Electrochimie: Concepts fondamentaux illustrés 9782759810666

L’ouvrage propose une approche à la fois conceptuelle et pratique des phénomènes et des méthodes de l’électrochimie qui

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Electrochimie: Concepts fondamentaux illustrés
 9782759810666

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ÉLECTROCHIMIE CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Grenoble Sciences Grenoble Sciences est un centre de conseil, expertise et labellisation de l’enseignement supérieur français. Il expertise les projets scientifiques des auteurs dans une démarche à plusieurs niveaux (référés anonymes, comité de lecture interactif) qui permet la labellisation des meilleurs projets après leur optimisation. Les ouvrages labellisés dans une collection de Grenoble Sciences ou portant la mention Sélectionné par Grenoble Sciences (Selected by Grenoble Sciences) correspondent à :  des projets clairement définis sans contrainte de mode ou de programme,  des qualités scientifiques et pédagogiques certifiées par le mode de sélection (les membres du comité de lecture interactif sont cités au début de l’ouvrage),  une qualité de réalisation assurée par le centre technique de Grenoble Sciences. Directeur scientifique de Grenoble Sciences Jean BORNAREL, professeur à l'Université Joseph Fourier, Grenoble I On peut mieux connaître Grenoble Sciences en visitant le site web : http://grenoble-sciences.ujf-grenoble.fr On peut également contacter Grenoble Sciences : Tél. : (33)4 76 51 46 95 - e-mail : [email protected]

Livres et pap-ebooks Grenoble Sciences labellise des livres papier (en langue française et en langue anglaise) mais également des ouvrages utilisant d’autres supports. Dans ce contexte, situons le concept de pap-ebooks qui se compose de deux éléments :  un livre papier qui demeure l’objet central avec toutes les qualités que l’on connaît au livre papier  un site web compagnon qui propose : – des éléments permettant de combler les lacunes du lecteur qui ne possèderait pas les prérequis nécessaires à une utilisation optimale de l’ouvrage, – des exercices pour s'entraîner, – des compléments pour approfondir un thème, trouver des liens sur internet… Le livre du pap-ebook est autosuffisant et nombreux sont les lecteurs qui n’utiliseront pas le site web compagnon. D’autres pourront l’utiliser et ce, chacun à sa manière. Un livre qui fait partie d’un pap-ebook porte en première de couverture un logo caractéristique et le lecteur trouvera les sites compagnons de plusieurs livres à l’adresse internet suivante : http://grenoble-sciences.ujf-grenoble.fr/pap-ebooks/

Grenoble Sciences bénéficie du soutien du Ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche et de la Région Rhône-Alpes. Grenoble Sciences est rattaché à l'Université Joseph Fourier de Grenoble.

ISBN 978-2-7598-0966-0 © EDP Sciences, 2013

ÉLECTROCHIMIE

CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Christine LEFROU Pierre FABRY Jean-Claude POIGNET

17, avenue du Hoggar Parc d’Activité de Courtabœuf - BP 112 91944 Les Ulis Cedex A - France

Electrochimie - Concepts fondamentaux illustrés Cet ouvrage, labellisé par Grenoble Sciences, est un des titres du secteur Sciences de la matière de la Collection Grenoble Sciences (EDP Sciences), qui regroupe des projets originaux et de qualité. Cette collection est dirigée par Jean BORNAREL, Professeur à l’Université Joseph Fourier, Grenoble 1.

Comité de lecture Michel CASSIR, professeur à l'ENSCP, Paris  Renaud CORNUT, post-doctorant au CEA, Saclay  Christophe COUDRET, chargé de recherche au CNRS, Toulouse Guy DENUAULT, senior lecturer à l'Université de Southampton, Royaume Uni  Didier DEVILLIERS, professeur à l'Université Pierre et Marie Curie, Paris VI  Bruno FOSSET, professeur au Lycée Henri IV, Paris Ricardo NOGUEIRA, professeur à Phelma, Grenoble INP Cet ouvrage a été suivi par Laura CAPOLO pour la partie scientifique et Sylvie BORDAGE du centre technique Grenoble Sciences pour sa réalisation pratique. L’illustration de couverture est l’œuvre d’Alice GIRAUD, d’après des éléments fournis par les auteurs.

Autres ouvrages labellisés sur des thèmes proches (chez le même éditeur) Electrochimie des solides. Exercices corrigés avec rappels de cours (A. Hammou & S. Georges) • Electrochimie des solides (C. Déportes et al.) • Chimie. Le minimum à savoir (J. Le Coarer) • Chimie organométallique (D. Astruc) • Méthodes et techniques de la chimie organique (sous la direction de D. Astruc en collaboration avec l'Institut Universitaire de France) • De l'atome à la réaction chimique (sous la direction de R. Barlet) • Thermodynamique chimique (M. Oturan & M. Robert) • Thermodynamique chimique - Document multimédia (J.P. Damon & M. Vincens) • Chemogénomique. Des petites molécules pour explorer le vivant (sous la direction de E. Maréchal, S. Roy & L. Lafanechère) • Radiopharmaceutiques. Chimie des radiotraceurs et applications biologiques (sous la direction de M. Comet & M. Vidal) • Abrégé de biochimie appliquée (G. Tremblin & A. Marouf) • Glossaire de biochimie environnementale (J. Pelmont) • Energie et environnement. Les risques et les enjeux d’une crise annoncée (B. Durand) • L'énergie de demain (Groupe Energie de la Société française de physique sous la direction de J.L. Bobin, E. Huffer & H. Nifenecker) • Spectroscopies infrarouge et Raman (R. Poilblanc & F. Crasnier) • La spectroscopie de résonance paramagnétique électronique (P. Bertrand) • Description de la symétrie. Des groupes de symétrie aux structures fractales (J. Sivardière) • Symétrie et propriétés physiques. Du principe de Curie aux brisures de symétrie (J. Sivardière) • Physique des diélectriques (D. Gignoux & J.C. Peuzin) • Analyse statistique des données expérimentales (K. Protassov) • Méthodes numériques appliquées pour le scientifique et l’ingénieur (J.P. Grivet) • Naissance de la physique. De la Sicile à la Chine (M. Soutif) • Science expérimentale et connaissance du vivant. La méthode et les concepts (P. Vignais, avec la collaboration de P. Vignais) • La biologie, des origines à nos jours (P. Vignais) • L'Asie, source de sciences et de techniques (M. Soutif) • Rencontre de la science et de l'art (J. Yon-Kahn) • L'air et l'eau (R. Moreau)

et d'autres titres sur le site internet : http://grenoble-sciences.ujf-grenoble.fr

AVANT-PROPOS L'électrochimie, qui traite principalement des interfaces entre matériaux, est aussi une science d'interface entre disciplines, se situant à la frontière entre la physique et la chimie. Ces deux sciences ont parfois du mal à parfaitement communiquer sans confusion dans les concepts et le vocabulaire propres à chacune. Avec le développement des nouvelles technologies, que ce soit dans la synthèse et l’élaboration de matériaux, dans les domaines de l'analyse, de l'environnement ou des énergies nouvelles, les spécialistes de divers secteurs sont aujourd’hui amenés à travailler de concert, en recherche comme en développement. Il convient donc de mettre à plat un certain nombre de notions, de manière compréhensible pour le lecteur intéressé, quelle que soit sa formation initiale. L’électrochimie est enseignée dans de nombreuses filières scientifiques, en formation de base de physique-chimie, tout comme dans les sciences de l’ingénieur. Pendant longtemps, il y eut peu d'ouvrages traitant d’électrochimie, notamment en langue française, permettant aux étudiants ou aux professionnels d'appréhender les concepts qui lui sont propres. La transmission des connaissances se faisait en grande partie par voie orale, entre maîtres et disciples, ou, au mieux, par la littérature en langue anglaise, plus fournie. Il y avait donc un manque important de manuels d'électrochimie, qui commence à se combler depuis une dizaine d'années, offrant ainsi un choix plus large de présentations, chacune ayant ses propres spécificités, sa propre originalité. Cependant, certains points, parfois obscurs dans bon nombre d’écrits, restent souvent passés sous silence, ou même ont été oubliés avec le temps. Cela pourrait s’expliquer par la demande toujours plus pressante d'avancement des technologies, mais va à l’encontre d’une compréhension approfondie et peut ainsi être source de confusion, voire d’erreurs. Ce livre s’appuie en grande partie sur la démarche suivie lors de l’élaboration du cours donné aux élèves ingénieurs de l’ENSEEG (Grenoble-INP) par Christine LEFROU. Il présente plusieurs développements inédits et est une invitation à creuser les concepts fondamentaux concernant les phénomènes qui se produisent dans une cellule électrochimique. L'essentiel est consacré au déplacement des espèces dans les systèmes électrochimiques complets, sans vouloir approfondir les mécanismes de réaction aux électrodes, car ce domaine est bien détaillé dans d'autres ouvrages. Il se découpe en quatre chapitres offrant une progression dans l'approche. Si quelques redondances en résultent, elles ne sont pas fortuites mais correspondent à une démarche pédagogique voulue pour conduire à une élévation de niveau par étapes. C’est à un véritable « voyage physico-chimique entre deux électrodes » que nous voudrions vous inviter… avec ce petit conseil en forme de maxime pour profiter du voyage : le promeneur sait que plus il se déplace vite, moins il enregistre les paysages qu'il parcourt, et moins il connaît les habitants du pays qu’il visite…

VI

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

GUIDE DE LECTURE Voici quelques indications pour bien démarrer ce voyage… En premier lieu, deux niveaux principaux de lecture sont offerts. L’un dégage l’essentiel, l’autre, en caractères gris plus petits, entre davantage dans le détail, avec généralement des exemples illustrant le propos. Ce deuxième niveau de lecture est donc souvent l’occasion de questions résolues numériquement, jouant le rôle d’exercices d’application intégrés au texte mais présentés de façon non traditionnelle (énoncé et résolution) pour ne pas briser le fil de la lecture. Ces exemples, et les figures qui les illustrent, donnent souvent des valeurs numériques qui ne doivent être considérées que comme des exemples pédagogiques. Même si elles sont vraisemblables, elles ne correspondent pas à de véritables données expérimentales. Certains développements comportant des calculs théoriques un peu longs, non détaillés dans le corps du texte, ainsi que quelques compléments dont la présentation ne s’imposait pas dans le fil pédagogique du texte, sont proposés au lecteur dans des annexes. Ces dernières présentent, pour une bonne moitié d’entre elles, des développements inédits et originaux. Par ailleurs, le lecteur trouvera également, dans de nombreuses notes de bas de page, des commentaires, des précisions et des renvois entre sections. Le premier chapitre est consacré aux notions de base, prérequis nécessaires à la lecture de la suite de l'ouvrage. Les définitions rigoureuses y sont rappelées et quelques aspects expérimentaux y sont abordés. Il est donc essentiellement destiné aux débutants en électrochimie. Les systèmes électrochimiques usuels sont décrits dans le deuxième chapitre où les lois élémentaires sont énoncées, sans démonstration approfondie, ce qui permet toutefois au lecteur parvenu à ce niveau de lecture de les mettre immédiatement en application. Les deux derniers chapitres et les annexes pénètrent plus au fond des notions qu’ils abordent de manière rigoureuse et souvent originale. L'un est consacré aux aspects thermodynamiques à l'équilibre, l’autre traite des dispositifs électrochimiques parcourus par un courant, donc hors équilibre. Des fiches de synthèse rappelant les éléments essentiels de chaque chapitre sont placées à la fin du livre. Enfin, pour aider le lecteur à s’auto-évaluer, des questions sont posées à la fin de chaque chapitre et leurs réponses sont rassemblées en fin d’ouvrage. Les applications de l’électrochimie ne sont pas approfondies ici, compte tenu de l’objectif fixé. Cependant, pour montrer que les concepts développés ne sont pas déconnectés de la réalité technologique, certaines applications sont évoquées dans des planches illustrées. Ces développements peuvent être lus de manière indépendante du cœur du texte. Dans la table des matières, ils sont grisés et signalés par le symbole . La bibliographie, enfin, recense les principaux livres consultés par les auteurs au cours de leur rédaction. Elle est donc plutôt centrée sur des documents (tant en français qu’en anglais) qui comportent une présentation des notions fondamentales de l’électrochimie.

AVANT-PROPOS

VII

REMERCIEMENTS Nous tenons à exprimer nos remerciements à toutes les personnes qui ont contribué à la réalisation de ce manuel. En tout premier lieu, nous sommes très reconnaissants aux membres du comité de lecture pour le soin qu’ils ont apporté à cette tâche. Leurs suggestions ou interrogations, toujours faites avec tact et modestie, ont été riches et ont relancé notre travail pour un contenu et une rédaction améliorés. Nos remerciements vont aussi à l’ensemble des membres de Grenoble Sciences, son directeur Jean BORNAREL mais aussi Laura CAPOLO et Sylvie BORDAGE. Leur invitation à ajouter des planches illustrées nous a beaucoup plu car elles donnent une lecture plus agréable. Que les différents contributeurs à leur contenu soient aussi remerciés ici. Enfin, ceux que nous ne pouvons citer individuellement, mais qui, pourtant, ont tout autant contribué à cet ouvrage, sont les étudiants que nous avons pu côtoyer durant toutes les années d’élaboration de ce projet. Ce sont leurs questions, leurs incompréhensions de notre discours d’enseignants, qui ont alimenté notre réflexion, voire ébranlé nos certitudes ! Les auteurs

7KLVSDJHLQWHQWLRQDOO\OHIWEODQN

TABLE DES MATIÈRES 1 - Notions de base.........................................................................................................................

1

1.1 - Introduction ................................................................................................................................ 1.1.1 - Etymologie .......................................................................................................................... 1.1.2 - Evolution historique des idées ..................................................................................... 1.1.3 - Importance économique et sociologique ...............................................................

1 1 2 4

1.2 - Oxydoréduction ......................................................................................................................... 1.2.1 - Notion moderne d’oxydoréduction ...........................................................................  Les origines de la pile VOLTA ...................................................................................... 1.2.2 - Nombre d’oxydation ........................................................................................................ 1.2.3 - Comment écrire une demi-réaction rédox ..............................................................

8 8 10 13 14

1.3 - Notion de courant ..................................................................................................................... 1.3.1 - Grandeurs macroscopiques définissant le courant .............................................. 1.3.1.1 - Densité de courant ................................................................................................... 1.3.1.2 - Courant ......................................................................................................................... 1.3.1.3 - Electroneutralité et courant conservatif .......................................................... 1.3.2 - Milieux conducteurs......................................................................................................... 1.3.2.1 - Différents porteurs de charge .............................................................................. 1.3.2.2 - Différentes classes de conducteurs....................................................................  Des électrodes ................................................................................................................ 1.3.3 - Electrodes et interfaces ...................................................................................................

17 17 17 18 18 19 19 20 22 23

1.4 - Description et fonctionnement d’une chaîne électrochimique .............................. 1.4.1 - Généralités ........................................................................................................................... 1.4.1.1 - Chaîne et cellule électrochimiques .................................................................... 1.4.1.2 - Polarité des électrodes ........................................................................................... 1.4.1.3 - Convention de signe du courant à une interface .........................................  Convention sur le signe du courant ....................................................................... 1.4.2 - Passage forcé du courant : situation d’électrolyse (ou de récepteur) ........... 1.4.3 - Passage spontané du courant : situation de générateur .................................... 1.4.4 - Passage spontané ou passage forcé du courant ...................................................

26 26 26 27 28 31 32 33 35

1.5 - Notions de potentiel - tension - polarisation .................................................................. 1.5.1 - Tensions et potentiels dans une cellule électrochimique .................................. 1.5.1.1 - Electrode standard à hydrogène ........................................................................ 1.5.1.2 - Electrodes de référence .......................................................................................... 1.5.1.3 - Polarité des électrodes ........................................................................................... 1.5.2 - Polarisations et surtensions dans une cellule électrochimique.......................

35 35 36 36 40 41

X

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

1.6 - Expériences d’électrochimie ................................................................................................. 1.6.1 - Dispositifs de mesure ...................................................................................................... 1.6.2 - Dispositifs d’alimentation et de contrôle .................................................................  Appareils électrochimiques....................................................................................... 1.6.3 - Différents types de contrôle électrique .................................................................... 1.6.4 - Régime stationnaire ......................................................................................................... 1.6.5 - Principales méthodes électrochimiques ..................................................................

42 42 42 44 45 46 48

Questions sur le chapitre 1 ..............................................................................................................

50

2 - Description simplifiée des systèmes électrochimiques ................................

53

2.1 - Caractéristiques des systèmes à l’équilibre thermodynamique .............................. 2.1.1 - Répartition des potentiels électriques à l’équilibre .............................................. 2.1.2 - Potentiométrie à l’équilibre .......................................................................................... 2.1.2.1 - Loi de NERNST .............................................................................................................. 2.1.2.2 - Potentiel standard apparent ................................................................................ 2.1.2.3 - Les couples rédox de l’eau ....................................................................................  Régulation de la carburation des moteurs ..........................................................

53 54 55 55 58 59 60

2.2 - Caractéristiques des systèmes parcourus par un courant ......................................... 2.2.1 - Phénomènes mis en jeu lors du passage du courant .......................................... 2.2.1.1 - Conduction en volume ........................................................................................... 2.2.1.2 - Phénomènes aux interfaces.................................................................................. 2.2.2 - Phénomènes faradiques ................................................................................................. 2.2.2.1 - Courant faradique et courant capacitif ............................................................. 2.2.2.2 - Loi de FARADAY............................................................................................................ 2.2.2.3 - Rendement faradique .............................................................................................  Stockage de l’énergie : les batteries Li Métal Polymère (LMP) ..................... 2.2.3 - Répartition de la tension de la cellule : profil de potentiel ................................ 2.2.4 - Chute ohmique dans un milieu conducteur ........................................................... 2.2.4.1 - Loi d’OHM et chute ohmique ................................................................................ 2.2.4.2 - Sens de déplacement par migration ................................................................. 2.2.4.3 - Conductivités molaires et nombres de transport ......................................... 2.2.4.4 - Electrolyte support ...................................................................................................

62 62 63 66 69 69 70 71 72 74 77 77 79 82 83

2.3 - Allure des courbes intensité-potentiel .............................................................................. 2.3.1 - Caractéristiques générales ............................................................................................ 2.3.1.1 - Signe de la polarisation .......................................................................................... 2.3.1.2 - Courbes stationnaires .............................................................................................  Stockage de l’énergie : les supercapacités........................................................... 2.3.2 - Rôle de la cinétique du transport de matière ......................................................... 2.3.2.1 - Existence d’un courant limite ............................................................................... 2.3.2.2 - Potentiel de demi-vague ....................................................................................... 2.3.3 - Rôle de la cinétique de la réaction rédox ................................................................. 2.3.4 - Additivité des courants ou densités de courant faradiques .............................. 2.3.5 - Les couples rédox de l’eau............................................................................................. 2.3.6 - Domaine d’électroactivité .............................................................................................

85 86 86 88 90 91 91 93 94 96 98 102

TABLE DES MATIÈRES

XI

2.4 - Prévision des réactions ............................................................................................................ 2.4.1 - Evolution spontanée d’un système à l’abandon ................................................... 2.4.2 - Points de fonctionnement d’un système électrochimique complet ............. 2.4.3 - Prévision des réactions en fonctionnement récepteur ....................................... 2.4.4 - Prévision des réactions en fonctionnement générateur .................................... 2.4.5 - Différents points de fonctionnement d’un système électrochimique ..........  Les premiers véhicules électriques .........................................................................

104 104 107 110 112 114 117

Questions sur le chapitre 2 ..............................................................................................................

119

3 - Description thermodynamique .....................................................................................

123

3.1 - Notions de potentiel ................................................................................................................ 3.1.1 - Potentiel électrique .......................................................................................................... 3.1.1.1 - Potentiel électrique et électroneutralité .......................................................... 3.1.1.2 - Potentiels VOLTA et GALVANI ................................................................................... 3.1.2 - Potentiels chimique et électrochimique .................................................................. 3.1.2.1 - Potentiel chimique ................................................................................................... 3.1.2.2 - Potentiel électrochimique ..................................................................................... 3.1.2.3 - Convention des tables de données thermodynamiques...........................

123 124 124 125 126 126 128 129

3.2 - Equilibre thermodynamique d’un système monophasique ..................................... 3.2.1 - Solution électrolytique.................................................................................................... 3.2.1.1 - Activité et coefficient d’activité moyens .......................................................... 3.2.1.2 - Force ionique .............................................................................................................  Corrosion des bétons armés ..................................................................................... 3.2.1.3 - Modèle de DEBYE-HÜCKEL ........................................................................................ 3.2.2 - Electrode métallique ........................................................................................................ 3.2.2.1 - Potentiel électrochimique ..................................................................................... 3.2.2.2 - Energie de FERMI ........................................................................................................ 3.2.2.3 - Travail d’extraction...................................................................................................

130 131 131 133 134 136 140 140 140 140

3.3 - Equilibre thermodynamique d’une interface.................................................................. 3.3.1 - Equilibre thermodynamique d’une interface non-réactive ............................... 3.3.2 - Equilibre thermodynamique d’une interface réactive ........................................ 3.3.3 - Equilibre thermodynamique d’une interface réactive mettant en jeu une seule réaction entre espèces neutres ................................ 3.3.4 - Equilibre thermodynamique d’une interface réactive mettant en jeu une seule réaction entre espèces chargées ............................. 3.3.4.1 - Jonction simple avec échange d’une seule espèce chargée .................... 3.3.4.2 - Interface électrochimique réactive avec une seule réaction .................... 3.3.5 - Jonction ou interface réactive multiple ....................................................................

141 141 143

3.4 - Etude thermodynamique des systèmes électrochimiques ....................................... 3.4.1 - Cellules électrochimiques sans jonction ionique ..................................................  Electrochimie et neurobiologie ............................................................................... 3.4.1.1 - Grandeurs thermodynamiques de réaction ................................................... 3.4.1.2 - Loi de NERNST ..............................................................................................................

153 153 154 156 158

146 147 147 150 151

XII

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

3.4.1.3 - Prise en compte de plusieurs équilibres chimiques .................................... 3.4.1.4 - Cas particuliers de l’intervention d’équilibres acido-basiques ................ 3.4.2 - Aspects expérimentaux .................................................................................................. 3.4.2.1 - Jonctions ioniques ................................................................................................... 3.4.2.2 - Electrodes de référence ..........................................................................................  Production industrielle d’aluminium en France ................................................

160 161 163 163 163 168

Questions sur le chapitre 3 ..............................................................................................................

171

4 - Passage d'un courant : processus hors équilibre ..............................................

173

4.1 - Bilans de matière ....................................................................................................................... 4.1.1 - Définitions des grandeurs macroscopiques liées au courant ........................... 4.1.1.1 - Flux de matière .......................................................................................................... 4.1.1.2 - Densité de courant ................................................................................................... 4.1.1.3 - Nombre de transport .............................................................................................. 4.1.2 - Bilan volumique de matière .......................................................................................... 4.1.3 - Bilan interfacial de matière ............................................................................................ 4.1.3.1 - Cas général .................................................................................................................. 4.1.3.2 - Espèces adsorbées ................................................................................................... 4.1.3.3 - Interfaces électrochimiques ................................................................................. 4.1.4 - Démonstration de la loi de FARADAY ...........................................................................  Conservation-restauration d’objets archéologiques .......................................

173 173 173 174 175 176 180 180 182 183 184 186

4.2 - Passage d’un courant dans un milieu conducteur monophasique ........................ 4.2.1 - Phénomènes de conduction : approche macroscopique .................................. 4.2.1.1 - Différents moteurs du transport ......................................................................... 4.2.1.2 - Thermodynamique des processus irréversibles linéaires .......................... 4.2.1.3 - Lien entre migration et diffusion ........................................................................ 4.2.1.4 - Expression des densités de flux molaire de matière et de courant ........ 4.2.1.5 - Equations générales dans un conducteur monophasique ....................... 4.2.2 - Phénomènes de conduction : mécanismes et ordres de grandeur ................  Les piles à combustible ............................................................................................... 4.2.2.1 - Exemples de mécanisme de conduction ......................................................... 4.2.2.2 - Mesures de conductivité ........................................................................................ 4.2.2.3 - Ordres de grandeurs des paramètres de conduction ................................. 4.2.2.4 - Modèles pour les solutions infiniment diluées ..............................................  Electrodialyse.................................................................................................................. 4.2.2.5 - Cas des solutions concentrées ............................................................................. 4.2.3 - Cas où la chute ohmique ne suit pas la loi d'OHM macroscopique ................

189 190 190 191 193 194 197 201 202 204 206 209 209 214 216 216

4.3 - Passage d’un courant à travers une interface électrochimique............................... 4.3.1 - Profils de potentiel et de concentration à une interface .................................... 4.3.1.1 - Profil de potentiel ..................................................................................................... 4.3.1.2 - Profils de concentration ......................................................................................... 4.3.1.3 - Exemple de régime transitoire : la diffusion semi-infinie ........................... 4.3.1.4 - Exemple de régime stationnaire : modèle de NERNST .................................. 4.3.1.5 - Sens des différentes densités de courant ........................................................

217 218 218 219 224 227 229

TABLE DES MATIÈRES

XIII

4.3.2 - Modèle cinétique d'une réaction hétérogène........................................................ 4.3.2.1 - Généralités .................................................................................................................. 4.3.2.2 - Vitesse d'une réaction hétérogène .................................................................... 4.3.2.3 - Modèle cinétique simplifié du mécanisme E (une étape) .......................... 4.3.2.4 - Contrôle cinétique ou étape cinétiquement limitante, déterminante . 4.3.2.5 - Réversibilité et irréversibilité d'une étape élémentaire de réaction ...... 4.3.2.6 - Rapidité d'un couple rédox ................................................................................... 4.3.3 - Polarisation d'une interface électrochimique en régime stationnaire .......... 4.3.3.1 - Profils de concentration et expression des courants limite ......................  Microscope Electrochimique à Balayage (SECM) .............................................. 4.3.3.2 - Systèmes rédox rapides ......................................................................................... 4.3.3.3 - Systèmes rédox lents............................................................................................... 4.3.3.4 - Cas général ..................................................................................................................

230 230 231 232 234 236 237 238 239 240 244 246 251

4.4 - Systèmes électrochimiques complets parcourus par un courant ........................... 4.4.1 - Cellule à un compartiment ............................................................................................ 4.4.1.1 - Cas où tous les états stationnaires obtenus sont à courant nul .............. 4.4.1.2 - Obtention d’états stationnaires à courant non-nul ..................................... 4.4.2 - Cellule à deux compartiments séparés ..................................................................... 4.4.2.1 - Différents types de séparation ............................................................................. 4.4.2.2 - Obtention d’états stationnaires à courant non-nul ..................................... 4.4.2.3 - Caractéristiques du régime transitoire : bilan HITTORF .................................  Expérience de bilan HITTORF ...................................................................................... 4.4.2.4 - Applications industrielles ......................................................................................

253 253 254 256 258 258 260 262 263 265

Questions sur le chapitre 4 ..............................................................................................................

267

Annexes .................................................................................................................................................

271

A.1.1 - Tension de jonction ionique à courant nul .................................................................. Relation de HENDERSON et ses conséquences pratiques ................................................... Eléments de démonstration de la relation de HENDERSON ...............................................

271 271 273

A.1.2 - Potentiostat et intensiostat ............................................................................................... Potentiostat...................................................................................................................................... Intentiostat .......................................................................................................................................

275 275 276

A.2.1 - Allure de la courbe intensité-potentiel pour la réduction de l’eau ou des protons : rôle de la cinétique du transport de matière .............................

277

A.2.2 - Différents points de fonctionnement d’un système électrochimique ..............

282

A.3.1 - Potentiel électrique : potentiels VOLTA et GALVANI .....................................................

285

A.3.2 - Activité moyenne d’un soluté dans un électrolyte ................................................... Chaînes électrochimiques sans jonction ionique .............................................................. Chaînes électrochimiques avec jonction ionique ..............................................................

287 288 289

A.3.3 - Modèle de DEBYE-HÜCKEL .....................................................................................................

291

XIV

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

A.3.4 - Equilibre thermodynamique d’une interface réactive mettant en jeu une seule réaction entre espèces chargées ou pas ................... Echange d’une espèce neutre M .............................................................................................. Echange d’un cation M+ .............................................................................................................. Équilibre rédox à une interface électrochimique ...............................................................

294 295 295 297

A.4.1 - Mise en évidence du rôle d’un électrolyte support sur le transport de matière et de ses conséquences dans une cellule d’électrolyse ................... Solution sans électrolyte support (solution S1) ................................................................... Solution avec électrolyte support (solution S2) ..................................................................

299 301 310

A.4.2 - Profils de concentration à une interface ....................................................................... Chronopotentiométrie avec diffusion plane semi-infinie ............................................... Chronopotentiométrie avec diffusion plane stationnaire .............................................. Chronopotentiométrie avec diffusion-convection selon le modèle de NERNST ...... Chronoampérométrie avec diffusion plane stationnaire ................................................

317 318 320 320 322

A.4.3 - Réaction électrochimique multiélectronique ............................................................. Système contrôlé par le transport de matière (nernstien) .............................................. Première étape irréversible et cinétiquement déterminante ........................................ Système à 2 électrons avec E°2 >> E°1 ..................................................................................... Système à 2 électrons avec E°2 = E°1 ........................................................................................ Système à 2 électrons avec E°2 0 νRed < 0  dans le sens de la réduction, ils sont parmi les réactifs :

νOx < 0

νe = −n < 0

νRed > 0

Certaines des espèces mises en jeu sont de type ionique, c’est-à-dire qu’elles portent une charge qui est un multiple entier de la valeur absolue de celle de l’électron, | e | = 1,6 . 10−19 C. Le facteur de proportionnalité, qui est donc un entier positif ou négatif, est appelé nombre de charge et noté par la suite zi. On parle d’anion si la charge de l’espèce est de signe identique à celle de l’électron (zi < 0) et de cation dans le cas contraire (zi > 0). Mais il n’y a pas de lien entre la charge portée par l’ion et son caractère oxydant ou réducteur : un anion (ou un cation) peut être suivant les cas un oxydant ou un réducteur.

z Les trois exemples suivants illustrent le fait qu’un réducteur peut être une espèce neutre, aussi bien qu’un cation ou un anion :

Li+ + e−

Li

Fe3+ + e−

Fe2+

Fe(CN)63− + e−

Fe(CN)64− Les nombres de charge de ces espèces sont les suivants :

z Li = 0

Li +

z Li+ = +1

Fe

2+

z Fe2+ = +2

Fe

3+

Li

z Fe3+ = +3

Fe(CN)6

4−

z Fe(CN)64− = −4

Fe(CN)6

3−

z Fe(CN) 63− = −3

De la même façon un oxydant peut porter une charge quelconque.

y

Dans d’autres cas plus compliqués, plusieurs espèces sont mises en jeu dans le bilan de la demi-réaction rédox [20] et, par convention, on n’indique dans le couple rédox que celles qui ont effectivement échangé des électrons.

z Par exemple, la demi-réaction rédox du couple AgCl/Ag s’écrit : AgCl + e− Cl− + Ag où l’espèce Cl ne subit ni oxydation ni réduction et participe pourtant au bilan de la réaction. −

[20] Le mode d’établissement du bilan d’une demi-réaction rédox est détaillé à la section 1.2.3.

y

1 - NOTIONS DE BASE

13

Il peut arriver qu’une espèce soit oxydant ou soit réducteur dans deux couples rédox différents, de manière analogue à un amphotère dans des équilibres acido-basiques.

z Par exemple, Fe2+ est oxydant dans le couple Fe2+/Fe et réducteur dans le couple Fe3+/Fe2+ : Fe2+ + 2 e− Fe

2+

Fe Fe + e− 3+

y

1.2.2 - NOMBRE D’OXYDATION Le nombre d’oxydation ou degré d’oxydation d’un élément dans un composé, noté n.o., est, selon la définition de l’IUPAC [21], « la charge qui serait présente sur un atome si tous les électrons dans chaque liaison aboutissant à cet atome étaient attribués à l’atome le plus électronégatif » [22]. Cette définition est formelle puisque les liaisons dans des édifices polyatomiques sont en général partiellement covalentes et les électrons ne sont donc que partiellement déplacés vers l’atome le plus électronégatif. De plus cette notion devient plus délicate à appréhender pour des liaisons entre atomes de valeurs d’électronégativité proches. Le lien entre le nombre de charge et les nombres d'oxydation des différents éléments d'un composé se traduit par :

"

nombre de l'élément dans le composé ! n.o. = nombre de charge du composé

différents éléments

Compte tenu des valeurs d’électronégativité des éléments, on peut retenir que :  le nombre d’oxydation de l’hydrogène dans la plupart des composés est égal à +I (en dehors du dihydrogène où il vaut 0 et de l’ion hydrure où il vaut −I) ;  le nombre d’oxydation de l’oxygène dans la plupart des composés est égal à −II (en dehors par exemple du dioxygène où il vaut 0, des peroxydes où il vaut −I et des composés fluorés comprenant des liaisons oxygène-fluor où il est supérieur ou égal à +I) ;  le nombre d’oxydation d’un atome d’halogène (c’est-à-dire fluor F, chlore Cl, brome Br, iode I et astate At) dans la plupart des composés halogénés est égal à −I (en dehors par exemple des corps purs du type X2 où il vaut 0, des composés comportant au moins une liaison de X avec un élément plus électronégatif comme dans les ions ClO− ou ClO4− où il est positif) ;  le nombre d’oxydation d’un atome d’alcalin (c’est-à-dire lithium Li, sodium Na, potassium K, rubidium Rb, césium Cs et francium Fr) dans la plupart des composés est égal à +I (en dehors des métaux correspondants où il vaut 0). Ces quelques remarques permettent de déterminer algébriquement les nombres d’oxydation des éléments dans un grand nombre de composés usuels. [21] IUPAC : International Union of Pure and Applied Chemistry. [22] L’électronégativité des atomes peut être définie de manières différentes (échelle de MULLIKEN, de PAULING…). Mais elle fait généralement référence à des propriétés non-étrangères à l’électrochimie puisqu’elle utilise les énergies correspondant à l’extraction ou l’addition d’un électron à un atome en phase gazeuse.

14

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

z Par exemple, dans l’anion MnO4−, le nombre d’oxydation du manganèse est égal à +VII

[en effet, −1 = +VII + 4×(−II)]. Dans l’anion IO3−, le nombre d’oxydation de l’iode n’est pas égal à −I puisqu’il y a une liaison oxygène-iode. Il est égal à +V [en effet, −1 = +V + 3×(−II)].

y

Cependant, dans certains cas, il est nécessaire de connaître aussi la structure du composé (par exemple la structure de LEWIS) afin de déterminer les nombres d’oxydation.

z Par exemple, l’ion peroxodisulfate S2O82− a pour structure : (O3S-O-O-SO3)2−.

Il possède donc un pont peroxo O-O et les deux atomes de soufre sont ainsi chacun au degré d’oxydation +VI [en effet, −2 = 2×(+VI) + 6×(−II) + 2×(−I)].

y

Dans d’autres cas encore, cette méthode conduit à un nombre d’oxydation virtuel, puisqu’il ne correspond qu’à une valeur moyenne. Il permet néanmoins d’équilibrer les demi-réactions rédox. Un exemple simple est celui de l’oxyde de fer Fe3O4, qui comprend des ions Fe2+ et Fe3+ dans son réseau cristallin, mais que l’on peut formellement écrire comme un oxyde de fer avec un nombre d’oxydation du fer égal à +8/3. C’est aussi le cas de nombreux composés utilisés dans le domaine des batteries [23] et appelés matériaux d’insertion, comme LixMnO2, HxWO3, LixV2O5… pour lesquels la notion de nombre d’oxydation donne lieu à divers débats ouverts encore aujourd’hui.

z On considérera par exemple que dans LixMnO2, le nombre d’oxydation du lithium est +I, celui de l’oxygène −II et donc par déduction celui du manganèse est (+IV −x).

y

1.2.3 - COMMENT ÉCRIRE UNE DEMI-RÉACTION RÉDOX Pour un couple rédox dont les deux composés sont connus, on peut écrire le bilan d’une demi-réaction rédox en procédant de différentes façons. Deux méthodes sont décrites brièvement ci-dessous.

 Première méthode On commence par écrire les deux éléments du couple rédox en ajustant, si nécessaire, les nombres stœchiométriques pour qu’il y ait conservation de l’élément changeant de nombre d’oxydation. Ensuite, le nombre d’électrons échangés est déterminé à partir de la différence entre les nombres d’oxydation de l’élément à l’état oxydé et à l’état réduit, en tenant compte des stœchiométries. On ajoute alors éventuellement des protons pour qu’il y ait conservation de la somme des charges de part et d’autre de l’équation-bilan [24]. Enfin, on ajoute éventuellement des molécules d’eau, H2O, pour qu’il y ait conservation de l’élément oxygène (ou hydrogène). On peut alors vérifier qu’il y a également conservation de l’élément hydrogène (ou oxygène) de l’équation-bilan.

z Par exemple, pour le couple Fe2O3/FeO, on écrit la conservation de l’élément fer : 2 FeO

Fe2O3

[23] Voir la planche intitulée « Stockage de l’énergie : les batteries Li Métal Polymère (LMP) ». [24] Les protons sont généralement écrits H3O+ ou H+. Nous prendrons ici la notation la plus simple, H+.

1 - NOTIONS DE BASE Ensuite, le nombre d’oxydation du fer passant de +II dans FeO à +III dans Fe2O3, on peut déterminer le nombre d’électrons échangés : 2 FeO Fe2O3 + 2 e− nombre d’oxydation : 2×(+II) 2×(+III) + 2×(−I) La conservation de la charge de part et d’autre de l’équation-bilan par ajout de protons entraîne : 2 FeO Fe2O3 + 2 H+ + 2 e− La conservation de l’élément oxygène par ajout de molécules d’eau entraîne : 2 FeO + H2O Fe2O3 + 2 H+ + 2 e− Enfin, l’écriture finale de la demi-équation rédox vérifie aussi la conservation de l’élément hydrogène.

15

y

 Seconde méthode On commence par écrire les deux éléments du couple rédox en ajustant éventuellement les nombres stœchiométriques pour qu’il y ait conservation de l’élément changeant de nombre d’oxydation. Ensuite, on ajoute éventuellement des molécules d’eau, H2O, et des protons, H+, pour qu’il y ait respectivement conservation des éléments oxygène et hydrogène. Dans l’équation-bilan, la conservation de la charge de part et d’autre permet enfin de déterminer le nombre d’électrons échangés. Cette méthode, plus formelle, évite le calcul des nombres d’oxydation mais peut être délicate si les couples rédox ne sont pas bien identifiés.

z En reprenant le couple précédent Fe2O3/FeO, on écrit dans un premier temps la conservation de l’élément fer : 2 FeO Fe2O3 La conservation de l’élément oxygène par ajout de molécules d’eau entraîne : 2 FeO + H2O Fe2O3 La conservation de l’élément hydrogène par ajout de protons entraîne : 2 FeO + H2O Fe2O3 + 2 H+ La conservation de la charge par ajout d’électrons entraîne : 2 FeO + H2O Fe2O3 + 2 H+ + 2 e−

y

Dans les exemples précédents, on fait intervenir des protons pour réaliser la conservation de l’élément hydrogène. Ce choix formel n’est pas significatif du pH du milieu où la réaction se déroule. On peut souhaiter écrire la réaction considérée en faisant intervenir des ions hydroxyde plutôt que des protons (par exemple dans une réaction faisant intervenir des ions cyanure, CN−, qui sont instables en milieu acide) :  pour la première méthode, il suffit d’équilibrer les charges en ajoutant des ions hydroxyde (OH−) plutôt que des protons,

z Reprenons le couple Fe2O3/FeO, après prise en compte de la conservation de l’élément fer et du changement

Fe2O3 + 2 e− du nombre d’oxydation du fer on a : 2 FeO La conservation de la charge de part et d’autre de l’équation-bilan par ajout d’ions hydroxyde au lieu de protons entraîne : 2 FeO + 2 OH− Fe2O3 + 2 e− La conservation de l’élément oxygène par ajout de molécules d’eau entraîne : 2 FeO + 2 OH− Fe2O3 + H2O + 2 e− On peut enfin vérifier que l’écriture finale de la demi-équation rédox vérifie aussi la conservation de l’élément hydrogène.

y

16

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

 pour la deuxième méthode, il suffit d’ajouter au bilan de la demi-réaction rédox l’équilibre d’autoprotolyse (ou auto-ionisation) de l’eau, avec le bon coefficient multiplicateur afin de faire disparaître les protons dans l’écriture du bilan.

z En reprenant l’exemple précédent, l’équilibre d’autoprotolyse de l’eau : H 2O H+ + OH− doit être multiplié par −2 pour faire disparaître les protons : ( 2 FeO + H2O Fe2O3 + 2 H+ + 2 e− ) × + 1 ( H 2O H+ + OH− ) × −2 ⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯ 2 FeO + 2 OH− Fe2O3 + H2O + 2 e−

y

Il existe d’autres cas pour lesquels l’équilibre ne s’écrit pas en faisant intervenir l’eau ou les protons, mais où il faut faire intervenir d’autres ions simples (comme les ions alcalins de type M+ ou les ions halogénure de type X−).

z C’est par exemple le cas de l’écriture de la demi-réaction du couple MnO2/LixMnO2. Le décompte des nombres

d’oxydation permet d’écrire dans une première étape (c’est le manganèse qui change de nombre d’oxydation, dans cette écriture formelle) : LixMnO2 MnO2 + x e− nombre d’oxydation : (+IV −x) +IV + −x Il faut nécessairement ajouter un produit qui contient un atome de lithium pour équilibrer cette demiréaction : on choisira l’ion Li+, pour obtenir finalement le bilan suivant : LixMnO2 MnO2 + x e− + x Li+

y

Dans un système électrochimique, tout comme en chimie rédox homogène, lorsqu’il y a une réduction, il y a toujours simultanément au minimum une oxydation, avec un bilan de transfert de charge équivalent. Il est d’usage courant dans certains domaines (bilan industriel de procédés électrolytiques ou description du fonctionnement des batteries par exemple) d’écrire une réaction chimique traduisant le bilan global de ces deux processus [25]. Afin de traduire l’égalité des charges échangées, l’écriture du bilan d’une réaction par voie électrochimique résulte de la combinaison de deux demi-réactions, avec les coefficients multiplicateurs adéquats : le bilan d’une réaction rédox ne fait pas apparaître les électrons.

z Par exemple si l’on veut écrire la réaction rédox entre les couples Ag +/Ag et Cu2+/Cu, pour faire disparaître les électrons, la demi-réaction rédox du premier couple doit être multipliée par −2 tandis que celle du deuxième couple est multipliée par +1 : ( Ag Ag+ + e− ) × −2 ( Cu Cu2+ + 2 e− ) × +1 ⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯ Cu + 2 Ag+ 2 Ag + Cu2+

[25] Autant elle est d’usage immédiat pour la chimie rédox homogène, autant cette notion de réaction bilan en électrochimie est à manier avec précaution dans les systèmes électrochimiques dès lors que l’on s’intéresse à des conditions où il y a plusieurs demi-réactions rédox se déroulant simultanément à la même interface. Pour approfondir cette question, on peut se reporter à la section 2.2.2.3 qui traite du rendement faradique.

1 - NOTIONS DE BASE

17

 Dans certains cas, une même espèce intervient simultanément comme oxydant dans un couple et comme réducteur dans l’autre. Ce type de réaction est appelé réaction de dismutation. Pour équilibrer une telle réaction, il faut d’abord repérer qu’il s’agit d’une dismutation, c’est-à-dire une réaction chimique particulière mettant en jeu deux couples rédox différents. Par exemple l’écriture suivante, bien que formellement équilibrée, n’est pas correcte pour représenter la dismutation chimique du diiode (dans la mesure où elle fait apparaître des électrons comme dans une demi-réaction rédox) : I 2 + 3 H 2O

I− + IO3− + 6 H+ + 4 e−

Le calcul des nombres d’oxydation des trois espèces mises en jeu permet de repérer cela : l’élément iode est au degré 0 dans I2, −I dans I− et +V dans IO3−. Cet équilibre n’est donc pas une demi-réaction rédox mais une réaction bilan globale des deux demi-réactions rédox correspondant aux couples IO3−/I2 et I2/I−. Les deux couples rédox conduisent aux équilibres suivants : 2 IO3− + 12 H+ + 10 e−

I2 + 6 H 2O I2 + 2 e −

2 I−

La combinaison de ces deux équilibres (avec un coefficient +5 pour le second) permet finalement d’équilibrer correctement la réaction de dismutation : 6 I 2 + 6 H 2O

10 I− + 2 IO3− + 12 H+

y

1.3 - NOTION DE COURANT Le courant est une notion macroscopique dont une des premières définitions a été donnée par AMPÈRE en 1820 : « déplacement global de charges au sein d’un conducteur ». Cette notion est reliée à son origine microscopique : le mouvement des espèces chargées. Elle correspond au débit ou flux de charges. Toute espèce élémentaire chargée possédant une masse, la notion de courant est nécessairement liée à une notion de mouvement de matière [26].

1.3.1 - GRANDEURS MACROSCOPIQUES DÉFINISSANT LE COURANT 1.3.1.1 - DENSITÉ DE COURANT En général, il y a plusieurs types d’espèces chargées en mouvement : le courant total !" est créé par le mouvement des différents porteurs de charge. La densité de courant j est la densité de flux global de charges (vecteur de module j exprimé en A m−2), c’est-à-dire la somme des densités de flux de charge de chacun des porteurs de charge : !" !" j = ! ji i

[26] Par exemple le passage d’un courant dans un métal correspond au mouvement d’ensemble des électrons. Dans la mesure où les électrons possèdent une masse, il y a donc un déplacement de matière. Le transport de matière est caractérisé en premier lieu par des flux de matière. La section 4.1.1 détaille le lien existant entre flux de matière et courant.

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ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

1.3.1.2 - COURANT

!" Pour toute surface (S) orientée par le vecteur normal n et d’aire S, l’intensité du courant traversant cette surface correspond à la quantité de charge la traversant par unité de temps. Elle est ainsi définie par : !" !" dq I = !! j .n dS = dt (S) avec : I

!" j dq dt

l’intensité du courant à travers la surface (S) !" (signe de I défini par le choix de l’orientation de n la densité de courant locale, module en un petit élément de charge traversant (S) un petit élément de durée

[27]

[A] )

[ A m−2 ] [C] [s]

Cette définition précise concerne l’intensité du courant qui est un scalaire correspondant au flux ou débit global de charge (1 A = 1 C s−1). C’est une grandeur qui n’est définie que par référence à une surface. Cependant dans certaines conditions que l’on considérera comme remplies dans la suite du document [28], on peut définir en valeur absolue l’intensité du courant dans un conducteur, c’est-à-dire en prenant n’importe quelle section du milieu conducteur. Pour ces raisons, et comme c’est l’usage dans de nombreux documents, on utilisera dans la suite du document un raccourci de vocabulaire en utilisant le mot courant pour l’intensité du courant à travers une section d’aire S.

