Harmonie et efficacité au cabinet dentaire: ou l'art de concilier travail, argent et bonne humeur 9782759820863

Ce livre n’est pas un livre de lecture à proprement parler, mais un livre de travail qui devrait vous faire petit à peti

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Harmonie et efficacité au cabinet dentaire: ou l'art de concilier travail, argent et bonne humeur
 9782759820863

Table of contents :
Remerciements
Hommages à Jo Bakkers
PRÉFACE
TABLE DES MATIÈRES
INTRODUCTION ET RECOMMANDATIONS
1 HARMONI-E-FFICACITÉ AU CABINET DENTAIRE
COMMENT ALLONS-NOUS PROCÉDER POUR ARRIVER À CETTE HARMONI-E-FFICACITÉ ?
2 CONNAISSANCE DE SOI
3 OBSERVER
4 DIRE CE QUE L’ON RESSENT, PENSE, VEUT SANS BLESSER L’AUTRE
5 ÉCOUTE ACTIVE
6 PRÉVENTION ET RÉSOLUTION DES CONFLITS. MÉDIATION
7 SOINS DENTAIRES AUX ENFANTS : QU’EST‑CE QUI EST IMPORTANT ?
8 TRAITEMENT DE L’ANXIÉTÉ DENTAIRE
9 ACCUEILLIR MON STRESS CONSCIEMMENT
Conclusion

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HARMONIE ET EFFICACITÉ AU CABINET DENTAIRE ou l’art de concilier travail, argent et bonne humeur

Michel Deslarzes, Joseph Bakkers, Susan Padrutt, Louis Schorderet, Christian Clerc, Patrick Jevean

17, avenue du Hoggar Parc d’activités de Courtabœuf, BP 112 91944 Les Ulis Cedex A, France

Mise en pages : Patrick Leleux PAO (14000 Caen) Imprimé en France

© 2016, EDP Sciences, 17, avenue du Hoggar, BP 112, Parc d’activités de Courtabœuf, 91944 Les Ulis Cedex A Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction par tous procédés réservés pour tous pays. Toute reproduction ou représentation intégrale ou partielle, par quelque procédé que ce soit, des pages publiées dans le présent ouvrage, faite sans l’autorisation de l’éditeur est illicite et constitue une contrefaçon. Seules sont autorisées, d’une part, les reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective, et d’autre part, les courtes citations justifiées par le caractère scientifique ou d’information de l’œuvre dans laquelle elles sont incorporées (art. L. 122-4, L. 122-5 et L. 335-2 du Code de la propriété intellectuelle). Des photocopies payantes peuvent être réalisées avec l’accord de l’éditeur. S’adresser au : Centre français d’exploitation du droit de copie, 3, rue Hautefeuille, 75006 Paris. Tél. : 01 43 26 95 35. ISBN : 978-2-7598-1626-2

Remerciements Je remercie très chaleureusement le professeur Jacky Samson, qui m’a encouragé dans ma démarche pour une meilleure communication avec les patients et avec le personnel soignant au cabinet dentaire. Je le remercie très sincèrement de m’avoir cédé, pendant plusieurs années, un certain nombre d’heures pour pouvoir donner aux étudiants de dernière année d’étude en médecine dentaire des notions élémentaires de communication. Je profite de cette occasion pour remercier le professeur Jean-Pierre Bernard d’avoir pris les mêmes options, après le départ à la retraite du professeur Samson. Toute l’équipe de la rédaction le remercie pour ses précieux conseils, pour toutes les corrections et pour toutes les améliorations qu’il a apportées à notre livre et évidemment pour tout le temps qu’il y a consacré. Longue vie à ce maître du détail pour la bonne compréhension du sujet, à cet enseignant à l’esprit scientifique et plein d’humour, enfin à l’écrivain à la belle écriture. Nous remercions aussi tout le comité de lecture : Mme Sabine Cimasoni, licenciée en lettres et en théologie, épouse de Georgio Cimasoni, professeur de parodontologie à l’École de Médecine Dentaire de Genève, décédé en février 2008, très intéressée par le relationnel et l’édition. Mme Laurie Demaurex, hygiéniste dentaire et enseignante à l’École d’Hygiénistes Dentaires de Genève, personnalité très attirée par tout ce qui est relation et qui enseigne cette discipline. Mme Danièle Willommet, assistante dentaire, très friande de développement personnel et formée à tout ce qui touche la communication de près ou de loin. Mr. Dr. Olivier Marmy, médecin-dentiste privé, spécialiste des troubles algodysfonctionnels de l’appareil manducateur, responsable de cet enseignement à l’École de Médecine Dentaire de Genève et intéressé par les problèmes des relations humaines. Mr. Dr. Wigger Tasman, médecin-dentiste privé, pratiquant l’hypnose, philosophe, très intéressé par le sujet du livre. Je remercie aussi Mr. Roland Gyger, conseiller en communication, qui m’a initié à l’informatique et aidé à la mise en page.

Nous remercions tous ceux qui nous ont encouragés et soutenus pour l’écriture de ce livre par leurs réflexions, leurs idées et leur amitié. Nous remercions nos familles qui nous ont soutenus et parfois supportés durant ce long accouchement littéraire. L’équipe rédactionnelle.

Hommages à Jo Bakkers Avec beaucoup d’émotions dans le cœur, je salue ici la mémoire de notre ami Jo BAKKERS. Depuis tant et tant d’années et durant tant et tant de rencontres studieuses et actives, nous avons été compagnons de recherches et de créativité. Homme de droiture, soucieux de présence affirmée dans la poursuite de la Justice, se nourrissant dans le champ d’une spiritualité très intime, il nous a quitté récemment dans la croyance certaine que la Mort n’est pas une régression, mais qu’elle est bien une promotion. Je ne sais pas qu’elle était, à la deuxième page de son passeport, le qualificatif professionnel qui y était inscrit ? Peut-être : psycho-sociologue, ou formateur, ou consultant. Quel que soit le terme qui s’y trouvait, j’aurais aimé le modifier, car, en ce qui concerne Jo BAKKERS, j’aurais désiré y écrire  : ARTISAN DE PAIX. Oui, Jo a tout tenté et tout fait pour être un artisan de paix. Merci à toi. Merci encore pour ce témoignage que tu nous offres ici dans notre œuvre commune. Je suis très honoré et très fier d’avoir pu œuvrer en ta compagnie Louis Schorderet J’aimerai aussi rendre hommage à mon ami de 20 ans et coauteur de ce livre, Jo Bakkers, qui nous a quitté en février 2013. Pour moi, il fut un ami, avec qui j’avais parfois des prises de tête mémorables ! Il fut aussi pour moi un formateur en communication remarquable que j’ai eu l’occasion d’apprécier tout au long de ses différents séminaires que j’ai suivis. C’est lui qui m’a aussi donné l’envie de m’engager dans cette voie de la communication. Avec tout ce qu’il m’a apporté et ma formation Gordon, j’ai pu mettre sur pied un cours de communication simple pour toute l’équipe dentaire, qui au gré de son contact et des années, s’est beaucoup amélioré. Je lui dois beaucoup. Malheureusement, il est tombé très malade en novembre 2012 pour mourir en février 2013, Il n’a donc pas eu le temps de fignoler son chapitre sur le stress, mais nous avons décidé le laisser tel quel en son honneur. Sa soif constante d’amour, de justice et de spiritualité transparaît bien dans tous ses chapitres de ce livre.

Merci de tout cœur, cher Jo. Tous les autres collaborateurs de l’équipe de la rédaction se joignent à nous deux pour aussi témoigner de leur amitié envers Jo Bakkers. Michel Deslarzes

PRÉFACE

Comme enseignant et comme praticien, j’ai pu constater à maintes reprises que ma formation était insuffisante dans le domaine des relations humaines, et surtout dans la prévention et la gestion des conflits. Au fil des années, j’ai vu la notion de hiérarchie évoluer et l’utilisation de la sanction être quasiment bannie. Quand j’ai été nommé responsable de la Division de stomatologie et de chirurgie orale de l’École de médecine dentaire de Genève en 1995, j’ai dû m’adapter et apprendre à diriger une équipe d’une quarantaine de personnes sans aucun moyen de rétorsion. Pour diriger une équipe efficacement dans ces conditions, il faut faire preuve d’assertivité, de procrastination, de résilience… c’est-à-dire des qualités qui ne sont pas innées et qui manquent cruellement, le moment venu, quand on n’a pas reçu une formation idoine. Les études en médecine et en médecine dentaire n’abordent pas, ou si peu, ce domaine et il est souvent difficile d’introduire cet enseignement dans le cursus des étudiants. Et faute d’un investissement suffisant de l’ensemble du corps enseignant et d’une formation en partie de type compagnonnage, les étudiants comprennent le plus souvent difficilement l’intérêt d’une telle formation. Certes, de nombreux praticiens fonctionnent avec un personnel réduit mais tous auront à traiter de nombreux patients. Pour les prendre en charge dans les meilleures conditions, il vaut mieux être préparé à gérer cette relation patientpraticien – qui elle aussi a bien évolué – et avoir un comportement adapté face aux patient anxieux, angoissés, agressifs… Toute relation sereine repose sur une qualité essentielle, l’empathie. Or, plusieurs études de M. Hojat ont montré que le niveau d’empathie des étudiants en médecine dentaire est souvent assez faible, qu’il tend même à décroître au cours des études pour augmenter un peu lors du passage en clinique. Cela est facilement compréhensible quand on sait que l’argent constitue la principale motivation pour la grande majorité des étudiants suisses. Les étudiants aiment-ils tant l’argent que cela ou sont-ils sans complexe pour parler de l’argent ?

viii

Préface

Le présent ouvrage, Harmonie et efficacité au cabinet dentaire, tente d’apporter des réponses à ces différents points. Cet ouvrage est le fruit d’une longue collaboration entre six personnes – quatre appartenant au monde médico-dentaire et deux ayant une activité dans le domaine de la psychologie – qui se sont investies dans la gestion des relations interhumaines (patients, personnel) et des conflits (prévention, règlement) aussi au sein des cabinets dentaires. Ce livre comporte neuf chapitres qui abordent les différentes situations que l’on peut rencontrer dans un cabinet dentaire. Chaque chapitre est rédigé par un ou deux des auteurs ayant collaboré à la réalisation de cet ouvrage mais, à sa lecture de cet ouvrage, on observe qu’il y a une cohérence dans les propos des différents auteurs et l’on perçoit l’existence d’une grande complicité entre eux. La lecture du dernier chapitre « Accueillir mon stress consciemment », rédigé par Joseph Bakkers, vous laissera sans doute la sensation d’un travail inachevé. Il s’agit en fait de l’ébauche qu’il avait préparée et dont il n’a pu achever la rédaction faute de temps. Par respect à sa mémoire et pour ne pas le trahir, les autres auteurs ont préféré présenter l’ébauche en l’état où il l’a laissée. Que vous soyez étudiant, enseignant ou praticien confirmé, la lecture de cet ouvrage vous permettra de combler les lacunes de votre formation dans ce domaine. Ainsi, vous aurez gagné en sérénité et en autorité lorsque vous aurez saisi l’importance de la communication non verbale, que vous aurez remplacé le «  tu qui tue  » par le «  je d’engagement  », et bien d’autres choses que vous découvrirez dans cet ouvrage. La valeur d’un homme tient dans sa capacité à donner et non à recevoir. Albert Einstein Jacky Samson Professeur honoraire à la Faculté de médecine de Genève

TABLE DES MATIÈRES

Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . iii Hommages à Jo Bakkers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . v Préface

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . vii

Introduction et recommandations Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 Recommandations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 1. Harmoni-e-fficacité au cabinet dentaire (J. BAKKERS et M. DESLARZES) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Commentaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Le concept harmoni-e-fficacité (Concept original de Jo Bakkers) .   Description d’un autoritaire (9.1 dans le schéma) . . . . . . . . . . . . . .  Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Assertivité (original de Jo Bakkers) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Premier test : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Second test : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Charte (original de Jo Bakkers) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Références . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

5 5 6 9 11 12 12 15 16 16

Comment allons-nous procéder pour arriver à cette harmoni-e-fficacité ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19 2. Connaissance de soi (J. BAKKERS et M. DESLARZES) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . « Connais-toi toi-même » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Test . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Être – faire (avoir-argent) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Conscient – inconscient . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Point de vue économique (ou dynamique) . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Inconscient . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Principe de plaisir (P.P) – conscient . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

21 21 23 28 30 32 32 32

x

Table des matières

  Principe de réalité (P.R) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Points de vue topiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Première topique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Deuxième topique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Iceberg humain dit psychologique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Partie consciente . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Partie inconsciente . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Partie consciente . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Partie inconsciente . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Personne – personnages . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Personnes – personn - âge . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Enfance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Adolescence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Adulte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Qu’ont-ils de particulier ceux qui recherchent et pratiquent la PAIX INTÉRIEURE (Hésychasme) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Références . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

32 32 32 33 34 35 36 38 38 39 41 41 42 42 44 44

3. Observer (M. DESLARZES) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Le regard . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . La mimique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . La voix . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . La gestualité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . La posture . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . La proxémie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . L’aspect vestimentaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Être – par être (paraître) (original de Jo Bakkers) . . . . . . . . . . . . . . Perception des phénomènes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Références . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

47 48 49 49 50 51 51 52 53 54 55

4. Dire ce que l’on ressent, pense, veut sans blesser l’autre (Adaptation de la méthode Gordon à la médecine dentaire) (M. DESLARZES et S. PADRUTT) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Qu’est-ce que la méthode de Gordon ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   C’est une autre manière d’être . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   C’est permettre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   C’est en particulier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Obstacles majeurs à la communication . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Les messages JE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Indications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Différentes sortes de message JE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Message JE affirmatif . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

57 57 58 58 58 58 59 63 63 64 64

Table des matières

xi

  Message JE de réponse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64   Message JE de prévention . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65   Le message JE de confrontation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65 5. Écoute active (Adaptation de la méthode Gordon à la médecine dentaire) (M. DESLARZES et S. PADRUTT) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Qu’est-ce que l’écoute active ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Indications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Structure . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Conditions de l’écoute active . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Pour faire de l’écoute active, il faut : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Erreurs de l’écoute active . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Résumé de l’entretien motivationnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Définition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Indications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Concepts autour de l’EM . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   L’esprit de l’EM . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Les quatre processus de l’EM . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Références . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6. Prévention et résolution des conflits. Médiation (L. SCHORDERET) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . De la nuisance des conflits à l’acceptation des affrontements . . . . . Quelle est la différence entre le conflit et l’affrontement ou la confrontation ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . De l’origine et des causes des conflits . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . À propos de la « résistance au changement » . . . . . . . . . . . . . . . . . À propos de la « communication pauvre » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . De la prévention des conflits . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Stratégies de la résolution de conflits . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . L’impact du langage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Regard no 1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Regard no 2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Regard no 3 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Négociation et médiation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Négociation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Médiation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Auto-analyse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Que faire face à la violence ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Être en état de vigilance constante . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Mise en application no  1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

71 74 74 76 77 77 77 79 79 80 80 81 82 83 85 85 86 87 88 89 89 89 92 94 94 95 96 98 98 98 99 99 100 101

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Table des matières

Mise en application no  2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Traitement de conflit sans intervenant extérieur . . . . . . . . . . . . . . . . .   Traitement de conflit avec intervenant extérieur . . . . . . . . . . . . . . . . . Mise en application no 3 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Quelques compléments de réflexion sur différentes stratégies de résolution de conflits . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Références . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7. Soins dentaires aux enfants : qu’est‑ce qui est important ? (C. CLERC) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Qu’est-ce qui est important ? Oser la relation . . . . . . . . . . . . . . . . . . Au fauteuil . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Atmosphère . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Première séance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Coupure du lien transgénérationnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Séance(s) d’exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Les soins . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Relaxation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Principe de réalité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Peur de l’inconnu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Cadre précis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Regard juste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Chemin inverse de la dissociation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Échecs ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Trois exemples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Relation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Signes de reconnaissance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Acceptation inconditionnelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Quelques autres signes simples de reconnaisance . . . . . . . . . . . . . . . . .   Au cabinet, quels signes ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Fausses routes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Conséquences . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Comment se construire dans ce contexte ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Émotions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Éloge de l’émotion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Système complet d’autoguérison . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Émotions au cabinet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Basculement de la conscience . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Actes modèles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Minimum et plus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Références . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

103 103 104 105 105 108 109 109 110 111 111 111 112 112 113 114 114 114 114 115 115 116 117 118 119 119 120 121 121 122 122 123 125 126 126 127 128 128 129 130 131

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8. Traitement de l’anxiété dentaire (P. JEVEAN) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Une médecine dentaire basée sur les besoins des patients et de l’équipe dentaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Empathie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Stress en dentisterie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Burn-out en médecine dentaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Stress, dépression et anxiété en dentisterie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Phobie dentaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Phobie dentaire (selon Berggren) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Prévalence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Conséquences bucco-dentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Étiologie de la phobie dentaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Évaluation de l’anxiéte dentaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Traitement de la phobie dentaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Principe de traitement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Approche iatrosédative (éclectique) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Approche comportementale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Approche cognitive . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Thérapie cognitivo-comportementale de la phobie dentaire   (méthode Berggren) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Psychothérapie de la phobie dentaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   De la théorie à la pratique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Madame X… . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Glossaire des tests psychométriques de l’évaluation de l’anxiété et de la phobie dentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  DAS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  DFS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   DFS – DENTAL FEAR SURVEY . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  GFS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Tests psychométriques d’évaluation de l’anxiété générale . . . . . . . . . . . Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Références . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9. Accueillir mon stress consciemment (J. BAKKERS) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Principes de base . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Le psychisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   La psychosociologie est… . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   Équipe ou team building . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Leadership . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  Trans-formation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

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133 133 135 136 140 141 141 144 145 146 147 148 152 155 155 155 155 156 157 157 158 162 165 165 167 168 170 171 172 173 181 181 184 185 186 187 188 188

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  Dimension opérationnelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 188   Un calcul simple . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 189   Oser se parler . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 189   Respect lapalissades . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 190   Iceberg psycho+logique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 190   Invisible, incompréhensible ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 190 Pourquoi et pour quoi la formation et l’autoformation permanentes ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 191   Alors, quoi de neuf ? Tout ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 192   Stress ou adaptation ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 193   Et les services ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 193   Une erreur très répandue… . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 193   La logique du doute… . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 194   Formation : quels chapitres ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 194   Maintenant, au « jour du oui » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 203   Ce qui compte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 204   Réflexions sur le doute . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 205   14 obstacles de la communication à 2 personnes (À bien comprendre   pour favoriser une communication plus efficace) . . . . . . . . . . . . . . . 205   Être « anti-stress » est-il utile ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 206 Nature du stress . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 207   4 sentiments de base chez l’être vivant, toutes leurs variantes, dérivés,   combinaisons, synonymes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 208   Stress, qu’est-ce ? (Répétez cela plusieurs fois très vite,   pour voir si cela vous énerve !) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 208   Importance actuelle du stress au travail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 214 Tests et exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 215  Tests . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 215   Mesures de mon stress : résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 219   Mesures de mon stress : causes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 219  Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 220   La proactivité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 229   La respiration consciente . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 231 Citations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 232   Qu’appelons-nous « réussir » ? Qu’ont-ils de particulier   ceux qui réussissent ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 238   Un conte amérindien (d’auteur inconnu) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 238   Le roi et son fils (Conte asiatique, d’auteur inconnu) . . . . . . . . . . . . . 239   Pardonner (Adaptation : Jean Monbourquette – Philippe Saint-Cheron   – Lewis Smedes) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 242 Références . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 244 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 246

INTRODUCTION ET RECOMMANDATIONS

Introduction Après mon diplôme fédéral en médecine dentaire, j’ai travaillé dans le privé, le public, l’enseignement, la recherche clinique et la recherche fondamentale notamment à Århus (DK). En 1967, j’ai été engagé, comme médecin-dentiste à temps partiel, à la clinique psychiatrique de Genève, puis, dès 1976, à temps plein, avec pour activités, les soins aux patients, l’enseignement et la recherche clinique. Très vite, je me suis aperçu, sans doute, en partie à cause de ces patients particuliers, que, pour être efficace, il était fondamental de travailler en harmonie avec les patients et avec le personnel. Cela est rapidement devenu l’une de mes priorités. Je me suis alors formé à la communication non violente de Thomas ­Gordon à Genève et plus tard à celle de Marshall Rosenberg. J’ai participé à des séminaires de management, d’analyse transactionnelle, de programmation neurolinguistique… Tout ce que j’ai appris, vécu, j’ai dû le laisser mûrir, reposer pour en retirer les lignes directrices et enfin pouvoir expérimenter le tout. Même si cela fut difficile au départ, je fus fort surpris par l’importance des résultats positifs. Tout devenait tellement plus facile et beaucoup moins fatiguant. Travailler en harmoni-e-fficacité devenait un plaisir. En 1984, j’ai commencé à enseigner cette nouvelle manière d’être aux assistantes dentaires, puis aux hygiénistes dentaires pendant trois ans et enfin… aux médecins-dentistes. J’ai été alors très étonné du nombre de plaintes à l’égard de ces derniers concernant les relations humaines !

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HARMONIE ET EFFICACITÉ AU CABINET DENTAIRE

Ainsi, j’ai essayé et j’essaie toujours d’apporter cette nouvelle manière de fonctionner, qui en est une parmi d’autres, mais qui a déjà fait ses preuves un peu partout dans le monde sur des sujets variés : enseignement, management, éducation, soins médicaux, accompagnement en fin de vie… J’ai obtenu de bons résultats dans le cabinet que je dirigeais à Belle-Idée (clinique psychiatrique de Genève), dans d’autres cabinets dentaires, dans des cliniques dentaires, auprès des hygiénistes dentaires (HD), des assistantes dentaires (AD) et de certains médecins-dentistes qui viennent à mes séminaires. Malheureusement, les responsables, les médecins-dentistes ne sont pas très nombreux à venir à ce genre de formation ! J’ai aussi décidé de continuer à donner mes séminaires sur ce sujet et d’écrire un livre sur « L’HARMONIE et L’EFFICACITÉ au CABINET DENTAIRE » en m’entourant de personnes compétentes connaissant le domaine dentaire. Joseph Bakkers et Louis Schorderet, deux spécialistes reconnus de la communication en Romandie, en France et en Italie, ont accepté de se joindre à moi. Tous deux ont donné des séminaires dans la formation continue de l’École de médecine dentaire de Genève. Louis Schorderet est aussi intervenu dans certaines cliniques dentaires ou cabinets dentaires pour essayer de résoudre des conflits plus ou moins graves. J’ai beaucoup d’admiration pour ces deux professionnels que j’ai fréquentés en tant que participant à leurs séminaires. J’ai aussi énormément de respect pour leurs compétences et leur sens didactique. J’apprécie avec beaucoup de bonheur leurs lumineuses personnalités. Sur ma demande, mon ancienne hygiéniste de Belle-Idée, Susan Padrutt, avec qui j’ai travaillé pendant 16 ans, nous a rejoint. Formée à la communication non violente, à la pédagogie et à la santé communautaire, elle possède beaucoup de bon sens et a souvent des idées très originales. Elle a réalisé, avec moi et d’autres auteurs, plusieurs publications. Deux médecins dentistes installés se sont greffés à notre équipe. Ils ont tous deux un cursus professionnel et personnel très intéressant et ont des personnalités ouvertes sur d’autres horizons. Christian Clerc s’occupe, entre autres, d’enfants et parvient à des résultats surprenants. Sa manière d’être est bien au-delà d’une technique, car il va chercher certaines forces tout au fond de son vrai soi. Patrick Jevean s’est formé à diverses approches de la psychologie et en particulier au traitement dentaire des phobiques. Il a une bonne formation

Introduction et recommandations

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scientifique dans ce domaine et obtient de bons résultats avec ce qu’il a appris en Suisse et en Suède. Les auteurs constituent donc une équipe très variée, avec des personnalités différentes, mais qui, toutes, sont ou ont été en contact avec la médecine dentaire et qui, toutes, veulent apporter un peu plus d’humanité dans cette branche. Nous espérons tous, que cet ouvrage suscitera la réflexion, peut-être vous fera évoluer jusqu’à vous modifier. Nous espérons aussi apporter tous les outils nécessaires : pour mieux dire ce que vous sentez, penser, voulez…sans blesser l’autre ; pour mieux écouter les patients (très utile à pratiquer avec les patients anxieux et dépressifs) ; et pour mieux prévenir et résoudre les conflits ; s’occuper d’enfants et de patients très anxieux, voire phobiques, qui sont très souvent source de tensions et de dysharmonie au cabinet dentaire. C’est ainsi que les deux derniers auteurs des chapitres 7 et 8 ont leur place dans ce livre. Pour terminer, nous parlerons de manière plus ciblée du comment accueillir son stress consciemment, engendré par notre profession, surtout celui qui n’a pu être dissout par les huit chapitres précédents. Concernant la bibliographie des différents chapitres, tous ont des références générales, composées de livres ou d’articles que nous avons lus ou sur lesquels nous avons travaillé. Sauf le chapitre 8 qui est construit plus comme un article. Elles donnent des compléments d’information ou d’autres vues sur le sujet. Pour les chapitres 4 et 5, une seule bibliographie commune figurera à la fin du chapitre 5, vu que ces deux chapitres Gordon forment un tout. Michel Deslarzes

Recommandations Ce livre n’est pas un livre de lecture à proprement parler, mais un livre de travail qui devrait vous faire petit à petit évoluer vers une meilleure harmonie au cabinet dentaire et, par ce fait, vers une efficacité plus soutenue. Nous vous recommandons de lire ce livre en entier pour en avoir une vue globale, puis de travailler chapitre par chapitre dans l’ordre du livre, ou d’approfondir uniquement les sujets dont vous avez besoin dans votre pratique de tous les jours.

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HARMONIE ET EFFICACITÉ AU CABINET DENTAIRE

Il est préférable de comprendre, de bien s’imprégner des notions apportées dans le chapitre étudié, puis de pratiquer les notions de ce chapitre dans toute votre vie professionnelle et personnelle. Vous avez aussi de bonnes références bibliographiques, où vous pourrez aller puiser des compléments d’informations. Au cours du livre, vous aurez aussi des rubriques vous indiquant des lieux où vous pourrez expérimenter votre formation livresque, voire même d’aller plus loin. Lorsque tout viendra facilement, rapidement, passez alors à un autre chapitre et agissez de même pour tous les chapitres qui vous intéresseront. Cela ira peut-être lentement, mais vous aurez alors déjà acquis d’autres réflexes face aux difficultés de votre vie professionnelle et personnelle. Votre vie en deviendra beaucoup plus simple, plus heureuse et passionnante. Vous pourrez partager, peut-être, certaines de vos découvertes avec vos proches et des collègues. Mais certaines resteront votre jardin secret. N’oubliez pas que l’entraînement est liberté. J’en ai fait l’expérience avec Gordon et maintenant, je suis en plein dedans avec la méditation et le moment présent. Pour toute l’équipe de la rédaction : Michel Deslarzes

1 HARMONI-E-FFICACITÉ AU CABINET DENTAIRE J. BAKKERS et M. DESLARZES

Commentaire En premier lieu, vous voyez dans le titre qu’il y a comme une fusion par le -e- central entre l’harmonie et l’efficacité, autrement dit, que vous ne pouvez pas être vraiment efficace, rentable à long terme, sans travailler dans une ambiance harmonieuse. Bien sûr, cela est toujours possible de travailler dans une atmosphère pesante, hostile, confuse, chargée de non-dits tout en étant rentable. Mais à quel prix : à long terme, notre santé physique et mentale s’en ressentira plus ou moins gravement, le personnel changera très souvent, les patients auront de la peine à être fidélisés et enfin, tout le monde finira par ne plus être satisfait de son travail. C’est alors le début de la pente glissante vers le  «  burn-out  », ou vers des pathologies somatiques ou mentales encore plus graves comme vous le verrez dans le chapitre 8. Analysons maintenant le mot harmonie. D’après le Petit Robert, harmonie, dans notre contexte, veut dire bonnes relations interpersonnelles : entente, paix, union. Est-ce toujours le cas  ? J’en doute… après toutes ces années d’enseignement aux hygiénistes dentaires et aux assistantes dentaires. Dernièrement, à Genève, sur une classe de quatorze élèves assistantes dentaires de deuxième année, aucune, après leur diplôme, n’allait rester dans le métier, vu la très mauvaise ambiance qui régnait dans leur cabinet dentaire respectif  !? D’une manière générale, seul 30 à 40  % des élèves continuent à vouloir travailler comme assistantes dentaires. Et pour les mêmes raisons  ! Pourtant, ce n’est qu’en améliorant l’harmonie au cabinet dentaire que nous pourrons « jouer » à travailler pour devenir plus efficace, en fidélisant patients et personnel. L’harmonie, dans notre profession, c’est aussi réfléchir, étudier les problèmes que nous posent les patients, avant de se précipiter à faire quelque chose (sauf urgence bien sûr, quoique !). C’est la balance entre le faire et l’être.

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HARMONIE ET EFFICACITÉ AU CABINET DENTAIRE

L’harmonie, c’est aussi trouver un équilibre entre l’avoir et l’être, entre l’être et le produit du travail, l’argent. Et l’efficacité ? C’est travailler de manière réfléchie, concentrée, soignée, propre, soucieuse de la qualité du travail, et du bien-être de soi-même, du patient et du personnel et enfin rester dans un rapport temps-qualité-rendement équilibré. Tout au cours des cinq chapitres auxquels j’ai participé, on a essayé d’associer théories, quelques schémas, commentaires, exemples et des exercices, afin que, petit à petit, vous arriviez à posséder parfaitement la matière développée et surtout que vous puissiez vous en servir en la mettant en pratique constamment, à la recherche d’amélioration, de perfectionnement. Michel Deslarzes

Le concept harmoni-e-fficacité (Concept original de Jo Bakkers) L’harmoni-e-fficacité est un écosystème, terme largement employé en écologie pour expliquer que les divers éléments d’un tout sont tous importants pour que l’ensemble fonctionne. Nous avons 3 groupes représentés par les 3 cercles de la figure 1 : le dentiste, le personnel soignant collaborant et les patients, avec chacun ses exigences qu’il faudra satisfaire. L’harmoni-e-fficacité est la plus grande quand le triangle formé par la superposition des 3 cercles est le plus important. Le dentiste et ses exigences

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Le personnel et ses exigences

Les patients et leurs exigences

3 HARMONI-E-FFICACITÉ

Fig. 1  Concept de l’harmoni-e-fficacité

Harmoni-e-fficacité au cabinet dentaire

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Exemples : Ce sont les numéros que vous retrouvez dans la figure 1. 1. Si le médecin-dentiste ne pense qu’à lui, qu’à son plaisir de réaliser des « chefs-d’œuvre » et qu’à empocher de l’argent, il n’est qu’un somptueux égoïste et rencontrera souvent des difficultés avec le personnel et les patients. 2. Si le médecin-dentiste ne pense qu’à lui et qu’au personnel, il n’est qu’un généreux utopiste qui ne tient pas compte du réel, les patients. Il aura fréquemment des situations difficiles, stressantes avec le vouloir des patients. 3. Si le médecin-dentiste ne tient compte que du personnel et des patients, il risque de s’épuiser, mais il peut être redoutablement efficace, quelques exemples : Albert Schweitzer, Gandhi, Mère Teresa, Mandela, Sœur Emmanuelle, abbé Pierre, Dalaï Lama, Aung San Suu Kyi et bien d’autres… qui sont pourtant tous devenus très vieux  !). Mais ce sont peut-être des exceptions  ? Quoique cela ne soit pas si sûr ! On les appelle les généreux suicidaires. 4. Si le médecin-dentiste ne tient compte que de lui et des patients, c’est l’exemple même du technocrate, profil qui semble très répandu dans notre profession. Il aura toujours des tensions et des conflits avec le personnel. Exercice : Réfléchissez bien  : à quel type appartenez-vous  : 1, 2, 3, 4 ou est-ce un mélange  ? Et pourtant, il serait très simple de tenir compte de soi, de ses employés et des patients. Tout irait beaucoup mieux. Tout deviendrait plus facile. Le travail en lui-même deviendrait presque un jeu, un grand plaisir. Les relations avec les patients, avec le personnel seraient alors un lieu de soins de qualité où rencontres et découvertes nous fidéliseraient patients et personnel. Les problèmes au travail seraient résolus ensemble. Et enfin, libérés de toute tension, nous pourrions jouir de l’autre vie, celle de l’amour, des loisirs, etc. Enfin, être épanouis dans toute notre vie. C’est bien ce que, secrètement, nous désirons, tous, le plus ardemment. Pour donner une autre approche du concept de l’harmoni-e-fficacité, on peut emprunter le concept des différentes casquettes qu’un chef, en l’occurrence, le médecin-dentiste, pourrait porter. Ce qui est illustré par la figure 2. C’est ici qu’il faudrait se poser la question « Quel est le type et la taille de cabinet dentaire qui correspond à mes idées, en tenant compte du degré de simplicité/ complexité dans les relations humaines que je suis prêt à gérer  ?  ». On voit bien sur le schéma ci-après que la seule casquette de chef qui tienne compte du

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rendement et du climat humain (médecin-dentiste, personnel et patients) est le 9.9, autrement dit le mode du partenariat. C’est là où l’on devient efficace et aussi là où tout le monde se réalise. Le 1.9 (attitude de grand frère, qui comprend, compatit, écoute et par ce biais réconforte et qui peut aller jusqu’à donner 1 ou 2 jours de congé pour que la personne puisse récupérer) peut être utile, mais seulement momentanément, si l’un ou l’autre de l’équipe connaît un gros problème passager. Le 9.1 (autoritaire) peut aussi être utile, mais aussi que momentanément, s’il y a une situation d’urgence, quelle qu’elle soit ou s’il faut remettre un peu de discipline. Malheureusement, cette attitude semble trop fréquente dans notre profession. On en parlera plus en détails à la page suivante. Le 5.5 et le 1.1 ne se rencontrent pratiquement pas dans les cabinets dentaires.

Climat humain 9

(5 %) Sentiments 1.9 GRAND-FRÈRE Affiliation

(90 %) Faits 9.9 PARTENARIAT Réalisation 5.5 DIPLOMATIE No comment!

1.1 FONCTIONNAIRE Sécurité+++

(5 %) Pouvoir 9.1 AUTORITAIRE Égotique 9

Rendement

Fig. 2  Autre approche du concept d’harmoni-e-fficacité

On devrait fonctionner à 90 % en mode partenariat, 5 % en mode grandfrère, 5 % en mode autoritaire. Cela apporte une réelle satisfaction de porter ces différentes casquettes. On se sent alors vraiment un bon chef. Exemple : Dans les cabinets dentaires où règne le mode 9.1, les résultats ne sont bons qu’à court terme : très vite, le personnel va changer et changer encore. Pour le médecin-dentiste, s’il n’est pas conscient de son attitude, tout risque de devenir épuisant, jusqu’au burn-out !

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Description d’un autoritaire (9.1 dans le schéma)

Son style de vie est : « Je veux ce que je veux », serre la vis. Son comportement personnel  : il est énergique, dur, ambitieux, travaille beaucoup, il est peu souriant, il n’écoute pas, se sent seul (solitude du chef). Son comportement par rapport à ses collaborateurs  : son cabinet, c’est sa propriété : il exige l’obéissance, crée de l’inertie et, à moyen terme, démotive et va provoquer une baisse de production. À long terme, va causer de l’absentéisme et des départs. Aspects positifs  : il est honnête, sincère, brillant, grand travailleur, veut des résultats rapides. Attention, d’instinct, nous le sommes tous ! Exercice : Quel est le mode que je privilégie dans mon cabinet et pourquoi ? On constate que si l’on veut vraiment avoir un rendement optimum, on doit tenir compte du climat humain : avez-vous déjà travaillé avec une AD ou une autre personne du cabinet qui n’est jamais contente, parce qu’elle ne se sent pas reconnue ? C’est épouvantable et, à la fin de la journée, c’est l’épuisement total ! En complément au concept des casquettes de chef, vous pouvez aussi vous questionner sur votre rôle de médecin-dentiste en tant que responsable d’une petite entreprise que sont le cabinet dentaire commun, le cabinet de groupe ou la clinique dentaire. Tout sera sous forme de questions et comptera quatre parties : moi, le médecin-dentiste, l’équipe, l’entreprise, les valeurs du système. •  Dans la première partie, moi, le médecin-dentiste, vous aurez à répondre à deux questions sur l’autonomie d’exécution : les collaborateurs apprécientils eux-mêmes la qualité de leurs performances et les mesures collectives à prendre ? Les supérieurs (direction) ont-ils confiance en leurs collaborateurs ? Pour tester la liberté d’expression au cabinet dentaire, à nouveau deux questions  : la liberté d’expression des opinions est-elle seulement tolérée, ou soutenue et encouragée ? Peut-on faire valoir son avis, voire discuter les instructions reçues ? Qu’en est-il de l’initiative  : les décisions et le travail en commun sont-ils encouragés, plus que la préoccupation de tout contrôler ou de faire contrôler ? Quelle capacité d’influence peut-on exercer dans votre cabinet  : est-il possible d’exercer une influence sur l’organisation ? Le système est-il flexible, perméable au changement, adaptable ? Quel est le degré d’influence ressenti ?

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•  Dans la deuxième partie, l’équipe dentaire, quatre questions sur le dialogue hiérarchique  : quelle est l’ouverture et la réceptivité des niveaux supérieurs et inférieurs aux problèmes de l’autre niveau ? Est-on disposé à échanger des points de vue  ? S’agit-il d’un climat de confiance, du haut vers le bas de la hiérarchie et réciproquement ? Et dans les contacts latéraux (même niveau) ? Trois questions sur le degré de participation  : les collaborateurs sont-ils associés activement et fréquemment aux décisions ? Leur fait-on confiance en tant qu’interlocuteurs valables ? Ont-ils la responsabilité de leur choix ? Et au niveau de la coopération  : y a-t-il un climat de libre communication  ? Est-on disposé à aider ou à recourir à l’appui ou à la compétence d’autrui ? (ou pratiquons-nous méfiance, rivalité, hostilité, utilisation du savoir des autres… ?) Êtes-vous dans un cabinet où l’on pratique la délégation  : quelle est la distribution, à tous niveaux, non seulement des tâches, mais aussi du pouvoir officiel de décision, avec appui et encouragement ? Les objectifs sont-ils élaborés par accord, négociation entre les subordonnés et leur chef ? •  Dans la troisième partie, l’entreprise : y a-t-il une communauté d’objectifs : Les objectifs sont-ils bien connus et identiques à tous les niveaux ? Les communications sont-elles précises ? Ou au contraire : disparité des objectifs, des communications tronquées ou faussées ? Quelle est la nature de l’information : intensité et exactitude des informations transmises ? Les collaborateurs se sentent-ils responsables de les fournir ? Peut-on prendre l’initiative de les communiquer  ? Le flux est-il abondant  ? S’accompagne-t-il de relations de proximité ? Ou de relations distantes ? Qu’en est-il de la communication ? Quelles sont la fréquence et la distribution dans la pyramide hiérarchique des communications adaptées à la réalisation des objectifs ? Les communications ascendantes ont-elles leur source à tous les niveaux hiérarchiques, ou proviennent-elles d’une source unique seulement ? Et quel est l’emploi des ressources ? Tire-t-on le meilleur parti possible des capacités, des connaissances et de l’intelligence des personnes, ainsi que des sources d’informations ? Enfin valorisez-vous votre personnel ? L’entreprise est-elle organisée de manière à favoriser le perfectionnement professionnel ? Et personnel ? Les cadres disposent-ils des moyens d’informer leurs collaborateurs ? Ont-ils eux-mêmes l’occasion de parfaire leur formation de cadres ?

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•  Dans la quatrième partie, les valeurs du système : quelle est notre attitude humaine  ? Qu’en est-il de l’écoute, de l’appréciation, de la connaissance et de la compréhension, par les chefs, des problèmes de leurs collaborateurs ? Y a-t-il implication réciproque des chefs et des collaborateurs dans les soucis ou problèmes de l’entreprise ? Quelle est l’efficacité de la formation : ces opérations ont-elles été ressenties positivement ou comme des « saupoudrages » agréables, mais peu utiles ? Les actions de formation entreprises ont-elles des retombées spécifiques sur les relations (climat), l’efficacité du travail, le développement du savoir et des connaissances. En conclusion, dans notre entreprise règnent de façon générale : CLIMAT de CONFIANCE, SENS des RESPONSABILITÉS, HUMOUR (potentiel de distanciation, prise de recul). Par rapport à toutes ces questions, qu’est-ce que je pratique déjà et qu’estce que je peux, veux encore améliorer. Vous le saurez en totalisant les oui ou idées positives et les non ou idées négatives : plus le nombre de oui ou d’idées positives sera élevé, plus vous êtes responsable de votre petite PME et moins vous aurez de choses à changer. Plus le nombre de non ou d’idées négatives sera élevé, plus votre PME est en danger et plus il est impérieux de prendre le taureau par les cornes pour vous modifier et faire évoluer vos structures. Dans le même sens, et pour vous aider à améliorer votre statut de chef, de responsable d’entreprise, si besoin est, nous vous proposons une liste des neuf compétences indispensables que devrait avoir un vrai chef. Vous pourrez ainsi vous rendre compte de celles qui sont déjà vôtres et de celles que vous devriez acquérir pour devenir un véritable responsable d’une PME (original de Jo Bakkers) 1. Écoute 2. Est clair 3. Et a le courage de l’être 3. Motive 4. Délègue 5. Décide 6. Consacre le plus précieux de son temps à 7. Et avec les autres développer une relation respectueuse avec soi-même 8. Développe son humour 9. Et conserve son calme en toute circonstance

Avant de vous proposer deux tests qui vous donneront une idée plus précise du fonctionnement de votre propre cabinet, nous aimerions vous donner à méditer une liste des droits fondamentaux de TOUS LES PARTENAIRES D’UN CABINET DENTAIRE, qui se regroupent sous le terme de

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l’assertivité, dont la définition est « affirmation de soi dans le respect d’autrui » (www.maieusthésie.com). Assertivité (original de Jo Bakkers) Le droit d’être traité avec respect et dignité D’avoir des sentiments et opinions personnels et de pouvoir les exprimer D’être écouté et pris au sérieux Le droit d’évaluer mes besoins, d’établir des priorités et de prendre des décisions personnelles Le droit de dire « non » sans aucun sentiment de culpabilité De demander ce que je veux, dans le respect du droit de refuser, qu’a aussi mon interlocuteur Droit de changer, droit de me tromper De demander des éclaircissements et d’être informé Le droit d’obtenir ce que j’ai payé Le droit de décider de ne pas être assertif, le droit d’être indépendant De décider quoi faire de mes priorités, de mon corps, de mon temps… sans violer les droits des autres personnes Le droit de réussir, d’avoir du succès, d’éprouver du plaisir et de la satisfaction Droit au repos, droit à ma solitude, en restant assertif Le droit de me surpasser, voire de surpasser les autres si je peux

ESSAYONS DE FAIRE AUX AUTRES CE QU’ON AIMERAIT QU’ILS NOUS FASSENT (sentence qui existe dans toutes les spiritualités, religions et cultures sous une forme ou une autre, semblable à celle-ci). Quel travail ! Comme annoncé plus haut, nous allons terminer ce chapitre de l’harmoni-e-fficacité par deux tests qui vous donneront encore une meilleure vue sur la dynamique de votre cabinet : Premier test :

Comment je vis actuellement mon cabinet dentaire, mon cabinet de groupe, ma clinique, ma PETITE PME 1 : entièrement d’accord = 1 point 2 : plus ou moins d’accord = 2 points 3 : indifférent = 3 points

4 : assez peu d’accord = 4 points 5 : pas du tout d’accord = 5 points

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1 2 3 4 5  1. Ici, on peut parler en toute liberté, tout est transparent.. . . . . . . . . . . . . . .  2. Ici, on doit faire son travail, un point, c’est tout . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  3. Dans ce cabinet, il y a des gens perfectionnistes qui ne sont jamais contents . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  4. Ce qui retient les gens dans ce cabinet, c’est surtout l’état d’esprit et les bonnes relations entre tous . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  5. Je suis sûr que nous sommes les meilleurs dans la profession . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  6. Dans ce cabinet, les titres et les diplômes ont de l’importance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  7. Finalement, nous sommes tous dans le même bateau : il faut quelquefois se sacrifier pour les autres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  8. Ceux qui n’acceptent pas de travailler au-delà des heures n’ont pas leur place parmi nous . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  9. Dans ce cabinet, on peut toujours prendre des initiatives, car on sait que l’on ne sera pas critiqué, ensuite, pour l’avoir fait . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10. Il faut que chacun ait une définition claire de ses fonctions, sinon c’est le désordre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11. Il faut toujours chercher à améliorer la qualité, même quand tout se passe bien . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12. Dans ce cabinet, il faut toujours rendre des comptes, on ne fait pas confiance facilement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13. Une bonne idée finit toujours chez nous par être examinée et souvent adoptée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14. Ici, l’essentiel est de gagner un maximum d’argent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15. Dans ce cabinet, patron, assistants, hygiénistes dentaires, assistantes dentaires, techniciens-dentistes, toutes ces distinctions, dans notre vie de tous les jours, nous les connaissons peu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16. Se fréquenter entre collègues, en-dehors du travail, crée un esprit d’équipe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17. Travailler ici, c’est avant tout adhérer à une certaine vision de la médecine dentaire et à un certain style de direction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

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1 2 3 4 5 18. Je suis heureux/se quand j’entends une appréciation positive sur nos prestations (accueil, hygiène, qualité du travail effectué) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19. Ici, il faut du temps pour être reconnu à sa juste valeur . . . . . . . . . . . . . . 20. Il faut savoir faire des sacrifices dans sa vie personnelle, si l’on veut garder son poste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21. Il est normal que l’ancienneté soit prise en compte pour la rémunération d’un employé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22. Dans l’ensemble, chez nous, les gens sont très compétents et efficaces . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23. Dans ce cabinet, les professionnels sont fixés sur l’esthétique et la technique, oubliant tout le reste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24. Ici, seuls le rendement et la technique comptent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25. Dans ce cabinet dentaire, les patients, la bonne harmonie, le personnel, la technique, le rendement, tous sont les plus importants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Total des points de chaque colonne Total de tous les points Exemple : Si vous êtes entièrement d’accord pour deux questions (deux fois la première colonne, soit 2  ×  1  =  2) et pas du tout d’accord pour trois autres questions (trois fois la cinquième colonne, soit 3 × 5 = 15). Le total sera de 15 + 2 = 17. Exercice : Répondez très franchement à ces 25 questions, faites l’addition de tous vos points et comparez-les aux résultats suivants : 77 points pour un cabinet qui tient compte de tout : patients, personnel (sans s’oublier soi-même), technique et rendement. 58 points pour un cabinet qui ne tient compte que de la technique et du rendement. Bien sûr, il y a une fourchette de 3 points en plus ou en moins pour chaque résultat.

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Vous serez peut-être étonné(e)s du résultat, mais il aura le mérite de vous montrer la direction que vous avez prise et comment y remédier, si vous voulez améliorer votre vie professionnelle, personnelle, votre santé physique et psychique. Second test :

Comment je me comporte en tant que RESPONSABLE D’AUTRES PERSONNES 1. Votre principale qualité personnelle (de leader ou manager) : ce que vous avez de mieux à offrir ? 2. Votre problème le plus important ou le plus actuel  : comment aimeriezvous le résoudre ? 3. Votre vœu ou souhait le plus fort, que d’autres (collègues, assistants, HD ou AD, voire le technicien-dentiste) pourraient réaliser pour vous ? 4. Votre objectif prioritaire (à long, moyen, court terme), vers lequel tendront vos efforts à venir ? 5. Votre motivation la plus intense, ce qui vous fait « bouger  » dans la vie professionnelle en matière d’autorité personnelle ? 6. Votre formation et développement personnels : où en êtes-vous, où et vers quels thèmes voulez-vous être davantage formé ? En répondant par une phrase ou deux, à chaque question, vous aurez une évaluation plus précise de vos qualités de chef ou de ce que vous avez à travailler pour l’être. En conclusion  : ce n’est pas toujours facile d’être un vrai chef, mais quel bonheur quand on y arrive, on se sent vraiment exister dans la joie. Cela me fait penser à un jeune médecin-dentiste qui avait suivi un de mes cours postgradué et qui m’écrivait qu’il avait trouvé non pas une fenêtre sur l’amour, mais une pleine terrasse, après avoir lu un livre de Jacques Lecomte. La bonté humaine. Altruisme, empathie, générosité. Odile Jacob, Paris, 2012. C’est donc possible. Exemple à suivre, peut-être ? Avant de commencer le prochain chapitre, nous aimerions vous laisser cette charte de Jo Bakkers que vous pourrez copier et afficher, si vous êtes d’accord avec elle, au-dessus de votre bureau pour que tous les jours de votre vie, elle vous soit présente.

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Charte (original de Jo Bakkers) RIEN ni PERSONNE ne changera autour de moi, si JE ne change D’ABORD ******** NUL ne fera pour moi ce que MOI SEUL dois faire Il n’est qu’une PERMANENCE, celle du CHANGEMENT Il n’est de changement véritable et profond que des PERSONNES Il n’est de changement profond des personnes qui ne commence par SOI-MÊME ********* Il n’est de changement profond de soi, qui ne vienne du « DEDANS » Il faut une nécessaire et suffisante modestie : SE CONNAÎTRE tel que l’on est, non tel que l’on s’imagine être

Références D’ANSEMBOURG T. Cessez d’être gentils, soyez vrais ! Être avec les autres en restant soi-même. Les Éditions de l’Homme, Montréal, 2004 BELLENGER L., SÈVE M. Booster votre créativité. EST-éditeur, Thiron, 2010 BENNIS W. Professionnal leader. InterEditions, Paris, 1995 CHALVIN D. Optimisez vos relations avec les autres. EST-éditeur, Thiron, 2010 CHALVIN D. Le manager flexible. EST-éditeur, Thiron, 2010 CORNEAU G. Victime des autres, bourreau de soi-même. Robert Laffont, Paris, 2003 CORNETTE DE SAINT CYR X. Pratiquer la bienveillance. Éditions Jouvence, Archamps, 2007 GORDON T. Relations efficaces. Éditions Le Jour, Québec, 2002 GORDON T. Leaders efficaces. Les Éditions de l’Homme, Montréal, 2006

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GUNTERN G. Les 7 règles d’or de la créativité. Éditions Pearson, Collection Village Mondial, Montreuil, 2001 GUNTERN G, La médiocratie démasquée. Éditions Pearson, Collection Village Mondial, Montreuil, 2001 HOFFMANN B. Albert Einstein, créateur et rebelle. Seuil, Paris, 1979 LEGOFF J-P. Les illusions du managmment : pour le retour du bon sens.Éditions La Découverte/ Poche, Paris, 1996 PIC DE LA MIRANDOLE G. De L’imagination. Arialia, Bonnieux,1996 ROBBINS S. 63 propositions pour bien diriger une équipe. Éditions Pearson, Collection Village Mondial, Montreuil, 2004 ROGERS C. Les groupes de rencontre. Éditions Dunod, Paris, 2005 ROSENBERG M. Les mots sont des fenêtres (ou des murs). Éditions Jouvence, Archamps, 1999

COMMENT ALLONS-NOUS PROCÉDER POUR ARRIVER À CETTE HARMONI-E-FFICACITÉ ?

La base de toute démarche psychologique est de mieux se connaître. Nous allons vous donner de nombreux moyens pour y arriver. L’observation de soi et des autres (communication non verbale) vous apportera encore d’autres possibilités pour se mieux connaître et mieux appréhender les autres. La méthode de Gordon vous permettra de dire ce que vous ressentez, pensez, voulez sans blesser l’autre. Elle vous initiera aussi à l’écoute active qui vous fera accomplir de petits miracles avec vos patients et votre personnel. Ils se sentiront enfin écoutés et compris La prévention et la résolution des conflits seront discutées de long en large. Vous aurez tous les outils nécessaires pour arriver à vous débrouiller seuls lors de difficultés ou de conflits avec vos patients ou avec votre personnel soignant. Les soins aux enfants ne sont pas simples, en tous cas avec une grande partie d’entre eux. Ils occasionnent souvent tension et frustration. Mais, grâce à la construction d’une bonne relation avec le médecin-dentiste, tout peut se faire en douceur. Là aussi, nous vous donnerons des outils et une marche à suivre. 50 % de nos patients sont anxieux à l’idée de venir chez le médecin-dentiste. Cela crée une anxiété diffuse dans le cabinet qui nous fatigue inutilement. Nous vous donnerons tous les outils nécessaires pour vous occuper de ces patients plus ou moins anxieux, voire même phobiques (quoique pour ces derniers, il faut passer par une formation appropriée). Enfin, si, malgré tous ces outils, il peut rester encore du stress, des notions sur la nature du stress, des tests, des exercices pratiques appropriés, des pensées

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philosophiques et spirituelles, vous donneront la possibilité d’accepter ce qui est et de lâcher prise. Normalement, avec tout cela, c’est notre souhait, vous devriez atteindre sûrement l’harmoni-e-fficacité. Mais faut-il le vouloir ! Toute l’équipe de la rédaction

2 CONNAISSANCE DE SOI J. BAKKERS et M. DESLARZES

« Connais-toi toi-même » Commençons par un commentaire de la célèbre phrase que Socrate avait prise pour devise : « CONNAIS-TOI TOI-MÊME ». Toute la vie de ce célèbre philosophe grec du ve siècle av. J-C a été centrée sur la recherche de la VÉRITÉ. « Gnôthi seauton » : « Connais-toi toi-même ! » Celui qui a gravé cet aphorisme sur le temple d’Apollon, à Delphes, a causé déjà beaucoup d’irritation. Il est vrai aussi, qu’il a fourni la base de la psychologie moderne. Mais au lieu de donner au monde un impératif aussi exigeant, n’eut-il pas été plus compréhensif de fournir en même temps le mode d’emploi. Comment faire pour se connaître soi-même  ? Comment démasquer ses propres intentions, surtout lorsque l’on tient beaucoup à se leurrer. Et quels avantages en retirer ? Finalement est-ce que je tiens vraiment à me connaître, à connaître ce passage obligatoire de ma barque pour la durée de cette traversée  ? Qui sait si ce qui se cache derrière ma façade, vaut la peine d’être révélé. La découverte sera-t-elle seulement aimable, bonne à être aimée ? Oui, je sais : « Avant tout, reste fidèle à toi-même et, aussi sûrement que la nuit suit le jour, tu ne seras jamais fourbe avec qui que ce soit » peut-on lire dans Hamlet. Or, peut-on être fidèle à soi, sans savoir qui l’on est ? Sans savoir si celui que l’on est bien obligé de rencontrer chaque matin dans son miroir lorsqu’on se rase ou se maquille, est bien celui à qui on entend être fidèle. Sans rêver, ce qui ne mènerait pas à grand-chose, reconnaissons que toutes les philosophies, les théologies, les psychologies (d’où qu’elles viennent) sont

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unanimes en exigeant de nous faire passer par ce seuil de la connaissance de soi, toujours remise en œuvre, pour que l’on ne se mente pas à soi-même, pour que l’on puisse se regarder en face, quelle que soit la grimace que la vie y imprime certains jours, et que l’on ne puisse plus mentir à quiconque. Mais justement, comment faire  ? On ne peut se contenter de frapper à la porte de son soi et demander à celui qui en sort de se présenter : « Qui êtesvous  ? Expliquez-vous à moi  !  » Existe-t-il un truc, une formule, une école pour la connaissance de soi ? Voici une indication, fournie par Samuel Butler (The Way of all Flesh) qui peut devenir précieuse : « Quoi que ce soit que quelqu’un fasse, qu’il s’adonne à la littérature, à la peinture, à l’architecture ou à n’importe quoi, ce qu’il crée est toujours le reflet de son propre moi. Plus il veut le dissimuler, plus son caractère ressort clairement, même contre son gré. Je fais mon portrait d’une main plus sûre que je ne peins les personnages qui figurent dans mon livre. Même si je le regrette, je ne peux rien y changer »

(Le Soi = moi profond chez C.G Jung, beaucoup plus vaste et contenant tout ce qui rattache l’homme au divin ; Le Moi, chez Freud entre le ça et le sur-moi). Par conséquent, celui qui tient à connaître son véritable moi, n’a qu’à observer ce qu’il a créé sciemment ou non, qu’à jeter un regard en arrière sur les cinq ou dix dernières années, sur son entreprise, son jardin, son bureau, les personnes qui l’entourent et leur attitude à son égard. Tout cela porte la même marque, au moins l’empreinte reconnaissable, de l’investigateur. Celui qui, même si ce n’est pas facile, après s’être examiné un certain nombre de fois, ne progresse toujours pas, ne tient peut-être pas à faire plus intimement connaissance avec lui-même. Il risque alors de devenir passager clandestin de son propre bateau, et ce serait dommage. Pour partir à la découverte de soi, un LONG TEST va, pour une fois, vous faire prendre conscience de ce que vous savez déjà sur vous et, peut-être, vous révéler les qualités ou les défauts que vous ne connaissiez pas, ou encore des frustrations que vous aviez soigneusement bien enfouies dans votre inconscient. Vous pourrez partager en totalité ou en partie les résultats de ce questionnaire, ou au contraire tout garder pour vous. C’est votre choix. (Tiré en partie et adapté du livre de KEEL P. All about me, Broadway Books, 1998)

Connaissance de soi

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Test PERSONNEL Prénom : • Nom : Est-ce qu’ils me plaisent ou non ? Pourquoi ? •  Date et lieu de naissance : •  Mon (mes) état(s) civil(s), mon, ma, mes conjoint(s, e, s), enfant (s) : •  Ma taille, mon poids, mon tour de taille, de cou, de tête, la pointure de mes souliers, de mes gants : •  Ma (mes) maladie(s) héréditaire(s) possible(s) : • Mes études primaires, secondaires, universitaires, postuniversitaires, professionnelles : •  Mes diplômes, ma profession : •  Mon éducation, ma culture : HISTORIQUE •  Nom et prénom de jeune fille de ma mère : date et lieu de naissance : •  Nom et prénom de mon père : date et lieu de naissance : •  Mes sœurs, mes frères : date et lieu de naissance :   Où je me situe par rapport à eux ? •  Mes grands-parents maternels : mes grands-parents paternels : •  Mes origines maternelles : mes origines paternelles : •  Ma (mes) langue(s) maternelle(s) : PRÉFÉRENCES •  La couleur que je préfère : •  La fleur qui me fascine : •  L’animal que j’apprécie le plus : •  Une odeur qui m’attire : •  Mon passe-temps favori, mon sport préféré : •  Le pays, la ville où j’aimerais vivre : •  Un livre qui m’a particulièrement emballé : •  Le quotidien, l’hebdomadaire que je lis régulièrement : •  L’(les) émission(s) TV que je suis assidûment : •  Mon meilleur moment de la journée :

Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ?

FRUITS de mon TRAVAIL •  Le choix de mon habitation : •  Mon moyen de transport le plus utilisé :

Pourquoi ? Pourquoi ?

