témoigne l'orientation résolument philosophique , et notamment stoï cienne , quoique teintée de platonisme, que Sénèque a donnée à cette Consola tion , reflet de sa vie et des principaux drames qu'elle a vécus. Cf. M. Fluss , art. « Marcia » 116 , RE XIV 2 , 1930 , col . 1603-1604.

RÉGINE CHAMBERT.

MARCIA

266

M 32 I

32 MARCIA RE 115

Épouse de Caton le Jeune ( >ⓇC 59) , fille de L. Marcius Philippus , consul en 56 ; elle est évoquée assez longuement par Plutarque ( Vie de Caton 25 , 3-12 ; 52 , 5-9) , ainsi que par Lucain (Pharsale II 326-391 ) ; cf. encore Appien , Bell. Ciu . II 99 et Strabon XI 515 C. Après un premier mariage peu réussi, Caton , aux environs de l'année 62 , épouse Marcia, dont il a deux enfants. Vers l'an 56, Hortensius, le grand orateur, n'ayant pu obtenir pour femme Porcia, la fille de Caton , déjà mariée , formule à nouveau son souhait de s'unir à la famille de Caton , en demandant cette fois Marcia , sa propre épouse, encore assez jeune pour enfanter (elle avait vraisemblablement 25 ans) et se trouvant alors précisé ment enceinte . Le père de Marcia, Philippus , consulté , ayant donné son accord , Caton, obéissant à des impératifs stoïciens tout autant qu'à des nécessités politi ques et morales, accepte de « céder » son épouse à Hortensius, alors âgé de 58 ans , pour qu'il puisse assurer sa descendance . A la mort de celui -ci , en 50 , Caton , au début de la guerre civile , reprend Marcia et lui confie sa maison et ses filles. Selon Lucain ( Pharsale II 340-343 et 378-380) , cette deuxième union restera chaste , à la demande de Marcia ( ... reuertor / iam nulli tradenda uiro. Da foedera prisci / inlibata tori, da tantum nomen inane / conubii... ) et avec le consentement total de Caton , vrai stoïcien pour qui le plaisir n'a dans cette affaire aucune place , d'autant que sa descendance est déjà assurée ( ... Veneris que hic maximus usus / progenies... ) ; désormais, c'est à Rome qu'il pense avant tout ( ... Vrbi pater est Vrbique maritus, II 388) . Marcia ayant hérité de la fortune d'Hortensius, certains, dont César dans son Anticaton, accusèrent le héros de calcul et de cupidité , ce que conteste Plutarque ( 52 , 5-8 ) . Sur cette pratique de la cession ou échange des épouses, dont le but était avant tout la procréation , et qui ne semble pas constituer un cas exceptionnel , voir E. Cantarella, « Marzia e la locatio uentris » , dans Vicende e figure femminili in Grecia e a Roma, Ancona 1995, p . 251-258 ; voir aussi P. Grimal, L'amour à Rome, Paris 1988 , 2e éd. 1995 , p . 261-265 , H. Harich , « Catonis Marcia : stoisches Kolorit eines Frauen porträts bei Lucan ( II , 326-350 ) » , Gymnasium 97 , 1990, p . 212-223 , M. Salvadore , Due donne romane : immagini del matrimonio antico, coll . « Prisma » , Palermo 1990 , 84 p. ( sur Marcia et Porcia) , et B. Navarro , « Lucano , una visión idealista de la historia » , HAnt 4 , 1974 , p. 111-178 , qui étudie , entre autres personnages, Caton et Marcia . Cf. F. Münzer, art. « Marcia » 115 , RE XIV 2 , 1930 , col . 1602. RÉGINE CHAMBERT. II

33 MARCIANUS RE 5 PIR2 M 205

Marc Aurèle ( I 6, 6 ) était reconnaissant à Diognète (** D 155 ) de lui avoir fait écouter Bacchios ( B2), Basilide ( PB 14 ) et Marcianus . On a envisagé d'identifier ce dernier à un certain Lucius Volusius Maecianus ( PIR V 657) , qui aurait enseigné le droit à Marc Aurèle ( SHA, Vita Marci III 6 ) . P. Hadot dans l'introduction de son édition ( Paris 1998 ), p. LXXXIII - LXXXIV , pense qu'il s'agit plutôt d'un philosophe comme Bacchios et Basilide. RICHARD GOULET.

M 35

MARCIANUS

267 IV - V

34 MARCIANUS RE 31 PLRE II : 3

“ Philosophe ", ancien gouverneur de Paphlagonie ( tòv apavta Mapaa yóvwv ) . Synésius de Cyrène, après son retour de Constantinople , prie son correspondant Tryphon, ancien gouverneur civil de Pentapole , de lui recom mander un compatriote et cousin germain du nom de Diogène, alors en proie à des calomnies ( Epist. 119 , 9-10 = p . 294 , 8 sq. Garzya ). Cette lettre est datée par les éditeurs du printemps 406. Dans une lettre adressée à l'avocat Pylémène d'Héraclée , un ami de Constantinople , Synésius qualifie « le très vénérable Marcianus » d'image d'Hermès, dieu de l’éloquence , ' EpuoŨ Qoy ou tútog (Epist. 101 , li . 67-68 Garzya-Roques = p . 258 , 59-62 Garzya ). Sur cette expression , voir L. Pernot, « “L'empreinte d'Hermès Logios ”. Une citation d'Aelius Aristide chez Julien et chez Damascius » , RAAN 71 , 2002, p . 191-207 . Sur le Maverańvlov, cénacle littéraire auquel appartenait Marcianus à Constantinople , voir H. Schlange-Schöningen, Kaisertum und Bildungswesen im spätantiken Konstantinopel, coll . « Historia - Einzelschriften » 94, Stuttgart 1995 , p. 113 et la note de Roques ad loc . (note 37 , p. 357-358) Éditions récentes des lettres : A. Garzya, Synesii Cyrenensis epistolae, Roma 1979 ; Synésios de Cyrène, Correspondance , Texte établi par A. Garzya, traduit et commenté par D. Roques, CUF, t. I ( Lettres 1 -LXIII ), Paris 2000 , t. II (Lettres LXIV-CLVI ), Paris 2000 . Une identification souvent proposée avec le géographe Marcien d'Héraclée, est possible, mais ne peut être démontrée. Voir Roques, note 33 , p . 357 . Cf. ( W. EnBlin ) , art. « Marcianus » 31 , RE XIV 2 , 1930 , col . 1514 .

RICHARD GOULET. 35 MARCIANUS PLRE II : 17 ( ? )

MF V

Cet épicurien , n'est connu que par une brève citation d'un auteur anonyme dans la Souda : « Marcianos. Cet homme fleurit sous Zénon. Il séjournait dans le lieu de prière où il avait été élu prêtre. Ayant cependant obtenu d'Illus un pouvoir considérable, cet égaré qui se nuisait par une adhésion de chaque jour aux doctrines d'Épicure, déclarait que le monde était auto- constitué et qu'il était administré , non par Dieu , mais par l'activité des astres : en effet, selon que chacune de ces choses ( les êtres du monde ? ) se trouve emportée avec leur tourbillon, elle reçoit en partage la prédominance des ( émanations ?) engendrées dans la pesanteur elle -même. » Ce passage , d'auteur inconnu , est rédigé dans un grec atticisant et assez littéraire, et suggère un historien ( assez vraisemblablement Malchus ) , peut -être un historien ecclésiastique, ou un hagiographe ou biographe de grand style . Marcianos, qui vécut donc sous l'empereur Zénon (474-491 ) et fut visible ment le protégé de son maître des offices Illus , peut-être après la rébellion de ce dernier en 484 et certainement avant sa mort en 488 , était chrétien , avait été ordonné prêtre , et semble s'être réclamé d'Épicure, ou avoir été considéré comme épicurien, dans la mesure surtout où il niait l'exercice d'une providence divine sur le monde et peut-être aussi en ce qu'il semble avoir défendu un déplacement des astres par tourbillons ( 8 vnoLG) . Pour le reste , la thèse qu'il défend évoque plutôt les positions de l'astrologie traditionnelle. Cela dit, la

268

MARCIANUS

M35

brièveté du fragment et le caractère obscur de la dernière phrase ne permettent guère d'en dire plus . Le personnage peut ainsi assez vraisemblablement être identifié avec Fl . Marcianus (RE 35 ) , fils de l'empereur d'Occident Anthémius ( 467-471) et petit-fils de l'empereur d'Orient Marcien (450-456 ), gendre de l'empereur Léon jer ( 456-474) et beau -frère de l'empereur Zénon . Consul en 470 et 472 , magister

utriusque militiae et patrice, il se révolte contre Zénon et revendique l'empire en 479. Après un succès initial , les troupes d'Illus , favorables à Zénon , le font prisonnier et il est ordonné prêtre en Cappadoce. Entre 479 et 484, il s'échappe et tente , avec l'aide de bandes de paysans , un coup de main sur Ancyre. Vaincu et capturé par le général Trocundès, il est emprisonné au fort de Papyrius en Cilicie . Lorsque Illus se révolte en 484, il libère Marcien et l'envoie en Italie demander de l'aide à Odoacre. On ne sait rien de son sort après cette date. S'il s'agit bien de notre personnage, notre fragment pourrait ainsi bien être extrait de l'Histoire de Malchus, et se rapporter aux événements qui suivent la rébellion d'Illus .

.

Em

WI

Edi

Source. Souda, s.v. MapxiavÓS (M 209), t. III, p. 326 Adler. STÉPHANE DIEBLER (†). 36 MARCIUS

DII

Claudien Mamert, De statu animae I 25 , p . 88 , 19-89 , 2 Engelbrecht = PL 53 , col . 731 b , rapporte les paroles adressées par « le mathématicien Adraste » ( > A 24 ) à ce philosophe qui déclarait ne pas voir la longueur ( abstraite des mathématiciens ) , alors qu'il voyait les lignes des artisans : « cela n'est pas étonnant , dit Adraste , car tu as des yeux pareils à ceux des artisans, mais un esprit différent de celui de Pythagore » ( utique non mirum est, inquit Adrastus, quod habes oculos similes fabrorum , ingenium dissimile Pythagorae ). Voir P. Moraux, Aristotelismus, t . II , p . 300 n . 23 . RICHARD GOULET.

Tra

37 MARCIUS LE SAMNITE

FII

Stoïcien , mentionné , avec son compatriote Nysios (PN 70 ), comme disciple de Panétius de Rhodes (mort vers 110a) dans l'Ind. Stoic. Herc., col . 74, 1-2 ( p. 124 Dorandi = Panétius , test. 1 Alesse ) . C'est apparemment par suite d'une erreur que A. Traversa, Index Stoicorum , p. 95 , croit retrouver le nom de ces philosophes samnites chez Strabon VI, 243 C. RICHARD GOULET. MARCIUS + CENSORINUS ( L. MARCIUS - ) (C 75) 38 MARCOMIR Comme Hildebald ( » H 135 ) et Athanarit ( - A 470 ) , « philosophe Goth » mentionné par le Géographe de Ravenne . L'existence et la datation de ces personnages ont été contestées . Cf. par exemple W. Wattenbach et W. Levison, Deutschlands Geschichtsquellen im Mittelalter, Vorzeit und Karolinger, t. I , Weimar 1952 , p . 69 ( bibliographie , p . 69 n . 113 ) . En faveur de l'historicité de

M 39

MARC AURÈLE

269

ces noms et de ces sources, voir J. Schnetz, Untersuchungen über die Quellen der Kosmographie des anonymen Geographen von Ravenna , SBAW 1942, Heft 7 , p. 75-76 . P. Riché , Éducation et culture dans l'Occident barbare. Vie - Vire siècles, coll . « Patristica Sorboniensia » 4, Paris 1962, p . 97 n . 42 , considère que le terme “ philosophe" peut qualifier ici des géographes. RICHARD GOULET.

39 MARCUS ANNIUS VERUS (MARC AURÈLE ) RE Annius 94

121-180

Empereur romain , né le 26 avril 121 , et mort le 17 mars 180 , auteur de réflexions pour soi -même ( eiç tautóv) profondément marquées par le stoïcisme. Jamais l'idéal platonicien d'un État où les philosophes sont rois ou les rois philosophes ne fut si bien réalisé que sous son règne (SHA, Vita Marci XXVII 7). Éditions critiques. 1 Marc - Aurèle, Pensées . Texte établi et traduit par A. I. Trannoy. Préface d'A . Puech, coll . CUF, Paris 1925 , XXV - 148 p. (en partie doubles ) , édition plusieurs fois réimprimée ; 2 The Meditations of the Emperor M. Antoninus, ed . with transl. and comm. by A.S.L. Farquharson, Oxford 1944, reprinted 1968 , LXXXIII - 935 p. en deux vol . ; 3 Kaiser Marc Aurel, Wege zu sich selbst, herausgegeben und übertragen von W. Theiler ( 1951 ) , Zweite , verbesserte Auflage, coll . « Die Bibliothek der alten Welt » , Griechische Reihe , Zürich 1974 , 348 p. ; 3. verb. Aufl ., 1984, 347 p . ; 4 J. Dalfen (édit. ) , Marci Aurelii Antonini ad se ipsum libri XII, coll . BT, Leipzig 1979 , XLII - 176 p .; 2. , verbess. Aufl. 1987 , XL- 165 p . ; sur cette édition voir 5 P. Hadot, « Remarques sur certains passages du livre I des Pensées de Marc Aurèle » , RPh 61 , 1987 , p. 285-294 ; 6 Marc Aurèle . Écrits pour lui-même. Tome I : Introduction générale. Livre I. Texte établi et traduit par P. Hadot avec la collaboration de Concetta Luna, CUF, Paris 1998 , CCXXV -59 p. (en partie doubles ) . Le second tome contiendra les autres livres. Traductions. Française : Hadot 6 ( livre I ) ; 7 traduction d'É. Bréhier, revue par J. Pépin, avec une notice et des notes de V. Goldschmidt, dans Les Stoïciens, textes traduits par É . Bréhier, édités sous la direction de P.-M. Schuhl , coll . « Bibliothèque de la Pléiade» 156 , Paris 1962 , p . 1133-1247 et 1370-1392 ; réimpr. dans la coll . « Tel >> 281-282 , avec la même pagination . Allemande : Theiler 3. Italiennes : 8 Scritti di Marco Aurelio . Lettere a Frontone, Pensieri, Documenti a cura di G. Cortassa, coll . « Classici greci » , Torino 1984 , 820 p. En plus du texte grec et de la traduction italienne, on trouve une riche documen tation : Fonti giuridiche ( p . 507-639 ) , Fonti epigrafiche ( p . 641-691 ) ; Fonti letterarie ( p . 693-741 ) ; Appendice : Testi apocrifi o di dubbia autenticità (p. 743-767 ) ; 9 Marco Aurelio, A se stesso (Pensieri) . Introd., trad . e note di E. V. Maltese , coll . « I grandi libri Garzanti » 514 , Milano , 1993 , XXXVII- 269 p.; Anglaises : 10 A.S. L. Farquharson et R.B. Rutherford , The Meditations of Marcus Aurelius Antoninus ( reprise de la traduction de Farquharson 2 ) , and a selection from the Letters of Marcus and Fronto ( par R. B. Rutherford ), Oxford 1989 , XXVII - 195 p .; 11 C.R. Haines , The Communing with himself of Marcus

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MARC AURÈLE

M 39

Aurelius Antoninus, Emperor of Rome, together with his Speeches and Sayings, coll . LCL, London 1916, réimpr. 1970. Études d'orientation . 12 P. von Rohden , art. « M. Annius Verus >> 94 , REI 2 , 1894, col . 2279-2307 , avec un appendice de J. von Arnim sur les Écrits pour soi-même , col . 2307-2309 ; voir aussi M. Bonaria, RESuppl. X , 1965 , col . 21 ; 13 H. D. Sedgwick, Marcus Aurelius. A biography, Oxford 1921 ; 14 R. Klein (édit. ) , Marc Aurel, coll . « Wege der Forschung » 550, Darmstadt 1979 , VI - 538 p . ( reprise en version allemande de dix-neuf études parues de 1934 à 1978 ) ; 15 A. Birley , Marcus Aurelius . A biography ( 1966 ), revised edition , London 1987 , 320 p. ; 16 P. Grimal, Marc Aurèle, Paris 1991, 449 p . ; 17 P. Hadot, La citadelle intérieure : introduction aux Pensées de Marc Aurèle [ 1992 ] . Éd. révisée et remaniée, Paris 1997, 386 p. ; trad . anglaise : The inner citadel : the « Meditations » of Marcus Aurelius. Transl . by Michael Chase , Cambridge ( Mass. ) 1998. X- 351 p. ; trad. italienne: La cittadella interiore : introduzione ai Pensieri di Marco Aurelio . Presentazione di Giovanni Reale ; trad. di A. Bori e M. Natali , coll . « Pubblicazioni del Centro di Ricerche di Metafisica. Temi metafisici e problemi del pensiero antico » 51 , Milano 1992. XII - 327 p. ; trad. allemande : Die innere Burg : Anleitung zu einer Lektüre Marc Aurels. Aus dem Französischen von M. Ozaki und B. von der Osten , Frankfurt am Main 1997 , 478 p . Bibliographies. Farquharson 2 , p . LXXX- LXXXIII ; Dalfen 4, p . XXXIV -XL ; Hadot 6 , p . CCVII - CCXII ; Cortassa 8 , p . 63-71 ; Klein 14, p. 503-529. Cf. 18 H.R. Neuenschwander, Mark Aurels Beziehungen zu Seneca und Poseidonios , coll . « Noctes

Romanae » 3 , Bern 1951 , VIII - 142

p .;

19 J.H. Oliver, Marcus Aurelius. Aspects of civic and cultural policy in the East, coll . « Hesperia Suppl . » 13 , Princeton 1970 , XV - 160 p . et 8 planches; 20 P. A. Brunt, « Marcus Aurelius in his Meditations » , JRS 64 , 1974 , p. 1-20 ; 21 H. Bannert, « Der Tod des Kaisers Marcus » , dans H. Bannert et J. Divjak ( édit . ) , Latinität und alte Kirche. Festschrift für Rudolf Hanslik zum 70 . Geburtstag , coll . « Wiener Studien Beihefte » 8 , Wien 1977 , p . 9-19 ; 22 M. Alexandre , « Le travail de la sentence chez Marc Aurèle. Philosophie et rhétorique » , dans Formes brèves. De la róun à la pointe, métamorphoses de la sententia = La Licorne , 3. Publ . Fac. des Lettres et des Langues de l'Université de Poitiers , 1979, p . 125-158 ; 23 R.J. Newman , « Cotidie meditare. Theory and practice of the meditatio in imperial stoicism » , ANRW II 36 , 3 , 1989 , p. 1473-1517 ; 24 S. Jäkel, Marcus Aurelius's concept of life , coll . « Turun Yliopiston julkaisuja » Ser. B 195 , Turku 1991 , 46 p. ; 25 G. Cortassa , « Fozio, Filostrato di Lemno e le lettere greche di Marco Aurelio » , Sileno 20 , 1994, p . 193-200 ; 26 T. Engberg -Pedersen , « Marcus Aurelius on emotions» , dans J. Sihvola et T. Engberg - Pedersen (édit. ) , The emotions in Hellenistic philo sophy, coll . « The new synthese historical library » 46, Dodrecht 1998 , p. 305 337 . Principales sources biographiques. ( a) Son recueil de réflexions person nelles, notamment le premier livre ( voir plus loin ).

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(b) Sa correspondance avec Fronton . Elle a été éditée par 27 M.P.J. Van den Hout ( édit . ) , M. Cornelii Frontonis Epistulae, Leiden 1954 ; 28 Id . ( édit . ) , Fronto , Epistulae, schedis tam editis quam ineditis Edm . Hauleri usus, iterum ed . M.P.J. Van d . H., coll . BT, Leipzig 1988 , XCVI-296 p. 29 H. Crossley, « The Correspondance of Fronto and M. Aurelius» , Hermathena 5 , 1877 , p. 67-91 ; 30 L. Pepe, Marco Aurelio latino, coll . « Biblioteca del Giornale italiano di Filologia » 4, Napoli 1957 , 172 p . ; 31 E. Champlin, Fronto and the Antonine Rome , Cambridge ( Mass . ) 1980 , 185 p. Pour la chronologie des lettres, voir 32 Id ., « The Chronology of Fronto » , JRS 64 , 1974 , p . 136-159 . Cette correspondance a fait l'objet d'un riche commentaire par 33 M.P.J. van den Hout, A commentary on the letters ofM.Cornelius Fronto , coll . « Mnemosyne . Supplementum » 190, Leiden 1999, X1-725 p . Certaines lettres citées par l'Histoire auguste ou par des apologètes chrétiens sont considérées comme pseudépigraphes. (c ) De nombreux documents épigraphiques, ayant parfois conservé des fragments de lettres ou de discours . On doit mentionner également les lois qu'il a promulguées et les monnaies frappées sous son règne. Oliver 19 , p. 3-9 ; 34 C.P. Jones , « A new letter of Marcus Aurelius to the Athenians » , ZPE 8 , 1971 , p . 161-183 ; 35 W. Williams, « Formal and historical aspects of two new documents of Marcus Aurelius» , ZPE 17 , 1975 , p. 37-78 ; 36 G.W. Bowersock , « A new Antonine inscription from the Syrian desert » , Chiron 6, 1976 , p . 349 355 ; 37 J.H. Oliver, « Marcus Aurelius and Lucius Verus [To the Athenians ) , A.D. 165 » , ZPE 20 , 1976 , p. 179-181 ; 38 F. Galli , « Un'iscrizione dedicata a M. Aurelio » , ZPE 20, 1976 , p . 229-230 ; 39 S. Follet , « Lettre de Marc Aurèle aux Athéniens ( EM 13366 ) : nouvelles lectures et interprétations » RPh 53 , 1979, p. 29-43 ; 40 J. Krier , « Zum Brief des Marcus Aurelius Caesar an den dionysischen Kultverein von Smyrna » , Chiron 10 , 1980 , p . 449-456 ; 41 J.H. Oliver, « Marcus Aurelius and the philosophical schools at Athens » , AJPh 102 , 1981 , p. 213-225 ; 42 S. Giglio, « L'epistola di Marco Aurelio agli Ateniesi » , dans Atti del IV Convegno internazionale dell'Accademia roma nistica Constantiniana in onore di Mario de Dominicis, Perugia 1981 , p. 547 610 ; 43 G. Cortassa , « La cu pooúvn di Erode Attico . Nota alla lettera di Marco Aurelio agli Ateniesi (EM 13366) » , ZPE 60 , 1985 , p. 177-182 ; sur le style et les caractéristiques personnelles des constitutions promulguées par Marc Aurèle, voir 44 W. Williams, « Individuality in the Imperial Constitutions: Hadrian and the Antonines » , JRS 66 , 1976 , p. 78-82 . ( d) Dion Cassius LXXI, dans l'Epitome de Xiphilin. Voir Zonaras XII 1-3 . (e) Hérodien, Ab excessu Divi Marci I 2-4 . ( f) SHA, Vita Marci Antonini philosophi (“ Iulius Capitolinus" ). Les vies d'Hadrien , d'Antonin le Pieux , de Lucius Verus, d'Avidius Cassius et de Commode contiennent également des renseignements sur Marc Aurèle. La critique historique de ces vies a été sérieusement lancée par 45 H. Dessau , « Über Zeit und Persönlichkeit der S.H. A.» , Hermes 24 , 1889 , p. 337-392 , qui a montré que les noms des six auteurs supposés de ces vies qui auraient écrit au début du IVe siècle , avaient été forgés de toutes pièces après Valentinien et

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Théodose. Voir aussi 46 Id ., « Über die Scriptores Historiae Augustae » , Hermes 27 , 1892, p. 561-605. Une des sources citées par la Vita Marci est un certain Marius Maximus (I 6 et XXV 10), qui était l'auteur d'une Vita Divi Marci ( SHA, Avidius Cassius, VI 6) qui comprenait au moins deux livres (ibid. VI 7 ) , de même qu'il avait rédigé des vies des empereurs de Nerva à Élagabal. Selon Hadot 18, p. 307 , cet historien aurait rassemblé tous les ragots qui couraient sur la famille impériale. Voir 47 F. Miltner, art. « L. Marius (Maximus) » 48 , RE XIV 2 , 1930, col . 1828-1831 , notamment col . 1830-1831 ; 48 R. Syme, Empe rors and Biography, Oxford 1971 , p. 113-114 . Plus favorable à cet historien : 49 R. Fossatelli , « Mario Massimo » , RCCM 15 , 1973 , p. 75-80 ; 50 S. D'Elia, « Note su Mario Massimo » , StudUrb (Ser. B) 49 , 1975 , p. 459-481. ( g ) Eutrope, VIII 9-14 . Voir (Aurelius-)Victor,Epitome 16 . (h ) D'autres sources plus tardives comme Orose , Cassiodore , etc. Principales dates de la vie de Marc Aurèle

26 avril 121 135-136 136

Naissance à Rome. Revêt la toga virilis dans sa quinzième année. Il est fiancé (par Hadrien ) à la fille de L. Ceionius Commodus, qui avait été adopté par Hadrien comme successeur souhaité, mais mourut avant Hadrien . Il s'agissait peut-être de cette Fabia qui après la mort de Faustina, la femme de Marc Aurèle, essaya d'épouser celui-ci (Vita Marci XXIX 10 ; voir aussi SHA, Verus X 3-4 ).

Lorsque l'empereur Hadrien , soucieux d'assurer sa dynastie et plus précisément l'accession ultérieure à l'Empire du jeune Marc Aurèle – qu'il appelait non pas Verus, mais Verissimus – (Vita Marci I 10 ; IV 1 ; XVI 7), adopta T. Aurelius Fulvus Boionius Arrius Antoninus (Antonin le Pieux ), il demanda au futur empereur d'adopter Marc Aurèle avec Lucius Commodus, fils de L. Ceionius Commodus. 10 juillet 138 Mort d’Hadrien . Accession d'Antonin le Pieux. A 18 ans, Marc Aurèle fiancé à Faustina, fille d'Antonin. 139 Marc Aurèle “ César ” . Il vivra pendant 23 ans dans l'intimité d'Antonin au palais impérial (domus Tiberiana ) sur le Palatin. 140 Premier consulat conjointement avec l'empereur Antonin . 145 Deuxième consulat également avec Antonin. Mariage avec Faustina, fille d'Antonin . Treize enfants naquirent de ce mariage, dont 6 survécurent : cinq filles et un garçon, le futur empereur Commode. Sur les rapports entre ces diverses naissances et l'iconographie de Faustina telle que la révèlent les émissions de monnaie de l'époque, voir 51 K. Fittschen , Die Bildnistypen der Faustina Minor und die Fecunditas Augustae, Göttingen 1982. 146 A l'âge de 25 ans , Marc Aurèle rejette les études de rhétorique (qu'il suivait sous la direction de Fronton ) et se tourne ouvertement vers la philosophie, probablement sous l'influence du stoïcien Q. Iunius Rusticus qui lui fit connaître l'enseignement d'Épictète dont il avait suivi les cours ( Écrits pour soi-même I 7) . 147 Naissance de Faustina, dix-huit mois après le mariage de Marc Aurèle ( avril 145 ) ; voir Birley 15 , p. 276 n . 29. Le 1er décembre, il revêt pour la première fois la tribunicia potestas, titre qui l'associait de très près à l'empire. Cette distinction fut renouvelée dix jours après, le 10 décembre 147 . 148 D'après les monnaies, Marc Aurèle commence à porter la barbe longue... 138

161

Troisième consulat, cette fois avec Lucius Commodus (Lucius Verus ).

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7 mars 161

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Mort d'Antonin. Accession de Marc Aurèle à l'âge de 39 ans. Il régnera 19 ans et 11 jours ( Dion Cassius LXXI 34, 5 ) . Partage son pouvoir avec Lucius Commodus (à qui il donne le nom de Verus), le fils de L. Ceionius Commodus. Il le fiance à sa propre fille aînée , née en 148, Annia Lucilla ( Vita Marci VII 7 ). Inondation provoquée par le débordement du Tibre, famine à Rome, tremble ment de terre de Cyzique. Début de la guerre contre les Parthes en Orient (161 166 ).

163-166 166

167 168 janvier 169 169-175 175 176

fin 176 177 178

août 178 179-180

Conquête de Ctésiphon et de Séleucie ( Dion Cassius LXXI 2-3). Célébration à Rome du triomphe sur les Parthes. L'Empire ravagé par la peste ramenée d'Orient par l'armée. Cf. 52 J. F. Gilliam, « The Plague under Marcus Aurelius » , AJPh 82, 1961 , p. 225-251 , repris en version allemande dans Klein 14, p. 144-175 ; 53 R. J. Littman, « Galen and the Antonine plague » , AJPh 94, 1973, p. 243-255 . Invasion des Quades et des Marcomans au Nord de l'Italie. Lucius Verus et Marc Aurèle réorganisent la défense de la frontière dans les Alpes et les provinces du Danube . Les empereurs passent l'hiver à Aquilée. Mort subite de Lucius Verus au cours du voyage de retour vers Rome. Marc Aurèle sur le limes à Carnuntum , Sirmium et peut -être Viminacium . Usurpation du général Avidius Cassius. Voyage de l'Empereur en Orient en compagnie de Faustina et de leur fils Commode : Cilicie, Syrie, Égypte. Mort de Faustina à Halala dans le Taurus. Au retour, à l'automne, en passant à Athènes , Marc Aurèle se fait initier aux mystères d'Éleusis. Il fonde quatre chaires de philosophie (platonicienne, stoïcienne, péripatéticienne et épicu rienne ), avec pour chacune une dotation annuelle de 10 000 drachmes (Lucien, Eunuque 3 ) et confie à Hérode Atticus le choix des professeurs ( Philostrate , Vitae sophistarum II 10, 4 ; voir aussi Dion Cassius LXXI 31 , 3). Il rentre à Rome après en avoir été éloigné pendant 8 ans (Dion Cassius LXXI 32 , 1 ) . Voir Oliver 37 et Oliver 41 . Célébration du triomphe sur les Germains et les Sarmates.

Son fils Commode est associé à l'Empire. Tremblement de terre de Smyrne. Marc Aurèle repart vers la frontière pour faire face à de nouvelles invasions.

11 passe l'hiver à Sirmium . 17 mars 180 Mort près de Sirmium ou à Vienne, alors qu'il avait presque pacifié la région . Il avait 58 ans, 10 mois et 22 jours (Dion Cassius LXXI 34, 5 ) . 54 G. Alföldy, « Herodian über den Tod Mark Aurels » , Latomus 32 , 1973 , p. 345-353 ; 55 H. Bannert, « Der Tod des Kaisers Marcus » , dans Latinität und Alte Kirche. Festschrift für R. Hanslik, coll . « WS Beiheft » 8 , Wien 1977, p. 9-19. Une fois décédé, Marc Aurèle fit l'objet d'une véritable vénération et resta un modèle pour ses successeurs, qui souvent portèrent son nom en témoignage d'admira tion .

Arbre généalogique de la famille de Marc Aurèle. Voir aussi les stemmas de P. von Rohden 11 , col . 2290 ; Farquharson 2, p . 255 .

X

1?

Claudius Severus Arabianus Claudius Severus

Lucilla Domitia 1 major

Catilius Severus

Faustina

Annia Cornificia Faustina Fadilla Cornificia

Libo Annius M.

minor Lucilla Domitia

Verus Annius

Verus Annius M.

Verus Annius

TRuso . ullus Calv P.

1

+1Antoninus 80 1 †192 Commodus Aurelius L. Sabina

=M. Verus Annius .M. Aur

Faustina Rupilia

Libo Rupilius

†176

Faustina Galeria Annia

Annia Faustina Galeria 1

Lucilla Annia

major

161

Aurelius Fulvus 1 Fulvus Aurelius T. † Antoninus Boionius

ATurelius Fulvus 1

Ceionius L. †1Commodus 38 Commodus Ceionia L. L)( ucius Fabia Verus †169

Fadilla Arria

T. Arrius Antoninus

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Les maîtres de Marc Aurèle en philosophie. Marc Aurèle se serait tourné vers la philosophie dès son plus jeune âge. Selon la Vita Marci II 6 il aurait couché sur la dure et revêtu l’habit du philosophe dès sa douxième année, bien qu'il se soit également intéressé à la peinture et ait pratiqué avec talent la boxe et le pugilat, la course , les jeux de balle et la chasse ( IV 9). Mais c'est surtout à 25 ans que délaissant l'enseignement rhétorique de Fronton il se convertit à la philosophie. Dion Cassius prétend que pour s'attirer la bienveillance de l'Empe reur de nombreuses personnes se tournèrent vers la philosophie sous son règne ( LXXI 35 , 2 ). Sur les philosophes ayant joui de hautes fonctions dans le gouvernement de l'Empire, voir Hadot 17 , p. 32-33. Les noms des maîtres fournis par cette source (III 2 ) sont confirmés par Marc Aurèle lui-même dans son premier livre . ( 1 ) Le peintre Diognète , I 6 (

D 155 ) , qui , sans être nécessairement

philosophe, poussa le jeune Marc Aurèle vers la philosophie et lui aurait fait entendre ( dans le cadre de conférences publiques ?) Bacchios ( ** B 2 ) , Tandasis ( = selon Hadot 6, p. LXXXIII, Basilide » B 14) et Marcianus ( RM 34 ) . (2 ) Q. Iunius Rusticus, I 7 , deux fois consul ( 133 et 162), « très versé dans la doctrine stoïcienne » ( Stoicae disciplinae peritissimus, Vita Marci III 3 ) , petit fils du stoïcien Q. Iunius Arulenus Rusticus, condamné à mort par Domitien en 93. Ce maître confia à Marc Aurèle les notes qu'il avait prises, comme Arrien de Nicomédie ( ** A 425 ), aux cours d'Épictète (1 7 , 8 ) , à moins qu'il ne s'agît des Entretiens rédigés par Arrien lui-même, peut-être dans une version plus com plète que celle qui nous a été conservée, car tout ce qui peut être attribué à Épictète chez Marc Aurèle ne se trouve pas dans les Entretiens tels que nous les lisons. Sur l'influence d'Épictète, voir la notice de 56 P.P. Fuentes González , « Épictète » , E 33 , DPLA III , 2000 , p. 106-151 , notamment p . 141 et, pour le schéma des trois topoi ( voir plus loin ) , p. 129-130. Sur les citations d'Épictète chez Marc Aurèle, voir Hadot 17 , p. 81-84 . ( 3 ) Apollonius de Chalcédoine , I 8 ( ** A 274 ) , stoïcien qui enseignait peut être à Chalcis en Coelé - Syrie, d'où Antonin le Pieux le fit venir à Rome. Il enseigna aussi à Lucius Verus ( Vita Marci II 7 ). ( 4 ) Sextus de Chéronée, I 9 , philosophe stoïcien , neveu de Plutarque de Chéronée . ( 5 ) Alexandre de Séleucie , dit Pèloplaton , le platonicien , I 12 ( > A 121 ), ab epistulis pour la langue grecque. ( 6) Cinna Catulus, stoïcien , I 13 (2C 128) . ( 7 ) Claudius Severus, péripatéticien, I 14 = Cn. Claudius Severus Arabianus. Il fut le père de Claudius Severus, également péripatéticien, auditeur de Galien (2G 3) et époux d'Annia Galeria Faustina, la fille aînée de Marc Aurèle . ( 8) Claudius Maximus ( - * M 71 ) , I 15. Il était probablement stoïcien. Sur ces maîtres, voir Hadot 17, p. 19-30 ; Hadot 6, p. LXXXI - CXVII.

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Les autres maîtres. Marc Aurèle mentionne essentiellement deux autres maîtres : ( 1 ) Alexandre de Cotyaeum (en Phrygie ), le grammairien , I 10. (2) M. Cornelius Fronton, le rhéteur, I 11 ( » F 19) . Dans les premières lettres, écrites en latin ou en grec, échangées à l'époque où Marc Aurèle n'était que César, on est principalement informé – à travers un déluge d'épanchements amicaux et d'innombrables évocations de rhumes, grippes ou rhumatismes – des lectures latines imposées par le maître ou des différents exercices rhétoriques exigés par le rhéteur: composer des vers (Ad M. Caes. et invicem , II 10, p. 30 Van den Hout), réécrire une maxime en deux ou trois versions, extraire des sentences du Jugurtha ou des Catilinaires ( III, 11 , p . 44 ; voir aussi les cinq cahiers d'extraits constitués en quelques jours par le jeune César à partir d'une soixantaine d'auvres, dont les farces atellanes, III, 17 , p. 49, 19), traiter un cas juridique du point de vue de l'accusation et de la défense (V 42, p. 77), trouver des applica tions à des images frappantes, par exemple l'île d'Aenaria qui contenait un lac où se trouvait une autre île (III 8 , p. 40 ), faire l'éloge de la fumée ou de la poussière (Laudes fumi et pulveris, p. 215), ou encore de la négligence ( Laus neglegentiae, p. 218) , du sommeil ou de la veille (I 4-5 , p. 5-9). Dans une lettre de 143 , année où Fronton fut consul suffect, on peut lire le jugement assez sévère exprimé par Marc Aurèle à la suite d'une conférence du grand sophiste Polémon (II 10, p. 29). Sur le conflit entre rhétorique et philosophie qui se trouvait au cœur des rapports entre Marc Aurèle et Fronton , voir les références regroupées dans 57 R. Goulet, notice « Fronton ( M. Cornelius - ) » , F 19 , DPLA III , 2000 , p. 428 430. 58 M. Van den Hout, « Reminiscences of Fronto in Marcus Aurelius' Book of Meditations » , Mnemosyne 3 , 1950 , p . 330-350 ; 59 G. P. Selvatico, « Lo scambio epistolare tra Frontone e M. Aurelio. Esercitazioni retoriche e cultura letteraria » , MAT 5 , 1981 , p . 225-301 ; 60 H. Gärtner, « Ein Kronprinz und sein Lehrer. Marc Aurel in seiner Korrespondenz mit Fronto » , dans P. Neukam (édit . ) , Struktur und Gehalt, coll . « Dialog Schule -Wissenschaft » , Klass. Sprachen & Lit. , 17 , München 1983 , p . 25-49 ; 61 H. Görgemanns , « Der Bekehrungsbrief Marc Aurels » , RHM 134, 1991, p. 96-109 . C'est dans une lettre de 146-147 , alors qu'il avait 25 ans , que Marc Aurèle, à la suite d'une lecture d'Ariston - probablement le stoïcien Ariston de Chios ( A 397 ) -, manifeste ouvertement son agacement envers les exercices de rhétorique imposés par Fronton ( IV 13 ; p . 75 ) . 62 J.-M. André, « Le De otio de Fronton et les loisirs de Marc - Aurèle » , REL 49, 1971 , p. 228-261 ; 63 A. Birley , « Some teachers of M.A.» , dans Historia Augusta - Colloquium , Bonn 1966/67 , Bonn 1968 , p. 39 sqq. Signalons la traduction française récente (mais limitée aux lettres de Fronton lui-même) de cette correspondance, accompagnée du texte grec et de notes : 64 Fronton - Correspondance, Textes traduits et commentés par Pascale Fleury, avec la collaboration de Ségolène Demougin coll . « Fragments » , Paris 2003, 426 pages. La Vita Marci II 2 mentionne encore , pour les études élémentaires (ad prima elementa ): ( 3 ) Euphorion ( litterator) , Geminus (comoedus) et Andron ( musicus et geometra ). ( 4 ) A côté d'Alexandre de Cotyaeum , la même source (II 3-4 ) mentionne pour la grammaire: du côté latin Trosius, Aper, Pollio, Eutychius Proculus de

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Sicca, et, pour la rhétorique, du côté grec Aninius Macer, Caninius Celer et Hérode Atticus, en plus de Cornelius Fronton pour le côté latin . Il fréquenta également les écoles publiques de rhétorique (III 8) . Dion Cassius en fait même l'élève d'Hermogène (LXXI 1,2) . (5 ) Enfin , il étudia le droit avec Lucius Volusius Maecianius ( III 6) . Études sur la psychologie et l'état de santé de Marc Aurèle. 65 R. Dailly et H. von Effenterre, « Le cas Marc Aurèle. Essai de psychosomatique histori que» ,REAnc 56, 1954, p. 347-365 ; 66 T. W. Africa, « The Opium addiction of Marcus Aurelius » , JHI 1961 , p. 97-102, repris en version allemande dans Klein 14 , p . 133-143 ; 67 E.C. Witke, « Marcus Aurelius and Mandragora » , CP 60 , 1965, p . 23-24. Contre cette approche, voir 68 P. Hadot, « Marc Aurèle était-il opiomane ? » , dans E. Lucchesi et H. D. Saffrey ( édit . ), Mémorial André- Jean Festugière. Antiquité païenne et chrétienne, coll . « Cahiers d'orientalisme » 10, Genève 1984, p. 33-50 repris dans Études de philosophie ancienne, coll. « L'âne d'or » , Paris 1998 , p . 95-114 ; Hadot 17 , p . 262-275 ; 69 H. Schlange Schöningen , Die römische Gesellschaft bei Galen . Biographie und Sozial geschichte, coll . « Untersuchungen zur antiken Literatur und Geschichte » 65 , Berlin 2003, p. 198-204. Connaissance de l'écrit de Marc Aurèle dans l'Antiquité. « Il est vrai semblable qu'à sa mort, un parent ou un proche a trouvé le précieux document et l'a conservé avec piété » ( Hadot 5 , p . XII ) . Il ne semble pas que Dion Cassius (dont l'ouvrage fut composé entre 222-234) , pas plus qu'Hérodien, Aurelius Victor ou l'auteur de la Vie d'Avidius Cassius dans l'Histoire Auguste, ni que Thémistius ou l'empereur Julien , ou encore l'auteur de la Vie de Marc Aurèle dans l'Histoire Auguste aient connu l'ouvrage, bien que la correspondance de Marc Aurèle ait pu servir à certains de ces auteurs ( Hadot 6 , p. XII - XIX). Les premières allusions certaines au texte de Marc Aurèle se trouvent chez Aréthas de Césarée au Xe siècle (Hadot 6 , p . XIX-XXIV ) . Voir aussi 70 G. Cortassa, « La missione del bibliofilo : Areta e la “riscoperta dell ' A se stesso di Marco Aurelio » , Orpheus 18 , 1997 , p. 112-140 ; 71 F. Ronconi , La traslitterazione dei testi greci, Spoleto 2003, p . 20-24. Plusieurs extraits sont cités par la Souda à la fin du Xe siècle ( Hadot 6 , p. XXIX - XXV ) . 72 Francesca Schironi , « Il testo di Marco Aurelio conservato dalla “ Suda ” » , SCO 47 , 2000 , p. 209-233 . Le titre. Ces réflexions que l'empereur écrivait pour lui-même ( eic Éautóv ) , n'avaient pas reçu de titre particulier. Il faut abandonner le titre de Pensées, « qui n'a aucun fondement dans la tradition manuscrite, ni même dans la tradition des éditions anciennes de l’æuvre, et qui a en outre le désavantage , pour un lecteur français, d'évoquer les Pensées de Pascal » ( Hadot 6 , p . VII - VIII ; voir aussi p . XXV-XXVII ) . Le genre littéraire. Il ne s'agit pas d'un “ journal ” au sens moderne du terme, où Marc Aurèle aurait exprimé ses états d'âme ; « il essaie de se rendre meilleur en se pénétrant, en s'imprégnant des dogmes stoïciens et en pratiquant les exercices spirituels recommandés par cette école » (Hadot 6 , p. XXXI ) . Ignorant ce caractère de l'ouvrage, déjà reconnu par Meric Casaubon ( 1634 ) ou Thomas Gataker ( 1652 ) , plusieurs commentateurs ont imaginé que le texte avait été

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complèment mutilé , bouleversé , interpolé, ou bien qu'il ne s'agissait que de notes destinées à une construction mieux ordonnée et ils n'ont pas hésité à remettre en ordre ces membra disjecta (Pierre de Joly en 1742 et 1773 , A. S.L. Farquharson en 1944 ). En vérité, Marc Aurèle, dans ces écrits qu'il rédigeait en grec, ne faisait qu'appliquer le conseil d'Épictète qui , à propos des principes stoïciens, écrivait: « Ces principes, il faut que tu les aies sous la main , la nuit et le jour, il faut les écrire, les lire » (Entretiens III 24, 103 ). « Voilà ce que doivent méditer les philosophes, voilà ce qu'ils doivent écrire tous les jours, qui doit être leur matière d'exercice » ( Ibid ., I 1 , 25 ). Voir Hadot 6, p. XXVII -XL . Pour l'interprétation d'ensemble de ces réflexions de Marc Aurèle , on attachera la plus grande importance aux travaux de P. Hadot qui a tenté de retrouver, sous un désordre apparent, « un système conceptuel extrêmement rigoureux » (Hadot 17 , p . 62 ) , essentiellement emprunté à Épictète et organisé autour des trois « disciplines de vie » , relatives au jugement, au désir et à l'action . 73 P. Hadot, « La physique comme exercice spirituel ou Pessimisme et optimisme chez Marc Aurèle » , RThPh 1972 , p. 225-239, repris dans Exercices spirituels et philosophie antique, 2e éd . rev . et augm . , Paris 1987 , p. 119-133 ; 74 P. Hadot , « Une clé des Pensées de Marc Aurèle, les trois topoi philo sophiques selon Épictète » , EPh 1978 , 65-83 , repris dans Exercices spirituels et philosophie antique, 2e éd . rev . et augm. , Paris 1987 , p. 135-153 . Datation . 75 C.R. Haines , « The composition and chronology of the Thoughts of Marcus Aurelius » , JPh 33 , 1914 , p. 278-295 . Le livre I. Le livre premier est très différent du reste de l'ouvrage. Il « se présente comme un inventaire énumérant les bienfaits que Marc Aurèle a reçus des dieux et de seize personnalités qui semblent ainsi avoir joué un rôle décisif dans sa vie » (Hadot 6 , p. XLI ) . Il est possible qu'il ait été ajouté en tête des autres livres, ce qui expliquerait, comme l'a proposé W. Theiler, que le livre II porte dans l'editio princeps l'inscription Tà év Kovádolç TPÒS TQ Tpavoúą a' . Voir Hadot 6 , p. XLVI - LII . Comme toutes les personnalités évoquées dans le premier livre sont présentées comme défuntes, « on peut supposer que livre I a été écrit entre 175-176, date de la mort de Faustina, et 180, date de la mort de Marc Aurèle . Les livres II - XII ont été écrits vraisemblablement entre 172 et 180 » (Hadot 6, p. LIII) . Le premier livre semble avoir été composé selon un plan assez précis et de façon continue (plan dans Hadot 6 , p. XLII ; XLV - XLVI), mais il est annoncé par de nombreuses esquisses dans les livres II- XII (Hadot 6, p . LIV - LVI ) . Sur le livre I , voir aussi Dalfen 12 , p . 4-33 ; Rutherford 10 , p . 48 125 ; 76 H. Schenkl , « Zum I. Buche der Selbstbetrachtungen des Kaisers Marcus Antoninus » , WS 34 , 1912 , p . 82-96 ; 77 K. Dürr, « Das erste Buch der Selbstbetrachtungen des Kaisers M. Aurelius Antoninus » , Gymnasium 49, 1938, p. 64-82 ; 78 P. Martinazzoli, La " Successio " di Marco Aurelio . Struttura e spirito del primo libro dei Pensieri, Bari 1951 ; 79 L. Mangano, « Letterarietà di un filosofo : studio sul primo libro di Marco Aurelio » , StudUrb (Ser. B ) 63 , 1990 , p. 137-64.

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Marc Aurèle a - t- il régné en stoïcien ? En réponse à cette question , Ilsetraut Hadot nous a communiqué les informations suivantes: Certains historiens, comme 80 G. R. Stanton ( « The Cosmopolitan Ideas of Epictetus and Marcus Aurelius » , Phronesis 12 , 1968 , p . 183-195 ; 81 Id . , « Marcus Aurelius Emperor and philosopher » , Historia 18 , 1969 , p . 570-587 ) , par exemple , ou 82 J. Francis (Subversive Virtue, Asceticism and Authority in The Second Century Pagan World, Pennsylvania State Univ . Press 1995 , p. 20 52 ) , ont considéré que Marc Aurèle n'avait pas été capable d'unifier son rôle d'empereur et son idéal philosophique , et que son stoïcisme n'avait exercé aucune influence sur sa manière de gouverner et sa législation. D'autres, comme 83 P. Noyen, « Marcus Aurelius , The Greatest Practician of Stoicism » , AC 24, 1955 , p . 372-383 , et 84 B. Hendricx , « Once Again : Marcus Aurelius, Emperor and Philosopher » , Historia , 23 , 1974 , p . 254-256 , ont pensé le contraire. On peut avec 85 Barbara Maier, Philosophie und römisches Kaisertum , Wien 1985 , p. 285-310, rappeler qu'il faut replacer le problème dans la perspective concrète de ce qu'était l'empire romain au temps de Marc Aurèle et ce que fut le déroule ment de son règne. D'une part, la mentalité de l'époque et la situation concrète de l'Empire ne permettaient pas des réformes révolutionnaires. D'autre part, et surtout, le stoïcisme ne fournissait pas un programme précis de réformes politi ques et sociales, mais avant tout une orientation générale de la conduite , caracté risée par le sens du devoir et le respect de la personne humaine . Marc Aurèle se refuse d'ailleurs à imposer aux hommes des principes qu'ils ne sont pas capables d'accepter ( IX 29 ) : « Car qui pourra changer leurs principes de vie ? Mais sans ce changement, qu'y a- t- il d'autre qu'esclavage de gens qui gémissent tout en faisant semblant d'obéir ? » On ne peut nier, en tout cas , la conscience scrupu leuse, allant jusqu'aux moindres cas particuliers, que Marc Aurèle a apportée dans l'accomplissement de ses tâches d'empereur, par exemple dans l'exercice des fonctions judiciaires ( Dion Cassius LXXII 6 , 1 ; Fronton, De feriis Alsien sibus 3 , 7 , p. 231 Van den Hout ; cf. 86 T. Honoré, Emperors and Lawyers, London 1981 , p. 13-14 ) et son attention à des détails , tout à fait inattendus dans la perspective de la mentalité générale de l'époque, comme l'obligation faite aux gladiateurs de ne combattre qu'avec des épées mouchetées ( Dion Cassius LXXII 29 , 3 ) ou , après la chute mortelle d'enfants funambules, la décision de faire placer des matelas sous les acrobates lors de leurs exhibitions (S.H.A. IV 12 , 12) . Par ailleurs certains historiens ( 87 J.M. Rist, « Are you a Stoic ? The case of Marcus Aurelius » , dans B.F. Meyer et E.P. Sanders (édit . ) , Jewish and Christian self -definition, t . III : Self -definition in the Greco - Roman world , London 1983 , p. 23-45 , notamment p. 23 , et 88 E. Asmis, « The stoicism of Marcus Aurelius » , ANRW II 36, 3 , 1989 , p. 2228-2252 ) ont affirmé que Marc Aurèle ne s'était pas considéré lui - même comme un stoïcien, parce qu'il ne s'affirme jamais comme tel et que sa philosophie aurait donc eu des tendances éclectiques. Mais ce silence peut s'expliquer tout simplement par le fait que le genre littéraire des entretiens avec soi-même ne l'obligeait pas à faire une profession de foi explicite de stoïcisme . Son entourage le considérait bien comme un authentique stoïcien , comme il apparaît nettement dans les Lettres de

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MARC AURÈLE

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Fronton qui présentent Cléanthe, Zénon et Chrysippe comme les autorités sous les auspices desquelles Marc Aurèle place son genre de vie ( De eloquentia 2 , 11 , p. 140, 6 , et De feriis Alsiensibus 3 , 6, p. 230, 14 : tuus Chrysippus, et Dion Cassius LXXII 1 , 3 ). ILSETRAUT HADOT. Rapports de Marc Aurèle avec les juifs et les chrétiens. 89 W.F. Adeney , « Marcus Aurelius and the Christian Church » , BOR 77 , 1883 , p . 1-35 ; 90 H. Eberlein , Kaiser Mark Aurel und die Christen , Breslau 1914 ; 91 L. Wallach , « The colloquy of M. A. with the patriarch Judah I. » , JewQRev 31 , 1940, p. 259 sqq. ; 92 Marta Sordi, « I nuovi decreti di Marco Aurelio contro i Cristiani » , Studi Romani 9 , 1961 , p. 365-378 , repris en version allemande dans Klein 14, p . 176-196 ; 93 P. Keresztes, « Marcus Aurelius a Persecutor ? » , HTHR 61 , 1968 , p . 321-341 , repris en version allemande dans Klein 14 , p . 279-303 ; 94 P. A. Brunt, « Marcus Aurelius and the Christians» , dans C. Deroux (édit . ), Studies in Latin Literature and Roman History, coll . « Latomus » 164 , Bruxelles 1979, p. 483-520 ; Birley 15 , p . 256-265 ( Appendix IV ) ; 95 C. Motschmann , Die Religionspolitik Marc Aurels, coll . « Hermes Einzelschriften » 88 , Stuttgart 2002, 296 p. Histoire du texte. Farquharson 2 , p . XXII- XLII ; Dalfen 4 , p . VII - XXXIII ; Hadot 6 , p. CLXXXV - CCIV . Un seul manuscrit conservé contient le texte complet : le Vaticanus graecus 1950 ( début du XIVe siècle ) , mais il faut tenir compte aussi du manuscrit perdu qui a servi à l’editio princeps parue à Zürich en 1559 ( le Toxitanus ). 96 P. Canart, Codices Vaticani Graeci. Codices 1745-1962, Città del Vaticano, I , 1970 , p . 762-766 ; II , 1973 , p. LXIX : descriptio de A ( cod. Vaticanus Gr. 1950 , saec . XV ). La descriptio d'une copie de l'editio princeps se trouve dans 97 E. Mittler et alii, Bibliotheca Palatina , Katalog zur Ausstellung vom 8. Juli bis 2. November 1986 , Heiliggeistkirche Heidelberg, 1 , coll . « Heidelberger Bibliothekschriften >> 24 , Heidelberg 1986 , p. 213-214. Voir encore 98 J. Dalfen , « Einige Interpolationen im Text von Marc Aurels Tà siç Éautóv » , Hermes 102 , 1974 , p . 47-57 ; 99 Id ., « Scholien und Interlinearglossen in Marc Aurel-Handschriften » , SIFC 50 , 1978 , p. 5-26 . Hadot se montre réticent face à cette hypothèse des interpolations. Les fol. 342 V - 344V ( Marc Aurèle I 16-17 ) sont reproduits en fac -similé dans 100 R. Merkelbach et H. van Thiel , Griechisches Leseheft zur Einführung in Paläographie und Textkritik, coll . « Studienhefte zur Altertumswissenschaft » 10, Göttingen 1965 , n° 13 , p. 32-34. Études sur la langue et le style. 1 R. Schekira, De imperatoris Marci Aurelii librorum td eic Éautóv sermone quaestiones philosophicae et grammaticae, Diss . Greifswald 1913 ; 2 H. Zilliacus , De elocutione Marci Aurelii imperatoris quaestiones syntacticae, coll . « Soc . Scien . Fenn ., Comment. hum . litt. » IX 2 . Helsingfors /Leipzig 1936 ; 3 G. Ghedini , La lingua greca di M. Aurelio Antonino, coll . « Publ. Univ . Cattol . Sacro Cuore » Ser. IV 5 , parte prima : fone tica e morfologia, Milano 1926 ; 4 D. Szumska , « De diminutivis apud M. A. obviis » , Eos 44 , 1964, p . 230-238 ; 5 J. Dalfen , Formgeschichtliche Unter suchungen zu den Selbstbetrachtungen Marc Aurels, Inaug . Diss . , München

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MARCUS DE BYZANCE

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1967 ; 6 R.B. Rutherford , The Meditations ofMarcus Aurelius . A study, coll . « Oxford class. monogr. » , Oxford 1989, XVIII-282 p . Citations philosophiques. Pour les citations philosophiques, voir Hadot 17 , p . 69-74 . A noter les deux recueils de citations en VII 32-51 et XI 22-39 , empruntées aux Tragiques, à Platon et à Épictète . 7 G. Cortassa , Il filosofo, i libri, la memoria. Poeti e filosofi nei “ Pensieri " di Marco Aurelio, Torino 1989 ; sur les citations d'Épictète dans les Pensées, voir 8 G. Breithaupt, De Marci Aurelii Antonini commentariis quaestiones selectae, Göttingen 1913 , p. 45-64. Réception . 9 J. Kraye , « Ethnicorum omnium sanctissimus : Marcus Aurelius and his Meditations from Xylander to Diderot » , dans J. Kraye et M. W.F. Stones (édit. ) , Humanism and early modern philosophy, coll . « London studies in the history of philosophy » 1 , London /New York 2000 , p. 107-134 . Iconographie. 10 K. Schefold , Die Bildnisse der antiken Dichtern , Redner und Denker, n° 208 , p . 330-331 ; 11 Catalogue de l'exposition Bronze et or. Visages de Marc Aurèle . Empereur, capitaine, moraliste, Genève 1996 ; 12 Kl . Stemmer (édit. ) , Kaiser Marc Aurel und seine Zeit, Berlin 1988 ; 13 E. R. Knauer, « Dar Reiterstandbild des Kaisers Marc Aurel » , dans Klein 14, p. 304 346 ( sur la statue équestre de la Piazza del Campidoglio ). Birley 15, dossier photographique entre les pages 128 et 129 ( monnaies et détails des scènes de la colonne de Marc Aurèle sur la Piazza Colonna). Je remercie Angelo Giavatto qui achève une thèse sur Marc Aurèle d'avoir relu cette notice et de m'avoir signalé de précieuses références. M. Pierre Hadot dont les travaux sur Marc Aurèle ont été largement exploités pour la rédaction de la présente notice a également accepté de relire ce texte et de proposer corrections et compléments. RICHARD GOULET. 40 MARCUS DE BYZANCE (MEMMIUS - ) PIR ? M 465

FI - DM II

Sophiste et philosophe. Philostrate, Vies de sophistes, I 24 , donne diverses indications biographiques sur le sophiste Marc de Byzance : descendant du fondateur éponyme de la cité, Byzas, ayant pour père un homme riche dont l'activité s'exerçait à Hiéron , à l'orée du Pont-Euxin , il fut le disciple du sophiste Isée l'Assyrien ( = I 27 ) et entendit aussi déclamer Polémon de Laodicée. Il s'illustra comme ambassadeur de sa patrie auprès de l'empereur Hadrien et s'efforça de réconcilier les Méga riens (Mégare était la métropole de Byzance ) avec les Athéniens . Il affectait un extérieur négligé, imité plus tard en cela par Onomarchos d’Andros (Philostrate, Vies de sophistes, II 18 ) . Son éloge de l'arc - en -ciel, symbole de l'art du sophiste, était parfois attribué au philosophe stoïcien Alcinoos ( 2A 93 ) . Depuis 1 N. Svoronos, « Nomismatika Analekta » , ArchEph 1889 , col . 107 115 , on l'identifie à un certain Memmius Marcus qui figure sur les monnaies de Byzance, notamment comme hiéromnèmon sous Antonin et comme « héros » sous Marc Aurèle – il est donc mort sous le règne de cet empereur. En revanche , l'inscription sur un couvercle de sarcophage que L. Robert avait cru pouvoir rapprocher se rapporte sûrement à un membre plus récent de la famille , le contexte archéologique obligeant à le dater entre Caracalla et Gordien

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MARCUS DE BYZANCE

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III . Voir 2 N. Firatli, Ann . arch . Museums Istanbul, 13/14 , 1966 , p . 188-210 ; 3 J. et L. Robert, Bull. épigr. 1965 , 245 ; 1966 , 249 ; 4 A. Łajtar, Die Inschriften von Byzantion , coll . IK 58 , I , Bonn 2000 , n ° 308 , p . 214-215 (Bull. épigr. 2001, 308 ) . Pour une synthèse récente, voir 5 B. Puech, Orateurs et sophistes grecs dans les inscriptions d'époque impériale, coll . « Textes et traditions >> 4, Paris 2002, p. 344-345, avec une chronologie un peu différente pour les monnaies mention nant le sophiste. SIMONE FOLLET . 41 MARDONIOS RE 2 PLREI:

MIV

Le nom de Mardonios fut porté par un esclave eunuque d'origine « scythe » , c'est- à -dire gothe ou sarmate , qui assura auprès du futur empereur Julien, durant une partie de son enfance et adolescence , la fonction de pédagogue. Les textes qui font allusion à ce personnage sont les suivants : Julien , Lettre à Saloustios 2 , 241 c ; Lettre aux Athéniens 5 , 274 d ; Contre Héracleios 23 , 235 a-c ; Contre les chiens ignorants 16, 198 a ; Misopogon 21-24, 352 a - 353 b ; Libanios, Discours 18 , 11 ; Socrate , Hist. Eccl. III 1 , 9 (ce dernier texte est le seul à donner en clair le nom du pédagogue, alors que Julien , Misop. 22 , 352 a, utilise le détour d'une sorte de devinette ).

Selon toute apparence, c'est cet homme que Julien , en Contre Héracleios 23 , 235 a, désigne par le terme de piñóoodoc. Toutefois, rien ne laisse penser que son pédagogue ait eu une compétence particulière en matière de philosophie : Julien le vénère en tant que « guide dans l'étude des poètes » . Deux raisons, outre la gratitude et l'affection, ont pu conduire Julien à décorer Mardonios du H 46), titre de philosophe : d'une part l'intention d'opposer à Héracleios ( philosophe indigne de ce nom , un philosophe non professionnel mais authen tique par sa sagesse et sa vertu , et d'autre part celle de suggérer que la culture humaniste est non seulement une préparation à la philosophie, mais en constitue une partie : voir J. Bouffartigue, L'Empereur Julien et la culture de son temps, Paris 1992 , p. 18-25 . H. Schlange - Schöningen , Kaisertum und Bildungswesen im spätantiken Konstantinopel, coll . « Historia - Einzelschriften » 94 , Stuttgart 1995 , p. 49-50, rappelle que Mardonios était chrétien , qu'il avait été élevé par le grand - père de Julien et avait appris à sa mère Basilina Homère et Hésiode (Jul . , Misop ., 352 b ). JEAN BOUFFARTIGUE . 42 MARINUS DE NÉAPOLIS RE 1 PLRE II : 3

MV

Professeur de philosophie , puis successeur de Proclus à la tête de l'École néoplatonicienne d'Athènes , c'est- à -dire « Diadoque » ( Souda , M 198 , t. III , p . 324 , 12-15 Adler = Damascius , Vita Isidori, fr. 90, $$ 42 et 141 ) . On place sa naissance vers 440 , et son arrivée à Athènes pour y commencer ou poursuivre ses études de philosophie vers 460 (cf. Marinus, Proclus ou Sur le bonheur, éd. Saffrey -Segonds, p. XI - XII ) . Il était originaire de Néapolis en Palestine , capitale religieuse des Samaritains , mais par suite d'un désaccord sur les doctrines

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MARINUS DE NÉAPOLIS

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religieuses de ses coréligionnaires, il embrassa les convictions et la manière de vivre des païens (Damascius, V. Isid ., § 141 ) . Il partit pour Athènes où nous savons qu'il y avait une diaspora abondante de Samaritains ( cf. l'ouvrage collectif édité par A. D. Crown, The Samaritans, Tübingen 1989 ) . Il devint l'élève de Proclus, et bientôt un disciple apprécié et peut-être un collaborateur de son maître. Proclus lui a dédié son important commentaire sur le mythe d’Er dans la République de Platon ( in Remp. II , p. 96 , 2-4 Kroll). Au cours de ce traité, il rapporte une opinion de Marinus sur la révolution du ciel ( ibid. p. 200 , 30 - 201, 6 ) . On doit donc supposer des discussions sur ce mythe entre Proclus et Marinus. L'estime que Proclus portait à son disciple, explique qu'il ait pensé à lui pour sa succession. Toutefois la mauvaise santé de Marinus faisait hésiter Proclus qui envisagea aussi d'autres candidats ( Damascius, V. Isid ., $$ 141 , 147 , 152 , et fr. 241). Mais ce fut finalement Marinus qui fut choisi à la mort de son maître en 485. L'année suivante , pour le premier anniversaire de la mort de Proclus, Marinus prononça un éloge funèbre qui nous est parvenu sous le titre Proclus ou Sur le bonheur. Il y développe le thème que Proclus fut le plus heureux des hommes parce qu'il a pratiqué jusqu'à la perfection toutes les vertus ( sur ce thème, cf. O. Schissel von Fleschenberg, Marinos von Neapolis und die neuplatonischen Tugendgrade, coll . « Texte und Forschungen zur byzantinisch -neugriechischen Philologie » 8 , Athènes 1928 , avec la recension de W. Theiler, Gnomon 5 , 1919 , p. 307-317 ) . En suivant le schéma classique de l'échelle des vertus, Marinus illustre chaque degré par des épisodes de la vie de Proclus et de l'École . De ce fait, son discours constitue le document le plus important sur l'enseignement de la philosophie à Athènes au Ve siècle . Parmi les disciples de Marinus, on connaît les noms d'Isidore ( » I 31 ) , de Damascius ( ** D 3 ) et d’Agapius ( A 31 ) . Damascius ( V. Isid ., § 144 ) dit que Marinus a peu écrit. Nous savons qu'ont existé de Marinus les ouvrages suivants : ( 1 ) un Commentaire sur les Data d’Euclide dont il nous reste les Prolégo mènes (éd. par H. Menge dans Euclidis Opera Omnia VI, Leipzig 1896, p. 233 257 , et par M. Michaux avec une traduction française, Louvain 1947 ), ( 2 ) un Commentaire sur le Philèbe , qui a été détruit par Marinus lui-même à la suite des critiques d'Isidore (Damascius, V. Isid ., fr. 90 ), ( 3 ) un Commentaire sur le Parménide, critiqué aussi par Isidore parce qu'il abandonnait l'interprétation de Proclus: Marinus voulait que le sujet du dialogue fût non pas les dieux mais les idées . Ce commentaire a été conservé par son auteur en raison d'une vision de Proclus qui lui disait de ne pas le détruire (Damascius, V. Isid ., fr. 245 et in Parm ., p . 294, 12-17 Ruelle ) . On est étonné qu’un désaccord aussi fondamental ne se soit pas manifesté du vivant de Proclus pour dissuader ce dernier de faire de Marinus son successeur. D'autre part, les commentateurs postérieurs et les scholies transmettent des opinions de Marinus sur le De anima (Ps. Philopon, in De anima III 5 , p. 535 , 4 18 , et p . 535 , 31 - 536, 2 Hayduck ) , le deuxième livre des Premiers Analytiques ( cf. Ch . Brandis , Scholia in Aristotelem , dans Aristotelis Opera Omnia , éd . Bekker, Berlin 1831 , p. 188 a 1-188 b 1 ) , l'Almageste de Ptolémée (cf. A. Tihon, dans Janus 63 , 1976, p. 167-184 ) et le Petit Commentaire de Théon d'Alexan

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MARINUS DE NÉAPOLIS

drie ( ibid ., p . 172-175 et p. 184 ) . Ces témoignages sont probablement des échos de l'enseignement oral de Marinus et n'obligent aucunement à penser qu'aient existé de Marinus des commentaires rédigés et publiés sur ces ouvrages. Le philosophe Élias (» E 15 ) rapporte cette sentence de Marinus : « Plût aux dieux que toutes les disciplines fussent des mathématiques » , qui s'accorde à ce que nous savons en effet de son penchant pour les mathématiques (Élias , Prolego mena philosophiae 10 , p. 28, 24-29 Busse). Toute la documentation est présen tée en détail dans H. D. Saffrey et A. Ph. Segonds, Marinus, Proclus ou Sur le bonheur , coll . CUF , Paris 2001, p . IX - XXXIX . Voir aussi S. Sambursky, « Proklos, Präsident der platonischen Akademie, und sein Nachfolger, der Sama ritaner Marinos » , SHAW ( M ) 1985 , 2 Abhandlung, p. 35-51 . Les témoignages biographiques ont été récemment rassemblés par 3 J. Radicke , Die Fragmente der griechischen Historiker continued, t. IV A : Biography, fasc. 7 : Imperial and undated authors, Leiden 1999, n° 1083 , p. 268-273. [ Selon M. C. J. Miller, « A lost monument containing a summary of the life of Proklos » , AncW 33 , 2002, p. 71-77 , l'inscription métrique attique aujourd'hui perdue publiée par W. Peek dans MDA(1) 67 , 1942, p. 71-72, pourrait provenir de la vie de Proclus écrite en vers R.G. ] par Marinus ( Souda M 198 , t. III p. 12-15 Adler).

HENRI DOMINIQUE SAFFREY . ja

43 MARIUS (M.-) RE 25

Ce Romain cultivé nous est connu grâce à la correspondance de Cicéron , entre 56 et 46. On sait qu'il était très lié à Cicéron et à son frère ( 1 F. Münzer, art. « Marius » 25 , RE XIV 2 , 1930 , col. 1819-1820 , a suggéré qu'il pouvait leur être apparenté ), que sa santé était mauvaise (Cic . , ad Q. fr. II 8 , 2-3 ; Fam . VII 1 , 1 et 5 ; Fam . VII 4) et qu'il habitait une villa avec vue sur la baie de Naples à Pompéi ( Cic . , Fam . VII 1 , 1 , et 2 J. D'Arms , Romans on the Bay of Naples, Cambridge 1973 , p. 46 et surtout n ° 29 p . 191 ) . Münzer 1 a proposé de l'iden tifier au candidat à l'édilité M. Marius connu grâce à sept recommandations de vote à Pompéi (CIL 1 ? 1656 a-g ) : il est vrai que Marius semble avoir fait partie du sénat de Pompéi (Cic . , Fam . VII 1 , 3 ) . S'il semble s'être tenu à l'écart, il a dû fréquenter assez souvent les jeux , surtout les représentations théâtrales (Cic . , Fam . VII 1 , 2 ) et s'intéressait à l'actualité (Cic ., Fam . VII 2 , 2) . Il avait des liens avec plusieurs hommes politiques: le tribun de la plebe de 56 L. Caninius Gallus ( Cic . , Fam . VII 1 , 4 ) qui était un partisan de Pompée ( il essaya en vain de faire confier à ce dernier la mission de restaurer sur son trône Ptolémée Aulète , cf. MRR , 2, p. 209 , et 3 E. S. Gruen , The Last Generation of the Roman Repu blic, Berkeley 1974 , p . 100 et 109-110) et L. Scribonius Libo ( Cic . , Fam . VII 4 ) qui était très proche de Pompée ( voir Gruen 3 p . 100 , 108 et 314 surtout), mais aussi un homme cultivé auteur d’Annales composées probablement pendant les années de la dictature de César (cf. 4 H. Bardon , La littérature latine inconnue, t. I , Paris 1952 , p . 267-269 ) . Une lettre de 46 ne laisse guère de doute sur les préférences politiques de M. Marius pour le camp de Pompée (Cic . , Fam . VII 3 , 1-2 et 5 ) .

--

M44

MARSIPOS

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M. Marius a été classé parmi les épicuriens par 5 N. DeWitt, « Epicurean Contubernium » , TAPHA 67 , 1936, p. 55-63 , p. 60 en particulier) à partir d'une remarque de Cicéron (Fam . VII 1 , 4-5 teque et istam rationem oti tui et laudo uehementer et probo) et 6 C.J. Castner, Prosopography, p. 95-96 : mais le choix de l'otium pouvait être dû à la mauvaise santé de Marius et non à son désintérêt pour la politique, puisqu'on a vu plus haut qu'il y prenait beaucoup d'intérêt et qu'il était manifestement un Pompéien. Enfin , Cicéron lui -même n'ayant jamais été un épicurien , on voit mal où DeWitt trouve argument à imaginer que ce dernier ait pu envisager une retraite commune de type épicurien avec M. Marius. D'autre part, 7 G. Della Valle, « Tito Lucrezio Caro e l'epicureismo campano » , AAP 62 , 1932 , p . 185-496 , surtout 331-336 , a rapproché le peu de goût de M. Marius pour les combats de gladiateurs avec le mépris affiché par Lucrèce ( AL 70) en ce qui concerne le spectacle des fêtes à Rome (De rerum natura IV 973-83 ) et leurs modes de vie à l'écart pour faire lui aussi du premier un épicurien . La correspondance de Cicéron ne laisse rien entendre d'autre que le fait que M. Marius était un homme de grande culture qui aimait la lecture et le théâtre. YASMINA BENFERHAT.

44 MARSIPOS OU MANIPPOS RE ( s. v . Manippos)

FIII

Philosophe profane (τον μεν των εκτός λόγων φιλόσοφον ) mentionne par Épiphane, Panarion III haer. 66 , 10 , 2 , p. 31 , 7 Kroll, dans le cadre d'une discussion du manichéisme ( III , p. 13 , 20 sqq . ) . Il est associé à Claude , un iatrosophiste, à Aigialeus, un grammairien, et à Cléoboulos, un sophiste, comme membre d'un jury nommé par Marcellus pour arbitrer un débat doctrinal tenu en public entre Mani et l'évêque Archélaos à propos des doctrines de Mani à Cascharè ( Cashkar , en Mésopotamie ), à la fin du IIIe siècle . Dans la source d'Épiphane pour ce passage , les Acta Archelai, un ouvrage écrit probablement en grec dans les années 330-348 , attribué à un certain Hégémonius et conservé seulement en latin , le nom du personnage est Manippos et il fait partie du jury de notables païens non pas à titre de philosophe , mais à celui de grammairien et de rhéteur (I 1 et XIV 5 : grammaticae artis et disciplinae rhetoricae peritissimus). Édition critique des Acta Archelai: 1 C.H. Beeson, Hegemonius, Acta Archelai, GCS 16, Leipzig 1906. Traduction anglaise : Hegemonius, Acta Archelai ( The Acts of Archelaus). Translated by M. Vermes, with introduction and commentary by S.N.C. Lieu , with the assistance of K. Kaatz , coll . « Manichaean Studies, 4, Louvain 2001, XII - 177 p. , notamment p. 35 et 59. Voir 2 S.N.C. Lieu , « Fact and fiction in the Acta Archelai» , dans P. Bryder (édit . ) , Manichaean studies. Proceedings of the first international conference on Mani chaeism , August 5-9, 1987, Department of History of Religions, Lund University, Sweden, coll. « Lund stud. in African and Asian religions » 1 , Lund 1988, p. 69-88 . A propos de l'auteur, Hégémonius, voir 3 M. Scopello , « Hégémonius, les Acta Archelai et l'histoire de la controverse anti-manichéenne » , dans R. Emmerick et alii, Studia Manichaica. IV . Internationaler Kongress zum Manichäismus, Berlin, 14. - 18. Juli 1997, Berlin 2000, P. 534-541. Cf. 4 H. Dörries, art. «Manippos » , RE XIV 1 , 1928 , col . 1146 . Jean -Daniel Dubois a bien voulu me communiquer, à propos de Manippos/Marsipos les observations suivantes : Les Acta sont une traduction latine d'un original grec et par

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MARSIPOS

M 44

conséquent le grec d'Épiphane peut conserver quelque chose de l'original grec de l'ouvrage. Marsipos pourrait être le nom original du personnage, étant donné sa région d'origine, et on pourrait l'interpréter en Mar Sipos (= Mar Iosippos, ou Mar Joseph ?) . Serait- ce un dignitaire ecclésiastique à cause du titre de Mar ? La traduction latine des Acta transcrit Manippus, sans doute à cause du nom de Mani . Il s'agirait alors d'une forme secondaire du nom d'un personnage qui ne semble pas connu par ailleurs. On peut se demander s'il s'agit d'un personnage historique , mais le cadre du débat public est en tout cas très vraisemblable: Cf. 5 R. Lim, « Manichaean Disputations in Late Antiquity » , Recherches augustiniennes, 36, 1992, p. 233-272, notamment sur les Acta Archelai p. 240-242 ). RICHARD GOULET. MARTIALIOS + MARTIANOS (M 00 ]

45 MARTIANOS RE 14 ( 1 )

I -IIР

Médecin anatomiste érasitratéen. Orientations bibliographiques : 1 W. Kroll, art. « Martianus » 1 , RE XIV 2 , 1928 , col . 2003; 2 W.A. Greenhill, art. « Marcianus » , DGRB II , 1865 , col . 942 ; 3 Id ., art. « Martialis » , DGRB II , 1865 , col . 964. Martianos ou Martialios ? Le nom de ce médecin cité par Galien ( 2 - G 3 ) dans deux de ses ouvrages, le Pronostic 3 et 4 ( t . XIV , 614. 616. 619 Kühn = 4 V. Nutton , CMG V 8 , 1 , p. 84 , 13 et 25 ; 88 , 16) et le Sur ses propres livres 1 (t. XIX , 13 et 14 Kühn = 5 I. Müller, Scripta Minora (= SM ) II , 94 , 24 ; 95 , 20 et 26 ) , n'est pas formellement établi . Tous les manuscrits du Pronostic ont la leçon Martianos ( Maptiavóc ) , tandis que le Sur ses propres livres qui nous a été transmis en grec par seulement deux manuscrits a la variante Martialios ( Maptiáłloc) . Nutton 4 , p . 168 , pense que c'est cette dernière forme qui est paléographiquement corrompue, la confusion entre les deux formes pouvant aisément s'expliquer par une faute d'onciales N /AI dans les manuscrits. Nutton concède cependant en faveur de Martialios/Martialis que ce cognomen lui paraît plus répandu que Martianos /Martianus. En réalité, dans la mesure où la forme Martianos est également bien attestée ( notamment chez Plutarque qui dans sa Vie de Galba 9 , 3 , mentionne un gladiateur du nom de Martianos : Éx Maptia VoŨ TOŨ uovouáxou) , rien ne permet véritablement de trancher. Ce qui est sûr en revanche , c'est que le traducteur arabe du Sur ses propres livres lisait bien déjà au IXe siècle Martialios qu'il a transcrit Martialis dans le manuscrit iranien de Meshed qui nous a conservé sa traduction . Il est vrai aussi que cette faute qui date de la translittération , c'est -à -dire du passage de la majuscule à la minuscule , pouvait déjà être présente dans l'exemplaire utilisé par Hunain . En conclusion , et dans la mesure où la forme Martianos est donnée par tous les témoins du Pronostic en face de Martialios donné par les deux manuscrits du Sur ses propres livres ( et la traduction arabe ), c'est semble-t - il le cognomen Martianos qui a le plus de chance d'être correct, mais sans certitude. Enfin , et comme le suppose à juste titre Nutton 4 , p . 168 , la mention par 6 K. Deichgräber de ce même personnage, dans Medicus gratiosus, coll . AAWMIGS 1970, 3 , Wiesbaden 1970 , p . 28 n. 2 , sous le nom de Martilianus, semble davantage relever d'une coquille que d'une tentative d'harmonisation entre les deux versions.

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Un médecin anatomiste de renom . Dans le Pronostic 3 et 4 (t. XIV , 614 sqq . Kühn = p . 84 , 2 sqq . Nutton ), Galien mentionne Martianos en tant que médecin anatomiste de renom jouissant d'une grande réputation auprès de ses jeunes collègues . Il précise que Martianos avait coutume de revendiquer le nom de médecin en même temps que celui de philosophe (Pronostic 4 : t. XIV , 619 , 14 Kühn = p. 88 , 15-16 Nutton , à noter cependant que la leçon qió < oopo > ç a été rétablie par Nutton qui adopte ici une correction de Schöne, en face de piós donné par les manuscrits mais certainement fautif). Galien le désigne en particulier comme disciple du grand anatomiste alexandrin Érasistrate (Sur ses propres livres 1 : t. XIX , 14 Kühn = SM II, p. 95 , 20) et le décrit comme amou reux de la querelle. Galien nous donne en outre un autre renseignement précieux sur la chronologie de ce Martianos quand il nous précise que lors de leur rencontre dans la capitale romaine (ca 160 ), celui-ci était alors âgé de plus de 70 ans (Sur ses propres livres 1 : t. XIX , 13 Kühn = SM II, 95 , 2) , ce qui fait naître Martianos aux environs de 90. Dans le Pronostic 3 (t. XIV , 615 Kühn = p. 84, 4 5 Nutton ), Galien mentionne deux ouvrages de Martianos sur l'anatomie spécia lement en vogue à Rome dans les années 160, mais dont malheureusement il ne nous donne pas le titre . Dans le Sur ses propres livres 1 (t. XIX , 13 Kühn = SM II , p . 95 , 2 ) , rédigé après 193 , Galien fait de nouveau allusion à ces deux ouvrages en précisant qu'ils se trouvent encore aujourd'hui entre les mains de nombreuses personnes. Malgré la volonté évidente de dénigrement manifestée par Galien à l'égard de Martianos, le médecin de Pergame reconnaît donc impli citement le succès réel remporté par ces deux traités d'anatomie près de trente ans après leur rédaction . La confrontation entre le médecin vieillissant et le jeune Galien encore en début de carrière semble avoir été relativement houleuse . Galien rapporte dans le Pronostic 4 ( t . XIV , 620 Kühn = p . 88 sqq . Nutton ) comment Martianos l'interpella un jour dans une rue de Rome pour lui deman der s'il avait lu le Prorrhétique II , traité hippocratique qui s'ouvre sur une condamnation des pronostics trop spectaculaires. Irrité par le succès de Galien auprès du philosophe Eudème ( E 92 ) , Martianos avait en effet prétendu que Galien avait en réalité eu recours non à la médecine , mais à la divination . Galien , comprenant que Martianos, par cette question , entendait critiquer la façon dont il avait brillamment pronostiqué l'évolution de la maladie d'Eudeme prit alors fort habilement les devants en déclarant que , personnellement, il ne considérait pas le Prorrhétique II comme un authentique traité hippocratique. Au -delà de l'animosité manifestée par les deux médecins , l'anecdote rapportée ici par Galien illustre la formation classique reçue par Martianos, parfaitement au fait de la médecine hippocratique et capable de citer de mémoire un passage tiré d'un traité du corpus. D'après le témoignage du Sur ses propres livres 1 ( t . XIV , 1 Kühn = SM II , p . 95 , 10 ) cependant, dans un passage lacunaire en grec, mais que j'ai pu rétablir sur la foi de la tradition arabe, Martianos prisait davantage l'anatomie d'Érasistrate que celle d'Hippocrate. Aussi Galien jugea-t il bon de lui répondre en composant deux ouvrages sur le sujet respectivement intitulés Sur l'anatomie d'Hippocrate et Sur l'anatomie d'Érasistrate. De même, Galien ne se prive pas , au cours d'une de ses conférences publiques , et après

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avoir aperçu Martianos dans le public , de critiquer ouvertement l'ouvrage Sur les crachements de sang composé par le même Érasistrate dont précisément se recommandait Martianos. Même si , en ces différentes occasions, Galien lui même confesse avoir largement agi par amour de la gloire, Martianos n'en apparaît pas moins comme la figure emblématique du médecin érasistratéen objet des inlassables critiques du médecin de Pergame. VÉRONIQUE BOUDON -MILLOT. 46 MARTIANUS CAPELLA RE 2

V ?

Auteur du De Nuptiis Philologiae et Mercurii, Les noces de Philologie et de Mercure, contenant une fiction mythologique de caractère allégorique et une encyclopédie des septs arts libéraux. Plus bref que les très volumineux ouvrages B 49) sur les mêmes sujets, plus complet que la rapide collection de de Boèce ( définitions qu'est le livre II des Institutions de Cassiodore (MC 52 ) , l'ouvrage a connu un succès immense dans les écoles médiévales . Éditions. 1 U.F. Kopp , De nuptiis Philologiae et Mercurii et de septem artibus liberalibus libri novem , Francfort 1836 , a fixé le découpage en para graphes. La citation se fait depuis lors en incluant ou non le numéro du livre : « Mart. Cap . IX 723 » ou « Mart. Cap . 723 » ; 2 F. Eyssenhardt , Martiani Capellae de nuptiis Philologiae et Mercurii, coll . BT, Leipzig 1866 ; 3 A. Dick , Martianus Capella, coll . BT, Leipzig 1925 , corrigé par J. Préaux, Stuttgart 1978 ; 4 J. Willis , Martianus Capella , coll . BT, Leipzig 1983. Il est sans exemple qu'un ouvrage ait nécessité un nombre aussi important d'éditions de la collection Teubner. La CUF des Belles Lettres a entrepris une édition des Noces, livre par livre, en commençant par l'arithmétique : 5 J.-Y. Guillaumin ( édit., trad . ), Les Noces de Philologie et de Mercure, t. VII : Livre VII, L'Arithmétique, CUF, Paris 2003. 6 N. Vanderkerckhoven (édit., trad .), Les Noces de Mercure et Philologie, livre III. Édition critique et traduction française, Bruxelles 1968. Traductions de l'ensemble . 7 W.H. Stahl, R. Johnson , E.L. Burge, Martia nus Capella and the Seven Liberal Arts, vol . 2 : The Marriage of Philology and Mercury, New York 1977 , traduction du texte édité par Willis 4. 8 I. Ramelli (édit . ) , Le nozze di Filologia e Mercurio. Introd ., trad ., comment. e appendici, Milano 2001, à partir du texte de Willis 4, traduction largement inspirée de celle de Stahl 7.

de

Traductions partielles. 9 L. Lenaz, (trad. et comment. ), Martiani Capellae nuptiis Philologiae et Mercurii liber secundus, Padova 1975 ;

10 G. Gasparotto, ( trad . et comment. ) , Marziano Capella. Geometria . De nuptiis Philologiae et Mercurii liber sextus, Verona 1983. 11 L. Cristante , ( trad . et comment . ) , Martiani Capellae de nuptiis Philologiae et Mercurii liber IX , Padova 1987 ; 12 L. Scarpa, ( trad. et comment.), De nuptiis Philologiae et Mercurii liber VII, Padova 1988 ; 13 A. Le Bouffle ( trad . et comment . ) , Martianus Capella. Astronomie, Vannes 1998. Commentaires . Sur l'ensemble de l'ouvre : 14 S. Grebe , Martianus Capella, “ De Nuptiis Philologiae et Mercurii ” . Darstellung der Sieben Freien Künste

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und ihrer Beziehungen zueinander, Stuttgart/Leipzig 1999 , et 15 le très important compte rendu d'I . Hadot sur cet ouvrage , Gnomon 76, 2004, p . 125 136. Sur les quatre sciences : 16 W.H. Stahl, R. Johnson , E.L. Burge , Martianus Capella and the Seven Liberal Arts, vol . 1 : The quadrivium of Martianus Capella. Latin Traditions in the Mathematical Sciences (50 A.C. - A. D. 1250) , New York/London 1971. Sur le livre I : 17 D. Shanzer, A Philological and Philosophical Commentary on Martianus Capella's De Nuptiis Philologiae et Mercurii Book I, Berkeley /Los Angeles/London 1986. Indices. Index rerum et uocum memorabilium , Willis 4 , p . 387-445 ; Index graecus : Willis 4, p. 446-448 ; Ramelli 8 , p . 1161-1166 ; Index auctorum, Willis 4, p. 449-450 ; Index citationum : Ramelli 8 , p . 1167-1173 ; Index nominum : Ramelli 8, p. 1133-1159 ; Hapax : Stahl 16, p . 250-252 . Études d'orientation . Sur l'ensemble de l'æuvre : 18 P. Wessner , art. « Martianus Capella » 2 , RE XIV 2, 1930 , col . 2003-2016 ; 19 M. Cappuyns , « Capella (Martianus )» , DHGE XI , 1949, col . 835-848 . Bibliographies. Éditions, traductions, commentaires : Stahl 16 , p . 224-237 ; Grebe 14 , p . 865-867 ; Ramelli 8 , p . 1107-1108 ; études : Stahl 16 , p . 221-224 ; Grebe 14, p. 879-905 ; Ramelli 8, p . 1108-1127 (bibliographie chronologique ); sources : Grebe 14, p. 867-878 . L'auteur. Dans les Noces, l'auteur se désigne sous le nom de Felix Capella (IX 806 ; IX 999) . Les premiers témoignages sur les Noces, Fulgence (Expositio sermonum antiquorum 45 ) et Cassiodore ( Inst. II 2 17 et II 3 20 ), font de même. Le premier correcteur du manuscrit des Noces, Securus Melior, en 534 , ( Leonardi 38 (cité plus loin) , p. 416 ) retient martianus min (n )e(i)us felix capella alors que Grégoire de Tours (Historia Francorum , X 31 , PL LXXI , col . 572 ) ne dit que Martianus, mais , à la suite des commentateurs du IX ° s . , Jean Scot Érigène ( 20 C.E. Lutz [ édit . ) , Johannis Scotti Annotationes in Marcianum , Cambridge, Mass . , 1939 ) et Rémi d'Auxerre ( 21 C.E. Lutz [ édit . ) , Remigius Autissiodorensis Commentum in Martianum Capellam , 2 vol . , Leiden 1962 1965), la postérité a adopté Martianus Capella ( ou Marcianus Capella, francisé en Martien ou Marcien Capella, voire Chapelle , E. Renan , L'avenir de la science, Paris 1890 , p. 241 ) . Il n'y a pas d'autres informations sur la vie de Martianus Capella que ce que dit l'auteur de lui-même dans les Noces, principalement dans les vers qui termi nent l'ouvrage (IX 999). On y apprend que Martianus Capella est afer, africain ( IX 999 ) , comme Marius Victorinus ( Cassiodore , Inst. Il 3 13 ) . Ainsi que Secu rus Melior, le premier éditeur des Noces, le précise, Martianus est plus précisé ment originaire de Carthage, carthaginiensis, comme Augustin (2 - A 508 ) , et aussi , comme Apulée ( > * A 294 ) , l'auteur de l'âne d'or, qui , s'il est né à Madaure, ( l'actuel M'daourouch , près de Souk Ahras , dans le Constantinois ) , a aussi séjourné à Carthage . On peut déduire d'une allusion à sa canitie commençante (12) et de l'épithète senilis se rapportant à la fable qu'il a écrite ( IX 997 ) , que Martianus est un quinquagénaire au moment où il écrit. On

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constate aussi qu'il a au moins un fils prénommé aussi Martianus ( 1 2 ) pour lequel il rédige sa satire. Martianus Capella a dû exercer une profession juridi que , avocat par exemple , comme le donnent à penser les joutes oratoires qu'il semble évoquer ( VI 577 ) et plus encore , le juridisme général des Noces qui se manifeste ci et là , dans l'évocation de la lex Pappia Poppea sur le mariage ( II 218 ) , dans la discussion sur la légalité d'un ajournement de l'examen de la dot constituée par les servantes offertes par Mercure ( IX 897 ) , dans l'emploi pertinent des termes juridiques. En revanche faire de Martianus le proconsul d'Afrique (Cappuyns 19, col . 837 ) sur une seule allusion , culmen proconsulare, est une conjecture. Il reste que la culture et la virtuosité stylistique manifestée dans le maniement des divers rythmes poétiques employés tout au long de l'æuvre révèlent le statut social et intellectuel élevé de Martianus Capella et c'est un anachronisme, assis sur le jugement moderne de son style , que d'en faire un paysan autodidacte ( 22 H. Parker, « The seven liberal arts » , EHR 5 , 1890 , p. 443 ). Date . Les discussions sur l'époque précise de sa vie ne sont pas éteintes. En l'état actuel des connaissances , on peut tenir pour assuré que les Noces ont été écrites avant 533 , date de la mort de Fulgence ( > * F 23 ) , l'auteur de l'Expositio sermonum antiquorum qui est le premier à le citer, si l'on admet qu'il s'agit de Fulgence , évêque de Ruspe, en Afrique du Nord (467-533 ) . Eyssenhardt 2 (De Martiano Capella, Berlin 1861 , p . 14-15 ) et Dick 3 ( p . XXV ) ont proposé comme terminus ante quem 330 au motif que Martianus désigne encore Constantinople sous son ancien nom de Byzance ( VI 657 ) et que le nom de Constantinople a été adopté en 330. Cet argument ne peut être retenu , parce qu'en l'occurrence, Martianus ne fait que suivre sa source, Solin . L'examen des sources fixerait le terminus post quem à 350 environ, date de la source la plus tardive de Martianus. Un certain nombre d'auteurs (Cappuyns 19, col . 842-843; Stahl 16 , p . 12-15 ; 23 M. Bovey , Cyclicae disciplinae : l'organisation du savoir dans l'æuvre de Martianus Capella, Trieste 2003) pensent que le De nuptiis a été écrit entre 410 et 439. Ils se fondent sur deux citations, l'une ( VI 637 ) qui fait allusion au sac de Rome par Alaric (410 ) , et l'autre, ( VI 669) qui semble évoquer le temps heureux d'avant la prise de Carthage par les Vandales (439 ) et sur le fait que le proconsulat évoqué ( IX 999 ) aurait disparu avec l'invasion vandale . Ces trois indices n'apportent aucune certitude : les malheurs de Rome peuvent tout aussi bien renvoyer à la razzia des Vandales de 455 ; la décadence de Carthage après sa prise par les Vandales n'est pas non plus un fait acquis ( 24 P. Courcelle , Les lettres grecques, p . 206 ; 25 C. Courtois, Les Vandales et l’Afrique, Paris 1955 ) ; en ce qui concerne la référence au proconsulat, on a pu démontrer qu'après 439 , il y a eu encore des proconsuls de Carthage (Shanzer 17 , p . 7 ) . Une troisième période a été proposée ( Shanzer 17 , p. 15 ; Grebe 14, p. 16-17 ), celle de « la renaissance vandale » , comprise entre 496 et 523 , sous le roi Thrasamund , qui serait en quelque sorte à Martianus Capella, ce que le roi ostrogoth Théodoric a été à Cassiodore et à Boèce. Cette hypothèse est confortée par ce que nous apprend la circulation du manuscrit . Si les Noces avaient été écrites avant 430, date de l'invasion vandale , le manuscrit serait arrivé rapide

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ment à Rome et plus généralement en Italie , à peu près en même temps que les æuvres d'Augustin . Cassiodore ( » * C 52 ) n'aurait donc pas eu à le chercher ( Inst. II 3 , 20) dans les années 555-560 au moment où , au retour de Constantinople , il écrit ses Institutiones, à l'intention des moines du monastère qu'il a fondé à Vivarium , dans le Bruttium , l'actuelle Calabre . Titre. Les manuscrits ont le plus fréquemment le titre de martiani minei felicis capellae de nuptiis philologiae et mercurii , mais les copistes hésitent entre des subscriptions plus ou moins précises, montrant ainsi que , vraisembla blement, le titre ne figurait pas dans le manuscrit corrigé en 534 par le premier éditeur, Securus Melior. La citation de Fulgence ( Expositio sermonum anti quorum , 45 ) mentionne l'ouvrage sous le titre de De nuptiis Philologiae et Mercurii mais comme la citation est extraite du livre I des Noces ( I 5 ) , il est possible que ce titre soit celui des deux premiers livres qui racontent le mariage . Grégoire de Tours ( Historia Francorum X 31 , 18 ) ne parle que des arts libéraux qu'il désigne comme les Septem disciplinae. Cassiodore ( Inst. II 2 17 ) emploie l'expression De septem disciplinis, mais précise ( Inst. II 3 20 ) qu'il n'a pu se procurer l'ouvrage. Genre littéraire. Le De nuptiis Philologiae et Mercurii, « Les Noces de Philologie et de Mercure » , est le récit du mariage du dieu Mercure et de Philo logie , une mortelle, imaginée par Martianus Capella ( livres I et II ) . En guise de réjouissances, les convives du banquet assisteront à une série de conférences données par chacune des sept servantes offertes par Mercure en dot à Philologie , Grammatica, Dialectica , Rhetorica , Geometria , Arithmetica , Astronomia, Harmonia, chacune des interventions occupant un livre ( livres III à IX ) . De la même manière que le récit raconte l'union de deux êtres hétérogènes , les Noces contiennent donc également l'alliance de deux types de discours hétérogènes , un récit d'inspiration mythologique et un contenu didactique . Pour réaliser cet alliage littéraire inattendu , Martianus Capella emploie la forme la mieux adaptée à son projet, parce que son principe est le mélange des tons et des formes d'expression, la satire , satura ( ou plutôt Satura , puisque, allégorisée , cette dernière intervient à plusieurs reprises ( VI 576-579 , notamment) dans le récit pour interpeller Martianus, l'auteur également mis en scène dans le récit ). La satire se développe principalement dans les deux livres initiaux qui contiennent la relation du mariage , mais pas seulement , puisque le récit des Noces s'accroît de plusieurs péripéties dans les autres livres , jouant principalement de l'oppo sition entre le sérieux extrême des exposés des servantes de Mercure et la frivolité de certains dieux peu portés à l'abstraction , tels Bacchus ou Vénus . Bien qu'il ne soit pas autrement cité dans les Noces que comme l'introducteur de la dialectique à Rome ( IV 335 ) , le modèle de Martianus est Varron , le

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prolifique polygraphe du jer s . av . J.-C. Auteur lui aussi d'une encyclopédie , Varron a écrit les Satires Ménippées, où il utilise , mais disposés autrement, les ingrédients qui sont ceux du récit de Martianus , c'est - à- dire « le monde des dieux, le voyage aux cieux , les arts libéraux , la philosophie , le mariage » ( 26 A. Cizek , « Les allégories de Martianus Capella à l'aube du Moyen Âge latin » , REL 70, 1992 , p . 198 ). Depuis son invention ou sa vulgarisation par le

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philosophe grec Ménippe ( 2M 129) , la satire est un genre spoudogeloion, qui mélange les tons « sérieux et comique » . À l'imitation de ses modèles Ménippe et Varron, Martianus « farcit » les récits des Noces d'éléments parodiques, anachroniques et comiques à la manière bouffonne, mais use d'ironie aussi bien à l'égard des dieux que contre lui -même. C'est ainsi qu'il donne aux dieux des comportements humains et aux humains , un statut divin , et qu'il attribue au peuple des dieux les coutumes africaines et le droit romain . Le style, qui évoque celui d’Apulée , est, dans les parties proprement littéraires, recherché, parsemé de mots forgés, ou « compliqué, maniéré, boursouflé » (Cappuyns 19, col . 842 ). Cependant, dès que Martianus fait parler les sept servantes de Mercure , il retrouve le ton sérieux et informatif qui est celui des grammairiens ou des dialecticiens. Enfin , se pliant encore aux lois du genre satirique, Martianus mélange la prose et la poésie dans une forme littéraire que les auteurs médiévaux appelleront très justement prosimetrum , « prosipoétique » . Tout au long de l'ouvrage, il compose avec une maîtrise de virtuose de petites pièces d'une ving taine de vers qu'il place en guise de transition, toujours en tête et à la fin de chaque livre, et parfois au milieu d'un livre. Au total, les jugements sévères qui ont été portés sur le style de Martianus et la valeur littéraire de l'ouvre doivent être atténués, voire réfutés, si l'on prend en compte les caractères stylistiques de la satire et si l'on voit dans Martianus Capella un auteur baroque, dont le comique et l'invention verbale le rapprochent de notre Rabelais. On ne doit pas non plus commettre d'anachronisme et il faut évaluer la satire de Martianus en la comparant à d'autres formes littéraires de l'Antiquité, tels que les dialogues philosophiques, les chroniques de banquets, et toutes les formes littéraires qui ont pour but de faciliter l'accès du lecteur à des connaissances rébarbatives. En tout état de cause , Martianus Capella a anticipé les critiques qu'on pourrait adresser à la forme littéraire qu'il a choisie puisqu'il avoue , avec la lucidité ironique qui appartient aussi à la panoplie du sati riste , que la fable qu'il a inventée « a farci ce qu'il faut taire de ce qu'il faut dire, a mélangé les muses et les dieux , et a imaginé de faire tenir aux sciences encyclopédiques des bavardages dans une fiction mal cuite bonne pour les paysans » ( IX 998 ).

Contenu philosophique et religieux des deux premiers livres (I 1-97 ; II 98-220 ). Dans le livre I , Martianus explique que le dieu Mercure, voulant se marier, se voit conseiller par Apollon comme épouse la plus savante des mortelles, Philologie ( I 3-22) . Junon donne son consentement à cette union ( I 22-35 ) , mais Jupiter est réticent car il craint que l'amour ne détourne Mercure de sa tâche de messager. Il interroge alors Pallas , laquelle suggère de réunir l'assemblée des dieux ( I 36-41 ) . Et de toutes parts affluent les dieux ( I 42-88 ) . Jupiter soumet le mariage au vote des dieux et la décision est adoptée par une bruyante mani festation .Il reste à régler un problème juridique, venant de la condition humaine de la future épouse . Il faut donc organiser l'apothéose de Philologie et, pour la

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circonstance, une loi est votée, aux termes de laquelle tout humain digne par ses mérites d'être dieu pourra désormais le devenir ( 1 91-94) . Après ce premier livre qui se partage entre une mythologie amusante et un juridisme parodique, Martianus décrit la divinisation de Philologie . La jeune femme, inquiète de cette promotion et de ce mariage qui va l'unir à un dieu qu'elle n'a vu qu'une fois alors qu'il sortait de la palestre , vainc ses appré hensions par l'arithmologie qui lui apprend combien elle et son futur époux sont bien accordés ( II 95-104) . La cérémonie nuptiale commence alors . On l'habille , on la prépare, on l'entoure ( II 105-133 ) . Athanasia, l'immortalité, apparaît enfin pour diriger l'apothéose de Philologie , qui se voit au préalable contrainte de vomir les nombreux livres qui obstruaient sa poitrine ( II 135-137 ) . Emportée sur une litière et suivie d'une procession guidée par Junon , elle s'élève jusqu'à la Voie lactée où l'attend l'assemblée des dieux et de ceux des humains dont le génie leur a valu d'être admis dans cette assemblée ( II 138-216 ) . Le sénat des dieux demande alors qu'en application de la Lex Poppeia , l'on apporte les biens offerts comme dot par Mercure, et Phébus fait s'avancer chacune des servantes de la maison de Mercure que celui -ci avait décidé d'apporter à son épouse en vertu de ses obligations matrimoniales ( II 217-218 ) . Le récit a évidemment un sens allégorique , principalement organisé autour de la figure du dieu Mercure. Bien avant Martianus Capella , le dieu Hermès, assimilé au dieu égyptien Thot , représentait le Logos et la Raison divine (27 A.J. Festugière, La révélation d'Hermès Trismégiste I , Paris 1950 , p . 67 88 ). Dans les Noces, Mercure est de même identifié à Thot ou en grec , OwÚO (II 102 ) et son symbole est l'ibis ( II 178 ) . Comme Hermès , il est le dieu de la raison, deus rationis ( II 106) . Quant à Philologie, sa nature est humaine, même si son amour de la science en fait la plus savante des mortelles. Son nom, Philologie, c'est- à -dire celle qui aime le logos, la prédestine à s'unir au Dieu du langage et de la raison. La personnalité des deux époux conduit inévitablement à une interprétation « hermétique » et néoplatonicienne du mythe de Martianus ( L. Lenaz 9 , Martiani Capellae de nuptiis Philologiae et Mercurii liber secundus, Padova 1975 , p . 6-120 ; 28 R. Turcan , « Martianus Capella et Jambli que » ,REL 36, 1958 , p . 235-254 ; 29 I. Hadot , Arts libéraux et philosophie dans la pensée antique, Paris 1984 , p . 137-155 ) . L'union de la mortelle Philologie au dieu Mercure et sa métamorphose concomitante en déesse symboliseraient le retour de l'âme humaine dans le séjour divin d'où elle est tombée . Cette inter prétation néoplatonicienne se renforce quand on analyse l'apothéose de Philo logie. La divinisation se déroule en seize étapes ( Lenaz 9 , p . 9-23 ; Hadot 29 , p . 142-148 ) , qui reproduiraient des rites initiatiques à mystères, principalement platoniciens. Mais si elle reste la plus plausible , l'interprétation néoplatonicienne du mythe des Noces n'est pas unique . L'union de Philologie et de Mercure pourrait aussi représenter l'être ambivalent du saluator salvandus , « le sauveur demandant à être sauvé » des gnostiques ( Lenaz 9 , p . 107 ). De son côté , Jean de Salisbury ( 1120 ?-1180 ) donne une interprétation originale du mythe en présentant le mariage de Philologie et de Mercure tantôt comme l'union néces saire de la philosophie et de la logique , cette dernière servant de propédeutique à

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l'étude de la première, comme le veulent les péripatéticiens (Metalogicon, II 3 ) , tantôt comme l'éducation de la jeunesse , incarnée par Mercure, par l'étude, symbolisée par Philologie . Il reste que , en prêtant à Philologie des pouvoirs divinatoires, une pratique théurgique capable de faire apparaître les dieux , des connaissances étendues en matière d'arithmologie, en parsemant aussi son récit d'expressions recueillies dans les Oracles chaldaïques ainsi que de quelques références à la vieille religion étrusque, Martianus prend sa place dans le courant néoplatonicien romain du IVe s . dont les représentants les plus éminents sont Symmaque, beau -père de Boèce ( = B 41 ) , et proconsul à Carthage, et Marius Vegetius Praetextatus, dont l'épitaphe portée sur son tombeau manifeste le même double intérêt que Martianus pour les mystères et pour la science. Quoi qu'il en soit, le lecteur est frappé du parallélisme existant entre les livres I et II des Noces de Martianus et le livre I des Institutions de Cassiodore ( C 52 ) : dans les deux cas , les développements religieux constituent le préalable des exposés didactiques . Il y aurait dans ce lien obligatoire peut-être une loi du genre encyclopédique, remontant à un modèle aujourd'hui perdu et qui ne figure pas dans la seule théorie antique des arts libéraux connue, celle du De ordine d'Augustin ( sur ce dernier point, Hadot 29 , p. 100-136 ). Plus encore , la hiérar chie des savoirs, selon laquelle la connaissance acquise seulement par révélation divine est subordonnée à la religion , est un des nombreux signes du déclin du rationalisme grec et du retour du savoir entre les mains des clercs après un intermède de quelques siècles au cours desquels les philosophes ont occupé le devant de la scène . Toutes ces interprétations doivent être accueillies avec prudence, parce qu'elles ont contre elles d'être trop cohérentes. Il est vrai que , dans les deux premiers livres comme dans tous les autres, la parodie de Martianus mêle les éléments véridiques et empruntés aux meilleures sources et certaines notations sur les dieux issues d'une interprétation naïve , voire puérile, de la mythologie. Certains des dieux de Martianus, Pallas, Mercure, Jupiter, sont généralement nimbés d'une dignité qui ne contrarie en rien les interprétations néoplatoni ciennes , mais l'attitude ou les plaisanteries de certains autres , Silène, Bacchus, par exemple , se prêtent à un rire vulgaire. La satire ouvre donc la voie à une double lecture et Cizek 26 , p. 201-202, rappelle opportunément que l'on peut tout aussi bien voir dans les deux premiers livres une intention bouffonne et anti intellectualiste souvent présente dans cette forme poétique. Il convient aussi de ne pas se méprendre sur l'importance que les lecteurs médiévaux accordaient à ces deux livres . Alors que les Noces sont généralement regardées aujourd'hui d'abord comme une encyclopédie des arts libéraux, ce sont les livres I et II qui ont suscité le plus grand nombre de copies , 51 fois ensemble ( sur les 241 manuscrits que comporte la liste de Leonardi 38 ) . Le succès de ces deux livres est allé croissant , 4 copies au IXe s . , 2 au Xe s . , 6 au XIⓇ, 16 au XII °, 10 au XIII , 6 au XIV , et 13 au XV . C'est encore ces deux livres que le moine Notker Labeo a traduit en vieil allemand au XIe s. La fable l'a donc emporté sur le savoir au cours du Moyen - Âge.

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Contenu didactique des livres III à IX : « L'encyclopédie » des arts libéraux Apollon a donc introduit les servantes de la maison de Mercure. Leur nombre n'est pas donné , et c'est au lecteur d'en compter neuf, dont seules sept auront droit à la parole, Jupiter ayant ordonné ( IX 891 ) que Médecine et Architecture, dont les préoccupations ne concernent que les humains , se taisent. Martianus, sans exposer une théorie du cycle à laquelle il préfère un procédé littéraire, insère la doctrine nouvelle et néoplatonicienne des sept arts libéraux dans l'antique doctrine que l'on pense être celle de Varron dont l'encyclopédie pourrait comporter neuf disciplines . Les sept feminae dotales, dont la nature , humaine ou divine, n'est pas précisée, sont Grammatica, Dialectica, Rhetorica, Geometria , Arithmetica, Astronomia et Harmonia . La distinction généralement établie entre les arts du langage, grammaire, dialectique, rhétorique, le triuium des Médiévaux , et les sciences, en latin disciplinae, géométrie, arithmétique, astronomie et musique , le quadriuium de Boèce , est à peine marquée dans les Noces par un hymne très court à Pallas, d'inspiration néoplatonicienne. Le cycle des arts libéraux n'est pas si ancien que l'on a pu le croire. Il s'est lentement constitué à l'intérieur du moyen -platonisme , par le rattachement de la rhétorique, bannie , on le sait, par Platon des disciplines libérales, aux études indispensables au philosophe , puis par la formation théorisée de la mathéma tique ou du futur quadriuium par Nicomaque de Gérasa [ ƏN 50] ( fer s . après J.-C. ) . « Ce n'est qu'au IVe s . que l'on trouve l'attestation d'un système élaboré au plus tard par Porphyre au IIIe s.... » ( Hadot 29, p. 310) Le cycle des arts libé raux trouve sa seule justification philosophique dans le De ordine d’Augustin (Hadot 29, p. 100-136 ) qui réalise une synthèse entre les idées des platoniciens et la doctrine chrétienne. Le cycle des arts libéraux représente le parcours difficile que doit suivre l'âme humaine pour se purifier et retrouver sa patrie céleste. Dans les faits, l'encyclopédie des arts libéraux n'a été réalisée que deux fois, en milieu latin , au cours de l'Antiquité tardive, par les Noces de Martianus, et par le second livre des Institutions de Cassiodore , de dimension bien plus modeste . Livre III : Grammatica ( III 221-326) Le premier livre didactique contient l'exposé de Grammaire . Le plan de ce livre sera le même pour toutes les autres disciplines. Il commence par la descrip tion de l'allégorie dont chaque trait a valeur de symbole . En l'occurrence, il s'agit d'une femme âgée, à la très belle chevelure , qui porte ses objets symbo liques , une férule pour corriger les fautifs, des couteaux pour émonder les fautes de grammaire et de prononciation. Elle donne ses origines et des explications sur son nom. Elle annonce le plan de son exposé : les lettres, voyelles et consonnes, leur prononciation ( III 261 ) , les syllabes, la morphologie et la description des parties du discours ( nom, verbe , etc. ), les déclinaisons et les conjugaisons. Elle aurait aimé exposer des solécismes ou des tropes, mais Pallas ne lui en laisse pas le loisir. Ce sont donc les rudiments de la grammaire qui sont donnés là. Les sources de Martianus ont été soigneusement étudiées (30 W. Langbein , De Martiano Capella grammatico, Iéna 1914) . Il s'agit en général des grammai

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riens du IVe s. , Diomédès, Charisius, Maximus Victorinus, Servius, et d'autres. Dans l'utilisation de ses sources , Martianus ne s'en tient pas à une copie servile , comme peut le faire Cassiodore dans ses Institutions et il réécrit même les extraits les plus proches des sources . De plus, il ajoute souvent des considé rations qui n'ont pas de source connue, mais on ne peut déterminer s'il s'agit de ses propres commentaires ou d'une source secondaire ayant compilé les sources primaires. Cette méthode de compilation et la présence de sources inconnues sont des éléments communs à tous les autres livres. Livre IV : Dialectica ( IV 327-424 ) La parole est ensuite donnée à Dialectique. Elle est d'origine grecque mais, hormis sa coiffure parfaitement ordonnée, son aspect lugubre est effrayant. Elle a de plus dans les mains des tablettes ou des figurines de cire multicolore qui lui permettent de séduire ses interlocuteurs et de les amener au pouvoir du serpent qui se tient caché dans son autre main . Pallas, pour mettre un terme aux plaisan teries de Bacchus , ordonne à Dialectique de rendre son étrange appareil et de tenir son discours. Désarmée, c'est - à -dire débarrassée des paradoxes et des pièges qui font sa perfidie légendaire, Dialectique apparaît alors sous son vrai visage, une jeune femme très savante en des choses très savantes, venue d'Égypte, élevée en Grèce par Socrate et Platon , développée par Aristote et par Chrysippe avant d'être apportée à Rome par Varron . Après cette introduction, l'exposé comporte quatre parties: la première partie , intitulée De loquendo ( sur le langage) contient des considérations générales sur les mots pris en dehors de toute combinaison . Le début de cette première partie provient pour l'essentiel de l'Isagogè de Porphyre et traite des prédicables (le genre, les formes ou espèces, la différence, l'accident, le propre ), de la défi nition , du tout et des parties, de la division selon les prédicables, de la partition du tout . Vient ensuite un long exposé sur l'enseignement des Catégories d'Aristote, à savoir les définitions de l'équivoque, de l'univoque, du plurivoque, du sujet et de ce qui est « dans le sujet » , et les dix catégories proprement dites : la substance ( première et seconde), la qualité, la quantité, le relatif, la position, possession , date et place dans l'espace, l'action et la passion. La seconde partie, De eloquendo ( sur l'expressivité ), a pour objet la combinaison des mots , les différents types de phrases obtenues par cette combinaison , la phrase susceptible du vrai et du faux, appelée proposition et qui constitue l'objet d'étude de la dialectique , les deux composants de la proposition que sont le nom ( ou partie subjective, particula subiectiua) et le verbe (ou partie déclarative, particula declaratiua ). La troisième partie, De proloquendo, est celle qui étudie la quan tité et la qualité des propositions, leur conversion , la combinaison des propo sitions. Dans la quatrième partie, De proloquiorum summa ( sur la somme des propositions ) , ce sont les syllogismes catégoriques répartis en 3 figures et 19 modes concluants et les syllogismes hypothétiques qui sont examinés . Le plus original de ce chapitre reste le compromis inattendu réalisé entre le plan suivi , dont le vocabulaire , d'origine stoïcienne, se trouve dans le De dialectica d'Augustin et qui remonte sans doute à Varron , et un contenu généralement aristotélicien .

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Les sources de Martianus Capella peuvent assez facilement être identifiées dans deux cas : les syllogismes catégoriques viennent du Tepi Épunve aç d'Apulée ( = A 294) et les syllogismes hypothétiques des Topiques de Cicéron. Mais le texte des catégories, la partie la plus importante du chapitre , est appa renté à la traduction de la Paraphrasis themistiana ( 31 L. Minio-Paluello [édit. ) , Pseudo - Augustini Paraphrasis themistiana , coll . « Aristoteles latinus » I 5 , Bruges/Paris 1961 , p . 133-175 ) , sans en être issu : c'est en fait la première traduction latine conservée (32 L. Minio-Palluelo, « The text of the Categoriae : the Latin tradition » , CQ 39 , 1945 , p . 63-74 , repris dans Opuscula, Amsterdam 1972 , p . 31-33 ) . La nature des exemples et diverses considérations placées en guise de transitions donnent à penser que, conformément à la hiérarchie des deux disciplines en milieu latin , la dialectique est subordonnée à la rhétorique. Livre V : Rhetorica ( V 425-566 ) Rhétorique se présente à l'assemblée des dieux dans le fracas d'une sonnerie de tuba. C'est une jeune femme majestueuse, coiffée d'un casque et vêtue d'une robe ornée de nombreux dessins représentant les figures de rhétorique. Ses armes, qui rendent un bruit de tonnerre , symbolisent son pouvoir de persuasion. Son origine grecque est soulignée , les grands noms de ceux qui l'ont servi sont énoncés, Cicéron et Démosthène, en tête, mais aussi les Grecs Eschine , Lysias , Isocrate , et les Latins, les Gracques, Regulus , et Fronton . L'objet de ses études est la question et son activité est double , selon que la question est finita , « définie » , quand elle concerne une action judiciaire ou infinita, « indéfinie » , quand elle concerne une discussion philosophique . Elle étudie ensuite , très classiquement , l'inuentio , la recherche des arguments, la dispositio de ceux -ci , puis l'elocutio , qui consiste à adapter le style à l'effet recherché, la memoria , qui donne les préceptes utiles pour apprendre les discours, et l'actio qui donne quelques règles pour impressionner favorablement l'auditoire par le ton et par les gestes employés pour souligner le discours. Ses sources sont traditionnelles ( 33 H. W. Fischer, Untersuchungen über die Quellen der Rhetorik des Martianus Capella , Breslau 1936) et , au premier rang, le très attendu De inuentione de Cicéron . Du même auteur, on trouve aussi quelques extraits de l'Orator ou du De oratore. D'autres passages viennent d'Aquila Romanus , de Quintilien , de Marcommanus, mais , comme toujours dans les Noces, la recherche des sources n'épuise pas le texte et l'on trouve des considérations que l'on ne peut rattacher précisément à aucun auteur conservé. Il est indubitable que le chapitre sur la rhétorique est le plus composite et cet éclectisme manifeste une culture et une maîtrise plus grandes en la matière que dans les autres disciplines.

Livre VI : Geometria ( VI 567-724 ) L'aspect de Géométrie est celui d'une femme d'une austère beauté, dont la chevelure, nullement provocante , est compliquée , comme ses raisonnements difficiles. Ses pieds, en revanche, sont couverts de poussière. Elle est vêtue à la manière grecque d'un péplum orné de figures astronomiques ou géométriques. Elle porte un abaque et une baguette pour tracer ses figures, ainsi qu'un plané

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taire où brillent les luminaires et au centre duquel est fixée la Terre autour de laquelle se meuvent les planètes . Euclide ( E 80 ) et Archimède pourraient parler à sa place , mais il n'y a aucun auteur latin qui puisse le faire. Le livre VI des Noces marque l'entrée du lecteur dans la mathématique , et c'est pourquoi il commence par un hymne à la déesse de la sagesse , Pallas Athéna , qui , pour les disciples tardifs de Platon , dont fait partie Martianus Capella, est celle qui a offert les quatre sciences mathématiques aux hommes (arithmétique, musique , géométrie, astronomie ). Curieusement , le livre sur la géométrie comprend dans sa majeure partie un exposé sur la géographie . Il est vraisemblable que , n'ayant pas à sa disposition la documentation nécessaire pour rédiger un livre sur la géométrie comparable par son ampleur aux autres livres, Martianus Capella a été contraint d'adjoindre un traité de géographie et de ce fait, il se trouve en contradiction avec les

conceptions néoplatoniciennes de l'encyclopédie qui veulent que les sciences n'aient d'intérêt que dans la contemplation spéculative des objets mathéma tiques . Martianus justifie donc son choix en remontant à l'étymologie du nom de « géométrie » qui veut dire « mesure de la terre » et en imaginant chez les dieux célestes un appétit de savoir qui leur font demander à connaître cette terre que Géométrie a tant arpentée : c'est de ces voyages terrestres que vient la poussière dont sont couverts les pieds de Géométrie . Néanmoins, si l'on ne peut placer la géographie de Martianus parmi les sciences spéculatives, elle conserve néan moins un caractère scientifique dans la mesure où elle expose, dans sa première partie, des considérations mathématiques sur la forme de la terre, ses dimen sions , sa position dans le monde . De même , dans le long exposé de géographie descriptive en forme de périple qui , partant de l'Europe, passant par l'Afrique , arrive en Asie , Martianus laisse de côté les faits miraculeux qui plaisaient tant aux Latins , notamment à Solin , l'une de ses sources.

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Pour la plupart, les sources de la géographie mathématique sont connues : il s'agit du second livre des Histoires Naturelles de Pline , mais certains de ces passages ont une origine inconnue , tels les calculs d'Eratosthène ( E 52 ) et de Ptolémée et la présentation des zones . Quant à la géographie descriptive , elle doit tout à Pline l’Ancien et à Solin . Cette compilation géographique est très fidèle à son modèle : son auteur a composé des centons en reliant des passages différents de Pline et de Solin qu'il reformule en général . Il suit de très près l'ordre de Pline et n'ajoute à ses sources que de rares considérations sur la mythologie et sur la géographie de l'Afrique , sa province natale . Un certain

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nombre d'erreurs de lecture et de chiffre viennent abîmer la qualité de cette compilation , mais il est difficile, la plupart du temps , de savoir à qui les attri

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buer, au compilateur, à ses sources ou aux copistes . Il est cependant vraisem blable que , eu égard à la tenue des Noces, généralement satisfaisante, la respon sabilité de l'auteur doive être dégagée. Séparée de la géographie par une petite pièce en vers , la géométrie se résume à une série de définitions de termes ( VI 708-723 ) qui est une brève compilation des Éléments d'Euclide et , dans une moindre mesure , de textes d'origine inconnue . On ignore si Martianus Capella est lui - même l'auteur de la traduction

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et de la compilation de ces sources: de nombreux résumés circulaient à la fin de l'Antiquité, et le caractère pratique que présentait un abrégé géométrique a pu attirer Martianus. Bien qu'elle doive beaucoup à Euclide , la géométrie des Noces n'est pas dépourvue d'intérêt, ni d'originalité : elle comporte peu d'erreurs et elle recueille des notions qui sont inconnues par ailleurs dans la littérature géométrique antique , qu'elle soit grecque ou latine : les trois types de figures planes ( VI 711 ) ; le développement sur les figures courbes et les figures mixtes ( VI 712-713 ) ; les figures de construction, dites ergastiques (VI 715 ) . Ces ajouts complètent le texte d’Euclide selon l'habitude des commentateurs tardifs qui avaient tendance à enrichir les Éléments de tout ce qui leur paraissait utile pour sa compréhension. En tout état de cause , ce livre VI contient l'un des rares traités de géométrie en langue latine connus. Livre VII : Arithmetica (VII 725-802 ) Arithmétique est présentée comme une femme dont les origines sont antérieures à celles de Jupiter, ce qui manifeste, selon les conceptions néoplato niciennes, que le nombre précède toute chose ( doctrine de l'Un néoplatoni cienne ). Dix rayons lumineux émanent de son front : ce sont évidemment les dix premiers nombres . Elle porte un vêtement merveilleux qui recouvre toutes les cuvres de la Nature et qui symbolise l'omniprésence du nombre dans le monde. Ses doigts s'agitent en un mouvement frénétique parce qu'elle compte sur ses doigts . Le porte -parole d'Arithmétique est Pythagore, mais aucune autorité latine, tout comme pour la géométrie, n'est mise en avant . Le contenu didactique de ce livre est divisé en trois parties. La première est l'étude arithmologique de la monade et des neuf autres unités de la décade. La seconde , plus proprement mathématique , contient l’arithmétique pythagori cienne et décrit les différentes classifications du nombre: les nombres pairs et impairs, les nombres plans et solides, les nombres égaux et inégaux , les nombres parfaits, abondants , déficients et, pour finir, les multiples et les sous-multiples. La troisième partie donne les théorèmes d'Euclide relatifs à ces nombres. Les sources de l'arithmologie sont obscures et remontent en dernière analyse à un texte du ir s . avant J.-C. (34 F.E. Robbins , « The Tradition of Greek Arithmology » , CPh 16 , 1921 , p . 118-122 ) . L'arithmétique pythagoricienne remonterait à l'Introduction arithmétique de Nicomaque de Gérasa ( » N 50 ) , dont on connaît l'adaptation en latin par Boèce ( 2B 41 ) , mais il est vraisem blable que Martianus s'est servi d'une autre traduction latine , peut -être celle d'Apulée ( > A 294) , perdue. Même en ce cas, il reste dans le texte de Martianus des considérations que l'on ne trouve pas chez Nicomaque, telle que la mention du « pythagoricien Thymaridas » ( VII 765 ) . Quant à l'arithmétique d'Euclide ( NE 80), si elle se laisse facilement reconnaître, la question de sa transmission à Martianus n'a pas de réponse.

Livre VIII : Astronomia ( VIII 803-898 ) Astronomie apparaît dans un globe enflammé. C'est un être ailé couvert de pierres précieuses, le front piqueté d'étoiles et les cheveux chatoyants. Elle tient dans ses mains une baguette longue d'une coudée et un livre où sont portés les

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calculs des orbites des planètes. Elle rappelle ses origines égyptiennes et cite comme ses porte -parole Ératosthène ( »E 52 ) , Ptolémée et Hipparque. Le contenu didactique de livre VIII se divise en deux parties. La première donne les généralités sur la cosmographie, les quatre éléments du monde, la forme sphérique du monde , la place de la Terre immobile en son centre , les astres présents dans l'éther , planètes et étoiles, les dix cercles qui structurent le monde , les constellations , le lever et le coucher de certaines étoiles , diverses considérations sur le zodiaque, les inégalités des jours au cours de l'année . La seconde partie a trait plus particulièrement aux planètes : le Soleil et les saisons, ainsi que les huit climata , ou zones climatiques de la Terre , la Lune, les éclipses du Soleil et de la Lune , Mercure, Vénus, Jupiter Saturne. Le livre VIII est célèbre parce que Martianus y présente dans cette seconde partie (VIII 854, 857 , 879) un système semi-héliocentrique dans lequel Mercure et Vénus tournent autour du Soleil et qui remonte à Héraclide du Pont ( pH 60 ] (IVe s. av . J.-C.). Les sources de ce livre VIII sont sujettes à de multiples conjectures. La plupart des commentateurs le font remonter à Varron (Courcelle 24, p. 199 ; 35 P. Duhem, Le système du monde, Paris 1914, t. III , p. 52 ; Stahl 16, p. 52 ) sans qu'il y ait quoi que ce soit de concret dans cette attribution, puisque le livre de Varron sur l'astronomie est perdu. Il paraît bien préférable de s'en tenir à une prudente abstention . Il est en effet prouvé, dans les livres sur la rhétorique, sur la dialectique , tout au moins, que Martianus est capable d'utiliser des sources diverses et que d'autres livres, comme le livre VII , ne révèlent pas plus leurs sources que le livre VIII , même si l'on peut remonter jusqu'à leurs sources grecques lointaines. Livre IX : Harmonia ( IX 899-1000 ) La dernière vierge dotale à prendre la parole est Harmonia , Musique. Sa tête est couverte de décorations en or et elle est plus gracieuse que Vénus en per sonne . Sa main gauche serre une multitude d'instruments utilisés par les hommes et sa main droite, un instrument extraordinaire, une rotunditas ignota , « un globe jamais vu » , appelé aussi egersimon ineffabile, résonnant d'une musique à nulle autre pareille. Ses interprètes désignés sont Orphée, Amphion , Arion et elle met en avant son influence sur l'homme qu'elle accompagne dans toutes ses activités, qu'elles soient guerrières, religieuses ou festives, sur les animaux et même sur le monde. La première des deux parties didactiques du livre traite de l'harmonique, les tons , les accords, les échelles de transposition , puis les sept divisions de l'har monique , les sons , les intervalles, les systèmes , les tons harmonique, chroma tique et diatonique , la définition du ton , la modulation et la mélopée. La seconde partie est consacrée à la rythmique : le primum tempus , les trois sortes de rythmes, le pied , le genre rythmique et ses espèces, dont l'iambe, le rythme composé. Une partie importante du livre remonte aux chapitres V à XIX du traité Sur la musique d'Aristide Quintilien ( A 354 ] ( 11° ou III s . ap. J.-C. ) , dont la traduc

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tion est maladroite . Mais, dans ce livre IX encore, on trouve des interpolations originales. Iconographie. La précision des allégories des Noces a inspiré aux artistes médiévaux des représentations extrêmement nombreuses et très fidèles des diverses disciplines , souvent associées avec celles des grands penseurs de chaque discipline. Aristote, parfois Porphyre , sont par exemple les compagnons de Dialectique . On trouve de nombreuses représentations dans toute l'Europe (36 R. van Marle, Iconographie de l'art profane au moyen -âge et à la renais sance , 2 , La Haye 1932 , p. 203-279) . En France , les premières représentations statuaires figurent sur la cathédrale de Chartres (37 E. Mâle « Les arts libéraux dans la statuaire du moyen-âge » , RA 17 , 1891 , p. 339) . Voir aussi Stahl 16, vol . 1 , p. 245-249. Tradition manuscrite . Présentation générale de la question : 38 C. Leonardi, « I codici di Marziano Capella » , Aevum 33 , 1959, p . 443-489 ; 34, 1960, p. 1-99 ( manuscrits 1-129 ) ; 34 , 1960 , p . 411-524 ( manuscrits 130-241 ) . Voir aussi Willis 4 , p . V -XVI , et Guillaumin 5 , p. LXXIX -LXXXIX . L'histoire de l'édition des Noces est longue puisque , par une subscription figurant sur certains manuscrits, on a le témoignage , rarissime, datant de 534, de l'intervention du premier correcteur, le rhéteur de la ville de Rome Securus Melior Felix ( Leonardi 38 , Aevum 33 , p. 446 ) travaillant sur des manuscrits mendosissimi, très corrompus. Un seul manuscrit est parvenu aux copistes carolingiens, mais il est à l'origine de plus de 240 copies . Sur ces 240 manuscrits, 53 contiennent l'ensemble de l'ouvrage et 52 les livres I et II copiés ensemble . Quelquefois les manuscrits contiennent des groupements de livres , 2 fois par exemple pour les livres VI sur la géométrie et VII sur l'arithmétique. Il est à noter cependant qu'aucun d'entre eux ne contient la copie séparée des livres II à IX sur les sept arts libéraux, et qu'un seul contient les quatre sciences du quadriuium ( livres VI à IX ) , ce qui donne une plus juste idée de la conception que se faisaient les savants médiévaux des Noces comme encyclopédie des arts libéraux . Chaque livre a été copié à part, débarrassé le cas échéant du contenu littéraire, pour pren dre place dans des manuscrits composites ou dans des compilations dédiées à telle ou telle discipline : 10 fois pour le livre III sur la grammaire et pour le livre V sur la rhétorique , 11 fois pour le livre IV , avant le XII s . Enfin ce sont aussi des extraits de livre qui ont été copiés à part, 15 fois pour le seul paragraphe grammatical III 261 sur la prononciation des voyelles et des consonnes , 10 fois pour les paragraphes V 508-525 sur les figures de style , pris principalement dans le De Figuris Sententiarum et Elocutionis d'Aquila Romanus . Il convient de mentionner la destinée particulière du livre VIII des Noces sur l'astronomie , copié 23 fois séparément, dont 15 fois en entier et 8 fois réduit au seul exposé didactique et la diffusion séparée de deux extraits du livre VI et du livre VIII contenant la mesure de la Terre et de celle de la Lune ( 20 fois, dont 9 fois au IX s . et 5 fois au XIVe s . ) . Sous une forme ou une autre , le manuscrit des Noces figurait dans la plupart des bibliothèques connues et à partir du IXe s . , dans tous les centres monastiques ou scolaires (Cappuyns 19, col . 846) .

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Trois éditions incunables sont connues , dont l'editio princeps, de Franciscus Bodianus, Vicenze, date de 1499. Les éditions postérieures les plus notables sont celles de B. Vulcanius (B. de Smet) de 1577 et de Grotius ( H. Groot) de 1599 . Diffusion et influence des Noces . Dès le viº s . , Cassiodore ( Inst . II 3 20, p. 130 , 11-14) demande aux moines de Vivarium de retrouver le texte de Felix Capella, ce qui a été fait par ses successeurs qui ont inséré quelques passages des Noces dans les recensions PA du livre II des Institutions. Dans l'Histoire des Francs (X 31 ) , Grégoire de Tours recommande la lecture de ce livre dont il donne le seul contenu didactique, mais qu'il ne semble pas vraiment connaître puisqu'il emploie l'expression Martianus noster qui laisse supposer que Grégoire le considère comme chrétien . Enfin , l'influence de Martianus se fait sentir dans quelques passages des Origines , notamment dans le livre sur la dialectique , mais Isidore n'aurait eu entre les mains que le De rhetorica de Martianus et s'en serait servi pour écrire le Liber de numeris (Leonardi 38, Aevum 33 , p . 461 n. 94 ; Guillaumin 5 , p. XXXI n . 71 ) . Martianus tombe ensuite dans un relatif oubli , démontré par le fait que c'est un seul exemplaire des Noces qui est parvenu jusqu'aux scriptoria des monastères de la renaissance carolin gienne . Il est ensuite commenté par Martin de Laon (875 , commentaire précé demment attribué à Dunchad , 39 C. E. Lutz, Dunchad, Glossae in Martianum , Lancaster 1944. Cf. 40 J. Préaux, « Le Commentaire de Martin de Laon > , Latomus 12 , 1953 , p. 437-459) ; en France , l'influence des Noces se manifeste chez Abbon , abbé de Fleury de 988 à 1004, qui cite littéralement une partie du paragraphe VII 746. Au XII ° s. encore , l'école de Chartres, imprégnée de plato nisme , est à l'origine d'une large diffusion des livres I et II , ainsi que du livre VIII . Plus spécialement, Thierry de Chartres (mort avant 1155 ) s'inspire large ment des livres V , VI et VII des Noces pour écrire son Heptateuchon , pendant que l'on trouve plusieurs références à Martianus dans le Metalogicon de Jean de Salisbury . On relève la dernière trace d'une influence des Noces dans la Visión delectable de la Philosophia y Artes Liberales, Metaphísica y Philosophía Moral d'Alfonso de la Torre parue vers 1435. C'est donc une influence millé naire que l'æuvre de Martianus, bien que païenne, bien qu'à de nombreux égards empreinte de régionalisme africain, a étendue sur la culture de l'Occident chrétien .

BARBARA et MICHEL FERRÉ . 47 MASSALÈNOS (MESSALINUS PIR2 M 512 ?)

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Admirateur d'Épictète et destinataire d'une lettre d'Arrien de Nicomédie ( A 425 ) qui lui avait dédié le Manuel d'Épictète (** E 33 ) , selon Simplicius, Commentaire sur le Manuel d'Épictète, p. 1 , 12-15 I. Hadot. La lettre -dédicace perdue devait , comme la lettre d'Arrien à Lucius Gellius ( 2G 11 ) qui sert de préface aux Entretiens, servir de présentation du Manuel. I. Hadot, Simplicius, Commentaire dur le Manuel d'Épictète. Introduction et édition critique du texte grec, coll . « Philosophia Antiqua » 66 , Leiden 1996, p. 152 n . 1 , et Simplicius, Commentaire sur le Manuel d'Épictète, t. I , CUF , Paris 2001, p . 131 , rappelle que la forme Messalinus , généralement retenue , résulte d'une conjecture

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MATIUS (G.-)

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" d'ailleurs peut- être bonne" de Claude Saumaise ( Cl . Salmasius , Notae et animadversiones in Epictetum et Simplicium , Lugduni Batavorum 1640 , p . 5 ) . Saumaise y reconnaissait M. Valerius Messalinus, consul dans la 10 ° année du règne d'Antonin le Pieux ( 147 ) , maintenant connu sous le nom de C. Vlpius Pacatus Prastina Messallinus. Voir G. Alföldy, Konsulat und Senatorenstand unter den Antoninen . Prosopographische Untersuchungen zur senatorischen Führungsschicht, coll. Antiquitas - Reihe 1 : Abhandlungen zur alten Geschichte 27, Bonn 1977 , p. 152. RICHARD GOULET. MATERNUS + FIRMICUS MATERNUS (IULIUS -) (F 12]

48 MATINIANUS DE NICOMÉDIE

ép . imp .

Sur sa stèle funéraire, connue par un croquis réalisé au XVIIIe siècle par J. Covel (J.-P. Grélois, Dr. John Covel. Voyages en Turquie 1675-1677 , Paris 1998 , p . 253-254 et n ° 58 p . 384 ; voir Bull. Épigr. 2000, 33 ) , ce " philosophe" de Nicomédie était représenté dans l'attitude typique du pepaideumenos, le rouleau à la main . Le nom , sur la copie , se lit Mateinianos ; H. Solin , Arctos, 36 , 2002, p. 112, exclut toute autre solution. L'épitaphe recommandait d'avoir « des amis et non de l'argent » . BERNADETTE PUECH .

49 MATIUS (G.- ) RE 1

1a

Chevalier romain proche de César ( 1 F. Münzer , art. « Matius » 1 , RE XIV 2 , 1930, col . 2206-2210) et, selon Tacite (Annales XII LX , 4) , un des hommes les plus puissants de Rome à son époque. Appartenant à la même génération que Cicéron (Fam . XI 27 , 2 ) , il fut de ses amis au temps de la jeunesse avant de s'éloigner un certain temps de Rome ( Fam . XI 27 , 2 : pour Rhodes ? ) . Dans les années 50, Matius est dans l'entourage de César, faisant partie de son état-major en Gaule (Cicéron , Fam . VII 15 , 2 et Fam . XI 27 , 2 ) . Matius est présenté alors comme un modéré qui s'efforce de rapprocher César de Cicéron . Bien qu'opposé à la guerre civile (Cicéron , Fam . XI 28 , 2 ) , il embrasse le parti de César dès le début des hostilités . Matius fut un des hommes de confiance de César, chargé à la fois de rallier les hésitants ( Fam . IX 27 , 8 ) et de gérer les affaires à Rome en l'absence du dictateur. Plutarque ( César 51 , 3 ) signale qu'il était connu pour sa cupidité, mais Matius se défendra plus tard d'avoir bénéficié d'avantages matériels ( Fam . XI 28 , 2 ) . Il était en 47 l'un des rares proches de César qui lui envoya le compte rendu de la bataille de Zela en employant dans sa lettre la fameuse formule ueni, uidi, uici ( Plutarque, César 50, 3 ) . Après la mort de César, la réaction de Matius oscilla entre le désespoir (Cicéron , Att. XIV 1 , 1 ) et le souci de rester en contact avec les différents camps politiques, Républicains inclus. S'il fit le projet de se retirer à Rhodes, l'un des plus prestigieux centres intellectuels alors, pour y passer une uita in otio ( Cicéron , Fam . XI 28 , 8 ) , il resta finalement en Italie , pour y jouer, grâce à ses relations et à son indépen dance politique marquée par une sincère fidélité à César, un rôle majeur, bien

304

MATIUS (G.-)

M 49

que discret. Nommé par Octave procurateur des jeux de la Victoire de César (Cicéron , Att . XV 2 , 3) qui eurent lieu du 20 au 30 juillet 44a ( 2 A. Alföldi, Oktavians Aufstieg zur Macht, Bonn 1976, p. 96-97 ) , Matius se montrait très élogieux envers le jeune homme ( Fam . XI 28 , 6) mais on le trouve également proche d'Antoine. Il appuya une loi d'Antoine en 44 , peut- être la lex de permu tatione provinciarum en juin qui lui donnait le commandement de la Macédoine ( 3 A. Gilboa , « A Further Comment on the Dating of the Cicero -Matius Correspondance » , Historia , 23 , 1974 , p . 217-222 ) . Matius apparaît comme un homme agréable et très cultivé ( Cicéron, Fam . VII 15 , 2 ) . Son goût pour les études ressort également de son choix de Rhodes comme lieu de retraite possible : Rhodes était alors l'un des plus brillants centres intellectuels du monde méditerranéen. Autre indice : son intérêt pour les recher ches de Cicéron qu'il encouragea à écrire ( Fam . XI 27 , 5 ) . Mais le meilleur portrait de Matius se trouve dans la correspondance de Cicéron en 44 lorsque ce dernier s'efforça de combattre la fidélité posthume de Matius à César. Ces lettres ont suscité beaucoup de questions : tout d'abord sur leur datation (Gilboa 3 ) , ensuite sur la nature de l'amitié de Matius pour César : 4 H. Dahlmann , « Cicero und Matius über Freundschaft und Staat » , JKPh 6 , 1938 , p. 225-239 , juge qu'il s'agissait d'une réelle amitié entre les deux hommes alors que 5 R. Combès, « Cicéron et Matius. Amitié et politique à Rome » , REL 36 , 1958 , p . 176-186 , y voit surtout l'expression d'un devoir social. Le problème de la définition de l'amitié selon Matius débouche en fait sur un autre problème qui est celui de l'adhésion éventuelle de Matius à l'épicurisme ( Dahlmann 4, p. 232 237 ) . 6 P. Grimal, « Le “ Bon roi” de Philodème et la royauté de César » , REL 44 , 1966 , p . 254-285 , en particulier 255 et 282 , 7 M. Fussl , « Epikureismus im Umkreis Caesars » , Symmicta Philologica Salisburgensia , Roma 1980, p . 63-80 , 69-70 en particulier, et 8 N. DeWitt, « Vergil and Epicureanism » , CW, 25 , 1932, p . 89-96, notamment p . 93 , ont classé Matius parmi les épicuriens, en tirant argument de sa modération politique, de ses liens avec un autre épicurien Treba tius , de son retrait de la politique , tandis que 9 C. Castner, Prosopography, p. 96-99, le considère comme dubius Epicureus en soulignant la fragilité de ces arguments. De fait, le thème de l'amitié n'était plus le propre de la philosophie épicurienne à la fin de la République, au point que l'on a même vu en Matius un stoïcien ( 10 C. Cichorius , Römische Studien : historisches epigraphisches literaturgeschichtliches aus vier Jahrhunderten Roms, Leipzig 1922 , p. 246 250 ) . Matius apparaît surtout comme un bon exemple de ces Romains qui avaient une excellente connaissance de la philosophie et savaient s'en servir, comme le montre sa réponse à Cicéron (11 M. Griffin , « Cicero and Matius on Friendship » , dans J. Barnes et M. Griffin [ édit.], Philosophia Togata, t . II , p. 86 109 ). Cf. 12 A. Heuss , « Cicero und Matius » , Historia 5 , 1956 , p . 53-73 ; 13 B. Kytzler, « Matius und Cicero » , Historia 9 , 1960, p. 96-98 ; 14 Id ., « Beo bachtungen zu den Matius-Briefen » , Philologus 104, 1960 , p. 48-62 ; 15 A. Heuss , « Matius als Zeuge von Caesars Staatmännischer Grösse » , Historia 11 , 1962 , p . 118-122 ; 16 J. Mandel , « Complementary Addendum to the Cicero

M 52

MATRIS DE THÈBES

305

Matius Correspondance ( Cic . Ad Fam . XI 27 and 28 ) » , Athenaeum 59 , 1981 , p. 191-195 . YASMINA BENFERHAT.

50 MATRÉAS D'ALEXANDRIE

Ia ? I ?

Ce bateleur de foires semble avoir parodié les Problèmes d'Aristote. Athénée , Deipnosophistes I 35 , 19 d : « On admirait en Grèce et à Rome le forain ( Itávoç, haondávoç Souda ) Matréas d'Alexandrie ; celui - là prétendait nourrir une bête qui se mange elle -même , en sorte que l'on cherche encore aujourd'hui ce que c'est que la bête de Matréas. Il rédigea aussi des problèmes parodiés de ceux d'Aristote ( Trapà tàç ’Aplototé ovç ảnop aç ) , dont il faisait des lectures en public : Pourquoi le soleil se plonge , mais ne plonge pas ; pour quoi les éponges boivent, mais ne s'enivrent pas ; pourquoi les tétradrachmes font la paie , mais non la guerre » (trad . Desrousseaux, CUF, Paris 1956) . Pour une explication de ces énigmes , voir les notes de Desrousseaux, p. 43 n . 9 (en p. 183 ) et p. 44 n . 1 . Il faut apparemment le distinguer de Matréas (ou Mètréas) de Pitane, parodiste auteur d'une description de banquet, également connu par Athénée (1 8 , 5 b), lequel cite peut -être plus loin son Banquet attique – celui offert par le rhéteur Xénoclès à Athènes – sous le nom de Matron le parodiste ( II 60 , 62 c , II 66, 64 c, III 4, 73 d-e, et IV 13 , 134 d - 137 c , et passim ). Les extraits de Matron de Pitane sont édités dans Suppl. Hell ., nos 534-540 (p. 259 368 ) . Voir S. D. Olson et A. Sens , Matro of Pitane and the tradition of epic parody in the fourth century , Atlanta 1999.

Apparemment absent de la RE . RICHARD GOULET. 51 MATRIS

FV - MIV

D'après Memnon ( FHG III 526) , père du philosophe platonicien Chion d'Héraclée ( 2 + C 110) . Quatorze des dix -sept lettres de Chion lui sont adressées. Il aurait été l'élève de Socrate (Epist. 5 ) . Voir aussi W. Ameling , « Prosopo graphia Heracleotica, dans Lloyd Jonnes , The Inscriptions of Heraclea Pontica, coll . IK 47 , Bonn 1994 , p . 150-151 . PATRICK ROBIANO. 52 MATRIS DE THÈBES ou D'ATHÈNES RE :

Hymnographe et buveur d'eau. Sources . A. Athénée , Deipnosophistes II , 44 c , dresse une liste de « buveurs d'eau » (υδροπόται ) parmi lesquels il cite un Μάτρις δ' ο 'Αθηναίος ( legon des manuscrits que Toup a voulu corriger en Onßatos à cause du texte de Ptolémée Héphaistion que nous citons en B ) qui , « tout le temps qu'il vécut , ne mangeait rien sinon des baies de myrte en petite quantité, qui s'abstenait de vin et de toute autre boisson à l'exception de l'eau » . 1 H. Hobein , art. « Matris » , RE XIV 2 , 1930 , col . 2287-2298 , notamment col . 2289 , explique que les baies de myrte (μυρρίναι) sont une sorte de figues appelées φιβάλεαι (cf. Athénée , III , 75 c , qui rapporte qu'il en est ainsi dans Les Crétois d'Apollophane ).

306

MATRIS DE THÈBES

M 52

B. Ptolémée Héphaistion (Histoire nouvelle III dans Photios, Bibliothèque, codex 190 , p. 148 b 1 Bekker ]) se demande de qui était l'hymne qu'on chantait à Thèbes en l'honneur d'Héraclès et où le héros était présenté comme fils de Zeus et d'Héra ; il cite alors plusieurs noms de « ceux qui composèrent des hymnes ... l'hymno dans différentes cités » ; le deuxième nom cité est celui de Matris : « ...

graphe Matris le Thébain s'est nourri toute sa vie de baies de myrte » . Dans une lettre qu'il adresse à L. Papirius Paetus ( Ad familiares IX 6, 8) , Cicéron déclare : « Si tu persistes à me ramener aux dîners de ton cher Matris , j'y souscrirai encore » ( cf. Hobein 1 , col . 2298 ) ; l'éditeur J. Beaujeu ( CUF, t . VII , Paris 1980 , p . 278 n . 5 ) identifie ce Matris avec le personnage d'Athénée et de Ptolémée connu pour son extrême sobriété. C. Athénée , X , 412 b : « Matris, dans son Hymne à Héraclès (£v TỢ TOŨ ‘ Hoaxkéovç éyxwuiw ), dit qu'Héraclès a été invité par Lépreus à un concours de boisson et qu'à nouveau il fut vaincu » . D. Pseudo- Longin , lɛpi ébouc (Du sublime) III 2 , cite plusieurs exemples d'auteurs au style gonflé et ampoulé, caricaturant celui de la tragédie (tà napatpaywda ), qui se pensent inspirés alors qu'ils ne font que plaisanter tels des enfants ( où Baxxevovoi årà naiCovoiv); il s'agit de Gorgias ( - G 28 ) , Callisthène (d'Olynthe ) [ "C 36 ) , Clitarque (l'historien du III s . , auteur d'une Vie d'Alexandre), mais aussi d'Amphicrate ( rhéteur athénien du jer siècle av . J.-C. ) , d'Hégésias ( de Magnésie , historien et orateur du II s . av . J.-C. ) et de « Matris » Identifications. De ces données brutes il ressort que le Matris d'Athènes, mangeur de baies de myrte et buveur d'eau évoqué par Athénée (A ) et le Matris de Thèbes mangeur de baies de myrte et hymnographe évoqué par Ptolémée Héphaistion ( B ) se signalent tous les deux par leur frugalité (de même que le personnage auquel fait allusion Cicéron dans sa lettre ). Il s'agit certainement dans les trois cas du même Matris, ce qui supppose une confusion ' Aonvatoç / Onßałoç. Tel est l'avis de 2 A. Dieterich, Kleine Schriften, Leipzig /Berlin 1911 , p . 162-163 , et de Hobein 1 , col . 2287 et 2296. Par ailleurs l'hymnographe cité par Ptolémée Héphaistion ( B ) dans un contexte où il vient d'être question de l'hymne thébain à Héraclès a toutes les chances d'être le même Matris , auteur d'un Hymne à Héraclès évoqué par Athénée (C ). Par conséquent, les sources A , B et C font référence selon toute vraisem blance au même personnage auquel il faut identifier également le Matris du Pseudo - Longin (cf. infra ). Ce Matris était thébain si l'on suit Ptolémée Héphaistion , athénien si l'on suit Athénée ( contrairement à l'opinion la plus répandue qui fait de lui un thébain , Hobein 1 , col . 2287-2288 , estime , mais sans argument décisif, qu'il faut peut-être privilégier le témoignage d'Athénée ). Il est encore à signaler qu'à côté de Matris il y avait aussi un « Matréas ( ou Métréas) de Pitane, le parodiste » , appelé aussi Matron , et un Matréas d'Alexan drie qui passait pour avoir parodié les 'Aplototé ouç åropía ( 2 - M 50 ). L’Hymne à Héraclès de Matris. 3 E. Bethe , Quaestiones Diodoreae Mythographae, Diss . Göttingen 1837 , p. 41-44 , notamment p. 42 n . 54 ,

M52

MATRIS DE THÈBES

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explique, en se fondant sur une inscription du jer siècle trouvée dans le temple d'Amphiaraos à Oropos, qui atteste qu'il y avait en l'honneur d'Amphiaraos des concours avec des épreuves gymniques , des épreuves musicales et des concours d'éloges en prose (éyxwuiolç xatanovádnu ) , que Matris a pu remporter la victoire aux jeux thébains en l'honneur d'Héraclès grâce à son Hymne à Héraclès, qui était peut-être plutôt en prose qu'en vers. Voir aussi 4 Susemihl, GGLA, t. II , p . 470-471, n . 80 . Matris, auteur de l'Hymne à Héraclès, est considéré comme une des sources de ce que dit Diodore de Sicile à propos d'Héraclès au livre IV de sa Bibliothè que historique ( cf. 5 E. Holzer, Matris. Ein Beitrag zur Quellenkritik Diodors, Gymnasialprogramm , Tübingen 1881 ; Bethe 3 , p . 41-44 ; 6 E. Schwartz, art. « Diodoros » , 38 , REV 1 , 1903, col. 676 ; Hobein 1 , col . 2296) . Principaux argu ments avancés en faveur de cette hypothèse : en I 24 , 4 Diodore emprunte l'étymologie du nom d'Héraclès (óti Ol ' " Hpav čoxe xéoç uç onowv ó Mãtpis ) à Matris ( étymologie répétée en IV 10 , 1 ) ; le style très rhétorique des chapitres dont Matris pourrait être la source , avec ses antithèses recherchées (3 Bethe, p. 41 ) , avec ses pointes, est différent du style habituel plutôt monotone de Diodore. Sur les parties du livre IV qui pourraient avoir été empruntées à Matris, voir Susemihl 4 , t . II p . 470 n . 79. En étudiant les passages où Diodore de Sicile a utilisé Matris, on a conclu à l'asianisme de celui -ci , ce qui s'harmo nise tout à fait avec le témoignage de l'auteur du traité Du sublime ( cf. supra ). Cf. 7 W. von Christ , Geschichte der griechischen Literatur , bearbeitet von W. Schmid , coll . « Handbuch der Altertumswissenschaft >> VII 2 , 1 , München 1959, p. 408 n . 3 , p . 456 n . 2 , p . 457 , qui range Matris aux côtés d'Eschyle de Cnide , Eschine de Milet et d'autres parmi les représentants de l'asianisme dans la seconde moitié du 11e siècle et au 1er siècle av . J.-C. ; Hobein 1 , col . 2296 et 2297 . Datation. Si Diodore de Sicile s'inspire de l'ouvrage de Matris quand il parle du héros dans son livre IV , ce qu'il dit en IV 18 , 1 pourrait fournir un terminus post quem , à savoir l'époque de la première guerre punique qui eut lieu entre 264 et 241 ( « Héraclès fonda sur cette terre une cité d'une grandeur extraordi naire appelée Hékatompylos ... ; cette cité continua (blauenévnxe) d'être prospère jusqu'à des temps assez récents où les Carthaginois, après avoir lancé une expédition contre elle , avec des forces considérables et d'excellents géné raux, s'établirent en maîtres » ). Il s'agit là seulement d'une hypothèse , envers laquelle Susemihl 4, t. II, p. 470 n. 76 , se montre sceptique , car non seulement la source du ch . 18 est incertaine, mais on peut penser, et c'est même bien plus vraisemblable, que c'est Diodore lui -même et non Matris qui attestait l'existence de la ville jusqu'à sa conquête par les Carthaginois. Un philosophe ? Dans quelle mesure est -il justifié de rapprocher Matris de la philosophie ? Le fait de manger des figues et de boire de l'eau signifiait un art de vivre fondé sur la λιτότης et Γ'ευτέλεια τροφής (cf. les développements de Hobein 1 , col. 2288-2296) . Or cette frugalité a été pratiquée par des philosophes et présentée comme spécifique de leur conception du Bíos philosophique . On peut citer par exemple Pythagore qui recommande aux hommes de boire de

MATRIS DE THÈBES

308

M 52

l'eau pure (D.L. VIII 13 ) , Anchimolos ou Anchipylos ( 34A 170) et Moschos ( ** M 194 ) , deux philosophes de l'école de Phédon d'Élis chez D.L. II 126, présentés par Athénée II , 44 c ( juste avant le passage sur Matris ) comme des sophistes , qui , à en croire Hégésandre de Delphes, « burent de l'eau toute leur vie et qui, en ne mangeant que des figues, avaient néanmoins une constitution physique robuste ; mais leur sueur sentait tellement mauvais que tout le monde s'écartait d'eux aux bains » ; Arcesilas ( A 302 ) qui est dit plóouxos, « amateur de figues » ( Élien III 39 ) , Diogène de Sinope ( D 147 ] ( par ex . cette anecdote en D.L. VI 26 où Platon envoie à Diogène un tonneau de vin alors que celui-ci demandait seulement un peu de vin et quelques figues sèches), Épicure ( » E 33 ) et ses amis qui en général buvaient de l'eau ( D.L. X 11 ) , ou encore Zénon de Citium , qui aimait les figues (Philodème, Stoic. Hist. ( PHerc. 1018), col. VI , p . 58 Dorandi, et D.L. VII 1 ) . En ce sens Matris, hymnographe, buveur d'eau et mangeur de figues, avait une façon de vivre qui permet de l'associer aux philosophes ayant pratiqué une discipline analogue, mais qui n'autorise pas à faire de lui un philosophe. MARIE -ODILE GOULET -CAZÉ . 53 MATRON

IV /III a

Esclave du Jardin d'Épicure à Athènes. Il est connu grâce à deux extraits épistolaires d'Épicure . Dans la première lettre , Épicure, en s'adressant à Polyainos (Philod ., De piet. I , col . XXXIII 5-10 [ = 932-937 Obbink ] = fr. 51 Tepedino ), lui révèle son souhait de continuer à mener une vie pure en compa gnie de Matron. Dans la deuxième ( PHerc. 176, fr. 5 XXIII = 261 Arrighetti ), en écrivant à Apia , fille de Métrodore de Lampsaque ( M 153 ) , il lui annonce qu'il est bien arrivé à Lampsaque en compagnie de Pythoclès, Hermarque (

H 75 ) et Ctésippe (

C 226 ) et l'invite à suivre les conseils de Matron .

Cf. D. Obbink ( édit. ), Philodemus, On Piety, Part 1 , Oxford 1996 , p. 447-450 . TIZIANO DORANDI. 54 MAURICUS (IUNIUS RUSTICUS - ) RE 94 PIR2 1 771

I

Iunius Rusticus Mauricus est le frère de Q. Iunius Arulenus Rusticus ; il est originaire du Nord de l'Italie, comme Pline le Jeune ( Pline I 14, 4) . Il est séna teur et, en 68 , au moment des violences qui suivent la mort de Néron, il déclare au sénat : « Je crains que bientôt nous ne regrettions Néron » (Plut. , Galba 8 ). En 70 , au moment de l'avènement de Vespasien , il demande que les sénateurs soient autorisés « à consulter les archives particulières des princes pour savoir quelles accusations avait formulées chaque délateur » (Tacite , Hist. IV 40 , 3 ). Nous ne possédons toutefois pas d'indications sur sa carrière politique : la question est posée par R. Syme , « A Political Group » , Roman Papers, t. VII , Oxford 1991 , p. 568-588 , en particulier, p . 574 et 580 , qui envisage plusieurs possibilités : carrière limitée à la préture ? consulat en 83 ? ou au début du règne de Trajan ? Sous le règne de Domitien , en 93 , au moment où Arulenus Rusticus , son frère, est condamné à mort, lunius Mauricus est condamné à la relégation

M55

MAXIME

309

( Tacite, Agricola 45 , 1 ; Pline le Jeune I 5 , 11 ; III 11 , 3 ). Il revient à Rome sous le règne de Nerva, sans doute en 97 ; comme son ami Pline le Jeune, il est proche de l'empereur Trajan ( Pline IV 22) ; et il participe avec lui à une réunion du consilium impérial ( ibid . ). Nous ne connaissons pas la date de sa mort , mais il est encore vivant en 107 , date probable du billet que lui adresse Pline (VI 14) . Iunius Mauricus appartient sans aucun doute possible à ce groupe de séna teurs stoïciens, unis par des liens familiaux , qui jouent un rôle important dans l'opposition à l'empire dès le règne de Néron , puis sous les Flaviens ; il est mentionné dans une lettre de Pline le Jeune ( III 11 , 3 ) parmi les stoïciens exécutés ou exilés par Domitien : Hérennius Sénecion , Arulénus Rusticus , Helvidius Priscus ( » H 39) . Mais seuls quelques indices laissent deviner son appartenance au stoïcisme. Martial (V 28 , 3 ) loue son équité. Plutarque (Galba 8 ) le place parmi les « meilleurs citoyens » . Les deux anecdotes rapportées par Pline le Jeune ( IV 22) révèlent sa rigueur morale et sa franchise courageuse ; Pline lui - même le qualifie de uir grauis et prudens ( I 5 , 16) et souligne sa fermeté et sa sincérité ( quo uiro nihil firmius, nihil uerius dans la lettre IV 22 , 3 ) , qualités qui le rapprochent du stoïcisme. Cf. E. Groag, art. « Iunius 94 Mauricus » , RE X 1 , 1917 , col . 1051-1053 . MICHÈLE DUCOS . 55 MAXIME

F II -D III ?

Parmi les auteurs chrétiens s'étant illustrés sous le règne de l'empereur Septime Sévère ( 193-211 ) , Eusébe de Césarée , Histoire ecclésiastique V 27 , 1 , mentionne un certain Maxime auteur d'un traité « sur la question maintes fois agitée chez les hérétiques : D'où vient le mal et que la matière est créée (TÓDev ń xax a , xaù trepà toŨ Yevnt Únápxelv Tv ünv ) » ( trad. G. Bardy). Eusébe mentionne dans le même contexte des ouvrages d'Héraclite sur l'Apôtre, de Candidus Sur l'Hexaeméron , de Sextus Sur la résurrection , « et un autre traité d'Arabianus » . Eusébe avoue que pour une multitude d'autres livres (et peut- être pour ceux qu'il vient de mentionner ), « il ne nous est pas possible d'indiquer la date par écrit ni de fixer le souvenir historique parce qu'il n'existe aucun moyen pour cela » (trad. Bardy), ce qui est sans doute le signe qu'il a daté lui -même ces ouvrages, souvent anonymes , à partir d'une lecture de leur contenu , tout comme il a établi de la sorte leur orthodoxie . Jérôme, De viris illustribus 47 (PL 23 , 661-662 A), mentionne également le nom de Maxime, en dépendance d'Eusébe. Un long extrait du Mepi tñç uans ( Sur la matière ) de cet auteur, « illustre représentant de l'école du Christ » , est cité par Eusébe dans sa Préparation évangélique VII 22 , 1-64 , sous l'intitulé Que la matière n'est pas incréée et qu'elle n'est pas non plus la cause des maux. Voir l'édition de 1 K. Mras, coll. GCS 43 , 1 , Berlin 1954 , p. 405-426 . Traduction française dans 2 Eusébe de Césarée, La Préparation évangélique, Livre VII. Introduction , traduction et annotation par G. Schroeder, texte grec révisé par Éd. des Places, coll. SC 215 , Paris 1975 , p. 280-312 (avec la note complémentaire d'Éd. des Places , p. 315 318 , et l'introduction de Schroeder, p . 111-126) . De nombreuses informations de la présente notice sont empruntées à cette édition.

310

MAXIME

M 55

Le fragment se trouve également dans la Philocalie (chap. XXIV), sous la paternité d'Origène . Il se retrouve également dans le ſepì toŨ CỦtecovolou, Sur le libre arbitre ( 5 , 1 - 12 , 8 ) de Méthode d’Olympe. Voir l'édition de 3 G. N. Bonwetsch , coll . GCS 27 , Leipzig 1917 , p. 157,5 – 178 , 9. Il en existe une version slave plus complète : 4 A. Vaillant , Le De autexusio de Méthode d'Olympe . Version slave et texte grec édités et traduits en français, coll . PO XXII 5 , Paris 1930 , 2e éd. Turnhout 1974. Pour la tradition de ce traité , voir

116

CPG 1811. Il existe également des rapports littéraires entre l'Adamantius et le De resurrectione de Méthode . C'est dans le cadre du De liberio arbitrio que le fragment est cité chez Photius , Bibliothèque, cod. 236.

14

C

La présence du passage dans la Philocalie s'explique par le fait qu'il est également incorporé dans l'ouvrage , faussement attribué à Origène – peut-être parce que l'interlocuteur principal du dialogue qui a donné son nom à l'ouvrage portait un nom connu comme le surnom d'Origène ( Eusèbe, H.E. VI 14 , 10) -, Adamantius ( CPG 1726). Cet ouvrage que l'on peut dater du début du IVe siècle, mais qui fut remanié après le Concile de Nicée, était en vérité d'inspiration anti origénienne . Voir l'édition de 5 W.H. van de Sande Bakhuyzen : Der Dialog des Adamantius ( IIEPI THE EIE OEON OPOHE NIETENE ), coll . GCS 4, Leipzig 1901, p. 146, 15 – 162 , 3 , ainsi que l'étude de 6 K. Tsutsui , Die Auseinandersetzung mit den Markioniten im Adamantius -Dialog : Ein Kommentar zu den Büchern l II, coll . « Patristische Texte und Studien >> 55 , Berlin 2004, XII - 384 p . ( qui

.

0

7 s'appuie sur une nouvelle collation du Marcianus gr. 496 ) . Traduction anglaise récente: 7 Adamantius : Dialogue on the True Faith in God. De Recta in Deum Fide. Translation and commentary by Robert A. Pretty , edited by G. W. Trompf, coll . « Gnostica : Texts and Interpretations» 1 , Leuven 1997 , XXI - 204 p. L'ou vrage fut traduit comme une æuvre d'Origène par Rufin d'Aquilée en 399. Voir 8 V. Buchheit ( édit. ) , Tyrannii Rufini librorum Adamantii Origenis adversus haereticos interpretatio. Eingeleitet, herausgegeben und kritisch kommentiert von V.B. , coll . « Studia et testimonia antiqua » 1 , München 1966 . Cf. 10 T. D. Barnes , « Methodius , Maximus , and Valentinus » , JTHSt 30 , 1979 , p. 47-55 , repris dans Early Christianity and the Roman Empire, Aldershot 1984 , n° XIX . Voir l'édition de 11 M.J. Routh , Reliquiae Sacrae, t. II , Oxford 1846 , p. 75-121 . 12 Th. Zahn , « Die Dialoge des “ Adamantius" mit den Gnosti kern » , ZKG 9 , 1888 , p. 193-239 ; 13 J. A. Robinson , The Philocalia of Origen , Cambridge 1893 , p. XL- XLIX, p. 212-226. L'attribution à Maxime a été mise en doute à cause du fait que ce passage

2

V figure dans l'Adamantius et chez Méthode. 14 G. Salmon, art. « Maximus » , DCB III , 1882 , p. 884-885 , voyait dans Maxime la source des deux autres textes. En vérité , la comparaison des trois documents montre qu'un long passage, commun à l'Adamantius ( p . 135 , 25 sqq . ) et à Méthode (3,1-4,5), précédait l'extrait conservé par Eusébe. Le passage trouve d'ailleurs chez Méthode dont il constitue la cinquième partie un contexte naturel . Selon Barnes 10 , p . 47-48, Eusébe ne ferait donc que citer Méthode. Sur l'identité stylistique et doctrinale entre le fragment de Maxime et l'ouvrage de Méthode, voir 15 A. Jahn , S. Methodii opera et S. Methodius platonizans, Halle 1865. Dans son édition de

M 56

MAXIME

311

la Philocalie, 16 J. A. Robinson , The Philocalia of Origen, Cambridge 1893 , a nettement soutenu que Méthode était l'auteur du passage et a suggéré qu'Eusébe avait pu prendre comme auteur du fragment un nom qui figurait peut-être comme le titre du dialogue de style platonicien de Méthode ( par exemple Μάξιμος , ή περί του αυτεξουσίου ) . Pour les autres exemples de titres platoniciens de dialogues chez Méthode, voir Schroeder 2 , p . 121. Voir aussi 17 B. R. Voss , Der Dialog in der frühchristlichen Literatur, coll . « Studia et testimonia antiqua » 9 , München 1970, p. 92-102 (voir également p. 135-147 sur l'Adamantius). Contrairement à la thèse prépondérante de Zahn 12 qui considérait que l'Adamantius dépendait lui aussi de Méthode, Barnes a cherché à montrer que la dépendance devait être inverse , l'Adamantius réfutant des doctrines sur la matière que l'on peut dater du IT siècle (Marcion, Bardesane et Valentin ) et c'est Rufin qui aurait ajouté dans trois passages de la version latine des allusions à Mani, amenant ainsi les historiens à situer l'ouvrage à une date plus tardive. On a également discuté la portée d'une divergence entre la version grecque de l’Adaman tius et la version de Rufin : la version grecque présente la persécution comme un événement passé, précisant que l'empereur rend maintenant un culte à Dieu ( p. 40 , 20), alors que Rufin parle de la persécution comme d'un phénomène contemporain. Selon Zahn et Barnes, sur ce point, c'est Rufin qui conserverait le texte originel et une telle situation ( un seul empereur, une période continue de persécutions) serait difficilement imaginable après les années 260 (Barnes 10, p. 50). Selon Barnes 10, p. 54, le copiste d'Eusébe aurait malencontreusement inséré un extrait de l'ouvrage de Méthode d'Olympe à la place d'une citation du dialo gue similaire sur la matière ( l’Adamantius) alors connu comme l’æuvre d'un certain Maxime. Dans cette perspective, Eusébe aurait daté une cinquantaine d'années trop tôt un auteur du milieu du IIIe siècle . RICHARD GOULET. 56 MAXIME

D III ?

Numénius aurait changé le nom latin d'un certain “ Maximus ”, qui était peut être son élève , en “ Megalos”. C'est ce que rapporte Porphyre, Vita Plotini 17 , 13-14 , qui rappelle que son propre nom sémitique originel de Malchos (littéra lement “ Roi " ) fut changé par son collègue Amélius ( A 136) en “ Basileus” . Une identification avec Maxime de Nicée, le commentateur de la République (** M 67 ) est chronologiquement envisageable . Une identification avec le “Maxime philosophe” dont le nom apparaît dans un graffiti de la vallée des rois en Égypte ( ~ * M 58 ) mérite également d'être considérée . Voir notice de L. Brisson dans PVP I , p . 96. Avec un peu plus d'audace, on pourrait envisager que Maximus et Megalos soient deux traductions d'un nom sémitique rattaché à la racine gdl, qui signifie “grand, le grand ” . Voir ainsi dans l'AT Guiddel ( Esdr. 2, 47 et 56 ; Néh. 7,49 et 58). On pourrait alors se demander si notre personnage n'est pas le Gédaleios ( ** G 10) auquel Porphyre a dédié son Commentaire perdu sur les Catégories d'Aristote. Le nom est en effet probablement d'origine sémitique et n'est pas attesté par ailleurs. RICHARD GOULET.

312

MAXIME

M 57 M III

57 MAXIME RE 13

D'après un fragment des Scythica de Dexippe ( FGrHist 100 F 24 = Exc. de strateg. 4) , lors du siège de Marcianopolis en Mésie par les "Scythes” ( i.e. les Goths) en 248 , ce citoyen féru de philosophie montra les dispositions d'un grand général . Voir M. Fluß, art. « Marcianopolis » , RE XIV 2 , 1930, col . 1509. Voir également sur ce siège Jordanès, Get. XVI 91-92, qui situe le siège sous le règne de Philippe l'Arabe ( 244-249 ). Cf. A. Stein , art. « Maximus » 13 , RE XIV 2 , 1930 , col . 2541 . RICHARD GOULET.

IV

58 MAXIME

Le philosophe Maximus , visiteur de la vallée des Rois (J. Baillet, Tombeaux, nº 150-151 ) , vivait probablement au IVe siècle . Mais aucun élément ne peut être invoqué à l'appui de l'hypothèse de J. Baillet qui le rapprochait de l'évêque Maxime d'Alexandrie , correspondant de Basile de Césarée et adversaire de l'arianisme (> M 70 ) . Comme l'a signalé L. Brisson ( L. Brisson , M.-O. Goulet Cazé, R. Goulet , D. O'Brien , Porphyre, Vie de Plotin , t . I , Paris 1982 , p . 96 ), une identification avec l'homonyme mentionné par Porphyre ( > M Plotin 17 , 14) serait tout aussi hasardeuse.

56 ] ( Vie de

Cette inscription est également mentionnée par A. Calderini, « Arti liberali in documenti dell'Egitto romano » , dans Studi in onore di Ugo Enrico Paoli, Firenze 1956, p. 155 . BERNADETTE PUECH . 59 MAXIME PLRE II : 10

DM V

Une lettre d'Isidore de Péluse est adressée à un Maxime philosophe ( Epist. IV 96 = 1716 ) . Elle tourne en ridicule la philosophie dont il se vante , condamnée comme une vaine sagesse . Cf. P. Évieux , Isidore de Péluse, Paris 1995 , p. 148 PIERRE MARAVAL .

IV

60 MAXIME PLRE I : 29

Recommandé par Symmaque à son “ frère " Flavien ( > N 49 ) comme « remar quable par sa vie et sa connaissance des arts libéraux » et allant « de pair avec tous les philosophes éminents » ( Epist. II 29 , datée d'avant 395 ). PIERRE MARAVAL. 61 MAXIME D'ANTIOCHE ( M. ATILIUS-)

II ou III

Comme à beaucoup d'autres hommes de lettres, dont un nombre non négli geable de Syriens ( voir H. Bouvier, « Hommes de lettres dans les inscriptions delphiques » , ZPE 58 , 1985 , p. 119-135 ) , les Delphiens avaient accordé le droit de cité au philosophe M. Atilius Maximus d'Antioche ( FD III 1 , 199, complétée par G. Daux , BCH 83 , 1959, p . 493-494) . L'écriture oriente vers le 11 ° ou le mie siècle de notre ère. Le titre de philosophe était suivi d'un sigle qui , malgré les

M 63

MAXIME D'ÉPHÈSE

313

réticences de G. Daux, doit être interprété comme l'abréviation de tarwexÓC, comme l'ont indiqué J. et L. Robert, Bull. Épigr. 1961 , 346. BERNADETTE PUECH .

II

62 MAXIME D’ÉGÉE (en Cilicie) RE 36

D'après Philostrate, V. Apoll. I 12 , sa réputation d'éloquence ( eỦdoxqu @ v Tv Duvnu) lui aurait permis d'entrer au secrétariat impérial. L'existence de Maxime n'est attestée que par Philostrate qui reconnaît en lui sa source pour tout ce qui concerne le séjour du jeune Apollonius de Tyane ( » Α 284 ) a Egée : ενέτυχον δε και Μαξίμου του Αίγιέως βιβλίω ξυνειλη póti tà Év Alyaīç ' Anorwvíov trávta (V. Apoll. I 3 ; vf. aussi I 12) . Parfois mise en doute - rappel du problème chez 1 F. Grosso , « Fonti e cronologia della Vita di Apollonio di Tiana » , Acme 7 , 1954, p. 338 n . 1 -, son existence paraît maintenant certaine ; des distorsions dans la chronologie philostratéenne pro viendraient de l'adoption de la chronologie de Maxime ( voir Grosso 1 , p . 355 356 , et 2 E. L. Bowie , « Apollonius of Tyana : Tradition and Reality » , ANRW II 16, 2 , 1978 , p . 1684 ) . Les témoignages ont été récemment rassemblés par 3 J. Radicke, Die Fragmente der griechischen Historiker continued, t. IV A : Biography, fasc . 7 : Imperial and undated authors, Leiden 1999 , nº 1066 , p. 166-171. Datation . Bowie 2 , p . 1684 , présente l'æuvre de Maxime comme une « contribution to the second century tradition » . École . Inconnue , mais une quasi -certitude: selon Bowie 2 , p . presented a Pythagorean Apollonius » . Maximus «

1684 ,

Bibliographie. Voir Grosso 1 , p. 336 n . 5 . Études d'orientation . Examen approfondi dans Bowie 2 , p . 1684-1685 . A consulter également 4 E. Diehl , art. « Maximos von Aigai » , RE XIV 2, 1930, col. 2555 . PATRICK ROBIANO . 63 MAXIME (D’ÉPHÈSE ?) RE 40 PLREI:21

MIV

Philosophe néoplatonicien, disciple d'Aidésius ( -A 56) , maître de l'empe reur Julien ( > 1 46 ). La documentation existante sur la vie de Maxime d'Éphèse est riche en ce qui concerne sa participation à la vie politique, mais son enseignement est beaucoup moins connu . D'impor tants problèmes concernant son identité et sa doctrine ne sont toujours pas résolus. Il figure parmi les chefs d'école philosophique qui se sont mêlés, dans la bonne tradition platonicienne, aux affaires du pouvoir, comme maîtres à penser ou éminences grises des gouvernants de tout temps . Plus particulièrement, il est devenu célèbre en tant qu'agent de la conversion à l'hellénisme du souverain, de même que s'appliquèrent, avec plus ou moins de succès , à exercer leur influence sur les souverains Platon pour Denys, Plotin pour Gallien , Sopatros pour Constantin, Eustathe (» E 161 ) pour Sapor, ainsi que les derniers scholarques athéniens pour Chosroès (-C 113 ). Cf. 1 K. Praechter, art. « Maximus » 40 , RE XIV 2, 1930 , col . 2563-2570 ; 2 R. Penella, Greek Philosophers and Sophists in the Fourth Century A.D. Studies in Eunapius of Sardis, Leeds 1990 ; 3 F. Delfim Santos, Los Filósofos

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Bizantinos y el Poder – Máximo ( de Éfeso ), t. I : Biografía , Genealogía Cultural, Estudios sobre las Fuentes ; t. II : Corpus Textual, Madrid 1993 (thèse doct. ). Témoignages. Delfim Santos 3, t. II : Corpus Textual. Il est très difficile d'établir un portrait équilibré de Maxime, du fait de l'hostilité de beaucoup des sources, y compris, à cause de quelques rivalités entre écoles , de son principal biographe, Eunape de Sardes ( E 121 ). Le récit de ce dernier, contenu pour l'essentiel dans ses Vies des philosophes et des sophistes VII , semble trop moralisant et largement rhétorique, présentant des contaminations et des topoi qui peuvent réduire son intérêt historique : d'abord, sa structure et le message de l'auteur qu'on y trouve sont très similaires à ceux qu'il nous a laissés un peu avant sur Sopatros, sans omettre le châtiment final sous l'action de la npóvola des deux couples de persécuteurs que furent Ablabius -Festus et Constantin -Valens ; dans le détail aussi , il y a des manques d'originalité : sa rencontre avec Julien ressemble beaucoup à celle de Plotin et d'Ammonius ( > A 140 ) racontée dans la Vie de Plotin par Porphyre ouvrage qu'Eunape connaît et cite : il y emprunte l'expression tuol de Ěunvuoaç Öv Chtouv ( VII 2 , 12 ; p. 44, 27-28 Giangrande) qui reprend la formule de Porphyre toūtov ÉCńtouv ( V. Plot. 3 , 13 ) ; de même les lignes hyperboliques sur la femme de Maxime ( VII 3 , 15-16) sont l'écho de celles qu'il avait consacrées plus haut à Sosipatra (VI 6, 5 ) ... Il veut exalter ses maîtres en dépit de ses concurrents , et cette perspective l'amène à dévaloriser Maxime au profit de Chrysanthe ( 2 ° C 116), ou Libanius au profit de Prohairésius. En ce qui concerne les autres témoins nous renseignant sur Maxime, on trouve du côté de ses admirateurs Julien, bien entendu , et Libanius. Mais ses détracteurs sont beaucoup plus nombreux : les chrétiens l'ont généralement diabolisé, au point de créer un personnage mythique, Magnus le Magicien , mis en scène dans un roman syriaque du Vile siècle ( voir 4 J. Richer, L'Empereur Julien, De l'histoire à la légende, Paris 1978 , p. 263 sqq . ). Les historiens modernes ont donné de lui une image peu favorable ; la bibliographie , qui se confond presque avec celle de Julien, est immense et contradictoire, et peut se résumer par la litote de P. Brown : Maximus is not everybody's cup of tea ... (Society and the Holy, Berkeley 1982 , p. 89). Biographie. Ammien Marcellin mentionne la ville d'Éphèse comme lieu de naissance de Maxime ( Ephesum ad genuinam patriam ... Res gestae XXIX 1 , 42 ) , mais il donne la même information à propos de son exécution . Une confu sion est donc possible entre la localisation de l'un et l'autre événement. L'histo rien Socrate ( III 1 ) , et à sa suite Sozomène ( V 2) , ont très probablement suivi Ammien . Mais parmi les auteurs qui l'ont connu personnellement aucun ne nous informe sur sa ville natale : Libanios le qualifie d ' « ionien » (Epitaphios 155 ) et Eunape omet cette donnée , alors qu'il n'oublie jamais de la mentionner pour tous les collègues de Maxime et en plus il reproche à Porphyre ( p . 5 , 20-21 Giangrande) de l'avoir omise à propos de Plotin ( V. Plot. 1 , 2) . Il est possible que du vivant même de Maxime on n'ait pas disposé d'information précise sur le sujet ( voir 5 H. Rabe , « De Maximi libello llepì årútov ávtiOÉoewv, Praefatio 34 , Prolegomenon Sylloge , dans Rhetores Graeci, coll . BT, Leipzig, t . XIV , 1931 , p . CXXI : « Eunapio patria Maximi ignota fuerit ; tacet enim de ea ; si Libanius certius quicquam compertum habuisset , quare eum appelavit " lova, non Ephesium , Smyrnaeum , Byzantium ? » ) . Enfin, la Souda mentionne l'Épire - confusion avec la région natale de son collègue Priscus ? – ou Byzance – confusion avec un homonyme ( > .M 64 ), peut- être le père de l'Euclide ( » E 81 ) à qui Julien adresse une lettre , l'Epist. 192 Bidez , et que Socrate distingue de notre philosophe dans H. E. III 1 , 16. La date de sa naissance est à situer vers 310 (Delfim Santos 3, p. 60-61). Rien n'est connu sur les riches parents de Maxime (Eunape VII 1 , 4 ) , mais Eunape

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fournit des renseignements sur deux de ses frères, Claudianus (

315 C 131 ) et

Nymphidianus , secrétaire de Julien ( ibid. et XVIII 1 et 3 ) . Eunape évoque l'épouse de Maxime, mais il ne nous donne pas son nom. Il semble cependant qu'elle se soit adonnée à la philosophie (VII 3 , 15-16) , tout comme Sosipatra. Par Eunape nous savons aussi qu'il appartenait à la famille de son maître Aidésius ( VI 9 , 3 ) par conséquent à celle d'Eustathe ( VI 4 , 6) , ce qui fait des trois fils de ce dernier, notamment le philosophe Antoninus ( ** A 221 ) , ses cousins. On pourrait également penser, comme W.C. Wright et Fowden , qu'Eunape, en VI 9, 3 , présente Maxime comme le parentde Sosipatra et non d'Aidésius. Mais comme Aidésius était par ailleurs parent avec Eustathe, Maximeserait par ce biais également apparenté par alliance aux enfants d'Eustathe et de Sosipatra. Son apparence physique était remarquable : le portrait qu'en fait Eunape , qui le présente comme une sorte d'épiphanie divine , est un des passages les plus éloquents de toute son cuvre biographique ( VII 1 , 1-3 ) . On sait par Julien ( Epist. 26 Bidez) qu'il s'habillait en cynique , c'est - à -dire de façon austère, avec les cheveux et la barbe longs , le manteau et le bâton ( voir Libanios, p. 694 Förster: oŰte n xaauùç oŰte ó xeipwv , et Julien ,Discours 190 d : tpibwva xai mnv xóunv ), mais, selon Eunape, pendant son séjour à la cour de Constantinople il a modifié cette austérité, adoptant des vêtement trop riches pour un philosophe (VII 4, 2 ) . Son caractère était aimable ( EůvoŨc) comme celui de Chrysanthe (XXIII 3 , 2 avec VII 2 , 1 ) , mais il aimait la polémique et était intarissable ( piłó νεικον et δυσεκβίαστον – XXIII 2 , 1 ) , ce qui fait qu'on le craignait comme adversaire dans les disputes philosophiques , tout au contraire du réservé et secret Priscus (VIII 1 , 8 ) . Ayant beaucoup d'amis, il ne les a pas oubliés au moment de sa gloire ( VII 3 , 14 et 3 , 16 et Libanios, Aristoph. 34 ) . Sur sa formation philosophique , la majorité des témoins mentionnent Aide sius comme son seul maître ( Simplicius , in Cat ., p. 1 , 13-16 Kalbfleisch ) et ce dernier n'était déjà plus assez connu au temps des commentateurs les plus tardifs pour qu'il soit superflu de préciser qu'il était élève de Jamblique ; mais dans une référence similaire d'Ammonius ( in Pr. Anal. 1.1 , 108 , CAG VI 6 , p . 31 , 16 Wallies ] ) on trouve , comme maître de Maxime , « Hiérios le disciple de Jambli que » au lieu d’Aidésius. Si Ammonius n'a pas confondu les deux noms (très rapprochés dans leur signification grecque ) on peut alors envisager l'hypothèse que ce Hiérios ( ~ H 121 ) ait été l'oncle d'Aristophane ( Libanios , Aristoph. 7 ) , et donc qu'à Corinthe, lieu d'enseignement de Hiérios (>-H 120 ) , Maxime ait aussi connu Jules Constance, le père de Julien , qui y a vécu entre 325 et 330 (à propos du rôle de Ménandre, marié avec la scur de Hiérios, dans la protection accordée au père de Julien contre Hélène , voir Libanios, Aristoph. 30 et 31 ) . Plus encore , nous connaissons l'amitié de Maxime pour Aristophane, qui date probablement de la période pendant laquelle tous deux ont été élèves de Hiérios, à l'époque où celui-ci a aussi enseigné à son neveu ( Libanios , Aristoph . 7 et 34 ). Ce fait pour rait expliquer accessoirement l'influence de Maxime sur Julien . La référence d'Ammonius suggère que Hiérios puisse être son maître en logique. Selon cette hypothèse, Maxime aurait commencé son instruction philosophique vers l'âge

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de 18 ans (ca 328) ; s'il a étudié à l'école de Corinthe, il a pu le faire pendant les sept années suivantes, au cours desquelles il a pu se lier d'amitié, pendant les deux premières années, avec le père de Julien ; il serait arrivé à Pergame pour suivre les leçons de son cousin Aidésius vers l'âge de 25 ans (ca 335 ) ; il y sera resté pendant les quinze années suivantes, jusqu'à ce qu'il ouvre sa propre école à Éphèse (ca 350) en approchant de la quarantaine. Sur la période de son séjour à Pergame nous sommes mieux renseignés: ses études ont dû porter – comme celles de Chrysanthe que décrit Eunape – princi palement sur Platon et Aristote , puis sur les autres courants philosophiques ( Itāv eloos plooopiac ) , en se poursuivant par la rhétorique, la religion, le pythago risme et néopythagorisme, le tout étant couronné par la “ divination ” , npóyuwols ( XXIII 1,5-2,2 ) , dans laquelle se sont spécialisés Maxime et Chrysanthe, ce qu'on peut déduire de la description qu'Eunape ( VII 2 , 2-12 ) nous a laissée d'Eusébe de Myndos ( -E 157) et de ce que l'on sait de Priscus par d'autres sources . La liste de traités que la Souda lui attribue relève de toutes les disci plines de sa formation : des traités philosophiques et logiques ( commentaires sur Aristote ), une æuvre de rhétorique ( Sur les antithèses insolubles), une autre de caractère pythagoricien (Sur les nombres) et une dernière sur la divination ( Sur les pronostics ) ; il semble que ces traités aient été écrits à l'instigation de Julien, comme le veut la Souda. La science divinatoire de Maxime était très respectée déjà à l'école de Perga me , si l'on en juge d'après l ' « affaire Philométor » racontée par Eunape, ( VI 9 , 3-8 ) . Mais contrairement à ce qu'on connaît de Sosipatra on ne peut pas être sûr de ses liens avec le mouvement théurgique ( VI 6,7-7,11 ) . Si la théurgie a atteint l’école de Pergame, cela concerne surtout Sosipatra, une protégée d'Aidé sius qui n'a jamais connu Jamblique et qui a été instruite dès son enfance par ses propres maîtres chaldéens, comme nous l'apprend Eunape ( ibid. ) . Le témoi gnage d’Eusébe de Myndos sur les rites accomplis par Maxime dans un 'Exam olov proche de Pergame ( VII 2, 7-10) est avec insistance associé par des auteurs modernes à la théurgie ; c'est oublier que des rites pyrophaniques et des anima tions de statues se retrouvent partout dans le monde, dans l'antiquité ou après. La dévotion de Maxime à Hécate ne signifie pas non plus qu'il s'est adonné à la magie : Eunape explique que, dans l ' « affaire Philométor » déjà mentionnée , Maxime utilise des sacrifices (oopia Outixń , p . 34 , 8 Giangrande) comme savoir supérieur capable de contrer les philtres d'amour de ce cousin de Sosipatra ( Vie d'Aidésius 9 , 6) . Il était expert dans l'interprétation des oracles, xenouoi ( VII 6 , 2-6 , Ammien Res gestae XXIX 1 , 42 ) , mais sur ce point Eunape est ambigu ; tantôt il fait l'éloge de la uavtixń de Maxime ( Ammien aussi lui rend hommage sur ce point), tantôt il estime que Maxime force et manipule les réponses des dieux à ses sacrifices pour obtenir la confirmation de ses propres volontés , ce qu'il lui reproche et oppose à l'attitude prudente de Chrysanthe ( VII 3 , 9 ; XXIII 2 , 1-59) . Maxime est aussi accusé par Ammien (Res gestae XXIII 5 , 11 et 14) , et par les chrétiens (Socrate, H. E. III 21 , 6, et Théodoret, H. E. III 22) d'avoir pratiqué une fausse divination et d'avoir ainsi trompé Julien : mais Libanios, dans sa Lettre 180 , considère que Julien ne

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recevait de personne des interprétations divinatoires, étant lui-même un maître dans ces arts. Pour en finir avec la supposée théurgie de Maxime, reste la lecture corrigée par Delfim Santos 3 , t. I , p. 129 , d'un passage d'Eunape concernant l'époque de sa réhabilitation à Constantinople, VII 6, 2 : « Maxime , défié de montrer ses capacités théurgiques , a choisi (au contraire) de démontrer sa maîtrise du logos (ses capacités philosophiques) » , ou selon une correction plau sible du texte (édočaçev corrigé en éðóçaçov , comme l'a autrefois proposé Huet) , « a vu reconnue par le public ( scil. de Constantinople ) sa maîtrise du logos » Julien a rejoint Maxime à Éphèse entre mai 351 et avril 352. Toutes les sources portent unanimement à son crédit la conversion de Julien à l'hellénisme , conversion que n'avaient pu obtenir ses collègues philosophes à Pergame quand Julien les avait fréquentés. La conversion a été opérée par la philosophie , comme le veut Libanios ( Disc. XII 33-34) qui nous résume ce que Maxime aurait enseigné à Julien dans Epitaph. 18 : des connaissances divines et démo niques , et des doctrines sur l'âme . 6 G. Fowden , « The Platonist Philosopher and his Circle in Late Antiquity » , Philosophia 7 , 1977 , p . 379, et 7 Id ., « The Pagan Holy Man in Late Antique Society » , JHS 102 , 1982 , p. 42, croit qu'une école à caractère permanent fut alors fondée à Éphèse , comme une nouvelle branche de l'école syro - pergaméenne de Jamblique - Aidésius, et une sæur aînée de l'école de Sardes fondée plus tard par Chrysanthe, ce dernier étant pour l'instant appelé à Éphèse par Maxime pour l'aider dans l'éducation du prince. Il faut se méfier de la mascarade décrite par Grégoire de Nazianze comme étant une prétendue « initiation mystérique » de Julien par Maxime à Éphèse (Discours I Contre Julien 54, 14 ; 55 ; 56). Maxime n'était titulaire d'aucun sacerdoce dans les mystères, sa relation à la théurgie est, comme on l'a vu, fort douteuse et la prétendue initiation de Julien par le philo sophe dans quelques « mystères » néoplatoniciens ou théurgiques n'est que le produit d'une lecture moderne trop naïve de Grégoire combinée avec l'interprétation littérale de l'expres sion tereotnoóuevos chez Julien dans son Contre Héracleios 235 b, et qui n'est autre qu'une métaphore très répandue de l'apprentissage de la philosophie - cf. à ce propos les analyses détaillées et fort convergentes de Delfim Santos 3, 1983 , ch . « Máximo uvota yoyós ? » , p. 103-115 , et 8 Carine Van Liefferinge, La Théurgie des Oracles Chaldaïques à Proclus, coll . « Kernos - Supplément » 9, Liège 1999, ch. « La théurgie selon l'empereur Julien » , p. 213-223 . Cette relation sera surveillée de près par les autorités chrétiennes, mais l'élève et le maître resteront en contact épistolaire. On conserve trois lettres de Julien à Maxime, qui sont à considérer comme authentiques , pace Bidez , comme l'ont montré 9 W.C. Wright, The Works of the Emperor Julian, t . III , London 1923 , p. LV , et Rabe 5 , p . CXVI, n . 2. Ces trois lettres, écrites respectivement en Gaule en 357/9 , à Naissos (Nisch ) en novembre 361 et à Constantinople en décembre 361 , portent les numéros 191 , 26 et 190 dans l'édition Bidez -Cumont , 16, 38 et 15 dans l'édition Hertlein , 59 , 8 et 12 dans l'édition Wright, et 11 , 14 et 15 dans Delfim Santos 3 , t. II – Corpus textual – Testimonia . La première, plutôt prudente, est probablement incomplète et devait accompagner un discours de Julien pour solliciter l'opinion du maître. Les deux autres lettres, écrites après sa prise du pouvoir et dans l'attente d'une réunion avec le destinataire, adoptent naturellement un style plus libre et plus sûr. Dans la lettre 26 Bidez, la plus

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importante, écrite pour rendre compte des tout premiers événements de son nouveau règne, Julien réaffirme ses dispositions de tolérance envers ses ennemis chrétiens, tout en reconnaissant que c'était Maxime qui l'avait poussé vers cette tolérance ; on y trouve une allusion à une importante mission en Grèce confiée à Maxime par Julien (415 a ) , l'envoi de l'hiérophante d'Éleusis dans la capitale des Parisiorum , où la présence de ce dernier aurait été décisive pour persuader le prince de lancer la rébellion de l'hiver 359-360 ( VII 3 , 7 ) . Cette mission a pu être transmise à Maxime par Priscus, qui a rendu visite à Julien à Lutèce (Epist. 13 Bidez) . Comme, après la lettre de Constantinople , les deux hommes seront restés ensemble jusqu'à la mort de l'Empereur, aucune autre lettre n'a donc été écrite . Il reste une autre lettre , perdue, adressée conjointement à Maxime et à Chry santhe pour les inviter à le rejoindre, écrite avant ou après la lettre de Constan tinople ( 190 Bidez ) , et qu'Eunape mentionne par deux fois ( Epist. 27 Bidez = VII 3 , 10 et XXIII 2 , 3 ) . Mais seul Maxime et, d'autre part, Priscus, accepteront de regagner la cour du prince. Les retrouvailles affectueuses du maître et de son disciple pendant une session du Sénat de Constantinople ont fait l'objet de deux descriptions, l'une négative par Ammien (Res gestae XXII 7 , 3-4 ) et l'autre positive par Libanios (Epitaph. 155-156 ) . Libanios sera aussi l'auteur de la dernière lettre adressée à Maxime que nous connaissons, envoyée d'Antioche à Constantinople au cours du printemps de 362 (Epist. 694 Förster, 80 Norman ). Eunape insiste sur l'inadéquation de Maxime à la vie de la cour ( VII 4, 1-4 ; Souda Y 175 ), ce qui s'explique par l'idéal néoplatonicien de réserve envers le pouvoir, et par l'oppo sition que le biographe veut instaurer entre la prudence et la réserve de Chrysanthe pendant la restauration de Julien et le rôle de premier plan obtenu par son compagnon Maxime, peut- être sans trop cacher la jalousie que cette notoriété elle- même causait aux autres membres de l'école . A ce malaise a pu contribuer aussi le népotisme de Maxime, qui peut être illustré par l’office obtenu pour son frère de rédacteur des documents officiels grecs de l'Empereur ( XVIII 2 ). Durant son séjour à la cour , Maxime a pris part à des discussions philo sophiques et a assisté à des discours de Julien comme celui de sa réponse à Héracleios ( H 46 ) , dans laquelle son influence est reconnaissable , et où il est expressément remercié . Il a rédigé des commentaires à Aristote , dédiés à Julien selon la Souda , et son Commentaire aux Premiers Analytiques a provoqué la réponse polémique de Thémistius, En réponse à Maxime, que Badawi a publiée dans sa version arabe . Julien a favorisé l'opinion de son maître dans sa propre contribution à la question de la perfection des deuxième et troisième figures syllogistiques ( Ammoniis , in Pr. Anal ., p. 31 , 16 Wallies ). En outre , on sait que Maxime a protégé la prêtresse Théodora accusée par Séleucus de favoriser ou de vivre avec un esclave chrétien ( Julien , Epist. 86 Bidez ) ; et qu'il a obtenu des postes pour ses élèves , comme le grand -prêtre Théodoros (Epist. 89 a et b Bidez ) ; Libanios nous renseigne également sur les protections dispensées par Maxime dans Aristoph. 34 ; et Eunape avait déjà laissé entendre que les pétitions le suivaient à son départ pour Constantinople ( VII 3 , 14 -4,1). 10 Polymnia Athanassiadi- Fowden, Julian and Hellenism , An Intellectual Biography, Oxford 1981 , p . 36 , trouve l'attitude de Maxime à la cour plutôt hiératique qu'arrogante.

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11 Constance Head, « Women in the Life and Writings of the Emperor Julian » , Byzantina 11 , 1982 , p . 19 , assure que la femme de Maxime eut aussi une influence appréciable sur l'Empereur, mais nous n'avons aucune documentation probante . Eunape et Libanios sont d'accord sur le fait que Maxime s'est beaucoup enrichi pendant le règne de Julien ( VII 4 , 2 et Epitaph. 287 ) . Zosime ( N.H. IV 2 , 2 ) est seul à mentionner que Maxime avait provoqué la chute en disgrâce de Valentinien , mais l'épisode est controversé et se serait passé en Gaule , donc loin de Maxime ( cf. Socrate , H. E. IV 1 , Sozomène , H. E. VI 6 , 2-6 , et Théodoret, H. E. III 12 ) . Somme toute, l'influence de Maxime sur Julien , selon ce dernier et contrai rement à l'opinion de ses détracteurs , s'est exercée en faveur de la tolérance et contre le radicalisme d'un jeune homme tout récemment converti, en le poussant vers la recherche de la vertu et de la modération ( Contre Héracleios 235 b) . Le philosophe ne s'est plus éloigné de son impérial élève , et Ammien rapporte que Maxime et Priscus furent les derniers à assister l’Empereur quand celui -ci , par suite d'une blessure au combat, perdit la vie sous une tente au cours de la tragi que expédition militaire contre la Perse (Res gestae XXV 3 , 23 ) . Les persécutions : si Eunape remarque que Maxime est resté hors de portée de ses ennemis pendant le court règne de Jovien et fut honoré par le nouvel Empe reur ( VII 4, 10) , en tout cas ne s'habillant plus comme un philosophe ( Socrate , H. E. III 24) , il devra faire face par la suite à trois persécutions, séparées par deux restaurations de sa situation personnelle et professionnelle. La première eut lieu au printemps de 364 à Constantinople ; les sources sont Zosime, N.H. IV 1 , 1 et 2 , 1-2 , et Ammien , Res gestae XXVI 4 , 4. Le motif en fut la maladie soudaine des deux frères devenus nouveaux Augustes , Valentinien et Valens , et l'initiative a appartenu au premier. Les accusations de trahison et peut -être de magie ( clandestinis praestigiis selon Ammien ) contre la vie des empereurs ont été abandonnées à cause de leur inconsistance et grâce à l'action de Saloustios selon Zosime . Mais la plèbe chrétienne ne cessa de chercher un bouc émissaire pour se venger du gouvernement de Julien , comme le remarque Zosime , H.N. IV 2 , 1. Et donc le deuxième assaut va se dérouler aussi à Constantinople en 365-366, sous Valens . Les sources sont Eunape , VII 4,11-6 , 1 , Libanios , Epitaph. 287 et Thémistius , Or. 7 , 99d - 100 a . Maxime est arrêté avec Priscus , accusé de malversations , mais son compagnon est libéré peu après . A Maxime on impose une amende , à cause de son enrichissement sous Julien . Il est envoyé en Asie , apparemment pour recueillir l'argent, mais comme le montant était bien au -delà de ses possibilités il est torturé et prépare son suicide , mais seule sa femme l'accomplira . Cléarque ( PLRE I : 1 ) , proconsul d'Asie , qui l'a sauvé des tortures des soldats et a restauré personnellement sa fortune et sa santé , tout en punissant les tortionnaires, exige et obtient la restitution de tout ce qu'on lui avait volé. La protection qu'il a dispensée au philosophe était si remarquable qu'Eunape dit de lui qu'il a été un second Julien pour Maxime. Celui - ci reprend son enseignement en Asie , peut - être à Éphèse , ( et c'est vers cette période qu'Eunape le rencontre , alors qu'il était lui-même encore tout jeune , évoquant ce rendez - vous dans le fameux portrait de VII 1 , 1-32 ). Quand il revint plus tard à

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Constantinople , totalement réhabilité , pour y poursuivre son enseignement philosophique , il raviva rapidement la jalousie de ses ennemis . Et c'est alors que survint la troisième persécution , dans l'hiver 371-372 , comme le rapportent Eunape VII 6, 3-7 , Ammien , Res gestae XXIX 1 , 42 , et Zosime, N.H. IV 15 , 1 3. Les procès contre les intellectuels , philosophes , courtisans, astrologues et magiciens se sont déroulés à Constantinople et poursuivis à Antioche où Valens séjournait, suscités apparemment par l'affaire de la « conjuration de Théodore » , dans laquelle un groupe de courtisans ambitieux a sollicité la compétence de Maxime en mantique pour interpréter les résultats d'une consultation divinatoire au sujet de l'identité du prochain Empereur. Après un non lieu , Maxime est envoyé à Éphèse pour être soustrait aux attentions du public , sous les ordres de Festus, le nouveau proconsul d’Asie ( appelé Festinus par Ammien, Res gestae XXIX 2 , 22 ) qui fit couler beaucoup de sang chez les autres prisonniers avant de décapiter lui - même Maxime (Souda 0 279) . On sait que d'autres condamnés ont été brûlés, morts ( ibid. ) ou vifs ( le célébre Simonidès , Ammien , Res gestae XXIX 1 , 38 , et Diogène , mentionné par Ammien , Res gestae XXIX 1 , 44 ), un destin également partagé par beaucoup de livres et de traités (ibid .XXIX 1,41 ). Ce sont les tout premiers bûchers allumés par des autorités chrétiennes contre des dissidents . L'école platonicienne d'Éphèse a probablement disparu à l'occasion de ces persécutions , car on n'a pas de témoignages sur sa postérité . La vengeance posthume de Maxime sur Festus fait aussi l'objet de la reconstitution d'Eunape en VII 6 , 9-13 . Disciples. Maxime fut le maître de l'empereur Julien ( » I 46 ) , ainsi que du grand -prêtre Théodoros, du philosophe chrétien Sisinnius , évêque novatianiste de Constantinople et logicien renommé (Socrate , H. E. V 21 et VI 22 ) , et peut être d'Eumenius (

E 119) et de Pharianus (Julien, Epist. 8 Bidez ).

(Euvres. ( 1 ) Commentaire sur les Catégories d'Aristote . Le seul fragment sûr de Maxime est celui présenté par Simplicius , dans in Phys. I , p. 592 , 7 Diels ) , sur l'idée de « place » ( Tónoc ). Ce commentaire est également signalé par Simpli cius comme une des sources qu'il a consultées pour la rédaction de son propre commentaire sur les Catégories ( CAG VIII , p . 1 , 16-17 Kalbfleisch ). Si, dans le passage de l'in Phys . , Simplicius trouve Maxime novateur, dans la mention qu'il lui dédie dans son in Categ. il le trouve trop dépendant d'Alexandre d’Aphrodise ( > A 112 ) . ( 2) Commentaire sur les Premiers Analytiques d'Aristote. Ammonius (p. 31 , 16 Wallies ) mentionne la doctrine de Maxime au sujet des figures syllogistiques, qui attestent un commentaire aux Premiers Analytiques. Thémistius y a « répondu » dans le Traité de Thémistius en réponse à Maxime au sujet de la réduction de la deuxième et de la troisième figures à la première , connu par la

version arabe éditée par 12 ' A. Badawi , Arisțū ‘inda l- ' Arab (Aristote chez les Arabes ) , Le Caire 1947 , p . 309-325 , trad . française dans 13 ' A. Badawi , La transmission de la philosophie grecque au monde arabe, coll . « Études de

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philosophie médiévale » 56, 2e édit . , Paris 1987 , p . 180-194 ; la réponse de Thémistius est connue d'Ammonius qui fait mention de son opinion , contraire à celle de Maxime . La matière proprement logique a été étudiée par 14 T. Lee, Die griechische Tradition der aristotelischen Syllogistik in der Spätantike. Eine Untersuchung über die Kommentare zu den Analytica priora von Alexander Aphrodisiensis, Ammonius und Philoponus, coll . « Hypomnemata » 79 , Göttin gen 1984 , p. 127 sqq . Celui -ci , curieusement, trouve les positions de Maxime fort originales et influentes sur les commentateurs postérieurs , s'éloignant beau coup d'Alexandre d’Aphrodise duquel , selon Simplicius , il s'était trop rapproché dans son Commentaire aux Catégories. Plus générale est la référence d'al Nadim , Kitāb al-Fihrist 7 , 1 , p . 614 Dodge , qui l'inclut dans une liste de commentateurs des æuvres d'Aristote « sur la logique et d'autres disciplines philosophiques » , en confirmant lui aussi au moins le commentaire de Maxime aux Pr. Anal. , s'accordant en cela avec la Souda M 174. L'intérêt tout particulier que Maxime a accordé à la logique est attesté par Socrate , H. E. V 21 et VI 22 . Par la Souda (s. v . Ioulianos) on sait que l'arbitrage de Julien , auquel Ammonius fait allusion , s'est matérialisé dans un traité Sur les trois figures du syllogisme. ( 3 ) Nepi árútwv å tibéoewy ( « Sur les antithèses insolubles » ) , attribué à Maxime par la Souda M 174 , est une æuvre de rhétorique conservée ( ed . princeps par Étienne 1554 , dernière édition par 15 H. Rabe « Prolegomenon Sylloge», dans Rhetores Graeci XIV , Leipzig 1931 , p. 427-447 ; voir ses impor tantes remarques dans « De Maximi libello llepì årútwv åvtidłoewV » , p . CXV CXXVI ). On a douté de son attribution à Maxime , surtout parce que la Souda confond notre Maxime avec Maxime de Byzance , à qui pourraient être attri buées quelques cuvres de la liste présentée à cet endroit, à l'exception évidem ment des commentaires aristotéliciens lus et préservés par les écoles néoplato niciennes. Mais Rabe opte résolument pour une attribution de ce traité à Maxime d'Éphèse, le sujet de l'æuvre étant plutôt sophistique ; la mention tà 'Exataſa à la p. 589, 13 Rabe aide à renforcer cette authenticité . (4 ) Tlepi xarapxõv (« Sur les pronostics » ) . Ce manuel d'astrologie est également conservé ( ed. princeps par Fabricius 1717 , dernière édition par 16 A. Ludwich , Maximi et Ammonis carminum de actionum auspiciis reliquiae, Leipzig 1877 , p . 1-50 ) . On connaît aussi de ce populaire manuel deux paraphrases byzantines ( ed. princeps par Dübner 1850 , dernière éd . par 17 Paola Radici Colace , Le parafrasi bizantine del llepi xatapyWv di Massimo, Introd ., testo crit. , trad. e note di commento ling .- filol. a cura di P.R.C. , coll . « Lett. e Civiltà biz ,» 4, Messina 1988 , p. 60-131 ). Mme Colace appuie sur des arguments philologiques son attribution au maître de Julien dans 18 « Giuliano, Selene e l'autore del ſlepà xarapxõv », paru dans B. Gentili ( édit . ) , Giuliano Imperatore. Atti del Convegno della S.I.S.A.C. ( Messina 3 aprile 1984) , coll . « Soc. Ital . per lo studio dell'antichità . Atti di Convegni » 3 , Urbino 1986, p. 132 .

On peutsupposer que l'ouvrage contient des éléments de la pensée astrologique de Maxime, nettement sélénocentrique, en parallèle avec la théologie solaire de son disciple . A signaler quelques contributions de critique textuelle : 19 P. Radici Colace , « Maxim . de action. auspiciis , 280-282 » , MCr 18 , 1983 , p . 271

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282 ; 20 Ead ., « Per una nuova edizione del lepi xarapxõv di Massimo» , BollClass 5 , 1984 , p. 138-149 , et 6, 1985 , p. 78-95 ; 21 N. Hopkinson , « Coniec tanea in Maximi Περί καταρχών et Manethonis 'Αποτελεσματικών libros » , Eos 73 , 1985 , p. 65-68 .. ( 5 ) Nepì đplouõv ( « Sur les nombres » ) . Traité perdu . Peut-être peut -on trouver un écho de son contenu dans les lignes consacrées par Julien ( Epist. 180 Bidez d'authenticité non reconnue , à tort, par Bidez ) à la perfection du nombre cent (éxatóv ) , lorsqu'il évoque l'épithète d'Apollon /Hélios exatos ; la forme féminine éxárn s'utilisait pour sa seur Artémis, et l'Hymne Orphique II invo que celle -ci comme Mpodupa a , une allusion à la Lune comme préparant le Soleil , tout comme Proclus, Hymne VI , invoque aussi ' Exárn npo úpale, l'Hécate des avant-portes. On se rappelle que Julien a utilisé cette même expression pour caractériser sa conversion par Maxime, en écrivant qu'il lui a ouvert les avant -portes de la philosophie (Contre Héracleios 235 ) . La Souda ( M 173 ) signale encore d'autres écrits dédiés à Julien (ärra tivà προς τον αυτόν Ιουλιανόν ). ). FILIPE DELFIM SANTOS. 64 MAXIME D'ÉPIRE OU DE BYZANCE PLREI: 22

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“ Philosophe", présenté par la Souda, s.v. Máxquoc, M 174 , t . III , p . 322 , 1-4 Adler, comme maître de l'empereur Julien , par suite d'une confusion manifeste avec Maxime d'Éphèse (-* M 63). Il est possible que l'un ou l'autre des traités que lui attribue la Souda soit de lui , plutôt que de son homonyme: Tepi árútov αντιθέσεων , Περί καταρχών , Περί αριθμών , υπόμνημα εις 'Αριστοτέλης , και άλλα τινά προς τον αυτόν Ιουλιανόν. Ces différents titres sont examines par Filipe Delfim Santos dans la notice consacrée à Maxime d'Éphèse. Pour distinguer les deux homonymes, l'historien Socrate, Hist. eccl. III 1 , 16 , le désigne comme originaire de Byzance et père d'un certain Euclide ( ó Βυζάντιος ο Ευκλε δου πατήρ). Dans le corpus des lettres de Tempereur Julien , deux lettres « à Maxime le philosophe » ( 190-191), considérées comme apocryphes et parfois attribuées à un sophiste antérieur à Julien d'une génération (Cumont a pensé à Julien de Cappadoce ), sont suivies d'une lettre à « Euclide le philosophe » [ PE 81 ] ( 192 = lettre 62 dans l'édition de W.C. Wright ) . Ce Maxime ne serait pas le maître de Julien , mais peut-être plutôt son homonyme, le père d'Euclide . Voir Franz Cumont , Sur l'authenticité de quelques lettres de Julien , coll . « Recueil de travaux publiés par la Faculté de philosophie et lettres >> 3 , Gand 1889 , p . 26 n . 5. Ces lettres sont éditées dans Imp ( eratori)s Caesaris Flavii Claudii Iuliani Epistulae, Leges, Poematia, Fragmenta Varia collegerunt recensuerunt I. Bidez et F. Cumont, « Nouvelle Collection de Textes et Documents » , Paris 1922 , p . 258-262.

L'attribution des lettres du Pseudo-Julien à Julien de Césarée (en Cappadoce ) qu'envisage Cumont a pour seul mérite de proposer un homonyme plus ou moins contemporain . Mais l'auteur se présente comme un disciple de Jamblique, détail qui n'aurait pas échappé à Eunape, et ses lettres semblent avoir été rédigées en Orient ( l'une d'entre elles à Damas ) avant la mort de Jamblique. Or Julien de Cappadoce était à l'époque depuis longtemps bien installé

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MAXIME DE NICÉE

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à Athènes où il enseigna au jeune Prohérésius, mort, selon Eunape, à près de 90 ans vers 369 ... Seeck le rapproche d'un homonyme recommandé par Symmaque, Epist. II 29 ( >* M 60 ), et du destinataire de la lettre 9 de Basile de Césarée, aussi bien que d'un chrétien , correspondant d'Athanase ( PG 26 , col . 1085 ) . Mais il s'agit fort probablement dans les deux derniers passages de Maxime Héron (

M 70 ) . La

même identification a été reprise par la PLRE ( t . I , s.v. « Maximus » 22 ) et par L. Brisson, art. « Maximos aus Lykien » , NP VII , 1999 , col . 1075 . C'est apparemment à tort que W.C. Wright fait de Maxime un correspondant de Libanius . Voir O. Seeck , Die Briefe des Libanius, Leipzig 1906 , réimpr. Hildesheim 1966, Maximus nº 11 , p. 210 .

Je n'ai pas pu lire J. Vanderspoel , « The fourth century philosopher Maximus of Byzantium » , AHB 1 , 1987 , p . 71-74 . RICHARD GOULET.

65 MAXIME DE GORTYNE (T. FLAVIUS -)

II

Ce philosophe mourut à Carthage, probablement au 11 ° siècle de notre ère , à l'âge de quarante - huit ans (CIL VIII Suppl. 1 , 12924 ) . Vu la banalité des noms , on ne peut ni exclure ni affirmer qu'il puisse être identique à son homonyme honoré à Césarée de Palestine ( > M 73 ) , dont la patrie n'est pas connue. BERNADETTE PUECH.

66 MAXIME DE LYCIE RE 39 PLREI : 10

MIV

Né en Lycie ( Libanius , Ep. 1384 ) , ce philosophe sans doute d'obédience néoplatonicienne a été l'enseignant en philosophie de Sévère de Lycie (PLRE 1 :9 ) , ami de Libanius (PL 521 (Ep. 309 , 659 , 665 , 1383 , 1384 , 1451 ) , mais il n'est pas assuré que ce soit à Athènes , et moins encore que Libanios ait lui même fait partie de ses élèves , comme le suppose O. Seeck , Die Briefe des Libanius, Leipzig 1906 , réimpr. Hildesheim 1966 , Maximus n ° 9 , p . 208. Il était très apprécié de celui -ci et entretenait avec lui des relations d'amitié . Deux lettres de Libanius (Ep. 665 , de 361 , et 1451 , de 363 ) montrent qu'il est mort avant 361 . PIERRE MARAVAL.

D UI ? 67 MAXIME DE NICÉE RESuppl. VIII : 134 PLREI : 9 Mentionné par Proclus , in Remp. II , p . 96 , 12 Kroll , comme commentateur platonicien du mythe d’Er dans la République de Platon . Il est nommé , parmi les chefs de file des platoniciens ( Tūv MatwvlxWv oi xopupalol), après Numé nius ( ** N 66 ), Albinus ( > A 78 ) , Gaïus ( G2 ), et avant Harpocration ( > * H 9 ) , Euclide ( * E 81 B ) et Porphyre. Comme l'ordre de présentation ne semble pas strictement chronologique , il est difficile de tirer de Proclus une datation, RICHARD GOULET.

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MAXIME DE TYANE

68 MAXIME DE TYANE

M 68 ép. imp.

Ce philosophe ne paraît connu que par l'autel élevé à Athènes ( IG II 3820 ), qui porte son nom au datif. BERNADETTE PUECH .

69 MAXIME DE TYR RE 37

II

Orateur et philosophe platonicien, auteur de quarante -et -une conférences ( AlaNÉEelg ). Études d'ensemble . 1 H. Kämmel , « Maximos der Tyrier. Ein Beitrag zur Geschichte der Pädagogik » , JKPh 104 , 1871 , p . 1-17 ; 2 R. Rohdich , De Maximo Tyrio theologo, Breslau 1879 ; 3 H. Hobein , De Maximo Tyrio questiones philologae selectae, Thèse , Göttingen 1895 , 100 p . ; 4 K. Dürr, Sprachliche Untersuchungen zu den Dialexeis des Maximus von Tyrus, coll . « Philologus » Suppl . 8 , Leipzig 1899, 156 p.; 5 K. Meiser, Studien zu Maximos Tyrios, München 1909 , 67 p . ; 6 H. Mutschmann , « Das erste Auftreten des Maximus von Tyrus in Rom > , Sokrates 5 , 1917 , p . 185-197 ; 7 W. Schmid et 0. Stählin , Geschichte der griechischen Litteratur, t. VII 2 , 2 , München 1924, p. 767-769 ; 8 W. Kroll et H. Hobein , art. « Maximos von Tyros » , RE XIV 2 , 1930 , col . 2555-2562 ; 9 H. Dörrie, art. « Maximus » II 1 , KP 3 , col . 1115 ; 10 J. Puiggali , Étude sur les Dialexeis de Maxime de Tyr, conférencier plato nicien du Irème siècle, Thèse, Univ . de Paris IV ( 10/06/1978 ), Lille 1983 , vol . I ( seul paru ), 585 -XXXIV p. ; 11 G. L. Koniaris, « On Maximus of Tyre : Zetemata ( I ) » , CA 1 , 1982 , p . 87-121 ; 12 Id ., « On Maximus of Tyre : Zetemata ( II ) » , CA 2 , 1983 , p. 212-250 ; 13 M. Szarmach , Maximos von Tyros. Eine literarische Monographie, Toruń 1985 , 133 p . ; 14 M.B. Trapp , Studies in Maximus of Tyre : A second century philosophical orator and his Nachleben , AD 200-1850, Thèse, Oxford Univ . 1986 , 566 p. , résumé dans DA 51 , 1990 , p. 156 ; 15 Id ., « Philo sophical sermons : the Dialexeis ’ of Maximus of Tyre » , ANRW II 34, 3 , 1997, p. 1945-1976 ; 16 Id . ( trad. ), Maximus of Tyre. The Philosophical Orations, Oxford 1997 , p. XI - XCIV ; 17 Id ., s.v. « Maximos von Tyros » 1 , NP VII , 1999, col. 1074 sq . Sources biographiques anciennes ( 1 ) La Souda , s.v. Máxquoc , M 173 , t. III , p. 321 , 35-37 Adler : Máxquoc, Τύριος , φιλόσοφος , διέτριψε δε εν Ρώμη επί Κομόδου. Περί “ Ομήρου και τίς η παρ ' αυτό αρχαία φιλοσοφία Eί καλώς Σωκράτης ουκ απελογήσατο xai ärra tivà giảóooga (ntuata (« Maxime de Tyr, philosophe . Il vécut à Rome sous Commode . [ Il écrivit] Sur Homère et sur la philosophie antique qu'on trouve chez lui , Socrate a- t- il bien fait de ne pas se défendre ? et d'autres problèmes philosophiques » ) . Le renseignement dérive de l’’Ovouatoróyos d'Hesychius [ H 113 ] (vre siècle) ; cf. 18 H. Mutschmann , « Die Über lieferungsgeschichte des Maximus Tyrius » , RHM 68 , 1913 , p. 560-583, notam ment p . 562 sq . , et 19 A. Adler (édit . ) , Suidae lexicon , 4 vol . , Stuttgart 1928 1938 ; réimpr. 1971 , t . I , p . XXI .

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( 2 ) Dans le Codex Parisinus graecus 1962 ( = R ) , l'archétype des confé rences , on les décrit trois fois ( fol. 1 ', 18 et 146 ') comme voici : Mačiuov Τυρίου Πλατωνικού φιλοσόφου των εν Ρώμη διαλέξεων της πρώτης ÉTLOnuías ( cf. infra). ( 3 ) Eusébe de Césarée ( » E 156) situe le floruit de Maxime dans l'olympiade 232 , c'est - à- dire , entre 149 et 152. La traduction latine de la Chronique par Jérôme ( Die Chronik des Hieronymos ( = Eusebios Werke VII ) , 3e éd . , Berlin 1984 , p. 203 Helm) associe Maxime à Arrien ( > A 425 ) , qui avait largement dépassé son acmè dans cette olympiade. Dans la traduction arménienne (Eusebii Chronicorum Canonum quae supersunt, t. II , Berlin 1866 , p . 168 Schoene ), les deux philosophes deviennent des maîtres de Marc Aurèle ( M + M 39) . Comme l'a indiqué 20 T. Gataker (édit. ) , Marci Antonini imperatoris De rebus suis... libri XII, Cantabrigiae 1652 , « Annotationes » , p. 26 (ad I 15 ), une telle datation est le fruit d'une identification erronée de notre auteur avec le philosophe stoïcien Claudius Maximus ( ** M 71 ) , maître de Marc Aurèle et proconsul d'Afrique devant qui Apulée de Madaure ( = A 294) a prononcé son Apologie en 158 . ( 4 ) Georges le Syncelle , Ecloga chronographica, p . 429 Mosshammer (= p . 662 sq . Dindorf) tient d'Eusébe sa confusion avec Claudius Maximus. ( 5 ) Théodore Métochite, Miscellanea philosophica et historica 17 , p . 128

Müller-Kiessling = p. 86, 5-9 Hult , associe Maxime à Porphyre parce qu'ils étaient Phéniciens tous les deux , plus précisément originaires de Tyr. Sur ce témoignage , cf. 21 W. Crönert, c.r. de Hobein 118 , dans BPhW 33 , 1913 , col . 644-648, notamment col . 646 ; Puiggali 10, p. 10 sq. , et Trapp 16, p. LXIV . Crönert 21 , col . 646 , ajoute à ces témoignages un passage des Anecdota graeca e codd. manuscriptis bibliothecarum Oxoniensium , t. III , Oxford 1836 , réimpr. Amsterdam 1963 , p . 196 Cramer , où l'on caractérise un certain « Maxime le philosophe » comme énuopioowv xai uehalvóuevoç ( « hirsute et noiraud » ), mais, comme le signale Puiggali 10 , p. 11 n . 1 , on ne peut pas être sûr que ce soit à Maxime de Tyr qu'il fasse référence. Biographie Localisation : La Souda , le Codex Parisinus et Théodore Métochite confirment son origine, ou du moins le lieu où il a obtenu sa renommée : Tyr ( aujourd'hui Sour ), dans la province de Syrie . Il a résidé à Rome du temps de l'empereur Commode, c'est - à - dire à une certaine période entre 180 et 192 , qui est sûrement la période que l'on identifie dans le Parisinus comme son « premier séjour (npóth ÉTidnuía) » , peut -être le seul dont il ait bénéficié, à Rome. C'est là qu'il développa ses enseignements sur des problèmes philosophiques (piaó ooga (nthuara ), centrés sur les deux pôles sélectionnés par l'auteur de l'article de la Souda : d'un côté , Homère , de l'autre , Socrate , dont il reconstitue le portrait à partir de Platon, mais aussi d'autres héritiers de la pensée socratique ; cf. Trapp 17 , p. 1074 sq . Il n'est pas prouvé que certaines des conférences conservées aient été prononcées hors de Rome . Les expressions κηρύττομαι εν Πανέλλησι ( 16 ) et ομιλείν αξιόχρεως θεάτρους ' Exnvixolç (1 10) ont mené plusieurs savants, dont Mutschmann 6, p. 191, à penser que cette conférence - là (ainsi que d'autres, peut-être ) fut prononcée en Grèce, notamment à

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Athènes. Au contraire, « tous les Grecs » est, comme le signale Puiggali 10, p. 50 , une réfé rence à « tous les gens cultivés, Grecs, Romains ou Orientaux hellénisés qui sont capables de comprendre et d'apprécier les diaréEELG de notre auteur » . Datation : Il prononce ses conférences à Rome du temps de l'empereur Commode, c'est-à-dire entre mai 180 et décembre 192 . D'après 22 K. Peitler, Die 11. Rede des Maximos von Tyros und die voûç Theologie des Albinos, Diplomarbeit Magist . Philos . , Graz 1989, p. 2 , cette datation est confirmée par l'insistance mise dans les conférences sur l'opposition entre la nature et la loi , et surtout sur le « discours véritable » (ånnons Nóyos ; cf. X 1 , XI 10 , XV 6, XVI 3 , XVII 3 , XXI 1 , XXXIII 1 ) , qui , à son avis , dérivent concrètement du Discours véritable de Celse ( C 70 ) , daté en 178 par 23 H. U. Rosenbaum , « Zur Datierung von Celsus ' Alethes logos» , VChr 26, 1972 , p . 102-111 , et vers 177-180 par 24 J. Whittaker , art. « Celsus » , C 70, DPLA II , 1994 , p . 255 sq . À en juger par ce qu'il déclare dans la première pièce de la collection, qui sert d'introduction à l'ensemble des conférences ( cf. Hobein 33 et Koniaris 97 , p. 26 32 ; contra Puiggali 10 , p . 49 n . 2) , à ce moment de sa vie il a déjà reçu passablement d'éloges et il jouit d'un grand renom ( I 6) , ce qui permet de penser qu'il ne visite Rome qu'après avoir récolté des succès pendant des années dans les provinces de l'Empire , vraisemblablement dans la partie orientale ; cf. Hobein 3 , p. 7 et n . 3 , et 25 J. Dillon , The Middle Platonists . A Study of Platonism . 80 B.C. to A.D. 220 , 2e éd . , London 1996, p. 399. Cela pourrait être confirmé par certaines informations que lui-même fournit sur ses voyages, si on devait y voir des propos autobiographiques et non pas rhétoriques ( cf. Hobein 3 , p. 7 n . 2 , et Dürr 4, p. 3 sq .) : il affirme avoir contemplé la pierre cubique sacrée des Arabes ( II 4 ) et les fleuves Marsyas et Méandre en Phrygie ( II 7 ) . Néan moins, ces informations ne permettent pas de préciser sa date de naissance ni son floruit, qui eurent probablement lieu dans la première et la seconde moitié du II ° siècle, respectivement. Essais d'identification (cf. Dürr 4, p . 4 sq .; Trapp 16, p . XII ) : ( 1 ) Avec le stoïcien Claudius Maximus ; cf. supra. ( 2 ) Avec Cassius Maximus , à qui Artémidore de Daldis ( > A 429) dédia les trois premiers livres de son Traité sur l'interprétation des rêves (’Ovelpo xoltixá ) ; cf. 26 0. Hirschfeld , « Vorrede » à S. Krause ( trad . ), Artemidor, Wien 1881 , p . VIII sqq. ; aussi PIR ? II 120 ( C 509 ) . L'identification est très probable : cf. 27 R. A. Pack (édit . ) , Artemidori Daldiani Onirocriticorum Libri V, coll . BT, Leipzig 1963 , p . XXV sq. , et Puiggali 10 , p . 11 sq . , avec une liste de ses partisans à la p. 12 n . 3 ; pour Trapp 119 , p. LVIII , elle manque d'une base suffisamment solide . Artémidore affirme en II 70 que Cassius Maximus est « le plus sage des hommes » et informe qu'il est d'origine phénicienne ; à en juger par le nom , le droit de citoyenneté romaine a dû lui être accordé par Avidius Maximus , gouverneur de Syrie en 166-172 . Cf. aussi la préface du livre II , où l'auteur demande au destinataire de son æuvre de ne pas la comparer à sa propre éloquence (Móyou ), au moyen d'une comparaison d'inspiration platonicienne spécialement chère à Maxime ( cf. e . g . V 8 , XI 1 , XIII 2, XL 4) . La proposition a

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l'avantage d'associer Maxime à Éphèse , centre culturel où Artémidore a travaillé ; cf. Onirocriticon III 66 , et Trapp 16 , p . XII . ( 3) Avec le « Sidonien » mentionné par Lucien dans la Vie de Démonax ( § 14) , expert en toutes sortes de philosophies, qui connaissait un grand succès à Athènes à cette époque; cf. 28 F. Fritzsche (édit . ) , Lucian , 3 vol . , Rostock 1860 1882 , t . II 1 , p. 198 , dont la suggestion a été développée par 29 K. Funk Unter suchungen über die Lukians Vita Demonactis , coll . « Philologus » , Suppl . 10 , Leipzig 1907, p . 180 et 686 ; aussi PIR? II 120 ( C 509 ) . Sidon ( aujourd'hui Saïda) était, comme Tyr, une cité phénicienne de la province de Syrie ; elle pourrait donc être aussi la patrie de Maxime ( cf. supra ). En outre , la parfaite maîtrise des doctrines des différentes écoles que Lucien attribue au Sidonien s'accorde avec les larges intérêts philosophiques de Maxime ; cf. I 10 , où celui - ci entreprend un éloge de sa compétence philosophique et cite comme ses précur seurs Pythagore, Socrate , Xénophon et Diogène le Cynique . 30 E. Rohde , Das griechische Roman , 4e éd . , Hildesheim 1960, p. 346 n . 4 , et Puiggali 10 , p . 12 sq . , s'opposent à cette identification . Trapp 119, p. LVIII n . 60 , et Id . 16 , p. XII , rappelle aussi un certain « Titus) Fl(avius ) Maximus , philosophe » ( 2 + M 73 ) , honoré sur une stèle de la cité de Césarée maritime ; cf. 31 B. Burrell, « Two Inscribed Columns from Caesarea Maritima » , ZPE 99 , 1993 , p . 287 295 , notamment p. 291 sq . Néanmoins , il est plus probable qu'il s'agisse du philosophe homonyme originaire de Gortyne en Crète ( *** M 65 ) , peut -être , ou du procurateur d'Urbisaglia en Italie (RE Flavius 132 ; PIR2 F 318 ) . Certaines identifications modernes, clairement erronées , apparaissent chez 32 I. Fabricius, Bibliotheca Graeca sive notitia scriptorum veterum Graecorum... Editio quarta curante G. Chr. Harles , t . V , Hamburgi 1796, réimpr. Hildesheim 1966, p. 516. (Euvres. On conserve un recueil de quarante -et - une conférences. D'après l'index qui les précède dans le Codex Parisinus Gr. 1962 ( fol. 1 '), elles portent les titres suivants : N.B .: Ci -dessous trois numérotations différentes sont offertes : la première est celle en onciales du Parisinus, acceptée par Hobein 118, Trapp 119 et Koniaris 120, qui ne numérote pas les conférences XXX- XXXV ( cf. infra ) ; la deuxième , celle qui reproduit l'ordre des conférences du Codex Parisinus Gr. 1962 ( R ) , acceptée par Davisius 114 et Duebner 117 ; et la troisième, celle du Codex Laurentianus Conventi Soppressi 4 ( 1 ) , acceptée par Paccius 127, Stephanus 108, Heinsius 109-110 et Davisius 113. ( 1 ) [= 7 R = 37 I ] " Oti npòç nãoаv ÚTÓDeolv ápuógetaL Ó toő pihooógov Nóyos, Que le discours du philosophe est adapté à tout sujet . (2) [= 8 R = 38 I ] Ei deoīç ayáruata idputéov , Faut- il élever des statues pour les dieux ? ( 3 ) [ = 9 R = 39 I ] Ei xaros étoinoev Ewrpárns un ånohoynoáuevoç, Socrate a-t-il bien fait de ne pas se défendre ? (4) [ = 10 R = 29 19 Τίνες άμεινον περί θεών διέλαβον ποιηταί , ή φιλό doqol , Lesquels ont eu les idées les plus justes sur les dieux , les poètes ou les philosophes ?

(5 ) ( = 11 R = 30 IJ El deſ EűxeoOai , Faut-il prier ? ( 6) [ = 12 R = 40 I] Tí éniorhun, Qu'est-ce que la science ?

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(7 ) [= 13 R = 41 1 ] Πότερα χαλεπώτερα νοσήματα τα του σώματος, ή τα tñs yuxñs, Quelles maladies sont les plus pénibles, celles du corps ou celles de l'âme ? ( 8 ) [= 14 R = 26 Ι ] Τί το δαιμόνιον Σωκράτους α ' , Qu'est-ce que le démon de Socrate ? Livre I. ( 9) [ = 15 R = 27 1) " Ετι περί του Σωκράτους δαιμονίου β ' , Derechef sur le démon de Socrate. Livre II . (10) [ = 16 R = 28 Ι ] Εί αι μαθήσεις αναμνήσεις , Les connaissances sont elles des réminiscences ? ( 11 ) [ = 17 R = 1 Ι ] Τίς ο θεός κατά Πλάτωνα , Qu'est Dieu selon Platon ? ( 12) [ = 18 R = 2 1] Εί τον αδικήσαντα ανταδικητέον , Faut -il rendre & l'injuste son injustice ? ( 13 ) [= 19 R = 3 1 ] Ει μαντικής ούσης , έστιν τι εφ ' ημίν , Si la divination existe, y a- t- il quelque chose qui dépend de nous ? ( 14) [= 20 R = 4 Ι] Τίσιν χωριστέον τον κόλακα του φίλου , Par quels critères faut- il séparer le flatteur de l'ami ? (15) [ = 21 R = 5 ] Τίς αμείνων βίος : ο πρακτικός , ή ο θεωρητικός , ότι ο πρακτικός, Quelle est la meilleure νie , la pratique ou la contemplative ? Que c'est la vie pratique. ( 16 ) [ = 22 R = 6 1] " Οτι ο θεωρητικός βίος αμείνων του πρακτικού , Que la vie contemplative est meilleure que la pratique. ( 17 ) [ = 23 R = 7 Ι ] Εί καλώς Πλάτων "Ομηρον της πολιτείας παρητή oato, Platon a - t- il bien fait de chasser Homère de l'État ? ( 18 ) [= 24 R = 8 Ι] Τίς ή Σωκράτους ερωτική α ' , Quel est l' art amoureux de Socrate ? Livre I. ( 19) [= 25 R = 9 1 ] Έτι περί έρωτος β ' , Derechef sur l'amour. Livre II .

( 20 ) [ = 26 R = 10 1] "Έτι περί της Σωκράτους ερωτικής γ ' , Derechef sur l'art amoureux de Socrate . Livre III. ( 21 ) [ = 27 R = 111 ] Έτι περί έρωτος δ ' , Derechef sur l'amour . Livre IV . ( 22 ) [ = 28 R = 12 Ι ] " Οτι πάσης της διά λόγων ευφροσύνης ή διά φιλοσόφων λόγων αμείνων , Que la joie tirée des discours philosophiques est meilleure que celle procurée par n'importe quel discours. ( 23) [ = 29 R = 13 1 ] Τίνες λυσιτελέστεροι πόλει : οι προπολεμούντες , ή οι γεωργούντες , " Οτι οι προπολεμούντες, Quels sont les citoyens les plus utiles à la cité, les soldats ou les agriculteurs ? Que ce sont les soldats. (24) [= 30 R = 14 1 ] " Ότι γεωργοί των προπολεμούντων λυσιτελέστεροι, Que les agriculteurs sont plus utiles que les soldats. ( 25 ) [= 31 R = 15 Ι ] " Οτι οι σύμφωνοι τοίς έργοις λόγοι άριστοι, Que les discours en harmonie avec les actions sont les meilleurs. ( 26) [= 32 R = 16 1 ] Ει έστιν καθ ' "Ομηρον αίρεσις , Existe - t -il une école de pensée propre à Homère ?

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( 27 ) [ = 33 R = 17 I ) Eỉ téxvn ń åpetń , La vertu est-elle un art ? ( 28 ) ( = 34 R = 18 I ) Nõç åv tiç äutog ein, Comment peut- on éviter le chagrin ? ( 29) (= 35 R = 19 I] Ti téhoç piaooogias , Quelle est la fin de la philo sophie ? ( 30) [= 1 R = 31 1] Περί ηδονής: ότι εί και αγαθόν, αλλ ' ου βέβαιον α ' , Sur le plaisir. Que même s'il était un bien, il n'est pas solide. Livre I. ( 31 ) [ = 2 R = 32 ] Περί ηδονής , ότι εί και αγαθόν, αλλ ' ου βέβαιον β ' , Sur le plaisir. Que même s'il était un bien , il n'est pas solide. Livre II . ( 32 ) [= 3 R = 33 I ] ɛpi ndovñs , őti ei xaż åyadóv, år ' où BÉBALOV Y ' , Sur le plaisir. Que même s'il était un bien, il n'est pas solide. Livre III . ( 33 ) ( = 4 R = 34 I ] Ti téroç qiiooopiac, Quelle est la fin de la philosophie ? ( 34 ) ( = 5 R = 35 I ] " Otı Šoti xaì x TÕV nepLOTÁJewV ÚVeneto Oai, Qu'il est possible de tirer profit des circonstances ( difficiles ). (35 ) (= 6 R = 36 I ] Nőç äv tiç npòç vízov napaoxEVÁOALTO , Comment peut- on se comporter à l'égard d'un ami ? ( 36) ( = 36 R = 20 l ] Ei nponyoúuevoç Ó toŨ XUVIYOŨ Bioç, La vie du cynique est -elle préférable ? ( 37 ) (= 37 R = 21 I] Ei ovubárletal npòç åpetnu tà èyxúuhla uadńuata, Les disciplines du cycle scolaire contribuent-elles à la vertu ? ( 38) (= 38 R = 22 I] El yévoltó tiç dela uoipą åyadós, Devient- on bon grâce à la providence divine ? (39) [= 39 R = 23 Ι ] Ει έστιν αγαθόν αγαθού μείζον εν ώ, ότι ουκ έστιν , Un bien est-il meilleur qu'un autre ? Dans ce traité : que ce n'est pas le cas . ( 40 ) ( = 40 R = 24 I) Eỉ Ěotiv åyadov åyado✓ METÇov. £v Q , őti Ěotiv, Un bien est- il meilleur qu'un autre ? Dans ce traité : que c'est le cas. ( 41 ) [= 41 R = 25 I ] Toũ leoũ và dragà TotoŨvoz , có kv Puisque Dieu produit les biens, d'où viennent les maux ?

xa xứ,

Études de détail sur les conférences . Sur la conférence I : 33 H. Hobein , « Zweck und Bedeutung der ersten Rede des Maximus Tyrius » , dans Xápites ( Festschrift F. Leo ), Berlin 1911 , p . 188 219 ; Koniaris 12 ; 34 M. Kokolakis, The dramatic simile of life , Athens 1960 , p . 48-50 ; 35 C.E. Glad , Adaptability in Epicurean and early Christian psycha gogy, Thèse, Brown University, 1992 , 561 p . , résumé dans DA 54 , 1993-1994, p. 210 . Sur la conférence II : 36 J. Geffcken , « Der Bilderstreit der heidnischen Altertums» , ARW 19 , 1916-1919 , p . 286-315 , notamment p . 296 sq .; 37 L. Mayda, De pulchritudine imaginum quid auctores Graeci saec. II p . Ch. n . iudicaverint, Cracovie 1939 , p. 17 ; 38 U. von Wilamowitz -Moellendorff, Der Glaube der Hellenen, 2e éd . , Darmstadt 1955 , réimpr. 1984 , t . II , p . 489 ; 39 V. Fazzo , La giustificazione delle immagini religiose dalla tarda antichità al cristianesimo , Napoli 1977, p. 137-150 ; 40 G.L. Huxley , « OPOE OEOE

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( Maximus Tyrius 2.8 ) » , LCM 3 , 1978 , p . 71 sq . ; 41 C. Stöcker, « Indische Schlagengötter in einer Alexandersage » , WJA N.F. 5 , 1979 , p . 91-97 ; 42 M. Szarmach, « Maximos von Tyros über Gottheit und Kultsymbole » , SPHP 6 , 1983 , p. 85-92 (reproduit dans ld . 13, p. 63-69 ) ; 42a M. Rosso , « Su Omero e Fidia : un incontro tra Dione Crisostomo ( XII ) e Massimo di Tiro ( II , IV , XXVI ) » , QuadAugRostagni, n.s. 1 , 2002, p. 237-249. Sur la conférence III : Meiser 5 , p. 24-31 ; 43 W. A. Oldfather, « Socrates at Court» , CW 31, 1938 , p . 203-211 . Sur la conférence IV : 44 M. Grimaldi ( trad ., comm . ) , Due orazioni di Massimo di Tiro (Diss. 4. 10 Trapp ), col . « Hellenica et Byzantina Neapolitana, Studi e Testi » 20, Napoli 2002, p. 25-86 ; 45 F. Stok, « Un topos platonico nel de medicina di Celso » , dans I. Mazzini et F. Fusco (édit . ) , I testi di medicina latini antichi. Problemi filologici e storici, Roma 1985 , p. 115-129 ; Rosso 42a . Sur la conférence V : 46 G. Soury, Aperçus de philosophie religieuse chez Maxime de Tyr, platonicien éclectique, Paris 1942 , p . 16-38 ; 47 P.W. Van der Horst , « Maximus of Tyre on Prayer. An annotated translation of Eỉ dei € Űxeodai ( Dissertatio 5 ) » , dans H. Cancik ( édit . ) , Geschichte - Tradition Reflexion ( Festschrift M. Hegel), t. II : Griechische und Römische Religion , Tübingen 1996, p. 323-338 . Sur la conférence VII : 48 H. Dörrie - M . Baltes, Der Platonismus in der Antike , t . III : Der Platonismus im 2. und 3. Jahrhundert nach Christus , Stuttgart/Bad Cannstatt 1993 , p. 304 sq. ( Baustein 91.5c ). Sur les conférences VIII - IX : 49 R. Heinze , Xenokrates. Darstellung der Lehre und Sammlung der Fragmente, Leipzig 1892 , réimpr. Hildesheim 1965 , p. 99-110 ; 50 J. Beaujeu, « Aperçu historique sur la démonologie gréco romaine » , dans Id . (édit. ) , Apulée. Opuscules philosophiques. Fragments. Texte établi et traduit par J. B. , coll . CUF , Paris 1973 , réimpr. 2002 , p . 183-201 , notamment p. 197 ; Dörrie -Baltes 48, p . 317-319 ( Baustein 93.3-4 ) ; 51 N. Fick , « La démonologie impériale ou Les délires de l'imaginaire au Ire siècle de notre ère » , dans J. Thomas (édit. ) , L'imaginaire religieux gréco -romain, Perpignan 1994, p . 235-272 . Sur la conférence X : 52 B.P. Reardon, Courants littéraires grecs des frème et urème siècles après J.-C. , Paris 1971 , p. 201 sq .; 53 C. Grotanelli, « La parola rivelata » , dans G. Cambiano, L. Canfora et D. Lanza (édit. ) , Lo spazio letterario della Grecia antica, t . I 1 , Roma 1992 , p . 219-264 , notamment p . 231 ; Grimaldi 44, p. 87-147 ; Dörrie - Baltes 48, p. 308 sq. ( Baustein 91.6c ). Sur la conférence XI : 54 M. Depré, La connaissance de Dieu chez Maxime de Tyr, Thèse Univ . de Louvain ( inédite ) ; Peitler 22 ; Dörrie - Baltes 48 , p. 333 sq . ( Baustein 96.3c). Sur la conférence XIII : 55 E. Schröder, Plotins Abhandlung Módev rà xaxá [ Enn. I, 8 ), Borna- Leipzig 1916 , p . 183 n . 3 ; Soury 46 , p . 39-56 ; 56 D. Amand, « Liberté humaine et eiuapuévn chez Maxime de Tyr et chez l'auteur de la dissertation Tepi eiuapuévns ( le Pseudo -Plutarque) » , dans Fatalisme et liberté dans l'Antiquité grecque, Louvain/ Paris 1945 , p . 101-106 ; Dörrie - Baltes 48 ,

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p . 325 sq . (Baustein 94. 14) ; 57 C. Moreschini, « Saggio introduttivo » à Calcidio , Commentario al Timeo di Platone, Milano 2003, p . LXXVII -LXXIX . Sur la conférence XIV : 58 M. Szarmach, « Maximos von Tyros über die Freundschaft » , Studia z zakresu antyku , Toruń 1984 , p . 125-137 ; 59 D. Konstan , Friendship in Ancient World , Cambridge 1997, p. 153 sq .; 60 P. Volpe Cacciatore , « Plutarco e Massimo Tirio : procedimenti retorici e tecnica formale » , dans L. Van der Stockt (édit . ) , Rhetorical theory and praxis in Plutarch . Acta of the fourth international congress of the International Plutar chean Society (Louvain , July 3-6 1996) , Louvain -Namur 2000 , p . 527-532 . Sur la conférence XVII : Dörrie -Baltes 48, p. 252 ( Baustein 85.4) . Sur la conférence XVIII - XXI : 61 M. Szarmach , « 'Epwtixoi Nóyol von Maxi mos Tyrios » , Eos 70, 1982, p . 61-69 ( reproduit dans Id . 13 , p. 71-82 ) ; Filippo Scognamillo 126 ; 62 H. P. Foley , « " The mother of the argument " : " eros " and the body in Sappho and Plato's “ Phaedrus ” » , dans M. Wyke (édit. ) , Parch ments of gender : deciphering the bodies of Antiquity, Oxford 1998, p. 39-70. Sur la conférence XXII : 63 E. Bignone, L'Aristotele perduto e la formazione filosofica di Epicuro , t. I , Firenze 1936, p. 310-312 ; 64 A. Tescari, Lucretiana, Torino 1936, p. 69 sqq .; 65 E. Bignone , « A proposito della polemica di Eraclide Pontico e di Massimo Tirio contro Epicuro » , Convivium 14, 1936, p. 445-450 ; 66 A. Tescari, « Per la interpretazione di un passo di Massimo di Tiro : Epicuro e la poesia » , ibid . 15 , 1937 , p. 212-214 ; 67 E. Bignone , « Ancora di Epicuro e di Massimo di Tiro » , ibid. , p . 345-347 ; 67a Ch . Orfanos, « Ecclésia vs banquet » , Pallas 61 , 2003, p. 203-217 . Sur les conférences XXIII et XXIV : 68 A. Michel, « De Socrate à Maxime de Tyr: les problèmes sociaux de l'armée dans l'idéologie romaine » , REL 47 (bis ) , 1970 , p. 237-251 ; 69 M. Szarmach , « Maxime de Tyr sur les cultivateurs et les soldats » , Études de Philologie Classique de l'Université de Toruń , Toruń 1983 , p. 71-78 . Sur la conférence XXVI: Dörrie - Baltes 48 , p . 252 ( Baustein 85.4) ; Rosso 42a . Sur la conférence XXIX : Dörrie - Baltes 48 , p. 329 ( Baustein 95.2 ) . Sur la conférence XXXIII : Dörrie - Baltes 48 , p. 329 ( Baustein 95.3 ) . Sur la conférence XXXV : 70 R. Renehan , « A new Hesiodic fragment », CPh 81 , 1986, p. 221 sq. Sur la conférence XXXVI: 71 A. O. Lovejoy et G. Boas, Primitivism and related ideas in Antiquity, Baltimore 1935 , réimpr., Baltimore - London 1997 , p. 145-151 ; 72 T. Cole , Democritus and the sources of Greek anthropology, coll . « American Philological Association , Philological Monographs » 25 , Cleve land 1967 , réimpr. mise à jour, Oxford 1990, p. 150 sq. Sur la conférence XXXVIII : 73 K. Meiser, « Ein Zitat dem “ Alkibiades ” des Sokratikers Aischines bei Maximos Tyrios » , BPhW 32 , 1912, col . 703 sq. Sur la conférence XLI : Soury 46 , p. 57-76 ; 74 W. Theiler, « Gott und Seele im kaiserzeitlichen Denken » , dans Recherches sur la tradition platonicienne,

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coll . « Entretiens sur l'Antiquité Classique » 3 , Vandæuvres- Genève 1955 , p. 63 91 , notamment p . 77 n . 2 ; Dörrie - Baltes 48 , p . 334 ( Baustein 96.4 ) ; 74a R. Batty, « A tale of two Tyrians » , CI 9, 2002, p. 1-18. La structure du corpus des Διαλέξεις .. L'ordre des conférences. La numérotation en minuscules des titres de confé rences dans l'index des Alarécenç du Parisinus ( fol. 1 ) les comprend toutes, mais assigne un même numéro à des conférences différentes appartenant à un même cycle thématique , qui ne se distinguent que par un numéro d'ordre relatif ; cela explique que le dernier numéro soit 35 , et non pas 41. Cette numérotation semble confirmer l'ancienneté de l'ordre des conférences dans le Parisinus Graecus 1962 , c'est - à -dire XXX -XXXV , I- XXIX et XXXVI-XLI, qui a été suivi par Davies 114 et Duebner 117 ; cf. aussi Puiggali 10, p. 18-21 . Cependant, Hobein 118 , p. XXIII -XXVI , soutenu par Koniaris 120 et Trapp 119 , a défendu l'ordre offert ci -dessus , qui est fondé sur une autre numérotation qui accom pagne les titres des conférences tout au long du codex. Celle-ci , en onciales, omet les numéros des six premières, mais, étant donné qu'elle passe de la XXIX directement à la XXXVI , on peut penser que les six premières conférences, non numérotées, correspondent aux absentes XXX-XXXV , qui sont passées en tête de la collection pour une raison inconnue . Ainsi , la numérotation en onciales couvre la totalité des quarante et une conférences et permet de récupérer l'ordre de l'édition qui a servi de modèle au Parisinus Graecus 1962. L'authenticité des titres des Alaréteiç . La Souda cite des titres différents pour les conferences XXVI ( Περί “ Ομήρου και τις παρ ' αυτό αρχαία φιλο σοφία) et III ( Eί καλώς Σωκράτης ουκ απελογήσατο). La variation suscite des réserves sur l'ancienneté plus ou moins grande de l'ensemble des titres offerts par le Codex R. C'est un fait incontestable que certains titres ne coïncident pas exactement avec les contenus développés dans les conférences respectives, ce qui a conduit nombre de savants à les considérer comme faux et comme l'æuvre d'un éditeur qui les a introduits dans une copie réalisée entre le IIe et le IXe siècles ; cf. Hobein 3 , p . 15 n . 19 , et Trapp 16, p. LVIII (aussi 75 H. G. Nesselrath , c.r. de Trapp 119 , dans MH 53 , 1996 , p. 315 sq . ) . Or, Koniaris 11 , p. 102-110 ( appuyé par 76 P. Kalligas , c.r. de Trapp 119 et Koniaris 120, dans Hellenika 46 , 1996, p. 389-396 , notamment p . 393 ) , soutient que rien ne s'oppose à l'authenticité des autres titres qui correspondent effecti vement au contenu des conférences. Dans ce cas , il faudrait assumer que les titres inadéquats le sont parce qu'au cours du temps la tradition éditoriale les a défigurés et éloignés des contenus correspondants. Un ou deux recueils ? Tout au long du Codex R les titres apparaissent dans l'ordre suivant et avec les en -têtes que voici : Μαξίμου Τυρίου Πλατωνικού φιλοσόφου των εν Ρώμη διαλέξεων της πρώτης επιδημίας (fol . 11 ) Titres des dissertations XXX -XXXV Μαξίμου Τυρίου Πλατωνικού φιλοσόφου των εν Ρώμη διαλέξεων της πρώτης ÉTLÔnuías ( fol. 18 ) Maţiuov Tuplov qedogovoúueva ( fol. 18V , dans la marge de gauche)

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Titres des dissertations I -XXIX et XXXVI- XLI Μαξίμου Τυρίου φιλοσοφούμενα (fol. 145 ). Mutschmann 6, p. 187 , suivi par Puiggali 10, p. 18-21 , a considéré les titres comme une preuve qu'on avait juxtaposé dans le codex deux collections différentes de conférences de Maxime. Il en vient même à proposer que les six premiers discours constituaient un cycle thématiquement homogène face au reste, au contenu hétérogène ; cf. Koniaris 11 , p. 94-102, et Puiggali 10, p. 430-432, qui ont démontré l'inexistence de ce cycle. D'après Koniaris (aussi Hobein 8, col. 2556, et Trapp 16, p. LVIII-LX), le fait de placer au début les conférences XXX XXXV dans le Parisinus a fait que ce groupe aussi a été précédé par le même en-tête que le reste d'où il s'était détaché, c'est- à -dire Mačiuov Tuplov MatoVLXOŨ pihoob ou TÕV ¿v Ρώμη διαλέξεων της πρώτης επιδημίας . Π est different de celui qui apparait a la fin des Conferences, Μαξίμου Τυρίου φιλοσοφούμενα, mais dans ce meme codex les titres qui figurent au commencement et à la fin de l'æuvre d’Alcinoos ( » A 92) sont différents aussi entre eux. Le copiste ou un correcteur ultérieur a probablement interprété la différence entre les deux titres comme un indice de l'existence de deux collections , et a introduit dans la gauche le titre Μαξίμου Τυρίου φιλοσοφούμενα , qui a son avis manquait. Les Alaréterç de Maxime forment un ensemble d'une certaine cohérence et d'une structure , aussi bien formelle que thématique, qui a été conçue à une fin éducative en accord avec une certaine conception de l'activité philosophique . Si on laisse de côté la distinction de deux corpora ( cf. supra ), elles se présentent comme un série assez complète d'enseignements philosophiques (ploooqov Meva ) précédée par une conférence en guise de préface (I ) , dont le sens pour l'ensemble de la collection a été mis en relief par Hobein 33 et par Koniaris 12. Tous deux soutiennent que l'image de la versatilité de l'acteur qui ouvre et ferme la conférence ( § 1 et 10) doit s'entendre comme un modèle de l'orateur philosophique que Maxime lui même incarnera dans les conférences suivantes. Celles-ci , à leur tour, ne présentent pas une articulation d'ensemble claire, si l'on excepte l'essai d'Heinsius 110 , p . 11-13 , de les grouper en tétralogies, mais elles laissent voir des structures partielles ou « cycles » . Ainsi , une structure antithétique héritée de la dialectique relie XIV et XVI ( sur les vies active et contemplative) et aussi XXIII et XXIV ( sur le mérite relatif pour les cités des soldats et des agriculteurs; ce sont les seules conférences où l'on a détecté une référence au contexte historique: cf. Michel 68, mais contra Puigalli 10 , p . 536 sq . ) . XXXIX et XL développent des thèses opposées au sujet de l'existence ou non de degrés du bien ( conférences mises apparemment dans la bouche de deux personnes différentes, la première adoptant une position très proche du stoï cisme) . VIII et IX se trouvent unies thématiquement par le sujet du démon socra tique ( VIII ), qui aboutit à la question générale de la nature des démons. XXX XXXIII forment un ensemble avec un sujet commun , le plaisir, et sont articulées comme une série , décrite parfois comme une tétralogie ; cf. Mutschmann 6, p. 194 sq. , qui inclut aussi dans le cycle XXXIV et XXXV ; contra Puiggali 10, p. 430-432 et Koniaris 11 , p. 88-102 ; Trapp 16, p . 236 , commence la série par la conférence XXIX et donne à l'ensemble le titre « De finibus de Maxime » . XXX et XXXII semblent accorder au plaisir certaines justifications, et les conférences XXXI et XXXIII refutent ces concessions . On retrouve une structure tétra logique dans la série XVIII-XXI , consacrée à l'amour socratique , dans laquelle chaque discours conteste le précédent comme dans le Phèdre platonicien ; cf. 77 M. B. Trapp, « Plato's Phaedrus in second -century Greek literature » ,dans

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D. A. Russell (édit . ) , Antonine Literature, Oxford 1990 , p . 141-173 , notamment p. 162 sq. On pourrait aussi organiser le corpus des AlaNÉEELG suivant les distinctions

fondamentales du discours philosophique . Conformément à la division en chapi tres de Puiggali 10, Maxime a deux grands intérêts philosophiques : d'un côté , la morale pratique (cf. VII et XXVIII , XII , XXXIV , XXV , XVIII -XXI , XIV et XXXV, XXVII , XXXVII et XXXVIIII , XXXIX et XL, XV et XVI , XXIII et XXIV ) et de l'autre, la philosophie religieuse (XI , IV , VIII-IX , II , V , XIII , XLI ). Ensuite, I , XXVI et XXIX traiteraient des questions générales, tandis que XXVI, III , XVII et XXXVI seraient consacrées aux maîtres reconnus par Maxime: Homère , Socrate , Platon et Diogène , respectivement. Finalement, Puiggali 10 traite séparément VI et X , qui concernent la théorie de la connaissance. Les conférences sur des problèmes de philosophie religieuse ont suscité un grand intérêt comme témoignage sur l'évolution des idées religieuses dans la période de formation de la philosophie chrétienne et du néoplatonisme ; cf. 78 W. Theiler, Die Vorbereitung des Neuplatonismus, coll. « Problemata » 1 , Berlin 1930, réimpr. Zürich 1964, passim , et, pour les auteurs chrétiens, 79 J. Daniélou , Message évangélique et culture hellénistique aux [le et fire siècles, Tournai 1961 , passim ; 80 ld ., « Origène et Maxime de Tyr » , RSR 34, 1947, p. 359 361 ; 81 J. F. Kindstrand, « The Date and Character of Hermias' Irrisio » , VChr 39 , 1980, p. 341-357 . Transmission

On dispose de l'archétype de la tradition manuscrite de Maxime , le Codex Parisinus graecus 1962 ( = R) , du IX ° siècle , qui avec la Souda permet de formu ler certaines hypothèses au sujet de la transmission du corpus de Maxime entre le 11e siècle et le ixº. Koniaris 120 , p . XVII -XX , a déduit de l'inexistence quasi totale de variantes textuelles dans les scholies marginales que l'exemplaire sur lequel ce codex fut copié n'en avait pas non plus et qu'on est en présence d'une transmission « protégée » , qui remonte sûrement à l'exemplaire originel des æuvres de Maxime. Selon Trapp 16, p. LX, Maxime et son æuvre ont dû susciter au vie siècle un grand intérêt, si l'on tient compte des données suivantes : ( 1 ) l'information de la Souda sur notre auteur provient de l''Ovouatolóyos d'Hesychius , du dernier quart du vie siècle ; ( 2 ) les scholies d'un strict intérêt philosophique contenues dans le Codex R peuvent provenir concrètement de l'érudition alexandrine du vie siècle ( cf. 82 J. Whittaker [édit. ) , Alcinoos . Enseignement des doctrines de Platon , coll . CUF, Paris 1990 , p . XXXVII pour Alcinoos ) ; ( 3 ) le manuscrit, outre les conférences de Maxime ( fol. 1 V - 145 '), contenait trois æuvres de divulgation du moyen-platonisme , une période de la diffusion de la philosophie platonicienne qui a cessé d'intéresser à partir du Viº siècle : le Aldaoxadixòç tõv Tiátwvog doyuátwv d’Alcinoos (fol. 147' 175 ) et deux traités d'Albinos , perdus depuis le Xive siècle : une Introduction αμα dialogues de Platon ( Εισαγωγή εις Πλάτωνος διαλόγους ) et une Esquisse des doctrines de Platon a partir des conferences de Gaius (Των Γαίου σχολών υποτυπώσεις Πλατωνικών δογμάτων ). Sur les changements dans la disposition relative de ces ouvrages , cf. 83 J. Whittaker, « Parisinus Graecus 1962 and the writings of Albinus , I » , Phoenix 28, 1974, p. 320-354, ( repris dans Id . 83a, Studies in Platonism and Patristic Thought, Aldershot 1984 , nº XX), et Whittaker 82, p. XXXVI sqq .

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Quant au Codex Parisinus gr . 1962 , il est écrit sur parchemin d'une écriture en minuscules élégante et lisible . Il fut copié à Constantinople dans la seconde moitié du ixe siècle , entre 850 et 875 , comme une partie d'un large projet d'édition d'œuvres philosophiques ( la “ Collection philosophique " ); cf. 84 T.W. Allen , « Palaeographica III : A group of ninth -century Greek manuscripts » , JP 21 , 1893 , p . 48-55 , et Whittaker 83, p . 321 . La condition d'archétype ne lui était pas encore reconnue dans Hobein 118, et elle n'a été établie qu'au début du XXe siècle par Mutschmann 18 et, surtout, par 85 F. W. Schulte, De Maximi Tyrii codicibus, Thèse, Göttingen 1915 , 84 p. Sur les vicissitudes du codex depuis qu'il est passé en Occident jusqu'à son arrivée à la Bibliothèque Royale de France , cf. Whittaker 83 et 86 Id ., « Parisinus Graecus 1962 and Janus Lascaris » , Phoenix 31 , 1977 , p. 239-244 ( repris dans Id . 83a , nº XXII). Du Codex Parisinus gr. 1962 dérivent un total de trente -quatre manuscrits, copiés entre le IXe et le XVI° siècles , et deux plus récents; ils ont été décrits par Trapp 119, p. XIX - XXIX . Voici les plus importants : ( 1 ) U = Vaticanus gr. 1390 , fol. 857-137 ", papier, copié entre 1250-1275 et dérivé de R. ( 2 ) I = Laurentianus Conventi Soppressi 4 , fol. 191-139 ' , papier, XIVe siècle . D'après Koniaris 120 , p . XXVIII sqq . , il dérive d'une copie de R aujourd'hui perdue ; d'après 87 M. B. Trapp , « Zenobi Acciaiuoli , Laurentianus Conventi Soppressi 4 , and the text of Maximus of Tyre » , BICS 42 , 1997-1998 , p . 159 182 , notamment p. 160 , il s'agit d'une tentative d'établir un « texte nouveau » à partir de l'intégration de lectures distinctives des traditions de R et de U. L'édi tion a sûrement été favorisée par Nicéphore Grégoras, qui a introduit l'en-tête et les titres des conférences. Le manuscrit inclut des annotations et des corrections de Zenobi Acciaiuoli (XVe siècle ) . Le codex présente les conférences dans cet ordre : XI-XXIX , XXXVI -XLI , VIII -X , IV- V , XXX- XXXV , I-III , VI- VII . Le reste des manuscrits dérive d'un ou de plusieurs de ces trois manuscrits (R , I , U ). Cf. Trapp 119 , p. XXXVII - XL , et Id. 16 , p . LXIV -LXV , pour des renseignements sur la transmission indirecte des conférences. Questions textuelles : Hobein 118 , p . V et XVII sq . pour la bibliographie du XVIe au XIXe siècles ; 88 A. A. H. Hahn , Observationes criticae in Maximum Tyrium , Diss . Inaug . , Vratislavae 1877 , 36 p .;89 S. Kontos , « Evupista Xpitixá » , BCH 2 , 1878 , p. 229-243 , notamment p. 40 ; 90 U. von Wilamowitz Moellendorff, « Coniectanea » , Ind . schol. aest . Gottingae 1884 , p . 3-18 , notamment p. 10 ( = Kleine Schriften , t. IV , Berlin 1962 , p. 562-582 , notamment p. 571 ) ; 91 L. Radermacher, « Varia » , RM 50, 1895 , p . 475-478 , notamment p . 478 ; 92 Th . Gomperz, « Zu Maximos Tyrios » , WS 31 , 1909, p . 181-189 ; Meiser 5, p. 32-67 ; 93 Id ., « Ein vergessene Emendation » , BPhW 32, 1912 , col . 573 ; Mutschmann 18 ; Schulte 85 ; 94 P. Shorey, « Emendation of Maximus of Tyre XVII . 8 » , CPh 10 , 1915 , p . 452 sq .; 95 E. Orth , « Varia critica » , Helmantica 6, 1955 , p . 69-79, notamment p . 73 sq .; 96 R. Kassel , « Kritische und exegetische Kleinigkeiten I » , RHM 106 , 1963 , p . 298-306, notamment p . 304 sq .; 97 G.L. Koniaris , Critical observations in the text of Maximus of Tyre, Thèse, Cornell Univ . 1962 , résumé dans DA 23 , 1963 , p . 3361 ; 98 Id ., « Emendations in the text of Maximus of Tyre » , RhM 108 , 1965 , p. 353

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370 ; 99 Id ., « On the text of Maximus Tyrius » , CQ n.s. 20 , 1970, p . 130-134 ; 100 Id ., « Emendations in Maximus Tyrius » , AJPh 93 , 1972 , p . 424-436 ; 101 M.Z. Kopidakis, « lapaonueLbOEIÇ OÈ ÉMnvixá xeiueva . A ' » , Hellenica 29 , 1976 , p . 344-348, notamment p . 345 sq . ; 102 G. L. Koniaris, « More emen dations in Maximus Tyrius » , Hermes 105 , 1977 , p . 54-68 ; 103 R. Renehan, « Some passages in Maximus of Tyre » , CPh 82 , 1987 , p . 43-49 ; 104 M.B. Trapp , « Some emendations in the text of Maximus of Tyre, Dialexeis 1-21 ( Hobein ) » , CQ n.s. 41 , 1991 , p . 566-571 ; 105 Id ., « More emendations in the text of Maximus of Tyre » , CQ n . s. 42 , 1992 , p . 569-575 ; 106 F.G. Hernández Muñoz, « Notas críticas al texto de Máximo de Tiro » , CFC 15 , 2005, p. 141-149 ; 107 J. Campos Daroca, « Una nota mitológica al texto de Máximo de Tiro » , ibid ., p. 151-154. Éditions. Editio princeps : 108 H. Stephanus , Maximi Tyrii philosophi Platonici Sermones sive Disputationes XLI. Graece nunc primum editae, 2 vol . , Genève 1557 ; 109 D. Heinsius , Maximi Tyrii, philosophi Platonici, Disser tationes XLI Graece. Cum interpretatione, notis et emendationibus D.H. Acces sit Alcinoi in Doctrinam Platonis Introductio ab eodem emendata : et alia eiusdem generis , 3 vol . , Lugduni Batavorum 1607 ; 110 Id ., Maximi Tyrii Dissertationes Philosophicae, Cum interpretatione et notis D. H. hac secunde editione emendatioribus . Accessit Alcinoi in Platonem Introductio, 2 vol . , Lugduni Batavorum 1614 ; 111 C. Lariot, Maximi Tyrii, philosophi Platonici, scriptoris amoenissimi, Dissertationes . Ex nova interpretatione recens ad Graecum contextum aptata, et collocata e regione : additis numeris, et erroribus anteriorum editionum quam diligenter detersis , Lugduni 1630 ( il s'agit d'une révision minime d'Heinsius 110 ) ; 112 Maximi Tyrii Dissertationes , Oxford 1677 ( une révision d’Heinsius 110 aussi ) ; 113 J. Davisius , Maximi Tyrii Dissertationes. Ex interpretatione Danielis Hensii . Recensuit et notulis illustravit J.D. , Coll . Regin . apud Cantabr . socius, Cantabrigiae 1703 ; 114 Id ., Maximi Tyrii Dissertationes, Ex recensione I.D. , Coll . Regin . Cantab. Praesidis. Editio altera, ad duos codices mss . locis quamplurimis emendata, notisque locupletio ribus aucta . Cui accesserunt viri eruditissimi , I. Marklandi , Coll . D. Petri Cantabrig . socii , annotationes , London 1740 ; 115 I. I. Reiske , Maximi Tyrii Dissertationes ex recensione I. Davisii , Colleg . Regii Cantab . Praesidis editio altera ... Recudi curavit et annotatiunculas de suo addidit I.I.R. , 2 vol . , Lipsiae 1774-1775 ; 116 N. Doukas , Mačiuov Tuplov Aóyou teooQpáxovta nai Elç. ' EnegepyaoHÉVTEÇ xai £ x800évtec napà N. A. , Wien 1810 ; 117 F. Duebner, Theophrasti Characteres, Marci Antonini Commentarii, Epicteti Dissertationes ab Arriano litteris mandatae, Fragmenta et Enchiridion cum commentario Simplicii, Cebetis Tabula , Maximi Tyrii Dissertationes . Graece et Latine cum indicibus . Theophrasti Characteres XV et Maximum Tyrium ex antiquissimis codicibus accurate excussis emendavit F.D. , Paris 1840 , réimpr. 1842 et 1877 ; 118 H. Hobein , Maximi Tyrii Philosophumena , coll . BT, Leipzig 1910 ; 119 M. B. Trapp , Maximus Tyrius Dissertationes, coll . BT, Stuttgart /Leipzig 1994 ; 120 G.L. Koniaris , Maximus Tyrius Philosophumena- Alaréelç , coll. « Texte und Kommentare » 17 , Berlin /New York 1995 .

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Dans une lettre datée du 7 novembre 1556, le juriste et helléniste autrichien Georg Tanner a exprimé son intention d'entreprendre une édition des Dialexeis, mais il n'a jamais accompli son projet ; cf. 120a M. B. Trapp, « The editio princeps that wasn't : Georg Tanner and the Dialexeis of Maximus of Tyre » , dans Apodosis (Festschrift W. W. Cruickshank ), London 1992, p. 95-104. Une édition préparée par J. Puiggali en 1978 est encore à ce jour inédite. Éditions partielles : 121 Maximi Tyrii philosophi Platonici disputatio, Vtri melius de diis tractavint, poetaene an philosophi, Lutetiae 1595 , 16 p . (Diss . IV , suivie de la traduction de Paccius 127) ; 122 Maximi Tyrii commentatio quod sermonum optimi sint qui operibus consonent, Helmstedtiae 1665 ( Diss . XXV ) ; 123 Περί του τίς ο Θεός κατά Πλάτωνα , dans J. Patousas, Εγκυκλοπαιδεία piroloyixń , Venetiis 1744 , t. III , p . 362 sqq . ( Diss . XI ) ; 124 J. A. Schier, Μαξίμου Τυρίου Λόγος τίσι χωριστέον τον κόλακα του φίλου... Curavit notasque suas adiecit et praefatus est J. A. S., Athenis ad Elmum ( = Lipsiae) 1760 ( Diss . XIV ) ; 125 U. von Wilamowitz -Möllendorff, Griechisches Lesebuch , Berolini 1902, t . I 2 , p . 338 sqq . et t . II 2 , p. 212 sqq . ( Diss . II) ; 126 A. Filippo Scognamillo, Massimo di Tiro . L'arte erotica di Socrate . Ed . critica, trad . e commento , coll . « Testi e studi / Università degli Studi di Lecce, Dipartimento di Filologia Classica e di Scienze Filosofiche » 10 , Lecce 1997 ( Diss . XVIII ) . Scholies du codex R. Trapp 119, p. 337-347 . Traductions En latin : 127 Cosmus Paccius , Roma 1517 , révisée par 128 Beatus Rhenanus, Basel 1519 ( cf. 128a M.B. Trapp , « Beatus Rhenanus and Maxymus of Tyre [Basel 1519] » , dans J. Hirstein [édit. ) , Beatus Rhenanus ( 1485-1547 ) : Lecteur et éditeur des textes anciens. Actes du Colloque International tenu à Strasbourg et à Sélestat du 13 au 15 novembre 1998 , Turnhout 2000 , p . 151 171 ) , et aussi par 129 G. Albertus Pictus , Paris 1554 ) ; partielles : 130 J. Reuchlin , 1488 ( Diss . XLI ) ; 131 A. Ferron , Paris 1557 (Diss . II ) ; 132 J. Caselius, Rostochiae 1587 ( = Helmstedtiae 1590 ; aussi dans J. A. Acker [édit . ) , J. Caselii Amoeniora Opuscula , Ienae 1707 ) ( Diss . XIV ) ; 133 J. Rainolds, Oxford 1613 (réimpr. ibid. 1614 , 1619 et 1628 ) , mais faite en 1581 ( Diss . VII , XV , XVI ) ; 134 H. Grotius, dans Philosophorum sententiae de fato et de eo quod in nostra est potestate , Paris 1648 ( Diss. XIII) . En français: 135 N. Guillebert, Rouen 1617 ; 136 J.-H.-S. Formey, Leyde 1764 ; 137 J.-J. Combes Dounous, 2 vol . , Paris 1802 ; partielles: 138 F. Morel, Parisiis 1596 ( Diss. XXIII ) ; 139 Id ., Paris 1607 ( Diss . IV et XXVIII ) ; 140 J.-H. S. Formey, dans J.-F. Dreux du Radier , Le Temple du Bonheur, t . I , Bouillon 1769 ( Diss. XXIII et XXIV ). En anglais : 141 T. Taylor, 2 vol . , London 1804 , réimpr. Chippenham , Wiltshire 1994 ; Trapp 16 ( excellente ) ; partielles : 142 H. Vaughan, London 1651 ( Diss. VII ) ; 143 G. Benson, dans Two letters to a friend, 2e éd . , London 1737 , et dans A collection of tracts, London 1748 ( Diss. V ) ; Koniaris 12, p. 244 250 ( Diss . I ) ; Van der Horst 47 ( Diss . V ) ; 144 R. Scott Smith , dans W.M. Calder III , B. Huss , M. Mastrangelo, R. Scott Smith et S. M. Trzaskoma ( trad .), The Unknown Socrates, Wauconda, Illinois 2002, p . 221-232 ( Diss . III ) .

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En italien : 145 Piero De Bardi , Venezia 1642 ; partielles : Filippo Scognamillo 126 , p . 3-43 ( à côté du texte grec ) ( Diss . XVIII ) ; Grimaldi 44 , p . 27-41 et 89-107 ( à côté du texte grec ) ( Diss. IV et X ) . En allemand : 146 Chr . T. Damm , Berlin 1749 ; réimpr. 1764 ; 3e éd . , ibid. 1845 ; 147 O. Schönberger et E. Schönberger, Würzburg 2001. En russe : 148 I. Kovalëva , dans A. Taho -Godi Aza et I. M. Nachov ( édit.), L'Antiquité dans le contexte de l'actualité, Moskva 1990 , p . 196-204 ( Diss . V ). En espagnol: 149 J.L. López Cruces et J. Campos Daroca, Máximo de Tiro, Disertaciones filosóficas. Introducción general de J.L.L.C. y J.C.D. Introduc ciones, traducción y notas de J. L.L.C. ( I- XVII ) et J.C. D. ( XVIII - XLI ) , coll . « Biblioteca Clásica Gredos » 330-331 , Madrid 2005. Les traductions italienne et espagnole qui , d'après Hobein 118 , p. IV , furent publiées à Venise en 1559 n'existent pas vraiment ; cf. Trapp 16, p. LXXXVIII n. 203 . Index. Index fontium : Trapp 119 , p . 359-377 ; Id . 16 , p . 343-346 , et pour Homère , Kindstrand 177 , p. 49-56 ; Index nominum : Hobein 118 , p. 488-510 ; Koniaris 120 , p. 515-527 ; Trapp 119, p. 359-377 , et Id . 16 , p . 347-359. Le genre littéraire des conférences ( AlaNÉEELC ) Les compositions que Maxime appelle, simplement , « discours » (Cóyor, e.g. I passim , II 9 , VI 4, VII 6 , X 6 , XI 1 ) ou « réflexions » ( oxbuuara , II 9 , III 2 , IV 2 , XXXI 1 , XL 2 ) reçurent dans l'Antiquité deux appellations : pilóooga ζητήματα (Souda ) ou φιλοσοφούμενα (souscription des Conferences dans R ) et dlaréĘELS , appellation qui figure dans les en - têtes des deux groupes de conférences de l'Index I du Parisinus. Selon Trapp 16, p. XL sqq. , dans le cas de Maxime les deux sens techniques différents que les Anciens ont appliqués au terme se rejoignent: ( 1 ) le discours philosophique (olároyoc ), avec la variété d'énonciation et les procédés pédagogiques des dialogues de Platon , de Xénophon et des autres socratiques ; cf. Heinsius 110 , p . 9 , qui propose d'ordonner les conférences par tétralogies ( p. 11-13 ) . Face aux dialogues , cependant, les diaréelç optent pour l'exposition monologique , mais elles maintiennent l'impression de dialogisme grâce à l'introduction ponctuelle d'un interlocuteur fictif ; cf. 150 O. Halbauer, Dediatribis Epicteti, Thèse , Leipzig 1911 , p. 9 ; 151 H. Throm , Die Thesis. Ein Beitrag zu ihrer Entstehung und Geschichte , Paderborn 1932 , p . 78 sq . ( 2 ) le discours rhétorique : au IIe siècle on avait l'habitude de réaliser, en guise de préface du discours (Mehérn) qu’on allait prononcer, une déclamation brève d'un caractère « détendu » et riche en images, que l'on pouvait détacher du discours principal ; c'est ce que la rhétorique antique a appelé Sláriç ou (npo ) ariá ; cf. Ménandre le Rhéteur ( * M 105 ), lepi ÉMLÔELXTIXWV, t . II , p . 388 , 16 - 394 , 31 Spengel ( = p. 114-126 Russell Wilson) ; 152 G. Anderson , The Second Sophistic, London 1993, p. 47-68 ; 153 L. Pernot, La rhétorique de l'éloge dans le monde gréco - romain , coll . « Études Augustiniennes . Série Antiquité » 137 , 2 vol . , Paris 1993 , t. II , p. 558 sq. Une conférence de Maxime

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devait durer entre vingt minutes et une demie-heure ; cf. Puiggali 10 , p. 31 ; Koniaris 11 , p. 100 , et Pernot 153, t . II , p. 454 sqq. , notamment p. 457 n. 219 . Le contexte scolaire . Un tel mélange de rhétorique et de philosophie suppose que l'on utilisait ces conférences brèves et « détendues » pour transmettre un savoir philosophique peu spécialisé de la part d'un maître à des disciples , ce qui permet de rattacher les conférences de Maxime au cadre générique de l'ensei gnement « scolaire » . D'après 154 I. Hadot , « Der philosophische Unterrichts betrieb in der römischen Kaiserzeit » , RhM 146, 2003, p . 48-71 , notamment p . 68 sq . (maintenant repris dans Arts libéraux et philosophie dans la pensée antique. Contribution à l'histoire de l'éducation et de la culture dans l'Anti quité. Seconde édition revue et considérablement augmentée, coll . « Textes et tradition » 11 , Paris 2005, (« L'organisation de l'enseignement philosophique à l'époque impériale », p . 487-505 ) , la diáreçiç est le second des deux moments successifs de l'enseignement d'époque impériale : d'abord , le professeur, ou un élève aidé par lui , commente les textes des grands auteurs classiques ( lectio ) ; puis , dans la phase d'assimilation et de pratique des principes théoriques, a lieu l'échange de questions des étudiants et de réponses du maître , où celui -ci développe en détail sa position. Les destinataires principaux des conférences sont donc les jeunes (VÉOL ) qui commencent à s'intéresser à la philosophie ; cf. I 7 et 8 , XIV 1 (le jeune Héraclès au carrefour ); voir aussi Grimaldi 44 , p. 15 sq ., qui pense à un auditoire plus large et plus varié. Le contexte scolaire expli que une série de traits récurrents dans les conférences : le ton , qui rend l'audi toire plus sûr de ses propres capacités ; l'abandon de la complexité conceptuelle et de la terminologie spécifique; la volonté d'appliquer la philosophie à toutes les activités de la vie ; l'utilisation consciente et mesurée des images comme moyen d'illustration dans l'exposition ( cf. Meiser 5 , p. 13-24 ), et, finalement, le choix des autorités citées par Maxime : il s'agit presque toujours d'auteurs qui faisaient partie de la formation scolaire que notre auteur présuppose chez son auditoire de jeunes aristocrates ( pour une liste des auteurs cités , cf. Trapp 15 , p. 1965-1970 , et Id . 16 , p . XXXV - XXXIX ) . Donc , les OaNÉEELS S'adressent à un public très concret auquel l'orateur ajuste son discours ; cf. I 9-10 , où Maxime prend soin de se différencier des prédicateurs populaires qui pullulent dans l'Empire. En raison de son contexte scolaire, la diámetis reçut dans l'Antiquité aussi le nom de « diatribe » ( Platpibń ) ou d '« enseignement scolaire » (oxoań ); cf. Halbauer 150, p. 3 sqq., et 155 J. Glucker, Antiochus, p. 160-166 . De fait, l'intégration rhétorique et philosophique dans les diaréels est semblable à celle qui a été proposée pour le genre de la diatribe par 156 U. von Wilamowitz -Möllendorff, Antigonos von Karystos, Berlin 1881 , réimpr. Wiesbaden 1953 , p. 307 , qu'il conçut comme « un croisement du dialogue philosophique et de l'épideixis rhétorique » ; cf. 157 T.C. Burgess, Epideictic Literature, Chicago 1902, p . 239 sq. Sur les problèmes de définition des genres de la diatribe et de la dialexis , cf. 158 D. M. Schenkeveld, « Philosophical Prose » , dans S. E. Porter (édit. ), Handbook of classical rhetoric in the Hellenistic period. 330 B.C.-A.D. 400 , Leiden /New York/Köln 1997 , p. 195-264, notamment p. 230-247 , et surtout 159 P. P. Fuentes González, Les diatribes de Télès. Intro duction, texte revu , traduction et commentaire des fragments, coll . « Histoire des doctrines de l'Antiquité classique » 23 , Paris 1998 , p . 44-78 . Le contexte scolaire explique aussi le caractère vulgarisateur des conférences de Maxime, qui correspondaient à la partie pratique de l'enseignement. Donc, on ne doit pas en extraire des conclusions sur le niveau de précision et

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de profondeur de l'enseignement théorique de Maxime ; cf. 160 P. Hadot, La citadelle intérieure. Introduction aux Pensées de Marc Aurèle, 2e éd . , Paris 1997, p. 79-81 , pour le cas d'Épictète. Composition et style des conférences. Les diaréelç embrassent d'ordinaire un seul thème ; parfois elles en englobent davantage , et , dans certains cas, le même sujet couvre plusieurs conférences, généralement deux ou quatre, soit en considérant une même question sous divers aspects, soit en présentant des déve loppements opposés, dont le dernier à être exposé est toujours celui qui prévaut; cf. supra. En général le thème de la dissertation ne se présente pas immédiate ment , mais à l'aide d'un exemple introductif emprunté à l'histoire, au mythe ou à la fable , et il se développe d'une façon généralement ordonnée au moyen d'une séquence d'arguments qui , occasionnellement, s'éloigne considérablement de la tâche établie au début ; cf. Hobein 3 , p. 25-27 n . 2 . Une étude détaillée des procédés rhétoriques et, en général , de la langue de

Maxime est offerte par Dürr 4 , résumée par Puiggali 10, p. 35-42, et complétée par Trapp 15 , p . 1960-1970 . Dans les conférences, on trouve le double mouve ment caractéristique de l'enseignement scolaire ( cf. 161 G. F. Nieddu , « Il ginna sio e la scuola : scrittura e mimesi del parlato » , dans G. Cambiano , L. Canfora et D. Lanza [édit. ] , Lo spazio letterario della Grecia Antica , t . I 1 , Roma 1992, p . 555-585 , notamment p . 565 ) : d'un côté , la volonté de maintenir l'impression de la communication orale à l'aide d'appels à l'audience , d'interrogations rhéto riques, d'exclamations , d'apostrophes, de changements d'opinion séance tenante et d'aveux de perplexité, ainsi que d'inversions et d'incohérences syntaxiques , comme des anacoluthes ou des changements de sujet ; de l'autre, un procédé de normalisation et de stabilisation du discours parlé, qui comporte un enrichisse ment au moyen d'éléments plus nettement persuasifs ou hédonistiques , comme une disposition soignée des mots grâce à des chiasmes , des structures parallèles et des antithèses , accompagnées d'accumulations verbales dont la fonction est marquée par une polysyndète réitérée , ainsi que le soin de finir les périodes par des clausules déterminées, parmi lesquelles prédominent celles qui se terminent par un crétique ; cf. Trapp 15, p. 1963 sq . Quand au style , Maxime intègre des éléments aussi bien du courant oratoire connu comme « asianisme » , à cause de sa prédilection pour les périodes courtes, pour les figures gorgianiques et pour les rythmes marqués que ces options comportent, que de l'atticisme , surtout à cause de la sélection lexicale , de la grammaire et de la syntaxe , ce qui permet de considérer Maxime comme un représentant de l'atticisme modéré, proche de Dion Chrysostome, Lucien et Philostrate ; cf. Trapp 15, 1964 sq . École philosophique Le platonisme de Maxime ( cf. Puiggali 10 , p . 569-575 , et Trapp 16 , p . XXII XXV ) . Des raisons aussi bien externes qu’internes permettent de définir l'affilia tion philosophique de Maxime : ( 1 ) Dans le fol. 1 ', 18v et 146 ' de l'archétype , on indique que les conférences sont l'æuvre « de Maxime , philosophe platonicien ( IllatwVIXÒÇ qilóoopoc) » , et l'index général du codex les inclut auprès d'æuvres d'Alcinoos ( > A 92) et

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d'Albinos (" A 78 ) , dont l'orientation et l'intérêt sont résolument platoniciens ( cf. supra ). (2) Maxime lui -même reconnaît à plusieurs reprises l'autorité de Platon : cf. εγώ γάρ τοι τά τε άλλα , και εν τη των ονομάτων ελευθερία πείθομαι Πλάτωνα (XXI 4) , μαντεύεται μoι η ψυχή , κατά τους Πλάτωνος λόγους ( XXIV 3 ) , LOTEów Mátovi ( XLI 2) , et aussi IX 6, XI 1-2, XX 4 et XXVII 5 ; voir Fabricius 32 , p. 515 , et Hobein 8 , col . 2560. Le schéma philosophique fondamental de Maxime est platonicien, ce qui se vérifie dans le modèle de la réalité à deux niveaux , matériel et intelligible , le second étant l'origine du bien et de la beauté du premier ; dans la condition transcendante de la divinité ( X 9 et XI ) ; dans la façon de concevoir l'âme humaine, dont le sort est étranger à celui du corps (VII 5 , X 9 , XI 6, XXI 7 ) , et dans le souci éthique de contrôler les passions qui poussent à la recherche du plaisir. Il faut y ajouter les très nombreuses citations directes et les allusions à des textes du fondateur de l'Académie dans pratiquement toutes les conférences ( cf. Dürr 4, p. 83-86) , ainsi qu'à ses doctrines. Parmi celles -ci , Puiggali 10 , p . 571 sq ., souligne l'héritage platonicien dans le « culte » de Socrate ( III ) , où il faut admettre une influence du moyen - platonisme (cf. 162 P.L. Donini, « Socrate “ Pitagorico " e medioplato nico » , Elenchos 24 , 2003, p . 332-359, notamment p. 357-359 ) et du stoïcisme ( cf. Meiser 5 , p . 24-31 ; Döring 169, p . 130 sq . ) ; dans l'éloge de l'État platoni cien ( XVII ) ; dans la critique de la démocratie (XVI ) ; dans la défense de la connaissance comme réminiscence (X) ; dans les idées sur l'amour exprimées dans les discours sur l'amour socratique ( XVIII - XXI ) , fondées sur le Phèdre ( cf. Trapp 77 , p . 161-164) ; finalement, dans les idées sur le plaisir, pour lesquelles cf. Aulu -Gelle , Nuits Attiques IX 5 , 1-8 ( = Calvenus Taurus, test. 18 Gioè ), un passage que 163 J. Annas, Platonic Ethics. Old and New , Ithacal London 1999 , p . 139 n . 5 , attribue non pas à Calvenus mais à Favorinus ( F 10 ) . En ce qui concerne la psychologie , la tripartition de l'âme que l'on trouve dans XVI 4 dérive de Platon , ainsi qu'en général la façon dont le corps est lié à l'âme et la prééminence qu'il accorde à celle-ci (VII et XXVIII ) . En ce qui concerne les questions plus strictement morales, Puiggali 10 , p . 571 sq . , souligne l'influence platonicienne dans la défense de la possibilité d'acquérir la vertu , soit à travers l'enseignement, soit grâce à une intervention divine ( XXVII et XXXVIII) ; dans la référence aux thèses socratiques sur la possibilité de souf frir l'injustice et de la commettre ( XII ) ; dans la conclusion de XL, à savoir qu'il existe une hiérarchie de biens , face aux thèses stoïciennes qui vont dans le sens opposé, et que Maxime défend seulement en apparence dans XXXIX ; aussi , dans la conception du Dieu comme la cause et la source du bien ( XLI 1-2) et dans la définition qu'on peut lire dans XXVI 9 du but de la philosophie comme assimilation au Dieu ( duoiwolç Oem, Théétète 176 b) ; cf. Puiggali 10 , p . 574 ; Dillon 25, p . 43 sq. , et Annas 163, p . 52-71 . Finalement, l'opposition de Maxime aux sophistes est également platonicienne; cf. I 8 , X 1 , XIV 8 , XV 6, XVIII 4 , XX 3 , XXI 4 , XXVI 2 , XXVII 8 , XXXI 1 , XXXII 3 . ( 3 ) Maxime tient également certains sujets de la tradition platonicienne ultérieure ; cf. Hobein 3 , p . 39-53 ; Puiggali 10 , p . 572 sq .; Trapp 16 , p . XXVI .

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Theiler 78 , p. 4 sqq . , 41 sq . , 53 sqq . , 121 et 150, se sert de Maxime pour construire les antécédents de la métaphysique néoplatonicienne en prenant comme point de repère Antiochos d'Ascalon ( A 200 ). Au sujet de l'infuence de Philon d'Alexandrie sur Maxime, 164 W. Theiler, « Philo und der Beginn des kaiserzeitlichen Platonismus » , dans K. Flasch ( édit. ) , Parusia ( Festschrift J. Hirschberger ), Frankfurt 1965 , p . 199-218 , notamment p. 200-203, a signalé leur ressemblance sur le motif platonicien du vol de l'âme, dans une recherche sur la médiation d'Eudore d'Alexandrie ( »E 97 ) dans la transmission du plato nisme . Ce n'est qu'après la mort de Platon qu’ont été clairement formulés les thèmes qui font l'objet des conférences VIII -IX ( la démonologie) , XIII ( le destin et le libre arbitre ), XV - XVI (l'idéal de la vie contemplative) et XXXIX - XL (la nature du bien et de la divinité) . Certains ont fait remonter à cette période de l'Académie la polémique contre Épicure de XXII . Trapp 16 , p. XXVI n . 35 , signale également la présence de doctrines aristotéliciennes dans I 2 , VI 4-5 , XXVII 7 et 9 , XXIX 1-5 et XXX 7. Heinze 49, p . 99-110 , et 165 I. Heinemann , Poseidonios' metaphysische Schriften, 2 vol . , Breslau 1921-1928 , réimpr. Hildesheim 1968 , t . I , p. 99 sq . , 128-130 et t . II , p. 283 n . 1 , ont soutenu l'influence de Posidonius dans le procédé d'assimilation de doctrines de l'Aca démie ancienne ; contra Puiggali 10 , p. 167 sq. n. 1 , et notamment pour l'image du vol de l'âme , 166 R. M. Jones , « Posidonius and the flight of the mind through the Universe » , CPh 21 , 1926 , p . 97-113 . (4 ) Le contenu des conférences permet d'inclure Maxime dans ce qu'on appelle le « moyen - platonisme » , désignation qui groupe une liste hétérogène d'auteurs attachés à la tradition platonicienne entre Antiochos d'Ascalon au jer siècle av . J.-C. et Plotin au IIIe siècle ; cf. 167 P.L. Donini , Le scuole, l'anima, l'impero. La filosofia antica da Antioco a Plotino, Firenze 1982 , réimpr. 1997, p . 133-137 . Il s'agit d'une période où l'Académie absorbe de nombreux éléments du stoïcisme ; cf. Hobein 3 , p . 39-53 pour Maxime. Puiggali 10, p. 573 sq . , a reconnu cette volonté de synthèse médio - platonicienne dans les aspects suivants : la conciliation de la liberté et la nécessité ( VII ) ; l'idée qu'il n'y a pas d'autre bien que la vertu ( mais sur le caractère platonicien de cette idée , cf. Annas 163, p. 31-51 ) ; la présence d'une psychologie bipartite ( XX 4, XXVII 5 ) et la défense d'une vie « mixte » dans le débat sur la vie contemplative et la vie active ( XV -XVI ) , même en accordant à la contemplative une plus grande dignité . En ce qui concerne les questions théologiques, Puiggali signale que dans XI on trouve, comme chez Alcinoos et chez Celse , les trois voies fondamentales de la connaissance de la divinité ; cf. 168 A.J. Festugière, La Révélation d'Hermès Trismégiste, 4 vol . , Paris 1949-1954, t. IV, p . 109-115 , et Peitler 22, p. 27-66 . Dans la définition de la prière (V ) , Maxime anticipe des idées néopla toniciennes.

Les autres socratiques Maxime estime que la pensée de Socrate peut se reconstituer à partir de la pensée commune de ses disciples : cf. XVIII 5 ånoxpiváoow nuiv unÈO TOŨ Σωκράτους Πλάτων , ή Ξενοφών , ή Αισχίνης , και τις άλλος των ομοφώνων aúto ( aussi XXII 6 ) ; 169 K. Döring, Exemplum Socratis. Studien zur

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Sokratesnachwirkung in der kynisch -stoischen Popularphilosophie der frühen Kaiserzeit und im frühen Christentum, coll . « Hermes - Einzelschriften » 42 , Wiesbaden 1979, p. 130-138 ; 170 M. Szarmach, « Drei Diatriben des Maximos von Tyros mit Sokrates » , Eos 72 , 1984, p . 75-84 (en polonais avec résumé en latin ; réélaboré dans Id . 13 , p . 24-35 ) . De Xénophon Maxime connaît surtout l’Apologie de Socrate , le Banquet et les Mémorables ( cf. e.g. III passim , et Dürr 4, p. 86 sq. ) . D’Aischinès de Sphettos ( >A 71 ) il connaît l'Alcibiade ( cf. VI 6 et VII 7 = SSR VI A 42 , XVIII 4 = SSR VI A 31 et 9, XXXVIII 4 = SSR VI A 62 ) et, peut-être, l'Aspasie ( cf. XVIII 4, XXXVIII 4 = SSR VI A 62) ; cf. Meiser 73. Enfin , la présence d'Antisthène ( > A 211 ) chez Maxime est plus controversée. Maxime ne le mentionne qu'une seule fois avec Aischinès en 19 (= SSR V A 19 ) comme disciple pauvre de Socrate dont la vertu n'était pas utile à la cité. 171 F. Napolitano , « Gli studi omerici di Massimo Tirio » , AFLN 17 , 1974-1975 , p . 81-103 , a soutenu une influence d’Antisthène sur l'interprétation homérique de Maxime à travers Dion Chrysostome, mais 172 J. Puiggali , « Dion Chrysostome et Maxime de Tyr » , AFLD 12 , 1982 , p. 9-24 , a montré que les parallélismes entre les deux auteurs ne sont pas valables et ne démontrent pas la dépendance de Maxime par rapport à Dion sur ce point. 173 Id ., « Maxime de Tyr et Favorinos » , AFLD 10 , 1980 , p . 47-62 , a également mis en question l'influence directe de Favorinus sur Maxime. L'éclectisme de Maxime, l'unité de la philosophie et l'exclusion d'Épicure L'existence dans quelques conférences d'éléments irréconciliables avec le platonisme ancien a mené certains à considérer Maxime comme un auteur éclec tique ; cf. e.g. Hobein 33 , p. 211 sqq . , et sur la variété des sources philo sophiques de Maxime, Id . 3 , p . 53-90 ( notamment sur le motif cynico -stoïcien de la vie en tant que représentation théâtrale, cf. Koniaris 12 , qui critique le platonisme de Maxime et rapproche ce dernier de la tradition cynico -stoïcienne ). Or, la qualification d ' « éclectisme » peut laisser entendre à tort que le penseur construit sa position en choisissant selon son goût ce qui lui convient le plus de chaque école philosophique; cf. Dillon 25, p. XIV , et 174 Id ., « ' Orthodoxy ' and ' Eclecticism ' : Middle Platonists and Neo - Pythagoreans» , dans J. Dillon et A. A. Long (édit. ) , The question of eclecticism , Berkeley 1988 , p . 103-125 . Pour commencer, on peut reconnaître dans une bonne partie de ces éléments la tendance du moyen -platonisme à incorporer des thèmes stoïciens à une doctrine essentiellement platonicienne ; cf. l'analyse de Soury 46 des conférences sur la prière ( V ) , le destin ( XIII ) et l'origine des maux humains ( XLI ) , où les éléments stoïciens sont soumis à la conviction platonicienne que l'homme participe du divin , où il doit retourner comme s'il s'agissait de sa patrie. Dans certains cas on trouve des idées acceptées par le milieu philosophique général de l'époque de Maxime , indépendamment de sa provenance ; cf. la définition de la philosophie dans XXVI 1 , qui , malgré ses racines stoïciennes, n'implique pas un engage ment philosophique spécifique. À ce niveau , il n'est pas pertinent de parler d'éclectisme, puisqu'il existe à l'époque de Maxime entre les diverses écoles des « mélanges » doctrinaux d'une variété extraordinaire qui seront la norme pendant un certain temps . Le moyen -platonisme depuis Antiochus se distingue par sa

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tendance à faire converger des traditions philosophiques qui remontent à Platon , à Aristote et au stoïcisme, auxquelles viendra bientôt s'ajouter le pythagorisme avec Eudore d'Alexandrie ( E97 ) ; cf. 175 E. Zeller, Die Philosophie der Griechen in ihrer geschichtlichen Entwicklung, t. III 2 , 5e éd . , Leipzig 1923 , réimpr. Hildesheim 1963 , p. 219-223 , et Dillon 25 , p . 115-135 . L'analyse du platonisme de Maxime doit donc signaler la façon dont les idées stoïciennes et pythagoriciennes se mélangent dans un ensemble d'inspiration originairement platonicienne qui ne permet pas une distinction nette entre ses composants. On doit ajouter que, du temps de Maxime, le qualificatif « platonicien » n'im plique pas tant une relation scolaire qu’un lien spirituel : il s'agit de connaître à fond les écrits de Platon et de cultiver une apparence et un comportement qui rappellent le maître ( uiderier gestiebat) ; cf. Aulu -Gelle , Nuits Attiques XV 2 , 1 sqq .; Glucker 155 , p . 137 sq . et 206-225 ; Trapp 16 , p. XXII , et Kalligas 81 , p . 391 sq . Or, on doit admettre l'existence d'autres éléments qui sont étrangers au moyen - platonisme ; par exemple , la définition de la science dans VI, ainsi que l'insistance généralisée sur la « morale pratique » dans XIV et XXXV ( sur l'amitié ), XXV ( sur l'accord entre l'action et la pensée ), XXXIV ( sur la possi bilité de tirer profit même des vicissitudes ) , II ( sur les images des dieux ) et XXXVI ( sur la vie cynique ) . Comme le souligne Trapp 16 , p . XXIII, bien qu'on reconnaisse l'existence d'une diversité doctrinale , ces doctrines ne s'opposent jamais aux platoniciennes et l'on n'oblige jamais l'auditoire à faire un choix parmi les doctrines . De fait, la philosophie authentique se présente comme une tradition unique qui , sous différentes personnalités philosophiques , dit toujours la même vérité ( I 10 ) . Dans la recherche de cette tradition unique, Maxime tourne son regard vers le passé et trouve des points de repère fondamentaux chez Platon et aussi chez Pythagore et les poètes , surtout chez Homère ; cf. 176 M. Szarmach , « Über Begriff und Bedeutung der Philosophia bei Maximos Tyrios » , dans P. Oliva et A. Frolíkova (édit. ) , Concilium Eirene XVI, Praha 1983 , t . I , p . 223-227 ( = « De significatu vocis philosophiae apud Maximum Tyrium » , Meander 38 , 1983 , 199-202 [en polonais, résumé en latin ) ; trad . allem . partielle dans Id. 13 , p . 11 sqq . ) . En ce sens , la philosophie de Maxime est inséparable d'une idée de l'histoire selon laquelle l'humanité dégé nère à mesure que la culture devient plus sophistiquée ; cf. 177 C. Andressen , Logos und Nomos . Die Polemik des Kelsos wider das Christentum , Berlin 1955 , p . 252-256 , pour qui Maxime a emprunté cette idée à Posidonius ; d'après Puiggali 10 , p . 91 n . 1 , il l'a empruntée à Antiochus. La parole (Móyoc) a subi une semblable décadence depuis le temps où la poésie déclarait les vérités essentielles sur la divinité et la vie humaine , la philosophie étant le reflet le plus fidèle de cette dégénérescence à cause de la diversification extrême qu'elle présente ; cf. IV 2-3 , XXVI 2 , XXIX 7. Maxime s'inquiète de la diversité des sectes philosophiques , dont l'effet sur le débutant peut être dévastateur ( XXX 1 ) . Il en exclut Épicure ( E 36 ) , qui aurait usurpé le titre de philosophe . En réalité, la distinction entre la philosophie et Épicure est la même qu'entre la vertu et le plaisir ; l'épicurisme n'est donc pas une option philosophique .