1.3.1.3 - ELECTRONEUTRALITÉ ET COURANT CONSERVATIF L’hypothèse d’électroneutralité est valable au sein de tout milieu conducteur au niveau local, mais à l’échelle macroscopique et après un régime transitoire très court nécessaire au réarrangement des charges (d’une durée de l’ordre de la femtoseconde dans un métal [29]). Grâce à la propriété d’électroneutralité en volume d’un matériau conducteur, on peut montrer [30] que le courant est le même dans toute section de conducteur, perpendiculaire ou non à la densité de courant. On peut alors définir sans ambiguïté, en dehors du signe [31], le courant I traversant le milieu conducteur, puisqu’il est identique quelle que soit la position de la section choisie, c’est-à-dire une surface coupant l’ensemble des lignes de courant : !" !" ! !" !" I = !! j .n dS = !! j' .n' dS (S)

(S')

On dit aussi que le courant est conservatif. [27] Le lien entre le signe du courant et le choix de l’orientation de la normale à l’interface est détaillé à la section 1.4.1.3. [28] Ces conditions sont détaillées à la section suivante (1.3.1.3) et le raisonnement menant à ce résultat se trouve à la section 4.1.2. [29] Un calcul d’ordre de grandeur de ce temps transitoire d’établissement de l’électroneutralité dans un milieu conducteur est effectué à la section 3.1.1.1. [30] Le raisonnement menant à ce résultat est à la section 4.1.2. [31] Cette question du signe attribué au courant, importante en électrochimie, est détaillée à la section 1.4.1.3.

1 - NOTIONS DE BASE

19

Une conséquence importante de cette propriété est illustrée sur la figure 1.3 où l’on considère un conducteur avec une section d’aire non-constante.

(S’)

(S)

ö n'

Figure 1.3 - Schéma d’un volume conducteur de section non-constante parcouru un courant

Le courant est le même dans les deux sections considérées. Les densités de courant moyennes à ces niveaux ne peuvent donc pas être identiques : la densité de courant moyenne est supérieure au niveau de la petite section par rapport à la plus grande. On a une relation du type : I = j S = j' S'

1.3.2 - MILIEUX CONDUCTEURS L’électrochimie implique la mise en œuvre de différents matériaux conducteurs de l’électricité. Les mécanismes microscopiques accompagnant le passage du courant peuvent différer d’un matériau à l’autre. En particulier on peut classer les différents matériaux conducteurs en fonction de la nature des porteurs de charge mis en jeu.

1.3.2.1 - DIFFÉRENTS PORTEURS DE CHARGE L’existence d’un courant est liée à des mouvements d’ensemble de matière chargée. La nature microscopique des différents porteurs de charge n’est en fait bien connue que depuis seulement le début du XXe siècle. Si l’on considère l’ensemble des matériaux conducteurs, on peut distinguer différents types de porteurs de charge :  les électrons,  les trous (particules fictives provenant d’un déficit électronique dans la bande de valence d’un réseau solide),  les ions (anions ou cations, simples ou complexes),  les lacunes ou défauts chargés dans les structures solides. La connaissance des porteurs de charge (nature et quantité) dans un milieu conducteur est un préalable indispensable à la compréhension des phénomènes de conduction. Et ce n’est pas toujours évident…

20

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

z Par exemple dans une solution aqueuse de sels ferriques et ferreux, les porteurs de charge contenant l’élément

Fe sont majoritairement des cations en milieu nitrate (aquocomplexes de Fe3+ et Fe2+) alors que ce sont majoritairement des anions en présence d’ions cyanure (Fe(CN)63− et Fe(CN)64−).

y

Ce problème de détermination des porteurs de charge est l’objet encore actuellement de nombreuses recherches dans des domaines aussi variés que les solutions aqueuses, les solutions organiques où il est très fréquent d’observer la formation de paire d’ions, les sels fondus ou les liquides ioniques, les milieux polymères ou les milieux solides.

1.3.2.2 - DIFFÉRENTES CLASSES DE CONDUCTEURS A partir des grandes classes de porteurs de charge précédemment définies, on peut classer les conducteurs selon la nature des porteurs majoritaires [32] :

 Conducteurs électroniques (isolants ioniques) On trouve dans cette catégorie :  métaux (et supraconducteurs) par exemple le cuivre (environ 1 électron de conduction par atome de cuivre),  semi-conducteurs par exemple le silicium, de valence IV, avec un taux contrôlé d’impuretés de valence V (par exemple des atomes de phosphore) est un semi-conducteur de type n, pour lequel les porteurs de charge majoritaires sont les électrons. Il devient de type p, c’està-dire avec des trous comme porteurs de charge majoritaires, si on le dope avec des impuretés de valence III (par exemple des atomes d’aluminium).

 Conducteurs ioniques (isolants électroniques) ou électrolytes Il y a des exemples très divers :  solutions électrolytiques, comme une solution aqueuse contenant KCl,  sels fondus, comme NaCl à haute température,  oxydes solides, comme (ZrO2)1−x(Y2O3)x/2 , un électrolyte de piles à combustible de type SOFC [33],  électrolytes polymères, comme LiClO4 dissous dans du polyoxyde d’éthylène (POE). Le mot électrolyte est aujourd’hui synonyme de milieu conducteur ionique mais il désigne également, dans le cas des solutions, le composé, appelé aussi soluté, qui est dissous dans le solvant et qui rend le milieu conducteur. Dans ce dernier sens, on distingue de plus un électrolyte fort lorsque la quantité de porteurs de charge est proportionnelle à celle de soluté introduite et un électrolyte faible dans les autres cas (soluté partiellement dissocié).

[32] Les grandeurs macroscopiques caractérisant la conduction ainsi que les différents mécanismes de conduction au niveau microscopique sont détaillés à la section 4.2. [33] SOFC : Solid Oxide Fuel Cell, c’est-à-dire le terme générique pour désigner les systèmes de pile à combustible utilisant un oxyde solide comme électrolyte et fonctionnant à hautes températures.

1 - NOTIONS DE BASE

21

z Prenons l’exemple d’une solution aqueuse d’acide acétique. Les variations des propriétés de conduction

électrique observées en fonction de la quantité d’acide introduite montrent que la quantité de porteurs de charge (anion acétate et proton solvatés) n’est pas proportionnelle à la quantité d’acide introduit. L’acide acétique est en effet un acide faible qui ne se dissocie que partiellement. Il est donc également un électrolyte faible. Un autre exemple un peu moins classique, mais cependant très fréquent pour ce type de matériaux, est le caractère électrolyte faible de nombreux sels dans les milieux solvants organiques ou polymère. Ces milieux sont complexes et on ne peut généralement pas y négliger la présence de paires d’ions non-dissociées.

y

Dans certaines applications, il est nécessaire de séparer deux électrolytes, pour éviter qu’ils ne se mélangent rapidement, mais en laissant passer des ions, pour assurer le passage du courant [34]. Pour remplir cette fonction, les séparateurs utilisés doivent être des conducteurs ioniques et présenter de bonnes propriétés mécaniques. Ils possèdent le plus souvent des propriétés de conduction particulières vis-à-vis d’un ou plusieurs types d’ions, c’est-à-dire qu’ils présentent une sélectivité plus ou moins prononcée. On peut rencontrer :  des matériaux poreux (céramiques, verres frittés, feutres ou papiers filtres…). La plupart de ces matériaux ne sont pas sélectifs : ils laissent passer l’ensemble des ions mais ils empêchent, ou plus exactement ralentissent, le mélange des solutions. Lorsque la taille des pores est suffisamment faible, on peut obtenir une certaine sélectivité due à des phénomènes de surface ;  des membranes permsélectives, par exemple des polymères (comme le Nafion® [35]) ou des résines présentant des groupements ioniques souvent acido-basiques fixés dans le matériau. Les solutions peuvent pénétrer dans la structure, à l’intérieur de nanopores. Les groupements anioniques (respectivement cationiques) fixés dans ces matériaux sont électriquement compensés par des cations mobiles au sein du matériau (respectivement par des anions mobiles). Dans ces membranes, la sélectivité ne joue que sur la charge des ions qui peuvent circuler, mais ne joue pas sur le nombre de charge ou sur la nature de l’ion. Les membranes anioniques laissent passer les anions et bloquent les cations à l’interface membrane/solution, les membranes cationiques ont la fonction inverse ;  des membranes conductrices ioniques monopolaires (c’est-à-dire ne conduisant que par une seule espèce ionique, comme le Nasicon [36] ou encore ZrO2 à haute température). Elles sont denses et ne présentent a priori aucune porosité, les ions se déplaçant dans le matériau à travers des sites de conduction à l’échelle atomique. Dans ce cas une seule espèce ionique peut être échangée à l’interface membrane/solution et traverser la membrane. La sélectivité est donc meilleure que celle des matériaux précédents et, entre les espèces ioniques de même charge, elle se fait par effet stérique (encombrement). Ces membranes sont assez peu nombreuses à l’heure actuelle. [34] Certains aspects de la description du transport de matière dans des systèmes électrochimiques à deux compartiments séparés par une membrane, sont décrits à la section 4.4.2. [35] Le Nafion® est un polymère perfluoré portant de nombreuses terminaisons SO3– sur les chaînes polymériques. C’est donc un matériau qui est conducteur de nombreux cations. [36] Le Nasicon (Natrium Super Ionic Conductor) est une céramique conductrice par ions Na+ à température ordinaire.

22

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

DES ÉLECTRODES

Système de référence Ag/AgCl intégré Système de référence au calomel

Résine isolante

Membrane de verre

Matériau poreux (a)

(b)

(c)

(d)

Au sens strict, le terme électrode devrait être réservé à l'interface où siège la demiréaction d'oxydoréduction (voir section 1.3.3). Généralement, on englobe dans cette désignation l’ensemble du dispositif : le matériau conducteur électronique, son support et la connexion électrique. Le dispositif (a) est une électrode métallique dont la connexion électrique est enrobée d'une résine isolante qui, de plus, permet de n’exposer qu’une surface bien définie au contact avec l’électrolyte. Généralement, une électrode de référence est un dispositif plus complexe qui inclut un système électrochimique dont le potentiel est connu et stable à condition que ce système soit immergé dans une solution adaptée. Le contact avec l'électrolyte de la cellule est alors assuré par l’intermédiaire d’un matériau poreux. L'électrode au calomel (d) en est un exemple (voir section 1.5.1.2). Par extension, on désigne usuellement par électrodes toutes les demi-cellules qui se terminent par une connexion électrique, y compris les électrodes spécifiques dont le système électrochimique est séparé de la solution par une membrane ionique. C'est le cas du dispositif (c) qui utilise une membrane de verre spécifique aux protons (il en existe pour d'autres ions). On trouve également sur le marché des cellules complètes intégrant dans le même support, l'électrode de référence, généralement coaxiale, qui est en contact avec la solution par l’intermédiaire d’un matériau poreux sur la partie latérale. C'est le cas de l'électrode à pH combinée (b).

1 - NOTIONS DE BASE

23

 Conducteurs mixtes (conduction ionique et électronique) On trouve dans cette catégorie :  certains oxydes, comme le film d’oxyde se développant lors de la corrosion sèche d’un métal en présence de dioxygène, ou encore des perovskites comme La 1−xSrxCoO3 utilisé pour des piles à combustibles du type SOFC,  des matériaux d’insertion, comme des dérivés du graphite KxC ou les bronzes d’oxyde de tungstène,  les plasmas (gaz ionisés),  les sels fondus contenant un métal alcalin en solution,  l’ammoniac liquide contenant du sodium dissous, où l’on peut mettre en évidence l’existence d’électrons solvatés et d’ions provenant de l’autoprotolyse de l’ammoniac.

1.3.3 - ELECTRODES ET INTERFACES L’électrochimie implique la mise en contact de différents matériaux conducteurs électriques. Afin de pouvoir assurer le contrôle du paramètre électrique, en utilisant par exemple un générateur de courant électrique continu, il est nécessaire que les deux extrémités du système reliées au dispositif de contrôle extérieur soient des matériaux conducteurs électroniques. Le système doit en outre comprendre au moins un conducteur ionique. Par exemple, une jonction électronique n/p n’est pas du domaine de l’électrochimie. L’électrochimie traite donc toujours de systèmes hétérogènes dont les deux extrémités sont des matériaux conducteurs électroniques. On désigne souvent ce système hétérogène par le terme chaîne électrochimique [37]. Le terme électrode [38] est un terme d’usage très courant en électrochimie. Il désigne cependant des objets relativement différents suivant le contexte. Dans ce document, compte tenu des systèmes électrochimiques simples choisis en exemple, il sera utilisé le plus souvent pour désigner le métal constituant une des extrémités du système considéré : on parlera par exemple d’électrode de platine ou encore d’électrode à disque tournant [39] en cuivre. Lorsque le système étudié comporte plus de trois matériaux, il est d’usage de désigner par électrode l’ensemble des matériaux qui se succèdent entre l’extrémité métallique et le matériau électrolyte qui constitue le cœur du système : on dira par exemple une électrode modifiée pour désigner un métal sur lequel a été déposé un film de matériau conducteur ou encore l’électrode positive d’une batterie pour désigner l’objet composite solide qui est en contact avec l’électrolyte. Dans un troisième type de contexte, le terme électrode désignera une demi-cellule [40] électrochimique : [37] Le terme de chaîne galvanique, lié aux débuts de l’électrochimie (voir section 1.1.2), est également d’usage courant. Cependant, dans la mesure où sa définition précise n’est pas identique pour tous les auteurs, nous préférons dans ce document ne pas employer cette terminologie. En effet, pour certains auteurs par exemple, l’usage du terme « chaîne » (ou « cellule ») galvanique est restreint aux systèmes fonctionnant en générateur, excluant les cellules d’électrolyse. [38] Voir la planche intitulée « Des électrodes ». [39] Voir la figure 1.17, section 1.6.4. [40] Une demi-cellule désigne une partie d’un système électrochimique, comme cela est défini à la section 1.4.1.1.

24

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

c’est avec ce sens qu’il est employé dans les expressions « électrode de pH » ou « électrode de référence ». Dans un dernier sens il désigne même l’ensemble de deux demicellules, par exemple pour des systèmes commercialisés pour la mesure de pH à l’aide d’une électrode combinée [41]. L’objet principal d’étude de l’électrochimie est la zone de forte hétérogénéité, généralement de faible épaisseur (typiquement une épaisseur de quelques nanomètres), entre deux matériaux dont la conduction est de nature différente. Cette zone est appelée interface électrochimique. De manière plus générale, la notion d’interface correspond à la séparation entre deux phases dans un système hétérogène. Cette séparation ne peut pas être caractérisée par une simple surface mathématique de discontinuité et il est plus rigoureux de parler de zone interfaciale ou interphase. Cependant, comme c’est usuel dans la plupart des ouvrages d’électrochimie, on emploiera dans la suite du texte le terme d’interface. Dans cette zone existent de fortes variations spatiales de grandeurs comme la concentration ou le potentiel. Ainsi les profils, c’est-à-dire les courbes de variations spatiales, de concentration ou de potentiel, montrent en général, à une échelle macroscopique, une discontinuité à l’interface [42]. L’exemple le plus simple d’interface électrochimique est la zone de contact entre un métal, l’électrode, et une solution contenant des espèces susceptibles de réagir ou d’intervenir dans un équilibre à cette interface. Ces dernières sont désignées par le terme espèces électroactives. A contrario, une espèce non-électroactive n’intervient pas dans les demi-réactions rédox mais peut jouer un rôle dans le transport du courant. L’interface électrochimique peut ainsi être le lieu très particulier d’une demi-réaction rédox mettant en jeu des espèces électroactives, également appelée transfert d’électrons [43] ou transfert de charge ou encore réaction d’électrode pour insister sur le fait que c’est une réaction hétérogène, localisée dans une zone de très faible épaisseur. Par définition, pour des interfaces où se déroule une seule demi-réaction rédox, l’électrode à l’interface de laquelle se déroule une oxydation est appelée anode, celle à l’interface de laquelle se produit une réduction est appelée cathode [44]. On peut souligner que, pour des systèmes à l’abandon, ces termes ne sont pas définis et ne doivent pas être utilisés pour désigner les électrodes, dans la mesure où les notions d’anode et de cathode sont définies à partir de la réaction se déroulant à l’interface [45]. [41] Une électrode combinée pour la mesure du pH intègre l’électrode de référence au corps de l’électrode de verre (voir la planche intitulée « Des électrodes »). [42] La description des profils de potentiel et de concentration à une interface dans des cas usuels fait l’objet de la section 4.3.1. [43] Le terme transfert d’électrons peut cependant être ambigu dans la mesure où il est également utilisé pour désigner le passage d’électrons d’un milieu à un autre dans des systèmes électrochimiques avec des métaux en contact avec un milieu conducteur mixte. Des électrons mobiles existent alors dans ces deux phases (par exemple électrons solvatés dans un sel fondu) et le passage du courant correspond en partie à un simple transfert des électrons d’une phase à l’autre, sans réaction rédox. [44] On peut proposer un moyen mnémotechnique pour retenir ces définitions : oxydation et anode commencent par une voyelle alors que réduction et cathode commencent par une consonne. [45] De la même façon l’utilisation des termes anode et cathode n’est pas recommandée pour des systèmes dits à électrodes bloquantes où un courant transitoire existe sans qu’aucune réaction

1 - NOTIONS DE BASE

25

Il faut cependant noter que ces systèmes, présentant un courant global nul, comprennent des interfaces qui à l’échelle microscopique ont un comportement hétérogène : à un instant donné certaines zones de l’électrode se comportent comme cathode et d’autres comme anode, le bilan en courant global étant nul. C’est le cas de n’importe quel système électrochimique à l’équilibre : l’équilibre est une notion dynamique qui recouvre, à l’échelle microscopique, voire atomique, le déroulement de plusieurs événements d’oxydation et de réduction qui se compensent exactement. Un autre exemple de système à l’abandon, cette fois-ci hors équilibre, est celui de la corrosion par couplage galvanique entre deux métaux en contact ou celui de la corrosion généralisée ou idiomorphique sur un seul métal. Là encore, à un instant donné, des zones de l’électrode se comportent comme anode et d’autres comme cathode, le bilan en courant global étant nul, mais pas le bilan chimique [46]. Ces interfaces électrochimiques font toujours partie d’une chaîne électrochimique comportant différents matériaux conducteurs et où l’on peut rencontrer plusieurs types d’interface que l’on peut classer suivant la nature des conducteurs mis en contact :  jonction électronique pour une interface entre deux conducteurs électroniques,  jonction ionique pour une interface entre deux conducteurs ioniques,  interface électrochimique pour une interface entre un milieu conducteur électronique et un milieu conducteur ionique,  jonction mixte dans tous les autres cas. L’étude des systèmes électrochimiques nécessite donc la compréhension de la conduction dans le volume des matériaux conducteurs ainsi que l’étude des interfaces entre deux milieux conducteurs différents. Dans le cas le plus général avec des matériaux à conduction mixte, le passage d’un type de conduction électronique à un type de conduction ionique n’est pas limité à une zone de faible épaisseur. C’est un cas fréquent dans les applications de l’électrochimie, par exemple pour le stockage de l’énergie. On parle alors aussi d’électrode volumique pour signifier que la réaction de transfert de charge est possible dans un volume relativement important, contrairement au cas usuel de l’interface électrochimique. Dans ce document présentant les notions fondamentales de l’électrochimie, on se limitera aux interfaces localisées, c’est-à-dire à des systèmes où la zone interfaciale est de très faible épaisseur. Dans certains cas, il peut y avoir des transferts d’électrons directement entre espèces chimiques au sein d’une même phase homogène, par exemple en solution aqueuse. Cette chimie rédox homogène ne fait pas, stricto sensu, partie du domaine de l’électrochimie, même si des corrélations peuvent être menées entre systèmes homogènes et hétérogènes.

rédox ne se déroule aux interfaces, comme cela est présenté de manière qualitative à la section 2.2.1.2. [46] La section 2.4.1 décrit de manière simplifiée ces phénomènes à l’aide des courbes intensitépotentiel.

26

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

1.4 - DESCRIPTION ET FONCTIONNEMENT D’UNE CHAÎNE ÉLECTROCHIMIQUE 1.4.1 - GÉNÉRALITÉS 1.4.1.1 - CHAÎNE ET CELLULE ÉLECTROCHIMIQUES Pour désigner un système électrochimique on utilise le terme cellule ou chaîne électrochimique. Le premier terme est généralement utilisé pour désigner l’objet concret que l’on peut par exemple manipuler au laboratoire. Le deuxième permet d’insister sur la nature hétérogène du système constitué de la succession de différents matériaux conducteurs en contact. Par convention, on représente toute interface par un trait vertical.

z La pile de VOLTA est un des exemples les plus simples de chaîne électrochimique, dont chaque élément est constitué de l’enchaînement de trois matériaux conducteurs [47] : Zn | solution aqueuse de NaCl | Cu

y

Si la chaîne électrochimique comporte une succession de milieux électrolytes, on adopte souvent une notation abrégée, | | , pour la zone de séparation entre deux électrolytes. Cela représente, par exemple, le matériau poreux contenant un mélange des deux électrolytes liquides, ou encore l’ensemble des différentes phases d’un pont salin (voir exemple ci-dessous). Souvent [48], la nature de cette zone intermédiaire est telle que l’on peut négliger la tension de jonction globale à courant nul. Par souci de simplification, on va par la suite se limiter à des cellules électrochimiques ne comportant que deux interfaces électrochimiques (et donc deux électrodes). Chaque système peut alors être décomposé en deux demi-cellules, chacune comportant une seule interface électrochimique.

z Prenons l’exemple de la pile DANIELL représentée sur la figure 1.4. Deux compartiments contenant respecti-

vement du zinc en contact avec une solution aqueuse de ZnSO4 et du cuivre en contact avec une solution aqueuse de CuSO4 sont mis en contact électrique par l’intermédiaire d’une troisième solution aqueuse, que l’on appelle un pont salin, par exemple une solution concentrée de KNO3. Elle est représentée par l’écriture : Zn | solution aqueuse de ZnSO4 | solution aqueuse de KNO3 | solution aqueuse de CuSO4 | Cu De manière très détaillée, on devrait écrire également les phases qui séparent les différentes solutions (souvent constituées d’un matériau poreux, par exemple un fritté). La solution à l’intérieur des pores, par exemple à l’extrémité du pont salin du côté cuivre, est un mélange de solutions de sulfate de cuivre et de nitrate de potassium, difficile à définir rigoureusement. On écrit alors de manière brève : Zn | solution aqueuse de ZnSO4 | | solution aqueuse de CuSO4 | Cu

[47] Voir la planche intitulée « Les origines de la pile VOLTA ». [48] Les tensions de jonction sont très souvent abusivement appelées « potentiel de jonction ». L’annexe A.1.1 donne des éléments pour estimer la tension de jonction entre deux solutions de composition différente. Quelques exemples numériques montrent qu’elle est le plus souvent inférieure à 30 mV. Dans le cas de l’utilisation d’un pont salin, la tension de jonction ionique globale devient même facilement inférieure à 1 mV, ce qui justifie l’approximation proposée ici. Il faut toutefois être vigilant et revenir sur cette approximation pour des mesures précises de tension, parfois nécessaires notamment pour des études thermodynamiques.

1 - NOTIONS DE BASE

27 Pont salin K+, NO3– en solution aqueuse

Zn

2+

Cu

Cu2+ SO42–

Zn SO42–

Figure 1.4 - Schéma d’une pile DANIELL

y

1.4.1.2 - POLARITÉ DES ÉLECTRODES La tension d’une cellule électrochimique, notée U, désigne la différence de potentiel entre les deux électrodes extrêmes de la cellule et s’exprime en volts (V) [49]. La notation U n’est pas toujours utilisée dans la littérature, mais elle est préférée ici à la notation E (notation fréquente en électrochimie mais également en électricité), qui sera réservée dans ce document aux tensions ou potentiels des demi-cellules. Dans certains ouvrages, on rencontre également le terme de fem (force électromotrice) de la cellule électrochimique pour désigner la grandeur U. Le terme de fem sera cependant réservé ici à la valeur de U dans le cas particulier de l’état d’équilibre [50], le terme général de tension étant conservé pour désigner la grandeur U. Donner une valeur algébrique à la tension d’une cellule électrochimique nécessite de discriminer les deux électrodes. L’électrode privilégiée est appelée électrode de travail (et notée le plus souvent WE ou W, pour working electrode en anglais). L’autre électrode est appelée contre-électrode (CE) ou électrode auxiliaire. La tension algébrique de la cellule électrochimique correspondante est alors la différence des potentiels électriques des deux électrodes, pourvu que l’on conserve la même référence des potentiels [51] :

U = ! WE " ! CE [49] Comme cela sera repris dans l’introduction de la section 3.4 et détaillé sur un exemple dans la section 3.4.1.1, lorsqu’on mesure une tension à l’aide d’un voltmètre la mesure est toujours celle de la différence de potentiel entre deux métaux de même nature (principe de mesure d’un voltmètre). La chaîne électrochimique correspondant à la tension d’une cellule devrait donc être écrite avec ses jonctions électroniques terminales (mais cette écriture complète est souvent omise). Par exemple la mesure de tension de la pile DANIELL précédemment évoquée correspond à la tension de la chaîne électrochimique suivante : Cu’ | Zn | solution aqueuse de ZnSO4 | | solution aqueuse de CuSO4 | Cu [50] La notion d’équilibre thermodynamique dans les systèmes électrochimiques fait l’objet du chapitre 3. [51] La notion de référence des potentiels en électrochimie est décrite à la section 1.5.1. Les notions de potentiels sont reprises de manière plus détaillée et rigoureuse dans le chapitre 3. En particulier, la distinction entre potentiel VOLTA et potentiel GALVANI fait l’objet de la section 3.1.1.2, et la description précise de la nature de la tension d’une cellule électrochimique fait l’objet de la section 3.4 (dans le cas particulier de l’équilibre thermodynamique).

28

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

La polarité des électrodes, qu’il ne faut pas confondre avec la polarisation [52] est définie par rapport au signe de la tension de cellule. Par exemple si la tension U est positive, on attribue la polarité + à l’électrode de travail, que l’on appelle alors parfois l’électrode positive, et la polarité − à la contre-électrode parfois appelée électrode négative. Inversement, si U est négatif, c’est l’électrode de travail qui présente la polarité −. En outre, dès lors qu’un courant parcourt le système, une des électrodes devient anode et l’autre cathode [53]. Mais il n’existe pas de lien automatique entre la polarité d’une électrode et son rôle de cathode ou d’anode [54]. Contrairement aux notions de cathode et d’anode, la polarité des électrodes est définie même lorsque le système est à l’abandon. Enfin, une même électrode peut, suivant le point de fonctionnement du système électrochimique, être anode ou cathode, et également changer de polarité [55].

1.4.1.3 - CONVENTION DE

SIGNE DU COURANT À UNE INTERFACE

Pour un point de fonctionnement donné, le sens de circulation du courant dans l’ensemble du système, c’est-à-dire l’orientation du vecteur densité de courant en chaque point, est toujours défini sans ambiguïté [53]. Une convention de signe du courant pour l’électrode de travail n’est alors rendue nécessaire que par le souhait de repérer rapidement si celle-ci est anode ou cathode et celui de présenter facilement des données expérimentales (courant et potentiel à l’électrode de travail) en distinguant les points de fonctionnement anodiques et cathodiques. On adoptera dans la suite la convention suivante pour définir une valeur algébrique du courant traversant une interface [56] : Courant compté positivement si l’électrode est globalement le siège d’une oxydation anode I > 0 Courant compté négativement si l’électrode est globalement le siège d’une réduction cathode I < 0 Compte tenu de la définition du courant à travers une surface, la convention adoptée ici revient à orienter la normale à l’interface du métal vers l’électrolyte (voir figures 1.5 et 1.7). Cette convention correspond de plus à une convention habituelle en thermodynamique : ce qui sort du système (ou ce qui est fourni par celui-ci) est compté négativement alors que ce qui y entre (ou ce qui lui est fourni) est compté positivement. [52] La notion de polarisation, qui est sans rapport avec celle utilisée en physique (en électrostatique ou optique par exemple), est définie à la section 1.5.2. [53] Cette phrase n’est pas tout à fait générale mais correspond à la très grande majorité des systèmes décrits dans ce document. Elle est cependant à manier avec prudence par exemple pour des systèmes à électrodes dites bloquantes qui sont traversés par un courant alors qu’aucune réaction rédox ne se déroule aux interfaces, comme décrit qualitativement à la section 2.2.1.2. [54] Les deux cas possibles (fonctionnement en générateur ou électrolyse) sont décrits aux sections 1.4.2 et 1.4.3. [55] La discussion des différents points de fonctionnement d’un système électrochimique à partir des courbes intensité-potentiel est menée à la section 2.4.5. [56] Cette convention est celle qui est généralement adoptée aujourd’hui par les électrochimistes européens. Cependant c’est la convention inverse qui a longtemps été utilisée pour des raisons historiques car l’électrochimie s’est beaucoup développée dans les années 1950 avec des études sur électrode de mercure en électrolyte aqueux, où seules les réactions de réduction pouvaient être étudiées. L’électrode de travail était donc très fréquemment la cathode.

1 - NOTIONS DE BASE

29

Elle correspond également à la convention dite récepteur des électriciens [57].

MÉTAL

(S)an

(S)cat

ÉLECTROLYTE

anode

intérieur du système

ö n'

e−

I > 0 par convention

le courant « entre » dans le système normale orientée dans le même sens que la densité de courant

MÉTAL

cathode

e−

I < 0 par convention

le courant « sort » du système normale orientée dans le sens opposé à celui de la densité de courant

Figure 1.5 - Schéma illustrant la convention de signe du courant dans un système électrochimique

En raison de la propriété d’électroneutralité de tout volume conducteur, on peut parler du courant traversant le milieu, puisqu’il est identique quelle que soit la section considérée [58]. Cette propriété peut être étendue à l’ensemble de la cellule électrochimique. Cela est toujours lié à l’électroneutralité globale du volume considéré, y compris lorsqu’il englobe une ou plusieurs interfaces. En particulier, le courant qui traverse l’interface anodique a la même valeur absolue que celui qui traverse l’interface cathodique. Cette propriété est importante d’un point de vue pratique, dans la mesure où, les surfaces respectives des deux électrodes n’étant pas nécessairement égales, il faut en général prendre en compte le fait que les densités de courant moyennes au niveau de chaque interface ne sont alors pas identiques en valeur absolue. Dans les expressions suivantes, et le!"reste du document, sauf précision contraire, j représente la projection du vecteur j sur la normale à la surface, avec la convention des électrochimistes. En tenant compte de la convention de signe précédemment introduite, on a toujours :

I = jan S an = ! jcat S cat

z Pour illustrer cette propriété, dans un cas de figure important en électrochimie analytique, on considère un

système, représenté sur la figure 1.6, dont l’électrode de travail est un disque de cuivre de 2 mm de rayon (section d’un fil métallique enrobé par un matériau isolant) alors que la contre-électrode est un fil de platine de diamètre 1 mm plongeant sur une longueur  dans l’électrolyte. On souhaite estimer la longueur du fil de platine nécessaire pour que la moyenne de la densité de courant à sa surface soit 100 fois plus faible que celle qui traverse l’électrode de travail, lorsque les deux électrodes sont reliées à une source d’énergie électrique extérieure. La conservation du courant aux deux électrodes, permet d’écrire :

j cuivre

! "r2 =

jplatine

! ( " r #2 + 2 " r # !)

Il faut donc une longueur de fil de platine de l’ordre de 20 cm. [57] Voir la planche intitulée « Convention sur le signe du courant ». [58] Cette notion, présentée à la section 1.3.1.3, est détaillée à la section 4.1.2.

30

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS Cuivre Isolant

Platine

Figure 1.6 - Schéma d’une cellule électrochimique avec une électrode de travail disque en cuivre et une contre-électrode constituée d’un fil de platine de longueur immergée 

 Prenons un deuxième exemple, dans un domaine où cette propriété est particulièrement importante : celui de la corrosion galvanique. On considère une plaque en acier ordinaire (c’est-à-dire composée majoritairement de fer) de 6 m2 d’aire, fixée à un ouvrage par l’intermédiaire de 60 rivets en acier (diamètre 16 mm) dont la surface est galvanisée, c’est-à-dire recouverte d’un film en zinc. On observe dans une atmosphère d’air humide une corrosion importante de ces derniers. En effet il se produit d’une part la réduction du dioxygène à la surface du fer, avec une densité de courant de 100 µA cm−2 (valeur usuelle pour des conditions atmosphériques et sans convection forcée). D’autre part, de manière couplée, on observe l’oxydation du zinc des rivets avec la relation : jplaque ! 6.10 4 = jrivets ! 60 ! " (0,8)2 Ainsi la vitesse de corrosion des rivets est caractérisée par une densité de courant de corrosion de l’ordre de 50 mA cm−2, ce qui correspond d’après la loi de FARADAY à une disparition du zinc métal à la vitesse de 85 µm h−1 (voir section 2.2.2.2, avec la masse molaire du zinc égale à 65 g mol−1 et sa masse volumique à 7,1 g cm−3).

y

Lorsqu’on n’étudie qu’une seule interface, on choisit souvent un schéma présentant une interface verticale en plaçant le métal à gauche et l’électrolyte à droite (figure 1.7) [59]. MÉTAL −

e

Fe

3+

Fe

2+

ÉLECTROLYTE

Figure 1.7 - Schéma représentant une interface électrochimique avec la convention usuelle de signe du courant : cas de la réduction d’ions Fe3+ en ions Fe2+, I < 0 [59] Sur ce type de représentation, que nous reprendrons fréquemment pour décrire les phénomènes aux interfaces, les flèches représentent les vecteurs densité de flux molaire de matière ou les vitesses des différentes espèces (ici les ions Fe2+, Fe3+ et les électrons). La longueur des flèches sur ce type de schéma est le plus souvent arbitraire (c’est-à-dire sans lien avec les normes exactes des vecteurs correspondants).

1 - NOTIONS DE BASE

31

CONVENTION SUR LE SIGNE DU COURANT

Une aiguille aimantée serait déviée de la même façon, placée près de l'anode ou près de la cathode (expérience d'OERSTED), ce qui indiquerait que le sens de circulation est bien le même. Par ailleurs, les deux ampèremètres doivent donner la même valeur s'ils sont connectés comme indiqué sur le dessin. Pour être en accord avec la convention des électrochimistes (ce qui entre est positif et ce qui sort est négatif), il suffit de placer les deux ampèremètres en opposition.

32

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Du fait de la convention précédemment décrite, sur ce type de schéma, la normale à la surface correspond donc toujours à l’horizontale orientée vers la droite, et ce aussi bien pour la situation décrivant l’anode que celle décrivant la cathode.

1.4.2 - PASSAGE FORCÉ DU COURANT : SITUATION D’ÉLECTROLYSE (OU DE RÉCEPTEUR) Lors d’une électrolyse, les deux extrémités de la cellule électrochimique sont reliées à une source extérieure qui fournit l’énergie nécessaire à produire une réaction nonspontanée dans le système électrochimique. Ce dernier se comporte alors comme un récepteur électrique. C’est la source d’énergie extérieure qui impose le sens de passage du courant. On rappelle que dans un circuit électrique passif, le courant circule dans le sens des potentiels décroissants : du pôle + du générateur vers son pôle − dans le circuit extérieur. Dans une représentation électrique simple, le circuit est celui de la figure 1.8 [60]. e−

I

Source extérieure d'énergie

Système électrochimique en situation d'électrolyseur



+

Figure 1.8 - Schéma électrique d’un électrolyseur et son alimentation

Pour les applications aux générateurs électrochimiques, cette situation correspond à la recharge d’une batterie (ou accumulateur) et la batterie est alors un système en opposition à la source d’énergie extérieure, comme l’illustre la figure 1.9. e−

I

Source extérieure d'énergie

Batterie en recharge



+

Figure 1.9 - Schéma électrique d’une batterie en recharge (récepteur) et son alimentation [60] Le symbole choisi pour la source d’énergie extérieure (figures 1.8, 1.9 et 1.10) est celui d’un générateur idéal de tension, où la pointe de la flèche indique le point de potentiel le plus élevé. Quant au symbole utilisé sur la figure 1.8 pour le système électrochimique fonctionnant en cellule d’électrolyse (électrolyseur), il ne doit pas être confondu avec celui d’un condensateur électrostatique.

1 - NOTIONS DE BASE

33

Dans un système électrochimique qui est le siège d’une électrolyse, ou lors de la charge d’une batterie, les électrons arrivent donc à l’électrode négative. Comme il n’y a pas d’électrons libres dans l’électrolyte et que ceux-ci ne peuvent pas s’accumuler durablement à l’électrode, seule une réduction est capable de consommer ceux qui arrivent à l’interface : l’électrode négative constitue donc la cathode de la cellule électrochimique. Le raisonnement est exactement symétrique à l’électrode positive, qui est anode. On peut donc compléter le schéma électrique précédent par la figure 1.10. Source extérieure d'énergie e−

I Réaction qui produit les e−

Réaction qui − consomme les e

Ox + n e−

Red

Red’

RÉDUCTION

OXYDATION

I CATHODE





Ox’ + n’ e

ANODE

+

Figure 1.10 - Schéma d’un électrolyseur et son alimentation Le trait pointillé schématise la membrane éventuellement introduite pour éviter le mélange des électrolytes.

Ainsi, dans une situation d’électrolyse (ou récepteur) : l'électrode positive constitue l’anode, l'électrode négative constitue la cathode

1.4.3 - PASSAGE SPONTANÉ DU COURANT : SITUATION DE GÉNÉRATEUR Pour un système électrochimique fonctionnant comme générateur, c’est-à-dire fournissant de l’énergie électrique à un circuit extérieur, les deux extrémités de la cellule électrochimique sont reliées, par exemple par une résistance. C’est le système électrochimique, lieu d’une réaction spontanée, qui impose le sens de passage du courant. Dans le circuit extérieur le courant circule toujours du pôle + du générateur vers son pôle −. On dit aussi que le système électrochimique a un fonctionnement de pile ou, dans le domaine des générateurs électrochimiques, que la pile ou la batterie [61] est en décharge.

[61] Dans la langue française courante actuelle, pour désigner les générateurs électrochimiques, on parle de batterie ou accumulateur lorsqu’on peut facilement faire fonctionner le système en générateur ou en électrolyse (c’est le cas par exemple d’une batterie de téléphone portable) et de pile pour les systèmes qu’il est impossible ou délicat de recharger, c’est-à-dire de faire fonctionner en électrolyse.

34

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Dans une représentation électrique simple, le circuit est celui de la figure 1.11. e−

Résistance

I

I

e





+

Figure 1.11 - Schéma électrique d’un système électrochimique en fonctionnement générateur

Dans un système électrochimique en situation de générateur, ou lors de la décharge d’une pile ou d’une batterie, les électrons arrivent à l’électrode positive. Comme il n’y a pas d’électrons libres dans l’électrolyte et que ceux-ci ne peuvent pas s’accumuler durablement à l’électrode, seule une réduction est capable de consommer ceux qui arrivent à l’interface : l’électrode positive constitue donc la cathode du système électrochimique. On peut compléter le schéma électrique précédent par la figure 1.12. −

e

Résistance

I Réaction qui consomme les e−

Réaction qui produit les e−

Red

Ox + n e



Ox’ + n’ e−

OXYDATION

RÉDUCTION

I ANODE



j

CATHODE

+

Figure 1.12 - Schéma d’un système électrochimique en fonctionnement générateur Le trait pointillé schématise la membrane qui est éventuellement introduite pour éviter le mélange des électrolytes.

Ainsi dans une situation de générateur (ou pile) : l'électrode positive constitue la cathode, l'électrode négative constitue l’anode

Red’

1 - NOTIONS DE BASE

35

1.4.4 - PASSAGE SPONTANÉ OU PASSAGE FORCÉ DU COURANT Le tableau 1.1 résume ces deux situations possibles pour un système électrochimique parcouru par un courant. Tableau 1.1 - Caractéristiques comparées d’un système électrochimique lors du passage spontané ou forcé du courant Type de fonctionnement Dans le cas d’une batterie [62] réactions

générateur pile

récepteur électrolyse

décharge

charge

spontanées

non-spontanées

électrode positive

cathode (réduction)

anode (oxydation)

électrode négative

anode (oxydation)

cathode (réduction)

cathode (réduction)

électrode positive

électrode négative

anode (oxydation)

électrode négative

électrode positive

1.5 - NOTIONS DE POTENTIEL - TENSION - POLARISATION 1.5.1 - TENSIONS ET POTENTIELS DANS UNE CELLULE ÉLECTROCHIMIQUE Le mot potentiel est ici à entendre comme un raccourci de potentiel électrique par rapport à une référence [63]. Tout comme en physique (électrostatique ou électrocinétique), le potentiel est toujours défini à une constante près : le potentiel absolu n’existe pas. Les seules grandeurs qui soient accessibles expérimentalement sont les différences de potentiel (ou ddp) entre deux points, encore appelées tensions. Ainsi la notion de potentiel doit être entendue comme tension entre un point donné et une référence. En physique, les références les plus utilisées sont le vide à l’infini (en électrostatique) et la terre (en électrocinétique). Il n’y a en général pas d’ambiguïté. En électrochimie ces dernières sont en général peu adaptées et on en introduit d’autres. Cependant comme il existe plusieurs types de référence possibles, il est recommandé, lors de la description des systèmes électrochimiques, de mentionner la référence choisie dans l’unité : une tension, U, s’exprime en V un potentiel, E, s’exprime en V/Réf

[62] Dans la littérature actuelle sur le domaine des générateurs électrochimiques, tant industrielle que scientifique, il est de plus en plus fréquent de lire les mots anode et cathode employés, de manière abusive, à la place d’électrode négative et respectivement positive. Si on parle d’une pile, cela peut se justifier. En revanche, lorsqu’il s’agit d’une batterie, cette dérive de langage est à bannir car elle donne lieu à des confusions importantes. [63] Les notions de potentiels électriques sont détaillées à la section 3.1.1 (potentiel VOLTA et potentiel GALVANI). D’autres notions utilisant ce terme de potentiel seront également définies à la section 3.1.2 (potentiels chimique et électrochimique).

36

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

1.5.1.1 - ELECTRODE STANDARD À HYDROGÈNE Pour définir une référence de potentiel utilisable en électrochimie, on prend un couple rédox de référence. Le choix s’est porté sur le couple H+/H2 dans l’état standard au sens de la thermodynamique : c’est ce qu’on appelle l’Electrode Standard à Hydrogène (ou ESH). Ce système de référence est virtuel mais bien défini et c’est la référence retenue dans toutes les tables actuelles de données thermodynamiques électrochimiques [64]. Dans certaines applications de l’électrochimie (par exemple lorsque l’on s’intéresse à l’électrochimie avec des matériaux semi-conducteurs au lieu de métaux), il peut être important de pouvoir relier l’échelle des potentiels relatifs utilisés en électrochimie (avec l’ESH comme référence) et l’échelle des potentiels habituellement utilisée en physique, avec une référence de potentiel nul à l’infini dans le vide. L’établissement quantitatif de ce lien n’est pas une question facile car il ne peut pas être issu uniquement d’une mesure expérimentale : il fait nécessairement intervenir des hypothèses et un modèle. La valeur communément admise pour H+/H2 en solution aqueuse est [65] : E/vide = E/ESH − 4,5 V

1.5.1.2 - ELECTRODES DE RÉFÉRENCE L’ESH étant un système virtuel, elle n’est pas réalisable expérimentalement. En revanche la nécessité de systèmes dits de référence est grande pour étudier et caractériser la répartition des potentiels électriques dans les systèmes électrochimiques. Différentes demi-cellules électrochimiques ont donc été développées comme référence pour les mesures de potentiel dans les systèmes électrochimiques. Quelques exemples fréquemment utilisés dans les montages électrochimiques sont décrits rapidement ci-dessous [66].

 Electrode à hydrogène (EH) Une électrode à hydrogène, représentée sur la figure 1.13, est réalisée par barbotage de dihydrogène dans une solution de pH connu, sur une électrode de platine (ou platine platiné [67]). [64] Quelques rappels de notions thermodynamiques et en particulier la définition de l’état standard pour différents systèmes sont donnés à la section 3.1.2. [65] Les comparaisons de grandeurs, ici relatives au couple H+/H2, dans des milieux différents (par exemple changement de solvant) font également appel à des notions délicates. Cet aspect sera repris rapidement dans la section 3.1.2.3. [66] Une présentation plus approfondie de certains aspects de ces systèmes en lien avec leurs caractéristiques thermodynamiques est menée à la section 3.4.2. Les principales caractéristiques des systèmes rédox qui en font de bons candidats pour être systèmes de référence y sont également listées. [67] Le platine platiné correspond à une mise en forme particulière de ce métal permettant d’obtenir par électrolyse un dépôt très pulvérulent et ainsi une surface métallique extrêmement rugueuse. Les photons pénétrant dans la porosité ouverte sont piégés, ce qui lui confère une couleur noire. L’aire de contact avec la solution est très fortement augmentée, ce qui a pour conséquence de diminuer la densité de courant la traversant par rapport à une électrode de platine lisse de même aire géométrique (voir section 1.4.1.3). La stabilité en terme de potentiel de cette demi-cellule est ainsi améliorée par diminution de l’influence des caractéristiques cinétiques de la demi-réaction rédox. L’obtention d’une surface métallique très rugueuse a également des propriétés intéressantes pour les mesures de conductimétrie, comme cela est évoqué à la section 4.2.2.2.

1 - NOTIONS DE BASE

37

La demi-cellule correspondante est : Pt platiné, H2 (1 bar) | H+ de concentration C | Elle fait intervenir le couple H+/H2 : H2

2 H + + 2 e−

Même si l’on choisit une concentration en acide égale à 1 mol L−1 (on a alors une ENH, N pour « normal », c’est-à-dire molaire pour un monoacide), celle-ci n’est pas l’ESH car les composés réels ne sont pas tous proches de l’état standard. Par exemple, l’activité du proton d’un acide de concentration égale à 1 mol L−1 n’est pas égale à 1 : la valeur du potentiel de l’ENH est de l’ordre de 6 mV/ESH à température ambiante pour de l’acide chlorhydrique. Dans la pratique, si l’on veut utiliser une électrode à hydrogène dont le potentiel soit le plus proche possible de l’ESH, on utilisera une solution acide légèrement plus concentrée que 1 mol L−1 [68]. L’utilisation de ce type d’électrode est délicate et doit rester réservée à des applications bien particulières : de nombreuses précautions expérimentales sont notamment nécessaires pour assurer l’état d’équilibre d’un tel système.