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•  Suis-je content de mes revenus ou pas ? Pourquoi ? •  Mes heures de travail sont-elles suffisantes ou non ? Pourquoi ? •  Ma (mes) montre(s), mon (mes) parfum (s), ma (mes) collection(s). Pourquoi ? •  Qu’est-ce que je pense des biens matériels en général et des miens en particulier ?Pourquoi ? •  Si mon logement brûlait, qu’emporterais-je comme bien matériel ? Pourquoi ? MORALE •  Une chose interdite que j’ai faite et qui étonnerait mes proches ? •  Âge minimum pour la première relation intime ? Quel âge avais-je la première fois ? •  Sur quel(s) sujet(s), quand et pourquoi je me mens à moi-même ? •  Une personne que j’ai tuée en pensées • Une dépendance, une addiction dont j’ai de la peine à me débarrasser. Drogue(s), alcool(s), tabac, nourriture, médicaments… que je prends régulièrement sans pouvoir m’arrêter ? Si oui, pourquoi ? •  Pourrais-je frapper un enfant, une femme, un homme ? Si oui, pourquoi ? •  Pourrais-je diffamer, calomnier ? Si oui, pourquoi ? •  Pourrais-je violer ? Si oui, pourquoi ? •  Pourrais-je prendre la femme, le mari d’un ami(e) ? Si oui, pourquoi ? SPIRITUALITÉ •  Ai-je une spiritualité ou une vie intérieure ? Quel genre et pourquoi ? Estelle reliée à une religion institutionnelle ? • Est-ce que je crois en Dieu, Allah, Yahvé, Jésus, Vishnou, Bouddha ou autres ? Pourquoi ? •  Que m’apportent spiritualité, vie intérieure, croyances dans ma vie de tous les jours ? •  Quelle est ma référence dans ma spiritualité ou vie intérieure : Dieu, Jésus, Socrate, Allah, Mahomet, Bouddha, Yahvé, Krishna ou autres ? •  Quelle est ma religion institutionnelle ? Je pratique ma foi, une fois par jour, plusieurs fois par jour, une fois par semaine, ou dans chaque instant de ma vie ? •  Suis-je en relation avec l’énergie divine d’amour ? •  À quoi sert ma vie ? À quoi cela sert de vivre ?

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OPINIONS •  Que pourrais-je faire pour réduire la pauvreté dans le monde ? Pour réduire le racisme ? Pour protéger l’environnement ? Pour interdire le port d’armes, sauf pour les sportifs, les chasseurs et les policiers  ? Pour qu’il n’y ait plus d’armée dans le monde entier ? Pour qu’il n’y ait plus de guerre, de torture ? Pour que le meurtre, la violence, la délinquance diminuent ? •  Pire crime contre l’humanité ? •  Pire crime politique ? •  Punition minimale et maximale pour les pédophiles, les violeurs ? •  Qu’est que je pense de l’armée ? Combattrais-je si cela était nécessaire ? AMIS •  Quels sont mes critères pour le choix d’un(e) ami(e) ? •  Jusqu’où peut aller mon amitié ? •  Mon amitié est-elle la même avec un homme ou une femme ? Pourquoi ? •  Pourrais-je tout partager avec lui ou elle, tout entendre, tout dire ? •  Son aspect physique est-il important dans ma relation avec lui ou elle  ? Et quel est-il ? •  Quelles sont les qualités fondamentales pour une amitié durable ? FAMILLE • Trois choses que j’aime (ais) chez ma mère. Trois choses que j’aime (ais) chez mon père. À laquelle des deux questions ai-je répondu le plus vite et le plus facilement ? •  Trois choses que je n’aime (ais) pas chez ma mère. Trois choses que je n’aime (ais) pas chez mon père. À quelle question ai-je répondu le plus facilement ? •  Traits physiques ou de caractère que j’ai hérités de ma mère. Traits physiques ou de caractère que j’ai hérités de mon père ? •  Mes parents ont-ils passé assez de temps avec moi ? •  Le plus beau souvenir ? •  Le plus mauvais souvenir ? •  Ma mère m’a-t-elle dit assez je t’aime ? •  Mon père m’a-t-il dit assez je t’aime ? •  Et moi, le leur ai-je suffisamment dit ? •  À qui je ressemble le plus ? •  Mes grands-parents, mes tantes, mes oncles, mes cousins (-es). Mes relations avec eux ? Qui je préfère ? Qui je déteste ? Qui prendrai-je parmi eux comme ami(e) ?

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CE QUE J’AIME et CE QUE JE N’AIME PAS •  Dans ma vie intérieure ? Dans ma spiritualité ? Dans ma vie émotionnelle ? •  Dans ma vie amoureuse ? Dans ma vie de parent ? Dans mon couple ? •  Dans ma vie professionnelle ? Dans mes activités annexes ? Dans mes loisirs ? •  Dans mes activités sportives ? ÉGO ou FAUX MOI (On pourrait l’apparenter au sur-moi de Freud) •  Qu’est-ce que je pense de moi ? Qu’est-ce qui a influencé l’idée que j’ai de moi : famille, éducation, instruction, culture, religion… ? •  Cette idée que j’ai de moi, est-ce vraiment mon moi profond ou mon soi ? Mon vrai moi ? •  Est-ce que je ne réagis pas trop souvent de manière épidermique pour protéger mon image, mon égo ? Pourquoi, quand et comment ? •  Ai-je déjà senti que mon égo était une prison que je devais défendre coûte que coûte mais qui ne correspondait pas à ce que j’étais en vérité ? •  Qu’est-ce que je fais pour trouver mon vrai moi, mon soi ? •  Vais-je accepter de lâcher beaucoup de choses auxquelles mon égo semble tenir énormément pour enfin trouver mon vrai moi, mon soi ? MES ÉMOTIONS • Positives  : de joie, de paix, de sérénité, d’amour, d’amitié, de satisfaction personnelle, professionnelle ? Quand, comment, pourquoi ? •  Négatives : de peine, de tristesse, de frustration, de colère, d’envie, de jalousie ? Quand, comment, pourquoi ? MON PSYCHISME •  Est-ce que je me sens bien dans ma peau ? Équilibré ? •  Suis-je anxieux ? • Ai-je des troubles de l’humeur  : un peu déprimé parfois, un peu exalté d’autres fois ? •  Ai-je une tendance à la dépression ou à l’humeur noire ? •  Suis-je intro- ou extraverti ? •  Ai-je des troubles de persécution ou de mégalomanie (folie des grandeurs) ? •  Ai-je des tendances : –– obsessionnelles ? (le perfectionnisme, par exemple) –– narcissiques ? (aimer démesurément son image) –– asociales ? (sauvage, sans remord) –– dépendantes ? (à des substances ou à des individu(e)s)

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–– borderline ? (j’aime, un moment après, je n’aime pas la même personne, je la porte aux nues, puis en enfer) –– histrioniques ? (ou hystériques, veut absolument qu’on la remarque et fait tout pour) MES PEURS • Quelles sont mes peurs  : physiques  ? psychiques  ? existentielles  ? relationnelles ? amoureuses ? sexuelles ? professionnelles ? •  Quand, comment, pourquoi ? MES SOUVENIRS • Quels sont mes plus beaux souvenirs  : de mon enfance  ? de mon adolescence ? actuels ? Et pourquoi ? •  Quels sont mes plus mauvais souvenirs : de mon enfance ? de mon adolescence ? actuels ? Et pourquoi ? MES VŒUX, MES RÊVES •  Qu’aimerais-je être comme : homme, femme, conjoint(e), père, mère, fils, fille, petit-fils, petite-fille…, personne physique : plus beau, plus grand, plus mince… •  Quels sont mes souhaits, du plus intime au plus extérieur ? •  Voyager : pourquoi ? •  Tout quitter et changer de mode de vie ? Pourquoi ? •  Vivre autrement ? Pourquoi ? • Me sentir vivre simplement ici et maintenant, vivre le moment présent  ? Pourquoi ? •  Avoir une maison, une résidence secondaire, un bateau… Pourquoi ? MA SEXUALITÉ •  Qu’est que la sexualité pour moi ? •  Suis-je un sexuel compulsif ? •  Suis-je un accro du sexe ? •  Pour moi, la sexualité fait-elle partie intégrante de l’amour ? •  Est-elle un partage physique ? •  Est-elle un abandon total à l’autre ? •  Est-ce que j’essaie de donner autant que j’espère recevoir ? •  Tendresse, douceur, douce violence font-elles partie de ma sexualité ? •  N’ai-je que des relations mécaniques ? •  Tout est-il permis dans la sexualité ? •  Quelles sont les limites à mes fantasmes ? •  Jusqu’où peut aller ma sexualité sans devenir perverse ?

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Si vous avez répondu à 150 ou mieux encore à 160 de ces 187 questions, franchement, sans complaisance, et en fouillant un peu dans votre inconscient, vous pouvez prétendre vous connaître assez bien. Vous pourrez aussi peut-être déjà voir certains domaines où vous pourriez approfondir vos connaissances sur vous pour plus de liberté dans votre vie. Vous connaissant mieux, vous comprenant mieux, étant plus libre, vous arriverez à mieux connaître et comprendre les autres, et ainsi à devenir un peu plus mature, un peu plus interdépendant. Pour encore affiner votre connaissance de soi, nous allons examiner différents paramètres, tel l’être et le faire (avoir-argent), le conscient et l’inconscient, la personne et les personnages que nous jouons, la personne et les personn-âges ou attitudes qui collent encore à notre peau depuis l’enfance ou l’adolescence. Nous terminerons par la paix intérieure qui nous fera prendre conscience de notre interdépendance, car si nous nous connaissons mieux, ce n’est pas seulement pour nous-même, mais aussi pour les autres.

Être – faire (avoir-argent) Krishnamurti, un des plus grands penseurs du xxe siècle, a écrit  : «  Être, c’est ne pas penser  ». Eckhart Tolle, spiritualiste contemporain, dit la même chose, en rajoutant que notre mental peut être un outil remarquable quand il est utilisé à bon escient. Nous essayerons de suivre ce dernier tout en étant d’accord avec le premier. Quant au faire, nous sommes dans une société du faire pour le faire, de la technologie et de la technique sans savoir toujours à quoi cela va-t-il enfin vraiment servir, de la consommation à outrance avec ses montagnes de déchets. Nous pouvons aussi très bien suivre cette tendance sociétale dans le non-respect de l’écologie de notre planète qui devrait pourtant être une de nos priorités actuelles. Pour atteindre une certaine harmonie dans notre vie de tous les jours et à notre niveau, il nous faut tenir compte aussi bien du faire que de l’être. Des moines chrétiens et bouddhistes que j’ai fréquentés ont pour tâches, l’oraison, la méditation, l’étude (c’est l’être), et les travaux pratiques, manuels ou artistiques (c’est le faire). Ils vivent souvent en se suffisant à eux-mêmes en vendant le produit de leur travail. Loin de moi, l’idée de vivre comme des moines, mais

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je crois qu’ils ont su garder un certain bon sens que nous pouvons parfaitement garder dans nos vies. Il faut donc rechercher aussi dans notre profession un certain équilibre entre le fait d’être, de penser, de réfléchir consciemment ou inconsciemment et le fait de faire, de réaliser le produit de notre réflexion et de le vendre Trop de médecins-dentistes sont prisonniers du « faire », au risque de ne pas réfléchir assez avant de prendre leurs instruments. Et, les ennuis commencent… très vite. Et surtout, quand on sait que cette obsession du « faire » est en partie une question de rendement à l’heure ! Nous pensons que nous sommes tous victimes de notre trop gros attachement à l’argent et à tous les produits qu’il peut nous procurer. Et pour finir, nous devons travailler, travailler pour payer ceci ou cela et la spirale du surtravail commence à nous aspirer. Pour finir, nous en venons à détester notre profession avec tout le chapelet des pathologies physiques et psychiques qui s’y rapportent  ! Si nous parlons de cette spirale c’est que nous avons déjà perdu plusieurs confrères de cette manière. C’est le lot de nombreux individus appartenant aux professions libérales ! Il vaudrait la peine de réfléchir à ce qu’on veut vraiment : être le plus riche du cimetière ou jouir de sa profession tout au long de sa vie professionnelle et d’en vivre bien confortablement. Un ami psychanalyste me disait en parlant des professions médicales : « Si tu aimes ton travail, si tu réfléchis à ce que tu vas faire, si tu es présent dans ce que tu fais et si tu sais écouter tes patients, l’argent viendra tout seul. » Nous voyons bien là les relations qui existent entre l’être, le faire, l’avoir et l’argent. Mais si certains ne s’occupent que du rendement et en oublient le fait de penser, de réfléchir et les relations humaines, à moyen terme et, à plus forte raison, à long terme, ils ne fidéliseront ni leurs patient, ni leur personnel et risquent le burn-out ou d’autres pathologies plus sérieuses. Heureusement, nombreux sont nos confrères qui parviennent très bien à amalgamer le tout. C’est avant tout un choix de société que nous avons à faire. Exemple : Dans notre profession, à force de faire de la prothèse, de la chirurgie, etc., sans se donner la peine de penser, de réfléchir à chaque cas, en définitive d’être (car si la pensée et la réflexion sont en partie conscientes, une grande partie de ces dernières, peut-être plus grande que l’on ne pense, est inconsciente, latente), on finit par commettre des erreurs, par s’épuiser mentalement

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et physiquement et par être dégoûté de sa profession, car on ne se sent plus vraiment exister. Exercice : À la fin de ma journée de travail d’aujourd’hui, je me pose deux questions : –– Qu’est- ce que j’ai fait techniquement qui m’a donné satisfaction ? –– Comment est-ce que je me sens par rapport à mes patients, mon personnel, mon cabinet, ma profession ? NOTRE BONHEUR TIENT AU FAIT D’AVOIR UN ÉQUILIBRE, UNE HARMONIE ENTRE L’ÊTRE ET LE FAIRE, ENTRE L’ÊTRE ET L’AVOIR

Le deuxième paramètre, connu et archiconnu de tous est la notion de conscient et d’inconscient proposée par Freud et toute l’équipe qui a vu naître la psychanalyse à la fin du XIXe, et au début du XXe siècle. Cette nouvelle découverte fit l’effet d’une bombe dans la très catholique et antisémite ville de Vienne, et surtout venant d’un homme athée et d’origine juive ! Et pourtant, plus de cent ans après sa découverte, cette technique d’analyse des profondeurs de l’être humain reste toujours valable, avec les bémols que la pratique nous a amené à faire. Bien sûr, d’autres approches, comme les psychothérapies cognitivo-comportementales, d’inspiration psychanalytique, l’analyse transactionnelle, la programmation neurolinguistique, la Gestalt-thérapie, l’écoute active, la communication non violente, la psychologie humaniste…, citées ici en vrac et sans ordre, ont à faire de loin ou de près à cette idée du conscient et de l’inconscient.

Conscient – inconscient Que savons-nous exactement des entités « Conscient et Inconscient » ? C’est plus simple et plus clair de vous le présenter sous la forme d’un schéma (Fig. 3). Comme on le voit, le Faire (l’agir, la réalisation), le Dire (les discours, exprimés par des regards, des mimiques, des vêtements) et la moitié du Penser (la réflexion consciente, construite) sont dans la zone consciente ou patente. L’autre partie du Penser (fait partie des choses qui sont conduites par mon inconscient), la Boîte à images (rêves, lapsus, actes manqués, fantasmes, inconscient incontrôlé) et le Ressenti (mes états d’âme) sont dans la partie inconsciente ou latente. Mais cela

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n’est pas quelque chose de bien défini, car il y a des interactions entre toutes les sphères et de toutes les sphères avec le centre MOI (ce qui est indiqué par les flèches noires pleines et les flèches noires pointillées). Si bien que la suite logique 1, 2, 3, 4, flèches noires pleines est illusoire ou, en tous cas, sujette à controverses.

FAIS

4 DIS 3

CONSCIENT

PENSE

MOI

INCONSCIENT BOÎTE À IMAGES

SENS RESSENS

2

La moitié de ce que je pense est inconsciente

1

Fig. 3  Conscient et inconscient

Exemple : Lorsque l’on étudie un cas dentaire sur un articulateur, une partie de nos pensées sont du raisonnement conscient, construit, alors que l’autre partie de nos pensées est formée d’idées qui jaillissent sans qu’on le veuille (pensées inconscientes). Une autre manière de le dire serait de différencier les déductions de l’intuition. Ce sont d’ailleurs souvent ces pensées inconscientes, intuitives qui nous apportent la solution. N’oublions pas de les écouter. Exercice : Vos rêves, vos lapsus, vos actes manqués, vos fantasmes vous révèlent une partie de votre inconscient. Essayez de les noter au réveil et de les analyser (plus tard dans la journée, si vous n’avez pas le temps tout de suite) pour voir ce qu’ils veulent dire dans votre vie, selon votre propre symbolique, car vos rêves ne sont vrais que pour vous. Et quelle idée a-t-on du fonctionnement entre ces deux entités ? Nous prendrons comme option la théorie de Freud sur le fonctionnement de l’appareil psychique, qui a le mérite d’être simple, compréhensible par tous

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et toujours adéquate dans les grandes lignes. Bien sûr, les neurosciences et les nouvelles pratiques psychologiques ont affiné ces données, mais, l’essentiel reste toujours vrai. Freud distinguait un point de vue économique (ou dynamique ou encore comment cela se passe entre le conscient et l’inconscient) et un point de vue topique (ou statique ou encore où se trouvent les différents éléments de ces deux parties) du fonctionnement de l’appareil psychique.

Point de vue économique (ou dynamique) Inconscient

L’appareil psychique est capable d’une activité psychique grâce à l’énergie psychique que sont les PULSIONS. Deux grandes pulsions régissent toutes les autres  : les pulsions de vie (l’amour par exemple) et les pulsions de mort (la haine par exemple) L’activité psychique a pour but de trouver le plaisir et d’éviter le déplaisir en déchargeant l’énergie pulsionnelle Principe de plaisir (P.P) – inconscient

L’appareil psychique doit distinguer les exigences du monde intérieur (P.P) de celles du monde extérieur, qui est le principe de réalité (P.R). Principe de réalité (P.R) – conscient

D’où CONFLITS que peut engendrer la haine (P.P), qui peut, elle, aboutir au meurtre. Le P.R l’emportera heureusement la plupart du temps et chez la plupart des gens, mais le fil est parfois ténu et nous savons les horreurs dont nous abreuvent les médias.

Points de vue topiques Première topique INCONSCIENT

L’inconscient est seul capable de rendre compte des rêves, des fantasmes, des lapsus, des actes manqués et des symptômes des troubles anxieux et dépressifs.

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C’est le lieu du REFOULÉ : toute action comporte des frustrations que l’on refoule consciemment ou inconsciemment. Ce qui crée des scories dans les cas les plus simples (les différentes interdictions dues à la vie en commun, par exemple), et des impressions, beaucoup plus néfastes que les scories (par exemple le manque d’amour dans l’enfance) qu’il nous faudra un jour ou l’autre jeter dehors sous forme de colères, de conflits, d’expressions, de confidences, autrement dit il faudra « VIDER SON SAC » EN SACHANT QU’ON LE VIDE de ses scories et surtout de ses impressions (très pathogènes physiquement et psychiquement). Par exemple : le père ou la mère, voire les deux, ont privé d’amour leur fils ou leur fille. L’enfant, pour ne pas trop souffrir, va refouler ce sentiment de manque. Puis en grandissant, il verra que les autres ont parfois des parents plus aimants, le manque va se faire sentir encore plus fortement et, à l’adolescence, tout va exploser, car l’adolescent attribuera tous ses échecs à ce manque et il saura qu’il faut qu’il le dise, qu’il le crie. Il ne sait pas le faire encore autrement que violemment. L’écoute et le pardon des parents seront alors fondamentaux pour fermer cette blessure. C’est exactement le même principe qui régit toute psychothérapie. CONSCIENT

CONFLITS : l’adolescent ci-dessus peut avoir de la haine envers son père ou sa mère jusqu’à vouloir les tuer, mais normalement, le principe de réalité, avec toutes ses raisons, va l’amener à ne pas le faire. Dans la réalité, malheureusement, cela arrive parfois, surtout si l’adolescent souffre de troubles psychotiques (paranoïa, schizophrénie)  ; il peut alors passer à l’acte. De nombreux cas ont été suffisamment décrits dans les médias. Deuxième topique INCONSCIENT

ÇA = pulsions, contient le refoulé

MOI

{

entre INCONSCIENT et CONSCIENT, médiateur entre les principes de plaisir et de réalité se développe au contact de la réalité extérieure, dépend du ÇA et du SUR-MOI

CONSCIENT

SUR-MOI  =  censeur par rapport à mon intégration des exigences et des interdits des parents, de la société, de la scolarisation, de l’instruction, des religions, des cultures…

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Ces deux points de vue nous montrent bien l’interaction entre l’inconscient et le conscient. Notre inconscient enregistre tout, voit tout, entend tout, sent tout et le garde en mémoire, le bon comme le mauvais. Il n’a aucune morale, aucun tabou. Il est imaginatif, créatif, libre. C’est par un travail d’analyse et de paroles dites en le sachant que nous arriverons à faire sortir de notre inconscient le mauvais enregistré et refoulé. Notre conscient est beaucoup plus limité, moins imaginatif, moins libre, car trop obsédé par la réalité du monde visible. Mais la conversation entre les deux doit se faire forte et ainsi serons-nous réalisés. C’est au fond le commerce entre le cerveau gauche, le conscient, et le cerveau droit, l’inconscient (Fig. 4). On peut aussi comparer la coexistence du conscient et de l’inconscient en faisant référence à l’image de l’iceberg où les 9/10 (l’inconscient) sont cachés sous l’eau. Le 1/10 apparent de l’iceberg est comparé au conscient (Fig. 4).

Iceberg humain dit psychologique

Conscient

CONSCIENT

Préconscient

INCONSCIENT

Subconscient

Inconscient

Inconscient collectif

Fig. 4  Iceberg humain, dit psychologique

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Conscient  : un des 5 niveaux de l’organisation et du fonctionnement de l’appareil psychique (conscient, préconscient, subconscient, inconscient, inconscient collectif). Le système conscient est celui qui reçoit les informations émanant de l’intérieur ainsi que celles venant du monde extérieur. Préconscient : système qui regroupe toutes les représentations ou contenus qui ne sont pas présents dans le champ de la conscience, mais qui peuvent y accéder (par exemple : évoquer un souvenir est faire passer au niveau conscient un contenu préconscient). Subconscient : qui est faiblement ou partiellement conscient. Se dit d’un fait psychologique qui échappe à la conscience. Processus mentaux peu accessibles à la conscience. Inconscient  : ensemble des éléments exclus de la conscience par un processus de refoulement. Ces éléments peuvent émerger au niveau conscient par le biais de formations substitutives dont le symptôme est le meilleur exemple. Inconscient collectif : nager, grimper, chasser, besoin d’absolu, culte des morts, procréation, réflexes de survie, vieilles coutumes, vieilles habitudes religieuses… (Tiré du Larousse Médical) Nous venons de voir l’iceberg humain avec ses cinq parties très bien délimitées pour des besoins didactiques, mais qui, en réalité, le sont un peu moins. Mais maintenant, osons mettre d’autres mots, d’autres concepts, dans la partie consciente et inconsciente d’un iceberg humain psychologique vu sous un autre angle. Partie consciente

La partie consciente est la partie évidente, patente, logique. C’est le langage verbalisé. C’est la logique d’exclusion (blanc ou noir), monocausale, monoconséquente. C’est le domaine de la raison. C’est aussi l’éducation que l’on veut apporter à ses enfants et celle que l’on a reçue. C’est le cerveau gauche.

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Partie inconsciente

La partie inconsciente est la partie cachée, latente, psychologique. C’est le silence. C’est la logique d’intégration (blanc et noir), pluricausale, pluriconséquente. Ce sont nos besoins physiologiques et de sécurité qui font partie de nos besoins fondamentaux biologiques. Ils ont été exploités par Abraham Maslow dans sa fameuse pyramide ou échelle des besoins que nous allons voir ci-après (Fig. 5). Il fut avec Carl Rodgers l’un des plus grands psychologues contemporains de l’être (psychologie humaniste). Ce sont aussi les motivations profondes. C’est la balance entre les désirs et les craintes, entre les pulsions et les répulsions. Ce sont aussi les 75 % des tendances profondes qui se sont déjà bien installées avant l’âge de trois ans ; c’est d’ailleurs à ce moment que l’on devient unique. C’est le lieu des instincts : le ça de Freud, les instincts permanents comme la respiration ou les instincts occasionnels comme la nage. L’hérédité biologique et psychologique en font partie. C’est notre cerveau droit, encore si mal exploité. Exemple : Si l’on refoule ses désirs et ses craintes, on peut développer des maladies somatiques et psychiques. Comment procéder pour faire venir à la conscience tout ce refoulé ? Cela peut surgir sous forme de colères, même parfois violentes, de confidences, « de vider son sac », de parler en sachant qu’on se libère de quelque chose de pesant et de douloureux qui souvent nous empêchait d’aller plus avant. Si l’on a de la chance d’avoir sous la main une grande oreille (parent, ami(e), conjoint(e), psychothérapeute, etc.) qui pratique l’écoute active, cela ira plus vite et sera plus rassurant. Faites une fois l’expérience et vous verrez la différence avant et après. Exercice : Essayez de voir, par autoanalyse, quels sont vos besoins non satisfaits et voyez pourquoi ils ne le sont pas et le restent. Dans la partie inconsciente de cet iceberg humain vu sous un angle différent, nous avons mentionné le psychologue de l’être, Abraham Maslow.

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Fig. 5  Pyramide ou échelle des besoins de MASLOW, tirée du net, site : images correspondant à la pyramide de Maslow.

Quatre livres, traduits en français : « MASLOW A. Vers une psychologie de l’être. Fayard, Paris, 2001 ; MASLOW A. L’accomplissement de soi. Eyrolles. Paris, 2004 ; MASLOW  A. Être humain  : la nature et sa plénitude. Eyrolles, Paris, 2006  ;

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MASLOW  A. Devenir le meilleur de soi-même  : besoins fondamentaux, motivation et personnalité. Eyrolles, Paris, 2008  », nous donnent déjà un petit survol de sa pensée. Nous ne voulions pas passer à côté de sa pyramide des besoins (Fig. 5), car elle résume très bien l’évolution que vous devriez favoriser pour le personnel soignant afin qu’il devienne très performant. Essayez, vous ne serez pas déçu ! Exemple : Avec vos assistantes dentaires, si leurs besoins biologiques et de sécurité ne sont pas couverts (respect de la personne, travail en harmonie, horaires et vacances réguliers, salaire convenable…), il est illusoire d’attendre d’elle plus que le minimum ! Exercice : Suivez pas à pas cette pyramide pour examiner si votre assistante dentaire a tout ce qu’il lui faut pour évoluer vers le bonheur de travailler dans son métier, dans votre cabinet, et enfin de prendre les bonnes initiatives ? Tirez-en vousmême les conclusions de ce que vous pourriez faire pour aider votre assistante dentaire à sortir de sa bulle de personne incompétente, peu sûre d’elle-même. On peut aussi étudier la partie consciente et inconsciente sur un iceberg humain dit philosophique, qui met en lumière le fait, que les grands génies se trouvaient plutôt dans la partie inconsciente ! Partie consciente

Nous trouvons, bien sûr, les sciences exactes avec leurs admirables certitudes ! La logique d’Aristote ou de Descartes. La logique formelle qui affirme, dualiste (A ou B), bidimensionnelle (A ou B), monosignifiante (A = B), de non contradiction (A = non A), d’exclusion (l’un ou l’autre, noir ou blanc). Cette partie consciente nous apparaît fermée, rigide, figée, morte Elle représente le cerveau gauche. Partie inconsciente

Il y a les sciences conjecturales avec leurs incertitudes. C’est le domaine de Pascal, Galilée, Copernic, Leonard de Vinci, Hegel, Kierkegaard, Einstein, Planck…C’est la logique informelle qui doute, multidimensionnelle (A, B, C…), plurisignifiante (A  =  B, C, D…), d’intégration, d’interpénétration (A+B+C, l’un et l’autre, tout intégrer même la contradiction comme je t’aime, je ne t’aime pas, j’espère, je redoute).

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C’est une partie vivante, imaginative, intuitive qui bouscule, remet toujours tout en question. C’est le cerveau droit. C’est aussi la phrase : « Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît pas. » Les deux sont utiles, mais dans notre monde occidental, on privilégie encore trop la partie consciente, alors que dans le monde oriental, c’est le contraire pour l’instant. Exemple : De très nombreux génies ne seraient jamais devenus tels, s’ils n’avaient pas, à un moment donné, suivi la partie inconsciente (De Vinci, Galilée, Flemming, Einstein, Planck, Drewermann, des musiciens, des peintres, des architectes…). 75 % des grandes découvertes arrivent lorsque la partie consciente fait silence ! Exercice : Dans votre vie, suivez-vous souvent votre intuition, qui se trouve dans la partie inconsciente ? Pourquoi oui, pourquoi non ? L’intuition se trompe rarement, comme si, inconsciemment, nous savions très bien ce qui est bon pour nous et pour les autres. C’est très souvent la raison qui vient alors perturber cet état d’esprit et conduit à l’échec. Une autre orientation dans la recherche de soi va nous amener à nous démasquer ! Sommes-nous toujours nous-même dans la vie ? Qu’est qui nous entraîne à vouloir être autrement que nous sommes, à porter des masques, à jouer des rôles… ? De très nombreux facteurs, comme la peur de ne pas être assez bien, de ne pas être aimé, si on se montre tel que l’on est… ?

Personne – personnages À certains moments de notre vie, nous jouons tous des rôles, portons tous des masques. Quelquefois, nous le devons. Il est donc très important de savoir que, dans ces moments-là, nous jouons un rôle ou portons un masque, sinon nous finirons par confondre notre rôle avec notre véritable moi. C’est alors l’aliénation. Il est donc vital que nos rôles, nos masques ne s’éloignent pas trop de notre zone d’authenticité ou alors que nous en soyons conscient (Fig. 6). C’est tellement plus simple et plus confortable d’être soi-même. Et le vrai moi de Freud ou le soi de Jung est tellement mieux que ce qui peut être pensé. À ne pas confondre avec l’égo, ce faux moi, le sur-moi de Freud, qui nous pourrit souvent la vie.

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HARMONIE ET EFFICACITÉ AU CABINET DENTAIRE

ZONES D’AUTHENTICITÉ

MOI

Mon, mes PERSONNAGE(S), Fonctions, Masques, « PAR ÊTRE »

Plus l’écart est grand entre l’être et le par être, plus l’ALIÉNATION est grande

Fig. 6  La personne et ses personnages

«  N’est-il pas intéressant que le sens étymologique du mot latin persona est exactement « masque de théâtre » ? Ce furent des masques à bouche en entonnoir, comme un mégaphone, pour se faire entendre dans le brouhaha du théâtre antique (d’où le son dans le mot per-sona). Le mot devint rapidement un pars pro toto pour les caractères que ces masques représentaient dans la pièce, ce qui finit par donner notre sens courant du mot « personne » pour un être humain dans son intégrité psychophysique » (TASMAN W, médecindentiste et philosophe). Exemple : Avec vos assistantes dentaires, ne serait-il pas plus simple d’être ce que l’on est vraiment, plutôt que de vouloir porter le masque du patron, de celui qui sait tout. Exercice : Essayez d’être vraiment vous-même et voyez ce qui se passe. Pour approfondir encore un peu plus notre connaissance de soi, un sujet intéressant peut nous y aider : voir les aspects psychologiques que nous avons gardés de l’enfance ou/et de l’adolescence. On peut être surpris de ne pas se trouver si adulte que ça  ! Pas si grave quand on en est conscient. Mais autrement…

Connaissance de soi

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Sur le schéma ci-dessous, figure 7, on voit bien deux aspects de l’âge : l’un, chronologique est irréversible, l’autre, psychologique est fluctuant. On peut ainsi trouver des personnes en âge chronologique adultes, mais qui présentent des facettes infantiles ou juvéniles ou les deux.

Personnes – personn - âge ÂGES (aspects chronologiques)

ÉTATS (représentant la chronologie)

ADULTE

INTERDÉPENDANCE

NON CONFORMISTE original, unique

ADOLESCENCE puberté

ENFANCE

ANTICONFORMISTE juvénile

CONTREDÉPENDANCE

DÉPENDANCE

CONFORMISTE infantile

Fig. 7  Personnes : âges et états

Exemple : Lorsque nous rabaissons, humilions quelqu’un ou que nous nous laissons emporter par la colère, n’est-on pas juvénile ? Encore des ados ? Lorsque nous avons de la peine à sortir de nos règlements, de nos rites, de nos pratiques, ne sommes-nous pas dépendants, donc infantiles ? Exercice : Essayez de voir à l’aide de ce schéma et de ce qui est écrit ci-dessous ce qui vous reste d’infantile, de juvénile. En étant conscient de ces états, vous pourrez sûrement amoindrir ces défauts ou les garder, mais en le sachant. Enfance

ÂGE RÉEL ASPECTS DOMINANTS : dépendance.

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Assimilation maximale, rêves, jeux (l’enfant joue pour vivre), recule devant les difficultés. BESOINS : sécurité. QUALITÉ ESSENTIELLE : spontanéité. ÉTATS PSYCHOLOGIQUES PERSONNELS : n’ose pas, passe inaperçu, n’a pas le sens des responsabilités, a besoin d’un maximum de sécurité, a une vue distordue du monde, obéissant, servile, naïf. PROFESSIONNELS : aime la routine, favorise l’ennui parmi ses collaborateurs, prend difficilement des décisions, autorité du type autruche : je ne veux pas le savoir. EXTRÊMES : alcool, drogues, suicide, schizophrénie. Adolescence

ÂGE RÉEL ASPECTS DOMINANTS : contre-dépendance. À grandi, phase d’idéalisation, veut l’homicide psychologique des parents, joue à vivre BESOINS : écoute. QUALITÉ PRINCIPALE : enthousiasme. ÉTATS PSYCHOLOGIQUES PERSONNELS  : conteste pour tout et souvent pour un rien, anticonformiste, violences verbales et corporelles, exhibe ses sentiments au vu de tous. PROFESSIONNELS : pinailleur, râleur, saboteur, pousse souvent à la grève. EXTRÊMES : dopage, guerres, révolutions. Adulte

ÂGE RÉEL ASPECTS DOMINANTS : interdépendant. Original, unique, non-conformiste et libre.

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BESOINS : partage. QUALITÉ PRIMORDIALE : créativité POINTS FORTS PERSONNELS  : mène sa vie à sa manière, tout en voyant les points de vue des autres, se réalise et aide les autres à se réaliser, responsable, relativise, sait prendre du recul, suit ses intuitions tout en se servant de sa raison, s’engage pour plus d’humanité dans le monde selon ses possibilités. PROFESSIONNELS  : responsable, prend ses décisions après avoir consulté ses collaborateurs, est un véritable partenaire, sait écouter, sait déléguer, souriant, ferme tout en faisant preuve de patience, aide, montre l’exemple. Pour lui, l’argent n’est qu’un moyen. Sait attribuer salaires, congés, récompenses selon les résultats, les compétences, les efforts. Bon patron, bon collègue. Maintenant, vous avez une meilleure idée de vous, vous savez davantage qui vous êtes. Vous voyez aussi toutes les possibilités de vous améliorer, de vous modifier, d’évoluer : cela peut faire mal, cela peut prendre du temps. Mais en définitive, on est tellement mieux que ce que l’on croit, car notre vrai moi est relié à l’énergie divine qui est AMOUR, JOIE et PAIX (Marshall Rosenberg, Eckhart Tolle). Et nous avons employé des moyens simples, accessibles à tous !

Avant de terminer ce chapitre sur la connaissance de soi, nous aimerions vous laisser cette page sur la paix intérieure que vous ressentirez un peu plus, vous connaissant mieux.

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HARMONIE ET EFFICACITÉ AU CABINET DENTAIRE

Qu’ont-ils de particulier ceux qui recherchent et pratiquent la PAIX INTÉRIEURE (Hésychasme) 1 Elles-ils se simplifient la vie, ont tendance à agir spontanément, plutôt qu’en réaction à des peurs, résidus d’expériences précédentes 2 Voient leurs problèmes sous un autre angle : perdant la crainte du jugement des autres, perdant même intérêt à leurs propres jugements et culpabilités, ils cessent d’interpréter les actions des autres 3 Rétablissent l’équilibre, jouent leur propre jeu avec de moins en moins de compétition et de conflits 4 Avec moins de capacité de s’inquiéter, libèrent du temps pour ce qu’ils considèrent comme essentiel : se regardent avec bonté dans le miroir de leur conscience, se découvrent et vivent de fréquents et irrésistibles moments d’autovalorisation secrète et modeste 5 Privilégient les solutions élégantes, avec le plein sentiment d’être connectés aux autres et avec la nature, s’imaginent avoir cent ans devant eux, et tout le temps de vivre de mieux en mieux. Redonnent sa place à la lenteur, et donc gagnent en rapidité avec une tendance à laisser les choses se faire plutôt que de les forcer 6 Ont de fréquentes attaques de sourires qui viennent du cœur et s’expriment par le regard 7 Une prédisposition augmentée à pardonner, aimer et bénir les autres, un incontrôlable besoin d’étendre cet amour toujours plus, et de plus en plus joyeusement

Références D’ANSEMBOURG T. Cessez d’être gentils, soyez vrais ! Être avec les autres en restant soi-même. Les éditions de l’Homme, Montréal, 2004. ARKADY E. Oser être soi. Éditions Jouvence, Montréal, 2002.

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BOURBEAU L. Cinq blessures qui empêchent d’être soi-même. Éditions ETC, INC, Québec, 2000. CHAN KHONG (sœur bouddhiste). La force de l’amour. Albin Michel, Paris, 2008. CORNEAU G. La guérison du cœur. Robert Laffont, Paris, 2000. CYRULNIK B. Vilains petits canards. Éditions Odile Jacob, Paris, 2002. Un merveilleux malheur. Éditions Odile Jacob, Paris, 2003. DALAÏ LAMA. La voie de la félicité. Éditions Ramsay, Pocket, Paris, 1999. Sagesse ancienne et monde moderne. Éditions Fayard, Paris, 1999. DESJARDIN A. Regards sages sur un monde fou. Éditions de la Table Ronde, Paris, 1997. Retour à l’essentiel. Éditions de la Table Ronde, Paris, 2002. DOLTO F. La foi au risque de la psychanalyse. Seuil, Paris, 1983. DREWERMANN E. La parole qui guérit. Cerf, Paris, 1997. L’essentiel est invisible pour les yeux. Une lecture psychanalytique du Petit Prince. Cerf, Paris, 2002. Le progrès meurtrier. Stock, Paris, 1994. La spirale de la peur. Le christianisme et la guerre. Stock, Paris, 1994. FOUNDATION FOR INNER PEACE AND FOUNDATION FOR A COURSE IN MIRACLES. Un cours en miracles. Préface. Texte. Livre d’exercices pour les étudiants. Manuel pour les enseignants. Clarification des termes. Éditions du Roseau, Chambraylès-Tours, 2005. POLETTI R. DOBBS B. Lâcher prise. Éditions Jouvence, Montréal, 1998. Accepter ce qui est. Éditions Jouvence, Montréal, 2004. PRADERVAND P. Vivre sa spiritualité au quotidien. Éditions Jouvence, Montréal, 1998. RAQUIN B. Maîtriser vos scénarios de croyance. Éditions Jouvence, Montréal, 2004. ROGERS C. Développement de la personne. InterÉditions, Paris, 2005. La relation d’aide et la psychothérapie. ESF-éditeur, Thiron, 2005. ROSENBERG M. Les mots sont des fenêtres (ou des murs).Introduction à la communication non-violente. Éditions Jouvence, Montréal, 1999. Spiritualité pratique : Les bases spirituelles de la communication non-violente. Éditions Jouvence, Montréal, 2007. RUIS M. Les quatre accords toltèques. Éditions Jouvence, Montréal, 1999. SCHOPENHAUER-KIERKEGAARD. Philosophie de l’existence. Presses Universitaires de France, Paris, 1973. THICH NHAT HANH. La sérénité de l’instant. Éditions Dangles, Escalquens, 1992. VIORST J. Les renoncements nécessaires. Robert Laffont, Paris, 1998. WILLIAMSON M. Un retour à l’amour. Éditions du Roseau, Chambray-lès-Tours, 1993. La grâce et l’enchantement. Éditions du Roseau, Chambray-lès-Tours, 2004.

3 OBSERVER M. DESLARZES1

La meilleure manière d’observer patients et personnel est de regarder ce qui se passe au niveau de la COMMUNICATION NON VERBALE. C’est-à-dire, observer, scruter ce que l’autre veut ou ne veut pas, consciemment ou inconsciemment, livrer à travers son regard, sa mimique, sa voix, sa gestuelle, sa posture, sa proxémie (le fait d’être proche physiquement de quelqu’un) et ses vêtements. Ces informations sont toujours très riches, mais demandent à être toujours vérifiées par un peu d’écoute active que nous verrons plus avant. La communication non verbale représente 80 % de la communication entre individus  ! Et là, on ne peut guère tricher  sur le moyen ou long terme. En tous cas, pour des personnes qui ne se gênent pas d’être ce qu’elles sont, qui sont bien dans leur peau, qui sont contentes d’exister et qui ne cherchent pas à manipuler les autres. Quel bonheur d’être ce qu’on apparaît ! On est tellement mieux qu’on croit. Les politiques, en particulier, apprennent, par cette communication non verbale, à des fins perverses, à manipuler les foules pour le meilleur ou pour le pire ! Mais… un jour ou l’autre, ils sont démasqués et alors le scandale éclate dans les journaux ! Vous trouverez sept petits chapitres où les sept points essentiels de la communication non verbale, cités ci-dessus, sont notifiés et développés. Il vous suffira de faire quelques exercices avec vos patients et, très vite cela se fera automatiquement. Ainsi, vous aurez une mine de renseignements que vous pourrez exploiter, ou non, suivant les nécessités du moment, non pas à des fins de pouvoir ou de manipulation, mais d’aide à l’autre. 1. Inspiré de Pasini W. et Haynal A., Manuel de psychologie odontologique, Masson, Paris, 1992.

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En plus, vous trouverez un schéma qui vous résume tout ce que vous avez à observer pour obtenir des renseignements utiles. Cette étude, qui est passionnante, parce qu’elle est la rencontre de l’autre, est autant valable avec les patients qu’avec le personnel. N’oublions pas que l’inverse est aussi vrai  : patients et personnel vous observent ! Nous terminerons en vous proposant un schéma sur la perception des phénomènes intérieurs qui nous montrera quels sens nous pouvons encore employer avec les patients atteints de démence.

Le regard Nous sommes sûrement tous d’accord pour dire que le regard tient une très large place dans le contact entre individus. Dans le regard, il y a les yeux qui sont très souvent le reflet de ce qui se passe à l’intérieur de nous, en tous cas dans notre civilisation occidentale. Et cela est encore plus palpable chez les peuples du Sud. D’ailleurs, la poésie des langues latines en parle passablement. Dans notre profession, on peut observer parfois des yeux terrorisés, qui sont grands ouverts et sont l’indice d’une peur importante non dite ou d’une grande angoisse sous-jacente inconsciente, non extériorisée. Le médecin-dentiste devrait voir ce qui se cache derrière ces yeux horrifiés en faisant de l’écoute active pour découvrir ce qui fait tellement peur au patient. Certains patients ferment les yeux durant tout le traitement. Pour d’aucuns, cela signifie qu’ils s’abandonnent, se détendent, car ils ont toute confiance en notre personne et en notre compétence. Mais cela peut aussi revêtir un sentiment de peur (du style, « je ne veux rien voir »). À nous de savoir ce qui se passe. Seule l’écoute active pourra nous le révéler. D’autres fixent un point sur le plafond. Ils pensent ainsi dériver leur attention sur autre chose que les soins. C’est donc qu’ils ont peur. Là aussi, c’est à nous de chercher ce qui leur fait peur pour arriver à les détendre. Moins embêtant, le regard fixé sur soi, peut aussi être un outil de séduction ! Mais il peut aussi chercher de l’aide ou voir sur notre visage si tout se déroule bien. Là, il sera de notre devoir de médecin-dentiste de savoir si ces patients sont angoissés.

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C’est en soignant l’angoisse de nos patients que nous nous soignons de ce stress engendré par l’angoisse de l’autre. Enfin, on peut aussi s’apercevoir que certains patients ont un regard vide, sans vie, un regard las, un regard absent, indifférent. Que se cache-t-il là-dessous ? C’est aussi souvent ce que l’on peut constater chez certains patients psychiatriques, en particulier chez ceux souffrant de troubles psychotiques, comme la schizophrénie.

La mimique La mimique est l’expression de nos émotions sur notre visage. C’est aussi le radar de la collaboration avec le patient. Certains anatomistes parlent même des muscles du mensonge, de la colère, de la peur, de la tristesse, de la surprise, de la joie, de l’excitation… Aussi est-il recommandé de jeter de temps à autre un coup d’œil sur les mimiques que peuvent faire les patients durant le traitement. La tension, l’appréhension, l’angoisse, la peur ou au contraire la paix, la détente, l’absence de peur peuvent se lire aisément sur leur visage. Avec l’habitude, cette analyse se fera très rapidement et à nous, grâce à l’écoute active, de savoir de quoi il en retourne.

La voix Nous le savons tous, il y des voix qui nous ensorcellent, nous captivent, il y a des voix qui nous ennuient et nous endorment, il y a des voix qui nous calment, nous donnent confiance. Il y a aussi des voix qui nous énervent. Plus la voix se trouve dans les registres de l’aigu, plus elle risque d’indisposer les gens. Je me rappelle ma première année de philosophie à l’Université de Genève avec Jeanne Hersch, philosophe genevoise, bien connue à l’époque dans toute l’Europe. Lors de la première heure, je la trouvais laide, et je me demandais comment j’allais pouvoir la supporter pendant un an. À la fin de cette heure, j’étais fasciné, subjugué par sa voix, le ton, le timbre de sa voix et la richesse de ses expressions verbales et non verbales. De laide, elle est devenue très belle à mes yeux. Et toute cette année fut pour moi un enchantement.

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Bien sûr, nous avons la voix que nous avons, mais le ton, le timbre, la richesse de nos expressions verbales sont révélatrices de notre passion ou de tout ce qui se passe à l’intérieur de nous et c’est un pan tout entier de notre personnalité qui est livré à nos patients. La douceur, la compassion, la tolérance, la patience, le calme et la paix se remarquent dans la voix. De même que la dureté, l’indifférence, l’intolérance, l’impatience, l’agitation et l’agressivité. Alors attention ! En plus de tout ce qui vient d’être dit, il nous faudra aussi apprendre à reconnaître dans la voix de nos patients la peur, l’anxiété, la douleur, la souffrance, voire la dépression et même la séduction ! Vous pourrez vous exercer au téléphone, avec des amis ou connaissances, à reconnaître s’ils vont bien ou au contraire mal. Ecoutez bien le ton employé, le timbre développé, la vibration du son émis. Avec le temps, vous arriverez à étonner vos amis. Faites l’essai.

La gestualité Les gestes sont aussi très révélateurs de ce qui se passe à l’intérieur de soi. Les personnes qui sont hypomimiques et hypotoniques peuvent souffrir momentanément d’un état dépressif ou d’un début de dépression. En revanche, les hypertoniques ou ceux qui tambourinent constamment avec leurs doigts sont sûrement des angoissés. Là encore, seule l’écoute active pourra confirmer, infirmer ou clarifier nos premières impressions suite à ces messages non verbaux. Et puis, regardez de temps en temps ce que fait le corps de vos patients durant le traitement : ils tricotent des pieds, se tiennent fermement au siège comme s’ils étaient sur un siège éjectable, se serrent les mains à se faire blanchir les articulations, s’enfoncent les ongles d’une de leurs mains dans les parties molles de l’autre. Ils ont peur, alors arrêtez de travailler, et faites un peu d’écoute active pour savoir ce qui se passe, afin qu’ils puissent se détendre et, vous, continuer sans que cette angoisse vous soit distillée. Attention. Ainsi, n’oubliez pas cette phrase : « Quand le patient se tait, son corps parle. » Un petit exemple. Lorsque j’ai fait ma formation postgraduée au Danemark, un soir, en rentrant à la maison, j’ai demandé à mon épouse si j’avais des mains spéciales, car tout le monde à l’école dentaire de Aarhus regardait mes mains. Mon épouse m’a répondu : « Mais tu parles avec les mains et eux pas. » C’était

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nouveau pour eux et c’était aussi un spectacle. Voilà une différence culturelle entre gens du Nord et ceux du Sud dont je fais partie. Cela m’a été confirmé par la suite par des amis danois.

La posture La posture est la manière de se tenir. Je vais commencer par un exemple rapporté par un professeur spécialisé en psychosomatique gynécologique : une belle femme d’une trentaine d’années vient pour la première fois en consultation. Elle s’assied en face du médecin, croise les jambes, croise les bras et serre les dents. Il se dit : « Tiens, tiens, elle semble se verrouiller. » Diagnostic après quelques séances de psychothérapie  : vaginisme. Quelle fermeture inconsciente ! On peut dire que très souvent jambes et bras croisés sont un signe de défense, de ne pas laisser pénétrer une autre personne dans son monde. Mais c’est quelque chose qu’il faut toujours contrôler par de l’écoute active. Car cela peut être tout simplement plus commode, plus confortable de se tenir ainsi. Sur le siège, mains agrippées, muscles tendus allant jusqu’à l’hyperlordose symbolise la peur. Ne laisser pas ainsi le patient, écoutez-le, car autrement, ce n’est ni bon pour vous, ni pour le patient. Rendez-vous compte de la charge négative que vous absorbez, si vous ne faites rien ! Il faut aussi citer toutes les postures possibles de la séduction. Qui existent bel et bien. C’est une réalité dont il faut tenir compte.

La proxémie Comme le nom le suggère, ce terme signifie la proximité. Nous sommes très près du patient, très près de sa zone intime qu’est sa bouche. Notre distance de travail est inférieure, la plupart du temps à 40-50  cm, qui est la distance moyenne intime de chaque individu. En outre, on pénètre dans l’orifice buccal, espace privé, avec nos doigts et nos instruments. Le toucher et l’odorat renforce encore cette intimité. Cela peut aussi être le contraire avec de mauvaises odeurs. C’est ce qui fait dire à certains patients qu’ils considèrent notre intrusion dans leur sphère privée comme un viol ! Heureusement, c’est très rare.

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Il ne faut pas sous-estimer cette proximité des individus, aussi bien avec les patients qu’avec le personnel soignant et être sur ses gardes. Bien sûr, les cas dégénérant sont rares, mais encore faut-il en être averti. D’où, l’importance, de se doucher régulièrement, de se parfumer avec parcimonie, d’avoir les mains et les ongles propres, l’haleine la plus fraîche possible, les cheveux propres et bien peignés et on le verra dans le chapitre suivant d’être toujours habillé proprement. C’est un signe de respect pour l’autre et pour soi. Pour terminer, nous aborderons donc le septième signe de la communication non verbale, l’aspect vestimentaire.

L’aspect vestimentaire Ne dit-on pas « L’habit ne fait pas le moine ! » Gottfried KELLER n’a-t-il pas aussi écrit « Kleider machen Leute » (traduction : Les habits font les gens) ! Les deux sont justes. Ce qui veut dire que nous devons faire très attention, de bien connaître les gens, avant de tirer des conclusions de la manière dont ils s’habillent. Ce n’est qu’une indication. Mais, malgré tout, les extrêmes, trop bien habillés, trop bien coiffés, trop propres, peuvent faire penser à quelqu’un d’obsessionnel, de narcissique qui risque d’être très difficile à contenter en particulier sur le plan esthétique. Nous connaissons tous ce genre de patient. Il est important avec ces patients de toujours demander et redemander ce qu’ils veulent vraiment et toujours tout marquer sur le dossier. Pour éviter des conflits qui souvent se terminent mal. Mais aussi bizarre que cela puisse paraître, pour l’hygiène buccale chez ces patients-là, on voit de tout : des surfaces dentaires ripolinées jusqu’à l’érosion dentinaire ou du tartre à profusion ! L’autre extrême, mal habillé, mal coiffé, pas très propre, ne sentant pas toujours très bon, fait penser à quelqu’un de négligeant pour qui tout cela n’a guère d’importance. Quelquefois le milieu socio-culturel peut nous expliquer ces attitudes. Mais nous rencontrons ces habitudes surtout chez les toxicodépendants. Et chez eux, l’hygiène buccale n’existe pas ou très peu, en plus de leur alimentation anarchique très riche en glucides. Voilà les sept signes de la communication non verbale qui ne sont pas à négliger, car ils sont bien le reflet de ce qui se passe à l’intérieur de l’autre. Mais toutes ces précieuses indications doivent être vérifiées par l’écoute active.

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En plus, ce tableau (Fig. 8), va vous aider à bien observer l’autre et à reconnaître chez lui tout ce qui a été écrit ci-dessus :

Être – par être (paraître) (original de Jo Bakkers) VISAGE STATIQUE -

CONTENU VERBAL

DYNAMIQUE

forme traits proportion des trois étages teint ornements et/ou masques : coiffure, barbe, moustaches, favoris, lunettes, maquillage… propreté tics tremblements sueur

- regards - mouvements de la bouche et risorius - mobilité - expressions

-

SOURIRE

CE QUE JE VOIS

CE QUE J’ENTENDS

LE PAYSAGE HUMAIN

VOIX

CORPS STATIQUE -

taille proportions force tranquille attitude point(s) d’appui équilibre symétrie vêtements couleurs netteté, propreté

idées exprimées agencement du discours clarté d’expression construction des phrases choix des mots références, citations appuis

DYNAMIQUE -

mains gestes et leur symbolique pieds (sous table) démarche et symétrie des mouvements (axes) - souplesse - ampleur - « position zéro »

-

son « medium » intensité : forte, faible hauteur : grave, aiguë débit : lent, rapide timbre : métallique, sourd profondeur : tête, nez, gorge - vibration (nerveuse) ?

Fig. 8  Être-Par-Être (paraître)

Un dernier schéma (Fig.  9) vous montre comment se passe la perception des phénomènes intérieurs, le monde… et comment nous la transmettons verbalement. On peut aussi comprendre comment on peut agir chez ceux où un ou plusieurs écrans ont été supprimés par une maladie ; on travaille alors avec ceux qui restent.

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HARMONIE ET EFFICACITÉ AU CABINET DENTAIRE

Ce schéma indique comment est perçu le phénomène humain (le monde intérieur, le monde, le réel, l’autre, les autres…) On s’aperçoit que ces phénomènes humains (qu’on retrouve dans la communication non verbale) passent à travers trois écrans (sensoriel, nerveux, cérébral de conceptualisation) qui sont non verbaux avant la traduction par des mots.

Perception des phénomènes 3e écran 1er écran

S Y S T È M E

Le phénomène intérieur Le monde Le réel L’autre Les autres

est SILENCIEUX et NON VERBAL

+

idem

2e écran

S E N S O R I E L

S Y S T È M E

+

idem

N E R V E U X

S Y S T È M E

+

C O N C C E É P R T EdU BeA R L A I L S A T I O N idem

M O T S

Est NON SILENCIEUX et VERBAL

Fig. 9  Perception des phénomènes

Exemple : Ce schéma montre très bien ce qui se passe avec un patient atteint d’une démence : seul l’écran sensoriel demeure. C’est pourquoi avec ces patients on peut encore utiliser le toucher, le regard, la gestualité pour essayer de rentrer en contact, même si on ne sait pas comment cela se passe. Exercice : La prochaine fois que vous aurez un tel patient, essayez d’avoir un regard spécialement compatissant, des gestes remplis de tendresse et donnez-lui quelques douces caresses. Vous pourrez constater que tout devient plus facile.

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Références AXTELL R.E. Le pouvoir des gestes. Guide de la communication non verbale. InterÉditions, Paris, 1993. BROWN S.G. Manuel pratique de morphopsychologie. Le Courrier du Livre, Paris, 2001. CORRAZE J. Les communications non verbales. Presses Universitaires de France, Paris, 1988. DEVERS T. Communiquer autrement. Expression non verbale, attitudes et comportements. Les Éditions de l’Organisation, Paris, 1995. GENDLIN E.T. Focusing  : Au centre de soi  : une porte ouverte sur le langage du corps. Les Éditions de l’Homme, Montréal, 1984. GUIRDHAM A. La communication silencieuse. Payot, Paris, 1972. MESSINGER J. Ces gestes qui vous trahissent. Éditions First, Paris, 2001. Ces gestes qui manipulent, ces mots qui influencent. Éditions First, Paris, 2006. Les gestes prédictifs. Presses du Châtelet. Paris, 2007. Le langage des gestes pour les nuls. Éditions First, Paris, 2009. Le profileur gestuel. Éditions First, Paris, 2009. Le langage psy du corps. Éditions J’ai Lu, Paris, 2010. Le sexe des gestes. Éditions J’ai Lu, Paris, 2012. PASINI W. et HAYNAL A. Manuel de psychologie odontologique. Masson, Paris, 1992. PEASE A. Interpréter les gestes, les mimiques, les attitudes. Éditions Marabout, Paris, 1996. SAUVEGRAIN B. Manuel pratique de la graphologie. Hachette Livre, Paris, 2005.

4 DIRE CE QUE L’ON RESSENT, PENSE, VEUT SANS BLESSER L’AUTRE (Adaptation de la méthode Gordon à la médecine dentaire) M. DESLARZES et S. PADRUTT

Introduction La méthode de Thomas Gordon à laquelle j’ai été formé à Genève, m’a beaucoup servi pour montrer que l’on pouvait être efficace et humain dans notre profession. Je l’ai expérimentée, utilisée tout au long de ma carrière de médecin-dentiste et dans ma vie personnelle. Ce ne fut pas facile, tant nos vieilles habitudes sont tenaces. Mais j’ai persévéré et je persévère toujours  ! Puis, je l’ai enseignée avec beaucoup de succès aux divers soignants de notre profession dont mon hygiéniste dentaire, Susan Padrutt, coauteur de ces deux chapitres, soit tous ensemble, soit catégorie par catégorie. C’est cette méthode que j’emploie toujours dans mes séminaires de communication. Elle nous semble simple, logique et facilement applicable, si on le veut bien  ! Pour faciliter son accès et son application dans la vie professionnelle ou personnelle des partenaires de l’équipe dentaire, nous l’avons fait précéder par un chapitre sur l’harmoni-e-fficacité, un autre sur la connaissance de soi, et un troisième sur l’observation de l’autre par la communication non verbale. Ainsi, peut-être, sera-t-il plus aisé d’accéder à cette méthode non violente de Gordon. Nous avons essayé aussi de simplifier au maximum celle-ci pour en retirer un essentiel didactique plus facilement applicable à notre profession.