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La philosophie d'Homère Cf. 178 S. Weinstock , « Die platonische Homerkritik und ihre Nach wirkung » , Philologus 82 , 1926 , p . 121-153 , notamment p . 148-150 ; 179 J. F. Kindstrand, Homer in der zweiten Sophistik, coll . « Acta Universitatis Upsaliensis. Studia Graeca Upsaliensia » 7 , Uppsala 1973 , p . 45-71 et 163-192 ; 180 F. Buffière, Les mythes d'Homère et la pensée grecque, 2e éd . , Paris 1973 , p. 525-528 ; Napolitano 171 ; 181 H. Schwabl , « Zeus nickt ( zu Ilias 1 , 524-530 und seiner Nachwirkung ) » , WS N. F. 10 , 1976, p . 22-30 , notamment p . 29 sq.; 182 J. Campos Daroca et J.L. López Cruces, « Maxime de Tyr et la voix du philosophe » ( sous presse ). Maxime est la source principale pour reconstituer le débat soutenu au II siècle sur la sagesse d'Homère et la valeur de sa poésie ; cf. Weinstock 178, p . 145-152 , 183 R. Lamberton , Homer the theologian, neoplatonist allegorical readings and the growth of the epic tradition , Berkeley -Los Angeles-London 1989 , p. 10-21 , Dörrie - Baltes 48 , p . 64 et 250-255 ( Baustein 85 : « Das Thema Platon und Homer » ) , et Kindstrand 179 sur l'Homère de Maxime . Ainsi , XVII se demande si Platon a bien fait de chasser Homère de son État idéal ; XXVI , si la sagesse d'Homère est une philosophie (aipeous ), et IV compare la façon dont poètes et philosophes parlent des dieux . La position de Maxime est résolument conciliatrice : philosophie et poésie sont des discours complémentaires et égale ment valables quand ils sont en quête de la vérité. Cependant, de façon cohé rente avec l'idée de l'histoire que se fait Maxime, les poètes ont le privilège de l'ancienneté et, donc , de la vérité : il accorde à Homère la prérogative d'être le maître de Platon lui-même, davantage encore que Socrate ( XXVI 3 ) . Du temps de Maxime il était fréquent d'expliquer le langage de la poésie en général et notamment d’Homère en termes d'allégorie , entendue comme un mode d'expression par lequel l'auteur attribue un sens caché qu'il est capital pour l'interprète de dévoiler s'il veut comprendre le texte dans son intégralité ; cf. Buffière 180 , p. 9-78 , 184 J. Pépin , Mythe et allégorie, 2e éd. , Paris 1976 , et 185 G. R. Boys-Stones (édit. ) , Metaphor, allegory and the classical tradition . Ancient thoughts and modern revision , Oxford 2003. Dans IV Maxime se sert de la série lexicale αίνιγμα- αινίττομαι pour mettre en relief la signification latente d'un passage ou d'un mythe ( $$ 3 , 5 , 6 et 7 ) . Pour lui , ce mode d'expression est commun à la poésie et à la philosophie et s'oppose à la licence moderne de tout dire ouvertement (Tappnoia ), que Maxime compare dans IV 5 à la profanation des Mystères et dans XXVI 2 même à la prostitution . L'expression de l'allé gorie , conçue comme vêtement et parure, suscite le respect (aidúc) des hommes envers ce qu'ils ne voient pas tout à fait, les incite à la quête de la vérité et, en même temps, leur procure un plaisir particulier qui n'est pas indépendant de sa capacité d'adaptation au public le plus varié. Malheureusement, l'effet éducatif n'était immédiat qu'avec le public simple et presque enfantin des premiers temps ( IV 2) ; à présent que le discours s'est fragmenté à cause de son utilisation par les sectes philosophiques , il faut compter, d'un côté , avec la dégénérescence du mythe poétique quand on lui ôte la vérité et, d'un autre , avec la transfor mation de la philosophie en quelque chose de pire qu'un mythe , comme dans le

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cas d'Épicure ( IV 8 ) . Avec cette conviction , Maxime lit dans la poésie d'Homère les mêmes vérités qu'expriment les philosophes en prose sur le monde physique ( IV 8 , XXVI 6) et sur le monde moral ( XXVI 8 ) . Homère est un des fondements du projet littéraire de Maxime de créer un discours philosophique (quóoopoc Nóyos ) qui tient compte de la diversité des publics et des situations sans perdre l'unité d'inspiration originelle ; c'est pour quoi , dans la première conférence, qui sert d'introduction à l'ensemble , il commence par l'exemple de l'acteur comme modèle du philosophe justement par son habileté à adapter sa voix aux différents personnages. La polyphonie, qui a un sens négatif quand elle s'applique à la diversité des voix discordantes du peuple ( VII 2 , IX 6, 7 , XI 10 , XIII 3 , XVI 4 , XXVII 6, XXIX 3 ) et de la philo sophie fragmentée en sectes (XXX 1 ) , est rapportée positivement à Homère dans la conférence XVIII , la première de la série sur l'amour de Socrate, où il est présenté comme le plus capable d'émettre des voix différentes (nohupovó tatoS , XVIII 8 ) . En cela il coïncide avec Platon : du temps de Maxime une interprétation des dialogues platoniciens est attestée selon laquelle « Platon a plusieurs voix , non pas plusieurs opinions » ; cf. Arius Dydimus chez Stobée II 7, 3f et II 7 , 4a ; Annas 161 , p. 9-30 . Le philosophe et le poète apparaissent unis dans leur capacité de diversifier leur voix sans que les opinions fondamentales changent , empêchant ainsi que la représentation de la diversité de la vie efface les distinctions éthiques fondamentales. Le modèle de Maxime ne serait pas tant la sagesse de l'acteur que celle de Calliope, la Muse « à la belle voix » , qui apprit à Homère à multiplier la sienne pour mieux transmettre la beauté morale (T) xalóv ) . Finalement, Homère et Platon se rejoignent aussi sur les tableaux moraux qu'ils tracent tout au long de leurs euvres, et qui deviennent signifi catifs à cause de leur emplacement antithétique dans le cadre de la trame ( XXVI 5 ). Postérité En général , cf. Trapp 16, p. LV - XCIV et les introductions qu'il consacre aux differentes διαλέξεις.. Le premier auteur byzantin qui parle de Maxime est Théodore Métochite au XIII ° siècle . Trapp 16 , p . LXIV , suggère qu'il peut avoir suscité un intérêt pour Maxime chez Nicéphore Grégoras (cf. supra à propos du Codex I ) . 186 K. Hult ( édit. ), Theodore Metochites on ancient authors and philosophy. « Semeioseis gnomikai » 1-26 & 71. A critical edition with introduction , translation , and notes by K.H. , with a contribution by B. Bydén , coll . « Studia Graeca et Latina Gotho burgensia » 65 , Göteborg 2002, p . 86 sq . n . 6, a vu une influence de Maxime XVIII 5 à propos de Socrate et des socratiques dans Miscellanea 8 , p. 66 Müller Kiessling. B. Bydén , dans Hult 184, p. 245-288, notamment p. 249, et 187 Id ., Theodore Metochites' « Stoicheiosis astronomike » and the study of natural philosophy and mathematics in early Palaiologan Byzantium , coll . « Studia Graeca et Latina Gothoburgensia » 66, Göteborg 2003, p . 331-334 , a repéré l'influence de Maxime XI 1-3 dans Miscellanea 88 et 90 et il a remarqué des ressemblances entre les deux auteurs dans la forme et dans la structure , mais non pas dans les détails du style.

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Tout au long du XVe siècle les manuscrits contenant l'æuvre de Maxime arrivent en Italie. On constate leur présence dans les bibliothèques de quelques professeurs et érudits , dans celles du Vatican et du cardinal Bessarion ( 1395 / 1403-1472 ), qui en a eu trois copies (manuscrits Y , Z et un troisième aujourd'hui perdu ). Une de ses connaissances , Michel Apostolès ( ca 1420 1474/86) , a inclus dans ses Proverbia neuf citations de Maxime qui ont été transmises dans la version augmentée du recueil préparée par son fils Arsène . Un moment essentiel de la réception de Maxime est l'accueil de ses conférences dans le cercle des Médicis dans la Florence des dernières décennies du Xve siècle et des premières du XVI°. Marsile Ficin l'a considéré comme une source digne de foi sur Socrate : il l'a cité dans l'introduction de sa traduction du Théagès platonicien et l’a paraphrasé in extenso dans son commentaire du Banquet ; cf. 188 M. Ficino (édit . , trad . ), Omnia Divini Platonis Opera, Basel 1551 , p . 8 et 415. Cristoforo Landino s'est servi des conférences XV et XVI sur les vies active et contemplative pour la structure de la première des Disputa tiones Camaldulenses et pour fournir des exemples à la fin de la troisième. Angelo Poliziano a cité des passages de Maxime dans plusieurs de ses euvres : Trapp 16 , p. LXXI sq . , rappelle, en outre, l'utilisation de XVIII 9 dans quelques notes du commentaire d'Ovide , notamment de la lettre de Sappho à Phaon (Héroïdes 15 ) , une citation de VIII 1 dans le commentaire aux Silves de Stace ( 1 2 , 247 ) et une autre de XXIX 1 dans Miscellanea I 15 ; 189 A. Guida, c.r. de Trapp 119 et de Koniaris 120 , dans Prometheus 23 , 1997 , p. 279-282 , notam ment p. 279, a signalé quelques citations de Maxime aussi dans les Nutricia de Poliziano ; cf. 190 F. Bausi (édit. ) , A. Poliziano, Silvae, Firenze 1996, p . XVII, 228 et 234. Selon Trapp 16 , p . LXXI , Poliziano est probablement l'auteur de certaines annotations du Codex Parisinus gr. 1962 , éditées par Trapp 119, p . 347-354 ; quelques-unes parmi elles , notamment celles de la fin de la Disser tation XVIII , ont été incluses par Poliziano dans des notes de son édition des æuvres d'Ovide ( Bodl. Auct. P. 2. 2 ) et dans la version écrite d'une série de conférences qu'il prononça au début de 1481 dans le Studio de Florence ; d'après 191 Chr. Förstel, c . r. de Trapp 119, dans Scriptorium 49 , 1995 , p . 168 , la consistence des annotations que Trapp attribue à Poliziano est faible et il existe certaines divergences entre celles-ci et les citations de Maxime qui appa raissent dans ses æuvres. Zenobi Acciaiuoli , proche de Poliziano et responsable de la Bibliothèque de Saint Marc à Florence, lut très attentivement le Codex Laur. Conv. Sopp. 4 (= I ) et essaya de corriger le texte de nombreux passages ; cf. Trapp 87. De son côté , Giovanni Pico della Mirandola et Janos Lascaris possédaient chacun une édition des conférences ; on ne sait pas quel était le manuscrit acquis par le premier, mais le second était le propriétaire du Har leianus gr. 5760 (= H ) , qu'il annota largement. Lascaris, en outre, a sûrement joué un rôle décisif dans l'arrivée du Parisinus gr. 1962 à Florence et a entraîné la première traduction latine de Maxime, celle de Paccius 127. De la survie de Maxime à partir de ce moment font foi les différentes éditions et traductions ( cf. supra ) ainsi que les citations , de plus en plus fréquentes, extraites des conférences, qui ont été recueillies en détail par Trapp 16 ,

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p. LXXIX - XCIV . Parmi celles-ci on peut souligner le parti tiré de Maxime pour des questions religieuses par 192 Lilio Gregorio Giraldi, De deis gentium , Basel 1548 , et par 193 G. Voss , De theologia gentili et physiologia christiana, sive De origine et progressu idolatriae, Amsterdam 1642, réimpr. 1668 et 1706 ; pour des questions philosophiques, par 194 R. Cudworth , The true intellectual system of the Universe , London 1678 ; réimpr. London 1845 et Bristol 1995 ; pour des questions artistiques, par 195 F. Junius , De pictura Veterum , Amsterdam 1637, et 196 Id ., Catalogus Architectorum ..., Rotterdam 1694 ; et pour la connaissance de la poésie et des poètes lyriques , notamment Sappho et Anacréon dans XVIII 9 , F. Orsini , Carmina novem illustrium feminarum ... et lyricorum , Antwerp 1568 . Pour l'Espagne et l'Amérique latine , voir López Cruces et Campos Daroca 149, vol . I , p. 69-73 . Hernán Núñez de Guzmán, « Comendador Griego » de l'Université de Salamanca connu comme « el Pinciano » , avait fait avant 1539 une copie personnelle de la version latine de Paccius 127 ; cf. 197 J. Signes Codoñer, C. Codoñer Merino et A. Domingo Malvadi , Biblioteca y Epistolario de Hernán Núñez de Guzmán (el Pinciano ) : una aproximación al humanismo español del siglo XVI, Madrid 2001, p. 279 n . 69 ; 198 V. Beltrán de Heredia, Cartulario de la Universidad de Salamanca, Salamanca 1970-1972 , t. III , nº 1143 , p. 491 . Maxime apparaît cité de façon récurrente comme une autorité dans des traités de poétique, surtout par sa manière originale de concilier dans XVII 3-4 la dévotion envers Homère avec son expulsion de l'État platonicien : cf. 199 A. López Pinciano , Philosophia Antigua Poética, Madrid 1596 ( texte établi par A. Carballo Picazo, 3 vol . , ibid. 1953 , t. I , p. 178 ) ; 200 L. A. de Carballo, Cisne de Apolo, Medina del Campo 1602 ( texte établi par A. Porqueras Mayo, 2 vol , Madrid 1958 , t. II, p. 4 ; aussi t . I , p. 134 , où l'on cite un passage du début de la conférence IV en traduction latine et espagnole à propos de l'étroit rapport entre philosophie et poésie ) ; 201 J. A. González de Salas , Nueva idea de la tragedia antigua, Madrid 1633 ; réimpr. ibid . 1778, p . 17 n . 2 et p. 74 sq. En 1774 , Reiske 115 , p . IV sq . , émet un jugement négatif qui finit par s'imposer sur le style de Maxime et , ainsi , pendant près de deux siècles il a été considéré comme un philosophe médiocre et comme un rhéteur ennuyeux ; cf. e.g. 202 E. Norden, Die antike Kunstprosa, Leipzig 1898 , t . I , p . 164, et 203 A. Croiset et M. Croiset , Histoire de la littérature grecque, Paris 1938 , t . V,

p. 581 . Notice traduite de l'espagnol et adaptée par Fedra Egea Tsibidou. JAVIER CAMPOS DAROCA ET JUAN LUIS LÓPEZ CRUCES.

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Philosophe cynique d'origine égyptienne , revendiquant un christianisme militant conforme à l'orthodoxie de Nicée . Sources. Maxime est connu surtout par Grégoire de Nazianze , son ami devenu son ennemi :

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– Discours 25 et 26 dans 1 J. Mossay (édit. ) , Grégoire de Nazianze , Discours 24 , 25 et 26 , coll . SC 284, Paris 1981 ; - De vita sua (= Carmina II 1 , 11 ) vv . 728-1112 , dans 2 J.T. Cummings, A critical edition of the “ Carmen de vita sua ” of St. Gregory Nazianzen , Princeton 1966 ; 3 Ch . Jungck ( édit . ) , Gregor von Nazianz, De vita sua . Einleitung, Text, Übersetzung, Kommentar, coll . « Wissenschaftliche Kommen tare zu Griechischen und Lateinischen Schriftstellern » , Heidelberg 1974 ; 4 Saint Grégoire de Nazianze, Euvres poétiques, t. I : 1 re partie, Poèmes person nels, II , 1 , 1-11 . Texte établi par A. Tuillier et G. Bady , traduit par J. Bernardi, CUF, Paris 2004, p. 57-136 . Trad . allemande par Jungck 3 ; trad . anglaise par 5 Carolinne White , Gregory of Nazianzus. Autobiographical Poems, coll . « Cambridge Medieval Classics » 6 , Cambridge 1996, p. 10-153 ; trad . française par 6 Alessandra Lukinovitch et C. Martinguay, dans Le dit de sa vie. Grégoire de Nazianze, Genève 1997 , et par Bernardi 4. - Contra Maximum (= Carmina II 1 , 41 ; PG 37 , col . 1339-1344 ); - In invidos (= Carmina II 1 , 40 ; PG 37 , col . 1337-1339 ) ; - Discours 42 , 20 dans 7 J. Bernardi, Discours 42-43 , coll . SC 384 , Paris 1992 , p. 92 , 17-18 (κέκμηκα και λόγω και φθόνω μαχόμενος και πολεμίοις xai nuetépolç, « Je suis las de me battre contre ce qu'on dit, contre la jalousie , contre mes ennemis et contre les nôtres » ) . Bernardi, qui estime que ce discours a été prononcé non, comme on le pense généralement, devant les évêques pendant le Concile de Constantinople , au début de l'été 381 , au moment où Grégoire a présenté sa démission, mais quelque temps après le Concile , ou même qu'il n'a jamais été prononcé oralement , suggère d'identifier les jaloux évoqués à Maxime, Pierre d'Alexandrie et peut-être le Pape Damase ; - Discours 36, 5 (PG 36, col . 272, n . 78) : une scholie byzantine attribuée à Élias de Crète croit reconnaître Maxime dans le personnage évoqué par Grégoire comme « Jeroboam , l'esclave du péché » ; mais les Mauristes pensent plutôt aux Ariens Démophile ou Eudoxe, une position qui est adoptée par 8 C. Moreschini, Discours 32-37 , coll . SC 318 , Paris 1985 , p. 253 n. 4. Maxime est connu aussi par quelques autres témoignages importants : - Athanase , Lettre à Maxime le philosophe ( PG 26 , col . 1085-1090 = CPG 2100 ), dont il existe également une version syriaque et une version latine. Traduction anglaise par 9 A. Robertson dans A Select Library of Nicene and Post-Nicene Fathers of the Christian Church , seconde série , Buffalo /New York 1886-1900 , t . IV , p . 578-579. Les Mauristes identifient (col . 1083-1084 ) ce Maxime avec Héron , ce qui semble tout à fait légitime . - Basile, Lettre 9 à Maxime philosophe dans 10 Y. Courtonne (édit. ) , Lettres de Basile, CUF, t. I , Paris 1957 , p. 37-40 . Outre qu'il s'agit d'un défenseur de l'orthodoxie, trois éléments invitent à identifier ce Maxime avec Maxime-Héron le Cynique : évocation d'un mot de Diogène à Alexandre en 3 , 22-24 ; allusion au cosmopolitisme cynique , Maxime étant présenté comme « citoyen de la terre habitée » en 3 , 28 , et à la morale des actes que préconisent les cyniques en 3 , 31 (« vous montrez par votre exemple les actes selon la vertu » ) . Voir

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11 R. Pouchet , Basile le Grand et son univers d'amis d'après sa correspon dance. Une stratégie de communion, coll . « Studia Ephemeridis “ Augustinia num " » 36 , Roma 1992, p. 117-125 ( « Basile et Maxime le Philosophe » ). - Ambroise , Lettre 13 , 3 , dans PL 16 , col. 950-953 = Lettre 9 dans CSEL 82 , t . III : Epistulae extra collectionem , p. 201-204 Michaela Zelzer; - Damase, Lettres 5 (Ad Acholium et alios Macedoniae episcopos) et 6 (Ad Acholium Thessalonicensem episcopum ), dans PL 13 , col . 365-370 = nº 79 A et B , dans 12 P.-P. Joannou , Die Ostkirche und die Cathedra Petri im 4 . Jahrhundert, bearbeitet von Georg Denzler, coll . « Päpste und Papsttum » 3 , Stuttgart 1972 , notamment Damasus I (366-384 ), p. 239-242 . - Le quatrième canon du Concile de Constantinople de 381 , dans 13 I. Ortiz de Urbina , Histoire des conciles æcuméniques, t . I : Nicée et Constantinople, Paris 1963 , p . 285 ( trad . française ), et dans 14 J. Stevenson , Creeds, Councils and Controversies. Documents illustrative of the history of the Church A.D. 337-461, London 1966, n ° 101 ( trad . anglaise ) , p. 147-150 , notamment p . 148 149 . - Jérôme , De viris illustribus, dans 15 E.C. Richardson, coll . « Texte und Untersuchungen » 14 , Leipzig 1896 , p . 52 ( chap . 117 ) et p. 54 ( chap. 127 ). Maxime avait défendu la doctrine de Nicée contre les hérétiques dans un ouvrage Contre les Ariens, qui était , selon Jérôme , De viris illustribus 117 , dédié à l'empereur Gratien Sozomène, Histoire ecclésiastique VII 9 , 4 dans GCS NF, Bd . IV , Berlin 1960, p . 312 , 6-11. - Théodoret, Histoire ecclésiastique V 8 , 3-9 dans GCS NF, Bd . V , Berlin 1954 , p . 287 , 14-288 , 23 . Un seul personnage avec deux noms ( nom et pseudonyme ? ) Toute la tradition manuscrite du Disc . 25 de Grégoire de Nazianze parle de « Héron » , alors que le De vita sua ( = Carmina II 1 , 11 ; vv . 763 , 810 et 1037 ) et le Contra Maximum ( vv . 21 et 27 ) parlent de « Maxime » . Bien que l'identité des deux personnages ait été contestée par 16 J. Sadjak , « Quaestiones Nazianzenicae I : quae ratio inter Gregorium Nazianzenum et Maximum Cynicum intercedat » , Eos 15 , 1909, p . 18-53 , elle est aujourd'hui admise , car trois témoignages viennent la confirmer ( cf. Mossay 1 , p . 120-127 ) : a ) Grégoire, De vita sua , vv . 954-967 , où Grégoire, parlant de « Maxime » , reconnaît en lui l'un des pires chiens ( xuvõv toùç xeipovac ) , auquel il a accordé son estime et qu'il a jugé digne des plus grandes louanges ( TÕU Meyiotwv yxwuiwv, allusion au Discours 25 qui est un éloge en l'honneur de « Héron » ) . b ) Jérôme, De viris ill. , chap . 117 , p . 52 Richardson, qui , parmi la liste des ouvrages de son ami Grégoire , mentionne : « Laudes Maximi philosophi post exilium reversi, quem falso nomine quidam Herona superscripserunt, quia est et alius liber vituperationem ejusdem Maximi continens, quasi non licuerit eundem et laudare et vituperare pro tempore , « " un éloge en l'honneur de Maxime le philosophe après son retour d'exil ” ; d'aucuns ont écrit par-dessus (ou au -dessus)

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de ce nom, en utilisant un faux nom, “ Héron ”, - parce qu'il y a aussi un autre livre qui contient un blâme à l'encontre du même Maxime, comme s'il n'était pas permis de louer et de blâmer le même homme selon les circonstances » . 17 P. Gallay, La vie de Saint Grégoire de Nazianze , Lyon /Paris 1943, p . 159 173 , notamment p. 163 , suit Jérôme et pense qu'on a écrit Héron à la place de Maxime dans le titre du Discours 25 ( cf. le titre offert par certains manuscrits , le Vindobon . theol. gr. 126 par exemple : Eiç " Howva tòv PlàÓOopov čx tñs εξορίας επανελθόντα ) . Le témoignage est important en raison de son ancienneté, car il a été daté de 393 par 18 P. Nautin , « La date du De viris illustribus de Jérôme, de la mort de Cyrille de Jérusalem et de celle de Grégoire de Nazianze » , RHE 56, 1961 , p. 33-35 . Jérôme suppose qu'on a voulu épargner à Grégoire le reproche de versatilité et d'inconséquence, son discours d'éloge [le 25 ] et son discours de blâme ( le 26 ] portant sur la même personne. 19 S. Lenain de Tillemont, Mémoires pour servir à l'histoire ecclésiastique des six premiers siècles, t . IX , Paris 1703 ( « Notes sur S. Grégoire de Nazianze » : p . 692-731 , notamment p . 712-713 ) , pense que « Maxime » et « Héron » sont les noms romain et égyptien d'un seul et même personnage ; il renvoie à deux passages de Vies de saints dues à Cyrille de Scythopolis (Vita Euthymii, dans 20 E. Schwartz [ édit . ) , coll . « Texte und Untersuchungen >> 49 , 2 , Leipzig 1939 , p . 60 , 7 , et Vita Sabae , ibid ., p. 183 , 13 ) , où l'hagiographe mentionne à côté d'Hippolyte l'Ancien et d'Épiphane le Chypriote , « Héron le philosophe et confesseur » , " Howvog toŨ piogódov xai duo oyntoũ. Il commente : « ceux qui lui (s.e. à Héron ) donnaient le titre de confesseur, n'avaient pas besoin de cacher son nom pour lui en donner un faux ; ainsi il semble assez probable qu'il avait les deux noms , mais qu'il se servait davantage de celui de Héron parmi les Égyptiens , et de celui de Maxime qui était romain , à Constantinople et parmi les Occidentaux. Néanmoins de la manière dont Saint Jérôme en parle, il paraît n'avoir point du tout su qu'il s'appelait Héron , et il est bien difficile de croire qu'il l'eut ignoré » . (c ) Grégoire, In invidos II 1 , 40 , v . 14-15 : pour ne pas « se souiller la langue » , Grégoire, qui a su que Maxime s'était fait légitimer comme évêque de Constantinople au concile d'Aquilée, mentionne au v . 15 « l'hypocrite par son langage et par son nom » ( eípwv'év Noyo xal toúvoua ), un hypocrite que B. Wyss a identifié avec Héron ( cf. 21 Marie -Madeleine Hauser-Meury, Proso pographie zu den Schriften Gregors von Nazianz, coll . « Theophaneia » 13 , Bonn 1960 , p. 119-120 n . 231 ) ; il a montré que elpwv n'est pas le participe présent au nominatif de elow , apposé au verbe xoávu dans la phrase, car il aurait été suivi de la construction eic Nóyov et non de tv Córw ), mais l'accusatif de εipwv' dont la finale a été abrégée. Ainsi kipuv' ... toŰvoua serait une façon voilée d'évo quer Maxime Héron sans avoir à prononcer son nom . Jungck 3 , p. 214 , rappro che de ce passage De vita sua, vv . 1518-1521 , où Grégoire procède de façon similaire à propos de Mélèce, l'évêque d'Antioche: « Qui n'a pas reconnu celui que mon propos dévoile, le chef de l'église d'Antioche , qui était ce que désigne son nom et qui était désigné par ce qu'il est ; doux comme le miel (uéditos) en effet étaient sa façon d'être et son nom » .

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Mossay 1 , p. 124, signale un problème d'orthographe: plutôt que d'écrire " Howv comme dans le Vindob. theol. gr. 126 par exemple ou ' HpWv (orthographe qu'on trouve dans plu sieurs manuscrits et qui a été adoptée dans la PG 35 ), il propose l'orthographe " Howv (qu'on lit dans le Patmiacus gr. 43 et le Mosquensis synod. 64 ), seule leçon rendant possible le jeu de mots suggéré par B. Wyss , qui implique un esprit doux . Si Maxime et Héron ne sont qu'un seul et même personnage , faut -il en

conclure que « Maxime » et « Héron » étaient deux noms , l’un romain et l'autre égyptien (Lenain de Tillemont ) , ou que l'un était le nom et l'autre le pseudo nyme ( Jérôme, Gallay, Wyss ) ? Les autres sources: Athanase, Basile , Ambroise , Damase, Théodoret, Sozomène et le quatrième canon du concile de Constan tinople ne parlent que de Maxime . Il n'est guère possible de trancher. Cependant Mossay 1 , p . 126-127 , s'appuyant sur De vita sua, v . 763 (et non 963 ! ) ( « comme si le genre masculin n'avait pas lui aussi ses Maxime » ), sur Contra Maximum v . 27 ( « Il y a beaucoup de Maxime et de désaxés » ) , deux passages où le nom employé au pluriel l'est dans un contexte tout à fait défavorable , et sur l'expression eípwv ' ... toúvoua de l’In invidos, se demande si « Maxime» ne serait pas « un mot réservé au reproche et à la vitupération » , auquel cas « Maxime » serait un surnom , un « sobriquet malveillant » et « Héron » le vrai nom . Comme si le problème des deux noms ne suffisait pas , on a voulu de façon tout à fait fantaisiste identifier Maxime Héron avec Évagre d’Antioche et Évagre le Pontique (22 R. Weijenborg, « Is Evagrius Ponticus the Author of the Longer Recension of the Ignatian Letters ? » , Antonianum 44 , 1969 , p . 339-347 ; 23 Id ., « Pompeianus Ruricius, Ancestor of Evagrius of Antioch and the Origin of the Constantinian Monogram » , Antonianum 46 , 1971 , p. 322-347 ; 24 Id ., « Les cinq Discours théologiques, attribués à Grégoire de Nazianze, en partie euvre de Maxime Héron le Cynique , alias Évagre le Pontique d'Antioche » , Antonianum , 48 , 1973 , p. 476-507 ; 25 Id ., « L'origine evagriana dei “Discorsi teologici III , IV , V (Discorsi XXIX , XXX , XXXI) ” attribuiti a Gregorio di Nazianzo » , Augustinianum 13 , 1973 , p . 551-565 ; 26 Id ., « Prova dell'inauten ticità del “ Discorso XXV ” attribuito a San Gregorio di Nazianzo » , Antonianum 54 , 1979 , p . 288-337 ) . Maxime aurait forgé le Discours 25 pour insinuer qu'il avait été loué par Grégoire ! Il serait également l'auteur des Discours 29 , 30 et 31. Sur les 45 discours attribués à Grégoire, 18 seulement seraient authentiques! Pour un avis réservé sur les thèses soutenues par Weijenborg, voir 27 V. Tiftixoglu, « Bibliographische Notizen und Mitteilungen » , BZ 68 , 1975 , p. 170 . Contexte historique 28 L. Duchesne, Histoire ancienne de l'Église, t . II4 , Paris 1910, p. 425-427 , 431 et 437 ; 29 J.B. Kidd , History of the Church, t . II : A.D. 318-408 , Oxford 1922, p. 279-295 ; 30 G. Bardy, P. de Labriolle et J.R. Palanque, Histoire de l'Église depuis les origines jusqu'à nos jours, t. III : De la paix constantinienne à la mort de Théodose, Paris 1936 , p . 285-296 ; Ortiz de Urbina 13 ; 31 A. M. Ritter, Das Konzil von Konstantinopel und sein Symbol. Studien zur Geschichte und Theologie des II. Ökumenischen Konzils, coll . « Forsch . zur Kirchen- und Dogmengeschichte » 15 , Göttingen 1965 , notamment p. 49-53 ;

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32 J. M. Szymusiak , « Pour une chronologie des discours de S. Grégoire de Nazianze» , VChr 20, 1966, p. 183-189 ; 33 H. Chadwick , The Early Church , Baltimore 1967 ; 34 J. Bernardi, La Prédication des Pères Cappadociens. Le prédicateur et son auditoire, ( s . 1. ] 1968 , p. 168-181 ; 35 G. Dagron , Naissance d'une capitale : Constantinople et ses institutions de 330 à 451, coll . « Biblio thèque byzantine. Études » 7 , Paris 1974, p. 447-461 ; 36 J. Mossay , « Gregor von Nazianz in Constantinopel » , Byzantion 47 , 1977 , p . 223-238 ; Joannou 12 , p. 159-293 ; 37 J. Bernardi, Saint Grégoire de Nazianze. Le Théologien et son temps ( 330-390 ), coll. « Initiations aux Pères de l'Église » , Paris 1995 , p. 175 228. La vie de Maxime Héron , notamment pendant les années 379-383 où nous avons des témoignages le concernant, est inséparable de l'histoire des Églises de Constantinople , d'Antioche et d'Alexandrie , en proie à cette époque aux divisions à cause de l'arianisme. Il fut mêlé aux querelles qui faisaient s'affron ter les orthodoxes et les Ariens, mais aussi aux rivalités qui opposaient entre eux les orthodoxes des églises d'Alexandrie et de Constantinople . Arius était mort depuis longtemps ( en 336) , mais l'hérésie s'était développée et les tenants du credo de Nicée essayaient de rétablir l'orthodoxie . L'Empereur arien Valens mourut le 9 août 378 à la bataille d'Andrinople. C'est Théodose , partisan de l'orthodoxie, qui lui succèda sur le trône d'Orient. Il fit son entrée triomphale à Constantinople le 24 novembre 380 ( cf. Socrate, Hist. eccl. V 6) , bien décidé à rétablir la foi de Nicée dans l'Empire d'Orient. Mais les Églises d'Alexandrie et de Constantinople étaient rivales ; celle d'Alexandrie , qui craignait le déclin de son autorité devant le prestige grandissant de la nouvelle capitale, veillait à ce que les évêques de Constantinople lui fussent acquis – ce qui permet de com prendre pourquoi Pierre d'Alexandrie voulut imposer Maxime comme évêque de Constantinople. L'Église d'Alexandrie, depuis que l'évêque arien Lucius s'était enfui à Constantinople (en 378 ; cf. Jérôme, De viris ill. 118 ) , avait à sa tête Pierre, le frère d'Athanase , celle d'Antioche Mélèce , qui mourut pendant le deuxième Concile ecuménique , lequel eut lieu à Constantinople , et celle de Constantinople un Arien , Démophile, qui avait été mis en place par Valens et qui , ne voulant pas se rallier au credo de Nicée , comme le lui demanda Théo dose le 24 novembre 380 , fut expulsé du siège épiscopal. A Constantinople le petit groupe des orthodoxes avait en 379 fait appel à Grégoire de Nazianze , qui avait accepté de revenir du monastère de Sainte - Thècle à Séleucie en Isaurie où il s'était retiré en 375. Comme à son arrivée il n'avait trouvé aucune église libre pour les chrétiens fidèles à la foi de Nicée, il avait converti en chapelle impro visée une pièce qui jouxtait la maison où il résidait et qui appartenait à des personnes qui lui étaient apparentées, et il l'avait appelée l’Anastasia, l'église de la Résurrection ( Disc . 26 , 17 ) . C'est dans ce contexte que Maxime fit son apparition à Constantinople. L ' « affaire Maxime » allait naître et se développer sur cette toile de fond ; elle suscita de vifs débats pendant le deuxième Concile æcuménique convoqué par Théodose à Constantinople (de mai au 9 juillet 381 ) , qui rétablit l'orthodoxie trinitaire que le Concile de Nicée de 325 avait définie, et elle s'acheva apparemment en 382.

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Biographie. Lenain de Tillemont 19, p. 712-713 ; 38 C. Lübeck , Die Weihe des Kynikers Maximus zum Bischofe von Konstantinopel in ihrer Veranlassung dargestellt, Schulprogramm Fulda 1907 ; Sajdak 16, p. 18-53 ; 39 O. Seek , art. « Heron » 2 , RE VIII 1 , 1912 , col. 992 ; 40 W. Ensslin , art. « Maximos » 109, RESuppl. V , 1931 , col . 676-677 ; Gallay 17 , p. 159-173 ; 41 B. Wyss, « Gregor von Nazianz, ein griechisch - christlicher Dichter des vierten Jahrhunderts » , MH 6, 1949 , p . 177-210 ; Hauser-Meury 21 , p. 119-121 ; Mossay 1 , p. 136-138 ; 42 B. Wyss , art. « Gregor II (Gregor von Nazianz) » , RAC XII , 1983 , col . 793 863 , notamment col . 796 et 822-824 ; 43 J. Bernardi, « Trois autobiographies de saint Grégoire de Nazianze » , dans M.-F. Baslez, Ph . Hoffmann et L. Pernot ( édit . ) , L'invention de l'autobiographie. D'Hésiode à Saint Augustin , coll . « Études de littérature ancienne » 5 , Paris 1993 , p. 155-165 . Maxime Héron est né à Alexandrie (Discours 25 , 3 , li . 19-21 Mossay : « Par la sagesse il est un citoyen de l'univers tout entier... , mais, physiquement il est originaire d'Alexandrie » ; De vita sua , v . 808 : « un second Protée égyptien » , Jérôme , De viris ill. 127 , p . 54 Richardson : « natus Alexandriae » ) dans une famille de martyrs chrétiens ( « il descend de martyrs, ex uaptúpwv, de sorte qu'il trouva au foyer familial l'exemple de la vertu » , Disc, 25 , 3 , li . 17-18 Mossay ) . Doit-on le présenter comme un converti ( cf. Gallay 17 , p. 160 ) ? Pas nécessairement. La phrase alléguée par Gallay : « C'était déjà beaucoup pour moi de voir un Chien venir à mon bercail et adorer le Christ au lieu d'Héraclès » ( vv . 974-975 ) , n'exclut pas que Maxime, né dans une famille chrétienne, ait été chrétien lui - même et qu'ensuite, devenu philosophe cynique , il ait néanmoins placé sa vénération pour le Christ avant celle qu'il portait à Héraclès, le Saint du cynisme . Il prit parti pour Athanase contre les Ariens. Dans une lettre écrite en 361 ou 362 (Lettre 9) , Basile , qui répond à Maxime, fait l'éloge de son « ardeur pour la science du divin » ( $ 1 ) et présente Maxime comme un homme qui s'intéresse de près aux questions théologiques -il l'invite ( § 3 ) à venir lui rendre visite pour discuter de la consubstantialité – et soucieux de lire des ouvrages de théologie ; Maxime lui a en effet demandé les écrits de l'évêque Denys d'Alexandrie ( 2 + D 81 ) , un païen converti, élève d'Origène, qui en 261 s'opposa au sabellianisme . Selon Pouchet 11 , p . 117-125 , il s'agit probablement de l'ouvrage en quatre livres de Denys: Réfutation et apologie, que celui- ci adressa en 263 à l'évêque de Rome , qui s'appelait aussi Denys. Maxime avait dû entendre parler de lui comme d'un témoin de la controverse trinitaire qui avait fait rage au milieu du IIIe siècle . Dom Pouchet identifie le Maxime de la Lettre 9 de Basile avec Maxime Héron , mais il signale, p. 121 n . 2 , que 44 Marcella Forlin - Patrucco, Basilio di Cesarea, Le lettere, t. I , coll . « Corona Patrum » , Torino 1983 , p. 299 , voit dans le Maxime de la Lettre 9 un magistrat engagé dans la vie publique , ce qui l'empêche de songer à une identification avec le cynique . Par ailleurs la lettre d'Athanase écrite autour de 371 et ainsi adressée : το αγαπητό και αληθώς ποθεινοτάτω υιώ Μαξίμω φιλοσόφω 'Αθανάσιος Év Kupiw xaipeiv, atteste que Maxime avait l'habitude dès cette époque d'écrire contre les païens et les hérétiques. Athanase loue Maxime pour ses écrits et l'encourage . Après la mort d'Athanase , le 2 mai 373 , Maxime combattit très

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vivement l'Arien Lucius , rival de Pierre à Alexandrie ; en conséquence de quoi il fut fouetté (Grégoire, Discours 25 , 3 , li . 3 : « champion de la Trinité jusqu'au sang » ; ibid. , 13 , li . 19 : « ton beau corps est lacéré à coups de fouet » ; De vita sua , v . 978 ) et en 374 banni au désert ( Discours 25 , 14) où il allait rester quatre ans. Au printemps 379 , Grégoire, qui avait quitté Nazianze à la mort de son père en 375 pour se réfugier au monastère de Sainte - Thècle à Séleucie d'Isaurie , arriva à Constantinople, à la demande de la petite communauté nicéenne de cette ville qui , se sentant opprimée , l'appelait au secours . Dans le courant de 379 arriva également à Constantinople Maxime Héron qui apparaît aux yeux de Grégoire comme porteur de la victoire de la foi ( De vita sua , v . 978 : tuoi VLXnpópos), qu'il invite à sa table et qui partage avec lui « toit, table, opinions et projets » ( ibid. , v . 811 ) . Grégoire, qui se considérait comme son ami ( ibid. , v . 954 ) et qui appréciait son soutien en faveur de l'orthodoxie, écrivít un éloge en sa faveur, le Discours 25 ( que l'on date des premiers mois de 379 ) , éloge qu'il prononça en sa présence devant les fidèles juste avant que Maxime ne s'embarque probablement pour Alexandrie où il dut aller voir Pierre (Disc. 25 , 19, li . 20 Mossay : « De cette façon quitte le pays , de cette façon prépare -toi au départ » ) . Bernardi 34 , p . 169-170 , situe avec de bons arguments ce départ pour Alexandrie au printemps 380 , alors qu'auparavant on le situait plutôt courant 379. Maxime revint ensuite à Constantinople. C'est alors qu'eut lieu , dans la première moitié de l'année 380, la tentative d '« usurpation » de Maxime (Bernardi 34 , p . 172 , n . 174 : « Maxime n'a pu revenir d'Alexandrie qu'après la reprise de la navigation : sa tentative se situerait donc au plus tôt en mars 380 , et plus probablement en avril - mai » ) . Pierre d'Alexandrie , qui avait pourtant adressé à Grégoire une lettre où il le reconnais sait comme évêque de Constantinople et où il l'honorait des « insignes » de sa juridiction épiscopale (De vita sua , vv. 858-863 ) , décida alors de faire consacrer Maxime – lequel bénéficia de la complicité d'un prêtre de Thasos porteur d'une forte somme d'argent ( v . 875 ) - évêque en secret dans l'église de l’Anastasia . Voir vv . 747 , 833 , 844 ; Discours 26 , 3 , li . 15-17 ; Ambroise , Lettre 9 , qui expliquera que si l'ordination de Maxime s'est faite en secret dans une maison privée , c'est à cause de la présence des Ariens dans les lieux de culte ( $ 3 , p. 202 Zelzer ; nous adoptons la leçon des manuscrits « secretum » , plutôt que la conjecture « se cre tum de M. Zelzer); Damase, Lettre 5 , PL 13 , col . 365 ( = nº 79 A 1 , p. 239 Joannou 12 ) , qui souligne que cette ordination va contra regulam ecclesiasticae disciplinae ; Lettre 6, PL 13 , col . 370 ( = nº 79 B , p. 240 Joannou 12) ; Théodoret, H. E. V 8 , 3 , p . 287 , 14-18 GCS, qui , par erreur, attribue à Timothée d'Alexandrie , l'évêque qui succéda à Pierre , les démarches que fit ce dernier en faveur de l'ordination de Maxime ; Sozomène , H. E. VII 9 , 4 , p. 312 , 10-11 GCS. Étaient venus d'Égypte pour la circonstance , à un moment où Grégoire était souffrant (De vita sua , v . 887 ) , des matelots, probablement destinés à prêter main forte à Maxime ( v . 841 ) , puis des évêques égyptiens que Pierre avait envoyés à Constantinople pour assurer l'ordination ( vv . 844-847 ). Ceux -ci entrent dans l'Anastasia la nuit , coupent les cheveux de Maxime

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( v . 892 ; cf. v . 913 ) auxquels celui-ci donnait tous ses soins et s'apprêtent à le consacrer évêque . En fait la cérémonie fut perturbée par des orthodoxes mais aussi par des Ariens qui s'indignaient ( vv . 898-902 ) ; elle se poursuivit ailleurs, dans le misérable local d'un joueur de flûte ( v. 909-916 ). Finalement Maxime s'enfuit à Thessalonique ( vv . 1001-1009 ) où il espérait convaincre l'empereur Théodose de la justesse de sa cause . Cette rencontre avec Théodose eut lieu avant juillet 380 ( voir 45 G. Rauschen , Jahrbücher der christlichen Kirche unter dem Kaiser Theodosius dem Grossen . Versuch einer Erneuerung der “ Annales ecclesiastici” des Baronius für die Jahre 378-395, Freiburg im Breisgau 1897 , p . 61 et p. 75 et n . 4 ; ce livre est capital pour comprendre la chronologie des événements qui eurent lieu de 379 à 381 ) . En effet, la Lettre 5 de Damase dit que l'affaire eut lieu « en un temps où , avec l'aide de Dieu , les hérétiques étaient en pleine déchéance » , ce qui renvoie à l'édit du 28 février 380, et par ailleurs Théodose a séjourné à Thessalonique jusqu'au 14 juillet ( cf. Code théodosien XIV 17,8 ) . En réalité l'affaire se termina mal pour Maxime ; « il fut chassé de là comme un chien errant » ( v . 1009 ). Il partit alors pour l'Égypte où , avec l'aide d'une armée de vagabonds mercenaires, il somma Pierre, du moins si l'on en croit Grégoire ( De vita sua, v . 1017-1020 ), de lui procurer « ce siège qu'il avait espéré » ( celui de Constantinople ), ou sinon le sien (celui d'Alexandrie ! ) . Mais le gouverneur (únápxov ) du diocèse civil d'Égypte , craignant de nouveaux troubles, le fit expulser ( v . 1021 ). Le 24 novembre 380 , Théodose est à nouveau à Constantinople. Dans la logique de l'édit contre les hérétiques qu'il avait publié le 28 février 380 (Code théodosien XVI 1 , 2 ) , il demanda à l'évêque arien de Constantinople, Démo phile , de signer une profession de foi d'orthodoxie. Démophile refusa et dut quitter la ville le 26 novembre. Le 27 , Théodose , qui voulait le remplacer par Grégoire , fit escorter ce dernier en grande pompe dans l'église des Saints Apôtres ; mais Grégoire demanda que l'affaire soit discutée au moment du concile prévu à Constantinople l'année suivante. En mai 381 , au Concile ecuménique de Constantinople , la consécration épiscopale de Maxime fut déclarée non canonique et Mélèce d'Antioche, champion de l'orthodoxie , qui présidait le concile, fit élire Grégoire évêque de Constantinople . Voici ce que dit le quatrième canon du concile : « A propos de Maxime le Cynique et des désordres qui , à cause de lui , se sont produits à Constantinople , ( nous déclarons ) que Maxime n'a jamais été et qu'il n'est pas évêque, ni que ceux qu'il a ordonnés à quelque degré du clergé ne l'ont été ; tout ce qui a été fait à son égard ou qu'il a fait lui -même est sans valeur » ( trad. G. Dumeige dans Ortiz de Urbina 13) . Grégoire cependant ne supporta pas que Paulin (De vita sua, v . 1624) , le candidat qu'il avait, pour apaiser la tension entre Occidentaux et Orientaux , proposé à la succession de Mélèce – décédé pendant le Concile ( vv . 1573-1578 ) – au siège d'Antioche , suscitât une oppo sition violente de la part des Méléciens . Profondément exaspéré, Grégoire offrit sa démission ( vv . 1849-1850 ) , qui fut acceptée avec un empressement qui le rendit amer, et il partit avant la fin du concile pour se retirer en Cappadoce ( vv . 1777-1949 ) ; Théodose, entre le début de juin et le 9 juillet 381 , fit consacrer

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Nectaire , un sénateur et ancien préteur, qui avait le soutien de Diodore, l'évêque de Tarse ( Théodoret, H.E. V 8 , 4-9, p . 287,19-288, 23 GCS ; Sozomène , H.E. VII 9 , 4 , p. 312 , 6-9 GCS). Le concile se termina le 9 juillet 381 . « L'affaire Maxime » avait provoqué la rupture avec Grégoire de Nazianze qui se déchaîna ensuite contre le philosophe dans son Discours 26 et ses Carmina. Maxime toutefois se rendit au Concile occidental d'Aquilée , dont la séance plénière eut lieu le 3 septembre 381 et devant plus de trente évêques venus d'Italie, de Gaule et d'Afrique du nord , il se fit reconnaître comme évêque légitime de Constantinople (cf. Bardy 30 , p . 292-294 ) . Voir 46 R. Gryson , Scolies ariennes sur le concile d'Aquilée, coll . SC 267 , Paris 1980 ( introduction sur le concile aux pages 121-143 ) . Après la séparation du concile, Ambroise , évêque de Milan , n'hésita pas à intervenir en faveur de Maxime. Dans sa Lettre 9 ( numérotation du CSEL ) à Théodose , on voit l'évêque de Milan affirmer l'ordination de Maxime est tout à fait valide, « tribus episcopis ordinantibus » ( $ 3 , p . 202 Zelzer ); en revanche il considère l'épiscopat de Grégoire comme « non conforme à la tradition des pères de l'Église de Constantinople » ( $ 4 , p. 202) et il ne reconnaît pas non plus l'ordination de son successeur Nectaire ( § 5 , p. 203-204 ). Mais, par la suite , Ambroise dut changer d'avis concernant Maxime. En effet, en 382 , au concile de Rome, réuni autour de Damase , et auquel assistait Ambroise, il semble qu'on n'évoqua même pas la question du siège de Constantinople . Après cette date on n'entend plus parler de Maxime. « L'affaire Maxime ». Grégoire de Nazianze avait donc commencé par encenser Maxime dans son Discours 25 , car le philosophe le soutenait dans son projet de rassembler les orthodoxes à Constantinople : « philosophe et sage » ( 2 , li . 13 ) , « le plus authentique défenseur de la vérité , champion de la Trinité jusqu'au sang » , « il est le meilleur parmi les meilleurs, le plus noble des nobles » ( 3 , li . 7-8 trad . Mossay). Grégoire sait qu'il peut compter sur lui pour lutter contre les hérésies et pour défendre l'orthodoxie ( 15 , li . 14-15 ) . Il présente Maxime comme un philosophe parfait, dédaignant luxe , fortune, pouvoir (4, li. 5-6) et comme un chrétien qui s'est battu pour l'orhodoxie au point de connaître l'exil et de souffrir dans sa chair. Mais peu de temps après, dans son Discours 26, Grégoire change complète ment de ton et se met à déverser de façon outrancière sa bile contre son ex - ami. « Je crains aussi des chiens qui se sont fait admettre envers et contre tout comme pasteurs et qui, ce qui est aussi un paradoxe, n'avaient présenté aucun autre titre au pastorat que d'avoir tonsuré leur chevelure à laquelle ils avaient malhonnê tement accordé tous leurs soins. Ces gens- là ne restèrent pas les chiens qu'ils étaient, et ils ne sont pas devenus des pasteurs, sauf pour déchirer, disperser et tourner à rien la peine qu'autrui s'est donnée : il est toujours plus aisé de détruire que d'entretenir » ( 3 , li . 15-21 trad. Mossay ) . Même véhémence dans le Contra Maximum . Entre temps Maxime a répondu par écrit aux attaques de Grégoire, ce qui met celui-ci en rage : « Quoi ! Tu oses , toi , Maxime , écrire ? ... Tu écris contre un homme pour qui l'écriture est aussi naturelle que l'est l'écoulement pour l'eau , le fait de brûler pour le feu » ( vv . 1 et 55-56 ) . Il se moque de « Maxime logographe » ( v . 21 ) . Mais c'est dans le De vita sua qu'éclatent ses

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invectives les plus démesurées. Grégoire, dans ce plaidoyer pro domo, évoque 1 Maxime sur près de quatre cents vers ( vv . 728-1112) . Il n'hésite pas à le traiter d ' « efféminé » ( v . 750 ) , de « fantôme égyptien » , de « fléau enragé » ( v . 751 ), de « chien , de roquet » ( v . 752 ) , lui reprochant d'avoir teint ses cheveux et d'en avoir modifié l'aspect ( vv . 754-756 : « blond et noir , bouclé et plat , caractéristiques d'origine, caractéristiques récemment acquises, I car l'art est un second démiurge » ) – ce que révéla la coupe de ses cheveux au moment où Maxime fut consacré évêque en secret ( vv . 764 et 915-919) –, de participer aux deux sexes , à celui des femmes par la chevelure et à celui des hommes par le bâton ( vv . 766-769 ) . Et Grégoire de constater amèrement : « Il était le plus mauvais , mais je l'honorais comme un homme de bien » ( v . 982). Les mêmes données reçoivent des interprétations contradictoires d'un texte à

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l'autre . Ainsi , alors que l'exil de Maxime dans la grande Oasis en 374 était présenté de façon très positive dans le Disc . 25 , 14, li . 3-4, Grégoire, au v . 976 du De vita sua , évoque « son exil dû aux méfaits les plus honteux» . Les sæurs qui , dans le Disc. 25 , 14 , li . 14-15 Mossay , pratiquaient comme Maxime la chasteté et la maîtrise de soi , sont assimilées à des prostituées aux vv . 933-937 du De vita sua : « tes " Corinthiennes" avec lesquelles autrefois tu pratiquais le service divin , formant seul avec elles seules une communauté en toute sagesse ». Grégoire, afin de justifier de façon générale son revirement pour le moins stupé fiant, avance l'argument de la « candeur » ( v . 957 ) et de l ' « ignorance » (v . 959). Mais s'il se garde bien de reprocher à Maxime des faits précis, n'est-ce pas parce qu'il n'a rien d'autre que des rumeurs pour alimenter ses accusations ? La phrase qui suit , par ses sous - entendus combinés à une totale imprécision, est assez significative à cet égard : « après avoir parcouru , comme nous l'entendons dire ( úc axovouev ), bien des mauvais chemins - quels qu'ils soient, c'est à d'autres de s'en occuper, car je n'ai pas le loisir d'enquêter sur tout, mais tous les registres de police en portent mention , Maxime finalement s'installe dans cette cité » (vv . 773-777 ) . Et il ne faut pas compter sur l'expression du v . 949: « távra tà mpóolev xaxá » , « tous les forfaits antérieurs » , pour en apprendre davantage. Comment interpréter cette sombre affaire qui empoisonna les milieux ecclé siastiques entre 379 et 382 ? Les historiens ont quasiment tous accordé crédit à la version de Grégoire et considéré que ce dernier, à cause de sa naïveté, avait été victime d'un intrigant , d'un ambitieux aux antécédents peu reluisants qui voulait s'approprier le siège épicopal de Constantinople , d'un « escroc » et d'un « repris de justice » selon les formules de Bernardi 34 , p . 168 , et 37 , p . 191-194 . Mais nous sommes tributaires de la seule version de Grégoire; la réponse aux attaques de Grégoire rédigée par Maxime , qui eût pu certainement nous éclairer sur les motivations et la conduite du philosophe , est malheureusement perdue (Grégoire, Contra Maximum vv . 55-56 , PG 37 , col . 1043 ) . Or il faut se méfier du fiel répandu par Grégoire, blessé à vif par l'histoire de la consécration secrète de Maxime et incapable en la circonstance d'impartialité ( cf. Disc. 26, 9 , li . 2-4 ). Aux méchancetés dont il accable Maxime il faut tout de même opposer la confiance que des gens comme Athanase , Pierre d'Alexandrie , Basile , Jérôme

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ou Ambroise , ont manifestée au philosophe. Celui -ci n'était certainement pas l'individu odieux et grotesque que Grégoire veut nous représenter à partir du Discours 26. Bernardi 34 , p . 169 , se demande « si Grégoire ne voyait pas en lui un intermédiaire éventuel , susceptible de lui ménager l'appui du puissant évêque d'Alexandrie, frère et successeur de Saint Athanase » . Dans son Saint Grégoire ( Bernardi 37 ) , p. 192 , il pense que Maxime a été envoyé auprès de Pierre afin de soutenir Grégoire et qu'au lieu de cela , il l'a trahi , l'a présenté comme un homme fatigué par l'âge , en mauvaise santé , et qu'il a ainsi convaincu Pierre qu'il valait mieux le consacrer lui - même comme évêque de Constantinople . Il est possible que Maxime , pris dans des enjeux de politique ecclésiastique qui le dépassaient , ait été une victime ; on a pu se servir de lui comme d'un pion dans la rivalité qui opposait les églises d'Alexandrie et de Constantinople . Qui est le responsable ? L'évêque Pierre d'Alexandrie , « l'arbitre de la situation >> selon la formule de Dagron 35 , p . 451 , soucieux de placer sur le siège de Constantinople un homme qui lui était dévoué ? Voir aussi Ritter 31 , p. 51 : « Hinter dieser tückischen Aktion stand zweifellos kein anderer als Bischof Petros von Alexandreia selbst » . De grandes zones d'ombre subsistent. Pourquoi Maxime se serait - il laissé manipuler et pourquoi a - t- il accepté cette ordination secrète ? Comment interpréter ses multiples tentatives pour récupérer son siège ? Pourquoi ses soutiens l'ont - ils ensuite abandonné ? Autant de questions sans réponse . Grégoire lui - même avait conscience du double jeu joué par Pierre d'Alexandrie et les « Égyptiens » : « Pierre dont le calame était autrefois fendu en deux, qui disait facilement tout et son contraire » ( vv . 1015-1016 ) . Mais il n'en excusait pas Maxime pour autant, bien au contraire . Il ne fait aucun doute que Grégoire s'est senti abusé , trahi ( v . 960 : « comme Adam je fus trompé par un goût mauvais » ) ; mais son brusque revirement est pour le moins suspect et il faut se garder de tout jugement hâtif porté sur Maxime ( cf. Jungck 3 , note au v. 750 , p. 184 : « Er (Maxime) mag eine wenig erfreuliche Erscheinung gewesen sein , doch wird man sich hüten müssen , ihn allein aufgrund des von Haß und Enttäuschung verzerrten Bilds zu beurteilen , das Gregor von ihm entwirft. Gregor ist in Lob und Schmähung maßlos gewesen » ) . Écrits. Maxime avait une véritable dimension intellectuelle. Il lisait , il écrivait. Basile , qui loue chez lui « l'ardeur pour la science du divin » (Lettre 9 , 2 ) , nous apprend que le philosophe lui demandait les écrits de Denys d'Alexandrie (-D 81 ) , élève d'Origène, qui fut évêque d'Alexandrie dans la seconde moitié du lire s . ( $ 2 ) . Basile invite Maxime à venir auprès de lui s'entretenir des problèmes de la consubstantialité ( 8 3 ) . Un échange de lettres s'était apparemment instauré entre eux , et Basile , à la fin de sa réponse , manifeste le souhait de recevoir d'autres lettres de la part de Maxime ( où dè ärra ypáðɛ , § 3 ) . Nous savons encore que Maxime écrivait des lettres à des personnages éminents , par exemple Athanase qui répond à une des lettres où il attaquait les hérétiques. Mais Maxime écrit aussi des livres . C'est ainsi que Jérôme cite de façon élogieuse son livre contre les Ariens , que le philosophe remit à Milan à

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l'Empereur d'Occident Gratien ( 367-383 ] ( De viris ill. 127 , p. 54 Richardson : « Maximus philosophus ... insignem De fide adversus Arianos scripsit librum , quem Mediolani Gratiano principi dedit » ) . Aussi Maxime ne resta- t - il pas inactif quand Grégoire se mit à l'attaquer. Dans son Contra Maximum , PG 37 , col . 1339-1344, Grégoire dit qu'il a eu entre les mains les vers polémiques que Maxime écrivit en réponse à ses attaques et il s'offusque de cette réponse pourtant bien légitime ( v . 19 : « Toi qui ignores la poésie, quetpoç öv ( jeu de mot sur le mètre et la mesure ), tu t'es mis à déverser des vers » ) . Il joue les scandalisés ( vv . 2 et 39 : « Quoi ! Tu oses , toi , Maxime, écrire ? » ), contestant son instruction ( v . 39 : einé uol, toữ vai tródev uaObv ;) et usant de comparaisons triviales pour mieux ridiculiser la prétention à écrire de son adversaire ( vv . 44-46 : les nóyou sont pour Maxime l'équivalent de la lyre pour un âne , des flots pour les boufs ou du joug pour les animaux marins ). On a attribué à Maxime les « histoires mythologiques » du Pseudo -Nonnos. Cf. Mossay 1 p . 138 : « Jean Tzetzes , le grammairien humaniste du XIIe siècle, attribuait à “ un certain Maxime” les scholies ou “histoires mythologiques” attribuées généralement au Pseudo- Nonnos . J. Sajdak, Historia , p. 7 et n. 2 , relève parmi les hypothèses destinées à identifier ce “ Maxime”, celle de V. Ribbeck attribuant ces commentaires mythologiques à notre Héron -Maxime. Pure présomption assurément, et pas invraisemblable a priori. Mais rien de plus » . Maxime, philosophe cynique. Grégoire avait des sympathies pour le cynisme . Voir 47 R. Asmus , « Gregorius von Nazianz und sein Verhältnis zum Kynismus . Eine patristisch-philosophische Studie » , Theologische Studien und Kritiken 67 , 1894, p. 314-339 , repris dans M. Billerbeck (édit. ) , Die Kyniker in der modernen Forschung , coll . « Bochumer Studien zur Philosophie » 15 , Amsterdam 1991 , p. 185-205 ; 48 J. Coman , « Hellénisme et christianisme dans le 25e discours de Saint Grégoire de Nazianze » , dans E. Livingstone (édit . ) , Studia patristica XIV , coll . « Texte und Untersuchungen » 117, Berlin 1976, p . 290-301 ; 49 G. Dorival , « Cyniques et Chrétiens au temps des Pères grecs» , dans Valeurs dans le stoïcisme . Du Portique à nos jours. Mélanges en l'honneur de Monsieur le doyen Spanneut, Lille 1993 , p . 57-88 , notamment p. 71-76 ; 50 Id ., « L'image des Cyniques chez les Pères grecs » , dans M.-O. Goulet-Cazé et R. Goulet ( édit . ) , Le cynisme ancien, p . 419-443, notamment p. 442-443 ; 51 M.-O. Goulet - Cazé , « Le cynisme à l'époque impériale » , ANRW II 36 , 4, p . 2720-2833 , notamment p . 2791-2795 ; 52 C. Moreschini, « Dottrine ciniche ed etica cristiana nella poesia di Gregorio Nazianzeno » , dans M. Salvadore (édit.), La Poesia tardoantica e medievale. Atti del I Convegno Internazionale di Studi sulla poesia greca e latina in età tardoantica e medievale , Macerata , 4-5 maggio 1998 , Alessandria 2001, p. 231-248 . Ces sympathies peuvent expliquer que Grégoire se soit lié d'amitié avec Maxime qui se présentait à la fois comme un chrétien et comme un philosophe cynique . Apparemment le passage du cynisme au christianisme ne devait tout de même pas être si fréquent au IVe s . , puisque Grégoire dans son De vita sua vv . 974-975 , p. 100 Jungck, rappelle qu'il s'est félicité de ce qu'un cynique vînt

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chez lui rendre un culte au Christ plutôt qu'à Héraclès. Comme Pérégrinus Proteus qui vivait, lui, au second siècle , Maxime Héron illustre les liens étroits qui pouvaient éventuellement se tisser entre cynisme et christianisme au point qu'un même homme pût se dire à la fois chrétien et cynique. Dans son panégy rique de Maxime, Grégoire précise clairement ce que n'est pas la philosophie de Maxime : « Il repousse le plus loin possible et rejette les péripatéticiens, les Académies, le vénérable Portique, la théorie de l'être spontané en même temps que l'atomisme et l'hédonisme d'Épicure » (Disc. 25 , 6, li . 1-4 trad . Mossay) et il confirme que le philosophe est bien un cynique, en rappelant par exemple son cosmopolitisme ( 3 , li . 19-20 ) . En même temps, il prend soin de le dépouiller de toutes les outrances caractéristiques de la philosophie de Diogène : « chien , non par l'impudence , mais par la franchise , ni par la gloutonnerie, mais par l'imprévoyance, ni par l'aboiement, mais par la protection du bien, la vigilance spirituelle, ainsi que par le fait de manifester de l'attachement à tout ce qui est familier de la vertu et d'aboyer contre tout ce qui lui est étranger » ( § 2 , 14-18 ). De même, parce qu'il sait que la réputation d'athéisme des cyniques n'est plus à faire , il veille à ce qu'aucun doute ne subsiste concernant la foi de son ami : « De la philosophie cynique , il répudie l'athéisme, mais adopte la frugalité : c'est ce qu'on a actuellement sous les yeux ; " chien " hostile aux " chiens ” véritables, philosophe hostile à ceux qui ne le sont pas , et chrétien par dessus tout, il réfute l'arrogance de ceux- là par l'analogie du costume qu'il porte , et la platitude de quelques - uns qui pourraient se trouver parmi nous , par l'originalité de son vêtement » ( 8 6 , li . 5-10) . Grégoire n'hésite pas à le présenter comme supérieur à tous les grands du cynisme ; tout ce qu'il fait est meilleur que « l'insolence d'Antisthène, l'absorption de nourriture crue ( nous corrigeons óqopaylaç en wuopaylas) par Diogène, le mariage public de Cratès » (8 7 , li . 18-20). Mais entre le Discours 25 et le De vita sua , Grégoire a complètement changé d'avis et sur Maxime et sur le cynisme. Les cyniques d'autrefois qui , dans le Discours 25 n'étaient rien par rapport à Maxime se trouvent soudain revalorisés : « C'est ainsi que philosophent les chiens d'aujourd'hui. Ce sont des chiens qui aboient et en cela seulement ce sont des chiens . Quoi de semblable avec Diogène ou Antisthène, que vous importe Cratès ? » ( De vita sua , vv . 1030-1033 trad. Mossay ). Il est difficile, avec les documents dont on dispose aujourd'hui, d'ima giner comment Maxime pouvait réussir à concilier son cynisme et son christia nisme. En fait, plusieurs éléments autorisent à penser que dès l'époque de Varron , il existait deux façons d'envisager le cynisme , cette possibilité étant due au fait que le cynisme est une philosophie sans bagage doctrinal développé. D'un côté le cynisme revendique le statut d'école philosophique , vise un téhoc qui peut être l'átupia , l'absence d'illusion et d'orgueil ( Clément d'Alexandrie, Stroma tes II 21 , 130, 7 ), ou l'åndela , l'absence de passion (Julien , Disc. IX 12 , 192 A ) , et continue d'être très critique à l'égard de la société, de la religion , de la politique ; des philosophes comme Agathobule ( -A 36) , Démonax ( 2 + D 74 ) , Enomaos ( 209 ) sont certainement de bons représentants de cette forme de cynisme . De l'autre côté , le cynisme est conçu comme une façon de vivre,

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fondée sur l'ascèse , qui peut être adoptée par des gens se réclamant de philo sophies différentes, et même du christianisme. Varron dans son De philosophia cité par Augustin, Cité de Dieu XIX 1 , 2-3 , fait état clairement de cette possi bilité . S'attachant à distinguer, en fonction de leur témoc , deux cent quatre vingt-huit écoles philosophiques possibles , il entreprend, au moment où il parvient à une classification en quarante -huit écoles, de doubler ce nombre en adoptant comme principe formel de classification le genre de vie : « Comme l'un peut encore suivre l'une de ces quarante -huit sectes, en adoptant le genre de vie des autres philosophies et l'autre en adoptant le genre de vie des cyniques, cette distinction double à nouveau leur nombre et le porte à quatre - vingt -seize » ( trad. G. Combès), et Varron en tire la conséquence: « Aussi bien s'est- il trouvé des gens pour rechercher des biens suprêmes opposés, les uns la vertu , d'autres la volupté, qui néanmoins avaient adopté la tenue et le genre de vie d'où les cyniques tirent leur nom » (trad . G. Combès). Augustin lui-même reprend l'idée de Varron , en l'appliquant aux philosophes qui veulent se faire chrétiens : « La Cité de Dieu n'impose pas aux philosophes eux - mêmes , quand ils se font chrétiens, de changer leur tenue et leurs manières de vivre, si elles n'ont rien de contraire à la religion , mais bien de renoncer à leurs fausses doctrines. Aussi ne s'inquiète -t-elle pas du tout de ce qui singularise, d'après Varron, la vie des cyniques , pourvu qu'il ne s'y trouve rien de honteux et d'indécent (XIX 19, 387, trad. G. Combès) » . Un chrétien peut donc porter l'accoutrement cynique et mener le genre de vie cynique à condition de renoncer à l'impudeur et à l'indécence . Diogène Laërce VI 103 témoigne indirectement de l'existence de ces deux formes de cynisme et de sa conviction que seule la première est vala ble : « Nous estimons que la philosophie cynique est elle aussi une école de pensée (aipeous ) et pas seulement, comme le prétendent certains, une façon de vivre ( ěvotaoc Biov ) » . Il apparaît donc qu'un chrétien , un platonicien , un aristotélicien ou un stoïcien , pouvaient se demander s'il faut, quand ils pour suivent leur telos respectif, adopter le mode de vie cynique . Certains, comme Maxime Héron , ou avant lui Pérégrinus Proteus, ont de toute évidence répondu positivement Grégoire de Nazianze d'ailleurs fait peut-être allusion à cette seconde forme de cynisme dans son Disc . 25 , 5 , li . 17-20 , quand il qualifie cette façon de philosopher propre à Maxime, à mi-chemin entre christianisme et cynisme, de voie moyenne : « Il suit une voie moyenne, à mi-chemin entre l'illusion de ceux là (= les Hellènes) et notre sagesse ; sa philosophie leur emprunte à eux l'habit et le décor, à nous la vérité et l'élévation ( trad. Mossay ) » . Maxime et le philosophe cynique anonyme de Julien . Dans son discours Contre les cyniques ignorants, Julien s'adresse à un jeune cynique dont il ne précise pas l'identité. 53 R. Asmus , « Zur Kritik und Erklärung von Julian . Ep. 59 ed. Hertl. » , Philologus 71 , 1912, p . 376, avait pensé à Nilus (> N 62 ), mais il fut réfuté par 54 J. Geffcken, Kaiser Julianus, coll . « Das Erbe der Alten » 8 , Leipzig 1914, p . 158-159 et 55 J. Bidez , Lettres, t . I 2 , CUF, Paris 1960 , p. 93 , n . 12. Voir également 56 C. Prato et D. Micalella ( édit . ) , Giuliano imperatore, Contro i Cinici ignoranti. Edizione critica , traduzione e commento , coll . « Studi

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e testi latini e greci » 4, Lecce 1988 (ad loc. ). Nilus est en effet âgé, puisqu'il est membre du sénat , alors que le cynique de Julien est dans la force de l'âge ( Discours IX 1 , 180 d ). Ne pourrait -on proposer de voir en ce cynique Maxime Héron quand il était jeune ? L'hypothèse n'a, apparemment, jamais été envi sagée, bien que plusieurs arguments plaident en sa faveur. Nous connaissons grâce à Grégoire de Nazianze le Maxime Héron des années 379-381 . Or Julien écrit son discours en 362 et il précise que le cynique auquel il s'adresse est dans la force de l'âge ( tnv naix av åxuácwv, IX 1 , 180 D) . Il faudrait donc imaginer que le Maxime de Julien était encore jeune et que dix sept ans après, quand il arriva à Constantinople , il avait atteint l'âge canonique pour devenir évêque . Voici les éléments en faveur d'une identification : 1. Maxime (Grégoire, Disc. 26, 3 , li . 19-21 Mossay ) est , comme le cynique de Julien ( Disc . IX 12, 192 D) , d'origine égyptienne. 2. Julien , considérant que son interlocuteur est capable de reconnaître « les paroles des Galiléens » , utilise devant lui en IX 12 , 192 D, une expression tirée de Genèse 9 , 3. Or on sait que Maxime a une véritable culture théologique, puisqu'il a remis à l'Empereur Gratien un ouvrage que lui-même avait écrit contre les Ariens. 3. Julien reproche à son interlocuteur d'admirer la vie morte de malheureuses femmes ( IX 20 , 203 C ) . Il s'agit sans aucun doute de moniales chrétiennes. Or Maxime avait vécu avec des moniales. Grégoire de Nazianze qui , dans son Disc. 25 , 14, li . 14-15 , soulignait la chasteté de celles-ci , les assimile dans son De vita sua à des prostituées, puisqu'il les traite de « Corinthiennes » . 4. Le cynique anonyme de Julien critique Diogène , l'accusant de vaine gloire et le raillant pour avoir mangé un poulpe cru ( IX 1 , 181 A ; 11 , 190 C et 12 , 192 C) . Or, fait troublant, Grégoire ( Disc. 25 , 7 ) affirme que ce que fait Maxime est meilleur que l'insolence d'Antisthène , l'absorption de chair crue par Diogène ( nous corrigeons óvopaylaç, la gourmandise, qui n'aurait pas de sens appliquée à Diogène , en duopaylas) et le mariage public de Cratès. 5. Enfn , on sait que Maxime avait une chevelure impressionnante, apparem ment des cheveux longs bouclés et teints, à en croire Grégoire (De vita sua , vv . 909-916 ). Or Julien ( IX 11 , 190 D) fait une allusion discrète, mais bien réelle, à la chevelure de Maxime , lequel copie « le manteau et la chevelure » d'un cynique , ce qui laisse entendre qu'on remarquait ses cheveux qui étaient proba blement longs.

MARIE -ODILE GOULET -CAZÉ.

71 MAXIMUS (CLAUDIUS -) REC 238 , 239 PIR2 C 933 et 934

II

A. Marc Aurèle ( 121-180 ) , dans ses Pensées, remercie les dieux d'avoir connu Apollonius [de Chalcédoine) ( >A 274 ), Rusticus et Maximus ( I 17 , 10) . Il énumère longuement toutes les qualités dont Maximus lui a donné l'exemple ( I 15 , 1-10) . Il évoque également la fermeté d'âme manifestée par son père adoptif Antonin le Pieux à l'occasion de la maladie de Maximus ( I 17 , 31 ) .

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L'ensevelissement de son père Verus par sa mère Lucilla et celui de Maximus par son épouse Secunda sont mentionnés en VIII 25 , 1 . 1 P. Hadot , La citadelle intérieure . Introduction aux “ Pensées” de Marc Aurèle, Paris 1992 , p. 300 , résume les qualités que Marc Aurèle prête à Claudius Maximus : « maîtrise de soi , tranquillité d'âme dans les adversités, douceur et dignité, réflexion dans l'exécution d'un projet, concordance entre les paroles , les actions et la conscience morale, qualité de ne s'étonner de rien , de ne s'effrayer de rien , de rester égal à soi -même , bienfaisance, indul gence, véracité , spontanéité dans l'action, art de plaisanter. » Claudius Maximus est également mentionné comme stoïcien dans la Vie de Marc Aurèle (Hist. Aug. 3 , 2 ) , avec les autres maîtres Sextus de Chéronée , Junius Rusticus et Cinna Catulus ( C 128 ) . B. Il est le plus souvent identifié avec Claudius Maximus , consul en 144, gouverneur de Pannonie supérieure de 150 à 154 , et proconsul d'Afrique vers 156-158 ; ce ne fut donc pas un homme d'école , mais un soldat et un homme politique . Voir Hadot 1 , p. 30 ; 2 P. Hadot, dans l’Introduction de son édition de Marc Aurèle , Paris 1998 , p . CXV -CXVI ; 3 P. Grimal, Marc Aurèle, Paris 1991 , p . 89-90 ; 4 A. Birley , Marcus Aurelius, London 1987 , p. 96-97. Voir aussi 5 H.-G. Pflaum , « La valeur de la source inspiratrice de la Vita Hadriani et de la Vita Marci Antonini, à la lumière des personnalités contemporaines nommément citées » , Bonner Historia -Augusta -Colloquium 1968/1969, coll . « Antiquitas» 4, 7 , Bonn 1970 , p . 210 ; 6 G. Alföldy, Konsulat und Senatorenstand unter den Antoninen . Prosopographische Untersuchungen zur senatorischen Führungs schicht, coll . Antiquitas - Reihe 1 : Abhandlungen zur alten Geschichte 27 , Bonn 1977 , p . 143 , 322 et 334 (consul suffect peut- être en 142 ; proconsul d’Afrique en 158/159) . Cette identification conduit à voir en lui le proconsul qui eut à juger l'accu sation de magie intentée contre Apulée de Madaure ( > A 294 ) . De fait dans l'Apologie, Claudius Maximus est présenté comme un homme « appartenant à une école très austère » . Apulée adresse son Apologie à Maximus en le traitant comme un philosophe : « Il l'appelle sanctissimus, le décrit comme un homme grave , austère dans sa manière de vivre et ayant fait une longue carrière de soldat, équitable et ferme ment attaché à la justice ( Apologie 19 , 2 ; 25 , 3 ; 41 , 4 ; 51 , 1 ; 64, 4-6 ; 85 , 2 ; 102 , 5 ) . Apulée suppose aussi que Claudius Maximus a lu les livres d'Aristote dont il cite lui - même les titres en grec : Sur la génération des animaux, Sur l'anatomie des animaux, Sur l'histoire des animaux, les Problèmes et d'autres ouvrages de son école , et qu'il les admire (Apologie 36 , 5 ) . Mais il semble le présenter comme un platonicien , lorsqu'il affirme que le proconsul a lu le Phèdre, qu'il connaît le " lieu supra - céleste" et la “ convexité de la voûte du ciel" - ici encore Apulée emploie les mots grecs correspondants - et surtout qu'il sait quel est le Roi dont parle mystérieusement Platon dans sa Deuxième Lettre » (Hadot 2 , p . CXVI ) . Apulée suppose de même que Maximus ne condamnera pas les vers érotiques qu'on lui reproche , car il sait qu'ils ont été composés à l'exemple de Platon ( 11,5 ) , tout comme il connaît la différence (Platon, Banquet 180 c ) entre la Vénus vulgaire et la Vénus céleste ( 12 , 2-3 ) . Il se contente de

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même de " rappeler" à son juge la définition du mage fournie par Platon dans le premier Alcibiade 121 b (26, 10-11 ) . Voir également 7 K. Bradley, « Law , Magic, and Culture in the “ Apologia" of Apuleius » , Phoenix 51 , 1997 , p . 203-223, notamment p . 215-217 , et, sur la date du procès p . 203 n . 1. Sur les sympathies platoniciennes de Claudius Maximus , voir aussi 8 R. Mortley, « Apuleius and Platonic Theology » , AJPh 93 , 1972 , p . 584-590 , notamment p. 585 . Cf. 9 A. Stein , art. « Claudius 238 Maximus» et art. « Claudius 239 Maxi mus » , RE III 2 , 1899 , col . 2772-2773 . MICHÈLE DUCOS et RICHARD GOULET . 72 MAXIMUS ( QUINCTILIUS -) PIR² M 399 , mieux Q 25

FI-D II

Épicurien. Épictète, dans un des Entretiens (III 7 ) préservés par Arrien ( =-A 425 ) , et Pline le Jeune ( Epist. VIII 24) font connaître un épicurien, Maximus , qui fut le premier legatus Aug (usti) ad ordinandum statum liberarum ciuitatium prouin ciae Achaiae ou διορθωτής των ελευθέρων πόλεων, avec pouvoir de juger les Grecs. Pline rappelle la carrière antérieure de son ami Maximus , commencée sous Nerva : il a été questeur en Bithynie , où il a laissé un excellent souvenir, tribun de la plèbe, préteur, candidat de Trajan pour plusieurs de ces fonctions et en dernier lieu pour celle de corrector. Pline lui recommande d'agir avec tact et de ménager la fierté des Grecs, habitués à être libres. Selon Épictète , Maximus n'est pas un épicurien orthodoxe : il est marié et père d'un fils pour lequel il a fait en plein hiver la traversée jusqu'à Cassopée en Chalcidique, il est riche et il fait carrière au service des empereurs romains; le philosophe lui reproche donc seulement de professer une doctrine qui est en désaccord avec sa vie . Les indications biographiques précises données par ces deux auteurs ont permis d'identifier Maximus à un sénateur originaire de la colonie romaine d'Alexandrie de Troade, dont le cursus est rappelé précisément dans CIL III 384 = ILS 1018 = 1. Alex. Troas, 39 : Sex( tus) Quinctilius Valerius Maximus, fils de Sex( tus) , de la tribu Ani (ensis ) , a été orné du laticlave par Nerva, questeur de Pont et Bithynie , patron de la colonie , pontife, duouir, praef ( ectus) fabrum . Depuis E. Groag, JÖAI 21-22, 1922-1924 , Beiblatt, p . 435 sqq . , cette identi fication a été généralement acceptée : voir par exemple H. Halfmann, Die Sena toren aus dem Östlichen Teil des Imperium Romanum bis zum Ende des 2 . Jahrhunderts n . Chr ., coll . « Hypomnemata » 58 , Göttingen 1979 , nº 40 , p . 136 ; E. Guerber, « Les correctores dans la partie hellénophone de l'Empire romain du règne de Trajan à l'avènement de Dioclétien : étude prosopographique » , AnatAnt 5 , 1997 , p . 211-248 ; PIR ? Q 25 . Son fils homonyme ( H. Halfmann, op . cit., n° 48 ; PIR ? Q 26 ) fut notamment questeur et légat propréteur de la province d'Achaïe . Son cursus complet figure dans une inscription de Tusculum ( CIL XIV 2609). Il est nommé à Sparte sur une statue de Trajan en 116/7 ( IG V 1 , 380 ) . Deux de ses petits - fils, « les Quintilii » , exerceront aussi des fonctions importantes en Achaïe ( voir stemma

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dans PIR ? Q 25 , p. 17 ) , célèbres eux aussi pour leur richesse, leur culture et leur influence politique.

SIMONE FOLLET. 73 MAXIMUS (T. FLAVIUS )

ép . imp.

Le philosophe T. Flavius Maximus était le patron de Varius Séleucos, curateur des bateaux à Césarée de Palestine , qui lui éleva à ce titre une statue , à une date inconnue entre 71 et 282 (ZPE 99, 1993 , p. 291 ) . BERNADETTE PUECH. MAXIMUS + FABIUS MAXIMUS (F 4] F 4 74 MAXIMINUS PLRE II : 12

MF V

Ce personnage n'est connu que par une brève notice de Damascius dans la Vie d'Isidore : « Maximinus - pour sa religion, c'était un Hellène - avait , dans les regards que dardaient ses yeux, une expression terrifiante et nocive au point de forcer ceux qui le regardaient à détourner les yeux . Conscient de ce fait, il gardait le plus souvent les yeux dirigés vers le sol , et non vers ceux qu'il rencontrait. Il eut également la contemplation de maintes apparitions que d'autres ne voyaient pas. Il était aussi capable d'envoyer des démons nuisibles, et de les repousser quand ils étaient envoyés d'ailleurs . Néanmoins , il fut convaincu d'impiété , et connut à Byzance le châtiment par le glaive sans parvenir à l'esquiver. » Ce personnage, dont il n'est pas même sûr qu'il ait été philosophe mais qui semble avoir au moins fréquenté ou intéressé les milieux néoplatoniciens décrits par Damascius , était donc un païen , qui vécut vraisemblablement dans la seconde moitié du ve siècle. Il fut ensuite condamné pour impiété à Constan tinople , puis exécuté, peut-être sous le chef de sorcellerie prévu par le Code théodosien ( IX 16 , 4 ) . Ses propriétés surnaturelles semblent s'être concentrées sur ses yeux ( mauvais æil , visions , etc. ) , et ce passage de Damascius est à rapp her du fr. 92 P Zintzen = 69 Athanassiadi, qui recense un certain nombre de cas similaires ( Saloustios , Ouranios (-O 47 ) et Nomos ) Source. Photius , Bibliothèque 242, $ 204 = Damascius , Vie d'Isidore fr. 204, p. 278 Zintzen [ 1 C. Zintzen (édit. ), Damascii Vitae Isidori reliquiae , edidit adnotationibusque instruxit C.Z. , coll . « Bibliotheca Graeca et Latina suppletoria » 1 , Hildesheim 1967 ), fr. 139, p. 310 Athanassiadi [2 P. Athanassiadi (édit. ), Damascius. The Philosophical History, text with translation and notes, Athènes 1999 ). STÉPHANE DIEBLER ( T).

75 MÉDIUS RE 4 PLREI:

M III

Philosophe stoïcien . Dans la préface de son livre Sur la fin (Porphyre, Vita Plotini 20 , 35 ) , écrit vers 265 , Longin ( " L 63 ] ( frag. 4 Brisson - Patillon ) classe Médius parmi les stoïciens qui ont entrepris « d'exposer par écrit leurs opinions pour permettre à la postérité d'avoir sa part des bienfaits par eux dispensés » ( ibid ., 20, 25-27 ) ; en ce domaine , Longin tenait pour très limitée l'originalité de Médius par rapport à

MÉGASTHÈNE

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ses prédécesseurs: ces philosophes n'auraient « retenu des recherches des anciens que des éléments tout à fait mineurs » ( ibid ., 20 , 63 ) . Longin associe Médius à Annius ( > A 187 ) , en précisant qu ' « hier encore » , c'est - à -dire aux alentours de 250 apr. J.-C. , « ils étaient au sommet de leur carrière » . Par ailleurs, selon Proclus ( in Remp. I , p. 233 , 29 - 234 , 9 Kroll ), Porphyre, dans ses Etuuixta npoßanuata ( passage commenté par H. Dörrie dans Porphyrios' Symmikta Zetemata , coll. « Zetemata » 20 , München 1959 , p . 104 107 ) , mentionnait un entretien ( ovvovo a ) de Médius avec Longin ( fr. 21 Brisson - Patillon ) au cours duquel le premier défendait la doctrine stoïcienne des huit parties de l'âme contre Longin qui , tout en y reconnaissant les trois parties qu'y distinguait Platon, maintenait l'unité de l'âme ( fr. 22 Brisson - Patillon ). Cf. W. Capelle, art. « Medios» 4, RE XV 1 , 1931 , col . 104-106. LUC BRISSON. MÉGALOPHANÈS

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Diplomate et ethnographe grec , auteur d'un ouvrage intitulé Indika dont seulement des fragments nous sont parvenus. Cet ouvrage contenait le rapport le plus important, aussi bien du point de vue littéraire que du point de vue histo rique, de l'ethnographie grecque sur l'Inde, et il a constitué par la suite dans l'Antiquité la source principale de la littérature sur l'Inde . Témoignages et fragments. 1 E. A. Schwanbeck ( édit . ) , Megasthenis Indica , Fragmenta collegit, commentationem et indices addidit E.A.S., Bonnae 1846 , réimpr. Amsterdam 1966 , IX - 194 p. Sommaire : Praefatio, III - IX ; Pars prior, continens commentationem de Megasthenis Indicis : I. De cognitione Indiae, qualis ante Megasthenem apud Graecos fuerit, 1-11 ; II . De Megasthene ( 1. De Indico Megasthenis itinere ; 2. De Indicis Megasthenis eorumque argumento ; 3. De fide Megasthenis, auctoritate et pretio ), 11-77 ; III . De scriptoribus eis, qui post Megasthenem de India scripserint, 77-81 ; Pars altera, continens Megastenis Indicon fragmenta, 83-178 ; Index scriptorum ; apud quos fragmenta reperiuntur, 179-180 ( sur deux colonnes) ; Index geographicus locorum indicorum et vicinorum , 181-185 ( sur deux colonnes) ; Index rerum memorabilium , 186-194 (sur deux colonnes) . C'est sur cette édition que le recueil des fragments de Mégasthène de 2 K. Müller, FHG , t. II , p . 397-439 , avec une traduction en latin , est fondé. Nous suivons la numérotation des fragments et des témoignages de l'édition de 3 F. Jacoby , FGrHist 715 , t. III C 2 , p . 603-639. Traductions. 4 J. W. McCrindle , Ancient India as described by Megasthenes and Arrian ; being a translation of the fragments of the Indika of Megasthenes collected by Dr. Schwanbeck , and of the first part of the Indika of Arrian , by J.W. McCrindle . With introd ., notes , and map of ancient India , Calcutta 1877 ( 2nd ed . revised by R. C. Majumdar, 1960 ), XI - 223 p . ; 5 R.C. Majumdar, The classical accounts of India ; being a compilation of the English translations of the accounts left by Herodotus, Megasthenes , Arrian , Strabo, Quintus , Diodorus Siculus , Justin , Plutarch, Frontinus, Nearchus , Apollonius , Pliny , Ptolemy, Aelian and others , with maps , editorial notes, comments , analysis and intro

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duction , Calcutta 1960 , réimpr. 1981 , XXVI - 504 p .; 6 B. N. Puri, India in classical Greek writings, Ahmedabad 1963, XII - 259 p.; 7 J. Sachse, Megasthe nes o Indiach , coll . « Acta Universitatis Wratislaviensis . Classica Wratisla viensia > 8 , Wroclaw 1981 , 94 p. Études d'orientation . 8 F. F. Schwarz , « Neue Perspektiven in den griechisch - indischen Beziehungen » , OLZ 67 , 1972 , p . 5-26 ; 9 A. Zambrini, « Gli Indiká di Megastene » , ASNP 3 ° s. , 12 , 1982 , p. 71-149 ( notamment, p. 71 102) ; 10 K. Karttunen, « Graeco- Indica. A survey of recent work » , Arctos 20, 1986 , p. 73-86 ; 11 Id ., « Graeco - Indica (2) » , Topoi 3 , 1993, p . 391-400 . Cf. 12 E. A. Schwanbeck , De Megasthene rerum Indicarum scriptore , Diss . Bonnae 1845 , 88 p . ; 13 F. Susemihl , GGLA , t. I , p. 547-552 ; 14 O. Stein, Megasthenes und Kautilya, coll . SAWW 191. Bd . , 5. Abh . , Wien 1921 , 336 p .; 15 B. Breloer, Altindisches Privatrecht bei Megasthenes und Kautilya, Leipzig 1928 , VIII - 189 p . ; 16 B. C. J. Timmer , Megasthenes en de indische maatschappij, Amsterdam 1930 , 323 p .; 17 O. Stein , art. « Megasthenes » 2 , RE XV 1 , 1931 , col . 230-326 ; 18 L. Skurzak , « Études sur les fragments de Mégasthène » , Eos 47 , 1954 , p . 95-100 ; 19 T. S. Brown , « The reliability of Megasthenes » , AJP 76, 1955 , p. 18-33 ; 20 ld ., « The merits and weaknesses of Megasthenes » , Phoenix 11 , 1957 , p . 12-24 ; 21 R.C. Majumdar, « The Indika of Megasthenes » , JAOS 78 , 1958 , p . 273-276 ( cf. 22 K.D. Sethna , « Rejoinder to R. C. Majumdar » , JAOS 80 , 1960 , p . 243-248 , et 23 R.C. Majumdar, « The surrejoinder to K. D. Sethna » , JAOS 89 , 1969, p. 248-250) ; 24 J.D. M. Derrett, art. « Megasthenes» , KP III , 1969, col . 1150-1154 ; 25 K. E. Müller, Geschichte der antiken Ethnographie und ethnologischen Theoriebildung, Teil I : Von den Anfängen bis auf die byzantinischen Historiographen, coll . « Studien zur Kulturkunde » 29 , Wiesbaden 1972 , p . 245-252 ; 26 T. S. Brown , The Greek Historians, Lexington / Toronto /London 1973 , p. 141-151 ; 27 N. S. Kalota , India as described by Megasthenes, Delhi 1978 , 128 p. ; 28 L. Skurzak , « En lisant Mégasthène. Nouvelles observations sur la civilisation indienne » , Eos 67 , 1979 , p . 69-74 ; 29 A. Zambrini, « Idealizzazione di una terra : etnografia e propaganda negli Indiká di Megastene » , dans Modes de contacts et processus de transfor mation dans les sociétés antiques, Actes du colloque de Cortone (24-30 mai 1981 ) organisé par la Scuola normale superiore de Pise et l'École française de Rome , « Coll . de l'École Française de Rome » 67 , Pise /Rome 1983 , p. 1105 1118 ; 30 S. R. Goyal, Kautilya and Megasthenes, Meerut 1985 , XVIII - 149 p. (notamment p . 70-134 ) ; 31 A. Zambrini, « Gli Indiká di Megastene. II » , ASNP 3 ° s . , 15 , 1985 , p . 781-853 ; 32 K. Karttunen , India in early Greek literature, coll . « Studia Orientalia » 65 , Helsinki 1989, 293 p. (notamment p. 96-101 ) ; 33 Id . , India and the Hellenistic world, coll . « Studia Orientalia » 83 , Helsinki 1997 , IX -439 p ; 34 K. Brodersen , art. « Megasthenes » , NP VII , 1999 , col. 1145 ; 35 S. R. Goyal , The Indica of Megasthenes : its contents and reliability, Jodhpur 2000 , XVI - 148 p . A. Données biographiques. Nous ne disposons que de très peu de rensei gnements sur la vie de Mégasthène (ca 350-2904, cf. Stein 17 , col . 233 ) . La question concernant sa possible origine ionienne est difficile à résoudre (pour les

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arguments en faveur d'une origine en Asie mineure, cf. Stein 17 , col . 230-231). D'après l'interprétation traditionnelle (Schwanbeck 1 , p. 11-23 ; Stein 14, p . 1-4 ; Id . 17 , col. 231-234 ; Brown 20, p. 12-15 ; Id . 26, p. 142) , il séjourna auprès du satrape d’Arachosie , Sibyrtios ; et , après la paix signée en 304/303a entre Séleucos Nicator et le roi indien Candragupta (Sandrocottos ), il fut envoyé par Séleucos comme ambassadeur auprès de Candragupta, le fondateur du grand empire Maurya dans l'Inde du nord , de l'Indus au Gange , et il séjourna à Patāliputra (Pali ( m )bothra ), aujourd'hui Patna, capitale du Bihar, sur le Gange ( cf. Arrien , Anab . V 6,2 = T 1 a ; Strabon II 1,9 = 12c; Strabon XV 1 , 36 = F 18 b ; Strabon XV 1 , 53 = F 32 ) . Il y demeura, après l'abdication de Candragupta, auprès de son successeur Bindusāra (cf. 36 J. André & J. Filliozat [ édit . ) , Pline l'Ancien. Histoire naturelle . Livre VI. 2 partie (L'Asie centrale et orientale , l'Inde ), Texte établi, traduit et comm . , CUF , Paris 1980 , p. 84 , § 58 , n . 5 ) . Généralement, on place son séjour en Inde de 303 à 292 ( cf. Stein 17 , col . 231-233 ) . Une référence à Porus que l'on trouve chez Arrien , Ind. 5 , 3 (= T 2 b) est considérée comme une erreur absurde, raison pour laquelle le texte d'Arrien fut corrigé (cf. Schwanbeck 1 , p . 22 ; Derrett 24 , col . 1151 ; Brown 26 , p . 142 et 164 , n . 8) . Pour sa part, Stein 17, col . 234 , interprète cette mention de Porus comme une glose , même s'il suggère aussi la possibilité que le successeur de Candragupta se cache sous ce nom. Récemment, 37 A. B. Bosworth , « The historical setting of Megasthenes ’ Indika » , CPh 91 , 1996 , p. 113-127 , après une analyse approfondie du passage , soutient que la mission diplomatique de Mégasthène eut lieu dans la période 320-318 , avant que le pouvoir de Candragupta ne se fut répandu sur la vallée de l'Indus , moment où ni Porus ni Candragupta ne pouvaient revendiquer l'hégémonie sur l'Inde ; c'est pourquoi l'Inde décrite par Mégasthène était encore celle de la période d'Alexandre . Quoi qu'il en soit, on peut tirer la conclusion que Mégasthène est parmi les historiens géographes de l'Inde celui « qui a vu peut-être de plus près la réalité indienne et s'est avancé le plus vers l'est, au point qu'il recueillit des renseignements sur la côte orientale et même sur Ceylan » ( André & Filliozat 36 , p . 14 ) , et que son activité littéraire a été très probablement une conséquence de son activité politi que (cf. Zambrini 29 , p . 1105-1106, n . 2) , ce qui fut le cas aussi plus tard pour d'autres auteurs d'Indika comme Daïmachos de Platées ( ~ D 1 , FGrHist 716 T 1 ) et Dionysius ( FGrHist 717 T 1 a, b) . B. (Euvre. Le titre de l'histoire de Mégasthène était Tà ' Ivôixá (Josèphe , A.J. 10, 227 = F1 ; Athénée IV 39 , 153 d = F2 ; Clément d'Alexandrie, Strom . I 72 , 4 = F 3 ) . L'ouvrage était divisé en quatre livres ( livre II : F 2 ; livre III : F3 ; livre IV : F1 ; pour les problèmes rattachés à l'existence du livre IV , cf. Stein 17 , col . 235 ) , d'après le schéme suivant : I : géographie, faune et flore, ethnographie ; II : mode de gouvernement et administration ; III : société , philosophie ; IV : archaiologia , mythologie , histoire ( cf. Schwanbeck 1 , p . 23-25 ; Stein 17 , col . 272 ; Derrett 24 , col. 1151 ; Zambrini 9 , p. 147 ) . Sa date de composition , d'après Bosworth 37 , p. 123 , doit se placer en 310 environ . Les Indika de Mégasthène ont joué un rôle capital dans la littérature grecque sur l'Inde : il s'agit certainement de l'ouvrage le plus structuré et le plus achevé

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que la culture grecque a produit sur l'Inde ( cf. Zambrini 29 , p. 1108 ). Pour les éléments et les connaissances ethnographiques qui ont précédé Mégasthène et qui sont présents dans son ouvrage , depuis Scylax de Carianda jusqu'aux histo riens d'Alexandre , nous renvoyons à Schwanbeck 1 , p. 1-11 , et Zambrini 9 , p. 102-149 . Ce dernier (9, p . 97-102 et 31 , passim ), à la suite des conclusions de 38 O. Murray, « Hecataeus of Abdera and pharaonic kingship » , JEA 56 , 1970 , p. 141-171 , notamment p . 166, et Id. 39 « Herodotus and hellenistic culture » , CQ 22 , 1972 , p. 200-213 , notamment p.208 , a mis en relief le rapport très étroit existant entre les Indika de Mégasthène et les Aigyptiaka d'Hécatée d'Abdère ( » H 12 , p . 524) , si bien qu'il soutient que celles-ci représenteraient en dernière analyse le modèle de la structure de composition des Indika. Quant à Zambrini 29, p. 1108-1109, 1111 (cf. Id . 31 , p . 782), il défend l'hypothèse selon laquelle le dessein principal de Mégasthène n'était pas de fournir une connaissance de l'Inde plus objective par rapport à la production ethnographique précédente, mais plutôt de présenter un modèle politique et social idéal en faveur des Séleucides , de la même manière qu'Hécatée d’Abdère avait prétendu offrir une image idéalisée de l'Égypte au service de la monarchie ptolémaïque. Enfin , pour ce qui est des sources indiennes , nous renvoyons à Stein 17 , col . 301-324 . Mégasthène a certainement été l'auteur qui a eu le plus d'influence sur la littérature grecque ultérieure au sujet de l'Inde . Son ouvrage est devenu le livre de référence obligatoire concernant ce pays , sur lequel seulement un petit nom bre d'auteurs grecs ont écrit après lui sur la base d'une expérience de première main . Mégasthène a été la source principale pour la description de l'Inde que fait Diodore de Sicile dans le livre II de sa Bibliothèque historique (II 35-42 = F 4, ce qu'on a appelé « épitomé de Mégasthène » ; cf. 40 E. Schwartz , art. « Diodorus » 38 , RE V 1 , 1903, col. 672 ; parmi les traductions récentes, avec des notes, de ce livre citons celles de 41 E. Murphy, The antiquities of Asia : a translation with notes of book II of the Library of History of Diodorus Siculus, New Brunswick 1989 , XVII - 130 p. , et de 42 J. Lens Tuero (coord. ) , Diodoro de Sicilia . Biblioteca histórica. Introducción general. Libros I-11, traducción coordinada por J. L. T. , trad . Id . [ livre I) , J. M. García González & J. Campos Daroca ( livre II ) , « Colección de Autores Griegos » , Madrid 1995 , p. 285-430 ). Mégasthène a été largement utilisé par Strabon (cf. 43 I. Puskás , « Strabo and his sources on India » , dans G. Németh (édit . ) , Gedenkschrift István Hahn , coll . « Annales Universitatis Scientiarum Budapestinensis. Sectio Historica » 26 , Budapest 1993 , p. 59-73 ) , ainsi que par Arrien dans la première partie (chapitres 1-17 ) de son opuscule sur l'Inde ( cf. 44 J. Meunier, « Les sources de la mono graphie d'Arrien sur l'Inde » , MusB 26, 1922, p. 5-24 ; 45 Ph . A. Stadter, Arrian of Nico media , Chapell Hill 1980, p. 114-132, 224-230 ; 46 A. Zambrini, « A propósito degli Indiká di Arriano » , ASNP 30 s . , 17 , 1987 , p. 139-154 ; et 47 N. Biffi (édit . ) , L'Indiké di Arriano, intro duzione , testo , traduzione e commento , coll . « Quaderni di Invigilata Lucernis » 11 , Bari 2000 , 261 p., notamment , p. 8-13 ; quant à l'hypothèse de 48 F. Reuss, « Zur Überlieferung der Geschichte Alexanders des Grossen » , RhM 57 , 1902, p. 578-581 , selon laquelle Arrien se serait servi de Mégasthène indirectement à travers Ératosthène [ ** A 52) , elle a été rejetée par Timmer 16, p. 25-28 ) . Mégasthène peut avoir été aussi la source de Sénèque, qui composa un traité ethnographique et géographique intitulé De situ Indiae (Servius, ad. Aen . 9 , 30 ), où étaient dénombrés, selon Pline ( Histoire naturelle VI, 60 ), 60 fleuves et 118 nations ; en effet, comme ces chiffres sont ceux de Mégasthène dans Arrien, Ind. 5 , 2 et 7 , 1 ( = F 12 ), on peut supposer que Mégasthène a influencé directement ou indirectement Sénèque ( cf. Schwanbeck 1 , p. 80 ; André & Filliozat 36 , p. 17) . Il a été aussi l'une des sources de Pline (sur le prolon gement de l'image de l'Inde de Mégasthène chez Pline, cf. 49 A. Dihle, « Plinius und die

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geographische Wissenschaft in der römischen Kaiserzeit » , dans Tecnologia, economia e società nel mondo romano , Atti del Convegno di Como, 27/28/29 Settembre 1979 , Como 1980, p. 121-137). On n'a pas de preuve du fait que Mégasthène ait écrit en dialecte ionien ( cf. Schwanbeck 1 , p. 25 ; Stein 17 , col . 236). Par ailleurs, il n'y a pas de raison de penser que l'ionien d'Arrien provient de ses sources ; c'est pourquoi l'hypothèse selon laquelle le dialecte ionien a été une des caractéristiques de l'œuvre de Mégasthène ou de Néarque manque complètement de fondement. Il semble clair que l'emploi du dialecte ionien par Arrien dans son ouvrage sur l'Inde s'explique comme un hommage à la tradition ethnographique ionienne ( cf. Stadter 45 , p . 116-117 et 225, n . 9 ; Zambrini 46 , p. 143-144 ; pour cette question , cf. Biffi 47 , p. 29-30) . C. Portée philosophique. Mégasthène présente une vision idéalisée de l'Inde qui est un exemple excellent d'utopie ethnographique : « alla svolta tra IV e III sec . a. C. gli Indiká hanno il carattere di una grande utopia costruita sull'appa rente resoconto “ informativo ” di un diplomatico “ colto ” , che usa di questa sua cultura, genericamente legata ai grandi dibattiti filosofici e politici del IV sec . a. C. ed ai più svariati topoi dell'etnografia greca, per organizzare la “ realtà ” indiana secondo linee di pensiero e di rappresentazione nella sostanza greche » (Zambrini 31 , p. 851 ) . Cette image stéréotypée de l'Inde comme une région extrême de l'oikoumene, comportant des aspects idéaux , exotiques et fabuleux, a bénéficié d'un très grand retentissement dans la tradition littéraire occidentale : elle se trouve à l'origine de la plupart des fables antiques et médiévales sur l'Inde et a contribué à la création d'images archétypiques de longue tradition , qui eurent la vie dure jusqu'au XVe siècle et au-delà. Pour la tradition de cette image dans l'Antiquité, nous renvoyons en général à 50 A. Dihle , « The conception of India in Hellenistic and Roman literature » , PCPS 10 , 1964, p. 15-23 , et à 51 J. André & J. Filliozat, L'Inde vue de Rome : textes latins de l'Antiquité relatifs à l'Inde, « Collection d'études anciennes » 27 , Paris 1986 , 461 p . D'après 52 M. Mund -Dopchie & S. Vanbaelen, « L'Inde dans l'imaginaire grec » , LEC 57 , 1989 , p . 209-226 , les procédés qui ont permis aux Grecs de donner de l'Inde l'image merveilleuse et fantastique d'un pays lointain , « devenu pour eux le miroir réfléchissant de leurs propres aspirations» (p. 211 ) , sont au nombre de trois : l'amplification, l'inversion , ou l'image du monde à l'envers , et le transfert de certains traits imaginaires d'un pays à l'autre (p . 219-226) . En partant de cette interprétation des Indika comme une utopie ethnographique, on peut mettre en relief dans les fragments conservés une série d'aspects d'intérêt philosophique : 1. Nature idyllique et modèle anthropologique. Mégasthène, du fait qu'il était le premier grec à avoir voyagé jusqu'à l'Inde orientale, fournissait dans la section géographique de son ouvrage des renseignements plus précis et plus rigoureux que ses devanciers sur la réalité géographique indienne (extension du territoire, indications hydrographiques et orographiques, etc. ) , mais il se servait aussi des éléments de la tradition ethnographique grecque antérieure, comme la

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description de l'excellence du climat du pays, du caractère fabuleux de sa faune et de sa végétation grâce à une terre exceptionnellement fertile , ainsi que les récits sur les peuples extraordinaires et fabuleux qui l'habitaient. Les renseigne ments d'ordre géographique contribuaient à donner une image de l'Inde comme un pays non contaminé, inaccessible et autochtone ( cf. Diodore II 38 , 1 : « on dit que l'ensemble de l'Inde, qui représente une extension énorme, est habité par un grand nombre de peuples de tout genre , dont aucun n'a dès le début une origine étrangère, mais dont chacun passe pour autochtone ; en outre aucun ne reçoit jamais de colonie étrangère ni n'en a jamais envoyée vers un autre peuple » = F 4) . À leur tour, les renseignements ethnographiques évoquaient les motifs traditionnels qui constituaient l'idéalisation du pays (cf. Zambrini 31 , p . 830 832) . Or, à cette exubérance et à cette prospérité de la nature indienne , Mégasthène ajoutait aussi un modèle anthropologique idéalisé, car il établissait une correspondance étroite entre nature idyllique et humanité idéale (cf. Zambrini 31 , p . 832 , 838 ; 53 J. Lens Tuero & J. Campos Daroca , « La geografía de Asia en el libro II de la Biblioteca histórica de Diodoro de Sicilia » , Emerita 65 , 1997 , p . 17-40 ; 54 Id ., Utopías del mundo antiguo : antología de textos, col . « Biblioteca Temática » 8226, Madrid 2000 ). Voici les trois aspects les plus remarquables de cet idéal de vie sociale et individuelle : a) La simplicité de la vie : les habitants de l'Inde, qui possèdent des conditions biologiques et physiques exceptionnelles, mènent un mode de vie austère, frugal et salutaire, éloigné de tout comportement dissipé, malgré les richesses naturelles abondantes et magnifiques du pays (cf.55 R. Vischer, Das einfache Leben : Wort- und motivgeschichtliche Untersuchungen zu einem Wertbegriff der antiken Literatur, coll. « Studienhefte zur Altertumswissenschaft » 11 , Göttingen 1965 , p. 108-109) ; ils font aussi preuve de leur amour pour la paix et de leur respect pour la nature ( cf. Diodore II 36, 6-7 = F 4) . Onésicrite ( » O 23 ) avait déjà présenté des éléments de cette simplicité de vie à propos du pays indien de Mousicanos, et c'est sans doute sa tendance cynique qui avait influé sur ce récit. Cet historien aurait donc fait la description d'un peuple d'après des principes philosophiques étrangers à celui -ci . Or, Zambrini 31 , p. 837 , considère que Mégasthène partage une vision similaire, qu'il étend à l'Inde dans son ensemble : årńDela, ånórns, eủTÉdela , Metórns (cf. Strabon XV 1 , 53-55 = F 32) caractérisent aussi chez lui les habitants de l'Inde, et ces notions s'inscrivent, comme chez Onésicrite , dans le contexte d'une nature riche et généreuse. C'est par ailleurs exacte ment les mêmes traits que l'on trouve dans le récit utopique de lamboulos pour le cas des habitants des îles du Soleil (2I 5 , p. 850) . Il s'agit bien de notions philosophiques rattachées à un idéal de vie cynique, à la recherche d'un ordre social et individuel fondé sur la simplicité ( cf. Zambrini 31 , p. 837 n . 160 ). b ) L'ignorance de l'écriture : À partir des éléments d'idéalisation que nous venons d'énoncer, Mégasthène rapporte sur les habitants de l'Inde d'autres aspects qui manquent de vraisemblance, comme la soi -disant ignorance de l'écriture (cf. Strabon XV 1 , 53 = F 32 : « ...ils ne connaissent pas l'écriture, mais ils administrent toute chose de mémoire ; et toute fois ils vivent contents et heureux grâce à la simplicité de leurs mæurs et à leur frugalité » ). Mégasthène reprend ici sans doute le renseignement fourni par Néarque (cf. Strabon XV 1 , 66 ), selon lequel les Indiens se servaient de lois non écrites. Même s'il y a eu des critiques pour qui Mégasthène veut dire aussi seulement que les Indiens manquent de lois écrites, on peut admettre la possibilité que l'historien ait envisagé de créer un modèle anthropologique dans lequel un trait positif comme l'importance de la tradition orale en Inde est présenté , dans un dessein d'idéalisation , comme quelque chose d'absolu et de généralisé. De ce point de vue , la négation de l'existence de l'écriture doit être interprétée dans le contexte du « triangle » ευτέλεια - αλήθεια -δικαιότης qui reprend l'idée dela justice des peuples situés aux extremes de l'oikoumene ( cf. Zambrini 31, p. 838 ).

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c) La non -existence de l'esclavage ( cf. Diodore II 39, 5 : « il est stipulé (par les habitants de l'Inde ) que personne parmi eux ne soit esclave en aucun cas, mais que, tous étant des hommes libres, ils respectent l'égalité dans le cas de toutes les personnes » = F 4 ; Strabon XV 1, 54 = F 32 ; Arrien, Ind. 10, 8 = F 16) . C'est un aspect tiré probablement d'Onésicrite, qui limite la non-existence de l'esclavage à la région de Mousicanos ( cf. Strabon XV 1 , 54 = FGrHist 134, F 24) , une particularité que Mégasthène étend de nouveau à toute l'Inde. 56 J. Sachse, « Le problème de la non-existence de l'esclavage en Inde selon Onésicrite et Mégasthène » , Eos 71 , 1983 , p. 299-308, soutient que le témoignage de ces deux auteurs ne se réfère pas à l'esclavage en tant que réalité sociale , mais à la philosophie indienne qui cherche à libérer l'homme de sa dépendance des contingences matérielles. Dans ce contexte, il serait question du service que le jeune disciple accomplit dans la maison de son maître, autrement dit du rôle des brahmanes dans l'éducation, ce qui serait sans rapport avec l'esclavage propre ment dit. Pour sa part, Zambrini 31 , p. 838 sq., considère que le but de Mégasthène serait de mettre en relief le modèle idéal de vie (aussi bien individuelle que sociale ) existant en Inde : plutôt que l'affirmation de la notion philos que d'ioórns (qui a des réminiscences cynico stoïciennes ), on aurait ici la conséquence logique d'une organisation sociale bien équilibrée, laquelle, du fait que les divers rôles y sont nettement distribués entre les différents groupes, divise la société uniformément en une série de « classes » et exclut le recours à l'esclavage. Cet ordre assure la réalisation d'un idéal philosophico -politique qui permet de concilier vóuoc et púois dans une vision de la société où l'esclavage devient une notion et une pratique inutiles en vertu de l'existence d'une hiérarchie qui institutionnalise les différences sociales au moyen d'une conception harmonieuse de la société dominée par la figure du roi. Enfin , comme le remarque Lens 42 , p. 394 n. 52 , l'absence d'esclavage est un élément constant dans les descriptions utopiques, et c'est grâce à elle que le peuple indien y mérite fréquemment le qualificatif de « juste » . 2. Aspects mythologiques et religieux . Cf. 57 B. Breloer & F. Bömer ( édit. ), Fontes historiae religionum Indicarum , collegerunt B.B. & F.B. , coll . « Fontes historiae religionum » 7 , Bonnae 1939 , 229 p.; 58 R.C. Vofchuk , Megasthénes y la religión de la India , coll . « Oriente - Occidente » 1 , Buenos Aires 1985 , 32 p. « Il n'est dès lors pas surprenant que les dieux aient aimé séjourner ou circu ler dans un pays aussi extraordinaire (scil. que l'Inde ) , au sein de populations peu banales et souvent proches de la perfection . [ ... ] Parmi les dieux grecs, Dionysos vint y accomplir une œuvre civilisatrice, enseignant à ses habitants la fabrication du vin , l'agriculture, l'art de vivre en société, les rites de la religion , tandis qu'Héraclès menait une expédition et faisait souche dans le pays » (Mund Dopchie & Vanbaelen 52, p . 219) . Depuis Schwanbeck 1 , p. 43-45, on a cherché à reconnaître dans la figure de Dionysos une traduction de la divinité indienne Siva, et dans la figure d'Héraclès celle de Krisna. Cette identification tradition nellement acceptée a été cependant contestée par 59 A. Dahlquist, Megasthenes and Indian religion : a study in motives and types, Stockholm /Göteborg /Uppsala 1962 , 320 p. ( pour Héraclès, p. 69-173 ; pour Dionysos, p . 175-289 ) en faveur d'une nouvelle interprétation d'Héraclès comme Indra et de Dionysos comme un héros auquel rend un culte la tribu Munda . A son tour, cette hypothèse de Dahlquist a été contestée par 60 S.S. Hartman , « Dionysos and Heracles in India according to Megasthenes : a counter -argument » , Temenos 1 , 1965 , p. 55-64, et par Zambrini 9 , p. 96-97, qui considère le livre de Dahlquist comme « un esem pio dei risultati aberranti, cui può arrivare una ricerca megastenica ottusamente chiusa nei limiti di un'indianistica a senso unico » (p. 96) . D'après Zambrini 29, p. 116 n . 24 , dans la période où Mégasthène a écrit son ouvrage , une référence littéraire à Dionysos et à Héraclès avait nécessairement

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pour effet d'établir un lien avec Alexandre . Cela paraît d'autant plus vrai si on pense que l'auteur déclare expressément comme la seule présence étrangère en Inde la présence grecque de Dionysos , Héraclès et Alexandre ( cf. Strabon XV 1 , 6-7 = F 11 a ; Arrien , Ind. 5 , 4 = F 11 b) , trois figures qu'il met donc en un rapport étroit. Zambrini suggère de la sorte que Mégasthène a introduit l'entre prise d'Alexandre dans un cadre historico -mythologique dominé par la présence de figures conquérantes et civilisatrices grecques. Celles-ci seraient considérées comme les responsables des innovations culturelles qui caractérisaient l'histoire primitive indienne décrite comme idéale dans des temps plus récents ( cf. Diodore II 38 , 3-39 , 4 = F 4 ; Arrien , Ind. 7-9 = F 12 , 13 a, 14) . Selon l'interprétation de Zambrini 31 , p. 781-797 , Mégasthène abordait le problème de la Kulturgeschichte de l'Inde par rapport à la prétention de ses habitants d'être autochtones, et de ne pas avoir eu de contacts avec d'autres peuples ou cultures. La section mythologique de l'ouvrage aurait pour fonction d'ordonner les renseignements concernant ce sujet selon la perspective d'une interpretatio Graeca des débuts de la civilisation indienne . Cette partie préhistorique serait enfin sur ce point rattachée de façon complexe aux Aigyptiaka d'Hécatée d'Abdère, à qui l'on devait une modification profonde de la théorie démocri téenne de la Kulturgeschichte , lorsqu'il adapta à son récit égyptien les réflexions de caractère général mises en æuvre par Démocrite. D'un côté , dans le dessein de rationaliser plus facilement la tradition égyptienne dans un contexte inspiré de Démocrite ( cf. 61 T. Cole, Democritus and the sources of Greek anthro pology, Cleveland 1967, p. 153 et 161 ), Hécatée modifia cette théorie en introduisant dans la préhistoire de l'Égypte des dieux -rois porteurs de civilisation et bienfaiteurs. Et, à ce sujet, le développement ultérieur de l'évhémérisme ( ** E 187 ) devait contribuer à renforcer concep tuellement la tendance à diviniser des figures royales comme celle d'Alexandre. De l'autre côté, Hécatée modifia la théorie démocritéenne en y remplaçant la vision du développement de la civilisation selon la notion démocratique de la polis par une vision de ce développement adaptée à l'Égypte ptolémaïque en tant qu'institution monarchique ( Zambrini 31 , p. 786). De là résulterait un modèle de pensée qui va jusqu'à reconstituer la préhistoire et la culture d'un peuple en fonction des intérêts d'une monarchie sous l'influence de laquelle on écrit. Mégasthène aurait donc hérité d'Hécatée la tendance à reconstituer les débuts de la civili sation indienne en fonction des desseins généraux de son œuvre. Dans ce sens, le recours aux figures d'Héraclès et de Dionysos dans l'Urgeschichte indienne « rientra in una prospettiva secondo la quale le informazioni indiane relative a Siva e Krishna [ ... ) furone intese da Megastene como errati riferimenti alla prehistoria greca » (Zambrini 31 , p. 786). De la sorte, l'isolement indien par rapport aux autres cultures, à l'exception de la culture grecque , serait la réponse de Mégasthène, visant à exalter la supériorité de la culture grecque sur les autres, aux soi-disant expéditions ou conquêtes de la part de figures plus ou moins mythiques provenant de ces cultures. Dionysos et Héraclès sont présentés comme des figures civilisatrices dont les actions fournissent à un groupe humain les éléments essentiels pour passer d'un état de vie primitif à un état civilisé ( Brown 26, p. 145 , a suggéré que la théorie de l'évolution humaine de Mégasthène pourrait avoir été influencée, peut-être indirectement, par Thucydide, qui abandonna l'idée d'un âge d'or en des temps reculés en faveur de l'idée d'un développement progressif de l'homme depuis l'état d’abrutissement primitif jusqu'à celui de la vie civilisée ). Or,l'isolement de l'Inde chez Mégasthène présente une valeur historico -culturelle différente de celle que l'isolement égyptien présente chez Hécatée (Diodore de Sicile I 30, 2 et 31 , 2 ), car cet isolement égyptien est l'expression de l'aúrápxela originaire d'un pays qui, en sa condition de berceau de l'humanité, allait être plus tard civilisateur de l'oikoumene tout entière, tandis que l'isolement de l'Inde est l'expression du développement d'un pays qui, en tant que paradigme d'une réalité idéale, eut un rapport exclusif avec la Grèce.

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Pour conclure sur le problème de l'identification de Dionysos et d'Héraclès avec telle ou telle autre figure mythique indienne , il faut, d'après Zambrini 31 , p. 790, l'envisager du point de vue non pas des renseignements positifs mais des connotations culturelles vis-à-vis du monde grec . Mégasthène met en rapport étroit la figure d'Alexandre avec Dionysos et Héraclès, en se fondant sur la tradition grecque précédente concernant les conquêtes de ceux ci , et en suivant un schéme qui , après la mort d'Alexandre, allait devenir classique : l'idée qu'on trouve dans les exploits du roi macédonien la réplique d'un comportement héroico divin qui justifie son apothéose ultérieure. 3. Société . La description que Mégasthène fait de la société de l'Inde ( cf. Diodore II 40 = F 4 ; Strabon XV 1 , 39-41 , 45-49 = F 19 b ; Arrien, Ind . 11 12 = F 19 a) représente la partie de son ouvrage qui a mérité le plus d'attention de la part des critiques modernes ( cf. Schwanbeck 1 , p . 41-43 , Stein 17 , col . 278-281 ; 62 B. Breloer, « Megasthenes (etwa 300 v. Chr. ) über die indische Gesellschaft » , ZDMG , n . s. 13 , 1934 , p. 130-163 ; 63 Id ., « Megasthenes über die indische Stadtverwaltung » , ZDMG , n . s . 14 , 1935 , p. 40-67 ; Brown 26 , p . 146 147 ; Zambrini 31 , p. 797-827 ; Timmer 16 ) . Cette description représente un modèle de société idéal : tout en ayant pour de nombreux aspects des correspon dances réelles dans la société maurya telle qu'elle fut observée par Mégasthène , elle reste pour l'essentiel une projection de la société parfaite qui était au centre du débat philosophico - politique grec au IVe siècle av . J.-C. ( cf. Zambrini , 31 , p. 798-801). Selon le système standard indien, la société était divisée en quatre castes , avec de nom breuses subdivisions à l'intérieur de chacune : les brāhmana (ou prêtres ), les ksatriya (ou guerriers ), les vaiſya (ou vulgaires : paysans et commerçants) et les sudra (ou servants ). La division de Mégasthène en sept groupes (philosophes , paysans, bergers -chasseurs, artisans commerçants, guerriers, inspecteurs, conseilleurs royaux ) ne correspond donc pas à la réalité de l'organisation sociale indienne . Stein 17 , col . 278-279 , suggère la possibilité que Mégasthène ait été influencé de façon inconsciente par le modèle littéraire de la République de Platon . Zambrini 31 , p. 802-808 , considère que la division mégasthénienne est issue de la nécessité , évidente dans le débat politique du IVe siècle , d'établir et de réaliser une société uniforme, dont le bon fonctionnement était assuré par une répartition équilibrée et rationnelle suffisamment stricte des fonctions sociales. Il remarque comment aussi bien pour Platon que pour Aristote la référence réelle est la polis grecque, et comment le mode d'analyse des parties constitutives d'un État dans le livre IV de la Politique d'Aristote rappelle pour l'essen tiel , mais de façon significative, la division de la société indienne . Ce qui serait resté dans la description de Mégasthène comme l'écho de ce débat philosophique et politique du IVe siècle serait la répartition stricte des fonctions sociales dans des groupes imperméables les uns aux autres . Cependant, il n'est pas facile ni souvent même possible de rapporter les caracté ristiques générales de la société indienne de Mégasthène à une source précise et concrète. Par conséquent, Zambrini estime qu'il est inutile de se demander si Mégasthène a bien compris ou non la notion de caste dans la société indienne ainsi que les mécanismes particuliers de cette société , puisque ce débat répond davantage aux intérêts des historiens modernes qu'à ceux de Mégasthène ( cf. aussi Breloer 62 , p . 132 ). Dans ce sens , il faut souligner comment Mégasthène fait passer les données de sa propre observation à travers les filtres des catégories politiques grecques, et comment le système de castes a été à ses yeux un système social résultant de l'action coordonnée de deux lois bien précises : l'une rattachée au règlement du droit familier, selon laquelle est interdit le mariage entre des castes différentes ; l'autre ayant un caractère économique, selon laquelle un individu ne peut pas changer de métier, sauf s'il s'agit de passer d'une classe dans celle des « sophistes » (cf. Diodore II 41 , 5 = F 4 ; Strabon XV 1 , 49 = F 19 b ; Arrien , Ind. 12, 8 = F 19 a). Il s'agit donc d'une société immobiliste, dans laquelle la notion d'endogamie telle que Mégasthène la décrit n'est pas rattachée à la notion de castes mais à celle de « groupe social » . Cela n'enlèverait pas la valeur objective de

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l'observation propre à Mégasthène, mais simplement exigerait de la maintenir restreinte au domaine de sa tendance idéalisante, qui agit aussi bien sur le plan biologique et géographique que sur le plan anthropologique, et sur celui des lois et des coutumes ( cf. Stein 17, col . 273 ). En effet, comme le conclut Zambrini 31 , p. 817 et 826, le modèle idéal politique et social décrit par Mégasthène ne peut pas se passer de tous ces éléments ethnographiques d'idéa lisation qui ont été créés depuis le ve siècle. C'est ici qu'il faudrait chercher la formation philosophique de Mégasthène, une formation par ailleurs générale qui envisageait dans un cadre théorique très ouvert et incliné à des abstractions littéraires les problèmes concernant l'organisation de la vie publique et individuelle d'un État, des problèmes qui représentaient le motif principal d'intérêt pour un diplomate de Séleucos à la cour maurya. 4. Philosophie : brahmanes et garmanes ( sarmanes ). D'après Strabon XV 1 , 58-60 ( = F 33 ) , Mégasthène , qui apparemment n'utilisait pas le terme gymnosophistes ( >* G 35 ) , distinguait , à propos des sages de l'Inde , entre « ceux qui habitent dans les montagnes » lesquels « chantent les louanges de Dionysos » , et « les sages de la plaine » lesquels, à leur tour, « vénèrent Héraclès » . Il faisait tout de suite une autre distinction entre deux groupes de sages : les « brahmanes » et les « garmanes » . Ce dernier mot fut corrigé par Schwanbeck 1 , p . 45 sq ., n . 44, en « sarmanes » , du fait que Bardesane ( = B 11 ; cf. FGrHist 719 F 2 ) distinguait aussi entre les brahmanes et les « samaneos» ; pour sa part, Clément d'Alexandrie, dans un passage fondé vraisemblablement sur Mégasthène (Strom . I 71 , 6 ; cf. Schwanbeck 1 , ibid.) , mentionne ceux qui « suivent les enseigne ments de Butha » ) . On a beaucoup discuté à propos du groupe ou des groupes qui se cachent sous la dénomination de « garmanes/sarmanes » . Certains critiques ont voulu voir ici une allusion claire aux bouddhistes , tandis que d'autres ont pensé qu'il s'agit d'une allusion générale à un plus grand nombre de groupes ou sectes religieuses autres que les brahmanes. Enfin , d'autres ont rejeté toute allusion à des ascètes ou bouddhistes . Nous renvoyons à Zambrini 31 , p. 843 sq . , n . 182, pour une orientation bibliographique sur les interprétations différentes. Parmi les sarmanes , Mégasthène distingue trois groupes: premièrement, les úloßiol, « qui habitent dans les forêts, se nourrissent de feuilles et de fruits sylvestres [... ] , s'abstenant des plaisirs sexuels et du vin » et qui « prêtent conseil aux rois » ( pour d'autres détails concernant ce groupe, cf.Clémentd'Alexandrie,Strom . 171 , 3 = FGrHist 721 , F 20 ) ; deuxièmement, les médecins, qui sont « des hommes de vie sobre, mais n'habitant pas dans les forêts » et qui, « tout comme les précédents, s'entraînent afin d'endurer les efforts et de supporter la douleur, si bien qu'ils passent toute la journée dans la même position sans bouger » ; troisièmement, « les devins, guérisseurs et connaisseurs des prières et des rituels relatifs aux morts » , un groupe dont « certaines femmes, qui s'abstiennent aussi des plaisirs sexuels, partagent l'étude de la sagesse » . En ce qui concerne la description des brahmanes, Zambrini 31 , p. 844 , remarque la difficulté objective rencontrée par Mégasthène pour rendre compte , sans tomber dans des simplifications, d'une réalité si différente à ses yeux . En effet, l'auteur ne décrit que les caractéristiques des deux premières étapes des quatre constituant la vie des brahmanes ( apprentissage, création d'une famille, abandon du monde et méditation constante), il ignore l'existence de textes sacrés ainsi que la nature du rapport maître -disciple, il rationalise le rituel rattaché à la grossesse, il justifie la polygamie par des raisons économiques et il attribue injustement l'exclusion des femmes de la philosophie à un sentiment de liberté. Cependant, Zambrini précise le fait que Mégasthène fournit un nombre considérable de renseignements concernant une réalité religieuse fort complexe et complètement différente de tout modèle grec .

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La doctrine des brahmanes a fait l'objet d'une étude approfondie de la part de Stein 17 , col . 259-266 (cf. aussi Zambrini 31, p. 844-846 ), qui résume dans une série de propositions les renseignements fournis par Mégasthène : a) Théories relatives à la mort: vivre c'est comme se trouver dans le ventre de la mère, et mourir c'est comme naître à une vie vraie et heureuse pour ceux qui ont cultivé la sagesse , ce pourquoi ils s'entraînent à être prêts à mourir ( la même idée a été rapportée par Bardesane, FGrHist 719, F 2 ; et cette doctrine, davantage grecque qu'indienne , fut reprise par le christianisme : au XVe siècle , elle devait rendre populaire le genre de l'Ars moriendi). b ) Rien de ce qui arrive aux hommes n'est absolument bon ni absolument mauvais, étant donné la possibilité d'une valorisation différente pour les mêmes situations ( c'est vraisembla blement une allusion aux đồlapopá des cyniques, l'imperturbabilité ou åtapatia étant la fin pour le sage stoïcien ). c ) En ce qui concerne la doctrine sur la nature , les brahmanes rejoignent les Grecs sur un grand nombre de croyances. d) Le cosmos est créé, corruptible et sphérique ( les mêmes caractéristiques que lui attri buaient les stoïciens ; pour les péripatéticiens, il était aussi sphérique). e) La divinité qui a créé l'univers et qui le dirige est présente dans toutes ses parties (c'est là, à première vue, la doctrine panthéiste du Brahman - Atman, mais les stoïciens enseignaient aussi que tout est pénétré par le principe divin). f) Les premiers principes de toutes les choses sont différents, mais celui du cosmos est l'eau. 8) Il faut ajouter aux quatre éléments un cinquième, dont proviennent le ciel et les étoiles. D'après Stein, cette doctrine présente chez Mégasthène une formulation aristotélicienne : éléments = otolxeta ( terre, eau , feu, air), nature = púois . Le cinquième élément est l'éther ( cf. Schwanbeck 1, p. 46) , dont l'apparition dans la pensée grecque est un processus graduel (cf. 64 W. K. C. Guthrie , HGPh, t. I, p. 271-273). h ) La terre a ses assises au centre de tout. i) L'âme est immortelle. j) On est soumis à jugement dans l'au-delà ( le rattachement de l'idée de l'immortalité de l'âme à un arbitrage est indubitablement grec). L'analyse de Stein met en relief le fait que presque aucune de ces propositions n'est d'origine strictement indienne, mais qu'elles ont été assimilées et filtrées à travers des formes de pensée grecques, notamment cyniques, stoïciennes et aristotéliciennes. On constate donc la tendance de Mégasthène à habiller d'un vêtement grec la pensée et la culture indienne, une tendance par ailleurs confirmée par Mégasthène lui-même, lorsqu'il affirme que les Indiens possèdent sur maints aspects la même opinion que les Grecs (cf. Strabon XV 1 , 59 ), ou que les doctrines des anciens se retrouvent, en dehors de la Grèce, chez les brahmanes en Inde ( cf. Clément d'Alexandrie , Strom . I 72, 4 = F 3). Dans ce sens, le fait que , comme l'avait remarqué Timmer 16, p. 81-84, la doctrine de la transmigration des âmes ne soit pas présente dans le catalogue ci -dessus, doit être interprété, d'après Zambrini 31 , p. 846, comme une preuve de la simplification et de la réduction des doctrines indiennes appliquées par Mégasthène, ainsi que des efforts de celui-ci pour expliquer les doctrines en question suivant un scheme philosophique compréhensible par un public grec . Stein refuse de ranger Mégasthène dans une école philosophique en particulier, puisque celui -ci montre souvent la diversité de sa formation philosophique . En revanche , 65 S. Mazzarino , Il pensiero storico classico, t. II 1 , Bari 1966 , réimpr. 1968 , p. 332, en partant de l'affirmation de Mégasthène selon laquelle les brahmanes rejoignent les Grecs sur un grand nombre de croyances, et selon laquelle l'univers est créé et corruptible, soutient qu'il s'agit là d'une doctrine stoïcienne ( opposée à la doctrine péripatéticienne). D'après cette interprétation, Mégasthène , lorsqu'il affirmait que les brahmanes « coïncident avec les Grecs » , serait en train de voir dans les stoïciens les « Grecs » par excellence , et aurait contribué de la sorte au succès de la doctrine stoïcienne (cf. aussi p. 333 : « la valutazione degli Indiká di Megastene è sempre collegata con i presupposti stoici [... ] della sua opera . Di

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qui , le difficoltà di sceverare, nei suoi giudizi , la componente idealizzatrice stoica e quella derivata da una diretta osservazione » ). Cependant, comme le remarque Zambrini 31 , p. 845 n. 187 , cette catégorisation stoïcienne est beaucoup trop restreinte pour enfermer l'ouvrage de Mégasthène : malgré la présence indéniable d'éléments stoïciens, ceux-ci sont en fait toujours accompagnés d'autres éléments cyniques, aristotéliciens et platoniciens. 5. L'épisode sur Alexandre et les sages indiens Mandanis (ou Dandamis » D 20 ) et Cal ( l ) anus ( C 14 ) . Strabon XV 1 , 68 ( = F 34 a ) et Arrien , Anab . VII 2 , 2-4 ( = F 34 b) nous ont rapporté l'épisode concernant ces sages qui seraient entrés en contact avec les Grecs lors du séjour d'Alexandre à Taxila au début de l'année 3264. Le témoignage le plus ancien est celui d'Onésicrite . Dans la version de Mégasthène, on fait les louanges de Mandanis , qui refuse l'invitation de vivre auprès d'Alexandre , en déclarant « qu'il ne demandait rien à Alexandre ..., il ne désirait ... rien de ce qu'Alexandre était maître de donner, pas plus qu'il ne craignait d'un autre côté d'être éventuellement exclu de ce dont Alexandre pouvait se rendre maître ; tant qu'il vivait, la terre indienne lui suffi sait ... et, mort, il serait débarrassé de son compagnon indésirable, son corps » ( Arrien , trad. P. Savinel ) . Calanus , en revanche, est présenté comme « un homme incontinent qui se laissa réduire en esclavage par la table d'Alexandre >> ( Strabon ) et qui « n'avait aucune maîtrise de lui-même » (Arrien ). D'après Zambrini 31 , p . 846-850 , cet épisode fait partie de la construction littéraire et philosophique qui constitue le sens ultime de l’æuvre de Mégasthène . Mégasthène y reprend le lieu commun classique de l'Inde considérée comme un pays marqué par une grande sagesse . Celle-ci , même si elle s'accorde parfaitement avec le motif traditionnel de la justice comme trait propre des régions situées dans les extrêmes de l'oikou mene et même elle reproduit certains aspects de la « philosophie indienne » , a été fixée selon les catégories de la pensée grecque : « una regione dal clima ideale , con una società paradigmatica, con una popolazione connotata da un comportamento di ideale semplicità e frugalità, non poteva non contemplare philosophoi barbaroi, che a quelle complessa idealità, fatta di armonioso equilibrio e semplicità di costumi , davano il crisma di una saggezza fondata essenzialmente sul rifiuto di tutto ciò che, socialmente od individualmente espressione di un “ eccesso ” , incrinava quello stesso equilibrio » (p. 847). Mégasthène a suivi dans cet épisode Onésicrite , en exploitant le récit que celui -ci avait fait de son entretien avec les sages indiens, mais en changeant radicalement son sens général ( cf. Zambrini 31 , p. 848 sq . ; Biffi 47, p. 23 sq . , 151 , 153 ) . Dans la version de Mégasthène , le ton qui marque le comportement initial d'Alexandre est menaçant, tandis que dans celle d'Onésicrite Alexandre se montre beaucoup plus respectueux à l'égard des principes et des habitudes des « sophistes » indiens. Chez Onésicrite, la figure de Mandanis a pour fonction de louer Alexandre comme « un roi philosophe » , désireux de connaissance , et, par conséquent, comme un conquérant illuminé et juste. En revanche , chez Mégasthène la figure d'Alexandre est fort différente : il représente le terme négatif dans une opposition entre la sagesse équilibrée et l'excès, ce pourquoi cette version mégasthénienne a été envisagée comme le modèle des attitudes, littéraires et philosophiques, contraires à Alexandre qui se sont déve loppées surtout dans les jer et ble siècles ap. J.-C. C'est 66 R. Höistad, Cynic hero and cynic king : studies in the cynic conception of man , Diss . Lund, Uppsala 1948 , p. 208 sq. , qui lança l'hypothèse selon laquelle la tradition hostile à Alexandre chez les moralistes revient à Mégasthène, qu'il rattache à l'école péripatéticienne ( il veut trouver un exemple de la colla boration péripatético -cynique contraire à Alexandre chez le moraliste Télès du me siècle av. J.-C.: cf. 67 P. P. Fuentes González, Les diatribes de Télès : introduction , texte revu et commentaire des fragments, avec en appendice une traduction espagnole, coll . « Histoire des doctrines de l'Antiquité classique » 23 , Paris 1998 , p. 415-417 ).

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Aussi bien dans la version d'Onésicrite que dans celle de Mégasthène , Calanos a pour fonction de mettre en relief la sagesse de Mandanis. Or, Mégasthène entame une polémique contre Onésicrite et le contredit sur un point: sur le fait que le suicide est admis par les philosophes indiens : « d'après Mégasthène, le suicide n'est pas un dogme parmi les sages, et ceux qui l'accomplissent sont taxés de puérils » ( cf. Strabon XV 1 , 68 ). D'après Timmer 16, p. 105-111, Mégasthène y aurait interprété correctement la condamnation indienne du suicide. Or, 68 T. S. Brown, « À Megasthenes fragment on Alexander and Mandanis » , JAOS 80, 1960 , p. 133-135 , attire l'attention sur le fait que les modalités de suicide (selon les différents caractères humains) mentionnées par Mégasthène rappellent davantage Aristote et Théo phraste que la pensée indienne. Dans le même sens, Zambrini 31 , p. 848-849, affirme que , comme c'était déjà le cas chez Onésicrite, Mandanis utilise chez Mégasthène un langage pour l'essentiel cynique, lequel , cependant, n'a pas pour fonction maintenant d'exalter la person nalité d'Alexandre, mais de le prévenir contre les excès et les dangers résultant d'un comportement arrogant. Finalement, dans la version de Mégasthène telle qu'elle est rapportée par Arrien, on trouve un détail significatif : Mandanis « voyait que ceux qui avaient erré avec lui [ Alexandre) à travers tant de terres de mers n'étaient en rien meilleurs, qu'il n'y avait aucune limite à leurs nombreuses courses errantes » (Anab . VII 2 , 3 , trad. P. Savinel). Cette affirmation s'accorde parfaitement avec la construction mégasthénienne d'une Inde autosuffisante, enfer mée en elle -même et immobile dans son état d'équilibre, « anti - impérialiste » ; et elle s'oppose ouvertement à la tendance à l'expansionnisme liée à la figure d'Alexandre. On peut rappeler à ce sujet Mazarino65, p. 332 , qui , en partant du renseignement fourni par Arrien, Ind . 9,9 (= F 14 ) selon lequel « aucun indien , en raison de son sentiment de justice, n'a jamais quitté ses frontières avec des intentions belliqueuses » , soutenait que Mégasthène voyait chez les Indiens des hommes justes par excellence, étrangers à tout impérialisme. L'idée d'un contact direct entre Alexandre lui- même et les brahmanes ou gymnosophistes, ainsi que celle de son entretien avec Dandamis (Mandanis ) sont issues de l'ambassade que , selon les récits d'Onésicrite et de Mégasthène , le roi envoya aux ascètes indiens . Onésicrite remarqua les coïncidences de vie et de doctrine entre les gymnosophistes et les philosophes cyniques . Or, c'est la version de Mégasthène qui est à l'origine du long entretien entre Alexandre et Dandamis que l'on trouve dans un texte du IT siècle ap. J.-C. , teinté de cynisme , qui a été conservé partiellement dans le PGenev . inv. 271 , édité par 69 V. Martin , « Un recueil de diatribes cyniques. Pap. Genev . inv . 271 » , MH 16 , 1959 , p. 77-115 ( cf. 70 P. Photiadès , « Les diatribes cyniques du papyrus de Genève 271 , leurs traductions et élaborations successives » , MH 16 , 1959 , p. 116-139 ; Brown 68 ; 71 G.C. Hansen, « Alexander und die Brahmanen » , Klio 43-45 , 1965 , p . 116-139 ; 72 W.H. Willis & K. Maresch , « The encounter of Alexander with the Brahmans : new fragments of the cynic diatribe P. Genev . inv . 271 » , ZPE 74 , 1988 , p . 59-83 ) . D'après 73 J. P. Oliver Segura, « Diálogo del rey Alejandro con el brahmán Dándamis (PGen . 271 ) » , dans F. Gascó & J. Alvar (édit . ), Heterodoxos, reformadores y marginados en la Antigüedad clásica, Sevilla 1991 , p. 107-136, un partisan des cyniques a dû opposer directement Dandamis et Alexandre , et il a dû développer le discours que Mégasthène attribuait au brahmane. C'est ainsi que le dialogue entre Alexandre et Dandamis serait devenu une « diatribe » et aurait commencé à circuler parmi les philosophes cyniques , lesquels , sous le masque des brahmanes, se seraient attaqués de la sorte aux habitudes de leur époque. Oliver Segura 73, p . 112, ajoute que la manipulation de ce dialogue aurait continué par la suite, si bien qu’un adepte de l'encratisme , l'une des nombreuses sectes gnostiques, aurait rassemblé deux des versions qui circulaient, et les aurait reliées, pour en faire une nouvelle rédaction dans laquelle il aurait introduit des idées des chrétiens et des encratites (ceux -ci , comme les cyniques, plaçaient l'éyxpátela , dont ils prenaient le nom, au -dessus des autres vertus ;

380

MÉGASTHÈNE

M 76

cf.aussi 74 R. Berg, « Dandamis : an early christian portrait of Indian asceticism » , C&M 31 , 1970, p. 269-305 ). Ce serait la version du PGen 271. Le texte de cet entretien devait constituer ensuite la deuxième partie du Récit sur la vie des brahmanes que Palladios d'Hélénopolis composa dans les années 408-410 ( cf. 75 J. D. M. Derrett, « The history of Palladius on the races of India and the Brahmans » , C & M 21 , 1960, p. 64-135 ; et 76 W. Berghoff [édit. ) , Palladius : De gentibus Indiae et Bragmanibus, coll. « Beiträge zur klass . Philologie » 24, Meisenheim am Glan 1967 , p. 1-55 ; sur l'attribution, peu probable, de cet opuscule à Arrien, cf. 77 S. Follet, « Arrien de Nicomédie » , A 425 , DPha, t. I, p. 603 sq .). Cette deuxième partie du récit de Palladios « a elle -même été réemployée dans différentes versions du Roman d'Alexandre ... et dans la traduction latine du Pseudo - Ambroise >> (cf. 78 C. Muckensturm , « Dandamis » , D 20, DPhA , t. II, p. 611 ). JOSÉ MARÍA CAMACHO ROJO et PEDRO PABLO FUENTES GONZÁLEZ . 77 MÉGILLOS DE SPARTE RE 4

III- II ?

Témoignages et fragments. H. Thesleff, The Pythagorean Texts , p . 115 , 9 21 . Un fragment en dialecte dorien d'un lepì đpiduāv de Mégillos , consacré au nombre 5 (pentade), défini comme altération (állo wolc) , lumière (páoc) et absence de haine (åveix a), est transmis par le Pseudo - Jamblique, Theol. arithm . 34 , 21 - 35 , 1-6 De Falco (= 115 , 15-21 Thesleff ). Cf. à ce propos W. Burkert, Lore and science , p. 467 n . 3 . Mégillos de Sparte est un personnage des Lois de Platon et de l'Épinomis (RE 3) ; selon H. Thesleff, Introduction, p . 111 , le traité de “ Mégillos " est apparenté à d'autres écrits pseudopythagoriciens liés d'une façon ou d'une autre à Platon, comme le De natura mundi du Pseudo-Timée de Locres ( epitome du Timée ), le De parentibus de Pempélos ( fondé sur les Lois ), le De sapientia de Périctionè (mère de Platon ) . Thesleff (p. 115 ) considère que le traité en question appartient à un groupe d'ouvrages composés en Occident entre le IIIe et le II ° siècle av. J.-C. Mégillos ne figure pas dans le catalogue des pythagoriciens de Jamblique. BRUNO CENTRONE . 78 MÉGILLOS DE SPARTE RE 3

va

Mégillos, qui est l'un des interlocuteurs de l'Étranger d'Athènes et de Clinias dans les Lois de Platon , représente les institutions de Sparte qu'il défend. Il apparaît également dans l'Epinomis pseudo -platonicien. Dans le premier livre des Lois (642 b) , il se présente comme un “ proxène ” d'Athènes. Le “ proxène” défendait les intérêts des ressortissants d'une cité étrangère ; son rôle est de type consulaire, à cette différence près qu'il est membre de la cité qui accueillait ces ressortissants . Pour une revue des hypothèses touchant l'identification de ce Mégillos avec des personnages historiques , voir Debra Nails, The People of Plato, s. v. « Megillus of Sparta » . LUC BRISSON , 79 MÉGISTIAS DE MÉTAPONTE Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique, V. pyth. 36 , 267 ; p . 144 , 5 Deubner. C.M. ) [Sur ce type de nom, voir Fr. Bechtel , Die historischen Personennamen , p. 279. BRUNO CENTRONE.

M83

MÉLANIPPOS DE CYRÈNE

80 MÉGISTIAS DE SMYRNE

381 F II - D III

Physiognomiste. Selon Philostrate, Vies de sophistes, II 27 , Mégistias de Smyrne était un des premiers physiognomistes de son temps. Il enseignait dans un sanctuaire proche de l'agora et avait de nombreux disciples ; il continuait sans doute la tradition de Polémon de Laodicée. Sous le règne de Septime Sévère probablement, il reçut la visite du sophiste Hippodromos de Larissa et, sans se laisser abuser par les appa rences, sut déceler en lui un sophiste de talent et un homme sensé , notamment en s'attachant à observer « son regard vif et brillant » . SIMONE FOLLET.

Ia

81 MÉLANION D'IASOS

On ne sait si Mélanion , fils de Théodoros, d'Iasos se consacra à la philo sophie une fois parvenu à l'âge adulte. Mais au temps de ses études , au 1 ° siècle avant notre ère, c'est dans cette discipline qu'il avait particulièrement brillé. Le décret de sa patrie qui l'honore en tant qu'éphébarque (IK 28 , 98 ) dresse le portrait de l'apprenti philosophe idéal « qui , depuis sa prime jeunesse, s'est pris de zèle pour la perfection et a fréquenté le gymnase , où il a manifesté son goût de l'effort et de l'étude et s'est appliqué à la perfection ; qui , en se consacrant aux disciplines propres à son âge, et parce qu'il a tout particulièrement, dans la discussion philosophique, acquis à force de progrès une compétence efficace, se comporte de manière raisonnable et de nature à susciter l'émulation , fournissant ainsi une belle illustration de sa règle de vie philosophique ... » BERNADETTE PUECH .

82 MÉLANIPPIDÈS DE TARENTE

Iva ?

Dans un fragment des Tarentins du poète comique Alexis , cité par Athénée ( IV , 161 b - c = fr. 221 , t . II , p. 378 Kock = Kassel -Austin , PCG II , fr. 223 ) , est mentionné un groupe d'hetairoi des pythagoriciens au sein duquel figure un certain Mélanippidès : ces gens mangeaient un bol de farine tous les cinq jours . Sur les pythagoriciens dans la comédie moyenne ( DK 58 e ) , voir la note de M. Timpanaro Cardini, I Pitagorici. Testimonianze e frammenti, coll . « Biblio teca di studi superiori » 28 , t . III , Firenze 1964, 19732, p . 372-381 , et W. Burkert, Lore and science , p . 198-202 . [Sur les Pythagoriciens dans la comédie moyenne , voir aussi G. Méautis , Recherches sur le pythagorisme, Neuchâtel 1922, p. 7-18 ; A. Melero Bellido, Atenas y el pitagorismo : investigación en las fuentes de la comedia, coll . « Acta Salmanticensia. Filosofia y letras » 67 , Salamanca 1972 ; J. L. Sanchis Llopis, « Los Pitagóricos en la comedia media : parodia filo C.M. ] sófica y comedia de tipos » , Habis 26, 1995, p. 67-82 .

BRUNO CENTRONE . 83 MÉLANIPPOS DE CYRÈNE Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique, V. pyth . 36, 267 ; p. 146 , 8 Deubner. [Y aurait - il lieu d'établir un lien quelconque de parenté entre ce Mélanippe inconnu par ailleurs et le “ pythagoriste ” tarentin Mélanippidès ( 3 - M 82 ), dont le poète comique Alexis

382

MÉLANIPPOS DE CYRÈNE

M83

nous apprend qu'il ne mangeait qu'un bol de farine tous les cinq jours ? Le rapprochement est déjà signalé par Diels (DK , vol. I , p. 448, 2-3) ; cf. encore L. Zhmud, Wissenschaft, Philo sophie und Religion im frühen Pythagoreismus, Berlin 1997 , p. 68 n . 6 et 8. Si l'on répond à cette question par l'affirmative, ce serait alors la seule et unique rencontre entre le catalogue de Jamblique ( provenant du pro-”mathématicien” Aristoxène deTarente (MMA 417 ] ) et les noms de "pythagoristes” transmis par les poètes comiques. Mais il semble plus probable qu’Alexis a tout simplement créé le personnage de ses Tarentins en s'inspirant du nom d'un pythagoricien réel. C.M. ) BRUNO CENTRONE. 84 MÉLANTAS RE Dedicataire de la Λεξέων Πλατωνικών συναγωγή κατά στοιχείον ( Collec tion alphabétique de mots propres à Platon ) de Boéthos ( B 44 ] ( Photius, Bibl. cod. 154) , dont il reste des vestiges regroupés par A.R. Dyck, « Notes on Plato nic Lexicography in Antiquity » , HSPh 89, 1985 , p. 75-88 . Cf. K. Praechter, art. « Melantas » , RE XV 1 , 1931 , col . 425-426 . RICHARD GOULET.

85 MÉLANTÈS RE 3

fl. D III a

Péripatéticien , fils d'un certain Léon ( identifié sans doute gratuitement par K. O. Brink, art. « Pankreon » , RE XVIII 3 , 1949, col . 625 , à Léon de Byzance [RE 23 ) , l'adversaire de Philippe de Macédoine ) et frère de Pancréon , héritier, avec son frère , des biens que possédait Théophraste oíxoi, c'est-à-dire sans doute à Érèse ( Lesbos ), selon les termes du testament cité par D.L. VI 51-57 = texte n° 1 dans W.W. Fortenbaugh et alii, Theophrastus of Eresus. Sources for his life, writings, thought and influence, edited and translated, t. I : Life, writings, various reports, logic, physics, metaphysics, theology, mathematics, coll . « Philosophia Antiqua » 54 , 1 , Leiden 1993 , p. 40-47 . C'est à titre d'ami ( piros ) de Théophaste que , plus loin dans le testament ( V 52-53 ) , il apparaît, avec son frère , comme l'un des dix héritiers solidaires du « jardin , du peripatos et de toutes les maisons attenantes au jardin » . Avec les autres, il pourra y étudier et y philosopher ( ovoxoá(elv xai ovuotooodɛīv ). En D.L. V 54, Théophaste évoque les conversations tenues avec Mélantès et Pancréon au sujet d'une somme de 2000 drachmes qui devaient être versées aux affranchis de Théophaste : Pompylos et Threpta. Il est possible que les fils de Léon aient été parents de Théophraste, car Mélantès ( ou Mélantas ) était également le nom du père ( W. Pape et G. E. Benseler, Wörterbuch , t. II , p. 886 b , parlent par erreur du frère [" B." ]) de Théophaste ( D.L. V 36 ) . Il faudrait alors rattacher toute cette famille à Érèse. La Souda, s. v. Deodpaotoç 199 , II , p. 701 , 21-24 Adler = texte n° 2 Fortenbaugh, donne pour père à Théophraste Mélantès ou bien Léon . Pancréon et Mélantès n'apparaissent pas dans la liste des sept exécuteurs testamentaires (Étqueantai tõv Év tñ diaOnxn ) dressée plus loin par Théo phraste ( V 56) , peut- être parce qu'ils ne résidaient pas habituellement à Athènes , mais des fonctions plus importantes leur sont confiées pour lesquelles Hipparque ( » H 143 ) - qui aurait dû leur être associé s'il n'avait fait un grave “naufrage "

M 87

MÉLANTHIOS DE RHODES

383

dans ses affaires personnelles ( V 55 ) - doit leur octroyer à chacun un talent ( V 56 ) . Cf. A. Hug , « Zu den Testamenten d . griech . Philosophen » , Festschrift 39. Philol. Versammlung. Univ . Zürich, 1887 , p . 3 sqq ., 6 sqq. RICHARD GOULET.

DI

86 MÉLANTHIOS ([MJÉLANTHIOS)

Académicien inconnu ( Philod ., Acad . hist., col . XXXIV 8-11 = Antioch . T 3 , 7-8 Mette ) , disciple d'Antiochus d'Ascalon ( 2 + A 200 ) ou de Philon de Larisse ( selon l'hypothèse de E. Puglia, ZPE 130 , 2000, p. 17-28 ) . TIZIANO DORANDI. 87 MÉLANTHIOS DE RHODES RE 12

FIIa

Académicien, disciple de Carnéade de Cyrène ( * + C 42 ) . Témoignages et fragments. 1 TrGF I 131 Snell . Philodème cite Mélanthios parmi les disciples de Carneade (Acad. hist., col . XXIII 14 ) et nous transmet un fragment des vers qu'Apollodore lui avait consacrés dans sa Chronologie (Acad. hist. , col . XXXI 3-13 = Apoll., FGrHist 244 F 58 = T1 ) . Cf. 2 U. von Wilamowitz -Möllendorff, « Melanthios von Rhodos » , Hermes 29 , 1894 , p . 150-154 ( = Kleine Schriften II , Berlin 1941 , p . 90-94 ) ; 3 W. Capelle , art. « Melanthios » 12 , RE XV 1 , 1931 , col . 429-431. Mélanthios est aussi connu en tant que disciple de Carnéade par Cicéron ( Luc. 16 = Carn . T 4a Mette ) , qui souligne la suavitas de son style . Diogène Laërce ( II 64 = T 3 ) raconte qu'Eschine de Naples ( A 70 ) avait été son disciple et son mignon . La chronologie de Mélanthios n'est pas précisée par Apollodore. La seule donnée certaine est qu'il était plus âgé qu'Eschine de Naples . Cela rend probable l'hypothèse de Wilamowitz 2 qui situe l'acmé de Mélanthios vers 150 . D'Apollodore on apprend que Mélanthios fut un poète tragique et le disciple du grand philologue Aristarque. Wilamowitz 2 a examiné de manière exhaustive les rapports d'identité de ce Mélanthios avec le poète tragique plus ancien Mélanthios d'Athènes, qui vécut à l'époque de Cimon , à propos de la paternité d'un trimètre sur la colère transmis par Plutarque ( De cohib. ira, 453 f et De sera num . vind. , 551 a = F 1 ) . Il a démontré que ce vers était influencé par Euripide et qu'il ne pouvait donc être attribué au poète tragique ( voir aussi Capelle 3 et Snell - Kannicht 1, p. 303. En faveur de l'attribution à Mélanthios d'Athènes , voir Nauck , TGF2, p. 760-761, et 4 H. Diehl , art. « Melanthios » 10 , RE XV 1 , 1931 , col. 428-429 ). Le contenu de ce trimètre présuppose en outre le débat entre stoïciens et académiciens sur la psychologie des passions (Wilamowitz 2, p. 153 ) . Le pseudo -Plutarque ( Vit. dec . orat. ; Lyc ., 842 c = T 4) parle d'un jardin du philosophe Mélanthios , personnage que Keil a identifié avec le philosophe

384

MÉLANTHIOS DE RHODES

M 87

académicien ( 5 B. Keil , « Der Perieget Heliodoros von Athen » , Hermes 30 , 1895 , p. 200 ). TIZIANO DORANDI.

88 MÉLÉAGRE

F III

Dédicataire du ſlepi únoécewv ' ( Sur les hypothèses) et des Aóyou υποθετικοί εις τους νόμους α' ( Arguments hypothétiques considérés du point de vue de leurs lois (Hadot ]) de Chrysippe ( C121 ), selon la liste de Diogène Laërce VII 196. Un tel ouvrage ne peut guère avoir été dédié qu'à un disciple ou à un collègue au sein de l'école stoïcienne. A propos du second titre, P. Hadot, DPHA II , 1989 , p. 348 , renvoie à Épictète , Dissert. I 26, 1 : « C'est une loi des arguments hypothétiques ... » Absent de la RE. RICHARD GOULET .

89 MÉLÉAGRE Rien n'autorise à identifier le Méléagre cité par Diogène Laërce II 92 , auteur d'un Tepi do [@v ( Sur les opinions) qui comprenait au moins deux livres , à Méléagre de Gadara ( » M 90 ). L'auteur de cet ouvrage parlait des cyrénaïques, affirmant qu'ils considéraient comme inutiles et la partie physique et la partie dialectique (de la philosophie ) . Diogène Laërce prête la même opinion sur les cyrénaïques à l'académicien Clitomaque [ 2C 149 ] ( successeur de Cratès de Tarse ( > C204 ) à la tête de l'Académie ).

MARIE -ODILE GOULET -CAZÉ.

flor. 96 90 MÉLÉAGRE DE GADARA RE 7 Poète et épigrammatiste , auteur de la célèbre Couronne . Il est clairement qualifié de cynique par Athénée , Deipnosophistes XI , 502 c (Mɛnéaypoc 8 ' Kuvixóc ) , et IV , 157 b (où la courtisane Nicion s'adresse à des cyniques qui participent au banquet et leur parle de leur « ancêtre » Méléagre : o apóyovog υμών Μελεάγρος ο Γαδαρεύς) Études. 1 H. Ouvré , Méléagre de Gadara, Paris 1894 ; 2 K. Radinger, Meleagros von Gadara, Innsbruck 1895 ; 3 J. Geffcken , art. « Meleagros » 7 , RE XV 1 , 1931 , col . 481-488; 4 F. Susemihl, GGLA, t . I , p . 46-47 ; t . II , p . 555-557 ; 5 A. Wifstrand, Studien zur griechischen Anthologie, coll . « Lunds Universitets Årsskrift » 23 , 3 , Lund /Leipzig 1926 ; 6 D.R. Dudley , A History of Cynicism , p . 121-122 ; 7 A. Cameron , The Greek Anthology from Meleager to Planudes, Oxford 1993 ; 8 Kathryn J. Gutzwiller, Poetic Garlands. Hellenistic Epigramsin Context , coll . « Hellenistic Culture and Society » 28 , Berkeley 1998 ; 9 K. Döring , dans GGPh , Antike 2/1 , Basel 1998 , p . 314. On lira toujours avec intérêt le beau portrait de Méléagre par Sainte-Beuve dans Portraits contem porains et divers, Paris 1846 , t. III , p. 476-505 . Datation . L'acmè de Méléagre se déduit de la seconde scholie qu'écrivit le lemmatiste (appelé L par Stadtmüller et J par Cameron ) en marge du proème à

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MÉLÉAGRE DE GADARA

385

la Couronne. Cette scholie , transmise par le Palatinus 23 , est éditée par 10 H. Stadtmüller, Anthologia graeca Epigrammatum Palatina cum Planudea , t. I, Leipzig 1894, p. 82. On y lit à propos de Méléagre: Ősquaoev Édì Eɛlɛúxov TOŨ toxárov. Le Séleucus en question est Séleucus VI Épiphane Nicator qui gouverna de 96/95 à 95/94 av . J.-C. ( cf. Gow et Page 16 [ cité plus loin ) , t. I , p . XIV ). Si l'on considère que l'acmè correspond à la quarantième année de la vie , Méléagre dut naître autour de 135 av . J.-C. Le dernier poète inclus dans la Couronne est Antipater de Sidon ( cf. IV 1 , 42 ; VII 428 : épitaphe d'Antipater rédigée par Méléagre ; et en VI 163 il imite l'épigramme IX 323 d’Antipater imitant lui-même Léonidas de Tarente IX 322 ; cf. Susemihl 4 , t . II , p. 552 et n. 180 ; p. 555 et n . 1870 ). Mais les dates d’Antipater ne sont pas faciles à établir. Il semble qu'il vivait vers 150a (cf. Gow et Page 16 , t. I , p. XIV -XVI , qui rappellent que l'épigramme 25 - dans leur édition - d’Antipater de Sidon est datée avec une forte probabilité d'environ 1508 et qu'il est raisonnable d'attri buer à Antipater de Sidon plutôt qu'à Antipater de Thessalonique l'épigramme 68 qui fait état du sac de Corinthe en 146 av . J.-C. ) . En outre le fait que Méléagre cite l'épigrammatiste Archias, qui est probablement le poète Archias d'Antioche immortalisé par Cicéron, amène à ne pas dater la Couronne avant 100a (cf. Cameron 7 , p. 51 ) . Il est à noter enfin que la Couronne ne contient pas d'épigramme de Philodème de Gadara qui était né vers 110 , alors que la Couronne de Philippe de Thessalonique , qui se présente comme un supplément à celle de Méléagre, mentionne Philodème parmi les épigrammatistes qu'elle ajoute (cf. IV 2 , 9 , ainsi que les poèmes V 11 et XI 35 ) . Gow et Page 16 , t. I , P. XVI , arrivent à la conclusion que la Couronne a été compilée dans les premières années du premier siècle av . J.-C. Méléagre dédia sa Couronne à un certain Dioclès ( cf. Anthologie Palatine IV 1 , 3 : « Celui qui l'a faite ( s.e. cette couronne ), c'est Méléagre ; et c'est à l'illustre Dioclès qu'il adresse ce souvenir » (trad. Walz ) , et XII 257 , 5-6, un poème attribué à Méléagre mais que l'on considère , en raison de son style , comme n'étant pas de lui , où il est dit que Méléagre « en hommage durable à Dioclès, tressa les fleurs d'une couronne poétique » , trad . Aubreton ). En tenant compte de cette dédicace , 11 E. Maass , De biographis Graecis quaestiones selectae, coll . « Philologische Untersuchungen >> 3 , Berlin 1880, p . 8-23 , a essayé de résoudre un problème de cohérence chronologique que pose un passage de Diogène Laërce. En VI 99 on lit en effet : « Les livres de Ménippe ( > M 129 ) regorgent de moqueries et présentent des ressemblances avec ceux de son contemporain Méléagre (Mɛneáypov toŨ xat ' ajtóv yevouévou ) ». Ménippe ayant vécu entre le dernier quart du IVe s et le premier tiers du III s . av . J.-C. , il ne peut être le contemporain de Méléagre. Maass 11 , p . 18 , a donc suggéré que Diogène aurait commis une méprise et se serait approprié une affirmation qui était en fait celle de sa source Dioclès de Magnésie ( ” D 115 ) cité juste avant , que Maass identifie au dédicataire de Méléagre. Dioclès aurait dit : « notre contemporain Méléagre » et Diogène aurait transposé en disant « son contem porain » , laissant supposer par là à tort que Ménippe était le contemporain de Méléagre. En fait nous ne savons pas si le Dioclès, éromène de Méléagre, que

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l'on rencontre dans la Couronne, est bien le Dioclès de Magnésie , auteur d'un Répertoire cursif des philosophes ( ’Enlôpour tőv pihooópwv en D. L. VII 48 et X 11 ) et de Vies des philosophes ( Bíol tõv plooópwv) auquel Diogène emprunte beaucoup de matériel. La construction de Maass , même si elle est séduisante, n'est qu'une hypothèse et se trouve parfois accueillie avec scepticisme (cf. Gow et Page 16 , t . I , p . XVI ; R. Aubreton , l'éditeur du livre XII dans la CUF, p. 139 n . 7 : « Ce Dioclès était-il un éromène de Méléagre ou le Dioclès de Magnésie, auteur de l’’Etiopoun tõv plooópwv utilisée par Diogène Laërce, ou les deux à la fois ? On ne sait . » Quoi qu'il en soit de l'hypothèse de Maass , on s'accorde pour penser que Ménippe et Méléagre ne pouvaient être contemporains (curieusement toutefois 12 D. H. Garrison, Mild Frenzy . A reading of the Hellenistic love epigram , coll . « Hermes Einzel schriften >> 41 , Wiesbaden 1978 , p . 9 n . 9 , laisse ouverte cette possibilité ). Cameron 7 , p. 49 , suggère que le rapprochement Ménippe/Méléagre est dû au fait qu'ils étaient nés dans la même cité de Gadara. Nous ne connaissons pas la date à laquelle Méléagre est mort, mais nous savons qu'il atteignit la vieillesse (cf. VII 418 , 3 : Eiç yñpaç 8 ' ot ' činv ; 418 , 4 éynpotpódei). Des datations assez différentes ont été proposées, par exemple Gutzwiller 8 , p . 236 n . 20 , situe la mort du poète dans la décade des années 90 (elle plaçait sa naissance « not later than 170 BC » ) , tandis que 13 H. Beckby (édit.), Anthologia graeca ?, t . I , München 1965 , propose une datation autour de 130 pour la naissance et autour de 60 pour la mort. Biographie. Méléagre a écrit trois poèmes autobiographiques ( VII 417 , 418 et 419 ) et peut- être un quatrième, le poème anonyme VII 416. On sait ainsi que Méléagre, fils d’Eucratès ( VII 417 , 3 et 418 , 5-6) , naquit dans la célèbre ville de Gadara (Tadápwv xhelvà nóiç en VII 418 , 1 ), « la nouvelle Attique des Syriens, Gadara » ( VII 417 , 2 ) , mais qu'il fut élevé à Tyr ( VII 417 , 1 et 419 , 5 ; cf. XII 256 , 11 ) . Sur Gadara, voir la notice « Ménippe » (2 M 129 ) . Méléagre devait côtoyer la communauté juive , à en juger par ses allusions quelque peu ironiques au sabbat ( V 160 ). Les épigrammes de la Couronne témoignent chez Méléagre d'amours à la fois homosexuelles et hétérosexuelles . Quand l'âge vint , il se retira à Cos , devenant ainsi concitoyen des Méropes ( VII 418 , 4-5 ) . C'est à Cos qu'il mourut, selon ce que dit le lemmatiste du proème de la Couronne (Stadtmüller 10 , t. I , p . 81 ) . L'épigramme funéraire de Méléagre transmise par l'Anthologie Palatine VII 419 se clôt sur une triple interjection : Earáu en syrien , Aůdovic en phénicien et xalpe en grec, par laquelle le poète défunt interpelle les passants ( cf. 14 M. Luz , « Salam , Meleager ! » , SIFC, n . s . , 6, 1988 , p . 222-231 ) . Ses écrits. Cf. Susemihl 4 , t . I, p. 46 n . 146. Méléagre, dans sa jeunesse, subit l'influence littéraire du cynique Ménippe de Gadara (Anth . VII 417 , 4 : ó ouv Μούσαις Μελέαγρος πρώτα Μενιππείοις συντρoχάσας Χάρισιν , « moi , Méléagre , qui d'abord , soutenu par les Muses , ai concouru avec les Grâces ménippéennes » , trad. Waltz ; VII 418 , 5-6 : « Ce sont les Muses qui m'ont , parmi un petit nombre , moi , Méléagre, fils d’Eucratès, paré des Grâces Ménip péennes » , trad . Waltz ; voir aussi VII 416 , 1-2 : « Je renferme, étranger,

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Méléagre, fils d'Eucratès, qui à l'Amour et aux Muses, unit les Grâces aux doux propos » , trad . Walz ). Les xáPITEç (= les Grâces) de Méléagre devaient être des satires d'inspiration ménippéenne ( Athénée , Deipnosophistes IV , 157 b : év tais XápLoLV ÉTLYpapouÉVALS ; Anth . VII 418 , 6 ; 421 , 9-10) ; un seul extrait nous en est parvenu ( Athénée , Deipnosophistes IV , 157 b : « Homère, qui était Syrien de naissance , avait représenté les Achéens comme s'abstenant de poisson, selon les coutumes de son propre pays , alors même qu'il y a du poisson en grande abondance dans la région de l'Hellespont » ) . Méléagre, en Anth. VII 417 , 4, présente Ménippe comme un “concurrent" dans le domaine poétique ( MɛvinneioLç ouvtpoxáoaç Xáplouv). Diogène Laërce (ou sa source ) a pu en conclure que les deux poètes étaient contemporains (D.L. VI 99). Cette explication est peut être plus vraisemblable que celle de Maass 11 exposée plus haut. Meleagre écrivit également un ouvrage qui contenait une λεκίθου και φακής o'yxploLc. 15 U. von Wilamowitz -Möllendorff, Antigonos von Karystos, coll . « Philologische Untersuchungen » 4 , Berlin , 1881 , p. 295 , traduit par l'expres sion « Streit des Linsenpürees und der dicken Linsen » , opposant ainsi les lentilles écrasées et accommodées avec de la graisse aux lentilles entières man gées au naturel, autrement dit les gourmands à ceux qui mangent sobrement; nous proposons « Comparaison des lentilles en purée et des lentilles entières » . D'après la formulation d'Athénée IV , 157 b ñ uovov åvéyvwte ovYypaurá των αυτού το περιέχον λεκίθου και φακής σύγκρισιν), cet ouvrage semble avoir été indépendant des XápLTES; mais tous ne pensent pas ainsi, par exemple Ouvré 1 . Enfin Athénée XI , 502 c , a conservé une phrase d'un Banquet: « Dans une telle situation, il lui confia la lourde tâche de porter un toast, douze profondes chytrides » . Une fois de plus Méléagre imite Ménippe, auteur lui aussi d'un Banquet. Nous n'en savons pas plus sur les cuvres de style ménippéen de Méléagre qui confirment la qualification de cynique que lui attribue Athénée. Mais ce qui fit la célébrité de Méléagre, qu'on a appelé « l'Ovide grec » ( cf. Susemihl 4, t. II, p. 556 et n . 190 ), c'est sa fameuse Couronne ( Etépavoc) d'épigrammes qui fit de lui un des poètes les plus représentatifs de l'Anthologie Palatine. Reviennent à Méléagre quelque 270 épigrammes erotica , 290 epitymbia, 135 anathematica et 50 epideictica, auxquelles il faut ajouter 45 épigrammes transmises par l'Anthologie de Planude. Méléagre composa cette Couronne alors qu'il avait déjà un certain âge ( cf. VII 417 , 7 : « Chargé d'années, j'ai gravé ces vers sur des tablettes devant ma tombe » , trad . Walz). Dans les vers 3 et 4 de l'hymne funéraire de VII 419, il donne en quelque sorte une définition de sa poésie en se présentant comme και τον γλυκύδακρυν " Έρωτα και Μούσας ιλαραϊς συστολίσας Χάρισιν , celui « qui allia aux Grâces riantes l’Érôs des douces larmes et les Muses » ( trad. Waltz ) . Les épigrammes combinent en effet l'Amour et les Muses à l'humour élégant. Elles sont éditées par 16 A. S. F. Gow et D.L. Page, The Greek Anthology. Hellenistic Epigrams, t. I : Intro duction, Text and indexes of sources and epigrammatists, Cambridge 1965 , L - 264 p. ; II : Commentary and indexes, Cambridge 1965 , V-716 p. ; 17 P. Waltz et alii (édit. ), Anthologie grecque , CUF, Paris 1928-1980, 13 vol . (avec traduction française ); 18 H. Beckby, Antho logia graeca , 4 vol . , 1957-1958 , 2e éd. , München 1965-1967 (avec traduction allemande ). Les épigrammes de Méléagre ont bénéficié d'éditions séparées : 19 P. Whigham (édit.), The poems of Meleager, ed . and verse transl . by P. W .; introd ., literal transl . and notes by P. Jay , Berkeley 1975 , 126 p. ; 20 J. Clack (édit. ) , Meleager, The poems, Wauconda ( Illinois) 1992 , VII - 160 p. ; 21 G. Guidorizzi (édit. ) , Meleagro, Epigrammi, coll. « Oscar classici greci e latini » 28 , Milano 1992, 139 p. ( texte grec, trad. et notes).

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Le cynisme de Méléagre . Athénée ( XI , 502 c ) qualifie Méléagre de « cynique » et Diogène Laërce VI 99 , dans son livre consacré au cynisme, compare les ouvrages de Ménippe à ceux de Méléagre. Par ailleurs l'utilisation du thème de la lentille dans un de ses ouvrages est en harmonie avec l'intérêt que les cyniques portaient à ce légume ( cf. Cratès, fr. 353 Lloyd - Jones/Parsons = 6 Diels = 8 Diehl = SSR V H 72 ) . Le goût de Méléagre pour la satire ménip péenne était tel qu'il écrivit lui - même des satires dans lesquelles il s'inspirait de son illustre prédécesseur. Une de ses épigrammes fait état d'un cosmopolitisme tout à fait conforme à l'esprit du cynisme ( VII 417 , 5 : « Si je suis Syrien , quoi d'étonnant ? L'unique patrie, étranger, c'est le monde que nous habitons ; un seul Chaos a produit tous les mortels » (trad . Walz ] ; voir aussi la fin de son épigramme funéraire en VII 419) . Il semble que Méléagre, après avoir pratiqué la philosophie cynique , se soit détourné du cynisme sous l'effet de l'amour. C'est ainsi que dans l'épigramme XII 101 , celui qu'il aime , Myiscos , « tire en plein ceur avec les yeux et lance triomphant: "Cette souveraine sagesse ( oxnntpopópoç oopia ) aux grands airs sourcilleux, je la foule aux pieds” » . Cédant à l'amour de Myiscos, Méléagre semble alors renoncer à la philosophie cynique , « sagesse porteuse de sceptre » littéralement, peut-être en souvenir du bâton du cynique , qui était l'insigne de la royauté du philosophe . D'autres épigrammes font une allusion discrète à cet abandon du cynisme (XII 23 et 117 ).

MARIE-ODILE GOULET -CAZÉ. 91 MÉLÉAGRE DE SÉLEUCIE (CILICIE)

IP ?

Le stoïcien Méléagros , fils d'Apollonios , de Séleucie du Calycadnos, paraît connu seulement par l'inscription de la statue que lui éleva sa patrie, « pour son mérite et son dévouement » ( S. Hagel et K. Tomaschitz, Repertorium der westkilikischen Inschriften , Wien 1998 , n ° 61 , p . 358 ) . À en juger par l'écriture , son activité pourrait se placer au le siècle de notre ère. BERNADETTE PUECH .

92 MÉLÉSIAS DE MÉTAPONTE Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique , V. pyth . 36, 267 ; p. 144 , 2 Deubner. [ En réalité Mɛano aç est une correction de K. Keil , Analecta epigraphica et onomato logica, Leipzig 1862 , p. 228 , adoptée par le dernier éditeur du traité de Jamblique Sur le mode de vie pythagoricien , L. Deubner. Le Laurentianus qui a transmis le texte du traité porte Μελισ ας. C.M. ] BRUNO CENTRONE.

93 MÉLÈSIPPÈ Personnage sans doute fictif, destinataire de la Lettre 42 de Diogène de Sinope ( D 147 ) ( = SSR V B 572 ] ( éd . avec trad . latine dans 1 R. Hercher, Epistolographi graeci, p . 256 ; éd . avec trad . allemande dans 2 Eike Müseler, Die Kynikerbriefe, t . II , p . 70 ; reprise du texte de Hercher et trad . anglaise par

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MÉLÈSIPPOS

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B. Fiore dans 3 A.J. Malherbe, The Cynic Epistles, p. 172-173 ; trad . française dans 4 G. Rombi et D. Deleule , Les Cyniques grecs. Lettres de Diogène et Cratès, coll . « Les philosophiques » , Paris 1998 , p . 84 ). Voir aussi 5 F. Junqua, Lettres de Cyniques. Sur la Lettre 42 , voir t. I , p. 90 ; t. II , p. 480 et 533 . Études. 6 V. E. Emeljanow , The Letters of Diogenes, Ph.D. , Stanford 1968 ( Ann Arbor, Michigan : Classical University Microfilms, Inc. , 1974) , p . 214 215 ; 7 G. Giannantoni, SSR, t. IV , 1990, n . 53 , p . 551-553 . Dans les manuscrits le nom de Mélèsippè est accompagné de rñ ooon . 8 G. Cobet , « De locis nonnullis apud Graecos epistularum scriptores » , Mnemosyne 10 , 1882 , p . 42-66 , a proposé de remplacer oooñ par nopví , correction adoptée par Müseler 2. Mais Junqua 5, t. I , p. 90, fait le commentaire suivant : « Il n'est pas certain que tel ait été l'intitulé de la lettre. On peut aussi supposer qu'un copiste a rajouté tñ ooon après Meneoinnn à cause de la proxi mité entre ce nom et celui de l'héroïne de la tragédie d'Euripide Meravinnnn oopń ( cf. 9 W. Capelle, De Cynicorum epistulis, Diss . Göttingen 1896 , p . 7 n. 1 ) . Cette Mélèsippè est au demeurant inconnue de nous et on aurait attendu un nom plus traditionnel du type Φρύνη ου Λαΐς . Il n'est pas impossible que le nom du destinataire de la Lettre 42 ait manqué dans certains manuscrits et que celui du destinataire de la lettre précédente (Meañol noc) ait été féminisé pour combler cette lacune » . La Mélésippè en question , personnage sans doute fictif , est de toute évidence une courtisane que Diogène fait venir pour assouvir son besoin des plaisirs de l'amour; mais il préfère anticiper sa venue en pratiquant la masturbation, ce qui lui donne l'occasion de rappeler que « l'assouvissement des plaisirs de l'amour est plus facile à obtenir que celui de la faim » (cf. D.L. VI 46 et 69) . MARIE -ODILE GOULET -CAZÉ. 94 MÉLÈSIPPOS Personnage sans doute fictif ( ** D 147 ) , destinataire des Lettres pseudépi graphes 20 (SSR V B 550) et 41 ( SSR V B 572) de Diogène ( > * D 147 ) . Éd. avec trad . latine dans 1 R. Hercher, Epistolographi graeci, p . 240 et 256 ; édition avec trad . allemande dans 2 Eike Müseler, Die Kynikerbriefe , t . II , p. 24 et 70 ; reprise du texte de Hercher avec trad . anglaise par B. Fiore dans 3 A. J. Malherbe, The Cynic Epistles, p . 112-113 et 172-173 ; trad. française dans 4 G. Rombi et D. Deleule , Les Cyniques grecs. Lettres de Diogène et Cratès, coll . « Les philosophiques » , Paris 1998 , p. 47 et 83-84 . Voir aussi 5 F. Junqua, Lettres de Cyniques. Sur la Lettre 20 , voir t . I , p. 89-90 ; t. II , p. 450 et 513 , et sur la Lettre 41 , voir t. I, p. 89-90 ; t. II , p. 480 et 533 . Études. 6 V. E. Emeljanow , The Letters of Diogenes, Ph.D. , Stanford 1968 ( Ann Arbor, Michigan : Classical University Microfilms, 1974 ) , p . 213 ; 7 G. Giannantoni, SSR, t . IV , 1990 , n . 53 , p. 551-553 .

Comme c'est le cas très souvent dans les Lettres pseudépigraphes, le person nage est sans doute fictif. Junqua 5 , t . I , p . 89 , a ce commentaire : « V.E. Emeljanow , p . 213 , voulait l'identifier avec l'émissaire lacédémonien Mélè sippos, fils de Diacritos, dont il est question à deux reprises chez Thucydide

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MÉLÈSIPPOS

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( I 139 et II 12) . Rien toutefois dans le contenu des deux lettres qui lui sont adressées ne permet de justifier cette identification : le Mélésippos en question est simplement un disciple de Diogène » . Dans la première lettre, Mélèsippos est attristé que des jeunes Athéniens ivres aient roué de coups Diogène; mais le philosophe le rassure , car si le corps de Diogène a effectivement reçu des coups de la part de ces ivrognes, sa vertu en revanche n'a pas eu à en souffrir. Dans la seconde lettre, Diogène conclut le propos qu'il adresse à Mélèsippos sur la vertu que les hommes pratiquent bien mal , par cette sentence : « Seul le chien sera donc capable de poser des actes conformes à la vertu » . MARIE -ODILE GOULET -CAZÉ.

95 MÉLISSA DE SAMOS RE 4 Sous le nom de Mélissa est conservée une lettre à Cléaréta écrite dans un dialecte dorien artificiel, caractéristique des pseudopythagorica. La lettre concerne la vertu des femmes. Elle est éditée par 1 H. Thesleff, The Pytha gorean Texts, p. 115 , 22 - 116, 17 = R. Hercher, Epistolographi Graeci, p. 607 608, n ° 11 ; 2 A. Städele, Die Briefe des Pythagoras und der Pythagoreer, coll. « Beiträge zur klassischen Philologie » 115 , Meisenheim am Glan 1980 , p . 160 163 (édition avec traduction allemande) ; p. 253-266 ( introduction et commen taire ) : la femme doit être sobre dans son apparence extérieure et fuir le luxe , exercer la sophrosunè dans la gestion de sa maison , consentir aux volontés de son mari qui sont pour elle comme des lois non écrites. La lettre peut être datée entre 100 av . J.-C. et 100 ap. J.-C. selon 3 W. Nestle, art. « Melissa » 4 , RE XV 1 , 1931 , col . 528 ; au IIIe siècle av . J.-C. , selon 4 H. Thesleff, Introduction, p . 115 , non sans quelques doutes ; entre le II ° s . av . J.-C. et le 11 ° siècle ap. J.-C. et de préférence vers la fin de cette période selon Städele 2, p. 256 . Le nom de Mélissa ne figure pas dans le catalogue des pythagoriciens de Jamblique. (Selon Aude Busine , Les Sept Sages de la Grèce antique. Transmission et utilisation d'un patrimoine légendaire d'Hérodote à Plutarque, avec une postface de B. Decharneux, coll. « Culture et Cité » 1 , Paris 2002, p. 77 , le thème de l'inutilité des parures féminines exposé par Mélissa s'inspirerait de la modération de Mélissa, la femme du tyran Périandre . Voir Plutarque , Banquet des Sept Sages 150 d. Chez Hérodote V 92 , Mélissa, défunte, ordonne à son mari dans une apparition de saisir et de brûler les vêtements des Corinthiennes. La lettre de Mélissa est traduite dans M. Meunier, Femmes pythagoriciennes. Fragments et lettres de Théano, Phintys, Mélissa et Myia . Traduction nouvelle avec prolégomènes et notes par M.M., Paris 1932, p. 109-112 . Elle a également été conservée dans PHaun . II 13, édité et commenté par A. Bülow -Jacobson dans Papyri Graecae Haunienses, fasc . II (P. Haun . II 13-44 ). Letters and mummy labels from Roman Egypt, Bonn 1981 , encore inconnu de Thesleff. R.G. ) BRUNO CENTRONE.

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MÉLISSOS DE SAMOS

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96 MÉLISSOS (MÉLISTOS) D'EUBÉE RE 3 Physiologue » d'époque inconnue qui aurait examiné , selon Fulgence , Myth . II 13 , p . 54 , 15-16 Helm ( » F 23 ) , les opinions de tous les physiologues (Melistus Euboicus, qui omnium fisiologorum sententias disputavit). Le nom Melistus a été corrigé en Melissus par ( W. Nestle ) , art. « Melissos von Euboia » 3 , RE XV 1 , 1932 , col . 530. Fulgence mentionne son nom en rapport avec une interprétation allégorique du mythe de l'union de Zeus, changé en cygne , avec Léda. Les étymologies grecques rappelées par Fulgence semblent empruntées à un auteur écrivant en grec. Voir la traduction anglaise de L.G. Whitbread , Fulgentius the Mythographer The mythologies ; The exposition of the content of Virgil according to moral philosophy ; The explanation of obsolete words ; On the ages of the world and of man ; On the Thebaid / Fulgentius the mythographer ; translated from the Latin , with introductions, Columbus ( Ohio) 1971, X - 258 p . RICHARD GOULET.

97 MÉLISSOS DE SAMOS RE 4 DK 30

Mya

Philosophe et homme politique . Son père s'appelait Ithaigénès . Il fut, selon Diogène Laërce IX 24 , le disciple de Parménide , mais fréquenta également Héraclite d'Éphèse (** H 64) qu'il soutint auprès des compatriotes du philo sophe. Il fut également un courageux amiral qui combattit contre les Athéniens ( voir aussi Élien , Var. hist . VII 14 ) . Diogène , à la suite d'Apollodore FGrHist 244 F 72 ) , situe son acmé dans la 84 Olympiade ( 444-441 ), formule qui peut, chez Diogène Laërce , désigner l'année même de l'Olympiade et donc la première, ce qui rejoint le témoignage d'Eusébe . La courte doxographie trans mise par Diogène le rattache à la tradition éléate . Ce rapport avec Parménide était déjà évident pour Platon , Théétète 180 d , et Aristote , Phys. 186 a 6 , De caelo 298 b 14. Dans son prologue, Diogène cite Mélissos comme exemple de philosophe n'ayant écrit qu'un seul ouvrage ( I 16 ) . Selon Stésimbrote de Thasos (FGrHist 70 F 195 ) , Thémistocle aurait également été l'élève de Mélissos « le physicien » . Ce témoignage impliquerait que Mélissos soit né au plus tard dans les premières années du Ve siècle . Mais Plutarque , Thémistocle 2 ( A 3 ) considère cette chronologie comme douteuse . La Souda, dans une notice sur « Mélètos , fils de Laros » , le présente comme un contemporain de Zénon d'Élée et d'Empédocle ( E 19 ) et lui attribue un traité ( en prose ) Nepi toũ övtoç, Sur l'être ( A 2 ) . Simplicius , in Phys., p. 70 , 16, et in De Caelo, p . 557, 10 ( A 4 ) donne comme titre Iepi PúcewÇ Ô Tepi toj Övroç. Il aurait victorieusement commandé la flotte samienne contre Sophocle , le poète tragique , dans la 84e Olympiade , plus exactement en 4414. Mais il fut ensuite vaincu par Péricles qui s'empara de Samos après un long siège ( en 440 ). Voir Plutarque, Périclès 26-28 ( A 3 ) . 1 E. Schmalzriedt , ſlepi púoewg. Zur Frühgeschichte der Buchtitel, München 1970 , considère que de tels titres n'ont pas été donnés avant l'époque des sophistes. Il est toutefois possible que le titre donné par Gorgias (** G 28 ) à l'un de ses ouvrages , lepi toð un Övtoç Ñ nepi Púoewç, fasse référence au traité de Mélissos.

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MÉLISSOS DE SAMOS

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Le Catalogue des anciens pythagoriciens transmis par Jamblique ( De vita pythagorica 36 , 267 ) inclut de façon étonnante Mélissos parmi les pythago riciens originaires de Samos. Aristote fait souvent référence aux doctrines de Mélissos. D'après le cata logue transmis par Diogène Laërce il aurait écrit un ouvrage en un livre Mooc tà Mɛa ooov ( V 25 ) . Comme l'ouvrage est suivi dans le catalogue d'ouvrages semblables dirigés contre Gorgias et “ Xénocrate" (nom que l'on corrige généra lement en Xénophane ), il pourrait s'agir des trois parties du traité pseudo aristotélicien De Melisso, Xenophane et Gorgia. Voir la notice de 2 B. Cassin , DPhA I , 1989 , p. 534-537 , et 3 Ead ., Si Parménide. Le traité anonyme “ De Melisso Xenophane Gorgia ” . Édition critique et commentaire, coll. « Cahiers de philologie » 4 , Lille ( 1980 ) , 646 p . Les rapports doctrinaux avec d'autres philosophes présocratiques comme Anaxagore ( > A 158 ) ou Empédocle (» E 19) sont diversement interprétés. Un témoignage tardif ( Tzetzes, Chil. II , 980 = A 5 ) fait de Leucippe ( » L 51 ) le disciple de Mélissos. Fragments et témoignages. 4 DK 30 , t . I , p . 258-176 ( avec Nachtrag, p . 498 ) . Voir surtout le recueil plus complet publié par 5 G. Reale ( édit . ) , Melisso. Testimonianze e frammenti. Introduzione, traduzione e commento , coll . « Biblioteca di Studi Superiori. Filosofia antica » 50 , Firenze 1970, XII -448 p.; 6 G. S. Kirk et J. E. Raven , The Presocratic Philosophers. A critical history with a selection of texts, Cambridge 1957 , chap. XIV , p . 390-401, nouvelle édition avec M. Schofield, Cambridge 1983 ; traduction française : 7 G. S. Kirk , J.E. Raven et M. Schofield , Les philosophes présocratiques. Une histoire critique avec un choix de textes, coll . « Vestigia » 16, Fribourg/Paris 1995 , p. 419-431. 8 P. Bicknell , « Melissus ' way of seeming ? A discussion note » , Phronesis 27 , 1982, p. 194-201 , attribue à Mélissos plutôt qu'à Métrodore de Chios ( 2 M 149 ) les concepts exposés en Ps . - Plut . , Strom . 11 avant la lacune. On a proposé récemment d'attribuer à Mélissos une formule du De nat. hom . 1 , 2 d'Hippocrate (p. 64, 10-14 Jouanna ) : 9 Chiara Faraggiana di Sarzana, « Ein bisher übersehenes Fragment des Melissos in der hippo kratischen Schrift De natura hominis » , dans Renate Wittern et Pierre Pellegrin (édit. ), Hippokratische Medizin und antike Philosophie. Verhandlungen des VIII. Internationalen Hippokrates-Kolloquiums in Kloster Banz/Staffelstein vom 23. bis 28. September 1993, coll . « Medizin der Antike » 1 , Hildesheim 1996 , p. 87-90 . Traductions. Française : 10 Dumont , Présocratiques, p. 295-315 (traduc tion ) et 1286-1294 ( notes ). Anglaise : 11 K. Freeman , Ancilla to Pre - Socratic Philosophers. A complete translation of the Fragments in Diels, " Fragmente der Vorsokratiker " , Oxford 1971 , p . 48-51 . Italienne : V. E. Alfieri dans G. Giannantoni et alii, 1 Presocratici : testimonianze e frammenti, 1 e éd . : coll. « Filosofi antichi e medievali » , Bari 1969 , réimpr.: coll . « Biblioteca Universale Laterza » Bari 1981 et 1983 , t. I , p. 305-322 . Études d'orientation . 12 W. Nestle , art. « Melissos von Samos » 4 , RE XV 1 , 1931 , col . 530-532 ; 13 J.H.M.M. Loenen , Parmenides, Melissus, Gorgias. A reinterpretation of Eleatic philosophy, Assen 1959 , 207 p . ; 14 D. E. Gershenson et D.A. Greenberg, « Melissus of Samos in a new light. Aristotle's Physics 186a 10-16 » , Phronesis 6, 1961 , p. 1-9 ; 15 J. Jouanna, « Rapports entre

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MEMMIUS (CAIUS -)

Mélissos de Samos et Diogène d'Apollonie , à la lumière du traité hippocratique De natura hominis » , REA 67 , 1965 , p. 306-323 ; 16 R. Vitali, « Per una lettura dei frammenti di Melisso di Samo » , Vichiana 5 , 1968 , p . 233-250 ; 17 Id. , Melisso di Samo sul mondo e sull'essere. Una interpretazione dell'elea tismo , coll . « Pubbl. Univ . di Urbino. Testi e saggi a cura dell'Ist. di Filos . » , Urbino 1974, 365 p. ; 18 W.K. C. Guthrie, A History of Greek philosophy, t. II , p. 101-118 ; 19 D. Furley , « Melissus of Samos » , dans K. J. Boudouris (édit. ) , Ionian philosophy, coll. « Studies in Greek philos . » 1 , Athènes 1989, p. 114 122 . Bibliographie. 20 J. Wiesner, « Melissos 1957-1970 » , AAHG 25 , 1972 , p. 43-56 ; 21 L. Paquet, M. Roussel et Y. Lafrance, Les Présocratiques. Biblio graphie analytique ( 1879-1980), t. II : D’Alcméon aux auteurs de la Collection hippocratique, Montréal/Paris 1989, p. 133-137 RICHARD GOULET.

MÉLISTOS D'EUBÉE → MÉLISSOS D'EUBÉE [M 96 ] 98 MÉLITON DE SARDES

II

Évêque chrétien , auteur de nombreux ouvrages énumérés par Eusébe de Césarée, Hist. eccl. IV 26, 2 (CPG 1092-1098 ) . Il avait écrit une apologie du christianisme adressée à l'empereur Marc Aurèle ( M 39 ) , dont un extrait est cité par Eusèbe, Hist. eccl. IV 26, 5-11 ( CPG 1093-1 / 2) . Méliton y présente le christianisme, nouvellement persécuté en Asie , comme une philosophie qui a d'abord fleuri chez les Barbares ( les Juifs ) et qui s'est développée conjointement avec l'Empire romain depuis le règne d'Auguste. Méliton estime que , contrai rement aux empereurs persécuteurs des chrétiens, Néron et Domitien , Marc Aurèle , saura comme ses ancêtres, Hadrien et Antonin le Pieux , et avec encore plus d'humanité et de philosophie , éviter « d'innover au sujet des chrétiens » . Cf. Stuart G. Hall , Melito of Sardis, On Pascha and Fragments, coll . « Oxford Early Christian Texts » , Oxford 1979, p. 62-64 ; O. Perler, Méliton de Sardes, Sur la Pâque et fragments, coll . SC 123 , Paris 1966 , p. 218-222 ( « Apologie de Méliton à Antonin » ) . RICHARD GOULET. MEMMIA + EURYDICE (MEMMIA -) (E 142] 99 MEMMIUS ( CAIUS - ) RE 8

Ia

C. Memmius est un personnage bien connu de la fin de la République romaine. Homme politique ambitieux , fin lettré et poète dilettante , il fut en relation avec les membres les plus éminents du monde politique et des cercles artistiques. Si , hormis quelques problèmes de chronologie , sa carrière politique a été , dans ses grandes lignes , aisément reconstituée grâce aux nombreux témoi gnages antiques, en revanche , ses liens avec l'école épicurienne, et notamment avec le poète T. Lucretius ( L 73 ) Carus, qui lui a dédié - au moins en partie son De rerum natura , restent problématiques.

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Testimonia . En tant que dédicataire de Lucrèce, C. Memmius est cité dans les chants I , II et V du De rerum natura ( I , v. 24-27 ; 1 , v. 41-43 ; I , v . 410-411 ; 1 , v . 1051-1056 ; II , v . 142-143 ; II , v . 180-182 ; V , v . 6-11 ; V , v . 91-96 ; V, v. 160-165 ; V , v. 864-867 ; V, v . 1281-1282 ) . Il est également le destinataire de trois lettres de Cicéron (Fam . XIII 1 , 2 et 3 ) , qui le mentionne par ailleurs dans sa correspondance ( cf. Att . I 18 , 3 ; IV 15 , 7 ; IV 16 , 6 ; IV 17 , 2-5 ; V 11,6 ; VI 1 , 23 ; Q. fr. I 2 , 16 ; III 2 , 3 ; III 6, 3 ) et porte dans le Brutus ( $ 247 ) un jugement sur ses talents d'orateur. Plutarque (Lucull. 37 , 1-2 ; Cat. Min . 29, 5-8 ; Pomp. 55 , 7 ) , Appien ( B.C. II 24 ) et Dion Cassius (XL 51 , 2-3 ; 53 , 1-2 ) apportent quelques informations sur sa carrière politique et les affaires judiciaires aux quelles il fut mêlé . Enfin Ovide ( Trist. II 433 ) , Pline ( Ep. V 3 , 5 ) et Aulu -Gelle (XIX 9 , 7 ) le citent comme poète. Cf. 1 Fr. Marx , « Der Dichter Lucretius » , Neue Jahrbücher für das klassische Altertum , Geschichte und deutsche Litteratur ( = JKPh ) 3 , 1899 , p. 533-548 ; 2 F. Münzer, art. « Memmius » 8 , RE XV 1 , 1931 , col . 609-616 ; 3 J.R. Walter Allen , « On the Friendship of Lucretius with Memmius » , CPh 33 , 1938 , p . 167-181 ; 4 W. Allen Jr. et P.H. DeLacy , « The patrons of Philo demus » , CPh 34 , 1939 , p . 59-65 ; 5 G. Della Valle , « Caio Memmio dedicatorio del poema di Lucrezio » , RAL , série 6, vol . 14 , fasc. 7-12 , 1939 , p. 737-886 ; 6 P. Boyancé , « Lucrèce et son disciple » , REA 52 , 1950 , p . 212-233 ; 7 Id ., « Cicéron et Athènes» , EEAth 24, 1973-1974 , p. 156-169 ; 8 J.-M. André, L'otium dans la vie morale et intellectuelle romaine , Paris 1966, p. 214-216 ; 9 T.P. Wiseman , « Lucius Memmius and his family », CQ 17 , 1967 , p. 164-167; 10 D.W.Roller, « Gaius Memmius : patron of Lucretius » , CPh 65 , 1970, p. 246 248 ; 11 P. Grimal , « Le poème de Lucrèce en son temps » , dans 0. Gigon (édit. ), Lucrèce . Huit exposés suivis de discussions , coll . « Entretiens sur l'Antiquité classique » 24 , Vandoeuvres -Genève 1978 , p. 233-246 ; 12 G.B. Townend, « The Fading of Memmius » , CQ 28 , 2 , 1978 , p. 267-283 ; 13 G. V. Sumner, « The coitio of 54 BC or waiting for Caesar » , HSPh 86 , 1982 , p . 133-139 ; 14 R. Keen , « Lucretius and his Reader » , Apeiron 19 , 1985 , p. 1-10 ; 15 C.J. Castner, Prosopography, p. 99-104 ; 16 J. M. David , Le patronat judi ciaire au dernier siècle de la république romaine, coll . BEFAR 277 , Rome 1992, p . 111-112 , 539-546, 842-843 ; 17 L. Canfora , Vita di Lucrezio , Palermo 1993, p . 44-54 ; 18 E. Deniaux , Clientèles et pouvoir à l'époque de Cicéron , coll . EFR 182, Rome 1993 , p. 81-89 , 208-209 , 418-419 ; 19 F. X. Ryan, « The Tribunate of Memmius L. f. » , Hermes 123 , 3 , 1995 , p . 293-302 ; 20 J. Bellemore, « The quaestorship of Cato and the tribunate of Memmius » , Historia 45 , 1996 , p . 504 508 ; 21 T. Dorandi, « Gaio Bambino » , ZPE 111 , 1996 , p. 41-42 ; 22 D. Braund, « The Politics of Catullus 10 : Memmius, Caesar and the Bithynians » , Herma thena 160 , 1996 , p . 45-57 ; 23 M. Torelli, Il rango, il rito et l'immagine. Alle origini della rappresentazione storica romana , Milano 1997 , p. 152-174 ; 24 A. M. V. Pizzone , « Memmio e i carmi catulliani contro Mamurra . Una proposta di cronologia », Maia 50 , 2 , 1998 , p. 281-289 . Identification . La première difficulté concernant le dédicataire de Lucrèce réside dans l'identification du personnage. Si la dédicace à Memmiades noster

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( De rerum natura I , v . 26 ) apparaît dès les premiers vers du prologue, le poème offre très peu d'informations précises sur la personne de Memmius, dont nous ignorons même le prénom . Toutefois , en se fondant sur les déductions faites par les érudits de la Renaissance ( cf. 25 D. Lambin [édit. ) , Lucrèce, De rerum natura , texte avec commentaire en latin , Paris 1564 ), on identifie généralement le Memmius de Lucrèce et le magistrat que Catulle a accompagné en Bithynie en 57 ( Catulle 10 et 28 ) . Il s'agit dans ce cas de l'orateur C. Memmius, préteur en 58 ( cf. 26 T.R. Broughton, Magistrates of the Roman Republic, Cleveland 1952 , t. II , p. 194) et mort au plus tard en 46 (Cic . Brut. 247 ) . Cette identi fication a été contestée ( cf. 27 E. Bignone , Storia della letteratura latina, Firenze 1945 , t . II , p. 160 ) sous prétexte que Cicéron, dans la lettre qu'il adresse à C. Memmius en 51 ( Fam . XIII 1 ) à propos des ruines de la maison d'Épicure, ne mentionne pas le nom de Lucrèce. Mais l'argument n'est pas déterminant car Cicéron, hormis dans la célèbre lettre à Quintus datée de février 54 (Q. fr. II 10) , ne mentionne Lucrèce ni dans sa correspondance ni dans ses traités philo sophiques ( cf. André 8, p. 216) . L'existence, à la même époque, d'un autre Caius Memmius ( cf. 28 F. Münzer, art. « Memmius » 9, RE XV 1 , col . 616-618 ) , ne permet pas non plus de remettre sérieusement en cause l'identification proposée car ce dernier , accusateur du Rabirius défendu par Cicéron ( Rab. Post. ), fut tribun de la plèbe en 54. Or, cette date tardive semble exclure le tribun car elle correspond à celle qui est habituellement retenue pour la mort de Lucrèce (cf. Boyancé 6, p . 213 ) . En outre, la notoriété et les talents oratoires et littéraires du préteur de 58 justifient davantage les vers élogieux de Lucrèce, qui fait référence aux nombreux dons de Memmius ( I , v . 27 , omnibus ornatum ... rebus) et à l'illustre descendance de la gens (1 , v. 42, Memmi clara propago ) interdisant à celui-ci de négliger le salut commun. Origines familiales . Malgré les prétentions que suggère la formule lucré tienne , les Memmii , d'origine plébeienne, n'appartenaient pas à une noblesse très ancienne. Il est possible que la famille soit originaire du pays volsque et notamment de Terracine où les Memmii avaient conservé des intérêts et possé daient des propriétés, comme le montre une anecdote rapportée par Cicéron (De or . II 240 ) à propos de C. Memmius , préteur en 104 ( cf. Marx 1 , p . 537 ) . L'épigraphie atteste en outre l'existence d'une clientèle locale : une inscription d'Éphèse, datée de la fin de la république, mentionne un L. Memmius T. f. Ouf. Tarrachinensis (CIL I , 2266 = III , 6086 ). Il s'agit probablement d'un client des Memmii , résidant à Éphèse mais inscrit dans la tribu de Terracine, comme l'indique l'ethnique Tarrachinensis ( cf. Torelli 23 , p. 163 ) . Bien que la famille ne fît pas partie de la nobilitas au sens strict du terme, puisqu'elle n'avait compté aucun consul dans ses rangs, elle revendiquait des origines troyennes dès le début du premier siècle avant notre ère. Virgile se fera l'écho de ces préten tions en lui attribuant pour ancêtre, Mnesthée, l'un des compagnons d'Énée (Aen . V, v . 116-117 ) . Cette généalogie mythique doit être mise en relation avec l'invocation à Vénus par laquelle s'ouvre le De rerum natura : la mère d'Énée (I , v . 1 , Aeneadum genetrix ) est à la fois la Venus Troiana, protectrice de Memmius (I , v . 26-27 , Memmiadae nostro, quem tu, dea, tempore in omni /

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omnibus ornatum uoluisti excellere rebus) et la Venus Physica , principe de plaisir et de génération. Il est également significatif que l'image de la déesse ait figuré sur des monnaies émises par des triumvirs monétaires issus de cette famille (cf. Boyancé 6 , p . 214) . Biographie . Le dédicataire de Lucrèce est le fils de L. Memmius, lui-même frère du tribun de 1114 L. Memmius père fut triumvir monétaire en 115 et consularius du tribun M. Liuius Drusus en 91. Wiseman 9, p. 164-167 , a en effet montré que , contrairement à l'opinion de Münzer 2 , col . 610 , L. Memmius ne pouvait être tribun de la plèbe lorsqu'il a été accusé au cours de l'année 90 en vertu de la loi Varia ( App. , B.C. I 37 ) et a plaidé lui-même, probablement sans succès , pour sa défense (Cic . , Brut. 304-305 ). C. Memmius, qui fut préteur en 58 (Cic . , Q. fr. I 2 , 16 ) , est donc né au plus tard en 98. Il épouse Fausta Cornelia, la fille de Sylla, née entre 88 et 86 (Plut. , Sulla 22, 1 ) , vers 72. Le fils né de cette union comparaîtra en effet au procès de M. Aemilius Scaurus, frère de Fausta Cornelia , en 54 ( Pro Scaur. Q. Asconii Pediani argumentum , dans P. Grimal [édit. ] , Cicéron, Discours, CUF, t. XVI , Paris 1976 , p. 181 ) . Sa participation au procès implique qu'il était âgé d'au moins 16 ou 17 ans et permet donc de situer le mariage 17 ou 18 ans plus tôt. Au début de sa carrière , C. Memmius , qui apparaît comme un partisan de Pompée, s'oppose aux frères Luculli : il intente un procès à M. Lucullus pour ses acta en tant que questeur sous Sylla ( Plut. , Luc . 37 , 1 ) . Après l'acquittement de Marcus, il attaque son frère Lucius (2L 74 ) en excitant une partie de la foule contre lui afin de retarder son triomphe (Plut . , Luc . 37 , 2 ; Cato Min . 29 , 5 ) . Selon le témoignage de Plutarque, il aurait agi ainsi non par animosité person nelle, mais pour servir les intérêts de Pompée, qui s'était vu confier le comman dement de la guerre contre Mithridate, alors qu'il avait été retiré à Lucullus en dépit de ses victoires. Dans cette affaire, C. Memmius fut opposé à Caton , qui prit la défense de son parent par alliance . Bien que Caton eût finalement contraint Memmius à retirer son accusation , le triomphe de Lucullus ne fut célébré qu'en 63 , soit trois ans après son retour d'Arménie (Cic . , Acad. II 3 ). Nous avons conservé grâce à Servius trois fragments du discours de Memmius contre le triomphe de Lucullus (Serv ., ad Aen . I 161 : C. Memmius de triumpho Luculli Asiatico : « inque luxuriosissimis Asiae oppidis consedisse » et mox : « inque Gallograeciam redierunt » . IV 261 : C. Memmius de triumpho Luculli : « Syriaci calceoli gemmarum stellati coloribus » ) . Même si ces bribes de discours peuvent suggérer une certaine connaissance de l'Asie , il est difficile d'en déduire quoi que ce soit quant à la biographie de l’orateur et à un hypo thétique séjour en Asie. Les poursuites contre les Luculli suscitent une difficulté chronologique liée au cursus honorum de Memmius . Il est généralement admis que celui -ci fut tribun de la plèbe en 66 et qu'il mena l'ensemble de ses actions contre les deux frères durant son tribunat ( cf. Broughton 26 , p. 53 ) . Mais cette datation n'est pas confirmée par les témoignages antiques . De plus, il a été démontré de manière convaincante ( cf. Ryan 19, p . 296-297 ) que si Memmius a poursuivi M. Lucullus en tant que tribun de la plèbe, il n'a pu le faire en 66. L'argument essentiel est le

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suivant: en 66 , le tribunal de peculatu, présidé par le préteur C. Orchivius (Cic . , Clu . 147 ) , avait repoussé une accusation de pecuniis residuis lancée contre Faustus Sylla, au motif que la charge de tribun donnait à l'accusateur un avantage trop important ( Cic . , Clu . 94 ). Quel que soit l'ordre chronologique des deux affaires, il est difficile de concilier ce refus avec un procès engagé par Memmius en tant que tribun, devant la même cour et au même motif. Celui-ci a donc probablement intenté l'action contre M. Lucullus en tant que priuatus . Quant à la datation du tribunat, elle dépend essentiellement de l'interprétation du témoignage de Plutarque. Or, étant donné que , dans le Cato Minor, l'opposition entre Memmius et Caton ( 29 , 5-8 ) est évoquée juste après le tribunat de Caton, exercé en 62 , on en a souvent déduit que Plutarque avait commis plusieurs erreurs de chronologie à propos du retour de Lucullus , de son triomphe et donc de la lutte entre Caton et Memmius (cf. 29 E. Gruen , « Some Criminal Trials of the Late Republic : Political and Prosographical Problems» , Athenaeum 49 , 1971 , p . 57-58 ) . Il est indéniable que le témoignage de Plutarque comporte quel ques incertitudes chronologiques, mais on peut penser que le biographe, afin de souligner les liens qui unissent L. Lucullus à Caton , revient à la période qui a suivi le retour à Rome du général. Et, dans le contexte limité de ce passage , il ne mentionne pas spécifiquement le tribunat de Caton ; il indique seulement qu'il exerçait une åpxń , dont il faillit être privé ( Cato Min . 29 , 7 ) . C'est pourquoi il a été suggéré ( cf. Bellemore 20 , p . 507-508 ) que Memmius avait décidé de postuler au tribunat après avoir poursuivi en vain M. Lucullus en 66 ou au plus tard en 65. C'est donc en 64 , et en tant que tribun de la plèbe , qu'il aurait prononcé devant les comitia tributa son discours contre L. Lucullus avant le vote , qui devait accorder ou refuser le triomphe à celui -ci ( Plut. , Luc. 37 , 2-3 ) . Dans ce cas , Caton est probablement intervenu en tant que questeur ( cf. Broughton 26 , p . 163-165 ) durant cette assemblée des comices (Cato Min . 29 , 7 ) . Cette hypothèse demeure cependant difficile à démontrer ( voir la discussion de Ryan 19 , p. 297-302 , qui privilégie la date de 62 pour le tribunat de Memmius). Memmius devient préteur en 58 et, dès novembre 59 , Cicéron se réjouit de cette élection , car il espère que Memmius et certains de ses collègues comme P. Nigidius Figulus ( » N 58 ) et L. Cornelius Lentulus lui seront favorables ( Q. fr. I 2 , 16 ) . Pourtant, il ne semble pas que Memmius ait particulièrement soutenu Cicéron, suivant en cela l'attitude réservée de Pompée. En revanche, les espoirs de Cicéron confirment les sympathies pompéiennes attribuées à Memmius ( cf. Pizzone 24 , p. 282-283 n . 3 ) . Celui -ci se signale durant sa préture par de violentes attaques contre César ( Suet. , Diu . Iul. 23 , 49 et 73 ) et Vatinius ( Cic . , Vat. XIV 33 ) . Il accusa César devant le sénat d'avoir commis des illégalités durant son consulat de l'année précédente ( Suet . , Diu . Iul . 23 ) . Memmius prononça à cette occasion plusieurs discours polémiques auxquels César répliqua vigoureusement ( Suet . , Diu . Iul. 73 : Gai Memmi cuius asper rimis orationibus non minore acerbitate rescripserat). Dans le contexte de la propagande anticésarienne, le préteur eut recours à la diffamation personnelle et exploita en particulier les anecdotes liées aux relations de César avec le dernier

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roi de Bithynie, Nicomède ( Suet. , Diu . Iul. 49) . En 57 , Memmius part pour la Bithynie en tant que propréteur, accompagné des poètes Helvius Cinna et Catulle . Ce dernier, déçu de n'avoir pas tiré de son voyage les profits escomptés, a exprimé fort crûment sa rancæur contre Memmius (Catulle 10 et 28 ) . Cependant, si , effectivement, le magistrat a administré sa province avec rigueur et veillé à la probitas de sa cohors, les invectives de Catulle constituent para doxalement un témoignage en sa faveur. Mais , étant données les manœuvres frauduleuses auxquelles il s'est livré durant sa candidature au consulat, il est probable que les motivations de Memmius furent avant tout politiques : se sachant soumis à la surveillance des césariens, il devait présenter un bilan irréprochable de manière à éviter toute accusation et à ménager la suite de sa carrière ( cf. Braund 21 , p. 50-52) . Cette magistrature en Bithynie a par ailleurs été célébrée par une émission monétaire datant de 56 et représentant Memmius triumphalis ( cf. 30 M. Crawford , Roman Republican Coinage, Cambridge 1972, p . 451 n . 427 ) . Contrairement à l'opinion de Münzer (cf. 31 F. Münzer, art. « Memmius » 10 , RE XV 1 , col . 618 ) , cette émission ne doit pas être attribuée au fils de notre Memmius , mais à un homonyme de celui-ci ( voir Münzer 28 , « Memmius» 9 ) : fils du tribun de 75 et cousin de L. Memmius , le père du dédicataire de Lucrèce, il fut triumvir monétaire en 56 et tribun de la plèbe en 54 ( cf. Wiseman 9, p. 167 n . 2, et Torelli 23, p. 158) . Memmius semble s'être réconcilié avec César, qui soutint sa candidature aux élections consulaires de 54 (Cic. , Att. IV 15 , 7 ; IV 16, 6) . Ce retournement est à mettre en relation avec le divorce de Memmius, qui avait répudié Fausta en 56 ou début 55 ( cf. Cic . , Att. IV 13 : la lettre, datée de novembre 55 , fait référence au mariage de Fausta et de Milon ) et avec le poème 11 de Catulle, qui célèbre les exploits guerriers de César ( cf. Grimal 11 , p. 239) . Mais son ambition conduit le candidat à conclure un pacte avec les deux consuls en exercice : selon les termes de l'accord , ceux-ci devaient appuyer sa candidature ainsi que celle de Cn . Domitius Caluinus et recevoir en échange plusieurs millions de sesterces. Les futurs consuls seraient toutefois dispensés de verser cette somme s'ils parvenaient, en falsifiant une loi curiale au moyen de faux témoignages (Cic . , Att. IV 17 , 2-3 ) , à faire attribuer des provinces à leurs complices. L'affaire fut ébruitée et Memmius, sur les conseils de Pompée, révéla la pactio au sénat pour discréditer les consuls en charge et retarder les élections jusqu'à l'arrivée de César (cf. Sumner 13 , p. 138-139) . A la suite de ces révélations, Memmius fut accusé de brigue par Q. Acutius (Cic., Q . fr. III 2, 3 ) et ne reçut pas de César le soutien qu'il en espérait (Cic . , Q. fr. III 6, 3 ) . Condamné en 52, il tenta en vain d'accuser son tour le consul Q. Caecilius Metellus Scipio pour retrouver son rang en vertu de la lex Pompeia (App. , B.C. II 24) . Mais Pompée soutint son beau -père avec fermeté ; il fit pression sur les juges et obtint le désistement de l'accusateur ( Plut. , Pomp. 55 , 7 , et App. , B.C. II 24 ; cf. David 16 , p . 242 et 842) , qui partit en exil pour Athènes. Soutenu par son parent Curion , Memmius comptait sur un prochain retour à Rome (Cic . , Att. VI 1 , 23 ) , qui ne devait jamais avoir lieu . C'est durant son exil qu'il fit probablement ériger à Éphèse un monument à la mémoire de son jeune

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fils, récemment décédé. Cette hypothèse a été défendue par Torelli 23 , p. 157 162 , au moyen de l'argument suivant : la dédicace à Memmius C. f. Sullae Felicis n . , telle qu'elle figure sur le monument éphésien , ne mentionne aucune nagistrature ni sacerdoce de sorte que le Memmius susnommé , qui est sûrement mort avant d'avoir pu entamer le cursus honorum , ne peut être le consul suffectus de 34 , comme le suppose Münzer 31 , col . 618. Cette édification pour rait d'autre part être associée à la lettre dans laquelle Cicéron intervient auprès de Memmius en faveur du sculpteur en renom C. Avianus Evander ( Fam . XIII 2 ) . Il n'est pas exclu que l'artiste , qui fut hébergé par Memmius , ait participé à la réalisation du monument. L'épicurisme de Memmius. Cicéron adressa à Memmius durant son exil à Athènes une autre requête concernant les ruines de la maison d'Épicure [ PE 36 ] ( Fam . XIII 1 ) . L'exilé avait en effet obtenu de l'aréopage l'autorisation de construire un bâtiment sur le terrain où se trouvaient les ruines de la maison d'Épicure. Patron, successeur de Phèdre à la tête de l'école épicurienne, avait demandé à Cicéron d'intervenir. L'exilé étant absent lors du passage de Cicéron à Athènes au cours de l'été 51 , l'orateur lui adressa une longue lettre, qui constitue un témoignage essentiel sur l'attitude de Memmius à l'égard de l'épicurisme . Cicéron , évoquant sa propre estime pour Patron, rappelle que Memmius avait connu le philosophe épicurien à Rome et que celui -ci lui avait toujours témoigné beaucoup de déférence ( Fam . XIII 1 , 2 ) . Ce passage atteste que Memmius avait fréquenté le scholarque du Jardin . Cicéron indique égale ment que Memmius avait renoncé à son projet lorsqu'il s'est décidé à intervenir ( ibid . 3 ) . Ces éléments suggèrent que l'ami de Lucrèce n'était pas totalement hostile à l'épicurisme. En revanche , le dédain affecté par Cicéron (cf. ibid. 3 : nescio quid illud Epicuri parietinarum ; 4 : totam hominis uitam rationemque quam sequitur in philosophia derideamus licet) implique un commun jugement dépréciatif à propos de la secte (cf. Boyancé 7 , p . 166 ). En dernier argument, Cicéron invoque la recommandation d'Atticus en niant , au mépris de la vérité , l'adhésion de son ami à la doctrine épicurienne , sous prétexte qu'il serait trop cultivé pour cela ( ibid. 5 : non quo sit ex istis ; est enim omni liberali doctrina politissimus ) . Cette allusion au mépris que les épicuriens affichaient pour la littérature , et notamment pour la poésie , permet d'expliquer en partie les réserves de Memmius , qui était lui -même réputé pour son goût de la culture hellénique ( Cic . , Brut . 24 : C. Memmius L. f. perfectus litteris , sed graecis, fastidiosus sane latinarum ) et avait composé des poèmes érotiques ( Ov . , Trist. II 433 ; Plin . , Ep. V 3 , 5 ) . Les précautions oratoires dont Cicéron entoure sa requête suffisent à prouver que Memmius n'était pas un épicurien convaincu ( cf. Castner 15 , p. 103-104) . A cet égard , il a été clairement établi par Dorandi 21 , p. 41-42, que , contrairement à l'hypothèse défendue par Allen et DeLacy 4, p. 64 , l'épicurien Philodème avait dédié le quatrième livre de sa Rhétorique non pas au protecteur de Lucrèce , mais à Gaius Vibius Pansa . En outre , rien ne permet de confirmer la thèse selon laquelle Memmius aurait eu pour projet de construire sur le territoire du Jardin non pas un édifice privé, mais un sanctuaire

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en l'honneur d'Épicure ( Cf. 32 E. Cocchia, « L'epicureismo di Gaio Memmio, l'amico di Lucrezio » , ARAA 2 , 1913 , p . 177-200 ). Pourtant, cela ne saurait signifier que Memmius n'ait eu aucune sympathie pour les idées du Jardin et les arguments de Boyancé 6, p. 224-233 , demeurent difficilement contestables : la dédicace de Lucrèce ne peut se comprendre que si le poète avait l'espoir de vaincre les réticences de son ami . Les idées épicu riennes sur l'amitié et le souci didactique fortement exprimé par le poète incitent à voir dans la dédicace autre chose qu’un banal hommage mondain . Le philo sophe songeait avant tout à convaincre Memmius , avec lequel il aurait pu ainsi partager une véritable amitié philosophique ( cf. DRN I v . 140-141 : sperata uoluptas / suauis amicitiae ) . Il est en outre significatif que Lucrèce évoque en liaison avec Memmius les difficultés qu'il éprouve à transcrire en latin les découvertes des Grecs ( DRN I v . 136-137 ) . Connaissant la culture raffinée de son ami , il n'est pas surprenant qu'il ait voulu lui prouver qu'épicurisme et poésie n'étaient pas inconciliables . La valeur et l'importance de la dédicace lucrétienne ne peuvent donc être remises en cause et il est difficile de soutenir que le vocatif Memmi constitue une simple commodité métrique ( cf. Roller 10, p. 248-246 ). Compte tenu du fait que le nom de Memmius n'apparaît pas dans les livres III , IV et VI du De rerum natura, il est cependant possible que Lucrèce ait renoncé à le convertir ( cf. Townend 12 , p . 267-283 ) , en particulier après le scandale de 54 ( cf. Canfora 17 , p. 44-48 ). Mais cette dernière hypothèse oblige à modifier considérablement la chronologie lucrétienne et notamment la date retenue pour la mort du poète. Quoi qu'il en soit , Memmius , qui semble avoir été d'un naturel trop ambi tieux et intrigant pour suivre la voie de l'ataraxie , a certainement déçu les espoirs de Lucrèce et il est clair qu'il ne fut jamais un épicurien de stricte obé dience . Néanmoins , on ne peut négliger le témoignage de Cicéron , qui rappelle à Memmius ses liens avec Patron . De plus , les milieux césariens comptaient de nombreux épicuriens et la réconciliation avec César ( C8) a pu être facilitée par un penchant commun pour la philosophie du Jardin . Par conséquent, l'atti tude de Memmius à l'égard de l'épicurisme apparaît fort complexe et reflète les revirements d'un esprit à la fois opportuniste et indépendant. Memmius a très bien pu être séduit par certains aspects du message épicurien sans pour autant se sentir lié en quelque manière à l'ensemble de la doctrine ni se croire obligé de vénérer son fondateur. SABINE LUCIANI. MEMMIUS + SYMMACHUS (Q. AURELIUS MEMMIUS -) 100 MEMNON

IV - III ( ? )

Philosophe mégarique ( ?) . Son nom figure dans un papyrus d'Herculanum (PHerc 1012 fr. 2 , 4 , fragment d'un écrit polémique d'un épicurien ancien , peut être Métrodore (-M 152 ) ; voir E. Spinelli , CronErc 16 , 1986, p. 29-43 , notam ment p . 37 ) , aux côtés de ceux de mégariques connus comme Alexinos

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MÉNAICHMOS

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(3** A 125 ) , Euboulidès ( » E 71 ) et Euphante ( ME 125 ) . Voir W. Crönert, Kolotes und Menedemos, p. 16-26 ; K. Döring, Die Megariker, fr. 69 et p . 115 . Ce nom est absent de la RE. ROBERT MULLER .

101 MÉNAICHMOS RE 3

fl.MIV

Mathématicien ( géomètre ), frère de Dinostrate , disciple d'Eudoxe de Cnide et ami de Platon . Aucun ouvrage de lui n'a été transmis . Son nom est rattaché à la solution du problème de la duplication du cube. Témoignages et « fragments ». 1 M.C.P. Schmidt , « Die Fragmente des Mathemathikers Menaechmus» , Philologus 42 , 1884, p. 77-81 ; 2 F. Lasserre ( édit.), De Léodamas de Thasos à Philippe d'Oponte : témoignages et fragments, édit . , trad . et comm. , coll . « La Scuola di Platone » 2, Napoli 1987 , p. 117-124 ( Ménechme n° 12 , Testimonia [T) , Fragmenta ( F) , Doctrina [ D] ) , p . 329-336 ( trad .), p. 545-559 (comm . ). Notices. 3 F. Kliem , « Menaichmos» 3 , RE XV 1 , 1931 , col . 700-701 ; 4 J. Mau , art. «Menaichmos » 3 , KP III, 1969, col . 1196 ; 5 1. Bulmer - Thomas, art.

« Menaechmus » , DSB IX ,

1974 , p . 268-277 ;

6 W.R. Knorr, art .

« Menaechmus » 2, OCD3 , 1996, p. 956 ; 7 M. Folkerts, art . « Menaichmos » 3 , NP 7 , 1999, col . 1213 . Cf. 8 H.G. Zeuthen, Die Lehre von den Kegelschnitten im Antiken, Deutsch von R. von Fischer-Benzon , Kopenhagen 1886 , réimpr. Hildesheim 1966 (hrsg. und mit einem Vorwort und Register versehen von J. E. Hoffmann ), p. 457-467; 9 P. Tannery, La géométrie grecque , comment son histoire nous est parvenue et ce que nous en savons : essai critique, Première partie : Histoire générale de la géométrie élémentaire, Paris 1887 , réimpr. 1988 , coll . « Les grands classiques Gauthier- Villars » , p . 18-28 , 77-88 , 130-132 , 135-140 , 144-146 ; 10 G.J. Allman , Greek geometry from Thales to Euclid, coll . « Dublin University Press series » , Dublin/London 1889 , réimpr. coll . « History of Ideas in Ancient Greece » , New York 1976, p. 153-179 ; 11 A. Sturm , « Das Delische Problem I : Behandlung des Problems in der platonischen Zeit » , dans XXIX . Programm des K.K. Ober -Gymnasiums der Benedictiner zu Seitenstetten . Veröffentlicht am Schlusse des Schuljahres 1895 , Linz 1895 , p . 3-56, notamment p . 37-48 ; 12 T. L Heath , A history of Greek mathematics, 2 vol . , Oxford 1921 , réimpr. New York 1981 , t. I : From Thales to Euclid, p . 251-255 ; t. II : From Aristar chus to Diophantus, p . 110-116 (cf. 13 Id . , A manual of Greek mathematics, Oxford 1931 , réimpr. New York 1963, p . 158-162 ) ; 14 O. Becker, Das mathe matische Denken der Antike, coll . « Studienhefte zur Altertumswissenschaft » 3 , Göttingen 1957 , 19662 ( mit einem Nachtrag von G. Patzig) , p . 82-85 ; 15 Id. , Grundlagen der Mathematik in geschichtlicher Entwicklung, coll . « Orbis Academicus . Problemgeschichten der Wissenschaft in Dokumenten und Darstellungen >> II 6 , Zweite erweiterte Aufl ., Freiburg im Breisgau / München 1964, réimpr. coll . « Suhrkamp - Taschenbuch Wissenschaft » 14 , Frankfurt am Main 1990, p . 99 , 101 ; 16 B.L. van der Waerden , Erwachende Wissenschaft:

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ägyptische, babylonische und griechische Mathematik, aus dem Holländischen übersetzt von H. Habicht mit Zusätzen des Verfassers, Zweite, ergänzte Aufl ., coll . « Wissenschaft und Kultur » 8 , Basel/Stuttgart 1966 , p . 313 sq.; 17 W.R. Knorr, « Observations on the early history of the conics » , Centaurus 26 , 1982 , p . 1-24 ; 18 Id . , Ancient tradition of geometric problems, Boston/ Basel/Stuttgart 1986 , p . 61-66, 351 sq .; 19 Id., Textual studies in Ancient and Medieval geometry, Boston /Basel/ Berlin 1989 , p . 94-100 ; 20 F. Lasserre, La naissance des mathématiques à l'époque de Platon, coll . « Vestigia » 7 , Fribourg Suisse /Paris 1990 ( paru d'abord en version anglaise : The birth of mathematics in the age of Plato , London 1964 ), p. 9 , 29 sq. , 97 , 173 sq. , 231 . Biographie. D'après Proclus, In primum Euclidis elementorum librum comm . , p . 67 , 8-12 Friedlein (= T 1 Lasserre ), « Amyclas d'Héraclée ( > A 148 C) , l'un des disciples de Platon , Ménechme, qui fut élève (àxpoatńc) d'Eudoxe ( ca 395 -ca 342 , » E 98 ) et fréquenta (ovyyeyovás ) Platon , et son frère Dinostrate ( > D 33 ) , perfectionnèrent encore l'ensemble de la géométrie » ( trad. Lasserre ) Il est tout à fait vraisemblable que Ménechme a fait partie des nombreux disciples qu'Eudoxe , d'après D. L. VIII 87 , a emmenés avec lui de retour à Athènes , après avoir enseigné à Cyzique et sur la Propontide, et sans doute pour un séjour plus long , que Lasserre 2 , p. 545 , 573 , place « aux alentours de 350 » , « entre 355 et 350 » ; et c'est alors que le contact d'Eudoxe avec l'Académie semble avoir été le plus étroit, même si Lasserre 2 , p. 141 , pense qu'il n'est pas entré dans cette école et qu'il n'a donc pas pu y enseigner, puisque Diogène Laërce affirme que son intention était de chagriner Platon, qui au début l'aurait dédaigné ( » E 98 , p. 296 ) . Malgré la proximité de Cyzique , où Eudoxe semble avoir fait connaissance de Ménechme, c'est à tort qu'on a voulu identifier celui -ci avec le philosophe platonicien Manaichmos , originaire d'Alopéconnèse ou du Proconnèse ( M 17 ) . Sur Ménechme nous avons une anecdote qui le met en rapport avec Alexandre le Grand et qui a été rapportée par Serenus, ap. Jean Damascène, Parall. Sacr. II 13 , 115 , p . 205 Meineke = Stobée , Anthologium II 31 , 114 , t . II , p . 228 , 30-33 Wachsmuth ( = T 3 Lasserre ): « Alexandre demandait au géomètre Ménechme de lui présenter la géométrie sous une forme résumée . Et lui de répondre : “ O roi, dans le pays , il y a des routes privées et des routes royales, mais en géométrie, il n'y a qu'une route pour tous " » ( trad. Lasserre ). Le fait qu'on trouve une anecdote similaire mettant en cause Ptolémée et Euclide chez Proclus , In primum Euclidis elementorum librum comm ., p. 68 , 6-20 Friedlein ( Ptolémée aurait demandé dans ce cas s'il y avait en géométrie un chemin plus court que celui des éléments ) semble bien indiquer qu'il s'agit d'un lieu commun sur le long apprentissage qu'exige la géométrie. Or, comme le remarque 21 B. Vitrac ( >-E 80, DPha , t. III, p. 254 ), ces anecdotes ont en tout cas comme fonction de déterminer la chronologie par le biais du synchronisme entre les personnages politiques ( et/ ou célèbres) et les autres : « Il y aurait de bonnes raisons de rejeter ce genre de récits s'ils mettaient en scène tantôt Euclide et Ptolémée tantôt Euclide et Alexandre ... Justement il n'en est rien : ils soulignent la contemporanéité de

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Ménechme et d'Alexandre (qu'il n'y a pas lieu de mettre en doute) et celle d'Euclide avec le premier Lagide ». Si on peut penser à une rivalité intellectuelle entre Eudoxe et Platon , dans le cas de Ménechme, celui-ci semble avoir exprimé surtout des points de vue différents par rapport à Speusippe, points de vue qui semblent mettre en relief le caractère beaucoup plus réaliste et pratique de ses recherches (cf. infra ). L'expression oi nepi Mévalxmov maonuatixol que l'on trouve chez Proclus, In primum Euclidis elementorum librum comm ., p . 78 , 9 et p . 254 , 4 Friedlein ( = D 5 et 7 Lasserre) a été interprétée comme une preuve du fait que Ménechme aurait eu une école ( cf. Bulmer- Thomas 5 , p . 269) . Depuis Allman 10 , p . 171 sq ., on a pensé qu'il s'agirait de l'école mathématique de Cyzique , dont Eudoxe ( et probablement aussi Hélicon [ H 25 ] ) auraient été scholarques avant Ménechme, et Polémarque et Callippe de Cyzique (

C33) après lui .

Euvre. Pour connaître la contribution de Ménechme dans le domaine de la géométrie nous devons nous borner à un petit nombre de témoignages (en réalité , on ne peut pas parler de fragments proprement dits ). Par ailleurs, nous ne possédons pas de titres de ses écrits ( la reconstitution de Lasserre 2 relève de la confusion avec Manechme d'Alopéconnèse), et l'interprétation des témoignages transmis n'est pas toujours facile . D'ordinaire et depuis longtemps ( cf. par exemple Allman 10 , p. 155-157 , 163-171 ; Zeuthen 8 , p . 457-467 ; Heath 12 , t . I , p. 251-255 ; Lasserre 20 , p. 173 sq .; Bulmer - Thomas 5 , p. 270 sqq .; et même Folkerts 7 ) , Ménechme est passé pour le fondateur de la théorie des sections coniques ( ellipse, parabole et hyperbole ). L'origine de l'hypothèse faisant de Ménechme l'inventeur de ces courbes se trouve dans un texte du commentaire d’Archimède rédigé par Eutocius d'Ascalon ( VI ; » E 175 ), Comm . in libros de sphaera et cylindro II, p . 78 Heiberg ( = D 3 Lasserre ), où l'on présente les sections coniques de Ménechme en rapport avec la solution du problème de la duplication du cube, le « problème délien » , qui avait été posé par Platon ( cf. Timée 31 b - 32 b) . Cette solution comportait l'intersection d'une parabole et d'une hyperbole. On a pensé que Ménechme, en partant de la proposition d'Hippocrate de Chios ( * H 151 , p. 766 sq .), selon laquelle la solution du problème revenait à le réduire à la recherche de deux moyennes proportionnelles entre le côté du cube donné et son double, s'était borné à y appliquer les découvertes qu'il avait déjà faites sur les sections coniques ; ou bien on a pensé qu'il avait fait ses découvertes dans ce domaine lorsqu'il tentait de résoudre le problème en question . Les tenants de cette hypothèse admettent cependant que les mots « parabole » et « hyperbole » n'ont pas été inventés par Ménechme, mais plus tard par Apollonius de Pergé ( III® ; cf. 22 G.J. Toomer, Diocles on burning mirrors, New York 1976 , qui a trouvé des preuves que ces mots étaient plus anciens qu'Apollonios ). Dans la lettre (inauthentique) qu'Eratosthène aurait adressée (»E 52, p. 209-212 ) à Ptolé mée Évergète sur le problème de la duplication du cube ( pour lui présenter sa propre solution) et qui nous a été transmise également par Eutocius, ibid ., p. 78 Heiberg (= D 1 b Lasserre ), on mentionne les tentatives d'Archytas de Tarente (>A 322), d'Eudoxe de Cnide ( E 98 ) et de Ménechme, qui sont dits avoir échoué pour n'avoir pas réussi à donner une application pratique à leurs solutions théoriques, sauf partiellement Ménechme (= D 1 b Lasserre ;

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cf. D 1 d-e Lasserre). Enfin, la lettre était suivie d'une épigramme où on fait allusion aux « triples sections du cône de Ménechme » (= D 1 a Lasserre ), allusion reprise par Proclus, In primum Euclidis elementorum librum comm., p. 111 , 20-22 Friedlein (= D 1c Lasserre ; cf. aussi Proclus, in Tim . 31 , t. II , p. 33 Diehl = D 1 f Lasserre ). Étant donné que cette solution , telle qu’Eutocius la présente ,a recours à des courbes coniques ( une parabole et une hyperbole orthogonale ), on a pensé que Ménechme pouvait avoir anticipé en quelque sorte la théorie des sections coni ques , compilée pour la première fois environ un demi - siècle plus tard par Euclide ( -E 80, p. 258 ) et par le géomètre Aristaios de Crotone cité par Pappus , Synagoge III , t . I , p. 56 , 6 ; VII , t . II , p . 634 , 9, p. 636, 23 , p . 672 , 12 , 20 , p . 674, 18 , p . 676, 26 Hultsch . Par ailleurs , il aurait obtenu ses courbes à travers une méthode différente de celle d'Apollonius de Pergé ( cf. Euclide , Elem . XI , def. 18 = D * 2a Lasserre ) : cf. 23 O. Neugebauer, « The astronomical origin of the theory of conic section » , dans Id . , Astronomy and history : selected essays, New York 1983 , p. 295-297 ( repris de PAPhS 92 , 1948 , p. 136-138 ) , notamment p . 295 ; 24 Id . , A history of ancient mathematical astronomy, In three parts with 9 plates and 619 figures, coll . « Studies in the history of mathematics and physical sciences » 1 , Berlin 1975 ( 1457 p. ) , notamment p. 677 . En revanche, Knorr 17, p. 1-5 , a démontré que l'attribution de cette solution à Ménechme est infondée, justement parce qu'elle presuppose des propositions de la théorie des sections coniques d'Apollonius de Pergé ( cf. Sturm 11 , p . 57-97 , notamment p. 66-74 ): il a rassemblé les arguments pour démontrer qu'Eutocius a utilisé dans le passage en question la doctrine sur les sections coniques d'Apollonius parce qu'il ne pouvait pas reconstituer en detail la solution du problème délien par Ménechme qui n'était plus transmise à son époque. En réalité , la méthode d'Apollonius était différente sur deux points essentiels de la soi-disant méthode originaire de Ménechme. Indépendamment de cette question, Knorr affirme que la tradition ne nous permet pas d'expliquer comment Ménechme a pu construire , autrement dit décrire, les différentes sections coni ques. Qui plus est , il défend l'hypothèse ( p . 7 ) selon laquelle la solution origi naire de Ménechme n'avait pas recours aux courbes coniques en tant que telles mais s'en tenait à une forme de la méthode d'analyse propre à Hippocrate ( » H 151 , p . 765 ) . Dans ce sens , Knorr conteste donc l'idée maintes fois exploitée selon laquelle Ménechme aurait été le fondateur de la doctrine antique sur les sections coniques : ce n'est que plus tard , au IVe siècle , plus près du temps d'Euclide, qu'on aurait conçu la génération d'un genre de courbes à travers la section d'un cône et qu'on aurait commencé la recherche géométrique de celles ci . En dehors d'Eutocius, la preuve qu'on a voulu mettre à contribution que les sections coniques remontent à Ménechme (notamment la lettre inauthentique d'Ératosthène, dont le témoignage a été repris par Proclus ) lui paraît très vague et faible . Cf. Knorr 18 , p . 61-66 , 351 sq .; Knorr 19 , p . 94-100 ; Knorr 6 ; 25 E. J. Dijksterhuis, Archimedes, transl . by C. Dikshoorn , With a new biblio graphical essay by W.R. Knorr, Princeton 1987 (édit . orig. 1938 ) , p . 56, 63-65 ; 26 H. R. Mendell, Aristotle and the mathematicians, Thèse Standford University 1986 , p. 320-326 ; 27 H.-J. Waschkies , GGP, Antike 2/1 , 1998 , p. 400 sq.

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Si l'interprétation de Knorr 17 est correcte , on ne peux donc pas établir avec certitude les détails de la solution que Ménechme proposa pour résoudre le problème de la duplication du cube. Ce qui semble clair c'est qu'il aurait donné à ce problème un solution pratico -mécanique ( cf. la fin de la lettre attribuée à Ératosthène ), comme d'autres l'avaient aussi tenté apparemment avec moins de succès. A ce sujet, on peut ajouter le témoignage de Plutarque, Quaest. conv. 8 , 2 , 1 ( = D1 e Lasserre ), selon lequel Platon aurait reproché à Ménechme, ainsi qu'à son maître Eudoxe et à Archytas, de « vouloir détourner le problème de la duplication des volumes sur des dispositifs instrumentaux et mécaniques , comme s'ils tentaient de déterminer les deux moyennes proportionnelles par un moyen irrationnel, à portée seulement pratique : ils détruisaient ainsi la géo métrie , ils en corrompaient la vertu en la faisant revenir au sensible au lieu de l'élever encore plus haut et de la faire participer aux représentations éternelles et immatérielles » ( trad . Lasserre ). Ménechme semble donc s'être intéressé à la technologie des mathématiques ( cf. Bulmer- Thomas 5 , p. 269). Outre le problème délien , issu de l'intérêt qui existait dans le milieu de l'Académie pour les recherches sur les irrationnels cubiques et la façon de construire des moyennes proportionnelles (cf. 28 W. R. Knorr, The evolution of the Euclidean elements : a study of the theory of incommensurable magnitudes and its significance for early Greek geometry, coll . « Synthese historical library. Texts and studies in the history of logic and philosophy » 15 , Dordrecht /Boston 1975 , p . 302 ) , Ménechme s'est occupé aussi , dans le même contexte philo sophique, du problème théorétique concernant la terminologie, la structure et la méthode de la recherche mathématique . En effet, comme le remarque Bulmer Thomas 5 , ibid ., plusieurs témoignages de Proclus montrent que Ménechme s'est beaucoup intéressé à la philosophie des mathématiques (cf. Becker 15 , p . 99, 101 ). Tout d'abord , d'après Proclus, In primum Euclidis elementorum librum comm . , p . 72 , 23 – 73 , 14 Friedlein ( = D 6 Lasserre ), Ménechme distinguait entre deux sens dans l'emploi du mot otolyetov ou « élément» : il y aurait, d'un côté , le sens large de « proposition » ( par exemple , chez Euclide , le premier lemme dans une démonstration est un élément du second , le quatrième , du cinquième ) ; dans ce sens , ce qui est le moyen pour obtenir quelque chose serait un « élément» de ce qui est obtenu (l'élément est ici comme un lemme ) ; il y aurait , de l'autre côté , le sens strict de « principe plus simple auquel aboutit la division d'un composé » (trad . Lasserre ) ; et en ce sens on ne pourrait plus dire qu’une chose est un « élément » d'une autre, mais seulement que des choses qui possèdent plus de la nature des principes sont des éléments de celles qui sont à leur égard en relation de résultats, comme les postulats sont des éléments des théorèmes ( cf. infra ). D'après Proclus, c'est en ce dernier sens qu’Euclide aurait utilisé le mot « élément» , et , comme le remarque Bulmer-Thomas 5 , ibid. , on peut conclure que Ménechme aurait contribué à fixer cette terminologie . A propos de cette distinction, cf. 29 T. L. Heath, The thirteen books of Euclid's elements, transl . from the text of Heiberg with introd . and comm . , second ed .

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rev. with add ., t . I : Introduction and Books I, II, New York 1956 , p . 114 , qui tente de la reproduire par la traduction élémentlélémentaire. A partir d'un autre passage de Proclus, In primum Euclidis elementorum librum comm ., p . 253 , 16 - 254, 5 Friedlein ( = D 7 Lasserre ), on apprend que les mathématiciens du cercle de Ménechme et d'Amphinomos ( A 145 ) auraient mis en relief que « beaucoup des réciproques (d'une proposition ) sont fausses, et ne sont pas de véritables réciproques » , autrement dit que la réciproque d'une proposition n'est pas toujours vraie : « Par exemple, tout nombre hexagone est aussi nombre triangle, mais il n'est plus vrai que tout nombre triangle soit aussi nombre hexagone » ( trad. Lasserre ). D'après 30 J. Barnes, « Aristotle, Menaechmus, and circular proof » , CQ 26, 1976, p. 278 292, c'est influencé par cette observation de Ménechme (que les propositions mathématiques péchaient souvent par circularité ), qu'Aristote aurait tenté d'expliquer les propositions circu laires dans sa syllogistique : il pensait que les propositions pouvaient être complètement réciproques dans la forme, et il imaginait une théorie de la démonstration circulaire, fondée sur l'occurrence cyclique des phénomènes naturels, qui pouvait répondre à un recul sceptique en épistémologie. Finalement, encore une fois Proclus, In primum Euclidis elementorum librum comm ., p. 181 , 16 sq., et p. 77 , 7-17 Friedlein (= D * 4 et 5 Lasserre), témoigne que Ménechme faisait la distinction entre « postulats » (airhuara ) et « axiomes >> (àxibuata ), et qu'il semble avoir entamé à cet égard une polémique avec Speu sippe ( cf. fr. 36 et 37 Isnardi Parente ). En effet, Proclus parle de la division des propositions en « problèmes » (npoßanuata ), qui « comprennent la génération de figures, les sections, les soustractions, les additions et en général les altéra tions subies par les figures » , et « théorèmes » (Dewpńuata ), qui « démontrent les propriétés inhérentes à chaque figure » ( trad . Lasserre ). À ce sujet, en faisant appel à l'histoire plus ancienne, il rapporte que ceux du cercle de Speusippe et d'Amphinomos soutenaient devoir tout appeler « théorème » , tandis que d'autres, comme les mathématiciens attachés à Ménechme, estimaient qu'il fallait tout appeler « problème » . Seulement, l'école de celui-ci précisait qu'il y avait deux types de problèmes selon le but qu'on se fixait: s'il s'agit de procurer l'objet de la recherche, les problèmes en question seraient des « postulats » ; s'il s'agit de considérer cet objet comme déjà défini et d'étudier alors ce qu'il est, ce que sont ses attributs , ou ses propriétés accidentelles, ou quels rapports il entretient avec un autre objet, ces problèmes seraient des « axiomes » . Proclus conclut en considérant comme justes aussi bien la tendance de Speusippe ( car « les objets proposés à la géométrie ne ressemblent pas aux objets proposés à la mécanique, qui sont perceptibles aux sens, qui naissent et qui se transforment » , trad . Id .) que celle de Ménechme ( car « la découverte des théorèmes ne se fait pas sans recourir à la matière » , trad . Id .). 31 A. C. Bowen, « Menaechmus versus the Platonists : two theories of science in the Early Academy » , AncPh 3 , 1983 , p. 12-29, a étudié cette polémique née dans l'Académie visant à savoir si les objets de la connaissance scientifique peuvent être générés et s'ils parviennent de la sorte à l'existence : Platon et certains platoniciens défendaient que tout ce qui est connu doit être éternel et immuable ; Ménechme, en revanche, alléguait que la géométrie n'est pas une

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science de ce qui est éternel, mais qu'elle avance par la production de nouveaux objets de connaissance. Concernant le témoignage de Proclus sur Speusippe et Ménechme, cf. 32 L. Tarán, « Proclus and the Old Academy » , dans J. Pépin et H.D. Saffrey ( édit . ) , Proclus lecteur et interprète des anciens , Actes du Colloque international du C.N.R.S. , Paris, 2-4 octobre , Paris 1987, p. 227-276. Finalement, nos témoignages indiquent que Ménechme s'est occupé aussi de l'application des mathématiques à l'astronomie. En effet, Théon de Smyrne , Expositio rerum mathematicarum ad legendum Platonem utilium, p . 201 , 22 202 , 2 Hiller (= F 2 Lasserre ), affirme que Dercyllidès ( ~ D 87 ) « blâme les philosophes qui , attachant les astres aux sphères et à leurs cercles comme des objets inanimés, introduisent des systèmes à plusieurs sphères, ainsi que le font Aristote ( cf. Met. 1073 b 38 ) et, entre les mathématiciens, Ménechme et Callippe [ MC 33 ] ( ibid. 1073 b 32) , qui ont imaginé les sphères tournant en sens direct et celles tournant en sens retrograde » (οι τάς μεν φερούσας , τας δε ανελιττού oaç kionghoavto ; trad. Lasserre ). Ménechme aurait donc travaillé sur les sphères homocentriques, sans doute suivant le modèle de son maître Eudoxe ( cf. aussi Théon de Smyrne, Liber de astronomia , p. 330 , 19-332 , 3 Martin ). Sur ce modèle eudoxéen , où la terre , immobile, occupait le centre du système, nous renvoyons à la notice sur Eudoxe ( r E 98 , p. 299 ; cf. Neugebauer 24 , p. 677-685 ). PEDRO PABLO FUENTES GONZÁLEZ .

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342/ 1- 292/1 ou 291 /2a

Poète de la Comédie Nouvelle , élève de Théophraste. Témoignages et fragments. Édition de référence : 1 R. Kassel et C. Austin ( édit . ) , Poetae Comici Graeci ( PCG ), ediderunt R.K. et C. A. , vol . VI 2 , Menander, Testimonia et Fragmenta apud scriptores servata , Berlin /New York 1998. En attendant la publication du vol . VI 1 , qui donnera l'édition des frag ments papyrologiques, on consultera 2 W.G. Arnott (édit. ) , Menander, ed . with an English transl. by W.G.A. , coll . LCL, Cambridge, Mass./London , vol . I : Aspis to Epitrepontes, 1979 , vol . II : Heros to Perinthia, 1996, vol . III : 2000. En français, pour les trois comédies du papyrus Bodmer : 3 J.-M. Jacques (édit . ) , Ménandre, texte établi et traduit par J.-M.J., CUF , Paris, t . I 1 : La Samienne, 1971 ' , 19892 ( 3e tirage 2003 ), t.12 : Le Dyscolos, 1963 ' , 19762 ( 5º tirage 2003), t. I 3 : Le Bouclier, 1998 ' , (2 tirage 2003). On trouvera une traduction française des comédies les mieux conservées dans 4 A. Blanchard (édit. ) , Ménandre, Théâtre. Texte traduit, présenté et annoté par A.B. , Paris, Le Livre de poche classique, 2000 . Biographie . Ménandre , fils de Diopeithès , du dème de Céphisia, et d'Hégestrate (Sud. M 589 = 1 T 1 ; Gell . XVII 4, 4 = 1 T 46, citant Apollodore ; IG XIV 1184 = 1 T 2 ) , est né en 342/1 (IG XIV 1184) , donc la même année qu'Épicure ( = * E 36) : la coïncidence des dates est renforcée par l'indication que donne Strab. XIV 1 , 18 = 1 1 7 et selon laquelle Ménandre fut le « synéphèbe » d'Épicure à Athènes. Le poète est mort en 292/1 ou en 291/0 , cette dernière date permettant de lui maintenir une durée de vie de 52 ans donnée par IG XIV 1184

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et Apollodore dans Aulu-Gelle . Ménandre eut une carrière bien remplie puisque, en trente ans environ , il écrivit 108 , 109 ou , plus sûrement, 105 comédies (Gell ., ibid .). Né apparemment dans une famille aisée, il put faire des études au Lycée. Élève de Théophraste (D.L. V 36 = 1 T 8 , citant l'érudite du siècle de Néron , Pamphile , dans le livre XXXII de ses Notes ), il eut la joie de voir un autre auditeur du maître, son ami Démétrius de Phalère [ -D 54] (D. L. V 79 = 1 T 9 ), de quelques années plus âgé , diriger Athènes de 317 à 307 ; il avait alors de 25 à 35 ans , et il remporta plusieurs victoires au théâtre , en particulier, nous le savons maintenant, son Bourru ( Dyscolos) obtint le premier prix en 316 (cf. la didascalie de la pièce conservée par le P. Bodmer IV) . Mais, au terme de dix ans de ce que certains ont appelé une tyrannie ( cf. Paus. I 25 , 6 , et, à un moindre degré , Plut . , Demetr . 10 , 2 ) , Démétrius de Phalère fut chassé d'Athènes par Démétrius Poliorcète. Le poète eut alors à affronter un procès et ne dut son salut qu'à l'intervention de Télesphoros ( D. L. V 79) , très probablement un parent de Démétrius de Phalère . Jamais les amis politiques de Ménandre, de son vivant, ne devaient revenir au pouvoir : suivant des modalités diverses, les démocrates tinrent le devant de la scène , et, au total, le poète se trouva rarement couronné, alors que , selon la tradition , quelqu'un qui ne le valait pas, son rival Philémon , remportait de nombreuses victoires. Ménandre resta cependant fidèle à Athènes, alors que lui venaient diverses invitations à s'expatrier . En tout cas , il fut heureux pour lui que , quelques années après sa mort, un régime conservateur ait été de nouveau en place. On dressa alors, au théâtre de Dionysos ( cf. Paus. I 21 , 1 = in 1 T 25 ) , une statue du poète , assis sur un clismos, et imberbe comme tout bon pro- macédonien et aristocrate : une cuvre des deux fils de Praxitèle, Céphisodote le Jeune et Timarque (IG II 3777 = 1 T 25 ) . Ménandre et la philosophie : bibliographie sélective. L'ouvrage fonda mental reste celui de 5 A. Barigazzi, La formazione spirituale di Menandro, Torino 1965. On trouvera par ailleurs des éléments intéressants dans quelques grandes synthèses sur Ménandre : 6 T.B. L. Webster, Studies in Menander, Manchester 1950 ' , 19602 ; 7 A. W. Gomme , F.H. Sandbach , Menander. A Commentary, Oxford 1973 ; 8 A. Blanchard , Essai sur la composition des comédies de Ménandre, Paris 1983 ; 9 N. Zagagi , The Comedy of Menander. Convention, Variation & Originality, London 1994 ; 10 S. Lape, Reproducing Athens . Menander's Comedy, Democratic Culture, and the Hellenistic City, Princeton /Oxford 2004. Articles spécialisés: 11 M. Tierney, « Aristotle and Menander » , PRIA 43 C , 6 , 1936 , p . 241-254 ; 12 L. A. Post, « Aristotle and Menander » , TAPHA 69 , 1938 , p. 1-42 ; 13 K. Büchner, « Epikur bei Menander » , SFIC 14 , 1937 , p . 151-166 ; 14 M. Pohlenz, « Menander und Epikur » , Hermes 78 , 1943 , p . 270-275 ; 15 N.W. de Witt , « Epicurus and Menander » , dans Studies Norwood Phoenix Suppl . I , Toronto 1952 , p . 116-126 ; 16 P. Steinmetz, « Menander und Theophrast. Folgerungen aus dem Dyskolos », RM 103 , 1960 , p. 185-191 ; 17 S. Luria, « Menander kein Perpatetiker und kein Feind der Demokratie » , dans F. Zucker ( édit .), Menanders Dyskolos als Zeugnis seiner Epoche, Berlin 1965 , p . 23-31 ; 18 K. Gaiser, « Menander und der Peripatos » , A & A

13 , 1967 , p . 8-40 ; 19 F. Wehrli , « Menander und die

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Philosophie » , dans E.G. Turner ( édit . ) , Ménandre, coll . « Entretiens de la Fondation Hardt >> 16, Genève 1970 , p . 147-155 ; 20 G. Ricciardelli Apicella , « Epicuro e Menandro » , RCCM 10 , 1968 , p . 3-26 ; 21 W.W. Fortenbaugh , « Theophrastus and Menander » , résumé dans BICS 20 , 1973 , p. 163-164 ; 22 M. Gigante, « Menandro e il Peripato » , dans R.B. Palmer , R. Hamerton Kelly (édit . ) , Philomathes. Studies Ph . Merlan , The Hague 1971 , p . 461-484 ; 23 J. Martínez Gásquez, « Menandro y Teofrasto » , BIEH 5 , 1971 , p. 43-47 ; 24 M. Marcovich , « Aristotle and Menander on education » , ZAnt 33 , 1983 , p. 131-132 ; 25 A. Blanchard , « Terreur et pitié chez Ménandre : Dyscolos, v . 589-609 » , CE 70 , 1995 , p. 173-188 ; 26 A. D'Angelo, « Menandro e Filo demo » , CronErc 27 , 1997 , p. 137-146 ; 27 A. Blanchard, « Colère et comédie : les conditions du rire dans le théâtre de Ménandre » , dans M. Trédé, Ph . Hoffmann , C. Auvray - Assayas ( édit . ) , Le Rire des anciens, Paris 1998 , p. 91-100 ; 28 Id ., « Moschion ở xóduloç et l'interprétation de la Samienne de Ménandre » , REG 115 , 2002, p. 58-74 ; 29 D. Munteanu , « Types of Anagno risis : Aristotle and Menander . A Self - Defining Comedy » , WS 115 , 2002 , p . 111-126 . L'inspiration philosophique chez Ménandre. Elle a été bien inutilement contestée sous le prétexte que Ménandre était avant tout un poète comique , désireux seulement de faire rire, et non le porte - parole d'une idéologie. Certes le poète, dans ses comédies , ne fait jamais platement de la morale . S'il est parfois des tirades qui sentent l'École, on admirera toujours la subtilité avec laquelle elles sont présentées. Ainsi les v. 449-451 du Dyscolos, sur le type de sacrifices qu'aiment les dieux ( l'encens et une galette d'orge) , paraissent sortir tout droit du De pietate de Théophraste, et Porphyre , Abst. II 17 , 3 , les cite en parallèle avec les textes du maître : dans le Dyscolos, ils sont placés dans la bouche d'un bourru, excédé par la gêne que lui occasionne la venue de gens désireux de sacrifier un mouton au dieu Pan ! D'une façon générale, le poète se dissimule derrière ses personnages et l'on ne saurait lui attribuer tout ce qu'ils disent. est alors , par lui-même, un génie comique hors de pair, génie qui le distingue d'un autre poète, issu comme lui , du Péripatos, Lyncée de Samos ( L 91 ) . Ceci reconnu , il n'en reste pas moins vrai que Ménandre doit à sa formation philo sophique une supériorité définitive sur ses grands rivaux Philémon et Diphile . Le problème est en fait celui de la nature de la formation philosophique assumée par lui .

Platon Iconographie. Dans la série de panneaux de mosaïque du début du IVe siècle de notre ère trouvés dans une villa de Mytilène et représentant des scènes de comédies de Ménandre, figure une représentation du Phédon de Platon , voir 30 S. Charitonidist, L. Kahil, R. Ginouvès, Les mosaïques de la Maison du Ménandre à Mytilène, Bern 1970 , panneau T3 , p . 33-36, pl . 3 , 2 et 17. Cette présence a intrigué; elle n'est cependant pas incongrue. Analyses platoniciennes. Ménandre paraît suivre à la lettre certaines de ces analyses. Deux exemples, très différents l'un de l'autre, suffiront à le montrer.

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( a) Dans le Philèbe 48 c-e , Platon définit le ridicule comme un vice qui s'oppose directement au puñol OQUtóv de Delphes ; il est le propre de ceux qui se méconnaissent eux - mêmes soit au plan de la fortune, soit au plan des avantages physiques . « Mais , ajoute Socrate , les plus nombreux , je crois, sont d'emblée ceux qui pèchent par la troisième sorte d'ignorance, relative aux qualités de l'âme , et se croient supérieurs en vertu alors qu'ils ne le sont point.» Pour ne citer qu'eux , le Moschion de la Samienne, si conscient de la bonne éducation qu'il a reçue, le Cnémon du Dyscolos, qui hait le mal (v . 388), le Smicrinès du Bouclier, si fort de son droit, présentent ce type de naïveté qui les rend comiques , et pourraient tout aussi bien les rendre odieux s'ils n'appar tenaient à la catégorie des personnages que Platon , ibid . 49 c , qualifie de faibles : tout l'art de Ménandre consiste en effet à montrer leur faiblesse; ces personna ges sont en réalité des esclaves , soient parce qu'ils prennent la place de l'esclave (ainsi , à la fin de l'acte III du Dyscolos , Cnémon , qui n'a pu convaincre sa servante de descendre dans le puits pour y récupérer sa pioche, y descend lui même au risque d'y perdre la vie ) , ou bien parce qu'ils se laissent diriger (Moschion) ou berner ( Smicrinès ) par lui. ( b) Dans le domaine à la fois psychologique et politique, on peut observer une autre rencontre entre Platon et Ménandre qui n'a rien de fortuit. Dans ses Sicyoniens, en effet, le poète comique présente un vieil « oligarque » , Smicrinès, dont le défaut risque de faire le malheur de la jeune première, enlevée jadis par des pirates, et qui , de toute manière , quand elle retrouvera son père, ne saurait lui devoir une heureuse condition car il est plongé dans la misère. Ce Smicrinès a un jeune fils, Moschion , d'un temperament apparemment tout opposé, mais qui risque, lui aussi , lors d'une assemblée populaire à Éleusis , de faire le malheur de la jeune première dont il est amoureux . On songe invinciblement au livre VIII de la République, quand Platon suppose que l'oligarque a « un fils nourri sous la direction et dans les sentiments de son père. ( ... ) Comme son père, il maîtrise par la force les appétits de plaisir qu'il sent en lui , qui le poussent à la dépense, mais sont ennemis de l'épargne » ( 558 d) . Mais ce père « n'a pas su élever son fils » ( 560 a-b ) , parce qu'il passe tout son temps à gagner de l'argent sans se soucier de la vertu (550 e) , et surtout parce qu'il a besoin que les autres s'abandonnent à une vie de plaisir pour qu'il puisse plus aisément gagner cet argent ( 555 c ) . Le fils de l'oligarque est donc tiraillé entre deux tendances: d'une part le mépris affiché par son père pour ceux qui ne sont pas riches, d'autre part son désir profond de plaisir que vient renforcer le spectacle du libertinage constaté chez la plupart des jeunes gens de son âge . Finalement, une fois qu'il a commencé de goûter à leurs plaisirs, « il passe chacune de ses journées à complaire au désir qui se présente » (561 c) . Il est même susceptible de « bondir à la tribune » de l'assemblée pour dire ce qui lui passe par la tête ( 561 d ) . Et voilà « comment d'oligarque on devient démocrate > ( 559 d ) . La finesse des analyses de Platon trouve ici son parfait équivalent dans celle des analyses de Ménandre et l'on observe même de nombreuses rencontres dans le vocabulaire employé.

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Les défis de Platon . Cependant le rapport entre Ménandre et Platon n'est pas aussi simple qu'on pourrait le croire à partir du développement précédent . Il est aussi complexe que peut l'être le rapport entre les mythes platoniciens et ceux que le poète comique a su créer. On sait qu'au livre X de sa République, Platon ne laisse presque aucune place aux poètes. En particulier, pour lui – et c'est là un thème présent dans plusieurs de ses dialogues - , les poètes comiques ne sont que des bouffons, d'une grossièreté affligeante , et on aurait tort de les prendre au sérieux, comme on l'a fait pour les Nuées d'Aristophane : ce poète a ainsi sa part de responsabilité dans la mort de Socrate (Apol ., 19 a-c) . D'autre part, comme le suggère la fin du Banquet, les poètes sont soit tragiques , soit comiques : seul le philosophe est capable de dominer à la fois ces deux versants de la condition humaine . Ménandre saura relever tous ces défis : chez lui , la comédie est toujours une tragédie inversée ; l'aioxponoy a est réduite au minimum et le style n'exprime plus que la vérité des caractères, ce dont Plutarque, dans sa Comparaison d'Aristophane et de Ménandre (Mor. 853 a - 854 d , extraits dans 1 T 103 ) , donnera acte au poète ; enfin , ce que n'a pas su voir le platonicien Macrobe dans son Commentaire au Songe de Scipion i 2 , 8 = 1 T 129, le théâtre de Ménandre est d'une haute portée morale . Encore faut -il, pour l'interpréter correctement, le replacer dans le cadre de la pensée du Péripatos.

Aristote et Théophraste ( 1 ) Poétique La Poétique d'Aristote permet de faire un premier commentaire concluant des comédies de Ménandre. Le poète comme le philosophe met au premier plan la composition : « Le poète doit être artisan de fables plutôt qu'artisan de vers » , avait dit Aristote, Poet . 9 , 1451 b 27-28 ; et , concernant Ménandre , Plutarque , De la gloire des Athéniens ( Mor . 347 e - f ) = 1 T 70 , rapporte l'anecdote suivante : « À ce qu'on raconte , un des amis de Ménandre lui dit : “Ménandre les Dionysies approchent et ta comédie n'est pas faite ?" et lui de répondre : “ Si, par les dieux , ma comédie est faite. J'en ai tout le plan , il ne me reste plus qu'à écrire les vers .” » Ce qui est donc mis en avant, c'est la création du « mythe » , histoire organisée en vue de produire un sens . Qu'en est - il , chez Ménandre, de cette organisation ? La division bipartite en déons et vouc, « næud » et « dénouement» , (Aristote, Poet . 18 , 1455 b 26-29 ) convient parfaitement à ses pièces : elle passe assez exactement dans leur centre . Mais Aristote ignore apparemment la division en cinq actes qui est habituelle chez Ménandre, et , pour la comprendre, il faut recourir à la division tripartite en npótaolc ( tension initiale ) , ÉT TOOLS ( surcroît de tension ) et xataotpooń ( renversement de la situation ou dénouement ) que Donat utilise dans son commentaire des comédies de Térence ( voir < Evanthius , De fabula > , 4 , 5 , et De comoedia 7 , 4 , dans 31 P. Wessner [ édit . ] , Aeli Donati Commentum Terenti, coll . BT, I , Leipzig 1902, p. 22 et 27-28 . Dans Webster 6 , p. 178-179 , on trouve l'idée que cette division tripartite pourrait remonter à Théophraste dont on sait qu'il a écrit un traité sur la comédie (cf. Diogène Laërce V 47 ) ; cependant ces textes ne figurent pas dans 32 W.W. Fortenbaugh ,

P. Huby , R. W.

Sharples et al. ( édit . ) ,

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Theophrastus of Eresus : Sources for his Life, Writings, Thought and Influence, II , Leiden 1992. Autres thèmes de la Poétique d'Aristote utiles pour la compréhension des pièces de Ménandre : il y a différents types de reconnais sances , la moins bonne étant celle qui s'opère par le moyen d'objets de reconnaissance, Poet. 16, 1454 b 19-21 (on trouve ces objets dans les meilleures comédies de Ménandre , par exemple l'Arbitrage, mais alors le poète s'ingénie pour que leur rôle soit seulement indirect ) ; l'action doit être à la fois logique et vraisemblable et ménager des surprises, Poet. 9, 1452 a 4 ( chez Ménandre les coups de théâtre sont nombreux, mais toujours justifiés par les caractères). On peut enfin admettre que la préférence accordée par Ménandre à Euripide parmi les poètes tragiques dont il s'inspire, préférence dont témoigne Quintilien X 1 , 69 = 1 T 101 , a été influencée par le choix semblable qu'on trouve chez Aristote, Poet. 13 1453 a 23-30. Mais, dans son ouvrage tel qu'il nous est parvenu, le philosophe parle essen tiellement de la tragédie , très peu de la comédie , et l'on a supposé qu'un livre II de la Poétique, plus spécifiquement consacré à la comédie, avait existé et s'était perdu. Si l'on peut utiliser le texte d'Aristote pour expliquer Ménandre , c'est bien en raison du parallélisme des genres comiques et tragiques, tellement sensi ble dans l'æuvre du poète (nous avons également, de Théophraste, 32 , fr. 708 , une définition de la tragédie et probablement une définition de la comédie qui confirment ce parallélisme des deux genres, esquissé par Aristote , Poet . 13 , 1453 a 35-39 ) . Mais la Poétique d'Aristote , qui nous précise quels sont les moteurs de la tragédie (c'est le fameux passage sur la terreur et la pitié et sur la catharsis qui en résulte, Poet. 6, 1449 b 27-28 ), est muette sur les moteurs de la comédie . C'est alors que le théâtre de Ménandre fait la preuve de son utilité philosophique dans ce domaine en permettant de vérifier parfaitement ( voir Blanchard 27 ) l'hypothèse de 33 J. Vuillemin , Éléments de Poétique, Paris 1991, p. 119 , qui montre , dans le prolongement de la pensée d'Aristote sur les passions tragiques et avec des exemples pris dans le théâtre de Molière , mais aussi celui d'Aristophane, qu'il n'y a d'émotion véritablement comique que si la colère que nous font éprouver les actes de certains personnages se transforme en rire , c'est à - dire si elle s'accompagne de mépris, ce qui se produit quand nous constatons que le personnage comique est victime d'une illusion sur lui -même, qu'il prend ses désirs pour des réalités, et n'agit pas de ce fait en pleine connaissance de cause . C'est sans doute régler définitivement une question longtemps débattue. On trouvera alors la « signature » de Ménandre comme élève du Péripatos dans Dysc. 589-609, voir Blanchard 25. ( 2 ) Éthique On a depuis longtemps remarqué que certaines pièces de Ménandre avaient des titres qui étaient empruntés aux Caractères de Théophraste : Agroicos, Apistos, Deisidaimon , Colax. Mais il serait bien superficiel d'en rester là . Pour composer un de ses caractères, par exemple le Cnémon du Dyscolos, Ménandre emprunte à plusieurs caractères de Théophraste ( voir Jacques 3 , p. XXXVI ) . Surtout cette petite cuvre du philosophe ne donne qu'une faible idée de l'ampleur de ses analyses dans le domaine moral . Les textes du maître de

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Ménandre étant perdus, il faut ici se reporter aux différentes Éthiques d'Aristote pour comprendre vraiment ce qu'a voulu faire le poète comique . Or, précisé ment , ces Éthiques se présentent non comme des discours normatifs, mais comme des études de caractères : simplement, il y a des caractères vertueux et des caractères vicieux . (a) Caractères, vices et vertus sont sur un même plan et Aristote en fait l'analyse suivante . Premier élément : la nipoa peolç ou choix rationnel, délibéré et réfléchi (E.N. III 4 , 1111 b 5-6) . Tout homme cherche évidemment le bonheur et le choix va porter sur les moyens d'atteindre ce but . Ce choix originel peut par la suite être oublié comme tel, il n'en est pas moins important. Il est au moins deux pièces de Ménandre où cette période de formation du caractère est évoquée, ce sont le Dyscolos et la Samienne . A l'acte IV du Dyscolos, Cnémon , accidenté et sauvé par Gorgias, prend conscience de l'erreur qui est la sienne : il est impossible, pour un homme de son âge, de vivre dans la solitude complète dont il rêve ( v . 713-717 ). Il explique alors son désir de solitude par l'horreur que lui causait l'appât du gain chez ses contemporains ( v . 718-720 ) . Cnémon, victime de l'illu sion cathare , a pris ensuite ses désirs pour des réalités en croyant qu'il pourrait vivre seul , mais la réalité s'est vengée , ou plutôt , car nous sommes dans une comédie et non une tragédie , il a trouvé dans son malheur un sauveur en la personne de Gorgias qui l'a tiré de son puits et lui a montré à la fois que tous les hommes n'étaient pas si méchants et qu'on ne pouvait se passer de l'aide d'autrui. Dans la Samienne, Moschion explique ingénument, dans le prologue qu'il prononce , l'erreur de jugement qui est à l'origine de son défaut: adopté par Déméas dans sa petite enfance et ayant par la suite reçu une excellente éduca tion , avec tous les moyens financiers que cela suppose , il a pensé qu'il pouvait rendre à son père adoptif ce que celui -ci lui avait donné et cela en étant xóquioc, « rangé » : ce n'est pas lui qui irait, comme les autres fils de famille, passer sa vie à boire et à banqueter avec des courtisanes, dilapidant ainsi le patrimoine familial. Mais ce que Moschion oublie - et que soulignait au contraire Aristote -, c'est que l'amitié entre un père et son fils est une amitié entre inégaux ( E.N. VIII 16 , 1163 b 17-22 ) . En voulant répondre aux désirs supposés de son père, le jeune homme s'engage en fait dans un genre de vie trop rangé, à la fois paradoxal parce que son père adoptif ne lui a pas donné l'exemple d'une telle retenue à l'égard des plaisirs , et dangereux parce que ce jeune homme a le sang vif et qu'il n'est pour lui d'autre frein que son désir de xoguiórns, bien insuffisant dans certaines circonstances. Deuxième concept pour comprendre ce qu'est un caractère : l'ÉEiç ou habi tude , manière d'être permanente ( E.N. II 2 , 1104 b 19-21 ) . Une fois la décision prise, par exemple , Cnémon décide de rompre avec l'humanité , un acte va suivre en accord avec cette décision , puis un autre semblable : Cnémon va refuser de parler à telle personne , de l'aider, etc. , puis il recommencera en une autre occa sion , et cette succession d'actes le fera devenir ce qu'il est maintenant : un bourru ; il n'a plus désormais à délibérer avant d'agir. Il y a une mécanique de l'habitude . La vertu est une habitude aussi bien que le vice , mais une habitude

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intelligente, ouverte et qui permet de vivre, tandis que le vice , qui repose sur une erreur de départ, conduit à des impasses. Dans le cas de la Samienne , on ignore quelles occasions de conquêtes féminines Moschion a laissé échapper pour être xóquios, mais on ne peut qu'être stupéfait quand il nous apprend qu'il a enlevé, pour le compte de son ( vieux ) père ( adoptif), la jeune et belle Samienne et qu'il l'a donc introduite dans la maison où il vit, lui , jeune célibataire : voilà qui peut bien forger un caractère ! Cet aspect d'habitude donne au caractère sa permanence et Ménandre la conserve avec rigueur. Certes il crée toutes les conditions pour que le person nage principal de la pièce , celui dont le défaut de caractère fait obstacle au bonheur de la jeune première, puisse prendre conscience de son erreur, cela régulièrement à l'acte IV . En un court instant, le personnage , ainsi rendu conscient, cesse d'être un personnage comique . Mais ce n'est que le temps d'un éclair et le rire du spectateur est à peine interrompu, car immédiatement le « caractère » , c'est -à-dire la mauvaise habitude, reprend le dessus. Dans la Samienne, Moschion prend - il enfin conscience des soupçons que ses cachot teries ont engendrées et se disculpe-t-il aux yeux de son père ? Immédiatement, il se dérobe et il laisse Déméas s'expliquer seul avec le père de la jeune première. Dans le Dyscolos, Cnémon n'a pas plutôt reconnu son erreur, qu'il se décharge de sa responsabilité paternelle sur son sauveur, Gorgias: premier pas sur la voie du retour à sa chère solitude . Les choses deviennent très claires au début de l'acte V. A ce moment, Cnémon , conséquent avec lui-même, refuse de participer au banquet des fiançailles de sa fille et de son beau - fils. Dans la Samienne , Moschion, bouleversé par les soupçons dont il a fait l'objet, dit qu'il va aller guerroyer en Asie , comme s'il n'était pas le premier responsable de ces soupçons. On a vraiment l'impression d'être revenu au début de la pièce, au moment où l'obstacle au bonheur de la jeune première apparaissait dans toute sa puissance. Simplement, à l'acte V , Ménandre peut appliquer le principe présenté par Aristote: « En général, ce n'est pas, semble-t-il, au raisonnement que cède la passion , c'est à la contrainte » (E.N. X 10 , 1179 b 28-29 ) . Gorgias essaie de raisonner Cnémon , et Déméas Moschion : en vain . Alors le personnage qui fait ainsi obstacle au bon déroulement des événements est remis dans le droit chemin par la force. La scène finale du Dyscolos a choqué quelques âmes sensibles : on y voit le cuisinier et l'esclave à qui Cnémon avait refusé son aide et qu'il avait même battus à l'acte III entreprendre de se venger, en profitant de ce que le vieillard est grabataire à la suite de son accident et tout seul puisqu'il a refusé d'aller au banquet qui réunit les familles : ils le sortent de chez lui , le font danser et l'entraînent à cette fête. Quant à Moschion , que le trop bon Déméas n'était pas arrivé à convaincre, il suffira que se montre son futur beau -père, menaçant, et l'accusant d'avoir suborné sa fille, pour que le jeune homme cesse immédiate ment de jouer sa comédie. ( b ) Si la définition générique de la vertu comme habitude est extrêmement importante chez Aristote et par suite chez Ménandre, il en va de même pour la définition spécifique de la vertu comme médiété . Pour Aristote, la vertu , et elle

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seule cette fois, est un milieu entre deux excès contraires, plus précisément un excès et un défaut. Soit l'exemple théorique qu’Aristote donne dans E.N. IV 12 , 1127 a 6-11 ) . Le philosophe parle ici de l'affabilité et de ses vices opposés. En fait, il ne donne aucun nom à une disposition proche de l'amitié , mais exempte de tout facteur sentimental. Il peut le faire facilement pour les vices opposés. Certains, dans leurs relations avec autrui, veulent lui éviter toute contrariété ; celui qui vise à faire plaisir sans poursuivre aucune autre fin , est un complaisant, õpeoxoç ( le Caractère V de Théophraste représente ce type ). Celui qui agit pour un avantage en argent ou autre est un flatteur, xóa ( voir aussi Théophraste, Char. II ) . D'autres au contraire font des difficultés en toute occasion : ils sont le type de l'homme bourru , dúoxolos , et chicanier. Voici maintenant l'application drama que fait Ménandre de cette analyse dans le Dyscolos. Le personnage du complaisant est incarné par le jeune Chéréas, ami que Sostrate est allé cher cher pour avoir de l'aide dans son entreprise amoureuse à l'acte I. Chéréas se montre effectivement plein d'empressement. Si la jeune fille avait été une courtisane , il l'aurait immédiatement enlevée pour l'offrir à son ami. Puisqu'il s'agit d'une jeune fille libre, il propose de faire l'enquête sur la famille. Le personnage du flatteur, c'est le cuisinier Sicon . Celui-ci se vante , à l'acte III , d'avoir un véritable « art » de la flatterie . L'homme affable, en tout cas prompt à établir des relations d'amitié, c'est Sostrate, on le voit en particulier dans ses relations avec Gorgias, symbole d'un monde de paysannerie pauvre si différent du sien . Quant au dyscolos, c'est évidemment Cnémon , et toute la pièce est écrite pour mettre en valeur ce caractère. En bon dramaturge, Ménandre fera se heurter, au centre de la pièce , les deux extrêmes, le flatteur et le bourru . Le Dyscolos n'est évidemment pas la seule comédie permettant de constater l'utilisation par Ménandre de structures conceptuelles d’Aristote dans la construction dramatique . Cette utilisation pourrait être vérifiée ailleurs , par exemple dans la Samienne. Dans E.N. II 7 , 1107 b 4-8 , Aristote précise que , pour ce qui est des plaisirs et des peines, la médiété est la modération (ow po oúvn ), l'excès le dérèglement (àxo ao a) et le défaut ce qu'il appellerait, faute de mieux , « insensibilité » (åvaloono a ) , car les vrais insensibles sont rares et il n'est pas de mot pour les désigner, ou peut-être aussi « vie ( trop) rangée » , xoquiÓTS (EN II 8 , 1109 a 16 ) . Dans la Samienne, le xóquioc est évidemment Moschion ; celui qui occupe tant bien que mal la position intermédiaire est son père adoptif Déméas qui fait aux plaisirs de la vie la part qui leur est due , en veillant qu'ils ne nuisent ni à lui -même ni à sa maison ; quant au personnage qui incarne , au moins de façon virtuelle, en tout cas très modérée, l’åxorao a , c'est l'ancienne courtisane Chrysis. (c ) Dans E.N.II 5 , 1106 b 35 , Aristote fait une citation de source inconnue disant : « L'honnêteté n'a qu'une seule forme, mais le vice en a de multiples . » Cela explique en partie que les comédies de Ménandre aient été si nombreuses: 105 ou 108 selon les sources. On peut à l'heure actuelle, par des moyens divers , connaître de façon assez sûre, le sujet moral d'une douzaine de ces pièces. Elles

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se laissent alors classer assez facilement grâce aux analyses de l'Éthique à Nicomaque. Le thème le mieux représenté est celui de l'argent. Il faut alors distinguer le défaut dans le fait de donner et l'excès dans le fait de prendre ( E.N. IV 3 , 1121 b 18-19 ) . L'excès dans le fait de prendre est illustré par le vieux Smicrinès du Bouclier, celui qui prétend épouser une jeune fille qui ne lui était pas destinée et cela pour mettre la main sur la richesse d'un butin qui ne lui était pas destinée non plus . La crainte de dépenser se traduit dans la comédie des Frères , 2° version ( les Adelphes de Térence) par le refus du personnage principal de voir et d'assumer les responsabilités nouvelles que lui confère sa nouvelle richesse ; dans l'Arbitrage par la crainte de l'appétit de jouissance qu'ont les jeunes, dans le Bourreau de soi-même ( adapté par Térence ) par la crainte des excès qui sont également le propre de la jeunesse . La possession de l'argent favorise d'autre part toutes sortes de défauts qui sont autant de naïvetés : ainsi , dans l’Andrienne ( adaptée par Térence ), le refus d'être contrarié, dans la Double Tromperie (adaptée par Plaute dans ses Bacchides ), le refus d'envisager qu'un fils puisse avoir en tête autre chose que l'augmentation du patrimoine, dans les Sicyoniens, l'idée que l'argent et la vertu sont synonymes. Ce sont là des passions de vieillards que l'âge renforce comme elle a renforcé la misanthropie de Cnémon, ennemi juré de ceux qui sont soumis à l'appât du gain , dans le Dyscolos. Parallèlement, chez les jeunes gens , Ménandre dénonce une brutalité qui consiste, par exemple, à ne voir que la valeur marchande des êtres et des choses et à exercer à partir de là un chantage sur autrui : tel est le soldat de l'Eunuque, adapté par Térence . Le soldat du Haï, Thrasonidès, exerce lui aussi un chantage, mais plus sentimental, en retournant sa violence contre lui-même et en menaçant de se suicider. Mais le thème que Ménandre développe avec prédilection à propos des jeunes gens , c'est le thème de l'honneur : les jeunes préfèrent le beau à l'intérêt, avait dit Aristote , dans Rhet . II 12 , 1389 a 32-33 . Cet honneur juvénile a les effets les plus opposés quand il est mal placé : il plonge le trop rangé Moschion de la Samienne dans l'embarras et l'hésitation ; il provoque chez le bouillant Polémon de la Tondue des actes précipités dont il ne tarde pas à se repentir. Toutes les conduites qui résultent de ces défauts ne présentent pas le même caractère de gravité. Aristote distingue les åtuxuara , « méprises » , ou actes contraires à nos calculs – ce sont les plus pardonnables - , les auapríuata , « fautes » , ou actes mal calculés mais non inspirés par le vice, et les adiunuara , « actes injustes » , tout ensemble calculés et vicieux ( Rhet . I 13 , 1374 b 4-10 ) . Il semble que la triade Bodmer de Ménandre, dans l'ordre Samienne, Dyscolos, Bouclier , ait été composée pour illustrer cette distinction : dans la Samienne, Moschion est bien victime d'une malchance quand son père découvre par hasard que le père de l'enfant, c'est lui , Moschion : le jeune homme déshonore Déméas sans l'avoir voulu ; dans le Dyscolos, Cnémon , qui hait le mal ( v . 388 ) , commet une erreur en croyant pouvoir vivre sans l'aide d'autrui ; dans le Bouclier, Smicrinès, que la cupidité conduit à des calculs sordides, est vraiment un méchant ( v . 120) et ses actes sont profondément injustes. Ces analyses pour

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raient être multipliées et encore nuancées. Ainsi, dans E.N. V 10, 1135 b 11-25 , Aristote distingue deux sortes d'ådxhuara : quand le coupable n'est pas méchant mais agit sous l'effet de la passion, en particulier de la colère - c'est, par exemple le cas , dans La tondue, du soldat Polémon quand il coupe la chevelure de sa maîtresse - ; quand le coupable est fondamentalement méchant comme l'est, nous venons de le voir, le Smicrinès du Bouclier. Certains ont vu une référence précise à la doctrine aristotélicienne dans 1 , fr. 688 , mais n'y sont distingués que l'ατύχημα et l' αδ κημα .. Dans tous les cas, la Fortune ( Túxn ) joue un grand rôle . Elle prononce en

particulier le prologue retardé du Bouclier et Ménandre lui fait dire qu'elle arbitre et organise tout ( v . 151-152 ) . Quand on connaît les ennuis que Théo phraste avait eus quelques années plus tôt , pour avoir dit que « c'est la Fortune et non la sagesse qui gouverne la vie » ( Cic . , Tusc. V 9 , 25 , témoigne aussi des vives réactions philosophiques que la formule a suscitées), on se dit que poète prend une sorte de revanche contre les ennemis de l'École . Mais les boulever sements politiques de l'époque pouvaient bien également frapper les esprits: Démétrius de Phalère a écrit sur le sujet de la Fortune tout un traité dont Polybe XXIX 21 nous a conservé un long extrait. (3 ) Politique La classe moyenne . Aristote, Pol. IV 11 , 4-15 , 1295 b 1 - 1296 a 21 , estime que les cités où il existe une classe moyenne nombreuse sont celles qui sont capables d'avoir une bonne constitution , aussi éloignée de la démocratie extrême que de l'oligarchie pure . Cette défense de la classe moyenne est sensible dans une comédie de Ménandre comme celle des Sicyoniens , v . 182 , où la classe moyenne ( ici , en l'occurrence, celle des paysans ) est dite « sauver la terre » . Mais le poète reprend ici une expression d’Euripide dans son Oreste , v . 920 . Tout aussi ambiguë est la façon dont la constitution de cette classe moyenne est inscrite dans la trame même des comédies de Ménandre : nombre d'entre elles se terminent en effet par le mariage d'un jeune homme riche et d'une jeune fille pauvre , mais le thème de Cendrillon est de tous les temps . Plus intéressant dans ces conditions et révélant mieux les intentions de l'École péripatéticienne est le second mariage qui est conclu à l'acte V du Dyscolos : il unit un jeune homme pauvre à une jeune fille riche ; en dépit du caractère comique attaché à une telle union , il suggère que la partie la plus pauvre de la classe moyenne doit refuser le vertige des profondeurs et comprendre la solidarité qui la lie à la classe dirigeante : l'ami de Ménandre , Démétrius de Phalère a très certainement rencontré ce problème lorsqu'il a pris le pouvoir en 317 et établi un régime censitaire plus large que ne l'avait fait auparavant Phocion. La meilleure constitution . Toute ambiguïté disparaît ici , Ménandre cessant de suivre Euripide ( et Platon ) pour présenter une position proche de celle d'Aristote. Dans son Oreste, le poète tragique avait montré une assemblée populaire menée par un démagogue qui flattait ses plus bas instincts et cette assemblée prenait des décisions tragiques : Euripide témoigne alors d'une période troublée où régnait une démocratie radicale et , encore au IVe siècle , Platon se fera l'écho de ces temps difficiles. Mais , à l'époque de Ménandre,

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c'est une démocratie modérée qui est en place et Aristote fait alors l'éloge des assemblées populaires où s'harmonisent de nombreuses et diverses compétences ( Pol . III 11 , 1-5 , 1281 a 39 - b 21 , et 15 , 8-10 , 1286 a 31 -b7 ) . L'assemblée populaire que décrit Ménandre à l'acte IV des Sicyoniens prendra ainsi les meilleures décisions. Éducation et politique. Chez Ménandre , comme chez Aristote ( cf. E.N. X 10 ), le thème de l'éducation est avant tout un thème politique. Deux comédies de Ménandre sont , sur ce point, sans équivoque : les Frères 2e version (comédie adaptée par Térence dans ses Adelphes) et la Samienne . Dans les Frères, le poète insiste sur l'idée de liberté : l'éducation doit être fondée sur le sens de l'honneur des jeunes gens bien nés ( Térence, Ad. v . 57-58 , cf. Aristote, E.N. X 10, 1179 b 7-9 ) , non sur la contrainte . Dans la Samienne, c'est le thème de l'égalité qui est au cæur du débat : cette égalité, si chère aux démocrates qui rêvent de l'Athènes d'autrefois, n'est , sur le plan familial ( cf. Aristote , E.N. VIII 16 ; 1163 b 17-22 , déjà cité ) comme sur le plan politique ( cf. Polit. V 1 , 3 , 1301 a 28-31 ) , qu'une fiction qui fait sourire le poète.

Épicure Le rapport entre Ménandre et Épicure est l'objet de nombreuses discussions. Pour des raisons de chronologie , il est impossible qu’Épicure ait pu avoir une quelconque influence sur la formation intellectuelle et morale de Ménandre . Le problème est en fait de savoir si le poète comique peut être considéré, à un stade ultérieur de sa carrière, comme un témoin de la place d'Épicure dans le mouve ment philosophique de son temps à Athènes ( comme il est le témoin de l'impression laissée par les cyniques Monimos ( --M 190 ), cf. D.L. VI 83 = 1 , fr. 193 , et Cratès [ C 205 ) , cf. D.L. VI 93 = 1 , fr. 114) , ou même s'il a considéré avec faveur les progrès de cette nouvelle école . Alciphron, dans ses Lettres fictives IV 19 , 14 = 1 , T 20 , 134 , fait de Ménandre un ami d'Épicure, mais il semble qu'il passe un peu vite du fait que les deux hommes sont stricte ment contemporains à la conclusion qu'ils étaient amis. De même la tradition manuscrite attribue au poète comique l'épigramme A. P. VII 72 ( 1 , fr. 1000) dans laquelle Épicure est loué pour avoir sauvé les Athéniens de l'hébétude : cette épigramme n'est sans doute rien d'autre qu'un exercice de maître d'école, dans la lignée du texte d'Alciphron. Dans le sens d'un rapport entre Ménandre et Épicure, on cite avant tout le v . 959 de l’Andrienne de Térence, emprunté, selon Donat , à l'Eunuque de Ménandre ( cf. 1 , fr. 146) : dans son commentaire , Donat ( transmettant sans doute l'opinion d'un grammairien antérieur) discerne égale ment un dóyua 'Entixoúpelov, le personnage , dans son bonheur d'avoir obtenu celle qu'il aime , s'estimant l'égal des dieux immortels et bienheureux ; mais avec ces aléas de la passion amoureuse , on est loin cependant de l'ataraxie prônée par le philosophe , et le thème est en fait un lieu commun de la lyrique amoureuse ; quant au bonheur même des dieux , qui sert ici de référence et auquel fait encore allusion l'esclave Onésime à l'acte V de l'Arbitrage, v . 1091, c'est également un lieu commun depuis Homère et il serait vain d'y voir un indice d'épicurisme.

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Une question toute différente est celle des références à Ménandre dans l’æuvre des épicuriens , en particulier Philodème. Dans le De bono rege ap. Hom ., PHerc. 1507, col . XXVIII , 15 , est citée une expression de Ménandre tirée de 1 , fr. 665, où est défendue l'idée de la lutte entre les esclaves nécessaire pour le bon déroulement de la vie domestique ; diviser pour régner est un principe connu depuis Homère (ainsi Il . XXI 389) , mais il n'est pas approuvé ici par Philodème. Dans le De ira, PHerc. 182, col . XXXVIII, 14, l'idée qu'il faut parfois se mettre en colère, illustrée par 1 , fr. 513 , est sans doute épicurienne, mais on la trouverait aussi bien chez Aristote, E.N. IV 11 , 1125 b 31-32 et 1126 a 6-8 . Enfin dans le De musica, PHerc. 1497 , col . XV , 11-13 , l'image de la musique allumant l'amour dans l'âme que l'on trouve dans 1 , fr. 178 de Ménandre, est assez frappante pour avoir été retenue par Philodème qui n'admet cependant pas que la musique puisse exercer une véritable influence dans ce domaine. On observera enfin que faire des références à Ménandre n'est pas le propre des épicuriens. Ainsi le poète satirique stoïcien Perse , Sat. V 161-167 , montre dans Chérestrate, le héros de l'Eunuque, le prototype du personnage qui est incapable , du fait de sa passion , de s'en tenir à une résolution raisonnable . Épictète IV 1 , 19-23 , illustre par Thrasonidès, le héros du Haï, l'esclavage auquel l'amour peut réduire l'homme le plus courageux. D. L. VII 130 témoigne aussi de l'importance de ce personnage comme exemplum dans la pensée stoïcienne. On n'en déduira évidemment pas que Ménandre fut, à un moment ou à un autre, stoïcien .

ALAIN BLANCHARD. 103 SENTENCES DE MÉNANDRE On désigne sous le nom de Monostiques de Ménandre (Menandri Sententiae ) une série complexe de recueils de sentences d'un seul vers ( le plus souvent en trimètres iambiques ) tirés de divers auteurs et classés par acrostiche alpha bétique. L'attribution au poète de la Nouvelle comédie , Ménandre, est concur rencée par d'autres intitulés ; elle n'est pas constante ni unique , mais reste majoritaire et elle est attestée au moins à partir du IIIe siècle apr . J.-C. ( P. Giss. Litt. 3. 4 ) . On peut considérer comme des témoins de la tradition des Monostiques une série de textes dont les dimensions et les caractéristiques sont très diverses ; la raison d'une telle diversité réside principalement dans la variation dans le nombre des sentences composant une même rédaction, et dans la liberté avec laquelle les rédactions pouvaient être enrichies de nouveaux vers . On constate qu'il est toujours possible d'incorporer, pour chacune des lettres de l'alphabet, un nombre très variable de monostiques et que la liberté avec laquelle les sentences sont en conséquence ajoutées ou enlevées est telle - à toutes les étapes de la tradition – qu'elle peut elle aussi être considérée comme une des caracté ristiques fondamentales de l'ouvrage, à partir du moment où il a été constitué . Une recherche portant sur la comparaison des témoignages antiques et médié vaux a montré qu'il est pratiquement impossible de remonter à un original, un archétype dont on ferait dépendre toute la tradition ultérieure . Cette conclusion a

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des conséquences considérables non seulement pour l'histoire du texte , mais aussi en ce qui concerne tous les problèmes relatifs à son édition . Nous avons affaire à une typologie de textes qu'il n'est pas possible d'identifier uniquement sur la base de leur contenu , mais qui est définie également par la présence simul tanée de certains éléments formels précis . Les caractéristiques indiquées au début se révèlent être, d'une rédaction à l'autre , de véritables paramètres per mettant d'identifier les Monostiques de Ménandre , et elles en soulignent de façon paradigmatique l'appartenance au genre des gnomologia . Cette précision s'impose également pour marquer une prise de distance sans équivoque à l'égard de la conception qui a inspiré toutes les éditions critiques parues jusqu'ici ( cf. au moins 1 A. Meineke ( édit.), Menandri. Ivõual Movóorixoi. Ex quinque codicibus mss. ductae, dans Fragmenta Comicorum Graecorum (ed . maior), IV , Berlin 1841 , p. 340-374 , et surtout 2 S. Jäkel (édit. ), Menandri Sententiae. Comparatio Menandri et Philistionis, coll. BT, Leipzig 1964, XXXV-230 p. ) . Se fondant sur une reconstruction plus utopiste qu’hypothétique de l'archétype perdu de toutes les rédactions qui nous sont connues (un ensemble gigantesque par rapport auquel les manuscrits réellement conservés ne seraient que des fragments ayant survécu, de véritables disjecta membra ), cette approche a fusionné tous les vers connus - tout en éliminant ceux qui sur la base du canon métrique classique ne pouvaient être attribués à l'antiquité – et elle a de fait reconstruit un texte qui n'est conservé par aucun témoin ; la disposition par acrostiche alphabétique a évidemment facilité l'élaboration et la reconstruction de cette nouvelle entité littéraire. En rétablissant l'origine typiquement gnomologique de cette typologie de textes , il est possible de dégager le terrain de préjugés inspirés par le purisme et de considérer comme superflue toute hypothèse “lachmanienne" de reconstruc tion de l'original perdu et de concentrer son attention moins sur la récupération de ce qui peut être sauvé et qui paraît " originel ”, que sur le mode de constitution et de développement continuel de ce genre de textes, où la variation et l'adap tation de ce qui est transmis d'une part et l'ajout constant de nouveaux maté riaux récupérés à partir d'autres sources ou créés ex novo sur la base des modèles établis d'autre part constituent des éléments fondamentaux dont il faut toujours tenir compte . L'analyse des divers témoignages met en lumière le fait que ces processus ont toujours été caractéristiques de l'histoire du texte et représentent par conséquent un acquis décisif sur le plan culturel : soit parce qu'ils mettent en lumière un mode de conservation et de transmission des textes radicalement différent de celui qui est habituel, soit parce qu'ils permettent de caractériser de fois en fois les diverses rédactions à partir du contexte qui a déterminé l'adjonction de nouveaux éléments . Pour ne prendre qu'un seul exemple , les Monostiques ont montré une énorme perméabilité aux influences chrétiennes depuis leur époque la plus ancienne. L'analyse approfondie du fonctionnement de ce mode de transmission se révèle par conséquent indispensable pour comprendre les textes, leur contenu et leur adaptation continuelle aux divers contextes de réception. Histoire du texte

La période ancienne La grande variété des formes et des contextes qui caractérise le texte des Monostiques peut déjà être aperçue à travers la typologie de leurs supports matériels . Rouleaux et codices de papyrus, ostraca, tablettes de cire , de bois, de

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calcaire , vastes collections , sélection d'un seul vers pour chaque lettre, mono stiques isolés : on peut dire qu'il n'existe pas de forme sous laquelle ce texte n'ait été conservé (pour une présentation complète des témoignages papyro logiques, cf. 3 C. Pernigotti « Raccolte e varietà redazionali nei papiri dei « Monostici di Menandro » , dans Papiri Filosofici. Miscellanea di Studi. III, coll. « Studi e Testi per il Corpus dei Papiri Filosofici » 10, Firenze 2000 , p . 171-228 , à compléter par 4 M. S. Funghi et M. C. Martinelli, « Ostraca letterari inediti della collezione Petrie » , ZPE 145 , 2003, p . 141-182 ) . On est en présence d'une grande variété de documents qui posent à chaque fois des problèmes divers: à côté de parcelles et de fragments irrémédiablement pauvres en infor mation , on trouve déjà dans les papyri des documents d'un caractère largement défini, tant sur le plan formel que sur le plan du contenu. Du point de vue strictement formel, on peut déjà dégager pour cette période diverses formes de recueils et on peut se représenter des formes embryonnaires de rédactions. La nécessité de les distinguer résulte du fait que tous les témoignages ne peuvent pas et ne doivent pas être considérés comme égaux : les attestations de sentences isolées n'ont pas le même poids que les collections plus amples, et notre attention doit se concentrer sur les témoignages qui permettent de reconstruire les grandes lignes de la transmission du texte, en mettant à part pour un moment tous ces multiples témoi gnages qui n'apparatiennent pas au type de rédaction dont nous avons la trace également pour l'époque médiévale: de ce point de vue également une des principales limites de la critique textuelle passée était de ne pas distinguer entre les témoignages , une opération qui est pourtant nécessaire et possible ( cf. 5 C. Pernigotti , « Appunti per una nuova edizione dei Monostici di Menandro », ns Papiri Filosofici. Miscellanea di Studi. I, coll . « Studi e Testi per il Corpus dei Papiri Filosofici » 8 , Firenze 1997 , p. 71-84) . Avec une longévité unique pour un gnomologium , les Sentences de Ménandre permettent de suivre le cours d'une tradition dont les premières traces remontent au moins au 11° / 1 ° siècle apr. J. -C.: c'est de cette époque que date un papyrus ( P. Giss . Litt. 3. 4 ) qui rapporte la partie finale d'un recueil (on lit dix sentences commençant par la lettre omega ), suivie par l'indication du titre : MENANAPOY | INIMAI. La comparaison avec des témoignages contemporains ( cf. P.Oxy. XLII 3006 , P. Mil. Vogl. 1241 verso) atteste de la circulation déjà bien établie de copies de librairie de ce genre de textes et pose en même temps certaines questions concernant la stabilité du texte . En fait, à côté de ce type de témoins qui montre que la forme rédactionnelle comportant un nombre variable de sentences pour chaque lettre de l'alphabet était déjà en circulation ( et était “ individualisée " avec un titre précis ), il existait, déjà à une époque antérieure et pendant une période pratiquement ininterrompue, des témoins d'une version ne comportant qu'une seule sentence par lettre : il s'agit de témoignages complexes difficiles à évaluer ( cf. par exemple P. Oxy. XLII 3004 , P. Vind. 19999 A , datables dans les deux cas du jer siècle) , du fait que dans une forme différente ils contiennent des vers gnomiques qui leur sont propres à côté des Monostiques véritables ( " reconnus ” comme tels en fonction de leur apparition ultérieure dans la tradition médiévale ) et du fait que d'autre part ils invitent à se demander comment considérer les collections breviores, surtout pour cette période chronologique ancienne. Le point est déjà crucial, car, en face d'un groupe de témoignages qui , pour le IIIe siècle , montre que s'affirme une typologie précise de textes, il faut comprendre comment on doit évaluer ces autres formes qui présentent quelque chose de commun et quelque chose de différent. C'est un

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problème qui revient souvent dans l'histoire du texte des Monostiques et qui est étroitement lié au problème général qui consiste à établir les éléments sur lesquels il faut se fonder pour affirmer qu'un témoin particulier appartient à une tradition aussi fugace. Il est clair que devant les premiers témoignages la question est encore plus délicate . Nous savons cependant que la forme présen tant une sentence par lettre ( avec 24 sentences par conséquent ) a connu une fortune constante au cours de toute la tradition, y compris au cours de la période médiévale , et que la diversité textuelle, la présence de phénomènes d'intru sion ” , d'ajouts ou de nouvelles créations de vers ou de groupes de vers , appar tient à la nature intrinsèque de cette tradition comme de toute tradition textuelle gnomologique. Étant donné ces prémisses, l'appartenance de ce petit groupe de papyri à la tradition des Monostiques semble vraisemblable, et sur la base de ces exemples on peut déjà faire un pas en avant , en cherchant à tirer d'un regard d'ensemble sur la tradition papyrologique certaines observations importantes sur le plan méthodologique, vu que déjà à cette hauteur on peut isoler des phéno mènes exemplaires, qui valent également dans l'examen de tous les témoignages ultérieurs, qu'ils soient ou non sur papyrus, qui de façons diverses présentent des problèmes analogues. Un seul témoin , dans toute la tradition papyrologique, a le titre, tous ont des séquences de sentences d'un vers disposés en acrostiche selon l'ordre alphabétique et tous se divisent en deux catégories , identifiées par le nombre de sentences par lettre, mais non par leur contenu : il est impossible par conséquent de reconnaître de façon cohérente ( sauf quelques rares exemples , voir Pernigotti 3 , p. 202-220 ) des convergences significatives de type textuel, et l'apport de nouveaux vers fourni par tout témoignage, bien que variable , est généralement déjà important. C'est là la différence la plus importante entre la tradition antique et la tradition médiévale. En vérité, si la phase la plus récente de la tradition, ainsi que nous le verrons, tend à se stabiliser dans des unités rédactionnelles définies, les “ classes” ( déjà isolées par 6 W. Meyer, « Die Urbinatische Sammlung von Spruchversen des Menander, Euripides und Anderer » , ABAW, 15. 2, 1880, p. 399-449, puis reprises par Jäkel 2 ), il est impossible d'en dégager de semblables pour la période antique. Entre les papyri (et entre les papyri et les manuscrits médiévaux ) on constate certes des superpositions, des coïncidences, surtout au niveau de sentences individuelles – et c'est d'ailleurs sur la base de ces correspondances que nous sommes en mesure de définir l'appartenance de tel témoin antique à cette tradition -, mais le type de succession des vers, les séquences longues à proprement parler et les assemblages textuels dans leur complexité n'offrent pas de points de contact avec la tradition ultérieure . En général , de la masse des témoins antiques des Sentences de Ménandre, nous pouvons tirer la confirmation de la popularité de ce texte et de son antiquité, et en même temps nous pouvons reconnaître la présence et la validité à cette époque chronologique ancienne des phénomènes caractéristiques d'innovation , d'altération et d'intervention sur le texte dont font montre les copistes qui ont accompagné encore pour longtemps l'histoire de ce texte : c'est ce qui explique principalement la fracture avec la tradition ultérieure, attestée avant toute autre chose par la grande quantité de vers présents dans les rédactions antiques et “ disparus ” à l'époque médiévale ( voir la liste dans Pernigotti 3 , p. 191-202 , et aussi dans Funghi-Martinelli 4 , p. 180-181). En ce qui concerne les contextes , une analyse plus minutieuse des témoi gnages matériels remet sérieusement en question un lieu commun traditionnel lement associé aux Sentences de Ménandre, à savoir le caractère exclusivement scholastique de ce texte ( cf. déjà quelques observations de 7 R. Cribiore,

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Writing, Teachers, and Students in Graeco -roman Egypt, coll . « American Studies in Papyrology » 36 , Atlanta 1996 , p . 45 n . 74 , et surtout l'étude de 8 M. S. Funghi « Tipologie delle raccolte papiracee dei Monostici : vecchie e nuove testimonianze » , dans 9 M.S. Funghi ( édit . ) , Aspetti di letteratura gnomica nel mondo antico , I , coll . « Studi dell'Accademia Toscana di Scienze e Lettere « la Colombaria » 218 , Firenze 2003, p. 3-19) . Nonobstant le fait que la typologie du texte – la succession de sentences de contenu moral dénuée de tout thème principal – suggère des modes d'emploi variés, mais qui privilégient le caractère instrumental et qui ont fait penser - et cela à juste titre – à une destination purement didactique, que ce soit pour l'apprentissage de concepts moraux valables en diverses circonstances, ou bien pour apprendre à bien écrire, afin de s'entraîner sur des séquences ininterrompues de textes brefs - les caractéristiques physiques elles-mêmes des documents imposent des distinctions importantes et ouvrent l'éventail des possibilités. Il existe en effet, et cela depuis la période la plus ancienne , des témoignages présentant des caractéristiques d'écriture , de mise en page et de présentation générale du texte qui ne correspondent pas aux traits typiques des produits destinées à l'école. A côté des mains inexpertes qui trahissent les débutants et des cahiers scolaires, nous avons de véritables livres, destinés à une forme de conservation et de transmission textuelle ; et l'instabilité constitutive qui , malgré ce fait, affecte la transmission des Monostiques n'est pas en contradiction avec l'existence de ce type de trans mission . Il ne faut pas oublier, quoi qu'il en soit, que les contextes d'utilisation restent nombreux, et surtout il ne faut pas penser que le fait qu'un texte ait connu une certaine forme de circulation typique du monde de la librairie lui assurait automatiquement une protection totale . C'est un fait que les Sentences de Ménandre doivent leur destinée très longue et, en un certain sens, unique à la spécificité de leur tradition, capable d'une certaine façon de se modifier et de s'adapter aux contextes les plus divers .