Tube de verre Échappement du gaz

H2

Connexion électrique Solution acide Pt platiné Bulles de dihydrogène

Figure 1.13 - Schéma d’une électrode à hydrogène

 Electrode au chlorure d’argent Une électrode au chlorure d'argent est constituée par un fil d’argent enrobé d’une couche de chlorure d’argent (AgCl, solide peu soluble dans l’eau) immergé dans une solution aqueuse de chlorure de potassium. La chaîne électrochimique de la demicellule est ainsi du type : Ag | AgCl | solution aqueuse KCl de concentration C | On peut effectuer une description globale des équilibres mis en jeu dans cette demi-cellule, en faisant intervenir le couple AgCl/Ag : Ag + Cl−

AgCl + e−

[68] Les raisons de ce choix sont expliquées à la section 3.4.2.2.

38

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

On fixe en général une concentration élevée en chlorure de potassium (de 1 à 3 mol L−1) mais inférieure à la valeur dans une solution saturée en KCl [68]. Par exemple :

E AgCl/Ag (KCl, 3 mol L!1 ) = + 0,21 V/ESH

 Electrode au calomel (Hg2Cl2) Une électrode au calomel est réalisée par la mise en contact du mercure avec le calomel (chlorure de mercure (I), Hg2Cl2, solide très peu soluble dans l’eau) et une solution aqueuse de chlorure de potassium. La chaîne électrochimique de la demi-cellule est ainsi du type : Hg | Hg2Cl2 | solution aqueuse KCl de concentration C | Elle fait intervenir le couple Hg2Cl2/Hg : 2 Hg + 2 Cl−

Hg2Cl2 + 2 e−

Orifice de remplissage avec bouchon Connexion électrique

Mercure Calomel Filtre Solution de KCl saturée Cristaux de KCl (excès) Fritté poreux Figure 1.14 - Schéma d’une électrode au calomel saturée, ECS

On utilise le plus souvent une solution saturée de chlorure de potassium (c’est-à-dire à température ordinaire une concentration C voisine de 5 mol L−1). On parle alors d’électrode au calomel saturée, ECS (figure 1.14). C’est aujourd’hui le système commercial le plus répandu pour les mesures de potentiel en électrochimie et la valeur de son potentiel à 25 °C est : EECS = + 0,24 V/ESH Le passage d’une échelle de potentiel à une autre se fait par translation. Le changement de référence n’est pas une opération compliquée. Il faut cependant prendre garde au sens de la translation. Un moyen simple est de repérer la valeur de la nouvelle référence (0 dans la nouvelle échelle) sur la première échelle, par exemple +0,24 V pour le passage de l’échelle ESH à l’échelle ECS, comme cela est illustré sur la figure 1.15.

1 - NOTIONS DE BASE 0

39

0,24

1

E [V/ESH ] E [V/ECS ]

0

1 − 0,24 = 0,76

Figure 1.15 - Illustration du changement de référence sur une échelle de potentiel

Il faut donc ici translater l’ensemble des potentiels de −0,24 V pour passer à la nouvelle échelle : +1 V dans l’échelle ESH correspond à +0,76 V dans l’échelle ECS. On peut exprimer cela également par l’intermédiaire des relations suivantes pour l’exemple précédent du passage entre les échelles ESH et ECS :

! " ! ECS = ! " ! ESH + ! ESH " ! ECS = ! " ! ESH " (! ECS " ! ESH ) ! " ! ECS = 1 " 0,24 = 0,76 V Pour les systèmes expérimentaux d’électrode de référence décrits ci-dessus, il est important de souligner que le caractère « de référence » est dû en particulier à la présence de la solution interne contenant une concentration fixée et connue en l’ion pertinent (H+ pour l’EH, Cl− pour l’électrode au calomel ou celle au chlorure d’argent dans les exemples cités ici) [69]. C’est la valeur de la tension entre l’extrémité métallique de l’électrode de référence et la solution interne associée qui est fixée et constante et qui donne la qualité « de référence » au système [70]. Dans certaines configurations expérimentales, il est difficile d’utiliser des électrodes de référence de ce type, c’est-à-dire avec un compartiment interne. On peut alors être amené à utiliser une pseudo-référence. Il peut s’agir par exemple d’un fil métallique (argent, platine…) ou de l’électrode Ag | AgCl en contact direct avec le milieu électrolyte quelconque. L’interface de la pseudo-référence avec l’électrolyte étudié n’est alors en général pas à l’équilibre thermodynamique [71], contrairement au cas de l’interface

[69] La solution interne est en contact avec l’électrolyte du système étudié par l’intermédiaire d’un matériau poreux. Ce dernier est indispensable car il permet de maintenir le contact avec une solution de concentration fixe et connue en cours d’expérimentation. Elle introduit cependant une jonction ionique entre la solution interne et l’électrolyte du système étudié. Cela peut être la source d’erreurs sur les mesures de potentiel. Ces erreurs sont en général difficiles à estimer mais, moyennant certaines précautions expérimentales, elles sont considérées comme négligeables la plupart du temps (voir section 3.4.2.2 et annexe A.1.1). [70] Un exemple qui met en lumière cette propriété et qui peut paraître étonnant en première lecture est que l’on peut parfaitement mesurer une tension non-nulle entre deux électrodes de référence strictement identiques mais placées en deux points différents d’une cellule. C’est le cas lorsque celle-ci est traversée par un courant. Il existe alors une tension entre deux points de l’électrolyte que l’on appelle chute ohmique et qui peut être mesurée entre deux électrodes de référence identiques (voir figures 2.11 et 2.12, section 2.2.3). Dans des cellules présentant des jonctions ioniques et/ou électroniques, on peut également mesurer des tensions non nulles entre deux électrodes de référence identiques placées en deux points différents, même en l’absence de courant. [71] Le potentiel mesuré à l’abandon est un potentiel mixte et non un potentiel d’équilibre, comme cela est décrit à la section 2.4.1.

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ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

électrochimique dans des systèmes usuels de référence comprenant une solution interne adéquate. Cependant, avec l’utilisation d'un potentiostat [72], cette électrode n’étant traversée par aucun courant, on peut alors faire l’hypothèse que son potentiel à l’abandon n’évolue pas au cours de l’expérience. Cette hypothèse demande à être vérifiée dans chaque cas expérimental. D’autre part la valeur précise de ce potentiel à l’abandon est la plupart du temps inconnue. L’utilisation d’une pseudo-référence nécessite alors la mesure du décalage en potentiel de cette électrode, par exemple par l’ajout d’un composé de référence en fin d’expérience [73].

1.5.1.3 - POLARITÉ DES ÉLECTRODES La polarité des électrodes indique uniquement le signe de la tension de la cellule électrochimique [74]. Ainsi, avec la convention généralement utilisée pour une cellule électrochimique, qui consiste à choisir d’écrire la tension comme la différence de potentiel entre l’électrode de travail (WE) et la contre-électrode (CE), la tension s’écrit :

U = ! WE " ! CE = E WE/Réf " E CE/Réf La polarité des électrodes ne traduit pas le signe de la tension des demi-cellules correspondantes, qui dépend de la référence choisie. Selon la nature de l’électrode de référence, on peut très bien avoir une valeur négative du potentiel de l’électrode positive par rapport à l'électrode de référence. Le potentiel de l’électrode négative, vis-àvis de la même électrode de référence, est alors également négatif avec une valeur absolue plus importante. A l’inverse, celui de l’électrode négative peut aussi être positif, mais avec une valeur plus faible que celui de l’électrode positive. Une autre conséquence concrète de ces définitions conduit au fait que donner une précision relative (par exemple en %) d’un potentiel d’électrode, dont la valeur dépend du choix de la référence, n’a aucun sens.

z Prenons l’exemple d’une électrode de cuivre plongeant dans une solution aqueuse contenant des ions Cu2+ en

concentration 10−3 mol L−1. Elle présente à l’abandon un potentiel (proche du potentiel thermodynamique) de +0,25 V/ESH. Si expérimentalement on mesure ce potentiel à l’abandon à l’aide d’une ECS la valeur obtenue est +0,01 V/ECS, alors que si l’on opte pour une électrode à sulfate mercureux Hg2SO4/Hg et solution saturée de K2SO4, la tension mesurée est de −0,39 V/MSE. Une erreur de mesure de l’ordre du mV sur ces tensions, se traduit donc par une erreur relative de 10% dans le premier cas et de 0,3% dans le deuxième. Mais cela ne signifie pas grand-chose…

y

[72] Un potentiostat est le nom de l’appareil électrique permettant l’étude des systèmes électrochimiques. Son principe est décrit à la section 1.6.2 et dans l’annexe A.1.2. [73] Un autre type d’exemple où cette notion de pseudo-référence devrait être utilisée concerne l’utilisation d’une ECS commerciale, avec un compartiment interne rempli d’une solution aqueuse de KCl saturée, immergée dans un électrolyte organique. Il est impossible de connaître précisément la tension de jonction entre les deux électrolytes (aqueux et organique), on ne peut donc pas prétendre connaître précisément la valeur du potentiel de l’électrode de référence. En revanche elle peut être utilisée comme point de référence si elle reste stable. [74] Ces notions ont été préalablement définies à la section 1.4.1.2.

1 - NOTIONS DE BASE

41

1.5.2 - POLARISATIONS ET SURTENSIONS DANS UNE CELLULE ÉLECTROCHIMIQUE Le passage du courant dans une cellule électrochimique correspond nécessairement à une situation hors-équilibre. En revanche lorsqu’il n’y a pas passage global de courant (système à l’abandon ou en circuit ouvert), le système peut être, ou non, à l’équilibre thermodynamique. En effet, l’état d’équilibre d’un système est toujours définissable, en revanche, il n’est pas nécessairement observable, c’est-à-dire qu’on ne peut pas toujours l’atteindre à l’échelle de temps de la mesure, le temps d’observation étant alors trop court. Pour un système initialement à l’équilibre thermodynamique, l’écart par rapport à cette situation d’équilibre est une caractéristique importante pour décrire les phénomènes : c’est le moteur de l’évolution. Ainsi on compare souvent la tension aux bornes d’une cellule électrochimique parcourue par un courant à la valeur de cette tension lorsque aucun courant ne traverse le système [75]. Cette grandeur est appelée surtension, notée η :

!globale = U " U (I = 0) = U " fem Lorsque l’état du système en circuit ouvert est quelconque, éventuellement hors équilibre, on utilise le terme de polarisation [76], notée π :

! globale = U " U (I = 0) Cette terminologie de surtension (ou polarisation) globale est souvent utilisée en milieu industriel, car généralement la conception des cellules ne permet pas de distinguer la part de surtension au niveau de chaque électrode. Ce n’est pas le cas des cellules d’étude en laboratoire, où l’introduction d’une (ou même de deux) électrode(s) de référence permet de bien distinguer les contributions de chaque électrode [77] :

! + = E+/Réf " E+/Réf (I = 0)

! " = E "/Réf " E "/Réf (I = 0)

! cat = E cat/Réf " E cat/Réf (I = 0)

! an = E an/Réf " E an/Réf (I = 0)

Ces valeurs ne dépendent pas de la nature de l’électrode de référence, mais elles peuvent dépendre de la position spatiale de cette électrode de référence dans le système électrochimique [78].

[75] Cette tension à l’équilibre thermodynamique est aussi appelée fem et son lien avec les grandeurs thermodynamiques de réaction est détaillé à la section 3.4.1.1. [76] Ce terme a été introduit par BECQUEREL. [77] Il aurait été logique d’utiliser deux termes différents comme surtension pour la cellule complète et surpotentiel pour une seule électrode. Cependant en français le mot surpotentiel n’est pratiquement pas utilisé. En anglais les deux termes overvoltage et overpotential sont utilisés, mais, la plupart du temps, les auteurs les utilisent comme synonymes et non pas pour distinguer deux grandeurs différentes. [78] La position de l’électrode de référence est une préoccupation que doit avoir tout expérimentateur en électrochimie, dès lors que les phénomènes de chute ohmique dans l’électrolyte étudié ne

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ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Cette décomposition de la tension globale d’un système électrochimique permet une meilleure compréhension des phénomènes à analyser. C’est un outil précieux qui sera repris et développé dans la suite à travers l’utilisation des courbes intensité-potentiel [79].

1.6 - EXPÉRIENCES D’ÉLECTROCHIMIE 1.6.1 - DISPOSITIFS DE MESURE Lors d’une expérience d’électrochimie, il y a toujours trois types de grandeurs importantes : le temps, le courant et la tension (qui peut être mesurée entre différents points). Dès lors, il est nécessaire de disposer de voltmètres et d’ampèremètres performants. Il existe plusieurs principes physiques permettant la mesure d’une tension. Pour que la mesure perturbe au minimum le phénomène étudié, il faut que le courant résultant de la mesure soit extrêmement faible. Ainsi pour les mesures électrochimiques, notamment à l’abandon, on utilise des voltmètres avec des transistors à effet de champ, dont l’impédance d’entrée est particulièrement élevée [80]. Les caractéristiques de l’ampèremètre dépendent, quant à elles, des types de systèmes étudiés. Les densités de courant peuvent être différentes d’un système à l’autre, mais ce sont surtout les surfaces qui varient dans de grandes proportions. La gamme des courants mesurés doit donc être très étendue. Citons quelques exemples pour fixer des ordres de grandeur :  dans un dispositif industriel, par exemple pour la fabrication de l’aluminium, les cellules d’électrolyse utilisent des courants qui sont de l’ordre de 100 000 A,  dans une batterie de démarrage dans un véhicule automobile, les courants mis en jeu lors de la phase de démarrage sont de l’ordre de 100 A,  dans une batterie de téléphone portable, les courants intervenant lors de la réponse à un appel téléphonique sont de l’ordre de 100 mA,  dans une pile bouton de montre, les courants mis en jeu sont de l’ordre de 10 µA,  dans des expériences d’électrochimie analytique utilisant des micro-électrodes, les courants sont couramment de l’ordre du nA et peuvent descendre jusqu’au pA, voire en-dessous [81].

1.6.2 - DISPOSITIFS D’ALIMENTATION ET DE CONTRÔLE Pour tous les points de fonctionnement du système électrochimique étudié en récepteur (mode électrolyse), il est nécessaire d’apporter de l’énergie au système. Les sources peuvent pas être négligés. Une illustration schématique d’une telle situation est détaillée à la section 2.2.3 et la figure 2.12. [79] Pour une présentation détaillée de ces aspects, on se reportera aux sections 2.3 et 2.4. [80] L’ordre de grandeur des impédances d’entrée des voltmètres utilisés en électrochimie est de 1012Ω. [81] Voir la planche intitulée « Microscope Electrochimique à Balayage (SECM) ».

1 - NOTIONS DE BASE

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d’énergie les plus employées sont les sources de courant et les sources de tension. Les points de fonctionnement de ce système en générateur peuvent être obtenus avec une résistance de charge variable. Lorsque le système est commandé en courant, on parle de montage intensiostatique ou galvanostatique, même si le courant imposé évolue dans le temps (voir ci-dessous), et les expériences correspondantes sont qualifiées de potentiométrie : on impose le courant et on mesure les tensions du système. Lorsque c’est la tension qui est imposée aux bornes du système, on parle de montage potentiostatique (même si la tension imposée varie dans le temps) et les expériences correspondantes sont qualifiées d’ampérométrie : on impose la tension aux bornes du système et on mesure le courant le traversant. Le tableau 1.2 résume les termes qualifiant les principaux types d’expériences d’électrochimie. Tableau 1.2 - Principales catégories d’expériences d’électrochimie

Le montage utilise une source de…

La grandeur contrôlée est… La réponse est dans la mesure…

Potentiométrie

Ampérométrie

courant contrôlé (montage intensiostatique ou galvanostatique)

tension contrôlée (montage potentiostatique) ou un potentiostat

le courant I (t )

la tension U (t ) ou le potentiel E (t )

de la tension U (t ) ou du potentiel E (t )

du courant I (t )

Le choix entre ces deux modes de sollicitation n’est pas toujours aisé. Dans de nombreuses expériences d’ampérométrie, on utilise un appareil plus sophistiqué qu’un simple générateur de tension afin de contrôler précisément la tension E entre l’électrode de travail et une électrode de référence. Ce dispositif est plus performant que le simple contrôle de la tension U entre les deux extrémités du système : électrode de travail et contre-électrode. En effet, dans ce cas de montage à deux électrodes, le contrôle de la tension n’est que global et la répartition de la tension entre les deux interfaces n’est pas maîtrisable. Le dispositif indispensable à toute étude de compréhension quantitative en électrochimie est ainsi celui d’un montage à trois électrodes utilisant un potentiostat. Les trois électrodes utilisées sont alors l’électrode de travail (ET ou WE), la contre-électrode (CE ou Aux) et une électrode de référence (Réf), qui n’est traversée par aucun courant. La figure 1.16 représente, de manière simplifiée, un exemple de montage expérimental d’électrochimie utilisant un potentiostat [82]. Le point de fonctionnement illustré correspond à une électrode de travail anode (I > 0 avec les conventions usuelles), la cellule électrochimique fonctionnant en électrolyse. [82] Un court développement sur les principes de réalisation de ces montages d’électrochimie est proposé dans l’annexe A.1.2. En particulier un schéma électronique simplifié d’un potentiostat est décrit (voir figure A.1), mettant en évidence l’utilisation d’un amplificateur opérationnel pour réaliser l’asservissement de E et U et maintenir un courant nul dans la branche de l’électrode de référence (voir aussi la planche « Appareils électrochimiques »).

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ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

APPAREILS ÉLECTROCHIMIQUES Document élaboré avec l’aimable collaboration de B. PETRESCU, ingénieur à Bio-Logic, Claix, France

Toute étude électrochimique nécessite un appareillage capable de piloter et mesurer des tensions et des courants aux bornes d’une cellule électrochimique. On désigne souvent ces instruments comme étant des potentiostats ou des galvanostats. Aujourd’hui la tendance des fabricants d’instrumentation électrochimique est de fournir une réponse globale aux besoins des utilisateurs par une intégration et une modularité accrues autant au niveau matériel qu’au niveau logiciel. En fonction de la spécificité de l’application, des modules intelligents peuvent être rajoutés au potentiostat de base souvent dans le même châssis. Des modules d’amplification spécifiques à forts courants (jusqu’à 100 A) répondent aux besoins des applications stockage ou production d’énergie (batteries, pile à combustible, photovoltaïque) tandis que des modules à faibles courants (résolution inférieure au picoampère) répondent aux besoins d’études des matériaux, bio-puces, capteurs, etc. De plus, le nombre de voies de mesure peut être modulé, ainsi la gamme s’étend du monovoie au multivoies.

Potentiostat modulaire multivoies VMP3 de la société Bio-Logic (© Biologic SAS)

Les énormes progrès technologiques faits dans l’électronique et la banalisation du numérique ont eu ces dernières années une forte incidence sur la miniaturisation et la simplification du montage autour de la cellule électrochimique tout en ouvrant la porte à de nouvelles fonctions. Configuration potentiostat, galvanostat ou analyseur d’impédance, enregistrement intelligent et nombre illimité des points, chaînage des techniques, analyse du pic ou identification paramétrique en impédance, protection des données, connexion Ethernet ou USB, voilà quelques-unes des possibilités d’un potentiostat moderne. Rappelons que, dans un passé récent, pour faire une voltamétrie cyclique on utilisait un potentiostat analogique couplé à un générateur de signaux et une table traçante. Pour une mesure d’impédance électrochimique l’utilisateur avait souvent à manipuler plusieurs instruments et plusieurs logiciels. Aujourd’hui, il n’est besoin que d’une seule machine et un seul logiciel pour piloter l’expérience, enregistrer les données et faire l’analyse des résultats. Tout cela dans le but de faire gagner du temps à l’expérimentateur tout en augmentant les performances et la fiabilité des mesures.

1 - NOTIONS DE BASE

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POTENTIOSTAT

V WE I

A Réf

CE

I=0

I

Figure 1.16 - Schéma simplifié d’un montage électrochimique utilisant un potentiostat WE : électrode de travail ; Réf : électrode de référence ; CE : contre-électrode La flèche pointillée symbolise le lien qui existe entre la tension indiquée par le voltmètre, tension entre WE et Réf qui est contrôlée, et celle effectivement délivrée par la source électrique entre WE et CE.

1.6.3 - DIFFÉRENTS TYPES DE CONTRÔLE ÉLECTRIQUE Il existe un grand choix d’expériences possibles pour un même système suivant le type de commandes employées et notamment leur dépendance temporelle. L’exemple le plus simple est la réponse du système quand on impose une tension ou un courant constant dans le temps. On parle de contrôle potentiostatique ou intensiostatique. Dans un cas quelconque, la réponse dépend du temps. On parle alors de régime transitoire. La réponse du système à une expérience de chronoampérométrie (contrôle potentiostatique) est une courbe I (t ), celle à une expérience de chronopotentiométrie (contrôle intensiostatique) est une courbe U (t ) ou E (t ) [83]. Il est parfois intéressant d’observer

[83] D’après cette présentation, qui s’en tient à l’étymologie des termes, les méthodes de chronoampérométrie regroupent donc les expériences pour lesquelles on peut retirer de l’information de la variation temporelle de la mesure du courant (ou du potentiel pour la chronopotentiométrie). Cependant ces termes ont été historiquement introduits pour des expériences de simple ou double saut (sollicitation constante pendant le temps de l’impulsion) et pour des expériences où seuls les phénomènes de transport par diffusion des espèces électroactives étaient à prendre en compte (de tels exemples sont présentés dans la section 4.3.1.3). Aujourd’hui de manière plus générale on utilise ce terme de chronoampérométrie (ou chronopotentiométrie) pour des expériences avec une sollicitation constante (au moins le temps d’une impulsion) mais avec des conditions de transport de matière quelconque (par exemple diffusion et migration ou même convection forcée, dès lors qu’on s’intéresse au régime transitoire avant l’établissement du régime stationnaire). En revanche, les expériences de suivi de potentiel à l’abandon (courant nul), fort utiles en corrosion ou lors de

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ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

l’évolution temporelle lorsqu’on change la consigne de sollicitation après une durée fixée. Dans ce type d’expérience on trouve, suivant le type de signal imposé, une expérience de simple saut, double saut ou des techniques plus sophistiquées utilisant des impulsions de durée fixée. Dans une autre classe importante d’expériences d’électrochimie, on impose une sollicitation variant de manière linéaire dans le temps. Parmi celles-ci se trouve la voltampérométrie à balayage linéaire de potentiel dans le temps, appelée fréquemment de manière raccourcie la voltamétrie ou voltammétrie. La pente de la courbe U (t ) ou E (t ) est appelée vitesse de balayage (en V s−1). On présente généralement la réponse du système sous la forme d’une courbe I = f (U ) ou I = f (E ) qui est donc parcourue au cours du temps. Le sens de variation du potentiel dans le temps peut être inversé lorsque le potentiel atteint une valeur donnée. On parle alors de voltamétrie cyclique. Sans vouloir être exhaustif sur toutes les techniques classiques, il faut également citer ici les techniques pour lesquelles la sollicitation évolue périodiquement dans le temps. Parmi celles-ci, la plus utilisée est la spectroscopie d’impédance électrochimique (ou spectroscopie d’impédance ou impédancemétrie en raccourci) où la sollicitation varie autour d’une valeur constante sous la forme d’une sinusoïde de faible amplitude et de fréquence f contrôlée. Après un régime transitoire, un régime stationnaire doit être atteint et l’amplitude de la réponse doit varier linéairement avec celle de la sollicitation. Cette deuxième condition est généralement vérifiée, pour des amplitudes suffisamment petites du signal d’entrée (typiquement quelques millivolts pour une sollicitation potentiostatique). Ce sont des conditions (stationnarité et linéarité) que tout expérimentateur se doit de vérifier avant de valider ses données, dans la mesure où la plage de validité peut varier d’un système à un autre. La réponse est alors sinusoïdale avec la même fréquence que l’excitation. Elle peut donc être traduite par une impédance, qui est fonction de la fréquence. Les grandeurs mesurées peuvent être représentées sous la forme des diagrammes de BODE [84] (fréquemment utilisés par les électriciens) mais en électrochimie elles sont plus fréquemment représentées sous la forme de diagrammes de NYQUIST : valeur opposée de la partie imaginaire −Im (Z ) en fonction de la partie réelle Re (Z ) pour différentes valeurs de fréquence.

1.6.4 - RÉGIME STATIONNAIRE Il est parfois possible d’atteindre au bout d’un temps expérimental raisonnable une réponse courant/tension qui n’évolue plus dans le temps. On parle alors de régime stationnaire et on trace ainsi par exemple des courbes intensité-potentiel stationnaires (U,I ) ou (E,I ) qui sont des outils précieux de l’analyse du comportement des systèmes électrochimiques [85]. dosages par exemple, ne sont généralement pas désignées par le terme de chronopotentiométrie même si étymologiquement cela resterait correct. [84] Les diagrammes de BODE, qui sont d’utilisation courante en électronique, représentent le module ou la phase d’une grandeur complexe en fonction de la fréquence en échelle logarithmique. [85] Les sections 2.3 et 2.4 traitent de l’allure des courbes intensité-potentiel et de l’utilisation que l’on peut en faire pour la compréhension et la description des systèmes électrochimiques.

1 - NOTIONS DE BASE

47

Il ne faut pas confondre cette notion avec la notion d’équilibre, c’est-à-dire faire une confusion entre les termes « stationnaire » et « constant ». Pour qu’il y ait un régime stationnaire il faut seulement que les variations dans le temps soient nulles en chaque point de l’espace. Un système électrochimique en régime stationnaire au sens strict peut donc présenter des gradients spatiaux, mais ils sont indépendants du temps. Par exemple, pour les concentrations, cela se traduit par :

!i

"C i =0 "t

mais éventuellement

"C i #0 "x

Les états d’équilibre sont des cas particuliers de régime stationnaire dans lequel le courant global est nul. Expérimentalement, des caractéristiques (U,I ) ou (E,I ) stationnaires à l’échelle de temps d’une expérience sont fréquemment observées alors que la stricte stationnarité des différents paramètres définissant le système (par exemple les différentes concentrations dans l’électrolyte) n’est pas vérifiée. On devrait alors parler de manière rigoureuse de régime quasi-stationnaire. L’existence de régimes strictement stationnaires différents de l’équilibre est très exceptionnelle en électrochimie. En effet, cela requiert notamment qu’il n’y ait pas d’évolution de la composition chimique moyenne de chaque phase [86]. Les systèmes présentant des caractéristiques (U,I ) ou (E,I ) stationnaires à l’échelle de temps d’une expérience sont ainsi le plus souvent des systèmes en régime quasi-stationnaire. Pour obtenir un régime quasi-stationnaire, la première condition qui doit être vérifiée est que la composition chimique globale reste quasiment invariante entre le début et la fin de l’expérience. Cela correspond à deux cas de figure assez différents :  une situation, typique des conditions de chimie analytique, où le volume de l’électrolyte et la quantité de matière qui y est contenue sont tels que la quantité de matière qui est produite ou consommée durant l’expérience est négligeable (un exemple de ce type est développé à la section 2.3.1.2). Ainsi la mesure ne perturbe pas le système analysé ;  une situation de macro-électrolyse dans un système à circulation d’électrolyte, qui permet de réalimenter en continu la cellule d’électrolyse d’un milieu de composition constante, alors que les produits formés sont évacués vers l’extérieur. Cette condition sur la composition chimique du système n’est pas suffisante pour assurer l’existence de régimes quasi-stationaires différents de l’équilibre et observables dans une échelle de temps raisonnable. Un exemple de dispositif permettant d’obtenir aisément au laboratoire un régime quasi-stationnaire est celui de l’électrode à disque tournant (ou EDT), illustrée sur la figure 1.17. Le corps de cette électrode est cylindrique et raccordé à un dispositif permettant de le faire tourner autour de son axe ; seule la section disque est en contact avec l’électrolyte.

[86] Des exemples de ce type sont décrits dans l’annexe A.4.1 pour un système où les réactions anodique et cathodique sont exactement opposées. L’électrolyte peut alors rigoureusement atteindre un régime stationnaire.

48

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Dans la suite, on choisira très souvent ce type de conditions expérimentales pour illustrer les différentes notions de l’électrochimie, en parlant de manière abusive, mais usuelle, de régime stationnaire.

Figure 1.17 - Schéma d’une électrode à disque tournant, EDT

1.6.5 - PRINCIPALES MÉTHODES ÉLECTROCHIMIQUES De manière résumée et schématique, les expériences classiques d’ampérométrie peuvent être rangées suivant les quatre grandes classes regroupées dans le tableau 1.3. Un tableau semblable pourrait être dressé pour les expériences classiques de potentiométrie (en dehors de la voltamétrie dont l’équivalent en potentiométrie n’est pas utilisé).

1 - NOTIONS DE BASE

49

Tableau 1.3 - Principales expériences d'ampérométrie en électrochimie

Tension imposée

Réponse

U,E

I

Stationnaire (pour certaines conditions expérimentales)

Régime stationnaire

t U,E

t I

Chronoampérométrie

Régime transitoire

simple saut

t U,E

double saut

t I

t U,E

Voltampérométrie

t I

v balayage t U,E

U – Im(Z)

Impédancemétrie

f t

Re(Z)

50

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

QUESTIONS SUR LE CHAPITRE 1 1 - Un anion est toujours chargé négativement

vrai

faux

2 - Un oxydant est toujours un cation

vrai

faux

3 - Dans la demi-réaction suivante : CoCl42− + 2 e− Co + 4 Cl− indiquer :  le couple rédox mis en jeu ..........................  l’espèce oxydée du couple ..........................  le nombre de charge (algébrique) de l’oxydant ..........................  le nombre stœchiométrique (algébrique) du réducteur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .  l’élément subissant l’oxydoréduction ..........................  le nombre d’oxydation de l’élément oxydé ..........................  le sens d’écriture de la réaction oxydation réduction 4 - On peut réduire un anion à la cathode

vrai

5 - Quel est le nombre d’oxydation habituel de l’oxygène dans un composé ?

faux .........

Parmi les composés suivants, préciser (en les entourant) ceux où l’oxygène est :  à son nombre d’oxydation usuel H 2O

FeO

OH−

H 2O 2

ClO4−

F 2O

CO2

CO

ClO4−

F 2O

CO2

CO

 à un nombre d’oxydation supérieur H 2O

FeO

OH−

H 2O 2

6 - Quel est le nombre d’oxydation de l’oxygène dans O3 ? −III

−I

0

+I

+III

7 - Ecrire la demi-réaction rédox du couple SiO2/Si en milieu acide ................................................................................. 8 - Un électrolyte est :  un milieu à conduction ionique  un récipient servant à réaliser une électrolyse  un composé qui se dissout dans un solvant en donnant des ions  un monsieur qui fait une électrolyse  une personne électrocutée

vrai vrai vrai vrai vrai

faux faux faux faux faux

1 - NOTIONS DE BASE

51

9 - Les sels fondus sont des milieux à conduction majoritairement électronique

vrai

faux

10 - Les semi-conducteurs sont des milieux à conduction de type électronique

vrai

faux

11 - Un électrolyte peut se trouver sous forme :  solide  liquide  gazeuse

vrai vrai vrai

faux faux faux

12 - L’ordre de grandeur usuel de l’épaisseur d’une zone interfaciale métal | solution électrolyte aqueuse est de quelques micromètres

vrai

faux

13 - En électrochimie, la cathode :  est toujours l'électrode négative du dispositif  présente toujours un potentiel relatif à ESH négatif  est toujours le siège d’une réduction

vrai vrai vrai

faux faux faux

14 - On réalise une électrolyse entre une électrode de 1 m2 de surface pour laquelle la densité de courant est égale à 1 mA cm−2 et une électrode dont la surface active est un carré de 10 cm sur 10 cm. La valeur de la densité de courant (en valeur absolue) à cette deuxième électrode est 10−3 A m−2

1 A m−2

103 A m−2

15 - Compte tenu des réactions d’électrode données, compléter le schéma suivant, en y précisant :  les positions de l’anode et la cathode  le sens du courant (ou de la densité de courant)  le type de dispositif extérieur (à placer en remplacement du point d’interrogation sur le schéma) +

PbO2 + SO42– + 4 H + 2 e  PbSO4 + 2 H2O

?

+



?

Pb + SO42–  PbSO4 + 2 e–

?



52

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

16 - Dans un montage expérimental à 3 électrodes, celles-ci sont appelées : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Quel est le nom de l’appareil électronique utilisé généralement au laboratoire dans ce cas ?

..............................

17 - En électrochimie, une électrode joue un rôle particulier, c’est l’ESH.  Quel est ce rôle particulier ? ..............................  Que signifient ces initiales ? ..............................  Quel est le couple rédox mis en jeu ? ..............................  Il existe une différence de potentiel entre l’ESH et l’ENH vrai

faux

18 - Citer 2 types d’électrodes de référence utilisables expérimentalement, en précisant le couple rédox mis en jeu.  ..............................  .............................. 19 - Un fil d’argent recouvert de chlorure d’argent est plongé dans une solution aqueuse contenant du nitrate de potassium. Cette électrode peut être utilisée comme électrode de référence pour des mesures de potentiel, repérables dans l’échelle des potentiels 20 - Pour un système ou une électrode parcouru(e) par un courant, qui, à l’abandon, n’était pas à l’équilibre, il faut employer uniquement le terme de

polarisation

vrai

faux

surtension

21 - Compléter l’allure des courbes de variation en fonction du temps de la tension et du courant, lors d’une expérience simple de chronoampérométrie. U

I

t

t

2 - DESCRIPTION

SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES Lors de l’étude d’un système électrochimique, il est nécessaire de comprendre ce qui détermine son point de fonctionnement courant/tension à chaque instant. Dans ce chapitre, tout en se limitant aux systèmes les plus simples, les aspects thermodynamiques et cinétiques des phénomènes se déroulant dans ces systèmes hétérogènes sont présentés en explicitant, sans les démontrer, les deux principales lois quantitatives de l’électrochimie : loi de NERNST et loi de FARADAY. Ensuite en restant à un niveau qualitatif, on montrera comment on peut rendre compte des points de fonctionnement d’un système électrochimique, grâce à l’outil que sont les courbes intensité-potentiel [1].

2.1 - CARACTÉRISTIQUES DES SYSTÈMES À L’ÉQUILIBRE THERMODYNAMIQUE En thermodynamique, la définition précise du système, de ses frontières et de ses échanges avec l’extérieur, est importante. Dans la description adoptée ici, le système électrochimique s’arrête aux matériaux métalliques constituant les deux électrodes. Ainsi, si l’on ne considère pas les échanges thermiques, le système à l’abandon (ou en circuit ouvert) est isolé, sans échange d’énergie ni de matière avec l’extérieur. C’est la définition de l’état d’équilibre thermodynamique de ce système isolé qui fait l’objet de cette section 2.1. On exclut ainsi de ce cadre la description d’un système alimentant un dispositif (cas d’une pile en fonctionnement). Dans ce cas, dans la mesure où l’on permet des échanges d’électrons et d’énergie électrique avec l’extérieur, ceux-ci provoquent une transformation, une évolution vers un nouvel état d’équilibre. On peut faire une analogie avec un système gazeux : le système isolé à l’équilibre est le gaz d’une bouteille sous pression, de volume et température fixes. Si l’on fait un trou permettant au gaz de se détendre dans un volume initialement vide, on assiste à une transformation vers un nouvel état d’équilibre. L’équilibre thermodynamique d’une chaîne électrochimique, défini en toute rigueur par l’équilibre au sein de toutes les phases et à chacune des interfaces, n’est pas nécessairement observable à une échelle de temps usuelle.

[1] Le terme « courbe intensité-potentiel » est un terme usuel des électrochimistes, même si, par souci de cohérence, on devrait plutôt parler de « courbe courant-potentiel ». En anglais, le terme d'usage est d'ailleurs « current-potential curve ». D’autres auteurs utilisent aussi le terme « courbe de polarisation », comme cela sera évoqué dans la section 2.3.

54

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

2.1.1 - RÉPARTITION DES POTENTIELS ÉLECTRIQUES

À L’ÉQUILIBRE

A l’équilibre, une chaîne électrochimique n’est traversée par aucun courant et chaque volume conducteur est équipotentiel. La tension aux bornes de la chaîne est ainsi la somme algébrique des tensions de jonction et/ou des tensions aux bornes des interfaces électrochimiques, comme cela est illustré sur la figure 2.1 dans une représentation simplifiée d’un profil de potentiel vraisemblable à l’intérieur d’une pile DANIELL en circuit ouvert [2].

j

jCu ø jZn

Zn

Solution aqueuse de ZnSO4

Solution aqueuse de KNO3

Solution aqueuse de CuSO4

Cu

Figure 2.1 - Profil de potentiel dans une pile DANIELL en circuit ouvert

Chacun des cinq volumes conducteurs qui composent cette chaîne électrochimique est équipotentiel. En revanche il existe a priori une différence de potentiel à chaque interface (que l’on a supposée, dans cette représentation simplifiée, d’épaisseur négligeable), y compris pour les jonctions ioniques. Dans de nombreux systèmes électrochimiques, notamment lorsqu’il est nécessaire de séparer les compartiments (voir exemple ci-dessus), la chaîne électrochimique fait apparaître des jonctions ioniques entre solutions de compositions différentes. En toute rigueur, l’équilibre thermodynamique de ce type de système correspond au mélange complet de toutes les solutions [3], et les tensions de jonction ionique sont donc toutes strictement nulles à l’équilibre thermodynamique. Cependant, le dispositif expérimental est le plus souvent conçu de manière à ralentir très fortement l’établissement de cet état

[2] Le profil de potentiel réel n’est pas accessible directement de manière expérimentale. On a donc, pour réaliser ce schéma, fait des choix arbitraires en ce qui concerne les signes des différentes tensions de jonction ou d’interface. La tension globale est en revanche une grandeur facilement mesurable. Son signe (positif si l’on prend le cuivre comme électrode de travail) est ainsi correctement traduit sur la figure 2.1. En ce qui concerne les tensions aux bornes des interfaces électrochimiques, leurs signes peuvent être déterminés si l’on connaît la position relative du potentiel de l’électrode à l’abandon et celui de son potentiel de charge nulle, mais cette discussion dépasse largement le cadre des objectifs de ce document. [3] L’étude précise de l’équilibre thermodynamique des interfaces est menée dans la section 3.3 et la démonstration du résultat énoncé ici se trouve dans la section 3.3.5.

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

55

d’équilibre, par l’emploi d’un fritté, d’une membrane ou encore d’un électrolyte gélifié [4]. On s’intéresse alors d’un point de vue expérimental à l’état quasi-stationnaire, atteint rapidement par un tel système et observable à une échelle de temps habituelle. Mais c’est un état différent de l’équilibre thermodynamique. De plus, dans le cas de l’utilisation d’un pont salin, tel qu’illustré dans l’exemple précédent, on admettra que le choix d’un électrolyte intermédiaire, de concentration importante devant les concentrations ioniques dans chacun des deux autres compartiments, permet de minimiser les tensions de jonction ionique à l’état quasi-stationnaire. Rappelons que, par convention, on définit la tension de la chaîne électrochimique comme la différence entre le potentiel de l’électrode de travail et celui de la contreélectrode : U = ! WE " ! CE

Lorsque le système est à l’équilibre thermodynamique, cette tension est appelée la fem de la chaîne électrochimique [5]. C’est une grandeur algébrique qui s’exprime en volts (V).

2.1.2 - POTENTIOMÉTRIE À L’ÉQUILIBRE 2.1.2.1 - LOI DE NERNST Lorsque les deux éléments d’un couple rédox sont présents à une interface, on peut démontrer, à partir de l’expression de la différence de potentiel à cette interface à l’équilibre, que le potentiel à l’équilibre thermodynamique de l’électrode correspondante par rapport à une électrode référence s’exprime suivant la loi de NERNST [6]. On utilisera l’expression suivante de la loi de NERNST :

E /Réf = E° /Réf +

RT ln " ai!i !e � i

où i représente chacune des espèces mises en jeu dans la demi-réaction rédox, à l’exclusion de l’électron, avec : E/Réf le potentiel de l’électrode en présence du couple rédox considéré relatif à la référence choisie [ V/Réf ] E °/Réf le potentiel standard du couple rédox considéré relatif à la référence choisie [ V/Réf ] R la constante des gaz parfaits [ J K−1 mol−1 ] T la température [K] [4] Certains aspects de la description du transport de matière dans des systèmes électrochimiques à deux compartiments séparés par une membrane, un gel ou un fritté, sont décrits dans la section 4.4.2. [5] La description de l’équilibre thermodynamique des systèmes et interfaces électrochimiques permettant de faire le lien entre la fem et les grandeurs d’enthalpie libre de réaction standard est réalisée dans la section 3.4.1.1. En toute rigueur, U est la ddp entre la connexion métallique à l’intérieur du voltmètre côté WE et celle côté CE (métal de même nature). [6] La description de l’équilibre thermodynamique des interfaces électrochimiques permettant de démontrer la loi de NERNST est réalisée dans les sections 3.3.4.2 et 3.4.1.2.

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ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

νe ai νi ^

le nombre stœchiométrique algébrique de l’électron l’activité de l’espèce i le nombre stœchiométrique algébrique de l’espèce i la constante de FARADAY [7] 1 ^ = 96 485 C mol−1 ≈ 96 500 C mol−1

[ C mol−1 ]

Dans la plupart des ouvrages, l’écriture employée utilise le nombre n d’électrons échangés et correspond donc implicitement à l’écriture de la demi-réaction dans le sens de l’oxydation (activité de l’oxydant au numérateur). Ici nous préférons une écriture plus générale qui fait intervenir le nombre stœchiométrique algébrique des électrons dans cette demi-réaction. Elle permet en effet d’appliquer la loi de NERNST en ayant écrit la demi-réaction considérée dans un sens quelconque, comme cela est illustré dans les exemples détaillés plus loin :  dans le sens de l’oxydation :  dans le sens de la réduction :

νOx > 0 νOx < 0

νe = n > 0 νe = − n < 0

νRed < 0, νRed > 0.

A 25 °C, en utilisant les logarithmes décimaux à la place des logarithmes népériens, on écrit aussi, avec (RT/^)ln 10 ≈ 0,06 V :

E /Réf = E° /Réf +

0,06 log " ai!i !e i

A ce niveau, il est utile de rappeler quelques notions élémentaires de thermochimie. Les grandeurs thermodynamiques dépendent de l’état précis du système. La description de l’état thermodynamique d’un système quelconque, c’est-à-dire en général un mélange de plusieurs composants, se fait par l’intermédiaire des activités de chaque composant. On rappelle ici la définition de l’activité, qui est un nombre sans dimension, dans le cas de systèmes idéaux [8] :  pour un mélange idéal de gaz parfaits (rapport de la pression partielle sur la pression standard P ° égale à 1 bar)

ai = Pi /P °

 pour un liquide pur

a=1

 pour le solvant d’une solution (composant majoritaire du milieu)

a=1

 pour un soluté (ionique ou pas) d’une solution idéale ai = Ci /C ° (rapport de la concentration sur la concentration standard C ° égale à 1 mol L−1)  pour un élément ou composé d’un solide seul dans sa phase

a=1

 pour des solutions ou mélanges solides idéaux ai = xi (fraction molaire du constituant considéré). Les exemples de ce type rencontrés le plus fréquemment en électrochimie sont les alliages métalliques ou les matériaux d’insertion solides. Ce sont en fait rarement des systèmes idéaux, mais leur description thermodynamique fait toujours appel à des grandeurs proches de la fraction molaire, comme le taux d’insertion dans un matériau d’insertion (voir exemple ci-dessous).

[7] ^ représente la valeur absolue de la charge d’une mole d’électrons : 1 ^ = 1 ⎜e ⎜avec 1 la constante d’AVOGADRO, 1 = 6,02 .1023 mol−1 et e la charge élémentaire de l’électron, e = − 1,6 .10−19 C. [8] Ces notions de base en thermochimie sont présentées de manière un peu plus détaillée dans la section 3.1.2.1.

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

57

z On peut illustrer par quelques exemples l’écriture de la loi de NERNST pour des systèmes idéaux :  Fe3+/Fe2+ : Fe2+ Fe3+ + e− Les nombres stœchiométriques sont les suivants : νe = 1 ν Fe2+ = −1 ν Fe3+ = +1 Les ions Fe3+ et Fe2+ sont des solutés dans une solution aqueuse, donc :

E = E°Fe

3+

/ Fe 2+

+ 0,06 log

[Fe3+ ] [Fe 2+ ]

 Cu2+/Cu : Cu2+ + 2 e− Cu Les nombres stœchiométriques sont les suivants : νe = −2 ν Cu2+ = −1 ν Cu = +1 Les ions Cu2+ sont des solutés dans une solution aqueuse, alors que Cu représente le métal cuivre seul dans sa phase, donc : 1 E = E°Cu2+/ Cu ! 0,03 log 2+ = E°Cu2+/ Cu + 0,03 log[Cu2+ ] [Cu ] Zn(OH)2 + 2 e− Zn + 2 OH−  Zn(OH)2/Zn : Les nombres stœchiométriques sont les suivants : νe = −2 ν Zn(OH)2 = −1 ν Zn = +1 ν OH− = +2 Les ions OH− sont des solutés dans une solution aqueuse, alors que Zn et Zn(OH)2 sont des solides constituant deux phases distinctes, donc [9] :

E = E°Zn(OH)2 / Zn ! 0,03 log[OH! ] 2 = E°Zn(OH)2 / Zn ! 0,06 log[OH! ]  Si l’on considère l’interface entre un électrolyte organique contenant des ions Li+ et le solide LixCoO2, oxyde de cobalt qui est un matériau d’insertion du lithium, on peut écrire la demi-réaction rédox sous plusieurs formes, par exemple : CoO2 + x e− + x Li+ LixCoO2 LiCoO2 Li1−x’CoO2 + x’ e− + x’ Li+ Dans l’idéal, les deux états extrêmes de ce matériau correspondraient au couple CoO2/LiCoO2. Pour écrire la loi de NERNST dans ce matériau, on peut de manière simplifiée ne considérer que l’équilibre concernant les ions lithium, qui restent au nombre d’oxydation +I. Cela implique que le matériau d’insertion est suffisamment conducteur électronique pour que la limitation se fasse par les sites d’insertion ionique. La demi-réaction rédox peut alors s’écrire :

! " + e# + Li +électrolyte

!Li"

où le symbole ! " représente un site d’insertion du matériau hôte : ! " pour un site libre et !Li" pour un site occupé. La loi de NERNST s’écrit donc :

E = E °CoO2 /LiCoO2 + 0,06 log

a Li+ a a

Li

= E °CoO2 /LiCoO2 + 0,06 loga Li+ + 0,06 log

1! y y

où, dans cette description simplifiée, y est le rapport entre le taux d'insertion du matériau et sa valeur maximale.

[9] Compte tenu de la demi-réaction écrite pour cet exemple, l’état standard particulier à prendre en compte est celui d’une solution avec des ions OH− d’activité égale à 1, soit pH = 14. Il ne faut donc pas confondre la valeur de E ° qui apparaît dans les équations écrites ici avec une valeur à pH = 0 qui correspondrait à la demi-réaction du même couple mais faisant intervenir H+ dans le bilan au lieu de OH−. On retrouve cette mise en garde dans la section 3.4.1.1 pour les données d’enthalpie libre standard de réaction. C’est également un cas particulier de potentiel standard apparent, comme cela est développé dans la section suivante.