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HARMONIE ET EFFICACITÉ AU CABINET DENTAIRE

Qu’est-ce que la méthode de Gordon ? C’est une autre manière d’être

C’est apprendre à communiquer de manière vraie, claire et précise. C’est une manière de s’engager personnellement dans l’interdépendance. C’est permettre

D’être tel que l’on est. De savoir ce que l’on veut (exprimer ses besoins). Que les autres nous connaissent mieux. De mieux connaître les autres et de mieux les respecter. De mieux connaître leurs besoins. D’éviter équivoques, malentendus, et de prévenir les conflits. D’avancer plus vite dans la relation. D’avoir du plaisir à la relation. C’est en particulier (Fig. 10)

SENTIR si le comportement de l’autre est acceptable (A) ou inacceptable (INA) pour moi, ici et maintenant. L’acceptabilité varie d’un individu à l’autre. Elle varie en fonction de moi (en forme ou pas), de l’environnement, du comportement, en fonction de l’âge, de la personnalité et du sexe de l’autre. D’où, il n’est pas possible d’être constant et pas nécessaire de faire front commun (en famille comme en milieu professionnel), car nous sommes tous différents et réagissons selon notre personnalité, notre éducation, notre instruction, notre culture, notre religion, et selon notre vécu. La véritable formule magique, c’est de faire avec la différence. Mais on n’a pas l’habitude. DÉTERMINER s’il y a problème ou non ou quels sont les besoins qui ne sont pas satisfaits ? Si oui, à qui appartient le problème : à soi-même, à l’autre, aux deux ? AGIR en exprimant ses sentiments ou, et, en écoutant ceux des autres, et en résolvant les conflits, par : MESSAGE JE de CONFRONTATION que nous verrons dans ce chapitre. ÉCOUTE ACTIVE que nous étudierons au chapitre 5. RÉSOLUTION DES CONFLITS, les 2 tiennent à leur besoins ou à leurs valeurs, les 2 ont un problème, donc conflit : CONFLITS DE BESOINS (horaires, vacances, qui ouvre et ferme le cabinet, qui s’occupe des commandes, le salaire…) et ses résolutions. CONFLITS DE VALEURS (respect, travail bien fait, être responsable…) et ses résolutions.

Dire ce que l’on ressent, pense, veut sans blesser l’autre

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Toute cette dernière partie de la prévention, de la résolution, de la médiation des conflits sera traitée par Louis Schorderet qui ne suivra pas la méthode Gordon (mais il reste dans le même esprit). Il vous donnera de nombreux outils qui vous permettront d’être beaucoup plus précis et efficaces dans ce domaine. SENTIR

Comportement acceptable

Comportement inacceptable

DÉTERMINER

AGIR

DÉTERMINER

L’autre a un problème

Message je Écoute active

L’autre a un problème

Zone sans problème (ni moi, ni l’autre n’a un problème)

Message je Écoute active (pour mieux connaître l’autre)

Moi qui ai un problème

Message je de confrontation + Écoute active (si réponse nég. au mess-je confrontation)

AGIR

CONFLITS DE BESOINS et ses résolutions

Soit Ils ont un problème entre eux 2 Soit J’ai un problème

CONFLITS DE VALEURS et ses résolutions

Fig. 10  Tableau qui résume la méthode de Gordon dans son ensemble

Mais avant d’aborder comment exprimer ce que l’on ressent, comment écouter selon Gordon, il faut savoir qu’il y a des :

Obstacles majeurs à la communication (Fig. 11) Malheureusement, nous pratiquons tous, plus ou moins, et de manière, le plus souvent, inconsciente, ces obstacles à la communication. Un grand pas en avant est, déjà, d’en être conscient, puis, petit à petit en cherchant les causes de cette archaïque manière de communiquer, nous arrivons à nous modifier et à utiliser de moins en moins ce mode de faire. Cela ne sera pas facile, surtout au début. Nous allons tomber et retomber dans nos vieilles ornières, encore et encore. Et puis, petit à petit, on modifie sa pensée et les mots qui ne blessent pas viennent de plus en plus souvent. Rien n’est plus difficile que de changer des mentalités. Voilà ce que nous devrions apprendre depuis l’école enfantine. Et cela se pratique déjà dans bien des endroits du monde.

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HARMONIE ET EFFICACITÉ AU CABINET DENTAIRE

ATTITUDES

TYPES D’EXPRESSIONS

RÉACTIONS

DONNER des SOLUTIONS •  Ordonner

TU dois… ; fais ceci, cela…; TU feras ce que je dis…

Opposition ; épreuve de force ; vengeance

•  Menacer

Sinon, TU… ; TU ferais mieux de… ; TU verras… ; si TU ne fais pas ceci, cela…

Crainte ; oblige à vérifier ; révolte

•  Moraliser

TU devrais… ; TU aurais dû… ; c’est TA faute… ; je TE l’avais dit…

Culpabilité ; l’autre va s’ancrer dans un sentiment de ne jamais faire juste ; va perdre confiance en lui

•  Conseiller

À TA place, je… ; je TE conseille de… ; essaie de…

Empêche l’autre de résoudre ses problèmes, dépendance

•  Argumenter

Voici pourquoi TU as tort… ; Oui, mais les faits prouvent que…

L’autre se défend ; se ferme ; l’autre se veut incompétent

PORTER DES JUGEMENTS •  Critiquer

TU TU TU TU TU

es paresseux… travailles mal… travailles comme un cochon… as encore une fois raté… ne te donnes aucune peine

L’autre se sent incompétent ; cela coupe toute communication, car l’autre a peur d’être mal jugé ; cela le rend passif, il ne prend plus d’initiative, ne pose plus de questions ; l’autre va s’identifier au jugement ou contre-attaquer violemment

•  Humilier

TU TU TU TU

es vraiment nul… ; n’y arriveras jamais… es le dernier des imbéciles… es pusillanime…

L’autre se sent rejeté ; cela détruit l’estime que l’autre a de lui-même, cela provoque parfois de violentes ripostes

•  Psychanalyser

TON problème à toi, TU es simplement fatigué… TU ne voulais pas vraiment dire cela…

Communication impossible, car le message de l’autre est détourné vers un autre plan, au lieu d’être écouté et respecté pour son contenu

•  Complimenter

TU es le meilleur… ; TU les as écrasé… ; TU es le plus beau, le plus fort, continue…

Forte exigence ; ressenti comme du paternalisme, engendre de l’anxiété par peur de ne pas être comme souhaité

•  Rassurer

Ne T’en fais pas… ; Ne T’inquiètes pas ; ce n’est pas grave, TU vas T’en sortir…

L’autre se sent incompris ; l’autre peut aussi comprendre que ça n’est pas bien de ressentir ce qu’il ressent

RÉDUIRE

POSER DES QUESTIONS Pourquoi ? Comment ? Quand ? Où ? Quoi ? Qui ?

Les réponses sont évasives ; les vérités sont des demi-mensonges ; l’autre devient anxieux, car ne sait pas où cela va le mener ;

Parlons d’autres choses ; parlons de choses plus agréables ; nous verrons plus tard ; ce n’est rien ; cela ne vaut pas la peine d’en parler

Suggère d’éviter les difficultés ; laisse croire que le problème de l’autre = 0 ; invite l’autre à ne pas se confier

ÉVITER, ESQUIVER

Fig. 11  Obstacles majeurs à la communication

Dire ce que l’on ressent, pense, veut sans blesser l’autre

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Tout cela montre qu’il vaut mieux éviter de s’exprimer en termes de jugement et d’appréciation objective de l’autre et plutôt parler en termes de ressenti et d’appréciation subjective de soi-même. Tout cela nous montre qu’il faut : ÉVITER LE TU OU LE VOUS • pour ne pas juger • pour laisser à l’autre le droit d’aimer ou de ne pas aimer • ce qui va responsabiliser l’autre • ce qui va éviter à l’autre de s’enfermer dans des schémas • pour lui laisser la liberté de sa réponse Mais PRATIQUER LE JE Le je d’engagement personnel et non le moi-je, orgueilleux

Il faut nous rappeler que nous fonctionnons encore, tous, la plupart du temps sur le mode TU. Pourquoi ? Voici quelques pistes : EXPLICATION ÉTHOLOGIQUE Chez les mammifères terrestres dont nous faisons partie, et dans la plupart des espèces, on retrouve un chef, un dominant qui impose ses règles, parfois même de manière violente. On retrouve le même phénomène chez l’être humain, comme si c’était un instinct qui était écrit dans notre inconscient collectif. Cela avait sûrement une bonne raison d’être à une certaine époque de notre développement mental, mais plus maintenant. EXPLICATION PHILO-PSYCHOLOGIQUE La peur et l’angoisse existentielle ont très vite pris possession de l’Homme. Il a cherché des réponses un peu partout et, entre autres, il a trouvé le TU pour ordonner, menacer, critiquer, humilier, éviter, etc. Ainsi, il n’avait pas à se remettre en question, car cela lui faisait trop peur. Grâce aux progrès de la psychologie, de la philosophie existentialiste, de la théologie à la lumière de la psychologie des profondeurs, ces peurs s’estompent et s’effacent pour laisser enfin apparaître le JE d’engagement. EXPLICATION CULTURELLE Dans notre monde occidental, ce n’est que, relativement récemment, que le patriarcat avec tout son chapelet d’actes autoritaires a commencé à se fissurer.

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HARMONIE ET EFFICACITÉ AU CABINET DENTAIRE

On commence à concevoir que nous pouvons faire autrement que par le passé et que nous avons tous à y gagner. AVANT TOUTE CHOSE la communication est une histoire de cœur, une histoire de paix intérieure, de joie intérieure et de connexion avec le divin qui peut se résumer dans le terme d’EMPATHIE (E. Tolle, M. Rosenberg). On voit très bien sur le schéma ci-après (Fig. 12) que pour atteindre cet état d’empathie, il faut exécuter un mouvement volontaire (parfois difficile pour certains, en tous cas dans les débuts de la pratique de l’empathie), afin d’arriver au stade de non jugement (ni condamnation, ni approbation). Ce n’est que dans cet état que nous serons à même d’aider celui ou celle qui en a besoin. L’empathie est en plus une compréhension attentive, une centration sur l’autre, un mouvement pour sentir comme l’autre, du dedans. L’empathie est la neutralité sur le problème ; c’est un engagement en faveur de la personne toute entière, à long terme. EMPATHIE

AIDE Mouvements volontaires

ANTIPATHIE (maximum haine)

SYMPATHIE (maximum amour)

Mouvements naturels (à reconnaître en soi) NON AIDE à dépasser Sentiments négatifs Sentiments positifs

APATHIE

Fig. 12 L’empathie

Dire ce que l’on ressent, pense, veut sans blesser l’autre

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Exemple : Un patient vous est antipathique, vous devez lui avulser les 18 et 48 incluses ; intervention difficile, que redoute ce patient antipathique. Si vous voulez vraiment l’aider, vous allez devoir faire un mouvement volontaire pour atteindre l’empathie. Difficile, oui, mais une fois fait, quelle satisfaction de vous rendre compte que vous avez pu amener ce patient à résoudre ses problèmes de peur. Il va sûrement vous paraître moins antipathique. Et vice versa. Exercice : Prenez quelques cas de patients avec lesquels vous avez eu des échecs de communication : analysez-les et voyez si vous avez toujours été empathique ? Petit conseil  : si vous vous trouvez face à quelqu’un que vous n’aimez pas, trouvez en lui ne serait-ce qu’une infime chose qui peut vous le rendre un peu plus sympathique. L’empathie va se retrouver dans la manière de dire ce que l’on ressent, pense, veut, sans blesser l’autre, dans la manière d’écouter et de comprendre l’autre, dans la manière de résoudre les conflits, dans leur prévention, et dans la manière de mener une médiation. C’est difficile, mais quelle joie quand on voit qu’on y arrive et que tout le monde est content. C’est presque indicible ! Expérimentez-le et vous verrez. D’une manière générale, essayez de fonctionner le plus souvent possible avec le Je d’engagement. Quelques exemples ci-dessous. Et surtout le message Je de confrontation, lorsque vous jugez que le comportement de l’autre est inacceptable pour vous, maintenant et ici. C’est donc vous qui avez un problème qu’il faudra résoudre par le message Je de confrontation, suivi souvent d’écoute active.

Les messages JE Indications

•  Dans n’importe quelle situation. •  Quand le comportement de l’autre est acceptable. •  Quand l’autre a un problème et en souffre.

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HARMONIE ET EFFICACITÉ AU CABINET DENTAIRE

Différentes sortes de message JE • Message JE affirmatif

Exemple : Je crois… ; je pense… ; je ressens… ; je suis… ; j’ai… ; j’aime… ; je n’aime pas… ; etc. : « Je n’aime pas les formes cubistes de Picasso » plutôt que : « C’est moche, Picasso. » «  J’apprécie les couleurs de Dali que je trouve éclatantes  » plutôt que  : « Comme c’est beau Dali. » Effets : Facilite les relations avec les autres. Rend responsable. Force à parler personnellement et non à se centrer sur les autres. Sert à faire connaître ses besoins personnels afin qu’ils soient satisfaits. • Message JE de réponse

Exemple : je ne veux pas… ; je choisis de… ; j’ai décidé de… ; + parce que… (mais employé tel quel, il ne passe souvent pas et doit être accompagné) + de la vraie raison (ce que l’on ressent vraiment) qui est liée à une perte de temps, d’énergie ou d’argent (l’une ou l’autre, ou les deux, ou les trois). Ce message je de réponse s’apparente au message je de confrontation que nous verrons dans les pages suivantes. « Non, je ne veux pas aller avec toi au musée aujourd’hui voir les tableaux de ce peintre, parce que je n’apprécie pas du tout sa façon de peindre, et en plus j’ai un travail urgent à terminer pour demain. » Effets : Cela force à être clair, direct, de ne pas parler des autres quand on veut dire non.

Dire ce que l’on ressent, pense, veut sans blesser l’autre

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• Message JE de prévention

Exemple  : je…parce que… «  Je ne veux pas que tu prennes la voiture aujourd’hui, parce que les routes sont verglacées et que les risques de collisions sont trop grands. » Effets  : dire simplement les choses, se centrer sur soi, satisfaire ses propres besoins, anticiper une situation qui risque de devenir conflictuelle. Le message JE de confrontation INDICATIONS

J’ai ressenti que le comportement de l’autre était, pour moi, ici et maintenant, un comportement inacceptable. Je suis donc ennuyé, énervé… par ce comportement de l’autre, j’ai donc un problème à cause de l’autre, d’où : CONFRONTATION

Pour qu’une confrontation soit efficace, il faut quatre critères que nous devons toujours maintenir présents dans notre esprit : 1. Qu’elle produise un CHANGEMENT réel, mais surtout pas par la force. 2. Qu’elle préserve l’ESTIME de soi et celle de l’autre. Il ne doit y avoir ni injures, ni autoritarisme. 3. Qu’elle maintienne la QUALITÉ DE LA RELATION. 4. Qu’elle développe l’AUTONOMIE de l’autre. Exemple : Voilà le même message, mais une fois avec le mode TU et l’autre fois selon le mode JE, pour solutionner une confrontation. Le fait : une assistante dentaire, même après quatre démonstrations, ne malaxe toujours pas comme il le faut un alginate. LE MESSAGE TU : - « Vous êtes sotte ou quoi, c’est la quatrième fois que je vous explique et montre comment malaxer un alginate et vous n’êtes pas foutue de le réussir aujourd’hui. Ça commence à bien faire. J’ai bien envie de vous donner votre congé. » Commentaire :

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HARMONIE ET EFFICACITÉ AU CABINET DENTAIRE

La personne qui parle porte un jugement sur son employée, l’humilie, puis la menace ; l’employée va se sentir incapable et rejetée, va sûrement perdre tous ses moyens et va devenir de plus en plus inefficace et va rater encore et encore ! LE MESSAGE JE DE CONFRONTATION : - « Valérie, je suis très déçu que vous ratiez pour la quatrième fois un alginate, car j’ai l’impression d’avoir perdu mon temps à vous le démontrer. J’aimerais bien voir avec vous les raisons de cet échec. » Commentaire : Dans cette phrase, il n’y pas de jugement sur la personne, ni humiliation, ni menaces, mais simplement les sentiments de celui qui est gêné par le comportement inacceptable de l’autre et l’effet concret qu’engendre ce comportement inacceptable. Puis une demande ; l’autre va se sentir en confiance pour exposer ses difficultés et se donner de plus en plus de peine pour réussir, car avec cette remarque elle n’a pas perdu confiance ni en elle, ni en son patron. Relisez bien vos 10 Messages JE de Confrontation puis comparez-les avec notre exemple en page 67. STRUCTURE DU MESSAGE JE DE CONFRONTATION

Pour bien faire apparaître les 5 PARTIES du message Je de confrontation, nous les avons illustrées dans le schéma ci-dessous (Fig. 13) : 1. DISTINGUER SES DIFFÉRENTS SENTIMENTS et DIRE le plus IMPORTANT par rapport au comportement inacceptable de l’autre. 2. DÉCRIRE le COMPORTEMENT INACCEPTABLE DE L’AUTRE de manière claire et précise. 3. DÉPEINDRE L’EFFET CONCRET (ou tangible) toujours en fonction d’une perte D’ÉNERGIE, DE TEMPS ou D’ARGENT. 4. FAIRE une DEMANDE pour comprendre le comportement inacceptable, afin qu’il ne se reproduise plus ou que ce comportement évolue petit à petit vers le mieux. 5. La RÉACTION SERA POSITIVE dans 60 % des cas (« excuse-moi, je n’y avais pas pensé…  ») mais dans 40  %, elle sera alors NÉGATIVE («  c’est pas mon problème… ») et devra être suivie par de L’ÉCOUTE ACTIVE que nous apprendrons à pratiquer dans le chapitre suivant.

Dire ce que l’on ressent, pense, veut sans blesser l’autre

SENTIMENTS 1

Comportement INACCEPTABLE de l’autre, c’est donc MOI qui ai un PROBLÈME

MESSAGE JE DE CONFRONTATION

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CONFRONTATION RÉUSSIE RÉPONSE POSITIVE 5

COMPORTEMENT INACCEPTABLE 2

DEMANDE

EFFET CONCRET

4

3 En fonction d’une PERTE

TEMPS ÉNERGIE ARGENT

5 RÉPONSE NÉGATIVE ÉCOUTE ACTIVE

Fig. 13  Les différentes structures du Message je de confrontation

Exemple : COMPORTEMENT Une jeune et jolie patiente arrive pour la troisième fois avec 20 minutes de retard

MESSAGE JE DE CONFRONTATION «  Mme Dupin, je suis très contrarié (SENTIMENT), que vous arriviez pour la troisième fois avec 20 minutes de retard (COMPORTEMENT INACCEPTABLE), parce que cela chamboule tout notre planning et que nous finirons ce soir avec une demi- heure de retard (EFFET CONCRET AVEC PERTE DE TEMPS ET D’ÉNERGIE). Si cela ne vous dérange pas, j’aimerais bien parler avec vous des raisons de ce retard (DEMANDE).

Exercices : Prenez cinq comportements inacceptables (CINA) de votre personnel et cinq de vos patients, soit 10 CINA. Inscrivez-les dans la colonne de gauche et

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HARMONIE ET EFFICACITÉ AU CABINET DENTAIRE

en regard, dans la colonne de droite, exercez-vous à formuler des messages de confrontation selon la figure 13 ci-dessus : COMPORTEMENT INACCEPTABLE 1.

MESSAGE DE CONFRONTATION

10. RÉACTIONS

Ce message Je de confrontation peut produire DEUX RÉACTIONS : 1. Une réaction POSITIVE : « Oh ! Excuse-moi, je n’y avais pas pensé et je ferai attention dorénavant.  » Changement de comportement, conservation de l’estime de soi et de l’autre, maintien de la qualité de la relation, sauvegarde de l’autonomie de l’autre font que la confrontation est réussie. C’est heureusement l’issue de 60 % des cas. 2. Une réaction NÉGATIVE, de défense, l’autre s’est senti attaqué : Deux attitudes sont possibles : A. PREMIÈRE Cette réaction de défense est ressentie comme un COMPORTEMENT INACCEPTABLE, d’où escalade de la violence et aucune résolution de la confrontation. B. DEUXIÈME Cette réaction de défense est ressentie comme un COMPORTEMENT ACCEPTABLE, c’est-à-dire : l’autre se sent visé, peiné, attaqué et se défend et c’est normal (Fig. 14).

Dire ce que l’on ressent, pense, veut sans blesser l’autre

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Nous avons donc à nous adapter à ce nouveau comportement qui nous révèle que l’autre a un problème par rapport à notre message Je de confrontation. C’est pourquoi, nous ferons suivre ce nouveau comportement par de l’ÉCOUTE ACTIVE.

L’autre a un problème

ÉCOUTE ACTIVE

Moi j’ai un problème

MESSAGE JE DE CONFRONTATION

Fig. 14 

Et, ainsi de suite, en utilisant alternativement message Je de confrontation et l’écoute active, nous arrivons à faire descendre la tension émotionnelle jusqu’au niveau zéro, car l’autre va se sentir écouté et compris. On voit donc que dans le 40 % des cas où la réponse est négative, le message Je de confrontation doit être suivi par de l’écoute active qui sera développée au chapitre suivant. LIMITES DU MESSAGE JE DE CONFRONTATION

1. Besoins opposés, chacun pensant que ses besoins sont légitimes. Employer alors un autre outil : pour des conflits de besoins, vous pouvez utiliser la méthode de Gordon «  Tout le monde est gagnant  » et pour des conflits de valeurs, la confrontation, l’exemple et la remise en question personnelle qui seront traités d’une autre manière, mais dans le même esprit par Louis S­ chorderet au chapitre 6.

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HARMONIE ET EFFICACITÉ AU CABINET DENTAIRE

2. Conflit important sous-jacent, c’est-à-dire que les besoins différents de chacun n’ont pas été exprimés (non-dits), cela transparaît d’ailleurs très souvent dans la communication non verbale (bouderies, gestualité agressive…). Procéder de la même manière qu’au numéro 1. 3. Le ton de la voix n’est pas congruent, exemple : être fâché (en criant ou non) et énoncer le message JE de confrontation tout calmement !!! 4. Il y a une sincérité défectueuse, car on ne dit pas ce qui est vraiment réel, ce qu’on ressent vraiment, ses vrais sentiments. On tourne autour du pot, on n’ose pas et cela complique, enfume la relation pour terminer par des éclats explosifs qui font du mal à tout le monde. 5. Le « parce que » de l’effet concret n’est pas convainquant. À nouveau, cela doit correspondre à la réalité vraie en fonction d’une perte de temps, d’argent ou d’énergie, sinon, le message JE de confrontation ne passe pas. 6. Le moment où le message Je de confrontation est dit, est mal choisi. 7. La qualité de la description du comportement inacceptable est mauvaise, par ex. : elle contient des blâmes, des injures, des mots comme « toujours » ou « jamais », « encore »…enfin des mots qui jugent. 8. Le message Je de confrontation n’est pas suivi par l’écoute active, alors qu’il l’aurait fallu. 9. Sans l’effet concret, le message Je de confrontation n’a aucune valeur. 10. À ne pas employer pour les tout-petits. On utilise alors une manière plus pratique. Par exemple : si un petit enfant lance des plots contre le mur et y fait des trous, le message de confrontation ne sert à rien. Mieux vaut alors lui enlever les plots ou le déplacer ou même construire une paroi en bois pour qu’il puisse le faire sans abîmer le mur. Pas si facile !

5 ÉCOUTE ACTIVE (Adaptation de la méthode Gordon à la médecine dentaire) M. DESLARZES et S. PADRUTT

L’écoute active est difficile. Il faut un certain temps pour arriver à bien reformuler. Vous allez vous tromper, vous tromper encore. Cela n’est pas grave, continuez, jusqu’à ce que cela vienne facilement et de manière naturelle. Ce qui est vraiment important dans l’écoute active, c’est L’INTENTION d’aider l’autre à résoudre lui-même ses propres problèmes. Cette intention se traduit aussi bien dans le non verbal que dans le verbal. Donc pas de tricherie possible ! EXEMPLE FAIT : Un patient vient à un rendez-vous pour se faire extraire les 18 et 48 incluses. C’est un patient qui appréhende les soins dentaires en général, et en particulier les extractions. Bien sûr cet exemple est parfait, presque trop beau, mais il l’est à des fins didactiques. Mais avec de la pratique, vous verrez que vous vous en rapprocherez beaucoup plus que vous le pensez ! RÉPONSES 1. MANIÈRE LA PLUS RÉPANDUE (qui peut se décliner de mille façons, suivant les différentes personnalités de l’équipe dentaire) de répondre à la peur du patient : - Bonjour, M. Lovan, en forme ce matin pour ces deux extractions ? Cela vous fait sûrement un peu peur ? - Oui, même très peur. - C’est normal, mais rassurez-vous, j’ai été bien formé dans un service de chirurgie orale, et j’en enlève au moins dix par semaine, alors l’habitude, vous voyez  ! J’y vais presque les yeux fermés. De plus tout est réalisé dans les

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HARMONIE ET EFFICACITÉ AU CABINET DENTAIRE

meilleures conditions d’asepsie, donc pas de souci d’infection. D’autre part, je n’ai jamais eu de problème et vos deux dents sont de difficulté moyenne. Donc, rien à craindre. Si jamais pendant l’intervention, il y avait quelque chose qui vous dérange, levez la main gauche. Maintenant, ouvrez la bouche, s’il vous plaît, pour que je puisse faire l’anesthésie. 2. ÉCOUTE ACTIVE : UNE AUTRE MANIÈRE DE RÉPONDRE - Bonjour, M. Lovan, en vous apercevant tout à l’heure dans la salle d’attente, il m’a semblé que vous aviez l’air inquiet ? - Bonjour docteur, oui, je suis très préoccupé par les deux extractions de ce matin. - Vous semblez même redouter l’extraction de ces deux dents de sagesse incluses. - Ah ! Docteur, j’ai honte de le dire, mais j’ai vraiment très, très peur. - Vous avez l’air presque terrorisé. - Oui, c’est bien cela. La nuit passée, je n’arrivais pas à m’endormir et je me voyais la bouche ouverte, impuissant, avec vos mains qui tiraient sur la pince, l’assistante avec son miroir, son aspirateur… J’en étouffais presque dans mon lit, je transpirais et mon cœur battait la chamade. - Si je comprends bien, vous avez vécu hier au soir tout ce que vous redoutez pouvoir vous arriver ce matin et en particulier cette sensation d’étouffement et d’impuissance à pouvoir arrêter le processus. - C’est exactement ça. - Il me semble que le fait d’avoir tous ces instruments et ces quatre mains dans votre bouche, et de ne pouvoir arrêter l’intervention, provoquent chez vous l’impossibilité de respirer. - C’est tout ce que je crains. (SILENCE) - Oui, c’est bien cela et uniquement cela. (SILENCE)

Écoute active

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- Mais peut-être puis-je vous demander d’arrêter un petit moment le traitement pendant l’extraction, afin que je puisse reprendre un peu mieux mon souffle. - Bien sûr, vous levez la main gauche et j’arrête. (SILENCE) - Tout d’un coup, il me vient une autre idée, je peux aussi respirer par le nez pendant toute la durée des extractions et vous demander, si nécessaire, avec la main gauche, des poses intermédiaires pour respirer tranquillement. (SILENCE) - Je me sens prêt maintenant pour les deux extractions. Je vous remercie de ne pas avoir pris ma peur à la légère, d’en tenir compte et surtout de m’avoir écouté et compris sans me juger. COMMENTAIRES 1. DANS LA PREMIÈRE RÉPONSE  : le médecin-dentiste ne laisse pas son patient exprimer les raisons de sa peur, et tente de le rassurer en faisant étalage de toutes ses qualités dans ce domaine. Cela part sûrement d’un bon sentiment de vouloir rassurer ainsi. Mais cela ne fonctionne pas. Cela peut venir d’une peur inconsciente du médecin-dentiste de ne pas savoir que faire par rapport à cette angoisse. Cela peut être le manque d’intérêt pour tout ce qui concerne l’approche psychologique des soins. Comme lui n’a pas peur, il voit mal pourquoi ses patients auraient peur, ce ne sont plus des enfants ! Ou tout simplement, les autres ne l’intéressent pas suffisamment. Ce qu’il y a de terrible, c’est que le patient va rester avec sa peur, qu’il risque d’être de plus en plus tendu, voire même qu’il puisse avoir une attaque de panique avec tout ce que cela comporte de désagréable pour tout le monde. Là, le médecin-dentiste sera tout de même contraint d’arrêter son travail pour un bon moment, voire de manière définitive sur ce patient. S’il peut terminer les extractions, je ne crois pas que le patient reviendra chez un professionnel de santé qui ne sait pas écouter, malgré toutes les autres qualités qu’il puisse avoir. 2. AVEC L’ÉCOUTE ACTIVE, TOUT CHANGE  : tout d’abord, le médecin-dentiste a su tout de suite décoder chez ce patient certains signes non verbaux de l’angoisse (pâleur, yeux cernés d’avoir mal dormi, mains moites…) qu’il va garder pour lui et vérifier par la suite avec l’écoute active. Il est attentif à tout ce qui touche son patient.

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HARMONIE ET EFFICACITÉ AU CABINET DENTAIRE

Mais le patient craint de révéler sa peur. Le médecin-dentiste, en reformulant ce que dit le patient, l’invite à se confier plus avant. Le patient se sent petit à petit mis en confiance, car il se sent écouté et compris complètement. Il peut ainsi trouver, choisir la/les solution(s) à sa peur. Donc plus de raison d’avoir peur. Tout se passera très bien. Le patient sera fier d’avoir eu le courage de parler et d’avoir vaincu son appréhension grâce au médecin-dentiste qui a su écouter. C’est très simple, mais on n’a pas l’habitude. Quelle satisfaction pour le patient et le professionnel ! Tous ces exemples donnés pour les messages Je de confrontation ou l’écoute active peuvent apparaître trop parfaits  ? Bien sûr, mais c’est très utile pour des raisons didactiques. En revanche, à force de pratiquer, on s’en rapproche énormément. Autre chose, nous avons souvent très peur du silence, nous avons peur de ne pas parler, alors on parle et c’est justement alors qu’il faudrait goûter un peu de ce silence si profitable à l’autre en le regardant avec bienveillance.

Qu’est-ce que l’écoute active ? C’est écouter avec son cœur, avec empathie. C’est montrer à l’autre que vous l’avez compris en reformulant ce que l’autre vit. C’est prendre du recul. C’est aider l’autre à résoudre lui-même ses problèmes, sans lui donner de solution.

Indications 1. SUITE AU MESSAGE JE DE CONFRONTATION J’ai senti le comportement de l’autre comme inacceptable, c’est moi qui suis gêné par ce comportement, donc c’est moi qui ai maintenant un problème. Pour résoudre la confrontation, je vais utiliser le MESSAGE JE de CONFRONTATION. Si 60 % des gens répondent positivement à ce message, 40 % répondent négativement. Il faut alors faire suivre le message Je de confrontation par l’écoute active (car on trouve normal que l’autre se rebiffe, donc son action de se défendre nous apparaît comme un comportement acceptable et c’est lui qui a présentement un problème suite à notre message Je de confrontation).

Écoute active

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EXEMPLE  : Une apprentie assistante dentaire ne fait pas tout ce qui lui revient de faire, en particulier la désinfection, le nettoyage et la stérilisation des instruments de l’unité dont elle est responsable. MESSAGE JE DE CONFRONTATION de l’assistante responsable : - Je ne me sens pas respectée (SENTIMENT) quand, au moment de partir du cabinet, je perds un temps fou à nettoyer et stériliser tes instruments (EFFET CONCRET), alors que tu avais le temps de le faire dans l’après-midi (COMPORTEMENT INACCEPTABLE), et j’aimerais bien voir avec toi le pourquoi de ce comportement (DEMANDE). - C’est toi la diplômée et c’est à toi que revient cette charge ! RÉPONSE NÉGATIVE de l’apprentie : ÉCOUTE ACTIVE de la responsable : - Tu penses que, parce que je suis diplômée, c’est à moi de faire les instruments de ton cabinet ? - Bien sûr, car tu es quatre fois plus payée que moi qui suis apprentie, donc tu dois travailler davantage que moi et, de plus, je ne suis pas ta bonniche. - Tu as l’air de penser que le salaire est uniquement proportionnel à la quantité de travail réalisé et que je te traite comme une bonne ? - Oui. - Tu viens de me dire aussi que tu étais apprentie ? - Oui. - Dans apprentie, il y a le mot apprendre. La désinfection, le nettoyage et la stérilisation des instruments sont très importants dans notre pratique pour éviter les infections croisées. Cela fait partie de ton apprentissage et de ton cahier des charges. C’est pourquoi, il est important que tu t’exerces, afin de ne pas te trouver désemparée lorsque tu te retrouveras un jour seule dans un autre cabinet. - Ah, je croyais que tu essayais de me refiler tout le travail, parce que tu voulais partir avant la fin de la journée. Je comprends maintenant et je vais essayer de m’appliquer, afin que je puisse être un jour une bonne assistante dentaire, consciente de ses responsabilités. 2. L’AUTRE A UN PROBLÈME On sent que l’autre a vraiment un GROS PROBLÈME, que son comportement soit acceptable ou non.

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3. ZONE SANS PROBLÈME Le comportement de l’autre est acceptable dans une zone SANS PROBLÈME. Très intéressant à pratiquer, si l’on veut mieux connaître quelqu’un, bien sûr, pour autant qu’il veuille parler et qu’on ne se serve pas de ce qu’il dira à des fins perverses !

Structure Le schéma suivant (Fig.  15) va nous aider à comprendre l’écoute active de façon très simple et très imagée. Gardez bien ce schéma dans votre mémoire, lorsque vous commencerez à pratiquer cette nouvelle manière d’être avec l’autre. Il y a quatre sphères, 1, 2, 3, 4. La «  1  » signifie que l’autre, qui a un problème, va nous livrer un message verbal ou non verbal en rapport avec son problème. La « 2 » est l’écoutant qui va essayer de sentir les sentiments que l’autre veut bien lui faire partager, c’est le décodage. La «  3  », c’est la reformulation, c’est-à-dire le reflet des sentiments décodés dans le message de l’autre. La « 4 » est la confirmation, l’infirmation, ou la clarification de la reformulation. Et ainsi de suite jusqu’à ce que l’autre ait exprimé complètement son problème et trouvé ses propres solutions à son problème. Premier cycle : 1, 2, 3, 1, 4 (flèches noires). Puis 4, 2, 3, 4 (flèches rouges)…

P A T I E N CONFIRMATION T INFIRMATION CLARIFICATION

MESSAGE

DÉCODAGE

1

2

4

3

S O I G N A N T

REFORMULATION

Fig. 15  Structure de l’écoute active

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Exemple : reprenez les deux exemples en début de ce chapitre et travaillezles, analysez-les. Exercices : vous pourrez les faire en fin de chapitre.

Conditions de l’écoute active Les sentiments et le problème doivent être exprimés, extériorisés par des signes verbaux ou non verbaux, sinon, c’est de l’inquisition. L’autre doit avoir envie de parler. L’écoute active doit être considérée comme un jeu et non pas comme être devant celui qui écoute, égal à Dieu.

Pour faire de l’écoute active, il faut : Se sentir acceptant. Vouloir aider. Avoir le temps nécessaire. Prendre le temps. Etre confiant en l’autre (il trouvera des solutions à son problème). Se sentir suffisamment distant de l’autre (recul). Pratiquer l’empathie : regarder à nouveau le schéma de la page 62.

Erreurs de l’écoute active Retarder l’autre. Devancer l’autre. Interpréter au lieu de reformuler. Stéréotypie des phrases. Répéter mot à mot ce que l’autre a dit (faire le perroquet). Omettre des choses importantes. Ajouter des éléments non donnés. Sur ou sous-estimer les émotions. Si j’ai moi un problème dont je ne suis pas conscient ou que je n’ai pas résolu, je risque de projeter mon propre problème sur celui de l’autre. On peut faire ainsi bien des dégâts ! Si l’autre a besoin d’informations spécifiques. Utilisation de l’Écoute Active à des fins perverses (menaces, mesures autoritaires). L’ÉCOUTE ACTIVE N’EST PAS UNE TECHNIQUE, MAIS UNE MANIÈRE D’ÊTRE FACE AUX SENTIMENTS ET AUX ÉMOTIONS DE L’AUTRE

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EXERCICES D’ÉCOUTE ACTIVE Relisez et relisez les exemples des pages 71 à 74 incluse et lancez-vous : LE FAIT 1. Patient qui se fâche très fort au téléphone, insulte la réceptionniste, traite les médecins dentistes de voleurs, d’escrocs, de sadiques, parce qu’il a eu très mal lors de la dernière séance et que sa note d’honoraires ne correspond ni au devis, ni au travail réalisé en bouche.

ÉCOUTE ACTIVE

2. Patient qui n’aime pas venir chez le médecindentiste, car il a très peur des soins dentaires, en particulier des extractions. Et ce matin, le médecin dentiste doit lui avulser les 28 et 38 incluses. Il est pâle, cerné, transpire, son pouls est rapide. 3. Dès qu’on aborde des questions d’honoraires avec ce patient, il arrive à chaque fois à éluder la discussion sur ce problème. 4. Une de vos jeunes élèves assistantes dentaires est, depuis 1 semaine, très pâle, cernée, semble fatiguée. Elle semble triste et rit de moins en moins. 5. Depuis deux semaines, une de vos hygiénistes dentaires arrive avec 10 à 15 minutes de retard, les trois jours de travail où elle est au cabinet. Elle ne communique plus avec le reste de l’équipe et tout son travail s’en ressent : travail en bouche beaucoup moins soigné, mauvaise motivation des patients, place de travail peu propre et cabinet en désordre.

MESSAGE JE DE CONFRONTATION RÉPONSE NÉGATIVE DE L’AUTRE ÉCOUTE ACTIVE

Pour les 4 premiers exercices, la réponse se fera sous forme d’exercices d’écoute active seulement. Pour le 5e exercice, il s’agit de répondre en utilisant le message Je de confrontation, suivi d’une réponse négative, à laquelle, on va répondre par l’écoute active.

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Ce sont des exemples vécus dans l’exercice de l’activité de médecins-dentistes. Vous pourrez sûrement mettre le nom de certains de vos patients et de vos collaborateurs sur ces cinq cas et cela vous aidera peut-être à écrire la bonne écoute active. MAIS Quand on s’aperçoit, dans le traitement de l’anxiété dentaire, que l’écoute active, avec sa communication non verbale importante, son empathie, ses questions ouvertes, ses reformulations et ses résumés n’est pas suffisante pour que le patient puisse résoudre lui-même ses problèmes, il faut y ajouter l’entretien motivationnel (EM). Cette nouvelle approche s’adresse à des personnes qui ont de la peine à changer de comportement face à un problème ou une situation quels qu’ils soient. Cette manière d’être avec ce genre de personnes a été développée par William Miller et Stephen Rollnick au cours des années 1980. C’est une démarche qui garde tous les éléments essentiels de l’Écoute Active, mais qui va, par divers procédés communs, renforcer la motivation de l’individu à changer tout en gardant son autonomie. Ce n’est pas si simple. C’est pourquoi, il y a de nombreux cours de deux jours dans plusieurs hôpitaux francophones, dont le CHUV (Centre Hospitalier Universitaire Vaudois), cours que j’ai suivi en février 2016 avec beaucoup d’intérêt. Cours que je recommande vivement. Dans ce livre, nous allons vous donner, ci-dessous un résumé de cette approche, tiré du site Internet de l’Association Francophone de Diffusion de l’Entretien Motivationnel (AFDEM – www.entretienmotivationnel.org. Nous l’avons légèrement reformaté pour l’occasion. Un livre sur le sujet de Miller et Rollnick, en français, est répertorié dans les références de ce chapitre.

Résumé de l’entretien motivationnel Définition

L’entretien motivationnel (EM), selon Miller et Rollnick, est un style de conversation collaboratif permettant de renforcer la motivation propre d’une personne et son engagement vers le changement.

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Indications

Dans toutes les situations où une personne est ambivalente face à un changement d’un comportement donné, même si celui-ci pourrait avoir des conséquences importantes sur sa santé ou sur sa situation sociale : anxiété dentaire intense, phobie dentaire, addictions de toutes sortes, perte de poids, troubles alimentaires, traitement médicamenteux contraignants, accompagnements de personnes en difficulté…, dans le secteur social et éducatif. Concepts autour de l’EM

• L’ambivalence est naturelle devant toute perspective de changement, même si… c’est à la fois vouloir et ne pas vouloir, C’est aussi désirer d’arrêter et de continuer. Malheureusement, trop souvent encore, les professionnels de la santé ont tendance à formuler des arguments en faveur du changement, c’est le réflexe correcteur qui prive le patient d’une certaine autonomie, d’où contre-argumentation en faveur du non-changement et c’est contre-productif, alors qu’à la place il faudrait soutenir l’autonomie du patient. • La dissonance. Le patient voit le pour et le contre du changement, explique son débat intérieur, justifie ses difficultés à changer, mais ne parle pas de changement. Si le soignant lui dit quel devrait être son changement, il lui impose son point de vue en le privant de son autonomie. Le patient va alors argumenter contre ce qu’on lui impose. Tout cela est la dissonance et c’est contre-productif. •  Le discours de maintien (DM) : Il fait partie de l’ambivalence, non provoqué par l’intervenant, c’est l’expression des raisons du patient qui l’empêche d’aller vers un changement. •  Le discours de changement (DC) : c’est le contraire du précédent et un élément clé de l’EM, c’est l’ensemble des assertions pour un changement. • Le discours de changement préparatoire (DCP)  : il y a des mots, des expressions, des attitudes…, des désirs, des besoins, des capacités… qui indiquent que le patient envisage un changement et va vers la mobilisation. • Le discours de changement mobilisation (DCM)  : engagement, activation, premiers pas. Souvent le DM et le DC sont souvent entremêlés, c’est l’expression de l’ambivalence. Repérer dans lequel le patient est le plus présent et l’aider à aller vers le changement.

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L’esprit de l’EM

L’EM est centré sur la personne dans une atmosphère empathique et valorisante, mais est directionnel, car la relation vise à augmenter la motivation au changement en respectant l’ambivalence et en explorant les valeurs et les perceptions propres du patient. Au fond, le professionnel aide le patient à énoncer ces propres motivations à changer. C’est le meilleur chemin. • Le Partenariat  : L’intervenant doit éviter la position de l’expert qui dispense son savoir à une personne passive. Au contraire, cela doit être une collaboration de deux experts. Le professionnel expert dans le savoir technique, le patient expert de sa situation. Celui-ci se connaît, sait ce dont il est capable, ce qui est difficile pour lui, comment il réagit. On ne peut forcer personne à changer, le changement ne peut venir que de sa propre motivation à changer. • Le Non-Jugement Regard inconditionnel  : accepter la personne comme elle est et croire dans ses capacités à évoluer Empathie approfondie : le professionnel cherche à comprendre le cadre de références de l’autre, à ressentir son mode intérieur. Éviter le piège d’évaluer selon nos critères de références. Soutien de l’autonomie du patient  : contraindre, diriger est un comportement nuisible et crée une réactance psychologique (désir de restaurer sa liberté). Au contraire, faire confiance aux capacités de la personne de se diriger vers une évolution positive. Valorisation : rechercher et reconnaître les capacités de la personne et les efforts qu’elle fournit. Il s’agit d’une posture, d’une manière d’être et de communiquer et non l’expression d’une approbation personnelle. Évocation : s’oppose à l’approche déficitaire où l’on considère que la personne manque de compétence, de savoir, de motivation et qu’il faut combler ces lacunes. L’EM s’appuie sur l’idée que la personne porte en elle les ressources pour résoudre son ambivalence. L’intervenant doit donc aider le patient à exprimer ses ressources. Altruisme  : c’est promouvoir le bien-être de l’autre, principe qui se pose en première place, suivi par les autres ci-dessus.

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Les quatre processus de l’EM

Actuellement, L’EM comporte quatre processus consécutifs et imbriqués les uns dans les autres. L’image la plus parlante est celle de l’escalier, où chaque marche s’appuie sur l’autre ; on redescend une marche pour pouvoir avancer de nouveau. • L’engagement dans la relation : ce n’est pas spécifique à l’EM. Dans toutes les relations thérapeutiques et d’accompagnement éducatif et social, il y a le temps de la rencontre, la création d’une Alliance Thérapeutique (AT). Ce premier temps est fondamental. Ici, tout rentre en jeu : les mots, l’attitude de l’intervenant, ce que le patient souhaite, attend (savoir écouter), pour voir ce qui crée l’ambivalence. Savoir explorer avec le patient, ses désirs, ses valeurs par des questions ouvertes, la reformulation, la valorisation et les résumés. Dans l’EM, on se concentre sur l’établissement d’une relation fondée sur la confiance mutuelle et sur une aide respectueuse. C’est difficile, car il faut éviter certains pièges, comme enfermer la personne dans une attitude passive ou provoquer de la dissonance en proposant un diagnostic réducteur, ou en jugeant ou en restant en surface pour éviter le vrai problème. Pour nous guider, explorer plusieurs points avec la personne : ce qu’elle attend, souhaite ; est-ce important pour elle ? A-t-elle vécu cette relation positivement et voit-elle un espoir de changement ? On pourra mettre nos actes et attitudes en concordance avec des objectifs. L’intervenant doit développer certaines compétences  : savoir écouter pour comprendre ce qui crée l’ambivalence chez la personne, savoir explorer avec elle ses propres valeurs, ses propres désirs par des questions ouvertes, la reformulation, la valorisation et les résumés (au fond, voilà l’usage de l’écoute active). • La focalisation  : doit permettre de s’accorder avec la personne sur la direction visée par l’accompagnement. Il n’y a pas toujours concordance, mais la focalisation permet de se mettre d’accord sur les projets d’accompagnement, sur les objectifs visés. L’EM guide en tenant compte du patient, du contexte, des perceptions de l’intervenant, par des échanges, des discussions, afin de s’accorder sur ce qui est souhaitable pour le patient. • L’évocation : phase pendant laquelle l’intervenant, par un discours-changement amène le patient à verbaliser ses propres arguments et ses propres motivations à changer. Bien explorer l’ambivalence. Ce DC nous dit où en est la personne. Il y a un DCPréparatoire exprimant désirs, besoins, capacité de la personne et un DMobilisation qui sont des indicateurs pour savoir si la personne a encore besoin d’aide ou si l’on peut planifier ensemble.

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•  La planification : débute quand le DC va dans le mode mobilisation. Renforcer cet engagement vers le changement. Formuler avec le patient des plans d’actions. Relever les motivations du patient, ses capacités et moyens pour évoluer, puis le soutenir dans la mise en œuvre. Apporter des informations, tout en respectant l’autonomie de celui-ci. Plusieurs plans sont possibles. Compétences déployées dans L’EM au cours des quatre processus : poser des questions ouvertes, écoute active avec ses reformulations, empathie, résumer souvent, informer, conseiller. Si nous vous avons mis ce résumé en fin de l’écoute active, c’est pour vous inviter à aller plus loin dans la prise en charge des patients qui ont beaucoup de peine à changer certains de leurs comportements. Mais cela demande une formation spéciale, comme dit au début, de deux jours que nous vous recommandons de suivre si vous voulez vous occuper de ces patients. Avec l’écoute active, il nous semble que vous pourrez très bien vous débrouiller avec ce qui est écrit dans ce livre, et cela va être suffisant pour l’anxiété dentaire légère à modérée, et elle est de toute manière aussi valable pour tous les patients en général, ainsi que l’EM. Il existe aussi à l’École de médecine dentaire de Genève un cours d’un jour sur l’Écoute Active dans la formation continue. CES MANIÈRES D’ÊTRE (de T.Gordon et de W.R Miller et S. Rollnick) AVEC L’AUTRE, AVEC LES AUTRES, SONT AUSSI LES PILIERS DE LA PRÉVENTION, DE LA RÉSOLUTION ET DE LA MÉDIATION DES CONFLITS COMME VOUS ALLEZ LE CONSTATER DANS LE CHAPITRE SUIVANT.

Références CIARAMICOLI A. et KETCHMAN K. Le pouvoir de l’empathie. Éditions de l’Homme, Montréal, 2000. CORNETTTE DE SAINT CYR X. Pratiquer la bienveillance. Éditions Jouvence, Montréal, 2007. CORNEAU G. Victime des autres, bourreau de soi-même. Robert Laffont, Paris, 2003. EVEQUOZ G. Les compétences clefs : pour accroître l’efficacité et l’employabilité de chacun. Éditions Liaisons, 2004. FAURE J-P et GIRARDET C. L’empathie. Éditions Jouvence, Montréal, 2003 FELDMAN D. et PES J-P. L’écoute. Éditions Jouvence, Montréal, 2003.

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GORDON T. Relations efficaces. Éditons Le Jour, Québec, 2002. Enseignants efficaces. Éditions de l’Homme, Montréal, 2005. Leaders efficaces. Éditions de l’Homme, Montréal, 2006. Parents efficaces. Éditions Marabout, Poche, Paris, 2007. GUNTERN G. Les sept règles d’or de la créativité. L’imagination au cœur de l’entreprise. Éditions Village Mondial, Paris, 2001. La médiocratie démasquée. Pour un leadership créatif. Éditions Village Mondial, Paris, 2001. LECOEUR E. Gestion des compétences : Le guide pratique. de Boeck, Paris, 2008. LEGOFF J-P. Les illusions du management : Pour le retour du bon sens. Éditions La Découverte, Paris, 1996. LEU L. Manuel de communication non violente. Guide pratique pour individus, groupes et écoles. Éditions Jouvence, Montréal, 2005. MILLER W. et ROLLNICK S. L’entretien motivationnel. InterEditions-Dunod, Paris, 2013. PETITCOLLIN C. Apprenez à écouter. Éditions Jouvence, Montréal, 2006. PORTELANCE C. Relation d’aide et d’amour de soi. L’approche non directive créative en psycho­ thérapie et en pédagogie. Éditions du Cram, Montréal, 1992. ROBIN S. 63 propositions pour bien diriger une équipe. Éditions Village Mondial, Paris, 2004. ROGERS C. Les groupes de rencontre : Animation et conduite de groupes. Dunod, Paris, 2005. ROSENBERG M. Les mots sont des fenêtres (ou des murs). Introduction à la communication non-violente. Éditions Jouvence, Montréal, 1999. La communication non-violente au quotidien. Éditions Jouvence, Montréal, 2003 Enseigner avec bienveillance. Instaurer une entente mutuelle entre élèves et enseignants. Éditions Jouvence, Montréal, 2006. Dénouer les conflits par la communication non-violente. Éditions Jouvence, Montréal, 2006. Spiritualité pratique. Les bases spirituelles de la communication non-violente. Éditions Jouvence, Montréal, 2007. Parler de paix dans un monde de conflits. Éditions Jouvence, Montréal, 2009 Être vraiment soi, aimer pleinement l’autre ! La communication non-violente en couple et entre amis. Éditions Jouvence, Montréal, 2011. TOLLE E. Le pouvoir du moment présent. Guide d’éveil spirituel. Éditions Ariane, Outremont, 2000. Mettre en pratique le pouvoir du moment présent. Enseignements essentiels, méditations et exercices pour jouir d’une vie libérée. Éditions Ariane, Outremont, 2002. Quiétude. À l’écoute de la nature essentielle. Éditions Ariane, Outremont, 2003. NouvelleTerre. L’avènement de la conscience humaine. Éditions Ariane, Outremont, 2005. De nombreux livres audio dont les quatre ouvrages ci-dessus, Éditions ADA inc.

6 PRÉVENTION ET RÉSOLUTION DES CONFLITS. MÉDIATION L. SCHORDERET

Introduction « IL Y A PLUS DE GENS POUR CONSTRUIRE DES MURS, QUE DE GENS POUR CONSTRUIRE DES PONTS » (Très vieil adage populaire)

Elle est là ma motivation à travailler depuis de très nombreuses années à la résolution de situations conflictuelles. C’est très facile de construire un mur. En revanche, construire un pont est une aventure faite d’analyses multiples et de dépenses d’énergie en tous genres. Ma profession (psychosociologue) a fait de moi un témoin. Tel un pompier qui arrive au milieu de l’incendie, je me retrouve très fréquemment devant de gros problèmes engendrés par des personnes de bonne volonté qui se pensaient outillées pour construire le pont. Je suis sollicité, mais si souvent je suis appelé trop tard, quand l’affaire est consommée. J’ai donc accepté de partager, dans ce livre, mes envies d’HARMONIE - ETD’EFFICACITÉ. Étant fréquemment appelé pour rechercher des solutions dans la résolution de conflits violents et difficiles, et cela depuis plus de quarante ans, j’ai quelques conclusions, voire quelques enseignements, à partager avec vous. Je n’aime pas les conflits, mais je veux tout faire pour accepter les conFRONTations et les afFRONTements. Simplement, nous devons impérativement décider et accepter de nous former. Pour ce faire, pour dire nos désaccords, nous avons besoin d’outils (des outils et non des armes). Il n’est pas du tout nécessaire de faire la guerre.

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Je suis témoin  : dans le monde du travail, il est incroyable de rencontrer tant et tant de personnes qui souffrent de la prétention inconsciente d’un savoir superficiel dans le domaine des relations humaines. Pourquoi en sommes-nous arrivés là ? L’analyse de nos « savoir-faire » devrait se nourrir davantage de principes éthiques, respectueux de la personnalité du patient et du collaborateur. J’ai un âge avancé et, car j’ai aussi été un patient, vous ne pouvez pas vous imaginer combien d’heures j’ai passées sur un fauteuil dans un cabinet dentaire. Aujourd’hui, je déplore profondément l’incompétence relationnelle de certains praticiens. Et ils sont encore trop nombreux. Si je ne dis pas non, je dis oui à la poursuite de pratiques génératrices de conflits. Qu’elle soit verbale ou physique, nous devons apprendre à désescalader la violence au travail. Mais surtout, sachons apprendre à être des ARTISANS DE PAIX. Pour y parvenir, cela nécessite FORMATION et ANALYSES.

De la nuisance des conflits à l’acceptation des affrontements Dans la pensée de chacun, le conflit résonne en termes de destruction, de rapports de forces négatifs, voire de violences verbales ou physiques. Notre propos est bien de comprendre de quoi est faite cette attitude, de nous demander comment on en arrive à cette extrémité ? Pourtant, il n’est pas pensable de tout accepter, de tout « laisser passer ». Notre devoir de loyauté, de justice et d’authenticité nous demande d’accepter de dire clairement nos désaccords, nos divergences de points de vue. C’EST POURQUOI JE VEUX TOUT FAIRE POUR ÉVITER ET ÉLIMINER LES CONFLITS, MAIS JE VEUX TOUT FAIRE POUR ACCEPTER LES AFFRONTEMENTS OU LES CONFRONTATIONS.

Car j’ai le droit d’avoir un point de vue différent du vôtre. Et, au nom de l’éthique, de la justice, du respect des autres et de moi-même, je dois m’exprimer. J’accepterai donc l’AFFRONTEMENT. Et ce n’est pas une raison pour nous faire la guerre.

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NOUS DEVONS NOUS DEMANDER DE QUOI SE NOURRIT UN CONFLIT ? SUR QUELLES BASES L’AFFRONTEMENT NOUS PERMET-IL DE MIEUX COMMUNIQUER ?

Quelle est la différence entre le conflit et l’affrontement ou la confrontation ? CONFLIT

AFFRONTEMENT – CONFRONTATION

Le CONFLIT se nourrit de polémique

L’AFFRONTEMENT se nourrit de controverses

Ici, j’argumente CONTRE L’AUTRE Je dis « tu » – « le tu, tue ! »

Ici, j’argumente À PARTIR DE MOI Je dis « JE » Le « Je » engagé. Et non pas le « Je » orgueilleux

Résultat : destruction du dialogue

Résultat : recherche du COMPROMIS

MORT DE LA RELATION

VIE DE LA RELATION

Avons-nous remarqué que dans le mot affrontement, comme dans le mot confrontation, on retrouve le radical front. J’ai une idée dans mon front, l’autre a une idée dans son front. Mettons ces idées sur la table. Il ne s’agit pas d’arriver à une compromission (qui ne serait que de la lâcheté), mais bien à un COMPROMIS, c’est-à-dire à la promesse commune que nous allons dépasser le problème et aboutir à une solution.

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Premier travail à faire : Dire « JE » et abolir le tu ou le vous agressif. Mais au-delà de cette action, nous devons aussi comprendre quelles sont les origines et les causes des conflits. Les origines sont toujours dans nos racines personnelles. Les causes sont provoquées par des circonstances ou des événements extérieurs. « Ma recherche de l’absolu m’a fait comprendre la beauté du compromis. » (Gandhi)

De l’origine et des causes des conflits « ORIGINE » : ce qui provoque l’apparition de quelque chose, ce qui en est la source, ce qui en explique la formation, l’apparition, la création. Les conflits prennent leur origine en nous (et non pas à l’extérieur) : • dans nos EXPÉRIENCES PRÉCOCES (ce qui veut dire que chacun de nous vient de son enfance et de ses expériences de vie). ÊTRE UNIQUE signifie que notre représentation des situations difficiles a marqué notre façon de nous comporter. De ce fait, je dois avoir conscience que certains peuvent détester toute situation conflictuelle, alors que d’autres sont ravis d’y être confrontés. D’où la question, première et indispensable  : QUEL GENRE DE PERSONNE SUIS-JE EN SITUATION TENDUE OU EXPLOSIVE ? • et dans la PERCEPTION que nous avons du RÔLE de chacun dans la société dans laquelle nous vivons ( ce qui veut dire que si l’autre agit, dans son rôle, différemment de la représentation que j’ai de ce qu’il devrait être et faire, les oppositions deviendront inévitables). « CAUSES » : raisons extérieures qui provoquent le phénomène. Les conflits trouvent leurs CAUSES EXTÉRIEURES, tels des clignotants, dans les circonstances suivantes lorsque les PROTAGONISTES sont confrontés à : • des DIFFÉRENCES de buts, d’intérêts, de valeurs • des DIFFÉRENCES dans la perception du problème • des RIVALITÉS de pouvoir • de l’INSÉCURITÉ par constats et sentiments d’incompétence • de la RÉSISTANCE au changement (cf. § suivant) • des CONFUSIONS dans les rôles • des MANŒUVRES pour se trouver une identité • l’EXPRESSION INADÉQUATE de besoins personnels

Prévention et résolution des conflits. Médiation

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• à l’INCONSCIENCE d’être dans des réseaux de COMMUNICATION PAUVRE (cf. § suivant)

À propos de la « résistance au changement » Dans ce terme le mot le plus important est le mot «  résistance  ». Et il y a résistance s’il y a : • un manque d’objectifs clairs • les personnes ne sont pas impliquées dans le changement • une communication pauvre • une injonction du type : « faîtes-moi plaisir » ou « faîtes un effort » • une offre de récompense inadéquate • une satisfaction du statu quo (on a toujours fait comme ça) • une ignorance des normes et des codes du groupe • une crainte de l’échec • un manque de confiance dans celui qui veut le changement (dans cette situation, chacun doit se demander : SUIS-JE CRÉDIBLE ?)

À propos de la « communication pauvre » Au contraire de la « COMMUNICATION RICHE », communication faite d’échanges, de dialogue, d’engagement, de sentiments exprimés, la «  COMMUNICATION PAUVRE  » se contente de généralisations sans preuve, de discours autoritaires, d’absence d’écoute de l’autre.

De la prévention des conflits Pouvons-nous nous interroger aussi sur nos incohérences ? Comment se faitil que la plupart des gens soignent davantage leur voiture que leurs relations ? Nous avons une voiture. Le constructeur automobile nous invite, dans un carnet d’informations, à prendre la précaution de faire, « régulièrement », cette visite interne du véhicule qui s’appelle «  LA VIDANGE  ». Dans les faits, il ne s’agit pas d’une action de réparation, il est bien question d’un ACTE DE PRÉVENTION. Dans les faits, nous arrêtons de rouler, nous ouvrons le capot, nous enlevons les huiles usées et nous les remplaçons par des huiles neuves.