Les traductions antiques Trois traductions antiques des Sentences de Ménandre ont été conservées. Elles appartiennent à des contextes et à des périodes les plus divers les uns par rapport aux autres. Les restes de deux codices de papyrus (du Vi°-VIIe siècle ) ont transmis deux copies d'un recueil dans lequel le texte grec est suivi par une traduction copte vers par vers (pour le texte , voir l'editio princeps publiée par 10 D. Hagedorn et M. Weber, « Die griechisch -koptische Rezension der Menandersentenzen » , ZPE 3 , 1968 , p. 15-50 ; pour un examen du contexte culturel de production , voir 11 S. Pernigotti, « La redazione copta dei Monostici e il suo ambiente culturale » , dans Funghi 9 , p. 71-81 ) . L'importance de ce document est accrue par le fait qu'il contient cas rare pour un document antique - une longue séquence de sentences, une collection étendue ( même si elle n'est pas complète) qui embrasse plusieurs lettres de l'acrostiche alpha bétique ; c'est justement la possiblité de suivre le texte sur une séquence suffi samment longue qui a permis d'isoler certains phénomènes caractéristiques. L'élément le plus intéressant, du point de vue du contenu , est la présence d'un groupe bien nourri de sentences , par ailleurs non attestées , dédiées à un thème

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spécifique : l'apprentissage ( les ypáupata ). Il s'agit d'un cas exemplaire, car il nous met en contact encore une fois avec l'extrême perméabilité de ce genre de textes : n'importe quel rédacteur peut soumettre le matériel en sa possession à ses propres exigences, ajouter des thèmes qui lui sont particulièrement chers et créer des sentences exprès pour cette fin . La taille du contenu certifie qu'il a été conçu dans un contexte didactique et montre une fois de plus l'adaptabilité aux usages les plus disparates. Le monde copte connaissait et utilisait les Sentences de Ménandre, comme on le voit dans au moins deux autres cas (cf. O. Vind. K 674 et 0. Mon. Epiph. II 615 , provenant du monastère du mont Epiphanius), mais c'est en général le monde chrétien qui donnera d'autres preuves de sa connaissance, son absorption et son adaptation de ce texte. Il est significatif, tant pour la rédaction gréco - copte que pour les tablettes du mont Epiphanius, que les recueils respectifs commencent par des sentences tirées de l'Ancien Testament. C'est à une période ultérieure qu'appartiennent les témoignages directs de deux autres ouvrages de traduction : l’une en langue arabe , l'autre en vieux slavon ( pour la traduction arabe, cf. 12 M. Ullmann Die arabische Über lieferung der sogenannten Menandersentenzen , coll . « Abhandlungen für die Kunde des Morgenlandes » 24.1 , Wiesbaden 1961 ; 13 Id ., « Bemerkungen zu den arabischen Übersetzungen der Menandersentenzen » , Der Islam , 42 , 1965 66 , p . 79-88 , et 14 R. Führer, Zur arabischen Übersetzung der Menander sentenzen , coll . « Beiträge zur Altertumskunde» , 43 Stuttgart 1993 ; pour la version slave , voir 15 R. Führer, Zur slavischen Übersetzung der Menander sentenzen , coll . « Beiträge zur Klassischen Philologie » , 145 Königstein / Ts. 1982 , et surtout 16 M. Morani , La traduzione slava delle Gnomai di Menandro , Alessandria 1996 ) . Les traits caractéristiques de ces rédactions ( chacune de celles-ci étant transmise par un nombre appréciable de manuscrits) mettent en évidence une transformation importante par rapport aux collections transmises par les papyri : les reconstructions proposées par les spécialistes suggèrent l'existence de collections déjà considérables ( la version en vieux slavon contient 443 sentences ) , très semblables , dans leur forme, à celles qui sont conservées dans les manuscrits grecs de l'époque médiévale. En outre , les rédactions arabes ( l'entreprise de traduction remonterait au IXe siècle) et vieux slavon (dont la constitution originelle est située vers le XIe siècle ) se présentent souvent dans des séquences de sentences très similaires entre elles : il convient toutefois de souligner que de telles coïncidences ne permettent pas d'isoler un filon parti culier, quelque chose de comparable aux classes médiévales que nous aborde rons plus loin . Bien qu'il soit possible de dégager des regroupements signi ficatifs, nous sommes encore fort loin de la formation d'entités textuelles bien définies ( cf. 17 C. Pernigotti , « La tradizione manoscritta delle “ Menandri Sententiae” : linee generali» ,dans Funghi 9 , p. 123-124) . Un cas particulier est constitué par ce qu'on appelle le Ménandre syriaque : il s'agit d'un recueil de dits moralisants en syriaque introduits par la formule « Ménandre le sage a dit » . Mais il convient de s'affranchir immédiatement des équivoques possibles : cette collection n'a rien de commun avec les Monostiques . La critique la plus récente situe l'origine de cette collection dans l'environnement du judaïsme hellénistique, et, au-delà de vagues et prévisibles convergences de contenu entre ces dits ( formellement très différentes par rapport aux

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Monostiques ) et certains monostiques, l'intérêt principal réside peut-être dans la présence du nom de Ménandre – tout compte fait il est difficile de penser que la célébrité de ce sage qu'avait répandue la tradition gnomologique n'avait eu aucune influence. La constitution originale du texte est située entre la fin du lle et le début du IVe siècle apr. J.-C. , et à cette époque, comme nous l'avons vu , la tradition des Monostiques était déjà amplement diffusée (sur toute cette question , cf. 18 P. Bettiolo, « Dei casi della vita , della pietà e del buon nome . Intorno ai “ detti ” siriaci di Menandro » , dans Funghi 9, p. 83-103). Les manuscrits médiévaux Les Sentences de Ménandre ont connu , sous des titres variés et des formes textuelles diverses , une grande fortune également dans la tradition médiévale : les collections ont été transcrites dans des manuscrits de tout genre ( quelques exemples sont analysés par 19 R.M. Piccione « Forme di trasmissione della letteratura sentenziosa » , dans 20 M.S. Funghi ( édit . ) , Aspetti di letteratura gnomica nel mondo antico, II , coll . « Studi dell'Accademia Toscana di Scienze e Lettere « la Colombaria » 225 , Firenze 2004 , p . 403-441 ) , ou bien dans des formes soigneuses du point de vue graphique, avec des mesures spécifiques pour assurer la lisibilité – par exemple le fait de revenir à la ligne à la fin de chaque vers, ou le recours à des marques de division , ou l'utilisation d'une autre couleur pour les lettres initiales -, ou bien dans des mises en page négligées et hâtives , exploitant au maximum l'espace disponible , dans la simple intention de remplir des pages laissées vides : cela signifie que dans les manuscrits comme dans les papyri le texte des Monostiques n'a pas été toujours et exclusivement considéré comme un texte d'usage. Sur le plan textuel , par rapport à ce qui se passait dans la tradition antique , il est possible de dégager des lignes de direction légèrement plus stables et les classes définies par les savants du passé peuvent être sans aucun doute confirmées. Mais , ainsi qu'on l'a déjà rappelé , à l'intérieur de ces (cinq ) classes , fort diverses entre elles , on trouve de fois en fois des témoins particuliers qui offrent des sélections , des adaptations , des formes originales , qui reproduisent dans des formes encore plus surprenantes les phénomènes que nous avons observés pour la période antique . En définitive, nous possédons , surtout pour les trois premières classes , une série de manuscrits qui transmettent de vastes collections qui sont largement apparentées entre elles dans les sentences qu'elles transmettent , dans la succession des sentences et les leçons textuelles ; c'est précisément sur la base de ces témoins principaux que nous sommes en mesure d'établir l'existence de ces rédactions ou de ces classes de manuscrits : d'un autre côté , à l'intérieur de ces rédactions elles - mêmes , on peut isoler des témoins qui partagent le même ordre , le même nombre de sentences et les mêmes leçons d'une façon moins constante , et qui ne peuvent pour autant être définis comme de simples sélections , dès lors que souvent ils présentent des matériaux tout à fait nouveaux même si à première vue ce qui frappe le plus est la différence dans le nombre brut des sentences et le fait que cette différence ne peut être expliquée uniquement en termes de sélection. En général il s'agit de manuscrits qui ne sont pas antérieurs au XIIIe siècle ( avec uniquement deux exceptions pour la classe v : voir infra ), et les recueils complets transmettent un nombre de monostiques très variable, mais qui oscille d'une façon générale entre 300 et 500 unités .

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Classe I : c'est la classe qui regroupe le plus grand nombre de manuscrits : A, Vindob . theol. gr. 277 , qui s'interrompt à la lettre omicron et qui contient 374 sentences ; B, Paris. gr. 396 (privé de la section omega ) , avec 497 sentences (un témoin qui , cependant, contient déjà des traces de contamination avec la classe II ). A côté de ces manuscrits, on compte un groupe important de témoins qui , tout en étant étroitement apparentés avec la classe I , présentent également de forts signes d'autonomie : F (Laur. gr. 60 , 14), R ( Vatic. gr. 305), D ( Vind. phil. gr. 321 ) . Font toujours partie de cette lignée , mais de façon particulièrement singulière, les manuscrits C ( Vind . phil. gr. 173 ) e H ( Vatic. gr. 915 ). Le premier en réalité présente deux sélections distinctes de monostiques : la première appartenant à la première classe, la seconde avec de très lourdes infiltrations de la seconde . Le manuscrit du Vatican , en revanche, rassemble un nombre important de sentences de contenu chrétien. Classe II : ici le cadre est encore plus compliqué ; le témoin le plus ancien et le plus important est K ( Athen . Bibl. Nat. 1070) , dont on constate toutefois qu'il a emprunté à une tradition antique qui s'est épuisée avec lui . Des autres témoins de cette classe, P (Paris . gr. 1168 ) est peut-être le plus important et il entretient avec K un lien indiscutable sur le plan textuel , mais ce lien est déjà moins fort si l'on considère les successions de vers ( un phéno mène cependant important). A mi -chemin se situe V ( Vind. theol. gr. 128 ), tandis que le manuscrit le plus intéressant est certainement U ( Vat. Urb. gr. 95 ) , un témoin de la classe II qui porte cependant , à partir d'un certain point de sa collection, des traces évidentes d'un lourd travail de réélaboration et d'intégration de vers provenant clairement d'une origine byzantine ( cf. Meyer 6 ) . Une sélection de Monostiques dérivés de la classe II est également présente dans un manuscrit de la classe v : il s'agit de Coll. gr. rom . 3 (cf. Pernigotti 16, p. 127). Un cas à nouveau particulier est offert par la Classe III : face à deux témoins isolés (Wo, Wolf. Gud. gr. 49 et Wi , Vind. phil. gr. 167 ) , on remarque un groupe compact de manuscrits ( unis sous le signe i par Jäkel ; mais la liste a été accrue depuis l'édition Teubneriana, cf. Pernigotti 16, p . 129-134 ) qui , à côté de signes importants de parenté , montrent qu'ils suivent une voie tout à fait autonome : une conclusion récente et importante relative à ces témoins concerne l'identification certaine du responsable de leur constitution matérielle, et, selon toute probabilité , de leur rédaction et conception : Georges Hermonyme de Sparte, professeur de grec et diplomate entre la France et l'Italie au tournant du XVIe siècle. Celui -ci, d'une façon qui est typique de sa façon de travailler, a joint à certaines de ses copies une traduction latine. Il reste à parler des recueils ne regroupant qu'une sentence par lettre, qui , à l'instar des témoins correspondants transmis sur papyrus, partagent le nombre de 24 sentences seulement: Vatic. gr. 845 ( Vat ) et Ven. cl. XI , 24 ( Ven ) . Il est difficile d'établir avec précision s'ils ont puisé à une classe en particulier et laquelle : on constate dans les deux cas une sorte de convergence à l'égard de la première classe , mais cela pourrait être fortuit, étant donné le nombre plus important de monostiques que cette classe comporte . La même remarque vaut pour un cas intéressant de sélection thématique sur les femmes (explicitée dans le titre : ånd των κατά στοιχείον γνωμικών του μενάνδρου περί γυναικών ) transmis par le mansucrit Paris. gr. 1630 ( Par ). Les rédactions que nous avons vues jusqu'ici, à une échelle plus étendue et avec une répartition en classes, s'insèrent cependant dans le filon de la tradition antique : comme les témoins antiques , en effet, ce sont toutes des collections où est maintenue la règle de l'acrostiche alphabétique et le nombre irrégulier de sentences pour chaque lettre (avec une variation de un à un nombre indéfini). A côté de ces trois classes , il en existe deux autres , fort diverses entre elles, qui montrent une substantielle différence structurale et , surtout, des traces d'une intervention critique . Nous avons rencontré quelque chose de semblable dans la famille des manuscrits , attribués à Georges Hermonyme, mais dans les cas que nous allons voir le travail sur le texte se révèle beaucoup plus important.

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La classe v est représentée par un groupe de manuscrits qui transmettent un type de rédaction qui, tout en respectant la règle de l'acrostiche alphabétique, conserve un nombre constant de sentences pour chaque lettre, soit quatre sentences. Elles ont en conséquence également un nombre déterminé de sentences pour l'ensemble de la collection, soit 96 (accidents mécaniques mis à part, on trouve toujours les mêmes sentences dans le même ordre ). L'attribution à Ménandre n'apparaît dans aucun des titres variés qui nous sont connus : ce sont des titres génériques qui prévalent ou bien , en plus d'un cas, l'attribution est faite à Grégoire de Nazianze (un auteur qui fait montre en plusieurs passages d'une connaissance et d'une utilisation des Monostiques, cf. notamment 21 S. Azzarà, « Fonti e rielaborazione poetica nei « Carmina Moralia » di Gregorio di Nazianzo » , dans Funghi 9, p. 53-69) : cette rédaction a bénéficié d'une traduction arabe propre (cf. Ullmann 12 , p. 60-73 ), elle aussi transmise sous le nom de Grégoire. Nous ne disposons d'aucun élément positif permettant d'en établir l'origine et la datation (même si aucun trait typique, relatif à la métrique ou au contenu, trahissant habituellement une période récente, n'apparaît) et, malgré l'attribution à Grégoire de Nazianze , on ne trouve aucune caractéristique nettement définissable comme chrétienne (sauf peut-être le monostique 819 , propre à cette classe : pāç łoti Tợ vợ npòs DEÒV BAÉTELV đ€ , où le mot Osóv peut-être compris avec une initiale en majuscule ou en minuscule ). Il faut noter qu'entre les témoins de la classe v - qui a été considérablement élargie depuis Jäkel 2 (cf. Pernigotti 5 , p . 79 n . 19) – on trouve les deux plus anciens manuscrits de toute la tradition médiévale des Sentences de Ménandre : Patm . 263 et Paris. Coisl. 236, tous les deux du Xe siècle. Pour l'autre classe ( T ) nous disposons d'une plus grande quantité d'informations : elle est, selon toute probabilité, le fruit de la doctrine de Maxime Planude et figure, copiée de sa propre main, dans le manuscrit principal de l'Anthologie planudéenne (Marc. gr. 431 ) et dans la copie de ce manuscrit effectuée avant la révision finale ( Lond. Brit. Mus. Add. 16409 ) ; elle partage avec l'Anthologie le même mode et le même type d'organisation. Les sentences dans cette rédaction (qui a puisé non seulement dans toutes les rédactions médiévales, mais aussi dans des rameaux perdus de la tradition antique) ont été passées au crible , éliminées, corrigées et réorganisées – toujours en respectant l'acrostiche alphabétique - en des capita thématiques disposés à leur tour dans l'ordre alphabétique ; avec un choix que nous pouvons cette fois attribuer avec certitude à la compétence du savant, le nom de Ménandre est enlevé du titre et remplacé par une locution plus prudente qui fait appel à des « poètes divers » (Tvõuai μονόστιχοι εκ διαφόρων ποιητών κατά κεφάλαια συντεταγμέναι). Cette redaction est la plus répandue et la plus stable sur le plan textuel : les témoins manuscrits en sont très nombreux (un chiffre qui dépasse largement ceux indiqués par Jäkel – cf. Pernigotti 5, p. 81 n. 26, et Pernigotti 17, p. 135 n . 21 ) ; en outre, la première édition imprimée ( Firenze, Alopa 1494) et les toute premières éditions critiques des Monostiques se sont fondées sur elle. Jusqu'à la découverte, dans les premières années du XIXe siècle, des premiers manuscrits appartenant aux autres classes (cf. Pernigotti 17, p. 122 n . 3 ), la classe I fut l'unique collec tion connue et l'unique forme sous laquelle étaient connus les Monostiques de Ménandre. Dans les deux dernières classes que nous venons de voir il est possible d'identifier le cadre historique et les personnages impliqués , ce qui facilite la mise en place de la critique textuelle : pour ces classes il est nécessaire de procéder à une évaluation distincte et spécifique et il ne faut pas les mettre sur le même plan que les autres classes, soit dans leur ensemble , soit par rapport aux sentences individuelles. Cette précision s'avère nécessaire principalement du fait que la plus récente édition critique et les traductions en langues modernes ( cf. encore récemment 22 Proverbios Griegos. Menandro. Sentencias. Introd. trad. y notas de R. M. Mariño Sánchez- Elvira y F. García Romero, Madrid 1999, 23 V. Liapis, Mɛvávopov Ivõual uovóotiXol, Athènes 2002), tout en ayant marqué des progrès sur le plan de l'analyse des parallèles, n'ont en rien modifié le cadre interprétatif traditionnel, n'ont aucunement pris en compte les différences substantielles que nous venons d'illustrer et, y compris sur le plan strictement textuel , ont amalgamé indistinctement des témoignages tout à fait différents entre eux , sans donner à chaque

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témoignage le poids qu'il mérite. En présence d'un cadre d'interprétation aussi composite, il est clair que la tâche de situer et de caractériser une rédaction particulière devient beaucoup plus complexe que la simple annotation mécanique d'une leçon et de son témoin. Il existe des témoins qui sont le fruit d'un travail critique remarquable et des rédactions qui se présentent dans une forme impossible à déchiffrer : leur portée textuelle doit nécessairement être évaluée de façon différente, précisément parce qu'il s'agit d'une tradition qui ne suit pas les règles habituelles. Reconstruire les physionomies des rédacteurs et les contextes de production est indispensable pour mieux comprendre les mécanismes de circulation et pour apporter davan tage de lumière sur les cas où les conditions des témoignages en notre possession rendent impossible une évaluation précise. Distinguer et évaluer des conjectures, des corrections ou des ajouts faits par différents copistes-auteurs est une étape nécessaire et cela nécessite tout d'abord de ne pas considérer les variantes textuelles selon une logique traditionnelle : elles ne sont pas toutes sur le même plan. On devra donc, autant que possible , essayer de maintenir séparées les rédactions et leurs physionomies également sur le plan de l'ecdotique et cette exigence est nécessaire également pour mettre en évidence, comme il se doit, les cas où une intervention critique a assuré au texte une assise significativement beaucoup plus solide, comme dans les deux dernières classes examinées, v et r . Il y a là une distinction fonda mentale et trop souvent négligée par la critique antérieure : face à un monostique qui a connu une ample tradition et qui est même attesté dans la classe C, on constate que dans ce dernier cas on trouve un “ nettoyage ” et une correction par rapport à tous les autres témoignages et nous savons bien que cet état de fait résulte du travail de Planude, dont l'activité philologique se manifeste aussi dans certaines corrections survenues entre les deux copies qu'il a produites. Or, l'attitude typique de la critique textuelle antérieure aurait été (et ce fut souvent effecti vement le cas ) de mettre dans le texte (un texte , on le voit, reconstruit comme originel ) la version de r, en annulant toutes les autres versions et en opérant ainsi un renversement total de perspective. C'est la même logique qui amène l'éditeur, en présence d'un monostique pour lequel toute la tradition manuscrite présente une version erronée du point de vue de la métrique, à proposer ex silentio quelque correction " évidente ” (le texte de Jäkel 2, par exem ple, fourmille de telles corrections). Le point extrême est ensuite atteint par les coupes, par les véritables suppressions de monostiques considérés comme apocryphes ou comme des dou blons. C'est le purisme qui conduit à une telle logique, mais un purisme mal placé, dans la mesure où il considère toute la tradition des Monostiques comme s'il s'agissait d'une unité et, de façon absurde, comme s'il s'agissait du texte de Ménandre. Nous verrons de façon plus approfondie quelques exemples plus loin, mais nous avons cherché à suggérer immédiatement comment, à partir de ces fautes et de ces caractéristiques, nous sommes en mesure de dater et de situer ces textes dans leur contexte historique et culturel précis et comment la plus grande source d'information sur l'étude de la transmission et la critique du texte des Monostiques dérive notamment de la connaissance de ces phénomènes . La connaissance de l'histoire de la tradition du texte des Monostiques de Ménandre est donc décisive et nécessaire si l'on veut arriver à une évaluation correcte du texte, ou plutôt des textes que nous pouvons ranger sous le titre de Sentences de Ménandre.

Texte L'histoire des études a toujours utilisé les Sentences de Ménandre comme un réservoir de fragments antiques purs mêlés à des scories d'origine disparate , en travaillant uniquement à dégager le matériel authentique ; et si une telle attitude a exercé des répercussions graves sur le plan ecdotique ( avec l'amalgame des rédactions ), elle n'a fait que suivre le même chemin sur le plan de la critique du texte , entraînant des interventions d'assainissement et de correction du texte contraires à la logique historique . Dans la méthodologie différente qui est en projet, le spécialiste moderne des Sentences de Ménandre ne peut plus prendre la liberté de " nettoyer" les vers , de rétablir la “version originale ”, ou bien parce que dans nombre de cas il n'existe pas de version originale, ou bien parce que

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simplement tel n'est pas son objectif. La tâche de l'éditeur des Monostiques est de fournir un cadre interprétatif complet et digne de foi de la situation historique traditionnelle et textuelle, sans préjugés inspirés par le purisme et sans mystifi cations. L'exemple le plus clair de ce point de vue est donné par la métrique: le trimètre iambique classique est plus d'une fois trahi, bouleversé , mal interprété, et c'est là un phénomène que l'on constate déjà dans les papyri ( cf. 24 M.C. Martinelli, « Estrazione e rielaborazione dei Monostici . Problemi di testo e metrica » , dans Funghi 9 , p. 21-34) . Mais on ne peut pas établir le texte des Monostiques avec des cruces ou avec des corrections, car l'histoire de leur trans mission est également et principalement une histoire de diffusion capillaire et de circulation du texte dans des contextes où le sens métrique s'est rapidement perdu, et annuler ces différences veut dire supprimer de précieuses traces de leur histoire . La même chose vaut pour les innombrables vers qui constituent des " doublons" : je fais allusion ici à un phénomène typique des Monostiques, selon lequel très souvent on trouve , dans la même rédaction , des sentences pratique ment identiques entre elles . Très souvent seul le premier mot change ou pas beaucoup davantage. Il y a là aussi un phénomène important sur le plan de la critique historique: la nécessité de fournir des sentences pour chaque lettre de l'acrostiche alphabétique a souvent fait qu'on était confronté à une rareté objec tive des vers commençant par certaines lettres, ce qui a souvent conduit les différents rédacteurs à avoir recours à leur propre imagination pour créer ex novo de nouvelles sentences, en travaillant la plupart du temps à partir de celles qu'ils avaient sous la main. Identifier les cas de ce genre , dans une tradition dont il est extrêmement nécessaire de situer les témoins dans leur cadre historique approprié, est une opportunité qu'il ne faut pas laisser passer et c'est pour cette raison qu'on ne peut plus accepter le choix critique des éditeurs du passé qui ont éliminé de tels doublons sur la foi d'un improbable souci d'éviter toute répéti tion. On ne peut finalement parler du contenu qu'à condition de garder présente à l'esprit la multiplicité des contenants : nous devons par la force des choses nous limiter à des lignes générales et nous devons nous rappeler que le principe fondamental de l'histoire de ce texte est que chaque copiste était potentiellement un rédacteur et que , par conséquent , chaque rédaction pouvait suivre des procé dés propres et des choix textuels originaux (de même qu'en ce qui concernait le contenu ) : on gardera toujours en mémoire le cas exemplaire du groupe de sentences thématiques " sur les ypápuata transmis seulement par la rédaction gréco -copte. L'attribution à Ménandre n'est évidemment que le résultat de l'énorme célébrité et de la diffusion du nom de Ménandre dans le domaine gnomologique, mais on n'a sous son nom qu'environ 80 sentences dispersées entre les papyri, les traductions antiques et les rédactions médiévales . Parmi les autres auteurs , le plus représenté est encore une fois – pour la tradition gnomologique - Euripide, mais il y a également des sentences de Sophocle et d'Eschyle ; suivent d'autres poètes de la Nouvelle comédie . Cette sélection initiale d'auteurs a été déterminée par leur utilisation du trimètre iambique et, sans vouloir aucunement reconstituer une " forme originelle " , il est clair que c'est justement le choix de ce

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vers qui explique la prépondérance des vers tirés de la tragédie et de la comédie et inversement. Les papyri ont restitué d'autres gnomologia tragiques ou comi ques fort anciens ( cf. 25 C. Pernigotti, « Osservazioni sul rapporto fra tradizione gnomologica e “ Menandri Sententiae" » , dans Funghi 9, p . 187-202 ) , et de façon générale il n'y a pas lieu de s'étonner d'un tel recours à ce type de répertoire. Il est davantage significatif qu'un des traits typiques des Sentences de Ménandre est le fait que ce patrimoine soit devenu exclusif et surtout que la dimension des excerpta soit devenue une et constante : le vers unique , précisément le mono stique . A un certain moment (lorsque la mesure d'un seul vers et la forme de l'acrostiche alphabétique furent devenues des règles fixes), s'ajouta la nécessité d'enrichir le patrimoine connu ou bien de combler des lacunes, ou bien dans une perspective de compilation , ou bien pour compléter le matériel transmis par des contenus chaque fois davantage appropriés. C'est ici qu'intervient le processus d'adaptation ultérieur qui entraîne les phénomènes que nous avons déjà vus amplement d'ajout, de modification, de réécriture et de complément: ce n'est pas uniquement le contenu qu'il fallait modifier, mais également la forme, et c'est justement cette modification de la forme que manifestent les mains plus récentes, à travers des erreurs métriques ou des interventions ( plus ou moins maladroites) de réduction à un vers unique de sentences plus amples ou d'élar gissement à la mesure standard de dictons très brefs ( dans plusieurs cas des dits des Sept Sages ont été élargis à la longueur du monostique ; le même processus se rencontre pour les proverbes, cf. 26 R. Tosi, « Tradizione dei « Monostici » e tradizione paremiografica » , dans Funghi 20 , p. 49-60 ). De ce point de vue l'indicateur le plus évident est toujours l'erreur métrique, même si à partir d'un certain moment on devrait parler directement d'une nouvelle sensibilité et si le dodécasyllabe byzantin a fini par prendre toujours plus d'espace sur le trimètre iambique. Mais ces vers aussi font partie de l'histoire du texte des Monostiques, et à ce titre ils doivent être pris en compte , tout comme les ajouts intervenus dans les papyri et répondant déjà à des conceptions métriques qui n'étaient plus celles de l'époque classique. En un mot, isoler des vers tragiques et comiques dans les Monostiques est possible, mais ce n'est qu'une des nombreuses opéra tions qu'il est possible de faire sur ce texte . Thèmes et utilisations des collections Le nombre des thèmes traités reste caractéristique de la gnomologie grecque : les dieux ( puis Dieu) , la fortune , la vie , la richesse, la pauvreté, l'esclavage, les femmes, etc. Le grille thématique est donc celle qui est habituelle, même si , au cours du temps elle a fait l'objet d'adaptations lourdes et spécifiques, parfois de façon anachronique par rapport au système de valeurs de la Grèce classique: une fois de plus, un examen attentif des caractéristiques des témoins d'une même sentence peut aider à définir ses traits spécifiques et expliquer les particularités de son contenu . Il faut d'autre part noter, d'un point de vue formel, que la structure type des Sentences de Ménandre relègue de facto les contenus au second plan , alors que la confrontation avec la gnomologie contemporaine et ultérieure met en évidence une direction diamétralement opposée : on constate qu'est déjà amplement diffusé , à une époque bien antérieure aux premiers

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témoins des Monostiques et encore bien après, le type du gnomologium organisé par capita thématiques, qui explicitent dans des titres du type nep + le sujet abordé les thèmes de fois en fois traités, en les disposant souvent sous forme d'antithèses. La forme standard des Monostiques, avec son recours à l'acrostiche alphabétique comme unique principe d'organisation met au second plan l'intérêt pour les thèmes et ce fait aussi devrait être un facteur à prendre en considération dans l'analyse définitive des caractères formels et de l'utilisation de ce gnomo logium si atypique et si populaire. Le problème de l'utilisation de ces recueils reste précisément le point le plus vague dans toute cette question : comme on l'a dit , l'idée traditionnelle d'une destination scolaire exclusive doit être revue et redimensionnée, même s'il est clair que l'école est un des lieux de principale diffusion de ces collections . Comme tous les gnomologia , il est plus que proba ble que les Monostiques ont servi de collecteur de matériaux utiles à différentes fins, principalement pour les rhéteurs et les grammairiens, mais il est clair que la forme présente des limitations objectives. Cette limitation se dresse manifeste ment devant tout type d'utilisation ( excepté peut- être l'utilisation comme exercice d'écriture, où savoir ce que l'on copie n'a pas autant d'importance ): quiconque lit à la suite une cuvre de ce genre doit renoncer à un quelconque fil logique, étant donné le caractère aléatoire que présente la succession des vers et des thèmes. Cette limitation conduit à une impasse inévitable dans l'interprétation du texte et dans la recherche concernant son contexte d'utilisation. En ce sens la rédaction planudéenne , avec son recours à l'organisation thématique , avait déjà mis le problème en évidence, cherchant à sa façon à le résoudre et montrant par là probablement qu'elle avait ressenti en face de cette forme antique de gnomo logium le même embarras et la même difficulté de compréhension que nous ressentons aujourd'hui. Témoignages antiques Il n'y a que deux passages où les Monostiques en tant que texte sont cités et il s'agit de passages très tardifs. ( 1 ) Dans les duia al elç 'ApBóvlov de Doxopatros ( XIe siècle , cf. C. Walz, Rhetores Graeci, II , Paris 1835 (réimpr. anastatique Osnabrück 1968 , p . 294 , li . 14) deux monostiques (portant les numéros 10 et 49 dans Jäkel 2 ) sont cités avec la formule : έν μονοστ χοις Μενάνδρου. ( 2 ) Au milieu d'une série de vers satiriques de Jean Catrari à Néophytos Prodromenos, deux érudits dų XIVe siècle , connus également comme copistes ( = PCG VI 2 , Men . test. 164 K.-A. ) on lit : oủx ’Aplotopávny oldev, I oủx ημέρας Ησιόδου ,Γουδέ τήν θεογον αν , Γού τα γνωμικά Μενάνδρου ,Γουδε Πνδαρον ενέγνω,Γούχ' ώμ λησεν Ομήρω. Restent naturellement les innombrables correspondances textuelles et les parallèles exacts avec des Monostiques qui se retrouvent dans une énorme quantité de textes ( parmi lesquels se détachent par leur importance les contacts que l'on peut repérer avec la section des préceptes contenus dans la version W de la Vita Aesopi ; cf. en dernier lieu 27 M.J. Luzzatto , « Sentenze di Menandro

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e “ Vita Aesopi” » , dans Funghi 9 , p . 35-52 ) , mais ce n'est que lorsque la localisation chronologique et textuelle des différentes rédactions des Monosti ques aura été clarifiée qu'il sera possible de savoir, de fois en fois, qui a servi de source et qui a puisé . Pour le cas particulier du rapport avec les gnomologia antiques, où valent cependant les observations déjà faites, cf. Pernigotti 23.

Comparatio Menandri et Philistionis Souvent rapprochée des Monostiques, la Comparatio est une compilation gnomologique très particulière ( pour le texte , de préférence à Jäkel 2 , on se référera toujours à 28 W. Studemund , Index Lectionum in Universitate litte rarum vratislavensi per aestatem anni 1887 a die 16 Aprilis habendarum . Praemissa est Menandri et Philistionis Comparatio cum appendicibus edita a Guilelmo Studemund, et 29 W. Meyer, « Die athenische Spruchrede des Menan der und Philistion » , ABAW, 19 , 1892 , p . 228-295 ) , qui utilise une structure de dialogue amébée entre deux personnages qui débattent sur des thèmes caracté ristiques des sentences en alternant des yvõual sous forme de distiques : la structure dialogique n'est qu'un prétexte et dans la plus grande partie des textes n'est pas en réalité respectée. Dans ce cas aussi une évaluation d'ensemble ne peut être faite à cause de la multiplicité des rédactions existantes : on en a jusqu'ici isolé quatre , extrêmement différentes entre elles dans la forme, apparentées seulement par quelques superpositions textuelles : elles sont certes significatives, mais non pas au point de permettre de parler du même texte. Ici aussi il s'agit davantage d'une forme qui s'est transmise dans le temps en modi fiant de fois en fois les contenus et les sources et pour la Comparatio également il est illusoire de penser reconstruire un " original ”. Le point extrême de ce processus est représenté par l'une de ces rédactions ( Comparatio II ) , dans laquelle la structure dialogique dans de longues sections est remplacée par une division en capita typique de tant de gnomologia : de longs excerpta , souvent également présents chez Stobée , sont distribués entre les personnages et intro duits par des titres. De la même façon , d'autres rédactions, tout en maintenant la forme dialogique, puisent à des sources totalement différentes : la rédaction qui s'approche le plus , à cause de parallèles textuels, des Monostiques de Ménandre est la Comparatio I ( cf. 30 C. Pernigotti , « La “ Comparatio Menandri et Philistionis ” : tradizione del testo e morfologie testuali » , dans Funghi 20 , p . 25 48 ) . Notice adaptée de l'italien par Richard Goulet . CARLO PERNIGOTTI. 104 MÉNANDRE dit DRUMOS ( « Bois de chêne » ) RE 17

Iva

Ménandre apparaît à côté d'Hégésias de Sinope ( » H 19) et de Philiscos d'Égine dans une liste de trois disciples de Diogène le Chien (** D 147 ) que Diogène Laërce insère entre sa Vie d'Onésicrite ( > 0 23 ) et sa Vie de Cratès [ PC 205 ] ( D.L. VI 84 = SSR V E ) . Il est présenté comme « admirateur d'Homère » (Oavuaoins ' Ouńpov ). On peut supposer que son surnom faisait allusion à sa force physique, mais ce n'est qu'une hypothèse. MARIE-ODILE GOULET -CAZÉ .

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Seconde moitié III Éditions et traductions. 1 C. Walz , Rhetores Graeci... Emendatiores et auctiores edidit ... C.W. , vol . IX , Stuttgart / Tübingen 1836 , XXVII - 782 p .; 2 L. Spengel, Rhetores Graeci. Ex recognitione L.S. , vol . III , Leipzig 1856 , XXXVI -539 p . ; 3 C. Bursian , « Der Rhetor Menandros und seine Schriften » , ABAW 16, 3 , 1882, p. 1-152 ; 4 J. Soffel, Die Regeln Menanders für die Leichen rede. In ihrer Tradition dargestellt, herausgegeben, übersetzt und kommentiert, coll . « Beiträge zur klassischen Philologie » 57 , Meisenheim am Glan 1974, V 295 p . ; 5 D.A. Russell et N.G. Wilson , Menander Rhetor . Edited with translation and commentary , Oxford 1981 , XLVII - 391 p. ; 6 F. Romero Cruz, Menandro, Sobre los géneros epidícticos. Introducción , traducción y notas, coll. « Acta Salmanticensia , Estudios filológicos» 218 , Salamanca 1989 , 95 p .; 7 F. Gascó , M. García García et J. Gutiérrez Calderón , Menandro el Rétor, Dos

tratados de retórica epidíctica. Introducción de F.G. Traduccion y notas de M.G. G. y J. G. C. , coll . « Biblioteca clásica Gredos » 225 , Madrid 1996, 280 p. Études. 8 H. Caffiaux, De l'oraison funèbre dans la Grèce païenne, Valenciennes 1864, VI -288 p. ; 9 W. Nitsche , Der Rhetor Menandros und die Scholien zu Demosthenes, coll. « Wissenschaftliche Beilage zum Programm des Leibniz -Gymnasiums zu Berlin , Ostern 1883 , Programm No. 63 » , Berlin 1883 , 26 p . ; 10 U. von Wilamowitz -Möllendorff, c.r. de Bursian 3, DLZ 4, 1883 , col. 408-409, repris dans Id. , Kleine Schriften, vol. III , Berlin 1969, p. 51-52 ; 11 H. Rabe, « De Christophori commentario in Hermogenis librum nepi OtáceWV » , RHM 50, 1895 , p. 241-249 ; 12 L. Schilling, « Quaestiones rhetoricae selectae » , JKPh , Suppl. 28 , 1903, p. 663-778 ; 13 W. Schmid et 0. Stählin, Wilhelm von Christ's Geschichte der griechischen Literatur. Sechste Auflage umgearbeitet von W.S. und O.S. Zweiter Teil : Die Nach klassische Periode der griechischen Literatur, coll . « Handbuch der Altertumswissenschaft » VII 2, 1-2 , 2 vol . , München 1920-1924, XIX - 1582 p. ; 14 L. Radermacher, art. « Menandros » 16, RE XV 1 , 1931 , col . 762-764 ; 15 F. W. Lenz, Aristeidesstudien , coll . « Deutsche Akademie der Wissenschaften, Schriften der Sektion für Altertumswissenschaft » 40, Berlin 1964 , VI -302 p.; 16 L. Robert, « Les inscriptions » , dans Laodicée du Lycos : le Nymphée. Campagnes 1961-1963, Québec /Paris 1969, p. 247-389 ; 17 H. Maehler, « Menander Rhetor and Alexander Claudius in a papyrus letter » , GRBS 15 , 1974 , p. 305-311 ; 18 L. Pernot, « Topique et topographie : l'espace dans la rhétorique épidictique grecque à l'époque impériale » , dans C. Jacob et F. Lestringant ( édit.), Arts et légendes d'espaces. Figures du voyage et rhétoriques du monde, Paris 1981 , p. 99-109 ; 19 J. Modrzejewski, « Ménandre de Laodicée et l'Édit de Caracalla » , dans J. Modrzejewski et D. Liebs (édit. ) , Symposium 1977. Vorträge zur griechischen und hellenistischen Rechtsgeschichte ( Chantilly, 1. -4. Juni 1977), coll . « Akten der Gesellschaft für griechische und hellenistische Rechtsgeschichte » 3 , Köln 1982 , p. 335-363 , art. repris dans J. Mélèze -Modrzejewski, Droit impérial et traditions locales dansl'Égypte romaine, coll . « Collected studies series » 321 , Aldershot 1990, nº XII ; 20 L. Pernot, « Les topoi de l'éloge chez Ménandros le Rhéteur » , REG 99, 1986, p. 33-53 ; 21 R. Velardi , « Le origini dell'inno in prosa tra V e IV secolo a . C. Menandro Retore e Platone », dans L'inno tra rituale e letteratura nel mondo antico. Atti di un colloquio, Napoli 21-24 ottobre 1991 = AION ( filol) 13 , 1991 , p. 205-231 ; 22 L. Pernot, La rhétorique de l'éloge dans le monde gréco -romain, coll . « Études Augustiniennes, Série Antiquité » 137 138 , 2 vol . , Paris 1993 , 881 p. ; 23 J. M. Bremer, « Menander Rhetor on hymns » , dans J. G. G. Abbenes, S. R. Slings et I. Sluiter (édit. ), Greek literary theory after Aristotle. A collection of papers in honour of D. M. Schenkeveld. Amsterdam 1995 , p . 259-274 ; 24 C. Harrauer, « Michael Marullus, platonische Götterhymnen und die Vorsokratik » , WS 109, 1996, p. 243 255 ; 25 L. Pernot, Éloges grecs de Rome. Discours traduits et commentés, Paris 1997 , 201 p.; 26 F. Gascó, « Menander Rhetor and the works attributed to him » , ANRW II 34, 4 , 1998 , p. 3110-3146 ; 27 L. Pernot, La rhétorique dans l'Antiquité, Paris 2000 , 351 p .; trad . angl . : L. Pernot, Rhetoric in Antiquity. Transl . by W. E. Higgins, Washington D. C. , 2005, XIV - 269

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p . ; 28 F.-G. Hernández Muñoz, « L’Angelic . 54 et autres recentiores de Ménandros le Rhéteur» , RHM 144, 2001, p . 186-203 ; 29 B. Puech , Orateurs et sophistes grecs sous l'Empire romain . Les inscriptions, coll . « Textes et traditions » 4, Paris 2002; 30 P. Harsting, « The Discovery of Late-Classical Epideictic Theory in the Italian Renaissance » , dans P. Harsting et S. Ekman (édit. ), Ten Nordic Studies in the History of Rhetoric, Copenhague 2002, p. 39-53 ; 31 L. Pernot, « Grégoire de Nazianze ( or. XXXIII , 6-7 ) et l'éloge rhétorique des cités » , Euphrosyne 31 , 2003, p. 271-286, art. repris en italien sous le titre « Gregorio di Nazianzo (or . 33, 6-7) e l'elogio retorico delle città » , dans M. S. Celentano (édit. ) , Ars / Techne . Il manuale tecnico nelle civiltà greca e romana , Alessandria 2003, p. 79-97 ; 32 M. Heath , Menander : A Rhetor in Context, Oxford 2004, XVII-374 p. Ménandros le Rhéteur : l'homme et l'æuvre. La Souda (M 590 ) consacre une brève notice à Ménandros de Laodicée du Lycos , sophiste , auteur de commentaires sur l'Art rhétorique d'Hermogène et sur les Exercices prépara toires de Minucianus ainsi que d'autres ouvrages . Le nom Ménandros est bien attesté à Laodicée du Lycos à l'époque impériale (Robert 16 , p. 280, 302, 327 328) , sans qu'aucune attestation coïncide avec le présent personnage. Les indi cations de la Souda sont recoupées par trois testimonia ou séries de testimonia transmis par ailleurs : ( 1 ) Dans les scholies à Démosthène, à Aelius Aristide et à Hermogène, il est fait plusieurs fois référence à un auteur nommé Ménandros, qui avait commenté Demosthène et Aristide. Voir Walz 1 , p. XIV- XV ; Bursian 3, p. 15-16 ; Nitsche 9 ; Lenz 15 , p. 79-86 . Les traces du commentaire de Ménandros sur Hermogène sont plus ténues et peuvent parfois se confondre avec celles du commentaire sur Démosthène (parce qu'Hermogène analyse des passages de Démosthène ) , mais elles existent: voir en particulier Rabe 11 , p. 247 ; Schilling 12, p. 744-747. ( 2 ) Un papyrus daté par l'éditeur, d'après l'écriture, de la seconde moitié du ve siècle ( PBerol. 21849) mentionne « l'Art rhétorique de Ménandros » (Mɛváv

dpov téxunv) ( Maehler 17 ) . L'interprétation de téxvnv par Art rhétorique dans ce papyrus est justifiée par l'usage, ce sens de téxvn étant fréquent, et par le contexte, qui oriente vers la rhétorique; car sur le même document sont cités un commentaire de Démosthène par Alexandros Claudios et des « Méthodes » et « Éloges » non précisés. (3 ) Deux traités conservés, portant sur les discours épidictiques, sont attribués par les manuscrits à Ménandros le Rhéteur ( voir ci-après). Il est raisonnable de supposer - hypothèse à peu près unanimement admise que ces différentes indications se réfèrent à un même personnage, qui fut donc un théoricien de la rhétorique , auteur de traités et de commentaires et jouissant d'une certaine notoriété . Le fait que les sources l'appellent tantôt « sophiste » (ooplotńs), tantôt « rhéteur » (öntwp ) , ne constitue pas une objection , car ces mots ne sont pas exclusifs l'un de l'autre et représentent deux points de vue ou deux manières de dire pouvant s'appliquer à une seule et même personne (pour d'autres exemples voir Puech 29 , p. 12-17 ) . Les testimonia suggèrent une datation postérieure à la fin du II ou au début du IIIe siècle ( date d'Hermogène et de Minucianus l'Ancien , en admettant que le passage de la Souda vise Minu cianus l’Ancien ( Schmid 13 , p . 937 ) plutôt que Minucianus le Jeune (Bursian 3, p . 12 n . 1 ; Soffel 4, p. 90 ]) et antérieure à la seconde moitié du Ve siècle (date de

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PBerol. 21849 ). Si l'attribution des traités sur les discours épidictiques ( ou de l'un d'entre eux ) est correcte, cette estimation large peut être précisée et rame née à la seconde moitié du IIIe siècle , date à laquelle lesdits traités appartiennent probablement, l'un comme l'autre . En l'état actuel de la recherche, il n'y a pas lieu d'identifier Ménandros le Rhéteur avec les ontopeç T. Flavius Ménandros connus par des inscriptions d'Éphèse ( Puech 29, n ° 170-172 ). Les fragments et témoignages se référant à Ménandros et l'activité de celui-ci comme théoricien et commentateur sont examinés en détail par Heath 32. Les traités sur les discours épidictiques. Les seules æuvres conservées sous le nom de Ménandros le Rhéteur sont deux traités consacrés aux discours épidictiques. Dans l'Antiquité, à partir d'Aristote, on a dénommé « épidictiques » les discours rhétoriques ayant pour sujet l'éloge ou le blâme. Cette forme d'éloquence a connu un grand développement dans le monde grec à l'époque de l'Empire romain . En raison de leur richesse et de leur précision, les traités attri bués à Ménandros constituent la meilleure source théorique conservée sur la question (voir Pernot 22 ; 25 ; 27 , p. 230-238 ). Ils ont connu une grande célébrité à la Renaissance (Harsting 30 , article contenant, p. 51-52 , la liste des publica tions de l'auteur sur la fortune de Ménandros aux XVe-XVIe siècles ). L'état du texte dans les manuscrits est confus ; en outre , la tradition est complexe, en raison d'importantes divergences de contenu et d’acolouthie entre les témoins, et n'a pas encore été complètement débrouillée. Des recherches sur ce sujet sont conduites par F.-G. Hernández Muñoz (voir Hernández Muñoz 28 , avec récapitulation, p. 187 , n . 4, des études précédentes publiées par l'auteur ). On admet depuis le XIX ° siècle, avec vraisemblance, que l'on a affaire à deux traités distincts, qui envisagent le même sujet sous deux angles différents, et que s'y trouve inséré de surcroît un troisième texte, les extraits d'Alexandros fils de Nouménios ( MA 109 ) . Dans la première famille de manuscrits , ou au moins dans le manuscrit P ( Parisinus gr. 1741 ) , les deux traités sont différenciés par leur titre : Division des discours épidictiques (Ala peolç TWV ÉTLÔELXTIXWV) pour le premier, Sur les discours épidictiques ( Ilepi ÉTTLOEIXTIXWv) pour le second ( d'après Bursian 3 , p. 5-6 ; Soffel 4, p. 106 ; Russell-Wilson 5 , p. 3 ) . L'usage actuel est de désigner les traités par des chiffres romains ( respectivement I et II ). On renvoie à la pagination et à la numérotation des lignes de l'édition Spengel 2 (p. 329-446 ), qui sont rappelées dans les éditions postérieures. L'édition de référence est aujourd'hui celle de Russell-Wilson 5, qui comporte une traduction anglaise. Il existe aussi deux traductions espagnoles complètes (Romero Cruz 6 ; García García - Gutiérrez Calderón 7) . Le premier traité a été traduit en français par Modrzejewski 19, p. 352-361 . Les chapitres sur les discours funèbres ( II , 413-414 , 418-422, 434-437 ) ont fait l'objet d'une vieille traduction française ( Caffiaux 8 , p. 270-278) et d'une édition avec traduction et commentaire en allemand ( Soffel 4) . Le premier traité étudie la matière épidictique en fonction de ses objets : il se compose d'un livre consacré à l'éloge des dieux , ou « hymne » (Űuvoç), et de deux livres consacrés à l'éloge des cités ; la suite, qui est perdue, devait aborder

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l'éloge des êtres vivants et des objets inanimés ( d'après l'annonce de I , 332 , 8 32 ). Le second traité est organisé en fonction des types de discours et envisage successivement : le « discours en l'honneur de l'empereur » (Baolixos Nóyoc ), le « discours d'arrivée » (Éribampos ), la « causerie » (Radiá ), la « causerie de bon voyage » (ntponeuntixn lahiá ) , l’« épithalame» (Émidadáulos ) , le « discours nuptial » (xateUvAOTIXÓC), le « discours d'anniversaire » (yeveOdia nós ) , la « consolation » ( ntapauvontixós), l' « adresse » (npoopwvNTIXÓC), l ' « oraison funèbre » (ÉALTÁPloc) , le « discours de couronnement » (otepavw tixóc) , le « discours d'ambassade » (npeobeUTIXÓC), le « discours d’invitation » (xAntixóc ), le « discours d'adieu » (ouvraxtlxóc), la « monodie » (uovwd a), le « discours en l'honneur d'Apollon Smintheus » (Euivolaxóc ). La méthode suivie dans les deux traités consiste à indiquer les « lieux >> (TÓTOL) adaptés à chaque sujet ou à chaque forme de discours, c'est - à -dire à suggérer une liste de points à aborder et un ordre dans lequel les disposer. Les traités fournissent ainsi des canevas pour chaque cas , en y ajoutant des conseils sur la manière de mettre les « lieux » en æuvre , en fonction des circonstances, ainsi que des préceptes stylistiques et littéraires et diverses recommandations pratiques ( Pernot 20 ). La datation se déduit d'allusions historiques qui , dans les deux traités , suggèrent la seconde moitié du IIIe siècle ( Russell - Wilson 5 , p. XXXIX -XL ). L'examen des auteurs cités oriente vers la même probabilité, les mentions les plus tardives renvoyant, dans le premier traité , au II° siècle ( Aelius Aristide [ > A 349 ] , Pausanias de Césarée, Protée - Pérégrinos ), et dans le second , au III siècle ( Philostrate , Nestor de Laranda, Callinicos de Pétra ). Bien qu'ils se situent dans une même période chronologique et qu'ils reflè tent, dans les grandes lignes, une même conception du genre épidictique , ces deux traités sont séparés par d'importantes différences d'esprit, de doctrine rhétorique , de références littéraires , d'allusions géographiques et de langue. C'est pourquoi on considère le plus souvent qu'ils sont dus à deux auteurs distincts ( voir en ce sens , de manière plus ou moins affirmative, Bursian 3 , p . 21-25 ; Nitsche 9 , p. 5-7 , 9-10 ; Russell-Wilson 5 , p. XXXVII - XXXVIII ; Pernot 18 et 20 ; Gascó 7 , p. 12 , et 26 ; contra Radermacher 14 , col . 764 , et Soffel 4, p. 100 ). Si tel est le cas , Ménandros le Rhéteur peut être l'auteur soit de I soit de II . Un candidat pour la paternité du traité non attribué à Ménandros est le sophiste Généthlios de Pétra, dont le nom apparaît peut- être à côté de celui de Ménandros , mais sous une forme corrompue, dans le titre du premier traité (γενεθλ ων , corrigé en ή γενεθλ ου dans le manuscrit P) . Les savants ont proposé différentes combinaisons , dont aucune ne s'impose ( Bursian 3 : I Ménandros, II Anonyme ; Nitsche 9 : I Généthlios , Il Ménandros ; Russell Wilson 5 : I Généthlios , II ? ) . En l'absence d'argument décisif, mieux vaut laisser la question ouverte. Le nom de Ménandros le Rhéteur continuera d'être utilisé, par convention , à propos des deux traités. Ménandros le Rhéteur et la philosophie. Les traités de Ménandros le Rhéteur offrent un double intérêt du point de vue de l'histoire de la philosophie: ils manifestent la présence structurelle de problématiques philosophiques dans la

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rhétorique épidictique et ils comportent des aspects philosophiques qui leur sont propres. Dans l'éloge et dans le blâme, l'influence de la philosophie se fait sentir prin cipalement au niveau de la topique. Historiquement, les listes de tódol édictées à propos de chaque catégorie d'objet ont été élaborées, par les théoriciens et les praticiens de la rhétorique, en dialogue constant avec les problématiques philo sophiques. S'agissant des personnes, des cités, et même des dieux , la topique s'appuie sur des critères éthiques , notamment sur les notions de « biens » et de « vertus » . Il s'y ajoute, à propos des cités, des considérations de philosophie politique, et à propos des dieux , des considérations théologiques. La rhétorique épidictique se veut juste et vraie, et de ce fait elle rencontre nécessairement, dans la perspective antique , un questionnement philosophique ( sur tout ceci voir Pernot 22 , p. 129-249 , 493-605 ). Ménandros, en tant qu'héritier d'une longue tradition, qu'il reprend, expose et perfectionne, illustre cette situation . Constam ment, il fait référence à des notions et à des critères qui en dernière analyse proviennent de la philosophie (par exemple les listes de vertus, omniprésentes), mais qui dans son texte sont parfaitement intégrés et recyclés au bénéfice de la rhétorique. Pour l'encomiaste et pour son public , cette philosophie héritée et diffuse est une garantie de sérieux, de culture , de haute tenue intellectuelle , de moralité – toutes qualités jugées nécessaires dans la rhétorique épidictique de l'époque impériale. Sur cet arrière -fond se détachent des prises de position plus marquées . L'auteur du premier traité manifeste une grande admiration pour Platon , qu'il cite à de nombreuses reprises, ce qui a fait penser qu'il pouvait être proche des cercles néoplatoniciens ( Bursian 3 , p . 23-24 ; Wilamowitz 10 , p. 408 ). De fait, l'ensemble du développement sur l'hymne ( I , 333-344 ) présente un caractère philosophique prononcé , non seulement à cause des citations , mais par la conception même du sujet. Pour Ménandros I , la composition d'un hymne en prose suppose des réflexions sur la nature et la naissance des dieux , sur les mythes , sur le bon usage de la prière, et admet des fictions et des abstractions divinisées . Platon est présenté comme l ' « archégète » du genre (Velardi 21 , p. 213-216) , et le terme technique uvoixòç ýuvos (1 , 338 , 1-2 ) parait emprunté au Phèdre ( 265 c ) . Empédocle, Parménide, Orphée et les textes pythagoriciens sont également cités . L'auteur précise qu'il avait lui -même composé un hymne dans lequel il divinisait le Wóyoç comme frère de Zeus ( I, 341 , 15-17) . On relève encore , dans le premier traité , le recours massif à la méthode de « division » (dla peols) conçue dans un esprit philosophique et platonicien , puisqu'il s'agit de diviser la réalité en ses différents aspects et non pas ( sens rhétorique de dla peolç) de diviser le discours en parties: voir Pernot 20 , p . 46 . Le passage sur la division des espèces animales ( I , 332 , 14-17 ) rappelle le Sophiste , 220 a-b . Enfin , il est question de philosophie à propos de l'éloge paradoxal ( I , 346 , 18-19) et du retournement des défauts apparents en avantages ( 1 , 347 , 23-30 : cf. Pernot 31 ) . Sans se poser le moins du monde en philosophe , l'auteur du premier traité se révèle donc influencé par l'approche philosophique ( théologique, logique , éthique) dans son travail de théoricien de la rhétorique.

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L'auteur du second traité en use différemment. Il tient la philosophie à distance, parce qu'il la considère comme trop technique et hors de propos dans un discours rhétorique, et il ne lui fait place que sous la forme de digressions, appelées Oboelç (« thèses » , c'est - à -dire développements généraux ), qui doivent être dûment maîtrisées et qui interviennent dans certains types de discours. Dans l'épithalame, il est recommandé d'insérer un développement sur le thème « Que le mariage est une bonne chose » , qu'on traitera en citant Empédocle et en démontrant que le Mariage et l'Amour ont créé l'Univers et qu'ils régissent toute la Nature ( II, 400 , 31 - 401, 28 ; cf. 411 , 9-13 ) . De même , le discours en l'honneur d'Apollon Smintheus doit comporter des « thèses » sur les bienfaits de la divination , de la médecine, des panegyries ( II , 442, 11-14 ; 443, 20-26 ; 444, 24-32 ). La consolation , qui existe soit comme partie de l'oraison funèbre, soit comme discours autonome , pose un problème d'un autre ordre. C'est un genre littéraire que la rhétorique partage avec la philosophie , et il est donc normal d'y trouver de nombreux thèmes et arguments philosophiques (II , 421 , 14-32 ; 413-414 : voir Soffel 4, p. 196-230 ; Russell-Wilson 5 , p. 325-357) . Deux préceptes résument l'admission contrôlée de la philosophie. A propos d'un développement théologique sur la nature du dieu , dans l'éloge d'Apollon, l'auteur conseille : « Et ici , tu philosopheras avec modération » (II , 442, 28 : Kai Ploooonoeic uetp wç évtaða ; cf. 438 , 24-25 ) . A propos d'un développe ment sur la nature humaine, dans la consolation , il explique : « Philosopher n'est pas une faute de goût» ( II , 414 , 2-3 : Kai piaooooñoai dè [... ] oủx åneupó xalov ) . Pour l'auteur du second traité, le discours d'éloge , parce qu'il touche à la nature des choses , a besoin d'une sagesse , qui ne renie pas ses origines, mais qui doit être utilisée avec précaution. LAURENT PERNOT.

106 MÉNANDROS (T. FLAVIUS - )

I- II

Flavius Ménandros est connu par la dédicace de la bibliothèque construite, sous Trajan, par son fils, T. Flavius Pantainos de Gargettos, en bordure de l'agora d'Athènes ( Hesp. 15 , 1946 , n ° 64, p . 233 ) ; cette construction pourrait d'ailleurs avoir été une adjonction à l'établissement où enseignait Ménandros: voir J. McK . Camp, dans S. Walker et A. Cameron , The Greek Renaissance in the Roman Empire, coll . « BICS Suppl. » 55 , London 1989 , p . 51 ) . Celui-ci était diadoque, c'est - à -dire titulaire d'une chaire publique (municipale à cette époque) de philosophie . Il se pourrait qu'il ait été , comme le pensait A. W. Parsons, Hesp. Suppl. VIII , 1949, p. 268-272 , un ancêtre du stoïcien Pantainos, maître de Clément d'Alexandrie ( MC 154) , mais il serait hasardeux d'en conclure qu'il était lui - même stoïcien. Son origine exacte n'est pas connue : l'absence de démotique dans l'inscription paraît indiquer qu'il n'était pas athénien . BERNADETTE PUECH .

M 107

MÉNAS

439

107 MÉNAS

VI

Préfet du Prétoire du 1er juin 528 au 7 avril 529 , Ménas prend part à la rédaction du Code Justinien où on le trouve cité . Il semble avoir été un proche de la famille impériale. Photius consacre le cod. 37 de sa Bibliothèque à un dialogue Sur la politique, dont il ne précise pas l'auteur. Il nous apprend seule ment que les protagonistes en étaient le « patrice Menas » et le « référendaire Thomas » et qu'ils auraient débattu du meilleur régime politique , sans ménager la République de Platon . Sur l'identité de ces deux personnages, voir 1 Averil Cameron , Procopius and the Sixth Century, Berkeley 1985 , p . 248-252 . Le dialogue aurait visé à intégrer les trois formes constitutionnelles classiques monarchie , aristocratie , démocratie - en un quatrième type, le « dicéarchique » (dikaiarchikon ), qui pourrait faire référence à Dicéarque de Messine ( D 98 ) , ce qui toutefois n'est pas certain ( voir 2 A. Fotiou , « Dicearchus and the mixed constitution in Sixth Century Byzantium : new evidences from a treatise on “Political Science” » , Byzantion 51 , 1981 , p . 533-547 ) . Il est très vraisemblable qu'il faille identifier comme une partie de ce dialogue les feuillets palimpsestes découverts au XIXe siècle dans le fameux Vat. Gr. 73 ( X ° s . ) par Angelo Mai , contenant un dialogue sur la politique dont les deux protagonistes ont pour nom Ménodoros et Thomasios . Il s'agit de l'une des æuvres philosophiques byzan tines les plus intéressantes, l'auteur tentant une symbiose entre la pensée juridi que latine - il connaît encore bien Cicéron -, la philosophie politique grecque et la métaphysique néoplatonicienne, le tout ayant au moins en partie vocation à donner un cadre théorique à l'absolutisme politique de Justinien . Quant à l'auteur de ce dialogue , il faudrait y voir Ménas lui - même , se mettant en scène , dans un procédé typiquement cicéronien , peu de temps après avoir été Préfet du Prétoire. C'est la thèse de 3 C.M. Mazzucchi ( voir Menae patricii cum Thoma refendario De scientia politica dialogus, iteratis curis quae exstant in codice Vaticano palimpsesto ed . Carolus Maria Mazzucchi , coll . « Bibliotheca erudita », Milano 2002 [ 1 re éd . en 1982 ) , p . XV ) corroborée - mais non prouvée - par un poème iambique en l'honneur du philosophe et juriste Men ( n ) as , conservé dans le Paris. Gr. 1116 , manuscrit copié en Italie du Sud en l'an 1124. Pour une bibliographie exhaustive des études sur Ménas , voir Mazzucchi , ibid. , p. XXIII XXV. Sur ce traité , voir les études récentes de 4 D. O'Meara , « The Justinianic Dialogue On Political Science and its Neoplatonic Sources » , dans K. Ierodiakonou ( édit. ) , Byzantine philosophy and its ancient sources, Oxford 2002, p. 49-62, et de 5 D. G. Angelov , « Plato , Aristotle and “ Byzantine Political Philosophy " », dans E. Gannagé , P. Crone , M. Aouad , D. Gutas et E. Schütrumpf ( édit . ) , The Greek Strand in Islamic Political Thought. Proceedings of the Conference held at the Institute for Advanced Study, Princeton, 16-27 June 2003 = MUSJ 57 , 2004 , p . 499-523 , notamment p . 506 511 .

MARWAN RASHED,

.

440 108 MÉNÉCÉE (MEVOIXEÚC) RE 3

MÉNÉCÉE

M 108

DIII

Disciple d'Épicure ( PE 36) (mort en 271/0 ) et destinataire d'une de ses lettres, sur les modes de vies , conservée par Diogène Laërce ( X 122-135 ; cf. nepi Biwv , X 29 , et nepi tõv Blotix @v, X 135 ) . Sur cette lettre , voir DPhA III , 2000, p. 179. D'après Philodème, Ad contubernales liber I , fr. 114, li . 12 , les fils de Ménécée furent les destinataires d'une lettre d'Épicure ( fr. 111 Arrighetti) écrite sous l'archontat d'Isaios , daté de 284/3 par T. Dorandi, « Gli arconti nei papiri ercolanesi » , ZPE 84, 1990, p. 121-138 (T 23 ) . Voir Anna Angeli , Agli Amici di Scuola ( PHerc. 1005 ). Edizione , traduzione e commento , coll . « La Scuola di Epicuro » 7 , Napoli 1988 , p . 168 . La lettre à Ménécée ( D. L. X 122 ) est également citée par Clément d'Alexan drie , Stromates IV 8 , 69 , 2-4 ; t . I , p . 279 , 18-26 Stählin . Dans la lettre 14, 3 des socratiques (Eschine à Xénophon), “Ménécée le philosophe " a été corrigé par Wilamowitz en “Ménécée le patriote” ( MɛvoLXÉO TÓv piónov), à partir de Platon, Apol. 24 b. Il s'agit du personnage de la tragédie, fils de Créon. Cf. Euripide, Phén ., v . 986 sq . et Cicéron, Tusc. I 48. Voir Liselotte Köhler, Die Briefe des Sokrates und der Sokratiker. Herausgegeben , übersetzt und kommentiert von L. K. , coll . « Philologus Supplementband » XX 1, Leipzig 1928 , p. 28 et commentaire p. 107 , et J. Sykutris, Die Briefe des Sokrates und der Sokratiker, coll . « Studien zur Geschichte und Kultur des Altertums » XVIII 2, Paderborn 1933 , p. 60 et n. 3 . RICHARD GOULET.

109 MÉNÉCLÈS

I ?

C'est probablement sur le territoire de Cymè – bien que l'on ne puisse tout à fait exclure la voisine Phocée - que vivait et que fut enterré, peut-être dans le cours du 1 ° siècle , le philosophe Ménéclès ( IK 5 , 48 ) . Il faisait partie des lointains disciples de Pyrrhon , peut-être réunis dans une sorte d'association cultuelle , comme semble l'impliquer son épigramme funéraire: « Moi qui conduisais les chants par la Grèce, moi qui ai totalement aplani ce qui touche à la raison, qui ai parcouru , parmi les mortels, le chemin de la tranquillité, je suis, moi que voici , Ménéclès le pyrrhoniaste » . Les Pyrrhoniastes devaient être comparables aux Diogénistes , Antipatristes et Panétiastes évoqués par Athénée ( V , 186 a) . BERNADETTE PUECH . 110 MÉNÉCRATÈS

F III

Stoïcien inconnu , disciple de Chrysippe (Philod., Stoic . hist., col . XLVII 5 = SVF II 12 ) . Chrysippe lui avait dédié un ouvrage de contenu logique : lepi toở oŰtiôoç npòç Mɛvexpárnu n ', Sur l'argument du « Personne » , à Ménécrate ( D.L. VII 198 ) . TIZIANO DORANDI. 111 MÉNÉCRATÈS Orientations bibliographiques : 1 A. Gerhard et A. Baumeister, Bericht über die Verhandlungen der kön . Preuss. Akad. d. Wiss., 1855 , p . 194 , n . 16 ; 2 J. Keil et A. von Premerstein , « Bericht über eine Reise in Lydien und der

M111

MÉNÉCRATÈS

441

südlichen Aiolis » , DAWW 53 , 1908, p. 62 , n . 126 ( IGR IV , 1359 ) , ce sont les premiers éditeurs de l'inscription dans son intégralité ; 3 TAM V , 1 : Tituli Lydiae , Inscription n° 650 , 1981 , dernière édition de référence pour cette inscription ; 4 M.N. Tod , « Sidelights on Greek Philosophers » , JHS 77 , 1957 , p. 139 ; 5 J. et L. Robert, « Bulletin épigraphique » , REG 71 , 1958 , n ° 84 , p . 199 ; 6 L. Moretti, « Epigraphica » , RFIC 103 , 1975 , n° 13 , p. 189-190 ; 7 V. Nutton, « Menecrates of Sosandra, doctor or vet ? » , ZPE 22 , 1976 , p . 93-96 ; 8 J. et L. Robert, « Bulletin épigraphique » , REG 90 , 1977 , n° 455 , p. 409 ; 9 J. Benedum, « Zur lydischen Arztinschrift IGRR IV 1359 » , ZPE 29, 1978 , p. 115-121 . Ménécratès dit « de Sosandra ». Un médecin du nom de Ménécratès est mentionné dans l'inscription honorifique IGR IV 1359 en tant que héros (npwa ) ayant rempli d'éminentes fonctions civiques ( stratège, gymnasiarque, prytane et agônothète ). La cité à l'origine de ce décret a été désignée à tort, notamment par Tod 4 , comme « the city of Sosandra in Lycia » ( Lycia étant manifestement ici un lapsus ou une faute d'impression pour Lydia) . Cette mention fautive a été relevée par J. et L. Robert 5 qui précisent que le lemme des IGR 1358-1361 , « Sosandrae » , d'où l'on tire cette cité , « n'est qu'une erreur ou une imprécision des éditeurs de cette publication » . Et se référant à Keil et von Premerstein 2, n . 126 et 131 , et à leur introduction de géographie historique sur les inscriptions copiées dans le bourg de Marmara, ils ajoutent que Sosandra est en réalité non le nom d'une cité , mais d'un domaine impérial situé dans les environs de Marmara. Ménécratès et ses collègues homonymes. Ce Ménécratès dit « de Sosandra » doit être distingué de deux autres médecins du même nom , un Ménécratès de Syracuse (deuxième moitié du IVe siècle av. J.-C. ) , surnommé Zeus et à qui est attribuée une correspondance fictive avec Philippe de Macédoine ( voir 10 H. Raeder, art. « Menekrates » 29 , RE XV 1 , 1931 , col . 802 ) , et un certain Tiberius Claudius Ménécratès ( voir 11 H. Raeder, art. « Menekrates » 28 , RE XV 1 , 1931 , col . 801 ) , médecin des empereurs et pharmacologue , auteur dans la première moitié du je siècle de notre ère de 156 livres, plusieurs fois cité par Galien ( t . XII , 989 Kühn ; t . XIII , 502. 937. 995 ; t . XIV , 31 ) et dont la tombe (CIG III 6607 = IGR XIV 1759, cf. PIR II ? 218 , n ° 937 , IGRI 286, SIG 803 ) a été retrouvée sur la via Ostiensis aux environs de Rome. L'identification de ce médecin romain avec le Ménécratès dit « de Sosandra » a en particulier été écartée par Keil et von Premerstein 2 sur la base de la mention « médecin des césars » utilisée dans l'épitaphe funéraire de la via Ostiensis , activité qui leur parut peu compatible avec l'exercice des différentes charges remplies par notre médecin de province. Benedum 9, cependant, pense qu'il convient d'identifier le Ménécratès dit « de Sosandra » avec celui de Rome , même s'il paraît assez peu probable, à supposer que ce célèbre médecin des empereurs ait fini ses jours dans cette région de Lydie , que l'inscription qui l'honore ait pu passer sous silence d'aussi prestigieux services. Ménécratès médecin et philosophe ? Les premières lignes de l'inscription IGR IV 1359 (= TAM V 1 , 650) mentionnent Ménécratès dans les termes suivants : Μενεκράτ[ην ] | Πολυζε δ)ου, μ [έγαν ?] Γιατρών και φιλόσο- ] / φον etc. (texte cité d'après la récente réédition des TAM 3 ) . Si l'édition des TAM

442

MÉNÉCRATÈS

M111

permet aujourd'hui de trancher le débat relatif au statut de philosophe de Ménécratès , elle ne réussit toutefois pas à résoudre toutes les difficultés liées à son statut de médecin ( iatros ) . De fait, la restitution de uéyav qui fait de Ménécratès un « grand médecin » est loin d'être sûre . Selon Moretti 6, l'adjectif Méyaç serait peu habituel pour célébrer les capacités professionnelles et intel lectuelles d'un individu , là où on attendrait plutôt un terme comme čvôotos, õplotos ou encore npôros . Aussi Moretti propose -t- il d'intégrer uloviol ιατρός sur le modele du mulomedicus latin et par analogie avec ιπποιατρός ( IGR I 586) ou intolatpóç ( IGR I 1373 ) . Peu séduit par la proposition de Moretti, Nutton 7 lui a opposé les arguments suivants : ( 1 ) Pourquoi recourir à un nom rare à l'intérieur d'une telle liste par ailleurs composée de termes traditionnels alors qu'il existe un équivalent grec commode et bien attesté : inflatpós ? ( 2 ) De plus, le peu que l'on sait des vétérinaires en Italie et dans l'ouest de l'Empire est en contradiction avec le portrait de Ménécratès dressé ici puisqu'il s'agit d'ordinaire d'esclaves ou d'affranchis attachés à une armée . Leur statut social ne paraît pas davantage enviable dans l'est de l'empire où ils remplissent rarement des charges publiques . Ensuite , il n'existe que deux très rares cas ( et assez particuliers) de décret honorifique pour un vétérinaire. La mention combinée d'un « philosophe » et d'un « vétérinaire » serait quelque chose d'unique et de parfaitement isolé. Aussi la mention de latpós dans ce contexte apparaît-elle préférable à celle d'un uovolatpóç. Enfin , et pour résoudre la difficulté posée par la fin de la l . 2, V. Nutton propose sans certitude de lire apres μ : μεθοδΙι] ατρόν qui cependant est un hapax , ou encore åya [Oóv ], mais qui est en réalité exclu car la lettre u est sûre , avant d'avancer que u puisse également être l'initiale de la troisième partie du nom de notre médecin ( peut-être un nouveau patronyme ou un ethnique) déjà désigné à la l . 2 comme le fils d'un certain Polueidos . Comme l'ont cependant noté J. et L. Robert 8 , aucune de ces propositions ne paraît recevable et la lecture uéyav, pourtant défendue par Benedum 9 par de sérieux arguments est encore donnée par prudence avec un point d'interrogation par les derniers éditeurs de l'inscrip tion (= TAM V 1 , 650) . En revanche, ceux-ci , en donnant la lecture de pov ( 1. 4) comme sûre , confir ment bel et bien la restauration de plafóoolpov défendu par Benedum 9, en face de Dia b [ oy lov proposé par Tod 4 et Nutton 7. Tout au plus se permettra -t -on de conclure que l'existence d'un médecin et philosophe du nom de Ménécratès honoré par sa cité aux environs du bourg de Marmara n'a, quant à elle , rien de douteux. VÉRONIQUE BOUDON -MILLOT. 112 MÉNÉCRATÈS D’ÉLAEA ( Ó ’Elatins) RE 25

FIII

Historien , présenté comme disciple de Xénocrate (mort en 314/3 ) par Strabon XII 3 , 22. Il est associé dans ce passage à Hécatée de Milet, lui aussi présenté comme disciple de Xénocrate, et à Paléphatos . Il aurait écrit un Périple du Pont Euxin ( év tñ 'Exanonovtiaxñ nepiódw, ibid. ) et un autre ouvrage Sur les fondations (de cités) (év tolç tepi xt gewv, Strabon XIII 3 , 3 ). Il est possible

M116

MÉNÉDÈME D'ÉRÉTRIE

443

que les fragments d'un historien du meme nom intitulés Περί Νικαίας της εν BLOvvią rónewç (FGrHist 701 ) soient à rapporter au même auteur. Voir également FHG II 342 et 345 qui distingue ces deux historiens. Élaea était le port de Pergame. RICHARD GOULET. 113 MÉNÉCRATÈS D'ÉPHÈSE RE 16

Iva

Grammairien et poète d'inspiration stoïcienne qui fut, selon la Souda (s.v. Aratos), maître du poète Aratos ( A 298 ) , auteur, comme Hésiode, de Travaux (des champs ) en vers dont il reste de maigres fragments. Cf. H. Diels, Poetarum philosophorum fragmenta, Berlin 1901 , réimpr. Hildehseim 2000 , n° 7 ( p. 171-172) ; Suppl. Hell ., n° 542-550. RICHARD GOULET.

I

114 MÉNÉCRATÈS DE DALDIS

Le médecin et philosophe Ménécratès fut honoré d'une statue posthume par sa patrie de Daldis ( Lydie ) , où il avait rempli d'importantes fonctions munici pales ( TAM V 1 , 650 ). Il peut avoir été un parent de T. Claudius Ménécratès, attesté à l'époque de Néron par des monnaies de Méonia (BMC Lydia, p. XLIX ), mais n'était pas lui - même citoyen romain . On ne peut donc l'identifier non plus à l'homonyme, également un Claudius, qui était médecin des empereurs (PIR ?? C 218, » M111, p . 441). BERNADETTE PUECH. la

115 MÉNÉCRATÈS DE MYTILÈNE RE

Académicien inconnu (Philod ., Acad. hist ., col . XXXIV 8-11 = Antioch . T 3 , 5 Mette ), disciple d'Antiochus d'Ascalon ( " A 200 ) ou de Philon de Larisse ( selon l'hypothèse de E. Puglia, ZPE 130 , 2000, p. 17-28 ) . TIZIANO DORANDI. 116 MÉNÉDÈME D'ÉRÉTRIE RE 9

ca 345/4 - ca 261/0

Fils de Clisthène , de la tribu des Théopropides à Érétrie , et fondateur de l'école d'Érétrie. L'essentiel de nos informations provient de la vie de Méné dème qui clôt le livre II de Diogène Laërce ( II 125-144 ) . Elle a été excellem ment éditée par 1 D. Knoepfler, La Vie de Ménédème d'Érétrie de Diogène Laërce. Contribution à l'histoire et à la critique du texte des "Vies des Philo sophes” , coll . « Schweizerische Beiträge zur Altertumswissenschaft >> 21 , Bâle 1991. La plupart des précisions historiques rappelées dans la présente notice sont empruntées à ce travail remarquable. On consultera avec profit la synopse chronologique entre la biographie de Ménédème et l'histoire générale , p . 205 210. Sur l'arrière- plan historique: 2 D. Knoepfler, La cité de Ménédème. Études et documents sur l'histoire d'Érétrie à la haute époque hellénistique. Thèse Sorbonne, 1984 ; 3 Id. , Décrets érétriens de proxénie et de citoyenneté = Eretria . Fouilles et recherches XI , Lausanne 2001. La Vie de Ménédème a été traduite et Laërce , Vies annotée par M.-O. Goulet - Cazé dans 4 Diogène

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MÉNÉDÈME D'ÉRÉTRIE

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et doctrines des philosophes illustres. Traduction française sous la direction de M. -0 . Goulet-Cazé. Introductions, traductions et notes, coll . « La Pochothèque Classiques modernes » , Paris 1999, p. 343-358 . Fragments et témoignages. Les témoignages relatifs à Ménédème sont rassemblés dans 5 G. Giannantoni , Socratis et Socraticorum Reliquiae, t. I, p. 503-518 , sub nº III F, et t. IV , “ Nota 12 ” , p . 129-133 . Voir également 6 Β.Α. Kyrkos , “Ο Μενέδημος και η Έρετρική σχολή ('Ανασύσταση και Μαρτυρ ες) . Συμβολή στην ιστορία της ελληνικής φιλοσοφ ας , coll . « Archiv für Euboisch. Stud . » 23 , Athènes 1980 , 227 p . ( contient , d'après Knoepfler 1 , p. 15 n . 10, un long résumé en allemand : Menedemos und die eretrische Schule : Rekonstruktionsversuch und Testimoniensammlung, p. 209-227 ). Quelques textes peuvent être ajoutés au recueil de Giannantoni : Pseudo-Galien , Hist. philos. 3 , 37 (Doxographi graeci, p . 600 , 16-17 ) et 7, 18 ( Doxographi graeci, p. 604, 16) ; Olympiodore, Proleg., p. 3, 16-17 Busse ; Élias, in Categ ., p. 109, 1 Busse ; Eustathe de Thessalonique , in Iliad ., t. I, p. 429, 5 Van der Valk ; Souda, s.v. " Apatos , A 3745 , t. I, p. 338 , 2 Adler. Voir également 7 K. Döring, dans son compte rendu détaillé des SSR de Giannantoni, Gnomon 66, 1994 , p. 201-211 , notamment p. 204. Le nom de Ménédème apparaît dans P. Heid. Inv. G 1109, col . II, li . 13-15 ( toùG ÚTÒ Μενεδημείων θλων συγχυθέντζας ] ατυχεϊν). 8 Martina Richter, « Zwei neue philosophische Papyri : P. Heid . Inv . G 1108 und 1109 » , dans Papiri filosofici: miscellanea di studi, 1 , coll . « Studi / Accademia Toscana di Scienze e Lettere La Colombaria » 163 , « Studi e testi per il Corpus dei papiri filosofici greci e latini » 8 , Firenze 1997, p. 85-138 , notamment p. 132-135 , rapporte le témoignage à Ménédème le Cynique (» M 119) , plutôt qu'à Ménédème d'Érétrie, mais les lignes lisibles du papyrus ne permettent pas une identification sûre. L'identité du Ménédème qui apparaît dans deux ouvrages de Colotès de Lampasque, Contre le “Lysis” de Platon ( PHerc. 208 ), et Contre l'" Euthydème" de Platon (PHerc. 1032) est discutée . On pense généralement à Ménédème le Cynique, mais 9 A. Concolino Mancini , « Sulle opere polemiche di Colote » , CronErc 6, 1976, p. 61-67 , y a vu des allusions à Ménédème d'Érétrie. Voir également l'étude récente de 10 F. Alesse, « La polemica di Colote contro il “socratico” Menedemo » , CronErc 33 , 2003, p. 101-106. Cf. 11 E. Zeller, Philosophie der Griechen , II 1 ' , p . 276-280 ; 12 K. von Fritz , art. « Menedemos » 9 , RE XV 1 , 1931 , col . 788-794 ; 13 K. Döring , « Phaidon aus Elis und Menedemos aus Eretria » , dans GGP, Antike II 1 , 1998 , p . 238-245 , avec la bibliographie , p . 353 ; 13 bis Id ., art. « Menedemos aus Eretria » , NP VII , 1999 , p. 1226 . Sources mentionnées par Diogène Laërce. Cratès de Thèbes (Suppl. Hell . 348 = II 126 , qui apparaît par ailleurs dans une anecdote en II 131 , et dans une autre , dans la vie de Cratès en VI 91 ) , Timon de Phlionte ( fr. 29 Di Marco = II 126 , voir aussi fr. 31 Di Marco = IV 33 ) ; Antisthène, l'auteur des Successions ( fr. 6 Giannattasio Andria = II 134 ) ; Héraclide Lembos ( II 135 , 138 , 143 et 144 ) ; Antigone de Caryste ( fr. 25 Dorandi = II 136 , et fr. 27 = II 143 ) ; Lycophron de Chalcis dans son drame satyrique intitulé Ménédème ( TrGF I 100 F 2-4 ] II 140 ) ; Euphante d'Olynthe , dans ses Histoires ( FGrHist 74 F 2 et fr. 71 Döring = II 141 ) ; Hermippe de Smyrne ( fr. 38 Wehrli = II 142 ; FGrHist cont. IV A , fasc. 3 , n ° 1026, fr. 79 , commentaire de J. Bollansée , p . 536-542 ). Dio gène cite par ailleurs sur la mort de Ménédème une épigramme de son propre

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Pammétros ( II 144 ). Sur ce poème voir 14 G. Morelli, « Sugli epigrammi di Diogene Laerzio » , GIF 23 , 1971 , p. 121-140. Le témoignage le plus important est celui d’Antigone de Caryste dont la Vie de Ménédème est largement utilisée par Diogène Laërce, à travers divers intermédiaires, mais aussi par Athénée . Voir 15 T. Dorandi (édit . ) , Antigone de Caryste. Fragments. Texte établi et traduit par T.D. , CUF, Paris 1999 , qui reprend et précise le travail de 16 U. von Wilamowitz -Möllendorff, Antigonos von Karystos, coll . « Philologische Untersuchungen » 4 , Berlin 1881. Antigone était un contemporain de Ménédème , il était comme lui originaire de l'Eubée et il est fort possible qu'il l'ait personnellement fréquenté dans sa jeunesse . Seul un intime pouvait connaître l'organisation des sobres banquets philosophiques offerts chez Ménédème ( II 139-140 et Athénée X , 419 e - 420 c = fr. 26 A - B Dorandi ), à moins qu'Antigone n'ait reconstitué sa description à partir du drame satyrique Ménédème du poète Lycophron de Chalcis – autre ville de l'Eubée -, cité par nos deux sources , et mentionné parmi les convives habituels de Ménédème ( II 133 ). Sur le Ménédème de Lycophron , un drame qu'Athénée II , 55 d , présente comme une raillerie à l'égard du philosophe et Diogène Laërce comme un éloge , voir 17 I. Wikarjak, « De Menedemo a Lycophrone in fabula satyrica irriso » , Eos 43 , 1948-1949 , p. 127-137 ( l'éloge de Ménédème dans cette pièce satirique serait ironique ) : 18 V. Steffen, « De Lycophronis Menedemo », dans Charisteria Th. Sinko ab amicis collegis discipulis oblata, Varsaviae Soc. Philol . Polon . 1951 , p. 331-337 (Lycophron tiendrait sur le philosophe des propos élogieux ) ; 19 Ch . Picard, « Du nouveau sur Lycophron et sur son Ménédèmos d'après les monuments figurés » , dans les Actes du 1 er Congrès international des études classiques, Paris 1951 , p. 191-196 ( soutient la position de Wikarjak contre Steffen ); 20 C.A. Van Rooy , Studies in Classical Satire and related literary theory, Leiden 1965 , p. 127-134 (et les notes p. 140-142). Ce dernier préfère le jugement d'Athénée à celui de Diogène : Lycophron « wrote his play in a mocking fashion as a paradoxical tribute to the philosopher » ( p. 134) . « In einem nach ihm benannten Satyrspiel des Lykophron war dargestellt, wie der Chor der Satyrn in einen der Symposien des M. eindrang , bei denen der Reichtum der Gespräche die Kärglichkeit der Kost ausglich ( TGrF I , 100 , 2-4) » Döring 13 bis , p. 1226 . Biographie. Son père Clisthène était un architecte de bonne naissance mais peu fortuné, ou , selon d'autres sources , un décorateur de théâtre ( scénographe ) , ce qui n'est pas incompatible avec la première profession . Ménédème aurait appris ces deux métiers . Knoepfler 1 , p . 171 n . 2 , signale que le nom du père de Ménédème est confirmé par un catalogue de citoyens d'Érétrie des années 280/70 qui rattache Ménédème au dème d'Aigalè ( IG XII 9 , 246 A , li . 66 : Μενέδημος Κλεισθένου Αιγα-). Sur l'organisation politique d'Érétrie , voir 21 D. Knoepfler, « Le territoire d'Érétrie et l'organisation politique de la cité (démoi, chôroi, phylai) » , dans M. H. Hansen ( édit . ) , The Polis as an Urban Centre and as a Political Community, coll . « Historisk - filosofiske Meddelelser» 75 , Copenhague 1997 , p . 352-449. Envoyé en garnison à Mégare ( comme opovpós ) , peut -être à l'occasion de la guerre Lamiaque ( 323/322 ) qui opposa la Macédoine et ses alliés érétriens et mégariens à la Ligue hellénique dirigée par Athènes ( voir Knoepfler 1 , p . 171 n . 5 , contre l'avis de Beloch et von Fritz 2 , col . 791 , qui situaient ce séjour en 31776 ; autres références bibliographiques dans 22 Döring , Die Megariker, p . 146 n . 10 ) , il aurait été captivé par l'enseignement de Platon à l'Académie et

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aurait quitté l'expédition ( D. L. II 125 ) . Ce témoignage étant généralement considéré comme irrecevable, du fait que Ménédème était beaucoup trop jeune à la mort de Platon en 347a et n'était vraisemblablement pas encore né ( Knoepfler situe sa naissance vers 345 au plus tôt ) -, on a envisagé diverses explications : il est possible qu'on ait confondu Ménédème d'Érétrie et Ménédème de Pyrrha (

M 117 ) , disciple de Platon, ou bien - c'est l'avis de

Giannantoni – que Ménédème , dit « platonicien » par Héraclide (Lembos) en D. L. II 135 , ait fréquenté l'Académie après la mort de Platon , ou enfin , comme le suggère Knoepfler 1 , p . 171 , qu'une confusion se soit produite, dans les sources de Diogène , entre les noms de Platon et de Stilpon , dont on sait par ailleurs que Ménédème fut le disciple . On sait en tout cas que Ménédème mépri sait les philosophes de l'école de Platon et de Xénocrate, ainsi que Paraibatès de Cyrène , en revanche il admirait Stilpon ( II 134 ) . Son ami Asclépiadès de Phlionte ( A 449) aurait ensuite entraîné Méné dème aux cours de Stilpon à Mégare ( fr. 170 Döring ). « Et de là ils s'embar quèrent pour Élis afin de se consacrer à Anchipylos ( P- A 170) et Moschos ( ” M 194 ), les disciples de Phédon . Un séjour d'études philosophiques de Ménédème et d'Asclepiadès à Athènes est confirmé par Athénée IV , 168 ab , qui rapporte, apparemment d'après Phano dème ou Philochore , que l'Aréopage , qui surveillait de près ceux qui vivaient au -dessus de leurs moyens , voulut savoir comment les deux jeunes amis réussis saient à étudier toute la journée avec les philosophes et à se bien porter, alors même qu'ils ne possédaient rien . A leur demande , on convoqua un meunier qui vint témoigner que chaque nuit ils venaient travailler dans son moulin , pour deux drachmes. L'Aréopage admiratif leur fit don de deux cents drachmes. K. von Fritz 2, col . 789, doute de l'historicité de cette anecdote , « weil sie den viel älteren Asklepiades mit M. gleichalterig sein läßt » . En réalité D. L. II 137 dit simplement qu'Asclé piadès était īpeobúrepoç sans préciser de combien d'années . Une semblable enquête fut lancée par l'Aréopage à Athènes contre le stoïcien Cléanthe ( D. L. VII 168-169). Dans une autre anecdote que Knoepfler 1 , p . 180 n . 27 , préfère dater après le retour à Érétrie , – peut-être après l'expulsion des philosophes d'Athènes en 307 par suite de la loi de Sophocle de Sounion - , on voit Ménédème , qui était le fils d'un pauvre architecte ( D. L. II 125 ) , et Asclépiades participer à la construction d'une maison , Asclepiadès , nu , apportant l'argile sur le toit et Ménédème se cachant, gêné , dès qu'il voyait venir quelqu'un (II 131 ) . Il conserva jusqu'à un âge avancé la constitution d'un athlète et une taille bien proportionnée que révélait « une statue qui se trouve dans l'ancien stade à Érétrie » ( II 132 ) . Cette robustesse amena sans doute Cratès de Thèbes à le désigner comme le taureau d'Érétrie ( D.L. II 126 = fr. 348 Lloyd -Jones et Parsons ) . Une anecdote obscène mettant en scène Cratès de Thèbes (SSR III F 11 ; cf. V H 35 ) et que D. L. VI 91 emprunte à Dioclès de Magnésie ( »» D 115 ) suggère qu'Asclépiadès était l'amant de Ménédème . L'affection que Ménédème portait à Asclépiadès est comparée à celle de Pylade ( pour Oreste ) ( II 137 ) .

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Ménédème et Asclépiadès épousèrent la mère et la fille ( D.L. II 137 ) . Après la mort de sa femme, Asclepiadès prit celle de Ménédème, lequel, devenu un homme politique important (vers 290-285 selon Knoepfler 1 , p . 193 n . 57 ) , épousa une femme riche, originaire d'Oropos, dont il eut trois filles ( II 138 ) . Comme tous partageaient la même maison, Ménédème confia l'administration de cette maison à sa première femme ( II 137 ) . Asclépiade mourut avant lui à un âge déjà avancé, peut-être vers le début des années 270 , selon Knoepfler 1 , p . 193 n . 58 , qui signale que « sa sobre épitaphe (? Aoxinnláồng OneLÁOLOC) a été retrouvée il y a peu à Érétrie » . Elle est encore inédite . Activité politique. Plusieurs anecdotes mettent en relief le rôle politique joué par Ménédème dans sa cité . Diogène Laërce prétend que Ménédème fut un jour à la tête de sa cité ( II 137) et ailleurs qu'on remit la cité entre ses mains ( II 140 ). Sur la carrière politique de Ménédème et ses liens avec plusieurs souverains contempo rains (Nicocréon de Salamine, Ptolémée Sôter, Démétrius Poliorcète et Antigone Gonatas), voir 23 H. Sonnabend, Die Freundschaften der Gelehrten und die zwischenstaatliche Politik im klassischen und hellenistischen Griechenland, coll . « Altertumswissenschaftliche Texte und Studien » 30, Zürich 1996, p. 293-305 . Voir aussi le portrait de Ménédème dressé par 24W.W. Tam , Antigonos Gonatas, Oxford 1913 , p. 21-26 et p . 286-287 . Le rôle politique important que semble avoir joué Ménédème dans sa cité invite à lire sa biographie dans le cadre général de l'histoire et du site d'Érétrie. Voir le guide très complet publié par 25 P. Auberson et K. Schefold , Führer durch Eretria , Bern 1972 . Il visita, en compagnie d'Asclépiade, le roi Nicocréon qui régna à Salamine de Chypre de 331 à 311/10 ( II 129-130) . Ménédème aurait en la circonstance heurté le souverain par sa franchise . L'épisode n'est pas sans rappeler les démêlées d'Anaxarque d'Abdère ( >A 160 ) avec le même souverain . Auprès de Démétrios Poliorcète il plaida contre Athènes (peut-être en 295 ou 287 ) la cause d'Oropos, ville voisine d'Érétrie de l'autre côté du détroit de l'Euripe ( II 141 , d'après Euphante d'Olynthe , Histoires, fr. 71 Döring = FGrHist 74 F 2 ) . Il fut à une autre reprise encore envoyé auprès de Démétrios ( en 289/288 selon Knoepfler 1 , p . 197 n . 71 ) et obtint une diminution « de cinquante talents du tribut de deux cents talents que la cité versait pour l'année en cours » ( II 140 ). Calomnié par un certain Aischylos ( sans doute Aischylos fils d'Antandridès, un polémarque d'Érétrie en 285 identifié par Wilamowitz , comme le rappelle Knoepfler 1 , p. 197 n . 73 ; voir Knoepfler 3 , p . 257-259) , il eut à se défendre auprès du roi ( auquel il écrivit une lettre, peut-être apocryphe, dont le début est cité en II 141 ) d'avoir voulu livrer la cité à Ptolémée 1er Sôter ( l'épisode se situerait en 288 selon Knoepfler 1 , p . 197 n . 72 ) . Il fut membre du Conseil à Érétrie (proboulos, II 143 ), ambassadeur ( II 140 ) auprès de Lysimaque, roi de Thrace et de Macédoine, sans doute vers 285 , et de Ptolémée II Philadelphe, peut- être en 279/8 (selon Knoepfler 1 , p. 197 n . 69 ) . Ménédème est présent , avec d'autres philosophes , au banquet offert par Ptolémée (Philadelphe ) aux 72 traducteurs de la Loi, à Alexandrie ( Lettre d'Aristée à Philocrate, 201 = SSR III F 24) . Il intervient pour féliciter, à la fin de la première journée, le premier groupe d'intervenants juifs d'avoir systématiquement pris en compte la divinité et la providence dans leurs conseils politiques. Voir également Tertullien, Apologie 18 = SSR III F 25 .

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Il fréquenta ensuite ( II 128 ) le fils de Démétrios Poliorcète , Antigone Gonatas ( MA 194 ), roi de Macédoine de 283 à 239 , qui se disait son disciple ( II 141 ) , ce qui n'implique pas que Ménédème ait été son précepteur comme on le dit parfois. A l'occasion d'une victoire d'Antigone sur les " barbares" (Galates ) près de Lysimacheia (en 278/7 ), Ménédème fit rédiger en son honneur un décret au nom des stratèges et des probouloi d'Érétrie ( II 141-142 ; pour un autre projet de décret, voir II 125 ) . Sur ce décret, voir Knoepfler 3 , Appendice 2 : « Le décret pour Antigone Gonatas chez Diogène Laërce (et une stèle à parasème au Musée d'Érétrie) » , p. 390-397 : un relief qui constituait le couronnement d'une stèle inscrite pourrait correspondre au décret (d'une authen ticité qui serait incontestable ) dont Diogène cite le début. Plusieurs anecdotes présupposent la présence de Ménédème à la cour d'Antigone : D. L. II 127 (Euryloque de Cassandréia et Cléippidès de Cyzique), 128 , 141-142, 143-144 . Par suite des calomnies d'un certain Aristodème qui l'accusait de vouloir livrer Érétrie cette fois à Antigone , Ménédème dut s'exiler dans le sanctuaire d'Amphiaraos à Oropos ( II 142 ); c'est là qu'il discuta avec le général d'Anti gone Hiéroclès « qui commandait le Pirée » ( II 127 ; voir aussi IV 39 ) de la prise (alors projetée ? ) d'Érétrie. Il fut d'ailleurs chassé de cet endroit par un décret confédéral des Béotiens à la suite de la disparition de coupes en or, à ce que rapportait la mauvaise langue d'Hermippe ( II 142 = fr. 38 Wehrli , fr. 79 Bollansée ) . Knoepfler 3 , p . 107 , date cet exil volontaire du début de la guerre de Chrémonidès ( 268 /7-262 / 1 ). Sur Hiéroclès, officier d'origine carienne, voir Knoepfler 1 , p. 175 n . 13 , et 26 M. Launey , Recherches sur les armées hellénistiques, coll . BEFAR , t. I, Paris 1949, p. 453, et t. II, « réim pression avec addenda et mise à jour en postface par Y. Garlan, Ph. Gauthier et C. Orrieux » , Paris 1987, p. 1109-1271 ( « Prosopographie militaire hellénistique » ),notamment p. 1218 . Ménédème revint alors secrètement dans sa patrie , puis partit avec sa femme et ses filles chez Antigone, où il mourut de découragement. Selon Antigone de Caryste et Héraclide Lembos (II 143 ) , Ménédème entretenait l'amitié d'Anti gone Gonatas pour obtenir son aide contre des tyrans locaux et c'est parce qu'il n'obtenait pas cette aide en faveur de la démocratie , notamment à cause des menées du stoïcien Persaios auprès d'Antigone , qu'il se serait laissé mourir de faim par découragement. Sur le contexte historique de ces conflits politiques, voir 27 D. Knoepfler, « Loi d'Érétrie contre la tyrannie et l'oligarchie » , BCH 125 , 2001, p . 195-238 ; 126, 2002, p. 149-204. Selon Sonnabend 23, p. 296, ces tyrans seraient les oligarques établis par Cassandre à Érétrie. Sur Oropos , son histoire au « siècle de Ménédème » et son sanctuaire , voir 28 D. Knoepfler, « Oropos et la Confédération béotienne à la lumière de quelques inscriptions “ revisitées " » , Chiron 32, 2002, p. 119-155 ; 29 P. Roesch, « L'Amphiaraion d'Oropos» , dans G. Roux (édit. ), Temples et sanctuaires. Séminaire de recherche 1981-1983, coll . « Trav . de la Maison de l'Orient, Univ . de Lyon » 7 , Paris 1984, p. 173-184 ; 30 J. J. Coulton , « The stoa of the Amphiaraion, Oropos » , ABSA 63, 1968, p. 147-183 . Ce rôle politique de premier plan et les revenus importants qui sont évoqués ( II 138 ) contrastent avec d'autres anecdotes qui insistent sur la pauvreté de Ménédème et d'Asclépiade . Dans leur jeunesse ils auraient travaillé la nuit dans un moulin pour un salaire de deux drachmes qui leur permettait d'étudier le jour : ces études semblent avoir été menées à Athènes puisque pour récompenser

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leur courage l'Aréopage leur accorda un somme de 200 drachmes ( Athénée , IV , 168 a-b = SSR III F 9 ) . On les voit ailleurs construire une maison pour le compte d'un charpentier ( II 131 ) . Même installés à Érétrie, ils devaient encore leur

subsistance à l'aide d'Agétor de Lamia qui donna 30 mines à chacun des deux philosophes ( II 138 ) ; plus tard Ménédème reçut l'aide d'Hipponicos de Macé doine (qui donna à Ménédème 2000 drachmes pour la dot de ses trois filles, détail étonnant si l'on se souvient qu'en secondes noces ce dernier épousa une riche citoyenne d'Oropos , selon II 137 , mais qui pourrait faire référence à la période postérieure à l'exil à Oropos puis à Pella ). On voit Asclépiade et Ménédème refuser ailleurs la somme de trois mille drachmes qu’un certain Archipolis voulait donner à chacun ( II 137 ) . A propos de D. L. II 138 , où il est dit que Ménédème et Asclepiade menèrent vie simple, malgré les grands moyens dont ils disposaient ( II 138 ) , Knoepfler a envisagé une correction proposée par Chamoux et Gauthier : από Μεγάρων pluto que από μεγάλων. Le passage ferait alors référence au début de leur amitié à l'époque de la garnison à Mégare. Mais cette correction est peu vraisemblable et il est préférable de s'en tenir aux hésitations de la tradition sur le niveau de vie du philosophe. Chronologie. Ménédème serait mort, après Asclepiade ( II 138 ) , dans sa 84e année ( D. L. II 144, selon la leçon de B et F retenue par Knoepfler 1 , p . 16-18 , contrairement à la leçon , choisie jusque là, qui parlait d'une 74° année ) . Mais Diogène ne nous dit pas en quelle année ou olympiade sa mort se situe . Parmi les nombreux événements de l'histoire politique qui sont évoqués par Diogène Laërce, on relève la victoire d'Antigone Gonatas sur les " barbares " à Lysi macheia en 278 ( II 141-142 ) . Mais une inscription de Delphes ( Corp. Inscr. Delph. II ( 1989 ) , n ° 124 , li . 3 et IV [ 2002 ] , n ° 20 ) , datée de 274/3 , sous l'archonte Héracléidas , mentionne un Ménédème d'Érétrie (['Epe tpiéwv Meve 0 ] ņuou ) comme hiéromnémon de l'Amphictionie . La reconstitution peut sem bler fragile, mais on retrouve ensuite dans une inscription de 269/8 ( Corp. Inscr. Delph. II ( 1989 ) , n ° 129 B , li . 3 ) , Ménédème ( [M ]ɛvéồnuoç 'Epetple [ us ] ) comme juge à l'Amphictionie en tant qu'ancien hiéromnémon. Enfin, si Méné dème dut s'exiler à Oropos parce qu'on l'accusait d'avoir livré Érétrie à Antigone , il faut situer sa mort après la prise de la ville par Antigone Gonatas en 267/6 (Knoepfler 1 , p . 210 , mais à la p . 175 n . 15 , il date l'événement vers 265 ) . Il serait mort, selon Knoepfler 1 , p . 210 , quelques années plus tard , vers 261/0 . Il faudrait en conséquence situer sa naissance vers 345/4 . Voir 31 K. J. Beloch , Griechische Geschichte, t . IV 22, Berlin/Leipzig 1927 , Appendice XXIV 7 ($ 212), p. 461-464, sur la chronologie de la vie de Ménédème. On corrigera dans la notice « Asclépiadès de Phlionte » A 449 , DPhA I , 1989 , p. 622 , l'âge donné pour la mort de Ménédème en tenant compte du texte retenu par Knoepfler : il faudrait lire non par « à 74 ans » , mais « dans sa 84e année » . On a retrouvé à Delphes plusieurs fragments d'une inscription exposant les tables d'un traité de tachygraphie . La date de l'inscription, la présence d'un M dans la dédicace et un vers célébrant le savoir technique du concepteur ont amené 32 J. Bousquet , « L'inscription sténographique de Delphes» , BCH 80 ,

1956 , p . 20-30 , à attribuer ce système à Ménédème d'Érétrie ; 33 H. Boge, Griechische Tachygraphie und tironische Noten . Eine Handbuch der antiken und mittelalterlichen Schnellschrift , Hildesheim /New York 1974 , p . 34-39 ,

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notamment p . 39 , trouve l'identification proposée par Bousquet “vraisemblable" . Elle est acceptée par F. Lefèvre , Corp. Inscr. Delph . IV , n° 17. En revanche, Döring 7 , p . 204, la trouve très fragile. Enseignement et disciples. Selon Plutarque , De tranquillitate animi 13 , 472 e (SSR III F 2 ) , Ménédème eut de très nombreux disciples . La classe de Ménédème est décrite en D. L. II 130 : elle semble avoir été assez désordonnée, les bancs n'étant pas disposés en cercle et chacun déambulant ou prenant un siège où bon lui semblait. Voir 34 H. von Arnim , Leben und Werke des Dio von Prusa , mit einer Einleitung : Sophistik , Rhetorik, Philosophie in ihrem Kampf um die Jugendbildung, Berlin 1898 , p . 24-25 : « Die Stelle ist ein wichtiges Zeugnis für die im allgemeinen in diesen Schulen gebräuchliche Form des Unterrichts. Sie zeigt aber auch , daß Menedemos selbst einen festen Schülerkreis hatte , da sich ja sonst das Fehlen der táčiç und der Báopa von selbst verstehen würde » ( cité par Giannantoni 5 , t . IV , p. 133 n . 25 ) . Antigone Gonatas déjà se disait son disciple ( II 141 ). Mais on mentionne aussi Denys d'Héraclée (> D 82 ) , le futur élève de Zénon de Citium (D.L. VII 166) , Arcésilas (2- A 302 , voir IV 33 et Numénius , fr. 25 des Places, conservé par Eusébe de Césarée, P.E. XIV 5 , 12 ) , Aratos ( > A 298 ) et Ctésibios de Chalcis (2C 225 ) ( voir Goulet- Cazé 4 , p . 356 n . 10 ) . Peut-être faut -il leur adjoindre Pasiphon l’Érétrique ( II 61 : et la note de Goulet - Cazé 2 , p . 362 n . 5 ). Il était l'ami d'Aratos de Soles , du poète tragique Lycophron de Chalcis et d'Antagoras de Rhodes ( II 133). La Souda , s. v. " Apatoç , A 3745 , fait du poète Aratos l'auditeur de Timon et de Ménédème. POxy. 3656 = SSR III F 25 = CPFI 1 ** , 1992, n° 68 1 T (p . 472) , publié par 35 P.J. Parsons, dans Helen M. Cockle (édit . ) , The Oxyrhynchus Papyri, t . LII , London 1984 , p . 47-50 , mentionne , sur la foi d'Hippobote ( ** H 148 ) , de Hiéronymos de Rhodes ( PH 129] ( év tỘ Nepi ouvoxñs ) et d'un certain “ Aristophane le Péripatéticien " [ A 404 ) ( ÉV TỘ Nepì áluníac), une femme dont le nom n'est pas conservé qui aurait été , après la mort de Platon , l'élève de Speusippe, puis de Ménédème d'Érétrie. On a cherché à l'identifier à Axiothéa ( HA 517 ) de Phlionte ou encore à Lasthéneia de Mantinée ( L 22 ) . Voir 36 M. Gigante , « Accessione Ippobotea » , PP 220 , 1985 , p . 69 ) ; 37 Id . , « Biografia e dossografia in Diogene Laerzio » , Elenchos 7 , 1987 , p. 59-62 . Le Ménédème de ce passage est explicitement identifié comme Ménédème d'Érétrie. Mais on peut se demander si notre Ménédème pouvait déjà être en âge d'assurer à Athènes un enseignement à une ancienne élève de Speusippe et peut-être déjà de Platon. Or Ménédème de Pyrrha (2M 117 ) fut à Athènes candidat à la succession de Speusippe en 339/8 à l'Académie. Il est donc envisageable qu'une confusion ait été faite entre ces deux homonymes. Ses préférences littéraires se portaient vers Homère , les poètes lyriques, Sophocle, Eschyle et son concitoyen Achaïos d'Érétrie ( II 133 ) . Ménédème fut par ailleurs l'adversaire d'Eschine de Sphettos ( > A 71 ) qu'il accusait de s'être approprié les dialogues de Socrate ( II 60 ), de Cratès de Thèbes ( -C 205 ) qu'il fit jeter en prison ( II 131 et VI 91 ) , et du stoïcien Persaios de Citium ( II 144 ). Des anecdotes ( II 135 ) le montrent s'opposant à Bion de Borythène ( -B 32 ; voir également IV 54 ) et à Alexinos d'Élis ( > * A 125 ; voir également Plutarque,

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De vitios. pud. 18 , 536 b = SSR III F 14 b) , à qui il rendit cependant service en escortant de Delphes à Chalcis son épouse qui craignait les brigands (II 136) . L'école d'Érétrie. Par Anchipylos et Moschos , Ménédème et Asclepiade se rattachaient à l'école de Phédon d'Élis ( II 125 et 126) : « Jusqu'à leur époque ( ....), les philosophes de cette école s'appelaient éliaques, mais ils s'appelèrent érétriques d'après la patrie de Ménédème . » En II 105 , Diogène mentionnait comme diadoque de Phédon d'Élis son compatriote Pleistanos, puis, à la géné ration suivante, Ménédème d'Érétrie et Asclepiadès de Phlionte, qui venaient de chez Stilpon. Il rappelait également qu'à partir de Ménédème l'école s'était appelée érétriaque. Socrate

École éliaque

École érétri (a )que

Phédon 1 Anchipylos etMoschos 1 Aslépiade et Ménédème

Pleistanos

Il n'est pas dit explicitement que c'est à Érétrie que Ménédème relança cette école , mais tous les détails biographiques que Diogène Laërce fournit sur Ménédème se rattachent à Érétrie où le philosophe exerça un rôle politique. Il est considéré par Diogène Laërce comme un véritable fondateur de secte philo sophique (xatápXelv aipédewÇ, II 105 : voir déjà I 19 : Ménédème d'Érétrie, fondateur de l'école érétriaque ; Athénée II , 55 d : đọ’ oở ń tâu 'EpetpixWV ůvouaoon aipeolç) . L'école érétriaque, qui est donnée comme exemple d'appellation des écoles philosophiques « à partir du nom des cités dont les fondateurs étaient originaires » ( II 17 ) , est la dixième des écoles " éthiques ” mentionnées en D. L. II 18 et la deuxième des neuf écoles de pensée énumérées par Hippobote ( fr. 1 Gigante ) en D.L. II 19. Le stoïcien Sphaïros de Borysthène avait écrit un ouvrage Sur les philosophes érétriaques ( Ilepi tõv 'Epetplaxov plooóbwv, D.L. VII 178 = SSR III F 21 ). Chrysippe mentionne Ménédème en l'associant à Stilpon dans un fragment de son traité Sur l'usage de la raison ( Plutarque, De Stoicorum repugnantiis, 10, 1036 f = SVF II 271 = SSR II O , 28 , 20-23 ) : le discours de ces philosophes qui avaient joui d'une immense « réputa tion de sagesse » serait devenu « objet d'opprobre, parce qu'il est jugé tantôt trop primaire, tantôt manifestement sophistique » ( trad. D. Babut) . Strabon ( X 1 , 11 = SSR III F 23 ) parle également de l'école des philosophes érétriques (ń tūv Έρετρικών φιλοσόφων σχολή των περί Μενέδημον εν τή Έρετρα γενο uévn ) à Érétrie. Voir également Eustathe de Thessalonique, in Iliad ., t . I , p. 429 , 5 Van der Valk , à propos des philosophes originaires de l'Eubée : ń oxoan TWV Έρετρικών σοφών των περί Μενέδημον . Sur la double appellation ( érétrique/ érétriaque ), voir Goulet-Cazé 4, p. 344 n . 7. Les philosophes de cette école sont ailleurs appelés Érétriens ("EpetpleTS, Élias, in Categ ., p. 109, 1 Busse ) . Philosophie. Diogène Laërce II 16 répertorie Ménédème parmi les philo sophes qui n'ont laissé aucun écrit. Selon Antigone de Caryste , il n'aurait composé aucun ouvrage pour ne pas figer sa pensée sur une doctrine particulière (D.L. II 136 = fr. 25 Dorandi).

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MÉNÉDÈME D'ÉRÉTRIE

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Plusieurs anecdotes et apophtegmes sont rapportés, montrant en Ménédème « un critique sévère au parler franc » (D. L. II 127-129), allant parfois jusqu'à la raillerie ( D. L. II 136) . D'autres insistent sur sa bonté , la simplicité de sa vie (D.L. II 136) et la chaleur de son amitié (D.L. II 137 ). En philosophie , on souligne le caractère éristique de son argumentation ( D.L. II 134) . Selon Antigone de Caryste ( fr. 25 Dorandi) c'était un rude adversaire dans des discussions qui sombraient parfois dans le pugilat ( D. L. II 136 ) . Curieusement Héraclide Lembos prétendait qu'il se moquait de la dialectique, mais dans cette même phrase il le présente comme “ platonicien ” dans ses doctri nes ( D.L. II 135 ) . Sa réponse à un dilemme d'Alexinos montre qu'il rejetait effectivement les règles du jeu dialectique. Pour éviter tout embarras dialectique, l'école d'Érétrie refusait toute attribution logique d'un prédicat à un sujet, s'en tenant à affirmer que l'homme est homme et que le blanc est blanc ( Simplicius, in Categ ., p . 91 , 28-33 Kalbfleisch = SSR III F 19) ; elle supprimait de même les qualités substantielles, considérant que les qualités n'existent vraiment que dans les êtres singuliers et composés ( ibid. , p. 216, 12-14 = SSR III F 19 b ) . Méné dème rejetait (dans la constitution des syllogismes) les propositions négatives au profit des seules affirmatives : et parmi celles-ci il acceptait les propositions simples et rejetait les non -simples, comme les conditionnelles et les conjonctives ( D. L. II 135 ) . Il enseignait l'unité de la vertu , supprimant toutes leurs diffé rences et n'y voyant que des noms différents pour désigner une même réalité, comme c'est le cas pour homme" et "être humain ” ( Plutarque, De virt. mor. 2, 440 e = SSR III F 17 c ). Il plaçait le bien dans la pensée et l'acuité de l'esprit qui permet de distinguer la vérité (Cicéron , Acad. prior. II 42 , 129 = SSR III F 17 b) . Essai d'interprétation philosophique de ces diverses prises de position dans 38 N. Denyer, Language, thought and falsehood in Ancient Greek philosophy, London /New York 1991, p. 37-43 ( « Menedemus and the Eretrians » ). Iconographie. « Une (petite) statue dans l'ancien stade à Érétrie » représen tait le philosophe presque nu ( D. L. II 132) . On a reconnu de façon conjecturale Ménédème , en compagnie d'Antigone Gonatas et de la mère de ce dernier, Phila, dans une grande fresque de la Villa de P. Fannius Sinistor à Boscoreale ( conservée au Musée archéologique de Naples) qui serait une copie du 1er siècle av . J.-C. d'une peinture datant de la fin du IIIe siècle . Un philosophe barbu , vêtu d'un épais manteau (que les commentateurs qualifient de cynique) , est appuyé sur un bâton . Pour une reproduction en couleur, mais limitée à la partie représentant le philosophe, voir 39 A. Maiuri , Le peinture romaine, Genève 1953 , p. 64 . L'identification à Ménédème a été soutenue d'abord par 40 Fr. Studniczka , « Imagines illustrium » , JDAI 38-39 , 1923-1924, p. 64-128 . A cause de la simililtude des portraits, 41 Ch . Picard , « Un cénacle littéraire hellénistique sur deux vases d'argent du trésor de Berthouville - Bernay » , dans Monuments et Mémoires par l'Académie des Inscriptions et Belles -Lettres ( Fondation Eugène Piot) 44 , 1950 , p. 53-82, notamment p. 67-76, a également voulu retrouver Ménédème sur un skyphos d'argent du trésor de Berthouville conservé au Cabinet des médailles de la BnF. 42 K. Schefold , Die Bildnisse der antiken Dichter, Redner und Denker, p. 132-133 ; 43 nouvelle édition remaniée, Basel 1997 , p. 260-261, fig. 143 ( pour la fresque) et p. 287 , fig. 163 (pour le skyphos) ; 44 Id ., « Vom Sinn der römischen Wandmalerei » , dans Mélanges d'archéologie et d'histoire offerts à Charles Picard , t. II = RA 31-32 , 1948 , p. 936-945 , notamment p. 943-944 ; 45 Id . , Pompejanische Malerei. Sinn und Ideengeschichte , mit 52 ganzseitigen Tafeln , Basel 1952 , p. 161-162 , 196 et pl . IV, paru en

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français sout le titre : La peinture pompéienne. Essai sur l'évolution de sa signification, coll . « Latomus » 108 , Bruxelles 1972, p. 75-76 et pl . IV ; 46 G. M. Richter, The Portraits of the Greeks, t. II, p. 244, n° 1073. L'identification est encore acceptée par 47 Claude Wehrli , Antigone et Demetrios, coll . « Études et documents » 5 , Genève 1968, p. 199-202, et par 48 L. A. Scatozza Höricht, Il volto dei filosofi antichi, p. 115-118 ( fig. 42-43 ). Mais on a également reconnu sous les traits du philosophe de la fresque Épicure ou Zénon de Citium . Contre l'identification, voir notamment 49 Phyllis W. Lehmann , Roman wall paintings from Boscoreale in the Metropolitan Museum of art, Cambridge (Mass .) 1953 ; 50 F. Queyrel, art. « Antigone Gonatas » A 194, DPhA Suppl., p. 72-73 . L'identification devrait rendre compte de l'epsilon (ou peut-être la diphtongue EI) qui semble gravé sur la bague que le philosophe de la fresque de Boscoreale porte à l'annulaire de la main gauche ( signalerait-elle les liens que Ménédème entretenait avec Delphes ?). Schefold 43, p. 286, a finalement considéré que le philosophe de la coupe de Berthouville ne correspondait pas à la représentation de Ménédème. La peinture est superbement reproduite dans 51 H. Lavagne, É. de Balanda et A. U. Echeverría, Jeunesse de la beauté . La peinture romaine antique, 2e éd . , [s. 1. ) , 2001, fig. 10, où elle est intitulée « La Perse vaincue par la Macédoine » . Tel serait en effet le thème de cette scène allégorique d'après le commentaire anonyme donné p. 304-305 : « On considère aujourd'hui que le personnage en position dominante est une figure de la Macédoine, armée de la lance caractéristique et coiffée du couvre-chef typique des Macédoniens. Elle observe une autre figure, celle-ci à ses pieds , coiffée de la tiare perse et méditative . Entre les deux est placé le bouclier macédonien frappé d'une étoile et symbolique de la victoire par les armes. Cette scène était interprétée comme l'expression même des revers de la Fortune dans l'histoire des Empires, car qui aurait pu croire que le petit royaume de Macédoine pourrait un jour vaincre l'immense empire des Perses ? Le vieillard, à gauche, est Démétrios de Phalère ( D 54), auteur d'un ouvrage sur la Fortune où il donnait précisément cet exemple historique » . Voir aussi U. Pappalardo , « La peinture romaine à Pompéia, idéal de vie et décors picturaux » , ibid ., p. 75 . [ Depuis 52 K. Fittschen, « Zum Figurenfries der Villa von Boscoreale » , dans B. Andreae, H. Kyrieleis (édit.) , Neue Forschungen in Pompeji und den anderen vom Vesuvausbruch 79 n . Chr. verschütteten Städten, Recklinghausen 1975 , p. 93-100 , l'identification du personnage principal du tableau central avec Antigone Gonatas (et donc du philosophe avec Ménédème) a été généralement abandonnée ; on a plutôt reconnu dans cette scène une composition allégorique : la Macédoine dominant la Perse (ou l'Asie). C'est l'interprétation que retient notamment 53 F. G. J. M. Müller, The Wall Paintings from the æcus of the Villa of Publius Fannius Synistor in Boscoreale , Amsterdam 1994. C'est également celle de 54 G. Sauron, Quis Deum ? L'expression plastique des idéologies politiques et religieuses à Rome, coll . BEFAR 285 , Rome 1994, p. 317-374, qui voit dans les tableaux de cette paroi une transpo sition picturale du commentaire de Polybe, XXIX 21 : l'historien trouve dans l'effondrement du royaume de Macédoine à Pydna une confirmation saisissante des réflexions, qu'il cite en les qualifiant de prophétiques, de Démétrios de Phalère ( 2 + D 54 ) , méditant, dans son traité Tepi Túxns, sur l'effondrement de l'empire perse au profit d'un empire macédonien qui pourrait bien un jour connaître le même sort . La fresque représenterait donc Démétrios dans sa méditation sur la victoire de la Macédoine . Il faudrait alors reconnaître un tau ( l'initiale de Túxn ) dans la lettre gravée sur la bague que le philosophe porte à la main gauche. Ce signe avait été identifié de la même façon par Ē. Zwierlein - Diehl, mais lu comme un epsilon par H. Möbius, K. Fittschen et Ph. W. Lehmann, et interprété par E. Simon comme un reflet : voir Sauron 54, p. 344, n . 117 et 118. Aucune de ces lectures ne s'impose cependant de façon incontestable et les excellentes reproductions de L. Romano dans 55 D. Mazzolini , U. Pappalardo et L. Romano, Fresques des villas romaines , Paris 2004, appuieraient plutôt l'interprétation toute différente proposée récemment par 56 M. Torelli, « The Frescoes of the Great Hall of the Villa at Boscoreale . Iconography and Politics » , dans D. Braund et Chr. Gill (édit . ), Myth , History and Culture in Republican Rome . Studies in honour of T.P. Wiseman , Exeter 2003, p. 217-256. En continuité thématique avec la paroi droite de la salle (où Achille reçoit ses armes, notamment le fameux bouclier où se profile l'image de son destin glorieux, chanté par la Muse), la paroi gauche évoquerait la jeunesse d'Alexandre et la prévision de ses

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MÉNÉDÈME D'ÉRÉTRIE

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triomphes : le personnage au teint clair du panneau central serait non pas une allégorie de la Macédoine mais le jeune Alexandre, en qui la Perse reconnaîtrait d'avance son futur vain queur ; et le philosophe veillant sur le destin glorieux de son élève serait évidemment Aristote, B.P.) dont la bague porterait l'initiale du nom.

RICHARD GOULET.

117 MÉNÉDÈME DE PYRRHA RE 8

Iva

Académicien , disciple de Platon . Témoignages et fragments. 1 F. Lasserre (édit. ), De Léodamas de Thasos à Philippe d'Oponte . Témoignages et fragments , Napoli 1987 , p. 91-96 , 311-316, 523-529 . La chronologie de Ménédème a été étudiée par Lasserre 1 , p . 523-524 : Ménédème naquit vers 390 ; il fréquenta les leçons de Platon à l'Académie où il resta jusqu'à la mort de Speusippe. Il se porta candidat à la succession de Speusippe ( en 339/8 ) , en même temps qu'Héraclide le Pontique ( H 60 ) et Xénocrate, qui le battit de peu (Philod ., Acad . hist., col . VI 38-VII 11 = T 7 ) . Déçu par cet échec , il fonda une autre école . Le poète comique Épicratès, dans un fragment célèbre ( fr. 5 Kassel-Austin = T 5 ) , se moque de la méthode de la dihairesis appliquée en philosophie par Platon , Speusippe et Ménédème. Selon Plutarque (Adv. Col., 1126 c = T 6) , Platon aurait envoyé Ménédème à Pyrrha afin de doter sa ville natale d'une constitution . Lasserre 1 , p. 525 , suppose que Ménédème aurait quitté l'Académie en 355 pour collaborer au rétablissement du régime oligarchique à Pyrrha et qu'il serait rentré à Athènes à la mort de Platon. Porphyre (Hist. philos . , fr. 213 Smith = F 1 ) attribue à Ménédème un livre dans lequel il soutenait que « Socrate ne cessait de parler de son père comme d'un ouvrier de la pierre et de sa mère comme d'une sage -femme » . Le titre de cet ouvrage tel qu'il nous a été transmis (év tỘ Dioxpátous) est sûrement corrompu : Nauck , dans son édition de Porphyre, avait conjecturé év tỘ Nepi Ewrpátovç ( cf. Lasserre 1 , p. 527-529) . TIZIANO DORANDI.

118 MÉNÉDÈME DE RHODES RE 10

Iva

Dans un passage d'Aulu -Gelle ( XIII 5 , 3-4 ) consacré au choix par Aristote de Stagire de son successeur à la tête du Péripatos, les noms des deux scholarques envisagés sont Théophraste de Lesbos et Ménédème de Rhodes. Aristote aurait exprimé son choix en goûtant des vins de ces deux îles et en marquant sa préférence pour la douceur du premier (nd wv ó Abobloc, en grec chez Aulu Gelle ) . Les éditeurs ont unanimement corrigé le nom de Ménédème en Eudème ( 7 - E 93 ) dans ce passage . La confusion a pu être encouragée par les prétentions similaires de Ménédème de Pyrrha ( 2M 117 ) à diriger l'Académie après la mort de Speusippe. RICHARD GOULET.

MÉNÉDÈME LE CYNIQUE

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119 MÉNÉDÈME LE CYNIQUE RE 11

III a

Philosophe cynique qui , à ce titre , bénéficie d'une " vie" au livre VI de Diogène Laëce ( VI 102). Fragments et témoignages. 1 G. Giannantoni , SSR V N , t. III , 587-589 ; commentaire dans la note 55 , t . IV , p. 581-583 . Cf. 2 W. Crönert, Kolotes und Menedemos, p . 1-12 et Nachträge, p. 162-172 ; 3 D.R. Dudley , A History of Cynicism , p . 61 et 107 ; 4 K. von Fritz , art. « Menedemos » 11 , RE XV 1 , 1931 , col . 794-795 ; 5 A. Concolino Mancini , « Sulle opere polemiche di Colote » , CronErc 6 , 1976 , p . 61-67 ; 6 G. Giannantoni , « I Socratici minori nei papiri ercolanesi » , dans Atti XVII Congr. Intern . Papirologia, Napoli 1984 , t. II , p. 522-532 ; 7 M.-O. Goulet Cazé, L'ascèse cynique, Paris 1986 , 2e éd . revue et augmentée, 2001 p. 237 , et 8 Ead ., dans son « Catalogue of known Cynic philosophers » , dans R.B. Branham et M.-O. Goulet -Cazé, The Cynics . The Cynic movement in Antiquitty and its legacy, Berkeley 1996 , p . 397 ; 9 M. Gigante, « Cinismo e epicureismo » , dans M.-O. Goulet- Cazé et R. Goulet, Le Cynisme ancien , p. 198-203 . Ménédème était déjà présenté plus haut ( VI 95 ) comme disciple d'Échéclès d'Éphèse dans une courte “ succession” cynique des élèves de Cratès de Thèbes:

Cratès ( 2 ° C 205) Cléomène ( C 163 ) Timarque d'Alexandrie

Échéclès d'Éphèse (»-E 3)

Théombrote Démétrios d'Alexandrie ( 2 + D 46 )

Ménédème Que cette liste concerne les disciples de Cratès et non de Métroclès (dont elle suit la vie) a été établi par 10 M.-O. Goulet -Cazé, « Une liste de disciples de Cratès le Cynique en Diogène Laërce 6,95 » , Hermes 114, 1986, p. 247-252 . C'est sans doute par erreur que K. von Fritz 4 , col . 794, désigne le maître de Ménédème comme Échéclès de Lampsaque. Goulet-Cazé 7 et 8 traite de Ménédème sous l'entrée “Ménédème de Lampsaque” , reprenant peut -être une hypothèse de Crönert 2 , p. 11 , qui supposait que ce philosophe avait été l'élève de Colotès « wie es scheint, in seiner Vaterstadt ». Giannantoni 1, t. IV, p. 581 , semble comprendre la phrase différemment et faire de Ménédème un autre disciple de Théombrote (qu'il appelle par erreur Théopompe aux p. 581 et 582).

La vie de Ménédème ne semble toutefois pas prendre en compte cette succes sion et elle donne pour maître à Ménédème l'épicurien Colotès de Lampsaque ( C 180 ) . La suite évoque , d'après Hippobote ( H 148 ; fr. 9 Gigante ) , un portrait burlesque de Ménédème qui pourrait en réalité concerner le philosophe de la section précédente, Ménippe (= M 129 ) , et faire référence à sa Néxula (D. L. VI 101 ) . Voir 11 M.-O. Goulet -Cazé, dans sa traduction du livre VI de Diogène Laërce , Paris 1999, p . 765 n . 1 , qui cite Crönert 2 , p . 1-4 , suivi par 12 J. Mejer, Diogenes Laertius, p. 22. Le passage se trouve effectivement ratta ché à Ménippe le Cynique dans la Souda, s.v. pa oç, Ø 180 , t. IV , p. 710 , 13-19 Adler. Ce témoignage de la Souda ne rend toutefois pas vraisemblable l'explication généralement proposée pour cette confusion , qui suppose que Diogène Laërce lui - même aurait mal inter prété une notation abrégée du nom du philosophe (Mev).

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Il en résulte que le seul renseignement que nous transmette Diogène Laërce est le nom de ses deux maîtres, probablement successifs : Colotès de Lampsaque et Échéclès d'Éphèse. Crönert 2 , p . 4-12 , et Nachträge , p . 162-172 , a édité et commenté les restes des deux papyri contenant un ouvrage de Colotès de Lampasque, un des maîtres de Ménédème , Contre le “ Lysis ” de Platon ( PHerc. 208 ) , et un autre Contre l '“ Euthydème" de Platon ( PHerc . 1032 ) . Sur ces deux traités , voir 13 T. Dorandi , notice « Colotès de Lampsaque » , C 180, DPLA II , p. 448-420 . Or dans ces deux ouvrages , le nom de Ménédème apparaît plusieurs fois, parfois dans le cadre d'une interjection , et vraisemblablement comme un auteur ayant attaqué des positions philosophiques épicuriennes sur certains sujets, notamment sur la valeur de la poésie. Ménédème aurait donc finalement rejeté les vues professées par son premier maître . Concolino Mancini 5 a montré la fragilité de certaines lectures de Crönert et a soutenu que l'adversaire de Colotès pouvait être Ménédème d'Érétrie : le fait que ce dernier n'ait rien écrit ne jouerait pas contre cette identification, car les passages des papyri qui amenaient Crönert à supposer des écrits de Ménédème reposeraient sur des lectures très contestables. Cette identi fication a toutefois été rejetée par Giannantoni 1 , t. IV , p. 581-583 , Giannantoni 9, 522-532, et Gigante 10 , p. 198-203 . Sur l'identité du Ménédème attaqué par Colotès , voir également l'étude récente de 14 F. Alesse , « La polemica di Colote contro il “socratico" Menedemo » , CronErc 33 , 2003, p. 101-106. Iconographie. D. Pandermalis, « Zur Programm der Statuenausstattung in der Villa dei Papiri » , MDAI ( A ) 83 , 1971 , p. 173-209 , notamment p. 178 , a proposé de reconnaître dans un hermès de la Villa des Papyri à Herculanum un philosophe cynique qui serait Ménédème ou Monime ( » M 190 ). L'hermès apparenté représenterait Bion de Borysthène . Voir, à sa suite , Maria Rita Wojcik , La Villa dei Papiri ad Ercolano . Contributo alla ricostruzione dell'ideologia della “ nobilitas ” tardorepubblicana, coll . « Ministero per i beni culturali ed ambientali . Soprintendenza archeologica di Pompei - Monografie >> 1 , Roma 1986 , p . 78-79 et planches XLII - XLIII ( B 13 et B 14) , laquelle penche finalement pour une identification avec Ménippe ( 3M 129) . L'image que ces deux auteurs se font de Ménédème est toutefois tirée de D. L. VI 102 , un passage qui doit plutôt être rapporté à Ménippe. RICHARD GOULET.

120 MÉNÉLAOS D'ALEXANDRIE RE 16

ca 45/50 - ca 110-120P

Mathématicien ( géomètre ) et astronome grec immédiatement antérieur à Ptolémée . Sa production nous est connue seulement par des citations ou des traductions . Il doit notamment sa célébrité à ses contributions dans le domaine de la trigonométrie sphérique , science dont on peut le considérer comme le père. Cf. 1 K. Orinsky , art. « Menelaos » 16 , RE XV 1 , 1931 , col . 834-835 ; 2 I. Bulmer-Thomas , art. « Menelaus of Alexandria » , DSB IX , 1974 , p . 296 302 ; 3 M. Folkerts & R. Lorch , art. « Menelaos von Alexandreia » , NP VII , 1999 , col . 1234-1235 ; 4 D. K. Raïos , Archimède, Ménélaos d'Alexandrie et le « Carmen de ponderibus et mensuris » : contributions à l'histoire des sciences, coll . « Dodone Suppl . » 29 , Ioannina 1989 , 256 p. , en particulier chap . III- IV ;

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MÉNÉLAOS D'ALEXANDRIE

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5 Id ., « Autour de la date des Sphériques de Ménélaos d'Alexandrie » , Hellenica 45 , 1995 , p. 33-47 . Biographie et chronologie . Nous ne connaissons presque rien de la vie de Ménélaos . Puisqu'aussi bien Pappus (IVP; Synagoge VI 110 , t. II , p . 602, 1 Hultsch ) que Proclus (VP ; In primum Euclidis elementorum librum comm . , p. 345 , 14 Friedlein ) l'appellent « d'Alexandrie » ( Mevéhaoç ó ' Are avopeúc), on peut supposer qu'il était originaire de cette ville, ou au moins que c'est ici qu'il a principalement exercé son activité . Grâce à Ptolémée ( IIP ; Syntaxis mathematica VII 3 ; cf. infra ), on peut fixer aussi un terminus post quem certain pour celle-ci , car il rapporte que Ménélaos , qualifié de « géomètre » (ó yew uétons ) , avait réalisé deux observations astronomiques à Rome dans la première année du règne de Trajan, c'est - à -dire en 98P (cf. infra ). Mais il était apparemment déjà en activité un peu avant, si on tient compte du fait que Domitien ( † 98 ) lui avait commandé un ouvrage ( cf. infra ). En outre, on le rencontre chez Plutarque, De facie quae in orbe lunae apparet XVII 5 , 930 a, comme personnage de ce dialogue qui eut lieu à Rome ou dans la proximité de cette ville probablement un certain temps après 75P. Plutarque y décrit un entretien entre Ménélaos et Lucius ( 2L 70) , dans lequel celui-ci prend notre personnage , présenté comme un « mathématicien » ( uaOnuatixóc ) , pour garant de sa réfutation d'une théorie relevant de la catoptrique. Même si cela n'implique pas que Ménélaos ait apporté une contribution particulière dans le domaine de l'optique, et même si Plutarque ne lui donne pas la parole à ce titre dans le dialogue ( cf. Bulmer - Thomas 2 , p. 300 ), on peut supposer au moins que Ménélaos jouissait déjà à cette époque d'une certaine réputation scientifique. Comme il est évident qu'en 98P, l'année de ses observations à Rome , il devait avoir au moins une vingtaine d'années , on a placé la date de sa naissance vers 70P. En tout cas , son floruit semble se situer vers 100P. On a supposé , par ailleurs, que son activité pouvait s'être prolongée encore une trentaine d'années , jusque vers 130P . C'est là la chronologie la plus généralement admise . Or, rien n'empêche en réalité d'établir une chronologie un peu plus haute . Le témoi gnage qui met en rapport Ménélaos avec l'empereur Domitien semble bien aller dans le même sens. De la sorte, Raïos 4 , chap. III , a pu préciser avec vraisem blance les dates de Ménélaos : celui -ci a dû naître à Alexandrie autour des années 45-50 et mourir vers 110-120 . Il semble s'être partagé notamment entre Alexandrie et Rome , bien que ce soit à la première ville qu'il faille sans doute le rattacher, ce qui n'a rien d'étonnant si on pense à la longue et riche tradition scientifique de cette cité . Il n'est pas invraisemblable enfin qu'il ait bénéficié d'une certain faveur auprès des empereurs de l'époque , Domitien et Trajan ( † 117 ) à tout le moins . On peut supposer qu'il a passé sa jeunesse à Alexandrie pour s'installer plus tard à Rome, tout en restant sans doute en contact avec la première ville (peut-être sa ville natale ). Euvre . La plus grande partie de la production scientifique de Ménélaos ne nous est connue que par des titres d'ouvrages ou par de courtes citations . Ce n'est que grâce à la tradition arabe que nous est parvenu l'ouvrage qui représente

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sans doute sa contribution la plus importante et qui appartient au domaine de la géométrie sphérique. On peut reconstituer une partie de l'ensemble de cette production à l'aide de l'Index ( Fihrist) de livres arabes élaboré au Xe siècle ( ca 990 ) par le libraire musulman Ibn al - Nadim ( cf. 6 R. Tajaddud [édit . ) , Kitab al- Fihrist li- l-Nadim , Tihran 1971 ; 7 B. Dodge ( trad . ), The Fihrist of Al-Nadim : a tenth century survey of Muslim culture, coll . « Record of civilization : sources and studies » 83 , New York /London 1970 , 2 vol . ) . On y parle de quatre ( trois ?) ouvrages écrits par Ménélaos, qui ne semblent pas mentionnés dans l'ordre chronologique, mais plutôt classés par ordre d'importance. En effet, cet Index mentionne d'abord Le livre sur les propositions sphériques, qu'il faut sans doute identifier avec les Epaipixá mentionnés par Pappus (Commentaria in Ptolemaei syntaxin mathematicam 5-6, t. II , p . 276, 1 sq . Rome; Synagoge VI 1 , t . II , p . 476, 16 sq . Hultsch ) et dont nous est parvenue la version arabe, qui est aussi à l'origine du reste des traductions , y compris la traduction latine du XIIe siècle ( Sphaerica ; cf. infra ). Il porte principalement sur les triangles sphériques et leur application à l'astronomie (cf. infra ). C'est le seul ouvrage incontestablement de Ménélaos qui nous soit parvenu dans son intégralité, en trois livres, bien qu'en tradition indirecte ( cf. l'histoire du texte esquissée par Bulmer - Thomas 2 , p. 301 sq. ) . On ne sait pas quand le texte grec a disparu. A partir de l'entrée « Menelaus grecus scriptus » qu'on trouve dans l'inventaire des livres d'Andreas Coner († 1527 ), 8 B. Noack, « Ein Kapitel aus der Geschichte der Rezeption griechischer Astronomie zwischen Bamberg und Rom » , dans K. Döring , B. Herzhoff & G. Wöhrle (édit . ), Antike Naturwissenschaft und ihre Rezeption 4, Bamberg 1994 , p . 59-79 , notamment p. 71 sqq . , a lancé l'hypothèse que Coner avait possédé un manuscrit grec de Ménélaos . De toute évidence, elle est consciente que le mot « grecus » dans ce contexte peut être interprété aussi comme faisant référence non à un manuscrit grec mais à un auteur grec, surtout parce que l'on a pu constater que l'entrée suivante « Archimedes Grecus scriptus » faisait bien référence à un manuscrit latin . Cependant, Noack maintient la vraisemblance de son hypothèse, entre autres, du fait que le copiste de l'inventaire a écrit correctement le nom « Menelaus » , tandis que dans les manuscrits latins, dont le texte est passé par l'intermédiaire de l'arabe ( cf. infra ), ce nom apparaît écrit en général de façon incorrecte ; et du fait qu'il ne semble pas vraisemblable, si le nom avait été écrit de cette façon dans un soi -disant manuscrit latin , que le copiste ait pu introduire une telle correction. Noack va même jusqu'à suggérer la possibilité que la Bibliothèque du Vatican renferme le Ménélaos grec dans son trésor de manuscrits encore inexploré. Quoi qu'il en soit , l'ouvrage grec fut traduit en arabe par Isḥāq ibn Hunayn ( † 910/911 ), ou peut-être par son père , Hunayn ibn Isḥāq ( † 873 ) . Cette traduction , révisée par plusieurs éditeurs à des moments différents, nous est parvenue dans un certain nombre de manuscrits. Les éditeurs les plus importants furent Abū Nașr Manşūr ibn 'Irāq ( 1007/1008 ), dont le texte est préservé dans le codex Leidensis 930, et Nasir al Din al - Țūsi ( 1265 ), dont le texte est préservé dans un plus grand nombre de manuscrits. 9 F. Sezgin , GAS, t. V : Mathematik bis ca. 430 H. , Leiden 1974, mentionne une révision du Xe siècle d'Abu'l -Fadl al- Harawi (GAS V 161 n° 2 ) , qui est conservée dans deux manuscrits et qui , d'après al-Harawi lui - même , est fondée sur la révision d'al -Māhāni † 880 ( GAS V 161 n° 1 = GAS V 261 n° 3). A partir de la traduction arabe , l'ouvrage fut traduit en latin par Gérard de Crémone ( † 1187 ). Le texte qui en résulte nous est parvenu plus ou moins complet dans environ 17 manuscrits , dont beaucoup présentent le nom de l'auteur sous la forme « Mileus » ou « Myleus » , formes qui s'expliquent sans doute parce que la traduction était faite à partir de l'arabe (cf.Noack 9 , p . 72 ). Plus tard , à partir des versions arabe et latine , l'ouvrage fut traduit en hébreu par Jacob ben Māḥir ibn Tibbon ( ca 1273 ).

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La première édition imprimée des Sphériques est la traduction latine de l'abbé de Messine et mathématicien Francesco Maurolico, publiée en 1558 ( 10 F. Maurolico [édit. ) , Theodosii Sphaericorum elementorum libri III ex traditione Maurolyci Messanensis mathematici; Menelai Sphaericorum lib . III ex traditione eiusdem ; Maurolyci Sphaericorum lib . II ; Autolyci De sphaera, quae mouetur liber ; Theodosii De habitationibus ; Euclidis Phaeno mena breuissime demonstrata ; Demonstratio & praxis trium tabellarum scilicet sinus recti, faecundae, & beneficae ad sphaeralis triangula pertinentum ; Compendium mathematicae mira breuitate ex clarissimis authoribus ; Maurolyci De sphaera sermo, Messanae in freto Siculo 1558 ). Cette traduction, fondée sur un manuscrit très pauvre , est pleine d'interpo lations. En 1644, un autre ecclésiastique , Marin Mersenne, le philosophe et mathématicien ami de Descartes, publie sa propre traduction , dont la qualité n'est manifestement pas meilleure ( 11 M. Mersenne ( édit. ), Universae geometriae mixtaeque mathematicae synopsis, et bini refractionum demonstratarum tractatus, studio & opera F.M.M. M , Parisiis 1644 ). Il faut mentionner ensuite la traduction latine du célèbre astronome Edmund Halley, publiée de façon posthume en 1758 ( 12 E. Halley [édit. ) , Menelai Sphaericorum libri III quos olim , collatis mss. Hebraeis & Arabicis, typis exprimendos curavit vir. cl. Ed. Halleius... Praefatio nem addidit G. Costard, A. M., Oxonii 1758 , 112 p. ). Halley s'est fondé notamment sur la traduction hébraïque, même s'il a fait un certain usage des manuscrits arabes. Cf. 13 A. A. Bjørnbo, Studien über Menelaos' Sphärik : Beiträge zur Geschichte der Sphärik und Trigonometrie der Griechen... Mit 75 Figuren im Text, Leipzig 1902, p. 10-22 ; 14 M. Krause (édit. ) , Die Sphärik von Menelaos aus Alexandrien in der Verbesserung von Abū Nașr Manṣūr b. 'Ali b. 'Irāg. Mit Untersuchungen zur Geschichte des Textes bei den islamischen Mathematikern , von M. K. , coll . AAWG 3. Folge, Nr. 17 , Berlin 1936, réimpr. Nendeln 1972 ; 15 G. Yussupova, « Zwei mittelalterliche arabische Ausgaben der “ Sphaerica " des Menelaos von Alexandria », HM 22, 1995 , p. 64-66 , qui s'occupe de la version de al- Țūsi et de celle du mathématicien al - Jazdi du XVIIe. Nous mentionnons aussi deux travaux présentés au Vile Colloque Maghrebin sur l'histoire des Mathématiques Arabes (Marrakech, Maroc, 30 mai – 1 Juin, 2002 ) : il s'agit de 16 P. Pinel : « The astronomical interpretation of the Spherics of Menelaos by Abū Nașr and at- Țūsi » ; 17 Taha Abd al-Quddous, « Remarks on some terms used in the first translations of Menelaos ' spherics » ( encore inédits). Comme le remarque Bulmer-Thomas 2 , p. 297 , même si on peut se demander dans chacune de ces versions différentes des Sphériques ce qui revient à Ménélaos lui-même et ce qui revient à ses éditeurs traducteurs -réviseurs, le commentaire de Bjørnbo 13 (qui représente la partie la plus importante de son étude, laquelle contient aussi une traduction allemande libre fondée sur l'édition de Halley et sur le codex Leidensis ), ainsi que l'édition critique par Krause du texte arabe, avec la traduction allemande ( fondée sur le même manuscrit de Leiden ), ont rendu l'étude de l'ouvrage de Ménélaos relativement aisée. La formule Basilides Allādi par laquelle les adaptateurs arabes désignent le ou les dédicataires du traité constitue un élément-clé dans la difficile question de la chronologie des Sphériques et a donné lieu à de multiples interprétations. Selon Raïos 5, devant l'impossibilité d'en établir la signification avec certitude, il semble raisonnable de penser qu'elle se réfère à « des personnes proches de l'empereur » et de penser que Ménélaos , ex -ami de Domitien , cherchait ainsi à s'assurer les bonnes grâces de Trajan au début de son règne. L’Index d'Ibn al-Nadim mentionne aussi un traité Sur la science des poids et la distribution des corps mixtes qui aurait été écrit à la demande de Domitien . Cela nous permet de supposer un certain rapport de Ménélaos avec cet empe reur, qui est mort en 96. En tout cas , nous ne croyons pas que ce renseignement soit nécessairement erroné, et qu'il faille supposer ici une invention à partir de la mention de Trajan chez Ptolémée ( cf. Bulmer- Thomas 2 , p . 300 n . 7 ) . Par ailleurs, l'aversion du dernier empereur flavien pour les philosophes n’a sans

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doute touché en rien un personnage comme Ménélaos, dont l'activité n'a jamais dû entraîner la moindre menace à l'égard du pouvoir établi . Outre l’Index d'Ibn al - Nadim , l'ouvrage en question est mentionné aussi par al - Hāzini au XII° siècle. Il paraît vraisemblable que cet ouvrage a été conservé dans un manuscrit arabe de l'Escorial , le ms . D. 960243/C . 955 ( D. = catalogue moderne de

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H. Darenbourg ; C. = catalogue ancien de M. Casiri ), dont on ne connaît ni le nom du traducteur ni la date de copie : cf. 18 A. Cano Ledesma, Indización de los manuscritos árabes de El Escorial, coll . « Biblioteca La Ciudad de Dios » IV A 12 , El Escorial 1996, t. I , p . 92 ( « Matemáticas nº 7 » ) , qui donne le titre Kitāb Milāws ilā Tārtās al-malik fi-l-hila al - lāti ta'rif bi -ha miqdar kull wāhid wāhid min ' uddat aysām mujalata , et le traduit comme « Libro de Menelao, dedicado al rey Timoteo ( sic ), sobre el procedimiento que permite conocer la proporción de cada componente en los cuerpos complejos » . Le texte de ce manuscrit a été traduit en allemand par 19 J. Würschmidt, « Die Schrift des Menelaus über die Bestimmung der Zusammensetzung von Legierungen >>, Philologus 80, 1925 , p. 377-409. Le troisième ouvrage mentionné par l'Index arabe , ce sont les Élements de géométrie , en trois livres. Ibn al - Nadim précise que cet ouvrage avait été édité par Tābit ibn Qurra ( IXP) . Il mentionne finalement Le livre sur le triangle, qui n'est peut-être, d'après Bulmer- Thomas 2 , p. 301 , qu'une partie de l'ouvrage précédent. Aucun de ces livres ne nous est parvenu , même pas en tradition arabe. A en croire le Liber trium fratrum de geometria, écrit par Muḥammad, Aḥmad et al - Hasan , les trois fils de Mūsā ibn Shākir ( Banū Mūsā ) dans la première moitié du IXe siècle , les Éléments de géométrie contenaient une solu tion au problème de la duplication du cube, qui reviendrait à celle d'Archytas de Tarente ( ** A 322 , p . 341 , et E 52 , p. 211 ) . Et , d'après Bulmer - Thomas 2, p. 299, c'est probablement dans l'un de ces ouvrages que Ménélaos avait proposé la très élégante démonstration alternative d'Euclide , lib . I , propos. 25 , qui nous est parvenue chez Proclus, In primum Euclidis elementorum librum comm . , p. 345 , 9- 346 , 13 Friedlein . La liste arabe d'Ibn al - Nadim peut être complétée par d'autres témoignages anciens qui font référence à des ouvrages qui n'ont pas été non plus conservés. Ainsi , d'après le mathématicien Pappus, Synagoge VI 110 , t . II , p. 600, 25 602, 1 Hultsch , Ménélaos aurait été l'auteur d'un traité sur le coucher des signes zodiacaux . Et Théon d'Alexandrie , Commentaria in Ptolemaei syntaxin mathe maticam I 10 , t . II , p. 451 , 4 sq . Rome , rapporte que Ménélaos avait écrit un traité sur les cordes du cercle en six livres, un ouvrage qui pourrait avoir compris ce qu'on appelle aujourd'hui un tableau de sinus ( cf. Bulmer - Thomas 2 , p. 297 , 301). Finalement, à partir de certains témoignages ( notamment Pappus , Synagoge IV 36 , t . I , p . 270, 17-26 Hultsch ) , on a parlé aussi de la possibilité que Ménélaos ait écrit un traité sur les courbes dites « non algébriques » ou « transcendantales » dans la terminologie de Leibniz ( cf. Bulmer - Thomas 2, p. 300 ). Le renseignement de Banū Mūsă selon lequel Ménélaos avait reproduit la solution proposée par Archytas pour la duplication du cube amena 20 P. Tannery, « Pour l'histoire des

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lignes et surfaces courbes dans l'Antiquité » , Bulletin des sciences mathématiques 7 , 1883 , p. 289-292, repris dans J.L. Heiberg & H.-G. Zeuthen (édit. ), Mémoires Scientifiques, t. II : Sciences exactes dans l'Antiquité 1899-1913, III, Toulouse /Paris 1912 , réimpr. 1995 , p. 16 18 , à considérer comme vraisemblable l'hypothèse selon laquelle la courbe que , d'après Pappus, Ménélaos avait longuement discutée et qu'il avait appellée « courbe paradoxale » ( ypapun napádotos ) n'était rien d'autre que la courbe à deux points doubles que l'on appelle « la fenêtre de Viviani » . Cependant, comme le remarque Bulmer-Thomas 2, p. 300 , cette conjecture, même si elle est séduisante , manque de toute preuve sérieuse . Ainsi donc , Ménélaos s'est occupé de géométrie, d'astrologie , et même de mécanique. On peut préciser maintenant quelques détails concernant sa produc tion en ces trois domaines. GÉOMÉTRIE Les Sphériques représentent la contribution la plus importante de Ménelaos dans le domaine de la géométrie, plus particulièrement de la trigonométrie, qui était encore une discipline naissante . La première contribution qu'on connaît à la trigonométrie est l'æuvre du mathematicien , astronome et géographe celèbre Hipparque de Rhodes ( † 120), qui avait produit un premier exemple de tableau trigonométrique, un tableau de cordes, dont l'objet était de fournir une méthode rapide pour résoudre les triangles. A partir de là , certains historiens sont même allés jusqu'à considérer Hipparque comme le fondateur de la trigonométrie. Mais son développement le plus important n'est arrivé en fait qu'avec les Sphériques de Ménélaos, qui est aussi à l'origine du développement ultérieur de la discipline assuré par Ptolémée ( cf. 21 G.J. Toomer, « The chord table of Hipparchus and the early history of Greek trigonometry » , Centaurus 18 , 1973 , p . 6-28 ; 22 Á . Szabó, L'aube des mathématiques grecques, traduit de l'allemand ( = Entfaltung der griechischen Mathematik, Mannheim 1993 ) par M. Federspiel, coll . « Mathesis » , Paris 2000, p. 55 sqq .). Ménélaos a même été le premier, d'après ce que l'on sait , à établir la défini tion d'un « triangle sphérique » , telle qu'on l'énonce encore de nos jours , à savoir une partie de la surface sphérique limitée par trois grands cercles ( cercles de rayon égal à celui de la sphère ), à condition que la mesure de chacun des arcs soit inférieure à celle d'un demi-cercle (c'est -à -dire moins de 180 ° ). On trouve cette définition au début du livre I , et c'est là en fait la première mention qu'on connaît d'un triangle sphérique . Pour cette figure Ménélaos réserve le terme tpinneupov ( cf. Pappus, Synagoge VI 2 , t . II , p . 476, 16-17 Hultsch ), un terme qu'Euclide ( > * E 80) avait utilisé auparavant dans ses Éléments pour désigner les figures triangulares rectilinéales. Comme le remarque Bulmer - Thomas 2 , p. 297 , le choix délibéré de ce terme pour un triangle sphérique semble témoigner d'une volonté d'innover chez Ménélaos. C'est le terme qui sera utilisé plus tard par Ptolémée pour le même type de triangle. Le livre I s'occupe des aspects les plus généraux des sphériques au sens ancien de ce terme, c'est - à -dire de la géométrie de la surface de la sphère. Ménélaos y jete les bases pour étudier la trigonométrie sphérique de la même façon qu'Euclide avait étudié la trigonométrie plane . Il met à contribution pour ses démonstrations concernant un triangle sphérique des propositions analogues

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à celles qu'Euclide avait utilisées pour un triangle plat dans le livre I de ses Élements. Cependant, il semble que Ménélaos n'est pas toujours satisfait de la méthode de démonstration par reductio ad absurdum souvent employée par Euclide, et qu'il propose un traitement plus complexe et systématique. Le livre II s'occupe de l'application de la géométrie sphérique à l'astronomie , car presque tous les problèmes d'astronomie exigent la réalisation de calculs avec un triangle sphérique. Pour résoudre un triangle sphérique, par ailleurs, il suffit de connaître au moins trois de ses six données ( trois côtés et trois angles ). A ce sujet, Ménélaos se fonde de toute évidence sur le traitement que Théodose de Bithynie ( F II - DI“) avait fait antérieurement dans ses Sphaerica, mais ses démonstrations sont encore une fois tout à fait différentes. Finalement , le livre III est consacré au développement de la trigonométrie sphérique proprement dite. La démonstration initiale et fondamentale du livre est la proposition que l'on connaît depuis longtemps comme « le théorème de Ménélaos » ( ou « proposition transversale » ) et qui concerne le problème capital de l'intersection de trois grands cercles sur la surface d'une sphère, mettant en connexion six arcs de grand cercle : sous sa forme la plus complète, ce théorème fournit une condition nécessaire et suffisante pour le co-alignement de trois points. La démonstration de ce théorème, nous est connue aussi par Ptolémée , Syntaxis mathematica I 13 , t. I 1 , p. 68 , 14 – 76,9 . Pour les détails géométriques de cette démonstration complexe , cf. Orinsky 1 , col . 834 sq.; 23 O. Neugebauer, A history of ancient mathematical astronomy, In three parts with 9 plates and 619 figures, coll. « Studies in the history of mathematics and physical sciences » 1 , Berlin/ Heidelberg /New York 1975 , Part One , p. 26-30 ; 24 B. L. van der Waerden, Erwachende Wissenschaft : ägyptische, babylonische und griechische Mathematik, aus dem Holländischen übersetzt von H. Habicht mit Zusätzen des Verfassers, Zweite, ergänzte Aufl., coll . « Wissenschaft und Kultur» 8 , Basel /Stuttgart 1966, p. 452-455 ; 25 G. J. Toomer, « Introduction (d ) : Chronology and calendars » , dans Ptolemy's Almagest, transl. and ann ., coll . « Duckworth Classical , Medieval and Renaissance editions » , London 1984 , p. 18 (« Introduction » . 5. ( f) « Explanations of special terms » , ( i ) « Geometrical » . « Menelaus Configuration and Menelaus Theorem » ), cf. ibid ., p. 69 n . 84. ASTROLOGIE Nous ne possédons plus rien de l'ouvrage ( ou des ouvrages) où Ménélaos aurait pu faire l'exposé des observations astronomiques que la tradition lui attribue et qui ne sont sans doute qu'une partie de celles qu'il a pu réaliser. Nous faisons référence aux deux observations réalisées à Rome dans la première année du règne de Trajan , en 98 , et dont Ptolémée , Syntaxis mathematica VII 3 , t. I 2, p. 30, 18 – 33 , 3 Heiberg, fait un rapport précis (cf. Neugebauer 23, p . 41 , 60, 117 , 288 , 848 ; Toomer 25, p . 336, 338 )..

La première observation (p. 30, 18 – 32, 3 Heiberg ) eut lieu cette année - là le 15/16 Mechir du calendrier égyptien ( = 10/11 janvier) à 4 heures de la nuit, moment de l'occultation de Spica par la lune, phénomène qui a duré jusqu'à 7 heures. La deuxième observation (p. 33, 3 – 34, 8 ) date du 18/19 Mechir (= 13/14 janvier) à 7 heures de la nuit : la corne sud de la lune paraissait alignée avec les étoiles centrales et les plus méridionales situées en face du Scorpion, le centre de la lune étant situé à l'est de cette ligne droite , aussi distante de l'étoile centrale que celle-ci l'était de l'étoile la plus méridionale, et à ce moment l'étoile nord (B du Scorpion) était occultée .

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26 A. A. Björnbo, « Hat Menelaios aus Alexandria einen Fixsternkatalog verfasst ? » , BiblMath 2 ( 3 ° sér.), 1901, p. 196-212 , sur la base des conjectures faites par al- Bättani ( † 929 ) , Al- Sufi ( † 986) et Hajji -Khalifa ( † ca 1658 ), selon lesquelles Ptolémée a obtenu ses coordonées des étoiles en ajoutant 0,25 ° aux longitudes trouvées par Ménélaos environ 50 ans avant, suppose que ce dernier a composé un ouvrage contenant un catalogue des étoiles fixes, auquel appartien draient ses observations astronomiques. En réalité , il n'y a là que des spécula tions sans aucun fondement. Cf. à ce sujet 27 E.B. Knobel, « The chronology of star catalogues » , Memoirs of the Royal Astronomical Society [London ] 43 , 1875-1877 , p. 1-74, notamment p. 3 sq. ; 28 C. A. Nallino (édit. ), Al- Battani sive Albatenii. Opus astronomicum , coll . « Pubblicazioni del reale Osserva torio di Brera in Milano » , 40, 1-3 , t . I , Milano 1903, p. 292 , t . II , 1907 , p . 269 sqq . ; 29 J. L. E. Dreyer, « On the origin of Ptolemy's catalogue of stars » , Monthly notices of the Royal Astronomical Society ( London ) 77 , 1917 , p. 528-539 ; 30 Id. , « On the origin of Ptolemy's catalogue of stars. II » , Monthly notices of the Royal Astronomical Society 78 , 1918 , p. 343-349 ; 31 H. Vogt, « Versuch einer Wiederherstellung von Hipparchs Fixstern verzeichnis » , Astronomische Nachrichten ( Berlin ) 224 , 1925 , col . 17-54 , notamment col . 37 sq. Les observations de Ménélaos ne semblent pas avoir fait partie d'un cata logue complet . Dans l'état actuel de nos connaissances, le premier catalogue d'étoiles , même s'il n'était pas fondé sur des coordonnées orthogonales de l'écliptique , est celui d'Hipparque, et le deuxième celui de Ptolémée contenu dans l’Almageste ( Syntaxis mathematica ) : cf. Bulmer-Thomas 2 , p . 297 ; Neugebauer 23, p. 288 .

MÉCANIQUE Quant à l'ouvrage de mécanique Sur la science des poids et la distribution des corps mixtes que la tradition arabe attribue à Ménélaos, on a supposé qu'il s'occupait d'hydrostatique, tout en étudiant les balances traitées par Archimède et d'autres inventées par Ménélaos lui-même, et qu'il s'intéressait de façon plus particulière au poids spécifique et à l'analyse des alliages . D'après Raïos 4 , chap. IV ( cf. chap . II ) , Ménélaos aurait inventé et décrit dans son ouvrage un appareil d'hydrométrie, l'aréomètre, pour la mesure des différences de densité des liquides. En effet, tout en reprenant une hypothèse lancée pour la première fois par Bauerreiss, il montre que les sources qui mentionnent cette balance hydrostatique (par exemple , Synésius , Epist. 15 à Hypatia) se réfèrent en fait à deux modèles , et il propose d'attribuer à Ménélaos la paternité du modèle allégué par le Carmen de ponderibus et mensuris de Remmius Flavinus ( IVP ) . Ménélaos aurait été lui - même proprement l'inventeur de cet instrument plutôt qu'il ne l'aurait redécouvert après Archimède. Cf. 32 A. M. Heinen , « The treatise on alloys by Menelaos of Alexandria : an example of an ancient Greek text lost in the original but preserved in an Arabic translation » , dans M. Pavan & U. Cozzoli (édit. ) , L'eredità classica nelle lingue orientali, coll . « Acta encyclopaedica » 5 , Roma 1986 , p. 171-180 ; 33 D. K. Raïos, Menelaus Alexandrinus et Remmius Favinus revisitati, loannina 1991 , 23 p.; Bulmer - Thomas 2 , p. 3000 ; Folkert & Lorch 3, col . 1235 . Influence. Le théorème de Ménélaos, repris par Ptolémée, est resté jusqu'à la fin du Xe siècle le fondement de l'astronomie , et il a été souvent employé même

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plus tard . L'importance de Ménélaos dans la tradition arabe est bien attestée par tout ce que nous avons dit notamment à propos des Sphériques. Ajoutons qu’al Māhāni a écrit un livre, perdu , où il tentait d'améliorer les descriptions fournies par Ménélaos dans son traité . Dans le domaine de l'astronomie , Ptolémée se fonde sur les observations astronomiques réalisées par Ménélaos à Rome ( cf. supra ) la première année du règne de Trajan, qui correspond à l'an 845 de l'ère de Nabonassar (qui a régné en 747-734") pour comparer la position des étoiles avec celle de l'observation qui avait été réalisée par Timocharis l'an 454 de l'ère de Nabonassar. A travers cette comparaison , il arrive à la conclusion ( et peut- être Ménélaos avant lui ) que les étoiles s'étaient avancées vers l'est environ 3° 55 ' en 391 ans, ce qui lui permettait de vérifier la découverte faite originairement par Hipparque selon laquelle l'équinoxe était en mouvement vers l'ouest à raison de 1 ° par siècle. Enfin , c'est en comparant la position de Spica ce jour- là avec celle rapportée par Timocharis qu'Hipparque avait été amené à postuler la précession des équinoxes ( cf. Neugebauer 23, p . 60 , 117 ; Bulmer - Thomas 2 , p. 297 ) . En ce qui concerne la mécanique , nous avons déjà noté la possibilité que Ménélaos ait été la source d'un passage du Carmen de ponderibus et mensuris de Remmius Flavinus (IVP) , même si Ménélaos n'est jamais mentionné dans ce poème. PEDRO PABLO FUENTES GONZÁLEZ.

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121 MÉNÉLAOS D'ANAIA (en Carie) RE 9

Péripatéticien connu d'Étienne de Byzance (s.v. 'Avaia, p .92, 6 Meineke). Son nom a été restitué dans un contexte incertain et lacunaire en PHerc. 1746 fr. V 2 ( p . 92 Crönert) par W. Crönert, Kolotes und Menedemos, p. 92 n . 450 ( [ Mevé ]NQoç). Il aurait dédié une épitomè à un certain [ A ]dra [ste ) de Myndos (** A 25 ). TIZIANO DORANDI. I

122 MÉNÉPHYLOS

Philosophe péripatéticien . Il enseignait vraisemblablement à Athènes, où Plutarque mentionne sa présence dans l'entourage d'Ammonios [ * A 138 ] ( Quaest. Conv. IX 6 et 14 . BERNADETTE PUECH, 123 MÉNESTOR DE SYBARIS RE

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Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique, V. pyth. 36, 267 ; p . 145 , 1 Deubner. Témoignages : DK 32 ; M. Timpanaro Cardini , I Pitagorici. Testimonianze e frammenti, fasc . 1 , coll . « Biblioteca di studi superiori » 28 , Firenze 1958 , ( n . 12 ) , p. 162-169 . Ménestor est considéré comme le père de la botanique et le premier à avoir étudié la physiologie des plantes ; ses doctrines sont partiellement connues grâce à quelques témoignages conservés dans les écrits botaniques de Théophraste (Historia plantarum , De causis plantarum ) . 1 W. Capelle, « Zur Geschichte der

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MÉNÉSTRATOS

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griechischen Botanik » , Philologus 69, 1910 , p. 264-291, datait l'activité de Ménestor de la première moitié du Ve siècle av . J.-C. , considérant que ses théories étaient plus primitives que celles d'Empédocle ( » E 19) . En réalité, selon Diels ( DK 32, t . I , p. 375 ) et 2 H. Steier, art. « Menestor » , RE XV 1 , 1931 , col . 853-855 , le témoignage de Théophraste , De causis plantarum I 21 , 5 (συνηκολούθηκε ... Μενέστωρ ) suggere que Ménestor était postérieur a Empe docle. Sa date de naissance devrait être située vers 480 av . J.-C. 3 W. Capelle, « Menestor redivivus » , RHM 104 , 1961 , p. 47-69 , notamment p . 47 n. 2 , a par conséquent révisé sa précédente position . Plus récemment, 4 L.I. Zhmud , Wissenschaft, Philosophie und Religion im frühen Pythagoreismus, coll . « Antike in der Moderne » , Berlin 1997 , p. 72-73 et 244-248, penche à nouveau pour la postériorité d'Empédocle, tout en signalant que la rareté des témoignages laisse la question douteuse . Sur Ménestor voir également 5 C. Viano , « Théo phraste, Ménestor de Sybaris et la ovuuetp a de la chaleur” » , REG 105 , 1992 , p. 584-592 ; 6 A .M . Battegazzore, « La presenza celata di Menestore e di Teofrasto nella disputa botanica di Plutarco sull’edera, che non attecchisce nei giardini di Babilonia ( Quaest. conv . III 2 , 648 b -649 e ) » , dans Multas per gentes. Studi in memoria di Enzo Cadoni, a cura del Dipartimento di Scienze Umanistiche e dell'Antichità. Sassari 2000 , p. 19-39 . BRUNO CENTRONE .

124 MÉNÉSTRATOS RE 8

D IIIa

Épicurien , destinataire d'une lettre de son maître Métrodore de Lampsaque ( 2 - M 152 ) , dont un extrait est conservé par Clément, Stromates V 14, 138 , 2 , t. II, p . 419 , 21-24 Stählin : Mntpodupov tə , xa tou 'Enixoupe ou yevouévou, ενθέως ταύτά γε ειρηκότος: « μέμνησο , Μενέστρατε, διότι, θνητός φύς και λαβών β ον ώρισμένον, αναβάς τη ψυχή έως επί τον αιώνα και την απειρ αν των πραγμάτων κατείδες και τα έσσόμενα πρό τ' εόντα ” » . « Métrodore , bien qu'il fût un épicurien , a prononcé ces paroles divinement inspirées : “ Souviens -toi, Ménéstrate , que , né mortel et avec une vie limitée , étant cependant monté , par ton âme , jusqu'à l'éternité et à l'infinité des choses , tu as vu aussi “ l'avenir et le passé " ( Hom . , Il . I 70 ) » ( trad . Le Boulluec ) . Voir A. Körte, Metrodori Epicurei fragmenta, coll . « Jahrb . f. Philol . , Suppl . » 17 , Leipzig 1890 , fr. 37 , p. 557 . Ce passage est une reprise d'une des Sentences vaticanes ( $ 10 ) : Méuvnoo ότι θνητός ών τη φύσει και λαβών χρόνον ώρισμένον ανέβης τοϊς περί φύσεως διαλογισμούς επί την απειρ αν και τον αιώνα και κατείδες, “ τα τ' łóvta tá t' Łoooueva npó t' ćóvta ” . « Souviens -toi qu'étant mortel par nature et ayant reçu une durée temporelle limitée, tu t'es élevé par les réflexions sur la nature jusqu'à l'infinité et l'éternité, et tu as vu “ ce qui est, ce qui sera et ce qui fut" » . Voir H. Usener, « Epikurische Spruchsammlung » , WS 10 , 1888 , p. 175 201 , notamment p. 192 , 10 . Cf. W. Capelle, art. « Menestatos » 8 , RE XV 1 , 1931 , col . 856 . RICHARD GOULET.

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M 125

MÉNESTRATOS

1

125 MÉNESTRATOS RE 7

Ménestratos est présenté comme un cynique dans une épigramme de Lucillius, conservée dans l'Anthologie grecque XI 153 : « Que tu sois un cynique (XUVLXÓV ), Ménestratos, que tu ailles pieds nus et que tu aies froid , absolument personne ne te le reproche. Mais si tu te mets à voler mon pain et mes miettes sans pudeur aucune , alors moi je lève mon bâton et les gens vont t'appeler chien ( xúva ) » . On ne sait s'il faut l'identifier avec le Ménestratos mentionné égale ment par Lucillius dans une autre épigramme qui ne fait point intervenir d'élé ment cynique ( ibid. XI 104 ). K. von Fritz, art. « Menestratos» 7 , RE XV 1 , 1931 , col . 856, ne mentionne pas l'épigramme de XI 153 . MARIE-ODILE GOULET -CAZÉ. 126 MÉNEXÈNE DE PÉANÉE RE 8 PA 9973

FVa

Ménexène , fils de Démophon et issu d'une grande famille athénienne (Ménexène 234 a) , apparaît comme un disciple de Socrate dans trois dialogues de Platon , le Lysis, le Phédon ( 59 ) et le Ménexène, ainsi nommé en son honneur ( 234a ) . Diogène Laërce V 22 rapporte qu'Aristote aussi aurait composé un Ménexène. Le même titre avait été donné à des dialogues socratiques de Glaucon [PG 21 ) ( D.L. II 124 ) et d'Antisthène ( > A 211 ] ( D.L. VI 18 ) . On sait que Ménexène était le cousin de Ctésippe de Péanée [ 2C 227 ] ( Lysis 203 a, Phédon 59 d ) , qui avait assuré sa formation sophistique (Lysis 211 c ) . Son père Démophon n'est pas le fils d'Hippocrate ( né en 450 et qui faisait partie de l'entourage de Périclès ). Ménexène était présent, tout comme Ctésippe, lors de la mort de Socrate ( Phédon 59 b) . Ménexène était également le nom du plus jeune fils de Socrate (RE 1 ). Lors de l'entretien avec Socrate rapporté dans le Lysis, Ménexène est un jeune adolescent qui , tout comme Lysis ( PL 102 ] (Lysis 208 c ) semble-t- il , n'a pas encore atteint l'âge auquel un jeune devient son propre maître et où il n'est plus accompagné d'un pédagogue ; il a donc aux alentours de 16 ans. Un certain Hippothalès, fils de Hiéronymos , recherche ses faveurs ( 204 d , 205 a , b , e , 206 c , 210 e ) . Avec Lysis, il serait l'un des plus jeunes interlocuteurs de Socrate. Ménexène s'est déjà taillé , malgré son jeune âge , une réputation d'éristique", c'est- à -dire de dialecticien versé dans la pratique de la réfutation pour elle -même ( 211 b- c ) . Pour un inventaire des hypothèses faites, dans le domaine de la prosopographie, sur ce personnage , voir Debra Nails , The People of Plato , s . v . « Menexenus of Athens , son of Demophon » . Cf. R. Hanslik , art. « Menexenos » 8 , RE XV 1 , 1931 , col . 858 . LUC BRISSON.

127 MÉNEXÉNÈ RE

Iva

D 124 ) , dont Une des cinq filles du philosophe mégarique Diodore Cronos ( Philon , le disciple ou condisciple de Diodore, rapporte qu'elles étaient à la fois dialecticiennes et d'une grande pureté de meurs . Voir K. Döring , Die

M 129

MÉNIPPE DE GADARA

467

Megariker, fr. 101 et 102 ( = fr. II F 6 Giannantoni) ; commentaire p . 125-126. Ses sœurs se nommaient Argeia ( > A 329 ), Artemisia ( » A 432 ) , Pantacleia et Théognis. ROBERT MULLER . 128 MÈNIOS D'APOLLONIA

ép. imp.

Ce philosophe d'Apollonia de Mysie , gendre du philosophe Magnus, de la même cité ( » M 12) , est connu par l'inscription de la statue de sa femme Magnilla ( M11) . BERNADETTE PUECH .

129 MÉNIPPE DE GADARA RE 10

FIV- M III

Philosophe cynique , d'origine phénicienne (Diogène Laërce VI 99 : ανέκαθεν ήν Φοίνιξ))..

Datation : Pour établir la datation de Ménippe il est important de savoir de qui il était le disciple : de Cratès de Thèbes ( ™ C 205 ) ou de Métroclès ( PM 141 ) ? Plutôt de Cratès. Voir 1 M.-O. Goulet- Cazé , « Une liste de disciples de Cratès le Cynique en Diogène Laërce 6,95 » , Hermes 114 , 1986 , p . 247-252 , qui a suggéré que les deux développements sur Métroclès et Hipparchia ( * H 138) qu'on trouve au livre VI 94-98 ont été insérés dans la Vie de Cratès et que l'expression uaontai 8' aŭtoŨ de la fin de VI 93 devait être suivie d'une série de noms de disciples de Cratès qui commençait par Métroclès; cette liste originelle n'a pas disparu ; on la retrouve dans les lignes qui suivent la mention de la mort de Métroclès en VI 95 et qui s'ouvrent par la répétition de la formule uaontal 8' aŭtoŨ, laquelle renoue avec l'énumération de VI 93 : « Ses disciples (uaOntal 8 ' aŭtoũ ) : Théombrote et Cléomène ; disciple de Théombrote : Démétrius d'Alexandrie ; disciples de Cléomène: Timarque d'Alexandrie et Échéclès d'Éphèse - cependant Échéclès fut aussi auditeur de Théombrote - , Échéclès dont Ménédème , sur qui nous reviendrons, fut le disciple . Parmi ses disciples ( év aútoīc), Ménippe de Sinope (sic) aussi fut célèbre » . Selon cette hypothèse, Hipparchia, dont la Vie suit la liste, fait partie des disciples de Cratès, ce à quoi on s'attendait, alors que dans l'autre hypothèse elle serait disciple de son frère Métroclès, ce qui ne serait guère vraisemblable . Trois détails concer nant Ménippe s'harmonisent bien avec son éventuelle qualité de disciple de Cratès : en VI 99 il est présenté comme citoyen de Thèbes ; en VI 100, Diogène Laërce, dans l'épigramme qu'il a lui-même composée, fait encore allusion au fait que le philosophe se pendit dans cette même ville , qui est la patrie de Cratès ; enfin dans les Fugitifs de Lucien , un des personnages du dialogue , Philosophie, s'exprime ainsi : « En fait, Antisthène et Diogène, et peu après Cratès et Ménippe, celui que vous connaissez bien , m'ont persuadée de prolon ger pour un temps très bref mon séjour » ; or cette formulation se comprendrait bien si les deux groupes Antisthène et Diogène , Cratès et Ménippe, recouvraient chacun un ensemble maître et disciple . La datation de Ménippe proposée jusqu'ici situait le philosophe dans la première moitié du II s . av . J.-C. 2 R. Helm , Lucian und Menipp, Leipzig

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Berlin 1906, réimpr. Hildesheim 1967 , p. 96-98 , a analysé avec précision les allusions à des événements historiques que l'on trouve dans l'Icaroménippe de Lucien ( P + L 66 ) et a constaté qu'elles n'allaient pas au -delà de l'année 2704. Par conséquent si Lucien a emprunté ces allusions à un écrit de Ménippe, celui-ci a dû être composé juste après 2702. 3 K. Döring, GGP, Antike 2/1 , Basel 1998 , p . 310-312 , notamment p . 310-311 , s'appuyant sur les remarques de Helm et sur le fait que Diogène Laërce apparemment range Ménippe parmi les disciples de Métroclès, le situe dans la première moitié du III s . av . J.-C. Si l'hypothèse que nous avons développée dans 2 , qui fait de Ménippe un disciple de Cratès est juste , il faut certainement remonter un peu la naissance du philosophe. Le floruit de Cratès indiqué par Diogène Laërce VI 87 étant la 113 ° olympiade, soit 328 325 , on pourrait proposer comme datation de Ménippe : dernier quart du Ive s./première moitié du III s . av . J.-C. Fragments : Curieusement les textes concernant Ménippe n'ont pas été rassemblés par G. Giannantoni dans ses deux éditions des Socratis et Socratico rum Reliquiae en 1983-1985 et en 1990. Les six fragments conservés des écrits ménippéens ont été regroupés par 4 A. Riese , M. Terenti Varronis Saturarum Menippearum Reliquiae, Leipzig 1865 , p . 245-246 . Döring 3, p . 310, indique les références des principaux témoignages : Diogène Laërce VI 29.95.99-101 et peut-être 102 ; Lucien : Icaroménippe, Piscator, Bis accusatus, Nekuomanteia , Fugitivi, Dialogi mortuorum ; Athénée , Deipnosophistes I , 32 e ; XIV , 629 e ; XIV , 664 e ; voir aussi IV , 160 c ; Probus, in Verg. Bucol. VI 31 , p . 336 Hagen ; Varron, fr. 516-518 et 542 Bücheler ; Cicéron, Acad. post. I 8 ; Strabon XVI 2, 29 ; Aulu-Gelle, II 18 , 6-7 ; Marc Aurèle VI 47 et Souda, s.v. palóc . Il précise que pour 5 J.C. Relihan , « Menippus the Cynic in the Greek Anthology » , SyllClass 1 , 1989 , p. 55-61 , le Ménippe d'Anthologie Palatine IX 74 et IX 367 est le cynique . Voir aussi 6 Q. Cataudella , « Un frammento di Menippo di Gadara » , Sileno 1 , 1975 , p . 143-154 ( l'auteur attribue aux Satires de Ménippe les lignes 39 à 44 d'un fragment dans POxy. 3010 , intitulé par l'éditeur 7 J. Parsons « Narrative about lolaus » , dans The Oxyrhynchus papyri, t . XLII, coll . « Graeco -Roman Memoirs » 58 , London 1974 , p. 34-41, notamment p . 37 ) ; 8 M. W. Haslam , « Narrative about Tinouphis in prosimetrum », dans P. Turner, Papyri : Greek and Egyptian ( Mélanges E.G. Turner ), coll . « Graeco -Roman Memoirs » 68 , London 1981 , p . 35-45, qui conclut de l'étude d'un fragment en prosimètre de PHaun. inv. 400 du second siècle que la forme des vers utilisés (des trimètres iambiques catalectiques avec une diérèse médiane qui transforme les vers en couplets), pourrait être une invention ménippéenne. Études . 9 R. Helm, art. « Menippos » 10 , RE XV 1 , 1931 , col . 888-894 ; 10 C. Wachsmuth , Sillographi Graeci, Leipzig 1885 , p. 78-84 ; 11 F. Susemihl, GGLA , t . I , p. 44-46 ; 12 J. Geffcken , « Menippos tepi Ovolwv » , Hermes 66 , 1931 , p. 347-354 ; 13 J. Martin, Symposion. Die Geschichte einer literarischen Form , coll. « Studien zur Geschichte und Kultur des Altertums » 17 , Paderborn 1931 , notamment p . 211-240 ; 14 Barbara P. McCarthy , « Lucian and Menippus » , YCIS 4 , 1934, p . 3-55 ; 15 D.R. Dudley , A History of Cynicism , p . 69-74 ; 16 G. Donzelli , « Una versione menippea della Alobrov Mpãous ? » ,

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RFIC 38 , 1960, p. 225-276 ; 17 D. Bartonková, « Prosimetrum , the Mixed Style , in Ancient literature » , Eirene, 14, 1976, p. 65-92 ; 18 R. B. Branham , Unruly Eloquence : Lucian and the Comedy of Traditions, coll . « Revealing Antiquity » 2 Cambridge ( Mass . ) / London 1989 , 279 p . , notamment p . 14-28 ; 19 J.C. Relihan , « Vainglorious Menippus in Lucian's Dialogues of the Dead » , ICS 12 , 1987 , p. 185-206 ; 20 Id . , Ancient Menippean Satire, Baltimore 1993 , 306 p ., notamment p . 39-47 (avec une bibliographie importante ) ; 21 Id . , « Menippus in Antiquity and the Renaissance », dans B. Branham et M.-O. Goulet-Cazé ( édit . ) , The Cynics. The Cynic Movement in Antiquity and its Legacy, Berkeley /Los Angeles 1997 , p . 265-293 . Biographie: Ménippe était un esclave ( Achaïcos ( P - A 6) , Éthiques, cité par Diogène Laërce VI 99 ; Aulu -Gelle , Nuits Attiques II 18 , 6) originaire de Gadara (Strabon XVI 2, 29) . Sur Gadara, dont Strabon dit qu'elle était la patrie de Ménippe le onovdoyérocos, de Méléagre, de l'épicurien Philodème et du rhéteur Théodore, voir 22 T. Dorandi, « La patria di Filodemo » , Philologus 131 , 1987 , p. 254-256. Après avoir distingué deux villes appelées Gadara, l'une dans la Décapole et voisine du lac de Tibériade, l'autre dans la Pérée inférieure, et la ville de Gazara ( la Gezer de la Bible), il conclut que Strabon ne connaissait l'existence que d'une seule ville qu'il appelait Gadara, mais qui était en fait Gazara , et que la ville d'où étaient originaires les personnages en question n'était pas Gazara , ville fortement ancrée dans la tradition juive, mais bien plutôt la Gadara de la Décapole ; sur Gadara en Décapole, voir le site internet de Menahem Luz : http : //research . hai ac . il/ ~mluz/ gadara. folder / gadara2. html). Voir aussi 23 M. Hadas, « Gadarenes in Pagan Literature » , CW 25 , 1931-1932 , p. 25 30, notamment p. 26-28 ; 24 M. Hengel , Judentum und Hellenismus, Tübingen 1969, p. 153 158 ; 25 J. Geiger, « Athens in Syria : Greek Intellectuals of Gadara » , Cathedra 35 , 1985 , p. 3-16, notamment p. 11-12 (en hébreu ). Ménippe était au service d'un certain Baton dans la région du Pont, c'est- à dire de la Mer Noire (Dioclès de Magnésie cité par D. L. VI 99 ), d'où proba blement le qualificatif de « Sinopeus» que lui attribue D.L. VI 95. Il acquit ensuite sa liberté : « mendiant de façon pernicieuse par amour de l'argent , Ménippe eut les moyens de devenir citoyen de Thèbes » ( VI 99 ). Il pratiquait l'usure, prêtant « à la grosse aventure » et prenant des gages , ce qui lui permit d'amasser une fortune colossale et lui valut son surnom d'hèmérodaneistès, « prêteur à la journée » (Hermippe cité par D.L. VI 99 = fr. 39 Wehrli , 80 Bollansée ). Sur le sens du passage d'Hermippe voir 26 P. Millet , « Note on a Greek text relating to credit transactions» , PCPhS, 1980 , 26 , p . 67-69 ; 27 J. Bollansée , dans FGrHist cont. IVA , fasc. 3 , n° 1026 , commentaire du fr. 80, p. 542-545 . Ces détails donnés par le biographe péripatéticien Hermippe ( H 86 ) sont considérés généralement comme douteux (Dudley 15 , p. 70) ; ils ont pu être inspirés par la biographie de Diogène le Cynique ( D 147 ) et l'épisode de la falsification de la monnaie. Finalement, Ménippe, victime d'un complot, fut dépouillé de tous ses biens et de désespoir se pendit ( D.L. VI 100 = Hermippe, fr. 39 Wehrli, 80 Bollansée ) . Si le suicide s'accorde avec les vues cyniques, le motif allégué, la perte des biens , et l'avarice prêtée à Ménippe sont fort peu cyniques . Sur le passage laërtien emprunté à Hermippe, voir le commentaire de 28 F. Wehrli, Hermippos der Kallimacheer, coll . « Die Schule des Aristoteles » , Supplementband I , Basel/Stuttgart 1974 , p. 69. On peut déceler

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un écho du suicide de Ménippe chez Lucien , Dialogues des morts 20 [ 10] , $ 11 (έσπευσα επί τον θάνατον καλέσαντος μηδενός ) . Varron écrivit une satire sur la mort de Ménippe ( Taon Mevíntov ) et un Testament (cf. fr. 516-518 et 542 Bücheler ). Diogène Laërce se montre sévère à l'égard de Ménippe dans le petit poème qui clôt le chapitre consacré à sa vie : « Phénicien par la race , mais chien de Crète, I Prêteur à la journée - tel était son surnom - 1 Ce Ménippe, tu le connais peut-être. I A Thèbes, le jour où , victime d'une effraction , Iil perdit tous ses biens , sans réfléchir à ce qu'est la nature d'un chien , il se pendit » . Le qualificatif de Crétois utilisé dans ce poème s'explique peut-être par le fait que les Crétois étaient connus dans l'Antiquité par la réputation de leurs trafiquants et de leurs pirates. Pour une autre interprétation , voir 29 J.C. Relihan, « Menippus , the Cur from Crete » , Prometheus 16 , 1990 , p . 217-224 ( après avoir rappelé que 30 H.G. Huebner, Commentarii in Diogenem Laertium , t. II, Leipzig 1833 , p. 93 , renvoie à plusieurs passages attestant les vertus des chiens crétois afin d'expliquer l'allusion laërtienne au « chien de Crète » , il suggère qu'il pourrait s'agir d'un cas de cynanthropie, c'est- à -dire d'une mélancolie qui se traduit par une attirance pour les tombes et le monde des morts , et que la tradition situe surtout en Crète ). Faut-il voir en Ménippe un « cynique caricatural » (31 Zeller, Die Philosophie der Griechen in ihrer geschichtlichen Entwicklung dargestellt, t . II 1 , 4ème edition , Leipzig 1889 , p . 286 ) ou suivre Varron qui le désignait ainsi : « Menippus ille , nobilis quidem canis » et Lucien qui , en rangeant « MéVLITOS oútoç » , « ce fameux Ménippe » , aux côtés d'Antisthène, Diogène et Cratès (Lucien, Fugitivi 11 ) le plaçait parmi les grands du cynisme ? Écrits. D.L. VI 101 lui attribue treize livres dont il mentionne plusieurs titres : -l'Évocation des morts ( Nexula ) influencée probablement par les paro dies d'Homère (Odyssée XI ) dues à Cratès et source d'inspiration de plusieurs dialogues de Lucien ; - les Testaments (Alaoñxat) dans lesquels Ménippe

parodiait peut- être les testaments des philosophes, tels que nous les connaissons grâce aux Vies de Diogène Laërce par exemple ; – les Lettres pleines d'esprit prétées aux personnages divins ( Επιστολαί κεκομψευμέναι από των θεών προσώπου) , qui servirent de modele a Lucien pour ses Επιστολαί Κρονικαί ( Epistulae Saturnales ) ; - Contre les physiciens, les mathématiciens, les grammairiens, les enfants d'Épicure et leur célébration de la fête du vingtième jour (Προς τους φυσικούς και μαθηματικούς και γραμματικούς και Γονάς Επικούρου και τας θρησκευομένας υπ ' αυτών είκάδας). Peut - etre faudrait il diviser ce dernier titre en deux (Usener, Epicurea , p. LXIV , pense qu'il y a une lacune dans le texte laërtien avant xai Továc) ; mais si l'on conserve le texte tel qu'il est transmis par les manuscrits, la présence d'un seul mpós invite à traduire comme s'il s'agissait d'un seul titre . Apparemment Ménippe attaquait les épicu riens qui , parce qu'Épicure l'avait souhaité dans son testament (D.L. X 18 ) , célébraient, le vingtième jour de chaque mois , le souvenir du maître et de son disciple Métrodore . - Par ailleurs Diogène Laërce utilise en VI 29 la Vente de Diogène de Ménippe, un ouvrage qui a pu être influencé par la Vie d'Ésope et qui dut à son tour inspirer Lucien dans sa Biwv rpãouc ( cf. Donzelli 16). Dans

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cet ouvrage Ménippe s'était aussi probablement inspiré du Syleus d'Euripide . D. L. cite un court extrait de la Vente de Diogène, qui nous rapporte les propos tenus par Diogène de Sinope, prisonnier des pirates et mis en vente comme esclave au marché. Quand on lui demande ce qu'il sait faire, Diogène répond : « Commander des hommes » et il dit au crieur : « Crie cette annonce : quelqu'un veut- il s'acheter un maître ? » . C'est à partir de cet ouvrage, dont l'influence dut être considérable dans la constitution de la légende de Diogène, que s'est élabo rée la tradition sur l'épisode des pirates qui auraient fait Diogène prisonnier et l'auraient ensuite vendu à Corinthe où il devait être acheté par Xéniade . Ménippe, lui -même esclave , a voulu montrer dans ce texte que le sage est indifférent à l'esclavage. - Grâce à Athénée nous savons que Ménippe écrivit aussi un Banquet où , parodiant sans doute l'enseignement des stoïciens, il évoquait une danse appelée « Embrasement de l'univers » , xóQUOU Éxnúpwolç ( Deipnosophistes XIV 27 , 629 f ) et un Arcesilas (ibid ., XIV 85 , 664 e ) où il devait donner une description de repas dont Athénée cite les lignes suivantes : « C'était une réunion de joyeux buveurs et quelqu'un ordonna d'apporter une mattya lacédémonienne. Aussitôt circulèrent quelques perdreaux, des oies rôties et des pâtisseries délicates » . Toujours grâce à Athénée I , 32 e , nous connaissons un hapax forgé par Ménippe à propos de la ville de Myndes : áruonotiv tņu Múvdov, « Myndes la buveuse d'eau salée » ( cette expression pourrait être un morceau d'hexamètre ; cf. 32 M. Coffey , Roman Satire, London 1976 , p. 163 ) . En dehors de ces passages rien n'est conservé de son æuvre dont l'influence fut pourtant considérable. - La Souda, s.v. MéVLTITOS, M 613 , t . III , p. 363 Adler = Kassel -Austin , PCG VII , p. 3 , attribue à un MéVLATNOG, xwUixós , des comédies ( opauata ) dont un KépxwTES (Les Fourbes ). S'agit- il du même Ménippe ? Aucun autre témoignage n'atteste l'existence de ces comédies ménippéennes. L'apparat de l'edition Adler précise : « Μένιππος εξ "Έρμιππος detortum esse putat Meineke » . [ Il s'agirait alors d'Hermippos RE 5 , un poète de l'ancienne comédie attique .] On notera que même si Helm 1 met comme titres courants dans sa conclu sion , p. 343 : « Charakteristika der Satire Menipps» , p. 345 : « Menipps Vorbild . Gehalt seiner Satiren » , et p . 347 : « Menipps Satiren » , un seul témoignage ancien prête à Ménippe des Satires. Le grammairien du jer s . , M. Valerius Probus, sur Virgile , Bucoliques VI 31 , dans 33 Servii Grammatici qui feruntur In Vergilii carmina Commentarii recensuerunt G. Thilo et H. Hagen , t. III 2 ( = Appendix Serviana . Ceteros praeter Servium et scholia Bernensia Vergilii Commentatores continens), recensuit H. Hagen, Leipzig 1902, p . 336, emploie en effet le mot « satiras » : « ... Varro , qui sit Menippeus non a magistro, cujus aetas longe praecesserat, nominatus , sed a societate ingenii , quod is quoque omnigeno carmine satiras suas expoliverat » , « Varron , qui a été appelé ménippéen non point du fait d'un maître qui avait vécu bien longtemps avant lui , mais du fait d'une communauté d'esprit, parce que ce maître avait poli ses satires avec des vers de toutes sortes » . 34 C. A. Van Rooy, Studies in classical satire and related Literary Theory, Leiden 1965 , p. 177 n . 56, fait remarquer que très probablement la caractérisation de l'euvre de Ménippe comme « satyrae »

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par Probus a été suggérée par le titre de l'ouvrage de Varron « Saturae Menippae » . 35 J.C. Relihan , « On the origine of Menippean satire as the name of a literary genre » , CPh 79, 1984 , p . 226-229 , insiste sur le fait que Varron n'a pas introduit à Rome un genre qui aurait été connu comme « satire ménippée ». Un tel genre n'existait pas , il y avait seulement 150 livres de Varron qui avaient pour titre : « Satires Ménippées » . Ce sont les critiques modernes qui ont pensé que ce genre était antérieur à Varron. En revanche la grande caractéristique de ces Ménippées, c'est - à -dire le mélange de prose et de vers, est due directement à l'influence de Ménippe. L'authenticité de la production ménippéenne a été contestée , comme le signale D. L. VI 100 : « Il y a des gens pour dire que les livres qu'on lui attribue ne sont point de lui , mais de Denys ( voir 36 T. Dorandi , notice « Dionysios de Colophon » , D 179, DPHA II , p . 865 ] et de Zopyre, tous deux de Colophon , qui les auraient écrits ensemble pour s'amuser et les lui auraient donnés dans l'idée qu'il était fort capable de les vendre » ( il s'agirait de deux disciples d'Arcésilas A 302 ) ; cf. Index Academicorum , col . XX , p . 155 Dorandi ; 37 Id . , ( « Filodemo e l'Academia Nuova (PHerc. 1021 , XVIII -XXVI ) » , CronErc 17 , 1987 , p. 122 n . 23 ) . La description qu'on lit dans la Souda ( notice PaLÓS , O 180, t. IV , p . 710, 13 19 Adler) de Ménippe aux Enfers a été mise par erreur dans la Vie de Ménédème le Cynique ( - * M 118 ) de Diogène Laërce VI 102 à la suite d'une mauvaise interprétation de la forme abrégée Mev ( cf. 38 W. Crönert, Kolotes und Mene demos, p. 1-4 ) ; elle est certainement empruntée à la Nekyia de Ménippe. Voir Relihan 19, p. 194-195 . Ménippe innova sur le plan littéraire. Délibérément il mêla le rire et le sérieux , d'où le qualificatif de spoudogeloios que lui attribue Strabon XVI 2 , 29. Il utilisa à des fins comiques ( cf. l'expression employée par Dialogue , un personnage du Bis accusatus ( $ 33 ] de Lucien : xwuwÔõv xai yehwTOTOLWV) à la fois le genre du dialogue et celui de la lettre . Cette innovation eut des consé quences formelles, notamment l'utilisation du prosimètre. Ménippe en effet mêla la prose et la poésie, mais selon Helm 2 , p . 343 , qui s'appuie sur Lucien , les morceaux en vers n'étaient pas seulement des citations parodiques ou des parties intégrées dans le discours des personnages, ils servaient à la représentation de l'action elle - même . Le témoignage de Lucien , Bis accusatus 33 , mérite d'être cité . Un des personnages, Dialogue , présente Ménippe comme un chien dont « la morsure est inattendue , dans la mesure où il mord et rit en même temps » ( TÒ δήγμα λαθραίον , όσο και γελών άμα έδακνεν ) , et il explique comment Ménippe l'a lui - même maltraité : « Le plus monstrueux de tout, c'est que je suis devenu une étonnante mixture (xpãouv ); je ne suis pas en prose et je ne chevau che pas les vers (ούτε πεζός είμι ούτε επί των μέτρων βέβηκα ) , mais j'ai l'air, pour ceux qui m'écoutent, d'une apparition composite et étrange (ouv Oetów tl xai EÉvov págua ), à la façon d'un hippocentaure » ). L'innovation était si caractéristique que Varron désigna à partir du nom de Ménippe un nouveau genre littéraire : la « satire ménippée » appelée encore la satire « cynique » (Aulu Gelle II 18 , 7 : « ille Menippus cujus libros M. Varro in satiris aemulatus est ,

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quas alii “ Cynicas”, ipse appellat “ Menippeas” » ; Macrobe, Saturnales I 11 , 42 , qui reprend exactement ce que dit Aulu-Gelle ) . Il serait imprudent de tirer des écrits de Varron et de Lucien , même s'ils sont imprégnés sans aucun doute de l'esprit de Ménippe, des conclusions trop précises sur le contenu et la forme de l'œuvre ménippéenne. Voir Relihan 20 , p. 39-48 et 228-233 . Il est possible que les Lettres de Ménippe soient à l'origine du genre de la poésie épistolaire héroï que que devait illustrer ensuite brillamment Ovide dans ses Epistulae Heroidum (cf. 39 H. Dörrie , Der heroische Brief: Bestandsaufnahme, Geschichte , Kritik einer humanistisch -barocken Literaturgattung, Berlin 1968 ). Diogène Laërce VI 99 se montre sévère à l'égard de l'euvre de Ménippe : « En vérité il n'offre rien de sérieux ( onovdatov oỦÔÉv ). Ses livres regorgent de moqueries (xatayé wrog) et présentent des ressemblances avec ceux « de son contemporain Méléagre » (pour une explication de cet anachronisme, voir notice « Méléagre de Gadara » , M 90 ). Autrement dit , Diogène refuse à Ménippe le onovôoYeoloc, la composante sérieuse, et ne lui laisse que celle qui relève du rire .

Marc Aurèle (Pensées VI 47 ) rangeait Ménippe parmi « ceux qui se moquent avec arrogance de la vie humaine mortelle et ephemere » (αυθάδεις αυτής της επικήρου εφημέρου των ανθρώπων ζωής χλευασταί ). De fait Menippe , avec son esprit à la fois satirique et plaisant , dénonçait le côté farcesque de la comédie humaine et se moquait des valeurs sociales. En bon cynique il critiquait tous ceux qui perdent leur temps à acquérir des connaissances vaines : physi ciens, mathématiciens, grammairiens. Manifestement il n'hésitait pas non plus à attaquer les philosophes , par exemple les épicuriens et leur pratiques ( D.L. VI 101 ) , peut-être aussi Arcésilas, qui était à la tête de la moyenne Académie et à qui il consacra un ouvrage ( Athénée XIV , 664 e ) . Influence: L'influence de Ménippe fut grande. En Grèce elle s'exerça sur Méléagre de Gadara ( » M 90 ) qui « a d'abord concouru avec les Grâces ménip péennes » (npõra MɛvinneÍOLÇ outpoyáoaç Xáploiv ) [ Anth. Pal. VII 417 , 4 ] , et plus tard sur Lucien qui était tout imprégné de ses æuvres , comme l'a bien montré Helm 2. Les nombreux dialogues de Lucien qui mettent en scène Ménippe ou qui se sont inspirés de lui , par exemple Ménippe ou la Nécyo mancie , l'Icaroménippe ou l'homme au - dessus des nuages , Charon ou les inspecteurs, La Traversée et Les Dialogues des Morts, doivent être cependant maniés avec précaution si l'on veut en tirer des conclusions sur les écrits ménip péens, car nous sommes incapables de déterminer l'ampleur de l'emprunt fait par Lucien à Ménippe. Alors que pour Helm 2 , Lucien était avant tout un imita teur de Ménippe, on a, depuis , davantage mis l'accent sur son indépendance ( cf. McCarthy 13 , p . 55 , qui s'oppose vivement à Helm et refuse de voir en Lucien « a revised Menippus » , même si elle reconnaît la dette qu'il a contractée). 40 J. Bompaire, Lucien écrivain, Paris 1958 , p . 182-185 , estime que le Ménippe de Lucien doit une bonne part de sa pensée et aussi de son être aux héros de la secte , surtout à Diogène avec qui il partage les mêmes anecdotes, les mêmes travers et les mêmes mots ; le parallélisme est frappant d'une part entre les rôles de Ménippe et de Diogène chez Lucien , et d'autre part entre le Ménippe

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de Lucien et le Diogène de la tradition. « Nous sommes en pleine imagerie à bon marché .

Sous différents noms historiques , Ménippe ,

Diogène , Cratès,

Antisthène , ou inventés, il n'y a au fond qu’un représentant du cynisme chez Lucien » ( p. 184) . Mais l'influence de Ménippe s'exerça aussi sur des écrivains de langue latine, d'abord sur Varron qui écrivit des Satires Ménippées. P. Livius Larensis ( Athénée IV 51 , 160 c ) le présente comme Ó łuòç rponátwp Oủáppwv ó MevíTTELOS ÉTTLXANOÚuevos, « Mon ancêtre Varron surnommé le Ménippéen >> (cf. Probus, sur Virgile , Bucoliques VI 31 , t . III 2 , p . 336 éd. Thilo et Hagen cité plus haut) et Cicéron , Academica I 2 , 8 , qui fait s'exprimer Varron de la sorte : « in illis veteribus nostris, quae Menippum imitati non interpretati quadam hilaritate conspersimus» , « dans ces cuvres anciennes qui sont les nôtres, que j'ai, dans mon imitation de Ménippe - ce n'est pas une traduction que j'ai faite aspergées de mon humeur joyeuse ... » ) ; elle s'exerça aussi sur Sénèque avec l'Apocolocyntose du divin Claude, Pétrone dans le Satyricon, Apulée ( > A 294 ) dans ses Métamorphoses, plus tard sur Martianus Capella (» M 45 ) dans son De nuptiis Mercurii et Philologiae, et sur Boèce ( » B 41 ) dans sa Consolatio Philosophiae. Voir 41 U. Knoche, Die römische Satire, Göttingen 1957 ; 42 F.J. Benda, The tradition ofMenippean satire in Varro, Lucian , Seneca and Erasmus, Univ . of Texas , Austin 1979 ; 43 R. Pratesi, « Timone , Luciano et Menippo. Rapporti nell'ambito di un genere letterario » , Prometheus 11 , 1985 , p. 40-68 ; 44 E. Woytek , section « Varro » , dans J. Adamietz ( édit . ) , Die römische Satire , Darmstadt 1986 , p . 311-355 , notamment le chap. 3 intitulé « Menipp von Gadara (Leben , Werk und Eigenart ) » ; 45 H. K. Riikonen , Menippean satire as a Literary genre with special reference to Seneca's Apocolocyntosis, coll . « Commentationes Humanarum Litterarum » 83 , Helsinki 1987 , 58 p . , notamment p . 9-16 ; 46 J.C. Relihan , « Old Comedy, Menippean satire , and Philosophy's Tattered Robes in Boethius’ Consolation » , ICS, 1990, 15 , p. 183-194. Iconographie. 47 K. Schefold , Die Bildnisse der antiken Dichter, Redner und Denker, p. 122-123 ; 2e éd. , 1997 , p. 248-249 , suivi par 48 G. M. A. Richter , The Portraits of the Greeks, t. II , p. 185 , fig. 1071 et 1074, estime que la statue d'un cynique , provenant de Civita Lavinia, qui remonte à un original grec daté autour de 240a et qui se trouve au Musée du Capitole à Rome , pourrait représenter Ménippe (plutôt que Bion de Borysthène [ ~ + B 32] avec qui il peut y avoir une hésitation ). 49 L. A. Scatozza Höricht, Il volto dei filosofi antichi, p. 132 et p. 134 ( fig. 51 ) , est d'accord avec cette identification. Par ailleurs, 50 M. R. Wojcik , La villa dei Papiri ad Ercolano. Contributo alla ricostruzione dell'ideologia della " nobilitas " tardorepubblicana, Roma 1986, p. 67-68 , reprend, à propos d'une face d'un double Hermes ( = B 13 , Tav . XLII ] de la Villa des Papiri d'Herculanum , actuellement au Musée National de Naples et dont l'archétype remonte à la première moitié du IVe s. , l'identification avec un philosophe cynique suggérée par 51 D. Pandermalis, « Zur Programm der Statuenausstattung in der Villa dei Papiri » , MDAI( A ) 86, 1971 , p. 173-209 , notamment p . 178. Mais , alors que Pandermalis proposait Ménédème le Cynique

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MÉNODORE

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( M 119) ou Monime ( ** M 190 ), Wojcik suggère qu'il pourrait s'agir de Ménippe de Gadara. Voir aussi Scatozza Höricht 49 , p. 132 et 133 ( fig. 50) .

MARIE -ODILE GOULET -CAZÉ.

I

130 MÉNIPPE DE LYCIE

Disciple d'Apollonius de Tyane ( 2 * A 284) , connu seulement par Philostrate . D'après V. Apoll. IV 25 , Ménippe de Lycie faisait partie des disciples de Démétrius le Cynique ( ** D 43 ) . Quand Apollonius séjourna à Corinthe, sept ans avant le projet néronien de percement de l'Isthme, Démétrius se convertit à la philosophie du sage, puis y convertit ses meilleurs élèves ; parmi eux figurait Ménippe, alors âgé de 25 ans. Le jeune homme se distinguait par son intelli gence et sa beauté. Il s'éprit d'une femme qui , comme le révéla Apollonius, était en réalité une empuse ( cette intervention d'Apollonius était, au dire de Philostrate , particulièrement célèbre ). Ménippe resta fidèle à son maître, même sous la persécution de Néron ( V. Apoll. IV 38 ) ; il apparaît d'ailleurs comme un opposant déterminé ( V. Apoll. IV 28 ; V 7 ). Au cours d'une discussion sur la mythologie , Ménippe , à la différence d'Apollonius, ne reconnaît pas de sagesse aux fables d'Esope (V. Apoll. V 14 ). Ménippe joua un rôle important dans les relations entre Euphratès ( E 132 ) et Apollonius. Ce dernier, partant pour l'Éthiopie , laissa son disciple à Alexan drie : ses qualités – των διαλεγομένων ήδη ετύγχανε και παρρησία χρήσθαι DelvÒç ñu - lui permettraient de contrôler Euphratès ( V. Apoll. V 43) . Et quand la querelle entre Apollonius et Euphratès s'envenima, Apollonius se déchargea en partie sur son disciple ( V. Apoll. VI 28 ) . Ménippe est mentionné comme un cynique en compagnie de Musonius ( 3 - M 198 ) et Démétrius ( -D 43 ) par Eunape, Vies des philosophes et des sophistes II 1 , 5 , p . 3 , 12 Giangrande. PATRICK ROBIANO . 131 MENNÉAS

DII

Ami et correspondant de Diogène d'Oinoanda. Son nom apparaît au vocatif dans le fr. 122 II , li . 4-5 Smith (Mev -lvéa Atate ). Il est associé dans la lettre à Carus ( C49 ) et Dionysius ( D 183 ) . Ces amis , sans doute épicuriens , auraient manifesté leur bonté à l'égard de Diogène lors d'un séjour qu'il aurait effectué à Rhodes. RICHARD GOULET. 132 MÉNODORE Philosophe, sans doute fictif , mentionné dans la lettre pseudépigraphe à Apolexis 18 de Diogène de Sinope ( SSR VB 548 ) . Il faut signaler qu'un manuscrit : le Laurentianus 86 , 8 offre la leçon Znvóowpov. Éditions et traductions. Éd . avec trad . latine dans 1 R. Hercher , Epistolographi graeci, p . 239 ; éd. avec trad . allemande dans 2 Eike Müseler, Die Kynikerbriefe, t. II , p. 22 ; reprise du texte de Hercher avec trad. anglaise par B. Fiore dans 3 A.J. Malherbe , The Cynic Epistles, p . 110-111 ; trad. française

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MÉNODORE

M 132

dans 4 G. Rombi et D. Deleule, Les Cyniques grecs. Lettres de Diogène et Cratès, coll . « Les philosophiques » , Paris 1998, p. 46. Voir aussi 5 F. Junqua, Lettres de Cyniques, t. II , p. 449, 512 et 563 . Études . V.E. Emeljanow , The Letters of Diogenes, Ph.D. , Stanford 1968 ( Ann Arbor, Michigan : Classical University Microfilms, 1974), p. 65 et 122 ; G. Giannantoni, SSR, t. IV , 1990 , n . 53 , p. 551-553 . Voici le contenu de la lettre adressée à Apolexis : « Des jeunes gens de Mégare m'ont demandé de te recommander le philosophe Ménodore ; la recom mandation est ridicule car, qu'il est un homme, tu le sauras en le voyant [(xal) ιδών εκείνον είση Capelle : εκ των εικόνων είση codd.]; qu'il est également un philosophe , tu le sauras grâce à sa façon de vivre et de parler. En effet le sage selon nous se recommande par lui - même » . 6 W. Capelle , De Cynicorum epistulis, Diss . Göttingen 1896 , p . 59 , a rapproché le passage qui fait problème d'Épictete II 3 , 1 : και ιδών γνώσεται et a pu ainsi proposer une correction intéressante à un texte absurde, à moins d'imaginer que Ménodore était sculpteur! Le personnage est sans doute fictif ; on peut néanmoins se demander d'où l'auteur de la lettre a pu tirer ce nom . Junqua 5 , t. II , p. 563, renvoie à 7 J. F. Marcks, Symbola critica ad epistolographos Graecos, Diss . Bonn 1883 , 57 p. , notamment p. 15 n . 2, qui , avec beaucoup de prudence ( « Pro certo hac de re nihil affirmaverim » ) rapproche le Ménodore de cette lettre d'un Ménodore qui était l'affranchi du fils cadet du grand Pompée, Sextus Pompée, tout en reconnaissant que le qualificatif de « philosophus » que l'on trouve dans la lettre va contre le rapprochement (il était en effet préfet de la flotte ), mais en suggérant que le nom cependant a pu être tiré de celui de cet affranchi. Sur ce Ménodore historique, dont le nom était parfois abrégé en Mnvās , voir F. Münzer, art. « Menodoros » 1 , RE XV 1, 1931 , col. 896-900 . MARIE-ODILE GOULET -CAZÉ.

133 MÉNODOTE DE NICOMÉDIE RE 2

ITP

Orientations bibliographiques : 1 M. Bonnet , De Claudii Galeni Subfiguratione empirica , Diss . Bonn 1872 , repris dans 2 K. Deichgräber, Die griechische Empirikerschule , p. 42-90 , avec une rétroversion en grec ; traduction italienne de 3 A. Russo (édit. ) , Scettici antichi, Torino 1978 , p . 731-759 : traduc tion anglaise de 4 R. Walzer et M. Frede dans Galen , Three treatises on the nature of science : On the sects for beginners ; An outline of empiricism ; On medical experience, Indianapolis 1985 ; traduction allemande de 5 J. Atzpodien , Galens Subfiguratio emperica. Deutsche Übersetzung und inhaltliche Erläute en Ansätze bei den griechischen Empirikern , coll . rung der medizintheoretisch « Abh . z . Gesch . d. Med . u . d . Naturwiss. » 52 , Husum 1986 ; traduction fran çaise dans 6 Galien , Traités philosophiques et logiques, traductions inédites par P. Pellegrin , C. Dalimier et J.-P. Levet, coll . GF, Paris 1998 ; 7 V. Brochard , Les sceptiques grecs, Paris 1887 , p. 311 sqq . , réimpr. Paris 1981 ; 8 R. Fuchs , Th . Puschmann , M. Neuburger , J. Pagel , Handbuch der Geschichte der Medizin , lena 1902, vol . I , p . 314-315 ; 9 A. Goedeckemeyer, Geschichte des griechischen Skeptizismus, Leipzig 1905 ; 10 A. Favier , Un médecin grec du IP siècle ap . J. C. , précurseur de la méthode expérimentale moderne : Ménodote de Nicomédie, Paris 1906 , thèse de médecine , 387 p .; 11 W. Capelle, art. « Menodotos » 2 , RE XV 1 , 1932 , col . 901-916 ; 12 J. Raeder , art. « Menodotos » 3 , RE XV 1 , 1932 ,

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col . 916 , cette dernière notice de dix lignes, après les quinze colonnes de la notice précédente consacrée au même personnage constitue un curieux redou blement vraisemblablement dû à une erreur ; 13 C. A. Viano, « Lo scetticismo antico e la medicina » , dans G. Giannantoni (édit. ) , Lo scetticismo antico, Atti del Convegno (Roma, 5-8 novembre 1980 ) , coll « Elenchos » 6, Napoli, 1981 , II, p. 563-656 ; 14 L. Perilli, « Menodoto di Nicomedia e i principi della medicina empirica » , dans A. Brancacci ( édit . ) , Antichi e moderni nella filosofia di età imperiale, Atti del II colloquio internazionale ( Roma, 21-23 settembre 2000 ), Napoli 2001, p . 267-297 ; 15 Id ., Menodoto di Nicomedia . Contributo a una storia galeniana della medicina empirica, München /Leipzig 2004. Célèbre médecin empirique et philosophe sceptique sur lequel notre princi pale source est le médecin Galien de Pergame ( » -G 3) auquel on doit d'ailleurs l'intégralité des fragments qui lui sont nommément attribués et qui ont été rassemblés par Deichgräber 2 , p . 212-214 , et plus récemment traduits et commentés par Perilli 15 . Repères chronologiques : On date Ménodote grâce à ses élèves , voir Deichgräber 2, p. 41-42, fr. 6 et 9. Étant donné que Ménodote passe pour avoir été le maître d'Hérodote de Tarse ( H 105 ), que ce dernier a eu à son tour pour élève Sextus Empiricus dont l'acmè se situe ca 200, en supposant une différence d'âge de 40 ans entre le maître et l'élève, Capelle 11 propose de situer l'activité de Ménodote autour de 120 ap . J.-C. , Deichgräber 2 pour sa part, p . 212 , le situant autour de 125. Notre principale source sur ce médecin et philosophe est Galien qui nous a conservé de précieux renseignements sur Ménodote et l'école empirique à l'intérieur de son traité intitulé Subfiguratio empirica (= S. E. ) qui appartient au genre littéraire de l ' « esquisse » , exposition brève mais efficace d'une doctrine. La rédaction de cet ouvrage, sans doute directement inspiré d'un traité de Ménodote , date du premier séjour du médecin de Pergame à Rome ( 162-166 ) , cf. Deichgräber 2 , fr. 10 a. L'idée que Ménodote ait directement pu inspirer Galien dans la rédaction de la S. E. a été exprimée pour la première fois par Brochard 7, p . 312 ; 365 n . 4 ; 371 et n. 4. Perilli 14, p. 281-284, défend une opinion plus nuancée, considérant Ménodote comme une source parmi d'autres du traité galénique. Galien le retravailla ensuite durant les premières années du règne de Septime Sévère ( Deichgräber 2 , p . 16-18 ; 16 J. Ilberg, RHM 52 , 1897 , p . 615 ) . La Subfiguratio empirica n'est plus aujourd'hui conservée qu'en latin dans une traduction de Nicolas de Reggio datée de 1341. Les références sont toutes données dans l'édition de Deichgräber 2 , p . 42 sqq .; les traductions françaises sont empruntées à l'ouvrage de Pellegrin et alii 5 . Sa vie et son œuvre : On ne sait presque rien de la vie de Ménodote , on ignore tout en particulier des lieux où il a enseigné . On est toutefois un peu mieux renseigné en ce qui concerne ses écrits qui , pour certains, semblent avoir compté de nombreux livres ( libros scribens decem milium verborum , S. E. 83 , 24 ). Le nombre total de ses ouvrages paraît également avoir été impressionnant ( in multis suis conscriptionibus, S. E. 84, 23 ) . Nous ne connaissons cependant le titre que d'un seul d'entre eux . Selon Deichgräber 2 , qui se fonde sur le témoi gnage de Galien dans la S. E. 84, 17 ( a nostris submemorationibus quas fecimus

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de his que in Severum ab eo dicta sunt) et 88 , 2 ( in judicatione eorumque ad Sevirum ab eo scripta sunt) , ce traité se serait simplement intitulé A Sévère ( Eeßhow ), et d'après le Sur ses propres livres 9 ( = Deichgräber 2 , fr. 1 , Perilli 15 , T 2 : εpi tõv Mnvoðótov Eeßúpw la ') il aurait compté onze livres ( « eine Schrift in elf Büchern » , p . 265 ) . Ici , Deichgräber fait cependant erreur car à l'intérieur de ces trois passages, Galien fait chaque fois allusion , non pas directe ment à l'ouvrage de Ménodote , mais plus indirectement au commentaire qu'il lui a consacré et qui , lui , comptait onze livres. Deichgräber a d'ailleurs varié d'opinion sur le sujet, s'arrêtant à cette seconde interprétation en deux autres endroits de son ouvrage , p . 5 ( « ein stark polemisch gehaltener Kommentar zu Menodots Schrift Ad Severum in elf Büchern » ) et 213 ( « ein Werk “ An Severus” , das Galen in 11 Büchern kommentiert » ) où il fait cette fois allusion au commentaire de Galien composé de onze livres. Quant au nombre exact de livres que comptait le traité de Ménodote , il faut donc renoncer à le préciser. Le Sur ses propres livres a cependant été traduit en arabe par Hunayn ibn Işhāq au IXe siècle et dans cette traduction, aujourd'hui conservée dans un unique manuscrit de Meshed , il est explicitement question d'un ouvrage de Galien intitulé « Sur < l’Introduction > de Ménodote à un ami en dix livres » . Mais la mention d'une “ Introduction " dans l'arabe a tout lieu d'être fautive et a sans doute été amenée par la mention de l'Introduction de Théodas à la ligne précé dente. Quant au nombre de livres ( 10 ou 11 ) , l'erreur semble là encore provenir de l'arabe par confusion sur le grec (ëvõexa / Év éxa ) . Le Sévère en question auquel Ménodote a dédicacé son ouvrage n'est cependant pas autrement connu et reste pour nous en grande partie mystérieux. Voir cependant les tentatives d'identification proposées par Perilli 15 , p . 79. Le traducteur arabe a d'ailleurs délibérément omis son nom , tout comme dans le passage suivant où il est de nouveau cité en grec. On rencontre en effet quelques lignes plus loin à l'intérieur du même passage du Sur ses propres livres 9 ( = Deichgräber 2 , fr. 1 , 1. 12 ) la mention eic tò Mnvodórov Eeßúpw qui a régulièrement gêné les différents éditeurs du traité galénique . Convient- il en effet de considérer cette nouvelle et deuxième mention d'un ouvrage de Ménédote à Sévère comme une interpolation et faut- il purement et simplement la supprimer en la plaçant entre crochets droits comme l'a fait I. Müller dans les Scripta Minora ( = SM ) II , 1891 , p . 115 , 13 , suivi par 17 H. Schöne, Rhm 75 , 1920 , p . 149 , et Deichgräber 2 , p . 37 , fr. 1 ? Ou bien faut- il, en accord avec 18 A. Gercke, RHM 41 , 1886 , p. 470-472 , rattacher cette mention soit au titre précédent, c'est - à - dire le commentaire de Galien en trois livres aux Kephalaia de Théodas, soit encore au titre suivant, c'est - à -dire le Protreptique ( Ilpotpentixòç énì iatpixńv ) de Galien ? J'ai personnellement adopté cette dernière solution déjà défendue par l'éditeur du Protreptique dans le Corpus Medicorum Graecorum (éd . A. Barigazzi, CMG V 1 , 1 , Berlin 1991) dans ma propre édition ( Paris, CUF, 2000 ) sur la foi là encore de la traduction arabe de Hunain qui effectivement mentionne Ménodote à cet endroit, tout en omettant il est vrai le nom de Sévère . Dans cette hypothèse, il existerait donc bien un lien entre le Protreptique de Galien et un ouvrage de Ménodote auquel

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le médecin de Pergame aurait souhaité apporter la contradiction ( voir sur ce point mon édition du Protreptique, p. 39 sqq . ) . En particulier, il ne paraît pas impossible de supposer que Galien , dans la seconde partie aujourd'hui perdue de son Protreptique, ait pu engager les jeunes gens qui se destinaient à la carrière médicale à l'étude de l'anatomie et de la physiologie. Or, il était inévitable que Galien rencontrât sur ce terrain l'opposition des empiriques pour qui la connais sance du corps humain était considérée comme inutile . Aussi le médecin de Pergame a- t-il très bien pu concevoir son propre traité sur la question à la fois comme une réponse et une risposte à l'un ou l'autre des écrits de Ménodote . Contre cette opinion , voir Perilli 15, p. 81-89. Un auteur polémique : À travers les témoignages nécessairement partiaux dont nous disposons, Ménodote apparaît avant tout comme un auteur polémique, particulièrement critique envers les tenants des autres écoles , et notamment les dogmatiques. Galien , pour sa part, le tient pour un médecin peu recommandable, avide de gloire et de richesse ( Sur les doctrines d'Hippocrate et Platon IX 5 : t. V , 751 Kühn = éd . Ph . De Lacy, CMG V 4 , 1 , 2 , p . 564, 24-28 ) , et le décrit comme peu sociable et ayant sans cesse l'insulte à la bouche (S. E. 84 , 1 : « Ménodote qui ne reculait devant aucune injure ni aucune bouffonnerie à l'égard des médecins < adverses > , soit ouvertement en aboyant comme un chien , soit en les injuriant simplement comme un cul-terreux , ou en attaquant grossiè rement, en traitant d'aigre -doux, de lions aigris , de couverts d'or et de beaucoup d'autres noms de cet acabit les médecins et les philosophes dogmatiques qui l'avaient précédé » ) . Il semble même ne pas toujours s'être abstenu de critiquer les empiriques de son propre camp ( S. E. 88 , 4 : « Mais écrire des sophismes pour réfuter les autres empiriques, comme il le dit lui -même , non seulement n'est pas élégant, mais est extrêmement grossier » ) . Deichgräber 2 , p . 88 , a émis des doutes sur ce passage et proposé de relativiser la critique de Galien en rempla çant empericorum par medicorum . Mais outre le fait que rien dans le texte de Galien ne justifie cette correction, Capelle 11 a justement souligné que le médecin de Pergame n'avait pas hésité à consacrer un premier traité en trois livres aux Divergences entre les empiriques et avait même dû ensuite écrire une défense de ce même traité intitulée Contre les objections faites au Sur les divergences entre les empiriques (S. E. 90 , 5-9 et Sur ses propres livres 9 = fr. 1 , 1. 9) . La critique pouvait donc se faire vive y compris entre adeptes de la même école. Galien semble avoir porté aussi peu d'estime à l'homme qu'au médecin , ne se privant pas de fustiger ses opinions sur l'opportunité de la saignée que Ménodote réservait aux seuls cas de pléthore ( Sur la saignée 9 : t . XI , 277 Kühn ; Commentaire au Régime des maladies aiguës IV 17 : t . XV , 766 Kühn = éd. G. Helmreich ,CMG V 9, 1 , p. 287 , 31 ; Commentaire aux articulations III 62 : t . XVIII A , 575 Kühn) . Le médecin de Pergame fait également plusieurs fois allusion à la polémique qui opposa Ménodote à son contemporain Asclépiade de Bithynie ( P - A 450 ) (S.E. 84 , 18-22 et 27-31 ; Sur les facultés naturelles I 14 : t . II , 52 Kühn ) à qui il reprochait de nier les faits évidents et dont il dénonçait toutes les théories comme fausses. Galien lui-même s'est d'ailleurs largement associé aux critiques adressées par Ménodote à Asclepiade, allant jusqu'à se

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refuser à seulement mentionner les opinions de ce dernier en matière de respira tion ( Sur l'utilité de la respiration 2 : t . IV , 475 Kühn ) . Asclépiade lui-même, comme le rappelle Galien , ne se privait d'ailleurs pas de son côté d'attaquer les empiriques ( Sur les écoles 5 : t. I , 75 Kühn ) . Pratique médicale et doctrine philosophique : Nous sommes assez mal renseignés sur la pratique médicale de Ménodote en dehors de sa position relati vement prudente à l'égard de la saignée . Les indications recueillies par Galien apparaissent en outre visiblement empreintes d'une telle dose de polémique qu'il est difficile d'y voir clair. Que penser en effet du passage où Ménodote est accusé par Galien d'avoir assigné comme seule fin ( TÉRoc) à la pratique médi cale la gloire ou l'argent (Sur les doctrines d'Hippocrate et Platon IX 5 : t . V , 751 Kühn = éd. Ph. De Lacy, CMG V 4 , 1 , 2, p. 564 , 24 ), quand on ignore tout du contexte d'où un tel jugement a été tiré ? Nous sommes en revanche un peu mieux informés sur la doctrine philo sophique de Ménodote qui , du moins aux yeux de Galien dans son Esquisse empirique, passe pour l'un des représentants les plus marquants de l'empirisme. Quant au témoignage de Sextus Empiricus dans ses Esquisses pyrrhoniennes à propos de son appartenance sceptique, il intervient à l'intérieur d'un passage corrompu où le nom de Ménodote a été rétabli ( Bekker I , 222 ) sur la base d'éléments , paléographiques et philosophiques, considérés comme extrêmement douteux par Deichgräber 2 , p . 266 , n. 2. Cf. 19 E. Spinelli , « Sextus Empiricus, the neighbouring philosophies and the sceptical tradition ( Again on Pyr. I 220 225 ) » , dans J. Sihvola (édit . ) , Ancient scepticism and the sceptical tradition , coll . « Acta Philosophica Fennica » 66 , Helsinki 2000 , p . 36-61 ; Perilli 15 , p. 101-124 . Il ne fait toutefois aucun doute que Ménodote ait partagé les thèses des sceptiques , comme l'attestent à la fois les témoignages de Diogène Laërce ( IX 116) et de Galien (S. E. 84, 32 Pyrrhon quem laudat ). Mais il devait s'agir d'un scepticisme modéré capable d'être concilié avec la croyance en l'observa tion des phénomènes et la fiabilité du témoignage des sens qui , elle , était niée par les sceptiques les plus intransigeants. Galien a résumé cette position origi nale d'une seule phrase : « L'attitude du sceptique face à la totalité de la vie , telle est l'attitude de l'empirique concernant la médecine » (S. E. 82 , 28 ). De fait, pour Favier 10 , p. 8 , Ménodote est « le premier sceptique qui nous soit présenté en termes formels comme un médecin empirique ; c'est en lui que s'est faite l'union de l'empirisme et du scepticisme , ou mieux l’union du scepticisme et de la science » . Galien qui connaissait parfaitement la doctrine des empiriques pour leur avoir consacré plusieurs ouvrages, s'est tout particulièrement inspiré des écrits de Ménodote qui apparaît comme la source vraisemblablement unique des chapitres II , VI - IX de la S. E. où son nom est plusieurs fois explicitement cité. L'aperçu que nous donne Galien des théories médicales et philosophiques de Ménodote est cependant assez sommaire et, nous l'avons vu , le plus souvent empreint d'une telle violence polémique que la plus élémentaire prudence recommande de recevoir ce témoignage avec précaution. Certains principes fondamentaux sem blent cependant pouvoir être dégagés. Comme les autres empiriques, Ménodote

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estimait que toute connaissance humaine devait être basée sur le concept fondamental d'expérience ( łuneup a ). Opposée en cela à celle des dogmatiques qui se flattent de connaître les causes et l'essence des maladies , la méthode empirique est d'abord fondée sur l'observation des phénomènes. La principale difficulté , de ce point de vue, consiste à tenter de cerner la contribution originale de Ménodote à cette position de principe partagée par tous les empiriques. Il convient en particulier de se demander dans quelle mesure Ménodote a person nellement enrichi la notion traditionnelle d'expérience héritée de ses prédéces seurs . Les médecins empiriques pratiquaient un art fondé non pas sur l'hypo thèse (comme les dogmatiques ) , mais sur l'observation . Constatant que tel remède administré à tel malade présentant tel symptôme , produisait tel effet et ce de façon récurrente, ils se trouvaient fondés à énoncer un théorème ( 0 € 6 pnua ) décrivant l'ensemble de tous les cas semblables . Leur art se définit donc avant tout comme une pratique fondée sur le recours à l'expérience elle-même envisagée selon différentes modalités : l'expérience directe (autopsia ), la prise en compte des faits observés par d'autres et consignés par écrit (historia c'est-à dire le recours à l'histoire pour éprouver la véracité des faits précédemment observés et pouvoir bénéficier des observations de ses devanciers ) , et enfin le passage du semblable au semblable (ή μετάβασις του ομο ου ) en vertu duquel tel traitement éprouvé comme efficace pour telle partie du corps sera également appliqué à une partie identique souffrant du même mal ou d'un mal semblable ( sur ces distinctions, voir Favier 10 , p . 80 sqq . , Pellegrin 6, p . 36 , et Perilli 15 , p. 154-176). Galien mentionne à ce propos dans le Sur les écoles 2 ( t. I , 68-69 Kühn) , le recours possible à un niveau plus élevé , celui de l'expérience « fondée sur pratique » (tpiß.xń), c'est - à -dire l'expérience savante au cours de laquelle le médecin reproduit les gestes et les traitements déjà observés comme efficaces dans des circonstances antérieures non pas simplement identiques , mais seule ment semblables. Or un des apports originaux de Ménodote semble précisément avoir été de concevoir l'expérience comme objet possible d'une mise en mémoire (memoratio ) . Pour le dire autrement, l'expérience ménodotéenne suppose le recours aux témoignages ainsi que la critique des renseignements collectés . Ménodote semble en effet avoir personnellement insisté sur l'utilité de la critique historique (S. E. 67 , 1 ) et avoir énoncé différents critères susceptibles d'opérer le partage entre le vrai et le faux parmi les écrits de ses prédécesseurs . Il paraît en outre avoir précisé et renouvelé le principe fondamental de la médecine empirique du passage du même au même en recommandant: ( 1 ) de recourir à un même traitement pour deux parties du corps non pas exactement identiques , mais du moins semblables dès lors qu'elles présentent une même affection, ( 2) d'appliquer un même médicament à deux affections comparables ( diarrhée et dysenterie par exemples) , ( 3 ) de prescrire le même médicament pour la même maladie . Il revient sans aucun doute aussi à Ménodote d'avoir posé la claire distinction entre les gens de l'art qui recourent à la stricte expérience dans l'observance des règles établies , et ceux qui se contentent de recourir à la routine ( S. E. 45 , 20 ). Ménodote désigne également la méthode inductive qui part de la uetáßaoıç toŰ Óuo ov ( le passage du semblable au semblable ) pour aboutir à la

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netpa tpißixń ( l'expérience fondée sur pratique) sous le nom d'epilogismum et la définit comme le « logos des phénomènes » , un raisonnement sur les choses apparentes (S. E. 69 , 2 : ... epilogismum , qui est sermo eorum quae apparent ). Cet « épilogisme » utilisé pour découvrir ce qui est provisoirement caché, mais susceptible de se révéler à travers l'expérience, illustre la position modérée de Ménodote à l'égard du recours à la raison et à la rationalité . Loin d'afficher un refus catégorique de toute démarche rationnelle, Ménodote aurait en réalité énoncé les conditions d'une expérience raisonnée et systématique ( voir 20 M. Frede , « The Empiricist Attitude towards Reason and Theory » , dans R. J. Hankinson [édit. ] , Method, Medicine and Metaphysics. Studies in the Philosophy of Ancient Science, = Apeiron, numéro spécial, Edmonton (Canada ) 1988 , p. 79-97 , et Perilli 15, p. 126-153 ) . Il paraît en revanche difficile de suivre Favier 9 lorsqu'il soutient, en se basant sur S. E. 63 , 26, que Ménodote ait pu introduire dans l'empirisme une « idée de la démonstration » . D'une manière générale , il convient d'ailleurs de souligner que même si le livre de Favier reste une référence incontournable pour aborder la méthode et la philosophie de Ménodote , son auteur part trop souvent des présupposés de la médecine de son temps pour inscrire son questionnement à l'intérieur des préoccupations et des concepts médicaux qui lui étaient contem porains. De ce point de vue , et même si Ménodote paraît avoir utilisé le concept de vérification ( à l'aide de la preuve ), on ne peut pour autant certainement pas en déduire comme le fait Favier 9, p. 289 sqq. , qu'il ait également eu recours au concept de démonstration . La démonstration (apodeixis ), dès lors qu'elle suppose une inférence portant sur ce qui se révèle inobservable, devait rester définitivement bannie du paysage épistémologique des médecins empiriques . VÉRONIQUE BOUDON -MILLOT. 134 MÉNON RE 17

Iva

Études d'orientation : 1 H. Raeder, art. « Menon » 17 , RE XV 1 , 1932 , col. 927 ; 2 H. Diels , « Über die Excerpte von Menons latrika in dem Londoner Papyrus 137 » , Hermes 28 , 1893 , p . 407-434 ; 3 H. Diels (édit . ) , Anonymus Londinensis ex Aristotelis iatricis Menoniis et aliis medicis eclogae = Supple mentum Aristotelicum III , pars 1 , Berlin 1893 ; 4 H. Beckh et F. Spät , Anonymus Londinensis. Auszüge eines Unbekannten aus Aristoteles -Menons Handbuch der Medizin , Berlin 1896 ( traduction allemande du texte édité par Diels ) ; 5 D. Manetti , « Note di lettura dell ' Anonimo Londinese . Prolegomena ad una nuova edizione » , ZPE 63 , 1986, p . 57-74 ; 6 Id ., « Autografi e incompiuti : il caso dell'Anonimo Londinese P. Lit.Lond . 165 » , ZPE 100 , 1994 , p . 47-58 ; 7 Id ., « ‘ Aristotle ' and the role of doxography in the Anonymus Londiniensis ( P. BrLibr inv . 137 ) » , dans Ph.J. van der Eijk (édit . ) , Ancient Histories of Medicine, Leiden 1999 , p. 95-141 . Le disciple d'Aristote . L'attention a été attirée sur ce personnage depuis la découverte par F.G. Kenyon d'un papyrus daté du jer siècle de notre ère et aujourd'hui conservé à Londres. Plus connu sous le nom d'Anonyme de Londres, ce papyrus, selon les derniers résultats de la recherche ( cf. Manetti 6 , 7 et 8 ) ,

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MÉNON

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nous a transmis un ouvrage médical autographe qui , bien que découvert en Égypte, semble avoir été rédigé en Asie par un auteur qui , sous les empereurs Domitien ou Trajan, a composé son texte en même temps qu'il le transcrivait. Or la présence d'une doxographie sur les causes de la maladie rassemblant les doctrines de nombreux médecins et philosophes des Ve-ive siècles avant notre ère, Hippocrate inclus, a très tôt attiré l'attention . Pour nourrir cette importante section ( IV 18 - XXI 9 Diels ) , l'auteur de l'Anonyme aurait, selon Diels 2 qui , sur ce point, suit les premières orientations de F.G. Kenyon, puisé à une doxo graphie d'origine aristotélicienne. Cependant et bien qu'introduites par des formules du type ώς φησιν περί αυτού 'Αριστοτέλης, ces différentes doxai seraient en réalité tirées, non pas d'un ouvrage d’Aristote lui-même , mais de son disciple Ménon . Cette suggestion devait d'ailleurs conduire Diels 3 à donner la première édition de cet Anonyme sous le titre Anonymus Londinensis ex Aristotelis iatricis Menoniis et aliis medicis eclogae. Diels 2 avait supposé que l'auteur de l'Anonyme n'avait pas une connaissance directe de la doxographie de Ménon, mais que celle-ci reposait vraisemblablement sur des intermédiaires de l'époque hellénistique ou romaine , par exemple le médecin Alexandre Philaléthès auteur d'un ouvrage intitulé 'Apéoxovta et dont le nom est cité dans l'Anonyme . Mais Manetti 7 , avec de bons arguments, a récemment rejeté l'existence de cet intermédiaire qui ne lui semble pas indispensable. L'auteur d'une doxographie médicale ? Le témoignage essentiel pour l'attribution à Ménon d'une doxographie médicale sur les causes de la maladie est celui du médecin du II° siècle de notre ère, Galien de Pergame ( ** G 3 ) , dans son Commentaire à la Nature de l'homme . On connaissait en effet d'Aristote une euvre intitulée, selon les sources , Ιατρικά β ' ou Περί ιατρικής avec ou sans indication du nombre de livres (ß ou r ) , cf. Diels 2 , p . 407, n . 2. Mais c'est explicitement à Ménon que Galien attribue la mise en forme et la rédaction d'un ouvrage intitulé Ιατρική συναγωγή ( ου Ιατρικά ). En effet, commentant le passage de la Nature de l'homme 1 , 1 où l'auteur hippocratique écrit « Car je ne déclare nullement que l'homme est air, feu, eau , terre » ( VI, p. 32, 4-5 Littré = éd . Jouanna, Berlin 1975 , CMG I 1,3 , p. 164, 5-6) , Galien recommande à ceux qui seraient intéressés par les théories des anciens médecins la lecture des ouvrages de Théophraste consacrés à ces matières ( tàs του Θεοφράστου β βλους ... καθ ' ας την επιτομήν εποιήσατο των φυσικών 0o @v ), auxquels il ajoute un ouvrage doxographique attribué à Aristote, mais qui en réalité serait d'un certain Menon : ώσπερ γε πάλιν , εί τας των παλαιών ιατρών δόξας εθέλοις ιστορήσαι , πάρεστ σοι τας της Ιατρικής συναγωγής αναγνώναι β βλους επιγεγραμμένας μεν Αριστοτέλους, ομολογουμένας δε υπό Μένωνος, δς ήν μαθητής αυτού , γεγράφθαι , διό και Μενώνεια προσαγορεύουσιν ένιοι ταυτί τα βιβλ α . Δήλον δε ότι και ο Μένων εκείνος, αναζητήσας επιμελώς τα διασωζόμενα κατ' αυτόν έτι των παλαιών ιατρών βιβλα, τάς δόξας αυτών εκείθεν ανελέξατο ( Commentaire a la Nature de l'homme I 2 : t. XV , 25 Kühn = éd . I. Mewaldt, Leipzig /Berlin , 1914, CMG V 9 , 1 , p . 15 , 26 sqq .). Diels 2 , p . 407, n . 2 , indique que le titre original de cet ouvrage devait être 'Αριστοτέλους Ιατρικά Μενώνεια, ce qui plus tard fut mal compris et devait

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devenir source de confusion . À part de minuscules et insignifiants fragments, on ne connaissait rien de cette cuvre médicale attribuée à Ménon jusqu'à la décou verte du papyrus de Londres. Tout au plus pouvait -on supposer qu'elle devait avoir pour but de rassembler la somme des connaissances médicales acquises depuis la naissance de la médecine au Ve siècle à Crotone, Cnide et Cos jusqu'à l'époque d'Aristote . D'après l'Anonyme de Londres ( cf. Manetti 7 ) , son auteur semble en outre avoir classé les médecins en deux groupes de théoriciens, distin guant entre les Diététiciens qui attribuent la cause des maladies à la seule qualité du régime, et ceux que Diels 2 , p. 415 , nomme les Somaticiens (Somatiker ) qui les attribuent à la différence des éléments constitutifs du corps. Perspectives récentes. Selon Manetti 7 cependant qui prépare une nouvelle édition de l'Anonyme chez Teubner, une seule chose peut être affirmée avec certitude, l'existence du temps de Galien d'un ouvrage doxographique circulant sous le titre 'latpixn ouvaywyń et auquel était lié le nom d'un certain Ménon . Mais il n'est pas possible , en l'état de nos connaissances, de clairement démêler le rôle exact de ce personnage. En particulier, rien ne permet de discerner s'il était le véritable auteur, l'éditeur, le réviseur, ou encore le simple possesseur d'une (des ) copie(s) de l'ouvrage doxographique en question . En conclusion , et dans la mesure où l'auteur de l'Anonyme était convaincu d'utiliser un texte d'Aristote, la prudence recommande de situer l'ouvrage qu'il a utilisé dans le contexte de l'école aristotélicienne sans essayer davantage d'en préciser l'auteur.

VÉRONIQUE BOUDON -MILLOT. 135 MÉNON DE CROTONE Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique, V. pyth . 36, 267 ; p . 143 , 24 Deubner. Il fut, selon Jamblique , V. pyth . 30, 170 ; p . 95 , 26-27 Deubner, l'époux de la fille de Pythagore ( Myia ? ) ; Ménage lisait toutefois en ce passage Mawvl à la place de Mévuvi. Voir la notice « Milon de Crotone » . [Sur la forme de ce nom, voir Fr. Bechtel, Die historischen Personennamen , p. 312. C.M.] BRUNO CENTRONE, 136 MÉNON DE PHARSALE RE 4

F va

Ce jeune et riche thessalien , fils d'Alexidème, est le principal interlocuteur de Socrate dans le dialogue platonicien qui porte son nom . En visite à Athènes, habitant chez le démocrate Anytos ( 2 * A 227 ) , il est accompagné d'une nom breuse escorte (Ménon 82 a) et l'un de ses serviteurs, « né dans sa maison » , sera interrogé par Socrate pour montrer que l'apprentissage mathématique qu'il subit est une réminiscence. C'est à tort que Diodore de Sicile, XIV 19, 8 , le rattache à Larissa de Thessalie . Cf. 1 E. Obst et W. Kroll , art. « Menon » 4 , RE XV 1 , 1931 , col . 925-926 ; 2 J. S. Morrison , « Meno of Pharsalus , Polycrates and Ismenias » , CQ 36, 1942 , p . 57-78 ( concerne surtout l'histoire de la Thessalie aux vie et ve siècles ) ; 3 E. N. Roussos , « MENS2N , O MAOHTHE TOY TOPTIA » , Philosophia 1 , 1971 , p . 228-251 [ avec rés . en all . ] ; 4 Monique Canto - Sperber, Platon . Ménon .

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MENTOR DE BITHYNIE

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Traduction inédite, introduction et notes, coll . GF 491 , Paris 1991, 350 p . , notamment p . 17-26 et p. 331 ( arbre généalogique de la famille de Ménon ) ; 5 Debra Nails , The People of Plato , p. 204-205 . A plusieurs reprises dans le Ménon , qui relate un dialogue qui se serait déroulé à Athènes au printemps 402a (Canto -Sperber 3, p. 37 ), Socrate présente le jeune Ménon comme un auditeur de Gorgias ( > G 28 ) qui vécut en Thessalie à la fin de sa vie ( 70 b ; 71 c ; 73 c ; 76 b - c ; 95 c ; 96 d). Ménon laisse entendre qu'il a lui - même déjà prononcé des discours sur la vertu ( 80 b) . Mais il suit Gorgias en considérant que l'objectif du sophiste n'est pas d'enseigner la vertu , mais bien le maniement du discours (95 c ) . C'est peut-être également à la suite de Gorgias qu'il partage aussi les vues d'Empédocle ( 2E 19 ) sur l'explication de la vision par les effluves et les pores ( 76 c = DK 31 A 92) . Selon Plutarque, De amicorum multitudine 1 , 93 a, le Ménon du dialogue revendiquait une grande compétence dans le maniement du discours (οιόμενον εν λόγοις ικανώς γεγυμ νάσθαι). ). Ménon est également connu comme un général. Un an après la date drama tique du dialogue qui porte son nom , et donc au printemps 4014, il est à Colosses - au côté de son amant (70 b) Aristippe de Larisse et malgré son jeune âge – à la tête d'un contingent de 1500 mercenaires grecs ( 1000 hoplites et 500 peltastes, Anabase I 2 , 6) venus soutenir la cause de Cyrus contre son frère aîné Artaxerxès. A ce titre, il est un des personnages principaux de l'Anabase de Xénophon, lequel toutefois donne de lui un portrait fort sombre (Anabase II 6, 21-29 ) . Après la défaite de Cunaxa, où périt Cyrus, en septembre 401, Ménon fut capturé avec d'autres généraux grecs dans un guet- apens tendu par Tissa pherne (mais dont Ctésias de Cnide ( apud Photius , Bibl. cod. 72 , p . 44 a 21-25 ) , que suit également Plutarque , Artaxerxès 18 , lui attribue la responsabilité) et envoyé chez le roi Artaxerxès (Anabase II 5 , 31-32 ) . Contrairement aux autres chefs des mercenaires, dont Cléarque et Proxène, il n'eut pas la tête tranchée , mais souffrit tout de même diverses mutilations , dignes d'un malfaiteur, et mourut un an plus tard (Anabase II 6, 29) . L'hostilité de Xénophon à l'égard de Ménon est encore rappelée par Diogène Laërce II 50. Cette trahison , réelle ou supposée, de Ménon – devenue en tout cas légendaire dans la tradition ultérieure ( Diodore de Sicile, XII 27 ; Athénée , Depnosophistes XI , 505 a-b ; 506 b ; Maxime de Tyr, XXXIV 9) – aurait donné lieu à un proverbe : « la machination thessalienne » . Voir Appendix proverbiorum , Centuria IV 93 : TÒ Oettarov cóploua : Énì tūv gol(o μένων και κακουργούντων. Από Μένωνος του το Kύρω τη νεωτέρω συναναβάντος, δς προύδωκεν 'Αρταξέρξη τους Έλληνας. Mais la tradition connait d'autres significations pour ce proverbe et fournit également des explications différentes. RICHARD GOULET. 137 MENTOR DE BITHYNIE RE 9

Па

Académicien , originaire de Bythinie , disciple de Carnéade ( =^ C 42. Philod . , Acad . hist. XXIV 1 = T 3b 16 Mette ). Diogène Laërce ( IV 63-64 ), par l'inter médiaire de Favorinus ( fr. 35 Mensching = 67 Barigazzi), raconte que Mentor venait à l'école de Carnéade pour chercher à obtenir les faveurs de la concubine de son maître. Carneade, s'en étant rendu compte , l'avait éloigné . Numénius , avec quelques variantes, fait allusion au même épisode ( ap. Eus . , P.E. XIV 8 , 13

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MENTOR DE BITHYNIE

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= fr. 27 Des Places = T 2 , 66-71 Mette ). Selon Numénius , Mentor aurait aussi été le successeur (dládoxoc) de Carnéade . TIZIANO DORANDI.

138 MÉROPIUS DE TYR RE PLRE

DM IV

“ Philosophe " qui , sous Constantin , entreprit de visiter l'Inde “ ultérieure ” ( India ulterior ), où la prédication de Barthélemy n'avait pas pénétré, l'Apôtre n'ayant évangélisé que la partie de “ l'Inde contiguë à l'Éthiopie ” (TV ouvnu μένην ταύτη [i.e. τη Αιθιοπ α] Ινδ αν ) . Il imitait en cela le philosophe Metro dore ( --M 147 ) qui avait effectué un voyage semblable peu auparavant ( Rufin, Hist. eccl. 19 ) . Au retour de ce voyage , au cours d'une escale, Méropius fut tué par les barbares, mais deux jeunes élèves de sa famille qu'il avait amenés avec lui , Frumentius (RE ) et Aidésius ( RE 5 ) , furent épargnés et accueillis par le roi. Frumentius devint le précepteur du fils du roi et, par la suite, après avoir été consacré évêque à Alexandrie par Athanase , revint assurer la conversion de cette région de l' “ Inde ” . On considère que la source de Socrate qui était Rufin confondait en fait l'Inde et l'Éthiopie, Frumentius ayant été nommé évêque d'Axioum à l'époque d'Athanase d'Alexandrie . Quand à Aidésius , qui fut ensuite prêtre à Tyr, il pourrait être la source orale de Rufin. Voir aussi Sozomène , Hist. eccl. II 24 ; Rufin , Hist. eccl. X 9 ; Théophane, Chronographia, a. 5816 , p. 24 , 11-13 de Boor. Sans mentionner le nom de Méropius , Théodoret, Hist. eccl. I 23 , raconte lui aussi le voyage de ce philo Sophe de Tyr (τότε τις Τύριος της θύραθεν φιλοσοφ ας μετέχων). Françoise Thélamon , Païens et chrétiens au IVe siècle . L'apport de l ' " Histoire ecclésiastique " de Rufin d'Aquilée, Paris 1981 , p. 39 , a montré que les historiens grecs, comme Socrate (Hist. eccl. I 19 ) , Sozomène (Hist. eccl. II 24 ) , Théodoret (Hist. eccl. I 23 ) et d'autres, dépendent de Rufin pour ce récit de l'évangélisation de l'Éthiopie. Cf. W. EnBlin , art. « Meropius » , RE XV 1 , 1931 , col . 1065. RICHARD GOULET. MESSALA + CORVINUS (M. VALERIUS MESSALLA - ) (C 190a ) MESSALINUS + MASSALÈNOS (M 47] MESTRIUS

EUPHRATÈS (MESTRIUS - ) [E 132]

MESTRIUS

FLORUS (L. MESTRIUS - ) (F 16]

METELLUS + CAECILIUS METELLUS NUMIDICUS (Q.-) (C3] 139 METILIUS NEPOS (P.-) RE 19 PIR2 M 42, 544, 545

ІЛІ

Études . 1 E. Groag, art. « P. Metilius 19 Sabinus Nepos » , RE XV 2 , 1932 , col . 1400-1402 ; 2 W. Eck , art. « P. Metilius ( Sabinus ) Nepos » , RESuppl. XIV, 1974 , col . 281-282 ; 3 R. Syme, « People in Pliny » , JRS 58 , 1968 , p . 135-151 = Roman Papers II, Oxford 1979 , p. 694-723 ; 4 A.R. Birley , Onomasticon to the Younger Pliny. Letters and Panegyric, München /Leipzig 2000 .

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Le nom même de ce personnage est problématique : dans les quatre lettres qui lui sont adressées par Pline le Jeune , trois ( II 3 ; III 16 ; VI 19 ) n'indiquent que le cognomen : Nepos ; pour la quatrième ( IV 26 ) l’Index du manuscrit B (Ashburnham ) indique ad Maecil. Nepotem , ce qui suppose un gentilice très rare , Maecilius, corrigé en Metilius par Mommsen ( dans l’Index de l'éd . établie par H. Keil , coll . BT, Leipzig 1870 ) , correction reprise par Groag 1. L'iden tification n'est pas alors plus aisée et 5 A. N. Sherwin - White, A commentary on Pliny's Letters, Oxford 1966 , p . 146-147 , considère que la correction n'est pas absolument nécessaire ( voir toutefois p. 305 , où cette affirmation est nuancée ) . En effet, Metilius Nepos est un sénateur destiné à gouverner une très importante province ( IV 26 , 2 : maximae prouinciae praefuturus) ; mais on ne sait s'il s'agit de P. Metilius ( Sabinus ) Nepos consul suffect en 91 ou de P. Metilius Nepos , consul suffect en 103 , consul désigné pour 128 , mais qui mourut avant son second consulat . Le premier, mort en 118 , mentionné dans les Actes des Frères Arvales en 105 , 110 , 111 , fut gouverneur de Bretagne avant 98. Le second fut gouverneur de Pannonie Supérieure en 105/106 ; c'est en général avec ce dernier qu'est identifié le correspondant de Pline ( Eck 2 , Syme 3 , Birley 4 ) : en effet, les lettres du livre IV sont écrites en 104/105 selon les éditeurs ( voir Sherwin -White 5 , p. 32-33 ) . Les liens de Metilius Nepos avec la philosophie ne sont pas non plus évi dents ; c'est assurément un homme de culture doctissimus et disertissimus ( IV 26, 2) : il souhaite emporter les écrits de Pline avec lui dans sa province ; dans la lettre II 3 , Pline fait l'éloge du rhéteur Isée et invite son correspondant à aller l'entendre . Dans la lettre III 16 sont rapportées les actions héroïques et les paroles remarquables d'Arria l'Ancienne ( " A 421 ) , la femme de Caecina Paetus , que Pline tient de Fannia ( » F 5 ) , la petite -fille d’Arria , la femme d'Helvidius Priscus (= H 39 ) . Ces indications conduisent à penser que Metilius Nepos témoigne de l'intérêt pour le stoïcisme (Groag 1 , col . 1401-1402 ), sans qu'ilsoit possible d'apporter d'indications plus précises . MICHÈLE DUCOS.

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fl. MF Va

Astronome (astrologue ? ) et chronographe athénien de l'époque de la guerre du Péloponnèse, fils de Pausanias et originaire du dème de Leuconoé . Avec ses disciples , il a joué un rôle important aux origines de l'astronomie en Grèce. Il est censé avoir établi un cycle luni - solaire de 19 ans comportant 6 940 jours et 235 mois lunaires synodiques. Cf. 1 W. Kubitschek , art. « Meton » 2 , RE XV 2 , 1932 , col . 1458-1466 ; 2 J. Mau , art. « Meton » 2 , KP III 1969 , col . 1278 ; 3 P. Kroh , art . « Meton » , LAA 1972, p. 414 ; 4 G.J. Toomer, art. « Meton » , DSB IX , 1974 , p . 337-340 ; 5 A. C. Bowen & B. R. Goldstein , « Meton of Athens and astronomy in the late fifth century B.C. » , dans E. Leichty, M. de J. Ellis & P. Gerardi ( édit . ) , A scien tific humanist : studies in memory of Abraham Sachs, coll . « Occasional publica tions of the Samuel Noah Kramer Fund >> 9 , Philadelphia 1988 , p . 39-81 ; 6 W.Hübner, art. « Meton » 2 , NP VIII , 2000 , col . 107-108 .

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Données biographiques. Nous avons sur Méton un témoignage contempo rain , celui d'Aristophane, qui le fait apparaître comme un personnage dans les Oiseaux, comédie représentée aux Grandes Dionysies de 414a ( cf. v . 992-1020 ). Cependant, comme il est normal chez le comique , il s'agit d'un témoignage parodique et hostile qu'il faut interpréter comme allant même au -delà de la figure historique concrète de Méton : il semble viser en général les savants beaucoup trop rationalistes du moment. Méton apparaît portant des instruments caractéristiques du géomètre destinés à « toiser l'air et à le diviser en arpents » pour Pisthétairos (995 sq. ) . Il se présente lui -même comme « Méton, que connaissent la Grèce et même Colone » (997 sq . ). Comme il affirme que le ciel a la forme plus ou moins d'un four, Aristophane se moque sans doute des théories du philo sophe pythagoricien Hippon de Samos ( ** H 157 ) déjà raillées par lui dans les Nuées 96 sqq., et qui , à en croire la scholie sur ce dernier passage d’Aristophane ( cf. DK 38, A 2 , t. I, p. 385 ), l'avaient été aussi par Cratinos le comique dans une comédie intitulée Ceux qui voient tout (Tavóntai, voir fr. 155 Kock = fr. 167 Kassel -Austin ) . Dans le passage des Oiseaux on trouve une allusion également au problème de la quadrature du cercle, d'actualité à l'époque, lequel est résolu par notre personnage d'une manière absurde (cf. à ce sujet la scholie très détaillée ; cf. FGrHist IIIB 135 , Philochore, fr. 122 ; cf. la Souda, M 801 ; t. III , p. 376, 26 377 , 4 Adler). Par ailleurs, le plan finalement tracé sur le ciel par Méton a été comparé avec celui de Thurium dessiné par Hippodamos de Milet [2H 153 ] (cf. 7 H. Diels, Antike Technik : sieben Vorträge, Leipzig /Berlin, Zweite , erweiterte Aufl ., 1920, p . 16). En effet, sous le masque de notre astronome, Aristophane semble se moquer aussi de ce célèbre architecte et urbaniste , modèle de rationalisme mathématique. Enfin , devant ces démonstrations de Méton , Pisthétairos, son interlocuteur, après s'être écrié iron nement – « Cet homme est un Thalès ! » ( v . 1009 ) -, le chasse violemment comme un imposteur, en lui disant : « Veux-tu bien te mesurer toi-même t'en allant ailleurs ? » (v. 1020). Méton fut aussi cité par un autre auteur de la comédie ancienne , Phrynicos, dans une pièce perdue intitulée Monotropos ( L'hermite ), qui fut représentée dans le même festival que les Oiseaux d'Aristophane. En effet, dans la même scholie aux Oiseaux 997 , on a conservé de cette pièce un fragment ( fr. 21 Kock = fr. 22 Kassel - Austin ) , où on mentionne Méton comme « celui qui trace le plan des fontaines » (ó tàç upńvaç öywv) , en précisant son lieu d'origine : Métov, ó AevxovoLEÚÇ . Sa patrie était donc le dème attique de Leuconoé (cf. aussi Élien , Varia historia X 7 ) . Dans la scholie à Aristophane ( où Méton est qualifié de öplotoç đotpovóuoc xai YEWUÉTPNg ) on lit qu'Euphronios ( sans doute le philologue disciple d'Ératosthène (PE 52 , p. 202 ] ) disait que Méton était de Colone , mais le scholiaste considère cela comme faux et allègue à ce sujet le témoignage de l'historien Philochore (III a). Cf. aussi la Souda, ibid ., où le qualificatif de o uaonuatixóc est ajouté. Il semble évident que l'affirmation d'Euphronios remonte à l'ironie burlesque du passage d’Aristophane d'un « Méton que connaissent la Grèce et même Colone » . Par ailleurs , comme le remarque Toomer 4, p . 339 , il serait tout à fait absurde de vouloir tirer une conclusion quelconque sur les intérêts réels de Méton dans le domaine de la géométrie à partir de ce portrait burlesque , de même qu'on ne peut pas conclure , à partir de sa représentation comique qui le montre traçant les rues de Néphélococcygia ou perforant des sources, qu'il s'est engagé dans la planification ou l'hydrographie d'Athènes . En tout cas , les renseignements que nous avons à propos de Méton sur un ton sérieux le placent plus précisement dans le domaine de l'astronomie ( plus concrètement dans ses aspects chrono graphiques ).

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Théophraste, fr. 6, 5-8 Wimmer, le présente également comme un astronome athénien, et fait référence à son cycle de dix - neuf ans , de même que Diodore de Sicile ( -D 131 ), Bibliothèque historique XII 36, 2 sq . (cf. chap. pr. ) , qui donne davantage de renseignements : sous l'archontat d'Apseudès à Athènes (432 ) , et dans cette ville , « le fils de Pausanias, Méton , astronome réputé (8E8o&auévoç 8è év đotpooyia ), présenta (ÉEÉOnxe) ce qu'on appelle “ le cycle de dix -neuf ans” ( ή εννεακαιδεκαετηρίς) , dont il fixa le début le treize du mois athenien scirophorion ( = 27 juin ) . En dix -neuf ans, les astres reviennent à leur position initiale et décrivent en quelque sorte la révolution d'une grande année, qu'on appelle parfois l'année de Méton (éviavtòç Métwvoc ). A ce qu'il paraît, cet homme a merveilleusement réussi dans ses pronostiques et ses prévisions : les astres se déplacent et apparaisent comme il le décrit (ovubúvuç tñ ypaon ) ; c'est pourquoi la plupart des Grecs utilisent aujourd'hui encore le cycle de dix neuf ans, et ne se trompent pas » ( trad . M. Casevitz ; cf aussi D. S. II 47 , 6 sq. , où on parle de « la grande année » ou ÉVLAUTÒc ubyac, le nom de Méton ayant été introduit dans l'édition Dindorf, mais faisant défaut dans le texte de Diodore, comme le montrent les éditions en usage aujourd'hui). Comme le remarque 8 M. Casevitz ( édit . ) , Diodore de Sicile, Bibliothèque historique, Livre XII, CUF, Paris 1972, p. 110 : « À Rome, ce n'est qu'en 45 que le calendrier solaire remplaça le calendrier lunaire dont les Romains se servaient sans déterminer d'intercalations fixes. Mais Diodore, empruntant à une source nettement antérieure , ne parle que des Grecs qui « se servent encore aujourd'hui du cycle de dix-neuf ans » . La date de l'archontat d'Apseudès était déjà fournie par l'historien Philochore ( cf. supra ), selon lequel cette année - là Méton aurait dressé un instrument pour observer les solstices (ηλίου τροπαί, un ηλιοτρόπιον) sur le mur de la Pnyx a Athènes . D'après Diels 7 , p. 160 , ce point d'observation solaire de l'époque de Périclès n'a pu être qu'un grand gnomon du type de l'héliotropion que le tyran Denys fer éleva a Syracuse au début du IVa ( cf. Plutarque, Dion . 29 : « ...un cadran solaire en un lieu élevé et bien en vue ... » ; cf. 9 K.W. Göttling , Commentatio de Metonis astronomi heliotropio Athenis in muro Pnycis posito, Ienae 1861 , 10 p . ; 10 K. Kouroniotes & H. A. Thompson , « The Pnyx in Athens » , Hesperia 1 , 1932 , p . 207-211 ) . Même si la forme de cet instrument de Méton reste tout à fait hypothétique, Toomer 4 , p . 338 , considère aussi qu'un gnomon vertical pouvait servir à ce propos, car il permettrait d'observer son ombre la plus large et la plus courte au midi . Certains auteurs estiment qu'il devrait s'agir d'un instrument beaucoup plus compliqué ( cf. 11 F.M. Dunn , « The council's solar calendar » , AJPh 120 , 1999 , p. 369-380 , notamment p. 375 ) , mais tout cela reste hypothétique. Quoi qu'il en soit , sur les observations astronomiques des solstices d'été ( Oepivai tponal) préalables à l'établissement du cycle de Méton , nous avons aussi le témoignage de Ptolémée , Syntaxis mathematica III 1 ; t. I , p. 203, 8-12 Heiberg, qui précise que Méton aurait fait ces observations avec l'aide d'Eucté mon . Un peu plus loin ( p . 205-207 Heiberg ) , il date , en faisant référence maintenant au calendrier alexandrin , l'observation de Méton et d'Euctémon ( il rapproche aussi les deux astronomes dans l'établissement du cycle) « sous l'archontat d'Apseudès (432 ), à Athènes , le 21 du mois phamenoth ( 27 juin ) , au

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matin » . Finalement, on a le fragment d'une inscription découverte en 1899 dans le théâtre de Milet , faisant probablement partie d'un calendrier astronomique ou parapegma (cf. 12 H. Diels & A. Rehm, « Parapegmenfragmente aus Milet » , SPAW 1 , 1904, p. 92-111 ; 13 A. Rehm , « Das Parapegma des Euktemon » , SHAW [4) , Jahrg . 1913 , 3 Abh . , p. 1-38 ; 14 W. Kubitschek, Grundriss der antiken Zeitrechnung, coll . « Handbuch der Altertumswissenschaft » I 7 , München 1928 , p. 161-162 , 173-174 [« Parapegmatisten » ] ; 15 A. Rehm , « Para pegmastudien : mit einem Anhang Euktemon und das Buch De signis . Vorgetragen am 4. Mai 1940 » , ABAW N. F. , Heft 19 , 1941 , notamment p . 7-9 ; 16 Id ., art. « Parapegma », RE XVIII 2 , 1949 , col . 1295-1366 , notamment col . 1299-1302) . Grâce à ce fragment on a pu constater que le 13 scirophorion et le 21 phamenoth étaient la même date. Or, les récits anciens de Diodore et de Ptolémée présentent une différence d'un jour par rapport aux calculs modernes, selon lesquels le solstice en question eut lieu le 28 juin 432a vers 11 heures 30 du matin . Devant cette situation , la plupart des critiques considèrent qu'il s'agit du 27 juin 432 * (cf. Toomer 4 , p. 337 sq . ) , mais d'autres, comme déjà 17 A. Boeckh, Ueber die vierjährigen Sonnenkreise der Alten , vorzüglich den Eudoxischen : ein Beitrag zur Geschichte der Zeitrechnung und des Kalenderwesens der Aegypter, Griechen und Römer, Berlin 1863 , p. 43 sq ., estiment qu'il faut en réalité l'identifier avec le 28 juin (cf. Hübner 6 , col . 108 ) . Ce problème a fait l'objet d'une analyse approfondie par 18 L. Depuydt, « The Egyptian and Athenian dates of Meton's observation of the summer solstice (-431) » , AncSoc 27 , 1996 , p . 27-45 , qui présente des arguments en faveur du 28 juin 432a ( la notation - 431 du titre répond à l'usage astronomique, qui tient compte d'une année zéro ). Pour l'historique de la question , cf. Depuydt 18, p. 42-44 . A son tour, Depuydt 18, p. 34 39, défend l'hypothèse que c'est la date athénienne ( 13 scirophorion) qui fut transmise à nos sources , alors que la date égyptienne ( 21 phamenoth ) fut calculée plus tard . D'après lui , le milieu intellectuel alexandrin possédait un rapport selon lequel le 13 scirophorion (calculé selon un calendrier athénien quelconque ), et à la fin de l'année dans laquelle Apseudès fut archonte, Méton observa le solstice d'été à Athènes. Ensuite , à un moment au début du mia, peut-être après, on aurait ressenti la nécessité de convertir cette date en celle du calendrier local égyptien . A ce moment , l'instrument le plus précis à la portée des astronomes pour cette conversion était le cycle de Callippe de Cyzique ( 2 ° C 33 ; cf. infra ), mais la date du solstice de Méton n'était pas obtenue selon ce cycle , qui n'existait pas à l'époque. Ce qu'on a fait, apparemment, d'après Depuydt 18, p. 36 , en ce qui concerne la date en question , fut de laisser de côté l'aspect lunaire de ce cycle , et de se servir seulement de son aspect solaire en union avec le calendrier égyptien . Ptolémée affirme que Méton observa le solstice au lever du soleil du 21 phamenoth de 432 a, et il vient de préciser plus haut qu'il a omis les observations des solstices de Méton (et d’Euctémon ) , ainsi que d'autres réalisées plus tard par Aristarque, parce qu'elles étaient un peu trop grossièrement faites, comme c'était déjà l'avis d'Hipparque. Or, la question qu'il faut poser ici est autre : pourquoi le solstice aurait -il été daté le matin du 21 phamenoth s’il était arrivé le 22 phamenoth , environ à 11 heures 30 du matin ? La raison de cela il faut la chercher, d'après Depuydt, justement dans le fait qu'on a calculé la date égyptienne par l'extension vers le passé de la règle de mesure du cycle callippéen, qui était trop longue , ce qui veut dire que le solstice d'été arrive plus rapidement que ce qui est indiqué dans le cycle : « Or, by calculating backward into the past with the Cycle, a summer solstice will be dated earlier in time than the time when it actually happened, or farther away than should be from the moment from which it is calculated » (p. 38 ). Comme le remarque Depuydt 18, p. 39 , on peut donc supposer comme probable que Méton observa le solstice le

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jour correct, 28 juin 432a, et donc que le 13 scirophorion était en réalité le 22 phamenoth (Depuydt 18, p. 40-42, ajoute quelques arguments en faveur de cette idée ). Par ailleurs, à partir des témoignages de la tradition, on a tiré l'idée que Méton , en se fondant sur son propre cycle , avait établi un calendrier civil proprement dit qui avait recours aux mois du calendrier athénien , et qui visait en quelque sorte à le corriger. C'est en effet en ce sens que l'on a interprété les passages suivants: le passage cité de Diodore où l'on parle d'un écrit (ypaoń ) de Méton extraordinairement fiable et utilisé par les Grecs ; une scholie à Aratos, schol. 752 , li. 16-26 (p. 478 Maass ), où l'on suggère l'existence d'un calendrier de 19 ans qui aurait été placé par les astronomes du cercle de Méton ( oi metà Μέτωνα αστρονόμοι) dans les villes sous la forme de planches (πίνακες ) ; Ptolémée , Phaseis, où Méton apparaît souvent comme autorité ( cf. t. II , p. 22, 4 ; 31 , 12 ; 43 , 11 , 16 etc. Heiberg ); et Élien, Varia historia X 7 , qui parle de stèles (ornat ). Cependant, rien n'autorise en réalité à penser que le calendrier en question ait été autre chose qu’un calendrier astronomique tout court, constituant sans doute le premier recueil proprement dit de données astronomiques rassemblé en Grèce , mais sans aucun rapport avec le calendrier civil (cf. infra, pour la discussion à ce sujet). En tout cas, la seule chose claire c'est que Méton a publié un calendrier astronomique, peut-être sous la forme d'un parapegma ( ntapánnyua ), ce qui pourrait expliquer les témoignages de la tradition. Nous avons enfin chez Plutarque une anecdote qui présente Méton réagissant contre la réalité politique athénienne contemporaine, concrètement la prépara tion de l'expédition en Sicile . Voici le récit chez Plutarque, Nicias 13 , 7-8 , 532 a-b : l'astronome (đotporóyos ), « soit par crainte des présages contraires à cette expédition , soit par suite de raisonnements purement humains (ůvopwntiva oyloum ), redoutait l'expédition, car il était préposé à un commandement ( pv γάρ εφ' ηγεμονίας τινός τεταγμένος) ; il simula la folie (ως μεμηνώς ) et mit le feu à sa maison . D'autres disent qu'il ne fit pas semblant d'être devenu fou (où uaviav oxntáuevov ), mais qu'il incendia sa maison pendant la nuit , et qu'il se présenta ensuite à l’Agora, l’air abattu , et supplia ses concitoyens , devant un tel malheur, d'exempter de l'expédition son fils, qui devait s'embar quer pour la Sicile comme triérarque ( trad. R. Flacelière & É. Chambry). Chez Plutarque, Alcibiade 17 , 5-6, 199 f - 200 a, l'attitude de Méton est comparée à celle de Socrate : « On dit pourtant que Socrate le philosophe et Méton l'astro nome n'espéraient rien de bon pour Athènes de cette expédition . Le premier avait sans doute entendu les avertissements de son Génie familier. Quant à Méton, soit que sa crainte de l'avenir vînt du raisonnement , soit qu'elle fût la suite d'une sorte de divination (είτε δείσας εκ λογισμού το μέλλον , είτε μαντικής τινί τρόπο χρησάμενος) , il feignit d'etre devenu fou (έσκήψατο MEUnvéval), et, saississant une torche enflammée, il fit mine de mettre le feu à sa maison . Quelques- uns disent que Méton ne simula pas du tout la folie , mais qu'il incendia sa maison pendant la nuit , et que , le matin venu , il se présenta devant le peuple et le pria et supplia, en considération de ce grand malheur, de

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dispenser son fils de l'expédition . En tout cas , il réussit à tromper ses concitoyens et obtint ce qu'il demandait » (trad . Id .).

Il aurait donc brûlé sa maison pour ne pas être obligé de prendre part à l'expédition de Sicile , dans laquelle il devait exercer un commandement et son fils y participer comme triérarque. Le point selon lequel Méton aurait eu recours à la simulation de la folie apparaît comme douteux dans les deux passages de Plutarque, tandis que le témoignage d'Élien , Varia historia XIII 12, insiste sur la réalité de cette astuce : le fait d'avoir brûlé sa maison (qui se serait trouvée proche de la Stoa Poikilè) n'aurait été qu'un des actes accomplis pour rendre sa maladie crédible. Élien va même jusqu'à dire que Méton simulait la folie mieux qu’Ulysse , car Palamède confondit celui - ci , « alors qu'aucun Athénien ne confondit Méton » . Élien corrobore aussi l'idée que Méton connaissait parfaite ment l'avenir (σαφώς δε επιστάμενος τάς μελλούσας τύχας ) , raison pour laquelle il voulait échapper à l'embarquement. Certains détails chez Élien, comme la précision concernant la localisation de la maison ou l'absence de mention du fils de l'astronome semblent indiquer une origine indépendante de Plutarque, ce qui peut renforcer l'idée de l'existence d'un fond de vérité dans cette anecdote . L'anecdote suggère également la possibilité que Méton ait pratiqué une espèce de divination , s'il est vrai que sa science lui révéla, au moment du départ de la flotte, le désastre qui attendait l'expédition de Sicile . L'idée d'un Méton astrologue ou au moins ayant eu quelque teinture d'astrologie a été exprimée par 19 F. Cumont , Astrologie et religion chez les grecs et les romains, texte présenté et édité par I. Tassignon, coll . « Institut historique belge de Rome . Études de philologie , d'archéologie et d'histoire anciennes » 37 , Bruxelles /Rome 2000 , p . 43 ( version originale de : Astrology and religion among the Greeks and Romans, New York 1960 , p . 26, avec deux chap. nouveaux ) , qui voyait en cela un indice de la possibilité d'une origine orientale (babylonienne ) des recherches astronomiques de Méton . Ce qui est attesté au moins par Diodore ( cf. supra ) c'est qu'il était fort admirable par l'exactitude de ses pronostics et ses prévisions astronomiques. Certains témoignages permettent même de supposer que les observations astronomiques de Méton ( son calendrier astronomique) eurent aussi une applica tion météorologique ( cf. 20 P. Tannery, Recherches sur l'histoire de l'astro nomie ancienne , coll . « Mémoires de la Société des Sciences physiques et naturelles de Bordeaux » 1 [4 ° s . ) , Paris /Bordeaux 1893 , réimpr. Paris 1995 , notamment p. 20) . On a même supposé que Méton aurait observé aussi les équinoxes , parce qu'il semble avoir accepté des durées inégales pour les saisons (90, 90 , 92 et 93 jours à commencer avec le solstice d'été ) , que Callippe ( C33 ) aurait fixées avec plus de précision ( cf. Eudoxe , Ars astronomica , fr. 173 a , 214 c , 3 , 236 b Blass ; 21 D.R. Dicks , Early Greek astronomy to Aristotle, coll . « Aspects of Greek and Roman Life » , London 1970 , p. 87 sqq. ). En réalité, il est question ici d'Euctémon et non pas de Méton , mais on considère que les deux astronomes auraient collaboré également dans ce domaine , comme semble le confirmer Simplicius , in De caelo , CAG , t . VII , p. 497 , 20 Heiberg.

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Cela dit , comme le remarque Toomer 4 , p . 338 , nos témoignages n'impliquent pas qu'ils ont fait des observations d'équinoxes : « The first Greek of whom we can say with certainty that he determined the lengths of the seasons by observation , and drew the conclusion that the sun has an anomalistic motion , is Callipus » (cf. Dicks 21 , p. 88 sqq . ). Les indications concernant les changements et les phénomènes des différentes saisons ( vent, pluie , grêle) sont rattachées au nom d'Euctémon (cf. Eudoxe, Ars astronomica, fr. 201 b, 202 , 206 , 207 b , 243 Blass), et, chez les auteurs latins, aussi à Méton : cf. Columelle, De re rustica I , chap. pr. , 32 (qui parle de la « providentia de Méton » au sujet des changements de vents ) ; ibid. , IX 14 , 12 ; Vitruve, De architectura IX 6 , 3 (cf. 22 A. Le Bæuffle, Le ciel des romains, coll. « Antiques » , Paris 1989, p. 6) . Par conséquent , bien qu'il reste une figure assez obscure , les témoignages dont nous disposons semblent nous permettre d'affirmer que Méton , avec la collaboration d'Euctémon , a dû jouer un rôle très important dans les débuts , un peu rudes, des recherches astronomiques en Grèce (cf. Toomer 4 , p . 339 ) . On cite d'ordinaire Euctémon comme son collaborateur, mais il est probable qu'il a eu à ses côtés d'autres astronomes ayant collaboré à ses travaux (cf. supra, la scholie à Aratos ). Comme le remarquent Bowen & Goldstein 5 , p. 40, on n'a connaissance que de deux témoignages sur des observations astronomiques réalisées en Grèce avant Alexandre : la prédiction d'une éclipse de lune ( peut-être celle de 585 a) par Thalès , et justement, l'obser vation faite par Méton du solstice d'été de 432a. « L'année de Méton » . L'activité astronomique de Méton a sans doute produit son résultat le plus important dans le domaine de la chronologie. Il s'agit du « cycle de dix - neux ans » ( ń évvEaxaldexaernpis), que , d'après le témoi gnage de Diodore ( cf. supra ), les Grecs appellaient souvent « l'année de Méton >> ( ÉVLAUTÒC Métovos ) ou « la grande année (de Méton ) » (ĚVLQUTÓS ubyac). Censorinus, De die natali 18 , 8 , mentionne le cycle de Méton parmi tous les autres qu'il englobe sous le vocable de « grandes années » ( « magni anni » ) . Pour cette notion , nous renvoyons à 23 A. Le Bæuffle, Astronomie , astrologie : lexique latin, Paris 1987, p. 44, s . v. « Magnus annus » : « Pour les philosophes antiques, comme tous les corps célestes se mouvaient régulièrement suivant des orbites circulaires, un moment devait arriver où non seulement le soleil et la lune ( cf. cyles luni-solaires : ... Metonicus ... ) , mais aussi toutes les planètes, malgré la diversité de leurs révolutions, se retrouveraient dans des positions respec tives absolument semblables à celles qu'ils avaient déjà eues. Alors serait révolue l'année parfaite, la Grande Année » . Le cycle de Méton ne représenterait donc pas au sens strict et parfait une Grande Année, mais Diodore de Sicile témoigne qu'il recevait cette dénomination. Comme Censorinus , Isidore de Séville , De rerum natura VI 3 ; p. 195 , 19 sqq . Fontaine, confond aussi le cycle de Méton avec la Grande Année . Le cycle de Méton se trouve aussi mentionné chez Cicéron, Epistulae ad Atticum XII 3 , 2 ( il semble annoncé chez Hygin , Astronomica , préf. 5 : « Meton diligentissime obseruasse uideatur » , mais le passage correspondant fait défaut). Sur le cycle de Méton, cf. la mono graphie ancienne de 24 C. Redlich , Der Astronom Meton und sein Cyclus : ein Beitrag zur griechischen Chronologie , Hamburg 1854, 74 p. ( cf. aussi 25 A. Mommsen , « Meton und sein Cyklus nach den Zeugnissen » , RhM 13 , 1858 , p . 428-456 ; 26 E. Müller, « Der Cyklus Meton's und seine Geltung in Athen » , RHM 14 , 1859, p. 41-78 , 327-328 ; 27 J. Oppert, « L'année de Méton » , REG 16, 1903, p. 5-17). Notre source la plus importante pour connaître le cycle créé par Méton est l'introduction à l'astronomie de Géminos ( P - G 15 ) , même si celui -ci ne men

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tionne pas le nom de Méton ( il mentionne en revanche celui de son collaborateur Euctémon ). Il y est question aussi , par ailleurs , d'autres cycles luni-solaires qui cherchaient à synchroniser les années lunaires et solaires, c'est - à - dire à établir

une concordance périodique entre la vieille année lunaire et les révolutions solaires : le cycle de 8 années ( l’octaétéride ) qui précédait celui de Méton ( cf. 28 J. Soubiran , « Solon , Harpale et l’octaétéride ( Aviénus , Arat. 1363 1370 ) » , Pallas 25 , 1978 , p. 9-20, pour l'attribution à Solon de l’octaétéride ), et celui de Callippe ( 2 ° C 33 , p. 181 ) qui l'a suivi et qui comportait 76 années. A ce sujet, il convient de partir du commentaire suivant de 29 G. Aujac ( édit. ), Géminos, Introduction aux phénomènes, texte établi et trad ., CUF, Paris 1975, p. 143 : « Il est probable que Géminos décrit la période métonienne à partir de la callippique ; c'est également, semble - t - il, en fonction de celle -ci qu'il décrit l’octaétéride, pour en montrer les insuffisances. La source de ces développe ments, directement ou indirectement, a pu être Ératosthène (PE 52 , p. 225 sq .) dans ses discussions sur la longueur de l'année . Le conflit semble en effet se situer ici entre l’octaéride d’Eudoxe ( » E 98 , p. 300 ] ( ou des Égyptiens ), attaquée par Ératosthène, et le cycle de 4 fois 19 ans ou cycle de Callippe pour lequel Géminos prend parti, comme avait dû le faire avant lui Ératosthène . La reconstitution que fait ici Géminos n'a donc aucune valeur historique, ne fonde en rien une chronologie ; c'est une simple discussion , théorique , sur le bien ou le mal fondé de l'un et l'autre système » . Le premier passage à considérer est Géminos, Introduction aux phénomènes VIII 42-49, qui porte sur l'erreur de l’octaétéride, le cycle que Méton aurait essayé de corriger, car il fallait intercaler 3 ou 4 jours tous les 16 ans pour rétablir la concordance avec le cours de la lune. Voici à nouveau le commentaire d'Aujac 29, p. 56, à ce passage : « Tout ce développement ( 42-49) est fondé sur l'idée que l'octaétéride ne concorde en aucun cas avec les apparences célestes, quelles que soient les corrections apportées: la durée mensuelle est supérieure à 29 j . 1/2 , et donc mois creux et mois pleins ne doivent pas alterner régulière ment ; d'autre part, les trois mois intercalaires sont trop longs, il y a un écart entre année lunaire et année solaire dans l’octaéride, comme il apparaît déjà en considérant une seule octaétéride, mais surtout en comparant une série de 19 octaérides avec la période de 19 ans » . Il s'agissait donc d'établir une relation entre le mois lunaire et l'année solaire. A ce sujet, on lit chez Géminos, Intro duction aux phénomènes VIII 50-56 : « (50) Comme l’octaéride se montrait donc erronée, les astronomes Euctémon, Philippe et Callippe ont composé une autre période, celle de 19 ans. (51 ) Ils ont considéré que 19 ans contenaient au total 6 940 jours, soit 235 mois y compris les intercalaires (en 19 ans on ajoute 7 intercalaires). L'année vaut donc selon eux 365 jours 5/19. (52) Dans les 235 mois, ils ont placé 110 mois creux et 125 mois pleins, si bien que mois pleins et mois creux n'alternent pas régulièrement, mais il y a parfois deux mois pleins à la suite. Ce procédé est parfaitement admisible , par nature , du point de vue des phénomènes célestes : il est conforme à la théorie de la lune, ce qui n'était pas le cas dans l'octaétéride. (53 ) Si , dans les 235 mois, on a placé 110 mois creux, c'est que, puisqu'en 19 ans il y a 235 mois, si l'on suppose tous les mois de 30 jours, cela fait en tout 7 050 jours : il faut donc 110 mois creux pour ramener la période de 19 ans à un total de 6 940 jours lunaires. (54) En effet les 7 050 jours correspondant à des mois constants de 30 jours sont en excédent sur 6 940 de 110 jours : on introduit donc

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110 mois creux afin que, dans les 235 mois, on arrive au total de 6 940 jours pour la période de 19 ans. (55 ) Afin que la soustraction des jours se répartisse aussi également que possible, on a divisé les 6940 jours par 110 : cela fait 63. Il faut donc tous les 63 jours, dans la période en question , ôter un jour. (56) Au lieu de supprimer uniformément le 30 du mois, c'est un seul jour tous les 63 jours qu'en principe il faut retrancher. (57 ) Cette période est la seule dans laquelle les mois semblent être évalués correctement, et les intercalaires ordonnés en accord avec les apparences célestes ; mais la durée de l'année ne concorde pas avec les apparences celestes. (58 ) En effet la durée de l'année, fondée sur des observations très anciennes, est d'un commun accord fixée à 365 jours 1/4 ; or, l'année contenue dans la période de 19 ans vaut 365 jours 5/19, soit un excédent de 1/76 jours » ( trad. Aujac ). Méton aurait donc découvert que le soleil et la lune occupaient la même position relative après 6 940 jours, en créant son cycle de 19 ans. Autrement dit , ce cycle était fondé sur l'observation que 235 mois lunaires correspondent à 19 années solaires (et à 19 années lunaires plus sept mois ) Or, le résultat final n'était pas non plus tout à fait exact. C'est la raison pour laquelle , d'après Géminos , la période de 76 ans fut créée : « ( 59 ) C'est pourquoi les astronomes , dont Callippe, pour corriger cette fraction de jour en excédent, ont composé la période de 76 ans, formée de 4 périodes de 19 ans , contenant 940 mois dont 28 intercalaires, et 27 759 jours seulement. (60 ) Ils ont utilisé le même ordre que ci -dessus pour les intercalaires. C'est là la période qui , de toutes, semble le mieux concorder avec les apparences celestes » (cf. 30 J. K. Fotheringham, « The Metonic and Callippic cycles » , Monthly Notices of the Royal Astronomical Society 84, 1923-1924 , p. 383 392 ; 31 B. L. van der Waerden , « Greek astronomical calendars , II : Callippos and his calendar » , AHES 29, 1984, p. 115-124). L'idée que la découverte de Méton communiquée en 432 aux Athéniens les aurait émerveillés au point qu'ils auraient fait graver ses calculs en caractères d'or sur l’agora relève purement de la légende. Cela est rappelé encore par le « nombre d'or » de nos calendriers ecclésiastiques chrétiens pour le calcul de la date du dimanche de Pâque dépendant de la pleine lune, les années du « cycle métonien » étant appelées « années d'or » ( cf. Cumont 19, p. 43). Un calendrier civil athénien ? Comme nous avons dit plus haut , on a imaginé que Méton , en se fondant sur son cycle, avait établi à Athènes un calen drier civil proprement dit qui avait recours aux mois du calendrier athénien . Il faut partir à ce sujet de l'interprétation qu'avait fait des témoignages de Diodore et Ptolémée 32 J.J. Scaliger, De emendatione temporum , Opus novum , abso lutum , perfectum , octo libris distinctum , Francofurti 1593 , 432 p . Tout d'abord , Scaliger ne pouvait pas à l'époque faire coïncider les dates de ces deux sources ( le parapegma de Milet n'ayant pas encore été découvert), qui feraient réfé rence , d'après lui , à des événements différents (cf. Toomer 4 , p . 337 sq .; Depuydt 18 , p . 42 sq .): le 21 phamenoth ( témoignage de Ptolémée ) au solstice d'été du 28 ( sic) juin ; et le 13 scirophorion ( témoignage de Diodore ) au début du cycle de Méton . Il considéra, par ailleurs , que le cycle devait commencer avec une conjonction astronomique. De ce point de vue , le 13 scirophorion, le début du cycle , et son 1 er hecatombaion auraient coïncidé avec la première lune après le solstice , et le mois hécatombaion pouvait donc ne pas être un mois lunaire. Scaliger voulait voir ici une preuve de sa très particulière hypothèse selon laquelle le calendrier courant athénien n'était pas lunaire . La conjonction du 13 scirophorion fut identifiée avec celle du 15 juillet , et son 1 er scirophorion , par conséquent, avec le 3 juillet . Méton aurait donc commencé son cycle avec la

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première nouvelle lune ( 13 scirophorion ou 3 juillet) après le solstice d'été ( 21 phamenoth , fixé à tort par Scaliger le 28 juin et non pas le 27 juin , même s'il avait bien eu lieu le 28 ) . Le caractère erronné de cette interprétation fut mis en évidence par la décou verte du fragment de Milet, qui faisait coïncider les dates fournies par Diodore et par Ptolémée : ce parapegma fournit l'information que le 13 scirophorion 432a était le jour du solstice d'été . Cependant, l'idée que Méton aurait établi un calendrier civil à Athènes a eu un très grand retentissement. Sur tous les problè mes soulevés à propos de ce soi -disant calendrier civil de Méton , on peut consulter la mise au point de 33 W.K. Pritchett , « The Choiseul marble » , University of California publications, Classical Studies ( Berkeley ] 5 , 1970 , p . 39-97 , qui tend à prouver que jamais Athènes n'a introduit le cycle de Méton ni aucun autre cycle dans ses calendriers. Le principal tenant de la thèse d'un calendrier de l'administration civile athé nienne fait en accord avec le cycle de Méton a été B.D. Meritt , qui se fonde notamment sur deux idées principales : (a ) les décrets athéniens présentent une série de dates lunaires accompagnées de la mention xatà Deov , expression qui doit être interprétée comme xatà oeinvnu et celle -ci comme « en accord avec le cycle de Méton » ; (b ) le début des années xarà 0 €õv marquait l'entrée dans leurs fonctions des prytanes et de la machinerie politique de la cité : Cf. 34 B. D. Meritt, The Athenian year, Berkeley /Los Angeles 1961 , p. 216 ; 35 Id ., « The seasons in Thucydides » , Historia 11 , 1962 , p. 436-446 ; 36 Id. , « Athenian calendar problems » , TAPHA 95 , 1964, p. 200-260 , notamment p. 235-242 ( « The calendar of Meton » ) ; 37 Id ., « Calendar studies » , ArchEph 1968 , p . 77-115 , notamment p. 92-105 ; 38 Id . , « Metonic intercalations in Athens» , Hesperia 38 , 1969 , p. 107-113 ; 39 D. M. Lewis , c.r. de Meritt 34, dans JHS 83 , 1963 , p. 195 ; 40 M.F. McGregor, « Method and manners in Greek epigraphy » , Phoenix 20, 1966 , p. 210-227 , notamment p. 220. Cf. aussi 41 W. B. Dinsmoor, The archons of Athensin the hellenistic age, Cambridge (Mass . ) 1931 , notamment p. 309-359 (chap. XVIII : « The nineteen -year cycles of Meton » ). D'autres critiques se sont bornés à interpréter l'expression xarà Deov comme « en accord avec la lune » , et n'envisagent ici nullement Méton . C'est l'interpré tation soutenue notamment par W. K. Pritchett (qui entama une âpre polémique à ce sujet avec Meritt dans les années 1960 : cf. McGregor 40 , p . 220 ) et O. Neugebauer : Cf. 42 W. K. Pritchett & O. Neugebauer, The calendars of Athens, Cambridge ( Mass. ) 1947 , p . 4 sqq . ; 43 W.K. Pritchett , « Julian dates and Greek calendars » , CPh 62 , 1947 , p. 235-243 ; 44 J. Pouilloux, c . r. du livre de Pritchett & Neugebauer 42 , dans BCH 73 , 1949 , p . 497 ; 45 E. J. Bickerman , Chronology of the ancient world , coll . « Aspects of Greek and Roman Life » , rev. ed . , London 1980 ( 1968 ! ) , p. 29, 37 sq.; 46 O. Neugebauer, Les sciences exactes dans l'Antiquité, Paris 1990 ( trad. de The exact sciences in Antiquity, New York 19572 ) , p. 25 , 128 , 177 ; 47 Id . , A history of ancient mathematical astronomy, In three parts with 9 plates and 619 figures, coll . « Studies in the history of mathematics and physical sciences » 1 , Berlin /Heidelberg/New York 1975 , p. 622-624 ( « The Metonic and Callippic cycle » ) ; 48 B.L. van der Waerden , « Greek astronomical calendars and their relation to the Athenian civil calendar » , JHS 80 , 1960 , p . 168-180 , notammment p . 179 sq .; 49 W.K. Pritchett & B. L. van der Waerden, « Thucydidean time-reckoning and Euctemon's seasonal calendar» , BCH 85 , 1961 , p. 17-52 ; 50 W. K. Pritchett, « Thucydide V 20 » , Historia 13 , 1964, p. 21-36 ; Id. , « The calendar of the Athenian civic administration » , Phoenix 30 , 1976 , p . 337-356 ; 51 B. L. van der Waerden , « Greek astronomical calendars, I : The parapegma of Euctemon » , AHES 29, 1984, p. 101-114.