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ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

 Pour la chaîne électrochimique correspondant à la pile DANIELL (voir figure 2.1 dans la section 2.1.1) : Zn | solution aqueuse de ZnSO4 | | solution aqueuse de CuSO4 | Cu en négligeant les tensions de jonction et en admettant que les deux interfaces sont à l’équilibre thermodynamique [10] : U = E°Cu2+/ Cu + 0,03 log[Cu2+ ] ! (E°Zn2+/ Zn + 0,03 log[Zn2+ ] )

2.1.2.2 - POTENTIEL STANDARD

y

APPARENT

Les caractéristiques thermodynamiques des couples rédox sont importantes pour la compréhension et le tracé qualitatif des courbes intensité-potentiel [11]. On peut évoquer certains cas particuliers expérimentalement fréquents : lorsque les protons ou les ions hydroxyde interviennent dans le bilan rédox et que le milieu étudié est tamponné, ou lorsque des composés en grande quantité interviennent dans le bilan de la demiréaction, on peut alors faire l’approximation que leur activité va rester constante quel que soit le degré d’avancement de la réaction. Dans l’expression de la loi de NERNST, on définit alors un potentiel standard apparent dans ce milieu-là. Des exemples de ce type se rencontrent fréquemment dans des systèmes comportant des solutions aqueuses très acides ou très basiques : le pH peut être considéré comme constant et on définit alors des potentiels standard apparents correspondant à des solutions aqueuses de pH fixé.

z Par exemple pour le couple IO3−/ I−, la demi-réaction rédox s’écrit : On a donc :

I − + 3 H 2O IO3− + 6 H+ + 6 e− ν I− = −1 ν H2O = −3 ν IO3− = +1 ν H+ = +6 ν e = +6

La loi de NERNST s’écrit à 25 °C :

E = E°IO3!/ I! +

6 0,06 (a H+ ) a IO3! log 6 a I! (a H2 O )3

Comme l’eau est le solvant de la solution, son activité est égale à 1. En utilisant la définition du pH, on obtient a ! E = E°IO3!/ I! + 0,01 log IO3 ! 0,06 pH finalement : a I! Si la solution étudiée est très acide (ou très basique) ou si le milieu est tamponné, on écrira la loi de NERNST sous a ! E = E°app ! ! + 0,01 log IO3 la forme : IO3 / I a I! avec

E°app

IO3!/ I!

= E°IO3!/ I! ! 0,06 pH

Ainsi lorsqu’on donne des valeurs numériques de potentiels standard apparents, il faut nécessairement préciser le milieu considéré (par exemple en précisant la valeur du pH pour l’exemple précédent).

y

[10] Comme cela sera repris dans l’introduction de la section 3.4 et détaillé sur un exemple dans la section 3.4.1.1, lorsqu’on mesure une tension à l’aide d’un voltmètre, la mesure est toujours celle de la différence de potentiel entre deux métaux de même nature (principe de mesure d’un voltmètre). La chaîne électrochimique correspondant à la mesure de la tension de la pile DANIELL est ainsi, de manière rigoureuse, la suivante : Cu’ | Zn | solution aqueuse de ZnSO4 | | solution aqueuse de CuSO4 | Cu [11] La section 2.3 décrit les différentes allures et caractéristiques des courbes intensité-potentiel, sur lesquelles on positionne toujours le potentiel thermodynamique standard (éventuellement apparent) pour chaque couple rédox à prendre en compte dans le système.

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

59

Dans les systèmes utilisant des matériaux d’insertion, on rencontre également une situation du même type, où l’ion échangé est en grande concentration, et on utilise alors également la notion de potentiel standard apparent pour l’écriture de la loi de NERNST, qui fait alors uniquement apparaître le taux d’insertion du matériau. On parle aussi d’isotherme d’insertion.

z Si on considère l’interface entre un électrolyte organique contenant des ions Li+ et le solide LixMnO2 (oxyde de manganèse qui est un matériau d’insertion du lithium) : MnO2 + x e− + x Li+ LixMnO2 la loi de NERNST s’écrit en fonction de y (voir section 2.1.2.1) : 1! y E = E °MnO2 /LiMnO2 + 0,06 loga Li+ + 0,06 log y

Pour des matériaux idéaux et si l’on peut négliger les variations de concentration en ion Li+ en solution, l’isotherme d’insertion, c’est-à-dire le potentiel d’équilibre pour différents taux d’insertion, prend la forme suivante : 1! y E = E °appMnO2 / LiMnO2 + 0,06 log y

E°appMnO / LiMnO = E°MnO2 / LiMnO2 + 0,06 loga Li+

avec

2

y

2

2.1.2.3 - LES COUPLES RÉDOX DE L’EAU L’eau, qu’elle soit solvant ou soluté, est un composé susceptible d’être oxydé ou réduit [12]. Cette espèce intervient en effet dans les deux couples rédox suivants : O2/H2O

et

H2O/H2

On peut écrire et équilibrer le bilan des demi-réactions rédox correspondantes avec des protons ou des ions hydroxyde : Tableau 2.1 - Différentes écritures des deux couples rédox de l’eau Milieu Acide Basique

Couple O2/H2O 2 H 2O 4 OH



Couple H2O/H2

O 2 + 4 H + + 4 e− O 2 + 2 H 2O + 4 e



2 H + + 2 e− 2 H 2O + 2 e



H2 2 OH− + H2

Mais quelle que soit l’écriture choisie, l’élément qui change de nombre d’oxydation est, respectivement pour les deux couples, l’oxygène ou l’hydrogène :  pour le couple O2/H2O, c’est l’oxygène qui change de nombre d’oxydation : 0 dans le dioxygène et −II dans H2O ou OH− ;  pour le couple H2O/H2, c’est l’hydrogène qui change de nombre d’oxydation : 0 dans le dihydrogène et +I dans H+ ou H2O. [12] Les mêmes couples de l'eau interviennent également souvent en milieux non aqueux (par exemple lorsque l’on considère des solvants organiques non parfaitement anhydres). Mais alors il faut considérer les données thermodynamiques adaptées à ces milieux (en prenant garde notamment à l’état de référence choisi pour l’eau soluté).

60

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

RÉGULATION DE LA CARBURATION DES MOTEURS Document élaboré avec l’aimable collaboration de J. F OULETIER, professeur à l’Université Joseph Fourier de Grenoble

Le capteur « lambda » est utilisé pour la régulation des moteurs à explosion. Il a la forme d’une bougie et est placé dans la pipe d’échappement des véhicules, en sortie de culasse. Il s’agit d’un capteur potentiométrique mettant en œuvre un tube céramique à fond fermé. Ce type de capteur est aujourd’hui produit à plusieurs millions de pièces par an.

Photo d’un capteur lambda extrait d’une voiture après utilisation

L'électrolyte solide utilisé, conducteur par les ions oxyde, O2–, est la zircone stabilisée à l’oxyde d’yttrium (ZrO2 – Y2O3, 8% en mol). Les deux surfaces (extérieure et intérieure) du tube sont revêtues de peinture au platine et constituent les électrodes. La référence de la cellule est l’oxygène de l’air qui est en contact avec l’intérieur du tube. L’extérieur du tube est en contact avec les gaz d’échappement. L'électrode de mesure est protégée par un cache métallique et une couche poreuse d’un oxyde. La chaîne électrochimique réalisée est alors : O2(air),Pt | O2–électrolyte solide | Pt,O2(gaz). La loi de NERNST, lorsque les électrodes sont à l'équilibre, permet de déterminer la pression partielle d'oxygène dans le gaz analysé, fixée par le mélange des produits de combustion. En réalité, les gaz d'échappement ne sont pas dans un état d'équilibre et le dispositif a plutôt la fonction d'un indicateur d'excès, ou de défaut, d’oxygène dans le mélange de carburation. Il est impératif que le combustible utilisé soit sans plomb pour éviter un empoisonnement de l’électrode de mesure. Le terme « lambda » indique que le capteur est prévu pour fonctionner au point stœchiométrique, c’est-à-dire pour un rapport air/essence égal à 14,5. Le passage d’un milieu « riche » en essence (donc pauvre en oxygène) à un milieu « pauvre », ou l’inverse, correspond à un changement du signal délivré par le capteur supérieur à 500 mV. Cette amplitude de variation est suffisante pour que ce capteur, incorporé dans une boucle d’asservissement, assure efficacement la régulation du dispositif de carburation. Enfin, des capteurs similaires utilisent de la zircone stabilisée, mais avec une électrode de référence, composée d'un métal en mélange avec son oxyde, placée à l'intérieur du tube de zircone. Ils sont également développés pour des mesures de pression partielle d'oxygène dans des gaz (atmosphère, effluents gazeux…) ou dans des matériaux fondus (en métallurgie).

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

61

Suivant les cas, on préférera une écriture plutôt qu’une autre, sans que ce choix ne modifie l’application de la loi de NERNST : il s’agit toujours du même couple rédox avec le même potentiel d’équilibre. La figure 2.2 représente le domaine de stabilité thermodynamique de l’eau en fonction du pH, sur un diagramme de type E/pH. Ce diagramme est construit par application de la loi de Nernst, avec pour les gaz la convention d’une pression partielle égale à 1 bar [13] :  pour le couple relatif à l’oxydation de l’eau : O 2 + 4 H+ + 4 e−

2 H 2O

E = E °O2 /H2O +

0,06 log ( a H+ 4

1

)4 ! 12

= 1,23 " 0,06 pH

 et pour le couple relatif à la réduction de l’eau : 2 H + + 2 e−

E = E °H+/ H + 2

H2

0, 06 log ( a H+ !2

)!2 " 1 = 0 ! 0,06 pH

E [ V/ESH ] Pente : – 0,06 V/pH à 25 °C

1,23 1,11

O2

0,51 0,39

H+, H2O, OH– 0

2

12

14

− 0,12

− 0,72 − 0,84

pH H2

Figure 2.2 - Diagramme E /pH des couples de l’eau en milieu aqueux

On notera, en particulier sur cet exemple, que l’influence du pH sur les caractéristiques thermodynamiques est importante puisque le passage d’un milieu acide à un milieu basique fait diminuer le potentiel d’équilibre de chaque couple rédox de plus de 600 mV. Il faut systématiquement prendre en compte les deux couples rédox de l’eau [14] lorsqu’on s’intéresse non plus à des états d’équilibre mais au déroulement des réactions rédox. C’est le cas en particulier, lorsque l’on cherche à prévoir et comprendre les [13] Ce type de diagramme E/pH, ou encore diagramme de POURBAIX, est d’utilisation très fréquente pour les équilibres rédox en solution et aussi dans le domaine des études de corrosion. Il s’agit d’une illustration graphique de données thermodynamiques issues de l’application de la loi de NERNST. L’exemple d’une partie du diagramme de POURBAIX de l’élément chlore en solution aqueuse fait l’objet de la section 3.4.1.4. On trouve facilement dans la littérature de nombreux autres exemples. [14] En effet, comme cela est détaillé dans les sections 2.3.5 et 2.3.6, les deux couples rédox de l’eau contribuent à l’allure des courbes intensité-potentiel dans des systèmes à électrolyte aqueux.

62

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

réactions se déroulant dans les systèmes électrochimiques à électrolyte aqueux. Le choix entre les deux écritures possibles (voir tableau 2.1) pour chacun de ces deux couples rédox est alors important. Cela va de soi pour des milieux acides ou basiques, mais mérite attention pour des milieux ni fortement basiques ni fortement acides. Pour ce choix, il faut alors prendre en compte le sens de la réaction considérée et positionner les protons ou les ions hydroxyde uniquement du côté des produits et non des réactifs. Par exemple (voir tableau 2.2) , il ne faut pas oublier qu’en présence d’eau la production de dihydrogène est toujours possible même si le milieu n’est pas acide : 2 H + + 2 e−

H2

2 H 2O + 2 e −

2 OH− + H2

ou encore qu’en milieu neutre, la réduction du dioxygène s’écrit : O 2 + 2 H 2O + 4 e −

4 OH−

Tableau 2.2 - Différentes écritures des deux couples rédox de l’eau Milieu

Couple O2/H2O

Couple H2O/H2

O 2 + 4 H + + 4 e−

Acide

2 H 2O

Neutre

2 H 2O O 2 + 4 H + + 4 e− O 2 + 2 H 2O + 4 e − 4 OH−

2 H 2O + 2 e − H2

Basique

4 OH−

2 OH− + H2

ou

ou

O 2 + 2 H 2O + 4 e −

H2

ou

2 H + + 2 e− 2 OH− + H2 2 H + 2 e− +

ou

2 H 2O + 2 e −

Le moyen proposé dans ce document pour ne pas oublier cet aspect est d’utiliser pour ces deux couples l’écriture suivante : O2/H2O,OH− H+,H2O/H2

pour O2/H2O et,ou OH− pour H+ et,ou H2O/H2

La prise en compte quantitative des données thermodynamiques de ces deux couples dans les caractéristiques des systèmes hors-équilibre, en particulier pour le tracé des courbes intensité-potentiel, est complexe [15]. Cependant, on pourra retenir qualitativement pour les milieux très acides ou très basiques que c’est la notion de potentiel standard apparent (calculé à partir de la loi de NERNST pour une pression de gaz O2 ou H2 égale à la pression standard, voir figure 2.2) qui est pertinente.

2.2 - CARACTÉRISTIQUES DES SYSTÈMES PARCOURUS PAR UN COURANT

2.2.1 - PHÉNOMÈNES MIS EN JEU LORS DU PASSAGE DU COURANT Pour décrire les phénomènes se produisant dans les systèmes électrochimiques lors du passage d’un courant, il faut pouvoir décrire ce qui permet le passage du courant dans les volumes des différents milieux conducteurs mais aussi à travers les différentes [15] L’allure de la courbe intensité-potentiel du couple H+,H2O/H2 dans l’hypothèse d’un couple rapide est présentée de manière détaillée dans l’annexe A.2.1 et justifie le résultat énoncé ici.

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

63

interfaces du système. Rappelons que le passage d’un courant, qui correspond à des mouvements macroscopiques de charge, correspond toujours à des déplacements macroscopiques de matière.

2.2.1.1 - CONDUCTION EN VOLUME Les phénomènes liés au passage du courant dans un milieu conducteur peuvent être abordés au niveau microscopique ou à partir de leur description macroscopique. Ici on ne donne qu’un premier aperçu de la description macroscopique des phénomènes de conduction [16]. On classe en général les différents processus de déplacement de la matière en trois catégories, décrites ci-dessous de manière simplifiée :  la migration : déplacement d’espèces chargées sous l’influence d’un champ électrique. La migration est généralement caractérisée par la concentration et la conductivité molaire de chacun des porteurs de charge. L’unité SI [17] d’une conductivité molaire (notation usuelle λi ) est le S m2 mol−1, mais on utilise aussi S cm2 mol−1 ;  la diffusion : déplacement d’espèces sous l’influence d’un gradient de concentration (en toute rigueur gradient d’activité). Les espèces se déplacent par diffusion de la zone la plus concentrée vers la zone la moins concentrée. La diffusion est généralement caractérisée par le coefficient de diffusion (ou diffusivité) de chacune des espèces. L’unité SI d’un coefficient de diffusion (notation usuelle Di ) est le m2 s−1, mais on utilise aussi cm2 s−1 ;  la convection : déplacement du milieu, lorsque celui-ci est fluide (liquide ou gazeux). Ce mouvement, caractérisé par une vitesse en m s−1, entraîne l’espèce i présente en concentration Ci (en mol m−3). Ce mouvement peut être de la convection naturelle, causée par des gradients de densité, ou forcée, correspondant à une homogénéisation par agitation mécanique. Dans certaines conditions expérimentales (voir exemples ci-dessous), il peut exister des zones de l’électrolyte où les phénomènes de diffusion jouent un rôle négligeable devant les autres phénomènes de transport de matière, migration et convection. On définit alors la (les) zone(s) où la diffusion ne peut pas être négligée comme la(les) couche(s) de diffusion [18]. Ainsi, la définition quantitative du volume de la couche de diffusion, et en particulier de son épaisseur, dépend de la précision à laquelle on choisit d’observer, de définir les phénomènes [19]. Dans une couche de diffusion, qui est généralement proche d’une interface, il peut y avoir également migration et convection. [16] Une description macroscopique quantitative de la conduction en volume fait l’objet de la section 4.2.1. Certains aspects des phénomènes microscopiques associés sont décrits dans la section 4.2.2. [17] D’autres notations que le siemens, S, peuvent être rencontrées dans d’autres ouvrages (Ω −1 ou encore mho) mais ne sont pas recommandées. [18] On prendra soin de ne pas confondre cette notion avec un autre terme utilisé aussi en électrochimie dans la description de la zone interfaciale : la couche diffuse de la double couche (voir les sections 3.3.1 et 4.3.1.1). [19] La section 4.3.1 décrit notamment les profils de concentration correspondant à quelques expériences classiques en électrochimie et permet ainsi de visualiser cette notion de couche de diffusion. Ce

64

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Un exemple de ce type de conditions est rencontré lorsqu’un dispositif d’agitation mécanique (convection forcée) est utilisé pour homogénéiser l’électrolyte liquide (essentiellement en dehors des zones proches des interfaces). C’est le cas en chimie analytique avec une électrode à disque tournant ou lorsqu’un système de circulation forcée de l’électrolyte est installé dans des électrolyseurs industriels. D’après un traitement simplifié que l’on appelle modèle de NERNST [20], on peut définir une épaisseur de couche de diffusion (souvent notée δ) indépendante du temps. L’ordre de grandeur de δ est de quelques µm. Elle augmente avec la viscosité du milieu ou le coefficient de diffusion de l’espèce concernée et diminue avec l’efficacité de l’agitation forcée. Le modèle de NERNST est fondé sur l’hypothèse simplificatrice que la convection est négligeable dans les couches de diffusion, comme cela est résumé sur la figure 2.3 indiquant les modes de conduction mis en jeu dans les différentes zones du système électrochimique. Au contraire, en dehors des deux couches de diffusion (épaisseurs δ1 et δ2), l’existence de la convection forcée permet de négliger les phénomènes de diffusion. Ce modèle simplifié introduit donc une discontinuité des modes de transport au sortir des couches de diffusion. Cette discontinuité n’a pas de réalité physique, mais cela n’a pas d’importance si l’on ne cherche pas à décrire de manière précise les zones de transition autour de δ1 et δ2 [21].

DIFFUSION

MIGRATION

DIFFUSION

MIGRATION

CONVECTION

MIGRATION

+

d1

+

+

d2

x

Figure 2.3 - Répartition des modes de transport de la matière dans un électrolyte soumis à une convection forcée, suivant le modèle de NERNST

Un autre exemple important est rencontré lorsque, à partir d’un système à l’équilibre, on impose des perturbations aux interfaces avec un électrolyte non-agité où on peut de plus négliger la convection naturelle. La figure 2.4 montre les modes de conduction mis en jeu dans ces conditions. Le volume d’électrolyte loin des interfaces n’étant pas perturbé immédiatement, il existe une zone de l’électrolyte qui est homogène et où seuls des phénomènes de migration sont observés. Au cours d’une telle expérience, traitement plus détaillé (sections 4.3.1.3 et 4.3.1.4) permet de faire la différence entre cette notion générale de couche de diffusion où la diffusion représente 90, 95, 99 ou 99,99%… du transport de matière et les épaisseurs issues de différents modèles (diffusion semi-infinie, modèle de NERNST…). Ces derniers donnent des valeurs précises d’épaisseur (définies grâce à la pente des profils à l’interface) qui constituent un bon ordre de grandeur de l’épaisseur de la couche de diffusion (épaisseur légèrement sous-évaluée, voir par exemple la figure 4.20 dans la section 4.3.1.4). [20] Les résultats du modèle de NERNST dont la justification fait appel à des calculs d’hydrodynamique, réalisés par LEVICH, sont décrits de manière plus détaillée dans la section 4.3.1.4. [21] La figure 4.20 de la section 4.3.1.4 illustre l’écart entre les profils de concentration réels et ceux qui sont issus du modèle de NERNST.

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

65

cette zone non-perturbée de l’électrolyte diminue et les épaisseurs des couches de diffusion augmentent dans le temps.

DIFFUSION

+

MIGRATION

MIGRATION

DIFFUSION

+

MIGRATION

Déplacement de d1 et d2 lorsque le temps augmente

d1(t )

d2(t )

x

Figure 2.4 - Répartition des modes de transport de la matière dans un électrolyte sans agitation Les épaisseurs des couches de diffusion dépendent du temps.

Dans des conditions expérimentales usuelles avec des électrolytes liquides, on ne peut pas éviter les phénomènes de convection naturelle. Ceux-ci interviennent par exemple à des distances de l’ordre de 300 µm par rapport à l’interface pour des solutions aqueuses à température ambiante. Pour conserver des conditions où l’on peut négliger la convection, il faut alors réaliser des expériences de courte durée dans ces milieux, typiquement de l’ordre de quelques minutes [22]. Deux autres cas particuliers ayant des conséquences sur les modes effectifs de conduction peuvent être fréquemment rencontrés :  celui des milieux conducteurs avec une seule espèce chargée mobile. Dans ces milieux, l’électroneutralité impose que l’unique espèce mobile soit en concentration identique dans tout le volume. Il n’y a donc ni gradient de concentration ni couche de diffusion. Par exemple dans un métal solide, les électrons ne se déplacent que sous l’effet de la migration : il n’y a ni convection ni diffusion. Il en est de même dans de nombreux solides ioniques pour lesquels dans certaines conditions, par exemple de pression partielle en dioxygène et de température, on peut considérer qu’il n’y a qu’un seul type de porteur de charge ;  celui des solutions comprenant un électrolyte support, c’est-à-dire des porteurs de charge non-électroactifs en grande concentration devant les espèces électroactives [23]. Retenons ici qu’en présence d’électrolyte support, on peut négliger la migration des espèces électroactives devant leur déplacement par diffusion et convection. Par exemple, dans l’exemple de la convection forcée (voir figure 2.3), les modes de transport des espèces électroactives sont, en présence d’électrolyte support, la diffusion dans les couches de diffusion et la convection à l’extérieur.

[22] L’ordre de grandeur de l’épaisseur de la couche de diffusion dans une expérience de diffusion semiinfinie est donnée à chaque instant par Dt . Une discussion plus précise de cet aspect est faite à la section 4.3.1.3. Ainsi pour un coefficient de diffusion d’environ 10−5 cm2 s−1, on obtient une durée d’expérience de l’ordre de 2 minutes avant que la couche de diffusion atteigne 300 µm et donc que les phénomènes de convection naturelle ne soient plus négligeables. [23] La section 2.2.4.4 et l’annexe A.4.1 développent certaines propriétés liées à la présence ou à l’absence d’un électrolyte support.

66

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

2.2.1.2 - PHÉNOMÈNES AUX INTERFACES  Phénomènes réactifs Prenons l’exemple classique de l’interface électrochimique entre un métal et une solution. Les électrons libres qui assurent le passage du courant dans le métal n’existant pas en solution, il faut donc qu’un ou plusieurs phénomènes assurent la transmission du courant aux porteurs ioniques. Le passage durable du courant à une telle interface met ainsi en jeu une réaction électrochimique. Les interfaces réactives sont celles où l’on observe au moins une réaction chimique. Les réactions se produisant aux interfaces sont par nature des réactions hétérogènes. Les réactions électrochimiques aux électrodes sont toujours des exemples de ce type. La figure 2.5 illustre l’exemple de la réduction, à une électrode de platine, d’ions Fe 3+ en solution aqueuse en indiquant le sens de déplacement des espèces correspondant au déroulement de la réaction [24]. MÉTAL

Fe3+

e−

ÉLECTROLYTE

Fe2+ Figure 2.5 - Schéma de la réduction de Fe3++ à une interface avec une électrode de platine

Lorsqu’un gaz est produit à une interface métal | électrolyte, le phénomène se déroule généralement en plusieurs étapes faisant intervenir des espèces adsorbées et l’espèce moléculaire produite à l’interface se dissout dans l’électrolyte (figure 2.6). H+

MÉTAL

e−

ÉLECTROLYTE

Hads H2 dissous

Figure 2.6 - Schéma de la réduction de H+ à une interface avec une électrode de platine [25]

Dès que l’activité du gaz dissous en solution dépasse la valeur critique de solubilité, des bulles de gaz se forment. Cette notion d’interface réactive est aussi beaucoup plus largement utilisée. On la retrouve par exemple dans la chimie des transferts de phase, ou l’étude des interfaces liquide-liquide. Par exemple la figure 2.7 représente la réaction de transfert de phase

[24] De manière précise sur ce type de schéma, les flèches représentent (avec des longueurs généralement arbitraires) les vecteurs densité de flux molaires de matière. [25] De manière quantitative, suivant la loi de FARADAY (voir section 4.1.4), la norme de la densité de flux de matière en dihydrogène dissous est égal à la moitié de celle des protons.

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

67

entre une solution aqueuse de chlorure de potassium et une solution d’un éther couronne (ligand L) dans un solvant organique [26]. EAU

L

K+ KL

PHASE ORGANIQUE

+

Figure 2.7 - Schéma de la réaction de complexation de K+ par le ligand L à une interface entre solvant aqueux et solvant organique

Parmi ces réactions interfaciales, on peut également trouver des cas où les espèces mises en jeu ne sont pas toutes mobiles. Les figures 2.8 et 2.9 illustrent deux cas où l’espèce produite n’est pas mobile : elle s’accumule dans la zone interfaciale.  Dans le cas de la réaction de dépôt d’un métal (argent) par réduction à partir d’une solution aqueuse contenant des cations (Ag+), l’atome formé reste en surface (figure 2.8) et l’interface évolue sans arrêt à l’échelle atomique au cours de l’avancement de la réaction. MÉTAL

e



Ag

Ag+

ÉLECTROLYTE

Figure 2.8 - Schéma de la réduction d’un ion Ag+ à une interface avec une électrode d’argent

 Dans le cas d’une réaction d’adsorption d’une molécule A, l’espèce adsorbée occupe un site vacant sur la surface de l’électrode qu’elle masque en partie (figure 2.9). MÉTAL

Aads

A

PHASE ORGANIQUE

Figure 2.9 - Schéma de la réaction d’adsorption d’une molécule A à une interface avec un métal

 Phénomènes d'échange Lorsqu’on retrouve dans les deux phases entourant l’interface des espèces de même nature chimique, même si elles n’ont pas les mêmes interactions avec leur milieu extérieur, des échanges peuvent avoir lieu si elles sont mobiles dans les deux phases (voir figure 2.10). L’interface est dite perméable à cette espèce. Par exemple, la jonction ionique entre du chlorure d’argent solide, qui est un solide ionique conducteur uniquement par Ag+, et une solution aqueuse contenant des ions Ag+ dissous est perméable à ces ions, même si ceux-ci n’ont pas les mêmes [26] On suppose ici que le solvant organique est suffisamment dissociant. Si tel n’est pas le cas, il faut compléter ce schéma en faisant intervenir les mouvements des anions formant une paire d’ions (KL+, X−) dans la phase organique.

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ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

interactions avec le milieu environnant, en solution aqueuse et dans le réseau cristallin de AgCl. SOLIDE

Ag

+

dans AgCl

+

Ag

EAU

dans l'eau

Figure 2.10 - Schéma de la réaction d’échange d’un ion Ag+ à une interface entre AgCl et une solution aqueuse contenant des ions Ag+

Ces phénomènes d’échange constituent un cas particulier de phénomènes réactifs. On peut en effet traduire le phénomène d’échange à l’interface dans l’exemple choisi par l’équation-bilan suivante : Ag+eau Ag+AgCl Suivant le nombre d’espèces échangeables, on distingue ainsi :  les jonctions imperméables (aucun échange de matière) : un exemple de jonction imperméable est l’interface métal M | électrolyte contenant des ions M+ ; en effet les ions M+ dans le réseau métallique ne sont pas mobiles, tout au moins à température ordinaire ;  les jonctions simples (un seul type d’espèces peut être échangé) : l’exemple précédent de l’interface AgCl | solution aqueuse contenant des ions Ag+ est un exemple de jonction simple, dans la mesure où les ions chlorure sont immobiles dans le solide ionique. Les jonctions électroniques sont aussi, à température ordinaire, des exemples de jonctions simples : seuls les électrons sont mobiles dans ces deux phases ;  les jonctions multiples (au moins deux espèces de nature différente sont échangées) : les jonctions entre deux solutions électrolytes sont des exemples de ce type. Cependant si cette terminologie (perméable/imperméable) est fréquemment utilisée dans le domaine de la thermodynamique des jonctions, elle ne sera pas conservée dans la suite du texte. Il est en effet plus simple, lorsqu’on s’intéresse à des chaînes électrochimiques faisant intervenir différents types d’interfaces, et notamment lorsque l’on veut décrire les phénomènes cinétiques s’y produisant, d’avoir un traitement commun de celles-ci. Traiter l’ensemble de ces interfaces comme des interfaces imperméables réactives ou non-réactives (voir cas suivant) permet cette unification. Il s’agit simplement, dans le cas d’une jonction perméable, de considérer les deux espèces s’échangeant (par exemple Ag+ dans le solide et Ag+ en solution) comme deux espèces différentes, l’une étant transformée en l’autre par réaction à l’interface.

 Phénomènes d'accumulation Il est important de ne pas confondre « interface non-réactive » et « interface où il ne se passe rien ». Une interface non-réactive peut être, transitoirement, le siège d’accumulation de matière et donc d’accumulation de charge s’il s’agit d’ions ou d’électrons. Un exemple important d’interface non-réactive est celui de l’interface entre un métal et un électrolyte ne contenant pas d’espèces électroactives. Cette situation est en général restreinte à un certain intervalle de potentiel l’électrode est dite « idéalement polarisable »

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

69

ou « bloquante ». Dans ces systèmes, une variation de potentiel entraîne un mouvement transitoire de porteurs de charge dans chacune des deux phases. En effet, bien qu’il n’y ait pas de réaction, on a une modification de la structure de la zone interfaciale, c’est-à-dire de la distribution des porteurs de charge, en accord avec la modification de distribution de potentiel. Une image très schématique de cette zone interfaciale est alors celle d’un condensateur, où il y a accumulation des porteurs de charge de signe différent sur deux plans très proches. On parle de double couche électrochimique [27]. On peut signaler que c’est cette situation particulière qui est exploitée dans certains dispositifs de stockage de l’énergie, appelés supercondensateurs ou supercapacités [28]. Les conditions, notamment en terme de potentiel, où il n’y pas de charge accumulée de part et d’autre d’une interface correspondent à une situation particulière qui peut être importante d’un point de vue expérimental. On parle par exemple de potentiel de charge nulle. Une accumulation de matière dans la zone interfaciale peut être un phénomène réactif ou non suivant la nature chimique des espèces présentes dans cette zone. S’il y a des interactions de nature chimique des espèces à l’interface, on parle de réaction d’adsorption ou de chimisorption. Comme dans les phénomènes de catalyse, la notion d’adsorption (ou chimisorption) n’est définie que par rapport à l’ordre de grandeur de l’énergie d’interaction : la frontière entre réaction d’adsorption et simple accumulation n’est donc pas très nette. Lorsque l’interface est le siège d’une réaction d’adsorption mettant en jeu un ion, on parle d’électrosorption. Il n’est en général pas facile de déterminer la nature exacte d’un ion spécifiquement adsorbé, c’est-à-dire la charge effectivement portée par cette nouvelle espèce adsorbée. Elle n’est en général pas un multiple entier de la charge élémentaire.

2.2.2 - PHÉNOMÈNES FARADIQUES 2.2.2.1 - COURANT FARADIQUE ET COURANT CAPACITIF Dans le cas général, le passage du courant correspond à des phénomènes réactifs (éventuellement d’échange) et/ou des phénomènes d’accumulation aux électrodes. Même si cela peut être parfois compliqué, notamment lorsqu’il y a adsorption, on sépare en général le courant en la somme de deux contributions [29] :  le courant faradique (car cette composante vérifie la loi de FARADAY) qui est lié aux phénomènes réactifs avec des espèces consommées et produites aux électrodes [30] ;  le courant capacitif (modèle simplifié d’un condensateur plan à l’échelle moléculaire) qui est lié aux phénomènes d’accumulation de charge aux interfaces.

[27] La section 3.3.1 décrit le profil de potentiel observé dans cette zone interfaciale lié à cette répartition particulière des charges de part et d’autre de l’interface. [28] Voir la planche intitulée « Stockage de l’énergie : les supercapacités ». [29] Les conséquences des phénomènes d’adsorption aux interfaces sont évoquées à la section 4.1.3. [30] La réaction hétérogène correspondante est appelée demi-réaction rédox ou encore transfert de charge ou transfert électronique, comme cela est défini dans la section 1.3.3.

70

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Dans de nombreux cas, et en particulier pour la quasi-totalité des applications industrielles mettant en jeu le passage d’un courant dans des systèmes électrochimiques, on peut négliger la contribution capacitive du courant. Dans ce document se limitant à une description des systèmes électrochimiques simples, on s’intéresse uniquement à la part faradique du courant.

2.2.2.2 - LOI DE FARADAY La part faradique du courant est une mesure directe de la vitesse d’avancement de la réaction, si elle est unique, correspondant à l’évolution du système par rapport à la situation initiale, c’est-à-dire caractérisant la quantité de matière qui a été transformée. La quantité d'électricité est une mesure de l’avancement de la réaction. C’est ce que traduit de manière quantitative la loi de FARADAY. Le plus souvent on utilise la loi de FARADAY sous sa forme intégrée, qui se traduit par le bilan suivant : "i "i t + !t farad Q farad= I (t ) dt !nifarad = "e � " e � #t et lorsque le courant est constant,

!nifarad =

"i "i I farad !t = j faradS !t "e � "e �

avec : � nifarad la variation algébrique de la quantité de matière de l’espèce i durant l’intervalle de temps Δt νi le nombre stœchiométrique algébrique de l’espèce i νe le nombre stœchiométrique algébrique de l’électron ^ la constante de FARADAY Q farad la quantité de charge faradique échangée algébrique durant l’intervalle de temps Δt le courant faradique algébrique traversant l’interface I farad j farad la densité de courant faradique algébrique Δt l’intervalle de temps pendant lequel passe le courant S l’aire de la surface de l’électrode considérée

[ mol ]

[ C mol−1 ] [C] [A] [ A m−2 ] [s] [ m2 ]

La démonstration de ces relations ainsi que l’expression locale vectorielle de la loi de FARADAY seront détailléees ultérieurement [31]. Les exemples d’application de cette loi sont très nombreux, notamment dans les applications industrielles. C’est par exemple cette loi qui est à la base du calcul des capacités théoriques des générateurs électrochimiques, des vitesses de corrosion homogène d’un métal, des quantités de matière produites ou consommées dans des procédés d’électrosynthèse…

z Dans un élément de pile à combustible d’aire S = 100 cm2 parcouru par un courant tel que j = 0,2 A cm−2, la loi de FARADAY permet de déterminer la densité de flux molaire de dihydrogène consommé ainsi que le débit volumique d’eau produite (à température ordinaire).

[31] La démonstration de la loi de FARADAY par l’application de bilans de matière interfaciaux est détaillée dans la section 4.1.4.

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

71

L’équation bilan de la réaction de la pile à combustible est : 2^ H 2O H2 + ½ O 2 Pour utiliser la loi de FARADAY, il est nécessaire de connaître les stœchiométries respectives des demi-réactions rédox à chaque interface, et en particulier celle des électrons. C’est ce que représente le chiffre au-dessus de la flèche de réaction ; il est déterminé par exemple en regardant la demi-réaction à l’anode : 2 H + + 2 e− H2 On a donc ainsi : νe = +2 ν H2 = −1 Le débit molaire en dihydrogène est calculable à partir de :

!n H2 " 1 farad = H2 j faradS = # j S !t "e � 2� Il y a donc consommation de 1,0.10−4 mol s−1 ou 0,37 mol h−1 de dihydrogène, c’est-à-dire, à température et pression ordinaires, 9,0 L h−1 de dihydrogène gazeux (Vmolaire = 24 L mol−1). Le débit volumique en eau est calculable en regardant les nombres stœchiométriques de l’équation bilan à la cathode : H 2O 2 H+ + 2 e− + ½ O2 On a donc ainsi : νe = −2 ν H2O = +1

!VH2 O " H2O farad 1 farad 1 farad = j SVmolaire = # j SVmolaire = j SVmolaire !t "e � 2� 2� En prenant pour valeur numérique du volume molaire celui de l’eau liquide à température ordinaire, c’est-àdire 18 cm3 mol−1, on obtient une production d’eau de 6,7 cm3 h−1.

y

2.2.2.3 - RENDEMENT FARADIQUE Si plusieurs demi-réactions rédox se produisent simultanément et de manière concurrente à une interface électrochimique, le courant faradique global est la somme des courants faradiques de chaque demi-réaction rédox [32]. Le rendement faradique relatif à une demi-réaction rédox est le rapport entre la variation effective de quantité de matière d’une espèce électroactive correspondante dans le milieu considéré et la variation de quantité de matière de cette même espèce que l’on pourrait attendre, par la loi de FARADAY, si tout le courant servait à cette demi-réaction :

r farad =

!n effectif !n farad

Le plus fréquemment on utilise cette notion de rendement faradique pour quantifier la compétition existant entre plusieurs réactions se produisant simultanément à une même interface. Il représente la fraction de courant qui est effectivement utilisée pour la demi-réaction considérée. Le rendement faradique (anodique ou cathodique) d’une demi-réaction particulière est ainsi inférieur à 100%.

[32] Cette propriété d’additivité des courants faradiques est démontrée sur un exemple dans la section 4.1.4.

72

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

STOCKAGE DE L’ÉNERGIE : LES BATTERIES LI MÉTAL POLYMÈRE (LMP) Document élaboré avec l’aimable collaboration de K. GIRARD, ingénieur à Batscap, Quimper, France

Le fonctionnement d'une batterie, ou accumulateur électrochimique, est basé sur l'association de deux couples redox, de potentiels d'oxydoréduction différents. Les deux électrodes sont séparées par un électrolyte, isolant électrique mais conducteur ionique. Le lithium est un matériau particulièrement intéressant car il s'agit du métal le plus léger (0,534 g cm–3) et le plus réducteur, ce qui en fait un matériau d'électrode négative idéal. Dans les batteries lithium-ion, il est utilisé seulement sous forme ionique. Les électrodes, positives et négatives, sont composées de matériaux d'insertion dans lesquels sont insérés les ions lithium, respectivement en décharge et en charge. Dans les batteries LMP, l'électrode négative est une feuille de lithium métallique, ce qui permet de profiter pleinement des propriétés de ce matériau. Une autre particularité des batteries LMP est l'électrolyte utilisé qui est un film tout solide à base de polymère. Ses principaux avantages sont une plus grande sécurité (aucun risque d'explosion) et une meilleure processabilité. Son principal inconvénient est une conductivité plus faible, nécessitant un fonctionnement à une température comprise entre 60 et 80 °C. Electrolyte : polyoxyéthylène (POE) et sels de lithium

Collecteur de courant Electrode positive composée d'oxyde de vanadium, de carbone et de polymère

Electrode négative : lithium métallique

Présentation des films composant une batterie LMP (© Batscap)

En décharge :

z Li+ + z e– z Li + Lix-zVOy + z Li + z e– LixVOy

Cela permet notamment d'obtenir des densités d'énergie particulièrement intéressantes, de l'ordre de 100 Wh kg–1 pour un pack de 30 kWh. Les différents phénomènes électrochimiques intervenant dans la chaîne de fonctionnement des batteries, tels que le transfert électronique ou encore la diffusion, limitent la densité de puissance à environ 200 W kg–1 en décharge pour le même pack de batterie. L'application principale de la batterie LMP est le véhicule tout électrique. Elle constitue un véritable réservoir d'énergie. Associée à un module de supercapacité, assimilable à un réservoir de puissance, elle ouvre à des performances idéales pour l’application véhicule électrique.

Présentation d'un pack batteries LMP de 30 kWh (© Batscap)

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

73

z Par exemple, lors d’un dépôt de nickel à partir d’une solution aqueuse acide contenant des ions Ni 2+, on

observe une faible production de dihydrogène qui se produit simultanément à la réduction des ions Ni2+. Expérimentalement, on peut mesurer une épaisseur de nickel égale à 60 µm pour un dépôt effectué à une densité de courant de 50 mA cm−2 pendant une heure. A partir des constantes physiques du métal déposé (masse molaire, M, masse volumique, ρvol) on peut alors déterminer le rendement faradique de ce dépôt électrochimique. Une variation d’épaisseur Δ homogène sur une surface d’aire S est en effet liée à un gain de matière Δn par la relation :

!n = S !!

" vol M

La demi-réaction rédox du dépôt de nickel est : Ni Ni2+ + 2 e− On a donc ainsi : νe = −2 ν Ni = +1 La densité de courant utilisée effectivement pour la réaction de dépôt de nickel est calculable à partir de la loi de FARADAY : !! " e � # vol !! # vol j dépôt = = $2� !t " Ni M !t M On obtient effectivement une valeur de densité de courant négative puisqu’il s’agit d’une réduction (en accord avec l’écriture entièrement algébrique de la loi de FARADAY). Avec la masse molaire du nickel égale à 59 g mol−1, sa masse volumique à 8,9 g cm−3, on obtient une densité de courant de dépôt égale à : 60 .10 !4 8,9 j dépôt = ! 2 " 96 500 = ! 49 mA cm!2 3600 59 On obtient donc finalement un rendement faradique pour le dépôt de nickel de 49/50 = 97%.

y

Pour un point de fonctionnement du système électrochimique avec des rendements proches de 100% aux deux électrodes, les deux demi-réactions rédox mises en jeu seront appelées demi-réactions principales. Dans ce cas-là, écrire le bilan de ces deux demi-réactions pour obtenir une réaction principale correspond effectivement au bilan global de transformation de la matière dans le système. En revanche dès qu’à l’une des deux électrodes (ou aux deux a fortiori) il y a plusieurs demi-réactions simultanées, on peut toujours formellement écrire des réactions bilan combinant une oxydation et une réduction, mais cela ne présente pas beaucoup d’intérêt car cela ne traduit pas un bilan effectif. Un exemple dans le domaine des batteries est détaillé ci-dessous.

z Dans une batterie au plomb en fin de recharge, on a en compétition à l’électrode positive (anode) les deux demi-réactions suivantes :

PbO2 + 2 e− + HSO4− + 3 H+ PbSO4 + 2 H2O ½ O2 + 2 H+ + 2 e− H 2O A l’électrode négative (cathode), dans une batterie où les gaz peuvent s’échapper (dite batterie ouverte), on peut également avoir compétition entre les deux demi-réactions suivantes : Pb + HSO4− PbSO4 + H+ + 2 e− + − H2 2H + 2e

74

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS Cependant dans la plupart des cas, le matériau actif de l’électrode négative étant en excès, le rendement faradique de l’électrode positive chute alors que celui de l’électrode négative reste très proche de 100%. Si l’on considère le cas extrême où le rendement faradique de la cathode est égal à 100%, c'est-à-dire sans production de H2, on peut alors écrire le bilan des deux réactions qui sont globalement en compétition en fin de recharge : 2 PbSO4 + 2 H2O PbO2 + Pb + 2 HSO4− + 2 H+ Pb + ½ O2 + H+ + HSO4− PbSO4 + H2O La deuxième devient progressivement la seule à considérer lorsqu’on prolonge la recharge, comme cela est le cas dans un mode d’utilisation appelée le floating [33]. Mais à aucun moment écrire le bilan des deux réactions d’oxydation et réduction de l’eau n’a un sens physique. C’est pourtant ce qui est communément répandu dans la littérature concernant ces batteries, où l’on lit fréquemment que la réaction parasite de fin de charge est l’électrolyse de l’eau.

y

2.2.3 - RÉPARTITION DE LA TENSION DE LA CELLULE : PROFIL DE POTENTIEL De manière tout à fait générale pour des systèmes où les interfaces sont localisées, la tension aux bornes d’une chaîne électrochimique peut être décomposée comme la somme des tensions interfaciales et des chutes ohmiques [34]. Rappelons qu’une tension interfaciale est la différence de potentiel de part et d’autre d’une zone interfaciale, dont l’épaisseur est en général de l’ordre de quelques nanomètres. C’est donc soit une tension de jonction ionique ou de jonction électronique soit une tension d’interface électrochimique. La chute ohmique est la différence de potentiel aux bornes du volume d’un même conducteur impliqué dans la chaîne traversée par un courant. En choisissant comme convention de signe, pour chacune des deux tensions interfaciales extrêmes, l’écriture de la différence entre le potentiel du métal et celui de l’électrolyte (Δϕ = ϕmétal − ϕélectrolyte), on peut alors écrire :

E+ ! E ! = "# + ! "# ! + $U chute

ohmique

+ $U jonction

[33] En mode « floating », on préférera utiliser des batteries au plomb dites fermées ou de type VRLA (Valve Regulated Lead Acid), pour lesquelles les phénomènes résiduels sont l’oxydation de l’eau à l’électrode positive et la réduction du dioxygène à l’électrode négative. Ainsi lorsque le régime stationnaire est établi, il n’y a pas de consommation de matière, ce qui n’est pas le cas pour une batterie ouverte pour laquelle le mode floating entraîne une perte continuelle d’eau. [34] Comme cela sera repris dans l’introduction de la section 3.4 et détaillé sur un exemple dans la section 3.4.1.1, lorsqu’on mesure une tension à l’aide d’un voltmètre la mesure est toujours celle de la différence de potentiel entre deux métaux de même nature (principe de mesure d’un voltmètre). Ainsi, on devrait en toute rigueur ajouter la (les) jonction(s) électronique(s) des connexions des électrodes au voltmètre pour décrire la répartition des potentiels donnant la tension U mesurée aux bornes de la cellule. Par exemple la figure 2.11 (ainsi que les figures 2.15 et 2.16 de la section 2.2.4.2) devrait comporter une première interface supplémentaire, jonction électronique entre le cuivre (Cu’) et le zinc du côté de l’électrode négative. On omet généralement d’indiquer cette interface. Mais en toute rigueur la ddp entre les deux points extrêmes représentés sur cette figure est différente de la tension U mesurée par un voltmètre. Le décalage correspond à la tension de la jonction électronique Cu’ | Zn. Cette valeur étant constante, quel que soit le fonctionnement de la cellule, tant que l’on ne s’intéresse qu’à des variations de ddp, cette précision n’est pas primordiale et on se contentera donc dans ce chapitre de noter «U» cette valeur de tension de cellule décalée de la tension de jonction électronique : «U» = ! + ! ! ! = U ! U jonction électronique des connexions

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

75

Les termes de chute ohmique peuvent être positifs ou négatifs selon les cas [35]. Dans les systèmes simples, la chute ohmique aux bornes d’un volume conducteur est proportionnelle au courant qui le traverse : c’est la loi d’OHM au niveau macroscopique [36], U = RI

(en valeur absolue [35])

La figure 2.11 représente schématiquement le profil du potentiel dans une pile DANIELL : Zn | sol. aqueuse de ZnSO4 | sol. aqueuse de KNO3 | sol. aqueuse de CuSO4 | Cu Le schéma montre le profil de potentiel à l’échelle du système, lorsque celui-ci est traversé par un courant et que le cuivre est la cathode et le zinc l'anode, c’est-à-dire dans une situation de pile [37]. La tension aux bornes de cette chaîne électrochimique se décompose en deux types de termes : d'une part les termes de chute ohmique, dans les conducteurs électroniques et dans les trois milieux conducteurs ioniques différents, et d'autre part les tensions interfaciales, tensions aux bornes des interfaces électrochimiques (Δϕ+ et Δϕ−) et tensions aux bornes des jonctions ioniques (jonctions entre les différentes solutions) [34].

j ö j

«U»

Dj+

Djê

Uchute ohmique

(sol. aq. CuSO4)

– Zn

+ Sol. aq. ZnSO4

Sol. aq. KNO3

Sol. aq. CuSO4

Cu

Figure 2.11 - Profil de potentiel dans une pile DANIELL parcourue par un courant en fonctionnement générateur [38] Pour ne pas surcharger le schéma, seule la chute ohmique dans la solution aqueuse de CuSO4 est représentée par une flèche. [35] La section 2.2.4.2 montre le profil de potentiel dans un système électrochimique en fonctionnement électrolyse ou générateur sur lesquels on peut observer des chutes ohmiques différentes (voir figures 2.15 et 2.16). [36] Un exemple plus compliqué, pour lequel cette relation n’est plus valable, est traité dans l’annexe A.4.1. [37] On rappelle (voir section 1.4.3) que le courant va toujours de l’électrode positive vers l’électrode négative à l’extérieur de la source d’énergie qui fournit l’énergie électrique. Ainsi sur la figure 2.11, qui correspond à l’intérieur de la source d’énergie, le courant va de l’électrode négative à l’électrode positive mais à l’extérieur du générateur il va bien de l’électrode positive à l’électrode négative. [38] Pour la définition précise de «U», se reporter à la note [34].