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Nous pouvons fermer le capot et remettre le contact pour poursuivre notre route. Même si cela nous coûte un peu de temps et d’argent, même si c’est parfois un peu contraignant, nous acceptons cette démarche afin de maintenir en bon état cet objet matériel. Communiquer veut dire « METTRE EN COMMUN ». La vie d’équipe, la vie de groupe, la vie institutionnelle, la vie relationnelle n’est pas un objet matériel. Comment faisons-nous pour l’entretenir ? LA MEILLEURE MANIÈRE DE GÉRER LES CONFLITS EST DE FAIRE DE LA PRÉVENTION

L’outil qui peut nous permettre d’enlever ce qui est usé dans la relation ou inadéquat, ou insupportable, existe. Il s’appelle « ESPACE DE PAROLE » ou lieu de rencontre, ou mise au point, ou tout autre terme à votre convenance. Dans tout groupe de travail, donc dans tout Cabinet Dentaire par exemple, il y a sûrement des colloques au cours desquels quelqu’un transmet des informations, des réunions de sondages d’opinions sur des techniques, des colloques de résolution de problème par exemple au sujet d’un patient. Serait-il envisageable, possible, d’imaginer, de mettre en place un nouveau colloque pour parler de « NOUS DANS L’ÉQUIPE » ? Propositions pour cet « espace de parole » ou colloque-fonctionnement ou colloque « vidange » : QUAND ? AVEC QUI ?

COMBIEN DE TEMPS ? DÉBUT DE SÉANCE ?

2 fois par semestre ou 1 fois tous les 2 mois Ou, si nécessaire : 1 fois par mois Toutes les personnes concernées, responsable ou chef de service inclus ; éventuellement aussi le personnel administratif Séances d’une heure minimum : de préférence prévoir une heure trente Pas d’ordre du jour autre que : PARLER DE NOUS. Tour de table éventuel pour faire l’énumération des questions présentes sur les thèmes : ce qui va bien – ce qui va bien mais peut être amélioré – ce qui ne va pas.

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INDISPENSABLE ?

Prévoir un animateur. Le chef de service ou un « tournus » d’animation POUR DIRE QUOI ? Il se révèle que CINQ THÈMES reviennent régulièrement : 1. Analyse des rapports de POUVOIR et AUTORITÉ à l’intérieur du Groupe ou de l’Équipe de travail, 2. et commentaires sur le STATUT et le RÔLE de chacun dans l’Équipe. 3. Analyse des Colloques et Prises de Décision. 4. Rapport à tout ce qui est extérieur à l’Équipe  : clientèle – hiérarchies – communications – problèmes financiers, … 5. Rapports entre les objectifs de travail et ce qui se passe quotidiennement. Il reste néanmoins vrai que les thèmes ci-dessus, évoqués ici théoriquement, ne rendent pas compte de l’atmosphère d’un colloque de fonctionnement. Quand il s’agit par exemple d’évoquer le rôle de chacun, le dialogue s’articule en termes souvent tendus. Exemple : Tu comprends, toi, tu te mêles de ce qui ne te regarde pas… Le «  tu  » s’adresse à quelqu’un qui s’appelle Jean-Pierre ou Caroline… Les colloques « vidange » font parfois un peu peur, parce qu’ils introduisent directement le domaine des «  RELATIONS INTERPERSONNELLES » dans l’équipe de travail. Et alors ? Préférerions-nous que tout se dise dans les couloirs, en apartés calomnieux, ou sous forme de rumeurs nauséabondes. Mettons-nous en face les uns des autres, et disons-nous nos besoins, nos attentes, nos craintes, nos bonheurs, nos satisfactions, nos propositions pour une vie meilleure en équipe. En fin de séance, il est indispensable de faire le point. Où en sommes-nous maintenant ? Prenons-nous de nouvelles décisions pour améliorer notre fonctionnement ? Quels sont les territoires de réflexion pour la suite ? Qui se charge de faire quoi  ? Comment être davantage SOLIDAIRES  ? La solidarité ne se décrète pas : elle s’appuie sur l’autodiscipline de chacun. Nous vérifierons, dans quatre semaines, ce qui, dans le Cabinet Dentaire, fait succès ou fait problème. Vraiment, il n’est pas nécessaire de se faire la guerre. Pour y parvenir, un territoire de paix a été créé. Nous avons fait de la PRÉVENTION.

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Stratégies de la résolution de conflits Il y en a plusieurs. Nous les énumérons et nous les décrivons, exemples à l’appui. Choisissez, en fonction de votre éthique, l’attitude qui est en cohérence avec ce que vous souhaitez. Mais commençons par un exemple… typique : Un mardi matin ; dix heures. Plaque fixée sur la porte du Cabinet dentaire : Nom du Praticien – Heures d’ouverture. En dessous l’invitation : Entrez sans sonner. Brutalement, la porte s’ouvre. Une voix d’homme, assez forte, résonne dans le hall d’entrée  : «  Y a quelqu’un  ?  » La porte de la salle d’attente est ouverte sur le hall  : deux jeunes femmes, l’une avec un enfant de neuf ans ; elles regardent, très surprises. L’homme a une carrure imposante. Encore plus fort : « Y’a quelqu’un ? » Une assistante du médecin-dentiste sort de la salle de soins : « Bonjour Monsieur (elle est apparemment calme), nous sommes en cours de soins auprès d’un patient, veuillez prendre place, s’il vous plaît, en salle d’attente, je viens vers vous dans quelques instants. » L’homme semble très énervé. L’assistante retourne à son activité. En fait, elle a reconnu un ancien patient, très revendicatif, qui s’était déjà comporté de façon odieuse lors d’une précédente visite, il y a quelques mois. L’homme tourne en rond dans le hall, entre dans la salle d’attente, mais ne s’assied pas. Cinq minutes plus tard, l’assistante revient, prend congé du patient soigné, s’adresse aux deux femmes en les priant de patienter encore quelques instants, puis : « Monsieur, le médecin-dentiste souhaite s’entretenir avec vous, il arrive de suite. » La conversation, agressive dans le ton et le contenu, a lieu dans le hall. L’assistante remet en ordre la salle de soins et la prépare pour la patiente suivante. Le dentiste : « Bonjour Monsieur, je me dois de vous dire que vous êtes ici aujourd’hui sans rendez-vous et que deux patientes m’attendent déjà. » L’homme : « Je n’en ai rien à foutre. » Le dentiste : (énervé) « Non, cela ne se passera pas comme cela. Si vous êtes revenu parce que vos dents vous font mal, sachez que je ne continuerai pas à vous soigner tant que vous n’aurez pas honoré les trois factures pour lesquelles vous avez reçu plusieurs rappels. »

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L’homme crie : « Vous avez le devoir de me soigner, et tout de suite. » L’une des femmes ferme la porte de la salle d’attente, l’assistante, blême, apparaît. Le dentiste : « Vous avez la liberté de vous adresser à un autre confrère, mais en ce qui nous concerne, nous ne pouvons plus rien pour vous. D’ailleurs la façon dont nous sommes traités, mon assistante et moi-même, ne nous semble pas acceptable… » L’homme entre dans une réelle colère et profère des menaces. Nous retrouverons la suite des événements dans un prochain chapitre, mais, à ce stade : QU’AURIEZ-VOUS FAIT ? Il y a certainement plusieurs stratégies de résolution de conflits, lorsque le conflit est malheureusement déjà engagé. Il est donc important d’y réfléchir, de savoir ce que nous voulons, en fonction des résultats que nous souhaitons et de notre savoir-faire concret, voire de notre philosophie personnelle. Quelques constats, quelques pistes : • L’ACTE DE POUVOIR, de force  : refus de tout dialogue voire même utilisation de la violence. Il est vrai que lorsque l’autre a été « tué »… C’est le régime de la peur, de la manipulation, de l’irrespect, du harcèlement. • La FUITE : la crainte d’entrer en matière sur un désaccord déclenche cette décision de fuir, de laisser faire, de s’écraser, voire d’évitement réellement physique. • L’ATTITUDE HAUTAINE, VOIRE MÉPRISANTE : quelles en sont les conséquences ? • ISOLER LE PROBLÈME : faire comme si il n’existait pas. C’est la porte ouverte à une certaine compromission. Il peut alors se faire que notre vie et notre pensée intérieure restent très préoccupées. • ISOLER LA « PERSONNE PROBLÈME » : dans le cas qui nous occupe, la discussion aurait pu avoir lieu ailleurs que dans le hall d’entrée. • ATTITUDE d’INERTIE, de PASSIVITÉ (grève) : l’autre est peut-être mis alors dans une attitude d’impuissance. • DIVISER ET CONQUÉRIR  : lors de conflits collectifs, certains responsables utilisent en effet des interventions de « triangulation » : ceci facilite leur tâche, mais provoque, dans le groupe ou l’équipe professionnelle, l’émergence de situations de méfiance. • PROCÉDURES BUREAUCRATIQUES : il s’agit par exemple de procédures juridiques : plaintes, blâmes, avertissements, courriers menaçants…

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• ATTITUDE « éponge », attitude de conciliation plus ou moins chaleureuse, paternaliste… (on va bien finir par s’entendre…). • CHANGEMENT DE STRUCTURE (par exemple décision de ne plus travailler ensemble, de ne plus être l’un en face de l’autre). • PROCÉDURES de NÉGOCIATION, de MÉDIATION. Cela signifie que l’on OFFRE DES ALTERNATIVES à ce qui est en train de se passer. En posant la question  : qu’auriez-vous fait dans la situation évoquée plus haut  ? Une analyse personnelle peut vous donner des éléments de réponses aux questionnements que vous acceptez de faire sur votre attitude habituelle. Cependant, nous ne pouvons pas en rester là. En situations de rencontres difficiles, comme en toute autre situation, nous utilisons notre parole, notre vocabulaire, nos affirmations… Donc, en termes de PRÉVENTION à la RÉSOLUTION et à la GESTION DES CONFLITS, le paragraphe suivant doit nous interroger sur l’impact du langage. D’une part, ma façon de m’exprimer est totalement subjective, et d’autre part, nous devons rester conscients de :

L’impact du langage Quelle que soit la profession, quel que soit le lieu, quel que soit l’âge, quelles que soient les circonstances, nous entrons ici dans un moment de FORMATION PERSONNELLE. Si l’idée d’une telle réflexion ou d’une telle remise en question devait vous agacer, passez outre. Il est vrai qu’un moment de FORMATION coûte un effort. Si cet effort vous semble trop lourd, trop coûteux, alors essayez l’ignorance. Mais au contraire, si vous vous sentez ouvert à une interrogation sur le langage utilisé en situations conflictuelles, vous découvrirez ici au moins trois regards différents au sujet de ce qui est mis en commun (communiquer = mettre en commun), au niveau de la parole, par les protagonistes concernés (étymologiquement, protagoniste : celui qui est debout devant, celui qui joue l’un des premiers rôles pour combattre). Regard no 1

Comment parler, comment réagir, que faire, lorsque je suis agressé verbalement  ? Il ne sert à rien de juger, d’agresser à son tour, d’entrer dans des

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polémiques oiseuses, de menacer, de se laisser envahir par des sentiments négatifs ou haineux… Lorsque l’autre se fâche, lorsqu’il « explose », il a avant tout besoin de savoir qu’il a été entendu. Le meilleur moyen de lui démontrer qu’il a été entendu est de lui redire, au moyen de nos propres mots, l’essentiel de ce qu’il a dit. Cela s’appelle LA REFORMULATION. Cette reformulation n’est en rien un langage de « perroquet ». Cette reformulation se veut être une CLARIFICATION. Par exemple : « Si j’ai bien compris, vous êtes en train de dire que vous êtes pressé… Au fond, ce que vous souhaitez, c’est que je vous soigne avant les deux personnes qui attendent et qui étaient à l’heure à leur rendez-vous… En vous entendant me parler ainsi, je me sens très menacé». Imaginez la suite : l’autre insistera et s’exprimera sur son propre besoin ; ou au contraire, il rectifiera sur ce que je n’ai pas compris. La reformulation clarification est une invitation à mon interlocuteur : ditesen davantage. Une telle proposition rassure l’autre tout en lui faisant comprendre qu’il n’est pas rejeté et que nous n’entrons pas dans une contre-attaque. Je reformule le contenu verbal, mais en même temps, je reformule ce que je vois : « vous me dites que vous êtes calme, mais je constate que le ton sur lequel vous me parlez est empreint d’une très forte agressivité. » Selon une théorie élaborée par l’un des disciples du psychologue américain Carl Rogers, cette attitude de reformulation est expliquée dans ce que l’on a coutume d’appeler les catégories de Porter. La reformulation est donc le moyen d’introduire un comportement de «  compréhension  ». Toutefois, soyons clair : comprendre ne veut pas nécessairement dire accepter. COMPRENDRE signifie que JE VOUS AI BIEN ENTENDU ; nous verrons, à l’intérieur de notre dialogue – calmement – ce que nous devons désormais négocier. Regard no 2

En paroles, il y a ce que je veux dire, ce que je dis, ce que je pense avoir dit, ce que l’autre a entendu, ce que l’autre a décodé, ce que l’autre pense avoir compris… Que d’obstacles, surtout lorsque nos émotions dépassent le courant de notre pensée. Alfred Korzybski, initiateur de ce que l’on a appelé la sémantique générale, nous propose trois axiomes fondamentaux, en utilisant la métaphore de la carte de géographie :

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1. La carte n’est pas le territoire LE MOT N’EST PAS LA CHOSE (que de confusions autour des mots « structure, aide, démocratie, solidarité, compétence… »). 2. La carte ne décrit jamais tout le territoire LE MOT NE DÉCRIT JAMAIS TOUTE LA CHOSE (lorsque je dis quelque chose qui me semble essentiel, ce mot, je dois le définir, dire quel est le sens que je lui donne, afin d’éviter le plus possible le malentendu) 3. La carte n’est que l’expression de celui qui la dessine LE LANGAGE N’EST QUE L’EXPRESSION DE CELUI QUI L’UTILISE Quand je m’exprime, quand je me fâche, quand l’autre m’agresse… relativisons : CHACUN N’ENGAGE QUE LUI-MÊME, ET JE NE SUIS JAMAIS OBLIGÉ D’ACCEPTER LE MODE DE RELATION QUE L’AUTRE M’IMPOSE. REGARD ESSENTIEL JE ME METS EN STUATION POUR COMPRENDRE

Regard no 3 AFFIRMER N’EST PAS ARGUMENTER

Oui, nous devons nous mettre en situation d’analyse pour comprendre. Écoutez, regardez, constatez  : dans toute situation qui dégénère, les affirmations se succèdent sur des sujets énoncés impulsivement. En termes de formation, nous nous arrêtons ici pour nous donner tous les moyens de nous faire entendre. L’argumentation est un outil (autrefois on aurait dit une rhétorique, c’est-àdire un mode d’emploi qui se met à la disposition des besoins de l’interlocuteur avec lequel nous sommes en difficultés). Les phrases : V  ous Vous Vous Vous Vous

êtes incompétent… ne m’écoutez pas… dites des bêtises… avez mal géré cette situation… êtes toujours en retard….

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ne sont que des affirmations et, fréquemment, celui ou celle qui s’énerve utilise des généralisations qui ne font qu’envenimer une situation durant laquelle tous les dérapages sont utilisés. Refusons de telles attitudes de non-communication, mais surtout, donnonsnous les moyens de faire autrement, de proposer d’autres alternatives, c’est-àdire de ne pas entrer nous-mêmes dans les mêmes défaillances que celles que nous reprochons aux autres. LES CRIS N’ONT PAS DE POIDS DANS L’ARGUMENTATION LES PREUVES ONT DU POIDS DANS L’ARGUMENTATION

Quelques points de repères : • Argumenter suppose que l’on a plusieurs éléments à coordonner, à mettre ensemble. • Cela prend du temps et cela ne peut pas être dit de manière impulsive, dans la colère. • Dans le conflit, il est dès lors nécessaire de rester lucide, d’arrêter l’escalade de la violence verbale, et de se fixer un moment (plus tard) pour dire son argumentation et échanger avec l’argumentation de l’autre. • Durant mon argumentation, je ne me laisse pas interrompre. Ce n’est qu’à la fin que l’autre peut comprendre ce que j’ai à dire. • Je me donne une stratégie d’expression. Par exemple : C oup d’éclat : ni agressif, ni méprisant, le coup d’éclat peut être l’expression d’un sentiment, d’une blessure… A ppel à l’écoute : « J’ai besoin d’aller jusqu’au bout de ce que j’ai à dire » C onstats : J’énonce les événements, je ne dis pas mes impressions, j’évoque des FAITS VÉRIFIABLES. T émoignage : Je dis ce que je ressens, ce que je vis intimement, ce qui m’est insupportable et inacceptable. U ne proposition : Le conflit peut devenir CRÉATIF si je sais être un artisan qui construit. S ynthèse : Je vous ai dit les faits, mes désaccords intimes, ma proposition… Où en êtes-vous ?

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Moyen mnémotechnique  : vous avez constaté, aperçu, découvert le mot « CACTUS », à la verticale de l’exemple. Oui, dans le conflit, j’ai des choses désagréables à dire, difficiles à entendre. Un cactus pique. Mais au moins une fois par an, le cactus fait une très belle fleur. C’est la « proposition ». EN RÉSUMÉ : TROIS REGARDS 1. LA REFORMULATION 2. L’ANALYSE MODESTE DU LANGAGE 3. L’ARGUMENTATION

Négociation et médiation Soyons cohérent avec ce que nous disions plus haut  : les mots que nous utilisons ont une définition. Au-delà du conflit, il est certainement possible de s’orienter vers la négociation, ou vers la médiation. Que signifient, pour vous, ces termes ? Ne restons pas dans le flou. Négociation

C’est une CONFRONTATON des PROTAGONISTES, réunis autour d’un ou de plusieurs points de vue divergents. Grâce à un DIALOGUE, durant lequel CHACUNE et CHACUN ÉCOUTE et ARGUMENTE, les protagonistes vont à la RECHERCHE de SOLUTIONS, avec le désir que chacune, chacun y trouve son compte. Médiation

C’est un processus spécifique de TRAITEMENT DES SITUATIONS CONFLICTUELLES dans lequel l’intervention d’un tiers impartial – LE MÉDIATEUR – permet aux PROTAGONISTES de CONFRONTER leurs points de vue et de rechercher, avec son aide, une SOLUTION au DIFFÉREND qui les oppose. Ces deux définitions, nous le voyons, décrivent leur principale différence dans le fait que la négociation n’est pas nécessairement concernée par le conflit, alors que la médiation est une instance spécifique de résolution de conflits. Il est d’autant plus important de dire ici que le résultat de la médiation est très aléatoire. Nous ne devons pas nous imaginer que la solution de la médiation

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réside dans le fait que « l’on va s’embrasser » en sortant de la salle de réunion. La rupture, constatée et acceptée, est aussi une solution envisageable.

Auto-analyse C’est le chapitre de notre TRAVAIL PERSONNEL. Quelle est mon attitude personnelle face au conflit ? Quel est habituellement mon style de résolution ? En quoi puis-je changer ? En quoi puis-je m’améliorer ? La réponse à ces questions va être capitale. Nous allons le comprendre en prenant connaissance de la suite de l’épisode évoqué sous le titre un « exemple… exemplaire » (cf. ch. Stratégies de la résolution des conflits, p. 92).

Que faire face à la violence ? L’histoire qui a été narrée aux pages 92-93 est, vous ne vous en étonnerez pas, malheureusement véridique. Elle s’est mal terminée. L’homme est entré dans une réelle colère, il a proféré des menaces, et il a frappé violemment le praticien. Bien entendu, nous nous disons que le médecin-dentiste aurait dû agir avec d’autres moyens. Nous venons d’en évoquer quelques-uns  : trouver un lieu plus adéquat pour parler, ne pas se laisser intimider par la hargne de ce patient agressif, mettre un cadre à une meilleure possibilité d’échanges sans se plier aux exigences inadmissibles d’un agresseur, etc. C’est toujours facile de dire, après l’événement, on aurait dû… il aurait fallu… D’où, une fois encore  : acceptons de nous former et de laisser de côté les réactions « non-professionnelles ». En l’occurrence, les dégâts ont été importants : blessures physiques, interventions de la police, mais surtout : arrêt de travail prolongé pour le praticien. Affecté gravement, il a été gagné par la dépression. Il semble qu’il se soit résigné à abandonner sa pratique. Vraie question : où en est-il à ce jour ? À ce stade, la question qui nous touche le plus est : COMMENT DÉSESCALADER LA VIOLENCE ? Répondre sur le papier est certainement trop aisé. Sachons cependant que la réflexion sur les stratégies est abondante (cf. l’ouvrage de KOHLRIESER G. : Négociations sensibles. Éditions Village Mondial, Paris, 2007).

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Les points de repères proposés : • Rappeler, dire qui nous sommes. • Prononcer le nom de famille (ou le prénom si nous le connaissons) de l’interlocuteur. • Avancer physiquement vers lui « les mains ouvertes ». • S’enquérir de son besoin immédiat. • Éventuellement accepter ou proposer un contact physique léger. • Élaborer un contrat immédiat (ex : on va parler, mais ici ce n’est pas possible et ce n’est pas le moment ; alors où et quand ?). Admettons que la situation est vraiment difficile. Et c’est bien, encore une fois, la raison qui fait que nous devons prévenir, nous préparer, nous former à sortir des répliques impulsives, grâce à une assurance personnelle.

Être en état de vigilance constante Une pièce de théâtre de Paul Valéry est intitulée « Monsieur Teste ». Le nom « teste » pourrait signifier par exemple (cf. testis en latin) : Monsieur Témoin. L’essentiel de la représentation nous fait assister à la rencontre d’un monsieur âgé et d’un serveur de bar. Le vieux monsieur vient prendre régulièrement son café en ce lieu et de belles et passionnantes conversations s’engagent entre les deux hommes. À un moment, le garçon est seul, nettoyant ses tables, et il monologue sur le fait que Monsieur Teste ne vient pas : il s’interroge sur les raisons de ce retard ou de cette absence. Monsieur Teste finit par arriver. Le serveur : Ah, vous voilà enfin. Je pensais à vous et je me faisais du souci au sujet de votre retard. Tout va bien j’espère ? Monsieur Teste : … Ainsi vous pensiez à moi… Puis-je savoir à quel sujet ? Puis-je en connaître la raison. Le serveur  : Oui, quand je vous vois ainsi, à votre âge… Je vous vois si calme, je vous sens si serein, vous respirez la sagesse… J’aime à vous écouter, à vous entendre : Mais comment fait-on pour en arriver là ? Et Monsieur Teste de répondre : « Je pense que l’UNE DES CHANCES DE MA VIE EST QUE J’AI RÉUSSI À NE JAMAIS ME PERDRE DE VUE. » Force de la Sagesse évidemment. Vous remarquez qu’à travers les questions et les termes divers traités dans ce livre «  Harmoni-e-fficacité  » une insistance se construit autour des concepts de

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vie, moment présent, savoir dire, hygiène de pensée, sagesse, recherche de paix, connaissance de soi, hygiène de vie, etc. PICASSO aurait écrit : « LE TALENT SANS UN PEU DE TECHNIQUE, CE N’EST JAMAIS QU’UNE SALE MANIE. » C’est là une des raisons qui fait que nous avons grandement besoin, dans la prévention et la gestion des conflits, de solidité et de sagesse intérieure, de compétence et d’analyse personnelle, mais aussi de « savoir-faire » relationnel. La formation et l’entraînement nous aident à acquérir les outils nécessaires et à nous empêcher de nous perdre de vue. Avant de clore provisoirement l’étude de ce thème, il nous semble utile d’évoquer la situation de l’après-conflit. En effet, comment ressortir avec le minimum de dommages de ces moments de blessures qui laissent des traces, voire de douloureuses cicatrices. Nourrie probablement de la sagesse de Monsieur Teste, une psychanalyste genevoise, Madame Lydia Müller, me disait, il y a plus de quarante ans : « Il faut savoir pardonner, et pour moi, PARDONNER, C’EST REFUSER DE TIRER PARTI DU TORT QUE L’ON VOUS A FAIT. » Il ne s’agit donc pas d’oublier. Il est essentiel de ne pas se perdre de vue afin de ne pas retomber dans les erreurs ou les fautes qui ont mis notre vie relationnelle en danger. Les fables de Jean de la Fontaine nous offrent très souvent une conclusion en forme de morale. Voici la morale que nous offre un proverbe italien : IL EST INDÉCENT DE MONTRER LES FAUTES DES AUTRES AVEC UN DOIGT SALE

Mise en application no 1 MAIS TROUVONS NOTRE LANGAGE PERSONNEL EN ESSAYANT DE DIRE : D’ailleurs, vous ne J’ai besoin d’être entendu ; je me permets donc m’écoutez pas. de vous redire mon point de vue en m’appuyant sur un exemple… Votre comportement est Dans notre lieu de travail, chacun, moi y inacceptable. compris, respectons des règles de fonctionnement et j’ai besoin de votre accord sur les points suivants : … NE DISONS PLUS :

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NE DISONS PLUS : Tu es toujours en train de m’attaquer. Vous avez très mal accueilli ce patient. Tu n’as pas à me parler sur ce ton. Je dis que tu me manipules…

Peu importe la manière, l’essentiel est qu’il n’ait plus mal. Je pense que vous n’avez pas les compétences pour en décider à ma place. J’ai toujours fait comme cela, ce n’est pas toi qui va m’apprendre mon métier. Mêle-toi de ce qui te regarde.

MAIS TROUVONS NOTRE LANGAGE PERSONNEL EN ESSAYANT DE DIRE : Je ne comprends pas la cause d’une telle agressivité à mon égard. Nous le connaissons, il est d’un abord difficile. Je pense que notre politesse à son égard peut devenir contagieuse et peut le faire réfléchir. Je n’accepte pas de poursuivre notre échange de cette manière, car je pense que c’est négatif pour chacun. Je n’accepte pas d’être conduit à un endroit où je n’ai pas envie d’aller. En ce qui me concerne, j’appelle cela de la manipulation. Entre nous je souhaite des rapports francs. J’ai un avis différent : notre respect réciproque et le calme de l’environnement font pour moi également partie du traitement. Nos divergences nous obligent à échanger sur nos domaines de responsabilités. Je fais encore confiance à mon expérience. Nous avons besoin de reprendre cette question et nous le ferons dès que possible. Je me sens agacé chaque fois que je sens une menace sur ma liberté. J’ai besoin de comprendre les raisons qui nous amènent à un tel incident.

Encore une fois, ce ne sont que des suggestions qui nous invitent à nous interroger. Chacun doit trouver un langage personnel : • qui évite l’utilisation permanente du TU qui tue ou du VOUS qui vomit. • qui évite d’AFFIRMER sans ARGUMENTER. • qui ne RESTE pas sur LE BOULEVARD DE LA PLAINTE. • qui tient compte des RESPONSABILITÉS de CHACUN des protagonistes. • qui intègre les VALEURS du COMPROMIS (la compromission serait de la lâcheté). Le COMPROMIS est, dans le dialogue ici et maintenant, une promesse que l’on progresse vers la découverte de solutions nous permettant de dépasser le conflit.

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• qui comprend que les «  seules connaissances qui peuvent MODIFIER le COMPORTEMENT D’UNE PERSONNE sont celles QU’ELLE DÉCOUVRE ELLE-MÊME et qu’elle s’approprie  » (Carl Rogers). En d’autres termes : La porte du changement s’ouvre toujours de l’intérieur. • qui se souvient que LE LANGAGE n’est que l’EXPRESSION de CELUI QUI L’UTILISE. • qui s’appuie sur des OUTILS DE COMPRÉHENSION de CE que L’AUTRE VEUT DIRE. Pour comprendre l’autre à l’endroit où il s’exprime, je dois souvent m’imposer le devoir de REFORMULER ce qu’il vient de dire afin de vérifier que nous sommes bien dans une bonne MISE EN COMMUN (= COMMUNICATION). Réflexion courante à ce stade  : c’est tout de même difficile  ! Oui, probablement. MAIS NOUS AVONS LE DROIT DE LE FAIRE AVEC DIFFICULTÉ

Mise en application no 2 Traitement de conflit sans intervenant extérieur

Médiateur ? Thérapeute de groupe ? Intervenant extérieur ? Psychologue ? Arbitre  ? Peu importe le titre ou le qualificatif que nous allons lui donner. Mais faut-il un intervenant extérieur ? Une telle question n’est que théorique. Mais la question qui demeure : L’Institution, le Cabinet, le Groupe, L’Entreprise ont-ils des moyens d’analyse suffisants pour faire face à ce qui leur arrive ? L’exemple suivant a un caractère d’exemplarité. Un groupe de travail composé de sept personnes dont un chef de service. Ce dernier, de par ses qualifications techniques et médicales a un statut supérieur et il est investi d’une responsabilité d’ensemble. Mais ce n’est pas parce que l’on a des diplômes dans une matière scientifique que l’on est automatiquement compétent pour gérer un groupe de personnes, quelle que soit la dimension de ce groupe. Un chef de service a deux activités : une activité technique, et un autre métier : une activité relationnelle. Dans le cas qui nous préoccupe, les collaborateurs sont totalement découragés. En permanence, ils se font rabrouer ; et plus ils sont jeunes, plus ils sont en situation d’apprendre et de se perfectionner, plus ils sont l’objet de harcèlements et d’attitudes hautaines et méprisantes de la part du chef de service. Que faire ?

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Sans grand succès, ils ont tenté de s’adresser à des instances supérieures, instances de surveillance et instances chargées de la déontologie professionnelle. Il faut admettre que le chef de service a une manière tout à fait autoritaire pour donner du crédit à ses propos dénigrants. Les ressources du groupe  : une solidarité à toute épreuve, un désir de ne pas déclencher la guerre, un souci permanent de se centrer sur la défense du client et non pas sur l’envie de tout faire pour décapiter la tête du service, une volonté de découvrir des outils crédibles pour faire valoir leurs droits et les défendre. Ce groupe s’adresse à un intervenant extérieur… pour se former à la négociation, pour acquérir des stratégies afin d’ASSUMER LUI-MÊME la prise en charge de la problématique qui les oppose, à certains moments violemment, au responsable de groupe. Ces personnes doivent être félicitées. Elles ont réussi. Elles ont appris à argumenter, avec précision, avec justesse. Elles ont su garder le calme nécessaire, démontrant par là leur détermination à défendre le client, à se faire elles-mêmes respecter, à travailler pour le bien fondé d’une profession à défendre à tout prix. L’intervenant extérieur n’est jamais entré dans l’institution pour assurer la résolution du conflit. Son action fut celle d’un formateur. Le groupe de collaborateurs ne s’est pas reposé sur lui. Il a œuvré sans relâche afin de dépasser une situation qui était réellement devenue insupportable. Et ce fut un succès. Il serait toujours souhaitable que les solutions et la manière de les mettre en œuvre trouvent leur origine dans l’énergie constructive et respectueuse des personnes concernées. À la fin, le chef de service, de lui-même, a pris l’initiative de donner sa démission. S’il souhaite reprendre un poste à responsabilités, nous devons espérer qu’il se souviendra qu’il a deux activités. Personne n’est obligé de devenir « patron ». Toutefois, si telle est son intention, il faut avoir la modestie de se former et de s’interroger sur soi-même. Il est important de signaler en l’occurrence que si rien n’avait pu être résolu, la seule issue envisageable eut alors été l’enquête administrative, voire le procès : que de dégâts, pour chacune et pour chacun… Traitement de conflit avec intervenant extérieur

Il apparaît à l’évidence que lorsque la violence éclate, il est probablement déjà trop tard. La situation que nous allons évoquer est de ce type.

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N’oublions pas tout ce qui a été dit, en particulier tout ce qui a un rapport avec la PRÉVENTION. Dans le cas que nous évoquons, il est vrai qu’il est déjà bien tard. Nous sommes dans une institution à caractère social. La direction alerte un intervenant extérieur, psychologue et médiateur de profession. Elle explique le conflit de l’entreprise. Depuis plusieurs semaines, une collaboratrice, très dynamique et certainement très compétente dans sa profession, s’attaque directement et indirectement à la directrice, lui reprochant d’avoir des comportements inadéquats à son point de vue. Ces propos qui sont mensongers sont repris par un représentant syndical tout aussi agressif à l’égard de la directrice. Que faire  ? Une séance plénière, en présence de quelques membres du Comité de l’institution, a été programmée. La présence d’un intervenant extérieur semblait indispensable, mais il était déjà trop tard… La séance a été houleuse, désagréable. Pourquoi ? C’est trop facile de s’en prendre aux agresseurs. Comment la Direction pouvait-elle réagir, d’autant plus que l’intervenant, neutre, avait les moyens, en respectant les deux parties, de jouer l’arbitre. Hélas, toute intervention des agresseurs était interrompue de façon incorrecte par la Direction, qui n’écoutait plus personne. Toute médiation peut se terminer par un constat d’incompatibilité de collaboration. Mais pourquoi tant de haine ? L’évolution confirmera que la séparation des protagonistes, (les agresseurs ont donné leur démission), était inévitable, mais la séparation s’est faite, grâce à l’intervenant, dans le respect de chacun. Si vous avez besoin d’une tierce personne, n’attendez pas qu’il soit trop tard. À quoi bon appeler les pompiers quand la maison est détruite ?

Mise en application no 3 Quelques compléments de réflexion sur différentes stratégies de résolution de conflits

Dans la liste qui va suivre, c’est à vous de décider ce qui vous paraît juste, ce qui vous convient en regard de votre personnalité, mais surtout en vous interrogeant sur les préceptes de votre ÉTHIQUE DE VIE.

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Pour vous déterminer, interrogez-vous sur la suite prévisible des événements, et imaginez les résultats que vous déclencherez. •  L’acte de pouvoir (ou la méthode Pinochet). Lorsque l’autre a été méprisé, massacré, dévalué, licencié, il n’y a plus de combattants. Le conflit direct a ainsi été étouffé. Un jour ou l’autre, les responsables sont rattrapés. •  La fuite. Par exemple, dans un service officiel de l’État (80 personnes), le Directeur part à la retraite. Un nouveau directeur est engagé. Après trois années, 70 % du personnel (toutes sur décision individuelle) a donné sa démission. Et nul, au sein de leurs responsables ne s’en étonne. Quel courage politique faudrait-il mobiliser pour que cette érosion silencieuse soit stoppée ? •  L’attitude hautaine et méprisante. Elle se nourrit essentiellement d’humiliations, de harcèlements, de jugements péremptoires, souvent sans rapport avec la réalité. •  On peut isoler le problème, l’ignorer, faire comme s’il n’existait pas. En fait, il s’agit d’une attitude faussement démocratique, voire paternaliste. On parle de tout, sauf de ce dont il est vraiment question. Rien n’est réglé et on assiste à une dégradation des relations, l’émergence de rumeurs et de bruits de couloir. Quel remède à cela ? Utiliser les réunions de fonctionnement (ou « réunions vidange ») pour retrouver un mode de communication acceptable. •  Isoler la « personne-problème ». Combien de fois avons-nous constaté qu’une personne qui «  sent mauvais  », en raison d’une hygiène insuffisante, subit une forme sournoise de harcèlement par isolement et mise à distance. En l’occurrence, le courage de dire ou de savoir dire est inexistant. Lâcheté ? Fausse conception de la notion de respect ? •  La passivité ou l’inertie. Le conflit est larvé, tant les protagonistes se démotivent et se découragent les uns les autres. Conséquences : animosités relationnelles, voire accidents réels. Et l’on affirme, en toute mauvaise foi, que c’est la faute de l’autre (retrouvez la parade à ce genre de situations dans les pages précédentes : application no 2 : les collaborateurs se sont mobilisés solidairement et se sont formés à mettre en place des stratégies adéquates). •  Diviser pour conquérir est une solution de résolution de conflits dans la triangulation dans la relation… On laisse traîner auprès de chacun des informations qui jettent la suspicion afin que chacun se méfie de ses collègues. • Les procédures bureaucratiques  : Que préférez-vous  : un mauvais arrangement ou un bon procès  ? Et lorsque le procès est là, n’est-il pas

Prévention et résolution des conflits. Médiation

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déjà trop tard  ? (vous pouvez vous reporter au chapitre qui traite de la prévention). • L’attitude éponge. C’est la pseudo charité qui excuse tout, qui fait réparer les fautes ou les erreurs par quelqu’un d’autre dans une volonté de protection, afin de ne «  pas avoir d’histoires…  ». Conséquences prévisibles  : épuisement et sentiment d’injustice chez celui qui éponge. Une fois de plus, le remède se trouve dans le « parler » et dans le « se parler ». • Changement de structure. Les personnes sont en conflit  ? Mutations dans le service, changements de postes, recherche de solutions d’éloignement. • Des processus de négociation. Il n’en reste pas moins vrai que nous recherchons tous de préférence, tout au moins dans l’intention, des solutions qui surviennent au cours de négociations et de médiations. Toutefois, souvenons-nous de quelques exigences, de quelques précautions élémentaires pour espérer quelques succès : • M’imposer un devoir de transparence de mes propos et ne pas déroger à mon honnêteté personnelle. • Me proposer à moi-même de m’orienter vers des solutions «  gagnantgagnant » ou bien des solutions « où il n’y a pas de perdant ». • M’engager modestement à définir le sens des mots que j’utilise  ; par exemple manipuler, mot qui n’a pas le même sens pour tout le monde. • Parfois, il est nécessaire de solliciter l’appui d’une personne crédible pour les deux protagonistes en conflit. Car il est souvent utile de se faire redéfinir les enjeux et de calmer les émotions si elles sont trop envahissantes. • Me donner les possibilités de vérifier, régulièrement, sur une certaine durée, l’évolution des prises de position et le maintien ou non des décisions prises. • En permanence, je soigne mon argumentation. J’ai le droit d’avoir un autre avis que celui qui est proposé par mes interlocuteurs. Ce n’est pas une raison pour nous faire la guerre. Il est réellement possible de nous affronter sainement et sereinement. NE PAS ME PERDRE DE VUE ET ME DEMANDER, DANS UNE ANALYSE FRANCHE ET SINCÈRE : SUIS-JE UN CONSTRUCTEUR DE MURS OU SUIS-JE UN CONSTRUCTEUR DE PONTS ?

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Références BELLENGER L. Être constructif dans les négociations et les discussions. Entreprise moderne d’édition, Paris, 1984. COPE M. Développez votre autorité. Éditions Village Mondial, Paris, 2002. De la ROCHEFORDIÈRE Y. Du conflit au dialogue. Éditions d’Organisation, Paris, 1990. FUSTIER M. Le conflit dans l’entreprise. Entreprise moderne d’édition, Paris, 1975. HIRIGOYEN M-F. Le harcèlement moral. Syros, Paris, 1998. KOHLRIESER G. Négociations sensibles. Éditions Village Mondial, Paris, 2007. MARZANO M. Extension du domaine de la manipulation. Grasset, Paris, 2008. MISSENARD B. Savoir négocier face à face. Éditions d’Organisation, Paris, 1987. ROGERS C. L’approche centrée sur la personne. Éditions Randin, Suisse, 2001. VERGLERIS E. Manager avec la philo. Éditions d’Organisation, Paris, 2007.

7 SOINS DENTAIRES AUX ENFANTS : QU’EST‑CE QUI EST IMPORTANT ? C. CLERC

Introduction Une proportion non négligeable de mes patients adultes me racontent la même histoire :« je me souviens du dentiste scolaire, et depuis, j’ai peur. » Bien sûr, notre activité est souvent vécue comme «  le prototype de l’agression  ». Mais, néanmoins, la phrase concernant les dentistes scolaires est récurrente. Les parents qui viennent chez moi avec leur(s) enfant(s) ont très peu de confiance dans les services dentaires scolaires. Je m’efforce toujours de rétablir la vérité, mais leurs opinions ne changent pas. J’ai personnellement connu un collègue qui détestait soigner les enfants. Sa méthode ? « Quelle est la dent qui fait mal ? » … et, sans explication, ni anesthésie, la dent de lait était extraite d’un coup sec… Ce qui, effectivement, va bloquer l’enfant, puis l’adulte… Là encore, même si c’est lui-même qui m’a expliqué sa façon de faire, il faut nuancer. Peut-être s’agissait-il d’une fanfaronnade ? Mais, sans doute l’avait-il une fois pratiquée… ? Cela suffit à faire une réputation ! J’ai assisté une fois à une «  mise à jour en pédodontie  ». Les participants étaient, bien sûr, tous des confrères concernés par les soins aux enfants : que des problèmes, des échecs, du découragement… On avait l’impression d’être à un enterrement ! Certes, il ne faut surtout pas fermer les yeux sur les difficultés, mais quelle joie, quel privilège aussi de soigner des enfants. Depuis plus de 25 ans, je soigne beaucoup d’enfants. Souvent dans la paix et la reconnaissance. Je me suis donc dit qu’un témoignage sur ma pratique

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(comment peut-on être efficace si l’on n’a pas créé une atmosphère harmonieuse ?) aurait toute sa pertinence dans le cadre de ce livre. Qu’est-ce qui est important ? Oser la relation

Dans mon cabinet, il se produit un phénomène curieux : les enfants viennent le plus souvent inquiets, voire apeurés. Et peu à peu, – à vrai dire très vite –, sur le fauteuil, ils s’apaisent. Les soigner devient donc plus facile, plus gratifiant. Leur attitude suscite même, si souvent, mon admiration. Que se passe-t-il  ? Ce qui pose d’emblée la question du titre de ce chapitre : « qu’est-ce qui est important ? » Soigner des dents, certes. Mais pourquoi alors cette question ? Y aurait-il à considérer d’autres aspects que ceux strictement techniques ? C’est là l’élément clé de mon expérience. Les médecins-dentistes se reconnaîtront certainement dans nombre de situations évoquées. Trois points m’autorisent à me prononcer sur ce sujet : 1. Mon vécu personnel  : j’ai toujours cherché à comprendre le pourquoi des choses, leur sens.  Je suis ainsi particulièrement sensible à la construction de la personnalité, surtout chez les enfants. Par conséquent aussi à la prise de conscience des blocages, des croyances, des peurs et autres attitudes « programmées », et au lâcher-prise de ces dernières. « On n’enseigne bien que ce qu’on a besoin d’apprendre », dit-on. Je donne donc aux enfants qui viennent dans mon cabinet ce que je n’ai pas reçu ! 2. Avant de devenir médecin-dentiste, j’ai été enseignant pendant douze ans dans diverses institutions : école primaire, classes à options, enseignement spécialisé pour les handicapés, école professionnelle pour les apprentis. 3. Depuis 25 ans, j’exerce en tant que médecin-dentiste à la campagne. J’ai traité plus de 3 000 enfants avec des résultats réellement concluants. J’ai divisé ma présentation en 6 points : –– Au fauteuil –– Relation –– Fausses routes –– Émotions –– Basculement de la conscience ; des actes « modèles » –– Conclusion

Soins dentaires aux enfants : qu’est‑ce qui est important ?

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Au fauteuil Atmosphère

Comme à l’Hôpital de l’enfance, à Lausanne (qui propose des cours remarquables1 sur la prise en charge des enfants en milieu hospitalier), j’ai essayé de créer une atmosphère accueillante : aquarium, tableau noir, table à dessins, jeux, livres, jouet à choisir à la fin de chaque séance, etc. Première séance

Je ne prodigue jamais de soins lors de la première consultation. Je le dis d’entrée, avant même que nous entrions dans la salle de soins. Les exceptions sont très rares, si urgence absolue. Même en cas, par exemple, d’un abcès sur une dent de lait qui va tomber, je prescris éventuellement du sirop de Voltaren®, et les soins seront effectués le lendemain. On passe d’un pré-adolescent terrorisé et qui souffre à un pré-adolescent centré et paisible : le changement est spectaculaire ! Après l’accueil des parents et de l’enfant dans la salle de soins, je procède toujours de la même façon. L’enfant est invité à manipuler tous les boutons pour voir comment ça marche : le fauteuil qui bouge, la soufflette, les aspirations, etc. • J’explique, à l’aide d’un modèle démontable, ce que sont les dents de lait et les dents permanentes. • Je montre aussi la porte ouverte, qui donne directement sur le secrétariat. J’indique aussi où est la salle d’attente, juste de l’autre côté, avec la porte ouverte également… « Ainsi ta maman entendra tout ce qui se passe. » • J’explique les « règles du jeu » : et avant les soins, je fais des séances d’exercices (en général, une à deux suffisent) jusqu’à ce que l’enfant gère ses émotions, prenne confiance1. • Si l’enfant lève la main, quel que soit le stade du traitement que ce soit, j’arrête immédiatement les soins2. Les parents ne sont jamais présents (sauf dans de rares exceptions). C’est un point indispensable. 1. Voir référence de l’Association le P.A.S (préparation, accompagnement, soutien) dans la biblio­ graphie. 2. Remarque : Je pose souvent la question aux adultes qui viennent au cabinet depuis tout petits : « Est-ce que vous vous souvenez de vos premières séances ici, quand vous aviez 4-5-6 ans ? Du panier avec le petit jouet à choisir ? » Ils me répondent presque à chaque fois : « Le panier, oui, c’était sympa. Mais c’était surtout la main qu’on pouvait lever pour tout arrêter. »

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Coupure du lien transgénérationnel

« J’aime beaucoup soigner les enfants. J’ai toute la patience du monde – pour autant que l’enfant joue le jeu… (voir plus loin « les enfants comédiens »). Jamais je ne ferai quoi que ce soit, sans te l’avoir expliqué, montré hors, puis dans la cavité buccale (principe du Tell, Show, Do), mais c’est toi, toujours, qui me diras« OK ». Et aux parents comme à l’enfant : « C’est sa bouche que je regarde, pas la vôtre, ni la mienne. Donc en contrepartie, l’enfant doit assumer, en toute sécurité, cette relation-là, seul(e) avec moi. Je sais que ce n’est pas facile : un cabinet dentaire, un professionnel en blouse blanche, lorsqu’on a cinq ans. Mais il/elle peut le faire «  puisqu’il/elle est monté(e) sur le fauteuil  ». Aux parents  : «  bien sûr, je vous tiendrai au courant, on vous fera venir ici pour vous montrer, à vous et à votre enfant – qui tiendra un miroir entre les mains – ce que j’ai vu, ce qu’il faut éventuellement faire et pourquoi. » On retrouve là une « loi de vie » : « Tu es créé unique. » « Quitte ton père et ta mère et va vers ta terre. » … Une fois les explications de la première séance bien comprises, le contrôle clinique effectué, on fixe un ou plusieurs rendez-vous-séance d’exercices et soins. Le temps passant permet de décanter toutes ces nouvelles informations. Puis, on entre plus avant dans la démarche avec les séances d’exercices : Séance(s) d’exercices

Tous les soins à faire sont montrés en temps quasi réel, hors, puis dans la cavité buccale. S’il existe un réflexe vomitif ou une peur d’étouffement, je mets en place un accord : position assise, arrêts fréquents, etc. Ainsi, l’enfant garde le contrôle du rythme. Et le temps «  perdu  » s’avère très vite une aide précieuse. Chaque séance dure environ quinze minutes. Une mère, un jour, a refusé la seule séance nécessaire d’exercices prévue : « On en a parlé avec mon mari et mon fils, c’est inutile. Faites les soins tout de suite. » Dont acte. Mais ce que l’enfant a perdu est en réalité inestimable  : pouvoir rentrer en lui- même, dans ses ressentis et devenir coauteur. Il a fonctionné comme un adulte. Les soins ont été prodigués, mais il n’a rien pu intégrer. Si la confiance n’est pas établie, on ne peut rien faire à long terme. Combien faut-il de séances d’exercices ? Je vois assez vite à qui j’ai à faire. Cela passe du mental dans le corps. Je ressens un enfant qui est centré, paisible dans son corps. Alors, il est prêt. C’est très beau d’assister à cela. Parfois même, cela va très vite : j’ai vu, une fois, pour une avulsion urgente d’une dent de lait, un jeune de douze ans hurler de peur… «  préventivement  »  !

Soins dentaires aux enfants : qu’est‑ce qui est important ?

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Je lui explique comment ça se passe. Exercices  : comment se déroule une avulsion, puis, que tout cela dépendra de lui, à son rythme, quand il sera prêt, on le fera. Après deux minutes d’exercices… : « Ah, ce n’est que ça ?, allons-y. » Ce que j’ai fait, bien sûr. Une fois l’enfant « apprivoisé », on peut alors passer aux soins : Les soins

Juste avant le début réel des soins, je dis à l’enfant : « Voilà, tu as tout vu, tout compris, tout essayé. Maintenant tu dois prendre LA décision : “oui” ou “non”. Je sais que tu es prêt, mais personne d’autre que toi ne peut décider cela… » Alors là, oui, quelque chose bascule. Mais il y a eu tant de petits pas au préalable. Un de plus en somme. Comme un père qui « lâche les mains » juste devant son enfant qui apprend à marcher. Il crée un « vide », tout petit, en complète sécurité. Les mains, au début, sont à quelques centimètres de son enfant, espace dans lequel l’enfant peut avancer. Je commence par le plus facile, ce qui permet souvent d’éviter l’anesthésie dans un premier temps. L’enfant fait donc un pas de géant sans douleur aucune. Ainsi, les peurs continuent de se dissoudre et sa confiance en lui de se construire. Tout cela a à voir avec une notion appelée « le lieu de décision » : un bébé, qui commence à découvrir le monde, s’il voit sa mère inquiète, s’il entend ses cris de frayeur, à chaque fois qu’il frôle un danger, ne voudra pas la décevoir et se couper de celle qui lui assure la sécurité et la vie, et il agira dans le sens de la mère. Son « lieu de décision » est extérieur à lui. Un autre, au contraire, sera encouragé à explorer, à faire ses propres expériences, avec, bien sûr, un discret aménagement des lieux pour éviter les gros problèmes. Il va vite ressentir et se dire qu’il n’y a pas de danger à agir ainsi et que ses découvertes sont passionnantes. Sa relation avec sa mère n’est pas remise en cause. Son « lieu de décision » prend racine peu à peu en lui-même. Après chaque séance-examen clinique, exercices, soins, je valide systématiquement tous les progrès réalisés. Je félicite l’enfant chaleureusement pour sa bonne volonté, son courage, la confiance qu’il me témoigne, les progrès réalisés, la peur qui s’estompe et, à la fin, il peut choisir un petit jouet. Vous avez ci-dessus le canevas de ce qui se passe lors des soins aux enfants. Mais d’autres notions entrent aussi en ligne de compte, que nous allons aborder ci-dessous : la relaxation, le principe de réalité, la peur de l’inconnu, le cadre, le regard juste, le chemin inverse de la dissociation, les échecs. Et on terminera ce chapitre, au fauteuil, par trois exemples.

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Relaxation

Pour être en phase juste avec ses ressentis, le corps (les muscles) doit être détendu et la respiration paisible. Le cas échéant, je fais faire de petits exercices de relaxation, pour contrôler ces deux types de tensions parasites. Il s’agit d’exercices très simples : si j’observe une respiration courte et rapide, je le lui dis, puis je lui demande de placer sa main sur son ventre pour la ressentir, jusqu’à ce qu’elle soit plus calme. La même chose avec les tensions musculaires : je lui fais remarquer, sentir que son bras est tout crispé. Puis je lui fais voir ce qu’est une tension musculaire, puis une détente. L’enfant répète le mouvement. Si j’observe, ensuite, que l’un ou l’autre paramètre, ou les deux réapparaissent, un seul mot suffit pour que l’enfant en prenne conscience et rétablisse la détente. Principe de réalité

Les soins dentaires ne sont pas agréables, même si la douleur aiguë a disparu, personne n’a envie d’être ici. Mais parallèlement, coexistent des aspects plus «  féminins  »  : sécurisation, acceptation inconditionnelle, respect des rythmes propres de l’enfant, apprivoisement… Dans un cadre sécurisé, avec un enfant qui garde le contrôle de tout, on part du « je ne sens rien » à « ça commence à être désagréable ». Je pose alors la question : « combien sur une échelle de 1 à 10 » et la réponse peut aussi être « je voudrais une anesthésie ». L’enfant est dans ses ressentis, pas dans le tout ou rien. Peur de l’inconnu

La peur de l’inconnu engendre souvent des blocages importants. Là, peu à peu, on explore, on avance en toute sécurité. Toutes les illusions, les écrans de fumée, les fausses peurs s’estompent, car les enfants ne sont plus du tout dans un système d’impuissance. Affronter les faits redonne du pouvoir. Cadre précis

• Il y a une structure des séances • Cette structure est expliquée aux enfants et à leurs parents • Avant les soins cette structure doit être acceptée par l’enfant et les parents • Il n’y a pas de possibilité « intermédiaire » • Avec cette façon de faire, un cadre est donné aux patients et aux parents • Respect des éventuelles difficultés de l’enfant de s’habituer au cadre. Mais de tels repères apportent un sentiment de sécurité.

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Regard juste

Bien des fois, je « corrige » le regard qu’a la maman sur son enfant, bien sûr avec la plus grande délicatesse possible. Par exemple : une maman arrive avec des jumeaux, un garçon et une fille. La fille a eu ses premières dents permanentes avant le garçon. Quand la maman a vu qu’une incisive centrale de lait ne tombait pas chez sa fille, elle est allée immédiatement avec elle chez son médecin-dentiste pour qu’il puisse l’extraire. « Et ma fille n’a fait aucune histoire, elle », dit-elle en direction de son fils, à qui il arrivait la même chose, et qui pleurait de peur toutes les larmes de son corps… Or chacun a son rythme, sa sensibilité. Il est donc préférable de ne pas comparer. Respecter tout et tous. Je m’adresse à la maman en lui parlant d’un livre simple et profond, écrit par un conseiller conjugal, Gary Chapmann : Les langages de l’amour. Il explique que chacun peut avoir un langage de l’amour qui n’est pas forcément le même que celui de son conjoint. L’un sera sensible aux paroles valorisantes, l’autre aux cadeaux, etc. Donc, même jumeaux, face à une même situation, les réactions peuvent être très différenciées. Et j’ai expliqué à la maman comme au garçon, comment ça se passait chez moi. En un instant l’enfant s’est calmé. Et, très vite, il a montré toute la bonne volonté possible. Il avait pour le moins autant de force que sa sœur, mais l’exprimait différemment. En plus, il ne fallait pas du tout extraire la dent de lait qui paniquait tant la maman… La vision de la maman change alors, ainsi que l’image qu’a l’enfant de luimême. Cet aspect d’un « regard juste » est à vrai dire très important pour les deux. Chemin inverse de la dissociation

Toute cette démarche, c’est le contraire donc de la dissociation (cf. ci-dessous « Les fausses routes »). Si on subit, tout petit, des violences graves (physiques, psychiques, émotionnelles), ça devient si insupportable qu’on se sépare en deux, on se dissocie littéralement, pour survivre. La petite fille violentée, par exemple, peut partir dans l’imaginaire. Nombre de garçons dans le mental. On peut nommer la réalité, et, par-là, se donner l’illusion d’une reprise du pouvoir. Mais «  vivre dans sa tête », ça n’est pas vivre. Et le drame, c’est que, devenu adulte, on reste dissocié (sauf miracle d’une rencontre, par exemple). Là, c’est exactement le contraire. Le mental, par quelques explications simples, joue son rôle ; puis, des exercices aux soins, tout se passe dans le corps, dans le lieu des émotions, des ressentis. Tout se passe, généralement, calmement, mais il faut compter sur les échecs et savoir comment les gérer.

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Échecs ?

Si je n’ai pas pu faire les soins, cela n’a aucune importance. Du sirop de Voltaren® sera éventuellement prescrit. Néanmoins, j’énumère tout ce qui a été fait, en félicitant l’enfant. Ce dernier peut constater qu’il a été respecté dans son rythme émotionnel, ses peurs, ses ressentis, qu’il a juste besoin d’un peu de temps pour « décanter » toutes ces informations. Quelques mois plus tard, tout est généralement en place. Il y a des enfants qui « jouent la comédie ». C’est très rare, et c’est toujours des garçons. J’explique alors à la maman, à haute voix, pour que l’enfant qui choisit un jouet entende aussi : « J’ai toute la patience du monde, mais là, non. Votre fils ne veut pas jouer le jeu. Alors “STOP  !” tout de suite. Votre fils hurle sur le fauteuil, mais 30 secondes après, il est tout calme pour choisir un jouet. Je ne suis pas dupe, mais je “n’entre pas du tout dans ces relations-là”. » Je précise cependant toujours à l’enfant qu’en urgence je suis toujours là (pour lui, comme pour tous mes autres patients). Par la suite, tout s’est remis en place, on peut commencer une « vraie » relation. Quelques enfants sont réellement terrorisés. Cela aussi, bien sûr, je le respecte : « On ne peut pas faire de contrôle ni de soins pour le moment, mais votre enfant va grandir. Il sait déjà qu’il est écouté, que jamais il ne sera contraint à quoi que ce soit. C’est une première étape. » Et le temps, là aussi, fait son œuvre. Peu à peu, la nouvelle se répand… Les enfants, par les ouï-dire, sont curieux de voir, plus détendus, presque joyeux. C’est toujours une surprise pour moi… et pour les parents… Et ça facilite le travail bien sûr : les parents sortent d’euxmêmes… ou les enfants demandent qu’ils le fassent… Depuis peu, quelques garçons de 5-6 ans refusent toute démarche, tout lien. C’est surprenant. Ils se représentent très bien que, si je mets un miroir dans leur bouche, cela sera la porte ouverte à tout le processus. Si cette attitude n’existe que dans le domaine de la médecine dentaire, ce n’est pas très alarmant, car on a d’autres possibilités de soins : prémédication, le gaz hilarant (N2O2 combiné avec l’O2) ou encore l’anesthésie générale. En revanche, si ce refus du lien et de grandir persiste, il faut alors s’inquiéter et envisager un accompagnement par un professionnel. Trois exemples

LA PETITE FILLE DE 8 ANS qui hurlait en refusant d’entrer dans la salle de soins. A ce stade, on procède ainsi :

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1re séance : elle me regarde, depuis le seuil, faire un examen clinique fictif à sa maman. 2e séance : la même chose, mais elle est à côté du fauteuil. 3e séance  : elle monte sur le fauteuil, mais elle est rapidement submergée par l’émotion. Je l’en fais descendre aussitôt et je la félicite chaque fois pour les progrès (comme pour tous les enfants)  : «  Bravo, alors que tu as peur, d’être montée sur le fauteuil déjà, c’est un cadeau pour moi ! » 4e séance : examen clinique normal. 5e à 7e séances : exercices sans problèmes. 8e séance : elle est complètement détendue et on peut commencer les soins… Remarque  : d’habitude, quand un enfant a «  basculé dans la confiance  », c’est acquis pour la vie. Là non. L’année suivante, elle était (certes un petit peu moins) à nouveau terrorisée. On avait là une souffrance (la petite était déjà très grosse) immense, qui dépassait largement le cadre d’un petit cabinet de campagne. LE GARCON DE 12 ANS, à qui il fallait extraire une dent de lait absolument. Il était prêt, totalement, mais n’arrivait pas à dire « oui », à passer à l’acte. J’aborde le problème sous un autre angle : « Tu te rends compte, si tu le fais (et c’est un saut dans l’inconnu : tu as peur et tu dois me faire confiance) quelle fierté tu pourras en tirer; tes parents aussi seront fiers. Et à moi tu m’auras fait le magnifique cadeau de la confiance… » Instantanément, hop, bouche grande ouverte. LA JEUNE FILLE, qui pleurait à chaudes larmes (« elle a si peur ! » m’a dit sa maman). Alors qu’elle vient de s’asseoir sur le siège dentaire, je ressens chez elle une paix qui rayonne. Je pose la question à mon apprentie assistante dentaire, elle ressent la même chose. Je le dis à cette jeune fille, qui en prend, avec stupéfaction, tout de suite conscience et se calme aussitôt ! Exemple... pas que les enfants ! Les femmes battues : « j’ai mal, mais vous ne pouvez rien faire. L’idée qu’on me touche la bouche m’est totalement insupportable. » Là encore explications, accueil, exercices, présence permanente de mon assistante... et ces femmes, peu à peu, reprennent du pouvoir, confiance. Bien vite, comme pour les enfants, comme pour la majorité des patients adulte terrorisés, elles se calment complètement, et les soins deviennent possibles sans problème.