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Toutefois, l'idée que Méton a joué (avec Euctémon ) un rôle décisif dans la réforme du calendrier lunaire attique a perduré même jusqu'à nos jours: cf. Hübner 6, col . 107. On peut citer également l'article de Dunn 11 , pour qui le calendrier des prytanies, contenant 366 jours et fondé sur une année solaire approximative ( avec la suppression fréquente d'un jour pour maintenir l'alignement solaire), fut probablement établi après la création par Méton de l'héliotropion en 433/2 . Il va même jusqu'à suggérer ( p . 378 sq.; cf. 52 Id ., « The uses of time in fifth - century Athens » , AncW 29 , 1998. p . 37-52 ) que le conflit entre le nouveau calendrier des prytanies et le calendrier des archontes, qui n'étaient pas de la même durée, pouvait se trouver à l'arrière- plan des plaintes exprimées par le cheur chez Aristophane, Nuées 615-626 (cf. déjà Bickerman 45, p. 37 ) . Comme le montre Toomer 4 , p . 337 sq . , le propos de Méton n'était pas de réformer le calendrier athénien mais d'établir une « chronologie astronomique >> ( cf. 53 G. J. Toomer, « Introduction [d] : Chronology and calendars » , dans Id . [édit. ] , Ptolemy's Almagest, translated and annotated, coll . « Duckworth Classi cal , Medieval and Renaissance editions » , London 1984 , p . 9-14 , notamment p. 12 ) . Pour le dire avec Neugebauer 47 , p . 622 : « Meton did not attempt to introduce a new lunar calendar but intended to establish a definite starting point in the solar year for the construction of parapegmata » . On peut aussi estimer, comme Aujac 29, p. 57 n . 2, que la procédure décrite par Géminos dans VIII 56 (cf. supra) pour le cycle de Méton devait compliquer singulièrement la tâche des faiseurs de calendriers, si bien qu'il n'y a rien d'étonnant qu'un tel système ne soit jamais passé dans la pratique. Origine babylonienne ? Il faut poser finalement la question concernant la possibilité d'une influence babylonienne sur Méton , car on sait par IVe siècle av . J.-C. qu'un cycle intercalaire courant de 19 ans ( 19 x mois synodiques ) était employé régulièrement en Babylonie, et il été connu , même s'il ne fut pas employé uniformément, à partir ve siècle. On ajoute à cela le témoignage de Théophraste, De signis 4 ( fr. 6 Wimmer), selon lequel Méton aurait dérivé son cycle

des textes du 12 + 7 = 235 semble avoir du début du tempestatum d'un certain

Phaéinos, un métèque résidant à Athènes, la possibilité que celui -ci fût un grec originaire d'Asie ayant pu jouer un certain rôledans la transmission de la sagesse astronomique des Babyloniens . D'après Toomer 4 , p . 339 , il faut ajouter une autre connexion de Méton avec l'astronomie babylonienne : le fait que , d'après Columelle , De re rustica IX 14, 12 , il a placé les équinoxes et les solstices à 8° de leurs signes zodiacaux respectifs, ce qui était caractéristique du « système B » dans les textes astronomiques des Babyloniens . Cumont 19, p . 25 , signale que durant une période de plusieurs siècles le développement de l'astronomie ( comme celui de la trigonométrie) en Orient et en Occident fut parallèle et dans une large mesure indépendant: « Personne ne pourrait dire actuellement à qui des Grecs ou des Babyloniens revient le mérite de certaines découvertes, par exemple celle du cycle de Méton . Mais ce qui appartient en propre aux Chaldéens, c'est d'avoir fait profiter la religion de ces conceptions nouvelles et d'avoir fondé sur elle une théologie savante . En Grèce la science est laïque, en

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Chaldée elle est ecclésiastique » . Par ailleurs , Cumont 19 , p . 43 , en ce qui concerne le cycle de dix- neuf ans , signale qu'il paraît difficile de croire que Méton ne se soit pas inspiré de l'exemple que lui donnaient les Orientaux . Comme indice de ce fait il allègue aussi les renseignements selon lesquels Méton aurait eu quelque teinture d'astrologie ( cf. supra ). En tout cas, comme Cumont lui-même le reconnaît, la possibilité d'un développement indépendant du cycle chez les Babyloniens et chez les Grecs, ou même de sa découverte d'abord par les Grecs, n'est nullement à exclure (cf. aussi Neugebauer 47 , p. 4 ; Dicks 21 , p . 172 ) . PEDRO PABLO FUENTES GONZÁLEZ. 141 MÉTOPOS DE SYBARIS OU DE MÉTAPONTE RE Dans le catalogue des pythagoriciens de Jamblique, V. pyth . 36 , 267 , p. 144 , 20 Deubner, figure un Métopos parmi les Sybarites. Toujours sous le nom de Métopos ( mais un Métopos originaire cette fois de Métaponte ) ont été transmis par Stobée ( III 1 , 115-116 , p. 66, 11 - 76 , 9 Hense ) deux fragments d'une certaine longueur (environ 130 lignes) tirés d'un traité Tepi åpetñs (Sur la vertu) , rédigé dans un dialecte dorien caractéristique des pseudopythagorica. Le contenu du traité est constitué par un mélange de doctrines platonico -académiciennes et aristotéliciennes : la vertu est la perfection de la nature de l'homme et ses éléments constitutifs sont la raison ( logos ), la capacité (dynamis) et le choix ( prohairesis), le premier élément se rattachant à la partie rationnelle de l'âme, les deux autres à la partie qui est privée de raison . La vertu s'achève lorsque se réalise l'harmonisation interne des parties (ovvap uoyń ) , laquelle est obtenue par un équilibre entre l'excès ( únepboań) et le défaut ( ĚNNELQc ) . Les hommes deviennent méchants à cause du vice ( xax a ) , propre à la partie rationnelle de l'âme, de l'incontinence (åxpao a ) , propre à la partie appétitive, de la bestialité ( Onplóms), propre à la partie irascible. Le traité présente de fortes similitudes avec le traité analogue sur la vertu transmis par Stobée ( III 1 , 117 et 118 ) sous le nom de Théagès. Cf. le commentaire de 1 K. Praechter, « Metopos , Theages und Archytas bei Stobaeus Flor. I 64 , 67 ff . » , Philologus 50 , 1891 , p. 49-57 . Édition . 2 H. Thesleff, The Pythagorean Texts, p. 116 , 21 - 121 , 12 ; 3 B. Centrone, Pseudopythagorica ethica. I trattati morali di Archita, Metopo, Teage, Eurifamo. Introduzione , edizione, traduzione e commento , coll . « Elenchos » 17 , Napoli 1990 (édition, p. 87-94 , traduction italienne , p. 121-125 , et commentaire , p. 193-216 ) . Une traduction anglaise incomplète due à K.S. Guthrie ( 1920 ) a été réimprimée dans 4 R. Navon , The Pythagorean Writings, p. 160-161, et dans 5 D. R. Fideler, The Pythagorean sourcebook, p. 249. Datation . IIIe siècle av . J.-C. selon 6 H. Thesleff, Introduction , p. 110 et 115 ; entre le jer siècle av . J.-C. et le jer siècle ap. J.-C. selon 7 W. Burkert, « Zur geistesgeschichtlichen Einordnung einiger Pseudopythagorica » , dans K. von Fritz (édit.), Pseudepigrapha I , coll . « Entretiens sur l'antiquité classique » 18 , Vandoeuvres -Genève 1971 , p. 25-55 , cf. notamment p. 38-41 , et Centrone 3,

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p. 41-44 . Sur les doctrines morales du traité , voir également 8 P. Moraux, Der Aristotelismus bei den Griechen , t . II , Berlin 1984 , p. 642-666 . BRUNO CENTRONE . 142 MÉTROCLES DE MARONÉE RE

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Philosophe cynique , venant d'une famille apparemment aisée de Maronée au sud de la Thrace ( Diogène Laërce VI 96) , frère d'Hipparchia ( » H 138 ) et disciple de Cratès de Thèbes (MC 205 ). Sources : textes rassemblés dans 1 G. Giannantoni, Socratis et Socraticorum Reliquiae, Roma 1990 , t. II ( SSR V L 1-6) , p. 581-583 ; voir aussi t. IV , p. 101 . À ces fragments et témoignages concernant Métroclès il faut ajouter D. L. II 102 (= SSR IV H 13 ) ; II 120 (= SSR II O 23 = fr. 190 Döring ); VI 33 ( = SSR V B 412 ) ; 96 ( = SSR VI 1 ) ; Souda, s.v. ' Innapxía, I 517 , t. II , p. 657 , 13 Adler; Lexicon Patmiense, s.v. éveſpinel, repris de l'édition Sakkelion , BCH 1 , 1877 , dans 2 K. Latte et H. Erbse, Lexica graeca minora , Hildesheim 1965 , p . 161 (= SSR II O 25 ) ; POxy. 3655 = n ° 69 1 T ( ?) dans CPFI 1 ** , p . 473 = n° 992 T dans CPF I 1 *** , p . 780-782 ( le texte est édité par 3 D. Sedley dans Helen M. Cockle , The Oxyrhynchus Papyri, vol . LII , coll . « Graeco -Roman Memoirs » 72, London 1984, p. 44-46 (il est reproduit dans SSR , t. IV , Nota 9 , p. 99 n . 27 ) ; en revanche il faudrait indiquer comme douteux le fr. 6 (D.L. VI 95 ) , car la liste des disciples présentés à première vue comme disciples de Métroclès se rapporte plutôt à son maître Cratès de Thèbes ; cf. 4 M.-O. Goulet- Cazé, « Une liste de disciples de Cratès le Cynique en Diogène Laërce 6 , 95 » , Hermes 114, 1986 , p. 247-252, ainsi que la notice sur Ménippe de Gadara ( 2M 129 ). Études . 5 K. Döring, GGP , Antike 2/1 , Basel 1998 , p . 304-305 ; 6 P.P. Fuentes González , Les diatribes de Télès. Introduction, texte revu , traduction et commentaire des fragments, coll . « Histoire des doctrines de l'Antiquité classique » 23 , Paris 1998 , p. 369 et 402-409. Biographie. Métroclès venait d'une famille de Maronée qui vivait certai nement dans l'aisance puisqu'il put suivre les cours des philosophes et que des prétendants riches voulaient épouser sa seur Hipparchia ( 2 H 138), qui décida envers et contre tout d'épouser Cratès de Thèbes ( + C 205 ) , puis de devenir philosophe cynique ( D.L. VI 96 ) . Avant d'être le disciple de Cratès, Métroclès avait en effet suivi les cours du péripatéticien Théophraste ( D. L. VI 94 = SSR V L 1 = V H 44 , et Télès , Diatribe IV A , p. 40, 5 Hense = p. 369 Fuentes González = SSR V L 5 ) et ceux de Xénocrate ( qui était le scholarque de l'Académie] ( Télès , ibid. ) . Fuentes González 6 signale ( p. 402 n . 1 ) que dans l'édition des fragments de Xénocrate qu'a publiée M. Isnardi Parente , Senocrate, Ermodoro : Frammenti, coll . « La scuola di Platone » 3 , Napoli 1982 , le témoignage de Télès est absent. On peut également, comme 7 A.J. Festugière, Deux prédicateurs de l'Antiquité : Télès et Musonius, Introduction et traduction, coll . « Bibliothèque des textes philo sophiques » , Paris 1978 , p. 35 n . 10, s'étonner d'une part que Diogène Laërce ne mentionne pas Xénocrate comme maître de Métroclès et d'autre part que Télès puisse présenter l'académicien comme susceptible d'avoir entraîné Métroclès

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vers un mode de vie luxueux , alors qu'il avait plutôt la conduite d'un homme austère ( cf. D. L. IV 6-9) . Télès, Diatribe IV A , p. 40-41 Hense = p . 369 Fuentes González, offre en effet une comparaison très évocatrice entre le mode de vie pratiqué par Métro clès chez Théophraste et Xénocrate ( le jeune homme craignait de mourir de faim alors qu'il recevait beaucoup de choses de chez lui ; il avait tout ce qu'il fallait et pourtant il se sentait constamment dans le besoin ) , et la vie de frugalité toute cynique qu'il mena une fois passé chez Cratès et qui lui permettait de se contenter de ce qu'il avait . Selon 8 O. Hense , Teletis Reliquiae, Tübingen 19092 (réimp. Hildesheim/New York 1969 ) , p . XXXV , tout ce que Télès raconte sur Métroclès proviendrait de Bion de Borysthène ( 2 ° B 32 ) . Pour un point de vue différent, voir Fuentes González 6 , p. 403 , qui refuse de faire de Télès un simple écho de Bion . D'après Hécaton de Rhodes ( > * H 13 ] (Chries I dans D.L. VI 94 = fr. 23 Gomoll ) , Métroclès brûla entièrement ses propres ouvrages ( tà Eavtoð ouyypáupata xataxalwv ) , ce qui laisse entendre qu'il avait lui-même écrit; d'autres disent que ce sont les notes prises au cours de Théophraste qu'il brûla ( D.L. VI 94 ) . Selon Döring 5 , p . 305 , « l'affirmation attribuée au stoïcien Hécaton , selon laquelle Métroclès a brûlé " ses propres ouvrages” ne semble être rien d'autre qu'une présentation inexacte du même incident » . Une anecdote amusante rapportée par D. L. VI 94 nous laisse deviner en Métroclès un jeune homme réservé, que Cratès sut convaincre d'accepter sans fausse honte les lois de l'humaine nature et de ne pas sacrifier aux règles sociales de la pudeur. Il menait, semble - t- il , le mode de vie cynique , « dormant l’hiver parmi les moutons et l'été dans les propylées des temples » ( Plutarque , An vitiositas ad infelicitatem sufficiat 3 , 499 b = SSR V L 3 ) . Il mourut à un âge avancé , dit Diogène Laërce ( VI 95 ) après s'être lui - même étranglé ( ou : après avoir retenu Son Souffle ? [εαυτόν πνίξας ]). Les disciples que D. L. VI 95 semble lui attribuer : Théombrote , Cléomène et Ménippe, sont en fait plutôt des disciples de Cratès ( cf. Goulet -Cazé 4) .

6 La tradition nous rapporte trois réflexions du philosophe ( sur les biens matériels qui s'acquièrent à prix d'argent, par opposition à ceux qui s'acquièrent à force de temps et de travail, comme l'éducation ; sur la richesse , qui nuit si on ne s'en sert pas , comme il convient [ D.L. VI 95 ) , ce qui laisse à penser qu'il prônait un cynisme adouci , et une définition de la vieillesse comme hiver de la vie transmise par Stobée, Anthologium IV 50 , 84 , t . IV , p. 1049 , 9-10 Hense) . Métroclès et Stilpon . Stilpon écrivit un dialogue intitulé Métroclès aujour d'hui perdu. Le Lexikon Patmense en a conservé cette phrase : « 'Eveßpiqet tỘ Etíanovi Mntpoxiñç » = fr. 190 Döring , ce qui a amené Gomperz à remarquer que Stilpon, comme Aristote et contrairement à Platon , intervenait en tant que personnage dans ses dialogues . De cet écrit de Stilpon pourrait dériver le passage que nous lisons chez Plutarque ( De Tranq. anim . 6 , p . 467 f - 468 a = fr. 154 Döring = SSR V L 2 et II O 17 ) , qui met en scène un dialogue entre

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Stilpon et Métroclès où ce dernier reproche au philosophe mégarique de mener une vie gaie alors que sa fille se conduit mal . K. Praechter, art. « Stilpon » , RE III A 2 , 1927 , col . 2525-2533 , notamment col . 2528 , suggère de voir encore Métroclès derrière le tiç de Diogène Laërce II 114 ( « Stilpon eut une fille aux mæurs dissolues qu'épousa un de ses familiers, Simmias de Syracuse. Celle-ci ne vivant pas de façon convenable , quelqu'un (tig ) dit à Stilpon qu'elle le déshonorait ; mais lui répliqua : “ Pas davantage que moi je ne l'honore” » ), auquel cas le passage pourrait également se rattacher au dialogue Métroclès. En outre un fragment du POxy. 3655 (publié en 1984 par Sedley 3, et donc absent de l'édition de 9 K. Döring, Die Megariker. Kommentierte Sammlung der Testi monien , coll . « Studien der antiken Philosophie » 2 , Amsterdam 1972 ) , tiré probablement du même dialogue encore qu'on ne puisse exclure qu'il provienne des Chries de Métroclès -, met en scène Métroclès, Stilpon et le jeune rhéteur Alcimos ( 2 - A 91 ) , disciple de Stilpon ( cf. D.L. II 114 = SSR II O 3 ). Métroclès reproche à Stilpon et à ses disciples de faire trop de cas du jeune Alcimos qui vient suivre les cours de Stilpon. A quoi le maître répond qu'il « lui suffit d'avoir un être humain à éduquer » . Sans doute pour bien montrer que le jeune homme n'est pas encore un philosophe , Métroclès demande à Stilpon si Alcimos connaît le bien et le mal ; Stilpon répond positivement. Métroclès demande alors à Alcimos lui - même de définir ce qu'est le mal . L'état du papyrus ne permet pas vraiment de deviner le contenu de la réponse qu'il obtint, sinon que la seule expression qui subsiste , tò uolxeveiv, commettre l'adultère, pourrait être un exemple d'action illlustrant le mal. Voir Döring 5, p. 231-232 .

Invention de la chrie. Ces dits attribués à une personnalité connue pouvaient se réduire à une parole ou être développés dans le cadre d'une anecdote. On pouvait les apprendre par cœur et les utiliser comme référence dans les situa tions difficiles de la vie . Métroclès est probablement l'inventeur du genre littéraire. Diogène Laërce VI 33 cite en effet un passage des Chries de Métroclès concernant Diogène . Si on ne peut être absolument certain qu'il soit l'inventeur de ce genre littéraire, c'est parce qu'à la fin du catalogue des ouvrages de Diogène ( D 147 ) transmis par Sotion , en D.L. VI 80 , sont signalées des Chries ; de même en D.L. II 85 , Sotion et Panétius attribuent trois livres de Chries à Aristippe ( > A 356 ) et plusieurs passage de Stobée font référence à des Chries d’Aristote ( - A 414] ( cf. Giannantoni 1 , t. IV , 1990 , p. 466-467 ) ; en fait on ne saurait exclure que les chries en question soient des « chries » écrites par quelqu'un d'autre et transmises comme chries de Diogène ou d'Aristippe , auquel cas Métroclès pourrait bien être tout de même l'inventeur du genre. L'ouvrage de Métroclès, qui véhicula les nombreux dits et apophtegmes de Diogène , dut avoir une influence considérable pour la transmission du cynisme ( cf. 10 M.-O. Goulet -Cazé, « Le livre VI de Diogène Laërce: analyse de sa structure et réflexions méthodologiques » , ANRW II 36, 6 , 1992, p . 3910-3911 ) . MARIE-ODILE GOULET -CAZÉ.

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MÉTRODORE

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143 MÉTRODORE Jamblique, V. pyth. 34, 241-243, atteste qu'un certain Métrodore, frère de Thyrsos ( d'après le dernier éditeur du traité de Jamblique Sur le mode de vie pythagoricien , L. Deubner, qui propose de lire Mntpódwpóç te ó Otpoov < ådenpòç tñc > TOŨ TATPÒç..., en s'inspirant d'une conjecture de H. Diels , qui ajoutait au même endroit) , appliquait à la médecine une grande partie des enseignements de son père Épicharme ( ** E 29) et de Pytha gore ; dans un ouvrage où il expliquait à son frère les doctrines de leur père, Métrodore soutenait que Pythagore, puis Épicharme, avaient considéré le dorien comme le meilleur des dialectes et l'harmonie dorienne comme la meilleure également. Cette conviction trouvait une confirmation dans le mythe qui permet trait de conclure que le dorien est le dialecte le plus ancien. Sur ce passage , voir 1 C. Macris , « Jamblique et la littérature pseudo -pythagoricienne » , dans S.C. Mimouni ( édit . ) , Apocryphité : histoire d'un concept transversal aux religions du Livre. En hommage à Pierre Geoltrain , coll . « Bibliothèque de l'École des Hautes Études . Section des Sciences religieuses» 113 , Turnhout 2002, p. 77-129 , aux p . 125-127 , avec les n . 195-198 . Compte tenu de quelques détails de théorie musicale post - aristoxénienne qui y sont discernables, 2 H. Diels (ad 23 A 8 DK ) avait conjecturé que le passage en question provien drait d'un ouvrage pseudépigraphe qui circulait sous le nom de Métrodore . Le fait qu'Orphée y est présenté comme un poète ayant écrit en dorien et Pythagore comme un grand admirateur de ce dialecte nous oriente dans la même direction . Car il est bien connu qu'une grande partie de la littérature dite pseudo - pythago ricienne est écrite en dorien. Sur le dorien des Pseudopythagorica, voir 3 H. Thesleff, Introduction , p. 77-96 ( avec la bibliographie antérieure ), 100, 102 et 119 sq . ; 4 A.C. Cassio , « Dialetti greci e pseudepi grapha pitagorici : le valutazioni degli antichi » , AION ( filol) 22, 2000, p. 153-165 (cf. aussi 5 Id., « Lo sviluppo della prosa dorica e le tradizioni occidentali della retorica greca » , dans A.C. Cassio et D. Musti (édit] , Tra Sicilia e Magna Grecia : aspetti di interazione culturale nel IV sec. a. C. Atti del Convegno, Napoli 19-20 marzo 1987 = AION (filol) 11 , 1989, p. 137 157 ), ainsi que les introductions des éditions modernes de ces textes, signalées dans la section I de l'article de Macris 1 , aux p. 79-85 ; ajouter 6 R. Fohalle, « La langue d'un texte “ dorien " » , dans Étrennes de linguistique offertes par quelques amis à Émile Benveniste, Paris 1928 , p. 27-51 , qui étudie la langue de l'apocryphe Sur la nature de l'homme, attribué par Stobée à la pythagoricienne Aisara ( *** A 69). Mais en réalité on ignore tout de l'ouvrage de “Métrodore ” et de son contenu . L'intérêt de l'auteur pour la médecine nous encouragerait toutefois à supposer que le contenu de son ouvrage était essentiellement médical ; et cela inviterait peut- être à son tour à étendre le fragment assigné à son ouvrage jusqu'au $ 244 du Mode de vie pythagoricien de Jamblique , où il est question de la médecine pythagoricienne. Cf. Macris 1 , p. 104 , avec la n . 120. Selon 7 H. Thesleff, The Pythagorean Texts, p. 121 (où est cité le témoignage de Jamblique, cf. p. 121 , 14 - 122, 14 ), qui adopte la conjecture de Diels, l'ouvrage devait être un pseudépigraphe comportant une introduction ayant fourni à Jamblique ses informations. Une lecture attentive des trente -cinq entrées « Metrodoros » de la RE (XV 2, 1932, col. 1474-1483, et RESuppl. X , 1965 , col. 393 ) montre que ce Métrodore fils d'Épicharme a échappé à la vigilance de ses rédacteurs. D'autre part, on voit mal comment les renseigne

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MÉTRODORE

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ments fournis par le traité de Jamblique Sur le mode de vie pythagoricien pourraient être rattachés à tel ou tel des “ Métrodore ” connus. Voir Macris 1 , n. 120 de la p. 104. Thesleff 7 , proposait discrètement un rapprochement possible du “Métrodore” de Jambli que , qui s'était occupé de médecine , avec Métrodore de Scepsis ( = RE 23, FGrHist 184 F 3 6), auteur de deux ouvrages à contenu médical ( Ilepì áleittixñs et Tepi ouvnde aç ) – et l'on pourrait ajouter également en faveur de cette identification les éventuelles affinités pythago riciennes de cet auteur, discernables dans son intérêt pour la mnémonique et pour la collecte de paradoxes, ainsi que ses préoccupations rhétoriques, qui s'accorderaient assez bien avec les remarques techniques sur le dialecte dorien qu'on retrouve dans le passage de Jamblique -, mais la chronologie semble exclure cette piste. Parmi les autres “Métrodore” recensés dans la RE, il y en a quelques-uns que l'on pourrait aussi rapprocher du “ Métrodore ” de Jamblique , mais sans arguments décisifs, - d'ailleurs, leur identification se heurte souvent à des problèmes de chronologie : - les trois médecins des nºs 26, 27 et 28 ;

- le n° 24, un rhéteur disciple d'Isocrate ; – le n° 12, un poète de l'Anthologie Palatine qui a écrit des poèmes à intérêt mathématique ( indice de pythagorisme [ ?] ) ; - Métrodore de Lampsaque , dit l'ancien ( 7M 151 ] (RE 15 = 61 DK), en raison de sa lecture allégorique d'Homère (la méthode allégorique étant associée parfois au pythagorisme (mais la question est très débattue] ; cf. aussi le renvoi à Hésiode dans le passage cité par Jamblique) et, surtout, de ses intérêts et connaissances mythologiques, qu'on retrouve dans le récit du Mode de vie pythagoricien relatif à l'ancienneté des dialectes grecs ; - et même Métrodore de Chios ( 3 - M 149, RE 14 ), le disciple de Démocrite, qui, dans ses Tpwixá , s'était intéressé à un épisode de l'histoire de la musique (à savoir l'invention du syrinx par Marsyas ). En l'absence de renseignements plus précis et d'une étude approfondie du dossier Métro dore” , il est donc plus prudent de s'abstenir de toute tentative d'identification du " Métrodore " de Jamblique avec les “Métrodore” connus par d'autres sources. Datation . IT® -jer siècle av . J.-C. selon Thesleff 3 , p. 116 . BRUNO CENTRONE et CONSTANTINOS MACRIS . 144 MÉTRODORE

MF III

Stoïcien , dédicataire d'au moins neuf ouvrages de Chrysippe ( MC 121 ) rela tifs à la logique ou à l'éthique (D.L. VII 189, 191 , 198-199 ) . Il était sans doute un disciple de Chrysippe ou bien son collègue dans l'école stoïcienne. Des "Opoi Olałextixoi (Définitions se rapportant à la dialectique) en six livres ( D.L. VII 189) deux fragments sont conservés (SVF III , p. 201-32-36 ) ; du Karà tñs ouvnosiac ( Contre l'usage ordinaire) en six livres ( D.L. VII 198 ) un fragment (SVF III , p. 204, 1-3 ) , du lepi tõv opwv ( Définitions) en sept livres ( D.L. VII 199) un fragment (SVF III , p . 201 , 37-45 ) . RICHARD GOULET.

145 MÉTRODORE RE 21

ca 168 a

“ Peintre aussi bien que philosophe ", mentionné par Pline l'Ancien , H.N. XXXV 135 (ubi eodem tempore erat Metrodorus, pictor idemque philosophus, in utraque scientia magnae auctoritatis ). En 168 ", lorsque L. Aemilius Paulus ( Macedonicus) [ RE Aemilius Paullus 114 ) , qui revenait d'un combat victorieux (à Pydna) contre Persée , roi de Macédoine (RE 5 ) , demanda aux Athéniens de

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MÉTRODORE

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leur indiquer le meilleur précepteur pour l'éducation de ses enfants et le meilleur peintre pour célébrer son triomphe, c'est Métrodore qu'on lui recommanda pour ces deux fonctions ( itaque cum L. Paulus devicto Perseo petiisset ab Athenien sibus , ut ii sibi quam probatissimum philosophum mitterent ad erudiendos liberos, item pictorem ad triumphum excolendum , Athenienses Metrodorum elegerunt, professi eundem in utroque desiderio praestantissimum , quod ita Paulus quoque iudicavit). « On sait par Plutarque ( Aem. , 6) que Paul -Émile fit venir pour l'éducation de ses fils parmi lesquels le futur Scipion-Émilien – non seulement des grammairiens, des sophistes et des rhéteurs, mais aussi des sculpteurs et des peintres » ( A. Reinach , Textes grecs et latins relatifs à l'histoire de la peinture ancienne (Recueil Milliet ), publiés, traduits et commentés sous le patronage de l'Association des études grecques. Avant-propos de S. Reinach . Intro duction et notes par Agnès Rouveret, coll . « Deucalion » , Paris 1985 , texte n° 530 et p. 399 n . 5. Dans la note précédente une identification est proposée avec le Métrodore « qui de architectonice scripsit » , mentionné parmi les auctores externi par Pline pour son livre XXXV , mais surtout avec le philosophe Métrodore de Stratonicée ( ** M 155 ). Cf. K. von Fritz, art. « Metrodoros » 21 , RE XV 2 , [ 1932 ) , col . 1480 ; Chr. Habicht , Hellenistic Athens and her philosophers, « David Magie Lecture » , Princeton 1988 , 22 p . , notamment p . 19 , repris dans Athens in hellenistischer Zeit. Gesammelte Aufsätze, München 1994 , p . 231-247 , notamment p . 245. Sur l'intérêt porté par Paul -Émile à la culture grecque et sur la bibliothèque de Persée qu'il aurait ramenée à Rome pour ses fils , voir aussi G. Garbarino, Roma e la filosofia greca , t . II , p. 352-353 . Le passage de Pline constitue le n° 67 de ce recueil de textes. RICHARD GOULET. 146 MÉTRODORE RESuppl. VII : 24a Qualifié de philosophus par Servius dans son commentaire sur les Géor giques de Virgile ( 1 229 ) , il expliquait la raison des cinq zones terrestres dans cinq livres de son ouvrage , au moyen d'explications astronomiques et géométri ques , et il aurait défendu Virgile contre les nombreux critiques qui reprochaient au poète son manque de connaissances astronomiques (quasi ignarum astro logiae). Voir l’éd . de G. Thilo, Leipzig 1887 , p. 185 , 1-18 . Dans le même commentaire ( sur Géorgiques II 336, p. 248 , 6 Thilo) , le Métrodore qui soutient que le monde n'est pas né et qu'il ne meurt pas (neque natum neque mori) n'est pas nécessairement le même auteur. Des positions d'Épicure, de Varron , de Platon et de Zénon sont mentionnées dans le même passage. Wachsmuth (édition du De ostentis de Jean Lydus ) a pensé à l'épicurien Métrodore de Lampsaque , solution que rejette Kroll. Le commentateur vient en effet de prêter à Épicure (p. 248, 3-4 Thilo) une position différente : omnia, quae orta , occidunt et aucta senescunt. Il est fort peu probable que cet auteur latin soit le parapegmatiste , dont plusieurs observations sont rapportées par Ptolémée ( Phaseis II , p . 14 , 15 et passim ) et , à plusieurs reprises, par Jean Lydus ( De mensibus IV 49, 61 , 123 , 141 , 148 : peut-être aussi De ostentis 70 , li . 61 , où ce nom est mentionné après Varron et Hipparque, et avant César ). Voir W. Hübner, art. « Metrodoros » 7 , NP VIII , 2000 , col . 135 . Cf. W. Kroll, art. « Metrodoros » 24a, RESuppl. VII , 1940 , col . 448-449. RICHARD GOULET.

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MÉTRODORE

147 MÉTRODORE RE 22 PLREI: 1

505 DM IV

Le philosophe Métrodore est nommé par Jérôme dans sa Chronique d'Eusébe pour l'année 330 apr . J.-C. ( p . 232 , li . 36 Helm : Metrodorus philosophus agnoscitur ). Selon Rufin, Hist. eccl. I 9 ( PL 21 , col . 478 B ) , dans son souci de « découvrir des pays et visiter la terre à fond » ce philosophe pénétra en « Inde ultérieure » (Metrodorus quidam filosofus inspiciendorum locorum et orbis perscrutandi gratia ulteriorem dicitur Indiam penetrasse ). Selon Rufin , ce voyage amena un autre philosophe , Méropius de Tyr ( 2 M 138) , à entreprendre , sous le règne de Constantin ( plus probablement de Constance ) , un voyage similaire “ en Inde ”, cette fois dans le royaume d'Axoum ou l'Éthiopie . Voir Françoise Thélamon, Païens et chrétiens au IVe siècle. L'apport de l' “ Histoire ecclésiastique " de Rufin d'Aquilée, Paris 1981 , p. 54. Elle montre, p . 39, que les historiens grecs, comme Socrate (Hist. eccl. I 19), Sozomène (Hist. eccl. II 24), Théodoret (Hist. eccl. I 23) et d'autres, dépendent de Rufin pour ce récit de l'évangélisation de l'Éthiopie . Le voyage de Métrodore est relaté, avec des variantes, par les chroniqueurs byzantins: Georges Cedrenus (XI s . ) , Compendium historiarum , éd . I. Bekker, CSHB 4 , Bonn 1838 , t . I , p . 516 , 12 - 517 , 4 ; Symeon Logothetes, Chronicon ( sub nomine Leonis Grammatici vel Theodosii Melisseni ) , éd . I. Bekker, CHSB 23 , Bonn 1842, p. 85 , 19 - 86, 9. Métrodore était d'origine perse (Tlepooyevńs) et avait des prétentions philosophiques (προσποιησάμενος φιλοσοφεϊν ) . II partit en Inde et impressionna les Brahmanes par une grande maîtrise de soi (ěyxpate q nomſ yéyovev év aútoīç oeßaotóc). Il construisit d'autre part pour eux des moulins à eau et des bains (ůdpouúrovç xai 2oetpá ), techniques que les Indiens ne possédaient pas encore . Sous prétexte de piété , il pénétra dans les sanctuaires et déroba des pierres précieuses et de nombreuses perles ( a Oovç τιμ ους και μαργαρ τας πολλούς). Il recut du roi des Indes des présents destinés à l'empereur. De retour à Byzance , il offrit à l'empereur ces présents comme des dons personnels, tout en prétendant qu'un plus grand nombre , envoyés par voie de terre , avait été confisqué au passage par les Perses . L'empe reur réclama donc ces présents au roi Sapor qui ne daigna pas répondre, ce qui entraîna la rupture de la paix entre la Perse et l'Empire romain . Cedrenus date le voyage et la rupture de la paix de la vingtième année de Constantin , soit en 326/7 , mais, selon Warmington (cité plus bas) , le début de la guerre se situe plutôt en 336/7 sous le règne de Constance. Le voyage de Métrodore avait été raconté par Ammien Marcellin dans un livre perdu. L'historien rappelle en effet, en XX 4 , 23-24 ( à propos de la mort de Julien ) , que ce sont les mensonges de Métrodore , crus trop légèrement par l'empereur Constantin , qui furent la cause de l'hostilité des Parthes et , en conséquence, de la mort de Julien . Selon B.H. Warmington , « Ammianus Marcellinus and the lies of Metrodorus » , CQ 31 , 1981 , p . 464-468 , cette explication des origines de la guerre contre les Perses proviendrait d'une source païenne, qui pourrait être Eunape de Sardes ( E 121 ) . Cette suggestion est intéressante – il est bien dans la manière d'Eunape de subordonner de grands événements historiques à des causes qui relèvent de l'anecdote -, mais se heurte au fait que Zosime qui dépend largement d'Eunape pour l'histoire de cette période ne parle pas de Métrodore. D'autre part, elle présuppose qu'Ammien Marcellin ait déjà utilisé l'Histoire d'Eunape. L'hypothèse a déjà été avancée ( notamment par W.R. Chalmers, E. A. Thompson

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et T. D. Barnes),mais des considérations chronologiques rendent ce rapport littéraire problé matique et une source commune peut également être envisagée . Voir R. Goulet, « Sur la chronologie de la vie et des æuvres d'Eunape de Sardes » , JHS 100, 1980, p. 72 , repris dans Études sur les vies de philosophes, p. 321-322 . Cf. W. EnBlin , art. « Metrodoros » 22 , RE XV 2 , ( 1932 ) , col . 1480-1481 ; J. Matthews , The Roman Empire of Ammianus, London 1989 , p . 135-136 et 448. RICHARD GOULET . 148 MÉTRODORE [ D’APAJMÉE

MII

Académicien disciple de Carnéade ( = + C 42. Philod ., Acad. hist., col . XXIII 15 ). TIZIANO DORANDI.

149 MÉTRODORE DE CHIOS RE 14 DK 70

DIV

Métrodore apparaît dans quatre successions transmises par Clément, Eusébe, Diogène Laërce et la Souda . Sur cette succession de l'école d'Abdère, voir IR . Goulet, notice « Diogène de Smyrne» D 148 , t . II , 1994, p. 823. En fonction de ces diverses sources, il apparaît, selon des associations diverses , comme disciple de Protagoras, de Nessas (» N 24) , de Démocrite ( D 70) et d'un mystérieux Métrodore d'Abdère ( nom qui pourrait cacher celui de Démocrite ). Les mêmes sources en font le maître de Diogène de Smyrne ( ⓇD 148), maître d'Anaxarque, ou directement d'Anaxarque ( A 160 ). Dans cette succession , en plus des philosophes originaires d'Abdère , Leucippe ( PL 51 ), Démocrite, Protagoras, le mystérieux Métrodore d'Abdère, et enfin Anaxarque, auxquels il faudrait ajouter Bion ( + B 31 ) et Hécatée ( H 12 ) , on relève le nom de Nausiphane, origi naire de Téos, dont Abdère était une colonie, et c'est sans doute à Abdère que Métrodore a pu suivre l'enseignement de Démocrite . En conséquence , il est légitime, selon 2 V.E. Alfieri, « Per la cronologia della scuola di Abdera » , RSF 7 , 1952 , p. 488-501 , de parler d'une véritable école d'Abdère . Aétius fait de Métrodore le fils d'un certain Théocrite de Chios [RE 2 ] ( fr. A 2 ) que la Souda présente comme un rhéteur, disciple de Métrodore “ l'isocra téen " [ RE 24 ] ( ibid .). Cette identification du père de Métrodore avec l'adversaire de Théopompe (cf. FGrHist 115 , fr. 252) semble acceptée par 3 W. Nestle , art. « Metrodoros von Chios » 14 , RE XV 2, [ 1932 ) , col . 1475-1477, et par4 K. Freeman , The Pre - Socratic Philosophers. A Companion to Diels, “ Fragmente der Vorsokratiker ”, 2e éd . , Oxford 1966, p. 327.Comme un dit de Théo crite de Chios se rapporte à Alexandre de Macédoine (Plutarque, De liberis educandis 11 a ) et qu'il avait attaqué Aristote ( Diogène Laërce V 11 ; Plutarque, De exilio 603 c ; Suppl. Hell. 738) et Antigone le Borgne (Plutarque, Quaest. conv. 633 c ; De liberis educandis 11 c ), son fils a dû vivre dans la seconde moitié du IVe siècle, ce qui n'est guère concevable s'il fut un disciple de Démocrite et un maître d’Anaxarque. R. Laqueur, art. « Theokritos aus Chios », RE VA 2, 1934, col . 2025-2027 , ne signale pas ce rapport entre Théocrite et Métrodore. C'est par erreur que Freeman , p . 327 n . 1 , attribue l'exécution de Théocrite de Chios à Antigone Gonatas. C'est le roi Antigone le Borgne qu'il avait attaqué. Voir à ce sujet 5 G. Weber, « The Hellenistic rulers and their poets : silencing dangerous critics ? » , AncSoc 29, 1998-1999 , p. 147-174 , notamment sur Théocrite p. 158-162 . Sur l'épigramme dirigée contre Aristote , voir 6 D. T. Runia, « Theocritus of Chios ' epigram against Aristotle » , CQ 36, 1986, p. 531 534. Pour la prosopographie de Chios , voir 7 Th. Ch . Sarikakis, Xcaxri Ilpoownoypad a, Athènes 1989 , XVI-504 p. On y relève une trentaine de Métrodore. Le philosophe porte le numéro M 193 ( p . 326-327 ). Métrodore l'Isocratéen porte le numéro M 194 ( p. 327 ). Pour

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Théocrite de Chios, il conviendrait de distinguer le sophiste, poète et historien , nº 0 61 (p. 223-225 ) du père de Métrodore, n° 63 (p. 225). Sur Théocrite de Chios, voir aussi 8 H. Berve, Das Alexanderreich, t. II, p. 176-177 , nº 364. Métrodore s'était rendu célèbre pour avoir soutenu une version extrême du scepticisme, niant savoir si nous savions ou ne savions pas quelque chose , et même s'il y avait quelque chose ( à savoir) ou non ... ( fr. B 1 ) . Sur la forme exacte de cette formule ( dont il existe au moins six variantes) et son inter prétation, voir 9 J. Brunschwig, « Le fragment DK 70 B 1 de Métrodore de Chio » dans K. A. Algra, P. W. Van der Horst et D.T. Runia (édit . ) , Polyhistor. Studies in the history and historiography of ancient philosophy presented to Jaap Mansfeld, coll. « Philosophia antiqua » 72 , Leiden 1996 , p . 21-38 . Malgré ce scepticisme , d'assez nombreuses doctrines de Métrodore sont attestées par des auteurs comme Sénèque , Aétius , Alexandre d’Aphrodise , Simplicius . Selon Théophraste, il reprenait l'atomisme de Démocrite , posant comme premiers principes le plein et le vide ( fr. A 3 ) . Comme Démocrite , il aurait également enseigné l'existence d'un nombre illimité de mondes dans l'univers ( fr. A 6) . Plusieurs autres témoignages concernent des points de la doctrine physique ( luminosité des étoiles , le soleil , la voie lactée, les nuages, les phénomènes météorologiques, etc. ). Cicéron et Eusebe ( B 1-2) citent un Mɛpi púoewç de Métrodore . Sur l'attri bution à des philosophes présocratiques de traités portant ce titre , voir 10 E. Schmalzriedt, Tepi púoewg. Zur Frühgeschichte der Buchtitel, München 1970 , 142 p . Les autres fragments d'une ouvrage intitulé Towixá d'un certain Métrodore de Chios et d'un autre intitulé 'Iwvixá de “Métrodore" sont d'attri bution discutée (B 3-6) . Fragments et témoignages. 11 DK 70 , t . II , p . 231-234 ( avec Nachtrag, p. 424 ). Manque dans ce recueil Plutarque, De facie 928 b. Traductions. Française : 12 Dumont, Présocratiques, p . 939-947 (traduc tion) et 1503-1505 ( notes ) . Anglaise : 13 K. Freeman , Ancilla to Pre - Socratic Philosophers. A complete translation of the Fragments in Diels, “ Fragmente der Vorsokratiker ", Oxford 1971 , p . 120-121 . Italienne : 14 V. E. Alfieri (édit. ) , Gli Atomisti. Frammenti e testimonianze. Traduzione e note, coll . « Filosofi antichi e medievali. Collana di testi e di traduzioni » , Bari 1936, p . 325-336, traduction reprise dans 15 G. Giannantoni et alii, I presocratici: testimonianze e frammenti, 1 re éd .: coll . « Filosofi Antichi e medievali » , Bari 1969 , réimpr.: coll . « Biblioteca Universale Laterza » Bari 1981 et 1983 , t. II, p. 831-837 . Études d'orientation . 16 F. Susemihl , « Aphorismen zu Demokritos » , Philologus 14 , 1901, p. 180-191 (appendice sur Métrodore de Chios et Nausi phane ) ; 17 B. Wisniewski , « Sur la philosophie de Métrodore de Chios » , Sileno 23 , 1997 , p . 283-284 ; 18 Th . Ch . Sarikakis , H XIOE ETHN APXAIOTHTA , Athènes 1998 , p. 143 ; 19 J. Brunschwig , « The beginnings of Hellenistic episte mology » , dans K. Algra et alii (édit . ) , The Cambridge history of Hellenistic Philosophy, Cambridge 1999, p. 237-240. Autres études récentes. 20 P. Bicknell , « Melissus ' way of seeming ? A discussion note » , Phronesis 27 , 1982 , p . 194-201 ; 21 M. Isnardi Parente ,

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MÉTRODORE DE CHIOS

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« I democritei e l'antiscetticismo di Epicuro ( Ratae sententiae XXIII - XXIV ) . La storia della filosofia come sapere critico » , dans Studi in onore di Mario dal Pra , Milano 1984 , p . 106-121 ; 22 A. Lebedev, « Quoiç taravteúovoa. Neglected fragments of Democritus and Metrodorus of Chios , II » , dans Proceedings of the First international Congress on Democritus, Xanthi 6-9 October 1983, II. Pref. by L.G. Benakis , Xanthi 1984 , p . 13-18 . 23 A.J. Carriker, « Some uses of Aristocles and Numenius in Eusebius' Praeparatio Evangelica » , JTHS 47 , 1996 , p . 543-549 ; 21 J.A. Palmer, « A new “ testimonium ” on Diogenes of Apollonia, with remarks on Melissus ' cosmology » , CQ 51 , 2001, p. 7-17 . RICHARD GOULET. 150 MÉTRODORE DE CYZIQUE RE 19

1a

Académicien inconnu , disciple de Métrodore de Stratonicée ( 2M 155 . Philod . , Acad. hist., col . XXXVI 8-12 ) . Cf. T. Dorandi (édit . ) , Filodemo : Platone e l'Academia , p . 82. Cf. K. von Fritz, art. «Metrodoros » 19, RE XV 2, 1932 , col . 1480. TIZIANO DORANDI.

151 MÉTRODORE DE LAMPSAQUE RE 15

VI/Va

Présocratique , disciple d'Anaxagore. Mythographe allégoriste d'Homère. Fragments . 1 DK 61 , t . II , p . 49-50 , test . 1-6 ( il est absent dans 2 R. L. Fowler (édit. ) , Early Greek mythography, t . I : Texts, Oxford 2000, XLVIII - 459 p. , qui se borne aux textes des mythographes qui avaient été déjà rassemblés par 3 F. Jacoby , FGrHist, t . I A : Genealogie und Mythographie, Vorrede, Text, Addenda, Konkordanz, Leiden 19572 ; réimpr. 1968 ). Cf. 4 W. Nestle, « Metrodors Mythendeutung » , Philologus 66, 1907, p . 503 510 ; 5 Id . , art . « Metrodoros » 15 , RE XV 2 , 1932 , col . 1476-1477 ; 6 F. Buffière, Les mythes d'Homère et la pensée grecque, Paris 1956 , p. 125 132 ; 7 N. J. Richardson , « Homeric professors in the age of the Sophists » , PCPhS 21 , 1975 , p . 65-81 , notamment p . 68-70 ; 8 R. Janko , « The physicist as hierophant : Aristophanes, Socrates ant the autorship of the Derveni Papyrus » , ZPE 118 , 1997 , p . 61-94 , notamment p . 76-79 ; 9 J. Hammerstaedt, « Die Homerallegorese des älteren Metrodor von Lampsakos » , ZPE 121 , 1998 , p . 28 32 . Données biographiques. Le témoignage le plus ancien sur le mythographe Métrodore de Lampsaque ( Mntpódwpoç ó Aaupaxnvóc) apparaît chez Platon, lon 530 c (= DK 1 ), où le rapsode Ion ( > 1 18 ) déclare à Socrate être lui-même celui qui a exprimé les pensées ( Plavolat ) les plus belles sur Homère , l'empor tant à ce sujet sur Métrodore de Lampsaque , ainsi que sur Stésimbrote de Thasos ( un rapsode du Ve siècle av . J.-C. ) ou Glaucon ( Glaucon de Rhégium , de la fin du Ve siècle , auteur d'un traité Sur les poètes et les musiciens anciens mentionné par Aristote, Poétique 1461 b ? ou bien plutôt celui de Téos, mentionné aussi par Aristote , Rhétorique 1403 b 26 ? cf. Janko 8, p . 76) . Diogène Laërce II 11 (= DK 2 ) , qui suit Favorinus , Histoire variée, fr. 61 Barigazzi, confirme la patrie de notre Métrodore ( Lampsaque , sur les bords de l'Hellespont) et il ajoute un

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renseignement important: il fut disciple ( yvápquoc ) d’Anaxagore de Clazo mènes (fl. 462 ? ; » A 158 , p . 184 ). Le témoignage déclare aussi que Métrodore de Lampsaque aurait développé une interprétation de la poésie d'Homère selon laquelle celle-ci traite de vertu et de justice ( ånoońvaodai elval nepi đpetñs xai Olxalogúvns), une interprétation qu'Anaxagore aurait été le premier à soutenir : c'est Métrodore qui , à son tour, se serait intéressé le premier à la façon dont le poete traite de la nature (πρώτον σπουδάσαι του ποιητου περί την φυσικών πραγματείαν ). ). En réalité, ce fut un autre présocratique plus ancien, Théagène de Rhégium ( fl. ca 5254 ), qui le premier trouva une méthode allégorique pour interpréter les mythes, y voyant l'expres sion de forces de la nature : la bataille des dieux , telle qu'Homère la décrit, était en réalité à ses yeux la bataille cosmique des éléments et des qualités fondamentales du monde contre leurs opposés – le feu contre l'eau , le froid contre le chaud, le léger contre le lourd - (cf. les très maigres témoignages qui nous en sont parvenus rassemblés dans DK 8 , t. I , p. 51 sq .; Buffière 6, p. 101-105 ). Par ailleurs, comme le remarque 10 R. Pfeiffer, History of classical scholarship : from the beginnings to the end of the Hellenistic Age, Oxford 1968 , réimpr. 1971 , p. 35 n. 3 , le fait qu'Anaxagore ait été le premier à soutenir que la poésie d'Homère traitait de la vertu et de la justice veut seulement dire qu'il a inauguré la tendance éthique dans la critique homérique, non pas qu'il a expliqué la poésie d'Homère comme une allégorie morale. Il ne faut pas confondre sa critique avec celle que ses disciples ont pu pratiquer. Janko 8, p. 76, rappelle à ce sujet un passage de Georges le Syncelle, Chronique, p. 174, 25 – 175 , 2 Mosshammer ( = DK 61 , 6 ), selon lequel « les anaxagoréens interprétaient les dieux des mythes : Zeus comme l'intelligence , Athéna comme la technique , d'où l'expression “ si les mains disparaissent, plus de sage Athéna” » . Il voit ici la preuve non seulement du fait que les disciples d'Anaxagore pratiquaient l'allégorie mais aussi du fait qu'ils l'appliquaient égale ment à la poésie orphique, puisque le vers cité est attribué ailleurs , avec une variante dans sa deuxième partie , à Orphée ( fr. 347 Kern ). Métrodore de Lampsaque , le disciple d'Anaxagore , est souvent appelé « l'ancien » par les critiques , afin d'éviter une confusion avec le disciple d'Épicure [ M 152 ] ( et de toute évidence avec Métrodore de Chios , le disciple de Démocrite [2M 149] ) . On ne possède pas d'autre renseignement concernant sa vie . Buffière 6 , p . 126 , étant donné qu'une partie de la tradition fait mourir Anaxagore à Lampsaque, lorsqu'il fut accusé d'impiété au début de la guerre du Péloponnèse et banni d'Athènes ( ** A 158 , p. 185 sq. ) , suppose que ce fut Métrodore qui lui ménagea cette retraite dans son pays d'origine jusqu'à sa mort. Euvre et doctrine. Concernant l'euvre de Métrodore, il faut tout d'abord analyser le témoignage de Tatien , Discours aux Hellènes 21 , 3 (= DK 3 ) , qui est marqué de toute évidence par l'hostilité à l'égard des Grecs païens et de la vision qu'ils offrent de la divinité . Au sujet du traité sur Homère de Métrodore de Lampsaque ( on ne peut pas être sûr que l'ouvrage avait eu en fait ce titre Nepì ' Ouńpov ) , il émet un jugement fort sévère : d'après lui , Métrodore aurait argumenté dans son ouvrage de façon très absurde , en tournant tout en allégorie (λίαν ευήθως διείλεκται πάντα είς αλληγορίαν μετάγων ). À partir des passages rassemblés par DK , on a tiré l'idée que non seulement les dieux mais aussi les héros étaient pour Métrodore allégorisés comme des forces cosmiques , et même qu'il voyait l'Olympe comme une espèce d'orga nisme , dont chaque organe était représenté par un dieu (cf. infra ). Le témoignage

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de Tatien est clair en ce qui concerne l'attribution à Métrodore de l'idée que les dieux étaient des forces de la nature : « Il affirme en effet que ni Héra ni Athéna ni Zeus ne sont réellement ce que supposent les gens qui leur ont consacré des temples et des sanctuaires, mais qu'ils sont des principes de la nature (PHOEWS È ÚnogtáOELS ) et des arrangements d'éléments (otolxeiWv Olaxoouňoels ) ». En revanche , on ne peut pas affirmer que tout le développement qui suit concernant les héros se rapporte en propre aux doctrines de Métrodore, comme on l'a fait un peu trop hâtivement à la suite de l'édition de DK ( cf. aussi Nestle 4 ; 11 G. Lanata [ édit. ), Poetica pre -platonica : testimonianze e frammenti, testo , trad. e comm . , coll . « Biblioteca di studi superiori » 43 , Firenze 1963 , p. 244; Buffière 6 , p . 126 ; Janko 8 , p . 77) . En fait, ces limites strictes pour le texte concernant Métrodore étaient déjà évidentes pour 12 E. Zeller, Die Philosophie der Griechen, t. I 2 : Allgemeine Einleitung, Vorsokratische Philosophie. Zweite Hälfte, Leipzig 19206, réimpr. Hildesheim 1963 , p . 1254 n . 4 ( cf. aussi 13 B. Hersman , Studies in Greek allegorical interpretation, Chicago 1906 , p. 12 ) , et elles ont été reprises récem ment par Hammerstaedt 9 , p. 30 sqq . , pour qui le texte qui suit doit être interprété non pas comme la suite de la référence à Métrodore, mais comme une deductio ad absurdum tirée par Tatien lui - même , comme un commentaire ironique et sarcastique de l'apologiste chrétien qui ne visait pas concrètement Métrodore mais les Grecs païens en général qui n'étaient pas conscients des conséquences ridicules auxquelles leur tendance allégoriste pouvait aboutir. D'après Hammerstaedt 9, le traitement concret que Métrodore donnait des héros, à la différence de son interprétation allégorique des dieux , ne devait pas inté resser ici Tatien , lequel n'en avait probablement même pas connaissance. Le but de l'apologiste était tout simplement de montrer que si on acceptait l'inter prétation allégorique de Métrodore selon laquelle les dieux homériques n'étaient que des principes ou des expressions de la nature et des arrangements d'élé ments , les hommes homériques, puisqu'ils participaient de la même nature que les dieux , ne devraient pas non plus avoir existé. C'est à cause d'une telle consé quence à ses yeux complètement absurde , puisque les personnages homériques étaient pour lui des figures historiques, que Tatien aurait présenté également comme complètement absurde la caractérisation allégorique des dieux d'Homère proposée par Métrodore . Voici le passage en question de Tatien : « Hector également, et Achille bien sûr, ainsi qu’Agamemnon et en général tous les héros grecs et les barbares avec Hélène et Paris, puisqu'ils sont de la même nature , vous pouvez dire qu'ils ont été introduits par raison d'économie , et non parce qu'aucun des personnages en question a réellement existé » . Que ce développement ne se rapporte pas directement à Métrodore mais qu'il soit bien un raison nement propre de Tatien semble confirmé, comme le remarque Hammerstaedt 9, p. 30 n . 14, par la phrase finale de l'auteur : « Mais cela nous l'avons avancé seulement aux fins du raisonnement, puisqu'il n'est pas légitime de comparer notre notion de Dieu avec ceux qui se roulent dans la matière et le bourbier » . Hammerstaedt 9, p . 31 , considère donc que le passage de Tatien suggère , par le recours à la deductio ad absurdum , que celui -ci n'était pas au courant du fait que Métrodore lui - même avait en fait expliqué de façon allégorique les héros d'Homère , ce dont nous sommes informés par d'autres sources ( cf. infra ). En

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revanche, en ce qui concerne les dieux , le témoignage de Tatien reste, comme le remarque Hammerstaedt 9 , p . 32 , le plus important et le plus sûr pour nous. Concernant les héros, Hesychius , Lexicon a 299 , rapporte sur Agamemnon : « Métrodore dit de façon allégorique qu'Agamemnon est l'éther » ( = DK 4 = p. 246 , 7 Lanata ). Ce témoignage semble confirmé et complété par un frag ment de Philodème de Gadara , que l'on a supposé appartenir au deuxième livre du traité Sur la poésie de l'épicurien ( = PHerc 1676 fr. 2 , 20 sqq. + PHerc 1081b fr. 12 , 1 sqq. = Tractatus tertius, col . II - III Sbordone ). Dans le passage en question , Philodème est en train de critiquer les allégoristes d'Homère tels que C 203 ) , et il en mentionne aussi d'autres encore pires en Cratès (de Mallos comparaison de ceux - là : « Certains vont même jusqu'à délirer ouvertement ( o [a ] vep [@ ] s uaivovtal ) , par exemple ceux qui déclarent qu'Homère composa ses deux poèmes comme traitant des parties du cosmos et des lois et des mæurs des hommes ( περί τε κόσμ[ο]υ ... μερών και περ[i ] νόμ [ων] κα [i ε ]θισ [μών TW[ v ] na [ p ] ' åv [Opó ]no[ is ]), et qu'Agamemnon était l'éther , Achille , le soleil, Hélène , la terre, Alexandre, l'air, Hector, la lune, et qu'ainsi les autres < héros > ont été nommés analogiquement . Et , parmi les dieux , Déméter était le foie , Dionysos, la rate , Apollon , la bile ... » . Même si le nom de Métrodore n'y est pas mentionné , le fait qu'on retrouve dans ce passage l'identification assez bizarre d'Agamemnon avec l'éther qu’Hesychius lui attribue nommément, amène à supposer que notre allégoriste devrait se trouver directement concerné par la critique de Philodème, qui repré senterait de la sorte un témoignage très important concernant Métrodore, un témoignage hostile comme celui de Tatien , mais cette fois -ci du côté païen. Qui plus est, on est allé jusqu'à affirmer que cette critique de Philodème sur les allégories les plus extravagantes viserait globalement Métrodore, autrement dit que celui -ci non seulement faisait intervenir les héros dans ses allégories mais qu'il présentait aussi une interprétation allégorique des dieux où ceux -ci repré sentaient les différents organes du corps humain. Or, comme l'a bien remarqué Hammerstaedt 9 , p . 29 , cela serait en contradiction avec le témoignage de Tatien, selon lequel Métrodore interprétait les dieux comme des expressions de la nature et des arrangements d'éléments . Il faudrait donc ne pas attribuer ce développement à Métrodore. En revanche, d'après Hammerstaedt 9, on pourrait accepter en général comme appartenant à Métrodore l'interprétation globale des poèmes homériques comme la description des parties du cosmos et des lois et mæurs des hommes dont parle Philodème ( cf. supra , le témoignage de Favo rinus ), ainsi que l'interprétation des héros comme représentant eux aussi des phénomènes naturels ( cf. Hesychius) . Par conséquent, de ce point de vue, Philo dème , lorsqu'il fait référence aux allégoristes d'Homère qui tombent dans le pur délire, ne vise nullement un seul auteur concret mais un ensemble de doctrines différentes dont il pouvait avoir connaissance. Fulgence, Mythologiae I 15 , p. 25 , 1-18 Helm, attribue à Anaximène de Lampsaque ( ** A 167 ?) une interprétation du mythe d’Apollon et des neuf Muses comme allégorie des dix organes de la parole , un passage que Jacoby 3 , t . I A , p. 160 sq . , rangea plutôt parmi les fragments d'Anaximène de Milet [ *** A 168 ?) (FGrHist 9 F 4 ; cf. t . Ia : Kommentar, Nachträge , p. 480 ; Fowler 2 , p. 39) . Pour sa part Janko 8 , p. 78 , en partant du passage de

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Philodème concernant les dieux-organes, ainsi que de l'idée que ce passage fait référence à Métrodore de Lampsaque, considère qu'il faudrait en réalité rapporter également à celui-ci le passage de Fulgence. Comme le remarque Buffière 6 , p. 127-129 , l'interprétation allégorique de Métrodore concernant les héros doit être rapprochée de la physique de son maître Anaxagore, avec la terre au centre du monde , soutenue en équilibre par l'air : « Cette terre étroitement enlacée par l'air, au centre de l'univers , Métro dore la retrouvait dans Hélène , enlevée par Alexandre : Hélène , centre de la poésie homérique , Hélène , entre les bras de son ravisseur » ( p . 127 sq .; cf. Nestle 4 , p. 508 ; Id . 5 , col . 1476 ) . Ensuite, « l'éther enflammant le soleil et les étoiles, les entraînant dans sa course autour de la terre , c'est Agamemnon , animateur de la grande expédition aux rivages troyens, chef de tous ces héros qui gravitent autour d'Hélène et dont le plus brillant est Achille » ( p . 128 ; cf. Nestle 4 , p . 507 sq . ) . Le couple Achille - Hector répondrait donc dans ce système allégorique au couple soleil - lune . Voici , d'après Buffière 6 , les raisons qui auraient guidé Métrodore: « Les deux héros , par leur vaillance , éclipsent tous leurs compagnons , l'un au camp des Grecs, l'autre au camp des Troyens: tout comme le soleil et la lune règnent au firmament, l’un pendant le jour, l'autre pendant la nuit ... Peut-être aussi Métrodore faisait- il état de la poursuite d'Hector par Achille , autour d'Ilion , image de la poursuite des deux astres dans le ciel (cf. Il. XXII 135 ) ; Hector tué par Achille pouvait rappeler encore que le soleil , quand il apparaît, éteint l'éclat plus faible de la lune » (ibid. ; cf. Nestle 4, p. 505 sq . ) . L'originalité de ce système de Métrodore , comme le remarque Buffière 6 , aurait été d'avoir donné une signification cosmique non pas aux dieux mais aux héros de l’Iliade : « l'éther,c'est Agamemnon et non pas Zeus ; le soleil c'est Achille et non pas Apollon ; la terre, c'est Hélène et non pas Héra ou Athéna » ( p. 129 ) . Buffière 6 tente d'expliquer les raisons pour lesquelles ce système fut très peu suivi par les commentateurs postérieurs, qui ont suivi, comme tout l'allégorisme classique , la direction indiquée par Théagène de Rhégium , où ce sont les dieux et non pas les héros qui sont transformés en forces cosmiques : « La raison en est double , semble - t - il : du point de vue apologétique, il importait de laver les dieux des reproches d'immoralité lancés par les philosophes ; la même nécessité ne jouait pas pour les héros, personnages humains et par conséquent faillibles... Par ailleurs , du point de vue scientifique, il était plus normal de retrouver les forces ou éléments de la nature sous la figure des grands dieux cosmiques , que de les incarner dans un Agamemnon ou un Alexandre . Aussi bien ces derniers avaient pour l'ensemble des Grecs une réalité historique et il était difficile de les dissoudre en allégories » (p . 129 ). En ce qui concerne les dieux , la reconstitution du système de Métrodore dépend , de toute évidence , des témoignages que l'on accepte comme faisant référence à celui -ci . Si on se borne au témoignage le plus sûr et précis de Tatien, on peut seulement affirmer que les dieux , comme Héra , Athéna et Zeus, étaient pour lui des principes de la nature ( púoewÇ È ÚnooTÁOEC) et des arran gements d'éléments (otoixeiwv Olaxoouňoelc ) . Quant aux divinités princi pales , on pourrait aussi ajouter le passage de Georges le Syncelle ( cf. supra ) selon lequel les anaxagoréens interprétaient Zeus comme l'intelligence, Athéna

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comme la technique, d'où l'expression “ si les mains disparaissent, plus de sage Athéna " . Ceux qui ont voulu mettre à contribution pour cette reconstitution le passage de Philodème concernant les dieux -organes: Déméter-foie, Dionysos-rate et Apollon -bile, ont fait appel (cf.Nestle 5 , col . 1476) à la comparaison chère au Ve siècle av . J.-C. de l'État avec l'organisme humain ( cf. 14 F. Dümmler, Prolegomena zu Platons Staat und der platonischen und aristotelischen Staatslehre, Programm zur Rektoratsfeier der Universität Basel , Basel 1891 , p . 11 , qui renvoie à Aristote, Politique I 1 , 1253 a 20 sqq.) ; ou bien aux comparaisons géographico -ethnologiques qui ont recours aux membres d'un corps, comme par exemple on trouve comparé dans l'écrit hippocratique Mepì ¿ßbouádwv le Péloponnèse avec la tête , l'Ionie avec le diaphragme (opéveç) du monde (cf. 15 W.H. Roscher, Über Alter, Ursprung und Bedeutung der Hippokratischen Schrift Von der Siebenzahl : ein Beitrag zur Geschichte der ältesten griechischen Philosophie und Prosaliteratur, coll . ASAW 28 , 5 , Leipzig 1911 , p. 6, 107 sqq. ). Dans la comparaison d'Apollon avec la bile, on a vu le dieu de la peste, étant donné que la physiologie contemporaine y envisageait la cause des maladies aiguës ( cf. Nestle 4, p. 508 sq.; Id . 5, col . 1476). Buffière 6, p. 130 sq., rappelle à ce sujet le passage de l’Iliade I 50-53 et 60 , où il est question de la peste provoquée par la flèche aiguë d'Apollon . En partant de l'idée que selon les théories médicales de l'école d'Anaxagore la peste , maladie « aiguë » , avait pour cause un excès de bile, dont les flots se répandaient dans l'organisme, il imagine que Métrodore devait considérer qu'Homère avait voulu signifier en parlant des flèches d'Apollon ce débordement de bile. En ce qui concerne le rapport de Déméter avec le foie et celui de Dionysos avec la rate, Nestle 4, p. 510, et ld. 5 , col . 1476 , rappelle que ces deux organes occupaient par exemple une position dominante dans le système artériel de Diogène d'Apollonie ( D 139 , cf. DK 64 B 6). Buffière 6 , p. 131 n . 25 , indique une piste d'interprétation : « le nom grec du foie (ħnap) peut désigner une terre fertile ..., et Déméter désigne aussi la terre nourricière. Pour Dionysos, ne faudrait - il pas entendre que Métrodore expliquait la folie bachique, le délire, par un engorgement ou un “ remplissage” de la rate, ce qu'Homère aurait traduit de façon imagée en faisant plonger dans l'onde Dionysos poursuivi par Lycurgue ? ( II ., VI , 132 sq . ) » . Indépendamment du fait qu'on accepte ou non la partie concernant les dieux organes dans ce système, la conclusion générale que Buffière 6 , p. 132 sq . , présente sur l'état d'esprit et le but qui poussèrent Métrodore à créer ses allégo ries nous paraît très juste : « Métrodore est un rationaliste : ce n'est pas pour défendre les dieux traditionnels qu'il en fait des allégories, c'est pour montrer que sous des apparences divines se cachent des réalités qui n'ont rien de divin. C'est la science substituée à la religion ... Métrodore cherche l'explication scien tifique des mythes , comme le feront, vingt-cinq siècles plus tard , Max Müller ou Adabert Kuhn ; et sa solution est déjà comme une ébauche de la leur : il ramène la légende des héros à des phénomènes solaires ou cosmologiques » . Cette interprétation présente bien un Métrodore qui ne serait pas si absurde que voulait le présenter Tatien ( cf. supra ), dont le jugement fut tellement effi cace qu'il fut considéré comme justifié par Nestle 4 , p. 510 , et Id . 5 , col . 1477 . Plus récemment, Janko 8 , p. 75 , place aussi Métrodore sour la rubrique des « lunatics » , ce qui semble aussi dériver de la même tradition hostile ancienne, dans ce cas peut- être plutôt d'un Philodème. Métrodore comme l'auteur du Papyrus de Derveni ? En 1962 fut trouvé à Derveni le papyrus orphique célèbre , qui a été daté entre 340 et 3200. Il nous a transmis des fragments d'un poème théogonique attribué à Orphée et qui peut être daté d'environ 500 ", ainsi que les fragments d'un commentaire, postérieur de toute évidence au poème, qui a pour but d'expliquer la vraie signification des

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vers de celui -ci , car , selon le commentateur, Orphée aurait donné à son texte un sens occulte ou allégorique , bien au -delà du sens apparent ( cf. 16 A. Bernabé, De Tales a Demócrito : fragmentos presocráticos, 2a ed . ampliada, introd ., trad . y notas, coll . « Biblioteca temática » 8241 , Madrid 2001 ; réimpr. 2003, p . 341 373 ; 17 Id . ( édit . ) , Orphicorum et Orphicis similium testimonia et fragmenta . Poetae Epici Graeci. Pars II. Fasc . 1 , coll . BT, München /Leipzig 2004, p . 2-12 ) . Étant donné que les deux caractéristiques fondamentales qui se combinent dans ce commentaire sont l'allégorie et la philosophie provenant d'Anaxagore, Métrodore de Lampsaque, qui réunissait les deux conditions , en a été suggéré à maintes reprises comme l'auteur possible , bien qu'il ait été aussi finalement d'ordinaire rejeté : Cf. Pfeiffer 10, p. 237 ; 18 M. L. West, The Orphic poems, Oxford 1983 , p. 82 ; 19 A.A. Long , « Stoic readings of Homer » , dans R. Lamberton & J. J. Keaney (édit. ), Homer's ancient readers : the hermeneutics of Greek epic's earliest exegetes, Princeton 1992, p. 41-66 , notam ment p. 65 n. 53 ; 20 T .M.S . Baxter, The Cratylus : Plato's critique of naming, coll. « Philosophia antiqua » 58 , Leiden 1992, p. 127-139 ; 21 D. Sider, « Heraclitus in the Derveni papyrus » , dans A. Laks & G. W. Most (édit. ) , Studies on the Derveni papyrus, Oxford 1997, p. 129-148, notamment p. 137 sq. ; Janko 8, p. 76-79. Janko 8, considère qu'il n'est pas possible que l'auteur de l'allégorie des dieux comme des organes que l'on trouve chez Philodème soit le même que celui qui compare dans le papyrus de Derveni les dieux olympiques avec des éléments et des forces cosmiques (cf. col . XIV sqq . ) . N'est -ce pas une raison de plus pour ne pas l'identifier avec Métrodore ( cf. Hammerstaedt 9 ) ? PEDRO PABLO FUENTES GONZÁLEZ.

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IV / III a

Philosophe épicurien de la première génération, mort avant Épicure ( »E 36 ). Témoignages et fragments. A. Körte , Metrodori Epicurei fragmenta , Lipsiae 1890 . Cf. 2 M. Erler , « Metrodor » , GGP, Antike 4 , 1 , 1994 , p . 216-222 ; 3 E. Spinelli, « Metrodoro contro i dialettici ? » , CronErc 16, 1986 , p. 29-43 ; 4 A. Tepedino Guerra, « Metrodoro contro i dialettici » , CronErc 22 , 1992 , p. 119-122 ; 5 A. Blanchard , « Épicure, Sentence Vaticane 14 : Épicure ou Métrodore ? » , REG 104, 1991 , p. 394-409 ; 6 A. Tepedino Guerra, Il pensiero di Metrodoro di Lampsaco, dans L. Franchi dell'Orto ( édit . ) , Ercolano 1738-1988 : 250 anni di ricerca archeologica, Roma 1993, p. 313-320 . Biographie. Diogène Laërce ( X 22-24) consacre une brève biographie à Métrodore. Originaire de Lampsaque , Métrodore serait né en 331/0 . Il aurait connu Épicure lors de son séjour à Lampsaque et serait devenu son disciple fidèle . Métrodore avait une seur, Batis ( -B 23 ) , épouse d'Idoménée ( » I 14 ) et deux frères, Mentoridès et Timocratès. Ce dernier avait déserté l'école d'Épicure et attaqué violemment son ancien maître. Métrodore eut pour compagne la courtisane Léontion ( » L 43 ) , qui lui donna un fils, nommé Épicure ( » E 34 ), et une fille du nom d'Apia. Métrodore mourut sept ans avant Épicure, dans sa 530 année , en 278/7 ( D.L. X 23 ) . Épicure consacra à la mémoire de son disciple le 20e jour du mois ( D.L. X 18 ) , et dans son testament recommanda les deux enfants de Métrodore à ses exécuteurs testamentaires ( D. L. X 19-21 ) , ainsi qu'à

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MÉTRODORE DE LAMPSAQUE

515

Idoménée ( D. L. X 22 ) et à Mithrès (> * M 173 ; Voir Épicure, fr. 78 Arrighetti). Métrodore est souvent cité dans les sources anciennes avec Épicure, Hermarque ( » H 75 ) et Polyen comme l'un des quatre ‘ guides ' (xaonyeuóveç ou ăvopec ) du Jardin . Titres attestés. Diogène Laërce ( X 25 = F 25 ) nous transmet une liste incomplète des ouvrages de Métrodore. Aucun de ces écrits ne nous est parvenu en entier: ( 1 ) Mpòs toùç iatpoúc, tpía, Contre les médecins, trois livres (2) ſepì aioOńoewv, Sur les sensations ( 3 ) Προς Τιμοκράτην, Contre Timocrates (4 ) Tepi meyarofuxiaç, Sur la magnanimité (5 ) Hepi tñs ' Entixoúpov åppworlaç, Sur la maladie d'Épicure (6) Προς τους διαλεκτικούς, Contre les Dialecticiens ( 7 ) Mpoç toùç OOplotác, évvéa , Contre les Sophistes, neuf livres ( 8 ) Nɛpi tñs énì ooplav nopeias, Du chemin qui mène à la sagesse ( 9) Περί της μεταβολής , Sur le changement ( 10) ſepà toutou, Sur la richesse ( 11 ) Mpòç Anuóxpitov, Contre Démocrite ( 12 ) Hepi eủyevelaç . Sur la noblesse. On connaît aussi les quatre titres suivants : ( 13 ) Mpòç tòv Nárovoç Copylav B ’ , Contre le Gorgias de Platon, deux livres ; ( 14) Ipós tóv Mátwvos Eủoúppova , Contre l'Euthyphron de Platon, et ( 15 ) Mpòs toùG από φυσιολογίας λέγοντας αγαθούς είναι ρήτορας , Contre ceux qui croient que la physiologie crée de bons rhéteurs. Du point de vue philosophique , il est probable que Métrodore ne s'éloigna = pas des doctrines d'Épicure (Cic . , De fin . II 92 l'appelle : paene alter Epicurus fr. 5 Körte ). On connaît quelques aspects de sa pensée. Métrodore s'était engagé dans un dialogue avec Épicure sur des problèmes concernant le language: la partie finale du livre XXVIII du traité Sur la nature d'Épicure (PHerc. 1479/1417 ) nous donne des détails de la discussion . Métrodore y soutient un conventionnalisme linguistique radical ayant pour but la création d'un langage spécifique à la philosophie (7 A. Tepedino Guerra, « Il contributo di Metrodoro di Lampsaco alla formazione della teoria epicurea del linguaggio » , CronErc 20, 1990, p. 17 25 ) . Dans un livre connu par le témoignage de la Rhétorique de Philodème, et intitulé Contre ceux qui croient que la physiologie crée de bons rhéteurs, Métrodore discute de la définition et du rôle de la rhétorique en s'opposant aux thèses de Nausiphane ( » N 8) . Selon Métrodore , la vraie rhétorique est distincte de la physiologie ; on ne doit considérer comme un art (technè) que la rhétorique sophistique (ou épidictique ) , et non celle du barreau ou de la politique ( 8 F. Longo Auricchio et A. Tepedino Guerra, « Per un riesame della polemica epicurea contro Nausifane » , dans F. Romano (édit. ) , Democrito e l'atomismo

516

MÉTRODORE DE LAMPSAQUE

M 152

antico , Catania 1980 , p . 467-477 , et 9 F. Longo Auricchio , « Testimonianze della Retorica di Filodemo sulla concezione oratoria nei primi maestri epicurei» , CronErc 15 , 1985 , p . 31-61 ) .

17

Dans le livre lepi Troútov , Sur la richesse, Métrodore a déterminé

TIP

comment le sage devait se procurer ses richesses et administrer sa maison . On conserve des restes en piteux état d'une copie de cet ouvrage dans le PHerc. 200 ( 10 A. Tepedino Guerra , « Il P. Herc. 200 : Metrodoro , Sulla ricchezza » , dans

RO

1 0

Actes du XV Congr. Internat. de Papyrologie, III , Bruxelles 1979, p. 191-197 ) ; un long extrait nous est transmis par Philodème ( De oeconomia , col . XII 45 -XXI

. 35 Jensen . Cf. 11 R. Laurenti, Filodemo e il pensiero economico degli Epicurei, Milano 1973 , p . 106-149 ) . Métrodore défend, d'accord avec Épicure, l'idée de l'existence d'une richesse naturelle ( ATMOŪTOÇ Xatà qÚolv) .

10

Dans ses traités Προς τους διαλεκτικούς, Contre les dialecticiens; Προς

STANO

τους σοφιστάς , εννέα, Contre les sophistes, neuf livres ; Προς Δημόκριτον, Contre Democrite ; Προς τον Πλάτωνος Γοργίαν β ' , Contre le Gorgias de Platon, deux livres ; Ipoç tov Mátwvoç Ejdú pova , Contre l’Euthyphron de Platon, Métrodore a attaqué les philosophes des écoles opposées à l'épicurisme. Spinelli 3 a signalé la présence de fragments du livre Contre les dialecticiens dans les restes très lacuneux d'un papyrus d'Herculanum ( selon Tepedino 4 , il s'agirait plutôt de restes du traité en neuf livres Contre les sophistes ). traité Mpòç Tipoxpárnv , Contre Timocratès ( fr. 39-42 Körte ), Dans

in 2

Ac

Métrodore a vraisemblablement pris, contre son frère Timocratès, la défense

bor ਦੇ n

d'Épicure. Il nous reste peu de fragments de sa correspondance.

3.

Il faut, enfin , attribuer à Métrodore et non à Épicure les sentences 10, 30-31 , 47 et 51 du Gnomologium Vaticanum ( voir Blanchard 5 ) . La sentence 51 est tirée d'une lettre de Métrodore à Pythoclès ( cf. T. Dorandi , CPF I 1 ** 70 IT p. 474-476 , et 12 T. Dorandi , « Aspetti della tradizione “ gnomologica ” di Epicuro » , dans M. S. Funghi (édit . ) , Aspetti di letteratura gnomica nel mondo antico, Firenze 2004 , p. 277-280) .

Ao

Le texte conservé dans le PHerc. 831 , et attribué par Körte 2, p. 571-591 , 594-597 , à Métrodore est plutôt une æuvre de Démétrios Lacon ( - + D 60 , P. 639 640 ) , comme l'a établi 13 R. Philippson , « Papyrus Herculanensis 831 », AJPh 64 , 1943 , p . 148-162 , qui suggère comme titre lepi MetewpLQUOū.

TIZIANO DORANDI. Iconographie. Plusieurs portraits romains doivent dépendre d'une statue de la première moitié du IIIe siècle av . J.-C. Voir 13 G. M. A. Richter, The Portraits of the Greeks, t . II , p . 200-203 et les figures 1230-1267 . Selon 14 K. Schefold, Die Bildnisse der antiken Dichter, Redner und Denker. Verfasst und neubear beitet von K. S. , Basel 1997 , p . 224 , l'original était en bronze. L'identification repose sur un hermès du Musée du Capitole , provenant d'une propriété romaine, représentant l ' « épicurien Métrodoros » (IG XIV 1150 ). Voir également 15 M. Flashar, Metrodoros : ein Philosophenporträt in der Archäologischen Sammlung der Universität Freiburg, München 1999 , 31 p . Voir aussi 16 F. Queyrel, notice « Hermarque » H 76 , DPLA III , 2000, p. 636-637 .

f

1

M 154

MÉTRODORE DE SCEPSIS

517

17 Métrodore : un philosophe, une mosaïque, Autun , Musée Rolin , 1992, 62 p. ill . , exposition organisée à l'occasion de la restauration d'une mosaïque gallo -romaine mise au jour en 1990 et représentant le philosophe Métrodore (de Lampsaque), assis, vêtu d'un pallium blanc, tenant un rouleau de papyrus fermé dans la main gauche, la tête appuyée sur son bras droit, à la manière du Penseur de Rodin. Autour du philosophe, une sentence déjà connue comme une réflexion d'Épicure grâce à Stobée et Plutarque : « Nous sommes nés une fois pour toutes, une deuxième naissance est impossible. Et toi qui n'es pas maître du lendemain , tu ajournes ce qui apporte la joie ; mais la vie, dans le délai , se perd , et chacun de nous, dans son manque de disponibilité, meurt. » ( trad. Alain Blanchard, p . 52) . Voir également 18 A. Blanchard, « Épicure,“ Sentence Vaticane ” 14 : Épicure ou Métrodore ? » , REG 54, 1991 , p . 394-409 . Sur un détail de cette mosaïque (l'umbilicus figuré sur le volumen tenu par le philosophe) , voir 19 M. Capasso, « L'instrumentum scriptorium nel nuovo mosaico di Metrodoro » , Rudiae 4, 1992, p. 39-45. BERNADETTE PUECH et RICHARD GOULET.

153 MÉTRODORE DE PITANE RE 20

II /Ia

Académicien , disciple de Métrodore de Stratonicée ( 2M 155 ) . Selon Bücheler, le personnage dont parle Philodème (Acad. hist., col . XXXV 33-35 ) , et dont le nom est perdu dans une lacune, n'est autre que Métrodore de Pitane. Je retiens cette hypothèse malgré le scepticisme de J. Glucker , Antiochus, p. 113 et n . 53 . Cf. K. von Fritz, art. « Metrodoros » 20, RE XV 2 , 1932 , col . 1480. TIZIANO DORANDI.

154 MÉTRODORE DE SCEPSIS RE 23

II/Ia

Académicien , disciple de Carnéade ( ** C 42 ) , connu par Strabon ( XIII 1 , 55 , p . 690-610 C. ) . Il commença sa carrière comme philosophe en fréquentant l'Académie (Strabon et Cicéron , De orat. III 75 ) . Il quitta ensuite Athènes et passa en Asie où il eut un grand succès comme professeur de rhétorique (Cicéron, De orat. II 360 et 365 ) . Il n'est pas certain que l'on puisse l'identifier avec l'historien Métrodore ( FGrHist 184 ) , partisan de Mithridate VI , et surnommé misorhômaios, il s'agit peut- être de deux homonymes : père et fils ? (on trouve une mise à jour de la question dans J.-L. Ferrary, Philhellénisme et impérialisme, p . 228-229, favo rable à l'identification des deux personnages). Sur l'historien , voir P. Pédech , « Deux Grecs face à Rome au jer siècle av . J.-C. : Métro dore de Scepsis et Théophane de Mitylène » , REA 93 , 1991 , p. 65-78 Cf. W. Görler, « Metrodoros aus Skepsis » , GGP, Antike 4, 2, 1994, p . 911 . TIZIANO DORANDI.

518

MÉTRODORE DE STRATONICÉE

M 155 II

155 MÉTRODORE DE STRATONICÉE RE 17

Métrodore de Stratonicée avait commencé ses études philosophiques à l'école d'Épicure ( D.L. X 9) ; il était passé ensuite, seul de tous les élèves du Jardin , à celle de Carneade ( C42 ). Le chapitre que Philodème lui a consacré dans son Histoire de l'Académie ( col . XXIV 9-16) est malheureusement très lacuneux ( cf. T. Dorandi ( édit . ), Filodemo : Platone e l'Academia , p . 71 ). On y lit que Métrodore a été disciple, dans un premier temps , des épicuriens Diogène de Tarse ( -D 138 ) – ou Basilide ( = B 16) – et d'Apollodore dit « Kèpotyrannos » ( ** A 243) ; il quitta le Jardin à cause d'un désaccord avec Apollodore (voir aussi Philod ., Acad . hist., col . XXVI 4-10, XXXII 13-16 XXXV 33-36 et XXXVI 8-13 ) . Apollodore d'Athènes ( ap . Philod ., Acad. hist., col . XXXII 13-16 = FGrHist 244 F 60 ) parle de Métrodore comme d'un philosophe qui « n'enseignait pas à Athènes » ( cf. J. Glucker, Antiochus, p. 103 , 107 ) . La chronologie de Métrodore demeure incertaine. Compte tenu qu'il avait suivi les cours de Carneade ( scholarque jusqu'à 137/6) , on peut supposer qu'il est né entre 170 et 165. Le témoignage de Cicéron ( De orat. I 45 ; voir aussi Luc. 16) porte à postuler qu'il était encore en activité en 1104. On ne connaît pas la date de sa mort. Philodème cite le nom de deux disciples homonymes: l'un de Pitane (Acad. hist . , col . XXXV 33-36 . » M 153 ) et l'autre de Cyzique ( Acad. hist . , col . XXXVI 8-13 M 150 ) . Philodème ( Acad . hist ., col . XXVI 4-10 ) raconte aussi que Métrodore était renommé pour sa façon de vivre et son éloquence, mais qu'il n'était pas doté de grâce. A la suite de Carnéade, il s'était intéressé à la doctrine « sceptique » de l'axatanyía . Ce dernier renseignement est confirmé par les témoignages de Cicéron (Luc. 16) et de saint Augustin ( Acad . III 41 ) . Un rôle important à l'intérieur de l'Académie est attribué à Métrodore dans Ch. Brittain , Philo of Larissa : the last of the Academic sceptics, coll . « Oxford classical monographs » , Oxford 2001. Mais l'existence d'une telle école de « Philonian /Metrodorians » est niée avec vigueur par J. Glucker dans son long compte rendu du livre de Brittain , « The Philonian / Metrodorians : problems of method in ancient philosophy » , Elenchos 25 , 2004, p. 99-153, notamment p. 118-133 . Cf. W. Görler, « Metrodoros aus Stratonikeia » , GGP, Antike 4 , 2 , 1994 , p. 905-906 . TIZIANO DORANDI. 156 MÉTRODORE dit le Théoricien RE 18

IV - III ?

Philosophe mégarique ( ? ) , dit le Théoricien ( Oewpnuatixóc). Son nom figure dans un passage de Philippe de Mégare ( cité par Diogène Laërce II 113 ) qui énumère ceux que le mégarique Stilpon a enlevés à d'autres maîtres ( en l'occurrence à Théophraste) et s'est attachés comme disciples. Voir K. Döring, Die Megariker, fr. 164 A et p . 144-145 ; K. von Fritz , art. « Metrodoros» 18 , RE XV 2 , 1932 , col . 1480 . ROBERT MULLER .

M 160

MÉTROPHANE DE LÉBADÉE

519

157 MÉTRÔN

FIva

Académicien inconnu , disciple de Xénocrate ( Philodème, Acad. hist ., col . IV 10) . TIZIANO DORANDI. 158 MÉTRONAX RE PIR2 M 561

I

Philosophe, probablement stoïcien , chez qui étudia Sénèque à un âge déjà avancé. Dans sa Lettre 76, 1 , ce dernier apprend à son correspondant Lucilius ( PL 68 ) qu'il suit depuis cinq jours les leçons de ce maître, se rendant à son école « pour l'ouverture du cours , dès la huitième heure » . Le nom de ce philo sophe n'apparaît qu'au paragraphe 4. Par rapport au théâtre de Naples qu'il faut longer pour se rendre chez Métronax , les bancs de cette école , « où l'on recher che quel est l'homme bon et vertueux , où l'on apprend à l'être » ( trad . Noblot ), sont peu garnis ( § 4 ) . La Lettre 93 du même Sénèque mentionne la mort de ce philosophe et adresse à Lucilius qui la déplorait les consolations stoïciennes d'usage . W. Kroll, art. « Metronax » , RE XV 2, [ 1932) , col . 1485 (voir également Martina Dürkop , art. « Metronax » , NP VIII, 2000 , col . 136), attribue au philosophe l'âge de 80 ans à sa mort. Mais si Sénèque évoque cet âge ( 8 $ 3-4), c'est pour opposer à la vie sans doute beaucoup plus brève, mais comblée par la philosophie , de Métronax, un exemple de longue vie passée dans des occupations frivoles. RICHARD GOULET.

159 MÉTROPHANE D'EUCARPIA ou EPICARPIA ( Phrygie ) RE 4

III

Sophiste, auteur, selon la Souda M 1009, t. III , p. 391 , 15-17 Adler, de traités Περί ιδεών λόγου et Περί στάσεων , commentateur de l'Art oratoire d'Hermogène et d'Aristide . Syrianus, in Hermog. nepi oráoewv, p. 55 , 5 , le qualifie de platonicien ( Ó TATWVLXÓC ) . Il est souvent cité dans la littérature des scholies sur Hermogène. Les références sont rassemblées dans l'index de Chr. Walz , Rhet. gr., t. IX , p . 645 . Il faut le distinguer du sophiste homonyme (RE6) de la fin du Ve siècle, fils et disciple de Lacharès d'Athènes, connu par des fragments de la Vie d'Isidore de Damascius. De son ouvrage en deux livres Sur la Phrygie (FHG IV 453 ), Stéphane de Byzance, Ethn ., p. 285 , 4-9 Meineke, a tiré un passage concernant l'étymologie de sa cité d'origine. Cf. W. EnBlin , art. « Metrophanes » 4, RE XV 2 , ( 1932 ) , col . 1491 . RICHARD GOULET. 160 MÉTROPHANE DE LÉBADÉE (en Béotie ) RE 5

IV

Sophiste , fils du rhéteur Cornélianus. En plus d'exercices rhétoriques et de panegyriques, il écrivit, selon la Souda M 1010 , t . III , p . 391 , 18-20 Adler , Sur les " caractères " de Platon, Xenophon, Nicostrate et Philostrate ( Ilɛpi tūv χαρακτήρων Πλάτωνος , Ξενοφώντος , Νικοστράτου , Φιλοστράτου ), ainsi que des exercices (UERÉTAL) et des panegyriques. Cf. W. EnBlin , art . « Metrophanes » 5 , RE XV 2 , [ 1932 ) , col . 1491. RICHARD GOULET.

520

MÉTROPHANE DE SPARTE

161 MÉTROPHANE (AELIUS -) DE SPARTE

M 161

DM III

Le « très considérable » Aelius Métrophanès, qui « se distinguait parmi ceux de son âge par la conduite philosophique de sa vie , sa culture et son éloquence » , dit l'inscription de la statue que la cité de Sparte lui avait élevée au théâtre ( IG V 1 , 63 ; B. Puech , Orateurs et sophistes grecs dans les inscriptions d'époque impériale, Paris 2002, n ° 174) , devait être un éphèbe qui avait particulièrement brillé dans ses études . Il appartenait à une famille influente de Sparte, ce qui exclut toute possibilité d'identification avec les sophistes homonymes de Lébadée ( > L 161 ) et d'Eucarpia ( » L 160 ). BERNADETTE PUECH . 162 MICCOS

va ?

Au début du Lysis de Platon ( 204 a), Miccos est mentionné comme celui qui « enseigne » dans une palestre nouvellement construite hors les murs d'Athènes. « Compagnon (Étalpos) » et « laudateur ( ÉTALVÉTs) » de Socrate, selon Hippo thalès, il est qualifié par Socrate de « sophiste de talent ( ixavoc ooolotńs ) ». On ne sait rien de lui par ailleurs . (Comme l'indique 1 D. Nails , The People of Plato , p . 206 , aucune identification n'est possible avec d'autres personnages mentionnés dans la littérature sous le nom de Miccos . ) Pour 2 T.B.L. Webster, Athenian Culture and Society, London 1973 , p . 69 , il s'agit d'un sophiste D 192), que Socrate mineur, comme Euthydème ( E 169) et Dionysodore ( rencontre d'ailleurs également dans une palestre , et même peut-être d'un débutant, ce que paraît démentir l'appréciation portée sur lui par Socrate . Fait unique dans le corpus platonicien, l'expression de cette estime réciproque entre Socrate et un sophiste a évidemment été diversement interprétée. Dans sa recension du Plato de G. Grote, 3 J. S. Mill , « Plato » , The Edinburgh Review , Apr. 1866 = Dissertations and Discussions political, philosophical, and historical, vol . III, London 1867 , p. 275-379, cit. p . 295 , y vit une preuve que Socrate était lui - même compté comme un sophiste ; 4 Th. Gomperz, Les Penseurs de la Grèce , trad. fr. par A. Reymond , vol. I , Paris 1904, p. 443, pense au contraire que cette appréciation élogieuse d'un sophiste a échappé à Platon « comme par mégarde » et ne s'explique que par une insignifiance telle du sophiste que Platon n'avait pas à le compter parmi ses adversaires. Plusieurs traducteurs, à l'instar de 5 L. Robin, Platon. Euvres complètes, vol . I , Paris 1950, p . 1286 ( n . 2 de la p. 321 ), qui traduit « parfait théoricien » , préfèrent entendre ici « sophiste » au sens de « professeur » ( « un homme qui sait bien son affaire » , Robin 5). MICHEL NARCY .

163 MICHEL D’ÉPHÈSE La notice paraîtra dans un tome ultérieur. 164 MIKYLOS Plutarque , De vitando aere alieno 7 , 830 с , cite trois vers qu'il attribue à Cratès de Thèbes [ * C 205 ] (= fr. 3 Diels ; 5 Diehl ; Suppl. Hell. 349 = SSR VH 69 ) , dans lesquels celui -ci imite Homère ( Iliade r 20, N 603 ; Odyssée 1 582 et 593 , u 257 , x 423 ) . Ces vers font intervenir un Mixúłog ( ou Mixuroc ) écrit parfois Mixxúłoç ( ou Mixxułoc ) inconnu par ailleurs : « j'ai vu Mik(k )ylos en train de carder la laine I , et sa femme cardant également la laine avec lui , I qui

M 164

MIKYLOS

521

essayaient d'échapper à la faim dans une lutte atroce » (Év aivſ Oniótnti, leçon de plusieurs manuscrits conforme à Homère, Iliade N 603; Odyssée u 257 , alors que d'autres manuscrits ont une leçon qui confine à l'oxymore : év aivſ ThulÓTnti: “dans une dignité terrible ” ; sur ces leçons, voir 1 M. Cuvigny , p. 194 n . 4 du volume XII ' de Plutarque, CUF, 1981 , qui opte pour év aivn Onlółnti). Mikylos est-il un « philosophus ignotus » , comme l'affirme 2 Giannantoni, SSR , t . II , p . 549 ? En fait, un Mikylos est évoqué par Callimaque , Épigramme 26 , p . 87 Pfeiffer ; p. 165 Lloyd-Jones et Parsons ( c'est l'épigramme VII 460 dans l'Anthologie palatine ) : « Je menais une petite vie avec peu de moyens , ne faisant rien de mal , ne commettant aucune injustice. Terre qui m'est chère , si moi , Mikylos , j'ai approuvé quelque chose de mauvais , que ni toi ni les autres dieux qui me gouvernent, ne soient légers à mon égard » [ ou , si l'on adopte la correction de Wilamowitz qui écrit μήθ' ίλεωa la place de μήτ ' άλλοι: « ne me sois pas légère et que les dieux qui me gouvernent ne me soient pas propices » ) . Par ailleurs un cordonnier portant le même nom est mis en scène par Lucien dans Kataplous 14-25 et dans Le rêve ou le coq, où il dialogue avec le coq , réincarnation de Pythagore. Faut- il identifier le Mikylos de Cratès chez Plutar que avec celui de Callimaque et celui de Lucien ? Les avis divergent sur la question . 3 C. Wachsmuth , Sillographi Graeci, Leipzig 1885 , p. 194-195 , est opposé à l'identification du Mikylos de Cratès chez Plutarque avec le cordonnier, de même que 4 G. Voghera, « Senofane e i Cinici autori di Silloi ? » , SIFC 11 , 1903, p. 1-16 , notamment p. 11 n. 2 : le Mikylos de Plutarque est probablement un philosophe ; on ne saurait donc l'identifier avec le cordonnier. Mais 5 R. Helm, Lucian und Menipp , Leipzig /Berlin 1906 , p. 76 et n . 3 , conteste l'argument: rien ne contraint à faire du Mikkylos de Plutarque un philosophe ; par ailleurs le cordonnier Mikylos , qui apparaît souvent dans la littérature cynique et qui n'a peut- être pas de fondement historique ( cf. le cordonnier Simon dans le Phèdre), illustre , comme le personnage des vers de Cratès , le type de l'homme qui travaille fort de ses mains pour parvenir à calmer la faim . Helm ne voit donc pas de raison de ne pas les identifier. A propos du cordonnier Mikkylos il dit : « zweifellos identisch mit dem Mikylos aus den Versen des Krates ; fraglich kann nur sein , ob ihn Lukian daher nahm oder ob er auch bei Menipp eine Rolle spielte » ) . Dans les trois cas , effectivement, Mikylos est un « petit » : il carde la laine pour pouvoir manger chez Cratès ; il mène une petite vie avec peu de moyens chez Callimaque et c'est un cordonnier chez Lucien . Nous ne pouvons affirmer avec certitude que derrière ces trois personnages se cache un même personnage historique, mais ce n'est pas impossible ; nous ne pouvons exclure non plus que ce nom soit devenu une sorte de symbole des petites gens modèles de vertu .

MARIE-ODILE GOULET -CAZÉ.

522

M 165

MILON

165 MILON RE 7 Auteur par ailleurs inconnu d'un ouvrage intitulé Physica Muvos ( OVOLXÕV ), dont un extrait est cité par Stobée, Anthol. I 29 , 3 , t. I , p. 238 , 13-19 Wachsmuth , à propos des éclairs (àotpana ) : une distinction y est faite entre éclair de jour et éclair de nuit. Cf. W. Kroll, art. « Milon » 7 , RE XV 2 , 1932 , col . 1677 . RICHARD GOULET. 166 MILON DE CROTONE

Via ya

Le légendaire athlète Milon de Crotone, célèbre pour sa force herculéenne, pour sa boulimie ( voir en particulier Athénée X , 412 e - f; Porphyre, De abstin . I 52 ) et son autodiscipline , vainqueur dans six Olympiades consécutives à partir de 532 av . J.-C. , était considéré comme un membre de l'association pythagori cienne ( cf. Strabon VI 1 , 12 , ainsi que le témoignage de Jamblique cité plus loin ) . L'identification explicite de l'athlète avec le pythagoricien se trouve chez Porphyre, V. Pyth. 55 ( cf. Schol. in Luc. 26 , 8 ) . En 511/10 Milon conduisit Crotone à la victoire dans la guerre contre Sybaris où Pythagore joua un rôle décisif comme conseiller (Diodore XII 9 ) . Milon figure dans le catalogue de Jamblique , V. pyth. 36 , 267 , p . 143 , 24 Deubner, parmi les Crotoniates. Jamblique , V. pyth. 23 , 104, p. 60, 1-19 Deubner, le compte parmi les plus anciens disciples qui dans leur jeunesse suivirent l'ancien Pythagore déjà âgé. Une des versions du récit des machinations dirigées contre les pythagoriciens remontant à Aristoxène ( Jamblique , V. pyth. 35 , 249 , p. 133 , 25 - 134 , 8 ; Porph ., V. Pyth . 55 , cf. Aristoxenos, fr. 18 Wehrli), veut que les hommes de Cylon mirent le feu à la maison de Milon alors que les pythago riciens y étaient réunis. Chez Jamblique , V. pyth. 30, 170 , p. 95 , 26-27 Deubner, il est dit que la fille de Pythagore ( Myia ?) en vint à épouser Ménon de Crotone ; Ménage en ce passage lit cependant M awvi à la place de Mévwvi ; dans le catalogue des pythagoriciens, V. pyth . 36 , 267 p . 147 , 1-2 Deubner, est en effet répertoriée Myia , épouse de Milon de Crotone. Selon Hérodote III 137 , la fille de Milon aurait épousé le médecin Démocédès de Crotone ( » D 64 ), lui aussi rattaché par un certain biais au pythagorisme. Il faut attacher une certaine importance au lien de Milon , prêtre à Crotone d'Héra Lacinia ( cf. Philostr . , Vita Apoll . IV 28 ) , avec Héraclès. Voir 1 M. Detienne , « Héraclès, héros pythagoricien » , RHR 158 , 1960, p . 19-53 , et 2 Id . , Les Jardins d’Adonis . La mythologie des aromates en Grèce , coll . « Bibliothèque des histoires » , Paris 1972 , p . 82-85 . Voir également 3 A. Modrze , art. « Milon » 2 , RE XV 2 , 1932 , col . 1672-1676 ; 4 A. Olivieri, Civiltà greca nell' Italia meridionale, coll . « Biblioteca filologica Loffredo » 2 , Napoli 1931 , p . 83-98 ; 5 V. Visa -Ondarçuhu, « Milon de Crotone , personnage exemplaire » , dans A. Billault (édit. ) , Héros et voyageurs Grecs dans l'Occident romain . Actes du colloque organisé au Centre d'études et de recherches sur l'Occident romain de l'Univ . Jean Moulin - Lyon III , janvier 1996 , Lyon /Paris, 1997, p. 33-62 .

M 169

MILTIADE

523

Un fragment de 5 lignes tiré d'un ouvrage intitulé Ovoixá, écrit dans un dialecte attique riche en archaïsmes, est transmis par Stobée I 29, 3 ( édité dans 6 H. Thesleff, The Pythagorean Texts, p. 122, 24 - 123 , 3 ) ; 7 Zeller, Philos. d. Griech . III 2 p. 119, à la suite de Gaisford , a voulu lire Philon au lieu de Milon , mais il est assez probable qu'il s'agit d'un pseudépigraphe. Voir Thesleff 6 loc. cit. La datation du fragment a été laissée indéterminée par 8 H. Thesleff, Introduction , p. 114 ; voir également 9 W. Kroll, art. « Milon » 7 , RE XV 2 , 1932, col. 1677 . BRUNO CENTRONE . 167 MILTAS DE THESSALIE RE

Iva

Membre de l'expédition montée par Dion de Syracuse ( -D 167 ) contre le tyran Denys II de Syracuse (2D 84) en 3574. D'après Plutarque, Dion 22, 5 , Miltas avait frequente l'Académie (μετεσχηκότα της εν ' Ακαδημεία dlatpibñs ) . Connu comme devin ( uáutic ) , il proposa à l'intention de l'armée une interprétation favorable d'une éclipse de lune (celle du 9 août 357 ) , mais avoua aux proches de Dion qu'il voyait comme un mauvais augure la venue d'un essaim d'abeilles au - dessus de la poupe du navire de Dion ( 24 , 1-4 ). Pour les nombreux prodiges survenus au début de l'expédition (24, 5-10) , Plutarque semble suivre Théopompe, mentionné en 24 , 10 , mais les paragraphes qui précèdent (24, 1-4) sont d'une inspiration différente . Cf. K. von Fritz, art. « Miltas » , RE XV 2, ( 1932) , col . 1678-1679 ; H. Beck, art. « Miltas » , NP VIII , 2000 , col. 192. Sur le contexte politique et le rôle des membres de l'Académie , voir K. Trampedach, Platon , die Akademie und die zeitgenössische Politik, coll . « Hermes Einzelschriften » 66 , Stuttgart 1994, notamment, pour Miltas, p . 111 . RICHARD GOULET. 168 MILTIADE RE 4

IIIa

Philosophe stoïcien hétérodoxe, disciple d'Ariston de Chios ( -A 397) , selon D. L. VII 161 (SVF I 333 , p. 75 , 4-5 ). Miltiade, qui porte le même nom que le père d'Ariston de Chios (D.L. VII 37 ) , était peut-être un parent de son maître (M. Pohlenz , Die Stoa, 3e éd. , Göttingen 1964 , t. II , p. 17 ) . En tout cas , d'après le témoignage de Diogène Laërce ( VII 161 ) , il suivait probablement les cours d'Ariston au Cynosarge, le gymnase où autrefois Antisthène ( 2 * A 211 ) avait tenu école. Il était un véritable sectateur d'Ariston et, comme son disciple Diphilos ( 2D 210) , se dénommait lui-même « Aristonéen » . CHRISTIAN GUÉRARD ( + ).

169 MILTIADE RE 9

FII

Apologète chrétien , auteur, selon Eusébe de Césarée, Hist. eccl. V 18 , 5 , de deux ouvrages complémentaires : un Mpòc " Exinvac ( Contre les Grecs ) et un Mpòc ' lovdalovs (Contre les Juifs ). Eusèbe semble en distinguer « une apologie en faveur de la philosophie qu'il suivait, pour les princes de ce monde » (trad . Bardy ). Ces princes pourraient être Antonin le Pieux et Marc Aurèle ( 147-161 )

524

MILTIADE

M 169

ou encore Marc Aurèle et Lucius Vérus ( 161-169 ). Il avait également attaqué les Montanistes et les Valentiniens. Voir Eusèbe, Hist. eccl. V 17 , 1 , et Tertullien, Adversus Valentinianos V 1 qui le qualifie d’ecclesiarum sophista ( « le sage de nos églises » ) . Voir également Jérôme, De vir. ill. 39. Cf. H.G. Opitz, art. « Miltiades » 9, RE XV 2, 1932, col . 1705-1706 . Miltiade semble avoir été oublié dans la CPG ( I ) . Il est également absent dans le Supplément. RICHARD GOULET. 170 MILTIADE DE CARTHAGE Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique, V. pyth. 36 , 267 , p. 145 , 3 Deubner. En V. pyth. 27 , 128 , p. 73 , 1 sqq., Jamblique raconte un épisode qui illustre le précepte pythagoricien de la solidarité devant lier les membre de la communauté : lorsque les Carthaginois voulurent expédier sur une île déserte plus de cinq mille hommes qui avaient servi dans leur armée , Miltiade reconnut parmi ces derniers un Argien du nom de Posidès qui était comme lui pythagoricien . Il s'approcha de lui et lui recommanda, sans lui révéler ce qui allait arriver, de retourner chez lui le plus rapidement possible ; il le fit embarquer sur un bateau qui faisait escale et le sauva ainsi du danger. Comme dans l'Antiquité on ne connaissait aucun philosophe originaire de Cathage, Olivier Masson proposait, comme déjà L. Dindorf ( Thesaurus Graecae linguae, s . v. " Avons et " Οδιος/ O8 ος ), de corriger Καρχηδόνιος (Carthaginois ) en Χαλκηδόνιος (= originaire de Chalcédoine, colonie mégarienne proche de Byzance), car « il est bien peu plausible qu'un groupe de Pythagoriciens aux noms grecs » , « tous du meilleur hellénisme » , « aient existé à Carthage à cette époque » ; voir 1 « Des philosophes “ carthaginois ” chez Jamblique ? » , en appendice à son article « La patrie de Diogène Laërce est -elle inconnue ? » , MH 52, 1995 , p. 229-230 ; 2 Id ., « Sur quelques noms de philosophes grecs : à propos du Dictionnaire des philosophes antiques , vol . II » , RPh 68 , 1994 , p. 236-237, repris dans Onomastica graeca selecta , vol . III , Genève 2000 , p. 223-224. En effet, la confusion entre ces deux ethnonymes, dont les graphies sont très proches, est fréquente dans les mss . Masson rappelle à ce propos le cas parallèle du stoïcien Hérillos ( 7H 72), donné lui aussi comme Kapxndóvios chez Diogène Laërce VII 37 , et comme Xarxndovlog (selon les mss BPF ) en VII 165, pour lequel 3 P. von der Mühll ( « Zwei alte Stoiker : Zuname und Herkunft » , MH 20, 1963 , p . 1-9, notamment p. 6 sq . ( repris dans Ausgewählte kleine Schriften, Basel 1976, p. 366-370 ]) a confirmé qu'il s'agissait bien d'un Chalcédonien ( il est approuvé par L. Robert, dans 4 N. Firatli et L. Robert, Les stèles funéraires de Byzance gréco -romaine, Paris 1964, p. 164, et par 5 R. Merkelbach, Inschriften von Kalchedon, coll . IK 20 , Bonn 1980, p. 147 [index ]). Mais puisqu'on parle au $ 128 de mercenaires, et que Miltiade est dit encore une fois Carthaginois, dans un contexte qui ne laisse aucun doute sur la fiabilité de la tradition manuscrite, la correction de Masson est superflue ; il faut donc conserver le texte transmis ; voir dans ce sens 6 L. Brisson et A. Ph . Segonds (édit. ) , Jamblique. Vie de Pythagore, Paris 1996, p. 220 n . 33 et, surtout, n . 34. D'ailleurs P. Kingsley a essayé de montrer que, bien qu'à peine documentés, les rapports entre les pythagoriciens et Carthage sont particulièrement significatifs (7 « From Pythagoras to the Turba philosophorum : Egypt and Pythagorean tradition » , JWI 57 , 1994 , p. 1-13 , aux p. 4-5 , notamment à la p. 5 , avec les n . 27-28 [l'auteur n'a pas exploité l'indication, précieuse pour son argument, fournie par le Catalogue des pythagoriciens de Jamblique ]). Voir également 8 la notice « Hodios de Cathage » , H 161 , DPLA III , 2000 , p. 804. Absent de la RE. BRUNO CENTRONE et CONSTANTINOS MACRIS.

M 172

MINUCIUS FELIX

525

171 MIMNOMACHOS DE TARENTE Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique, V. pyth. 36, 267 ; p . 144 , 18 Deubner. [ Sur ce type de nom, voir Fr. Bechtel, Die historischen Personennamen, p. 318 . C.M. ) BRUNO CENTRONE . MINICIUS → FUNDANUS (G. MINICIUS - ) (F 25 ) 172 MINUCIUS FELIX RE 15 PIR2 M 611

M III

Apologiste chrétien. Né païen , avocat à Rome , auteur de l'Octavius (dialogue entre trois amis , très probablement originaires d'Afrique, le païen Cécilius , adepte du scepticisme, et le chrétien Octavius, Minucius Felix tenant le rôle d'arbitre ) et peut- être d'un second ouvrage, non conservé, De fato , que Minucius Felix paraît annoncer ( XXXVI 2) et que Jérôme connaissait sous le titre De fato uel contra mathematicos, mais dont il doutait de l'authenticité , jugeant ses qualités littéraires inférieures à celles de l'Octavius (De uiris ill. 58 , Epist. 70,5 , 1 ). Voir sur ce traité 1 J. R. G. Préaux, « A propos du De Fato ( ?) de Minucius Felix » , Latomus 9, 1950 , p. 395-413. État des questions et bibliographie. 2 J. Quasten , Initiation aux Pères de l'Église, trad . de l'anglais par J. Laporte , t . II , Paris 1957 , p . 188-193 ; 3 E. Heck , HLL 4, 1997 (tr. fr. NHLL , 2000) $ 475 ; 4 F. Chapot, « Les grandes orientations des travaux sur l'Octavius de Minucius Felix . Remarques sur trente ans de bibliographie » , VL 150, 1998 , p. 18-28 . 5 J.-C. Fredouille « Dal dialogo ciceroniano all ' Octavius di Minucio Felice » , dans Studi agostiniani, vol . 13 , Città Nuova, Roma 2005, p. 219-233 ; 6 Id ., « L'apologétique latine préconstan tinienne ( Tertullien, Minucius Felix , Cyprien ) : essai de typologie » , dans L'apologétique chrétienne préconstantinienne, coll . « Entretiens sur l'Antiquité classique » 51 , Genève - Vandoeuvres 2005, p . 39-67 . Sur les aspects philosophiques : 7 C. Becker, Der Octavius des Minucius Felix. Heidnische Philosophie und frühchristliche Apologetik, coll . « SBAW » 1967 , 2, München 1967 , 111 p .; 8 E. Valgiglio , « Tra scetticismo filosofico e tradizionalismo religioso . C. Aurelio Cotta in Cicerone e Cecilio Natale in Minucio Felice » , RSC 21 , 1973 , p . 1-22 ; 9 B. Baldwin , « Fronto and the Christians » , ICS 15 , 1990 , p . 177-181 ; 10 A. Fürst , « Der philosophie geschichtliche Ort von Minucius Felix ' Dialog Octavius » , JbAC 42 , 1999 , p. 42 49 ; 11 Stefan Freund, « Philosophorum supercilia contemnimus : Überlegungen zur Bewertung der Philosophie im Octavius des Minucius Felix » , Gymnasium 107 , 2000, p . 425-434 ; 12 A. Fürst , « Die Selbsterkenntnis des Skeptikers im Octavius des Minucius Felix » , ZAC 4 , 2000, p . 270-281. La « Chronica Tertullianea et Cyprianea » ( CTC ), qui paraît dans le second fascicule de la REAug, intègre annuellement depuis 1985 toutes les publications concernant Minucius Felix (REAug 32 , 1986 → = CTC 85 →) . Principales éditions et traductions récentes . 13 J. Beaujeu ( édit. ), Minucius Félix , Octavius, texte établi et traduit par J.B. , CUF, Paris 1964 , 19742 ( avec testimonia , p. CX- CXII , et comm ., p . 69-162 , et index nominum, p . 163-166 ) ;

526

MINUCIUS FELIX

M 172

14 B. Kytzler, coll . BT , Leipzig 19922 ; 15 M. Pellegrino, P. Siniscalco , M. Rizzi, coll . « Corona Patrum » , Torino 2000 (avec trad. italienne et comm . ); 16 B. Kytzler , München 19914 ( avec trad . allemande et comm . ). 17 E. Paratore, Ottavio , coll . « Piccola biblioteca filosofica Laterza >> 73 , Bari 1971 (trad. italienne et comm. ) . - Commentaire des chap. 1-4 : 18 W. Fausch , Die Einleitungskapitel zum “ Octavius ” des Minucius Felix, Zürich 1966 . Lexique , concordance. 19 J.-P. Waltzing , Lexicon Minucianum , coll . « Bibliothèque de la Faculté de philosophie et lettres de l'Université de Liège >> 3 , Liège 1909 , 283 p. ; 20 B. Kytzler, D. Najock, A. Nowosad, Concordantia in Minuci Felicis Octavium , coll . « Alpha-Omega . Reihe A : Lexika , Indizes, Konkordanzen zur klassischen Philologie » 72 , Hildesheim 1991, X -423 p. Datation La bibliographie est surabondante et récurrente. On ne dispose que de deux critères sûrs: le terminus post quem fourni par l'allusion, en IX 6 et XXXI 2 , au discours de Fronton PF 19) (mort vers 166) ( cf. 21 P. Kraft, « Fronto und Minucius Felix » , dans Alvarium . Festschrift C. Gnilka , Münster W. 2002, p. 219-225 ) et le terminus ante quem , que donnent les mentions de Minucius Felix par Lactance ( Inst. div ., I 11,5 ; V 1 , 22 ) , soit une fourchette de près d'un siècle et demi. En fait les discussions (depuis le Xvire s. ) sont centrées sur le sens dans lequel s'est exercé le rapport évident d'intertextualité entre l’Apologeticum de Tertullien ( 197 ) et l'Octavius. Bien que le débat ne soit pas entièrement clos, la grande majorité des critiques considère aujourd'hui comme acquise l'antériorité de Tertullien (mise au point toujours utile de 22 J. Beaujeu, A 341 ) , Mnémarchos, fils de Pythagore , qui aurait ensuite confié la direction de l'école à Boulagoras ( -B 55 ). Selon Eusébe , P.E. X 14 , 14 , et Théodoret, De princ. 23 , auraient succédé à Pythagore sa femme Théano et ses fils Télaugès et Mnésarque. Dans une scholie sur la République 600 b, p. 273 Greene = Suid. s.v. Ivdayópaç, II 3120, t. IV , p. 262 , 25-26 Adler, les noms donnés pour les deux fils de Pythagore sont Télaugès et Mnesarque (Télaugès et Mnesarque également chez Suid. s.v. Oeavú , 84, t . II , p. 688 , 18-20 Adler). Selon un auteur anonyme cité par Phot . , Bibl. 438 b 29 , Mnésarque, un des fils de Pytha gore , serait mort avant son père. Mnésarque ( ici aussi Mnémarchos selon d'au tres sources, cf. Jamblique , V. pyth . 4 ; Diog. Laërce VIII 1 et d'autres) est aussi le nom du père de Pythagore. Le nom de Mnésarque ne figure pas dans le catalogue de Jamblique . Son existence même est douteuse. Voir K. von Fritz , art. « Mnesarchos » 4, RE XV 2, 1932 , col . 2272 ; en toute hypothèse la succession des scholarques pythago riciens est une construction tardive. BRUNO CENTRONE.

181 MNÉSARQUE D'ATHÈNES RE 5

MF II- DI

Stoïcien , fils d'un certain Onésimos , mentionné dans (a) l'Ind. Stoic. Herc ., col . 51 , 4, p . 102 Dorandi : Mvňoapxos 'Ovnoiuov l'Aonvalos, dans ce qui semble une liste des disciples de Diogène de Babylonie ( > D 146 ) . Il y est précédé de Panétius de Rhodes et suivi de Dardanos d'Athènes ( D 22 ) . Il réapparaît plus loin , ( b ) col . 78 , 5 , p . 126 Dorandi, à nouveau à côté de Dardanos, comme maître d'Apollonius de Ptolémaïs ( A 282 ) , philosophe que l'auteur de l'Index Stoicorum (Philodème) ou sa source (Stratoclès de Rhodes ), présente comme ami (φίλος ημών) : και Απολλώνιος Πτολεμαιεύς φίλος ημών 1 διακηκοός και Δαρδάινου [ και ] Μνησάρχου. On sait par ailleurs qu'un certain Apollos de Nicée (** A 292 ) aurait été le disciple de cet Apollonius. ( c ) Mnésarque, "auditeur de Panétius ", est seul cité comme stoïcien influent à Athènes lors de la visite de L. Licinius Crassus ( ™ C 198 ) , alors questeur en Macédoine, vers 110a (Cicéron , De orat. I 11 , 45-47 ) . À la tête ou dans les rangs de l'Académie il y avait alors Charmadas ( C 100 ), qui lut avec Crassus le Gorgias de Platon ( où était fondée la théorie académicienne de la rhétorique ), Eschine de Naples ( > A 70) , Clitomaque de Carthage ( ~ * C 149 ) et Métrodore de Scepsis ( 2 + M 154) , tous disciples de Carnéade de Cyrène ( 2 ° C 42 ) ; à la tête du Péripatos Diodore de Tyr ( Ə - D 132 ) , disciple de Critolaos de Phaselis ( C219 ). Mnesarchos rejoignait la tendance , commune à l'époque chez les philosophes , qui excluait les rhéteurs de la politique et de la science pour les reléguer aux tribunaux et aux débats de la place publique ( I 11 , 46) . Voir 1 J.-L. Ferrary, Philhellénisme et impérialisme, p . 451-459 .

M 181

MNÉSARQUE D'ATHÈNES

539

Selon 2 F. Alesse , Panezio di Rodi. Testimonianze. Edizione, traduzione e commento, coll . « Elenchos » 27 , Napoli 1997 , p. 174, ce passage impliquerait que Mnésarque aurait été le successeur de Panétius, tout comme les académiciens cités et Diodore étaient les successeurs de Carnéade ou Critolaos. Mnesarque aurait pu devenir scolarque après avoir tenu une école indépendante ouverte lors de la mort d'Antipatros de Tarse (»A 205). Cette déduction semble encore influencée par un passage de l'Index Stoicorum (col . 53 , p. 104 Dorandi) où l'on croyait lire une telle succession de Panétius à Mnésarque et Dardanos, mais le passage est aujourd'hui lu différemment (voir plus loin ). (d) La position de Mnesarchos sur l'art oratoire est présentée plus loin chez Cicéron avec plus de détails par M. Antonius (** A 223 ) qui passa en 102a quel ques jours à Athènes , alors qu'il partait exercer son proconsulat en Cilicie ( Cicéron , De orat. I 18 , 82-84) . Selon le stoïcien , seul le sage est orateur (I 83 ). Pour un commentaire récent de ces passages (a et b) du De oratore , voir 3 A. D. Leeman et H. Pinkster (édit . ) , De oratore libri III, Kommentar , I : Buch 1 , 1-165 , coll . « Wissenschaftliche Kommentare zu griechischen und lateinischen Schriftstellern » , Heidel berg 1981 , p. 87 et 93-94 ; voir aussi p. 135-137 (« Der historische Hintergrund der Replik des Crassus »). Sur une influence des vues de Mnesarque sur Aélius Aristide, voir 4 D. Sohlberg, « Aelius Aristides und Diogenes von Babylon. Zur Geschichte des rednerischen Ideals » , MH 29, 1972, p. 177-200 et 256-277. Chez (e ) Cicéron, De finibus I 2 , 6, Mnesarque apparaît dans une liste de philosophes stoïciens après Diogène et Antipatros ( 2 * A 205 ) , avant Panétius et Posidonius. ( f) Dans un fragment de Numénius d'Apamée ( » N 66 ) , Mnésarque est présenté comme le maître d'Antiochus d'Ascalon ( » * A 200) ( fr. 28 des Places apud Eusèbe, P.E. XIV 9, 3) . Voir également ( g ) Augustin , Contra Acad. III 18 , 41 . ( h ) Cicéron , Acad . II 22 , 69 , fait de Mnésarque et de Dardanos les principes Stoicorum à Athènes lorsqu'Antiochus d’Ascalon fonda son école , l ' « Ancienne Académie » ( au début des années 100-90 selon 5 J. Glucker, Antiochus, p . 19-20 , dans les années 100-90 selon 6 J. Barnes , « Antiochus of Ascalon » , dans M. Griffin et J. Barnes, Philosophia Togata , t . I , p. 69 : « in the nineties » ) . Selon Ferrary 1 , p. 451 et 452-453, ces principes stoicorum n'étaient pas nécessaire ment des scholarques de l'école , mais peut-être seulement « les plus éminents des philosophes stoïciens » . Mnesarchos faisait peut-être l'objet d'une section biographique dans la partie finale perdue du livre VII de Diogène Laërce, comme l'atteste ( i ) un index ancien conservé dans le Parisinus graecus 1759 ( cf. éd . Long , p . 392 ) , si toutefois on accepte de corriger le nom transmis par les manuscrits qui n'est pas Mnesarchos, mais Mnesarchidès. La liste énumère Zénon de Tarse , Diogène , Apollodore, Boéthos, Mnesarchidès, Mnésagoras , Nestor, Basilide , Dardanos, Antipatros, Heraclidès , Sosigénès , Panétius, etc. Il apparaît donc avant Panétius dont il aurait pourtant été l'auditeur selon Cicéron et assez loin du nom de Dardanos auquel il est souvent associé . Sur cette liste , voir 7 T. Dorandi , « Considerazioni sull’index locupletior di Diogene Laerzio » , Prometheus 18 , 1992, p. 121-126. Sur les anomalies dans l'ordre de ces stoïciens, voir Alesse 2 , p. 173 : « La prosopografia stoica procedette non solo per dadoxa ma anche seguendo direttrici e linee d'influenza facenti capo a diversi maestri, e quindi parallele e tendenti ad una certa autonomia l'una dall'altra » .

540

MNÉSARQUE

M 180

Comme Dardanos est associé à Mnesarque dans plusieurs témoignages ( a , b, h ) , Glucker 5 , p . 19 , reprenant une hypothèse déjà soutenue par Zeller, Susemihl , von Arnim et Pohlenz ( voir Ferrary 1 , p . 452 ) , a supposé que les deux stoïciens auraient pu exercer une sorte de « joint headship » de l'école stoïcienne à Athènes, l'expression principes Stoicorum faisant dans cette perspective réfé rence au scholarcat, sens que le terme princeps implique dans d'autres passages de Cicéron où il est employé à propos de Philon de Larisse ou de Zénon de Sidon (Ferrary 1 , p. 452) . Cette hypothèse reposait sur la reconstitution proposée par Comparetti en 1875 de ( i) la colonne col . 53 , 3-7 , p . 104 Dorandi, selon laquelle Dardanos aurait été « lui aussi » successeur de Panétius. Cette hypothèse qui avait été mise en question par Ferrary 1 , p. 451-460, a été fermement rejetée par T. Dorandi, qui , grâce à un nouvel examen du manuscrit, a remis en cause la reconstitution en rattachant à la couche supérieure du papyrus quelques lettres qui s'étaient collées à cet emplacement ( sottoposto ). La reconstitution qu'il propose (Aáploavoc 'Avopouáxov ( ' A ]lon [ v ]aioç, xai oŬ [[oç ' Ανίτιπάτρων έσχόλ[ ασεν Αθήν[ η ] σι ) reste toutefois surprenante tant pour la syntaxe que pour le sens : si le nom de Dardanos apparaît, comme il est supposé, dans une liste énumérant au nominatif des disciples d’Antipatros de Tarse ( » A 205 ), il est superflu de préciser que « lui aussi (comme le diadoque d'Antipatros mentionné juste avant dans la liste et qui ne peut être que Panétius) étudia avec Antipatros à Athènes » . Le passage est trop abîmé pour que l'on puisse en tirer des données sûres. Zénon de Tarse de MII

Diogène de Babylonie

Antipatros de Tarse FII

Panétius de Rhodes Mnésarque d'Athènes

Dardanos d'Athènes

Antiochus d'Ascalon

Apollonius de Ptolemaïs

Contemporains: Charmidès, Eschine, Clitomaque, Diodore

DI

MI

Posidonius d'Apamée

Apollos de Nicée Plutôt qu'une co-direction de l'école , Ferrary et Dorandi envisagent un éclatement de l'école stoïcienne dans les années qui suivirent la mort de Diogène de Babylonie . On connaît, grâce à Athénée, Deipnosophistes V , 186 a ( Panétius, fr. 39 Alesse ), l'existence à Athènes à son époque ( la fin du II° siècle apr. J.-C., mais le présent employé pourrait être recopié d'une source beaucoup plus ancienne) de Diogénistes, d'Antipatristes et de Panétiastes ( voir Ferrary 1 , p. 458 n . 82 ) . C'est dans le même contexte que se situerait l'enseignement paral lèle de Mnésarque et de Dardanos. « Dans les années 110-100 , les Panétiastes pourraient être une école dirigée par un disciple de Panétius , les Diogénistes l'école de Mnésarque se réclamant de Diogène, les Antipatristes l'école de Dardanos se réclamant d’Antipater » ( Ferrary 1 , p. 459 n . 34) .

M 181

MNÉSARQUE D'ATHÈNES

541

Ferrary 1, p. 459 : « Mnésarque prit très tôt son indépendance après la mort de Diogène de Babylone et ( ... ) Dardanos fit probablement de même à la mort d'Antipater de Tarse, Panétius se trouvant ainsi à la tête d'un Portique déjà éclaté » . C'est donc à tort que Cicéron (c ) aurait presupposé entre Panétius et Mnésarque un rapport de maître à disciple (Ferrary 1 , p. 455 ). Alesse 3 , p. 173 , rappelle que selon Pohlenz, Die Stoa, t. I , p. 239 (p. 496 de l'édition italienne ), ces groupes se seraient constitués à l'intérieur de l'école stoïcienne. On remarquera toutefois que les témoignages qui les rapprochent associent plutôt qu'ils ne les séparent comme des rivaux les deux philosophes stoïciens. On imagine mal qu'Apollonius de Ptolémaïs ( b) ait étudié conjointement avec deux maîtres stoïciens en opposition. Sur la datation de Mnesarque, voir Barnes 6, p. 69-70, qui suppose qu'il a pu naître vers 160, étudier auprès de Diogène de Babylonie non pas “avant 150”, mais “ avant 140”, et avoir enseigné à Athènes jusque “dans les années 90”. Cette suggestion est liée à la datation de la “ conversion " d'Antiochus d'Ascalon . Pour la dater des années 90 , Barnes est amené à faire descendre la mort de Diogène de Babylonie d'une dizaine d'années pour que les scholarques stoïciens aient pu étudier avec lui et n'avoir pas été trop âgés lorsqu'Antiochus étudia à Athènes. 8 T. Dorandi, Cronologia, p. 28-34 , situe finalement la naissance de Mnésarque et Dardanos vers 170 av. J.-C. , la mort de Diogène de Babylonie , dont ils furent les disciples, dans les années 150-140, et la mort de Mnesarque et de Dardanos après 88 , date qu'il retient pour la “ conversion ” d’Antiochus d’Ascalon . 9 D. Sedley , « The School, from Zeno to Arius Didymus » , dans B. Inwood ( édit. ), The Cambridge Compation to the Stoics, Cambridge 2003, p . 27-30, considère que les années 88-86 marquent la fin des écoles philosophiques à Athènes et le début d'une décentralisation de l'enseignement dans des centres comme Rhodes ( Posidonius ) , Tarse ou Rome . Les athéniens Mnésarque et Dardanos n'auraient dû leur notoriété qu'au fait qu'eux seraient restés à Athènes , sans pour autant avoir été scholarques. Sur ce déplacement de l'activité philosophique à l'époque , voir également 9 bis Id ., « Philodemus and the decentralisation of philosophy » , CronErc 33 , 2003, p . 31-41. En plus de ses positions radicales sur l'opposition entre la rhétorique et la philosophie , nous savons par Cicéron que Mnesarque maintenait contre l'Acadé mie sceptique la possibilité d'un critère du vrai et du faux et qu'il a pu influencer Antiochus d’Ascalon sur ce point (Acad . II 22 , 69 ) . D'autres positions philosophiques de Mnesarque sont exposées, par exemple sur Dieu dans Aetius , apud Stobée I 1,29 b, p. 303 , 19 (p. 35 , 10 Wachsmuth = DDG , p. 303 b 13-14) . Chez Arius Didyme, fr. 27 = DDG, p. 463 , 5 , apud Stobée I 20, 7 , p. 179, 6-17 Wachsmuth , il est traité de la difference entre κατά το ίδ ως ποιόν et κατά την oủo av . Selon le Pseudo -Galien , Hist. philos. 24 , 42 (DDG , p . 615 , 6-10 ) , il aurait supprimé parmi les parties de l'âme le pwvnt.xòv et le ontepuatixòv, ne conservant que le noyixòv et l'aioOntıxov (qui regroupait sans doute les autres parties). Sur ce dernier passage, voir Pohlenz, Die Stoa, t. I , p. 241-242 ; Alesse 2, p. 173-174 et 178 , 10 F. Alesse , Panezio di Rodi e la tradizione stoica, coll . « Elenchos » 23 , Napoli 1994 , p . 203-204 ; 11 Ead . , La Stoa e la tradizione socratica, coll . « Elenchos » 30, Napoli 2000 , p. 57 n . 81 . Cf. 12 K. von Fritz, art. « Mnesarchos » 5 , RE XV 2 , [ 1932) , col . 2272-2274 ; 13 T. Dorandi (édit . ) , Filodemo, Stoà , p. 24-25 ; 14 A. Schmekel , Die Philo sophie der mittleren Stoa in ihrem geschichtlichen Zusammenhange, Berlin

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MNÉSARQUE

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1892, réimpr. Hildesheim 1989 , p . 296-297 ; 15 Susemihl, GGLA , II , p. 238 sq .; 16 P. Steinmetz, GGP Antike 4/2 , chap. IV : Die Stoa, Basel 1994 , $ 39, p. 661 662. RICHARD GOULET.

182 MNÉSIBOULOS DE RHÉGIUM Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique, V. pyth . 36, 267 ; p. 145 , 19 Deubner.

BRUNO CENTRONE .

183 MNÉSIGÉNÈS

D III

Troisième des neuf exécuteurs testamentaires ( épimélètes) du testament de Straton de Lampsaque, mort vers 268 (Diogène Laërce V 62-63 ) . Il n'est pas dit expressément qu'il s'agit de disciples au sein de l'école péripatéticienne, mais la phrase qui suit stipule que la diatribè est léguée à Lycon ( ML 83 ] (huitième nom dans la liste) parce que les autres sont trop âgés ou trop occupés ( ãoxonoi). Absent de la RE. RICHARD GOULET.

184 MNÉSISTRATE DE THASOS RE

III

?

A. W. Capelle , art. « Mnesistratos » , RE XV 2 ( 1932) , col . 2281 , fait de ce personnage un disciple de Platon . En vérité, après avoir donné une liste des disciples de Platon et avoir ajouté que, selon certains, Théophraste aurait égale ment été son auditeur, de même que , selon Chaméléon ( 2 + C 93 ) cette fois, le rhéteur Hypéride (» H 176 ) et Lycurgue , Diogène Laërce III 47 poursuit: « Sabinus ( sophiste de l'époque d'Hadrien , RE 22a ) , dans le Ive livre de sa Mɛnetntix üan ( cf. Souda E 11 ; t . IV , p . 311 , 9-11 Adler) , dit ( que fut) égale ment (disciple de Platon) Démosthène et il cite en ce sens ( ntapatidépevoc) Mnésistrate de Thasos . Et cela est vraisemblable » . En tant que source de Sabinus sur les études de Démosthène , ce Mnésistrate pourrait bien être un rhéteur. B. Un Mnésistrate est mentionné en D.L. VII 177 : il aurait accusé le stoïcien Sphaerus d'avoir dit que Ptolémée ( Philopator) ( 222/ 1-204 ) n'était pas roi. Capelle refuse d'identifier les deux Mnésistrate parce qu'il fait du premier un disciple de Platon . En réalité, on ne peut rien dire pour ou contre l'identification. Athénée , Deipnosophistes VII , 279 d-e, rappelle que les épicuriens ne sont pas les seuls philosophes à avoir accueilli le plaisir ( comme bien suprême ). Il faut leur adjoindre « les cyrénaïques et < les Thasiens, qui sont appelés mné sistratéens. Car ceux -ci également aiment mener une vie de plaisir < *** > , ainsi que le dit Posidonius [ fr. 289 Edelstein- Kidd ] » . Bien que le passage ait besoin d'être reconstitué, il semble bien que les mnésistratéens soient membres d'une école fondée par un Mnésistrate. Le mot « Thasiens » ayant été restitué dans le texte par Capps, on ne peut pas être sûr qu'il s'agit de Mnésistrate de Thasos.

M 185

MÔCHOS DE SIDON

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Cf. F. Salviat, « Platon et Thasos . Un portrait thasien ; Mnésistratos et la philosophie » , Annales Faculté Lettres Aix -en - Provence 43 , 1967 , p. 57-64, surtout p . 63-64 , qui est favorable à l'identification de ces homonymes, tout en rappelant que d'autres thasiens portant le nom de Mnésistratos sont connus par des textes épigraphiques ou littéraires. Voir la prosopographie réunie par Chr. Dunant et J. Pouilloux , Recherches sur l'histoire et les cultes de Thasos, t . II : De 196 avant J.-C. jusqu'à la fin de l'Antiquité, coll . « Études thasiennes >> 5 , Paris 1958 , p 291 b, et J. Pouilloux, REA 61 , 1959 , p. 289 n . 6 . G. Röper, « Conjecturen zu Diogenes Laertius » , Philologus 3 , 1848 , p. 22-65 , notamment p. 58-61 , voudrait retrouver également MvnoiotpatoÇ Ó Odolog en D. L. II 60 , où se lit le nom de Πεισίστρατος ou de Περίστρατος ο Εφέσιος. La conjecture semble fragile a W. Kroll, art. « Peisistratos » 6, RE XIX 1 , 1937 , col . 191 . RICHARD GOULET.

185 MÔCHOS DE SIDON RE En Diogène Laërce I 1 , parmi les personnages mentionnés en rapport avec l'hypothèse, soutenue par certains, d'une origine barbare de la philosophie, est cité un certain Môchos phénicien . En réalité, selon la tradition manuscrite, Diogène Laërce (et déjà sa source , Hesychius [ ?] ; cf. la Souda, s. v. " Sexos, 12 283 , t . III , p. 631, 14-15 Adler) appelle cet ancien philosophe phénicien “ Ôchos ”, et c'est cette forme qui a été retenue par M. Marcovich dans sa récente édition teubnerienne de Diogène , mais les autres témoignages au sujet de ce personnage imposent comme une quasi-certitude que la forme correcte est “Môchos” . 1 Fabricius, Biblio theca graeca , Hamburg 17904, p. 119, avait déjà proposé de corriger ainsi le texte transmis, et sa correction a été adoptée par 2 H. Diels, Doxographi graeci, p. 250 , n. 1 ; 3 R. Goulet dans M.-O. Goulet-Cazé (dir. ) , Diogène Laërce. Vies et doctrines des philosophes illustres, Paris 1999 , p. 66 , avec la n. 1 . La documentation à notre disposition permet de supposer que Môchos devait représenter une figure de sagesse extrêmement importante et particulièrement respectable pour les intellectuels d'origine syrienne. Ce n'est pas un hasard si la plupart des témoignages le concernant proviennent d'auteurs d'origine syrienne, qui avaient un enracinement très profond dans la culture locale: Posidonius ( d'Apamée ), Jamblique ( de Chalcis ) , Damascius (de Damas). Posidonius ( fr. 285 Edelstein -Kidd = fr. 57 a Theiler = Strabon , XVI , 2 , 14, p . 757 ) voit en Môchos de Sidon , qui aurait vécu avant la guerre de Troie, un prédécesseur des doctrines atomistes de Démocrite ( DK 68 A 55 ) et d'Epicure. Voir aussi fr. 286 Edelstein - Kidd = fr. 57 b Theiler = Sextus Empiricus, Adv . math . IX ( = Adv. dogm . III ) , 363. Selon 4 H. Diels ( DK , vol . II , p . 98 , n . ad l . 25 ) , cette tradition serait née probablement dans le cercle de l'atomiste Diotimos de Tyr [ » D 208 ] ( mais cf. 5 Id ., « Aristotelica. 1. Ein neues und ein altes Wort. 2. Ein falsches Experiment » , Hermes 40, 1905, p . 301-316 , à la p . 315 n . 2 ) . Voir encore 6 E. G. Schmidt, « Atome bei Mochos , Nonnos und Demokrit » , Philologus 122, 1978 , p. 137-143 . Chez Jamblique , V. pyth. 3 , 14 , il est dit quolonóros et npopřing: le premier de ces termes fait de Môchos un philosophe s'étant occupé de la nature et des origines ( ntepi púoewc ) , ce qui nous rapproche du témoignage de Posidonius, tandis que le deuxième renvoie à sa capacité de communiquer avec

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MÔCHOS DE SIDON

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les dieux et de parler en leur nom, comme la première classe des prêtres égyptiens ( cf. la note complémentaire 99 de l'édition Patillon-Segonds du De abstinentia de Porphyre, reportée à la p. 59 (CUF, Paris 1995 ] ) . Selon la même notice , à Sidon Pythagore aurait rencontré les descendants de Môchos. 7 1. Lévy, La légende de Pythagore, de Grèce en Palestine, Paris 1927 , p . 22 et n . 5 , pensait que la notice de Jamblique représenterait une transposition à Pythagore de la légende rapportée par Posidonius , avec une substitution de la physiologie pythagoricienne à la doctrine des atomes et on doit rappeler dans ce contexte que ( la source de ) Jamblique , V. pyth . 23 , 104 , p . 60, 6-7 Deubner range l'atomiste Leucippe ( L 51 ) parmi les pythagoriciens anciens. Ce qui est sûr, c'est que le Syrien Jamblique voulait avant tout établir pour Pythagore une filiation intellectuelle concrète avec la sagesse locale ; voir 8 C. Macris , Le Pythagore des néoplatoniciens : recherches et commentaires sur "Le mode de vie pythagoricien ” de Jamblique, Thèse de Doctorat, École Pratique des Hautes Études – Section des Sciences religieuses ( dir. Ph . Hoffmann ), Paris 2004 , t. II , p. 74-82 et 147-157 , spéc. 148-149. Damascius , De princ. fol. 125 , t. III , p . 166, 8-22 Westerink - Combès ( avec les notes , p . 237-239 ) (= I 323 Ruelle ) , expose une cosmogonie phénicienne empruntée à Môchos ; selon cette cosmogonie , à partir de deux principes, l'Éther et l'Air, aurait été engendré Oulômos, dieu qui constituerait le sommet de l'intel ligible , puis de celui -ci serait né Chousôros; par la suite serait venu l'euf cosmi que , dont la rupture provoquerait la génération du ciel et de la terre . Voir à ce sujet 9 H. Schwabl , art. « Weltschöpfung » , RESuppl. IX , 1962, $ 40 , notamment col . 1497 . Tatien, Ad Graecos 58 , rapporte que Laitos ( Laetus ) , auteur de Phoinikika ( FGrHist 784 T 1 ) , fit connaître en Grèce les livres de trois hommes : Théodote , Hypsicratès et Môchos , et qu'il s'occupa des vies des philosophes qu'il traita avec précision. Flavius Josèphe, Ant. jud. I 107 , attribue lui aussi des Phoinikika à Môchos. Dans les FGrHist de F. Jacoby ( 784 F 2-6), les fragments concernant Môchos sont rassem blés sous le nom de Laetus ( Aaitos), car c'est lui (apparemment un auteur de l'époque romaine ) qui avait reproduit en grec l'ouvrage supposé du prophète phénicien . S'agirait- il d'un faux ? (Selon 10 Zeller -Nestle, p. ex . ( vol. I , 2, p. 1047 , n . ) , l'ouvrage attribué à Môchos serait une fabrication d'époque hellénistique ). La situation fait penser à l'ouvrage de Philon de Byblos qui se présente, de manière analogue, comme une traduction de “ Sanchouniathon ", et qui , après avoir soulevé pendant très longtemps des soupçons d'inauthenticité parmi les savants , s'est avéré finalement très proche de la mythologie phénicienne telle que l'ont révélée les tablettes de Ras Shamra . 11 R. Goulet, « Les références chez Diogène Laërce : Sources ou autorités ? » ( 1997), repris dans ses Études sur les vies de philosophes dans l'Antiquité tardive, Paris 2001, p. 96, a proposé de voir dans l'allusion de Tatien à un ouvrage inconnu de Laitos sur les vies de philosophes une glose du IIIe siècle ayant confondu l'auteur d'ouvrages sur la Phénicie avec Diogène Laërce (Laërtios). L'indication figure chez Eusèbe, P. E. X 11 , 10-12 , mais non chez Clément, Strom . I 21 , 114 , 2 qui ne parle que des Phoinikika . 12 J. Dillon ( The Middle Platonists : a study of Platonism 80 B.C. to A. D.220, London / Ithaca 19962 [ 1977] , p. 143) avait proposé de voir en “ Môchos ” une version du nom de Moïse ( « Mochos takes on something of a life of his own in Hellenized tradition , but he does sound suspiciously like a garbled form of Moses himself »), mais cela contredit Josèphe, Ant. Jud., I 107 , où Môchos est considéré comme une autorité distincte de Moïse .

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Sur Môchos, voir aussi Athénée, III , 126 a ; Ampelius II 7 (Môchos inventeur de la balance ). Cf. 13 R. Laqueur, art. « Mochos » , RE XV 2 , 1932 , col . 2314 ; 14 G. Staab, Pythagoras in der Spätantike : Studien zu “ De vita Pythagorica ” des lamblichos von Chalkis, coll. « Beiträge zur Altertumskunde » 165 , Stuttgart 2002, n. 630, aux p. 249-250. BRUNO CENTRONE et CONSTANTINOS MACRIS . 186 MODÉRATUS DE GADÈS RE 5

I

Philosophe néopythagoricien . Études d'orientation . 1 W. Capelle , art. « Moderatus » 5 , RE XV 2 , 1932 , col . 2318-2320 ; 2 J. Dillon , The Middle Platonists. A Study of Platonism , 80 BC to AD 220, London 1977 ( 2e éd . 1996 ) , p . 344-351 ; 3 H.D. Saffrey et L.G. Westerink ( édit. ), Proclus, Théologie Platonicienne, CUF , Paris 1974 , t . II , p. XXVI- XXXV ; 4 E. Á . Ramos Jurado, « Moderato de Gades : estado de la cuestión : cronología y forma de vida » , Habis 34 , 2003, p. 149-160 . Bibliographie. 5 L. Deitz , « Bibliographie du platonisme impérial antérieur à Plotin : 1926-1986 » ,dans ANRW II 36 , 1 , 1987 , p. 173 . Cf. 6 L. Charlo Brea, « Escritores gaditanos de la antigüedad clásica » , dans J. M. Maestre Maestre , L. Charlo Brea et A. Serrano Cueto (édit. ) , Estudios sobre Columela , Cádiz 1997 , p. 93-99 ; 7 C. Riedweg , Pythagoras. Leben Lehre - Nachwirkung. Eine Einführung, München 2002, p . 40-41. Témoignages. 8 C. J. de Vogel , Greek Philosophy. A Collection of Texts with notes and Explanations. Vol . III : The Hellenistic -Roman Period , Leiden 19642, p. 348-351 , nºs 1285-1286. Voir également les témoignages d'Eusèbe, Hist. eccl. VI 19 , 8 ( = Suidae Lexicon , s.v. 'Spuyévns, 12 182 , t . III , p . 617 , 3-8 Adler ; Porphyre, Vita Plotini 20, 74-76 ; 21 , 6-9 ; Photius, Bibl. 167 , 114 b ; Proclus, in Tim . II , p. 19 , 3-7 Diehl ( sur les médiétés ) ; Syrianus, in Metaph. p . 151 , 20-22 Kroll ( différence entre l'un et la monade) ; Jérôme, Adv. Ruf. III 39, 30-32 (Jamblique , imitateur de Modératus dans son commentaire sur le carmen aureum ) Vie et chronologie. Presque rien n'en est connu . Chez Plutarque, Quaest . conv . VIII 1 , 727 b- c , un certain Lucius ( 1 71 ) , d'origine étrusque, présenté comme disciple de Modératus, participe au banquet organisé par Sylla à Rome à l'occasion du retour de Plutarque ( Dillon 2 , p . 345 n . 1 , envisage la possibilité qu'il s'agisse du Lucius dont s'inspira le platonicien Nicostratos ( PN 55 ] dans sa critique des catégories d’Aristote ) . Comme la date hypothétique de cette rencontre se situe vers l'année 90 de notre ère , on peut situer, de façon conjectu rale, l'activité de Modératus au 1er siècle ap . J.-C. Euvres . En V. Pyth. 48 Porphyre mentionne un ouvrage de Modératus en dix livres où l'auteur rassemblait les apéoxovta des pythagoriciens. À la leçon majoritaire év Évdexa B162 orç qu'ont éditée les deux derniers éditeurs de la V. Pyth .de Porphyre, A. Nauck et Éd. Des Places, il faut sans doute préférer la leçon Év Céxa B162 ouç du ms W ( Vindobonensis philos. - philol. graecus 225 ), à laquelle avait donné aussi sa préférence 9 Fr. Bücheler, « Coniectanea » , RhM 37 , 1882 , p. 335 , étant donné la prédilection des pythagoriciens pour la décade ; voir 10 D. J. O'Meara, Pythagoras revived :

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mathematics and philosophy in Late Antiquity , Oxford 1989 ; réimpr. 1997, p. 23 n . 52 ; 11 C. Macris ( édit.), lloppúpoç. Moarópov ß os, coll. « 'Yotepn apxatómta » 6 , Athènes 2001, n. 167 , aux p. 341-342 ; 12 G. Staab , Pythagoras in der Spätantike. Studien zu “De Vita Pythagorica " des lamblichos von Chalkis, coll . « Beiträge zur Altertumskunde » 165 , München /Leipzig 2002, p. 78 n . 173 . Sur l'appartenance de l'ouvrage décalogique de Modératus au genre littéraire des “De placitis”, voir Macris 11 , n . 168 , p. 342 . A en juger d'après le contenu de la npayuate a sur les nombres citée ou paraphrasée par Porphyre aux $ 8 48-52 ( ou 53 ; cf. infra ) de sa V. Pyth . , il devrait s'agir essentiellement de placita mathematica, comme c'était le cas avec les Evvaywya des doctrines pythagoriciennes composées par Nicomaque de Gérasa (> N 50 ) et Jamblique ( I 13 ) . Étienne de Byzance, Ethnica , p. 193 , 11-13 Meineke , mentionne des luda yopixai oxona en cinq livres: on ne peut savoir s'il s'agit d'une subdivision de l'ouvrage précédent ou d'une cuvre différente . Simplicius , in Phys ., p . 230 , 34 sqq . Diels , en exposant les doctrines de Modératus , cite ensuite comme source le second livre du Iepi ünns de Porphyre . Stobée , Anthol . I 8-9 , p . 21 , 6-25 Wachsmuth , cite deux extraits d'euvres de Modératus sur le nombre, la monade, l'unité ( fr. 1-2 Mullach , FPhGr t . II , p. 48 ) . Jamblique dans son De anima ( conservé par Stobée, Anthol. I 49 , 32 , p . 364, 8 Wachsmuth) fait référence à une doctrine de Modératus sur l'âme, sans préciser l'ouvrage qui la contenait. École. Modératus est présenté formellement comme un pythagoricien chez Stobée, Anthol . I 8 , p . 21 , 6 Wachsmuth ; Jamblique , De anima ( chez Stobée, Anthol. I 49 , 32 , p . 364, 10-11 Wachsmuth ). Chez Syrianus ( CAG VI 1 , p . 151 , 20-21 Kroll), il est cité avec Nicomaque ( » * N 50) parmi les pythagoriciens plus récents . Chez Porphyre, Vita Plotini 20 , 74-76 et 21 , 6-9 , il figure dans un C 223 ) et Thrasylle. Une groupe comprenant Numénius ( » N 66 ) , Cronius ( adhésion de Modératus au bios pythagoricien a été déduite du passage cité de Plutarque ( cf. Dillon 2 , p . 344-345 ; pour une opinion différente , voir 13 B. Centrone, « Cosa significa essere pitagorico in età imperiale » , dans A. Brancacci [édit . ) , La filosofia in età imperiale. Le scuole e le tradizioni filosofiche, coll . « Elenchos >> 31 , Napoli 2000 , p. 137-168 , notamment p . 157 160 ). Cf. aussi Ramos Jurado 4. Pour définir la position philosophique de Modératus il faut prendre en compte l'important témoignage de Porphyre, V. Pyth . 48-53 : selon Modératus , comme les pythagoriciens ne pouvaient exprimer , communiquer facilement par le discours les idées incorporelles et les principes premiers, ils recoururent, à des fins pédagogiques, à leur représentation au moyen des nombres, de la même façon que les géomètres se servent de figures visibles , mais raisonnent à partir des figures en elles- mêmes. Ils définissaient comme " un" le principe de l'iden tité , de l'égalité, la cause de la conspiration et de la sympahtie universelle, de ce qui reste identique à lui -même ; “ dualité ” était le principe de la diversité et de l'inégalité, de ce qui est divisible et en perpétuel changement; un semblable discours pourrait être développé pour tous les nombres. Pour un commentaire

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détaillé de ce passage ( sous forme d'annotation continue ) , voir Macris 12 , n . 169-177 , aux p . 342-354. Assez discutée est l'attribution à Modératus de la thèse contenue au $ 53 , où il est dit que, selon certains pythagoriciens, Platon et Aristote, Speusippe, Aristoxène et Xénocrate s'appro prièrent les doctrines les plus fécondes des anciens pythagoriciens, en les remaniant légère ment, et qu'ils définirent au contraire comme bien propre de l'école les doctrines les plus superficielles et les plus ridicules. Le passage en question vient immédiatement après une longue citation de Modératus, mais en réalité il est difficile de déterminer la source dont il est tiré. Dillon et Isnardi Parente attribuent le passage en question à Modératus (voir Dillon 2, p. 346 ; 14 Id. , « “ Orthodoxy" and " eclecticism ”. Middle Platonists and Neo -Pythagoreans » , dans J. Dillon et A. A. Long (édit. ] , The question of " eclecticism ” . Studies in later Greek philosophy, Berkeley/Los Angeles/London 1988 , p. 103-125 , repris dans The Great tradition : further studies in the development of Platonism and early Christianity , Aldershot 1997, ch. VI, à la p. 120 ; 15 M. Isnardi Parente [édit. ) , Speusippo. Frammenti, coll . « La scuola di Platone » 1 , Napoli 1980, p. 237-238 ), tandis que Burkert, O'Meara et Centrone pensent que la citation de Modératus se termine juste avant ce passage ( voir 16 W. Burkert, Lore and science, p. 95 , avec la n . 52 ; O'Meara 10, p. 11 et n . 8 ; Centrone 13 , p. 153-154, avec la n . 32) - et en effet, le développement de l'auteur sur la théorie pythagoricienne des nombres semble constituer une unité de texte autonome, qui commence et se termine par les phrases : ń δε περί των αριθμών πραγματε α ( V. Ρyth. 48, p. 58, 21 sq . ) et ή μεν δή περί των αριθμών rpayuate a tolaútn toiç Nuoayope ouç ( V. Pyth. 53 , p. 61 , 12-13 ) . Cette dernière phrase semble être la conclusion de la section . Dans ce cas, deux autres candidats possibles pour l'attribution du § 53 seraient Nicomaque et Porphyre ; mais le premier semble devoir être écarté en raison de l'incompatibilité qui existe entre la sensibilité qu'il semble avoir montrée à l'égard du dorien (voir 17 A. C. Cassio, « Nicomachus of Gerasa and the dialect of Archytas, fr. 1 » , CQ 38 , 1988, p. 135-139) et le propos négatif que l'on rencontre ici à propos de ce dialecte. 18 C. Macris ( Le Pythagore des néoplatoniciens : recherches et commentaires sur " Le mode de vie pythagoricien ” de Jamblique, Thèse de Doctorat, École Pratique des Hautes Études Section des Sciences religieuses (dir. Ph. Hoffmann ), Paris 2004, t. II, p. 47-48 , avec la n . 99 ) serait enclin à attribuer les propos du § 53 à Porphyre lui-même ; Staab 8, p. 214, n. 525 serait du même avis. Sur le contenu et les enjeux du § 53 , voir Burkert 16, p. 95-96 et 175 ; Centrone 13, p. 153 156 ; Macris 11 , n . 178-183 , aux p. 354-360 ; 19 C. Macris , « Jamblique et la littérature pseudo - pythagoricienne » , dans S. C. Mimouni (édit. ) , Apocryphité : histoire d'un concept transversal aux religions du Livre. En hommage à Pierre Geoltrain , Turnhout 2002, p. 77 129, aux p. 111-112. Pour une analyse comparée du passage porphyrien et du § 2 du traité de Jamblique Sur le mode de vie pythagoricien, voir Staab 12, p. 213-216. Récemment Staab 12, p. 77-81 , a proposé à nouveau l'hypothèse selon laquelle le témoi gnage sur Modératus commencerait dès le paragraphe 46. Simplicius, in Phys. 230, 34 sqq. Diels , rapporte un développement de Modé ratus sur les doctrines des pythagoriciens, dans lequel est distingué un premier un , au -delà de l'être , un second un , l'être réel ou les idées , et un troisième un , l'un psychique , dont procède la nature sensible. On a attribué à Modératus sur cette base une interprétation métaphysique de la seconde partie du Parménide de Platon . Voir 20 E.R. Dodds , « The Parmenides of Plato and the Origin of the Neoplatonic “ One ” » , CQ 22 , 1928 , p . 129-142 , et 21 H. Tarrant, Thrasyllan Platonism , Ithaca /London 1993, p. 150-178 : Modératus interprétait les hypo thèses du Parménide dans le sens d'une progression métaphysique semblable à celle qui est habituellement associée au nom d'Amélius ( A 136) . Saffrey Westerink 3, p . XXXIII- XXXV , soulignent plutôt l'influence de la seconde lettre pseudoplatonicienne.

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M 186

Cf. 22 F.P. Hager , Gott und das Böse im antiken Platonismus, coll . « Elementa » 43 , Würzburg 1987 , p . 125-130 ; 23 J. Halfwassen , « Speusipp und die metaphysische Deutung von Platons “ Parmenides” » , dans L. Hagemann et R. Glei ( édit. ), " Ev xai niños. Einheit und Vielheit. Festschr. für K. Bormann zum 65. Geburtstag, coll . « 1993 , p. 339-373 ; 24 M. philosophische Lehre des nische Physik ( im antiken

Religionswissenschaftliche Studien » 30 , Würzburg Baltes , Der Platonismus in der Antike, t. IV : Die Platonismus. Einige grundlegende AxiomelPlato Verständnis ), I Bausteine 101-124 , Stuttgart 1996 ,

p. 176-179 ( texte et traduction du passage de Simplicius) ; p . 477-485 commen taire ; 25 C. Tornau , « Die Prinzipienlehre des Moderatos von Gades : zu Simplikios in Ph . 230, 34 - 231 , 24 » , RHM 143 , 2000 , p. 197-220 ( critique de l'interprétation de Baltes). BRUNO CENTRONE et CONSTANTINOS MACRIS.

187 MOIRAGÉNÈS RE 1

II

« Non chrétien , mais philosophe» , d'après Origène, C. Cels. VI 41. Auteur d'une biographie perdue d'Apollonius de Tyane ( ** A 284) . Il a parfois été identifié avec l'Athénien qui , chez Plutarque, Quest. Conv . IV 6 , affirme l'identité du Dieu des Juifs et de Dionysos. Datation et localisation . Elles ne reposent que sur des hypothèses. Conclu sion prudente tirée par 1 W. Speyer, « Zum Bild des Apollonios von Tyana bei Heiden und Christen » , JOAC 17 , 1974 , p . 49 : « Er schrieb jedenfalls vor Philostrat und stammte vielleicht aus Kleinasien » . Euvre. Une seule cuvre est attestée , à caractère biographique, dont Origène, C. Cels. VI 41 , nous a transmis le titre : Tà ' Anorwvíov toŨ Tvavéwç Máyou xal pooópov ánouvnuovevuara. Ouvrage en quatre livres ( V. Apoll. I 3 ) . Sur son contenu , nous ne possédons que deux minces informations : l’une , four nie par Origène , ibid. , indique que Moiragénès rappelait comment des philo sophes, entre autres le stoïcien Euphratès ( ~ + E 132) et un épicurien, avaient été abusés par la mageia d'Apollonius ; l'autre, fournie par Philostrate , V. Apoll. III 41 , indique que Moiragénès mentionnait un llepi uavrelaç đotépwv écrit par Apollonius en quatre livres. Philostrate , V. Apoll. I 3 , reproche à Moiragénès d'etre incomplet (πολλά δε τών περί τον άνδρα αγνοήσαντι). Sans doute jalousie d'auteur : « The main reason for Philostratus ' hostile attitude is clearly the usual ground for ancient polemic : Moiragenes' was the standard work when Philostratus wrote » ( 2 E. L. Bowie , « Apollonius of Tyana : Tradition and Reality » , ANRW II 16 , 2 , 1978 , p . 1673 ) . La tendance de l'écrit est discutée . Pour certains philologues , et en dernier lieu Speyer 1 , p . 50, Moiragénès aurait représenté Apollonius comme un rońs , pour d'autres, au contraire, il l'aurait représenté à la fois comme un mage et comme un philosophe ( cf. dans le titre les mots uáyou xai pilooooov ). Cette thèse est défendue par Bowie 2 , p . 1673 1675. Les témoignages ont été récemment rassemblés par 3 J. Radicke , Die Fragmente der griechischen Historiker continued, t . IV A : Biography, fasc. 7 : Imperial and undated authors, Leiden 1999 , nº 1067 , p. 172-179.

M 190

MONIME DE SYRACUSE

549

Études d'orientation . 4 J. Miller, art. « Moiragenes » , RE XV 2 , 1932 , col . 2497. L'étude la plus complète est désormais celle de Bowie 2, p. 1673 1680. Bibliographie. 5 F. Grosso , « Fonti e cronologia della Vita di Apollonio di Tiana » , Acme 7 , 1954, p . 333 n . 6 . PATRICK ROBIANO.

VI ?

188 MOIRIS RE 4

Selon Diogène Laërce VIII 11 , qui cite le second livre d’Anticlide (RE 2 ) Sur Alexandre, ce mathématicien aurait été le premier à avoir découvert les “ éléments ” de la géométrie, tandis que Pythagore aurait porté cette discipline à ses limites. RICHARD GOULET. MOLÔN -+ APOLLONIOS D'ALABANDA , DIT MOLÔN (A 267] 189 MONIME

IV

Monimos , philosophe apparemment inconnu par ailleurs, a laissé sa signature aux Tombeaux des rois de Thèbes (J. Baillet, Tombeaux, nº 631 ). Cette inscription est également mentionnée par A. Calderini, « Arti liberali in documenti dell'Egitto romano » , dans Studi in onore di Ugo Enrico Paoli, Firenze 1956, p. 155 . BERNADETTE PUECH . 190 MONIME DE SYRACUSE RE 10

Iva

Disciple de Diogène le Cynique. Sources. Les témoignages sont rassemblés dans 1 G. Giannantoni, SSR VG 1-5 , t . II , p . 519-521 . On ajoutera un passage d'un papyrus qui vient de Panopolis: PDuke inv . G 178 , col . II 15 , et qui a été édité par W.H. Willis , Two Literary Papyri in an Archiv from Panopolis, ICS 3 , 1978 , p . 145-151 (= Monimus , n° 71 dans CPF I 1 ** , p. 479 ; le texte , qui donne une liste de scholarques classés par écoles, constitue le fragment n° 1 dans CPFI 1 * , p. 82 ) . Cette liste est intéressante. Monime est rangé parmi les cyniques et présenté comme sortant de l'esclavage, ce qui correspond à ce que dit Diogène Laërce. 13 Κυνικοί Διογένης ο Σ [ i] νωπ [εύ] ς 15 Μόνιμος από δουλίας Κράτης Βοιώτιος Un autre renseignement important est fourni un peu plus loin , à la ligne 23 : Etwi]xoi uętà [T] āv Kuyix(@v ) , ce qui signifie que l'auteur de ces lignes adopte probablement la même position que Diogène Laërce sur la succession du cynisme au stoïcisme. Diogène Laërce VI 82-83 ( = SSR VG 1 ) consacre à Monime une biographie ; les autres témoignages se trouvent chez Sextus Empiricus, Marc Aurèle et Stobée.

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Les lettres pseudépigraphes 37 et 39 de Diogène ont pour destinataire Monime ( SSR V B 567 et 569) . Études. 2 K. von Fritz , art. « Monimos » 10 , RE XVI 1 , 1933 , col. 126-127 ; 3 D.R. Dudley , A History of Cynicism , p. 40-42 ; 4 K. Döring, GGP Antike 2/1 , Basel 1998 , p. 302-304 . Biographie . Monime est originaire de Syracuse (Diogène Laërce VI 82 ) . Alors qu'il était l'esclave d'un banquier de Corinthe, selon ce que dit Sosicrate ( = fr. 14 Giannattasio Andria ), Monime entendit vanter la vertu de Diogène le Cynique ( D 147 ) par Xéniade, un riche Corinthien qui avait acheté le philo sophe comme esclave et qui l'employait comme précepteur de ses enfants. Voulant quitter son maître afin de pouvoir suivre Diogène pour qui il s'était pris de passion, Monime , simulant la folie, se mit à jeter tout l'argent qui se trouvait sur le comptoir du banquier, jusqu'à ce qu'il fût renvoyé, ce qui lui permit de devenir le disciple du cynique . Il fréquenta aussi Cratès de Thèbes ( C 205 ) pendant longtemps et adopta le même genre de vie que lui ( D.L. VI 82 ) . Il semble que Monime connut la célébrité, au point que Ménandre ( ** M 101 ) l'évoqua dans une de ses pièces , L'écuyer ( D.L. VI 83 = fr. 215 Körte = fr. 193 Kassel-Austin ): Il y avait, Philon, un sage du nom de Monime, mais qui était un peu moins célèbre . A. Celui qui portait la besace ? B. Tu veux dire trois besaces. Pourtant, il n'a prononcé, par Zeus, aucune parole du genre du « Connais- toi toi-même », ou de ces autres mots souvent cités. Il allait bien au-delà, notre mendiant malpropre ; il disait en effet que tout ce que l'homme a conçu est vaine fumée (tū oc).

Le mot que Ménandre lui attribue au dernier vers rejoint la critique traditionnelle du TÕ og dans le cynisme ancien ( cf. 5 M.-O. Goulet-Cazé, L'ascèse cynique, Paris 1986 ; 2e éd ., Paris 2001, p. 17 n. 2 ; p. 34 et 158) . A juste titre Döring 4, p . 303, remarque que si Ménandre dans ce fragment parle de Monime au passé (Móviuós tis nu äv pwnOC ...), c'est le signe que Monime n'était plus à Athènes au moment où Ménandre écrivait sa comédie , ou bien qu'il était déjà mort. Selon von Fritz 1 , col . 126-127 , « le récit de la vie de Monime est étroitement lié aux histoires romanesques de la Aloyévouç npãoug [ la Vente de Diogène) et à la vie de Diogène , esclave de Xéniade à Corinthe » . La personnalité de Monime est brièvement esquissée par Diogène Laërce selon qui il était d'une gravité extrême ( éußpidéotatoc ), au point de mépriser l'opinion et de s'élancer vers la vérité (napopuãv] ( D.L. VI 83 ) . Dudley 3 , p. 41 , suggère, à cause du verbe rapopuãv, que pour Monime la vérité venait peut-être des impulsions (cf. le titre depi opuõv d'un de ses ouvrages ), ce qui s'accorderait bien avec la conception diogénienne de la vie selon la nature . Écrits . Monime écrivit des παίγνια σπουδή λεληθυία μεμιγμένα , « des poésies légères auxquelles se mêlait subrepticement le sérieux » , ( D.L. VI 83 ) ; c'est pourquoi on le considère comme l'inventeur du spoud (ai)ogeloion, ce mélange de rire et de sérieux qui caractérise l'écriture cynique ( sur cette notion

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employée par Strabon XVI 2 , 29 ( MéviaTOS ó orovdoyéolog ), voir 6 P. P. Fuentes González , Les diatribes de Télès. Introduction , texte revu , traduction et commentaire des l'Antiquité classique » 23 , Paris l'expression ralyvia désignant utilisée par Diogène Laërce en « Besace » .

fragments, coll . « Histoire des doctrines de 1998 , p . 77-78 ) . Döring 4 , p. 303 , rapproche les écrits de Monime de la même expression VI 85 à propos du poème de Cratès intitulé

Diogène Laërce lui prête également deux livres: l'un Sur les impulsions ( ſlepi opuwv) et l'autre intitulé Protreptique. Grâce à Stobée deux apophtegmes de Monime nous sont parvenus : « il vaut mieux être aveugle que sans éducation , parce que dans un cas on tombe dans le trou, dans l'autre on tombe dans le gouffre » ( Anthologium II 31 , 88 , t . II , p . 216, 14-16 Wachsmuth = SSR V G5) et « la richesse est un vomissement de la Fortune » ( ibid ., IV 31 , 89 , t . V, p. 766, 14-15 Hense = SSR V G 4) . Monime et Xéniade. Sextus Empiricus ( Adv. Math . VII 48 ) cite le nom de Monime parmi ceux qui ont rejeté le critère de la vérité, aux côtés de Xénophane de Colophon, Xéniade de Corinthe, Anacharsis le Scythe ( »A 155 ) , Protagoras, Dionysodore ( D 192 ) , Gorgias de Léontion ( MG 28 ) , Métrodore de Chios ( - * M 149) et Anaxarque l’Eudémoniste (> -A 160 ). En VII 87-88 ( = SSR V G 2) , il explique pourquoi on considère qu'Anaxarque et Monime ont aboli le critère de vérité : « parce qu'ils ont comparé les étants à un décor de théâtre (oxnvo Ypačią ảneixaoav tà óvta) et supposé qu'ils ressemblaient aux images qui nous envahissent dans le sommeil ou la folie » . Enfin en VIII 5 (= SSR V G 2) , Sextus cite à la suite l'un de l'autre le point de vue de Xéniade de Corinthe : « rien n'est vrai » , et celui de Monime le Chien : « Tout est fumée vaine » , qui revient, dit- il , à penser ce qui n'existe pas comme si cela existait (ontep oinous Èoti tōv oủx otwv ác Övrov ) . Les vers de L'écuyer de Ménandre cités supra et un passage de Marc Aurèle II 15 ( = SSR V G 3 ) : " Oti tãv únóanys , « Que tout est supposition » (cf. Ménandre , fr. 215 Körte = fr. 193 Kassel - Austin ) , parole adressée , selon les manuscrits , após tov Kuvixòv Móviuov, « au cyni que Monime » , mais que Ménage , peut-être avec raison, a voulu corriger en npòç toŨ KUVIXOŨ Moviuov, « prononcée par le cynique Monime » , vont égale ment dans le sens de l'attribution d'une pensée sceptique à Monime. Döring 4, p . 303-304 , relativise toutefois ce trait qui distinguerait Monime des autres cyniques et que Sextus a pu emprunter à la comédie de Ménandre : « Nichts spricht dafür, dass Monimos sich im Unterschied zu den anderen Kynikern mit ontologischen und erkenntnistheoretischen Fragen beschäftigt hat . Sein Anliegen war vielmehr gewiss das aller Kyniker, die gängigen Vorstellungen über Wert und Unwert als Irrtum zu entlarven und die Natur zum Maßstab alles Handelns zu machen » . Le Xéniade de Corinthe mentionné à plusieurs reprises chez Sextus est- il le Xéniade , maître de Diogène ? Autrement dit le philosophe de la première moitié du ve s . av . J.-C. , qui soutenait que toute représentation (pavtaoia ) et toute opinion ( 865a) sont dans l'erreur ( Levoegal) [ Adv. Math . VII 53 ] et qu'il n'existe pas de critère de la vérité (Hypot. Pyrrh. II 18 ) , est - il le maître de

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Diogène le Chien (dont il est question en D.L. VI 30.31.36.74.82 ) ? Pour une identification des deux Xéniade , voir 7 A. N. Zoumpos, « Zwei Nachrichten über Xeniades von Korinth » , ZAnt 10 , 1960, p . 16 : il identifie le Xéniade de Sextus et celui de Diogène Laërce qui a acheté Diogène le Chien , sous prétexte que le nom est rare (ce sont les deux seuls connus [ le LGPN , t. III A en signale tout de même deux autres à Corinthe dans des inscriptions]), que tous les deux sont de Corinthe, qu'ils appartiennent à peu près à la même époque (ce qui n'est pas tout à fait vrai ) et qu'ils font tous deux montre de scepticisme, parce que , dit- il , les cyniques méprisent toute connaissance et sont les adversaires de la dialectique et de la métaphysique. 8 J. Brunschwig, « Démocrite et Xéniade » , Proceedings of the 1st. International Congress on Democritus (Xanthi 6-9 October 1983 ) , Xanthi 1984 , t . II , p. 109-124 , notamment p. 110 n . 4 , propose une hypothèse intéressante : « S'il s'agit d'un seul et même personnage, Démocrite (>> D 70 ) n'a pu entendre parler de lui que dans la dernière partie de sa longue vie ; en effet, le Xéniade dont parle Diogène Laërce avait confié à Diogène le Cynique l'éducation de ses enfants ; il devait donc être à peu près son contemporain , ce qui placerait sa date de naissance aux environs de 410 , alors que Démocrite est né vers 460. Cependant on sait que l'homonymie entre grand -père et petit -fils était un phénomène assez fréquent; on ne peut donc entièrement écarter l'hypo thèse selon laquelle le Xéniade dont parle Sextus serait le grand -père de celui dont parle Diogène Laërce . Dans ce cas le premier serait un contemporain de Démocrite » Iconographie. Sur une des deux coupes d'argent conservées au Louvre copies d'époque claudienne d'après des originaux d'environ 250 av . J.-C. - et provenant du trésor de Boscoreale est représenté le squelette de Monime portant une besace avec l'inscription MONIMOE AOHNAIO (cf. 9 K. Schefold, Die Bildnisse der antiken Dichter, Redner und Denker, p. 166-167 ( n° 4) ; 2e éd. , 1997 , p. 300-303, Abbildung 180. Voir aussi 10 G.M. A. Richter, The Portraits of the Greeks, t . II , fig. 1704. Dans sa deuxième édition , p . 252-253, Abbildung 139 , K. Schefold pense que la statuette d'un cynique en bronze de 230 av . J.-C. environ, qui est conservée au Metropolitan Museum de New York , pourrait représenter Monime . Par ailleurs , 11 D. Pandermalis , « Zur Programm der Statuenausstattung in der Villa dei Papiri » , MDAI( A ), 86 , 1971 , p . 173-209, notamment p . 178 , avait proposé d'identifier avec un philosophe cynique le personnage représenté sur une des deux faces d'un double Hermes ( = B 13 , Tav . XLII ) de la Villa des Papiri actuellement au Musée National de Naples et dont l'archétype remonte à la première moitié du IVe s . Il proposait Ménédème le Cynique ( M 119 ) ou Monime . 12 Maria Rita Wojcik , La Villa dei Papiri ad Ercolano . Contributo alla ricostruzione dell'ideologia della " nobilitas " tardo repubblicana, coll . « Ministero per i beni culturali ed ambientali. Soprintendenza archeologica di Pompei - Monografie » 1 , Roma 1986 , p. 67-68 , a repris son hypothèse, mais en suggérant qu'il pourrait s'agir de Ménippe de Gadara ( M 129) . MARIE-ODILE GOULET -CAZÉ.

M 192

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I -II

191 MOSCHION

Médecin , contemporain de Plutarque, qui le met en scène dans les Quaest. Conv. III 10 et dans le De tuenda sanitate . Il se rattache à la tradition des médecins philosophes qui jugent leur art indissociable de la philosophie . BERNADETTE PUECH . 192 MOSCHION RE 8 Sous le titre de Μοσχ ωνος υποθήκαι et de Μοσχ ωνος γνώμαι on fait référence à deux recueils différents de sentences en prose – l’un transmis par un bon nombre de manuscrits, l'autre par un seul - attribués à un personnage qui est inconnu par ailleurs . La dernière édition reste celle de H. Schenkl ( édit . ) , Epicteti Dissertationes ab Arriani digestae, Lipsiae 1916, réimpr. Stutgardiae 1965, p. 493-496 . Du point de vue du contenu , ces recueils montrent des coïncidences et se superposent avec d'autres brèves séries de gnomai rapportées par Stobée sous le nom d'Épictète : l'importance de ces coïncidences a conduit les spécialistes , depuis A. Elter, « Gnomica II . Epicteti et Moschionis quae feruntur sententiae » , Ind . Schol. Bonn . Aest. 1892, Lipsiae 1892 (voir également K. von Fritz, art. « Moschion » 8 , RE XVI 1 , col . 348-349 ) , à reconstituer un florilège original, dont les témoignages en notre possession seraient les traces et les fragments conservés. Sur la base de son hypothèse , Elter a fourni un texte de dimension considérable, mais pourvu d'une structure plutôt fragile, dans laquelle les diffé rentes eklogai se succèdent par association verbale ou structurale , sans correspondre à un développement cohérent du contenu . En elle - même une telle circonstance ne justifierait pas une remise en cause de la reconstruction d'Elter – tant sont nombreux les types de textes que l'on peut faire entrer sous la catégorie de florilège et tant sont nombreux les critères ayant déterminé le rassemblement de ce matériel -, mais une attitude de prudent scepticisme est toujours conseillée dans le cas de telles reconstructions « évolutionnistes » , étant donné les nom breux cas où des hypothèses analogues ont été démenties par les faits. Par consé quent, si nous sommes en possession de divers recueils qui rapportent, sous le même nom ou sous des noms différents, des textes qui sont en partie identiques et en partie différents, il n'est pas pour autant permis de penser que ce fait résulte d'un processus de développement cohérent de la tradition , étant donnée la liberté avec laquelle les compilations gnomologiques ont été composées et recomposées de fois en fois en fonction des exigences des divers compilateurs. Il est donc peut- être préférable de se borner à recueillir les éléments du devenir et la diffusion , sous des formes variées, d'une série de propos senten tiaires très hétérogènes attribués à un nom auquel nous ne parvenons pas à donner une figure et dont la fortune a croisé celle d'Épictète. A bien y réfléchir, on constate que le destin de l'Épictète véritable est lui aussi marqué par une semblable multiplicité de transcriptions littéraires et de formes textuelles . Les thématiques abordées dans ces recueils vont d'éléments stoïcisants jus qu'aux contacts avec les sentences de Sextus le Pythagoricien , ou simplement avec les concepts courants de la sagesse populaire. Elter pensait qu'une seule et

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MOSCHION

même personne était responsable de la rédaction matérielle de ce recueil, mais cette hypothèse aussi reste liée à une perspective unitaire qui risque de surévaluer les formules stylistiques typiques et récurrentes dans les formules sententiaires, en les interprétant, avec peut-être trop d'optimisme , comme des caractéristiques stylistiques véritables. Notice adaptée de l'italien par Richard Goulet. CARLO PERNIGOTTI.

II

193 MOSCHION DE MALLOS RE 7

Académicien , disciple de Lacydès ( L 11 , Philod ., Acad. hist ., col . M 17 et XXVII 35-38 ) . Selon Apollodore ( cité par Philodème, Acad. hist. XXVII 35-38 = FGrHist 244 F 47 ) , il serait mort sous l'archontat d'Eupolemos en 185/4. Le mauvais état de conservation du papyrus fait obstacle à une reconstruction des autres données chronologiques . Cf. T. Dorandi (édit . ) , Filodemo : Platone e l'Academia , p. 249. Cf. [K. von Fritz ), art. « Moschion » 7 , RE XVI 1 , 1933 , col . 348 . TIZIANO DORANDI.

MF IV

194 MOSCHOS D'ÉLIS RE 3

Selon Diogène Laërce II 126 , Ménédème d'Érétrie ( » M 116 ) , alors en garnison à Mégare (en 312/311 ?) fut attiré par Asclepiade de Phlionte ( = A 449) aux cours de Stilpon à Mégare ( fr. 170 Döring ). « Et de là ils s'embarquèrent pour Élis afin de se consacrer à Anchipylos (> A 170) et Moschos , les disciples de Phédon . Et jusqu'à leur époque ( ... ) , les philosophes de cette école s'appe laient éliaques , mais ils s'appelèrent érétriaques d'après la patrie de Méné dème » . En II 105 , Diogène avait mentionné comme diadoques de Phédon d'Élis Pleistanos d'Élis, puis Ménédème d'Érétrie et Asclepiade de Phlionte. Athénée , Deipnosophistes II , 44 C , rapporte qu'au témoignage d'Hégésandre de Delphes (FHG IV 418 ) Anchimolos et Moschos qui exercèrent comme sophistes (ooploteúoavtaç) à Élis burent de l'eau toute leur vie et ne mangè rent que des figues sans que leur force physique n'en souffrît. Mais la mauvaise odeur que dégageait leur sueur faisait qu'on les fuyait aux bains publics. Un dialogue de Stilpon de Mégare s'intitulait Moschos ( D. L. II 120 ). RICHARD GOULET.

II ?

195 MOSPOS DE CIRTA

Le philosophe Mospos, de Cirta , n'est connu que par l'épitaphe de sa femme, morte à vingt-deux ans ( ILA II 823 ) . Le style de l'écriture situe son activité sous le Haut Empire. BERNADETTE PUECH . 196 MUMMIUS ( SPURIUS-) RE 13 Cf. 1 F. Münzer, art. « Sp. Mummius » 13 , RE XVI 1 , 1933 , col . 525-527 . Frère de L. Mummius , consul en

146 ", le vainqueur de Corinthe ,

Sp. Mummius ne semble pas avoir dépassé le rang de préteur. En 146, il fut le

M 198

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légat de son frère à Corinthe (Cic . , Att. XIII 5 , 1 ; 30 , 2 ; 33 , 3 ) et envoyait à ses amis des lettres en vers ( Att. XIII 6 , 4 : epistulas uersiculis factas ad familiaris missas a Corintho ). Cicéron en fait un proche de Laelius ( L 12) et de Scipion Émilien (Lael. 19 , 69 ; 27 , 101 ; Rep . I 12, 18 : quem in primis [ scil. Scipio ) diligebat). Il accompagna d'ailleurs ce dernier dans son ambassade de 140-138 en Orient (Cic . , Rep . III 35 , 48 ; Justin XXXVIII 8 , 8 ; cf. 2 J.-L. Ferrary , Philhellénisme et impérialisme, p. 590 , n . 5 ) . Dans le Brutus 25 , 94 , Cicéron classe Sp . Mummius parmi les orateurs de qualité moyenne (mediocris ); il indique que sa prose était resserrée (astrictior ), et explique ce caractère par sa formation stoïcienne: fuit doctus ex disciplina Stoicorum . Nous n'avons pas d'autre indication sur ce point; mais cette appartenance stoïcienne doit être mise en rapport avec l'influence exercée par Panétius (Münzer 1 ; 3 G. Garbarino, Roma e la filosofia greca , t. II , p . 424-425 ). Dans l'euvre cicéronienne, Sp. Mummius fait partie des interlocuteurs du De re publica ( I 12 , 18 ) ; toutefois, il n'intervient qu'une seule fois dans ce qui subsiste du dialogue ( III 34 , 46 - 35 , 48 ) à propos de la liberté du peuple . Scipion Émilien souligne à ce propos son aversion pour la démocratie et évoque leur séjour à Rhodes.

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DM III

Philosophe stoïcien mentionné comme un contemporain dans la préface du traité Sur la fin écrit vers 265 par Longin [ L 63 ] (Porphyre, Vita Plotini 20 , 48 = frag. 4 Brisson - Patillon ). Longin l'associe à un certain Athénée ( 2 * A 478 ) qui aurait vécu comme lui « dans la Cité » ( év őotel xataßiboavtec ), c'est - à -dire probablement à Athènes où enseignait Longin. Ces philosophes , comme plu sieurs autres de différentes écoles, se seraient contentés d'assurer la formation de leurs disciples sans écrire aucun ouvrage. LUC BRISSON. 198 MUSONIUS RUFUS (C.-) RE 1

MFI

Philosophe stoïcien d'origine toscane , dont le floruit se situe sous Néron (54 68 ) . Biographie . L'ensemble des témoignages biographiques a été regroupé et commenté par 1 O. Hense dans l'introduction de ses C. Musonii Reliquiae, Leipzig 1905, p. V-XXXVI (réimpr. coll. BT, Leipzig 1990 ), par 2 K. von Fritz , art. « Musonius » 1 , RE XVI 1 , 1933 , col . 893-897, notamment 893-894, et par 3 Cora E. Lutz, « Musonius Rufus, “The Roman Socrates" » , YCIS 10 , 1947, p . 3-147 (sur la biographie proprement dite : p . 13-24) . Sur l'arrière -plan histo rique de la vie de Musonius , voir entre autres 4 D. R. Dudley , A History of Cynicism , chap. VII : « Demetrius. The ' philosophic opposition ' in the first century A.D.» , p. 125-142 ; 5 Margarethe Billerbeck , Der Kyniker Demetrius. Ein Beitrag zur Geschichte der frühkaiserzeitlichen Popularphilosophie, coll . « Philosophia antiqua » 36 , Leiden 1979 , X -69 p .; 6 Ead . , « La réception du cynisme à Rome» , AC 51 , 1982 , p . 151-173 ; 7 Miriam T. Griffin , « Le mouve

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ment cynique et les Romains. Attraction et répulsion » , dans M.-O. Goulet-Cazé et R. Goulet ( édit . ) , Le cynisme ancien, p . 241-258 . On ne connaît pas de biographie ancienne de Musonius. Eunape, V. Soph. II 1 , 5-6 , p . 3 , 12-16 Giangrande, mentionne d'ailleurs Musonius parmi les philo sophes de son époque dont personne n'a écrit la biographie. Origine toscane : Tacite , Annales XIV 59, 2 (« Tusci generis » ) ; Favorinus , De exilio , conservé dans PVat . 11 , col . 1 , 32 , p . 376 , p . 401 Barigazzi ; Philostrate , V. Apol. VII 16 (MovoÁVLOV TOV Tuppnvóv ); d'après la Souda ( Hesychius ) , M 1305 , t . III , p . 416 , 5 Adler , Musonius serait né à Volsinies , l'actuelle Bolsena ; CIL VI 537 ( une table de marbre aujourd'hui au Musée du Vatican [Gall . lap. Dii II ] porte une inscription précédée de « R (ufius ) Festus vir ) c (larissimus) de se ad deam Norti[ am ] » ; ce Rufius Festus Avienus , originaire de la ville étrusque de Volsinies ( « Lari cretus Vulsiniensi » ) est pré senté comme un descendant de Musonius ( « Festus, Musoni suboles prolesque Avieni » ) . Nom complet : Caius (praenomen attesté seulement par Pline le Jeune, Lettre III 11 , 5 et 7 ) Musonius Rufus (Tacite , Histoires III 81 , 1 ; IV 40 , 7 , Scholie sur Juvénal , Satires I 33 , p. 6 Wessner) . Tacite l'appelle aussi parfois seulement « Musonius » ( Annales XIV 59 , 2 ; Histoires IV 40 , 8 ) . De même la Chronique de Jérôme dit tantôt « Musonius » (anno 68 p . Chr. , p. 185 Helmº), tantôt « Musonius Rufus » (anno 79 p . Chr. , p . 189 , 12 Helm ) . Chez Dion Cassius , Epitome LXII 27 , 4, il est désigné comme Rufus Musonius , alors qu'Épictète, Entretiens III 15 , 14 , et le Scholiaste d'Épictète ( cf. H. Schenkl, Editio minor, 19162 , p . 280 ) le nomment par son seul cognomen : Rufus. Photius parle de « Musonius » dans le Codex 167 de sa Bibliothèque, p . 114 b (= p . 156 , 9 Henry ) et dans le Codex 243 , p. 366 a ( = p. 94, 41 Henry ), et de « Rufus» dans le Codex 167 , p. 114 b (= p. 156, 17 Henry ). Diverses épithètes accompagnent son nom : o Tuppnvós, « de Toscane» , mais aussi , comme nous le verrons plus loin , ó Túploc , « de Tyr » , et ó Baßułuvios , « de Babylone » . Date de naissance généralement admise : vers 20-30 après J.-C. (cf. 8 E. Zeller III 1 , Die Philosophie der Griechen“, III 1 , Leipzig 1909 , p . 755 ). Origines familiales : fils d'un certain Capito ( Souda, M 1305 , t . III , p . 416 , 5 Adler) , il faisait partie de l'ordre équestre ( Tacite, Histoires III 81 , 1 : « Musonius Rufus equestris ordinis » ) . Appartenance philosophique : école stoïcienne (Tacite , ibid .: studium philosophiae et placita Stoicorum aemulatus ; Souda, M 1305 , t . III , p. 416 , 5-6 Adler : diałextixòç piłócopos xai Etwixóc ) . Mais Eunape de Sardes, V. Soph . II 1 , 5 , p . 3 , 10-13 Giangrande , le présente comme un philo sophe cynique , aux côtés de Démétrius ( → D 43 ) et de Ménippe ( M 129 ) . Dans les Scholies sur Lucien , De morte Peregrini, 18 ( p . 221 H. Rabe ), il est qualifié de cynique également, mais cette fois aux côtés de Dion ( -D 166 ) et d'Épictète ( 2 - E 33 ) . On reconnaît effectivement dans les Diatribes une influence du mode de vie ascétique préconisé par le cynisme , notamment quand l'auteur s'élève contre les excès de table , contre le luxe dans l'habillement et

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l'ameublement, quand il conseille de porter la barbe ou quand il préconise une ascèse commune au corps et à l'âme (cf. Diatribe VI : Hepi đoxńoewç; voir 9 M.-O. Goulet-Cazé , L'ascèse cynique, coll . « Histoire des doctrines de l'Antiquité classique » , 10 , Paris 1986 , p. 185-188 ) . Toutefois , l'affiliation stoïcienne de Musonius ne fait pas de doute. Sur cette question, voir Lutz 3 , p. 28-20 . Relations avec le pouvoir impérial . La Chronique de Jérôme , anno 68 p. Chr. , p. 185 Helm ?, ainsi que la Souda, t . III , p. 416, 6 Adler, situent Musonius sous le règne de Néron. De fait, en 60 , le philosophe fait partie des quelques amis qui accompagnèrent en Asie Rubellius Plautus en qui Néron craignait un successeur éventuel ( Tacite, Annales XIV 22 , 2) . Quand, en 62 , Néron décide le meurtre de Plautus , Musonius conseille à son ami la constance dans l'attente de la mort (ibid. , 58-59 ; voir aussi les fragments XXII et XXXV Hense) . Il dut ensuite revenir à Rome , puisqu'à l'issue de la conjuration de Pison , en 65/66, il fut condamné à l'exil dans une petite île des Cyclades parti culièrement redoutée des exilés : Gyaros (Tacite, Annales XV 71 , 9 ; Favorinus, De exilio, col . 1 , 32 , p. 376 et col . 21 , 37 , p . 401 Barigazzi [= 3T dans CPF I 1 ** ] ; Lucien , De morte Peregrini, 18 ; Philostrate , V. Apol. VII 16 ; Dion Cassius, Epitome LXII 27,4 ; Julien , Lettre 30 au grand -prêtre Théodore ; p. 56, 20 - 57 , 1 Bidez ( sur l'interprétation erronée que la Souda, t . III , p. 416, 18 Adler, fit de cette lettre , en écrivant Éneuémeto Bapāv – et en commentant TOUTÉOTI TEIXÕU -, au lieu de éneuéreto ſvápwv, voir Hense 1 , p. XXX -XXXI ; Lutz 3 , p. 15 n . 51 ] ; Thémistius, Or. VI , p . 107 , 19 Downey -Norman ; Jean d'Antioche, fr. 90 FHG IV , p . 575 Müller) . Cet exil est attesté par Musonius lui-même (Diatribe IX , p. 49, 9-14 Hense ). D'après Philostrate, V. Apol. VII 16 , il lui valut une grande popularité, puisque des Grecs affluaient de partout pour venir l'écouter (cf. Lucien , De morte Peregrini 18 ). Musonius découvrit même une source sur cette île jusque là sans eau (Philostrate, ibid. ) . La Souda, qui cite un peu plus loin , à la ligne 19, le passage de la lettre de Julien où il est dit que Néron ordonna le bannissement de Musonius, prétend, à la ligne 9 , que l'empe reur fit périr le philosophe ( voir également la notice KopvoữTOG , K 2098 , t. III, p . 159 , 13-14 Adler) . D'après Zeller 8 , p. 755 n . 3 , l'erreur pourrait venir de Justin , Seconde Apologie 8 , 1. C'est en tout cas sous Néron que Musonius devint célèbre (Philostrate , V. Apol. VII 16 ; Chronique de Jérôme anno 68 p . Chr. , p. 185 Helm?; Julien, Discours VI (à Thémistius], 11 , 265 c -d ). Seul un passage de Thémistius, Or. XXXIV 15 , p. 223 , 5-6 Downey -Norman, témoigne de rela tions personnelles entre l'empereur et Musonius : le philosophe aurait réussi à détourner Néron de jouer de la cithare ( cf. Philostrate, V. Apol. V 19 , quand Musonius , en train de creuser l'Isthme, dit à Démétrius tout affligé : « Je te fais de la peine, Démétrius, quand je creuse l'Isthme pour la Grèce ; mais si tu me voyais en train de jouer de la cithare, comme Néron, qu'éprouverais -tu ? » ) . En V. Apol. VII 16, Philostrate dit seulement que Musonius s'opposa au pouvoir de Néron en de nombreuses circonstances. Deux fragments de Musonius font allu sion à des personnages contemporains de Néron : Thrasea Paetus ( fr. XLIII Hense = Arrien, Entretiens d'Épictète I 1 , 26) et Rutilius (fr. XXXVII = Plutar

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que , De vitando aere alieno 830 b ) dont Hense 1 , p . XXVII , se demande s'il s'agit de C. Rutilius Gallicus, le contemporain de Néron . Après la mort de Néron , sous le nouvel empereur , Galba, Musonius revint d'exil . La déclaration que fit le philosophe après la mort de Galba (fr. XLVII Hense = Arrien , Entretiens d'Épictète III 15 , 14) est difficile à interpréter: « Après le meurtre de Galba, quelqu'un disait à Rufus : "Et maintenant, c'est la Providence qui gouverne le monde ?”. Et lui de répondre : “Me suis - je jamais, même accessoirement, appuyé sur l'exemple de Galba pour prouver que la Providence gouverne le monde ? ” » ( trad . Jagu ] ( voir aussi la Scholie sur le passage d'Épictète, p . 280 Schenkl). Lutz 3 , p. 15 n. 52 , en donne une interpré tation plutôt positive à l'égard de Galba : « As Galba's kindness in recalling Musonius did not constitute for him a proof of the existence of Providence, so Galba's murder did not constitute a refutation of it. But I suspect that the remark held a wider implication . After the horrors of the last years of the reign of Nero, there is reason to believe that the more responsible Romans looked upon the accession of Galba as truly providential » . En 69 , au moment où les deux armées de Vespasien , qui ont déjà dévasté Crémone, se retrouvent, sous la conduite d'Antonius Primus et de Quintus Petillius Cerialis, aux portes de Rome, Vitellius décida de leur envoyer des ambassadeurs pour les inviter à faire la paix. Musonius faisait partie de l'ambas sade envoyée à Antonius. La prédication du philosophe, qui alla exhorter l'armée d'Antonius , se solda par un échec et fit même courir à Musonius des risques pour sa vie . L'épisode fut jugé sévèrement par Tacite (Histoires III 81 , 1-2 ) qui parla d '« intempestiva scientia » ; voir aussi Dion Cassius, Epitome LXIV 18-19. Vespasien arriva au pouvoir en décembre 69. Au tout début de son règne eut lieu le procès du philosophe stoïcien P. Egnatius Celer (PC 64 ) qui , en 66 , avait fait une déposition mensongère au procès de Barea Soranus que Néron envoya à la mort ( Tacite , Annales XVI 32 ; Histoires IV 10 , 1-4 et 40 , 6-8 ; Dion Cassius, Epitome LXII 26 ; Juvénal , Satires I 33 et III 116-118 ; Scholie sur Juvénal, Satires I 33 ) . Musonius se porta accusateur de Celer, tandis que , fait surprenant, la défense était assurée par le cynique Démétrius ( -D 43 ) . A l'issue du procès, Celer fut condamné. Sur cet épisode voir 10 J. Moles , « Honestius quam ambi tiosius ? An exploration of the Cynic's attitude to moral corruption in his fellow men » , JHS 103, 1983 , p. 103-123 . En 71 , sur les incitations de Mucianus, Vespasien chassa de Rome tous les philosophes , à l'exception de Musonius ( Dion Cassius , Epitomè LXV 13 , 2 = Xiphilin 208 , 7-15 = Zonaras, Epitome XI 17 , PG 134, col . 973-976) . Celui -ci toutefois connut à nouveau l'exil peu de temps après, puisqu'on le voit en 79 revenir à Rome, probablement rappelé par Titus qui , dès son arrivée au pouvoir, en 79 précisément ( Thémistius, Or. XIII , p. 248, 19-20 Downey -Norman ), le rappela d'exil ( Chronique de Jérôme anno 79 p. Chr. , p. 189 , 12 Helm ) . Ce fut certainement au cours de ce second exil que Pline le Jeune qui passait six mois comme tribun militaire en Syrie (en 81 ) rencontra Musonius ( Lettre III 11 ) . C'est peut- être aussi à cette époque que Musonius, en visite en Grèce, protesta

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contre les jeux de gladiateurs au théâtre de Dionysos ( Dion Chrysostome , Discours XXXI , 122 ) , si du moins Hense 1 , p. XXV , a raison d'identifier le philosophe romain dont parle Chrysostome avec Musonius . Nous ne disposons pas d'éléments sur les dernières années de Musonius , mais la Diatribe VIII 1 commence ainsi : « Comme un des rois de Syrie était un jour venu vers lui , car il y avait alors encore des rois en Syrie sujets des Romains... » , ce qui permet de mettre un terminus ante quem à la rencontre, car on sait qu'après 106 il n'y eut plus de rois sujets de Rome en Syrie. Date de la mort : Dans la Lettre III 11 de Pline, l'auteur parle de Muso nius au passé ( « C. Musonium quantum licitum est per aetatem , cum admiratione dilexi » ) . Comme cette lettre a été écrite en 101/102 , on peut en conclure que la mort du philosophe dut avoir lieu à la fin du premier siècle . La famille de Musonius : ( a) Grâce à la lettre envoyée par Pline au rhéteur Julius Genitor ( III 11 ), le nom d'un gendre de Musonius nous est connu : A 431 ) que Pline considérait comme un de le philosophe stoïcien Artémidore ( ses amis les plus intimes (par. 5 ) et auquel il prêta de l'argent (par. 2) . ( b ) Deux inscriptions grecques honorent un Gaius Musonius Rufus qui pourrait être un petit-fils de Musonius . L'une , trouvée à Athènes et datée de 140 / 141-143 / 144 ( IG I12 2472 ) , fait allusion à un Movoávioç ' Poū [oc ], prêtre à vie d'Apollon de Délos. Le même personnage est évoqué sous le nom de rádioc) MovoúviOS ' Poūpos dans une inscription de Délos ( voir 11 F. Dürrbach , « Fouilles de Délos » , BCH 28 , 1904, p. 184 n . 60 ), qui rappelle que par trois fois , sous les archontats de P. Philéas de Mélité , de P. Aelius Alexandros et de ( Vibu ] llius Rufus, il conduisit la dodécade délienne aux festivals annuels , et qui , à partir de la deuxième dodécade, lui attribue le titre d'épimélète de Délos. (c ) Une autre inscription ( IG 112 2044) mentionne dans une longue liste d'éphèbes datée de 139-140 , sous l'archontat du second Flavius Alcibiadès , les noms de Movoó VLOG ' Poūdos ( li . 90 ), que l'on considère communément comme le fils du prêtre de Délos , donc comme l'arrière -petit -fils de Musonius , et de Movoøvlog Happios ( li . 91 ) . Aucune indication de dème n'accompagne ces noms . ( d ) Une inscription latine de Volsinies , précédemment évoquée ( CIL VI 537 ) , fait état de l'hommage rendu à la déesse étrusque de la Fortune Nortia par un certain Rufius Festus Avienus ( ” A 515 ) , descendant de Musonius et originaire lui aussi de Volsinies ( « Lari cretus Vulsiniensi » ) . Il s'agit du poète du IVe siècle connu notamment pour sa traduction d'Aratos. (e) Au IVe s. encore , Himérius, Discours XXIII 21 Wernsdorf ( = VIII 21 , p . 151 Völker ) , pleurant son fils Rufinus, évoque diverses qualités de celui -ci, en affirmant à chaque fois qu'elles sont plus grandes que celles de tel membre de sa famille , et il nomme successivement Minucianus , Nicagoras, Plutarque, Musonius et Sextus , pour conclure que Rufinus était plus brillant et meilleur que tous ses ancêtres réunis. Comme les autres personnages cités sont des membres de la famille d'Himérius, Von Fritz 2 , art. « Musonius » 18 , col . 899 , en a conclu qu'il y avait un lien familial entre Rufinus et Musonius . Mais H. Völker, l'éditeur d’Himérius, reste prudent: « Es wäre durchaus ehrenvoll für die Familie des Himerios, auch C. Musonius Rufus

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zu den Vorfahren der Gattin des Himerios zählen zu dürfen , allerdings sind die verwandschaftlichen Beziehungen bislang nicht geklärt » (p. 11 ) . Les disciples et les amis : (a) Les stoïciens , opposants à Néron , Rubellius Plautus, Barea Soranus et Thrasea Paetus. ( b ) Les disciples mentionnés par Fronton , Lettre à Antoine Auguste I 1 (i.e. Marc Aurèle ) ( = De eloquentia I ) , p . 135 van den Hout : Euphratès de Tyr ( 2E 132 ] ( voir aussi Épictète III 15 , 8 ; IV 8 , 17 ; Manuel 29 , 4 ; Pline , Lettre I 10, 7 ; Philostrate , V. Apol. V 33-34 ; V. Soph. I 7 , 2 , p . 488 Olearius ; I 25 , 5 , p . 536 Olearius ; cf. H. von Arnim , art. « Euphrates von Tyrus » 6, RE VI , 1909, col . 1216) ; Dion Chrysostome ( = D 166) qui , d'après Synésius, Dion 11 (dans J. Lamoureux et N. Aujoulat, Synésius de Cyrène, Opuscules, t . I , CUF, Paris 2004 , p . 143 ) , écrivit un Mpòç Movoøvlov ( « A Musonius » ou « Contre Musonius » ?) et dont le corpus de cinq lettres conservées comporte deux lettres d'authenticité contestée adressées à un certain Rufus ( p . 259 Hercher ) ; cf. 12 P. Desideri, Dione di Prusa . Un intellettuale greco nell'impero romano, coll . « Biblioteca di cultura contemporanea » 135 , Messina/ Firenze 1978 , chap. 1 , p. 1-60 , notam ment p. 6-16 ; 13 Id ., « Tipologia e varietà di funzione comunicativa degli scritti dionei » , ANRW II 33 , 5 , 1991 , p . 3909-3959, notamment p . 3925-3926 ; voir aussi 14 J.L. Moles , « The career and conversion of Dio Chrysostom » , JHS 98 , 1978 , p . 79-100 ; Timocratès d'Héraclée , le maître de Démonax (++ D 74) et des sophistes Polémon et Lesbonax ( voir aussi Lucien , Démonax 3 ; Philostrate, V. Soph. I 25 , 5 , p . 536 Olearius ; cf. 15 W. Capelle, art. « Timokrates » 14 , RE VI A , 1936 , col . 1270-1271 , 16 K. Aulitzky, art. « Lesbonax » 3 , RE XII , 1924 , col . 2104-2106 , et 17 W. Stegemann , art. « Polemon » 10 , RE XXI 2 , 1952 , col . 1320-1357 ) ; Athénodote (+ A 499 ) , le maître de Fronton ( F 19 ) lui -même ( voir aussi Marc Aurèle , Pensées I 13 ; cf. 18 P. von Rohden , art. « Athenodotus » RE II , 1895 , col . 2048 ) . (c ) Pline et ses amis. En raison de son jeune âge, Pline lui-même ne fut pas un élève de Musonius , mais il l'admira beaucoup (Lettre III 11 , 5 ) . Son ami, le philosophe stoïcien Artémidore ( ** A 429 ) , était le gendre de Musonius que celui -ci avait choisi parmi un groupe de prétendants issus de toutes les classes sociales (III 1 , 7 ) . Quant à C. Minutius Fundanus ( = F 25 ) , qui était également l'ami de Pline et qui accéda au consulat en 107 ( les Lettres I 9 , IV 15 et VI 6 lui sont adressées et Pline parle de lui en V 16, 7 ) , Plutarque le présente en train de discuter les enseignements de Musonius ( De cohibenda ira 2 , 453 d ). ( d) Lucius ( 2 + L 69 ) qui écrivit les Diatribes transmises par Stobée . (e ) Épictète [ PE 33] ( I 7 , 32 ; 19 , 29-30 ; III 23 , 29 : « Rufus avait l'habitude de dire : “ Si vous trouvez le temps de me louer, c'est que ma parole est vaine " . Aussi parlait - il de telle sorte que chacun d'entre nous, assis auprès de lui , s'imaginait qu'on lui avait dévoilé ses fautes, tant il touchait du doigt notre état actuel , tant il mettait sous les yeux de chacun ses misères >> ( trad. Souilhé ] ) . Voir 19 R. Laurenti, « Musonio , maestro di Epitteto » , ANRW II 36 , 3 , 1989 , p. 2105-2146 . ( f) Pollion ( voir plus bas pour l'identification de ce personnage ) . ( g ) La Souda ( M 1305 ; t . III , p . 416 , 6-7 Adler) prétend que Musonius aurait été le familier d'Apollonius de Tyane ( > A 285 ) et de biens d'autres (γνώριμος δ ' 'Απολλωνίου του Τυανέως και άλλων πολλών , p. 416 ,

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7-8 ) , puis fait allusion à la correspondance échangée par Apollonius et Muso nius . Outre le problème de la confusion éventuelle avec un hypothétique Musonius de Babylonie , la valeur de ce témoignage dépend du crédit que l'on accorde à l'ouvrage de Philostrate. ( h ) Lutz 3 , p. 20, mentionne encore Hiéro clès le Stoïcien ( 124) , comme un continuateur de Musonius : « Beyond Musonius ' immediate circle, Hierocles most effectively carried on his tradition of liberal stoicism » . ( i ) Il convient de rectifier l'erreur commise par 20 E. V. Arnold , Roman Stoicism , Cambridge 1911 , réimp. London 1958 , p. 117 , et encore récemment par 21 A. Jagu , Musonius Rufus. Entretiens et Fragments. Introduction, traduction et commentaire, coll . « Studien und Mate rialien zur Geschichte der Philosophie » , Kleine Reihe , Bd V , Hildesheim / New York 1979, 113 p. , notamment p. 103 , qui , à la suite d'une mauvaise interpré tation du fr. 51 d'Hense (= Aulu-Gelle , Nuits Attiques XVI 1 : « Adulescentuli cum etiamtum in scholis essemus , évovunuáriov hoc Graecum quod adposui, dictum esse a Musonio philosopho audiebamus » ) , ont compris qu'Aulu -Gelle ( 2 - A 509) avait lui-même entendu le philosophe Musonius et donc qu'il en était le disciple, ce qui est chronologiquement impossible ; Aulu-Gelle veut seulement dire que , quand il était à l'école , il a appris que l'enthymème en question , qu'il cite d'ailleurs juste après, avait été formulé ( antérieurement) par Musonius. Problèmes d'identification : nius de Tyane de Philostrate .

( a ) Le Musonius de la Vie d'Apollo

Philostrate fait état à quatre reprises de Musonius . - en IV 35 , sous l'appellation Movo úvlog ó BaßuávioC: « Musonius de Babylonie , un homme qui ne le cédait qu'à Apollonios ( > A 284) , fut jeté en prison ( s.e. par Néron ) à cause de sa sagesse , et , là, courut de grands dangers , car il serait mort, si cela n'avait dépendu que de son geôlier, et s'il n'avait eu une robuste constitution » ( trad. Grimal). - en IV 46, Philostrate explique que Musonius , enfermé dans les prisons de Néron, échange des lettres avec Apollonius par l'intermédiaire de Ménippe (de Lycie ] ( M130 ) et de Damis [PD 9 ]. Philostrate cite deux lettres d'Apollonius à Musonius ainsi que les deux réponses que fit ce dernier ; ces courtes lettres, dont la Souda, s.v. MovoÁVLOG, M 1305 , t . I 3 , p. 416, 7-8 Adler, atteste l'existence , sont éditées dans Hense 1 , p. 142-143 . - en V 19, Démétrius (= D 43 ) dit à Apollonius qu'il a rencontré Musonius prisonnier sur l'Isthme et contraint de creuser pour le percement de l’Isthme . - en VII 16, sous l'appellation Movo øvlov tov Tuppnvóv, « Musonius le Tyrrhénien » , qui fait allusion à l'origine étrusque de Musonius , Philostrate rappelle que Néron gardait le philosophe prisonnier dans l'île de Gyaros et que de nombreux Grecs allaient rendre visite à celui - ci . Ces quatre témoignages pourraient s'harmoniser avec le personnage de Musonius Rufus, si Musonius n'était qualifié en IV 35 de o Baßunúvloç. C'est pourquoi une correction a été suggérée qui , paléographiquement, est tout à fait plausible : il faudrait lire Βουλσίνιος au lieu de Βαβυλώνιος , comme le proposent 22 P. Nieuwland , Dissertatio de Musonio Rufo philosopho stoico

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(écrite en 1783 ) , publiée dans 23 J. V. Peerlkamp, C. Musonii Rufi Philosophi Stoïci Reliquiae et Apophthegmata, Haarlem 1822 , p. 35 , et 24 Ed. Baltzer, Apollonius von Tyana, aus dem Griechischen des Philostratus übersetzt und erläutert, Rudolstadt in Thüringen 1883 , note sur IV 35 , p . 189. Hense 1 (p. XXXIII) est sceptique . Mais dans la mesure où Philostrate présente ce person nage comme prisonnier de Néron, ce qui était la situation de Musonius Rufus, il est difficile de penser que, parlant de Musonius de Babylonie, il ne pense pas à Musonius Rufus. La correction apparaît donc comme une solution sensée , et cela d'autant plus que tous les manuscrits de la Souda à l'article « Musonius » ( M 1305 ) , se sont trompés sur l'orthographe de Volsinies , A , V et M écrivant Βουασινίου et G Mουασινίου . (b) Le Musonius du Pseudo- Lucien : Néron ou Sur le creusement de l'Isthme. Ce dialogue revient selon toute probabilité à l'un des trois Philostrate , éven tuellement au père de l'auteur de la Vie d'Apollonius et des Vies des sophistes à qui la Souda , s.v. Qiootpatos ó npõroc , Q 422, t . IV , p. 734, 18 Adler, attribue entre autres un Néron . Musonius y raconte à un certain Ménécratès que pendant soixante - quinze jours il a participé au creusement de l'Isthme. Comme dans la Vie d'Apollonius (V 19) le cynique Démétrius ( - • D 43 ) fait état auprès d'Apollonius d'une conversation qu'il eut avec Musonius en train de creuser l'Isthme , on peut conclure que Philostrate et le Pseudo-Lucien pensaient au même Musonius , prisonnier de Néron, donc à Musonius Rufus. Pour des objections contre l'historicité de l'épisode, voir Lutz 3, p. 23 n . 88 . (c ) Le Musonius de Tyr des Vies des sophistes de Philostrate. Philostrate ( V. soph. II 1 , p. 556-557 Olearius) fait allusion à un Movowviw Tô Tupiw , Musonius de Tyr, dont Lucius ( » L 70 ) , un familier d'Hérode Atticus, suivit les cours . La correction Tupiw en Tuppnva (« l'Étrusque » ) a certes été proposée par Olearius, afin que l'adjectif puisse s'appliquer à Muso nius Rufus. Cette correction ne serait pas aberrante , puisque Philostrate en Vie d'Apollonius VII 16 désigne Musonius par l'expression Movo ÁVLOV TOV Tuppnvóv . Mais la chronologie interdit l'identification de Musonius Rufus avec Musonius de Tyr. En effet, il faudrait supposer que le Lucius de Philostrate qui, en 160, essayait de raisonner Hérode Atticus accablé par la mort de son épouse Régilla et qui rencontra à Rome Marc Aurèle déjà ynpáoxwv (3 + M 39 ) , allant écouter le philosophe Sextus de Chéronée, aurait pu être le disciple de Musonius avant la fin du premier siècle et éventuellement l'auteur des Diatribes transmises par Stobée (cf. le titre de la Diatribe V : Aux ou éx TÕV Movowv ov). La somme des témoignages ne permet pas une interprétation d'ensemble satisfaisante, puisqu'on ne parvient pas à déterminer la relation qu'entretient le couple Musonius Rufus/Lucius avec le couple Musonius de Tyr/Lucius, ami d'Hérode Atticus . 25 C.P. Parker, « Musonius the Etruscan » , HSCP 7 , 1896 , p . 123-137 , distinguait deux Musonius : l'un , Musonius Rufus, d'origine étrusque, maître d'Épictète et vivant au temps de Néron , dont les idées ont été conservées par Épictète ; l'autre , Musonius de Tyr ( appelé une fois Musonius de Babylonie par Philostrate) , vivant au temps d'Hadrien et auteur des diatribes conservées dans

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Stobée . Mais cette hypothèse ne résiste pas au fait que le Musonius des Diatribes évoque son exil à Gyaros, lequel eut lieu en 65. Pour une réfutation de l'hypothèse de Parker, voir Hense 1 , p. XVIII - XIX ; von Fritz 2 , col. 895 ; Lutz 3, p. 22 n. 85 . Hense 1 , p. XVII , suggérait deux Lucius : le Lucius de Musonius et le Lucius, ami d'Hérode Atticus , et il proposait d'identifier le second avec le Lucius péripatéticien ( * L 72 ). Ce dernier était l'auteur d'un Commentaire sur les Catégories d'Aristote connu par Simplicius et auquel pourrait convenir, selon Hense , l'idéal de la juste mesure ( Hegórns ) rappelé à Hérode Atticus ( voir 26 K. Praechter, « Nikostratos der Platoniker » , Hermes 57 , 1922 , p. 481-517 , repris dans ses Kleine Schriften , édités par H. Dörrie, Hildesheim /New York 1973, p. 101-137 ; Praechter et 27 W. Capelle, art. « Lukios» 3 , RE XIII , 1926 , col. 1797-1798 , refusent également d'identifier le Lucius des Vies des sophistes de Philostrate au Lucius des Diatribes de Musonius et pensent qu'une identifi cation de l'ami d'Hérode Atticus avec le Lucius péripatéticien est chrono logiquement possible, mais qu'on ne dispose pas des moyens pour en décider ). On ne saurait exclure qu'il y ait chez Philostrate une part de fiction littéraire favorisée par le caractère légendaire de la figure de Musonius. Mais , à la diffé rence de la Vie d'Apollonius de Tyane, les Vies des sophistes ne laissent guère de place à la fiction . Reste l'hypothèse d'une vraie confusion de la part de Philostrate . Il aurait écrit Movowviw tỘ Tuppnvợ , en pensant à Musonius Rufus, mais il aurait confondu le Lucius dont il savait qu'il avait édité les Diatribes de Musonius avec un autre Lucius , ami d'Hérode Atticus, à identifier peut-être , comme le suggérait Hense , avec le philosophe péripatéticien. On aurait donc un seul Musonius (Musonius Rufus le Tyrrhénien ) et deux Lucius , celui qui a édité les Diatribes de Musonius Rufus et un autre Lucius , sans lien avec le précédent ni avec Musonius . ( d ) En outre, Dion Chrysostome, dans son Discours Rhodien ( XXXI 121 122 ), rappelle que les Athéniens n'avaient pas la pudeur des Corinthiens en ce qu'ils regardaient dans leur théâtre, et non en dehors de la cité, les combats de gladiateurs. Il précise encore qu'un philosophe romain jouissant d'une réputa tion extraordinaire et dont on s'accordait à reconnaître qu'il menait une vie conforme à ses principes, adressa aux Athéniens des reproches qui furent mal accueillis, si bien qu'il quitta la ville et choisit d'aller ailleurs en Grèce. Faut- il identifier ce philosophe avec Apollonius de Tyane, bien que ce dernier ne fût pas Romain , à cause d'un passage de la Vie d'Apollonius de Tyane (IV 22) où Philostrate fait état des vues critiques que formula Apollonius à l'encontre du goût des Athéniens pour les jeux des gladiateurs ? Tel était l'avis de 28 H. Valesius, Emendationes, Amsterdam , 1740 , p . 78 , dans une note à propos de Philostrate IV 22 , et de 29 J. J. Reiske , Dionis Chrysostomi orationes, Leipzig 1784, t. I , p. 631 , n . 46. Ou faut-il reconnaître en ce philosophe Muso nius , comme le voulait par exemple Hense ? Pour un état de la question , voir Lutz 3, p. 17 et n . 60. Si l'identification avec Musonius se trouve être la bonne,

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il faut alors admettre que le philosophe a fait un voyage en Grèce postérieure ment à la mort de Néron , puisqu'on peut déduire de ce que dit Dion en XXXI 148-150 que Néron est mort au moment où il prononce son discours et que l'intervention du philosophe est présentée comme récente . La transmission de l'enseignement de Musonius : Musonius donnait toujours ses entretiens en grec. Le fait qu'Aulu -Gelle rapporte des passages en latin ne contredit pas ce fait. Musonius a-t- il écrit ? Trois témoi gnages semblent aller en ce sens : Eunape, Vies des philosophes et des sophistes II 1 , 6, p. 3 , 16 Giangrande, qui attribue des ypáupata à Démétrius ( * D 43 ), Ménippe ( * M 130 ) et Musonius ; Philostrate, V. Apol. IV 46 qui cite les quatre lettres échangées par Musonius , alors dans les prisons de Néron , et Apollonius de Tyane; enfin la Souda , M 305 , t. III , p. 416, 10-11 Adler , qui prête à Muso nius des λόγοι διάφοροι φιλοσοφίας έχόμενοι , και επιστολαί . Ces témoigna ges malheureusement n'ont pas grande valeur. Les lettres transmises par Philostrate sont considérées comme inauthentiques, ainsi qu'une longue lettre de Musonius adressée à Pancratidès et traitant de l'éducation des fils de ce dernier. Sur cette lettre, voir Hense 1 , p . 137-142 ; elle est éditée aussi par 30 R. Hercher, Epistolographi Graeci, Paris 1873 , p. 401-404 ; 31 M. Pohlenz , Die Stoa, t. II , Göttingen 1949, « 3e éd . » , 1964, p . 146 , voit dans cette lettre un Protreptique contenant les idées fondamentales de Musonius : « Musonius ' Grundgedanken sind in dem Briefe an Pankratides zu einem kurzen Προτρεπτικός πρός φιλο ooplav zusammengefaßt » . Par ailleurs Lutz 3 , p . 5 , suggère , à partir de certaines formules qui y sont employées , que la Diatribe IX Sur l'exil pourrait être une lettre écrite par Musonius à un ami lui -même en exil . Si Musonius n'a rien écrit , son enseignement oral toutefois nous a été conservé sous trois formes : dans les Diatribes transmises par Stobée et dues probablement toutes à Lucius , dans les fragments préservés par Épictète , enfin dans les Apophtegmes cités par Stobée, Plutarque, Aulu -Gelle et Aelius Aristide, et qui pourraient provenir des ’Anouvnuoveúuata de Musonius que la Souda attribue à Pollion . Éditions. Peerlkamp 23 : cette édition ancienne ( 1822 ) , après une Praefatio ( I - XXIV ) , reproduit la Dissertatio de Nieuwland ( p. 7-137 ) , puis donne le texte grec des Diatribes et des fragments (p . 141-275 ) , suivi d'Adnotationes ( p . 279 422) . Mais l'édition de référence reste celle de Hense 1 et il convient , pour citer les passages , de garder les numéros des fragments attribués par cet éditeur. Elle contient une introduction, p . V - XXXVI , les 21 fragments de Diatribes transmis par Stobée , p. 1-116 ; 32 fragmenta minora, p. 117-134 ; les Epistulae spuriae ( à Pancratidès et à Apollonius), p . 137-143 , et trois indices, p. 144-148 ( 1. Nomina Musonii Dissertationum a Lucio digestarum , 2. Nomina Musonii Fragmentorum minorum, 3. Memorabilia ). Cette édition ( 1905) est postérieure à celle du tome III de Stobée par le même auteur ( 1894) , mais antérieure à celle des tomes IV ( 1909) et V ( 1912 ) . Hense n'a pas retenu un texte d'auteur inconnu qui avait été édité par Peerlkamp ( p . 185-188 ): « Quid vacuum doloris faciat» , et que lui même attribue à Télès ( Teletis Reliquiae, p . 11 , 10 - 17,6 ) , pas plus que deux fragments attribués à Musonius par Gesner dans son édition de Stobée ( 1549 ),

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p. 31 , et que Peerlkamp avait inclus ( p . 254-255 ) . Dans l'édition Hense de Stobée, l'un est attribué à Théodore le Cyrénaïque (t . III 2, 32, p. 185 H. ) et l'autre est identifié comme le fragment XVIII 1 Bernardakis ( = fr. 161 Sandbach ) de Plutarque (t. III 2, 34, p. 186 H. ). Lutz 3 : cette publication de 147 pages comporte une riche introduction de 30 pages, qui fait le point sur les problèmes biographiques et littéraires, le texte grec des Diatribes et des fragments repris de l'édition Hense et accompagné de quelques notes – avec en plus le fragment du papyrus Rendel Harris qui comble ce qui manque entre XV A et XV B -, une traduction anglaise, ainsi qu'une table des sources . Texte grec avec traduction italienne dans 32 Ilaria Ramelli , Musonio Rufo . Diatribe, frammenti e testimonianze : testo greco a fronte , coll . « Bompiani testi a fronte » , 31 , Milano 2001, 357 p . Signalons deux éditions séparées : Diatribe III dans 33 E. Eyben, « Musonius Rufus. Ook vrouwen moeten filosofie studeren » , Hermeneus 48 , 1976 , p. 90-107 ; Diatribe IV dans 34 E. Eyben et A. Wouters , « Movowvíov Èx toŨ Εί παραπλησίως παιδευτέον τας θυγατέρας τοις υιοίς » , Lampas 8 , 1975 , p . 186-213 ( introduction , texte , traduction, commentaire du fragment, en néer landais, avec résumé en anglais ). Une correction textuelle dans 35 M. K. Hopkins , « A textual emendation in a fragment of Musonius Rufus. A note on contraception » , CQ, 1965 , 15 , p. 72-74 ( à propos d'un passage du fr. XV A : Hopkins propose de corriger åtoxía en ατόκια). ). Fragments attribués à Musonius: 36 G.D. Kilpatrick , « A Fragment of Musonius» , CR 63 , 1949 , p. 94 , signale que l'édition Lutz 3 omet un court passage d'Origène transmis par le Vindobonensis 8 , fol. 229 ', qu'on trouve dans 37 R. Cadiou, Commentaires inédits des psaumes, Paris 1936, p. 118 , et qui fait état d'un paradoxe de Musonius sur la colère ; 38 I. Andorlini et R. Laurenti, CPF 11 ** , Firenze 1992, p . 490-491, mentionnent un passage du Commen taire de Didyme l’Aveugle sur Ecclésiaste 7 , 3ab ( = 2T) , tiré d'un papyrus de Tura du Viº /VII° s .: PTura III , 197 , 27 - 200, 1-3 , qui traite également de la colère et où est employé [åvaļļOnvūv, participe qu'il convient de rapprocher de l'hapax ávat.Onvntéov que l'on rencontre dans le fragment signalé par Kilpatrick 36. 39 D. A. Christidis, « ENA NEO AMOENAEMA TOY MOYENNIOY » , Hellenica 50, 2000 , p . 343-346 ( l'auteur propose de restituer à Musonius un passage du Florilegium Baroccianum , le fr. 40 , 43 dans l'édition de É. Sargologos ( Un traité de vie spirituelle et morale du XIe siècle : le florilège sacro - profane du manuscrit 6 de Patmos, Asprovalta -Thessalonique 1990 ) attribué jusqu'ici à Lucien, l'attribution Aovxlavoõ reposant probablement sur une corruption de Λυκίου). Traductions – latine dans l'édition de Stobée par 40 C. Gesner, Bâle 1549 ; - françaises : 41 A.J. Festugière, Deux prédicateurs de l'antiquité. Télès et Musonius, coll . « Bibliothèque des textes philosophiques » , Paris 1978 , p. 49-127 ( traduction des 21 Diatribes avec de brèves introductions et quelques notes) ; 42 A. Jagu , Musonius Rufus. Entretiens et Fragments. Introduction, traduction et commentaire, coll . « Studien und Materialien zur Geschichte der Philo

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sophie » , Kleine Reihe, Bd V , Hildesheim /New York 1979, 113 p. ( Introduction de 13 pages ; traduction et annotation des Diatribes et des fragments , courte bibliographie ; table des sources ; index des mots grecs [ 22 mots) ; index des auteurs anciens et index des auteurs modernes cités dans les notes ); - anglaise : Lutz 3 ; - allemandes : 43 W. Capelle, Epiktet, Teles und Musonius, Wege zu glückseligem Leben, übertragen und eingeleitet von W.C. , coll . « Bibliothek der alten Welt » , Zürich 1948 , 336 p. , notamment p. 233-302 et 323-334 ; 44 Id. , Dir selber treu . Antike Lebensweisheiten von Epiktet und Musonius, coll . « Artemis Bibl . » 25 , Zürich 1986 ; 45 (W. Capelle) – R. Nickel , Epiktet, Teles und Musonius : Wege zum Glück, auf der Grundlage der Übertragung von W.C. neu übersetzt, mit Anmerkungen versehen und eingeleitet von R. N. , coll . « Die Bibliothek der alten Welt . Griechische Reihe » , Zürich/München 1987 ; 2e édition : Wege zum Glück : Epiktet, Teles und Musonius, coll . « dtv » , 2269, München, 1991 ; 46 R. Nickel , Epiktet, Teles, Musonius : Ausgewählte Schriften, Griechisch - Deutsch, hrsg. und übers. von R.N. , coll. « Sammlung Tusculum » , München /Zürich 1994, p. 400-537 ; – italiennes : 47 R. Laurenti (édit.), Musonio Rufo. Le diatribe e i frammenti minori, Roma 1967 ; Ramelli 32 ; - espagnole : 48 Paloma Ortiz García (édit . ) , Tabla de Cebes, Musonio Rufo : Disertationes , Fragmentos menores, Epicteto : Manual; Fragmentos, coll. « Biblioteca clásica gredos » 207 , Madrid 1995 , p. 51-146. Études. 49 Ed. Baltzer, Musonius. Charakterbild aus der römischen Kaiser zeit, Nordhausen 1871 , 49 p.; 50 P. Wendland , Quaestiones Musonianae, Berlin 1886 ; 51 Th . Pflieger, Musonius bei Stobaeus, Inaugural Diss . Freiburg im Breisgau, Leipzig 1897 ; 52 C. Schmich , De arte rhetorica in Musonii diatribis conspicua , Inaugural Diss . , Freiburg im Breisgau 1902 ; 53 A. Oltramare, Les Origines de la diatribe romaine, Lausanne 1926 ; 54 M.P. Charlesworth , Five Men . Character Studies from the Roman Empire, Cambridge (Mass .) 1936 , chap. II , p . 33-62 ; 55 M. Pohlenz , Die Stoa, Göttingen 1948 ; « 4 ° éd . » , 1972, p. 300-303 ; Pohlenz 31 , p. 151-152 ; 56 A. C. van Geytenbeek, Musonius Rufus en de griekse diatribe, Diss . , Amsterdam 1949, 203 p .; Id . , Musonius Rufus and Greek diatribe (édition révisée et traduction anglaise par B.L. Hijmans, Assen 1963 , IX - 176 p. ; 57 L. Gallinari , Il pensiero pedagogico morale di Musonio Rufo, Roma 1959, 145 p.; 58 A. Barigazzi, « Note al De Exilio di Telete e di Musonio » , SIFC 34, 1962 , p. 70-82 ; 59 R. Laurenti, « Musonio ed Epitteto » , Sophia 34, 1966, p. 317-365 ; 60 Id ., « La concezione della virtù in Musonio » , Sophia 35 , 1967, p . 301-317 ; 61 G. Baldassare , « Osservazioni sui 'Memorabili di Musonio ' di Lucio » , Prometheus 4, 1978 , p . 276-280 ; 62 Id ., « Musonio Rufo e l'Economico di Brisone » , dans E. Livrea et G. A. Privitera (édit.), Studi in onore di A. Ardizzoni, coll . « Filologia e Critica » 25 , Roma 1978 , t. I , p. 39 48 ; 63 E. Eyben, « De latere stoa over het huwelijk » , Hermeneus 50 , 1978 , p . 15-32 , 71-94 , 337-358 ; 64 Ch.P. Baloglou , « Ai oixovoucxai kvieńVEIS TÕV OTOLXWV ' Iepoxhéouç xai Movowvíov » , Platon, 44 , 1992 , p . 122-134, notamment p. 127-130 ; 65 A. Grilli, « Musonio o il sospetto d'un mondo alla rovescia » , dans La langue latine, langue de la philosophie, Actes du colloque organisé par l'École Française de Rome avec le concours de l'Université de

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Rome « La Sapienza » ( Rome , 17-19 mai 1990 ), Rome 1992 , p . 173-186 ; 66 J. S. Houser, The Philosophy ofMusonius Rufus: a study of applied ethics in the late Stoa, Ph.D. , Brown Univ . , Providence [ R. I. ) 1997 , 211 p .; 67 Ilaria Ramelli, « Il tema del perdono in Seneca e in Musonio Rufo » , dans Marta Sordi ( édit. ), Responsabilità, perdono e vendetta nel mondo antico, coll . « Pubblicazioni dell'Università cattolica del Sacro Cuore. Scienze storiche » 65 , « Contributi dell'Istituto di Storia Antica » 24 , Milano 1998 , p . 191-207 ; 68 R. Valantasis , « Musonius Rufus and roman ascetical theory » , GRBS 40 , 1999 , p . 201-231 ; 69 G. Lenta , « L'immagine del filosofo nelle “ Diatribe " musoniane » , dans Quaderni del Dipartimento di filologia, linguistica e tradi zione classica Augusto Rostagni, coll . « Pubblicazioni del Dipartimento di Filo logia, Linguistica e Tradizione Classica , Università degli Studi di Torino » 13 , Bologna 1999, p . 291-316 ; 70 Martha C. Nussbaum, « Musonius Rufus : ene of double standards for men and women ? » , dans Karla Pollmann (édit. ) , Double standards in the ancient and medieval world , coll . « Göttinger Forum für Altertumswissenschaft. Beihefte » 1 , Göttingen 2000 , p. 221-246 ; 71 D.M. Engel , « The gender egalitarianism of Musonius Rufus » , AncPhil 20, 2000 , p . 377-391 ; 72 E. Olshausen , « Der Stoiker C. Musonius Rufus - ein Pazifist ? : Überlegungen zu Tac . Hist . 3 , 81 , 1 » , dans Stephanie Böhm et K.-V. von Eickstedt ( édit .), Festschrift für Jörg Schäfer zum 75. Geburtstag am 25. April 2001, Würzburg 2001, p . 249-255 ; 73 G. Wöhrle , « Wenn Frauen Platons “ Staat " lesen oder : Epiktet und Musonius konstruiren Geschlechterrollen » , WJA N. F. 26, 2002, p. 135-143 ; 74 D. M. Engel, « Women's role in the home and the state : Stoic theory reconsidered » , HSPh 101 , 2003, p. 267-288 ; 75 V. Laurand, Stoïcisme et lien social à l'époque impériale : enquête autour de l'enseignement de Musonius Rufus, Thèse de doctorat de l'université de Paris XII , 2002, 627 p .; 76 Martha C. Nussbaum , « The incomplete feminism of Musonius Rufus, Platonist, Stoic and Roman » , dans M.C. Nussbaum et Juha Sihvola (édit. ) , The sleep of reason . Erotic experience and sexual ethics in ancient Greece and Rome, Chicago ( III . ) 2002, p. 288-326 ; 77 M.Sigismund , Über das Alter. Eine historisch -kritische Analyse der Schriften « Über das Alter » / ɛpi yépwg von Musonius, Favorinus und luncus, coll. « Prismata » , 14, Bern /Frankfurt am Main 2003 , IX- 374 p. Les diatribes transmises par Stobée ( fr. I -XXI Hense ) ( a ) L'auteur des diatribes . Tous les fragments précisent dans leur titre qu'ils ont Musonius pour auteur : Movowvlov čx toŨ ... , sauf le fr. XXI intitulé ’ Ex toŨ nepi xovpãs ( encore que certains manuscrits contenant ce fragment portent l'indica tion Movowvíov et d'autres toŨ CỦTOū ) . Mais le lemme du fragment V introduit un élément supplémentaire : Λυκίου εκ των Μουσωνίου πότερον ισχυρότερον ĚDoç Ñ Nóyoç. Bien que ce Lucius ( ** L 69) ne soit mentionné qu'une seule fois, on reconnaît généralement en lui l'auteur de l'ensemble des diatribes, qu'il a rédigées, pense - t-on , à partir de l'enseignement oral de Musonius dont on suppose qu'il était le disciple. En fait, on manque de précisions sur ce Lucius . Pour des raisons purement chronologiques, on ne peut l'identifier avec le Lucius de Philostrate , ami d'Hérode Atticus et contemporain de Marc Aurèle

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(cf. supra ). Peut - être était -il en exil à Gyaros en 65 , en même temps que Musonius . C'est du moins ainsi qu'on a interprété la Diatribe IX ( voir Hense 1 , p . XIV et Lutz 3, p. 8 n . 17 ) . En fait, rien ne prouve que l'exilé auquel s'adresse Musonius soit précisément Lucius . Pflieger 51 , p . 5 n . 2 , et Hense 1 , p. X , préfèrent la leçon Aovxlov plutôt que Auxlov , à cause de l'index de Photius qui n'a pas de Aúxlos , mais qui connaît un Aouxios , et à cause du traité de Lucien : Aoúxloc ñ ovoc. Néanmoins, dans le titre de la Diatribe V , p. 19, Hense écrit Auxíov. A noter que l'on rencontre dans 78 L. Sternbach , « Appendix Vati cana » , dans Rozprawy Akademii Umiejętności Wydział Filologiczny, Seya II 5 , Cracow 1894 , p. 214 n . 108 , une sentence attribuée à un Aoúxloc , que Lutz 3, p . 8 n . 18 , considère comme revenant indubitablement à Musonius : Aoúxlog έφη, ώσπερ άλειμμα ου το ηδύ καλόν , αλλά το υγιεινόν , ούτως και τροφή ουχί η ηδεία καλή , αλλά την υγείαν ή ποριζομένη [voir 79 V. Schmidt, « úylaivouau im Corpus Hippocraticum und ein Fragment des Musonius » , WJA N. F. 6, 1980, p. 29-44 ). ( b ) La date des diatribes .

Grâce à un renseignement fourni par la

Diatribe VIII et signalé supra , on peut fixer un terminus post quem à la compo sition de cette diatribe . L'auteur fait en effet allusion à la visite que rendit à Musonius un roi de Syrie et il précise : « car il y avait alors encore des rois en Syrie , sujets des Romains » . Or, on sait qu'après 106 , il n'y eut plus de rois sujets des Romains en Syrie. Par conséquent, on peut conclure que cette diatribe fut rédigée postérieurement à 106 et , de façon plus générale, on admet que Lucius a rédigé les diatribes vers 110 ( voir Hense 1 , p . XV ) . Si l'on tient compte du fait que la Diatribe IX rapporte des paroles de Musonius prononcées dans le cadre de l'exil à Gyaros qui eut lieu en 65 , on peut se demander si Lucius fait état de souvenirs personnels, auquel cas , comme le suggère Hense 1 , p . XIV , il faudrait admettre qu'il a été le disciple du philosophe pendant de longues années , de 65 à la fin du siècle , ou qu'il a travaillé , du moins partiellement, sur une documentation antérieure. ( c ) La fidélité de Lucius à l'enseignement de Musonius : On a souvent souligné la différence de ton qui existe entre les diatribes de Lucius et les fragments conservés par Aulu -Gelle, Plutarque et Aelius Aristide, que l'on considère d'ordinaire, ainsi que nous le signalerons plus bas , comme tirés des nouvnuoveúuata de Pollion. Lutz 3, p. 12, résume bien le problème: « There is a very remarkable difference in the pictures that these two early editors ( i.e. Lucius et Pollion ) have succeeded in producing of the same man . Lucius is very consciously playing the role of Xenophon to his Socrates and so consistently transforming what must have been scenes of vivid discussion full of the rapid give and take of debate into rather conventionalized essays on ethical questions that the portrait of Musonius loses sharpness and vigor. Another factor which may be responsible for the diluted form in which we have Musonius ' conversations is the fact that they were written down many years after the event, so that they must have lost their original freshness in Lucius' mind and Lucius himself had grown old and less vigorous. As a result, we get the impression of Musonius as a man who was good , to be sure , but mild and tolerant , and , in

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contrast with his pupil Epictetus, quite lacking in spirit. On the other hand, when one considers the fragments of Pollio , even from these disjecta membra a strong personality stands forth , kindly but sharp, vivid and determined , a figure to admire and to follow » . (d ) Intitulé des fragments des rement modifiée ) :

diatribes ( trad .

Jagu

légè

Ι. ότι ου δεί πολλαίς αποδείξεσι προς έν πράγμα χρήσασθαι (Stobée II 31 , 125 ) , « Qu'il ne faut pas, quand il s'agit d'un seul point, user d'un grand nombre de démonstrations » . II .

Traité sans titre. On l'intitule généralement , à partir d'une expression tirée du texte lui -même : oti npòç åpetnu yéyove ó ävopwnoc ( II 9,8 ) , « Que l'homme est né pour la vertu » .

III . Őti xal yuvalgi pihoooontéov ( II 31 , 126 ) , « Que les femmes doivent, elles aussi , faire de la philosophie » .

IV .

ει παραπλησίως παιδευτέον τας θυγατέρας τοίς υιοίς ( II 31 , 123 ) , « Faut- il donner la même éducation aux filles et aux garçons ? » .

V.

nótepov loxupótepov čoos ñ nóyos ( II 15 , 46) , « La pratique l'emporte -t-elle sur la théorie ? » .

VI .

nepi đoxńoewÇ ( III 29, 78 ) , « De l'exercice moral » .

VII .

Ötl nóvov xatappovntkov ( III 29 , 75 ) , « Qu'il faut mépriser la peine » .

VIII .

Őti piaoooontéov xai tots BaolleŰOLV (IV 7,67) , « Que les rois, eux aussi , doivent philosopher » .

IX . Őti oủ xaxov ń pur ( III 40,9), « Que l'exil n'est pas un mal » . Χ.

εί γραφήν ύβρεως γράψεται τινα ο φιλόσοφος ( III 19 , 16) , « Le philosophe intentera-t- il des poursuites pour outrage ? » .

XI .

tíç ó piloooow npoońxwv Trópos ( IV 15 , 18 ) , « Des moyens d'existence appropriés au philosophe » .

XII . XIII A.

nepi đopodioiwv (III 6, 23) , « Des plaisirs sexuels » . Tí nepáralov ránov ( IV 22 , 90 ), « Du but principal du mariage » .

XIII B. tí nepáralov yápov ( IV 22 , 104 ), « Du but principal du mariage » . XIV .

tí šunódlov TẬ pinooodetu rauos ( IV 22 , 10 ) , « En quoi le mariage constitue un obstacle à la philosophie » .

XV A - B .

ei návra tè yivóueva téxva Open téov ( IV 24 , 15 ; IV 27 , 21 ) , « S'il faut élever tous les enfants qui sont nés » .

XVI . ei trávta TELOTÉOV TOTS YOVEūOLV ( IV 25 , 51 ) , « S'il faut obéir en tout à ses parents ».

XVII .

XVIIIa- b .

tí õplotov mowç épóồLOV (V 50,94) , « Du meilleur viatique de la vieillesse » . nepi tpooñs ( III 17 , 42 ; III 18 , 37 ) , « De la nourriture » .

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MUSONIUS RUFUS

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XIX . nepì oxénns (III 1 , 209) , « De l'habillement » . XX .

nepi oxevūV ( V 28 , 20 ) , « Du mobilier » .

XXI . Èx ToŨ nepi roupãç (III 6, 24), « De la coupe des cheveux » . On constate , à la lecture de ces titres, que Musonius traite seulement de sujets relevant de l'éthique. (e ) La Diatribe XV : celle -ci est divisée en deux morceaux dans Stobée. Mais un papyrus du IIIe siècle , publié par 80 J. E. Powell, The Rendel Harris Papyri of Woodbrooke College, Birmingham , Cambridge 1936 , p . 1-5 , puis édité par 81 Id ., « Musonius Rufus : Ei návta tè yivóueva téxva Opentéov in P. Harris 1 » , APF 12 , 1937 , p . 175-178 , non seulement restitue le texte de XV A ( les premiers mots, tels que les a transmis Stobée, offrent quelques modifications par rapport au papyrus, ce qui permet de voir la façon dont Stobée travaillait ), mais surtout a conservé une partie de la transition entre XV A et XV B , soit une dizaine de lignes de grec. Le texte de la diatribe, avec les dix lignes nouvelles , a été repris et traduit dans Lutz 3 , p. 96-100 , puis réédité, traduit et commenté en 1992 par Andorlini et Laurenti 38 , n° 72, p . 480-490 . Il a été traduit également par Festugière 41 , p . 103. Lutz 3, p . 6 n . 12 : « This papyrus written in the third century, must have been a part of the complete Corpus Musonianum from which Stobaeus, two centuries later, took excerpts » . ( f) La survivance du Corpus Musonianum dans la tradition arabe . 82 E. Rohde , Der griechische Roman und seine Vorläufer , Leipzig 1900 , p . 593 n . 2 , a suggéré que derrière l’æuvre portant sur l'éducation et attribuée à Murujanus ( ou Muzujanus, Muzubanus, Muzunajus), qui est signalée dans le Fihrist, composé à Bagdad en 988 par al -Nadim , se cachait peut-être un Hepi taldeiaç de Musonius Rufus. Lutz 3, p. 20 n . 83 , en conclut : « If this were the case , it would mean that part of the Corpus Musonianum now completely lost must have been in existence as late as the tenth century ». Ele signale cependant que l'éditeur du Fihrist, 83 G. Fluegel, Leipzig 1872, t . I , p. 306 et t. II, p. 150, attribuait cet ouvrage à un moine grec : « Wahrscheinlich Name eines griechischen Mönchs, etwa Morianus oder Murianus » . Mais 84 B. Dodge, The Fihrist of al -Nadim . A Tenth Century Survey of Muslim Culture, t . II , New York 1970, p . 718 , lit : « of Myronianus about culture » et commente (p . 718 n . 45 ) : « This title is given in various forms by the different versions, but it almost certainly refers to a book by Muronianus » ( 2 + M 207 ) . Les fragments transmis par Épictète. Il faut distinguer les six fragments provenant des Entretiens ( fragments LXIII -LXVIII Hense ) et les cinq transmis par Stobée qui portent le lemme Ρούφου εκ των Επικτήτου Περί φιλίας ( fragments XXXVIII-XLII ) . Apparemment donc , si l'on en croit H. Schenkl, dans la Préface à son édition de 1916, p. XLIII-XLV, les Entretiens d'Épictète par Arrien ( > A 425 ) auraient comporté à l'origine un tel chapitre aujourd'hui perdu. Dans un des fragments de ce lepi plnías ( fr. XXXVIII ) , on retrouve des concepts chers a Épictete ( χρήσις των φαντασιών, τα μεν εφ ' ημίν / τα δ ' ουκ Šp ' nuiv ). Pohlenz 31 , p . 145, estime qu'Épictète a exprimé dans sa propre terminologie les vues de Musonius . Il est certain qu'on ne retrouve pas ces

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MUSONIUS RUFUS

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concepts ailleurs dans les fragments de Musonius. On notera encore qu’hormis le fragment XXXIX qui rapporte un mot de Lycurgue, les cinq fragments conservés par Stobée se caractérisent par leur portée doctrinale , tandis que les six fragments tirés des Entretiens rapportent des remarques de Musonius pleines de vivacité, dont Épictète a bien su retenir la pointe. Les autres fragments. Quatre sont conservés par Aulu -Gelle ( XLIX- LII ) , deux par Plutarque ( XXXVI - XXXVII ) et un par Aelius Aristide ( LIII ) . Si on met à part le fragment XLIX transmis par les Nuits attiques d'Aulu -Gelle, qui apparaît comme un extrait de discours , ces textes qui ont en eux-mêmes leur unité pourraient provenir des Απομνημονεύματα Μουσωνίου του φιλοσόφου dont l'existence est attestée par la Souda. Celle - ci toutefois, en les attribuant à Asinius Pollion , commet une erreur, puisque ce Pollion vivait sous Pompée ( Souda II 2165 , t . IV , p. 185 , 8 Adler ) . Il semble que l'auteur ait confondu Asinius Pollion avec un autre Pollion , soit le Valérius Pollion d'Alexandrie qui vivait à l'époque d'Hadrien , qui fut le maître de Marc Aurèle et que la Souda présente comme grammairien et philosophe (II 2166, t. IV , p. 185 , 12-15 Adler) , soit , ce que Lutz considère comme plus plausible , puisqu'il est facile de confondre Asinius et Annius , l'Annius Pollion , gendre de Barea Soranus et exilé en même temps que Musonius , au moment de la conjuration de Pison ( cf. Tacite, Annales VI 9 , 3 ; XV 56 et 71 ; XVI 30 ) . Zeller 8 , p. 756 , n . 3 de la page précédente, Hense 1 , p . XII , et Lutz 3 , p. 10, ont opté pour la première solution, von Fritz 2 , col . 896, plutôt pour la seconde . Quoi qu'il en soit, il n'est pas certain que les fragments en cause proviennent de l'ouvrage de Pollion , lequel a peut-être complètement disparu. Les avis sur cette question restent partagés et les arguments convaincants font défaut ( voir Lutz 3, p. 11 n . 31 ) . Les lettres. Celles échangées avec Apollonius de Tyane et celle adressée à Pancratidès sont considérées comme inauthentiques. Quant aux deux lettres de recommandation adressées par Dion Chrysostome à un certain Rufus ( p . 259 Hercher ), on peut supposer qu'elles ont notre Musonius pour destinataire . L'influence de Musonius. Sur les liens entre Musonius et le christianisme primitif, voir 85 P.W. van der Horst, « Musonius Rufus and the New Testament. A contribution to the Corpus Hellenisticum » , NT 16, 1974, p . 306-315 ; 86 W. Klassen , « A Child of Peace . Luke X , 6 in first century context » , NTS 27, 1981 , p . 488-506 ; 87 M. Adinolfi, « Le diatribe di Musonio Rufo sulla donna e il matrimonio alla

luce delle lettere paoline » , dans G.C. Bottini (édit . ), Studia Hierosolymitana III , nell'ottavo centenario francescano ( 1182-1982 ) , « Collectio Major » 30 , Jérusalem , Studium Biblicum Franciscanum, 1982 , p. 121-135 ; 88 D.L. Balch , « I Cor . 7 : 32-35 and Stoic Debate about marriage, anxiety and distraction » , JBL 102 , 1983 , p . 429-439 ; 89 W. Klassen , « The king as “ living law ” with particular reference to Musonius Rufus » , SR 14 , 1985 , p . 63-71 ; 90 Id . , « Musonius Rufus, Jesus and Paul . Three first - century feminists » , dans P. Richardson et J.C. Hurd (édit . ) , From Jesus to Paul . Studies in honour of Francis Wright Beare, Waterloo (Ontario ) 1984 , p. 185-206 ; 91 R.B. Ward , « Musonius and Paul on Marriage » , NTS 36 , 1990 , p . 281-289 ; Ramelli 27 ,

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MUSONIUS RUFUS

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p. 27 n . 19, note une certain nombre de passages parallèles entre les diatribes de Musonius et les écrits néo - testamentaires. Dans les écoles au second siècle , on citait Musonius , puisqu'Aulu - Gelle (** A 509) , Nuits Attiques XVI 1 ( = fr. LI Hense ) raconte qu'à l'école , quand il était adulescentulus, il retint par cæur un évouunuáriov du philosophe, court et bien dit , qu'il se plaît à rappeler dans ses Nuits attiques. On croit retrouver l'influence de Musonius chez deux auteurs du second siècle , d'une part le stoïcien Hiéroclès ( » H 124) qui vécut sous Hadrien, d'autre part Clément d'Alexandrie ( C 154) dont le Pédagogue abonde en parallèles avec les Diatribes de Musonius ; voir Wendland 50 , p . 22-34 ; 92 Id . , Philo und die kynisch - stoische Diatribe, Berlin 1895 , Anhang : « Musonius und Clemens Alexandrinus » , p . 68-73 ; 93 P. Parker, « Musonius in Clement », HSPh, 12 , 1901, p. 191-200 ; 94 M. Spanneut , Le Stoïcisme des Pères de l'Église?, Paris 1957 , p. 107-111 ; 95 J. M. Blázquez , « El uso del pensamiento de la filosofia griega en el Pedagogo ( I - II ) de Clemente de Alejandría », Anuario de historia de la Iglesia ( Pamplona Universidad de Navarra Facultad de Teología ), 3 , 1994 , p. 49-80, notamment p. 59-62 .

MARIE -ODILE GOULET CAZÉ.

199 MUSONIUS DE TYR RE2

MII

Philostrate ( V. soph. II 1 , p. 556-557 Olearius) fait allusion à un Musonius de Tyr, auprès de qui Lucius ( = L 70) , un familier d'Hérode Atticus , reçut une formation philosophique ( Μουσωνίω δε τω Τυρίω προσφιλοσοφήσας ) . Sur la possibilité de corriger Tupiw en Tuppnvõ et par conséquent d'identifier ce Musonius avec Musonius Rufus, voir la notice « Musonius Rufus » ( 2 + M 197 ). MARIE-ODILE GOULET -CAZÉ. 200 MYDRON (? ) Ce nom ( non attesté par ailleurs) apparaît avec ceux de plusieurs philosophes présocratiques dans un unique passage de la version arabe du Pseudo -Plutarque ( Aétius ) . Voir C. Baffioni, « Anaximène, Anaximandre , Anaxagore et Démocrite dans la tradition arabe » , DPhA , Supplément, Paris 2003, p. 753 , 757 , 767 et 770 ( toutes ces références visent le même passage ) . Pour le texte arabe, voir H. Daiber (édit . ) , Aetius Arabus. Die Vorsokratiker in Arabischer Überlieferung, coll . « Akademie der Wissenschaften und der Literatur. Veröffentlichungen der Orientalischen Kommission >> 33 , Wiesbaden 1980 , p . 156 : « Anaxagore ( > A 158 ) , Démocrite ( D 70 ) , Métrodore (» M 149 ) et Mydron pensent que le corps du soleil est comme une roche en feu » . Mais l'original grec d'Aétius a ici ( II 20 , 6 ) : « Pour Anaxagore, Démocrite et Métrodore , c'est une masse (uúdpov ) ou une pierre incandescente » (trad . Lachenaux) . Il semble bien que la version arabe ait pris pour une autorité supplémentaire un mot grec dont elle ne comprenait pas le sens . RICHARD GOULET.

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MYIA

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201 MYÈS DE PAESTUM RE 1-2 Pythagoricien dont le nom apparaît dans le catalogue de Jamblique, V. pyth . 36, 267 , p. 145 , 10 Deubner. Dans la Souda, (s. v. "INUÇ, I 591 , t. I , p. 665, 22-25 Adler) , il est dit qu'un certain Myès fit une epitomé des Elxealxai TpáĘELS d'Hippys (2H 159) . Il s'agit probablement de la même personne, étant donné que le nom est très rare , selon E. Bux , art. « Myes » 1 , et K. von Fritz , art. « Myes » 2 , RE XVI 1 , 1933 , col . 996. On a aussi formulé l'hypothèse ( U. von Wilamowitz -Moellendorf, « Hippys von Rhegion » , Hermes 19 , 1884, p. 442 452, notamment p. 444-445 ) que l'epitome ne concernait pas Hippys , mais le pythagoricien Hippasos ( » H 144 ); le changement de nom serait dû à une confusion créée par l'hypocoristique. BRUNO CENTRONE. 202 MYIA RE 2 Pythagoricienne dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique, V. pyth. 36, 267 , p . 147 , 1 Deubner, où elle est présentée comme épouse de Milon de Crotone ( M 166 ). En ce qui concerne ce dernier, dans le passage de la V. pyth. 30 , 170, p. 95 , 26-27 Deubner, où il est dit que la fille de Pythagore (Myia ?) en vint à épouser Ménon de Crotone, Ménage proposait de lire Mawvl à la place de Mévwvl. Chez Porphyre, V. Pyth. 4, il est dit que Théano donna à Pythagore un fils, Télaugès , et une fille, Myia, selon d'autres sources également Arignotè ( 2 * A 331 ) , et que de ceux-ci furent conservés des écrits pythagoriciens. On a conservé en effet une lettre apocryphe de Myia à Phyllis sur le soin des enfants. Elle a été éditée par 1 R. Hercher, Epistolographi Graeci, p. 608, puis par 2 H. Thesleff, The Pythagorean Texts, p. 123 , 11 - 124, 8 , et par 3 A. Städele, Die Briefe des Pythagoras und der Pythagoreer, coll . « Beiträge zur klassischen Philologie » 115 , Meisenheim am Glan 1980 , p . 162-165 ( texte grec et traduction allemande ); p. 267-281 ( introduction et commentaire ) : il s'agit de 35 lignes écrites dans un dialecte dorien superficiel et contenant divers archaïsmes. La lettre est datée vers 200 av . J.-C. par 4 H. Thesleff, Introduction , p. 102 ; à la fin du II ° siècle ap. J.-C. par Städele 3, p . 269. [ Traductions. Française : 5 M. Meunier, Femmes pythagoriciennes. Frag ments et lettres de Théano, Périctioné, Phintys, Melissa et Myia, Paris 1932 , réimpr. 1980 , p . 113-116 ; anglaises : 6 K. S. Guthrie, dans The Pythagorean sourcebook ; 7 V.L. Harper, dans M.E. Waithe (édit . ) , A history of women philosophers , vol . 1 , Ancient women philosophers, 600 B.C. - 500 A.D. ,,

Dordrecht /Boston / London 1987 , réimpr. 1992 , p . 15-16 ( les auteurs considèrent C.M. ) à tort cette lettre comme un document de l'ancien pythagorisme ). Dans l’Anonyme de Photius (Bibl. cod. 249 , 438 b ) les filles de Pythagore sont appelées Aisara (2 A 69) et Myia. Dans la Souda (s . v. Muğa , M 1363 , t. III , p. 421 , 28 Adler) Myia est dite Samienne ( originaire de Samos ) . Voir également Souda (s.v. Iudayópaç, II 3129, t.IV , p . 262 , 26-27 Adler = Schol. in Plat. Phaed. 600 b, et s.v. Oeavó 2 ; Clément, Stromates IV 19 , 121 , 4. C'est peut-être à Myia que fait référence un passage de l'historien Timée (FGrHist 566 F 131 = Porph ., V. Pyth . 4 ) qui rapporte que la fille de Pythagore à Crotone

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MYIA

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aurait été à la tête des jeunes femmes. Voir enfin Lucien , Éloge de la mouche 11 , 13-15 ; K. von Fritz, art. « Myia » 2, RE XVI 1 , 1933 , col . 1002. BRUNO CENTRONE. 203 MYLLIAS DE CROTONE Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique, V. pyth . 36 , 267 , p. 143 , 22 et 146, 18 Deubner. A propos du secret pythagoricien, Jamblique, V. pyth. 31 , 189 , p . 104 , 24 Deubner, cite Hippobote et Néanthe ( FGrHist 84 , fr. 31a) comme sources d'un récit sur les pythagoriciens Myllias de Crotone et son épouse Timycha de Sparte ( 88 189-194) : un groupe de pythagoriciens à qui l'on avait tendu une embuscade sur l'ordre du tyran Denys entrèrent par hasard , en s'enfuyant, dans un champ où poussaient des fèves ; pour ne pas enfreindre le précepte qui imposait de ne pas toucher les fèves, les fuyards s'arrêtèrent et furent tués par les assaillants. Ces derniers rencontrèrent ensuite Myllias et Timycha qui étaient restés en arrière à cause de la grossesse de la femme. Les ayant faits prisonniers , ils les conduisirent devant le tyran . Denys leur offrit de régner avec lui et, devant leur refus, leur promit la vie sauve s'ils lui expliquaient pourquoi leurs compagnons avaient préféré mourir plutôt que de piétiner les fèves. Myllias répondit que si eux avaient préféré mourir plutôt que de piétiner les fèves, lui préférerait piétiner les fèves plutôt que de révéler la raison de leur choix . Denys ordonna que Myllias fut exécuté et que Timycha soit torturée; mais cette dernière se trancha la langue avec ses dents et la cracha à la face du tyran . [Sur le topos de la langue tranchée crachée à la face du tyran , voir 1 T. Dorandi, « De Zénon d’Élée à Anaxarque : fortune d’un topos littéraire », dans Ainsi parlaient les Anciens. In C.M. ] honorem Jean - Paul Dumont, Lille 1994, p. 26-37 . L'épisode figurait également dans la Vie de Pythagore de Porphyre ( § 61 ) ; le manuscrit Bodleianus s'arrête précisément sur la mention du récit d'Hippobote et de Néanthe, dont la suite n'est pas conservée. La citation précédente de Nicomaque ( » N 50 ) par Porphyre ( $ 59) permet d'établir que la source directe de Jamblique était Nicomaque . Voir 2 W. Burkert, Lore and Science, p . 98 et n . 6. Il faut rapprocher ce passage du récit d'Hermippe ( Diog . Laert. VIII 40 = fr. 20 Wehrli ) qui rapporte que Pythagore mourut durant la guerre qui opposait Agrigente et Syracuse pour n'avoir pas voulu traverser un champ de fèves ; il est difficile de déterminer lequel des deux récits est le plus ancien. Voir Burkert 1 , p . 117 n . 47 . [3 Gregor Staab , Pythagoras in der Spätantike : Studien zu “ De vita Pythagorica " des lamblichos von Chalkis, Stuttgart 2002, p. 124 , avec la n. 297 , pense que les derniers para graphes conservés de la V.P. ( S $ 59-61 ) seraient un ajout dû à un scribe tardif, qui aurait voulu offrir au lecteur une illustration de la fameuse amitié pythagoricienne. D'après Staab, « [djiese Erzählung von Phintias und Damon fügt sich weder in die klare Struktur der Vita noch entspricht sie dem Vorgehen des Porphyrios, der bisher alles mit Blick auf Pythagoras selbst berichtet hatte » . Pour appuyer son hypothèse, l'auteur attire l'attention sur le parallèle qui existe entre la fin du 8 58 (qui serait donc le dernier de la V.P. ) et la fin des évangiles de Matthieu et de Marc (Mt 28 , 20 ; cf. Mc 16, 8 et 16, 20) : ici et là on retrouve en effet le même souci pour la conservation de la parole du Maître après sa disparition , exprimé à l'aide d'un vocabulaire assez semblable. Mais cela n'exclut pas que , après avoir traité de Pythagore et

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raconté la fin de son école , Porphyre soit passé ensuite à l'examen de la biographie et/ou des doctrines d'autres pythagoriciens, comme il était d'usage dans les Histoires de la philosophie de son temps (c'est ainsi qu'a procédé p. ex. Diogène Laërce dans son livre VIII, consacré à Pythagore et aux pythagoriciens). D'autre part, s'il est vrai que la tradition arabe de la V.P. ne connaît pas les épisodes illustrant la pia a pythagoricienne, Staab n'a pas pris en considé ration un passage d'Ibn Abi Uşaybi'a sur les écrits ( faux et authentiques) de Pythagore et des pythagoriciens, un passage qui est pourtant absent de l'original grec tel qu'il nous est parvenu , et qui, de ce fait, semble confirmer la mutilation du texte transmis – la V.P. n'est d'ailleurs pas le seul texte porphyrien à avoir subi pareil accident: il suffit de rappeler la fin abrupte du De abstinentia ( cf. l’Introduction de M. Patillon et d’A . -Ph . Segonds au livre IV de l'ouvrage, C.M.) CUF , Paris 1995 , p. LI -LVI).

Jamblique , V. pyth. 28 , 143 , p. 80, 11-14 Deubner (cf. Élien , V.H. IV 17 = Aristot ., fr. 191 Rose, fr. 174 Gigon) , raconte que Pythagore amena Myllias à se souvenir qu'il avait été Midas , fils de Gordios, et que Myllias se rendit sur le continent ( Asie mineure ) pour accomplir sur sa tombe les rites qui lui avaient été prescrits par Pythagore; la source ultime de l'épisode est fort probablement Aristote . Voir Burkert 1 , p. 142 et n . 120 . BRUNO CENTRONE .

204 MYONIDÈS Jamblique, in Nicom ., 163 , p. 116, 4-7 Pistelli, mentionne les pythagoriciens Myonidès ( DK 56 = 30 Timpanaro Cardini) et Euphranor ( E 129), présentés comme plus récents, et il leur attribue la découverte de quatre médiétés ( pour les formules qu'il emploie voir 1 G. Loria , Le scienze esatte nell'antica Grecia , Milano 19142 , p. 344 sqq . ) qui s'ajoutaient à celles qui avaient été découvertes par Hippasos ( ** H 144 ) et Archytas (2 * A 322 ) . Il ne semble pas possible de retrouver de plus amples informations sur Myonidès et Euphranor. Voir 2 W. Burkert, Lore and Science , p. 442 n . 92. BRUNO CENTRONE . 205 MYRMEX RE 8

IV- III ?

Philosophe mégarique ( ? ) , fils d'Exénète , désigné comme dialecticien par Étienne de Byzance (s.v. Enetoi). Son nom figure dans un passage de Philippe de Mégare (cité par Diogène Laërce II 113 ) qui énumère ceux que la réputation de Stilpon ( II O 3 Giannantoni ) attira à Mégare et que ce dernier s'attacha comme disciples. Voir K. Döring, Die Megariker, fr. 164 A et B ; commentaire p. 145-146, et K. von Fritz, art. « Myrmex » 8 , RE XVI 1 , 1933 , col . 1107 . Le rattachement à la cité d'Énétos rapporté par Étienne de Byzance provient d'une mauvaise lecture de sa source , Diogène Laërce, Exainetou, « fils d'Exénète » ayant été lu ex Enetou, « d'Énétos » . ROBERT MULLER .

206 MYRO DE RHODES Femme " philosophe ” d'époque inconnue qui aurait écrit des "Chries de reines” et des récits mythiques (xpɛ aç yuvalx @ v Baoua Swv xai uúčovç) , selon la Souda M 1465 , t . III , p. 429 , 4-55 Adler. Elle semble absente de la RE , car il faut la distinguer de la poétesse Myro (ou Moiro ) de Byzance , qui s'inté

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ressait elle aussi aux mythes (cf. J. Geffcken , art. « Moiro » , RE XV 2, ( 1932 ) , col . 2512-2513 ) . RICHARD GOULET. 207 MYRÔNIANOS D’AMASTRÉE Diogène Laërce cite à six reprises les ‘ Quota iotopixà xepárala de ce biographe ( I 115 ; III 40 ; IV 8 et 14 ; V 36 ; X 3 ) , qui comprenaient plus qu'un livre, puisque « le premier » est cité en IV 14. Les trois dernières références concernent des philosophes qui auraient connu l'esclavage : Xénocrate , racheté par Démétrius de Phalère ( » E 54 ) , Pompylos , l'esclave de Théophraste, Mys ( - M 210 ) , l'esclave d'Épicure ( E 36 ). Pompylos et Mys figurent dans le chapitre consacré par Aulu -Gelle à ce thème ( II 18 , 8 ) . L'unité du thème donne à penser que V 36 et X 3 proviennent, comme IV 14 , du premier livre. Diogène aura réparti dans trois biographies un développement qui , conformément au titre de l'ouvrage de Myrônianos, tentait d'établir un parallèle historique entre diverses figures. Le fait que Diogène se permette d’abréger le titre en citant les ' Ouola , montre qu'il faut comprendre le titre complet comme signifiant « Chapitres de similitudes historiques » , plutôt que « Chapitres historiques similaires » . Si D. L. IV 14 doit être rapproché des deux derniers fragments, il est possible que IV 8 , qui met en scène Xénocrate et Antipatros de Macédoine, provienne toujours du seul et même passage . C'est ce que suppose Ed . Schwartz , art. « Diogenes » 40 , RE VI 1 , 1903, col . 742 , qui considère également que les deux premiers fragments ( I 115 : Épiménide ; II 40 : Platon ) ont pu être empruntés à un même passage qui traitait de proverbes. Absent de la RE. Selon Fr. Leo , Die griechische -römische Biographie nach ihrer litterarischen Form , Leipzig 1901 , p . 51 n . 2 , 58 et 60 , Diogène Laërce aurait eu une connaissance directe de l'ouvrage de Myronianos. Le nom de “ Myronianus ” a été lu par Dodge comme celui d'un auteur grec écrivant sur la culture dans le Fihrist d’al -Nadim . Voir B. Dodge, The Fihrist of al-Nadim ,2 vol . , New York 1970, t. II , chap. VIII, sect. 1 , p. 718. G. Flügel , dans G. Flügel, J. Rödiger et A. Müller (édit. ), al-Nadim , Kitāb al -Fihrist, 2 vol . Leipzig 1871-1872, t . II, p. 150, y reconnaît plutôt le nom d'un moine grec : Morianus ou Murianus. RICHARD GOULET. 208 MYROPNOUS ( le Parfumé)

MII

Personnage, sans doute fictif, des Fugitifs de Lucien . Son nom signifie « Le Parfumé » , litt. « qui exhale l'odeur du parfum » . « Philosophie » , un des personnages du dialogue, se plaint des mauvais traitements que lui font subir des gens qui se prétendent philosophes et qui se mettent sous le patronage d'Antisthène ( > A 211 ) , Diogène ( PD 147 ) et Cratès ( PC 205 ) - les grands noms du cynisme -, mais qui , en réalité, font semblant d'être philosophes afin d'échapper à leur condition d'esclaves . Devant l'émotion que manifeste Philosophie, Zeus, son père, demande à Héraclès et à Hermès de

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descendre avec elle sur terre pour exterminer ces « chiens » . Ils arrivent alors dans une ville de Thrace, Philippopolis, où ils rencontrent des hommes à la recherche de trois esclaves fugitifs accompagnés d'une femme que ceux - ci ont réduite en esclavage . Ces esclaves en fuite font partie précisément des gens dont se plaint Philosophie . Il s'agit de Cantharos [-C 37a ) ( $ 28 ) , Lécythion ( » L 26) et Myropnous ( 8 32 ) . Lorsque Philosophie demande à Hermès de prononcer un jugement , celui - ci ordonne à Lécythion et à Myropnous de retourner chez leurs maîtres et de continuer à apprendre leur précédent métier qui , dans le cas de Myropnous, consistait à raccommoder les manteaux déchirés. Mais auparavant l'un et l'autre seront fouettés avec de la mauve ( $ 33 ] ( si l'on adopte la correction uaotiywdévte proposée par De Jong, alors que les manuscrits ont uaotlywoévra , auquel cas seul Myropnous aurait droit au fouet).

MARIE -ODILE GOULET - CAZÉ. 209 MYRTILUS DE THESSALIE RE 7

II ?

Grammairien originaire de Thessalie , probablement fictif, qui est l'un des interlocuteurs du banquet décrit dans les Deipnosophistes d'Athénée (II - III ) . Il voit dans les philosophes de son époque notamment des faux philosophes, et il s'attaque dans cette perspective principalement aux cyniques ( ou du moins aux représentants des aspects les plus rudes et les plus grossiers de cette philosophie ) et aux stoïciens. Cf. 1 R. Hanslik, art. « Myrtilos» 7 , RE XVI 1 , 1933 , col . 1166. Historicité et personnalité philosophique. Myrtilus n'est connu que par le banquet d'Athénée ( * A 482 ) qui est censé avoir eu lieu dans la maison d'un riche et illustre haut fonctionnaire romain , P. Livius Larensis . Certains convives de ce banquet sont des personnages historiques connus par ailleurs , comme le célèbre juriste et haut fonctionnaire romain Ulpien de Tyr ( Domitius Ulpianus ), mort en 228 , qui est le principal intervenant dans le dialogue . En revanche, comme dans le cas de Myrtilus, l'historicité d'autres personnages n'est pas attestée par ailleurs , à commencer par l'historicité même de l'hôte Larensis ; et c'est le cas aussi du cynique Cynulcus ( « conducteur de chiens » , de son vrai Théodore, au dire d'un autre convive , Démocrite de Nicomédie (2D 70a] : cf. XV , 669 e , 697 b ) , qui est le deuxième interlocuteur par ordre d'importance dans le banquet et le principal opposant d'Ulpien , dont il critique souvent la pédanterie. Cela dit, dans le cas de Myrtilus, qui est le troisième interlocuteur par ordre d'importance, l'idée qu'il peut s'agir d'un personnage tout à fait fictif semble se heurter à la difficulté qu'Athénée, contrairement à ses habitudes, est assez prodigue en données biographiques sur son compte ( cf. 2 L. Rodríguez nom

Noriega Guillén , Ateneo , Banquete de los eruditos, libros I - II, introd ., trad . y notas, coll . « Biblioteca clásica Gredos » 257 , Madrid 1998 , p . 51 ) : on sait en effet par Athénée qu'il était originaire de Thessalie ( III , 108 d ; XIII , 568 c ) , qu'il était le fils d'un cordonnier ( XIII , 568 e ) , qu'il avait vécu à Corinthe , où il exerça comme sophiste ( XIII , 567 c , 573 c ) , et qu'il réalisa un voyage de Synnade à Métropolis, en Phrygie ( XIII , 574 f ).

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Or, le métier de cordonnier que l'on attribue à son père est un élément qui , dans la littérature philosophique populaire, se trouve souvent rattaché à l'image de l'individu qui possède des aptitudes naturelles et une situation appropriée pour se consacrer à la philosophie . On a donc eu tendance à l'interpréter comme le signe supplémentaire d'une pure création littéraire : cf. 3 C. B. Gulik , Athenaeus, The Deipnosophists, with an English transl., coll . LCL 204, London 1927 , t . I , p . XIII , qui signale cette humble origine et le métier du père comme un lieu commun de la littérature cynique . En revanche, Rodríguez -Noriega Guillén 2 , p. 51 n . 97 , insiste sur la possibilité que le renseignement en question puisse être authentique dans ce cas , comme le personnage de Myrtilus en général. Le plus prudent est donc de laisser dans le doute la question de son historicité, ou d'affirmer en tout cas la possibilité (comme c'est, en général, probablement le cas de tous les personnages du banquet ) d'un mélange d'éléments historiques et d'éléments fictifs. Sur la figure du cordonnier philosophe, cf. 40. Lau , Schuster und Schusterhandwerk in der griechisch -römischen Literatur und Kunst, Inaug. -Diss. Bonn 1967 , 217 p. ; 5 R. F. Hock , « Simon the shoemaker as an ideal cynic » , GRBS 17 , 1976, p. 41-53 ; réimpr. dans M. Billerbeck (édit . ), Die Kyniker in der modernen Forschung : Aufsätze mit Einführung und Bibliographie, coll. « Bochumer Studien zur Philosophie » 15, Amsterdam 1991, p. 259-271 : 6 R. Goulet, « Trois cordonniers philosophes » , dans M. Joyal (édit. ), Studies in Plato and the Platonic tradition : essays presented to John Whittaker, Aldershot 1997, p. 119-125, repris dans R. Goulet, Études sur les vies de philosophes, p. 145-149. En ce qui concerne son propre métier, on ne peut pas conclure, comme le remarque Hanslik 1 , que Myrtilus était poète du fait qu'il se trouve rattaché par son nom au comique du Ve siècle av . J.-C. ( XIII , 566 e) . Pour expliquer sa personnalité, il faut plutôt tenir compte de son métier d'enseignant : en fait, Ulpien le considère comme un didáoxalos ( IX , 386 e ) ; il est qualifié ailleurs dans le banquet comme un grammairien ( ypauzuatıxóc, XIII , 567 c ; 610 c ; Ypapuatıxúratos, 570 a) , et l'on fait l'éloge de son érudition ( roavuaoin , XIII , 610 b) . On l'appelle aussi « sophiste » ( 0oplotńs, XIII , 567 a) et on peut même l'imaginer comme un sophiste itinérant ( cf. supra Corinthe, Phrygie ). On sait au moins qu'il a exercé en particulier ce métier à Corinthe, si bien qu'il est appelé « le sophiste des Corinthiens» (XIII , 573c ; cf. ibid. 567 c ). Si Myrtilus est appelé dans le banquet « sophiste » ou , le plus souvent, « grammairien >> sur un ton clairement méprisant, notamment par Cynulcus qui lui reproche son excès d'érudition comme une charlatanerie , il emploie aussi à son tour sur un ton similaire le terme de « philosophe » (plóoodoc ), en parlant justement de personnages comme Cynulcus (cf. XIII , 572 b , 610 b - e ). Par là , Athénée exprime sans doute ses sentiments dans le vif débat qui oppose à son époque « littérature » et « philosophie » . Cynulcus commence par reprocher à Myrtilus, notamment en raison de son amour des courtisanes, la mollesse de sa vie ( XIII , 566 fsqq. ), accusation dont il se défend (XIII , 571 a sqq . ) . Myrtilus est en fait le grand interlocuteur du livre XIII d'Athénée, intitulé par la tradition Sur les femmes, mais qui représente en réalité une espèce de dialogue sur l'amour en général , un épwtixòç kóyoç: cf. 7 J.L. Sanchis Llopis, Ateneo de Náucratis, Sobre las mujeres, Libro XIII de La cena de los eruditos, trad., coll . « Akal/Clásica » 40 , Torrejón de Ardoz 19943 , 204 p . ( cf. en particulier p. 25-39) ; 8 L.K. McClure, Courtesans ai table :

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gender and Greek literary culture in Athenaeus, New York London 2003, XII -242 p. , notamment p. 51-56. Myrtilus illustre la nature d'Éros, ainsi que les souffrances des amoureux, à travers une série de fragments d'Euripide, de Pindare et de plusieurs poètes comiques du IVe s . av . J.-C. ( cf. 561 a - 563 b ) . Il cite ensuite un fragment du poète Hermeias de Curion (cf. 9 J.U. Powell, Collectanea Alexandrina, Oxford 1925 ; réimpr. 1970, p. 237 ) qui fustige les stoïciens comme des charlatans et des comédiens qui font justement le contraire de ce qu'ils proclament. A ce sujet, Myrtilus s'attaque ici en particulier ( cf. 563 e – 564 f) aux stoïciens en tant que pédérastes , les qualifiant de corrupteurs d'enfants, et ajoutant que ce n'est que sur ce seul point qu'ils imitent Zénon, lequel n'eut jamais de rapport avec des femmes mais toujours avec de jeunes garçons (= Antigone de Caryste, fr. 33 A Dorandi) : il leur reproche de proclamer qu'il faut aimer non seulement les corps mais aussi les âmes des favoris, alors qu'ils disent aussi qu'il faut les retenir jusqu'à l'âge de 28 ans ; et de choisir leurs favoris pour leur menton rasé . Quant à la barbe, il leur rappelle les enseignements de Chrysippe, qu'il dit admirer, et qui faisait appel à la censure du cynique Diogène ( 2 - D 147) contre les hommes rasés. Myrtilus cite aussi Zénon, qui , comme s'il avait prévu le style de vie hypocrite de ses disciples, avertit ceux-ci de la nécessité de bien comprendre ses enseignements, s'ils ne veulent pas devenir des hommes sordides et avares ( 365 d = Antigone de Caryste, fr. 37 Dorandi). Il dit que la plupart des philosophes ( stoïciens) sont des hypocrites : désireux de se consacrer à l'autarcie et à la frugalité, on les voit mener une vie vulgaire, comme des avares, même s'ils portent des manteaux grossiers et s'ils critiquent ceux qui utilisent des parfums et portent des vêtements un peu plus efféminés. Myrtilus reconnaît qu'il fait lui-même aussi l'éloge de la beauté , et il fournit des renseignements sur la valeur que celle-ci possède notamment chez les Grecs, au point d'être même objet de concours (365 a-366 e ). Théodore - Cynulcus, comme porte- parole des cyniques (philosophes ) présents dans le banquet, répond aux attaques de Myrtilus (cf. 366 e - 571 a) : il accuse celui-ci de ne pas accepter les rapports pédérastiques parce qu'il fréquente les courtisanes ; et immédiatement après il adresse sa réprobation contre les courtisanes et contre tout ce qui a à voir avec elles. Myrtilus, à son tour, en fera l'éloge (571 a - 601 b) : il rappelle la noblesse de l'étymologie de leur nom (Étaipa ), il fait référence aux temples et aux fêtes qui leur sont consacrés, ainsi qu'à leur rôle en tant que bienfaitrices de la communauté ; et il prononce finalement un long discours sur les courtisanes les plus célèbres et leurs surnoms (ÉpwTixòç xatároyos ) . Il reconnaît qu'il tombe facilement amoureux , mais il nie qu'il soit perturbé à cause de l'amour, comme le prétend Cynulcus ; il se borne à accepter aussi bien l'importance d'Éros que celle d'Aphrodite ( 599 e ) . Il revient (601 e - 605 d) sur l'amour des garçons , et il finit par reconnaître à la pédérastie une fonction positive du point de vue social: il évoque la Crète, Athènes ( l'épisode du tyrannicide ), etc. Cependant, à côté de cela, il raconte d'autres anecdotes amusantes sur des rapports pédérastiques, et il reprend le ton de la censure et de l'avertissement à l'encontre des philosophes qui ne croient pas à l'amour ( impossible ) des femmes. Pour lui , il suffit de renoncer, lorsqu'on comprend qu'il est impossible. En revanche, il accuse les philosophes ( stoïciens) de manquer de sentiments et de s'adonner à la débauche et à la violence sous les effets du vin ( il raconte l'anecdote de Persée de Citium et de la joueuse de flûte : cf. Antigone de Caryste, fr. 34A Dorandi). Myrtilus reprend le sujet primitif du dialogue se concentrant sur la beauté des femmes (608 a - 610 a), et il cite de nombreux passages en témoignage. A ce point du banquet, Cynulcus intervient pour critiquer l'excès d'érudition exhibé par Myrtilus: il le méprise à nouveau comme grammairien, et il prétend montrer que par un tel excès d'érudition Myrtilus ne fait en réalité que cacher son ignorance (610 b-e). A son tour, Myrtilus poursuit son attaque contre les philosophes , qui méprisent la littérature ( uloodiołóyol ) . Il se réjouit du fait qu'ils se trouvent souvent expulsés des villes par leurs gouvernants ( 610 e ) . L'attaque est maintenant adressée nettement contre les cyniques représentés par Cynulcus : il leur reproche de mépriser les qualités positives et admirables du chien , c'est- à -dire son flair qui lui permet de distinguer ce qui lui est propre de ce qui lui est étranger, et la fidélité de sa protection pour tous ceux qui le traitent correctement. Bien au contraire, ces cyniques-là ne s'associent à personne et ne connaissent personne ; ils ne

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s'attachent à imiter que les côtés négatifs du chien (611 c ) : « Le chien est par nature injurieux et vorace ; pire, il mène une vie misérable ... et dépouillée ; or ces deux aspects, vous vous appliquez à les imiter : vous dites des méchancetés, vous êtes gloutons et qui plus est, vous vivez sans toit et sans foyer » ( trad. 10 M.-O. Goulet - Cazé, « Les premiers Cyniques et la religion » ,dans Ead. & R. Goulet (édit. ) , Le cynisme ancien, p. 117-158 , notamment p. 137 n . 92 ). Bref, ils se révèlent pour Myrtilus étrangers à la vertu et inutiles dans la vie. Myrtilus va même jusqu'à déclarer que « rien n'est moins philosophe que ceux qui s'appellent philo sophes » ( ουδέν γάρ έστι των καλουμένων φιλοσόφων αφιλοσοφώτερον , 611 c ). Η termine son attaque contre les philosophes en évoquant le socratique Eschine, qui peut paraître admirable si on lit les dialogues qu'il a publiés sous son nom, mais le serait beaucoup moins si on le jugeait d'après le portrait qu'en fait Lysias ( 2 +L94 ) dans un discours dirigé contre lui (611 d - 612 f = SSR VI A 16). Comme on peut le voir, Myrtilus considère que les philosophes (ou ceux qui se présentent comme tels ) ne sont en réalité que de faux philosophes. D'après lui , c'est eux paradoxalement qui méritent le moins d'être appelés des « amants de la sagesse » . Il s'attaque de façon spécialement virulente aux cyniques et aux stoïciens, mais il s'en prend en général à tous les socratiques et à tous les philo sophes, dans la mesure où ils sont pour lui en principe suspects d'hypocrisie. En ce qui concerne les cyniques , il faut noter que le portrait qu'en trace Athénée ailleurs , à travers notamment Ulpien , est tout à fait négatif, évoquant surtout les traits de la gloutonnerie et de la grossièreté (cf. III, 96 f, III , 121 f), comme s'il voulait montrer la face la plus désagréable, la plus rude et incon venante de cette philosophie , qui était sans doute la face la plus couramment montrée par les cyniques de son époque. Et cela coïncide avec les traits que le personnage ( historique ou pas) de Myrtilus attribue à Théodore -Cynulcus et aux autres philosophes . On peut préciser que Myrtilus pouvait éprouver de l'admi ration pour les vrais représentants du cynisme, si on pense qu'il cite quelquefois de façon positive Diogène, et qu'il semble aussi manifester un certain respect pour les ancêtres des stoïciens tels que Zénon et Chrysippe ( cf. supra ), peut-être relativement aux attitudes qui pouvaient les rapprocher justement des cyniques primitifs. Cela dit , nous préférons renoncer à ranger Myrtilus proprement parmi les cyniques , même à titre fictif ( cf. 11 M.-O. Goulet-Cazé, L'ascèce cynique : un commentaire de Diogène Laërce VI 70-71, coll . « Histoire des doctrines de l'Antiquité Classique » 10, Paris 1986 , réimpr. 2001, p. 248 ). Il semble bien que la condition de philosophe au sens propre ne convienne pas trop bien à un personnage comme Myrtilus. Il semble plutôt rattaché à la tradition littéraire, et en ce sens on peut voir en lui peut -être un certain reflet d'Athénée lui - même . Par ailleurs, comme le fait Sanchis Llopis 7 , p . 37 n . 1 , on peut rapprocher la posi tion d'Athénée dans la polémique « littérature » versus « philosophie » de celle d'un auteur comme Lucien (" L 66 ) : « En semejante polémica Ateneo se muestra muy cercano a Luciano , quien en su Banquete, que reproduce la oposi ción literatos/ filósofos, arremete duramente contra la hipocresía y vulgaridad de los sofistas y el exceso de erudición vacua de su época. » PEDRO PABLO FUENTES GONZÁLEZ.

M210

210 MYS RE 2 et 5 (doublon ! )

MYS

581 IV - III

Esclave d'Épicure. Il est mentionné à plusieurs reprises dans la vie d'Épicure de Diogène Laërce. En X 3 , après avoir signalé que les trois frères d'Épicure avaient philosophé avec lui , Diogène ajoute que , selon les Similitudes historiques de Myronianus d'Amastrée ( > * M 207 ), ce fut aussi le cas de son esclave Mys . Plus loin , en X 10 , après avoir énuméré diverses qualités d'Épicure, dont « sa bienveillance envers ses parents , ses bienfaits envers ses frères, sa douceur à l'égard de ses serviteurs, comme il ressort clairement de son testament et aussi du fait qu'ils philosophaient avec lui » (trad. Balaude ) , Diogène présente Mys comme le plus célèbre (évôo &oratoc ). On peut estimer que Diogène généralise ici à tous les serviteurs un renseignement qui n'était originellement fourni que pour Mys . Le testament d'Épicure se termine par l'affranchissement de plusieurs esclaves : Mys , Nicias , Lycon , ainsi qu ' servante du nom de Phaidrion ( X 21 ) . Aulu-Gelle , Nuits attiques II 18, 8 (repris par Macrobe, Saturnales I 11 , 42 ) , mentionne Mys , l'esclave d'Épicure, à l'intérieur d'un chapitre consacré aux philosophes célèbres qui avaient connu une condition servile . Plusieurs lettres d'Épicure auraient Mys comme destinataire selon Usener ( fr. 152-155 ) , mais un nouvel examen des papyri semble avoir amené Arrighetti à rejeter ces témoignages. Voir R. Goulet , notice « Épicure de Samos » , E 36 , DPA III , 2000 , p. 178 .. Cf. F. Geyer, art. « Mys » 2, RE XVI 1 , 1933 , col . 1184 , et W. Capelle, art. « Mys » 5 , RE XVI 1 , 1933 , col . 1185 . RICHARD GOULET.

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1 NASON

La diatribe II 14 des Entretiens d'Épictète porte comme titre A Nason ( Ilpos Náowva ). C'est apparemment la seule diatribe qui porte un titre de cette nature . Nason est- il ce riche romain évoqué au début de la diatribe, qui entre dans l'école avec son fils et avec lequel Épictète dialogue un peu plus loin ? Il est connu de l'empereur et possède à Rome beaucoup d'amis ( $ 18 ) . RICHARD GOULET. 2 NASTAS DE CAULONIE Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique, V. pyth . 36, 267 , p . 146 , 4 Deubner. Sur ce nom voir A. von Blumenthal, « Messapisches » , Glotta 17 , 1929 , p. 152-153 . BRUNO CENTRONE.

3 NAUCRATÈS D'ÉRYTHRÉE RE 2

MIVA

Rhéteur, disciple d'Isocrate ( I 138 ) . Théopompe de Chios ( FGrHist 115 T 3a) , d'après Photius , Bibliothèque, cod. 176 , 120 b 31-39 , disait avoir été le contemporain d'Isocrate d'Athènes , de Théodecte de Phaselis et de Naucratès d'Érythrée. « Ils auraient tenu le premier rang avec lui dans l'éloquence chez les Grecs. Mais à cause de leur manque de ressources, Isocrate et Théodecte écri virent des discours pour de l'argent, se firent sophistes pour enseigner à la jeunesse et tirèrent leur subsistance de ces métiers. Lui- même et Naucratès ayant de quoi se suffire consacrèrent leur temps à la philosophie et à l'étude » ( trad. Henry ). Comme d'autres rhéteurs il aurait composé un discours funèbre pour Mausole à la demande de son épouse Artemisia ( Souda , s.v. Okoðumns, 138 ) , vers 352/1. Voir aussi Aulu-Gelle , Nuits attiques X 18 , 6. Il faut le distinguer d'un Naucratès d'Érythrée (RE 3 ) plus récent, commen tateur d'Homère et disciple d'Aristarque. Cf. F. Alexander, art. « Naukrates >> 2 , RE XVI 2 , 1935 , col . 1952-1954 . RICHARD GOULET.

4 NAUCRATÈS LE SAGE Stobée, Anthol. III 20 , 64 , t. III , p. 553 , 5-8 Hense , cite une sentence de ce personnage d'époque inconnue . Il est difficile de savoir s'il peut être identifié à l'un des quatre homonymes répertoriés dans la RE.

584

N4

NAUCRATÈS LE SAGE

Voir Sibylle Ihm , Ps.-Maximus Confessor. Erste kritische Edition einer Redaktion des sacro -profanen Florilegiums “Loci communes ” , coll . « Palingenesia » 73 , Stuttgart 2001, chap. 19, 32/50, p. 478. Pour les différents homonymes connus, voir W. Pape et G.E. Benseler, Wörterbuch , t. II, p. 978 a. RICHARD GOULET. 5 NAUCYDÈS RE 1 ( = s.v. “ Nausikydes” 3 )

Iva

Ce nom est associé à celui de Nausiphane ( ** N 8) dans la succession “ itali que ” chez Diogène Laërce 1 15. Ces deux philosophes y apparaissent comme disciples de Démocrite et maîtres d'Épicure. Diels a cependant supprimé le nom de Naucydès qui ne réapparaît pas chez Diogène Laërce ni ailleurs. Il pourrait s'agir d'une variante pour le nom de Nausiphane . K. von Fritz, art. « Nausi kydes » 3 , RE XVI 2 , 1935 , col . 2020-2021 , suppose qu'il faut lire non pas Naucydès , mais Nausicydès. Voir déjà W. Pape et G. E. Benseler, Wörterbuch , t . II , p. 980 a, qui citent le prologue de Diogène sous le lemme “ Nausikydès". Mais les deux noms sont attestés. RICHARD GOULET. 6 NAUMACHIOS D'ÉPIRE

MIV

Dans son commentaire du mythe d'Er de la République de Platon , Proclus fait appel à diverses sources ayant raconté des récits de résurrections , notamment Naumachios d'Épire qu'il situe deux générations avant lui , du temps de ses grands- parents ( in Remp. II , p . 115 , 7-15 Kroll ). Proclus emprunte plusieurs anecdotes à ce paradoxographe. Cette source réapparaît en II , p . 323,5 sqq . , à propos d'un autre détail du même mythe d'Er . Naumachios aurait consacré un monobiblos à deux problèmes du mythe d'Er . A propos de l'anecdote de Polycrite d'Étolie résumée par Proclus , L. Brisson , Le sexe incertain . Androgynie et hermaphrodisme dans l'Antiquité gréco - romaine, coll . « Vérité des mythes » , Paris 1977 , p . 14-23 , traduit et commente la version complète conservée par Phlégon de Tralles qui s'en remet au témoignage de Hiéron d'Éphèse. On l'a identifié à l'auteur d'un poème parénétique en hexamètres sur la conduite de la femme dans le mariage , dont de longs passages sont cités par Stobée , Anthologie IV 22 b , 32 (Tauixà napayyénuata ); IV 23 , 7 ; IV 31 c , 76 ( TIɛpi tútov ). Le poème est édité par E. Heitsch , Die griechischen Dichterfragmente der römischen Kaiserzeit, t . I , 2e éd . , Göttingen 1963 , n ° 29 , p . 92-94 . Cf. R. Keydell , art. « Naumachios » 1 , RE XVI 2 , 1935 , col . 1974 1975. A. J. Festugière, dans sa traduction du Commentaire de Proclus, t. III , Paris 1970, p. 59 n . 2 , considère cependant cette identification comme douteuse. Voir J. Latacz, art. « Naumachios » , NP VIII , 2000 , col . 751 . On connaît également un Naumachios d'Épire, qui aurait été le maître du médecin Phila grios d'Épire (cf. E. Bernert, art. « Philagrios » 2, RE XIX 2 , 1938 , col . 2103-2105 ). La Souda (O 295 ) situe ce dernier après Galien ( 2 + G 3 ) ; il aurait par ailleurs été utilisé par Oribase ( » O 40 ). Ce Naumachius pourrait donc être un peu plus ancien que l'auteur dont parle Proclus. RICHARD GOULET.

N8

NAUSIPHANE DE TÉOS

NAUSICYDÈS

585

NAUCYDÈS ( N 5)

7 NAUSICYDÈS DE CHOLARGES RE 2 PA 10571

F va

Comme Teisandros d'Aphidna et Andron , fils d'Androtion ( 2 A 176) , ce jeune athénien est l'associé de Calliclès ( ** C 17 ) dans l'étude de la philosophie , selon Platon , Gorgias 487 c . Socrate rapporte les avoir entendus un jour délibérer sur l'extension qu'il fallait donner aux études philosophiques . « L'opi nion qui prévalait parmi vous fut qu'il ne fallait pas la trop approfondir, et vous vous êtes conseillé les uns aux autres de prendre garde à ne pas vous laisser gâter à votre insu par l'excès même de la science » ( trad. CUF) . Selon E.R. Dodds, Gorgias, Oxford 1959 , p. 282 , « the general picture which the evidence suggests is that of a group of ambitious young men , drawn from the jeunesse dorée of Athens , who have acquired just enough of the " new learning” to rid them of inconvenient moral scruples » . Cf. Debra Nails, The People of Plato , p. 204-205 . Dodds identifie ce Nausicydès avec un riche meunier, mentionné par Aristo phane, Assemblée des femmes, v . 426, et par Socrate dans les Mémorables de Xénophon ( II 7 , 6). Les charges publiques qu'il aurait fréquemment assumées auraient été rendues possibles par l'exploitation de la misère publique. Une scholie ancienne sur le passage d’Aristophane précise : Navolxúdouc Oi uèv ότι άλφιταμοιβός, οι δε ότι πένης. Cette identification avait déja été avancée par W. Pape et G. E. Benseler, Wörterbuch , t . II , p . 980 a. Anneliese Mordrze , art. « Nausikydes » 1-2 , RE XVI 2 , 1935 , col . 2020 , la considère comme possible , mais non démontrée. RICHARD GOULET .

8 NAUSIPHANE DE TÉOS RE DK 75

MIV

Ce philosophe apparaît en Diogène Laërce I 15 , avec un mystérieux Naucydès (3 - N 5 ) comme intermédiaire entre Démocrite ( 2 - D 70) et Épicure ( 2E 36 ) à l'intérieur de la succession italique. Il est présenté comme un disciple de Pyrrhon en IX 69 et 102, et aussi comme un maître d'Épicure dans le premier de ces passages . En IX 64, on apprend que Pyrrhon aurait captivé Nausiphane , alors encore tout jeune , par sa façon de pratiquer le débat dialectique et qu'Épi cure avait coutume de l'interroger sur le style de vie de Pyrrhon. Apollodore confirmait dans sa Chronique qu'Épicure avait été l'auditeur de Nausiphane et de Praxiphane (Diogène Laërce X 13 ) , mais Épicure, dans sa Lettre à Euryloque refusait cette dépendance intellectuelle, prétendant avoir été son propre auditeur. Le même Épicure prétendait dans ses lettres que Nausiphane , dans un moment d'exaspération , l'avait insulté en le traitant de « maître d'école » ( X 8 ). Cicéron, De natura deorum I 26 , 73 ( A 5 ) , confirme cette hostilité d'Épicure envers Nausiphane “ le démocritéen” . Nausiphane est également qualifié de démocritéen par la Souda qui en fait un maître d'Épicure, comme Pamphile le disciple de Platon. ( A 4 ) . Dans sa vie d'Épicure, Ariston de Céos prétendait que le Canon d'Épicure avait emprunté sa substance au Trépied ( TP novc ) de son maître Nausiphane (Diogène Laërce X 14 = A 6) . Quant à l'hostilité d'Épicure à

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l'égard des mathématiques (ou des disciplines scolaires ), elle serait due , selon Sextus , Adv . math . I 2 ( A 7 ) , à la haine qu'il ressentait pour Nausiphane, “ le disciple de Pyrrhon ”. Il évoquait et calomniait dans sa lettre aux philosophes de Mitylène l'enseignement qu'il avait reçu de lui à Téos ( A 7 ) . Il l'attaquait de même et le qualifiait de tous les noms ( « poumon marin » , « illettré » , « char latan » et « fille de joie » , dans la traduction de J.-P. Dumont) dans son traité Sur la nature et dans ses lettres ( A 9 ) . Philodème présente longuement dans sa Rhétorique des vues sur la rhétorique philosophique que l'on attribue à Nausiphane. Témoignages et fragments. 1 DK 75 , t . II , p . 246-250 et Nachtrag, p . 424 . Les fragments tirés des papyrus sont à réviser ( voir les travaux de Longo Auricchio et Tepedino Guerra ). Sources papyrologiques. Philod ., Rhétorique , PHerc . 832/1015 - 2 F. Longo Auricchio et A. Tepedino Guerra, « Per un riesame della polemica epicu rea contro Nausifane » , dans F. Romano (édit. ) , Democrito e l'atomismo antico , Catania 1980 , p . 467-477 ( = SicGymn 33 , 1980 ) , et 3 F. Longo Auricchio, « Testimonianze della Retorica di Filodemo sulla concezione oratoria nei primi maestri epicurei», CronErc 15 , 1985 , p. 31-61 . Philod . , Ad contubernales, PHerc . 1005, fr. 116 Angeli ( cf. 4 A. Angeli [édit . ) , Filodemo , Agli amici di scuola (PHerc. 1005 ), Napoli 1988 , p. 169, 241-251 ). Traduction . Française : 5 Dumont , Les présocratiques, p . 968-974 et les notes p . 1513-1515 . Italienne : 6 V.E. Alfieri ( édit . ) , Gli Atomisti. Frammenti e testimonianze . Traduzione e note , coll . « Filosofi antichi e medievali . Collana di testi e di traduzioni » , Bari 1936 , p . 367-379 , traduction reprise dans 7 G. Giannantoni et alii, I presocratici : testimonianze e frammenti, 1'e éd . : coll . « Filosofi Antichi e medievali » , Bari 1969, réimpr .: coll . « Biblioteca Universale Laterza » Bari 1981 et 1983 , p. 857-863 . Cf. 8 K. von Fritz, art. « Nausiphanes» , RE XVI 2 , 1935 , col . 2021-2027 . Bibliographie . 9 W. Görler, « Nausiphanes aus Teos » , GGP, Antike 4 , 2 , 1994 , p . 768-769 , 773 ( bibliographie ) ; 10 D. L. Blank ( édit . ) , Sextus Empiricus, Against the grammarians, Oxford 1998 , p. 75 sq . Études récentes. 11 S. Zeppi, Intorno al pensiero di Nausifane. Nausifane tra la sofistica e Democrito , Univ . degli Studi di Trieste , Ist. di Filos, 1962 , 18 p.; 12 F. Longo, « Nausifane nei papiri Ercolanesi » , dans F. Sbordone , Ricerche sui papiri Ercolanesi, Napoli 1969 , t. I , p. 7-21 ; 13 J. I. Porter, « Duolo oyeiv . Nausiphanes of Teos and the physics of rhetoric : a chapter in the history of Greek atomism » , CronErc 32 , 2002, p . 137-186 ; 14 D.L. Blank , « Atomist rhetoric in Philodemus » , CronErc 33 , 2003, p . 69-88 . RICHARD GOULET. 9 NAUSITHOOS DE TYRRHÉNIE Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique, V. pyth. 36, 267 , p. 146,1 4 Deubner. Le pythagoricien tyrrhénien Nausithoos est mentionné plus haut par Jamblique ( 27, 127 , p . 72 , 20 - 73 , 1. cf. DK 58 D 7 ) dans un récit qui illustre le précepte pythagoricien de l'amitié : Nausithoos, ayant reconnu en

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Eubule de Messène ( » E 78 ) , qui avait été capturé par les Tyrrhéniens, un disciple de Pythagore, il parvint à le soustraire aux pirates et à le faire retourner à Messène en toute sécurité. BRUNO CENTRONE. 10 NÉANTHE DE CYZIQUE RE

FIVa ?

Auteur grec (originaire de Cyzique, dans la Propontide ), dont la production se trouve à mi- chemin entre les genres historique et paradoxographique , et qui s'est intéressé aussi à la biographie d'une grande variété de personnages illustres, les philosophes entre autres. Son euvre a été sans doute marquée par sa formation comme rhéteur auprès de Philiscos de Milet, le disciple d'Isocrate . Témoignages et fragments : 1 F. Jacoby, FGrHist 84 ( Text: t . II A , p. 191 202 ; Kommentar : t . II C , p. 144-149 ). Cf., pour les fr. 21 b , 22 et 23 , 2 T. Dorandi (édit. ) , Filodemo, Academia , p. 133 sq . (Ac . Index II 38 sqq. , Additam . in marg. inf. V ; trad. p . 187 ; comm . p . 87 , 89, 222 ; cf. introd . p. 35 37). Cf. 3 R. Laqueur, art. « Neanthes aus Kyzikos » , RE XVI 2 , 1935 , col . 2108 2110 ; 4 W. Spoerri, art . « Neanthes » , KP IV , 1972 , col . 29 : 5 M. Beißenberger, art. « Neanthes (Neávons ) » 1 , DNP VIII , 2000 , col . 772 ; 6 W. Burkert , « Neanthes von Kyzikos über Platon : ein Hinweis aus Herculaneum » , MH 57 , 2000 , p . 76-80. Identité et chronologie. Depuis 7 F. Blass , Die Attische Beredsamkeit, 2. Abt. : Isokrates und Isaios, 2. Aufl ., Leipzig 1892 , p . 455 n . 1 ( cf. aussi 8 F. Susemihl, GGLA, t. I , p. 617-619), l'analyse des témoignages sur Néanthe (de Cyzique ) a amené les critiques à distinguer pour des raisons chronologiques deux personnages différents (peut-être apparentés) éloignés l'un de l'autre par environ un siècle : on parle ainsi de Néanthe l'Ancien , dont on place d'ordinaire le floruit ca 3004, et de Néanthe le Jeune ( ca 200a). Récemment, Burkert 6 , p. 79 , a même déplacé un peu plus vers le haut la chronologie de Néanthe l'Ancien , en supposant qu'il était déjà actif ca 330/320, puisqu'on sait aujour d'hui , grâce aux dernières éditions de l'Index Acad . Herc . de Philodème, que Philippe d'Oponte, le disciple et secrétaire de Platon , lui avait raconté de vive voix les derniers moments de celui-ci ( cf. infra ): ce Néanthe aurait donc été un écrivain préhellénistique de la fin du IVe siècle av . J.-C. , contemporain des péripatéticiens Aristoxène de Tarente ( > A 417 ) et Théophraste, ainsi que d'un autre historien, Timée de Tauroménion ; et il aurait été plus vieux en tout cas que le biographe Antigone de Caryste ( A 193 ) et qu'un autre biographe , le péripatéticien Hermippe de Smyrne, dit le « callimaquéen » ( »H 86 ; cf. infra ). Le témoignage le plus ancien nous est fourni par une inscription ( SIG I 377 = T 2 Jacoby ), où l'on trouve Néanthe de Cyzique , fils de Nicotélès, et son frère Polyclès distingués avec les plus grands honneurs par les citoyens de Delphes sous l'archontat d'Héracleidas. 9 É . Bourguet, BCH 35 , 1911 , p . 487 , auquel on doit l'identification du Néanthe de l'inscription avec l'écrivain connu par d'autres sources, avait daté cette inscription tout d'abord vers 287 " ( cf. Jacoby 1 , t . III A , p . 191 ; Laqueur 3 , col . 2108 ; 10 H. Bouvier, « Hommes de lettres dans

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les inscriptions delphiques » , ZPE 58 , 1985 , p. 119-135 ) , mais il corrigea plus tard cette datation , en plaçant l'inscription probablement en 274a ( cf. 11 É . Bourguet ( édit . ) , Fouilles de Delphes, t . III : Épigraphie, 1 : Inscriptions de l'entrée du sanctuaire au trésor des Athéniens, Paris 1929 , n° 429 ; cf., en revanche, 12 G. Daux , Chronologie delphique, Paris 1943 , p. 28 sq ., qui retient à tort comme date 287/2864) . En tout cas , ce témoignage semble s'accorder à celui de la Souda, N 114 , t . III , p. 444, 12 Adler ( = T 1 a Jacoby ), selon lequel Néanthe de Cyzique, qualifié ici de rhéteur, aurait été le disciple de Philiscos de Milet . Celui -ci en effet était le rhéteur, mort très probablement avant 300m, qui fut le disciple d'Isocrate et le maître également de Timée de Tauroménion (cf. 13 F. Solmsen, art. « Philiskos » 9, RE XIX 2, col . 2384-2387 ). En revanche , un autre témoignage ne semble pas s'accorder avec cette chronologie : il s'agit d'un passage d'Athénée XV 57 , 699 d , où l'on cite ( à propos d'une curiosité étymologique) le premier livre d'un ouvrage de Néanthe intitulé Tepi " Attalov iotopía . En effet, on a pensé qu'il doit s'agir du roi Attale jer de Pergame (241-1974), qui avait pour épouse une cyziquéenne ; et l'on a pensé que l'histoire en question n'a dû être composée qu'après la mort de son protagoniste, ce qui ne conviendrait pas au Néanthe dont il était question dans l'inscription . C'est pour cette raison qu'on a attribué cette histoire à un Néanthe ( le Jeune ) qui , provenant de la même famille que son homonyme plus ancien , serait né vers le milieu du IIIe siècle av . J.-C. et dont la vie aurait pu se prolonger jusqu'au II ° siècle ( cf. Jacoby 1 , t. II C, p. 144 ; FGrHist 171 ). Laqueur 3 , col . 2108 sq . , suggéra un moyen d'expliquer ce témoignage problématique afin d'éviter la distinction de deux Néanthe, en corrigeant l'expression nepi " Attalov de la citation d'Athénée en npòç " Attalov. Il imaginait ainsi que Néanthe avait dédicacé ses Histoires ( iotopíal, terme générique qui ferait référence à l'un ou l'autre des titres transmis, cf. infra ) à Attale une fois que celui-ci était monté sur le trône de Pergame ( 2414) : le roi avait épousé une femme de Cyzique, ville qui était aussi par ailleurs très liée à Pergame depuis le temps du fondateur de ce royaume, Philétère. Cette hypothèse, cependant, n'a pas été retenue, et on distingue d'ordinaire deux Néanthe. Euvres. La difficulté se pose de toute évidence pour l'attribution à l'un ou l'autre Néanthe des ouvrages que la tradition rattache à ce nom, ainsi que pour la distribution des « fragments >> sans titre ( cf. F 17-39 Jacoby ) entre les différents titres qui nous sont parvenus. Voici les titres en question : ( a ) Helléniques, ' EXanvixá ( cf. F 1-3 Jacoby ( Athénée ] ) , en six livres au moins ;

(b) Histoire relative à Attale , lepì " Attalov iotopía . ( cf. F 4 Jacoby [ Athénée ] ) ; (c ) Chronique < de Cyzique > , ' 12poi < KuÇexnvõv> ( cf. F [ Athénée ] ) , en six livres au moins ;

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Jacoby

(d ) Les mythes concernant la cité, Tà xatà nóiv uvoixá ( cf. F 6-12 Jacoby ), en cinq livres au moins ; (e ) Sur les hommes illustres, lɛpi évôbEwv åv&pőv (cf.F 13 Jacoby ) ; ( f) Sur les pythagoriciens, lepi tõv Iudayop.xõv ( ?) ;

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(g) Sur les mystères, llepi temetőv (cf. F 14-16 Jacoby), en deux livres au moins. Jacoby 1 , même si apparemment il voulait réserver en principe pour Néanthe le Jeune uniquement l'ouvrage sur Attale ( cf. FGrHist 171 ) , se montre prêt finalement, dans son commentaire ( t . II C , p . 144 ), à lui accorder aussi l'ensem ble des écrits et des fragments historiques. Il considère , en effet, que le caractère varié de ceux -ci amènerait à ranger son auteur dans la tradition des historiens hellénistiques Douris ( FGrHist 76 ) et Ménechme ( FGrHist 131 ) . Jacoby veut interpréter aussi comme favorisant cette chronologie plus basse « le caractère remarquablement philologique des fragments ... et l'intérêt remarquable de l'auteur pour les pythagoriciens » ( cf. infra ). Il ajoute qu'il est plus facile de croire que c'est Néanthe le Jeune plutôt que l'Ancien qui a fait l'objet des critiques de deux historiens périégètes du IIe siècle av . J. -C .: d'un côté , Démétrios de Scepsis (cf. F 39 Jacoby, sur les Argonautes ), qui probablement aurait attaqué les deux ouvrages de Néanthe traitant de Cyzique , aussi bien celui qui portait sur l'époque mythique (Tà xatà nóv uvoixá ) que la chronique qui s'occupait de l'époque historique (* Slpol ) ; de l'autre côté , Polémon d’llion (cf. F 16 Jacoby ), qui aurait attaqué l'ouvrage de Néanthe sur les Mystères, et probablement aussi celui Sur les hommes illustres ( cf. F 13 ) , dans Son écrit Προς τον Νεάνθην Αντιγραφαί. En ce qui concerne l'ouvrage Sur les hommes illustres, Jacoby 1 , ibid. et p. 146 , l'attribue aussi volontiers à Néanthe le Jeune, comme l'avait fait 14 G. F. Unger , « Herakleides Pontikos der Kritiker » , RAM 38 , 1883 , p . 481-506 , notamment p. 492 n . 1. Jacoby 1 , t . II C, p . 146, affirme que cet ouvrage portait sans doute sur la vie des philosophes , et qu'il devait s'occuper aussi des poètes (cf. F 18 Jacoby), mais pas nécessairement des hommes d'État, lesquels auraient été traités, d'après lui , dans les Helléniques, comme l'indiquent le fr. 2 , et peut être aussi le fr. 17 , s'il faut le rapporter au même ouvrage, ces deux fragments portant sur la biographie de Thémistocle. Il considère également la possibilité que l'ouvrage Sur les pythagoriciens, ainsi qu'en général tous les fragmens concernant les philosophes de cette école faisaient partie du même ouvrage Sur les hommes illustres. L'argument en fonction duquel Jacoby attribue cet ouvrage à Néanthe le Jeune se revèle encore une fois fort subjectif, notamment si on pense à la pauvreté de nos témoignages : en effet, Jacoby estime que l'ouvrage en question ne présentait guère un caractère préalexandrin . Il avance aussi un autre argument, dont la faiblesse est tout à fait manifeste, à savoir : qu'alors que Sotion (F 19 Jacoby ), Hippobote (F 31 ; + H 148 ) et même son contemporain Istros peuvent avoir utilisé , au 11/ Ie siècles av . J.-C. , l'ouvrage de Néanthe, celui ci connaît manifestement Hermippe, un auteur du IIIe siècle av . J.-C. ( F 25-26 Jacoby ; » H 86 ; cf. infra ; pour Hermippe voir maintenant 15 J. Bollansée (édit. ) , FGrHistCont., IV : Biography and Antiquarian Literature. A : Biography. Fasc . 3 : Hermippus of Smyrna , Leiden 1999, p . 450, 462 n . 53 , 466 sq .). Cette idée que Néanthe l'Ancien serait le rhéteur disciple de Philiscos de Milet dont parle la Souda et qui apparaît dans l'inscription de Delphes , et que le Jeune serait l'historien auquel il faudrait attribuer les fragments rassemblés par

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Jacoby, fut reprise par Spoerri 4. Cependant, elle fut contestée déjà par Laqueur 3 , col . 2109 , qui avait mis en relief la faiblesse des arguments de Jacoby : d'après lui , le fait que Néanthe soit cité dans certains passages comme source à côté d'Hermippe, Hippobote, Deïlochos, Istros etc. ne permet pas de déterminer si c'est Néanthe qui a utilisé les autres auteurs, ou ceux-ci qui ont utilisé Néanthe ; par ailleurs , les attaques de Démétrios et de Polémon pouvaient s'adresser en fait aussi bien à Néanthe le Jeune qu'à Néanthe l'Ancien . S'il faut continuer à postuler l'existence d'un Néanthe le Jeune qui aurait écrit une histoire relative à Attale ſer après la mort de ce roi en 1979, il n'y a pas de raison de lui rattacher un autre témoignage que celui qui faisait chrono logiquement difficulté à l'idée d'un Néanthe ayant eu son floruit vers le début du IIIe siècle ou même plutôt vers la fin du IVe siècle : l'ouvrage de ce Néanthe le Jeune pourrait bien s'expliquer comme un exemple de monographie historique royale typique dans le milieu des monarchies hellénistiques ( cf. 16 A. Momigliano, The development of Greek biography, Cambridge (Mass .) 1971 , p. 71 , 83 ) . Ce seul témoignage ne permet pas d'aller plus loin, sauf que l'ouvrage en question semble avoir manifesté un goût pour les antiquités et les curiosités les plus diverses qui pourrait expliquer l'intérêt que lui porta un auteur comme Athénée ( > A 482 ) . On pourrait penser dans ce cas à une parenté non seulement familiale mais aussi littéraire entre ce Néanthe et son prédécesseur, puisque celui -ci semble avoir eu le même goût pour la varieté et les détails étranges. En tout cas, on n'a pas en principe de raison de ne pas attribuer à Néanthe l'Ancien tous les autres ouvrages que la tradition rattache au nom de Néanthe.