76

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

On notera que, comme sur la figure 2.1 en l'absence de courant, les signes choisis pour les différentes tensions interfaciales, Δϕ+ et Δϕ− , sont arbitraires (positifs sur le schéma). En revanche le sens de variation du potentiel dans les volumes conducteurs (sur le schéma représenté par le signe des pentes des droites) est bien en accord avec le sens du passage du courant, et donc avec le signe des différentes chutes ohmiques (termes négatifs ici). On remarquera que, dans ce cas de fonctionnement en générateur, le sens du champ électrique dans les différents milieux conducteurs est opposé à celui issu des polarités du système. Usuellement, pour un système à l’équilibre thermodynamique en absence de passage du courant et présentant des tensions de jonctions ioniques négligeables, c’est uniquement la différence des tensions interfaciales avec et sans passage du courant que l’on appelle surtension. Par rapport à la définition générale [39], les termes de chute ohmique sont donc usuellement sortis des termes de surtension. Cela revient à imaginer que l’on peut placer deux références infiniment proches de chacune des interfaces. De manière usuelle, on utilise donc la relation suivante :

E+ ! E ! = "E éq + #+ ! #! + $ U chute

ohmique

Dans un cas quelconque, la description est plus complexe, car même en circuit ouvert les volumes des conducteurs ne sont pas nécessairement équipotentiels et l’expression en absence de courant n’est guère plus simple que lors du passage du courant [40]. Cependant si on peut négliger le terme de chute ohmique à l’abandon et l’évolution de la somme des potentiels de jonction ionique lorsque le courant passe, on peut écrire la relation simplifiée suivante :

E+ ! E ! = E+ (I = 0) ! E ! (I = 0) + " + ! " ! + # U chute

ohmique

Dans la suite de ce chapitre, seules des situations de ce type seront décrites. En particulier on ne considérera pas des systèmes électrochimiques pour lesquels les jonctions ioniques montrent une évolution importante de la tension lorsqu’il y a passage du courant dans la cellule électrochimique. D’un point de vue pratique, il est souvent utile d’introduire une électrode de référence pour décomposer cette tension globale aux bornes du système. L’utilisation d’une électrode de référence décompose la chaîne en deux parties et permet de séparer les contributions de chacune des deux extrémités. Il faut cependant prendre garde au fait que lorsque les valeurs des différentes chutes ohmiques ne sont pas négligeables, la position spatiale de l’électrode de référence a une influence sur les valeurs de tension mesurées expérimentalement.

z En reprenant l’exemple ci-dessus (pile DANIELL, figure 2.11), on peut par exemple comparer deux types de

mesure de potentiel suivant que l’électrode de référence est placée dans la solution aqueuse de CuSO4 ou celle

[39] On peut se reporter à la section 1.5.2. [40] Par exemple dans un système à l’abandon hors-équilibre, comme un système soumis à la corrosion, la densité de courant n’est pas strictement nulle en tout point de l’électrolyte. Ainsi, même si globalement le courant est nul, le volume de l’électrolyte (et des électrodes) n’est pas nécessairement équipotentiel et les termes de chute ohmique peuvent alors être non nuls à l’abandon.

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

77

de ZnSO4. Comme cela est schématiquement représenté sur la figure 2.12, dans le premier cas, la mesure de tension de l’électrode positive (ECu − ERéf 1) contient une contribution de chute ohmique moindre que celle de la tension de l’électrode négative (EZn − ERéf 1). Dans le second cas (avec Réf 2), c’est la mesure de la tension de l’électrode négative qui sera le plus proche de sa tension interfaciale.



Réf 2

Zn

Sol. aq. ZnSO4

Sol. aq. KNO3

Réf 1

+

Sol. aq. CuSO4

Cu

Figure 2.12 - Positionnements d’une électrode de référence dans une pile DANIELL

y

2.2.4 - CHUTE OHMIQUE DANS UN MILIEU CONDUCTEUR Une partie de la tension aux bornes d’un système électrochimique, plus ou moins importante suivant les systèmes, est donc la somme des chutes ohmiques aux bornes de chaque milieu conducteur. C’est l’évaluation de ces termes que nous allons décrire ici dans des cas simples.

2.2.4.1 - LOI D’OHM ET CHUTE OHMIQUE Dans certaines conditions expérimentales, les couches de diffusion représentent un volume faible de l’ensemble de chaque milieu conducteur considéré. On se trouve ainsi souvent, sur la quasi-totalité du volume de chaque milieu conducteur, dans une situation de migration pure [41]. Dans d’autres cas, même lorsque les couches de diffusion sont importantes mais en présence d’un électrolyte support [42] et si l’on peut confondre courant total et courant de migration, on obtient également une situation simple pour la définition du potentiel et le calcul de la chute ohmique. On peut alors considérer que la densité de courant de chaque porteur de charge est proportionnelle au champ électrique [43]. C’est la loi d’OHM au niveau local :

!" avec : j σi !σ!" E ρ

$ !" j = ! && # " i % i

' !!!!" !!" 1 !!" )) grad * = " E = E + (

la densité de courant, module en la conductivité électrique due à l’espèce i la conductivité électrique du milieu le champ électrique, module en la résistivité électrique du milieu

[ A m−2 ] [ S m−1 ] [ S m−1 ] [ V m−1 ] [Ωm]

[41] Lorsqu’il y a convection, on peut montrer (voir section 4.2.1.5) que la densité de courant globale de convection est nulle. Ainsi, en ce qui concerne l’expression de la densité de courant dans une zone où on peut négliger les phénomènes de diffusion, on peut considérer qu’il y a uniquement des phénomènes de migration. [42] La définition d’un électrolyte support est donnée dans la section 2.2.1.1. La section 2.2.4.4 ainsi que l’annexe A.4.1 développent certaines propriétés liées à sa présence. [43] On peut se reporter à la section 4.2.1 qui décrit les lois macroscopiques de la conduction et en particulier les termes de migration.

78

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Dans tout milieu conducteur, en dehors des couches de diffusion, la conductivité électrique de chaque porteur de charge est constante [44]. Lorsqu’on intègre la loi d’OHM écrite au niveau local en fonction de la géométrie du système, on obtient la valeur de la chute ohmique aux bornes du milieu (U = RI, en valeur absolue). Par exemple, pour un conducteur homogène de forme cylindrique droit de section normale d’aire S et de longueur  , représenté sur la figure 2.13, le profil de potentiel est linéaire. La géométrie du système est dite plane, c’est-à-dire que les équipotentielles sont des plans et les lignes de courant des droites [45].



(S)

Figure 2.13 - Schéma d’un volume conducteur de forme cylindrique

La résistance du volume électrolyte, R, et la différence de potentiel, U, entre deux sections distantes l’une de l’autre d’une longueur  sont du type :

R =

!! ! = S "S

et

avec : R la résistance de l’échantillon ρ la résistivité électrique du milieu σ la conductivité électrique du milieu  la longueur du cylindre S l’aire de la surface U la différence de potentiel I le courant j le module de la densité de courant

U =

!! ! I = j S " [Ω] [Ωm] [ S m−1 ] [m] [ m2 ] [V] [A] [ A m−2 ]

z Pour fixer un ordre de grandeur de la chute ohmique dans une cellule électrochimique, prenons l’exemple

d’une cellule d’électrolyse de géométrie cylindrique dans laquelle les deux électrodes de géométrie identique sont séparées de 5 cm. On supposera que l’épaisseur des couches de diffusion est suffisamment faible pour que seule la valeur de la chute ohmique au sein de l’électrolyte soit importante. Lors de l’électrolyse, la cellule est traversée par un courant de densité égale à 7 mA cm−2 (même aire pour les deux électrodes donc même

[44] En dehors des couches de diffusion les différentes concentrations sont homogènes. La conductivité, qui n’est qu’une fonction de ces dernières (pour un système isotherme, voir sections 2.2.4.3 et 4.2.2), est également une constante sur le volume correspondant. [45] Dans les études de génie électrochimique, définir la répartition et la forme des lignes de courant et des surfaces équipotentielles correspondant à la prise en compte uniquement des phénomènes de migration dans l’électrolyte en tenant compte de la géométrie de la cellule électrochimique est souvent la première étape. On dit alors que l’on calcule la distribution primaire de courant. La géométrie considérée ici (géométrie plane) est la plus simple possible. Elle ne correspond pas à l’ensemble des dispositifs expérimentaux.

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

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densité de courant). Enfin l’électrolyte comporte de l’acide sulfurique en concentration 0,5 mol L−1 comme électrolyte support, ce qui fixe une conductivité de la solution égale à σ = 43 S m−1 = 0,43 S cm−1. !! ! Dans cette cellule à géométrie plane : U= I= j " S d’où finalement une valeur de chute ohmique égale à 81 mV. Cette valeur est déjà relativement élevée, alors que la solution utilisée est fortement concentrée. On voit ainsi notamment l’importance de la distance séparant les deux électrodes. Pour se repérer dans les ordres de grandeur, la chute ohmique aux bornes d’un métal de même géométrie serait, avec une conductivité de l’ordre de σ = 5 .107 S m−1 = 5 .105 S cm−1, égale à 0,1 µV. Ainsi dans la plupart des systèmes électrochimiques la chute ohmique est essentiellement dans l’électrolyte. Ce n’est cependant pas une règle absolue. Par exemple, dans certaines installations industrielles de production d’aluminium [46], on impose pour une cellule d’électrolyse fonctionnant à 1 A cm−2 environ une tension moyenne de l’ordre de 4,3 V, dont 2,4 V de chute ohmique, qui se répartit entre 1,7 V pour la chute ohmique dans l’électrolyte et 0,7 V dans les électrodes elles-mêmes (aluminium, carbone…) et les amenées de courant et connexions entre les cuves adjacentes (une installation industrielle est effectivement composées de nombreuses cellules en série).

2.2.4.2 - SENS DE DÉPLACEMENT

y

PAR MIGRATION

Les sens de déplacement par migration des espèces chargées négativement (électrons, anions) et positivement (trous, cations) sont opposés : les charges positives se déplacent dans le sens du champ électrique et les charges négatives dans le sens opposé. En revanche les densités de courant correspondantes sont toujours dans le même sens que le champ électrique comme l’illustre la figure 2.14. ö E s+ > 0 s− > 0

ö j+

ö w+ ö w−

ö j−

ö ö ö j+ = z+C+ ww++ = s+ E ö ö ö j− = z−C− ww−− = s− E

Figure 2.14 - Schéma !de !" déplacement!"des porteurs de charge soumis à un champ électrique : ! i , vitesse, et j i , densité de courant de l’espèce i

Les conductivités électriques de chaque type de porteur de charge (ainsi que la conductivité électrique totale) sont toujours des grandeurs positives. On a donc pour un milieu conducteur quelconque, y compris les matériaux mixtes :

! =! + ! trous + ! anions + ! cations !électrons ##"## $ !##"##$ ! électronique ! ionique Précisons également que dans ce cas simple (migration pure), le sens de déplacement des ions est directement lié au sens de la densité de courant : les cations se déplacent dans le même sens que la densité de courant et les anions dans un sens opposé. Cette caractéristique peut s’exprimer également suivant la formulation suivante (qui est facile à retenir) qui est valable dans les deux situations de l’électrochimie, pile ou électrolyse. Les anions migrent vers l’anode et les cations vers la cathode. [46] Voir la planche intitulée « Production industrielle d’aluminium en France ».

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ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Ce résultat est généralisable à la plupart des systèmes électrochimiques : il suffit en effet que les densités de courant de migration soient dans le même sens que la densité totale de courant [47]. On prendra soin de retenir cela et de ne pas faire un raisonnement trop simpliste de type électrostatique en regardant les polarités des électrodes et en concluant par exemple que les cations sont attirés et donc migrent vers l’électrode de polarité négative : dans une pile, les cations migrent vers la cathode qui est le pôle + du dispositif. L’erreur faite ici serait de considérer la différence de potentiel globale entre les deux électrodes (en regardant les polarités), alors que le champ électrique responsable de la migration des ions est celui régnant dans l’électrolyte, c’est-à-dire après avoir franchi les deux interfaces électrochimiques. Cet aspect est illustré précédemment sur la figure 2.11 montrant l’allure du profil de potentiel dans une pile DANIELL en situation de générateur, ou encore par l’exemple plus simple suivant qui compare pile et électrolyse sur un système sans jonction ionique. D’autre part, il faut bien garder en mémoire le fait que la migration n’est qu’un mode de transport de la matière parmi d’autres : ce n’est pas parce qu’un cation migre vers la cathode qu’il ne peut pas réagir à l’anode [48]. Dans ce dernier cas, la convection et la diffusion du cation assurent un transport de sens opposé à la migration [49].

z Une pile au lithium est un exemple de chaîne électrochimique sans jonction ionique qu’on peut considérer à

l’équilibre thermodynamique en circuit ouvert : Li | solution organique de LiTFSI | LixMnO2 L’électrolyte organique est une solution dans un solvant organique de cations Li+ et d’anions bis-(trifluorométhanesulfonyl)imidure, notés TFSI−.  Les schémas de la figure 2.15 représentent le profil du potentiel à l’échelle du système, en circuit ouvert et parcouru par un courant en situation de pile (ou décharge) : le lithium, l’électrode négative, est anode. Comme pour les figures 2.1 et 2.11, les signes de Δϕ+(I = 0) et Δϕ−(I = 0) sont choisis arbitrairement. Pour les schémas, on fixe un même potentiel pour un point arbitraire de l’électrolyte dans le système parcouru par un courant ou en circuit ouvert (position d’une électrode de référence par exemple). En revanche le sens de variation du potentiel dans les volumes conducteurs (sur le schéma représenté par le signe des pentes des droites) est en accord avec le sens du passage du courant et donc le signe des différentes chutes ohmiques. On notera que les schémas mettent en évidence les relations générales suivantes [50] :

!" # # !" # (I = 0) = $# = $an > 0 !" + # !" + (I = 0) = $+ = $cat < 0

[47] Le lien entre densité de courant global et densité de courant de migration est détaillé dans un exemple de la section 4.2.1.5. [48] Dans la section 1.2.1, on a déjà vu qu’un cation pouvait aussi bien être oxydant que réducteur dans un couple rédox. [49] Des systèmes avec des sens de flux de migration et diffusion différents sont présentés qualitativement dans la section 4.3.1.5. [50] Ces relations générales peuvent être illustrées de manière différente par l’utilisation des courbes intensité-potentiel pour représenter le point de fonctionnement d’un système électrochimique, comme cela est décrit dans les sections 2.4.3 et 2.4.4.

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

81

et on a donc globalement U < U (I = 0) pour le cas d’un dispositif en fonctionnement générateur. I=0

j

«U» (I = 0)

I≠0

j

ö j

«U»

∆j+ (I = 0)

∆j+ ∆j−

∆j− (I = 0)

jRéf

jRéf

− Li

Sol. LiTFSI

+



LixMnO2

Li

+ Sol. LiTFSI

LixMnO2

Figure 2.15 - Comparaison des profils de potentiel dans un système à l’équilibre et en fonctionnement générateur [51]

 Le second schéma de la figure 2.16 correspond à une situation d’électrolyse (ou recharge) : le lithium, l’électrode négative, est cathode. j

j

I=0

I≠0

ö j «U»

«U» (I = 0)

∆j+

∆j+ (I = 0)

∆j− (I = 0)

jRéf

− Li

∆j−

jRéf

Sol. LiTFSI

+



LixMnO2

Li

+ Sol. LiTFSI

LixMnO2

Figure 2.16 - Comparaison des profils de potentiel dans un système à l’équilibre et en fonctionnement en électrolyse [51]

Dans ce deuxième cas, les schémas mettent en évidence les relations générales suivantes [50] :

!" # # !" # (I = 0) = $# = $cat < 0 !" + # !" + (I = 0) = $+ = $an > 0 Et on a donc globalement U > U (I = 0) pour le cas d’un dispositif en fonctionnement électrolyse.

y

[51] La tension «U» est la tension aux bornes de la cellule, à une constante près : voir note [34] de la section 2.2.3.

82

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

On peut souligner, en lien avec le signe des chutes ohmiques, que dans le cas d’un générateur qui débite du courant, la chute ohmique a pour effet de diminuer la valeur de la tension délivrée. En revanche, dans le cas d’une cellule d’électrolyse (récepteur), la chute ohmique conduit à augmenter la différence de potentiel à imposer pour effectuer la(les) réaction(s). Dans les deux cas, la chute ohmique conduit à une dégradation d’énergie sous forme de chaleur (effet JOULE).

2.2.4.3 - CONDUCTIVITÉS MOLAIRES ET NOMBRES DE

TRANSPORT

Les conductivités électriques sont fonction du nombre de porteurs de charge par unité de volume. Le lien entre conductivité et concentration n’est pas nécessairement une fonction simple [52] mais on peut définir la conductivité molaire de chaque type de porteur de charge par la relation : "i ou " i = ! i C i !i = Ci avec : λi la conductivité molaire du porteur de charge i σi la conductivité électrique du porteur de charge i Ci la concentration en porteur de charge i

[ S m2 mol−1 ] [ S m−1 ] [ mol m−3 ]

λi est, comme σi , une grandeur positive (voir figure 2.14). On définit également la conductivité molaire Λ = σ /C d’un électrolyte composé d’une solution de concentration C en soluté Ap+Bp−. Les concentrations ioniques sont : C + = p +C donc, comme σ = σ+ + σ− ,

et

C − = p −C

Λ = p+ λ+ + p− λ−

Dans la situation où seuls les phénomènes de migration sont à prendre en compte [53], on quantifie la fraction de courant transportée par l’espèce i, c’est-à-dire sa contribution à la conductivité totale, par une grandeur appelée nombre de transport et définie par :

I i = ji = ! i ti = ! I j avec

!ti

=1

i

C’est généralement dans ce cas-là (c’est-à-dire lorsqu’on peut ne considérer que la migration comme mode de transport) que l’on utilise cette notion de nombre de transport. Toutes les densités de courant étant parallèles et de même sens (celui du champ électrique, voir figure 2.14), les nombres de transport sont des nombres compris entre 0 et 1.

[52] Par exemple, la relation entre conductivité et concentration est relativement compliquée dans le cas des solutions concentrées, comme cela est décrit dans la section 4.2.2.5. [53] La définition générale des nombres de transport en un point où il y a simultanément diffusion, migration et convection est donnée dans la section 4.1.1.3 et illustrée dans l’annexe A.4.1.

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

83

Pour les différents milieux conducteurs, la grandeur facilement accessible expérimentalement est la conductivité totale. Pour discriminer la contribution des différents porteurs de charge, il faut réaliser des expériences complémentaires, souvent plus complexes, de mesure des nombres de transport.

z Par exemple, pour une solution aqueuse décimolaire de nitrate de calcium, Ca(NO3)2 que l’on supposera

complètement dissocié (électrolyte fort), on mesure à 25 °C une conductivité électrique σ = 26,2 mS cm−1. En considérant, de manière approchée, que les conductivités molaires sont indépendantes de la concentration, on peut calculer les valeurs de la conductivité molaire de l’électrolyte, celle de l’ion calcium et les nombres de transport des deux ions présents en solution, grâce aux données de la littérature (voir tableau 4.2 dans la section 4.2.2.4) : λNO3− = λ0NO3− = 7,14 .10−3 S m2 mol−1 σ = 26,2 mS cm−1 = 2,62 S m−1

" [NO3! ] = 2C = 0,2 mol L!1 = 200 mol m!3 # 2+ !1 !3 $ [Ca ] = C = 0,1 mol L = 100 mol m

! = "NO3# [NO3# ] + "Ca2+ [Ca2+ ] = (2 "NO3# + "Ca2+ )C = $ C Λ = 26,2 .10−3 S m2 mol−1 d’où λCa2+ = 11,9 .10−3 S m2 mol−1 et Dans les tables de données sur les solutions, on trouve encore souvent des données dites de conductivité équivalente. Par exemple pour le cation Ca2+, on trouvera : 1 ! 2+ = !éq = 5,96.10"3 S m2 mol"1 2 Ca Cependant la notion d’équivalent tend à disparaître et ne sera pas utilisée ici, car elle prête à confusion. Pour les nombres de transport, on détermine le rapport suivant : " ! #NO3! tNO3! = NO3 = et t Ca2+ = 1!tNO3! " #NO3! + 1 2 #Ca2+

!1

2 Ca

2+

=

tNO3! = 0,545

et

t Ca2+ = 0,455

y

2.2.4.4 - ELECTROLYTE SUPPORT Si l’on ajoute dans un milieu conducteur ionique un électrolyte fort en grande concentration par rapport aux concentrations des autres ions (on admet en général qu’un facteur 100 est suffisant), on observe que la quasi-totalité du courant de migration est assurée par celui-ci. On parle alors d’électrolyte support. Dans les cas usuels, cet électrolyte support est composé d’ions non-électroactifs : il ne contribue pas aux phénomènes faradiques aux interfaces (c’est-à-dire aux réactions rédox), mais en revanche il participe au passage du courant dans le volume de l’électrolyte et éventuellement au courant capacitif aux interfaces.

z Les effets de l’ajout d’un électrolyte support sont mis en évidence par un exemple numérique de calcul des nombres de transport et conductivités dans deux solutions différentes :  une solution aqueuse contenant du nitrate d’argent en concentration 10−3 mol L−1,

84

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

 une solution aqueuse contenant du nitrate d’argent en concentration 10 −3 mol L−1 et du nitrate de potassium en concentration 0,1 mol L−1. La littérature donne les valeurs de conductivité molaire à dilution infinie (voir tableau 4.2, section 4.2.2.4). Pour simplifier, on considérera que les conductivités molaires sont indépendantes de la concentration : λ NO3− = λ0NO3− = 7,14 .10−3 S m2 mol−1 λ Ag+ = λ0 Ag+ = 6,19 .10−3 S m2 mol−1 λ K+ = λ0 K+ = 7,35 .10−3 S m2 mol−1  solution de nitrate d’argent : [Ag+ ] = [NO3! ] = 10!3 mol L!1 = 1 mol m!3 La conductivité de la solution est calculée à partir de la relation suivante :

! = "NO3# [NO3# ] + "Ag+ [Ag+ ] = ( "NO3# + "Ag+ ) [Ag+ ] σ = 13,3 .10−3 S m−1 = 1,33 .10−4 S cm−1 d’où D’autre part les nombres de transport des deux ions sont égaux à : $ ! Ag+ "Ag+ = = 0,46 & t Ag+ = ! "NO3# + "Ag+ & % "NO3# & t # = ! NO3# = = 0,54 & NO3 ! "NO3# + "Ag+ '  solution de nitrate d’argent et nitrate de potassium :

# [Ag+ ] = 10 !3 mol L!1 = 1 mol m!3 % + !1 !3 $ [K ] = 0,1 mol L = 100 mol m % ! !3 !1 !3 %& [NO3 ] = 0,1 + 10 " 0,101 mol L = 101 mol m La conductivité de la solution est calculée à partir de la relation suivante :

! = "NO3# [NO3# ] + "Ag+ [Ag+ ] + "K+ [K+ ] $ ( "NO3# + "K+ ) [K+ ] σ = 1,46 S m−1 = 1,46 .10−2 S cm−1 d’où soit une valeur environ 100 fois plus élevée que dans la solution précédente. De plus, on a : % 10"3 #Ag+ ! + ' t + = Ag = $ 0,004 Ag ' ! 10"3 #Ag+ + 0,1 #NO3" + 0,1 #K+ ' ' !+ 0,1 #K+ $ 0,49 & tK+ = K = "3 ! 10 #Ag+ + 0,1 #NO3" + 0,1 #K+ ' ' 0,1 #NO3" ! " ' tNO " = NO3 = $ 0,51 "3 3 ! 10 #Ag+ + 0,1 #NO3" + 0,1 #K+ '( On retiendra que dans ce deuxième cas (présence de l’électrolyte support KNO3), la solution présente une conductivité beaucoup plus élevée et que : t Ag+  tK+ t Ag+  tNO3! et

y

L’ajout d’électrolyte support, lorsqu’il est possible (c’est-à-dire dans des électrolytes liquides), n’a d’intérêt que dans certaines applications. Par exemple, dans la mesure où on peut alors négliger la migration des espèces électroactives devant leur déplacement

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

85

par diffusion et convection, sa présence permet souvent de simplifier l’exploitation des données électrochimiques et est donc intéressante pour des applications analytiques. Elle permet également d’augmenter la conductivité globale de l’électrolyte. Cependant, dans de nombreuses applications industrielles, la quantité d’espèces électroactives est suffisamment grande pour assurer une bonne conductivité de l’électrolyte et on évite alors en général d’ajouter un composé supplémentaire. C’est par exemple particulièrement important quand le poids du système global est un critère important, comme dans les applications aux batteries d’appareils électroniques portables.

2.3 - ALLURE DES COURBES INTENSITÉ-POTENTIEL Dans la description des systèmes électrochimiques parcourus par un courant, les variations des polarisations (ou surtensions le cas échéant) anodique et cathodique, en fonction du courant et du temps, jouent un rôle particulièrement important. On représente généralement ces relations sous la forme de courbes intensité-potentiel d’une électrode, I = f (E ), E étant la tension entre l’électrode considérée et une électrode de référence [54]. Les résultats expérimentaux peuvent également être présentés sous la forme de courbes densité de courant-potentiel. Cependant lorsque l’étude porte sur l’ensemble du système électrochimique et n’est pas seulement focalisée sur l’électrode de travail, il est préférable de travailler avec la représentation intensité-potentiel [55]. De manière générale, ces caractéristiques dépendent du temps. Ici, on ne discute que des courbes intensité-potentiel stationnaires. Mais les allures présentées restent qualitativement valables à chaque instant. En outre, la tension accessible expérimentalement inclut un terme de chute ohmique entre l’électrode considérée et l’électrode de référence, dont on ne tient pas compte dans cette description simplifiée. De telles courbes, corrigées de la chute ohmique, peuvent être déterminées expérimentalement dans la plupart des cas. Nous ne discuterons pas ici le détail de ces courbes mais seulement leur allure qualitative [56]. Les courbes intensité-potentiel traduisent le comportement cinétique des systèmes rédox puisqu’elles donnent l’évolution du courant, donc de la vitesse de réaction, pour les différentes valeurs de potentiel. Le mot cinétique est très général et englobe ici l’ensemble des phénomènes conduisant au passage d’un courant. En électrochimie, on distingue fréquemment les deux principaux types de phénomènes intervenant par les

[54] Dans certains ouvrages, ces courbes sont également dénommées « courbes de polarisation », notamment quand la représentation adoptée est E = f(I) plutôt que I = f(E). C'est par exemple le cas des diagrammes d’EVANS, d’utilisation courante en corrosion. Dans ce document on optera uniquement pour des représentations de type intensité-potentiel (current-potential curve en anglais), qui sont assez naturelles si le tracé est réalisé par des techniques potentiostatiques. [55] Les sections 2.4.2 à 2.4.5 détaillent différents exemples illustrant l’importance de travailler sur des courbes intensité-potentiel lors de la représentation des points de fonctionnement dans un système électrochimique. Ce choix est justifié par la constance du courant, et non de la densité de courant, dans toutes les sections du système, comme cela est présenté dans la section 1.4.1.3. [56] Des expressions analytiques quantitatives de ces courbes sont données pour les systèmes rédox simples dans la section 4.3.3.

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ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

expressions « cinétique du transport de matière » et « cinétique de la réaction rédox » [57]. Les sections 2.3.2 et 2.3.3 décrivent les conséquences principales des deux types de phénomène cinétique sur l’allure des courbes intensité-potentiel.

2.3.1 - CARACTÉRISTIQUES GÉNÉRALES 2.3.1.1 - SIGNE DE LA POLARISATION Le signe de la polarisation dépend des situations rencontrées. Cependant une analogie avec les systèmes mécaniques permet de comprendre certaines règles à propos de ce signe. Lors du déplacement spontané d’un objet à partir d’une vitesse initiale dans un milieu où il n’est plus soumis qu’à des frottements, son énergie mécanique diminue et, pour maintenir une vitesse donnée, il faut fournir un supplément d’énergie compensant celle dissipée par les forces de frottements. Ici, dans une chaîne électrochimique en fonctionnement récepteur (électrolyse), pour provoquer le passage d’un courant, c’està-dire une vitesse de réaction donnée, il faut fournir une énergie électrique supplémentaire due aux polarisations électriques. On peut dire que les polarisations électriques jouent un rôle équivalent à celui de forces de freinage, de frottements : il faut les vaincre pour imposer une vitesse (c’est-à-dire un courant) donnée. Cette énergie fournie est dégradée en chaleur au sein du système électrochimique au même titre que l’effet JOULE. En résumé, compte tenu de la convention choisie pour le signe du courant [58], on vérifie généralement que : !+ I+ > 0 et !! I! > 0 de même

! an I an > 0

et

! cat I cat > 0

De manière générale, on peut retenir que la polarisation de l’anode est positive et la polarisation de la cathode est négative. Les courbes intensité-potentiel sont ainsi souvent monotones et croissantes (avec les conventions de signe choisies dans ce document), mais ce n’est pas une règle absolue [59]. Nous nous limiterons ici à des courbes monotones. Il est important de ne pas confondre les notions de polarité et de polarisation d’une électrode : il n’y a pas de lien obligatoire entre les signes de ces deux grandeurs. Ainsi lors d’une électrolyse, l'électrode positive est anode et sa polarisation est positive, c’està-dire que son potentiel lors du passage d’un courant est supérieur à celui mesuré en absence de courant. Dans le cas d’un fonctionnement en générateur, l’électrode positive est en revanche cathode et sa polarisation est négative. Dans cette dernière situation, [57] Une description qualitative plus complète des phénomènes pouvant être mis en jeu lors du passage du courant dans un système électrochimique est donnée dans la section 4.3.2.1. [58] La description de la convention de signe du courant utilisée en électrochimie est détaillée dans la section 1.4.1.3. [59] Par exemple en présence du phénomène de passivation d’une surface métallique lié à la formation d'une couche à caractère isolant (oxyde, hydroxyde…), on observe un blocage de la réaction rédox. Le courant diminue alors brusquement. Le phénomène est observable lors du tracé d'une caractéristique I(E) en mode potentiostatique. En mode intensiostatique, le potentiel saute brusquement jusqu'à une valeur où une nouvelle réaction rédox se produit.

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

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le passage spontané du courant ne permet de récupérer qu’une énergie électrique diminuée du fait des polarisations électriques du système. Lorsque les deux espèces d’un couple rédox Ox/Red sont présentes, la courbe intensitépotentiel a l’allure représentée sur la figure 2.17. Sur ce type de représentation, on repère la polarisation, pour un point de fonctionnement donné, par une flèche orientée : le signe de la polarisation est positif si la flèche est orientée dans le même sens que l’axe des potentiels, comme sur la figure 2.17, et négatif lorsque la flèche est orientée dans le sens opposé. Par convention sur une courbe intensité-potentiel, on écrit les deux éléments du couple rédox responsable du courant ainsi qu’une flèche indiquant le sens de la réaction (sens de l’oxydation pour un courant positif). Par rapport à l’orientation de l’axe des potentiels (ici, croissants vers la droite), on indique l’espèce réduite du couple (Red) à gauche et l’espèce oxydée (Ox) à droite : cela correspond à une écriture analogue à celles des diagrammes de prédominance utilisées par exemple pour les équilibres acido-basiques [60]. Suivant les conventions usuelles des électrochimistes, on doit ainsi toujours représenter des réactions avec une flèche vers la droite pour les courants positifs (oxydations) et une flèche vers la gauche pour les courants négatifs (réductions). I

Red

Ox

E (I = 0)

p Red

E [ V/Réf ]

Ox

Figure 2.17 - Courbe intensité-potentiel d’une électrode en présence des deux éléments d’un couple rédox

Dans le cas particulier considéré ici, les deux éléments d’un seul couple rédox sont présents et le potentiel à l’abandon correspond donc au potentiel d’équilibre donné par la loi de NERNST appliquée à ce couple. On peut alors parler de surtension au lieu de polarisation.

[60] On peut effectivement faire une analogie entre la loi de NERNST exprimant le potentiel E d’un couple rédox et la loi exprimant le pH d’une solution à partir du pKa et des concentrations respectives des deux formes d’un couple acido-basique.

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ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

2.3.1.2 - COURBES STATIONNAIRES Lorsque, dans le système étudié, une seule espèce du couple est présente, l’allure de la courbe intensité-potentiel est différente de celle de la figure 2.17 et le potentiel à l’abandon ne peut pas être défini en ne considérant que cette seule espèce. En particulier la loi de NERNST n’a plus de sens : l’activité d’une des espèces est nulle et ne définit donc pas de valeur de potentiel à l’équilibre. D’autre part, dans la mesure où l’on ne considère ici que la représentation de courbes intensité-potentiel stationnaires, si une espèce est absente dans le système initial, elle le reste durant toute la durée de l’expérience et elle ne peut pas contribuer à un courant faradique. On n’observe dans ce cas-là qu’une seule partie de la courbe, anodique ou cathodique suivant le cas. Par exemple, si l'on considère l’interface entre une électrode de cuivre et un volume important d’électrolyte aqueux ne contenant pas d’ions Cu2+, il n’y a pas, en régime stationnaire, de réduction possible pour le couple rédox Cu2+/Cu. La courbe intensité-potentiel correspondante est donc entièrement dans la zone anodique, relative à l’oxydation du cuivre, comme le montre la figure 2.18. I

Cu

E°Cu2+/Cu

Cu

2+

E [V/Réf ]

Figure 2.18 - Courbe intensité-potentiel en présence d’un seul élément du couple rédox Exemple d’une électrode cuivre plongeant dans une solution aqueuse ne contenant pas d’ions Cu2+

Dans un tel système, qui est en réalité quasi-stationnaire [61], lorsqu’on mesure un point correspondant à un courant non-nul sur la branche anodique, il y a production d’ions Cu2+, et leur concentration peut être importante dans la couche de diffusion, proche de l’électrode de travail. Cependant par rapport au volume d’électrolyte, la quantité d’ions Cu2+ produite pendant le temps de cette mesure est toute petite (voir exemple cidessous). Ainsi, lorsqu’on se place à un potentiel plus faible, auquel la réduction des ions Cu2+ est attendue, on n’observe en pratique aucun courant stationnaire de réduction car les ions Cu2+ précédemment produits sont extrêmement dilués dans l’ensemble du volume de l’électrolyte : il n'y en a presque plus dans la couche de diffusion [62]. [61] Une discussion sur la notion de systèmes strictement ou non à l’état stationnaire est menée dans la section 1.6.4. [62] Cette caractéristique des courbes intensité-potentiel est liée au caractère stationnaire, choisi dans cette description. Dans une expérience en régime transitoire sur le même système électrochimique

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

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z Afin de vérifier la condition de quasi-stationnarité pour la concentration moyenne en espèces électroactives dans une expérience typique de chimie analytique en laboratoire, il suffit d’appliquer la loi de FARADAY (voir section 2.2.2.2). Considérons par exemple une expérience de chronopotentiométrie réalisée dans un bécher contenant 30 mL de solution avec une électrode de travail dont la surface active est un disque de 2 mm de diamètre. L’expérience dure 5 minutes avec une densité de courant de 3 mA cm−2, c’est-à-dire un courant de 0,1 mA. Si on suppose que l’espèce électroactive est en concentration initiale égale à 2.10 −3 mol L−1, et que les coefficients stœchiométriques sont tous égaux à ±1, la variation de la quantité de matière durant l’expérience est donnée par :

Q It = = 3.10 "7 mol F F On a donc une variation de concentration en espèces électroactives entre le début et la fin de l’expérience qui est égale à : 3.10 "7 !C = = 10 "5 mol L"1 30.10 "3 ce qui reste négligeable devant la concentration initiale. Cependant on peut remarquer que le rapport entre C et ΔC n’est pas extrêmement grand. Cela signifie qu’un écart important sur les conditions expérimentales (volume d’électrolyte sensiblement plus faible ou surface active sensiblement plus élevée, ou durée d’expérience sensiblement plus élevée…) peut faire sortir des conditions d’applicabilité de la quasi-stationnarité. y !n =

Un autre point important, pour le tracé de l’allure de ces courbes intensité-potentiel stationnaires, est la position par rapport à l’axe des potentiels de la branche tracée, anodique dans l’exemple ci-dessus. Comme cela a été souligné auparavant, on ne peut pas placer de potentiel à l’équilibre sur cette courbe intensité-potentiel puisqu'on ne peut pas écrire la loi de NERNST à l’abandon, cependant la constante thermodynamique associée au couple rédox considéré, ici le potentiel standard E °(Cu2+/Cu) [63], reste une valeur qui permet de situer la courbe intensité-potentiel, c’est-à-dire la zone de potentiel où le courant varie brusquement (voir figures 2.18 ci-dessus et 2.21 dans la section 2.3.2.2) [64]. Il faut bien garder en mémoire qu’il s’agit ici de tracer et d’utiliser des allures de courbes, mais pas de prévoir leurs expressions mathématiques précises ni les valeurs de potentiel au mV près. Si l’on fait passer durablement un courant dans un système électrochimique, on observe en général une évolution de la composition chimique du milieu. Ce type de système n’est plus stationnaire comme l’était l’exemple présenté ci-dessus. On voit alors apparaître un courant correspondant à une espèce produite, non-présente initialement, comme cela est illustré sur la figure 2.20 dans la section 2.3.2.1.

(électrode de cuivre dans une solution sans Cu2+), comme une expérience de voltamétrie par exemple, on observerait un courant de réduction sur la partie retour du voltamogramme, qui est aussi une courbe intensité-potentiel : les ions Cu2+ produits par l’oxydation de l’électrode de cuivre pendant le balayage aller, sont toujours, pour partie, présents à l’interface lors du balayage retour. [63] Plus généralement, la valeur à considérer ici est le potentiel standard apparent lorsque celui-ci est pertinent (voir section 2.1.2.2 avec par exemple le couple IO3−/I− en milieu tamponné). [64] Cette propriété est valable pour des systèmes rapides. L’évolution des courbes intensité-potentiel lorsque la cinétique des réactions rédox intervient est discutée dans la section 2.3.3.

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ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

STOCKAGE DE L’ÉNERGIE : LES SUPERCAPACITÉS Document élaboré avec l’aimable collaboration de K. GIRARD, ingénieur à Batscap, Quimper, France

Les supercapacités ne font pas intervenir de réaction d'oxydoréduction en fonctionnement normal. Toutefois, leur fonctionnement n'en n'est pas moins basé sur un phénomène bien connu des électrochimistes : le phénomène de double couche. En électrochimie, ce phénomène traduit l’accumulation d’ions au voisinage d’une électrode chargée (la charge de l’électrode étant opposée à celle des ions). Ce principe permet d'accumuler un maximum de charge q selon la relation suivante : q = CdlS (E − E0), où Cdl est la capacité de double couche, S la surface développée, E le potentiel du système et E0 le potentiel du système au repos. L'épaisseur de la couche de HELMOTZ, de l'ordre de quelques nanomètres, associée à une surface développée importante, permet ainsi d'obtenir des charges sensiblement plus importantes que pour des condensateurs classiques. Il est possible d'obtenir une capacité de plusieurs milliers de farads pour un élément unitaire. Carbone actif : conducteur électronique

e

Electrolyte : conducteur ionique

Collecteur de courant

Séparateur

Electrode

Electrolyte

e–

Schéma de principe d’une supercapacité (© Batscap) et élément unitaire (2,7 V, 3000 F) (© Batscap)

Les supercapacités sont composées :  de deux électrodes poreuses (pour maximiser la surface) à base de carbone actif,  d'un séparateur à base de polymère ou de cellulose,  d'un électrolyte organique, bon conducteur ionique. L'absence de réaction électrochimique permet une cinétique particulièrement rapide. Cette très grande rapidité de fonctionnement se traduit par une forte densité de puissance, en charge comme en décharge. Des densités de puissance supérieures à 10 000 W/kg peuvent être obtenues. En revanche, la quantité d'énergie embarquée dans de tels systèmes reste relativement faible, de l'ordre de quelques Wh/kg. La cyclabilité de ces systèmes est très bonne, de l'ordre de plusieurs centaines de milliers de cycles. Les supercapacités seront donc utiles dans des applications nécessitant de fortes puissances sur des temps courts et de fréquentes recharges. Par exemple, un tramway sans caténaire nécessite beaucoup de puissance au démarrage mais peut être rechargé à chaque arrêt.

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

91

2.3.2 - RÔLE DE LA CINÉTIQUE DU TRANSPORT DE MATIÈRE 2.3.2.1 - EXISTENCE D’UN COURANT LIMITE L’intervention de la cinétique des processus de transport de matière se manifeste, sur les courbes stationnaires intensité-potentiel, par l’existence d’un courant limite pour le processus rédox mettant en jeu ce transport de matière. Sur une courbe intensitépotentiel, l’existence d’un courant limite se traduit ainsi par un palier horizontal. On l’appelle souvent courant limite de diffusion. Il dépend des paramètres du transport de matière (migration, convection et diffusion) et il est, sauf exception [65], proportionnel à la concentration en espèce consommée, celle dont le transport de matière limite la vitesse de réaction et donc le passage du courant [66]. Reprenons l’exemple de l’interface entre une électrode de cuivre et un électrolyte aqueux, en introduisant cette fois-ci des ions Cu2+ dans la solution étudiée. Les deux éléments du couple Cu2+/Cu étant présents, les deux branches de la courbe intensitépotentiel sont alors observées. Pour un point de fonctionnement cathodique, les ions Cu2+ doivent être amenés à l’interface pour y être réduits. On va donc, comme cela est représenté sur la figure 2.19, observer un courant limite en réduction dont la valeur est proportionnelle à la concentration en ions Cu2+ au sein de la solution. I

Cu2+

Cu E(I = 0) = Eéq

I lim

Cu

E°Cu2+/Cu Cu2+

E [V/Réf ]

Figure 2.19 - Courbe intensité-potentiel d’une électrode de cuivre en présence d’une solution aqueuse acide contenant des ions Cu2++

[65] De telles exceptions se rencontrent par exemple pour des mélanges entre les deux espèces d’un même couple rédox dans des conditions où la migration de ces dernières ne peut pas être négligée : absence ou petite quantité d’électrolyte support dans l’électrolyte. [66] Les lois quantitatives donnant le lien entre la valeur du courant limite et la concentration en espèce consommée dans les systèmes simples sont données dans la section 4.3.3.1.

92

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

En revanche l’allure de la courbe intensité-potentiel est différente en oxydation car le cuivre métal n’est pas concerné par les phénomènes de transport de matière : il y a toujours du cuivre à l’interface. La zone de forte variation du courant correspond à une zone de potentiel proche du potentiel à l’abandon, égal dans ce cas au potentiel d’équilibre du système. Ce dernier, que l’on peut exprimer par l’intermédiaire de la loi de NERNST, est légèrement décalé par rapport à la valeur du potentiel standard du couple considéré. Pour fixer les ordres de grandeur, pour une concentration en ions Cu2+ égale à 10−3 mol L−1, on a :

0,06 log (aCu2+ ) 2 0,06 + log [Cu2+ ] = E°Cu2+/ Cu " 90 mV 2

E éq = E°Cu2+/ Cu + E éq ! E°Cu2+/ Cu

Dans un autre type d’expérience, à partir d’une solution aqueuse ne contenant pas initialement d’ions Cu2+, le courant limite de réduction peut être utilisé pour suivre l’avancement de la réaction durant une électrolyse produisant des ions Cu2+ à une anode en cuivre. Cet exemple, illustré sur la figue 2.20, est détaillé ci-dessous.

z Considérons une situation d’électrolyse dans un système électrochimique pour lequel la réaction anodique est

l’oxydation d’une électrode de cuivre dans une solution non-renouvelée qui initialement ne contient pas d’ions Cu2+. Si l’on trace rapidement une courbe intensité-potentiel stationnaire à différents moments de l’électrolyse, on peut suivre l’avancement de cette électrolyse grâce à la mesure du courant limite en réduction, qui indique la concentration en Cu2+ générés. La durée du tracé de chaque courbe, très petite devant la durée de l’électrolyse, correspond à un régime quasi-stationnaire. Mais le système n’est plus stationnaire à l’échelle de temps de l’électrolyse, comme l’illustre la différence entre les deux courbes intensité-potentiel représentées sur la figure 2.20. I

2+

Cu

Cu

E°Cu2+/Cu Etat initial, t = 0 En cours d'électrolyse, t > 0

t↑

Cu

2+

Cu

Figure 2.20 - Exemple d’une électrode cuivre plongeant dans une solution aqueuse ne contenant pas initialement d’ions Cu 2+ : évolution en cours d’oxydation

E [V/Réf ]

y

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

93

Vis-à-vis de ces courants limite, il existe un autre cas particulier important : celui des espèces électroactives présentes en très grande quantité en comparaison des autres espèces électroactives étudiées (par exemple le solvant dans des systèmes avec des solutions électrolytes). Les courants limite étant proportionnels aux concentrations en solution, le palier correspondant à la limite du transport de matière pour ces couples est beaucoup plus grand (en valeur absolue) que ceux des autres couples rédox du système. Ainsi, à l’échelle du tracé des courbes intensité-potentiel, ces paliers ne sont pas visibles et le courant augmente très brusquement (en valeur absolue). On parle souvent, dans ce cas, de mur du solvant même si cela constitue un abus de langage lorsque la réaction correspondante fait intervenir soit l’électrolyte support soit l’électrode elle-même. C’est à partir des caractéristiques du solvant que l’on définit la notion de domaine d’électroactivité, qui est développée dans la section 2.3.6.