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Si l’on reprend une phrase-clé du début, « sans la confiance, on ne peut rien faire », on est dans le « apprivoise-moi » du renard au Petit Prince. C’est-à-dire, l’élément principal, la relation.

Relation Lorsqu’on m’a encouragé à écrire sur l’approche que je pratiquais dans mon cabinet pour soigner les enfants, je n’avais jamais ressenti le besoin de la formaliser. J’étais en vérité emprunté. J’ai alors consulté Monique Assal, une amie physiothérapeute, très compétente en relation thérapeutique, afin que nous voyions ensemble ce qui se passait de particulier dans ma relation avec les enfants. Il est ressorti de cet entretien que je pratique, dans ce cas, une prise en charge globale. Il s’agit d’un apprivoisement. Cela donne à l’enfant le temps d’être là, en entier  ; et non pas de mettre à disposition une partie de lui-même (sa bouche), en protégeant tout le reste… (ainsi, on supprime 90 % des ressources propres de l’individu). Laisser le temps et l’espace, le lieu. L’enfant est ainsi apprivoisé, il est avec, et le lien se crée. Un lien, d’ailleurs, qui n’a pas besoin d’échanges d’informations personnelles. On devient alors des partenaires. Si l’enfant pleure, il se sent disqualifié une fois de plus. Au cabinet, il y a syntonisation, et aucun jugement, les résistances tombent, il a accès à ses plus grandes ressources, à tout ce qui est immédiat, de l’ordre du présent. Plus d’inquiétude du futur, ni de ressassement du passé de parents étant absents. L’enfant, lui aussi, par rapport à eux, est libre. L’enfant devient alors cocréateur de ce moment, puisque il est totalement partenaire. Un partenaire ne peut que construire la même histoire (aucune manipulation). Il a vu qu’on le « croyait ». Et qu’il avait pleinement le droit de ressentir, et d’exprimer ses émotions. J’ai alors commencé à saisir l’importance extrême de la relation, des signes de reconnaissance, de l’acceptation inconditionnelle, et à voir les différents signes de reconnaissance au cabinet. Au commencement est la relation : après la nourriture, l’oxygène, l’eau et le sommeil, le lien est notre plus grande source d’énergie. Si l’incapacité à former des liens persiste, l’individu risque de s’écrouler !

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Signes de reconnaissance « De l’enfant qui vient de naître au vieillard au seuil de sa vie, la construction de l’identité, le sentiment d’exister se fondent sur la circulation et la qualité des signes de reconnaissance qu’ils échangent avec l’environnement. Il s’agit de tout geste, contact, parole, signe, symbole qui nous sont manifestés par autrui et qui nous permettent de nous reconnaître comme existant. Ce besoin vital d’échange avec notre environnement affectif ou social est aussi important que boire, manger ou dormir. Paradoxalement, notre société d’hyper-communication échange beaucoup plus de signes de reconnaissance qu’il y a cent ans, mais leurs qualités sont faibles en teneur relationnelle. Nombreux sont ceux qui survivent en-dessous du minimum vital et s’appauvrissent de jour en jour ou compensent leur déficit par des substituts comme les tranquillisants, l’alcool et pléthore de paroles et gestes violents. Parmi ceux-ci, nous avons le besoin incompressible d’être reconnu, c’est-à-dire recevoir des stimulations de la part des autres pour nous sentir exister. » (NUNGE O. Satisfaire son besoin de reconnaissance : s’accepter et être accepté)

Les textes qui suivent concernent les adultes. Mais il est évident que de telles attitudes, appliquées aux enfants, auront les mêmes magnifiques conséquences. Acceptation inconditionnelle « À partir du moment où un individu sait que quelqu’un l’accepte tel qu’il est, il se sent libéré, prêt à changer lui-même sa vie selon ses propres désirs, ou, du moins disposé à y réfléchir sérieusement. L’acceptation est comme un sol fertile, elle libère le potentiel de croissance, permet à l’individu de mettre son potentiel en valeur. Elle renferme une force et un pouvoir incroyables. Accepter quelqu’un tel qu’il est, représente un acte d’amour et se sentir accepté, c’est se sentir aimé. » (Michel DESLARZES dans « Enseignants efficaces », cours donné à l’École de médecine dentaire, formation continue)

Si l’on reçoit des signes de reconnaissance (situation nouvelle), il est possible, peut-être, qu’au début, la terre de notre cœur soit si sèche, si peu habituée à recevoir cette eau vive, qu’elle ne l’accueillera pas. Mais, bien vite, la terre va s’imbiber et le cœur s’ouvrir. Les gens ont souvent une vision très négative d’eux-mêmes et pensent qu’ils n’ont, bien sûr, aucun talent, alors que leurs talents « sautent aux yeux »… Donc, pour bien leur faire comprendre qu’ils ont d’énormes talents, il faut valider, mettre en évidence, remercier, solliciter…

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Quelques autres signes simples de reconnaisance REGARD

Regarder l’autre, c’est le faire exister. Combien un regard peut être absent, méprisant, jugeant. « POUR LUI, J’EXISTAIS » : paroles du cocher de la voiture qui conduisait tous les jours Jean Bosco de son domicile à l’Œuvre, par rapport au regard, au respect et à l’amitié qu’il lui témoignait. Elles ont été rappelées lors du procès en canonisation de Jean Bosco. Pour moi, c’est le miracle le plus extraordinaire. Jean Bosco était vraiment un saint parce que les gens qui croisaient sa route pouvaient dire : « pour lui, j’existais. » Dans notre culture du contrôle et de l’action, la présence toute simple a beaucoup perdu de sa valeur. Par exemple, le pasteur qui va rendre visite à une famille dont le fils de 19 ans s’est tué à moto. Il n’a pas pu dire un mot, et pourtant, pendant des années, cette famille lui a été si reconnaissante. TENDRESSE

Cela me rappelle une jolie histoire. Des chercheurs faisaient une expérience sur des lapins divisés en quatre groupes. Les lapins de trois groupes développaient les pathologies prévues, mais un groupe résistait mieux à la maladie. Ils cherchèrent à comprendre pourquoi. C’est en observant l’étudiant qui avait la charge de ce 4e groupe qu’ils trouvèrent la réponse  : il aimait les bêtes, leur parlait, les caressait ; ces simples gestes d’amour suffisaient pour que l’infection se développe beaucoup plus lentement ! Une vache à qui l’on donne un prénom donne plus de lait ! On peut très bien transposer ces deux histoires à l’être humain et, en particulier, aux enfants. La tendresse, il faut y penser. SOLIDARITÉ

Quand quelqu’un me dit  : «  ma bouche c’est une horreur  »  ; je réponds toujours que ce n’est pas moi, avec mes kilos en trop, qui vais faire la leçon aux autres… Dans des groupes où l’on peut librement se dire (par exemple dans Anticancer, David SERVAN-SCHREIBER mentionne des femmes se réunissant en groupe, ayant toutes un cancer du sein. Il y a là, dans la souffrance exprimée et partagée, une solidarité profonde, instantanée, magnifique). C’est donc la

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même chose au cabinet. Par exemple, je dis souvent aux enfants, en présence des parents  : «  je suis stupéfait de la bonne volonté et du courage de votre enfant, moi, qui suis terrorisé chez le médecin et chez le médecin-dentiste. » Au cabinet, quels signes ?

L’enfant apprend, entend : « tu es important ; tu es unique ; tu existes ; tu peux  ; ce que tu vas faire, à ton rythme, sera un cadeau pour toi, pour tes parents, pour moi… tu es un cadeau. Tu as le droit d’avoir peur, d’avoir des manques, comme moi, et beaucoup d’autres, de dire non, d’avoir des émotions, des ressentis, etc. » Conclusion

En fin de compte, avec des moyens tout simples, on peut donc oser la relation MA PART

« J’ai tout mon temps pour toi… Je vais à ton rythme… On va progressivement : expliquer et regarder ; exercices ; soins : les plus simples sans anesthésie et les plus complexes avec… Merci de tout ce que tu donnes (validation permanente)… On vit la même histoire ensemble… » Je dis à l’enfant et aux parents ce qu’il y a de positif et souvent son regard sur lui-même change (ainsi que celui des parents). PART DE L’ENFANT

Écoute… Touche les boutons… Monte sur le fauteuil… Laisse la mère ou le père partir… Participe aux exercices (ressent peu à peu ses émotions dans le ventre)…Se détend, se laisse faire… « joue le jeu »… revient toujours avec joie et fait confiance. On sent bien là l’importance de la rencontre  : sous le regard de l’autre, l’enfant se sent accepté inconditionnellement, reconnu, il est amené à un partenariat, il retrouve le pouvoir, il est en totale sécurité. Chemin de construction de soi ; chemin de libération : de grandes forces sont libérées qui vont petit à petit faire disparaître les peurs. Toute cette démarche est une preuve d’amour, et qui ne peut déboucher que sur une prise de conscience essentielle : « je suis aimable. » Si l’autonomie et la liberté sont aujourd’hui les valeurs suprêmes de l’Occident, ce sont les liens et l’interdépendance qui fondent l’humanité. On peut

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constater que notre société de consommation et de compétition à outrance privilégie certains aspects de l’être humain au détriment de beaucoup d’autres. Pour survivre, l’enfant, puis l’adulte met en place des comportements, qui ne sont pas, à long terme, porteurs de vie et qu’on pourrait appeler les fausses routes.

Fausses routes Dans ce chapitre je vais donc poursuivre ma démarche en essayant de distinguer quelles sont les conséquences sur l’enfant de nos différentes attitudes, et en quoi, tout petitement, ce qui se passe au cabinet « corrige » un peu certaines attitudes de l’entourage. Témoignage de Béatrice : « Mon père voulait absolument un garçon. Ma mère ne pouvait avoir qu’un seul enfant. Je suis née fille et j’ai donc profondément déçu mon père. Pendant toute mon enfance, j’ai été inexistante à ses yeux. C’est là ma blessure la plus profonde. Très jeune, j’ai pris une direction mortifère, une fausse route, à savoir : quand on déçoit l’autre, on est rejetée, exclue. Si je veux exister, je ne dois décevoir personne, je dirai toujours oui, je m’arrangerai pour répondre positivement aux désirs de l’autre. Cela, c’est la fausse croyance qui est le point de départ de ma fausse route. » « D’une façon générale, nous pouvons assurer que l’enfant, tout particulièrement, se façonne corps et âme par identification directe à ses parents. D’où le rôle si important des parents qui ne consiste pas tant à agir qu’à être. » (de SOUZENELLE A.) Toute fausse route perturbe le lien d’une manière considérable sur le long terme. Conséquences

Masques, mentalisation (une des formes les plus courantes de dissociation en Occident), verbalisation, silence, déni, identité de groupe (donc interdit d’identité propre), insensibilité, extériorisation, déresponsabilisation, victimisation, codépendance. On vit soit dans l’organisation du manque : « j’ai si peu, mais ça au moins je connais », soit dans le comblement du manque : addictions de toute sorte,

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travail, sexe, TV, internet, alcool, nourriture, activités incessantes (mentales, émotionnelles, physiques), peurs, contrôle de l’autre, culpabilisation, manipulation, médicaments, etc. Citons encore les contrats de loyauté : dans les secrets de famille, imaginer même briser la loi du silence implique un rejet total, violent, etc. Comment se construire dans ce contexte ? MISE EN PLACE DE CROYANCES

L’enfant peut se dire, puisque les parents sont vus « comme des dieux » : « si mes parents ne m’aiment pas, c’est que je ne suis pas aimable. » « Si ma mère ne m’avait pas eu, elle n’aurait pas été obligée de rester dans cet enfer, elle aurait pu refaire sa vie et être heureuse. » Ce sont des généralités, connues de tous. Concrètement, au cabinet dentaire, que se passe-t-il ? : Des collaborateurs d’Éric Berne, Bob et Mary Goulding ont mis en évidence douze thèmes apparaissant très souvent et formant la base des décisions de vie prises par l’enfant. Ces thèmes apparaissent sous une forme d’interdictions ou de permissions données à l’enfant par son entourage. Ci-dessous, les phrases en italique, en parallèle aux paroles de Rosette Poletti (qui a donc réactualisé ce thème), représentent ce que je tente de faire au cabinet dentaire avec les enfants (POLETTI R. La résilience : l’art de rebondir). •  Tu as le droit d’exister (ou n’existe pas) : Ce que je fais, ou mets en place. •  Tu as le droit d’être toi-même (ou ne sois pas toi-même)  : «  Ressens tes émotions, respecte-les. » •  Tu as le droit de grandir (ou ne grandis pas)  : Dire «  oui  » aux soins, en pleine conscience, c’est ne plus jamais revenir en arrière. •  Tu as le droit d’être un enfant (ou ne sois pas un enfant)  : Remplacé par « sois-toi même », le tout dans l’acceptation inconditionnelle. •  Tu as le droit de réussir (ou ne réussis pas) : Depuis le « tu peux ! » jusqu’à « tu l’as fait ! » •  Tu as le droit de faire et de découvrir (ou ne le fais pas) : Ou entre dans l’expérience, dans les ressentis, sur le chemin à découvrir. •  Tu es important (ou ne sois pas important) : Pendant ce temps, il n’y a que toi qui compte, valider, valider, valider.

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•  Tu as le droit d’appartenir (à ta famille, etc.) (ou n’appartiens pas) : Là c’est être intégré dans un cabinet dentaire par une vraie équipe solidaire. • Tu as le droit de penser (ou ne pense pas)  : L’enfant peut poser toutes les questions possibles. • Tu as le droit de ressentir (ou ne ressens pas)  : Toute la démarche dit  : « ressens ! » On pourrait ajouter, selon la pyramide des besoins biologiques de Maslow et en suivant FLÈCHE C. (Mon corps pour me guérir), avec le même canevas que ci-dessus : Besoin d’être le projet de quelqu’un d’autre que soi : Le « tu peux ». Besoin de sécurité  : Sécurité totale  : c’est toi qui dis «  oui  », ou «  stop  », qui demande une pause, un rinçage. Besoin social, relationnel : On crée un lien : c’est le « apprivoise-moi » du Petit Prince ; « que votre enfant et moi ». Besoin d’être entendu : Totalement dans des registres prioritaires pour toi, beaucoup de messages non verbaux. Besoin de repères : Chaque étape, mini étape est expliquée, montrée, essayée. Besoin de création : Devenant partenaire, il devient cocréateur de ce moment présent. Besoin d’avoir sa place : « Tu es au centre ; à ton rythme, selon tes ressentis. » Besoin de vivre le moment présent  : Non seulement le vivre, mais en être cocréateur. Besoin de ne plus avoir de besoin  : «  Laisse-moi faire, laisse-toi faire  », cela s’appelle la confiance, le lâcher-prise « arrête donc de lutter. » Besoin d’exercer une influence sur mon environnement  : De sentir que, ce que je dis, ce que je fais a du poids, et peut être pris en compte. SOLUTIONS : DES RENCONTRES

Quatre exemples précis de paroles, d’attitudes justes permettant la résilience (aptitude d’un individu à se construire et à vivre de manière satisfaisante en dépit de circonstances traumatiques) : 1. Je pense à ce médiateur qui reçoit beaucoup d’adolescents faisant partie de ce qu’on appelait « les classes à options ». Une caractéristique commune à tous ces adolescents : une image de soi détruite : « je ne vaux rien ! » un

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retard « scolaire », souvent entretenu par les parents. Or ce médiateur, lui, leur trouve de nombreuses qualités – certes, peut-être pas toujours scolaires – et le leur dit, ainsi qu’aux parents qui ont, trop souvent, une vision trop étroite de leur enfant. 2. L’enfant hyperactif, à la limite du supportable qui, en un an, devient calme, centré. Je pose la question à sa maman, qui est veuve : « Que s’est-il passé ? » Réponse de la maman : « Je l’ai mis à l’école Steiner » (système scolaire qui privilégie la relation et l’envie d’apprendre). De quoi faire réfléchir ! Les deux exemples suivants parlent d’adultes, mais ce qu’ils racontent peut très bien s’appliquer à des enfants. Ils ont le mérite de bien nous faire comprendre ce que veut dire le mot rencontre : 3. Un religieux belge, qui a un sens profond de l’accueil de l’autre, quel que soit son état, fait, avec chaque personne rencontrée, une vraie rencontre ; jamais elle ne ressent son immense culture. Il resitue, accueille, apaise, éclaircit toute situation, prend en compte, sans être contaminé, les souffrances, les blessures, les colères de l’autre. Le cœur s’éveille et s’ouvre alors assez vite devant cet amour et accueil inconditionnels. 4. Un psychiatre m’a raconté l’histoire suivante : une de ses connaissances se plaignait qu’en 50 ans, elle n’avait jamais pu dialoguer une seule fois avec son père. Il lui a répondu  : «  C’est comme si vous vous trouviez devant une grande falaise. Vous avez l’impression qu’elle est infranchissable. Mais il suffit de trois pitons pour franchir cette falaise. Peut-être y a-t-il, dans vos relations avec votre père, qui a si peur du dialogue, au moins trois moments, non verbaux, le cas échéant, d’un vrai cœur à cœur, où il vous a manifesté, silencieusement, son amour, voire même son admiration. » Être un repère pour quelqu’un à un moment précis, c’est lui donner un piton. Et c’est justement ce que j’essaie de réaliser avec mes petits patients.

Émotions En introduction au chapitre, les émotions, quelques extraits d’un article de Mme Ruell-Kellermann sur les relations médecin-dentiste/patients : «  Le patient vit consciemment ou inconsciemment l’acte dentaire comme une agression. Qu’il le veuille ou non, le médecin-dentiste ne peut pas ne pas être impliqué. »

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Sans aucun contrôle sur cet organe diabolique, sa dent, devenue le centre d’intérêt d’un technicien affairé, le patient, tel le nourrisson qui tète, n’a comme possibilité d’interrogation que les yeux de l’opérateur. Vêtu, à demi allongé sur un fauteuil dit relaxant, il se voit livré dans une situation intrusive, proche d’un viol (avec cette voix off du « tiens-toi tranquille » du père ou de la mère menaçant). Dans cette effraction, l’angoisse surgit, massive, « archaïque ». Un cabinet dentaire, de fait, est bien un lieu «  privilégié pour ressentir et exprimer, si possible, des émotions ». Examinons, en premier lieu, deux extraits de textes sur ce thème fondamental, qui est valable aussi bien pour les adultes que pour les enfants. Il s’agit de données universelles. Puis nous verrons ce qui se passe à ce niveau-là au cabinet dentaire. Éloge de l’émotion

À la suite des travaux présentés dans son ouvrage Mon corps pour me guérir de Christian FLÈCHE, nous pouvons constater qu’il s’agit de prendre très au sérieux «  le monde des émotions  ». C’était peut-être quelque chose de plus naturel au xxe siècle avec l’époque romantique ou dans les années 1960 à 1970. Aujourd’hui, le monde émotionnel est facilement banalisé, voire ridiculisé. Il ne faut pas pleurer, il faut cacher ses émotions, il faut être fort, et autres radotages peuvent blesser plus ou moins gravement des milliers d’êtres humains. Les sentiments et les émotions ainsi refoulés peuvent alors devenir un obstacle intérieur à son propre épanouissement. Système complet d’autoguérison

Le deuxième extrait nous vient de Stephen T.CHANG et Richard MILLER dans leur livre Le système complet d’autoguérison : les exercices taoïstes internes : « Selon la théorie taoïste des deux cerveaux, les nouveau-nés normaux ont plus de fonctions cérébrales dans la région abdominale que dans le cerveau. Certaines cultures valorisent la mémorisation d’un très grand nombre de faits et insistent davantage sur le développement cérébral (rationnel) que sur le développement interne (sentiments), ce qui a pour effet de réprimer les fonctions du cerveau abdominal, lesquelles sont bientôt oubliées. Le cerveau devient une grande bibliothèque où l’information est entreposée (le cerveau devient de plus

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en plus volumineux). S’ensuit un cortège de problèmes physiques et mentaux, ces maladies dites des temps modernes. En niant leurs véritables émotions, les êtres humains entravent les fonctions du plexus solaire, ce qui a pour effet de perturber le fonctionnement des organes et d’écourter leur vie. Les véritables émotions se situent dans le plexus solaire plutôt que dans le cerveau. Ce dernier ne fait qu’enregistrer le souvenir d’une émotion. On nous apprend malencontreusement à utiliser les pouvoirs de la raison, c’est-à-dire, du raisonnement cérébral, pour réprimer nos émotions. » Émotions au cabinet

Je le répète : au cabinet, j’explique, pour mettre des mots et faire comprendre mentalement ce qui va se passer. Après, tout se passe au niveau des ressentis dans le corps. Et je « vois » poindre peu à peu « la conscience », et le « oui » aux soins dans le corps. Une fois que c’est là, apaisé, l’enfant est prêt. Par comparaison, examinons mon approche avec les adultes. Avant la première séance d’examen clinique, je dis toujours, en expliquant mes tarifs dentaires affichés à la salle d’attente : « il n’y a pas de surhommes, de super-women ; si, tout à coup, vous ressentez une immense fatigue, un profond découragement, soyez honnête avec ces émotions, dites-le moi (je n’ai pas à savoir pourquoi), et on fait une pause, ou même on arrête. » «  Ici, au cabinet dentaire, dites-le. C’est très important. Si quelque chose doit sortir, pleurer par exemple, laissez-le sortir. Et puis, surtout, ne puisez pas dans vos réserves. » La différence avec les enfants, c’est qu’ils vivent naturellement leurs émotions alors que les adultes ont appris à « composer » et à enfouir ce qui veut arriver à la surface. C’est au médecin-dentiste d’observer le langage non verbal exprimé par le patient : muscles qui se crispent, pâleur, transpiration, etc. Et c’est alors à lui d’essayer de mettre les mots, de prendre les devants : « On s’arrête un moment ? Un peu de ventilation ? Un café ? » Le dernier point de mon chapitre avant la conclusion est de nature plus « philosophique » : l’enfant, après avoir traversé tout ce processus expliqué tout au long de ces pages, a changé : il y a eu un basculement de la conscience.

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Basculement de la conscience Le paragraphe « Au fauteuil », indique comment je procède. L’enfant, ainsi « préparé », le mental jouant son rôle, « rentre en lui-même », dans ses ressentis, ses émotions. Pleinement sécurisé, il est totalement présent, ici et maintenant, dans l’expérience, dans son corps, calme. Alors il devient partenaire responsable, et donc cocréateur de ce moment, il apprivoise ses peurs ou plutôt elles se dissolvent sous ses yeux. Depuis les explications des « règles du jeu », avant même d’entrer au cabinet, en passant par les exercices, jusqu’au « oui » aux soins, marquant l’aboutissement de la démarche, un monde a basculé intérieurement. L’image de l’enfant se façonne donc : depuis le « tu peux le faire » jusqu’au « je l’ai fait ». C’est cela qui se passe au cabinet. L’enfant est «  actif  », il est pleinement présent à ce qui se passe en lui ; on nomme tout. Il se laisse faire totalement. Cela se passe « tout seul » Il est libéré des peurs, des « écrans de fumée ». Ce que les parents, moi compris, n’ont pas réussi à faire en 30, 40, 50 ans, lui, l’enfant l’a fait à 5, 7, 10 ans. J’assiste alors, spectateur émerveillé et surpris à chaque fois, à ce torrent de vie qui se met à jaillir, comme si on avait ôté des cailloux sur une source. C’est magnifique ! On peut mettre en évidence des actes, des attitudes qu’on retrouve à chaque fois, et qui peuvent servir de points d’appui, de référence, dans toute sorte de situations. C’est ce que Denis de ROUGEMONT, dans son livre sur «  Les méfaits de l’instruction publique », a appelé « des actes modèles ». Actes modèles

Comme le disait donc Denis de Rougemont : « Si un acte pédagogique n’est pas modèle, il n’a aucun sens. » Quels sont, lors de soins aux enfants, des actes qui seraient « modèles » ? • Se relaxer (muscles détendus; respiration paisible), ici et maintenant, rentrer dans ses ressentis, ses émotions, pour « lâcher prise » sont des attitudes universelles pour toute démarche « en profondeur », des soins dentaires à la méditation. • Observer objectivement tous les ressentis du corps et les émotions induits par les exercices et les soins prodigués. À exercer plusieurs fois. De même,

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le côté désagréable des soins dentaires, même indolores, permet de situer l’intensité de manière très objective. On n’est plus dans le « tout ou rien » dû à la peur ou à l’impuissance, mais dans l’expérience. • La séparation d’avec les parents  : les enfants ont à vivre eux-mêmes leur propre vie : « Va vers ta terre ! » • Prendre conscience et respecter ses propres rythmes intérieurs. • Ce basculement de la conscience, ce « oui aux soins » est un acte intérieur modèle : le patient devient responsable de sa vie, ne serait-ce qu’un peu. • Accepter ses limites, les limites de la situation, et faire le mieux possible dans ce qui est donné. • Être validé, recevoir des signes de reconnaissance permet de se dire : « je suis aimable » … et d’offrir ce « je suis aimable » aux autres. • Les émotions sont inscrites dans le corps. Le cerveau (mental) en prend note, c’est tout. Le « véhicule » pour les retrouver c’est le corps. • Présence et lâcher prise ; on n’est plus dans un monde de combat !

Conclusion Un cabinet dentaire est un véritable lieu de vie, un microcosme social. Il n’y a plus ni jeunes, ni vieux, ni blancs, ni noirs, ni athées, ni croyants, juste un « frère » qui a besoin d’être soulagé, à l’instar, sans doute, de ce qui ce passe dans d’autres cercles : sports, musique, arts, médecine, etc. Un cabinet dentaire, c’est aussi un lieu de vérité. Un lieu où l’on ne peut pas tricher. Selon des études réalisées en Suisse depuis 1960, 65 % du corps médical, dont nous faisons partie, ont choisi cette activité pour des raisons d’abord financières, ensuite techniques. Il n’est toutefois pas incompatible de se considérer aussi comme des soignants qui veulent rendre service, écouter, accueillir le patient dans sa globalité. Certes, les soins dentaires aux enfants («  en terrain mouvant et humide  »), « rapportent » peu en termes financiers. Mais, pour peu qu’on y soit ouvert, ils apportent considérablement en termes de satisfaction intérieure. En effet, devenir l’observateur privilégié et émerveillé de tous ces « petits-là qui grandissent », «  deviennent  », «  rayonnent  », est très gratifiant. Le praticien peut trouver et pratiquer, dans cette manière de procéder, une forme de tendresse, importante dans ce monde parfois si dur.

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Minimum et plus

Que demandent les parents à un dentiste  ? «  Soignez les dents de mon enfant ! ». C’est tout. Il y a une grande variété de méthodes et d’approches : les uns iront chez le médecin-dentiste maternel, les autres chez un confrère qui distraira l’enfant par des vidéos au plafond pour, comme le dit Eckart Tolle, « amener l’enfant endessous de sa conscience », ou le subjuguera par des éléments technologiques. Certes, le résultat sera là, les soins seront prodigués. Pour nombre de mes confrères, c’est l’essentiel. Et cela suffit. Mais peut-on imaginer une autre approche ? Je le pense. Tout en offrant des soins classiques, je mets l’accent sur la disposition du cœur. Dans mon approche, j’entends souligner prioritairement l’accueil, la participation de l’enfant, le respect de ses rythmes et de ses ressentis, l’écoute active, la validation permanente, le processus de sécurisation, l’apaisement, la reconnaissance, le contact. En bref, insister sur la relation. Paramètres que l’on pourrait retrouver dans toute relation humaine. Des signes simples, concrets, qui me disent : « ce que tu dis, ce que tu es est important pour moi. » L’enfant devient alors proactif, il est pleinement présent à ce qui se passe à l’extérieur et à l’intérieur de lui-même. Le résultat, c’est win-win : tout le monde y gagne. L’enfant grandit, dans son acceptation de la situation, la mère ou le père est heureux que tout se passe bien (avec un enfant dont elle/il ne soupçonnait souvent pas le potentiel). « Vous faites des miracles.» Et le praticien, à travers les soins et l’accueil de l’enfant, reçoit le tout comme un véritable cadeau. Ainsi est ce témoignage sur ma pratique, ses finalités, son inspiration. Je veux y trouver, à l’évidence, une vision spirituelle de l’homme et de l’enfant. Et susciter une capacité au changement. Une vision qui fait un peu contrepoids au tout technologique et qui affirme que l’homme prime la machine, que la relation, dans sa dimension plurielle, prime la technologie, une, rassurante. Je tente de proposer à mes patients, rien moins que de s’engager sur la voie d’une transformation de leur mentalité, de leur attitude, de leur approche. Par mon travail avec les enfants, je souhaite simplement prendre part à cette « chaîne » d’éducateurs qui vont façonner leur personnalité. Les milliers d’enfants que j’ai soignés dans mon cabinet viennent valider cette approche. Oui, l’enfant célèbre la vie. L’enfant a des émotions et les vit le plus naturellement du monde, sans porter aucun jugement de valeur. L’enfant vit totalement

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le moment présent. L’enfant est riche de la soif de vivre, il est pauvre de tout ce qui fait le monde des hommes : l’avoir, le paraître, le pouvoir, les passions, les masques, les mécanismes de survie, les arrangements avec soi-même pour trouver son intérêt… TOUT CE QUE NOUS ENSEIGNONS A UN ENFANT, QUE CE SOIT PAR NOS PAROLES OU NOS ACTIONS, CONTINUERA DE VIVRE DANS SON CŒUR POUR TOUJOURS

Références CHANG S. T et MILLER R. Le système complet d’autoguérison : les exercices taoïstes internes. Éditions Reuille, Suisse, 1989. CHAPMANN G. Les langages de l’amour. Éditions Farel, Croissy Beaubourg, 2000. CYRULNIK B. Un merveilleux malheur. Éditions Odile Jacob, Paris, 2002. DEMERS J-C. L’enfant et l’hôpital. Lep Éditions Loisirs et Pédagogie, Suisse, 2008 de ROUGEMONT D. Les méfaits de l’instruction publique 1929. Aggravés d’une Suite des méfaits 1972. Eureka, Lausanne, 1972. FLÈCHE C. Mon corps pour me guérir. Éditions Le Souffle d’Or, 2005. MILLER A. Notre corps ne ment jamais. Flammarion, Paris, 2004. NUNGE O. et MORTERA S. Satisfaire son besoin de reconnaissance. Éditions Jouvence, Montréal, 1998. POLETTI R. et DOBBS B. L’estime de soi. Éditions Jouvence, Montréal, 1998. La résilience : l’art de rebondir. Éditions jouvence, Montréal, 2001. SERVAN-SCHREIBER D. Anticancer. Robert Laffont, Paris, 2007. St-EXUPÉRY A. Le petit prince. Gallimard, Paris, 1999. TOLLE E. Quiétude. À l’écoute de la nature essentielle. Éditions Ariane, Outremont, 2003. Nouvelle Terre. L’avènement de la conscience humaine. Éditions Ariane, Outremont, 2005.

8 TRAITEMENT DE L’ANXIÉTÉ DENTAIRE P. JEVEAN

Introduction Aujourd’hui, dans un monde où la compétitivité règne en maître, il est souvent difficile de concilier une activité professionnelle efficace et une atmosphère de travail harmonieuse. La médecine dentaire du XXIe siècle est confrontée, comme tous les autres univers professionnels à ce difficile challenge : instaurer un climat de travail propice au meilleur rendement, sans être un obstacle à l’épanouissement personnel de chacun. L’implémentation d’une médecine dentaire harmonieuse et efficace dépend de nombreux facteurs dont certains vous ont déjà été présentés dans les chapitres précédents. L’amélioration des soins aux patients anxieux, développée dans ce chapitre en est une étape importante qui permet, à la fois de pouvoir gérer l’anxiété de n’importe quel patient, mais aussi d’éliminer l’un des principaux facteurs de stress de la pratique quotidienne. L’enfer que vivent les patients atteints de phobie dentaire ne facilite pas la tâche de l’équipe dentaire conduite à les rencontrer lors de traitements d’urgence. Dans ces circonstances, le cabinet dentaire bascule dans un monde aux antipodes de celui que pourraient inspirer ces fameux vers… «  Là, tout n’est qu’ordre et beauté, luxe, calme et volupté… » (Charles Baudelaire dans L’invitation au voyage). Au cabinet dentaire, souvent l’ordre règne, parfois le luxe et la beauté, mais il est difficile d’imaginer un havre de paix où patient phobique et équipe dentaire vivraient les traitements dans le calme et la volupté. Les statistiques donnent raison à cette assertion. Selon certaines recherches suédoises 50  % de la population éprouvent de la peur lors des traitements

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dentaires dont 10 à 18 % ressentent une peur intense et parmi eux 2 %2-7 de la population générale, les phobiques dentaires, évitent tout contact avec la dentisterie. Une étude française69 plus récente montre que l’étendue du problème n’a guère évoluée. Force est de constater que le périple dentaire du patient phobique n’est pas un long fleuve tranquille aux berges calmes et voluptueuses. Si l’on considère le versant professionnel, pour l’équipe dentaire, la situation n’est pas plus sereine. L’anxiété sévit davantage chez les dentistes avec un taux de 42,1 %, soit 12,3 % de plus que chez les sujets appartenant à d’autres catégories professionnelles12. L’hypertension et les maladies coronariennes, qui peuvent être directement reliées au stress, sont de 25 % plus élevées que dans la population générale. Outre les facteurs liés au stress organisationnel, la tension émotionnelle causée par le sentiment d’être responsable de la douleur de leurs patients peut créer chez les dentistes une certaine instabilité et une forme de frustration pouvant engendrer une profonde anxiété. Les dentistes ont en effet tendance à moins aimer leur travail que les autres professionnels de la santé, et cela dans une proportion de 15,7 % contre 5,5 %13. Comme nous le verrons plus tard, ces professionnels stressés subissent leur travail (mot dont l’origine latine est tripalium, appareil de torture) comme un supplice et exercent toute leur carrière professionnelle dans un état de tension bien éloigné du calme et de la volupté. Les patients anxieux relatent plus fréquemment des expériences douloureuses7-9, des anesthésies inefficaces10, des rencontres avec des dentistes cruels (souvenirs d’enfance), la peur de traitement en particulier (fraisage, extraction, traitement de racine) ou d’instruments (seringues et sondes). Les phobiques se plaignent beaucoup du sentiment de perte de contrôle qui entraîne de la méfiance à l’égard du personnel soignant ainsi que des jugements sévères et négatifs en sous-évaluant la qualité du travail3-7. Du point de vue de la profession, les patients phobiques accroissent le stress au cabinet. Une étude suédoise3 a demandé aux dentistes quelles sont les attitudes les plus fréquentes occasionnant du stress ? Ceux-ci répondent : la non compliance aux règles de l’hygiène bucco-dentaire (54 %), des manifestations de peur (42 %), une annulation tardive ou omission répétée des rendez-vous (38 %). Lorsqu’on leur demande quelles sont les conduites des patients qui génèrent une forte augmentation de stress ? Ils répondent, sous-évaluer la valeur du travail accompli (71 %), interrompre le traitement (70 %), annulation tardive, omission,

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arrivée tardive aux rendez-vous (69 %), être critiqué (68 %), mauvaise hygiène (44 %), manifestations de peur (24 %). Tous ces comportements engendrant un fort degré de stress se retrouvent dans les conduites communes à tous les phobiques. Les patients sont bien souvent sous l’emprise de l’anxiété, ce qui est pour le praticien une source de stress supplémentaire ; il est constamment confronté à ces émotions négatives en pensant que son intervention en est la cause. Le climat de travail et les relations humaines sont de ce fait parfois difficiles. L’anxiété de ses patients peut même l’empêcher d’avoir la détente nécessaire pour faire son travail. Il hérite, en quelque sorte, de l’anxiété du patient, qui lui, impose une charge affective négative et alimente son propre stress11. C’est donc en traitant l’anxiété de ses patients que le praticien pourra gérer son propre stress. D’une part en diminuant une part non négligeable des facteurs de stress et d’autre part en ayant accès aux outils des thérapies cognitives et comportementales indispensables dans le traitement de l’anxiété dentaire (relaxation, désensibilisation systématique, exposition graduelle, restructuration cognitive).

Une médecine dentaire basée sur les besoins des patients et de l’équipe dentaire Résoudre certaines problématiques nécessite parfois d’examiner les choses avec plus de distance, chausser d’autres lunettes. Chaque médecin-dentiste s’est forgé au cours de sa formation, de son expérience, de ses convictions sur la meilleure éthique, et surtout sur ce qu’il juge être la meilleure manière de traiter ses patients et comment l’administrer à chaque patient spécifique. Mais cette méthodologie correspond-elle aux attentes des patients ? L’étude intitulée Attitude du public à l’égard des dentistes réalisée par Robin Di Matteo14 peut aider à répondre à cette question d’autant plus qu’elle rend compte d’une recherche qui évalue les attitudes du public envers les dentistes et la dentisterie et les compare aux propres attitudes des dentistes au sujet de leurs rôles. La connaissance améliorée des perceptions des patients peut aider les dentistes à gagner une meilleure compréhension des perceptions du public d’eux-mêmes et de la médecine dentaire comme profession, aussi bien qu’améliorer leurs rapports avec les patients.

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Des études antérieures ont suggéré que la satisfaction des patients avec leurs dentistes était un facteur de première importance pour rechercher un traitement dentaire ainsi que de la prévention15,16. Les personnes qui sont insatisfaites des aspects interpersonnels avec leurs dentistes tendent à éviter les traitements dentaires et compromettent ainsi leur santé bucco-dentaire. Cette recherche a constaté également qu’un des facteurs principaux de stress professionnel et de détresse mentale, rapporté par les dentistes eux-mêmes, est le sentiment que les patients manquent de considération envers la pratique de la dentisterie17. La connaissance des éléments du soin qui affectent la considération du patient peut aider les dentistes dans leur rapport avec les patients et améliorer ainsi leur propre bien-être. L’étude la plus fiable faite à l’échelon national américain et dont les résultats peuvent se généraliser certifie que les caractéristiques les plus importantes pour un dentiste étaient de faire un travail dentaire de qualité, avoir la compétence de réduire la douleur et de pratiquer des honoraires raisonnables. L’étude de Di Matteo révèle « qu’en 1992-1993 environ 85 % des répondants ont au moins un degré de confiance au minimum modéré dans les dentistes ». Les répondants estiment que l’éthique professionnelle, la pertinence dans le diagnostic et le traitement dentaire ainsi que la communication avec les patients sont de première importance et ceux-ci par 80 % des sondés. Les dentistes ont la même perception d’importance à savoir l’éthique professionnelle, la pertinence diagnostique et thérapeutique, et l’aptitude à communiquer avec les patients ; 50 % reconnaissent toutefois être mal formés dans ce domaine. Les auteurs relèvent encore que les femmes peuvent être, en quelque sorte, plus concernées que les hommes, par la sensibilité des professionnels des soins et leur sollicitude dans le traitement. Le public, en accord avec ce que nous avons déclaré plus haut, constate lui aussi l’importance que le praticien puisse se former et développer son empathie ainsi que ses aptitudes à traiter ses patients sans peur, ni douleur. Nous reviendrons sur ce dernier point dans les lignes concernant le traitement des patients anxieux. Mais qu’en est-il du développement de l’empathie chez les dentistes. Empathie

Le rôle de la communication et de la compréhension entre le praticien de soins de santé et le patient suscite l’attention croissante en dentisterie générale1,2

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et dans les spécialités dentaires18-20 Une des composantes-clé pour une communication et une compréhension pertinentes est la capacité de montrer de l’empathie clinique. Dans le contexte général, montrer de l’empathie implique de s’efforcer de comprendre sans juger les expériences et les sentiments d’une autre personne et d’avoir la capacité, en reflétant cette compréhension, d’aider les autres à résoudre leurs propres problèmes21,22. L’empathie dans le cadre des soins de santé, appréhendée comme attribut cognitif et comportemental, implique la capacité de comprendre comment les expériences et les sentiments du patient influencent et sont influencés par leurs symptômes et leur maladie et la capacité de communiquer cette compréhension au patient23,24. On se réfère au concept de la compassion objective qui se distingue de la sympathie, par une réponse plus affective au malheur d’un patient, ce qui pourrait interférer avec l’objectivité dans le diagnostic et les soins. L’empathie est reconnue pour jouer plusieurs rôles importants dans la relation médecin-patient23,25. Par exemple, les médecins avec forte empathie sont plus compétents dans le recueil de l’historique de vie et les examens physiques26 ; ils ont une plus grande satisfaction dans la relation entre médecin et patient28, et l’on recense à leur sujet un taux de litige inférieur aux médecins avec basse empathie28-31. De plus, l’empathie est décrite comme étant un facteur significatif dans la motivation des patients à participer activement au traitement et est un élément-clé dans le succès du traitement32. Le rôle de l’empathie dans la relation dentiste-patient a reçu moins d’attention33. Un faisceau d’évidence suggère que les pédodontistes utilisant un modèle compréhensif d’écoute et de communication ont plus de succès dans leur traitement19,34. La probabilité que les enfants montrent des comportements disruptifs pendant l’examen dentaire diminue quand le dentiste utilise des réactions compréhensives et démontre un certain sens de l’autorité et applique le renforcement34. Faire preuve d’empathie et de capacité à la sollicitude diminuent la peur des soins dentaires35, améliorent les résultats de traitement chez les patients avec douleur myofasciale36, augmentent l’adhésion au traitement orthodontique37 et augmentent la satisfaction du patient lors des soins dentaires d’urgence33, de traitements orthodontiques37, d’extractions, de restaurations et de traitements endodontiques38.

Afin de mieux comprendre l’empathie en dentisterie, Jeffrey Sherman et Adam Cramer ont évalué par une étude39 réalisée avec les étudiants de la Faculté de médecine dentaire de l’Université de Washington, la fiabilité de l’échelle

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de Jefferson pour médecin (seule mesure psychométrique validée de l’empathie pour les professions médicales) appliquée au champ de la dentisterie. Et, par la même occasion, ils ont mesuré les variations du niveau d’empathie des étudiants au cours de leur formation. Leurs constatations sont édifiantes : « Comme dans d’autres cadres de soins de santé, la relation entre le dentiste et le patient a une incidence considérable sur le traitement réussi et sur la satisfaction du patient et du soignant. » L’empathie, la compréhension des expériences intérieures des patients et de leurs points de vue combinée avec la capacité de communiquer cette compréhension, est primordiale à l’établissement et au maintien de cette ­ relation. Cette étude a démontré que l’empathie chez les étudiants en médecine dentaire pouvait être définie et mesurée de manière valide et fiable en utilisant un instrument d’auto-évaluation initialement développé pour mesurer l’empathie chez les étudiants en médecine. Le niveau moyen d’empathie pour les étudiants en médecine dentaires correspondait étroitement à ceux des étudiants en médecine40. Cependant, il résulte que le niveau d’empathie pendant la première année d’étude à l’école dentaire est tout à fait élevé et comparable à celui retrouvé dans des spécialités médicales comme la psychiatrie, mais que l’empathie baisse pendant la deuxième année de la formation dentaire et reste à ce niveau le plus bas pendant toute la formation. Cette année correspond à celle où les étudiants commencent à soigner des patients ! Il a été reporté par M. Hojat en 200241,42 que la diminution de l’empathie apparaît aussi après les expériences cliniques pour les étudiants en médecine. Ce rapport paradoxal peut être expliqué de plusieurs manières. Il se peut que les demandes techniques accrues pendant la formation clinique intensive épuisent les ressources des étudiants et que des compétences et des comportements moins essentiels soient sacrifiés. L’environnement de beaucoup d’écoles dentaires peut encourager les étudiants à se focaliser sur des attitudes procédurales plutôt qu’à se centrer sur le patient. D’autres ont suggéré que le développement d’un sentiment d’appartenance à une élite et à un groupe favorisé, tel qu’être un « Docteur », contribuait aux déclins de l’empathie43. La baisse de l’empathie peut également être une défense qui accompagne la crainte et l’insécurité quand les praticiens novices entrent en contact avec des patients.

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Actuellement, il existe un faisceau d’évidence, montrant que les qualités d’empathie et de communication peuvent améliorer la formation visée dans les professions médicales44-46 et dentaires47-49. Le semestre d’hiver de première année du programme d’études de l’école dentaire de l’Université de Washington forme ses étudiants en priorité en sciences comportementales avec des cours dans des qualités de communication, des compétences culturelles, et de recueil anamnestique. Ces classes soulignent l’utilisation des comportements non-verbaux (par exemple, le consentement par hochement de tête, le contact visuel, la posture) et des comportements verbaux comme l’écoute réflective, la validation, le soutien, la thérapie collaborative, et le respect qui est preuve d’une communication empathique. Bien que, statistiquement, peu significative, il est intéressant de noter une légère augmentation du niveau de l’empathie au cours de la dernière année de l’école dentaire. Pendant leur dernière année, les étudiants reçoivent une formation dans l’éthique, la gestion du cabinet, et la gestion et le traitement des patients anxieux. Une augmentation progressive d’empathie suit cette dernière année de formation à l’école dentaire et il est possible d’espérer qu’elle continue en pratique ou en formation post-graduée. Si Jefferson Sherman et Adam Cramer stigmatisent la baisse du taux d’empathie des étudiants de l’Université de Washington que penseraient-ils de celui des Universités Européennes (en particulier celles du sud de l’Europe) qui ne reçoivent qu’un enseignement très frugal en sciences comportementales et en gestion du stress. Se pourrait-il que les étudiants en médecine dentaire de l’Université de Genève, par exemple, échappent au stress qui semble frapper universellement l’ensemble de leur communauté ? Le souvenir que j’en ai conservé s’accorde aux constatations de Maurice Bourassa dans son étude sur le niveau de stress des étudiants Canadiens en médecine dentaire et reportées dans son excellent livre Une dentisterie comportementale. Les agents stressants inhérents à la dentisterie interviennent, graduellement et cumulativement, dès la formation universitaire. L’observation et les recherches50 le démontrent clairement. En somme, plus les étudiants approchent du terme de leur formation, plus le stress qu’ils subissent est comparable à celui qu’éprouvent les dentistes. Une intervention préventive dès la formation universitaire apparaît donc nécessaire. Son effet stabilisateur pourrait se prolonger au cours de la vie professionnelle.

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Stress en dentisterie

R.M. O’Shea, N.L. Corah et W.A. Ayer ont étudié51 en 1984 les sources de stress chez les dentistes en enquêtant auprès de 1 000 dentistes assistant au congrès annuel de leur association et ils ont rempli un questionnaire d’autoévaluation comportant 25 items. Il ressort que, d’une manière générale, chaque dentiste pensait être moins soumis au stress que les autres dentistes. Les dentistes utilisent une série de moyens pour faire face au stress, mais un quart rapportait ne rien faire. Parmi les facteurs de stress, on notait en particulier, le retard sur l’horaire, essayer d’obtenir la perfection technique, infliger de la douleur ou de l’inquiétude, des rendez-vous annulés ou le retard des patients, et le manque de coopération des patients dans le fauteuil. Une analyse factorielle exploratoire permettait de présumer six sources de stress pour les dentistes : problèmes d’être dans la conformité ; de la douleur et de l’inquiétude des patients ; relations interpersonnelles ; la contrainte physique du travail ; pressions économiques ; contraintes envers des tiers ; et la contrainte du perfectionnisme et des résultats idéaux. Le bien-être du médecin-dentiste, de celui du personnel et des patients dépend de la bonne gestion des contraintes professionnelles. La plupart des répondants ont identifié la médecine dentaire comme plus stressante que d’autres professions. Cette étude51 comme le reste des travaux de Norman L. Corah fait référence et a inspiré beaucoup de futures recherches. Robert E. Rada et Charmaine Johnson-Leong52, en 2004 [33], ont étudié le stress professionnel en dentisterie et décrivent en ces termes ses effets désastreux débouchant sur les troubles mentaux que sont le burn-out, l’anxiété, la dépression chez les dentistes52. « Les problèmes dus au stress en dentisterie résultent de l’environnement de travail et des types de personnalité des personnes qui choisissent cette profession. » L’endroit de travail est habituellement exigu et le point de concentration du médecin-dentiste est sur un espace encore plus petit, la cavité buccale. Les médecins-dentistes doivent rester assis toute la journée en position de confinement, exécutant des mouvements très précis et lents avec leurs mains, alors que leurs yeux restent concentrés sur un point spécifique52. L’isolement du médecin-dentiste est également commun. En outre, une étude a prouvé que la médecine dentaire tendait à attirer des personnes avec des personnalités compulsives, qui ont souvent des attentes

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irréalistes et des niveaux inutilement élevés de performance, et qui exigent l’approbation et le statut social53 (National Health Institute of Mental Health). Malheureusement, les médecins-dentistes reçoivent relativement peu de formation de gestionnaire des relations interpersonnelles. Ils peuvent ainsi manquer de compétences en résolution de conflits. Burn-out en médecine dentaire

Une des conséquences possible du stress professionnel chronique est le burn-out professionnel. Il est défini par trois caractéristiques en coexistence. D’abord, la personne est épuisée mentalement ou émotionnellement. En second lieu, la personne développe une attitude négative, indifférente ou cynique envers des patients, ou des collègues ; cela est désigné sous le nom de dépersonnalisation ou déshumanisation. Et finalement, il aura tendance à se sentir insatisfait de ce qu’il accomplit et s’évaluera négativement. Les effets du burn-out, bien que liés au travail, ont souvent un impact négatif sur leurs relations personnelles et leur bien-être55,56. La meilleure description du burn-out est une érosion progressive de la personne. Une étude a prouvé que certains aspects de la pratique dentaire, comme la pression des horaires, les problèmes liés au patient et à la gestion du personnel auxiliaire étaient des facteurs de stress significatifs. Cependant, le manque de perspective de carrière était l’aspect le plus crucial dans le développement du burn-out54. Stress, dépression et anxiété en dentisterie

Plusieurs des traits de personnalité qui également caractérisent un bon dentiste peuvent prédisposer des dentistes à la dépression. Les études ont indiqué que l’anxiété et les désordres dépressifs étaient observés fréquemment chez les dentistes57-59. Bien que les dentistes aient été dépeints en tant que bons candidats au suicide, il n’y a aucune évidence statistique pour le prouver et un faisceau d’évidence suggère le contraire60. En fait, les dentistes tendent à avoir une meilleure santé physique et vivent plus longtemps que des personnes d’autres professions, mais leur santé mentale s’est avérée plus vulnérable61,62. De façon générale, la communauté médicale est connue pour montrer un niveau relativement plus élevé de dépression que les professionnels d’autres

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groupes63,64. Un facteur de complication vient du fait que le personnel de santé peut être embarrassé par la pensée de devoir rechercher de l’aide auprès de confrères57. Certainement, ceci est un sujet qui demande à être mieux étudié. Après la longue liste des facteurs de stress déjà évoqués, Maurice Bourassa insiste sur l’importance des aspects psychologiques11 : « Le stress est avant tout une expérience subjective », c’est-à-dire reliée directement aux engagements, aux buts, aux croyances qui animent une personne dans le contexte particulier où elle évolue. Il se développe à la faveur de l’analyse cognitive d’une situation donnée. La personnalité, la nature et la qualité des relations interpersonnelles, les tâches à accomplir, l’organisation et les conditions matérielles de travail sont autant d’éléments qui entrent en ligne de compte… Les relations professionnelles du dentiste se limitent surtout à celles qu’il entretient avec ses patients65. Ceux-ci lui procurent les gratifications dont tout individu a besoin pour garder une saine image de soi et pour que l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie personnelle soit satisfaisant. De ce fait, la qualité de ces relations est tout aussi importante pour lui que pour les patients. Mais l’interaction est fragile, soumise à des déterminants comme la douleur ou la peur de la douleur et la continuelle impression, pour le praticien, d’être perçu comme celui qui fait mal ou qui pourrait faire mal. Il s’agit d’un système d’interaction complexe basé à la fois sur la personnalité, les attitudes et les comportements du dentiste, les attitudes et les comportements du patient ainsi que sur le système de communication qu’ils ont établi entre eux. L’appréhension, la peur ou la confiance que le patient va développer dans la relation thérapeutique sont tributaires de la personnalité, des attitudes et des comportements du praticien. Selon les lois fondamentales de la psychologie de l’apprentissage, la peur du dentiste s’explique la plupart du temps par un préconditionnement dont le résultat pourra conduire jusqu’aux comportements de fuite ou d’évitement. Très souvent, ce pré-conditionnement sera le fruit d’une expérience médicale antérieure où la personnalité même du soignant aura joué un rôle important. Des personnes qui avouent leur peur, si elles sont invitées à décrire le dernier dentiste consulté, utiliseront en effet dans presque tous les cas des termes tels que «  impersonnel  », «  désintéressé  » et « froid ». Au contraire, les « bons dentistes » seront habituellement qualifiés de personnes empathiques, amicales, compréhensives, calmes et capables de mettre le patient à l’aise.

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De la même manière que la personnalité du dentiste influe le cours de la relation thérapeutique, celle du patient produit un effet tout aussi déterminant. Par exemple, le stress sera moindre et le travail sera facilité si le patient est motivé et coopère plutôt que s’il est craintif et réticent. Les manifestations négatives de celui-ci risquent de provoquer une baisse de motivation et d’attention chez le praticien ; le traitement sera exécuté plus rapidement et donnera peut-être de moins bons résultats cliniques. Troisième élément déterminant de la relation patient-dentiste  ; l’efficacité du système de relation, du système de communication qui s’établit entre eux. On pense à tort devoir s’astreindre à un mode de communication unilatéral, où le praticien transmet des messages à un patient qui les reçoit passivement. En réalité, les échanges peuvent être mutuels et se situer à différents niveaux. Ainsi, plutôt que d’être, un simple émetteur, le praticien à l’écoute sera en mesure de saisir une foule de messages utiles émis par le patient de façon verbale et non-verbale. « La communication verbale, comme il est admis généralement, permet d’échanger des idées plutôt complexes ; on s’adresse ici à l’intelligence et à la raison de l’interlocuteur. En revanche, dans la communication non-verbale, le contenu du message est généralement de nature émotionnelle. En interprétant le discours non-verbal du malade, le praticien sera en mesure, par exemple, de détecter les émotions négatives comme la peur et l’anxiété et d’agir en conséquence. » Comme il a été décrit plus haut un environnement stressant peut instaurer une psychopathologie conduisant à l’apparition de troubles somatiques et psychiques. Roger Alexander s’est posé la question suivante « le suicide lié au stress chez les dentistes ou tout autres membres de professions médicales, fait ou folklore ? »60 et a collecté bon nombre d’informations à ce sujet dans une revue de la littérature exhaustive et par un contrôle drastique de la validité des données. C’est donc très objectivement qu’il conclut : « La révision des trois dernières décennies de la littérature sur le stress professionnel et de son rapport, le cas échéant, avec les suicides des dentistes, confirme qu’une pleine connaissance de l’incidence du suicide, des causes et de la prévention nous manque toujours. Il y a un faisceau d’évidence, les professionnels de soins de santé, y compris des dentistes, peuvent être sujets au stress, dépression, désillusionnement et vulnérables à l’idéation suicidaire. Il n’y a cependant, aucune preuve concluante qu’ils agissent à ce sujet plus souvent que n’importe quel autre groupe professionnel apparié statistiquement dans notre société. »

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Dans ses conclusions60, il poursuit en insistant sur le fait que même si, statistiquement, les dentistes ne souffrent pas plus de troubles psychiques qu’un autre groupe professionnel apparié, ni ne commettent pas plus de suicide, ils n’en restent pas moins tout aussi démunis, si ce n’est plus devant ce fléau qu’est le stress professionnel. Le stress professionnel peut conduire le praticien épuisé à des extrémités peu compatibles avec les qualités tant attendues par les patients. Citons parmi les plus importantes : la pertinence du diagnostic et du traitement, les compétences de communication et les capacités à gérer le stress de leur patient par le contrôle de la peur et donc de la douleur, et d’autres capacités nécessitant le développement de l’empathie.

Si ces compétences sont attendues du grand public, ce n’est pas un euphémisme de dire qu’elles sont particulièrement espérées des patients anxieux et encore plus par les plus atteints d’entre eux, les phobiques. Leur prise en charge ne peut se faire alors sans la connaissance et l’application des sciences comportementales et de leurs outils thérapeutiques (relaxation, désensibilisation systématique, exposition graduelle, restructuration cognitive, jeux de rôles en communication affirmée et autres méthodes de coping). Les patients anxieux ont souvent, en raison d’une gestion inappropriée dans le cadre dentaire de leur montée anxieuse, des conduites agressives ou autres impliquant un surcroît de tension dans le cabinet ; ceci sera détaillé ultérieurement. Le succès de leur prise en charge peut apporter une réduction importante du nombre et de la qualité des facteurs de stress. La connaissance des outils (qui sont communs à tous les programmes de gestion du stress), nécessaires à cette prise en charge, peut se révéler précieuse pour le praticien, pour la gestion de son propre stress. En d’autres termes et dans la perspective de l’interaction patient-dentiste, l’amélioration d’un des pôles en cercle vertueux influence l’autre. Phobie dentaire PEUR

Selon Milgrom, la peur est la réponse émotionnelle d’un individu qui perçoit une menace ou un danger, elle est composée de trois éléments. Un état cognitif déplaisant, comme le sentiment que quelque chose de terrible va se passer. Des modifications physiologiques sous l’effet de l’activation

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de la branche sympathique du système nerveux autonome incluant des réactions typiques (tachycardie, transpiration, accélération de la respiration avec hyperventilation, tensions musculaires, troubles gastriques ou intestinaux et autres signes physiologiques caractéristiques d’une montée de l’émotion…). Des modifications comportementales comme des sursauts, tremblements, mouvements de protection, de fuite ou de tentative d’évitement de la menace perçue. ANXIÉTÉ

Milgrom définit aussi l’anxiété68 : « Le terme d’anxiété est fréquemment utilisé pour décrire une expérience émotionnelle comparable à la peur. La réponse de peur et d’anxiété est la même, en revanche, on les différencie par l’origine de la situation. On parle d’anxiété pour parler de la réponse émotionnelle à des situations où la menace est moins claire, plus vague, moins immédiate, une réponse émotionnelle à des anticipations. On peut résumer en disant que l’on ressent de la peur face à un danger précis et de l’anxiété à l’idée que ce danger pourrait se produire dans le futur. » PHOBIE

La phobie est une peur intense devant un objet ou une situation précise qui provoque une réaction immédiate et incontrôlable d’évitement. Peur non raisonnée et continue d’un objet, d’un être vivant ou d’une situation déterminée qui, en eux-mêmes, ne présentent aucun danger. Le sujet est conscient de l’irrationalité de sa phobie et il souffre du fait que son comportement est régi par l’évitement des stimuli phobogènes et la crainte de lui être confronté inopinément. Les phobies peuvent être simples ou spécifiques. Dans la population générale, elles sont fréquentes et de nature très diverse (plusieurs centaines) ; les facteurs génétiques semblent surtout évidents dans la phobie du sang et des blessures avec chute de la tension artérielle, entraînant dans certains cas une perte de connaissance (anomalie héréditaire du système nerveux végétatif). Phobie dentaire (selon Berggren)

La phobie dentaire implique une peur intense d’objets ou de situations relatives aux soins dentaires qui induit un comportement d’évitement, entraînant, à long terme, un cercle vicieux1 (Fig. 16).