C'est ainsi que Laqueur 3 attribue à ce Néanthe aussi bien les Helléniques ( qui porteraient de toute évidence sur l'histoire grecque générale) que les deux ouvrages sur Cyzique (mythe et histoire ), l'ouvrage sur l'histoire religieuse (mystères), et l'ouvrage (ou les ouvrages) ayant un caractère plus proprement biographique. Récemment Burkert 6 a insisté en particulier sur l'impossibilité que Néanthe le Jeune ait été l'auteur de l'ouvrage Sur les hommes illustres, et sur la nécessité par conséquent d'attribuer cet ouvrage à Néanthe l'Ancien . Importance philosophique. Il convient ici de nous concentrer maintenant sur la production biographique de Néanthe, en particulier sur les fragments qui se rapportent à la vie des philosophes. A ce sujet, il faut considérer notamment l'ouvrage Sur les hommes illustres, ainsi que Sur les pythagoriciens, que ce titre fasse référence à un ouvrage différent ou bien à une partie du même ouvrage qui a pu circuler séparément. Quoi qu'il en soit, il ne fait pas aujourd'hui de doute que l'auteur de cette production philosophique fut Néanthe l'Ancien ( qui est donc l'auteur qui compte pour nous dans le contexte de cette notice ). C'est grâce aux derniers éditeurs de l’Index Acad. Herc . de Philodème (cf. 17 K. Gaiser [édit. ) , Philodems Academica : die Berichte über Platon und die Alte Akademie in zwei herkulanensischen Papyri, coll . « Supplementum Platonicum » 1 , Stuttgart /Bad Cannstatt 1988 , et Dorandi 2 ) qu'on a pu se faire aujourd'hui une idée un peu plus précise de l'ouvrage Sur les hommes illustres, même si ce titre n'est pas cité dans les fragments qui nous ont été conservés du

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papyrus d'Herculanum qui contenait un brouillon de l'ouvrage de Philodème. Jusqu'alors, on devait se borner au témoignage d'Étienne de Byzance, Ethnica, s.v. Kpagtóc ( F 13 Jacoby ), le seul témoignage où l'on trouve cité l'ouvrage de Néanthe par son titre, à propos du poète comique Épicharme ( *** E 29 ) et de la courtisane Laïs. En ce qui concerne le papyrus d’Herculanum , l'édition de Jacoby ( fondée sur celle de 18 S. Mekler, Academicorum philosophorum index Herculanensis, Berolini 1902; reimpr. 1958 ) était pauvre et très peu fiable (cf. F 21 b, 22-23 ). Il faut donc renvoyer aujourd'hui à l'édition de Dorandi 2 , où Neanthe est mentionné dans la col . II 38. Dorandi 2 , p. 35 n . 37 , ne doute pas que l'ouvrage de Néanthe ( l'Ancien ) qui se trouve derrière cette référence est bien Sur les hommes illustres ( cf. p . 265 ) . D'après lui , cet ouvrage aurait été l'une des sources de la Vie de Platon de Philodème par laquelle celui -ci ouvrait son Histoire de l'Académie . Concrètement, l'état de conservation du texte nous permet d'affirmer que l'auteur a reproduit au moins trois extraits de Néanthe : un sur le nom de Platon, un autre sur l'épisode de son esclavage et sa vente à Égine , et un troisième sur sa dernière nuit. Comme le remarque Dorandi 2 , p. 35 , les deux premiers extraits proviennent sans doute d'une tradition plus ancienne, que Néanthe dit avoir écoutée de Philiscos d'Égine ( ?). Quant au troisième extrait, Néanthe dit avoir eu comme source directe de son récit Philippe d'Oponte, qui était alors le secrétaire de Platon . C'est justement cette dernière source qui amène Burkert 6 , p . 79 , à faire reculer d'une vingtaine ou d'une trentaine d'années le floruit de Néanthe l'Ancien : celui - ci n'aurait pas pu entendre directement de Philippe ( † ca 327a) le récit des derniers moments de Platon s'il n'avait pas été actif déjà vers 330/320a. Selon le premier extrait (cf. Index Acad . Herc., col . II 38-43 , p . 133 Dorandi ) , le philosophe aurait été appelé « Platon » par ses parents à cause de la largeur de son front (cf. D. L. III 4) . En ce qui concerne le deuxième extrait ( cf. Index Acad . Herc., col . II 43 – III 33 , p. 133 Dorandi), voici la reconstitution de l'anecdote selon Dorandi 2 , p. 33 , 36 : Platon est confié à Syracuse à certains marins spartiates qui naviguent vers Athènes ; pendant une escale à Égine, le philosophe , dont on ignore la vraie identité, est vendu comme esclave en compagnie d'autres Athéniens . Devant le comportement des Spartiates, Platon a peur (d'être reconnu ? ) ; malgré cela, il revèle son identité à son racheteur, Annicéris de Cyrène (** A 185 ), et lui promet toute sa reconnaissance en échange de sa liberté. Dorandi 2, p. 36, préfère laisser dans l'obscurité la mention du roi de Macédoine Archélaos (cf. Index Acad. Herc ., col . III 10 sq . , p . 133 Dorandi ) : Gaiser 17 , p. 413 , 417 sq . , avait suggéré une allusion à l'anecdote , connue par d'autres sources ( cf. Dorandi 2 , p. 219) , qui montrait Socrate refusant l'invitation d'Archélaos à sa cour en Macédoine (d'après Gaiser, dans le contexte de l'anecdote sur la vente de Platon , cette allusion se serait située au moment de la demande de paiement d'une rançon faite par les Spartiates à leurs prisonniers, et elle s'expliquerait comme un rappel fait par le philosophe , devant celui qui va payer pour lui la rançon , de l'enseignement de son maître selon lequel il ne faut rien accepter qu'on ne puisse rendre après). En ce qui concerne l'origine et le développement de la tradition sur l'esclavage de Platon à Égine, Dorandi 2 partage les conclusions de Gaiser 6 , p. 399 , 416-421 (cf. aussi 19 H. Thesleff, « Platonic chronology » , Phronesis 34, 1989, p. 1-26, notamment p. 5 ), en particulier sur l'importance du témoignage de Philodème pour reconstituer la vérité historique qui se trouve derrière l'épisode, laquelle fut complètement rejetée notamment par 20 U. Kahrstedt , « Platon's Verkauf in die Sklaverei » , WJA 2 , 1947, p. 295-300 . En outre , cette version de Philiscos /Néanthe, qui serait la plus ancienne et que Philodème reprend, impliquerait une

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défense du tyran Denys ( er (cf. Index Acad. Herc ., col . X , p. 130 sq. Dorandi ), qui aurait été accusé à tort d'être le responsable direct de l'esclavage de Platon , lorsqu'il le chassa de Syracuse vers 390 a. Cette accusation aurait été lancée seulement à une époque ultérieure, quand, afin de souligner la rupture entre Platon et Denys, on aurait rattaché l'épisode d’Égine à la volonté du tyran d'éliminer le philosophe ( cf. Dorandi 2, p. 37 ). Enfin, le troisième extrait ( cf. Index Acad . Herc ., col . III 34 - V 22 , p. 133 sq . Dorandi) contient un récit détaillé de la dernière nuit de Platon tel que Néanthe l'aurait entendu raconter de vive voix par le secrétaire du philosophe. Voici à nouveau la reconstitution de ce récit selon Dorandi 2 , p. 37 sq.: Platon, même s'il souffre de la vieillesse et de la fièvre, accueille chez lui comme hôte un chaldéen accompagné d'une flûtiste thrace. Celle-ci , dans le dessein de faire baisser sa fièvre , commence à jouer, sur la suggestion du chaldéen, un rythme dactylique . Platon s'écrie que le chaldéen a perdu la raison pour avoir suggéré un mètre tellement peu à même d'apporter un soulagement. Pour lui répondre, l'étranger reconnaît l'inaptitude des barbares à comprendre tout rythme, et Platon se réjouit avec l'hôte . Finale ment, pendant la nuit, après s'être réveillé à cause d'un accès plus fort de fièvre , le philosophe meurt. Philodème ( Index Acad . Herc ., Additam . in marg. inf. V , cf. p. 222 Dorandi) oppose à cette version de Néanthe une autre provenant du neveu de Platon (Speusippe ), selon laquelle le philosophe serait mort pendant son sommeil. Gaiser 17 , p. 89-91 , conteste l'hypothèse de 21 F. Lasserre (édit . ) , De Léodamas de Thasos à Philippe d'Oponte : témoignages et fragments, édités, traduits et commentés , coll . « La Scuola di Platone » 2 , Napoli 1987, p. 162 sq. , 219 sq . , 601-611, selon laquelle la source directe des premiers chapitres de l'ouvrage de Philodème (y compris donc les extraits de Néanthe ) aurait été en réalité Hermodore de Syracuse ( 2 - H 91 , p. 664 ; à l'encontre de cette hypothèse, cf. aussi Dorandi 2 , p . 87 ; 22 T. Dorandi, c. r. de Lasserre 21 , Prometheus 15 , 1989, p. 191-192 ) . Dans la Vie de Platon de Diogène Laërce ( III 3 = F 20 Jacoby ) on lit que Néanthe prétendait que le philosophe était mort à l'âge de quatre -vingt - quatre ans (et non à l'âge de quatre - vingt- un ans , en 348/347 , comme le disait Hermippe, ibid. 2 = fr. 41 Wehrli = 70 Bollansée ; cf. Philodème , Index Acad. Herc., col . II 35-38 , p. 129 Dorandi). Néanthe y est cité aussi ( D. L. III 25 = F 22 Jacoby ) à propos de l'arrivée de Platon à Olympie en 366 et de son entretien avec Dion , qui assistait aux Jeux Olympiques et qui préparait une expédition militaire contre le tyran de Syracuse Denys II : cf. Burkert 6 , p . 80 , pour qui Néanthe aurait lu le texte de la septième lettre de Platon ( 350 b-d ) , où cette rencontre est évoquée (cf. 23 L. Brisson, Platon, Lettres, trad. inédite, introd ., notices et notes, coll . « GF » 466, Paris 1994, p. 207 sq . , 217 [ n . 48 ] ) et repré senterait ainsi le témoignage indirect le plus ancien sur ce texte . Les autres socratiques semblent avoir aussi attiré l'attention de Néanthe . Ainsi , on peut conclure de Diogène Laërce VI 13 qu'il a joué un certain rôle dans la caractérisation cynique d'Antisthène : d'après Néanthe , Antisthène aurait été le premier à plier en deux son manteau ( = F 24 Jacoby ). Diogène Laërce cite à ce sujet immédiatement auparavant Dioclès de Magnésie ( 115 ) , qui parta gerait cet avis . En revanche, on apprend ensuite dans le même passage qu'il y avait à ce sujet dans l'Antiquité une polémique, où le nom du pythagoricien du début du IVe siècle av . J.-C. Diodore d’Aspendos ( ~ D 128) intervenait comme le philosophe qui aurait introduit, à côté d'autres habitudes ( se laisser pousser la barbe , porter besace et bâton ) , l'innovation du redoublement du manteau . L'au teur auquel Diogène Laërce attribue cette version est Sosicrate de Rhodes ( 114) . Comme le remarque 24 M.-O. Goulet - Cazé, dans 25 Ead . & alii ( édit. ), Diogène

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Laërce, Vies et doctrines des philosophes illustres, coll . « Le livre de poche » , Paris 1999 , p. 692 n . 5 : « Pour Néanthe et Dioclès, c'est Antisthène qui est le fondateur du cynisme, alors que pour Sosicrate le pythagoricien Diodore affi chait déjà cette caractéristique qui devait devenir typique du cynisme . Cette dernière position pourrait laisser entendre que le cynisme avait une origine pythagoricienne » . A ce sujet, Goulet- Cazé cite 26 B. Centrone, « Diodoros d'Aspendos » , D 128 , DPA, t . II , p. 783 , qui présente Diodore comme « un représentant typique de la tendance acousmatique du pythagorisme, qui fut ensuite confondue avec le cynisme » . Outre Platon et les socratiques, l'intérêt de Néanthe pour la vie des philo sophes s'est porté aussi sur les présocratiques. A ce sujet, on trouve plusieurs témoignages conservés à nouveau chez Diogène Laërce. Celui -ci cite Néanthe par exemple à propos des circonstances de la mort d'Héraclite ( H 64 ), une fois que celui-ci s'était enterré lui - même dans la bouse dans l'espoir de trouver un remède à son hydropisie ( D. L. IX 4 = F 25 Jacoby ) : d'après Néanthe , « ne pouvant s'arracher la bouse , il resta ainsi , et ... , devenu méconnaissable sous l'effet de cette transformation, il devint la proie des chiens » (trad. Brunschwig ). Diogène Laërce vient de citer dans le même passage la version d'Hermippe ( fr. 29 Wehrli = 64 Bollansée) : devant le refus des médecins de souscrire à sa demande de le guérir en vidant ses entrailles, le philosophe se serait mis au soleil et aurait ordonné à ses serviteurs de l'enduire de bouse ; ainsi étendu , il serait mort le lendemain , et aurait été enseveli sur la place publique . Les critiques se sont posé la question du rapport chronologique existant entre ces deux sources , Néanthe et Hermippe : Jacoby 1 , t . II C , p . 147 , soutenait la priorité d'Hermippe ( cf. supra ); en revanche, 27 F. Leo, Die griechisch -römische Biographie nach ihrer litterarischen Form , Leipzig 1901, réimpr. Hildesheim 1965 , p. 113 , s'était déjà prononcé pour la priorité de Néanthe ( cf. aussi Laqueur 3 , col . 2109 ; Momigliano 16 , p . 79 n . 15 ) . Récemment Burkert 6, p. 79, en harmonie avec sa datation plus haute de Néanthe l'Ancien ( cf. supra ), réaffirme cette priorité . A son tour, Bollansée 15 , p . 266 , 466 sq . , tout en admettant l'impossibilité d'établir d'une façon sûre la relation chronologique entre Hermippe et Néanthe, penche plutôt pour l'avis de Jacoby 1 , considérant que le récit de Néanthe sur Héraclite semble, comme l'avait remarqué Jacoby , « eine “ Verbesserung" der hermippischen Vorlage » ( cf. 28 J. Fairweather, « The death of Heraclitus » , GRBS 14 , 1973 , p . 233-239 ) . Néanthe a été aussi une source importante pour la tradition biographique sur Pythagore et ses disciples ( cf. 29 W. Burkert, Lore and science , p. 102) . Diogène Laërce s'est sans doute servi de lui dans l'ensemble du livre qu'il consacre aux philosophes de cette école (cf. 30 B. Centrone, « L'VIII libro delle " Vite ” di Diogene Laerzio » , ANRW II 36, 5 , 1992 , p. 4183-4217 , notamment p. 4185 sq . ) , bien qu'il ne le cite nommément que dans la Vie d'Empédocle: ainsi dans VIII 55 (= F 26 Jacoby ) , où on lui attribue l'affirmation que jusqu'à Philolaos et Empédocle les pythagoriciens laissaient libre accès aux conférences : « une fois que lui-même ( Empédocle) par le biais de la poésie les eut rendues publiques , ils se firent une règle de ne rien communiquer à aucun poète épique ( on dit que

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Platon également a subi le même traitement ; de fait il a été exclu) » ( trad. J.-F. Balaudé). Le passage continue en disant que Néanthe n'a pas précisé duquel des pythagoriciens Empédocle a été l'auditeur. Un peu plus loin ( D.L. VIII 58 = F 27 Jacoby), à propos des tragédies d'Empédocle, Diogène Laërce, après avoir rapporté l'avis d'Héraclide Lembos ( = H61 ), fr. 6 Müller, pour qui les tragédies n'étaient pas d'Empédocle, et celui du péripatéticien Hiéronymos de Rhodes ( 2H 129 ), fr. 30 Werhli, pour qui ces tragédies étaient au nombre de quarante trois, affirme que, d'après Néanthe, il s'agissait d'œuvres de jeunesse et qu'elles étaient seulement au nombre de sept.

Le passage en question n'est pas sûr. Cf. 31 J.-Fr. Balaudé, dans Goulet - Cazé 23, p. 986 n . 9 : « Je traduis avec la correction de Diels reprise par Long (aŭtőv Éntà au lieu de aŭtov ÉTELTA ) , qui ne me semble pas complètement probante, y compris du point de vue gramma tical . L'anecdote est à rapprocher de la Vie de Platon ( III 5 ) : Platon aussi aurait composé des tragédies dans sa jeunesse , avant de les détruire. Empédocle, en revanche, n'aurait pas renie ces æuvres, à moins que le deuxième évtetuXNXÉval ne soit une faute de copiste, et se soit substitué à un verbe tel que apelvéval , comme me le suggère M. Patillon ; il faudrait alors lire : xai aŭtov ÉTELTA ÅPELXÉVAI, autrement dit “ et qu'ensuite il les a reniées” . Cela permet trait de comprendre le doute sur l'authenticité » . Pour sa part, l'édition de 32 M. Marcovich, Diogenis Laertii Vita philosophorum , coll . BT, t. I, Stutgardiae 1999, porte xai aŭtos (Cobet] επτά εντετυχηκέναι.. Selon une troisième citation de Néanthe dans la Vie d'Empédocle de Diogène Laërce ( VIII 72 sq . = F 28 Jacoby ), « Empédocle aurait persuadé les Agrigentins de mettre fin à leurs querelles et de pratiquer l'égalité politique. De plus, il aurait doté beaucoup de filles de la cité qui se trouvaient sans dot , grâce à la fortune dont il disposait » ( trad. Balaudé ) . Burkert 6 , p. 79 , en accord avec la chronologie haute pour Néanthe, considère que celui -ci , en ce qui concerne les renseignements sur les pythagoriciens , Philolaos et Empédocle , a été sans doute une source pour Timon de Phlionte, et peut même au moins être pris en considération comme une source possible pour Timée de Tauroménion (ca 350-250 ; cf. Jacoby 1 , t . II C , p. 552 ; Bollansée 15, p . 492 n . 178 ) . Il corrige ainsi l'idée qu'il avait exprimée dans un ouvrage précédent (cf. Burkert 29 , p . 102 ) , où il défendait la priorité de Timée . On peut déduire aussi facilement des fragments conservés ( cf. F 29-32 Jacoby) que Néanthe a été une source de Porphyre et de Jamblique , qui dans leur Vie de Pythagore respective le citent de concert avec Hippobote ( » H 148 ] ( cf. Jacoby 1 , t . II C , p . 148 sq .; Bollansée 15 , p . 255 n . 71 , 281 sqq . ) . On a pensé par conséquent que ce dernier pourrait avoir fait usage du livre de Néanthe , consi déré par ailleurs comme le « manuel » le plus ancien sur Pythagore ( cf. Burkert 6 , ibid . ; 33 L. Brisson & A. Ségonds [édit.), Jamblique, Vie de Pythagore, introd ., trad. et notes , coll . « La roue à livres » , Paris 1996, p. LXV) . Enfin , Néanthe a dû inclure aussi dans son ouvrage biographique les Sept sages, car Diogène Laërce ( 1 99 = F 19 Jacoby ) le cite à propos de Périandre .

PEDRO PABLO FUENTES GONZÁLEZ.

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Chez Cicéron , Cato maior de senectute 12, 39-41 , Caton rapporte un discours d'Archytas ( *** A 322) sur le plaisir corporel ( cf. Athénée XII , 545 a = Archytas DK A 9 = Aristoxène, fr. 50 Wehrli) qui lui aurait été rapporté dans sa jeunesse à Tarente ( en 209 av . J.-C. ) par Néarque, présenté comme hospes noster, lequel serait resté en rapports d'amitié avec le peuple romain même après la défection de Tarente en 213. Le lien qui unissait Caton et Néarque est rappelé par Plutarque , Cato maior 2 , 3 , selon qui Caton fut l'hôte de Néarque, lequel est présenté comme un pythagoricien, et de qui il entendit le discours d'Archytas contre le plaisir. Il s'agirait d'un personnage inventé selon 1 E. Zeller et R. Mondolfo, La filosofia dei Greci nel suo sviluppo storico , Parte I , Vol . II , a cura di R. Mondolfo, p. 433 n . 4 ; 2 F. Leo, Die griechisch -römische Biographie nach ihrer literarischen Form , Leipzig 1911 , p. 167 ; 3 F. Della Corte, Catone Censore, Firenze 19692; qui aurait réellement existé selon 4 P. Wuilleumier, Tarente des Origines à la Conquête romaine, coll. BEFAR 148 , Paris 1939, p. 328. Voir 5 G. Garbarino , Roma e la filosofia greca dalle origini alla fine del II secolo a . C. Raccolta di testi con introduzione e commento , Torino 1973 , vol . II , p . 324-329 , et en dernier lieu 6 A. Mele , « Archita e Gaio Ponzio Sannita » , dans M. Tortorelli Ghidini , A. Storchi Marino et A. Visconti (édit .), Tra Orfeo e Pitagora. Origini e incontri di culture nell'antichità. Atti dei seminari napoletani 1996-1998, Napoli 2000 , p. 433-444. [Sur l'épisode raconté par Cicéron, voir en dernier lieu l'analyse minutieuse de 7 C. A. Huffman , « Archytas and the sophists » , dans V. Caston et D. W. Graham (édit. ) , Presocratic philosophy. Essays in honour of Alexander Mourelatos, Aldershot 2002, p. 251 270 ; cf.8 Id. , Archytas of Tarentum , Pythagorean, philosopher and mathematician king , Cambridge 2005, p. 73-74 (aperçu d'ensemble ), 307-322 (témoignage d'Athénée), 323-337 C.M. ) (De senectute ). BRUNO CENTRONE . 12 NÉBRIDIUS RESuppl. VII :4

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« De tous les amis d'Augustin entre les années 376 (date de son entrée en fonction à Carthage ) et 390/1 (date de son ordination ) , Nébridius apparaît comme l'un des plus doués sur le plan intellectuel, au témoignage d'Augustin qui ne tarit pas d'éloges à son égard » ( 1 G. Folliet, « La correspondance entre Augustin et Nébridius » dans L'Opera letteraria di Agostino tra Cassiciacum e Milano. Agostino nelle terre di Ambrogio , Palermo 1987 , p . 191-215 , p. 192) . Il subsiste de leur correspondance une douzaine de lettres ( Ep. 3-14 dans 2 K.-D. Daur, Sancti Aurelii Augustini, Epistulae I- LV , coll . CC 31 , Turnhout 2004, p. 6-35 ), qui nous renseignent précisément sur les préoccupations intellectuelles et spirituelles d'Augustin , de Cassiciacum à Thagaste. 1. PROSOPOGRAPHIE Cf. 3 M. de Gonzague, « Un correspondant de Saint Augustin : Nebridius » , Augustinus Magister, Paris 1953 , I, p . 93-99 ; 4 S. Lancel, Saint Augustin , Paris 1999, p . 189-194 ; 5 A. Mandouze (édit . ) , Prosopographie chrétienne du Bas Empire, vol. 1 : Afrique (303-533) , Paris 1982 , p. 774-776 ; 6 A. Solignac ,

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Introduction et notes aux Confessions, coll . BA 13 , Paris 1962 ; 7 T. Viñas Román , « La amistad y los amigos en el proceso de conversión de san Augustín » , Augustinus XXXIII , 1988 , p. 195-213 . La vie de Nébridius est connue par les Confessions. Plus jeune qu'Augustin peut- être d'une dizaine d'années ( cf. De Gonzague 3 , p. 93 , qui formule cette hypothèse d'après le témoignage de la Lettre 98 d'Augustin ), il est né près de Carthage, où son père possède une belle propriété ( Conf. VI 10 , 17 ) . « Sa rencontre avec Augustin se situe au cours de la période manichéenne , inaugurée en 373 à Carthage » (Mandouze 5, p. 774 ) . Il exerce une influence bénéfique sur Augustin en tentant de le persuader aux côtés de Vindicianus de la vanité de la divination (Conf. IV 3 , 6 ; VII , 6 , 8 ) et d'autre part en ébranlant ses convictions manichéennes sur un point essentiel grâce à un raisonnement fondé sur l'incor ruptibilité divine (Conf. VII 2, 3 ) . Il demandait, en substance : « Que peut contre Dieu la race des ténèbres s'il ne consent pas à engager le combat avec elle ? Et il éliminait par avance toute réponse d'un dilemme sans échappatoire possible : ou la race des ténèbres peut nuire à Dieu , et dans ce cas il n'est pas incorruptible; ou elle ne peut lui nuire, et alors il n'y a nulle raison d'engager le combat avec elle » (Solignac 6 , p . 133 ). Suite au départ d'Augustin pour l'Italie, il quitte sa mère et sa maison et le rejoint à Milan à seule fin de vivre avec lui et avec Alypius ( P - A 128 ) « dans la brûlante passion de la vérité et de la sagesse » (Conf. VI 10 , 17 ) . Doué d'une bonne connaissance des lettres, il seconde dans son enseignement Verecundus, un grammairien de Milan ami du cercle d'Augustin , pour lui rendre service, et s'acquitte de sa tâche en se gardant des gens du siècle de façon à se ménager « des heures de loisirs pour des recherches, des lectures, des entretiens sur la sagesse » (Conf. VIII 6, 13 ) . « Absent lors de la fameuse visite de Ponticianus qui précède la conversion d'Augustin et d'Alypius (Conf. VIII 6, 14), Nébridius partage la joie de ses amis , sans être encore libéré d'un penchant au docétisme ( Conf. IX 3 , 6) » ( Mandouze 5 , p . 775 ) . Nébridius est également absent , à son grand regret, au moment du séjour d'Augustin à Cassiciacum (Ep. 4 , 1 ) . De cette époque datent les deux premières lettres conservées de leur correspondance. Rédigées par Augustin ( après les Soliloques (cf. Ep. 3 , 4] ) , elles tiennent notam ment Nébridius au courant des discussions menées . Peu après le baptême d'Augustin ( avril 387 ) , Nébridius « entra lui aussi dans la foi catholique » et , ajoute Augustin , « pratiquant la chasteté parfaite et la continence , il Te servait en Afrique auprès des siens , après avoir gagné toute sa maison au christianisme » ( Conf. IX 3 , 6 ) . Regrettant qu'Augustin se soit installé à Thagaste ( en 388 ) , Nébridius se résout à devoir communiquer avec lui par lettres, jusqu'à sa mort prématurée (Conf. IX 3 , 6 ) , qui fut contemporaine de celle d'Adéodat et qui survint vraisemblablement avant l'ordination sacerdotale d'Augustin (janvier 391 ) .

2. LA CORRESPONDANCE ENTRE AUGUSTIN ET NÉBRIDIUS Cf. 8 O. Du Roy , L'Intelligence de la foi en la Trinité selon saint Augustin , Paris 1966 , p . 391-401 ; 9 M. Dulaey , Le Rêve dans la vie et la pensée de saint

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Augustin , Paris 1973 ; 10 P. Hadot, « “ Numerus intelligibilis infinite crescit” , Augustin , Epistula 3 , 2 » , dans Miscellanea André Combes , t. I , Roma 1967 , p. 181-191 ; 11 Id ., « La notion d'infini chez saint Augustin » , Philosophie 26, 1990 , p. 59-72 ; 12 G. Madec, a Patrie et la voie. Le Christ dans la vie et la pensée de saint Augustin , Paris 1989 ( « 5. Nebridius, de l'incarnation du Fils » , p . 75-78 ) ; 13 F. Navarro Coma , « La correspondencia de Agustín durante su estancia en Casiciaco : una reconstrucción » , Augustinus XLV ( 176-177) , 2000, p. 191-213 ; 14 R. Piccolomini , « Sant'Agostino, Verso la verità. Corrispondenza tra Agostino e Nebridio » , Roma 1990 ; 15 G. O'Daly, Augustine's Philosophy of Mind , Berkeley/ Los Angeles 1987 ; 16 A. Solignac, « Doxographies et manuels dans la formation philosophique de saint Augustin » , Recherches Augustiniennes 1 , 1958 , p. 113-148 ; 17 G. Watson , Phantasia in Classical Thought, Galway 1988 . La correspondance, qui compte douze lettres dont trois sont de Nébridius ( Ep . 5 , 6 et 8 ) , est malheureusement incomplète. L'Elenchus de Possidius signale dix lettres d'Augustin , alors qu'il n'en reste que neuf. Par ailleurs, Augustin fait lui même allusion à de nombreuses lettres reçues de la part de son correspondant. Celles qui nous restent font comprendre les qualificatifs de « quaestionum difficillimarum scrutator acerrimus » (Conf . VI 10 , 17 ) , d ' « inquisitor ardentissimus ueritatis » ( Conf. IX 3 , 6) et de « rerum obscurarum ad doctrinam pietatis maxime pertinentium diligentissimus et acerrimus inquisitor) ( Ep . 98 , 11 ) qu’Augustin attribue à Nébridius . Comme l'écrit Georges Folliet , « ce dossier, bien que incomplet, nous permet de nous faire une idée des problèmes d'ordre philosophico -religieux qui intriguaient les deux amis à cette époque » . Trois sujets principaux y sont abordés : « Le thème du “retour sur soi” ; Le monde - L'âme et ses facultés – La connaissance ; La Trinité – L'incarnation » ( Folliet 1 , p. 194) . Ep. 3-4 : La distinction « entre la nature sensible et la nature intelligible » La Lettre 3 , qui a été analysée par Pierre Hadot ( 10 et 11 ), comporte les premières réflexions d'Augustin sur l'infini. Augustin décline l’appellation d ' « homme heureux » qui lui a été adressée parce qu'il ignore pourquoi le monde a telle dimension déterminée. Si l'on peut diviser la réalité corporelle à l'infini, pourquoi un corps ne pourrait- il pas croître à l'infini ? Pour résoudre cette question , Augustin fait appel à une « doctrine secrète » , qu'il a déjà révélée à Alypius, et qui opère une opposition entre nombre intelligible et nombre sensible : « Le nombre intelligible croît à l'infini sans pourtant diminuer à l'infini car il ne peut pas se fractionner en -deçà de l'unité (monas) » tandis que le nombre sensible, c'est - à -dire la quantité corporelle, « peut diminuer à l'infini mais ne peut pas croître à l'infini » ( Ep. 3 , 2). Le monde sensible admet donc des limites , même si l'on ne sait toujours pas pourquoi il a telle dimension. Une analogie avec des miroirs, rendue possible par la thèse selon laquelle le monde sensible est une image du monde intelligible, doit illustrer cette explication . La notion d'un nombre intelligible qui croît à l'infini et l'opposition entre nombres intelligible et sensible viennent peut-être de l'Introduction arithmétique de Nicomaque de Gérasa ( 3 * N 50) , traduite en latin par Apulée ( P - A 294 ] ( Solignac 16 , p. 136) et plus sûrement du néoplatonisme (Enn. VI 5 , 9, 12 et Sentence 37 de Porphyre ; Hadot 11 , p. 62) . Une telle doctrine permit à Augustin de se libérer de la conception manichéenne de l'infini qu'il partagea un moment. Comme il le dit lui-même , il concevait Dieu comme une grandeur qui traversait les espaces infinis, jusqu'à ce qu'il découvre que Dieu est infini « d'une autre manière » (aliter ) (Conf. VII 14, 20 ) . On comprend mieux dès lors l'importance de ses

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spéculations sur l'infini à cette époque. Augustin conclut sa lettre en consultant Nébridius sur un point de grammaire : « Faut-il dire cupi ou cupiri » ( Ep. 3 , 1 ) ? La Lettre 4 répond au désir qu'avait Nébridius de savoir quels progrès Augustin et ses compagnons avaient faits à Cassiciacum sur « ce qui permet de distinguer la nature sensible et la nature intelligible » . Leurs progrès, insensibles, comme ceux de l'âge, s'opèrent notamment à l'aide du raisonnement selon lequel la supériorité de l'esprit et de l'intelligence sur les yeux et leur vision tient à celle des intelligibles par rapport aux choses sensibles. Ep. 5-7 : L'imagination, la mémoire et l'intellection Après s'être plaint dans la Lettre 5 du fait qu'Augustin soit retenu à Thagaste par les siens (cf. Lancel 4, p . 190 ), Nébridius pose dans la Lettre 6 diverses questions à Augustin sur les facultés de l'âme et tout particulièrement sur ce qu'il nomme « phantasia » et qu'Augustin appellera pour sa part en latin « imagines » ou « imaginaria uisa » (Ep. 7 , 1 ). L'exorde est révélateur du climat intellectuel de leur échange : Nébridius déclare qu'il garde les lettres de son correspondant comme la prunelle de ses yeux et que « certaines lui feront entendre le Christ, d'autres Platon et d'autres Plotin » ( Ep. 6, 1 ). Une double thèse est d'abord formulée : bien que toute représentation de l'imagination ( phantasia ) ne soit pas accompagnée par la mémoire, la mémoire ne peut pas exister sans imagination. Nébridius prévient ensuite une objection qu'Augustin pourrait, selon lui, lui adresser: comment expliquer que nous nous souvenions d'avoir compris ou pensé quelque chose ? En effet,comme il faut le sous-entendre, l'intelligence ne se confond pas avec l'ima gination ; il faut donc qu'il existe une mémoire sans imagination . À quoi Nébridius répond que « lorsque nous avons compris ou pensé, nous avons fait naître quelque chose de corporel et de temporel, qui relève de la phantasia . En effet, soit nous avons ajouté à notre intellection ( intellectus) et à nos pensées des mots, lesquels mots ne sont pas dépourvus de temporalité (sine tempore ) et relèvent du sens ou de la phantasia , soit notre intellect ( intellectus) ou notre pensée ont éprouvé quelque chose de tel qu'ils aient pu en conserver le souvenir dans l'esprit qui imagine (in animo phantastico) » (Ep. 6, 1 ). Il demande enfin pourquoi il ne serait pas possible de dire que la phantasia tient toutes ses images d'elle -même plutôt que des sens. Car il se pourrait que, de même que notre « esprit intellectuel » (animus intellectualis) est incité par les sens à regarder les intelligibles, qui lui appartiennent en propre, de même l ' « esprit qui imagine » soit incité par les sens à contempler des images qui lui sont propres et qui ne lui viennent donc pas d'eux. N'est-ce pas la raison pour laquelle cette faculté peut voir des choses que les sens n'ont jamais perçues ? Dans sa réponse ( Ep. 7) , Augustin montre tout d'abord que la mémoire peut être indépen dante de l'imagination en invoquant la théorie platonicienne de la réminiscence. L'éternité par exemple ne requiert pas de représentation imaginaire pour venir à l'esprit. Le fait cependant qu'elle ne puisse pas y venir à moins que nous nous en souvenions montre qu ' « il peut y avoir une mémoire de certaines choses sans aucune imagination ( sine ulla imaginatione ) » ( Ep. 7, 1 , 2 ). Augustin formule ensuite une distinction entre trois genres de représentations de l'imagi nation, selon qu'elles se rapportent à des choses qui ont été senties ( sensis) ( par ex . Carthage ou Verecundus), figurées (putatis) ( Énée ou trois mondes empilés les uns sur les autres) ou comptées (ratis) (Ep .7, 2, 4) . À l'instar des représentations fictives ou figurées, les représen tations imaginaires de choses comptées sont toujours fausses. Les nombres et les dimensions, les figures géométriques et l'infinité des nombres « ont beau être compris en toute vérité comme je l'affirme quant à moi , ils font pourtant naître de fausses images, auxquelles la raison elle -même s'oppose avec peine, même si ce n'est pas sans peine que l'art du raison nement (disciplinam disserendi, i.e. la dialectique) s'exempte lui-même de ce mal, lorsque, dans les divisions et les conclusions, nous imaginons comme des jetons » . Les représentations imaginaires qui accompagnent la perception rationnelle sont donc comme un produit résiduel qui risque toujours d'être une source d'erreurs. Augustin nie enfin fermement que l'âme ait la faculté pour ainsi dire a priori d'imaginer quelque chose sans avoir fait usage des sens , tout en expliquant « d'où il vient que nous pensions à ce que nous n'avons jamais vu » ( Ep. 7 , 3 , 6). La raison en est, dit-il en reprenant

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une doctrine stoïcienne, que l'âme a le pouvoir d'augmenter et de diminuer les images de ce qu'elle a déjà vu . Lui -même , Augustin , qui a passé son enfance au milieu des terres, a pu imaginer la mer à la vue de l'eau dans une petite coupe. En revanche, il ne pouvait pas se représenter le goût des fraises avant d'en avoir mangé en Italie , et les aveugles de naissance ne savent que répondre quand on les interroge sur les couleurs et sur la lumière ( Ep. 7 , 3 , 6 ). Gerard Watson a souligné l'importance de ce texte d'un point de vue historique. Augustin « est de toute évidence très intéressé par les opérations de la phantasia ,ou de ce qu'il appelle l'imaginatio . C'est grâce à lui , en particulier, que nous avons “ imagination " (ou son proche équivalent ) qui est utilisé comme la traduction la plus commune pour phantasia dans les langues européennes modernes » , même s'il ne fut pas le premier à employer ce terme (Watson 17, p. 138 ). Ep. 8-9 : Les songes L'échange des Lettres 8 et 9 porte sur les rêves , un thème souvent abordé dans des textes contemporains ( cf. Cont . Acad . III 25-28 ; Sol . II 10-12 ; De quant. anim . 33 , 71 , etc. ) . Influencé par certaines doctrines néoplatoniciennes ( cf. Dulaey 9 , p. 79-84) , Nébridius demande par quel art, par quels moyens , les « puissances supérieures » nous montrent des songes tandis que nous dormons. Il envisage à ce propos trois hypothèses : « Ébranlent -elles notre esprit par leurs pensées de sorte que nous imaginions nous aussi ces songes en pensant ( ut nos etiam ea cogitando imaginemur) ? Ou bien est-ce qu'elles nous les présentent et nous les montrent une fois qu'elles ont été faites dans leur propre corps ou dans leur propre imagination ( in sua phantasia ) ? » . Nébridius ne dit rien de la première hypothèse , qui envisage , semble - t - il , une commu nication directe entre les puissances et l'esprit du rêveur en excluant tout intermédiaire corporel ou imaginatif. La deuxième présente l'inconvénient, selon lui , d'impliquer l'existen ce d'une seconde paire d'yeux corporels, interne , qui soit capable de percevoir les images corporelles que les puissances ont formées dans leur corps. La troisième « postule un transfert d'images d’imagination à imagination » ( O'Daly 15 , p . 121). Si toutefois l'imagination est capable d'une telle action, pourquoi Nébridius ne peut-il pas lui-même ébranler l'imagination d'Augustin en produisant en elle des songes qu'il aurait formés le premier dans la sienne ? Cette incapacité est d'autant plus étonnante que nous constatons que notre corps peut lui même influencer nos rêves , lorsque par exemple , ayant soif, nous rêvons que nous buvons , Par conséquent, s'il peut s'établir imaginairement ( phantastice ) un transfert du corps à l'âme , pourquoi deux puissances incorporelles ne peuvent-elles pas agir l'une sur l'autre ? Tout en se disant effrayé par le problème soulevé, Augustin avance l'explication suivant laquelle les démons peuvent bien agir indirectement sur notre âme en agissant sur notre corps. L'explication repose sur la conviction que « tout mouvement de l'âme (animus) produit un effet (aliquid facere )dans le corps » , même lorsque cet effet est pour nous imperceptible. Les démons cependant, qui disposent d'un corps subtil , fait d'air ou d'éther ( Ep. 9 , 3 ), sont quant à eux capables de percevoir les empreintes (uestigia ) corporelles que les mouvements de l'âme ont fixées dans le corps comme une sorte d'habitus, et aussi d'agir sur elles : « Lorsque ces empreintes ont été remuées (agitata ) et tâtées (contretacta ) sans qu'on s'en rende compte , au gré de celui qui les remue et les tâte , elles font naître les pensées et les songes et cela se produit avec une étonnante facilité » ( Ep. 9, 3 ) . Des pensées peuvent donc être communiquées de la part des démons à travers un medium corporel en raison de l'influence réciproque du corps et de l'âme. Une allusion à la théorie médicale des humeurs conforte cette explication , tout en reprenant l'observation de Nébridius au sujet de l'influence du corps sur l'âme dans les rêves : lorsque nous nous mettons en colère un surcroît de bile est secrété dans le corps , qui nous dispose lui -même à entrer facilement dans de nouveaux accès de colère presque sans motif (Ep. 9,4 ). Ep. 10 : Le retour en soi La Lettre 10 tente de réconforter Nébridius, qui souffre de solitude. Elle répond d'abord au reproche selon lequel Augustin négligerait de rechercher les moyens qui leur permettraient à tout deux de vivre ensemble. S'il est plus raisonnable qu'ils se voient à Thagaste plutôt qu'à

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Carthage , comment faire pour mener à bien ce projet ? Augustin propose à son ami de lui envoyer un véhicule approprié à son état souffrant: une litière fermée (basterna ), qui ne lui ferait courir aucun risque, au dire de Lucinianus ; mais comment sa mère supporterait -elle de le voir partir malade , alors qu'elle supportait déjà mal son absence lorsqu'il était bien portant ? De son côté, il ne peut pas abandonner les siens. Il évoque en outre la fatigue des allers - retours qu'il lui faudrait faire. Outre le fait que son état de santé à lui aussi ne les lui permet pas, ces déplacements iraient à l'encontre du genre de vie dont ils ont fait choix et le détourneraient de penser « à ce dernier voyage qu'on appelle la mort » (Ep. 10, 2 ) . Il reste que Nébridius peut « trouver en (son) esprit un séjour agréable » ( apud tuam mentem suauiter habitare) ( Ep. 10, 1 ). Si le thème du retour en soi traverse la correspondance ( cf. Folliet 1 , p. 194-200 ), il trouve ici son expression la plus développée. Augustin formule l'idéal commun qui consiste à « se déifier dans la retraite » (deificari in otio) et à rechercher « cette tranquillité » qui « survient d'autant plus fréquemment qu'on adore Dieu davantage dans le sanctuaire de son esprit >> ( tanto euenit crebrius, quanto quisque in mentis penetralibus adorat Deum) et qui « persiste la plupart du temps même dans l'action humaine, si c'est de ce lieu sacré ( ex illo adyto ) qu'on sort pour agir » (Ep. 10, 3 ). Augustin rappelle à Nébridius qu'il connaît bien « les chemins vers les hauteurs » (itinera in superna) et cet état dans lequel il s'est déjà trouvé lorsque, lui dit-il , « tu te meus au plus intime de toi -même » (in intimis tuis ageris) . Suite à ces exhor tations, qui se comprennent à la lumière de la découverte de l'intériorité initiée par la lecture des platoniciens, Augustin invite son correspondant à examiner lui -même comment ils doivent vivre ensemble et ce qu'il est de son devoir de faire pour sa mère. Ep. 11-12 : L'Incarnation et la Trinité Les Lettres 11 et 12 répondent à une lettre perdue de Nébridius, qui demandait pourquoi c'était le Fils et non le Père qui s'était incarné pour le salut des hommes . Pour Augustin , qui commence par s'étonner que son ami n'ait pas mentionné aussi le Saint Esprit ( Ep. 11 , 2 ), c'était « l'occasion de mettre pour la première fois au net, et en peu de mots, une théologie trinitaire dont on peut suivre la genèse depuis les écrits de Cassiciacum » (Lancel 4, p. 193 ). On a pu écrire que « nulle part la pensée trinitaire d’Augustin ne s'est exprimée de façon aussi ferme et systématique dans les écrits antérieurs à son ordination » (Du Roy 7, p. 391 ; cf. aussi sur ce thème Folliet 1 , p. 205-213 ) . Il déclare que toute nature se caractérise par le fait « premièrement qu'elle est ; ensuite qu'elle est ceci ou cela ; troisièment qu'elle demeure dans ce qu'elle est autant qu'elle le peut» (Ep. 11 , 3 ) . Chacun de ces traits fait voir l'une des personnes de la Trinité : « Le premier fait voir la Cause (Causa ) même de la nature , de laquelle viennent toutes choses ; le second, la Forme (Species) par laquelle toutes choses sont fabriquées ( † ) et formées; le troisième, une certaine Permanence (manentia ), pour ainsi dire, dans laquelle sont toutes choses » . Les trois traits distingués permettent aussi de montrer brièvement l'inséparabilité des Personnes. Ils doivent enfin faire comprendre pourquoi c'est le Fils qui s'est incarné. En effet, « la Forme touche à l'enseignement , et à un certain art ( si l'on peut employer correctement ce terme pour de telles choses) , et à l'intelligence, grâce à laquelle l'esprit lui -même est formé par la pensée des choses » ( Ep. 11 , 4). Le but de l'Incar nation étant d'offrir aux hommes un « enseignement de vie » et « un exemple de ce qui est commandé » , c'est donc normalement au Fils que ce rôle est attribué ( sur cette analyse, qui a fait conclure au « caractère moralisant de la sotériologie augustinienne à cette époque » ( Du Roy 7, p. 398 ) , cf. l'importante « mise au point » de Madec 12 ). Ep. 13 : L'hypothèse d'un corps véhicule de l'âme La Lettre 13 traite « d'une sorte de corps permanent ou de quasi- corps de l'âme ( ... ) que certains appellent aussi son véhicule (uehiculum )» (Ep. 13 , 2 ) . Au dire d'Augustin, la question du « véhicule de l'âme » les « tenait » , Nébridius et lui , « fréquemment en haleine » et était pour eux un « casse-tête » . Elle est donc un témoin supplémentaire de l'importance de certaines doctrines néoplatoniciennes , comme celle de l'öxnua en l'occurrence, dans la recherche philosophique d'Augustin à cette époque.

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C'est en fait le statut intermédiaire de ce prétendu véhicule qui pose problème à Augustin . Comment pouvons - nous de ce fait nous assurer de son existence ? S'il est muable selon le lieu , il est clair qu'il n'est pas intelligible (Ep. 13 , 2 ) . Ce qui n'est pas intelligible peut certes tomber sous les sens. Mais si une chose ne peut être ni comprise ni sentie , il est téméraire de s'en former une opinion . Mieux vaut donc prendre congé de la question posée. Si Nébridius objectait qu'il est du moins possible de comprendre, au sujet de certains corps que nous ne pouvons pas percevoir nous-mêmes , qu'ils existent, il faudrait répondre en distinguant deux espèces de compréhension : « De ces deux espèces, la première, celle au sujet de ce qui est en nous, nous la comprenons par nous-mêmes en consultant Dieu ( illud primum per nos, id est de eo quod apud nos est, Deum consulendo ) ; la seconde, au sujet de ce qui est annoncé par le corps et les sens , nous la comprenons en consultant tout autant Dieu ( hoc autem secundum de eo quod a corpore sensusque nuntiatur, nihilo minum Deum consulendo intellegimus ) ». En d'autres termes, ce qui est intelligible dans nos perceptions présuppose nécessairement une sensation. Par conséquent , dans le cas du prétendu véhicule de l'âme, « personne ne peut connaître si ce corps existe à moins qu'un sens ne lui ait annoncé quelque chose à son sujet » (Ep. 13 , 4 ). Or nos sens n'ont rien décelé de tel . Peut- être ce prétendu corps pourrait-il être perçu par un être doté de sens plus fins que les nôtres ( Ep. 7 , 4). Nos sens étant cependant ce qu'ils sont , la question de son existence ne nous concerne pas . Ep. 14 : Existe - t -il une formedes choses individuelles ? La Lettre 14, qui marque l'interruption de la correspondance, tente de répondre à deux questions : pourquoi Augustin et Nébridius peuvent-il accomplir de nombreuses actions identiques alors que le soleil et les autres astres ne le peuvent pas (Ep. 14, 1 ) ? Le Fils de Dieu , « suprême sagesse et forme première des choses » « contient-il la raison de l'homme de façon générale ou bien aussi la raison de chacun d'entre nous » (Ep. 14, 4) ? C'est , dit Augustin, une « grande question ». Elle soulève de fait un problème ancien , posé par Platon ( Rép . 596 a) puis repris par Alcinoos ( Didasc. 163 , 24 sq . ) ( ^ A 78) et par Plotin (Enn. V 9, 12 ; V 7 [ 18] ), et qui consiste à savoir de quelles entités il y a des formes ( cf. O'Daly 15 , p. 197 ) . La réponse d’Augustin est dense. Elle repose sur la distinction suivante : « Il me semble » , dit- il , « qu'eu égard à la création de l'homme, il y a en Lui seulement une raison de l'homme et non pas la mienne ou la tienne, mais qu'eu égard au cycle du temps , les diffé rentes raisons des hommes vivent dans la pureté qui est la Sienne » . Une analogie fort complexe avec la géométrie doit illustrer ce point « très obscur » . EMMANUEL BERMON .

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Auteur (plutôt qu'auteurs) gréco - égyptien , sous un nom fictif ( légendaire ), d'un manuel célèbre d'astrologie, vraisemblablement produit au cours du 11 ° siècle av . J.-C. , mais fondé sans doute sur une tradition plus ancienne . Ce manuel , dont on ne conserve que des fragments épars, représente l'un des témoi gnages les plus anciens sur la tradition hermétique. Témoignages et fragments. 1 E. Riess (édit . ), « Nechepsonis et Petosiridis fragmenta magica » , coll . « Philologus Suppl . » 6, Göttingen 1891-1893 , p. 323 394 ; 2 F. Boll (édit. ) , Epistula Petosiridi supposita (e cod . Berol. 170 , fol. 10), dans CCAG VII : Codices Germanici, Bruxellis 1908 , p . 161-162 ( de nombreux témoignages importants absents du recueil de Riess 1 se trouvent édités dans le CCAG ; cf. en particulier Boll 2 , p. 129-151 ) ; 3 F. Jacoby (édit. ) , FGrHist 663 , test . 3C : 214 ; 4 A. Olivieri (édit . ) , Aëtii Amideni libri medicinales 1 - IV , dans CMG VIII 1 , Leipzig 1935 , p . 152-255 , notamment p. 164 ( fr. tiré du livre II d'Aétius ) ; 5 S. Zervos , « ’ Aktiov ’ Aulonvoũ Nóyoç déxatoç néuntoç » , Athena 21 , 1909 , p. 7-138 , notamment p . 42 ( fr. tiré du livre XV d'Aétius ) ;

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6 J.-L. Fournet, « Un fragment de Néchepso » , dans H. Melaerts ( édit . ), Papyri in honorem Johannis Bingen octogenarii ( P.Bingen ) , coll . « Studia varia Bruxellensia ad orbem Graeco - latinum pertinentia » 5 , Leuven 2000 , p . 61-71 (pl . 7 ) .

Études. 7 E. Riess, Nechepsonis et Petosiridis fragmenta magica, dissertatio philologa , Bonnae 1890 , 34 p . ; 8 F. Boll , « Entstehungszeit der àotpo Royovueva des Nechepso und Petosiris » , dans Studien über Claudius Ptole mäus : ein Beitrag zur Geschichte der griechischen Philosophie und Astrologie, coll . « JKPh Suppl . » 21 , Leipzig 1894 , p. 236-238 ; 9 E. Riess , « Epikritisches zur Astrologie des Nechepsos und Petosiris » , Philologus 54 , 1895 , p . 185-189 ; 10 C. Darmstadt, De Nechepsonis -Petosiridis Isagoge quaestiones selectae, Lipsiae 1916, 31 p. ( Diss. Breslau ) ; 11 F. Boll , C. Bezold & W. Gundel, Stern glaube und Sterndeutung : die Geschichte und das Wesen der Astrologie, 5 . durchgesehene Aufl., Mit einem bibliographischen Anhang von H. G. Gundel, reprografischer Nachdruck der von W.G. hrsg. 4. Aufl. Leipzig und Berlin , 1931 , Stuttgart 1966 ( 1re édit . Leipzig /Berlin 1918 ) ; 12 W. Kroll , art. « Nechepso » , RE XVI 2 , 1935 , col . 2160-2167 ( supplément de M. Pieper en fin d'article ] ; 13 Id ., art. « Petosiris » , RE XIX 1 , 1937 , 1165 ; 14 F. Cumont , L'Égypte des astrologues , Bruxelles 1937 , réimpr . 1982 , 254 p .; 15 A. J. Festugière, La Révélation d'Hermès Trismégiste, t . I : L'astrologie et les sciences occultes, avec un appendice sur l’Hermétisme Arabe par L. Massignon, coll . « Études bibliques » , Paris 1950 ?, réimpr. « Collection d'Études Anciennes. Série grecque » 75 , 1989 , XIV - 441 p. ; 16 W. Gundel & H.G. Gundel , Astro logumena. Die astrologische Literatur in der Antike und ihre Geschichte , coll . « Sudhoffs Archiv » , Beiheft 6, Wiesbaden 1966 , p. 27-36 ( « Pseudepigrapha auf der Grundlage nicht-griechischer Provenienz . A : Nach Ägypten weisende Pseudepigrapha. Necepso und Petosiris » ) ; 17 P. M. Fraser, Ptolemaic Alexan dria , Oxford 1972 , t . I , p . 434-444 ( « The false sciences » ) , t . II , p . 629-639 ( notes ) ; 18 E. Boer, « Nechepso und Petosiris » , KP IV , 1972 , col . 36-37 ; 19 D. Pingree , art . « (Pseudo-) Petosiris » , DSB X , 1974 , p . 547-549 ; 20 R. Krauss, art. « Nechepso » , dans W. Helck & W. Westendorf ( édit.), Lexikon der Ägyptologie, Wiesbaden 1982 , t. IV , col . 367 sq .; 21 W. Hübner, « Nechepso » , NP VIII , 2000 , col . 781 . Auteur (s ) et chronologie. Néchepso (Nexeq @ ) et Pétosiris ( Tletóolpi ) se trouvent rattachés à un manuel encyclopédique ou recueil systématique d'astro logie (' Aotpoàoyoúueva ) issu de la tradition hermétique ( * H 79) . Cet ouvrage fut très important et connu dans l'Antiquité tardive ( notamment avant la parution du Tetrabiblos attribué à Ptolémée ), bien que seuls des fragments épars nous soient parvenus ( le plus souvent sans doute de façon très indirecte ). Dans la tradition, les deux personnages en question , plus ou moins légendaires, se trouvent cités ensemble ( quelquefois présentés comme oi Alyúntial ou oi małaloi ) , mais plus souvent encore séparément, lorsque l'on attribue certaines doctrines et même certains écrits concrets à Néchepso, d'autres à Pétosiris. Cf. Fraser 17 , t. II , p. 631 ( n . 490), qui rassemble les dénominations dans les formules d'énonciation de nos fragments: « Pétosiris» ( cf. fr. 16 Niess) ; « Néchepso » (cf.fr. I Riess ) ;

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« le roi Néchepso » ( cf. fr. 5 Riess) ; « le roi Pétosiris » ( cf. fr. 18 Riess) ; « Pétosiris et Néchepso » ( cf. fr. 17 , 25 Riess ) ; « les égyptiens » ( cf. fr. 12 Riess) . On peut ajouter « les anciens » ( cf. fr. 23 Riess). Comme on peut voir, même si c'est surtout Néchepso qui apparaît cité comme « le roi » , Pétosiris a aussi mérité l'appellatif royal . L'idée qu'il était prêtre ne provient pas directement de nos fragments, et elle reste une hypothèse non confirmée (cf. infra ). L'appellatif royal, par ailleurs, fait sans doute plutôt référence à une possession de la sagesse qu'à une quelconque royauté historique. En réalité , on ignore les auteurs , ou plutôt peut-être l'auteur, réel( s) du recueil, lequel semble avoir été rédigé dans le milieu alexandrin vers le milieu du II° siècle av . J.-C. , à en juger par le contexte historique évoqué dans certains fragments (cf. fr. 6, 7 , 10 , 12 Riess ; cf. infra ). Le fait que le recueil soit présenté sous la responsabilité et l'autorité d'un couple incarnant par excellence le pouvoir et la sagesse , un roi au nom de Néchepso ( Firmicus Maternus IV 22 , 2 , le présente comme « très juste Pharaon d'Égypte, et en même temps fort bon astrologue » , trad. P. Monat) et son confi dent le sage Pétosiris, n'est sans doute qu'une fiction littéraire visant à prêter au recueil en question davantage d'antiquité et de dignité . Qui plus est, la légende faisait de ces deux personnages les inventeurs de l'astrologie (au sens moderne du terme), qui auraient reçu leurs doctrines par révélation, notamment d'Hermès (-Thot), mais aussi d'Asclépios (le confident ordinaire d'Hermès) et d'Anubis : cf. test. 6 Riess (CCAG VIII 4,95 ), et Firmicus Maternus III 1 , 1 ; IV 3 , 5 (test. 7 Riess) . La sagesse divine destinée aux « âmes royales appelées à être illumi nées » (cf. Manilius I 38 sqq. ) qui est censée leur avoir été révélée, d'une façon prophétiquement obscure, comprend tous les aspects possibles de l'univers (à commencer par l'ordre des planètes selon la durée des révolutions) et de la vie humaine. En effet, ce que Néchepso -Pétosiris auraient fait, grâce à la révélation dont ils ont été les premiers destinataires, c'est , pour le dire avec Firmicus Maternus III , praef. 4 et chap. 1 , 1 , de tracer l'horoscope du monde ( « thème du monde » ou description du ciel tel qu'il se trouvait à son premier jour) , dans l'idée que le monde régit aussi les destins de l'homme , car celui - ci est formé selon la nature du monde et à sa ressemblance ( cf. infra ). L'astrologie univer selle et l'astrologie individuelle faisaient ici partie d'un même système. Comme l'indique Festugière 15 , t. I , p. 325 , le plus courant dans la tradition hermétique est de trouver la fiction du roi instruit par un sage , d'ordinaire à travers une correspondance épistolaire. C'est le cas aussi pour le corpus de Néchepso-Pétosiris , car, dans le cadre de la même fiction littéraire, Pétosiris apparaît comme l'auteur de plusieurs lettres adressées à son maître ( cf. fr. 37-40 Riess, et Boll 10, CCAG VII 161 ; Festugière 15, t. I , p. 327 ). Cependant, on trouve aussi dans la tradition l'image du roi instruit directement par la divinité . En effet, le fr. 1 Riess = Vettius Valens VI , praef., p. 241 , 16 sqq . Kroll, présente la fiction de Néchepso comme ayant été l'objet d'une révélation divine au cours d'une extase qui dura toute une nuit : le roi astrologue se sent monter (?) en l'air, il entend une voix du ciel et il voit apparaître une forme enveloppée d'un péplos sombre qui répand de l'obscurité ( cf. Festugière 15 , t. I , p. 314 n. 1 ). On a essayé par ailleurs d'identifier les personnages historiques qui pouvaient se trouver évoqués par les noms de Néchepso et Pétosiris. On a identifié norma lement le premier avec le roi égyptien Néchepso de la dynastie de Saïs, la XXVI ', qui est cité chez l'historien Manéthon ( cf. fr. 68 , 69 Waddell) comme

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( selon les sources ) le deuxième ou le troisième roi, pendant 6 ans, de cette dynastie saïte, laquelle remonte au VIIe siècle av . J.-C. En réalité, le premier pharaon proprement dit de la dynastie saïte de l'Égypte (664-525a) a été, comme on le sait, Psammétique Ier, suivi par Nécho II, Psammétique II, Apries, Amasis et Psammétique III . Les rois cités par Manéthon avant Psammétique Ier doivent plutôt être considérés comme des rois locaux de la dynastie « proto- saïte » , dont le dernier aurait été Nécho Ier (672-664 ) : cf. 22 K. A. Kitchen, The third intermediate period in Egypt ( 1100-650 BC), 2nd ed. with suppl . , Warminster 1986 , reprinted with a new preface 1995 , p. 145-147 , 391 , 395 , 403, 468 , 589. Néchepso, identifié avec le Nekau -ba que l'on trouve inscrit sur une amulette ( cf. 23 J. D. Ray, « Pharaoh Nechepso » , JEA 60, 1974, p. 255-256), aurait été le troisième roi de cette dynastie locale, et il aurait régné pendant 16 ans (688-672 ), plutôt peut être que pendant 6 ans (678-672 ), comme il est indiqué dans les fragmens de Manéthon ( cf. Kitchen 22, p. 146 sq. ). Enfin, d'autres critiques considèrent qu'il peut s'agir d'un nom alternatif de Nécho II (664-525), nom qui aurait été pris à tort chez Manéthon comme celui d'un roi différent (cf. Krauss 20 , col . 368 ). En fait, l'idée que le nom de Néchepso chez Manéton n'est que le résultat d'une confusion ou même d'une pure invention se trouve déjà énoncée par A. Wiedemann , Ägyptische Geschichte, Gotha 1884, p. 600 sq . ( cf. Riess 7 , p. 6 sq.; Id . 1 , p. 327 ; Fraser 17, t. II , p. 631 ( n . 492 ] ). Aucune certitude donc à ce sujet. 24 F. J. Lauth , « König Nechepsos, Petosiris, und die Triakontaëteris » , SBAW 2, 1875 , p. 89-114, voulait confirmer l'historicité du roi Néchepso cité par Manéthon grâce à un papyrus égyptien qu'il datait ca 619a, où , selon lui , Néchepso serait cité comme l'auteur d'un livre « de motu caeli cyclico » ( la triacontaétéride était la période de 30 années ou jubilé royal égyptien et perse , marquée par la révolution sidérale de Saturne), mais la lecture du nom du roi en question faite par Lauth n'était pas digne apparemment de crédit ( cf. Riess 1 , p. 238 ; Id . 7 , p. 6). Lauth alléguait aussi un autre papyrus contemporain (617a) , où il croyait trouver Pétosiris (prêtre ) en connexion avec le roi Néchepso. Quoi qu'il en soit , comme le reconnaît Pieper dans son supplément à l'article de Kroll 12, l'identification même de notre astrologue avec le roi Néchepso de la tradition manéthonienne reste aussi très douteuse . Par ailleurs, on ne pourrait pas discerner aujourd'hui, comme le remarquent Gundel & Gundel 16 , p . 28 , le biais par lequel on serait arrivé depuis la figure historique du roi Néchepso jusqu'à l'image qu'on se faisait de lui dans les textes astrologiques tardifs, image dont on peut supposer, cependant, qu'elle n'avait rien à voir pour l'essentiel avec le soi- disant roi Néchepso historique. Gundel & Gundel ajoutent qu'on peut se demander si le roi appelé en contexte astrologique Nécheus , Néchao, Nécho, Notopso etc. doit toujours être identifié avec Néchepso, qui peut être considéré aussi tout simplement comme le pseudonyme de l'auteur de l'ouvrage dont il est question ici . En effet, la tradition parle de nombreux rois égyptiens qui se seraient intéressés aux questions astronomiques et astrologiques , et on peut trouver par exemple la série Hermès - Thot, Néchao, Quérasphoros, Pétosiris, Néchepso, etc. ( cf. 25 F. Cumont, CCAG V1 : Codicum Romanorum , Bruxellis 1904, p. 208 , 21 sqq. ) . Gundel & Gundel 16 , p . 29 , suggèrent la possibilité que les Égyptiens d'époque hellé nistique aient eu recours au nom de ce pharaon, légendaire dans le contexte de la domination assyrienne en Égypte (ca 670 - ca 660 ), afin de souligner l'ancienneté de la « sagesse » de leur pays à l'encontre des représentations d'origine mésopotamienne qui étaient sans doute en train d'y pénétrer très fortement depuis le vile siècle. Cette hypothèse, en tout cas , ne semble pas confirmée par certains témoignages de la tradition, où Néchepso est présenté comme « roi des assyriens » ( cf. fr. 41 Riess, CCAG VIII 3 , 75 [ fol. 43v) , XI 2, 69 [ fol. 130v ), 163, 22). La seule chose donc qu'on puisse affirmer est que l'auteur ou les auteurs de ce manuel hellénistique sur l'astrologie eurent recours tout d'abord au nom de Néchepso afin de prêter à leur ouvrage une plus grande antiquité et en même temps une auréole de révérence et de mystère. En ce qui concerne Pétosiris , son nom occupe normalement dans cette tradi tion astrologique hermétique le troisième rang, après Hermès et Néchepso.

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Gundel & Gundel 16, p. 31 , suggèrent que son nom – « cadeau d'Osiris » – pou vait renvoyer à des prophéties astrologiques réalisées en connexion avec cette divinité , mais Pétosoris est lui aussi notamment ( tout comme Néchepso) le véhi cule de la révélation de certaines doctrines d'Hermès - Thot. Pétosiris est qualifié de « philosophe » dans sa correspondance fictive adressée à Néchepso ( fr. 39 Riess ; cf. Festugière 15 , t. I , p. 327 ). La Souda, II 1399, t . IV , p . 117 , 4-6 Adler ( Hesychius ) fait mention aussi de Pétosiris comme philosophe egyptien ( Αιγύπτιος, φιλόσοφος ) et elle met en relief le caractere gréco -égyptien de ses doctrines théologiques au moyen du premier des titres qu'elle lui attribue : καθά "Έλληνες και Αιγύπτιοι τα περί θεών διετάξαντο ( cf. test. 1 Riess ) . Les témoignages historiques dont on dispose ont amené maintenant les critiques à placer le personnage évoqué par ce nom quelques siècles après le pharaon, concrètement au IVe siècle av . J.-C. En effet, dans un papyrus de l'université de Manchester (Catal. of the Gr. Pap. Manch . II ( 1915 ) nº 63 , p. 2 ; cf. Boll , Bezold & Gundel 11 , p. 136 ; Gundel & Gundel 16 , p. 31 ), ce personnage apparemment se retrouve, sous le nom de « Peteesis » , dialoguant avec Platon à propos d'une mélothésie zodiacale (c'est - à -dire, une correspondance des signes du zodiaque avec le corps humain ) . En outre on a trouvé au début du XXe siècle en Haut- Égypte, à Hermopolis, le tombeau d'un prêtre très important du nom de Pétosiris (et de sa famille ), un monument qui peut être daté vraisemblablement vers le milieu du même IVe siècle av. J.-C. ( cf. 26 G. Lefebvre, Le tombeau de Petosiris, Le Caire 1923-1924 : t. I : « Description » ; t. II : « Les textes » ; t. III : « Vocabulaire et planches » ; 27 É. Suys, Vie de Petosiris, grand prêtre de Thot à Hermopolis-la -Grande, avec une préface de J. Capart, Bruxelles 1927 , 158 p. ) . Parmi les inscriptions hiéroglyphiques placées sur le tombeau, on peut lire notamment une grande inscription biographique ( inscr. 81 Lefebvre ) qui présente Pétosiris comme le deuxième prophète d'Ammon-Rê, et qui souligne qu'il avait exercé les fonctions de contrô leur (neobvnc) de Thot, dieu dont il avait entre autres reconstruit le temple. Par ailleurs, le monument présente aussi certains graffitis du début de la période ptolémaïque où l'on a voulu voir que les Grecs de cette époque identifiaient le personnage auquel le monument était dédié avec le célèbre mystique et astrologue . Il s'agit notamment du graffiti où Pétosiris est décrit comme oooós ( cf. Lefebvre 26 , p. 24). C'est en effet à partir de tels indices que 28 W. Spiegelberg, « Eine neue Spur des Astro logen Petosiris » , SHAW [ 13 ] , Jahrg. 1922, 3 Abh. , 8 p. , notamment p. 1 sq. , a voulu identifier ce prêtre de Thot du IVe siècle av . J.-C. avec notre astrologue. En revanche, Lefebvre 26, p. 9, jugea comme peu vraisemblable l'identification ( cf. aussi Suys 27). En réalité , comme on peut le lire dans Boll , Bezold & Gundel 11 , p. 96 [l'ajout provient de Boll ) , ni les inscriptions, ni les graffitis qui montrent les Grecs comme ayant eu un intérêt pour le tombeau n'autorisent à confirmer cette identification ( cf. aussi Fraser 17 , t. II , p. 631 ( n. 492 ) ; 29 S. Nakaten, art. « Petosiris » , dans W. Helck & W. Westendorf (édit. ), Lexikon der Ägyptologie, Wiesbaden 1982 , t. IV , col . 995-998, notamment col . 996) . A leur tour, Gundel & Gundel 16 , p. 31 , même s'ils semblent prêts à accepter cette identification, se bornent plutôt à l'affirmation que les grecs qui ont écrit les graffittis peu après la construction du monument ont pu faire remonter les Astrologoumena attribués à Pétosiris à des écrits ou à des doctrines provenant de ce prêtre. En revanche , Gundel & Gundel 16, p. 31 sq. , estiment comme de pures fantaisies d'autres tentatives plus tardives de rendre plus claire, d'une façon ou d'une autre , la personnalité du soi -disant Pétosiris historique : ainsi , à l'époque de Justinien , Jean Lydus, De ostentis pr. 2 , p. 6, 9 Wachsmuth (= test . 10 Riess ) , lorsqu'il fait de lui un successeur du perse Zoroastre ( cf. 30 J. Bidez & F. Cumont, Les Mages hellénisés : Zoroastre, Ostanès et Hystaspe d'après la tradition grecque, Paris 1938 , réimpr. 1973 , t. I : Introduction, p. 134 ; t. II : Les textes, p. 207 [Ps.

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Zoroastre, fr. 0 78 ] ; rappelons aussi que certaines traditions talmudiques font de Néchepso lui-même (Nécho ) un contemporain de Salomon : cf. Gundel & Gundel 16, p. 30 ). C'est sans doute pour rapprocher chronologiquement Néchepso du prêtre Pétosiris, que l'on a même suggéré, sans le moindre fondement, qu'on pouvait l'identifier avec le pharaon égyptien Nectanébo II ( 360-343), qui fut, selon la légende, le tuteur en astrologie d'Alexandre le Grand : cf. D. Houlding dans http://www.skyscript.co.uk/heritage/egyptians2.html. Cette encyclopédie astrologique , qui comprenait au moins 15 livres (cf. infra ), aurait donc rapproché fictivement comme auteurs , d'une façon en outre tout à fait anachronique si les identifications historiques proposées plus haut sont correctes, un pharaon du VII ° siècle et un prêtre du IV . En réalité, il faut sans doute voir ici avant tout un phénomène essentiellement littéraire, comme c'est fréquent en général dans l'hermétisme (cf.Festugière 15, t. I , p. 81 87 ) . En ce qui concerne le lieu où le recueil fut rédigé, on ne peut nullement l'établir avec précision. Le milieu alexandrin , en tout cas , semble le plus probable , si on pense qu'Alexandrie était la ville qui réalisait mélange des influences orientales et grecques ; par ailleurs, le point de vue de l'ouvrage semble tout à fait égyptien , sinon même alexandrin : on y fait mention souvent de l'Égypte et de la Syrie, tandis que d'autres régions du monde méditerranéen sont rarement mentionnées ( cf. Fraser 17 , t . I , p. 437 ). Les tentatives de datation ont eu recours aux arguments les plus différents, avec plus ou moins de bonheur. Les hypothèses les plus fiables se fondent notamment sur l'analyse réalisée par Kroll ( cf. infra ) concernant l’horizon géographique et l'atmosphère historique qui semblent évoqués dans certains fragments conservés par Héphaistion de Thèbes, à propos des prédictions astrologiques, au -delà de leur inévitable obscurité ( fr. 6 , 7 , 10 , 12, notamment le fr. 6 ; cf. infra ). En effet, même si les événements en question ne sont jamais très précis, ils pouvaient être présents à l'esprit des auteurs originels des prédictions. A partir de cela, on a présenté des solutions qui vont de ca 150 a jusqu'à ca 1202 ( cf. Hübner 21 , col . 781 ) , ce qui place la composition de l'ouvrage de Néchepso Pétosiris sous le règne de Ptolémée VI Philométor ou peu après ( cf. Fraser 17, ibid. ) . Et cela s'accorde aussi avec un autre argument fondé sur la constatation que Néchepso - Pétosiris avaient utilisé un traité astronomique qui nous est parvenu, l’’Avapopixos ( Sur le lever des astres) de l'astronome grec Hypsiclès d'Alexandrie, qui divisa pour la première fois , au moins chez les Grecs, le zodiaque en 360 degrés ( cf. Fraser 17 , t . I , p. 423-425 ; t. II p. 612-614 ( notes ) ) , et dont le floruit peut être placé ca 170a ( sa mort ca 120a ?). C'est 31 W. Kroll, « Aus der Geschichte der Astrologie » , JKPh 7 , 1901, p. 559-577 , notamment p . 572-577 ( cf. Id. 12 ; col . 2163 sq . ) principalement qui a élaboré tous les arguments de cette datation ( cf. aussi Fraser 17, t. I , p. 437 ; II, p. 631 sq. ( n . 494-499 ]). Celui concernant Hypsiclès se fonde sur un passage de Vettius. Valens III 16, p. 157, 12-19 Kroll ( fr. 5 Riess), où on lit que Néchepso ( « le roi » ) s'était borné à montrer les levers des signes du zodiaque pour le premier des sept climats ou zones de l'æcoumène , celui d'Alexandrie, et où on peut déduire de ce qui précède qu'il avait suivi en cela Hypsiclès. A partir de cette analyse, Kroll 31 , p. 576 sq . , conclut: « so können wir die Zeit des Nechepso und Petosiris auf etwa 170-100 bestimmen » , Dans un autre fragment ( fr. 6, li . 98 sqq. Riess ; cf. CCAG VII , p. 134 sq. ) on parle d'un roi qui débarque à Chypre, et on peut rappeler à ce sujet que Ptolémée Philométor, expulsé par son frère cadet, Ptolémée Évergète, se retira dans cette île en 1679. Plus loin (ibid ., li. 101

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sqq. ; cf. CCAG VII , p . 135 ), on y fait référence à un royaume séparé à Cyrène, et à ce sujet on peut rappeler que Prolémée vií Évergète II obtint la Cyrénaïque en mai 163a comme un royaume separé et qu'il la garda comme tel jusqu'à son accession définitive comme seul roi au trône d'Égypte en 145a. Le même fragment fait référence à l'hostilité entre l'Égypte et la Syrie ( ibid. , li . 66 sqq.; cf. CCAG VII , p. 133 ) d'une façon qui semble impliquer une connaissance de l'invasion d'Égypte par Antiochos IV Épiphane et de sa mort en 164a. Et ce fragment semble fournir aussi un terminus post quem s'il fait allusion ( li . 166 sqq .; cf. CCAG VII , p. 140 sq . ) à la menace des Parthes ( « les barbares » ) contre la Syrie après l'expédition d'Antiochus Sidétès en 129a. On s'est demandé , par ailleurs , si on ne trouve pas dans nos fragments une mention de Rome. En effet, dans un passage ( ibid. , li. 78 sq . ), on trouve le nom de Rome , d'après l'édition de Riess, que Kroll 31 , p. 574 ( cf. Id . 12, col . 2163 ) accepte , mais Boll 2, p. 130 sq. , doute de la correction de cette lecture, puisque le texte , tel qu'il est conservé dans les Excerpta Monacensia, ne présente pas ce nom ( cf. CCAG VII , p. 134, 8 sqq . ) . A ce sujet, il faut signaler qu'on a voulu fixer un terminus ante quem se fondant sur l'hypothèse que les poleis grecques n'avaient pas encore perdu la liberté au profit de Rome , ce qui est arrivé notamment après la chute et la destruction de Corinthe par les Romains en 146 a ( cf. Boll , Bezold & Gundel 11 , p. 24, où l'on trouve comme date après 150 a). Boll 2, p. 130, proposa que la composition des Astrologoumena devait être fixée avant 146a à partir de CCAG VII 149, 4, où on lit : "EMnVeç npòs árnouç nonɛuńcovol. A son tour, Kroll 12, col . 2164 , allègua le fr. 6, 91 Riess , si les barbares qui y sont mentionnés sont les Romains (βαρβάρων στρατιάν πολεμήσαι τοίς " Ελλησι και ελεϊν αυτούς) , pour suggérer plus précisement la composition vers 150a avec une préférence pour une date postérieure. A titre d'information érudite, évoquons la tentative de datation antérieure de Niess 7, p. 26 sq. ( cf. Id. 1 , p. 329) : il fixa la composition des Astrologoumena entre les années 80 et 60 av . J.-C. , du temps de Sulla ou peu après. Les arguments sur lesquels il voulait s'appuyer furent peu après l'objet de la critique de Boll 8, et ils ne méritent pas d'être retenus. A son tour, Boll proposa , en se fondant sur le rapprochement des Astrologoumena avec la littérature herméti que philosophique, une datation plus tardive : autour du premier siècle de notre ère, du temps de Tibère ( cf. la réplique de Niess 9). Cependant, comme on l'a déjà vu, il fut convaincu plus tard de la nécessité de faire remonter sa datation beaucoup plus haut. En réalité, même les arguments de Kroll rapportés plus haut ne sont pas concluants, et ils n'ont pas convaincu 32 J. Schwartz, « Héphestion de Thèbes » , dans Livre du centenaire 1880-1980 de l'Institut français d'Archéologie orientale du Caire, coll . « MIFAO » 104, Le Caire 1980, p. 211-321 , notamment p. 318 n . 5 , 320 sq . , qui considère le lle siècle av . J.-C. trop haut dans le temps, même s'il ne propose pas d'autre date . En ce qui concerne la façon dont le recueil astrologique connu comme Astrologoumena aurait été compilé et fixé en grec vers le milieu du II ° siècle av . J.-C. , l'opinion commune de la critique depuis le début du XXe siècle ( cf. Boll , Kroll, Cumont ) imagine un auteur anonyme qui l'aurait compilé à partir notam ment de deux ouvrages pseudépigraphes plus ou moins contemporains, l'un mis sous le nom du roi Néchepso , l'autre sous celui de ( son prêtre) Pétosiris ; cet auteur anonyme aurait réélaboré ensemble ces ouvrages pour créer un recueil encyclopédique réunissant les éléments et les doctrines les plus importants de l'astrologie babylonienne et égyptienne , mêlés ici avec d'autres ayant une origine plus proprement grecque. Cependant, Gundel & Gundel 16 , p. 28 n . 1 ( cf. aussi Boll , Bezold & Gundel 11 , p . 24) , considérant que cette solution semble un peu trop simpliste , se demandent si on peut supposer déjà au III ou même au IVe siècle av . J.-C. l'existence de certains écrits de caractère mystico astrologique attribués à Néchepso et à Pétosiris, des écrits qui ont pu devenir

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plus tard l'objet d'une réélaboration anthologique avant d'arriver à leur état de rédaction finale . Il faut, par ailleurs , envisager probablement ici le milieu des clercs hellénisés appartenant au sacerdoce indigène ( cf. Cumont 14 , p . 15 ) , mais on ne peut pas déterminer le rôle que la langue égyptienne a pu jouer dans ce processus ( cf. Gundel & Gundel 16, p. 35 ). Pour essayer de trouver une réponse plus précise au problème de la rédaction des Astrologoumena , Gundel & Gundel 16 , p . 28 n . 1 , considèrent qu'il faut commencer tout d'abord par créer un recueil , le plus complet possible, des fragments et des témoignages de l'ensemble de la tradition , car celui de Riess est dépassé depuis longtemps ( cf. aussi Boll , Bezold & Gundel 11 , p. 96 ) . En fait, c'est une tâche qui reste à faire encore de nos jours, à la différence de ce qui est arrivé pour la tradition hermétique plus strictement philosophique , dont les textes sont considérés comme plus tardifs, écrits entre 100 et 300 de notre ère ( PH 79 , p . 642 sq .). En ce qui concerne l'ouvrage de Néchepso -Pétorisis, il faut sans doute aller dans le sens de Fournet 6, p. 64 n . 10 , et considérer que la nature hétérogène de ce corpus « implique très vraisemblablement une variété de data tion de ses différentes parties» (cf. aussi p. 71 ) . En tout cas , on peut affirmer que l'œuvre ( perdue) d'Hermès Trismégiste, qui peut être placée aux III/II ° s . av . J.-C. , et celle de Néchepso -Pétosiris formerent une espèce de vulgate hellénistique , qui devait être plus tard la source directe des euvres d'un Ptolémée ( ITP) ou d'un Firmicus Maternus ( IVP ; cf. infra ). Comme exemple de la même tradition astrologique gréco -égyptienne de l'époque alexandrine, on peut citer aussi le Liber Hermetis Trismegisti découvert à la fin des années 1930 par W. Gundel : il s'agit de la traduction latine (conservée dans le ms. Harleianus 3731 , daté de 1431 ) d'une compilation astrologique dont certaines parties remontent jusqu'au IIIe siècle av . J.-C. , mais qui a été mise à jour et retouchée à plusieurs reprises, en dernier lieu à l'époque de Julien de Laodicée ( 480P ; cf. 33 W. Gundel , Neue astrologische Texte des Hermes Trismegistos, coll . ABAW, N. F. , Heft 12, München 1936 ; Cumont 14, p. 13-23 ; Festugière 15, t. I , p. 112-123 , 128 sq.; Fraser 17 , t. I, p. 438 sq .;t. II , p. 635 sq . ( notes) ). En ce qui concerne la forme des Astrologoumena, on ne peut presque rien préciser, mais on a imaginé la présence de parties en trimètres iambiques, et donc l'emploi du prosimetrům ( cf. Kroll 12 , col . 2166 ; Hübner 21 ). Par ailleurs, Fraser 17 , t. I , p. 436, a remarqué comment la diversité de formules d'énonciation que l'on trouve dans nos fragments (cf. supra) suggère beaucoup moins un ouvrage combiné qu'un ouvrage dont les sections concrètes étaient attribuées soit à Néchepso, soit à Pétosiris. Titre . La fin du témoignage de la Souda sur Pétosiris évoqué plus haut présente les titres de plusieurs des ouvrages théologiques de celui- ci, entre autres les Astrologoumena : επιλογάς εκ των ιερών βιβλίων. αστρολογούμενα , και περί των παρ' Αίγυπτίοις μυστηρίων. Le titre 'Αστρολογούμενα pouvait décrire sans doute fort bien l'état le plus achevé de cette longue tradition encyclopédique de Pétosiris (-Néchepso ), où étaient rassemblés des matériaux qui avaient pu circuler auparavant sous des titres indépendants. Nos sources attestent de ce fait, lorsqu'elles parlent , par exemple , du Cercle de Pétosiris ( cf. infra ). La Souda semble parler aussi pour le même Pétosiris d'un ouvrage sur les mystères de l'Égypte, dont apparemment rien ne nous est parvenu. Quant aux επιλογαί εκ των ιερών βιβλίων mentionnées dansla meme source , Riess 7 , p. 9 sq. , lança l'hypothèse selon laquelle on pouvait l'interpréter comme un titre

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alternatif aux Astrologoumena : il éditait en fait le témoignage de la liste comme επιλογάς εκ των ιερών βιβλίων αστρολογούμενα, και περί των παρ' Aiyuntiouc uvornpiwv ( cf. Fraser 17 , t. II , p. 631 ( n. 492 ] ) . Même si la correc tion de Riess reste douteuse, et même si le témoignage en général présente un caractère confus, il est sans doute un peu exagéré de conclure, avec Kroll 12 , col . 2160 , et Kroll 13, que cette liste de titres est sans valeur. Niess rassemble prudemment la plupart des fragments de son recueil sous le titre générique αστρολογούμενα (fr . 1-25 ). En ce qui concerne le titre καθά " Έλληνες και Αιγύπτιοι τα περί θεών διετάξαντο, il y rattache un passage théurgique tiré de Proclus , in Remp. , t. II, p. 344, 26 – 345 , 4 Kroll ( fr. 33 Niess ; cf. Niess 1 , p. 9) . En revanche, aucun fragment ne se trouve classe sous le titre περί των παρ' Αίγυπτίοις μυστηρίων (fr . 34 Niess). Pour les autres titres que l'on peut tirer de la tradition , concernant la médecine astrologique, cf. infra, dans la section qui suit. Contenu de la grande encyclopédie astrologique hermétique. Néchepso Pétosiris passent pour les créateurs du zodiaque, c'est - à -dire de son application astrologique ( cf. Kroll 12 , col . 2162 ) . Alors que les origines de l'astrologie prédictive sont attribuées d'ordinaire aux anciens Babyloniens , celles de l'astro logie judiciaire (personnelle, horoscopique) semblent remonter à l'Égypte de l'époque hellénistique , quand on était en train de mettre en valeur la sagesse barbare. En fait, c'est vraisemblablement aussi vers cette même époque que l'astrologie babylonienne est arrivée en Grèce, et à ce sujet il faut citer tout d'abord le Pseudo - Bérose de Cos , qui représente sans doute une falsification de l'époque hellénistique faite au profit du nom prestigieux de l'historien Bérose de B 26 , p. 95 sq .): le Pseudo -Bérose est censé avoir transmis en Babylone ( Grèce l'astrologie chaldéenne à travers une école fondée à Cos, où , comme il s'était intéressé par ailleurs aux travaux du médecin grec Hippocrate , il est censé aussi avoir fondé la médicine astrologique , une pratique qui rattachait chaque partie du corps à un signe astrologique et attribuait aux maladies une origine astrale . Quant à l'astrologie judiciaire (l ' « astrologie » caractéristique de nos jours ) , elle peut avoir été l'œuvre de Grecs qui habitaient en Égypte , ou bien d'Égyptiens natifs de ce pays, et c'est dans ce contexte qu'il faut situer l'auteur des Astrologoumena hermétiques, qui sont l'aboutissement sans doute de toute une tradition égyptienne plus ancienne, mêlée aussi à des éléments babyloniens, et toujours adaptée, bien sûr, à la culture grecque (cf. Boll , Bezold & Gundel 11 , p. 24 , et Gundel & Gundel 16, p. 40 ). En effet, comme le remarque 34 O. Neugebauer, A history of ancient mathematical astro nomy, In three parts with 9 plates and 619 figures, coll . « Studies in the history of mathematics and physical sciences » 1 , Berlin /Heidelberg/New York 1975 , Part Two, p. 613 : « Before the fifth century B.C. celestial omina probably did not include predictions for individuals, based on planetary positions in the signs of the zodiac and on their mutual configurations. In this latest and most significant modification astrology became known to the Greeks in the hellenistic period. But with the exception of some typical Mesopotamian relics the doctrine was changed in Greek hands to a universal system in which form alone it could spread all over the world . Hence astrology in the modern sense of the term , with its vastly expanded set of “methods " is a truly Greek creation, in many respects parallel to the development of Christian theology a few centuries later » ( cf. 35 Id. , The exact sciences in Antiquity, coll . « Acta historica scientiarum naturalium et medicinalium » 9, Princeton /London 1951 , p. 139 181 : « Origin and transmission ofHellenistic science » (ch. VI ] , notamment p. 164 sqq .).

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L'idée que l'astrologie « scientifique » que nous connaissons, fondée sur des données astronomiques précises, n'est pas plus ancienne que le IVe s. av. J.-C. et qu'elle présente une structure indéniablement hellénistique avait déjà été affirmée par 36 M.P. Nilsson, « The origin of belief among the Greeks in the divinity of heavenly bodies » , HTHR 33 , 1940 , p. 1-8 . Pour comprendre ce système, il faut partir du fait que l'astrologie égyptienne est fondée (et c'est là sa contribution fondamentale à l'évolution de l'astrologie ) sur ce qu'on appelle les « décans » , c'est - à -dire des périodes de 10 jours, dont chacune se trouve sous la tutelle d'une divinité représentée par une étoile ou un groupe d'étoiles ( cf. 37 W. Gundel , Dekane und Dekansternbilder : ein Beitrag zur Geschichte der Sternbilder der Kulturvölker, mit einer Untersuchung über die ägyptischen Sternbilder und Gottheiten der Dekane von S. Schott , coll . « Studien der Bibliothek Warburg » 19 , Glückstadt 1936 ; 2. durchgesehene Aufl ., Mit einem bibliographischen Anhang von H.G. Gundel , Darmstadt 1969, X -451 p .; Bidez & Cumont 30 , t . I , p . 177 sq .; Festugière 15 , t . I , p. 112-123 ) . Il y avait 36 décans en tout ( qui étaient donc les maîtres des 36 divisions de 10 ° introduites dans le cercle du zodiaque ), et on les utilisait en principe pour suivre le cycle de Sirius ( Sothis) , dont le lever héliaque ouvrait les diverses parties de l'année , appelées décades (pour les astrologues égyptiens le début du monde correspondait au commencement de l'année , au début de la période sothiaque). Mais ce qui n'était au début qu'une façon de mesurer le temps finit par devenir un système prédictif ( les décans , ce qu'on appelle les « aspects » dans les textes du Moyen Âge ) : les étoiles du temps deviennent les dieux du temps , les souverains de la Destinée ( cf. Boll , Bezold & Gundel 11 , p . 156 sq .). Ce système astrologique se rattachait en outre à d'autres domaines , comme ceux de l'alchi mie , de l'étude des pierres et des plantes magiques etc. C'est bien le genre d'astrologie que l'on trouve dans le manuel de Néchepso - Pétosiris, où , outre les « aspects » , il faut considérer aussi le système classique (alexandrin ) des 12 lieux ( Dodekatopos) ou maisons astrologiques. Gundel 33 , p. 301-313 (chap. 13 : « Die Lehre der Kentra und der Quadranten » ; et 14 : « Die Lehre der zwölf Hauser oder Orte » ), a proposé une théorie de l'évolution du système des maisons astrologiques en 4 étapes : une organisation initiale en 4 quadrants définis par les points cardinaux ( se succédant dans le sens des aiguilles d'une montre et symbolisant les 4 âges de l'existence), une organisation en 8 secteurs de 45° (quadrants et secteurs cardinaux ), une organisation en 12 secteurs (toujours comptés dans le sens des aiguilles), et enfin l'orga nisation en 12 secteurs (comptés dans le sens inverse des aiguilles), qui a donné naissance aux systèmes couramment utilisés aujourd'hui et dont Hermès Trismégiste aurait été l'inventeur et Néchepso - Pétosiris le légataire. Concernant l'idée alchimique de l'homme comme un microcosme, comme une espèce de miroir de l'univers, avec tout le mysticisme qui est lié à cette idée ( la sympathie entre les parties du corps humain et les planètes ), il est plus difficile de préciser l'importance de Néchepso -Pétorisis, mais on peut affirmer au moins qu'ils avaient l'essentiel de cette idée, comme aussi de la géographie astrologique ou décanale (cf. Boll , Bezold & Gundel 11 , p. 78 sq . , 156 sqq. , 166 ).

Comme nous l'avons dit , les Astrologoumena rassemblaient un corpus de doctrines babyloniennes , égyptiennes et grecques. Le contenu du recueil était un mélange de cosmogonie , d'astrologie et de magie , dans lequel il semble qu'on

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puisse reconstituer quatre grands ensembles (cf. Pingree 19) : le premier concerne les phénomènes astraux et météorologiques, comme les éclipses, le lever de l'étoile Sirius, capital pour la civilisation égyptienne , ou les comètes et leur rapport avec les signes du zodiaque, tout cela du point de vue des présages ( omina ) ; le second a comme point de départ la révélation de Néchepso ( cf. supra ) et constituerait l'exposé, en trimètres iambiques , de l'art de l'horo scope de celui -ci : les cycles bons et mauvais , les voyages, la descendance et la méthode pour calculer la durée de la vie d'une personne ( c'est la partie plus strictement astrologique ) ; le troisième se rattache à la médecine astrologique et à l'influence de chaque décan ( iatromathématique ); enfin , le dernier ensemble ressortit à une numérologie fondée sur les signes zodiacaux. Les citations plus ou moins directes nous permettent de nous faire une idée de la variété des contenus qui couvraient ce système astrologique hermétique de Néchepso - Pétosiris ( cf. Kroll 12, col . 2161-2164, et Gundel & Gundel 16 , p .29-34) . L'une de nos sources les plus importantes est Vettius Valens, qui nous a déjà fait connaître la révélation dont Néchepso avait été l'objet ( fr. 1 Riess, cf. supra ). Ce récit faisait partie du livre XIII du manuel (en trimètres iambiques), et il est probable que d'autres discussions qui suivent chez Vettius Valens ont été tirées aussi de ce même livre ou en général du manuel (cf. fr. 2 sq. Riess) : on y aurait des traces de doctrines qui nous montreraient en Néchepso un astronome scientifique, comme les doctrines sur la grandeur des orbites des planètes ; sur le lever des signes du zodiaque (åvapopai ) , domaine où Néchepso s'était borné à la première des sept zones ou climats (witual) de l'æcoumène, celle d'Alexandrie. Il s'agit toujours là en réalité de connais sances astrales dont l'interprète des étoiles se sert pour réaliser son travail astrologique. On y fait référence à l'heptazone, qui paraît avoir été, comme le dit Festugière 15, t. I , p. 343 n . 3 , une sphère astrologique servant à la détermination des confins ou termes planétaires ( opia ) d'après l'ordre égyptien des planètes selon la durée de leurs révolutions (Soleil au milieu , entre Saturne Jupiter Mars au-dessus, Vénus Mercure Lune au -dessous). Selon Néchepso, les facteurs les plus décisifs pour découvrir le sort de la Fortune ou du Démon ( « maître de la maison » , cf. infra) à travers une procédure de calcul concret seraient la Lune, le Soleil (c'est à -dire les luminaires) et l'Horoscope : ce dernier terme désigne proprement le lieu de la vie ou Ascendant, c'est-à-dire le point du cercle zodiacal qu'on voit émerger de l'horizon à l'heure de la naissance, du côté du levant ; cf. 38 P. Monat (édit. ) , Firmicus Maternus, Mathesis, t. III, texte établi et traduit , CUF, Paris 1994 , p. 164 n . 51 ; les Grecs avaient créé le système hermétique de domification évoqué plus haut en 12 secteurs ou lieux ( les maisons des astrologues modernes) qui régissent des domaines différents relatifs à la destinée humaine ; ces lieux résultent de l'attribution à chaque astre , luminaire ou planète , d'un ou deux signes, respectivement, où chacun se considère comme chez lui et donne par conséquent d'heureux effets (cf. Monat 38 , p. 93 n . 14 ). Néchepso s'occupait entre autres des sujets suivants : l'influence des éclipses et des phénomènes concomitants ( fr. 6-8 Riess) ; les comètes ( fr. 9-11 Riess ; cf. Boll , Bezold & Gundel 11 , p. 129 sq. , et 39 P.L. Keyser, « On cometary theory and typology from Nechepso -Petosiris through Apuleius to Servius » , Mnemosyne 47 , 1994 , p .625-651, notamment p. 641-647 ) ; le lever de Sothis ( fr. 12 Riess) ; la doctrine des décans ( fr. 13 Riess) , très liée à la iatromathématique ( fr. 28 Riess ; cf. infra ) ; la position de la lune au moment de la naissance et de la conception (fr. 14 Riess) ; la durée de la vie humaine ( fr. 16 18 Riess ) ; le sort de la Fortune (xanpoç tñs Túxns; fr. 19 Riess) ; le mois « opératif » ou approprié pour réaliser une entreprise ( unu xenouatixóc ; fr. 20 sq. Riess) ; l'ensemble de la doctrine apotelesmatique des « initiatives » ou « entreprises » (xatapxai ) , qui exige la connaissance de la naissance de l'individu etc. avec qui on veut entrer en rapport, en parti culier la position de la lune, connaissance (généthialogie ou doctrine de la nativité) à laquelle s'ajoutent les « aspects » ( relations angulaires entre les planètes d'une carte du ciel , mesurées en angles à l'intérieur de l'écliptique), et les jours ou les années « climatères » ou « égyptia ques » , des jours ou des années dangereux dont il faut se méfier ( le terme provient de xaqua, « échelon » , fr. 23 Riess ; il ne faut pas confondre les jours climatères avec les jours critiques

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d'Hippocrate) , sans oublier l'influence de l'oixodeonórns ou « maître de la maison » ( Démon) , c'est - à -dire la planète qui est la plus importante dans un signe et une position du zodiaque et qui est le maître de la géniture, c'est-à-dire dispense les années de vie ( c'est la doctrine grecque du dominion ; fr. 24 Riess) ; le thème de la nativité du monde, d'origine égyptienne, qui décrit la situation des luminaires et des planètes au moment où le Démiurge a mis le monde en mouvement ( fr. 25 Riess ; cf. Monat 38, p. 13 sqq. , 285 , et Boll , Bezold & Gundel 11 , p. 147 sq . ) . D'après Firmicus Maternus VIII 5 ( cf. fr. 26) , Néchepso - Pétosiris n'ont pas eu connaissance du calendrier non grec (babylonien-égyptien) appelé Sphaera barbarica. D'autres citations ont été tirées du livre XIV ( fr. 29 Riess) , dont Néchepso apparaît toujours comme l'auteur. Dans ce livre, Néchepso amenait l'astrologie dans le domaine de la médecine. Cette astrologie médico -magique ( iatromathématique) était fondée sur les affinités des pierres et des plantes avec les astres, et de ceux-ci avec les différents organes du corps humain (pour guérir une maladie on prescrivait par exemple de prendre les médicaments sous certaines constellations ). L'auteur d'une lettre de l'époque impériale qui a été identifié avec Harpocration d'Alexandrie, l'auteur des Cyranides, mais qui doit plutôt être identifié avec un autre astrologue du nom de Thessalos (» H 8 , p. 500 sq . ), dit avoir échoué dans la mise en pratique des recettes contenues dans le livre de Néchepso sur la médecine astrologique, raison pour laquelle il réalisa un pélerinage à Thèbes, où l'un des prêtres le fit entrer en contact avec Asclépios, qui lui révéla les secrets ignorés par Néchepso, comme le lieu et le moment précis favorables pour la récolte des plantes ( fr. 35 Riess , parmi les fragments douteux, rattaché à d'autres témoignages constituant le fr. 36 Riess ; cf. Boll , Bezold & Gundel 11 , p. 140, et Gundel & Gundel 15 , p. 30 ; on trouve une traduction de la lettre chez Festugière 15 , t. I, p. 56-58 ). Comme le remarquent Bidez & Cumont 30 , t. I, p. 203 sq . , p. 245 , 320 n . 11 , à propos du Ps . -Ostanès , fr. A 6 (= Ps - Démocrite, Physica et mystica, édit. 40 M. Berthelot, Collection des anciens alchimistes grecs, avec la collaboration de Ch.-É. Ruelle, Paris 1888 ; réimpr. London 1963 t. II [Texte grec ), p . 42 , 21 ), où on trouve la formule « la nature est charmée par la nature ; la nature vainc la nature ; la nature domine la nature » , qui traduit l'idée de la sympathie universelle et le principe alchimique de la transmutation des éléments, une partie de cette formule apparaît déjà dans la iatromathématique de Néchepso : natura alia natura vincitur ( cf. Firmicus Maternus IV 22 , 2 = fr. 28 Riess ; cf. aussi fr. 27 et fr. 29-32 Riess). D'après Firmicus Maternus, Néchepso appliquait le principe à la médecine décanique : « Ainsi Néchepso, très juste Pharaon d'Égypte, et en même temps fort bon astrologue, a - t- il établi la correspondance avec chaque décan de toutes les infirmités et de toutes les maladies, montrant quel décan donnait telle maladie ; et, parce qu'une nature est vaincue par une autre nature , et que souvent un dieu l'emporte sur un autre dieu , il a découvert, grâce à l'ensei gnement magistral de la raison divine, à partir des natures et des pouvoirs opposés les uns aux autres, les remèdes à toutes les maladies » ( trad . P. Monat ; cf. Festugière 15, t . I, p . 232 n . 2 ). La correspondance fictive de Pétosiris avec Néchepso atteste aussi l'existence d'un livre de Pétosiris sur le même domaine médico-magique (cf. fr. 37-42 Riess, parmi les fragments douteux) : c'est ce qu'on appelait le Kúxos Terooipewç, qui est vraisemblablement le même ouvrage que l'on trouve évoqué aussi par le titre "Opyavov kotpovouixov [ ɛto oipewç npòc Nexequ Baoiléa ’Acoupíwv. Au sens strict, le « Cercle de Pétosiris » était une espèce de diagramme servant comme instrument « mystique » de prognose , de divination mathématique ( arithmomancie ) et médicale : une ligne médiane, qui sépare le monde supé rieur du monde inférieur, représente la « limite de la vie et de la mort » ; au-dessus et au dessous, sont inscrits une série de chiffres et l'on tire au sort l'un d'eux ; lorsque l'on obtient un nombre placé dans l'hémisphère « supra - terrestre » , le pronostic est que le malade pour lequel on fait la consultation vivra ; si au contraire le sort désigne un nombre du demi-cercle « infra-terrestre » , c'est un présage de mort ( cf. Berthelot 40, t. I [ Introduction ), p. 87-92 ; 41 F. Cumont , Recherches sur le symbolisme funéraire des Romains, coll . « Bibliothèque archéologique et historique de l'Institut Français d'Archéologie d'Istanbul » 35 , Paris 1942, réimpr. 1966, p. 37 sqq .; Festugière 15 , t. I , 125 n. 1 ). L'instrument aurait été dédicacé au roi Néchepso ( fr. 40-41 Riess ; cf. Festugière 15, t. I, p. 327 ). La même tradition, et dans le même contexte médico- magique, attribue aussi à Pétosiris une méthode d'onomatomancie astro

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logique, fondée sur les rapports entre les lettres du nom et les signes du zodiaque ( fr. 37-39 Riess, où le pronostic porte sur les malades alités, les esclaves fugitifs ou les gladiateurs ; Boll 9, CCAG VII, p. 160 ; cf. Festugière 15, ibid. ). Comme l'a remarqué Fraser 17 , t. I , p. 436, il est possible que cette correspondance n'ait pas fait partie de l'ouvrage original. Récemment, concernant le même domaine magique, on a trouvé dans le P.Bingen 13 (= P.IFAO inv. 313 ) du début des 11/11Ie siècle av . J.-C. un fragment d'un livre XV de Néchepso sur les ’ Anotpontiaguoi, c'est- à -dire les formules apotropaïques pour chasser des malades les esprits du mal (cf. Fournet 6). Comme le remarque Pingree 19 , p . 548 : « The importance of Pseudo - Peto siris works ... is their illumination of - although in a very fragmentary form two important processes of Ptolemaic science : the development of the astral omens that the Egyptians of the Achemenid period had derived from Meso potamia, and the invention of a new science of astrology based on Greek astronomy and physics in conjunction with Hellenistic mysticism and Egypto Babylonian divination from astral omens » . Influence. Pour un grec de l'époque classique, la représentation des astres comme des êtres vivants , idée rattachée à leur identification avec des divinités, n'a pas été acceptée spontanément. On peut citer par exemple Aristophane, Paix 406-413, où les Grecs sont distingués des barbares du fait que ces derniers vénèrent de façon superstitieuse le Soleil et la Lune. Il est évident que la situa tion a beaucoup changé lorsqu’un Zénon de Citium enseigne à la Stoa l'idée de la planète comme être vivant et divin , et qu'il se sert de l'astrologie dans un dessein de divination. Il faut reconnaître dans cette nouvelle réalité l'influence de la tradition chaldéenne fondée sur la connexion entre la divinité et les astres, ainsi que l'influence de la religion égyptienne , qui représentait depuis longtemps le zodiaque à travers ses divinités, comme on peut le voir, par exemple, dans le zodiaque de Denderah qui a été daté aux environs de 150 av . J. -C , mais qui reproduit sans doute un zodiaque beaucoup plus ancien . On peut citer aussi Ératosthène ( E 52 ) , qui parle déjà d'un lien entre divinité et zodiaque, alors qu'en poésie Aratos ( * A 298 ) commence à associer les étoiles aux mythes anciens. Mais c'est la concrétisation de toute cette tradition astrologique, mêlant les influences babyloniennes et égyptiennes avec de nouveaux éléments grecs, dans le recueil de Néchepso - Pétosiris qui devait agir comme le facteur qui allait exercer la plus grande influence dans ce changement de mentalité de la part des Grecs vis -à-vis de l'astrologie. En effet, l'ouvrage de Néchepso - Pétosiris, rédigé au plus tard en 150 , rem plaça sans doute d'autres livres grecs plus anciens, même s'il était fondé sur ceux - ci ( un fonds hérité de l'époque ptolémaïque ), et devint une véritable Bible pour les astrologues, le texte qui faisait le plus autorité dans ce domaine jusqu'à la parution des ouvrages de Ptolémée au IIe siècle de l'ère chrétienne . Les successeurs grecs les plus immédiats, antérieurs à l'Empire, furent Sérapion , Timée et Critodème, dont on n'a conservé aussi que des fragments ( cf. Cumont 14 , p . 18 : Kroll 12, col . 2166 ). Peu après sa rédaction , au cours du 1er siècle avant notre ère, l'ouvrage de Néchepso - Pétosiris allait être diffusé aussi dans les milieux cultivés de Rome, lesquels, en outre, recevaient directement l'enseignement du philosophe stoïcien

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d'origine syrienne Posidonius d'Apamée , qui succéda au grec Panétius à la tête de l'école stoïcienne (cf. Kroll 12 , col . 2165 sq .; 42 A. Le Bæuffle , Le ciel des romains, coll . « Antiques » , Paris 1989 , p. 56 , 58 ) . C'est sans doute grâce en partie à Posidonius que les Grecs ont connu plus profondément l'astrologie orientale et que la résistance à celle -ci s'est peu à peu affaiblie . A ce sujet, il faut citer notamment le représentant de l'Académie Nouvelle , Carnéade ( 2 ° C 42 ) , et tous ceux qui l'ont suivi dans la critique de la croyance dans les effets des étoiles sur la vie des hommes , et dans l'omnipuissance du Destin , des adversaires qui ont accentué leur dialectique lorsque le ils avaient tendance à ne pas considérer et à laisser au moins une marge pour pourrait dire que le point de vue de

livre de Néchepso - Pétosiris est apparu : comme inévitables les décrets du Destin l'action du libre - arbitre. Au début , on Carnéade l'a remporté, mais à la fin

l'influence orientale a repris de la force avec Posidonius. Le maître de celui-ci, Panétius, comme on peut le déduire du témoignage de Cicéron, De div . II 89, connaissait déjà la doctrines des aspects, et cela sans doute à partir de l'astro logie égyptienne , voire de Néchepso. Cependant, malgré sa filiation stoïcienne , il finit par rejeter aussi l'astrologie, en niant en fait aux astres tout rapport avec la divinité , alors que Varron voyait dans les dieux seulement des symboles des corps célestes. Parmi les auteurs qui ont connu les doctrines de Néchepso et Pétosiris à l'époque impériale et qui les ont cités comme des autorités dans le domaine de l'astrologie, on a déjà mentionné Thessalos (cf. supra ), à qui on peut associer maintenant Thrasylle de Mendès ( cf. Juvénal VI 569 sqq .) et l'épigrammatiste de l'époque de Néron Lucillos ( cf. A. P. XI 164 ) , ainsi que Pline l'Ancien ( cf. Histoire naturelle II 88 = fr. 2 Riess ; VII 160 = fr. 17 Riess ) et Manilius ( cf. infra ), toujours au 1er siècle de notre ère (cf. Kroll 12 , col. 2165 ) . Les atta ques ont de toute évidence continué à cette époque, comme on peut le voir, par exemple , chez Philon d'Alexandrie . Cf.43 M. Dragona -Monachou, « The problem of evil in Philo of Alexandria with special reference to the De providentia », Philosophia 5-6, 1975-1976, p. 306-352, pour qui l'attaque philonienne contre l'astrologie n'est pas dirigée contre les stoïciens, notamment contre Posi donius , mais contre des déterministes : soit les Chaldéens , soit l'empereur Tibère ou Manilius, soit encore notre astrologue anonyme qui écrivit sous le nom de Néchepso -Pétosiris ou , plus vraisemblablement, le stoïcien égyptien Chérémon ( * + C 91 ) . Les Astronomiques de Manilius (

M 19) représentent la première euvre

traitant de la divination astrale qui nous soit parvenue , à l'époque d'Auguste . Mais , comme le remarque Cumont 14 , p . 18 , Manilius est plus fidèle à sa condition de poète qu'aux théories pseudo - scientifiques de ses devanciers . Au contraire, Vettius Valens , qui vivait sous les Antonins , était un esprit dépourvu de toute originalité : « Il ouvre la série des auteurs qui se bornent à résumer et à compiler , à transcrire ou à traduire des préceptes et des présages que leur antiquité même rendait vénérables à leurs yeux » ( ibid .). Outre les Anthologies de Vettius Valens , il faut citer aussi le Tetrabiblos de Ptolémée ( ITP) , la Mathesis de Firmicus Maternus et les Apotelesmatica d'Héphaistion de Thèbes ( IVP) comme les témoignages conservés les plus importants et les plus cohérents sur l'astrologie hellénistique . En effet, la tradition hellénistique, notamment celle

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des Astrologoumena de Néchepso - Pétosiris, a constitué sans doute une source fondamentale pour tous ces traités: cf. fr. 25-28 Riess ( Manilius ) , fr. 1 , 5 , 18-24 Riess ( Vettius Valens), fr. 15 Riess (Ptolémée ), fr. 13 , 16 , 25-28 Riess ( Firmicus Maternus ), fr. 6, 7 , 10 , 12 Riess (Héphaistion ). Comme le remarque Cumont 14, p. 20 , on peut établir que « l'astrologie telle que nous la trouvons développée chez les mathematici de l'époque impériale, reproduit dans une large mesure les règles et les présages qu'avaient formulés les auteurs de l'Égypte hellénistique » , bien que l'analyse concrète des sources ne soit pas facile : « À mesure que se multiplient les intermédiaires, s'estompent naturellement les contours de l'image primitive, dont les écrivains tardifs reproduisent encore les traits essentiels, mais altèrent parfois l'expression » (ibid. ) . Comme intermédiaire on peut citer notamment Dorothée de Sidon ( IP), dont on ne conserve que d'assez longs fragments . Qui plus est, si on considère l'ensemble des æuvres qui nous sont parvenues, on constate avec Cumont 14 , p . 21 , que, même à la fin de l'Empire, un grand nombre d'astrologues sont des Égyptiens, comme l'étaient avant eux Ptolémée, ou l'auteur de la compilation en vers intitulée ’ AnotemeOuatixá, laquelle , sous le nom ancien de Manéthon , se présente comme l'æuvre d'un disciple de Péto siris et d'Hermès ( cf. I 11 , V 10 édit. Koechly = test . 8 sq . Riess ) : ainsi l'Anonyme de l'année 379 (CCAG V 1 , p. 194 ; VIII 4 , p. 115 ) , Paul d’Alexan drie (IVP) , et Rhétorios ( VIP) , le grand compilateur que les byzantins ont largement utilisé. Pour un aperçu de l'ensemble de la tradition astrologique hermétique depuis le 11 / 11 ° s. av. J.-C. jusqu'au IX e s. ap. J.-C. , nous renvoyons à Gundel & Gundel 16, p. 384, et à Monat 37, p. 17 . On peut affirmer que le recueil de Néchepso -Pétosiris, comme tout l'hermé tisme en général , a continué d'exercer, après la parution d'ouvrages comme le Tetrabiblos qui en ont reçu par ailleurs l'héritage, une influence considérable sur les astrologues et les alchimistes pendant des siècles . Le facteur qui traduit le renouveau de l'astrologie au Moyen Âge et à la Renaissance est notamment l'idée que les dieux antiques sont en réalité des étoiles , de sorte que leur représentation contient implicitement et parallèlement une signification cosmo logique, une idée qui provenait de l'Antiquité . À l'époque de la Renaissance on peut citer entre autres le célèbre John Dee , mage à la cour de la reine Élisabeth fre d'Angleterre. Ce ne serait qu'au XVII ° siècle que cette astrologie tellement mêlée à la magie, à l'occultisme et à la superstition, fut soumise à une critique spécialement acharnée , à une époque dominée par l'orgueil de la raison et le refus de tout autre mode de connaissance .

PEDRO PABLO FUENTES GONZÁLEZ .

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FIV

Nectarius est un notable lettré de Calama en Numidie ( = Guelma en Algérie ) qui « trouve dans sa vieillesse une occasion exceptionnelle de manifester son attachement à sa patrie » ( 1 A. Mandouze [édit. ] , Prosopographie chrétienne du Bas - Empire, vol . 1 : Afrique ( 303-533 ), Paris 1982, p. 776-779 , p. 776) en solli citant l'intervention et la clémence de saint Augustin , suite à des actions sacrilèges dont ses concitoyens s'étaient rendu coupables au mois de juin 408.

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L'affaire nous est connue par la correspondance échangée entre eux à ce sujet (Ep. 90-91 ; 103-104 dans 2 A. Goldbacher (édit . ) , S. Aureli Augustini, Epistulae, coll . CSEL, 34/2, Vindobonae 1898 ) . Dans sa première lettre ( apud Aug. , Ep. 90 ), Nectarius ne dit rien des événe ments eux -mêmes , récemment survenus. Après un exorde en forme de prété rition ( Quanta sit caritas patriae, quoniam nosti, praetereo ), dans son souci de « laisser sa patrie florissante » et sa crainte de « la rigueur du droit public » , il demande à l'évêque d'Hippone d'intervenir en faveur des habitants de Calama et d'agir pour que les innocents soient exemptés de peines et que les châtiments excluent les supplices. La réponse début août ( cf. Mandouze 1 , p . 777 ) d'Augustin , qui était allé sur place au lendemain du drame ( cf. Ep. 91 , 10 ) , nous apprend ce qui s'était passé à Calama . Sans doute en réaction à la loi du 15 novembre 407, « qui marquait la ferme volonté d'en finir avec les derniers signes extérieurs du paganisme » ( 3 S. Lancel , Saint Augustin , Paris 1999 , p . 433 ) , un défilé parcourut bruyam ment les rues de la ville . L'église fut criblée de pierres. Suite à une plainte de l'évêque , l'église fut à nouveau attaquée huit jours plus tard. Le lendemain , elle fut enfin incendiée et pillée , et un clerc fut mis à mort, sans que les autorités municipales n'aient rien fait pour rétablir l'ordre, si bien que le reste du clergé ne dut son salut qu'à la fuite ( Ep . 91 , 8 ) . « L'évêque d'Hippone eut à ceur de s'occuper lui-même de cette affaire qui s'était déroulée aux portes de son diocèse et avait mis en péril l'un de ses disciples les plus chers » ( Lancel 3 , p. 434 ) : Possidius. Dans la lettre où il relate ces événements , Augustin commence par évoquer les « fleurs » qui poussent dans la patrie de Nectarius et qui ne produisent que des épines (Ep. 91 , 2) . Il en veut pour preuve le témoignage de la République de Cicéron, qui nourrit le patriotisme de Nectarius . Ne fait -elle pas l'éloge des vertus, qui rendent vraiment florissante une cité ? Sans vouloir se départir de la mansuétude chrétienne ni laisser impuni un exemple de méfait ( Ep . 91 , 6 ) , Augustin assure cependant Nectarius qu'il veillera à ce que « personne ne soit frappé d'une peine trop sévère » (Ep. 91 , 7 ) et à ce que les coupables aient la vie sauve . Quant aux dommages matériels, ils seraient à la charge des chrétiens eux mêmes ( Ep. 91 , 10) . Huit mois plus tard , au printemps de 409 , Nectarius adressa une seconde lettre à Augustin (apud Aug. , Ep. 103 ) qui plaide cette fois , semble -t- il, pour l'allégement des condamnations pécuniaires qui avaient frappé les responsables des événements de l'année précédente . « Dans sa première lettre , l'évêque lui avait signifié qu'il resterait aux coupables de quoi “mal vivre " , ce qu'il enten dait au sens moral , car il ne se faisait pas d'illusions sur leur contrition . Mais l'autre faisait mine de l'entendre au sens matériel et, revenant à la charge auprès de l'évêque, il lui représentait qu'il était plus pénible de “ mal vivre que d'en finir par la mort avec ses maux " (Ep. 103 , 3 ) . En clair , la mort était préférable à une vie misérable, conséquence de la confiscation des biens qui réduisait à l'indigence - l'inopia : c'est le mot des textes de loi pour désigner cette peine ceux qui en étaient punis » (Lancel 3 , p. 434) . Augustin lui-même, en aidant les

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pauvres et en soignant les malades , ne cherchait -t -il pas à alléger les peines des affligés ? Nectarius allègue ensuite que la gravité des péchés importe peu, dès lors qu'on implore pour eux l'indulgence et que « si , comme le veulent certains philosophes , tous les péchés sont égaux , une indulgence commune doit leur être attribuée à tous » (Ep. 91 , 3 ) . Qu'Augustin songe enfin aux cris et aux lamen tations des mères, des épouses, des enfants , à la honte de ceux qui ont subi la torture , au spectacle de leurs cicatrices, etc. ( Ep. 91 , 4 ) . « En réponse à ce plaidoyer, Nectarius reçoit une longue lettre ( Ep. 104 ) dans laquelle il se voit reprocher d'avoir sollicité le texte de la première lettre dans un sens impliquant des accusations imméritées » ( Mandouze 1 , p . 778 ) . Son argu mentation est réfutée point par point, jusqu'à l'appel à considérer toutes les fautes comme égales : « Tes Stoïciens » , lui écrit Augustin , « tiennent que tous sont également fautifs, eux qui veulent que tous les péchés soient égaux » ; cependant comme ils blâment toute miséricorde, ils estiment non pas que tous doivent être également pardonnés, mais que tous doivent être également punis ( Ep. 104, 4 , 17 ) . Nectarius se réclamait des valeurs romaines traditionnelles . Il va jusqu'à comparer Augustin à Cicéron (Ep. 103 , 1 ) et sa profession de foi selon laquelle il y a, après la mort, des demeures préparées pour ceux qui ont bien servi leur patrie ( Ep. 103 , 2 ) est directement inspirée de la République (Resp. VI 13 ) . Augustin lui répond en se référant à Cicéron ( Ep . 104 , 1 , 3 et passim) , aux exempla tirés de la tradition romaine ( Ep. 104, 2 , 6) , à Salluste ( Ep. 104, 1 , 4) et à Virgile (Ep . 104 , 3 , 11 ) . Par conséquent, « Nectarius paraît être un représentant typique de ces païens du début du Ve siècle qui se situent tout naturellement dans un univers de discours culturel et religieux permettant le dialogue avec un homme comme Augustin , représentant non moins typique d'un christianisme inséparable de cet univers » (Mandouze 1 , p . 779 ) . EMMANUEL BERMON .

15 NÉLEUS DE SCEPSIS RE Neleus 4

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Philosophe péripatéticien , disciple d'Aristote et de Théophraste. Cf. 1 K. von Fritz , art. « Neleus >> 4 , RE XVI2 , 1935 , col . 2280-2281 ; 2 F. Wehrli , GGP , Antike 3 , p. 534 ; 3 U. von Wilamowitz -Moellendorff, « Neleus von Skepsis » , Hermes, 62 , 1927 , p. 371 ; 4 H. von Arnim , « Neleus von Skepsis » , Hermes 63 , 1928 , p. 103-107 ; 5 F. Lasserre, De Léodamas de Thasos à Philippe d'Oponte. Témoignage et fragments. Édition, traduction et commen taire, Napoli 1987 , chap. 10, p. 539-542 ; 6 P. Moraux , Der Aristotelismus, p. 3-31 ( sur le sort de la bibliothèque d'Aristote ) ; 7 J.P. Lynch , Aristotle's School. A study of a Greek educational institution , Berkeley/Los Angeles/ London 1972 ; 8 H.B. Gottschalk , « Notes on the wills of the Peripatetic scholarchs » , Hermes 100, 1972 , p. 314-342 (en particulier, p . 335-342 « Aristo tle's library » ) ; 9 H.B. Gottschalk , « Aristotelian philosophy in the Roman world from the time of Cicero to the end of the second century AD » , ANRW II 36, 2 , p. 1079-1174 ( sur Nélée , p . 1083-1088 ) ; 10 F. Wehrli , Aristoxenos, coll . « Die Schule des Aristoteles » 2 , 2e éd . , Basel/Stuttgart 1967 , fr. 62 (Aristoxène de

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Tarente [ A 417 ] aurait été le parasite de Nélée ) ; 11 R. Goulet , notice « Aristote de Stagire » A 414 , DPhA , t. I , p. 434-435 ; 12 H. B. Gottschalk , art. « Neleus » 3 , NP VIII , 2000 , col. 809-810 ; 13 H.J. Drossaart Lulofs, « Neleus of Scepsis and the fate of the library of the Peripatos » , dans R. Beyers et alii (édit. ) , Tradition et traduction. Les textes philosophiques et scientifiques grecs au Moyen Age latin, Hommage à F. Bossier, coll . « Ancient and Medieval philosophy » series 1 , vol . 25 , Leuven 1999 , p. 9-24 (cet article, posthume, a été complété par A. M. I. van Oppenraay ) ; 14 F. Grayeff, Aristotle and his school. An inquiry into the history of the Peripatos with a commentary on Metaphysics Z, H, 1 and O , London 1974 (chap. IV ; « The library of the Peripatos and its history » , p. 69-85 ) ; 15 W. K.C. Guthrie , A History of Greek philosophy, t. VI , Cambridge 1981 , p . 59-65 ; 16 J. Bidez , Un singulier naufrage littéraire dans l'Antiquité. A la recherche des épaves de l'Aristote perdu, Bruxelles 1943 ; 17 J. Barnes, « Roman Aristotle » , dans J. Barnes et M. Griffin (édit . ) , Philo sophia togata , t. II , p. 1-69. Originaire de Scepsis en Troade, Nélée est le fils du fameux Coriscos souvent cité dans des exemples par Aristote ( 2 - C 187 [ R. Goulet) où Coriscos est présenté comme académicien ; Strabon , XIII 1 , 54 le qualifie de “ socratique" [Ewxpatıxóc : disciple de Socrate le Jeune selon Lasserre 5 , p. 540 ] ; mais il était en réalité un élève d'Aristote , selon Gottschalk 12 ( il faut sans doute comprendre : à l'Académie d'abord, puis en Asie mineure , avant la fondation du Lycée en 335 ] ; il serait entré à l'Académie en même temps qu'Aristote , Lasserre 5, p. 540 ). Nélée fut “ l'auditeur à la fois d'Aristote et de Théophraste " (Strabon, ibid. ; étrangement, on lit parfois que Nélée était le neveu de Théophraste, e.g. 18 A. Kenny , The Aristotelian Ethics. A study of the relationship between the Eudemian and Nicomachean Ethics of Aristotle , Oxford 1978 , p . 217 ) . Nous ne lui connaissons pas de domaine de recherche propre et aucun titre d'ouvrage ne lui est attribué. Pourtant il devait être un membre important du Péripatos ; en effet , dans son testament , Théophraste ( † 288/7 ou 287/6 selon 19 W. W. Fortenbaugh et alii [édit . ) , Theophrastus of Eresus. Sources for his life, writings, thought and influence, coll . « Philosophia antiqua » 54 , 1-2 , Leiden 1992 , t . I , p . 1 ] ) lui légua en particulier sa bibliothèque qui contenait celle d'Aristote ( D.L. V 52-57 ( testament de Théophraste ); Théophraste lui légua en outre un esclave ; Nélée fait aussi partie de la communauté des dix philosophes qui reçoivent ensemble “ le jardin, la promenade et toutes les maisons attenantes au jardin " ( trad. M. Narcy, dans Diogène Laërce, Vies et doctrines des philo sophes illustres , Paris 1999, p. 614 ] ; il fait encore partie des sept exécuteurs testamentaires. Cf. aussi Strabon XIII 1 , 54 ). On a supposé que l'intention de Théophraste était de faire publier les ouvrages scolaires du Stagirite par Nélée (Gottschalk 8 , p. 337 [ Théophraste a l'intention de faire de Nélée " his literary executor” ) et Gottschalk 12 ) ; on a aussi pensé que Théophraste indiquait par là sa préférence pour Nélée comme futur scholarque ( cf. déjà von Arnim 4, p. 105 ; mais cette inférence est discutable, cf. C. Natali, Bios theoretikos, La vita di Aristotele e l'organizzazione della sua scuola, Bologna 1991, p. 109 ). De fait, la

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communauté d'amis chargés d'élire le successeur de Théophraste fit porter son choix sur Straton de Lampsaque. Le nom de Nélée est étroitement lié au destin de la bibliothèque d'Aristote ( et de celle de Théophraste) et en particulier des traités dits " ésotériques " du Stagirite. Les textes essentiels qu'il faut prendre en compte pour l'examen de ce dossier sont d'abord : Strabon XIII 1 , 54 ( on trouvera une traduction française dans 20 P. Schubert, « Strabon et le sort de la bibliothèque d'Aristote » , LEC 70 , 2002, p. 225-237 , trad . p. 226-227 (à la ligne 6 de la traduction , il faut remplacer Théophraste par Aristote ) ; cf. Fortenbaugh 19 , t . I , n ° 37 , p. 90-93 avec trad . angl . ; Barnes 17, p. 2-3 (avec trad . angl . ) ; Plutarque, Sulla 26 ( Plutarque dépend peut-être de Strabon ou de sa source ) ; ensuite : Athénée I 1 , 3a- b ( épitome ; ce texte n'est pas conciliable avec la tradition Strabon -Plutarque) et V 47 , 2112 53 , 215b ( fragment de Posidonius , extrait sans doute des Histoires ; cf. Barnes 17, p . 8-12 ) ; Diogène Laërce V 52-57 ( testament de Théophraste ) ; Souda, s.v. Euanas ( mainmise par Sulla sur la bibliothèque d'Apellicon ( ™ A 235 ) ; le passage dépend explicitement de Plutarque). La bibliographie sur cette question épineuse est immense et comporte presque toujours une part importante de spéculation. On consultera Moraux 6 avec une bibliographie abondante dans les notes ; Lynch 7 ; Gottschalk 8 (bibliographie , p. 335 n . 2 ) et 9 ; Goulet 11 ( avec bibliographie) ; Drossaart Lulofs 13 ( pour le savant néerlandais , Nélée n'est pas retourné à Scepsis avec la bibliothèque ; il a reçu les livres en tant que respon sable de la bibliothèque au sein de l'école ) . Le dossier a été récemment repris par Barnes 17 avec l'esprit critique qui caractérise le savant anglais (biblio graphie, p. 2 n . 1 ) . L'aventure de la bibliothèque héritée par Nélée peut se résumer, dans sa première phase , comme suit . Après le choix de Straton comme scholarque , Nélée rentra dans sa patrie (de dépit ? cf. déjà von Arnim 4 , p . 105 ; Barnes 17 , p. 5 ) en emportant avec lui la bibliothèque qui lui avait été personnellement léguée ( selon le témoignage de Strabon XIII 1 , 54 et de Plutarque, Sulla 26 ; sur ce point, Athénée I 1 3ab , peut s'accorder avec cette version : Ptolémée Philadel phe achète tous les livres à Nélée pour les emporter à Alexandrie “ avec les livres venant d'Athènes et de Rhodes” – ce qui peut laisser supposer qu'il n'a pas acheté la bibliothèque de Nélée à Athènes [ autre interprétation dans Drossaart Lulofs 13 , 21 ] ) . Un siècle environ après la mort de Nélée , ses descendants enfouirent les documents dans une sorte de fosse (év diápuy tivi Strabon , loc. cit. ) , afin de les soustraire, pour une raison qui nous échappe , à l'avidité des Attalides ( sans doute sous Eumène II ( 197-159 ] ) . Rongés par l'humidité et les mites, ils furent finalement rachetés à prix d'or par Apellicon de Téos ( > A 235 ) vers 100 av . J.-C. Les dates de sa vie ne sont pas connues ( cf. la tentative de von Arnim 4 , p. 104 : l'auteur place la naissance de Nélée dans la seconde moitié des années cinquante du IVe siècle ; Coriscos l'envoie à Athènes dès la fondation du Lycée ) . On peut supposer qu'à l'époque de la succession de Théophraste (ca 287 ) il avait environ 60 ans, puisqu'il avait été l'élève d'Aristote . Il serait donc né entre

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350 et 345. Les dates données par 21 O. Gigon dans LAW , « Neleus » 2, ca 340 260 , sont sans doute un peu trop basses. Wilamowitz 3 a proposé de corriger le texte de Magna Moralia II 7 , 1205 a 17 en introduisant, dans un exemple , le nom de Nélée ( figurant en fait dans certains manuscrits) , qui remplit une fonction analogue à celui de Coriscos ailleurs chez Aristote ( cf. DPhA t. II , s . v. Coriscos, p. 458 ) . L'auteur du traité veut montrer que les plaisirs sont des dispositions qui diffèrent en espèces ( plaisir de la table , de l'amour etc. ) , contrairement à la disposition qui résulte de l'acquisition d'un savoir : èàv čxn ràp Adunpoç mv ypapuatixńv, duo wç [δε ] διακε σεται υπό της γραμματικής ταύτης ο γραμματικός άλλω ότωούν έχoντι γραμματικήν , ου> ( 1928 , en all . ) ; elle n'est pas reprise dans la traduction française de O. Sedeyn : 24 W. Jaeger, Aristote. Fondements pour une histoire de son évolution, Paris 1997 ] ) . Un témoignage isolé indique en passant , à propos d'Aristoxène , que ce dernier était " le parasite de Nélée ” ( Lucien , De parasito 35 = Wehrli 10, fr. 62 ) . Une relation, quelle qu'elle soit, entre Aristoxène ( A 417 ) et Nélée au sein du Lycée , sous le scholarcat d'Aristote ou de Théophraste, n'est en soi guère surprenante . JEAN -PIERRE SCHNEIDER .

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F III ?

Nemertios n'est pour nous qu'un nom, et même , un nom seulement attesté dans les trois occurrences du titre d'un ouvrage perdu de Porphyre, dont quelques fragments subsistent chez Cyrille d'Alexandrie ( Contra lulianum , III 79 et 95 , et V 166 , respectivement, PG 76 , col . 621 A 3-4 , 645 B 2-3 et 753 C 13 ) . Cependant, cette circonstance n'a pas empêché la PLRE (t. I , 1971 , p. 621 ) de fournir trois indications à peu près positives sur ce personnage fantomatique :

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« dedicatee of Porphyry’s Πρός Νημέρτιον λόγος, presumably his disciple and probably a senator ( cf. 1 J. Bidez, Vie de Porphyre, Gand 1913 , p . 67 n . 2 ) » . Comment expliquer ces renseignements biographiques, à propos d'un parfait inconnu ? C'est manifestement l'effet d'un rapprochement analogique avec les noms de destinataires d'autres cuvres de Porphyre, mieux conservées, tels que Chrysaorios ( C 117 ) , Firmus Castricius ( + F 13 ) , Gédaleios ( > * G 10 ) , Anato lios ( ** A 157 ) , et Gauros ( >G 9). Néanmoins , les renseignements donnés par la PLRE sont-ils fiables, si modestes et prudemment distillés qu'ils soient ? Que Nemertios ait été « probablement sénateur » , c'est une assertion qui , faute d'être argumentée , paraît absolument gratuite . Le renvoi à une note du livre de Bidez 1 , p . 67 n . 2 ) ne permet pas d'assurer davantage l'information , puisque cet auteur, qui juge le fait probable, ne donne pas la moindre référence , le moindre indice ni le moindre argument. Procédant par analogies successives , il met notre inconnu sur le même pied que Chrysaorios et Firmus Castricius, parmi les « sénateurs les plus en vue » que fréquentait Porphyre, alors même que rien ne dit que ce Firmus ait été sénateur ( voir 2 J. Bouffartigue et M. Patillon dans Porphyre, De l'abstinence, Livre I , Paris 1977 , introduction , p . XVIII - XXIV , et 3 L. Brisson , « Notices sur les noms propres » , dans 4 Porphyre, La Vie de Plotin , I , Paris 1982 , p . 89-90 , et 5 Id ., notice « Firmus Castricius » du DPhA (t . III , F 13 , p . 425 ) , qui ne disent mot sur cette possibilité , et pour cause ; voir en revanche PLRE, I , p. 340-341, avec la mention : « peut-être sénateur » , mais sans aucune référence à l'appui, et 6 L. Brisson, « Plotin : une biographie » , et note à Vita Plotini 7 , 24 , dans 7 Porphyre, La Vie de Plotin, II , Paris 1992 , respective ment p. 11 et p . 233 , qui , en ces deux endroits, le qualifie de sénateur ). Suivant sans doute Bidez , et sans présenter non plus le moindre indice ou argument , 8 H. D. Saffrey fait aussi de Firmus Castricius , Nemertios, Chrysaorios, et même de Gauros , « des notables , probablement des sénateurs romains » ( « Pourquoi Porphyre a-t-il édité Plotin ? » , dans Porphyre 7 , p . 40 ). Que Nèmertios ait été « vraisemblablement un disciple de Porphyre » , c'est encore une assertion tout à fait sujette à caution , pour deux raisons . Tout d'abord, nous y reviendrons, il n'est pas possible d'assurer que le sens du titre est « à Nèmertios » , plutôt que « contre Nemertios » . Ensuite , à supposer même que le sens soit « à Nèmertios » , il n'est pas possible d'inférer de cette simple interprétation que le destinataire de l'ouvrage fut un disciple de Porphyre . L'inférence est toutefois faite également par 9 Marie -Odile Goulet -Cazé ( « L'arrière -plan scolaire de la Vie de Plotin » , dans Porphyre 4, p . 246-248 ) , qui nomme parmi les disciples qui « apparaissent uniquement comme dédicataires de certains ouvrages porphyriens » , Nemertios , Gauros , Gédaleios , Anatolios et Eudoxios . Mais , comme le disait H. D. Saffrey ( 8 , p . 39 ) , dresser une liste des élèves de Porphyre à partir des adresses de ses écrits , « c'est un procédé que l'on doit manier avec discernement » , a fortiori pour le fantomatique Nemertios , puisqu'il pourrait n'être que le destinataire d'un écrit , voire d'une lettre , comme le suggère H.D. Saffrey, par une analogie , cette fois , avec les écrits adressés à Anébon ( A 183 ) et à Marcella (MM 23a ) ( 8 , p . 40) . R. Beutler était d'ailleurs prudent, dans la section de sa notice consacrée aux élèves de Porphyre ( RE XXII

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1 , 1953 , col . 312 ) , qui , préférant parler de cercle, plutôt que d'école proprement dite, admettait dans celui -ci Chrysaorios, Gédaleios et Anatolios , mais ne faisait pas mention de Nèmertios ou de Gauros. Que Nemertios ait été le « dédicataire d'un ouvrage de Porphyre » , dans le titre duquel paraît son nom , ce n'est en réalité pas un fait assuré , mais une simple possibilité . Contrairement à ce qui se passe, par exemple, pour le traité Tlpos Taūpov, dont le début , conservé , nous présente une formule d'adresse amicale qui nous assure que Gauros était le dédicataire , il est difficile de dire si la forme du titre signale ici une réfutation , ou bien s'il annonçait une mise au point amicale sur le sujet du mal , de la providence et de la puissance divine. La préposition npóç suivie de l'accusatif d'un nom de personne est ambiguë, quand elle entre dans la formulation d'un titre. Le sens « contre » est classique et extrêmement fréquent, dans la rhétorique judiciaire ou politique dès la période classique, comme ensuite en philosophie , que la préposition soit suivie d'un nom de personne, d'un pluriel désignant les membres d'une école philosophique, ou d'un participe substantivé indiquant les tenants d'une thèse ; et ce sens ne fait pas de doute quand , du moins, le nom qui le suit est celui d'un philosophe connu , qui , souvent, a vécu assez longtemps avant l'auteur. En revanche , en cas de personnage inconnu , comme ici , le doute ne peut guère être levé quant au sens de la préposition. En l'absence d'argument positif, c'est donc seulement du fait qu'il est pour nous un parfait inconnu , que l'on peut préférer penser, par analogie avec d'autres noms de destinataires qui étaient certainement des amis du philosophe , que Nèmertios est un contemporain et qu'il est lui -même le destinataire amical de l'écrit de Porphyre, plutôt qu'un adversaire. Le titre de l'écrit de Porphyre serait alors du type, bien attesté, des Mpoç... nep ..., « À un tel , sur tel sujet » (voir, outre le loòc Taūpov nepì toŨ Tiūç uquxoūtal tà šußpva , par exemple, les derniers titres de la liste des écrits de Xénocrate dans Diogène Laërce IV 14 , ou encore de très nombreux titres de Chrysippe [ C 119] , dans D.L. VII 189-202) . L'absence d'un titre thématique introduit par nep est sans doute ce qui a fait penser H. D. Saffrey à une lettre, où le npóç indiquerait le destinataire: mais le terme Nóyos, qui apparaît seul dans les trois occurrences du titre , forme avec la préposition npóc un syntagme qu'on tradui rait bien plus naturellement par « discours à Nemertios » ( dans l'hypothèse d'un Tipóç non adversatif) et où il paraît difficile de lire, stricto sensu , la désignation d'une lettre. On ne peut exclure toutefois qu'il s'agisse d'une double désignation de l'écrit comme discours et comme lettre ( par exemple , Cicéron, à cinq jours d'intervalle , désigne une lettre d'admonition à César d'abord comme un ouußovreutixóÇ (Wóyos ) ( Lettres à Atticus, XII 40, 2) , puis ( ibid. , XIII 26, 2 ) simplement comme une epistula ad Caesarem : voir 10 C. Lévy, « Quelques remarques à propos des titres des œuvres théoriques chez Cicéron » , dans 11 J.-C. Fredouille et alii ( édit. ), Titres et articulations du texte dans les æuvres antiques , Paris 1997 , p. 191-207 , à la page 195 ) . Et on sait que les auteurs anciens font montre d'une grande plasticité dans la désignation des écrits en prose : sans multiplier les exemples , la Lettre à Marcella est désignée chez Eunape par le terme, non spécifique, Biba ov et un même écrit de Cyprien de

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Carthage est appelé quelque temps plus tard epistula par Augustin et liber par Jérôme ( voir 12 S. Deléani, « Les titres des traités de Saint Cyprien : forme et fonction » , dans Fredouille 11 , p . 397-425, à la page 400 ). Si Cyrille n'a pas ignoré ou omis la partie thématique du titre du discours (et toujours dans l'hypo thèse d'un após non adversatif ), ce Nóyoç à simple titre -dédicace indiquerait qu'il s'agit d'un discours philosophique impersonnel ( comme on peut le suppo ser par les quelques fragments conservés ), mais adressé sous forme de lettre personnelle à Nèmertios, et visant sans doute , au -delà de lui , à enseigner ou à exhorter un cercle de personnes éloignées. Si c'est une telle situation d'écriture que reflète le titre, un discours sous forme de lettre, on est amené à penser à certains écrits adressés à Chrysaorios, que , faute de revenir à Rome, Porphyre lui envoya de Sicile ( voir notamment Ammonius , in Porphyrii Isagogè, éd . A. Busse, Berlin 1891 (CAG IV 3 ) , p. 22 , 11-22 , et Élias, in Porphyrii Isagoge, éd. A. Busse , Berlin 1900 [CAG XVIII 1 ) , p. 39 , 6-19) . L'étude onomastique montrera bientôt s'il y a ou non quelque chance que Némertios ait été un aristocrate romain vivant à la fin du III ° siècle , comme Chrysaorios - et donc s'il ya moyen ou non d'étayer l'hypothèse qu'il fut le destinataire amical d'un écrit philosophique de Porphyre, plutôt que l'auteur philosophe de thèses adverses . Mais on doit rester conscient que, à ce stade de l'enquête , le Némertios dédica taire est le résultat d'un choix très hypothétique quant au sens de la préposition , et aussi d'un raisonnement par analogie qu'il faut en tout cas se garder de pousser jusqu'au point d'augmenter, de manière aussi généreuse qu'arbitraire, la liste nominative des « disciples » de Porphyre. Pour ce qui est du nom lui - même , il est très rarement attesté dans nos sources antiques, mais, comme on va le voir, il n'est pas sans intérêt de donner ici quel ques indications onomastiques à son propos. D'origine grecque , il est formé sur Nemertès, nom dérivé d'un appellatif poétique qui correspond à un adjectif signifiant « véridique» et qui fournit le nom d'une Néréide ( Il. XVIII 46 , Hésiode, Théogonie, 262, Empédocle, fr. 122 , 4 Diels -Kranz ). En tant que nom de personne , Nemertès est lui- même rare : on connaît un citoyen d'Iasos, vers 200 avant J.-C. (voir 13 F. Bechtel , Die historischen Personennamen , p . 563 ( référence que je dois à D. Feissel ] ), et un Iunius Nèmertès, à Rome , dont le nom apparaît sur une plaque de marbre datée de la première moitié du II ° siècle avant J.-C. ( 14 CIL VI , Inscriptiones urbis Romae Latinae, IV 2 , Berlin 1902, nº 30983 , 17 , et 15 H. Solin , Die griechischen Personennamen in Rom . Ein Namenbuch , Berlin / New York 1982 , t. II , p. 654) ; Plutarque, enfin (Apophtheg mata Laconum , 230 A ; voir 16 Pape -Benseler, Wörterbuch, t. II , p . 972 ) , nomme un Namertès ( forme dorienne ), qui n'est pas autrement connu . Pour en venir à Némertios, M. Laurent Dubois m'indique qu'il s'agit d'une réfection proto -byzantine typique , et M. Denis Feissel précise à mon intention : « La suffixation en -ios ( comme en latin -ius ) devient très productive à partir du IIIe siècle après J.-C. , d'abord dans la catégorie des signa (élément marginal de la nomenclature ), avant d'envahir et d'enrichir massivement le répertoire des cognomina . Beaucoup de noms nouveaux apparaissent ainsi , formés sur toutes sortes de substantifs ou d'adjectifs, sans qu'il y ait forcément à la base un

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anthroponyme ancien comme Nemertès. [ Le ) Nèmertios contemporain de Porphyre est remarquable aussi par sa date relativement haute : il peut alors s'agir d'un signum , et non d'un cognomen reçu à la naissance, et il n'est pas en ce cas interdit de spéculer sur la signification du nom choisi. » Les deux autres occurrences du nom Nemertios ( PLRE, II , p . 775 , n ° 1 et 2 ) , qui apparaissent dans les Lettres de Nil d'Ancyre ( PG 79, col . 205-206 , id est livre II , lettres 12 et 13 , adressées à un Nemertios silentiaire, et col . 309-312 , id est livre II , lettre 210, à un Nemertios &xxoc - c'est - à - dire un defensor ) sont plus tardives et sont donc certainement des cognomina proto -byzantins. On peut tirer de ces indications onomastiques que le Némertios du titre de Porphyre a bien peu de chances d'être un auteur antérieur au philosophe, mais qu'il est très certainement un contemporain (ce qui n'avait jamais été argumenté jusqu'ici), étant donné le succès rapide et massif de ce type de suffixation dans l'anthroponymie (pour les supernomina ) à partir du IIIe siècle ( voir 17 liro Kajanto , Onomastic Studies in the Early Christian Inscriptions of Rome and Carthage , Helsinki-Helsingfors 1963 , p. 25-26 - l'enquête de Kajanto dépasse en fait le cadre de l'épigraphie chrétienne -, et 18 Benet Salway , « What's in a Name ? A Survey of Roman Onomastic Practice from 700 B.C. to A. D. 700 » , JRS 84 , 1994, p . 124-145 , à la p. 136 ) . De plus, dans cette première période , pré byzantine, les nouveaux noms en -ios ont une valeur expressive tirée du terme à partir duquel ils sont formés, et ils sont souvent destinés à mettre en valeur une qualité de la personne ( voir Kajanto 17 , p . 29 , qui montre aussi que bon nombre de ces noms ne peuvent être des noms donnés à la naissance , mais qu'ils ont été donnés - ou pris - plus tard dans la vie de la personne, et Salway 18, p . 136) . Un dernier point remarquable est que , jusqu'au début du IVe siècle, la classe domi nante romaine , répugnant sans doute à abandonner la nomenclature tradi tionnelle , loin d'utiliser ces formations récentes en -ius/ios comme noms de naissance et cognomina proprement dits, a eu tendance à limiter leur emploi aux surnoms ( supernomina ) désignés comme signa et à privilégier les noms tirés du grec ( Salway 18 , p. 136-137 ) ; 19 I. Kajanto, Supernomina : a study in Latin epigraphy, Helsinki-Helsingfors, 1966, p. 62, précise que nombre de signa ont dû être formés par des personnes connaissant bien le grec – et souvent même écrits en grec -, dans les classes aisées et cultivées de l'Occident latin, et tout particulièrement à Rome , dans un souci de distinction socio -culturelle ( sur la distribution sociale inégale de ces signa , pour Rome, voir l'impressionnante statistique de la page 58 ) ; et ce savant indique ( ibid ., p. 64 ) que, bien que formés à la ressemblance des épithètes honorifiques, ces signa ont dû être dans bien des cas des surnoms permanents. De là il ressort que Nèmertios pourrait tout à fait être le supernomen d'un aristocrate romain , comme c'est certainement le cas pour Chrysaorius ou Chrysaorios, qui doit être le signum ( là encore renfermant un adjectif épique grec , servant d'épithète divine ) choisi par un sénateur de la famille des Symmaque , ami de Porphyre . Que Porphyre nomme un aristocrate par son supernomen ne doit pas surprendre et n'est pas un argument contre cette hypothèse : c'est ce qu'il fait pour Chrysaorios, dont on sait pourtant par une

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autre source qu'il faisait partie de la grande famille sénatoriale des Symmaque ( voir DPhA , II , C 117 , p. 323 ), et le signum conserve ici et là quelque chose de l'épithète honorifique, avec une “ valeur culturelle ajoutée” due à l'emprunt au grec homérique ; d'autre part, René Cagnat , le grand épigraphiste, avait remar qué que , là où on peut comparer usage littéraire et épigraphique, au IVe siècle en tout cas , souvent le signum d’un personnage des hautes classes est le seul élement connu ou mentionné par les auteurs ( 20 R. Cagnat, Cours d'épigraphie latine, 4e éd. , 1914 , p. 59-60 et n . 4, avec des exemples – comportant d'ailleurs des signa grécisants - empruntés à Ammien Marcellin : un Adelfius, en XVI 6 , 2 , qui correspond à Clodius Celsinus Adelfius - voir CIL VI 1711 et IX 1576-, préfet de la Ville en 351 , ou encore un Hymetius, en XXVIII 1 , 17 , qui désigne Iulius Festus Hymetius, proconsul d'Afrique en 362 ) . Et puisque, à cette date haute , chez un personnage appartenant certainement à l'élite sociale , il doit s'agir d'un signum et non d'un cognomen , le choix du nom , où s'entendent à la fois l'adjectif et le théonyme épiques (associés tous deux à la parole de vérité de type prophétique ), pourrait répondre à une intention socio -culturelle de distinc tion. Il est délicat d'aller plus loin et de spéculer sur l'intention qui a présidé à ce choix : marque -t-il l'intérêt constant, voire le choix de vie d'un romain cultivé et bilingue pour les valeurs de la philosophie , au moyen d'un surnom culturelle ment distingué , formé sur un nom où les connaisseurs ne manqueraient pas de reconnaître un terme ( vnueprńs) appartenant à l'ancienne poésie théologique , fréquent chez Homère , repris en théonyme par Hésiode et allégorisé par Empé docle ? Ce serait alors un beau surnom – si l'on veut spéculer – pour un ami de la vérité , sinon de Porphyre.

STÉPHANE TOULOUSE. 17 NÉMÉSIUS D'ÉMÈSE RESuppl. VII : 8 CPG 3550

FIV

Évêque d'Émèse ( auj. Homş ) , auteur d'un traité Sur la nature de l'homme ( Περί φύσεως ανθρώπου ). PLAN DE LA NOTICE Éditions Traductions Études d'orientation. A. Vie et cuvre de Némésius B. Structure et contenu du De nat. hom.

i . Chap. 1 ii . Chap. 2 iii. Chap. 3 iv. Chap. 4-5 v. Chap. 6-27 vị. Chap 28-43. C. La postérité du De nat. hom . i . La tradition manuscrite du De nat. hom . ii . La tradition latine du De nat. hom .

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La tradition géorgienne La tradition syriaque La tradition arménienne La tradition arabe

Éditions . 1 M. Morani , Nemesii Emeseni De natura hominis, coll . BT, Leipzig 1987 ; 2 Chr. Fr. Matthaei , Nemesius, De natura hominis, graece et latine, Halle 1802 , réimpr. Hildesheim 1967 . Traductions. 3 W. Telfer, Cyril of Jerusalem and Nemesius of Emesa , coll. « The Library of Christian Classics >> 4 , London 1955 , p. 224-453 ; 4 J. Thibault, Sur la nature de l'homme, Paris 1844 ; 5 M. Morani (édit. ) , Nemesio di Emesa , La natura dell'uomo, trad . a cura di M. M. , Salerno 1982 ; 6 E. Orth , Nemesius von Emesa, Anthropologie, Maria -Martental bei Kaisersesch ( Bez. Coblenz ) 1925. Une traduction anglaise par J. Urmson paraîtra prochainement dans la collection « Translated Texts for Historians » (Liverpool University Press ). Études d'orientation . 7 E. Skard, art. « Nemesios » , RESuppl. VII , 1940 , col . 562-566 ; 8 W. Schmid et O. Stählin , Handbuch der klassischen Altertumswissenschaft, VII : Geschichte der griechischen Literatur, 2 : Die nach klassische Periode der griechischen Literatur, 2 : Von 100 bis 530 nach Christus, 6. Aufl., München 1924 ; 90. Bardenhewer, Geschichte der altchristlichen Literatur, IV : Das fünfte Jahrhundert mit Einschluss der syrischen Literatur des Vierten Jahrhunderts, Freiburg im Breisgau 1924 ; 10 E. Zeller , Die Philosophie der Griechen in ihrer geschichtlichen Entwicklung, III 2 , Die nacharistotelische Philosophie, zweiter Hälfte, 5. Aufl., Leipzig 1923 ; 11 W. Vanhamel , art. « Némésius d'Émèse » , DSp XI , 1982 , col. 92-99 ; 12 É . Amann , art. « Némésius d'Émèse » 9, DTC XI 1 , 1931 , col . 62 67 ; 13 S. Lilla, art. « Némésius d'Émèse » , DECA II , 1990 , col . 1715-1716 ; 14 F.M. Young , art. « Nemesius von Emesa » , TRE 24 , 1994 , p . 256-259 ; 15 G. Fatouros , art. « Nemesios » , BBK VI , 1993 , col . 605-607 ; 16 L. Brisson , art. « Nemesios » , NP VIII , 2000, col . 817-818 ; 17 W.W. Jaeger, Nemesios von Emesa. Quellenforschungen zum Neuplatonismus und seinen Anfängen bei Poseidonios, Berlin 1914 ; 18 A. Kallis , Der Mensch im Kosmos. Das Weltbild des Nemesios von Emesa, coll . « Münster. Beitr. zur Theol. » 43 , Münster 1978 ; 19 A. Siclari, L'Antropologia di Nemesio di Emesa , coll. « Filosofia e religione >> 9, Padova 1974 ; 20 E. Dobler, Zwei syrische Quellen der Theologischen Summa des Thomas von Aquin : Nemesios von Emesa und Johannes von Damaskus : ihr Einfluss auf die anthropologischen Grundlagen der Moraltheologie ( S. Th . I- II, 99.6-17 ; 22-48) , coll . « Dokimion » 25 , Fribourg ( Suisse ) 2000 ; 21 B. Motta, La mediazione estrema. L'antropologia di Nemesio di Emesa fra platonismo e aristotelismo. Pref. di E. Berti, coll . « Problemata » 1 , Padova 2004 .

A. Vie et euvre de Némésius On ignore presque tout de la vie de Némésius : même sa datation approxi mative doit être déduite des données que lui - même nous révèle dans son unique écrit, le De natura hominis. Or, puisqu'aussi bien Eunome, l'évêque de Cyzique

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( E 122 , mort vers 394 ) qu'Apollinaire, évêque de Laodicée ( ~ * A 239 , condamné au Concile de Chalcédoine en 381 et mort vers 390 ) y sont évoqués, la rédaction du De nat. hom . est à dater au plus tôt de la dernière décennie du IVe siècle . Par ailleurs , l'absence de toute mention des protagonistes des contro verses christologiques du Ve siècle , comme Eutychès ou Nestorius, jointe à l'absence de toute allusion à la condamnation d'Origène ( qui eut lieu en 399 à Alexandrie et en 400 à Rome), bien que celui -ci soit critiqué dans l'ouvrage à cause de son hétérodoxie (chap. 3 , p. 44, 18 sq . Morani ) , suggèrent de ne pas reporter la date de Némésius beaucoup plus tard que 400. Bien que certains historiens (cf. Zeller 10 , p . 509 n . 1 , à la suite de Ritter; Schmidt- Stählin 8, p. 1448 ; Amann 12 , p. 65 ) aient situé notre auteur au milieu du Ve siècle, il est donc plus probable que Némésius a rédigé le De nat. hom . vers 400 apr. J.-C. ( Bardenhewer 9 , p . 278-279 , suivant 22 D. Bender, Untersuchungen Nemesios von Emesa , Diss. Heidelberg 1898 ).

zu

Plusieurs tentatives pour cerner l'identité de notre auteur ( cf. Bender 22 , p. 3 sqq .) semblent devoir être écartées. Déjà dans l'Antiquité , certains manuscrits attribuent le De nat. hom . à un certain Adimantius d'Émèse ( Vanhamel 11 ) , mais puisque ce personnage n'est attesté nulle part ailleurs, on en a conclu avec raison à son caractère chimérique. Déjà dans l'Antiquité, nom bre de manuscrits grecs ( les modèles, aujourd'hui disparus, des traditions arabe et arménienne, par exemple), attribuent la paternité de cet ouvrage à Grégoire de Nysse , peut- être parce que les chap . 2-3 ont circulé à un moment donné de manière indépendante comme un traité sur l'âme de ce dernier ( cf. 23 J. Dräseke, « Ein Testimonium Ignatianum » , ZWTH 46, 1903, p. 505-512 ), ou bien à cause de la ressemblance du titre de l'ouvrage ( ſlepi púoewÇ åvOpúrov ) avec celui d'un écrit de contenu similaire de Grégoire (De creatione hominis I- II, CPG 3215-3216, intitule Περί της του ανθρώπου γενέσεως dans la majorite des mss . , mais είς τήν του ανθρώπου κατασκευήν dans les mss . ΛΕΠ ) ; ou bien parce que certains passages des deux ouvrages traitent des même thèmes de manière semblable (Dobler 20 , p . 45 ) . En tout cas , c'est cette identification abusive , rendue canonique par la traduction latine de Burgundio de Pise ( vers 1160, cf. infra ) qui explique que , pendant tout le Moyen Âge latin en occident et encore jusqu'à récemment ( l'écrit « Grégorien » intitulé Tepi Juxñs dans PG 45 , col . 187-222, n'est rien d'autre qu'un extrait des chap. 2-3 du De nat. hom . némésien ), l'ouvrage ait été transmis et cité , entre autres par Albert le Grand et Thomas d'Aquin , sous le nom de Grégoire. C'est d'ailleurs dans une large mesure le nom prestigieux de Grégoire qui a permis la préservation du texte dans une multitude de manuscrits (on en connaît plus de cent, cf. infra ). Il est aussi possible que ce soit Némésius qui se cache derrière la mystérieuse figure de « Remigius » , auteur autrement inconnu d'un écrit intitulé De anima, au contenu semblable à celui des traités de Jean Damascène, et qui est cité entre autres par Alexandre d'Halès ( 1185-1245 ) et Philippe le Chancellier ( vers 1165 vers 1236) ; cf. 24 I. Brady, « Remigius - Nemesius » , FranciscStud 8 , 1948 , p. 275-284 ; 25 M. Morani, La tradizione manoscritta del “ De natura hominis ” di Nemesio , Milano 1981 , p. 26-28 .

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Finalement , la tentative d'Ellebodius ( dans son editio princeps, Anvers 1565 ) , suivi par Le Nain de Tillemont (Mémoires, Paris 1714, t. IX , p. 540-541 ; 601) et beaucoup d'autres, pour identifier notre auteur avec le gouverneur de Cappadoce Seconde (PLRE I : 2 , p. 622, fl. vers 386 apr. J.-C. ) , correspondant de Grégoire de Nazianze ( Epist. 198-201 ) et auquel celui -ci a adressé un poème ( II 7 , PG 37 , col . 1551-1578 ), a obtenu l'adhésion de quelques historiens (Telfer 3, p. 208-210 ; Siclari 19 ; Young 14 , p. 257 ; Brisson 16) . Cependant, le correspon dant de Grégoire était un avocat; or l’æuvre de Némésius ne contient que peu d'allusions présupposant une quelconque formation judiciaire. En effet, à part le nom et un certain intérêt pour les doctrines chrétiennes, le gouverneur de Cappa doce ne semble pas avoir grand chose en commun avec l'auteur du De nat. hom . ( cf. Dobler 20 , p . 15 : « Wer die Briefe und das Gedicht gelesen hat , kann dieser Identifizierung auch nicht den Hauch einer Wahrscheinlichkeit abgewinnen » ) . La question ne saurait être tranchée à la lumière de nos informations actuelles ; cependant, l'identification est loin d'avoir été prouvée, et peut à bon droit être considérée comme peu vraisemblable. Reste le seul ouvrage en effet, la tentative de 26 J. Dräseke , « Demetrios

Kydones oder Nemesios ? » , ZWTh 44 , 1901, p. 391-410 , d'attribuer à l'évêque d'Émèse l'écrit intitulé De contemnenda morte (PG 154, col . 1169-1212 ) , normalement attribué à Démétrius Kydones ( XIVe s . ) , n'a pas suscité l'adhésion des historiens – de Némésius , Sur la nature de l'homme . Il s'agit de ce qu'on a pu appeler « le premier texte d'anthropologie chrétienne » (cf. 27 W. Telfer, « The birth of Christian anthropology » , JThS 13 , 1962 , p. 347-35 ; Lilla 13 ; Dobler 20 , p . 34-35 ; Motta 21 , p. 13 ; mais cf. 28 L. W. Barnard , « Father of Christian anthropology », ZNTW 63 , 1972 , p . 254-270, qui réserve cet honneur aux écrits d'Athénagore d'Athènes ( A 475 ] ) , ou même simplement « le premier traité complet d'anthropologie » (Bardenhewer 9 , p. 275 ; Amann 12 , col . 62 ) . Quoi qu'il en soit , l'ouvrage représente un effort admirable pour intégrer la quasi-totalité de la sagesse païenne dans une Weltanschauung chré tienne , même s'il reste à préciser de quelle variété de christianisme il s'agit ( orthodoxe ou hétérodoxe , de tendance antiochienne ou chalcédonienne ) . On a suggéré, étant donné la quantité et la qualité des renseignements d'ordre physio logique et médical que fournit son traité , que l'auteur a dû suivre des études assez poussées de médecine , et aurait même pu être lui-même médecin ( Telfer 3, p. 210-211 [mais Némésius aurait été un « gentleman doctor » qui ne pratiquait pas la médecine ); Siclari 19 , p. 14 ; 29 A. Charles- Saget, « Fragilité et repentir : introduction à Némésius d'Émèse » , dans A. Charles - Saget ( édit. ), Retour, repentir et constitution de soi, coll . « Problèmes et controverses » , Paris 1998 , p . 246-250 ) . La chose est possible , mais il faut aussi admettre que Némésius a pu suivre des études de médecine dans le cadre des cours universitaires de philosophie qu'il a peut-être suivis à Antioche ( Dobler 20, p. 21-22). Rédigé par un évêque, le De nat. hom . - qui frôle parfois l'hérésie , notam ment en ce qui concerne la question de la préexistence de l'âme ( cf. Motta 21 , p . 188-201 ) – est manifestement destiné à un public qui comporte des païens ( chap. 42 , p . 120 , 22 Morani ; cf. Young 14 , col . 257 ) ; en effet, on a

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l'impression que c'est surtout à ceux-ci que l'auteur s'adresse. Cependant, il serait sans doute abusif de conclure de ce fait que Némésius était encore païen à l'époque où il rédigea son ouvrage et qu'il n'aurait rajouté un vernis de christianisme qu'après sa conversion ( Telfer 27) . On a considéré le De nat. hom . comme un ouvrage de caractère apologétique, peut -être destiné à répondre au « Kulturkampf » qui aurait été mené contre les chrétiens par l'Empereur Julien ( 30 E. A. Wyller , « Die Anthropologie des Nemesios von Emesa und die Alkibiades I - Tradition. Eine Untersuchung zum Platon - Bild in der Schrift “ Über die Natur des Menschen" (Kap. I , 1 ) » , SO 44, 1969 , p . 126-145 ) ; cependant, une telle perspective, fondée sur des hypothèses fragiles ( importance supposée de l'influence de l'exégèse de Jamblique sur le Premier Alcibiade et sur le Parménide: en fait les traces de ce premier dialogue chez Némésius sont minces, et celles du deuxième inexistantes), ne s'impose pas . En effet, le recours à l'Alcibiade dans le cadre du problème de l'union de l'âme et du corps est traditionnel ( cf. 31 H. Dörrie, Porphyrios' EYMMIKTA ZHTHMATA . Ihre Stellung in System und Geschichte des Neuplatonismus nebst einem Kommentar zu den Fragmenten, München 1959 , p. 41 n . 1 ) , et on n'a pas besoin d'évoquer un commentaire de Jamblique pour l'expliquer. En outre, l'étude de la tradition manuscrite du De nat. hom . ( Morani 25 ) montre que l'ouvrage de Némésius n'a pas été beaucoup lu avant le viº siècle. C'est d'ailleurs l'une des raisons qui avaient amené Zeller ( 10 , p. 509 n . 1 ) à situer la date de sa rédaction au milieu , plutôt qu'à la fin, du ve siècle . L'ouvrage semble n'avoir d'abord circulé, au cours des deux premiers siècles de son existence, qu'à l'intérieur d'un cercle limité, sans doute en Syrie. Il n'est cité pour la première fois que dans les Ambigua de Maxime le Confesseur, rédigés entre 628 et 634 (cf. Morani 25 , p. 101-104 ; 32 Kh. Samir, « Les versions arabes de Némésius de Homs » , dans P. Massimiliano et C. Umberto (édit. ) , L'eredità classica nelle lingue orientali, coll. « Acta encyclopaedica » 5 , Roma 1986 , p. 99-151 , p. 100 ), avant que Jean Damascène n'en intègre vers 743 , sans en indiquer l'auteur, de longs morceaux dans son De fide orthodoxa (cf. 33 K. Burkhard , « Johannes von Damaskus ' Auszüge aus Nemesios» , WE 1909, p. 89-101 ; Morani 25, p . 104-114 ; Dobler 20 , p. 56-58 ) . On a depuis longtemps remarqué que , comme l'a bien dit Bardenhewer (9 , p. 275 ) , le De nat. hom . relève moins de l'histoire de la théologie que de celle de la philosophie . En effet, étant donné le rôle relativement modeste accordé au Christ, ainsi que l'anthropologie optimiste de Némésius , où la nécessité de la Grâce divine pour que l'homme puisse atteindre à la béatitude divine éternelle n'est évoquée que de manière épisodique, on peut estimer avec 34 F. M. Young ( « Adam and anthropos. A study of the interaction of science and the Bible in two anthropological treatises of the fourth century » , VChr 37 , 1983 , p . 110-140 , notamment p. 134 ; cf. Motta 21 , p . 13 ) que notre auteur ne se sert le plus souvent de la Bible que pour confirmer des doctrines qu'il avait déjà puisées à d'autres sources, notamment, en l'espèce, la philosophie néoplatonicienne de tendance porphyrienne. C'est d'ailleurs cet aspect « leicht christianisiert » du traité némésien ( Young 14 , p . 257 ) qui a rendu possible un phénomène sur

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lequel nous reviendrons plus loin , à savoir la circulation comme des traités indépendants de divers extraits du De nat. hom . , extraits qui finissent souvent par être intégrés dans des écrits de tendance philosophique et de culture extrê mement diverses . Dans les controverses qui se font jour à la fin de l'Antiquité tardive autour de la question de la possibilité de concilier la foi chrétienne et l'érudition païenne, Némésius s'inscrit moins dans la perspective d'un Tertullien - dont le De anima montre par ailleurs de fortes ressemblances avec le traité némésien, surtout en ce qui concerne son utilisation de la tradition doxographique pour les doctrines sur l'âme ( Tertullien , De an . chap . 5 - Némésius chap. 2 ) – pour qui la philosophie païenne a été définitivement dépassée par la révélation chrétienne, que dans celle qui fut d'abord prônée par Clément d'Alexandrie et poursuivie par Grégoire de Nysse , selon laquelle christianisme et philosophie païenne sont presque entièrement conciliables . D'ailleurs, les fortes ressemblances entre le De nat. hom .et le De hominis opificio de Grégoire, rédigé peut-être une vingtaine d'années plus tôt , permettent de penser à l'utilisation d'une source commune, qui a été différemment identifiée par les historiens modernes ( Posidonius, Philon / Commentaire d'Origène sur la Genèse , Commentaire de Porphyre sur le Timée ). En effet, chez les deux auteurs on retrouve la conception de l'homme comme point culminant du développement graduel de la nature, lui dont les facultés sont rangées en un ordre hiérarchique où chaque membre dirige son successeur (Motta 21 , p. 61 et n . 46) . Néanmoins , il subsiste d'importants points de divergence entre Grégoire et Némésius : celui -ci admet (chap. 1 ) , tandis que celui - là rejette, la désignation traditionnelle de l'homme comme uexpos zóquoq; pour Némésius, qui suit ici encore ses sources néoplatoniciennes, c'est la doctrine de l'immortalité de l'âme qui prime , tandis qu'aux yeux de Grégoire c'est celle de la résurrection des corps ( Young 34, p . 132) . Avant tout, ce qui sépare les deux traités , c'est l'absence presque totale dans l'écrit némésien d'une doctrine du péché originel (cf. Charles -Saget 29 ) , et par voie de conséquence, d'un quelconque rachat de l'humanité par le sacrifice du Christ . L'ouvrage de Némésius se révèle dans ce sens comme fondamentalement optimiste,et, si l'on peut se permettre une expression quelque peu anachronique , humaniste. Cependant, ces différences peuvent aussi s'expliquer par les différents publics auxquels ces deux ouvrages sont destinés : à des chrétiens, dans le cas de Grégoire ; partiellement, sinon principalement à des païens dans le cas du traité de Némésius ( Dobler 20 , p. 46) . Sur les différences doctrinales qui séparent Grégoire de Nysse et Némésius, cf. Telfer 27 , p. 350 sq . , et 35 G. Verbeke et J.R. Moncho (édit . ) , Némésius d'Émèse, De natura hominis. Éd. critique avec une introd . sur l'anthropologie de Némésius, coll . « Corpus Commentariorum in Aristotelem Graecorum » , Suppl . 1 , Leiden 1975 , p . LXII sq. Par ailleurs , on a depuis longtemps souligné les fortes ressemblances, du moins en ce qui concerne l'utilisation de la doxographie d'Aëtius, entre le De nat . hom . de Némésius d'une part, et d'autre part la Curatio affectionum Graecarum de Théodoret de Cyr (cf. 36 J. Dománski, Die Psychologie des Nemesios, coll . « Beiträge zur Gesch . der Phil . des Mittelalters >> 3 , Münster

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1900 , p. XIX , Jaeger 17 , p. 11 sqq . , 37 J. Mansfeld et D.T. Runia, Aëtiana . The method and intellectual context of a doxographer, I : The sources , coll . « Philosophia antiqua » 73 , Leiden 1997 , p . 291-299 ; pour d'autres rapproche ments entre Théodoret et Némésius , voir, sur le plan de l'anthropologie, 38 T. Halton , « The five senses in Nemesius, De natura hominis and Theodoret, De providentia » , Studia Patristica 20 , 1989 , p. 94-101 ; sur le plan théologique, Amann 12, p. 65 ). Une fois de plus, les deux ouvrages furent vraisemblablement rédigés à quelques 200 kilomètres l'un de l'autre et dans un intervalle d'une vingtaine d'années , s'il est vrai , comme on l'a suggéré, que le futur évêque de Cyr a rédigé son opus major avant d'être nommé à son siège (Mansfeld -Runia 37 , p. 272-273 , citant l ' « Introduction » de 39 P. Canivet [édit. ) , Théodoret de Cyr, Thérapeutique des maladies helléniques. Texte critique, introd ., trad . et notes , coll . SC 57 , Paris 1958 ) . Pour ce qui est du fond doctrinal, on a relevé dans le De nat. hom . l'influence de plusieurs tendances philosophiques : aristotélisme, platonisme, allusions aux pré -socratiques, au stoïcisme et à l'épicurisme, etc. Cependant, Aristote, bien qu’utilisé par Némésius , peut-être principalement à travers la tradition doxo graphique, n'est cité que là où l'auteur rejette sa doctrine (Bardenhewer 9 , p. 277 ) , et la plupart des historiens ont remarqué une certaine réticence de la part de notre auteur envers le Stagirite. Cependant, plutôt qu'à un souci d'orthodoxie chrétienne ( Dománski 36 , p. XVI ; 165 ; Dobler 20 , p. 66 ; Motta 21 passim ), cette réticence est plutôt à mettre sur le compte de l'attitude ambiguë de ses sources néoplatoniciennes vis- à -vis d'Aristote, en l'espèce surtout Porphyre. En effet, à l'aristotélisme notre auteur préfère le platonisme : plus spécifiquement, son adhésion va au néoplatonisme post -plotinien : mais il s'agit d'un platonisme de tendance plutôt porphyrienne que jambliquéenne (malgré Wyller 30, suivi à tort par 40 H. Hunger, Die hochsprachliche profane Literatur der Byzantiner (= Handbuch der Altertumswissenschaft 12.5 ) , 2 vol . , München 1978 , t. I , p . 44 45 ) . En effet, les recherches décisives de Dörrie 31 , qui ont permis la reconsti tution de l'ouvrage perdu de Porphyre intitulé Espuxta (ntuara, ont montré de façon définitive l'importance fondamentale de la pensée du philosophe tyrien pour la formation de celle de l'évêque d'Émèse . B. Structure et contenu du De nat. hom. Contrairement aux habitudes du DPhA , nous tenons à fournir au lecteur une analyse de l'ouvrage de Némésius, car, comme on ne sait pratiquement rien de cet auteur, c'est sa pensée elle -même qui peut servir à le situer dans le temps et dans la tradition philosophique . Le De nat . hom . peut se diviser en cinq ( Young 34 ; 14 ) ou six grandes sections (Mansfeld -Runia 37 ) : I. chap. 1 Exorde , culminant dans une espèce de panégyrique à la gloire de l'homme . II . chap . 2 : sur la nature de l'âme . III . chap . 3 : sur la relation entre l'âme et le corps. IV . chap . 4-5 : sur le corps humain et les éléments qui le constituent. V. chap . 6-28 : structure et fonctionne ment des facultés psychiques et corporelles selon les différents domaines de l'activité humaine . VI . chap . 29-43 : aspects éthiques de l'anthropologie: le volontaire et le choix (chap. 29-34 ) ; le destin ( chap. 35-38 ) ; le libre arbitre et ce

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qui dépend de nous ( chap. 39-41 ), le tout culminant dans une discussion de la providence (chap. 42-43 ) . i. Le chap. 1 décrit le statut de l'homme dans le cosmos.On y remarque une conception grandiose de la Nature – plutôt, comme l'a montré 41 G. Verbeke, Filosofie en christendom in het mensbeeld van Nemesius van Emesa , coll. « Med . H. Vlaamse Acad. Wet . Lett. Schone Kunsten Belg . , kl . Lett . » 33 , 1 , Brüssel 1971 , néoplatonicienne que stoïcienne, comme l'avait pensé Jaeger 17, et caractérisée par l'harmonie entre ses parties et son agencement providentiel, grâce auxquels tout procède de façon graduelle , du moins parfait à la créature terrestre la plus parfaite, l'homme . Dans cette structure hiérarchiquement continue , où tout est parfait, chaque élément existe pour les autres : il n'y a que l'homme qui soit fait pour lui -même, ce qui explique qu'il règne sur la terre entière. L'homme , en tant que limite ou frontière ( év uedop oLs) entre le sensible et l'intelligible , constitue le lien qui maintient ensemble le Tout ; en tant que reflet du Tout , c'est un microcosme représentant le macrocosme. Dans son état primitif, l'homme se trouve dépourvu de la force brute qui caractérise plusieurs autres animaux, et il est sujet aux besoins continuels de la nourriture, de la boisson et de la protection contre les éléments ; mais il assure son salut en s'associant dans des communautés politiques. C'est ainsi que le besoin (xpe a ) constitue le moteur du progrès humain civilisateur, ainsi que du développement des arts, des sciences et des techniques . Situé entre les anges et les bêtes, l'homme gouverne ces dernières en maître juste et équitable, et il est capable de se rendre égal aux anges grâce au don divin du pardon . Le monde et tout ce qu'il contient a été fait pour cette noble créature, pour laquelle Dieu s'est fait homme, dont la fin est l'immortalité, et qui fuit le mortel (vai tò Ovntów dlapeúyo Toc, p . 15 , 9 Morani ). Dans ce premier chapitre du De nat. hom . , on trouve donc réunis , peut-être pour la première fois (cf. 42 K. Reinhardt, art. « Poseidonios von Apamea » , RE XXII 1 , 1953 , col . 558-826 , notamment col . 773 ) , deux schémas conceptuels fondamentaux : d'une part, celui de l'homme comme oúvdeouoc entre le sensi ble et l'intelligible ; d'autre part, celui du monde comme un ensemble caractérisé par la transition graduelle d'un niveau hiérarchique à l'autre , sans solution de continuité, depuis la nature inanimée jusqu'à sa culmination dans la nature rationnelle de l'homme , schéma qu'on a désigné comme la théorie des « degrés >> ( « Stufen » ; cf. Reinhardt 42 , col . 771 ) . Or, on a souvent jugé contradictoires ces deux schémas (Reinhardt , loc . cit.; 43 R.A. Norris, Manhood and Christ. A study on the Christology of Theodore of Mopsuestia , Oxford 1963, p . 142 148 ; Kallis 18 , p . 6 ) : la théorie du cúvoequos supposerait un dualisme radicalement incompatible avec le monisme qui constituerait l'essence de la théorie des degrés. Sur ce chap. 1 , cf. Jaeger 17 , p . 96-137 ; 44 E. Skard , « Nemesios und die Genesisexegese des Origenes » , SO 15-16, 1936, p. 23-43 ; 45 W. Theiler ( édit. ), Poseidonios, Die Fragmente, coll . « Texte und Kommentare » 10, Berlin 1982 , t . I , p. XI et p. 227-233 ; t . II , p. 188-192 ( qui reproduit la plus grande partie du

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chap. 1 , d'après le texte de Matthaei , du De nat. hom. comme fr. 309 a-b de Posidonius) ; Charles -Saget 29 ; Motta 11 , p. 45-112 . ii . On passe ensuite ( chap. 2 ) à l'examen de la nature de l'âme , avant d'aborder au chap. 3 la question de son union avec le corps. Némésius , qui insiste , à la suite de Porphyre , sur le caractère incorporel et donc immortel de l'âme humaine, s'oppose sur ce point aussi bien au matérialisme des stoïciens qu'à la doctrine péripatéticienne de l'âme comme entéléchie ( contra : Siclari 19 , p . 118 sq . suivi par Motta 21 , p . 176 sq ., lesquels insistent sur la « récupération » par Némésius de la conception aristotélicienne de l'entéléchie ). En effet, Némésius soumet cette doctrine à une réfutation en règle ( p . 26 , 10 - 29 , 18 Morani), développement qu'il achève par un rejet absolument sans appel: åpxet και ταύτα εκ πολλών αποδείξαι την ψυχήν μήτε εντελέχειαν ούσαν μήτε åx vntov uńte év Obuatı yevvwuévnu ; cf. déjà p . 28, 9-10 Morani: où δύναται το νυν η ψυχή κατ' ουδένα τρόπον εντελέχεια του σώματος είναι . On se souviendra que Porphyre s'était lui aussi opposé à cette doctrine, aussi bien dans son écrit perdu Πρός Αριστοτέλης < περί > του είναι την ψυχήν ÉVTENÉXELAV (ouvrage n° 31 , p . 259 dans 46 A. Smith, [ édit. ], Porphyrius, Frag menta , coll . BT, Leipzig, 1993 ) que dans son écrit fragmentairement préservé Ilɛpì quxñc npòc Bóndov ( ouvrage n ° 32 , fr. 242-250 , p 259-268 Smith ; d'autres traces des arguments de cet ouvrage se retrouvent chez Macrobe, in Somn. Scip ., II 14-16) . Pour Némésius , donc, comme pour Porphyre, l'âme est une substance incor porelle et immortelle , dont le mouvement autonome entraîne celui du corps. Il admet la préexistence de l'âme (chap. 2 , p. 23,5 sq.; p. 37 , 28 sqq. Morani), et il semble être prêt à admettre la doctrine de sa métempsychose (chap. 2 , p. 35 , 11 sqq. Morani; contra : Amann 12, col . 62 ; Vanhamel 11 , col . 95 , suivi par Dobler 20 , p. 30 ) , du moins sous la forme restreinte dans laquelle celle-ci exclut la possibilité d'une métempsychose en des corps d'animaux – doctrine que notre auteur attribue à Jamblique, apparemment sans savoir qu'il s'agissait déjà avant lui d'une doctrine bien attestée de Porphyre ( Dörrie 31 , p . 148-151 ) . On a souvent vu dans Porphyre la source principale de la doctrine némé sienne de l'âme telle qu'exposée au chap. 2 (47 H. Krause, Studia Neoplatonica, Diss . Lipsiae 1904 , p. 16-31 ; Jaeger 17 , p. 31 ) ; cependant Dörrie 31 , chap . 2 , p. 111-148 , penche plutôt pour une source médio-platonicienne. Mais les raisons mises en avant par Dörrie ne sont pas toujours convaincantes. Notamment, la tonalité anti -aristotélicienne des arguments contre la doctrine aristotélicienne de l'entéléchie ( Dörrie 31 , p. 126-127 ) ne sauraient exclure , on vient de le voir, une éventuelle origine porphyrienne, pas plus que la doctrine selon laquelle le corps serait à considérer comme l'instrument de l'âme (De nat. hom . , chap . 2 , p . 25 , 26 Morani). Loin de rejeter cette dernière notion, comme l'affirme étrangement Dörrie 31 , p. 125 n . 2 , Porphyre en fait un élément constant de sa propre philosophie ( cf. De abstinentia I 43 ; II 8 ; in Tim . II , fr. 51 Sodano ; Phil. ex orac . , p. 160 Wolff, etc.). Or, on a récemment proposé ( 48 J. Mansfeld , « Doxography and dialectic. The Sitz im Leben of the “Placita" » , ANRW II 36, 4 , Berlin 1990 , p. 3056-3229,

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3076 et n . 70 ; cf. Mansfeld -Runia 37 , p . 292-296 ) une solution susceptible de rendre justice à ces deux perspectives: le matériel némésien sur les doctrines de l'âme proviendrait bien d'un recueil doxographique dérivant en dernière analyse des Placita d'Aétius , mais ce matériel serait parvenu à Némésius par l'inter médiaire de Porphyre. Cf. Young 34, p . 130-131 . iii . Quant à la manière dont l'âme se joint au corps, Némésius , suivant une fois de plus Porphyre , nie au chap . 3 qu'il puisse s'agir d'un mélange ( oúrxvolg ), d'une juxtaposition ( ntapáDeous) ou d'une mixture (wpãous , p . 38, 17 sqq. Morani). La solution correcte , affirme- t - il, a été donnée par Ammonios ( A 140 ), le maître de Plotin , dans un fragment généralement considéré comme authentique par les historiens ( mais cf. 49 J.M. Rist « Pseudo - Ammonius and the soul/body problem in some Platonic texts of Late Antiquity » , AJPh 109, 1988 , p . 402-415 ): l'âme est liée au corps grâce à une « union sans mélange >> (ÉVWolg đoúyxutoC), dans laquelle les parties s'interpénètrent complètement pour former une nouvelle entité, mais sans être transformées l'une par l'autre . Il s'ensuit que l'âme et le corps, éléments de ce mélange qui n'en est pas vraiment un , peuvent par la suite se séparer l'un de l'autre sans rien perdre de leur nature originelle ; voilà ce qui est prouvé par l'expérience du sommeil , où l'âme, laissant le corps inerte derrière elle , s'associe aux intelligibles dans ses rêves, pouvant émettre par la suite des prédictions véridiques concernant l'avenir. Des analogies peuvent nous aider à comprendre cette relation de l'âme au corps : la présence de celle- là à celui -ci est analogue à la présence (napovo a ) du soleil à l'atmosphère qu'il chauffe et illumine ( cf. Porphyre, Ad Gaurum 11 , 3 ) ; par ailleurs, l'inclinaison ( born ) de l'âme vers le corps est analogue à l'attachement exercé par la personne aimée sur l'amant . La présence de l'âme, à l'instar de celle de tout autre incorporel, n'est pas locale : lors donc qu'elle se trouve être présente au corps, l'âme l’est non pas de manière locale, mais par relation (oxéolc ), de la même manière que le dieu se trouve être présent dans notre for intérieur (ουχ ώς εν τόπω ... αλλ ' ώς εν σχέσει, ώς λέγεται ο θεός εν ημίν, chap . 3 , p. 41 , 15-16 Morani ) . Ce mode de l'union de l'âme et du corps, ajoute Némésius (chap. 3 , p. 42 , 9 sqq . Morani ) , en s'écartant de son modèle porphy rien ( cf. Dörrie 31 , p . 100 sq .), ne diffère pas de celui dont le Verbe divin s'unit à l'homme dans l'union hypostatique . Cette notion de l'àovyxútwç “võotal, dérivant de Porphyre, le principal ennemi du christianisme, sera intégrée dans la théologie chrétienne orthodoxe à la suite du Concile de Chalcédoine (cf. 50 A. Grillmeier, « Die Vorbereitung der Formel von Chalkedon » , dans A. Grillmeier et H. Bacht [ édit . ) , Das Konzil von Chalcedon . Geschichte und Gegenwart, Würzburg 1951-1954 , t . I , p . 158-159 ; 51 S. Lilla, « Introduzione allo studio dello Ps. Dionigi l'Areopagita » , Augustinianum 22 , 1982 , p . 533-577 , 553 sq . ). C'est principalement à partir du chapitre 3 que Dörrie 31 , à la suite d'autres chercheurs ( notamment 52 H. von Arnim, « Quelle der Überlieferung über Ammonius Sakkas » , RHM 42 , 1887 , p . 276 sqq .; Krause 47 ) , et sur la base d'une comparaison des passages parallèles tirés des Solutiones ad Chosroem de Priscianus , a reconstitué les fragments d'un ouvrage perdu de Porphyre, les Summikta zetemata . Les fragments porphyriens tirés de Némésius sont repris,

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avec les passages parallèles des Solutiones de Priscien en regard , dans le recueil des fragments de Porphyre édité par Smith 46 , ouvrage n° 34, p . 278-292 . Les objections contre la thèse de Dörrie soulevées par Rist 49 s'appuient avant tout sur des argumenta e silentio : il est étrange, aux yeux de cet historien , que si Porphyre a inventé la terminologie de l'àovyxútwÇ » vãodal pour expliquer le mode d’union de l'âme au corps, on n'en trouve pas trace dans les Sentences de ce même auteur. Cependant, même si cette constatation était vraie , l'argument ne serait que de peu de poids , car il suffirait pour l'expliquer de supposer soit que Porphyre a rédigé les Summikta zetemata après les Sentences, ouvrage de jeunesse que le Tyrien a vraisemblablement mis par écrit à l'époque où il assistait aux ouvovo al de Plotin à Rome , soit que les Summikta zetemata , ouvrage destiné à introduire le lecteur aux concepts de base de la métaphysique, introduisait une terminologie que son auteur ne considérait pas nécessairement comme appropriée pour des études métaphysiques plus avancées . En réalité, Porphyre esquisse dans d'autres écrits une solution au problème de l'union des corps et des incorporels qui est identique à celle que Némésius aura trouvée dans ses Summikta Zetemata , sauf que l'expression àovyxútwę ºvãodal n'y apparaît pas . Dans son ouvrage d'embryologie Ad Gaurum ( 10 , 5 sqq . ) , par exemple , Porphyre parle dans le cadre du mélange dans l'embryon de l'âme de la mère et du père de « ce mélange divin et paradoxal » ( Tv Oɛ av Éxe vnv zpãouv xal napádočov ), ce « mélange complet qui n'induit pas de destruction mutuelle » (της ασυμφθάρτου δι ’ όλων κράσεως) dans lequel les composants ne sont ni détruits ni réduits à leurs éléments , mais où le composant incorporel s’unit à ce qui est capable de le recevoir comme les choses qui sont mélangées et qui péris sent ensemble , tout en gardant leurs propres puissances ( tàç oixe aç duváELS) comme les choses pures et distinguées à part soi . Par ailleurs dans la Sentence 33 , Porphyre affirme que lorsqu'on parle de réalités complètement séparées les unes des autres , il ne faut pas s'imaginer que leur mode d’union puisse être envisagé selon le modèle des modes d'union entre des corps. L'union que l'on cherche doit dépasser tous les modes reconnus par la Stoa : il ne s'agit ni d'un mélange (wpãouc ) , ni d'une mixture (UTELS), ni d'une conjonction (dúvodoc ), ni d'une juxtaposition (napáDeolç) , « mais d'un mode de conjonction [ ... ] qui transcende tous les modes de conjonction qui tombent sous les sens » (aw ' έτερος τρόπος [... ] πασών δε εκβεβηκώς των πιπτουσών υπό την αίσθησιν ). II semble donc hors de doute que, comme l'avait déjà dit von Armin 52 , p. 279 , et comme l'a ensuite confirmé Dörrie 31 , c'est l'ouvrage porphyrien intitulé Summikta zetemata qui a fourni à Némésius sa doctrine de l'unification sans mélange de l'âme et du corps, comme il l'a fait à la même époque pour son collègue occidental Augustin ( cf. De immortalitate animae 17 , 6) . Sur ce chap . 3 en général et sur la doctrine du mélange de l'âme et du corps en particulier, cf. Dörrie 31 , p. 99-110 ; 53 H. A. Wolfson , The philosophy of the Church Fathers, t . I : Faith , Trinity, Incarnation , Cambridge ( Mass . ) 1956 , p. 400 sqq . ; 54 E.L. Fortin , Christianisme et culture philosophique au cin quième siècle, Paris 1959 , p . 119 sqq . ; 55 J. Pépin , « Une nouvelle source de Saint Augustin : Le Súmua de Porphyre sur l’union de l'âme et du corps » , REA

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66 , 1964, p . 53-107 , repris avec d'importants addenda dans « Ex platonicorum persona » . Études sur les lectures philosophiques de Saint Augustin, Amsterdam 1977 , p . 211-315 ; 56 E. Peroli, Il Platonismo e l'antropologia filosofica di Gregorio di Nissa, con particolare riferimento agli influssi di Platone, Plotino e Porfirio. Introd . di Cl . Moreschini, coll . « Pubblicazioni del Centro di ricerche di Metafisica. Collana Platonismo e filosofia patristica. Studi e testi » 5 , Milano 1993 , p. 206-221 ; Motta 21 , p . 123-185 . iv . Les chap. 4-5 ont comme objet le corps humain et les éléments qui le constituent. Le chap. 4 nous introduit à la doctrine des quatre humeurs et de leur liaison aux quatre éléments, ainsi qu'à la distinction des parties homéomères et anoméomères du corps. La prévoyance de la nature est montrée par quelques informations tirées de l'Histoire des animaux d'Aristote (486 a), auquel Némé sius renvoie le lecteur. Comme partout dans son traité, Némésius se montre un bon pédagogue , prenant soin de donner des définitions et d'expliquer les expressions techniques . Les historiens de la première moitié du XXe siècle avaient conclu à une utilisation massive des écrits de Galien pour expliquer les sources de chap. 4 , comme pour la plus grande partie des chap. 5-24 ; cependant 57 F. Lammert, « Zur Lehre von den Grundeigenschaften bei Nemesios, c . 5 » , Hermes 81 , 1953 , p. 488-491, a soutenu que , ici comme ailleurs dans le De nat. hom. , il faut plutôt songer à une source commune à Galien et à Némésius . Les quatre éléments ( terre, eau , air, et feu ) se trouvent liés entre eux de manière harmonieuse par les quatre qualités ( le sec , l'humide , le froid, le chaud) . A l'instar des autres héritiers de la tradition doxographique , tels ses quasi - contemporains Jean Stobée , Théodoret et sans doute aussi le Pseudo - Plutarque, Némésius se contente d'exposer l'une à la suite de l'autre les diverses doctrines sur le « Kreislauf der Elemente » ( Jaeger ): l'on y trouve évoquées la théorie stoïcienne de la division des éléments en actifs et passifs, les doctrines aristotéliciennes du cinquième corps aidéplov xai xvxopopixóv ( p . 52 , 20-21 Morani ) et la distinction entre les deux variétés de l'air , l'ατμώδες et le καπνώδες ( p. 50 , 1-3 Morani, cf. Aristote , Météor. 378 b ) , la doxographie des penseurs présocratiques qui n'identifiaient qu'un seul des éléments comme fondamental et originaire : Thalès , Anaximène , Héraclite, Hipparque. Cette doctrine est réfutée par une citation tirée d'Hippocrate (De nat. hom . 2 , p . 53 , 21-54,9 M. ) rappelant que si l'homme était un , il ne sentirait pas de douleur. C'est la présence de cette citation en traduction latine au folio 28 ', li . 42 sq . du ms . Bayerische Staats bibliothek Clm 23535 ( XII° s . ) qui a permis à 58 H. Grensemann et O. Weisser, Iparchus Minutiensis alias Hipparchus Metapontinus : Untersuchungen zu einer hochmittelalterlichen lateinischen Übersetzung von Nemesios von Emesa, “De natura hominis ", Kapitel 5 : " De elementis " : mit einer interlinearen Ausgabe des Textes und der griechisch -arabischen Übersetzungsvorlage, Bonn 1997, d'identifier dans ce manuscrit une traduction latine d'une version arabe de ce chap. 5 du traité de Némésios ( voir infra, « La postérité de Némésius » ) . Cepen dant, c'est à la doctrine platonicienne ( Timée) de l'association de figures géomé triques aux éléments , dont les formes sont censées expliquer les transformations

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des uns dans les autres, qu'est consacré le développement le plus long du chapitre. Aussi a-t-on l'impression que c'est la doctrine du Timée qui emporte l'approbation de Némésius , même si celui-ci reste très discret sur le sujet. En effet, ce sont les principes de l'harmonie et de l'analogie qui expliquent les transformations et les métamorphoses du monde sublunaire . Sur les chap . 4-5 , cf. Jaeger 17 , 68-120 ; 59 J.-P. Mahé, Hermès en Haute Égypte, t . II : Le fragment du « Discours Parfait » et les « définitions » hermé tiques arméniennes ( NH VI, 8 ;8a ), coll . « Bibliothèque copte de Nag Hammadi – Section “ Textes ” » 7 , Québec 1982 , p. 228-333 . Grensemann -Weisser 58 repro duisent le texte grec du chap . 5 du De nat . hom . , d'après l'éd . Morani, avec traduction allemande , le texte latin de la traduction médiévale anonyme et de celle d'Alfanus, ainsi que le texte de la traduction arabe d'après le manuscrit de Damas (voir infra, « la postérité du De nat. hom . » ) . v. Les chap. 6-28 étudient la constitution psychologique et physiologique de l'homme. Tout d'abord, dans cet ensemble les chap . 6-15 sont consacrés aux facultés sensorielles et cognitives. On commence par l'étude de l'imagination ou faculté de représentation ( chap . 6 tepi toŨ pavtaotlXOŰ ) . Comme chez Porphyre mais déjà aussi chez Galien et dans la médecine gréco -romaine pré galénique, un rôle important est dévolu au pneuma, sorte d'intermédiaire entre la substance spirituelle qu'est l'âme et l'organisme physique du corps. À partir des ventricules du cerveau , le pneuma psychique dont ceux -ci sont remplis est transporté vers les différentes parties de l'organisme par les nerfs. Comme nous le verrons plus loin , ce pneuma psychique , organe de la connaissance sensible , joue un rôle dans l'activité de la mémoire ( chap . 12 ) . Némésius aborde ensuite l'étude des cinq sens et de leur lien avec les éléments , en se penchant longue ment sur le sens de l'odorat. Plusieurs définitions de la sensation ( aſoonous) sont passées en revue, et le chapitre se termine sur une brève discussion des distinctions hiérarchiques qui caractérisent les facultés psychiques . Le chap. 7 traite de la vue , du rôle de la mémoire dans la perception visuelle, et de la nature des illusions optiques , matériel qui dérive en majeure partie des Parva naturalia aristotéliciens. Le chap. 8 est consacré au toucher, seul sens qui n'ait pas été fourni à l'homme par le Démiurge en des organes doubles : à cause de son universalité et de son importance, le toucher a plutôt été distribué dans l'ensemble du corps. À ce sujet, la localisation de la faculté du toucher dans les ventricules antérieurs du cerveau donne lieu à une discussion physiologique très sophistiquée sur la façon dont les sensations afférentes sont renvoyées par les nerfs depuis le cerveau jusqu'aux extrémités du corps. Les nerfs sont à envisager comme des parties du cerveau , remplies de pneuma psychique. Avec le goût, le toucher est le seul sens par rapport auquel l'homme doit être considéré comme supérieur aux autres animaux. Au chap. 9, consacré précisément au goût, on exa mine, suivant encore une fois le De sensu aristotélicien ( 441 b 15 sqq . ) les huit qualités gustatives que cette faculté est susceptible de distinguer. Deux brefs chapitres (chap . 10-11 ) sont ensuite consacrés respectivement à l'ouïe -- on y

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apprend que l'homme et le singe sont les deux seuls animaux à ne pas remuer les oreilles (cf. Galien , De usu partium , t . IV , p. 295 , 12 sqq. Kühn ) - et à l'odorat. Au chap . 12 , on aborde l'étude des puissances psychiques proprement rationnelles , avec l'étude de la faculté intellectuelle discursive (Slavontıxov ), responsable des jugements , des assentiments, des aversions et des impulsions, ainsi que des intellections des êtres, des vertus, des sciences et des arts , et finalement des facultés du choix et de la délibération . Son siège est le ventricule médian du cerveau , son organe le pneuma psychique qui la remplit. Le chap. 13 traite de la faculté de la remémoration (uvnuovevtixóv) , responsable de la mémoire (uvun ) aussi bien que de la réminiscence (åváuvnouc). Comme au chap. 6, on se trouve devant une énumération d'ordre doxographique, où sont citées entre autres les opinions d'Origène et de Platon. L'âme se saisit aussi bien des sensibles à travers les organes des sens , processus dont le résultat est l'opinion ( Sóta ), que des intelligibles à travers l'intellect, processus d'où résulte l'intellection (vónouc ) . Or, la remémoration , c'est la préservation des impres sions ( Tútot) en provenance de ces deux sources. Cependant, Némésius modifie tout de suite sa présentation, pour souligner une différence entre la remémo ration des sensibles et celle des intelligibles : ceux - là sont rappelés par eux mêmes , ceux - ci par accident . En effet, la mémoire des sensibles a lieu par l'intermédiaire d'une représentation ou d'une imagination ( pavtao a ) , ce qui n'est pas le cas pour les intelligibles, dont nous nous saisissons soit par l'appren tissage, soit par des idées innées ( ex uaOngewÇ Ñ quolxnc évvo ac ) . La rémi niscence , par contre, c'est le recouvrement de la mémoire qui s'est évanouie. Le processus cognitif dans son ensemble se passe donc de la manière suivante : dans un premier temps , la faculté de représentation (oavtaotixóv ) transmet les impressions des phénomènes sensibles à la faculté intellectuelle discursive ( tỘ diavontixõ) . Celle -ci se charge alors de ces données, et , après les avoir jugées , les renvoie à la faculté de remémoration , dont l'organe est le ventricule postérieur du cerveau , aussi appelé cervelet ( ntapeyzepał ) . À l'instar d'un psychologue cognitif moderne, Némésius confirme sa théorie de la localisation des différentes facultés dans les divers ventricules du cerveau en faisant appel aux expériences de malades souffrant de lésions et d'inflammations cérébrales. Sur les sources galéniques de ce chapitre, cf. Jaeger 17 , p. 66 sqq ., et 60 H. Schöne , « Verschiedenes » , RHM 73 , 1920-1924, p. 154-156. Le chap . 14 commence par étudier la distinction entre discours intérieur et discours extérieur (περί του ενδιαθέτου και προφορικού λόγου ; sur ce sujet cf. 61 Cl . Panaccio , Le discours intérieur, de Platon à Guillaume d'Ockham , Paris 1999 ) , et contient une discussion assez détaillée des organes phonétiques. Cette distinction , d'origine stoïcienne ( cf. Porphyre, De abstinentia III 2 ) , est présentée comme une division de la partie rationnelle de l'âme; or au chap. 15 on passe en revue, de manière doxographique, plusieurs divisions alternatives des « puissances ou espèces ou parties » de l'âme. On y rencontre une division en partie végétative ( aussi appelée « nourricière » et « passive » ) , sensitive , et rationnelle ; une division en huit parties attribuée à Zénon le Stoïcien ( SVF I 143 ; cf. Porphyre, Sur les puissances de l'âme, fr. 253, p. 271,5 sq . Smith ), une

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division attribuée à Panétius ; celle d'Aristote dans les écrits physiques ( De anima , 414 a 31sq . ) et dans les écrits éthiques ( Éthique à Nicomaque, 1102 a 27 sqq.) , où la division ne se fait qu'en deux : une partie rationnelle et une autre irrationnelle. Avec le chap . 16 on passe à l'étude de la partie ou espèce irrationnelle de l'âme, aussi appelée passible ( naOntıxov ) ou désirante (opextixóv ). Cette partie se subdivise à son tour ( cf. Arist . , Eth . Nic . I 13 , 1102 b 28 ) en une partie appétitive ( ÉTTLOvuntixóv ), dont l'organe est le foie , et une partie irascible (Oulxóv ) , dont l'organe est le cæur. On aborde ensuite la discussion du náboç , défini ici encore de plusieurs façons, dont « ce que suivent le plaisir (ńdovń) et la peine (aúnn ) » , ou encore « un mouvement contre nature » ( ntáboç [ ... ] napà φύσιν ) . Bref, le πάθος est un mouvement de la partie irrationnelle de l'ame , surtout s'il est suffisamment violent pour être aperçu .

Le chap . 17 est consacré à l'ÉnlOvuntixóv , qui , outre ses deux subdivisions du plaisir et de la peine, est susceptible d'une division en quatre espèces régie par la combinaison des quatre “differentiae” suivantes : bien, mal , présent, atten du . Le bien attendu constitue le désir ( énlovu a ) ; le bien présent , le plaisir (nôovń ); le mal attendu , c'est la peur ( póßoc ) ; le mal présent, la peine (Núnn ). Les affections mauvaises ( tà paūha naon ), elles , doivent leur présence dans l'âme soit à la mauvaise éducation (8à xaxñç åywyñs ), soit à l'ignorance (Ě auad ac) , soit à une mauvaise disposition ( únò xayet ac). À ce sujet, Némé sius donne des indications thérapeutiques pour chaque cas , en montrant, pour le cas de la disposition , la manière dont le tempérament humain dépend du mélange des quatre humeurs corporelles fondamentales . Le long chap. 18 étudie les plaisirs , divisés en psychiques – ceux qui sont relatifs à l'apprentissage et à la contemplation - et corporels – ceux qui se réfèrent à la nourriture et à l'activité sexuelle ( ouvovo al ) , plaisirs qui sont des accomplissements et des guérisons d'un état de besoin . Les plaisirs se divisent en plaisirs sages ( onovdałal ) , qui sont véritables , les plaisirs bas et vils (daŭral), qui sont faux ; ou bien en plaisirs de l'intellect, appelés aussi « selon la science » ( xat' Ènlorunv ), et plaisirs du corps, appelés aussi « selon la sensa tion » ( xat' aioOnouv ), ces derniers se subdivisant à leur tour en plaisirs naturels et plaisirs non naturels. Dans la subdivision qui suit des plaisirs corporels en « nécessaires et naturels » , « naturels mais non nécessaires » , et « ni nécessaires ni naturels » , on retrouve une intéressante adaptation christianisante d'une doctrine épicurienne bien connue : on distingue entre celui qui vit en ne poursuivant que les plaisirs nécessaires et naturels ; celui qui poursuit, avec modération , aussi les désirs naturels mais non nécessaires , ce qui est dit vivre selon le deuxième ordre des vertus (év devtÉPạ Táeel tõv åpet @ V TETAyMÉvw ). Cependant , poursuit l'auteur, en s'en remettant cette fois au Philèbe de Platon ( 36 e sqq .; 40 c ) , le plaisir dans le vrai sens du terme consiste dans la contemplation des réalités divines , plaisir purement psychique qui n'est mélangé à rien de matériel , et n'inspire au sujet aucun remords par la suite . La définition la plus adéquate du plaisir est donnée à la suite d’Aristote (cf. Eth . Nic ., 1153 b 9 sq . ) : c'est la fin ( téhoc) des activités naturelles de l'animal , exercées sans obstacle . Finalement,

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les plaisirs, comme les parties de la faculté rationnelle discursive , peuvent se diviser en théoriques et pratiques ; ceux- là doivent être considérés plus purs que ceux-ci , puisque l'homme les partage avec les autres animaux, tandis que les vertus et les plaisirs théoriques ne sont caractéristiques que de l'homme. Les chap . 19-22 , très brefs , sont consacrés aux émotions : ils étudient respectivement la peine (nepì Aúnns), l'emportement ( ntepi Ovuoő ), la peur ( htepi póßov ) , et la partie de l'âme irrationnelle qui n'obéit pas à la raison ( htepi του αλόγου του μή κατηκόου λόγου ). Ces différentes passions y sont definies et divisées en leurs sous- espèces, parfois données avec des tentatives d'explica tions étymologisantes, et parfois accompagnées d'explications d'ordre physiolo gique . De tels développements ressemblent fort à ce qu'on trouve dans des manuels éthiques de tendance stoïco - péripatéticienne, tels ceux du Pseudo Andronicus de Rhodes (2 A 181 ) ou d'Arius Didyme ( > A 324) ; mais on y trouve aussi du matériel d'origine galénique : en effet, le chap. 21 contient ( p . 82 , 7 sqq . Morani) une citation du troisième livre de l'ouvrage aujourd'hui perdu de Galien intitulé 'ATO ELXTIXÝ . Après avoir passé en revue les facultés de la partie irrationnelle qui sont susceptibles d'être persuadées par le Nóyos, Némésius passe au chap. 23 à l'exa men des facultés qui ne sont pas susceptibles d'une telle persuasion : il s'agit, au chap. 23 , de la faculté nourricière (Opentixóv ), autrement connue comme natu relle (puolxóv ) et génératrice (yevvnt.xóv ) , suivi au chap. 24 par l'étude du pouls ( opUyuLxóv ), lequel est connu aussi comme la faculté vitale ( (wtixóv ). Le chap. 23 traite en détail de la physiologie et des organes de la nutrition , de la digestion , de l'excrétion , et de la conversion des aliments en sang par le foie. Le chap. 24 traite du système circulatoire : depuis son ventricule gauche , le cæur envoie a travers les arteres la chaleur innée ( την έμφυτον θερμότητα ) partout dans le corps. Tout comme les nerfs véhiculent le mouvement et la sensation à partir du cerveau , et les veines transportent le sang nourricier à partir du foie, de la même façon les artères servent de canal au pneuma vital ( CwtLXÒV aveŪua ), qui circule à partir du cour. Le chap. 25 physiologie de reproductif. Le en sperme, qui

est consacré à la description très détaillée et sophistiquée de la la faculté génératrice ou spermatique , c'est - à -dire à l'appareil sang dans les veines et les artères se transforme par concoction circule par deux veines et deux artères jusqu'à la tête , avant de

redescendre jusqu'aux testicules . Les femmes possèdent les mêmes organes sexuels que les hommes , sauf qu'ils sont internes dans le cas de celles- là, externes dans le cas de ceux-ci . Aristote et Démocrite ont tort de nier l'existence d'une semence féminine; celle-ci existe bel et bien , comme l'affirme Galien , et elle consiste en du sperme non concocté. C'est le mélange (uTĒLv ) de la semence mâle et femelle qui donne lieu à la conception . Le bref chap. 26 présente une division alternative des puissances qui dirigent l'animal ( Ola peolç Tūv dlouxovOWv duvámeWV TÒ ÇQov), qui prend son point de départ dans la distinction entre d'une part les puissances psychiques , qui sont volontaires , et d'autre part les puissances naturelles et vitales, qui ne le sont pas. Le chap. 27 , pour sa part, traite , dans le cadre d'une discussion du mouvement

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volontaire, des nerfs, des muscles, des tendons, des mains – propres à l'homme et des pieds. Le Démiurge, dans sa prévoyance, a mêlé les puissances naturelles aux puissances psychiques, nous donnant par exemple dans sa bonté le contrôle volontaire sur les processus d'excrétion . La respiration (chap . 27 ) , nécessaire pour empêcher l'extinction de notre chaleur vitale , représente un autre exemple où le naturel se mêle au psychique , c'est - à -dire au volontaire . L'appareil respiratoire s'y trouve décrit avec force détails. La chair des poumons concocte le pneuma comme le foie le fait pour le sang, en même temps qu'il rafraîchit le cæur. Sont aussi prises en considération vers la fin du chapitre l'utilité de la bile jaune , des reins et de la rate , des glandes, de la chair, de la peau et des os. Seuls les cheveux , qui surgissent par solidification des exhalaisons du corps, viennent à l'existence de manière accidentelle ; cependant, même ici le démiurge en profite pour embellir le corps humain et le protéger. vi. Dans la dernière section du De nat. hom . (chap. 28-43 ), Némésius quitte le domaine de la nature pour examiner la constitution de l'homme dans une perspective éthique : on y aborde des questions philosophiques telles que la nature du volontaire et de l'involontaire, la liberté de choix et le destin (eiuap uévn ), et finalement la providence. Le chap . 29 traite , en suivant l'Éthique à Nicomaque aristotélicienne ( cf. 1109-1111 ) , du volontaire ( Exotolov) et de l'involontaire ( axoúolov ). Pour être volontaire, une action doit pouvoir faire l'objet soit d'éloges , soit de condamnation ; elle doit être accompagnée de plaisir, et elle doit être digne de choix de la part de l'agent, soit toujours, soit dans des circonstances particu lières. L'action involontaire , quant à elle (chap. 30) , est caractérisée par les traits opposés : digne de pardon, elle est accompagnée de douleur (aúnn ). L'action involontaire s'effectue soit par la force (xatà ß av ), définie comme l'action dont la cause efficiente est externe au sujet, et à laquelle celui-ci ne contribue en rien ; soit par l'ignorance ( OL ' ayvolav ), qui fait l'objet du chap . 31. Les actes non volontaires commis par ignorance sont ceux où nous ne fournissons pas nous-mêmes la cause de notre ignorance : c'est ainsi qu'un acte commis sous l'influence de l'ivresse est volontaire, car dans ce cas nous sommes volontai rement à l'origine de notre propre ignorance . On remarquera dans ce chapitre ( p . 97 , 15 sqq . Morani) un développement intéressant sur ce que les rhéteurs appellent les « particules de circonstance » ( Tteplotatixà uopla ) , telles que « qui , quoi , à qui , où , quand, comment , pourquoi » , souvent évoquées dans le cadre des commentaires sur les Staseis d'Hermogène, mais rarement mentionnés en dehors des traités de rhétorique ; or celui qui ignore la plupart de ces circonstances, ou bien les principales d'entre elles, est dit agir par ignorance. Le chap. 32 traite rapidement du volontaire : c'est l'acte qui n'est commis ni par force (car le principe de l'action réside dans l'agent) , ni par ignorance (car toutes les circonstances pertinentes sont connues de l'agent) . La colère (Ovuós) et le désir (ÉtiOvu a) sont volontaires. Le chap. 33 aborde la question du choix ( htepi Tipoalproew ): cette faculté est à distinguer du volontaire ( EXOÚolov ), du désir (ÉTiOvu a ) , de la volonté (Boúanouc), de l'opinion (86 & a ), et de la délibération

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( Boúhevoic, Bovań ), facultés dont on esquisse à grands traits les caracté ristiques. En fait le choix consiste dans une combinaison du désir, du jugement et de la délibération, et il peut se définir comme le désir délibératif des choses qui dépendent de nous. Le chap. 34 est consacré à la délibération (Bovan ) : nous délibérons au sujet de ce qui dépend de nous ( ntepì tūV ÉP' nuīv ), de ce qui peut être réalisé par notre intermédiaire, et dont la fin ( Témoc) n'est pas encore claire . En effet, notre délibération se limite à ce qui est contingent ( TÒ Évdexóuevov ), concept , dit Némésius (p. 103 , 10 Morani) qu'il faut expliquer davantage. C'est ici que Némésius semble changer soudainement de source : tandis que jusqu'ici il avait suivi fidèlement l'Éthique à Nicomaque, ou plus vraisembla blement un commentaire péripatéticien de cet ouvrage ( 62 H.A. Koch , Quellen untersuchungen zu Nemesios von Emesa, Diss . Leipzig 1921 , p . 26 sq . , 32 sqq ., 40 ), pour les développements qui suivent il dépend d'une source dont les paral lèles les plus proches se trouvent , d'une part dans les ouvrages Sur le destin d'Alexandre d'Aphrodise ( FA 112) et du Pseudo - Plutarque, et d'autre part chez Apulée ( > A 294), Alcinoos ( A 92 ) et le Commentaire sur le Timée de Calcidius ( MC 12 ) , tous des représentants de ce que l'on a parfois désigné comme l'École de Gaius ( P - G 2 ) . Sur cette section du De nat . hom . , cf. 63 A. Gercke, « Eine platonische Quelle des Neuplatonismus » , RHM 41 , 1886, p . 266-291 ; 64 W. Theiler, « Tacitus und die antike Schicksalslehre » , dans Phyllobolia für Peter von der Mühll, Basel 1946, repris dans Forschungen zum Neuplatonismus, coll . « Quellen und Studien zur Geschichte der Philo sophie » 10 , Berlin 1966, p. 46-103 ; 65 R. Sharples, « Nemesius of Emesa and some theories of divine Providence » , VChr 37 , 1983 , p . 141-156 ; 66 J. M. Dillon , The Middle Platonists, p . 294-298 et 320-326 . Dans le reste du chap . 34 , on examine le contingent et le nécessaire, avec la distinction du premier en pour-la -plupart (ÚÇ Énù nonú ), également possible ( úc Én ons ), et le-moins- souvent ( úc Én ' frattov ). La délibération ne se fait qu'à propos de la catégorie intermédiaire, l'également contingent. Le chap. 35 aborde l'examen du destin (nepi eiuapuévns). Attribuer la responsabilité pour tout ce qui se passe à la rotation des corps célestes est absurde et impie . Ceux qui , comme Chrysippe et Philopater (SVF II 991 ) , soutiennent qu'il est possible de préserver aussi bien la puissance du destin que la responsabilité humaine, disent en fait que tout dépend du destin , car nos impulsions ( ópua ) viennent , elles aussi , du destin . Le chap. 36 étudie le destin exercé par l'intermédiaire des astres : il y est question notamment de certains Égyptiens ( c'est - à - dire , des philo sophes hermétistes ) qui soutiennent que les figures des étoiles indiquent le destin de manière fidèle, mais que celui -ci peut être infléchi par des prières et des sacrifices expiatoires ( eúgałç xal å otpontiaguołç, p . 106, 16 Morani ). Aux yeux de Némésius , cette perspective est inacceptable, car, outre ses autres conséquences funestes, elle réduit le statut moral des hommes à celui de simples instruments du destin . Le chap. 37 est consacré à ceux , désignés comme les « plus sages d'entre les Hellènes » , c'est - à -dire sans doute les platoniciens , qui soutiennent que le choix de nos actes dépend de nous , mais que les consé quences de ces actes dépendent du destin . Bien que plus acceptable aux yeux de

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l'évêque d'Émèse que la perspective précédente, cette doctrine n'est correcte qu'à moitié, car les conséquences de nos actes doivent être attribuées non pas au destin , mais à la Providence. En effet, le résultat de la doctrine de ces philo sophes, comme de la précédente, c'est que nos choix ne dépendent pas de nous , ce qui élimine le concept de responsabilité morale. Au chap . 38 , l'on aborde la doctrine platonicienne du destin . Celui -ci est divisé en destin selon la substance (xat' oủo av ) , sens dans lequel il est à identifier à l'âme du monde ; et en destin selon l'activité ( xar' ÉvÉpyelav ), aussi appelé selon la providence (xatà nepovolav ), loi divine inéluctable, donnée par le premier dieu à l'âme du monde en vue de la mise en ordre du Tout, que Platon appelle « décret d'Adrastée » (Dequóv 'Adpaote ac) . En effet, le destin est embrassé par la providence, elle qui embrasse toutes choses : quelques - unes par hypothèse (xao' ÚTÓDeoLv ) - c'est le cas des causes principales que sont nos assentiments , nos jugements et nos impulsions - d'autres à partir d'une hypo thèse ( ÚTOOÉoew ): ce sont les choses qui s'ensuivent comme conséquences des premières. Par exemple , il dépend de nous d'entreprendre ou de ne pas entreprendre un voyage par mer ; c'est l'aspect « par hypothèse » . Mais ensuite vient en jeu l'aspect « à partir d'une hypothèse ( ÉE ÚnoéoewC) » : étant donné qu'on a choisi d'effectuer le voyage , est- ce qu'on fera naufrage ou non ? Il s'ensuit que selon cette doctrine, ce qui est principal - nos décisions - dépend de nous « par hypothèse » ; les conséquences de nos actes , étant « à partir d'une hypothèse » ( ÉE ÚTOOÉDewÇ ), ne dépendent pas de nous , mais sont régies par la Nécessité. Or selon Némésius , ce n'est que cette doctrine, qu'on a baptisée « la théorie médio- platonicienne du destin conditionnel » ( Sharples 65 , p . 147 ; cf. Dillon 66 , p. 295 sq . ) qui est conciliable avec la fameuse proclamation du Prophète dans le Mythe d'Er du livre X de la République ( 617 e ) : « celui qui choisit est responsable , le dieu est innocent (ait a Éouévov, Deòç åva tioc ) » , ainsi qu'avec l'existence de la divination . Néanmoins , cette doctrine , comme on vient de le voir, n'est pas acceptable aux yeux de Némésius , bien que , dans la mesure où le destin est rendu sujet à la providence, elle ne diffère que peu de l'Écriture sainte ( tà Oɛta Nóyia ), selon laquelle tout est déterminé par la Provi dence . En effet, on ne saurait maintenir que les conséquences s'ensuivent de nos actes de manière nécessaire : en fait, elles ne le font que de manière contingente (Év exouévwÇ). Dieu et sa Volonté se trouvent au -dessus de la nécessité, lui qui en est le créateur. La doctrine stoïcienne ( SVF I 109 ) de l'éternel retour est ensuite rejetée, doctrine qu'il ne faut surtout pas confondre avec celle , chré tienne, de la Résurrection , laquelle, loin de se répéter à l'infini, n'a lieu qu'une seule fois . Les chap. 38-40 sont consacrés à ce qui dépend de nous , c'est - à - dire au libre arbitre ( περί του εφ ' ημίν ό έστι περί του αυτεξουσ ου ) , exposition dont les différentes sous-divisions sont abordées dans des chapitres séparés: on traite d'abord de la question : existe -t - il quelque chose qui dépend de nous ? ( chap . 39 ) , avant de passer ( chap . 40 ) à la question suivante : quelles sont les choses qui dépendent de nous ? Enfin, on se demande ( chap . 41 ) pourquoi nous avons été créés pourvus de libre arbitre.

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Chap. 39 : on ne saurait attribuer les actes humains ni à dieu ( Okov ) , ni à la nécessité (åváyxnv ) , ni au destin (eluapuévnv ), ni à la nature (púolv ) , ni à la fortune ( túxnv ), ni à la spontanéité (TÒ aŭtóuatov ): il reste donc que l'homme est le principe de ses propres actes, c'est - à -dire qu'il est pourvu de libre arbitre . On le montre d'après la théorie aristotélicienne des vertus éthiques ( E.N. 1103 a 15 sqq . ) : l'habitude (ÉELS) dépend des exercices (uerétal); mais ceux -ci dépendent de nous ; il s'ensuit que l'habitude dépend de nous . Mais alors les actes ( Tupáčecc), dérivant de l'habitude , dépendent de nous aussi . Chap. 40 : Dépend de nous tout ce que nous faisons de manière volontaire, qui est suivi d'approbation ou de censure , et qui relève du domaine de l'exhor tation et de la loi ; autrement dit, tout ce qui est psychique et qui fait l'objet de nos délibérations . Notre libre arbitre ne concerne pas les biens externes, mais nos actions qui touchent à la vertu et au vice . Nos intentions comptent autant que nos actes, car la réalisation de ceux -ci est parfois permise, parfois empêchée par la Providence. Celle-ci se divise en providence particulière et en providence universelle : ce qui peut paraître injuste depuis l'une de ces perspectives se révèle comme justifié lorsqu'on prend l'autre en ligne de compte. Chap . 41 : Le libre arbitre est inséparable de la rationalité ; on le montre en résumant ce qui a été dit plus haut sur la division du rationnel en partie théoré tique - aussi connue comme l'intellect ( voûc ) et sagesse (000 a ) - et partie pratique, domaine du logos et de la prudence (opóvnouc ). Tout être rationnel est nécessairement caractérisé par le libre arbitre ( précisément par le fait d'être rationnel) et par le fait d'être sujet au changement ( tpenttóc), du fait qu'il tire son origine physique d'un substrat matériel . Cependant, les hommes qui , à l'instar des anges , se sont rendus contemplatifs (0ɛwpntixo ) en s'éloignant de la matière et des choses pratiques, se sont eux aussi rendus inchangeables ( ätpentoi ) . Puisque le mal réside dans les habitudes , la responsabilité en incombe, non pas à Dieu - qui nous a donné la puissance (Húvauiç ) de faire le mal , mais non pas l'habitude (EELS ) - , mais à nous-mêmes. Enfin , aux chap. 42-43 on aborde l'étude de la providence ( htepi nepovo ac) , divisée , comme l'était l'étude de ce qui dépend de nous , en trois rubriques : ( i ) La providence existe - t-elle ? ( ii ) Quelle est sa nature ? et ( iii ) De quel domaine de la réalité relève - t- elle ? Chap. 42 : Leur connaissance de l'Écriture Sainte suffit pour convaincre les chrétiens de l'existence de la providence, mais , puisqu'on s'adresse actuellement aux Hellenes aussi (arà xal tpos " Ewnvas, p. 120 , 22 Morani ), il faut se servir des argumentations que ceux -ci approuvent. L'ordre et la régularité qui règnent parmi les phénomènes naturels montrent bien l'existence de la provi dence , ainsi que le fait, bien attesté entre autres par l'histoire d'Ibycus et les grues ( cf. Plutarque, De garrulitate, 509 f sqq., Souda, s.v. IBúxov Ěxdixou, etc. ) , que des crimes commis sans témoins sont souvent révélés par la suite de façon inattendue. L'idée universellement répandue selon laquelle il faut adorer la divinité témoigne de l'existence de la providence ; d'ailleurs, sans la croyance en celle -ci , aucune moralité n'est possible, pas plus que ne l'est l'organisation et

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la préservation d'une quelconque communauté politique. Les différences entre les membres d'une même espèce , leur permettant de se distinguer et de se recon naître entre eux , représente encore un preuve de l'existence de la providence. Puisqu'on parle à des Hellenes, on peut ajouter les oracles, les présages et les signes divins (p . 124 , 22 - 125 , 2 Morani, passage que cet éditeur athétise car il manque dans la tradition arménienne, mais qui a pu être victime des scrupules religieux d'un scribe ). La providence est à définir ( c'est le point [ ii ] supra , p . 125 , 3 sqq. Morani ), soit comme la sollicitude ( ÉTUMÉRela ) de Dieu envers les êtres, soit comme la volonté de Dieu (Botanouc Deoù ), grâce à laquelle chaque être reçoit la manière de vivre ( Legaywyń ) qui lui convient. Chap. 43 : Dans ce long chapitre final, on aborde la question ( iii ) évoquée supra : à propos de quelles choses y a-t - il providence ? Notamment , la providence s'exerce -t - elle uniquement sur les universaux (rà xadónov ), ou bien s'occupe -t -elle aussi des individus ( tà xal ' éxaota ) ou des particuliers ( tà xarà dépoc) ? Or selon Platon , il y a providence aussi bien des universels que du particulier. Ce philosophe divise la providence en trois : d'abord celle du Premier Dieu (IV) TOŨ npótov Deoũ) , qui s'occupe principalement des Idées , mais aussi du reste de l'univers, y compris les genres ( TÕV Yevőv ), c'est - à -dire les Catégories aristotéliciennes hypostasiées , comme dans le néoplatonisme tardif, jusqu'à devenir des sortes de Formes ou d'Idées platoniciennes primor diales. Tout ce qui se passe dans le monde de la génération et de la corruption est dévolu à la deuxième providence, celle des planètes ; il s'agit d'un écho des « jeunes dieux » responsables de la fabrication de l'âme humaine selon le Timée ( 42 d -e ) . Finalement, les choses de la vie humaine , telles que l'obtention des biens matériels, reviennent à la troisième providence, exercée par les démons (da uovec ), situés autour de la terre, et qui veillent sur la moralité des actes humains . L'être émane depuis la première de ces providences, à travers la deuxième et jusqu'à la troisième, les liant toutes ensemble et faisant en sorte que c'est la Volonté de Dieu qui gouverne toutes choses , soit directement, soit indirectement. On est ici en plein moyen -platonisme, comme le montrent les parallèles très proches qui se trouvent dans des passages du De fato pseudo plutarquéen ( 572 f sqq . ) , du De Platone d’Apulée (I 12) , et du Commentaire sur le Timée de Calcidius (chap. 142-190 ). Ce réseau d'idées, dont l'origine précise est difficile à préciser (cf.Dillon 66 ), remonte , du moins dans ses grandes lignes , jusqu'au jer- II ° siècles de notre ère, et sans doute plus haut ; cependant, il n'est pas impossible, comme l'avait déjà suggéré Gercke 63 , qu'un écrit aujourd'hui perdu de Porphyre ait pu servir de voie de transmission pour cette doctrine jusqu'à Némésius . En effet, comme l'a souligné 67 M. Williams , « Higher Providence, lower Providences and Fate in Gnosticism and Middle Platonism Neoplatonism and Gnosticism » , dans Richard T. Wallis & Jay Bregman (édit . ) , Neoplatonism and Gnosticism , coll . « Studies in Neoplatonism » , Albany ( N.Y. ) 1992 , p. 483-507 , notamment p. 501-503 , Apulée , seul des théoriciens médio platoniciens de la providence qui puisse être daté avec certitude, semble ignorer la doctrine de la troisième providence exercée par les démons. Cette doctrine

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n'est donc attestée que chez Némésius et le Pseudo - Plutarque : or on ignore la date de ce dernier, bien qu'on ait généralement supposé qu'il est à situer vers la même époque que le Plutarque authentique. Ici encore , Némésius n'accepte la doctrine des sages grec qu'à moitié. Il est vrai que tout dépend de la Volonté divine , mais attribuer une quelconque provi dence aux planètes équivaut au même fatalisme astrologique que l'auteur avait déjà réfuté plus haut. Après avoir rappelé sa réfutation de la doctrine stoïcienne du destin ( cf. SVF II 1021 et 1027 ) , Némésius passe rapidement en revue les opinions de ceux qui nient la providence : il s'agit tout d'abord de Démocrite ( 2 + D 70) , d'Héraclite ( 22H 64) et d'Épicure ( 2 - E 36) (avec citation p. 127 , 2-3 Morani de la première des Ratae Sententiae ). Aristote , pour sa part, ne nie que la providence individuelle ; il n'y a que la divine nature qui règne sur les individus ( cf. E.N. VII , 1140 b 1 ) . L'opinion d’Euripide ( fr. 1018 Nauck ?) et de Ménandre ( fr. 749 Kaibel) est ensuite rapportée, selon laquelle il n'y aurait que l'intellect individuel ( TÒV voŰV TÒV ÉV ÉxáoTW ) à exercer de la providence. Mais l'intellect n'est responsable que pour ce qui dépend de nous : or précisément la providence est active dans le domaine de ce qui ne dépend pas de nous . On ne saurait non plus attribuer la providence à la nature , car celle - là est douée d'une extension plus grande que celle-ci ; la nature n'est donc qu'une partie de la providence. Ceux qui , observant le fait que souvent les méchants fleurissent et les hon nêtes gens souffrent dans ce monde , en concluent qu'il n'y a pas de providence individuelle , ont tort, et leur erreur dérive de deux sources : d'abord , ils ne prennent pas en considération l'immortalité de l'âme ; ensuite , ils se trompent sur la nature des biens , ne considérant comme tels que les biens externes . Ils ignorent par conséquent que les biens de l'âme dépassent en valeur les biens du corps dans la même mesure que l'âme est supérieure au corps. La vertu suffit pour procurer le bonheur ; tous les gens de bien sont heureux , tous les méchants ipso facto misérables . De manière générale , la providence en sait beaucoup plus long que nous, de sorte que les malheurs apparents, y compris la perte de nos enfants, peuvent en réalité être des événements préférables à leurs alternatives. Dieu n'est ni ignorant du fait que l'existence de la providence est souhaitable , ni réfractaire à sa réalisation , ni incapable de la mettre en æuvre : en effet, en l'absence d'une providence s'occupant des individus , les universaux ne tarde raient pas à être détruits. S'occuper des détails du monde terrestre n'est pas indigne de Dieu , qui ne saurait être contaminé par contact avec la matière, pas plus que ne sont les rayons du soleil qui éclairent la boue . Même les techniciens terrestres, comme les médecins , s'occupent des sujets individuels de leur art : à plus forte raison Dieu , créateur du Tout, en fait de même . Ceux qui affirment qu'il n'y de providence que pour les individus ont été fourvoyés, d'une part par leur conviction que l'âme se dissout en même temps que le corps, d'autre part parce qu'ils ne parviennent pas à percevoir une providence individuelle. Mais en fait l'âme est immortelle – même la doctrine grecque de la métensomatose et de la rétribution post -mortem , bien qu'imparfaite à certains égards, est préférable à ce nihilisme - et le fait qu'on n'arrive pas à percevoir quelque chose n'est pas un argument probant en faveur de son inexistence . Nécessairement infini, le Nóyoç

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nous est incompréhensible, mais il est parfaitement transparent aux yeux du Démiurge. Le chapitre, et donc l'ensemble de l'ouvrage , se termine par des considéra tions de nature beaucoup plus nettement chrétiennes que ce qu'on avait vu depuis le premier chapitre : il y est question des souffrances des martyrs , de saint Paul et de Lazare, du miracle apparemment absurde du salut des hommes par la Croix . Dans le cas des martyrs, ils meurent de manière juste , mais la façon d'agir de leurs bourreaux n'en est pas moins injuste. Même la mort des justes peut être expliquée par le fait qu'il convenait que leur vie s'arrêtât là où elle s'est effectivement arrêtée, « comme dans le cas de Socrate et des saints » (ÁS Ewxpátel xai toiç ay ouç, p . 136 , 3 Morani). Ce dernier chapitre se termine de façon assez abrupte, ce qui a fait penser que Némésius n'a pas eu le temps de mettre les dernières touches à son ouvrage (Bardenhewer 9, p. 276) . C. La postérité du De nat. hom. On a déjà évoqué plus haut la toute première histoire , assez modeste , de l'impact de l'ouvrage némésien , cité pour la première fois par Maxime le Confesseur et Jean Damascène ( cf. Morani 25 , p . 104-114 ; Dobler 20 ; 68 Id . , Indirekte Nemesiuszitate bei Thomas von Aquin : Johannes von Damaskus als Vermittler von Nemesiustexten , Freiburg ( Schweiz) 2002 ). La tradition postérieure du traité némésien a été bien étudiée par Morani 25 , p. 101 179 , qui examine les citations du De nat. hom . dans le ms . Bodleianus Auct. T. 1 . 4 ( Misc . 184 ) ( XII s . ) , dans l'écrit anonyme intitulé Barlaam et loasaph , dans les Quaestiones (date incertaine ) d'Anastase le Sinaïte ( VIIe siècle ) , chez Michel Glycas ( XII ° s . ) , Nilus Doxopatres (XII ° s . ) , Mélétius ( VII - IX s . ) , et d'autres. Il semble possible aujourd'hui d'élargir la liste , notamment par le nom de Michel Psellus (XI s . ) . En effet, son écrit intitulé 'Anoplav Núolç Tene a xal åvayxa a (ed . 69 D.J. O'Meara , Michael Psellus Philosophica Minora, vol . II , coll . BT, Leipzig 1989 , p . 23-30 , opusc . 12 ) n'est rien d'autre qu'une série d'extraits de l'ouvrage némésien. Le même texte a également fait l'objet d'une édition par 70 I. N. Pontikos, ’Avwvúuov Olhooopixà Etupelxta = Anonymi Miscellanea Philosophica . A miscellany in the tradition of Michael Psellos ( Codex Barroccianus Graecus 131 ), coll . « Corpus Philosophorum Medii Aevi : BYZANTINOI QIAOEODOI = PHILOSOPHI BYZANTINI » , 6) Athènes /Paris /Bruxelles 1992 , p. 48-57 , opusc . 16. D'autres témoins pourraient sans doute être retrouvés. i. La tradition manuscrite du De nat. hom. La tradition manuscrite a fait l'objet de plusieurs études très fouillées de la part de M. Morani ( cf. Morani 1 , p. V sqq.; Morani 25 ; 71 Id ., « Traduzioni orientali e filologia greca » , dans R.B. Finazzi et A. Valvo [ édit . ] , La diffusione dell'eredità classica nell'età tardoantica e medievale : il « Romanzo di Alessan dro » e altri scritti. Atti del seminario internazionale di studi , coll . « L'eredità classica nel mondo orientale » 2 , Roma- Napoli , 25-27 settembre 1997 , Alessan dria 1998 , p . 175-187 ) , dont il est inutile de rappeler tous les détails ici . Rappelons simplement les grandes lignes : M. Morani a commencé par diviser

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les manuscrits grecs existants - plus de cent - en deux familles, désignées par et y. Parmi les membres de la famille ß , qui peut être considérée comme la plus fiable, figurent le ms. Patmiacus S. Iohannis 202 ( xºs . = II) et le codex Biblio thecae Bodleianae Auct. E. 5. 4 ( X1 ° s . = B ) . Le manuscrit le plus largement diffusé est le codex Harleianus 5685 ( British Library) (XI - XII ° s . = H) qui peut être considéré comme présentant le meilleur texte. Les apographes auxquels il a donné lieu peuvent à leur tour se diviser en trois familles ( Ha, Hb , Hc ). La famille y , quant à elle , est caractérisée par un grand nombre d'inter polations et de leçons corrompues ; cependant elle porte aussi les traces d'une tradition plus ancienne . Figurent parmi les membres de cette famille le ms. Vaticanus Chisianus R. IV . 13 ( X®-XI ° s. = K ) qui a peut-être été utilisé par le traducteur Burgundio de Pise ( cf. infra ); le codex Bibliotheca Medicea Lauren tiana LXXXVI 6 ( XII ° s . = F) ; le codex Bibliotheca Monacensis Bavarica gr. 562 (XI -XII s . = A) ; le codex Bibliotheca publica urbis Dresdae Da 57 ( XII ° s. = D) , manuscrit presque entièrement détruit au cours du bombardement de Dresde en 1945 , et le ms. Parisinus gr. 1268 (XII ° s . = P) , pour ne mentionner que les principaux témoins. Or le ms . H , par son excellence et la clarté de son écriture, est vite devenu « l'édition >> de référence aux XII -XIII ° s . ( cf. Morani 71 , p . 182-183 ) , phéno mène qui a contribué à l'élimination des textes plus anciens. C'est donc le ms. H qui domine la tradition récente, mais un certain nombre de leçons plus ancien nes , et donc appartenant à la tradition antérieure au Xe siècle , pourraient encore être récupérées à partir de la tradition orientale ( cf. infra ). Certains éléments de cette tradition plus ancienne se sont d'ailleurs introduits par contamination dans la tradition de la famille y . ii. La tradition latine du De nat. hom. (Les informations qui suivent nous ont été communiquées par Ana Palanciuc qui prépare une thèse de doctorat sur la postérité du De memoria d'Aristote dans la philosophie latine médiévale .) La plus ancienne traduction en latin du De natura hominis de Némésius d'Émèse est celle de Nicolas Alfanus ( m . 1085 ) , archevêque de Salerne, à qui on doit également un traité De pulsibus et un ouvrage sur les quatre humeurs. I s'agit d'une traduction incomplète , probablement à cause de l'intérêt exclusive ment médical d'Alfanus, car le manuscrit grec consulté était complet et appar tient à la meilleure famille ( cf. Morani 25 , p . 18 ) . La traduction d'Alfanus reste pourtant assez défectueuse - on a pu supposer que les connaissances de l'arche vêque en matière de langue grecque n'étaient pas au-dessus de toute reproche ; cf. Verbeke et Moncho 35 , p. LXXVII - et elle ne comprend pas les chap. 34 et 37 sur le destin , ni les chapitres 41-42 sur la providence. Les chapitres 6 et 12 portent le même titre , De phantastico, alors que le grec donne Hepi toŨ DavtaotlXOÙ (chap. 6) et lepi toŨ dlavontixoŨ ( chap. 12 ) respectivement; les chap . 14-15 ont été réunis sous le même titre : De occulta et manifesta occa sione . Au XII ° siècle , Adélard de Bath , Guillaume de Conches, Guillaume de

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Saint-Thierry consulteront cette traduction et y puiseront abondamment, comme le fera Albert le Grand , un siècle plus tard. La traduction d'Alfanus a été éditée par 72 K. Burkhard , Nemesii episcopi PREMNON PHYSICON sive ΠΕΡΙ ΦΥΣΕΩΣ ΑΝΘΡΩΠΟΥ liber a N. Alfano archepiscopo Salerni in latinum translatus recogn . C.B. , coll . BT, Lipsiae 1917 , d'après le ms . Parisinus Lat. 15078 ( ff. 111 |-200 ', XI -début XII ° siècle ) qui en contient le prologue, le ms. Avranches 221 ( ff. 89-114 ' , XIIe siècle) et le Codex Cottonianus (Mus. Brit. Cottonian . MSS. Galba E. IV 2, ff. 205-214 ', XIIe siècle ; pour la datation de ce manuscrit, cf. 73 F. Bossier, « L'élaboration du vocabu laire philosophique chez Burgundio de Pise » , dans J. Hamesse (édit. ) , Aux origines du lexique philosophique européen : l'influence de la Latinitas. Actes du Colloque organisé à Rome par FIDEM , Louvain 1997 , p. 88 ) . Deux autres manuscrits, inconnus de Burkhard , contiennent la traduction d'Alfanus: le ms . Harleianus 3969 ( ff. 168 ' - 196 ', XII ° siècle) et le ms. Bambergensis M.IV.16 ( ff. 45 ' -69 ', XII ° siècle ) ; cf. Morani 25, p. 18 . Burgundio de Pise ( 1110-1193 ) , juriste au Palais de Latran vers 1151 et ensuite à Pise , va entreprendre vers 1164/65 une deuxième traduction latine du traité némésien , entre deux voyages à Constantinople, le premier autour de 1136 , quand il prendra part au débat théologique des deux Églises,à côté de Jacques de Venise et Moyses Italus de Bergame , et le second, attesté dans les années 1169-1171, quand il sera de nouveau envoyé comme légat ( cf. 74 G. Vuillemin Diem et M. Rashed , « Burgundio de Pise et ses manuscrits grecs d’Aristote : Laur. 87.7 et Laur. 81. 18 » , RTAM 64, 1997 , p. 136-198 . ) . Avant de traduire le traité de Némésius , Burgundio en avait déjà traduit entre 1153 et 1154 des parties importantes contenues dans sa version du De fide orthodoxa de Jean Damascène . Pour la traduction du De nat. hom ., traduction qu'il dédie à l'empe reur Frédéric Barberousse , le manuscrit dont il s'est servi vient de Constan tinople et pourrait être identique au Codex Vaticanus Chisianus 13 (Morani 25 , p . 35 ; cf. Verbeke et Moncho 35 , p . LXXXIX ) . Il s'agit d'une traduction connue également d'Albert le Grand , de Pierre Lombard et de Thomas d'Aquin ( Dobler 20) . La traduction de Burgundio a été publiée pour la première fois par Burkhard à la fin du XIXe siècle , dans les Jahresberichte du Staatsgymnasium Unter Meidling (Vienne) , édition élaborée sur la base de trois manuscrits : le codex 949 (autrefois II , 960 , daté fin XIII -début XIVe siècle ) de la Bibliothèque Royale de Bruxelles, et deux manuscrits de la Bibliothèque Saint-Marc de Venise : le codex Marcianus 46 (Rec . ) ( XIVe siècle) et le codex Marcianus 276 ( Bess . ) (copie fidèle du Marcianus 46 , daté du XVe siècle) . Depuis l'édition de Burkhard , quatre nouveaux manuscrits ont été découverts, dont trois sont signalés dans 75 P.O. Kristeller, Iter Italicum . A finding list of uncatalogued or incompletely catalogued humanistic manuscripts of the Renaissance in Italian and other libraries, t. I : Italy : Agrigento to Novara, London 1963 : le codex Delta IV 10 de la Biblioteca Civica di Bergamo, le codex 19 du Collegio di Spagna de Bologne et le codex Urbin . Lat. 485 de la Bibliothèque Vaticane ) . Avec un cinquième manuscrit , découvert par Verbeke à Cracovie (codex 1292 , fin XIVe s. ) , ces manuscrits seront utilisés pour l'édition du texte de la traduction de

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Burgundio donnée par Verbeke et Moncho 35. Cependant, dans cette édition les gloses contemporaines du manuscrit principal, Bergamo, Biblioteca Civica, MA 252 ( ancien Delta IV 10 ) , daté par erreur au XVe siècle et non au XII°, ne sont pas prises en compte ; cf. Bossier 73, p. 88. On a vu plus haut qu'une version latine anonyme du Ve chapitre du traité némésien , Liber de elementis , contenue dans deux mss . latins du XII ° s . parmi quelques textes médicaux attribués à Constantin l'Africain et la traduction d'Alfanus ( ff. 2014-202 ), circulera tout au long du Moyen Age . Cette traduction est indépendante de celles d'Alfanus et de Burgundio, peut-être l'æuvre d'un physicien à la recherche d'un matériel pédagogique (cf. 76 R.C. Dales . , « An unnoticed translation of the chapter De elementis from Nemesius ' De natura hominis » , M & H 17 , 1966 , p. 11-19) . Pour chaque terme technique grec, le traducteur préfère rendre l'équivalent latin , en évitant la paraphrase . Or les éditeurs allemands du texte ( cf. Grensemann - Weisser 58 , p . 60-63), suggèrent une possible attribution de cette traduction à Constantin l'Africain : dans tous les cas , il s'agirait d'une traduction faite à partir d'un original arabe, réalisée à Monte Cassino ou à Salerne. Cependant, comme on le verra plus loin , les nombreuses questions soulevées par cette traduction anonyme n'ont pas encore reçu de solution définitive. À la Renaissance , le De nat. hom . fut traduit à trois reprises: à Venise , au xve siècle, par le médecin et professeur de sciences Georges Valla (ob . 1499 ); sa version sera publiée en 1538 à Lyon et l'éditeur, Gaudentius Merula , va dédier l'ouvrage à Jacobus Philippus Sacchus , président du Sénat des Insubriens. Il s'agit d'une traduction défectueuse , bien inférieure à celle de Burgundio et qui n'a pas eu une grande influence. Une autre traduction latine fut réalisée par Johannes Cono ( Konow ) , dominicain né à Nürnberg, établi vers 1507 à Bâle et qui , à l'initiative de Beathus Rhenanus , entreprend cette traduction de Némésius bien que n'ayant accès qu'à quelques fragments de l'original grec. La version de Cono , effectuée d'après la traduction de Burgundio , paraît à Strasbourg en 1512 et fut incluse dans l'édition de Grégoire de Nysse publiée à Bâle en 1562 . Cependant, cette traduction ne respecte pas la division en chapitres du traité , mais en invente une autre en huit livres. Cf. Verbeke et Moncho 35 , p . XCII XCIV , et Morani 25, p. 16-17 . ANA PALANCIUC.

iii. La tradition géorgienne Une traduction en langue géorgienne fut élaborée au XIe siècle par Jean Petrizius . Elle subsiste en trois mss . , indépendants les uns des autres mais remontant au même archétype, qui semble apparenté au ms . Harleianus 5685 ( H ) , du XII° siècle , qui , on l'a vu , a joué un rôle prépondérant dans la tradition textuelle grecque . Ces trois mss . , cotés comme les nº 2579 (XIVe s . ) , 339 (XVIII s . ) et 1358 ( XVIII s. ) , sont conservés dans la Bibliothèque de la Société pour la diffusion de la culture à Tbilisi . Cf. 77 A. Zanolli , « La versione georgiana di Nemesio » , AIV 107 , 1948, p. 1-12 ; Morani 25, p . 88 sq .

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iv. La tradition syriaque On n'a pas encore retrouvé de manuscrit contenant la version syriaque du De nat. hom . , dont l'existence est pourtant assurée . En effet, on trouve des vestiges de cette version dans les gloses rajoutées dans les marges des mss. arméniens de Saint-Lazare, ainsi que dans le De anima de l'évêque jacobite de Mossoul Mõše Bar Kēphā (vers 863-903 ) ; cf. 78 O. Braun, Moses Bar Kepha und sein Buch von der Seele, Freiburg 1897 ; 79 G. Klinge , « Die Bedeutung der syrischen Theologen als Vermittler der griechischen Philosophie an den Islam » , ZKG , Dritte Folge 9 , 58 , 1939 , p. 346-386 ; Morani 25 , p . 100 ). Dans une lettre à Rabbān Pēthion , le Katholikos nestorien de Baghdad Timothée fer ( vers 780 820 ; cf. 80 L. Van Rompay, « Past and Present Perceptions of Syriac Literary Tradition » , Hugoye : Journal of Syriac Studies, 3 , 2000 , http://syrcom.cua.edu/ Hugoye/Vol3No1 /HV3N1 VanRompay.html ) évoque le début d'une version syriaque du De nat . hom . , que Timothée attribue non à Grégoire de Nysse , comme dans la tradition arabe, arménienne et géorgienne, mais à Némésius. On a pu supposer que deux versions du traité circulaient en langue syriaque: l'une contenant le livre I du De nat. hom . transmis comme un ouvrage indépendant, aurait été attribuée à Némésios ; l'autre, complète, aurait été attribuée à Grégoire de Nysse. Cf. Morani 25 , p. 97 , 81 M. Zonta , « Nemesiana Syriaca : new frag ments from the missing Syriac version of the De natura hominis » , JSS 36, 1991, p. 223-258 , et Dobler 20, p . 48-49 .

v. La tradition arménienne Une traduction arménienne du De nat. hom . fut effectuée vers 717 par les soins de Dawit ' Kark'ac'i, assisté de Step'anos Siwnec'i ; P. Tiroyean en donna une édition en 1889 , à partir des mss . vénitiens conservés dans la Bibliothèque des Pères Melchites . Selon Morani ( 1 , p . X ; 71 , p. 186) il existerait encore une trentaine de mss . , non encore collationnés , dans la Bibliothèque Matenadaran d'Erevan, ainsi que plusieurs mss . d'un commentaire inédit sur cet ouvrage en langue arménienne. Selon ce même érudit ( 1 , p . XI ) , ces mss . seraient parti culièrement importants pour la constitution du texte, du fait qu'ils omettent une série d'émendations communes au reste de la tradition textuelle . Aux considérations mises en lumière par M. Morani, on rajoutera l'impor tante découverte de Mahé 59 , p . 328-333 , qui a reconnu dans un passage des Définitions pseudo -hermétiques, préservées dans une traduction arménienne effectuée probablement dans la période entre la fin du ve et le début du Viº siècle, une interpolation résumant à grands traits le chap . V de Némésius, De elementis. Il s'agit des Définitions, chap. XI , 1-6 , dont le texte arménien avec traduction française a été édité par ce savant (Mahé 59, p. 403-405 ). La date de cette interpolation est impossible à déterminer, mais doit être postérieure à la traduction arménienne du De nat. hom . en 717 ; il s'agit vraisemblablement d'une intervention composée à dessein , destinée à suppléer les remarques jugées trop fugitives d'Hermès au sujet des éléments . Or il est intéressant de noter que ce fut précisément ce chap. V du De nat . hom . , consacré à la doctrine des éléments , qui , selon Grensemann -Weisser 58 , circula comme un traité séparé

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dans une version latine effectuée d'après la traduction arabe de l'écrit némésien . C'est, comme on le verra à l'instant, encore une fois ce chap. V du De nat. hom. qui fut intégré avec une partie d'un autre traité, à tendance hermético -mystique, cette fois rédigé en langue arabe. vi. La tradition arabe Il existe cinq mss. de la traduction complète en langue arabe du De nat. hom ., effectuée directement du grec, soit vers 873-877 par Ishaq ibn Hunain (ob . 910 911 ) , soit par le père de celui-ci, Hunain ibn Ishaq : 1. Damas, Zāhiriyya, 'Amm 4871 , XIIe siècle. Le texte de Némésius se trouve aujourd'hui aux fol. 36-374 et 40 '-62 ' de ce manuscrit, bien qu'il ait constitué originellement le premier des 43 textes de nature philosophique et scientifique qui forment cette collection extrêmement importante (Grensemann -Weisser 58 , p. 46) . Le texte de Némésius fut transcrit probablement en Iraq, au plus tard en 1155 , dans une écriture nashi , à caractères très serrés et petits, de 39 à 46 lignes par page . Pour une description complète de ce manuscrit, cf. 82 J. Ragep et E. S. Kennedy , « A description of Zāhiriyya (Damascus) Ms. 4871 : a philo sophical and scientific collection » , JHAS 5 , 1981 , p . 85-108 ; 83 R. Rashed , Géométrie et dioptrique au Xe siècle . Ibn Sahl, al-Qühi et Ibn al-Haytham , coll. « Collection Sciences et Philosophies Arabes . Textes et études » , Paris 1993, p. CXXVIII-CXLI . 2. Le Caire , Patriarcat Copte, Théologie 224 , copié le 24 kiyahk 1461 des Martyrs = 20 décembre 1744, ff. 1V- 102 '. 3. Le Caire, Patriarcat Copte, Théologie 225 , XVIIe siècle , ff. 2-105 '. Les deux dernièrs folios manquent dans ce manuscrit. 4. Alep , Fondation Georges et Mathilde Salem , ms . Paul Sbath

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(Égypte, Xive siècle) , sauf les fol. 1-16 ; 207 qui sont du XVIIIe siècle , 207 folios. 5. Alep, Famille Gibrā'il Hayyāț, négociant arménien catholique vers 1920 . À cet ensemble, on rajoutera deux témoins partiels : le Sinaï arabe 481 ( copié en 1091 ) , fol. 109-111', qui contient des extraits du chap . 1 , et l'Oxford Bodléienne Huntington 240 ( Égypte, Xviº s . ) , fol. 114-115 ', qui contient une adaptation du chap . 18 du traité némésien , sur les plaisirs. C'est la version du Sinaï arabe, dont la traduction pourrait remonter au IXe siècle , que Samir 32 considère comme la meilleure des quatre versions de la traduction arabe de Némésius ; en même temps, c'est la seule à attribuer le texte à Némésius plutôt qu'à Grégoire de Nysse. De la tradition indirecte, amplement traitée par Samir 32 , p. 107-110 , on retiendra surtout le matériel némésien intégré dans la recension B du Sirr al Haliqah ( « Secret de la création » ) du Pseudo -Apollonius de Tyane A 284 ) ( ed. 84 U. Weisser , Das Buch über das Geheimnis der Schöpfung » von Pseudo - Apollonius von Tyana, coll . « Ars Medica » 3. Abt. Bd. 2 , Berlin 1980, sur la base de deux manuscrits : K = Istanbul Köprülü 872 ( A.H. 584 = A. D. 1189 ) , fol. 170 '- 207 ' ; P = Paris arabe 2300 ( A.H. 628 = A. D. 1240 ), fol. 114 ' .

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144 '. Vers l'année 200 de l'Hégire (= A.D. 815-816 ; cf. 85 P. Kraus, Jābir ibn Hayyān. Contribution à l'histoire des idées scientifiques dans l'Islam , t . II : Jābir et la science grecque, coll . « Mémoires présentés à l'Institut d'Égypte » 45 , Le Caire 1942 , quelque 18 lignes de texte arabe, correspondant aux pages 55-60 Matthaei du traité némésien, furent intercalées entre les paragraphes 2.5 et 2.7 de la cinquième maqālah de l'ouvrage du Pseudo - Apollonius. Ensuite , à un moment indéterminé, mais avant 1189 , le texte du Sirr al- Haliqah fut soumis à un remaniement, qui a eu comme résultat l'insertion d'une longue incise , correspondant à une version abrégée des chap. 1-30 du traité de Némésius. Les recherches de Kh . Samir (32, p . 110 sq . ) ont donc abouti à distinguer quatre versions arabes du texte de Némésius : ( 1 ) Le texte du Pseudo -Apollo nius ; ( 2 ) le texte du Sinaï arabe 481 ; ( 3 ) le texte des versions complètes , représenté par les deux mss . (= C, Q de Samir ) conservés par le Patriarcat Copte du Caire ; et (4) la recension du ms. de Damas (= D). Or, bien que les mss . C et Q aient été transcrits aux XVII°- XVIII ° siècle , tandis que le ms. de Damas ( D ) , lui , fut copié au XIe siècle , ce sont, selon Samir 32 , les mss. C et Q qui transmettent la version la plus ancienne du texte de la traduction arabe de Némésius, dont D nous conserverait une version revue et corrigée. En effet, D présente un style plus soigné , ainsi qu'un vocabulaire philosophique plus sophistiqué que la version de C et Q. Or, Kh . Shamir considère qu'on peut établir un terminus ante quem pour cette version primitive, représentée par C et Q : en effet, le texte du Risalah fi hudūd al- asya ' wa -rusūmiha d'al-Kindi, dont la définition de la colère dérive du chap. 21 de Némésius ( p . 81 , 8-10 Morani; cf. 86 E. Riad, « À propos d'une définition de la colère chez al- Kindi » , OS 22 , 1973 , p. 62-65 ) , refléterait cette version primitive des mss. Cet Q. Celle -ci doit donc être située avant la mort d'al - Kindi , survenue vers 873. Ceci implique , selon Kh. Samir, que le traducteur du grec en arabe n'est pas , comme l'affirment certaines sources , Ishaq ibn Hunain (ob. 911 ) , mais plutôt le père de celui -ci Hunain Ibn Ishaq ( ob. 873) . On a déjà évoqué l'existence d'une version latine médiévale du chap. 5 du traité de Némésius, qui a circulé comme un ouvrage indépendant sous le titre De elementis . Cet ouvrage se trouve aux ff. du ms . Bayerischen Staatsbibliothek Clm 23535 , XIIe siècle , parmi une série de textes galéniques et hippocratiques, dont plusieurs avaient été traduits d'abord du grec en arabe avant d'être traduits de l'arabe en latin . Ce même texte De elementis se retrouve dans le Codex British Library ( olim British Museum) Cotton Galba E. IV, lui aussi du XII ° siècle , aux fol. 27 ', 4 -28 ' , 17 , parmi un ensemble de textes médicaux dont plusieurs sont attribués à Constantin l'Africain . Les recherches de Grensemann -Weisser 58 montrent que la version arabe qui a servi de modèle au traducteur en latin était étroitement apparentée au ms . de Damas, c'est- à - dire à la version « retravaillée » de la traduction attribuée dans les mss . à Isḥāq . À la fin de leur étude , Grensemann -Weisser ( 58 , p . 60-61) se posent un certain nombre de questions , auxquelles ils avouent ne pas pouvoir apporter de réponse définitive, questions concernant l'identité du destinataire de la traduction (médecin ou élève de médecine ?) , l'étendue originelle de la traduc

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tion (celle -ci s'est - elle limitée au seul chap. 5 du traité némésien ? ) ; bref, quand , par qui , et pour qui cette traduction a-t-elle été élaborée ? Or, aucun des histo riens qui se sont occupés de la tradition arabe de Némésius – ni Grensemann Weisser, ni Samir , ni Morani – ne semble s'être avisé de la découverte de J.-P. Mahé, selon laquelle une version de ce même chap. 5 de Némésius aurait circulé en traduction arménienne comme ouvrage indépendant, pour être finale ment intégrée dans les Définitions hermétiques. L'étude comparative de ces deux versions , et surtout de l'utilisation qui en a été faite dans le cas de l'ouvrage arménien , risque , semble - t -il, de pouvoir jeter de la lumière sur les questions susmentionnées. MICHAEL CHASE .

18 NÉOCLÈS DE GARGETTOS RE 5

FIV

Frère d'Épicure ( » E 36 ) , de Chairédème ( C 90 ) et d'Aristoboulos ( -A 362 ) . Comme ses frères, il philosopha avec Épicure et à son instigation, selon Diogène Laërce X 3 , qui suit le dixième livre de la EÚvtatis Tõv pihoobowv de Philodème de Gadara. Voir le stemma présenté dans DPHA II , p . 284. Voir aussi Souda E 2404, t. II , p. 362, 20-21 Adler. Comme il porte le nom du père d'Épicure et qu'il est mentionné avant les deux autres frères, il était sans doute l'aîné . Les trois frères moururent avant Épicure. Trois ouvrages du philosophe ont chacun pour titre le nom d'un des trois frères (D.L. X 27-28 ). Celui qui était intitulé Néoclès était dédié à Thémista ( D.L. X 28 ) . Voir R. Goulet, art. « Épicure de Samos » E 36 , DPLA III , 2000, p. 162 . Selon Plutarque, Non posse suaviter vivi secundum Epicurum 4 , 1089 F, il serait mort, comme Aristoboulos (mss Agathoboulos) d'hydropisie. Au cours de sa propre maladie, Épicure se plaisait à citer les dernières paroles de Néoclès ( Ibid . 16 , 1097 e ) . Plutarque, ibid . 18 , 1100 A ( fr. 178 Usener ) , prétend que Néoclès, encore enfant, avait affirmé qu'il n'y avait jamais eu un homme sage comme Épicure et qu'il n'y en avait pas d'autre. La Souda N 192 , t . III , p. 450 , 9-10 Adler, attribue à Néoclès le philosophe, frère d'Épicure, un ' Ynèp tñ id ac aipéoewÇ (Sur sa propre école, ou Au profit de sa propre école ? ) et prétend qu'il serait l'auteur du ráoɛ ßiáoac. Cf. R. Philippson, art. « Neokles » 5 , RE XVI 2 , 1935 , col. 2416 . RICHARD GOULET. 19 NÉOCRITOS D'ATHÈNES Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique , V. pyth. 36, 267 , p. 146 , 15 Deubner.

BRUNO CENTRONE . 20 NEPOS ( CORNELIUS - ) RE 275

1

Éditions. 1 A.-M. Guillemin , Cornelius Nepos. Euvres, CUF , Paris 1923 , 44 tirage revu et corrigé par Ph . Heuzé et P. Jal , 1992 ; 2 E. Malcovati, Cornelii

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Nepotis quae exstant, Torino 1944 ; 3 P.K. Marshall, Cornelii Nepotis Vitae cum fragmentis, coll . BT, Leipzig 1977 . Études . 4 G. Wissowa, RE IV , 1901, col . 1408-1417 ; 5 E.M. Jenkinson , « Genus scripturae leve : Cornelius Nepos and the Early History of Biography at Rome» , ANRW I 3 , Berlin 1973 , p. 703-719 ; 6 J. Geiger, Cornelius Nepos and Ancient Political Biography, coll . « Historia Einzelschriften » 47 , Stuttgart 1985 , 128 p. Biographie. La biographie de Cornelius Nepos ( son prénom est inconnu ) est très mal connue . Il est originaire de Cisalpine , compatriote de Catulle qui lui dédia son recueil de poèmes ( Carm . 1 ) , mais passa son existence à Rome. Sa date de naissance est incertaine ; on la situe en général vers 1000. Nous savons qu'il entendit le plaidoyer prononcé par Cicéron pour la défense de C. Cornelius en 65 , (Jérôme, C. loann. Terosol. 12 = frag. 38 Marshall ) . Il mentionnait l'édilité de P. Lentulus Spinther (634), comme une date postérieure à sa jeunesse ( Pline , N.H. IX 137 ) . Selon une indication de Jérôme (Ad Eus. Chronicon, an . 1977) il connut la célébrité vers 40a : Cornelius Nepos scriptor historicus clarus habetur. Une lettre de Pline le Jeune ( V 3 , 6) indique qu'il n'était pas sénateur ; et il resta éloigné de toute activité politique . Il mourut sous le principat d'Auguste (Pline, N. H. IX 137 ) sans qu'il soit possible de préciser la date de sa mort : après 27 (Wissowa 4) ? entre 29 et 27 ? Cornelius Nepos était très lié avec Atticus ( > A 505 ) , l'ami de Cicéron : dans sa biographie d'Atticus (Ad Att. XIII 7 ) , il mentionne sa familiaritas avec lui ; il le rencontra sans doute peu après son retour à Rome et devint un de ses familiers ; par là Cornelius Nepos se trouva en contact avec les amis d'Atticus : Cicéron , Varron, Hortensius. Ses relations avec Cicéron ne semblent pourtant pas très étroites ; une lettre adressée à Atticus en 44 montre la distance qui existait entre ces deux hommes (Ad Att. XVI 5 , 5 ; Jenkinson 5, p. 704 )

Euvres . Elles sont très nombreuses ; - Cornelius Nepos avait écrit quelques poèmes légers selon Pline le Jeune ( V 3 , 6) . - Des Chronica en trois livres (Catulle 1 , 5-7 ) qui étaient composés et connus au moment où sont publiés les poèmes de Catulle, vers 56-54 (7 T.P. Wiseman , Clio's Cosmetics, Leicester 1979 , p. 157-159 ) ; il s'agissait d'une chronologie reprenant les événements les plus importants depuis les temps les plus reculés jusqu'à son époque ; les fragments contiennent des références à Saturne, Homère et à la Rome royale ( 3 , 4, 7 Marshall ) . Cornelius Nepos s'intéressait simulta nément à l'histoire culturelle et politique de Rome et de la Grèce . Geiger 6 , p. 68-72 et 94, insiste sur l'originalité de l'æuvre, la première dans l'historio graphie romaine à ne pas s'en tenir exclusivement à l'histoire romaine. Des Exempla en cinq livres au moins ( Gell . VI 18 , 11 = 12 Marshall ); Cornelius Nepos semble avoir mis en parallèle exemples grecs et romains, comme dans l'ouvrage précédent; il s'intéressait au développement du luxe, par exemple avec l'utilisation de la pourpre ( 27 ) , plus largement à l'histoire de la civilisation et à l'histoire sociale . Geiger 6 , p . 72-75 , souligne à nouveau

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NEPOS (CORNELIUS -)

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l'originalité du sujet, où était utilisée une documentation que l'auteur ne pouvait trouver chez des prédécesseurs. - Un ouvrage de géographie dont l'existence n'est pas explicitement attestée, mais semble probable (Geiger 6 , p. 76-77 ; Wiseman 7 p . 162 ; 8 E. Rawson, Intellectual Life in the Late Roman Republic, London 1987 , p. 263-265 ) . - Des biographies isolées : celle de Caton le Censeur, écrite à la demande d'Atticus ( Cato 3 , 5 ) et celle de Cicéron (Gell. XV 28 ) . - Le De uiris illustribus, recueil de biographies des grands hommes qui , à Rome et en dehors de Rome , se sont distingués par leurs talents; actuellement subsiste le livre De excellentibus ducibus exterarum gentium , dédié à Atticus, comprenant les biographies d'une vingtaine de généraux grecs, les rois de Perse , de Macédoine et les successeurs d'Alexandre, Hannibal et Hamilcar. Il reste en outre deux Vies extraites du livre sur les historiens anciens : Caton l'Ancien et Atticus ; il faut ajouter à cet ensemble une lettre de Cornélie, la mère des Gracques. L'auteur écrivit sans doute ce recueil à la fin de sa vie ; il y eut deux éditions, l'une postérieure à 354, l'autre entre 29 et 27 (Geiger 6 , p. 85 ) . Cet ouvrage d'une extrême ampleur présentait des biographies d'hommes illustres présentées par paires : un livre pour les Romains et un pour les étrangers; Cornelius Nepos affirme nettement dans la vie d'Hannibal ( 13 , 4) sa volonté de permettre des comparaisons. L'ensemble des vies comprenait au moins seize livres (43 Marshall ) et plus probablement dix - huit . Mais le détail du contenu nous échappe : il est souvent suggéré que Cornelius Nepos aurait traité des rois, des orateurs, des poètes, des grammairiens, des philosophes et même des artistes et des jurisconsultes ( Wissowa 4 , col . 1413 ) . Toutefois Geiger 6 , p . 88-92 , a souligné le caractère hypothétique de ces reconstructions ; il n'exclut pas la possibilité de livres traitant des orateurs et des philosophes , mais n'affirme rien de leur existence ; on ne sait quels furent les choix de l'écrivain en ce domaine, et encore moins la façon dont il traitait ces vies . Pour les livres conservés, les erreurs fréquentes et le manque d'esprit critique de l'écrivain ont été très souvent soulignés ( Rawson 8 , p. 230-231 ; Jenkinson 5 , p. 713-714 ; Geiger 6 ,

p. 108 ) Dans les vies conservées, Cornelius Nepos affirme à plusieurs reprises sa volonté de s'en tenir aux éléments biographiques : s'il mentionne un cadre histo rique , il entend surtout parler de l'homme , de sa formation et de son caractère (Epaminondas 1,4 ; Pélopidas 1 , 1 ) . Il a sans doute voulu faire connaître à son public « ignorant les écrits des grecs » ( Praef. 2 ) des coutumes différentes : « je crois devoir conseiller aux lecteurs de ne pas rapporter des usages étrangers aux leurs et de ne pas croire que ce qui à leurs yeux manque de sérieux ait été jugé de la même façon chez d'autres peuples » (Epaminondas 1 , 1 ; sur ce relativisme voir 9 F.-H. Mutschler , « Moralischer Relativismus bei Nepos ? » dans A. Haltenhoff, F.-H. Mutschler ( édit .), Hortus litterarum antiquarum . Festschrift für Hans Armin Gärtner zum 70 Geburtstag, Heidelberg 2000 , p. 391-406 ).

N 22

NÉRON

657

Cornelius Nepos n'éprouvait que peu d'intérêt pour la philosophie : dans sa vie d'Atticus , il n'avait pas mentionné les choix épicuriens d'Atticus ( 10 H. Lindsay , « The Biography of Atticus : Cornelius Nepos on the Philo sophical and Ethical Background of Pomponius Atticus » , Latomus 57 , 1998 , p . 324-337 ) Dans la lettre à Atticus citée plus haut, Cicéron écrit « il (Nepos) est si impatient d'avoir mes œuvres, alors que celles dont je suis le plus fier ne méritent pas à ses yeux d'être lues » Et dans une lettre adressée à Cicéron, Nepos critiquait sévèrement la philosophie : « bien loin de croire que la philosophie nous enseigne à vivre et à réaliser la vie heureuse, je pense que personne n'a plus besoin d'apprendre à vivre que la plupart de ceux qui se consacrent à l'enseigner. Je constate en effet qu'une grande partie de ceux qui dans l'école enseignent l'honneur et la maîtrise de soi de la façon la plus subtile , sont en même temps livrés aux passions et à tous les désirs. » (Lactance , Inst. diu . III 15 , 10 = 39 Marshall).

MICHÈLE DUCOS. NEPOS → METILIUS NEPOS (P.) (M 139] 21 NÉRINTHOS

Iva

Ce nom a été donné par Aristote à l'un de ses dialogues perdus ( Núpivoog a ' ) . Voir Diogène Laërce et Hésychius , n° 6 dans DPHA I , 1989, p. 424. On ne possède aucun fragment authentifié de ce dialogue , mais on a rappro ché de ce titre un témoignage de Thémistius, Or. XXIII , p. 295 c ; t. II , p . 90 , 18 91 , 2 Downey - Norman (fr. 64 Rose" , fr. 1 Ross) , qui évoque trois conversions à la philosophie provoquées par la lecture d'ouvrages de Platon : celle d'Axiothéa de Phlionte ( MA 517) , à la lecture de la République en Arcadie, celle de Zénon de Citium à la lecture de l’Apologie de Socrate en Phénicie (voir aussi Diogène Laërce VII 2-3 , où Zénon écoute la lecture du deuxième livre des Mémorables de Xénophon chez un libraire à Athènes ) et celle d'un fermier ( yewpróc) de Corinthe à la lecture du Gorgias. Ce dernier aurait immédiatement abandonné son champ et ses vignes pour aller à Athènes confier son âme à Platon . Pour ce troisième exemple , Thémistius fait référence à un dialogue d'Aristote intitulé Le Corinthien (TQ dlaróvw tỢ Kopivoim) où aurait été honoré ce cultivateur. Les titres des dialogues sont donc différents, mais on a envisagé diverses corrections pour les rapprocher. Pour une tentative de reconstitution – hautement hypothétique – du contenu scénique et philosophique du dialogue et pour une discussion des corrections proposées au texte de Thémistius, voir R. Laurenti, Aristotele. I Frammenti dei dialoghi, Napoli 1987 , t. I , chap. V , p. 461-491. RICHARD GOULET.

22 NÉRON

ІІa

Démétrios Lacon (-D 60 ) lui avait adressé au moins le deuxième livre de son æuvre intitulée lepà nounuátwv, conservé dans PHerc. 1014 et édité par 1 C. Romeo, Demetrio Lacone. La poesia (PHerc. 188 e 1014) , Napoli 1988 ,

658

NÉRON

N 22

col . LXVI 11-15 : πολλή δέ σοι χάρις, Γ [ ώ φίλτατε Νέρω [ν, ού μό] [ ον υπόμνημα ] ΤΟΝ μοι [ είς τό] τ [ ελέσαι ] πλείσ[[ τον συμβαλλομένωι : Démétrios remercie son ami Néron pour sa collaboration dans la rédaction des livres sur les poèmes . Néron , d'origine romaine , fut probablement l'un des protecteurs de Démétrios . L'attribution du PHerc. 1014 à Démétrios Lacon permet de dater Néron du IIe siècle av . J.-C. Une identification a été envisagée avec le personnage homonyme , T. Claudius Nero, fils de Tiberius, petit-fils d'Appius , monetarius en 84a, mais elle reste incertaine ; Varron lui aurait dédié son Epistula ad Neronem . Cf. 2 H. Dahlmann, « Bemerkungen zu den Resten der Briefe Varros » , MH 7 , 1950 , p. 206-208, et Romeo 1 , p. 66-67 . TIZIANO DORANDI. 23 NERVAS PLRE 2

DM V

Un des sept philosophes qui auraient accompagné , en 421 , la future impéra trice Eudocie ( Athénaïs ) d'Athènes à Constantinople et fourni à Théodose II des interprétations pour certaines des anciennes statues de l'hippodrome ( Patria Constant., II 81 , p . 193 Preger; voir aussi I ( = Parastaseis syntomoi chronikai] 64 , p . 61-64, qui rapporte les mêmes anecdotes ). Voir aussi les notices consacrées à Apelles, Carus, Cranus , Curbus, Pelops et Silvanus . Pour le texte des Parastaseis, voir la nouvelle édition de Averil Cameron et Judith Herrin (édit . ) , Constantinople in the early eighth century . The Parastaseis syntomoi chronikai. Introduction, translation and commentary, coll . « Columbia studies in the classical tradition » 10 , Leiden 1984 , p. 140-147, avec les notes p. 253-259. Voir aussi H. Schlange - Schöningen , Kaisertum und Bildungswesen im spät antiken Konstantinopel, coll . « Historia - Einzelschriften >> 94, Stuttgart 1995, p . 86. Sur la signification de “ philosophe ” dans cette littérature et les traits qui le rapproche de la figure chrétienne du " saint", voir G. Dagron , Constantinople imaginaire. Études sur le recueil des " Patria " , Paris 1984 , p . 123 n . 100, et aussi p. 103-115 , 119 sq . , 124 sq . PIERRE MARAVAL. 24 NESSAS DE CHIOS RE Nessos 4 DK 69

FV

Dans une succession de philosophes présocratiques transmise par Eusébe de Césarée , Préparation évangélique XIV 17 , 10 ( A 1 DK ) , Nessas est mentionné comme un disciple de Démocrite ( ~ D 70) et un maître de Métrodore de Chios (** M 149 ) . La succession qui suit une citation du huitième livre du De philo sophia d'Aristoclès de Messine (* A 369 ) sur les philosophes qui , comme Xénophane , Parménide , Zénon , Mélissos ( ~ M 97 ) , Stilpon et les mégariques, abolissent les sensations ( XIV 17 , 1-9 = Aristoclès, fr. 5 Heiland ), énumère les noms de Xénophane , Parménide , Mélissos , Zénon ( d'Élée ) , Leucippe ( » L 51), Démocrite , Protagoras et Nessas , puis Métrodore ( de Chios ) , Diogène (de Smyrne ) [PD 148 ) , Anaxarque ( 2 - A 160 ) et enfin Pyrrhon, qui fonda l'école des sceptiques , des philosophes qui estimaient « qu'il n'y avait rien, ni dans la sensation , ni dans la raison , de saisissable et suspendaient en tout leur juge ment » (trad . des Places ) . Eusèbe cite ensuite de longs extraits d'Aristoclès ( XIV

N 24

NESSAS DE CHIOS

659

18 , 1-30 = fr. 6) contre les sceptiques, puis contre les disciples d'Aristippe ( XIV 19, 1-7 = fr. 7 ) , contre ceux de Métrodore et de Protagoras ( XIV 20 , 1-12 = fr. 4), enfin contre les épicuriens ( XIV 21 , 1-7 = fr. 8 ). Diogène Laërce IX 58 ( A 2 DK ) , au début de son chapitre sur Anaxarque d'Abdère, rappelle qu'il fut le disciple de Diogène de Smyrne, qui avait lui même été l'élève de Métrodore de Chios, un disciple de Nessas de Chios ou bien de Démocrite ( d'Abdère ) . On voit que les deux successions se recouvrent partiellement: Eusébe

Diogène Laërce

Xénophane, Parménide ,

Mélissos, Zénon (d'Élée ), Leucippe, Démocrite,

Démocrite ou Nessas de Chios

Protagoras et Nessas, Métrodore (de Chios) ,

Métrodore de Chios

Diogène (de Smyrne ), Anaxarque

Diogène de Smyrne Anaxarque d'Abdère

Pyrrhon Sur la succession de l'école d'Abdère, voir aussi R. Goulet, notice « Diogène de Smyrne » , D 148 , t . II , 1994 , p . 823 . Dans les deux fragments consignés par Diels et Kranz le nom est transmis sour la forme Nessos de Chios . Ils concernent l'interprétation d'Homère et d'Hésiode. Kathleen Freeman The Pre -Socratic Philosophers, p. 326 n. 1 , rappelle que le fleuve Nessos ou Nestos se jetait dans la mer près d’Abdère et que Nessas a pu être formé dans cette ville par Démocrite, avant de s'établir à Chios où il enseigna à Métrodore. Fragments et témoignages. DK 69 , t. II, p. 230, 10-24. Traductions. Française : Dumont, Présocratiques, p . 937-938 . Anglaise : K. Freeman , Ancilla to Pre -Socratic Philosophers. A complete translation of the Fragments in Diels, “ Fragmente der Vorsokratiker ” , Oxford 1971 , p . 120 . Italienne : V.E. Alfieri (édit . ) , Gli Atomisti . Frammenti e testimonianze . Traduzione e note , coll . « Filosofi antichi e medievali . Collana di testi e di traduzioni » , Bari 1936, p. 321-323 , traduction reprise dans G. Giannantoni et alii, I presocratici: testimonianze e frammenti, 1 re éd . : coll . « Filosofi Antichi e medievali » , Bari 1969, réimpr.: coll . « Biblioteca Universale Laterza » Bari 1981 et 1983 , t. II , p. 830 . RICHARD GOULET.

660

NESTOR DE TARSE

N 25 ra

25 NESTOR DE TARSE RE 5

Philosophe stoïcien, mentionné après Antipatros ( A 205 ) et Archédème ( > A 307 ) , avant les deux Athénodore ( » A 497-498 ), comme l'une des célé brités stoïciennes de Tarse par Strabon XIV , 674 C. Une section de la partie finale perdue du livre VII de Diogène Laërce était consacrée à Nestor ; elle venait après Diogène de Babylonie ( =D 146 ) , Darda nos ( 2D 22) et Antipatros ( cf. éd. Long, p. 392) . Pseudo -Lucien , Macrob . 21 , signale parmi les philosophes qui ont vécu jusqu'à un âge avancé : « Nestor de Tarse, le stoïcien , maître de l'empereur Tibère ( né en 424), qui a vécu 92 ans » . Comme la liste de Diogène Laërce semble rapprocher Nestor de disciples de Diogène de Babylonie ou de Panétius, Zeller III 1 , p . 591 n. , suivi par Susemihl, GGLA , t. II , p. 243 n. 27 , a soupçonné le Pseudo -Lucien d'avoir confondu le stoïcien avec son homonyme et compa triote académicien , Nestor de Tarse ( » N 15 ; RE 4 ) qui fut le maître de Marcellus ( 2M 28 ) , le neveu d'Auguste (429-23 ). Voir dans le même sens G. W. Bowersock, Augustus and the Greek World, Oxford 1965 , p . 34 n . 5 ( « erroneous in calling him a Stoic » ) . Disciple de Diogène de Babylonie ou de Panétius, Nestor le stoïcien serait , selon Zeller, une figure du milieu ou de la fin du fra et non , malgré son extrême longévité , de la fin du 14. J. Glucker, Antiochus, p. 122 n . 8 , rejette cette hypothèse : « The so-called Epitoma Diogenis need not be refering to Nestor of Tarsus, or be strictly chronological or either » . Susemihl, GGLA , t. II , p. 243 n. 27, signale un passage des Rhet. gr. VII 226 Walz , selon lequel Nestor, en opposition à Hermagoras et aux stoïciens de sa propre école, refusait à l'amphibolia toute signification en rhétorique. Cf. A. Mordrze, art. « Nestor > 5 , RE XVII 1 , 1936 , col . 124 . RICHARD GOULET. 26 NESTOR DE TARSE RE 4

ja

Philosophe « académicien » , mentionné comme l'une des célébrités contem poraines (xao'nuãc) de Tarse par Strabon XIV , 675 C. Il fut, rapporte la même source , le maître de Marcellus ( M 28 ] (424-23a), le fils d'Octavie , seur d'Auguste . Il succéda par la suite à Athénodore ( A 497 ) , fils de Sandon, philosophe stoïcien , comme chef du gouvernement de sa ville natale et « vécut le reste de sa vie honoré par les dirigeants , ainsi que dans la population » ( xai ούτος δε προέστη της πολιτείας διαδεξάμενος τον ' Αθηνόδωρον , και ). διετέλεσε τιμώμενος παρά τε τοϊς ηγεμόσι και εν τη πόλει ). Selon J. Glucker, Antiochus, p. 122 n . 8 , Nestor avait dû remplacer Athéno dore comme « house -tutor » de la famille d'Auguste avant de lui succéder à Tarse . Toujours selon Glucker, p. 123 et n . 9 , le titre d'académicien ne signifie rait pas que Nestor ait été élève de l'Académie platonicienne d'Athènes, car celle-ci ne semble pas avoir survécu au départ pour Rome de son dernier scholarque, Philon de Larisse, au début du jer siècle av . J.-C. L'Académie qu'il avait fréquentée était probablement l'“ Ancienne Académie” fondée par Antio chus d'Ascalon (** A 200 ) et c'est d'Aristos ( A 406) , frère et successeur

N 27

NESTORIUS

661

d'Antiochus, que Nestor, comme Eudore d'Alexandrie ( » E 97 ) , aurait été le disciple, ou bien encore de Théomneste, académicien qui enseigna à Brutus ( » B 63 ) à Athènes en 44a ( Plutarque, Brutus 24 , 1 ) . Pour une confusion possible de Nestor de Tarse le stoïcien avec cet acadé micien homonyme chez le Pseudo-Lucien , Macrob . 21 , voir la notice précé dente. Cf. A. Modrze, art. « Nestor» 4, RE XVII 1 , 1936 , col. 124 . RICHARD GOULET. 27 NESTORIUS RE 3 PLREI: 2

300-380 ?

Un texte de Zosime , Hist. Nouv. IV 18 , 2-4 , raconte que la ville d'Athènes a été sauvée d'un tremblement de terre et d'un incendie par la prière de Nestorius. À la suite d'un songe , il honora la statue d'Athéna au Parthénon par une image du héros Achille et protégea Athènes de ce fléau. Zosime tenait le souvenir de cet épisode d'un hymne que le philosophe Syrianus avait composé en l'honneur d'Achille et qui mentionnait ce miracle . Comme Zosime dit que Nestorius était alors « très agé » ( únépynpwc) et que le tremblement de terre eut lieu en 375 (cf. A. Hermann, art. « Erdbeben » , RAC V , 1962, col . 1107 ) , on peut placer la date de naissance de Nestorius vers 300 ; on ne sait rien de la fin de sa vie , mais 300-380 comme dates de sa vie paraissent raisonnables, cf. P. Castrén, « General Aspects of Life in Post -Herulian Athens » , dans P. Castrén (édit. ) , Post-Herulian Athens. Aspects of Life and Culture in Athens. A.D. 267-529, Helsinki 1994, p . 6-7 ( voir aussi F. Paschoud , Zosime, Histoire Nouvelle, CUF , t . IV , Paris 1979 , p . 367-369, n . 138 ) . Aucun texte ne présente vraiment Nestorius comme un philosophe , mais il était lié au fondateur et aux principaux membres de l'École néoplatonicienne d'Athènes , car il était le grand -père de Plutarque d'Athènes, et c'est en cette qualité que Proclus le mentionne : « aieul de Plutar que qui fut mon maitre et celui de mon professeur » (πάππος ών Πλουταρχου του καθηγεμόνος ημών τε και των ημετέρων διδασκάλων, in Remp. II , p. 64 , 6-8 Kroll ). Dans la XIII dissertation sur la République de Platon , Proclus rapporte la méthode de Nestorius pour calculer le meilleur moment pour la génération et pour connaître le chronocrator de l'année, c'est - à -dire la planète qui préside à toute une année. C'est une méthode fondée sur l'astrologie et la magie des lettres et des noms . Proclus ( in Remp. II , p . 64 , 5 - 66, 21 Kroll) utilise cette méthode dans son commentaire sur le discours des Muses dans la République ( VIII , 546 a 1 - 547 a 5 ) pour la réglementation des mariages dans la cité ( voir la traduction d’A . J. Festugière dans Proclus , Commentaire sur la République, t. II , Paris 1970 , p . 174-178 avec les notes ) . Dans une autre dissertation du même commentaire sur la République ( in Remp. II , XVI ° disser tation , p. 324, 11 -325 , 10 ) , Proclus rapporte que Nestorius, qu'il qualifie alors de « grand hiératique » (' uéyaç åvno iepatıxóc ), avait guéri à Rome une femme de famille sénatoriale qui était tourmentée par le souvenir de ses réincar nations successives antérieures dans des corps d'animaux ( chien , serpent, ourse ). Dans le texte de Zosime cité plus haut, Nestorius est présenté comme lepopav TETV tetayuévoç et la critique a voulu voir dans cette expression la preuve que

662

NESTORIUS

N 27

Nestorius était hiérophante à Éleusis ( d'où le rapprochement généralement accepté avec le hiérophante anonyme qui avait initié l'empereur Julien et plus tard Eunape, V. Soph. VII 3 , 1-5 , p. 45-46 Giangrande ). En fait, T.M. Banchich, « Nestorius iepopavteīv teta Yuévoç » , Historia 47 , 1998 , p. 360-374 , a montré que le terme lepo avteīv n'implique pas la charge de hiérophante du culte éleusinien , le terme pouvant désigner toute personne capable d'assurer la média tion entre les puissances divines et les hommes. Peut- être connaissons- nous aussi le père de ce Nestorius. En effet, deux inscriptions ( IG IV 12, nºs 436-437) contiennent des dédicaces à Asclepius par un certain Plutarque qui exécute la volonté du dieu de lui élever une statue à Épidaure. Ces inscriptions sont datées de 308 et ce Plutarque est qualifié de « grand - prêtre de l'Attique et prêtre de Dionysos » . Quand on connaît les traditions familiales où les noms et les fonctions se transmettaient d'une génération à l'autre, on est tenté de faire de ce Plutarque l'arrière - grand - père de Plutarque d'Athènes et donc le père de notre Nestorius ( cf. K. Latte, dans Gnomon 7 , 1931 , p . 118 n . 1 ) . Cette dévotion à Asclépios peut aussi expliquer le nom très rare donné par Plutarque d'Athènes à sa fille, Asclépigéneia [** A 451 ] ( cf. E. Sironen, « Life and Administration of Late Roman Attica in the Light of public Inscriptions » , dans Post - Herulian Athens , cit. p . 49-50 ) . Le nom de Nestorius n'est pas moins rare , cf. Marinus, Proclus ou Sur le bonheur $ 28 , 12 et Saffrey -Segonds, n . 9, p. 155. Nestorius était regardé par Proclus comme la source de toute la pratique théurgique qui lui avait été transmise par Asclépigéneia et Plutarque d'Athènes , cf. ibid . § 28 , 10 15. Sur ce Nestorius en général, voir Ét . Évrard, « Le maître de Plutarque d'Athènes et les origines du néoplatonisme athénien » , AC 29, 1960 , p. 108-133 et 391-406 , H.D. Saffrey et L. G. Westerink, Proclus, Théologie platonicienne, coll . CUF, t. I , Paris 1968 , p. XXVII-XXX et PLRE I , s.v. Nestorius 2. HENRI DOMINIQUE SAFFREY.

IV

28 NESTORIUS RE 4 PLREI: 3

Fils du précédent et père de Plutarque d'Athènes , le fondateur de l'École néoplatonicienne d'Athènes. On ne sait rien de possibles activités philosophi ques de ce Nestorius. Il n'est connu que par la formule Moúrapxos ó Neoto piov , que l'on trouve dans les textes suivants : Marinus, Proclus § 12 , 2-3 , Simplicius , in De an . , p. 260, 1 , Priscianus Lydus, Metaphr. in Theophr ., p. 32, 35 ; Souda III , p . 469, 2 Adler, où il est désigné dans l'expression Hovtápxou δε λέγω του επίκλης Νεστορίου (sans doute pour distinguer ce Plutarque , surnommé fils de Nestorius, de Plutarque de Chéronée ), et IV , p . 150 , 31 et 210 , 6 . HENRI DOMINIQUE SAFFREY. 29 NICAGORAS ( IUNIUS - ) D'ATHÈNES PLRE I 1

III- IV

Nicagoras était le petit- fils du sophiste homonyme titulaire de la chaire athénienne, qui se disait lui-même « descendant de Plutarque et de Sextus >> (IG I12 3814 ; B. Puech , Orateurs et sophistes grecs dans les inscriptions d'époque impériale, Paris 2002, nº 180 ), le fils du sophiste Minucianus qui était

N 30

NICAGORAS

663

à son acmè sous Gallien et le beau - père du sophiste Himèrios ( » H 136 ] (Or. VII , 4 et VIII , 21 ) : sur cette famille, on se reportera aux études d'O . Schissel , « Die Familie des Minukianos » , Klio 21 , 1926, p. 361-373 (dont la reconstruc tion généalogique doit cependant être utilisée avec prudence : voir au moins une autre solution possible dans C. Settipani , Continuité gentilice et continuité fami liale dans les familles sénatoriales romaines à l'époque impériale, Oxford 2000 , p . 480-483 ) ; F. Millar, « P. Herennius Dexippus : the Greek World and the Third - Century Invasions » , JRS 59 , 1969, p . 16-17 ; K. Clinton , The Sacred Officials of the Eleusinian Mysteries, coll . TAPHA 64, Philadelphia 1974 , p. 80 81 ; S. Follet, Athènes au Trème et au 117ème siècle, Paris 1976, p . 288 ; M. Heath , « The Family of Minucianus ? » , ZPE 113 , 1996 , p. 66-70 . Pour un arbre généalogique de cette famille, voir J. Schamp, notice « Himérius » , H 136, DPLA III 2000 , p. 721 . Il était dadouque à Éleusis lorsqu'il visita les tombeaux de la Vallée des Rois, transformant cette visite en un pélerinage sur les traces de Platon . Il était d'ailleurs apparemment accompagné d'autres philosophes platoniciens qui , comme lui , laissèrent leur signature dans la tombe de Ramsès VI , près du tableau de la Métempsycose ( ™ B 29 et 57 ; » 43 ) . h (OGIS 720 ; J. Baillet , Tombeaux, n ° 1265 ) : « Moi , le dadouque des très saints mystères d'Éleusis, fils de Minucianus, Athénien, en contemplant les syringes, bien des années après le divin Platon venu d'Athènes , j'ai admiré et rendu grâces aux dieux et au très pieux empereur Constantin , qui m'a fourni l'occasion de cette visite » . Suit cette invocation , qui montre que le divin Platon était bien , pour les visiteurs, l'objet d'un véritable culte : « qu'ici aussi , Platon nous soit propice » . Une autre signa ture, sur le mur opposé ( OGIS 721 ; J. Baillet , Tombeaux, nº 1889 ) , est plus sèche et conventionnelle et , curieusement, désigne Nicagoras par son nom , au mépris de l'hiéronymie ; peut -être faut - il comprendre, avec G. Fowden , JHS 107 , 1987 , p . 51-57 , qu'elle était l'æuvre du guide . Elle ajoute néanmoins une indication précieuse en datant la visite du septième consulat de Constantin , premier consulat de Constance César, soit de 326. G. Fowden estime que Nicagoras avait été chargé par Constantin d'une mission diplomatique : obtenir l'adhésion des prêtres de Thèbes au projet de Constantin de faire transporter à Rome l'obélisque dit « du Latran » , qu'il voulait offrir à la capitale occidentale à l'occasion de ses vicennalia . BERNADETTE PUECH .

30 NICAGORAS (DE CHYPRE ? ) RESuppl VIII : 7a

Iva

Ses vues sur l'origine ( de la crue) du Nil sont brièvement rapportées dans un ouvrage anonyme , mais parfois attribué à Aristote , De inundatione Nili ( FGrHist 646 F 1 [ 7] ; Aristote , fr. 248 Rose ) , et sont mentionnées après celles d'Anaxagore ( 2 - A 158 ) , d'Eschyle , d'Euripide (» E 139 ) et de Sophocle et avant celles de Démocrite ( » D 70 ) et d'Oinopidès de Chios ( » O 10 ) dans une Scholie sur Apollonius de Rhodes ( IV 269-271 = FGrHist 647 F 3 ( 2 ] ) . Il prétendait que le Nil prenait sa source au -delà de l'Équateur terrestre , chez nos “ antèques ” où les saisons sont inversées (Nıxayópaç dé onolv ånd tõv

664

NICAGORAS

N 30

avto xwv ajtóv peīv ). Comme cette théorie presuppose la sphéricité de la terre , il pourrait s'agir d'un auteur du début du IVe siècle av . J.-C. Selon Danielle Bonneau , La Crue du Nil, t. I : Ses descriptions, ses explica tions, son culte d'après les auteurs grecs et latins, et les documents des époques ptolémaïque, romaine et byzantine, Thèse, Paris 1964 , p. 199-200 , ce savant, « contemporain d'Aristote » , fondait son explication sur la théorie des zones terrestres : « le régime du fleuve serait le même que celui des autres cours d'eau alimentés par les pluies , connus du monde antique ; mais ses crues, dues à des chutes de pluies, se produiraient à une saison inverse : l'hiver sévirait aux sour ces du Nil au moment où l'été dessèche son cours terminal » (p. 199 ) . Cf. F. Gisinger , art. « Nikagoras von Kypros » 7 a, RESuppl. VIII , 1956 , col. 361-363 . RICHARD GOULET . 31 NICANDRE D'ALEXANDRIE RE 13 Auteur d'un Περί των ' Αριστοτέλους μαθητών ( Sur les disciples d'Aristote ), dans lequel il présentait le poète Aischrion de Mitylène ( > A 72 ) comme un disciple ( yvúpquoc) et un mignon ( épúuevoc) d'Aristote ( Souda At 354 ; t . II , p. 185 , 1-3 Adler) . Voir J. Radicke dans FGrHist continued nº 1112 , p. 444-447, qui le considère comme fictif.

RICHARD GOULET. NICANDROS + LYCANDRE (L 79] 32 NICANOR RE 24

D Ma

Disciple d'Épicure. Comme il avait vieilli avec le maître dans la philosophie et lui avait prouvé son attachement , il fait l'objet des recommandations d'Épicure dans son testament ( Diogène Laërce X 20 ) . Cf. R. Philippson, art. « Nikanor » 24 , RE XVII 1 , 1936, col . 272-273 . RICHARD GOULET. 33 NICARÉTÈ DE MÉGARE Courtisane, maîtresse du philosophe Stilpon , selon Diogène Laërce II 144 , qui cite un certain Onétor ( 27 ) . Athénée , Deipnosophistes XIII , 596 e , précise que Nicarétè, issue d'une noble famille de Mégare, était fort attirante par sa culture (xatd naloe av Ểnépaotoç pv ) et qu'elle avait été l'auditrice de Stilpon. Absente de la RE. RICHARD GOULET.

34 NICASICRATÈS DE RHODES

II

Épicurien dissident , originaire de l'île de Rhodes. Les renseignements sur sa vie font défaut. On peut partiellement reconstruire sa pensée à partir de certains passages de l'euvre de Philodème.

N 35

NICÉRATOS

665

Nicasicratès, peut-être chef de l'école de Rhodes, était intervenu dans un débat sur la colère et sur la flatterie. En ce qui concerne la colère, Philodème (dans son traité intitulé Sur la colère, PHerc . 182) faisait une distinction entre θυμός (emportement) et φυσική οργή (colere ) et admettait que meme le savant peut être sujet à la colère, mais jamais à l'emportement. Nicasicratès nie carré ment que le savant puisse être sujet à n'importe quelle passion y compris la DUOLXn ópyń ( Philod ., De ira, col . XXXV 26-XXXVIII 28 Indelli ) . Timasa goras ( autre épicurien dissident , qu'on doit probablement identifier à Tima goras : voir F. Longo Auricchio et A. Tepedino Guerra , « Chi è Timasagora ? » , dans Atti del Convegno : La Regione sotterrata dal Vesuvio . Studi e prospettive, Napoli 1982 , p. 405-413) eut des opinions semblables à celles de Nicasicratès à propos de la colère, mais il les justifiait par des motifs différents. En ce qui concerne la flatterie, Épicure, dans son éthique, réfutait l'existence des flatteurs, mais admettait que le savant s'efforcât de se montrer agréable envers ses camarades. Nicasicratès critique cette opinion ( Philod ., De adul ., PHerc. 1457 , col . IV 5-25 ; X 4-12 ; XII 5-16 Bassi) , mais ne donne pas de définition des différents genres de xonaxe a . L'opinion de Nicasicratès revient par consé quent , selon Philodème, à des positions qui ressemblent à celles de Démocrite [ + D 70 ] ( Philod ., De adul., PHerc. 1457 , col . X 4-12 = Dém . 68 B 153 D.-K. ) . On a retrouvé le nom de Nicasicratès dans les restes fragmentaires du PHerc. Paris . 2 , pz. 270a 5-8 et 279 , 23 , rouleau qui devait conserver une cuvre de Philodème dédiée probablement au vice de la calomnie ( cf. M. Gigante , M. Capasso et A. Angeli , dans Proceed . XIX Intern . Congr. Papyrology, I , Cairo 1992, p . 283-289 ) . Cf. F. Longo Auricchio et A. Tepedino Guerra, « Aspetti e problemi della dissidenza epicurea» CronErc 11 , 1981 , p . 25-40 ; M. Erler , « Dissidenten » , GGP, Antike 4 , 1 , 1994, p. 283-285 ; D. Sedley , « Philodemus and the decentra lisation of philosophy » , CronErc 33 , 2003, p. 31-41 , notamment p. 33 . TIZIANO DORANDI .

35 NICÉRATOS

DII ?

Ce nom, peut-être celui d'un membre de l'école épicurienne, apparaît dans une Lettre de Diogène d'Oinoanda à Dionysios (de Rhodes) [ D 183 ] , conser vée par l'inscription de Diogène sur le mur de sa cité. Dans ce passage ( fr. 70 , II , li . 5 et III li . 9 , p . 264-265 Smith ) , Diogène semble reprocher à ses correspon dants d'avoir été la cause d'un événement malheureux survenu à Nicératos et de l'affliction que Diogène lui - même en ressentit : tíl nadóvTEÇ, . uaxápuoi, I προς τοιαύτην ονήσατε πράξιν, αφ ' ής οχληρά μέν τω Νεικηράτω Ι πάθη γέγονεν , οχληρά 1δ' ήμεϊν διά τάς συμφοιράς τας εκείνου ; Selon M. F. Smith (édit. ) , Diogenes of Oinoanda. The Epicurean inscription . Edited with introduction , translation and notes, coll . « La Scuola di Epicuro » Suppl . 1 , Napoli 1993, qui traduit le passage ( p. 400-401) et le commente (p. 516-517 ) , on ignore quelle fut pour Nicératos cette douloureuse expérience, mais il pourrait s'agir d'un naufrage, comme l'a envisagé G. N. Hoffmann ( Diogenes of Oenoanda. A Commentary, Diss . , University of Minnesota 1976) . Voir

666

NICÉRATOS

N 35

également A. Casanova (édit. ) , I Frammenti di Diogene d'Enoanda, coll . « Studi e Testi » 6, Firenze 1984, p. 308-311 (= fr. 71 ) . RICHARD GOULET.