2.3.2.2 - POTENTIEL DE DEMI-VAGUE Même si l’objet de cette présentation n’est pas de donner des relations quantitatives, il est intéressant de connaître une caractéristique issue de la mise en équation complète de ces courbes [67]. On peut en effet montrer que, pour un système rédox simple et présentant des paramètres de transport de matière très proches (dans l’exemple cidessous, coefficients de diffusion quasiment identiques pour les deux éléments du couple Fe3+/Fe2+), on observe, à son potentiel standard [68], une valeur de courant égale à la demi-somme des courants limite (voir figure 4.26 dans la section 4.3.3.2). En d'autres termes, le potentiel de demi-vague, E½ et le potentiel standard sont alors confondus. Pour des systèmes comprenant les deux espèces du couple initialement en présence, cela n’est pas très important pour le tracé qualitatif des courbes intensité-potentiel dans la mesure où la loi de NERNST permet de placer le potentiel à l’abandon. En revanche, cette propriété devient importante pour la représentation correcte de l’allure des courbes intensité-potentiel lorsqu’une seule espèce du couple est présente. Prenons l’exemple de la courbe intensité-potentiel d’une électrode de platine au contact d’une solution aqueuse contenant des ions Fe2+ et pas d’ions Fe3+ (figure 2.21). I I lim Fe2+

Fe3+

I lim/2

E1/2 = E °Fe3+/Fe2+

E [ V/Réf ]

Figure 2.21 - Courbe intensité-potentiel d’une électrode de platine en présence d’une solution aqueuse contenant des ions Fe2++ [67] Des expressions analytiques quantitatives de ces courbes sont données pour les systèmes rédox simples dans la section 4.3.3. [68] Plus généralement, la valeur à considérer ici est le potentiel standard apparent quand il a un sens.

94

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Dans une zone limitée de potentiel, seule l’espèce Fe2+ étant électroactive, on n’observe que la branche anodique qui présente un courant limite proportionnel à la concentration en ions Fe2+ en solution. On ne peut pas placer, dans ce cas, de potentiel à l’équilibre pour ce couple rédox, mais pour situer correctement la zone de forte variation du courant il suffit de savoir que le potentiel de demi-vague est proche du potentiel standard du couple Fe3+/Fe2+. On admettra que, tant qu’on ne s’intéresse qu’à l’allure de ces courbes intensité-potentiel, la valeur du potentiel standard (éventuellement apparent) du couple permet toujours de situer la zone de potentiel où le courant varie fortement, à condition que la cinétique des réactions rédox elles-mêmes n’intervienne pas (voir section 2.3.3). Lorsque la notion de potentiel standard apparent est pertinente, sa prise en compte est donc particulièrement importante pour situer les portions de courbes intensité-potentiel les unes par rapport aux autres. Par exemple dans un milieu très basique, les caractéristiques des différents couples peuvent ou non dépendre du pH du système, et on peut donc observer des inversions de potentiels standard apparents par rapport à l’ordre en milieu très acide. Ce raisonnement à partir de la valeur de potentiel de demi-vague permet un tracé qualitatif mais rigoureux des courbes intensité-potentiel dans ce cas de figure. Il est à mettre en opposition avec des raisonnements courants dans la littérature, notamment dans le domaine de la corrosion : pour tracer la courbe intensité-potentiel dans le cas où une seule espèce rédox est présente, on a recours à une concentration arbitraire faible, le plus souvent 10−6 mol L−1 (mais pourquoi pas 10−7 mol L−1 ou 10−9 mol L−1 ?), de l’espèce absente afin de pouvoir évaluer un potentiel d’équilibre par la loi de NERNST, et considérer cette valeur comme potentiel à l’abandon, ce qui n’est pas justifié.

2.3.3 - RÔLE DE LA CINÉTIQUE DE LA RÉACTION RÉDOX La cinétique des réactions rédox intervient également dans l’allure des courbes intensité-potentiel. On admettra que cela se manifeste principalement par la modification des zones de potentiel où se situent les réponses du couple rédox considéré [69]. Ainsi pour les deux cas limite concernant la cinétique des réactions rédox, que l’on nomme le plus souvent couples rapides et couples lents [70], on constate que :  pour les couples rapides, la cinétique de la réaction rédox, c’est-à-dire l’étape de transfert d’électrons, n’intervient pas dans les caractéristiques de la courbe intensitépotentiel. Celle-ci présente des variations importantes de courant autour du potentiel de demi-vague, donc du potentiel standard. Ce cas correspond à tous les exemples vus jusqu’à présent.

z Considérons l’interface entre un électrolyte organique contenant des ions Li+ et le solide LixMnO2 (oxyde de

manganèse qui est un matériau d’insertion du lithium). Lorsque aucun courant ne passe, ce système est à l’équilibre thermodynamique. Le potentiel d’équilibre est en général assez proche du potentiel thermodynamique standard apparent (voir isotherme d’insertion dans la section 2.1.2.2) :

[69] Des expressions analytiques quantitatives de ces courbes en fonction des différents paramètres cinétiques et thermodynamiques sont données pour les systèmes rédox simples dans la section 4.3.3. [70] On trouve dans la section 4.3.2.6 une définition précise de ces termes lent et rapide lorsqu’ils sont utilisés pour caractériser la cinétique de transfert de charge de couples rédox simples.

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

95

E éq = E °appMnO / LiMnO + 0,06 log 2

2

1! y y

L’allure de la courbe intensité-potentiel est représentée sur la figure 2.22. I

LixMnO2 E (I = 0) = Eéq

MnO2 E °app MnO2/LiMnO2 E [ V/Réf ]

LixMnO2

MnO2

Figure 2.22 - Courbe intensité-potentiel d’une électrode d’oxyde de manganèse en présence d’une solution organique contenant des ions Li +

y

 pour les couples lents, la cinétique de la réaction rédox influence en revanche fortement les caractéristiques de la courbe intensité-potentiel. Celle-ci présente un écart de potentiel important entre les branches anodique et cathodique, lorsque les deux espèces du couple sont présentes au sein de l'électrolyte ou de l'électrode. En ce qui concerne la branche anodique, les variations importantes de courant se trouvent autour d’un potentiel appelé potentiel de demi-vague anodique, E½an , qui est supérieur au potentiel thermodynamique standard [71]. La différence entre le potentiel de demi-vague anodique et le potentiel standard du couple considéré est d’autant plus importante que la cinétique de la réaction rédox est lente. Le comportement est du même type pour la branche cathodique, avec un potentiel de demi-vague cathodique inférieur (algébriquement) au potentiel standard. Pour un couple rédox de mécanisme simple dont les deux espèces sont présentes au sein de la solution, l’évolution de l’allure de la courbe intensité-potentiel en fonction de la cinétique de la réaction rédox, toutes choses étant identiques par ailleurs, est représentée sur la figure 2.23. Les potentiels de demi-vague anodique et cathodique y sont repérés pour le système le plus lent (courbe d) [72]. [71] Plus généralement, la valeur à considérer ici est le potentiel standard apparent lorsque celui-ci est pertinent. La définition précise des potentiels de demi-vague anodique et cathodique dans le cas de systèmes rédox lents et la relation avec les paramètres cinétiques du système sont présentées dans la section 4.3.3.3. [72] On peut envisager d’utiliser la valeur de la pente de la courbe intensité-potentiel au niveau du potentiel à l’abandon comme critère de détermination de la cinétique de réaction rédox. Il est en revanche impossible de donner par exemple une valeur de pente correspondant à un couple

96

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS I I liman

a Red

I liman /2

b

c

d

Ox

E(I = 0) E ½ cat E°app I limcat /2

Red

E ½ an

E [V/Réf ]

Ox

I limcat Figure 2.23 - Courbe intensité-potentiel d’une électrode en présence des deux éléments d’un couple rédox pour des systèmes de cinétiques rédox différentes a - très rapide ; b - rapide ; c - lent ; d - très lent

Dans certains ouvrages, la différence entre le potentiel de demi-vague et le potentiel à l’équilibre est appelée surtension d’activation [73]. Cette terminologie n’est pas reprise ici car, dans un cas général, il n’est pas possible de séparer sans ambiguïté ou sans approximation les différentes contributions à la surtension d’un système [74]. La cinétique des réactions rédox dépend naturellement du couple considéré mais peut également dépendre de l’électrode sur laquelle se fait la réaction, même si celle-ci n’intervient pas explicitement dans le bilan rédox de la réaction (elle intervient alors dans le mécanisme). C’est par exemple le cas de la réduction des protons en milieu acide, dont les caractéristiques sont très différentes sur platine et sur mercure (voir figure 2.31 dans la section 2.3.6).

2.3.4 - ADDITIVITÉ DES COURANTS OU DENSITÉS DE COURANT FARADIQUES Rappelons que le courant faradique est additif : s’il y a plusieurs espèces électroactives réagissant à une même interface, les densités de courant faradique correspondantes s’ajoutent. Dans les cas simples, la courbe intensité-potentiel globale à une interface est donc construite par addition des courbes intensité-potentiel individuelles dues à chaque espèce électroactive. Il faut souligner qu’expérimentalement seule la courbe résultant de

rapide car cette pente est fortement dépendante des valeurs de courants limite anodique et cathodique. Pour mener cette discussion quantitativement, on peut partir de l’expression de la résistance de polarisation autour du potentiel d’équilibre (voir section 4.3.3.4). [73] Cette expression provient des notions d’énergie d’activation et de complexe activé (voir section 4.3.2.3). Elle fait ainsi référence à l’influence de la cinétique de la demi-réaction rédox. On trouve même parfois le terme polarisation d’activation, qui a encore moins de sens si l’abandon ne correspond pas à l’équilibre thermodynamique. [74] Une discussion précise et quantitative sur cette question est menée, pour des systèmes simples dans la section 4.3.3.4.

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

97

la somme est accessible. Lorsque l’interface n’est pas uniforme, comme c’est souvent le cas en corrosion [75], cela est plus compliqué. On se limitera ici à des cas simples. Pour un système donné, on peut ainsi prévoir l’allure de la courbe intensité-potentiel d'une interface, en effectuant les étapes suivantes :  faire la liste exhaustive des espèces électroactives effectivement en présence dans le système à l’interface considérée, sans oublier ni le solvant, ni l’électrode quand elle n’est pas inerte. Sauf cas particuliers, on ne considère pas, dans cette discussion qualitative, les espèces qui ne sont présentes qu’à l’état de traces dans le milieu. Par exemple l’allure de la courbe intensité-potentiel d’une électrode de cuivre (voir figure 2.18), même si le cuivre utilisé contient des traces d’un autre élément électroactif, est représentée en considérant le matériau pur ;  dresser la liste de tous les couples rédox possibles concernant chaque espèce recensée. En particulier, on n’oubliera pas pour les solutions aqueuses que l’eau intervient dans deux couples rédox [76] : O2/H2O,OH− et H+,H2O/H2 ;  positionner les potentiels standard (éventuellement apparents [77]) pour chacun de ces couples ;  représenter les courbes intensité-potentiel de chacun des systèmes électroactifs en les positionnant par rapport au potentiel standard (voir comment se fait ce positionnement dans les sections 2.3.2 et 2.3.3) ;  enfin, pour chaque valeur de potentiel, faire la somme des courants de toutes les courbes intensité-potentiel représentées précédemment. Seule cette courbe somme est accessible expérimentalement. Pour un potentiel donné, la construction de la courbe intensité-potentiel globale, à partir des différentes contributions de chaque espèce électroactive, permet de visualiser la notion de rendement faradique, comme illustré ci-dessous.

z On considère l’interface entre une électrode de platine inattaquable et un électrolyte aqueux acide désaéré

(c’est-à-dire sans dioxygène dissous) contenant des ions H + (pH = 2) et Ni2+. Cet exemple reprend le système choisi précédemment pour illustrer la notion de rendement faradique (voir section 2.2.2.3). L’allure de la courbe intensité-potentiel globale est représentée sur la figure 2.24 en trait mixte [78]. Si on ne s’intéresse qu’à la branche cathodique de la courbe intensité-potentiel, les espèces électroactives sont les protons et les ions Ni2+. Les traits en gris représentent les courbes intensité-potentiel que l’on observerait si une seule des espèces réductibles était présente. Chaque branche est située dans la zone correspondant à son potentiel standard apparent :

[75] Il est très fréquent dans les phénomènes de corrosion qu’une même interface présente des zones anodiques et des zones cathodiques. [76] Les notations utilisées ici, pour les deux couples rédox de l’eau introduites dans la section 2.1.2.3, correspondent aux écritures de ces deux couples en milieu acide ou basique. [77] La notion de potentiel standard apparent, définie dans la section 2.1.2.2 (et 2.1.2.3 pour les couples de l’eau), est utile lorsqu’une ou plusieurs espèces chimiques intervenant dans l’écriture de la demiréaction rédox est en très grande quantité devant les autres. C’est par exemple le cas souvent pour des couples rédox en milieu très acide ou très basique. [78] Rappelons que la figure 2.24 ne représente pas des données expérimentales. Elle n’est qu’une allure simplifiée, illustrant les différents principes mis en jeu ici.

98

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

E°Ni2+/ Ni = ! 0,23 V/ESH

E°app +

et

H , H2O/H2

= ! 0,12 V/ESH

La courbe intensité-potentiel globale (en trait mixte) est la somme des deux courbes en gris. Pour le point de fonctionnement considéré sur la figure 2.24, le courant I1 de la réduction des ions Ni2+ correspond environ à 25% du courant total I = I1 + I2. Le rendement faradique de la formation de dihydrogène par réduction est donc environ égal à 75%. I − 0,23

− 0,12

E [V/ESH]

I1 I = I1 + I2

I2

2+

Ni

Ni

H2

H+,H2O

Figure 2.24 - Courbe intensité-potentiel d’une électrode de platine en présence d’une solution aqueuse acide contenant des ions Ni 2+

y

2.3.5 - LES COUPLES RÉDOX DE L’EAU Comme cela a déjà été souligné, les couples rédox de l’eau jouent un rôle particulièrement important dans tous les systèmes électrochimiques à électrolyte aqueux. Les caractéristiques des courbes intensité-potentiel associées sont relativement complexes, notamment du fait de l’existence de l’autoprotolyse de l’eau [79]. On peut cependant retenir quelques caractéristiques qualitatives, notamment pour les milieux très acides ou très basiques dans le cas de réactions rédox rapides [80]. En effet dans ces conditions, on peut retenir que ce sont les potentiels standard apparents qui définissent qualitativement la position des courbes intensité-potentiel. Considérons par exemple l’interface entre un électrolyte aqueux très acide (pH = 1), ne contenant ni dioxygène ni dihydrogène dissous, et une électrode de platine qui est inattaquable dans ce milieu. On suppose de plus que les seules espèces électroactives présentes initialement sont l’eau et les protons. Les couples rédox mis en jeu sont O2/H2O,OH− et H+,H2O/H2. [79] Un traitement détaillé de l’allure de la courbe intensité potentiel du couple H+,H2O/H2 dans l’hypothèse d’un couple rapide est traité dans l’annexe A.2.1 et justifie les résultats énoncés ici. [80] On peut se reporter à la figure 2.28 pour un exemple où la cinétique des réactions rédox est prise en compte. Rappelons ici que les courbes intensité-potentiel représentées sur les figures de ce document ne sont pas des données expérimentales mais des représentations simplifiées pour expliquer les différents phénomènes mis en jeu.

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

99

L’allure de la courbe intensité-potentiel de la figure 2.25 est la somme (courbe en trait mixte) des contributions de chaque couple supposé rapide (courbes en gris), avec les valeurs de potentiels standard apparents suivantes :

E°app

H+, H2 O/H2

= ! 0,06 V/ESH

et

E°app

O2 /H2 O,OH!

= + 1,17 V/ESH

I



H2O,OH

− 0,06

H2

O2

+ 1,17

E [V/ESH ]

+

H ,H2O

Figure 2.25 - Courbe intensité-potentiel d’une électrode de platine en présence d’une solution aqueuse acide

Comme l’eau et les protons sont en grande quantité, on n’observe pas (dans les gammes usuelles de courant) de palier limite en courant qui correspondrait à une limitation de la vitesse d’apport de matière en eau ou en protons à l’interface. Cette courbe intensitépotentiel est l’illustration de la position des murs du solvant dans ce système (voir section 2.3.6). Pour un milieu très basique, on trouverait exactement le même type de courbe intensité-potentiel, seules les valeurs de potentiels standard apparents étant modifiées. On n’observerait pas non plus de courant limite. En revanche, dès que les valeurs de pH sont moins extrêmes, l’allure des courbes est modifiée et peut devenir relativement complexe (voir annexe A.2.1), comme cela est illustré par deux exemples ci-dessous (figures 2.26 et 2.27).

z Prenons l’exemple de l’interface entre une électrode de platine inattaquable et un électrolyte aqueux acide

désaéré (c’est-à-dire sans dioxygène dissous) contenant des ions H + (pH = 3), en considérant les couples rédox mis en jeu comme rapides. Dans ces conditions, la quantité de protons étant limitée, on voit apparaître dans le domaine cathodique un courant limite correspondant. Cependant, de par les caractéristiques particulières de ces couples rédox de l’eau, H2O peut également être réduite et l’on observe une deuxième zone de potentiel pour la formation du dihydrogène, correspondant à la réduction de l’eau et ne présentant donc pas de courant limite, comme cela est illustré sur la figure 2.26.

100

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS I −

H2O,OH E°app H+,H2O/H2

H2

E°app O2/H2O,OH− E [V/Réf ]

+

H2

O2

H

+

H ,H2O

Figure 2.26 - Courbe intensité-potentiel d’une électrode de platine dans une solution aqueuse désaérée de pH = 3

 Un comportement tout a fait symétrique est observé dans la partie anodique pour des solutions peu basiques (pH = 11 par exemple). La courbe intensité-potentiel correspondante fait apparaître deux zones anodiques correspondant au seul couple O2/H2O,OH−, comme cela est illustré sur la figure 2.27. I −

H2O, OH

OH− E °app H+,H2O/H2 H2

O2

O2

E °app O2/H2O,OH−

E [ V/Réf ]

+

H , H2O

Figure 2.27 - Courbe intensité-potentiel d’une électrode de platine dans une solution aqueuse désaérée de pH = 11

y

De plus, les réactions de dégagement de dihydrogène (ou dioxygène) par réduction (ou oxydation) d’une solution aqueuse donnée sont des exemples de réactions particulièrement complexes où les caractéristiques (et même les mécanismes mis en jeu) diffèrent grandement selon la nature de l’électrode. Ce sont des réactions qui sont abondamment étudiées, en particulier dans le contexte du développement des piles à combustible, puisque toute limitation cinétique de ces couples entraîne une baisse de performance de ces systèmes. Une des principales limitations des piles à combustible à température modérée, comme les PEMFC [81], est la cinétique de réduction du dioxygène. Si l’on en revient aux cas plus classiques des productions de dioxygène ou de dihydrogène, qui constituent la plupart du temps les murs du solvant pour des systèmes électrochimiques à électrolyte aqueux, ces couples peuvent donner lieu à des allures de courbes intensitépotentiel fort différentes suivant les mécanismes mis en jeu. Le cas de limitation cinétique le plus simple est celui où il y a globalement pour les deux réactifs une cinétique lente qui entraîne le décalage habituel de la courbe intensité-potentiel vers les potentiels plus cathodiques que le potentiel standard apparent pour le dégagement de [81] PEMFC : Proton Exchange Membrane Fuel Cell.

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

101

dihydrogène, et plus anodiques pour le dégagement de dioxygène. C’est typiquement ce que l’on observe pour la courbe intensité-potentiel d’une électrode de diamant dopé au bore au contact d’une solution acide, comme cela est représenté sur la figure 2.28. Pour ces réactions rédox particulières, les courants limites n’étant pas définis, on ne peut pas définir de manière rigoureuse des potentiels de demi-vague. On a alors recours à la notion, plus relative, de potentiel effectif de réaction [82]. I

H2O,OH− E effectif H+,H2O/H2

E°app H+,H2O/H2

E°app O2/H2O,OH−

O2 E effectif O2/H2O,OH− E [V/Réf ]

1,23 V H2

H+,H2O

4,0 V

Figure 2.28 - Courbe intensité-potentiel d’une électrode de diamant dopé au bore dans une solution aqueuse acide

On peut enfin souligner que, même dans le cas où on n’observe pas de courant limite lors de la production de dihydrogène ou dioxygène, on observe fréquemment un courant limite de diffusion en réduction (voir figure 2.29) : il correspond à la réduction du dioxygène dissous lorsque l’électrolyte n’est pas correctement désaéré. En effet, l’air est approximativement composé de 20% de dioxygène et 80% de diazote et pour obtenir une réelle desoxygénation du milieu par barbotage d’un gaz inerte (diazote ou argon le plus souvent) il faut effectuer cette opération pendant au moins une dizaine de minutes et maintenir ensuite une atmosphère gazeuse inerte au-dessus de la solution. La contribution du dioxygène à la courbe intensité-potentiel reste cependant souvent négligeable, dans la mesure où la concentration en dioxygène dissous est relativement faible, typiquement de l’ordre de 3 .10−4 mol L−1 à une pression usuelle d’air. La valeur du courant limite de diffusion de réduction du dioxygène dissous est ainsi de l’ordre de 1 mA cm−2 pour des systèmes à convection forcée usuelle [83].

[82] Cette valeur de potentiel effectif de réaction est alors définie pour une valeur de courant ou densité de courant de référence, typiquement 1 mA cm−2. [83] Cette valeur correspond par exemple à une expérience sur EDT à une vitesse de rotation de l’ordre de 500 tr min−1 et donc une épaisseur de couche de diffusion de l’ordre de 30 µm.

102

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS I

H2O, OH− E °app H+,H2O/H2



H2

E °app O2/H2O,OH−

H2O, OH

E effectif H+,H2O/H2

O2

O2

E [ V/Réf ]

H+, H2O

Figure 2.29 - Courbe intensité-potentiel d’une électrode de platine dans une solution acide non-désaérée

2.3.6 - DOMAINE D’ÉLECTROACTIVITÉ Dans tout système électrochimique, les courants dus aux contributions des murs du solvant viennent toujours s’ajouter aux autres phénomènes, comme cela est illustré dans l’exemple suivant. La figure 2.30 représente la construction de l’allure de la courbe intensité-potentiel d’une électrode platine en contact avec une solution acide de pH = 2 contenant des ions Fe2+ en concentration 10−3 mol L−1. La courbe intensité-potentiel (trait mixte noir) est la somme des courbes (en gris) correspondant aux ions Fe2+ (voir figure 2.21) et aux couples de l’eau (voir figure 2.25). I



H2O,OH 2+ Fe

Fe2+ − 0,12

H2

O2 3+ Fe

Fe3+ + 0,77

+ 1,11

+

H ,H2O

Figure 2.30 - Courbe intensité-potentiel d’une électrode de platine en présence d’une solution aqueuse acide contenant des ions Fe 2++

E[V/ESH ]

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

103

Concrètement, lorsqu’on étudie un système, il est donc recommandé d’examiner tout d’abord les caractéristiques en l’absence des composés électroactifs que l’on souhaite étudier. On trace ainsi par exemple la courbe intensité-potentiel du solvant, le cas échéant en présence d’électrolyte support. Cela revient à faire un blanc pour les mesures suivantes. Cette courbe intensité-potentiel fait apparaître en général les deux murs du solvant. La plage de potentiel comprise entre ces deux zones, où le courant augmente rapidement, est communément appelée domaine d’électroactivité (même s’il s’agit plutôt de la zone d’électroinactivité du solvant ou encore de la fenêtre de stabilité rédox de ce dernier). Elle correspond à la zone de stabilité cinétique du système et peut être plus large que la zone de stabilité thermodynamique si les réactions de décomposition du solvant (ou de l’électrolyte support le cas échéant) sont lentes. Expérimentalement, elle constitue l’intervalle de potentiel dans lequel on peut ensuite mener les diverses études. En effet, on ne peut pas, dans ce milieu, étudier une espèce électroactive dont la courbe intensité-potentiel se trouverait au-delà de cet intervalle : on ne mesurerait que le courant global, dont la plus grande partie serait alors due à la réaction du mur du solvant masquant complètement la part du composé ajouté. Les domaines d’électroactivité de quelques systèmes sont rassemblés dans la figure 2.31, qui donne des ordres de grandeur. Ces valeurs d’intervalle de potentiel dépendent bien sûr du choix des limites maximales en courant/densité de courant.

z Le domaine d’électroactivité est un intervalle de potentiel qui est fortement dépendant de la composition de

l’électrolyte et de la nature de l’électrode. Cela est illustré ci-dessous au travers de quatre exemples différents : électrolyte aqueux ou organique et électrode de platine ou mercure. Dans ce dernier cas, le mur en oxydation correspond à l’oxydation du mercure, et le terme mur du solvant est donc utilisé abusivement. Les limites des intervalles en potentiel reportées sur la figure 2.31 sont estimées expérimentalement pour des valeurs de densité de courant de l’ordre de 10 µA cm−2.  solution aqueuse d’acide sulfurique, de concentration 1 mol L−1 sur électrode de platine : −2

−1

0

1

2

E [ V/ECS ] −1

 solution aqueuse d’acide sulfurique, de concentration 1 mol L sur électrode de mercure : −2

−1

0

1

2

E [ V/ECS ] −1

 solution aqueuse d’hydroxyde de sodium, de concentration 1 mol L sur électrode de mercure : −2

−1

0

1

2

E [ V/ECS ] −1

 solution de TBAP (tétrabutylammonium phosphate), de concentration 1 mol L dans du dichlorométhane, CH2Cl2,sur électrode de platine : −2

−1

0

1

2

E [ V/ECS ]

Figure 2.31 - Domaine d’électroactivité de quatre systèmes différents

104

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

On constate en particulier sur cette figure, que :  les électrolytes organiques montrent une plage de stabilité rédox souvent plus importante que les électrolytes aqueux ;  le mercure présente la particularité de ralentir considérablement la réduction des protons en solution aqueuse. Cette dernière propriété est exploitée dans plusieurs techniques d’électrochimie analytique, qui, bien que de moins en moins utilisées à cause de la toxicité du mercure, sont particulièrement performantes pour l’analyse de traces d’ions métalliques. L’ensemble des techniques d’analyse utilisant le mercure comme électrode de travail est regroupé sous le terme de polarographie.

y

2.4 - PRÉVISION DES RÉACTIONS Le tracé des courbes intensité-potentiel, qualitatif ou quantitatif, est un outil particulièrement performant pour comprendre et/ou prévoir les réactions se produisant dans différentes situations de l’électrochimie, ainsi que pour rendre compte de leurs points de fonctionnement (U,I ).

2.4.1 - EVOLUTION SPONTANÉE D’UN SYSTÈME À L’ABANDON Le premier exemple traité ici concerne la prévision des phénomènes se produisant dans un système non-traversé par un courant. Rappelons qu’un tel système peut être ou non à l’équilibre. Quand on décrit l’abandon d’un système électrochimique global, on considère généralement de manière indépendante ce qui se passe sur chacune des deux interfaces. On ne s’intéresse donc, dans la description suivante, qu’à une seule courbe intensité-potentiel (une seule interface). La construction de la courbe intensité-potentiel permet de repérer les processus se produisant pour le système à l’abandon. En effet l’abandon, qui se trouve, par définition, au point d’intersection de la courbe intensité-potentiel avec l’axe des potentiels, correspond toujours à la somme d’un courant d’oxydation et d’un courant de réduction, de valeurs opposées. On peut distinguer essentiellement trois situations :  L’interface considérée est à l’équilibre thermodynamique. Pour être dans cette situation, il faut nécessairement que les deux espèces d’un couple rédox soient en présence. Le potentiel à l’abandon est alors égal au potentiel d’équilibre donné par la loi de NERNST pour ce couple rédox. Théoriquement, on peut décomposer la courbe intensité-potentiel globale en deux contributions, anodique et cathodique, comme l’illustre la figure 2.32 qui reprend l’exemple de l’interface entre un électrolyte organique contenant des ions Li+ et le solide LixMnO2 (voir figure 2.22). Au point de la courbe intensité-potentiel correspondant à l’abandon, le courant total nul est constitué de la somme de deux courants exactement opposés, comme cela est repéré sur la figure par le symbole //. La valeur absolue commune de ces deux courants constitue un indicateur de la vitesse de la cinétique rédox puisqu’elle caractérise le nombre d’événements par unité de temps qui se produisent à l’abandon dans des sens exactement opposés les uns aux autres et qui conduisent à l’état d’équilibre, sans transformation chimique globale. Lorsque le couple rédox considéré est très lent, la valeur théorique du potentiel à l’abandon reste définie par la loi de NERNST. Cependant la pente de la courbe intensité-potentiel étant alors très faible, ce potentiel est sensible à

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

105

de faibles perturbations et le retour à l’équilibre est lent. Par exemple, le passage d’un très faible courant ou la présence à l’état de traces d’une autre espèce peut faire évoluer significativement la valeur du potentiel à l’abandon d’un tel système. I LixMnO2

MnO2

//

E(I = 0) = Eéq

E [ V/Réf ]

//

LixMnO2

MnO2

Figure 2.32 - Courbe intensité-potentiel d’une électrode d’oxyde de manganèse en présence d’une solution organique contenant des ions Li +

 L’interface considérée n’est pas à l’équilibre thermodynamique. Pour être dans cette situation, il faut nécessairement qu’au moins deux couples rédox différents interviennent pour fixer le potentiel à l’abandon. Le courant global nul à l’abandon correspond alors à un bilan chimique qui n’est pas nul. C’est par exemple le cas des situations de corrosion. L’abandon ne correspond pas à l’équilibre thermodynamique et le système évolue dans le temps. Le potentiel à l’abandon n’est pas donné par la loi de NERNST mais dépend des propriétés de deux couples rédox au moins : on parle alors de potentiel mixte. Par exemple, dans le cas d’une lame de cuivre plongeant dans une solution acide (ne contenant initialement pas d’ions Cu2+) qui n’est pas désaérée, le dioxygène peut être réduit. On obtient alors une courbe intensité-potentiel, représentée sur la figure 2.33 en trait mixte, qui résulte de la somme de trois courbes en gris relatives aux trois couples rédox (supposés rapides) mis en jeu dans ce système : Cu2+/Cu, H+,H2O/H2 et O2/H2O,OH−. Soulignons ici de nouveau qu’expérimentalement seule la courbe résultante en trait mixte est accessible. Au niveau du potentiel à l’abandon, dans ce système simple, la courbe globale intensité-potentiel résulte de la somme du courant d’oxydation du cuivre et du courant de réduction du dioxygène, et rend compte du phénomène de corrosion de la lame de cuivre : 2 H 2O 4 H + + 4 e− + O2 Cu2+ + 2 e− Cu —————————————————— O2 + 4 H+ + 2 Cu 2 H2O + 2 Cu2+

106

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS I

Cu

Cu

2+

H2O, OH Icorr

H2

E °Cu2+/Cu

H+, H2O

// //



O2

E (I = 0) = E corr E °O2/H2O,OH−

H2O, OH−

O2

E [ V/Réf]

Figure 2.33 - Courbe intensité-potentiel d’une électrode de cuivre en présence d’une solution aqueuse acide contenant du dioxygène dissous

Le courant d’oxydation du cuivre au potentiel à l’abandon est appelé courant de corrosion et caractérise la vitesse de dégradation du métal par corrosion. Le potentiel à l’abandon, appelé aussi potentiel de corrosion, est compris entre les potentiels standard des deux couples rédox mis en jeu, sans avoir un lien simple avec ces deux valeurs : en particulier il n’y aucune raison pour le trouver au milieu, comme cela est illustré sur l’exemple de la figure 2.33.  L’interface n’est pas à l’équilibre thermodynamique mais les propriétés des couples rédox mis en jeu au potentiel à l’abandon font que la réaction-bilan chimique correspondant à cette situation avance extrêmement lentement. Si on reste à une échelle de temps pas trop grande, le système n’évolue quasiment pas. Cependant ce dernier n’est pas rigoureusement à l’équilibre thermodynamique. En particulier, le potentiel à l’abandon est un potentiel mixte qui n’est pas déterminé uniquement par des propriétés thermodynamiques et la présence à l’état de traces d’une autre espèce peut faire évoluer significativement sa valeur.

z Reprenons l’exemple de l’interface entre un électrolyte aqueux acide ne contenant ni dioxygène ni dihydro-

gène dissous et une électrode de platine qui est inattaquable dans ce milieu. Les seules espèces électroactives considérées sont l’eau et les protons. Les couples rédox mis en jeu sont donc O2/H2O,OH− et H+,H2O/H2. L’allure de la courbe intensité-potentiel est représentée sur la figure 2.34 (identique à la figure 2.25) : le trait mixte correspond à la courbe somme. Lorsque le courant ne passe pas, ce système n’est pas à l’équilibre thermodynamique. Mais la réaction qui se produit : 2 H2 + O2 2 H 2O s’effectue à une vitesse extrêmement lente. Le potentiel mesuré à l’abandon, potentiel mixte, dépend des caractéristiques (thermodynamiques et cinétiques) des couples O2/H2O,OH− et H+,H2O/H2 à l’interface considérée (ici, avec le platine) et est situé entre les deux potentiels standard apparents des deux couples rédox de l’eau.

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

107

I −

H2O,OH

O2

E°app H+,H2O/H2 E(I = 0)

H2

+

H ,H2O

I

E°app O2/H2O,OH−

E [V/Réf ]

Dilatation de l'échelle sur le courant (× 108 )

H2O,OH−

O2

E(I = 0) E [V/Réf ]

H2

H+, H2O

Figure 2.34 - Courbe intensité-potentiel d’une électrode de platine en présence d’une solution aqueuse acide désaérée

Dans ces conditions expérimentales, le potentiel à l’abandon n’est en général pas très stable. Cela peut s’expliquer par la pente de la courbe intensité-potentiel extrêmement faible dans cette zone. Une espèce électroactive dans cette zone de potentiel, et présente à l’état de traces, peut par exemple modifier significativement la valeur du potentiel à l’abandon.

y

2.4.2 - POINTS DE FONCTIONNEMENT D’UN SYSTÈME ÉLECTROCHIMIQUE COMPLET La description suivante est restreinte à des systèmes simples, pour lesquels les deux électrodes peuvent être considérées comme « chimiquement » indépendantes : les produits des réactions à une des électrodes n’interviennent pas à l’autre électrode. Expérimentalement, on se trouve fréquemment dans une telle situation, par exemple :  lors d’une microélectrolyse comme souvent en électrochimie analytique,  dans de nombreux types de batteries où les systèmes rédox font intervenir des espèces en phase solide,

108

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

 dans un électrolyseur où une membrane, placée entre les deux électrodes, sépare un compartiment anodique et un compartiment cathodique, de compositions a priori différentes. Des exemples plus complexes, pour lesquels on ne peut pas considérer les phénomènes aux deux électrodes comme indépendants, sont cependant fréquents [84]. Lorsque les produits issus de la réaction à une électrode interviennent à l’autre électrode, cela équivaut à un court-circuit ionique ; on parle aussi alors de phénomène de navette électrochimique. Le point de fonctionnement du système global, c’est-à-dire le couple (U,I ), correspond à deux points (un point sur la courbe intensité-potentiel (E,I ) de chaque électrode), tels que les valeurs de courant soient égales en valeur absolue (voir figure 2.35, traits verticaux en pointillés). Le fonctionnement d’un tel système électrochimique est caractérisé par un point en oxydation et un point en réduction, mais sur deux électrodes différentes. Attention, lorsque les surfaces des deux électrodes sont différentes, il faut prendre soin de considérer l’égalité des valeurs absolues des courants et non pas celle des densités de courant [85]. Il est important de bien distinguer les situations à la cathode et à l’anode, car il n’y pas nécessairement les mêmes espèces en présence. On pourrait par exemple représenter les courbes intensité-potentiel à la cathode et à l’anode par deux couleurs différentes. La construction de l’allure de chaque courbe intensité-potentiel ayant été détaillée dans le paragraphe précédent, on insiste ici uniquement sur leur utilisation pour un système complet. I U(I )

LixMnO2

MnO2

//

h+

h− E(I = 0) = Eéq−

E(I = 0) = Eéq+

E [V/Réf ]

//

Li

Li+ Figure 2.35 - Courbes intensité-potentiel des deux électrodes et représentation d’un point de fonctionnement en électrolyse (c’est-à-dire lors d’une recharge de la batterie)

[84] Quelques exemples de ce type sont exposés dans la section 4.4. [85] Des exemples de l’influence d’une différence entre les surfaces anodiques et cathodiques ont été donnés dans la section 1.4.1.3.

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

109

Par exemple, sur la figure 2.35 est représentée l’allure des courbes intensité-potentiel de chaque interface dans une batterie au lithium Li/LixMnO2. Les réactions rédox mises en jeu sont d’une part la réaction d’insertion du lithium dans MnO2 et d’autre part la demiréaction rédox du couple Li+/Li. On a représenté chacune des deux courbes dans leur totalité (branches anodique et cathodique), comme elles seraient obtenues indépendamment l’une de l’autre. En l'absence de courant, le système global est à l’équilibre thermodynamique. Le point de fonctionnement du système complet représenté sur la figure 2.35 correspond à une situation en recharge ou électrolyse (le système électrochimique est récepteur) [86]. Rappelons qu’en charge l’anode est l’électrode positive (LixMnO2) et la cathode l’électrode négative (le lithium métal). On retrouve, par cette construction graphique, les signes des polarisations introduits précédemment (voir section 2.3.1) : les couples de points de fonctionnement représentés correspondent ainsi à une surtension anodique positive et une surtension cathodique négative. Un cas particulier est rencontré dans des systèmes où deux électrodes identiques (même nature et même surface) sont placées dans le même électrolyte. Les deux courbes intensité-potentiel sont alors confondues et les deux électrodes jouent un rôle symétrique. Mais contrairement à l’étude des systèmes à l’abandon, il faut bien raisonner en considérant deux courbes et non pas une seule. En particulier pour ce type de système, la situation à l’abandon correspond toujours à une tension globale du système nulle, (U = 0 ou court-circuit).

z Par exemple un système avec deux électrodes de platine plongeant dans une solution acide aqueuse désaérée, présente les courbes intensité-potentiel représentées sur la figure 2.36. I

H2O, OH−

O2

pPt1 EPt2(I = 0) //

H2

pPt 2

EPt1(I = 0)

// E [ V/Réf ]

H+, H2O

Figure 2.36 - Point de fonctionnement en électrolyse pour un système avec deux électrodes de platine identiques plongeant dans une solution aqueuse acide désaérée

y

[86] Le cas d’un système électrochimique en décharge ou en fonctionnement générateur est illustré ensuite, par exemple sur la figure 2.38 de la section 2.4.4.

110

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

2.4.3 - PRÉVISION DES RÉACTIONS EN FONCTIONNEMENT RÉCEPTEUR Rappelons que pour toute cellule électrochimique parcourue par un courant [87] :

E+ ! E ! = E+ (I = 0) ! E ! (I = 0) + " + ! " ! + # U chute ohmique Ainsi, pour une cellule électrochimique en situation d’électrolyse (ou récepteur), compte tenu du signe des polarisations anodique et cathodique ainsi que celui, positif, des termes de chutes ohmiques :

# ANODE = électrode positive + % $ CATHODE = électrode négative ! % et " ! = " cat < 0 & " + = " an > 0 on obtient en choisissant l’électrode positive (c’est-à-dire l’anode) comme électrode de travail : U (I ! 0) " U (I = 0) + U chute ohmique " U (I = 0) Lorsque, à partir de la situation à l’abandon, on augmente progressivement le courant d’électrolyse, la tension imposée aux bornes du système augmente également et on peut éventuellement observer plusieurs demi-réactions simultanées à l’une des deux électrodes (ou aux deux électrodes). On rappelle qu’il y a alors addition des courants de chaque demi-réaction rédox à la même interface, conduisant à des rendements faradiques inférieurs à l’unité. Lorsqu’il y a plusieurs réactions possibles à une des deux électrodes, la demi-réaction principale est celle qui présenterait, pour le même courant individuel, la plus faible polarisation en valeur absolue. Dans le système complet, lorsqu’on peut envisager plusieurs réactions aux deux interfaces, la réaction globale principale, bilan des deux demi-réactions principales, est ainsi celle qui nécessite la plus faible tension imposée. Sauf cas particuliers, pour un point de fonctionnement quelconque sur une électrode, la demi-réaction principale présente le rendement faradique le plus important. Les courbes intensité-potentiel permettent ainsi par exemple de définir un intervalle de potentiel sur chaque électrode pour que le rendement faradique reste proche de 100% (figure 2.37). Il faut garder en mémoire le fait que, tout comme le tracé de ces courbes intensitépotentiel, les raisonnements suivis ici sont qualitatifs et il ne faut pas chercher une grande précision pour la définition de ces intervalles de potentiel.

z On considère une cellule d’électrolyse contenant une solution aqueuse acide désaérée contenant du sulfate de cuivre. Les deux électrodes sont respectivement en cuivre et en platine. La figure 2.37 représente l’allure de la branche anodique de la courbe intensité-potentiel de l’électrode positive en platine et celle de la branche cathodique pour l’électrode négative en cuivre. On a ajouté sur la figure les deux points des courbes (symboles ronds) permettant de définir un point de fonctionnement à faible courant d’électrolyse et deux autres points (symboles carrés) définissant un point de fonctionnement de l’électrolyse à plus fort courant.

[87] On pourra se reporter aux sections 1.5.2, 2.2.3, 2.2.4 et 2.3.1 pour l’introduction de ces notions et leur signe dans le cas d’une électrolyse.

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

111

I H2O, OH

U(I  )

− 0,4

Cu

Cu

2+

O2

//

U(I  )

− 0,04



+ 0,9

+ 1,4

E [ V/ECS ]

//

H2

+

H , H2O

Figure 2.37 - Courbes intensité-potentiel d’une électrode de cuivre (branche cathodique) et d’une électrode de platine (branche anodique) en présence d’une solution aqueuse acide désaérée contenant des ions Cu 2+

A l’abandon l’interface avec l’électrode de cuivre est à l’équilibre tandis que celle avec l’électrode de platine présente un potentiel mixte (potentiel défini par l’addition des courants d’oxydation de l’eau et de réduction des protons). Les tensions de chacune des deux électrodes par rapport à une électrode de référence au calomel saturée (grandeurs mesurables expérimentalement) permettent de définir les polarités des électrodes à l’abandon. Conformément à la figure : E Cu (I = 0) = − 0,04 V/ECS E Pt (I = 0) = + 0,9 V/ECS A l’abandon, l’électrode de cuivre constitue donc l'électrode négative du système alors que l’électrode de platine est l’électrode positive. La branche anodique du côté de l’électrode positive correspond à une seule réaction rédox, l’oxydation de l’eau : on a donc, quel que soit le point de fonctionnement, un rendement faradique anodique égal à 100%. Pour qu’il y ait passage d’un courant (et donc fonctionnement en électrolyse), il faut : E Pt (I ≠ 0) > +1,4 V/ECS (voir figure 2.37). Cette valeur est à prendre comme ordre de grandeur : entre 0,9 et 1,4 V/ECS, il y a aussi un fonctionnement de type électrolyse mais avec un très petit courant. La branche cathodique du côté de l’électrode négative correspond à une ou deux réactions rédox suivant la zone de potentiel : la réduction des ions Cu2+ et celle des protons (ou de l’eau). Pour qu’il y ait passage d’un courant (et donc fonctionnement en électrolyse), il faut : E Cu (I ≠ 0) < −0,04 V/ECS. Si l’on augmente (en valeur absolue) le courant d’électrolyse, le potentiel de l’électrode de cuivre diminue et lorsque ce potentiel est inférieur à − 0,4 V/ECS (point de fonctionnement représenté par des carrés sur la figure 2.37) il correspond à deux réactions simultanées et le rendement faradique de chacune de ces réactions devient inférieur à 100%. Ainsi en résumé, le bilan de la réaction principale, correspondant par exemple au point de fonctionnement représenté par des ronds, est : 4 H+ + 4 e− + O2 2 H 2O 2+ Cu Cu + 2 e− —————————————— + 2 H2O + 2 Cu2+ O2 + 4 H + 2 Cu

112

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Ecrire l’équation bilan n’a de sens que dans la zone de fonctionnement où les rendements faradiques anodique et cathodique sont identiques et égaux à 100%. Alors que la tension à l’abandon de cette cellule d’électrolyse est égale à +0,94 V (en choisissant l’électrode de platine comme électrode de travail : 0,9 − (−0,04) = 0,94), la tension minimale d’électrolyse est de l’ordre de 1,4 − (−0,04) = 1,44 V. Enfin, pour rester dans une zone de fonctionnement correspondant à des rendements faradiques de 100% et donc au bilan précédent, si on considère que la branche anodique est quasi-verticale (on néglige donc la polarisation à cette électrode lorsque le courant augmente), la tension d’électrolyse doit être comprise entre 1,4 V et 1,4 − (−0,4) = 1,8 V.

y

2.4.4 - PRÉVISION DES RÉACTIONS EN FONCTIONNEMENT GÉNÉRATEUR Pour une cellule électrochimique parcourue par un courant et en situation de pile (ou générateur), compte tenu du signe des polarisations anodique et cathodique ainsi que celui, négatif, des termes de chutes ohmiques [88] :

# ANODE = électrode négative ! % $ CATHODE = électrode positive + % et " ! = " an > 0 & " + = " cat < 0 on obtient, en choisissant l’électrode positive (c’est-à-dire la cathode) comme électrode de travail : U fournie ! U (I = 0) "#U chute ohmique#! U (I = 0) Lorsque l’on augmente progressivement le courant fourni par le générateur (tout en le maintenant inférieur au courant de court-circuit, voir section 2.4.5), on peut éventuellement observer plusieurs demi-réactions simultanées à l’une des deux électrodes (ou aux deux électrodes). Comme dans le cas précédent, lorsqu’il y a plusieurs réactions possibles à une interface, la réaction principale est celle qui présente, pour le même courant individuel, la plus faible polarisation en valeur absolue. Dans le cas d’un fonctionnement en générateur, lorsqu’on peut envisager plusieurs réactions aux interfaces, la réaction globale principale est donc celle qui fournit la plus forte tension au circuit extérieur. Comme dans le cas du fonctionnement en électrolyse, la demi-réaction principale présente en général le rendement faradique le plus important et les courbes intensitépotentiel permettent de définir un intervalle de potentiel sur chaque électrode pour que le rendement faradique reste proche de 100%, comme cela est illustré sur la figure 2.38.

z Considérons un système électrochimique avec deux compartiments séparés par une membrane ou un pont

salin, dont on négligera l’impact en termes de tension et de chute ohmique. Dans le premier compartiment, une électrode de zinc est en contact avec une solution aqueuse acide désaérée. Le deuxième compartiment contient une électrode d’argent dans une solution aqueuse acide désaérée contenant des ions Ag+ et Cu2+. La figure 2.38 représente l’allure de la branche cathodique de la courbe intensité-potentiel de l’électrode positive en argent et celle de la branche anodique pour l’électrode négative en zinc. On a ajouté sur la figure les deux points des courbes (symboles ronds) permettant de définir un point de fonctionnement à faible courant fourni et deux autres points (symboles carrés) définissant un point de fonctionnement pour un fonctionnement à fort courant fourni.