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Besoin de soins

Peur et anxiété

Sentiment de honte

Évitement

Détérioration de l’état bucco-dentaire

Fig. 16  Cercle vicieux de la phobie dentaire selon Berggren

Tous les facteurs présents dans le schéma ci-dessus s’intensifient avec l’évitement à long terme. Un autre aspect important est que la phobie dentaire à un impact sur l’accroissement du stress professionnel. Afin de juger de l’étendue du problème, il faut savoir que la peur des soins dentaires et du dentiste fait partie des 10 peurs les plus fréquentes dans la population. La peur phobique dentaire (liée à un évitement) arrive à la 5e place par ordre de fréquence. Malgré les grands progrès dans les traitements et les techniques d’anesthésie, la visite chez un dentiste constitue toujours une expérience paniquante pour beaucoup de personnes. Prévalence

La fréquence observée de la peur excessive des soins dentaires varie selon les pays et les études de 4  % (Danemark) à 14  % (Canada). Cette différence est avant tout due à la formulation des questions posées lors de l’enquête. En 1988, Milgrom, dans une étude portant sur la population générale de Seattle a montré que 50  % des sujets ressentaient de la peur chez le dentiste (28 % une peur légère, 13,1 % une peur modérée, 4,3 % une peur intense et 3 % une peur panique). En 1962, une enquête suédoise réalisée par la SIFO (Staaten Institut for Forsning), a montré qu’environ la moitié de la population générale ressentait une peur lors de soins dentaires (30 % une peur légère, 16 % une peur modérée, et

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5 % une peur intense). Dans ce dernier groupe, 70 % ont accès aux soins, et 30 % évitent les traitements dentaires. Ces 30 % correspondent aux phobiques dentaires, et représentent environ 1,5-2 % de la population générale2-7. En 2007, Emmanuel Nicolas69 dans une étude sur une population générale en France trouve que 13,5 % des sujets éprouvent une anxiété dentaire sévère. Conséquences bucco-dentaires

LA PHOBIE DENTAIRE N’EST PAS ANODINE Elle a des conséquences sur la détérioration de la bouche mais aussi dans la vie de tous les jours. DÉTÉRIORATIONS BUCCO-DENTAIRES

Dans certains cas d’atteintes sévères, le phobique n’effectue plus aucune mesure d’hygiène dentaire car la seule vue de la brosse à dents lui fait penser à la nécessité d’un traitement et fait monter son anxiété qui induit l’évitement. Cela tend à augmenter drastiquement la fréquence des caries et l’atteinte parodontale sévère, rendant les traitements dentaires plus lourds et complexes. Cela a pour effet de renforcer les anticipations négatives et d’augmenter l’anxiété du phobique ; lors de douleurs trop intolérables, le phobique consulte en urgence et le traitement se révèle délicat et il se trouve conforté dans sa peur. C’est un cercle vicieux. Un autre aspect du cercle vicieux est que le phobique ressent de la gêne et de la culpabilité vis-à-vis de son délabrement dentaire, ce qui a pour effet d’accroître encore son anxiété en vue d’une prochaine visite43. Les conséquences de la phobie dentaire sur l’état bucco-dentaire ont été relatées dans plusieurs études. Hakeberg70 compare une population de phobiques dentaires à un groupe contrôle et constate que, dans la population phobique, le nombre total de dents extraites était 4 fois supérieur au nombre de dents extraites du groupe contrôle, que le nombre de faces cariées était dans un rapport de 20 à 8, le nombre de faces restaurées dans un rapport de 8 à13 et le nombre de lésions périapicales, 4 fois supérieur. L’augmentation de perte de l’os parodontal est également plus élevée dans le groupe phobique. Cela démontre d’une part la détérioration de l’état bucco-dentaire et d’autre part, lors d’accès aux soins, une diminution de la qualité.

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IMPACT SUR LA VIE COURANTE

La phobie dentaire a aussi un impact sur les aspects de la vie courante. En ce qui concerne les conséquences négatives de la phobie dentaire sur la vie courante et l’isolement social, Kent72 en 1996 et auparavant Berggren71,73 en 1984 et 1993 en a dressé la liste : 52 % des phobiques souffrent d’isolement social, 46 % ne partent plus en vacances, 41 % ont des problèmes familiaux et 31 % ne trouvent pas de travail. Et lorsqu’on mesure l’effet positif du traitement et de la guérison de la phobie dentaire, on constate une amélioration de l’humeur, une réduction des problèmes généraux, une réduction de la prise médicamenteuse, une réduction de la consommation d’alcool, une réduction des congés maladie. Les conséquences sur le staff dentaire de la prise en charge des phobiques dentaire augmentent le stress professionnel et les tensions diverses. Étiologie de la phobie dentaire

La peur est rarement une réaction congénitale. C’est pourquoi la peur dentaire a souvent été considérée comme une réponse conditionnée à des expériences aversives en dentisterie. Cependant, la réaction phobique est généralement un concours d’événements bien plus complexe qu’un simple conditionnement, et plusieurs facteurs ont été pris en compte pour expliquer la phobie dentaire1. Quand les patients détaillent les différentes phases de traitement, la plus grande peur est celle de la fraise, puis celle de l’anesthésie, de l’extraction, de l’attente du traitement1. La façon la plus courante pour développer l’anxiété dentaire est de faire des expériences négatives directes au cabinet dentaire68. Celles-ci peuvent prendre la forme d’une douleur ou d’une peur intense ou dépendre de relations interpersonnelles négatives entre patient et dentiste. Dans chacun des cas, le patient va associer dentisterie et expérience aversive, c’est un conditionnement émotionnel (réponse conditionnée émotionnelle). CONDITIONNEMENT

Dans la perspective des sciences comportementales, la phobie découle du conditionnement classique et considère donc l’anxiété résultante comme une réponse apprise au cours d’une expérience traumatique où un stimulus neutre est fortuitement associé à un stimulus inconditionnel aversif.

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Dans la situation de soins dentaires, l’opération consistant à fraiser la dent est associée au bruit de la turbine ou du contre-angle. Dans le cas où la douleur est présente, on assiste à cette séquence comportementale. Par exemple : Fraise → douleur = stimulus inconditionnel aversif → peur = réponse inconditionnelle Fraise → bruit = stimulus neutre = Association Bruit → peur = réponse conditionnée (conditionnement si répétition) C’est le schéma du conditionnement associatif. Dans le cas du conditionnement opérant, il y a apprentissage par les conséquences de l’action et non plus association entre deux stimuli, le phobique qui évite, apprend à soulager son anxiété par l’évitement de la situation qu’il redoute. C’est un renforcement négatif, par suppression des situations phobogènes. S’exposer à la situation (soins dentaires) pendant un laps de temps nécessaire pourrait réduire l’anxiété par le phénomène d’habituation. L’évitement a donc pour effet à court terme de réduire son anxiété, mais comme effet durable à long terme de l’augmenter. Le comportement initié va rapidement se généraliser à d’autres situations qui rappellent la situation initiale. À long terme, le sujet va avoir des anticipations de plus en plus négatives, car la perception de ses capacités à faire face à la situation diminue, et donc, avec le temps l’anxiété s’accroît. À la base, certains individus par prédisposition génétique (surtout dans les phobies du sang) sont plus vulnérables à l’apparition de phobie. Certaines expériences indirectes dues à l’observation ou l’échange d’informations peuvent conduire, de manière tout aussi efficace que des traumatismes vécus, à croire que la dentisterie peut être source de danger. Il s’agit alors du conditionnement indirect. L’homme est un animal social et ces comportements sont souvent dus à des apprentissages socio-culturels. Certains facteurs éducationnels de l’enfance conditionnent de manière aussi efficace qu’une expérience douloureuse. De plus, les images négatives concernant certains aspects des soins dentaires trouvent une large audience et suffisent à elles seules à accroître la réponse anxieuse de certaines personnes. Des patients qui n’ont jamais expérimenté de situations dentaires traumatisantes peuvent avoir acquis leur peur par généralisation. Ces patients ont vécu douleurs ou peurs dans d’autres procédures médicales et, par une certaine

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analogie de situations avec les soins dentaires, la réponse de peur peut être elle aussi stimulée. Nous venons de voir comment le processus de conditionnement peut sélectionner réponse émotionnelle chez un patient, basée sur une association entre peur ou douleur et une situation spécifique. C’est une réponse automatique émotionnelle, mais tous les patients phobiques ne relatent pas des expériences douloureuses significatives. LES EXPÉRIENCES DIRECTES DE NATURE INTERPERSONNELLE

Le comportement du dentiste en relations interpersonnelles est une des sources de peur ou d’évitement en dentisterie. Dans certains cas, la peur résulte de remarques ou de comportements et, dans d’autres, elle est la conséquence d’une tendance du patient à sur-généraliser ou à faire de fausses interprétations (distorsions cognitives). Cependant quelle que soit la situation, le dentiste se doit d’assumer une communication positive et de tout mettre en œuvre pour prévenir une interprétation erronée de ses propos ou de ses actions. Souvent les patients annoncent « j’ai peur du dentiste », mentionnant ainsi leur peur de l’ensemble des soins dentaires. Mais chez certains, il s’agit bien de la peur que provoque le dentiste. Cela peut être compris dans le sens d’une augmentation de l’anxiété due à l’anticipation négative d’une mauvaise relation interpersonnelle entre patient et dentiste, et notamment le fait d’être critiqué ou rabaissé (et donc de ressentir de la gêne). Une étude de Gale75 (1972) démontrait l’importance de cette peur dans le phénomène de l’évitement. Parmi 25 autres formules, la déclaration, « le dentiste vous annonce que votre bouche est en mauvais état et qu’il faut en prendre mieux soin  » était classé au troisième rang pour déclencher de l’anxiété. VULNÉRABILITÉ ET PERTE DE CONTRÔLE

C’est un principe de base de la psychologie77,78 que, dans une situation potentiellement dangereuse, l’absence de contrôle ainsi que le sentiment de vulnérabilité augmentent la réponse de peur. Il n’est pas étonnant que le cadre des soins dentaires avec un matériel inconnu et potentiellement menaçant, la position couchée du patient, bouche ouverte et, la présence à ses côtés (distance d’intimité) d’un dentiste, faisant figure de

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toute puissance, engendrent un sentiment de vulnérabilité et une perception de perte de contrôle. Le dentiste ne peut pas, d’un autre côté, laisser un contrôle total au patient, pour le succès du traitement. Il se doit d’en maîtriser les composantes. En fait, cela n’est pas nécessaire, car il suffit que le patient perçoive avoir un peu de contrôle pour être sécurisé. Si le dentiste peut le convaincre par des propos et surtout des faits que le traitement sera arrêté s’il devient aversif, il est vraisemblable que la situation génèrera moins de peur. Le sentiment de contrôle ou de perte de contrôle que le patient ressent pour telle situation, dépend de la signification qu’il lui donne79. Si cette signification est qu’il va vivre une situation inconfortable sans pouvoir la contrôler ou s’en échapper le résultat sera une augmentation de son anxiété. Certaines personnes anxieuses gèrent leur montée anxieuse en essayant de contrôler au maximum la situation qui les effraye. Cela part d’une déduction assez logique : un animal apprivoisé, par exemple, fait moins peur qu’un animal sauvage, un lion en cage effraye moins qu’en liberté. Dans une situation de soins dentaires, il faut laisser faire le dentiste dans une position qui souvent génère un sentiment de vulnérabilité. C’est souvent inconscient chez le patient et en prendre conscience est déjà thérapeutique mais ne suffit pas. Le dentiste aussi doit le réaliser en donnant plus de contrôle sur la situation, par exemple en arrêtant tout traitement sur un geste du patient ou en prévoyant, par avance, en accord avec le patient, des plages de respiration. Le succès du traitement chez ces patients réside dans les moyens de leur permettre de lâcher prise en gérant leur montée anxieuse par des techniques de respiration abdominale et de relaxation. ORIGINE EXOGÈNE ET ENDOGÈNE

Il apparaît que l’anxiété dentaire chez l’adulte, trouve son origine dans 51 % des cas au cours de l’enfance, pour 22 % d’entre eux, cette angoisse remonte à l’adolescence, et pour 27 %, elle apparaît à l’âge adulte80. Weiner et Sheehan (1990) [50] ont montré que l’anxiété dentaire apparaissant au cours de l’enfance avait plutôt une origine exogène alors que l’anxiété dentaire apparaissant à l’âge adulte avait une origine endogène81. En ce qui concerne l’origine exogène de l’anxiété dentaire, celle-ci serait le résultat d’un conditionnement82. Ce conditionnement est double. D’une part, l’enfant peut être marqué au départ par une expérience dentaire négative  : on parle de

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conditionnement direct. D’autre part, l’enfant peut être victime au départ par le comportement négatif de personnes importantes à ses yeux, comme ses parents : on parle alors de conditionnement indirect. En ce qui concerne l’origine endogène, les caractéristiques psychologiques du patient jouent un rôle essentiel : état anxieux général, phobies, troubles de l’humeur82. Ces caractéristiques psychologiques vont s’exprimer par une fragilité propre à générer la phobie dentaire. Selon Liddel (1999), chez l’enfant, toutes les formes de conditionnement jouent un rôle important dans l’apparition de l’anxiété dentaire, que ce soit le conditionnement direct ou indirect, alors que chez l’adulte seul le conditionnement direct jouerait un rôle80. En ce qui concerne les caractéristiques psychologiques, celles-ci ne jouent qu’un rôle mineur dans l’anxiété qu’éprouvent les enfants face aux soins dentaires. En revanche, la relation entre anxiété dentaire et caractéristiques psychologiques est très clairement démontrée pour l’angoisse apparaissant à l’âge adulte83. De nombreuses études ont montré que la peur de la douleur et les mauvaises expériences antérieures étaient fortement corrélées à l’angoisse face aux soins dentaires84-87. En effet, une grande proportion des patients qui ont connu une expérience dentaire douloureuse, appréhendent et considèrent, dès lors, les soins dentaires comme pénibles et douloureux88. Malgré l’évolution des traitements dentaires vers l’inocuité, les patients sévèrement anxieux voire phobiques persistent à éprouver une peur intense. Alors que s’exposer à une situation sans danger ni douleur avec le bénéfice secondaire d’améliorer le status oral, devrait conduire à une désensibilisation, la pénibilité du stress subi à chaque séance, conforte leur attente négative : le dentiste « ça fait peur même si ça ne fait pas mal » ayant pour conséquence l’effet contraire. Évaluation de l’anxiéte dentaire

Comme nous l’avons vu plus haut, la phobie dentaire n’est pas une phobie simple, mais une réponse à un phénomène complexe dont les causes sont multiples. L’expression de la réponse de peur est faite de trois composantes  : verbale (dire au dentiste, je suis paniqué), l’activation physiologique (sueur, tremblements, tension musculaire, accélération de la fréquence cardiaque, réaction

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cutanée) et des effets comportementaux (évitement, difficulté d’adaptation au traitement, conduites agressives, manifestations motrices de nervosité). Parmi les réponses physiologiques, les plus largement étudiées sont la fréquence cardiaque, l’amplitude du pouls au niveau du pouce, l’activité électrodermale, l’activité de sudation palmaire et la tension musculaire. D’autres paramètres ont été également étudiés : ce sont les indicateurs biochimiques du stress dentaire comme le taux des stéroïdes sanguin et salivaire ou la composition en protéines de la salive. Cependant plusieurs indices ont montré les limites du manque de cohérence entre données physiologiques. Une faible corrélation a aussi été notée avec les mesures faites entre des indices physiologiques et nonphysiologiques de l’anxiété. Il semble qu’il y ait une large palette de réactions individuelles et leur interrelation n’est pas claire. Les techniques d’enregistrement sont parfois compliquées et difficiles à gérer, incompatibles avec la pratique clinique. D’autre part, la complexité de certains appareillages, la pose de capteurs ou d’électrodes peuvent être anxiogènes et rajouter de l’anxiété. Dans certains cas, il existe une différence entre ce que le patient relate verbalement de sa peur et les signes physiologiques qu’il manifeste (mains moites, tremblements, etc.) ; il faut donc être attentif. D’autre part, certains signes physiologiques peuvent êtres contradictoires, par exemple intense sudation mais rythme cardiaque lent. Cette absence de corrélation entre les diverses composantes de l’anxiété peut mener à des constatations erronées sur l’état réel du patient. C’est pour cela que d’une manière générale on utilise une autoévaluation sous forme de questionnaires. MESURES PSYCHOMÉTRIQUES (voir aussi glossaire des tests psychométriques)

L’échelle la plus courante est l’échelle DAS (Dental Anxiety Scale) de Corah. La valeur moyenne normale est d’environ 8, avec un écart de 3.5. Les patients avec des valeurs DAS de 15 et plus ont pratiquement toujours d’importants problèmes cliniques. Pour avoir une meilleure information clinique des réactions des patients, il est préférable d’utiliser le DFS (Dental Fear Survey). Le DFS donne une mesure valide et fiable et fournit des informations précieuses sur la réaction des patients en fonction des diverses phases de traitement dentaire conventionnel.

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MESURES COMPORTEMENTALES

Le niveau d’anxiété peut être évalué en mesurant les comportements. Parmi les mesures comportementales, mentionnons le « Critère d’évaluation par le dentiste sur la traitabilité du patient  » et l’«  Échelle d’évaluation  », qui ont pour but d’exprimer les aspects importants de peur en situation observés par le dentiste. Le dentiste évalue le patient immédiatement après le traitement-test. ÉVALUATION PSYCHOLOGIQUE

L’évaluation psychologique se fait lors du premier entretien. La phobie dentaire est en général liée à l’état psychique. Des enquêtes ont démontré une corrélation avec ce qu’on appelle «  l’état d’anxiété  », c’est-à-dire le degré actuel d’anxiété générale. Le but de cet entretien est d’obtenir une information aussi complète et adéquate que possible sur le patient et ses problèmes. L’anamnèse couvre en principe les points suivants  : des généralités comme les conditions familiales et professionnelles, la situation sociale, l’enfance mais aussi, l’histoire des soins dentaires, l’état de la cavité buccale, l’expression de la peur, les soins en psychiatrie – psychosomatique, l’évaluation des souhaits, de l’attente et de la motivation. En-dehors du recueil d’informations, le but de l’anamnèse est avant tout de créer une bonne relation entre le patient et le thérapeute

Les problèmes psychologiques surgissant lors des premiers rendez-vous dépendent de la qualité relationnelle entre soignant et patient. Souvent, le dentiste doit fonctionner en décharge de toutes les opinions et sentiments que le patient a accumulé lors de ses précédentes expériences de soins dentaires. Ce n’est pas rare que le patient ait ainsi un comportement agressif et dénigrant. La difficulté consiste alors à faire évoluer cette opinion et à présenter les traitements nécessaires qui vont contre l’attente du patient. Le premier entretien est important pour établir le bon contact en démontrant empathie et authenticité pour établir l’alliance thérapeutique, primordiale à la réussite du traitement. Le recueil des informations anamnestiques lors de l’entretien avec le dentiste se focalise autour des précédents traitements dentaires, de l’attribution des raisons d’une peur excessive, des conséquences sociales de la phobie dentaire, des traitements préférés (accessibles).

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Traitement de la phobie dentaire Principe de traitement

Le principe général est de substituer chez les phobiques le comportement inadéquat, à savoir l’évitement, en leur apprenant un mode de gestion plus efficace de l’anxiété. Ceci leur permettra de s’exposer au traitement dentaire conventionnel et finalement les guérira par habituation. Il existe de nombreuses méthodes réduisant l’anxiété dentaire par des moyens pharmacologiques ou psychologiques. Nous nous limiterons à présenter ici les approches iatrosédative, cognitive et comportementale. Approche iatrosédative

Une bonne relation thérapeutique entre patient et dentiste74,84 est la base de cette approche comme dans de nombreuses thérapies. G. Wardle90 (1983) utilise en pratique générale une stratégie basée sur le fait d’éviter la douleur, laisser plus de contrôle au patient et informer le patient sur la sensation qu’il va percevoir. N.  Friedman91,92 et al. proposent la «  Iatrosédation  ». C’est une approche systématique où le dentiste vise à calmer le patient par son comportement lors de l’entretien et le traitement en alternant de manière avisée écoute active et informations pertinentes. Le dentiste fait part de son attention et de son soutien en apportant des réponses verbales et non-verbales au patient. Cette capacité de satisfaire les besoins et les interrogations du patient contribue à calmer son anxiété et augmenter l’alliance thérapeutique. Iatro-sédation. •  Calmer le patient (rôle du comportement du dentiste). •  Augmenter l’alliance thérapeutique. •  Éviter la douleur. •  Donner des informations continues sur la perception de la sensation. •  Augmenter le contrôle du patient

Approche comportementale

Diminuer des symptômes empêchant les phobiques à adopter de nouveaux aménagements leur facilite un meilleur fonctionnement.

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La modification comportementale est basée sur les principes de l’apprentissage dans le cadre du conditionnement classique93,94, du conditionnement opérant95, ou de l’apprentissage social96,97. De nombreuses études89,98-101 prouvent l’efficacité de la relaxation pour réduire l’anxiété. Les méthodes de relaxation sont nombreuses (respiration abdominale, hypoventilation, méthodes de Jacobson et de Schulz, relaxation différentielle, visualisation, etc.). La désensibilisation systématique93 est basée sur l’inhibition réciproque (impossible d’être à la fois calme et anxieux). Le patient se relaxe avant une exposition graduelle en imagination, pour contrôler et affaiblir la connexion entre un stimulus provoquant l’anxiété et sa réponse (excitation, tension, peur). En réalisant une séquence ordonnée et hiérarchisée de situations phobogènes, ou en construisant une échelle individuelle pour le patient pour chaque étape du traitement, la communication s’améliore et permet une meilleure évaluation de la réduction de l’anxiété. Le patient va pouvoir s’exposer graduellement au traitement dentaire conventionnel grâce à l’apprentissage progressif de la régulation de son anxiété et, dès lors, la guérison intervient par le processus d’habituation. Le taux de guérison102,103 (accès à des soins dentaires réguliers) varie entre 70-90  %. L’échec tient plus à une faible motivation [64] ou à des difficultés psychopathologiques104,105 qu’à l’intensité initiale de la peur. Approche cognitive

A.  Ellis97 a montré que les pensées ainsi que les émotions ne sont pas des processus séparés mais qu’ils se recouvrent. Les patients phobiques font preuve d’attentes inappropriées, leurs croyances sur le traitement sont erronées, ainsi que leur capacité de se confronter avec la situation. Modifier ces cognitions négatives réduit l’anxiété107. En conséquence le but du traitement cognitif est une restructuration cognitive accroissant le contrôle. Les patients perçoivent leur état émotionnel (et corporel) à travers des « signes internes » (par ex. tachycardie, oppression respiratoire, etc.) interprétés par un schéma107 construit lors de précédentes expériences (indirectes ou directes). La restructuration cognitive agit sur ce monologue intérieur en modifiant les croyances ou les schémas préfigurant. Fournir de nouvelles informations au patient phobique va lui permettre de reconfigurer sa perception d’une situation

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dentaire en précisant l’usage de tel ou tel instrument. De préférence, de telles explications sont dispensées préalablement à toute procédure et en association avec toute sensation éventuelle90. En résumé, il faut : •  Rechercher les pensées catastrophiques au sujet de certains instruments de traitements ou de dentistes, •  Sonder les attentes de performances du patient, •  Interroger et restructurer les pensées (Beck).

Thérapie cognitivo-comportementale de la phobie dentaire (méthode Berggren)

Cette méthode mise au point par Ulf Berggren109 (1984) et son équipe est constituée par l’association d’une exposition graduelle par une vidéo automatique (montrant divers types de traitement dentaire), d’une procédure de biofeedback (qui capte l’état émotionnel) et de réattribution cognitive (corriger les idées catastrophes ou erronées que les phobiques dentaires se font des traitements). C’est une sorte de simulation de traitement dentaire qui dure en moyenne 5 à 7 séances (soit par un dentiste spécialisé ou par un psychologue). En fin de traitement, pour juger de la guérison, le patient teste des traitements dentaires standardisés qui lui permettent de confronter ses nouvelles compétences à la réalité. Le patient peut désormais avoir accès à un traitement dentaire régulier par un autre dentiste. Initialement la procédure de biofeedback de la méthode de Göteborg utilise l’enregistrement du tonus musculaire par un électromyogramme de la face qui, à travers les tensions musculaires de la face, évalue l’état émotionnel du patient. Personnellement, je préfère l’enregistrement de la variabilité de la fréquence cardiaque à partir d’un capteur placé sur le lobe auriculaire relié à un logiciel informatique appelé « Freeze Framer ou Emwave PC » développé par l’Institut HeartMath de San-Francisco qui analyse les impulsions et traite les informations selon le principe des outils HeartMath de la cohérence cardiaque. Cette technique de biofeedback favorise l’apprentissage du contrôle des émotions. Grâce à cet outil performant, les patients apprennent à reconnaître leur état émotionnel et renforcent leur compétence de régulation en suivant les principes de la cohérence cardiaque décrits par Doc Childre121.

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Psychothérapie de la phobie dentaire

En accord avec la théorie classique de l’apprentissage issue des sciences comportementales, le traitement se passe au cabinet dentaire, c’est-à-dire dans la situation que le patient tend à éviter. Le patient apprend à gérer sa peur en la rencontrant et à gérer ses réactions physiologiques, ses sentiments et ses cognitions au lieu d’essayer de contrôler son entourage. Cela veut dire que le patient apprend à considérer sa peur et la douleur comme des signaux qui appellent une action et non pas une situation à éviter à tout prix. Cette compétence de gestion anxieuse, permet l’acquisition d’un nouveau répertoire comportemental qui a contrario de l’évitement, aide les phobiques à s’exposer à un traitement dentaire conventionnel. La capacité du patient de gérer son environnement s’améliore en renforçant sa capacité d’exprimer ses sentiments et de faire des demandes plus ouvertement. Cela lui permet de planifier le traitement en collaboration avec le dentiste. Bientôt, le patient sera moins dépendant du dentiste-thérapeute (initialement, seul recours d’accès aux soins) et pourra profiter des compétences d’autres dentistes. De la théorie à la pratique

D’une manière générale, la thérapie cognitivo-comportementale de la phobie dentaire ou méthode de Göteborg est une thérapie brève et structurée en collaboration avec le phobique. Elle dure en moyenne une demi-douzaine de séances, pendant lesquelles on recueille les informations nécessaires à la compréhension du phobique sur son mode de fonctionnement et à la mise en place d’une stratégie offrant des outils nécessaires au patient pour évoluer vers le but commun. Comme il a été abondamment décrit précédemment, la phobie dentaire est un phénomène complexe dont l’étiologie n’est pas uniforme. Même si le principe de traitement est avant tout de substituer le comportement inadéquat, c’est-à-dire l’évitement, et que le traitement est avant tout basé sur une exposition graduelle, il est primordial, pour ne pas échouer, de faire une bonne évaluation préalable à l’analyse fonctionnelle, décrivant et expliquant selon le modèle cognitivo-comportemental le dysfonctionnement du phobique. Selon le recueil anamnestique que le patient fournit et grâce à la mise en place d’une thérapie collaborative et structurée, il est alors possible de définir une stratégie de traitement en accord avec le patient, basée essentiellement sur le déconditionnement de comportements inadéquats qui freinent l’évolution

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du patient vers l’apprentissage, l’acquisition, l’intégration et le renforcement de nouveaux comportements. Graduellement l’accroissement de la confiance du patient en ses capacités à s’autogérer et l’apparition de nouvelles conduites propices à une évolution conduisent le patient vers le but fixé en collaboration avec le thérapeute, c’està-dire pouvoir s’exposer comme n’importe quel patient à un traitement dentaire conventionnel. Dès que possible, le patient s’entraîne à domicile à des tâches assignées, pouvant commencer par une simple auto-observation sur son mode de fonctionnement en situation de stress, comme l’évitement ou la mise en place d’une stratégie de conduite visant à fuir ou à contrôler la situation phobogène. Plus tard, c’est l’entraînement à la respiration abdominale, respiration antiétouffement (nasale, bouche ouverte), contrôle respiratoire, méthodes diverses de relaxation et apprentissage du biofeedback par la méthode de la cohérence cardiaque. Puis, après sondage des attentes du patient, on adapte un plan de traitement pour une exposition graduelle en adéquation avec le traitement dentaire. Avant toute exposition in vivo, une séance de désensibilisation systématique est mise en place simulant grâce à une vidéo automatisée de divers types de traitement. Cette exposition in vitro ne peut être réalisée qu’après l’apprentissage de la régulation de la montée anxieuse grâce au biofeedback de la variabilité de la fréquence cardiaque (HRV). Le patient relié à un logiciel d’enregistrement du rythme cardiaque par capteur auriculaire, apprend à initier un mode de respiration couplée à l’induction de sentiments positifs. Cette harmonisation des systèmes somatiques (respiration, rythme cardiaque) et le sentiment positif d’appréciation met le patient dans un état dit de configuration cohérente du rythme cardiaque (cohérence cardiaque) traduisant une activité synchronisée des systèmes nerveux sympathique et parasympathique. Cette synchronisation favorise une plus grande stabilité émotionnelle, une meilleure clarté mentale et une meilleure fonction cognitive111-121. Lorsque le patient a bien intégré cette technique, les pensées automatiques ou les scénari-catastrophe qui font irruption lors du visionnage d’une vidéo montrant diverses procédures dentaires (injections d’anesthésique, fraisage, extraction, etc.) sont analysés.

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Le patient peut alors relativiser ses schémas, croyances et anticipations grâce à un état émotionnel différent de celui de la peur. Calmé, il peut envisager plus sereinement de nouvelles alternatives. Cette restructuration cognitive est particulièrement efficace pour réduire l’anxiété et le patient peut alors anticiper plus sereinement la prochaine exposition in vivo. Dès lors, le patient est prêt pour réaliser le programme de l’exposition programmée. Lors de la séance d’exposition, il faut veiller à mettre l’accent sur le but visé, à savoir la régulation de l’émotion de peur et non pas le traitement dentaire. Pendant l’exposition, il est très important d’accomplir sans aucune surprise le programme prévu au préalable, veiller aux stratégies d’évitement, d’écourtement, de conduites agressives que le patient peut être tenté d’utiliser en vue d’alléger le traitement et, finalement, bien encourager et renforcer l’apparition des comportements souhaités. Il est primordial chez les patients maniaques du contrôle de les conduire à réguler leur sentiment de vulnérabilité pour pouvoir s’exposer au traitement dentaire conventionnel. Durant toute la thérapie, il faut dispenser de nombreuses explications, en se fixant sur la réalité des futurs traitements ainsi qu’aménager le traitement dentaire en accord avec les nouvelles aptitudes du patient. Après avoir acquis ces nouvelles techniques, méthodes et comportements, le patient va pouvoir, enfin, abandonner ses anciennes manies d’absolu contrôle sur la situation externe (contrôle des traitements ou du dentiste), au profit d’un autocontrôle de sa montée anxieuse. L’apparition de cette dernière étant le point de départ de l’utilisation des stratégies répétées au préalable (respiration abdominale, relaxations diverses, cohérence cardiaque). Une fois l’exposition réalisée, le patient est interrogé sur ses perceptions (feedback). Une brève entrevue hors-cadre de traitement est mise en place pour recueillir les impressions du patient pendant la séance et son degré d’anxiété est évalué par Visual Analogic Scale (VAS). On demande au patient d’imaginer un axe de 0 à 10 et de cocher le degré d’anxiété qu’il a ressenti à tel ou tel moment de l’intervention. Si un enregistrement de la variabilité de son rythme cardiaque par le logiciel PCEmwave a été réalisé, on peut alors vérifier, graphique à l’appui, la corrélation entre la perception du patient et son état neurovégétatif réel.

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Le patient en fin de séance peut aussi exprimer son sentiment ou formuler des critiques. Cette phase de la séance est très importante chez les personnes souffrant de timidité excessive ou de phobie sociale. À ce stade, un exercice de jeu de rôle peut être couplé afin d’entraîner sa capacité à formuler des critiques, à imposer une demande. Cet exercice, extrêmement délicat dans ce genre de psychopathologie, permet au patient d’accroître son assertivité et d’augmenter son sentiment de contrôle de la situation, faisant baisser ainsi son anxiété. Pour préparer la prochaine exposition (traitement dentaire) une rapide revue des diverses étapes de la future séance en imagination est fournie au patient (mise en relaxation ou en cohérence cardiaque) dans le sens d’une désensibilisation systématique tendant à affaiblir le conditionnement émotionnel entre la situation et la réponse antérieurement conditionnée. Afin de mieux illustrer ces propos voici le cas de Mme X (Pour respecter l’anonymat). Cet exemple n’est pas représentatif d’un cas de phobie dentaire typique où l’anxiété est avant tout exogène, c’est-à-dire liée surtout à la situation de soins dentaires par conditionnement simple et engendrant un évitement à long terme. Ce type de cas de phobie dentaire classique répond d’ailleurs très bien à la thérapie qui vient d’être exposée. Mme X… fait partie de ce type de patient à forte anxiété endogène (moins liée à la situation et plus dépendante d’une structure psychopathologique) que l’on rencontre fréquemment au cabinet et qui, par discipline, s’inflige annuellement le supplice de la visite dentaire. Ils ne ressentent pratiquement jamais de douleur, mais vivent leur périple dentaire dans un tel inconfort (dû à l’intensité de la peur qui les envahit), qu’ils n’arrivent jamais à se désensibiliser par simple exposition. Dans leur esprit, au sortir de la séance, reste toujours l’idée que même si le dentiste ne fait plus mal, il fait toujours très peur… Madame X… PRÉSENTATION

Mme X…, femme de 65 ans, a très peur des traitements dentaires. Cette patiente, anxieuse, est atteinte depuis cinq ans d’une myopathie. Elle a vécu une enfance plutôt solitaire  ; ses parents, gens très affairés, la confièrent aux bons soins d’une grand-mère. Son éducation fut stricte, le mot d’ordre étant de ne pas déranger.

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HARMONIE ET EFFICACITÉ AU CABINET DENTAIRE

Mme X est aujourd’hui mariée à Georges depuis 8 ans. Elle est mère de Jasmine, fille unique de 42 ans, issue d’un premier mariage. Mme X est maintenant à la retraite et vit seule avec son mari. Aujourd’hui, bien que se décrivant comme très à l’aise dans les relations interpersonnelles et aimant partager diverses activités avec de nombreuses amies, elle est astreinte, en raison du handicap dû à sa myopathie, à un rythme de vie plutôt casanier. ÉVALUATION

Voici les résultats obtenus pour cette patiente : Penn State = 57, résultat correspondent à une anxiété généralisée Marks et Mattews = 35, signant une phobie du sang MADRS = 21 reflétant un état dépressif de léger à modéré. Cette évaluation se base uniquement sur des tests psychométriques dont vous allez retrouver le sens et l’intérêt dans le chapitre « Glossaire des tests psychométriques de l’évaluation de l’anxiété et de la phobie dentaire  ». Elle n’a pas vocation de diagnostic. CONCEPTUALISATION

L’analyse fonctionnelle montre que tout ce qui peut faire mal dans certaines situations, et, en particulier chez le dentiste, déclenche chez Mme X des conduites qui s’apparentent à l’évitement. En effet, tenaillée d’une part par l’envie de fuir et d’autre part de se montrer raisonnable et faire bonne figure, elle adopte une stratégie comportant trois étapes. Premièrement, elle s’efforce d’écourter les soins en choisissant la solution la moins pénible, au détriment d’une bonne fiabilité ou pérennité des traitements dentaires. Deuxièmement, elle fait face à l’anxiété engendrée par les soins dentaires, en effectuant une barrière mentale par un comptage effréné, bloquant ainsi l’apparition d’idées catastrophes. Troisièmement, lorsqu’elle a atteint ses limites d’endurance, elle met en place une stratégie d’échappement en adoptant des conduites agressives ou des plaintes écourtant le traitement Cette stratégie ne lui a pas permis de se désensibiliser de son anxiété dentaire en s’exposant aux soins mais, au contraire, en ne laissant pas assez de temps pour

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que son anxiété puisse se réduire par habituation, elle s’est plutôt sensibilisée par renforcement négatif. STRATÉGIE DE TRAITEMENT

En premier lieu, la prise en charge s’est efforcée de parer à l’évitement en aidant Mme X à se détendre dans les situations qui la crispent. La thérapie envisage, donc, de lui apprendre à pratiquer la respiration abdominale et la relaxation de Jakobson espérant ainsi l’amener graduellement à s’exposer à des traitements dentaires avec un niveau d’anxiété plus bas. En deuxième lieu, on envisage une intervention cognitive pour réviser certaines de ses croyances et d’assouplir ses schémas afin de lui faciliter l’accès à de nouvelles conduites. DÉROULEMENT DU TRAITEMENT

Les premières séances sont consacrées au recueil des informations anamnestiques, à la détermination des objectifs, à l’explication de la thérapie cognitivocomportementale et à l’évaluation. La thérapie se poursuit par l’apprentissage de la respiration abdominale, le contrôle respiratoire ; comme la respiration abdominale ne sera jamais vraiment acquise, on met en place une respiration contrôlée plus lente et plus ample. Puis, l’apprentissage de la relaxation de Jakobson. La patiente ayant déjà la capacité de surmonter sa peur, accepte rapidement de passer de la désensibilisation à l’exposition au traitement dentaire. TRAITEMENT DENTAIRE

La première séance de traitement comporte un simple examen, des radiographies, un diagnostic, l’évaluation de l’anxiété par échelle visuelle analogique de Scott (sur la chaise de dentiste, la patiente ressent un pic d’anxiété à 7 qui descend progressivement jusqu’à 3 après 20 minutes). La séance se poursuit hors de l’unit par une exposition en imagination (presque une simulation) en montrant tous les instruments, les gestes qui seront effectués pendant la future exposition. Lors de la deuxième séance de traitement (traitement endodontique), la patiente dit ressentir moins d’anxiété (pic à 5) et le traitement se déroule très bien pour le dentiste, car la patiente est compliante  ; elle avouera plus tard

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bloquer toute perception de peur par son ancienne méthode (efficace) de comptage effréné. À la troisième séance de traitement (traitement endodontique) la patiente banalise totalement l’exercice (« pas pire que faire ses commissions »). En réalité, cette attitude constitue une tentative d’écourtement, qui consiste à rassurer le médecin-dentiste sur les résultats de la relaxation pour en finir au plus vite. Lors du choix du traitement dentaire définitif, la patiente opte pour la solution la moins indiquée (écourtement) ; le recueil des impressions lors des traitements indique que la patiente ne sait pas vraiment se relaxer en situation. Lors d’un nouveau traitement dentaire non planifié, la patiente ressent un fort pic d’anxiété (6) et elle n’arrive pas à se relaxer, mais ses attentes sont plus positives, des idées catastrophes apparaissent qu’elle bloque par un comptage effréné et une prière litanique. Le traitement est effectué néanmoins sans difficulté. À ce stade, on décide d’intensifier le travail de restructuration cognitive. INTERVENTION COGNITIVE

La recherche des situations lors de fortes émotions a mis à jour des pensées automatiques : « Ma valeur dépend des autres », « Moins on en sait, mieux ça vaut », « Il faut faire bonne figure ». La recherche de pensées alternatives lui permet de relativiser et, de ce fait, les pics d’anxiété lors de situations impliquant ces croyances sont moins fréquents et moins intenses. La patiente ressent beaucoup plus de motivation par cette approche cognitive qui lui semble plus accessible que la relaxation, en raison de sa tendance à tout rationaliser. Elle se montre maintenant plus souple par rapport à ses croyances, ses schémas, et ses règles de vie. Des exercices d’affirmation de soi et des jeux de rôle lui permettant d’exprimer ses craintes, ses soucis à son entourage, favorisent la mise en place de nouvelles conduites qui lui apportent des solutions à ses soucis quotidiens, d’où une baisse du niveau d’anxiété générale. Pour l’évaluation finale, on propose à la patiente deux options : la première comporte un contrôle de base (examen clinique, radiographies, détartrage), la deuxième comporte un contrôle de base et le remplacement d’une obturation défaillante.

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Bien que ce traitement soit nécessaire, il n’est pas indispensable dans l’immédiat, la patiente choisit la deuxième option démontrant ainsi l’efficacité du traitement cognitif. En effet, elle n’a pas choisi la solution la moins pénible, c’est-à-dire générant le moins d’anxiété dentaire, comme elle le faisait systématiquement auparavant, mais celle qui présente la meilleure garantie pour sa santé bucco-dentaire. Lors du traitement la patiente a ressenti une certaine anxiété (4) qu’elle pouvait surmonter plus par des pensées favorisant l’action (POC) que par sa capacité à se relaxer. CONCLUSION

Le niveau d’anxiété relativement haut reste un handicap pour vivre un traitement dentaire en toute quiétude et risque d’être un facteur important dans la récidive de ses comportements proches de l’évitement, raison pour laquelle il nous semble judicieux de mettre en place un suivi avec des contrôles réguliers afin de prévenir toute rechute.

Glossaire des tests psychométriques de l’évaluation de l’anxiété et de la phobie dentaires DAS

Le DAS (Dental Anxiety Scale) de Corah est l’échelle la plus courante de mesure de l’anxiété dentaire. L’échelle comprend quatre items qui demandent au patient d’évaluer le degré de désagrément que lui procurent quatre différentes situations. Chaque question a 5 alternatives, commençant par  : pas de réaction jusqu’à la réaction extrême ; les alternatives sont cotées de 1 à 5 avec un total qui varie entre 4 à 20 ; le total 20 correspond à une peur extrême. Échelle d’anxiété des soins dentaires. Cocher chaque fois la situation qui convient 1. Imaginez-vous dans une situation où vous avez rendez-vous demain chez le dentiste. Comment vous sentez-vous ? . . . Cela ne me dérange pas du tout . . . Cela ne m’inquiète pas particulièrement

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. . . Cela m’inquiète un peu . . . J’aurais peur que cela soit désagréable ou douloureux . . . Je serais paniqué à l’idée de ce que va faire le dentiste 2. Imaginez-vous assis dans la salle d’attente, attendant votre tour. Que ressentiriez-vous ? . . . Parfaitement calme . . . Un peu inquiet . . . Tendu . . . Nerveux et anxieux . . . Si nerveux et paniqué que cela me ferait transpirer et me sentir mal. 3. Imaginez-vous que c’est votre tour. Vous prenez place au fauteuil et vous voyez le dentiste préparer ses instruments. Que ressentiriez-vous ? . . . Parfaitement calme . . . Un peu inquiet . . . Tendu . . . Nerveux et anxieux . . . Si nerveux et paniqué que cela me ferait transpirer et me sentir mal. 4. Imaginez-vous installé dans le fauteuil. Il ou elle va juste commencer à vous faire un détartrage ? . . . Parfaitement calme . . . Un peu inquiet . . . Tendu . . . Nerveux et anxieux . . . Si nerveux et paniqué que cela me ferait transpirer et me sentir mal. Dans une enquête réalisée en 1992 il a été trouvé parmi les habitants de Göteborg, une valeur moyenne légèrement inférieure à 7. Les patients avec des valeurs DAS de 15 et plus ont pratiquement toujours d’importants problèmes cliniques. DFS

Pour avoir une meilleure information clinique des réactions des patients, nous utilisons à présent le DFS (Dental Fear Survey). Cette échelle a été introduite pour la première fois aux États-Unis en 1973 par Kleinknecht, Klepac et Alexander35. 20 différents aspects et situations sont

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évalués sur une échelle de 1 à 5. 1 correspond à pas de peur et 5 à une peur extrême. Il y a donc une variation possible de 20 (aucune peur) à 100 (peur extrême) pour le résultat total. Il existe 2 items sur l’évitement des soins, qui constituent une bonne indication de phobie dentaire, car c’est la manifestation la plus apparente. 5 items traitent les réactions physiologiques durant le traitement, notamment les tensions musculaires, une accélération du rythme respiratoire, la transpiration, les nausées et une accélération du rythme cardiaque. Les questions 8-19 ciblent plus des stimuli ou des situations spécifiques, tels qu’une angoisse d’anticipation lors de prise de rendez-vous chez le dentiste jusqu’au moment où l’on s’approche du cabinet, de la salle d’attente, où l’on s’assoit dans le fauteuil, et où l’on perçoit les odeurs typiques du cabinet dentaire. La question 13 et les suivantes considèrent les attributs spécifiques aux soins dentaires, par exemple l’arrivée du dentiste dans la salle, raison pour laquelle on nomme cette maladie «  la peur du dentiste  ». La peur de l’anesthésie, de l’aiguille, de la fraise et d’une élimination de la plaque dentaire viennent ensuite. La question n° 20 est de nature plus générale et tente de mesurer le niveau global de peur des soins dentaires. Le DFS s’est avéré donner une mesure valable et fiable. Comme mentionné ci-dessus le DFS est construit autour de trois facteurs bien délimités. Le premier regroupe les questions 1 et 2, 8-13 et 20, c’est-à-dire des aspects cognitifs de la peur associés à l’évitement et l’anticipation anxieuse devant une visite. Les questions 14-18 qui s’intéressent au deuxième facteur portent sur certains stimuli comme la piqûre et la fraise. Pour le troisième facteur, les questions 3-7 cherchent la présence de réactions physiologiques. La question n° 19, qui parle d’un traitement chez l’hygiéniste, ne fait partie d’aucun groupe. Différentes études ont démontré que les patients atteints de phobie dentaire totalisent 70 points ou plus. Nous savons également que les valeurs de la population «  normale  » varient autour de 35. Des résultats semblables existent en Hollande, en Suède, et aux États-Unis, et il est intéressant de constater qu’en

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plus d’être d’une grande validité et fiabilité, ce test peut être un prédicteur dans des enquêtes. DFS – DENTAL FEAR SURVEY35

Évaluation de la peur des soins dentaires Les questions dans ce formulaire décrivent différentes situations, sentiments et réactions qui peuvent avoir un lien avec les soins dentaires. Marquez vos sentiments et réactions en encerclant le chiffre qui correspond le mieux à votre réaction. 1.  La peur du dentiste vous a-t-elle empêché de prendre rendez-vous chez le dentiste. 1. Jamais 2. Parfois 3. Quelques fois 4. Souvent 5. Presque toujours. 2.  La peur du dentiste vous a-t-elle fait annuler ou manquer un rendez-vous planifié ? 1. Jamais 2. Parfois 3. Quelques fois 4. Souvent 5. Presque toujours. Pendant le traitement dentaire 3.  Mes muscles sont tendus 1. Pas du tout 2. Légèrement 3. Modérément 4. Intensément 5. Extrêmement 4. Ma respiration est accélérée 1. Pas du tout 2. Légèrement

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3. Modérément 4. Intensément 5. Extrêmement 5. Je transpire 1. Pas du tout 2. Légèrement 3. Modérément 4. Intensément 5. Extrêmement 6. J’ai des nausées et j’ai envie de vomir 1. Pas du tout 2. Légèrement 3. Modérément 4. Intensément 5. Extrêmement 7. Mon cœur bat plus vite 1. Pas du tout 2. Légèrement 3. Modérément 4. Intensément 5. Extrêmement Voici ci-dessous une liste de faits et de situations liés aux soins dentaires fréquemment considérés comme angoissants, voire paniquants. Évaluez l’intensité de votre peur, angoisse ou malaise que vous causent ces situations sur une échelle de 1 à 5. 1. 2. 3. 4. 5. 8. 9.

Pas du tout Légèrement Modérément Intensément Extrêmement Prendre rendez-vous Entrer dans le cabinet dentaire.

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10. Rester dans la salle d’attente 11. S’asseoir dans le fauteuil 12. Sentir l’odeur 13. Voir arriver le dentiste 14. Voir la seringue. 15. Sentir la piqûre lors de l’anesthésie. 16. Voir la fraise. 17. Entendre la fraise 18. Sentir les vibrations de la fraise. 19. Subir un détartrage. 20. En conclusion à combien évaluez-vous votre peur d’un traitement. De manière générale, on considère qu’une réaction phobique est une problématique clinique proportionnelle à la présence d’autres phobies. On peut alors penser qu’il est plus facile de traiter une phobie dentaire chez un sujet avec des phobies peu sévères et peu nombreuses, que chez les patients avec des phobies nombreuses et extrêmes. GFS

Le Gear Fear Scale (GFS ou parfois FSS-II) récapitulatif des diverses phobies est une bonne mesure de la tendance à la peur, obtenue en évaluant chaque réponse de 1 à 7, où 7 correspond à une peur extrême, et ensuite de les additionner. GFS-GEAR FEAR SCALE (Échelle de multiphobie) Nom :

Traitement : Date :

La phobie et la peur des soins dentaires peuvent parfois être associées à d’autres peurs. Essayez d’évaluer votre peur sur une échelle de 1 (= pas de peur) à 7 (= complètement paniqué). Cochez le chiffre qui décrit le mieux votre peur. 1 = Pas de peur 4 = Peur intense 7 = Peur panique

2 = Peur légère 5 = Peur sévère

3 = Peur modérée 6 = Peur extrême

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1

2

3

4

  1 L’anesthésie dentaire   2 Objets pointus   3 Ver de terre   4 Rats et souris   5 Aiguilles d’injections  6 Araignées  7 Sang   8 Endroits élevés   9 Endroits clos 10 L’orage 11 Serpents 12 Cimetières 13 Endroits sombres 14 Chiens inconnus 15 Insectes qui piquent 16 Accidents de voiture

5

6

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7

17 Réceptions, événements sociaux 18 Les grands espaces vides 19 Les gens 20 Douleur 21 Étouffement 22 Paraître stupide 23 Avion 24 Disputes familiales 25 Être critiqué 26 Être seul 27 La mort 28 Rassemblements 29 Maladies 30 Être ridicule 31 Contact avec le sexe opposé 32 Chômage

Un nombre de point GFS élevé constitue également une indication que la phobie dentaire peut être difficilement traitée. Le groupe multi-phobique demande souvent un traitement plus long et plus important. Tests psychométriques d’évaluation de l’anxiété générale QUESTIONNAIRE DES PEURS DE MARKS ET MATTHEWS

Ce questionnaire a pour objectif d’évaluer les problèmes phobiques. Il permet d’évaluer l’anxiété et la dépression associées aux phobies. C’est l’instrument le plus utilisé pour évaluer l’efficacité du traitement des sujets agoraphobes et phobiques sociaux. Il prend en compte quatre dimensions  : l’agoraphobie, la phobie du sang (peur des blessures), la phobie sociale et l’anxiété-dépression. QUESTIONNAIRE SUR LES INQUIÉTUDES DU PENN STATE

Ce questionnaire évalue les intrusions cognitives ou les inquiétudes excessivement irréalistes, constituant les principaux symptômes du trouble de l’anxiété généralisée. Il permet d’évaluer la fréquence et l’intensité de l’inquiétude sans cependant identifier le sujet des inquiétudes du patient.

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INVENTAIRE D’ANXIÉTÉ ÉTAT-TRAIT

Cet inventaire est destiné à évaluer d’une part l’anxiété trait et d’autre part l’anxiété état. L’anxiété état se rapporte à l’anxiété ressentie à un moment donné. L’anxiété trait serait la tendance usuelle d’une personne à être anxieuse. L’ÉCHELLE DE PHOBIE SOCIALE DE LIEBOWITZ

Cette échelle évalue la phobie sociale en regard de situations de performance et d’interaction sociale, et permet de coter l’évitement dans chacune des situations. L’ÉCHELLE DE DÉPRESSION MADRS (MONTGOMERY AND ASBERG DEPRESSION RATING SCALE)

Cette échelle de 10 items permet d’étudier les modifications de l’humeur. Elle est relativement rapide pour évaluer l’intensité de la dépression et apparaît sensible au changement thérapeutique.

Conclusion Le traitement des patients anxieux nécessite l’apprentissage et l’utilisation d’outils thérapeutiques issus des sciences comportementales. Anxieux ou pas, les patients attendent d’un «  dentiste idéal  » non seulement, une pertinence professionnelle mais aussi la capacité de réduire la peur et la douleur. Il a été démontré que l’apprentissage des sciences comportementales et des thérapies de l’anxiété dentaire accroissait le niveau d’empathie de l’étudiant. Améliorer l’accompagnement d’un patient anxieux, c’est aussi soustraire de sa pratique quotidienne une part significative d’un bon nombre de facteurs de stress, infligeant à un nombre non négligeable de nos confrères des troubles psychologiques (burn-out ou dépression). En résumé l’application de méthodes comportementales comme la relaxation, la désensibilisation systématique, l’exposition graduelle, la restructuration cognitive, ainsi que l’emploi des outils HeartMath contribuent à instaurer au sein du cabinet l’harmonie nécessaire au bon fonctionnement. Peut-être est-il encore utopique de prétendre comme le poète que «  …là, tout n’est qu’ordre et beauté, luxe, calme et volupté…  », mais, peut-être, n’est-il pas illusoire d’espérer qu’à la lumière de ces nouveaux paradigmes, l’implémentation d’une dentisterie harmonieuse et efficace soit désormais possible dans chaque cabinet dentaire.

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9 ACCUEILLIR MON STRESS CONSCIEMMENT J. BAKKERS

Introduction Préambule, réflexion préliminaire, à un ami dentiste  : «  pour un stress conscient ». Le premier, le principal problème du sujet stressé, c’est qu’il est stressant pour autrui. Et de plus, la plupart du temps, il en est largement inconscient. Un stress conscient, accueilli, gérable… serait-ce possible ? C’est l’hypothèse que nous allons tenter de développer ici ! « La seule tragédie existant en ce monde, c’est l’ignorance », nous dit Antony de MELLO. Quand la conscience s’éveille. Albin Michel, Paris. 2002. Or, il semble bien que le plus responsable : le dirigeant, le chef, le plus haut gradé, le propriétaire, etc. soit souvent aussi le plus stressé ! L’argument, qui a motivé le choix de ce chapitre, serait que, par conséquent, dans le monde du cabinet dentaire, le plus grand stress appartiendrait au médecin-dentiste responsable. CQFD. Pourquoi cette situation est-elle aussi répandue ? Il m’a été donné de fréquenter vos confrères à de nombreuses reprises lors de cours ou conférences organisés par l’École de médecine dentaire de Genève, ou lors d’interventions plus en profondeur, personnelles ou de groupes, à propos des relations (souvent détériorées) dans l’un ou l’autre cabinet. À propos des stress divers qui sévissent dans cette profession. Que représente la relation stressé-stressant : ne s’agirait-il pas d’une manière de se projeter, de se défendre, de se protéger ? Une manière de ne pas entrer

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dans une relation vraie, authentique, simple et humaine ? Un peu comparable à la relation dominant – dominé que l’on attribue aux seuls animaux ? Résumons une croyance très répandue  : on peut, paraît-il, être un très « bon » médecin-dentiste en étant « seulement » un excellent technicien. S’agirait-il alors d’un travail manuel seulement, logique seulement, et/ou intellectuel seulement ? Un film célèbre s’intitulait : « Et la tendresse, bordel ? »… À quoi pourrait-elle bien servir, cette tendresse, la tendresse dans le rapport humain, le relationnel simplement humain ? Est-ce efficace ? Voyez le titre de ce livre : efficacité, certes (vous connaissez cela sans aucun doute, ayant passé des années de votre vie à étudier les conditions de votre efficacité et n’ayant pas attendu d’ouvrir ce livre pour y réfléchir. Oui, mais aussi : « HARMONIE » ? Pour quoi, pour qui ? Soyez égoïste, songez à vous, rien qu’à vous, à votre santé, à votre longévité, mais surtout à la QUALITÉ de votre existence ne luttez plus contre le stress, mais amadouez-le, accueillez-le, utilisez-le, positivez-le, soyez en conscient, mais dans la joie si possible. Le soussigné et les autres complices de ce livre, nous vous souhaitons tout ce bien-être là avec un peu de tendresse, un peu d’humour dans un monde professionnel si bien rangé, seulement, pour votre propre plaisir. Le chapitre qui suit est rédigé de façon un peu inhabituelle, avec même un léger désordre  : citations, schémas ou résumés de cours et conférences, à déguster par petites envolées. Autorisez-vous à papillonner d’une page à l’autre avec un brin de fantaisie dans cette vie très unique, donc précieuse : la vôtre ! Rien ne changera a été dit dans ce livre et sera redit souvent dans les pages qui suivent, si JE ne change pas d’abord.

C.Q.Q.O.Q.P  : (retenez bien cet acronyme)  : Comment, quand, quoi, où, qui, pourquoi… ? Détendez-vous et méditez au moins deux fois dix minutes par jour, jouez en silence avec votre subconscient, votre irrationnel, votre imaginaire, réapprenez à être jeune, causez à vos cellules, à vos organes, au meilleur de vous-même, courtoisement, élégamment. Sans vous prendre trop au sérieux, soignez d’abord et surtout le bien-être de cette personne merveilleuse, miraculeuse, unique et irremplaçable : VOUS.

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Soyez le/la premier(ière) à vous faire ce cadeau  : détendez-vous  ! Soyons concrets : MÉTHODE : Ne soyons pas contre le stress : Il y en a déjà tellement… Ici, nous tenterons de vous donner quelques aspects de vie libre, jamais anti rien du tout, pour ramener la pensée au présent… ce cadeau ! Dans un lieu calme, sans dérangement : aucun matériel, aucun gourou : il est simple, gratuit, d’être maître chez soi, et vous êtes la personne la plus parfaitement compétente pour prévenir et guérir vos effets stressants. Organisons de façon systématique, mais très soigneusement, une sorte de plan de non-travail : •  Méditation attentive, •  Contemplation calme, •  Assise ou posture immobile et symétrique, •  Silence serein, •  Souffle (inspiration – expiration) régulier et harmonieux. C’est un minimum : deux fois 10 minutes par jour, rien qu’à vous, bien tranquille, immobile, silencieux/se, sans téléphone ni TV, ni personne autour de vous, assis, debout ou couché : méditation, respiration consciente, relaxation musculaire, visualisation de vos meilleurs paysages intérieurs, confection de messages positifs, c’est tout un art (méthode Coué en tête) de vivre au présent. Parlez tendrement à vos cellules, à votre inconscient (votre meilleur(e) ami(e) en ce monde), à vos organes… Ces instants vous deviendront vite indispensables, bénéfiques, bienfaisants… c’est simple et c’est gratuit ! Patience – persévérance – entraînement à la sérénité : Cinq jours, puis trois semaines, deux ans, pour SE changer en profondeur… Ces instants de détente-méditation quotidiens deviendront les meilleurs moments de vos journées ! Alors se produira ce miracle incomparable : vous deviendrez bientôt « doux et humble de cœur », le patron impeccable ET gentil, adorable, patient, aimable, souriant, optimiste, dynamique et détendu, que vous avez toujours souhaité être. Ce qui ne vous empêchera nullement d’être et de rester le « technologue » le plus efficace !