36 NICÉTÈS (IULIUS - ) DE BITHYNION

DM II

Ce philosophe était un notable de sa cité de Bithynion -Claudioupolis, qui l'honora d'une statue (IK 31 , 67 ) . L'écriture et l'orthographe de l'inscription situent son acmè vers l'époque d'Hadrien . BERNADETTE PUECH . 37 NICIAS

III

Dedicataire du Περί των στοιχείων του λόγου α' (Sur les elements du langage) de Chrysippe ( C121] (Diogène Laërce VII 193 ) . Un tel ouvrage ne peut guère avoir été dédié qu'à un disciple ou à un collègue au sein de l'école stoïcienne . Absent de la RE. RICHARD GOULET. 38 NICIAS RE 19 PLREI: 2 Philosophe ami de Symmaque , qui le recommande à son futur beau - père ( Epist. IX 39 ( s.d. ), p . 247 Seeck ) . PIERRE MARAVAL .

39 NICIAS DE NICÉE RE 26a ( RESuppl. VII )

I ?

Auteur d'un ouvrage intitulé Successions des philosophes (év tais tv plooópwv Aladoxaīc ), cité à plusieurs reprises par Athénée , parfois sous une forme moins précise (Histoire des philosophes ou Successions ). Les fragments ont été présentés et rassemblés par 1 Rosa Giannattasio Andria, I frammenti delle « Successioni dei filosofi » , coll . « Università degli Studi di Salerno Quaderni del Dipartimento di Scienze dell’Antichità » 5 , Napoli 1989 , p. 145 159 . Cf. 2 R. Philippson , art. « Nikias von Nikaia » 26a, RESuppl. VII , 1940 , col. 569-570. Il est associé deux fois à un autre auteur de Successions de philosophes, Sotion d'Alexandrie ( IV 54 : ώς Νικ ας ο Νικαεύς ιστορεί εν τη περί των φιλοσόφων ιστορα και Σωτ ων ο Αλεξανδρεύς εν ταίς Διαδοχαίς , et XI 112 : ώς Νικ ας ο Νικαεύς ιστορεί και Σωτ ων). Philippson 2 a pense qu'Athénée ne connaissait Nicias qu'à travers Sotion qui est cité en dernier dans ces deux passages, ce qui conduirait à situer Nicias avant la fin du III ° siècle av . J.-C. comme l'a proposé 3 E. Mensching, Favorin von Arelate, Berlin 1963, p. 44-45, ou du moins avant l'ère chrétienne comme l'a envisagé Philippson qui identifie, sans doute de façon erronée (comme l'a montré Wehrli ) , l'auteur des Successions avec le maître de Sénèque , mais l'inverse peut tout aussi bien être envisagé , auquel cas Nicias aurait pu vivre au début de l'époque impériale,

NICIDION

N 40

667

comme le proposait 4 F. Susemihl , GGLA I , p. 505-506. La mention d’Hestiaios du Pont (Athénée VI 105 , 273 d = fr. 2 Giannattasio Andria ), connu par la Souda comme maître du grammairien Tyrannion d'Amisée , amène Giannattasio Andria 1 à dater Nicias du jer siècle av . J.-C. « The date of Nicias cannot be determined except that he must be later than Hestiaeus of Pontus ( ca. 100 BC ) and earlier than Athenaeus » (5 J. Mejer, Diogenes Laertius, p. 64 ). Un tableau permet de mettre en évidence les biographies prises en compte par Nicias et les points de rapprochement qu'il présente avec d'autres auteurs s'inscrivant dans ce genre de littérature.

1

Athénée, Deipnosophistes IV 54, 162 e

2

VI 105 , 273 d



3 ( X 50,437 e-f

4 XI 112 , 505 b

Bios

Parallèles

Références et associations

Persaios ( ou Zénon ?)

ως Νικ ας ο Νικαεύς ιστορεί εν τη περί των φιλοσόφων ιστορα και Σωτων ο 'Αλεξανδρεύς εν ταις Aladoyais (fr. 21 Wehrli). ? ώς ο Νικαεύς Νικ ας ιστορεί εν ταϊς Διαδοχαίς ώς φησι Νικ ας ο Νικαεύς εν Denys d'Héraclée ταϊς Διαδοχαίς

Platon

ώς Νικ ας ο Νικαεύς ιστορεί xai Ewt wv ( fr. 14Wehrli )

Platon

ώς φησι Νικ ας ο Νικαεύς

5

X1114 , 506 c

6

XIII 61 , 5911-592a Bion

ώς φησι Νικ ας ο Νικαιεύς έν ταϊς των φιλοσόφων Διαδοχαίς

Diogène Laërce VII 167 ; voir aussi Antigone de Caryste, Vie de Denys ( fr. 41 Dorandi) Diogène Laërce III 48 = Aristote , Sur les poètes, livre I et Favorinus , Apomnè moneumata ( fr. 17 Mensching, 47 Barigazzi ) Diogène Laërce III 62 = Favorinus, Apo mnèmoneumata V Diogène Laërce IV 46

Ces rapprochements ont autrefois conduit 6 H. Usener, « Die Unterlage des Diogenes Laertios » , SPAW 49 , 1892 , p. 1023-1034 , à faire de Nicias de Nicée la source unique et tacite des Vies de Diogène Laërce . RICHARD GOULET.

40 NICIDION RE Comme Mammarion , Hédeia ( »

IV - III H 14 ) et Érotion (

E 55 ) , hétaïre du Jardin

d'Épicure selon un témoignage hostile , mais sans doute véridique sur ce point, rapporté par Diogène Laërce X 7. Sur les hétaïres du Jardin , voir DPA III , 2000, p . 169. Elle est également mentionnée par Plutarque , Non posse suaviter L 43) , Boïdion ( > -B 51 ) vivi secudum Epicurum 16 , 1097 d -e , avec Léontion ( et Hédeia parmi les « jolies jeunes femmes » qui hantaient le Jardin. Dans un

668

NICIDION

N 40

passage du traité de Philodème, Ad contubernales liber I , § 2 , fr. VI , li . 14-15 , p. 174 Angeli , Nicidion est présentée comme l'amante d'Idoménée de Lampsaque ( » I 14 ) ( wai Nexídlov v 'loouevéwç épwuélyn ). Selon Anna Angeli , Agli Amici di Scuola ( PHerc. 1005 ). Edizione, traduzione e commento , coll . « La Scuola di Epicuro » 7 , Napoli 1988 , p . 271-272 , l'affirmation se présenterait comme une calomnie lancée par un épicurien attaqué par Philodème dans ce passage. Comme ceux de Mammarion, Hédeia et Boïdion , son nom apparaît sur des inscriptions du IVe siècle à Athènes . Voir C.J. Castner, « Epicurean hetairai as dedicants to helping deities ? » , GRBS 23 , 1982 , p. 51-57 . Cf. R. Philippson, art. « Nikidion » , RE XVII 1 , 1936, col. 341 . RICHARD GOULET . 41 NICION surnommée « Mouche à chiens » (XUVápivia ) Courtisane du Banquet des Cyniques de Parméniscus cité par Athénée , Deipnosophistes IV , 157 a - b . Avec Melissa , elle est présentée comme faisant partie des « courtisanes bien connues » . S'adressant aux cyniques du banquet, elle cite un passage des Grâces du poète cynique Méléagre de Gadara ( M 90 ) et elle mentionne un autre des ouvrages du poète , celui qui contient « une comparaison des lentilles en purée et des lentilles entières » (c'est le seul endroit où cet ouvrage est cité ) . Voyant l'abondante préparation de lentilles destinée à leur repas, elle reprend les mots d ' « Antisthène le Socratique » (

A 211 ) pour

conseiller aux cyniques qui l'entourent de « se délivrer eux -mêmes de la vie s'ils doivent manger pareille nourriture » ( SSR V A 133 ) . MARIE -ODILE GOULET -CAZÉ. 42 NICIPPOS

fl. D III

Péripatéticien, « ami » (piaoc) de Théophraste (mort en 286 *) et l'un des dix héritiers solidaires du « jardin, du peripatos et de toutes les maisons attenantes au jardin » , selon les væux du testament de Théophraste ( Diogène Laërce V 52 53 ) , qui leur laisse ces biens pour qu'ils puissent y étudier et y philosopher en commun (ovoyoNáčelv vai ovudioOOPEīv ). Nicippos n'apparaît pas dans la liste des sept exécuteurs testamentaires (επιμεληται των εν τη διαθήκη ) dressée plus loin par Théophraste ( V 56) . Absent de la RE. RICHARD GOULET.

43 NICOLAS Ce nom apparaît en Diogène Laërce X 4 entre celui du stoïcien Posidonius ( F 288 Edelstein -Kidd ) et celui d'un Sotion , auteur de Réfutations de Dioclès , comme responsable de calomnies dirigées contre Épicure. L'identification avec le péripatéticien Nicolas de Damas , retenue par J.-F. Balaudé (Diogène Laërce, Vies et doctrines des philosophes illustres, 2e éd ., Paris 1999, p. 1240 n . 1 ), n'est qu'une possibilité parmi d'autres.

N 45

NICOLAS DE DAMAS

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La référence qui est faite dans la même note au fr. 37 Usener -Radermacher ne concerne pas Nicolas de Damas, mais Denys d'Halicarnasse mentionné quelques lignes plus loin . Quant à la datation de Posidonius au 11 ° siècle apr. J.-C. qui se trouve chez le même commentateur (p. 1239 n . 6), elle est également erronée. RICHARD GOULET. 44 NICOLAS

À la fin de la XIII dissertation de son commentaire sur la République de Platon , consacrée au discours des Muses au livre VIII , Proclus ( in Remp. II , p . 25 , 27 - 26 , 14 Kroll) élabore une doxographie sur ce que Platon a appelé « le nombre de l'Engendré divin et humain » . Il produit successivement les opinions de Cronius ( C 223 ) , Démétrius le géomètre (™ D 61 ) , maître de Porphyre, Sosigène , maître d'Alexandre d’Aphrodise (** A 112) , Dercyllidès ( 3D 87) , des pythagoriciens et d'un certain Nicolas qui est inconnu par ailleurs. Ce Nicolas est présenté comme ayant été paraphrasé par un géomètre appelé Magnus ( > • M 00 ) , sur lequel on ne sait rien non plus ( Ότι και Νικόλαος και Μάγνος ο γεωμέτρης τα Νικολάου παραφράζων δόξαν την αυτήν έσχον...). Ils remar quaient que, dans les nombres, « telles ou telles conjonctions rendent semblables ou dissemblables les nombres qui en sont issus » . Ils en concluaient qu'il ne faut pas laisser à la Fatalité le soin de régler les accouplements des époux, mais qu'ils doivent s'accoupler au moment convenable de leur âge. La conclusion formule « que le moment opportun consiste dans la juste proportion des époux, pour qu'ils procréent dans la verdeur de l'âge » ( cf. A. J. Festugière, Proclus, Commentaire sur la République, t. II , Paris 1970 , p. 132) . Absent de la RE . HENRI DOMINIQUE SAFFREY. 45 NICOLAS DE DAMAS RE 20 PIR ? N 86

MF Ia

Historien de cour et philosophe péripatéticien. Fragments et témoignages. Il n'existe pas de recueil complet . Tout ce qui , dans la tradition grecque , relève de l'histoire (au sens large) a été réuni dans 1 F. Jacoby , FGrHist II A 1926 , n ° 90 , p . 324-430 ( témoignages [T] et fragments [ F] ) , et II C , p . 229-291 ( commentaire ). Les fragments de l'autobio graphie , des Histoires , du Recueil de coutumes et les Testimonia sont repris (parfois augmentés) , traduits et commentés dans 2 E. Parmentier- Morin , L'æuvre historique de Nicolas de Damas . La vie de Nicolas de Damas et la composition de son cuvre historique. La place de Nicolas de Damas dans l’æuvre de Flavius Josèphe, Thèse de l'Université de Paris X – Nanterre , 1998 ( non publiée ) . Une partie des témoignages grecs et orientaux , syriaques et arabes, concernant l'activité philosophique de Nicolas se lisent dans 3 H. J. Drossaart Lulofs , Nicolaus Damascenus , On the Philosophy of Aristotle , fragments of the first five books translated from the Syriac with an introduction and commentary , coll. « Philosophia antiqua » 13 , Leiden ( 1965 ) , 2e éd . 1969 (en plus de l'édition syriaque avec traduction des fragments Sur la philosophie d'Aristote , l'auteur regroupe les testimonia sur les cuvres philosophiques de Nicolas sous treize rubriques ( T 1-13 ) , avec commentaires ). Les diverses

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NICOLAS DE DAMAS

N 45

versions conservées du De plantis sont réunies dans 4 H.J. Drossaart Lulofs et E.L.J. Poortman , Nicolaus Damascenus, De plantis. Five Translations, coll . « Aristoteles Semitico-Latinus » , Amsterdam /Oxford /New York 1989. Pour les éditions antérieures des fragments philosophiques, on consultera 5 P. Moraux, Der Aristotelismus bei den Griechen, t. I , Berlin 1973 , p. 465 n . 2. Voir aussi 6 Th . Reinach , Textes d'auteurs grecs et romains relatifs au Judaïsme, Paris 1895 , p. 78-87 ; 7 M. Stern , Greek and Latin authors on Jews and Judaism , edit. with introduction , translation and commentary , vol . I , Jerusalem 1974, p. 227 260 . Études d'orientation . 8 R. Laqueur, art. « Nikolaos » 20 von Damaskos, RE XVII 1 , 1936 , col . 362-424 , et col . 1269 ( Addendum de W. Jaeger). 9 B.Z. Wacholder, Nicolaus of Damascus , coll . « University of California Publications in History » 75 , Berkeley /Los Angeles 1962 (ce qui est dit du contenu du manuscrit syriaque de Cambridge (Gg 2 , 14) , p . 19-20, doit être remplacé par l'étude de Drossaart Lulofs 3 ) ; Moraux 5 , p . 445-514 ; 10 F. Wehrli , GGP Antike 3 , p. 596-597 . 11 H.B. Gottschalk , « Aristotelian philosophy in the Roman world from the time of Cicero to the end of the second century AD » , ANRW II 36 , 2 , p . 1079-1174 (en particulier, p . 1122-1125 ) . 12 K. Meister, art. « Nikolaos » 3 , NP VIII , 2000 , col . 920-922 ( avec biblio graphie ) ; 13 E. Schürer, The history of the Jewish people in the age of Jesus Christ ( 175 B.C. - A.D. 135) . A new English version revised and edited by G. Vermes and F. Millar, vol . I , Edinburgh 1973 , p. 28-32 .. Vie. La carrière de Nicolas de Damas, fils d'Antipatros et de Stratonice, nous est assez bien connue grâce aux fragments conservés de son autobiographie (et à la Souda qui dépend de l'autobiographie ) . Il naît vers 64 av . J.-C. ( il avait environ 60 ans à la mort d'Hérode, en 4 av . J.-C. , [ F 136, 8 ] ) dans une des familles les plus en vue de Damas . Son père, Antipatros, occupait diverses fonctions officielles : il se vit confier des ambassades , des arbitrages et des magistratures dans sa cité . C'était un habile orateur. Une anecdote sur sa piété envers les dieux garantit l'appartenance de la famille à la religion traditionnelle ( Souda , s.v. ’Avt natpoç A 2705 = F 131,3 ) . L'éducation de Nicolas, comme celle de son frère Ptolémée , fut soignée : grammaire et poésie, rhétorique et musique , étude des sciences ( ou des mathématiques : tñS nepì tà uaðnuata dewp aç) et philosophie entière (piloood aç náons ). Dans un fragment auto biographique conservé dans la Souda (s.v. Nexólaoç N 393 = F 132 , 3 ) , Nicolas compare l'éducation à un voyage à l'étranger : « Nicolas disait que le (cycle ) complet de l'éducation ressemblait à un voyage . Quand on voyage et que l'on suit une longue route, tantôt on ne s'arrête que pour passer la nuit , tantôt on ne fait que prendre un repas, tantôt on reste plusieurs jours ou on visite quelques sites en passant, pour revenir finalement habiter en ses foyers ( ÉOT ALÇ); de même, quand on parcourt le (cycle ) complet de l'éducation , il faut s'adonner davantage à certaines matières, moins à d'autres ; il faut accueillir certains (enseignements) en entier, d'autres en partie, pour d'autres il faut s'en tenir aux notions élémentaires, et, après que l'on a retenu ce qu'il y a d'utile en tout cela, il faut revenir à son véritable foyer paternel et se consacrer à la philosophie (φιλοσοφεϊν ) . » ( Pour des parallèles, cf. Drossaart Lulofs 3 , p. 2 n . 4 ; cf. aussi 14 I. Hadot, Arts libéraux et philosophie dans la pensée antique, Paris 1984 , p. 35-36).

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Nous ne savons rien de sa formation philosophique . Aucun maître ni aucun lieu d'étude ne sont nommés (Drossaart Lulofs 3 , p. 20 , voit en Nicolas “ a kind of freelance" ; cela peut rendre compte du fait, remarquable à la fin du 1er s . av . J.-C. , que Nicolas nous apparaît comme un péripatéticien orthodoxe, chez qui ne se décèle aucune trace d'éclectisme). Après sa formation , il se vit confier, certainement à Alexandrie, l'éducation des enfants d'Antoine et de Cléopâtre ( T2 ; sans doute s'agit- il de leurs jumeaux , Cléopâtre et Ptolémée , nés en 40 ). Il devient ensuite - à une date inconnue ( au début des années 20 suppose Jacoby 1 , II c , p . 229 ) - le conseiller et l'éducateur ( en philosophie , rhétorique et histoire ) du roi de Judée , son aîné d'une dizaine d'années, Hérode le Grand (roi “ami et allié” des Romains depuis 40 ), à la cour de qui il demeura jusqu'à la mort de ce dernier (4 av . J.-C. ). En 14 av . J.-C. , on le trouve dans l'entourage d'Hérode en Ionie où le roi accompagne M. Vipsanius Agrippa , alors chargé de mission en Orient par Auguste ; à cette occasion Nicolas est sollicité par Hérode pour défendre les Juifs des cités qui se plaignent de multiples vexations ; son plai doyer devant les magistrats locaux eut un écho favorable et servit sans doute la politique d'Hérode en Judée (T 4 et F 81 ) . Dans son activité diplomatique au service d'Hérode, il se rend à plusieurs reprises à Rome où il se lie d'amitié avec Auguste ( premier voyage avec Hérode en 12 av . J.-C. [F 135 ) ; deuxième voyage en 8/7 pour défendre, avec succès , Hérode tombé en disgrâce auprès d'Auguste [T 5 ; F 136, 1 ] ) . A la mort d'Hérode, il fait un troisième voyage à Rome pour soutenir l'accession au trône du fils d'Hérode, Archélaos (T 8 ; F 136 , 8-11 ) . Il semble qu'il restera ensuite dans la capitale, dans l'entourage d'Auguste. Nous ignorons la date et le lieu de sa mort. Les dattes appelées " Nicolas " selon de nombreux témoignages doivent leur nom au conseiller d'Hérode ( T 10 ; cf. Schürer 13, p. 29). Euvres. Nous distinguerons les œuvres littéraires et historiques ( A ) de la production plus spécifiquement philosophique ( B ).

A. Euvres littéraires et historiques . 1. Comédies et tragédies (F 132 , 1 ) . Il semble que rien de cette production ne nous soit parvenu ( cf. Drossaart Lulofs 3, p. 1 , n . 2 , et Jacoby 1 , II C , p . 290 ). 2. Discours . Les quelques discours attribués à Nicolas de Damas par l'historien Flavius -Josèphe sont vraisemblablement des reconstructions litté raires ( cf. F 142 et 143 ) . 3. ' lotop al ( Histoires ; F 1-102 ) . Il s'agit d'une monumentale Histoire universelle en 144 livres (T 11 ) , s'étendant des grands royaumes de l'Orient ancien ( Assyrie, Lydie , Perse) jusqu'à la mort d'Hérode le Grand ( 4 av . J.-C. ) . Pour apprécier l'euvre il faut garder à l'esprit qu'elle fut écrite à l'instigation d'Hérode ( cf. F 135 et les critiques de Josèphe dans A.J. XVI 184-185 = F 102 ) . On a conservé des fragments assez importants des sept premiers livres grâce aux Excerpta réunis sous l'impulsion de Constantin VII Porphyrogénète ( Xe s . ) . Athénée et Flavius -Josèphe avaient encore accès à l'ensemble de l'ouvrage. Pour les événements contemporains de la vie de Nicolas , en particulier pour l'histoire d'Hérode, l'ouvrage a dû servir de source principale ( directe ou

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indirecte ) à Josèphe ( tous les fragments retenus par Jacoby proviennent des Antiquités juives; sur l'utilisation de Nicolas par Josèphe, cf. Jacoby 1 , II A, p. 230 ; 15 G. Hölscher, art. « Josephus » 2, RE IX 2 , 1916 , col. 1943-1949 ( B.J. ) et 1970-1973 ( A.J.] ; Parmentier- Morin 2 , p. 105 sqq . ) . Sur Nicolas et en particulier sur l'Histoire universelle dans son rapport avec l'æuvre de Strabon, on trouvera des remarques intéressantes dans 16 J. Engels , Augusteische Oikumenegeographie und Universaltheorie im Werk Strabons von Amaseia, coll . « Geographica historica » 12, Stuttgart 1999 , p. 261-276. Wacholder 8 , p . 9-13 , indique qu'un texte médiéval hébraïque intitulé Séfer Yosippon (ou Yosiphon , milieu du Xe s . ) - une histoire romancée du peuple juif -, contient de fréquentes références à Nicolas ; mais, comme l'auteur ano nyme s'appuie sur Flavius-Josèphe , il est raisonnable de penser qu'il n'a pas eu une connaissance directe de l'histoire universelle de Nicolas. Cf. 17 1. Wandrey, art. « Jossipon » , NP V , 1998 , col . 1092. 4. Περί του β ου Κα σαρος του Σεβαστού και της αυτού αγωγής (Sur la vie de César Auguste et sa formation , F 125-130 ) . On trouvera l'édition, la traduction et le commentaire des fragments, avec une importante bibliographie, dans 18 J. Malitz , Nikolaos von Damaskus, Leben des Kaisers Augustus , coll . « Texte zur Forschung » 80 , Darmstadt 2003 ( sur la forme du titre, cf. p . 97) . Des fragments importants de ce panégyrique sont conservés dans les Excerpta susmentionnés . Jacoby 1 II C , p. 263 , envisage, comme date de rédaction , la seconde moitié des années 20 av. J.-C. , avant les Histoires ( il est moins probable que l'ouvrage soit paru après la mort d'Auguste comme l'ont soutenu certains commentateurs, cf. Malitz 18 , p. 6-8 ; Meister 12 , col . 921 ) . Il utilise le mémoire d'Auguste sur sa vie (De vita sua en 13 livres , allant jusqu'à sa campagne en Espagne [ 25 av . J.-C. ) ) . On ne sait à quel moment s'arrête la biographie de Nicolas (Malitz 18, p. 5 , propose 31 ou 27 av. J.-C. ). Cf. 19 A. Momigliano , The development ofGreek biography, Cambridge (Mass .) 1971, p. 86 (= Les origines de la biographie en Grèce ancienne , trad. par E. Oudot , Strasbourg 1991, p. 124 ) ; 20 H. Sonnabend , Geschichte der antiken Biographie von Isokrates bis zur Historia Augusta, Stuttgart/Weimar 2002, p. 119-123 . 5. Περί του ιδ ου β ου και της εαυτού αγωγής ( Sur sa propre vie et sa formation ; F 131-139) . Des fragments importants de cette autobiographie , écrite à la troisième personne , sont conservés également dans les Excerpta de Constantin . Il s'agit d'une œuvre de la vieillesse (év mpą F 137 , 2 ) , où le portrait moral procède selon les vertus exposées dans l'éthique aristotélicienne ( cf. E.N. II 7 , 1107 b - 1108 a ; cf. Laqueur 8 , col . 423 ; mais Nicolas a pu s'appuyer aussi sur l'Éthique à Eudème ou sur la Grande morale ; cf. 21 M. Affortunati et B. Scardigli, « Considerazioni sull ' autobiografia di Nicolao di Damasco » , AFLS 7 , 1986 , p . 389-401, surtout p. 397-401 ) ; on notera au passage l'attitude d'ouverture de Nicolas à l'égard de ses esclaves : " après s'être adonné à l'éducation de ses esclaves et leur avoir donné des mœurs conformes aux siennes (duońDelav ) grâce à une vie commune avec eux , il les traitait tout comme des amis" . Cf. 22 G. Misch , Geschichte der Autobiographie , I 1 , 3e éd ., Bern 1949 , p. 321-328 ( l'auteur voit dans l'attitude de Nicolas à l'égard de ses

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esclaves une influence juive [ p. 325 n . 2 ] ) ; Momigliano 19 , p . 91 ( p . 130 de la trad . fr .); Wacholder 9, p . 37-51 ( l'auteur tente d'expliquer l'autobiographie de Nicolas à partir de la tradition juive , ce que conteste , en passant , Momigliano 19, p. 86 n . 21 ( p . 155 n. 21 de la trad . fr. ). On a supposé que Nicolas comptait son autobiographie parmi ses œuvres philosophiques (cf. Malitz 18, p. 4-5 ) . 6. 'EAWV ouvayoyń (Recueil de coutumes ; F 103-124 + T 13 et Drossaart Lulofs 3 , T 3 (cf. Photius , Bibl . 189 , 145 b 35 - 146 a 14 Henry ] ) . Parmentier Morin 2 ajoute aux fragments ( tous attribués explicitement à Nicolas ) rassemblés par Jacoby des extraits d'Athénée et d'Élien . On trouvera aussi une édition critique des fragments dans A. Giannini , Paradoxographorum Graeco rum reliquiae, recognovit, brevi adnotatione critica instruxit, latine edidit A.G. , Milano 1965 , p . 49-163 . Il s'agit d'une collection de meurs étranges de diffé rents peuples dédiée à Hérode “ le roi des Juifs” ( Photius parle de napadówv ŁOWv ouvayoyń , ce qui semble être une description du contenu , plutôt que le titre de l'ouvrage ) ; on a supposé que l'ouvrage reprenait en les complétant les Nóuqua Bapßapixá attribués à Aristote ( cf. Jacoby 1 , II C , p . 256 ; Moraux 5 , p. 448 n . 7 ; Gottschalk 11 , p . 1122 ) . Tous les fragments retenus par Jacoby sont extraits de l'Anthologie de Stobée . Il semble exagéré de dire comme Drossaart Lulofs 3 , p . 16 , que l'ouvrage “ has to a great extant survived " ( 7 pages dans l'édition de Jacoby ) . On pouvait aussi ranger cet ouvrage sous la rubrique " philosophie ”.

B. Philosophie. 1. Hepi toŨ nAVtós ( Sur l'Univers ; Drossaart Lulofs 3 , T 1 , et Moraux 5 , p . 462-464 ). Simplicius (in De cael ., p . 3 , 25-29 ) cite de mémoire cet ouvrage du " péripatéticien Nicolas ” où , dit - il , “ il traite de toutes les choses qui sont dans le monde , espèce par espèce (zat ' ciòn)” . Nicolas y donnait un exposé systéma tique de la physique , embrassant la matière aristotélicienne dispersée dans plu sieurs traités distincts . Il n'y a aucune raison de considérer cet ouvrage comme une partie du grand compendium ( ci - dessous n ° 5 ; cf. Drossaart Lulofs 3 , p . 15 ) , ni de l'identifier au compendium lui-même ( hypothèse envisagée par B. Besnier dans DPHA Suppl., p. 297 ). 2. Nepì 0 € őv ( Sur les dieux ; Drossaart Lulofs 3 , T 4 , et Moraux 5 , p. 451 461 ) . Comme pour le titre précédent, Simplicius est le seul à mentionner cet ouvrage ( in Phys., p . 23 , 14 et 151 , 21 ) . Simplicius mentionne deux opinions hétérodoxes de Nicolas sur la nature du principe dans la philosophie de Xéno phane et dans celle de Diogène d'Apollonie ( > D 139 ) . De ces deux témoi gnages , il serait risqué d'inférer la nature exacte du traité (mythologie ou /et doxographie philosophique sur les principes (Moraux 5 , p . 451 n . 2 ] ) . 3. Tepì tūV Év tolç rpaxtıxOīç xarūv ( Sur le beau moral dans l'action ; Drossaart Lulofs 3 , T 2 ) . Cet ouvrage , qualifié de volumineux ( rođúotixos (nonúotoixoç I. Hadot ]) , est mentionné par Simplicius ( in Epict. XXXVII 15-16 [ I. Hadot) = T 2 , 1 ) où il est mis en relation avec les traités Sur les devoirs (Ilepi xaonxóvrov ) . On ne sait rien du contenu de l'ouvrage . Il s'agit du seul titre traitant de questions relatives à l'éthique ( cf. toutefois l'usage de l'éthique

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aristotélicienne dans la composition de l'autobiographie ; voir aussi 23 F.E. Peters, Aristotle and the Arabs. The Aristotelian tradition in Islam , London 1968 , p . 270 ) . Le témoignage T 2 , 2 ( = D.L. X 4 ) qui mentionne Nicolas, avec d'autres, comme l'auteur d'attaques contre Épicure ne concerne pas nécessai rement cet ouvrage ( voir la notice précédente ). Ce serait d'ailleurs la seule indication chez Nicolas de Damas d'une polémique avec les thèses d'une école rivale . 4. Θεωρία των Αριστοτέλους μετά τα φυσικά ( Étude de la Metaphysique d'Aristote ; Drossaart Lulofs 3 , T 7 ) . Il ne s'agit sans doute pas d'un titre à proprement parler. En effet, dans une scholie figurant à la fin de la Méta physique de Théophraste dans certains manuscrits on lit : Νικόλαος δε εν τη θεωρα των Αριστοτέλους μετά τα φυσικά μνημονεύει αυτού (scil. le traite qui précède la scholie ), Néywv elval Osoppkorov (“ Nicolas mentionne cet ouvrage dans son étude de la Métaphysique d'Aristote, affirmant qu'il est de Théophraste" ) . On ne peut donc pas invoquer cette scholie pour affirmer que nous avons lala premiere attestation sure du titre τα μετά τα φυσικά.. Cf. DPhA Suppl., p. 224 [M. Narcy) et la remarque de 24 J. Barnes, « Roman Aristotle », dans J. Barnes et M. Griffin (édit. ), Philosophia togata , t. II , p. 62 n . 262. La scholie nous apprend aussi que ni Andronicus ( ** A 181 ) ni Hermippe ( » » H 86) n'ont connu (ůyvooðoiv ) ce texte, car (yáp ) ils ne l'ont pas mentionné dans leur catalogue des æuvres de Théophraste. Il est vraisemblable que cette découverte de Nicolas figurait dans la partie traitant de la Méta physique de son gros ouvrage Sur la philosophie d'Aristote. Sur l'interprétation de cette scholie , cf. 25 Théophraste, Métaphysique, texte édité, traduit et annoté par A. Laks et G. W. Most , CUF, Paris 1993 , p. XI -XVIII ; contrairement à Drossaart Lulofs 3, p. 28 et 139, les auteurs n'envisagent pas une découverte par Nicolas de l'opuscule de Théophraste, mais seulement l'attribution à Théophraste d'un texte connu, en tout cas d'Andronicus, et attribué alors à Aristote ; il devait figurer comme introduction à la Métaphysique d’Aristote. Mais est il vraisemblable que cette “ introduction ” soit tombée en dehors de la numérotation des livres de la Métaphysique, si elle était connue d'Andronicus, l'éditeur du traité aristotélicien ? La comparaison avec l'Eisagogè de Porphyre est inadéquate (p. XV n . 21 ] . Drossaart Lulofs 3, p. 28 , pense que Nicolas a pu découvrir le texte dans une bibliothèque orientale.

Par ailleurs , Nicolas connaît le livre petit alpha de la Métaphysique ( Drossaart Lulofs 3 , F21 ) , dont on peut douter qu'il figurât dans l'édition d'Andronicus ( en 13 livres selon le catalogue de Ptolémée ; cf. DPHA I , p. 433, nº 56 ) ; l'a-t- il ( aussi ) découvert ou en devait- il la connaissance aux travaux des membres de l'école d'Andronicus ? Sur cette question , cf. Drossaart Lulofs 3, p. 30, et Gottschalk 11 , p . 1100 et n . 107 . 5. Hepi tñs 'Aplototéhovç dihooo0 aç ( Sur la philosophie d'Aristote ; Drossaart Lulofs 3 , T 5 , 6 , et “ additions and corrections ” , p . 171 ; pour l'appréciation historique et philosophique de l'ouvrage , cf. Moraux 5 , p . 465 . 487 [ p . 465 n . 2 pour les éditions plus anciennes ) ; cf. aussi 26 H.J. Drossaart Lulofs, art. « Niķūlā’ūs » , El t . VIII , 1995 , p . 37-38 ). Dans la tradition grecque , Simplicius est le seul à mentionner ce titre ( in De cael. 399, 1-2 ) , qu'il connaît sans doute seulement par l'intermédiaire d'un commentateur antérieur, Alexandre d'Aphrodise ( > -A 112 ) ou , plus vraisemblablement, Porphyre. Dans la tradition orientale , syriaque et arabe , le titre est fréquemment cité ( avec la

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variante Compendium de la philosophie d'Aristote) et l'ouvrage y a circulé beaucoup plus longtemps (Bar Hebraeus ( 1225-1286 ] en possédait une copie intégrale en syriaque, augmentée de scholies ; cf. Drossaart Lulofs 26, p. 37 , col . B , et 27 H.J. Drossaart Lulofs , « Aristotle, Barhebraeus and Nicolaus » , dans A. Gotthelf (édit . ) , On nature and living things, Bristol 1985 , p . 345-357 ) . Les sources arabes mentionnent une traduction arabe, peut-être partielle, de Ibn Zur'a ( 942-1008 ) ; cf. Drossaart Lulofs 3 , p . 37-39 , et Drossaart Lulofs 27 , p. 356. Nous connaissons assez bien la structure de cette ouvre monumentale grâce à un manuscrit syriaque de la Bibliothèque de l'Université à Cambridge ( ms. Gg. 2. 14 (pas avant ca 1400 Drossaart Lulofs 3 , p . 45 ] ) . Il s'agit d'une version sévèrement abrégée, parfois à la limite de l'intelligible , et mêlée de gloses et de scholies , d'une traduction syriaque complète perdue (cf. le schéma de la transmission du texte dans Drossaart Lulofs 3, p. 38) . Malgré les difficultés d'interprétation , on peut, grâce au travail du savant hollandais Drossaart Lulofs 3 (et Drossaart Lulofs et Poortman 4, p. 17-21 ) dégager la structure suivante :

I. Physique II - III . Métaphysique IV . Du ciel I et II V. Du ciel III - IV + De generatione et corruptione VI . Météorologiques I - III VII . Météorologiques IV VIII . Histoire des animaux IX . Des parties des animaux X. De l'âme XI . Du sens et des sensibles + Du sommeil et de la veille et Des songes XII . De la génération des animaux I - IV XIII . De la génération des animaux V + De la longévité et de la brièveté de la vie

Comme le manuscrit comporte à la fin un feuillet (mutilé ) contenant des extraits du De plantis, il était tentant de considérer que les deux livres du De plantis venaient clore le compendium de philosophie naturelle de Nicolas ( sans exclure cette possibilité, Drossaart Lulofs et Poortman 4 , p. 20-21 , privilégient finalement l'hypothèse d'une édition séparée du De plantis). Seuls les fragments des livres I à V ont été édités et traduits ( Drossaart Lulofs 3 ; le feuillet contenant les extraits du De plantis est édité par le même auteur dans Drossaart Lulofs et Poortman 4 , p. 50-53 , avec photographies ). On remarquera que , dans ce résumé de la philosophie d'Aristote , ni la logique ni l'éthique ne trouvent de place ( cependant, pour l'éthique , cf. Drossaart Lulofs 3, p . 24 et 95-96) . D'après un témoignage d'Averroès (T 11 ) il semble que le De motu animalium devait figurer dans le compendium (Drossaart Lulofs 3 , p. 24 ; 38-39 ) . Il semble que dans la tradition syriaque le texte du compendium ait circulé sous deux formes : une copie intégrale de l'ouvrage tôt soumise à abrègements ;

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des parties séparées (par exemple , livres I - IV ; VIII -IX ou X -XIII , Drossaart Lulofs 3 , p. 39-40 et 14-15 ) . Les trois citations attribuées à Nicolas “ le philo sophe " sur la météorologie dans un manuscrit syriaque de Paris (B.N. Syr. 346 ) et publiées par 28 F. Nau ( « La cosmographie au VIIe siècle chez les Syriens » , ROC 15 , 1910 , p . 225-254, p. 230-232 pour les trois extraits) sont en fait des extraits du commentaire d'Olympiodore ( 2017 ) sur les Météorologiques (cf. Drossaart Lulofs 3 , p . 6 ; 37 ; 41 ; 45 , et Drossaart Lulofs 26 , p. 37 , col . b). Le compendium des Météorologiques comporte en effet, dans le ms de Cambridge, plusieurs scholies empruntées au commentaire d'Olympiodore qui ont été reprises par l'excerpteur du ms de Paris et attribuées à Nicolas (cf. Drossaart Lulofs 3, p. 41 et 45 ) . Malgré le caractère fragmentaire de la transmission du texte , la méthode de Nicolas est encore perceptible. Il suit l'ordre interne des traités aristotéliciens qu'il paraphrase ou résume en rapprochant parfois certains passages séparés dans l'ouvre du Stagirite (par exemple , des passages de la Métaphysique sont intégrés dans le compendium sur la physique, les définitions de Met. A sont insé rées aux endroits appropriés dans les autres livres, de même que les apories du livre B sont reportées aux passages où Aristote en donne la solution ( cf. Gottschalk 11 , p . 1123 ; Drossaart Lulofs 3 , p . 32-34 et T 7 , 4 ; cf. DPHA Suppl., p . 249-250 C. Luna] ) . Le seul péripatéticien qu'il cite est Théophraste ( Drossaart Lulofs 3 , p . 29 ; Id . 26 , p. 37 , col . b ) . Il est possible que Nicolas ait utilisé l'édition d’Andronicus (à Rome , par exemple , si on admet que le compendium a été rédigé après 4 av . J.-C. [Drossaart Lulofs 3 , p . 4-5 ) ) , mais les arguments positifs font défaut ( les inter prètes modernes sont plus ou moins affirmatifs sur cette question : « in general Nicolaus followed the order of Andronicus ' edition » Gottschalk 11 , p. 1123 , et encore p. 1100 ; cf. aussi Wehrli 10 , p. 597 ) . Il faut dire que le détail du corpus aristotélicien édité par Andronicus est mal connu , ce qui laisse beaucoup de place à la spéculation ( cf. Barnes 24 , p . 31-39 ) . On admettra toutefois que l'ordre des traités figurant dans le catalogue de Ptolémée el -Garib conservé dans des sources arabes reflète grosso modo l'état des II vaxes d’Andronicus ( 29 P. Moraux , Les listes anciennes des ouvrages d'Aristote , Louvain 1951 , p. 308 ) . On fera seulement les quelques remarques suivantes. Nicolas connaît Met. a ; mais l'édition de la Métaphysique en 13 livres, selon le catalogue de Ptolémée , pouvait compter Met . a comme un simple appendice à Met . A ( Moraux 29 , p . 308 n . 2 ) . Dans le catalogue de Ptolémée, l'ordre des traités nº 40 à 56 (cf. DPHA t . I , p. 433 ) est proche de celui du compendium , avec quel ques différences dont la plus remarquable est la place de la Métaphysique ( le terme figure dans les rubriques des livres II et III du compendium , mais n'appa raît pas dans le texte même ) ; elle suit immédiatement la physique chez Nicolas, mais figure après l'ensemble des traités de philosophie naturelle dans le cata logue ( notons aussi que les deux traités Historia animalium et De partibus animalium suivent les Météorologiques chez Nicolas , mais viennent plus loin , après De generatione animalium dans le catalogue ) . La logique , qui figure au début des traités acroamatiques dans le catalogue - et on sait qu'Andronicus

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faisait commencer par elle l'étude de la philosophie d'Aristote -, n'apparaît pas dans le compendium de Nicolas . Si elle en a jamais fait partie ( nous n'avons aucun témoignage ), elle figurait sans doute après les traités physiques , comme peut- être l'éthique . Il semble alors que Nicolas faisait commencer l'étude d'Aristote par la physique , contrairement à Andronicus, mais en accord avec le disciple de ce dernier, Boéthos de Sidon ( -B 48 ; cf. Drossaart Lulofs 3 , p . 21 22 ) . D'autre part, on sait que Nicolas divisait la Physique en 4 livres sur les principes et 4 sur le mouvement ( division 4 + 4 , reprise par Porphyre, Olympiodore et, dans un premier temps, Simplicius (in De cael ., p. 226, 19-23 ] ) , tandis qu'Andronicus faisait la division après le livre 5 ( division 5 + 3 , reprise par la plupart des commentateurs dont Alexandre et Simplicius [ in Phys., p . 923 , 3 - 925 , 2, traduit dans Barnes 24 , p . 67-69 ]) ; sur ce point, cf. Drossaart Lulofs 3 , p. 43 n . 16 , et surtout F 15 , commentaire p. 130-131 , et Barnes 24 , p. 34-36 . Enfin, on a vu que Nicolas découvrit la Métaphysique de Théophraste , ignorée par Andronicus en tout cas comme æuvre indépendante attribuée à l'Érésien. Par conséquent , si Nicolas utilise l'édition d'Andronicus, il fait singulièrement preuve d'indépendance et d'esprit critique (cf. Drossaart Lulofs 3 , p. 23 ) . On peut enfin se demander si le fait lui-même, exceptionnel pour l'époque, selon lequel Nicolas n'a recours qu'à Aristote et à Théophraste ne pourrait pas être un indice d'une utilisation des éditions d'Andronicus par le Damascène (pour la liste des ouvrages de Théophraste utilisés par Nicolas dans son compendium , cf. Drossaart Lulofs 3 , p. 29 , à quoi il faut ajouter en tout cas le De causis plantarum , si on admet que le De plantis faisait partie de l'ouvrage ). Comme le notait Drossaart Lulofs (3 , p. 6 ) on peut raisonnablement attendre de la tradition orientale de nouveaux témoignages sur le grand ouvrage de Nicolas. Le savant hollandais lui-même en a publié un en annexe à sa seconde édition (Drossaart Lulofs 3 , p. 171-173 ) . En décrivant précisément la méthode de Nicolas, le même auteur a montré comment repérer dans le Candélabre du Sanctuaire ( Candelabrum Sanctuarii) de Bar Hebraeus des extraits du compen dium ( Drossaart Lulofs 27 , p . 351-356) . Récemment, M. Zonta a engagé une recherche analogue dans le grand ouvrage encyclopédique de Bar Hebraeus, la Crème de la science (Butyrum sapientiae ), qui n'a été édité jusqu'ici que partiel lement (30 M. Zonta ,.« Il Compendio aristotelico di Nicola Damasceno : Nuovi dati dalla tradizione siriaca » , dans Pensiero e istituzioni del mondo classico nelle culture del Vicino Oriente , Atti del Seminario Nazionale di Studio ( Brescia, 15-16 ottobre 1999) , a cura di R.B. Finazzi e A. Valvo, Alessandria 2001, p. 315-339) . L'auteur a extrait 32 passages attribués à Aristote par le philosophe syriaque ; la plupart des passages retenus par l'auteur n'ont pas d'équivalent dans le compendium tel qu'il nous est parvenu ; on signalera les extraits correspondant à des passages conservés du compendium : deux provien nent du Commentaire sur les Météorologiques d'Olympiodore figurant comme scholies dans le ms de Cambridge ( nº 15 ; 16) , deux autres des Météorologiques [nº 8 et 10 ] ; en outre , deux passages sont empruntés au De plantis ( nº 17 ; 18 ) . Pour la tradition arabe , cf. 31 M. Ullmann , Die Medizin im Islam , dans Handbuch der Orientalistik, Abteilung 1 ( Der nahe und der mittlere Osten ) ;

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Ergänzungsband VI , 1 , Leiden 1970 , p. 347 (citations du livre VIII du compen dium dans un traité sur la grossesse et les soins aux nourrissons, le Kitâb Tadbir al- Habālā wa -l-atfāl, du médecin al-Baladi (xºs . ] ) . 6. Résumé de la philosophie d'Aristote Sur l'âme. Le titre est conservé en arabe dans le Fihrist ( Drossaart Lulofs 3 , T 5 n° 4) . Dans son Grand commen taire sur le De anima, Averroès mentionne Nicolas, à côté de Théophraste et de Thémistius, comme un interprète qui est plus littéral qu'Alexandre d'Aphrodise ( sous - entendu dans leur " commentaire " sur le De anima). Dans la tradition grecque, Porphyre mentionnait, dans son ouvrage Sur les puissances de l'âme, une opinion de Nicolas sur la notion de parties de l'âme ” , qu'il ne faut pas comprendre “selon la quantité ” , mais “selon la qualité” (Porphyrii Fragmenta, ed. A. Smith , Stuttgart/Leipzig 1993 , 235 F 88-109 ). Il est vraisemblable que l'ouvrage sur le De anima auquel ces témoignages font référence, explicitement ou implicitement , corresponde à la partie du compendium traitant de la psychologie ( Sur la philosophie d'Aristote, livre X ; cf. Drossaart Lulofs 3, p . 39-40 , et, pour l'interprétation de ce témoignage, Moraux 5 , p . 481-485 ). Cf. aussi 32 H. Gätje, Studien zur Überlieferung der aristotelischen Psychologie im Islam , coll. « Annales Universitatis Saraviensis, philosophische Fakultät » 11 , Heidelberg 1971 , p . 75-76, et 33 G. Movia, Anima e intelletto . Ricerche sulla psicologia peripatetica da Teofrasto a Cratippo, Padova 1968, p. 200-203. 7. Réfutation de ceux qui affirment que l'intellect est identique à l'intelligible ( Drossaart Lulofs 3 , T 5 , n° 5 c [ Ibn al -Qifți ) ; nº 6 [Bar Hebraeus, qui attribue par erreur l'ouvrage à un Nicolas de Laodicée ( 2 ° N 35 ) , contemporain de l'empereur Julien ] ) . Il s'agit d'un ouvrage polémique , sur une question très discutée au sein du Péripatos, dont nous ne connaissons que le titre , grâce aux sources orientales. Voir la discussion dans Moraux 5 , p. 485-487 , et Movia 33, p. 203 . 8. Iepi putõv (Sur les plantes; Drossaart Lulofs 3 , T 12 ; cf. Moraux 5, p. 487-514 ) . On trouvera dans Drossaart Lulofs et Poortman 4 toutes les versions conservées ( partielles ou complètes ) du De plantis attribué à Nicolas de Damas ( textes en syriaque, arabe , hébreu , latin et grec ). Le texte « est surchargé de gloses et de digressions énigmatiques » (Drossaart Lulofs 26 , col . 37 B ). L'ouvrage original grec , en deux livres, est perdu. Le texte nous est parvenu grâce à la seule tradition orientale. En simplifiant quelque peu les données, on possède : ( 1 ) la traduction arabe de Isḥāq ibn Hunayn (ca 900 ), faite sur une traduction syriaque du grec, aujourd'hui perdue (seules des citations du livre I chez Bar Hebraeus et le dernier feuillet du manuscrit de Cambridge susmen tionné nous conservent quelque chose de cette traduction ) ; ( 2 ) la traduction hébraïque de Qalonymos ben Qalonymos ( 1314) faite sur la version arabe ; ( 3 ) la traduction latine d'Alfred de Sareshel (ca 1200 ) faite aussi sur l'arabe ( son titre varie : De vegetabilibus; De vegetabilibus et arboribus; De vegetabilibus et plantis ) ; ( 4 ) une traduction grecque de la version latine (ca 1300 ) attribuée parfois, sans doute à tort, à Maxime Planude (Drossaart Lulofs et Poortman 4 , p. 566-567 : Drossaart Lulofs propose le nom d'un autre Byzantin , contemporain de Maxime Planude, Manuel (Maxime) Holobolos ).

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Selon Drossaart Lulofs, De plantis est essentiellement une compilation faite par le Damascène à partir du lepi purūv d'Aristote (déjà disparu - s'il a jamais existé - à l'époque d'Alexandre d’Aphrodise (in De sens . 87 , 11-12 ] ) et des deux traités de Théophraste sur les plantes (De causis plantarum et surtout Historia plantarum ). Le texte comporte aussi de nombreuses gloses et digres sions. Cf. aussi Gätje 32, p. 74-75. Cf. DPHA Suppl., p . 499-505 H. Hugonnard Roche et p. 489-490 J. Bertier.

C. Spuria . 1. Introduction à l'éthique. Dans un manuscrit arabe, daté de 1232 , découvert à Fez , le texte anonyme ( une introduction à l'étude de l'éthique ) est précédé d'une notice du copiste qui propose Nicolas (sans l'ethnique ) comme l'auteur de l'ouvrage. ( Voir notice suivante . ) Mais , d'après les noms propres cités , le traité doit être postérieur à Plotin ( Drossaart Lulofs 3 , p . 13-14 ; 34 M.C. Lyons , « A Greek ethical treatise » , Oriens 13-14, 1961 , p . 35-57 ; 35 A. Kenny , The aristotelian ethics. A study of the relationship between the Eudemian and Nico machean ethics of Aristotle, Oxford 1978 , p . 22-23 ) . Cf. DPhA Suppl ., p . 193 194 M. Zonta. On notera que , dans un ouvrage partiellement conservé attribué à Ibn al -Matrān ( m . en 1191 ) , le Jardin des médecins, l'auteur cite l'Introduction à l'Éthique de Nicolas de Damas ( cf. Peters 23 , p . 270 ) . D'autre part, le Com pendium de l'Éthique à Nicomaque connu sous le titre Summa Alexandrinorum (cf. DPhA Suppl., p. 197-198 M. Zonta, qui situe la rédaction de l'original grec à Alexandrie au VIe siècle) , traduit de l'arabe en latin par Hermann l'Allemand en 1243 ou 1244, devrait être attribué à Nicolas selon les derniers travaux de feu D. M. Dunlop. Malheureusement, la démonstration n'est pas publiée et l'on doit se contenter d'une brève notice de 36 H. Daiber, « Salient trends of the Arabic Aristotle » , dans G. Endress and R. Kruk (édit . ) , The ancient tradition in Christian and Islamic Hellenism . Studies on the transmission of Greek philology and sciences, dedicated to H.J. Drossaart Lulofs on his 90th birthday, Leiden 1997, p. 29-41 , p. 33-34 ( où il faut corriger summaria en summa ). 2. Nicolai Peripatetici Questiones . Il s'agit d'un faux qu'Albert le Grand attribuait à Michel Scot ( Drossaart Lulofs 3, p. 14 et 41-42) . Cf. 37 P. Schulthess et R. Imbach (édit. ) , Die Philosophie im lateinischen Mittelalter. Ein Handbuch mit einem bio -bibliographischen Repertorium , Düsseldorf/Zürich 1996, p . 30 , s . v. “ Nicolaus Peripateticus ( Pseudo ) ”. Corriger le nom du Aauac (D 2a) mentionné par Simplicius ( in Phys. 924 , 12-14 ) comme auteur d'une Vie d'Eudoxe, en Aauaoxnvós, selon l'hypothèse de 38 O. Gigon (Vita Aristotelis Marciana , herausgegeben und kommentiert von 0. G. , coll . « Kleine Texte für Vorlesungen und Übungen » 181 Berlin , 1962 , p. 29) est erroné ( la notice du DPhA ne mentionne même pas cette hypothèse ). Cf. Drossaart Lulofs 3 , p. 131 . On se gardera par ailleurs de prendre au sérieux l'existence des commentaires mentionnés comme conservés en grec dans 39 A. Badawi , La transmission de la philosophie grecque au monde arabe, 2e éd ., Paris 1987 , p. 123 . JEAN -PIERRE SCHNEIDER.

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NICOLAS « DE LAODICÉE »

46 NICOLAS « DE LAODICÉE » (PSEUDO-)

N 46

IV ?

On désigne généralement sous ce nom l'auteur anonyme d'un opuscule de morale, originairement écrit, selon toutes probabilités, en grec et dont il ne reste qu'une version arabe incomplète et, apparemment, non dépourvue d'inexacti tudes. Cette version arabe a été découverte et étudiée pour la première fois par 1 M.C. Lyons , « A Greek Ethical Treatise » , Oriens 13-14 , 1960-1961, p. 35-57. L'unique copie aujourd'hui connue de ce texte a été retrouvée par Lyons dans un manuscrit sur parchemin de 23 folios, privé de signature, conservé dans la bibliothèque de la mosquée Qarawiyin de Fez ; la partie centrale du manuscrit est perdue : elle comprend maintenant à la place 19 folios provenant d'un autre manuscrit et contenant une partie du livre VII de la version arabe, faite par Ishaq ibn Hunayn , de l'Éthique à Nicomaque d'Aristote ( sur cette version , voir M. Zonta , art. « Aristote de Stagire. Les Éthiques. Tradition syriaque et arabe » , DPA Suppl., 2003, p . 193-194 ) . D'après la reconstruction de 2 D. M. Dunlop , « The Nicomachean Ethics in Arabic, Books I - VI » , Oriens 15 , 1962 , p. 18-19 , le manuscrit constituerait la section finale d'un codex plus ample , par la suite divisé en trois parties, qui contenait le texte complet de cette version arabe de l'Éthique à Nicomaque et qui fut copié vers le 18 juin 1232 ( 27 ša'bān 629 de l'hégire ). Cette date constitue donc un terminus ante quem solide pour la version arabe de l'opuscule ; d'autres éléments de datation , tirés de l'étude de la trans mission de l'ouvrage ( voir infra ), suggèrent par ailleurs que la version aurait été produite avant la fin du Xe siècle . L'unique indication dont nous disposions concernant l'auteur de l'opuscule est une brève annotation , peut- être rédigée par le même copiste, placée en épigraphe au texte du manuscrit de Fez : « Traité sur l'introduction à l'éthique (en arabe : al-madhal ilā 'ilm al-ahlāq, qui pourrait être la traduction d'un titre grec MpotpentIXÒÇ Énù tà noixá) , dont l'auteur n'est pas identifié. Je pense qu'il est l'æuvre de Nicolas ( les italiques sont de nous ) , et je l'ai ajouté ( à l’Éthique à Nicomaque ) à titre de résumé de philosophie ( muhtașara fi l falsafa ) » . Dans la tradition arabe médiévale le nom de « Nicolas » (Niqūlā'ūs) désigne presque toujours Nicolas de Damas (= N 45 ) , mais l'attribution de l'ouvrage à cet auteur qui a vécu au début du premier siècle apr. J.-C. n'est pas envisageable, du fait que le nom de Plotin est mentionné explicitement dans le traité ( voir infra ). C'est pourquoi Lyons 1 , p . 48 , a suggéré d'attribuer l'opuscule à un autre Nicolas, un certain « Nicolas de Laodicée » , inconnu de la tradition grecque et mentionné uniquement par l'historien de langue syro - arabe du XIII ° siècle Grégoire (Jean ) Bar - Hebraeus ( cf. Griġūriyūs Abi l-Farağ Ahrūn al- Tabib al - Malați al -ma'rūf bi - Ibn al- ' Ibri, Tārih muhtașar al-duwal, ed . Anțūn Șāliḥāni , Bayrūt 1403/1983 , p. 139-140) ; l'attribution proposée par Lyons a été retenue comme possible aussi bien par 3 H. J. Drossaart Lulofs, Nicolaus Damascenus On the Philosophy of Aristotle, coll . « Philosophia Antiqua » 13 , Leiden 1965 , deuxième édition augmentée 1969, p . 13-14 , que par 4 F.E. Peters, Aristoteles Arabus. The Oriental translations and commentaries on the Aristo telian Corpus, coll . « Monographs on Mediterranean Antiquity » 2 , Leiden 1968,

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NICOLAS « DE LAODICÉE »

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p. 53. En réalité – comme on peut le voir en se reportant au texte de Drossaart Lulofs 3, p. 9-10 - en présentant ses notices sur la vie et les æuvres de « Nicolas de Laodicée » , qu'il situe à l'époque de l'empereur Julien ( 361-363 ) , Bar Hebraeus ne fait que lui attribuer les æuvres que la tradition arabe antérieure (al Nadim , Ibn al - Qifti) avait inscrites sous le nom de Nicolas de Damas, y compris sa provenance présumée de Laodicée , attestée uniquement par un auteur tardif , le médecin arabe Ibn Buțlān ( m . 1068 ) . Il ne semble donc pas hasardeux de supposer que ce « Nicolas de Laodicée » n'a jamais existé – une hypothèse qui , une fois acceptée , fait retomber dans l'anonymat l'auteur de l'opuscule en question qui aurait été attribué à Nicolas (de Damas) par un copiste uniquement pour valoriser l'auteur aux yeux des lecteurs . Dans cette hypothèse , on pourrait accepter la suggestion de 5 ‘ A. Badawi (édit . ) , Arisțūtālis, al- Ahlāq, targamat Isḥāq ibn Hunayn , haqqaqahu ... ' A.B. , Kuwayt 1979 , p . 392 , qui tifie l'opuscule avec un « traité inconnu (ou : anonyme) d'éthique » (maqāla mağhūla fi l -ahlāq ), qu'Ibn al - Qifti mentionne parmi les traductions du syriaque en arabe effectuées par le philosophe arabe chrétien Abū ' Ali İsă Ibn Zur'a ( 943-1008 ). Les seuls éléments sûrs permettant de définir la date de composition et l'origine de l'ouvrage peuvent être tirés de l'examen de son contenu , que l'on peut étudier ou bien à travers l'analyse conduite par Lyons 1 , p . 36-37 , 41-57 , ou bien dans l'unique édition complète – mais non critique – du texte qu’a publiée Badawi 5 , p . 394-431 (édition précédée , aux p . 391-393 , par une brève intro duction sur la question de l'auteur et sur le contenu de l'ouvrage ) . L'opuscule commence par une dédicace à la fille de l'auteur, à laquelle il est destiné en tant qu'instrument pédagogique pour l'enseignement de la morale . Selon l'auteur, l'éthique – ou bien la science assurant à l'homme le contrôle de soi -même étudie avant tout la fin de l'homme vertueux, et expose en second lieu la façon d'atteindre cette fin . La fin de l'homme est le bonheur, qui consiste , selon Platon , dans l'imitation de Dieu ( cf. Platon , Théétète 176 b) : l'âme humaine en effet, qui est selon Aristote liée au corps, est pourtant également, selon Platon , immortelle et divine . Les actions qui amènent l'homme au bonheur sont les vertus, qui ont leur siège dans les parties rationnelle et irascible de l'âme ; la vertu est le juste milieu entre deux vices opposés - selon la définition aristo télicienne - et les vertus principales – selon la classification platonicienne – sont au nombre de quatre : sagesse, tempérance, courage et justice , mais elles se prê tent à des subdivisions ultérieures. L'exposé de ces quatre vertus – interrompu , dans le manuscrit, par de larges et fréquentes lacunes - est suivi par celui des ádiápopa et des vices. Après l'examen d'une série de questions morales ( si la vertu est unique ou multiple , d'où vient la connaissance de la vertu , si la vertu est différente en l'homme , en la femme et chez les dieux , si les vertus sont indépendantes ou non les unes des autres ), l'ouvrage s'achève avec la division des vertus proposée par Plotin . Comme le remarque Lyons 1 , p. 56, l'ouvrage manifeste une tendance évidente à l'harmonisation entre Platon et Aristote ; en outre , on y trouve de nombreuses références au stoïcisme, également notées par Badawi 5, p. 393. De façon générale, le texte contient divers renvois, qui ne sont pas toujours identifiables ( cf. Lyons 1 , p. 43 et 45 ), à des auteurs de la littérature

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NICOLAS « DE LAODICÉE »

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grecque et latine ( les références sont faites à la page et à la ligne de l'édition contenue dans Badawi 5) : Homère ( allusion à Odyss. IX 525 ; cf. p. 427 , li . 6-7) , Thucydide ( II 49 , 8 ; cf. p . 426 , li . 14-16 ) , Démosthène (dont est cité le « discours à Philippe » , en arabe qawluhū li -Filifūs ; il pourrait s'agir en réalité d'une allusion , non littérale , à l’Ad Philippi Epistulam 14 : cf. p . 424, li . 4-6 ), Marcus (Marc Aurèle ?) (cf. p. 414 , li . 12-14 ) , Plotin ( il est fait référence , sans citation littérale, au thème traité en Enn . I 2 [ 19 ] , 1-7 : cf. p . 428 , li . 7-15 ) , Pythagore ( cf. p. 425 , li . 3-4 ), Ératosthène ( PE 52 ] (mais Badawi écrit en arabe 'r'tsw't'ns : il s'agit peut- être d'une corruption du nom d'Antisthène " [ A 211 ) , dont Diogène Laërce VI 3 et 10 , p . 376 , 16-18 et 381 , 1-5 Marcovich , rapporte deux affirmations similaires à propos de la femme) (cf. p. 423 , li . 16-424 , li . 2) ; il faut naturellement ajouter les références, plus ou moins littérales, à Platon et Aristote identifiées par Lyons 1 , p . 42-45. On peut remarquer çà et là d'autres références implicites , mais d'une certaine façon identifiables, à des sources grecques : par exemple l'allusion au meurtre du fils de Crésus par Adraste le Phrygien ( p . 419 , li . 1-3 ) semble rappeler directement le récit correspondant chez Hérodote ( cf. Hist. I 43 3 ) ; une anecdote sur Cratès (de Thèbes ) ( P + C 205 ] (p. 414 , li . 8-10) pourrait être tirée de la Souda, vol . III , p. 182 , 18-19.21-22 Adler ; une autre anecdote rapportée à un certain Dywswsws (peut-être une corruption du nom Fwsydwnyws, “ Posidonius” : cf. p . 413 , li . 19 21 ) pourrait provenir de Diogène Laërce IX 68 (p . 679 , 17 - 680, 3 Marcovich ), où l'anecdote est rapportée à Pyrrhon , mais où est mentionné le nom de Posido nius (d'Apamée ) comme source du récit (et l'auteur ou plus probablement le traducteur arabe aurait pu changer le personnage concerné par cet épisode avec ce dernier ). Enfin, il faut relever les étymologies fantaisistes de opovnouç comme provenant de pépwv ovnov ( cf. p . 402, li . 16-18 ) , attestée dans l'Etymo logicum magnum ( p. 800 , 44 Gaisford ), et celle d'åvope a comme dérivée de ůvoponpwpoç, « avec un visage humain » (cf. p . 403 , li . 4-5 ) , cette dernière apparemment absente des sources grecques connues . La citation explicite des Ennéades de Plotin , déjà signalée , amène à dater l'opuscule après le III ° siècle de notre ère. Sur ce point, on ne peut exclure totalement la possibilité que l'auteur anonyme de l'ouvrage - qui , ainsi que le suggère Lyons 1 , p . 57 , semble avoir été un vulgarisateur philosophique du Ive siècle – soit à identifier avec un personnage déjà connu , ou bien même avec le philosophe et rhéteur Thémistius ( 317-388 ) . A l'appui de cette hypothèse d'une attribution éventuelle à Thémistius , pourrait jouer le fait qu'au début de son petit traité De virtute, conservé seulement dans une version syriaque ( cf. p. 17 , 6-9 Sachau ; cf. également la traduction latine de R. Mach dans H. Schenkl [édit . ) , Themistii Orationes quae supersunt, recensuit H. S. , opus consummaverunt G. Downey et A.F. Norman , vol . III , Leipzig 1974 , p. 11 , 7-9 ) , Thémistius semble faire référence à un de ses ouvrages antérieurs de contenu éthique , appa remment sur le même sujet que le De virtute et inspiré par la pensée de Platon et d'Aristote ; d'autre part, certains des auteurs cités dans l'ouvrage (Cratès, Marc Aurèle , Pythagore, mais non pas par exemple Plotin ou Thucydide ) sont fréquemment mentionnés dans les ouvrages conservés de Thémistius (par exem

N 47

NICOLAS DE MYRE

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ple, une référence à l'histoire d’Adraste, déjà citée, se retrouve, dans des termes similaires, chez Thémistius, Orat. I 16 a) . Mais évidemment de tels rappro chements ne permettent pas d'identifier de façon certaine l'auteur de l'ouvrage avec Thémistius. L'ouvrage a certainement été connu dans la littérature philosophique arabe médiévale , comme le montrent aussi bien les rapports probables, signalés par Lyons 1 , p. 51-52 , entre la subdivision des quatre vertus ici présente et la subdivision analogue, mais non identique, que l'on trouve dans le Tahdib al ahlāq, La correction des mæurs, célèbre écrit éthique de l'auteur persan Ahmad (Ibn) Miskawayh (m . 1030) , que l'influence manifeste, bien que non reconnue, exercée sur l'auteur d'un traité d'éthique attribué à Avicenne (980-1037 ) et conservé dans deux manuscrits d'Istanbul , Bibliothèque de l'Université 1458 , ff. 1851-186 ', et Suleymaniyye, Pertev Paša 617 , ff. 235-240 ', comme l'a récemment signalé 6 B. Karliga, « Un nouveau traité d'éthique d'Ibn Sina inconnu jusqu'à nos jours » , dans J. Janssens et D. De Smet ( édit. ), Avicenna and his Heritage. Acts of the International Colloquium , Leuven - Louvain -la -Neuve, September 8 - September 11 , 1999, coll . « Ancient and Medieval Philosophy » , s . 1 , vol . 28 , Leuven 2002, p. 30-32. MAURO ZONTA .

V

47 NICOLAS DE MYRE RE 21 PLRE II : 2

Ce Nicolas n'est pas à proprement parler un philosophe , mais un sophiste. D'après les notices de la Souda (N 394-395 , t. III , p . 469 , 1-8 Adler) , il est né à Myre en Lycie et sa vie a atteint son acmè sous l'empereur Léon Ier et s'est prolongée sous les règnes de Zénon et d'Anastase. Il est donc mort après 491. Sa naissance semble se placer vers 410, puisqu'il a accueilli , en tant qu'étudiant à Athènes, Proclus, Lycien comme lui , à son arrivée au Pirée venant d'Alexandrie vers 430 ( cf. Marinus, Proclus § 10 , 16-23 ) . Dans le récit de Marinus ( > * M 42) , c'est ce Nicolas qui semble avoir conduit Proclus à la jeune école néoplato nicienne d'Athènes. Il était en effet familier de Plutarque d'Athènes ( Souda N 394 ) et élève du sophiste Lacharès ( » L 3 ] ( Souda N 395 ) , lui - même lié à l'école néoplatonicienne (Marinus, § 11,5-9 et 19 et Saffrey - Segonds, n . 13 , p. 99-100 ). Il enseigna la rhétorique à Constantinople. Il est l'auteur d'une Téxvn ontopixeń ( perdue ), de Mɛmétal (perdues), et de lipoyouváquata ( conservés et édités par J. Felten, Leipzig 1913 ) . On a relevé depuis longtemps des traces très claires d'influence néoplatonicienne dans ce dernier ouvrage , cf. W. Stegemann, art. « Nicolaos » 21 , RE XVII 1 , 1936 , col . 424-457 , en particulier col . 425,52 426, 10. À cause de son nom, on a quelquefois soutenu qu'il était chrétien (RE, col . 425 , 37 sqq . ) . Cela est une erreur, car il n'y a pas la moindre trace de christianisme dans son æuvre, et l'on voit qu'il était en relations intimes avec le milieu païen d'Athènes . D'autre part le culte de S. Nicolas, évêque de Myre, est bien postérieur ( milieu du vie siècle, voir Chr. Markschies, art. « Nikolaos 4, Heiliger » , NP VIII , 2000 , col . 922 ) . HENRI DOMINIQUE SAFFREY.

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N 48

NICOLOCHOS DE RHODES

48 NICOLOCHOS DE RHODES RE 2

F III - DII ?

Philosophe sceptique de tradition pyrrhonienne, mentionné dans la section IX 115-116 qui termine la Vie de Timon dans Diogène Laërce . Sur cette section , cf. quelques indications d'ensemble dans les notices consacrées à Dioscourides de Chypre ( 2D 203 ) et à Euboulos d'Alexandrie (

E 75 ).

En IX 115 , Diogène Laërce s'appuie sur Hippobote ( fr. 22 Gigante ) et Sotion ( fr. 33 Wehrli) pour dire que Nicolochos de Rhodes a été l'un des "auditeurs" ( dinxovoav ) de Timon , ainsi que trois autres philosophes : Dioscouridès de Chypre, Euphranor de Séleucie ( E 130) et Praylus de Troade ( c'est par l'effet d'une construction grammaticale erronée que ces quatre personnages sont présentés comme des disciples de Ptolémée de Cyrène par G. Reale, Storia della filosofia antica, Milano 1980 , t . V, p. 452 - erreur corrigée tacitement p . 529 ). Diogène Laërce semble opposer ce témoignage à celui de Ménodote de Nicomédie ( > M 133 ) , cité immédiatement auparavant, d'après lequel Timon n'aurait eu aucun “ successeur” ( dládoxos ). Mais il n'y a pas nécessairement de contradiction : Timon peut avoir eu des " auditeurs” sans avoir été pour autant un chef d'école, et donc sans avoir transmis cette école à un “ successeur ” officiel. Cf. K. von Fritz, art. « Nikolochos » 2 , RE XVII 1 , 1936, col . 458 .

JACQUES BRUNSCHWIG . 49 NICOMACHUS FLAVIANUS ( VIRIUS ) RE 14 PLREI : 15

ca 334-394

Sénateur romain , Préfet du prétoire d'Italie en 382-383 , puis en 389-394 . Pour les détails de sa carrière politique mouvementée , on se reportera aux études spécialisées, notamment 1 0. Seeck, art. « Flavianus » 14 , RE VI 1 , 1909, col . 2506-2511 ; 2 W. Kuhoff, art. « Virius Nicomachus Flavianus » , BBK XII , 1997 , col . 1442-1456 (riche bibliographie ) ; 3 T. Honoré , Virius Nicomachus Flavianus, coll . « Xenia » 23 , Konstanz 1989 , 48 p. ; 4 J. Flamant, Macrobe et le Néo - Platonisme latin, à la fin du IVe siècle, coll . EPRO 58 , Leiden 1977 , p. 45 58 ; 5 0. Seeck (édit . ) , Symmaque, Opera, coll . MGH , Auctores antiquissimi, t . VI 1 , 1883 , p. CXII-CXIX ( sur la vie de Nicomaque Flavien ) ; 6 Ch.W. Hedrick , History and silence : purge and rehabilitation of memory in late antiquity, Austin ( Tex .) 2000 , XXVI - 338 p .; 7 A. Coşkun , « Die Karriere des Virius Nicomachus Flavianus: Mit Exkursen zu den praefecti praetorio Italiae, Africae et Illyrici 388-95 » , Athenaeum 92 , 2004, p. 467-491. Son nom est lié à l'opposition sénatoriale au christianisme à la fin du IVe siècle à Rome. A ce titre, il serait visé par l'ouvrage anonyme Carmen adversus paganos . Voir 8 D. Romano , L'ultimo pagano : Flaviano nello specchio del Carmen contra paganos, coll . « Letteratura classica » 20 , Palermo 1998, 58 p . Il se donna la mort en 394 lors de la chute de l'usurpateur Eugène qu'il avait soutenu contre Théodose. « Il est le champion du paganisme, en quelque sorte son " combattant suprême ” : celui qui ira jusqu'à la trahison, jusqu'à l'insurrec tion armée et finalement jusqu'à la mort, pour défendre une cause perdue >> ( Flamant 4, p. 45 ) .

N 49

NICOMACHUS FLAVIANUS

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Il était le père de Nicomachus Flavianus ( RE 15 , PLRE I : 16 ) , qui obtint au cours des mêmes événements la clémence de l'empereur en se convertissant au christianisme (voir Augustin, Cité de Dieu V 26, 1 ). Sur le contexte historique , voir 9 R. Klein , Der Streit um den Victoria - Altar. Die dritte Relatio des Symmachus und die Briefe 17, 18 und 57 des Mailänder Bischofs Ambrosius. Einführung, Text, Übers. & Erl . , coll . « Texte & Forsch . » 7 , Darmstadt 1972 , VIII- 198 p. Il écrivit des Annales ( CIL VI 1783 = ILS 2948) , aujourd'hui perdues, dédiées à Théodose ler et s'étendant apparemment du premier siècle après J.-C. à la mort de l'usurpateur Procope ( 366 ) , selon 10 O. Seeck , « Zur Chronologie und Quellenkritik des Ammianus Marcellinus » , Hermes 41 , 1906 , p. 494 , ou celle de Gratien ( 383) , selon 11 M. Festy, « Le début et la fin des Annales de Nicomaque Flavien » , Historia 46, 1997 , p . 465-478 . Les historiens ont cru en retrouver l'influence chez plusieurs auteurs , dont Ammien Marcellin , Eunape, Jérôme et l'Epitome de Caesaribus. 12 J. Schlumberger, Die Epitome de Caesaribus. Untersuchungen zur heidnischen Geschichtsschreibung des 4. Jahrhunderts n . Chr., coll . « Vestigia » 18 , München 1974, XV-275 p. ; 13T. D. Barnes, « The “ Epitome de Caesaribus ” and its sources » , CPh 71 , 1976, p. 258-268 ; 14 B. H. Warmington, « Ammianus Marcellinus and the lies of Metrodorus » , CQ 31 , 1981 , p. 467 , considère que l'hypothèse d'une influence de Nicomachus Flavianus sur Ammien ou Eunape doit être rejetée ; 15 J. Schlumberger, « Die verlorenen Annalen des Nicomachus Flavianus. Ein Werk über Geschichte der römischen Republik oder Kaiserzeit » , dans J. Straub (édit. ), Bonner Historia Augusta -Colloquium 1982/1983, coll . « Antiquitas R. 4 » 17 , Bonn 1985 , p. 305-329 . 16 Fr. Paschoud, « Valentinien travesti ou De la malignité d'Ammien » , dans J. Den Boeft, D. Den Hengst et H.C. Teitler (édit.), Cognitio gestorum : the historiographic art of Ammianus Marcellinus, coll. « Koninklijke Nederlandse Akademie van Wetenschappen Verhandelingen Afd. Letterkunde » N. R. 148, Amsterdam 1992 , p . 67-84 ; 17 B. Bleckmann, « Bemerkungen zu den Annales des Nicomachus Flavianus » , Historia 44 , 1995 , p. 83-99 ; 18 S. Ratti , « Jérôme et Nicomaque Flavien : sur les sources de la Chronique pour les années 357-364 » , Historia 46, 1997 , p. 479-508 . Les prétentions philosophiques de Flavianus sont attestées par son ami Symmaque ( Epist. II 61 ) qui , en lui recommandant Sérapammon , un étranger qui portait l'habit philosophique ( philosophis congruentem ornatum ), s'en remet à son jugement d'homme revendiquant la connaissance de ces choses (qui talium rerum profitemini notionem ) . Comme le philosophe Eustathe ( E 159) , il est l'un des convives du banquet des Saturnales de Macrobe (ouvrage écrit après 394) . Il annonce en I 24 , 25 qu'il accueillera les invités dans sa maison le lendemain . Les entretiens de cette deuxième journée sont rapportés au livre III (malheureusement lacunaire ). « Macrobe l'a donc placé sur un pied d'égalité avec Prétextat et Symmaque ; la fonction d’hôte assure aux trois chefs du paganisme un prestige exceptionnel » ( Flamant 4, p . 45 ) . D'après Sidoine Apollinaire, Epist. VIII 3 , 1 , Nicomachus Flavianus traduisit en latin la Vie d'Apollonius de Tyane ( 2 - A 284 ) “ le Pythagoricien " de Philostrate , « qui , au cours des temps , était devenue une machine de guerre contre le christianisme » ( 19 P. de Labriolle , La réaction païenne. Étude sur la polémique antichrétienne du 1er au VIe siècle, 11 e éd . , Paris 1948 , p . 352 ) . On a contesté que Flavianus ait traduit l'ouvrage et on a parlé d'une simple transcription en grec du texte de Philostrate . Voir 20 A. Loyen , Sidoine Apollinaire, t. III : Lettres (Livres

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NICOMACHUS FLAVIANUS

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VI -IX ), CUF, Paris 1970, p. 196-197. A la demande de son ami Léon (2L 34 ), Sidoine ( Epist. VIII 3 ) a fait une traduction nouvelle de l'ouvrage ( translatio - Labriolle 19, p. 457 , parle d'une révision ), en se fondant non pas sur le texte de Flavianus, mais sur celui de Tascius Victorianus (PLRE II : 2 ) qui lui-même ne dépendait pas de Philostrate, mais de Flavianus ... En tout cela, il n'est sans doute pas question de copie de manuscrits ( tâche matérielle qu'un sénateur pouvait confier à un serviteur), mais bien d'adaptations diverses pour des publics particuliers. Apollonius était depuis longtemps un héros de l'hellénisme et il avait été utilisé par le gouverneur Hiéroclès (» H 125 ) et peut -être déjà par Porphyre comme un modèle de sage. Mais chez Sidoine , dans la suite de la lettre, le pythagoricien est présenté comme un modèle philosophique tout à fait acceptable pour le lecteur chrétien : si Léon voyage avec le citoyen de Tyane « tantôt vers le Caucase et l'Indus, tantôt chez les gymnosophistes d'Éthio pie ou les brahmanes de l'Inde » , il découvrira un homme semblable à lui sur un très grand nombre de points, « soit dit avec toute la déférence due à la foi catholique » ( trad . Loyen ). On peut imaginer que la version d'Apollinaire donnait de la sorte un portrait philosophique d'Apollonius dépouillé de tout trait susceptible de heurter les chrétiens. Flavianus aurait également été l'auteur d'un De vestigiis ou De dogmate (ou dogmatibus) philosophorum , selon Jean de Salisbury ( né vers 1115-1120 ) , Poli craticus II 26 et VIII 11 ( PL 199, col . 460 B et 755 A) . Voir 21 P. Courcelle, Les Lettres grecques en Occident de Macrobe à Cassiodore, Paris 1948, p. 6 n. 6. Voir l'édition de 22 C.C. J. Webb (édit. ), Ioannis Saresberiensis Episcopi Carnotensis Policratici sive De Nugis Curialium et vestigiis Philosophorum libri VIII, recognovit et prolegomenis, apparatu critico , commentario , indicibus instruxit C.C.I. W. , 2 vol ., Oxford 1909, L-368 p. et VIII -511 p. Les livres I-IV ont été édités par 23 K. S. B. Keats - Rohan (édit.), loannes Saresberiensis, Policraticus I- IV , coll . CCCM 98, Turnhout 1993 , LVI - 275 p.; 24 P. I. von Moos, Geschichte als Topik. Das rhetorische Exemplum von der Antike zur Neuzeit und die "historiae" im “Policraticus” Johanns von Salisbury, Hildesheim 1988, p. 211 . RICHARD GOULET .

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FI

Philosophe néopythagoricien , qui constitue une source importante pour la connaissance de l'histoire du pythagorisme antique. Études d'orientation . 1 F. Kliem, art. « Nikomachos von Gerasa » 21 , RE XVII 1 , 1936 , col . 463-464 ( ne traite que de l'Introduction et brièvement des Theologoumena, omettant toute référence à l'Encheiridion et à la Vie de Pythagore); 2 Th.L. Heath , A History of Greek Mathematics, t. I, Oxford 1921 , p . 97-112 ; 3 L. Tarán , art. « Nicomachus of Gerasa » , DSB X, 1981 , p. 112-114 ; 4 B. L. Van Der Waerden , Die Pythagoreer. Religiöse Bruderschaft und Schule der Wissenschaft, Zürich /München 1979 , p. 49-63 ( sur la Vie de Pythagore de Nicomaque) et 294-320 ; 5 J. Dillon , The Middle Platonists, p . 352-361 ; 6 D.J. O'Meara, Pythagoras Revived. Mathematics and Philosophy in Late Antiquity, Oxford 1989 , p. 14-23 , Bibliographie. 7 L. Deitz , « Bibliographie du platonisme impérial antérieur à Plotin : 1926-1986 » , ANRW II 36, 1 , Berlin 1987 , p. 173-174 . Cf. 7 J. Guillaumin , « Longueur, largeur et profondeur dans les diagrammes de Nicomaque ( Introduction arithmétique) » , REA 92 , 1990 , p . 265-271 ; 8 A. Meriani, « Un esperimento " di Pitagora ( Nicom . Harm . ench . 6 , p. 245 248 Jan) » , dans B. Gentili et F. Perusino (édit. ) , Mousike. Metrica ritmica e musica greca in memoria di G. Comotti, coll . « Studi di metrica classica » 11 ,

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Pisa /Roma 1995 , p . 77-92 ; 9 N. Thurn , « Die siebenseitige Lyra » , Mnemosyne 51 , 1998 , p . 411-434 ( sur Nicom . Harm . 274 ) ; 10 G. Staab, Pythagoras in der Spätantike. Studien zu De Vita Pythagorica des lamblichos von Chalkis , coll . « Beiträge zur Altertumskunde » 165 , München /Leipzig 2002, p . 81-91 ; 11 J.-Y. Guillaumin , « La transformation d'une phrase de Nicomaque ( Introduction arithmétique I , 18 , 2 ) chez Boèce ( Institution arithmétique I , 23 ) » , Latomus 48 , 1989 , p . 869-874 ; 12 Id ., « La structure du chapitre 1 , 4 de l'Institution Arithmétique " de Boèce et le cours d'Ammonios sur Nicomaque » , RHS 47 , 1994 , p. 249-258 . (Euvres. ( 1 ) ’AplОuntix ) Eloaywyń ( Introductio arithmetica ). Édition. 13 R. Hoche (édit. ), Nicomachi Geraseni Pythagorei Introductionis arithmeticae libri II, coll . BT, Leipzig 1866 , XI - 199 p.; 14 R. Hoche (édit . ) , Introductio arithmetica , Leipzig 1893 . Traductions et commentaires : L'ouvrage fut traduit en latin par Apulée ( > A 194 ) , mais cette traduction n'est pas conservée . L'Institutio arithmetica de Boèce est cependant une paraphrase de cette Introduction et pratiquement une traduction ( sur les différences, voir D'Ooge 24 [cité plus bas) , p. 132-137 ) . L'Introduction fut également traduite en arabe. Voir 15 W. Kutsch , Tābit ibn Qurra's arabische Übersetzung der Αριθμητική Εισαγωγή des Nicomachos von Gerasa, Beyrouth 1958 ; sur la tradition du texte dans le moyen - âge islamique voir 16 Sonja Brentjes, « Untersuchungen zum Nicomachus arabus » , Centaurus 30 , 1987 , p. 212-239 . L'Introduction fut commentée par - Jamblique ( * I 3 ) : 17 lamblichi In Nicomachi Arithmeticam Introductio nem libri, ed. Hermenegildus Pistelli [1894 ), avec les corr. de U. Klein , coll . BT, Stuttgart 1975 , XXIII - 195 p. Voir 18 M. Federspiel, « Notes critiques et exégé tiques sur le commentaire de Jamblique à l’Introduction arithmétique de Nicomaque : premier article » , REA 102 , 2000 , p. 59-80 . - Jean Philopon : 19 Philoponus, Ad Nicomachi Introductionem Arithmeticam scholia , ed . R. Hoche , coll . BT, I , Leipzig 1864 ; II , Leipzig 1867 ; cf. 20 W. Haase , Untersuchungen zu Nikomachos von Gerasa , diss. Tübingen 1982 , 11-447 p . , contient , aux pages 401-447, un « specimen novae editionis criticae commentarii Joannis Philoponi in Nicomachi Introductionem arithme ticam » ; 21 G. Giardina, Giovanni Filopono Matematico tra neopitagorismo e neoplatonismo. Commentario alla Introduzione aritmetica di Nicomaco di Gerasa , Introduzione, testo , traduzione e note , coll . « Symbolon » 20 , Catania 1999 , XIII - 525 p. - Asclépius de Tralles (7+ A 458 ) : Comm . in Nicom . Geraseni Pythagorei Introductionem , édité dans 22 L. Tarán , Asclepius of Tralles, Commentary to Nicomachus' Introduction to Arithmetic, coll . TAPHS N. S. 59, 4, Philadelphia 1969 ; - Sotéricus : 23 Soterichus , Ad Nicomachi Introductionem Arithmeticam de Platonis psychogonia Scholia, ed . R. Hoche , Progr. Elberfeld 1871 .

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Haase 20, p . 319-398 , contient la liste des manuscrits de l'Introduction et de ses commentateurs grecs . Voir aussi 24 A. Bravo García , « Sobre un comentario anónimo a la Aritmética de Nicomaco de Gerasa y sus mss . en bibliotecas españolas » , CFC 16, 1979-1980 , p. 27-40 . Traduction anglaise de l’Introductio : 25 Nicomachus of Gerasa : Introduction to Arithmetic, transl . by M. L. D'Ooge , with Studies in Greek Arithmetic by F.E. Robbins and L.C. Karpinski, coll . « University of Michigan studies. Humanistic series » 16 , New York 1926, réimpr. New York 1972 , IX 318 p . Traduction française : 26 J. Bertier, Nicomaque de Gérase , Introduction arithmétique , coll . « Histoire des doctrines de l'antiquité classique » 2 , Paris 1978 , 254 p.; contient une introduction ( p . 7-51 ) , la traduction ( p . 53-140 ), des notes de commentaire ( p . 141-225 ) , une bibliographie et des index ( 227-249 ) ; sur cette publication , voir 27 M. Caveing , « À propos d'une récente traduction de l'Introduction arithmétique de Nicomaque de Gérase » , AIHS 30, 1980, p. 52-68. ( 2 ) 'Erxeup Olov ( Harmonicum Enchiridium ). Édition. 28 K. von Jan , Musici Scriptores Graeci. Aristoteles, Euclides, Nicomachus, Bacchius, Gaudentius, Alypius et melodiarum veterum quidquid

exstat, recognovit, prooemiis et indice instruxit Carl Jan, coll . BT, Leipzig 1895 , p . 235-265 ( introduction aux p. 210-234 ) . Traductions. Anglaises : 29 F.R. Levin , Nicomachus of Gerasa . Manual of Harmonics. Translation and Commentary, Diss . Columbia Univ . 1967 ( trad . p . 14-53 ; commentaire p . 54-271 ; voir également 30 Id . , The Harmonics of Nicomachus and the Pythagorean Tradition , coll . « Amer. Class . Stud . » 1 , Amer . Philol . Assoc . 1975 , 113 p . ) . Française : 31 Nicomaque de Gérase . Manuel d'Harmonique et autres textes relatifs à la musique, traduits en français pour la première fois avec commentaire perpétuel par Ch.-Em. Ruelle , coll . « Auteurs grecs relatifs à la musique » 2 , Paris 1881. Italienne : 32 La manua listica musicale greca : ( Euclide ), Cleonide, Nicomaco, Excerpta Nicomachi, Bacchio il vecchio, Gaudenzio, Alipio, Excerpta Neapolitana, a cura di L. Zanoncelli , coll . « Ricerche » , Milano 1990 , p. 133-139 ( introduction ) ; 140 181 ( texte grec et traduction ) ; 182-204 ( commentaire ). ( 3 ) TEwMETPLX ) eloaywyń ( Introduction à la géométrie ), citée dans l’Intro duction arithmétique II 6, 1 , p . 83 , 4 Hoche et aujourd'hui perdue ; ( 4 ) Harmonica. Fragments dans Jan 28 , Excerpta ex Nicomacho, p . 266-282 ; traduction francaise dans Ruelle 31 , p . 41-55 ; traduction italienne dans Zanoncelli 31 , p. 207-209 ( introd .), 210-229 (texte grec et traduction ), 230-243 (commentaire ). ( 5 ) Vie de Pythagore . De cette æuvre dont l'existence n'est pas univer sellement admise ( voir plus bas) il reste de nombreux extraits dans les Vies de Pythagore de Jamblique (qui cite Nicomaque uniquement en V. pyth. 251 , mais reconnaît moins que Porphyre sa dette ) et Porphyre ( qui cite l'ouvrage en V. Pyth. 20 et 59) , pour qui il constitue une de ses principales sources. Les

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témoignages sont rassemblés dans 33 FGrHist continued ; IV a , Biography , Fasc . 7 , by J. Radicke, Leiden 1999 , nº 1063 , p . 112-123 ( fragments ) ; 124-131 ( commentaire ). L'existence de cette cuvre a été niée par 34 J. A. Philip , « The Biographical Tradition . Pythagoras » , TAPHA 90 , 1959 , p . 185-194 ; mais pour une critique détaillée de la thèse de Philip, voir Staab 10 , p . 224-228 . Sur les sources de Jamblique , voir l'étude classique de 35 E. Rohde , « Die Quellen des lamblichos in seiner Biographie von Pythagoras » , RhM 26 , 1871 , p. 554-576 , et 27 , 1872 , p. 23-61 , repris dans ses Kleine Schriften, t . II , Leipzig 1901 , p . 101-128 ; 36 W. Burkert, Lore and science , p . 97-101 ; pour une synthèse sur Jamblique, voir 37 Giamblico. Vita Pitagorica. Introduzione , tradu zione e note di M. Giangiulio , coll . « I Classici della BUR ( Biblioteca Universale Rizzoli ] » L825 , Milano 1991 , p . 46-50 ; une étude récente davantage approfondie se trouve dans Staab 10 , p . 217-237 . Nicomaque se fondait sur Aristoxène et sur d'autres sources dont l'identification est difficile ; il soulignait les aspects thaumaturgiques de la figure de Pythagore, mais également son enseignement public et politique ; il ne traitait pas seulement de la vie de Pythagore, mais aussi de façon générale des événements marquants de la vie de la communauté pythagoricienne . ( 6 ) Théologie arithmétique. On trouve des extraits de cette cuvre chez Photius, Bibl. cod. 187 , 1426-145b , et dans les Theologoumena arithmetica du Pseudo-Jamblique ( 17 , 14 - 19 , 20 ; 42 , 2 ; 56 , 9 et passim ). S'il faut croire un compte rendu provenant de l'antiquité tardive (Anonymi Prolegomena in Intro ductionem arithmeticam Nicomachi, édité dans Diophantus Alexandrinus, Opera omnia , ed . P. Tannery , Leipzig 1895 , t . II , p . 73-77 ) , cette æuvre était une sorte d'arithmétique « majeure » dont l'Introduction n'était que la propédeutique. Sur ce problème, voir O'Meara 6, p . 19-22 .

1 ( 7 ) Euvaywyai tõv nvdayopɛ wv doyuátwv , cité par Syrianus , in Arist. Metaph. p . 103 , 5-7 Kroll .

1

Selon Staab 10, p. 93 sqq . , ces différentes æuvres constituaient ensemble un compendium général de philosophie . Dans la tradition arabe ont été répertoriées d'autres æuvres . Voir 38 F. Sezgin , Geschichte des arabischen Schrifttums, t . V , Leiden 1974 , p . 164 166. Vie et chronologie . Nous savons très peu de choses à propos de Nicomaque . Un compte rendu détaillé des hypothèses formulées par les historiens se trouve chez Haase 20, p . 50-70 . Grâce à Lucien , Philopatris 12 , et d'après des scholies sur Philopon et les manuscrits des æuvres de Nicomaque, nous savons qu'il était originaire de Gérasa . Un terminus post quem peut être tiré de la citation , dans l’Enchiridion 260 , 16 Jan de Thrasylle ( vers 36 de notre ère ) . Le terminus ante quem est fourni par la traduction de l'Introduction faite par Apulée ( Cassiodore , Inst. II 4 , 7 , p. 140 , 17 Mynors ), dont la datation est de son côté incertaine, mais qui peut se situer entre 170 et 180 ( Haase 20 , p . 57-58 ) . Lucien , né en 120 , considérait Nicomaque comme un homme déjà célèbre ( « il calcule comme Nicomaque » ). Selon 39 J. Dillon , « A date for the death of Nicomachus of

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Gerasa ? » , CR 19, 1969 , p. 274-275 , sa mort daterait de 196, puisque Proclus, né en 412 , considérait , si l'on en croit Marinus ( Vita Procli 28 ) , qu'il était une réincarnation de Nicomaque et que certains pythagoriciens croyaient que la réincarnation survenait à des intervalles de 216 années. Contre cette datation voir Tarán 3 , p . 113 : rien ne permet de penser que Proclus attribuait une importance spéciale au nombre 216 et Proclus ne cite pas ce nombre dans son commentaire sur le Timée. Selon 40 A.H. Criddle , « The Chronology of Nicomachus of Gerasa » , CQ 48 , 1998 , p. 324-327, la date probable de la mort de Nicomaque est, sur la base des idées numérologiques présentes dans la Théologie arithmétique, l'année 142 de notre ère. BRUNO CENTRONE .

L'Introduction arithmétique de Nicomaque de Gérase dans les traditions syriaque, arabe et hébraïque

L'Introduction arithmétique a fait l'objet de deux traductions en arabe : la première, associée aux noms de Habib Ibn Bahriz et d'al - Kindi , est issue d'une traduction syriaque et a ensuite fait l'objet d'une traduction hébraïque ; la seconde version arabe, due à Thābit Ibn Qurra, a été faite sur l'original grec. I. La traduction Ibn Bahriz - Kindi. Ce que nous savons de cette traduction arabe, antérieure à celle de Thābit , nous le devons au texte hébreu intitulé Sefer ha - ' aritmatiqa ' ( = Le Livre de l'arithmétique ) et attribué à Nicomaque de Gérase (Niqūmākhūs al-gaharshini). Les aspects historiques de ce texte ont été récemment étudiés dans : 1 G. Freudenthal et T. Lévy , « De Gérase à Bagdad : Ibn Bahriz , al -Kindi, et leur recension arabe de l'Introduction arithmétique de Nicomaque , d'après la version hébraïque de Calonymos ben Qalonymos d'Arles » , dans R. Morelon et A. Hasnawi (édit . ) , De Zénon d'Élée à Poincaré. Recueil d'études en hommage à Roshdi Rashed , coll . « Les cahiers du MIDEO » 1 , Louvain / Paris 2004 , p. 479 544. Les remarques qui suivent sont issues de cette étude . L'ouvrage hébreu, qui n'a pas encore été édité , est conservé dans huit manuscrits ; deux d'entre eux nous apprennent qu'il a été traduit de l'arabe par le célèbre traducteur provençal Qalonymos b. Qalonymos d'Arles , le travail ayant été achevé le 5 Nissan ( 50177 ( 19 mars 1317 ) . L'ouvrage transmis en hébreu n'est pas une traduction de l'original grec , mais une recension , qui se distingue du texte grec de l'Intro duction arithmétique par les traits suivants : 1. L'ouvrage hébreu paraphrase , plus qu'il ne traduit, le texte grec , en l'abrégeant souvent . 2. L'ouvrage hébreu contient des gloses, signalées comme telles et attribuées à « Abū Yusuf » , que le prologue identifie comme le philosophe Ya'qub b . Ishaq b. al- Şabbāḥ al - Kindi . 3. L'ouvrage hébreu contient , de plus , d'autres gloses , qui ne sont pas signalées comme telles.

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4. A côté de diagrammes numériques ( représentations en tableaux de certains énoncés mathématiques) qui figurent dans l'original grec , l'ouvrage hébreu contient d'autres diagrammes, qui n'apparaissent pas dans l'ouvrage grec . ( Signalons cependant que l'édition du texte grec ( 2 Richard Hoche [ édit. ), Introductionis arithmeticae Libri II, coll . BT, Leipzig 1866) , établie à partir de neuf manuscrits seulement, ne contient pas tous les diagrammes conservés dans la tradition manuscrite grecque , comme le montre une comparaison avec la traduction en anglais, laquelle reproduit des diagrammes transmis par des manuscrits non consultés par Hoche. Voir 3 Nicomachus of Gerasa, Introduction to Arithmetic. Translated into English by Martin Luther D'Ooge , with Studies in Greek Arithmetic by Frank Egleston Robbins and Louis Charles Karpinski, New York 1926 ). 5. L'ouvrage hébreu contient en outre des tableaux de type « textuel » ( une synthèse d'énoncés théoriques ), qui n'ont aucun modèle dans l'original grec. 6. L'ouvrage hébreu est précédé d'un prologue ( édité et traduit dans Freudenthal et Lévy 1 ) qui nous livre de précieux renseignements sur sa genèse. L'auteur, anonyme , du prologue, qui se décrit comme un élève d'al - Kindi , adresse l'Introduction arithmétique à une personnalité qui n'est pas nommée . Il indique qu'il s'agit d'une version « corrigée » ou « révisée » de la traduction faite par « Habib Ibn Bahriz le Nestorien » ; ce dernier avait réalisé, à la demande de Tāhir b . al - Husain « l'ambidextre » , une version arabe d'un texte syriaque. Al Kindi a révisé le texte arabe ainsi produit, afin d'en éliminer les nombreuses erreurs qu'y avait introduites Ibn Bahriz . L'histoire de l'ouvrage comporte les étapes suivantes. 1 ° Un anonyme traduit l'Introduction arithmétique du grec en syriaque. On peut supposer que la traduction d'un ouvrage d'un niveau philosophique et mathématique aussi élevé ne remonte pas trop haut et situer cette traduction , dont aucune trace ne subsiste , à la fin du VIII ou au début du IXe siècle . Une étude récente montre que cette traduction a probablement été littérale, en conformité avec le caractère général des traductions du grec en syriaque à cette époque. Voir 4 G. Freudenthal et M. Zonta, « Remnants of Habib Ibn Bahriz's Arabic Translation of Nicomachus of Gerasa's Introduction to Arithmetic » , dans Y. Tzvi Langermann, Josef Stern et Ilai Alon (édit . ) Mélanges Joël L. Kraemer ( à paraître à Leiden ). 2 ° Puis l'ouvrage est traduit du syriaque en arabe par Habib Ibn Bahriz , métropolite nestorien , traducteur connu de la première moitié du IX s . ( 5 Gérard Troupeau, « ' Abdishū' Ibn Bahriz et son livre sur les définitions de la logique» , dans Danielle Jacquart [ édit . ) , Les voies de la science grecque , Genève 1997 , p . 135-145 ) . Ibn Bahriz a travaillé pour différents patrons, au rang desquels Tāhir b. al - Husain , général d'al - Ma'mūn , et al - Kindi . La traduction en arabe de l'Introduction arithmétique a été réalisée avant la mort , en 822 , de Țāhir b . al Husain, qui l'avait commandée . Une comparaison entre l'ouvrage de logique d'Ibn Bahriz ( dans 6 Al -Mantiq ( Logic) by Ibn Muqaffa ' (and ] Hudūd al-Mantiq ( Definitions of Logic ) by Ibn

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Bihriz, Edited with Notes and Introduction by Muḥammad Taqi Dāneshpazhūh [ Teheran 1978 , 1398 H ) , p. 97-126) et la version hébraïque de l'Introduction arithmétique met en évidence que les tableaux de type textuel se trouvant dans cette dernière ( et nulle part ailleurs ) sont caractéristiques du style d'Ibn Bahriz: ils sont donc son cuvre . On relève également dans le texte une glose ( non signalée comme telle ) évoquant une méthode de raisonnement « appelée diallelos » ( le terme, grec, est translittéré en lettres hébraïques ), qui consiste « à déterminer une de deux incon nues par l'autre » : cette glose reproduit un passage du Commentaire de Jambli que sur l'Introduction arithmétique. Elle ne semble pas pouvoir provenir de sources arabes et a dû être introduite par Ibn Bahriz, lequel avait accès à des sources grecques. Ce dernier est ainsi intervenu fréquemment dans l'ouvrage qu'il a traduit. Il convient donc de parler, à propos d'Ibn Bahriz, d'une recension plutôt que d'une traduction. 3 ° Peu de temps après, al - Kindi révise la version d'Ibn Bahriz pour en élimi ner les « erreurs » introduites par le Nestorien ; il le fait très certainement sans référence à un original ( syriaque ou grec ) . Al - Kindi a apparemment étudié orale ment, avec ses élèves , tout en la revisant, l'Introduction arithmétique (l'ouvrage a effectivement été exploité par lui dans différents contextes) , mais il n'en a pas produit, lui -même , une version écrite révisée. Le rédacteur, élève d'al - Kindi , affirme en effet avoir rédigé la version révisée de l'Introduction arithmétique selon l'enseignement reçu et en y insérant des observations recueillies de la bouche d'al - Kindi . Ces observations apparaissent dans le texte sous forme de gloses , introduites par les mots « Abū Yusūf dit » . ( Une de ces gloses se retrouve dans L'Épître des définitions attribuée à al - Kindi , confirmant ainsi cette attribu tion . ) D'autres gloses, nombreuses, ne sont pas signalées comme telles : il s'agit, soit d'un résumé, par l'élève , de l'enseignement oral d'al - Kindi , soit d'explica tions, dans l'esprit d'al -Kindi , formulées par l'élève . Les interventions d'al - Kindi et de son élève produisent ainsi une nouvelle rédaction, qu'il convient d'appeler la version Ibn Bahriz - Kindi. 4 ° À une date inconnue , le texte arabe révisé par al - Kindi arrive en Andalous. Deux colophons , dans le texte hébreu , attribuent la révision de l’Introduction arithmétique à un certain « Abū Sulaimān Rabi ' ben Yahyā , évêque d'Elvira l'andalou » . L'identification de ce personnage a posé beaucoup de problèmes aux historiens , depuis plus d'un siècle. Il semble bien que ces colophons ont été introduits dans l'ouvrage en Andalous et ont probablement remplacé les colo phons originaux ; ils sont donc tardifs et peu fiables. Rabi' ben Yahya , si une personne de ce nom a jamais existé , n'a rien à voir avec l'Introduction arithmé. tique. L'ouvrage a été révisé en Orient , par un élève d'al - Kindi , et il est arrivé en Andalous dans l'état où l’a trouvé le traducteur de l'arabe en hébreu . 5º En 1317 , Qalonymos ben Qalonymos a traduit l'ouvrage en hébreu. Il n'est certainement pas intervenu dans le texte , ses traductions étant très littérales , L'Introduction arithmétique telle qu'elle est transmise en hébreu reflète ainsi la version de l'ouvrage après sa révision par al - Kindi . Quelques fragments de la

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version d'Ibn Bahriz avant sa révision par Kindi ont pu être identifiés dans l'ouvrage Ta'rih d'al - Ya'qubi (m . 897 ) . Voir Freudenthal -Zonta 4. Les traduc tions du grec en syriaque et de l'arabe en hébreu ayant été littérales , il s'ensuit que le caractère paraphrastique de l'ouvrage dans la version préservée est certai nement dû à Ibn Bahriz, ainsi qu'à Kindi . A côté des quelques gloses explici tement attribuées à al - Kindi , cette version inclut de nombreuses gloses sans attribution spécifique: elles sont dues en partie à Ibn Bahriz et en partie à l'élève d'al- Kindi, lequel résume les idées de son Maître.

II . La traduction de Thābit Ibn Qurra. Le mathématicien et philosophe Thābit Ibn Qurra ( 826-901) a traduit l'ouvra ge directement du grec en arabe. Le texte a été publié: 7 Wilhelm Kutsch ( édit .), Tābit b . Qurra's arabische Übersetzung der ’Apiąuntixn eloaywyn des Nikomachos von Gerasa, Beyrouth 1958 , mais n'a pas encore fait l'objet de recherches. Postérité et influence : Al - Kindi lui- même s'est inspiré de l’Introduction arithmétique dans plusieurs domaines , y compris la pharmacologie . Voir 8 Y. Tzvi Langermann , « Another Andalusian Revolt ? Ibn Rushd's Critique of al -Kindi's Pharmacological Computus» , dans Jan P. Hogendijk et Abdelhamid I. Sabra (édit. ) , The Enterprise of Science in Islam . New Perspectives, Cambridge , Mass/London , MIT Press , 2003 , p . 351-372 . L'ouvrage de Nicomaque est un point de départ important des recherches mathématiques de Thābit Ibn Qurra en théorie des nombres. Des témoignages concernant la connaissance de l'Introduction arithmétique par les savants arabes sont rassemblés dans 9 Fuat Sezgin , Geschichte des arabischen Schrifttums, Band V : Mathematik , Leiden 1974 , p . 164-166 ; 10 Sonja Brentjes, « Untersuchungen zum Nicomachus Arabus» , Centaurus 30, 1987 , p. 212-239 ; 11 Carmela Baffioni, « Citazioni di autori antichi nelle Rasā'il degli Ikhwān al -Safā ' : il caso di Nicomacho di Gerasa » , dans 12 Gerhard Endress et Remke Kruk (édit. ) , The Ancient Tradition in Christian and Islamic Hellenism . Studies on the Transmission of Greek Philosophy and Sciences dedicated to H. J. Drossaart Lulofs on his Ninetieth Birthday, Leiden 1996 , p. 3 27. La quasi -totalité des auteurs de langue arabe ont connu l'Introduction arithmétique par la traduction de Thābit . S'agissant des mathématiciens anda lous réunis autour d'Abū ' l - Qāsim Maslama b . Aḥmad al-Majriți et d'Ibn Sayyid , dans la deuxième moitié du Xe siècle ( 13 Julio Samsó , « The Exact Sciences in al - Andalus» , dans Salma Khadra Jayyusi (édit. ) , The Legacy of Muslim Spain (= Handbuch der Orientalistik , t. XII ) , Leiden 1992 , p . 952-973 , aux p. 953-954) , on peut cependant supposer qu'ils ont connu l'ouvrage dans la version « Ibn Bahriz -Kindi » : cette dernière a circulé en Andalous , puisque c'est là que Qalonymos s'en est procuré le texte , avant de le rendre en hébreu . Dans sa version hébraïque, l'ouvrage a connu un grand retentissement. Voir 13 Y. Tzvi Langermann , « Studies in Medieval Hebrew Pythagoreanism . Translations and Notes to Nicomachus ' Arithmological Texts » , dans Gli Ebrei e

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NICOMAQUE DE STAGIRE

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le Scienze. The Jews and the Sciences ( = Micrologus IX [ 2000 ]), Firenze 2000 , p. 219-236. GAD FREUDENTHAL .

51 NICOMAQUE DE STAGIRE RE 19 Fils d'Aristote , élève de Théophraste.

FIva

Cf. 1 K. von Fritz, art. « Nikomachos » 19 , RE XVII 1 , 1937 , col . 462-463 ; 2 I. Düring, Aristotle in the ancient biographical tradition , Göteborg 1957 ; 3 H.B. Gottschalk , « Notes on the wills of the Peripatetics scholarchs » , Hermes 100 , 1972 , p . 314-342 ; 4 M. Narcy ( traduction du livre V ) , dans Diogène Laërce, Vie et doctrines des philosophes illustres, traduction française sous la direction de M.-O. Goulet -Cazé, Paris 1999 ; 5 R. Goulet, dans DPhA , t. I, p. 418-421 ( « La famille d'Aristote » ) ; 6 W.K.C. Guthrie, A history of Greek philosophy, t. VI ( 1981 ) . 7 A. Kenny , The Aristotelian ethics. A study of the relationship between the Eudemian and Nicomachean ethics of Aristotle, Oxford 1978 ; 8 Id ., Aristotle. On the perfect life, Oxford 1992 ; 90. Gigon , Vita Aristotelis Marciana, herausgegeben und kommentiert von 0. G. , coll . « Kleine Texte für Vorlesungen und Übungen » 181 , Berlin 1962 ; 10 P. Moraux, « Diogène Laërce et le Peripatos » , Elenchos 7, 1986 ( « Diogene Laerzio storico del pensiero antico » ) , p. 247-294. Vie . Nicomaque , portant le même nom que son grand -père, est le fils d'Aristote et le frère de la jeune Pythias. Quand Aristote meurt, Nicomaque est trop jeune encore pour hériter et sa seur n'est pas encore en âge de se marier ( cf. le testament d'Aristote , dans D.L. V 11-16 ) . Dans plusieurs sources anciennes, interprétant abusivement le testament, sa mère n'est pas la femme du Stagirite, Pythias, mais une servante ( Depátaiva , Timée de Tauroménion , FGrHist 566 F 157 ) ou une courtisane (Taraxń (D.L. V 1 citant Timothée ( corrigé souvent, peut -être à tort, en Timée , cf. Narcy 4, p. 555 n . 4 ; Goulet 5 , p. 420 admet la correction ; Gigon 9 , p . 28 ) ] ou éta pa ( Athénée , XIII , 589 c = Hermippe, fr. 46 Wehrli]) : Herpyllis, qui serait devenue la compagne d'Aristote, voire sa femme (Eusébe, P.E. XV 2 , 15 ), après la mort de Pythias. Cette version , peut-être malveillante à l'origine, semble admise par von Fritz 1 , col . 462 , mais refusée par Düring 2 , 266-267 et 269-270 , et battue en brèche par Gottschalk 3 , p . 323-328 ; Nicomaque serait bien alors le fils de Pythias et le frère de la jeune Pythias. Sur toute cette question , cf. Goulet 5. Après la mort d'Aristote ( 322) Nicomaque semble avoir été élevé chez Théo phraste – il en aurait été l'élève ( Souda, s . v. Nexóuaxoc N 398) – et serait mort encore jeune (uelpax oxov Övta) à la guerre (Aristoclès de Messine ( + A 369) , cité par Eusèbe, P.E. XV 2 , 15). Sa mort précoce trouve une confirmation dans le testament de Théophraste qui stipule : « Je veux que soit achevée aussi l'effigie (eixóv ) de Nicomaque » ( D. L. V 52 , trad. Narcy 4 ) , ce qui ne se comprend que si Nicomaque était déjà mort depuis un certain temps (von Fritz 1 , col . 463).

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NICOMAQUE DE STAGIRE

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L'affirmation concernant la relation pédérastique qui aurait lié Nicomaque à Théophraste peut n'être qu'une inférence fondée, à partir du Phèdre de Platon , sur la relation maître - élève ( D.L. V 39 [ l'anecdote est empruntée à Aristippe ( +* A 356 , æuvre n ° 32 , apocryphe : Iepi nahalāç touons : Sur la vie sensuelle des anciens)} ; Souda, s. v. Okoppaotoç © 199 ; Nixouaxoc N 398). On trouve encore dans le Gnomologium Vaticanum ( n ° 330 Sternbach ) l'anecdote isolée , rapportée à Théophraste , selon laquelle « Nicomaque , le fils d'Aristote , mettait peu d'entrain à la recherche philosophique » ( cf. Gigon 9 , p . 28 , qui voit là le topos du fils indigne de son père ; 11 W.W. Fortenbaugh et alii [ édit . ] , Theophrastus of Eresus. Sources for his life, writings, thought and influence , coll . « Philosophia antiqua » 54 , 1-2 , Leiden 1992 , t . I , n ° 21 , p . 74 ) . La Souda mentionne deux ouvrages attribués à Nicomaque : une Éthique ( Ηθικά ) en six livres et un traite Sur le cours de physique de son pere ( Περί της puoluñç åxpoácewÇ TOŨ natpòç aŭtoũ) . Selon K. von Fritz , l'attribution de ces deux ouvrages à Nicomaque est très douteuse ( von Fritz 1 , col. 463 ; Düring 2 , p . 265 , voit une confusion entre Nicomaque et Eudème de Rhodes ( E93 ). Il reste que l'Éthique nicomachéenne ( EN ) a parfois pu être attribuée à Nicomaque lui - même : Cicéron , De fin. V 12 ( source : Antiochus d'Ascalon [ A 200 ] ?): Teneamus Aristotelem et eius filium Nicomachum , cuius accurate scripti de moribus libri dicuntur illi quidem esse Aristoteli, sed non video cur non potuerit patri similis esse filius ( « Tenons - nous en à Aristote et à

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Nicomaque , son fils, dont on dit que les livres écrits avec soin sur l'éthique sont en vérité d'Aristote ; mais je ne vois pas pourquoi le fils n'aurait pu être sem blable à son père . » ( cf. Kenny 7 , p . 15-17 ; il n'est même pas sûr que l'éthique à laquelle se réfère Cicéron soit EN , cf. ibid . p. 16 n . 4 ; Kenny 8 , p . 118 ; Moraux 10 , p. 293 ] ) ; Diogène Laërce VIII 88 , rapporte à Nicomaque , hors contexte , une thèse formulée dans l'Éthique nicomachéenne ; sur cette attribution , cf. 12 J. Barnes , « Roman Aristotle » , dans J. Barnes et M. Griffin ( édit. ) , Philo sophia togata, t. II , p . 58 . Les modernes ont interprété différemment le qualificatif “ nicomachéenne" ( Nixouáxela ) de EN, dont le titre explicite apparaît pour la première fois au IIe s . chez le médio- platonicien Atticus (2 - A 507 ) , dans une citation d'Eusebe ( P.E. XV 4, = 9 Düring 2 , p . 326 ; le titre ne figurait pas dans le catalogue le plus ancien des ouvrages d'Aristote – celui d'Ariston de Céos ( A 396 ) , selon l'hypothèse controversée de P. Moraux ; cf. 13 P. Moraux , Les listes anciennes des ouvrages d'Aristote, Louvain 1951 , p . 237-247 , et , avec de sérieuses

!

hésitations sur sa thèse précédente , Moraux 10 , p . 251 ) : il s'agirait de l'Éthique dédiée à Nicomaque , le père d'Aristote (hypothèse la moins vraisemblable, par son caractère anachronique ) ou le fils (hypothèse apparaissant déjà dans les milieux néoplatoniciens et , dans la tradition arabe , chez al - Kindi déjà (DPhA Suppl., p . 191 ] ; cf. 14 R. A. Gauthier, dans Aristote , L'Éthique à Nicomaque, introduction , traduction et commentaire par R. A. Gauthier et J. Y. Jolif, Louvain / Paris , t . I , 2e éd . 1970 , p . 83 n . 39 et 40 ) ou plutôt d'une Ethique éditée - et non pas composée par le fils (cf. Gauthier 14 , p . 84-87 : EN aurait été éditée par Nicomaque peu avant 300 av . J.-C. ) Sur cette question , cf. encore

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NICON

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Gigon 9 , p . 28-29 , qui conclut par un non liquet ; cf. aussi C. Natali, DPA Suppl., 2003, p. 191-182 . JEAN - PIERRE SCHNEIDER .

TIP

52 NICON RE 1

Père du médecin Galien de Pergame (

G 3).

Orientations bibliographiques : 1 H. Diller, art. « Nikon » 18, RE XVII 1 , 1936, col . 507-508 ; 2 P. Moraux, Galien de Pergame. Souvenirs d'un médecin , Paris 1985 , d'où sont tirées (parfois légèrement modifiées) les traductions des passages empruntés à Galien. Galien ne mentionne nulle part dans la partie de son œuvre qui nous est parvenue le nom de son père. Celui-ci nous est connu grâce à deux témoignages tardifs, ceux de la Souda (Xe siècle ) et de Tzetzès ( XII ° siècle) qui reposent sur des sources inconnues de nous . La Souda (éd. A. Adler, Leipzig 1928 , p. 506, nº 32 , s.v. Tannvóc) présente en effet Galien comme le fils d'un certain Nicon geometre et architecte : Γαληνός... υιός Ν κωνος γεωμέτρου και αρχι TÉXTOVOS . L'historien Jean Tzetzès dans ses Chiliades XII 8 (éd . P. A. M. Leone, Napoli 1968 , p. 468 ) mentionne également un certain Nicon , architecte et géomètre, mais ajoute prudemment qu'il ne peut garantir l'exactitude du nom qu'il transmet : Υιός δ' ήν αρχιτέκτονος ανδρός και γεωμέτρου , H δοκώ την κλήσιν Ν κωνος, λέγειν σαφώς ουκ έχω. Un père attentif et féru de philosophie. Sans être lui - même philosophe , le père de Galien a joué un rôle déterminant dans la formation philosophique de son fils. Galien voue d'ailleurs une grande admiration à ce père dont il vante le caractère « le moins colérique, le plus juste, le plus honnête et le plus humain qui soit » en l'opposant à celui emporté de sa mère ( Sur la connaissance et le traite ment des affections de l'âme 8 : t . V , 40 Kühn = éd . I. Marquardt, Scripta Minora I , 1884 ; éd. W. de Boer, CMG V 4, 1 , 1 , 1937 ) . Ailleurs, il rappelle encore la mémoire de ce père « très fort en géométrie, en architecture, en calcul, en arithmétique et en astronomie » (Sur les sucs des aliments 1 : t . VI , 755 Kühn ) . Il s'agissait d'ailleurs là, aux dires de Galien dans le Sur ses propres livres 11 ( t . XIX , 40 Kühn = éd . I. Müller , SM II , 1891 ) d'une véritable tradition familiale puisqu'avant le père de Galien , le grand - père et l'arrière - grand -père avaient déjà pratiqué ces disciplines . Mais surtout, toujours selon Galien , ce père si vénéré jouissait de rares qualités personnelles de justice , d'honnêteté , et de modération qui firent que tous ceux qui le connaissaient lui témoignaient « plus d'admiration qu'ils ne le faisaient pour aucun philosophe » ( ibid. ) . Sans se contenter de cultiver un mode de vie philosophique , ce père décrit par Galien comme exceptionnel, ne cesse en effet de se préoccuper du bien -être de son fils, tant physique qu'intellectuel. Il s'applique aussi bien à régler et surveiller son régime alimentaire ( ibid. ) qu'à rechercher les meilleurs maîtres pour veiller sur son éducation. Galien , dans le Sur l'ordre de ses propres livres 4 ( t. XIX , 59 Kühn = SM II ) rédigé à la fin de sa vie , porte le regard suivant sur sa prime éducation : «j'ai été éduqué par un père qui était un savant en arithmétique, en

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calcul et en littérature , et qui m'a nourri de ces disciplines et des autres sciences qui font partie de l'éducation . Quand j'entrai dans ma quinzième année , il m'amena à l'étude de la dialectique, pour que mon esprit s'attache uniquement à la philosophie . Ensuite , alors que j'entrais dans ma dix -septième année , il fut influencé par des songes très clairs et me fit entreprendre l'étude de la médecine, conjointement avec celle de la philosophie » . Ailleurs, dans le Sur la connais sance et le traitement des affections de l'âme 8 ( t . V , 41 Kühn ), après avoir cité ses principaux maîtres de philosophie ( un stoïcien élève de Philopator, un platonicien élève de Gaios ( G 2 ) , un péripatéticien élève d'Aspasios ( A 461 ) et un épicurien originaire d'Athènes ) , Galien nous éclaire sur les critères qui présidèrent au choix de son père. En homme avisé et cultivé , ce dernier accompagna son fils chez chacun de ces maîtres et « enquêta sur la conduite et les doctrines de chacun d'eux » ( ibid. 8) . Galien a en effet lui -même hérité de son père la conviction qu’un bon philosophe se juge autant par la qualité de son genre de vie et la hauteur de sa moralité que par le contenu de son enseignement. En application de ces deux principes et dans le respect de ces deux exigences , le père de Galien veillera à ce que celui -ci reçoive une forma tion aussi complète et diversifiée que possible, sans se proclamer d'emblée membre d'une école , « mais en prenant le temps d'apprendre à connaître et à juger les différentes doctrines » . L'éclectisme de Galien trouverait donc ses fondements dans cette première formation intellectuelle initiée par son père. On sait avec quelle ferveur Galien adoptera ce principe, l'érigeant tout au long de la rédaction de son euvre au statut de véritable dogme, répétant inlassablement qu'il ne se déclare « l'adepte d'aucune école , mais ( s ']applique de toutes ( ses ) forces à ( se ) livrer à un examen critique de toutes » ( ibid. 8 ) . Parallèlement, Nicon s'est visiblement efforcé de munir son fils d'une philo sophie de la vie qui lui permette jusque dans les épreuves et les difficultés de témoigner d'une sérénité parfaitement en accord avec le stoïcisme ambiant . Aussi exhorte - t -il son fils en ces termes : « Les vertus que louent tous les hommes et à propos desquelles les philosophes eux - mêmes sont d'accord pour dire qu'il faut les cultiver, ces vertus, tu dois dès maintenant et pendant toute ta vie prendre soin de t'y exercer... Fais grand cas de la justice , de la modération, du courage et de la sagesse » ( ibid . 8 ). Galien semble d'ailleurs avoir suivi à la lettre les conseils paternels , quand il conclut quelques lignes plus loin : « Ces recommandations que j'ai reçues de mon père, je m'y suis tenu jusqu'à mainte nant... Je ne me laisse point frapper non plus par les incidents de la vie quoti dienne , imitant ainsi l'attitude de mon père. Il n'est pas non plus de perte qui puisse m'attrister, sauf peut-être si je venais à perdre complètement tout ce que je possède, mais c'est une situation dans laquelle je ne me suis jamais trouvé » . La mort de ce père tant aimé intervient alors que Galien a atteint l'âge de 20 ans (Des bons et des mauvais sucs 1 : t. VI , 756 Kühn ) , c'est- à -dire en 149. Il laisse alors à son fils une fortune suffisante pour lui permettre de consacrer tout son loisir à l'étude et d'entreprendre ses premiers voyages scientifiques (Sur la méthode thérapeutique VIII 3 : t. X , 561 Kühn) .

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3 H. Schöne , Schedae philologae Hermanno Usener oblatae, Bonn 1891 , p. 90 sqq . (voir à ce propos Diller 1 , col . 508 ) a cherché à identifier le père de Galien avec un architecte du même nom mentionné dans une inscription de Pergame . La question s'est compliquée du fait de la découverte de nouvelles inscriptions pergaméniennes de l'époque d'Hadrien , ou un peu postérieures, mentionnant en réalité deux personnes de ce nom et toutes deux architectes (CIG 3544/45 = IGR IV , n ° 502 et 503 ) . La première trouvée sur le marché de Pergame mentionne un I ( ulios ) Nikodemos appelé aussi Nicon le Jeune (ó xai Nɛ xwv Ó véoç) qui aurait aménagé à ses frais le portique du marché de Pergame. La seconde fait état d'un Ailios N ( e )ikon , également architecte , et qui aurait fait ériger la statue d'un « joyeux satyre » . Selon Moraux 2 , p. 15 , n . 1 , ces inscriptions proviennent du même milieu et probablement de la même famille. Elles présentent en effet la particularité d'être « isopséphiques » ( ioóynda ) , c'est-à - dire que si on additionne la valeur numérale affectée à chaque lettre, on obtient une somme égale pour chaque ligne . 4 H. Schlange -Schöningen , Die römische Gesellschaft bei Galen. Biographie und Sozialgeschichte, Berlin /New York 2003, p . 45-60 , a depuis procédé à un nouvel examen de ce dossier épigra phique avant de conclure sur l'impossibilité d'une identification certaine. S'il est donc probable que l'un de ces deux personnages était le père de Galien , il paraît en revanche impossible de trancher entre eux avec certitude. VÉRONIQUE BOUDON -MILLOT. 53 NICOSTRATOS « Nouvel Aristote et l'égal de Platon » (" Alov ’Aplototéinv, Nixó otpatov , ioonnátwva ). C'est ainsi qu'est célébré ce philosophe dans une épigramme d'Agathias le Scholastique (RE 2 , ca 536-582 ) conservée dans l'Anthologie Palatine ( XI 354 ) . Les positions que le poète prête à Nicostratos témoignent d'un certain scepticisme sur la transcendance de l'âme , malgré sa pratique des Météores et du traité De l'âme d'Aristote ou du Phédon de Platon ( li . 7-9 ) . S'il ne s'agit pas d'un contemporain d'Agathias , il ne serait pas impos sible que ce Nicostratos, qualifié de « subtil interprète d'une sagesse transcen dante » (oxiv arauoppkornu ainutátns oopías), soit le platonicien , commentateur d'Aristote , connu par Simplicius ( * + N 55 ) . Mais le poème développe un thème littéraire et Nicostratos pourrait n'être ici qu'un prête -nom . Averil et Alan Cameron, « The Cycle of Agathias » , JHS 86 , 1966 , p . 15 , rejettent l'identification entre ces deux Nicostratos . L'éditeur de la CUF , R. Aubreton ( 1972 ) , la trouve difficilement évitable . Voir également J. Relihan , « Agathias Scholasticus (“ A.P.” 11.354) , the Philosopher Nicostratus , and Boethius’ “ Consolation " » , C & M 41, 1990 , p . 119-129, notamment p . 123-124, qui souligne le caractère caricatural du personnage . RICHARD GOULET . 54 NICOSTRATOS D'ALEXANDRIE

MII

Académicien inconnu , disciple de Carnéade ( Philod ., Acad . hist., col . XXIII 48 = XXXII 41 = T 3b 15 Mette ) . TIZIANO DORANDI.

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NICOSTRATOS D'ATHÈNES

55 NICOSTRATOS D'ATHÈNES ( CLAUDIUS - ) RE 26

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fl. M II

A. « Philosophe platonicien d'Athènes » , honoré à Delphes , avec ses collè gues Bacchius ( -B 2 ] (maître de Marc Aurèle ( >M 39 ) , cf. In semetipsum I 6) , Paphius, Zosime ou Sotime et M. Sextius Cornelianus de Mallos ( * C 188 ) , dans un décret daté de l'archontat d'Euboulidès , fils d'Euboulidès (vers 150 160 ), F. Delphes III 4 , 34 (Syll. II 868 = Gaius T 2 Gioè ). B. Dans un article important paru en 1922 , 1 K. Praechter, « Nikostratos der Platoniker » , Hermes 57 , 1922 , p. 481-517 , repris dans Kleine Schriften, heraus gegeben von H. Dörrie, coll . « Collectanea » 7 , Hildesheim 1973 , p. 101-137 , a montré qu'il s'agissait d'un philosophe plusieurs fois cité dans le Commentaire de Simplicius sur les Catégories d'Aristote ( CAG VIII ) . Sur Nicostratos , voir également 2 K. von Fritz , art. « Nikostratos » 36, RE XVII 1 , 1936, col . 547-551 . Fragments et témoignages. 2 bis A. Gioè (édit. ) , Filosofi medioplatonici del II secolo D.C. Testimonianze e frammenti. Gaio, Albino, Lucio, Nicostrato , Tauro, Severo , Arpocrazione, coll . « Elenchos » 36 , Napoli 2002, p . 155-219 ( avec un commentaire ); 2 ter D. P. Taormina, « Nicostrato contro Aristotele , “Aristotele contro Nicostrato " » , dans F. Dastur et C. Lévy (édit . ) , Études de philosophie ancienne et de phénoménologie ( = Cahiers de philosophie de Paris XII - Val de Marne, 3 , 1999) , Paris 1999 , p. 73-127 (en annexe , traduction de 30 fragments de Nicostrate , p . 105-127 ) . La date de ce critique des Catégories que connaissaient déjà Porphyre ( Simplicius , p. 21 , 4 sqq. Kalbfleisch ) et Jamblique [ I 3 ] (p. 268 , 22 ; 369 , 14 ; 370 , 1.7 ; 381 , 23 ) , peut être déterminée assez précisément , car Atticus [ * A 507 ] ( fr. 41 des Places ) , dont Jérôme situe l'acmè en 176 , connaissait et reprenait une de ses apories (p . 30 , 16 sqq . ) ; en revanche, il ne semble pas que l'on puisse suivre Praechter ( p . 486-487 = 106-107 ) lorsqu'il tire un autre élément de datation du fait que Nicostratos aurait cité Herminus (pH 83 ] ( disciple d'Aspasius ( + A 461 ] et maître d'Alexandre d'Aphrodise [ A 112 ] ) , dont l'acmè se situe vers 150/160 (p. 58 , 15 sqq . ) : 3 P. Moraux, Der Aristotelismus bei den Griechen von Andronikos bis Alexander von Aphrodisias , coll . « Peripatoi » 6 , Berlin/New York 1984 , p . 529 , a montré que cette dépendance littéraire était erronée et qu'il fallait renoncer à établir un rapport chronologique entre Nicostratos et Herminus. Quoi qu'il en soit, une telle datation (début de la seconde moitié du II ° siècle ) correspond bien à la date de l'inscription ( cf. Praechter 1 , p . 487-488 = 105-107 ) . Que le Nicostratos de Simplicius ait été athénien comme le platonicien de l'inscription peut également se déduire des exemples athéniens qu'il choisit , p. 406 , 6 sqq. ( cf. von Fritz 2 , col. 547). Praechter ( 1 , p . 487-492= 107-112 ) a également montré que ce philosophe n'était pas, comme l'avait cru Zeller III 14, p . 716 n . 1 , un stoïcien (malgré l'utilisation à des fins polémiques de concepts stoïciens plus ou moins bien assi milés , p. 402, 12 ; 410 , 25 sqq . ) , mais un platonicien , comme le suggère par exemple p . 429, 16 sqq. ( voir von Fritz 2, col . 547-548 ) . Les fragments cités par Simplicius sont brièvement commentés par Praechter , p . 495-498 = 115-118 . Voir aussi Moraux 3 , p . 428-563 ( analyse approfondie

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des fragments ; corrige quelques erreurs de Praechter), et 4 R. Chiaradonna, Sostanza, movimento, analogia . Plotino critico di Aristotele , coll . « Elenchos >> 37 , Napoli 2002, p. 42-54. La liste peut en être retrouvée facilement en consul tant l'index de Kalbfleisch . Simplicius souligne ( p. 1 , 20-22) le caractère systématique de la critique de Nicostratos qui portait sur le texte entier d'Aristote ( y compris sur les « post prédicaments » , dont l'authenticité avait été contestée par Andronicus de Rhodes [ > A 181 ] ). Nicostratos relevait également des contradictions dans les Catégo ries par rapport à d'autres traités d'Aristote (cf. von Fritz 2, col . 549 ). K. von Fritz a souligné le caractère superficiel de l'ensemble de cette critique et s'est demandé si leur caractère scolaire n'expliquait pas leur faiblesse: « Man kann sich beim Lesen einer Zusammenstellung der Argumente des N. zunächst des Eindrucks nicht erwehren , als ob es sich weniger um eine Widerlegung der Kategorienschrift handelte als um eine Zusammenstellung möglicher Einwände, die selbst erst geprüft und unter Umständen widerlegt werden sollen, zur Übung für die Schule » ( col . 548 ) . Mais on doit constater qu'il arrive à Nicostratos d'apostropher directement Aristote ( p. 368 , 12 sqq .) et que la tradition néoplato nicienne a pris cette critique au sérieux. D'après Simplicius ( p. 1 , 19-20 ) , Nicostratos reprenait en partie les apories déjà soulevées par un certain Lucius qui pourrait être l'ami d'Hérode Atticus ( » L 70 ) dont parle Philostrate ( V. Soph. II 8 sq . ; p . 64 , 20 sqq . Kayser), à condition de reconnaître que Philostrate lui - même l'a confondu avec le compila teur des diatribes de Musonius Rufus ( > * M 198 ) . La métriopathie recommandée par Lucius à Hérode Atticus pourrait, selon Praechter 1 , p . 502 = 122 n . 1 , convenir à un platonicien de cette époque. Ce rapprochement reste très hypothé tique . Le Lucius de Simplicius est en tout cas platonicien (cf. p . 73 , 28 ) . Il est possible que même lorsque Lucius est mentionné seul , ses apories aient été transmises à la tradition postérieure ( Porphyre et Jamblique, puis Simplicius ) par Nicostratos. Il faudrait donc ajouter aux fragments nominaux de Nicostratos les passages où figure le nom de Lucius ( voir l'index de Kalbfleisch , auquel il faut ajouter, selon Praechter, p . 64 , 29 sqq . et 65 , 2 sqq . , qui forment une unité grammaticale avec l'aporie formulée en 64 , 18 par oi nepi töv Aoúxlov ; cf. Praechter 1 , p . 503 = 123 n . 1 ) . Simplicius ( p. 1 , 22 - 2 , 1 ) reconnaît que la critique de Nicostratos et celle de Lucius qui l'avait précédé dans cette voie ont été pour les exégètes ultérieurs l'occasion d'un approfondissement de la dialectique aristotélicienne (cf. Praechter 1 , p . 498 = 118 et n . 1 ) . Les apories de Nicostratos ont été transmises à Simplicius par le grand Commentaire perdu de Porphyre sur les Catégories, en sept livres ( p. 2 , 5 ) , comme le montrent certains passages ( p . 21 , 2.5 ; 29 , 25.29 ; 30 , 16.23 ; 48 , 1.11 ; 414 , 27.34 ) . A côté du commentaire de Porphyre, Simplicius utilisait aussi celui de Jamblique ( p. 3 , 3 ) , lequel s'était également préoccupé de répondre aux apories de Nicostratos ( cf. p . 268 , 22 sqq.; 369, 14 sqq.; 381 , 20 sqq .). Selon Praechter 1 , p. 503 = 123 sqq ., la victoire de la doctrine aristotélicienne des catégories et la transformation du cadre scolaire où se pratiquait l'exégèse

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des Catégories à partir de Porphyre expliqueraient que dans la tradition posté rieure les apories aient été attribuées anonymement aux stoïciens ou aux platoni ciens en général . Praechter 1 , p . 505-507 = 125-127 , s'attache à retrouver grâce aux parallèles où chez Simplicius leur auteur est identifié – la trace de la critique de Nicostratos dans le Commentaire par questions et réponses par Porphyre (CAG IV 1 ) , le Commentaire dialogué de Dexippe [ -D 88 ] ( CAG IV 2 ) , puis chez Ammonius [-A 141 ] (CAG IV 4 ) , Jean Philopon ( CAG XIII 1 ) , Olympiodore ( >017 ) (CAG XII 1 ) et Élias ( P - E 15 ] (CAG XVIII 1 ) . L'ouvrage de Nicostratos était peut-être cependant encore connu au début du ve siècle , car une Lettre de Synésius ( n° 129 , li . 42-44 Garzya ( CUF 2000 , p . 263 ] écrite en 407 = T 30 Gioè) mentionne tò Nixootpátelov xai toŨ ' Appoồloléwç ’ Alecávopov ( Bibliov ) . La présence du nom d'Alexandre d'Aphrodise pousse Praechter 1 , p . 504 = 124 , en note , à voir dans ce Nicostratos le philosophe platonicien . Voir aussi Synésios de Cyrène , Correspondance, CUF, t. III , p. 385 n . 24. 5 K. von Fritz, art. « Nikostratos » 27 , RE XVII 1 , 1936, col . 553 , croit pour sa part qu'il s'agit dans ce passage de T. Aurelius Nicostratus de Macédoine , sophiste de la même époque , connu par la Souda ( N 404 ), Hermogène et Stobée. On a également pensé à deux poètes comiques de ce nom. Le voisinage d'Alexandre d’Aphrodise rend toutefois l'identification avec le philosophe néoplatonicien envisageable , sinon vraisem blable (voir A. Garzya, note 24, p . 385 ) . Praechter montre également ( 1 , p. 508-511 = 128-131 ) que certains rappro chements permettent d'établir une continuité entre la critique de Lucius Nicostratos et celle de leurs devanciers stoïciens Athénodore ( > A 497 ) et Cornutus ( 7C 190 ), ou platoniciens comme Eudore d'Alexandrie ( » E 97 ) et peut- être Calvenus Taurus. La critique anti -aristotélicienne du platonicien Atticus reprenait et clarifiait les apories de Nicostratos , comme le montre un passage de Simplicius (p. 30, 16 sqq . ) et Plotin a également, sans le nommer, mis à profit, dans le cadre d'une réflexion originale, certains points déjà soulevés par Nicostratos (Praechter 1 , p. 512-513= 132-133 ) . Voir sur ce point l'ouvrage de Chiaradonna 4 . 7 J. Glucker, Antiochus, p . 143 n . 80 , s'est demandé si Nicostratos n'était pas le maître auquel Titus Pompeius Apollonidès a dédié une inscription à Marseille (IG XIV 2454, citée par Glucker, p. 128 n . 26) . A son hésitation – Nicostratos était un nom courant à Athènes et ailleurs on peut ajouter comme motif le fait

que ce maître s'appelait T. Flavius Nicostratus, tandis que le « philosophe plato nicien d'Athènes » honoré à Delphes s'appelait Claudius Nicostratos . Je remercie Concetta Luna qui a révisé attentivement cette notice . RICHARD GOULET. 56 NICOTÉLÈS DE CYRÈNE RE 2

(

FIVa . D III

Philosophe cyrénaïque, frère , selon la Souda A 2466 , d’Annicéris de Cyrène A 186 ) .

C'est sans doute d'Annicéris, auquel la notice est consacrée, plutôt que de Nicotélès qu'un Posidonius, par ailleurs inconnu , fut un disciple “ célèbre ” ( Énipavńs).

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Voir W. Crönert, Kolotes und Menedemos, p. 96 , qui le distingue du Nico télès de Cyrène ( N 00 ) qui écrivit contre Conon de Samos un ouvrage sur la section du cône (Apollonius de Pergé, Conica, IV , prooem .). On pourra donc enrichir le stemma des disciples d'Aristippe de Cyrène présenté dans la notice « Hégésias » (DPLA III , 2000 , p. 528 ) , à partir des données de Diogène Laërce II 86, par les éléments suivants : Paraibatès Hégésias Peisithanatos Annicéris frère de Nicotélès . Posidonius RICHARD GOULET. 57 NICOTÉLÈS DE CYRÈNE RE 3

III

Mathématicien ( géomètre) de l'époque hellénistique qui s'attaqua à certains résultats de Conon de Samos sur les sections coniques. Cf. 1 K. Orinsky , art. « Nikoteles » 3 , RE XVII 1 , 1936 , col . 554 ; 2 W. N. Knorr, The ancient tradition of geometric problems, Boston 1986 , réimpr. New York 1993 , p . 282 n . 41 ; 3 K. Döring, GGP, Antike 2/1 , 1998 , p . 259 ; 4 M. N. Fried & S. Unguru, Apollonius of Perga's Conica : text, context, subtext, coll . « Mnemosyne Suppl. » 222 , Leiden 2001, p . 119-128 , 373 , 416 sq . Notre seule source pour ce Nicotélès mathématicien est Apollonios de Pergé ( III/ II “). En effet, comme l'avait déjà remarqué 5 W. Crönert, Kolotes und Menedemos, p . 96 , il ne faut sans doute pas le confondre avec le philosophe homonyme ( » N56 ) qui fut le frère d'Annicéris de Cyrène ( > A 186) et qui était vraisemblablement un peu plus ancien ( F IV - D III “). Knorr 2, p. 282 n . 41 , suggère la possibilité que Nicotélès soit en réalité le mathématicien Nicomèdes (cité chez Pappus , Synagoge III et IV , t . I, p. 56, 58 , 241 , 246 , 252 Hultsch), qui avait découvert notamment une courbe appelée « conchoïde» ,et qui serait, d'après Knorr 2, p. 219, un contemporain d'Apollonios (son floruit se placerait concrètement dans le dernier tiers du IIIe s. av. J.-C .; cf. Fried & Unguru 4, p. 194) . Knorr explique qu'un copiste aurait été négligent dans la transcription du nom original « Nicomèdes » dans les Coniques. Il signale qu'aussi bien là où la tradition parle de Nicotélès que là où elle parle de Nicomèdes on trouve une personnalité corrosive , engagée dans des recherches géométriques avancées concernant l'æuvre de géomètres du IIIe siècle av. J.-C. ou peu après. Knorr reconnaît cependant qu'il n'y a aucune preuve assurant cette identification. Apollonios cite Nicotélès de Cyrène dans le livre IV de ses Coniques, qui traite des points de rencontre des sections coniques entre elles et avec la circon férence du cercle. Le seul point de référence chronologique concernant ce mathématicien est fourni par le renseignement d'Apollonios (Coniques IV , prol., t . II , p . 2 , 16 sqq . Heiberg ) selon lequel Nicotélès aurait été l'auteur d'un écrit polémique (åvtlypaon ) contre les résultats présentés par l'astronome et mathématicien Conon de Samos (cf. 6 A. Rehm , art. « Konon » 11 , RE XI 2 , 1922 , col . 1338-1340 , notamment col . 1340 ) sur certaines questions concernant les points d'intersection des sections coniques ( y inclus le cercle ) : cf. 7 P. Ver Eecke, Les coniques d'Apollonius de Pergé, euvres traduites pour la première

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fois du grec en français avec une introd . et des notes, Bruges 1923 , réimpr. Paris 1963, p. 281sq. ( cf. p . XVIII sq. ) , et Fried & Unguru 4 , p . 416 sq . Cf. aussi 8 M. Decorps-Foulquier, Recherches sur les " Coniques " d'Apollonios de Pergé et leurs commentateurs grecs : histoire de la transmission des livres grecs I-IV, coll . « Philosophies antiques » , Paris 2000 , p. 20-23 ( sur la tradition antérieure à Apollonios). Conon ( ca 280-ca 220a) est connu surtout pour avoir été l'astronome officiel du roi Ptolémée III Évergète à Alexandrie, et il se trouve cité dans le poème de Callimaque relatif à la « Chevelure de Bérénice » . Cependant, il étudia aussi les sections coniques et son travail servit de base au quatrième livre des coniques écrit par Apollonios, même si celui-ci y fait à peine une allusion dans le prologue, qui se présente sous la forme d'un lettre à Attale ( ?). Apollonios y fait référence aux questions qu'il aborde dans ce livre, et il mentionne Nicotélès nommément au sujet de la « première » et de la « deuxième » questions, qu'il énonce claire ment : la « première » question concerne « le plus grand nombre de points suivant lesquels des sections de cône , qui ne coïncident pas entièrement, peuvent se rencontrer mutuellement , et rencontrer la circonférence de cercle » ( trad . Ver Eecke ); la « deuxième » question concerne « le plus grand nombre de points suivant lesquels une section de cône et une circonférence de cercle rencontrent des sections opposées » (trad . Id. ) . En ce qui concerne la « première » question , Apollonios rapporte que Conon en avait présenté la démonstration à un certain Thrasydée (on parle souvent d'un livre de Conon Mpòc Opaovôatov ), et il affirme que Nicotélès de Cyrène attaqua cette démonstration « à juste titre » comme incorrecte . Quant à la « deuxième » question, Apollonios rapporte que Nicotélès se borne à dire qu'il la considérait, à l'encontre de Conon , comme susceptible d'être résolue ou démontrée, ce à quoi Apollonios ajoute qu'il n'a pas trouvé de démonstration ni par Nicotélès ni par quelqu'un d'autre. Apollonios dit que c'est la même chose aussi pour la « troisième » question ( portant, d'après l'interprétation de 9 T. L. Heath , Apollonius of Perga, Treatise on conics sections, Cambridge 1896, p. LXXII -LXXIII , reprise par Fried & Unguru 4 , p. 416 n . 2, sur tous les points où les sections opposées peuvent se rencontrer les unes avec les autres ), ainsi que pour les autres questions « du même genre» (portant vraisemblablement sur les points où les sections coniques, les cercles , ainsi que les sections opposées peuvent se rencontrer les uns avec les autres). Il serait en train de montrer ainsi nettement sa priorité dans la recherche concernant les sections opposées. Enfin , Apollonios ajoute que la démonstration de tout cela exige l'élaboration de théorè mes fort complexes, qui sont très utiles pour l'établissement des limites de la recherche (le terme grec est dloplouoi, notion que Fried, dans Fried & Unguru 4, p. 417 n. 5 , interprète au sens technique de « limits of possibility » ). Et , sur ce point, Apollonios mentionne à nouveau Nicotélès , en affirmant qu'il avait tort lorsqu'il disait , toujours dans le contexte de sa polémique avec Conon , qu'aucun des théorèmes auxquels celui -ci avait consacré ses recher ches n'avait la moindre utilité pour l'établissement de ces « limites » . En fait, Apollonios défend leur utilité , au moins relative . De toute évidence, les détails de l'ensemble du témoignage d'Apollonios nous échappent et ne peuvent pas être dûment jugés aujourd'hui , puisqu'on n'a pas conservé ni l’écrit de Conon ni la réplique de Nicotélès . PEDRO PABLO FUENTES GONZÁLEZ .

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989 ( ?) - 45a

Philosophe romain néo -pythagoricien . Témoignages et fragments. 1 A. Swoboda, P. Nigidii Figuli operum reli quiae, Wien /Praha 1889 , réimpr. Amsterdam 1964 , 143 p . , contient l'ensemble des fragments, les testimonia de uita et studiis, avec un conspectus fragmen torum et un index nominum et rerum , précédé d'une introduction (Quaestiones Nigidianae, p. 3-63 ) . Ce livre reste l'ouvrage de base, même s'il comprend des

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fragments douteux et représente un état ancien de la critique textuelle . A compléter par 2 G. Funaioli , Grammaticae Romanae Fragmenta , vol . I , coll . BT, Leipzig 1907, p . 158-179 ; l'auteur propose aussi une liste des testimonia et recense les fragments, mais dans un ordre différent de celui de Swoboda et en éliminant tous ceux qui ne présentent pas un caractère d'absolue certitude. 3 F. Semi , P. Nigidius Figulus ( loannes Lydus ), Fonteius et Etruscae disciplinae scriptores, coll . « Scriptorum Romanorum quae extant omnia » 37-38 , Venezia 1964, 127 p .; cette édition n'apporte rien de neuf par rapport aux précédentes: l'auteur reprend la liste de Swoboda, mentionne les réserves de Funaioli, mais sans se prononcer personnellement. 4 D. Liuzzi , Nigidio Figulo , astrologo e mago . Testimonianze e frammenti, Lecce 1983 , 117 p . ( introduction , texte , traduction et commentaire des fragments, à l'exclusion des commentarii grammatici). Études. 5 W. Kroll, art . « P. Nigidius Figulus » , RE XVII 1 , 1936 , col . 200 212 ; 6 L. Legrand, Publius Nigidius Figulus, philosophe néo - pythagoricien orphique, Thèse complémentaire présentée à l'Université de Clermont, Paris 1932 , 214 p . Cet ouvrage est le seul à proposer une traduction des fragments ( p . 97-214 ) , mais il insiste trop longuement sur des spéculations mystiques et occultes dont le rapport avec l'œuvre de Nigidius est souvent trop lointain . 7 L. Ferrero, Storia del pitagorismo nel mondo romano ( Dalle origini alla fine della repubblica ), Torino 1955 , p . 285-310 ; 8 A. Della Casa, Nigidio Figulo, Roma 1962 , 138 p . Cette étude contient des aperçus originaux sur la biographie antique de Nigidius ( chap. 1 « Sulle tracce di una perduta biografia suetoniana » ) et une analyse de l'æuvre. Voir le c.r. de 9 H. Thesleff, Gnomon 37 , 1965 , p. 45-48 . Biographie. Sa carrière ( voir infra ) et son nom ( il possède les tria nomina ) prouvent sa qualité de citoyen romain. Mais il n'est pas possible de préciser ses origines. Seul 10 T. P. Wiseman , New men in the Roman senate 139 B.C.-A.D. 14 , Oxford 1971 , p . 92 et 244, en fait un homo nouus et le croit originaire de Pompéi. Mais il est en général présenté comme un membre d'une famille prétorienne et serait un descendant de C. Nigidius , préteur en 1459. Della Casa 8 , p . 1 , suggère en outre des origines étrusques qui expliqueraient sa connais sance de la disciplina etrusca. Le cognomen « Figulus » n'est pas mentionné dans les sources contempo raines, à l'exclusion de l'en - tête de la lettre que Cicéron lui adresse en 46 (Ad fam . IV 13 : P. Figulo ), mais il figure couramment dans les cuvres du premier siècle de notre ère ( Lucain I 639 , Pline l’Ancien) et chez les auteurs postérieurs. Il a trouvé une explication tardive : Nigidius aurait reçu ce surnom parce qu'à ses yeux le monde tournait à la vitesse d'un tour de potier ( Schol. Lucan . I 639 ) . Saint Augustin ( Ciu . Dei V 3 , 194) précise même qu'il avait formulé cette réponse pour expliquer le destin dissemblable des jumeaux . Ces indications constituent bien sûr une tentative a posteriori pour éclaircir un cognomen qui paraît étrange et que l'on rattache ainsi aux préoccupations du philosophe. Il est beaucoup plus difficile de déterminer la date à laquelle elles apparaissent. 11 C. Brugnoli, « Rota figuli » , RivCultClassMed 9 , 1967 , p . 226-229 , pense

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qu'elles sont connues du temps d'Apulée ; pour Della Casa 8 , p . 15 , elles se trouvaient dans une biographie écrite par Suétone . Sa carrière politique peut être reconstruite indirectement grâce aux témoi gnages que nous possédons. Nigidius est sénateur en 63a ( Pro Sulla 14, 42) au moment du consulat de Cicéron et de la conjuration de Catilina ; il est même chargé de noter l'interrogatoire des Allobroges et leurs dénonciations . Il a par conséquent exercé la questure avant cette date. Selon Plutarque (Cicéron 20 , 3 ; An seni 27 ) , il aurait alors conseillé le consul et l'aurait même fortement poussé à agir pour réprimer la conjuration de Catilina . Il faut noter dès ce moment ses rapports étroits avec Cicéron ( cf. Ad fam . IV 13 ) . Nous retrouvons Nigidius en 60 ; au moment où va s'ouvrir le procès de C. Antonius , accusé de concussion , il intervient dans une réunion publique en menaçant d'un procès les juges qui feraient défaut et favoriseraient trop ouvertement l'accusé (Ad Att. II 2 , 3 ) . Exerce -t - il alors des fonctions officielles ? On admet le plus souvent qu'il est édile . Mais 12 E. Badian , « Caesar's cursus and intervals between offices » , JRS 49 , 1959 , p. 81-89 , repris dans Studies in Greek and Roman History, Oxford 1964, p. 163 , considère qu'il pouvait prendre la parole sans exercer de fonctions officielles. 13 M. Mayer, « Puntualizaciones sobre el cursus honorum de Publio Nigidio Figulo » , Pyrenae 9-10 , 1973-1974 , p . 181-194, préfère placer l'édilité en 61 pour faire de Nigidius fin 60 un iudex quaestionis qui instruit les prélimi naires du procès. De toute façon , il est nécessaire que Nigidius exerce une magistrature vers cette date. L'hypothèse d'un tribunat en 59 est mentionnée par 14 J. Carcopino, La basilique pythagoricienne de la Porte Majeure, Paris 1927 , p . 197 , et par 15 T.R.S. Broughton, The Magistrates of the Roman Republic, New York 1951-1952 , t . II , p . 190 ) ; mais elle est finalement rejetée dans Broughton 15 , t. III : Supplement, Atlanta 1986, p . 147 , ( où est repris le cursus mentionné plus haut : édilité en 60 , iudex quaestionis en 59 , puis préture ); elle est en effet impossible à admettre parce qu'il est tout à fait irrégulier d'exercer deux magistratures différentes, deux années consécutives . Or Nigidius est préteur en 58 (Ad Quint. I 2 , 16 ) . Cicéron le cite même parmi ceux qui lui sont très favorables (amicissimi ) . Ce renseignement, l'un des plus précis que nous possédons sur Nigidius, permet de dater sa naissance au plus tard de 98. Mais son activité en tant que préteur nous échappe : il apporta sans doute son soutien à Cicéron, contraint de s'exiler en 58 (Ad fam . IV 13 , voir infra ). En 51 , Cicéron , partant pour la Cilicie qu'il doit gouverner comme proconsul, le rencontre à Éphèse au moment où s'achèvent ses fonctions de légat (Tim . I 1 , 2 : ex legatione decedens ). Il se peut que Nigidius ait exercé d'autres fonctions politiques, mais pour nous sa carrière s'arrête là : elle n'est donc pas très importante, puisqu'il n'est pas parvenu au consulat . Mais il convient de noter ses liens avec Cicéron et les optimates, liens dont témoignent la lettre à Quintus, citée plus haut, et la lettre adressée à Nigidius lui-même (Ad fam . IV 13 , 7 ) où Cicéron affirme : « je garderai le souvenir de tout ce que tu as fait pour moi aux jours les plus sombres de ma vie » . Dans la guerre civile de 49, Nigidius se range aux côtés de Pompée et des optimates. Après être resté avec L. Domitius Ahenobarbus à Corfinium en

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février 49 , il se rend à Capoue (Ad Att. VII 24) et suit sans doute Pompée en Épire. Après la victoire de César il vit en exil : en août 46, Cicéron lui adresse une lettre de consolation , n'ayant pas, écrit - il, la possibilité de favoriser son retour à Rome, mais il estime que sa situation n'est pas désespérée ( Ad fam . IV 13 ) . Il est vraisemblable que les césariens n'étaient pas favorables à Nigidius ( Della Casa 8 , p . 43-53 ) : les sympathies de l'opinion publique n'allaient pas au pythagorisme ( cf. infra ) et le goût de Nigidius pour les spéculations occultes pouvait passer pour dangereux. Il meurt en exil en 45 , comme l'indique la Chronique de Jérôme (ad Eus. Chron . Ol. 183 , 4). Le philosophe. Tous les témoignages contemporains ou postérieurs insistent sur la science et l'érudition de Nigidius ( Cic . , Tim . I 1 ; Ad fam . IV 13 , 3-4 ; Gell. IV 9,1 ; X 11 , 1 ; XIII 10 , 4 ; XV 3,5 ; XIX 14 , 1 ) ; Cicéron le présente comme « un chercheur acharné et attentif dans tous les domaines que la nature a enveloppés de ténèbres » ( Tim . I 1 ) . Son æuvre laisse voir des connaissances considérables qui appartiennent à des domaines très divers : elles empruntent à la philosophie, à l'orphisme, aux disciplines étrusques , aux spéculations orientales, à l'astronomie et même à la science chaldéenne et égyptienne . Il ne nous est évidemment pas possible de préciser l'origine de ce savoir : il pouvait être acquis à Rome (Ferrero 7 , p . 296-298 ) . A. Della Casa 8 , p. 20 , suggère le nom d'Alexandre Polyhistor. Seules les scholies de Lucain ( Ad Lucanum I 639 ) mentionnent un voyage en Grèce et la légation en Asie lui permit sans doute des contacts avec le monde oriental. Nigidius est assurément l'un des représentants les plus marquants du néo pythagorisme à la fin de la République. Certes, son appartenance à ce mouve ment est mise en doute par Thesleff 9 , sans raisons véritables, et discutée par 16 Danuta Musial, « “ Sodalicium Nigidiani" . Les pythagoriciens à Rome à la fin de la République » , RHR 218 , 2001, p . 339-367. Les fragments qui subsistent de ses æuvres ne mentionnent pas le nom de Pythagore, ne semblent pas contenir d'allusions aux questions considérées comme caractéristiques du pythagorisme: musique, mathématiques, éthique et politique ( 17 E. Rawson, Intellectual Life in the Late Roman Republic, London 1985 , p. 291-292) . Mais l'originalité de sa pensée ne doit pas l’exclure de ce mouvement ; il faut noter son intérêt pour le langage, pour l'astronomie et la divination ainsi que sa volonté de percer les secrets de la nature ; ses recherches sont proches de celles de Varron, avec lequel il est souvent comparé ( par exemple Gell . XIX 14 , 3 ; Servius Ad Aen . X , 175 ) . En outre, ses contemporains le considéraient comme un pythagoricien : Cicéron affirme qu'il a restauré ( renouare) la discipline des anciens pythagoriciens ( Tim I 2 ) ; après lui , Jérôme le qualifie de Pythagoricus. Il avait sans doute constitué , sinon une école , du moins une confrérie (sodalicium ) qui réunissait un nombre important de membres ( Ps . Cicéron, In Sallustium 14 ; Schol . Bob. , Ad Cic. In Vatin . 14 , p. 317 Orelli ; selon Musial 16 , p. 357-358 , il s'agirait simplement d'un groupe d'amis ). Carcopino 14, p . 196 206 , insiste sur le caractère mystique de cette « chapelle » reproduisant l'organi sation pythagoricienne et présente Nigidius comme un apôtre. Il est sûr que ces réunions d'initiés , ces spéculations mystérieuses déconcertaient l'opinion publi

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que ; on accusait les pythagoriciens de se livrer à toutes sortes de sacrilèges (Cic . , in Vatin . 6, 14 ; cf. 18 M. L. Freyburger, G. Freyburger, J.-C. Tautil , Sectes religieuses en Grèce et à Rome dans l'Antiquité païenne, Paris 1986, p. 215 218 ) ; au mieux , on les considérait comme une « faction peu recommandable » (minus probabilis, Schol. Bob. , Ad Cic. in Vatin . 14, p. 317 Orelli). Plusieurs anecdotes mettent particulièrement en relief le goût de Nigidius pour l'astrologie et la divination ainsi que les prédictions; selon Apulée (Apo logie 42 , 7 , qui rapporte une anecdote transmise par Varron ), par ses incanta tions il aurait amené des enfants à indiquer où se trouvait une somme d'argent perdue. Il aurait notamment prédit à C. Octavius , dès la naissance de son fils, le futur Auguste , en 63 qu'il serait le maître de l'univers ( Suétone , Aug. 94 , 6 ; Dion Cassius XLV 1 , 3-5 ) . Les fragments de ses euvres ( voir infra) révèlent le même intérêt pour la divination . De là vient l'image que se transmettent les siècles postérieurs; dans la Pharsale de Lucain ( 1 639-672) , il est « celui qui connaît les dieux et les secrets du ciel » ( 639) ; en apprenant que César a franchi le Rubicon , il consulte les astres, annonce qu'une catastrophe se prépare et prédit que finalement « la paix viendra accompagnée d'un maître » ( sur ce passage , souvent commenté , voir 19 R. J. Getty, « The Astrology of P. Nigidius Figulus (Lucan I , 649-65 ) » , CQ 35 , 1940-1941, p. 17-22 ; 20 A. Luisi , « Lucano e la profezia di Nigidio Figulo » , dans M. Sordi ( édit. ) , La profezia nel mondo antico, Milano 1993, p . 239-244 ; 21 A.-M. Lewis, « What Dreadful Purpose Do You Have ?: A New Explanation for the Astrological Prophecy of Nigidius Figulus in Lucan's Pharsalia I , 658-63 » , dans C. Deroux (édit . ) , Studies in Latin Literature and Roman history, t . IX , p . 379-400 ) . Saint Jérôme le présente comme un « mage » . Sa survie et son influence sont difficiles à mesurer : même si les auteurs anciens insistent sur sa science , ils font aussi remarquer la difficulté de sa pensée. Les œuvres de Nigidius « ne sont pas répandues dans le public ; leur obscurité et leur subtilité ont été délaissées comme peu utiles » (Gell . XIX 14,3 ; XVII 7 , 5 ) , à la différence de celles de Varron . Aussi n'en subsiste-t- il que quelques fragments. Néanmoins , l'abondance relative des citations chez Pline l'Ancien ou Aulu-Gelle laisse penser que ses écrits ont été connus assez long temps : voir 22 A. Roehrig, De P. Nigidio Figulo capita duo, Coburg 1887 , 63 p . , qui énumère les auteurs dont Nigidius serait la source , bien que cette étude ancienne doive être corrigée dans le détail . Quelques travaux ont fait apparaître son influence au temps d'Auguste : 23 J. Gagé , Apollon romain . Essai sur le culte d'Apollon et le développement du ritus Graecus à Rome des origines à Auguste, Paris 1955 , 741 p . , et surtout 24 J. Carcopino, Virgile et le mystère de la IVe Églogue, Paris 1943, 247 p . , qui insiste sur l'influence pythagoricienne dans la Quatrième Bucolique et fait de nombreux rapprochements avec Nigidius . 25 M. Mayer , « Quis fuit alter . En torno a Verg. Ecl. 3 , 40 » , Durius 2 , 1974 , p. 397-411 , s'interroge sur une allusion à Nigidius dans les Bucoliques , mais conclut négativement.

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Euvres. Nous utilisons constamment, sauf indication contraire, l'édition de Swoboda 1 . ( 1 ) Commentarii grammatici. Malgré quelques variantes (53 , 57 , 62 ), c'est le titre sous lequel apparaît le plus fréquemment ce traité de grammaire. Comme l'a fait Funaioli 2 , il faut éliminer un certain nombre de citations de Nonius insérées par Swoboda à la suite de 26 M. Hertz, De P. Nigidii Figuli studiis atque operibus, Berlin 1845 , 50 p. Bien qu'il en dénonce le caractère douteux dans son introduction et les fasse suivre d'un astérisque, il les conserve pourtant . Or ces passages ne contiennent aucune mention de Nigidius et ne lui sont attribués que par analogie . Pour les adjectifs en -osus , seuls les fragments 4 et 5 constituent un témoignage sûr où figure le nom de l'auteur , mais les suivants ( 6 , 7 , 8 ) ne présentent pas la même certitude. De même, en ce qui concerne les adverbes en -im , il faut conserver les fragments 11 et 12 et supprimer 13 à 33. En outre , il faudrait peut- être faire figurer un passage d'Aulu - Gelle ( XII 14 , 1 = 48 Funaioli ) qui mentionne les Commentarii gramma tici mais pour expliquer qu'une interprétation de l'adverbe saltem , attribuée à Nigidius , n'y figure pas . Notons également que tous les fragments ne permettent pas de déterminer avec exactitude ce qui revient à Nigidius : ce ne sont pas tous des citations et il s'y mêle souvent , chez Aulu-Gelle par exemple, des commen taires de l'écrivain qui mentionne Nigidius (cf. le fragment 5 ) . Cet ouvrage comportait au moins vingt - neuf livres, mais sur l'ensemble des fragments conservés , seuls quinze comportent l'indication du livre dont ils sont extraits . Il est bien plus difficile d'attribuer une place aux autres. Le contenu de certains livres nous échappe donc totalement et ces lacunes rendent la reconsti tution de l'ouvrage très incertaine : le classement proposé par Funaioli 2 a peu de points communs avec Swoboda 1 ; certains fragments sont même attribués à des æuvres différentes. Il est par conséquent malaisé de reconstituer le plan de l'ouvrage et l'on constate surtout la diversité des questions étudiées. Sur le contenu de l’æuvre , voir 27 A. Traglia, « Etimologia e sinonimia in Nigidio Figulo » , dans J. Collard ( édit . ) , Varron . Grammaire antique et stylistique latine, Paris 1978 , p . 273-289 , qui insiste sur sa communauté de pensée avec Varron, mais il faut aussi souligner les préoccupations d'une époque comme le fait 28 J. Collard, Varron grammairien latin, Paris 1954 . Dans ce traité , Nigidius s'intéressait à - la phonétique : 35-38 , 53-57 ; la notion de casus interrogandi ( 37 ) que Nigidius fait intervenir pour justifier la différence d'accentuation Váleri /Valéri a donné lieu à de nombreuses études qui se sont efforcées d'en préciser le sens: parmi les plus récentes : 29 S. Mariner, « Una paradoja fonemática Váleri/ Valéri» , Helmantica 5 , 1954, p. 141-165 ; 30 A. Ronconi, « Un equivoco di Aulo Gellio ? » , SIFC 28 , 1956, p . 450-459 ; 31 Id ., « I nomi dei casi e le ire di un linguista » , A & R 7 , 1962 , p . 91-95 , qui répond à 32 V. Pisani , « Casus interrogandi » , dans Hommages à Léon Hermann, Bruxelles 1960, p. 624-638 ; et , en dernier lieu 33 W. Belardi et P. Cipriano, Casus interrogandi : Nigidio Figulo e la teoria stoica della lingua, Viterbo 1990, 170 p . , qui analysent longuement ce fragment et étudient la théorie stoïcienne du langage.

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- la morphologie : en particulier l'alternance fit facitur ( 10) ou irascerel irasci (2), ou les formes correctes (63-64 ). - la syntaxe : valeur du futur antérieur ( 34), sens et valeur de quin ( 52). - la signification des termes archaïques (9, 40, 57 , 62). Il cherchait à préciser le sens exact des termes, en les distinguant de leurs synonymes ( 1 , 4 , 11-12 , 42 45 , 47-51 ) . Il opposait ainsi locuples et auarus ( 42-44 ) et analysait ce qui sépare mendacium dicere de mentiri (48 ) . Plusieurs fragments révèlent un grand intérêt pour l'étymologie : sens de religiosus (4) ou de frater interprété comme fere alter (50) . Sur le fragment 4, voir 34 M. Mayer, « Sobre el fragmento 4 ed . Swoboda de Publio Nigidio Figulo » , CFC 9 , 1975 , p. 319-328 . Nigidius insistait enfin sur l'origine naturelle du langage (Gell . X 4 = 41 ) . Ce traité a été diversement interprété: l'influence pythagoricienne est discutée par Thesleff 9 et Musial 16 , p . 362 ; Belardi 33 , p . 112 , indique une influence stoïcienne ; Della Casa 8 , p. 55-101 , souligne au contraire la place du pythago risme dans ce traité et en analyse longuement les aspects essentiels : origine naturelle du langage, importance accordée à l'étymologie , qui dévoile le sens véritable des mots . ( 2 ) De gestu ( ? ) . Une seule mention chez Quintilien, Inst. orat. XI 3 , 143 : « Nos ancêtres laisaient tomber la toge jusque sur les chaussures comme les Grecs le pallium ; et c'est ce que recommandent Plotius et Nigidius qui ont écrit vers cette époque sur le geste . » Nigidius avait donc traité du port de la toge et des gestes de l'orateur, questions qui constituent une partie importante de l'action oratoire. S'agissait- il vraiment d'un traité consacré à ce seul sujet et portant ce titre ou plutôt, comme le suggère Swoboda 1 , p. 83 , d'une cuvre plus vaste portant sur la rhétorique dans son ensemble ? De toute façon , son influence est restée très limitée. ( 3 ) De diis : ce traité comprenait au moins dix - neuf livres (Macrobe, Sat. III 4,6 = 69 ) dont il ne subsiste que quelques rares fragments. Il faut sans doute y rattacher quelques fragments concernant des divinités, mais pour lesquels nous n'avons pas l'indication de l'euvre dont ils sont extraits. En revanche, il est plus difficile d'inclure dans l'æuvre une série de citations concernant la Mère des dieux ( 75-76) où le nom de Nigidius n'apparaît pas, bien qu'il en ait sans doute parlé dans son cuvre , et, surtout, un long passage de Martianus Capella (78 ) sur le ciel des Étrusques qui contient sans doute des données empruntées à notre auteur, mais dont le nom n'est pas mentionné ( 35 S. Weinstock , « Martianus Capella and the cosmic system of the Etruscans » , JRS 36, 1946, p . 101-129 ; en part. 115-116 , pour Nigidius) . Cet ensemble très fragmentaire rend difficile toute approche précise de l'æu vre : elle constituait pourtant la première étude des divinités romaines puis qu'elle est antérieure aux traités de Varron , mais elle fut éclipsée par ces der niers. On y retrouve la même volonté d'expliquer le vocabulaire archaïque que dans les Commentarii Grammatici (71-72 , 77 ) , la recherche d'un accord avec la nature ( 66 ) - s'il s'agit bien d'une règle de vie . Nigidius proposait une synthèse originale où se rencontrent les croyances étrusques, l'orphisme et les religions

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orientales des mages ; il cherchait l'unité du divin ; c'est ce que révèle l'énumération des différents âges du monde (67 ) ou l'analyse des Pénates ( 69 ; pour Musial 16 , p . 362 n . 59 , aucun lien ne peut être établi avec le pythagorisme) ou dans les rapprochements établis entre Apollon , Janus et Diane ( 73 ) . (4 ) De augurio priuato. Une seule mention chez Aulu -Gelle ( VII 6, 10 = 80 ): « Les oiseaux opposés aux oiseaux de bon augure (praepetes) sont appelés inferae ( bas ) comme le dit Nigidius Figulus dans le livre premier de sa Science augurale privée : “ La droite s'oppose à la gauche , praepes à inferus ”. » L'ouvra ge comprenait au moins deux livres, comme l'indique la mention du livre I , et traitait de la science augurale privée , celle qui intéresse les particuliers dans le cadre de la religion domestique . On peut simplement conclure de ce passage que Nigidius étudiait le vol des oiseaux et les signes qu'il apportait. Il faut peut-être rattacher à ce livre le fragment 79 où Nigidius explique ce qu'est l'interpres. La citation de Servius ( Ad Aen . X 175 ) ne contient aucune indication permettant de conclure à un traité général sur la science augurale. ( 5 ) De extis. Une seule mention chez Aulu -Gelle ( XVI 6 , 12 = 81 ) : « Dans le traité qu'il a composé sur les entrailles des victimes, ( Nigidius Figulus ) déclare que le nom de bidentes ne s'applique pas aux brebis seules , mais à toutes les victimes qui ont deux ans . » Ce traité avait pour objet les animaux que l'on sacrifie et aussi l'examen de leurs entrailles ( notamment du foie ) et les conclu sions que l'on pouvait en tirer, fondées sur une science d'origine étrusque. (6 ) De somniis . Une seule mention chez Ioannès Lydus ( De ostentis 45 , p. 95-96 Wachsmuth ) : « Nigidius dans son examen des songes donne une inter prétation contraire au sujet du tonnerre. Il dit en effet que pour tous en général, l'arrivée des orages est funeste, même si elle ne cause pas de dommages, mais pour ceux qui croient en songe essuyer un orage, c'est de très bon augure et le présage d'un sort brillant . » L'interprétation des songes se rattache à la divi nation ; en outre, les pythagoriciens attribuaient une place importante au rêve. (7 ) Calendrier brontoscopique. Voir 36 A. Piganiol , « Sur le calendrier brontoscopique de Nigidius Figulus » , dans Studies in Roman Economic and Social History in honour of Allan Chester Johnson , Princeton 1951 , p. 79-87 , 37 S. Weinstock , « Libri fulgurales » , PBSR 19 , 1951 , p . 122-153 ; 38 L. A. Yelnitski , « Social and political aspects of the brontoscopic calendar of Publius Nigidius Figulus» , VDI 116 , 1971 , p. 107-116 ( en russe avec résumé en anglais) , qui critique l'attribution à Nigidius parce qu'il trouve dans ce docu ment une tendance démocratique en contradiction avec les « vues réaction naires » de notre auteur ; 39 C. Ampolo , « Lotte sociali in Italia centrale . Un documento controverso : il calendario brontoscopico attributo à Nigidio Figulo » , Opus 9-10 , 1990-1991, p . 185-196 ; 40 Ch . Guittard , « Les calendriers bronto scopiques dans le monde étrusco -romain » , dans C. Cusset (édit . ) , La météo rologie dans l'Antiquité entre science et croyance, Université de Saint- Étienne, 2003, p. 455-466 . Un long passage de Ioannes Lydus ( chap . 27-38 , p. 57-83 Wachsmuth = 83 Swoboda) contient un document intitulé « calendrier brontoscopique selon le

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cours de la lune , d'après le romain Figulus , tiré des écrits de Tagès , traduction littérale » . Il suit l'ordre des mois à partir du 1 er juin et indique pour chaque jour la signification du coup de tonnerre : présage heureux ou malheureux concernant l'agriculture, la vie politique ou sociale . L'origine première de ces textes est babylonienne ( voir Piganiol 36 ), mais ils se présentent comme étrusques sous le patronage de Tagès qui avait révélé la disciplina etrusca : l'interprétation des foudres y tenait une place importante. Ampolo 39 a insisté sur les éléments étrusques, et les échos des luttes sociales en Étrurie. Mais, selon Weinstock 37, p . 140-141, ils ont été adaptés et remaniés pour Rome sans doute par Nigidius lui - même : les dissensions entre les grands, les conflits et les troubles semblent évoquer la période de la fin de la République. ( 8 ) De sphaera. Voir 41 F. Boll , Sphaera. Neue griechischen Texte und Untersuchungen zur Geschichte der Sternbilder, Leipzig 1903, p . 350-377 . Servius mentionne cet ouvrage en parlant de sphaera Graecanica (84-85 ) ou de sphaera Barbarica ( 102 ). Il ne s'agit pas de deux traités différents, mais , comme l'a montré Boll 41 d'une même euvre où Nigidius traitait successivement du ciel des Grecs, c'est - à -dire des constellations qu'ils pouvaient observer, puis du ciel des barbares, c'est- à -dire des Égyptiens . Il devait étudier les planètes (87 ), les astres dont il mentionnait le lever, le coucher et la culmination , non seule ment pour les constellations du zodiaque, mais pour celles qui sont situées en dehors et qui apparaissent en même temps. La plupart des fragments, conservés dans les scholies aux Aratea de Germanicus et dans le Liber memorialis d'Ampelius, concernent des catastérismes. (9) De terris. Servius (Ad Aen . XI 715 = 101 ) mentionne un ouvrage intitulé De terris et cite un passage concernant le caractère des Ligures. En fait, le texte des manuscrits est erroné et le titre restitué: Swoboda 1 , p . 44-45 préfère la correction De sphaera. Mais , comme le soulignent Kroll 5 , coll . 206, et Roehrig 19 , p . 58 , on comprend mal de telles considérations dans un ouvrage d'astro nomie ; elles ont au contraire leur place dans un traité géographique . Il faudrait sans doute rattacher à cet ouvrage un long passage de Pline l'Ancien ( VI 39 , 211-218 ) concernant les différentes zones climatiques qui mentionne le nom de Nigidius . L'absence de référence au traité dans l'Histoire Naturelle ne suffit pas à en réfuter l'existence parce que Pline indique seulement le nom des écrivains qu'il utilise sans préciser le titre des euvres . ( 10) De uentis . Ce traité comprenait au moins quatre livres ( Schol. Bern . Ad Verg. Georg. I 432 ) . Nigidius étudiait les différents vents , leurs propriétés et les signes les concernant. ( 11 ) De hominum natura . Le titre de ce traité, qui comptait au moins quatre livres, est restitué par Kroll 5, col . 205 Les rares fragments qui ont été conservés laissent penser que Nigidius s'intéressait à l'anatomie, à la génération et au meilleur régime. ( 12 ) De animalibus. Ce traité , largement utilisé par Pline l'Ancien comprenait au moins 4 livres. Les fragments que nous possédons concernent surtout des faits remarquables ou extraordinaires et ne permettent pas de se représenter le

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contenu de l'œuvre . Toutefois Rawson 17 , p. 181 , indique que la description et l'identification de plusieurs animaux pouvaient figurer dans ce traité ; l'infor mation de Nigidius provient sans doute d'Aristote ( Rawson 17 , p. 182-183 ) : il cherchait à rendre accessible aux Romains le savoir d'Aristote et de Théophraste dans ce domaine . Selon Swoboda 1 , p . 63 , Nigidius se serait spécialement intéressé à l'amitié entre les animaux. MICHÈLE DUCOS . 59 NIGRINUS RE

II ?

Philosophe médio -platonicien qui aurait été le responsable de la « conver sion » de Lucien ( > L 66 ] ( de la rhétorique ) à la philosophie , s'il est bien un personnage historique et non pas , comme il semble plus probable, une pure fiction littéraire de Lucien destinée à faire l'éloge ( non toutefois sans ironie ? ) de la vie philosophique représentée par Athènes ( avec son amour pour la raison , la liberté et la simplicité ), face à la vie mondaine ( folle, tyrannisée et fausse ) de Rome. Témoignages. 1 H. Dörrie & M. Baltes , Der Platonismus im 2. und 3 . Jahrhundert nach Christus : Bausteine 73-100 : Text , Übersetzung, Kommentar, coll . « Der Platonismus in der Antike » 3 , Stuttgart /Bad Cannstatt 1993, C 9 , nº 98 ( Die Platoniker im Urteil Außenstehender : Höhenflug und Dunkel haftigkeit) 5 (= Nigrinus 1-5 ) , li . 31-58 , p . 102-105 (comment. p . 367-372) . Cf. 2 K. Praechter, Die Philosophie des Altertums, zwölfte, umgearbeitete und erweiterte , mit einem Philosophen- und Literatorenregister versehene Aufl., hrsg . von K. P. = Fr. Ueberweg , Grundriss der Geschichte der Philosophie I , Berlin 1926, p. 524-556 ( « Der mittlere Platonismus » ) , notamment p. 527 , 547 sq .; 3 A. Peretti, Luciano : un intelettuale greco contro Roma, Firenze 1946 ; 4 G. Anderson , « Lucian's Nigrinus : the problem of form » , GRBS 19 , 1978 , p . 367-374 ; 5 J. A. Hall , Lucian's satire , New York 1981 , p . 157-173 , 242-249 ; 6 C. P. Jones , Culture and society in Lucian , Cambridge (Mass. )/London 1986, p . 25 , 131 n . 69 ; 7 D. Clay , « Lucian of Samosata : four philosophical lives ( Nigrinus , Demonax , Peregrinus, Alexander Pseudomantis ) , ANRW II 36, 5 , 1992, p. 3406-3450 , notamment p. 3420-3425 ; 8 J. L. Brandão, « La morsure du chien : philosophie et politique dans le Nigrinus de Lucien » , dans P. Lévêque, J. A. Dabdad Trabulsi & S. Carvalho (édit . ) , Recherches brésiliennes : archéo logie, histoire ancienne et anthropologie, coll . « Annales littéraires de l'Univer sité de Besançon » 527 , « Centre de recherches d'histoire ancienne » 130 , Paris 1994 , p . 79-93 ; 9 B.-J. Schröder, « “ Eulen nach Athen ” : ein Vorschlag zu Lukians “ Nigrinus” » , Hermes 128 , 2000 , p . 435-442.

Historicité et chronologie . En principe Nigrinus n'est connu que par l'ouvrage que Lucien ( = + L 66) consacre à faire l'éloge de sa philosophie ( il le présente comme un « philosophe platonicien » ) , raison pour laquelle on a douté de son existence historique . Cependant, Praechter 2 , p. 547 sq . , 589, en était convaincu, et d'autres critiques estiment également qu'il n'y a pas de raison d'en douter ( cf. par exemple Anderson 4, p. 373 , Hall 5 , p. 163 sq . , et Jones 6 , p. 25 ) .

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Puisque Lucien le présente comme son contemporain , auquel il rend visite dans sa maison à Rome, on a placé son floruit vers la moitié du IIe siècle après J.-C. , en correspondace plus ou moins avec le floruit de Lucien lui-même (ca 165 ) . D'après le récit de Lucien , Nigrinus était très familiarisé avec la culture grecque, pour laquelle il éprouve un sentiment profond d'admiration : il regrette la vie à Athènes ( où il se serait sans doute formé à la philosophie ) ainsi que ses habi tants, tandis qu'à Rome, dont il abomine le milieu social et culturel, qu'il semble par ailleurs connaître très bien , il mène une vie à l'écart. Dans sa maison , il enseigne bénévolement aux disciples qui s'adressent à lui , les exhortant à pratiquer sa propre philosophie. On a pensé aussi que le cognomen « Nigrinus » pourrait indiquer un rapport avec les Auidii de Fauentia , dont deux étaient des amis de Plutarque ( cf. PIR2 A 1407-1410 ) : à noter C. Auidius Heliodorus (+ H 28 B ) , rhéteur et philosophe sous Hadrien ( PIR2 A 1405) et deux Auidii philosophes de Thespies ( Avidius Archestratus [ 2A 312 ] et Avidius Parménidès): cf. 10 A. Plassart, « Inscriptions de Thespies » , BCH 50, 1926 , p . 283-462, notamment p. 433 n° 63 ( IG 2519 ; l'inscription semble du IIe siècle ). Par ailleurs, dans un papyrus de Memphis qui peut être daté du début du 111 siècle et qui contenait une liste d'ouvrages philosophiques et littéraires, on a voulu retrouver le nom de notre philosophe ( cf. 11 F. Longo Auricchio , « Su alcune liste di libri restituite da papiri » , RAAN 46 , 1971 , p . 144-145 ; 12 A. Linguiti (édit. ) , CPF I 1 * 2 , p. 87 = PRossGeorg I 22 , col . I 15 = Pack2 nº 2089) : [ N ]!ypivov ’ An [ 0 ]hoyíal ( cf. 13 U. Wilcken , dans L. Mitteis & Id . , Grundzüge und Chrestomathie der Papyruskunde, Erster Band: Historischer Teil; Zweite Hälfte : Chrestomathie, n° 155 , Leipzig /Berlin 1912 , p . 182-184 ; cf. 14 V. Jernstedt, « Veščij papirus », Žurnal Ministerstva narodnogo prosveš čenija ( Petrograd) 1901, p. 48-55 , repris dans Commentationes Nikitinianae : sbornik statej po klassičeskoj filologii v čest Petra V. Nikitina po povodu tridcatiletija sluzenija ego russkomu prosveščeniju 1871-1901, Petrograd 1901 , p . 342-349 , et dans ld ., Opuscula , Petrograd 1907, p . 171-178 ) . Cependant, Wilcken 13 considérait déjà la restitution Nuypivov comme trop courte et peu en accord avec les traces de l'écriture . En fait, la lecture de la lettre qui suit la lacune n'est pas sûre, et l'extension de la lacune semble plus grande. C'est pour cette raison que d'autres critiques ont pensé plutôt à Pérégrinus ( IIɛ ]peypivov ), le philosophe cynique qui fut protagoniste lui aussi d'un écrit de Lucien : cf. Praechter 2 , p . 547 ; 15 W. von Christ & W. Schmid , Geschichte der griechischen Literatur, t . II 2 , München 19135 , p. 572 n . 9 = 19246, p . 734 n . 4 ) ; et notamment 16 W. Crönert, c . r. de J. Sykutris, Die Briefe des Sokrates und der Sokratiker, Paderborn 1933 , dans Gnomon 12 , 1936 , p . 146-150 , notamment p. 149 n . 1 ; 17 J. Schwartz ( édit . ) , Lucien de Samosate , Philopseudès et De morte Peregrini, avec introd . et comm . , coll . « Publications de la Faculté des Lettres de l'Université de Strasbourg. Textes d'Étude » 12 , Paris 19632 , p. 101 ; Jones 7 , p . 25 , 131 n . 69. Plus récemment, Linguiti 12 , p. 88 , 92 , continue à admettre cette possibilité (cf. aussi Clay 7 , p. 3421 ) . Il n'écarte pas qu'il puisse s'agir du Nigrinus de l'écrit de Lucien , mais en tout cas il considère moins

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Vraisemblable que Νιγρίνου απ [ ο ] λογίαι puisse etre interprété comme un titre alternatif de cet écrit. Indépendamment de l'identification de l'auteur mentionné dans le papyrus, rien n'indique que le Nigrinus philosophe platonicien de Lucien ait vraiment existé . De même , aucune preuve ni aucun argument solide ne peut confirmer cette existence réelle à travers l'hypothèse selon laquelle c'est la personnalité du philosophe grec médio -platonicien Albinus (** A 78 ) , lui - même peu connu , qui se cacherait en fait derrière la dénomination de « Nigrinus » , qui serait donc un pseudonyme plus ou moins burlesque . Le premier à proposer cette identification, fondée sur le jeu de mots niger /albus, a été 18 F. V. Fritzsche ( édit. ) , Lucianus Samosatensis, Rostock 1869 , t . II 2, p. 50 sq.: cf. aussi 19 L. Hasenclever, Über Lukians Nigrinos, Inaug . - Diss . München 1907 [ 1906 ) ( = Königliches Maximi lians-Gymnasium , Programm 1908 ), p. 13 ; 20 A. Quacquarelli, La retorica antica al bivio (l'Ad Nigrinum e l'Ad Donatum ), Roma 1956, p. 43-49 ; 21 P. Steinmetz , Untersuchungen zur römischen Literatur des zweiten Jahrhun derts nach Christi Geburt, coll . « Palingenesia » 16 , Wiesbaden 1982 , p. 112 ; 22 H. A. S. Tarrant, « Alcinous , Albinus , Nigrinus» , Antichthon 19 , 1985 , p. 87 95 ; 23 J.-M. André, « Les écoles philosophiques aux deux premiers siècles de l'Empire » , ANRW II 36 , 1 , 1987 , p . 5-77 , notamment p. 59 sq . ; 24 M.D. Macleod, « Lucianic studies since 1930 » , with a chapter ( VII ) : « Recent work ( 1930-1990 ) on some Byzantine imitations of Lucian » , by B. Baldwin , ANRW II 34 , 2 , 1994 , p. 1362-1421 , notamment p . 1389 sqq. C'est Tarrant 22 en particulier qui a développé cette hypothèse : il suggère que le philosophe Albinus aurait connu une conversion dans sa vie , en passant de la composition de commentaires philosophiques sur Platon à la vie d'un philosophe -prédicateur éclectique ; et il prétend qu'il aurait changé parallèlement son nom pour celui d'Alcinoos, sous lequel un ouvrage intitulé Disdaskalikos a été conservé ( l'identification d’Albinus avec Alcinoos est d'usage depuis la fin du XIXe s. , mais repose sur des bases insuffisantes ; " A 92, p. 112 ). En transformant le nom en Nigrinus, Lucien se moquerait de ce changement de nom d'Albinus en Alcinoos, et il représenterait en même temps de façon ironique cette conversion ou change ment de vie. En réalité, comme le remarque Dörrie , dans Dörrie & Baltes 1 , p . 368 n . 1 (cf. 25 Id ., art. « Albinos » , RESuppl. XII , 1970 , col . 14-22 , notamment col. 15 ), même si on peut voir dans le nom Nigrinus une association avec niger , un homme « obscur» , on n'éclaire pas par là complètement le pseudonyme: même s'il est tentant de rapprocher le nom de Nigrinus du nom d'Albinus (par l'asso ciation avec albus), et même si les jeux de mots étaient du goût de Lucien, cela ne peut constituer ni une preuve ni un argument de probabilité en faveur de cette identification. On peut évoquer l'image insociable et autoritaire que Lucien présente de Nigrinus, mais aucun trait concret de la caractérisation de Nigrinus, dont on sait seulement ce que Lucien en raconte , ne permet de le rattacher au moindre témoignage sur Albinus . Pour sa part, Clay 7 , p. 3420 , signale que Lucien n'aurait pas éprouvé le moindre scrupule à mentionner directement ses contemporains et que les pseudonymes de ses dialogues ne suivent jamais le modèle de l'inversion ( cf. aussi Anderson 4, p. 373 n. 20). Devant cette situation , donc , le plus raisonnable est de considérer, comme le fait 26 J. Bompaire, Lucien écrivain : imitation et création , coll . BEFAR 190 ,

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Paris 1958 , réimpr. coll . « Theatrum Sapientiae. Essais » 1 , Paris 2000 , p. 530 , que Nigrinus n'est qu'un produit de l'imagination de Lucien. Ou bien , comme l'écrit Brandão 8 , p. 83 n . 11 : Nigrinus est un personnage de Lucien et il peut avoir, comme d'autres personnages, des traces de plus d'une figure historique, suivant une technique de composition qui semble caractéristique de l'auteur. Image philosophique. En faveur de l'idée que Nigrinus n'est en dernière analyse qu'une « invention » de Lucien , on peut ajouter que le dialogue à travers lequel celui -ci le présente se revèle de toute évidence comme une pure fiction littéraire. Le dialogue est précédé d'une lettre de salutation -demande d'excuses ( le ton est assez ironique) adressée à Nigrinus . Par ailleurs, l'évocation que Lucien fait de la philosophie et la personnalité de Nigrinus, pour expliquer à son interlocuteur anonyme la raison de la transformation personnelle soudaine qu'il a vécue , est pleine de lieux communs littéraires et philosophiques . Si on laisse de côté quelques éléments scénographiques, comme la présence dans le cabinet d'étude du philosophe d'une tablette contenant des dessins de figures géométri ques et une sphère représentant l'univers ( $ 2) , l'image de Nigrinus qui en résulte n'a pratiquement rien à voir avec ce à quoi on s'attendrait pour un plato nicien . Nigrinus y apparaît plutôt en moraliste. Il exalte avec nostalgie la liberté et le mode de vie d'Athènes, montrant une image de celle-ci passablement idéalisée ( § 12-14) . Il s'attaque en revanche aux vices de Rome ( $ 15-34) , en particulier à l'amour de ses habitants pour la richesse et à leur recherche insensée des plaisirs du moment. Il présente en général le milieu romain comme dominé par la démence, et pour cette raison comme un grand « gymnase » de vertu (§ 19), puisque ce milieu met sans cesse à l'épreuve l'âme des individus et leur capacité à résister à tant de tentations . Il fustige les riches, les adulateurs et les faux philosophes . Il prône en revanche une vie de simplicité , dans une intervention où se mêlent des idées qui nous rappellent quelquefois des traits cyniques : aucun souci pour les biens matériels (la possession d'une propriété dont on ne s'occupe pas représente sans doute un lieu commun cynique), une nourriture frugale, des exercices gymnastiques modérés, un habillement sobre, un esprit équilibré, un caractère aimable. On a l'impression en fait d'un mélange de lieux communs qui ne décrivent en réalité aucune doctrine en particulier. Ce qu'on peut constater par ailleurs c'est une critique de certains philosophes qui estiment bon d'enseigner les jeunes à supporter beaucoup de souffrances et de douleurs ( § 27). Est -ce aux stoïciens, ou au moins à certains représentants de cette philosophie , qu'il est fait allusion ? Nigrinus manifeste par ailleurs sa propre idée de l'éducation : il ne faut nullement éduquer les âmes dans l'endurance et l'insensibilité, comme si on avait un modèle absolu et abstrait de formation, mais plutôt envisager ce qui s'accorde aux forces humaines selon chaque âge et chaque situation particulière. La critique de Nigrinus-Lucien contre Rome se concentre finalement, suivant un goût très lucianesque, sur certaines habitudes rattachées aux banquets ou aux bains. L'idée d'un Lucien conspirateur de la résistance contre Rome, esprit profon dément et violemment inspiré de sentiments anti -romains (anti - impérialistes), une idée défendue notamment par Peretti 3, doit être rejetée, comme le remarque Bompaire 26 , p. 500, 510 ( cf. aussi 27 V. Fumarola, « Conversione e satira antiromana nel “ Nigrino " di Luciano » , PP 6, 1951 , p. 182-207 ), même si cette hypothèse a été reprise avec vigueur par Brandão 8 , p . 83 , 86, 90 ( ** L 66 ). Pour notre part, nous sommes prêt à reconnaître qu'il faut bien se garder de masquer, à travers une vision purement littéraire, toute la portée idéologique que l'ouvrage de Lucien a pu avoir à son époque. Cela dit, l'idée d'un Lucien qui

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agit avec son Nigrinus en activiste presque révolutionnaire nous semble beau coup trop exagérée. A côté de l'éloge de la vie philosophique face à la vie mondaine, l'autre grand sujet du Nigrinus est l'opposition entre le vrai philosophe et le charlatan. Notamment dans la partie finale du dialogue, Lucien fait l'éloge de la capacité surprenante de Nigrinus à captiver profondement ses auditeurs. Encore une fois, il y a ici sans doute beaucoup de lieux communs. L'idée même que Lucien , qui présente la pensée et la personnalité de Nigrinus , affirme s'être converti à la philosophie après avoir écouté notre « platonicien » ( § 1 sq . , 5 , 35 sqq . ) n'est sans doute qu'une fiction littéraire, même si certains critiques y ont vu une conversion authentique ( cf. par exemple 28 A. Gallavotti, « Il “ Nigrino ” di Luciano » , A & R 11 , 1930, p. 252-263 , et Quacquarelli 20, p. 5 et I , ch . 2 ), alors que d'autres en revanche l'ont toujours envisagée avec soupçon, y décelant de l'ironie ( cf. Hasenclever 19 , p . 44 sq . , 28 bis R. Venchi , La presunta conver sione di Luciano , Roma 1934 , 78 p . , Fumarola 27 , Bompaire 26 , p . 510 sq . , 29 F. Barberis, « Introduzione » , dans Luciano, Racconti fantastici, trad. e note di M. Matteuzzi , coll . « I grandi libri Garzanti » 571 , Milano 1995 , p . VII - XLI , notamment p . X , et Brandão 8, p. 86 sq .; » L 66). Le dialogue à travers lequel Lucien communique cette soi- disant conversion à la philosophie a été considéré comme un élément choquant dans la structure de l'ouvrage (cf. Anderson 4 ) . A l'encontre de Peretti 3 , p. 114 sqq . , pour qui la fiction de ce dialogue serait un procédé destiné à égarer les autorités de la censure, en masquant l'essentiel , c'est - à - dire l'attaque politico - sociale contre Rome , Bompaire 26 , p . 510 sq . , considère que la raison des particularités et des bizarreries de composition du Nigrinus doit être cherchée tout simplement dans les remaniements relevant du pur métier d'écrivain : soit Lucien aurait voulu rendre moins indigeste la satire à travers l'épisode de la conversion ; soit, à l'inverse, « il aurait étoffé le drame primitif de la conversion par les clichés anti romains que la visite à Nigrinus lui permettait d'insérer facilement » , ce qui semble à Bompaire moins convaincant, car cette hypothèse tend à faire prendre au sérieux l'épisode autobiographique, généralement considéré comme ironique. Dans le même sens, Anderson 4 , p. 372 sq . , considère le caractère désorga nisé de la composition du Nigrinus , en particulier celui de l'encadrement du dialogue , comme dû à la volonté de Lucien de combiner le dialogue et la comé die ( dans le cadre de son « dialogue comique » qui rattache la philosophie à la comédie ) , autrement dit les réminiscences platoniciennes ( Phèdre, Banquet) avec l'auto -parodie. D'après lui , indépendamment du fait que Nigrinus ait existé ou pas ( il n'y a pas de raison en principe pour en douter ), les motifs de Rome et de la conversion font partie ensemble du thème plus ample du philosophe qui fait une révélation frappante ( dans ce cas à Lucien ) lorsqu'il tourne le dos à la cité en proie à tous les vices ( cf. Dion de Pruse XXXII 97 et Philostrate, V.Apoll. I 16 ) . En fait, l'anecdote de Lucien qui cherche à Rome un médecin capable de guérir sa maladie des yeux ( $ 2 , 4 ) n'est qu'un symbole littéraire de la cécité spirituelle (cf. Clay 7 , p . 3422 sqq . ) . Comme le remarque Clay 7 , p. 3425 :

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« Lucians' “ Nigrinus ” is an elaborate and highly allusive staging of the pheno menon of the conversion to philosophy in an age when philosophy might have been converted to religion but never abandoned the goddess Rhetorike » . Encore dans le même sens , on peut citer plus récemment Schröder 8 , laquelle considère aussi que c'est Lucien lui - même tout simplement qui se trouve derrière la figure de Nigrinus : il se serait servi de cette figure ( sans doute fictive ) pour mettre en valeur avec ironie sa capacité d'influencer ses auditeurs lecteurs ( son interlocuteur lui-même se manifeste à la fin prêt à la conversion ). Nigrinus représenterait donc tout simplement un nouveau rôle joué par Lucien pour exprimer une série d'idées issues de la philosophie morale populaire » . PEDRO PABLO FUENTES GONZÁLEZ.

60 NIGROS DE CHÉRONÉE

I

Sophiste . Dans les Quaest. Conv. VI 7 , Plutarque donne de lui un portrait chargé ; le comportement et l'état d'esprit qu'il lui prête sont un résumé des défauts qu'il reproche couramment aux stoïciens (cf. D. Babut, Plutarque et le stoïcisme, Paris 1969 , p. 253-254) . Le « philosophe illustre » dont Nigros était l'élève est donc vraisemblablement Épictète (* + E 33 ) : voir M. Cuvigny, Actes du Ville Congrès de l'Association G. Budé, Paris 1968 , p . 565-566 . Nigros mourut en Gaule, au cours d'une tournée de conférences : Plutarque expose dans le De tuenda sanitate ( 131 A- B ) les circonstances de sa mort. BERNADETTE PUECH .

I

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Philostrate , Vie d'Apollonius de Tyane VI 12 , rapporte qu'un certain Nilus , le plus jeune des Gymnosophistes, fut immédiatement accueilli, sur son souhait, parmi les disciples d'Apollonius ( A 284 ) . En effet, admis chez les Gymno sophistes , après avoir renoncé à son patrimoine , il avait été déçu de ne pas trouver chez eux la sagesse des Indiens . C'est sur lui et sur Ménippe ( * • M 130) qu'Apollonius se déchargea des discussions qui l'opposaient à Euphratès ( E 132 ] (V. Apoll. VI 28 ) . PATRICK ROBIANO.

62 NILUS PLREI : 2 ( « Dionysius Nilus » )

MIV

Personnage de l'aristocratie romaine et philosophe (cynique ?) . Sources. L'empereur Julien vitupère contre lui dans une lettre qu'il écrivit durant son séjour à Antioche entre juillet 362 et le 5 mars 363 (Lettre 82 , introduite, éditée et traduite par 1 J. Bidez , Lettres , t. I 2 , CUF, Paris 1960, p . 92-94 et 133-143 ) . Par ailleurs Libanios, dans une lettre qui paraît dater de la fin de 362 ( Lettre 758 , 5 , p . 684 Foerster ), évoque une mésaventure arrivée à Nilus comme si elle avait eu lieu récemment. Le contexte est le suivant : Libanios ( L 52 ) , le maître de Julien (» I 46 ) , et son ami Aristophane, dont il a plaidé la cause auprès de

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l'Empereur, ont eu peur soudain , à la suite d'une méprise, que Julien ne les écoute pas. A la fin de cette lettre, Libanios fait part à l'Empreur de la frayeur qu'ils éprouvèrent: « Nous craignîmes aussitôt qu'ayant pris le parti d'engager la lutte contre mon discours , tu fisses succomber ton maître et que tu causasses à Aristophane la même déconvenue qu'à Nilus » . Libanios fait encore allusion à ces événements dans son Discours 18 , 198 : « La cité (d'Antioche ) ayant osé commettre de plus grands méfaits encore , ... laissant de côté les châtiments dont dispose le pouvoir, (Julien dans son Miso pogon ) recourut à ceux dont use un rhéteur. Il aurait pu torturer et tuer ; c'est par un discours qu'il se vengea de la ville. Il avait agi de même, je pense, auparavant déjà, envers un Romain qui , par son outrecuidance ( npòç ăvôpa ' Pwualov Opaovvóuevov ), aurait mérité à tout le moins de perdre ses biens. Au lieu de les lui confisquer, Julien , pour l'atteindre, décocha contre lui les traits d'une épître » (trad . Bidez , ibid ., p. 142 n . 2 ) . Nilus/ Denys . La Lettre 82 de Julien a pour titre : ’lovilavòç xarà toð Neihov , mais à deux reprises (en 444 c , p. 136 , 6 Bidez et 445 b , p. 138 , 20 ), Julien s'adresse à Nilus en l'appelant « Denys » (Alovúoloc ). Quant à Libanios, dans sa Lettre 758 , c'est le nom Netoç qu'il emploie pour désigner le person nage . Éléments biographiques. Nilus était un sénateur romain (nohírns ydp ởv xai tñs yepovolas Metéxwv, 446 a, p. 142 , 3 Bidez) , d'origine égyptienne. Après une jeunesse peu édifiante , à en croire Julien (445 b , p. 138 , 12-13 ) , et après avoir été congédié par l'empereur Constant et s'être brouillé avec l'usur pateur Magnence ( 443 d - 444 a, p . 134 , 3-13 ; 444 a , p . 135 , 2-3 ) , il refusa une fonction officielle que lui avait proposée Julien ( 444 c , p . 136 , 4-5 ; 445 b, p . 137 , 13-16 et 446 c , p. 142 , 4) . Pour se justifier et rentrer en grâce, Nilus essaya d'obtenir une audience de l'empereur (446 b, p. 143 , 2-5 ) ; n'y parvenant point, il fit remettre à celui -ci un texte où il développait sa propre apologie et où il le priait d'accepter ses services. Julien répondit par une lettre ouverte , la Lettre 82, dans laquelle il reprochait à Nilus son outrecuidance et son effronterie . Pour 2 R. Asmus , « Zur Kritik und Erklärung von Julian . Ep. 59 ed. Hertl. » , Philologus 71 , 1912, p. 376-389 , Nilus devait faire partie du groupe des cyni ques auxquels en voulait Julien et contre qui il écrivit son Discours IX Contre les Cyniques ignorants. Mais 3 J. Geffcken , Kaiser Julianus, coll . « Das Erbe der Alten » 8 , Leipzig 1914 , p. 158-159 , suivi par Bidez 1 , p. 93 n. 12, réfuta cette hypothèse . Voir également 4 C. Prato et D. Micalella (édit . ) , Giuliano imperatore, Contro i Cinici ignoranti. Edizione critica, traduzione e commento , coll . « Studi e testi latini e greci » 4 , Lecce 1988 ( ad loc. ). Il est certain cepen dant que Julien reconnaissait en Nilus un philosophe ( 444 b, p. 135 , 17-19 ; 445 b , p . 137 , 3-8 ) ; il avait même espéré que grâce à la philosophie le personnage pourrait s'améliorer ( 445 a , p . 137 , 6-7 ) . Il lui reprochait sa franchise : mv nappnoiav (445 b , p. 138 , 5 ) , « son excès de suffisance , son effronterie , son intempérance de langage, la sauvagerie de son âme, la folie de son esprit et son extravagance en toutes choses» (446 a, p. 141 , 24 - 142 , 1 ) : < tNv > ayav aùdá δειαν και την θρασύτητα και την ακολασίαν τήν της γλώττης και το της

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ψυχής άγριον και το μαινόμενον των φρενών και το παρακεκινηκός εν TÕOLV ) . Comme nous ne disposons que du témoignage de Julien , la prudence s'impose pour apprécier le portrait bien sombre qu'il trace de Nilus .

MARIE -ODILE GOULET -CAZÉ. 63 NINON DE CROTONE Jamblique , V. pyth . 35 , 258-261 , p. 139-140 Deubner, rapporte la version , transmise par Apollonius , des troubles antipythagoriciens survenus à Crotone, dans lesquels le rhéteur Ninon , qui appartenait à la classe populaire, joua un rôle important. Prétendant avoir recherché les secrets des pythagoriciens, Ninon confia au greffier pour qu'il en fasse lecture un petit livre intitulé discours sacré » ( Hieros Logos ). Il s'agissait d'un apocryphe qu'il avait lui-même com posé à dessein contenant la prétendue philosophie des pythagoriciens: il ressor tait de la lecture que ces derniers aspiraient à la tyrannie et complotaient contre le peuple. Cette entreprise de diffamation culmina dans un enchaînement d'atta ques contre les pythagoriciens. Par la suite , une fois la paix revenue, naquit le proverbe « Nous ne sommes plus aux temps de Ninon » en rapport avec ceux qui favorisent les agitations politiques. Voir également Aristophane, Eccles. v . 943 . Sur les tumultes antipythagoriciens, voir en outre D. Musti , « Le rivolte anti pitagoriche e la concezione pitagorica del tempo » , QUCC 65 , 1990 , p. 35-65 . Cf. K. von Fritz , art. « Ninon » , RESuppl. IX , 1962 , col . 461-462. BRUNO CENTRONE. NOBILIOR -> FULVIUS NOBILIOR (M.-) (F 24 ) MF III a

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Stoïcien , disciple de Chrysippe de Soles ( P - C 121 ) , mentionné dans l'Ind . Stoic . Herc ., col. 47 , 3 ( p . 98 Dorandi): NJón ; [oç. RICHARD GOULET. 65 NONIUS MARCELLUS RE N 38 PLREI: Marcellus 11

FIV-D V ?

Grammarien et lexicographe africain . Édition. 1 W.M. Lindsay ( édit .), Nonii Marcelli De compendiosa doctrina libros XX , onionsianiis copiis usus edidit W.M.L., 3 vol. , coll . BT, Leipzig 1903, réimp. Hildesheim 1964 , et dans la coll . BT, Leipzig 2003 ; 2 J.H. Onions (édit. ) , Nonius Marcellus, De compendiosa doctrina I - III, Edited with introduction and critical apparatus by the late J.H.O., Oxford 1895 ; 3 L. Müller ( édit.), Compendiosa doctrina, emendavit et adnotavit L.M. , coll. BT , Lipsiae 1888 ; 4 L. Quicherat ( édit.), De compendiosa doctrina ad filium / Nonii Marcelli, peripatetici tubersicensis ...; collatis quinque pervetustis codicibus nondum adhibitis cum ceterorum librorum editionumque lectionibus et doctorum suisque notis edidit L.Q. , Paris 1872. Études d'orientation. 5 M. Schanz, Geschichte der römische Literatur bis zum Gesetzgebungswerk des Kaisers Justinian, Vierter Teil : Die römische Litteratur von Constantin bis zum Gesetzgebungswerk Justinians, Erste Hälfte :

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Die Litteratur des vierten Jahrhunderts, Zweite, vermehrte Auflage, München 1914 : 6 P.L. Schmidt , art . « Nonius » , NP 8 , 2000 , col . 994-995 ; 7 W. von Strzelecki, art. « Nonius » , 38 , RE XVII 1 , 1936 , col . 882-897 ; 8 W.M. Lindsay , Nonius Marcellus ' dictionary of Republican Latin, Oxford 1901, réimp. Hildesheim 1965 . Un grand nombre d'études , consacrées souvent à la question des sources et des méthodes de Nonius , mais aussi aux textes des différents auteurs dont il transmet les fragments, sont parues dans la série Studi Noniani, dont 15 volumes ont été publiés entre 1950 et 2000 (coll. « Pubbl. Ist. di Filol . class. e mediev . » , Genova) . Pour s'y orienter, l'on consultera 9 G. Barabino et R. Mazzacane « Bibliografia Noniana » , dans R. Mazzacane, P. Gatti, G. Barabino , a cura di F. Bertini, Prolegomena Noniana, coll . « Pubblicazioni del D. AR . FI . CL.ET. Nuova serie > 189, Genova 2000 . On sait peu de choses sur la vie de cet auteur, dont le seul ouvrage qui nous soit parvenu est le De compendiosa doctrina . Or la plupart des manuscits de cet ouvrage, qui remonteraient tous à un archétype en minuscule anglo -saxon du VII - VIII ° siècle (Schmidt 6, p. 995 ), comportent une inscriptio décrivant l'auteur comme un péripatéticien de Thubursicum : Index earum rerum quae hoc codice continentur Nonii Marcelli Peripatetici Thubursicensis de compendiosa doctrina per litteras ad filium ( sur les variations de cette formule dans les mss. , cf. 10 T. Mantero , « La inscriptio dei codici del De compendiosa doctrina e Nonius Marcellus Peripateticus Thubursicensis » , Studi Noniani 3 , Padova 1975 , p. 123-188 , 135 sqq . ) . On a retrouvé une inscription (ILAlg. I 1273 = CIL VIII 4878 = ILS 2943 ; cf. 11 Th . Mommsen , « Inschrift des Nonius Marcellus » , Hermes 13 , 1878 , p. 559 sqq . ) en provenance de Thubursicum Numidarum et datant soit de 324 après J.-C. , soit , plus vraisemblablement ( 12 R. A. Kaster, Guardians of language. The grammarian and society in Late Antiquity, coll . « The Transformation of the Classical Heritage » 11 , Berkeley /Los Angeles/ London 1988 , p. 418 ) de 326/333 apr. J.-C. , honorant pour ses activités civiques et évergétiques un certain Nonius Marcellus Herculius. Cependant, il ne semble pas qu'on puisse identifier avec certitude ce personnage à notre auteur, puisqu'il pourrait tout aussi bien s'agir de son père ou de son fils (Mommsen 11 , p. 559 560 ; Mantero 10 , p . 141 ) . L'inscription nous permet au moins d'identifier la patrie de Nonius : il s'agit de l'actuelle Khamissa en Algérie ( sur la ville antique, cf. Mantero 10, p . 182 sq. ) . Les seuls autres critères permettant de dater notre auteur proviennent du texte du De comp . doctr.: or l'auteur y cite ( p . 68 , 21 Lindsay) Apulée ( mA 294 , vers 125-170 apr. J.-C. ) et (à neuf reprises) Septimius Sérénus ( fl. vers 200 apr. J. - C .; pour la date de cet auteur, cf. 13 P.T. Keyser « Later authors in Nonius Marcellus and his date » , HSPh 96, 1994, p. 369-390, notamment p . 377 ) . À son tour, le De comp. doctr. est cité vers 525 par Priscien ( Inst., I 46 ; VI 86 ; X 7 etc. ) , ainsi que par Fulgence . On a pu penser que la subscriptio du ms . Monte pessulanus 212 ( saec . IX -X ) , f. 66 ' , témoignant d'une correction de l'ouvrage par les soins de Flavius Iulius Tryfonianus Sabinus (PLRE II : 13 , p. 970), nous fournissait un terminus ante quem en 402 (Schanz 5, p. 143-144 ) ; mais on s'est

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par la suite rendu compte que cette notice se réfère en fait à l'æuvre de Perse ( cf. 14 W. Clausen, Hermes 91 , 1963 , p. 254) , qui suit directement le De comp. doctr. dans ce manuscrit ( f. 66 ' -79 ). Malgré une tentative récente de dater notre auteur sous les Sévères (cf. infra ), l'on doit donc , semble-t-il , se contenter d'attribuer à Nonius Marcellus une date située entre les dernières années du IVe et les premières années du Ve siècle (Mantero 10, p. 143 ) . Le De comp. doctr. se présente comme une sorte de lexique lemmatisé de la langue latine , qui se divise en deux parties. Dans la première, l'on traite de l'étymologie ( chap. 1 ) , de la stylistique (chap. 2 ; 6) , de la sémantique (chap. 4 ; 5 ) , de la morphologie (chap. 3 , 8 , 7 , 10 , 11 ) et de la syntaxe (chap . 9 ) . Le deuxième livre est consacré aux termes techniques relevant de divers domaines particuliers : on y traite des dénominations des navires, des vêtements , des vais seaux et des coupes, des couleurs , de la nourriture, des boissons , des termes désignant la parenté. Un seizième livre, aujourd'hui perdu, traitait de la termi nologie des chaussures. Ce qui fait la valeur de l'ouvrage aux yeux du lecteur moderne, c'est le fait qu'à l'occasion de presque chaque lemme ( sauf pour le dernier livre, ce qui laisse croire que l'auteur n'a pas pu mettre la dernière main à son ouvrage), Nonius cite des exemples tirés presque exclusivement de la littérature latine de l'époque républicaine (sur les prédilections littéraires de Nonius , cf. Keyser 13, p. 369-382) . En général, les qualités intellectuelles de l'auteur telles qu'elles se mani festent dans son ouvrage n'ont pas donné lieu à des appréciations élogieuses de la part des historiens: Schanz 5 , par exemple, parle à ce propos de sa « bêtise épouvantable » ( entsetzliche Dummheit ). Cependant, les exemples cités par Nonius nous transmettent de précieux fragments d'une littérature autrement disparue : c'est grâce à lui que nous avons une quelconque connaissance des fragments de Lucilius , des Satires de Varron , et de plusieurs autres textes latins de l'époque républicaine. En effet, on a compté 41 ouvrages cités par Nonius , dont 33 de nature littéraire ( Keyser 13 , p . 369-370 ), ce qui doit représenter le fonds de la bibliothèque de Nonius , qui était peut-être grammaticus, ou profes seur de langue et de littérature , dans la ville provinciale de Thubursicum (Mantero 10, p. 183 ; mais cf. Kaster 12, p. 417-418 , qui nie cette possibilité). La plupart de ces ouvrages figurent d'ailleurs dans la description quasi-contem poraine donnée par Augustin (Conf. I 13-16) de l'instruction fournie par les grammatici en Afrique du nord (Mantero 10, p. 185 ) . En ce qui concerne la désignation , attestée dans le titre de son ouvrage , de “ péripatéticien ”, le De comp. doctr ., ouvrage lexicographique qui consiste essentiellement en des lemmes illustrés par des citations tirées principalement d'auteurs de l'époque républicaine , et qui est donc caractérisé par un style résolument impersonnel, ne nous fournit que de maigres indications . On a suggéré depuis Quicherat (4 , p. VI ; cf. Müller 3 , t . II , p . 245 ; v . Strzelecki 7 , col. 883 ) que le développement consacré par l'auteur au fatum (t . III , p . 845-846 Lindsay ) , avec ses arguments contre l'inévitabilité du destin dans le cadre de la mort prématurée (ante diem ) de Didon ( Virgile, Aen . IV 695 ), pourrait repré

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senter une réponse péripatéticienne dirigée contre la conception stoïcienne du destin . Cependant, pour d'autres ( e.g. Mantero 10 ) le passage en question serait de contenu trop banal pour permettre l'identifcation d'une quelconque filiation philosophique : les thèses qui y sont défendues ne seraient pas spécialement péripatéticiennes. Qui plus est, on a tiré argument du fait que quelques-unes des même citations virgiliennes citées par Nonius réapparaissent chez Servius ( in Aen . IV 697 ) pour conclure que Nonius a dû trouver ce développement d'allure philosophique , qui dériverait en dernier lieu d'un commentaire virgilien, dans les marges de son exemplaire de l'æuvre de Virgile (Mantero 10, p. 155-164). Cependant, on a pu signaler d'autres traits dans l'œuvre de Nonnius susceptibles de suggérer un rattachement au moins à certaines doctrines péripatéticiennes, notamment l'importance qu'il attribue, dans un cadre éthique à l'idéal de la mediocritas (uedómns) ( cf. 15 S. Fasce, « Medioximus e il lessico della mode razione » , Studi noniani 12 , 1987 , p . 41-59 ) , citant Nonius , De comp. doctr. p. 520, 20 Müller = p. 837 Lindsay ; Nonius p. 55 , 23 M. = p. 78 L. Par ailleurs, le seul élément susceptible de nous renseigner sur la raison de la désignation de Nonius comme Peripateticus est le titre d'un autre ouvrage de cet auteur, auquel lui-même se réfère de la manière suivante ( VI , t. III , p. 723 , 11-12 Lindsay) : « nos in Epistulis quae inscribuntur a doctrinis de peregrinando» ,que Schanz ( 5 , p . 145 ) , à la suite de Müller, interprète comme signifiant « le renoncement à la philosophie et aux arts libéraux » . Müller (3, t. II , p. 47 ; 245 ), pour sa part, avait corrigé le texte en « de peregrinando a doctrinis » , phrase qui serait à comprendre dans le sens de « de contemptu doctrinarum » , puisque le mot peregrinari serait pris ici dans son sens de « abesse , abstinere » . On a suggéré qu'il s'agissait d'un écrit de nature protreptique ( v . Strzelecki 7 , col . 884 ) . Cependant, Mantero ( 10, p. 167 ) a montré avec vraisemblance que le mot « doctrina » dans le titre de l'ouvrage perdu de Nonius serait à comprendre dans le sens d ' « enseignement » ; le titre dans sa totalité devrait donc être traduit « éloignement de l'activité d'enseignement » : il s'agirait d'une sorte de passe temps ou « hobby » auquel le grammaticus Nonius se serait livré dans ses heures de loisir. Dans cette hypothèse, le contenu de ces Épitres perdues aura été non pas philosophique au sens strict du terme, mais plutôt de nature " antiquaire" et littéraire, à l'instar des Nuits attiques d'Aulu-Gelle ( > A 509) ou des Saturnales de Macrobe ( M9). [ Réagissant contre une opinion courante remontant à l'ouvrage de Fr. Leo , Die griechisch römische Biographie nach ihrer litterarischen Form , Leipzig 1901, p. 118 , St. Schorn, « Wer wurde in der Antike als Peripatetiker bezeichnet ? » , WJA 27 , 2003, p. 39-69, et Satyros aus Kallatis . Sammlung der Fragmente mit Kommentar, Basel 2004, p. 56-63 (« Satyros als Peri patetiker » ) , se refuse à restreindre la signification du titre « péripatéticien » , chez des auteurs comme Hermippe ou Satyros , à leur activité comme historien de la littérature ou comme biographe dans la tradition alexandrine . Il souligne au contraire tous les traits qui attestent R.G. ) d'une connaissance réelle de la philosophie aristotélicienne chez Satyros.

Dans une contribution très remarquée, Keyser 13 a suggéré, à l'encontre de l'opinion quasi unanime des historiens , que la date de Nonius est à situer non pas au tournant des IVe-ve siècles ap . J.-C. , mais sous les Sévères, c'est -à -dire environ deux siècles plus tôt . L'auteur met en avant comme arguments

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principaux pour étayer sa conclusion surprenante : ( 1 ) La nature et le nombre des citations faites par Nonnus d'auteurs latins tardifs ; notamment , il y aurait un ensemble de 12 citations datant de la période qui s'étend entre 160-210 de notre ère ; or, étant donné la conviction de Nonius selon laquelle seuls les auteurs de la période républicaine possèdent de l'auctoritas dans les questions d'usage , la présence de ces auteurs récents dans son ouvrage serait inexplicable , à moins de supposer que ce sont ses contemporains . ( 2 ) L'affiliation philosophique de Nonius ; ( 3 ) La présence dans sa bibliothèque de rotulae ; et (4 ) Les remarques que fait Nonius à propos de la sermo hodiernus. Or, dans un article conçu comme réponse aux argumentations de Keyser, 16 M. Deufert, « Zur Datierung des Nonius Marcellus » , Philologus 145 , 2001, p. 137-149 , a réfuté de manière efficace les arguments 1 , 3 , et 4. Pour ce qui est des citations , Keyser se trompe sur l'identification d'un certain nombre de ces auteurs . En fait il ne reste que deux auteurs datant d'une époque aussi tardive que la fin du II° siècle : Apulée et Septime Sévère. Or Deufert croit pouvoir démontrer que Nonius ne les connaît pas directement , mais seulement à partir d'une source intermédiaire. En ce qui concerne ( 3 ) , Deufert montre que Nonius a conçu son ouvrage non pas pour des rotulae, mais pour un codex. Enfin, le point (4 ) confirme plutôt la datation tradi tionnelle de Nonnus qu'il ne la met en doute : en effet, Nonius désigne comme « contemporains » plusieurs mots et expressions qui ne sont pas attestés avant la fin du IVe siècle de notre ère . Reste le point ( 2) , concernant l'affiliation philosophique de Nonius . Selon Keyser, le titre de Peripateticus doit nous incliner à attribuer à notre auteur un terminus post quem de 250 après J.-C. , étant donné que le dernier péripatéticien que nous connaissions serait Alexandre d'Aphrodise ( > A 112 ) . Mais Keyser écarte un peu trop rapidement des observations de Montero 10, p. 178 , qui , tout

T

en niant que l'on puisse considérer Nonius comme péripatéticien dans le sens strictement philosophique du terme , affirme, textes parallèles à l'appui , que le terme de peripateticus/ htepinamntixóc à l'époque de Nonius a pu évoluer au point de ne désigner que « l'activité d'un maître d'école de province dans le domaine de la grammaire et de l'antiquariat » . Un dernier point de l'argumentation de Keyser mérite d'être pris rapidement en considération . Pour étayer son affirmation que Nonius serait à considérer comme un péripatéticien stricto sensu , qui serait par conséquent à dater au plus tard vers 250 apr. J.-C. , Keyser souligne la citation chez Nonius (De comp. doctr., chap . 5 , p . 441, 3-5 M. ) d'un texte tiré du De memoria d'Aristote ( 2 , 453 a 6) , où on lit : « MEMINISSE et IN MEMORIAM REDIRE [ hoc ] differre Aristoteles putat : διαφέρει το μνημονεύειν του αναμεμνήσθαι ». En montrant que Nonius est « familiar with the works of Aristotle » , affirme Keyser ( 13 , p . 381 ) , cette capacité à citer le De Memoria 2 fournit la preuve de l'allégeance philosophique de Nonius. En effet, affirme cet historien , un tel texte est « hardly the sort of work to have been found in one of Nonius ' grammatical Latin " glossaries”...or in some philosophical florilegium he may have read » . Or une telle affirmation ne semble pas être acceptable . En fait, pareille cita tion est précisément du genre à être reprise dans des florilèges philosophiques ,

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comme elle l'a effectivement été par Jean Stobée (** J 2) dans son Anthologie ( III 25 , 1 , t . III , p. 605, 12 - 606 , 12 Hense ) , à partir de l'ouvrage de Porphyre de Tyr Ilɛpi tõv Tño yuxñs duvámewv ( fr. 256, p. 278 , 21-23 dans 17 A. Smith [édit . ) , Porphyrii Fragmenta, Leipzig 1993 ) . Or Jean Stobée travaillait vraisem blablement au Ve siècle , où la grande majorité des historiens situent l'activité littéraire de Nonius . À la même époque, mais dans une autre région de l'empire romain , l'évêque Némésius d'Émèse ( - N 17 ) consacrait le 13e chapitre, intitulé περί του μνημονευτικού, de son unique ouvrage De natura hominis au meme sujet de la distinction entre la mémoire et la remémoration (dans l'apparat de son édition critique ( Leipzig 1987 ) , M. Morani, dernier éditeur de l'ouvrage némésien , indique parmi les sources de ce chapitre précisément Aristote, De mem . 430 sqq . ) . On ne saurait donc rien conclure quant aux lectures philo sophiques de Nonius de cette citation aristotélicienne - la seule, il faut le noter, qui apparaisse dans la totalité de l'euvre de Nonius , et que celui-ci a presque certainement tirée d'un florilège philosophique . La date de Nonius semble donc pouvoir être fixée de manière plus ou moins définitive vers l'année 400 apr. J.-C. Quant à la question de l'affiliation philosophique de l'auteur, elle doit, semble-t-il , rester ouverte , en attendant les résultats de recherches ultérieures sur le sens que pouvait avoir l'épithète peripateticus dans l'Antiquité tardive en général , et plus particulièrement dans l'Afrique du nord de la fin du Ive et du début du Ve siècle de notre ère .

MICHAEL CHASE .

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Philosophe de la seconde moitié du II ° siècle ap. J.-C. qui combine le néopythagorisme et le médio-platonisme , sans doute avec d'autres influences plus proprement « orientales » , et annonce le néoplatonisme.

Éditions. 1 E.-A. Leemans, Studie over den wijsgeer Numenius van Apamea met uitgave der fragmenten , coll . « Mémoires de l'Académie royale de Belgique, Cl . des Lettres et des Sciences Morales et Politiques » XXXVII 2 , Brüssel 1937, 174 p . ; 2 É . des Places , Numénius, fragments, texte établi et trad., CUF, Paris 1973 , 156 p . Voir aussi les éditions anciennes de 3 F. Thedinga, De Numenio philosopho platonico, Diss . Bonnae 1875 , et de 4 F.G. A. Mullach, FPhG III , Parisiis , 1879 , p . 152-174 , avec trad . latine ; cf. p . 175-184. Cf. 5 R. D. Petty, The fragments of Numenius , text , transl ., and comm . , Diss . University of California, Santa Barbara , Calif. 1993 , 191 p . Nous suivons ici l'édition de des Places 2 . Traductions. 6 F. García Bazán , Oráculos caldeos, con una selección de testimonios de Proclo, Pselo y M. Itálico ; Numenio de Apamea : fragmentos y testimonios, introd ., trad. y notas, coll . « Biblioteca clásica Gredos » 153 , Madrid 1991 , p . 195-308 ( p . 197-223 : « Introducción general» ; p . 225-229 : « Biblio grafía » ; p. 231-301 : trad . esp . des fragments).

Cf. aussi supra, éditions , et infra, études d'ensemble.

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Bibliographie. 7 G. Invernizzi, « Lo stato attuale degli studi su Numenio di Apamea » , RFN 70 , 1978 , p . 604-625 ; 8 C. Mazzarelli, « Bibliografia medio platonica. Parte terza : Numenio d'Apamea », RFN 74 , 1982, p. 126-159. Études d'ensemble . 9 K. Praechter, dans F. Überweg, Grundriß der Geschichte der Philosophie , t. I : Die Philosophie des Altertums, Berlin 192612 , p. 520-522 ; 10 K. S. Guthrie, Numenius of Apamea, the father of new platonism : works, biography, message, sources, and influence, London / Grant wood , N.J. 1917 , réimpr. 1931 , IV - 215 p. ( Thesis Columbia University 1914 ; contient une trad . angl . , avec comm . ; texte grec - anglais : p. 1-93 ; cf. édit. abré gée : 11 Id. , The Neoplatonic writings of Numenius, collected and transl., with a foreword by M. Wagner, coll. « Great works of philosophy series » 4, Lawrence , Kansas 1987 , IV -93 p. ) ; 12 J. M. van der Ven , « Leven , leer en beteekenis van Noemenios van Apamea » , Bijdragen van de philosophische en theologische faculteiten der nederlandsche Jesuiten [Maastricht] 1 , 1938 , p . 236-272 ; 13 R. Beutler, art. « Numenios » 9 , RESuppl. VII , 1940 , col . 664-678 ; 14 G. Martano, Numenio d'Apamea, un precursore del neoplatonismo, coll . « Biblioteca del Giornale italiano di filologia » 11 , Napoli 19602 (Roma 1941'), 120 p . ( contient une trad . ital . des fragments les plus importants ) ; 15 A.J. Festugière, La révélation d'Hermès Trismégiste, t . III : Les doctrines de l'âme ... , coll . « Études bibliques » , Paris 1953 , réimpr. « Collection d'études anciennes. Série grecque » 75 , Paris 1990 ; t . IV : Le dieu inconnu et la gnose, coll . « Études bibliques » , Paris 1954 , réimpr. « Collection d'études anciennes. Série grecque » 76, Paris 1990 , p. 123-132 ; 16 E. R. Dodds, « Numenius and Ammonius» , dans Les sources de Plotin , coll. « Entretiens sur l'Antiquité classi que » 5 (Fondation Hardt, Vandæuvres-Genève , 21-29 août 1957 ) , Genève 1960 , p. 4-32 ( [discussion p. 33-61 ) , trad. en all . , « Numenios und Ammonios » , dans C. Zintzen (édit. ] , Der Mittelplatonismus, coll . « Wege der Forschung » 70, Darmstadt 1981 , p. 488-517) ; 17 J.H. Waszink , « Porphyrius und Numenius» , dans Porphyre, coll . « Entretiens sur l'Antiquité classique » 12 (Fondation Hardt, Vandeuvres -Genève , 30 août - 5 septembre 1965 ) , Genève 1966 , p . 37-78 , repris dans C. Zintzen (édit. ) , Die Philosophie des Neuplatonismus, coll . « Wege der Forschung » 436, Darmstadt 1977 , p. 167-207 ; 18 Ph . Merlan , « Numenius » , dans A. H. Armstrong, The Cambridge history of later Greek and early medieval philosophy, Cambridge 1967 , réimpr . 1980 , p . 96-106 ; 19 H. Dörrie , art . « Numenios » 4, KP IV 1972 , col . 192-194 ; 20 R. del Re , « Numenio di Apamea e questioni numeniane » , C& S 47 , 1973 , p. 53-58 ; 21 J. Dillon , « Numenius of Apamea » , dans Id . , The Middle Platonists, p . 361-379 ; 22 S. Lilla, art. « Medio platonismo » , DPAC II , 1983, col. 2198-2202 ; 23 Id ., art. « Numenio » , DPAC II , 1983 , col . 2443-2446 ; 24 É . des Places, « Le platonisme moyen au IIe siècle après J. - C .: Numénius et Atticus» , Koivwvía 8 , 1984 , p. 7-15 ; 25 J. Montserrat i Torrents dels Prats, « Numenio de Apamea » , dans Id . , Las transformaciones del platonismo, coll . « Enrahonar. Monografies » 1 , Bellaterra 1987 , p . 53-63 ; 26 M. Frede, « Numenius » , ANRW II 36 , 2 , 1987 , p. 1034-1075 ; 27 D.J. O'Meara, Pythagoras revived : mathematics and philosophy in late Antiquity, Oxford 1989 ; réimpr. 1997 , p. 9-14 ; 28 S. Lilla , « Numenio di Apamea » , dans

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Id . , Introduzione al Medio platonismo, coll . « Sussidi patristici » 6, Roma 1992 , p . 100-110 ( sélection de fragments, avec des notes ; texte grec p. 164-167) ; 29 M. Frede, art. « Numenios » 3 , NP VIII 2000 , col . 1050-1052. A. Biographie et chronologie. On ne possède pratiquement pas de rensei gnements précis sur la vie de Numénius . La notice de la Souda, s.v. Novuń Loc , N 517 , t . III , p. 481 , 17-20 Adler, se borne à affirmer que c'était un pythago ricien originaire de Syrie , concrètement d'Apamée ( ' Anqueúc ) , et met en évidence le fait qu'il voyait dans la pensée de Platon la quintessence des doctrines de Moïse sur la divinité et l'univers , si bien qu'il allait jusqu'à dire : « Qu'est- ce en effet que Platon , sinon un Moïse qui parle attique ? » ( trad . des Places; cf. fr. 8 = Eusèbe, Préparation évangélique XI 10 , 12-14 , 526 d - 527 a , t. II , p . 28 , 1-11 Mras) . Le fait que sa patrie était Apamée ( ’ Anáuela ) , ville située au nord de la Syrie, est attesté déjà chez Porphyre, Vie de Plotin 17 , 18. D'après Dillon 21 , p . 361 , Apamée n'était pas rattachée à Numénius uniquement comme son lieu de naissance : il y a sans doute enseigné, comme le suggère le fait que le disciple de Plotin, Amélius ( 2A 136 ) , qui était un admirateur ardent de Numénius (environ un siècle après sa mort), a choisi d'habiter pendant longtemps dans cette ville (cf. infra, E) . Comme le remarque Dillon 21 , ibid ., même s'il ne faut pas aller jusqu'à penser que Numénius est resté toujours dans sa ville natale , on ignore les contacts qu'il a pu entretenir avec les cercles philosophiques d'Alexandrie ou d'Athènes. Par ailleurs, si Jean Lydus, De mens. IV 80 , p. 132 , 11-15 Wünsch (= fr. 57 ) , l'appelle « le romain » (ó ‘ Pwualoc ), ce n'est sans doute que par inadvertance ou pour faire allusion à une éventuelle période d'enseignement de Numénius à Rome , où le philosophe avait peut-être composé l'ouvrage que Lydus était en train d'utiliser (cf. Dodds 16 , p . 6 ; des Places 2, p . 125 ; Dillon 21 , p . 361 ). Quant à la chronologie, on possède tout d'abord le terminus ante quem fourni par l'auteur le plus ancien qui cite Numénius, à savoir Clément d'Alexandrie, dont le floruit peut être fixé ca 204 ( PC 154 ) . Et notamment on rappelle aussi ( cf. Dillon 21 , p . 362 ) que Numénius a influencé Harpocration d'Argos ( » H9) , un élève d'Atticus ( > A 507 ) , dont le floruit peut être placé ca 176. Les critiques ont donc tendance à placer le floruit de Numénius ca 150, à l'époque de Marc Aurèle. Il serait de la sorte un contemporain de Taurus et d'Albinus ( ** A 78 ) . Même si on n'a pas un terminus post quem certain , Dillon 21 , ibid ., allègue dans ce sens à juste titre le fait que Numénius se trouve souvent dans la tradition doxographique rapproché de Cronius ( C 223 ) , qui est décrit comme son compagnon (Étałpos ; cf. fr. 31 ) plutôt que comme son élève, et qui est vraisem blablement le philosophe du même nom auquel Lucien adresse son ouvrage Sur la mort de Pérégrinus, écrit en 165 ou peu après (3 + L 66) : « Numenius and Cronius are mentioned by Longinus (ap. Porph . V. Plot. 20) as constituing the culmination of a line of Pythagorean writers beginning with Thrasyllus and continuing with Moderatus , who “fall far short of Plotinus in precision and fulness”, which places him in a suitable context. »

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B. (Euvres. Notre connaissance de l'ouvre de Numénius est beaucoup plus précise, même si elle reste fragmentaire. La tradition nous a conservé sept titres de ses ouvrages, auxquels on ne peut pas toujours attribuer des fragments précis ( cf. « fragments divers » , fr. 30-60 ) : Iepì tảyadoŨ ( Sur le Bien, fr. 1-22) , lepi Tūv napà Mátovi å oppntwv ( Sur les doctrines secrètes de Platon , fr. 23 ), Περί των Ακαδημαϊκών προς Πλάτωνα διαστάσεως ( Sur l'infidelite des académiciens à l'égard de Platon, fr. 24-28 ) , llepì đpoapolaç quxñs ( Sur l’incorruptibilité de l'âme, fr. 29) , ‘ OĚnoy ( La huppe ), lepi đplou @ v (Sur les nombres ), ſlepi Tónov ( Sur le lieu ; pour ces trois dernier titres, cf. le fr. 1 c , tiré d'Origène ). Comme le remarque Dillon 21 , p. 363 , l'ouvrage principal du point de vue philosophique était sans doute celui qui est intitulé Sur le Bien, qui comprenait au moins six livres, et qui proposait une réflexion sur la nature du Premier Principe, c'est- à -dire l'Être ou le Bien , sous la forme d'un dialogue entre l'inter locuteur principal, vraisemblablement Numénius lui-même, et un étranger, dont le rôle dans le dialogue , au moins à en juger par nos fragments, n'était pas très actif: il pose des questions appelant des éclaircissements ultérieurs, ou bien il se borne à répondre à des questions simples . Dillon 21 , ibid. , estime qu'on peut rapprocher cet ouvrage d'un dialogue hermétique plutôt que d'un dialogue plato nicien . Cependant, il précise que ce n'est pas la tradition du Corpus Hermeticum ( » H 79) qu'il faut invoquer dans ce cas mais celle des Oracles chaldaïques ( » O 34 ) , compilés par Julien le théurge ( » I 48 ) sous le même règne de Marc Aurèle, donc à peu près à l'époque où Numénius était en activité . Par ailleurs, Numénius avait recours dans cet écrit à l'interprétation (allégorique) des doctri nes non seulement de Pythagore et de Platon mais aussi des brahmanes, des Juifs, des Mages et des Égyptiens ( cf. fr. 1 ) . Il s'agit donc d'un écrit qui semble en principe très susceptible, comme le remarque Dillon 21 , ibid ., d'avoir subi l'influence des Oracles (cf. infra ). Si la plupart des fragments de ce dialogue Sur le Bien ont été transmis dans la Préparation évangélique d'Eusébe de Césarée ( -E 156 ) , dans le cas de l'ouvrage Sur l'infidélité des académiciens à l'égard de Platon c'est la totalité des fragments conservés (assez longs) qui nous ont été transmis par cette source . Par ailleurs , il s'agit dans le cas présent d'un ouvrage polémique ayant un dessein et un ton tout à fait différents : Numénius y attaque âprement la Nouvelle Académie sceptique lui reprochant de s'être écartée de la véritable doctrine platonicienne ; à en juger par nos fragments, il suivait un parcours allant d'Arcé silas ( > A 302) jusqu'à Philon de Larisse, et se terminait par une attaque finale contre Antiochos d’Ascalon ( » A 200 ) qu'il accusait d'être passé au stoïcisme ( les stoïciens n'échappent pas non plus à ses attaques ). Les critiques de Numé nius ne s'expriment pas ici d'un point de vue strictement philosophique , mais plutôt sous la forme de critiques personnelles à travers des anecdotes. Dillon 21 , p. 365 , signale à ce sujet l'emploi fréquent par Numénius d'un certain ton comi que et même d'un vocabulaire nettement aristophanesque, et il fait référence à la tradition de l'historiographie philosophique hellénistique qui est la source principale de Diogène Laërce ( D 150) . Il cite enfin comme exemple illustratif

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le long récit amusant ayant comme protagonistes Lacydès ( esclaves ( cf. fr. 26) .

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En ce qui concerne l'ouvrage Sur les doctrines secrètes de Platon , le seul fragment qui nous est parvenu ( fr. 23 ) est très décevant pour ce qui est du contenu de l'ensemble : dans ce fragment, Numénius considère que c'est pour éviter le danger de critiquer ouvertement l'attitude des Athéniens à l'égard de la religion , que Platon aurait eu recours au personnage tout simple d'Euthyphron pour représenter cette attitude . Dillon 21 , p. 364, suggère la possibilité que cet ouvrage de Numénius ait commencé par l'interprétation allégorique des parties introductives des dialogues de Platon ainsi que de leurs personnages. A ce sujet, ne trouvant pas de preuve de l'existence d'un commentaire suivi de Numénius sur le Timée ( cf. 30 M. Baltes , « Numenius von Apamea und der platonische Timaios » , dans H. Th . Johann & M. Lausberg [édit . ) , Festgabe für 0. Hiltbrunner zum 60 . Geburtstag (29. 12. 1973 ), Münster 1974, p. 4-37, repris dans VChr 29, 1975 , p. 241-270 ; 31 Id. , Die Weltentstehung des platonischen Timaeus nach den antiken Interpreten, coll. > A 92 ) la thèse de Plotin , Enn . I , 6 , 9 et V , 5 , 12 , selon laquelle le Beau n'est pas identique au Bien ( cf. Edwards 85 ) . Pour plus de détails sur les ressemblances et les différences entre Plotin et Numénius , nous renvoyons à Dodds 16 , p . 16-24 ( cf. aussi Martano 14 , p . 99-115 , Phillips 90, et O'Meara 82 ) . Dodds 16 conclut à la fin de son exposé ( p . 23 ) que Numénius formule explicitement deux des postulats fondamentaux du néoplatonisme : d'une part, le postulat que tout est dans tout , mais dans chaque partie d'une façon particulière, suivant son mode particulier d'essence ( cf. fr. 41 ) , un postulat que l'on trouve chez Plotin (cf. par exemple Enn. V 8 [ 31 ] 4 , 10 ) , et que les néoplatoniciens postérieurs , comme Proclus, reprennent constamment ( cf. aussi Dufour 88 , à propos d'Enn . II 1 [40 ] , 6 , 23-24) ; d'autre part, le postulat que la transmission des biens divins n'appauvrit pas le donateur (cf. fr. 14) , un postulat que Plotin applique à la communication de la connaissance (cf. Enn . IV 9,5 ). Par ailleurs, Dodds 16 , p . 61 , remarque que le système de Plotin possède beaucoup plus d'intensité et de dynamisme que celui de Numénius , relativement inerte et statique au moins tel que nous le connaissons ( cf. aussi des Places 2 , p. 26, et O'Meara 82 ) . Et , bien sûr , Plotin s'oppose radicalement au dualisme de la psychogonie numénienne (cf. Phillips 90 ). Comme le remarque des Places 2 , p . 26 , mieux que chez Plotin , certaines préoccupations de Numénius se retrouvent chez Porphyre, même si on a souvent abusé de la phrase de Proclus: « Porphyre, qu'on s'étonnerait de voir s'écarter en ses propos de la doctrine de Numénius » (cf. fr. 37, fin ; trad. des Places). Le principal exposé sur Porphyre et Numénius est celui de Waszink 17 (cf. le résumé dans des Places 2 , p . 26-28, O'Meara 27 , p. 101-105 , et surtout récem ment 93 bis M. Zambon , Porphyre et le moyen -platonisme, préf. de C. D'Ancona, coll . « Histoire des doctrines de l'Antiquité classique » 27 , Paris 2002 , chap. IV , p . 171-250) . On met ici l'accent tout d'abord sur l'importance de la philosophie hébraïque chez Porphyre, qui a pu la connaître vraisembla blement à travers Numénius , qui n'hésitait pas à dire que Platon était un Moïse qui parle attique ( cf. supra , A ) . L'intérêt en général de Porphyre pour les tradi tions des peuples barbares pourrait provenir de l'influence directe de Numénius. Par ailleurs , un autre aspect à remarquer ici est celui de l'influence directe de Numénius sur l'interprétation allégorique des mythes proposée par Porphyre, en particulier du mythe sur le combat des Atlantes et des Athéniens, et de celui de la description de la grotte des nymphes (cf. supra, B et C4 ) . En revanche, pour ce qui est de la métaphysique , notamment des hypostases divines, la matière et l'origine du mal , Waszink 17 , p . 65 , suggère que l'influence de Numénius sur Porphyre n'aurait été qu'indirecte , à travers les Oracles chaldaïques, mais cela impliquerait d'admettre , comme le remarque des Places 2, p. 27, la postérité de ceux-ci .

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NOUMÉNIOS D'APAMÉE

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L'influence la plus remarquable de Numénius sur un néoplatonicien a été sans doute celle qu'il a exercée sur Amélius ( cf. supra, A ) . Comme le remarque des Places 2 , p. 8 , « Amélius s'accordait avec Numénius et Cronius pour faire participer aux Idées à la fois les sensibles et les intelligibles , alors que Porphyre y faisait participer les seuls sensibles » ( cf. fr. 46 b, c) . Sur le grand intérêt porté par Amélius à la philosophie de Numénius , voir 94 R. Goulet , « L'oracle d'Apollon dans la Vie de Plotin » , dans L. Brisson , M.-O. Goulet - Cazé , R. Goulet & D. O'Brien , Porphyre, La Vie de Plotin , t. I : Travaux préliminaires et index grec complet, Paris 1982 , p. 369-411 , notamment p . 405-408, repris dans Id . , Études sur les Vies de philosophes, p . 191-229 , notamment p . 223-226 . Sur les rapports doctrinaux entre Amélius et Numénius , on sait aussi que Jamblique écrivit un Προς τους αμφί 'Αμέλιον και Νουμίνιον αντιρρήσεις (Proc., in Tim . 36 d , t . II , p . 277 , 28-30 Diehl ) , expression qui , comme le remarque Goulet 95 , p. 405 = p . 223 , « suggère qu'Amélius avait fait école ( à Apamée) et que son enseignement s'inscrivait dans la ligne de Numénius >> Sur l'écrit de Jamblique, cf. aussi 95 B. D. Larsen , Jamblique de Chalcis, exégète et philosophe, Århus 1972 , t. I, p. 218. Van der Horst & Mansfeld 79 , p. 11 , ont également reconnu l'influence de Numénius sur un autre néoplatonicien , Alexandre de Lycopolis ( > A 116) , concrètement sur sa conception du premier principe comme un intellect incor porel, simple, divin, productif qui se trouve au -delà de l'être et reste difficile à connaître ; par ailleurs , même si sa théorie des hypostases n'est pas médio platonicienne, on trouve chez lui l'écho du soi-disant « principe de la donation non amoindrissante » de Numénius ( cf. supra ). Pour la période ultérieure , en ce qui concerne Macrobe ( M9) et Calcidius (MC 12 ) , on a tendance à considérer qu'ils ont connu Numénius surtout à travers Porphyre : cf. Dillon 21 , p. 401-408 ; des Places 2, p. 28 . Déjà chez les auteurs chrétiens , l'influence de Numénius sur la pensée d'Origène ( 2O 42 ) à propos du Père , du Logos et de leur rapport a été remar quée par Somos 89. Mais c'est Eusébe notamment qui a montré le plus grand intérêt pour Numénius et sa théologie est marquée par une influence de ce philo sophe : cf. des Places 76, des Places 2, p. 28-32 , des Places 80 , et Saffrey 40 . En ce qui concerne Marius Victorinus, 96 P. Hadot, Porphyre et Victorinus, 2 vol . , Paris 1968 , défend l'hypothèse que sa seule source philosophique est Porphyre. Cependant, cette hypothèse n'est pas partagée par Tardieu 86 ni par Brisson 87 , qui mettent en relief l'influence justement de Numénius. La discussion fait intervenir ici le plus long traité gnostique de la bibliothèque de Nag Hammadi , l'Apocalypse de Zostrien, dont le terminus ante quem pour la version copte (NH VIII , 64 , 11-68 , 26 ; 75 , 6-24 ; 84, 18-22 ; 74 , 8-21 ) est l'an 348 ( le texte originaire remonte à environ 263 ), et dont Tardieu et Hadot ont récemment découvert un fragment latin dans l'un des écrits théologiques de Victorinus , l'Adversus Arium I 49-50, que l'on peut dater ca 359 360. A partir de cette découverte , Tardieu ( tout en admettant que Porphyre est l'auteur des fragments du Commentaire sur le Parménide qu'Hadot lui a attribués, et que de nombreux textes que l'on trouve chez Victorinus sont d'origine porphyrienne) défend l'existence d'une source commune à l'auteur du « Zostrien » et à Marius Victorinus , source qui , selon toute vraisemblance, serait médio-platonicienne et qui aurait joué un rôle central dans toute l'œuvre théologique . Il s'agirait d'un commentaire sur le premier principe, que Tardieu propose

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NOUMÉNIOS D'APAMÉE

N 66

d'attribuer à Numénius. Cette source aurait été connue directement ou grâce à un ou plusieurs intermédiaires. En revanche, Hadot, dans sa discussion de ce travail de Tardieu , et revenant sur la question des sources néoplatoniciennes de Victorinus qu'il avait déjà examinée ( cf. Hadot 96), insiste sur leur origine porphyrienne et souligne la difficulté de faire remonter directement à un philosophe médio -platonicien un texte désignant le principe suprême par le terme de fivedua (spiritus ). Pour sa part, Brisson 87, p. 187 , se range à l'hypothèse de Tardieu : la source commune de l'Apocalypse de Zostrianos et de Marius Victorinus est Numénius ou quelqu'un qui a été soumis à son influence. Brisson rappelle à ce sujet l'énorme influence que Numénius a exercée dans la seconde moitié du IIe siècle aussi bien parmi les philosophes païens que chez les chrétiens, et comment il tentait d'unir Platon et Pythagore et semble avoir fréquenté les textes juifs, peut-être même les textes chrétiens. Brisson ajoute que la doctrine numénienne sur le Bien a été imprégnée de l'enseignement que l'on trouve dans la Lettre II attribuée à Platon, où l'on constate une énorme influence pythagoricienne : « In short, by using Parme nides, Timaeus and the Republic as intermediaries, Numenius, basing himself on Letter II, was able to claim to have taken inspiration from Plato himself, according to the middle Platonic interpretation, which , with Plotinus, was in the midst of becoming neo -Platonism . We therefore find ourselves, along with Numenius, on the indecisive border between Plato nism and Pythagoreanism on the one hand, and between mid- and neo-Platonism on the other, which could well explain the questions relative to Pierre Hadot's hypotheses on Marius Victorinus » . Finalement, sur les rapports reliant Denys l'Areopagite (MD 85 ) , à travers Jamblique et Proclus, aux Oracles chaldaïques, donc aussi à Numénius, et par delà le platonisme moyen à Platon , cf. des Places 84 .

PEDRO PABLO FUENTES GONZÁLEZ. NOVATUS -> IUNIUS GALLIO (= L. ANNAEUS NOVATUS) (G4) 67 NUMA POMPILIUS Une longue tradition affilie le second roi de Rome , Numa Pompilius, au pythagorisme ou en fait même un disciple direct de Pythagore ( voir par exemple Ovide , Epist. ex Pont. III 44 ; Diodore de Sicile VIII 14 ; Plutarque, Numa 1 , 1 3 ; Dion Chrysostome, Or. XLIX 6-7 ; Clément, Stromates I 15 , 71 ) . Les témoi gnages relatifs à cette question sont rassemblés dans 1 G. Garbarino , Roma e la filosofia greca dalle origini alla fine del II secolo a. C. , t . I : Introduzione e testi, Torino 1973 , p . 53-62 , sous le titre « Rapporti fra l'antica scuola pitagorica e il mondo romano . La leggenda di Numa e Pitagora ». Cette tradition est rejetée avec véhémence par Cicéron, De rep . II 15 , 28-29, pour des raisons chronologiques : il fait dire à Scipion l'Africain qu'une telle croyance populaire, fausse et inventée de manière absurde, n'est pas confirmée par les annales publiques ; Pythagore , en réalité, n'arriva pour la première fois en Italie que dans la soixante-deuxième Olympiade ( 532/1 av . J.-C. ), environ 140 ans après la mort de Numa ; voir encore Cicéron , De orat. II 37 , 154 ; Tite -Live I 18 , 2-3 ; Denys d'Halicarnasse, Ant. II 59 , 1-5 ( I , p. 238 , 7 - 239 , 19 Jacoby ) ; sur les difficultés chronologiques, voir Plutarque, Numa 1 , 1-4 . Au livre XV de ses Métamorphoses, Ovide (vv . 1-478 ) le discours de Pytha gore sur la fondation de Crotone est adressé à Numa . Toujours selon Cicéron , Tusc. IV 1 , 2, le fait que Numa ait été présenté comme un disciple de Pythagore est dû à l'admiration des Romains pour les doctrines pythagoriciennes et à la

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N 68

NYMPHIOS

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réputation d'équité et de sagesse de Numa ; Plutarque , Numa 8 , énumère les nombreux points de contact entre Numa et le pythagorisme en rapport avec les prescriptions cultuelles , ainsi que d'autres éléments : Numa aurait appelé un de ses quatre fils Mamercus, nom qu'aurait porté le fils de Pythagore ; c'est de lui , que son père appelait Aimulios à cause de son affabilité , que la gens Aemilia aurait tiré son nom ; cf. Plutarque, Aem . P. , 2 , 1 ; Festus , s.v. Aemilia (p . 22 , 9-12 Lindsay) . Sur cette question , il est important de rappeler l'énigmatique découverte, survenue en 181 av. J.-C. dans une maison sur le Janicule, de livres attribués à Numa ( les témoignages sont rassemblés dans Garbarino 1 , p . 64-69 ) , qui ne montraient aucun signe d'ancienneté (recentissima specie ) et étaient manifeste ment apocryphes; sept de ces livres, écrits en latin , traitaient de iure pontificum , sept autres , en grec , furent qualifiés de pythagoriciens par Valerius Antias . Les

‫شا‬

livres furent lus par le préteur Q. Petillius qui décréta leur destruction par le feu, dans la mesure où ils représentaient un danger pour la religion officielle. Sur cet épisode, voir 2 K. R. Prowse, « Numa and the Pythagoreans. A curious incident » , G&R 11 , 1964, p. 36-42 ; 3 A. Grilli , « Numa, Pitagora e la politica antiscipionica » , CISA 8 , 1982 , p. 186-197 ; 4 A. Willi , « Numa's dangerous books . The exegetic history of a Roman forgery » MH 55 , 1998 , p. 139-172 ; 5 M. Peglau , « Varro und die angeblichen Schriften des Numa Pompilius » , dans L. Bodson (édit . ) , Ces animaux que l'homme choisit d'inhumer. Contribution à l'étude de la place et du rôle de l'animal dans les rites funéraires, coll . «Colloques d'histoire des connaissances zoologiques » 11 , Liège 2000 , p. 441-450. L'invention de la légende d'un Numa pythagoricien peut remonter aux milieux grecs de l'Italie méridionale , en particulier à Tarente, ou avoir une origine plus proprement romaine, où elle aurait eu pour objectif de sanctionner le caractère sacré des institutions romaines en les rapprochant de celles des Grecs, avec Pythagore comme garant ; la datation de l'origine de cette légende est également controversée ; sur la question on consultera 6 A. Storchi Marino , Numa e Pitagora. Sapientia constituendae civitatis, Napoli 1999 , et 7 Ead ., « Il pitagorismo romano. Per un bilancio di studi recenti » , dans M. Tortorelli Ghidini , A. Storchi Marino et A. Visconti (édit . ) , Tra Orfeo e Pitagora. Origini e incontri di culture nell'antichità . Atti dei seminari napoletani 1996-1998 , Napoli 2000, p. 335-366, en part. p. 341-353 , avec une bibliographie des études antérieures. Voir encore 8 P. Panitschek , « Numa Pompilius als Schüler des Pythagoras » , GB 17 , 1990, p. 49-65 ; 9 V. Buchheit, « Numa- Pythagoras in der Deutung Ovids » , Hermes 121 , 1993 , p . 77-99 ; 10 M. Mahé , « Le pythagorisme d'Italie du Sud vu par Tite- Live » , Ktèma 24 , 1999 , p . 147-157 . BRUNO CENTRONE.

NUMIDICUS 68 NYMPHIOS

CAECILIUS METELLUS NUMIDICUS (Q.-) (C 2]

IIIa

Dans l'Etym . Magn ., s.v. Táprapoç, un fragment de Noupíos ó pirocopos doit être rapporté à l'historien de la première moitié du III Nymphis d'Héraclée . Les fragments de cet historien sont rassemblés dans FGrHist 432 et add . ( = FHG fr. 10 Müller ) . Voir Susemihl , GGLA , t . II , p . 191 n . 247 , et l'Index , p . 754 ;

742

N 68

NYMPHIOS

R. Laqueur, RE XVII , 1937 , col . 1608-1623; W. Ameling , « Prosopographia Heracleotica , dans Lloyd Jonnes , The Inscriptions of Heraclea Pontica, coll . IGSK 47 , Bonn 1994 , p . 154-155 . Voir FGrHist 432 F 19 (Zweifelhaftes) pour différentes conjectures.

RICHARD GOULET. 69 NYMPHIS

MF III

Stoïcien, disciple de Chrysippe de Soles ( MC 121 ) , mentionné dans l'Ind. Stoic. Herc ., col . 47 , 9 ( p . 98 Dorandi): [ Núudouc . RICHARD GOULET. 70 NYSIOS LE SAMNITE

FII

Stoïcien, mentionné , avec son compatriote Marcius ( 2M 37) , comme disci ple romain de Panétius de Rhodes (mort vers 110a) dans l'Ind . Stoic. Herc ., col . 74 , 1-5 ( p . 124 Dorandi = Panétius , test. 1 Alesse ) , où l'on présente Nysios comme l'inventeur d'un genre poétique nouveau : Núolog oè xai | tò tov onovdalonalpú < i> ówv [hapax dont le sens serait, selon LSI : « composer of half serious burlesques » ) yévos apātoç 1 [ nt £ ]vónoev. T. Dorandi ( p. 125 ) traduit : « E Nisio per primo inventò anche il genere dei componimenti a metà tra il serio e il faceto » . C'est apparemment par suite d'une erreur que A. Traversa , Index Stoicorum , p. 95 , croit retrouver le nom de ces philosophes samnites chez Strabon VI, 253 C. RICHARD GOULET.

O

1 - JOCLÈS Vestige probable d’un nom propre conservé dans un contexte incertain et lacunaire en PHerc. 558 fr. 7 , col. II 2 (p . 71 Giuliano) . W. Crönert, Kolotes und Menedemos, p. 195 , exclut la possibilité qu'il s'agisse de Dioclès de Magnésie ( > D 115 ) . Voir F.M. Giuliano , « PHerc. 495 - PHerc. 558 ( Filodemo, Storia di Socrate e della sua scuola ? ) » , CronErc 31 , 2001, p . 37-79 : 72 . TIZIANO DORANDI.

2 JOCRATES Vestige probable d'un nom propre conservé dans un contexte incertain et lacunaire en PHerc. 1780 VIII I. et VIII m . 8 ( p. 83 Crönert ). W. Crönert, Kolotes und Menedemos, p. 83 et 85 n . 422 , a supposé , non sans hésitations , qu'il s'agissait de Philocratès de Rhamnonte , mentionné plus loin dans le papyrus. Mais cette hypothèse reste très fragile. TIZIANO DORANDI. 3 - ]ONYMOS Vestige probable d'un nom propre conservé dans un contexte incertain et lacunaire en PHerc. 1780 VI m . 6 (p . 82 Crönert ). W. Crönert, Kolotes und Menedemos, p. 82, a supposé qu'il s'agissait d'un Aristonyme inconnu. TIZIANO DORANDI.

4 OCCELÔ Pythagoricienne sans doute inexistante, créée par la mauvaise compréhension d'un passage du catalogue de Jamblique ( V. pyth . 36 , 267 , p. 146 , 18-20 Deubner) et par les conjectures des philologues modernes à son sujet. C'est la raison pour laquelle nous proposons ci -dessus une discussion détaillée du passage en question . Pour faciliter la discussion , nous reproduisons d'abord le texte du Laurentianus ( ms F) qui a transmis la V. pyth ., suivi de l'ensemble des conjectures proposées, classées en deux catégories , qui représentent deux manières foncièrement divergentes de comprendre le texte transmis . Φιλτύς ... Βυνδάκου αδελφή Όκέλω (κ superscr . ) και Έκκέλω των Λευκανών F : A.

'Povoárov W. Schmid , W. Ehlers

αδελφή Όκέλλω Nauck Όκκελώ και Έκκελώ τώ Λευκανώ Scaliger , Diels Όκκέλω και Έκκέλω Deubner ( « Bemerkungen » ) Όκκελώ και Έκκελώ < αδελφαί Όκκέλω και Όκκ λω > Deubner ( edition )

OCCELO

744 B.

04

Buvoax , adenon Oxxénw Thesleff, Masson , Centrone -Goulet

Ρυνδακώ Rohde : A. Selon le Laurentianus, Philtys était la seur de Byndacos, alors qu ' 'Oxbhw ( corrigé par la deuxième main en 'Oxxéw ) et 'Exxénw ( nominatifs féminins) Seraient deux pythagoriciennes de Lucanie. Pensant qu ' Όκκέλω et Έκκέλω étaient des noms de femmes ( cf. 1 H. Pistelli , « lamblichea » , SIFC 1 , 1893 , p. 25-40, à la p . 37 ) , mais transmis sous une forme fautive, Scaliger voulut les corriger en Όκκελώ et Έκκελώ. L. Deubner adopta finalement cette conjecture dans son édition de la V. pyth ., malgré le fait qu'il acceptait au départ ( dans ses 2 Bemerkungen zum Text der " Vita Pythagorae " des lamblichos, Berlin 1935 , p . 77-78 = SPAW 1935 / 19, p. 686-687 = Id . (éd . O. Deubner ), Kleine Schriften zur klassischen Altertumskunde, Königstein / Ts . 1982 , p. 545-546) , la remarque de son collègue Ed . Schwyzer, selon laquelle « die in der H [ and ]s [ chriften ] überlieferte Betonung der beiden offenbar lukanischen Frauennamen der vorauszusetzenden oskischen entspricht, also zu halten ist » ( ibid. , p. 78 = p. 687 [ = p . 546 ] ) . Avançant d'un pas , il vit en elles ( « mit Wahrscheinlichkeit » ) les seurs d' " Όκκελος et " Όκκιλος mentionnés plus haut dans le catalogue ( p. 145, 11 ) , et, supposant que le texte transmis aurait été ici victime d'un saut du même au même, jugea bon d'y ajouter le renseignement suivant: < ådengai 'Oxxénov xal 'Oxx hov > ( dans ses Bemerkungen, p . 78 = p . 687 [ = p. 546 ]), < åbenbai 'Oxxław xai 'Oxx aw > dans son édition (en adoptant la forme dorienne du génitif masculin , en -w , forme qui est en même temps plus proche de celle des noms figurant dans les mss - le génitif tūv Aevxavőv, qui suit, pouvant être entendu indifféremment comme se rapportant à des femmes ou à des hommes, l'addition de Deubner ne dérange en rien , sur ce point, ni la syntaxe ni la grammaire ). Le texte édité par Deubner a été repris et perpétué par la suite dans les traductions de la V. pyth. dues à M. von Albrecht, G. Clark , J. Dillon & J. Hershbell et L. Brisson & A.-Ph. Segonds , ainsi que dans la notice « Byndacos ou Rhyndacos » ( 2 + B 70) de B. Centrone, DPhA II , 1994 , p. 144. Si la parenté de ces deux pythagoriciennes avec Occelos et Occilos est tout à fait plausible, il semble pourtant que l'addition du renseignement dans le texte transmis est arbitraire , superflue et après tout peu vraisemblable . Outre qu'elle propose trop de remaniements et qu'elle ajoute plusieurs mots ( comme le remar quait récemment Olivier Masson (3 « Sur quelques noms de philosophes grecs : à propos du Dictionnaire des philosophes antiques, vol . II » , RPh 68 , 1994 , p. 233 , repris dans Onomastica graeca selecta , vol . 3 , Genève 2000 , p. 220 ), elle ne résout en réalité aucun problème; car la seule raison invoquée par Deubner 2 pour justifier cette addition est que « die Frauen des Katalogs [... ) nach Möglichkeit durch die Zugehörigkeit zu Männern bestimmt werden , die größten teils ebenfalls im Katalog begegnen » (Bemerkungen , p . 77-78 = p. 686-687 = [ p . 545-546] ) , une assertion qui est loin d'avoir une valeur absolue de prin cipe, comme semble l'admettre Deubner lui -même en employant les expressions prudentes « nach Möglichkeit » et « größtenteils » ) : en effet, sept pythagoricien nes sur les dix -sept (ou les seize) du catalogue ne sont désignées que par leurs seuls nom et ethnonyme, sans référence à leur père, leur frère ou leur époux.

L4

OCCELO

745

Curieusement, Deubner n'invoque pas le problème posé par le bout de phrase 'Oxxéw και Έκκέλω (ου Όκκελώ και Έκκελώ ) των Λευκανών pour justifier son addition , alors que le seul avantage, à notre avis, de celle-ci est qu'elle donne un texte qui se lit de manière beaucoup plus naturelle (le problème n'étant pas toutefois que l'expression 'Oxxénw ... TWV Aevxavāv est fausse grammaticalement ou syntaxiquement, mais qu'elle n'est pas conforme aux habitudes du redacteur du catalogue : on attendrait plutot de lui Όκκέλω και Έκκέλω [ου Όκκελώ και Έκκελώ ] Λευκανα (tout comme on a plus bas Έχεκράτεια Φλιασα , Τυρσηνίς Συβαρίτις , etc.) . B. Mais il y a une autre manière de lire ces lignes, moyennant toutefois une petite correction : n'ajoutant pas de virgule après á denon et corrigeant Buvoa κου en Bυνδακού , Βυνδάκω ou Bυνδακώ , pour obtenir un nom de femme au nominatif, on retrouve, à la suite de Philtys, une Byndacô, seur des Lucaniens Occelos et Eccelos – et il est évident que dans ce cas la pythagoricienne Occelô disparaît. L'intervention dans le texte est infime et sa compréhension fort aisée, tandis qu ' Όκκέλω et Έκκέλω deviennent des formes doriennes du genitif masculin parfaitement acceptables grammaticalement (4 H. Thesleff, Intro duction , p . 75 , n . 2 , remarquait déjà que la forme ' Exxenó est due à une corruption de la forme dorienne du génitif masculin singulier 'Exxéw ) . Si on avançait d'un pas et l'on identifiait le " Oxxios de la p. 145 , 11 de la V. pyth. à " Exxenos (ce que n'a pas voulu faire Deubner; voir ses Bemerkungen, p. 77 = p . 686 [ = p . 545 ] ) , la correspondance serait parfaite , et l'on obtiendrait une triade de pythagoriciens Lucaniens (Occelos, Occilos/Eccelos et Byndacô ) liés par des liens fraternels. Cette solution a été proposée par 5 H. Thesleff, The Pythagorean texts, p . 77 , 12 ( quoique E. Rohde déjà, en conjecturant ' Puvoaxó à la place de Buvoárov, s'orientait apparemment vers une solution analogue) et adoptée sans réserves par 0. Masson (3 , p . 233-234 ( = 220-221 ] : « je suis persuadé qu'il s'agit d'une femme» ) , B. Centrone et R. Goulet ( art. « Eccélos de Lucanie » , E 1 , DPA III , 2000, p. 51-52 ) et L. Brisson & A.-Ph. Segonds (dans la deuxième édition de leur traduction de la V. pyth. ( à paraître ]). Elle est en effet préférable aux précédentes, entre autres parce qu'on évite ainsi le Buv Baxov adenon, qui , allant avec ce qui précède, rompt l'ordre des nominatifs féminins, tout en laissant inexplicable la mention d'un Byndacos qui n'aurait pas été nommé parmi les pythagoriciens de sexe masculin et apparaîtrait ici sans être rattaché à une patrie ( voir 6 M. Timpanaro Cardini, I Pitagorici. Testimonianze e frammenti, vol . II , Firenze 1962 , p. 386, et vol . III , Firenze 1964, p. 42-43 ) . Pourtant nous ne pouvons pas partager entièrement l'enthousiasme de ceux qui la soutiennent, car elle n'est pas sans problèmes : en effet, contrairement aux solutions examinées plus haut ( A ) , cette dernière ( B ) réduit le nombre des femmes pythagoriciennes de 17 ( total figurant en bas de la liste ) à 16 (problème signalé déjà par Deubner 2 , p . 78 = p . 687 = (p . 546] ) ; cela nous oblige à recourir à une nouvelle correction , cette fois du if' de la p. 147 , 6 en is ' ( voir déjà 7 H. Diels, dans DK , vol . I , p . 448, 15 , n . ) , en supposant soit une erreur accidentelle soit, plus probablement , que , une fois établie dans la tradition manuscrite la version transmise par le Laurentianus , où on lisait 17 noms, un copiste tardif aurait modifié le chiffre final (en écrivant 17 à la place de 16) , afin de le faire correspondre à la ( nouvelle) réalité qu'il avait devant les yeux .

746

OCCELÔ

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Ajoutons que si l'on accepte la solution ( B ) ou la version radicale de (A ) , comportant l'addition proposée par Deubner, il devient tout à fait envisageable (quoique non nécessaire ) de suivre la conjecture de Scaliger (adoptée aussi par Diels, DK , vol . I, p . 440 , 2-3 et 448, 8 9), qui consiste à faire du génitif pluriel tõv Aevxavāv un génitif masculin duel (Tù Aevxavó) ; la raison en est que dans les deux cas l'accord se fait avec deux noms de genre masculin . BRUNO CENTRONE et CONSTANTINOS MACRIS .

5 OCCÉLOS (OCELLOS) DE LUCANIE Pythagoricien lucanien dont le nom figure, avec celui d'Occilos ( Eccelos ) dans le catalogue de Jamblique , V. pyth. 36, 267 , p. 145 , 11 Deubner ( cf. aussi p. 146 , 19-20) . Jamblique présente Occélos et Occilos comme des frères, quoique les philologues allemands du début du XXe s . voyaient dans ces deux noms une tentative (de la part de Jamblique, de sa source ou d'un copiste ) pour concilier les deux principales variantes d'un seul et même nom ( voir infra ). Témoignages : 1 DK 48 = 2 M. Timpanaro Cardini, I Pitagorici. Testimo nianze e frammenti, coll . « Biblioteca di studi superiori » 28 , Firenze 1962 , t. II , n° 22 , p . 386-401. Ajouter Phot . , Bibl. cod. 167 , 114 b 13. Les témoignages sont rassemblés également dans 3 R. Harder ( édit . ) , Ocellus Lucanus. Text und Kommentar , coll . « Neue philologische Untersuchungen >> 1 , Berlin 1926, réimpr. Dublin 1966, p . 3-7 , qui contient l'édition de l'écrit apocryphe, ſlepi mñs TOŨ Tavtos PÚCews, transmis par de nombreux manuscrits ( voir la notice « Pseudo-Occelos) . Voir aussi 4 R. Beutler, art. « Okellos » , RE XVII 2 , 1937 , col . 2361-2380 . 5 H. Thesleff, The Pythagorean texts, p. 124, 11-14 et 138 , 13 22 . Graphie. Les formes transmises des deux noms divergent de ms en ms : dans les mss de la V. Ρyth . on rencontre les graphies " Όκκελος, "Όκελλος, "Όκελος, "Εκελος pour le premier et "Όκκιλος, "Όκιλος, " Οκυλος, Όκύλος pour le second , tandis que la forme du nom du deuxième frère est quelque peu différente en V. pyth . 36, 267 , p. 146, 19-20 : "Exxehoç ( ** E 1 ) . Pour plus de détails ,on consultera l'apparat critique de l'édition Aug. Nauck de la V. pyth . ad loc., ainsi que ceux de Diels 1 (DK , vol. I, p. 440 ) et de Harder 3 ,p. 3-7 et 11 , avec le comm . correspondant, p. 48-49 ). Les conjectures des philologues sont assez nombreuses également. A la place du premier nom, L. Dindorf, lisait " Sexuelos ; Pour le second , Dom . Comparetti (Rivista di Filologia 9, p. 549) avait proposé " Oxxvios; Arcerius, " Exemos (sur la base de V. pyth., p. 146 , 20 ) ; L. Dindorf ( Thesaurus Graecae linguae, t. V, 1853 B ) , "Slxumos (sur la base de Xénophon, Hist. Gr. V 4, 22 et VI 5 , 33 , où le nom est porté par un Lacédémonien). 6 A. von Blumenthal, « Messapisches » , Glotta 17 , 1929 , p. 155 sq ., quant à lui , regardait "Oxwehoc et " OxxiÀOG comme les formes originales et expliquait " Exxenos comme « entweder Schreibfehler [... ] oder zur stärkeren Differenzierung in Anlehnung etwa an ' E paradoc gebildet worden sein » et "Slxxenos « aus der Analogie von dxúc » . Thesleff 5 , n. ad li . 11 ) préférait la forme "Oxxenoc, qui non seulement est lectio difficilior, mais aussi la forme la plus commune dans les mss (plus que " OxeMoç, forme moins commune mais traditionnellement plus répandue ). Enfin, 7 Olivier Masson , « Sur quelques noms de philosophes grecs : à propos du Dictionnaire des philosophes antiques, vol . II » , RPH 68 , 1994 , p. 233 , repris dans Id., Onomastica graeca selecta , vol. 3 , Genève 2000 , p. 220) propose d'écrire “ Occelos (Ocellos) ”, pour tenir compte des variantes, car, faute de parallèles, il est malaisé de retrouver quelle est la forme exacte de ce nom. Selon ce savant, la forme “ Ocellos ” de la vulgate (celle qui est aussi le plus souvent adoptée dans les recueils ; cf. p. ex . le titre de l'édition de Harder 6, ou les articles de la RE et de la KP ) serait peut-être influencée par le latin ocellus.

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OCCÉLOS DE LUCANIE

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Origine. Quoi qu'il en soit de sa forme exacte , ce nom, ainsi que celui qui suit dans le catalogue (“ Occilos [Eccelos ) " d'après Masson ), serait « italisch , vielleicht oskisch » selon W. Schulze (consulté jadis par R. Harder 3 , p. 49) , et cet avis est partagé encore aujourd'hui par Masson 7. A. von Blumenthal 6 , quant à lui (loc. cit. ) , pensait à des noms messapiens, “ * Okkel" et " * Okíl ” | “ Aukíl ” respectivement, ou plutôt à un seul nom, en proposant de lire le passage de la V. pyth. de la maniere suivante : Λευκανοί " Όκκελ [sic] δς και " Όκκιλος [ådendo ) , 'Opéoavopos ( cf. aussi 8 Ph . Wahrmann , Glotta 17 , 1929 , p. 251 ) hypothèse à notre avis invraisemblable. Mais, indépendamment de la plausibilité de sa reconstitution du texte grec, la question que se posait von Blumenthal 6 , p . 153 sq . , à savoir « ob die zwei angeblichen Brüder nicht Varianten ein und derselben Person seien » , est tout à fait pertinente. Mis à part les renseignements fournis par le catalogue de Jamblique sur le frère et la seur d'Occelos ( nommés Occilos/Eccelos et Byndacô) et sur son origine lucanienne (en fait l'ethnonyme Aevxavóc accompagne presque systé matiquement son nom partout où celui -ci apparaît dans nos sources), on ne possède aucun témoignage biographique sur Ocellos . Occélos est unanimement défini comme pythagoricien dans les sources anti ques. Si cependant on excepte son insertion dans le catalogue de Jamblique, qui est probablement originelle, puisqu'on ne peut rien déduire du traité apocryphe concernant ses frères ( voir Harder 3, p . 31 ) , la totalité des témoignages se fonde sur l'ouvrage apocryphe attribué à Occélos . Il n'est donc pas possible de recon stituer les éventuelles doctrines originales du pythagoricien Occélos. Trois autres textes qui parlent d'Occelos semblent emprunter leurs informa tions à la tradition doxographique ( les rapports littéraires avec le traité apocry phe Sur la nature de l'univers mériteraient d'être précisés ) ; il s'agit des passages suivants : a ) Sextus Empiricus , Adv . Math . X 316 ( = 48 A 3a DK ) , qui , par- delà Aristote , fait remonter l'origine du cinquième élément (TÒ TÉUntov xai xvxo popntixòv oõua, ŁĘ 0ð héyovoiv elval td oủpávia) à Ocellos ( le renseigne ment est repris par un scholiaste de Basile, XXVIII , éd . Pasquali = NAWG 1910 , p. 201 ) ; b) Stobée I 26 , 1 , t . I , p . 218 , 18-19 Wachsmuth ( = Aétius II 25 , 13 ; absent dans DK , mais inclus dans Timpanaro Cardini 2 ) , qui évoque ensemble Héra clide ( le Pontique ( pH 60 ] = fr. 114a Wehrli ) et Ocellos (dans cet ordre ) comme tenants de la théorie selon laquelle la lune serait une espèce de terre enveloppée de brouillard (γή ομ χλη περιεχομένη ) ; Selon 9 H. Diels , Doxographi Graeci, p. 100, n . 1 et p. 216, n . 2 , que suit Harder 3, p. 39, il s'agirait d'une interpolation ; les mots xai "Oxelos auraient été ajoutés par Stobée (mais on ne voit pas trop pourquoi). c) Jean Lydus , De mensibus II 8 , p. 27,4-9 Wünsch ( = 48 A 8 DK), qui , sous le nom de "Ώκκελος , " Όκελλος οι Κεκ λιος (sic pour Kαικ λιος ? ou pour "Exxoc ? [cf. von Blumenthal 6, p. 156, n. 3 ; cf. 10 B. Centrone, art. « Caeci lius » , C 1 , DPhA II , 1994 , p. 146] – la tradition manuscrite est très perturbée à cet endroit -, a transmis un fragment pythagoricien, où il est dit que la triade est

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OCCÉLOS DE LUCANIE

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le premier nombre comprenant début (principe ), milieu ( médiété) et fin ( topos doxographique remontant au moins à Aristote ) . BRUNO CENTRONE et CONSTANTINOS MACRIS.

6 PSEUDO -OCCÉLOS Sous le nom d'Ocellos ( Occélos ) de Lucanie a été transmis par divers manuscrits un traité Sur la nature de l'univers ( Ilepi tñ toŨ Tavtos Púcewc). Édition de référence . 1 R. Harder (édit . ) , Ocellus Lucanus . Text und Kommentar , coll . « Neue philologische Untersuchungen » 1 , Berlin 1926 , réimpr. Dublin 1966 , avec les comptes rendus substantiels de 2 W. Theiler, Gnomon 2 1926, p . 585-587 , de 3 K. Praechter, DLZ 47 , 1926 , p . 2078-2084 et les remarques de 4 H. Thesleff, Introduction , p. 38 . L'ouvrage comprend une introduction à l'édition ( I -XXV ), les témoignages antiques sur Ocellos de Lucanie ( p. 3-7), l'édition critique (p. 11-25 ) , le fragment du Nepi vóuou ( voir infra ), ceux du Nepi Olxalooúuns d’Eccélos, le fragment conservé par Jean Lydus (voir infra ), un important commentaire (p. 31-153 ), un lexique du vocabulaire du traité (p. 154 160 ). L'édition est reproduite dans 5 H. Thesleff, The Pythagorean Texts, p. 125 , 8 - 138, 12. Analyse globale : 6 R. Beutler, art. « Okellos » , RE XVII 2, 1936, col . 2361 2380 , et, sur une partie du texte seulement ( $$ 43-51 ) , 7 K. Praechter, Hierokles der Stoiker, Leipzig 1901, p. 137 sq. , repris dans ses Kleine Schriften (édités par H. Dörrie ), Hildesheim 1973 , p. 311-467 , aux p. 446 sq. (nous n'avons pas pu consulter la dissertation de von Heyden Zielewics, Breslau 1900, signalée par Thesleff ; cf. le compte rendu de 8 K. Praechter, WKPh 19 , 1902, p. 434-437 ). Traductions. Une traduction anglaise due à K.S. Guthrie ( 1920) a été réimprimée dans 9 D.R. Fideler, The Pythagorean sourcebook, p . 203-211, et dans 10 R. Navon , The Pythagorean Writing, p. 61-63 ; 105-114 . Voir aussi 11 A. H. Chroust, « Pseudo - Ocellus De universi natura 3.4.41 (Harder). A fragment of Aristotle's On philosophy » , CPh 69, 1974 , p . 209-210. Bien que rédigé dans le langage de la koinè, l'ouvrage appartient au groupe des pseudopythagorica en dialecte dorien ; des sections de ce traité écrit dans un dorien superficiel caractéristique des apocryphes sont en fait transmis par Stobée ( I 20 , 3-5 , t. I , p . 173 , 19 - 176, 2 Wachsmuth = Harder 1 p. 5-6 = Thesleff 5, p. 129 , 14-22 ; 129 , 24 - 130 , 4 ; 131 , 8-12 ; 134 , 27 - 135 , 8 ) , et la preuve que ces extraits correspondent à la recensio originale est donnée par le fait que dans les manuscrits on retrouve des traces du dialecte dorien originel ( cf. Harder, p. XVIII - XIX ) . Les $ 8 52-57 du lepì púoewç proviennent d'un texte d'Aristoxène (cf. Jamblique , V. pyth . 31 , 209-213 ; Stob . IV 37 , 4, p. 878-879 Hense = Aristoxène , fr. 39 Wehrli ) ; analyse synoptique dans Harder 1 , p. 134 145 ; cf. 12 C. Macris , « Jamblique et la littérature pseudo -pythagoricienne» , dans S.C. Mimouni ( édit . ) , Apocryphité : histoire d'un concept transversal aux religions du Livre . En hommage à Pierre Geoltrain , coll . « Bibliothèque de l'École des Hautes Études . Section des Sciences religieuses » 113 , Turnhout 2002, p. 77-129 , aux p . 105-106. Témoignages. Le Περί της του παντός φύσεως έtait connu de Censorinus, Le jour natal 4 , 3 ( d'après Varron ) ; Philon , De l'éternité du monde 12 ;

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PSEUDO -OCCÉLOS

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Syrianus, in Metaph ., p. 175 , 5-11 Kroll = 931 a 9 Usener (où le nom transmis par le ms C est “ Eccelos" ) ; Proclus, in Tim . 32 a-b, t. II , p. 37 , 33 sq. Diehl . Contenu : L'univers est éternel, inengendré et indestructible ; il ne fait l'expé rience d'aucune espèce de changement, mais reste perpétuellement identique à lui-même ; le tout est divisé en monde supra - lunaire, toujours en mouvement, et monde sublunaire, toujours soumis à la corruption. Le genre humain est éternel; les hommes doivent s'unir non pour le plaisir, mais en vue de la génération de l'homme, pour que le genre humain se perpétue à travers toute la durée du temps et devienne immortel.

Il existe de fortes connexions avec Aristote, De generatione et corruptione II 1-4, dont proviennent également certaines citations littérales. Pour une compa raison entre la cosmologie aristotélicienne et celle du Pseudo-Occélos , voir 13 B. Effe, Studien zur Kosmologie und Theologie der Aristotelischen Schrift “ Über die Philosophie" , München 1970 , p . 31-72 . Voir aussi Chroust 11 , p. 209-210. Sous le nom d'Ocellos, Stobée I 13 , 2 , t . I , p. 139 , 15 - 140 , 9 Wachsmuth = Harder 1 , p . 26 ( cf. aussi son commentaire , p. 145-146 ) , a transmis en outre un fragment en dialecte dorien (une dizaine de lignes) d'un lepi vóuov ( Thesleff 5, p. 124 , 15 - 125 , 7 ; traduction anglaise de K. S. Guthrie dans Fideler 9 , p. 213 , et dans Navon 10 , p . 90 ) : analogie entre l'être vivant , la maison , la cité et le cosmos ; la loi est cause de la concorde sur laquelle reposent les maisons et les cités, qui assure leur permanence dans le temps ; division du cosmos en une partie toujours mobile et une autre toujours soumise au changement. Sur ce fragment, voir 14 A. Delatte, Essai sur la politique pythagoricienne, Liège/Paris 1922 , p . 172-173 , qui contient également une traduction . Il est hautement probable qu'il s'agit du traité dont on parle dans la lettre d ’“ Archytas ” ( + A 323) à Platon transmise par Diogène Laërce VIII 80 . Dans le cadre de sa notice sur Archytas (en VIII 80-81 ) , Diogène Laërce rapporte deux lettres apocryphes extraites d'un échange épistolaire présumé entre Platon et Archytas ( il y en avait peut-être d'autres, qui n'ont pas été conservées ; cf. 15 J.-Fr. Balaudé dans M.-O. Goulet - Cazé ( dir. ) , Diogène Laërce . Vies et doctrines des philosophes illustres, Paris 1999 , p . 1004 n . 6, discutant une suggestion de M. Narcy ). Celle de Platon fait également partie du corpus platonicien ( Lettre XII , 359 c-e) . Voir Harder 1 , p. 7 ( texte grec ) et 39-48 ( comm . ) ; 16 H. Thesleff, « Okkelos , Archytas and Plato » , Eranos 60 , 1962 , p . 8-36 ( comportant éd . et trad . angl . ) ; Thesleff 5 , p . 46 ( texte grec ) ; 17 M. Timpanaro Cardini, I Pitagorici. Testimonianze e frammenti, t . II , coll . « Biblioteca di studi superiori » 28 , Firenze 1962 , p. 392-396 (texte grec , trad. ital. & n . ) ; 18 L. Brisson, Platon . Lettres, coll . GF, Paris 19942 [ 1987 ) , p . 267 274 ( introd ., trad . fr. & n. ) ; Balaudé 15, p. 1004-1006 ( trad. fr. & n. ) . Dans la première lettre, il est question d'un voyage d'Archytas chez les Lucaniens à la rencontre des descendants d'Occelos (ou à la recherche de ses productions littéraires [l'expression employée est ενετύχομες τοίς Όκκέλω Éxyóvouc ); sur les deux interprétations possibles de ce membre de phrase, voir Balaudé 15 , p . 1005 n . 5 ) . Archytas termine sa lettre en prétendant envoyer à

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PSEUDO -OCCÉLOS

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Platon des mémoires (únouvnuata ), plus exactement des ouvrages Sur la loi, Sur la royauté, Sur la sainteté et Sur la naissance du tout, et en promettant de lui en faire parvenir d'autres dès que possible. Dans sa réponse , “ Platon" se réjouit et parle en termes très élogieux de l'auteur de ces mémoires (Occelos) , qui serait « digne de ses fameux lointains ancêtres » , originaires de Myra, la capitale de la Lycie (en tant que Lucanien , Occelos était considéré comme un descendant des émigrants troyens du temps de Laomédon , les premiers à arriver sur le sol italien , bien avant Énée et ses compagnons ; voir Balaudé 15 , p. 1006 , n . 3-5 ) . Pace 19 M. Isnardi Parente ( « Ocello Lucano nella “Epistola XII ” dello Pseudo-Platone » , ASCL 67 , 2000 , p . 5-14) , la correspondance échangée entre Archytas et Platon doit être considérée comme pseudépigraphe , et par consé quent , les renseignements qu'elle fournit ne sauraient être pris au sérieux. Le but de cet échange épistolaire fictif serait de légitimer les apocryphes qui avaient été attribués à Ocellos (cf. déjà Diels 1 , vol . I , p. 440 , n . ad li . 17 , « die von dem selben Autor herrührenden falschen Okkelosschriften beim Publikum zu verbürgen » ) en exploitant les rumeurs qui circulaient dans l'Antiquité au sujet des plagiats de Platon . Selon Thesleff 16 , le but de la correspondance serait plutôt d'affirmer, en une période d'ascension de Rome , que les origines des Lucaniens remontaient à une époque bien antérieure à celle des Romains ; Platon lui -même dépendait d'un Lucanien , Ocellos. Datation . L'ouvrage sur la nature du tout est connu par Varron ( cf. Diels Doxographi Graeci 186 ) et Censorinus, De die natali 4, 3 , lequel rapporte que la doctrine de l'éternité du genre humain avait été soutenue par Pythagore , Ocellos ( cf. § 38 ) , Archytas, et de façon générale par tous les pythagoriciens ; la date probable de composition est par conséquent le II° siècle av . J.-C. , avant Andro nicus de Rhodes ( 2 * A 181 ) selon Harder 1 , p. 31-32, 110-111 , 149-50 ; vers 200 av . J.-C. en Italie méridionale selon Thesleff 4 , p. 100-102, 115 . Le fragment de l'ouvrage Sur la loi est daté des 111-11a par Thesleff 4, p. 115 ; les fortes ressemblances pour la langue et le contenu que l'ouvrage présente avec d'autres pseudopythagorica relevant de l'éthique , traités datés entre le fer s. av . J.-C. et le 1er s . ap . J.-C. par 20 W. Burkert, « Zur geistesgeschichtlichen Ein ordnung einiger Pseudopythagorica » , dans Pseudepigrapha I , coll . « Entretiens sur l'Antiquité classique » 18 , Vandoeuvres-Genève 1971 , p . 25-55 ( cf. p. 38 41 ) , par 21 P. Moraux , Der Aristotelismus bei den Griechen , t . II , Berlin 1984, p . 605-607 et 678 , et par 22 B. Centrone (édit. ) , Pseudopythagorica ethica. I trattati morali di Archita , Metopo, Teage, Eurifamo. Introduzione , edizione , traduzione e commento , Napoli 1990 , p . 15 et n . 7 ; p. 41-44, conduisent à supposer pour ce fragment une semblable datation . BRUNO CENTRONE et CONSTANTINOS MACRIS . 7 OCCILOS DE LUCANIE Pythagoricien, frère d'Occélos ( > 05 ), d'après le catalogue de Jamblique, V. pyth. 36, 267 , p. 145 , 11 Deubner. BRUNO CENTRONE.

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OINOMAOS DE GADARA

8 ODAENATHUS DE SYRIE PLRE II :

751 DV

Philosophe platonicien originaire de Syrie , dont le nom n'est pas sans évoquer celui de l'époux de la reine de Palmyre Zénobie, un siècle et demi plus tôt. Élève de Plutarque d'Athènes , mort en 432, il a dû naître vers le début du ve siècle . Damascius, notre seule source sur ce personnage , évoque un étudiant peu intelligent qui dérangeait les cours de son maître, visiblement par des questions sur la divinité . Contrairement à ce qu'indique la notice de la PLRE , la seconde moitié du fragment de Damascius contient la réplique adressée à Odénath par un autre personnage , désigné par éxeīvos , sans doute Plutarque d'Athènes lui même . On ne sait rien d'autre sur ce personnage. Source. Souda, s.v. 'Oda vadoç (O 31 ), t. III, p. 507 Adler = Damascius , Vie d'Isidore fr. * 142 , p. 123-125 Zintzen ( 1 C. Zintzen (édit. ), Damascii Vitae Isidori reliquiae, edidit adnotationibusque instruxit C. Z. , coll . « Bibliotheca Graeca et Latina suppletoria » 1 , Hildesheim 1967) , fr. 65 , p. 174 Athanassiadi (2 P. Athanassiadi (édit. ), Damascius. The Philosophical History , text with translation and notes , Athènes 1999) (le texte du fragment est loin d'être aussi corrompu que ses deux éditeurs le prétendent): « Odénath , de Syrie. Cet individu, quand il fréquentait le philosophe Plutarque, emplissait de ses questions (ảnop al) les cours (Platpiba ) du maître et l'empêchait de mener son discours à bien à force de le gêner. Toutefois, Odénath était trop faible pour comprendre la vérité, et il (Exeīvoc ) lui demandait de bien vouloir penser qu'il ne fallait pas que le philosophe fût soumis à des questions et y répondît à brûle pourpoint sur'n'importe quel sujet. De plus , disait- il , il est extrêmement difficile, et presque impossible de dire ou de penser quelque chose au sujet des dieux quand nous ne sommes que des hommes. » Cf. Sur le rituel en deux temps des cours de philosophie à la fin de l'Antiquité (commen taire ou conférence magistrale , puis questions , ånop al ) , cf. 3 P. Hadot, Arrien, Manuel d'Épictète , Paris 2000, p. 26-30. Sur le souci manifesté par Damascius dans la Vie d'Isidore pour rétablir une discipline pédagogique dans l'enseignement de la philosophie , cf. 4 S. Diebler, « Cursus et court-circuit. Programmes et problèmes de l'enseignement de la philosophie dans l'Antiquité tardive » , Littératures classiques 37 , automne 1999, p. 33-43. STÉPHANE DIEBLER († ). OFELLIUS + LAETUS (OFELLIUS - ) (L 13] 9 OINOMAOS DE GADARA RE 5

II

Philosophe cynique, auteur de plusieurs ouvrages, qui a critiqué violemment la mantique et qui est à l'origine d'une conception renouvelée du cynisme à l'époque impériale. Les travaux récents les plus importants sur le philosophe Oinomaos de Gadara sont dus à J. Hammerstaedt: 1 Die Orakelkritik des Kynikers nomaus, coll . « Beiträge zur klassischen Philologie » 188 , Frankfurt am Main , 1988 ( bibliographie aux pages 309-315 ) ; 2 « Der Kyniker Oenomaus von Gadara » , ANRW II 36, 4 , 1990 , p. 2834-2865 ; 3 « Le cynisme littéraire à l'époque impé riale » , dans M.-O. Goulet - Cazé et R. Goulet (édit . ) , Le cynisme ancien , p . 399 418. Autres travaux. 4 Th . Saarmann, De Oenomao Gadareno, Diss. (Tübingen) , Leipzig 1887 ; 5 P. Wendland , c.r. de Saarmann 1887 , BPW 7 , 1887 , col. 1269 1272 ; 6 0. Crusius, « Die Kuvos aútoowvía des Oinomaos » , RHM 44, 1889 , p . 309-312 ; 7 I. Bruns, « Lucian und Oenomaus » , RAM 44, 1889 , p . 374-396 ; 8 H. Lewy, « Philologische Streifzüge in den Talmud » , 3 : « Zu Oinomaos von

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Gadara » , Philologus 52 , 1893 , p. 383-384 ; 9 H.J. Mette, art. « Oinomaos » 5 , RE XVII 2 , 1937 , col . 2249-2251 ; 10 D. R. Dudley, A History of Cynicism , p. 162-170 ; 11 D. Sperber, EncJud, XII , 1971 , p . 1331-1332 ; 12 H. Dörrie, art . « Oinomaos » 3 , KP IV , 1972 , col . 261-262 ; 13 S.J. Bastomsky, « Abnimos and Oenomaus . A question of identity » , Apeiron 8 , 1974 , p. 57-61 ; 14 M. Luz , « Abnimos , Nimos , and Oenomaus : A note » , JewQRev 77 , 1986-1987 , p . 191 195 ; 15 Id ., « A Description of the Greek Cynic in the Jerusalem Talmud » , JSJ 20, 1989 , p. 49-60 (cet article n'est pas consacré directement à Oinomaos, mais il traite, à partir de l'analyse de passages du Talmud de Jérusalem , des caracté ristiques du cynique tel qu'il apparaissait aux sages juifs du IIIe siècle de notre ère , notamment à Jean de Tibériade ; or, selon Luz, les sages de Tibériade connaissaient le cynisme grâce aux contacts qu'ils pouvaient avoir avec les Grecs de Gadara et il est tout à fait possible que le personnage d'Abnimos, inspiré d'Oinomaos , ait été conforme au type cynique dont parle Jean de Tibé riade ) ; 16 Id ., « Cynics as Allies of Scepticism » , dans L. C. Bargeliotes ( édit.), Scepticism : Interdisciplinary Approaches, Proceedings of Second International Symposium, Athens 1990, p. 101-104 ; 17 M.-O. Goulet- Cazé, « Le cynisme à l'époque impériale » , ANRW II 36, 4, 1990, p . 2720-2833 , notamment p. 2783 2785 et 2802-2803 ; 18 M. Luz, « Oenomaus and Talmudic Anecdote >>, JSJ 23, 1992 , 42-80. Les témoignages et les fragments ( hormis ceux des Charlatans démasqués) ont été regroupés, traduits et commentés par 19 J. Radicke dans F. Jacoby, Die Fragmente der Griechischen Historiker continued, IV A : Biography, Fasc . 7 : Imperial and undated authors, Leiden 1999 , p . 190-197 . Voir aussi 20 A. Brancacci , « Libertà e Fato in Enomao di Gadara » , dans A. Brancacci (édit. ) , La filosofia in età imperiale. Le scuole e le tradizioni filosofiche, Atti del colloquio Roma, 17-19 giugno 1999 , p. 39-67 , (témoignages p. 66-67 ) . Une épigramme de l'Anthologie Palatine IX 749 , due à un certain Oinomaos, ne présente pas d'indice invitant à penser qu'il s'agit du même Oinomaos. Datation . Deux témoignages de nature contradictoire s'opposent. La Souda Oi 123 présente Oinomaos comme un philosophe cynique un peu plus âgé que Porphyre, ce qui le situerait au début du IIIe siècle, puisque Porphyre est né en 234 ( φιλόσοφος κυνικός , γεγονώς oύ πολλώ πρεσβύτερος Πορφυρίου). Telle est la position adoptée par Saarmann 4 , p. 5-6 . Mais 21 E. Zeller, Die Philosophie der Griechen in ihrer geschichtlichen Entwicklung dargestellt III 1 , Leipzig, 1925 , p . 797 n . 2 , a expliqué que si , dans la Souda , Oinomaos est mis de façon erronée en relation avec Porphyre, c'est probablement parce qu'Eusèbe parlait des deux auteurs en même temps dans sa P.E. et parce qu'en outre, Eusébe, en V 18 , 6 , évoque Oinomaos comme un « auteur récent » , TIS Tõv véwv. Ce témoignage de la Souda s'oppose en fait à d'autres, manifeste ment plus fiables, qui permettent de faire remonter d'un siècle la date du cyni que . Ces autres témoignages se fondent sur la Chronique d'Eusèbe. On peut reconstituer ce qu'il y avait chez Eusèbe pour l'année 119 ap. J.-C. à partir du témoignage de la Chronique de Jérôme (R. Helm, Berlin 1956, p. 198 , 1-3 ) : Plutarchus Chaeroneus et Sextus et Agathobulus et Oenomaus philosophi

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insignes habentur, et de celui des Ecloga chronographica de Syncelle (éd. A.A. Mosshammer, Leipzig 1984, p. 426, 22-24 : Moútapxoc Xalpoveùç PINÓ σοφος επιτροπεύειν Ελλάδος υπό του αυτοκράτορος κατεστάθη γηραιός. Σέξτος φιλόσοφος και ' Αγαθόβουλος και Οινόμαος εγνωρίζετο ). La datation suggérée est donc antérieure d'un siècle à celle de la Souda. Mais 22 E. Rohde, « Téyove in den Biographica des Suidas » , RhM 33 , 1878 , p. 161 220 et p. 638-639, notamment p. 170-171 , privilégiait le témoignage de la Souda et mettait en doute la datation fournie par l'ouvrage d'Eusébe qui avait pu , selon lui , rassembler sur une même année des gens appartenant à des époques tout à fait différentes ; par exemple Plutarque mpalóc ne peut être un contemporain de Sextus ( sauf si , comme le pense von Arnim , art. « Sextus » 3 , RE II A 2 , 1923 , col . 2057 , il s'agit non pas de Plutarque mais de son neveu , qui peut être daté , comme Agathobule ( +*+ A 36), de la première moitié du second siècle) . La diver gence qui opposait Zeller et Rohde concernant la datation d'Oinomaos n'est pas davantage surmontée aujourd'hui. D'autres arguments ont été avancés , notam ment la présence d'un oracle en prose cité par Oinomaos , fr. 12 , 15-17 Hammerstaedt, ou encore l'amitié entre Oinomaos , si l'on admet qu'il a inspiré le personnage d'Abnimos ( A 3b) , et Rabbi Meir (cf. infra ). Ni la datation haute ni la datation basse n'ont pu être prouvées. Hammerstaedt 1 (p. 18) reste à juste titre très prudent: « Une datation d'Oinomaos au deuxième siècle est plus vraisemblable que l'indication chronologique donnée par l'article de la Souda. On ne saurait cependant prouver que cette dernière est fausse » . Pour le débat sur la datation d'Oinomaos et les différentes prises de position à cet égard, voir Hammerstaedt 1 , p. 11-18 . Identification avec Abnimos, l'ami de Rabbi Meir ? Les travaux de Luz 14 et 16 , ont remarquablement éclairé le problème de cette identification. Plusieurs textes appartenant à la littérature rabbinique des 111e-viº s . et du IXe s . évoquent un personnage appelé ’Abnomos (ou 'Abnimos ou Nimos) ha -gardi, c'est - à - dire « né à Gader = Gadara ) » . Nous indiquons leurs dates de rédaction telles qu'on les trouve dans Luz 14, p. 53 n. 29 et 30. Certains de ces textes appartiennent au Midrash Rabbah et sont édités et traduits dans H. Freedman et M. Simon (édit. ) , Midrash Rabbah translated into English with notes, glossary and indices , London 1939 : (a) sur Gen. LXV 20 ( [date : ca 425 ) , trad. H. Freedman ), t. II 2, p. 596 ; (b) sur Exode XIII 1 ([ date : 800-900 ), trad . S. M. Lehrman ), t. III , p. 150 ; (c) sur Ruth II 13 ( [date : ca 600 ], trad. L. Rabinowitz ), t . VIII , p . 35 ; (d) sur Lamentations, Proem 2 ( [ca 480 ] , trad. A. Cohen ), t . VII , p. 3-4. Le passage sur Ruth se rattache aux traditions locales faisant état des contacts étroits qu'entretenait Rabbi Meir avec les apostats des Gentils et les autres représentants de la culture non juive . Rabbi Meir, venu de la ville voisine de Tibériade , apparaît à l'occasion du décès de la mère de son ami Abnimos pour présenter ses condoléances et un peu plus tard au moment du décès de son père. Un bref échange, débouchant implicitement sur l'abolition du statut de la patrie, a lieu entre les deux personnages. Dans celui sur l'Exode, Abnimos interroge les

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sages juifs sur la façon dont fut créé le monde, mais, personne n'étant compétent en la matière, les rabbis l'envoient chez Abba Joseph le maçon qui lui fournit une explication ; ceux sur la Genèse et les Lamentations rapportent une même anecdote due au Palestinien de la fin du IIIe siècle Abba bar Kahana, où Abnimos déconseille aux païens de la Décapole d'attaquer les Juifs, s'ils entendent les voix de leurs enfants monter des synagogues et des écoles, autre ment dit si les jeunes Juifs étudient la Torah ; Abnimos et Balaam , fils de Beor (cf. Nombres 22 ) , y sont présentés comme les plus grands philosophes parmi les Gentils . On trouve une variante de cette anecdote dans (e ) Pesikta de Rav Kahana XV 5 ( date : ve s . ) , dans B. Mandelbaum ( text with commentary and introduction ), New York 1962, t . I , p. 254 ; traduit de l'hébreu et de l'araméen par W.G. Braude et I. J. Kapstein, Philadelphia 1975 , p . 279. Par ailleurs ( f) un passage du Talmud de Babylone , Haguiga 15 b (date : IIIº-ve s . ) , traduit par I. Abrahams, dans I. Epstein ( édit . ) , The Babylonian Talmud Seder Mo'ed , transl. into English with notes, glossary, indices, London 1935-1952 , t . IV , 1938 , p. 100 ( trad. française Le Talmud. Traité Haguiga. Traduit de l'araméen et de l'hébreu, introduit et annoté par I. Salzer, coll . « Les dix paroles » , Lagrasse 1991, 320 pages, notamment p. 122) présente le tisserand Nimos ha-gardi posant à Rabbi Meir une question à portée sans doute allégorique sur la teinture de la laine jetée dans le chaudron . Enfin , un dernier texte (g) , Aboth de Rabbi Nathan XXIV 7 , [date : ca 200 ) édité par S. Schechter, London 1887 , fait état d'une conversation entre Abnimos et Gamaliel II , où le premier demande au second : « Qu'est- ce qui est la gloire (ou le premier-né] du monde » ? et s'entend répon dre : « La paix » . Les discussions où est mis en situation Abnimos ainsi que les questions qu'il pose traduisent de la part du personnage une bonne connaissance à la fois des problèmes du judaïsme , de la Bible et même de l'homélitique rabbinique . Dans ( d ) , ( e ) et ( g ), on lit « Abnimos ha-gardi » , dans ( a ) , ( b ) et (c) « Abnomos ha -gardi » et dans ( f) Nimos ha- gardi. Dans ( c ) et ( f) le personnage est mis en relation avec le juif Rabbi Meir qui vivait à Tibériade sous le règne d'Hadrien, vers 135 , et dans (g ) avec Gamaliel II qui vécut de 80 à 116 , connaissait le grec, encourageait son étude et avait des contacts avec les Grecs. Dans un cas le personnage est présenté comme tisserand ( f) et dans ( a) , (d ) et (e) comme un des philosophes les plus importants parmi les Gentils. Luz 14 étudie de façon très précise la possibilité linguistique d'une équation Oinomaos /Abnimos ou Abnomos quand on passe du grec à l'hébreu . Après avoir montré que le Ab- ne peut représenter un ol- grec d'origine, il explique qu'Oivó uaoç a été translittéré en araméen au jer s . en ’ Inomos/ 'Unomos qui , devenus ’Inomis / Unimis, ont donné par suite d'une apocope les formes Nóuoc /Njuos, cette dernière étant précisément celle que l'on trouve dans le Talmud ( f ). On aurait donc un développement Oivouaos grec > ’ Inomos araméen > Nimos (Nomos ) dans le Talmud > Abnimos ( Abnomos) dans le Midrash . Il en conclut ( p . 195 ) : « The midrashic Abnimos should thus be seen as a later expansion of an earlier talmudic Nimos ... This could have happened by way of midrashic

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folk - etymology, whereby Nimos ' anecdotal role as friend of the Jews could have lent him the appellation ' Ab -nimus ( “ master of gentility / law " ). Bastomski 13 avait déjà trouvé plausible l'identification, en raison de la proximité à la fois chronologique et géographique, du personnage cité dans les sources juives et d'Oinomaos. Il faut noter cependant qu'aucun trait cynique n'est prêté à Abnimos dans toutes ces anecdotes. Luz 14 et 18 a repris le problè me à nouveaux frais en s'appuyant sur un examen approfondi de chacun des passages cités plus haut , en en étudiant tous les aspects philosophiques et idéo logiques et en essayant de voir à chaque fois les concordances possibles avec la philosophie cynique - lesquelles concordances semblent bel et bien exister, puisqu'on peut y déceler par exemple la critique de la notion de patrie, l'impor tance accordée à l'éducation , les valeurs de paix et de concorde, la pratique de la franchise -, ceci afin de déterminer si la figure d'Abnimos rejoint le type du cynique tel qu'il pouvait se manifester dans la tradition cynique de Gadara ( cf. Luz 15 étudiant les traits du type cynique tels qu'ils apparaissent dans y Gittin VII 1 , p. 38 b ; y Terumoth I 1 , p. 2 a et b Haguiga 3b-4a) . Il conclut à une double tradition dans le traitement de la figure d'Abnimos, distinguant les anecdotes où celui -ci approche les rabbis : (b ) , ( f) et ( g ), et les autres. Son interprétation sur une éventuelle identification des deux personnages est nuancée ( Luz 18 , p . 80) : « In none of these traditions , do we find the Abnomos figure based upon any particular Greek philosopher, but rather on a type ... Although Oenomaus may have given his name to Abnomos in this tradition in as much as he exemplifies a type , his own peculiar philosophy cannot be identified here . This is, however, not to deny that his general Gadarene Cynic tradition of ethical and social criticism does not overlay certain aspects of what is ascribed to Abnomos in nearly all the anecdotes both early and late. As an anecdotal figure, this Gadarene takes on a life of its own » . Le personnage fictif que nous rencontrons dans les textes midrashiques et le Talmud aurait donc reçu le nom du cynique Oinomaos . Hammerstaedt 1 , p. 17 , considère l'identité comme possible, et Hammerstaedt 3, p . 412 , ajoute: « Les mots d'Abnimos qui appa raissent dans ces anecdotes sont probablement inventés, mais ces narrations se sont formées au plus tôt sous l'impression efficace de la personnalité d'un philo sophe de la secte cynique » . Biographie. De sa vie nous ne savons rien sinon qu'il était, comme Ménippe et Méléagre, originaire de Gadara ( sur cette cité , voir la notice « Ménippe de Gadara » , »M 129 ) et qu'il est allé consulter lui-même à trois reprises l'oracle de Claros dont les réponses ambiguës et obscures le laissèrent fort insatisfait ( cf. fr. 14-15 Hammerstaedt). Voir 23 H. W. Parke , The Oracles of Apollo in Asia Minor, London 1985 , notamment p. 142-146 ( selon Hammerstaedt 2, p. 2843 , les hypothèses formulées par Parke sur la biographie d'Oinomaos ne peuvent pas être toutes prouvées, mais l'épisode de l'oracle dut avoir lieu ) . Hammerstaedt 2 , p. 2843 , pense , à cause de l'expression Év Apois , ei yevoiunv, « si j'étais à Delphes » ( V 23 , 3 = fr. 15 , 17 ) , par laquelle le philo sophe s'adresse à Apollon, qu'Oinomaos, au moment où il écrit son ouvrage contre les oracles, n'a jamais été à Delphes . En fait l'expression à l'optatif

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aoriste signifie plus probablement qu'Oinomaos n'est pas à Delphes au moment où il parle, mais que la possibilité qu'il y soit un jour existe bel et bien. De son ouvrage Sur les charlatans démasqués nous pouvons conclure qu'Oi nomaos reçut certainement une formation littéraire et philosophique , et qu'il devait avoir accès aux bibliothèques . Rien ne laisse supposer qu'il menait le mode de vie cynique tel que l'avaient illustré Diogène ou Cratès. Hammerstaedt 2 , p . 2843 , n . 74 signale qu'il connaissait les Phéniciennes d'Euripide, qu'il avait lu Hérodote et qu'il connaissait la théorie du Destin et la théorie de la connaissance des stoïciens . Il n'est donc pas question de l'assimiler à un prédicateur populaire sans éducation , ce que furent probablement certains cyniques .