[88] On pourra se reporter aux sections 2.2.3, 2.2.4 et 2.3.1 pour l’introduction de ces notions et leur signe dans le cas d’un fonctionnement générateur.

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

113 I

Zn2+

Zn

U(I  ) U(I  ) // −1

− 0,6

+ 0,4 − 0,4

− 0,05

Ag

// Cu H2

Ag+ E [V/ECS]

2+

Cu

H+,H2O

Figure 2.38 - Courbes intensité-potentiel d’une électrode d’argent (branche cathodique) en présence d’une solution aqueuse acide désaérée contenant des ions Ag+ et Cu 2+ et d’une électrode de zinc (branche anodique) en présence d’une solution aqueuse acide désaérée

A l’abandon, l’interface avec l’électrode d’argent est à l’équilibre tandis que celle avec l’électrode de zinc présente un potentiel mixte (potentiel défini par l’addition des courants d’oxydation du zinc et de réduction des protons, cette dernière étant très lente sur électrode de zinc). Les tensions de chacune des deux électrodes par rapport à une électrode de référence au calomel saturée (grandeurs mesurables expérimentalement) permettent de définir les polarités des électrodes à l’abandon. Conformément à la figure : E Zn (I = 0) = − 1,0 V/ECS E Ag (I = 0) = + 0,4 V/ECS A l’abandon, l’électrode de zinc constitue donc l'électrode négative du système alors que l’électrode d’argent est l’électrode positive. La branche anodique du côté de l’électrode négative correspond, dans le domaine tracé, à une seule réaction rédox, l’oxydation du zinc : l’oxydation simultanée de l’eau correspondrait à un point de fonctionnement avec un courant extrêmement important et on peut donc considérer que, quel que soit le point de fonctionnement, le rendement faradique anodique est égal à 100 %. Pour qu’il y ait passage d’un courant anodique, il faut que E Zn (I ≠ 0) > −0,6 V/ECS (voir figure 2.38). Cette valeur est à prendre comme un ordre de grandeur : entre −1,0 et −0,6 V/ECS il y a aussi un fonctionnement de type générateur, mais avec un très faible courant. On considérera dans la suite que cette branche anodique est quasi-verticale. La branche cathodique du côté de l’électrode positive correspond à une, deux ou trois réactions rédox suivant la zone de potentiel : la réduction des ions Ag+, Cu2+ ou celle des protons (ou de l’eau). Pour qu’il y ait passage d’un courant cathodique, il faut que E Ag (I ≠ 0) < +0,4 V/ECS. Si le courant fourni par le système électrochimique augmente (en valeur absolue), le potentiel de l’électrode d’argent diminue et lorsque le potentiel est approximativement inférieur à −0,05 V/ECS il correspond à deux réactions simultanées (la réduction des ions Ag+ et des ions Cu2+, comme cela est représenté par des carrés sur la figure 2.38) et le rendement faradique de la réaction principale devient inférieur à 100%. Lorsque le potentiel est approximativement inférieur à −0,4 V/ECS il correspond à trois réactions simultanées. Le bilan de la réaction principale, correspondant par exemple au point de fonctionnement représenté par des ronds, est : Zn2+ + 2 e− Zn + − Ag + e Ag ——————————— 2+ Zn + 2 Ag+ 2 Ag + Zn

114

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Ecrire l’équation bilan n’a de sens que dans la zone de fonctionnement où les rendements faradiques anodique et cathodique sont identiques et égaux à 100%. Alors que la tension à l’abandon est égale à +1,4 V (en choisissant l’électrode d’argent comme électrode de travail : 0,4 − (−1,0) = 1,4 V), la tension maximale que peut fournir ce système lorsqu’il fonctionne en générateur est de l'ordre de 0,4 − (−0,6) = 1,0 V. Pour que la zone de fonctionnement corresponde à des rendements faradiques de 100%, et donc au bilan précédent, la tension fournie doit rester entre − 0,05 − (−0,6) = 0,55 V et 1,0 V.

y

2.4.5 - DIFFÉRENTS POINTS DE FONCTIONNEMENT D’UN SYSTÈME ÉLECTROCHIMIQUE Pour un système donné, on peut envisager de passer d’un type de fonctionnement à un autre. Lorsque les courbes intensité-potentiel des deux électrodes du système sont monotones (cas le plus fréquent), on peut distinguer, selon la valeur du courant ou de la tension aux bornes du système, trois zones de fonctionnement de celui-ci, qui sont schématisées sur la figure 2.39. I

a

I

b

p+ p−

// //

p+

//

E [V/Réf ]

E [V/Réf ]

//

p− U

U

I G É N É R A T E U R

R É C E P T E U R

R É C E P T E U R

0

U(I = 0)

−I cc

c

U I p+ //

E [V/Réf ] //

p− U

Figure 2.39 - Trois zones de points de fonctionnement (I,U) d’un système électrochimique

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

115

Sur cette figure la courbe principale représente les différents points de fonctionnement (U,I ) du système considéré. On prendra garde au fait que ce schéma n’est pas une courbe intensité-potentiel, comme celles tracées dans les sections précédentes : en abscisse on représente la tension U aux bornes du système, entre les deux électrodes, et non pas la tension E d’une des électrodes par rapport à une référence. On choisit ici comme électrode de travail l’électrode qui est positive à l’abandon : la tension à l’abandon du système est donc positive. Sur la courbe principale de la figure 2.39, le signe du courant est celui du courant traversant l’électrode de travail : positif (respectivement négatif) lorsque cette dernière présente un fonctionnement anodique (respectivement cathodique). Sur cette figure, trois médaillons représentent les courbes intensité-potentiel de chacune des deux électrodes avec un point de fonctionnement typique de chacune des trois zones. Ainsi par exemple le médaillon b s’inspire de la figure 2.35 en électrolyse. Les trois situations (U,I ) possibles sont délimitées par deux points particuliers correspondant respectivement à l’abandon (U(I = 0),I = 0) et à la situation de pile en court-circuit (U = 0,I = − |Icc |). Parmi ces trois zones, deux correspondent aux situations classiques de pile et électrolyse. D’une part, lorsque le système fonctionne en générateur, l’électrode positive est la cathode [cas a, − |Icc| < I < 0 et 0 < U < U(I = 0)]. D’autre part, lorsque le système fonctionne en récepteur (électrolyse) et l’électrode positive est l'anode [cas b, I > 0 et U > U(I = 0)]. La troisième zone [cas c, I < − |Icc| et U < 0] correspond à un cas plus rare, pour lequel il y a inversion des polarités des électrodes par rapport à l’abandon. Dans la mesure où l’électrode de travail, qui est devenue l’électrode négative en fonctionnement, est la cathode, ce type de point de fonctionnement n’est accessible qu’avec une source d’énergie extérieure suffisante : le système fonctionne en récepteur. On peut par exemple rencontrer ce cas de figure dans une batterie comportant plusieurs éléments en série : un élément défectueux peut présenter une inversion de polarité alors que l’ensemble de la batterie continue de fonctionner en générateur. La réaction se produisant dans l’élément défectueux est une réaction forcée rendue possible par celles spontanées se produisant dans les autres éléments. Les deux situations particulières, abandon et court-circuit, sont schématisées sur la figure 2.40. On peut souligner que le point U = 0 correspond à un court-circuit parfait et serait donc réalisé avec un conducteur tel qu’il soit le siège d’une chute ohmique négligeable dans cette situation (ce qui n’est pas toujours facile à réaliser expérimentalement). On rappelle que les courbes représentées correspondent à des systèmes où l’on peut négliger la chute ohmique dans l’électrolyte. Dans des systèmes où deux électrodes strictement identiques sont placées dans le même électrolyte, les points de fonctionnement à l’abandon ou en court-circuit sont confondus (autrement dit le courant de court-circuit est nul) et tous les points de fonctionnement correspondent à des situations d’électrolyse. Les deux électrodes jouent un rôle parfaitement symétrique. La courbe (U,I ) des points de fonctionnement du système global est symétrique : seul le rôle d’anode ou de cathode est inversé entre les deux électrodes, mais le système ne fonctionne jamais en générateur.

116

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS I U(I = 0) Icc

pan(Icc ) // E −(I = 0)

//

pcat(Icc )

E +(I = 0)

E(V/Réf)

Figure 2.40 - Points de fonctionnement (U,I ) particuliers d’un système électrochimique : abandon () et court-circuit ()

z On peut prendre l’exemple d’un électrolyte et de deux électrodes strictement identiques : la tension à

l’abandon est nulle et les points abandon et court-circuit sont donc confondus. Les deux électrodes ne sont pas discernables et la courbe des points de fonctionnement est symétrique, comme le représente la figure 2.41. I

Icc et U (I = 0) = 0 U

Figure 2.41 - Points de fonctionnement d’un système avec deux électrodes identiques de platine dans une solution aqueuse acide désaérée

y

Si les surfaces actives des deux interfaces ne sont pas identiques, les deux courbes intensité-potentiel tracées en courant (et non en densité de courant) sont de nouveau distinctes, mais là encore la tension à l’abandon étant nulle, le courant de court-circuit est nul et tous les points de fonctionnement sont des points de fonctionnement en récepteur (voir figure 2.41).

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

117

LES PREMIERS VÉHICULES ÉLECTRIQUES Au XIXe siècle, 3 moyens de propulsion se sont concurrencés pour remplacer les fiacres :  la vapeur après la découverte du chariot à vapeur (4,8 km/h) de CUGNOT en 1769, premier véhicule d'A. BOLLÉE, l'OBÉISSANTE, 12 passagers, en 1873 ;  l'électricité fournie par des batteries (modèle réduit de DAVENPORT en 1834, puis véhicule biplace de M. FARMER en 1847) ;  le moteur à explosion (à deux temps d'E. LENOIR, 1859, à quatre temps d'E. DELAMAREDEBOUTTEVILLE, 1883, et diesel de R. DIESEL, 1889). Par exemple à la fin du XIXe siècle, le parc des véhicules sans chevaux comportait 40% de véhicules à vapeur, 38% à traction électrique et seulement 22% à moteur à explosion.

La JAMAIS CONTENTE

(Automobile électrique. France 1899. Fabrication : Compagnie internationale des transports automobiles électriques JENATZY - 56, rue de la Victoire - Paris. Caisse en partinium, carrossée par RHEIMS et AUSCHER, accumulation FULMEN. Cliché de P. FABRY, avec l’aimable autorisation du Musée national de la voiture et du tourisme - château de Compiègne)

La lutte pour s'imposer sur le marché se manifestait par des compétitions. La plus légendaire escalade à la vitesse s'est déroulée entre Gaston DE CHASSELOUP et Camille JENATZY, pour atteindre en quelques mois (1898-1899) jusqu'à 105,9 km/h (sur 1 km). Fils d'un industriel belge du caoutchouc (dont les pneumatiques) C. JENATZY détiendra son record trois ans. La JAMAIS CONTENTE, profilée comme un obus, était équipée de deux moteurs arrière et de plus d'une demi-tonne d'accumulateurs au plomb. Compte tenu de l'état de la chaussée et de la rusticité de la mécanique (direction, amortisseurs), l'exploit mérite d'être salué. C. JENATZY, tout en dirigeant sa manufacture, resta un pilote chevronné (nouveau record de vitesse en 1909 de 200 km/h, mais sur un véhicule avec moteur à explosion). Le véhicule électrique présentait des avantages certains (silencieux, propre, entretien léger, simplicité de pilotage, durée de vie du moteur) par rapport au véhicule à essence (dangereux démarrage par manivelle, nécessité d'un embrayage, entretien fréquent, émanations malodorantes…). Si les premiers véhicules ont été peu performants en endurance, certains ont ensuite atteint une autonomie de 300 km. Des parcs importants se sont alors développés dans les grandes agglomérations (taxis, poste, laitiers, ramassage d'ordures…). Après avoir été supplantés par les véhicules à essence ou diesel (suite à la découverte du démarreur et la fabrication à la chaîne introduite par FORD), les véhicules électriques sont en train de retrouver une nouvelle vie grâce aux (ou à cause des) perspectives de pénurie du pétrole.

118

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Soulignons enfin la différence entre :  une réaction rédox spontanée, correspondant à deux demi-réactions se produisant sur une même interface : il n’y a pas globalement passage de courant. Cela revient à une situation où deux électrodes sont en court-circuit. Cette situation est en général évitée, mais elle est en revanche au cœur des phénomènes de corrosion où il y a toujours des zones anodiques et cathodiques en contact, même si elles ne sont pas toujours en strict court-circuit. Elle est aussi à l’origine des phénomènes d’autodécharge des générateurs électrochimiques ;  une réaction rédox spontanée dans une pile ou une batterie en décharge. Le bilan est effectivement une réaction spontanée, mais ce bilan est la somme de deux phénomènes (réactions rédox) se produisant au niveau de deux interfaces différentes (l’une fonctionnant en cathode et l’autre en anode) : pour que le bilan soit effectif, il est indispensable que les deux électrodes soient reliées par l’intermédiaire d’un circuit extérieur, qui peut ainsi récupérer de l’énergie électrique (ce qui est impossible dans le premier cas).

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

119

QUESTIONS SUR LE CHAPITRE 2 1 - Les trois processus de transport de la matière sont : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2 - On considère une interface entre du cobalt (métal) et une solution de Na+Cl− dans l’acétonitrile (un solvant organique) où se déroule la réaction : CoCl42− + 2 e− Co + 4 Cl−  Cette interface est réactive vrai  Par convention, le signe du courant est positif vrai

faux faux

3 - La loi de FARADAY exprime, pour une réaction rédox, la quantité de matière transformée en fonction de la quantité d'électricité qui traverse l’interface considérée. Le coefficient de proportionnalité fait intervenir au numérateur :  la température vrai faux  la constante de FARADAY vrai faux  le nombre d’électrons vrai faux  le nombre stœchiométrique de l’espèce considérée vrai faux 4 - Dans une installation industrielle de production d’aluminium, la réaction principale à la cathode fait intervenir le couple Al(III)/Al avec un rendement faradique de 90%. La quantité d’aluminium produite en une heure dans une cellule d'électrolyse fonctionnant avec un courant de 300 000 A est 103 mol 3,4 .103 mol 3,6 .103 mol 104 mol 3,4 .106 mol 5 - La polarisation globale d’une chaîne électrochimique peut être décomposée en différents termes. Dans un système sans jonction ionique, comment appelle-t-on le terme qui s’ajoute aux deux polarisations interfaciales pour constituer la valeur de la polarisation globale d’une chaîne électrochimique ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 - La concentration d’une solution contenant une espèce à 0,1 mol L −1 est aussi égale à 100 mol m−3

10−4 mol m−3

100 mol cm−3

10−4 mol cm−3

7 - En admettant que la conductivité molaire des ions Cu2+ en solution aqueuse est une constante égale à 10 mS m2 mol −1, la valeur de leur conductivité dans une solution où ils se trouvent à une concentration de 0,1 mol L−1 est 1 S cm−1

10−2 S cm−1

1 S m−1

10 S m−1

8 - Dans un système électrochimique, l’ajout d’un électrolyte support diminue, pour des ions électroactifs :  leur nombre de transport vrai faux  leur conductivité ionique vrai faux

120

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

9 - Sur le schéma suivant :  hachurer le demi-plan correspondant à un fonctionnement anodique  indiquer les demi-réactions dans chaque demi-plan, avec les conventions usuelles d’écriture, en prenant pour exemple le couple Fe3+/Fe2+ I

E [V/Réf] E (I = 0)

 que représente la flèche noire pour le point de fonctionnement représenté par un point noir ? ................................................................................. 10 - Sauf dans des cas très particuliers, on peut prévoir le signe de chacune des deux polarisations interfaciales en fonction du système étudié. Ainsi, dans la plupart des cas, on peut dire que :  la polarisation de l’électrode positive est positive vrai faux  la polarisation de l’anode est positive vrai faux 11 - Représenter sur le même schéma l’allure des courbes intensité-potentiel stationnaires de trois systèmes qui auraient le même potentiel à l’abandon et les mêmes courants limites de diffusion : un rapide (a), un lent (b) et un très lent (c). I

E(I = 0) E [V/Réf]

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

121

12 - Représenter sur le schéma suivant la courbe intensité-potentiel stationnaire d’un système comprenant une électrode de travail inattaquable plongée dans une solution aqueuse désaérée contenant des ions Fe2+ (et sans Fe3+) en quantité justifiant l’existence d’un courant limite. L’électrode de référence est une électrode au calomel saturée. On admettra que les « murs du solvant » sont déterminés par les demi-réactions rapides de l’eau (en supposant pH = 0). On indiquera sur le schéma les valeurs numériques pertinentes de potentiel, ainsi que les réactions mises en jeu. E (ECS) = + 0,24 V/ESH E °H+/H2 = 0 V/ESH (à pH = 0)

E °Fe3+/Fe2+ = + 0,77 V/ESH E °O2/H2O = + 1,23 V/ESH (à pH = 0)

I

E [V/ECS]

122

ÉLECTROCHIME - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

13 - Complétez le schéma suivant (qui représente sur le même diagramme les courbes intensité-potentiel stationnaires des deux électrodes d’une même cellule électrochimique) en y indiquant par des flèches :  la tension à l’abandon du système, U (I = 0)  la polarisation π− de l’électrode négative pour le point de fonctionnement repéré par un point noir  la polarisation π+ de l’électrode positive pour le point de fonctionnement correspondant pour cette électrode (que l’on repérera sur le schéma)  la tension de fonctionnement correspondante, U (I ≠ 0) I

E +(I = 0) E [V/Réf]

E −(I = 0)

 le fonctionnement représenté sur le schéma correspond à une électrolyse

vrai

faux

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE Pour tout système, on peut définir son état d’équilibre, pour lequel les variables intensives (pression, température, concentrations…) n’évoluent pas dans le temps. Dans ce chapitre, on se propose de décrire l’état d’équilibre d’un système électrochimique et de donner des exemples de conditions pour lesquelles celui-ci peut être observé [1]. En effet, l’état d’équilibre n’est pas nécessairement observable, c’est-à-dire qu’on ne peut pas toujours l’atteindre à l’échelle de temps de la mesure. Lorsqu’un système est à l’équilibre, on n’observe aucun mouvement d’espèces à l’échelle macroscopique. Cela entraîne que, dans un système à l’équilibre, le courant est nul. En revanche, lorsque le courant est nul, cela ne veut pas nécessairement dire que le système est à l’équilibre : il peut y avoir compensation des flux de charges de différents porteurs. C’est par exemple le cas dans une situation où le potentiel à l’abandon d’une interface est un potentiel mixte [2] ou encore celle d’une jonction liquide, d’un pont salin, dans un système électrochimique à l’abandon [3].

3.1 - NOTIONS DE POTENTIEL Le mot potentiel est fréquemment utilisé dans différents domaines de la physique et de la chimie. Il désigne toujours une énergie par unité de quantité reliée à la matière (nombre, masse, charge…). Ici nous nous intéressons particulièrement à l’énergie électrique et l’énergie chimique. On parlera donc d’une part de potentiel électrique : en prenant pour unité de quantité le coulomb (C, unité de charge), on obtient un potentiel électrique qui s’exprime en volts (V = J C−1). Nous définirons d’autre part le potentiel chimique : en prenant pour unité de quantité la mole (mol, unité de quantité de matière), on obtient un potentiel chimique qui s’exprime en J mol−1. [1] Comme cela a été présenté dans la section 2.1, un système électrochimique est ici défini comme isolé, sans échange possible d’énergie ni de matière avec l’extérieur. Pour prendre une autre comparaison que celle de la section 2.1, on peut considérer une pomme posée sur une table. On dira que cette dernière est en équilibre, pourtant si on retire la table, son état d’équilibre sera celui où elle est posée sur le sol. De la même façon tout système électrochimique isolé possède un état d’équilibre qui est le plus souvent différent de celui qui serait défini si on avait autorisé le passage spontané du courant à travers un circuit extérieur passif, c’est-à-dire après un fonctionnement en générateur. [2] Ce type de comportement d’une interface à l’abandon hors équilibre a été présenté dans la section 2.4.1. [3] Comme cela a été décrit qualitativement dans la section 2.1.1, en présence d’un pont salin ou d’une jonction liquide à travers une membrane poreuse, l’état d’équilibre, qui correspond au mélange parfait des solutions, est atteint extrêmement lentement. On observe donc en général un état quasi-stationnaire à l’abandon (donc à courant nul) dans lequel il existe des flux de matière qui sont faibles mais non nuls (voir annexe A.1.1).

124

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Dans un milieu matériel, cette notion de potentiel est une notion macroscopique : elle correspond à une moyenne sur un volume de taille grande devant les dimensions atomiques (supérieur à quelques dizaines de nm 3).

3.1.1 - POTENTIEL ÉLECTRIQUE A l’équilibre, l’existence de charges électriques, dans un milieu ou dans le vide, est associée à celle d’un champ électrique qui dérive d’un scalaire appelé potentiel électrique. D’un point de vue mathématique, celui-ci est défini à une constante près. En physique, on définit généralement cette constante en prenant le vide à l’infini pour référence des potentiels. On utilise alors le terme de potentiel pour toutes les valeurs utilisant cette référence et le terme de tension pour la différence entre deux potentiels (ddp). Une tension est donc indépendante de la référence utilisée (le vide, la terre ou toute autre). De manière plus générale, en dehors de l’équilibre (en physique c’est le passage de l’électrostatique à l’électrocinétique), il apparaît a priori, en plus du champ électrique, un champ magnétique. La description de ces deux grandeurs se fait par l’intermédiaire des équations de MAXWELL. En électrochimie, sauf cas particuliers [4], on peut négliger les effets des champs magnétiques, on est alors dans une situation où le champ électrique dérive d’un potentiel et les équations de MAXWELL se réduisent à la loi de POISSON :

# ch $ le potentiel électrique au sens général la densité volumique de charge la permittivité diélectrique du milieu !2V = "

avec : V ρch ε

3.1.1.1 - POTENTIEL ÉLECTRIQUE

[V] [ C m−3 ] [ A2 s4 kg−1 m−3 ]

ET ÉLECTRONEUTRALITÉ

A l’équilibre, tout conducteur est équipotentiel et non-chargé en volume. On dit aussi qu’il y a électroneutralité en tout point macroscopique du volume. Si l’on descend à l’échelle atomique, cette propriété n’est plus vérifiée : il y a des électrons chargés négativement et des noyaux chargés positivement. On peut montrer qu’en cas de perturbation macroscopique de la répartition des charges, l’électroneutralité, en dehors des zones interfaciales et après suppression de la source de cette perturbation, est rétablie après un régime transitoire extrêmement rapide (d’une durée de l’ordre de la femtoseconde [5] dans un métal, voir ci-dessous).

z Considérons un milieu conducteur électrique possèdant à l’instant initial une distribution volumique de charges électriques telle qu’il n’y ait pas électroneutralité (notée ρch = ρ0 ≠ 0). On suppose que l’on peut écrire localement la loi d’OHM avec une conductivité et une permittivité relative du milieu qui restent constantes. Un raisonnement

[4] Un exemple où l’existence de champs magnétiques dans un système électrochimique ne peut pas être négligée est celui de l’industrie de l’aluminium. Le passage de courants extrêmement importants lors de l’électrolyse permettant de fabriquer l’aluminium entraîne l’existence d’un champ magnétique intense. Une conséquence est par exemple la production de vagues à la surface du liquide qui, si elles deviennent trop importantes, peuvent créer des court-circuits entre anode et cathode. [5] C’est-à-dire 10−15 s.

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE

125

simple permet d’estimer la constante de temps caractérisant le processus spontané de retour à l’équilibre, où le volume conducteur est équipotentiel et l’électroneutralité vérifiée dans l’ensemble du volume. La charge est alors répartie à sa surface, c’est-à-dire à l’interface avec le milieu extérieur. !!" !!!" !" # En combinant la loi d’OHM (j = ! E = " ! gradV ) , la relation de POISSON ( ! 2V = " ch ) et la relation de

$ !" !" ch = # div j ), on obtient en effet l’équation différentielle suivante : conservation de la charge ( !t !!!" # !" ch = # div (gradV ) = $ " ch !t % La situation d’électroneutralité, ρch = 0, est donc atteinte via une loi exponentielle du type : [6]

!ch = !0 e

!

t "

" "0 " r . = # # Pour une solution électrolytique aqueuse, l’ordre de grandeur de σ est 1 S m−1 [7] et εr est de l’ordre de 80. On obtient donc [8] une constante de temps de l’ordre de 1 ns. Pour un métal comme le cuivre, l’ordre de grandeur de σ est 107 S m−1 et εr ≈ 1. On obtient donc une y constante de temps qui est de l’ordre de 10−18 s. avec une constante de temps τ ayant pour expression : ! =

Le passage du courant dans une cellule électrochimique peut entretenir un léger écart à l’électroneutralité. Il est cependant important de prendre garde au fait que, bien que très faible numériquement, il est susceptible de provoquer une modification significative du profil de potentiel en raison de la valeur très petite de ε [9]. Par conséquent dans un système électrochimique classique, on peut utiliser la relation d’électroneutralité pour décrire les profils de concentration au sein des milieux conducteurs à l'extérieur des zones interfaciales. En revanche, il ne faut pas en déduire qu’on peut l’utiliser pour définir le potentiel électrique par l’intermédiaire de la loi de LAPLACE (∇2V = 0), qui n’est applicable que lorsque l’électroneutralité est strictement respectée (voir annexe A.4.1).

3.1.1.2 - POTENTIELS VOLTA ET GALVANI Les lois de l’électrostatique montrent qu’un conducteur dans le vide est équipotentiel dans son volume : il ne peut donc être chargé qu’en surface. Le potentiel électrostatique est constant dans le volume du conducteur mais varie brutalement au franchissement [6] La conservation de la charge découle de la combinaison des différents bilans de matière volumiques des espèces chargées, comme cela est décrit dans la section 4.1.2. [7] Le tableau 4.1 de la section 4.2.2.3 donne des valeurs de conductivité pour divers porteurs de charge dans différents milieux conducteurs. 1 = 9.10 9 USI. [8] Avec 4! " 0 [9] Un exemple d’électrolyse avec un électrolyte dilué contenant uniquement les ions Ag+ et NO3− est décrit dans l’annexe A.4.1. On y trouve quelques ordres de grandeur au sujet de l’importance des écarts à l’électroneutralité vis-à-vis des profils de potentiel (voir figure A.17 de l’annexe A.4.1). En particulier, un écart à l’électroneutralité de l’ordre de 10−14 mol L−1 ne provoque pas, en solution aqueuse, d’écart à la loi de LAPLACE (profil linéaire de potentiel) alors qu’un écart de l’ordre de 10−11 mol L−1 ne peut plus être négligé pour la description du profil de potentiel.

126

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

de la surface de celui-ci, et évolue enfin plus lentement dans le vide lorsqu’on s’éloigne du conducteur. La tension entre le volume du conducteur et le vide à l’infini, ϕ, peut être décomposée en deux termes, comme cela est schématisé sur la figure 3.1 avec ϕ = ψ + χ. On appelle :  potentiel GALVANI ou potentiel interne, ϕ, la différence de potentiel électrique entre l’intérieur du conducteur et le vide à l’infini ;  potentiel VOLTA ou potentiel externe, ψ, la différence de potentiel électrique entre la sortie de la zone interfaciale et le vide à l’infini ;  tension électrique de surface, χ, la différence de potentiel aux bornes de la zone interfaciale [10]. La tension électrique de surface, χ, est notamment liée aux charges de surface [11]. Cependant, même en absence de charge de surface, l’existence de dipôles de surface peut entraîner une valeur importante de ce terme. Potentiel du vide à l’infini = 0

y j Potentiel de la surface du conducteur Potentiel du volume du conducteur

c

Figure 3.1 - Niveaux de potentiel d’un volume conducteur dans le vide

3.1.2 - POTENTIELS CHIMIQUE ET ÉLECTROCHIMIQUE 3.1.2.1 - POTENTIEL CHIMIQUE En thermochimie, on définit le potentiel chimique d’une espèce i , non-chargée, dans un système monophasique, par la relation : " !G % µi = $ ' # !ni &n j (i ,T ,P avec : G l’enthalpie libre du système monophasique ni la quantité de matière de l’espèce i nj la quantité de matière de chacune des autres espèces

[J] [ mol ] [ mol ]

[10] Le terme potentiel de surface est aussi parfois employé. On prendra soin de ne pas confondre la tension électrique de surface, χ , avec la tension de surface utilisée dans la description thermodynamique des énergies de surface, par exemple pour des bulles de savon (énergie par unité de surface exprimée en J m−2). [11] Les calculs du profil de potentiel électrostatique, et de la valeur des trois tensions décrites ici, pour une sphère conductrice chargée en surface et en équilibre dans le vide sont détaillés dans l’annexe A.3.1.

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE

127

µi est donc l’enthalpie libre molaire partielle et on peut montrer (identité d’EULER pour toute fonction homogène de degré 1) que l’enthalpie libre du système monophasique peut être exprimée sous la forme de la somme suivante : G = ! ni µi i

Ainsi µi est la contribution de l’espèce i (ramenée à une mole) à l’enthalpie libre du système, c’est-à-dire en interaction avec d’autres espèces dans le milieu considéré. C’est aussi le travail nécessaire au passage réversible, à T, P et composition constantes, d’une mole de l’espèce i de l’infini dans le vide jusqu’au sein du système. On définit l’activité de l’espèce i, ai (nombre sans dimension), à partir de son potentiel chimique par la relation : µi = µi° + RT ln ai où µi° est le potentiel chimique standard de l’espèce i à la température T. Il faut donc définir, pour chaque espèce i, un état standard, qui correspond par définition à ai = 1. La plupart du temps (exception pour les solutions, voir ci-dessous), l’état standard de l’espèce i à la température T correspond au corps pur dans son état physique considéré (gaz, solide, liquide) sous la pression standard P ° = 1 bar. On définit aussi pour chaque corps pur un état standard de référence qui correspond à l’état standard du corps pur dans son état physique le plus stable à la température considérée. D’autre part, on définit également des comportements idéaux et pour décrire un composé dans un système réel, l’écart à l’idéalité est alors caractérisé par le coefficient d’activité qui est, tout comme l’activité elle-même, un nombre sans dimension.

 Pour les gaz L’état standard est le gaz parfait correspondant à la pression standard P ° [12]. L’activité (encore appelée fugacité) d’un composé i dans un mélange de gaz sous la pression totale P est donc définie par : P P ai = !i xi = !i i P° P° avec : γi le coefficient d’activité, ou encore coefficient de fugacité du gaz i dans le mélange gazeux , qui prend en compte les interactions dans le gaz xi la fraction molaire du composé i dans le mélange gazeux Pi la pression partielle du gaz i dans le mélange gazeux

[ bar ]

 Pour les solutions On peut rencontrer des mélanges liquides avec des compositions assez équilibrées entre les différents composants. On garde alors comme état standard les corps purs en utilisant les fractions molaires comme activités idéales, les activités s'exprimant alors comme ai,x = γi,x xi . Mais le plus souvent dans les milieux mis en œuvre en électrochimie, l’un [12] Pour tous les gaz, le comportement à très faible pression est celui d’un gaz parfait. Sous 1 bar (= P°) ce comportement de gaz parfait reste vrai pour la plupart des gaz usuels. Mais il s’en écarte en revanche à des pressions élevées.

128

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

des composants, appelé le solvant, est en très grande quantité devant les autres composés, que l’on appelle solutés. Dans ce dernier cas, on choisit souvent de discriminer ces deux types de composants en choisissant un état standard différent pour le solvant et les solutés :  pour le solvant, l’état standard est le corps pur à la pression standard P °. Pour une solution pas trop concentrée, xsolvant ≈ 1, on a donc γsolvant ≈ 1 et on considère ainsi le plus souvent que asolvant = γsolvant xsolvant ≈ 1 ;  pour les solutés, l’état standard est une solution hypothétique sans interaction entre les ions ou molécules de solutés (solution dite « infiniment diluée »), sous P °, extrapolée à C ° = 1 mol L−1 (ou m ° = 1 mol kg−1) :

ai = !i

Ci C°

avec

!i $$$$$$" 1

# Ck " 0 k

(ou ai,m = !i,m

mi ) m°

 Pour les solides L’état standard correspond au solide seul dans sa phase à la pression standard P °. On rencontre fréquemment les solides dans leur état standard, cependant en électrochimie il existe des cas où la phase solide est composée d’un mélange : c'est le cas par exemple des alliages métalliques pour certaines compositions ou des matériaux d’insertion que l’on trouve dans de nombreux générateurs électrochimiques. On définit alors les activités à partir de paramètres de composition, par exemple la fraction atomique pour les alliages, la concentration dans les électrolytes solides…

3.1.2.2 - POTENTIEL ÉLECTROCHIMIQUE Pour les systèmes électrochimiques, dont l’état dépend d’un paramètre supplémentaire, le potentiel GALVANI, ϕ , on emploie très fréquemment le terme de potentiel électrochimique des différentes espèces au lieu du terme de potentiel chimique, bien qu’il s’agisse exactement de la même notion : contribution à l’enthalpie libre de l’espèce i, chargée ou non, dans le milieu considéré. On introduit également souvent une autre notation ( !! ) afin de rappeler la prise en compte du paramètre intensif supplémentaire ϕ :

! = G

! ni µ!i i

Pour un métal, le potentiel électrochimique des électrons correspond à une grandeur mesurable [13]. Pour un électrolyte en revanche, il est plus difficile d’envisager la détermination expérimentale du potentiel électrochimique d’un ion : en effet, du fait de l’électroneutralité des milieux considérés, l’apport d’un ion ne peut être réalisé expérimentalement qu’avec simultanément au minimum un contre-ion. On a donc uniquement accès au potentiel électrochimique d’un électrolyte, qui est confondu avec son potentiel chimique. Cela a différentes conséquences détaillées dans la suite : introduction de l’activité moyenne d’un électrolyte (section 3.2.1.1), convention des tables de données thermodynamiques des ions en solution (section 3.1.2.3). [13] C’est une grandeur qui est reliée au travail d’extraction des électrons, comme cela est décrit dans la section 3.2.2.3.

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE

129

Les interactions de l’espèce i avec les autres composés qui l’entourent font intervenir des forces de nature électrique, qui ne se résument pas à l’influence du potentiel électrique macroscopique local. On utilise cependant souvent pour les ions la décomposition du potentiel électrochimique en deux termes : un dit « purement électrique » et un autre, qui est usuellement appelé « potentiel chimique » car il a la même forme que l'expression vue précédemment : ! µ = µ + z � ! = µ ° + RT ln a + z � ! i

i

i

i

i

i

Il faut cependant prendre garde au fait que ce langage usuel peut être source de confusion. En particulier l’activité d’un ion peut a priori dépendre de la valeur du potentiel électrique. Néanmoins, on fait couramment l’hypothèse simplificatrice que le terme dit chimique ne dépend pas du potentiel électrique mais seulement de la composition chimique du milieu (comme par exemple dans la loi de D EBYE-HÜCKEL, voir la section 3.2.1.3). Pour un système où il y a électroneutralité, cette notion de potentiel électrochimique n’est pas nécessaire à la description et les seules grandeurs accessibles expérimentalement sont les grandeurs de potentiels chimiques des électrolytes. En revanche dès que l’on veut décrire des milieux s’écartant de l’électroneutralité, et c’est notamment le cas pour l’électrochimie lorsqu’elle cherche à décrire les zones interfaciales, la notion de potentiel électrochimique est un outil de représentation très utile [14].

3.1.2.3 - CONVENTION DES TABLES DE DONNÉES THERMODYNAMIQUES Dans les tables de données thermodynamiques (enthalpies et enthalpies libres standard de formation et entropies molaires standard) relatives aux composés autres que les ions en solution, la convention habituelle est de prendre des valeurs d’enthalpie standard et d’enthalpie libre de formation (ou potentiel chimique) standard égales à 0 J mol−1 pour tous les corps purs simples dans leur état physique stable à la température considérée. Les données sont donc relatives aux équilibres de formation des composés à partir des corps simples. Pour les ions en solution, dès lors que l’on ne peut pas, à cause de l’électroneutralité, mesurer séparément des grandeurs thermodynamiques relatives à l’anion et au cation (les données expérimentales thermodynamiques donnent seulement des valeurs pour des électrolytes), on introduit une convention supplémentaire, appelée convention de LATIMER, qui consiste à fixer le potentiel chimique standard d’un ion particulier, le proton, égal à zéro : !T µ°H+ = 0 J mol"1 où H+ représente le proton solvaté dans le solvant considéré (aqueux ou non) [15]. [14] C’est par exemple la cas pour la description des interfaces à l’équilibre (voir section 3.3) ou encore la décomposition du courant en terme de migration et diffusion (voir section 4.2.1). [15] Cette convention, que l’on peut rapprocher du choix du couple H+/H2 pour l’ESH, permet des définitions non ambiguës des données thermodynamiques, même si elles sont alors parfois virtuelles. Il faut cependant être conscient que de tels choix ne permettent pas les comparaisons aisées de données thermodynamiques d’un solvant à un autre. L’énergie du proton solvaté est en effet grandement variable selon le milieu considéré (le proton est un ion de petite taille donc très

130

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Toutes les valeurs de potentiel chimique des autres ions en solution s’en déduisent, à partir des mesures expérimentales d’enthalpie libre standard de réaction. Cette convention est étendue aux valeurs d’enthalpie, entropie et capacité calorifique du proton en solution qui sont prises par convention égales à 0. Le tableau 3.1 donne un extrait de tables de données thermodynamiques à 25 °C. Tableau 3.1 - Données thermodynamiques Composé F2

gaz

Δ fH ° [ kJ mol−1 ] 0

F−

gaz

− 270,7

F−

sol. aq.

− 332,6

H+

gaz

1536,2

H

+

Δ fG ° = µ ° [ kJ mol−1 ] 0

S° [ J K−1 mol−1 ]

C P° [ J K−1 mol−1 ]

202,7

31,3

− 278,8

− 13,8

− 106,7

1523

109

20,8

sol. aq.

0

0

0

0

H+

sol. non-aq.

0

0

0

0

H2

gaz

0

130,6

28,8

H 2O

liquide

69,9

75,3

0 − 285,2

− 237,2

Remarquons que, pour un même ion, on peut trouver des valeurs différentes suivant qu’il est pris en solution ou à l’état gazeux dans un plasma. Dans ce dernier cas, la production de données thermodynamiques nécessite une convention du même type que celle de LATIMER : les données de H+ gazeux reportées ci-dessus, sont ainsi obtenues en posant que le potentiel électrochimique des électrons dans le plasma est nul à toute température.

3.2 - EQUILIBRE THERMODYNAMIQUE D’UN SYSTÈME MONOPHASIQUE Comme précédemment énoncé, toute phase conductrice à l’équilibre est équipotentielle dans son volume et l’électroneutralité est vérifiée en chaque point [16]. Par analogie à la thermochimie, l’équilibre thermodynamique se traduit dans ces systèmes conducteurs par :  en absence de réaction chimique possible,

!i

! = Cte µ i

dans le volume

sensible aux effets électrostatiques de solvatation). Pour des comparaisons entre différents milieux (par exemple correspondance entre échelles de potentiel standard en ce qui concerne l’électrochimie), on utilise d’autres composés de référence. Ainsi il est fréquent de considérer que l’enthalpie libre standard de solvatation de BPh4− AsPh4+ (deux ions volumineux de charges opposées) est répartie en deux parts égales pour chaque ion, et ce quel que soit le solvant. Cette hypothèse extrathermodynamique permet alors d’établir des comparaisons entre données thermodynamiques dans différents solvants. [16] La description de l’équilibre thermodynamique des interfaces fait l’objet de la section 3.3.

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE

131

 en présence d’une ou plusieurs réactions chimiques possibles (indice r), l’équilibre thermodynamique se traduit de plus par les relations suivantes :

! = " rG

!r

# !i,r µ! i i

=0

dans le volume

avec νi,r le nombre stœchiométrique algébrique de l’espèce i dans la réaction r considérée [17]. Comme il y a conservation de la charge lors d’une réaction chimique (charge globale identique de part et d’autre de l’équation bilan), les enthalpies libres de réaction électro! , et chimique, ! G , sont confondues (voir l’exemple ci-dessous). L’égalité chimique, !rG r précédente s’exprime alors sous la forme suivante :

! = ! G = ! G° + RT ln # a i,r = 0 !r G r r i "

i

K éq (T ) =

ou encore :

" ai!i,r

loi d’action de masse

i

0 = !r G°(T ) + RT ln K éq (T )

avec

Les réactions chimiques peuvent être des réactions rédox, comme illustré ci-dessous.

z Par exemple, dans une solution aqueuse contenant de l’iodure de potassium, KI, entièrement dissocié, et du diiode dissous, I2, on observe rapidement en phase homogène l’équilibre rédox des couples I2/I3− et I3−/I− : I 3− I− + I2 A l’équilibre, on peut écrire : !=µ !" "µ !" "µ ! 0=!G r

I3

I

I2

! = µ " " �# " µ " + �# " µ = ! G 0 = !r G I2 r I3 I

y

3.2.1 - SOLUTION ÉLECTROLYTIQUE 3.2.1.1 - ACTIVITÉ ET COEFFICIENT D’ACTIVITÉ MOYENS Rappelons qu’il est expérimentalement impossible de mesurer le potentiel électrochimique d’un ion en solution électrolytique : on ne peut pas faire varier la quantité d’un ion sans faire varier simultanément la quantité d’au moins un autre ion. On définit alors des valeurs dites moyennes, accessibles expérimentalement [18].

[17] Certains auteurs préfèrent la notion d’affinité à la notion d’enthalpie libre de réaction. En effet, les notations permettent alors d’éviter une confusion possible entre variation d’enthalpie libre, ΔG (J) et enthalpie libre de réaction, ΔrG (J mol−1). [18] L’annexe A.3.2 montre sur quelques exemples comment des expressions écrites couramment à l’aide des activités individuelles des ions peuvent faire croire, à tort, que cette grandeur est mesurable. En réalité, les expressions rigoureuses contiennent toujours des grandeurs d’activité moyenne. Deux exemples classiques sont les mesures potentiométriques, soit à l’aide d’électrodes dites sélectives (réversibles à un ion donné), soit dans des piles avec jonction liquide ou pont salin.

132

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Par exemple, une mole d’un soluté, entièrement dissocié en solution, du type Ap+ B p! , avec z+ et z− les nombres algébriques de charge des ions, correspond à p+ mole(s) de Az+ et p− mole(s) de B z−. z+ p+ + z− p− = 0

On a :

La seule grandeur expérimentalement accessible est le potentiel électrochimique du soluté, qui se confond avec son potentiel chimique :

! µ Ap

! z+ + p µ ! = p+ µ ! Bz! A

+ Bp!

! µ Ap

+ Bp!

= p+ µAz + + p+ z + ! + p! µB z ! + p! z ! !

! µ Ap

+ Bp!

= µAp+ Bp!

On définit le potentiel électrochimique moyen du soluté par la relation suivante, où p = p+ + p− est le nombre total de moles d’ions par mole de composé Ap+ B p! :

! = µ = µ ± ± ainsi,

1 1 µ = µAp+ Bp! p+ + p! Ap+ Bp! p

p+ µ °Az + + p! µ °B z ! RT RT ! µ ± = µ± = + ln a +p+ + ln a !p! p p p RT ! µ ± = µ± = µ °± + ln a +p+a !p! p

La définition de l’activité moyenne de ce soluté découle de la relation précédente : ! µ = µ = µ ° + RT ln a ±

d’où :

a± =

p

a p! ! a p+ +

±

±

ou

±

aAp+ Bp! = a p± = a p+ + a p! !

Finalement, à partir des concentrations de chaque ion (qui sont accessibles expérimentalement), on définit par analogie les concentrations et coefficients d’activité moyens :

C ± = p C !p! C +p+

" ± = p " !p! " +p+

et

avec la relation usuelle entre activité, concentration et coefficient d’activité :

a ±= ! ± C ±

z Par exemple, pour un électrolyte 1−1 comme KCl, les grandeurs moyennes correspondent à des moyennes géométriques :

p+ = p! = 1

donc

# a ±= a + a ! %% $ "± = "+ " ! % %&C ± = C + C !

Ces relations sont valables également pour des mélanges d’électrolytes. On peut alors avoir des concentrations de cations et d’anions différentes, mais l’expression des valeurs moyennes est toujours du même type (voir KCl dans l’exemple suivant, section 3.2.1.2).

y

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE

133

3.2.1.2 - FORCE IONIQUE Pour des solutions diluées, LEWIS, RANDALL et BRÖNSTED ont montré expérimentalement que chaque coefficient d’activité moyen dépend de l’ensemble des ions de l’électrolyte par l’intermédiaire de la force ionique, Fionique [19] :

log ! ± = A z + z " Fionique

Fionique =

avec

1 C i zi 2 2! i

Pour des solutions aqueuses à 25 °C : A ≈ 0,5 L1/2 mol−1/2, si la force ionique Fionique et les concentrations Ci sont exprimées en mol L−1. Cette relation est expérimentalement vérifiée avec une bonne précision pour des milieux de force ionique telle que Fionique ≤ 10−3 mol L−1 (ou exceptionnellement jusqu’à 10−2 mol L−1). On rappelle que les nombres de charge sont des nombres algébriques : le produit z+ z− est ainsi toujours négatif. Par conséquent, dans le cadre de validité de cette relation, le coefficient d’activité moyen est un nombre inférieur à 1.

z Par exemple, estimons les activités et coefficients d’activité moyens pour une solution aqueuse contenant un mélange de chlorure de zinc, ZnCl2, en concentration 0,001 mol L−1 et de nitrate de potassium, KNO3, en concentration 0,003 mol L−1. La force ionique de la solution est égale à :

1 Fionique = "# 0,001 (1! 2 2 + 2 ! 12 ) + 0,003 (1! 12 + 1! 12 ) $% = 0,006 mol L&1 2 On peut calculer les activités et coefficients d’activité moyens pour les électrolytes ZnCl2 et KNO3, mais aussi KCl et Zn(NO3)2 [20]. Par exemple pour KCl,

a ± = !± C ± Par exemple pour ZnCl2,

a ± = !± C ±

log ! ± = "A 0,006 et C ± = 0,003 " 0,002 = 0,0024 mol L#1 log ! ± = " 2A 0, 006 et C ± = 3 0,001 (2 " 0,001)2 = 0,0016 mol L#1

d'où

! ± = 0,91

a ± = 0,0022 d'où

! ± = 0,84

a ± = 0,0013

y

[19] Attention, dans de nombreux documents la notation utilisée pour désigner la force ionique est I. Dans ce document, elle est notée Fionique afin d’éviter des confusions entre cette grandeur et le courant I. [20] Les notions d’activité (ou coefficient d’activité) moyenne d’un électrolyte donné au sein d’une solution contenant plus que deux types d’ions sont pertinentes et correspondent à des grandeurs accessibles expérimentalement. Par exemple dans une solution aqueuse réalisée par dissolution de nitrate d’argent, de chlorure de potassium et de perchlorate de sodium, la solubilité du chlorure d’argent est directement liée à l’activité moyenne de AgCl dans ce milieu. Un autre exemple, d’importance dans l’industrie de l’aluminium, est celui du sel fondu utilisé dans cette électrolyse industrielle. Il contient essentiellement, à environ 1000 °C, des ions Na+, F−, AlF52−, AlF63− et AlF4−. L’atmosphère gazeuse surmontant un tel électrolyte étant principalement constituée de NaAlF4, la mesure de la pression correspondante permet d’accéder à l’activité moyenne du tétrafluoroaluminate de sodium.