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Réflexions : Laissons se faire jour en nous ces forces formidables : Devenons consciemment positifs : chaque fois que surgit une pensée négative, remplaçons-la par un message dynamique, calme, qui ne comporte que des mots et tournures de phrases uniquement positifs : c’est une discipline très précise. Ne plus résister au courant spontané et souple de nos sentiments. Se fâcher contre quelqu’un, n’indique que notre propre impuissance à nous réaliser nous-mêmes. Si nous laissons toutefois échapper notre agressivité naturelle, confrontonsnous surtout à sa véritable cause. Parlons-en à nos proches, libérons calmement ce qui était refoulé avec entêtement. Soyons ouverts à la sagesse intérieure, sentant et ressentant l’autorité en soi. Nous pouvons (re)prendre la direction de notre vie. Reconnaissons et écoutons nos forces intuitives, vivons librement et sans angoisse. Repos et mouvement, méditation et recréation, dialogue «  avec nos cellules  »  : notre subconscient est notre meilleur ami, le plus bienveillant, avec qui nous nous éveillons chaque matin ! Parlons-lui, réveillons-le aimablement ! Transformons nos énergies accumulées en action et en créativité ! Prenons la liberté de jouir des belles choses, ne soyons plus si durs envers nous-mêmes. Essayons…et que Dieu nous vienne en aide, nous vous le souhaitons de tout cœur !

Principes de base Dans ce chapitre, on vous donnera quelques principes de base, qui n’ont pas forcément de suite logique entre eux, mais qui sont fondamentaux à la compréhension du stress en général, de son étiologie, de sa gestion et de sa thérapie. On vous parlera de ce que veut dire le terme psychisme, on vous

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expliquera ce qu’est la véritable psychosociologie qui peut nous aider à éviter le stress. Puis, très longuement, on vous exposera la formation comme outil indispensable pour amoindrir le stress. Vivre le présent, savoir ce qui compte vraiment seront bien pris en compte. On terminera en parlant du doute, des obstacles à la communication à deux et enfin par, non, je ne suis pas antistress. Vous aurez là des pistes originales qui pourront certainement vous aider à être beaucoup moins stressé. Mais encore faut-il vouloir le faire et le faire encore ! Le psychisme

Nous sommes constamment traversés par les émotions les plus diverses, dont nous composons une gamme bien personnelle à force de vivre et de traverser des situations. Les émotions (é – motions) constituent le mode normal de notre fonctionnement humain. Elles émanent de nos sensations, et nous procurent nos sentiments. Lorsque nous croyons raisonner-penser, de la manière la plus froide, rationnelle ou impersonnelle, nous nous défendons à notre insu, de succomber aux émotions les plus diverses. Les caractéristiques de notre « conscient » évoluent sur notre mode de perception egocentré et dualiste. Il est difficile, voire impossible, d’y échapper totalement. Ce processus conscient est supporté, sous-tendu par des niveaux successivement préconscient, subconscient, puis inconscient. Ces « étages » créent nos motivations, besoins, désirs et craintes ambivalents, puis, de plus en plus profondément, nos tendances très personnelles, uniques… jusqu’à nos instincts, sorte de mémoire ou de bagage collectif qui n’oublie rien de ce qui nous est advenu. « Rien ne se perd » : aucun souvenir, aucun rêve, aucune pensée, ni parole, ni événement, ni image… tout reste inscrit… « quelque part » dans le tréfonds de notre mémoire subconsciente ; c’est le « bagage » unique et irremplaçable avec lequel nous évoluons. Tout cela peut être représenté par l’image d’un iceberg dont le dixième visible peut nous faire penser au conscient et les neuf autres dixièmes qui sont sous l’eau, partie la plus importante, peuvent être comparés à l’inconscient (Fig. 17).

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Fig. 17  Véritable iceberg avec son immense masse potentiellement dangereuse cachée sous l’eau.

La psychosociologie est…

… contenue toute entière dans le bon sens populaire, disait l’un de mes professeurs ! Cette branche des sciences humaines n’est pas encore tout à fait reconnue, souvent confondue avec une sorte de psychologie sociale mal définie, et n’a pas encore conquis droit de citer dans toutes nos Universités, en Suisse notamment. Si l’ensemble des affaires humaines se présentait sous la forme d’un arbre aux branches et sous-branches multiples, nous dirions que la philosophie en est le tronc principal, déconsidéré de nos jours (qui ose encore se dire philosophe ?), et c’est dommage. Parmi les branches principales, nous retiendrions la morale, l’étude des religions, la psychologie et la sociologie. La psychologie étudie l’être humain au singulier, pose sur lui son microscope, cherche les moyens de lui venir en aide. Définition sommaire. La sociologie, elle, appréhende la très grande dimension humaine, la foule, le grand nombre, les grandes réunions, la publicité, la politique, les transports, etc., comme des mécanismes sociologiques. Entre ses deux «  grandes sœurs  » qui l’ont précédée, la psychosociologie, ou connaissance des « petits groupes », tire bien entendu une part importante de son enseignement des deux premières citées, mais développe aussi ses lois propres et originales ; c’est une extension de ce que l’on a souvent nommé la dynamique des groupes. Très développée aux États-Unis dès 1942, au Canada, puis en France, elle est devenue une branche à part entière de l’arbre des sciences humaines.

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Or la vie en petits groupes, ou groupes de dimensions restreintes, disons de moins de vingt-cinq ou trente personnes (selon les auteurs), est fréquente et importante dans la vie, si l’on songe à la famille, à la scolarité, à la vie professionnelle ou sociale, aux sports, à la notion d’équipe et de groupe, partout ! Elle présente bien des avantages, cette notion, notamment celui de ne pas culpabiliser ceux qu’elle décrit : c’est l’affaire du groupe ! Point-clé du bon fonctionnement d’un groupe  : il est très important de rendre apparents, de formuler soigneusement les points communs et les différences. Il s’agit bien ici des points de ressemblance et de différence entre les personnes, leurs avis, les comportements ou attitudes lors de tel évènement, réunion, démarche, projet, etc. Un groupe sans différence interne serait relativement stérile. Bien les ­reconnaître conduit à s’accepter réciproquement, au prix de quelques efforts qui promeuvent précisément la progression d’un groupe ou d’une équipe. Équipe ou team building

Il est vraiment possible d’aider un groupe, de le rendre performant, rien qu’en lui faisant apparaître cela : ses caractéristiques internes. La différence que l’on cache peut devenir racisme intérieur, celle que l’on aborde ouvertement devient une occasion de se rencontrer vraiment. La rencontre, quoique souvent difficile, n’est-ce pas ce qu’il y a de plus précieux dans la vie ? N’est-ce pas devenu une occasion un peu rare en notre monde moderne, qui souvent sépare ? Bien sûr, les gens qui travaillent ensemble ne se sont pas choisis réciproquement. Il n’en reste pas moins vrai que le lieu de travail est/ serait aussi une occasion de rencontres, qui nous est offerte. Il est plus qu’important (et rare) de pouvoir parler vrai : si j’ai un problème, celui-ci aura en dedans de moi un effet corrosif, potentiellement destructeur, aussi longtemps que je reste muet, que je le garde pour moi, tandis qu’à partir du moment où je l’aurai fait sortir de moi rien qu’en l’exprimant, rien qu’en le disant sur un ton acceptable, je deviendrai de plus en plus équilibré, à l’aise, en possession de moi-même et de mes moyens. J’y serai parvenu par le moyen, le support, la pratique du groupe. Plus un problème ou un souci est difficile à dire, plus il serait nécessaire, utile de le dire. On se grandit, s’épanouit le jour où l’on peut enfin le dire, l’exprimer.

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Plus j’aurai la chance de vivre près d’une personne au sein d’un groupe, plus j’aurai, réciproquement et complémentairement de chances de lui «  apporter quelque chose  » en m’exprimant. Tout le problème est dans l’acquisition de cette compétence. Oui, il existe une véritable compétence de la relation inter-personnes. Leadership

On dit assez justement qu’il n’est pas de grand homme pour son valet. Si un employé ne me voit vivre qu’une heure par mois, il ne sera pas très difficile d’apparaître comme un grand seigneur à ses yeux. Si, en revanche, il me voit vivre et me côtoie dix heures par jour, le rapport sera différent ! La quotidienneté use nos rapports. Celui qui a une grande équipe à gérer, disons plusieurs dizaines de personnes, connaît-il chacun de ses employés personnellement ? Seul remède à ce genre de situation : la délégation, qui consiste à faire faire par d’autres ce que vous ne pouvez plus faire seul en vous trouvant des seconds valables, suffisamment compétents (autre aspect du problème de la compétence). Trans-formation

Ceci ouvre tout un chapitre, une problématique mal comprise parce que mal définie encore. À vous la tâche de former, de rendre compétents vos collaborateurs directs… jusqu’à ce qu’ils deviennent, si possible, plus forts que vous au lieu de passer votre vie à redouter qu’ils vous fassent de l’ombre. Il y a, en bonne délégation, bien assez d’occasions d’appliquer la psychologie ou le style du patron, pourvu que l’on installe une chaîne de relais suffisants. Le patron pourra pratiquer la politique de la porte ouverte –ouvrable ! – afin que le personnel n’ait pas peur d’entrer dans le bureau de son chef (que va-t-on penser de moi, mon problème n’est pas assez important pour que je le dérange, etc.). Dimension opérationnelle

De nombreuses recherches ont montré que le «  groupe idéal  » est de 7 à 12 personnes. Qu’en est-il pour un cabinet dentaire ? 2, 3, 4, 5, 7 ? Au-delà, garder le contact, la communication vraie, commence à devenir plus laborieux, à ne plus « passer » aussi bien. Il y a formation systématique de sous-groupes.

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Si au contraire le groupe n’est pas assez nombreux (4-5 personnes), d’autres problèmes surviennent en sens inverse : le groupe manque d’idées neuves, d’initiatives, d’apports différents, d’interaction, un manque d’invention qui nuira à son efficacité. À quatre personnes, par exemple, on peut jouer aux cartes… la codification d’un jeu est nécessaire et remplace en quelque sorte ce manque relatif d’apports. Un calcul simple

En simplifiant encore, il est permis de dire qu’entre deux personnes coexistent deux relations : « ce que je pense de toi, ce que tu penses de moi. » Entre trois personnes, disons a, b, c, coexistent 6 relations : de a vers b et c, de b vers a et c, et de c vers a et b. Faites un petit graphique, et vous verrez qu’entre quatre personnes coexistent en permanence 12 relations ; entre cinq personnes : 20 relations ; entre six personnes : 30 relations ; entre dix personnes : 90 relations ; entre douze personnes : 132 relations. Or que faut-il gérer ? Non pas le nombre de personnes, mais une simultanéité de relations, en tout instant et en tout lieu ! Que se passe-t-il par exemple si, au cours d’une réunion, l’un des membres arrive en retard, ou quitte le groupe avant la fin : c’est un « paquet » de relations qui s’ajoute ou qui se soustrait ! En fait, les membres sont comme les atomes de la molécule-groupe  : en ajouter, en soustraire ou même en déplacer modifie en profondeur la nature même, la « chimie interne » du groupe ! Ce qui nous fait répéter que le groupe humain est un organisme vivant ! Oser se parler

Un chef, un responsable, un dirigeant, un leader ne perd rien de son prestige, bien au contraire, en étant vraiment simple, en vivant sans masque, en parlant très ouvertement à ses employés, collègues, collaborateurs… Nous avons pu vérifier cela dans d’innombrables situations. La réponse, forte et évidente, a été chaque fois : plus que jamais. Une certaine vie affective en commun, créée par les expériences, les contacts habituels dans le travail, et confirmée par la compréhension dans la vie courante, renforce et cimente l’autorité.

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L’humour au quotidien, de bon aloi, la « juste distance », est aussi renforçateur. Ce que l’employé ne pardonne pas, c’est l’incompétence de la relation. Respect lapalissades

Blâmer en privé, mais féliciter en public, devant ses collègues, telle personne qui le mérite, est une bonne hygiène pour le groupe. Petites choses ? Vétilles ? Elles ont tellement de conséquences ! La «  centration attentive  » sur autrui, le respect voulu et cultivé en soi, cette gymnastique volontaire de l’affectif, sont la «  compétence du respect  », conséquence d’un respect sincère que l’on a décidé, choisi de vouer à quelques humains, pas n’importe lesquels, ceux qui partagent nos efforts, quotidiennement, à faire le même travail, à assurer le succès de nos missions. Iceberg psycho+logique

L’homme a souvent été comparé à un iceberg, dont on ne voit qu’une petite partie, dix pour cent paraît-il. Cette image rend très clair le fait que ce que nous voyons, ce qui est apparent, évident dans le comportement d’une personne, n’est qu’une très petite partie du tout, de tout ce que l’être humain est vraiment. Nous commettons souvent la grave erreur de croire et d’agir comme si l’humain qui nous est prêté en tant que collègue était logique, seulement logique. Il l’est en effet, mais il est aussi tellement plus, en même temps. Il est simultanément et surtout d’une autre logique, d’une logique différente et complémentaire, qui répond à d’autres lois, que l’on a appelé psycho-logiques. Il y a donc un comportement visible et un comportement moins visible, puis non visible. Invisible, incompréhensible ?

Ce non visible, moins visible est sans signification pour l’incompétent. Peu visible, le tréfonds du comportement humain, cela veut-il dire inexistant, sans importance, mensonger ou idiot ?

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Être incompétent – humainement parlant – c’est précisément avoir pris l’habitude, la routine ou la facilité, de ne pas vouloir voir ce « moins visible », moins patent, moins rationnel, moins évident. C’est refuser d’y consacrer un peu de temps et de réflexion. C’est une gestion mécaniste et un peu facile des êtres que nous côtoyons … Avec une compétence humaine grandissante, ou qui cherche à se développer, nous pourrions apprendre à lire… un peu mieux, ce qui gît à une certaine profondeur dans la partie immergée de l’iceberg. Chez autrui… et en nous-mêmes. Le niveau visible, qui émerge, le conscient (ce que nous faisons en le sachant) est soutenu, enrichi par le préconscient, le subconscient et l’inconscient. C’est ici que résident les sources de stress… tout comme leurs préventions ou améliorations. Le niveau conscient (hors de l’eau) est verbal, verbalisable  : les choses ici peuvent se dire et s’écrire. Être raisonnées. C’est le domaine du cerveau, où siègent les sciences dites exactes. Le non-verbal est beaucoup plus important et plus signifiant  : le sens des silences non voulus, des hésitations, etc. dans le contact entre deux ou plusieurs personnes. Par exemple, lors des soins aux patients, les regards, le contact physique avec le patient, jouent un rôle important ; l’odorat joue aussi un rôle (parfum, alcool…), qui nous donne une sensation grâce à laquelle on évalue la personne en face de nous. L’ÉQUIPE DU CABINET DENTAIRE EST UN TOUT PSYCHOSOCIOLOGIQUE VIVANT QUI PERMET « HARMONIE ET EFFICACITÉ »

Pourquoi et pour quoi la formation et l’autoformation permanentes ? Tenons compte de ce que disait Carl Rogers : « Toute entreprise humaine devrait avoir le développement de la personne, pour objectif supérieur. » Un plaidoyer de plus en faveur de la formation, est-ce bien nécessaire ?

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Sans doute le chef d’entreprise (petite, moyenne, grande) n’en est-il plus là… mais déjà las d’un concept que notre société commence à rabâcher… Alors, quoi de neuf ? Tout !

On passe vite, à notre époque, de l’inconnu au méconnu. C’est le cas de tant de notions qui ne sont déjà plus neuves : marketing, informatique, merchandising et autre bureautique. Oseriez-vous demander à vos voisins quelle est leur définition personnelle de chacun de ces termes  ? Houleuse soirée en perspective ! Mais la formation, direz-vous, est bien vieille comme le monde ? Ou comme le monde industriel ? Ou comme le monde post-industriel ? Il n’est pas bien loin, le temps où l’on considérait que l’étudiant sortant des grandes écoles en avait pour longtemps avant de voir se démoder les notions consignées lors de son cursus. Aujourd’hui, la formation d’un anesthésiste est démodée en moins d’un an… C’est un peu comme le vol d’un oiseau, on sait quand il prend son envol, mais on ne sait pas quand il va s’arrêter de voler (Fig. 18). Mais nos techniciens, porteurs de tant de nos certitudes  ? Combien mériteraient encore, sur leur place de travail, les mentions honorables figurant sur leur certificat. Fermons prudemment les yeux, ou ouvrons-les au contraire  ? La chimie, l’électricité, la physique subatomique, le courant faible, etc., autant de branches dont le volume de connaissances a plus que doublé, en moins de dix ans ! Tout diplôme devrait, comme les boîtes de yaourts, porter une date de fraîcheur !

Fig. 18 Le mystère de l’oiseau qui s’envole

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Ce que l’on nomme le progrès, du moins le progrès scientifique et technique, semble bien évoluer à la vitesse d’une boule de billard sur un plan incliné : de plus en plus vite. Des quantités de progrès constamment augmentées en des temps égaux. Ou si vous préférez : des quantités de progrès constants, énormes en des temps de plus en plus courts. Jusqu’à quand ? Stress ou adaptation ?

Jusqu’au vertige, mais cela n’apporte pas de solution. Le pessimisme de style « fichue époque » non plus. Ni même le romantisme, ni l’enthousiasme béat, ni les belles phrases à propos de notre époque fabuleuse. Alors, s’adapter ? C’est justement de cela qu’il est question. De la formation, adaptation indispensable. Quand, où, qui, comment, malgré quoi et contre qui ? Par où commencer ? Et où tout ceci risque-t-il de nous mener ? Voilà bien quelques questions très concrètes qui demandent une réponse urgente. Ou plutôt : réponses et réflexion. Et peut-être remise en cause, remise en question du bien-fondé de nos attitudes passées. Déjà dépassées. Et les services ?

J’en vois qui ne se sentent pas concernés par tout ceci. Qui sont-ils ? Ce sont ceux qui s’épanouissent bien au chaud, près du poêle douillet de leurs fausses Certitudes ? Ce sont ceux qui croient, qui sont persuadés, convaincus, mais là tout-à fait sûrs que dans leur secteur à eux, rien n’a changé, rien ne change, rien ne changera. Ceux qui représentent, justement, la plus ancienne activité qui soit au monde : les commerçants. Les commerçants, les activités de contact humain. La vente et l’achat, le rapport avec le public, la relation publique. La banque, les services. Notre époque n’est-elle pas celle des sacro-saints services ? Voilà au moins, me direz-vous, qui ne saurait changer, évoluer, se modifier ? Une erreur très répandue…

L’être humain, lui au moins, est toujours resté pareil à lui-même  ? On ne vend, on n’achète, on ne commerce pas autrement aujourd’hui qu’hier ? Les rapports humains sont bien, à la base, ce qu’il y a de plus sûr, de plus stable,

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de plus inchangé, inchangeable depuis toujours. Et l’on compte bien que rien n’y fera. Erreur grave, magistrale  ! Formidable erreur, dangereuse erreur, parce que bien répandue. Il ne suffit pas qu’une erreur soit très répandue pour qu’elle devienne vérité. Même si certains ont parfois intérêt à la faire passer pour telle. L’humain change, et vite. Sous vos yeux, et vous ne le voyez pas. Figurezvous que la psychologie a fait d’importantes découvertes au cours des dix, quinze dernières années ! Découvertes, vous avez dit découvertes ? Cela veut-il dire que l’on a, vraiment, trouvé du nouveau  ? Des choses que l’on ignorait auparavant  ? Et qui seraient utiles  ? Utilisables par nous, chefs d’entreprises  ? Parfaitement, mais procédons avec rigueur et méthode. La logique du doute…

Savez-vous, incidemment, qui a dit que « le doute est la plus haute expression de l’esprit humain » ? Ce n’est pas bien nouveau, cela date d’un certain Descartes. Ne dites pas : tiens on l’avait oublié, mais plutôt : pourquoi a-t’on oublié cet aspect-là de son enseignement ? Alors, cadres, responsables, dirigeants, chefs d’entreprises, offrons-nous un peu de doute, un peu de la logique du doute, apprenons à douter volontairement, en connaissant les règles de ce jeu-là, qui s’appelle l’esprit de recherche. Il inclut des angoisses, des techniques de créativité, des expressions du cerveau droit (on n’en parlait pas encore, il y a dix ans !). Formation : quels chapitres ?

Nous venons de voir l’urgence absolue de s’adapter à un monde qui court trop vite, dont la seule permanence est ce changement continuellement accéléré. Ni se plaindre, ni se stresser, mais s’a-dap-ter. Comment, et sur quels plans ? Nous en connaissons trois, dont les méthodes sont différentes : 1.»SAVOIR».

C’est un processus d’augmentation des connaissances. On s’adresse à la tête, au cerveau des gens, qui doivent, de nos jours, ingurgiter ou déglutir de plus en plus de matières données, scientifiques, théories diverses qui évoluent ou changent sans cesse. C’est l’aspect le plus évident de la formation, encore que… Nous restons souvent victimes d’une habitude d’un passé où la fin des études correspondait à la fin de la scolarité. La courbe des choses apprises (sur ce plan

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théorique) s’arrêtait net, souvent vers les vingt ans… le reste des acquisitions se faisant exclusivement sur le terrain. Cette attitude ne peut déjà plus survivre : même les lois changent, comme les méthodes financières, comptables, sans parler du formidable effort d’étude demandé à quiconque veut tenir la tête hors de l’eau pour être un simple utilisateur de l’informatique. Cette accélération ne s’arrêtera pas, elle fait partie du sens de rotation de la planète ! Nous deviendrons des étudiants permanents. L’Université aura-t-elle le courage de dire ouvertement, que son enseignement ne peut plus désormais être considéré comme définitif, suffisant pour la vie, mais seulement comme une entrée en matière dans la vie professionnelle, à réviser constamment, sous peine d’obsolescence. Qui peut procurer cet enseignement ? L’entreprise en est-elle responsable ? À vérifier dans chaque situation, sans doute, mais l’entreprise aura, la plupart du temps, un intérêt évident à favoriser l’étude, à stimuler par des bibliothèques et vidéothèques, des programmes Internet, des abonnements… l’autoformation, sur place ou à distance. Motivation Il nous semble que c’est relativement peu coûteux, que cela revient à considérer les gens comme adultes, de mettre à leur disposition des lieux, des moyens et des temps pour une étude individuelle. Car, à l’encontre de ce que prônent encore bien des formateurs sous l’effet de mode (de la mode du groupe notamment), le moyen le plus efficace que l’on ait trouvé pour étudier, c’est de s’isoler, de se confronter en un tête-à-tête, ou tête-à-livre, ou tête-à-ordinateur avec la matière à apprendre. Et cela, rien ni personne ne peut le faire à la place de la personne qui veut apprendre. Il est surprenant de voir que, la plupart des centres de formation d’organismes très importants, disposant de moyens imposants, ont fait peu de choses pour organiser, encourager, contrôler ladite autoformation, pour l’étude individuelle de leur personnel, aux techniques nouvelles. Culture para-professionnelle Dans toutes les professions, un grand nombre de livres paraissent chaque année, qui signalent les tendances de notre société face à l’économie, la sociologie, le rapprochement de sciences voisines, concernées par la profession. Qui lit ces livres, hormis les universitaires ou intellectuels, qui sont moins directement

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touchés par ces phénomènes, que les cadres, les dirigeants, les responsables de nos grandes, moyennes, petites entreprises ? Le temps manque, direz-vous, à nos directeurs et cadres supérieurs, de lire les Fritjoff Capra, Alwin Tofler, Carl Rogers, Crozier, Chalvin, Naisbitt et Aburdene… Que font-ils, les patrons, que peuvent-ils bien faire, au milieu de leur activité parfois étonnante, pour tenir à jour leurs connaissances humanistes, cette culture qui qualifiait autrefois l’honnête homme ? Nous avons eu parfois quelques déceptions. Peut-être n’est-il pas nécessaire d’aller toutefois jusqu’au sarcasme comme Henri Hartung qui a écrit dans « Ces Princes du Management » que le drame, ce n’était pas que le manager ne soit pas un philosophe, mais que le manager d’aujourd’hui ne savait même plus ce qu’était la philosophie. Sans aller aussi loin, nous dirions que l’entreprise, responsable des hommes qu’elle embarque à son bord, pourrait se sentir plus responsable de leur culture voisine du professionnel, ou para-professionnelle. Ne serait-ce pas le rôle de la fonction de formation, dans une entreprise, que de proposer, répartir les lectures, de faire et distribuer des synthèses, d’en discuter en réunions. Au lieu de parler seulement du travail lui-même dans nos réunions, ou de sujets (football, politique) qui en sont carrément éloignés. L’entreprise, votre entreprise, au-delà de l’exécution aussi parfaite que possible, de ses missions et de ses tâches, ne pourrait-elle se sentir responsable de la culture moderne de son personnel, pas seulement de ses cadres ? Dans la poursuite de nos buts et objectifs, ne pourrait-on inscrire le développement de la personne, de toute personne à bord, comme finalité supérieure ? La mise en place d’une telle politique humaniste du personnel serait motivante et demande une vraie compétence. 2. « SAVOIR-FAIRE ».

Histoire vraie : lors d’une réunion annuelle importante, dans un organisme international, les délégués nationaux demandaient certaines modifications ou améliorations des procédures administratives en vigueur. Leur directeur-«  réseau  », présent, leur assura qu’un de ses collègues, d’un autre département, s’en préoccupait déjà depuis longtemps, et que l’on mettait la dernière main à ces améliorations. Branle-bas dans l’assemblée d’une centaine de personnes – dites-nous tout de suite, sur-le-champ, avant que nous repartions à l’étranger, les grands axes que la direction nous prépare ! Nous voulons savoir ! etc. Le moment est délicat. Il faut informer, vite et bien.

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Je suis assis dans la même salle, juste derrière le directeur gestionnaire de l’étude du nouveau système. À ses côtés, l’un de ses adjoints, qui avait conduit tous les travaux, depuis deux ans… Un dialogue rapide entre eux deux : – Communiquez-leur, là tout de suite, succinctement, l’essentiel de vos démarches ! –  Monsieur, je n’ose pas, je ne suis pas prêt, je n’ai pas mes dossiers, je ne m’attendais pas… –  Ça ne fait rien, allez-y quand même, il faut les informer à grands traits, puisqu’ils le demandent, pendant qu’ils sont tous présents. –  Mais, mais… je ne suis pas préparé… –  Allez-y, vous dis-je, prenez la parole. Cent personnes, environ, attendent. Je vois alors se lever ce jeune cadre que je connais, universitaire brillant et collaborateur dévoué. Les genoux s’entrechoquant d’émotion, la voix cassée et la main tremblant sur la vitre du rétroprojecteur, je le vois détruire et presque ridiculiser un travail de deux années. Sa présentation est tellement lamentable que tous les délégués présents sont rapidement convaincus que le projet ne vaut vraiment pas grand-chose. Sans parler de la propre réputation du pauvre présentateur improvisé, discrédité pour longtemps. Personne n’était satisfait. Que faut-il retenir de cet incident  ? Que tout le monde ne peut pas improviser, d’accord. Mais la qualité du « geste » professionnel, à qui incombe-t-elle ? Mais évidemment au directeur gestionnaire qui n’a pas su saisir cette occasion. Une assemblée, même de cent personnes, reconnaît et mérite aussi cette compétence-là ! Gérer nos gestes professionnels Savoir-faire  : diriger une réunion, mener son écoute lors d’un entretien, pratiquer un recrutement, féliciter publiquement, ou faire une réprimande, négocier sans conflit, décider, déléguer, etc. sont autant de ces gestes professionnels, de situations psychologiques ou psychosociologiques que le cadre moderne doit intégrer et pratiquer. Posons cette simple question : combien de cadres, à tout niveau dans une entreprise, dirigent par messes basses, convoquant presque secrètement, une personne à la fois dans leur bureau, dans une ambiance feutrée où il y a plus d’opacité que de transparence, uniquement parce qu’ils craignent d’animer une réunion, tremblent

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à la seule pensée de devoir agir publiquement ! Qui dira le tort, les dommages causés au « management » par notre sacro-sainte pudeur romande ! Il est vrai que l’on fait habituellement mal, ce que l’on pratique peu. Il est vrai que l’on prend vite mauvaise conscience, lorsque l’on se sait mal à l’aise dans tel ou tel geste du management. Le mot « management » vient du vieux français « aménagement », bien avant que les Anglo-Saxons se l’approprient et le rendent récemment à la langue française. Nous soulignons ce niveau importantissime qui demande une formation constante, pour se voir évoluer : le niveau de nos gestes et de nos attitudes, de nos réflexes quotidiens, de nos essais et habitudes, tellement ancrés. Il s’agit, ni plus ni moins, de nos systèmes psycho-sensori-moteurs, de nos sens physiques, qui méritent, par une vraie hygiène de vie, d’être constamment affinés, sous peine de céder au conditionnement. C’est par «  compagnonnage  », face à face, en osant se parler, en transmettant pratique et expérience de la résolution des problèmes, que les choses s’apprennent, par monitorat, recours délibéré à un formateur-tuteur. C’est une formation nécessaire, mais non suffisante – pas plus que celle du seul savoir, mais il faut viser constamment à plus d’habileté, de virtuosité, d’expertise… tant il est vrai que le musicien, le cuisinier, l’artisan, l’homme de métier, se reconnaissent à la sûreté de leurs gestes, gages de sécurité et de confiance. Il n’existe, dit-on au Japon, que quatre catégories de cadres : –– les compétents, conscients de l’être : ils devraient pouvoir reproduire en tous temps, les conditions de la réussite ; –– les compétents inconscients : peut-être la race la plus dangereuse, car ils ne transmettent pas, et les conditions de leur réussite ne sont pas garanties, elles restent aléatoires ; –– les incompétents conscients : catégorie intéressante, pour peu qu’ils aient la modestie d’apprendre ; –– les incompétents inconscients que, sans doute, vous n’engagerez jamais  ! Sinon, une remise en question s’imposerait, d’urgence ! Cette plaisanterie nippone n’est sans doute pas innocente. Laissons-la pour aborder la phase essentielle de toute formation, soit son aspect humain : 3. « SAVOIR-ÊTRE »

Combien d’heures de notre vie avons-nous consacrées à apprendre nos techniques, nos spécialités professionnelles  ? Et combien d’heures consacrées

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à comprendre l’homme ? Cet humain qui est en nous et autour de nous. Cet humain, homme ou femme sans qui pourtant, aucune réalisation, même professionnelle, ne pourrait se faire. Dites-moi pourquoi, à qualités professionnelles égales, intelligence et capacités égales, deux ingénieurs, ou deux cadres, ou managers, … une fois placés dans la situation de conduire une équipe, obtiendront en tous cas des résultats différents ? L’un y sera tendu, crispé et sèmera l’insatisfaction avec, pour conséquence, l’inefficacité. L’autre y sera à l’aise et sera volontiers « suivi » et entouré par une équipe. Une compétence à l’humain Vouloir s’améliorer ou non, c’est la seule question. La réussite, en ce domaine des relations dites humaines, paraît toujours, sur le terrain, extrêmement simple, comme allant de soi. Or il s’agit, ici aussi, ici surtout, de compétence, d’une compétence au contact humain. Il n’y a pas de magie, tout s’apprend ou du moins, se développe. Nous croyons peu au chef charismatique de naissance ; l’éducation, quand elle a été bien équilibrée (ce qui est parfois le cas, tout de même !) porte souvent ses fruits. Mais il n’y a pas d’école de management. Il n’y a pas d’enseignement de l’autorité, de la relation, du contact à commencer, comme le disait Denis de Rougemont (L’avenir est notre affaire), par le contact, la qualité du contact avec soi-même, de la relation avec soi-même, et de l’autorité que l’on exerce sur soi-même, seules forces capables d’équilibrer, et de légitimer l’autorité que l’on peut être amené à exercer sur autrui. N’estce pas un peu la même chose avec notre contact avec la nature ? (Fig. 19).

Fig. 19  Quel contact avons-nous avec cette belle nature ?

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Promu à un poste de cadre À n’importe quel niveau et quel que soit son âge, le jeune espoir en est réduit à… rêver, à imaginer, par différences, ce que sera son style propre, par rapport aux expériences de sa vie, de sa jeunesse. Il y rencontrera évidemment les modèles parentaux, scolaires, militaires, et professionnels, de ses anciens chefs. C’est souvent pour avoir subi plus ou moins douloureusement l’autorité d’autrui, que nous avons, sur mesures, confectionné notre propre manière. Souvent sur le mode du jamais plus ! Il est vrai que l’humanité, finalement, cahincaha, progresse. Mais on pourrait bien, tout de même, nous donner un coup de main, pour gagner un peu de temps, et de clarté dans nos comportements. Citons ici Carl Rogers, qui a révolutionné la psychologie appliquée et remis les pendules à l’heure : « Je déplore amèrement que les connaissances que nous avons acquises, soient si peu reconnues et si peu utilisées… Nous possédons déjà les connaissances qui, mises en application, utilisées préventivement, pourraient aider au développement de personnes mûres, non défensives, et compréhensives… Si je réussis à faire comprendre à un nombre important de gens les ressources déjà disponibles dans le domaine des relations humaines, je me considèrerai alors comme hautement récompensé. » (Le Développement de la Personne). Nous souscrivons pleinement, le cœur plein d’espoir, à ce constat. Pourquoi l’entreprise ne deviendrait-elle pas le lieu d’un humanisme moderne, authentique, vrai, sans marchandage inutile ? Il faut deux pans pour faire un toit, habituellement. Nous sommes de ceux qui prétendent que le collaborateur heureux ne travaille pas moins, ni moins bien que le patron, qui n’a pas forcément des intérêts contraires à ceux de son personnel. Il sera bientôt temps de faire entrer ces conceptions dans la pratique quotidienne, certaines entreprises aujourd’hui ont démontré que c’est tout à fait possible. Les meilleurs femmes et hommes iront aux meilleures entreprises, cela paraît inéluctable dans une libre économie. Les artifices, les délocalisations, la mondialisation n’y changeront rien. Seule une formation généreuse et désintéressée sera, finalement, payante. Toutes autres manœuvres sont de court terme. La formation qui inclut un développement humain véritable, vise le long terme. Les demi-mesures ne valent rien : une voiture ne peut rouler en faisant l’économie d’une roue. Motivation-motricité Pourquoi ? Car il s’agit de motivation. Il s’agit de procurer un moteur, une motricité aux femmes et aux hommes qui habitent nos entreprises. Ils en sont le

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seul élément capable de dynamique, et rien ne se construit sans enthousiasme. Et la faculté d’enthousiasme est un secret humain, exclusivement et positivement humain. L’homme de valeur sera l’atout-cœur, dans l’entreprise de demain. Notre époque a maîtrisé les mécanismes techniques. Le produit et son avenir n’ont plus de secrets pour nos spécialistes. Les techniques de la finance, sauf crises ou incidents, sont bien dans les mains de nos managers. Peu de surprises. L’élément humain, lui au moins, est et semble rester la pochette surprise de nos entreprises. Ce qui le motive sera l’objet de notre recherche soigneuse. Le Professeur Cuendet, de l’Université de Genève a pu publier une plaquette intitulée L’absence de motivation au travail. Ce mot absence (pas ailleurs, mais ici en Suisse) nous fait penser que le prochain génie sera celui qui précisément, saura motiver la personne au travail. Or, comme la motivation reste une chose très individuelle, malgré les théories. Apprenons à comprendre l’individu, la personne humaine qui nous confie, au travail, à peu près 50 % de sa vie consciente. Reconnaissons qu’un apprenti de dix-sept ans, ne se traite plus aujourd’hui comme on nous traitait à son âge. Ce qui le motive est souvent sujet d’ignorance ou d’étonnement pour son chef direct… Apprenons l’apprenti. Se pourrait-il que l’objectif de l’entreprise devienne à la fois économique et humain, de façon complémentaire ? Qui peut s’acquitter de cette double mission ? Pour qui ? Certains ont mission de négocier. Ce sont les vendeurs, guichetiers, téléphonistes, … toutes les personnes qui sont au contact plus ou moins constant du public, de clients. Et qui en éprouvent sans nul doute une fatigue, une sorte d’usure, en fin de journée  : l’usure de la friction avec nos semblables. Ces chargé(e)s d’accueil, agents technico-commerciaux, ou de relations publiques, sont les responsables de la négociation. Leur formation aura l’indispensable effet, en supplément, de leur recharger les batteries. Dans l’espace de toute entreprise, coexistent forcément (c’est-à-dire  : sans choix réciproque) deux autres catégories de personnes  : les chefs et les nonchefs. Ceux qui sont responsables de leur propre comportement, des résultats, des performances, etc. et ceux que nous nommons hommes responsables d’autres hommes. Qu’ils soient contremaîtres, directeurs, responsables, éducateurs, chefs de services ou de département, formateurs, parents. C’est à leur qualité de contact que nous nous adresserons.

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Qualité du contact avec soi avant le contact avec l’autre ; qualité de l’écoute avant qualité de la parole ; qualité des chefs, avant qualité des exécutants (un participant de séminaire me disait qu’un escalier se nettoie en commençant par les marches les plus hautes !). Il s’agit donc bien d’une formation-développement de la sensibilité, de la mentalité, non d’intellectualisme : évoluer de la mentalité « s’attacher au règlement » vers « créer, produire ensemble, et résoudre les problèmes ». Le droit d’être soi-même La proposition est de découvrir un style d’autorité personnel, harmonisé, pour découvrir les objectifs parfois contradictoires de ses collaborateurs. Connaître, pour se les refuser si nécessaire, les comportements abusifs du pouvoir, la délégation d’autorité, les relations-communications-informations dans l’entreprise, les lois de la prise de décision. L’éducation n’est-elle pas le prix de la continuité de la direction ? La négociation n’est possible qu’entre partenaires éduqués, adultes l’un comme l’autre. Les jeunes cadres se demandent souvent si leur autorité est encore légitime. Si le collaborateur bien formé, bien informé, ayant reçu délégation, ne risque pas finalement de les dépasser, ou tout au moins de leur faire de l’ombre ! Il faut répondre, consolider cela, vouloir être transparent. Il faut préférer l’action à long terme, planifiée, permanente, aux séances isolées, insatisfaisantes parce qu’insuffisantes. Organiser les groupes en formation-développement, de telle façon que les personnes se connaissent de mieux en mieux, installant graduellement une complicité de langage, d’humour, d’esprit d’entreprise. Préférer un langage adapté, sans excès de jargon psychologisant. Changer la personne ? Notre but sera d’aider à changer, de procurer à la personne les moyens de déclencher son libre, son propre changement. Tout (le monde) change autour de nous, en permanence. La vie elle-même n’est possible, biologiquement, qu’au prix d’un changement permanent fait, en alternance : –– de changements en continu : évolution, progression, –– de changements en discontinu : mutation, brusques changements d’état.

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Il en va de même de la possibilité de croissance de tout «  organisme  », de toute organisation, milieu ou entreprise. Cet objectif de changement fonde les démarches de la formation (technique, scientifique, intellectuelle, professionnelle) et du développement humain (sensibilisant, émotionnant, psychologique). Il va au-delà de la seule acquisition de connaissances théoriques ou de gestes et réflexes, même bien conditionnés. Il n’est de changement vrai qui ne vienne de la personne, « du dedans », du plus profond de son être, de sa mentalité. Toute autre démarche sera forcée, inefficace. L’être humain seul a le droit de se changer, de se développer luimême, par décision intérieure. Il y faut une suffisante modestie : se connaître et s’accepter tel que l’on est, tel que souvent les autres nous jugent, nous connaissent, et non tel que l’on s’imagine être. Alors s’atténuera l’habituelle résistance au changement provoquée essentiellement par nos blocages affectifs, non rationnels. Rien, ni personne ne changera autour de moi, si je ne change pas… d’abord ! Laissons sur ce chapitre le dernier mot à ce petit prince qui assurait que l’essentiel est invisible pour les yeux : « La grandeur d’un métier n’est-ce pas avant tout d’unir des hommes ? Il n’est qu’un luxe véritable. Et c’est celui des relations humaines. »

Maintenant, au « jour du oui »

Merveilleuse expression, jeu de la langue française. Oui, le présent est vraiment un cadeau ! Oui, il est ta seule fortune. Oui, tu le tiens en mains, tu le tiens vraiment en ton esprit. Or, la plupart des gens pensent au passé ou au futur : Au passé : hier, j’aurais dû…, mes études incomplètes…, la répartie ratée…, la trahison, la facture encore impayée…, j’ai pas eu de chance : culpabilisations diverses, regrets… Au futur : mon agenda trop rempli, ou pas assez… l’échéance qui approche, la rencontre que tu redoutes, l’entretien prévu, le travail non terminé…, jamais je n’y parviendrai…, inquiétudes, angoisses, peurs. Et procrastinations. Remarque : la personne qui se complaît dans le passé, souvent appréhende aussi le futur : prérationalisation. Autre remarque : la personne qui « rêve » ses lendemains, reconstruit aussi artificiellement son passé : post-rationalisation.

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Pré et post-rationalisation peuvent devenir maladives, excès de l’imaginaire qui « rongent » véritablement le mental, sources fréquentes du stress ! Exemple : un homme de 40 ans racontait en toute sincérité  : «  J’ai peur de toutes les blondes, car j’ai trop souffert à cause d’une blonde !» Authentique. Apprends à ton cerveau à ne gérer qu’une seule idée à la fois, et au présent ! Cesse donc de penser à ton travail pendant que tu me lis ! Ce cerveau qui est le tien a pris la déplorable habitude de traiter (mal) 11, 26 ou 158 notions et réflexions à la fois, en broussaille, en désordre. C’est terriblement anxiogène, et avec effet retour : plus tu penses vite, plus tu deviens inquiet ; plus tu t’inquiètes, plus tu penses vite, quelle pagaille ! Apprends à ton cerveau à gérer une seule idée à la fois. Comment ? En te concentrant sur le PRÉSENT, uniquement. Il ne faut pas faire taire ton imaginaire, mais le domestiquer, comme un bon cavalier compétent, qui aime et comprend et conduit son magnifique étalon, pour un bonheur mutuel. AMOUR (de soi, en soi), PATIENCE, CONSTANCE… ENTRAÎNEMENT CE QUE JE NOUS SOUHAITE DÈS À PRÉSENT : LE PASSÉ NE CHANGERA PLUS, LE FUTUR SERA CE QU’IL SERA ET MOI, JE SERAI À LA HAUTEUR TOUT N’EST QU’ENTRAÎNEMENT, L’AUTODISCIPLINE EST LA LIBERTÉ

Ce qui compte

Ce qui compte c’est d’être vraiment humain et simple, ce qui compte c’est d’être vrai, et alors vient l’humanité et la simplicité. Alors, je suis comblé avant d’avoir désiré, l’éternité est là telle que je l’espérais. Ce n’est plus être heureux que je souhaite maintenant, seulement être conscient. 1. L’amour humain n’est pas forcément réciproque. L’amitié au contraire, requiert de la réciprocité. Je ne puis être l’ami de quelqu’un qui n’est pas mon ami. 2. De mon ami, j’attends qu’il partage l’image que je me fais de moi-même, dans une mesure raisonnable. 3. L’amour peut être sublime et misérable, héroïque et stupide. Rarement juste. Ce n’est pas l’amour qui relève du registre de la justice, c’est l’amitié.

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4. Une rencontre est un moment de bonheur intense, un moment de vie où nous comprenons mieux le monde et nous-même, où nous percevons que l’autre nous aide à suivre la juste voie. 5. Rien, cependant, n’est plus éloigné de l’amitié que le rapport maître-élève. L’ami n’est pas un gourou qui possède la vérité, comme l’enseignant ; sa révélation n’est pas un enseignement, comme celle de l’enseignant ; mais c’est une démarche qui permet de parvenir à la même conclusion en partant de points de vue différents, c’est une convergence dans la vérité. Réflexions sur le doute

Le doute est une condition du mental, parfois très subtile et déroutante : «  Celui qui sait  » sait que le doute est un doute  ! Important ou banal, le doute est doute, rien de plus. « Dois-je rester ici ou aller ailleurs ? » Le doute n’est ni erreur, ni faute. C’est une occasion de choix, de progrès possible. Or souvent, « j’ignore ou je prétends ignorer que je ne sais pas ». Mais, nous pouvons savoir, apprécier et identifier qu’il y a doute, c’est alors une porte qui s’ouvre. Le premier pas sur le chemin de la connaissance, c’est de savoir que nous ne savons pas. Si nous ignorons quelque chose, mais sommes conscients du fait que nous ne savons pas, ce genre de conscience devient connaissance ! L’HOMO SAPIENS SAPIENS EST UN ÊTRE CONSCIENT D’ÊTRE CONSCIENT

14 obstacles de la communication à 2 personnes

(À bien comprendre pour favoriser une communication plus efficace) Ces 14 obstacles ne sont pas tous, ni toujours présents dans toute communication… mais un seul d’entre eux peut la ruiner complètement !   1 : CHAMP DE CONSCIENCE : émettre « en le sachant », en étant attentif, en étant « présent à soi-même », autrement cela devient une barrière,   2 : MILIEU : familial, social, religieux, économique, culturel, politique, professionnel, etc. qui conditionne immanquablement nos émissions,   3 : FAISCEAU DES INTENTIONS (attitude envers le récepteur)  : direction, degré d’ouverture,

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  4 : BARRIÈRE DE L’EXPRESSION : verbale et non verbale : une mauvaise adaptation de nos «  moyens personnels  » au moment de communiquer, jusqu’ici ce sont les responsabilités de l’émetteur   5 : CHOIX DES MOYENS : canal, media choisi pour la communication,   6 : LIMITES propres au canal choisi : fading, bruits, brouillage, turbulences, aspect technique, souvent choisi par l’émetteur  7 : BARRIÈRE DE LA COMPRÉHENSION LOGIQUE  : exemple  : le récepteur comprend-il les termes employés ?   8 : HALO : amplification, exagération de l’information, rumeurs, etc.,   9 : CENSURE : soustraction, omission, oubli d’une partie du message reçu, 10 : FAISCEAU DES INTÉRETS  : degré d’ouverture, et bonne direction (voir 3), 11 : MILIEU : du récepteur (voir 2), 12 : CHAMP DE CONSCIENCE du récepteur (voir 1 : en réciproque), 13 : ACTION  : passage à l’acte, catharsis (délivrance), transformation d’un concept en mouvement, 14 : RÉSULTAT : capacité individuelle à la réalisation 10 à 14 sont les responsabilités du récepteur N.B : les étapes ou obstacles 13 et 14 sont statistiquement reconnus pour être les plus fréquents et les plus dommageables pour l’efficacité de la communication. FEEDBACK ou QUITTANCE  : retour de l’information à son émetteur (non pas : « est-ce que », mais « qu’est-ce que » … vous avez compris ? Démarche indispensable, mais « fréquemment censurée, par manque de courage ! »(selon C.R. Rogers). Être « anti-stress » est-il utile ?

Ici, nous tentons de donner quelques aspects de « vie libre », jamais « anti » rien du tout, pour ramener la pensée au présent, ce cadeau ! Laisse se faire jour ces forces formidables. Ne résiste plus au courant spontané et souple de tes sentiments. Mais, si tu parviens à organiser de façon systématique, très soigneusement, une sorte de « plan de non-travail », deux fois 10 minutes par jour, tu noteras des progrès certains.

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Si tu es fâché contre quelqu’un, cela indique simplement ta propre impuissance à te réaliser. Laisse s’envoler ton agressivité naturelle, mais confronte-toi à la cause de cette agressivité. Un lieu calme, sans dérangement. Tu n’as besoin d’aucun matériel, d’aucun « gourou » : c’est simple, gratuit, et tu es le « maître chez toi », parfaitement compétent pour « prévenir ou guérir » les effets de ton stress. Parles-en avec tes proches, libère calmement ce qui était refoulé avec entêtement. Sois ouvert à ta sagesse intérieure, sens l’autorité en toi. Deviens systématiquement positif : chaque fois que surgit une pensée négative, remplace-la par un message dynamique, calme, qui ne comporte que des mots, des tournures de phrases uniquement positifs  : c’est une discipline très précise. Tu peux prendre la direction de ta vie. Reconnais et écoute les forces de ton intuition, vis librement, sans angoisse. Repos et mouvement, méditation et recréation, «  dialogue avec tes cellules » : ton subconscient est ton meilleur ami, le plus bienveillant, avec qui tu t’éveilles chaque matin ! Parle-lui, réveille-le aimablement ! Transforme tes énergies accumulées en action et en créativité ! Prends la liberté de jouir des belles choses, ne sois plus si dur envers toi-même. Ces instants de détente-méditation quotidiens deviendront les meilleurs moments de tes journées ! PATIENCE – PERSÉVÉRANCE – SÉRÉNITÉ

Nature du stress Nous aborderons ce chapitre par un exercice sur les quatre sentiments de base chez l’être vivant avec toutes leurs variantes et combinaisons pouvant nous mettre dans une situation de stress. Ensuite, nous passerons en revue les différents points de vue sur le stress, ses causes et ses conséquences, parfois fort invalidantes (Fig. 20).

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4 sentiments de base chez l’être vivant, toutes leurs variantes, dérivés, combinaisons, synonymes

JOIE C O L È R E

P E U R

TRISTESSE Fig. 20  La croix des 4 sentiments de base

Vous pouvez faire un petit exercice avec cette croix : écrivez tous les synonymes de ces quatre sentiments de base que vous trouverez, puis tous leurs dérivés et leurs variantes. Enfin, créer des combinaisons de ces quatre sentiments de base. Vous trouverez alors de nombreux noms communs qui peuvent vous créer un stress plus ou moins fort. Exemples. C  olère-courroux-fureur-fulminer, s’emporter-colérique-irritable Peur-angoisse-terreur-frayeur-panique-craindre-redouter-angoissé Vous pouvez ainsi voir les liens entre la peur et la colère, etc. Il y a donc une variété de sentiments qui peuvent engendrer le stress et celuici peut aussi faire naître d’autres sentiments… Stress, qu’est-ce ?

(Répétez cela plusieurs fois très vite, pour voir si cela vous énerve !) «  Mon  » stress est unique  ; ce qui m’énerve, m’agace ou me déprime, n’a pas forcément le même effet sur les autres.

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CAUSES

Mais « avant » le stress, en nous et autour de nous, surgissent inévitablement des causes préalables de natures multiples, ces causes sont internes (ex : manque de confiance en soi, mon «  terrain  »…) et/ou externes (ex  : trafic routier, conditions de travail…) souvent liées à la vie moderne, occidentale, trépidante, au rythme des modes et des médias. En faire la liste exhaustive est illusoire ; le vrai problème est de s’adapter. Ce qui signifie que les causes sont toujours plurielles, mais c’est souvent « la cause en trop », le + 1, qui fait éclater le problème, qui fait ressentir alors qu’il y a un véritable problème de stress. STRESS

Il est désigné aussi comme « défaut de réponse adaptée » : nous sur ou sous réagissons aux causes (événements) de façon inefficace vis-à-vis de notre propre santé, de nos relations, des résultats attendus, donc de la qualité de vie que nous espérons. Ainsi surgissent alors des CONSÉQUENCES

Non voulues, qui vont faire boule de neige, s’amplifier jusqu’à des extrêmes tels (ex : insomnie, irritabilité…) que l’on ne voit plus rien d’autre. Mélanger ces trois niveaux, prendre les conséquences (symptômes) pour le stress lui-même, conduit à autoalimenter, à amplifier le phénomène, en soi ou dans la société tout entière. Prière donc, de considérer ces trois facteurs ou niveaux, sans les mélanger. Cette erreur de raisonnement (prendre les conséquences pour des causes) fait progresser le stress en soi, dans la cité et dans le monde. Ne pas reconnaître ses problèmes, ou prétendre ne pas en avoir, ne pas se les avouer, c’est conduire un bolide dans la nuit, tous phares éteints sur une route encombrée. Autrement dit : mes pires problèmes sont ceux que je prétends ignorer ou nier. Le vrai problème de celui qui a mauvaise haleine, c’est que personne n’osera le lui dire de façon acceptable et efficace. De même, il ne sert à rien de dire à un bègue de ne plus bégayer immédiatement. Il faudra recourir à d’autres moyens ou combinaison de moyens, certes moins spectaculaires, mais absolument efficaces, simples et gratuits.

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CAUSES EN FONCTION DES CHANGEMENTS ET DES CIRCONSTANCES DANS LA VIE

Nous avons fort simplifié cette liste (très approximative), mais indicative des causes externes du stress, dressée par nos confrères américains, mais c’est tout notre mode de vie moderne qui est à repenser. De 100 à 65 points : Mort d’un conjoint – Mort d’un parent (deuils, selon proximité). Divorce difficile ou séparation d’avec sa femme ou son mari. Condamnation importante, séjour en prison. De 65 à 45 points : Blessure ou maladie (selon gravité évidemment). Mariage ou réconciliation (avec sa femme ou son mari). Licenciement ou retraite. Ennuis de santé d’un parent proche. De 45 à 30 points : Grossesse – Naissance – Problèmes sexuels. Problèmes d’affaires – Modification de situation financière. Mort d’un ami intime. Changement de situation – Chômage. Disputes conjugales répétées. Hypothèque ou dette importante. Changement de responsabilités professionnelles. De 30 à 20 points : Fils, fille quittant la maison - Problèmes avec les beaux-parents. Exploit personnel marquant - Début ou fin de scolarité – Examens. Époux-se se mettant à travailler ou s’arrêtant – Déménagement. Changement de condition de vie – Changement d’école. Difficultés avec un patron ou un chef hiérarchique. Changements d’horaires ou de conditions de travail. Changement religieux, ou d’activités sociales. Moins de 10 points : Hypothèque ou emprunt moins important. Changement dans les habitudes de sommeil ou les habitudes alimentaires. Vacances, préparation des fêtes. Amendes et contraventions.

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Mais alors… QUE FAIRE ? 1. Noter les causes, leur fréquence : Tenir le « journal de bord » de son stress, cela aide… chercher les schémas répétitifs des manifestations. 2. Noter ses résolutions et décisions de mise en pratique : Exemples : promenade, gymnastique, périodes de relaxation… avec le maximum de précision. Prendre des engagements vis-à-vis de soi-même. 3. Mettre ses décisions en pratique quotidienne : Étapes : 5 jours, puis 21 jours, puis 2 années… sont les étapes-clé, pour « être changé » et noter les succès de son autodiscipline : Souvenez-vous : « TOUT est entraînement, TOUT n’est qu’entraînement » EFFETS PHYSIQUES LIÉS À TROP ET TROP LONGTEMPS DE STRESS

Nous allons passer en revue les différents systèmes qui sont le plus souvent touchés par les effets du stress Système cardio-vasculaire : Crises cardiaques (infarctus), angine de poitrine, attaques (accident vasculaire cérébral), artériosclérose, hypertension artérielle (très fréquente  : 90  % après 50 ans), palpitations cardiaques (tachycardie), extrasystoles et arythmie, parfois jusqu’à la fibrillation, embolies pulmonaires, essoufflements inhabituels. Système digestif : Maux d’estomac : brûlures, ulcères, constipation ou diarrhée. Système nerveux : Maux de tête, migraines, tics nerveux, gestes nerveux, épuisement, réveils avec fatigue, troubles du sommeil (endormissement difficile ou insomnies). Système neuro-végétatif : Transpirations excessives Flush (rougeurs de la peau) Système musculo-tendineux : Tensions musculaires localisées Douleurs dorsales

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Système immunitaire : en baisse Systèmes métaboliques : Matières grasses – production de lipides : en hausse (cholestérol) Pseudo-diabète Abus : Abus de boissons : alcool déprime – café excite Abus de tabac : nicotine stimule et calme Abus de drogues… STRESS ET SOMMEIL

Interview d’un cadre : « Pour vous, qu’est-ce que le stress ? » Sa réponse : « C’est un mal dont nous souffrons dans tous les aspects de notre vie, avec l’impression de ne pas pouvoir le contrôler par l’esprit. Cela ressemble à de l’anxiété. Il entraîne l’insomnie. La pensée est trop souvent absorbée, fixée sur le problème particulier que vous êtes en train d’essayer de résoudre… Je me rappelle de nombreuses fois où, confronté au stress, je souffrais d’insomnie et j’avais les nerfs détraqués. » Il souffrait nerveusement… Une telle personne peut-elle produire de bons résultats ? Un nombre croissant de personnes ressentent la même chose que lui. Quand des personnes demandent un avis concernant le stress, elles recherchent toujours un traitement. Comme ce cadre, elles ressentent le stress comme une maladie. Pourtant, ce n’en est pas une. Un stress normal est aussi nécessaire que la respiration. C’est ce qui nous donne de l’énergie pour créer et réussir. Une saine tension ne nous rend pas seulement plus efficace mais rend aussi notre travail plus agréable, excitant. Le problème est que le niveau où le stress est le plus productif est voisin de celui où il devient trop fort et commence à abaisser notre performance. Quand il est trop important pendant trop longtemps, le stress va perturber notre sommeil. Et cela devient sérieux. Si vous sentez que vos nerfs sont atteints, vous pouvez vous tourner vers les médicaments ou l’alcool afin d’avoir une bonne nuit de sommeil. Cela ne peut-il être contrôlé par la seule pensée  ? Oui, c’est possible – et cela s’apprend – ces quelques pages vont vous enseigner comment, brièvement, conduire vous-même cette prévention, ou ces « réparations ».

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L’insomnie produit la maladie et l’absentéisme. Demandez à n’importe quel médecin. Une association d’industriels allemands a estimé qu’une journée d’absence coûte en moyenne $400 à une entreprise. Ainsi, l’absentéisme coûte à l’Allemagne $16 milliards par an. En Suisse, une personne adulte sur cinq, se plaint de la qualité de son sommeil… et les périodes dépressives, la panique, la perte du sens, ne sont pas loin. Nous parlons de dollars et d’économie en parlant d’insomnie et d’absentéisme ? Supprimez ces derniers et nous éliminerons les coûts. Si vos collaborateurs à tous les niveaux hiérarchiques apprennent à mieux dormir, ils travailleront mieux. Diminuer les coûts, augmenter la productivité… n’est-ce pas ce que vous voulez ? Enfonçons quelques portes ouvertes : la personne stressée dort mal, souvent sujette à l’hypertension… à partir de 50 ans en moyenne – et devient rapidement désagréable pour son entourage : LA PERSONNE STRESSÉE EST STRESSANTE EN RÉSUMÉ

On peut dire que : Le stress est douloureux, car tout corps humain (y compris le tien) est littéralement capable de se détruire lui-même lorsqu’il est forcé de maintenir trop, trop longtemps des états de stress élevé (trop) sur de longues périodes et sans relâche (trop longtemps). ET TA VOLONTÉ SEULE N’Y CHANGERA RIEN

C’est d’ailleurs ainsi que survient cette maladie sournoise, le burn-out, qui est un épuisement physique et psychique dû au stress. PHYSIOLOGIE DU STRESS

Pour rafraîchir votre mémoire et mettre à jour vos connaissances, nous vous proposons sur le site www.­neur-one.fr « Système nerveux et comportement » janvier 2011, un article remarquable de 19 pages, composées de texte bien structuré et de schémas très clairs. À lire absolument.