Écrits. Oinomaos écrivit plusieurs ouvrages cités par la Souda Oł 123 qui se fonde sur Hesychius de Milet: un Περί κυνισμού, une Πολιτεία , un uvrage intitulé Περί της καθ ' " Ομηρον φιλοσοφίας et un Περί Κράτητος και ALOYÉVOuç xai tõv Rountőv (Brancacci 20, p. 42 n. 4, interprète différemment de Hammerstaedt le tõv outõv qui suit ce titre et qui ne serait pas une partie du titre, mais évoquerait d'autres ouvrages dont la Souda ne donnerait pas les titres). Julien (Discours VII 6, 210 D - 211 A) , fournit une autre liste : Oinomaos écrivit des tragédies, mais aussi ( ibid . 5 , 209 AB ) un ouvrage intitulé ‘ H toŨ Κυνός αυτοφωνία (La vraie voix du Chien ) et le Κατά των χρηστηρίων (Contre les oracles ), qu'il faut certainement identifier à la Contāv pápa ( Les Charlatans démasqués ), le seul ouvrage dont il nous reste des fragments, grâce à la Préparation évangélique d'Eusébe. Les fragments des Charlatans démasqués ont été transmis par Eusébe dans sa Préparation évangélique V 18-36 et VI 7 , un ouvrage composé au début du IV siècle . Si nous laissons de côté Pérégrinus qui commenta les livres des chrétiens et composa lui-même de nombreux ouvrages d'inspiration chrétienne, ainsi que Maxime Héron ( 3 • M 70) qui écrivit un ouvrage contre les Ariens et une réponse aux attaques de Grégoire de Nazianze, ces deux productions étant perdues, il faut bien admettre que le seul cynique qui se soit distingué sous l'Empire par une œuvre littéraire véritable est Oinomaos de Gadara, et nous avons la chance d'avoir conservé un grand nombre de fragments d'une de ses æuvres. Ces fragments ont été édités ( 16 fragments) et commentés par Hammerstaedt 1. Théodoret de Cyr, dans sa Thérapeutique des maladies helléniques, a cité des extraits d'Oinomaos empruntés à la P. E. d'Eusebe ( en VI 8-11 et en X 41-42 ). En 1889 , 24 Th . Saarmann avait publié des Adnotationes in Oenomai Cynici fragmenta, Progr ., Dortmund 1889 , p . 25-36 , et 3 P. Vallette, De Enomao Cynico, Paris 1908, une édition avec trad. latine et commentaire. Les fragments de la P. E. ont été traduits en français par 25 L. Paquet, Les Cyniques grecs. Fragments et témoignages, Ottawa 1975 , p . 233-263 , trad. reprise dans la nouvelle édition , Ottawa 1988 , p . 239-270 , et par 26 E. Des Places , dans son édition des livres V et VI de la Préparation évangélique d'Eusèbe, coll . SC 266, Paris 1980. Il faut signaler encore qu'un papyrus de Berlin de la seconde moitié ou de la fin du II ° s . édité par 27 W. Schubart, « Aus einer Apollon -Aretalogie »,

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Hermes 55 , 1920 , p. 188-195 , présente de nombreuses expressions communes avec Oinomaos. ' H TOV Kuvos aŭtopwvla. Crusius 6 rappelle la position de Saarmann 4 , p . 8 , qui voyait derrière cet ouvrage , dont le titre est cité par Julien , le Mepl κυνισμού . Cette identification est généralement acceptée , Περί κυνισμού étant alors considéré non comme un titre, mais comme la description du contenu de l'ouvrage , à moins qu'il ne s'agisse d'un sous - titre (cf. Hammerstaedt 1 , p. 42 47 ) . Oinomaos aurait donné dans cet ouvrage sa propre vision du cynisme , qui n'était pas celle des autres cyniques ( cf. la phrase que rapporte Julien , Discours IX 8 , 187 C [ = fr. 17 Hammerstaedt), et qui provient sans doute de cet ouvrage : ο κυνισμός ούτε ' Αντισθενισμός εστιν ούτε Διογενισμός , « Le cynisme n'est ni un antisthénisme ni un diogénisme » ) . Cette phrase , la seule conservée en dehors des fragments critiquant les oracles, était une réponse de la part d'Oinomaos à la question de l'identité du fondateur du cynisme . Apparemment il ne voulait pas réduire la philosophie cynique à la pensée et au mode de vie d'une seule personnalité, fût-elle Antisthène ou Diogène, et il se proposait de mener une réflexion fondamentale sur le cynisme . Après avoir cité cette phrase d'Oinomaos , Julien rappelle que « les plus distingués des cyniques soutiennent que le grand Héraclès, qui s'employa à nous dispenser tous les autres biens , légua également aux hommes le plus haut exemple de ce genre de vie » (trad. Rochefort ). Il est probable, mais pas absolument sûr, qu'Oinomaos lui-même se réclamait d'Héraclès comme précurseur et modèle d'un cynisme authentique. Crusius propose la traduction suivante : « Des Kyon leibhafte Stimme » , littéra lement « La voix du Chien en chair et en os » . Il comprend que derrière le Chien en question se cache soit Héraclès, le héros éponyme du cynisme, soit l'animal lui-même qui montre à l'homme la voie pour renouer le lien qui a été rompu avec la nature . Mais Hammerstaedt voit derrière cette expression plutôt une allu sion à la conception personnelle qu'Oinomaos se faisait du cynisme : « L'attitude autonome adoptée par Oinomaos à l'égard des anciens cyniques et son éman cipation du stoïcisme tout autant que son œuvre littéraire en général lui ont procuré chez les cyniques une telle autorité qu'il est considéré par Julien comme le représentant du nouveau cynisme» (Hammerstaedt 2 , p . 2851 ) . Luz 14, p . 47 , pour qui l'aůtopwvía signifie que le divin se révèle directement à l'individu sans l'intercession d'un prêtre ou d'un prophète, suggère de traduire : « A Dog's Personal Revelation » , estimant qu'Oinomaos utilise le terme dans son sens métaphorique, ce qui signifierait que le cynisme au lieu d'être un antisthénisme ou un diogénisme , est « the personal calling of the individual Cynic after the model of the divine Hercules » . Il explique que le cynique n'a besoin d'aucun intercesseur, qu'il se tourne vers sa conscience individuelle et son libre -arbitre comme s'ils étaient directement inspirés par le divin . Enfin Radicke 19 propose The Kyon's Own voice et comprend que ce qui est mis en avant c'est l'opinion personnelle d'Oinomaos . A défaut de pouvoir trancher de façon argumentée parmi les interprétations possibles, nous proposons de traduire par « La vraie voix du Chien » , l'expression pouvant signifier tout aussi bien « l'expression

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authentique de la philosophie du cynique » que « la vraie voix qu'entend le cynique » . 28 D. A. Wyttenbach , Epist. crit . super nonnullis Juliani locis ad D. Ruhnkenium , Göttingen 1769 , p . 19 , a voulu identifier l'ouvrage avec Les charlatans démasqués, sous prétexte qu'il voyait dans Kuvos aŭtopwvía une allusion aux ajtóowvol xpnouoi, ces oracles que le dieu prononce person nellement . La suggestion fut rejetée par Saarmann 4, p. 7 , car la formulation de Julien en VII 5 , 209 B , exclut une telle identification : év tñ TOŨ XUVÒÇ αυτοφωνία και τα κατά των χρηστηρίων.. La rontāv púpa . Sur la nécessité d'adopter la forme pápa, « la décou verte » , « le dévoilement » , plutôt que pwpá, « le vol » , voir Hammerstaedt 1, p . 33-38 . L'ouvrage semble avoir eu deux titres , à moins que Karà tõv xenornpiwv ne soit un sous - titre ou une erreur de la Souda (Hammerstaedt 1 , p. 46 ). Oinomaos , dans un débat fictif, s'adresse directement à Apollon, en usant de la première personne, mais le cadre de l'ouvrage n'est pas Delphes ( cf. fr. 15, 17 : Èv A £apoiç ki yevoiunv ). Dans les fragments du livre V de la P.E., Oinomaos se livre à une polémique violente contre les oracles delphiques dont il souligne toute l'ambiguïté – il les qualifie de « ruses et de sophismes habilement imaginés par des charlatans pour tromper la foule » ( V 21 , 6) -, tournant en dérision ces oracles , n'hésitant pas à parodier des vers oraculaires bien connus ( par exemple fr. 2 , 33 ; voir Hammerstaedt 1 , p. 126 ) et critiquant les activités frauduleuses des gardiens des temples ; le philosophe apostrophe directement les dieux , critique la crédulité des gens qui croient en la divination et traite Apollon de « sophiste » ( V 26 , 3 = fr. 8 , 1-18 ) . En fait il ne remet pas en cause l'existence des dieux comme telle , mais il s'attaque à l'utilisation scandaleuse des oracles à laquelle se livrent les gardiens des temples. Au détour d'un passage ( V 28, 10 = fr. 10 , 50-55 ) , Oinomaos évoque les valeurs qui lui tiennent à ceur dans le domaine politique et qu'il souhaite voir naître dans la cité : le courage (åvopeia) , la liberté (élevdepía) et la concorde (óuoppooúvn ). Dans le livre VI , il s'en prend aux écoles philosophiques , attaquant les déterministes comme Démocrite ( > D 70) et les fatalistes comme Chrysippe ( C 121 ) , bien décidé qu'il est à défendre la liberté humaine contre l'eiuapuévn : « Il a disparu, pour autant du moins qu'il dépend des savants , il a disparu de notre vie humaine, le gouvernail, l'étai , le fondement – selon qu'il vous plaira de l'appeler -, c'est -à dire la liberté ( ń & Eovoia ) dont nous affirmons l'indépendance à l'égard des nécessités les plus pressantes » ( trad . Des Places ) . Les critiques adressées par Oinomaos aux stoïciens peuvent nous étonner, vu qu'à l'époque impériale des gens comme Sénèque ou Épictète intégraient le cynisme, ou du moins certains de ses aspects, dans leur philosophie. En plus des oracles, Oinomaos cite Homère , Hesiode, Démocrite, Platon et les stoïciens. Toutes les références aux oracles et aux auteurs cités sont rassem blées par Hammerstaedt 1 , p . 321-324 . Hammerstaedt 3 , p. 408-409, suggère qu'Oinomaos a pu subir l'influence de Ménippe de Gadara ( ™ M 129), en ce qu'il a pratiqué le mélange de vers et de

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prose caractéristique du style ménippéen . Il cite, p. 406 n . 39 , trois exemples : fr. 1 , 7-10 ; 3 , 1-8 et 5 , 8-12 , où les vers font partie intégrante de la structure syntaxique de la phrase d'Oinomaos.

Au jugement d'Eusèbe, Oinomaos manifeste dans son ouvrage une argumen tation vigoureuse (åvôpixõ Noyloum ) [V 18 , 6 ) , une pensée fougueuse (vea ViXQ Opovňuati) [ VI 6, 74 ) , beaucoup de franchise ( ntaponoiac) et l'amère âpreté des cyniques (XUVIUñS Tlxpiac ) ( V 21 , 6] . Le jugement de Julien en revanche est très sévère : « Que le cynique ne soit pas comme Oinomaos, sans pudeur et sans honte ; qu'il ne méprise pas en même temps toutes les choses divines et humaines » ( IX 17 , 199 A) . Hammerstaedt 2 , p. 2853-2862 , étudie comment Oinomaos , qui est considéré comme cynique à la fois par Julien , Hesychius de Milet et Eusebe ( 29 F. Sayre, The Greek Cynics, Baltimore 1948 , p. 56 , avait en effet remis en cause l'appar tenance d'Oinomaos au cynisme ) , se situe par rapport à ce qu'on trouve chez d'autres auteurs en matière de critique cynique des oracles . A cet effet il établit une comparaison avec le De Pythiae oraculis et le De defectu oraculorum de Plutarque, le Discours 9 de Dion Chrysostome (= D 166) , les propos de Maxime de Tyr (2M 69) sur les oracles et plusieurs dialogues de Lucien (> L 66) , entre autres le Juppiter Confutatus et son personnage Cyniscus (= C 230 ) . Pour une étude de la philosophie d'Oinomaos, de sa conception de la liberté, de ses critiques adressées à Chrysippe et Démocrite, de son originalité par rapport au cynisme ancien, voir Hammerstaedt 2 , p. 2844-2850, et Brancacci 19 , p. 52-66 . Περί Κράτητος και Διογένους και των λοιπών . Ce titre d'interpretation difficile ne permet pas de deviner le contenu de l'ouvrage . On s'étonne de l'absence du nom d'Antisthène et de l'interversion chronologique des noms de Diogène (

D 147 ) et de Cratès (

C 205 ) .

Περί της καθ ' “ Ομηρον φιλοσοφίας . Nous ne disposons d'aucun autre renseignement sur cet ouvrage , dont Hammerstaedt 2, p. 2851 , remarque qu'il rappelle un titre de Philodème ( lui aussi de Gadara ): Nepà Toũ xa0 ' " Ounpov αγαθού βασιλέως . On connait également un ouvrage de Porphyre intitule Περί tñs 'Ouńpov piogop ac et un de Longin ( ™ L 63 ) traitant de la question Eỉ φιλόσοφος " Ομηρος.. Mohitela . Dans cet ouvrage , qui portait le même titre que celui de Diogène, Oinomaos devait exposer des vues politiques qui n'étaient pas nécessairement identiques à celles de Diogène. Comme nous l'avons vu à propos des Charlatans démasqués, les valeurs qu'il prônait en politique étaient le courage, la liberté et la concorde. Tragédies. La Souda 0 1142 attribue des tragédies à un « Diogène ou Oinomaos » , dont le floruit coïnciderait avec le renversement des Trente , sans rapport par conséquent avec l'époque où vécut Oinomaos de Gadara . Les titres, sauf une Sémélé, recouvrent ceux des tragédies de Diogène. Il serait par consé quent imprudent de voir dans ces titres de la Souda les tragédies d'Oinomaos auxquelles fait allusion Julien , Discours VII 6 , 210 D , en des termes extrême

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ment critiques : « Lisons maintenant les tragédies d'Oinomaos - car il en écrivit, et dans le même ton que ses discours ; c'est l'ignomnie des ignominies , l'ex trême degré de la perversité, et je ne saurais les désigner convenablement, quand bien même j'irais jusqu'à parler des maux des Magnésiens , du mal Termérien, bref de toute espèce de tragédie accompagnée du drame satyrique, de la comédie et du mime ; si grand est l'art avec lequel notre homme a réalisé en cela le comble de la honte et de la déraison ! » ( trad. G. Rochefort ). Oinomaos en V 33 , 13 (= fr. 1 , 57-59 Hammerstaedt) fait cette remarque sur le matériau tragique que peuvent utiliser les auteurs tragiques de son époque, et lui-même par consé quent : « pour ce qui est de nos tragédies, il ne se trouverait plus maintenant ni Thyeste ni Edipe ni le fameux Phinée » . Faut-il tirer une conclusion du fait qu'Oinomaos écrivit, comme Diogène une Politeia et des tragédies ? Voulait-il , par cette rivalité littéraire, se présenter comme le fondateur d'un cynisme renouvelé ? Réception et influence. Des rapprochements textuels que l'on peut faire entre Oinomaos et Clément d'Alexandrie ( >C 154 ) , Hammerstaedt 1 , p. 22-24, conclut que Clément a lu Oinomaos – ce qui suppose la datation haute - , et qu'à différentes époques il a pu lui emprunter des motifs que l'on retrouve dans plusieurs de ses ouvrages , notamment dans le Protreptique et les Stromates. Voir aussi Hammerstaedt 2 , p. 2840-2841, qui commente ces rapprochements. De même il est vraisemblable qu’Origène (2042 ), auteur du Contre Celse, a lu Oinomaos à Alexandrie comme Clément, et qu'ensuite il a amené l'ouvrage à Césarée où Eusébe allait plus tard le lire dans la bibliothèque de son maître Pamphile . Cette suggestion semble plausible à 30 A. Carriker, The Library of Eusebius of Caesarea, coll . « Supplements to Vigiliae Christianae» 67 , Leiden 2003, p . 96. Quant à Julien , il a pu lire l'ouvrage entre 342 et 348 à Fundus Macelli en Cappadoce dans une copie prêtée par Georges de Cappadoce, dont Julien s'efforça d'acquérir plus tard la riche bibliothèque (cf. Lettre 23 , 378 c ) . Sur ces hypothèses , voir Hammerstaedt 1 , p. 25-28 et 2, p. 2842, et Carriker 30, p . 97. Nous avons déjà signalé que Théodoret citait des extraits d'Oinomaos empruntés à la P. E. d’Eusébe. On trouvera dans Hammerstaedt 2, p . 2862-2864, d'autres références témoignant d'une influence de l'écrit d'Oinomaos sur Cyrille d'Alexandrie , dans son ouvrage contre Julien ( PG 76 , 812 D ) et sur Jean Chrysostome dans son Discours sur Babylas contre Julien VI ( PG 50 , col . 555 557 ). Il n'est pas impossible que Lucien , créant le personnage de Cyniscus dans son Juppiter confutatus ait subi l'influence d'Oinomaos ( cf. Hammerstaedt 3, p . 416-418 ). Mais c'est chez l'empereur Julien ( »I 46 ), qui parle de lui dans deux de ses Discours, qu'on mesure le mieux combien Oinomaos et ses écrits avaient de l'importance. Ils firent en effet l'objet de violentes attaques de la part de l'Empereur qui oppose au cynisme tel que conçu par le philosophe de Gadara son Diogène idéalisé, un Diogène plein de respect pour la divinité ( VII 8 , 212 A 213 A ) . Julien connaissait ' H toŨ Kuvos aútoowvía , l'ouvrage contre les oracles et les tragédies, probablement aussi l'ouvrage sur « Diogène , Cratès et

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les autres » . Il avait lu certainement d'autres livres d'Oinomaos , à en juger par VII 5 , 209 A - B , où , s'adressant à Héracleios, il cite ' H toũ Kuvos autopuvía ainsi que le Κατά των χρηστηρίων , poursuivant ainsi : και πάσιν απλώς οίς Šypadev ó åvýp . La démarche d'Oinomaos risquait d'entraver l'ambitieux projet de restauration de l'hellénisme, et en particulier de la religion, qui était celui de Julien . Celui -ci n'hésite pas à comparer Oinomaos aux « pillards du désert » et aux « frères de la côte » , puisqu'il ne manifeste aucun respect pour les droits d'autrui (Discours VII 5 , 209 A-210 A ). Les tragédies du philosophe sont « le comble de la honte et de la déraison » , puisqu'il y couvre les dieux de blasphèmes et y aboie contre tout le monde ( VII 6, 210 D-211 A) . L'image de Diogène qui se dégage des écrits d'Oinomaos est réprouvée par Julien ( VII 8 , 212 A ) . Aux prises avec les cyniques de son époque, notamment Héracleios ( H 46 ) contre qui il écrivit son Discours VII , l'Empereur met en garde les adeptes de ce cynisme nouveau qu'il réprouve : « Que le cynique ne soit donc pas un imitateur d'Oinomaos qui a perdu toute pudeur et toute honte et qui méprise tout ensemble les choses divines et humaines » ( trad . Rochefort) » ( IX 17 , 199A ). Voir Hammerstaedt 3 , p . 413-416. Il est probable que les cyniques auxquels s'attaque l'Empereur Julien dans ses deux Discours, même si celui -ci ne le dit pas expressément, étaient sous l'influence des écrits d'Oinomaos et de sa conception renouvelée du cynisme que Julien ne partage pas du tout . Oinomaos incarne de fait une nouvelle conception du cynisme , un cynisme radical moins par son mode de vie que par l'attaque qu'il mène contre les valeurs de la société ambiante, notamment les valeurs religieuses. Même s'il se réfère aux grands noms du cynisme , il ne reconnaît plus ceux -ci comme les fondateurs ou les modèles de cette philosophie . Oinomaos en outre témoigne d'un cynisme cultivé , n'hésitant pas à user de l'æuvre littéraire pour dispenser son message , bien éloigné en cela de la plupart des cyniques de l'époque impé riale qui circulaient dans les rues des grandes cités de l'Empire, mendiant et aboyant MARIE -ODILE GOULET -CAZÉ.

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Astronome et mathématicien , dont certaines théories physiques sont connues . Les témoignages relatifs à Oinopidès sont rassemblés dans 1 DK 41 , t . I , p. 393-395 . Une version plus complète de la notule chronologique du fr. la est imprimée dans l'appendice du 2 CCAG VIII 3 , Bruxelles 1912, p. 95 , 8-19 (on peut extraire quelques informations complémentaires pour l'apparat critique de la description du Paris cod. gr. 2425 dans le tome VIII 4 , Bruxelles 1922, p . 38) . Quelques autres références peuvent être ajoutées: Sextus , Adv. Math . IX 361 ; (Galien ), Phil. hist. 18 (complète le fr. 5 ) ; [Galien ) , Phil. hist. 55 ( = Aetius II 12, 2 ) ; Cornutus 32 , p. 67 , 15-16 Lang ( pour le fr. 7 ) ; Sénèque , Quaest. nat. IVA 2, 26-27 et l’Anonymus Florentinus dans Cod. Laur. 56, 1 [647 F 1 Jacoby, sect. 6] (pour le fr. 11 ) . A la seule exception d'une sentence conservée dans le Gnomologium Vaticanum (420 = fr. 4 ) , les témoignages des auteurs ultérieurs ne prétendent pas rapporter les mots mêmes d'Oinopidès.

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Il n'existe pas de biographie antique d'Oinopidès. Il peut être daté à partir de la liste de mathématiciens postérieurs à Pythagore conservée dans Proclus, in Eucl. p. 65 , 21-66, 7 Friedlein ( Eudème de Rhodes ( E93 ), fr. 133 Wehrli ), où il est mentionné après Anaxagore ( = A 158 ) et avant son contemporain plus jeune, Hippocrate de Chios ( ~ H 151 ) . Proclus mentionne également Oinopidès en in Eucl. p. 80, 15-20 Friedlein ( = fr. 12 ) , comme le premier d'une succession de mathématiciens. Dans cette lignée sont mentionnés pour une époque plus tardive Andron (** A 175 ) et Zénodote , mais la datation de ces mathématiciens et l'intervalle chronologique entre Oinopidès et eux ne permet de tirer du passage aucune conclusion quant à sa datation . Sur les conséquences potentielles de la rareté de telles successions de mathématiciens dans les témoignages antiques, voir 3 R. Netz, The shaping of deduction in Greek mathematics, Cambridge 1999, Chapter 7 (“ The historical setting” ), Section 2 (“Demography”), notamment p. 291-292. A part sa datation et son lieu d'origine , l'île de Chios , on ne connaît rien d'autre concernant la vie d'Oinopidès . Le détail le plus instructif à propos d'Oinopidès dans cette maigre documentation se trouve dans le contexte narratif des premières lignes du dialogue pseudo-platonicien Les Rivaux ( Anterastai) 132 A - B . Dans ce passage , Socrate rappelle une discussion dont il avait été témoin dans l'école de Dionysios ( D 187 ) entre deux jeunes Athéniens à propos d'un sujet qui concernait ou bien Anaxagore ou bien Oinopidès, les deux jeunes gens dessinant des cercles et représentant des inclinaisons par les gestes de leurs mains . L'anecdote n'implique certainement pas qu'Oinopidès ait été actif à Athènes , comme c'était le cas pour Anaxagore. Néanmoins il montre qu'il exerçait une forte influence intellectuelle à Athènes. La vie de Démocrite ( •D 70) en Diogène Laërce IX 37 et 41 , donne une image semblable d'Oinopidès. Au § 37 , on rapporte que Thrasylle, l'éditeur ancien des ouvrages de Démocrite, prétendait que si le dialogue Les Rivaux est une æuvre authentique de Platon, l'interlocuteur sans nom de Socrate, « différent des disciples d'Anaxagore et d'Oinopidès » , devrait être Démocrite lui-même. Selon le § 41 , Démocrite, dans son Petit système du monde, déclarait qu'il avait quarante ans de moins qu'Anaxagore. Suivent les dates de sa naissance, telles que proposées par Apollodore ( » * A 244 ) et Thrasylle, le second faisant de Démocrite un contem porain d'Archélaos (** A 308 ), le disciple d’Anaxagore, et des disciples d'Oinopidès ( ToùG περί Οινοπ δην). Le passage signale enfin que Democrite mentionnait également un de ces derniers, c'est -à -dire , outre Anaxagore, Archélaos ou Oinopidès. Comme il est impossible de savoir ce que cette affirmation implique exactement et qu'on ne sait pas si l'æuvre de Démo crite à laquelle il est fait allusion est authentique , ce passage n'ajoute rien au " témoignage ” des Rivaux. Doctrines. La notule historiographique du CCAG 2 , VIII 3 , p. 95 , 12-14 , soutient qu'Oinopidès fut le premier à écrire , d'un point de vue suffisamment théorique , sur l'astronomie ( πρώτος δε παρ ' “ Ελλησιν ο Χίος Οινοπ δης τάς đotpołoyixòç MEDódovç #Enveyxe £iç ypaońv ) . Bien qu'il puisse ne s'agir ici que d'une présomption conjecturale tardive, cette estimation n'est pas sans fondement, si l'on considère les nombreuses découvertes qui sont attribuées à Oinopidès . Les découvertes astronomiques devaient figurer dans un ou plusieurs ouvrages d'Oinopidès qui fournirent aux astronomes et aux philosophes de la génération suivante un ensemble de données et nous ne connaissons aucun

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ouvrage antérieur ayant joué un rôle similaire . Comme aucun titre d'ouvrage d'Oinopidès n'a été conservé, les témoignages qui suivent seront regroupés par thèmes. A. Oinopidès aurait découvert le zodiaque. Un témoignage remontant à Eudème ( fr. 145 Wehrli ) et transmis par Théon de Smyrne, p. 198 , 14-16 Hiller, qui dépendait de Dercyllidès ( 2D 87 ) , attribue à Oinopidès la découverte de la circonvolution ( diá (wolc) - ou bien , si l'on suit la correction de Diels, l'obli quité (aótwolc ) – du zodiaque . Deux autres témoignages développent cette information : Aétius en II 12 , 2 , prétend que l'obliquité fut découverte par Pytha gore, mais qu'Oinopidès s'appropria cette idée et la publia comme sienne , et Diodore de Sicile , en I 98 , 2 , dit qu'Oinopidès apprit les doctrines astro nomiques qu'on lui prête , notamment l'obliquité du cercle du soleil, des prêtres égyptiens. La valeur de ces témoignages a été remise en cause par 4 A. C. Bowen , art. « Oenopides » , dans D. J. Zeyl ( édit. ), Encyclopedia of Classical Philosophy, Westport, Connecticut 1997, p. 357 , qui suggère qu'ils peuvent s'expliquer par « the casual reference to Oenopides in Plato's Amatores ( 123 a-b) » ( c'est -à -dire dans le passage des Rivaux 123A - B ) . Cette suggestion soulève cependant plus de problèmes qu'elle n'en résout , car on ne voit pas pourquoi une référence occasionnelle à Anaxagore et Oinopidès aurait pu donner lieu à l'idée que ce dernier, plutôt qu'Anaxagore qui lui était antérieur, avait découvert le zodiaque ( cf. Aetius II 16, 1 (= 59 A 78 DK ] , qui soutient que selon Anaxagore tous les astres se déplacent d'est en ouest , c'est-à-dire qu'aucun d'eux ne possède un mouvement propre, dans le zodiaque, en sens contraire à la révolution céleste diurne ). Il n'est donc pas raisonnable de penser que les témoignages doxographiques sont des extrapolations à partir de la scène d'ouverture du dialogue pseudo- platonicien qui pourrait être postérieur à Eudème lui - même ( cf. 5 Th . Heath A history of Greek mathematics, Oxford 1921 ( réimp. New York 1981 ), vol . I : From Thales to Euclid , p. 174, qui , tout en supposant que la discussion du début des Rivaux devait concerner l'obliquité de l'écliptique, ajoute en guise de mise en garde : « [ i ] t would probably be unsafe to conclude that Anaxagoras was also credited with the same discovery, [... ] » .) La doctrine exacte que l'on peut attribuer à Oinopidès dépend de l'état d'avancement des connaissances astronomiques que l'on est prêt à reconnaître à l'époque qui lui est immédiatement antérieure. Contre la priorité d'Oinopidès dans la découverte d'un double mouvement des planètes - y compris du soleil et de la lune -, l'un s'accomplissant d'est en ouest, commun avec les étoiles fixes, et un autre en sens contraire, plus lent, à l'intérieur du bandeau du zodiaque, on a fait valoir que cette découverte avait souvent été prêtée à Anaximandre ( P - A 165 ) . ( Ainsi 6 W. Burkert, Lore and science , p . 306 n . 38 , contre la thèse attribuant à Pythagore la découverte du zodiaque . Voir également 7 H. Diels , « Anaximandros von Milet » , JKPh 51 , 26. Jg . , 1923 , p . 72 , réimpr. dans ses Kleine Schriften zur Geschichte der antiken Philosophie , hrsg. von W. Burkert, Hildesheim 1969 , p. 8. ) Mais le témoignage de Pline l'Ancien , H. N. II 31 (= 12 A 5 DK ) repose sur une fausse compréhension de la cosmologie d'Anaxi mandre , pour qui l'inclinaison des roues du soleil et de la lune explique que le pôle céleste de la révolution diurne ne se situe pas directement au-dessus de nos têtes ( voir 8 D.L. Couprie, « The visualization of Anaximander's astronomy» , Apeiron 28 , 1995 , p . 159-181 ) . La priorité d'Oinopidès devrait donc être remise en question au profit de Pythagore et des premiers pythagoriciens. La question

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ne peut être tranchée de façon sûre : les déclarations des astronomes ultérieurs ne peuvent être acceptées sans examen , dans la mesure où ils attribuent à Pythagore non seulement la découverte du zodiaque, mais également des vues constitutives de la théorie astronomique des siècles ultérieurs ( voir Burkert 6, p. 325 n . 10 ). Reste le témoignage d'Aétius (II 16 , 2-3 = 24 A 4 DK ) qui prête à Alcméon ( PA 98 ) l'idée d'un mouvement propre des planètes, contraire à la rotation céleste diurne. Ceux qui veulent attribuer la découverte du zodiaque à Oinopidès doivent rejeter ou interpréter également ce témoignage. En revanche, si on accepte ce témoignage d'Aétius relatif à Alcméon et si l'on prend les témoignages des astronomes concernant les premiers pythago riciens cum grano salis, en considérant qu'ils ont dépassé leur pensée en employant des formules globales et anachroniques à propos du mouvement propre des planètes , on se trouve confronté à deux possibilités. Ou bien on doit reconnaître qu’Eudème pour quelque raison a négligé Alcméon et d'autres pythagoriciens anciens au profit d'Oinopidès . Ou bien on peut attribuer à Oino pidès la découverte de quelque détail supplémentaire de cette théorie . 9 K. von Fritz , art. « Oinipides » ,RE XVII 2 , 1937 , col . 2260-2261 ( repris dans une version légèrement abrégée dans ses Schriften zur griechischen Logik , Bd . 2 : Logik , Ontologie und Mathematik, Stuttgart/Bad Cannstatt 1978, p . 151 ) , a ainsi soutenu que le compte rendu que Théon emprunte à Dercyllidès a été désarti culé , si bien que la découverte finale, mentionnée p . 199, 2-8 Hiller et attribuée dans ce passage aux “autres [astronomes )", selon laquelle l'obliquité du zodia que serait de 24 degrés pourrait également être attribuée à Oinopidès . ( Cette proposition ne manquera cependant pas d'être contestée. Voir 10 Th . Heath , Aristarchus of Samus: The ancient Copernicus, Oxford 1913 , réimpr. New York 1981 , p. 131 : « at all events he cannot be credited with the estimate 24º, which held its own till the time of Eratosthenes [...] . » ) B. La Voie lactée. Aristote, Meteor. I 8 , p. 345 a 13-18 , signale deux théories pythagoriciennes pour la Voie lactée. La seconde, selon laquelle il s'agirait de l'orbite plus ancienne du soleil , est mise au compte d'Oinopidès par Achilles, Isag. p. 55 , 18-24 Maass. On ne sait pas si Oinopidès a repris sur ce point les vues de pythagoriciens plus anciens , si Aristote a considéré Oinopidès comme un pythagoricien , ou bien si des pythagoriciens ultérieurs , avant l'époque d'Aristote , ont adopté ces vues d'Oinopidès . Le témoignage d'Achille ajoute pour embellir son compte rendu que le soleil aurait modifié sa course par dégoût devant " le repas de Thyeste" . Une vue similaire expliquant le mouvement en sens contraire des planètes par le repas de Thyeste est rapportée aux amusements des mythes au chapitre 6 de la première introduction tirée de scholies aux Phénomènes d'Aratus (p . 98 , 5-7 Maass ). Voir également Euripide, Électre 726-736, Oreste 1001-1010 et Platon, Pol. 268 E - 269 A, où le repas thyestéen est l'occasion d'un complet renversement des révolutions célestes. Cela n'exclut pas cependant que l'idée vienne d'Oinopidès: on peut établir un rapprochement avec un autre ornement théologique d'Oinopidès, prétendant qu'Apollon avait reçu l'épithète Loxios à cause de l'obliquité ( loxos ) du zodiaque, en tant que divinité solaire (Macrobius, Saturn . I 17,31 ; Cornutus 32,

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p . 67 , 15-16 Lang ) ; à nouveau une variante de cette conception est attribuée à certains ( TIVEC) au chapitre 5 de la même introduction anonyme tirée de scholies ( p . 96 , 10-13 Maass ). A moins que la scène initiale des Rivaux ne fasse référence à Anaxagore et Oinopidès comme à de simples noms célèbres – auquel cas n'importe quel détail astronomique pourrait leur être rattaché -, la discussion qui semble en cause dans ce passage , ainsi que le suggère 11 W.K.C. Guthrie, A History ofGreek philosophy, vol. II : The presocratic tradition from Parmenides to Democritus, Cambridge 1965 , p. 305 n. 3, pourrait concerner un changement radical qu'Anaxagore et Oinopidès auraient pu supposer dans le domaine céleste. Mais, dans le cas d'Anaxagore, le changement ne concerne pas que l'orbite du soleil , mais c'est plutôt , ainsi que l'attestent Diogène Laërce II 9 (= 59 A 1 DK ) et Aétius II 8, 1 (= 59 A 67 DK), l'ensemble de la révolution diurne du ciel qui recevrait une inclinaison qui expliquerait que son axe n'est plus directement au-dessus de nos têtes. C. La " grande année" d'Oinopidès , selon Aétius II 32 , 2 et Élien , Var. hist. X 7 , correspond à 59 années solaires. Il semble clair que ce chiffre s'explique par la volonté de trouver un commun multiple pour la longueur d'une année et pour le mois synodique de 29 1/2 jours . Par conséquent, on doit supposer que les 59 années contiennent au moins 365 * 59 ( = 2 * 29 1/2 ) jours, composant donc 365 * 2 = 730 mois synodiques ( contrairement à la grande année de Philolaos, lequel pour des raisons numérologiques soustrayait un mois , faisant durer la grande année 93 = 729 mois ; voir Censorinus 18 , 8 et 19, 2 (= 44 A 22 DK] ) . Censorinus 19 , 2 précise que l'année naturelle d'Oinopidès durait 365 22/59 jours. Cela reviendrait à accorder à la période de 59 années une durée de 21 557 jours, ce qui correspond très bien au mois synodique, mais entraîne une erreur de plus d'une semaine dans l'année solaire à la fin de la période d'une grande année. Il convient de noter qu'une erreur s'est glissée dans 12 O. Neugebauer, A History of Ancient Mathematical Astronomy, Berlin 1975 , Part Two, p. 619 : pour obtenir 21 557 jours il ne suffit pas de prendre (en plus des 59 * 12 = 708 mois réguliers de la période de 59 ans contenant alternativement 29 et 30 jours) les 22 mois additionnels (intercalaires) “ pleins”, c'est- à -dire de 30 jours. 11 autres mois parmi les 354 mois “ caves ” ( i.e. de 29 jours) doivent également être pris comme pleins. Comme il n'y a aucun moyen simple d'arriver au résultat fourni par Censorinus , l'accord excellent obtenu avec la longueur du mois synodique doit être considéré comme douteux . D'où la suggestion plausible de G. J. Toomer (dans une communication privée rapportée dans 13 I. Bulmer Thomas, art. « Oenopides of Chios », DSB X, 1974, p. 180) : le chiffre rapporté par Censorinus résulte probablement d'un calcul postérieur, se fondant sur le paramètre babylonien fonda mental pour la durée moyenne du mois synodique : 29 + 31/60 + 50/3600 + 8/216000 + 20/12960000 jours, également adopté par Hipparque (pour ce paramètre voir Ptolémée , Synt. math . IV 2, p. 270 , 19-271, 12 et Neugebauer 12, Part I, p. 309-312 ). Ceci amène à voir dans la grande année d'Oinopidès un moyen pour mettre les mouvements du soleil et de la lune en accord, comme on l'a fait au moyen des cycles d'intercalage de l'octaeteris et des cycles de Méton ( M 140 ),

Eudoxe ( » E 98 ) et Callippe ( 2C 33 ] ( pour ces cycles d'intercalation, voir Neugebauer 12, Part II , p. 615-620) . 14 P. Tannery , « La grande année d'Aristar que » , repris dans ses Mémoires scientifiques, édités par J.-L. Heiberg et H.-G. Zeuthen , Toulouse /Paris 1912 , vol . II , p. 362-363 , a réfuté avec de bons arguments l'idée que la grande année d'Oinopidès aurait pris en compte les mouvements des autres planètes, comme l'année complète" décrite par Platon , Timée 39 D. D. Les principes matériels. Oinopidès est mentionné par Sextus, P.H. III 30 ( = fr. 5 ) , Adv. Math . IX 361 , et [Galien ) Phil. hist. 18 , avec d'autres penseurs qui

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ont posé deux principes matériels, comme ayant retenu en tant que principes le feu et l'air. On ne sait pas comment ces deux principes étaient censés agir dans le monde.

E. L'âme du monde . Aétius I 7 , 17 rapporte que pour Diogène (d'Apollonie [ PD 169 ) ou de Babylonie ( > D 146 ] ) , Cléanthe ( C 138) et Oinopidès l'âme du cosmos est dieu . L'âme du monde des stoïciens et de Diogène d'Apollonie , si c'est lui dont il est question dans ce passage , est constituée de pneuma et d'air; elle peut donc être la manifestation la plus forte de leurs principes matériels respectifs. Le statut de l'âme divine du monde d'Oinopidès pourrait être sem blable : il pourrait être la plus puissante manifestation des deux principes fondamentaux , l'air et le feu. 15 E. Zeller, Die Philosophie der Griechen in ihrer geschichtlichen Entwicklung, III . T.: Die nacharistotelische Philosophie, Abt. 1 , 4. Auflage, ed . E. Wellmann, Leipzig 1909, p. 48 n. 1 (à la p. 50), a considéré que cette doctrine - et le détail étymologique qu'on trouve chez Macrobe, Saturn . I 17 , 31 (fr. 7 ) – devraient être rapportés à un autre Oinopidès , stoïcien. 16 L. Zhmud , The birth of the history of science in antiquity (en russe ), Saint- Petersbourg 2002, p. 369 n . 150 , suggère dans cette même ligne que la succession Oinopidès - ( ... ) Andron, Zénodote , rapportée par Proclus, in Eucl. p. 80, 15-20 Friedlein (= fr. 12 ) pourrait également faire référence à un Oinopidès stoïcien. Mais, comme l'a fait remarquer von Fritz 9 col . 2271-2272 , l'hypothèse d'un second Oinopidès n'est pas indispensable. F. L'inondation du Nil . Diodore de Sicile I 41 , 1 , Sénèque , Naturales quaestiones IVA 2 , 26, et l'Anonymus Florentinus dans Cod . Laur. 56, 1 (647 F 1 Jacoby , sect . 6 ) , rapportent l'explication fournie par Oinopidès pour les inondations estivales du Nil ( et l'absence d'inondations hivernales ). L'explication la plus proche du phénomène est celle qui est donnée dans la version latine médiévale de l'ouvrage De inundacione Nili ( fr. 248 Rose) attribué à Aristote, p . 196, 19-26 (= 646 F 1 Jacoby, sect. 9 ) . G. Constructions géométriques . Proclus signale à propos de deux construc tions - Euclide ( »E 80 ] I 12 (dessiner une perpendiculaire à une ligne droite à partir d'un point donné) et Euclide I 23 (dessiner une droite d'un angle donné à un point donné sur une ligne droite ) – qu'elles remontent à Oinopidès. Dans le second cas , Proclus , in Eucl. p . 333 , 5-6 Friedlein , s'en rapporte à l'autorité d'Eudème de Rhodes [ E 93 ] ( fr. 138 Wehrli ) , tandis que dans le premier cas, in Eucl. p . 283 , 7-10 Friedlein , il fournit des explications sur la terminologie mathématique employée par Oinopidès, ce qui montre qu'il utilisait manifeste ment un manuel contenant ces détails techniques: ce renseignement pourrait donc également remonter à Eudème. Ces tâches peuvent cependant être réalisées au moyen d'équerres et d'instruments de mesure des angles directement, sans recourir à des constructions . Par conséquent le témoignage doit signifier qu'Oinopidès fut le premier à fournir des constructions pour dessiner des perpendiculaires et des angles et celles-ci pourraient avoir été assez semblables à celles que l'on trouve dans la géométrie de l'époque d'Eudème. Ce témoignage direct doit être comparé à ceux où Eudème opère des déductions à partir de détails concrets,par exemple là où il conclut, de la méthode attribuée à Thalès pour mesurer la distance de navires en mer, à la connaissance par ce dernier du théorème 26 du livre I des Éléments d'Euclide (Proclus, in Eucl.p. 352 , 14-18 Friedlein = Eudème fr. 134 Wehrli). Le fait est que les résultats géométriques qu’Eudème attribue aux mathématiciens antérieurs à

O 12

OLYMPICHOS

767

Oinopidès impliquent nécessairement le dessin de perpendiculaires et de lignes droites selon des angles donnés. Cela signifie que même si leur extension restait limitée – n'oublions pas que c'est à Hippocrate de Chios ( » H 151 ) et non à Oinopidès qu'on attribuait le mérite d'avoir compilé les premiers Éléments en géométrie, voir Proclus, in Eucl. p. 66, 7-8 Friedlein (= Eudème fr. 133 Wehrli ) -, on doit porter au crédit d'Oinopidès des résultats qui répondaient éventuellement aux exigences de la géométrie euclidienne ( voir 17 Ian Mueller, « Greek arithmetic, geometry and harmonics : Thales to Plato » , dans C.C.W. Taylor ( édit. ], Routledge History of Philosophy, vol . I : From the Beginning to Plato, London /New York 1997 p. 308 ). On tiendra compte cependant des remarques de 18 W.R. Knorr, The ancient tradition of geometric problems, Boston 1988 ( réimpr. New York 1993 ) ; p. 16, qui rappelle que même si des solutions " euclidiennes " peuvent être prêtées à Oinopidès, on doit se garder de lui attribuer « a consciously formal geometric effort » . Knorr s'appuie en partie sur le fait que les constructions géométriques d'Oinopidès sont signalées dans des contextes astronomiques, ce que l'on peut déduire de l'affirmation de Proclus, in Eucl. p . 283 , 7-8 Friedlein, qui prétend qu'Oinopidès essayait de dessiner des perpendiculaires à une droite donnée parce qu'il considérait que c'était utile en astronomie. Cette conclusion s'appuyait peut-être sur la constatation terminologique qui suit, à savoir que « Oinopidès employait pour " perpendiculaire " ( x60etov), d'une façon archaïque ( apxaïxac), l'expression comme le gnômôn (xatd yvbuova ), parce que le gnômôn forme également un angle droit avec l'horizon » (Proclus, in Eucl. p. 283 , 8-10 Friedlein ). Mais le gnômôn ne dési gne pas seulement la tige du cadran solaire, mais également l'équerre (pour cet usage , voir par exemple Théognis 543 ), de sorte que l'emploi de la formule chez Oinopidès pouvait tout aussi bien vouloir dire que la perpendiculaire est « d'équerre » (ainsi von Fritz 9, col . 2265-2266 [ réimpr. p. 155 ) et Burkert 6, p. 424 n . 129) , auquel cas le contexte exclusivement astrono mique de cette construction géométrique ne serait qu'une supposition de la part de Proclus. Cf. Guthrie 11 , p. 360-361 ; Bulmer - Thomas 13, p. 179-182 ; Knorr 18, p. 15 . 17 ; Heath 10 , p . 130-133 ; von Fritz 9 , col . 2258-2272 ( réimpr. p . 149-163 ) ; Zhmud 16, p. 369-379 ; L. Gemelli Marciano, MH 50 , 1992, p . 79-93 . ISTVÁN BODNÁR .

11 OLYMPIADÈS ( ?)

FIva

Académicien inconnu , disciple de Xénocrate (Philod ., Acad . hist., col . IV 14) . TIZIANO DORANDI.

12 OLYMPICHOS

D III

Premier des neuf exécuteurs testamentaires ( épimélètes) du testament de Straton de Lampsaque, mort vers 268a (Diogène Laërce V 62-63 ) . Il n'est pas dit expressément qu'il s'agit de disciples au sein de l'école péripatéticienne, mais la phrase qui suit stipule que la diatribè est léguée à Lycon ( > L 83 ] ( huitième nom dans la liste) parce que les autres sont trop âgés ou trop occupés ( coxool ). Absent de la RE . RICHARD GOULET.

768

OLYMPICOS DE GAZA

013

13 OLYMPICOS DE GAZA

MII

Académicien inconnu , disciple de Carnéade ( 2 col . XXIII 11-12 = T 3b 10 Mette ).

C 42 , Philod ., Acad . hist.,

TIZIANO DORANDI. 14 OLYMPIODOROS (M. AURELIUS –)

DM III

Le philosophe M. Aurelius Olympiodoros, honoré en tant que curator par la cité de Trézène ( IG IV 796 ) , était peut- être identique à l'homonyme connu par une inscription d'Aedepsos ( B. Puech , Orateurs et sophistes grecs dans les inscriptions d'époque impériale, Paris 2002, n° 140 ) : ce dernier était le petit -fils du sophiste Hippodromos de Larissa et avait épousé, vers 235 , la fille du consul Flavius Philinos de Thespies. L'identité de ces deux personnages ne peut cepen dant être tenue pour certaine, car l'absence d'ethnique suggère que le philosophe était un citoyen de Trézène, honoré lors de sa désignation comme curator. BERNADETTE PUECH . 15 OLYMPIODOROS D’ALEXANDRIE L'ANCIEN RE 12 PLRE II : 2

V

Un des professeurs de philosophie aristotélicienne au Ve siècle à Alexandrie où le jeune Proclus fut son élève vers 430 ( cf. H.D. Saffrey et A. Ph . Segonds, Marinus, Proclus ou Sur le bonheur, p . 10 n . 16) . Marinus, Proclus $ 9, 15-32 , s'exprime ainsi : « Pour les études aristotéliciennes , il fréquenta l'école du philosophe Olympiodore, dont la réputation était grande... Du temps qu'il était l'auditeur d'Olympiodore, qui avait un grand talent de parole et qui , à cause de sa facilité d'élocution et de sa subtilité dans l'argumentation , n'était accessible qu'à un petit nombre de ses auditeurs, Proclus, au sortir de la leçon , répétait de mémoire devant ses camarades tous les mots du cours dans les termes mêmes, bien qu'il y en eût beaucoup, comme me l'a rapporté l'un de ses condisciples, Ulpien de Gaza, qui lui - même a consacré une bonne partie de sa vie à la philosophie » . Olympiodore aurait désiré marier sa fille, elle - même élevée dans la philosophie , autrement dit païenne (cf. ibid ., p. 11 n . 7 ) , à Proclus. L'article de la Souda 0 216, t. III , p. 521 , 29 - 522 , 3 Adler, n'est qu'une citation du texte de Marinus. HENRI DOMINIQUE SAFFREY. 16 OLYMPIODOROS D'ALEXANDRIE l'alchimiste PLRE II :4 Philosophe d'Alexandrie ( $ 1260opoç årečavopeúc ), c'est- à - dire non pas professeur de philosophie , mais alchimiste comme dans toute cette littérature ( cf. W. Gundel , art. « Alchemie » , RAC I , col . 239-260 en particulier 248 ) . Il est l'auteur d'un commentaire sur le traité Kat ' évepyelav de l'alchimiste Zosime de Panopolis ( début du IVe siècle ) . Ce commentaire a été édité par Berthelot Ruelle dans la Collection des anciens alchimistes grecs, Paris 1887-1888 (réimpr. London 1963 ) , t. III , p. 69-104 ( texte grec ), t. II, p. 75-113 ( traduction ). Il ne doit être identifié , ni à l'historien (RE 11 ) , ni à Olympiodore d'Alexandrie , philosophe néoplatonicien ( 2017 ) , commentateur de Platon et d'Aristote, car l'alchimiste est ouvertement chrétien et son style n'est pas comparable avec

017

OLYMPIODOROS D'ALEXANDRIE

769

celui de cet autre Olympiodore, cf. L. G. Westerink, The Greek Commentaries on Plato's Phaedo , vol . 1 , Amsterdam 1976, p. 22-23 . Son commentaire puise aux traditions anciennes de la doxographie issues de Théophraste et les infor mations qu'il procure ont été défendues par P. Kingsley , Ancient Philosophy, Mystery and Magic, Oxford 1995 , p. 60-62. La date de cet Olympiodore est controversée , mais J. Letrouit, « Chronologie des alchimistes grecs » , dans D. Kahn et S. Matton (édit. ) , Alchimie : Art, histoire et mythes, coll . « Textes et Travaux de Chrysopeia » 1 , Paris 1995 , p. 11-93 , en particulier p. 49-56 , a pro duit de bons arguments pour le situer à la fin du IVe siècle. De son côté, David Bain, « Mɛravītis yñ. An unnoticed Greek name for Egypt : New evidence for the origins and etymology of Alchemy » , dans The World of AncientMagic, coll . « Papers from the Norwegian Institute at Athens » , Bergen 1999 , p. 205-226, en particulier p. 221-222 , voudrait placer Olympiodore l'alchimiste plus tard que Letrouit, probablement au Ve ou même au Vie siècle . Pour une présentation générale de l’æuvre d'Olympiodore, voir E.O. von Lippmann, Entstehung und Ausbreitung der Alchemie, t. I , Berlin 1919 , p. 98-102 et passim . Pour des vues davantage favorables à l'identification des deux homonymes , voir les études de Cristina Viano , « Olympiodore l'alchimiste et les présocrati ques : une doxographie de l'unité ( De arte sacra , 18-27 ) » , dans D. Kahn et S. Matton (édit . ) , Alchimie. Art, histoire et mythes. Actes du jer colloque international de la Société d'Étude de l'Histoire de l'Alchimie (Paris , Collège de France , 14-16 mars 1991 ) , coll . « Textes et travaux de Chrysopæia » 1 , Paris/ Milano 1995 , p . 95-136 , notamment p . 99-102 ; Ead ., « Le Commentaire d'Olympiodore au livre IV des Météorologiques d'Aristote » , dans Cristina Viano ( édit. ) , Aristoteles Chemicus . Il IV libro dei “ Meteorologica " nella tradizione antica e medievale, coll . « International Aristotle Studies » 1 , Sankt Augustin 2002, p. 59-79 , notamment p. 76-79 . HENRI DOMINIQUE SAFFREY. 17 OLYMPIODOROS D'ALEXANDRIE RE 13 PLRE II : 5

VI

Professeur de philosophie à Alexandrie au VIe siècle . Sa date de naissance doit être placée avant 505, car sinon il n'aurait pu être l'élève d'Ammonius dont on place généralement la mort vers 520-525 ( voir Westerink , Prolégomènes, p. 11 ) , et après 495 , étant donné , comme nous le verrons, qu'il enseignait encore en 565 . Toute l'æuvre conservée d'Olympiodore consiste en notes de cours prises par des étudiants. On lui connaît trois commentaires sur Platon ( tous transmis par le Marc . Gr . 196 , un des manuscrits de la Collection philosophique du IXe siècle ( voir L. G. Westerink , Damascius, Traité de Premiers Principes I , p. LXXIII LXXX , en particulier LXXIV ; n° 7] : ( 1 ) Commentaire sur l'Alcibiade (ed . L.G. Westerink , Amsterdam 1956) ; ( 2 ) Commentaire sur le Gorgias (ed. L. G. Westerink , Leipzig 1970 , trad . angl. R. Jackson, K. Lycos, H. Tarrant, Olympiodorus' Commentary on Plato's Gorgias, coll . « Philosophia Antiqua » 78 , Leiden 1998 ) ;

770

OLYMPIODOROS D'ALEXANDRIE

L 17

( 3 ) Commentaire sur le Phédon (ed . L.G. Westerink, Amsterdam 1976 , qui est le premier à avoir fait le départ, dans la tradition manuscrite , entre ce qui relève d'Olympiodore et ce qui appartient à Damascius) ;

et deux sur Aristote : ( 4) Commentaire sur les Catégories, avec les Prolegomena traditionnels (ed. A. Busse (CAG XII 1 ] , Berlin 1902 ) ; (5 ) Commentaire sur les Météorologiques ( ed . G. Stüve (CAG XII 2 ] , Berlin 1900 ). Ces commentaires reproduisent les cours d'Olympiodore, qui sont divisés en leçons , chaque leçon étant elle -même partagée entre théoria et lexis ( sur cette division des leçons en théoria et lexis, cf. A.J. Festugière, « Modes de compo sition des commentaires de Proclus » , MH 20, 1963, p . 77-100, en particulier p. 77-80 , repris dans Études de Philosophie grecque, Paris 1971 , p. 551-574 , en part. 551-554 ) . L.G. Westerink a remarqué que ces commentaires comportent en moyenne 40 à 50 leçons (npáčelç ) , que ces leçons avaient lieu chaque jour, et que , si l'on tient compte des congés et des fêtes, on peut estimer qu'un professeur lisait cinq textes par an , et que donc il fallait environ trois années pour couvrir le cycle des études platoniciennes, et encore trois autres pour le cycle des études aristotéliciennes ( cf. L.G. Westerink , The Greek commentaries on Plato's Phaedo, I , p . 25-26 ) . Le commentaire sur les Météorologiques peut être daté avec certitude après 565 , date d'une comète dont le passage est mentionné p. 52 , 31 ( cf. Westerink , ibid ., p . 21 n . 27 ) . Sur le commentaire du livre IV , voir Cristina Viano, La cause matérielle . Olympiodore et le livre IV des “ Météorologiques " d'Aristote, coll . « Tradition de la pensée classique » , Paris, à paraître en 2006 (comprend le texte grec de Stüve avec quelques changements, la traduction française et des notes ) . Le problème de l'identification du commentateur néoplatonicien et de l'alchimiste est abordé dans un appendice. Voir également Ead ., « Le Commentaire d'Olym piodore au livre IV des Météorologiques d'Aristote », dans Cristina Viano ( édit. ), Aristoteles Chemicus. Il IV libro dei “ Meteorologica ” nella tradizione antica e medievale, coll . « Inter national Aristotle Studies » 1 , Sankt Augustin 2002, p. 59-79. ( 6 ) Un commentaire anonyme sur Paul d'Alexandrie , écrit en 564 , peut vraisemblablement être attribué à Olympiodore (cf. J. Warnon, « Le commen taire attribué à Héliodore (PH 30 ) sur les Eisagogika de l'astrologue Paul d'Alexandrie » , dans Recherches de Philologie et de Linguistique , Louvain 1969 , p. 197-217 , et L.G. Westerink, « Ein astrologisches Kolleg aus dem Jahre 564 » , BZ 64, 1971 , p . 6-21 , repris dans Texts and Studies in Neoplatonism and Byzantine Literature, Amsterdam 1980, p. 279-294) . Cette attribution est fondée sur des rapprochements précis avec les méthodes reconnues dans les autres commentaires d'Olympiodore. Cela montre qu'au vie siècle , à Alexandrie, l'astrologie était ouvertement enseignée, peut -être dans le cadre de l'enseigne ment du quadrivium ( voir Westerink , art. cité, p. 18-21 = p. 291-294 ). Des fragments du commentaire d'Olympiodore au De interpretatione d'Aristote, contenus dans le ms. Vaticanus Urb. 35 , ont été reproduits par L. Tarán dans Anonymous Commentary on Aristotle's “ De interpretatione " (Codex Parisinus Graecus 2064 ), Meisenheim am Glan 1978 , p. 25-41. Tarán dénie à Olympiodore la paternité du commentaire anonyme, mais il lui attribue la paternité de ces fragments. Sur ces fragments, dont la caractéristique la plus

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OLYMPIODOROS DE GAZA

771

frappante est une interprétation “ astrologique ” des futurs contingents de De int. 9, voir Cristina Viano, « Aristote contre les astrologues (Olympiodore, sur De interpretatione 9) » , à paraître dans J. Barnes et S. Husson (édit . ), Les interprétations du “ De interpretatione” ( Actes du séminaire du Centre Léon Robin 2002/2004 ), Paris 2006 . La datation des commentaires d'Olympiodore est délicate . On peut placer le Comm . in Alc . après 527. En effet, dans la biographie de Platon , en tête de ce commentaire , p . 2 , 80 , Olympiodore raconte le succès remporté par le grammai rien Anatolius , en citant un vers d'Homère en l'honneur de Hephaestus faisant son entrée dans la ville d'Alexandrie comme gouverneur (cf. R. A. Kaster, Guar dians of Language. The Grammarian and Society in Late Antiquity, Berkeley/ Los Angeles 1988 , p . 242 : Grammatici , nº 12 ) . Or ce gouverneur a été nommé quo pour ce par Justinien , empereur en 527 , ce qui constitue un terminus

commentaire et n'empêche pas de le placer tardivement dans la carrière d'Olym piodore . Sur cette datation voir L.G. Westerink , Prolégomènes, p . XVII - XXI . Le commentaire sur le Gorgias , qui fait souvent référence à l'enseignement d'Ammonius (onze références explicites alors que l'in Alc. n'en comporte aucune ) et qui se caractérise par un contenu assez pauvre , semble donc se placer au début de sa carrière . Plusieurs fois, Olympiodore fait allusion aux doctrines du christianisme , en prenant chaque fois ses distances de penseur païen. Et nous voyons qu'il parta geait le mépris de Proclus et de Damascius pour la société chrétienne : « Les poètes de l'ancien temps ne savaient pas qu'arriverait une société corrompue qui honore seulement l'apparence et ne cherche absolument pas ce qui est caché dans les profondeurs du mythe » ( c'est- à -dire la théologie ) ( in Gorgiam , p . 239 , 16-19) . Et aussi : « Autrefois les hommes libres se distinguaient des esclaves par leur nom et leur manière de se coiffer, les esclaves ayant des noms comme le Gète , le Dave ou le Phrygien ; mais de nos jours la confusion règne dans ce domaine aussi » (in Alcibiadem , p . 149 , 1-3 ) , car autrefois les hommes libres étaient identifiés par leur trois noms (prénom , nom , surnom ), avec les Chrétiens, ils ne portent plus qu'un seul nom, leur nom de baptême. Olympiodore dénonce cette suprême confusion sociale, les hommes libres confondus avec les esclaves ( cf. H. D. Saffrey, « Le thème du malheur des temps chez les derniers philo sophes néoplatoniciens » , dans EOQIHE MAIHTOPEE, « Chercheurs de sagesse » , Hommage à Jean Pépin , Paris 1992 , p . 431 , repris dans Le néoplatonisme après Plotin , Paris 2000, p. 216) ! Sur Olympiodore en général , cf. L.G. Westerink qui est revenu plusieurs fois sur cet auteur dans ses éditions depuis celle de l'in Phaedonem ( 1976) , p. 20-27 , jusqu'à celle des Prolégomènes à la philosophie de Platon , Paris 1990 , p. XVII -XXXI . HENRI DOMINIQUE SAFFREY. 18 OLYMPIODOROS DE GAZA

MII

Académicien inconnu , disciple de Carneade ( 2 - C 42 , Philod ., Acad. hist., col . XXIV 6 = T 3b 18 Mette ) . TIZIANO DORANDI.

772

OLYMPIOS D'ANTIOCHE

19 OLYMPIOS D'ANTIOCHE RE 2 PLREI : 4

019 MIV

Médecin , fils d’un Olympios et père d'un autre Olympios (PLRE I : 11 ), il fut élève de Libanius à Constantinople ou à Nicomédie . Il fréquenta la cour impé riale à Constantinople et à Rome , devenant médecin de l'empereur Constance ( 337-361 ) . Dédicataire de nombreuses lettres de Libanius et mentionné dans plusieurs autres , il est présenté comme doué en grammaire, en rhétorique et en philosophie ( Libanius , Lettre 412 à Léonas , $ 2 , datable de 355 ) . Il est dit ailleurs disciple d'Hippocrate et de Platon (Lettre 409, 4 ) et qualifié de sage ( Lettres 406 et 413 ) , capable de soigner les âmes et les corps ( Lettre 414 , 1 ) . Il était païen ( Lettres 439 , 555 et 1534 ) et possédait chez lui des statues d'Apollon, d'Asclépius et d'Hygie ( Lettre 1534 , 4 ) . Cf. O. Seeck , Die Briefe des Libanius, Leipzig 1906, réimpr. Hildesheim 1966 , p . 222-223 ( Olympius I ) . RICHARD GOULET. 20 OLYMPIOS ou OLYMPOS RE Olympios 19 PLREI : 2 (Olympus)

FIV

Philosophe païen , peut-être originaire de Cilicie ( mais la phrase de Damascius pourrait tout aussi bien désigner le point de départ d'un voyage), frère d'une certaine Generosa dont le nom, associé à la destination ultime de ce personnage , suggère plutôt des origines italiennes . De Cilicie, il se rend à Alexandrie au cours de la seconde moitié du IVe siècle pour rendre un culte à Sérapis ( plutôt que Sarpedon : le texte de la Souda est très vraisemblablement corrompu ici ) . De belle prestance et de belle apparence, ilest alors dans “ le plus sensé de l'âge ", ce qui suggère un âge assez avancé et une naissance vers la fin du premier quart du siècle . Sa connaissance des rites et des pratiques antiques ainsi que son éloquence lui permettent de séduire les milieux païens d'Alexandrie , alors fortement menacés par la montée du christianisme. Cela ne signifie pas pour autant qu'il ait été rhéteur, comme l'a cru le rédacteur de la notice qui lui est consacrée dans la PLRE. Ce personnage qui évoque plutôt le prêtre ou l'homme divin semble bien cependant avoir revendiqué la qualité de philosophe . Son nom est surtout associé à l'épisode des émeutes païennes de 391 à Alexandrie . Selon Sozomène , les chrétiens d'Alexandrie auraient alors trans formé en église un sanctuaire de Dionysos et fait parade des objets de culte dans les rues de la ville . Cela suscita une émeute chez les païens, qui s'emparèrent de chrétiens , les maltraitèrent et se barricadèrent dans le Sérapéum . Olympios/ Olympos se serait trouvé parmi eux et aurait joué un rôle de tribun, exhortant les foules à ne pas négliger les traditions de leurs pères et à mourir pour elles s'il le fallait et leur déclarant qu'il ne fallait pas s'inquiéter de voir les objets de culte détruits , ces derniers n'étant que des reflets ( ivoáruara ) habités par des puissances divines ( Oɛtau duváuels ) qui s'envolaient alors pour rejoindre les cieux , un argument qui évoque de fait les points développés par Porphyre dans le De statuis ( fr. 253 , p . 409-410 Smith ) et suggérerait une influence néoplato nicienne .

0 20

OLYMPIOS

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Devant l'évolution de la situation , le préfet d'Égypte fit alors appel à l'empe reur Théodose qui envoya des troupes achever le siège du Sérapéum et le détruire. La nuit précédant la prise de l'édifice cependant, Olympios/ Olympos ( selon Sozomène , pour avoir entendu une voix de nulle part chanter l'allélouïa et avoir ainsi compris l'événement à venir) aurait quitté le temple en secret, avant de s'embarquer pour l'Italie . On ne sait rien de ce qu'il est advenu, après cet épisode, de ce personnage que Damascius associe à d'autres figures de restau rateurs des antiques traditions païennes qu'il évoque dans la Vie d'Isidore : Épiphane et Euprépius à Alexandrie au IVe siècle , Héraïscus ( ** H 67 ) , Asclé piadès ( > A 446 ) et Asclépiodote (>A 453 ) au siècle suivant . Sources. Sozomène, Histoire Ecclésiastique VII 15 , 6 et 9 (édit. 1 J. Bidez, Sozomens Kirchengeschichte, coll . GCS 50, Berlin 1960, p. 320-321) ; Rufin , Histoire ecclésiastique II 22-29 ; Nicéphore Calliste XII 25-26 ; Cassiodore -Épiphane, Histoire ecclésiastique IX 27-29 (2 W. Jacob et R. Hauslik [édit. ] , Cassiodori-Epiphanii Historia Ecclesiastica Tripartita , coll . CSEL 71 , Wien 1952, p. 536-540) ; Socrate, Histoire ecclésiastique V 16 ; Photius, Biblio thèque 242, § 48 et 49 + Souda, s. v. "Olujnos (O 218), t. III, p. 522 Adler + Souda , s.v. åtepáuwv (A 4343 ), t. I, p. 402 Adler = Damascius, Vie d'Isidore, fr. 48-50, fr. 91 , 92, 94, 97 et 98, p. 68-73 Zintzen [3 C. Zintzen (édit.), Damascii Vitae Isidori reliquiae, edidit adnota tionibusque instruxit C. Z. , coll . « Bibliotheca Graeca et Latina suppletoria » 1 , Hildesheim 1967 ) , fr. 42E-H , p. 124-126 Athanassiadi (4 P. Athanassiadi (édit. ), Damascius. The Philo sophical History, text with translation and notes , Athènes 1999) : « Il était venu de Cilicie à Alexandrie pour le culte de Sérapis. A tous égards, il possédait un naturel qui méritait l'admi ration , grand de corps et de silhouette bien découplée , de belle et bonne allure. Se trouvant alors dans le plus sensé de l'âge , il était de commerce agréable et plaisant à suffisance pour ceux qui le rencontraient - et profitable plus que personne pour ceux qui voulaient se laisser persuader. Et il n'y avait personne qui eût l'âme assez barbare et roide pour ne se laisser persuader et enchanter par les discours qui s'écoulaient de cette sainte bouche : telle était la persuasion qui résidait sur les lèvres de cet homme, quelque chose qui n'avait rien d'humain et évoquait plutôt le divin ! De la sorte donc , il fut pour les Alexandrins un maître ès choses sacrées, en un temps où ils étaient déjà emportés par le torrent du régime. Mais lui , en toute occasion, rassemblait autour de lui ceux qui se présentaient et leur enseignait les antiques coutumes et la félicité qui leur fait suite, en leur disant combien grande et combien pure est cette félicité envoyée par les dieux à ceux qui respectent ces pratiques avec exactitude. Et Olympos était si plein de dieu qu'il alla jusqu'à prédire à son entourage que Sérapis abandonnerait son temple - ce qui se produisit. » Sur la prédiction de la destruction du Séra péum , cf. Augustin, De divinatione daemonum 1 , ainsi que la notice « Antoninus » ( A 221 ). Cf. Sur la destruction du Sérapéum et le rôle joué par Olympios/Olympos , cf. 5 A. H. M. Jones, The Later Roman Empire 284-602 , 3 vol., Oxford 1964, p. 168 et 943 ; 6 P. Athanassiadi , « Persecution and Response in Late Paganism : the evidence of Damascius » , JHS 113 , 1993, p. 1-29 (notamment p. 10 et 13-16) ; 7 J. Geffcken, Der Ausgang des griechisch -römischen Heidentums, coll . « Religionswissenschaftliche Bibliothek » 6, Heidelberg 1920, p. 157-158 et 298-299, n . 113-115 8 ; Id ., « Der Bilderstreit des heidnischen Altertums » ,ARW 19, 1916-1919, p. 288-315 (notament p. 313 ) ; 9 P. Chuvin, Chronique des derniers païens. La disparition du paganisme dans l'Empire romain du règne de Constantin à celui de Justinien, Paris 1990, p. 71. Sur ce personnage de l'homme divin dans le paganisme et la philosophie à la fin du ſve siècle, cf. 10 G. Fowden, « The Pagan Holy Man in Late Antique Society » , JHS 102, 1982, p. 33-59 ; 11 R. Goulet, « Les Vies de philosophes dans l'Antiquité tardive » , dans ses Études sur les vies de philosophes, p. 3-63 .

STÉPHANE DIEBLER ( † ).

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OLYMPIOS DE SYRIE

21 OLYMPIOS DE SYRIE RE 23+38 PLRE II : 1

021

IV / V

Destinataire de plusieurs lettres de Synésius de Cyrène ( Epist. 44 , 96-99 , 133 , 148-149 , qui sont à dater de 398 à 412 ou 413 ) , ce personnage originaire de Syrie était venu à Alexandrie et avait suivi les cours d'Hypatie ( « notre commune maîtresse » , Epist. 133 ) . Synésius évoque l'époque où il philosophait en sa compagnie » (Epist. 148 ) et l'invite à s'occuper de philosophie autant que le doit quiconque l'a abordée avec un amour divin » ( Epist. 98 ) . Cf. D. Roques , Études sur la correspondance de Synésios de Cyrène, Bruxelles 1989, p . 105-115 . PIERRE MARAVAL. 22 ONATAS DE CROTONE Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique , V. pyth . 36, 267 , p. 143 , 23 Deubner. Graphie. En réalité le ms F de la V. pyth. de Jamblique ( Laurentianus) porte “ Onatos " ( "Ovatos ), nom attesté dans l'Antiquité ( cf. 1 Fr. Bechtel , Die historischen Personennamen , p . 349 ) , et c'est cette variante qui a été préférée par 2 K. von Fritz , art. « Onatos » , RE XVIII 1 , 1942 , col . 411 , ainsi que par 3 H. Thesleff, Introduction ,passim ( cf. son index , s.v. ) . Les deux derniers éditeurs de la V. pyth. de Jamblique , A. Nauck et L. Deubner, en revanche, ont corrigé en 'Ováraç, sur la foi d'Aristote, Sur la poétique (= ouvrage perdu Sur les poètes ? ) , livre III , fr. 75 Rose3 = Diog . L. II 46 = 14 A 15 DK ( variante 'Ovárns). Le génitif ’Ovátou, qu'on rencontre chez Stobée ( I 1 , 39, t. I , p. 48, 4 Waschmuth ) , n'aide pas à élucider la question , puisqu'il peut être le génitif des formes du nom citées précédemment. Une autre variante encore : 'Ovýrac, conjecturée plus tard par le même 4 H. Thesleff ( The Pythagorean texts , p. 138 139 , 140, 21 ) sur la base d'un passage de Jean Lydus qui introduit un fragment sur la divinité ( De mens . II 12 ) , est considérée par lui comme la forme originale du nom - quoique le personnage mentionné par Lydus soit présenté comme originaire de Tarente , et non pas de Crotone . Lydus parle en réalité d'un auteur appelé ó öńtup ó Tapavtīvos, mais certains mss donnent la leçon ó výtup. Cette leçon fait plutôt penser à un 'Ovntwp (20 26 ) dont une scholie vaticane à Proclus (in Remp., t. II, p. 378, 23-24 Kroll) connaissait l'ouvrage Sur la proportion arithmétique ( Ilepì åplounti »ñç åvaroy aç ; voir également Atticus, fr. 44 Des Places ) , mais en tenant compte de l'existence de l'apocryphe De deo attribué à Onatas ( voir infra) et du contenu similaire du fragment cité par Lydus, Thesleff 4, p. 140, 21 , a conjecture Όνήτας de Tarente . Nous pensons que toutes ces variantes, dues pour la plupart au passage du dialecte dorien à l'attique (a + n ) , et , pour ce qui est de la leçon du Lauren tianus , à une confusion entre a et o , s'expliquent aisément si l'on considère 'Ováraç comme la forme originale , dorienne, de ce nom ( cf. en ce sens Thesleff 4, p . 138 , n . ad li . 23 ). La forme apparentée 'Ováoaç est d'ailleurs très bien attestée dans les sources épigraphi ques ; voir 5 0. Masson , « Notes d'anthroponymie grecque. III . 'Apxécaç, 'Ováoac et autres noms tirés de participes aoristes en -oaç » , RPh 56 , 1982 , p. 13-17 , notamment p. 14-15 , repris dans Onomastica graeca selecta , vol . 2, p. 393-397, notamment p. 394-395.

O 22

ONATAS DE CROTONE

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Selon le témoignage d'Aristote signalé ci -dessus ( fr. 75 Rose} = Diog . L. II 46 ) , Onatas serait , avec Cylon ( C 229 ), un rival de Pythagore, tout comme Antiloque et Antiphon avaient été adversaires de Socrate. La mention à première vue paradoxale d'un pythagoricien qui serait le “ rival" de son propre maître a sans doute inspiré à Ménage la correction du Kúrwv xai 'Ovárac (ou 'Ováms] des mss en Kúlwv Kootwviáms; cf., dans son sillage, 6 Fr. Beckmann, De Pytha goreorum reliquiis, Diss. Berlin 1844, p. 15 sq . ; 7 Zeller-Nestle , Die Philosophie der Griechen, vol . III 23 , p. 101 ; von Fritz 2. Cette correction a convaincu également H. S. Long , l'éditeur anglais de Diogène Laërce , ainsi que Thesleff 4 , p. 138 , 28-29 , mais elle est rejetée par 8 H. Diels (DK , vol . I , p. 103 , n . ad l. 12 ) ; 9 I. Lévy , Recherches sur les sources de la légende de Pythagore, Paris 1926, réimpr. New York 1987 , p. 2 n . 2 ; 10 M. Timpanaro Cardini , I Pitagorici : testimonianze e frammenti, t. I , Firenze 1958 , p . 54 ; 11 W. Burkert, Lore and science, p. 115 n . 42 ; M. Gigante et M. Marcovich , dans leur trad . et éd . ( respectivement) de Diog . L. ; 12 M. Narcy, dans M.-O. Goulet -Cazé (dir. ) , Diogène Laërce. Vies et doctrines des philosophes illustres , Paris 1999 , p. 249 n . 3. Quoiqu'il faille noter qu'Onatas n'est pas désigné dans ce passage comme pythagoricien , il pourrait très bien s'agir - comme dans le cas de Cylon (cf. Jamblique , V. pyth. 248 , p. 133 , 12 sq. Deubner), avec qui Onatas fait couple selon le témoignage d'Aristote , – d'un aspirant pythagoricien refusé par Pythagore ( cf. ibid ., $$ 73-74, p. 41 , 19 - 42 , 22 Deubner), ou d'un ex -membre de la secte, qui soit aurait été expulsé pour avoir transgressé une de ses règles, soit se serait retiré de sa propre initiative . Le fragment cité par Jean Lydus, où il est dit que dieu est chef et principe de toutes les choses , un , immobile , identique à lui -même , est cité par Philon , De opif. mundi 100 comme étant de Philolaos . Cf. Thesleff 4, p. 151 n . 8 . Stobée (I 1 , 39, p. 48 Wachsmuth ) a transmis un fragment en dialecte dorien ( environ 45 lignes) d'un ouvrage intitulé Tepi DeoŨ xai Oɛ ov ( Sur dieu et sur le divin ) d'Onatas, qui appartient sûrement au groupe des apocryphes pythago riciens. Le texte a été édité par 13 H. A. Brown , Philosophorum Pythagoreorum collectionis specimen , Diss . Chicago 1941 , p . 88-92 (avec un riche apparat de parallèles anciens et la bibliographie moderne ), et par Thesleff 4 , p. 139, 1 140, 19 , et traduit en anglais dans 14 E.R. Goodenough , By light, light : the mystic gospel ofhellenistic judaism ,New Haven /London /Oxford 1935 , p. 20-21. Contenu : le dieu est nous, âme et chef de tout le cosmos ; il n'est pas visible , ni perceptible, mais peut être contemplé uniquement par le voûç ; il y a égale ment d'autres dieux qui courent dans le ciel , mais le dieu auquel est attribué le prédicat « un » est celui qui gouverne le tout, ainsi que les autres dieux ; ces derniers sont comme des coryphées par rapport au choreute ou des soldats par rapport au général. Dieu n'a besoin de rien et c'est pourquoi il n'est pas composé, comme l'homme d'une âme et d'un corps. Il faut distinguer entre dieu et le divin ( le cosmos) , de même qu'entre le démon ( l'âme ) et le démonique ( le corps ). Comme pour la plus grande partie des pseudopythagorica en dialecte dorien , l'ouvrage est constitué d'un mélange de doctrines académiciennes et péripaté ticiennes . Voir 15 J.P. Maguire, The Sources of Pseudo - Aristotle De mundo , Oxford 1925 , notamment p . 154 sqq.; 16 Ph . Merlan , c . r. de H. Thesleff, Intro duction , dans Mind 72 , 1963 , p. 303-304 , pour les liens avec le De mundo pseudo -aristotélicien ; 17 P. Moraux, Der Aristotelismus bei den Griechen , t. II , Berlin 1984 , p. 638-641.

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ONATAS DE CROTONE

0 22

Un fragment de l'ouvrage ( p. 139 , 20-22 Thesleff) se trouve également chez un platonicien non identifié dans Stobée I 1 , 28 , p . 32 , 17-21 Wachsmuth (= fr. 3 Brown ) . Sur ce passage , voir 18 J. Dillon , « An unknown Platonist on God », dans M. Barbanti , G.R. Giardina et P. Manganaro (édit. ) , ENNEIE KAI PIAIA . Unione e amicizia. Omaggio a F. Romano , Catania 2002, p. 237-245 . Datation . Iirº av . J.-C. selon Thesleff 3 , p. 115. Entre le 1er siècle av. J.-C. et le IIe siècle ap . J.-C. selon Moraux 17 , p . 605-607. BRUNO CENTRONE et CONSTANTINOS MACRIS.

23 ONÉSICRITE D’ASTYPALAEA RE:

MF IV

Marin ayant assumé des responsabilités de commandement dans la flotte d'Alexandre le Grand , historien d'Alexandre, et présenté par diverses sources comme philosophe cynique , disciple de Diogène le Chien . Sa ville d'origine , Astypalaea était soit une des îles sporades de la mer Égée , pas très éloignée de l'île de Cos, soit la capitale (jusqu'en 366/5 ) de l'île de Cos (cf. 1 J. R. Hamilton, « Cleitarchus and Aristobulus » , Historia 10, 1961 , p. 457 , et 2 Id. , Plutarch : Alexander. A Commentary, Oxford 1969 , p. LV ). L'hypothèse évoquée par 3 Th . J. Figueira, « An Aiginetan family of the fourth cent. B.C. » , AncW 14, 1986, p. 5-11, notamment p. 9, selon laquelle Astypalaea serait un district de la ville d'Égine , est fondée en principe sur le témoignage d'Hérodote VI 88 , mais elle ne résiste pas à l'examen du texte qui parle seulement de « la vieille ville » (TN) v naraíav nóiv ). Sources. Les fragments et témoignages concernant Onésicrite d'Astypalaea sont rassemblés dans 4 F. Jacoby , FGrHist II B ( Texte ), n ° 134 , p. 723-736 ( 13 témoignages et 39 fragments ) et commentés au tome II B (Kommentar), p. 468 480. Édition très partielle dans 5 Giannantoni SSR V C 1-4 . Ni Jacoby ni Giannantoni ne font la distinction entre Onésicrite d'Égine et Onésicrite d'Astypalaea. Une des grandes sources sur Onésicrite et l'histoire d'Alexandre est le livre XV des Geographica de Strabon.

Études . 6 F. Susemihl , GGLA, t. I , p. 534-537 ; 7 D. R. Dudley , A History of Cynicism , p . 39-40 et 219-220 ; 8 H. Strasburger, art. « Onesicritos » , RE XVIII 1 , 1939 , col . 460-467 ; 9 T. S. Brown, Onesicritus . A study in Hellenistic historiography , coll . « University of California. Publications History » 39, Berkeley 1949 , p. 3-4 , notamment chap . 1 , p. 1-24 : « The Life and Work of Onesicritus » ; chap . 2 , p. 21-53 : « Onesicritus and the Cynics » ; 10 L. Pearson, The lost Histories of Alexander the Great, coll. « Philological Monographs » 20 , New York 1960 ; 11 P. Pédech , Historiens compagnons d'Alexandre: Callisthène, Onésicrite, Néarque, Ptolémée, Aristobule, « Collection d'Études Anciennes » , Paris 1984 , chap . II , p. 71-157 ; 12 Th . J. Figueira, « An Aiginetan family of the fourth cent . B.C. » , AncW 14 , 1986 , p . 5-11 ; 13 Valerie French et Patricia Dixon , « The source tradition for the Pixodaros affair » , AncW 14, 1986, p . 25-40 , notamment p . 28-29 ; 14 R. Stoneman , « Naked Philosophers : the Brahmans in the Alexander Historians and the Alexander Romance » , JHS 115 , 1995 , p . 99-114 . Un ou deux Onésicrite ? Le nom d'Onésicrite apparaît chez Diogène Laërce dans deux contextes différents. ( a) Dans le premier passage , en VI 75 , il parle d'un « certain Onésicrite d'Égine » , 'Ovnoizpitów tiva, qui envoya successive

0 23

ONÉSICRITE D'ASTYPALAEA

ment à Athènes ses deux fils Androsthène ( >

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A 182 ) et Philiscos auprès de

Diogène de Sinope ( 2D 147 ) , puis qui , ne les voyant pas revenir, alla lui-même auprès du philosophe et fut tellement séduit par ses discours qu'il devint à son tour son disciple . Il est difficile d'assigner une date précise à cette anecdote , mais il faut la situer au cours de la période athénienne de Diogène , avant son départ de Corinthe, et donc probablement avant 350-340 . ( b ) Dans le second passage , en VI 84, il consacre une vie à un Onésicrite, qu'il présente comme un des disciples les plus illustres de Diogène et comme un historien d'Alexandre . Mais la formule d'introduction qu'il utilise : « Onésicrite . Les uns le disent d'Égine , mais Démétrios Magnès dit qu'il est d'Astypalaea » , laisse ouverte la possibilité que dans son esprit il identifie cet Onésicrite au disciple de Diogène , Onésicrite d'Égine , dont il a parlé précédemment. Il n'y aurait alors pour lui qu'un seul Onésicrite , mais il hésiterait sur sa ville d'origine . Onésicrite est dit d'Astypalaea ('Aotunalaleuc) non seulement par Démé trius de Magnésie , mais aussi par Arrien , L'Inde 18 , 9 ( FGrHist 133 F 1 ) , dans la liste qu'il donne des officiers de la flotte, une liste qui remonte à Néarque de Crète, chef de la flotte ( cf. ibid. , 17 , 7 ) , et par Élien , De natura animalium XVI 39 (FGrHist 134 F 16b ) . Son appartenance au cynisme est confirmée par trois autres témoignages : ( a ) Strabon XV 1 , 65 ( FGrHist 134 T 2 ) fait état , à propos d'une conversation entre Mandanis et Onésicrite , du lien de ce dernier avec Diogène : « Socrate et Diogène , dont il avait lui - même suivi les leçons » ; ( b ) Plutarque De Alexandri magni fortuna aut virtute I 10 , 331 e ( T 5a ) , présente lui aussi Onésicrite , le pilote de la flotte d'Alexandre , comme le disciple de Diogène de Sinope : « De nombreux historiens racontent qu'Onésicrite , le disciple de Diogène le Chien , fut nommé premier pilote » ; ( c ) De même dans Vie d'Alexandre 65 , 1 , 701 c ( F 17 b ) : « Onésicrite était un philosophe, de ceux qui étudiaient auprès de Diogène le cynique » . from

Il faut par conséquent se demander si les passages où Diogène Laërce mentionne le nom d'Onésicrite font référence à un seul et même personnage ou bien à deux homonymes .

14

Wu Pent

L'hypothèse d'un seul Onésicrite suppose une chronologie que l'on peut certes contester, mais qui n'est pas impossible . Nous disposons de trois dates bien établies pour Onésicrite d'Astypalaea . En 326 , lors de l'expédition d'Alexandre en Orient , le souverain l'envoya auprès des gymnosophistes de Taxila et la même année il le nomma pilote du navire royal ( Arrien , Ind. 18 , 9 = T 4) . En 324 , Onésicrite reçut d'Alexandre une couronne d'or ( Arrien , Anab . VII 5 , 6 = T 6 ) . Enfin en 305 , date à laquelle Lysimaque prit le titre de roi, il lut au roi Lysimaque le livre IV de son ouvrage consacré à l'éducation d'Alexandre ( Plutarque, Alexandre 46 = T 8 ) . Par ailleurs , si les fils d'Onésicrite ont étudié avec Diogène , ils devaient avoir autour de 20 ans dans les années 350-340 et leur père autour de 40 ans . Il faut donc supposer qu'en 326 Onésicrite avait entre 55 et 65 ans environ , et qu'en 305 chez Lysimaque il avait entre 75 et 85 ans . Cet âge avancé a suscité des objections contre l'hypothèse d'un seul Onésicrite . Ainsi Jacoby 4 , p. 469 : « Nach der vulgata müßte man annehmen , daß O [nesi kritos) mehrere Jahre vor 334 bereits erwachsene Söhne hatte , was ihn reichlich

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ONÉSICRITE D'ASTYPALAEA

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alt macht » . Jacoby souligne également que la formule utilisée par Diogène Laërce VI 75 pour présenter Onésicrite d'Égine : 'Ovnoizpitov tiva, laisse entendre qu'il s'agissait d'un inconnu , ce qui bien sûr n'était pas le cas d'Onési crite d'Astypalaea . On peut encore s'interroger sur l'origine réelle d'Onésicrite : Astypalaea ou Égine , et s'étonner qu'un disciple de Diogène soit devenu premier pilote de la flotte d'Alexandre. La seconde hypothèse suppose deux Onésicrite. Il peut s'agir de deux person nages totalement distincts . Mais comme aussi bien Diogène Laërce que d'autres historiens font d'Onésicrite d'Astypalaea un disciple de Diogène le Cynique , on se retrouve avec deux homonymes disciples de Diogène . Une troisième hypothèse distingue deux Onésicrite , mais en supposant un lien de famille entre eux . C'est ainsi que Figueira 3 a distingué Onésicrite I d'Égine, père de Philiscos et d'Androsthène, devenu comme ses deux fils disci ple de Diogène à Athènes , et Onésicrite II d'Astypalaea, premier pilote de la flotte d'Alexandre qui pourrait être , selon lui , le fils de Philiscos , donc le petit fils d'Onésicrite I. Par la Souda ( O 359 ) et par Élien , Hist. var. XIV 11 , on sait que Philiscos d'Égine a appris à lire à Alexandre, ce qui pourrait expliquer que son fils soit lié à l'entourage du souverain . Cette hypothèse en fait soulève elle aussi une difficulté, car elle contredit les témoignages de Plutarque et Strabon qui font d'Onésicrite d'Astypalaea un disciple de Diogène , sauf à admettre que trois générations de la même famille ont fréquenté le même maître . Les avis des modernes sont partagés. Brown 9 , p. 3-4 , opte pour un seul Onésicrite , mais il estime que l'anecdote des fils d'Onésicrite d'Égine rapportée par Diogène Laërce VI 75 serait une invention de l'auteur des Vies ou de sa source . En revanche , Pearson 10 , p . 84 , admet que l'anecdote concernant Onésicrite d'Égine peut s'appliquer à l'historien. Biographie . Onésicrite fut un des disciples les plus en vue de Diogène de Sinope. Il prit part à l'expédition d'Alexandre en Orient. Le souverain l'envoya en 326 auprès des Gymnosophistes indiens de Taxila ( au Pendjab ) pour s'infor mer de leur doctrine et à la fin de la même année il fut nommé pilote (ỏ tñs ’ Alekávopov vewÇ xußepvńing) du navire royal dans la descente de l'Hydaspe et de l'Indus ( Arrien , L'Inde XVIII 9 = T 4 ) . Puis Alexandre ordonna à sa flotte de faire un périple des bouches de l'Indus aux bouches de l'Euphrate ; il lui donna alors pour chef öveuúv) Néarque et pour premier pilote (àpxixußepvning) Onésicrite (Plutarque, Alexandre 66, 702 a = T Sb et Strabon XV 2 , 4 = T 5c ) . Est équivalente à ce titre l'expression äpxwv tūv xußepvntāv par laquelle Plutarque , De Alexandri magni fortuna aut virtute I 10 , 331 e = T 5 a , le désigne. En 324 , Onésicrite reçut d'Alexandre une couronne d'or ( Arrien , Anabase VII 5 , 6 = 1 6) . Nous ne savons pas ce qu'il devint ensuite. Strabon XV 1 , 64 = F 17 , donne de lui une description pitto resque qu'il met dans la bouche du gymnosophiste Calanos ( C 14 ) , Onésicrite est enveloppé de sa chlamyde ; il a un chapeau à larges bords sur la tête et des sandales de voyage aux pieds. Le récit d'une rencontre entre Onésicrite et les sages indiens nous a été conservé par le livre XV de la Géographie de Strabon (XV 1 , 63-65 = F 17 ) et

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par un résumé que donne Plutarque dans sa Vie d'Alexandre 65. Sur Onésicrite et les gymnosophistes, voir 15 C. Muckensturm , « Les gymnosophistes étaient ils des cyniques modèles ? » , dans M.-O. Goulet -Cazé et R. Goulet (édit. ) , Le cynisme ancien , p. 225-239 . Onésicrite , envoyé en mission par Alexandre, rencontra les gymnosophistes à vingt stades de Taxila ( $ 63 ) . Il conversa tout d'abord avec le gymnosophiste Calanos, qui lui dit que l'homme, autrefois , était devenu arrogant à cause de l'abondance et du bien - être qu'il y avait sur terre et que pour cette raison Zeus lui avait envoyé une vie soumise à l'effort ( Tóvos ) . C'est alors qu'un autre gymnosophiste, Mandanis ( ou Dandamis ( -D 20 ) selon Arrien , Anabase VII 2 , 2 , et Plutarque, Alexandre , 65 , 701 d ) , qui était le gymnosophiste le plus âgé et le plus sage , intervint, reprochant à Calanos lui même son arrogance ( § 64 ) . Le gymnosophiste conversa avec Onésicrite qui interpréta de la sorte ses paroles : le discours le plus sage est celui qui éloigne de l'âme aussi bien noóvn que aúnn ; il ne faut point confondre la souffrance (aúnn ) et l'effort ( novos ) , la première étant une ennemie et le second au contraire un ami ; en exerçant son corps par l'effort on donne un surcroît de force à ses pensées ( $ 65 ) . Onésicrite dit encore que le gymnosophiste reprochait aux philosophes grecs tels que Pythagore, Socrate et Diogène de « mettre la loi avant la nature » ( ibidem ). Plutarque, Alexandre 65 , 3-4 , 701 d , fait état d'une autre version : « D'autres prétendent que Dandamis se borna à dire ces seuls mots : " Pourquoi Alexandre est - il venu jusqu'ici en faisant un si long chemin ?" » . Dans quelle mesure les gymnosophistes exprimaient-ils des idées authenti quement indiennes ou étaient- ils les porte -parole du cynisme d'Onésicrite , par exemple dans l'exposé sur novos et aúnn ? Brown 9 , p . 45 , pose ainsi le problème: ou bien Onésicrite a trouvé les idées de Diogène confirmées en Inde ou bien , ce qui est plus probable, il a utilisé les Indiens comme porte - parole de ses propres idées . En tout cas , sur un point au moins : la conception d'Alexandre comme philosophe en armes à la recherche de la sagesse ( Strabon XV 1 , 64 = F 17 ), les idées des gymnosophistes ne rejoignent pas celles de Diogène , mais correspondent aux vues d'Onésicrite et des autres auteurs du IVe s. Son ouvrage. Le livre qu'Onésicrite à son retour écrivit sur le souverain et qui s'intitulait lõç ' Aréfavopos ňxon , « Comment Alexandre fut éduqué » (cf. Arrien, Anabase VI 2 , 3 = T 9b : év tñ ourypaoñ, nvtiva únèp ’Alegáv opou ouvéypade ; Pseudo- Lucien , Macrobioi 14 = T 9 a : tà nepi ’Alegáv opov ovyypávac ), rappelle la Cyropédie de Xénophon ( Diogène Laërce VI 84) . Il comportait au moins quatre livres puisque Onésicrite lut son livre IV , celui qui contenait l'histoire de l’Amazone , au roi Lysimaque ( Plutarque , Alexandre 46 = T 8 ) . Diogène Laërce établit un parallèle légitime entre les deux auteurs : « Son histoire n'est pas sans rappeler celle de Xénophon . Ce dernier en effet se joignit à l'expédition de Cyrus, notre homme à celle d'Alexandre. L'un écrivit la Cyropédie, l'autre raconta la formation d'Alexandre . L'un fit un éloge de Cyrus, l'autre d'Alexandre . Par l'expression également Onésicrite est proche de Xénophon , à ceci près qu'il occupe le second rang, comme une copie par rapport à son archétype » ( ibidem ). La fiabilité historique de l'ouvrage fut contestée dès

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ONÉSICRITE D'ASTYPALAEA

0 23

l'Antiquité ( cf. infra le jugement de Strabon ). Pédech 11 , p . 77 , remarque qu'Onésicrite est probablement le seul historien qui ait exposé en détail l'édu cation d'Alexandre . Les autres, comme Aristobule , Ptolémée ou Plutarque, ne commençaient en effet son histoire qu'avec son avènement. Il signale encore ( p. 78) qu'Onésicrite est le seul historien qui ait présenté Alexandre comme un roi- philosophe. Cet aspect a influencé Plutarque, quand il écrivit les chapitres 4 et 10 de son De Alexandri magni fortuna aut virtute. Il faut également rappeler qu'au témoignage de Strabon , Onésicrite , même s'il lui arrivait de relater quelquefois des faits ayant un air de vraisemblance, se laissait aller dans son récit au merveilleux : « Tous ceux qui entouraient Alexan dre ont accordé davantage de créance à ce qui est étonnant qu'à ce qui est vrai et , par le côté prodigieux de ses récits, Onésicrite paraît les surpasser tous» ( Strabon XV 1 , 28 = T 10) . Strabon (XV 1 , 28 = F 16 a) et Élien (De natura animalium XVI 39 = F 16 b ) rappellent par exemple l'histoire du prince Abisar relatée par Onésicrite, qui aurait nourri deux énormes serpents, l'un de quatre vingts coudées de long et l'autre de cent- quarante. L'ouvrage d'Onésicrite est peut -être une source de l’Anabase d'Arrien de Nicomédie ( > A 425 ) . C'était un ouvrage largement diffusé, puisque Aulu Gelle , Nuits attiques (IX 4 , 1-3 = T 12 ) le voyait dans les boutiques des libraires de Brindes. Le jugement que porte Dudley 7 , p. 40, sur le personnage est intéressant: « Onesicratus is not an important figure in the development of Cynicism . He himself did not lead the xuvixòç Bios ; yet more than any Cynic he was “ a wanderer over the face of the earth ” and in discovering Diogenes' doctrines on the banks of Indus he shows how , in the minds of his admirers, Cynicism is already not a school of philosophy, but a way of life » .

MARIE-ODILE GOULET - CAZÉ.

24 ONÉSICRITE D'ÉGINE

IV

D. L. VI 75 parle d'un « certain Onésicrite d'Égine » , 'Ovnoizpitov Tiva , qui envoya successivement à Athènes ses deux fils Androsthène (» A 182 ) et Philiscos auprès de Diogène de Sinope ( - D 147 ) , puis qui , ne les voyant pas revenir , alla lui - même auprès du philosophe et fut tellement séduit par ses discours qu'il devint à son tour son disciple . Sur l'identification possible de ce personnage avec Onésicrite d'Astypalaea ( »O 23 ) dont parle Diogène en VI 84 , voir la notice précédente.

MARIE -ODILE GOULET -CAZÉ.

25 ONÈTOR

III

Dédicataire d'un ouvrage de Chrysippe ( °C 121 ) relevant de la logique: Sur les arguments qui se rapportent à des opinions imprécises et qui font rester silencieux , en deux livres ( περί των εις τας υπολήψεις λόγων και ήσυχα ÇÓVTWV hipòç 'Ovýropa a'B', Diogène Laërce VII 197 (trad. P. Hadot ] ). Un tel

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ONÈTOR

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ouvrage ne peut guère avoir été dédié qu'à un disciple ou à un collègue au sein de l'école stoïcienne. Absent de la RE. RICHARD GOULET.

26 ONÈTOR Dans Damascius, in Phaedonem ( versio 1 ) , $ 100, il est associé à Atticus ( ** A 507 ) comme commentateur du Phédon de Platon à propos des " authen tiques philosophes” évoqués par Socrate en 66 b 1-2 . Le fait que ces philosophes expriment en 66 b - 67 b des sentiments marqués par les passions du commun des mortels posait problème. Apparemment pour Onétor, et pour Atticus qui le citait peut- être sur ce point, ces philosophes étaient plutôt des npoxónTOVTEC. Cette position est distinguée par Damascius de celle de Patérius et de Plutarque qui semblent avoir maintenu la référence à des philosophes authentiques . Proclus ( li . 4-5 ) , reprenant peut-être la position de Plutarque d'Athènes ( plutôt que de Chéronée ), considérait que le discours rapporté par Socrate était bien celui des philosophes, mais que ces derniers faisaient référence aux passions des hommes en général. Voir l'édition de L.G. Westerink , The Greek Commentaries on Plato's Phaedo, t. II : Damascius, coll . « Verhandelingen der Koninklijke Nederlandse Akademie van Wetenschappen , Afd . Letterkunde , Nieuwe Reeks » 33 , Amsterdam 1977 , p . 67 et la note sur le $ 100. L.G.Westerink, The Greek Commentaries on Plato's Phaedo , t. I : Olympiodorus, coll . « Verhandelingen der Koninklijke Nederlandse Akademie van Wetenschappen, Afd . Letter kunde , Nieuwe Reeks » 92 , Amsterdam 1977 , introduction , p. 11-12 , rapproche Onétor de l'auteur mentionné par Diogène Laërce ( HO 27 ) , mais envisage aussi la possibilité qu'il s'agisse d'un homonyme. La fréquence de ce nom (Onator, Onètor) peut être établie par la consultation des quatre tomes parus du LGPN . On trouve ainsi 29 Onètor en Attique. Il faut donc se garder d'identifier tous ces homonymes . Une scholie accompagnant le commentaire de Proclus sur la République de Platon (t. II , p. 378 , 23-24 Kroll) cite le livre V ( ÉV TV TÉ[UTTọ ]) d'un ouvrage d'Onétor intitulé Nepì đpiОuntixñs åvahoy aç ( Sur la proportion arithmé tique ). Absent de la RE . Voir J. Radicke dans FGrHist continued nº 1113 , p . 448 451 . RICHARD GOULET.

27 ONÈTOR Source de Diogène Laërce. En II 114 , le passage concerne Stilpon (= fr. 115 Döring = SSR II O 17 ) qui avait une femme, ainsi qu'une maîtresse du nom de Nicarétè (voir également, sans indication de source , Athénée , XIII 70 , 596 e = fr. 156 Döring). La suite qui concerne la vie dissolue de sa fille qui était mariée à son disciple Simmias de Syracuse (déjà nommé en II 113 ) , pourrait également provenir de cette même source . Voir J. Radicke dans FGrHist continued nº 1113 , p. 448-451, qui rappelle que Cratès de Thèbes ( 2 * C 205 ) avait écrit des vers sur Stilpon et sa bien - aimée ( Diogène Laërce II 118 ) .

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ONÈTOR

027

En III 9 , Diogène Laërce cite de lui un ouvrage intitulé Le sage s'enrichira -t il ? ( Ei xenuatiettal Ó Copóc ). Il y affirmait que Platon était riche , du fait qu'il avait reçu de Denys de Syracuse plus de 80 talents . Absent de la RE. RICHARD GOULET. 28 ONÈTOR Un philosophe de ce nom était cité dans une section aujourd'hui perdue de l'Anthologie de Stobée selon Photius , Bibl. cod. 167 ( p . 114 b 13 ) . RICHARD GOULET. 29 ONOSANDROS RE

I?

“ Philosophe platonicien ” , auteur d'un Commentaire de la République de Platon , selon la Souda 0 386 , qui l'identifie , probablement à tort, au tacticien Onasandros dont un ouvrage est conservé ( éd . H. Koechly, 19232, trad . anglaise par W.A. Oldfather, LCL , London 1923 ) : 'Ovóoav &poc, płócoqoç Matu νικός. Τακτικά , Περί στρατηγημάτων, Υπομνήματα εις τας Πλάτωνος Πολιτε ας..

Voir A. Dain , Les manuscrits d'Onesandros, Paris 1930. Le traité militaire est dédié à un certain Quintus Veranius, en qui on a reconnu le consul de 49 (PIR III 399 ), mort en 59. Mais cette datation a été remise en cause par E. Bayer, « Onasandros . Die Entstehungszeit des Strategikos » , WJA 2, 1947 , p. 86-90 . Pour la fréquence des noms Onasandros, Onèsandros et Onisandros dans toutes les régions du monde grec, voir les quatre tomes parus du LGPN . On recense 58 Onasandros et 19 Onèsandros dans le seul tome I ( 1987 ) qui concerne la Grèce des îles . Onosandros est plus rare ( une seule attestation , à Rhodes, dans ces quatre tomes ). Une inscription du temple d'Aphrodite à Paphos ( OGIS 172 ) que l'on date vers 100 av. J.-C. a conservé le nom d'un Onèsandre , fils de Nausicrate, prêtre du Ptolemaion fondé par Ptolémée IX Sôter II (Lathyrus) et directeur de la “grande bibliothèque d'Alexandrie”. L'inscription a été originellement publiée par R. Elsey Smith, dans D.G. Hogarth, M. R. James , R.E. Smith et E. A. Gardner, « Excavations in Cyprus, 1887-88 . Paphos, Leontari, Amargetti » , JHS 9 , 1888 , p. 147-271 ( p. 240 , n° 50). Voir R. Pfeiffer, History of Classical scholarship, , Oxford 1968 , p . 273 n . 8. Il s'agit probablement d'un homonyme plus ancien . Cf. L. W. Daly et W.A. Oldfather , art. « Onasander » , RE XVIII 1 , 1939, col. 403-405. RICHARD GOULET . 30 OPILLUS (AURELIUS-) RE Aurelius 176

DI

Grammarien . Témoignages et fragments. Funaioli , GRF I , p . 86-95 . Études. 1 G. Goetz , art. « Aurelius 176 Opilius » , RE II 2 , 1896 , col . 2154 ; 2 G. Garbarino, Roma e la filosofia greca , t . II , p. 444 ; 3 C. Castner, Prosopo graphy, p . 81 . Aurelius Opillus ( Sur la lecture Opillus , de préférence à Opilius , voir 4 M.-C. Vacher [ édit . ) , Suétone , Grammairiens et rhéteurs , CUF , Paris 1993 , p. 80 ) affranchi d'un épicurien, enseigna d'abord la philosophie , puis la rhétorique et ,

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OPSIMOS DE RHÉGIUM

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enfin , la grammaire ( Suétone , Gramm . 6) . Vers 92 av . J.-C. , il accompagna le stoïcien P. Rutilius Rufus dans son exil et s'installa à Smyrne ( voir aussi Symmaque, Epist. I 20 , 2 ) . Il composa alors de nombreux traités sur la langue latine en s'intéressant à l'étymologie. Il avait également établi un catalogue des æuvres de Plaute ( Aulu-Gelle III 3 , 1 ) ; Suétone (ibid. ) mentionne un ouvrage en neuf livres qui avait pour titre Musae (titre mentionné aussi par Aulu -Gelle I 25 , 17 ; voir les fragments dans Funaioli, GRF ) et un autre Pinax . Sa renommée fut considérable : Varron et Verrius Flaccus se réfèrent à son æuvre . Seul Suétone indique explicitement des liens avec la philosophie , puis qu'Opillus , affranchi d'un épicurien , enseigna la philosophie . Malgré ses rapports avec P. Rutilius Rufus, qui était stoïcien, il est considéré comme proche de l'épicurisme ; Castner 3 , p. 81 , le classe parmi les Epicurei incerti ; 5 E. Rawson , Intellectual Life in the Late Roman Republic, London 1985 , p . 124 , indique également un penchant épicurien. MICHÈLE DUCOS . 31 OPPIA (AURELIA -) DE SPARTE

DM III

C'est apparemment en vertu d'une sorte de tradition familiale qu'Aurelia Oppia est qualifiée de « très philosophe » dans l'inscription de la statue que lui éleva la cité de Sparte, dans la première moitié du IIIe siècle ( IG IV 598 ) . Le même qualificatif est en effet appliqué à son père Calli [cratès ?] ( MC 18a) et à sa fille Aurelia Héracleia (= H 44 ). L'épigramme qui suit l'inscription en prose , en insistant, au -delà de la sophrosunè , sur sa sophia , montre que la famille revendiquait véritablement une supériorité intellectuelle et culturelle . Oppia est honorée par la cité du titre de « nouvelle Pénélope » , dont héritera sa fille Héracleia , et de celui de « nouvelle Laodamie » . BERNADETTE PUECH .

32 OPSIMOS DE RHÉGIUM Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique, V. pyth. 36 , 267 , p. 145 , 20 Deubner. Témoignages. Le nom d'Opsimos ne nous est connu , en dehors du catalogue , que par Athénagore, Legatio, 6 , 1 , p . 6 , 15 Schwartz = p . 31 Marcovich ( passage reproduit dans 1 DK 46 A 4 ; 2 M. Timpanaro Cardini, I Pitagorici. Testimo nianze e frammenti, t. II , Firenze 1962 , nº 20 ( avec Archippos et Lysis ) , p. 258 261 ; 3 H. Thesleff, The Pythagorean texts, p. 140 , 27 - 141 , 4 . "Ovqoç est en réalité une correction remontant à 4 lo. Meursius , Denarius Pythagoricus, Lugdunum Batavorum 1631 , p. 9 ; les mss d’Athénagore portent l'impossible “ ” (sic) . Les doctrines arithmo-théologiques attribuées à Opsimos (tout comme celles qui sont mises sous le nom de Lysis (PL 104 ), qui est évoqué à côté de lui ) semblent dériver de sources tardives. Plus exactement , elles proposent une défi nition de Dieu comme intervalle entre le nombre maximal ( c'est - à-dire le nombre dix ) et celui qui est immédiatement voisin ; Dieu serait donc la monade . Thesleff 3 , p. 140 , 27 , n . , remarquait que « possibly the arithmology attributed to Okkelos (dans Jean Lydus , De mensibus , II , 8 ] has something to do with this notice : the names

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OPSIMOS DE RHÉGIUM

O 32

Okkelos ( Okellos , Okillos) and Opsimos may have been confused » . Mais cela n'est pas nécessaire : d'abord , parce que les noms ne prêtent pas tellement à confusion - en réalité, ils n'ont en commun que le O initial et la terminaison -oç; deuxièmement, parce qu'il est tout à fait concevable qu'on ait attribué des doctrines arithmologiques à n'importe quel pythago ricien (il en est ainsi, par exemple, de Lysis, dont on ne connaît par ailleurs que la lettre [ apocryphe] adressée à Hipparchos (» H 140 ), mais qui est évoqué dans le même passage d'Athénagore comme le tenant d'une doctrine arithmo-théologique). BRUNO CENTRONE et CONSTANTINOS MACRIS . 33 OPTIMOS LE PHILOSOPHE RE 3 PLRE I : 1

IV ?

Un des auteurs de Centons homériques - transposant le matériau évangélique dans le langage homérique - contenus dans le Paris. suppl. gr . 388 . Cf. A.-L. Rey (édit. ) , Patricius, Eudocie , Optimus , Côme de Jérusalem , Centons homériques ( Homerocentra ). Introduction, texte critique , traduction , notes et index, coll . SC 437 , Paris 1998 . On a proposé de l'identifier avec un Optimus ( RE 3 ), rhéteur connu par une lettre de Libanius ( Ep. 1544 ; t. XI , p. 561-562 Foerster, qui propose de la dater de 374) et qui pourrait être de son côté un évêque d'Antioche de Pisidie qui participa au concile de Constantinople en 381 et avait antérieurement détenu le siège d'Agdameia en Phrygie (Socrate, Hist. eccl. VII 36). Voir aussi la constitution du CT XVI 1 , 3 , du 30 juillet 381. Cette identification pose toutefois, selon Rey , p. 57 , des difficultés chronologiques. RICHARD GOULET. 34 ORACLES CHALDAÏQUES

FII

Du recueil constitué par les Oracles chaldaïques, il ne reste plus que des témoignages et des fragments que l'on doit glaner chez certains auteurs de l'Antiquité tardive. Les premières collections d'Oracles chaldaïques pourraient avoir été celles de Proclus, de Psellus et de Gémiste Pléthon . Les premières éditions imprimées furent celle de 1 Francesco Patrizi ( Nova de universis philosophia libris quinquaginta comprehensa, in qua aristotelica methodo non per motum , sed per lucem et lumina ad primam causam ascenditur ; deinde nova quadam , ac peculiari methodo tota in contemplationem venit divinitas ; postremo methodo platonica rerum universitas a conditore Deo deducitur, auctore Francisco Patritio , ... quibus postremo sunt adjecta : Zoroastris oracula CCCXX ex platonicis collecta . Hermetis Trismegisti libelli, et fragmenta, quotcunque reperiuntur, ordine scientifico disposita. Asclepii, discipuli, tres libelli . Mystica Aegyptiorum , a Platone dictata , ab Aristotele excepta, et perscripta philosophia. Platonicorum dialogorum novus penitus a Francisco Patritio inventus ordo scientificus. Capita demum multa in quibus Plato concors, Aristoteles vero catholice fidei adversarius ostenditur, Ferrare 1591 ; réimpr. Venise 1593 ; une première recension avait paru chez Jean - Loyc Tiletanus à Paris en 1538 , puis avec les commentaires de Pléthon , en 1539 ) et de 2 Johannes Opsopoeus (Oracula magica Zoroastris, cum scholiis Plethonis et Pselli nunc primum editi ... Studio Johannis Opsopoei. Magica Zoroastri oracula, Plethonis commentariis enarrata , Jacobo Marthano , ... interprete. E bibliotheca regia studio Johannis Opsopoei, Paris 1599 ) , d'après laquelle travailla 3 S. Gallaeus : Sibyllina oracula ex veteribus codicibus emendata ac

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ORACLES CHALDAÏQUES

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restituta et commentariis diversorum illustrata opera et studio Servatii Gallaei, Amstelodami 1689. Ad calcem ( seconde pagination ), p. 1-69 , “oracula metrica Jovis ... : magica Zoroastris cum scholiis Plethonis et Pselli nunc primum edita ... studio Johannis Opsopoei” ; p. 78-81 [ 30 Magica logia , texte et traduction latine ) . La Patrologie grecque de Migne donne le recueil de Pléthon au début d'une section placée sous le nom de Psellus . 4 W. Kroll , De Oraculis Chaldaicis, coll . « Breslauer Philologische Abhand lungen » 7 , 1 , Breslau 1894 , a négligé le témoignage de Pléthon, à la différence d'Éd. des Places qui après avoir édité, traduit et annoté 226 fragments tirés d'un grand nombre d'auteurs et surtout de Proclus et de Damascius , donne en Appendice des textes de Proclus, de Psellus et de Michel Italicos . Éditions des fragments. 5 Éd. des Places (édit. ) , Oracles chaldaïques. Avec un choix de commentaires anciens, coll . CUF, Paris 1971 , 19892 . Comprend en appendice A. Michel Psellus : Commentaire des oracles chaldaïques ; Exposition des croyances chaldéennes ; Esquisses des croyances chaldéennes ; Oraison funèbre de Jean Xiphilin (extraits) ; Accusation de Michel Cérulaire ( extraits ); À ceux qui avaient demandé combien il y a de genres de discours philosophiques ; B. Extrait de Grégoire de Nazianze, jer Discours sur le Fils ; C. Proclus, Esquisse du Commentaire sur la philosophie chaldaique ; D. Michel Italicus, Lettre XVII. Enfin , 6 H. D. Saffrey, « Nouveaux oracles chaldaïques dans les scholies du Paris Gr. 1853 » , RPh 43 , 1969, p . 59-72 , repris dans Recherches sur le néopla tonisme après Plotin , Paris fragments.

1990 , p . 81-94 , a édité quelques nouveaux

L'édition des Places a servi de base à une adaption anglaise : 7 Ruth Majercik (édit. ) , The Chaldean Oracles. Text, translation and commentary, coll . « Studies in Greek and Roman religion » 5 , Leiden 1989 , et à une adaptation espagnole : 8 F. García Bazán (édit. ) , Oráculos caldeos, con una selección de testimonios de Proclo , Pselo y M. Itálico (comprend également: Numenio de Apamea, Frag mentos y testimonios ). Introd ., trad . y notas, Madrid 1991 . Cf. 9 Éd . des Places , « Les oracles chaldaïques » , ANRW II 17 , 4 , 1984 , p . 2299-2335 ; 10 K.H. Dannenfeldt, « Oracula Chaldaica » , dans Catalogus translationum I , p . 157-164 ; 11 Ilana Klutstein , « Oracula Chaldaica. Addenda et corrigenda » , dans Catalogus translationum VII , p . 326-329 ; 12 Carine Van Liefferinge, La théurgie : des « Oracles chaldaïques » à Proclus, coll . « Kernos Supplément» 9, Liège 1999 , 319 p . Origines. Traditionnellement, on fait remonter l'origine des Oracles chaldaï ques à deux “ Chaldéens ”, c'est - à -dire à deux magiciens, du nom de Julien, qui vivaient sous Marc Aurèle ( 161-180) et qu'évoquent deux notices de la Souda (s. v . 'lovalavós, t . II , p. 641,32-642, 4 Adler) . Comme dans un passage du Commentaire sur le Parménide conservé dans la traduction faite par G. de Moerbeke ( In Parm . VII p. 58,30-60, 9 Steel ), Proclus fait allusion, par l'inter médiaire des Oracles chaldaïques au dieu syrien Hadad, 13 H. D. Saffrey, « Les Néoplatoniciens et les Oracles chaldaïques » , REAug 27 , 1981 , p . 209-225 ,

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ORACLES CHALDAÏQUES

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repris dans Recherches sur le néoplatonisme après Plotin , Paris 1990 , p. 63-79, a été amené à penser que les deux Julien auraient pu être d'origine syrienne . Si l'on en croit Psellus dans son traité Sur la chaîne d'or, Julien père amena l'âme de son fils à atteindre la vision immédiate de l'âme de Platon qu'il pouvait interroger sur ce qu'il voulait . Structure. Comment, dans le recueil original , les Oracles étaient - ils présen tés ? Parmi les fragments conservés comme citations dans les commentaires néoplatoniciens , on ne trouve aucune question . On a naturellement fait l'hypo thèse que les questions , dont les Móyla sont les réponses , n'avaient pas été conservées. Il s'agit là d'un argument e silentio qui vaut ce que vaut un argu ment e silentio . Comme toutes les autres réponses oraculaires transmises en grec , les Oracles Chaldaïques sont en hexamètres dactyliques . Ils contiennent un grand nombre de citations ou d'allusions homériques; et ils abondent en néologismes et en tournures bizarres, dus au fait qu'ils sont écrits en vers et que plusieurs des termes platoniciens auxquels ils cherchent à faire référence ne pouvaient entrer dans le mètre retenu . Vision du monde. Pour autant que l'on puisse se la représenter, la vision du monde dans les Oracles s'apparente à celle que l'on retrouve dans des courants religieux des débuts de l'Empire : ( 1 ) le monde du feu est celui de l'intelligible uniquement , ( 2 ) le monde éthéré , un mélange de feu et d'air sans doute , comprend les corps célestes , ( 3 ) le monde matériel enfin comprend le monde sublunaire , où interviennent les quatre éléments ( feu, air, eau et terre) et tout le monde terrestre , un monde livré au devenir, à la naissance et à la mort, et d'où l'âme doit s'échapper en se purifiant à l'aide des techniques de la théurgie. Les rites ou la théurgie . La théurgie est un système religieux qui fait entrer l'âme de l'homme en contact avec les dieux , non seulement par la seule éléva tion de son intellect vers le Dieu , mais au moyen de rites concrets et d'objets matériels . Le terme Deovpy a est un composé où interviennent les deux termes Okoç etěpyov. Ce composé fait référence à la possibilité d'exercer une influence sur la divinité . Ces rites sont des procédés magiques qui s'apparentent à ceux que l'on trouve dans les Mystères, lesquels équivalent à une initiation . À partir de Jamblique , les néoplatoniciens seront très sensibles à la théurgie”, laquelle a inspiré la conception et la pratique d'un commentaire qui s'efforçait de retrouver les correspondances entre les Oracles chaldaïques et le système philosophique que l'on attribuait à Platon . Une interprétation médio - platonicienne du Timée de Platon . Les trois mondes sont structurés en fonction des trois principes mis en avant dans le médio -platonisme: Dieu, le Modèle et la Matière. Face au platonisme stoïcisé et aristotélisé qui se trouvait sous l'influence d'un scepticisme cultivé et éclectique, se fit progressivement sentir le besoin , chez certains philosophes , d'une philosophie plus religieuse . C'est alors que la pensée de Platon réapparut comme un moyen d'accéder à un autre ordre de réalités , celui des Formes et du divin , que seule pouvait appréhender l'âme . Ainsi , au jer siècle de notre ère , se

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produisit chez les platoniciens cette renaissance à laquelle on donna le nom de moyen - platonisme. Sur les rapports entre les Oracles et le Timée, voir 14 L. Brisson , « Plato's Timaeus and the Chaldaean oracles » , dans Gretchen J. Reydams- Schils (édit. ) , Plato's Timaeus as Cultural Icon , Notre Dame ( Ind . ) 2003, p. 112-132 . Sur le plan exégétique , les dialogues de référence qu'exploitèrent les médio - platoni ciens pour construire ce nouveau dogmatisme furent le Timée et la République. Ces dialogues ne firent pas , dans un premier temps du moins , l'objet de commentaires suivis , mais on voulut y retrouver des vues sur la divinité , sur le monde , sur l'homme et sur la société, dans le cadre d'un système articulé autour de trois principes, c'est- à -dire de trois instances données d'entrée de jeu : Dieu , le Modèle et la Matière . - Le Dieu devait être identifié au Bien de la République et au démiurge du Timée. Et , puisque ce dieu est le tout premier dieu , le principe suprême, rien ne peut lui être supérieur. Une telle suprématie détermine le type de relation que le dieu entretient avec le second principe : le Modèle. - Le Modèle correspondait aux Formes et donc à l'Intelligible lequel , en tant qu'objet de pensée du premier dieu , l'Intellect, lui était extérieur et inférieur. - Platon s'est borné à suivre l'opinion de ses devanciers et à leur exemple il n'a admis que quatre éléments , dont tous les autres corps se sont formés par suite de transformations et de combinaisons selon des proportions définies: ce sont la terre , l'eau , l'air et le feu, qui occupent dans l'espace des positions déter minées par la constitution même de l'univers . Ces éléments sont sortis d'une matière unique , homogène et indifférenciée . Il s'agit sans doute de ce que Platon , dans le Timée, appelait le troisième genre , la cause errante , l'étendue , le réceptacle. Ce troisième genre était perçu comme une réalité corporelle et sensible , une sorte de chaos indifférencié, dans lequel étaient confondus tous les éléments de l'univers. Les médio - platoniciens faisaient de ce troisième genre un équivalent de la matière aristotélicienne . C'est dans ce cadre que viennent se disposer les divinités chaldéennes . Le troisième principe, la Matière est présen tée métaphoriquement en terme de lit et de creux (xo awua ) ; elle se trouve en bas. La description qu'en font les Oracles correspond en gros à ce qu'on trouve dans le Timée , et dans la tradition qui a interprété le Timée ( F 163 ) : la “ matière" platonicienne joue en effet le rôle d'un réceptacle. Depuis longtemps , on a remarqué une parenté entre ce que nous pouvons reconstituer de la pensée de Numénius ( » N 66) et la doctrine des Oracles chaldaïques. Entre le fragment 7 des Oracles chaldaïques et le fragment 17 (des Places) de Numénius, le parallélisme est étonnant. On peut donc penser que les Oracles chaldaïques ont subi l'influence de Numénius; mais on pourrait tout aussi bien retourner l'argument , et penser que c'est le contraire ; Numénius aurait subi l'influence des Oracles chaldaïques. Sur les liens des Oracles avec Numénius , voir 15 L. Brisson , « The Platonic background in the Apocalypse of Zostrianos: Numenius and Letter II attributed to Plato » , dans J.J. Cleary (édit. ) , Tradition of Platonism . Essays in honour of John Dillon , Aldershot 1999 , p . 173-188 .

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En réexaminant une hypothèse de W. Kroll, 16 M. Tardieu , « La gnose valentinienne et les Oracles chaldaïques » , dans The Rediscovery of gnosticism . 1 : The School of Valentinus. Proceedings of the International conference on gnosticism at Yale, New Haven , Connecticut, March 28-31 , 1978 , coll . « Studies in the history of religions >> 41 , Leiden 1980, p . 194-237 , a voulu mettre en évidence sur des points précis des analogies entre la gnose valentinienne et les Oracles chaldaïques, Valentin et les auteurs des Oracles chaldaïques correspon dant au même type d'interprétation du platonisme . Avant Plotin qui allait s'affronter à ce phénomène, les mythes platoniciens sont réactualisés à l'aide de mouvement religieux extérieurs. Quelques études sur les doctrines philosophiques et religieuses dans les Oracles chaldaïques. 17 O. Geudtner, Die Seelenlehre der chaldäischen Orakel, coll . « Beiträge zur klassischen Philologie » 35 , Meisenheim 1971 ; 18 S. Breton, « Téléologie et ontogénie . Variations sur les Oracles chaldai ques » , RecSR 66, 1978 , p . 5-26 ; 19 Id ., « L'homme et l'âme humaine dans les Oracles chaldaïques» , Diotima 8 , 1980, p. 21-24 ; 20 H.D. Saffrey, « La théur gie comme phénomène culturel chez les néoplatoniciens (IV -ve ss. ) » , Koinonia 8 , 1984 , p. 161-171 , repris dans Recherches sur le néoplatonisme après Plotin , Paris 1990 , p . 51-61 ; 21 Sarah Iles Johnston , The development of Hekate's archaic and classical roles in the Chaldean Oracles and related mystic literature, Cornell Univ . Ithaca, N.Y. , 1987 , 316 p. ; 22 Ead ., Hekate Soteira. A study of Hekate's roles in the Chaldaean oracles and related literature, Atlanta, GA 1989 , VIII - 192 p . ; 23 J.D. Turner, « The figure of Hecate and dynamic emanationism in the Chaldean Oracles, Sethian Gnosticism , and Neoplatonism » , SCent 7 , 1989-1990 , p . 221-232 ; 24 R. Majercik , « Chaldaean triads in Neoplatonic exegesis: some reconsideration » , CQ 51 , 2001, p . 265-296 . L'utilisation des Oracles dans le néoplatonisme de l'École d'Athènes. Alors que l'influence des Oracles chaldaïques sur Porphyre ne fait aucun doute , on continue de se demander si Plotin en avait eu connaissance . Les premiers mots du traité 16 ( 1 9 ) Sur le suicide raisonnable sont présentés par Psellus comme appartenant aux Oracles chaldaïques. Plusieurs éditeurs et traducteurs ont accepté cette identification. Mais W. Kroll la refusa, en faisant valoir que la formule ne pouvait provenir d'un hexamètre dactylique. Proclus, dans son commentaire, aurait cité par inadvertance cette formule , et Psellus aurait cru à tort qu'elle appartenait aux Oracles chaldaïques. La polémique se poursuit. Voir 25 J. Dillon , « Plotinus and the Chaldaean Oracles » , dans St. Gersh et Ch . Kannengiesser (édit . ) , Mélanges Édouard Des Places. Platonism in late antiquity, Notre Dame ( Ind . ) 1992, p. 131-140 ; 26 R. Majercik, « The Chaldean oracles and the school of Plotinus » , AncW 29 , 1998 , p. 91-105 . Porphyre, il n'y a aucun doute sur le sujet, a connu et utilisé les Oracles chaldaïques. Encore faut- il déterminer dans quels ouvrages. - Une première possibilité est représentée par la Philosophie tirée des oracles . Mais aucun néoplatonicien tardif ne cite comme “ chaldéen " un des oracles cités par Porphyre dans son ouvrage.

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- En revanche, le De regressu animae connu par Augustin , qui le cite abon damment dans le livre X de la Cité de Dieu , et peut- être par Macrobe, décrit le rôle que joue la théurgie chaldaïque dans la remontée de l'âme . La théurgie n'exerce son action que sur la partie irrationnelle de l'âme humaine et ne permet de remonter que jusqu'aux dieux astraux ; seule la philosophie , qui n'est à la portée que d'un petit nombre d'hommes permet le salut de l'âme , comme l'a bien montré 27 P. Hadot, Porphyre et Victorinus, Paris 1968 , t. I , p. 94 et 107 108. 28 J.J. O'Meara, Porphyry's Philosophy from Oracles in Augustine, Paris 1959, a voulu identifier le De regressu animae avec la Philosophie tirée des oracles, mais cette hypothèse a été vigoureusement rejetée. - Enfin , dans le Commentaire au Parménide de Platon, attribué à Porphyre par P. Hadot , on trouve au début de la colonne IX (2-10) une référence au F 3 des Oracles chaldaïques ; alors que les Oracles chaldaïques eux -mêmes sont vénérés, leurs interprètes sont critiqués. - Selon Énée de Gaza, Théophraste , p . 45 , 5 Colonna ( = fr. 368 Smith) , Porphyre avait écrit un ouvrage sur les Oracles de Chaldéens (των Χαλδα ων τα Róyla ). Jean Lydus, De mensibus IV, p. 110 , 18-25 Wünsch , parle explicitement d'un commentaire de Porphyre sur les Oracles ( Ó MÉvtol Toppúpios Év TV Únouvnuati tõv hoy wv) . Quant à la Souda, elle évoque parmi les œuvres de Porphyre un traité Εις τα Ιουλιανού του Χαλδα ου . Il est possible, mais non certain que ces différentes désignations se rapportent à un même ouvrage . Voir 29 R. Beutler, art. « Porphyrios » , RE XXII 1 , 1953 , col . 296-297 . Sur Porphyre et les Oracles chaldaïques, voir 30 S. Montero , « Porfirio e il sacrificio divinatorio » , Etrusca disciplina 8 , 1999 , p . 81-93 ; 31 M. Bland Simmons, « The eschatological aspects of Porphyry's anti- Christian polemics in a Chaldaean -Neoplatonic context » , C&M 53 , 2001, p. 193-215 ; 32 M. Tardieu , Recherches sur la formation de l'Apocalypse de Zostrien et les sources de Marius Victorinus, coll. « Res Orientales » 9 , Bures- sur - Yvette 1996 , p . 7-114 ; 33 P. Hadot, « Porphyre et Victorinus. Questions et hypothèses » , dans Tardieu 16, p . 115-125 . Sur une expression des Sentences qui pourrait correspondre à une interprétation porphyrienne des Oracles chaldaïques, voir 34 M. Chase , « What does Porphyry mean by DeWv namp ? » , Dionysius 22 , 2004, p. 77-94. C'est d'ailleurs par l'intermédiaire de Porphyre que des auteurs latins comme Arnobe, Lactance , Marius Victorinus et Augustin , et des auteurs grecs comme Synésius ont connu les Oracles chaldaïques. Comme l'a montré P. Hadot, Porphyre se trouve confronté à une question à laquelle tous les néoplatoniciens postérieurs ont tenté de répondre: comment concilier le systéme médio -plato nicien des Oracles chaldaïques où Dieu qui est Intellect garde une certaine multiplicité et l'exigence néoplatonicienne qui tient à faire de Dieu une unité absolue au -delà de l'être. Pour les néoplatoniciens postérieurs, les Oracles chaldaïques ne commencent à jouer un rôle qu'à partir du niveau de l'Intellect Intelligible, la doctrine des hénades procliennes permettant d'associer ce niveau au niveau supérieur. Si on en croit Psellus et Olympiodore, Jamblique révérait les Oracles chal daïques. Mais cette vénération ne se traduit pas par des citations expresses. Le

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De mysteriis se contente d'allusions que des Places a pris la peine d'énumérer dans l’Introduction à son édition des Oracles chaldaïques. Voir sur cette question 35 F. W. Cremer, Die Chaldäischen Orakel und Jamblich “ de mysteriis ”, coll . « Beiträge zur klassischen Philologie » 26, Meisenheim 1969. La Théologie chaldaïque que , selon Damascius ( I , p. 86, 5-6 Ruelle = Des Premiers Principes II 1 , 8 ; cf. I , p. 154 , 13-14 Ruelle = Des Premiers Principes II 104 ), Jamblique ( » J 3 ) aurait rédigée a probablement inspiré ses successeurs ; malheureusement l'ouvrage est perdu. Cela dit , l'influence des Oracles chaldaï ques sur Julien l'empereur, qui fut à Athènes l'élève de Maxime ( **M63 ), un disciple de Jamblique , est évidente. Voir 36 A. Penati, « L'influenza del sistema caldaico sul pensiero teologico dell'imperatore Giuliano » , REN 75 , 1983 , p . 543-562 . Dans la Lettre 12 , l'empereur demande à Priscus un exemplaire de tout ce que Jamblique a écrit sur son homonyme ( Julien le théurge) Les néoplatoniciens de l'École d'Athènes ( qui se constitua à la fin du Ive siècle apr. J.-C. ) développèrent ces idées d'une façon systématique . Son ensei gnement sur les dieux , Platon le donne de plusieurs manières : d'une manière dialectique comme dans le Parménide et le Sophiste; d'une manière symbolique , comme dans le Protagoras, le Gorgias et le Banquet ; et d'une manière qui procède à partir d'images comme dans le Timée et dans le Politique. Ces mêmes distinctions , Proclus les applique aux différents " théologiens" : Orphée, Pytha gore , les Chaldéens et Platon . Orphée révèle les principes divins au moyen de symboles: Pythagore, lui , se sert d'images, dans la mesure où les réalités mathé matiques jouent le rôle d'images par rapport aux principes divins ; les Chaldéens s'expriment sous l'effet d'une inspiration divine ( sur ce type d'exposition, cf. Proclus, in Tim ., t . III , p . 244, 19 ) ; et c'est le mode d'expression scientifique qui caractérise Platon . Cf. 37 L. Brisson , « Le commentaire comme prière destinée à assurer le salut de l'âme » , dans M.-O. Goulet-Cazé et alii (édit . ) , Le commentaire entre tradition et innovation , Paris 2000 , p . 329-353 ; 38 H.D. Saffrey, « Accorder entre elles les traditions théologiques: une caracté ristique du néoplatonisme athénien » , dans G. Boss et G. Seel (édit. ), Proclus et son influence. Actes du colloque de Neuchâtel, Zürich 1992 , p . 35-50 , repris dans Recherches sur le néoplatonisme après Plotin , Paris 2000, p. 143-158 ; 39 Id ., « L'hymne IV de Proclus, prière aux dieux des Oracles chaldaïques » , dans Néoplatonisme. Mélanges offerts à Jean Trouillard, coll . « Les Cahiers de Fontenay > 19-22 , Fontenay - aux - Roses 1981 , p . 297-312 , repris dans Recherches sur le néoplatonisme après Plotin , Paris 2000 , p . 193-106 ; 40 Rita Masullo , « Ascendenze omeriche e caldaiche negli Inni di Proclo » , Vichiana 16 , 1987 , p . 151-168 ; 41 L. Brisson , « Les Oracles chaldaïques dans la Théologie Platonicienne » , dans A. Ph . Segonds , C. Steel et alii ( édit . ) , Proclus et la Théologie Platonicienne. Actes du Colloque International de Louvain , Leuven / Paris 2000, p . 109-162 ; 42 L. Brisson , « Kronos, Summit of the Intellective Hebdomad in Proclus' Interpretation of the Chaldaean Oracles » , dans Gerd Van Riel et Caroline Macé ( édit . ) , Platonic Ideas and concept formation in ancient and medieval thought, Leuven 2004, p . 191-210.

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Les Oracles chaldaïques chez certains auteurs chrétiens. 43 É . des Places , « Les Oracles chaldaïques dans la tradition patristique africaine » , dans F.L. Cross ( édit . ) , Studia patristica 11 , Part 2 , Berlin 1972 , p . 27-41 ; 44 Id ., « Denys l'Aréopagite et les Oracles chaldaïques» , FZPhTh 24 , 1977 , p. 187-190 ; 45 Id. , « Les Oracles chaldaïques et Denys l'Arépopagite » dans Néoplatonisme. Mélanges offerts à Jean Trouillard, coll . « Les Cahiers de Fontenay » 19-22 , Fontenay -aux - Roses 1981 , p. 291-295 ; 46 Id ., « Le pseudo Denys l’Aréopagite , ses précurseurs et sa postérité » , DHA 7 , 1981 , p. 323-332 ; 47 R. Majercik, « A reminiscence of the Chaldaean Oracles at Gregory of Nazianzus, Or. 29, 2 » , VChr 52 , 1998 , p . 286-292 ; 48 W. Theiler, Die chal daïschen Orakel und die Hymnen des Synesios, Halle 1942. L’influence des Oracles dans le monde byzantin : Psellus et Pléthon. Deux ouvrages, le Commentaire sur les Oracles chaldaïques et le traité Sur l'accord entre Orphée, Pythagore, Platon et les Oracles chaldaïques attribués à Proclus sont maintenant perdus. Mais il semble que Psellus ( 1018-1082 ) au XIe siècle connaissait encore le Commentaire de Proclus sur les Oracles chaldaïques. Selon 49 M. Sicherl , Die Handschriften ... von lamblichos De mysteriis, Berlin 1957 , p . 134 , c'est probablement de Psellus que proviennent l'épitomé du Commentaire de Proclus sur les Oracles chaldaïques que publièrent, sur la base d'un manuscrit du Vatican , 50 J.-B. Pitra, Analecta sacra, t . V , Rome/Paris 1888 , p . 192-195 , puis 51 A. Jahn , Eclogae e Proclo de philosophia chaldaica , Halle 1891 , p. 1-5 ( texte ) et 6-48 ( commentaire ). Psellus a rédigé plusieurs opuscules sur les Chaldéens et conservé une collection de fragments. La liste de ces opuscules a été dressée par 52 L.G. Westerink, Mnemosyne 10 , 1942 , p . 279 , et par 53 H. Lewy, Chaldaean Oracles and Theurgy. Mysticism , Magic and Platonism in the Later Roman Empire, Le Caire 1956 ( nouvelle édition par Michel Tardieu, Paris 1978 ) . En Appendice à son édition , Éd . des Places 5 a donné le texte de quatre d'entre eux : Commentaire des Oracles chaldaïques, Exposition des croyances chaldéennes ; Exposition des croyances assyriennes ; Esquisse des croyances chaldéennes. Pour le texte , on utilisera la nouvelle édition de Psellus donnée par 54 D.J. O'Meara Michaelis Pselli Philosophica minora , II : Opuscula psycho logica, theologica, daemonologica, Stuttgart /Leipzig 1989 , nº 38 , 39 , 40 , p . 126 148. En plus de ces pièces importantes, on trouve nombre d'allusions parsemées dans d'autres traités . Les commentaires que Psellus propose de ces Oracles chaldaïques cherchent à concilier néoplatonisme et christianisme . Cf. 55 M. Tardieu, « Un texte négligé de Psellus sur les Oracles chaldaiques » , Byzz 73 , 1980 , p . 12-13 ; 56 Éd . des Places , « Quelques progrès récents des études sur Michel Psellus en relation surtout avec les Oracles chaldaïques » , Orpheus 9, 1988 , p. 344-348. À l'Université , Jean Italos , son disciple le plus éminent, succéda à Psellos en 1055 dans la charge de " consul des philosophes". Vers 1076-1077 , dix positions furent condamnées par un synode, sans qu'Italos ne soit nommé . Mais , le 13 mars 1082 , dimanche de l'orthodoxie, la doctrine d'Italos , condensée en onze articles, fut anathémisée en présence du professeur coupable . À la suite de ces

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anathèmes , on interdit à Italos tout enseignement public ou privé , et il fut relégué dans un monastère. À l'occasion furent brûlés plusieurs livres, dont très probablement les ouvrages de Proclus sur les Oracles : d'où l'importance primordiale des travaux de Psellos . L'intérêt pour les Oracles, sensible chez Jean Xiphilin , se maintint chez Michel Italicos ( XI -XII ° siècle ) ou chez Nicé phore Grégoras ( début du XIVe siècle ) et surtout chez Georges Gémiste Pléthon (ca 1360-1452) qui tentait de restaurer le paganisme. Pléthon va s'emparer des Oracles , qu'il rassemble dans une collection intitulée Oracles magiques des mages de la tradition de Zoroastre, pour en faire le pilier principal de tout son système philosophique. Désormais attribués aux mages , c'est - à -dire aux disciples de Zoroastre, et non plus aux deux Julien, et entièrement décapés de toute interprétation christianisante , les Oracles sont alors promus à une place exceptionnelle, puisqu'ils deviennent l'Écriture de référence ultime de tout l'hellénisme en cours de restauration . C'est à la lumière de ce texte , à la fois révélé et rationnel, que sera jugée la validité de telle ou telle thèse philosophique . L'ouvrage a été récemment édité : 57 Oracles Chaldaïques. Recension de Georges Gémiste Pléthon . Édition critique avec introduction, traduction et commentaire par Brigitte Tambrun -Krasker; La recension arabe des Magika logia par Michel Tardieu , coll . « Corpus Philosophorum Medii Aevi . Philosophi Byzantini » 7 , Athènes /Paris /Bruxelles 1995. La Patrologie grecque donne le recueil de Pléthon au début d'une section placée sous le nom de Psellus , avant l'Exégèse de celui -ci . Voir également 58 M. Tardieu , « Pléthon lecteur des Oracles » , dans Métis 2 , 1987 , p. 141-164; 59 L. Brisson , « Pléthon et les Oracles Chaldaïques » , à paraître. LUC BRISSON . 35 ORACLES PHILOSOPHIQUES Quand s'ouvre l'ère chrétienne, on constate dans tous les domaines une quête passionnée pour des certitudes qui dépassent la raison. Chez les païens qui ainsi voulaient répondre aux chrétiens, il n'y avait pas de discours plus assuré que celui que tenaient les dieux , ces êtres parfaits qui s'exprimaient directement à travers les oracles. Pourtant, de façon paradoxale, à partir du début du IIe siècle de notre ère, on observe ce que , avec Plutarque, on peut appeler la disparition des oracles traditionnellement rendus dans les grands sanctuaires, ceux de Delphes, de Didyme , de Dodone et de Claros notamment. Sur les oracles de Delphes, voir 1 H. W. Parke et D. E. W. Wormell, The Delphic Oracle, vol . I : The History, vol . II : The Oracular Responses, Oxford 1956 ; 2 J. Fontenrose, The Delphic Oracle. Its Responses and Operations, with a Catalogue of Responses, Berkeley 1978 ; 3 M. Giebel, Das Orakel von Delphi. Geschichte und Texte : griechisch /deutsch, coll. « Universal -Bibliothek » 18122 , Stuttgart 2001, 125 p. ; 4 L. Andersen , Studies in oracular verses. Concordance to Delphic responses in hexameter, coll . « Hist.- filos. Meddel. » 53 , København 1987 , XX-274 p. 2 indices . Sur les autres centres oraculaires à l'époque impériale, voir 5 K. Latte, art. « Orakel » , RE XVIII 1 , 1939, col . 829-866 , notamment col . 861-866 (Kaiserzeit ) ; 6 G. Wolff, De novissima oraculorum aetate, Berlin 1854 ; 7 H.W. Parke, Greek Oracles, London 1967 ; 8 H. W. Parke , The oracles of Apollo in Asia Minor, London 1985 , 272 p . ; 9 J. C. Montégu , Oracles in Asia Minor under the Empire, Harvard Univ . Cambridge , 1966. Sur l'histoire des centres oraculaires à l'époque impériale, voir 10 S. Levin , « The old Greek oracles in decline » , ANRW II 18 , 2, 1989 , p. 1599-1649.

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Or, à cette désaffection à l'égard des oracles traditionnels fait pendant un besoin avide pour de nouveaux oracles . D'où une double conséquence . On se met à réunir des collections d'oracles anciens , et on en forge de nouveaux . Corrélativement, les demandes que l'on fait à ces nouveaux oracles ont changé. On ne cherche plus à connaître l'avenir et surtout la conduite à tenir dans telle ou telle occasion délicate , on veut que le dieu donne des précisions sur lui même , sa nature , son action , son mystère , sur le monde , sa constitution et sa structure , et surtout sur le salut de l'âme humaine, en rendant plus facile sa remontée vers la divinité . Voir 11 A.D. Nock, « Oracles théologiques » , RÉANC 30, 1928 , p. 280-290 , repris dans Z. Stewart (édit . ), Essays on Religion and the Ancient World, Oxford 1972 , p. 160-168. État de la question dans 12 S. Pricoco , « L'oracolo teologico » , dans A. Garzya (édit . ) , Metodologie della ricerca sulla tarda antichità. Atti del primo convegno dell'Associazione di studi tardoantichi, coll. « Assoc. di studi tardoantichi. Atti dei convegni » , Napoli 1989, p . 267-285 . Certains des philosophes qui ont assuré la renaissance du platonisme au début de l'ère chrétienne ont favorisé l'influence de ce mouvement religieux en philosophie . Théon de Smyrne est le premier qui compare d'une façon systéma tique la philosophie platonicienne aux différents degrés de l'initiation aux mystères ( Exp. rer . math ., p. 14, 17-16, 2 Hiller) . Pour Celse, l'homme ne peut entrer en contact avec dieu que par l'intermédiaire des démons (Celse , ap . Origène, C. Cels. VIII 38 , 33 , 35 ) . Et pour répondre à la question qu'il vient de poser: “ Qui est dieu selon Platon ?" , Maxime de Tyr s'écrie : " Ah ! que n'ai- je à consulter quelque oracle , qu'il soit de Zeus ou d'Apollon , pourvu qu'il voulût répondre d'une manière ni obscure ni ambiguë .” (Or. XI 6 , 114-115 Trapp = XI , 5c , 100-102 Koniaris). En philosophie , la parole n'est plus seulement à la raison , elle est aussi aux oracles, comme le rappelle Porphyre au début de son traité, La philosophie tirée des oracles : « Le présent recueil comportera l'exposition d'un grand nombre de principes philosophiques contenant la vérité que les dieux ont voulu exprimer dans leurs oracles » ( apud Eusébe de Césarée, P.E. IV 7 , 2 ) . Mais le contexte de production de ces oracles n'est plus le même, comme l'a montré 13 L. Robert, « Trois oracles de la Théosophie et un prophète d'Apollon » , CRAI 1968 , p . 568-599 . Il s'agit de consultations divinatoires privées dont le rituel était peut- être assez semblable à celui des Oracles chaldaïques, tel que décrit par 14 H. Lewy, Chaldaean Oracles and Theurgy. Mysticism , Magic and Platonism in the Later Roman Empire, Le Caire 1956 ( nouvelle édition par Michel Tardieu , Paris 1978 ) . Voir également sur ces oracles privés et leur rituel 15 E.R. Doods , The Greek and the Irrational, Berkeley 1951 , Appendix II : Theurgy, p. 283-311 . C'est dans ce contexte qu'il faut situer la figure d'Alexandre d'Abonotique ( 2 A 110) qui n'est connu que par le récit très hostile de Lucien ( » L 66 ] ( Alexandre ou Le faux devin ). Le personnage avait instauré dans sa ville natale, en Paphlagonie sur le Pont - Euxin, un oracle et des mystères qui attirèrent, sous l'Empire romain, beaucoup de dévots. L'existence de cet oracle , où intervenait Asclépios sous les traits d'un serpent ( nommé Glycon ) amené de Pella en Macédoine, est d'ailleurs attestée sur des monnaies . Voir 16 L. Robert, à travers

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l'Asie mineure. Poètes et prosateurs, monnaies grecques, voyageurs et géogra phie, coll . BEFAR 239 , Paris 1980 , p. 393-411; 17 Id., « Le serpent Glycon d'Abônoutechos à Athènes et Artémius d'Éphèse à Rome» , CRAI 1981 , p. 513 530. C'est alors que l'on se met à produire des oracles , les plus célèbres chez les platoniciens étant les Oracles chaldaïques ( » O 34 ) et qu'apparaissent les grandes collections d'oracles , par exemple les Oracles Sibyllins. C'est dans ce courant que , au cours du IIIe siècle , Porphyre rassemble une collection d'oracles à laquelle il donne le titre de Philosophie tirée des oracles. Édition des frag ments dans 18 G. Wolff ( édit . ) , Porphyrii De Philosophia ex oraculis haurienda librorum reliquiae, Berlin 1856 , réimpr. Hildesheim 1962. Ces fragments ont été réédités par 19 A. Smith (édit. ) , Porphyrii philosophi fragmenta, coll . BT, Leipzig 1993 , p. 351-407. Des oracles sont aussi cités dans plusieurs autres æuvres d'orientation philo sophique : un oracle rendu par Apollonius de Tyane ( > A 284 ) après sa dispa rition (Philostrate, Vita Apollonii VIII 31 ) ; un oracle à Apollon dans la Vie de Plotin ( chap . 22 ; interprétation, chap. 23 ) par Porphyre ; un oracle à Aidésius ( 2* A 56) par Eunape ( Vit. soph ., p . 24, 6-12 Giangrande ) ; un oracle sur Julien ( > 1 46 ) dans la Chronique ( fr. 26 Müller) du même Eunape; des oracles que Proclus « crut proférer en songe » dans la Vie de Proclus par Marinus ( chap. 28 , voir chap. 32) ; un oracle de Zeus chez Augustin (Cité de Dieu XIX , chap. 22, 23 ; voir aussi Lactance, De ira XXIII 12 ) . Sur les origines et la signification de l'Oracle d'Apollon sur Plotin , voir 20 R. Goulet, « L'Oracle d'Apollon dans la Vie de Plotin » , dans Porphyre, La Vie de Plotin . Tome I : Travaux préliminaires et Index grec complet par L. Brisson , M. -0. Goulet - Cazé, R. Goulet et D. O'Brien , avec une préface de J. Pépin , coll . « Histoire des doctrines de l'antiquité classi que » 6, Paris 1982, p. 369-411, repris dans Études sur les Vies de philosophes, p. 191-229 ; 21 J. Igal , « El Enigma del Oraculo de Apolo sobre Plotino » , Emerita 52 , 1984, p. 83-115 ; 22 L. Brisson , « L'Oracle d'Apollon dans la Vie de Plotin par Porphyre » , Kernos 3 , 1990 , p. 151-155 ; 23 L. Brisson et J.-M. Flamand, « L'Oracle d'Apollon dans la Vie de Plotin par Porphyre. Structure, contenu et intentions » , dans L. Brisson et alii, Porphyre, La Vie de Plotin. Tome II : Études d'introduction , texte grec et traduction française ,commentaire, notes complémentaires, bibliographie , coll . « Histoire des doctrines de l'antiquité classique » 16, Paris 1992 , p . 565-577 ; 24 R. Goulet, « Sur quelques interprétations récentes de l'Oracle d'Apollon » , ibid. , p. 603-618, repris dans Études sur les vies de philosophes, p .231-244. On trouvera dans ces différentes études des références à la bibliographie plus ancienne . Sur les autres vers oraculaires cités chez ces différents auteurs , voir 25 C. M. Bowra, « Einare tõ Baouañ » , Hermes 87 , 1959, p. 426-435 ; 26 T. E. Gregory, « Julian and the last oracle at Delphi » , GRBS 24 , 1983 , p. 355-366 ; 27 H. Chadwick , « Oracles of the end in the conflict of paganism and christianity in the fourth century » , dans E. Lucchesi et H. D. Saffrey (édit . ) , Mémorial André-Jean Festugière. Antiquité païenne et chrétienne , coll . « Cahiers d'orientalisme» 10, Genève 1984, p . 125-129 ; 28 P. F. Beatrice, « Un oracle antichrétien chez Arnobe » , dans Mémorial Dom Jean Gribomont ( 1920-1986 ), coll . « Studia Ephem. Augusti nianum » 26, Roma 1988 , p. 107-129 ; 29 S. Pricoco, « Per una storia dell'oracolo nella tarda antichità. Apollo Clario e Didimeo in Lattanzio » , Augustinianum 29 , 1989 , p . 351-374 ; 30 Id. , « Tre frammenti oracolari di Apollo : ( Lact . Inst. 1. 7.9-10 ), II » , dans Polyanthema. Studi di letteratura cristiana antica offerti a Salvatore Costanza, coll . « Studi tardoantichi » 8, Messina 1991 , t. II , p. 337-353 ; 31 G. Fatouros, « Eỉnate to Baouiñe» , Hermes 124 , 1996 , p . 367-374 ; 32 L. Andersen , « An oracular creed » , dans Bettina Amden et alii, Noctes

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Atticae : 34 articles on Graeco -Roman antiquity and its Nachleben . Studies presented to Jørgen Mejer on his sixtieth birthday, March 18, 2002, Copenhagen 2002 , p. 11-23 . Plus tard, à la fin du Ve siècle , un auteur chrétien inconnu rassembla, pour défendre la vérité du christianisme, une collection d'oracles qu'il intitula Théo sophie. On a retrouvé dans des inscriptions plusieurs de ces oracles conservés dans un manuscrit de Tübingen , ce qui prouve que les réponses avaient bien été obtenues à la suite d'une véritable consultation. La Théosophie de Tübingen fut nommée ainsi d'après le Tubingensis Mb 27 , du XVIe siècle , découvert en 1881 par Karl J. Neumann ( voir 33 K. J. Neumann , « Über eine den Brief an Diognet enthaltende Tübinger Handschrift Pseudo Justin's » , ZKG 4, 1881 , p. 284-287 ), et dont la première édition fut donnée par 34 Karl Buresch, Klaros. Untersuchungen zum Orakelwesen des späteren Altertums, nebst einem Anhang, das Anecdoton Xpnouoi tūv 'EXNvixőv OE @ v enthalten, Leipzig 1889 , réimpr. Aalen 1973. Ce document et ceux qui l'entou rent sont restés longtemps dans l'ombre parce que presque tous les exemplaires de l'édition fondamentale de 35 Hartmut Erbse ( édit . ) , Fragmente griechischer Theosophien herausgegeben und quellenkritisch untersucht, coll . « Hamburger Arbeiten zur Altertumswissenschaft » 4 , Hamburg 1941 , ont été détruits en 1943 dans l'incendie de la maison d'édition . La situation est différente depuis la réédition de ce recueil en 1991 par 36 H. Erbse (édit . ) , Theosophorum Graeco rum Fragmenta iterum recensuit H.E. , coll . BT, Stuttgart /Leipzig 1991 , qui a collationné cette fois un nouveau témoin de la collection d'oracles sibyllins trouvée par 37 K. Mras, « Eine neuentdeckte Sibyllen -Theosophie » , WS 18 , 1906 , p. 43-83 . Cette collection des Oracles sibyllins a permis à Mras de prouver qu'elle donne une partie originale de la Théosophie dont le manuscrit de Tübingen n'est qu'un épitomé tardif. 38 P.F. Beatrice , Anonymi Monophysitae Theosophia. An attempt at reconstruction , coll . « Supplements to Vigiliae Christianae » 56, Leiden 2001, a récemment entrepris de reconstruire la Théo sophie originelle , en rassemblant dans l'édition d'une æuvre unique les fragments épars juxtaposés par Erbse , et d'autre part de mettre en valeur le caractère chrétien de ce texte et sa coloration doctrinale . La reconstruction que propose P. F. Beatrice est guidée par le résumé qui précède dans le manuscrit de Tübingen la version de la Théosophie fournie par ce document. L'auteur du résumé, probablement le compilateur de cette version de la Théosophie , nous apprend que celle -ci comportait quatre livres et qu'elle venait à la suite de sept livres “ Sur la foi droite ” , comme un appendice justi ficatif. Le premier livre ( le huitième de l'ensemble) était une collection d'oracles de dieux grecs ; les suivants traitaient des théologies des sages grecs et égyptiens ainsi que des oracles des Sibylles ; le quatrième ( le onzième ) contenait des extraits du livre d'Hystaspe et s'achevait par une chronique universelle “ très concise " , depuis Adam jusqu'à l'empereur Zénon . Dans le recueil qu'il cherche à reconstituer, P.F. Beatrice cherche à faire correspondre un contenu à ce schéma, à l'aide des matériaux qu'il juge pertinents. Puis , ayant réuni tout un faisceau d'indices , il attribue la fabrication de cette collection à Sévère d’Antio che ; mais on peut légitimement douter de la validité de cette attribution. On lira

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à propos de ce travail le compte rendu de 39 F. Alpi et A. Le Boulluec , Apocrypha 15 , 2004, p. 293-306 . Dans le cadre du violent débat qui opposa païens et chrétiens, les Pères de l'Église ont tenté de montrer que les dogmes du christianisme étaient en parfaite harmonie avec la philosophie grecque. Dans ce contexte, poursuivant la démar che exégétique inaugurée par Philon , les alexandrins Clément ( C 154 ) et Origène ( 2 + 0 42) ont notamment essayé de montrer que les révélations sacrées du christianisme, transmises par les divins logia de la Bible , étaient en accord avec la meilleure tradition philosophique grecque. A plusieurs reprises, Clément et Origène enjoignent à leur lecteur de chercher la vérité (alètheia ) ou la sagesse ( sophia ) dans les logia, c'est - à - dire dans les prophéties bibliques , donc dans les Écritures. On peut dès lors supposer que le titre de la Philosophie tirée des oracles a voulu répondre aux brillantes démonstrations des ennemis de Porphyre , qui entendaient tirer une vérité ou une sagesse des logia de la Bible. Cet écrit, où des citations de réponses oraculaires d'Apollon , de Sérapis et d'Hécate notamment étaient invoquées comme preuves, présente le plan suivant : le premier livre traite des dieux , le second livre, des démons , le troisième, des héros. Dans cette hypothèse, l'ouvrage de Porphyre aurait voulu démontrer que c'était à partir des logia du paganisme que l'on pouvait espérer, à condition d'en décoder le sens , tirer une philosophie divine . En cela , Porphyre se serait inscrit dans la polémique païenne autour des révélations bibliques , déjà thématisée avant lui par Celse ( apud Origène, Contre Celse VII 2-18 , VIII 45-47 ), qui avait montré que les prophéties auxquelles les chrétiens accordaient tant de crédit étaient en tout points inférieures aux oracles païens. Première attaque portée contre les chrétiens, la Philosophie tirée des oracles aurait été reprise et améliorée dans son ouvrage Contre les chrétiens qu'il aurait rédigé par la suite en Sicile . Réagissant contre ce courant d'interprétation , P.F. Beatrice, qui oriente l'atten tion vers l'attribution à Sévère d'Antioche , et qui met en situation historique cette Théosophie en la ramenant à son sol natif, au lieu d'en faire seulement un document pour la connaissance du paganisme grec tardif, pense que Porphyre n'aurait rédigé qu'un seul ouvrage de polémique anti -chrétienne, la Philosophie tirée des oracles , auquel appartiendraient la plupart des fragments rapportés depuis A. von Harnack , au Contre les chrétiens, à l'exception des fragments de l'adversaire anonyme de Macarios de Magnésie , dont il rejette l'attribution à Porphyre. 40 R. Goulet, « Hypothèses récentes sur le traité de Porphyre Contre les Chrétiens» , dans M. Narcy et É . Rebillard (édit . ) , Hellénisme et christia nisme, Villeneuve d'Ascq 2004 , p . 61-109 , a réagi contre cette hypothèse inter prétative en faisant remarquer que cet ouvrage de Porphyre n'était pas explicite ment dirigé contre les chrétiens, même si on note une orientation anti -chrétienne dans certains des oracles de la collection . Voir également les critiques exprimées par 41 R. Goulet , Études sur les Vies de philosophes, p. 395-397 . 42 Aude Busine , « Des logia pour Philosophie » , PhilosAnt 4, 2004, p . 153-168 , partage avec prudence cet avis . Voir également 43 Ead ., « Hermès Trismégiste , Moïse et

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ORATA (C. SERGIUS -)

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Apollonius de Tyane dans un oracle d'Apollon » [dans Théosophie I 40) , Apocrypha 13 , 2002, p. 227-243. Que la Philosophie tirée des Oracles ait consiste en une attaque directe diri gée contre les chrétiens, ou qu'elle ait été exclusivement destinée aux philo sophes païens en quête de salut, l'ouvrage de Porphyre comportait une critique à l'encontre de la religion chrétienne. On retrouve notamment cette critique dans les discussions relatives au Christ et aux chrétiens. En effet, Eusébe et Augustin rapportent que Porphyre fit usage de prophéties d'Apollon et d'Hécate pour affirmer la mortalité et la souffrance du Christ, voulant par là montrer que les chrétiens, tombant dans l'erreur, vénéraient le Christ comme s'il était un dieu, et non un homme sage et pieux . Sur ces oracles, voir 1 Francine Culdaut, « Un oracle d'Hécate dans la Cité de Dieu de saint Augustin : "Les dieux ont proclamé que le Christ fut un homme très pieux ” (XIX , 23 , 2 ) » , REAug 38 , 1992 , p. 271 289. Mais l'ampleur et la portée de la polémique contre les chrétiens restent très limitées. On en voudra pour preuve le fait que, lorsqu'ils citent ces passages, les auteurs chrétiens ne s'intéressaient pas aux arguments de Porphyre contre le christianisme, mais s'y référaient dans le but de démontrer la perversité et la nature démonique des soi-disant dieux de leurs adversaires païens . À l'inverse , c'est peut-être cette puissante entreprise d'apologétique païenne qui encouragea les auteurs chrétiens, comme Lactance et l'auteur de la Théosophie, à prendre en compte les révélations des dieux païens, tant critiqués par leurs prédécesseurs, dans l'intention de montrer que ces textes sacrés étaient en accord avec les principaux dogmes constitutifs du christianisme. Il convient par ailleurs de souligner que 44 H. D. Saffrey, « Connaissance et inconnais sance de Dieu : Porphyre et la Théosophie de Tübingen » , dans Gonimos. Neoplatonic and Byzantine Studies presented to L.G. Westerink, Buffalo (N. Y. ) 1988 , p . 3-20, repris dans Recherches sur le néoplatonisme après Plotin , coll . « Histoire des doctrines de l'Antiquité classique » 14, Paris 1990 , p. 130 , a trouvé un parallèle étonnant entre un passage de la Théosophie de Tübingen (34, 108-109 Beatrice ) évoquant Amélius ( A 136) et Porphyre et le Commentaire sur le Parménide ( IX 1 - X 35 ) attribué par P. Hadot à Porphyre. Sur les oracles dans le De mysteriis de Jamblique, voir 45 A. Busine, « La consultation de l'oracle d'Apollon dans le discours de Jamblique » , Kernos 15 , 2002, p. 187-198 LUC BRISSON .

36 ORATA (C. SERGIUS - ) RE 33

1a

Homme d'affaires romain . On voit en lui un membre de la gens Sergia (cf. 1 F. Münzer, art. « Sergius >> 33 , RE II A 2 , 1923 , col . 1713-1714 , et 2 Ö. Wikander, « Senators and equites . 6, Caius Sergius Orata and the invention of the hypocaust » , ORom 20 , 1996, p. 177-182) et donc un proche parent de Catilina. Selon 3 C. Castner, « Difficulties in identifying Roman Epicureans : Orata in Cicero De Fin. 2. 22. 70 » , CJ, 81 , 1985 , p. 138-147 , il serait un des deux consuls de l'année 104. Il fut particulièrement actif en Campanie à la fin des années 90 avant la Guerre Sociale (Pline , H. N. , IX 169) et fut défendu lors C 198 ) , le grand orateur de d'un procès contre M. Gratidianus par L. Crassus ( l'époque (Cicéron, De Or . I 178 et Off. III 67) . On lui attribue plusieurs inventions toutes liées au développement du luxe à Rome et en particulier à la

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ORATA (C. SERGIUS -)

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pisciculture : son cognomen même viendrait de son goût pour certains poissons appelés auratae , nos dorades (Macrobe, Sat. III 15 , 2-3 , et 4 M. Kajava, « “ Murenae ” , oysters and gilt - heads : fish for name , table and show in ancient Rome » , ACD , 34-35 , 1998-1999 , p . 253-268 ) . Il aurait en outre inventé le système des pensiles balinae ( Cicéron , Hort. fr. 76 ) , mais on ne sait pas avec certitude ce que ce terme recouvre : des bains chauds avec un système d'hypocauste qu'Orata aurait alors non pas inventé mais perfectionné ou bien des piscines pour les poissons élevés par les membres de l'élite romaine ( cf. 5 G. G. Fagan , « Sergius Orata : Inventor of the Hypocaust ? » , Phoenix 50 , 1996 , p . 56-66 ) . Orata a parfois été considéré comme un épicurien à cause d'un passage du de

Finibus (Fin . II XXII , 70 ) dans lequel Cicéron cite son nom avec celui de Thorius Balbus ( B 7a ) ; mais Castner 3 ( et 6 Ead. , Prosopography, p. 105 109 ) a bien montré qu'il n'en est rien . D'ailleurs , selon Pline ( H. N. , IX 168 ), ce ne fut pas par goût du plaisir mais par appétit du gain qu'Orata inventa la pisciculture. Cicéron ( Fin . II 70 ) ne dit pas qu'Orata fut épicurien mais qu'il représente un modèle de vie qui devrait recueillir l'assentiment des épicuriens , comme le montre le passage en question : « Mais , diras -tu , Épicure nie (c'est en effet cette pensée qui est votre flambeau ) qu'une vie qui n'est pas morale puisse être une vie agréable. Comme si je me souciais de savoir ce qu'il affirme ou ce qu'il nie ! Ce que je cherche , c'est ce que doit dire , pour être conséquent avec lui - même , un homme qui met le souverain bien dans le plaisir. Quelle preuve m'apportes - tu que Thorius , Postumius et leur maître à tous , Orata, n'ont pas vécu très agréablement ? Du reste , Épicure lui - même déclare, comme je l'ai rappelé plus haut , que la vie des débauchés n'a rien de répréhensible, à moins qu'ils ne soient des fous, c'est - à -dire à moins qu'ils n'aient des passions ou des craintes. » YASMINA BENFERHAT. 37 ORESTADAS DE MÉTAPONTE Pythagoricien dont le nom figure dans le catalogue de Jamblique , V. pyth . 36, 267 , p . 144 , 1 Deubner, et connu également par une notice de Diogène Laërce dans la “ Vie " de Xénophane ( en IX 20 ), provenant du livre I des Mémorables de Favorinus d'Arles ( > * F 10 ] (FHG III 577 = fr. 8 Mensching = fr. 38 Barigazzi). Dans les deux cas , il est évoqué en compagnie d'un certain Parm (en ) iscos. D'après le témoignage de Favorinus , Xénophane de Colophon aurait été vendu comme esclave ( ntenpãodai) par les pythagoriciens Orestadas et Parmé niscos . « Sans doute parce qu'il lui paraissait impensable que deux philosophes aient pu vendre un troisième » , 1 H. Diels ( DK 20 A 2 = 21 A 1 , t . I , p. 114 , 10 11 ) a supposé dans ce passage un saut du même au même et essayé de le com bler partiellement par quelques mots faisant dire au texte que finalement Xéno phane avait été vendu comme esclave , puis racheté et libéré par Parméniscos et Orestadas ( Diels proposait en effet de lire πεπράσθαι υπό < * και λελύσθαι υπό > των Πυθαγορικών Παρμεν σκου και Ορεστάδου ; cf., dans le méme sens , la solution plus économique adoptée par le dernier éditeur de Diogène

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ORIBASE

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Laërce , M. Marcovich : nettpãodai < xai Renúodai > ÚTÒ ... ) : ainsi « l'honneur des Pythagoriciens restait sauf » (2 J. Brunschwig, dans M.-O. Goulet-Cazé ( dir. ) , Diogène Laërce. Vies et doctrines des philosophes illustres, Paris 1999, p. 1063 n . 1 ) . Mais , même pour un auteur comme von Fritz, qui trouvait la leçon des mss « sowohl dem Zusammenhang nach unsinnig als mit dem Leben des Xenophanes unvereinbar » ( 3 K. von Fritz , art. « Orestadas » , RE XVIII 1 , 1939, col . 960 ), cette conjecture semble « nicht glücklich » . De même tenpãodal = Tenpñolai « ist aus sachlichen wie sprachlichen Gründen äußerst unwahr scheinlich » . D'autres philologues , pensant à une liaison par association d'idées , remplacent le tempão al des mss par terápeal ( « enseveli » – conjecture non signalée par Marcovich dans son apparat critique ), ce qui semble plus plausible ( « denkbar » , selon von Fritz, « da vorher vom Begraben die Rede war und Diog . Laert. gerade gegen Ende eines ß os häufig nach äußeren Assoziationen verfährt » ) . La question reste à notre avis ouverte . De telles anecdotes , comme d'autres illustrant les rapports de Parménide avec la secte , ne font qu'effleurer, en le transposant sur le plan biographique , le problème assez compliqué de la relation – ambiguë , et peut -être même tendue entre pythagorisme et éléatisme . CONSTANTINOS MACRIS . 38 ORGIAS « Comme on lui demandait : “ Grâce à quel régime de vie as - tu atteint une vieillesse aussi avancée ?” , il dit : “ En ne mangeant et en ne faisant jamais rien en vue du plaisir " » . Voir Sibylle Ihm , Ps .-Maximus Confessor. Erste kritische Edition einer Redaktion des sacro -profanen Florilegiums “Loci communes ", coll . « Palingenesia » 73 , Stuttgart 2001, chap. 70, 34/48 , p . 1034 , qui conserve le nom Orgias, que l'on a généralement corrigé en Gorgias ( > ^ G 27 ) . RICHARD GOULET.

39 ORIBASE PLRE II : 58

DM V

Une lettre d'Isidore de Péluse (Epist. V 437 = 1822 ) est adressée à un Oribase ; Isidore reconnaît en lui un médecin expérimenté et un sage et l'engage à acquérir la santé de l'âme qui lui manque. Cette invitation pourrait s'adresser au médecin de Pergame ( 2 + 0 40 ), resté païen , mais , ne serait-ce que pour des raisons chronologiques, on ne peut assurer qu'il s'agisse ici de ce personnage . Oribase de Pergame eut quatre fils, dont Eustathius qui fut également médecin ; il pourrait s'agir d'un de ses descendants . Cf. B. Baldwin , « Some Addenda to the Prosopography of the Later Roman Empire » , Historia 31 , 1982 , p . 97-111 , notamment p. 101 , repris dans Studies on Late Roman and Byzantine History, Literature and Language, coll . « London Studies in Classical Philology » 12 , Amsterdam 1984 , p. 67 ; P. Évieux , Isidore de Péluse, Paris 1995 , p. 147-148. PIERRE MARAVAL.

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ORIBASE DE PERGAME

40 ORIBASE DE PERGAME RESuppl. VII

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Oribase ( ca 325 -ca 395 ) , médecin et ami de l'empereur Julien dit l'Apostat ( 361-363 ) . Études d'orientation : 1 H.O. Schröder, art. « Oreibasios » , RESuppl. VII , 1940 , col . 797-812 ; 2 R. De Lucia , « Doxographical hints in Oribasius' Collectiones Medicae I » , dans Ph.J. van der Eijk ( édit . ) , Ancient Histories of Medicine. Essays in Medical Doxography and Historiography in Classical Antiquity, Leiden 1999 , p. 473-489 ; 3 A. Guardasole, « Nuovi escertidi Oriba sio » , dans U. Criscuolo (édit . ) , Da Costantino a Teodosio il Grande. Cultura, società , diritto . Atti del Convegno internazionale (Napoli, 26-28 aprile 2001), Napoli 2003, p . 177-196 ; 4 R.J. Penella, Greek philosophers and sophists in the Fourth Century A.D. Studies in Eunapius of Sardis, coll . « ARCA » 28 , Leeds 1990, p. 112-114 ; 5 B. Baldwin , « The Career of Oribasius » , AClass 18 , 1975 , p . 85-97 , repris dans Studies on Late Roman and Byzantine History, Literature and Language, coll . « London Studies in Classical Philology » 12 , Amsterdam 1984 , p . 157-169 ( comprend beaucoup d'hypothèses construites sur les silences d'Eunape ). Biographie . Eunape de Sardes (

E 121 ) , qui fut le dédicataire d'un ouvrage

médical d'Oribase , rappelle dans la courte biographie qu'il lui a consacrée (Vies des philosophes et des sophistes XXI ) , que son origine pergaméenne était pour ce médecin un gage de renom , tout comme, pour un orateur, le fait d'être né à Athènes ( XXI 1 , 1 , p . 87 , 16-21 Giangrande ). Eunape devait penser non seule ment à la célébrité de Galien , mais aussi à celle du sanctuaire d'Asclépios dans cette cité . Tant du côté maternel que paternel, Oribase était de bonne naissance et il reçut une formation très poussée . Il étudia, en compagnie de Magnus de Nisibe , auprès du médecin Zénon de Chypre. Il soigna Chrysanthe ( ** C 116) à Sardes , mais le traitement appliqué n'empêcha pas le philosophe, âgé de 80 ans, de mourir au bout de quatre jours ( XXIII 6, 9 , p . 101 , 9-16) . Baldwin 5, p. 88 = 160, présente également lonicus de Sardes ( ~ 121 ) comme condisciple d'Oribase chez Zénon et lui attribue une grande influence sur Oribase. La chose est possible, mais Eunape ne dit rien de tel . Ayant rapidement obtenu une réputation médicale de premier plan , il fut choisi par Julien ( > * I 46 ) , devenu César, comme médecin personnel et , selon Eunape, manifesta la supériorité de ses vertus en faisant de Julien un empereur ( Baoinéa tov 'lov lavòv NÉDELEE, XXI 1 , 4 , p . 88 , 6 ) . Oribase aurait joué en effet, avec Évhémère de Libye , un rôle dans l'usurpation de Julien en Gaule (VII 3 , 8 , p. 47 , 2-3 ) . Pour cet épisode , Eunape renvoie au récit qu'il avait donné des événements dans son Histoire . C'est d'ailleurs à l'instigation d'Oribase qui lui fournit un hypomnèma à cette intention , qu'Eunape entreprit de rédiger son Histoire ( fr. 8 ) . Il n'est pas sûr que l'écrit corresponde au ſlepi Baoule aç ( « Sur la royauté » ) que la Souda , O 543 , t. III , p . 555 , 21-24 Adler, attribue à Oribase, avec divers écrits de médecine et un ſepi na wv (« Sur les passions » ?) dont le caractère médical ou philosophique ne peut être déterminé. L'intérêt du médecin pour la philosophie est signalé par Eunape qui rapporte qu ' « il est possible pour tout homme qui est un philosophe authentique de rencontrer Oribase » ( XXI 13).

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Une longue lettre de Julien à Oribase , écrite alors que le jeune César com battait en Gaule , est conservée (Epist. 14 Bidez) . Julien fait allusion à lui au moyen d'une périphrase dans sa Lettre aux Athéniens, 77 c . Selon la Souda, ibid ., et d'autres sources, Oribase aurait été nommé questeur de Constantinople, sans doute sous Julien . Selon Jean Lydus, De mens. IV 118 et Philostorge , Hist. eccl. VII 15 , Oribase aurait été présent à la mort de Julien. Les successeurs chrétiens de Julien ( Valentinien et Valens ) prirent contre Oribase des mesures d'expropriation et envisagèrent même de le faire mourir, décision qu'ils remplacèrent par un exil chez les barbares ( XXI 1 , 5 - 2 , 1 ; p. 88 ; 7-17 ) . Ce banissement - que Baldwin 5 , p .95 = 167 , suggère d'expliquer par une possible conspiration du médecin à l'usurpation de Procope en 365-366 – fut pour lui l'occasion d'acquérir une grande renommée à la cour de ces rois barbares où il fut vénéré comme un dieu ( XXI 2, 2-3 ; p. 88 , 17-89 , 2 ) . Autorisé à revenir dans l'Empire en possession de ses seules vertus, il épousa une femme riche de haute lignée qui lui donna quatre enfants ( XXI 2 , 5 , p . 89 , 8-9 ) , dont Eustathe, le dédicataire d'un de ses traités médicaux , et obtint même en justice la restitution des biens qui avaient été confisqués ( XXI 2 , 6, p. 89, 11-14) . Selon Baldwin 5, p. 86 = 158 , cet Eustathe serait un archiatrus destinataire de deux lettres de Basile de Césarée ( Epist. 151 et 189) et aurait été chrétien , contrairement à son père. Voir la PLRE . Tout comme ses enfants , Oribase était encore vivant lors de la composition des Vies des philosophes et des sophistes, sans doute au tout début du Ve siècle ( XXI 2 , 5-6 , p. 89 , 9-11 ) . Peut-être vivait - il à l'époque à Sardes, où résidait Chrysanthe qu'il eut à soigner. Philostorge, Hist. eccl. VII 15 , le rattache en tout cas à Sardes (ó éx Eápoewv). Une épigramme de l'Anthologie grecque XVI 274 ( voir R. Aubreton et F. Buffière, Anthologie grecque . Deuxième partie: Anthologie de Planude, CUF, Paris 1980 , t . XIII ) , ornait peut- être un portrait ou une statue du médecin : « C'est le grand médecin de l'empereur Julien . Il est digne de révérence, le divin Oribase . Il eut, comme l'abeille , la même sage idée : butiner ça et là les fleurs des médecins, ses précédesseurs » ( trad . Aubreton et Buffière, p . 183 ) . Le commentaire que donnent ces deux éditeurs (p. 183 n . 4, en page 297 ) abonde en datations dont on aimerait connaître l'origine : « Oribase de Pergame fut l'ami , le biblio thécaire ( ?) et le médecin de Julien qui l'emmena en Gaule en 355. ( ... ) Julien devenu empereur, il fut questeur de Constantinople ( 361 ) . Exilé par Valentinien ( 363 ), il rentra en grâce avec Arcadius et mourut en 403. » Un autre poème (Anth . Pal. IX 199 ) semble confirmer les propos d'Eunape sur la longévité souvent menacée d'Oribase : « Ce livre est du divin Oribase ; son art immortel le fit craindre de la Moire, qui souvent prolongea le fil de sa vie » ( trad. CUF, t . VII , p . 79). Éditions: 6 C.F. de Matthaei, XXI veterum et clarorum medicorum Grae corum varia opuscula , Moscou 1808 ( cette première édition grecque est toute fois loin d'être complète, puisque seuls ont été retenus les passages des livres I XV des Collectiones medicae qui n'étaient tirés ni de Galien ni de Dioscoride ; 7 V.C. Bussemaker et C. Daremberg , 6 volumes , Paris 1851-1876 (première édition complète d'Oribase à l'exception toutefois des livres XI - XIII presque

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entièrement extraits de Dioscoride et qui n'ont pas retenu l'attention des deux éditeurs ) ; 8 J. Raeder ( édit . ) , Oribasii Synopsis ad Eustathium . Libri ad Eunapium , CMG VI 3 , Leipzig/Berlin 1926 ; 9 J. Raeder (édit . ) , Oribasii Collectionum Medicarum Reliquiae, vol . I : Libri I - VIII, CMG VI 1 , 1 , Leipzig Berlin 1928 ; vol . II : Libri IX -XVI, CMG VI 1 , 2 , 1929 ; vol . III : Libri XXIV . XXV . XLIII-XLVIII, CMG VI 2 , 1 , 1931 ; vol . IV : Libri XLIX - L . Libri incerti. Eclogae medicamentorum . Index, CMG VI 2 , 2 , 1933 . Oribase est le premier grand encyclopédiste médical de la fin de l'antiquité . Après des études à Alexandrie , il se consacre à la médecine et à la rédaction de son cuvre dont la plus grande partie a été composée à la demande même de Julien , lui-même passionné par la matière médicale. En particulier, dans l'esprit de Julien, les ouvrages composés par Oribase, en illustrant la supériorité de la médecine grecque, devaient faire figure de monuments élevés à la gloire de l'hellénisme , et donc du paganisme ( cf. De Lucia 2 , p . 474) . Son cuvre. Le principal témoignage sur l'æuvre d'Oribase est celui de Photius dans sa Bibliothèque ( codd. 216-219 , 173 b - 176 b, éd . R. Henry , CUF, tome III , Paris 1962 , p . 131-139) . Outre sept traités pour lesquels il ne fournit aucun renseignement et qu'il est aujourd'hui impossible d'identifier, Photius mentionne quatre autres traités composés par Oribase qu'il décrit à l'intérieur de quatre notices distinctes : Un compendium des écrits de Galien (PG 3 ] composé par Oribase à la demande de Julien . De cet ouvrage aujourd'hui perdu, il ne reste plus que le prologue cité par Photius. Les Collectiones medicae ( = CM ), à l'origine en 70 livres, mais dont seuls les livres 1-16 ; 24-25 ; 43-50 sont aujourd'hui conservés . Oribase , toujours à la demande de Julien , y avait réuni des extraits des médecins les plus célèbres de l'antiquité . Son but était de rassembler les connaissances appartenant à toutes les branches de la médecine : diététique , pronostic, diagnostic , physiologie , anato mie , thérapie , chirurgie , hygiène . Bien qu'Oribase ne précise nulle part à quel type de public il destinait ses Collectiones medicae , l'ampleur même de l'ou vrage suppose un public averti et déjà très spécialisé. La Synopsis ad Eusthatium , en 9 livres, se présente comme un abrégé de l'ouvrage précédent. Oribase l'a composé pour son propre fils, Eustathe. Il y a rassemblé différentes recettes de remèdes susceptibles d'être aisément réali sables , aussi bien au cours d'un voyage qu'en cas d'extrême urgence . L'ouvrage s'adresse donc non seulement à son dédicataire, mais aussi à tous ceux qui ont une connaissance non pas superficielle , mais déjà approfondie de la science médicale pour s'y être exercés à travers la lecture préalable des Collectiones medicae. Les Libri ad Eunapium , en 4 livres, sont un ouvrage destiné à tout homme cultivé et désireux d'acquérir une culture médicale susceptible de lui être utile pour son usage personnel au cours d'un voyage ou en toute occasion où il se trouverait dépourvu de médecin .

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Les Eclogae medicamentorum , liste de recettes de médicaments , ne sont pas l'æuvre d'Oribase. Raeder 9 considère (vol . IV , praef. p . VIII) qu'elles ont été composées par un médecin postérieur à partir de passages tirés des CM, notamment du livre 44 ( sur les Eclogae, voir 10 É . Littré, Revue de philologie 2 , 1847 , p. 166 sqq . ) .

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La Synopsis ad Eusthatium et les Libri ad Eunapium , dont le but comme l'utilité sont essentiellement pratiques, sont en réalité des abrégés des Collectio nes medicae . Ces deux courts traités peuvent donc aujourd'hui servir, dans les cas les plus favorables, à combler ceux des livres des Collectiones medicae qui ne nous sont pas parvenus . Dans le prologue de cet imposant ouvrage , Oribase expose clairement le but qu'il poursuit: rechercher et rassembler (åva [nteīv xai ouvayayelv ) les principaux écrits des meilleurs médecins . Il en est un en particulier qui les surpasse tous pour avoir fait usage de la meilleure méthode et des définitions les plus exactes qui soient, et pour avoir suivi les principes et les opinions d'Hippocrate , c'est Galien de Pergame ( Coll. med . prol. 3 , vol . I , p . 4 , 11-18 Raeder) . Oribase puisera en effet la plus grande partie de ses extraits dans l'æuvre immense du célèbre médecin . Mais il nous a aussi conservé des passa ges de plusieurs représentants de l'école pneumatique ou empirique , comme

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Lycos ( L 88 ? ) dont les rares extraits qui nous sont parvenus ne nous sont connus que par le témoignage d'Oribase . À côté de Galien dont l'æuvre est la plus fréquemment utilisée , on citera Dioscoride dont la Materia medica a inspiré les livres 11 à 13 des Collectiones medicae et naturellement Hippocrate ( H 152 ) . En dehors de ces trois grands noms, les principaux médecins cités par Oribase dans les trois traités qui nous sont parvenus ( Collectiones medicae , Synopsis ad Eusthatium et Libri ad Eunapium ) sont les médecins Antyllus ( 108 extraits ), Rufus d'Éphèse ( 67 ) , Héliodore ( 39 ) , Hérodote ( 32 ) , Zopyrus ( 19 ) , Soranos ( 18 ) , Archigène ( 16 ) , Dieuchès ( 11 ) , Dioclès ( 10 ) > D 113 ] , Philagrios ( 9 ) , Hérophile ( 3 ) , Érasistrate ( 3 ) , Héraclide de Tarente ( 1 ) ( P + H 58 ) , Asclépiade de Bithynie ( 1 ) [ " A 450 ). Voir sur ce point le relevé effectué par De Lucia 2 , p . 484 , qui ajoute quelques références absentes de l'index de l'édition Raeder . En général , sur la technique de citation adoptée par Oribase , sur la façon dont il sélectionne son matériel et opère ses choix , voir l'étude de De Lucia . La philosophie d'Oribase. Oribase est un médecin avant d'être un philo sophe . Il témoigne cependant dans son cuvre d'une certaine attitude philoso phique apparemment inspirée par le néoplatonisme ambiant à son époque. Celle ci se laisse en particulier saisir dans le prologue de ses Collectiones medicae où l'on a cru discerner l'influence de la théorie platonicienne de la réminiscence à travers la théorie oribasienne de l'avaçńmouc ( la recherche) et de la ouvayoyń ( la collecte ) des fragments des anciens médecins. Mais sa (ńmouc obéit égale ment aux plus purs principes aristotéliciens, s'efforçant d'apporter des réponses aux quatre grands types de questions définis par le Stagirite (Analytica poste riora II 1 , 89 b 24 sq . ) : la chose elle -même, sa cause , si la chose existe réelle ment , ce qu'elle est . Enfin , l'entreprise littéraire d'Oribase apparaît comme l'expression d'une croyance bien ancrée dans l'idée de progrès. Si pour lui , il ne fait pas de doute que la médecine a connu son acmè au cours du lie siècle de

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notre ère, il est en même temps intimement persuadé que ce point d'achèvement n'a pu être atteint que par la prise en compte des découvertes successives attri buables à des générations de médecins . Dans cette perspective, le devenir de la médecine s'inscrit à l'intérieur d'un processus de développement ininterrompu qui relie le passé au présent et éventuellement au futur. Le fait est, cependant, que l'on jauge habituellement l'æuvre d'Oribase, non pas tant à l'aune de sa valeur philosophique , qu'à celle des nombreux fragments de traités médicaux pour lesquels elle est bien souvent notre seule source . La postérité. L'ouvrage d'Oribase a à son tour inspiré d'autres encyclo pédistes et commentateurs comme Aétius d'Amide (viº siècle ) , auteur d'une compilation en seize livres rédigée sous le règne de Justinien et pour laquelle Oribase représente l'une des sources principales, ou encore Paul d'Égine ( VII siècle ) . Les livres les plus brefs furent traduits en latin et l'æuvre d'Oribase put ainsi avoir une certaine influence en Occident ( 11 H. Morland , « Die lateinischen Oribasiusübersetzungen » , SO 5 , 1932 , a situé à Ravenne la production des premières traductions latines d'Oribase ) . On a également conservé de la Synopsis et des Euporista ( titre latin traditionnel des Libri ad Eunapium ) deux traductions latines anciennes qui pourraient n'être que « deux états diversement remaniés d'une seule et même traduction de la fin du ve ou du début du Viº siècle » ( voir Bibliographie des textes médicaux latins, Publications de l'Univer sité de Saint- Étienne , 1987 , n ° 433-440 ). VÉRONIQUE BOUDON- MILLOT et RICHARD GOULET. 41 ORIGÈNE LE PLATONICIEN RE 4 PLREI:

DM III

Philosophe platonicien , condisciple de Plotin dans l'école d'Ammonios dit Saccas ( >* A 140 ). Plotin qui étudia chez Ammonios à Alexandrie de 232 à 242, fit avec deux condisciples , Érennius ( + E 53 ) et Origène , un pacte consistant à ne révéler aucune des doctrines développées par Ammonius dans ses cours (Porphyre, Vita Plotini 3 , 24-26 ) . Sur la nature de ce pacte , voir 1 M.-O. Goulet-Cazé , « L'arrière -plan scolaire de la Vie de Plotin » , PVP I , 1983, p . 257-260 (« Plotin , professeur de philosophie » ) ; 2 Denis O'Brien, « Plotin et le væu du silence » , PVP II, 1992 419-459 , surtout p. 440 . Ce pacte fut rompu d'abord par Érennius , ensuite par Origène qui cependant n'écrivit aucun ouvrage , si ce n'est un traité Sur les démons ( ſlepi tūv dayuó vwv ) et , sous le règne de Galien ( 254-268 ) , un ouvrage au titre mystérieux: Que le roi seul est créateur ( oti uóvoç noining Ó Baoileuc ), enfin par Plotin lui même qui , au moins dans un premier temps , « tirait ses cours de l'enseignement d'Ammonius » , mais n'écrivait rien (ibid., 3 , 29-35 ) , puis commença, en la première année du règne de Galien (254 ) à écrire des traités ( ibid. , 4, 9-11 ). Après s'être installé à Rome en la première année du règne de Philippe l'Arabe ( 244 ), Plotin y enseigna jusqu'à sa mort en la deuxième année de Claude en 270. A un moment indéterminé de cette période , mais plutôt au début et sans doute avant l'arrivée dans l'école de Porphyre en la dixième année du règne de Galien

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( 263 ) , Origène se présenta au cours de Plotin qui « examinait dans l'esprit d'Ammonius les questions qui se présentaient » et provoqua chez lui une certaine gêne à l'idée d'exposer des doctrines déjà connues par son ancien condisciple ( ibid ., 14 , 20-25 ) . C'est peut-être à cause de ce passage qu'Eunape présente comme des condisciples de Porphyre chez Plotin « Origène , Amérius ( = Amélius , cf. Vita Plotini 7 , 3-5 pour le jeu de mot) et Aquilinus (le Gnostique de 16, 3 ) » (Vies de philosophes et de sophistes IV 2 , 1 , p . 9, 4-5 Giangrande ). Plus loin , Porphyre cite l'introduction du Tepì térovç (Sur la fin ) de Longin , écrit sans doute au début du séjour de Porphyre chez Plotin à Rome ( 263-268 ) , dans laquelle le philosophe athénien déclarait avoir eu pour maîtres pendant la plus grande partie de ses études les platoniciens Ammonios et Origène ( Vita Plotini 20 , 36-38 ) . Longin les range dans un groupe de philosophes qui se sont entièrement consacrés à l'enseignement et , sauf des écrits de circonstance, n'ont pas laissé d'æuvre philosophique écrite ( ibid. , 20 , 40-47 ) . Il cite comme exem ple le traité d'Origène Sur les démons ( ibid. , 20 , 41 ) déjà mentionné par Porphyre. Pour l'établissement de ces diverses dates , voir 3 R. Goulet , « Le système chronologique de la Vie de Plotin » ( 1982 ), repris dans 4 Id . , Études sur les Vies de philosophes, p. 153-190. Voir également 5 R. Goulet , « Sur la datation d'Origène le Platonicien » , dans L. Brisson et alii, Porphyre, La Vie de Plotin . Tome II : Études d'introduction, texte grec et traduction française, commentaire, notes complémentaires, bibliographie , coll . « Histoire des doctrines de l'antiquité classique » 16, Paris 1992 , p . 461-463 . Les deux titres Sur les démons et Que le roi seul est poète ont fait se multiplier les hypothèses. On a pensé que Proclus et Porphyre s'étaient inspirés du livre d’Origène Sur les démons, quand ils évoquent l'influence des démons sur nous ( voir le chapitre consacré par 6 D. O'Brien sur ce titre dans PVP II , 1992 , p. 436-437 ) . Par ailleurs, on continue de s'inter roger sur le titre du second livre : Que le roi seul est poète ( voir le chapitre consacré par D. O'Brien sur ce titre dans PVP II , 1992 , p. 437 , et surtout ses études 7 « Origène et Plotin sur le roi de l'Univers » , dans M.-O. Goulet -Cazé , G. Madec et D. O'Brien ( édit . ) , EOQIHE MAIHTOPEE. Chercheurs de sagesse. Mélanges Jean Pépin, Paris 1991 , p. 419-459, ainsi que 8 « Plotinus and the Secrets of Ammonius » , Hermathena 157 , 1994 , p. 117-153 ) et les notes à 3 , 31 et 32 et à 20 , 41 ) ; est-ce un ouvrage de circonstance pour flatter l'empereur Gallien (dont l'activité poétique est par ailleurs attestée : SHA XXIII 11 , 8 ; Anth . Lat. 711 Riese ; voir 9 F. M. Clover, « Gallienus the Poet » , dans G. Bonamente et K. Rosen , Historiae Augustae colloquium Bonnense , coll . « Munera : studi storici sulla Tarda Antichità » 9 , « Historiae Augustae colloquia . Nova series » 5 , Bari 1997 , p. 115-127 ) , une description du démiurge, ou même les deux à la fois ? Les autres attestations du nom d'Origène dans la tradition philosophique se trouvent chez Proclus et concernent l'exégèse du Timée de Platon . Elles sont souvent liées au nom de Longin . Pour les témoignages et les fragments, voir 10 K.-O. Weber, Origenes der Neuplatoniker. Versuch einer Interpretation, coll . « Zetemata » 27 , München 1962 , XVI - 164 p . ; 11 M. Patillon et L. Brisson ( édit . ) , Longin, Fragments. Art rhétorique, CUF, Paris 2001, fragments 25 , 28 , 29 , 31 , 32 , 33 , 36. Dans un passage rapporté par Proclus ( fr. 10 Weber = fr. 29 Patillon et Brisson , apud Proclus , in Tim . , t . I , p . 63 , 29 - 64 , 3 Diehl ) , Porphyre, peut être à la suite de Longin , rapporte que sur un point « Origène a passé trois jours entiers dans les clameurs , les rougeurs d'indignation , les flots de sueur, déclarant que c'est ici une grave question et qui fait bien difficulté, et s'appliquant avec

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zèle à montrer que l'art imitatif d'Homère sait se hisser au niveau des actions héroïques » (trad. Patillon et Brisson ). Pour une possible mise en scène par Porphyre du témoignage d'Origène sur ce point, voir la note de Patillon et Brisson 11 , p. 312. Voilà à peu près tout ce que nous savons de ce philosophe néoplatonicien et on pourrait en rester là si on n'avait pas souvent et encore récemment identifié cet Origène à l'auteur ecclésiastique bien connu ( O 42 ) . Les arguments per mettant de distinguer les homonymes - qui portaient un nom très répandu à Alexandrie et ailleurs à l'époque impériale – ont été rassemblés par Weber 10, p . 17-34 , et par 12 R. Goulet , « Porphyre, Ammonius , les deux Origène et les autres... » ( 1977 ) , repris dans Goulet 4 , p . 267-290 , notamment p . 277-278 . Voir également pour la bibliographie plus récente Goulet 4 , Addenda et corrigenda, ibid. , p . 391-394 . Parmi les partisans récents d'un seul Origène, citons 13 H. Kettler, « Origenes, Ammonios Sakkas und Porphyrius » , dans Kerygma und Logos. Festschrift für G. Andresen , Göttingen 1979 , p . 322-328 ; 14 P. F. Beatrice , « Porphyry's judgement on Origen » , dans R.J. Daly ( édit . ) , Origeniana Quinta, Leuven 1992 , p. 351-367 . Les partisans d'une identification des deux Origènes s'en remettent au témoi gnage d'un fragment du IIIe livre du traité de Porphyre Contre les chrétiens ( fr. 39 Harnack ), transmis par l'Histoire ecclésiastique d'Eusébe de Césarée ( VI 19 ) , dans lequel le chrétien Origène , que Porphyre prétend avoir rencontré dans sa jeunesse , est présenté comme un ancien élève d'Ammonius. Porphyre oppose Ammonius , un ancien chrétien converti à la philosophie , et Origène, un ancien “ Hellène" ayant « dérivé vers l'effronterie barbare » . Une analyse détaillée du passage de l'Histoire ecclésiastique montre qu'Eusébe, qui trouve chez Por phyre une confirmation de la célébrité d'Origène auprès des philosophes païens, n'est pas en mesure d'apporter un témoignage indépendant et que certaines affirmations de Porphyre , notamment sur les origines païennes d'Origène, sont contredites par ce que nous savons de l'enfance d'Origène . Comme il existait cependant des similitudes entre les deux Origène ( voir Goulet 4, p. 279-280), i faut envisager l'hypothèse d'une confusion dans l'esprit de Porphyre. Une telle confusion a été soutenue notamment par 15 Ch . Bigg , The Christian Platonists of Alexandria . Eight Lectures, Oxford 1886 , p . 119 n . 1 ; 16 H. Dörrie, « Ammonios , der Lehrer Plotins» , Hermes 83 , 1955 , p. 439-478 , et, de façon toutefois différente , par Goulet 4 , p . 279-287 . Pami ceux qui n'acceptent pas cette hypothèse , il s'en trouve qui , tout en maintenant une distinction entre les deux personnages, ont supposé que les deux homonymes avaient pu étudier chez Ammonius. Il est cependant difficile de retrouver chez Origène le chrétien des doctrines dépassant le niveau de développement du moyen-platonisme et une tentative récente de comparaison doctrinale avec Plotin ( 17 H. Crouzel, Origène et Plotin . Comparaisons doctrinales, coll . « Croire et savoir» , Paris 1993 , 550 p. ) , ne parvient pas à établir des rapprochements significatifs. Voir Goulet 4, p . 393-394 . Pour une tentative plus ancienne fortement marquée par les préconceptions de l'auteur , voir 18 W. Theiler , « Ammonios der Lehrer des Origenes » , dans ses Forschungen zum Neuplatonismus, Berlin 1966, p. 1-45. Plus récemment, 19 Maria Di Pasquale Barbanti , « Origene di Alessandria e la

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scuola di Ammonio Sacca » , dans M. Barbanti, G.R. Giardina et P. Manganaro (édit . ) , ENNEIE KAI QIAIA . Unione e amicizia . Omagio a Francesco Romano, Catania 2002, p. 355-373 , tout en acceptant, non sans réticences, la distinction entre les deux Origène , a cherché à montrer que le chrétien pouvait , lui aussi , avoir étudié chez Ammonius et que ses vues sur le premier principe, défini comme monade et intellect (De principiis I 1 , 6) , seraient celles que discuterait Proclus dans sa Théologie platonicienne, t. II , p. 31 , 4-11 Saffrey -Westerink. LUC BRISSON et RICHARD GOULET.

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ca 185 - apr. juin 251

Exégète , théologien et polémiste chrétien, considéré comme un « grand philo sophe chez les Grecs eux - mêmes » selon son biographe ancien , Eusébe de Césarée ( Hist . eccl. VI 18 , 3 ). Sa vie, son cuvre et sa pensée ont fait l'objet de trois ouvrages célèbres : 1 P.-D. Huet , Origeniana. Tripartitum opus quo Origenis narratur vita, doctrina excutitur, scripta recensentur, Rouen 1668 ( = PG XVII , col . 633-1284 ) ; 2 E.-R. Redepenning , Origenes . Eine Darstellung seines Lebens und seiner Lehre, 2 vol . , Bonn 1841-1846 ; 3 E. de Faye , Origène, sa vie, son æuvre, sa pensée, 3 vol . , Paris 1923-1928 . Aucun ouvrage récent ne faisant la synthèse de ce que l'on sait aujourd'hui sur la vie , l'euvre et la doctrine d'Origène, les trois études signalées méritent toujours d'être consultées . Toutefois, il y a trente ans , notre connaissance de la vie et de l'euvre d'Origène a été renouvelée grâce à 4 P. Nautin , Origène. Sa vie et son cuvre, Paris 1977. Cet ouvrage contient la première étude critique des sources anciennes qui nous renseignent sur la vie et l'euvre d'Origène : la correspondance d'Origène ; le Discours de remerciement de Théodore ( qui , pour Eusébe , n'est autre que le célèbre Grégoire le Thaumaturge, - une identification qui est loin d'être assurée ) ; le témoignage de Porphyre, Contre les chrétiens ( le titre de cet ouvrage est discuté ) , cité par Eusébe, Hist. eccl. VI 19 , 4-8 ; la notice d'Eusébe , Hist. eccl. VI 1 - VII 1 ; l’Apologie pour Origène de Pamphile et Eusébe ; les informations données par des écrivains plus tardifs, Épiphane , Jérôme ( notamment la Lettre 33 qui donne la liste des cuvres d'Origène ) et Palladius. Au terme d'analyses minutieuses , P. Nautin propose une « Chrono logie » des æuvres d'Origène et une « Esquisse d'une biographie d'Origène » , qui peuvent être considérées comme les meilleures mises au point actuelles . Depuis 1975 se tiennent tous les quatre ans des colloques consacrés à Origène. Le lecteur qui veut se tenir au courant des résultats récents de la recher che doit aller consulter les huit volumes d'actes parus à ce jour : 5 H. Crouzel, G. Lomiento et J. Rius -Camps ( édit . ) , Origeniana . Premier colloque inter national des études origéniennes (Montserrat, 18-21 septembre 1973 ), coll . « Quaderni di Vetera Christianorum » 12 , Bari 1975 , 375 p .; 6 H. Crouzel et A. Quacquarelli (édit . ) , Origeniana Secunda. Second colloque international des études origéniennes (Bari, 20-23 septembre 1977) , coll . « Quaderni di Vetera Christianorum » 15 , Rome 1980 , 404 p .; 7 R. Hanson et H. Crouzel ( édit . ) , Origeniana Tertia . The Third International Colloquium for Origen Studies

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(Manchester, September 7th - 18th 1981), Rome 1985 , 320 p.; 8 L. Lies ( édit.), Origeniana Quarta . Die Referate des 4. internationalen Origeneskongresses ( Innsbruck, 2. -6. September 1985 ), coll . « Innsbrucker theologische Studien » 19, Innsbruck /Wien 1987 , 505 p. ; 9 R.J. Daly (édit. ) , Origeniana Quinta .Papers of the 5th International Origen Congress ( Boston , 14-18 August 1989) , coll. « Bibliotheca Ephemeridum Theologicarum Lovaniensium » 105 , Leuven 1992, 635 p . ; 10 G. Dorival et A. Le Boulluec ( édit. ) , Origeniana Sexta. Actes du Colloquium Origenianum Sextum ( Chantilly, 30 août-3 septembre 1993), coll. « Bibliotheca Ephemeridum Theologicarum Lovaniensium » 118 , Leuven 1995 , 865 p . ; 11 W. A. Bienert et U. Künhweg (édit . ) , Origeniana Septima. Origenes in den Auseinandersetzungen des 4. Jahrhunderts (Marburg, 25. - 29. August 1997) , coll . « Bibliotheca Ephemeridum Theologicarum Lovaniensium » 137 , Leuven 1999 , 848 p . ; 12 L. Perrone, Origeniana Octava. Origen and the Alexandrian Tradition . Origene e la tradizione alessandrina (Pisa, 27-31 August 2001 ), coll . « Bibliotheca Ephemeridum Theologicarum Lovaniensium » 164 - A et 164 - B , Leuven 2003 , 2 vol . , 1406 p . Le neuvième colloque consacré à Origène s'est tenu à Pecs ( Hongrie ) du 29 août au 2 septembre 2005. D'autres colloques ont été consacrés à Origène et leurs Actes doivent être consultés avec attention . D'abord , les International Conferences on Patristic Studies , organisées tous les quatre ans depuis 1951 , comprennent souvent des sessions consacrées à Origène ou à Clément d'Alexandrie et Origène : les communications sont publiées dans les volumes de 13 Studia Patristica, dont les volumes I à XVI , correspondant aux Conferences de 1955 à 1975 , sont parus dans la collection « Texte und Untersuchungen » à Berlin , entre 1957 et 1985 ; le volume XVII ( Conference de 1979) a été édité par Pergamon Press à Oxford, en 1982 ; les volumes XVIII et suivants (Conferences à partir de 1983) sont édités par Peeters à Leuven depuis 1989. Ensuite , on peut signaler 14 U. Bianchi et H. Crouzel ( édit . ) , Arché e Telos. L'antropologia di Origene e di Gregorio di Nissa . Analisi storico - religiosa , Milano 1981 ( neuf contributions lors d'un colloque tenu en 1979 ) ; 15 L'origenismo : apologie e polemiche intorno a Origene, Roma 1986 ( vingt-trois communications prononcées lors d'un colloque de l'Augustianum en 1985 ) ; et 16 C. Kannengiesser et L.W. Petersen (édit. ), Origen of Alexandria . His World and His Legacy, Notre Dame (Indiana) 1988 ( dix - neuf contributions proposées en 1986 ) . C'est en 1994 que le groupe italien de recherche sur « Origène et la tradition alexandrine » a inauguré ses activités scientifiques. Il a organisé plusieurs collo ques , dont deux concernent des æuvres d'Origène : en 1996 , le Traité de la prière ; en 1997 , le Contre Celse . Ces deux colloques ont été publiés : 17 F. Cocchini (édit . ) , Il dono e la sua ombra . Ricerche sul ſlepi € úxñs di Origene, Roma 1997 ( neuf contributions ) , et 18 L. Perrone (édit . ) , Discorso di verita . Paganesimo, giudaismo e cristianesimo a confronto nel Contro Celso di Origene , Roma 1998 ( dix contributions ) . Le groupe, dont les principaux anima teurs sont Lorenzo Perrone et Adele Monaci Castagno, publie également, chaque année depuis 1995 , la revue 19 Adamantius ( Adamantius, “l'homme de fer”, était , à en croire Eusébe , Hist. eccl. VI 14 , 10 , un surnom d'Origène). C'est un

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excellent instrument de travail , qui propose des articles de fond et des contri butions plus brèves, qui tient une chronique des projets en cours, des rencontres scientifiques et des thèses soutenues, qui offre un répertoire bibliographique des publications du groupe et des parutions récentes sur Origène et la tradition alexandrine, depuis l'époque des diadoques jusqu'à Maxime le Confesseur. Des index très complets font des numéros de cette revue un outil indispensable , surtout depuis le n° 4 de 1998 . Le dynamisme scientifique du groupe italien s'est récemment traduit dans la publication d'un ouvrage de référence, qui présente les principaux acquis de la recherche sur Origène : 20 A. Monaci Castagno (édit . ) , Origene. Dizionario , la cultura, il pensiero , le opere , Roma 2000 , 489 p. Ce dictionnaire a fait appel à une trentaine de collaborateurs, en majorité italiens, mais aussi anglais , français et suisse. Il contient plus de cent notices, dont plusieurs seront signalées dans la suite de cet exposé. On peut d'ores et déjà renvoyer le lecteur à 21 G. Dorival, art. « Filosofia » , p. 171-177 . En 2004, le groupe italien a créé une collection , la « Biblioteca di Adaman tius » , dont le premier volume , édité par 22 A. Monaci Castagno , La biografia di Origene fra storia e agiografia, Villa Verucchio 2004 , 334 p . , réexamine, à la suite de Nautin 4 , les sources qui nous font connaître la vie d'Origène ( dix contributions ). La philosophie dans la vie d'Origène . La formation philosophique d'Origène a soulevé et soulève encore bien des controverses, qui tiennent à la difficulté de concilier entre elles les données souvent contradictoires des sources biographiques anciennes . Faut- il dès lors adopter un point de vue hypercritique et considérer que tout le récit de la jeunesse d'Origène est légendaire ? C'est l'opinion de 23 M. Hornschuch , « Das Leben des Origenes und die Entstehung der alexandrinischen Schule » , ZKG 71 , 1960, p. 1-25 . En tout cas , il n'est plus possible aujourd'hui de se représenter le « didascalée d'Alexandrie » , l ' « École d'Alexandrie » , sur le modèle des écoles philosophiques païennes, avec un enseignement spécifique et intensif de philosophie ; sur ce point , il faut consi dérer comme dépassé l'ouvrage de 24 R. Cadiou , La Jeunesse d'Origène . Histoire de l'École d'Alexandrie au début du IIIe siècle, Paris 1936. L'article de 25 M.P. Roncaglia, « Pantène et le didascalée d'Alexandrie : du judéochristia nisme au christianisme hellénistique » , dans R. H. Fischer ( édit. ) , A tribute to Arthur Vööbus, Chicago 1977 , p . 211-233 , accorde trop de confiance au témoi gnage d’Eusèbe, qui doit être critiqué, comme l'a montré Nautin 4, p . 25 . Ce qui est sûr, c'est que , grâce à son père, le jeune Origène a reçu une double formation : une formation à l'enkyklios paideia et une formation de type catéchétique centrée sur l'apprentissage et la compréhension des Écritures . La première lui a permis d'enseigner les grammatika ou grammatikoi logoi, c'est-à dire la lecture , l'écriture et le calcul , et de subvenir ainsi aux besoins de sa famille , sans ressources depuis la confiscation des biens de son père qui avait été exécuté à cause de sa foi chrétienne vers 201. La seconde formation lui a valu de se voir confier l ' « école de la catéchèse » par l'évêque Démétrius. Son contact avec la philosophie a eu lieu sans doute plus tard , dans des circonstances

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qu'Origène lui-même raconte dans sa Lettre à Alexandre de Jérusalem ( voir 26 P. Nautin , Lettres et écrivains chrétiens , Paris 1962 , p . 132-134 ) : pour répondre aux besoins de son enseignement catéchétique qui attirait des païens instruits dans la philosophie , il a décidé de fréquenter celui qu'il appelle « le didascale des disciplines philosophiques » , en s'autorisant des exemples du célèbre Pantène et d'Héraclas ( » H 43 ) , le futur évêque d'Alexandrie ; ce dernier , ajoute Origène, suivait cet enseignement depuis cinq ans déjà quand il l'a rejoint. Il n'est pas facile de déterminer à quel moment de sa vie Origène a fréquenté ce maître. Eusébe suggère qu'Origène a accédé à la direction de l'école de catéchèse dès 201 , alors qu'il n'avait que dix -sept ans. On peut penser qu'Eusèbe, soucieux d'exalter la précocité d'Origène , a quelque peu anticipé la date de l'accès à la direction du didascalée. Il paraît plus sûr de songer à la persécution des années 206-210 , durant laquelle des jeunes gens et des jeunes filles suivent la catéchèse dispensée par Origène . A- t - il fréquenté le maître de philosophie dès cette époque, ou seulement une fois le calme revenu , ou même plus tard , au retour d'un voyage à Rome , peu après 215 , quand il a divisé le didascalée catéchétique en deux niveaux ? Apparemment, Eusébe va contre cette dernière hypothèse, puisqu'il explique qu'à cette date, Origène confie l'instruc tion élémentaire des catéchumènes à Héraclas et qu'il se réserve le niveau supérieur, caractérisé notamment par l'enseignement des « disciplines philo sophiques » . Il semble donc qu'en 215 Origène soit déjà formé à la philosophie. Mais il se peut qu'Eusébe ait projeté sur l'école de catéchèse d'Alexandrie l'enseignement qu'Origène a dispensé à Théodore et à Athénodore , plus tard, vers 238-245 , à Césarée de Palestine. En fait il n'y a pas de raison de penser que le didascalée de la catéchèse à deux niveaux ait été autre chose qu'une école centrée sur l'apprentissage et l'approfondissement des Écritures. Dès lors , est- il possible de donner un terminus ante quem pour la formation philosophique d'Origène ? Les fragments qui subsistent des premiers ouvrages publiés par Origène témoignent d'une réelle compétence philosophique , en particulier certains extraits des Stromates ( voir Nautin 4, p. 293-302 ). Or les Stromates ont été écrits entre 222 et 229. De ces remarques il résulte qu’Origène a pu fréquen ter le maître de philosophie à n'importe quel moment entre 206 et 220 . 27 H. Dörrie, « Ammonios der Lehrer Plotins » , Hermes 83 , 1955 , p . 439-477 ( en particulier p. 468 ) , repris dans Platonica Minora , coll . « Studia et Testimonia Antiqua » 8 , München 1976, p . 324-336 , et Nautin 4, p. 415 , situent ce moment vers 205 ; 28 K.O.Weber, Origenes der Neuplatoniker. Versuch einer Inter pretation , München 1962 , p . 28 , pense à 210 ; Cadiou 24 , p . 205 , et 29 P.F. Beatrice , « Porphyry's Judgement on Origen » , dans Daly 9, p . 351-367 (en particulier p . 359) , suggèrent 220 . Quel était ce maître ? Origène a - t - il été l'élève d'Ammonius ( Saccas ) [PA 140 ], comme l'affirme Porphyre cité par Eusébe, Hist. eccl . VI 19 , 3-8 ? Ou bien a- t - il suivi les leçons d'un Ammonius chrétien , dont parle probablement Eusébe ? On peut aussi voir la question du côté de l'élève : quel était l'Origène qui a fréquenté Ammonius Saccas ? Est - ce l'Origène chrétien , comme le croit Porphyre ? N'est-ce pas plutôt un autre Origène ( 20 41 ) , un païen , dont la Vie

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de Plotin par Porphyre nous apprend qu'il a suivi l'enseignement d'Ammonios aux côtés d'Érennius ( » E 53 ) et de Plotin ? Des réponses divergentes ont été apportées à ces questions. – Il y aurait eu un seul Ammonios, le maître de Plotin , et un seul Origène, le célèbre exégète . 30 R.P.C. Hanson , Origen's Doctrine of Tradition , London 1954 , se prononce contre l'hypothèse d'Origène le païen . 31 H. Langerbeck, « The Philosophy of Ammonios Saccas and the Connection of Aristotelian and Christian Elements Therein » , JHS 77 , 1957 , p . 67-74 , considère qu'Ammonios Saccas est l'auteur du traité (qu'il qualifie d'antimarcionique) Sur l'accord de Moïse et de Jésus dont parle Eusébe ; c'est à l'enseignement d'Ammonios qu'Origène serait redevable de certaines notions prégnantes du Traité des Principes. 32 F.H. Kettler, « Origenes, Ammonios Sakkas und Porphyrios » , dans Kerygma und Logos. Festschrift für C. Andresen, Göttingen 1979 , p. 322 328 , se prononce en faveur d'un seul Ammonios et d'un seul Origène . Beatrice 29 suggère que le traité Sur l'accord de Moïse et de Jésus a pu être écrit par Ammonius avant son apostasie ou encore qu'Eusébe aurait confondu Ammonius avec un autre Ammonius inconnu dont l’æuvre aurait été conservée dans la bibliothèque de Césarée ; il pense qu'Origène a pu lire et discuter les écrits de Longin, même si celui- ci était plus jeune que lui de vingt ans ; selon lui , Origène aurait rencontré Plotin à Alexandrie en 231-232 , juste avant son départ pour Césarée ; à la mort d'Ammonius , en 242 , il serait revenu à Alexandrie et là il aurait conclu avec Érennius et Plotin le pacte dont parle Porphyre dans la Vie de Plotin 3 , 24-27 et selon lequel ils s'engageaient à ne rien révéler des doctrines d'Ammonius ; le conflit entre Origène et Héraclas aurait eu lieu en 243-244, et non en 233-234 ; Origène aurait revu Longin à Athènes en 245 et il aurait séjourné à Rome en 245-246 ; c'est là que , comme le raconte la Vie de Plotin 14, 20-24, il aurait voulu assister à un cours de Plotin , qui , à sa vue , aurait rougi et aurait refusé ; Beatrice interprète cette attitude de Plotin comme le signe de la rupture entre les deux hommes ; une fois rentré à Césarée , Origène aurait repris ses activités et , dans cette ville ou à Tyr, le jeune Porphyre, encore nommé Malkos, aurait suivi son enseignement; Origène aurait écrit Que seul le roi est créateur sous l'empereur Gallien après septembre 253 ; Eusèbe , qui fait mourir Origène sous Gallus, en 251-252, aurait confondu ce dernier avec Gallien . Pareille thèse se heurte à quatre fortes objections: ( a) Weber 28 a édité et commenté les dix -sept fragments d'Origène cités par Proclus, Commentaire sur le Timée ; il conclut qu'il faut distinguer entre l’Origène chrétien et l'Origène païen. Ses conclusions ont été acceptées par les spécialistes du néoplatonisme , par exemple par 33 I. Hadot , Le problème du néoplatonisme alexandrin . Hiéroclès et Simplicius, Paris 1978 , p. 72. L'idée avancée par Cadiou 24 , qui rapproche les fragments cités par Proclus du Stromate VII d'Origène ( PG XI, col . 101-102 ) , n'est plus aujourd'hui défendable. (b ) La tradition néoplatoni cienne attribue à Origène deux ouvrages seulement: Sur les démons ( Porphyre, Vie de Plotin 3 , 31 et Longin , Sur la fin 2, 41 ) et Que seul le roi est créateur (Porphyre 3 , 32) . Or ces titres ne se retrouvent pas dans l'abondante biblio graphie de l'Origène chrétien . ( c ) 34 L. Brisson, dans Porphyre. Vie de Plotin ,

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Paris 1982 , p. 114, rappelle qu'il est impensable que Longin ( cité par Porphyre) ait pu dire, vers 268 , que le platonicien Origène n'avait écrit qu’un ou deux ouvrages, s'il était vrai qu'il s'agissait du prolifique auteur ecclésiastique si bien connu par ailleurs . ( d) L'identification des deux Origène oblige à réviser consi dérablement les renseignements donnés par Eusébe , qui , par exemple , ne dit rien sur le retour d'Origène à Alexandrie en 242-244 ni sur sa rencontre avec Longin en 245 ni sur son séjour à Rome en 245 et qui propose une autre date pour la mort de l'Alexandrin. Inversement , la thèse de l'unité des Ammonius et des Origène a pour elle un argument fort: le fait que, pour Eusèbe, il y a manifeste ment un seul Ammonius et que l'Origène dont parle Porphyre est identifié avec l'Origène chrétien . Voir sur ces points la contribution récente de 35 T. Böhm, « Origenes - Theologe und (Neu )-Platoniker. Oder: Wem soll man misstrauen Eusebius oder Porphyrius ? » , Adamantius 8 , 2002, p. 7-23 . - Il y aurait eu deux Ammonius ( un chrétien , un païen ) ayant enseigné à deux Origène ( un chrétien , un païen ): c'est l'idée développée à deux reprises par Dörrie 27 et 36 art. « Ammonios Sakkas » , TRE 2 , 1978 , p. 463-471. - Il y aurait eu deux Ammonios ( un chrétien , un païen ) ayant enseigné à l'Origène chrétien. C'est la thèse de 37 W. Theiler dans la discussion qui a suivi l'exposé de E. R. Dodds, « Numenius and Ammonius » , dans Les sources de Plotin , coll . « Entretiens sur l'Antiquité classique » 5 , Genève - Vandæuvres 1960 , p. 35 . – Il y aurait un seul Ammonius ayant enseigné à deux Origène ( un chrétien , un païen ). C'est la thèse de 38 F.M. Schroeder, « Ammonius Saccas » , ANRW II 36 , 1 , 1987 , p. 493-526 (Origène le chrétien aurait été un " élève occasionnel ”, Origène le païen un “ étudiant proche” ; on reconnaît là la reprise et la transfor mation d'une affirmation de Porphyre selon laquelle Origène aurait été un simple auditeur, åxpoats, d'Ammonius, non un élève assidu, (nawińs). - Il ne semble pas que la thèse selon laquelle il y aurait eu deux Ammonios ( un chrétien, un païen ) ayant enseigné à un seul Origène ait été soutenue : signe que la dualité des Origène est aujourd'hui bien admise ? Il y a trente ans , un article a apporté des lumières nouvelles sur les sources biographiques d'Eusébe et de Porphyre: 39 R. Goulet , « Porphyre, Ammonios , les deux Origène et les autres» , RHPR 57 , 1977 , p. 471-496 , repris dans ses Études sur les Vies de philosophes, p. 267-290. De sa minutieuse démonstration, il faut retenir que le maître de philosophie fréquenté par Origène n'est ni Ammonius Saccas ni un Ammonius chrétien : « il y aurait donc bien eu deux Origène, mais un seul dans l'esprit de Porphyre ( au moment où il écrit son traité Contre les chrétiens ), et un seul Ammonius, le maître d'Origène le platonicien, qui n'aurait rien à voir avec le “ maître des disciplines philosophiques " dont parle Origène , ni avec l'auteur chrétien que connaissait Eusébe » ( p . 495 ). Malgré l'opinion défavorable d'H . Crouzel ( voir 238 : « bien difficile à croire » ) , l'hypothèse de Goulet mérite d'être retenue , car c'est elle qui rend le mieux compte de l'ensemble des sources biographiques anciennes, et notamment de leurs contradictions. De la démonstration de Goulet, il faut retenir encore que l'Origène qui a rencontré Plotin à Rome n'est pas l'Origène chrétien.

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Dans la ligne de ce travail , 40 G. Dorival, « L'apport d'Origène pour la connaissance de la philosophie grecque » , dans Daly 9 , p . 189-216, a montré qu'Origène était beaucoup plus compétent en matière de stoïcisme qu'en matière de platonisme ; notant que , dans sa lettre autobiographique citée par Eusébe, Hist. eccl. VI 19 , 4-8 , Origène ne donne pas de nom à son maître des disciplines philosophiques, il a émis l'hypothèse que ce maître anonyme n'aurait rien à voir avec Ammonios Saccas et pourrait être un philosophe stoïcien . Formé à la philosophie, Origène est un lecteur de philosophes. Quelles étaient ses lectures ? Aux dires de Porphyre cité par Eusèbe, Origène « vivait dans la fréquentation constante de Platon et il pratiquait les écrits de Numénius ( > ^ N 66 ) et de Cronius ( ™ C 223 ) , d'Apollophane (** A 289 ) , de Longin ( " L 63 ) et de Modératus ( ** M 186) , de Nicomaque (** N 50) et des pythagoriciens les plus célèbres. Il utilisait également les livres de Chairémon le stoïcien (2C 91 ) et de Cornutus ( 2C 199 ) » . La chronologie s'opposant (malgré l'avis contraire de Beatrice 29) à ce qu'Origène ( né vers 185 ) ait pu lire Longin ( né vers 213 ) , Weber 28 , p. 36, a proposé de substituer le nom d'Albinus ( A 78 ) à celui de Longin. Mais la vraie question porte sur la fiabilité du témoignage de Porphyre. Or, comme l'a montré Dorival 40, de tous les auteurs signalés par Porphyre, seuls Platon, Numénius, les pythagoriciens et Chairémon sont cités par Origène ; en revanche, on ne trouve pas chez lui les noms d’Apollophane, de Cornutus, de Cronius, de Modératus, de Nicomaque, pas plus que ceux d’Albinus ou de Longin. Même s'il est sûr qu'Origène ne signale pas toujours explicitement ses sources, à elle seule cette constatation suffit à remettre en cause la fiabilité du témoignage de Porphyre en matière de lectures philosophiques d'Origène et à corroborer les conclusions de Goulet 39. Pour découvrir les lectures d'Origène, il faudra scruter ses écrits eux-mêmes, ce qui sera fait dans la suite de la présente notice quand on traitera de « l'apport d'Origène pour l'historien de la philosophie antique » . Origène a-t- il été lui-même un professeur de philosophie ? Goulet 39, p. 473 479, et Nautin 4 , passim, ont fait justice de l'image qu'Eusébe a tenté d'imposer à la tradition ultérieure : celle d'un Origène qui , à Césarée de Palestine , serait devenu un maître ès sciences philosophiques profanes dont des autochtones et des étrangers innombrables seraient devenus les disciples. En fait Eusébe ne cite que deux noms : Théodore, qui pour lui n'est autre que Grégoire le Thauma turge, et son frère Athénodore. De l'étude du témoignage de Théodore, Discours de remerciement à Origène, édité par 41 H. Crouzel, coll . « Sources chré tiennes » 148 , Paris 1962 , il ressort, selon Goulet, qu'il ne faut pas généraliser ce qui a été dans la vie d'Origène une expérience exceptionnelle : il est vrai qu'il s'est occupé à Césarée de Palestine , pendant cinq ans ( selon Eusébe ) ou huit ans ( selon Théodore en I 3), sans doute entre 238 et 245 , de la formation morale et philosophique de deux jeunes gens qui étaient les beaux - frères d'un assesseur du gouverneur de Palestine ; mais de là il ne faut pas conclure qu'Origène avait ouvert une école de philosophie , encore moins une « École des Hautes Études religieuses » , selon l'expression de 42 H.-I. Marrou , Histoire de l'éducation dans l'Antiquité, Paris 1965 , p. 463. Il faut ajouter qu'Origène avait une manière

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bien particulière d'enseigner la philosophie à Théodore, comme le rappelle Nautin 4 , p . 194-195 : tous les philosophes athées étaient exclus ; la lecture des philosophes était l'occasion de montrer qu'ils se contredisent entre eux ; et surtout elle était considérée comme une simple propédeutique à l'explication de l'Écriture . Voir 43 H. Crouzel, « L'école d'Origène à Césarée » ,BLE 71 , 1970, p. 15-27. Est -ce à dire que la formation dispensée par Origène est étrangère à la forma tion philosophique païenne ? En réalité, les choses sont complexes , comme le montre 44 G. Dorival , « Origène et ses disciples » , dans G. Filoramo (édit.), Maestro e discepolo, Brescia 2002, p. 159-179 . Grâce à Théodore, nous connais sons assez bien la formation dispensée par Origène. Elle comporte d'abord une période préliminaire dans laquelle Origène accueille les jeunes gens et s'efforce de les convertir à la philosophie ( VI 73-92 ) . La formation proprement dite se fait en cinq étapes: d'abord , la purification préliminaire ( VII 93-98 ) ; ensuite , la formation logique et dialectique ( VII 98-108) ; puis, la physique, la géométrie et l'astronomie ( VIII ) ; ensuite , l'éthique , à propos de laquelle Théodore insiste sur le fait qu'Origène prêchait d'exemple ( IX - XII ) ; enfin, la théologie , sous la forme de la lecture des philosophes et de celle des Écritures ( XIII - XV ) . Tous ces moments peuvent être rapprochés de la formation philosophique païenne. La période préliminaire de type protreptique évoque le thème païen de la nécessité de la conversion à la philosophie . Théodore insiste sur l'importance de l'amitié entre le maître et les disciples pour fixer ces derniers dans la philosophie.Ce rôle attribué à l'amitié doit être rapproché de ce qui se passait dans les écoles platonicienne et épicurienne, où , comme l'a bien montré 45 P. Hadot, Qu'est-ce que la philosophie antique ? , Paris 1995, p . 192 , l'amitié est le chemin privilégié pour parvenir à la transformation de soi -même recherchée par la formation philosophique . La période de purification, à propos de laquelle Théodore évoque la « manière socratique » d'Origène , rappelle la formation pythagoricienne telle que Jamblique ( » I 3 ) la rapporte ( V. pyth . 68-72 ) , ainsi que la formation néoplatonicienne , dans laquelle il n'était pas possible de mener des études philo sophique profitables si l'on n'avait pas acquis auparavant certaines dispositions morales et si l'on n'avait pas purifié son âme ( voir 46 I. Hadot, Simplicius. Commentaire sur le Manuel d'Épictète, Leiden 1996, p. 51 ) . Les quatre étapes suivantes paraissent combiner les schémas stoïcien et platonicien de formation. Ce qui signale l'influence stoïcienne, c'est, d'une part, la présence de la logique, d'autre part, la place de la physique avant l'éthique. Ce qui vient de la formation médioplatonicienne et néoplatonicienne , c'est la dernière étape de théologie. Une autre caractéristique de la formation reçue par les deux frères évoque la philosophie païenne. Les philosophes de l'Antiquité étaient des directeurs de conscience et la direction de conscience , comme le rappelle Hadot 46 , p. 322 326 , revêtait deux aspects : la formation morale en général et le rapport personnel entre le maître et le disciple . Ces deux aspects se retrouvent dans la formation dispensée par Origène : d'une part, il leur faisait un exposé sur les vertus ( IX 122-125 ) ; d'autre part, il avait un rapport personnel et amical avec eux ( VII 102-106 ; IX 116 ; XII 145-147 ) .

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Cependant, même si elle est ancrée dans la tradition philosophique païenne, la formation reçue par les jeunes gens a ses traits d'originalité : (a) la combinais on entre les schémas stoïcien et platonicien paraît propre à l'enseignement d'Origène. (b ) L'étape théologique comporte à la fois la lecture des philosophes et la lecture des Écritures chrétiennes. Ces dernières sont évidemment absentes de la formation païenne et signent une éducation chrétienne. Mais un autre trait de christianisation est plus intéressant à analyser, car il est plus subtil : Origène a une manière originale de faire lire les philosophes, qui aboutit à une christiani sation de la lecture philosophique . D'abord , il procède à une sélection : il élimine les écrits des athées qui nient Dieu et la providence. Ensuite, il ne privilégie aucune école , mais lit et explique tous les philosophes, retient en chacun d'eux ce qui est utile et vrai, élimine ce qui est mensonger ( XIV 172-173 ) . Il ne s'agit donc pas d'une approche sceptique de la philosophie , qui consisterait à prendre appui sur les contradictions entre les philosophes pour conclure à la suspension du jugement et, de là, à la nécessité de la foi. C'est une approche positive, qui reconnaît à la philosophie une vraie valeur de vérité . Mais cette approche positive se combine à une dévalorisation de la philosophie, réduite au rang de servante de la foi sous sa forme intellectuellement élaborée . Crouzel 41 , p . 156 n . 2 , a- t - il raison de voir dans l'étape éthique de la formation un aspect spécifiquement chrétien ? Lors de cette étape, Origène insuffle aux deux frères l'amour de la justice, de la sagesse , de la tempérance, de la patience et de la piété. On n'a pas de peine à reconnaître dans les quatre premières vertus les quatre vertus grecques par excellence , comme Crouzel le signale . Ce seraient les deux vertus finales de patience et de piété qui intro duiraient une coloration spécifiquement chrétienne. Mais cette conclusion n'est pas exacte dans le cas de la piété, puisque celle-ci est la plus importante des vertus, selon Platon , Epinomis 989 b ( voir aussi Cicéron , De la nature des dieux II 61 , 153 ) . On peut davantage hésiter dans le cas de la patience , que Théodore appelle « notre patience » , en d'autres termes la patience qui est en usage chez nous, les chrétiens. On peut y voir une allusion aux martyrs et aux ascètes. Faut il pour autant voir en cette patience une vertu qui s'ajouterait aux quatre vertus grecques ? Ne faut - il pas plutôt suivre Nautin 4 , p . 192 , qui fait de la patience une apposition grammaticale du courage et qui comprend qu'Origène insufflait l'amour du courage, que les chrétiens appellent patience ? Clément d'Alexan drie, Stromates II 18 , 79 , fournit un argument pour aller dans ce sens : le mot “patience” semble bien être chez lui le mot chrétien synonyme des noms païens du courage . Ainsi , il n'y aurait pas de christianisation de la formation éthique dispensée par Origène , mais seulement une christianisation du lexique des vertus. Un autre exemple de récupération et de dévalorisation de la philosophie est attesté chez Origène. Entre 234 et 250 , il envoie à un certain Grégoire, qu'il ne faut pas confondre avec Grégoire le Thaumaturge, une lettre de direction de conscience , connue par la Philocalie 13. Ce Grégoire est originaire de Palestine et étudie le droit et la philosophie à Alexandrie . Origène l'encourage à utiliser ses dons naturels « pour le christianisme » . De même que les philosophes font de

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la géométrie , de la musique , de la grammaire et de l'astronomie des auxiliaires

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de la philosophie , de même nous , les chrétiens, devons faire la même chose de la philosophie relativement au christianisme . On retrouve le thème de la philo sophie auxiliaire et servante de la théologie déjà vu à propos du Discours de Théodore. La philosophie dans l'euvre d'Origène. L'euvre d'Origène était immense : peut -être pas 2000 titres différents, comme on a voulu le faire dire à Jérôme ( voir Nautin 4 , p . 233 ) , mais environ 800. Ce chiffre doit toutefois être relati visé , parce qu'un même livre de la Bible peut être commenté par plusieurs tomes ou homélies , qui constituent autant de titres, ou parce qu'un même traité peut être divisé en plusieurs tomes , qui sont chacun décomptés dans le chiffre total . Nautin 4 , p . 242-260 , reconstitue, à partir d'Eusébe et de Jérôme , une liste de soixante -dix - sept titres différents, distribués selon trois catégories: I. Traités 1. sur le Nouveau Testament ;

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2. sur l'Ancien Testament : 3. divers ; II . Homélies 1. sur le Nouveau Testament ; 2. sur l'Ancien Testament ; 3. diverses ;

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III . Lettres. A ces soixante - dix -sept titres, il faut ajouter les Hexaples. Bon nombre des traités, homélies et lettres d'Origène ont disparu, en totalité ou partiellement. Certains ouvrages ne sont plus connus en grec , mais seulement

Il n'existe pas d'édition complète des euvres d'Origène . Celles qui s'en rapprochent le plus sont , en Allemagne , les vingt - cinq volumes de 47 C.H. E. Lommatzsch , Berlin 1831-1843 , et , en France , 48 les tomes XI à XVII de la Patrologie grecque de Migne , Paris 1857-1863 , qui reproduit l'édi tion des bénédictins Ch . et V. de la Rue de 1733-1759 enrichie des Hexaples édités par B. de Montfaucon en 1713. En Allemagne ( à Leipzig, puis à Berlin), la collection Die Griechischen Christlichen Schriftsteller der ersten drei Jahr hunderte ( GCS ) a entrepris , depuis 1899 , de publier les 49 Origenes Werke : douze volumes ont été publiés jusqu'en 1941 ; par la suite , certains tomes édités ont été refondus, mais la collection ne progresse plus véritablement. En France, la collection « Sources chrétiennes » a édité une vingtaine d'œuvres différentes d'Origène , au total une quarantaine de volumes, depuis sa fondation en 1942 : 50 n °S 7 , 16 , 29 , 37 , 67 , 71 , 87 , 120 , 132 , 136 , 147 , 148 , 150 , 157 , 162 , 189,

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par des traductions , en latin ou en arménien . La tradition directe de plusieurs Quvres manque : elles sont parvenues jusqu'à nous sous forme de citations qu'on trouve dans des florilèges ( comme la Philocalie attribuée à Basile de Césarée et Grégoire de Nazianze ) ou dans les chaînes exégétiques grecques.

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190 , 222 , 226 , 227 , 232 , 238 , 252 , 253 , 268 , 269, 286 , 287 , 290 , 302 , 312 , 321 , 328 , 352, 375 , 376, 385 , 389,411 , 415 , 442, 461 , 464, 465 . Comment, dans la pratique, se repérer dans les œuvres d'Origène ? Comment mettre la main sur la ou les meilleures éditions ? Nautin 4 , p . 242-260, indique , pour chacune des soixante -dix -sept cuvres présentées, la (ou les) édition( s) - si toutefois elles existent -, ainsi que les principales études complémentaires. Il faut également consulter les pages que 51 M. Geerard consacre à Origène dans sa Clavis Patrum Graecorum , t . I , Turnhout 1983 , p. 141-186 , à compléter par 52 M. Geerard et J. Noret, Clavis Patrum Graecorum . Supplementum , Turnhout 1998 , p. 23-31 : on trouve les références aux Patrologies grecque et latine et aux éditions critiques, ainsi que , dans le cas d'œuvres inédites , l'indication des papyrus et des manuscrits qui les contiennent . Parmi les euvres d'Origène, il n'est pas facile de faire le partage entre celles qui offrent un intérêt philosophique et celles qui n'en présentent pas , ou peu. On pourrait croire , par exemple , que le Commentaire sur les psaumes 1 à 150 est un ouvrage d'un intérêt purement exégétique . Or il n'en est rien : le commentaire du psaume 1 , 3 (PG XII , col . 1089 C) contient une distinction entre les êtres qui existent à titre premier et les êtres qui existent à titre de conséquence , à cause des êtres qui existent à titre premier; « l'être doué de raison , nous dit Origène, existe à titre premier, les animaux et les plantes de la terre pour son besoin » . Cette distinction a un équivalent chez les philosophes stoïciens et néoplatoni ciens et elles présente un intérêt philosophique central, lorsqu'il s'agit de poser et de régler le problème de la métensomatose dans les corps d'animaux , ainsi que l'a montré 53 G. Dorival , « Origène a- t- il enseigné la transmigration dans les corps d'animaux ? ( A propos de Peri Archôn I 8 , 4 ) » , dans Crouzel et Quacquarelli 6 , p . 11-32 . Bien d'autres passages des traités exégétiques ou des homélies d'Origène contiennent ainsi de véritables pépites philosophiques . L'historien de la philosophie antique ne peut faire l'économie de lire l'ensemble de l'æuvre d'Origène. Toutefois certains ouvrages de l'Alexandrin présentent un intérêt philosophi que immédiat: ( 1 ) Le Traité des Principes ( ſlepì åpxõv, De Principiis) est un traité de physique chrétien , qu'il est possible de rapprocher de traités de physique païens ( voir 105 et 106 ) . Il a sûrement été écrit avant 232 , date où Origène quitte définitivement Alexandrie, peut-être en 229-230 ( cf. Nautin 4 , p . 423-425 ) . L'original grec est perdu, mais Photius, vers 850, le connaissait encore (Bibl. cod. 8) . Le traité nous est parvenu dans la version latine de Rufin , rédigée en 398 et qui , aux dires mêmes du traducteur dans ses deux Préfaces, n'offre pas le texte intégral . Il subsiste des bribes d'autres traductions latines : vingt - huit extraits dans la traduction , par Rufin , en 397 , de l'Apologie pour Origène de Pamphile et Eusebe (ces fragments ont fait l'objet d'une édition critique par les soins de 54 A. dell'Era , Le citazioni dal De Principiis di Origene nell'Apolo geticus Pamphili pro Origene Rufino interprete , L'Aquila/Rome 1984 ) ; cinquante - six extraits dans la Lettre 124 que Jérôme envoie à Avitus vers 410 et qui proviennent de la traduction complète faite par le même Jérôme en 399 ; cinq

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fragments dans le Contre Jean de Jérusalem de Jérôme ( 396) ; huit fragments dans la lettre 92 et trois dans la lettre 98 de Théophile d'Alexandrie traduites par Jérôme vers 401. La valeur de ces traductions a souvent été discutée. Rufin est aujourd'hui considéré comme un traducteur satisfaisant, même s'il adapte sa traduction aux exigences du public de son époque . On se reportera à 55 H. Chadwick, « Rufinus and the Tura Papyrus of Origen's Commentary on Romans » , JTHS 10, 1959 , p. 10-42 ; 56 B. Studer, « Zur Frage der dogmatischen Terminologie in der lateinischen Übersetzung von Origenes de Principiis » , dans Epektasis. Mélanges J. Daniélou, Paris 1972 , p. 403-414 ; 57 J.M.Rist, « The Greek and Latin texts of the discussion on free will in de Principiis Book III » ,dans Crouzel, Lomiento et Rius-Camps 5 , p . 97-111 , repris dans Platonism and its Christian Heritage, London 1985 , n° IV ; 58 H. Crouzel, « Comparaisons précises entre les fragments du Peri Archôn selon la Philocalie et la traduction de Rufin » , dans Crouzel, Lomiento et Rius-Camps 5 , p. 113-121 ; 59 N. Pace, Ricerche sulla traduzione di Rufino del De Principiis di Origene, Firenze 1990 . 60 F. Winkelmann, « Einige Bemerkungen zu den Aussagen des Rufinus von Aquileia und des Hieronymus in ihre Übersetzungstheorie und -methode » , dans P. Granfield et J.A. Jungmann ( édit. ) Kyriakon. Festschrift J. Quasten, Münster i . W. 1970, t. II , p. 532-547 , a comparé les procédés de traduction de Rufin et de Jérôme. De courts fragments grecs du Traité des Principes subsistent , chez Méthode d'Olympe, Marcel d'Ancyre cité par Eusébe de Césarée, Athanase , Épiphane, Antipatros de Bostra , Jean de Scythopolis, Léonce et Théodore, la Lettre à Ménas de Justinien ( écrite en 543 ) , mais non chez Grégoire de Nysse ni dans les anathématismes de 543 et 553. La Philocalie d'Origène, peut -être composée par Basile de Césarée et Grégoire de Nazianze entre 364 et 378 , a conservé deux longs fragments, d'une part le traité d'herméneutique ( = Traité des Principes IV 1-3 ) , d'autre part le traité sur le libre arbitre ( = III 1 ) ; il s'agit d'extraits , très abondants certes, mais incomplets : le traité d'herméneutique de la Philocalie contient deux passages supplémentaires et trois passages en moins par rapport à la traduction de Rufin ( voir 61 Philocalie 1-20. Sur les Écritures, édition M. Harl , coll . SC 302 , Paris 1983 , p . 197-198 ) , le traité sur le libre arbitre est plus long dans Rufin que dans la Philocalie . On trouve une étude complète de ces fragments dans 62 M. Harl , G. Dorival et A. Le Boulluec , Origène. Traité des Principes, introduction , traduction et dossier annexe , Paris 1976, p . 257-300.

Sur l'histoire complexe du texte du Traité des Principes, on peut encore consulter 63 G. Bardy , Recherches sur l'histoire du texte et des versions latines du De Principiis d'Origène, Paris 1923 . Il existe quatre éditions critiques : 64 P. Koetschau, Origenes Werke, V : De Principiis, coll . GCS 22 , Leipzig 1913 ( texte composite, fabriqué à l'aide de l'ensemble des fragments grecs et des versions latines , caractérisé par une hosti lité excessive envers la traduction latine de Rufin et une confiance exagérée dans les ( prétendus) extraits grecs); 65 H. Görgemanns et H. Karpp (édit . ) , Origenes. Vier Bücher von den Prinzipien, herausgegeben , übersetzt, mit kritischen und erläuternden Anmerkungen versehen , Darmstadt 1976 ( le texte est celui de

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Rufin , mais la traduction est celle d'un « Urtext » recomposé à l'imitation de celui de P. Koetschau ) ; 66 H. Crouzel et M. Simonetti (édit. ), Origène, Traité des Principes, 5 vol . , coll . SC 252 , 253 , 268 , 269 et 312, Paris 1978-1984 (le texte latin de Rufin est édité et traduit ; lorsqu'il existe , le texte grec des Philocalistes occupe le haut de la page, le texte de Rufin le bas de la même page et les deux textes sont traduits ; les fragments provenant des autres citateurs antiques sont édités et traduits dans les volumes de commentaire, les tomes II et IV ) ; 67 J. Rius -Camps, Origenes, Tractat dels Principis. Introduccio , text revisat, traduccio i notes, 2 vol . , Barcelona 1998 ( le texte édité est celui de Rufin ; des crochets droits [ ... ] entourent les passages considérés comme des additions de Rufin ou des copistes ultérieurs ; des parenthèses ( ... ) signalent les doubles traductions estimées comme absentes de l'original grec ; là où il existe , le texte de la Philocalie est donné en haut de la page, le texte de Rufin en bas de la même page ; les passages présents chez le seul Rufin et considérés comme appartenant à l'original grec sont pourvus de { ... } ; le texte traduit tente de reconstituer l'Urtext d'Origène et fait appel à tous les citateurs anciens ; des signes typographiques permettent de savoir à quels citateurs on a affaire ). Le Traité des Principes est traduit en plusieurs langues modernes, en allemand (68 K.F. Schnitzer, Stuttgart 1835 ; Görgemanns et Karpp 65 ) , en anglais (69 F. Crombie, Edimburgh 1871 ; 70 G. W. Butterworth , London 1936, 2e éd . 1966) , en catalan ( 71 J. Rius-Camps, Tractat sobre els principis, Barce lone 1988 , ainsi que 67), en français (Harl, Dorival et Le Boulluec 62 ; Crouzel et Simonetti 66 ) , en italien ( 72 M. Simonetti, Torino 1968 , Firenze 1975 (morceaux choisis] ) , en japonais (73 T. Odaka, Tokyo 1978) , en néerlandais ( 74 H.U. Meijboom , Leiden 1921 ) , en polonais (75 S. Kalinkowski , W. Myszor, E. Stanula , Varsovie 1979), en russe (76 N. V. Petrov, Kazan 1899, rééd . Riga 1936) . Ces traductions offrent souvent des annotations et certaines, de véritables commentaires. C'est avant tout à propos du Traité des Principes que l'on a posé la question : Origène est- il systématique ? Y a-t-il un système d'Origène ? 77 U. Berner, Origenes, Darmstadt 1981 , a fait un remarquable historique de cette question depuis le XIXe siècle : Origène est vu tantôt comme le père de la théologie dogmatique ou scientifique (78 G. Thomasius , Origenes . Ein Beitrag zur Dogmengeschichte des dritten Jahrhunderts , Nürnberg 1837 ; Redepenning 2) , tantôt comme le tenant d'une philosophie cosmologique de la religion (79 A. Harnack , Lehrbuch der Dogmengeschichte, Erster Band : Entstehung der kirchenlichen Dogmas , Tübingen 1886 , p. 650-697) , tantôt comme l'auteur d'une synthèse entre l'hellénisme et le christianisme (de Faye 3), tantôt comme l'inventeur d'un système chrétien médio -platonicien (80 H. Koch , Pronoia und Paideusis. Studien über Origenes und sein Verhältnis zum Platonismus, Berlin / Leipzig 1932 ) , tantôt comme le fondateur d'une gnose biblique ( 81 H. Lietzmann , Geschichte der alten Kirche, Band II , Berlin 1932 , p . 305 329 ). À l'opposé, 82 G. Bardy , Origène , Paris 1931 , décrit un Origène non systématique, intéressé par les problèmes de morale et la contemplation ; 83 W. Völker, Das Vollkommenheitsideal des Origenes : eine Untersuchung zur

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Geschichte der Frömmigkeit und zu den Anfrägen christlicher Mystik, Tübingen 1931 , cherche à montrer que les fondements de la théologie d'Origène reposent sur une expérience mystique. Le plus souvent, la tradition germanophone argumente en faveur du caractère systématique de la pensée d'Origène . 84 H. Jonas , « Origenes Peri Archon - ein System patristicher Gnosis » , ThZ 4 , 1948, p. 101-119 , décrit le Traité des Principes en termes de système gnostique ; 85 E. van Ivanka, Plato Christianus. Übernahme und Umgestaltung des Platonismus durch die Kirchenväter, Einsiedeln 1964 ( traduction française 1990 ), voit en Origène un vrai chrétien, qui n'a pas su échapper à l'influence du néoplatonisme (qui n'existait pas à l'époque d'Origène ! ) et dont la tournure de pensée est gnostique, puisqu'elle explique la diversité des êtres par un événement précosmique ; 86 F. Kettler , Der ursprüngliche Sinn der Dogmatik des Origenes, Berlin 1966, estime qu'Origène masque le caractère systématique de sa pensée en énonçant des hypothèses alternatives (par exemple sur la disparition finale , ou non , de la matière ) dans le but de ne pas choquer et d'échapper aux critiques concernant son orthodoxie : 87 P. Kübel , Schuld und Schicksal bei Origenes , Gnostikern und Platonikern , Stuttgart 1973 , voit en Origène un théoricien systématique de la religion chrétienne. L'opinion inverse insiste sur le caractère non systématique de la pensée d'Origène . 88 H. de Lubac , Histoire et esprit. L'intelligence de l'Écriture d'après Origène, Paris 1950 , pense que la réflexion d'Origène est avant tout d'ordre exégétique et repose sur une interprétation spirituelle de l'Écriture ; 89 H. T. Kerr, The First Systematic Theologian , Origen of Alexandria , Princeton ( New Jersey) 1958 , ne voit pas Origène comme un systé matique , contrairement à ce que suggère le titre de son livre ; 90 H. Crouzel, Origène et la connaissance mystique, Bruges /Paris 1961 , estime que le Traité des Principes est “ multiforme" et qu'Origène est à la fois un penseur, un prédicateur, un spirituel , un mystique ; le même 91 H. Crouzel, Origène, Paris /Namur 1985 , décrit Origène comme une sorte de théologien post - Vatican II , ouvert, posant des questions qu'il ne sait pas résoudre ; 92 W. Schütz , Die christliche Gottesdienst bei Origenes, Stuttgart 1984 , voit en Origène un homme d'église plus qu'un philosophe. Une opinion moyenne est attestée chez 93 R. Cadiou , Introduction au système d'Origène, Paris 1932 , qui voit Origène comme un intellectuel non rationaliste , chez 94 J. Daniélou , Origène , Paris 1948 , qui décrit un Origène partagé entre une tendance mystique et une tendance rationaliste et systématique et incapable d'opérer une synthèse entre ces deux pôles, et chez 95 L. Lies, Origenes Peri Archon. Eine undogmatische Dogmatik, Darmstadt 1992 , dont le titre est significatif. Un acquis de la recherche sur Origène depuis un demi-siècle est d'avoir montré que sa théologie n'était pas abstraite et spéculative, mais était fondamen talement scripturaire et biblique ; Origène veut interpréter l'écriture et compren dre à l'aide de l'Écriture. On se reportera à de Lubac 88 et à 96 M. Harl, Le Déchiffrement du sens . Étude sur l'herméneutique chrétienne d'Origène à Grégoire de Nysse, Paris 1993 ( recueil d'articles). C'est dans cette perspective qu’ont été abordées ces dernières années les questions du titre, de la structure et

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de la signification du Traité des Principes. En ce qui concerne le titre, deux thèses anciennes ont été écartées : celle qui affirme que les åpxai sont les ensei gnements fondamentaux de la foi chrétienne ( voir Koetschau 64 et Schnitzer 68 ) et celle pour qui elles sont les principes constitutifs de l'Être ( voir Daniélou 94 , von Ivanka 85, Koch 80 ). En réalité , par ce titre , Origène inscrit son travail dans la tradition philosophique grecque : en plus de la “ logique ", qui étudie le langage et les procédés d'argumentation, et de l '“ éthique ", qui dit comment il faut agir, la réflexion philosophique porte sur la “ physique”, c'est- à -dire les questions relatives au monde , aux êtres qu'il contient, à son créateur ou démiurge, aux rapports entre Dieu et le monde , et elle tente de les élucider à l'aide d'un petit nombre de principes constitutifs, les åpxai . Pour Origène, il n'y a qu'un seul principe, le Dieu trine, unique créateur du monde et des hommes. Le fait même que le titre soit au pluriel montre que , pour lui , c'est un titre étiquette, qui n'a d'autre valeur que de situer son ouvrage dans la tradition philosophique. Voir Harl, Dorival et Le Boulluec 62, p. 7-19 . La division du Traité des Principes en quatre livres remonte sans doute à Origène lui -même. Vers 850 , 97 Photius, Bibl. cod. 8, connaît les quatre livres du traité ; toutefois , il ne signale ni la Préface ni la Récapitulation et il situe le développement « sur la fin » , non pas en queue du livre III , mais en tête du livre IV . Voir 98 J. Rius-Camps, « El Peri Archon segun en Codice 8 de la Biblioteca de Focio » , dans A. Dupleix (édit. ) , Recherches et tradition . Mélanges patristi ques offerts à Henri Crouzel, Paris 1992 , p. 251-257 . Cela étant , la division en quatre livres n'apprend rien sur la composition réelle de l'ouvrage, comme on l'a cru longtemps ( voir 99 J. Quasten , Patrology. Second Volume : The Ante nicene Literature after Irenaeus, Utrecht/ Antwerp 1953 , p. 37-101 , trad. Initia tion aux Pères de l'Église, II , Paris 1957 , p . 49-123 , pour qui le livre I traite de théologie , le livre II de cosmologie, le livre III d'anthropologie et le livre IV d'herméneutique ). En réalité cette division est matérielle et correspond à la longueur des rouleaux utilisés par Origène. Longtemps, le plan du Traité des Principes a paru énigmatique : voir par exemple 100 M. Simonetti , « Osser vazioni sulla struttura del De Principiis di Origene » , RFIC 40 , 1962 , p. 273-290 , et 372-393 . 101 B. Steidle , « Neue Untersuchungen zu Origenes’ Peri Archôn » , ZNW 40 , 1941 , p. 236-243 est le premier à avoir montré que le traité était composé de trois parties d'inégales dimensions, traitant à chaque fois des mêmes sujets, Dieu , les créatures douées de raison , le monde . Pour lui , ces trois parties correspondent à trois cycles d'enseignement. Cette dernière hypothèse n'a pas été acceptée , mais la tripartition de l'ouvrage est en général admise . 102 M. Harl, « Recherches sur le Peri Archôn d'Origène en vue d'une nouvelle édition : la division en chapitres » , dans Studia patristica III , coll . « Texte und Untersuchungen » 78 , Berlin 1961 , p. 57-67 , a étudié la division en de multiples et courts chapitres dans les manuscrits latins ; elle ne doit pas être conservée ; il y a en réalité un assez petit nombre de traités groupés dans un ordre déterminé). 103 P. Kuebel, « Zum Aufbau von Origenes de Principiis » , VChr 25 , 1971 , p . 31-39 , rapproche la démarche d'Origène de celle de Plotin . 104 M. Harl , « Structure et cohérence du Peri Archôn » , dans Crouzel, Lomiento et Rius

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Camps 5 , p . 11-32 , a montré que le Traité des Principes se composait d'une Préface, d'un premier exposé général relativement court (I 1 - II 3 ) , consistant en une vue synoptique des questions de physique traitées de manière systématique et selon le point de vue chrétien , d'une deuxième partie plus développée (II 4 IV 3 ) , qui revient sur les sujets de la première et est faite de neuf questions particulières, lesquelles correspondent à un but explicite de réfutation et de recherche , selon un programme défini dans la Préface, et d'une brève récapitulation ( IV 4) , qui revient sur les sujets de la première partie et donne quelques développements supplémentaires. Selon 105 G. Dorival, « Remarques sur la forme du Peri Archôn » , dans Crouzel, Lomiento et Rius -Camps 5 , p. 33 45 , cette organisation est typique des ouvrages de physique qui étudient les rapports entre Dieu et le monde ; le Traité des Principes peut être rapproché de Jamblique ( » I 3 ), Réponse à la lettre de Porphyre à Anébon sur les mystères d'Égypte (vers 300 ), de Saloustios, Des dieux et du monde ( vers 360 ), et de Proclus, Lettre à l'ingénieur Théodore sur la providence (Ve siècle ). 106 G. Dorival, « Nouvelles remarques sur la forme du Traité des Principes », Recherches augustiniennes 22, 1987 , p. 67-108 , a apporté quelques rectifications à Harl 104 : la Préface n'annonce pas seulement la deuxième partie ( $ 1-9 début ) , mais aussi la première ( 9 suite - 10 ). Surtout, il a donné de nouveaux exemples de traités de physique bâtis comme le Traité des Principes, avec une Préface programmatique, un premier exposé relativement court, général et systématique , un second exposé plus développé, réfutatif et sous le signe de la recherche : outre les trois traités cités en 105 , l'Onirocriticon d'Artémidore ( 7A 429 ; vers 150 ) et le Traité du destin d'Alexandre d'Aphrodise ( A 112 ; vers 200 ), ainsi que deux traités chrétiens, les Hypotyposes de Théognoste d'Alexandrie ( connues par le codex 106 de Photius) et Sur la création de l'homme (De hominis opificio ) de Grégoire de Nysse (SC 6) . Il a également précisé le statut de la récapitulation. Ces analyses ne sont pas unanimement acceptées. 107 J. Rius- Camps, El Peri Archon d'Origenes . Radiografia del primer tractat de teologia dogmatico sapiencial, Barcelona 1985 , 108 Id ., « Los diversos estratos redaccionales del Peri Archôn de Origenes » , Recherches augustiniennes 22, 1987 , p . 5-65 , et Rius - Camps 67, voit le traité comme le produit de quatre strates rédactionnelles : la première strate , antimarcionite , est qualifiée de " cycle dogmatique” ; la deuxième relève d'un " cycle sapientiel " ; la troisième est celle des " questions ouvertes ” ; et la dernière est le " cycle philosophique ” ; la Préface mêlerait les deux premières strates ; I 1 - II , 3 correspond essentiellement à la deuxième strate et II 4 - IV 3 à la première ; mais ces deux parties contiennent des passages qui relèvent des " questions ouvertes” ; IV 4 correspond à la dernière strate . Sur le caractère paradoxal de cette analyse , voir Dorival 106. 109 C. Kannengiesser, « Divine Trinity and the Structure of Peri Archon » , dans Kannengiesser et Petersen 16 , p . 231-249 , 110 Id ., « Origen, Systematician in De Principiis » , dans Daly 9, p. 395-405, et 111 Id ., « Écriture et théologie trinitaire d'Origène » , dans Dorival et Le Boulluec 10 , p. 351-364 , ne croit pas qu'Origène reprenne à son compte une structure littéraire de la tradition philosophique païenne. Il

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propose de distinguer le Traité des Principes proprement dit ( I 1 - II 3 et IV 4) , qu'Origène aurait composé pour clarifier le concept de Dieu trine, et le reste de l'exposé , sur lequel il reste silencieux . 112 M. Simonetti , « ( I ) Principi » , dans Monaci- Castagno 20 , p. 371-376, qui accepte la bipartition ou la tripartition du traité, exprime son scepticisme sur la possibilité de parvenir à des résultats assurés. Quelles que soient les divergences entre ces travaux, ils ont renouvelé la question de l’Origène systématique. Il y a aujourd'hui un large accord pour dire que le Traité des Principes n'est pas une somme théologique avant la lettre. Il est limité aux questions de physique au sens païen du terme. Ces questions sont traitées selon le point de vue chrétien. Elles donnent lieu à un premier exposé systématique . Mais le second exposé consiste à faire des recherches sur des questions difficiles et parfois à proposer plusieurs solutions différentes , comme l'a bien montré 113 M. Alexandre , « Le statut des questions concernant la matière dans le Peri Archôn » , dans Crouzel, Lomiento et Rius -Camps 5 , p . 63 81. En d'autres termes , Origène est à la fois systématique et en recherche . ( 2) Le Traité de la Prière ( Ilepì củxñs , De Oratione), écrit à Césarée de Palestine vers 234-235 (selon Nautin 4, p. 385 ) , se compose de deux parties bien distinctes : si la seconde ( 18-34 ) est un commentaire du Notre Père qui , appa remment, n'intéresse pas directement l'histoire de la philosophie , en revanche la première ( 1-17 ) traite du problème de la prière ( tò tñc euxñs npóßanua) et peut être rapprochée d'ouvrages philosophiques comme la dissertation S'il faut prier de Maxime de Tyr ( = - M 69 ; éd . M. B. Trapp , Stuttgart /Leipzig 1994 et G. L. Koniaris, Berlin /New York 1995 ) ou encore du traité de la prière qui se trouve au sein du Commentaire du Timée de Proclus ( éd . E. Diehl , Procli Diadochi in Platonis Timaeum commentaria , I , Leipzig 1903, p . 206-217, trad. française A.-J. Festugière, Proclus. Commentaire sur le Timée, II , Paris 1967 , p . 27-40 ). Tous ces textes examinent les rapports entre prière et providence. Origène connaît et réfute l'opinion de chrétiens qui « athétisent » les prières en utilisant deux arguments d'origine philosophique qu'ils appuient sur les Écritures : si Dieu , qui est provident, sait à l'avance ce qui se produira (comme le dit le v . 35a du supplément grec au livre de Daniel qui raconte l'histoire de Suzanne ), alors la prière est inutile ; si les décisions de Dieu , qui est provident, sont fermes (comme l'affirme Sagesse 11 , 24) , alors la prière est inutile . Sur ces argumentations, voir 114 J. Pépin , « Prière et providence au 2° siècle ( Justin , Dial . , 14) » , dans F. Bossier et al. (édit . ) , Images of Man in Ancient and Medieval Thought. Studia Gerardo Verbeke ab amicis et collegiis dicata, Louvain 1976 , p . 111-125 ; 115 L. Perrone, « Il discorso protrettico di Origene sulla preghiera. Introduzione al Nepi eủyñs », dans Cocchini 17 , p . 7-32 ; 116 G. Bendinelli , « Il Tepi củync di Origene e la tradizione neoplatonica » , dans Cocchini 17 , p . 33-52 ( confrontation d'Origène avec Plotin , Porphyre, Jamblique , Proclus) ; 117 G. Dorival, « Païens en prière » dans G. Dorival et D. Pralon, Prières méditerranéennes d'hier et d'aujourd'hui, Aix - en -Provence 2000, p. 87-101 .

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On ne s'attend pas à ce que la seconde partie du Traité de la Prière , consa crée à commenter les demandes du Notre Père , contienne des passages intéres sants pour la philosophie . C'est pourtant le cas en deux endroits : ( 1 ) en 24, 2 , à propos du nom de Dieu qu'il faut sanctifier, Origène réfléchit à la distinction entre nom commun et nom propre et tente d'établir qu'il y a une correspondance entre le nom d'un individu ( par exemple Paul ) et sa « qualité propre » ( i8 a Tolórns ) . En fait Origène réfléchit ici , en termes stoïciens , à ce qui fait l'individualité d'un individu , à ce qui fait qu'il n'y a qu'un seul Paul . ( 2 ) En 27, 7-8 , il est question du « pain epiousios » , un adjectif dont Origène ne connaît pas d'autre exemple dans la littérature grecque ; c'est l'occasion pour lui de réfléchir sur le mot oùo a , dont il donne une série de définitions qu'il emprunte peut-être au dictionnaire d'Hérophile (

H 109 ) . Voir 118 R. Cadiou , « Dictionnaires

antiques dans l'euvre d'Origène » , REG 45 , 1932 , p . 271-285 , et 119 Elorduy , « El influjo estoico en Origenes » , dans Crouzel, Lomiento et Rius-Camps 5 , p . 277-288 . Édition critique : 120 P. Koetschau , Origenes Werke, II . Die Schrift vom Gebet, coll . GCS 3 , Leipzig 1899 , p. 297-403 . Traductions allemande par 121 P. Koetschau, München 1926, anglaises par 122 E.G. Jay , London /Westminster (Maryland ) 1954 , 123 J.J. O'Meara , New York/Ramsey 1954 , et 124 R. A. Greer , Toronto 1979 , espagnole par 932, et 125 F. Mendoza Ruiz, Madrid 1966 , françaises par 126 G. Bardy, Pa 127 A. G. Hamman , Paris 1977 , italiennes par 128 G. del Ton , Roma 1974, et 129 N. Antoniono , Roma 1997 , japonaise par 130 T. Odaka, Tokyo 1985, Steur , Brugge / Utrecht 1965 , russe par néerlandaise par 131 P. 132 N. I. Korsunskij, Saint-Pétersbourg 1899 .

Études d'ensemble sur le Traité de la prière: 133 W. Gessel , Die Theologie des Gebetes nach « De oratione » von Origenes, Münster /Paderborn /Wien 1975 ; Cocchini 17 ( neuf contributions ) ; voir aussi 134 L. Perrone, art. « Preghiera» , dans Monaci-Castagno 20 , p . 364-371. ( 3 ) Le Contre Celse (Karà Kémoov ), écrit à Césarée ( ou à Tyr ?) en 249 ( selon Nautin 4 , p . 439 ) , est une réfutation du Discours véritable de Celse ( C79 ), dont l'opuscule serait entièrement perdu sans les citations d'Origène. Sur l'identité de Celse (Origène connaît deux épicuriens de ce nom , ainsi qu'un Celse qui a écrit contre la magie ; mais on connaît l'existence d'autres Celse au IIe siècle ) , sur l'école philosophique à laquelle se rattache Celse (est - il un épicurien comme le croit Origène au début de sa réfutation ? Ou bien dissimule t- il son épicurisme, comme il le pense à un autre moment ? Ou est-il un moyen platonicien ? ) , sur la date et le lieu de composition du traité dirigé contre les chrétiens (entre 160 et 180 , à Rome , à Alexandrie , ailleurs ?) , sur la structure du traité et la signification du titre , sur la confiance qu'on peut accorder aux fragments cités par Origène, sur la “ philosophie ” de Celse ( est -elle une théologie d'inspiration platonicienne conciliant le monothéisme philosophique et le poly théisme religieux , comme le pense 135 K. Pichler, Streit um das Christentum . Der Angriff des Kelsos und die Antwort des Origenes, Frankfurt am Main Bern 1980 , ou une véritable philosophie de l'histoire, selon 136 C. Andresen, Logos

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und Nomos. Die Polemik des Kelsos wider das Christentum , Berlin 1955 ) , sur l'histoire des études consacrées à Celse , on trouve une bonne mise au point dans 137 M. Borret, Contre Celse, t . V , Paris 1976 , p. 9-246 , et chez 138 A. Le Boulluec , « Vingt ans de recherches sur le Contre Celse : état des lieux» dans Perrone 18 , p. 9-28 . Voir aussi 139 G. Dorival, art. « Celso ( Contro ) » , dans Monaci Castagno 20 , p. 67-71 .

La tradition directe du Contre Celse soulève des problèmes complexes, en partie posés par 140 P. Koetschau , Die Textüberlieferung der Bücher des Origenes gegen Celsus in den Handschriften dieses Werkes und der Philocalia , Leipzig 1891. Cette tradition indirecte de la Philocalie, qui offre sept passages différents du Contre Celse, remonte à un archétype meilleur que celui de la tradition directe, ainsi que l'a montré 141 R. P.C. Hanson , « The passage marked unde ? in Robinson's Philocalia XV , 19 » , dans Crouzel et Quacquarelli 6 , p. 293-303. Éditions critiques: 142 P. Koetschau , Origenes Werke, I : Buch I- IV gegen Celsus, coll . GCS 2 , Leipzig 1899 , p. 49-374 ; II : Buch V - VIII gegen Celsus, coll . GCS 3 , Leipzig 1899, p . 1-293 ; 143 M. Borret, Origène. Contre Celse, 5 vol . , coll . SC 132 , 136, 147 , 150 et 227 , Paris 1967-1976 ( le tome V contient l'Introduction générale, des tables et un index ). Traductions allemande par 144 P. Koetschau , München 1926-1927 ( revue par 145 K. Pichler, München 1986 ( morceaux choisis ] ) , anglaise par 146 H. Chadwick , Cambridge 1965 ( avec annotation copieuse ) , espagnole par 147 D. Ruiz Bueno, Madrid 1967 , française par Borret 143 , italiennes par 148 A. Colonna, Torino 1971 , par Simonetti 72 , par 149 L. Datrino , Padova 1987 , et 150 P. Ressa, Brescia 2000 , japonaise par 151 M. Demura, Tokyo 1987 ( livres I - II ) , néerlandaise par Meijboom 74, polonaise par Kalinkowski, Myszor et Stanula 75 , roumaine par 152 T. Bodogae , Bucarest 1984 , russe 153 L. Pisarev , Kazan 1903, rééd . 1912 . Les recherches récentes sur le Contre Celse touchent à l'histoire de la philo sophie principalement sur deux points. Elles posent d'abord la question de la compétence d'Origène en matière de platonisme et de stoïcisme. Le débat a été lancé par 154 H. Dörrie, « Die Schultradition im Neuplatonismus und Porphy rios » , dans Porphyre, coll . « Entretiens sur l'Antiquité classique » 12 , Genève Vandæuvres 1966 , p . 1-32 , repris dans Platonica Minora , München 1976 , p . 406-419, et 155 Id ., « Die platonische Theologie des Kelsos in ihrer Aus einandersetzung mit der christlichen Theologie , Auf Grund von Origenes c . Celsum 7 , 42ff » , NAWG 1967 , 2 , p. 19-55 , repris dans Platonica Minora, p . 229-262 : il établit qu'Origène est incapable de comprendre la portée d'un exposé typiquement platonicien comme celui de Celse dans le Contre Celse VII 42-43 . Mais cette analyse a été contestée en même temps et dans le même ouvrage par 156 J. M. Rist, « Beyond Stoic and Platonist: a sample of Origen's Treatment of Philosophy (Contra Celsum IV , 62-70 ) » , dans Platonismus und Christentum . Festschrift für Heinrich Dörrie = JAC 10 , 1983 , p. 228-238 , repris dans Platonism and its Christian Heritage, London 1985 , nº VI , et par 157 C. J. de Vogel, « Der sog. Mittelplatonismus, überwiegend eine Philosophie

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der Diesseitigkeit ?» , ibid ., p. 277-302 . Rist, en examinant un passage du Contre Celse, se propose de dégager la familiarité d'Origène avec des textes stoïciens et platoniciens très complexes ; selon lui , Origène parle comme un véritable maître ès Platon , qui s'efforce de corriger le raisonnement de Celse au nom même du platonisme ; en IV 62 , Celse , cité par Origène, affirme que, puisque l'univers est un et semblable , le nombre des maux doit être toujours identique ; Origène affirme que l'argumentation de Celse est une mauvaise paraphrase de Théétète 176 a ; utilisant Timée 22 d, Origène montre que la somme des maux est varia ble ; il fait apparaître des fautes dans le raisonnement de Celse : Celse, en tant que platonicien , doit souscrire à la doctrine de la providence ; or sa théorie des maux est en contradiction avec cette doctrine ; car l'idée que la providence ferait en sorte que les maux restent toujours identiques n'est pas platonicienne; en d'autres termes, Origène réclame plus de compétence à Celse en matière de platonisme et le corrige au nom de sa propre compétence. Comme l'a montré Dorival 40 , p. 194 , Origène lui - même revendique cette compétence en plato nisme à quatre reprises, y compris le passage analysé par Rist : en Contre Celse III 63 , il retourne contre Celse une citation des Lois 716 a ; en Contre Celse VI 8 , il établit que Platon a parlé du Fils de Dieu dans la Lettre 6 et il soutient que Celse a omis intentionnellement ce passage qui le gênait ; en Contre Celse VI 10, il cite Timée 41 a pour rectifier l'image que Celse veut donner de Platon. Origène est-il vraiment ce spécialiste en doctrine platonicienne que suggère Rist , mais que conteste Dörrie ? Comme le rappelle Dorival 40 , il faut attirer l'attention sur ce qui fait la fine pointe de l'argumentation d'Origène dans le passage discuté : pour établir que le mal ne subsiste pas toujours au même degré, Origène utilise le Traité élémentaire sur les biens et les maux de Chrysippe ( C 121 ) , notamment l'exemple de la prostitution qui s'est aggravée à travers les siècles . Donc , ce que l'article de Rist met surtout en valeur, à son corps défendant, c'est l'excellente connaissance du stoïcisme qu'a Origène. Le Contre Celse permet même de généraliser cette remarque et d'affirmer que , chaque fois que Celse présente une argumentation de type platonicien , Origène rétorque par une argumentation empruntée aux stoïciens. Le Contre Celse offre de nombreux autres exemples de cette connaissance en profondeur du stoïcisme. Il faut se reporter sur ce point aux analyses précises de 158 H. Chadwick , « Origen , Celsus and the Stoa » , JThS 48 , 1947 , p . 34-49. 159 M. Girardi, « Osservazioni sulle nozioni comuni in Origene con particolare referimento al Contra Celsum » , dans Crouzel, Lomiento et Rius -Camps 5, p . 279-292 , a étudié la doctrine des rouvai Švvolal chez Origène. En outre , depuis une trentaine d'années, des savants anglophones ont fait découvrir la grande familiarité qu'entretient Origène avec les aspects les plus techniques de la logique stoïcienne. Le premier, 160 L. Roberts, « Origen and Stoic Logic » , TAPhA 101 , 1970 , p . 433-444, a mis en valeur l'utilisation de la logique stoï cienne par Origène (emploi du mot npãyua au sens de « signifié » à de très nombreuses reprises ; distinction entre la vérité et le vrai, qui se situe au niveau de la proposition ; l'argument paresseux et l'argument des deux conditionnelles ). 161 J. M. Rist , « The Importance of Stoic Logic in the Contra Celsum » , dans

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H.J. Blumenthal et R. A. Markus ( édit. ) , Neoplatonism and Early Christian Thought. Essays in Honour of A. H. Armstrong, London 1981 , p . 64-78 , repris dans Platonism and his Christian Heritage, London 1985 , nº V , a rectifié et précisé certaines des analyses de Roberts ( notamment sur le sens du mot npãyua et sur le syllogisme des deux conditionnelles ); mais il insiste lui aussi sur l'apport d'Origène à notre connaissance de la logique stoïcienne ; Origène connaît le sens technique d ' axolove a, la distinction stoïcienne entre le possible et le nécessaire, probablement la distinction entre les assertions isolées et les assertions liées ensemble ( la doctrine des confatalia ). Rist conclut que , du point de vue de la connaissance de la logique stoïcienne , seul Galien rivalise avec Origène. Le même Rist 156 montre qu'Origène apporte une grande lumière sur deux points obscurs du stoïcisme : la théorie des démons et, surtout, la théorie des cycles cosmiques ; dans ce dernier cas, Origène connaît en effet la théorie chrysippienne (orthodoxe ) des cycles absolument identiques et les deux autres versions de la théorie : celle des cycles indistinguables entre eux et celle des cycles caractérisé par des changements infimes. Voir aussi 162 J. Barnes, « La doctrine du retour éternel » , dans Les Stoïciens et leur logique, Paris 1978 , p. 3-20 . La seconde question que permet de traiter le Contre Celse est celle des modes d'écriture philosophiques . 163 G. Dorival , « La forme littéraire du Contre Celse » , dans Perrone 18 , p . 29-45 , montre que cette apologie ne peut être rapprochée ni des apologies juives de langue grecque , ni des apologies chré tiennes des trois premiers siècles . En revanche, il existe au moins trois traités païens antérieurs au Contre Celse dont la composition rappelle celle de ce dernier : une préface suivie de la réfutation d'un texte de référence cité sous forme de fragments, chaque fragment étant suivi d'une réplique argumentée. Le plus ancien de ces traités est le Contre Colotès ( 2 + C 180 ) , Mooc Kwłótny, de Plutarque, où le philosophe de Chéronée s'en prend à un auditeur et élève d'Épicure ( » E 36) , qui avait écrit un traité Qu'on ne saurait même pas vivre selon les doctrines des autres philosophes ; il y attaquait successivement les opinions de Démocrite, Empédocle , Platon , Socrate et Stilpon , ainsi que celles de contemporains, que Plutarque essaie d'identifier. Les deux autres traités sont écrits par Galien . Dans le Contre ce qui a été opposé aux aphorismes d'Hippo crate par Julien, Πρός τα αντειρημένα τοίς Ιπποκράτους αφορισμούς υπό ’lovalavoŨ, Galien s'en prend aux quarante -huit livres rédigés par Julien d'Alexandrie contre les aphorismes d’Hippocrate. Dans le Contre Lykos, Mpòs Aúxov, il critique Lykos ( > L 88 ) qui , dans ses Commentaires exégétiques des aphorismes d'Hippocrate, s'en prenait en particulier à l'aphorisme « les êtres qui croissent ont une très grande chaleur innée » . Dans ces deux traités, Galien cite des passages (Øňoeiç) de Julien et de Lykos et, ensuite , les réfute . Ce qui rappro che le Contre Celse de ces trois traités, c'est d'abord le titre. Certes, la tradition manuscrite attribue deux titres au Contre Celse: Contre le traité qui a pour titre Discours vrai de Celse , Πρός τον επιγεγραμμένον Κέλσου αληθή λόγον , selon le papyrus de Toura, avec la présence de la préposition npòs pour dire “ contre” ; Contre Celse, Katà Kéoov ou Tà xarà Kéoov selon le Vaticanus

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graecus 386 et la Philocalie , avec la préposition xatà ; mais le titre le plus ancien est vraisemblament le premier, le second titre s'expliquant par la multiplication des traités Karà 'Exnvwv à partir du IVe siècle , de la sorte, le Contre Celse s'inscrit dans le droit fil de la tradition grecque de réfutation , qui distinguait les discours xará tiva , qui sont des discours qui mettent en accusation un accusé , ainsi les traités de Colotès , Julien , Lykos et Celse , et les discours após tiva , qui sont des discours de défense en réponse à une accu sation , comme les traités de Plutarque, Galien et Origène. En second lieu , tous ces traités sont des apologies, c'est - à - dire des réponses argumentées à des accu sations, celles de Julien et de Lykos contre Hippocrate, celles de Colotès contre toute une série de philosophes, celles de Celse contre les chrétiens. Le troisième trait commun est la présence d'une préface qui offre toujours trois thèmes : le caractère outrageant de l'accusation ; sa nullité qui contraste avec le mérite de l'accusé et qui ne devrait appeler aucune réplique sinon le silence ; enfin l'inter vention d'un tiers qui a décidé l'auteur à répliquer. En quatrième lieu , Plutarque, Galien et Origène donnent la parole à leurs adversaires, sous forme de citations, et ils les réfutent au fur et à mesure ; en règle générale, les citations sont fidèles et sont données dans l'ordre même des traités qui font l'objet de la réfutation ; parfois, les citateurs prennent des libertés avec leurs sources : Plutarque cite souvent Colotès au style indirect et semble proposer des résumés ; Galien reconnaît qu'en présence de très longs passages, il s'est contenté de l'essentiel ; Origène signale qu'il a interverti deux passages ( V 34 ) ; il est sûr qu'il anticipe des citations et qu'il en omet d'autres ; néanmoins, grâce à cette technique de la citation , il est possible de reconstituer avec une bonne fiabilité les textes de départ. Le cinquième trait commun consiste dans le caractère composé, " syggraphique", des traités : loin d'être des notes personnelles destinées à des cours (únouvnuata ), ce sont des écrits tout d'abord destinés à être édités, diffusés et lus , ensuite pourvus de l'ornement du style , enfin obéissant à la règle du but unique ( Elç oxonóc ). (4) Il est possible que , parmi les ouvrages perdus d'Origène, certains aient traité « de questions théoriques de philosophie ou de morale » selon l'expression de Nautin 4 , p . 252 , à propos du traité Sur certaines questions des Proverbes. Toutefois, si les deux fragments tirés du Livre sur les Proverbes de Salomon et cités par Pamphile, Apologie pour Origène 186 et 188 (SC 464) proviennent non pas des Trois livres sur les Proverbes, mais du traité Sur certaines questions des Proverbes, ainsi que le suggère Nautin 4 , p . 250 , alors on peut douter que ce traité ait abordé des questions de philosophie théorique, puisque le premier de ces fragments consiste en une critique par Origène de croyances de certains chrétiens dans la transmigration de l'âme dans les corps d'animaux et que le second traite du châtiment des péchés. L’apport d'Origène pour l'historien de la philosophie antique. On s'attend à ce que cet apport soit faible , pour deux raisons. D'abord , comme l'a souligné 164 H. Chadwick , Early Christian Thought and the Classical Tradition, Oxford 1966 , p . 85-123 , et 165 Id ., « Origen » , dans A.H. Armstrong ( édit. ), The Cambridge History of Later Greek and Early Medieval Philosophy,

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Cambridge 1967 , p . 162-182, Origène, comme les autres Pères, est le témoin d'une sorte de koiné philosophique qui se caractérise par des emprunts de type scolaire aux logiques aristotélicienne et stoïcienne, à l'éthique stoïcienne et à la physique platonicienne. En second lieu, Origène n'est pas un philosophe au se de l'Antiquité ; ce qui l'intéresse , c'est l'Écriture, qu'il a passé sa vie à scruter, c'est la vraie sagesse , la vraie philosophie , la vie chrétienne ; dans cette perspec tive, il pense que la philosophie païenne a son utilité pour l'établissement de la sagesse chrétienne, ainsi que l'ont montré 166 M.J. Denis , De la philosophie d'Origène, Paris 1884, et 167 H. Crouzel, Origène et la philosophie, Paris 1962 , et ainsi qu'Origène l'affirme lui-même, par exemple dans la Lettre à Grégoire 1 ( citée par Philocalie 13 ) : « ce que les enfants des philosophes disent de la géométrie, de la musique , de la grammaire, de la rhétorique et de l'astronomie, qu'elle sont des auxiliaires ( ouvéplooi) de la philosophie, cela nous (i.e. les chrétiens) devons le dire aussi de la philosophie relativement au christianisme » . Sur la dévalorisation et la récupération de la philosophie par Origène, voir supra la fin de l'exposé sur « la philosophie dans la vie d'Origène » . En ce sens , il arrive qu’Origène élabore des concepts originaux à partir d'élé ments empruntés aux différents systèmes philosophiques ( aristotélicien, stoïcien et platonicien surtout). Par exemple, pour tenter de penser la résurrection future en accord avec les données de l'Écriture, qui oppose le corps spirituel ou pneumatique à venir au corps animé ou psychique de cette vie ( I Cor. 15 , 44 ), Origène crée le concept de forme corporelle ( Eldoç owuatixóv), qui combine une terminologie platonico - aristotélicienne (ETdoc ) et une terminologie stoï cienne ( owuatixóv) ; cette forme corporelle est à la fois de l'ordre du corps ( les cicatrices, les taches de rousseur, les stigmates feront partie du corps ressuscité si l'on en croit le Commentaire sur le psaume 1 , 5 ) , mais aussi de la transfor mation du corps ( le corps ressuscité n'aura plus ni visage , ni membres , ni entrailles ) ; c'est cette forme corporelle qui est appelée à ressusciter. Sur ce concept , difficile à comprendre et qui a fait, dès l'Antiquité , l'objet de contresens, voir 168 A. Le Boulluec , « De la croissance selon les stoïciens à la résurrection selon Origène» , REG 88 , 1975 , p . 143-155 ; 169 J. Ruis - Camps , « La suerte final de la naturaleza corporea segun el Peri Archôn » , dans Studia Patristica XIV , coll . « Texte und Untersuchungen » 117 , Berlin 1976 , p . 167 179 ; 170 D. J. Bostock , « Quality and corporeity in Origen » , dans Crouzel et Quacquarelli 6, p. 323-337 ; 171 H. Crouzel, « La doctrine origénienne du corps ressuscité » , BLE 81 , 1980, p . 175-200 , 241-266 , repris dans Les Fins dernières selon Origène, Aldershot 1990 , nº IV ; 172 G.C. Stead , « Individual personality in Origen and the Cappadocian Fathers » , dans Bianchi et Crouzel 14 , p . 170 191 , repris dans Substance and Illusion in the Church Fathers, London 1985 , nº XIII ; 173 A. Vitores , Identidad entre el cuerpo muerto y resucitado en Origenes segun el « De Resurrectione » de Metodio de Olimpo, Jérusalem 1981 , p . 88-115 ; 174 G. Dorival , « Origène et la résurrection de la chair » dans Lies 8, p . 291-321 (qui , pour faire comprendre l'intuition d'Origène , rapproche l’etdoç owuatixóv du concept moderne de code génétique ) .