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Importance actuelle du stress au travail

Tout cabinet dentaire souhaite sans doute se profiler comme un acteur de la santé publique face aux personnes, entreprises, État, institutions. Le but est de présenter cette problématique de santé, d’importance croissante. Cette prise de contact élémentaire pourrait se poursuivre lors d’ateliers d’une ou plusieurs demi-journées pour acquérir les pratiques applicables dans l’activité quotidienne. Les soignants, tout comme leurs patients, vivent des états émotionnels difficiles et souvent mal gérés, sur des périodes parfois longues qui créent peu à peu des conditions favorables à l’apparition de toutes sortes de troubles de la santé. Ces états émotionnels sont la cause et la conséquence d’états de stress générant des dysfonctionnements : –– de la communication, –– des relations, –– de l’organisation personnelle et interpersonnelle. De ces perturbations naissent des conflits qui créent à leur tour des émotions négatives générant un nouveau stress et ainsi de suite : une spirale destructive est enclenchée. Peu à peu, les gens s’installent dans un stress qui s’autoalimente et les empêche de trouver les ressources pour en sortir. « Je n’ai pas de temps parce que je suis mal organisé – je ne peux pas m’organiser parce que je n’ai pas de temps !» Peu à peu, la situation se détériore en interne et en externe, jusqu’à la rupture. Le développement du « mal-être » en milieu professionnel et les pathologies liées au stress engendrent un absentéisme estimé en Suisse entre 4,8 et 6,6 Md de francs, soit 1,3 % du PIB (source : Institut Universitaire Romand de santé au travail). Le SECO (Secrétariat d’état à l’économie) a estimé les seuls coûts liés au stress à 4,2 Md de francs pour 1999. Un taux moyen d’absentéisme de 5,5 % en 1996, en hausse constante, signifie pour les entreprises un demi-poste payé à vide pour 10 personnes présentes au travail. En dehors du problème personnel, le stress est aussi un problème social et économique. DÉCOUVRIR QUELQUES ASPECTS DU STRESS

Accueillir son stress particulier, pour mieux le vivre, voire le revivre. Faire le point avec un spécialiste de la psychologie comportementale pour voir ce qui me stresse (mes territoires de stress), pour examiner comment je me

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stresse (les symptômes de mon stress). Puis, apprendre à faire un autodiagnostic et établir un guide pratique de prévention et d’autothérapie de mon stress. Le défi de tout responsable est de gérer son propre stress face au stress des employés et autres partenaires, pour rester attentif et proactif dans ses rapports professionnels. Comment : •  préserver mes propres ressources ? •  définir mon rôle et fixer mes limites ? •  gérer le stress des autres ? •  prendre soin de mon propre stress et de mes besoins ? •  soit : se mobiliser pour sortir du stress. Découvrez comment le stress entre dans votre vie : •  changement non voulu •  conflit d’intérêt non prévu •  mauvaise évaluation d’une situation •  surestimation de mes capacités •  sous-estimation des contraintes Découvrez comment utiliser le stress pour rebondir : •  être proactif – être mobile – être agile Le stress est un signal pour nous mobiliser

Tests et exercices À vos crayons pour ce chapitre. Vous irez de découvertes en découvertes Tests TEST ULTRA-RAPIDE : « ÊTES-VOUS STRESSÉ ?» (RÉSUMÉ ET SIMPLIFICATION DE NOMBREUX AUTRES TESTS)

Répondre simplement par OUI ou par NON : 1. Irritable, plus cassant, « de mauvais poil », 2. Moins confiant, moins ouvert, moins à l’aise, tendance à garder en moi mes vrais sentiments et impressions, 3. Fatigué, sinon crevé, à bout, épuisé, trop souvent, manque d’énergie, impression de puiser dans mes réserves,

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HARMONIE ET EFFICACITÉ AU CABINET DENTAIRE

4. Peu créatif, à court d’idées, routinier, comme dans un tunnel, plus d’idées neuves, 5. Un peu seul, isolé, manque de soutien, coupé des autres, 6. Désir d’évasion, d’être ailleurs, m’en aller, faire autre chose, être avec quelqu’un d’autre – indépendance, échapper, m’en sortir, 7. Tentatives pour produire davantage : plus d’heures, travailler dur, quantité de travail, nombreux efforts, acharnement, 8. Plus vite  : obligé de courir tout le temps, toujours pressé(e) même sans raison, lutte contre la montre, vitesse, 9. Moins de joie, moins d’enthousiasme, moins de plaisir ou de satisfactions (travail, loisirs, amour, sexualité, idéal, amitié) – résignation devant mon avenir, 10. Sommeil en panne : endormissement difficile et tardif, ou réveils nocturnes. Plus de 4 ou 5 oui : vous partez dans la mauvaise direction. Plus de 7 oui : votre état doit être pris en mains sérieusement. Ne négligez pas ces symptômes, ils indiquent un état généralisé : •  Ils sont le résultat d’une accumulation, non d’un problème particulier •  Il est à notre portée immédiate de développer une meilleure maîtrise de soi •  par une meilleure respiration. •  Substituer à notre respiration habituelle, incontrôlée et inconsciente, des instants de respiration attentive 1 fois par heure, inspiration et expiration ralenties, cadencées, conscientes, surtout respectueuses et méditatives. TEST DU DR. SOLY BENSABAT (EXTRAITS ET ADAPTATION DES TESTS DU DR.BENSABAT)

Test détaillé pour déceler et évaluer les causes  : MESURE DE MON STRESS. Répondez objectivement aux 60 questions, en notant vos réponses : 1 : jamais  2 : rarement  3 : parfois  4 : souvent  5 : presque toujours 1. Avez-vous tendance à « ruminer » vos problèmes ? 2. Est-ce que vous vous déplacez, marchez et mangez rapidement ? 3. Vous fâchez-vous lorsque votre avis n’est pas entendu alors qu’il est correct ? 4. Vous impatientez-vous en voiture, si vous êtes conduit par un conducteur trop lent ?

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5. Prenez-vous tout trop à cœur ? 6. Faites-vous toujours les choses au dernier moment ? 7. Avez-vous tendance à réprimer vos réactions ? 8. Êtes-vous préoccupé par votre avenir professionnel ? 9. Fumez-vous plus de 10 cigarettes par jour ? 10. Avez-vous du mal à prendre du recul ? 11. Avez-vous des difficultés à vous exprimer sur ce qui ne va pas ? 12. Souffrez-vous d’un environnement bruyant ? 13. Pensez-vous que c’est une perte de temps de rechercher le sens des mots inconnus du dictionnaire ? 14. Rentrant chez vous, prenez-vous un verre (vin, alcool) pour vous détendre ? 15. Vous découragez-vous vite ? 16. Avant de partir en vacances, préparez-vous une liste de choses à faire ou à voir, et de gens à qui écrire ? 17. Votre vie sexuelle ne vous donne-t-elle pas entière satisfaction ? 18. Avez-vous tendance à finir les phrases de vos interlocuteurs ? 19. Votre travail est-il source de pressions, de contrariétés, de frustrations ? 20. Votre réussite est-elle due au fait que vous comprenez ou réalisez les choses plus rapidement qu’autrui ? 21. Prenez-vous des somnifères ? 22. Avez-vous l’impression que rien ne bouge assez vite dans votre entreprise ? 23. Attachez-vous de l’importance à l’opinion que l’on a de vous ? 24. Vous est-il difficile d’oublier votre travail pendant le week-end ? 25. Vous énervez-vous lorsque la voiture qui vous précède dans le trafic roule trop lentement à votre gré ? 26. Avez-vous le sentiment d’être sous-estimé par vos supérieurs hiérarchiques ? 27. Manquez-vous de temps pour vos loisirs ? 28. Supportez-vous mal les critiques ?

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29. Avez-vous du mal à dire non ? 30. Êtes-vous plutôt insatisfait de votre vie affective ? 31. L’ambiance sur votre lieu de travail est-elle mauvaise ? 32. Pensez-vous manquer de vrais amis à qui vous confier ? 33. Vous sentez-vous vaguement coupable et mal à l’aise quand vous vous reposez ? 34. Vous est-il pénible de regarder quelqu’un faire un travail que vous êtes capable de faire mieux ou plus vite ? 35. Pensez-vous que dans votre entreprise la communication est mal faite ? 36. Votre vie conjugale est-elle source de contrariétés, agressions, frustrations ? 37. Essayez-vous de faire de plus en plus, en moins en moins de temps ? 38. Prenez-vous des tranquillisants, anxiolytiques, calmants ? 39. En parlant, accentuez-vous les mots-clés ? 40. Avez-vous tendance à vouloir tout contrôler ? 41. Est-ce que votre alimentation est déséquilibrée (composition et horaires) ? 42. Votre appétit sexuel a-t-il diminué ? 43. Êtes-vous pris par le besoin de gagner lorsque vous jouez ? 44. Dans votre travail, avez-vous du mal à faire appliquer vos décisions ? 45. Avez-vous du mal à vous adapter aux changements ? 46. Vous sentez-vous actuellement surmené par votre travail ? 47. Manquez-vous de temps ? 48. Dans votre entreprise, avez-vous le sentiment de ne pas savoir ce que l’on attend de vous ? 49. Vous sentez-vous souvent fatigué ? 50. Avez-vous été touché ou concerné par des problèmes de votre entourage ? 51. Avez-vous du mal à décharger vos émotions ? 52. Vous sentez-vous mis à l’écart de ce qui se passe dans votre entreprise ? 53. Souffrez-vous d’insomnies au milieu de la nuit ou très tôt le matin ?

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54. Souffrez-vous de manque de gratifications matérielles dans votre travail ? 55. Souffrez-vous d’un manque d’affection ? 56. Êtes-vous irritable, facilement en colère ? 57. Vous impatientez-vous de la lenteur de la plupart des événements ? 58. Faites-vous plusieurs choses à la fois ? 59 Pensez-vous que vous ne faites pas assez de sport ? 60. Croyez-vous que les tensions exercent un effet négatif sur vous-même, comme sur la qualité de vos relations avec autrui ? Mesures de mon stress : résultats

•  60 à 120 points : passablement détendu, je n’ai pas de problème de stress • 121 à 180  : assez détendu, mais occasionnellement stressé. J’examine les questions qui me concernent •  181 à 240 : souvent victime du stress. Il faut intervenir dans un avenir proche pour éviter des risques, tels que problèmes cardiaques •  241 à 300 : je suis stressé ; intervenir tout de suite pour changer de vie Mesures de mon stress : causes

MON TEMPÉRAMENT ET MA PERSONNALITÉ me prédisposent-ils au stress ? Totaliser les scores des questions 1, 5, 10, 13, 15, 23, 28,33 et 40 •  Moins de 18 points : non •  De 19 à 27 : occasionnellement •  De 28 à 36 : souvent •  De 37 à 45 : en permanence MON COMPORTEMENT me prédispose-t-il au stress ? Totaliser les scores des questions 3, 4, 7, 11, 16, 18, 25, 29, 34, 37, 39,43 et 51 •  Moins de 32 points : non •  De 33 à 48 : occasionnellement •  De 49 à 64 : souvent •  De 65 à 80 : en permanence

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HARMONIE ET EFFICACITÉ AU CABINET DENTAIRE

MON TRAVAIL me prédispose-t-il au stress ? Totaliser les scores des questions 8, 19, 20, 22, 24, 26, 31, 35, 44, 46,48 et 54 •  Moins de 24 points : non •  de 25 à 36 : occasionnellement •  de 37 à 48 : souvent •  de 49 à 60 : en permanence MA VIE DE COUPLE me prédispose-t-elle au stress ? Totaliser les scores des questions 17, 30, 36, et 55 •  Moins de 8 points : non •  De 9 à 12 : occasionnellement •  De 13 à 16 : souvent •  De 17 à 20 : en permanence MON MODE DE VIE me prédispose-t-il au stress ? Totaliser les scores des questions 9, 12, 14, 21, 27, 32, 38, 41, 50 et 59 •  Moins de 22 points : non •  de 23 à 33 : occasionnellement •  de 34 à 44 : souvent •  de 45 à 55 : en permanence MESURE DE MON STRESS : RÉSUME DES CAUSES 1. Mon tempérament et ma personnalité ? 2. Mon comportement ?  3. Mon travail ?  4. Ma vie conjugale ?  5. Mon mode de vie ?  

…… …… …… …… ……

points points points points points

Total : …… points

À faire absolument ! Exercices

Beaucoup de petits exercices, sous forme de conseils vous seront présentés au tout début de ce sous-chapitre : l’autosuggestion positive, les quatre accords avec soi-même, un plan de non-travail en général et sur soi-même. Puis, crayon

Accueillir mon stress consciemment

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en main, vous pourrez aborder les cinq étapes d’une méthodologie (de la sensation à l’action) qui devrait être présente en tout projet et en toute évolution. Deux pages très explicites sur ce que nous demandons à notre milieu de travail et pourquoi vos employés ne font pas toujours ce que vous leur demandez  : voyez ce que vous faites déjà et apprenez à faire ce que vous ne faites pas encore. Enfin, deux nouvelles notions : les ateliers et la proactivité, et comment s’en servir pour éviter le stress. Last but not least, la respiration consciente. PROMETS-TOI À TOI-MÊME PAR AUTOSUGGESTION POSITIVE ET CONSCIENTE (INSPIRÉ DE CASTANEDA)

Décision, choix libre, autonome et pleinement consenti, voulu par toi positivement. • D’être si souple et fort… que rien en ce moment ne puisse troubler ton calme, la paix de ta pensée, • De parler de santé, de bonheur et de prospérité à chacun(e), que tu rencontreras, •  De faire en sorte que tes amis, puis tes autres interlocuteurs sentent qu’il y a en eux quelque chose de précieux pour toi, •  De regarder le bon côté des choses, faisant de ta réalité : –– de l’optimisme, –– de l’amour, –– de la vérité, –– de la lumière, •  De penser toujours au « mieux » : –– de travailler de ton mieux, –– de parler mieux –– pour atteindre seulement le meilleur QUATRE ACCORDS AVEC SOI-MÊME (INSPIRÉS DES « 4 ACCORDS TOLTÈQUES » SELON MIGUEL RUIZ. « ÇA A L’AIR SIMPLE ! »…)

1. MA PAROLE EST IMPECCABLE Je parle avec intégrité, je ne dis que ce que je pense vraiment. Je n’utilise pas ma parole contre moi-même ni pour médire sur autrui. À l’origine, impeccable voulait dire sans péché. 2. JE RÉAGIS DE FAÇON AUTONOME Je sais une fois pour toutes que ce que les autres disent et font est la projection de leur propre réalité, ou de leur rêve. Immunisé contre cela, je ne suis plus jamais victime.

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3. JE NE SUPPOSE PAS Je prends le courage de poser des questions et d’exprimer mes vrais désirs. Je communique avec les autres clairement et posément, pour éviter toute tristesse, malentendu ou drame. Ceci seul peut transformer toute ma vie. 4. TOUJOURS DE MON MIEUX Mon mieux change d’instant en instant ! Quelles que soient les circonstances, je fais simplement de mon mieux, évitant de me juger, de me culpabiliser et d’avoir des regrets. CONNAISSANCE DE SOI « Aller au bout de soi-même, découvrir sa vraie personnalité, la développer jusqu’à son plein épanouissement, c’est notre devoir. Militer pour la conquête de sa propre spécificité, c’est la condition première pour se comprendre, puis se mettre au service de l’Autre. » (George Bernard Shaw) UN PLAN DE NON-TRAVAIL

Se donner chaque jour deux séances de 10 minutes de « vacances » : de non-pensée, de rien faire, non agir, non vouloir… il s’agit de rééduquer en soi. L’AUTOSUGGESTION CONSCIENTE OUI, il s’agit bien de « parler à son inconscient », à ses cellules, à son cœur, à ses sensations physiques de l’instant présent. (Lire  ici  : TOLLE E, Le Pouvoir du Moment Présent.  Editions Ariane, 2002 ou tout autre de ses ouvrages ; GRAF DÜRCKHEIM K. Hara, centre vital de l’homme. Éditions Le Courrier du Livre, 1974 ; LELOUP J-Y, Compassion and Meditation: The spiritual Dynamic between Buddhism and Christianity. Éditions Kindle, 2009) Pour atteindre ce degré de restauration naturelle, il faut beaucoup de douceur, de constance, de patiente et soigneuse attention, de respect de sa personne sacrée : «  Mon inconscient, tu es mon/ma meilleur(e) ami(e), tu m’accompagnes depuis ma naissance, tu es présent dans chacun de mes gestes, chacune de mes pensées, jamais tu ne me quittes. Et moi je prétends t’ignorer, je te fais taire presque tout le temps. » Ainsi mal traité par nous-même, sous le prétexte du temps qui manque, d’activités et d’ambitions diverses, nous perdons le contact avec cette porte

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d’entrée en nous, de la spiritualité naturelle à tout être humain ! Et notre sub ou inconscient dort ! Notre « meilleur ami » s’endort, ou s’atrophie, se cache en nous, nous joue des tours éventuellement depuis combien d’années ? Nous en perdons l’intuition, la puissance créatrice, l’imaginaire, nous nous quittons, nous ne sommes plus amis, respectueux et curieux de nous-mêmes ! Ne rien brusquer, mais choisir et décider de deux « moments qui m’appartiennent » chaque jour, où rien ni personne, à aucun prix, ne pourra intervenir dans mon « îlot sacré » de la reconstruction de mon être. Il s’agit, en un lieu et à des moments voulus, d’organiser avec le plus grand soin : MA RESPIRATION MA RELAXATION MA VISUALISATION MON MESSAGE PERSONNEL

(Il faudrait bien sûr y ajouter  : mon alimentation, mon exercice physique, mon repos et mon sommeil, toute mon hygiène de vie, etc.) PLAN DE NON-TRAVAIL SUR SOI

(Pour installer pleinement son autosuggestion consciente) Sérénité, accueil ou prévention du stress, conscience de vie : « Les événements du futur seront ce qu’ils seront… et moi, je serai à la hauteur, si je laisse croître consciemment ce qui peut croître en moi ! » (Fig. 21) En 5 jours, Je crée, j’installe une attitude nouvelle en moi

En 3 semaines, L’ancrage de cette nouvelle attitude s’installe en moi

Pour changer rapidement, il suffit de s’entraîner 2×10 min. par jour

En 2 ans, Je suis un être transformé selon ma propre volonté

Fig. 21  Plan de non-travail sur soi

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… et vous vous apercevrez bien vite, que ces deux moments d’«  activité méditative  » deviennent les plus précieux, les plus intenses moments de vos journées ! TABLEAU DE SYNTHÈSE : 5 ÉTAPES D’UNE MÉTHODOLOGIE PRÉSENTE EN TOUT PROJET ET EN TOUTE ÉVOLUTION

En tous cas  : «  je suis  », c’est-à-dire réaliser pleinement, qu’en cet instant, je suis ! La première caractéristique de l’humain, c’est cela : « Être conscient d’être conscient. » Quels sont les outils ? 1. PREMIÈREMENT, LA SENSATION  : Je ressens, par mes 5 sens et quelques autres. Le premier contact avec le monde extérieur est physique : la sensation (tactile, gustative, équilibre, douleurs, etc.) Question : je sens QUOI ? Dans l’ordre d’intensité : 1.

je sens moi : par exemple au réveil ?

2.

je sens autour de moi : lumière, décor, paysage, parfums.

3. enfin, je deviens capable de sentir l’autre  : mon partenaire, celui qui demande mon écoute vraie. 2. Cette première prise de conscience réveille immanquablement la plus belle puissance de notre esprit (habituellement censurée, tronquée ou niée)  : L’IMAGINAIRE. Devenir conscient de l’omniprésence de notre imaginaire ! 4/5e de l’activité de notre cerveau droit. Sois artiste : l’imaginaire, fleur précieuse, est à manipuler avec compétence, soin, et précaution, sinon c’est le désordre ! Notre société impose à notre imaginaire, par ses médias, les images d’autrui qui nous sont imposés de force, par exemple la télévision et nous font perdre l’indispensable discernement ainsi que notre liberté ! 3. Étape suivante, la plus glorifiée dans le monde moderne qui, sans cesse, nous sollicite : sois efficace, rationnel, exigeant. La sacro-sainte PENSÉE : « je pense, donc je suis. » Nourri par mon imaginaire, je trie, classe, range, combine, élabore, réunis, supprime, synthétise, catégorise.

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Prends une feuille de papier et note tes IDEES chaque matin. 4. Jusqu’ici, tout se passe « à l’intérieur », en-dedans de moi, notre monde secret, c’est cela. Dommage de ne pas être capable de S’EXPRIMER. L’homme est un être social, sociable. Il serait bon et utile de sortir, hors de soi, en toute confiance et confidence. « Ce que je ressens de plus gênant, de plus difficile à dire, serait précisément ce qu’il me serait le plus utile de me débarrasser.» Problème de la confiance : qui m’écoute vraiment, à qui oserai-je m’exprimer totalement ? (nécessité des psychothérapies analytiques). Remarque bien que l’expression n’est pas uniquement verbale (les mots et les maux), mais que le non-verbal nous révèle plus encore que le verbal : NonVerbal > Verbal. Regardez les politiciens à la télévision, mais coupez le son ! Gestes, regards, postures, silences : monde de l’infra verbal. Dépassée la frontière qui mène au dire, nous aboutissons très naturellement au projet qui s’exprime : intentions, mises en pratique, essais : 1er essai, 2e…, 3e…, jusqu’au point de non-retour, projet et « catharsis » précédant le véritable… 5. PASSAGE À L’ACTE Par lequel nous serons connus, évalués, mesurés, voire jugés, par nos semblables (Fig. 22).

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3

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Fig. 22  Les 5 étapes d’une méthodologie pour tout projet dont on ne connaît pas le résultat dans l’immédiat.

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CE QE NOUS DEMANDONS À NOTRE MILIEU DE TRAVAIL

(Source : European Research Group on Adults Education in ManagementBrussels-Leuven) De 1972 à 2008, des groupes de chercheurs ont catégorisé systématiquement les valeurs et besoins formulés par plus de 5 000 cadres européens ayant participé aux divers cours et séminaires de cette étude. 1. motivation 2. esprit d’équipe, travail en groupe 3. sensibilisation, participation de tous les niveaux, à l’intérêt et aux soucis de l’entreprise 4. information et participation 5. formation 6. confiance 7. dialoguer 8. relations internes 9. respect des autres 10. délégation 11. pouvoir appliquer ce que l’on a appris (en formation) 12. solidarité En répondant à ces douze demandes, vous pourrez voir ce que vous faites déjà de manière correcte et tout ce que vous ne faites pas ou mal. Alors au travail ! POURQUOI VOS EMPLOYÉS NE FONT-ILS PAS TOUJOURS CE QUE VOUS LEUR DEMANDEZ ? (À AFFICHER… SI VOUS L’OSEZ !)

1. Parce qu’ils ne savent pas ce qu’ils sont supposés faire exactement, 2. Parce qu’ils ne savent pas comment le faire, 3. Parce qu’ils ne voient pas pourquoi ils devraient le faire, 4. Parce qu’ils croient que votre façon n’est pas la meilleure, 5. Parce qu’ils croient que leur façon est la seule bonne,

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6. Ils croient qu’autre chose est plus important ou plus urgent, 7. Ils ne voient pas de conséquence positive, 8. Ils croient qu’ils le font déjà, 9. Ils ont déjà été punis ou mal récompensés pour l’avoir fait, 10. Ils ont déjà été récompensés pour ne pas l’avoir fait, 11. Ils prévoient des conséquences négatives pour l’avoir fait, 12. Il n’y a pas de conséquences négatives pour ne pas le faire, 13. Il y a des obstacles qu’ils ne contrôlent pas, 14. Leurs limites personnelles les empêchent de réaliser ce que vous avez demandé, 15. Les limites de l’organisation empêchent de réaliser ce que vous avez demandé, 16. Ils ont des problèmes ou difficultés personnels, 17. Personne ne pourrait le faire ! Quelle source de réflexions pour un vrai chef ! Alors faites-le et vous allez alléger votre stress de manière considérable : amélioration de ce qui est, création de ce qui n’est pas, inventez, changer, même licencier… ATELIERS, EXEMPLE D’UNE DÉMARCHE

Leur but est de montrer une problématique de santé au travail. Cette prise de contact avec un thème se poursuivra lors d’un atelier d’une ou deux demijournées pour acquérir des connaissances pratiques applicables dans l’activité quotidienne. Les personnes au travail vivent des émotions difficiles, souvent mal gérées sur des périodes parfois longues qui créent peu à peu des conditions favorables à l’apparition de toutes sortes de troubles de la santé. Ces états émotionnels sont la cause et la conséquence d’état de stress générant des dysfonctionnements de la communication, des relations et de l’organisation personnelles. De ces perturbations viennent des conflits qui créent à leur tour des émotions négatives générant un nouveau stress. Une spirale destructive est enclenchée. Peu à peu les gens s’installent dans un stress qui s’autoalimente, les empêche de trouver les ressources pour en sortir. « Je n’ai pas de temps parce que je suis mal organisé. Je ne peux pas m’organiser parce

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que je n’ai pas de temps. » Peu à peu la situation se détériore en interne et en externe, jusqu’à la rupture. If you don’t know where you go… it is difficult to get there (dicton irlandais) L’action efficace est le meilleur antidote du stress. Mais trouver de l’efficacité en état de stress est difficile, surtout sans méthode. ATELIER POUR ACCUEILLIR SON STRESS CONSCIEMMENT

Ateliers d’une demi-journée ou plus, pour mettre en pratique Gérer son stress pour le revivre Faites le point avec un spécialiste de la psychologie comportementale humaniste. 1. DIAGNOSTIC, REMÈDES ET SOLUTIONS DIAGNOSTIC : IDENTIFIER ET PRÉVOIR Qu’est qui « me » stresse ? (les territoires du stress). Comment je me stresse ? (discussion sur les symptômes), Faire son autodiagnostic. Guide pratique pour la prévention et l’auto-thérapie. Tests individuels confidentiels. Description et symptômes physiques, psychologiques, relationnels. Défaut de réponse adaptée. Phases de l’évolution du stress. REMÈDES ET SOLUTIONS  : PRÉVENTION ET/OU RÉPARATIONS ? Respiration : clé de voûte de la vie. Diététique : raisonnable et raisonnée. Exercices d’isométrie. Sommeil et reprogrammation du cerveau. Relaxation et autosuggestion consciente. 2. STRESS DU RESPONSABLE Le défi du responsable est de pouvoir gérer son propre stress face aux employés, pour rester attentif et proactif dans ses rapports professionnels. Savoir comment : préserver ses propres ressources ?, définir son rôle et fixer ses limites ?, gérer le stress des autres ?, prendre soin de son propre stress, utiliser l’attitude walk the talk pour une gestion du stress : « Comment utiliser l’énergie des émotions face au stress d’une manière constructive pour le corps et l’esprit.» Analyse de ses propres schémas de stress, définition des zones du corps sensibilisées, exercices de renforcement et de relaxation, apprentissage de la fluidité de l’énergie découlant des émotions.

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3. SE MOBILISER POUR SORTIR DU STRESS Comment le stress entre dans notre vie  : changement non voulu, conflit d’intérêt non prévu, mauvaise évaluation d’une situation, surestimation de ses capacités, sous-estimation des contraintes. Comment utiliser le stress pour rebondir  : être proactif, être mobile, être agile. Le stress est un signal pour nous mobiliser. La proactivité

(Réflexions et notes prises lors d’un exposé de KRAUSE T. Ph.D & CEO of Behavioral Science Technology, Ojai, Californie) Reconnue comme étant le concept du et du cabinet dentaire, par analogie.

xxie

siècle dans la gestion d’entreprise

DANS TOUTE ENTREPRISE coexistent 3 composantes classiques  : ­Personnes + Produit (ou Service) + Profit soit le PPP (théorie d’Henry Ford). Toute entreprise développe 4 relations habituelles envers : 1. les fournisseurs. 2. les clients. 3. le public ou l’environnement. 4. l’interne. Quelles sont les questions à se poser  : quel est, aujourd’hui, votre secteur le plus «  à Risque  »  ? Quels sont les processus en cours pouvant causer  : un dommage corporel, psychique, matériel, financier ; une sanction pénale, administrative, etc. ; un tort moral, sens de culpabilité, etc. LA PROACTIVITÉ est caractérisée par trois axes principaux : 1. Anticipation : pensée, réflexion 2. Analyse du/des risques : définition, identification, diagnostic (quelle est la différence entre une situation à risque et un danger ?) 3. Action ou projet d’activité dynamique : « prendre les devants », agir consciemment. Non seulement pré-voir, pré-sentir, pré-dire, pré-juger ou «  pré-caution  ». Contraire de la réaction, de la réactivité. La plupart des organisations occidentales, modernes, avancées, technologiques, sont réactives, c’est-à-dire qu’elles agissent a postériori dans leurs efforts face à la sécurité, à la santé, à l’hygiène, à l’environnement, etc. Lorsqu’elles constatent l’imprévu, l’incident ou l’accident, de nouvelles mesures sont prises pour corriger le problème. Donc, tant qu’il y a peu ou pas d’accident, peu d’actions sont envisagées.

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La proactivité est aussi une réflexion antistress du chef d’entreprise, du responsable du cabinet dentaire qui se développe en permanence : 1. Une culture interne : des visions, des valeurs, des postulats subséquents, etc. 2. Des systèmes de gestion : des priorités, des pratiques, de la formation, des conceptions d’installations, d’équipements, des responsabilités, des sanctions et des récompenses, des évaluations et des modèles qui sont ou seront. 3. Des causes directes des conditions et comportements, et d’un résultat ou… d’« incidents-accident » (non prévus).  uels sont aujourd’hui les processus en cours pouvant causer : un dommage Q corporel, psychique, matériel, financier, etc. ; une sanction pénale, administrative ; un tort moral, sens de la culpabilité, etc. ; raisons pour lesquelles le problème n’a pas été anticipé ?  uel est, aujourd’hui, votre secteur le plus « à-risque » – maîtrise du risque Q (exemple : l’accident physique.) « CYCLE » DE LA PROACTIVITÉ : 1. L’observation « inter pares » des comportements : Observation systématisée, scientifique des comportements au travail. Instruments « pour objectiver » les décisions de la direction. Peer to peer (inter-pares) : système non hiérarchique ! No name, no blame : anonymat, ni sanction, ni discipline ! Feedback : positif – guidance : jamais négatif ! 2. Le rôle de la direction est très important de par ses pensées et décisions (% de risques, ex.  : en matière d’hygiène, de santé, de sécurité et d’environnement). 3. Le travail doit tenir compte de l’énergie et des comportements de chacun. 4. Le comité de pilotage pour l’autoformation est vital pour l’amélioration en continu. 5. Le rôle de l’observateur est un poste nouveau à créer. Il est fondamental dans la logique de la proactivité. 6. Informations  : cumul statistique, consolidé sur ordinateur, en vue de la continuité des améliorations, détermination des % « à risque ».

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7. Transformation : pour une amélioration permanente, par une relation de style nouveau, l’empowerment. 8. Proposition-conclusion  : par la méthodologie, l’attitude et l’esprit pro­actifs, nous nous concentrons sur «  un agir en anticipation  » pour identifier des situations problématiques «  à-risque  », avant même que l’imprévu, l’incident – ou l’accident – ait lieu. Nous visons donc le «  zéro – accident  ». Devenir « PROACTIF » à titre personnel et dans son organisation, implique des changements très importants de la part des employés et des managers. « Au futur, cette nouvelle attitude de l’esprit humain, mise en pratique dans tous les domaines de l’activité, fera évoluer positivement notre civilisation. » (Krause T) La respiration consciente (Fig. 23)

Avec attention et application, volontairement, sans effort, détendu, confortable, souple, profondément, intensément, lentement, Insister sur l’expiration, profondément  ; pendant l’expiration, rentrer le bas-ventre (« hara ou tanden » une largeur de main sous le nombril), Ne rien forcer, trouver son rythme personnel… EXEMPLE DE RESPIRATION EN 4 TEMPS 1. 2. 3. 4.

Inspiration, en comptant lentement jusque 4 ou 5, Rétention du souffle de même durée, Expiration lente, de durée double (nez, puis bouche : souffler), Court moment « à vide », sans suffoquer !

ATTITUDE MENTALE Conscientiser, déguster cet instant précieux de respiration en 4 temps (nous respirons plus de 20 000 fois par jour (18 à 20 x par minute). Bien ressentir, réveiller les sensations physiques en soi Diriger l’énergie mentalement, vers telle ou telle partie du corps Ne pas « penser », faire le vide Laisser aller, laisser être, prendre soin de son être Écouter son cœur, parler à ses cellules ! VIVRE l’instant ! LE PRÉSENT EST UN CADEAU

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RESPIRATION EXPIRATION RELAXATION CONCENTRATION MÉDITATION AUTOSUGGESTION VISUALISATION AFFIRMATION MOUVEMENT – REPOS – SOMMEIL NUTRITION NON DÉPENDANCE AMOUR – AMITIÉ – SPIRITUALITÉ TOUT EST ENTRAÎNEMENT = LIBERTÉ Fig. 23  La respiration consciente avec ses buts et ses résultats.

Citations Feront-elles écho dans votre vie ? Ces quelques phrases de personnages lumineux vous révèleront-elles que, vous aussi, vous êtes peut-être plus lumineux que vous ne le pensez ? Ces citations vous bousculeront-elles dans votre vie ? vous feront-elles avancer avec plus de conscience et de présence ? Ces citations peuvent être ressenties comme des paroles d’amour, de sagesse que l’on pourra toujours relire.

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Vous pourrez en apprendre certaines par cœur et vous pourrez vous les répéter quand vous en aurez besoin comme une prière ou un mantra. Ou comme ce médecin-dentiste dont j’ai parlé plus avant, qui avait découvert l’Amour, ces citations pourraient être un tremplin pour aller plus avant sur votre chemin de vie. CHRISTIANE SINGER

« Qu’importe à Dieu par quelle voie nous parvenons à Lui ! Et de quel bois nous alimentons le feu qui nous consume ! L’ardeur du désir compte seule ! » (Du bon usage des crises, Christiane Singer, 1996, Albin Michel, reproduit avec l’aimable autorisation des éditions Albin Michel) « Chaque passion donne au monde une chance supplémentaire de briser les murailles d’indifférence derrière lesquelles l’humanité a pris ses quartiers d’hiver, une chance supplémentaire d’entrer enfin dans la ferveur. » « L’amour est visionnaire. Il voit la divine perfection de l’être aimé au-delà des apparences auxquelles le regard des autres s’arrête. » « Quelqu’un qui ne laisse pas la réalité déranger ses rêves est un sage. » (La mort viennoise, Christiane Singer, 1978, Albin Michel, reproduit avec l’aimable autorisation des éditions Albin Michel) « L’amour a ceci de commun avec la grâce que tout – et jusqu’à la manière de pousser une porte ou de nouer un lacet – est modifié. Rien de ce qui était avant ne demeure. » « L’amour est la grande affaire de notre vie. Ce que l’Éros ouvre à l’être c’est la dissolution de l’ego dans quelque chose qui le dépasse. » « Le meilleur et le pire ne sont que le recto et le verso du même. » (Seul ce qui brûle, Christiane Singer, 2006, Albin Michel, reproduit avec l’aimable autorisation des éditions Albin Michel) « Qui peut mieux qu’un enfant nous arracher à toutes nos amarres ? » « Dieu a créé les riches pour donner aux pauvres le paradis en spectacle. » (La mort viennoise, Christiane Singer, 1978, Albin Michel, reproduit avec l’aimable autorisation des éditions Albin Michel) « Ne jamais oublier d’aimer exagérément : c’est la seule bonne mesure. » « L’amour n’est pas un sentiment. C’est la substance même de la création. »

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« Il n’est que l’expérience menée à terme qui libère. » « L’éducation n’est qu’un tissage de regards. » « Pourquoi seulement choisir le plaisir quand on peut avoir la joie, la gratitude, la mélancolie même ? » (Derniers fragments d’un long voyage, Christiane Singer, 2007, Albin Michel, reproduit avec l’aimable autorisation des éditions Albin Michel) RAINER MARIA RILKE

« Le partage total entre deux êtres est impossible et chaque fois que l’on pourrait croire qu’un tel partage a été réalisé, il s’agit d’un accord qui frustre l’un des partenaires, ou même tous les deux, de la possibilité de se développer pleinement. Mais lorsqu’on a pris conscience de la distance infinie qu’il y aura toujours entre deux êtres humains, quels qu’ils soient, une merveilleuse vie “côte à côte” devient possible : il faudra que les deux partenaires deviennent capables d’aimer cette distance qui les sépare et grâce à laquelle chacun des deux aperçoit l’autre tout entier, découpé sur le ciel. » HENRI BERGSON

« Il faut agir en homme de pensée et penser en homme d’action » GUSTAVE THIBON

« Il faut vivre comme l’on pense, sinon on finit par penser comme l’on vit » BERNARD SHAW

«  Il y a des gens qui voient le monde comme il est et qui se demandent pourquoi. Il y en a d’autres qui rêvent le monde comme il n’a jamais été et qui se demandent pourquoi pas. » GOETHE JOHANN

« Vérité élémentaire, dont l’ignorance a tué d’innombrables idées et projets splendides  : dès l’instant où tu t’engages à fond, la Providence, elle aussi, se met en marche. » «  Des circonstances infinies se succèderont pour t’aider, des occasions qui sans cela ne seraient jamais advenues… » « Quelque projet que tu te croies capable d’entreprendre, ou rêve d’entreprendre, fais-le, commence-le. »

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«  L’audace porte en soi le génie, le pouvoir et la magie  : commence tout de suite ! » DALAÏ LAMA

Vœux de vie et d’humour du Dalaï Lama, qui valent la peine d’être lus et partagés, même si l’on n’est pas bouddhiste. 1. «  Tenez compte du fait que le grand amour et les grandes réussites impliquent de grands risques. » 2. « Lorsque vous perdez, ne perdez pas la leçon. » 3. « Suivez les trois R : Respect de soi-même, Respect des autres, Responsabilité de tous vos actes. » 4. « Ne pas obtenir ce que vous voulez est parfois un merveilleux coup de chance. » 5. « Apprenez les règles pour savoir comment les transgresser correctement. » 6. « Ne laissez pas une petite dispute meurtrir une grande amitié. » 7. « Lorsque vous réalisez que vous avez commis une erreur, prenez immédiatement des mesures pour la corriger. » 8. « Passez un peu de temps seul(e) chaque jour. » 9. « Ouvrez vos bras au changement, mais ne laissez pas s’envoler vos valeurs. » 10. « Rappelez-vous que le silence est parfois la meilleure des réponses. » 11. « Vivez votre vie d’une façon bonne et honorable. Ainsi, lorsque vous vieillirez et que vous regarderez en arrière, vous en profiterez une deuxième fois. » 12. « Un foyer aimant est la fondation de votre vie. La meilleure des relations est celle dans laquelle l’amour que chacun porte à l’autre dépasse le besoin que vous avez de l’autre. » 13. « Dans les désaccords que vous avez avec ceux que vous aimez, ne vous occupez que de la situation actuelle. Ne réveillez pas le passé. » 14. « Partagez votre savoir. C’est une manière d’atteindre l’immortalité. » 15. « Soyez tendre avec la terre. » 16. « Une fois par an, allez quelque part où vous n’êtes jamais allé auparavant. » 17. « Jugez vos succès d’après ce que vous avez dû sacrifier pour les obtenir. »

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JANUSZ KORCZAK

« Sois toi-même apprends à te connaître avant de prétendre connaître les autres, mesure tes capacités Parmi tous ceux que tu pourrais avoir à comprendre, élever ou instruire, tu viens en premier, car c’est par toi qu’il faut commencer Sois ce que tu es et observe attentivement, mais ne demande rien. As-tu un sourire doux et un regard patient ? Ne dis rien, cherche ta propre voie » Tiré du livre Comment aimer un enfant, Éditions Robert Laffont, collection Réponse, 1998. PIERRE PRADERVAND

Le simple art de bénir (PRADERVAND P. Vivre sa spiritualité au quotidien. Éditions Jouvence, 2007) « Au réveil, bénissez votre journée, car elle déborde déjà d’une abondance de biens que vos bénédictions font apparaître. Car bénir signifie reconnaître le bien infini qui fait partie intégrante de la trame même de l’univers. Il n’attend qu’un signe de vous pour se manifester. En croisant les gens dans la rue, dans le bus, sur votre lieu de travail, bénissez-les tous. La paix de votre bénédiction sera la compagne de leur chemin, et l’aura de son discret parfum une lumière sur leur route. Bénissez ceux que vous rencontrez dans leur santé, dans leur travail, leur joie, leur relation au divin, à eux-mêmes et aux autres. Bénissez-les dans leur abondance et dans leurs finances. Bénissez-les de toutes les façons concevables, car de telles bénédictions ne sèment pas seulement les semences de la guérison mais, un jour, jailliront comme autant de fleurs de joie dans les espaces arides de votre propre vie. En vous promenant, bénissez votre village ou votre cité, ceux qui la gouvernent et ses enseignants, ses infirmières et ses balayeurs, ses prêtres et ses prostituées. À l’instant même où quelqu’un exprime la moindre agressivité, colère ou manque de bonté à votre égard, répondez par une bénédiction silencieuse. Bénissez-les totalement, sincèrement, joyeusement car de telles bénédictions

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sont un bouclier qui les protège de l’ignorance de leurs méfaits, et détourne la flèche qui vous est adressée. Bénir signifie désirer et vouloir inconditionnellement, totalement et sans réserve aucune le bien illimité – pour les autres et les événements de la vie – en puisant aux sources les plus intimes et les plus profondes de votre être. Cela signifie révérer et considérer avec un émerveillement total ce qui est toujours un don du Créateur – et cela quelles que soient les apparences. Celui qui est porté par votre bénédiction est mis à part, consacré, entier. Bénir signifie invoquer la protection divine sur quelqu’un ou quelque chose, penser avec une reconnaissance profonde à elle, l’évoquer avec gratitude. Cela signifie encore appeler le bonheur sur quelqu’un – encore que nous ne soyons jamais la source de la bénédiction, mais simplement le témoin joyeux de l’abondance de la vie. Bénir tout et tous sans discrimination aucune, constitue la forme ultime du don, car ceux que vous bénissez ne sauront jamais d’où vient ce rayon de soleil qui soudain perça les nuages de leur ciel, et vous serez rarement les témoins de cette lumière dans leur vie. Quand, dans votre journée quelque événement inattendu vous bouleverse vous autant que vos plans, éclatez en bénédictions, car la vie est en train de vous apprendre une leçon, même si sa coupe peut vous sembler amère. Car cet événement que vous pensez être si indésirable, vous l’avez en fait suscité, afin d’apprendre la leçon qui vous échapperait si vous hésitiez à le bénir. Les épreuves sont des bénédictions cachées, et des cohortes d’anges suivent leurs traces. Bénir signifie reconnaître une beauté omniprésente cachée aux yeux matériels. C’est activer la loi universelle de l’attraction qui, du fond de l’univers amènera dans votre vie exactement ce dont vous avez besoin dans le moment présent pour grandir, progresser, et remplir la coupe de votre joie. Quand vous passez devant une prison, bénissez ses habitants dans leur innocence, leur bonté, la pureté de leur essence et leur pardon inconditionnel. Car on ne peut qu’être prisonnier de l’image qu’on a de soi-même, et un homme libre peut marcher sans chaînes dans la cour d’une prison, tout comme les citoyens d’un pays libre peuvent être prisonniers quand la peur se tapit dans leur pensée. Quand vous passez devant un hôpital, bénissez ses patients dans la plénitude de leur santé, car même dans leur souffrance et leur maladie, cette plénitude attend simplement d’être découverte. Quand vous voyez une personne en pleurs ou apparemment brisée par la vie, bénissez-la dans sa vitalité et dans sa joie, car les sens ne présentent que l’inverse de la splendeur et de la perfection ultimes que seul l’œil intérieur peut percevoir. Il est impossible de

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bénir et de juger en même temps. Alors maintenez en vous ce désir de bénir comme une incessante résonance intérieure et comme une perpétuelle prière silencieuse, car ainsi vous serez de ceux qui procurent la paix, et un jour vous découvrirez partout la face même de Dieu. » P.S. Et par-dessus tout, n’oubliez pas de bénir cette personne merveilleuse et totalement belle dans sa vraie nature, et si digne d’amour, que vous êtes. Qu’appelons-nous « réussir » ? Qu’ont-ils de particulier ceux qui réussissent ?

La réponse est simple : choisir librement entre l’échec et le succès, mais la majorité des gens ne savent pas que ce choix est possible à chaque instant, tout en restant serein. Ceci implique de s’observer, de remettre souvent en question le bien-fondé de certaines des idées bien ancrées en nous dont nous parvenons difficilement à nous débarrasser, au lieu de cultiver des certitudes tout en observant seulement autrui avec scepticisme, et ce qui se passe autour de nous. Ainsi, ma vie a pris un tournant lorsque j’ai découvert que la foi bien orientée, pouvait insuffler à chacune de mes pensées une vigueur immense et que, poussé par cette confiance en Dieu et en moi, je pouvais atteindre plus « naturellement » et avec plus de vigueur, les objectifs que je m’étais assignés. Un engagement. La foi devient alors le chimiste de mon esprit, fait converger mes pensées, qui émettent alors des vibrations captées dans mon subconscient, les transforme en une évidence concrète. Quel que soit le nom que vous lui donnez, « BONNE FOI » à vous, à votre équipe, à ceux que vous aimez, aux autres… à tous ceux et toutes celles qui vous entourent ! Un conte amérindien (d’auteur inconnu)

Un vieux chef indien et son très jeune petit-fils sont assis silencieux devant un feu de camp, par un beau soir. Le jeune demande tout à coup à l’ancêtre  : «  Grand-père, pourquoi les hommes sont-ils souvent si méchants ? » Le vieux répond : « C’est parce que, en chacun d’eux, deux loups se battent sauvagement, chacun pour dominer l’autre. »

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Et le petit-fils : « Mais pourquoi chacun veut-il dominer ? » Le grand-père : « Parce que l’un cherche la paix et la sérénité, et l’autre veut imposer la haine et la guerre. » Alors, l’enfant demande : « Et lequel gagne, à la fin ? » L’ancien répond : « Celui des deux que tu nourris le plus. » Le roi et son fils (Conte asiatique, d’auteur inconnu)

Un roi avait pour fils unique un jeune prince courageux, habile et intelligent. Pour parfaire son apprentissage de la vie, il l’envoya auprès d’un vieux sage. « Éclaire-moi sur le sentier de la vie », demanda le prince. « Si je te réponds, mes paroles s’évanouiront comme les traces de tes pas dans le sable », répondit le sage. «  Cependant je veux bien te donner quelques indications. Sur ta route, tu trouveras 3 portes. Lis les préceptes indiqués sur chacune d’entre elles. Un besoin irrésistible te poussera à les suivre. Ne cherche pas à t’en détourner, car tu serais condamné à revivre sans cesse ce que tu aurais fui. Je ne puis t’en dire plus. Tu dois éprouver tout cela dans ton cœur et dans ta chair. Va, maintenant. Suis cette route, droit devant toi. » Le vieux sage disparut et le prince s’engagea sur le chemin de la vie. Il se trouva bientôt face à une grande porte sur laquelle on pouvait lire « Change le monde ». «  C’était bien là mon intention, pensa le prince, car si certaines choses me plaisent dans ce monde, d’autres ne me conviennent pas. » Et il entama son premier combat. Son idéal, sa fougue et sa vigueur le poussèrent à se confronter au monde, à entreprendre, à conquérir, à modeler la réalité selon son désir. Il y trouva le plaisir et l’ivresse du conquérant, mais pas l’apaisement du cœur. Il réussit à changer certaines choses mais beaucoup d’autres lui résistèrent. Bien des années passèrent. Un jour il rencontra le vieux sage qui lui demanda : « Qu’as-tu appris sur le chemin ? » « J’ai appris, répondit le prince, à discerner ce qui est en mon pouvoir et ce qui m’échappe, ce qui dépend de moi et ce qui n’en dépend pas. » « C’est bien, dit le vieil homme. Utilise tes forces pour

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agir sur ce qui est en ton pouvoir. Oublie ce qui échappe à ton emprise. » Et il disparut. Peu après, le Prince se trouva face à une seconde porte. On pouvait y lire « Change les autres ». « C’était bien là mon intention, pensa-t-il. Les autres sont source de plaisir, de joie et de satisfaction mais aussi de douleur, d’amertume et de frustration. » Et il s’insurgea contre tout ce qui pouvait le déranger ou lui déplaire chez ses semblables. Il chercha à infléchir leur caractère et à extirper leurs défauts. Ce fut là son deuxième combat. Bien des années passèrent. Un jour, alors qu’il méditait sur l’utilité de ses tentatives de changer les autres, il croisa le vieux sage qui lui demanda : « Qu’as-tu appris sur le chemin ? » « J’ai appris, répondit le Prince, que les autres ne sont pas la cause ou la source de mes joies et de mes peines, de mes satisfactions et de mes déboires. Ils n’en sont que le révélateur ou l’occasion. C’est en moi que prennent racine toutes ces choses. » « Tu as raison, dit le sage. Par ce qu’ils réveillent en toi, les autres te révèlent à toi-même. Sois reconnaissant envers ceux qui font vibrer en toi joie et plaisir. Mais sois-le aussi envers ceux qui font naître en toi souffrance ou frustration, car à travers eux la vie t’enseigne ce qu’il te reste à apprendre et le chemin que tu dois encore parcourir. » Et le vieil homme disparut. Peu après, le Prince arriva devant une porte où figuraient ces mots « Changetoi toi-même». « Si je suis moi-même la cause de mes problèmes, c’est bien ce qui me reste à faire. » se dit-il. Et il entama son troisième combat. Il chercha à infléchir son caractère, à combattre ses imperfections, à supprimer ses défauts, à changer tout ce qui ne lui plaisait pas en lui, tout ce qui ne correspondait pas à son idéal. Après bien des années de ce combat où il connut quelque succès mais aussi des échecs et des résistances, le Prince rencontra le sage qui lui demanda : « Qu’as-tu appris sur le chemin ? » «  J’ai appris, répondit le Prince, qu’il y a en nous des choses qu’on peut améliorer, d’autres qui nous résistent et qu’on n’arrive pas à briser. » « C’est bien » dit le sage. « Oui, poursuivit le Prince, mais je commence à être las de me battre contre tout, contre tous, contre moi-même. Cela ne finira-t-il jamais ? Quand trouverai-je le repos  ? J’ai envie de cesser le combat, de renoncer, de tout abandonner, de lâcher prise. » « C’est justement ton prochain apprentissage, dit le

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vieux sage. Mais avant d’aller plus loin, retourne-toi et contemple le chemin parcouru. » Et il disparut. Regardant en arrière, le prince vit dans le lointain la troisième porte et s’aperçut qu’elle portait sur sa face arrière une inscription qui disait : « Accepte-toi toi-même. » Le Prince s’étonna de ne point avoir vu cette inscription lorsqu’il avait franchi la porte la première fois, dans l’autre sens. «  Quand on combat on devient aveugle, se dit-il. » Il vit aussi, gisant sur le sol, éparpillé autour de lui, tout ce qu’il avait rejeté et combattu en lui  : ses défauts, ses ombres, ses peurs, ses limites, tous ses vieux démons. Il apprit alors à les reconnaître, à les accepter, à les aimer. Il apprit à s’aimer lui-même sans plus se comparer, se juger, se blâmer. Il rencontra le vieux sage qui lui demanda : « Qu’as-tu appris sur le chemin ? » « J’ai appris, répondit le Prince, que détester ou refuser une partie de moi, c’est me condamner à ne jamais être en accord avec moi-même. J’ai appris à m’accepter moi-même, totalement, inconditionnellement. » «  C’est bien, dit le vieil homme, c’est la première sagesse. Maintenant tu peux repasser la troisième porte. » À peine arrivé de l’autre côté, le prince aperçut au loin la face arrière de la seconde porte et y lut : « Accepte les autres.» Tout autour de lui il reconnut les personnes qu’il avait côtoyées dans sa vie ; celles qu’il avait aimées comme celles qu’il avait détestées. Celles qu’il avait soutenues et celles qu’il avait combattues. Mais, à sa grande surprise, il était maintenant incapable de voir leurs imperfections, leurs défauts, ce qui autrefois l’avait tellement gêné et contre quoi il s’était battu. Il rencontra à nouveau le vieux sage. «  Qu’as-tu appris sur le chemin  ?  » demanda ce dernier. «  J’ai appris, répondit le Prince, qu’en étant en accord avec moi-même, je n’avais plus rien à reprocher aux autres, plus rien à craindre d’eux. J’ai appris à accepter et à aimer les autres totalement, inconditionnellement. » « C’est bien, dit le vieux sage. C’est la seconde sagesse. Tu peux franchir à nouveau la deuxième porte. » Arrivé de l’autre côté, le Prince aperçut la face arrière de la première porte et y lut : « Accepte le monde. » Curieux, se dit-il, que je n’aie pas vu cette inscription la première fois. Il regarda autour de lui et reconnut ce monde qu’il avait cherché à conquérir, à transformer, à changer. Il fut frappé par l’éclat et la beauté de toute chose.

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Par leur perfection. C’était pourtant le même monde qu’autrefois. Était-ce le monde qui avait changé ou son regard ? Il croisa le vieux sage qui lui demanda : « Qu’as-tu appris sur le chemin ? » « J’ai appris, dit le Prince, que le monde est le miroir de mon âme. Que mon âme ne voit pas le monde, elle se voit dans le monde. Quand elle est enjouée, le monde lui semble gai. Quand elle est accablée, le monde lui semble triste. Le monde, lui, n’est ni triste ni gai. Il est là ; il existe ; c’est tout. Ce n’était pas le monde qui me troublait, mais l’idée que je m’en faisais. J’ai appris à l’accepter sans le juger, totalement, inconditionnellement. » « C’est la troisième Sagesse, dit le vieil homme. Te voilà à présent en accord avec toi-même, avec les autres et avec le monde. » Un profond sentiment de paix, de sérénité, de plénitude envahit le prince. Le silence l’habitat. « Tu es prêt, maintenant, à franchir le dernier seuil, dit le vieux sage, celui du passage du silence de la plénitude à la plénitude du silence. » Et le vieil homme disparut. Pardonner (Adaptation : Jean Monbourquette – Philippe Saint-Cheron – Lewis Smedes)

Pardonner est un chemin en plusieurs étapes, et ce n’est pas le plus facile ! Trois formes du non-pardon : 1. « Tu m’as blessé(e), et je t’en veux !» 2. « Je ne peux pas accepter ce qui est, je voudrais que cela ne soit pas. » 3. « Je suis encore en colère à cause de ce qui est arrivé. » Ce ressentiment, ou non-pardon, est une émotion négative et destructrice qui aliène celui qui l’abrite. Bien compréhensible, le ressenti devient un poison s’il stagne longtemps. Il s’ajoute à la douleur de l’offense et empêche d’atteindre la paix intérieure. Trois erreurs : 1. Pardonner serait-ce « oublier » ? : C’est au contraire, lâcher prise volontairement du désir de vengeance et avancer pas à pas, difficilement, vers la liberté. C’est «  mettre à distance  » ce qui s’est produit, ne plus y réagir émotionnellement, tout en se souvenant des

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circonstances de l’action d’offense pour éviter de la renouveler. C’est éviter de perpétuer en soi et chez les autres le mal subi, éviter de rester accroché au passé et de vivre le ressentiment permanent. 2. Pardonner, serait-ce « renoncer à ses droits » ? : Faire valoir ses droits représente un aspect important du respect de soi-même. Ce n’est pas excuser, ni nier l’offense, ni accepter qu’elle continue. 3. Pardonner, serait-ce « se réconcilier » ? : Pardon et réconciliation sont deux chemins différents, qui ne vont pas forcément ensemble : c’est choisir de se réconcilier ou de ne plus entrer en relation avec l’offenseur. Ce n’est pas forcément se retrouver comme avant l’offense. Douze étapes : 1. Décider de ne pas se venger et faire cesser les gestes offensants, 2. Reconnaître l’existence de sa blessure, sa dimension, 3. Partager sa blessure avec quelqu’un, oser se confier, 4. Bien identifier la perte, pour en faire le deuil, 5. Accepter sa colère et son envie de se venger, 6. Se pardonner à soi-même, 7. Commencer à comprendre son offenseur, 8. Trouver le sens de la blessure dans sa vie, 9. Se savoir digne de pardon… c’est déjà pardonner, 10. Cesser de s’acharner à vouloir pardonner, 11. S’ouvrir à la grâce de pardonner, 12. Décider de mettre fin à la relation, ou de la renouveler. Questions : 1. À qui n’ai-je pas (encore) pardonné ? 2. Est-ce que je souhaite vraiment entrer dans le chemin du pardon ? 3. Est-ce que je retire un quelconque avantage de ce(s) ressentiment(s) ? 4. Suis-je prêt à me pardonner à moi-même ? 5. Suis-je prêt au lâcher prise ?

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Les pardons les plus difficiles : • Au parent décédé, • Au parent invisible qui a donné son enfant à adopter, • Au patron injuste mais inconnu au sommet de la hiérarchie, • À tous ceux qui ne se repentent pas, qui ne se sentent pas concernés, ni coupables, ou qui se moquent des conséquences de leurs actes, • À soi-même, lorsqu’on se sent coupable. Cependant, le pardon contient en germe la guérison de celui qui a été offensé, quelle que soit l’attitude de l’offenseur. C’est cesser de cohabiter avec de vieux cadavres, c’est vidanger ses citernes, se préparer à accueillir pleinement sa Vie.

Références ALBOM M. La dernière leçon : Le vieil homme qui m’a appris la vie. Éditions Pocket, Paris, 2004. BÉLANGER B. La suggestologie. Retz, Paris, 1978. BENSABAT S. Vive le stress. Changer le message du stress en énergie positive. Robert Laffont, Paris, 1998. BERNHEIM H. De la suggestion. Éditions CEPL, France, 1975. BOON H., DAVROU Y., MACQUET J-C. La sophrologie. Éditions CEPL, France, 1976. DREYFUSS C. Les groupes de rencontres. Éditions CEPL, France, 1978. FLORENSKY P. La colonne et le fondement de la vérité. Éditions L’Âge d’Homme, Suisse, 1994. GUIRE W., HULL R. C.G Jung parle. Éditions Buchet-Chastel, Paris, 1998. HARTUNG H. Ici et maintenant. Éditions Siloë, Nantes, 1989. HAWKING S. Une brève histoire du temps. Éditions J’ai lu, Paris, 2008. PRADERVAND P. Plus jamais victime. Éditions Jouvence, Archamps, 2001. Vivre sa spiritualité au quotidien. Éditions Jouvence, Archamps, 2007. ROGERS C. Le développement de la personne. InterEditions, Paris, 2005. La relation d’aide et la psychothérapie. ESF, Paris, 2010. RUIZ M. Les quatre accords toltèques, la voie de la liberté personnelle. Jouvence, Archamps, 2005. SAINT ISAAC LE SYRIEN. Les discours ascétiques. Éditions Monastère St Antoine le Grand, 2006 SHAPIRO D. L’intelligence du corps. Éditions J’ai lu, Paris, 2004.

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SINGER C. La mort viennoise. Albin Michel, Paris, 1978. Du bon usage des crises. Albin Michel, Paris, 1998. Seul ce qui brûle. Albin Michel, Paris, 2006. Derniers fragments d’un long voyage. Albin Michel, Paris, 2007. TOLLE E. Le pouvoir du moment présent. Éditions Ariane, Outremont, 2000.

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Conclusion Comme conclusion, nous aimerions vous laisser sur cette magnifique parole du Bouddha qu’il adressa un jour à ses disciples : « N’ACCEPTEZ JAMAIS QUELQUE CHOSE PARCE QUE JE VOUS L’AI DIT. MÉDITEZ, RÉFLECHISSEZ, EXAMINEZ BIEN ET SEULEMENT QUAND VOUS ÊTES SÛRS QUE CELA EST BON POUR VOUS, ACCEPTEZ-LE. »