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Origène est donc fondamentalement un théologien . Pourtant son apport à l'histoire de la philosophie grecque est loin d'être négligeable, et cela dans trois domaines , comme l'a montré Dorival 40 . ( 1 ) Origène citateur. Origène peut parfois être considéré comme une sorte d'auteur de manuel d'opinions philosophiques ; c'est ce que montre 175 E. Junod , Origène . Philocalie 21-27, SC 226, p. 97-102 à propos du chapitre 26 de la Philocalie ( « Sur ce que sont les biens et les maux » ) , qui provient du Commentaire sur le psaume 4 : Origène passe en revue les définitions épicurienne , stoïcienne et péripatéticienne des biens dans un exposé scolaire. Mais son apport est plus intéressant dans le cas de citations précises. Il a été question supra des extraits du Discours vrai de Celse : notre connaissance de ce traité caractéristique de la pensée médio -platonicienne repose exclusivement sur les citations d'Origène ; Celse fait lui - même quelque vingt-cinq citations des présocratiques et de Platon ; or, via Origène , Celse est le seul citateur à transmettre trois fragments d'Héraclite (» H 64 ; B 78 ; B 79 et B 80 ) et un fragment de Phérécyde ( B5 ) . Passons maintenant aux autres citations d'Origène: - les presocratiques : dans le Contre Celse , Origène mentionne Anaxagore ( A 158 ) , Démocrite ( > D 70 ) , Phérécyde , mais sans citer de textes de ces auteurs . En Contre Celse IV 25 , il cite un passage du traité Sur la vérité d'Antiphon ( > A 209 ) , qu'il confond avec l'orateur attique. Enfin , en Contre Celse V 49 , il cite anonymement un fragment d'Empédocle (» E 19 ; Catharmes B 137 ). - Pythagore et les pythagoriciens : Origène (Contre Celse V 57) affirme qu'il a lu Pythagore, mais il ne donne aucune citation de lui . En revanche, il fait connaître cinq titres de l'æuvre de Nouménios ( > * N 66 ); sans Origène, nous ignorerions l'existence de quatre de ces traités ( Sur les nombres, ſlepi đpiðuwv; Sur le lieu , Nepì tónov ; La huppe, " EnoŲ ; Sur l’incorruptibilité de l'âme, lepi ågdapo aç yuxñs ; voir Contre Celse V 51 et 46 ) et nous ne saurions pas que le cinquième traité , Sur le bien ( Ilepì tảyadoő ) , comportait au moins trois livres ( Contre Celse I 15 et V 51 ) ; à propos de ce dernier traité, Origène est le seul à donner les informations suivantes : les Juifs définissent Dieu comme incorporel; Numénius interprète allégoriquement les prophètes, ainsi que l'histoire de Jésus. Origène fait encore connaître un long fragment sur Sérapis, devenu dieu grâce à des rites impies et des sortilèges démoniaques (Contre Celse V 38 ) . Proche de ce dernier passage par la thématique est le fragment d'un pythagoricien anonyme auquel Origène se réfère ( Contre Celse VII 6 ) ; il s'agit d'une interprétation allégorique d'Homère : la peste envoyée aux Grecs par Chrysès, prêtre d'Apollon , renvoie à l'action des mauvais démons ; on peut se demander si ce pythagoricien anonyme ne serait pas Numénius . Sur l'influence exercée par Numénius sur Origène , voir 176 R. Somos , « Origen and Numenius», Adamantius 6 , 2000 , p. 51-69 . - Platon et les platoniciens : Origène cite onze livres différents de Platon ,le Phèdre ( quinze citations dans le Contre Celse I 20 ; 57 ; III 80 ; IV 40 ; V 2 , 42 ; VI 19 ; 20 ter ; 43 ; 59 ; VII 44 ; VIII 4 ) , la République ( douze citations dans le Contre Celse I 17 ; 29 ; II 16 ; IV 36 ; 50 ; V 43 ; 47 ; VI 4 ; 64 ; VII 5 ; 38 ; et les

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Stromates VI , voir Nautin 4 , p. 295 ) , le Timée (sept citations dans le Contre Celse IV 20 ; 56 ; 62 ; V 21 ; VI 10 ; 21 ; 58) , l'Apologie ( trois citations, Contre Celse VI 8 ; VII 6 ; VIII 7-8 ) , les Lettres 6 et 7 ( trois citations , Contre Celse VI 8 ; 10 et 12 ) , les Lois ( trois citations, Contre Celse IV 26 ; 79 ; VI 63 ) , le Philèbe ( trois citations, Contre Celse I 25 ; IV 48 ; VII 43 ), le Banquet (Contre Celse IV 39 ) , le Criton ( Contre Celse II 17 ) , le Gorgias (Contre Celse VI 57 ) et le Théétète ( Contre Celse II 17 ) . De la sorte , ses lectures recoupent celles de Celse. Origène ne cite Plutarque qu'une seule fois (Contre Celse V 57 ) , mais c'est pour donner un des six fragments de son traité Sur l'âme, dont les cinq autres sont connus par Aulu-Gelle (deux ) , Eusébe de Césarée ( un ) et Jean de Stobi (deux ). Les écrits d'Origène font écho à de nombreux thèmes de la tradition platonicienne . Voir par exemple 177 H. Crouzel , « Le thème platonicien du “ véhicule de l'âme” chez Origène » , Didaskalia 7 , 1977 , p. 225-237 , repris dans Les Fins dernières chez Origène, Aldershot 1990 , n° III ; 178 T. Mikoda , « A Comparison of the Demonologies of Origen and Plutarch » , dans Daly 9 , p. 326 332 ; 179 J. Pépin, Idées grecques sur l'homme et sur Dieu , Paris 1971 , p . 178 203 ( la thématique du Premier Alcibiade chez Origène ) ; 180 J. Dillon , « Looking on the Light : Some Remarks on the Imagery of Light in the First Chapter of the Peri Archon » , dans Kannengiesser, Petersen 16 , p . 215-239, repris dans The Golden Chain . Studies in the Development of Platonism and Christianity, Aldershot 1990 , nº XXII ; 181 A. Scott , Origen and the Life of Stars. An History of an Idea, Oxford 1991 ( outre Platon , il est question des pré socratiques, d'Aristote, des stoïciens et des philosophes d'époque hellénistique ) ; 182 G. Sfameni Gasparro, « Eguaglianza di natura e differenza di condizione dei Royixo : la soluzione origeniana nel contesto delle formule antropologiche e demonologiche greche del II e III sec . » , dans Daly 9 , p . 301-319 (rappro chements avec Platon et Plutarque ); 183 K. Comoth , « " Homoiosis " bei Platon und Origenes » , dans Bienert et Kühneweg 11 , p. 69-74 ( le thème de l'assimi lation à Dieu) ; 184 L. Perrone, « " Ixvoç évovolaquoŨ. Origen , Plato and the Inspired Scriptures » , dans Hellenic Studies on the Verge of Centuries = Phasis. Greek and Roman Studies, vol . 2-3 , Tbilissi 2000 , p . 319-326. Sur les éléments platoniciens de la pensée d'Origène et sur la manière dont il se démarque de Platon , voir 185 J. M. Rist , Eros and Psyche. Studies in Plato , Plotinus and Origen, Toronto 1964 ( 19672 ) , p . 195-212 (par exemple , pour parler de Dieu , Origène utilise le biblique ó űv , et non le neutre tò õv) . – Aristote et les péripatéticiens: Origène fait onze références à Aristote dans le Contre Celse, qui consistent dans l'énoncé de thèses aristotéliciennes par exemple sur les noms qui existent par convention et non par nature , ou sur l'éther immatériel . 186 D.T. Runia, « Festugière Revisited : Aristotle in the Greek Fathers » , VChr 43 , 1989 , p . 1-34, signale ces références et propose de voir deux autres allusions à Aristote dans le Commentaire sur les Psaumes qu'Origène a composé à Césarée de Palestine en 246 et 247. En fait, le passage sur le Psaume 35 (34 TM ) , 6 (PG 12 , 1316 A ) revient à Évagre le Pontique ( scholie n ° 3 de la série du Vaticanus gr. 754 ) . En revanche l'allusion de la

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préface ( 1053 A ) est bien d'Origène : pour commenter le titre des psaumes“ sur la fin ” (Eiç tò témoc ) , il a recours aux définitions du mot “ fin ” qu'il a trouvées dans « les écrits d'Aristote » ; il cite trois définitions, dont les deux premières ont un parallèle étroit avec la Métaphysique a 2 , 994 b 9-10 ; la troisième ne semble pas figurer chez Aristote . Mais on peut douter qu'Origène cite directement Aristote. Il utilise probablement un lexique alphabétique des æuvres d'Aristote, dans lequel ont été introduites des définitions extra -aristotéliciennes. D'autres définitions d'allure aristotélicienne présentes chez Origène peuvent remonter à ce lexique , par exemple les définitions d'apxń dans le Commentaire sur Jean I 16 , la définition d'auapt a dans le Commentaire sur Romains IX 2, la définition des homonymes que donne l'Homélie 20 sur Jérémie 1 ( qui remonte aux Catégories 1 ) . Voir Cadiou 118 et 187 E. Klostermann, « Überkommene Definitionen im Werke des Origenes » , ZNW 37 , 1938 , p . 54-61 . Origène a- t - il été un familier et un grand lecteur d'Aristote ? C'est ce qu'affirment de Faye 3 , III , p . 87 ( selon lui , Origène doit à Aristote sa méthode d'exposition , qui consiste à énoncer pour commencer « une série interminable d'únop al » ; il retrouve dans le Contre Celse V 45 la doctrine aristotélicienne des óvóuata ; en VI 62 , la définition aristotélicienne de la povń dans le Traité sur la Prière, la théorie des opalpoeldñ obuata ), Langerbeck 31 ( Ammonios Saccas , le maître d'Origène, aurait délivré un enseignement imprégné d'aristo télisme , auquel Origène serait redevable de certaines notions prégnantes du Traité des Principes, ainsi la notion d'EEC), et 188 B.D. Jackson, « Sources of Origen's Doctrine of Freedom » , CH 35 , 1966 , p . 13-23 . Ces trois auteurs ont voulu rattacher à l'Éthique à Nicomaque la doctrine du libre arbitre ( Tò aútegoúolov ) exposée dans le Traité des Principes III 1. Voir aussi 189 W. A. Banner, « Origen and the Tradition of Natural Law Concept » , DOP 8, 1954 , p . 51-82 , et 190 R. M. Berchmann , « Origen on The Categories: A Study in Later Platonic First Principles » , dans Daly 9 , p . 231-252. Même si toutes ces affirmations ne sont pas dénuées de fondement ( par exemple la méthode d'exposition d'Origène rappelle effectivement celle d'Aristote ) , en revanche l'influence propre d'Aristote sur Origène ne soit pas être surestimée : les traits aristotéliciens que l'on trouve chez lui relèvent en réalité d'une philosophie scolaire commune ; par exemple , comme l'a montré 191 G. Bardy, « Origène et l'aristotélisme » , dans Mélanges G. Glotz, Paris 1932 , p. 78-83 , la doctrine du Traité des Principes sur la matière distincte des qualités est moins aristotélicienne que dans l'air du temps . En outre, la doctrine du libre arbitre reprend une terminologie stoïcienne, et non aristotélicienne. Dans le Contre Celse I 15 , Origène cite un fragment du péripatéticien Hermippe ( > * H 86 ; fragment 81 Wehrli ) , qu'il tire de son traité Sur les nomo thètes, connu par huit autres fragments : trois viennent d'Athénée de Naucratis ( » A 482 ) , deux d'un papyrus d'Oxyrhynchos , deux de Plutarque et un de Porphyre . Il n'est pas sûr qu'Origène ait eu un accès direct à Hermippe, mais il le connaît probablement par un intermédiaire. Épicure et les épicuriens : dans le Contre Celse, Origène se réfère à eux quinze fois ( I 10 ; 13 ; 24 ; 43 ; II 13 ; III 75 ; 80 ; IV , 14 ; V 47 bis ; 61 ; VII 3 ;63;

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66 ; VIII 45 ) , sans qu'il s'agisse de citations d'œuvres précises. Quatorze de ces citations sont données par le recueil de 192 H. Usener, Epicurea, Leipzig 1887 . Sur l'importance du fragment que ne donne pas le recueil ( IV 14 ) , voir infra. - les stoïciens ( voir Chadwick 158) : Origène se réfère à Zénon à six reprises ( Contre Celse I 5 ; III 54 ; IV 54 ; VII 63 ; VIII 35 ; 49 ) ; le recueil de 193 I. ab Arnim , SVF I , ne signale que quatre de ces références ( n ° 40 ; 244 ; 265 ; 297 ) ; il omet les citations de Contre Celse IV 54 ( où il est question de la thèse des disciples de Zénon sur les corps d'animaux et les plantes : citation d'un stoïcien inconnu ?) et VIII 49 (pour Zénon , Dieu est corporel ) . En ce qui concerne Chrysippe ( C121), ab Arnim a estimé que , chaque fois qu'Origène dit « les stoïciens » ou que ses phrases ont une coloration stoïcienne, « ce sont les mots mêmes de Chrysippe » qui sont présents ( vol . I , p . XLVI XLVII ) . D'où la présence de soixante dix - huit extraits tirés de huit des écrits d'Origène ( cinquante -cinq viennent du Contre Celse ; sept , du Traité des Prin cipes ; cinq , du Commentaire sur Matthieu ; quatre, du Commentaire sur Jean ; deux , du Traité sur les Prière ; deux , du Commentaire sur la Genèse ; un , du Commentaire sur Ezéchiel et du Commentaire sur les Psaumes ). En particulier, ab Arnim reconstitue la doctrine du destin et du libre arbitre à partir de fragments empruntés au Traité des Principes III 1 ( fragments 988 et 990 ab Arnim, t . II ) , au Traité sur la Prière 6 , 1-4 ( fragment 989 ab Arnim , t . II ) et au Commentaire sur la Genèse ( fragment 996 ab Arnim , t. II ) . Mais , comme l'ont montré Jackson 188 et surtout 194 J. M. Rist , « Prohairesis : Proclus, Plotinus et alii » , dans De Jamblique à Proclus, coll . « Entretiens sur l'Antiquité classique » 21 , Genève /Vandeuvres 1975 , p . 103-117 , repris dans Platonism and its Christian Heritage , London 1985 , nº XIV , la doctrine du libre arbitre mêle des éléments stoïciens ( notamment l'idée que la liberté consiste dans le pouvoir de réagir aux représentations ou encore la distinction entre les causes principales et les causes auxiliaires) et des apports platoniciens ( par exemple les idées de choix antérieur et de causes plus anciennes ) . Il en résulte que le jugement libre d'Origène n'est pas identique à l'assentiment de Chrysippe. De manière géné rale , il n'est pas légitime d'attribuer à Chrysippe des passages qu'Origène prend nettement à son compte ( dans le Contre Celse IV 69 , Origène affirme que « nous » , les chrétiens , pensons qu'aucune âme n'a été faite mauvaise , mais qu'elle le devient par l'éducation , la perversion, l'entourage ; il est surprenant de lire ce texte en SVF III n ° 233 ) . Pas plus qu'il n'est légitime de considérer que les passages introduits par une formule du type « les stoïciens disent que ... » reviennent à Chrysippe, comme le montre le cas suivant : dans le Contre Celse II 20 , Origène réfute l'argument paresseux par la distinction entre le possible et le nécessaire ; ce n'est pas l'argumentation de Chrysippe, qui distingue les asser tions isolées et les assertions liées , confatales ( voir Cicéron , Traité du Destin 30) . En réalité , il n'est question de Chrysippe que dans le Contre Celse et à onze reprises seulement : il est explicitement cité en I , 40 ; 64 ; II 12 ; IV 48 ; 63 ; V 57 ; VIII, 49 ; 51 ; il est implicitement visé en trois autres passages : IV 64 ( qui est la suite du fragment cité en 63 , sous une forme adaptée au contexte ) ; IV 78 ( la thèse selon laquelle les fauves nous sont donnés pour développer les germes

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de courage en nous revient à Chrysippe comme le montre le parallèle avec Porphyre, De l'abstinence III 20) ; VIII 67 ( l'identification entre Athéna et la sagesse est atribuée à Chrysippe par Philodème, Sur la piété 16 ) . Trois de ces onze passages ne prétendent pas donner des citations d'écrits précis de Chrysippe ( I 40 ; II 12 ; VIII 49) . Deux des huit passages restants proviennent du Traité élémentaire sur les biens et les maur , Εισαγωγή περί αγαθών και xaxőv (titre légèrement différent chez Athénée , Deipnosophistes IV , 159 d , et Plutarque, Des contradictions des stoïciens 9 ) : IV 63 et 64 ; de cette manière , Origène nous fait connaître deux des quatre fragments de ce traité, les deux autres étant donnés par Athénée. Deux autres textes proviennent du livre « théra peutique » du Traité sur les passions, qui était le quatrième et dernier livre de ce traité ( voir SVF III n° 44 ) ; mais Origène ne fait connaître en réalité qu'un seul extrait de ce livre, car le Contre Celse I 64 est un résumé du texte littéral donné par VIII 51 ; de la sorte, il apporte beaucoup moins à notre connaissance du traité de Chrysippe que Galien ( quarante -deux extraits ) et Plutarque ( quatre extraits ). Restent quatre passages , dans lesquels Origène ne donne pas d'indications précises ( IV 48 ; 78 ; V 57 ; VIII 67 ) : un seul peut être rattaché à une cuvre de Chrysippe, le fragment de IV 48 , dans lequel Origène raconte que Chrysippe interprétait allégoriquement un tableau de Samos peignant Zeus et Héra faisant l'amour ; en effet, Diogène Laërce, Vies et doctrines des philosophes illustres VII 187-188 , rapporte que Chrysippe interprétait l'histoire de Zeus et d'Héra dans le traite Sur les anciens physiologues, Περί των αρχα ων φυσιολόγων , il est probable que le fragment d'Origène vient de ce dernier ouvrage. Origène fait connaître le titre d'un écrit de Chairémon , prêtre égyptien et philosophe stoïcien du premier siècle de notre ère ( > C91), et il transmet le seul fragment connu de ce traité Sur les comètes, llepì xountāv ( Contre Celse I 59 = fragment 3 van der Horst ). Dans la préface à son Commentaire sur les Psaumes, Origène cite le lexique d'Hérophile, qu'on date du IIe siècle de notre ère, Sur l'usage stoïcien des noms, Tlepi otwixñÇ óvouátwv XońoewÇ. En réalité , il cite deux extraits de cet écrit: d'abord la définition du mot “ fin ” , téžoç ensuite , les sept définitions du mot “ dieu” , deoç. De plus , comme l'a montré Cadiou 118 , Origène a probablement recours au même lexique dans le Traité sur la Prière 27 , 8 , où il donne une série de définitions du mot " essence ” , oủo a . Enfin , il est possible que le Commen taire sur le Psaume 4 , cité par la Philocalie 26 , 1 , fasse référence au même lexique dans le passage où Origène passe en revue les définitions épicurienne, stoïcienne et aristotélicienne des biens . A moins que ces définitions ne provien nent du lexique aristotélicien signalé supra ou d'un autre lexique. Un apport d'Origène en matière de stoïcisme que les historiens de la philo sophie méconnaissent en général concerne Musonius Rufus ( M 198 ) , le maître d'Épictète ( 2E 33 ) , célèbre pour ses démêlés avec Néron et Vespasien et pour son amitié avec Titus . Dans ses Scholies sur les Psaumes, partiellement éditées d'après le Vindobonensis th . gr. 8 par 195 R. Cadiou , Commentaire inédits des Psaumes, Paris 1936, p . 118 , au psaume 118 , 161 , Origène cite un paradoxe de

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Musonius , qui ne figure pas dans les éditions de ses fragments, ni dans le papyrus Rendell Harris de Musonius. Le voici : 'Ασκητέον το λο δωρον και το πικρώς λο δωρον, αλλά καθ ' εαυτού τον θυμόν και την πικρ αν ανατιθηνητέον, αλλά κατά της εν ημίν ηδυπαθε ας. « Il faut pratiquer l'insulte , voire l'insulte cruelle, mais contre soi - même ; il faut nourrir la colère et la cruauté, mais contre la sensualité qui est en nous. » Où Origène a-t- il trouvé ce fragment ? D'après 196 C. Lutz , « Musonius Rufus ‘ The Roman Socrates" » , YCIS 10 , 1947 , p. 1-147 , la confrontation entre les fragments connus par Jean de Stobi ( » J 2 ) et le papyrus Rendell Harris de Musonius prouve qu'au IIIe siècle , il existait un corpus musonien complet , dans lequel Jean de Stobi s'est alimenté deux siècles plus tard . Il est possible qu'Origène ait eu un accès direct à ce corpus. – les cyniques : dans le Commentaire sur Matthieu XV 15 , Origène rapproche l'épisode évangélique du jeune homme riche de l'attitude de Cratès ( > * C 205 ) , qui a donné toute sa fortune aux Thébains ; en accomplissant ce geste , Cratès déclare : « aujourd'hui Cratès libère Cratès » ( ońuepov ó Kpáms Kpárnta ÈNevdepoi) or, Origène est le seul à transmettre ce propos sous cette forme , qui ne figure pas dans les éditions des cyniques . Sur l'attitude d'Origène à l'égard du cynisme , parfois dénonciatrice , plus souvent positive , voir 197 G. Dorival , « L'image des cyniques chez les Pères grecs » , dans M.-O. Goulet -Cazé et R. Goulet , Le Cynisme ancien , p . 419-443, en particulier p . 440-441. - philosophes divers : dans le Contre Celse VI 8 , Origène cite un fragment d'Aristandros (>* A 343 ) qui avait écrit que Platon était le fils , non d’Ariston , mais d'un fantôme qui avait la forme d'Apollon et qui s'était uni à sa mère Amphictionè ( erreur pour Perictionè ) . Aristandros est soit Aristandros de Telmessos ( voir 198 A. S. Riginos , Platonica, p . 11 ) , le devin d'Alexandre , soit un Aristandros connu par le Commentaire du Timée III de Proclus ( éd . Diels , t . II , p . 153 , 1. 23 ) et qui , comme Nouménios, professait que l'âme est un nombre , soit un autre Aristandros. En outre , on doit à Origène une citation de Moiragénès ( ” M 87 ; Contre Celse VI 41 ) , un philosophe qui avait écrit des Mémorables relatifs à Apollonios de Tyane . Enfin , dans le Contre Celse II 72 , Origène donne des définitions du mot " voix ” , ouvń , qu'il dit provenir des livres Tepi Dwvñs. Arnim imprime cet extrait parmi les fragments de Chrysippe ( SVF II 128 ) . Mais les définitions données par Origène ont une multitude de parallèles dans les textes philosophiques de toutes origines . Il s'agit d'un titre , qu'on ne peut rattacher à une école plutôt qu'à une autre . On a proposé de répérer chez Origène d'autres citations . Par exemple , de Faye 3 pense que le trope dont il est fait mention dans le Contre Celse VII 15 provient de Sextus Empiricus . En réalité , Origène tient ce trope des stoïciens, comme il le dit lui - même explicitement . La suggestion de Vitores 173 , avancée avec prudence, selon laquelle Origène aurait lu Galien , est discutable . ( 2 ) L'apport d'Origène pour la reconstitution de systèmes ou de concepts philosophiques : - Origène et l'épicurisme : 199 H. Chadwick , « Origen , Celsus and the Resurrection of the Body » , HTHR 41 , 1948 , p . 83-102 , a attiré l'attention sur le

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Contre Celse IV 14 , qui est le seul passage relatif à l'épicurisme absent du recueil d'Usener 192 ; Origène y explique que les dieux d'Épicure, étant composés d'atomes , sont sujets à la dissolution ; s'ils ne se dissolvent pas, c'est qu'ils secouent et rejettent les atomes corrupteurs. Origène éclaire ainsi un point difficile de l'atomisme épicurien . - Origène et le moyen platonisme. Trois questions se posent: ( a ) Origène permet - il de reconstituer l'enseignement d'Ammonios Saccas ( 7 - A 140 ) ? Rien n'est moins sûr. D'abord parce que, comme on l'a montré supra , il n'est pas établi qu'Origène ait été l'élève d'Ammonios. Ensuite parce que , en supposant qu'on admette le témoignage de Porphyre, ce dernier raconte qu'Origène a été un simple auditeur , åxpoatńs , et non un élève assidu , (nawińç. Il ne peut donc être un chemin d'accès privilégié à la pensée du maître de Plotin . Précisément , on a tenté de reconstituer la pensée d'Ammonius en confrontant Origène et Plotin . Mais cette confrontation est décevante , car, à chaque fois qu'on trouve chez eux un point d'accord , il y a aussi un point de désaccord. C'est ce qu'ont bien montré , à propos de la conception de la vertu , 200 J. Dillon , « Plotinus , Philo and Origen on the Grades of Virtue », dans Platonismus und Christentum . Fetschrift Heinrich Dörrie , JAC 10 , 1983 , p. 92 105 , repris dans The Golden Chain , Aldershot 1990 , n ° XVIII ; à propos de la doctrine des sens spirituels , le même 201 J. Dillon , « Aisthểsis Noête : A Doctrine of Spiritual Senses in Origen and in Plotinus » , dans A. Caquot et al. ( édit . ) , Hellenica et Judaica : Hommage à Valentin Nikiprowetsky, Paris 1986, p . 443-455 , repris dans The Golden Chain, Aldershot 1990 , nº XIX ; à propos de la doctrine du salut, 202 A. Tripolitis , « Return to the Divine : Salvation in the Thought of Plotinus and Origen » , dans Disciplina nostra . Essays in memory of R.F. Evans, Cambridge ( Mass . ) 1979 , p . 171-178 ; à propos de la conception de Dieu , 203 A.H. Armstrong , « Plotinus » , dans The Cambridge History of Later Greek and Medieval Philosophy , Cambridge 1967 , p . 195-271 , notamment p . 198-199 ( la doctrine origénienne de la distinction entre le Père et le Fils rappelle la distinction plotinienne entre l'Un absolument indéterminé et l'Intel lect déterminé, mais , à la différence de Plotin , Origène n'hésite pas à employer les mots " être " et " intellect " pour parler du premier principe). 204 H. Langerbeck, « Die Verbindung der aristotelichen und christlichen Elemente in der Philosophie des Ammonius Saccas » , dans Aufsätze zur Gnosis, Göttingen 1967 , p . 146-166 , et 205 W. Theiler, « Ammonios , der Lehrer des Origenes » , dans Forschungen

zum

Platonismus , Berlin 1966, ont voulu

reconstituer la pensée d'Ammonios en confrontant Origène au néoplatonicien Hiéroclès ( > 126 ) . Mais Hadot 33 a montré que ce type d'approche privilégie méthode l'accord la de , sans se livrer à la contre -épreuve indispensable , la méthode de la différence. ( b ) la pensée d'Origène est -elle typique du moyen -platonisme ? De Faye 3 , Koch 80 , Jonas 84 ont tenté d'assimiler le système d'Origène à un système platonicien . Plus récemment , 206 R. Berchman , From Philo to Origen. Middle Platonism in transition , Chico 1983, a voulu démontrer que le système philo sophique d'Origène devait être compris sans référence à la tradition biblique et

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chrétienne, uniquement à l'intérieur de l'histoire du platonisme : Origène ne serait rien d'autre qu'un philosophe moyen-platonicien , dont la théorétique, l'épistémologie et la dialectique seraient caractéristiques du platonisme de son temps ; l'apport inestimable d'Origène serait même de proposer des solutions à trois problèmes majeurs du moyen -platonisme : la relation entre les intelligibles ; la relation entre les intelligibles et les sensibles ; la conception du premier principe. Au rebours de ces auteurs, 207 H. Dörrie , « What was the Platonism of Late Antiquity ? » , ThR 36, 1971 , p . 285-302 , repris dans Platonica Minora, München 1976, p. 508-523 , et 208 Id ., « Die andere Philosophie » , Th & Ph 56 , 1981 , p. 1-46 , affirme qu'il n'y a aucune continuité entre le platonisme et les Pères, en dehors d'une continuité de mots et d'images qui ont perdu leur signifi cation originale ; le platonisme et la théologie seraient incompatibles, comme le montre le fait que les Pères sont entrés en conflit avec les philosophes plato niciens . 209 H. Chadwick , « Christian Platonism in Origen and Augustine» , dans Crouzel, Hanson 7 , p. 217-230 , insiste sur la méfiance d'Origène à l'égard du platonisme et estime qu'il en a incorporé dans sa théologie beaucoup moins qu'Augustin dans la sienne. La position de 210 C. J. de Vogel, « Platonism and Christianity: a mere antagonism or a profound common ground ? », VChr 39, 1985 , p. 1-62 , est à mi-chemin de ces positions extrêmes: entre le platonisme et les Pères, il y a des éléments de continuité , comme le veut la première catégorie d'auteurs , mais aussi de discontinuité , comme le pensent les autres. Dans le même sens , 211 R. Mortley, From Word to Silence. II. The Way of Negation , Christian and Greek , Bonn 1986 , p . 63-84 , montre que l'épistémologie et la théologie mystique d'Origène sont en rupture avec le moyen - platonisme sur plusieurs points : le thème de l'imitation d'un modèle humain , Jésus, si cho quante pour la philosophie ; le thème de la nécessité de la grâce divine , en face des trois voies de la synthèse , de l'analyse et de l'analogie qui , selon le moyen platonisme , permettent de connaître l'essence divine ; le thème de l'incommu nicabilité de Dieu , au lieu de sa communicabilité relative. En fait, concevoir Origène comme un moyen platonicien, c'est passer à côté de ce qui fait son originalité, laquelle consiste à établir des liens dialectiques entre le donné biblique et les courants philosophiques de son temps. ( c ) Origène constitue - t- il un apport ponctuel pour la connaissance du moyen platonisme ? Ce qui rend vraisemblable une réponse positive à cette question , c'est qu'Origène est au courant de discussions internes au moyen - platonisme: comme le rappelle 212 J. Whittaker, « 'EnéXELVA voở xai oủo aç » , VChr 23 , 1969, p. 91-104, repris dans Studies in Platonism and Patristic Thought, London 1984 , nº XII , il sait que les uns définissent Dieu comme intellect , d'autres comme au -delà de l'intellect et de l'essence ( Contre Celse VI 64 ; VII 45 ; 68 ) . Un de ces apports ponctuels a été mis en valeur par Junod 175 , p . 54 : la doctrine des astres signes et des astres lettres, qui est commune à Origène et à Plotin , a une origine médio -platonicienne ( qui n'est pas forcément Ammonios Saccas ). Un autre apport a été signalé par 213 J. Dillon , « The Magical Power of the Names in Origen and Later Platonism » , dans Crouzel et Hanson 7 , p. 203-216 , repris dans The Golden Chain , Aldershot 1990, n° XXIII : il met en parallèle les

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affirmations d'Origène sur le pouvoir incantatoire des noms bibliques (Homélie 20 sur Josué) avec la théorie de l'efficacité magique des noms dans le néoplato nisme; il montre qu'Origène constitue la meilleure voie d'accès pour connaître la théorie telle qu'elle était, avant le néoplatonisme, dans le moyen -platonisme. 214 J. Pépin , « Celse , Origène, Porphyre sur les limites de la theia dunamis » , dans F. Romano et R. L. Cardullo (édit . ) , Dunamis nel neoplatonismo, Firenze 1996 , p . 31-61 , et 215 Id. , « Dieu est- il tout -puissant ? Alexandre d'Aphrodise, Origène le chrétien , Plotin » , dans J. J. Cleary, The Perennial Tradition of Neoplatonism , Leuven 1997 , p . 3-18 , rapproche les doctrines de Celse , d'Origène, de Plotin et de Porphyre sur la puissance divine. 216 R. Berchmann, « The Categories of Being in Middle Platonism : Philo, Clement and Origen of Alexandria » , dans J.P. Kenney (édit. ) , The School of Moses : Studies in Philo and Hellenistic Religions in Memory of H. R. Moehring, Atlanta (Georgia ) 1995, p. 98-140, montre que , sur la question des catégories de l'être, Origène est typi que du moyen -platonisme. On est moins convaincu par une autre analyse de 217 J. Dillon, « Origen's Doctrine of the Trinity and Some Later Neoplatonic Theories » , dans D.J. O'Meara ( édit. ) , Neoplatonism and Christian Thought, Norfolk (Virginia) 1982 , p . 19-23 , repris dans The Golden Chain , Aldershot 1990 , nº XXI , qui rapproche le Traité des Principes I 3 , 5-8 , et Proclus, Éléments de théologie 57 : de même que , pour Origène , le Père étend son pouvoir à tous les êtres, le Fils aux seuls êtres rationnels et l'Esprit -Saint aux seuls saints, de même, pour Proclus, le Bien agit sur tous les niveaux de la créa tion , l'Intellect seulement sur les entités douées d'une forme, l'Âme seulement sur ce qui a vie ; aucun texte platonicien de l'époque d'Origène ne présente la doctrine de Proclus; celle -ci remonte donc à la même source que celle dont s'inspire Origène , probablement Ammonios Saccas ; de la sorte , Origène transposerait à la Trinité une doctrine médio -platonicienne. On peut refuser une telle conclusion , car Dillon s'appuie sur le texte du Traité des Principes tel que le fait connaître Justinien et il récuse le texte de Rufin , à tort comme l'ont montré Crouzel et Simonetti 66 , t. II , p. 64-70 : Justinien donne accès à des thèses des origénistes du IVe siècle ; ces origénistes et Proclus dépendent sans doute d'une source commune, qui est probablement plus tardive qu'Ammonios Saccas . - Origène et le néoplatonisme : Selon 218 K. Praechter, « Christlich - neuplato nische Beziehungen » , ByzZ 21 , 1912 , p. 1-27 , repris dans Kleine Schriften, Hildesheim 1973 , p . 138-164 , et 219 Id . , « Richtungen und Schulen im Neuplatonismus » , dans Genethliakon für Carl Robert, Berlin 1910, p . 105-156, repris dans Kleine Schriften, p. 165-216, l'influence de la pensée chrétienne (et donc celle d'Origène) s'est exercée d'une manière si forte sur le néoplatonisme alexandrin qu'elle a réussi à en modifier le système théologique. L'ensemble de ce dossier a été repris par Hadot 33 , qui a critiqué avec raison cette affirmation. Cela ne signifie pas qu'il n'y ait pas de rapports entre Origène et les néoplato niciens , comme l'a bien montré, dans le cas de Plotin, 220 H. Crouzel, Origène et Plotin . Comparaisons doctrinales, Paris 1992 : il confronte le Père origénien et l'Un plotinien , le Fils origénien et l'Intelligence plotinienne, l'âme du monde

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de Plotin et ses correspondances chez Origène , leurs conceptions respectives de l'humanité et du monde ; il repère à chaque fois des points de ressemblance et des points de divergence ; il conclut en soulignant que la seule doctrine qui montre une vraie proximité est celle des astres signes du destin des hommes , encore que , à la différence d'Origène , Plotin ne disqualifie pas radicalement l'astrologie. Voir aussi 221 E. Schokenhoff, « Origenes und Plotin . Zwei unter schiedliche Denkwege an Ausgang der Antike » , dans Daly 9 , p . 284-295 ; 222 K. Demura, « Ethical Virtues in Origen and Plotinus » , dans Daly 9, p. 296 300 ; 223 P. Ciner de Cardinali, « El amor y la union mistica en Plotino y Origenes » , TV 39, 1998 , p. 222-236 ; 224 Id ., « La presencia bibiya de lo divino en el pensiamento de Plotino y de Origenes » , Diadoche 1 , 1998 , p . 31-53 . Une autre rencontre entre Origène et le néoplatonisme a été signalée par Dorival 53, à propos de la transmigration des âmes dans les corps d'animaux. En refusant de souscrire à cette croyance à laquelle le Timée fait allusion , Origène fait écho à la position de certains moyen - platoniciens et de Porphyre, telle qu'elle a été analysée par 225 H. Dörrie , « Kontroversen um die Seelenwanderung im kaiser zeitlichen Platonismus » , Hermes 85 , 1957 , p. 414-435 , repris dans Platonica Minora, p . 420-440, et 226 Id ., « La doctrine de l'âme dans le néoplatonisme de Plotin à Proclus » , dans RThPh 1973 , p . 116-134 (dès le II° siècle apr. J.-C. , les courants platoniciens sont hésitants sur la question de la transmigration dans les corps d'animaux ; ces hésitations sont visibles chez Albinus , et , plus tard, peut être chez Plotin ; Porphyre exclut purement et simplement la transmigration dans les corps d'animaux en faisant une distinction radicale entre l'âme douée de raison et l'âme irrationnelle ). - Origène et le stoïcisme. 227 M. Pohlenz, Die Stoa. Geschichte einer geistigen Bewegung, Göttingen 1948-1949, t . I , p . 423-428 , t . II , p . 202-207 , a remarquablement dégagé les éléments stoïciens de la pensée d'Origène : le jugement libre, la providence, l'anthropocentrisme, l'irrationalité des animaux , la théodicée , les notions communes, la métriopathie. 228 T. Kobusch , « Die philosophische Bedeutung des Kirchenvaters Origenes. Zur christlichen Kritik an der Einseitigkeit der griechischen Wesensphilosophie » , ThQ 165 , 1985 , p. 94-105 , a souligné que la théologie grecque depuis Origène ne peut être comprise sans référence à la philosophie stoïcienne du langage et notamment au concept d'Én vola . Malgré cette imprégnation stoïcienne d'Origène, les allu sions qu'il fait aux stoïciens, sans plus de précision, souvent n'apportent pas grand chose à notre connaissance du stoïcisme, car il rappelle en termes géné raux des doctrines bien connues par ailleurs : les stoïciens ne croient pas à l'immortalité de l'âme et à la métensomatose ( Contre Celse I 13 ) , au cinquième élément (IV 56) , à la tripartition de l'âme ( V 47 ) ; selon eux , les premiers élé ments sont corporels ( VI 71 ) , Dieu est corporel ( 1 21 ; III 75 ; IV 14 ; VIII 49 ) ; ils nient les réalités intelligibles et , pour eux , toute représentation dépend des sensations ( VII 37 ) ; les noms existent par nature et non par convention ( I 24 ) . Toutefois, en matière d'éthique stoïcienne, Origène est plus précis. Comme l'ont montré 229 J. Classen , « Der platonisch - stoische Kanon der Kardinal tugenden bei Philo , Clemens Alexandrinus und Origenes » , dans Kerygma und

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Logos. Festschrift für Carl Andresen, Göttingen 1979 , p . 68-88 , et Dillon 200, Origène connaît assez bien la doctrine stoïcienne des vertus. Il connaît égale ment la théorie des actions indifférentes ( IV 26 ) , la manière dont certains stoïciens envisageaient le lien entre la liberté de choix et l'action ( IV 45 ) . Il cite certains paradoxes stoïciens sur le sage , aussi heureux que Dieu , seul prêtre, seul à être libre ( VI 48 ; Commentaire sur Jean II 15 ( 10) ) . Mais , là où Origène est le plus précieux , c'est lorsqu'il nous renseigne sur des points mal connus ou difficiles du stoïcisme . En matière de logique , le Commentaire sur Matthieu X 4 contient un passage éclairant sur la manière dont les « spécialistes » ( OELVO ) distinguent le sens générique et le sens spécifique des mots . Surtout, le Contre Celse VII 15 ( passage curieusement absent des SVF) offre l'exposé le plus clair et le plus complet que nous ayons sur le syllogisme des deux propositions ou argument tiré des deux conditionnelles , ainsi que l'ont montré 230 B. Mates , Stoic Logic, Berkeley/Los Angeles 1953 , 2e éd . 1961 , p . 80-81 et 126 , Roberts 160 et Rist 161. Cette familiarité d'Origène avec la logique stoïcienne est si grande qu'il a suffi à 231 C. Schäublin , « Origenes und stoische Logik » , MH 6 , 1979 , p . 166-167 , de se reporter au long exposé de logique qui figure chez Diogène Laërce, et notamment au deuxième syllogisme dit avanóôELXTOç , pour proposer une correction convaincante à un passage désespéré du Traité des Principes. En matière de physique , Origène apporte des renseignements précieux pour comprendre dans quelle condition se produit l'embrasement du monde , l'Èxnúpwolç ( VIII 72 ) . Comme l'a montré Rist 156, il a une connaissance particulièrement précise des diverses théories stoïciennes sur les cycles cosmiques : il connaît la théorie orthodoxe de Chrysippe sur les cycles absolument identiques entre eux , la théorie des cycles indistinguables entre eux et celle des cycles caractérisés par des changements infimes (IV 12 ; 68 ; V 20 ; 23 ) . Origène nous renseigne sur la conception stoïcienne de la provi dence : il faut distinguer entre les hommes qui existent à titre principal et les animaux qui existent pour le bien de l'homme ( IV 74-75 ) . Le passage sur l'argument paresseux, đpròc nóyoc, est un des meilleurs exposés de l'Antiquité sur la question ( II 20 ) . La conception stoïcienne de la divination est éclairée par Origène ( IV 88 ) , ainsi que , sans doute , la doctrine stoïcienne sur les premiers hommes ( 1 37 ) . ( 3 ) L'apport d'Origène pour la connaissance des modes d'écriture philo sophiques : 232 B. Neuschäfer , Origenes als Philologe, Bâle 1987 , montre comment l'Alexandrin , qui a exercé le métier de grammatikos, utilisait constam ment, dans son travail sur la Bible , les méthodes profanes d'explication des textes et même qu'il constituait une mine pour mieux connaître le savoir philo logique d'époque impériale . Pourquoi un phénomène du même ordre ne se constaterait - il pas dans le domaine des modes d'écriture philosophique, étant donné qu'Origène a suivi plusieurs années l'enseignement d'un maître en philosophie ? Jusqu'à une date récente , les recherches en ce domaine étaient rares et relativement mineures. De Faye 3 III , p. 87 , a été frappé par l'habitude origénienne d'aborder un problème en passant en revue toutes les questions susceptibles d'être soulevées sur le sujet ; il pensait que ce mode d'exposition

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venait directement d'Aristote . Bardy 191 a rectifié cette conclusion et montré que la méthode des apories , dont l'origine est effectivement aristotélicienne , était devenue , à l'époque d'Origène , un procédé d'exposition scolaire . 233 A. Orbe , « Insercion e importancia de la metensomatosis en el esquema origeniano De Anima » , Estudios ecclesiasticos 1 , 1957 , p. 75-88 , a montré que le court passage du Commentaire sur Jean VI 14 , 85-87 , relatif à l'âme présen tait le plan traditionnel des traités sur l'âme : ( 1 ) nature de l'âme ; ( 2 ) incorpo ration de l'âme ; ( 3 ) destin de l'âme incarnée ; (4 ) eschatologie . Ce sont les études sur la démarche du Traité des Principes qui ont renouvelé ce type de recherches à partir des années 1975. On se reportera supra à Harl 104, qui , la première, a dégagé le plan du traité, et à Dorival 105 et 106 , qui a montré qu'une telle organisation de la matière était attestée dans les traités de physique païens. L'étape suivante date des années 1985. 234 I. Hadot , « Les Introductions aux commentaires exégétiques chez les auteurs néoplatoniciens et les auteurs chré tiens » , dans M. Tardieu ( édit . ) , Les Règles de l'interprétation , Paris 1987 , p . 99 122 , montre que le prologue d'Origène à son Commentaire sur le Cantique des cantiques est organisé selon un schéma en six points ( 1. les personnages ; 2. le genre littéraire ; 3. les dispositions nécessaires pour aborder l'ouvrage; 4. le but du livre ; 5. sa place dans l'ordre de lecture des écrits de Salomon et dans les divisions des parties de la philosophie ; 6. la raison du titre ) qui rappelle le schéma en six points qu'on lit dans les introductions des néo -platoniciens aux Catégories d'Aristote ( 1. le but du livre ; 2. son utilité ; 3. son authenticité ; 4. sa place dans l'ordre de lecture ; 5. la raison d'être de son titre ; 6. sa division en chapitres ) et le schéma en huit points présents dans les introductions aux dialo gues de Platon ( 1. la mise en scène dramatique du dialogue ; 2. la signification des personnages ; 3. le but du dialogue ; 4. sa place relative ; 5. son utilité ; 6. sa division en chapitres; 7. son style ; 8. la manière dont il est rapporté et le sens allégorique à en tirer) . Mais , au lieu de mettre ce schéma en rapport avec la tradition néoplatonicienne , comme le fait Hadot , Neuschäfer 232 , qui , en la même année 1987 , analyse les prologues d’Origène au Commentaire sur les Psaumes et au Commentaire sur le Cantique des cantiques, rattache leur démar che à la tradition philosophique scolaire : Origène et les néoplatoniciens dépen dent de cette tradition . Ces études en ont entraîné d'autres . 235 R. E. Heine , « The Introduction to Origen's Commentary on John compared with the Intro ductions to the Ancient Philosophical Commentaries on Aristotle » , dans Dorival et Le Boulluec 10, p. 3-12 , a analysé selon la perspective ainsi définie le prolo gue au Commentaire de Jean . 236 C. Bammel , « Origen's Pauline Prefaces and the Chronology of his Pauline Commentaries » , dans Dorival et Le Boulluec 10, p. 495-513 , en a fait autant pour le prologue au Commentaire sur Romains, qui pose des problèmes spécifiques. La méthode des apories a donné lieu à de nou velles études , notamment par 237 L. Perrone , « Perspectives sur Origène et la littérature patristique des “ Quaestiones et responsiones” » , dans Dorival et Le Boulluec 10 , p . 151-164, qui rappelle l'origine aristotélicienne du procédé qui consiste à passer en revue toutes les questions susceptibles d'être soulevées sur

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le sujet que l'on aborde; il situe ce mode d'exposition par rapport au genre litté raire des (ntuata xal Núoelg et il examine quelques textes d'Origène qui en relèvent, en particulier le Traité des Principes III 1 , 7-24 ( le libre arbitre ), le Traité sur la Prière 18-30 , le Commentaire sur la Genèse , le Commentaire sur Jean . Bibliographie. 238 H. Crouzel , Bibliographie critique d'Origène , Steenbrugge /La Haye 1971 ; 239 R. Farina, Bibliografia origeniana 1960-1970 , Torino /Milano /Genoa 1971 ; 240 H. Crouzel, Bibliographie critique d'Origène. Supplément I, Steenbrugge /La Haye 1982 ; 241 H. Crouzel, Bibliographie critique d'Origène. Supplément II, Steenbrugge/La Haye 1996 . GILLES DORIVAL .

43 ORION RE 2 Épicurien , connu exclusivement par la liste des « disciples remarquables » d'Épicure en Diogène Laërce (X 26 ). TIZIANO DORANDI.

44 ORION D’ALEXANDRIE RE 3

V

Cet Orion n'est pas un philosophe mais un grammairien. La Souda présente deux notices sous le nom Orion : Orion de Thèbes ( 82 188 , t.III , p . 623 , 9-11 Adler) : « Orion de Thèbes en Égypte . Auteur d'une Collection de sentences ou Anthologie en trois livres, dédiée à Eudocie, impératrice épouse de Théodose le Petit ( Théodose II , empereur de 408-450 ) », et Orion d'Alexandrie ( 12 189, t. III , p . 623 , 12-13 ) : « Orion d'Alexandrie, grammairien . Anthologie, Collection de mots attiques, Sur l'étymologie, Éloge de l'empereur Hadrien ». Ces deux notices s'empruntent mutuellement des données ( Anthologie ), tandis que la deuxième consacrée à un certain Orion d'Alexandrie , contient des éléments provenant de la notice d'un autre grammairien Orus d'Alexandrie ( 22 201 , t . III , p. 623 , 25-30) . Il paraît plus prudent de rapprocher du grammairien Orion qui fut à Alexandrie le maître de Proclus, Orion de Thèbes : selon Marinus, Proclus $ 8, 14-19 , Proclus à Alexandrie « fréquenta l'école du grammairien Orion , qui était issu de la classe sacerdotale des Égyptiens et qui avait si bien approfondi son art qu'il avait composé de petits ouvrages originaux qu'il laissa après sa mort pour le profit de la postérité » . Cela devait se passer vers l'année 425. Un élément essentiel conduisant à identifier Orion de Thèbes et le maître de Proclus, est le fait que celui -ci appartenait à la caste sacerdotale égyptienne. Or on sait que la ville de Thèbes représentait pour ainsi dire la capitale religieuse de l'Égypte antique ( sur ce point voir G. Fowden, The Egyptian Hermes, Cambridge 1986 , p. 168-173 ( trad . franç. Hermès l'Égyptien, Paris 2000, p. 246-252) . Sur Orion de Thèbes, voir aussi R. A. Kaster, Gardians of Language. The Grammarian and Society in Late Antiquity, Berkeley /Los Angeles 1988 , p . 322-325 ( les indica tions selon lesquelles Orion aurait enseigné à Constantinople et à Césarée sont extrêmement douteuses ) et FGrHist. IV 7 , p. 350-353 , n° 1093 Orion .

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Le problème de l'identité des deux Orion dont parle la Souda a été récem ment réexaminé par M. Haffner, Das Florilegium des Orion, mit einer Ein leitung herausgegeben, übersetzt und kommentiert, coll . « Palingenesia » 75 , Stuttgart 2001, 267 p . , notamment p . 11-18 , qui opte pour leur identification. A chacun est attribuée une anthologie qui est le florilège d'Orion conservé dans le Vindobonensis graecus 321 ( editio princeps par F. W. Schneidewin en 1839 ; voir aussi A. Meineke en appendice à son édition de Stobée en 1857 ) . D'autre part, l'Etymologikon prêté à Orion d'Alexandrie par la Souda est transmis sous le nom d'Orion de Thèbes ( voir F. W. Sturz , Orionis Thebani Etymologicum , Leipzig 1820 ; il est également mentionné dans Etymol. Magn. 108 , 40 ) . La dédi cace à Eudocie signalée pour Orion de Thèbes correspond bien à la datation du maître de Proclus à Alexandrie . Ces deux ouvrages sont transmis sous le nom d'Orion ( de Thèbes dans le cas de l'Etymologikon ), grammatikos à Césarée, ce qui rapproche à nouveau les deux homonymes . De son côté , Tzetzes , Chil. X. H. 306 ( vers 56-59 Kiessling = 49-52 Leone ) rapporte qu’Eudocie aurait été l'élève d'Orion (et d'Hyperechios ). Selon Haffner, cet enseignement n'aurait pas été donné à Constantinople , mais à Césarée, où Orion de Thèbes aurait pu ensei gner, après avoir été le maître de Proclus à Alexandrie . Quant à l'éloge de l'empereur Hadrien prêté à Orion d'Alexandrie , il n'implique pas nécessaire ment que l'auteur ait vécu au II° siècle , car il pourrait s'agir d'un discours modèle de caractère rhétorique. Voir aussi J. Radicke dans FGrHist continued, nº 1093, p. 348-353 . HENRI DOMINIQUE SAFFREY . ORRONTIUS

MARCELLUS ORRONTIUS (M 30 ]

45 ORPHÉE, ORPHISME ET LITTÉRATURE ORPHIQUE Il n'y aurait pas lieu de parler dans le présent dictionnaire de ce poète, sans doute légendaire, considéré comme fondateur d'une vaste mouvement religieux, si certains textes de la littérature mise sous son nom n'avaient fait l'objet, des présocratiques aux derniers néoplatoniciens , de nombreux commentaires philo sophiques . L'orphisme a partie liée avec le moyen - platonisme qui a fourni la structure de plusieurs des textes circulant sous le nom d'Orphée, et surtout avec le néoplato nisme qui avait entrepris de montrer l'accord entre la théologie de Platon et celle d'Orphée. De l'orphisme, il ne subsiste plus que des fragments dont la plupart nous sont parvenus par l'intermédiaire d'auteurs néoplatoniciens . Ces fragments ont été recueillis par des érudits depuis H. Estienne en 1573 ( voir 1 , cité plus loin ) . Jusqu'à récemment, on utilisait le recueil publié par Otto Kern en 1922 ( 9 ) , en dépit du fait que depuis , au cours des années , d'autres collections de fragments avaient paru ( 10-11 ) . Mais en 2004 est paru le premier tome d'un nouveau recueil compilé par A. Bernabé (12 ). Principales éditions. 1 Henri Estienne ( édit . ) , Poesis philosophica. Vel saltem . Reliquiae poesis philosophicae Empedoclis, Xenophanis, Timonis, Parmenidis. Cleanthis, Epicharmi, Adjuncta sunt Orphei illius Carmina qui a

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suis appellatus fuit oi Deoło you. Item Heracliti et Democriti loci quidam , et eorum espistolae, [Genève ) 1573 ; 2 I. M. Gesnerus, 'OPPÉWÇ Ónavra . Orphei Argonautica Hymni Libellus de lapidibus et Fragmenta cum notis H. Stephani, A. Chr . Eschengachii , curante C. Ch . Hambergero, Lipsiae 1764 ; 3 G. Hermann , Orphica cum notis H. Stephani, A. Chr. Eschengachii, I. M. Gesneri , Th . Tyrwhitti rec ., Lipsiae 1805 , réimpr . Hildesheim 1971 ; 4 C.A. Lobeck , Aglaophamus sive de theologiae mysticae Graecorum causis libri tres, Regimonti 1839 ; 5 H. Düntzer, Die Fragmente der epischen Poesie der Griechen bis zur Zeit Alexander's des Großen, Köln 1840 , p . 74-86 (Nachtrag , Köln 1841 , p . 33 ) ; 6 F.W.A. Mullach, Fragmenta Philosophorum Graecorum I , Paris 1860, p . 162-190 ; 7 E. Abel Orphica recensuit, Accedunt Procli hymni , hymni magici , hymnus in Isim aliaque eiusmodi carmina , Lipsiae /Pragae 1885 , réimpr. Hildesheim 1971 ; 8 H. Diels et W. Kranz, Die Fragmente der Vorsokratiker, Berlin 1903 , dernière édition : Berlin 19555 ; 90. Kern , Orphicorum Fragmenta , Berlin 1922, réimpr. Dublin /Zürich 1972 ; 10 G. S. Kirk , J.E. Raven et M. Schofield, The Presocratic Philosophers ( 1957 ) , Cambridge 19832 ; 11 G. Colli , La sapienza greca , I , Milano 1977 ; 12 A. Bernabé (édit. ) , Poetae epici Graeci. Testimonia et Fragmenta, München / Leipzig 2004. Cf. 13 K. Ziegler, art. « Orpheus » , RE XVIII 1 , 1939, col . 1200-1316 ; 14 R. Keydell et K. Ziegler, art. « Orphische Dichtung » , RE XVIII 2, 1942, col . 1321-1417 ; 15 C. Calame , art. « Orphik , Orphische Dichtung » , NP IX , 2000 , col . 58-69 ; 16 J.-M. Roessli, art. « Orpheus, Orphismus und Orphiker » , dans M. Erler et A. Graeser (édit. ) , Philosophen des Altertums, I. Von der Frühzeit bis zur Klassik, Darmstadt 2000 , p. 10-35 . Études d'orientation . 17 E. Bikerman , « The Orphic Blessing » , JWCI 2 ,

1938-1939 , p . 368-374 , réimpr. dans Religions and politics in the Hellenistic and Roman periods, Como 1985 , p . 231-239 ; 18 W. Burkert, Griechische Religion der archaischen und klassischen Epoche, Stuttgart 1977 ; 19 Id. , Ancient Mystery cults, Harvard 1987 , trad. fr.: Les cultes à mystères dans l'Antiquité. Nouvelle traduction par A.-Ph. Segonds, coll . « Vérité des mythes » , Paris 2003 ; 20 W.K.C. Guthrie, Orpheus and Greek Religion : a Study of the Orphic Movement, London 1935 , seconde édition revue et corrigée 1952 , réimp. Princeton ( NJ ) 1993 , trad . fr.: Orphée et la religion grecque : étude sur la pensée orphique, Paris 1956, trad. espagnole: Orfeo y la religión griega, Buenos Aires 1970 ; 21 O. Kern , «Orphischer Totenkult» , dans Aus der Anomia, Berlin 1890 , p . 86-95 ; 22 Id . , Orpheus. Eine religionsgeschichtliche Untersuchung, Berlin 1920 ; 23 Id . , Die griechischen Mysterien der klassischen Zeit, Berlin 1927 , trad. italienne : I misteri greci dell'età classica, Catania 1931 ; 24 Id . , Die Religion der Griechen I - III , Berlin 1935-1938 ; 25 Id . , « Zu den Orphischen Hymnen » , Hermes 24 , 1889 , p. 498-508 ; 26 L. Linforth , The Arts of Orpheus, Berkeley /Los Angeles 1941 , réimpr. New York 1973 ; 27 Chr. A. Lobeck , De carminibus Orphicis. Dissertationes I. II., Regimontii 1824 ; 28 Id. , De Orphei aetate . Dissertationes IV , Regimontii 1826 ; 29 Id . , De Orphei theogonia et sermone sacro , Regimontii 1827 ; 30 M.P. Nillson , Geschichte der griechischen

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Religion, München I 1967 ; 112 1961 ; 31 R. Sorel,Orphée et l'orphisme, coll . « Que sais - je ? » 3018 , Paris 1995 ; 32 M.L. West, The Orphic Poems, Oxford 1983 , trad . italienne : I poemi orfici, Napoli 1993 ; 33 U. von Wilamowitz Moellendorff, Der Glaube der Hellenen , Berlin 1931 , réimpr. Darmstadt 1959, t . II , p. 188-202 ; 34 W. Wili , « Die orphischen Mysterien und der griechische Geist » , Eranos Jahrbuch 11 , 1944, p. 61-105 . Bibliographie. 35 M.A. Santamaría Álvarez, « Orfeo y el orfismo: actuali zación bibliográfica ( 1992-2003) » , Ilu 8 , 2003, p. 225-264. Sur Orphée et sa légende , on se bornera à citer les titres suivants : 36 R. Böhme, Orpheus : das Alter des Kitharoden , Berlin 1953 , particulièrement p. 61-80 , 116, 136-137 ( il date Orphée entre les Xve et XIVe siècles avant J.-C. ) ; 37 J. Coman, « Orphée, civilisateur de l'humanité », Zalmoxis 1 , 1938 , p. 130 176 ; 38 R.S. Conway , « From Orpheus to Cicero » , BJRL 17 , 1933 , , p. 67-90 ; 39 F. Graf, « Orpheus: A Poet Among Men » , dans J. Bremmer (édit. ) , Interpre tations of Greek Mythology, Titowa ( N. J. ) 1986 , p. 80-106 ; 40 Ch . R. King , « The Historicity of Orpheus » , DR 98 , 1934 , p. 59-71 ; 41 Ch . Riedweg , « Orfeo » , dans S. Settis (édit. ) , I Greci. Storia , cultura, arte, società , II 1 : Una storia greca . Formazione, Torino 1996, p. 1251-1280. Les ouvrages " orphiques" en circulation à l'époque impériale . Voir 42 L. Brisson, « Orphée et l'orphisme à l'époque impériale. Témoignages et interprétations philosophiques, de Plutarque à Jamblique » , dans ANRW II 36 , 4, 1990 , p. 2867-2931 , réimpr. dans 43 Id ., Orphée et l'orphisme dans l'Antiquité gréco -romaine, coll. « Collected studies series » 476 , Aldershot 1995 , n° IV . Ces ouvrages se distribuent en deux grands groupes : une théogonie , dont on connaît à cette époque trois versions , et plusieurs poèmes sur des sujets divers appa rentés à cette théogonie ou à la vie et aux activités d'Orphée. Théogonie : les trois versions. On peut distinguer trois versions de la théogonie orphique. ( 1 ) Une version ancienne , celle qu'évoquèrent Aristophane , Platon , Aristote , Eudème , et qui se trouve commentée dans le papyrus de Derveni, c'est - à -dire très probablement le Discours sacré ( ' lepòc Móyoc) dont parle Hérodote ( II 81 ) . ( 2 ) La version des Discours sacrés en vingt - quatre Rhapsodies, nouvelle version rédigée vers le début de l'ère chrétienne à partir de l'ancienne et des divers poèmes tenus pour orphiques ; l'expression ‘ lepoi Róyou indique le caractère religieux de ces texte et la précision “ en vingt- quatre Rhapsodies " les associe aux poèmes homériques pour leur antiquité. ( 3 ) Une autre version qui serait une tentative pour accorder la théogonie des Rhapsodies avec celles d'Hésiode et d'Homère et qu'on attribua à Hieronymus et à Hellanicus . La version ancienne . Lorsqu'il cite la version de la théogonie qu'il aurait trouvée chez Eudème ( voir 44 Gabor Betegh , « On Eudemus fr. 150 ( Wehrli ) » , dans I. Bodnár et W. W. Fortenbaugh (édit. ) , Eudemus of Rhodes, coll . « Rutgers University Studies in Classical Humanities » 11 , New Brunswick 2002, p. 312 341 , et Brisson 13 ) , Damascius ( De princ . , 124 = t . III , p . 162 , 18 - 163 , 6 Combès -Westerink ) témoigne du fait que , pour Eudème, le premier personnage de la théogonie orphique était la Nuit , corroborant ainsi le témoignage d'Aristo

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phane ( Oiseaux 693-703 = OF 1 Kern = 64 Bernabé ). Suivant ce témoignage auquel semble faire allusion un passage du Banquet de Platon, de l'euf produit par la Nuit sort Éros , un être ailé brillant, dont vient tout le reste de la réalité. Cette théogonie est, semble - t- il, celle commentée dans le papyrus de Derveni, si on en croit la reconstruction proposée par West 32. Dans un bref proème, Orphée annonce qu'il va chanter pour les initiés ce qu'ont fait Zeus et les dieux nés avec lui . Son récit commence au moment où Zeus, sur le point de s'emparer du pouvoir royal , sollicite l'avis de la Nuit. Sur les conseils de cette dernière, Zeus avale Protogonos, le “ Premier -ne” . En un “ flash - back " est évoquée la lignée divine dont Zeus est issu : Nuit, Protogonos, Ouranos (Gaia ), Kronos (qui châtre Ouranos ) . Après avoir avalé Protogonos, Zeus devient le début, le milieu et la fin de tout , c'est - à - dire toutes choses . Puis Zeus procède à une nouvelle fabrication du monde , que décrit le commentateur. Et le récit s'arrête sur la mention du désir exprimé par le dieu de s'unir sexuellement à sa propre mère. Sur la portée de la formule Discours sacré ( ʻlepòç dóyos), voir 45 A. Henrichs, «“Hieroi logoi ” and “ hierai bibloi” : the ( un ) written margins of the sacred in ancient Greece», HSP 101 , 2003, p. 207-266. Les Rhapsodies orphiques . La plupart des témoignages qui nous sont parve nus sur la théogonie orphique se rattachent à la version qualifiée de "courante" par Damascius (De princ. 123 = t. III , p. 160 , 16 Combès -Westerink), celle des Discours sacrés en vingt- quatre Rhapsodies. Dans cette version, le principe primordial est Chronos , c'est - à -dire le Temps, qui engendre l'Éther et le Chaos ( OF 66 = 105 Bernabé ). Toutes choses se trouvaient alors indistinctes ( OF 67 = 106 Bernabé), allusion probable à l'Érèbe ou à la Nuit . Chronos fabrique au moyen de l'Éther un (Euf éclatant de blancheur ( OF 70 ) . De cet Euf primordial ( OF 71a, 79 , 81 = 119 , [ 116, 130 ] , [ 1291 , 134 , 136] Bernabé), va sortir Phanès qui a aussi pour nom Éros. La suite est la même que celle qui vient d'être rappelée . La différence porte essentiellement sur Dionysos . Zeus s'unit à Korè, sa fille, pour engendrer Dionysos , à qui , alors qu'il n'est encore qu'un enfant, il transmet la souveraineté . Suivent les épisodes qui racontent d'abord le meurtre de Dionysos par les Titans , son dépecage en sept morceaux , sa manducation, puis le châtiment des Titans foudroyés par Zeus ( Brisson 60 , p. 481-499 ).

Un certain nombre d'indices permettent de supposer que les Rhapsodies furent composées vers le début de notre ère, à partir de la version ancienne de la théogonie et de poèmes divers mis sous le nom d'Orphée. L'argument majeur en faveur de cette datation réside dans le fait qu'aucun témoignage sur Chronos, la figure mythique qui précède la Nuit au début des Rhapsodies ne remonte plus haut que la seconde moitié du II° siècle . Or, l'introduction de cette figure résulte d'une influence, sur l'orphisme, du mithriacisme qui fut introduit dans l'Empire romain au début de l'ère chrétienne. Une telle datation permet d'expliquer pour quoi , dans les rhapsodies , on décèle des traces d'allégorie stoïcienne, et se mani feste une influence néo - pythagoricienne ( importance accordée au nombre) et même médio -platonicienne ( double création , triades divines). La théogonie d'Hiéronymus et Hellanicus. La théogonie d'Hiéronymus et d'Hellanicus correspond à celle des Rhapsodies, sauf pour ce qui est du début.

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Chronos résulte en effet d'une eau primordiale mêlée de terre qui , selon certains auteurs, prend une forme ovoïdale. Cette théogonie est évoquée par Athénagore, par les Homélies pseudo - clémentines et par Damascius. L'interprétation allégo rique de type physique pratiquée par les stoïciens y joue un rôle important. Sont aussi pris en considération des dieux étrangers au panthéon gréco -romain ; par exemple Mithra assimilé (par isopséphisme) au cours de l'année et Osiris dont le démembrement est assimilé à celui de Dionysos par les Titans . Des éléments juifs y sont discernables ; l'importance de l'esprit et le rôle qui lui est dévolu rappelle la Genèse . Tous ces éléments donnent à penser que la théogonie d'Hiéronymus et d'Hellanicus n'est qu'une variante de celle des Rhapsodies qu'elle suit de peu et qu'elle cherche à accorder avec les vers d'Homère ( Iliade XIV 201 , 246 et 302) qui font de l'Océan , le père des dieux et de toutes choses. Autres æuvres attribuées à Orphée. À l'époque impériale , circulaient plusieurs autres textes attribués à Orphée. La Souda ( O 654) en énumère une vingtaine , dont plusieurs étaient également connus comme l'æuvre d'autres auteurs . La liste est commentée par Ziegler 14 , notamment col . 1406-1417 . Ces textes peuvent être répartis en quatre grandes classes : (a) ceux qui ont rapport avec la vie et les activités d'Orphée, ( b) les hymnes en l'honneur de figures divines évoquées dans les différentes versions de la théogonie , ( c ) des œuvres relatives à des questions naturelles, elles aussi évoquées dans les différentes versions de la théogonie , comme l'astronomie et la médecine , enfin (d ) des textes destinés à annexer la figure d'Orphée à un mouvement philosophique ou religieux. Ils ne seront pas détaillés ici en raison du rôle modeste qu'ils ont joué auprès des néoplatoniciens. Sous le titre Argonautiques orphiques (absent de la liste de la Souda) ont été conservés 1376 hexamètres de datation discutée, mais sans doute tardive (début du Ve siècle ? ) . L'intérêt principal de l’æuvre relève de la magie, en dehors de toute perspective proprement néoplato nicienne. Voir Keydell 14, col . 1333-1338. Édition critique récente avec traduction française par 46 F. Vian (édit. ) , Les Argonautiques orphiques, CUF, Paris 1987 ; voir 47 Id ., « La tradi tion manuscrite des Argonautiques orphiques» , RHT 9, 1979, p . 1-46 (classement et établisse ment du stemma des 55 mss. connus) ; 48 Id ., « Le périple océanique des Argonautes dans les Argonautiques orphiques», dans F. Jouan et B. Deforge (édit. ) , Peuples et pays mythiques. Actes du Ve Colloque du Centre de recherches mythologiques de l'Université de Paris X (Chantilly , 18-20 septembre 1986), coll . «Vérité des mythes » , Paris 1988 , t. IV , p. 177-185 ; Lexique : 49 G. Pompella, Index in Orphei Argonautica, coll . « Alpha-Omega Reihe A. Lexika, Indizes, Konkordanzen zur klass. Philologie » 39, Hildesheim 1979, 155 p. Traduction espagnole (avec la Vie de Pythagore et la Vie de Plotin par Porphyre, ainsi que les Hymnes orphiques, par 50 M. Periago Lorente dans la collection « Los clásicos de Grecia y Roma» 64 , Barcelona 199. Sur la datation, voir 51 M. Rovira Soler, «Datación de la Argonáutica órfica por su relación con la de Valerio Flaco », CFC 14, 1978 , p. 171-206. Les Lithica orphiques concernent les vertus magiques des pierres, mais leur rattachement à l'orphisme proviendrait d'une erreur de Tzetzes. L'ouvrage devrait être daté de la fin du Ive siècle apr. J.-C. (condamnation de la magie , rapprochements avec la théurgie caractéristique de l'école de Jamblique). Voir Keydell 14, col. 1338-1341. Édition et traduction française par 52 R. Halleux et J. Schamp (édit. ) , Les lapidaires grecs, CUF, Paris 1985 ( sur cette édition ; F. Vian, « La nouvelle édition des Lithica orphiques » , REG 99, 1986, p. 161-170 ) . Voir aussi 53 J. Schamp, « Apollon prophète par la pierre » , RBPh 69 , 1981 , p .29-49 (traduction et commentaire de Lithica, v. 360-389 ) ; 54 G. Giangrande, « On the text of the Orphic Lithica » , Habis 20, 1989, p. 37-69.

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La place , le rôle et la signification de l'orphisme dans le néoplatonisme. Les fragments des écrits qualifiés d'orphiques” qui sont parvenus jusqu'à nous ont , pour l'essentiel , été transmis par les écoles néoplatoniciennes d'Athènes et d'Alexandrie, lesquelles, en dépit de certaines divergences sur des points mineurs, partageaient la même interprétation de Platon et adhéraient au même système de pensée. C'est chez Jamblique que l'usage systématique de l'orphisme trouvera sa justification. 55 Luc Brisson , « Orphée, Pythagore et Platon . Le mythe qui établit cette lignée » , dans Metaphysik und Religion . Zur Signatur des späntantiken Denkens. Akten des Internationalen Kongresses vom 13. - 17 . März 2001 Würzburg, unter Mitwirkung von Irmgard Männlein -Robert, Register von Dirk Cürsgen , München /Leipzig 2002, p. 415-427 . Avant lui , Plotin et Porphyre n'ont fait référence à des éléments orphiques que dans le cadre d'une interprétation allégorique . La Justice comme parèdre de Zeus (OF 158 = 233 Bernabé) est évoquée en Enn . V 8 , 4 , et les jouets utilisés par les Titans pour attirer Dionysos ( OF 209 = [ 274, 308 , 309, 322 , 324 ) Bernabé) le sont en Enn . IV 3. On trouve des allusions à deux autres passages douteux (OF 345 et 351 = 161 Bernabé ) en Enn . I 6 , 9 et en Enn . III 5 , 8. Pour sa part, Porphyre propose dans l'Antre des nymphes, une interprétation allégorique, inspirée de Numénius et de Cronius, de quelques vers ( 102-112) du chant XIII de l'Odyssée ; dans ce contexte, il évoque au $ 21 (p. 67 , 21 Nauck 2) l'ivresse de Kronos provoqué par Zeus ( OF 154 = [ 187 , 220, 222, 225 ] Bernabé) et au § 14 ( p. 67 , 21 Nauck2) le peplum tissé par Korè ( OF 192 =286 Bernabé ). Mais il est impossible de savoir avec exactitude quel rôle concret joua chez Jamblique l'exégèse des poèmes orphiques dans le commentaire des dialogues de Platon : la rareté des témoignages empêche de s'en faire une idée . Marinus, Proclus 27 , rapporte en tout cas que dans son enseignement sur l'orphisme, Proclus s'appuyait sur Jamblique et sur Syrianus. Ce programme néoplatonicien de l'interprétation de l'orphisme se lit au début de la Théologie Platonicienne de Proclus, là où le philosophe évoque dans ses grandes lignes toute l'histoire de la philosophie : « Il faut montrer ensuite que chacune de ces doctrines est en accord avec les principes premiers de Platon et avec les traditions secrètes des théologiens . Toute la théologie grecque est fille de la mystagogie d'Orphée ; Pythagore avait repris d’Aglaophamos les initia tions relatives aux dieux ; Platon ensuite a reçu , des écrits pythagoriciens et orphiques, la science toute parfaite qui concerne les dieux » ( Théol. Plat. I 5 , p . 25 , 26 - 26 , 24 Saffrey -Westerink ). L'étude de l'orphisme fut en réalité très tôt intégrée dans le programme d'études de l'école néoplatonicienne d'Athènes comme en témoignent deux disciples de celui que l'on considère comme le fondateur de cette École , Plutarque d'Athènes. Hiéroclès (= H 126) consacra tout le livre V de son ouvrage Sur la Providence ( qui en comprenait sept ) à montrer qu'Orphée et Homère étaient les précurseurs de Platon (voir Photius, Bibliothèque , cod. 214 , 173 a ) . Mais il faut attendre Syrianus pour voir la référence à l'orphisme devenir systématique. Mais , Le chapitre 27 de la Vie de Proclus par Marinus montre que c'est à Syrianus que remonte le projet d'établir un accord (ovu wv a ) entre les théologies d'Orphée, de Pythagore et des

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Oracles Chaldaïques, et la philosophie de Platon interprétée comme une théo logie ( c'est - à - dire comme un discours sur les dieux ) , que la seconde partie du Parménide exposait à la façon d'un manuel, mais que l'on retrouvait sous une forme moins systématique dans les autres dialogues . Sur ce projet, voir 56 H.D. Saffrey, « Accorder entre elles les traditions théologiques : une caracté ristique du néoplatonisme athénien » , dans On Proclus and his influence in Medieval Philosophy, coll . « Philosophia Antiqua » 53 , Leiden 992 , p. 35-50 , repris dans Le néoplatonisme après Plotin , coll . « Histore des doctrines de l'antiquité classique » 24 , Paris 2000, p ; 143-158 . Dans sa Vie de Proclus 26, Marinus raconte que Syrianus avait proposé à ses élèves , Proclus et Domninus ( D 219) , de leur faire l'exégèse soit des Oracles chaldaïques soit des poèmes orphiques. Mais le désaccord entre Proclus, qui avait choisi les Oracles chaldaïques, et Domninus, qui avait choisi les poèmes orphiques, l'empêcha de mettre son projet à exécution . On peut replacer cet événement dans l'histoire . C'est à partir de 432 (en septembre probablement) que Proclus entreprit à Athènes , sous la direction de Syrianus, l'étude des auteurs à expliquer dans l'Académie : Aristote, Platon et les Théologiens ( chap. 13 ) . Mais le dissentiment entre Proclus et Domninus retint Syrianus de compléter le programme ; il n'eut pas le temps d'exposer, outre ceux des Chaldéens, les principes de l'orphisme dans une série de cours , auxquels doit faire allusion Proclus dans son Commentaire sur le Timée ( 1 , p. 315 , 1-2 Diehl ), lorsqu'il parle de Cours sur l'orphisme ( Oppixaì ouvovo al ). On ne peut dire si c'est avant ces cours ou après que Syrianus rédigea les Commentaires sur Orphée, c'est-à -dire très probablement Sur la théologie d'Orphée et L'accord entre Orphée, Pythagore , Platon et les Oracles chaldaïques. Proclus étudia ces ouvrages, peu après la mort de son maître , pour parfaire sa connaissance de l'orphisme. C'est dans les marges de ces livres que plus tard , à la demande de Marinus, il rédigea de longues remarques (Marinus, Proclus 27 ). Par ailleurs, Syrianus ne réservait pas son exégèse des poèmes orphiques à la dernière étape de son programme d'enseignement, mais devait y avoir recours dans la lecture commen tée des différents dialogues de Platon. C'est ce que montre bien le Commentaire sur le Phèdre de Platon, où Hermias a réuni des notes qui reproduisent l'enseignement oral de Syrianus dans le cadre de cours auxquels assistait aussi Proclus qui posait des questions ( voir in Phaedr. p. 92, 6 sq . Couvreur ). Cette pratique se maintint chez Proclus dans ses commentaires sur le Timée, sur la République, sur le Cratyle, sur l'Alcibiade, sur le Parménide: l'orphisme tient aussi une place importante dans la Théologie platonicienne. Voir 57 L. Brisson , « Proclus et l'orphisme» , dans Proclus. Lecteur et interprète des anciens, Paris 1987 , p. 43-103 , repris dans Brisson 43 . Damascius, qui fut le dernier chef de l'École néoplatonicienne d'Athènes , y attacha la même importance dans son commentaire sur le Parménide, non sans apporter des innovations remarquables, peut-être liées à l'exploitation de sources nouvelles . Voir 58 L. Brisson , art. « Damascius et l'orphisme » , dans Ph . Borgeaud ( édit . ) , Orphée et orphisme: en l'honneur de Jean Rudhardt. Textes réunis et édités par Ph . Borgeaud , coll . « Recherches et Rencontres » 3 , Genève 1991 , p. 157-209 , repris dans Brisson 14, nº VI La plupart des témoignages sur l'orphisme que l'on retrouve chez Damascius viennent des Rhapsodies , considérées comme la version courante de la théogonie orphique (De princ. 123 = III , p . 160, 16 Combès -Westerink ). Cela dit , Damascius est le seul à faire état de deux autres versions de la théogonie orphique.

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La première est celle de la théogonie de Hieronymus ( 2 + H 128 ) et d'Hella nicus ( OF 54-59 = 69-89 Bernabé). Damascius évoque en effet une théogonie qu'il attribue , non sans quelque hésitation , à deux personnages énigmatiques : « La théologie rapportée d'après Hiéronymus et Hellanicus , si toutefois il ne s'agit pas du même peronnage , est la suivante . » (De princ ., 123bis = III , p . 160 n. 17-18 Combès-Westerink ). Cette phrase d'introduction est particulièrement énigmatique . L'hésitation de Damascius , qui ne sait s'il faut parler de deux auteurs ou d'un seul , rend d'entrée de jeu très hasardeuse toute tentative pour identifier ces auteurs . Des auteurs , on est donc renvoyé aux témoins. Or, on ne trouve de témoignages sur cette version que chez un apologiste chrétien de la fin du II° siècle de notre ère, Athénagore (Supplique au sujet des chrétiens, 18 , 3-5 = OF 67 = 106 Bernabé ; 20 = OF 58 = ( 81 , 82 , 84, 85 , 87 , 88 , 89 ) Bernabé : 32 , 1 = OF 59 = [87 , 89] Bernabé) et dans des romans, les Homélies (VI , 3-13 = OF 55 et 56 = [ 104, 114, 115 , 117 ] , [ 120 , 171 , 184, 200 , 202, 203 , 207 , 213 , 214, 215 , 236 ] Berrnabé ) et les Reconnaissances (X 17-19 = OF 56 = Bernabé ; X 30 = OF 55 = [ 104, 114 , 115 , 117 ) , ( 120, 171 , 184 , 200 , 202 , 203 , 207 , 213 , 214, 215 , 236 ] Berrnabé ). Attribués à Clément ſer de Rome , ce sont des apocryphes dont une partie au moins , celle qui nous intéresse, reproduit un ouvrage apologétique juif qui remonterait, lui , au milieu du lje siècle. Voir 59 Ivan Amersfoort, « Traces of an Alexandrian Orphic theogony in the pseudo Clementines » , dans R. van den Broek et M. I. Vermaseren (édit. ), Studies in Gnosticism and Hellenistic religions presented to Gilles Quispel on the occasion of his 65th birthday, Leiden 1981 , p. 13-30. Sur le plan de la structure narrative, cette théogonie semble être de peu posté rieure à celle des Rhapsodies, dont j'ai placé la composition vers la fin du jer siècle ou au début du IIe siècle apr. J.-C. La théogonie d'Hiéronymus et d'Hella nicus se borne en effet à interpréter la théogonie des Rhapsodies de façon à la rendre compatible avec les théogonies que l'on trouve chez Homère et chez Hésiode, et même avec la cosmologie stoïcienne. Cette hypothèse qui résulte d'une analyse interne se voit corroborée par le fait que les témoignages relatifs à la théogonie d'Hiéronymus et d'Hellanicus ne se rencontrent jamais avant le milieu du second siècle apr. J.-C. Après avoir cité la théogonie des Rhapsodies, Damascius cite la théologie mentionnée par Eudème de Rhodes (-E 93 ] ( De princ., 124 = t . III , p. 162 , 18 163 , 6 Combès -Westerink ), un disciple d'Aristote ( voir OF 28 = [ 20 , 427 II ] Bernabé). Que conclure du témoignage de Damascius sur l'orphisme ? ( 1 ) À l'époque de Damascius, la version la plus courante de la théogonie orphique était celle des Discours sacrés en vingt-quatre rhapsodies, qui comprenait une théogonie, une cosmogonie et une anthropogonie qui justifiaient une éthique et qui fondaient des rites . ( 2) Pour interpréter les Rhapsodies, Damascius devait avoir sous les yeux , comme les autres membres de l'école , l'ouvrage de Syrianus intitulé : Accord entre Orphée, Pythagore, Platon et les Oracles Chaldaïques, ouvrage dont Proclus avait rempli les marges de ses commentaires. Le fait est que la plupart du temps , Damascius parle des Rhapsodies dans un contexte chaldaïque et qu'il associe très souvent orphisme et pythagorisme. ( 3 ) Pour

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justifier l'adjonction de l'Ineffable dans son système , Damascius cite par ailleurs une théogonie attribuée à Hieronymus et Hellanicus, laquelle fait sortir Chronos d'un mélange d'Eau et de Terre. Cette version semble être une adaptation de celle des Rhapsodies interprétée à la lumière du stoïcisme notamment . (4) Enfin, à partir de la citation par Damascius de la théogonie d'Eudème de Rhodes , on peut supposer que, à l'époque de Platon , la théogonie orphique commençait par la Nuit et se terminait avec Dionysos , sans cependant que nous sachions quels épisodes comprenait le drame final. Damascius témoigne par ailleurs , dans sa Vie d'Isidore, de l'importance de l'orphisme dans le milieu de l'école néoplatonicienne d'Alexandrie . Isidore ( 131), qui fut disciple de Proclus et qui devint chef de l'école néoplatoni cienne d'Athènes après la mort de Marinus , vécut en effet à Alexandrie où il connut les deux frères Héraïscus ( » H 67 ) et Asclepiade (> A 446 ), qui étaient des philosophes profondément religieux . Après voir raconté plusieurs prodiges concernant Héraïscus , Damascius fait cette remarque : « Proclus reconnaissait, dit-on , que Héraïscus lui était supérieur, car ce qu'il savait lui - même , Héraïscus le savait aussi , mais ce que l'autre savait , Proclus l'ignorait » ( Vie d'Isidore § 107 = p . 148 , 7-8 Zintzen = Photius , Bibliothèque , cod. 242 , 343a , trad . R. Henry ) . Pour sa part, Asclépiade , l'auteur d'ouvrages sur l'histoire et la religion , entreprit, toujours selon Damascius , “d'écrire sur l'accord entre toutes les théologies” ( Souda, H 450 , t. II , p. 580 , 5-6 Adler) . Parmi les amis alexan drins d'Isidore , il faut aussi compter Sarapion et Asclépiodote . Sarapion , un ascète peu attiré par les subtilités de la philosophie , ne possédait et ne lisait que deux ou trois livres , parmi lesquels se trouvaient les poèmes d'Orphée ; sur les questions orphiques c'est Isidore qu'il consultait , en raison de la compétence de ce dernier en la matière ( Souda , £ 116 , t . IV , p . 324 , 17-29) . Pour sa part, Asclepiodote (> + A 453 ) , qui fut le disciple de Proclus et qui aurait servi de pédagogue à Isidore, faisait passer la philosophie après l'étude de la nature et tout particulièrement après l'observance religieuse . D'où ce jugement peu flatteur de Damascius : « Asclepiodote n'était pas , sous le rapport des dons naturels, un homme accompli ; ainsi en ont jugé la plupart des gens . Prompt à objecter mais peu vif à comprendre, il manquait de suite dans les idées notam ment en ce qui concerne les notions relatives au domaine divin , invisibles et intelligibles , qui caractérisent la pensée de Platon . Et vis - à- vis de la sagesse sublime de l'orphisme et du chaldaïsme, qui dépasse le niveau de la vie ordi naire, sa faiblesse était encore plus accusée » ( Vie d'Isidore § 126 = p . 170 , 1-6 Zintzen = Photius , Bibliothèque, cod . 242 , 344a - b , trad . R. Henry ). Par ailleurs , tout porte à croire qu'Ammonius d'Alexandrie ( > A 141 ) , le fils d'Hermias ( 2 - H 78 ) , chercha à l'instar de son père à mettre en accord entre elles la doctrine de Platon et toutes les autres théologies , puisque ses disciples Simplicius et Philopon adoptèrent une telle attitude exégétique . Il en va de même pour Olympiodore ( 2017 ) , un autre disciple d'Ammonius, qui accéda à la chaire de philosophie en 541 et qui mourut après 565. Sur Olympiodore et l'orphisme , voir 60 L. Brisson , « Le corps “ dionysiaque ". L'anthropogonie décrite dans le Commentaire sur le “ Phédon ” de Platon ( 1 , par. 3-6 ) attribué à Olympiodore

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est - elle orphique ? » , EOQIHE MAIHTOPEE, Chercheurs de sagesse. Hommage à Jean Pépin , « Collection des Études Augustinienne. Série Antiquité » 131 , Paris 1992 , p . 481-499, repris Brisson 43. Une étude des contextes de citation de fragments orphiques par tous ces auteurs montre qu'ils partageaient tous le même idéal d'accord entre toutes les théologies ( la philosophie platonicienne étant elle-même assimilée à une théo logie ) et que tous associaient les mêmes divinités orphiques aux mêmes élé ments du système philosophique auquel ils adhéraient. En raison du nombre de ses cuvres conservées et de la fréquence de ses références à l'orphisme, Proclus reste notre meilleur témoin en la matière. Avec la fermeture de l'école néoplatonicienne d'Athènes en 529 apr. J.-C., allait être dispersée une bibliothèque qui aurait pu nous renseigner sur l'histoire et l'évolution de la littérature orphique depuis l'époque de Platon . Force est de conclure cependant que seule une connaissance profonde de la doctrine défendue par l'école néoplatonicienne d'Athènes et d'Alexandrie, au Ve siècle et au Vie, peut nous permettre de nous faire une idée de l'orphisme dans son ensemble . C'est d'ailleurs cette interprétation qui , par l'intermédiaire du monde byzantin , fut reprise à la Renaissance et transmise jusqu'à nous par différents recueils. Études thématiques. 61 A. Bernabé, « La toile de Pénélope : a-t-il existe un mythe orphique sur Dionysos et les Titans? » , dans RHR 219 , 2002, p. 401-433; 62 A. Boulanger, « Le salut selon l'orphisme » , dans Mémorial Lagrange, Paris 1940 , p . 69-79 ; 63 M. Detienne , Dionysos mis à mort, Paris 1977 ; 64 R. Edmonds , « Tearing apart the Zagreus myth . A few disparaging remarks on Orphism and Original Sin » , CIAnt 18 , 1999 , p . 35-73 ; 65 F. Graf, « Dionysian and Orphic eschatology New texts and old questions » , dans T.H. Carpenter et C. Faraone (édit . ) , Masks of Dionysus, Ithaca /London 1993, p . 239-258 ; 66 Jean Pépin , « Plotin et le miroir de Dionysos ( Enn IV , 3 [ 27 ] , 12,1-2 ) » , Rev Int Philos 24, 1970 , p. 304-320 ; 67 C. Ramnoux, La Nuit et les Enfants de la Nuit dans la tradition grecque, Paris 19862 ; 68 J. Rudhardt, Le thème de l'eau primordiale dans la mythologie grecque, Berne 1971 ; 69 Id., « De l'inceste dans la mythologie grecque » , Revue Française de Psychanalyse 46 , 1982 , p . 731-763 ; 70 M. Tortorelli Ghidini , « Un mito orfico in Plotino ( Enn IV 3 , 12 ) » , dans PP 30 , 1975 , p . 356-360 ; 71 Ead . , « Semantica e origine misterica dei ' symbola ' » , FT 5 , 1991 , p . 391-395 ; 72 Ead . , « I giocattoli di Dioniso tra mito e rituale » , dans M. Tortorelli Ghidini , A. Storchi Marino et A. Visconti ( édit . ) , Tra Orfeo e Pitagora Origini e incontri di culture nell'antichità . Atti dei Seminari Napoletani 1996-1998 , Napoli 2000, p. 43-80. La cosmologie. 73 A. Bernabé, art. « Una cosmogonía cómica : Aristófanes, Aves 685 ss . » , dans J. A. López Férez ( édit . ) , De Homero a Libanio (Estudios actuales sobre textos griegos . II ) , Madrid 1995 , p . 195-211 ; 74 Id ., « Consi deraciones sobre una teogonía órfica » , dans Actas del VIII Congreso Español de Estudios Clásicos, vol . II , Madrid 1994, p. 91-100 ; 75 Id ., « La Noche en las Rapsodias órficas » , dans Actas del IX Congreso Español de Estudios Clásicos, Madrid 1998 , p . 71-76 ; 76 M. Treml, « Die antike griechische Kosmologie bei

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144 , 2003 , p . 19-29 . On a retrouvé un autre papyrus de contenu orphique, sans toutefois la dimension exégétique du papyrus de Derveni. Sur un autre papyrus orphique , voir 142 J. Hordern , « Notes on the Orphic papyrus from Gurôb ( P. Gurôb 1 ; Pack ? 2464 )» , ZPE 129 , 2000, p. 131-140 pl . 3 . Les présocratiques. 143 A. Bernabé, « Lo uno y lo múltiple en la especula ción presocrática : nociones , modelos y relaciones » , Taula 27-28 , 1997, p. 75 99 ; 144 A. Bernabé , « Orphisme et Présocratiques : bilan et perspectives d'un dialogue complexe » , dans A. Laks et C. Louguet ( édit . ) , Qu'est-ce que la Philosophie Présocratique ? , Lille 2002 p . 205-247 ; 145 W. Burkert, « Orpheus und die Vorsokratiker . Bemerkungen zum Derveni-Papyrus und zur pythago reischen Zahlenlehre » , A & A 14 , 1968 , p . 93-114 ; 146 F. Casadesús Borodoy , « Heráclito y orfismo » , Enrahonar 23 , 1995 , p . 103-116 ; 147 G. Scalera McClintock , « Anassimandro e la “ parola orfica" » , PP 40, 1985 , p. 250-268 . Empédocle . 148 G. Betegh , « Empédocle , Orphée et le papyrus de Derveni», dans P.-M. Morel et J.-F. Pradeau (édit. ) , Les anciens savants : études sur les philosophies préplatoniciennes , Paris 2001 = Les cahiers philosophiques de Strasbourg 12 , 2001 , p . 47-70 ; 149 G. Casertano, « Orfismo e Pitagorismo in Empedocle ? » , dans M. Tortorelli Ghidini , A. Storchi Marino et A. Visconti ( édit . ) , Tra Orfeo e Pitagora. Origini e incontri di culture nell'antichità . Atti di seminari napoletani 1996-1998 , Napoli 2000 , p . 195-236 ; 150 Ch . Riedweg , « Orphisches bei Empedokles » , dans A & A 41 , 1995 , p. 34-59 . Platon . 151 F. Adorno , « Da Orfeo a Platone . L'orfismo come problematica filosofica » , dans Orfismo in Magna Grecia . Atti del quattordicesimo convegno di studi sulla Magna Grecia : Taranto, 6-10 ottobre 1974 , Napoli 1975 , p. 9-32 ; 152 A. Bernabé, « Una etimología platónica : oñua -owua » , Philologus 139, 1995 , p . 204-237 , avec une riche bibliographie ; 153 A. Bernabé, « Platone e l'orfismo » , dans G. Sfameni Gasparro (édit . ) , Destino e salvezza . Tra culti pagani e gnosi cristiana . Itinerari storico - religiosi sulle orme di Ugo Bianchi, Messina 1998 , p . 33-93 ; 154 A. Bernabé Pajares, « Orfeotelestas, intérpretes, charlatanes : transmisores de la palabra órfica » , dans Homenatge a Miquel Dolç. Actes del XII Simposi de la Secció Catalana i l de la Secció Balear de la SEEC, Palma , 1 al 4 de febrer de 1996 , Palma de Mallorca 1997 , p . 37-41 ; 155 L. Brisson , « La réminiscence dans le Ménon ( 80e - 8le ) et son arrière -plan religieux » , dans Trindade Santos ( édit . ) , Anamese e Saber, Lisboa 1999 , p.23 46 ; 156 F. Casadesús Bordoy , « Orfeo y orfismo en Platón » ,Taula 27-28, 1997, p . 61-73 ; 157 Ead. , « Nueva interpretación del Crátilo platónico a partir de las aportaciones del papiro de Derveni » , Emerita 68 , 2000, p. 53-71 ; 158 Ead., « La borrachera eterna como premio : el testimonio de Plutarco » , dans J. Guillermo Montes Cala , M. Sánchez Ortiz de Landaluce et R. J. Gallé Cejudo ( édit . ) . Plutarco , Dioniso y el vino . Actas del VI simposio español sobre Plutarco : Cádiz , 14-16 de mayo de 1998 , Madrid 1999 , p. 161-170 ; 159 M.S. Funghi , « Il mito escatologico del Fedone e la forza vitale dell'Aiora, PP 35 , 1980, p . 176-201 ; 160 A. Masaracchia , « Orfeo e gli " Orfici” in Platone», dans Id . , Orfeo e l'orfismo . Atti del Seminario Nazionale (Roma-Perugia 1985-1991 ) , Roma 1993 , p . 173-197 , art . repris dans Riflessioni sull'antico, Pisa /Roma,

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ORPHÉE, ORPHISME ET LITTÉRATURE ORPHIQUE

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1998 , p . 373-396 ; 161 C. Megino Rodríguez, « Platón como lector de obras órficas : ¿ qué clase de literatura órfica pudo conocer Platón ? » , EClás 44 , 2002, p . 163-171 . Orphée et orphisme dans le moyen platonisme. 162 A. Bernabé , art. « Plutarco e l'orfismo » , dans Plutarco e la religione. Atti del VI Convegno plutarcheo ( Ravello , 29-31 maggio 1995 ), Napoli 1996 , p. 63-104. Orphée et orphisme dans le néoplatonisme. Brisson 13 , p . 2867-2914 ; 163 L. Brisson, art. « Nascita di un mito filosofico : Giamblico ( V. P. 146) su Aglaophamos » , dans M. Tortorelli Ghidini , A. Storchi Marino et A. Visconti (édit . ) , Tra Orfeo e Pitagora. Origini e incontri di culture nell'antichità . Atti di seminari napoletani 1996-1998, Napoli 2000, p . 237-253 ; 164 J.-M. Roessli, art. « Nature et signification du mythe d'Orphée dans le De Consolatione Philo sophiae de Boèce » , Archivum Bobiense 21 , 1999 , p. 27-72 ; 165 Id ., art. « La figure du Kronos orphique chez Proclus. De l'orphisme au néo -platonisme, sur l'origine de l'être humain » , RHR 219/4 ( « L'orphisme et ses écritures. Nouvelles recherches » ) , 2002, p. 435-458 . Orphée et orphisme dans le néoplatonisme de la Renaissance. 166 D.P. Walker, art. « Orpheus the Theologian and Renaissance Platonists » , Journal of the Warburg and Courtauld Institutes 16 , 1953 , p . 100-120 , réimpr. dans The Ancient Theology , Londres 1972 ) ; 167 Id ., art . « The Prisca Theologia in France » , Journal of the Warburg and Courtauld Institutes 17 , 1954 , p. 204 259 ; 168 J. Warden , « Orpheus and Ficino » , dans Id . , Orpheus. The Meta morphoses of a Myth , Toronto 1985 , p . 85-110 ; 169 E. Wind , Les mystères païens à la Renaissance, Paris 1992 , chap. 4 : « Orphée et la louange de l'amour aveugle » , p. 67-94 (trad . fr. de Pagan Mysteries in the Renaissance , London 1958). Orphée juif. 170 R. Baumgarten , Heiliges Wort und Heilige Schrift bei den Griechen . Hieroi Logoi und verwandte Erscheinungen , Tübingen , 1998 , spécialement le chapitre III ( iepoà Tóyou : Orphisches Schriftum , p . 70-121 ) ; 171 C.R. Holladay, Fragments from Hellenistic Jewish Authors. Volume IV : Orphica ( SBL : Texts and Translations . Pseudepigrapha Series . Texts and Translations 40. Pseudepigrapha Series 14) , Atlanta 1996 ; 172 Id ., art. « The Textual Tradition of Pseudo - Orpheus: Walter or Riedweg ? » , dans Geschichte Tradition - Reflexion. Festschrift für Martin Hengel zum 70. Geburtstag, 1 : Judentum , Tübingen, 1996 , p . 159-180 , et 173 Id ., « Pseudo -Orpheus: Tracking a Tradition » , dans A. J. Malherbe, F. W. Norris et J. W. Thompson ( édit . ) , The Early Church in its Context. Essays in Honor of Everett Ferguson, Leiden 1998 , p . 192-220 ; 174 R. Radice, La filosofia di Aristobulo e i suoi nessi con il « De mundo » attribuito ad Aristotele, Milan , 19952 ; 175 Ch . Riedweg , Jüdisch hellenistische Imitation eines orphischen Hieros Logos. Beobachtungen zu OF 245 und 247 ( sog . Testament des Orpheus ), coll . « Classica Monacensia . Münchener Studien zur klassischen Philologie » 7 , Tübingen 1993 ; 176 J.-M. Roessli, « Postface : De l'Orphée juif à l'Orfée écossais. Bilan et perspectives » , dans J. B. Friedman , Orphée au Moyen Âge, traduit de l'anglais

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ORPHÉE, ORPHISME ET LITTÉRATURE ORPHIQUE

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par J.-M. Roessli avec le concours de V. Cordonier et F.-X. Putallaz, coll . C 83 ) comme « rejeton de Zeus » , comme « véritablement oủpáviós te xúwv » ( D.L. VI 76 = fr. 1 Powell = fr. 54 Livrea ; voir E. Livrea, « La morte di Diogene cinico » , dans Filologia e forme letterarie . Studi offerti a Francesco Della Corte, t.I, Urbino 1987 , p. 427-433 ) . Antipater de Thessalonique, dans une épigramme de l'Anthologie grecque XI 158 , rappelle aussi que Diogène était un chien céleste tandis qu'une épigramme anonyme en VII 64 offre cette belle formule : « Maintenant qu'il est mort, il a les étoiles pour demeure » . Le philosophe lui même , dans une lettre pseudépigraphe adressée à son père Hicétas (Lettre 7 , p. 8 Müseler) déclare : « On m'appelle chien du ciel (wówv ó oúpavoũ ) , non de la terre » . Enfin Ausone , dans son Épitaphe 28 ( p . 82 Peiper = p . 65 Prete ) , se demande où Diogène s'en est allé : « Mais où est - il allé ? Là où brûle la brillante étoile du Lion ; I il est désormais installé comme chien de garde pour la juste Érigone ( i.e. la fille d'Icare, transformée en constellation de la Vierge ) » . On ne peut cependant exclure qu'une personne se soit réellement appelée « Quranios » ( cf. la notice précédente ) et qu'elle ait professé le cynisme.

MARIE -ODILE GOULET -CAZÉ.

50 OVIDIUS NASO (P.-) RE 3

43-17

Études. 1 W. Kraus , art. « P. Ovidius Naso » , RE XVIII 2 , 1942 , col . 1910 1986 ; 2 H. Fraenkel , Ovid : A Poet between two Worlds, Berkeley /Los Angeles 1945 , 2e éd. 1956 , VIII - 282 p. ; 3 N. Herescu (édit. ), Ovidiana, recherches sur Ovide , Paris 1958 , 567 p . ; 4 S. Viarre, L'image et la pensée dans les “Métamorphoses " d'Ovide, Paris 1964, 479 p.; 5 Ead ., Ovide, Essai de lecture poétique, Paris 1976 , VIII - 175 p. ; 6 B. Otis , Ovid as an Epic Poet, Cambridge 1966 , XVIII -441 p. ; 7 J. M. Frécaut, L'esprit et l'humour chez Ovide, Presses

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OVIDIUS NASO (P. -)

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Universitaires de Grenoble 1972 , 404 p.; 8 O.S. Due , Changing Forms : Studies in the Metamorphoses of Ovid ,Copenhagen 1974 , 210 p. ; 9 R. Syme , History in Ovid, Oxford 1978 , 240 p . ; 10 A. Barchiesi, Il poeta e il discorso augusteo , Bari 1994 , 340 p. ; 11 B. Boyd , Brill's Leiden 2002, XII - 533 p. ; 12 Ph . Hardie , The Cambridge Cambridge 2002 , XVI -408 p . ; 13 Id . , Ovid's Poetics of 2002, VIII -365 p.

principe. Ovidio e il Companion to Ovid, Companion to Ovid, Illusion , Cambridge

Biographie. Né en 434, Ovide fut l'élève des rhéteurs et se mit très tôt à composer des poèmes ( Tristes IV 10, 26 ) . Il appartient néanmoins à une famille de rang équestre ( Tr. IV 10 , 7-8 ) et s'engagea dans les toutes premières étapes d'une carrière politique: triumuir capitalis ( Tr. II 94-96 ; IV 10 , 34 ) , membre du tribunal des centumvirs , et il a été amené aussi à exercer parfois des fonctions de juge pour quelques procès privés ( Tr. II 95-96 ) . Mais il s'arrêta là et se consacra à la poésie ; dès l'âge de 18 ans , semble -t-il ( Tr. IV 10, 57-58 ) , il lit ses premiers poèmes en public , sans doute des pièces des Amours . C'est vers la même époque qu'il compose les Héroïdes, recueil de lettres écrites par les héroïnes de la mythologie . On situe leur publication entre 20a et 154, pour les quinze pre mières ; il y eut une seconde publication où furent ajoutées de nouvelles pièces . Les Amours, où Ovide chante son amour pour Corinne , furent rédigés à partir de 25a ; une première publication en 5 livres eut lieu en 15a, une seconde édition , en trois livres , fut publiée en 4a. Il faut ajouter L'Art d'aimer , publié vers 1 ", les Remèdes à l'amour (entre 18 et 2 ) . Ovide est donc d'abord « le poète badin des tendres amours » ( Tr. IV 10 , 1 ) . Mais il envisageait des æuvres plus sérieuses : vers 1a, il commence un long poème en 15 livres , les Métamorphoses, où il reprenait les légendes de la mythologie concernant les métamorphoses d'êtres humains ou d'animaux en plantes , en animaux , en pierres ; telle est la matière de ce poème qui part de la création du monde et du déluge pour aboutir à Rome et à la mort de César. En même temps , ou peu après , Ovide se mit à composer les Fastes ,commentaire du calendrier religieux romain avec ses cultes et ses fêtes ; les six premiers livres furent écrits ( janvier à juin ) , mais l'æuvre resta inachevée . En effet, en 8 , Ovide fut sur décision d'Auguste envoyé en rélégation à Tomes , sur la mer Noire . Le prétexte avancé était l'immoralité de l’Art d'aimer, pourtant publié en 1a ! Dans ses poèmes Ovide lui - même évoque une faute ou une erreur sans donner de précisions ( Tr. III , 6 , 35 ; IV 1 , 24 ) . Les conjectures ont été multiples et variées : affaire d'adultère ? intrigue politique ? sacrilège ? ( voir Syme 9 , p . 215-222 ) . L'appartenance à un cercle pythagoricien a été suggérée par 14 J. Carcopino , « L'exil d'Ovide , poète néo- pythagoricien » , dans Rencontres de l'histoire et de la littérature romaines, Paris 1963 , p . 59-170 . Il faut souligner que le poète avait été condamné à la rélégation , sans un procès , sur une décision du prince ( Tr. II 125-138 ) . Par la suite , Ovide ne cessa de multiplier les demandes auprès d'Auguste pour rentrer en grâce ; il écrivit à ses amis et à sa femme pour demander leur soutien , tout en évoquant les difficultés d'un séjour dans ce pays glacé , inhospitalier et barbare . Les poèmes d'exil forment deux recueils , les Tristes en cinq livres , écrits entre 8 et 12 , et les

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OVIDIUS NASO ( P. - )

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Pontiques, en quatre livres, écrits de 13 à 16. Malgré ses supplications, Ovide ne put obtenir le pardon d'Auguste , ni celui de Tibère, et mourut en exil vers 17 . Bien des études récentes ont renouvelé l'approche littéraire de l'æuvre d'Ovide dans sa diversité . Seule la question de la philosophie retiendra ici notre attention : elle se pose surtout à propos des Métamorphoses. Ovide y retrace la création du monde , mentionne l'âge d'or (livre I ) . En outre, dans le livre XV, il reproduit un long discours ( XV 75-478 ) attribué à Pythagore ; les paroles de Pythagore sont adressées à Numa, puisque ce roi passait , selon la tradition, pour avoir été pythagoricien . Le philosophe condamnait d'abord comme un crime la consommation de viande et invitait à s'en abstenir ( 75-142 ) ; dans un second temps, il exposait la théorie de la migration des âmes , puis le principe d'un changement universel : « tout change , rien ne périt » ( XV 165 ), principe illustré par divers exemples : migration des âmes , vieillissement des êtres humains, les saisons , les éléments , les terres et les eaux qui se modifient, la génération spon tanée , le phénix . Ce principe est également appliqué aux cités . Ce passage a été diversement interprété ; pour certains critiques, il reproduit la pensée profonde d'Ovide et constitue l'explication philosophique qui fonde le poème ( 15 L. Alfonsi, « L'inquadramento filosofico delle Metamorfosi ovidiane » , dans Herescu 3 , p . 265-272 ; 16 R. Crahay et J. Hubaux , « Sous le masque de Pytha gore » dans Herescu 3, p. 282-300 ) ; après une longue analyse, Viarre 4, p. 211 288 , souligne qu'Ovide est proche du pythagorisme, mais qu'on ne trouve pas dans son æuvre de « pensée systématiquement intellectualisée » ( Viarre 4 , p . 288 ) . Mais des travaux ont fait apparaître l'éclectisme d'Ovide dans le discours qu'il prête à Pythagore : le végétarisme est fortement accentué, la métempsychose renvoie au pythagorisme , mais l'idée du changement universel des choses provient d'Héraclite , les mirabilia renvoient à des recueils de paradoxa ( 17 S. Myers , Ovid's Causes. Cosmogony and Aetiology in the Metamorphoses, Ann Arbor 1994 , 206 p . ; voir en particulier le chap. 6 « Pytha goras , Philosophy and Paradoxography » , p. 133-166) ; les allusions à Empé docle sont nombreuses ( 18 Ph . Hardie , « The speech of Pythagoras in Ovid Metamorphoses 15 : Empedoclean Epos » , CQ 45 , 1995 , p . 204-214 ) ; les échos lucrétiens ont également été soulignés ( XV 153-159 ; 19 C.P. Segal , « Inter textuality and immortality : Ovid , Pythagoras and Lucretius in Metamorphoses 15 » , MD 46, 2001 , p . 63-101 ). Ovide n'a pas cherché à reproduire à la lettre les principales théories d'un pythagoricien ( voir également 20 C. P. Segal, « Myth and Philosophy in the Metamorphoses: Ovid's Augustanism and the Augustan Conclusion of Book XV » , AJPh 90, 1969, p. 257-292 ; 21 D. A. Little , « The Speech of Pythagoras in Metamorphoses 15 and the structure of the Meta morphoses » , Hermes 98 , 1970 , p . 340-360 ; 22 J.-P. Néraudau , Ovide ou les dissidences du poète , Paris 1989 , 191 p . ) ; toutefois, ce discours lui permet d'insister fortement sur le principe du changement universel, principe qui est aussi celui que les Métamorphoses mettent en lumière . Il faut également rappeler que le poème dans son ensemble contient bien des allusions à la philosophie: la présence de Lucrèce a souvent été soulignée ( Myers 17 , p . 53-57 ) ; Lucrèce apportait en effet un modèle de poésie philo

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OVIDIUS NASO (P. -)

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sophique et didactique dont Ovide devait tenir compte même si le poète insère ces échos dans un contexte qui en transforme le sens . La création du monde semble plutôt inspirée par le Timée ( 23 T.M. Robinson , « Ovid and the Timaeus» Athenaeum 46, 1968 , p. 254-260 ; mais la part de la philosophie est discutée par 24 R. McKim , « Myth against Philosophy in Ovid's account of Creation » , CJ 80, 1984-1985 , p. 97-108 ) . Il y a donc chez Ovide des références philosophiques évidentes, mais une pensée éclectique . Des travaux récents tendent à souligner la part de la tradition littéraire dans ce domaine (voir 25 J. Fabre -Serris, Mythe et poésie dans les “Métamorphoses ” d'Ovide . Fonctions et significations de la mythologie dans la Rome augustéenne , Paris 1995 , 425 p . , en particulier, p . 327-353 : « Mythe et Philosophie » ; et 26 Ead ., Mythologie et littérature à Rome. La réécriture des mythes aux jers siècles avant et après J.-C. , Lausanne 1998 , 271 p. ) : Ovide répond à Lucrèce et à Virgile ; avec les grandes thèses du discours de Pythagore, il critique les rencontres entre politique et pythagorisme que proposent ces poètes. Selon l'auteur des Métamorphoses, ce sont d'abord les mythes qui révè lent le changement et l'instabilité du monde . La sagesse des mythes est première et la philosophie s'en fait l'écho.

MICHÈLE DUCOS.

Illa

COMPLÉMENTS AUX PRÉCÉDENTS TOMES

A

111a

ALEXANDROS (TITUS AURELIUS -)

MII

Ce philosophe, jusqu'ici inconnu , a été honoré à Aphrodisias par son fils, qui portait lui aussi le nom de Titus Aurelius Alexandros et s'honorait d'être « l'un des diadoques à Athènes » . Ce dernier est très certainement le philosophe aristotélicien Alexandre d’Aphrodise ( PA 112 ) , dont on découvre ici le nom complet . La base rectangulaire en marbre a été retrouvée dans un village voisin ( Karacasu ) . L'inscription , récemment publiée par Angelos Chaniotis , « New Inscriptions from Aphrodisias ( 1995-2001) » , AJA 108 , 2004 , p. 377-416 , sous le n ° 4 (p. 388-389 ) , et annoncée dans DPHA Suppl. p. 61 , porte le texte suivant : ψηφισαμένης της βουλής και του δήμου Τίτος Αυρήλιος ' Αλέξανδρος , φι λόσοφος , των ' Αθή νησιν διαδόχων T. Αυρήλιον Αλέ ξανδρον , φιλόσο φον , τον πατέρα « A la suite d'un décret du conseil et du peuple , Titus Aurelius Alexandre , philosophe , l'un des diadoques à Athènes , son père , le philosophe , T. Aurelius Alexandre » . Il est difficile de savoir ce que cette base de 1,14 m . de hauteur et d'environ 50x50 cm , soutenait . Chaniotis évoque « a crowning feature » , mais dans sa traduction il écrit qu'Alexandre aurait « ( erected the statue of) his father » . La citoyenneté romaine a pu être acquise par la famille lorsque le futur empereur Antonin le Pieux ( Titius Aurelius Fulvus Antonius ) était gouverneur de la province d'Asie ( 135-136 ) . Pour l'expression, “ l'un des diadoques d'Athènes”, voir Vita Plotini, $ 20 . RICHARD GOULET.

219a

ANTONINUS (CLAUDIUS –)

II

Dans une lettre conservée dans un papyrus du II ° siècle de notre ére ( PHamb ] 37 , r) , Lôreios Caminos ( L 78 ) écrit à Claudius Antoninus en évoquant sa xaroxayal a et ses meurs, qui sont celles d'un authentique philosophe.

868

ANTONINUS (CLAUDIUS -)

A 219 a

Lôreios reconnaît avoir reçu de lui une formation comme il n'en a reçue d'aucun de tous les autres philosophes . Il salue pour terminer les enfants du philosophe Chara et Antoninus . RICHARD GOULET. 284 APOLLONIOS DE TYANE (complément) C'est à un monument élevé au philosophe à Mopsueste, à la fin du III ou au IVe siècle , qu'appartient l'épigramme éditée par Dagron et Marcillet- Jaubert 17 ( DPhA I , p . 291 ) : voir G. Dagron et D. Feissel, Inscriptions de Cilicie, Paris 1987 , n° 88 , p. 137-141 , où l'on trouvera la bibliographie antérieure . Le premier distique célébrait Apollonios comme un modèle moral : « L'homme que voici , qui tire son nom d'Apollon et vient de Tyane, par sa splendeur a éteint les fautes des hommes » . Le deuxième distique , selon les restitutions retenues, a été compris soit en référence aux pouvoirs de thaumaturge manifestés par le philo sophe de son vivant, soit comme une évocation des bienfaits qu'il prodigue à l'humanité depuis sa mort. Sans doute faut-il, avec G. Dagron , se rallier plutôt à la première interprétation et comprendre: « [ Certes, il était bien un enfant) de Tyane, mais c'est le ciel qui l'a (envoyé ) pour dissiper les maux des mortels . » De la même façon, l'assimilation à Éphèse d'Apollonios à Héraklès Alexikakos ( Lactance , Div . inst . V 2 , 12 ; CSEL XIX 1 , p . 405 , 22 sqq . ) devait faire référence à l'épidémie à laquelle il avait mis fin de son vivant ( voir Bowie 2, p . 1687 ) . Le poème est en tout cas un témoignage précieux sur la diffusion de la légende d'Apollonios et l'exaltation de sa mission apollinienne. BERNADETTE PUECH . 329a ARIARATHÈS DE SYPALLÈTOS

FII

Cet athénien a élevé à l’agora, avec son concitoyen Attale de Sypalletos ( > A 502a) , une statue en l'honneur du philosophe académicien Carnéade ( > C 42) . Voir la notice « Mithridate » ( »M 174 ) . RICHARD GOULET. 348a ARISTIDE

FV

Selon les Parastaseis syntomoi chronikai 40 ( p. 46 , 13-15 Preger), dans une inscription qu'il aurait fait graver avant de quitter la ville, ce "philosophe" aurait donné un nom ( mal conservé) à un endroit de Constantinople où un certain Galien ( - + G 2a) , médecin et philosophe ( p. 45 , 10-11 Preger ), sous l'empereur Zénon (474-491 ) , avait donné une interprétation des Gorgones de marbre, contenant des hiéroglyphes et des signes astronomiques, mises en place par l'empereur Constantin , en y décelant des prophéties relatives à l'histoire des empereurs. L'épisode est également raconté sous des formes abrégées ou déformées dans d'autres textes de ce corpus (voir Patria II 46) . Le passage est traduit en anglais et commenté dans Averil Cameron et J. Herrin (édit . ) , Constantinople in the Early Eight Century. The Parastaseis syntomoi chronikai, Introduction , translation and commentary , coll . « Columbia Studies in the Classical Tradition » 10 , Leiden 1984 , p . 108-111 , avec un commentaire, p. 222-224 .

C 37a

CANONARIS

869

Cf. B. Baldwin , « Some Addenda to the Prosopography of the Later Roman Empire » , Historia 31 , 1982 , p . 97-111 , notamment p . 103 , repris dans Studies on Late Roman and Byzantine History, Literature and Language, coll . « London Studies in Classical Philology » 12, Amsterdam 1984 , p. 69 ( nº 11 ) . RICHARD GOULET. 428a ARTEMIDOROS D'AMYZON ( T. FLAVIUS AELIANUS -)

II ou III

Originaire d'Amyzon en Carie , T. Flavius Aelianus Artémidoros fut honoré à Tralles « pour le remercier d'enseigner à ses élèves à la fois les éléments de la philosophie et ceux de la rhétorique » ( B. Puech , Orateurs et sophistes grecs dans les inscriptions d'époque impériale, Paris 2002, n ° 47 ) . Il vivait dans la deuxième moitié du II° siècle ou au III°. BERNADETTE PUECH . 502a ATTALE DE SYPALÈTTOS

( (

FIIa

Cet athénien a élevé à l’agora, avec son concitoyen Ariarathès de Sypalletos A 329a ) , une statue en l'honneur du philosophe académicien Carnéade C 42 ) . Voir la notice « Mithridate » ( M 174 ) . RICHARD GOULET.

С

18a CALLI[CRATÈS ? ] DE SPARTE

II - III

Le « très philosophe » Calliſcratès ? ] est connu par les inscriptions des statues élevées par la cité de Sparte à sa fille Aurélia Oppia ( 0 31 ) et à sa petite - fille Aurélia Héracleia ( »H 44 ). BERNADETTE PUECH .

37a CANONARIS

DM IV

Selon les Parastaseis syntomoi chronikai 55 ( p . 55 , 19 - 56 , 6 Preger ) , ce " philosophe ” païen aurait accusé , sur le forum de Constantinople , l'empereur Constantin d'avoir supprimé ses ancêtres ( ó tūv apoyóvwv zadaipérns ). Sommé par l'empereur de cesser d'énn ( ELV, le philosophe aurait maintenu ses convictions et aurait été décapité. Voir H. Schlange - Schöningen , Kaisertum und Bildungswesen im spätantiken Konstantinopel, coll . « Historia - Einzelschriften >> 94 , Stuttgart 1995 , p . 69 . Le passage est traduit en anglais et commenté dans Averil Cameron et J. Herrin ( édit . ) , Constantinople in the Early Eight Century. The Parastaseis syntomoi chronikai, Introduction , translation and commentary, coll. « Columbia Studies in the Classical Tradition » 10 , Leiden 1984 , p . 128-131 et p . 241 . RICHARD GOULET.

870

CTÉSIPHON DE THASOS

225a CTÉSIPHON DE THASOS

C 225 a II ou III

Ctésiphon , fils de Némonios, appartenait à une famille de notables de Thasos. Sa patrie l'honora d'une statue en tant que philosophe ( BCH 118 , 1994 , p . 407 410 ) . On a également retrouvé son sarcophage: J. Pouilloux , Recherches sur l'histoire et les cultes de Thasos, t . II : De 196 avant J.-C. jusqu'à la fin de l'Antiquité, coll . « Études thasiennes » 5 , Paris 1958 , p. 285. Son activité se place au II° ou au IIIe siècle . BERNADETTE PUECH .

D DACYDAS + LACYDAS DE MÉTAPONTE

111a DIOCLÈS

FIV?

Prêtre rencontré par Palladius ( Histoire Lausiaque 58 , 3 ) près d'Antinoé en Égypte. Il avait vécu 35 ans en ermite dans une grotte, après avoir quitté, dans sa vingt-huitième année , des études de grammaire et de philosophie . Selon lui , « l'intellect qui s'éloigne de la pensée de Dieu devient ou bien un démon ou bien une bête (xtñvoc ) » . Il expliquait : « il tombe nécessairement dans la convoitise ( ÉTTLOVU a ) ou dans l'emportement ( Ovuóc ) . La convoitise est bestiale , l'em portement démoniaque » . B. Baldwin , « Some Addenda to the Prosopography of the Later Roman Empire » , Historia 31 , 1982 , p. 97-111 , notamment p. 105 , repris dans Studies on Late Roman and Byzantine History, Literature and Language, coll . « London Studies in Classical Philology » 12, Amsterdam 1984 , p. 71 ( n ° 29 ). RICHARD GOULET.

G 2a GALIEN Selon les Parastaseis syntomoi chronikai 40 ce médecin et philosophe ( p. 45 , 10-11 Preger) avait interprété, sous l'empereur Zénon (474-491), des Gorgones de marbre , contenant des hiéroglyphes , mises en place par l'empereur Constantin, en y décelant des périodes de l'histoire des empereurs. L'épisode est également raconté sous des formes abrégées ou déformées dans d'autres textes de ce corpus ( voir Patria II 46 ). Le passage est traduit en anglais et commenté dans Averil Cameron et J. Herrin (édit . ) , Constantinople in the Early Eight Century. The Parastaseis syntomoi chronikai, Introduction , translation and commentary , coll . « Columbia Studies in the Classical Tradition » 10 , Leiden 1984 , p . 108-111 , avec un commentaire, p. 222-224 .

H63 a

HÉRACLITE

871

Cf. B. Baldwin , « Some Addenda to the Prosopography of the Later Roman Empire » , Historia 31 , 1982 , p. 97-111 , notamment p . 103 , repris dans Studies on Late Roman and Byzantine History, Literature and Language, coll . « London Studies in Classical Philology » 12 , Amsterdam 1984, p. 72 (n° 42) . RICHARD GOULET. IV - V

15a GEORGES

Prêtre arien ordonné par l'évêque Barbas de Constantinople ( +430) . Il se distinguait, selon Socrate, Hist. eccl. VII 6 ( PG 68 , col . 748 B -C) , par sa culture hellène et sa pratique constante de Platon et d'Aristote qu'il avait toujours en main . Il rejetait les positions les plus extrêmes de l'arianisme. Cf. B. Baldwin , « Some Addenda to the Prosopography of the Later Roman Empire » , Historia 31 , 1982 , p . 97-111 , notamment p . 106, repris dans Studies on Late Roman and Byzantine History, Literature and Language, coll . « London Studies in Classical Philology » 12 , Amsterdam 1984 , p . 72 ( n ° 45 ) . RICHARD GOULET .

H

63a HÉRACLITE

DV ?

Selon la Chronique de Jean de Nikiou , LXXXIV 26-32 ( p . 93-95 Charles 1916 ; la forme éthiopienne du nom n'est pas traduite p. 337 Zotenberg 1883 ) , ce philosophe de Constantinople , ami de la famille d'Athénaïs et connu par l'impératrice Pulchérie , aurait facilité l'introduction à la cour impériale d'Athénaïs, la future impératrice Eudocia par suite de son mariage en 421 avec Théodose II. Sur cette chronique, voir M. H. Zotenberg, La Chronique de Jean , évêque de Nikiou . Notice et extraits, Paris 1879. Le texte éthiopien dépend d'une version arabe traduite du grec. La Chron . Pasch ., a. 420, CSHB 6 ( 1832) , I , p. 576 , 7 Dindorf = PG 92 , 793 a, et Jean de Nikiou lui - même donnent le nom d'Héraclite au père d'Athénaïs, généralement appelé par les autres sources Léontios ( 2L 44 ) (Socrates, Hist. Eccl. VII 21 ; Jean Malalas XIV , p. 353 , 10 ; 354 , 17-18 ; 355 , 1 = PG 97 , 527 sqq.; Cedrenus, Compendium Historiarum , CSHB 4 ( 1838 ) , I , p . 590 , 9 = PG 121 , 641 ; Zonaras, Epitomae Historiarum , CSHB 46 ( 1847 ) , XIII 22 , t. III , p . 101 , 3 Pinder = PG 134 , 1185 ) . Cf. F. Gregorovius, Athenaïs, Geschichte einer byzantinischen Kaiserin, 3e éd ., Leipzig 1892, XII -279 p. ; 0 . Seeck et L. Cohn , art. « Eudokia » 1 , RE VI 1 , 1907, col. 906-913 ; H. Schlange - Schöningen, Kaisertum und Bildungswesen im spätantiken Konstantinopel, coll . « Historia- Einzelschriften » 94 , Stuttgart 1995 , p. 86. RICHARD GOULET.

HERENNIANUS

872 71a HERENNIANUS

H71 a II - III ?

Deux stèles hermaïques, probablement disposées dans les thermes de la cité de Dion , portaient le buste d'un même personnage, Herennianus. Les fragments de l'inscription , la même sur les deux hermès , ont été publiés par D. Pandermalis, Alov. Havaxalvýń, Athènes 1999 , p . 158-159 (SEG 49, 696). Il pourrait s'agir d'un philosophe , qui aurait vécu à la fin du II° et au début du IIIe siècle , mais il n'est pas exclu que le personnage soit plutôt un notable de la cité ayant contribué à l'embellissement du complexe thermal. BERNADETTE PUECH.

106a HÉRON LE PHILOSOPHE

MV

Parmi 427 statues ou " stèles " , majoritairement païennes, enlevées de l'emplacement de la future église de Sainte -Sophie à Constantinople , il s'en trouvait une représentant une prêtresse d'Athéna, vue de profil, en train de donner un oracle à “ Héron le philosophe ” ('Ev tñ Meyáan èxxino a tị vũ ονομαζομένη αγ α Σοφ α στήλαι αφηρέθησαν υκζ' (427) [ ... ] και ιέρεια της 'Αθηνάς από του πλευρου τον “Ήρωνα φιλόσοφον μαντεύουσα ). Voir Averil Cameron et J. Herrin (édit. ) , Constantinople in the Early Eight Century. The Parastaseis syntomoi Chronikai, Introduction , translation and commentary, coll . « Columbia Studies in the Classical Tradition » 10, Leiden 1984, chap. 11 , p. 70, 10-11 ( texte ), et p . 185 ( commentaire ). Le passage est partiellement cité dans la Souda , s.v. Sophia E 809. Les statues auraient été dispersées dans Constantinople par Justinien ( 527-565 ) , lorsqu'il entreprit de construire la “Grande église ” ( p . 72 , 4-5 ) . Les auteurs des Parastaseis font observer qu'il est toujours possible de retrouver un grand nombre de ces æuvres d'art lorsqu'on se promène dans la cité ( p. 72 , 5-7 ) . Les éditeurs ont pensé à Héron d'Alexandrie ( » H 101a ) , le mécanicien , qui n'est généralement pas présenté comme un philosophe, mais également à un professeur païen d'Alexandrie qui enseigna les mathématiques à Proclus ( Marinus , Proclus 9 , p. 11 , 17-19 Saffrey -Segonds- Luna, avec la note 5 , p. 89 90 ). Selon Proclus, ce professeur, « attaché au culte des dieux » , « n'hésita pas à révéler à Proclus toutes les façons dont il honorait les dieux et voulut l'avoir constamment à son foyer » ( ibid. , 9 , p . 11 , 23-25 ) .

RICHARD GOULET. HIPPOLOCHOS DE MACÉDOINE

IV -III

Auteur de lettres sur des banquets adressées à Lyncée de Samos ( ** L91 ), peut-être élève de Théophraste. Cf. 1 A. Dalby , « The wedding feast of Caranus the Macedonian by Hippolochus » , Petits Propos Culinaires 29 , 1988 , p . 37-45 ; 2 Id. , Siren feasts. A history of food and gastronomy in Greece, London /New York 1996 . Sur Hippolochos ( ' Intółoxoç ó Maxedov ) , Athénée est notre seul témoin. Il présente ce personnage ( IV , 128 a ) comme un contemporain des deux frères samiens, Lyncée et Douris ( 2- D 226 ) . Selon Athénée (ibid.), Hippolochos aurait

Jla

JEAN LE PHILOSOPHE

873

laissé des lettres sur les banquets (δειπνητικαι επιστολα ) adressées a Lyncée de Samos. L'auteur des Deipnosophistes donne de l'une d'entre elles un résumé, fait de citations littérales, “parce qu'elle est difficile à trouver” ( IV , 128 c ) . Il s'agit de la description d'un banquet de noces somptueux qu'un certain Caranos de Macédoine aurait donné sans doute dans les premières décénies du III ° s . av . J.-C. ( vers 275 selon Dalby 1 , p. 37 ) . Le texte figure dans Athénée III , 127 e IV , 130 d ; la lettre est encore mentionnée ailleurs ( III , 126 d -e ; IX , 402 a ; XIV , 614 d ) . On trouvera une traduction anglaise annotée des extraits de la lettre en question dans Dalby 1 , p. 39-45. On classe ou non Hippolochos parmi les élèves de Théophraste selon la lecture que l'on adopte d'Athénée IV , 128 a 3 Kaibel. Si l'on conserve la leçon des manuscrits ( Oɛoppáotov ... Maontńs), on le comptera alors – comme d'ailleurs son correspondant Lyncée -, au nombre des élèves de Théophraste ; si , comme Kaibel, on adopte le texte corrigé par Adamantos Koraïs ( A. Coray) : uaontás , le pluriel renvoie aux deux frères samiens . La correction du savant grec est adoptée , sans être mentionnée comme telle , par Gulick dans la collection Loeb ( t. II , p. 90) , et 3 W. Spoerri, dans l'article du DPhA qu'il consacre à Douris ( ™ D 226 , p. 899) , note simplement que cette correction est vraisemblable . Cependant , 4 A. Dalby , « The curriculum vitae of Duris of Samos » , CQ 41 , 1991 , p . 539-541 , défend vigoureusement la leçon des manuscrits ( mais Spoerri 3 , p. 899 , parle, sans autre précision, de “ faux argu ments " ). Or, convaincus par les arguments de Dalby 4, les auteurs d'un récent catalogue des disciples et auditeurs de Théophraste consacrent une entrée à Hippolochos ( W.W. Fortenbaugh et alii [édit. ] , Theophrastus of Eresus. Sources for his life, writings, thought and influence, coll. « Philosophia antiqua » 54 , 1-2 , Leiden 1992, t. I , p. 68-69 , nº 9 ) . Dans son histoire du " banquet” comme forme littéraire, Josef Martin suppose que Hippolochos , tout comme Caranos , sont des créations littéraires de Lyncée (Symposion : die Geschichte einer literarischen Form , Paderborn 1931 , p. 159 160 ). JEAN -PIERRE SCHNEIDER .

J

la JEAN LE PHILOSOPHE

D III ?

Philosophe et astronome consulté par l'empereur ( Septime ) Sévère à Byzance , lors de la prise et de la destruction de la cité après un siège de trois ans , d'après un récit légendaire tardif (xviº siècle ) sur la colonne creuse du Xérolophos à Constantinople (en réalité élevée à l'époque d'Arcadius ). Le texte grec a été édité par G. Dagron et J. Paramelle, « Un texte patriographique . Le " Récit merveilleux , très beau et profitable sur la colonne du Xèrolophos” ( Vindob. Suppl. gr . 172 , fol. 43 ' - 63 % ) » , TM 7 , 1979 , p . 491-523 , notamment

p. 514 .

874

JEAN LE PHILOSOPHE

Jla

Les éditeurs résument le passage ( li . 40-77) de la façon suivante : installé au Xèrolophos, « découragé par les succès des Byzantins, Sévère fait venir une nuit un philosophe et astrologue du nom de Jean , depuis longtemps son familier, pour savoir si les Romains pren dront la ville. L'horoscope révèle qu'après avoir été prise et détruite, Byzance restera désertée pendant de nombreuses années, puis deviendra la capitale d'un empereur ; les astres donnent le nom des successeurs de cet empereur jusqu'à l'Antéchrist, et prédisent l'avenir de la ville. Sévère et Jean sont stupéfaits et, pour que ne soient pas oubliées de telles merveilles, dressent une colonne au Xèrolophos et y sculptent la succession des règnes et des événements jusqu'à la fin des temps. » Dans le récit, un autre Jean , un des sages (convoqués ), « possédant une sagesse et une intelligence supérieures aux autres » (li . 355-356 ), apparaît plus loin pour inter préter à l'intention de l'empereur Léon VI la signification du nom BAKAAL figurant sur une tête d'homme en marbre exhumée au Phanar, hors de la ville. RICHARD GOULET.

Index des noms propres

Cet index contient les noms de tous les personnages historiques mentionnés dans les notices. Les noms des auteurs des sources primaires anciennes ne sont pas pris en compte. En règle générale, nous avons évité d'identifier les personnages homonymes connus par des sources distinctes , lorsque l'identification n'apparaissait pas comme certaine. Une brève caractérisation du personnage n'a été ajoutée que là où elle semblait nécessaire, notamment pour distinguer les homonymes. Il arrive que la translittération des noms propres retenue dans l'index ne soit pas celle qui a été utilisée dans les notices. Comme cet index entend compléter la séquence des notices , lorsque le personnage bénéficie d'une notice dans le présent tome, aucune référence n'est faite à la notice correspondante. Les numéros renvoient aux notices (pour les lettres L à O de l'alphabet) et un seul renvoi est indiqué pour une même notice, même si le nom figure à plusieurs endroits. Toutefois, pour les notices qui comprennent plusieurs pages , on a ajouté un renvoi aux pages ou à la section de la notice où le nom propre apparaît. Les numéros de notices sont séparés par des points - virgules, les numéros de pages ou de sections par des virgules. Exemple : Alcibiade C 16 ; 17 ; 102 ; 174 ; 175 ; 216, p. 516, 520 ; D 13 , p . 604; 91 ; 195 ; 226, p. 901, 905.

Cette référence doit se lire de la façon suivante: On trouvera le nom d'Alcibiade dans les notices C 16, C 17 ... C 216, puis D 13 , D 91 , D 195 , D 226. Pour la notice C 216, un renvoi complémentaire est fait aux pages 516 et 520. De même pour D 226 aux pages 901 et 905. L'identification des noms propres relevant de la tradition syriaque et arabe a été assurée par Maroun Aouad . Sont indiqués, d'abord , une appellation usuelle, puis, entre parenthèses, les autres éléments du nom, ce qui permet d’dentifier les personnages désignés différemment et d'éviter la confusion entre ceux qui ont des noms voisins. Quand il existe un nom équivalent ( transformation par les Latins... ), il est indiqué entre crochets. Pour le classement alphabétique de ces noms, il n'est pas tenu compte de l'article défini français ou arabe (al-, l-), ni de b. Abba bar Kahana, 09, p. 754. Abba Joseph le maçon, O 9, p. 754. Abbon de Fleury, M 46 , p. 302. Abélard (Pierre -), M 9, p. 242. Ablabius, M 63 , p. 314. Abnimos, O 9, p. 752-754. Abnomos, O 9, p. 753 . Abū Nașr Manşūr b. ' Ali b. ' Irāq, M 120 , p. 458-459 .

Achaïcos, M 129, p. 469. Achaïos d'Érétrie, M 116, p. 450 . Achilles ( Tatius ), O 10, p. 764. Acutius (Q. -), M 99, p. 398 . Adélard de Bath , N 17 , p. 648. Adelfius ( Clodius Celsinus -), N 16, p. 625 . Adéodat, N 12, p. 596.

Abū al -Qāsim Maslama b . Aḥmad al Mağriți, N 50 , p. 693 .

Adimante, frère de Lysias, L 94 . Adimantius d'Émèse, N 17 , p. 627. Adraste , mathématicien, M 36. Adraste le Phrygien , N 46 .

Abū Sulaymän Rabi b . Yahyā , évêque d'Elvire, N 50, p. 692.

Aegidius, M 24 . Aelius Dionysios, L 15 .

876

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

Aétius , doxographe , N 17 , p. 630, 634. Aétius , général, M 24. Aétius d'Amide, médecin , O 40 , p. 804. Agamestor, académicien, L 11 . Agapius d'Athènes, L 89, p. 206 , 209; M 42 Agapius, auteur de l'Heptalogos, 0 47 . Agathias le Scholastique, N 53 ; 0 48. Agathoboulos = Aristoboulos , frère d'Epicure, N 18, p. 654 .

Alcméon de Crotone, L 30 ; 33a ; 104 ; O 10, p. 764. Alemán (Mateo -) , L 66, p. 159.

Agathoboulos d'Alexandrie, cynique, 09 , p. 753. Agétor de Lamia , M 116, p. 449. Aglaophamos, O 45 , p. 848 . Agrippa, voir Vipsanius Agrippa ( M.-). Ahenobarbus, voir Domitius Ahenobarbus (L. --) Aḥmad b. Abū Sa'd al-Harawi, Abū al-Fadi , M 120 , p. 458. Aḥmad b. Mūsā b. Sākir, M 120 , p. 460 . Aidésius, prêtre à Tyr, M 138 . Aidésius de Cappadoce, M 63 , p. 313 , 315 316 ; O 35 , p. 794. Aigialeus, grammairien, M 44. Aisara, M 202. Aischrion de Mitylène , N 31 . Alaric II , roi wisigoth, L 34 ; M 46 , p. 290 . Albert le Grand, N 17, p. 627, 649, 679. Alberti (Leone Battista -), L 66, p. 159. Albinus , médio-platonicien , L 63 , p . 118 ; M 67 , 69 , p. 340 ; N 59, p. 714 ; 66 , p. 726, 731 ; 0 42, p. 813 , 839. Albinus , mentionné dans les satires de Lucilius , L 67. Albinus ( A. Postumius -) , consul en 180a, L 67 .

Alexandre d'Abonotique , L 47 ; 66 , p. 140 , 152, 156; 0 35 , p. 793 . Alexandre d'Aphrodise, A 111a ; M 14 ; 63 , p. 320 ; N 17, p. 642; 44 ; 45 , p. 674, 677 678; 55, p. 699 ; 65 , p. 723 ; 0 42, p. 822. Alexandre d'Halès, N 17 , p. 627 . Alexandre de Cotyaeum , M 39, p. 276. Alexandre de Jérusalem , O 42, p. 810. Alexandre de Lycopolis, N 66 , p. 739.

Albinus (Sp. Postumius -), consul en 148a, L 67 . Alcibiade, L 103.

Alexandre, père de Lacydès de Cyrène, L 9 ; 11 . Alexandre , roi de Macédoine , L9 ; 70 ; M 17 ; 70, p. 349 ; 76, p . 374-375 , 378 ; 101 , p. 402; 116, p. 454; 149 ; 179 ; N 13 , p. 606 ; 20 ; 0 23 .

Alexandre de Séleucie , dit Pèloplaton , platonicien, M 39, p . 275 . Alexandre Philaléthès , M 134. Alexandre Polyhistor, N 58 , p. 706 . Alexandros , fils de Nouménios , M 105 , p. 435 . Alexandros ( P. Aelius -), archonte athénien, M 198 . Alexandros ( Titus Aurelius -) , ( = Alexandre d'Aphrodise ), A 111a. Alexandros Claudios, M 105 , p. 434. Alexidème , père de Ménon de Pharsale, M 136. Alexinos d'Élis, M 100 ; 116, p. 450 , 452. Alexis , poète comique, M 82 . Alfanus (Nicolas -), N 17 , p. 637 , 648 , 650 . Alfred de Sareshel, N 45 , p. 678. Alypius, ami d’Augustin, N 12, p. 596 , 597. Amafinius, L 62.

Alcibiadès II ( Flavius -) , archonte athénien , M 198 .

Amasis, N 13, p. 604 .

Alcidamas , L 86.

Ambroise , M 70, p. 350, 357, 359. “Ambrosiaster”, M 7 .

Alcimos , rhéteur, M 142 , p. 501 . Alcinoos, médio-platonicien , L 63 , p . 119 , 125 ; M 69, p. 333 , 340 , 342 ; N 12 , p. 601; 17 , p. 642; 59, p. 714; 66 , p. 738 . Alcinoos, philosophe stoïcien , M 40 . Alciphron , L 66 , p . 158 ; 102 ; M 102 , p . 418 ; 178 .

Amélius (Gentilianus -), L 63 , p. 119-123 ; 99 ; 100 ; N 66, p. 726 , 737 , 739 ; 0 35 , p. 797 ; 41 , p. 805. Amérius, voir Amélius.

Ammien , cousin de Jean Lydus , L 89, p. 206 .

INDEX DES NOMS PROPRES

877

Ammien Marcellin , L 2 ; M 147 ; N 16, p. 625 ; 49. Ammonius, auteur chrétien , 0 42, p. 810.

Annicéris de Cyrène , aurige qui racheta Platon , N 10, p. 591 . Annicéris de Cyrène, philosophe, N 56.

Ammonius, maître de Plutarque de Chéronée , L 17 ; M 122 . Ammonius, péripatéticien , L 63 , p. 119 . Ammonius d'Alexandrie , L 72 , p. 173 ; 89, p. 209; N 55 , p. 701 ; 0 17 ; 45 , p. 851 . Ammonius dit Saccas, L 63 , p . 118-119 , 122; M 63 , p . 314 ; N 17 , p . 634 ; 0 41 , p. 804, 806 ; 42, p. 810, 832, 836-837 . Ampelius (L -), N 58, p. 710. Amphicrate, rhéteur, M 52. Amphictionè, O 42 , p. 835 .

Annius, stoïcien , L 63 , p. 119 ; M 75 . Antagoras de Rhodes, M 116, p. 450. Anthémius, empereur, M 24; 35 . Antias ( Valerius -), N 67 .

Amphinomos, M 101 , p. 406 . Amphion , M 3 . Amyclas d'Héraclée, M 101 , p. 402. Anacharsis le Scythe, L 60 ; M 190 . Anacréon, M 69, p. 348. Anastase , empereur, L 89, p. 208. Anastase le Sinaïte, L 2 ; 89 , p. 208 ; N 17 , p. 647 . Anatolius , dédicataire d'un traité de Porphyre, L 63 , p. 120 ; N 16, p. 621-622 . Anatolius, grammairien , O 17 . Anaxagore de Clazomène, L 45 ; 73 , p. 183 ; 89 , p. 209 ; M 97 ; 151 , p. 508-509, 512513 ; 200 ; N 30; O 10, p. 762 , 765 . Anaxarque d’Abdère, M 116 , p. 447; 149 ; 190 ; N 24. Anaximandre , L 89, p. 209 ; O 10, p. 763 . Anaximène de Lampsaque, M 151 , p. 511 . Anaximène de Milet, L 89, p. 209 ; M 151 , p. 511 ; N 17, p. 636. Anchimolos, M 52 ; M 194. Anchipylos , M 52; 116, p. 446 , 451 ; 194. Andron , musicien et géomètre, maître de Marc Aurèle M 39, p. 276.

Andron , fils d’Androtion, N 7. Andron, mathématicien, O 10, p. 762 , 766. Andronicus de Rhodes, L 38 ; N 17, p . 640 ; 45 , p. 674 , 676-677 ; 55 , p. 700; 0 6. Androsthène , fils d'Onésicrite d'Égine , O 23 ; 24. Androtion , N 7 . Anébon , N 16, p. 621 ; 0 42, p. 822.

Anticlide, M 188. Antigone de Caryste, L 83 ; M 116, p. 444 445 , 448 , 451 ; M 209 , p. 579 ; N 10 , p . 587; 39. Antigone Gonatas, M 116, p. 447-450 , 452 453 ; 149 . Antigone le Borgne, L 83 ; M 149. Antiloque, O 22 . Antimaque, L 63 , p. 124. Antiochis , fille d'Antiochus le Grand , M 174, p. 529. Antiochus d’Ascalon , L 74 ; 98 ; M 69 , p. 342-344 ; M 86 ; 115 ; 176 ; 181 ; N 26 ; 51 ; 66, p . 727. Antiochos IV Épiphane, N 13 , p. 607.

Antiochus le Grand , M 174, p. 529. Antiochus Sidétès, N 13 , p. 607 . Antipater de Sidon , M 90 , p. 385 . Antipater de Thessalonique, M 90, p . 385 . Antipatros , père de Nicolas de Damas , N 45 , p. 670. Antipatros de Bostra , O 42 , p. 818 . Antipatros de Macédoine, général macédo nien , L 9 ; M 207. Antipatros de Tarse, L 67 ; M 181 ; N 25 . Antiphon , sophiste, O 22. Antiphon , orateur attique, O 42, p. 830 . Antisthène , L 9 ; 26 ; 86 ; M 69 , p. 343 ; 70, p. 361 , 363 ; 116, p. 444 ; 126 ; 129 , p. 467 , 470, 474 ; 168 ; 208 ; N 10, p. 592 ; 41 ; 46 ; 09, p. 757, 759. Antoine, voir Marc Antoine. Antonin le Pieux , empereur, A 111a ; M 39, p. 271-272, 275 ; 71 ; 98 ; 169. Antoninus , fils de Claudius Antoninus , A 219a; L 78. Antoninus, fils d'Eustathe et de Sosipatra, M63 , p. 315 . Antoninus (Claudius -), L 78 .

878

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

Antonius (C. - ), N 58 , p. 705 .

Antonius ( M. -) , M 181 . Antonius de Rhodes, ami de Porphyre, L 63 , p. 120 . Antonius Primus, M 198 . Antyllus , médecin , O 40 , p. 803 .

Anytos, adversaire de Socrate , M 136. Apelles, membre de l'escorte d'Athénaïs , N 23 . Apellicon de Téos , N 15 , p. 619. Aper, M 39 , p. 276. Apia , M 53 . Apolexis, M 132 . Apollinaire de Laodicée , M 2 ; N 17 , p. 626.

Apollodore , correspondant de Lyncée de Samos, L 91 . Apollodore d'Athènes , L 11 ; M 87 ; 102 , p. 407; 155 ; 193 ; N 8 ; O 10 , p. 762 . Apollodore Kepotyrannos, M 155 . Apollonidès (Titus Pompeius - ) , N 55 , p. 701. Apollonius, grammairien , L 63 , p . 119-120 . Apollonius, archistrator, L 66 , p. 142.

Apollonius (d'Antioche?) , médecin , L 88 . Apollonius , père de Méléagre de Séleucie , M91 . Apollonius de Chalcédoine , stoïcien , M 39, p . 275 ; 71 . Apollonius de Pergé , M 101 , p . 403-404 ; N 57 . Apollonius de Ptolémaïs , L 79 ; 85a ; M 181 . Apollonius de Tyane , L 34 ; M 62 ; 130 ; 187 ; 198 ; N 17 , p . 652 ; 61 ; 63 ; 0 35 , p. 794 ; 42 , p . 835 . Apollonius Dyscole , M 9 , p. 234.

Apollophane , auteur dramatique , M 52. Apollophane , stoïcien , L 63 , p. 118 ; 0 42 , p. 813 , Apollos de Nicée , L 79 ; 85a ; M 181 . Appius , monetarius en 84 *, N 22 . Appius Claudius , voir Caecus ( Appius Claudius - ).

Apries , N 13 , p. 604. Apseudès , archonte p. 489.

athénien ,

Apulée, L 2; 34; 66 , p. 142, 148; M 18; 46, p. 289 , 297 , 299 ; 69 , p. 325 ; 71 ; 129, p. 474 ; N 12, p. 597 ; 17, p. 642, 645; 50, p. 687 , 689 ; 58, p. 705 ; 65, p. 720, 723. Aquila Romanus, M 46, p. 297, 301 . Aquilinus , disciple gnostique de Plotin, 041 , p . 805 . Aquilius (C. -), M 26. Arabianus, auteur chrétien, M 55. Arabianus (Cn . Claudius Severus -), M 39,

p. 275 . Aranéola, L 34 ; M 12. Aratos de Soles , M9, p. 236; 19, p. 251; 113 ; 116, p. 450 ; 198 ; N 13 , p. 613 ; 58, p. 710 . Arcadius, empereur, O 40, p. 801 . Arcésilas de Pitane , L 9; 11 ; 66, p. 154; M 52 ; 116, p. 450; 129, p. 472-473; N 66 , p. 727 . Arcésos, L 104 . Archédème, N 25 . Archélaos, évêque, M 44 . Archélaos, roi de Macédoine , N 10, p. 591 . Archélaos, fils d'Hérode le Grand, N 45, P. 671 . Archélaos le Physicien, O 10, p. 762. Archestratus de Thespies (Avidius -), N 59,

p. 713 . Archias d’Antioche (Aulus Licinius -), poète . L 74 ; M 90, p. 385. Archigène, médecin , O 40 , p. 803 . Archimède, L 73 , p. 187; M 46, p. 298; 101 , p. 403; 120, p. 463 . Archinos, L 94. Archipolis, M 116, p. 449. Archippos, pythagoricien , L 104; 0 32. Archytas, “architecte ", L 28 . Archytas de Tarente , L 14; 72, p. 167-168 , 173 ; 104; M 204; 101 , p. 403, 405; 120,

p . 460 ; N 11 ; 06. Aréobindos , préfet du prétoire d'Orient en 553 , 0 48 . Aréthas de Césarée ( de Cappadoce),L 66, p. 159; M 39, p. 277. Argeia , fille de Diodore Cronos, M 127. Ariarathès de Sypalèttos , A 502a ; M 174,

M 140 , P. 534 .

INDEX DES NOMS PROPRES Ariarathès IV Eusébès, roi de Cappadoce, M 174, p. 529. Ariarathès X Eusébès Philadelphos, M 174, p. 531 . Ariarathès, fils d'Attale , M 174 , p. 533 . Ariarathès, fils de Polémaios, de Sypalèttos, M 174, p . 533-534.

Arignotè, M 202 . Ariobarzane II Philopator, M 174, p. 531 . Ariobarzane III , M 174 , p. 531 . Aristaios de Crotone, L 104 ; M 101 , p. 404 ; 180. Aristandros, O 42 , p. 835 . Aristandros de Telmessos , devin d'Alexan dre , 0 42, p. 835 . Aristarque de Samothrace ou d'Alexandrie, philologue , M 87 ; N 3 . Aristarque de Samos , astronome , M 140 , p. 490 . Aristénète, L 66, p. 158 . Aristide ( Aelius - ) , L 66 , p. 139 ; M 105 , p. 434,436 ; 159 ; 181 . Aristide de Thèbes dit le Jeune , peintre , L 43 ; M 179. Aristide Quintilien , M 46 , p. 300. Aristippe, académicien , L 11 . Aristippe de Cyrène , L 67 ; 85 ; M 142 , p. 501 ; N 24 ; 51 ; 56. Aristippe de Larisse, M 136. Aristoboulos, frère d'Épicure, N 18 , p. 654. Aristoboulos, historien d'Alexandre , O 23 . Aristoclès de Messine , L 85 ; N 24 ; 51 . Aristodème , adversaire de Ménédème d'Érétrie , M 116, p. 448 . Ariston , père de Platon , O 42 , p. 835 . Ariston de Céos, L 83 ; N 8 ; 51 . Ariston de Chios, M 39 , p. 276 ; 168 .

Aristonicos, M 174, p. 529. Aristonyme, père de Clitophon , L 94. Aristonyme , nom reconstitué dans un papy rus d'Herculanum , O 3 . Aristophane, ami de Libanios, M 63 , p. 315 ; N 62 . Aristophane , poète comique , L 66 , p . 152 ; 101 ; M 102 , p. 411-412 ; 140 , p. 488, 497 ; N 7 ; 13 , p. 613 ; O 45 , p. 845 .

879

Aristophane le Péripatéticien, L 22 ; M 116, P. 450 . Aristos, frère d’Antiochus d'Ascalon , N 26. Aristote de Stagire, G 15a ; L 33 ; 45 ; 57 ; 63 , p. 118 , 125 ; 72 , p. 167 , 171-173 ; 74 ; 83 ; 85 ; 86 ; 89, p . 209 ; M 46, p. 296, 301 ; 50 ; 52 ; 63 , p. 316, 318 ; 69, p. 342 , 344; 71 ; 76 , p. 375 , 379 ; 97 ; 101, p. 406-407; 102 , p. 411 , 413-414 , 417 ; 116 , p . 454 ; 118 ; 126 ; 134 ; 142 , p. 500 ; 149 ; 151 , p . 513 ; 179 ; 186 ; 203 ; N 15 , p . 617 , 619 ; 17 , p. 631 , 636-637 , 639-641, 644, 646 , 648 ; 21 ; 30 ; 31 ; 45 , p. 673 , 676 ; 46 ; 51 ; 53 ; 55 , p . 699-700 ; 58 , p. 711 ; 65 , p . 723 ; 66 , p. 731 , 738 ; 0 6; 10 , p . 764, 766 ; 16 ; 17 ; 40 , p. 803 ; 42 , p. 831 , 841 ; 45 , P. 845 , 849; 48. Aristoxène de Tarente , L 18 ; 22 ; M 166 ; 186 ; N 10, p. 587 ; 15 , p. 620 ; 50 , p. 689 ; 06. Arius, M 70 , p. 353 . Arius Didyme, N 17, p. 640 . Arnobe, L 2 ; 7 , p. 65 ; O 34 , p. 789. Arria, platonicienne , L 76 . Arria l'Ancienne , épouse de Caecina Paetus, M 139. Arrien de Nicomédie, L 66, p. 141 , 153 ; 79 ; 85a ; M 39, p. 275 ; 47 , 69, p. 325 ; 72 ; 76, p. 370-371 , 380 ; 198 ; 0 23 . Arsène, M 69 , p. 347 . Artaxerxès, M 136. Artémidore , stoïcien , M 198 . Artémidore de Daldis , M 69 , p . 326 ; 0 42 , p. 822 . Artémise, épouse de Mausole, L 63 , p. 120 ; N 3. Artemisia, fille de Diodore Cronos , M 127 . Asclépiade de Bithynie , médecin , M 133 , p. 479 ; O 40 , p. 803. Asclépiadès d'Alexandrie , O 20 ; 45 , p. 851 . Asclépiadès de Phlionte , M 116 , p. 446 , 449; 194 . Asclépigéneia, N 27 .

Asclépiodore d'Athènes, peintre, M 179. Asclépiodote d'Alexandrie, M 23 ; 0 20 ; 45 , p . 851 . Asclépius de Tralles,N 50, p . 687 . Aspasius , N 52 ; 55 , p. 699 ,

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DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

Astérios , disciple de Lacharès, L 3 . Astyanax , neveu de Lycon de Troade, L 81 . Astyanax, père de Lycon de Troade, L 81 ; 83 . Athanarit , M 38 . Athanase , M 2 ; 64 ; 70 , p . 349 , 353-354 , 358-359 ; 138 ; O 42 , p . 818 . Athénagore d'Athènes , apologiste , N 17 , p . 628 ; 0 45, p . 847,850. Athénaïs, voir Eudocie , épouse de Théodose II .

Athénée , stoïcien, L 63, p . 119 ; M 197 . Athénée , L 66, p. 159 ; M 209, p. 577 , 580 ; N 39 ; 45 , p . 671 . Athénodore, élève d'Origène le Chrétien , 0 42 , p. 810, 813 .

Avienus ( Rufius Festus - ) , traducteur d'Aratus, L 55 , p. 104; M 9, p. 236; 198. Avitus, empereur, M 24. Avitus , correspondant de Jérôme, 0 42, p. 817 . Axiothéa de Phlionte , L 21 ; 22 ; M 116, p. 450 ; N 21 .

Bacchius, M 33 ; 39, p. 275 ; N 55, p. 699. Al - Baladi ( Aḥmad b. Muhammad b. Yahyā ), médecin , N 45, p. 678 . Balbus ( L. Thorius -), O 36. Banū Mūsā, M 120, p. 460 . Barhebraeus, voir Ibn al-' Ibri. Barbas de Constantinople, G 15a. Bardesane, M 55 ; 76, p. 376, 377.

Athénodore de Tarse, dit Cordylion, N 25 . Athénodore de Tarse , dit Calvus , fils de Santon L 72 , p. 167-168 , 171 , 173 ; M 28 ; N 25 ; 26 ; 55 , p. 701 . Athénodote , maître de Fronton, M 198.

Barthélemy, apôtre, M 138 . Basile de Césarée, L 9 ; M 8 ; 58 ; 64; 70, p . 349, 354, 358-359 ; O 42,p. 816,818.

Attale de Sypalèttos , A 329a ; M 174 , p. 534 .

P. 275. Basilide , épicurien , M 155 . Basilide , gnostique , N 66 , p. 736. Bāsilides Allādi , M 120 , p . 459. Basilina , mère de l'empereur Julien , M 41 .

Attale Jer, roi de Pergame , L 9 ; 11 ; 97 ; M 174 , p. 532-533 ; N 10 , p. 588 , 590 ; 57 . Attale II de Pergame , roi de Pergame, M 174 , p. 529 , 530-532, 534. Atticus , médio - platonicien, L 63 , p . 119 , 125 ; 72 , p . 167 ; N 51 ; 55 , p . 699 ; 66 , p . 726, 733 , 735 ; O 26.

1

Basileus de Tyr, voir Porphyre. Basilide , maître de Marc Aurèle , M 33 ; 39,

Basiliscus, M 24. Bassus (Gavius -) , L 89, p. 209. Bathyll(a )os , L 30 ; 33a. Batis , M 152 .

Atticus ( T. Pomponius -) , L 65 ; 73 , p. 177 ; M21 ; 99 , p . 399 ; N 20. Auguste , empereur, L 1 ; 59 ; 89 , p. 208 ; M 28 ; 31 ; 98 ; N 25 ; 26 ; 45 , p . 671-672 ; 0 50 . Augustin , L 34 ; 55 , p. 101-104 ; 61 ; M 46, p . 289 , 291 , 294-296 ; N 12 , p . 595-597 , 601; 14 ; 16, p. 622 ; 17 , p . 635 ; 65 , p. 721 ; O 34, p. 789 ; 35 , p. 794 .

Aulu -Gelle , M 3 ; 9 , p . 242 ; 198 ; 207; N 58 , p. 707 , 709; 65 , p. 722 ; 0 23 . Aurélien , empereur, L 63 , p . 121 . Aurispa, L 66 , p. 159. Aurunculeia, M 22 . Averroès, voir Ibn Rusd . Avianus, auteur de Fables, M9 , p. 230. Avicenne , voir Ibn Sinā.

Baton , M 129, p . 469. Al -Battāni , abū 'Abd Allah Muhammad b. Gābir b . Sinān al -Șābi ’ ( Albategni ou Albatenius ) , M 120 , p . 463. Bérénice , N 57 . Bérose de Babylone , N 13 , p. 609.

1 Bérose de Cos, N 13 , p . 609. Bessarion , M 69, p. 347. Bias , L 60 ; M 18 . Bindusāra, M 76, p. 369. Bion d'Abdère , M 149. Bion de Borysthène, M 116, p. 450; 119; 129, p. 474 ; 142, p. 500; N 39. Boèce, L 55 , p. 104; M 9, p. 242; 46, p. 288, 290, 294-295 , 299; 129, p. 474; N 50, P. 687 .

INDEX DES NOMS PROPRES Boéthos, lexicographe, M 84. Boéthos de Sidon , N 17, p. 633 ; 45 , p. 677 . Boiardo ( Matteo Maria -), L 66 , p. 159. Boidion , N 40 ; M 16. Bolos de Mendès, L 45 . Borgia (Girolamo -), L 73 , p. 175 . Boulagoras, M 180. Brotinos , L 30 ; 33a.

Brutus ( M. Iunius -) , L 62 , 64 ; M 27 ; N 26. Brysôn, L 104. Burgundio de Pise , N 17 , p. 627 , 648-650 . Byndacô, O 4 ; 5 . Caecilius, O 5 . Caecilius, protagoniste de l'Octavius de Minutius Felix , M 172 . Caecilius de Kalé Akté , L 63 , p . 117 . Caepio (Q. Seruilius - ), L 12 , p. 76 . Cal ( l )anus, M 76 , p. 378-379 ; O 23 . Calcidius , M9 , p . 242 ; N 17 , p . 642 , 645 ; 66 , p . 732 , 739. Caligula , L 68 ; M 31 . Calliclès, médecin , L 88 . Calliclès , personnage du Gorgias, N 7 . Callicratès , père d'Aurelia Oppia de Sparte, O 31 . Calliétès , invité de Longin , L 63 , p . 119 . Callimaque de Cyrène , L 97 ; M 164 ; N 57 . Callinicos de Pétra, M 105 , p. 436. Callippe de Cyzique , M 101 , p . 407 , 403 ; 140 , p. 490 , 492 , 494-495 ; O 10 , p. 765 . Callisthène d'Olynthe , M 52 . Callistrate , archonte athénien , L 11 . Calpurnius Bibulus ( M. -), L 65 . Calvinus ( Cn . Domitius - ) , M 99 , p . 398 . Calvisius , grand -père de Marc -Aurèle , L 66, p. 143 . Campestris ou Campester, L 89 , p . 207. Candidus , M 55 . Candragupta ( Sandrocottos ) , roi indien ,

M 76 , p . 369 . Cantharos, L 26 ; 66, p. 137 ; M 208 . Capella ( Felix - ) , voir Martianus Capella, M 46, p. 289. Caphisias , L 104 . Capito, juriste , L 1 .

881

Capito, père de Musonius Rufus, M 198 . Caranos de Macédoine , H 153a. Carbo ( C. Papirius - ), L 12 , p. 76, 78 .

Carnéade de Cyrène , A 329a ; 502a ; L 7 , p. 68 ; 11 ; 12 , p . 78 ; 67 ; M 87 ; 137 , 148 ; 154 ; 155 ; 174 , p. 529 , 532-534 ; 181 ; N 13 , p. 614 ; 54 ; 0 13 ; 18 . Carus , correspondant de Diogène d'Oinoan da , M 131 . Carus, N 23 .

Cassandre , M 116, p. 448. Cassiodore , M 9 , p . 242 ; 46 , p . 288-291 , 294-296 , 302 . Cassius ( Avidius - ) , L 66 , p. 143 , 144 ; M 39 , p. 271 , 273 . Catilina, L 65 ; 74 ; M 21 ; 22 ; 27 ; N 58 , p. 705 . Caton d'Utique , L 62 ; 64; 74 ; M 27 ; 32 ; 99, p. 396 . Caton l'Ancien , L 59 ; N 20. Catrari (Jean - ),M 103, p. 431 .

Catulle , L 73 , p. 177 ; M 22 ; 99, p . 395 , 398 ; N 20. Catulus, voir Cinna Catulus. Caystros , invité de Longin , L 63 , p. 119. Cécilius , voir Caecilius . Celer (Caninius -) , M 39 , p. 277. Celer ( P. Egnatius - ), M 198 . Celse , épicurien , L 66, p. 148 , 156 . Celse , platonicien , L 66 , p . 153-154 ; M 2 ; 69 , p . 326 , 342 ; O 35 , p . 793 , 796 ; 42 , p. 830, 838. Censorinus, M 140, p. 493 ; O 10, p. 765 . Céphale de Syracuse, L 94. Céphisodote le Jeune , M 102 , p. 408. Cerealis ( Quintus Petillius -) , M 198 . Cervantes (Miguel de -) , L 66 , p. 159 . César (Jules -) , L 62 ; 64 ; 65 ; 73 , p. 177 ; M 22 ; 27 ; 32 ; 43 ; 53 ; 99 , p. 397-398 , 400 ; 146 ; N 16 , p. 622 ; 58 , p. 706-707 ; 0 50. Chairas , L 78 . Chairédème , frère d'Épicure , N 18 , P. 654 . Chairémon d'Alexandrie , L 63 , p . 118 ; N 13 , p . 614 ; 0 42. p . 813 , 834 . Chamailéon d'Héraclée , péripatéticien , L 83 ; M 184. Chara , A 219a.

882

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

Charès, L 81 . Charisius, M 46 , p. 296. Charlemagne, empereur, L 73 , p. 177. Charmadas, académicien, M 181 . Charmantidès de Péanée, L 94 . Charondas, L 104. Chilon, L 60 . Chion d'Héraclée, L 31 ; M 51 .

Chosroès ler, M 63 , p. 313 ; 0 48. Chrémonidès, M 116, p. 448 . Chrysanthe de Sardes, M63 , p. 314-316, 318 ; O 40, p. 800. Chrysaorios, N 16, p. 621-623 . Chrysippe de Soles, L 1 ; 11 ; 19 ; 48 ; M 46 ,

Clément d'Alexandrie , M 106; 198 ; N 17, p. 630 ; 66 , p. 726 ; 0 9 , p. 760; 35, p. 796 . Clément ſer de Rome, pape , O 45, p. 850. Cléoboulos, sophiste, M 44 . Cléobule , sage , L 60 . Cléocritos, L 28. Cléodamos , dédicataire d'un traité de Longin, L 63 , p. 120 . Cléodème, péripatéticien, L 66 , p. 152. Cléomède, M 19, p. 252. Cléomène, disciple de Cratès de Thèbes, M 119; 129 , p. 467; 142, p. 500. Cléopâtre, N 45 , p. 671 . Cléopâtre, fille d'Antoine et de Cléopâtre , N 45, p. 671 . Clinias, M 78 . Clisthène, père de Ménédème d'Érétrie, M 116, p. 443, 445.

p. 296 ; 110 ; 21 ; 39 , p. 280 ; 88 ; 116, p . 451 ; 209 , p . 579-580 ; 144 ; N 16 , p. 622 ; 17 , p. 642; 37 ; 64 ; 69; 0 9, p. 758759; 25 ; 42 , p. 826, 833 , 835, 840 . Cicéron (Marcus Tullius Cicero ), L 1 ; 2 ; 7 , Clitarque, historien, M 52. p. 67 , 71 ; 12 , p . 76-79 ; 56 ; 59 ; 62; 65 ; 67 ; Clitomaque de Carthage, L 67 ; M 181 . 73 , p. 175 , 177 , 184 ; 74; 83 ; M 9, p. 238 , Clitophon , L 94 . 240 ; 21 ; 22 ; 26 ; 27; 43 ; 46 , p. 297; 49; 52; Clodius, M 27. 99 , p. 394 , 397 , 399 ; 107 ; 172 ; 174 , Colotès de Lampsaque, M 116, p. 444 ; 119 ; p. 529 , 533-534 ; 196 ; N 14 ; 16, p. 622 ; 042, p. 827 . 20 ; 51 ; 58 , p. 704, 706 ; 67 ; 0 36. Cicéron ( Quintus Tullius Cicero ), frère de Commode, empereur, L 66, p. 143 ; M 39, p. 271-273 . Cicéron , L 56 ; 73 , p . 176 ; M 43 ; 99 , Commodus (L. Ceionius -) , M 39, p. 272. p. 395 ; N 58, p. 705 . Commodus (Lucius - ), Lucius Verus, fils de Cilo (P. Magius -), M 27 . L. Ceionius Commodus, M 39, p. 272. Cinna ( Helvius -) , L 73 , p . 177 ; M 99 , Cono (Johannes -), N 17, p. 650 . p. 398 . Conon de Samos, N 56 ; 57. Cinna Catulus, stoïcien , M 39, P. 275 ; 71 . Constance, empereur, M 147 ; N 29 ; 0 19. Claude, empereur, L 24 ; 59. Claude, iatrosophiste , M 44. Claudianus, frère de Maxime d'Éphèse , M 63 , p. 315 . Claudien Mamert, L 55 , p. 104. Caecus ( Appius Claudius -), L 34 . Cléanthe d'Assos , M 39 , p . 280 ; 116 , p. 446 ; O 10, p. 766 .

Constant, empereur, N 62. Constantin , empereur,A 348a; C 37a; G 2a; L 7, p. 66 , 68 ; 63 , p. 121 ; M 63 , p. 313 ; 147 ; N 29. Constantin l’Africain , N 17 , p. 650, 653 . Constantin VII Porphyrogénète, N 45 , p. 671-672 .

Cléaréta, M 95 .

Cordus ( A. Cremutius -), père de Marcia, M 31 .

Cléarque, historien, L 26.

Corinne, O 50 .

Cléarque, proconsul d'Asie, M 63, p. 319. Cléarque, général, M 136.

Coriscos, N 15 , p. 618-619.

Cléarque d'Héraclée, L 31 .

Cornelia ( Fausta - ) , épouse Memmius, M 99, p. 396 . Cornélianus, M 160 .

Cleippidès de Cyzique, M 116, p. 448.

de

C.

INDEX DES NOMS PROPRES

883

Cornelianus de Mallos ( M. Sextius -), N 55 , P. 699 . Cornelius (C. -), N 20.

Cyrille de Scythopolis, M 70, p. 351 . Cyrus, M 136 ; 0 23.

Cornificius Longus, L 2 ; 89, p. 209. Cornutus , L 3 ; 63 , p. 118 ; 64; 72 , p. 168 , 171 , 173 ; N 55 , p. 701 ; 0 42, p. 813. Cossus (A. Cornelius -), L 59. Cotta ( L. Aurelius -), M 21 . Cotta ( M. Aurelius -), consul en 74a, L 74. Cranus, N 23 . Crassus Dives (M. Licinius - ) , triumvir, L 62 ; 73 , p. 174 . Crassus (C. Licinius -), tribun , L 12 , p. 76.

Daïmachos de Platées , M 76, p. 369. Damascius , L 89 , p. 210 ; M 24 ; 29 ; 42 ; 74 ; 0 17 ; 20 ; 26 ; 34 , p. 785 ; 45 , p. 847 , 849 851 ; 48 .

Crassus ( L. Licinius -) , orateur, M 26 ; 181 ; 0 36 . Cratéros , M 173 . Cratès de Mallos, M 9, p. 242 ; 151 , p. 511 . Cratès de Thèbes, L 9 ; 26 ; 102 ; M 70 , p. 361 , 363 ; 102, p . 418 ; 116 , p . 444 , 446, 450 ; 119 ; 129 , p. 467-468 , 470, 474 ; 142 , p. 499 ; 164; 178 ; 190 ; 208 ; N 46 ; 09 , p. 756, 759 ; 27 ; 42 , p . 835 . Cratinos, poète comique , M 140, p. 488 . Cratippe de Pergame, M 27 . Crésus, N 46. Crispus, fils aîné de Constantin , L 7 , p. 66. Critodème , astrologue , N 13 , p. 613 . Critolaos de Phasélis , L 12 , p. 78 ; M 174 , p. 530 ; 181 . Criton d'Alopékè , L 75 . Cronius , L 63 , p . 118 ; 66 , p . 148 ; M 14 ; 186 ; N 44 ; 66 , p . 726 , 735 , 737 , 739 ; O 42 , p. 813 ; 45 , p. 848 . Ctésias de Cnide , M 136.

Ctésibios de Chalcis , M 116 , p. 450. Ctésippe, épicurien , M 53 . Ctésippe de Péanée, M 126. Curbus, N 23 . Curion , M 99, p. 398 . Cylon , O 22 . Cyniscus , O 9 , p. 759 , 760. Cynulcus , voir Théodore dit Cynulcus. Cyprien de Carthage, M 172 ; N 16 , p. 622 . Cyrano de Bergerac ( Savinien- ) , L 66 , p. 159 . Cyrille d'Alexandrie , 0 9, p . 760.

Damase , pape , M 70 , p. 349-350 , 357 . Damis, M 198 . Dandamis, M 76 , p . 378 ; 0 23 . Dardanos d'Athènes , L 79 ; 85a ; M 181 ; N 25 . Darius, M 179.

Dawit' Kark'ac'i , N 17 , p. 651 . Déanax, variante pour Léanax, L 25 . Decius Albinus , M 9 , p . 235 . Dee ( John -), N 13 , p . 615 . Deilochos, N 10, p. 590 . Démétrianus , dédicataire de Lactance , L 7 ,

p. 71 . Démétrius d'Alexandrie , M119 ; 129 , 467 ; 0 42 , p. 809. Démétrius de Magnésie , O 23 . Démétrius de Phalère , M 102 , p . 408 , 417 ; 116 , p . 453 ; 207 . Démétrius de Scepsis , N 10, p. 589-590 . Démétrius Kydones, N 17 , p. 628 . Démétrius Lacon , M 152 ; N 22 . Démétrius le Cynique , M 130 ; 198 . Démétrius le Géomètre , L 63 , p. 119-120 ; M 14 ; N 44 . Démétrius Poliorcète , L 43 ; 91 ; M 102 , p . 408 ; 116, p. 447. Démétrius , disciple de Panétius de Rhodes, L 79.

Démocédès de Crotone, M 166. Démoclès, archonte athénien , M 173 . Démocrate , père de Lysis d'Aixoné , L 103 . Démocrite, platonicien , L 63 , p. 119. Démocrite d'Abdère, L 45 ; 51 ; 66 , p . 157 ; 73 , p . 183 , 187 ; 87 ; M 76 , p. 374 ; 143 ; 149 ; 151 , p. 509; 152 ; 185 ; 190 ; 200 ; N 5 ; 8 ; 17 , p. 640 , 646 ; 24 ; 30 ; 34 ; 09 , p. 758 759 ; 10, p. 762 ; 42 , p. 827 . Démocrite de Nicomédie , M 209 , p. 577 . Démonax de Chypre , L 66, p . 141 , 152 , 154-155 ; 198 .

.

884

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

Démophile, arien , M 70 , p. 349, 353 ; 356. Démophon, père de Ménexène , M 126.

Diogène d'Apollonie, M 97 ; 151 , p. 513 ; N 45 , p. 673 ; 0 10, p. 766.

Démosthène, L 52 ; 66 , p . 152 ; M 29 ; 46 , p. 297 ; 105 , p . 434 ; 184 ; N 46. Denys , autre nom de Nilus, N 62. Denys d'Alexandrie , M 70, p . 354 , 359 .

Diogène d'Argos, L 16. Diogène d'Oinoanda , L 73 , p. 185-186; M 131 ; N 35 . Diogène de Babylonie, L 12 , p . 78 ; 58 : 67 ; M 19, p. 253 ; 174, p. 530; 175 ; 181 ; N 25; O 10, p. 766.

Denys d'Halicarnasse , L 63 , p. 117 , 122 ; N 43 .

Denys d'Héraclée , M 116, p. 450 ; N 39. Denys de Rome , pape , M 70 , p. 354. Denys jer de Syracuse , L 14 ; 94 ; M 140 , p. 489 ; 203 ; N 10 , p . 591 . Denys II de Syracuse , L 21; 22; 86 ; M 63 , p. 313 ; 167 ; N 10 , p. 592 ; O 27. Denys l'Aréopagite, N 66 , p. 740 ; O 34.

p . 791 . Deogratias , L 34 . Dercyllidès, M 17 ; 101 , p . 407; N 44; 0 10, p. 763-764. Dexippe, L 72 , p. 169 ; M 57 ; N 55 , p. 701 . Dexithéa , variante pour Axiothéa , L 22 . Diagoras , correspondant de Lyncée de Samos , L 91 .

Dicéarque de Messine , M 107 . Diderot ( Denis -) , L 66 , p. 160 . Didyme ( Claude -), M 9, p. 234 . Dieuchès , médecin, O 40 , p. 803 . Dinostrate , M 101, p . 401.

Dioclès de Carystos , médecin , O 40, p. 803 . Dioclès, dédicataire de la Couronne de Méléagre de Gadara, M 90 , p. 385-386. Dioclès de Magnésie , M 90, p . 385-386 ; 116 , p . 446 ; 129 , p . 469 ; N 10 , p. 592 ; 01 . Dioclétien , empereur, L 7 , p . 65-66 , 69 ; M 23a. Diodore, médecin , L 88 . Diodore Cronos , M 127. Diodore d’Aspendos, L 85 ; N 10, p. 592.

Diodore de Sicile , M 52 ; 76 , p . 370; 140, p. 493 . Diodore de Tarse , M 7 ; 70, p. 357 . Diodore de Tyr, M 181 . Diogène , condamné dans le procès d'Antioche , M 63 , p. 320. Diogène de Cyrène , cousin de Synésius , M 34.

Diogène de Sinope, L 9 ; 26 ; M 52 ; 69, p. 327 , 334; 70, p. 349, 361 , 363 ; 93 ; 94; 104; 129, p. 467, 469-471, 473-474; 132; 142 , p. 501 ; 190 ; 208 ; 209 , p. 579-580; 09, p. 756-757, 759-760; 23 ; 24; 49 . Diogène de Smyrne, M 149; N 24. Diogène de Tarse, M 155. Diogène Laërce, L 83 ; M 116, p. 443; 119; 129, p. 467 ; 133 , p. 480; 142, p. 499; 152 ; 185 ; 190 ; 207 ; N 5 ; 39; 66, p. 727; 0 23. Diognète , peintre, M 33 ; 39, p. 275. Diomédès, grammairien, M 46, p. 296. Dion Cassius , L 64; M 39,, p. 277. Dion Chrysostome , L 23 ; M 69 ,

p. 340, 343 ; 198 ; 09, p. 759. Dion d'Alexandrie , L 65 . Dion de Syracuse, M 167 ; N 10, p. 592. Dionysios, maître de Socrate, O 10, p . 762. Dionysios de Colophon , académicien , M 129 , p . 472 . Dionysios de Rhodes , épicurien , M 131 ; N 35 . Dionysius, historien, M 76, p.369. Dionysodore de Chios, sophiste , M 162 ; 190 . Diopeithès , père de Ménandre le comique,

M 102 , p . 407. Dioscoride , O 40, p . 801 . Dioscouridès de Chypre, N 48. Diphilos, poète comique , M 102, p. 409.

Diphilos , stoïcien, M 168. Disarius , médecin , M 9, p. 236. Dolabella (P. Cornellius -), L 62 . Domitien , empereur, M 39, p. 275 ; 54; 98; 120 , p . 457 , 459. Domitius Ahenobarbus (L. -), M 27; N 58,

p. 705. Domninos de Larissa , M 23 ; 0 45, p. 849. Domnulus, L 34 ; M 12 .

!

INDEX DES NOMS PROPRES Donat , grammairien , L 73 , p . 174 ; M9 , p. 236; 102 , p. 411,418 . Donatus , confesseur, L 7 , p. 69. Dorothée de Sidon , N 13 , p. 615 . Douris de Samos, L 91 ; N 10, p . 589 . Doxopatros, M 103 , p . 431 . Drusus maior ( Nero Claudius Germanicus

-), L 59. Drusus ( M. Livius -) , tribun , M 10 ; 99, p. 396 . Dunchad , M 46, p . 302 .

885

Érasistrate, médecin , M 45 ; 0 40 , p . 803 . Érasme de Rotterdam , L 66 , p. 159 . Ératosthène de Cyrène , L 94 ; M 9, p . 242 ; 46 , p . 298 , 300 ; 76, p . 370 ; 101 , p . 403 404 ; 140 , p . 488 , 494 ; N 13 , p. 613 ; 46 ; O 10, p. 764. Érennius , disciple d'Ammonius Saccas , 041 , p. 804 ; 42, p . 811 . Érigène ( Jean Scot - ) , M9 , p . 242 ; 46 , p. 289 . Érotion , courtisane du Jardin d'Épicure , L 43 ; M 16 ; N 40 .

Dungal , érudit irlandais, L 73 , p. 178 . Eschine , orateur attique , M 46 , p. 297 ; 179. Eschine de Milet , M 52 . Échéclès d'Éphèse, M 119 ; 129, p . 467 . Échécrateia de Phlionte , O 4 . Élagabal , empereur, M 39 , p . 272 . Élias , L 72 , p. 168 , 173 ; M 42 ; N 55 , p. 701 . Élias de Crète, M 70 , p . 349 . Élizabeth Ire , N 13 , p . 615 . Empédocle d’Agrigente , L 57 ; 60 ; 73. p . 179 , 182-183 , 191 ; 104; M 97 ; 105 , p. 437-438 ; 123 ; 136 ; N 10 , p . 593 ; 16 , p. 625 ; 66, p. 733 ; O 42 , p . 827 , 830. Ennius , L 73 , p. 179 , 190-191. Épaminondas, L 104 . Épicharme de Syracuse, M 143 ; N 10 , p. 591 . Épicrate, archonte athénien , M 174 , p. 533 . Épicratès , poète comique , M 117 . Épictète , L 24 ; 66 , p . 153 ; M 39 , p . 272 , 275 , 278, 281 ; 47 ; 69, p. 340 ; 72 ; 102, p . 419 ; 132 ; 192 , 198 ; N 1 ; 60 ; 09 , p. 758 . Épicure , fils de Léonteus et de Thémista, L 40. Épicure de Samos , L 40 ; 43 ; 47 ; 51 ; 62 ; 66, p. 154, 156 ; 68 ; 73 , p. 174, 177 , 179, 182 188 ; 87 ; M 16 ; 20 ; 35 ; 52 ; 53 ; 69 , p . 331 , 342-344 , 346 ; 70, p. 361 ; 99 , p . 395 , 399 ; 102, p . 408 , 418 ; 108 ; 116 , p . 453 ; 129 , p . 470 ; 146 ; 151 , p . 509 ; 152 ; 155 ; 173 ; 185 ; 207 ; 210 ; N 5 ; 8 ; 17 , p. 639, 646; 18 , p. 654 ; 32 ; 34 ; 40 ; 43 ; 45 , p. 674 ; O 36 ; 42 , p . 827 , 832 ; 43 . Épiménide, L 60 ; 104 ; M 207. Épiphane d'Alexandrie, O 20 . Épiphane de Salamine, M 70. p . 351 ; 042 ,

p . 807,818 .

Eschine de Naples, M 87 ; 181 . Eschine de Sphettos, M 69, p. 342-343 ; 108 ; 116, p. 450 ; 209, p. 580 . Eschyle , poète tragique, M 103 , p . 429 ; 116, p . 450; N 30 .

Eschyle d'Érétrie , M 116 ,p. 447. Eschyle de Cnide , M 52 . Ésope, acteur , L 56. Ésope , fabuliste, L 83 ; M 129 , p. 470 ; 130. Estienne ( Robert - ) , L 66 , p. 159 . Étienne de Byzance , N 10 , p. 591 . Euboulidès , philosophe mégarique, M 100 . Euboulidès , fils d'Euboulidès , archonte athénien , N 55 , p. 699. Euboulidès , père d'Euboulidès, N 55 , p. 699 . Eubule , platonicien , L 63 , p. 119. Eubule d'Alexandrie, N 48 . Eubule de Messène, N 9. Eubule , nom de trois académiciens homony mes , L 11 .

Euclide , fils de Maxime de Byzance , M 63 , p. 314 ; 64 . Euclide, mathématicien , L 32 ; M 42 ; 46, p . 298-299 ; 101 , p . 402, 404-405 ; 120 , p. 460-461; 0 10, p. 766. Euclide , platonicien , L 63, p. 119 ; M 67 . Eucratès , père de Méléagre de Gadara , M 90 , p. 386-387 . Euctémon , M 140 , p. 489, 492-494, 497 . Eudème, philosophe péripatéticien soigné par Galien , M 45 .

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DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

Eudème de Rhodes, M 118 ; N 51 ; O 10, p. 762-764, 766 ; 45 , p. 845, 850-851. Eudocie , épouse de Théodose II , H 63a; L 44; N 23 ; O 44 Eudore d'Alexandrie , M 69, p. 342, 344 ; N 26. Eudoxe, évêque arien, M 70, p. 349. Eudoxe de Cnide , M 17 ; 101 , p. 401, 403, 405, 407 ; 140, p. 494; N 45, p. 679; O 10, p. 765. Eudoxios, dédicataire de Porphyre , N 16, p. 621 . Eugène, usurpateur, N 49. Eumène II de Pergame, M 174, p. 531-532 ; N 15 , p. 619. Eumenius, philosophe ami de l'empereur Julien, M 63 , p. 320. Eunape de Sardes, L 63 , p. 118, 120 , 122 ; 66, p. 136, 148 ; M 63 , p. 314; 147; 198 ; N 16 , p. 622 ; 27 ; 49 ; O 35 , p. 794 ; 40 , p. 800 . Eunoios d'Émèse , sophiste , M 29. Eunome de Cyzique, N 17, p. 626. Euphante, philosophe mégarique, M 100 .

Euphante d’Olynthe, M 116, p. 444 , 447. Euphorion, M 39, p. 276. Euphranor, pythagoricien, M 204. Euphranor de Séleucie , disciple de Timon de Phlionte, N 48 . Euphratès de Tyr, M 130; 187 ; 198 ; N 61 . Euphrôn ( L. Vidius -) , gendre de T. Claudius Lepidus, L 47. Euphronios, disciple d'Ératosthène, M 140, p. 488 . Eupolémos, archonte athénien, M 193 . Eupolis, L 66, p. 152. Euprépius, o 20. Euric, roi wisigoth, L 34. Euripide , M 3 ; 87 ; 93 ; 102, p. 412, 417 ; 103, p . 429; 129 , p. 471; 209, p . 579 ; N 17 , p. 646 ; 30 ; 09, p. 756.

Euryloque de Cassandreia , M 116, p. 448 . Eurytos de Tarente , pythagoricien, L 104. Eusèbe, rhéteur, M 9, p. 235 , 236. Eusébe de Césarée, L 7, p. 66 ; 63 , p. 121 ; M 55 ; 69, p. 325 ; 98 ; N 24 ; 66 , p. 727 ,

739 ; 0 9, p. 756, 759-760 ; 41 , p. 806 ; 42, p. 807,817. Eusébe de Myndos, M63, p. 316. Eustathe, fils de Lacharès, L 3. Eustathe, commentateur d'Hermogène , L 3. Eustathe , philosophe grec, convive des Saturnales de Macrobe, M9, p. 236; N 49 . Eustathe, fils d'Oribase de Pergame, O 40 , P. 801-802 . Eustathe de Cappadoce , M 9, p. 236, 313, 315 .

Eustathius, fils de Macrobe, M9, p. 232, 235, 242. Eustathius (Plotinus -), préfet de Rome, M9, p . 232. Eustèphios d’Aphrodisias, L 3 . Euthydème, M 162. Euthyphron, N 66 , p. 728 .

Eutocius d'Ascalon , M 101 , p. 403-404. Eutychès, N 17, p. 627. Eutychius Proculus de Sicca, M 39, p. 276. Euxénon, L 31 . Évagre d'Antioche, M 70 , p . 352 ; M 70 , p. 352 ; 0 42, p. 831 . Evander (C. Avianus -), sculpteur, M 99 , p. 399. Évandre de Phocée , L 11 . Evangelus, M 9, p. 236. Événos de Paros, L 57. Évhémère de Libye, M 76, p. 374; O 40,

P. 800 . Fabia, M 39, p. 272. Fajardo (Saavedra -) , L 66 , p. 159.

Fannia, petite fille d'Arria l'Ancienne, M 139. Fannius (C. -), gendre de C. Laelius Sapiens, L 12, p. 77-78. Fausta Cornelia, fille de Sylla, M 99, p. 398 . Faustina, épouse de Marc -Aurèle, M 39 ,

p. 272, 278 . Faustina (Annia Galeria -), fille de Marc Aurèle, M 39, p. 275. Favonius Eulogius, M 9, p. 238. Favorinus d'Arles, M 69, p. 341, 343 ; 137 ; 151 , p. 508 ; N 39; 0 37.

INDEX DES NOMS PROPRES Fénelon (François de Salignac de la Mothe -), L 66 , p. 160. Fenestella, L 12, p. 77 . Festinus, M63, p. 320 .

Festus, M 63 , p. 314, 320. Festus (Rufius -), descendant de Musonius Rufus, M 198 . Ficin (Marsile -), M 69, p. 347 . Fielding (Henry -), L 66, p. 160 . Firmicus Maternus, L 2 ; N 13 , p. 608 ; 13 , p. 614; 16, p. 621 . Flaccus (Granius -), L 89, p. 209. Flaccus (Verrius -), L 89, p. 209. Flavius Pantainos de Gargettos (T. -), fils de T. Flavius Ménandros, M 106 . Flavius -Josèphe, N 45, p. 671 . Fonteius, L 89, p. 208. Fontenelle (Bernard de -), L 66 , p. 160 . Frédéric Barberousse, N 17 , p. 649. Fronton ( M. Cornelius -), rhéteur , L 63 , p. 117 . Fronton (M. Cornelius -), L 34 ; 66 , p. 143 , 157 ; M 39, p. 272 , 275-276 , 280 ; 46, p. 297 ; 172 ; 198 . Fronton d'Émèse, rhéteur, L 63 , p. 116.

Frontonis, mère de Cassius Longinus, L 63 , p. 116 . Frumentius, M 138 . Fulgence, auteur de l'Expositio sermonum antiquorum , M 46 , p. 289-291 ; 96 ; N 65 , p. 720 . Fulgence de Ruspe, M 46, p. 290 . Fundanus (C. Minutius -), M 198. Gabinius (A. -), M 22. Gabriel, préfet de Constantinople, L 89, p. 207 . Gaius, médio -platonicien, N 17, p. 642; 52 ; M 67. Galba, empereur, M 198 . Galère, empereur, L 7, p. 69; M 23a. Galien, médecin et philosophe sous l'empe reur Zénon , A 348a. Galien de Pergame, L 66, p. 136, 141 , 152 ; 88 ; M 39, p. 275 ; 45 ; 133, p . 477, 480 ; 134 ; N 17 , p. 636-637 , 640, 653 ; 52 ; O 40 , p. 800-802; 42, p. 827, 835 .

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Gallicus (C. Rutilius -), M 198. Gallien , empereur , L 63 , p. 120 ; M 63 , p. 313 ; 0 41 , p. 805 ; 42, p. 811 . Gallus (L. Caninius -), M 43. Gamaliel II , О 9, p. 754. Gaurus, N 16, p. 621 . Gédalius, M 56; N 16, p. 621-622. Gélase, pape, L 7, p. 71 . Gellius (Lucius -), M 47. Géminos, M 39, p. 276 ; 140, p. 493 .

Gémisthe Pléthon, voir Pléthon (Gémiste -). Generosa, O 20. Généthlios de Pétra, M 105 , p. 436. Genitor (Julius -), M 198 . Gennade, M 7 . Genséric , M 24 . Gérard de Crémone, M 120 , p. 458 . Germanicus (lulius Caesar - ), M 19, p. 248 ; N 58, p. 710. Gétulicus, L 68. Gilles de Rome, L 45 . Glaucias, médecin , L 88. Glaucon, frère de Platon , L 94 ; M 126. Glaucon de Rhégium , M 151 , p. 508. Glaucon de Téos, M 151 , p. 508. Glycère, courtisane, L 43 . Goethe ( Johann W. -), L 66 , p. 160 . Gorgias de Léontini, L 57 ; 86 ; 104; M 52; 97 ; 136; 190 ; 0 38 . Gracchus (C. -) , L 12, p . 76-78 ; M 46, p. 297 . Gracchus ( Tiberius -), L 12, p. 76; M 46, p. 297 . Gratidianus (M. -), O 36. Gratien , empereur, M 70, p. 360, 363 ; N 49. Gratus, père d'Ortyx de Parion, O 46. Grégoire, correspondant d'Origène le Chré tien, 0 42, p. 815 . Grégoire de Nazianze, M 63 , p. 317 ; 70, p. 348 , 353 , 355-356 , 361 , 363 ; 103 , p. 427 ; N 17 , p. 628 ; 09 , p. 756 ; 34, p. 785 , 791 ; 42, p . 816, 818 . Grégoire de Nysse, M 2 ; 8 ; N 17, p. 627, 630, 650-652; O 42, p. 822. Grégoire de Tours, M 46, p. 289, 291, 302.

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DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

Grégoire le Thaumaturge, O 42, p. 807 , 813 , 815 .

Héphaistion , auteur d'un ouvrage de mérique L 63, p. 124.

Grégoras (Nicéphore -) , O 34 , p . 792 . Guarino de Vérone , L 66 , p . 159 . Guevara ( Luis Vélez de -) , L 66 , p. 159 . Guillaume de Conches , N 17 , p. 648. Guillaume de Saint- Thierry , N 17 , p. 649.

Héraclas, O 42, p. 810.

Habib ( ' Abd Yašū ' ) b. Bahriz , N 50 , p. 690 691 .

Hadrien , empereur, M 39 , p. 272 ; 40 ; 98 ; 174 , p. 532 ; O 44 . Hadrien de Tyr, sophiste , L 66, p . 142. Hāğği Halifa , Mustafā b. ' Abd Allāh Kātib Čelebi , M 120, p. 463 . Hamilcar , N 20.

Hannibal , N 20 . Al - Harawi , voir Aḥmad b . abū Sa'd al Harawi , Abū al - Fadl . Harpocration d'Alexandrie, N 13 , p . 612. Harpocration d'Argos, M 67 ; N 66 , p. 726 , 733 , 735 . Al-Hasan b. Mūsā b . Šākir, M 120 , p. 460 . Al - Hāzini , abū Manşūr ( Abū Ğa'far) abū al Fath ' Abd al-Raḥmān , M 120, p. 460 . Hécatée d'Abdère , M 76 , p . 370, 374 ; 149. Hécatée de Milet, M 112. Hécaton de Rhodes , M 142 , p. 500 . Hédéia , courtisane du Jardin d'Épicure , L 43 ; M 16 ; N 40 . Hégémonius, M 44 .

Hégésandre de Delphes , M 52 ; 194. Hégésias de Magnésie , historien , M 52 . Hégésias de Sinope, M 104. Hégésias Peisithanatos , N 56 . Hégéstrate , mère de Ménandre le comique , M 102, p . 407. Hélène, mère de Constantin , M 63 , p. 315 . Hélicon de Cyzique , M 101 , p. 403 . Héliodore , médecin , O 40 , p. 803. Héliodore d'Alexandrie , péripatéticien , L 63 , p. 119 . Heliodorus ( C. Avidius -) , N 59 , p . 713 . Hellanicus , O 45 , p. 845-847 , 850-851 . Helvidius Priscus, M 54 ; 139 . Héphaistion de Thèbes, N 13 , p. 606 , 614.

Héracleia (Aurelia -) , fille d’Aurelia Oppia de Sparte, C 180 ; 0 31 . Héracleidas, archonte à Delphes, M 116 , p. 449; N 10, p. 587. Héracleios , philosophe cynique, M 41 ; 63, p. 318 ; 09, p. 761 . Héracléon , lexicographe ( ?), L 63, p. 124. Héracléon d'Athènes, maître de Lacharès

d'Athènes, L 3 . Héraclide, médecin , L 88 ; O 40, p. 803 . Héraclide le Pontique , L 36 ; 83 ; 85 ; M 46,

p. 300 ; 117; 0 5. Héraclide Lembos, M 116, p. 444, 446 ,448 , 452 ; N 10, p. 594. Héraclite , auteur d'un ouvrage sur l'apôtre Paul , M 55 . Héraclite , père d'Athénaïs, L 44 . Héraclite d'Éphèse , L 66, p. 136 , 141 ; 73, p . 182-184 ; 89 , p . 209 ; M 97 ; N 10 , p. 593 ; 17 , p. 636 , 646 ; 042, p. 830 : 50. Héraïscus d'Alexandrie, O 20; 45, p. 851 . Herculius ( Nonius Marcellus -), N 65 , p. 720 . Hermagoras, N 25 . Hermann l'Allemand , N 45 , p. 679. Hermarque de Mytilene, L 51 ; M 53. Hermeias d'Alexandrie, O 45 , p. 849,851.

Hermeias de Curion , M 209, p. 579. Hermès- Thot, N 13 , p . 604. Hermias de Samos, L 10. Herminus , platonicien , L 10; 72 , p. 172; 100 ; N 55 , p . 699. Herminus, stoïcien , L 63 , p. 119. Hermippe, poète comique , M 129, p. 471 . Hermippe de Smyrne, L 60; 83 : 97; M 116, p . 444 , 448 ; 129, p. 469 ; 203 ; N 10, p . 587 , 589-590 , 592-593 ; 45, p. 674 ;

0 42 , p . 832 . Hermodore , père d'Hermias de Samos, L 10. Hermodore de Syracuse , N 10, p. 592 . Hermogène. L 63 , p. 122 : M 39, p. 277 ;

105, p. 434 ; 159; N 17, p. 641.

1

INDEX DES NOMS PROPRES Hermogène, platonicien chrétien , N 66, p. 733 . Hermonyme (Georges -), M 103 , p. 426. Hermotime, stoïcien , L 66 , p. 154. Hérode Atticus, L 66, p. 139, 143 ; 70 ; 72, p. 169; M 39, p. 273 ; 39, p . 277 ; 198 ; 199 ; N 55, p. 700 . Hérode le Grand, N 45, p. 671 , 673 .

Hérodien , M 39, p. 277 . Hérodote, L 66 , p. 157 ; N 46; 09, p. 756. Hérodote de Tarse , M 133 , p. 477 ; O 40 , P. 803. Héron d'Alexandrie , maître de Proclus , H 106a.

Héron d'Alexandrie, mécanicien, H 106a. Hérophile, lexicographe, O 42, p. 824, 834.

Hérophile, médecin , O 40, p. 803 . Herpyllis, N 51 . Hésiode, M 41 ; 113 ; N 24 ; 0 9 , p . 758 ; 45 , p. 845, 850. Hestiaios du Pont, N 39. Hesychius de Milet, M 17.

Hicétas, père de Diogène de Sinope, O 49. Hierius , disciple de Jamblique , M 63 , P. 315 . Hiéroclès, officier, M 116, p. 448 . Hiéroclès, père de Léon Thrason de Strato nicée, L 37 . Hiéroclès d'Alexandrie , néoplatonicien , O 42, p. 836; 45 , p. 848 . Hiéroclès (Sossianus -), L 7 , p. 66 ; 34 ; M 2 ; N 49. Hiéroclès le Stoïcien , M 198. Hiéron d'Éphèse, N 6. Hiéronymos, père d'Hippothalès, M 126 . Hiéronymos de Rhodes, L 22 ; 83 ; M 116, p. 450; N 10, p. 594 . Hieronymus, 45 , p. 845-847, 850-851.

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Hipparque de Rhodes , astronome, M 46, p. 300; 120, p. 461 , 463, 464; 140 , p. 490 ; 146 ; O 10, p. 765 . Hippasos , pythagoricien , L 102 ; 104 ; M 201; 204. Hippobote , L 22 ; 58 ; M 116, p . 450-451 ; 119 ; 203 ; N 10, p. 589-590 , 594 ; 48 . Hippocrate, ami de Périclès, M 126. Hippocrate de Chios, L 32 ; M 101 , p. 403 404; O 10, p. 762 , 767 . Hippocrate de Cos , L 45 ; 66, p. 136 ; 88 ; M 45 ; 97 ; 134 ; 151 , p. 513 ; N 13 , P. 609, 612 ; 17, p. 636, 653 ; O 19 ; 40, p. 803 ; 42 , p. 827 . Hippodamos de Milet, L 94; M 140, p. 488. Hippodromos de Larissa, M 80; O 14. Hippolochos de Macédoine, L 91 . Hippolyte l'Ancien , M 70, p. 351 . Hippon de Samos, M 140, p. 488 . Hipponicos de Macédoine, M 116, p. 449 . Hippothalès, fils de Hiéronymos, M 126 ; 162.

Hippys , M 201. Holobolos ( Manuel [Maxime ] -) , N 45 , P. 678 . Homère, L 63 , p. 124 ; 64 ; M 9, p. 240; 41 ; 69 , p. 325 , 328 , 334 , 338 , 343-346, 348 ; 90 , p. 387 ; 102 , p. 418 ; 104; 116, p. 450; 129 , p. 470 ; 151 , p. 508-509 ; 164; 172 ; N 3 ; 24 ; 46 ; 09 , p. 758-759 ; 17 ; 41 , p. 806 ; 42 , p. 830 ; 45 , p. 845 , 848 , 850 ; 48 . Horace, L 34; M 10. Hortensius, L 74 ; M 32 ; N 20. Horus, cynique, M 9, p. 236 . Hunayn b. Isḥāq al-'Ibādi abū Zayd, M 45 , 120, p. 458 ; 133 , p. 478 ; N 17 , p. 652 653 . Hutten ( Ulrich von -), L 66 , p. 159 . Hyménaus, dédicataire de Linus de Thèbes, L 58.

Hilarios d’Antioche, M 23.

Hipparchia, M 129, p. 467 ; M 142 , p. 499. Hipparque, ami de Théophraste, M 85 .

Hymetius ( Iulius Festus -), N 16, p. 625 . Hypatie, 0 21 . Hyperechios, O 44. Hypéride, M 184. Hypsiclès d'Alexandrie, N 13 , p. 606 .

Hipparque , pythagoricien , L 102 ; 104 ; N 17, p. 636; 0 32.

Hypsicratès, M 185 . Hystaspe, O 35 , p. 795.

Hildebald, M 38 . Himérius , M 198 ; N 29 .

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DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

lamboulos, M 76, p. 372.

Ibn Abi Uşaybi'a, Muwaffaq al -Din abū al ' Abbās Aḥmad b. al- Qāsim b. Halifa b. Yunus al-Hazraği, M 203. Ibn Buțlān , abū al - Hasan al - Muhtār Yuwānis b. Hasan b. ' Abdūn b . Sa'd médecin , N 46. Ibn al - ' Ibri (Gºrighör- Yūḥannān -abū al Farağ) [ Barhebraeus), N 45 , p. 675 , 677678 ; 46. Ibn al-Maţrān , Muwaffaq al -Din abū Nașr As'ad b. abi al- Fath Ilyās b. Girgis, N 45 , P. 679 . Ibn al -Nadim, voir Al-Nadim. Ibn al-Qifți (Gamāl al-Din al-Hasan 'Ali b Yūsuf b . Ibrāhim b. ' Abd al-Wāḥid al Saybāni al - Qādi al- Akram ), N 45 , p. 678; 46 . Ibn Rušd , abū al -Walid Muḥammad b . Aḥmad Muḥammad al-Hafid ) (Averroès ), N 45 , p. 675 , 678 . Ibn Sayyid , N 50, p. 693 . Ibn Sinā, abū 'Ali al-Husayn b. ' Abd Allāh ( Avicenne ), N 46 Ibn Zur'a (Abū ' Ali ' Isā) , N 45 , p. 675 ; 46. Ibycus , pythagoricien, L 85 ; N 17 , p. 644 . Iccus, L 85. Idoménée de Lampsaque, M 152 ; N 40. Illus, M 35 . Ion, platonicien , L 66, p. 152 . Ion , rhapsode, M 151 , p. 508 . Ionicus de Sardes, médecin , O 40 , p. 800 . Isaios, archonte athénien , M 108. Isée l’Assyrien , rhéteur, M 40; 139.

Ithaigénès , père de Mélissos de Samos , M 97 . lunia, épouse de L. Manlius Torquatus, M 22. Iunia (Tertia -), L 62.

Jacob b. Mahir b .Tibbon , M 120, p. 458. Jacques de Venise, N 17 , p. 649. Jamblique de Chalcis, L 2 ; 72 , p. 168-169, 173-174 ; 89, p. 209; M 5 ; 63 , p. 315 , 316; 64 ; 143 ; 186 ; 203 ; N 10, p . 594 ; 17. p . 629 , 633 ; 50 , p. 687-688 , 692 ; 55 , p. 699-700 ; 66, p. 735 , 739-740 ; O 34 , p. 786, 789 ; 35 , p. 797 ; 42, p . 814, 822 ; 45, p. 848.

Jean , sage à Constantinople, J la. Jean Chrysostome, M 2; 09, p. 760 . Jean Damascène , N 17 , p. 627 , 629, 647, 649. Jean de Cappadoce, L 89, p. 206 . Jean de Jérusalem , O 42, p. 818 . Jean de Salisbury, M 46, p. 293 , 302 ; N 49. Jean de Scythopolis, 0 42, p. 818 . Jean de Tibériade, O 9, p. 752. Jean Stobée , N 17 , p. 636 ; 45 , p. 673 ; 63 , p . 121 ; 65 , p. 724 ; M 198 ; O 6; 22; 28 ; 42, P. 835 . Jérôme, L 73 , p. 176; M 147 ; N 16, p. 622 ; 49; O 42, p. 807, 816-817. Jovien, empereur, M 63 , p. 319. Jules Constance, père de l'empereur Julien, M63, p . 315 . Julie, M 28 .

Isḥāq b. Hunayn b. Ishaq al-' Ibādi, M 120, p. 458 ; N 17, p. 652-653 ; 45 , p. 678 ; 46. Isidore d'Alexandrie , M 42 ; M 46, p . 302 ; 0 45 , p. 851 . Isidore de Péluse, M 59 ; O 39.

Julien , empereur, L 52 ; 66 , p . 159 ; 89 , p. 209 ; M 2 ; 39 , p. 277 ; 41 ; 63 , P. 313 314, 316-317 , 319-322 ; 64; 70, p. 362, 363 ; 147 ; N 17 , p. 629 ; 27 ; 46 ; 62 ; 09 , p. 756-760 ; 34 , p. 790 ; 35 , p. 794 ; 40 , p. 800-802 .

Isidore de Séville , L 7 , p. 71 ; M 9, p. 242; 140, p. 493 .

Julien d'Alexandrie , 0 42, p. 827. Julien de Cappadoce, M 64 .

Isocrate , orateur, M 46, p . 297 ; N 3 ; 10, p. 587-588 . Istros, N 10, p. 589-590 . Italicos (Michel -), O 34, p. 785 , 792. Italos (Jean -), O 34, p. 791 .

Julien de Laodicée, N 13 , p. 608. Julien le Théurge, fils, O 34, p. 785 , 792. Julien le Théurge, père, N 66 , p. 727 ; O 34, p. 785 ; 0 34, p. 790 , 792 .

INDEX DES NOMS PROPRES Justinien, empereur, H 106a; L 89, p. 206208 ; O 42, p. 818, 838 . Katrarios (Jean-), L 66 , p. 159. Al-Kindi abū Yusuf Ya'qūb b. Isḥāq, N 17, p. 653 ; 50, p. 690-691 ; 51. Labeo ( Antistius -), L 2. Labeo (Cornelius -), L 89, p. 208-209. Labeo (M. Pacuvius –), père de M. Antistius Labeo , L 1 . Labeo (Notker -), M 46, p. 294. Lacharès, père de Lacharès d'Athènes, L 3 . Lacharès d'Athènes, M 159; N 47 . Lactance , L 2; 66 , p. 136; 73, p. 175, 187 ; M 172 ; O 34, p. 789; 35 , p. 797. Lacydès de Cyrène, L 9; 39; 42 ; M 193 ; N 66 , p. 728 . Laelius Sapiens, L 67 ; M 196. Laenas (T. Popilius -), consul en 1329 , L 12 , p. 76. Laetus, M 185 .

Laïs, courtisane, M 93 ; N 10, p. 591 . Laïtos, M 185. Lamia, courtisane, L 43 ; 91 . Lamiscus de Samos, L 14.

891

Léon , père de Mélantès, M 85. Léon de Byzance, M 85 . Léon de Métaponte, L 30. Léon de Narbonne, M 12 ; N 49. Léon Ier, empereur, M 24 ; 35.

Léon VI , empereur, Jla. Léonas, O 19. Léonce, O 42, p. 818 . Léonidas de Tarente, M 90 , p. 385 . Léonteus, épicurien , L 87 . Léonteus de Cyrène, L 42 . Léontichus, L 39. Léontion , M 152 ; N 40 . Léontius, père d'Athénaïs, H 63a. Léontius, rhéteur correspondant de Libanius d'Antioche, L 53 . Leopardi ( Giacomo -), L 66, p. 160. Lepida (Claudia -) , fille de T. Claudius Lepidus, L 47. Lepidus ( M. Aemilius -), M 10 . Lepidus (T. Claudius -), L 47 . Lesbonax de Mytilène, L 50 ; M 198. Leucippe, L 45 ; 104; M 97 ; 149 ; N 24. Libanius d'Antioche, L 53 ; 63 , p. 122 ; 66, p. 159 ; M 6 ; 9, p. 236 ; 63 , p. 314; 64; 66 ; N 62; 0 19; 33 . Liberalis (Q. Aebutius -), centurion, L 54. Libilla (Julia -), L 68. Libius Sévère, M 24 .

Lampon, médecin à Péluse , L 15 . Lamprias , grand - père de Lamprias de Chéronée, L 17. Lamprias, archonte à Delphes, L 17 . Libo (L. Scribonius -), M 43 . Lampros, musicien, L 18. Livie , M 31 . Lampros, grammairien ( ?), N 15 , p. 620 . Lobon d'Argos, L 58 . Landino ( Cristoforo -), M 69, p. 347. Larensis (P. Livius -), M 129, p. 474 ; 209, Lombard ( Pierre -), N 17 , p. 649. p. 577 . Longin , rhéteur, L 63 , p. 121 . Laros, père de Mélètos, M 97 . Longin , platonicien , L 66, p. 138 ; 99 ; 100 ; Lascaris (Janos -), M 2; 69, p. 347 . M 30 ; 75 ; 197 ; 0 41 , p. 805 ; 42, p. 813 . Lasthéneia de Mantinée , M 116, p. 450. Longinianus ( Fl . Macrobius - ) , préfet du Latéranus, consul , L 24. prétoire des Gaules, L 61 . Laurentius , père de Jean Lydus , L 89 , Longinus ( C. Cassius - ) , meurtrier de p. 206 . César, L 63 , p. 117 . Le Pogge ( Giovanni Francesco Poggio Longinus (Cassius -), chronographe, L 63 , Bracciolini), L 66 , p . 159 ; 73 , p . 178 ; p. 125 . M 19, p. 248. Lôreios Caminos, A 219a. Lécythion, M 208. Lucain , N 58 , p. 707 . Lentulus ( L. Cornelius -), M 99 , p. 397 . Lucceius (Cn. -), L 65. Léon , historien, L 33 . Lucceius M. f. (L. -), L 65 .

892

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

Lucceius Q. f. ( L. - ), L 65 .

Lycos de Rhégium , historien, L 85.

Lucien de Samosate , L 47 ; M 69, p. 340 ; 129 , p . 468 , 470 , 473 ; 198 ; 208 , 209 , p. 580 ; N 50, p. 689 ; 59 , p . 712-717 ; 66, p. 726 ; O 9 , p. 759 ; 35 , p. 793 . Lucifer de Cagliari, L 7 , p. 71 .

Lycurgue, orateur, M 184 . Lycurgue de Sparte, M 198 . Lydus ( Jean -), L 2; N 58, p. 709.

Lucilius , correspondant de Sénèque, L 54 ; M 158 . Lucilius , poète satirique , L 12 , p . 78 ; N 65 , p. 721 . Lucilla ( Annia -) , M 39, p. 273 ; 71 . Lucillius , épigrammatiste , L 68 ; M 125 ; N 13 , p . 614 . Lucinianus, N 12 , p. 600 . Lucius , évêque arien , M 70 , p. 353 , 355 . Lucius , ami d'Hérode Atticus, M 198 ; 199 ;

N 55 , p. 700. Lucius , disciple de Modératus et ami de Plutarque de Chéronée , M 120 , p . 457; 186. Lucius , critique des Catégories d'Aristote. M 198 ; N 55 , p. 700. Lucius , disciple de Musonius Rufus, M 198 ; M 198 ; N 55 , p. 700 . Lucius de Patras , L 66 , p . 148 . Lucrèce (T. Lucretius Carus ) , M 10 ; 19 , p. 250 ; 20 ; 43 ; 99, p. 393-394 ; 0 50 . Lucullus ( L. Licinius -) , consul en 1514, grand -père de L. Licinius Lucullus , L 74. Lucullus (L. Licinius -), L 65 ; 73 , p. 175 : M 99, p. 396 . Lucullus ( M. Licinius - ) , frère de L. Licinius Lucullus , L 74 ; M 99 , p. 396. Lupus ( P. Rutilius -) , L 83 . Lycandros de Nicée , L 85a.

Lycinus , L 66, p. 154 . Lycon , péripatéticien, L 81 . Lycon , neveu de Lycon de Troade , L 82 . Lycon , esclave d'Épicure, M 210 . Lycon de Bithynie , L 85a . Lycon de Nicée , L 79 . Lycon de Troade, L 80 ; 81 ; 82 ; M 183 ; 0 12 . Lycophron , tyran , L 86 . Lycophron de Chalcis , M 116, p. 444, 445, 450 . Lycos , médecin , O 42, p. 827 .

Lyncée de Samos, H 153a; M 102, p. 409. Lysias , général athénien, L 102. Lysias, M 46, p. 297 ; 209, p. 580. Lysimaque, maître d'Amélius, L 99; 101. Lysimaque, platonicien, L 100. Lysimaque, roi de Thrace et de Macédoine, L 83 ; 97 ; M 116, p. 447; 173 ; 0 23. Lysimaque, stoïcien, L 63 , p. 119 . Lysis , grand -père de Lysis d'Aixoné , L 103 . Lysis d'Aixoné , M 126.

Lysis de Tarente , pythagoricien , L 102; 0 32.

Al -Ma'mūn , abū al -' Abbās 'Abd Allāh b. Hārūn al-Rašid , N 50, p. 691 .

Macer (Aninius -) , M 39, p. 277. Machado de Assis (Joaquim M. - ), L 66, p. 160 . Machiavelli ( Niccolò -), L 66 , p. 159. Macrobe, L 2 ; 89 , p. 210; M 102 , p. 411 ; 49 ; 65 , p . 722 ; 66 , p. 735 , 739; O 34,

P. 789 . Macrobius, praepositus sacri cubiculi , M9, p. 231 . Macrobius , proconsul d'Afrique , M 9. P. 231 . Macrobius , vicaire des Espagnes , M9,

p. 231 . Macrobius Plotinus Eudoxius , vir clarissi mus, petit-fils de Macrobe, M 9, p. 232. Maecianus ( L. Volusius -), M 33 ; 39, p. 277 . Magnence , usurpateur, N 62 . Magnès , mathématicien , M 14. Magnilla , fille de Magnus d'Apollonie,

M 13 ; 128 . Magnus d'Apollonie, M 128. Magnus de Narbonne, L 34; M 11 ; N 44 .

Magnus de Nisibe, O 40, p. 800. Magnus le Magicien, M63 , p. 314. Al - Māhāni , abū 'Ali Muḥammad b. 'fsā, M 120 , p. 464.

INDEX DES NOMS PROPRES Major, rhéteur, L 63,p. 119. Majorien , empereur, M 24 . Malchos/Malkos, nom original de Porphyre, L 63, p. 120; 66 , p. 138 ; 0 42, p. 811 . Malchus, historien , M 35. Mamercus, fils de Pythagore, N 67 . Mamercus, fils de Numa Pompilius, N 67. Mammarion , courtisane du Jardin d'Épicure , L 43 ; N 40.

Manaichmos d’Alopéconnèse, M 17 ; 101 , p. 402, 403. Mandanis, M 76, p. 378-379 ; O 23 . Manéthon , historien , N 13 , p. 603, 615. Mani, M 44 ; 55 . Manilius, L 64; N 13 , p. 614. Manius Torquatus ( L. -), père de L. Manlius Torquatus, M 22. Manlius Torquatus, préteur, fils de L. Man lius Torquatus, M 21 . Manlius Torquatus (A. -), M 27 . Marc Antoine (Marcus Antoninus ), L 62 ;

M 10; 49 ; N 45, p. 671 Marc Aurèle , empereur, L 63 , p . 117 ; 66 , p. 141 , 143 , 144, 151 ; L 70 ; M 33 ; 69, p. 325 ; 98 ; 129, p. 473 ; 169 ; 198 ; N 46 ; 55 , p. 699. Marcel d'Ancyre, O 42, p. 818 . Marcella , épouse de Porphyre, M 30; N 16, p. 621 . Marcellianus, variante pour Marcellinus, M 24. Marcellinus , correspondant d'Augustin , L 34. Marcellus, adversaire du préteur C. Verres, M 26. Marcellus, arbitre d'un débat à propos de Mani, M 44 . Marcellus (C. Claudius -), consul en 50a, M 28. Marcellus ( M. Claudius -) , neveu d’Auguste , N 25 ; 26. Marcellus ( M. Claudius -) , vainqueur de Syracuse en 2114, M 28. Marcellus Orrontius, M 23a. Marcianè ( Claudia - ) , épouse de T. Claudius Lepidus, L 47 .

893

Marcianus, maître de Marc Aurèle, M 39, p. 275 . Marcianus (Fl. -), fils d'Anthémius, M 35 . Marcien d'Héraclée, géographe, M 34. Marcion , M 55 . Marcius le Samnite, N 70. Marcommanus, M 46 , p. 297 . Marinus , L 89 , p. 206 ; N 47 ; O 15 ; 35 , p. 794; 45, p. 848-849, 851 . Marius (C. -), vainqueur des Cimbres en 1024, M 26. Marius (C. -), adversaire de Sulla, fils du précédent, L 65. Marius, fils du précédent, M 21 . Martial, L 64 . Martianus, gladiateur, M 45 . Martianus, fils de Martianus Capella, M 46 , p. 290 . Martianus Capella, L 2 ; M 9 , p. 239 ; 9, p. 242; 129, p. 474; N 58, p. 709. Martilianus, variante pour le nom de Martianus, M 45 .

Martin de Laon , M 46, p. 302 . Massinissa, M 9, p. 238. Matréas d'Alexandrie , M 52 . Matréas de Pitane, M 50 , 52 . Matron le parodiste, M 50. Mausole, L 63 , p. 120 ; N 3 . Maxime, invité de Longin, L 63 , p. 119. Maxime d'Alexandrie, M 58 . Maxime d'Éphèse, M 64; 0 34, p. 790. Maxime de Byzance, M 63 , p. 314, 321 . Maxime de Gortyne, M 69, p. 327 . Maxime de Nicée, M 56.

Maxime de Sidon, M 69, p. 327. Maxime de Tyr, 09, p. 759; 35 , p. 793 ; 42, .p. 823 . Maxime Héron, L 9; M 64 ; 0 9, p. 756. Maxime le Confesseur, N 17 , p. 629, 647. Maximin Daïa, L 7, p. 69. Maximus, proche de Marc Aurèle, M 71 . Maximus ( Avidius -), M 69, p. 326. Maximus (Cassius -), dédicataire d'Artémi dore de Daldis, M 69, p. 326. Maximus (Claudius -) , M 39 , p. 275 ; 69, p. 325 , 326.

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DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

Maximus (Marius -), M 39, p. 272 .

Memmius Marcus, hiéromnèmon , M 40 .

Maximus ( Sextus -), fils de Sextus Quinctilius Valerius Maximus, M 72. Maximus ( Sextus Quinctilius Valerius -) d'Alexandrie de Troade, sénateur, M 72. Maximus (Titus Flavianus -) , philosophe , M 69, p. 327. Maximus Allobrogicus (Q. Fabius -), L 12 , p. 77. Mécène , père ou grand-père de Gaius Cilnius Maecenas, M 10.

Memmius T. f. Ouf. Tarrachinensis (L. - ), M 99, p. 395 . Memnon , M 51 . Men ( n )as, philosophe et juriste , M 107. Ménandre , beau - frère de Hiérios, M 63 , P. 315 . Ménandre, poète comique, L 91 ; M 103 , p. 419, 429 ; 190 ; N 17, p. 646 . Ménandros (T. Flavius -), M 105, p. 435.

Médius, stoïcien, L 63 , p. 119. Mégalos, M 56 . Mégapenthès, L 9 . Meilichios , L 53. Mélanchthon (Philipp -), L 66 , p. 159.

Mélantès (ou Mélantas ) , père de Théophraste, M 85 . Mélanthios d'Athènes , poète tragique , M 87 . Méléagre de Gadara, M 89 ; 129, p. 469, 473 ; N 41 ; 09 , p. 755 . Mélèce d'Antioche, M 70, p. 351 , 353 , 356. Mélèsippos, destinataire d'une lettre de Diogène de Sinope, M 93 . Mélèsippos, émissaire lacédémonien , M 94. Mélétios , moine , N 17, p. 647. Mélètos, = Mélissos, M 97 .

Melior Felix (Securus -), rhéteur, M 46, p. 289, 291 , 301 . Mélissa, courtisane, N 41 . Mélissa, épouse de Périandre, M 95 . Mélissos, L 14 ; N 24. Memmius , tribun en 1114, M 99, p. 396. Memmius (C. -) , accusateur de Rabirius, M 99, p. 395 .

Ménécée le philosophe, M 108. Ménechme, M 17 . Ménechme de Sicyone, historien d'Alexan dre, M 17 ; N 10, p. 589. Ménécratès , ami de Musonius Rufus , M 198 .

Ménécratès, historien , M 112. Ménécratès (T. Claudius -), médecin des empereurs , M 111 ; 114 . Ménécratès de Syracuse, médecin, M 111 . Ménédème d'Érétrie, L 22; M 119; 194. Ménédème de Pyrrha, M 116, p. 446 , 450 ; 118. Ménédème le Cynique, M 116, p. 444 ; 129, p. 472, 474 ; 190 . Ménexène , fils de Socrate, M 126. Ménexène de Péanée, L 103. Mènios, M 11 . Ménippe de Gadara , L 9 ; 66 , p. 149 , 152 ; M 46, p . 292 ; 90 , p. 385-387 ; 119 ; 129, p. 471 ; 142, p. 499 ; 164 ; 190 ; 09, p. 758. Ménippe de Lycie , M 198 ; N 61 ; 09, p. 755 . Ménodore , affranchi de Sextus Pompée, M 132. Ménodoros , protagoniste du dialogue de Ménas, M 107.

Memmius (C. -) , orateur, M 99, p. 395 . Memmius (C. - ) , préteur en 104a, M 99, p. 395 . Memmius ( C. - ) , dédicataire de Lucrèce, L 73 , p. 176. Memmius (G. -), tribun en 54a, M 22.

Méropius de Tyr, M 147.

Memmius (L. -) , père de C. Memmius le dédicataire de Lucrèce, M 99 , p. 396 .

Merula (Gaudentius -), N 17, p. 650. Messaline, L 24; 68 .

Memmius C. f. Sullae Felicis n . , fils de C. Memmius, M 99, p. 399.

Messalinus (C. Vlpius Pacatus Prastina - ) , M 47 .

Ménodote de Nicomédie , médecin , L 88 ; N 48. Ménon de Crotone, M 166 ; 202 . Mentoridès, M 152.

1

isés

ที่

INDEX DES NOMS PROPRES Messalinus ( M. Valerius - ) , M 47 . Metellus Scipio (Q. Caecilius -) , consul , M 99, p. 398 . Méthode d’Olympe, M 55 ; O 42, p. 818. Metillus, fils de Marcia, M 31 . Méton , astronome, O 10, p. 765 .

Métroclès de Maronée, cynique , M 119 ; 129, p. 467 . Métrodore, architecte, M 145 . Métrodore , disciple d'Isocrate , M 143 ; 149. Métrodore , historien , M 154. Métrodore, philosophe, M 138 . Métrodore , poète, M 143 . Métrodore d'Abdère , M 149. Métrodore de Chios , M 97 ; 143 ; 151 , p. 509 ; 190 ; 200 ; N 24. Métrodore de Cyzique , M 155 . Métrodore de Lampsaque , épicurien , L 40 ; 43 ; M 53 ; 129 , p. 470 ; 146 ; 151 , p . 509 ; 173 ; 124.

Métrodore de Lampsaque , dit l'Ancien , M 143 . Métrodore de Pitane , M 155 . Métrodore de Scepsis , M 143 ; 181 . Métrodore de Stratonicée , M 145 ; 150 ; 153 . Métrophane , sophiste, M 159. Métrophane d'Eucarpia , M 161 . Métrophane de Lébadée , M 161 . Michel Apostolès, M 69 , p. 347 . Michel Glycas , N 17, P. 647. Michel Scot, N 45 , p. 679. Micros, L 81 . Milon , défendu par Marcellus, M 27 ; 99 , p. 398 . Milon de Crotone , L 104 ; M 135 ; 202 . Miltiade , père d'Ariston de Chios , M 168 . Minucianus l’Ancien , M 105, p. 434. Minucianus le Jeune, M 105 , p . 434 ; 198 ; N 29. Minucius Felix , M 7. Miskawayh , abū ' Ali Ahmad b. Muḥammad , N 46 . Mithrès, M 152. Mithridate VI , roi du Pont , L 74 ; M 99 , p. 396; 154 .

895

Mnaséas , père de Mnason de Rhodes , M 179. Mnasis , M 178 . Mnason de Phocis , délégué des Phocidiens, M 179.

Mnémarchos, fils de Pythagore, M 180. Mnesarchidès, M 181 . Mnésarque, père de Pythagore, M 180 . Mnésarque d'Alexandrie , M 175 . Mnésias , père d'Aristoxène de Tarente , L 18 . Modératus de Gadès , L 63 , p. 118 ; 71 ; N 66, p. 726, 730; 0 42 , p. 813 . Mõšē Bar Kēphā , évêque jacobite de Mossoul , N 17 , p. 651 . Moeragénès, O 42 , p. 835 . Moïse , N 66 , p. 726, 728, 736, 738 . Monime de Syracuse , L 9 ; M 102 , p . 418 ; 119 ; 129 , p. 475 . More (Thomas -) , L 66 , p. 159.

Morianus, M 207. Moschion , L 11 . Moschos , M 52 ; 116, p. 446 , 451. Moyses Italus de Bergame, N 17 , p. 649. Mucianus, M 198 . Muḥammad b . Mūsā b . Šākir, M 120 , p. 460 . Mummius (L. - ) , consul en 146a, vainqueur de Corinthe , M 196 . Murianus, M 207 . Murujanus, M 198 . Musa (Antonius -), médecin , M 28 . Mūsā ibn Shakir, M 120, p . 460 . Musée , О 45 , p. 854 . Musonius , stoïcien , L 63 , p. 119 . Musonius de Babylonie, M 198 . Musonius de Tyr, M 198 . Musonius Rufus, arrière -petit -fils de Muso nius Rufus, M 198 .

Musonius Rufus , L 69 ; 70 ; 72 , p . 169 ; M 199 ; N 55 , p. 700 ; 0 42, p. 834 . Musonius Rufus ( C. - ) , petit-fils de Muso nius Rufus, M 198. Muzubanus, M 198 . Muzujanus , M 198 . Muzunajus, M 198 .

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DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

Myia, M 135 ; 166 . Myiscos , M 90 , p. 388 . Myro (ou Moiro ) de Byzance , poétesse, M 206 . Myronianus d'Amastrée, M 210. Myropnous, L 26. Myrtilus, poète comique , M 209, p. 578 . Mys, esclave d'Épicure, M 207 . Al-Nadim , abū al - Farağ Muhammad b. abi Ya'qūb Ishaq al - Warrāq al - Bağdādi , M 120 , p. 458,460 ; 198 ; N 46. Namertès, N 16, p. 623.

Narcisse , ab epistulis sous Claude, L 68 . Naucratès d'Érythrée , commentateur d'Homère , N 3 . Naucydès , N 8.

Naumachios d'Épire, médecin , N 6. Nausicratès , père d'Onésandros, O 29 . Nausicydès, N 5 . Nausiphane, M 149 ; 152 ; N 5 . Néanthe de Cyzique, L 104; M 203 ; N 10, P. 587 . Néarque de Crète, M 76, p. 371-372 ; 0 23 . Néchao , N 13 , p. 604 .

Nepotianus , M 24. Nero ( T. Claudius -), fils de Tiberius, N 22. Néron , empereur, L 24 ; 64; 68 ; M 54 ; 98 ; 130; 198 ; 0 42, p. 834. Nerva, empereur, M 39, p. 272 ; 54; 72. Nessas, M 149 . Nessos de Chios, N 24. Nestor de Laranda, M 105 , p. 436. Nestor de Tarse, académicien, N 25; M 28. Nestor de Tarse, stoïcien, N 26. Nestorius, N 17, p. 627. Nicagoras, rhéteur, L 63, p. 119 ; M 198 ; N 29.

Nicarétè , maîtresse de Stilpon, O 27 . Niccoli (Niccolò -), L 73, p. 178. Nicéphore de Constantinople, M 2 . Nicéphore Grégoras, L 66 , p. 159; M 69, p. 335 , 346 . Nicetas de Remesiana, M 7. Nicias, rhéteur, L 94. Nicias, esclave d'Épicure, M 210. Nicidion, courtisane du Jardin d'Épicure, L 43 ; M 16. Nicion , courtisane, M 90 , p. 384.

Néchepso, roi égyptien , N 13 , p. 603-604. Nécheus, N 13 , p. 604. Nécho Jer, N 13 , p. 604.

Nicocréon de Salamine, M 116, p. 447 . Nicodemus (Iulius -), N 52 . Nicolaos, commentateur de la République de Platon , M 14.

Nécho II , N 13, p. 604 . Nectaire de Constantinople, M 70, p. 357 .

Nicolas, évêque de Myre, N 47. Nicolas de Damas, N 43 ; 46 .

Nectanébo II , N 13 , p. 606 . Nekau -ba, N 13 , p. 604. Nemertès (Iulius -), N 16, p. 623 . Némertès d'lasos, N 16, p. 623 .

Nicolas de Laodicée , N 45 , p. 678. Nicolas de Myre, disciple de Lacharès , L 3 .

Nemertios, silentiaire, N 16, p. 624. Nemertios, defensor, N 16, p. 624. Némésius , gouverneur de Cappadoce Seconde , N 17 , p. 628 . Némésius d'Émèse, N 65 , p. 724. Némonios , père de Ctésiphon , C 225a. Néoclès, père d'Épicure, N 18 , p. 654. Nepos ( P. Metilius -) , consul suffect en 103 , M 139. Nepos ( P. Metilius Sabinus -) , consul suffect en 91 , M 139. Nepos (Q. Pompeius -), L 12, p. 76 .

Nicolas de Reggio, M 133 , p. 477 . Nicolas le philosophe, N 45 , p. 676. Nicomachus Flavianus, fils de Virius Nico machus Flavianus, N 49. Nicomachus Flavianus Senior (Virius - ), L 34 ; M 9 ; 60 .

Nicomaque, père d'Aristote, N 51 . Nicomaque de Gérasa, L 63 , p. 118 ; M 9 , p. 239 ; 46 , p. 295 , 299 ; 186 ; 203 ; N 12 , p. 597 ; 66, p. 728 ; O 42 , p. 813. Nicomède IV Épiphane Philopator, roi de Bithynie, M 99, p. 398. Nicomédès, mathématicien , N 57 . Nicon (Aelius -), architecte, N 52.

INDEX DES NOMS PROPRES

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Nicostrate, platonicien , L 72, p. 167 , 170173 ; M 186; N 53 .

Odeynat, roi de Palmyre, L 63, p. 120 . Odoacre, M 35 . Nicostrate, M 160 . Ofellius Macedo (A. -), L 13 . Nicostratus de Macédoine, sophiste, N 55 , Oinomaos , poète épigrammatiste , 09 , p. 701. p. 752. Oinopidès, stoïcien , O 10, p. 766 . Nicostratus ( T. Flavius -), N 55 , p. 701 . Nicotélès , père de Néanthe de Cyzique, Oinopidès de Chios, N 30 . N 10, p. 587. Olympiodore d'Alexandrie , néoplatonicien , Nicotèles de Cyrène, philosophe cyrénaï L 72, p. 172-173 ; N 45 , p. 676-677 ; 55 , que , N 57. p. 701 ; 0 16; 45 , p. 851 . Nicotélès de Cyrène, mathématicien, N 56. Nigidius (C. -) , préteur en 145a, N 58 , p. 704. Nigidius Figulus , L 2 ; 89 , p. 208; M 99, p. 397 . Nigrinus, L 66 , p. 140, 151-153. Nil d’Ancyre, N 16, p. 624. Nilus, M 70, p. 362.

Olympios, père du médecin Olympios d'Antioche, O 19. Olympios , fils du médecin Olympios d'Antioche, O 19. Onasandros le tacticien , O 29. Onésandros, prêtre du Ptolemaion, O 29. Onésicrite d'Astypalaea, M 76, p. 372-373 , 378-379; 104; 24.

Nilus Doxopatres, N 17 , p. 647. Nimos le tisserand, 09, p. 753-754. Nomos, M 74.

Onésicrite d'Égine, O 23. Onésimos, père de Mnésarque d'Athènes , M 181 .

Notopso, N 13 , p. 604. Nouménios , père d'Alexandros, M 105 ,

Onétor, source de Diogène Laërce, N 33. Onétor, commentateur du Phédon, O 22. Onomarchos d'Andros, M 40. Oppia ( Aurelia -), C 18a. Optimus, rhéteur, 0 33. Optimus , évêque d'Antioche de Pisidie , 0 33 . Orchivius (C. -), M 99 , p. 397 .

p. 435 . Numa, L 59; L 89, p. 207. Numance, L 67 . Numénius d'Apamée, L 2 ; L 11 ; 63 , p. 118 , 125 ; 89, p. 209 ; 100 ; M 56 ; 67 ; 137 ; 181 ; 186 ; O 34, p. 787 ; 42, p. 813 , 830, 835 ; 45 , p. 848. Nymphidianus , frère de Maxime d'Éphèse, M 63, p. 315 , 318 . Nymphis d'Héraclée, historien , N 68. Nysa , épouse d'Ariarathès V , M 174 , p. 529,531 . Nysios le Samnite, disciple de Panétius de Rhodes, M 37 . Occelos, O 4; 5 ; 7. Occilos, O 4; 5 . Ôchos, M 185 . Octavie, sæur d'Auguste , M 28 ; N 26. Octavius , protagoniste du dialogue de Minucius Felix, M 172 . Octavius (C. -) = Auguste, M 10; 49. Octavius (C. -) , père d'Auguste , N 58 , p. 707.

Oribase de Pergame, N 6 ; O 39. Origène le Chrétien , L 63 , p . 118 ; 66 , p. 153 ; M 7 ; 55 ; 70 , p. 354 , 359 ; 187 ; N 17 , p. 627 ; 17 , p. 630; 66, p. 728 , 739 ; 09, p. 760; 35, p. 796; 41 , p. 806 . Origène le Platonicien , L 63 , p. 118-119 , 122, 124 ; 0 42 , p. 810. Orion de Thèbes, 0 44 . Orphée, L 61 ; M 105 , p. 437 ; 143 ; 151 , p. 514 ; O 34, p. 790-791. Orus d'Alexandrie, O 44 . Ouranios, M 74. Ourias, archonte athénien , L 40 . Ovide ( P. Ovidius Naso ), M 69 , p. 347; 90, p. 387 ; 129, p. 473.

Pacuvius (M. -), M 3. Paetus ( Caecina -), M 139.

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DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

Paetus (L. Papirius -), M 52. Paetus (P. Autronius -), M 21 .

Pausanias , père de Méton de Leuconoé, M 140, p. 487 .

Paetus ( Thrasea -), M 198 . Palaiphatos, M 112 . Palladius d'Hélénopolis, D 111a ; M 76, p. 380; 0 42, p. 807 . Pamphile, disciple de Platon, N 8 . Pamphile d'Épidaure, M 102, p . 408 . Pamphile de Césarée, M 7 ; 09, p . 760; 42 , p. 807, 817. Pamphilus (Musonius -), M 198. Pancratidès , correspondant de Musonius Rufus, 198 . Pancréon , frère de Mélantès, M 85 . Panétius de Rhodes, L 12, p. 78 ; 38 ; 67 ; 79; 84 ; M 37 ; 142 , p. 501 ; 181 ; 196 ; N 13 , p. 614; 17, p. 639 ; 25 ; 70. Pansa (Gaius Vibius -), M 99, p. 399 . Pantacleia, fille de Diodore Cronos, M 127 . Pantainos, maître de Clément d'Alexandrie, M 106 ; O 42 , p. 810.

Pausanias de Césarée, M 105 , p. 436. Peisistratos, M 184. Pélagius de Cyr, M 6. Pelops, N 23 . Pempélos, M 77. Pérégrinus Proteus, L 66 , p. 137, 141 , 148 , 152 , 154, 156; M 70, p. 361-362 ; 105 , p. 436; N 59, p. 713 ; 09, p. 756. Périandre, L 60 ; N 10, p. 594. Périclès, L 94 ; M 97 ; 126. Périctionè , mère de Platon , M 77 ; O 42 , P. 835 . Périers (Bonaventure des -) , L 66 , p. 159. Peristratos, M 184 . Persaios de Citium, disciple de Zénon de Citium, M 116, p. 448 , 450 ; 209, p. 579 . Perse (Aules Persius Flaccus), poète, L 64; M 102, p. 419; N 65 , p. 720 . Persée, roi de Macédoine, M 145.

Pantheia, L 66 , p. 141 . Panthoïdès, dialecticien, L 83 .

Peteesis, N 13 , p. 605. Petillius (Q. -), N 67.

Pantiadès, archonte athénien, L 11 . Paphius, N 55 , p. 699.

Pétosiris, N 13 , p. 602, 604 . Pétrarque, L 7 , p . 71 . Petrizius (Jean -), N 17 , p. 651 .

Pappus, M 120, p. 457, 460. Paraibatès de Cyrène, M 116, p. 446 ; N 56. Parménide , L 45 ; 89, p . 209 ; M 97 ; 105 , p. 437 ; N 24. Parménides de Thespies ( Avidius -), N 59,

p. 713 . Parméniscus, O 37 ; N 41 . Paséas, académicien , L 11 . Pasiphon d'Érétrie , M 116, p. 450. Patérius, 0 26. Patron , épicurien, L 56; M 99, p. 399-400. Paul d'Alexandrie , astrologue, N 13 , p. 615 ; 0 17 .

Paul d'Égine, médecin , O 40, p. 804. Paul de Samosate , L 63 , p. 121 . Paul Émile, voir Paulus ( L. Aemilius -). Paulin , ami d'Augustin , L 55 , p. 103 . Paulin d'Antioche, M 70, p. 356. Paul ( l )us Macedonicus ( L. Aemilius -) , ( Paul Émile), L 12 , p. 77 ; 59 ; M 9, p. 238 ; M 145 .

Pétrone (C. Petronius Arbiter) , M 129, p. 474 . Phaeinos, M 140 , p. 497 . Phaidrion, servante d'Épicure, M 210. Phanodème, M 116, p. 446 . Phaon , M 69, p. 347 . Pharianus, M 63, p. 320. Phédon d'Élis, M 52 ; 116, p. 446 , 451 ; 194 . Phèdre, ami de Socrate, L 94. Phèdre , épicurien , L 73 , p . 183 ; M 99 , p. 399 . Phérécyde, O 42, p. 830 . Phila, mère d'Antigone Gonatas , M116, p. 452 . Philagrios d'Épire, médecin , N 6 ; 0 40 , P. 803. Philagros de Cilicie, sophiste , L 66 , p. 142. Philéas de Mélité (P. -) , archonte athénien , M 198 . Philémon, poète comique , M 102 , p. 408 409.

INDEX DES NOMS PROPRES Philétère ( Philetairos), roi de Pergame, N 10, p. 588 . Philinos de Thespies (Flavius -) , consul , 0 14. Philippe, archonte athénien, L 40 .

Philippe, astronome, M 140, p. 494 . Philippe d'Oponte, N 10, p. 587, 591 . Philippe de Mégare, M 156; 205. Philippe II , roi de Macédoine , L9 ; 33 ; M 85 ; 111 ; N 46 . Philippe le Chancelier, N 17, p. 627. Philippus (L. Marcius -), consul en 56a, M 32. Philiscos , fils d'Onésicrite d'Égine et , disciple de Diogène de Sinope, M 104 ; N 10, p. 591 ; 0 23 ; 24. Philiscos de Milet, N 10, p. 587,588 , 589. Philochore, historien, M 116, p. 446 ; 140 , p. 488 . Philocratès de Rhamnonte, O 2. Philodème de Gadara, L 73 , p . 177 , 191 ; M 10; 90 , p. 385 ; 102, p. 419 ; 129, p. 469 ; 151 , p. 511 ; 153 ; 173 ; 181 ; N 8 ; 10 , p. 591 ; 18, p. 654; 34. Philolaos , L 89, p. 209 ; 104 ; N 10 , p. 593 ; O 10, p. 765 ; 22. Philométor, M 63, p. 316. Philon d'Alexandrie , L 63 , p. 117 ; M 69 , p . 342 ; N 13 , p . 614 ; 17 , p . 630 ; 66 , p. 731 , 736; O 22 ; 35 , p. 796. Philon de Crotone, M 166. Philon de Larisse, L 98 ; M 86 ; 99, p. 399 ; 115 ; 155 ; 176 ; 181 ; N 26; 66 , p. 727. Philon de Mégare, M 127 . Philopator, stoïcien , N 17, p. 642; 52. Philopon (Jean-) , L 72, p . 172 ; N 50 , p. 687 ; 55, p. 701 ; 0 45 , p. 851 . Philostrate de Lemnos, L 34 ; 66 , p. 135 , 158 ; M 62 ; 69 , p. 340 ; 105 , p. 436 ; 160 ; 198 ; N 49.

Philtys, 04. Philus (L. Furius -), L 12, p. 78 . Phlégon de Tralles, N 6. Phocas, L 89, p. 206 , 209. Phocion, L 33 ; M 102, p. 417.

Phoibion, stoïcien , L 63, p. 119.

899

Photius , L 63 , p . 122 ; 66, p . 137 , 159 ; M 107 ; O 40 , p. 802; 42, p. 817, 821 . Phryné, courtisane, M 93 . Phrynicos, poète comique, M 140, p. 488. Phylarque, M 24 . Phyllis, M 202. Pico della Mirandola (Pico -) , L 7 , p. 71 ; M 69, p. 347 . Pierre d'Alexandrie, M 70 , p . 349, 353 , 355-356, 358-359. Pierre le Patrice, O 48 . Pindare , M 209, p. 579. Piso (C. Calpurnius -), conjurateur, L 64; L 68 ; M 198. Piso (C. Calpurnius -), consul en 180a, L 24; 67 . Piso (C. Calpurnius -), consul en 673, M 21 . Piso ( L. Calpurnius -), consul en 148a, L 67. Pisthétairos, M 140 , p. 488 . Pittacos, L 60 . Planude (Maxime -), M 103 , p. 427 ; N 45 ,

P. 678 . Platon , G 15a; L 2 ; 7 , p. 68 ; 13 ; 14 ; 21 ; 22 ; 29 ; 32 ; 33 ; 52 ; 63 , p. 118-122, 125 ; 66 , p. 150 ; 72, p. 168 ; 75 ; 86 ; 89, p. 209 ; 102; 103 ; M 4; 9, p. 235, 238-240, 242 ; 14 ; 17 ; 39, p. 281 ; 46, p. 295-296, 298 ; 52 ; 63 , p. 313 , 316 ; 67 ; 69, p. 325, 328 , 334, 338, 341-342, 344-346 , 348 ; 71 ; 75 ; 76, P. 375 ; 77 ; 78 ; 84 ; 97 ; 101 , p. 401, 405-406 ; 102, p. 409, 417 ; 105 , p. 437 ; 116, p. 444-445 , 450; 117 ; 119; 126; 142, p. 500 ; 146; 151 , p. 508 ; 152 ; 160; 162 ; 172 ; 179; 181 ; 184 ; 186 ; 207 ; N 10, p. 587 , 591-593 ; 12 , p. 598 ; 13 , p. 605 ; 17 , p. 639, 643, 645 ; 21 ; 27 ; 29 ; 39 ; 44 ; 46; 51 ; 53 ; 59, p. 714; 66, p. 726-728 , 730, 733 , 736, 740; 0 6; 9, p. 758 ; 10, p. 762, 765 ; 16 ; 17 ; 20 ; 26 ; 27 ; 29 ; 34, p. 786, 790-791; 40 , p. 803 ; 41 , p. 805; 42, p. 813, 815, 826-827, 830 831 , 835 , 841 ; 45 , p. 843 , 845 , 848-849, 851-852 ; 50. Platon d'Azénia, M 174, p. 530. Platon de Sardes, épicurien , L 56. Plaute, M 102, p. 416; 0 30. Plautus (Rubellius -), M 198. Pleistanos d'Élis, M 116, p. 451 ; 194.

900

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

Pléthon ( Gémiste -) , O 34, p. 784 , 791-792 .

Polyeidos, père de Ménécratès, M 111 .

Pline l’Ancien , L 88 ; M 46 , p. 298 ; 76 , p . 370 ; 145 ; N 13 , p. 614 ; 58 , p. 707 , 710. Pline le Jeune , M 54 ; 72 ; 139 ; 198 . Plotin , L 2 ; 63 , p. 119-123 ; 72 , p. 169-170, 172 ; 89 , p. 209; M9 , p . 232 , 240-241 ;

Polyen, voir Polyainos. Polymnis , L 104. Pompée (Cn . Pompeius Magnus), L 62 ; 64; 65 ; 73 , p. 174 ; 74; M 21 ; 22; 27 ; 43 ; 99, p. 396 , 398 ; N 58, p. 705-706 .

23a ; 30 ; 63 , p . 313 ; 69 , p . 342 ; N 12 , p. 598 , 601; 17 , p. 634 ; 45 , p. 679 ; 46 ; 55 , p . 701 ; 66 , p. 726, 730-731 , 733-734, 736738 ; O 34 , p. 788 ; 35 , p . 794 ; 41 , P. 804, 806 ; 42 , p. 811 , 821 , 836, 838-839 ; 45 , P. 848 . Plotius, N 58 , p. 709. Plutarque , arrière - grand - père de Plutarque d'Athènes , N 27 .

Pompée ( Sextus ), fils du précédent, M 10, 243 ; 132 . Pompylos, M 85 ; 207.

Plutarque d'Athènes , N 27 ; 28 ; 47 ; O 8 ; 26 ; 45 , p. 848 . Plutarque de Chéronée , L 62 ; 2 ; 17 ; 63 , p. 125 ; 66 , p. 150, 157 ; 71 ; 74 ; M 186 ; 198 ; 39 , p. 275 ; 99, p . 397 ; 102 , p . 411 ; 120 , p . 457 ; 191 ; 198 ; N 15 , p . 619 ; 17 , p. 642, 645-646 ; 28 ; 29 ; 59 , p. 713 ; 60 ; 66, p . 733 , 735-736 ; O 9, p. 753 , 759 ; 23 ; 26 ; 35 , p. 792 ; 42, p. 827 , 831 . Polémaios de Sypalèttos , M 174, p. 533 , 534 . Polémarque, frère de Lysias, L 94 . Polémarque , mathématicien , M 101, p . 403. Polémius , L 34; M 12 . Polémon d’llion , N 10, p. 589-590 .

Polémon de Laodicée , sophiste , L 66 , p. 139 ; M 198 ; 39 , p. 276 ; 40; 80 Poliziano ( Angelo -), M 69 , p. 347 . Pollion, auteur de Mémorables de Musonius Rufus, p . 276 ; 198 . Pollion ( Annius -), M 198 . Pollion ( Asinius -), M 198. Pollion d'Alexandrie ( Valerius -) , grammairien maître de Marc Aurèle , M 39 ; 198. Pollux , L 66 , p . 142 .

Polos , L 57 . Polyainos, épicurien , M 53 ; 152 .

Polybe , L 59 . Polyclès , frère de Néanthe de Cyzique , N 10, p. 587 . Polycrite d'Étolie , N 6.

Ponticianus, N 12, p. 596. Porcia, fille de Caton , M 32. Porphyre de Tyr (Malchos /Basileus), L 2; 7, p. 65 ; 34 ; 63 , p. 118-123 ; 66, p. 138 ; 72, p. 168-169, 173 ; 89, p. 209; 99; 100; M 9 , p . 232 , 240-241; 14 ; 23a ; 30; 46 , p . 301 , 295-296 ; 56 ; 63 , p. 314; 67; 69, p . 325 ; 75 ; 102 , p. 409; 186; 203 ; N 10, p . 594 ; 16 , p . 620 ; 17 , p . 630-631 , 634, 637 , 645; 44; 45 , p . 674, 677-678 ; 49 ; 50, p . 688 ; 55 , p . 699-701 ; 56; 65 , p. 724; 66, p . 728 , 737-739 ; 09 , p. 752 ; 20; 34, p . 788 ; 35 , p . 793-794 , 796-797 ; 41 , p . 804-806 ; 42 , p. 807 , 810, 822 , 836, 838-839 ; 45, p. 848. Porus, M 76, p . 369.

Posidès d'Argos, M 170. Posidippe, poète comique , L 91 . Posidonius, disciple d'Annicéris de Cyrène, N 56 . Posidonius d'Apamée , M 19, p. 249, 252 253 ; 69, p. 342, 344; 181 ; 184; 185; N 13,

p. 614 ; 17, p. 630, 633 ; 43 ; 46 . Possidius, N 12 , p . 597; 14. Postumius , O 36. Potamon de Mytilène, L 50 . Praetextatus (Marius Vegetius -), M9, p. 235-236 ; M 46, p. 294; N 49. Praxiphane, N 8 . Praxitèle , M 102 , p. 408. Praylus de Troade, N 48 . Priscien , (Priscianus Lydus ), N 17, p. 635 ; 0 48 . Priscien, grammairien, N 65 , p. 720. Priscus de Thesprotie, M63 , p. 314-316 ,

318-319 ; O 34 , p . 790. Probus, correspondant de Lactance , L 7, p. 71 .

!

INDEX DES NOMS PROPRES Probus ( M. Valerius -) , grammairien , M 129, p. 471 . Proclinus de Troade , platonicien , L 63 , p. 119. Proclus de Lycie , H 106a ; L 3 ; 32 ; 63 , p. 121-122 , 124 ; 89 , p . 206 , 209 ; M 14 ; 42 ; 63 ; 67 ; 101 , p. 404-405 ; 120 , p. 457 ; N 6 ; 27 ; 44 ; 47 ; 50 , p. 690 ; 66 , p . 738 , 740 ; O 10 , p. 762 ; 10 , p. 766 ; 15 ; 17 ; 26 ; 34, p . 784-785 , 788 , 790, 792 ; 35 , p. 794 ; 41 , p . 805 ; 41 , p . 807 ; 42 , p . 811 , 822 823 , 835 , 838 ; 44 ; 45 , p. 848-850 , 852 . Procope, historien , L 89 , p. 210. Procope, usurpateur, N 49 ; O 40 , p. 801 . Prodicos de Céos, L 62. Prodromenos ( Néophytos - ) , M 103 , p. 431 . Prohairésius, sophiste , M 63 , p. 314 ; 64. Properce ( Sextus Propertius ), L 90 ; M 10. Prosénès, péripatéticien, L 63, p. 119. Protagoras d’Abdère , L 94 ; M 149 ; 190 ; N 24.

Proxène, général , M 136. Prudence ( Aurelius Clemens Prudentius ) , L 7 , p. 71 . Psammétique ſer, N 13 , p. 604. Psammétique II , N 13 , p. 604. Psammétique III , N 13 , p. 604 . Psellus ( Michel -) , L 63 , p . 122 , 66, p. 159 ; N 17 , p. 647 ; 0 34, p. 784-785 , 788 , 791 . Ptolémée , péripatéticien, L 63 , p. 119 .

i

A. g

Ptolémée, astronome , L 72 , p . 167-168 ; 89 , p. 208 ; M 42 ; 46, p. 298 , 300 ; 120 , p. 456 457 , 461-464 ; 140 , p. 489 ; N 13 , p. 602 , 608 , 613- 615 ; O 10, p . 765 . Ptolémée, frère de Nicolas de Damas, N 45 , P. 670 . Ptolémée , fils d'Antoine et de Cléopâtre , N 45 , p . 671 . Ptolémée, historien d'Alexandre , O 23 .

Ptolémée III Évergète , M 101 , p. 403 ; 174 , p. 532 ; N 57.

Ptolémée Ptolémée Ptolémée Ptolémée

IV Philopator , M 184. V Épiphane, M 174 , p. 532. VI Philométor, N 13 , p. 606 . VII Évergète II , N 13 , p . 606-607 .

Ptolémée IX Sôter II ( Lathyrus), O 29. Ptolémée XII Aulète , M 43 . Pulchérie, impératrice, H 63a. Pylémène d'Héraclée , avocat , ami de Synésius , M 34 . Pyrrhon d'Élis , M 109 ; N 8 ; 24 ; 46 ; 0 48 . Pythagore de Samos , L 13 ; 36 ; 53 ; 58 ; 66 , p . 153 ; 85 ; 104 ; M 9 , p . 239 ; 36 ; 46 , p. 299 ; 52 ; 69 , p. 327 , 344; 135 ; 143 ; 164; 166 ; 180 ; 185 ; 188 ; 202, 203 ; N 9 ; 10 , p. 593-594 ; 46 ; 50, 689 ; 58 , p. 706 ; 66 , p . 727 , 736, 740 ; 67 ; 0 6 ; 10 , p . 762-763 ; 22 ; 23 ; 34 , p . 790-791 ; 42 , p. 830 ; 45 , p . 848-849 ; 50 . Pythias, fille d'Aristote , N 51 . Pythoclès, M 53.

Qalonymos b . Qalonymos d'Arles , N 45 , p . 678 ; 50, p. 690 , 692 . Quérasphoros, N 13 , p. 604. Quevedo ( Francisco de - ), L 66 , p. 159 . Quinctius ( P. -), M 26. Quintilianus ( M. Fabius - ) , M 10 ; 46 , p. 297 . Rabbān Pēthion, N 17 , p. 651 . Rabbi Meir, O 9, p. 753-754 . Rabelais ( François -) , L 66, p. 159 ; M 46 , p. 292 . Ramsès VI , L 15 . Regilla , épouse d'Hérode Atticus , L 70;

M 198 . Regulus , M 46, p. 297 .

.

Ptolémée de Cyrène, N 48 . Ptolémée al - gārib , pinacogaphe , N 45 , p . 674, 676 . Ptolémée Héphaistion , M 52 . Ptolémée er Sôter , M 101, p . 402 ; 116 , p. 447 . Ptolémée II Philadelphe, M 116 , p . 447 ; N 15 , p. 619.

901

Rémi d'Auxerre, M 46 , p. 289 . Remigius , N 17 , p. 627. Remnius Flavinius , M 120, p. 463-464. Rhenanus ( Beathus - ) , N 17 , p . 650 . Rhetorius, N 13 , p. 615 . Rhyndacô, O 4 . Ricimer, M 24.

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

902

Rogatianus, M 30. Romanianus, fils de Licentius, L 55 , p. 102. Rufin d'Aquilée, M 7 ; 55 ; 138 ; 147 ; 0 42 , p. 817,838 . Rufinus, fils d'Himérius, M 198. Rufius Postumianus, M 9, p. 235 . Rufus, correspondant de Dion Chrysostome, M 198.

Rufus, correspondant de Musonius Rufus, M 198. Rufus (L. Varius -), L 73 , p. 176; 90 . Rufus (M. Caelius -), M 27. Rufus (P. Rutilius - ), O 30. Rufus (Servius Sulpicius -) , juriste, L 1 ; M 27. Rufus (Vibullius -) , archonte athénien , M 198. Rufus d'Éphèse, médecin , O 40 , p. 803. Rupilius (P. - ), consul, L 12, p. 76 . Rusticus (Q. Iunius -), stoïcien , maître de Marc -Aurèle, M 39, p. 272, 275 ; 71 .

Rusticus (Q. Iunius Arulenus -) , stoïcien, grand -père du précédent, M 39 , p. 275 ; 54. Rutilius, voir C. Rutilius Gallicus, M 198 . Rutilius Rufus, L 12, p. 78 . Sabellius, hérétique, M 70, p. 354. Sabinillus, élève de Plotin , M 30. Sabinus, sophiste , M 184. Sabinus ( Flavius Iulius Tryfonianus -) , N 65 , p. 720. Sacchus (Jacobus Philippus - ) , N 17 , P. 650 . Sacerdos de Tion , L 47. Sachs (Hans -), L 66 , p. 159. Salluste, historien, N 14. Saloustios, auteur du traité Des dieux et du monde, O 42, p. 822. Saloustios, philosophe, M 24; 29; 74. Saloustios, préfet du prétoire, M 63 , p. 319. Santra, grammairien, L 12, p. 77 . Sapor, M 63 , p. 313 ; 147. Sappho, M 69, p. 347-348 ; 178 . Sapricius, L 53 . Sarapion , 45 , p. 851 .

Satius, L 15. Scaevola (Q. Mucius -), l'augure, gendre de C. Laelius Sapiens, L 12, p. 77. Scaurus (M. Aemilius -), M 27 ; 99, p. 396 .

Scipion Émilien (P. Cornelius Scipio Aemi lianus), L 12, p. 75 , 77 ; 67 ; M 9, p. 238 ; 145 ; 196 . Scipion l'Africain ( C. Scipio Africanus maior), L 12, p. 75 ; M 9, p. 238 ; N 67 . Scylas de Carianda, M 76, p. 370 . Secunda , épouse de Claudius Maximus, M 71 . Secundinus de Tralles, platonicien, M 25 . Sedulius Scotus , L 7, p. 71 . Séjan (L. Aelius Seianus), M 31 . Seleucus, adversaire de la prêtresse Théo dora, M63, p. 318. Seleucus ( Varius -), M 73. Séleucus VI Épiphane Nicator, M 76 , p. 369, 376; 90, p. 385 . Sénecion (Herennius -), M 54.

Sénèque, L 54 ; 64 ; 68 ; M 10; 27 ; 28 ; 31 ; 76, p. 370; 129, p. 474; 158; 172; 09, p. 758. Sénèque le Père, L 59. Sérapammon, N 49. Sérapion, médecin, L 88. Sérapion, astrologue, N 13, p. 613 . Serenus (Septimius -), N 65 , p. 720 , 723 . Sergius, préfet, L 89, p. 206 . Servilia, L 62. Servilius l'augure, L 74 . Servius, commentateur de Virgile , M9 , p. 236; 46, p. 296 ; 146 ; N 65 , p. 722.

Sévère, consul en 470, M 24. Sévère ( Septime -), empereur, J la. Sévère d'Antioche, O 35 , p. 795-796 . Sévère de Lycie, M 66. Severus, correspondant de Lactance, L7, P. 71 . Severus (Claudius -), péripatéticien , M 39,

p. 275 . Severus ( Claudius -) fils, péripatéticien , M 39, p. 275. Sextus, ancêtre d'Himérius, M 198. Sextus, auteur d'un traité sur la résurrection , M 55.

-

INDEX DES NOMS PROPRES Sextus de Chéronée, L 70; M 39, p. 275 ; 71 ; 198 ; N 29; 09, p. 753 . Sextus Empiricus , L 66, p. 154 ; M 133 , p. 477, 480 ; 190 ; O 42, p. 835 ; 48 . Sextus le Pythagoricien, M 192. Sibyrios, satrape d’Arachosie, M 76, p. 369. Sidoine Apollinaire, L 34 ; M 12 ; N 49.

Silvanus, N 23. Simmias de Syracuse, M 142, p. 501 ; 0 27. Simon, cordonnier, M 164. Simonidès, M 63, p. 320. Simplicius, L 72, p. 169-170, 172-173 ; 89, p .210 ; M 63 , p. 320 ; 186; N 45 , p. 674 , 677 ; 55 , p. 699-700 ; O 45 , p. 851 ; 48. Sinistor (P. Fannius -), M 116, p. 452 . Sisinnius, évêque, M 63 , p. 320. Smicythos de Sypalèttos, M 174, p. 530. Socrate , L 61 ; 66 , p. 156; 67 ; 75 ; 86 ; 94; 103 ; M 4; 46 , p. 296 ; 51 ; 64; 69, p. 325 , 327-328 , 334, 341-342 , 345-347 ; 102 , p. 411 ; 116, p. 450 ; 117 ; 126 ; 136 ; 140 , p . 491 ; 151 , p. 508 ; 162 ; 198 ; N7; 10, p . 591 ; 17 , p. 647 ; 21 ; 66, p. 730 ; O 10, p. 762 ; 22; 23 ; 42 , p. 814, 827 ; 48 . Socrate , historien , M 138 . Socrate le Jeune, L 29. Solin, géographe, L 55 , p . 104 ; M 46 ,

p. 298 . Solon, un des sept Sages, L 60 ; M 18 ; 140 , P. 494 . Sopatros, M 63, p . 313-314. Sophocle , poète tragique , M 97 ;

103 ,

p. 429 ; 116, p. 450; N 30. Sophocle de Sounion, M 116, p. 446 . Soranos, médecin , O 40, p. 803 . Soranus (Q. Marcius Barea -), M 198. Sosicrate de Rhodes , L 36; M 190 ; N 10,

P. 592 . Sosigène, maître d'Alexandre d'Aphrodise, M 14 ; N 44 . Sosipatra, M 63 , p. 314 , 315 , 316. Sostratos Héraclès, L 66, p. 155 . Sotéricus, N 50, p. 687 . Sotion , auteur de Réfutations de Dioclès, N 43 . Sotion, maître de Sénèque , N 39. Sotion d'Alexandrie, M 142 , p. 501 ; N 10 , p. 589; 39; 48 .

903

Sozomène, historien ecclésiastique, M 138. Speusippe, L 21 ; 22 ; M 101 , p. 403 , 406 ; 116, p. 450 ; 117 ; 118 ; 179 ; 186 ; N 10, p. 592 . Speusippe d'Azénia, M 174, p. 530. Sphaïros de Borysthène, stoïcien , M 116, p. 451 ; 184 . Spintharos , grand -père d’Aristoxène de Tarente, L 18. Spinther (P. Lentulus -), N 20. Stace (P. Papinius Statius), L 64 ; 73 , p. 175 ; M 20 ; 69, p. 347 . Statianus (C. Calvisius -), L 66, p. 143 . Statius Proxumus, tribun , L 24. Statonice, mère de Nicolas de Damas, N 45 , p. 670 . Step'anos Siwnec'i , N 17 , p. 651 . Stésimbrote de Thasos, M 97 ; 151 , p. 508. Stilpon, M 116, p . 446 , 451 ; 142, p. 500; 156 ; 194 ; 205 ; N 24 ; 33 ; 0 27 ; 42 , p. 827 . Stobée, voir Jean Stobée. Strabon , M 76, p. 370; N 45 , p. 672 ; O 23 . Stratoclès de Rhodes, L 38 ; M 181 . Straton de Lampsaque, L 83 ; M 183 ; N 15 , p. 619 ; O 12.

Stratonice, sæur d'Ariarathès V , M 174 , p. 531 . Sittius, amiral de César, M 22. Suétone, biographe, L 64; 73 , p. 174 ; N 58 , p. 705 ; 0 30 . Al- Ṣūfi, 'Abd al -Raḥmān b. ' Um abū al Husayn, M 120 , p. 463. Sulla ( L. Cornelius -) , dictateur, L 62 ; 65 ; 74 ; M 21 ; 99, p. 396; 186 ; N 13 , p. 607; 15 , p . 619. Sulla ( P. Cornelius -), fils du dictateur, M21 .

Sulla (P. Cornelius), consul en 66a, M 22. Sulla (Sextius -), L 71 . Swift (Jonathan -), L 66 , p. 160 . Symmaque ( Q. Aurelius Symmachus ) , L 34 ; 61 ; M 9, p. 232 , 236; 46 , p. 294; 60 ; 64 ; N 16, p. 624 ; 38 ; 49. Synésius de Cyrène, M 34 ; N 55 , p. 701 ; 021 ; 34, p. 789, 791 . Syrianus, L 63 , p. 121 ; 89, p. 209 ; M 159 ; N 27,0 45, p. 848-850.

904

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

Tacite , L 34 ; 64; M 198 . Tagès , N 58 , p. 710 .

Tandasis , M 39, p. 275 . Tascius Victorianus , voir Victorianus (Tascius -). Tatien , apologète, M 151 , p. 509, 510. Taurus ( Calvenus - ) , platonicien , M 69 , p . 341 ; N 55 , p. 701 ; 66 , p. 726. Teisandros d'Aphidna, N 7 . Télaugès , fils de Pythagore, M 180 ; 202 .

Téléclès , académicien , L 11 .

Télès , M 76, p. 378 ; 142 , p. 500 ; 198 . Télesphoros, M 102 , p. 408. Térence , poète comique latin , L 12 , p . 77 ; M 102 , p . 411,416,418. Terentia, M 10. Tertullien, M 172 ; N 17 , p. 630 . Testa ( Trebatius -) , juriste, L 1 . Teucros de Carthage, L 28 . Tābit b. Qurra,M 120, p. 460; N 50, p. 687,

690 , 693 . Tāhir b. al -Husayn b . Mus'ab b .Ruzayq , Dū al - Yaminayn , N 50, p. 691. Thalès de Milet , L 60 ; 89 , p . 209 ; M 18 ; 140 , p . 488 , 493 ; N 17 , p . 636 ; O 10 , p. 766 . Théagène de Rhégium , M 151 , p . 509 , 512 .

Théagès , M 141 . Théano, femme de Pythagore , M 180 ; 202 . Théanor , L 104. Thémista , épicurienne , L 40 ; N 18 , p. 654 . Thémistius , M 39 , p . 277 ; 46, p . 297 ; 63 , p . 318 , 320 ; N 21 ; 45 , p. 678 ; 46 . Thémistocle , stoïcien , L 63, p. 119 ; M 97 ; N 10, p. 589. Théocrite de Chios , M 149. Théodas , médecin , L 88 ; M 133 , p . 478 . Théodecte de Phasélis , N 3 . Théodora , prêtresse , M 63 , p . 318 . Théodore , conjurateur, M 63 , p. 320. Théodore , élève d'Origène le Chrétien , O 42 , p. 810, 813 , 818. Théodore , grand -prêtre , M 63 , p. 318 , 320. Théodore , ingénieur , O 42 , p. 822 . Théodore , père de Mélanion d’lasos , M 81 . Théodore de Cyrène , dit l'Athée , L 97 ; M 198 .

Théodore de Gadara , rhéteur, M 129, p. 469. Théodore dit Cynulcus, M 209, P. 577-580.

Théodore Métochite, M 69, p. 346 . Théodore Prodromos, L 66, p. 159. Théodoret de Cyr, M 138 ; N 17 , p. 630, 636 ; 09, p. 756, 760. Théodoric, roi ostrogoth, M 46, p. 290. Théodose de Bithynie, M 120, p. 462. Théodose fer, empereur, M 70, p. 353, 356; N 49 ; 0 20. Théodose II, empereur, L 44; N 23 ; 0 44. Théodosius , dédicataire d'Avianus, M9, p. 230 . Théodosius , préfet du prétoire en Italie,

M 9, p. 231 . Théodote, platonicien, L 63, p. 119. Théodote , auteur d'un ouvrage sur la Phénicie , M 185 . Théognis, fille de Diodore Cronos, M 127. Théognoste d'Alexandrie, O 42, p. 822.

Théombrote, M 119 ; 129, p. 467 ; 142, P. 500 . Théomneste , peintre, M 179. Théomneste , académicien , N 26. Théon , sophiste , M 23a. Théon d'Alexandrie, M 42 ; 120, p. 460. Théon de Smyrne , M9, p . 239 ; 0 10, p. 764; 35, p. 793. Théophane de Mitylène, M 154. Théophile d'Alexandrie , 0 42, p. 818. Théophraste d'Érèse, H 153a; L 43 ; 83; 91 ; 97 ; M 76, p. 379 ; 85 ; 102 , p. 407-409, 411-412 , 417 ; 118 ; 123 ; 140, p. 489,497; 142 , p. 499-500 ; 149; 156 ; 184; 207; N 10, p. 587 ; 15, p. 617, 619; 45, p. 674, 676-678 ; O 16 ; N 42 ; 51 ; 58, p. 711 .

Théopompe de Chios , M 119 ; 149; 167; N 3. Théorus, peintre, L 43 . Théosthène , dédicataire de Macarius de Magnésie , M 2. Thessalos , astrologue, N 13 , p. 612, 614. Theudios de Magnésie, M 14. Thierry de Chartres, M 46, p. 302. Thomas, référendaire, M 107 .

INDEX DES NOMS PROPRES Thomas d'Aquin , M 9, p. 242 ; N 17 , p. 627 , 649. Thomasios, M 107 . Thrasamund, roi, M 46, p. 290 . Thrason Léon, frère de Léon Thrason de Stratonicée , L 37 .

Thrasybule, L 94 . Thrasydée, N 57 . Thrasylle de Mendès , M 186 ; N 13 , p. 614 ; 50 , p. 689 ; 66, p. 726 ; O 10, p. 762. Thrasymaque de Chalcédoine , L 94. Thrasys, L 11 . Threpta, servante de Théophraste , M 85 . Thucydide , historien , M 26 ; 76 , p . 374 ; N 46 .

905

Trajan, empereur, M 54 ; 72 ; 120, p. 457 . Trebatius, M 49 . Trocundès, général, M 35 . Trosius , M 39 , p. 276. Trygetius, élève d'Augustin , L 55 , p. 102.

Tryphon, stoïcien et platonicien , L 100. Tryphon, gouverneur de Pentapole , M 34 . Tubero , L 12 , p . 77 . Tucca (P. -), L 73 , p. 176. Tullia, L 65 . Tuscus (Clodius -) , L 89, p . 208 . Al -Tūsi , Nașir al - Din abū Ga'far Muḥam mad b. Muḥammad b. al -Hasan , M 120 , p. 458-459. Tzetzès, L 66, p. 159.

Thymaridas , L 104; M 46, p. 299. Thyrsos, M 143 .

Tibère , empereur, M 31 ; N 13 , p. 614 ; 25 ; O 50. Tiberius, père de T. Claudius Nero, N 22 . Timarque , fils de Praxitèle , M 102 , p. 408. Timarque d'Alexandrie, M 119 ; 129 , p. 467 . Timasagoras, N 34. Timée, astrologue, N 13 , p. 613 . Timée de Locres , M 77 . Timée de Tauroménium, L 85 ; M 179 ; 202 ; N 10, p. 587-588 , 594 ; 51 . Timocharis , M 120 , p. 464. Timocratès , frère de Métrodore de Lampsaque , L 40; M 152 . Timocratès d'Héraclée , rhéteur , L 50 ; M 198 . Timon de Phlionte , L 60 ; M 116 , p . 444 ; 116, p. 450 ; N 10, p. 594; 48 . Timothée , historien, N 51 . Timothée , roi, M 120, p. 460. Timothée d'Alexandrie , M 70 , p. 355 . Timothée ſer, Katholikos nestorien de Baghdad, N 17 , p . 651 . Timycha de Sparte, M 203 . Tisias , L 94 . Tissapherne , M 136 . Tite - Live ( T. Livius), historien , L 34 . Titus, empereur, M 198 ; O 42 , p . 834 . Torre ( Alfonso de la -) , M 46, p. 302 . Torres ( Francesco -), M 2.

Ulpien de Gaza, O 15 . Ulpien de Tyr (Domitius Ulpianus ) , M 209, p . 577 , 580. Vacca, commentateur de Lucain , L 64. Valdés ( Alfonso de -) , L 66 , p. 159 . Valens , empereur, M 63 , p . 314, 319 , 320 ; 70, p . 353 ; 0 40, p. 801 . Valentin , M 55 ; N 66 , p. 731 . Valentinien , empereur, M 63 , p. 319 ; O 40,

p. 801. Valentinien III , empereur, M 24. Valera (Juan de -), L 66, p. 160 . Valla ( Georges -), N 17 , p. 650. Varron ( M. Terentius Varro ) , L 2 ; 55 ,

p . 103-104 ; M 9, p. 242 ; 46, p. 291 , 295 296, 300 ; 70 , p. 361-362 ; 129, p. 470-472 , 474 ; 146 ; N 13 , p . 614 ; 20 ; 22 ; 58 , p. 707, 709; 65 , p. 721 ; 0 6 ; 30 . Varus, M 19, p. 248 . Vatinius ( P. -) , M 99 , p . 398 . Veranius (Quintus -) , dédicataire d'Onasan dros le tacticien , O 29 .

Verecundus, N 12, p. 596, 598 . Verres (C. -), M 26. Verrius Flaccus ( M. - ) , O 30 . Verus ( Lucius - ) , empereur, L 66 , p. 141 , 143 ; M 39 , p. 271-272 , 275 ; 71 ; 169. Vespasien , empereur, L 23 ; M 54 ; 198 ; O 42 , p. 834 .

906

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

Vettius Valens, N 13, p. 611 , 614.

Vicellius, L 89, p. 208. Victor (Aurelius -), M 39, p. 277. Victorianus ( Tascius -), L 34; N 49. Victorinus (Marius -), M 46 , p. 289 ; N 66 , p. 739 ; O 34, p. 789. Victorinus (Maximus -), M 46, p. 296. Villalón ( Cristóbal de -), L 66 , p. 159. Vindicianus , N 12, p. 596. Vipsanius Agrippa ( M. - ) , gendre d'Au guste, M 10; N 45, p. 671 . Virgile (P. Vergilius Maro ), L 2 ; 55 , p. 104 ; 64; 73 , p . 174; 90 ; M 9, p. 236 ; 9, p. 240 ; 10 ; 19, p. 250 ; 28 ; 99, p. 395 ; 146 ; 172 ; N 14; 58 , p. 707 ; 65 , p. 722 ; 0 50. Viriathus, chef lusitanien, L 12, p. 76. Vitellius, M 198 . Vives (Juan Luis -), L 66 , p. 159. Voltaire, L 66 , p. 160 . Volusianus, L 34. Vopiscus ( P. Manilius P. filius -), fils de P. Manilius Vopiscus, M 20.

Wieland (Christoph Martin -) , L 66 , p. 160. Xéniade de Corinthe, maître de Diogène de Sinope qu'il avait acheté comme esclave , M 129, p. 471 ; 190. Xéniade de Corinthe , rejetait le critère de la vérité, M 190 . Xénoclès, rhéteur, M 50. Xénocrate , M 97 ; 112 ; 116 , p. 446 ; 117 ; 142 , p . 499 ; 157 ; 179 ; 186 ; 207 ; N 16, p. 622 ; 66 , p. 731 , 733 ; 0 11 . Xénophane de Colophon , L 60 ; M 97 ; 190 ; N 45 , p. 673 ; 0 37 . Xénophon , M 69, p. 327 , 338 , 342-343 ; 108 ; 136; 160 ; 198 ; N 21 ; 24; 0 23 .

Xiphilin ( Jean -), O 34, p. 792. Al - Yazdi , Muḥammad Baqir Zayn *Abidin al- Yazdi, M 120, p. 459.

al

Zaleukos, L 104. Zamolxis, L 104 . Zenobi Acciaiuoli , M 69, p. 347. Zénobie, reine de Palmyre, L 63 , p. 120, 121 ; 0 8. Zénodore, M 132 . Zénodote , mathématicien , o 10 , p. 762 , 766 .

Zénon , empereur, M 35 ; 0 35 , p. 795 . Zénon d'Élée, L 51 ; M 97 ; N 24. Zénon de Chypre, O 40 , p. 800 . Zénon de Citium, M 39 , p. 280 ; 52 ; 116 , p. 450; 116, p. 453 ; 146; 174, p. 530 ; 209, p. 579-580 ; N 13 , p. 613 ; 17 , p. 638 ; 21 ; 39; 0 42, p. 833 . Zénon de Sidon, L 73, p. 183 ; M 181 . Zénon de Vérone, L 7, p. 71 . Zéthos, M 3 . Zopyre, M 129, p. 472. Zopyrus, médecin, O 40 , p. 803. Zoroastre, N 13, p. 605; 0 34 , p. 792. Zosime, historien , L 89, p. 210; M 147 . Zosime, N 27. Zosime de Panopolis, alchimiste, O 16. Zosime /Sotime, platonicien, N 55 , p. 699 . Zostrien , N 66 , p. 739. Zoticus , préfet du prétoire d'Orient, L 89, p. 206-207

Index des mots - vedettes figurant dans les titres d'ouvrages des philosophes

Cet index devrait permettre de retrouver d'après leurs mots principaux les ouvrages attri bués aux philosophes qui ont bénéficié d'une notice dans le quatrième tome de ce dictionnaire . Un même mot peut renvoyer à plus d'un titre dans la même notice ou la même section de notice . Comme les notices ne rapportent pas toujours en grec le titre des ouvrages, on a complété l'index grec par une liste de mots français ou latins, tels qu'ils apparaissent dans la notice . Tous les titres attribués aux auteurs ne sont pas nécessairement des titres d'ouvrages philosophiques. Les commentaires, traductions et paraphrases sont regroupés sous le nom du philosophe qui fait l'objet de ces travaux érudits. Lorsque la ste des æuvres comporte une numérotation, on renvoie à ces numéros. Pour les notices longues, on renvoie également à la page où le titre apparaît.

Αιγύπτιος Ν 13 (bis). 'Ακαδημαϊκός Ν 66 , p. 727. 'Αμέλιος L63 (2), L 63 (6). 'Αντίμαχος L 63 (22). 'Απολλώνιος M 187. 'Αριστοτέλης M 134 ; Ν 31: 45 , p. 674 (bis). 'Ασσύριος Ν 13. " Ατταλος Ν 10. 'Αττικός L 63 (21 ). Βησαίος L 33 . Γεντιλιανός L63 (2). Γοργίας Μ 152 ( 13 ).

Δημόκριτος M 152 ( 11 ). Διογένης Ο9. " Ελλην Ν 13 . Ελληνικός Ν 10. Επίκουρος Μ129; 152 ( 5). Ευθύφρων M 152 ( 14 ) . “Ηρακλέων L 63 (22). Ινδικός M76. Ιωνικός Μ 149 . Καίσαρ Ν 45 , p. 672.

Μενώνειος M 134 . ΝεχεψώN 13. Νικόστρατος M160 . 'Όδείναθος L 63 (24). “Ομηρικός L 63 ( 14). " Ομηρος L63 ( 15 ), 63 (18), 63 ( 19) ; Μ 69 ( 17), 69 (26); Μ 151 ; O 9. Ξενοφών Μ 160 . Πετόσιρις Ν 13 (bis). Πλάτων L 63 ( 7 ) ; 75 ; M 69 ( 11 ), 69 ( 17) ; 152 ( 13), 152 ( 14); 160; Ν 66 , p. 727 (bis). Πλωτίνος L 63 (2). Πυθαγόρειος Ν 50 (7 ). Πυθαγορικός Ν 10. Σεβαστός Ν 45, p. 672 . Στωϊκός L 63 ( 8). Σωκράτης Μ 69 ( 3) , 69 ( 8 ), 69 (9 ) , 69 ( 18 ), 69 (19); M117.

Τευθραντικός L 33. Τιμοκράτης Μ 152 ( 3 ). Τρωικός Μ 149 . Τυανεύς Μ 187. Φιλόστρατος M 160.

Κένταυρος L91 ( 1 ). Κορνούτος L 3.

Κράτης Ο9 . Κυζικηνός Ν 10. Μένανδρος L 91 ( 3 ).

αγαθός M 69 (4), 69 ( 15), 69 ( 16), 69 (22), 69 (25 ) , 69 (30), 69 (31 ), 69 (32), 69 (38), 69 (39 [bis ] ) , 69 (40 [bis] ), 69 (41 ) ; 198 (XVII) ; 152 (15); N 66 , p. 727 .

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DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

άγαλμα M 69 ( 2 ) . αγωγή N 45 , p. 672 ( bis). αδικείν M 69 (12). αίρεσις M 69 ( 26 ) ; N 18 . αίσθησις Μ 152 (2 ).

ακρόασις Ν 51 . άλεκτρυών L 75. άλυπος M 69 (28). άλυτος M 63.

αναλογ α Ο 26. ανάμνησις M 69 (10). ανήρ Ν 10. άνθρωπος M 198 (II); Ν 17 . ανταδικείν M 69 ( 12 ).

αντ θεσις M 63. αντ ρρησις L 63 ( 8 ) . απόδειξις Μ 198 ( Ι ). απολογείν M 69 (3 ). απομνημόνευμα L91 ( 2) ; Μ 187. απόρημα L63 ( 14 ) .

απόρρητος Ν 66 , p. 727 . απόφθεγμα L 91 ( 2 ) . αρέσκειν Μ 186. αρετή M 69 ( 27 ), 69 ( 37 ) ; 141; 198 ( II ).

αριθμητικός Ν 50 (1); O 26. αριθμός M 63 ; Μ 77 ; Ν 66, p. 727 . αρμόζειν Μ 69 (1 ). άρρωστία M 152 ( 5 ) . αρχή L 63 ( 1 ) ; Ο 42 . άσκησις Μ 198 ( VI ). αφθαρσία Ν 66, p. 727 . αφροδίσιος Μ 198 ( XII ) .

αστρολογείν Ν 13. αστρονομικός Ν 13 . αυτοφωνία 09 . βασιλεύς Μ 198 ( VIII ) ; N 13. βέβαιος M 69 ( 30 ), 69 ( 31 ) , 69 ( 32 ) . βιβλίον Ν 13 . βίος L63 (4) ; M 69 ( 15 ), 69 ( 16 ), 69 ( 36 ) , Ν 45 , p . 671 , 672. γάμος Μ 198 ( XIII A ), 198 ( XIII B ), 198 ( XIV ). γενητός M 55 . γεωμετρικός Ν 50 ( 3 ) .

γεωργείν M 69 (23). γεωργός M 69 (24). γήρως Μ 198 (XVII ). γόης Ο9 . γονεύς Μ 198 ( XVI). γονή Μ129. γραμματικός L63 ( 17 ); M 129. γράφειν Μ 198 ( X ).

γραφή Μ 198 ( X ). γυνή Μ 198 (ΙΙΙ ). δαιμόνιον M 69 ( 8 ), 69 (9 ). δείν M 69 ( 5 ); Μ 198 ( 1 ). δειπνητικός L91 (5 ).

διαδοχή Ν 39 . διαθήκη M 129. διάκοσμος L51 . διαλαμβάνειν Μ 69 (4). διαλεκτικός Μ 152 ( 6). διάλεξις L 3. διάστασις Ν 66, p. 727.

διατάττειν Ν 13 . δικαιοσύνη L 63 ( 7).

δόγμα Ν 50 (7). δόξα L 63 ( 8) ; M 89. εγκύκλιος M 69 (37). εγχειρ διον 50 ( 2). έθος Ν 45 , p . 673 ; Μ 198 (V ) . εικάς M 129. εισαγωγή N 50 ( 1 ), 50( 3). έκδοσις L63 (21 ). εκλογή L3. εμπόδιος Μ 198 ( XIV ). έν Μ 198 .

ένδοξος Ν 10. εξηγείσθαι L 63 ( 17) . επιλογή N 13. επιστήμη M 69 (6). επιστολή L 63 (6); L91 (5 ) ; M 129.

έποψ N 66, p. 727 . έργον M 69 ( 25 ) . έρως M 69 ( 19), 69 (21 ). ερωτικός Μ 69 ( 18 ), 69 ( 20). ευγένεια M 152 ( 12) . ευφροσύνη Μ 69 (22).

INDEX DES TITRES εύχεσθαι M 69 (5 ) . ευχή Ο 42 . εφ ' ημίν Μ 69 ( 13 ). εφόδιον Μ 198 ( XVII ) . ηδονή Μ 69 (30 ), 69 ( 31 ), 69 ( 32). ηθικός Ν 46; 51 . θείος M 69 ( 38 ) ; O 22 . θεός M 69 ( 2 ) , 69 ( 4 ) , 69 ( 11 ) , 69 (41 ) ; M 129; Ν 13; 45 , p. 673 ; O 22 . θεωρητικός Μ 69 ( 15 ) , 69 ( 16 ) . θεωρ αN 45 , p. 674. θρησκεύειν Μ 129. θυγάτηρ Μ 198 ( IV ). ιατρικός M 134 (bis ). ιατρός M 152 (1 ). ιδέα L63 (5 ). ιδρύειν Μ 69 ( 2 ). ιερός L 33 ; Ν 13 . ιστορ αL3; 63 ( 17 ) ; N 10; 45 . ιστορικός L63 ( 17 ) ; Μ 207 . ισχυρός Μ 198 ( V ). κακα M 55. κακός Μ 69 (41 ) ; Μ 198 (ΙΧ). καλός N 45 , p. 673 . καλώς M 69 ( 3 ) , 69 ( 17 ). καταρχή M 63 . καταφρονείν Μ 198 (VII). κεφάλαιον Μ 198 ( XIII A ) , 198 ( XIII Β ) ; Μ 207 .

κόλαξ Μ 69 ( 14). κόμμα L 3 . κομψεύειν Μ129. κόσμος L 58 . κουρά M 198 (XXI). κύκλος Ν 13 .

μάθημα M 69 (37). μαθηματικός Μ 129. μάθησις M 69 (10). μαθητής Ν 31. μαντικός Μ 69 (13). μεγαλοψυχία M 152 ( 4). μέγας M 69 ( 39 ) , 69 (40). μέθη L 83 . μελέτη N 47 . μετά τα φυσικά Ν 45 , p. 674. μεταβολή M 152 ( 9 ). μοίρα M 69 ( 38 ). μυθικός Ν 10. μυστήριον Ν 13. νέκυια Μ129. νόμος Ο 6. νόσημα M 69 ( 7 ) . νούς L51. ομιλία L 63 ( 13 ) . όμοιος M 207. όρα Ν 10. όργανον Ν 13. ορμή L 63 ( 3 ) ; M 190 . όψωνητικός L91 (4 ). παιδεία M 198 ( IV ). παιδεύειν Μ 198 . παλινωδία L 63 ( 5). παραιτείσθαι M 69 ( 17 ) . παραπλησίως Μ 198 ( IV ). παρασκευάζειν Μ 69 ( 35 ). πας M 69 ( 1 ) , 69 ( 22 ) ; 198 ( XV ) , 198 ( XVI); N 45 , p. 673; Ο 6. πατήρ Ν 51. πείθειν Μ 198 ( XVI ). περ οδος L 3 .

κυνικός Μ 69 ( 36). κυνισμός Ο9 . κύων Ο 9. κώλον L 3 .

περίστασις M 69 ( 34 ) . πλούτος M 152 ( 10 ) . ποιείν M 69 ( 3 ), 69 ( 41 ) . ποιητής M 69 (4 ) .

λέξις L63 ( 19 ) , 63 ( 22 ) , 63 ( 21 ) .

πόλεμος L 33 . πόλις M 69 (23); Ν 10. πολιτεία M 69 (17); Ο 9 . πολύς Μ 198 ( Ι ). πόνος Μ 198 ( VII ). πορεία M 152 ( 8 ) .

λόγος M 69 ( 1 ) , 69 ( 22 [bis ]) , 69 ( 25 ) ; Μ 198 ( V ).

λύσις L63 ( 15 ) . λυσιτελής M 69 ( 23 ) , 69 ( 24 ) . μάγος M 187.

909

910

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

πόρος Μ 198 ( ΧΙ ) . πράγμα M 198 ( Ι ). πραγματε α Μ 186 . πρακτικός Μ 69 ( 15 [ bis ] ) , 69 (16); N 45 , p. 673. πρόβλημα L63 ( 15 ).

προγύμνασμα Ν 47 . προηγείσθαι M 69 ( 36 ) . προπολεμείν M 69 ( 23 [ bis ) , 69 (24).

προσήκειν Μ 198 ( ΧΙ). πρόσωπον M 129. προτρεπτικός Ν 46 . ρητορικός L 3 , 63 ( 23 ) ; N 47 . ρήτωρ Μ 152 ( 15 ) . σημαινείν L 63 ( 19) . σκέπη Μ 198 ( ΧΙ ). σκευή M 198 ( XX ). σοφία M 152 ( 8). σοφιστής M152 (7 ). σοφός Ο 27 . στοιχείον L 32 . στοιχείον (κατά - ) L 3 . συμβάλλειν Μ 69 ( 37 ).

σύμφωνος M 69 (25). συναγωγή M 134; Ν 45 , p. 673 ; 50 ( 7). σφαιρικός Μ 120.

σώμα M 69 ( 7 ). τέκνον M 198 ( XV ). τελετή Ν 10. τέλος L 63 (2 ) ; M 69 (29) , 69 (33 ) . τέχνη L 63 ( 23 ) ; 91 (4) ; N 47; M 69 (27 ) . τόπος N 66 , p. 727 . τρέφειν Μ 198 ( XV ) . τρ πους Ν 8 .

τροφή Μ 198 ( XVIII ) . ύβρις Μ 198 (X ) . υιός Μ 198 (IV). ύλη M 55 (bis).

φιλοσοφία M 69 (29) , 69 ( 33 ) ; N 45 , p. 674; Ο 9. φιλόσοφος L63 ( 18) ; M 69 ( 1 ), 69 (4), 69 (22); 187; 198 ( X), 198 (XI ) ; Ν 39.

φυγή M 198 ( ΙΧ). φυσικός Μ 129: 165 ; Ν 51 . φύσιν (κατά - ) L63 (4). φυσιολογία M 152 (15).

φύσις L 58 ; Μ 97 ; 149; Ν 17; Ο 6. φυτόν 45 , p. 678.

φώρα 09. χαλεπός M 69 ( 7) . χαρακτήρ Μ 160 . χρηματίζειν O 27 . χρήσθαι Μ 198 (Ι). χρηστήριον Ο9. χρονικός L 63 (26). χωρίζειν Μ 69 ( 14). ψυχή L 63 (8); M 69 (7) ; N 66, p. 727. ωφελείσθαι M 69 (34 ).

Apollo L 2. Asclepiades L 7. Clarius L 2 . Etrusca L 2. Iudaeus L7. Mercurii M 46 . Octavius M 172.

| animalis L 2. animus L 7 . avis L 7. carmen L 7.

deus L 2; 7 (bis); N 58. disciplina L 2 . divinus L 7.

dogma N 49. dominus L 7.

υπάρχειν Μ 55 . υπόθεσις M 69 ( 1 ).

epitome L 7. fasti L 2.

φιλαρχαίος L63 ( 16). φιλόλογος L 63 ( 13 ) . φίλος M 69 ( 14 ), 69 ( 35 ). φιλοσοφείν Μ 198 ( III ), 198 ( VIII ) , 198 ( XIV ).

fatum M 172. grammaticus L 7. haeresis L 7. harmonica N 50 (4). hodoeporicum L 7.

INDEX DES TITRES institutio L 7. ira L 7 . magistratus L 89. mathematicus M 172 . mens L 89. mors L 7. motus L 7 .

natura L 73 .

nuptiae M 46 . opificium L 7. oraculum L 2 . ostentum L 89. passio L 7. persecutor L 7. philologia M 46.

911

Hippys - EixeAixaÌ Tpágelç, epitome M 201. Paul d'Alexandrie - commentaire anonyme O 17 .

Phrygie M 159 . Philostrate Vie d'Apollonius de Tyane, traduction N 49. Platon - Alcibiade, commentaire O 17 .

– Euthyphron, ouvrage contre l’- M 152 ( 14). - Gorgias, commentaire 0 17 ; ouvrage contre le - M 152 ( 13 ). - Parménide , commentaire L 63 ( 11 ) ; M 42.

philosophus N 49. phoenix L 7 . res L 73 . sphaera N 58 .

symposium L 7 . vestigium N 49. Apollonius N 49. Arcésilas M 129. Aristote L 72 ; N 45 , p. 678 . - Catégories, commentaire M63 ; commentaire avec Prolegomènes 0 17 : ouvrage contre les - L 72 .

- Phédon , commentaire L 63 ( 10) ; O 17 ; 26. - Phèdre , commentaire L 63 ( 12). - Philèbe, commentaire M 42.

– République, commentaire M 17 ; commentaire sur le mythe d’Er M 67 ; N 66 ; monobiblos sur deux problèmes du mythe d’Er N 6 . - Timée, commentaire L 63 (9). Proclus M 42. Ptolémée - Almageste, commentaire M 42. Pythagore N 50 (5 ). Saturnales M9. Théon d'Alexandrie

- De anima, commentaire M 42. – De interpretatione, commentaire 0 17 . - Météorologiques, commentaire 0 17. – Petit Commentaire, commentaire M 42 . - Premiers Analytiques, commentaire M Tyane N 49. 63 ; livre II, commentaire M 42. Zosime de Panopolis Cicéron - Kar' vepyetav, commentaire 0 16. – République, Songe de Scipion, commen taire M9. algébrique M 120. Diogène M 129. âme N 45 , p. 678 . Etna L 68 . arithmétique N 50 (6) . Euclide astronomica M 19 . - Data, commentaire M 42. banquet M 129 . Héphestion - Manuel de métrique, commentaire L 63 bonheur M 42 (bis). catégories L 72. (20 ) cercle M 120. Hippocrate de Cos - Περί τόπων των κατά άνθρωπον , commentaire (’ E &nyntixóc ) L 88 .

commentaire L 2. corde M 120.

912

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

corps M 120. coucher M 120 . courbe M 120. créateur ( 41 . démon O 41 . dieu N 66 . distribution M 120. élements M 120 . éthique N 45 , p. 679. géométrie M 120 . intellect N 45, p. 678 intelligible N 45 , p. 678 introduction N 45 , p. 679. lettres L 7 ; 63 (27). livre M 120. matière N 66 .

mixte M 120. nombre M 186. philosophie N 45 , p. 678 . poids M 120. protreptique M 190 . réfutation N 45, p. 678 . résumé N 45, p. 678 . roi O 41 . science M 120. signe M 120. théologie N 50 (6 ) triangle M 120 . vente M 129. vie N 50 (5 ). zodiacal M 120.

Liste des notices du tome IV LETTRE L

1 LABEO ( M. ANTISTIUS -) 2 LABEO (CORNELIUS -) 3 LACHARÈS D'ATHÈNES 4 LACON DE SAMOS 5 LACRATÈS DE MÉTAPONTE 6 LACRITOS DE MÉTAPONTE 7 LACTANCE 8 LACYDAS DE MÉTAPONTE 9 LACYDÈS 10 LACYDÈS 11 LACYDÈS DE CYRÈNE 12 LAELIUS SAPIENS (C. -) 13 LAETUS (OFELLIUS -) 14 LAMISCUS DE TARENTE 15 LAMPON 16 LAMPRIAS D'ARGOS 17 LAMPRIAS DE CHÉRONÉE 18 LAMPROS D'ÉRYTHRÉE 19 LAODAMAS 20 LAPHAON DE MÉTAPONTE 21 LASTHÉNEIA D'ARCADIE 22 LASTHÉNEIA DE MANTINÉE 23 LASTHÉNÈS DE BITHYNIE 24 25 26 27 28 29 30 31. 32

LATERANUS (Q. PLAUTIUS -) LÉANAX DE SYBARIS LÉCYTHION LEITÈ ( AURELIA -) LÉOCRITOS DE CARTHAGE LÉODAMAS DE THASOS LÉON LÉON LÉON 33 LÉON DE BYZANCE 33a LÉON DE MÉTAPONTE 34 LÉON DE NARBONNE 35 LÉON DE NICOPOLIS 36 LÉON DE PHLIONTE 37 LÉON DE STRATONICÉE 38 LÉONIDÈS DE RHODES 39 LÉONTEUS DE CYRÈNE 40 LÉONTEUS DE LAMPSAQUE 41 LÉONTEUS DE TARENTE 42 LÉONTICHUS

59 60 64 65 65 65 65 71 71 74 74 75 79 79 80 80 80 81 81 81 81 82 83 83 84 84 84 85 85 86 86 86 86 87 87 90 90 91 91 91 92 92 92

43 44 45 46 47 48 49

LÉONTION D'ATHÈNES LÉONTIUS LÉOPHANÈS LÉOPHRON DE CROTONE LÉPIDUS D’AMASTRÉE LEPTINÈS LEPTINÈS DE SYRACUSE

50 51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 61 62 63 64 65 66 67 68 69 70 71 72 73 74 75 76 77 78

LESBONAX DE MYTILÈNE LEUCIPPE LIBANIUS LIBANIUS LIBERALIS (AEBUTIUS -) LICENTIUS DE THAGASTE LICINUS LICYMNIOS DE CHIOS LINUS DE THÈBES LIVIUS (TITUS) LOBON D'ARGOS LONGINIANUS LONGINUS (C. CASSIUS --) LONGINUS (CASSIUS - ) LUCANUS (M. ANNAEUS ) LUCCEIUS Q. f. (L.-) LUCIEN DE SAMOSATE LUCILIUS (C. -) LUCILIUS IUNIOR (GAIUS -) LUCIUS LUCIUS LUCIUS LUCIUS LUCRETIUS CARUS (T. -) LUCULLUS ( LUCIUS LICINUS --) LUPERCUS DE BÉRYTE LUPUS LUPUS (P. CORNELIUS -) DE NICOPOLIS LURIUS CAMINUS

79 80 81 82 83 84

LYCANDROS DE NICÉE LYCOMÈDE LYCON LYCON LYCON D'ALEXANDRIE LYCON DE BITHYNIE

93 93 94 95 95 96 96 96 97 98 100 100 101 105 105 107 107 111 113 113 116 125 130 131 160 163 165 166 166 167 174 191 194 194 195 195 195 195 196 197 197 200

914

1

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

85 LYCON D'IASOS, OU DE TARENTE 85a LYCON DE NICÉE 86 LYCOPHRON 87 LYCOPHRON 88 LYCOS DE NAPLES 89 LYDUS ( IOHANNES -) 90 LYNCEUS 91 LYNCEUS DE SAMOS 92 LYRAMNOS DU PONT 93 LYSIADÈS DE CATANE 94 LYSIAS

200 203 203 205 205 205 210 210 212 212 212

95 96 97 98 99 100 101 102 103 104

LYSIAS DE TARSE LYSIBIOS DE TARENTE LYSIMAQUE LYSIMAQUE LYSIMAQUE LYSIMAQUE LYSIMAQUE LYSIS LYSIS D'AIXONÉ LYSIS DE TARENTE

214 214 214 215 215 215 216 216 217 218

LETTREM 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16

MAL MACARIUS DE MAGNÉSIE MACEDO MACEDO (C. CALPURNIUS COLLEGA -) MACEDONIUS MACÉDONIUS DE CYR

MAC( H )ARIUS MACRINE MACROBIUS MAECENAS (GAIUS CILNIUS -) MAGNILLA D'APOLLONIA MAGNUS D'APOLLONIA MAGNUS DE NARBONNE MAGNUS LE GÉOMÈTRE MALIÓN DE DARDANOS MAMMARION IV - III 17 MANAICHMOS D'ALOPÉCONNÈSE 18 MANDROLYTOS DE PRIÈNE 19 MANILIUS ( M. -) 20 MANILIUS VOPISCUS ( P. -) 21 MANLIUS TORQUATUS ( L. -) 22 MANLIUS TORQUATUS ( L. -) 23 MARAS DE BÉROÉ 23a MARCELLA 24 MARCELLINUS 25 MARCELLINUS (COELIUS -) 26 MARCELLUS (MARCUS CLAUDIUS -) 27 MARCELLUS ( MARCUS CLAUDIUS -) 28 MARCELLUS ( MARCUS CLAUDIUS -) 29 MARCELLUS DE DAMAS 30 MARCELLUS ORRONTIUS 31 MARCIA 32 MARCIA

221 221 224 225 225 225 226 226 227 242 244 244 244 245 245 246 246 248 248 254 255 256 257 257 258 261 261 261 263 264 264 265 266

33 34 35 36 37 38 39

40

MARCIANUS MARCIANUS MARCIANUS MARCIUS D II MARCIUS LE SAMNITE MARCOMIR MARCUS ANNIUS VERUS

( MARC AURÈLE) MARCUS DE BYZANCE ( MEMMIUS -) MARDONIOS MARINUS DE NÉAPOLIS

266 267 267 268 268 268

269 281 282 282 284 285 286 288 302

41 42 43 44 45 46 47 48

MARIUS ( M.-) MARSIPOS OU MANIPPOS MARTIANOS MARTIANUS CAPELLA MASSALÈNOS MATINIANUS DE NICOMÉDIE

49 50 51 52

MATIUS (G.-) MATRÉAS D'ALEXANDRIE MATRIS MATRIS DE THÈBES ou D'ATHÈNES

53 54

MATRON MAURICUS ( IUNIUS RUSTICUS -)

55 56 57 58

MAXIME MAXIME MAXIME MAXIME MAXIME MAXIME MAXIME D'ANTIOCHE (M ATILIUS -) 312 313 MAXIME D'ÉGÉE 313 MAXIME (D'ÉPHÈSE ) 2 MAXIME D'ÉPIRE OU DE BYZANCE 32

59 60

61 62 63 64 65

303 303 305 305 305 308 308 309 311 312 312 312 312

MAXIME DE GORTYNE (T. FLAVIUS - ) 323

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES 66 67 68 69 70 71 72 73 74 75 76 77. 78 79 80 81 82 83 84 85 86 87 88 89 90 91. 92 93 94 95

MAXIME DE LYCIE MAXIME DE NICÉE MAXIME DE TYANE MAXIME DE TYR MAXIME HÉRON D'ALEXANDRIE MAXIMUS (CLAUDIUS -) MAXIMUS ( QUINCTILIUS -) MAXIMUS ( T. FLAVIUS) MAXIMINUS MÉDIUS MÉGASTHÈNE MÉGILLOS DE SPARTE MÉGILLOS DE SPARTE MÉGISTIAS DE MÉTAPONTE MÉGISTIAS DE SMYRNE MÉLANION D'IASOS MÉLANIPPIDÈS DE TARENTE MÉLANIPPOS DE CYRÈNE MÉLANTAS MÉLANTÈS MÉLANTHIOS ([M ]ÉLANTHIOS) MÉLANTHIOS DE RHODES MÉLÉAGRE MÉLÉAGRE MÉLÉAGRE DE GADARA MÉLÉAGRE DE SÉLEUCIE MÉLÉSIAS DE MÉTAPONTE MÉLÈSIPPÈ MÉLÈSIPPOS MÉLISSA DE SAMOS

96 97 98 99 100 101 102 103 104

MÉLISSOS (MÉLISTOS) D'EUBÉE MÉLISSOS DE SAMOS MÉLITON DE SARDES MEMMIUS (CAIUS -) MEMNON MÉNAICHMOS MÉNANDRE SENTENCES DE MÉNANDRE MÉNANDRE dit DRUMOS

105 106 107 108 109 110 111 112 113

MÉNANDRE LE RHÉTEUR MÉNANDROS ( T. FLAVIUS -) MÉNAS MÉNÉCÉE MÉNÉCLÈS MÉNÉCRATÈS MÉNÉCRATÈS MÉNÉCRATÈS D'ÉLAEA MÉNÉCRATÈS D'ÉPHÈSE

323 323 324 324 348 363 365 366 366 366 367 380 380 380 381 381 381 381 382 382 383 383 384 384 384 388 388 388 389 390 391 391 393 393 400 401 407 419 432 433 438 439 440 440 440 440 442 443

114 115 116 117 118 119 120 121 122 123 124 125 126 127 128 129 130 131 132

MÉNÉCRATÈS DE DALDIS MÉNÉCRATÈS DE MYTILÈNE MÉNÉDÈME D'ÉRÉTRIE MÉNÉDÈME DE PYRRHA MÉNÉDÈME DE RHODES MÉNÉDÈME LE CYNIQUE MÉNÉLAOS D'ALEXANDRIE MÉNÉLAOS D'ANAIA MÉNÉPHYLOS MÉNESTOR DE SYBARIS MÉNÉSTRATOS MÉNESTRATOS MÉNEXÈNE DE PÉANÉE MÉNEXÉNÈ MÈNIOS D'APOLLONIA MÉNIPPE DE GADARA MÉNIPPE DE LYCIE MENNÉAS MÉNODORE

133 134 135 136 137 138 139 140

MÉNODOTE DE NICOMÉDIE MÉNON MÉNON DE CROTONE MÉNON DE PHARSALE MENTOR DE BITHYNIE MÉROPIUS DE TYR METILIUS NEPOS (P. -) MÉTON DE LEUCONOÉ

141 MÉTOPOS DE SYBARIS OU DE MÉTAPONTE 142 MÉTROCLES DE MARONÉE 143 MÉTRODORE 144 MÉTRODORE 145 MÉTRODORE 146 MÉTRODORE 147 MÉTRODORE 148 MÉTRODORE ( D'APAJMÉE 149 MÉTRODORE DE CHIOS 150 MÉTRODORE DE CYZIQUE 151 MÉTRODORE DE LAMPSAQUE 152 MÉTRODORE DE LAMPSAQUE 153 MÉTRODORE DE PITANE 154 MÉTRODORE DE SCEPSIS 155 MÉTRODORE DE STRATONICÉE 156 MÉTRODORE DIT LE THÉORICIEN 157 MÉTRÔN 158 MÉTRONAX 159 MÉTROPHANE D'EUCARPIA 160 MÉTROPHANE DE LÉBADÉE

915

443 443 443 454 454 455 456 464 464 464 465 466 466 466 467 467 475 475 475 476 482 484 484 485 486 486 487 498 499 502 503 503 504 505 506 506 508 508 514 517 517 518 518 519 519 519 519

916

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

161 MÉTROPHANE ( AELIUS - ) DE SPARTE 162 MICCOS 163 MICHEL D'ÉPHÈSE 164 MIKYLOS 165 MILON 166 MILON DE CROTONE 167 168 169 170 171 172 173 174

520 520 520 520 522 522 523 MILTAS DE THESSALIE MILTIADE 523 MILTIADE 523 MILTIADE DE CARTHAGE 524 MIMNOMACHOS DE TARENTE 525 525 MINUCIUS FELIX 528 MITHRÈS LE SYRIEN MITHRIDATE (ARIARATHÈS V EUSÉBÈS 529 PHILOPATOR )

175 176 177 178 179

MNASAGORAS D'ALEXANDRIE MNASÉAS DE TYR MNASILAOS MNASO MNASON DE PHOCIS

180 181 182 183 184 185

MNÉSARQUE MNÉSARQUE D'ATHÈNES MNÉSIBOULOS DE RHÉGIUM MNÉSIGÉNÈS MNÉSISTRATE DE THASOS MÔCHOS DE SIDON

535 535 536 536 536 538 538 542 542 542 543

186 187 188 189 190 191 192 193 194 195

MODÉRATUS DE GADÈS MOIRAGÉNÈS MOIRIS MONIME MONIME DE SYRACUSE MOSCHION MOSCHION MOSCHION DE MALLOS MOSCHOS D'ÉLIS MOSPOS DE CIRTA

196 197 198 199

MUMMIUS ( SPURIUS -) MUSONIUS MUSONIUS RUFUS (C. -) MUSONIUS DE TYR

200 201 202 203 204

MYDRON ( ?) MYÈS DE PAESTUM MYIA RE 2 MYLLIAS DE CROTONE MYONIDÈS

205 206 207 208 209

MYRMEX MYRO DE RHODES MYRÔNIANOS D'AMASTRÉE MYROPNOUS MYRTILUS DE THESSALIE

210 MYS

1

545 548 549 549 549 553 553 554 554 554 554 555 555 572 572 573 573 574 575 575 575 576 576 577 581

LETTREN

NASON 1 NASTAS DE CAULONIE 2 NAUCRATÈS D'ÉRYTHRÉE 3 NAUCRATÈS LE SAGE 4 NAUCYDÈS 5 NAUMACHIOS D'ÉPIRE 6 NAUSICYDÈS DE CHOLARGES 7 NAUSIPHANE DE TÉOS 8 NAUSITHOOS DE TYRRHÉNIE 9 10 NÉANTHE DE CYZIQUE 11 NÉARQUE DE TARENTE 12 NÉBRIDIUS 13 NÉCHEPSO-PÉTOSIRIS 14 NECTARIUS 15 NÉLEUS DE SCEPSIS 16 NÈMERTIOS 17 NÉMÉSIUS D'ÉMÈSE 18 NÉOCLÈS DE GARGETTOS 19 NÉOCRITOS D'ATHÈNES

584

20

585 585 585 585 586 586

21 22 23 24 25 26 27 28 29

587 588

NEPOS (CORNELIUS -) NÉRINTHOS NÉRON NERVAS NESSAS DE CHIOS NESTOR DE TARSE NESTOR DE TARSE NESTORIUS NESTORIUS NICAGORAS (IUNIUS -) D'ATHÈNES NICAGORAS DE CHYPRE NICANDRE D'ALEXANDRIE

589 597

30

597 603 617 619

31 32 33 34

NICANOR NICARÉTÈ DE MÉGARE NICASICRATÈS DE RHODES

622

35 36

NICÉRATOS NICÉTÈS (IULIUS -) DE BITHYNION

37 38

NICIAS NICIAS

627 656 656

656 659 659 660 660 662 662 663 664 664 665 666 666 666

666 667 668 668 668

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES

39

40 41 42 43 44 45

NICIAS DE NICÉE NICIDION NICION NICIPPOS NICOLAS NICOLAS NICOLAS DE DAMAS

668 669 670 670 670 671 671

46 47 48 49 50 51. 52 53 54

NICOLAS « DE LAODICÉE » (PSEUDO-) NICOLAS DE MYRE NICOLOCHOS DE RHODES NICOMACHUS FLAVIANUS ( VIRIUS -) NICOMAQUE DE GÉRASA NICOMAQUE DE STAGIRE NICON NICOSTRATOS NICOSTRATOS D'ALEXANDRIE

682 685 686 686 688 696 698 700 700

55 56 57 58 59 60 61 62 63 64 65 66 67 68 69 70

917

NICOSTRATOS D'ATHÈNES NICOTÉLÈS DE CYRÈNE NICOTÉLÈS DE CYRÈNE NIGIDIUS FIGULUS ( PUBLIUS -) NIGRINUS NIGROS DE CHÉRONÉE NILUS NILUS NINON DE CROTONE NOÈTOS NONIUS MARCELLUS NUMÉNIUS D'APAMÉE NUMA POMPILIUS NYMPHIOS NYMPHIS NYSIOS LE SAMNITE

701 703 704 705 714 719 719 719 721 721 721 726 742 743 744 744

ONÈTOR ONÈTOR ONÈTOR ONOSANDROS OPILLUS ( AURELIUS -) OPPIA ( AURELIA -) DE SPARTE OPSIMOS DE RHÉGIUM OPTIMOS LE PHILOSOPHE ORACLES CHALDAIQUES ORACLES PHILOSOPHIQUES ORATA ( C. SERGIUS -) ORESTADAS DE MÉTAPONTE ORGIAS ORIBASE ORIBASE DE PERGAME ORIGÈNE LE PLATONICIEN ORIGÈNE D'ALEXANDRIE ORION ORION D'ALEXANDRIE ORPHÉE, ORPHISME ET LITTÉRATURE ORPHIQUE ORTYX DE PARION OURANIA OURANIOS QURANIOS KYNIKOS OVIDIUS NASO ( P. - )

783 783 784 784 784 785 785 786 786 794 799 800 801 801 802 806 809 844 844

LETTRE O 1 - JOCLÈS 2 -JOCRATES 3 - JONYMOS 4 OCCELÔ OCCÉLOS ( OCELLOS) DE LUCANIE 5 6 PSEUDO -OCCÉLOS 7 OCCILOS DE LUCANIE 8 ODAENATHUS DE SYRIE 9 OINOMAOS DE GADARA 10 OINOPIDÈS DE CHIOS 11 OLYMPIADÈS ( ?) F IVa 12 OLYMPICHOS D Illa 13 OLYMPICOS DE GAZA 14 OLYMPIODOROS ( M. AURELIUS - ) 15 OLYMPIODOROS D'ALEXANDRIE L'ANCIEN 16 OLYMPIODOROS D'ALEXANDRIE L'ALCHIMISTE 17 OLYMPIODOROS D'ALEXANDRIE 18 OLYMPIODOROS DE GAZA 19 OLYMPIOS D'ANTIOCHE 20 OLYMPIOS ou OLYMPOS 21 OLYMPIOS DE SYRIE 22 ONATAS DE CROTONE 23 ONÉSICRITE D'ASTYPALAEA 24 25

ONÉSICRITE D'ÉGINE ONÈTOR

744 745 745 745 748 749 752 752 753 763 769 769 770 770

770 770 771 773 774 774 776 776 778 782 782

26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50

845 860 860 860 864 864

918

DICTIONNAIRE DES PHILOSOPHES ANTIQUES COMPLÉMENTS AUX LETTRES A-I

illa 219a 284 329a 348a 428a

ALEXANDROS (TITUS AURELIUS -) 869 869 ANTONINUS (CLAUDIUS -) APOLLONIOS DE TYANE (complément) 870 870 ARIARATHÈS DE SYPALLÈTOS 870 ARISTIDE ARTÉMIDOROS D'AMYZON 871 ( T. FLAVIUS AELIANUS -) 871 502a ATTALE DE SYPALÈTTOS 871 18a CALLI[CRATÈS ?J DE SPARTE 37a CANONARIS 871

225a Illa 2a 15a 63a 71a 106a 153a la

CTÉSIPHON DE THASOS DIOCLÈS GALIEN GEORGES HÉRACLITE HERENNIANUS HÉRON LE PHILOSOPHE HIPPOLOCHOS DE MACÉDOINE JEAN LE PHILOSOPHE

872 872 872 873 873 874 874 874 875

TABLE DES MATIÈRES

AVANT - PROPOS ......

5

Auteurs des notices du tome IV

7

Abréviations

11

Avertissement

57

NOTICES LETTRE L

59

LETTREM

221

LETTREN

583

LETTRE O

743

COMPLÉMENTS AUX PRÉCÉDENTS TOMES

867

Index des noms propres

875

Index des mots - vedettes figurant dans les titres

907

Liste des notices du tome IV

913

1

1

1

1

Impression : Imprimerie Moderne de Bayeux ZI , 7, rue de la Résistance - 14400 Bayeux Achevé d'imprimer en Novembre 2005 Dépôt légal : 18318

Imprimé en France