134

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

CORROSION DES BÉTONS ARMÉS Document élaboré avec l’aimable collaboration de E. C HAUVEAU, ingénieur R&D au sein de Ugitech, Ugine, France

La mosquée Hassan II de Casablanca fut édifiée dans les années 1990. L’architecte, s’inspirant d’un verset du Coran qui dit que "le trône de Dieu était sur l’eau", a conçu un bâtiment luxueux aux deux tiers sur l’eau de l’océan Atlantique. Les fondations, soumises à l’action de l’eau de mer et à la houle, nécessitèrent 26 000 m3 de béton et 59 000 m3 d’enrochement. Dès 1998, apparurent des signes de dégradation du bâtiment liés principalement à la corrosion des structures soumises aux mouvements des vagues et au contact avec l’eau de mer.

Dégradation sur un pilier due à l'environnement marin (© Christine RAYNAUD - BTPM n°13, juin 2008)

Les mécanismes conduisant à cette dégradation très accélérée sont rapidement décrits ci-dessous. Le béton est constitué d’un mélange de ciment, de sable et de granulats (pierres et graviers). La prise du béton résulte de l’hydratation de l’orthosilicate de calcium, selon le bilan suivant : Ca3Si2O7,3 H2O + Ca(OH)2 4 H2O + 2 Ca2SiO4 Cette réaction lui confère un caractère basique. Les propriétés mécaniques en traction du béton étant médiocres, on a, dès 1870, eu l’idée d’introduire un maillage de barres d’acier au carbone (dites fers à béton). L’interface entre chaque barre et le béton est constituée de ciment dont la porosité varie principalement en fonction de la constitution du béton et de la teneur en eau de la structure. On veille ainsi usuellement à ménager une épaisseur minimale de 30 mm de béton entre une armature en acier et l'extérieur de la structure. En effet, lorsque le béton est soumis à une atmosphère humide, l’eau pénètre par capillarité et la zone d’hydratation peut atteindre une armature. Lorsque ce phénomène se produit toutefois, un deuxième mécanisme permet usuellement une bonne durabilité des structures : du fait des propriétés chimiques du béton, le pH dans cette zone humide est voisin de 12, l'acier se recouvre alors d'une couche passivante de FeOOH protectrice. Les deux causes majeures de corrosion plus ou moins accélérée des armatures sont :  en présence d’une forte teneur en dioxyde de carbone dans l’atmosphère environnante, ce dernier diffuse à travers la zone poreuse hydratée entraînant un abaissement du

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE

135

pH local. A partir d’une valeur de pH voisine de 9, le métal n’est plus protégé car FeOOH s’hydrate en Fe(OH)3 et forme une couche poreuse, non protectrice ;  si le milieu environnant est chargé en ions chlorure (eau salée), ces derniers peuvent également diffuser jusqu'à l’interface métal-béton et dépassiver le métal par formation de complexes chlorés. Ces deux phénomènes peuvent coexister, mais pour un béton immergé le risque de carbonatation est faible. Lorsque les armatures sont dépassivées, la corrosion par le dioxygène se développe, fournissant des produits dont le volume finit par créer des fissures ouvertes, ou par faire éclater le béton. La corrosion des armatures peut alors progresser le long de l’interface entre armature et béton, dégradant ainsi l'ouvrage. La prévention de la corrosion se fait généralement par une optimisation de la formulation de bétons compacts, peu poreux, la protection des armatures par galvanisation, ou ajout d'anodes solubles (zinc, magnésium…, à potentiel rédox plus bas et qui subissent l'oxydation protégeant ainsi l'acier), métallisation de surface du béton, revêtements époxydiques des aciers, voire choix d'aciers inoxydables en armature. Dans certaines situations, les armatures peuvent aussi être traitées par protection cathodique, c’est-à-dire par application d'un potentiel à caractère réducteur. Dans le cas de la mosquée de Casablanca, la dégradation fut si rapide qu’il a fallu envisager rapidement des travaux de réfection pour maintenir le bâtiment. Ils ont consisté, depuis 2005, au montage d’une digue provisoire pour permettre les travaux au sec (200 000 m3 de matériaux divers, 2800 tétrapodes de béton de 6,3 m3), la démolition de 8000 m3 de béton, l’injection de 1200 m3 de coulis et mortiers, et surtout la mise en place de 10 000 m3 de béton haute performance armé par 1300 tonnes de ronds en acier inoxydable ferrito-austénitique Duplex (Ugitech). Le coût de ces travaux est estimé à 50 millions d’euros, soit environ 5% du coût initial des travaux de construction.

Reconstruction en béton de hautes performances armé en acier inox des 100 peignes extérieurs supportant les dalles périphériques. Les poteaux sont appelés « peignes » pour leur rôle de brise-houle. On distingue à l’arrière plan la mer et la digue provisoire d’assèchement pour travaux, ainsi que les tétrapodes de maintien de la digue (© Christine RAYNAUD - BTPM n°13, juin 2008).

136

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Les charges des ions mis en jeu jouent un rôle très important dans les interactions électriques et donc dans les valeurs des coefficients d’activité. Cette propriété est illustrée dans le tableau 3.2 qui rassemble les valeurs de force ionique et de coefficient d’activité moyen (calculées d’après les relations précédentes) pour différents types d’électrolytes, en concentration égale à 10−3 mol L−1. Tableau 3.2 - Exemples de valeurs de force ionique et de coefficient moyen d’activité Fionique (10− 3 mol L− 1)

γ±

NaCl

1

0,96

1−2 ou 2−1

Na2SO4 ou ZnCl2

3

0,88

1−3 ou 3−1

Na3PO4 ou CeCl3

6

0,76

2−2

CuSO4

4

0,74

2−3 ou 3−2

Ca3(PO4)2 ou Ce2(SO4)3

15

0,42

Type d’électrolyte : z+−z−

Exemples

1−1

La force ionique d’une solution donnée est unique. Ainsi, dans la limite de validité de la relation précédente, les électrolytes de même type (c’est-à-dire avec la même valeur du produit z+ z−), ont tous, pour une force ionique donnée, le même coefficient d’activité moyen, et ceci quelle que soit leur concentration. Lorsqu’un électrolyte support est utilisé dans des solutions électrolytiques, sa présence entraîne un autre avantage simplificateur au-delà des conséquences directes vis-à-vis des propriétés de transport de matière [21] : l’électrolyte support fixe la force ionique de la solution. On peut dire aussi qu’une solution comportant un électrolyte support est un cas de solution tampon de force ionique.

3.2.1.3 - MODÈLE DE DEBYE-HÜCKEL Le modèle théorique proposé par DEBYE et HÜCKEL permet de retrouver cette loi expérimentale. La démarche proposée pour déterminer l’écart à l’idéalité consiste d’abord à calculer les interactions que subit un ion central de la part de tous les autres ions [22]. Ces interactions apparaissent alors sous la forme d’un terme correctif dans le potentiel électrostatique autour de l’ion central et débouchent sur l’expression d’un coefficient d’activité pour cet ion. Il convient de préciser les différentes hypothèses du modèle de DEBYE-HÜCKEL permettant d’aboutir, grâce aux approximations qu’elles autorisent, à une expression du coefficient d’activité des différents ions dans un électrolyte. Les hypothèses, explicitées ci-dessous, découlent presque toutes du fait que cette théorie est développée pour des solutions diluées :  tous les solutés sont des électrolytes forts, donc entièrement dissociés. On admet notamment qu’il n’y a pas de molécules neutres, à l’exception du solvant, et qu’il n’y a pas de paires d’ions ; [21] voir section 2.2.4.4. [22] Les différentes étapes du raisonnement et des calculs menant à loi limite de DEBYE-HÜCKEL, à partir des hypothèses exposées ici, sont décrites dans l’annexe A.3.3.

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE

137

 la permittivité du milieu est supposée constante et égale à celle du solvant pur, quelle que soit la position par rapport à l’ion central ;  les interactions entre les différents ions en solution sont exclusivement de nature électrostatique (loi de COULOMB) ;  le système est à symétrie sphérique autour de chaque ion, supposé ponctuel par rapport aux distances considérées ;  l’énergie coulombienne est, en valeur absolue, très inférieure à l’énergie d’agitation thermique. La loi correspondant aux hypothèses précédentes est appelée loi limite de DEBYE-HÜCKEL :

log ! k = "A z k 2 Fionique Pour des solutions aqueuses à 25 °C, l'expression théorique de A donne la même valeur, A ≈ 0,5 L1/2 mol−1/2 (voir section 3.2.1.2), si la force ionique Fionique et les concentrations Ci sont exprimées en mol L−1. Elle est utilisée en général lorsque la force ionique est inférieure à 10−3 mol L−1. Lorsque la valeur de la force ionique est supérieure à 10−3 mol L−1, on peut utiliser la relation de DEBYE-HÜCKEL suivante [23] :

log ! k = "A z k2

Fionique 1 + Fionique

Cette relation est issue d’un calcul similaire au précédent, mais où les charges ne sont plus considérées comme ponctuelles. Le terme correctif par rapport à la loi limite est nécessaire, à température ordinaire, pour des valeurs de force ionique supérieures à 10−3 mol L−1 (de l’ordre de 10% de correction sur le logarithme pour une force ionique de 10−2 mol L−1). Cette loi est généralement utilisée pour des forces ioniques jusqu’à 10−2 mol L−1 (et exceptionnellement 10−1 mol L−1). On passe facilement de l’expression théorique du coefficient d’activité d’un ion à celle du coefficient d’activité moyen d’un électrolyte, qui est la seule expression qui peut être confrontée à des données expérimentales. Par exemple pour la loi limite :

log ! ± =

p z 2 + p+ z +2 1 (p" log ! " + p+ log ! + ) = "A Fionique " " p+ + p" p

et puisque p− z− + p+ z+ = 0, avec z+ et z− algébriques :

log ! ± = "A Fionique d’où :

"p+ z + z " " p" z " z + p+ + p"

log ! ± = A z " z + Fionique

Les courbes expérimentales de variation du coefficient d’activité moyen en fonction de la molalité (c’est-à-dire la quantité de matière, en mol, par kilogramme de solvant [24]) que l’on trouve dans la littérature, présentent souvent un minimum et, de plus, la valeur [23] La loi de DEBYE-HÜCKEL est décrite de manière plus complète dans l’ annexe A.3.3.

138

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

du coefficient d’activité moyen peut dépasser la valeur 1 (voir figure 3.2). Ainsi, pour des électrolytes concentrés, on semble s’éloigner assez rapidement des lois de variation présentées ci-dessus, qui montrent toutes une variation monotone du coefficient d’activité moyen en fonction de la molalité ou la concentration.

Coefficient d'activité moyen g±

3

2

LiCl NaCl KCl RbCl

1

0

0

1

2

3

−1

4

5

6

Molalité [mol kg ] Figure 3.2 - Evolution du coefficient d’activité moyen en fonction de la molalité de quelques solutés en solution aqueuse

En réalité ces résultats expérimentaux ne sont pas en totale contradiction avec un modèle de type DEBYE-HÜCKEL, dans le cadre duquel le coefficient d’activité moyen diminue lorsque la molalité augmente, si l’on tient compte du fait que, pour des électrolytes concentrés, une description classique de type soluté/solvant n’est plus satisfaisante. En effet, pour des électrolytes concentrés, le nombre de molécules de solvant qui sont dans la sphère de solvatation proche des ions ne peut plus être négligé devant le nombre total des molécules de solvant. La prise en compte de ce phénomène entraîne trois types de correction, détaillés ci-dessous.

z Dans le cas de solutions concentrées, il faut :  remplacer la molalité apparente (quantité d’ions divisée par la masse de solvant) par celle effective des ions solvatés (quantité d’ions solvatés divisée par la masse des molécules de solvant libres). Cette molalité effective n’est plus une donnée expérimentale directe puisqu’il faut faire l’hypothèse d’un nombre d’hydratation, qui est a priori différent pour chaque soluté. Elle est plus élevée que la molalité apparente : m apparente m effective = 18 1! n m 1000 hydratation apparente [24] Expérimentalement à cause des variations de volume liées au mélange, il est beaucoup plus facile d’avoir une mesure précise de la molalité d’une solution concentrée (quantité de soluté introduit dans 1 kg de solvant par exemple), que de connaître sa concentration. Les données thermodynamiques expérimentales sur les solutions concentrées sont donc très fréquemment explicitées en terme de molalités. Afin de revenir à une échelle en concentration, il est alors nécessaire de connaître les données de l’évolution de la densité des solutions en fonction de leur composition.

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE

139

 recalculer le coefficient d’activité effectif correspondant à la molalité effective en écrivant que les énergies (potentiel chimique) du système réél et du système apparent non-hydraté sont identiques : ! A +hydraté + Cl hydraté " A+ + Cl! + n hydratation H2 O

2 RT lna ±effective = 2 RT lna ±apparente + n hydratationRT lna eau

d’où

)

(

soit

(a ±

ou encore

! ±effectif = ! ±apparent

effective

2

= a ±apparente

2 ) ( a eau )n

hydratation

m ±apparente (a )n hydratation /2 m ±effective eau

 et finalement tenir compte du fait que l’on ne peut plus considérer que l’activité de l’eau soit égale à 1 :

18 n m 1000 hydratation apparente 18 1" (n " 2)m apparente 1000 hydratation Ces deux dernières corrections donnent la relation suivante pour le coefficient d’activité moyen effectif de l’électrolyte : n eau libre a eau! x eau libre = = n eau libre + n + + n "

! ± effectif = ! ± apparent

1"

( 18 # & %$ 1 " 1000 n hydratation m apparente ('

1+n hydratation /2

( 18 # & %$ 1 " 1000 (n hydratation" 2)m apparente ('

)

n hydratation /2

)

y

La figure 3.3 montre le résultat de la prise en compte de ce phénomène d’hydratation des ions sur les données expérimentales des électrolytes aqueux contenant du chlorure de lithium en quantité variable en supposant un nombre d’hydratation égal à 7.

Coefficient d'activité moyen g±

3

2

LiCl apparent LiCl effectif DEBYE-HÜCKEL 1

0

0

1

2

3

4

Molalité [mol kg−1]

5

6

Figure 3.3 - Evolution des coefficients d’activité moyens apparent et effectif en fonction de la molalité apparente pour des solutions aqueuses de LiCl

140

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

La courbe calculée à partir de la loi de DEBYE-HÜCKEL étendue est également reportée, après avoir intégré les variations expérimentales de densité des solutions concentrées, c’est-à-dire la relation entre molalité et concentration. Cette figure montre que si l’on prend soin de définir correctement les termes de concentrations pour les milieux fortement concentrés, les coefficients d’activité moyens expérimentaux ne sont pas très éloignés de ceux prévus par la loi de DEBYE-HÜCKEL étendue : la courbe corrigée ne présente plus de minimum et le coefficient moyen d’activité ne devient pas supérieur à 1.

3.2.2 - ELECTRODE MÉTALLIQUE 3.2.2.1 - POTENTIEL ÉLECTROCHIMIQUE Dans le volume d’un métal, on considère que l’activité des électrons est constante. Cette hypothèse est réaliste car il y a une très grande quantité de porteurs de charge, c’est-àdire d’électrons mobiles. En posant alors l'activité des électrons égale à 1, on définit leur état standard comme leur état réel dans le métal : µ e = µ°e

! = µ° ! � " µ e e

ainsi :

3.2.2.2 - ENERGIE DE FERMI D’après la statistique de FERMI-DIRAC, le potentiel électrochimique des électrons correspond au niveau électronique ayant une probabilité d’occupation de 1/2. A température nulle (0 K), cela correspond exactement au niveau occupé le plus énergétique : c’est l’énergie de FERMI, ou encore l'énergie de la HOMO [25]. Ainsi, comme on peut en général négliger l’influence de la température :

! (T ) ! µ ! (0 K) = �E µ F e e ! s’exprime en J mol−1, 1 est la constante d’AVOGADRO, E F s’exprime en J, ou de µ e manière plus habituelle en eV [26]. Si l’on prend comme référence l’énergie des électrons dans le vide à l’infini, ces deux valeurs sont négatives [27].

3.2.2.3 - TRAVAIL D’EXTRACTION Le niveau de FERMI dépend très fortement de la charge portée en surface par le métal. Dans les tables de données, on trouve des valeurs se rapportant au métal non-chargé : le travail d’extraction d’un électron. Il s’agit du travail, accessible expérimentalement, qu’il faut fournir pour extraire un électron du métal non-chargé dans le vide et l'éloigner à l’infini. [25] HOMO : Highest Occupied Molecular Orbital. [26] 1 eV = 1,6 . 10−19 J. [27] Cependant la référence usuelle des physiciens du solide étant le niveau d’énergie dans l’état fondamental (état quantique de plus basse énergie), on trouve habituellement dans les tables de données des valeurs positives pour l’énergie de FERMI des différents métaux.

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE

141

! µ e = !Wextr ! | e | " � avec ψ le potentiel VOLTA ou potentiel externe, µ° ou encore : Wextr = ! e + | e | " � avec χ la tension électrique de surface, différence entre le potentiel GALVANI et le potentiel VOLTA (ϕ = ψ + χ). Wextr qui s’exprime en J ou, de manière plus habituelle, en eV, est une grandeur positive. On a donc

De plus, rappelons que : ! sont des grandeurs accessibles expérimentalement, E , W , ψ, µ F

extr

e

 ϕ , µ°e , χ ne sont pas des grandeurs accessibles expérimentalement. Les valeurs de travail d’extraction pour les métaux les plus utilisés en électrochimie (argent, cuivre, or, zinc) sont de 4 à 5 eV. Pour les monocristaux, le type de la face cristalline a un impact sur la valeur du potentiel d’extraction, ce qui n’est pas étonnant puisque les propriétés de surface du métal influent sur la tension électrique de surface χ. Les différences observées entre différents types de face cristalline sont de l’ordre de 0,1 eV.

3.3 - EQUILIBRE THERMODYNAMIQUE D’UNE INTERFACE A l’équilibre, une interface n’est pas le siège de déplacements macroscopiques de matière. En particulier elle n’est traversée par aucun courant [28]. Ces propriétés macroscopiques peuvent correspondre à des situations microscopiques assez différentes. Pour des interfaces réactives (une ou plusieurs réactions possibles), l’équilibre correspond à une situation dynamique avec, au niveau microscopique, plus ou moins d’espèces réagissant à la surface. A l’équilibre, il y a exactement, à tout instant, autant d’espèces réagissant dans un sens que dans l’autre. Par exemple, pour une réaction correspondant au passage d’une espèce d’une phase à une autre [29], l’équilibre correspond à une situation où, à tout instant, il y a exactement autant d’espèces qui traversent l’interface dans un sens que dans le sens opposé. En revanche, pour des interfaces non-réactives, il y a à tout moment, et en particulier à l’équilibre thermodynamique, absence totale de mouvement microscopique à travers l’interface. L’écriture de l’équilibre thermodynamique ne se fera pas de la même façon, comme nous allons le détailler dans cette section.

3.3.1 - EQUILIBRE THERMODYNAMIQUE D’UNE INTERFACE NON-RÉACTIVE L’équilibre thermodynamique d’une interface non-réactive ne peut pas être réalisé par échange de matière. L’accumulation de matière de part et d’autre de l’interface, [28] Rappelons que la réciproque n’est pas vraie : une interface qui n’est pas traversée par un courant n’est pas nécessairement à l’équilibre (voir introduction du chapitre 3). [29] Rappelons (voir la section 2.2.1.2) que nous avons fait le choix de considérer comme processus réactifs les phénomènes d’échanges interfaciaux. Ainsi, on n'utilise pas la classification entre interfaces perméables et imperméables : toutes les interfaces sont considérées ici comme imperméables avec ou sans processus réactifs.

142

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

conduisant à une composition de surface permettant de minimiser l’énergie, ne peut être que transitoire. Les raisonnements sont ceux de la thermodynamique des interfaces, utilisés par exemple dans la description des émulsions huile/eau, des bulles de savon… Ils font intervenir un terme énergétique de surface qui dépend de la tension de surface et des concentrations d’excès de surface. Lorsqu’une interface électrochimique est non-réactive, on parle d’interface idéalement polarisable ou d'électrode bloquante. En général cette situation ne peut être rencontrée que dans un intervalle limité de potentiel. Dans une telle situation, on observe transitoirement, lors de l’établissement de l’équilibre thermodynamique, une accumulation d’espèces chargées de part et d’autre de l’interface, qui reste globalement neutre. On a donc un courant transitoire correspondant à une variation des excès de charge superficielle de part et d’autre en fonction de la tension aux bornes de l’interface. La zone interfaciale a ainsi un comportement du type condensateur et est appelée double couche. Ce phénomène est du même type que celui rencontré pour les diodes n/p ou p/n ou SCHOTTKY où il est appelé phénomène de charge d’espace. Pour une interface idéalement polarisable simple, une description détaillée de la structure de la double couche est connue sous le nom du modèle de GOUY-CHAPMAN-STERN [30]. Cette théorie, qui ne sera pas détaillée ici, repose sur des principes assez proches du modèle de DEBYE-HÜCKEL. Elle revient aussi à écrire que le potentiel électrochimique de chaque espèce est une constante dans la phase où elle est présente, ce qui se traduit par un lien entre le profil de potentiel et les profils de concentration des espèces chargées dans la zone interfaciale. Elle permet de rendre compte de manière satisfaisante des valeurs expérimentales de capacité de double couche, dans une situation classique. Selon cette théorie, la double couche électrochimique est constituée de deux zones, ce qui justifie son appellation. Une première couche, proche de l'électrode, est appelée « couche compacte » ou « couche de HELMHOLTZ ». Son épaisseur LH est de l’ordre de quelques Å, ce qui correspond à la distance minimale d’approche des ions solvatés vis-à-vis de la surface. Dans cette couche, le profil de potentiel est linéaire. La seconde couche est applelée « couche diffuse » [31]. L’ordre de grandeur de son épaisseur est donné par la longueur de DEBYE LD [32]. Dans cette seconde couche, le potentiel varie plus lentement. Sans étudier l’équation mathématique complète du profil de potentiel dans la double couche, on peut retenir que, lorsque la différence de potentiel aux bornes de la couche diffuse est modérée, la variation est proche d’une exponentielle dans cette dernière [33] :

! " ! solution = Cte e

"

x "L H LD

[30] En présence de phénomènes d’adsorption spécifique, la description de la zone interfaciale est plus complexe. Elle est souvent modélisée avec plusieurs condensateurs en série ou parallèle. [31] Cette terminologie n’est pas très heureuse à cause des risques de confusion avec la couche de diffusion, mais c’est celle employée usuellement pour désigner cette zone de la double couche. [32] La définition mathématique de la longueur de DEBYE est donnée dans l’annexe A.3.3 décrivant la théorie de DEBYE-HÜCKEL. Des ordres de grandeur en sont indiqués dans la suite du texte. [33] Typiquement on rencontre des profils de potentiel de type exponentiel pour des valeurs de tension aux bornes de la couche diffuse de l’ordre de 50 mV pour un électrolyte 1−1, ce qui correspond à de nombreuses situations expérimentales.

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE

143

L’allure des évolutions de potentiel en fonction de la distance à l’interface, à l’échelle de l’épaisseur de la double couche, est représentée sur la figure 3.4. j j0

jsolution

LH

couche compacte MÉTAL

ÉLECTROLYTE

x couche diffuse double couche

Figure 3.4 - Profil de potentiel dans la double couche électrochimique

Pour des solutions concentrées (par exemple en présence d’un électrolyte support en concentration supérieure à 0,1 mol L−1), la longueur de DEBYE est inférieure au nanomètre et on peut considérer que la double couche se réduit à la couche compacte. Pour des solutions très diluées (par exemple avec une force ionique de l’ordre de 10−5 mol L−1) la longueur de DEBYE est de l’ordre de 0,1 µm et la couche diffuse représente la plus grande part du volume de la double couche. On retiendra que l’épaisseur usuelle de la double couche électrochimique est de l’ordre de quelques nanomètres. Les phénomènes liés à l’existence de cette double couche seront peu abordés dans la suite de cet ouvrage. Ils sont cependant à l’origine d’un certain nombre d’applications de l’électrochimie comme l’électrophorèse, l’électroosmose, les supercondensateurs… Dans la suite, on s’intéresse à des interfaces réactives. Là encore l’équilibre thermodynamique correspond à des profils de potentiel particuliers dans la zone interfaciale. Bien que, pour ces interfaces réactives, il y ait également des phénomènes de double couche, on s’intéresse dans la suite à une échelle très largement supérieure à celle de la double couche. Le profil de potentiel apparaît alors simplement comme plat dans les deux phases extrêmes et présentant une discontinuité au passage de l’interface. C’est cette discontinuité, cette différence de potentiel entre les deux phases, que la thermodynamique permet de relier à la composition du système comme cela est détaillé ci-dessous.

3.3.2 - EQUILIBRE THERMODYNAMIQUE D’UNE INTERFACE RÉACTIVE De manière générale, tout comme cela a été rappelé pour l’équilibre thermodynamique des volumes, lorsqu’une réaction est possible, cela se traduit par une enthalpie libre électrochimique de réaction nulle : ! = $# µ ! !r "rG i,r i = 0 i

144

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Dans le cas des phénomènes réactifs à une interface, la particularité est que les espèces considérées (réactifs ou produits) ne sont pas toutes dans la même phase. La conséquence est très importante pour l’électrochimie car les espèces mises en jeu dans la réaction ne sont pas alors soumises au même potentiel électrique. Donc, bien que le bilan de charge de la réaction chimique soit nul, l’enthalpie libre chimique de réaction est différente de zéro dès que des espèces chargées interviennent dans le bilan chimique :

! =0 !r G

mais

!rG " 0

En restant au niveau des potentiels électrochimiques, l’écriture de l’équilibre thermodynamique d’une interface réactive est immédiate. Elle permet alors d’exprimer la différence de potentiel GALVANI interfaciale à l’équilibre. Différents exemples sont envisagés ci-dessous.

z Prenons d’abord la réaction interfaciale la plus simple, c’est-à-dire l’échange d’une espèce entre deux

phases. Il faut distinguer ici si la particule échangée est chargée ou non. Dans un premier temps considérons l’échange d’une molécule, M, comme cela est représenté sur la figure 3.5. M

EAU

M

HUILE

α

β Figure 3.5 - Equilibre d’échange d’une molécule à une interface eau | huile

Cela correspond par exemple à l’équilibre entre deux solutions d'un alcool M dans l’eau et dans l’huile. M La réaction surfacique est la suivante : M α β L’équilibre thermodynamique se traduit par l’égalité suivante : ! = µ! # µ! = 0 !G r

M"

M$

ou encore :

µ! M! = µ! M"

et puisqu’il s’agit d’une molécule (espèce neutre) :

µ M! = µ M"

 Considérons dans un deuxième temps l’échange d’une espèce chargée, en supposant que c’est le seul phénomène réactif se produisant à l’interface. C’est par exemple le cas, représenté sur la figure 3.6, d’un solide AgCl en équilibre avec une solution aqueuse contenant des ions Ag+. SOLIDE AgCl

Ag

+

Ag

+

α

ÉLECTROLYTE

β

Figure 3.6 - Equilibre d’échange de l’ion Ag+ entre un cristal de AgCl et une solution aqueuse

Ag+ Ag+ α β L’équilibre thermodynamique se traduit par l’égalité suivante : ! = µ! + # µ! + = 0 !r G Ag " Ag $ La réaction surfacique est la suivante :

ou encore puisque Ag+ est un cation : µAg+! + � " ! = µAg+# + � " #

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE

145

La différence de potentiel GALVANI entre les deux phases est donc : 1 ! " # ! $ = (µAg+$ # µAg+" ) �  Prenons maintenant l’exemple de la réaction de transfert de phase entre une solution aqueuse de chlorure de potassium et une solution d’éther couronne L (complexant des ions K+) dans un solvant organique, représenté sur la figure 3.7 [34]. L

EAU

α

K

PHASE ORGANIQUE

β

+

KL

+

Figure 3.7 - Equilibre de complexation à une interface eau | phase organique

K+ + L KL+ α β β L’équilibre thermodynamique se traduit par l’égalité suivante : µ! + µ! + = µ! + La réaction surfacique est la suivante :

L!

ou encore :

K

"

KL !

µ L! + µ K+" + � # " = µ KL+! + � # !

On obtient ainsi l’expression de la différence entre les potentiels internes (ou GALVANI) des deux phases : 1 ! " # ! $ = (µ KL+$ # µ K+" # µ L$ ) �  Prenons enfin l’exemple d'un équilibre rédox entre une solution aqueuse contenant des ions ferreux et ferriques et une électrode de platine, représentée sur la figure 3.8. Fe3+

MÉTAL

α

ÉLECTROLYTE

β



e

Fe

2+

Figure 3.8 - Equilibre rédox à une interface métal | électrolyte

Fe2+ e− + Fe3+ β α β L’équilibre thermodynamique se traduit par l’égalité suivante : ! +µ ! 3+ = µ ! 2+ µ

La réaction surfacique est la suivante :

e!

ou encore :

Fe "

Fe "

µ e! " � # ! + µ Fe3+$ + 3� #$ = µ Fe2+$ + 2 � #$

On obtient ainsi l’expression de la différence entre les potentiels internes (ou GALVANI) des deux phases : 1 ! " # !$ = ( µ Fe3+$ + µe" # µ Fe2+$ ) �

y

[34] Ce type d’interface se rencontre dans certaines électrodes spécifiques à membrane liquide (ou polymère) contenant des complexants. La valinomycine, qui est un complexant sélectif de l’ion K+, est par exemple utilisée dans des membranes d’électrodes sélectives à base de PVC.

146

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Ces relations ne donnent que des liens entre grandeurs à l’équilibre. Pour des espèces chargées, elles donnent le lien entre la différence de potentiels GALVANI et les compositions chimiques des deux phases à l’équilibre. En général, il n’est pas suffisant d’en rester à ces écritures car il manque le lien entre les conditions initiales d’un système et l’état d’équilibre qu’il atteint. De ce point de vue, la distinction entre espèces chargées et espèces neutres est très importante, comme l’illustrent les paragraphes suivants.

3.3.3 - EQUILIBRE THERMODYNAMIQUE D’UNE INTERFACE RÉACTIVE METTANT EN JEU UNE SEULE RÉACTION ENTRE ESPÈCES NEUTRES Reprenons ici le cas le plus simple de l’échange d’une molécule entre deux phases nonmiscibles (voir figure 3.5). L’établissement de l’équilibre thermodynamique à partir d’un état initial quelconque est réalisé par échange de molécules à travers la jonction jusqu’à égalité des potentiels chimiques, c'est-à-dire avec un flux transitoire de matière. Par exemple, considérons une membrane permettant seulement l’échange de molécules M, et séparant deux solutions, α et β, avec comme condition initiale [35] :

µ0! > µ0" Suite à la mise en contact des deux phases, il se produit un déplacement des molécules M de la solution de plus haut potentiel chimique (α) vers la solution de plus bas potentiel chimique (β), comme cela est représenté sur la figure 3.9.

α

β

m0α méqα

méqβ

m 0β M Figure 3.9 - Jonction simple avec échange de molécules M de la phase α vers la phase β

L’équilibre thermodynamique, dans ce cas, est réalisé lorsque les molécules échangées ont le même potentiel chimique de part et d’autre de la membrane. Cela nécessite en général le déplacement d’un grand nombre de molécules et une variation des potentiels chimiques de l’espèce M dans les deux phases entre l’état initial et l’état d’équilibre. Cet état d’équilibre peut donc être long à atteindre. Le rapport des activités à l’équilibre de la molécule échangée entre les deux phases vérifie [35] : #a & µ° ) µ°" ln % éq! ( = ! RT $ a éq" ' [35] Attention aux notations employées ici : ne pas confondre µ 0! (valeur initiale) et µ °! (valeur standard).

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE

147

Dans le cas particulier où les deux solutions mises en contact sont dans le même solvant [36], les potentiels chimiques standard sont identiques dans les phases α et β. L’équilibre thermodynamique est alors réalisé lorsque les solutions de part et d’autre de la membrane sont identiques puisqu’il doit alors y avoir, à l’équilibre, égalité des activités de la molécule échangée dans les deux phases. Dans le cas général, le rapport des activités à l’équilibre dans les deux milieux est appelé coefficient de partage et peut prendre des valeurs très différentes, et en particulier très différentes de 1, suivant les solvants considérés, comme l’illustrent les exemples du tableau 3.3. Tableau 3.3 - Exemples de coefficients de partage Molécule diiode acide salicylique acide décanoïque oxine caféine

Solvant

a solvant /a eau

CCl4 CHCl3 CHCl3 CHCl3

102 2 2 .104 5 .102

CCl4

0,16

3.3.4 - EQUILIBRE THERMODYNAMIQUE D’UNE INTERFACE RÉACTIVE

METTANT EN JEU UNE SEULE RÉACTION ENTRE ESPÈCES CHARGÉES

On traitera d’abord le cas simple de l’échange d’une espèce chargée à l’interface entre deux phases. Puis on regardera le cas plus classique, en électrochimie, d’une réaction rédox à une interface métal | électrolyte.

3.3.4.1 - JONCTION SIMPLE AVEC ÉCHANGE D’UNE SEULE ESPÈCE

CHARGÉE

L’établissement de l’équilibre thermodynamique est réalisé par échange de charges à travers la jonction jusqu’à l'égalité des potentiels électrochimiques des ions échangés de part et d'autre de la membrane : l’établissement de l’équilibre entraîne donc l’existence d’un courant transitoire. Par exemple, comme cela est représenté sur la figure 3.10, considérons une membrane permettant uniquement l’échange du cation M+, séparant deux solutions, α et β, où M+ a deux potentiels électrochimiques initialement différents, avec : ! >µ ! µ 0! 0" Après la mise en contact des deux phases, on observe un déplacement des cations M+ de la solution de plus haut potentiel électrochimique (α) vers la solution de plus bas potentiel électrochimique (β). Les milieux conducteurs ne pouvant être chargés qu’en surface, le mouvement des charges à travers la jonction se traduit par une évolution des charges surfaciques respectives des deux phases, et donc par une variation significative des potentiels électriques (interne et externe). A l’équilibre thermodynamique, on [36] On peut imaginer par exemple un système avec une membrane d’épaisseur négligeable empêchant le mélange rapide des deux milieux par convection.

148

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

observe a priori une différence de potentiel GALVANI entre les deux phases, appelée tension de jonction. α β α β ∼ m 0α

m0α ≈ méqα ∼ méqα

j0α

jéqα ∼ méqβ ∼ m 0β

jéqβ j0β

m0β ≈ méqβ Figure 3.10 - Jonction simple avec échange de cations M+ de la phase α vers la phase β Evolution des potentiels chimiques et électrochimiques (schéma de gauche) et des potentiels GALVANI (schéma de droite) entre l’état initial et l’état d’équilibre

On peut raisonnablement admettre [37] que, lors de processus d’échange de matière entre deux milieux montrant, pour l’espèce échangée, une différence de potentiel électrochimique initiale, l’obtention de l’état d’équilibre correspond à :  une variation importante des concentrations entre l’état initial et l’état d’équilibre pour un échange de molécule (espèce neutre) ;  une variation de concentration négligeable pour un échange d'un seul type d’espèce chargée, mais avec une variation de la tension de jonction non-négligeable. On retiendra surtout la conséquence importante suivante pour les lois de la thermodynamique à ces interfaces : pour des échanges faisant intervenir un seul type d'espèce chargée notée i, on peut considérer que les concentrations, et donc les potentiels chimiques, demeurent inchangés entre l’état initial et l'équilibre du système. L’expression de la tension de jonction à l’équilibre en fonction des potentiels chimiques dans les deux phases est donc de la forme : µi # µi " ! " # !$ = $ zi � avec les potentiels chimiques correspondant aux compositions initiales des phases α et β. Cette tension de jonction est en général non-nulle. De plus, d’un point de vue pratique, comme l’établissement de l’équilibre thermodynamique correspond à un mouvement de très peu de charges, celui-ci est généralement rapidement atteint. Deux exemples particuliers de ce type de jonction simple sont les suivants :  la jonction métallique : entre deux métaux différents, il ne peut y avoir à température ambiante que des échanges d’électrons. Lorsqu’on met en contact deux métaux différents [38], il s’établit très rapidement (temps de l’ordre de 10−18 s) un état d’équilibre. De [37] Un exemple de calculs effectués sur des systèmes fictifs, mais permettant de mettre en évidence cette différence de comportement entre molécule et espèce chargée, est développé dans l’annexe A.3.4. [38] On observe le même phénomène pour deux métaux identiques, mais avec des structures différentes, comme, par exemple, deux faces monocristallines d’argent : Ag (100) et Ag (110).

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE

149

part et d'autre de l'interface électrochimique, les niveaux de FERMI et les potentiels électrochimiques des électrons sont égaux, ce qui correspond à une tension de jonction électrique non-nulle : 1 ! " # ! $ = (µe" # µe$ ) = Cte � Cette tension de jonction électrique n’est pas accessible expérimentalement. La mesure de tension à l’aide d’un voltmètre correspond toujours à une mesure entre deux métaux identiques (constituant les connexions internes du voltmètre). Ainsi, pour un système présentant une jonction métallique, la mesure de tension introduit toujours au minimum deux jonctions électroniques et seule la somme algébrique des deux tensions de jonction est mesurable. Sur une chaîne de conducteurs électroniques à la même température la tension mesurée est ainsi toujours nulle. En revanche si les jonctions intervenant dans la chaîne ne sont pas à la même température, on mesure alors une différence de potentiel non-nulle (en général de l’ordre de 10 µV pour une différence de température de 1 °C) : c’est, en particulier, le principe du thermocouple.  la jonction ionique simple : un exemple de ce type est le contact entre une solution électrolytique et un solide conducteur ionique peu soluble ayant un ion commun ou encore deux solutions électrolytiques de concentrations différentes séparées par une membrane ne laissant passer qu’un seul des ions. On constate l’établissement rapide d’un équilibre avec une tension de jonction ionique à l’équilibre du type :

! " # !$ =

ai 1 1 RT (µi $ # µi " ) = (µ°i $ # µ°i " ) + ln $ zi � zi � z i � ai " ! ###"### $ Cte

L’ordre de grandeur de ce type de tension de jonction peut être relativement élevé (mV à V). Mais il faut garder en tête que cette tension de jonction n’est pas directement mesurable, pas plus que dans le cas des jonctions électroniques. Lorsque la jonction est une membrane sélective séparant deux solutions dans un même solvant mais de concentrations différentes, les potentiels chimiques standard étant égaux, la constante dans l’expression de la tension de jonction est nulle et celle-ci est alors directement liée au rapport des activités de l’ion échangé de part et d’autre.

z Le contact entre un solide ionique de chlorure d’argent peu soluble dans l’eau (phase α, comprenant deux sous

réseaux d’ions Ag+ et Cl−) et une solution aqueuse de chlorure d’argent (phase β, comprenant des ions Ag+ et Cl− solvatés) constitue un exemple de jonction ionique simple. En effet, même si deux types d’ions sont communs aux deux phases, dans la phase solide, seuls les ions Ag+ sont mobiles. A l’équilibre thermodynamique, on peut écrire (réaction d’échange de Ag +) : 1 RT aAg+$ ! " # !$ = ( µ °Ag+$ # µ °Ag+" ) + ln � � aAg+" Par définition des états standard dans le solide AgCl, aAg+! = aCl"! = a AgCl! = 1 . On a donc :

! " # !$ =

1 RT ( µ °Ag+$ # µ °Ag+" ) + lnaAg+$ � �

150

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

On peut aussi obtenir une expression de cette tension de jonction ionique en fonction de l’activité des ions Cl− en solution. Pour cela on tient compte de l’équilibre de dissolution de AgCl : Ag+β + Cl−β AgClα

ln(aAg+!aCl"! ) = lnK éq =

µ °AgCl# " µ °Ag+! " µ °Cl"!

=

µ °Ag+# + µ °Cl"# " µ °Ag+! " µ °Cl"!

RT RT En combinant les deux dernières relations, on obtient : 1 RT RT ! " # !$ = ( µ °Cl#" # µ °Cl#$ ) # ln(aAg+$aCl#$ ) + lnaAg+$ � � � donc, à l’équilibre thermodynamique,

! " # !$ =

1 RT ( µ °Cl#" # µ °Cl#$ ) # lnaCl#$ � �

La dernière relation est identique à la relation que l’on obtiendrait si c’étaient les ions Cl− qui étaient échangés à l’interface au lieu des ions Ag+ [39]. Les mesures thermodynamiques ne peuvent pas distinguer ces différents mécanismes : elles ne permettent pas de déterminer quelles sont les espèces échangées. Une telle interface (jonction simple) présente donc à l’équilibre une tension de jonction non-nulle. Si l’on considère de plus que les coefficients d’activité des anions et des cations du même milieu sont égaux [40], on peut écrire, en tenant compte de l’électroneutralité du milieu β ([Ag+]β = [Cl−]β) :

ln(aAg+!aCl"! ) = 2 lnaCl"! RT 1 lnaCl!" = ( µ °Ag+# + µ °Cl!# ! µ °Ag+" ! µ °Cl!" ) � 2� Finalement, on obtient une expression simple de la tension de jonction : 1 ! " # !$ = ( µ °Ag+$ # µ °Cl#$ # µ °Ag+" + µ °Cl#" ) 2�

d'où

y

3.3.4.2 - INTERFACE ÉLECTROCHIMIQUE RÉACTIVE AVEC UNE SEULE RÉACTION On peut appliquer le même type de raisonnement dans le cas d’une interface électrochimique, c’est-à-dire pour une phase métallique au contact avec un électrolyte contenant des espèces électroactives susceptibles de réagir à l’interface par une réaction électrochimique. De la même façon que précédemment pour les jonctions simples, on admettra [41] qu’à une interface électrochimique réactive, l’obtention de l’état d’équilibre, à partir d’un état initial quelconque, entraîne une variation de concentration négligeable, c’est-à-dire une très petite quantité d’espèces transformées, mais une variation significative de la tension interfaciale. On retiendra surtout la conséquence importante suivante pour les lois de la thermodynamique à ces interfaces : on peut considérer que [39] D’autres exemples d’écriture de l’équilibre thermodynamique de ce système sont détaillés dans la section 3.4.2.2. De plus, rappelons encore une fois que cette tension GALVANI aux bornes d’une interface n’est pas une grandeur accessible expérimentalement. L’expression fait apparaître l’activité d’un seul ion, qui n’est pas non plus une grandeur mesurable (voir annexe A.3.2). [40] L’hypothèse d’égalité des coefficients d’activité, valable par exemple dans le cadre de la théorie de DEBYE-HÜCKEL, permet de simplifier les calculs sans affaiblir la généralité du raisonnement. [41] Un exemple de calculs effectués sur des systèmes fictifs, mais permettant de mettre en évidence cette propriété, est développé dans l’annexe A.3.4.

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE

151

les concentrations, et donc les potentiels chimiques, ne sont pas modifiés par l’établissement de l’équilibre. Ainsi par exemple, si l’on plonge une électrode inattaquable dans une solution aqueuse contenant des ions Fe2+ et Fe3+, la différence de potentiel entre le métal et la solution prend spontanément la valeur prévue par la thermodynamique. De plus, d’un point de vue pratique, comme l’établissement de l’équilibre thermodynamique correspond à un mouvement de très peu de charges, celui-ci est généralement rapidement atteint. La généralisation pour un couple rédox quelconque conduit à l'expression suivante de la tension interfaciale à l'équilibre, proche de l’expression habituelle de la loi de NERNST :

! métal " ! électrolyte =

1% 1 '' µ emétal + #e �&

(

RT

$ # i µi ** = Cte + # e � ln+ ai#i i

)

i

où νi est le nombre stœchiométrique algébrique de l’espèce i dans la demi-réaction rédox et les activités sont celles des composés à l’état initial. Le coefficient νe étant algébrique dans cette écriture, le signe de la tension interfaciale ne dépend pas du choix du sens d’écriture de la réaction. Le potentiel chimique des électrons, qui n’est pas nul, est inclus dans la constante. Comme pour les jonctions précédentes, cette tension n’est pas mesurable expérimentalement de manière directe [42] et il ne peut pas y avoir de tables donnant les valeurs de la constante pour les différents types d’interface. En ce sens, cette expression n’est pas la loi de NERNST (voir section 3.4.1.2), qui donne une expression de grandeur mesurable faisant référence à une chaîne électrochimique complète et pas seulement à une interface.

3.3.5 - JONCTION OU INTERFACE RÉACTIVE MULTIPLE Lorsqu’à la même interface coexistent plusieurs phénomènes réactifs, il faut traduire l'équilibre de l'interface par le fait que les enthalpies libres électrochimiques de réaction sont nulles pour chaque phénomène. En particulier il faut prendre garde au fait qu’écrire une combinaison des différents équilibres en un seul équilibre global ne donne pas l’ensemble des informations permettant de décrire correctement l’équilibre de l’interface, comme cela est illustré ci-dessous pour des jonctions multiples. Pour une jonction où plusieurs espèces peuvent être échangées, la tension de jonction ionique à l’équilibre est liée aux différences de potentiels chimiques de chacune des espèces échangées, selon les relations suivantes :

1 (µ $ µi # ) zi � i %

!i

" # $ "% =

!i

" # $ "% =

!i

" # $ " % = Ctei +

ai 1 RT (µ°i % $ µ°i # ) + ln % zi � z i � ai # ai RT ln % z i � ai #

[42] Rappelons par exemple que le potentiel électrochimique des électrons dans un métal est une grandeur mesurable mais que leur potentiel chimique ne l’est pas (voir section 3.2.2).

152

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

z On a ainsi des relations entre les potentiels chimiques de deux types, Xzi et Y j , d’espèces échangées, z i µ j ! " z j µi ! = z i µ j # " z j µi #

correspondant à l’équilibre chimique suivant :

z i Y z j ! + (" z j ) Xzi !

z i Y z j ! + (" z j ) Xzi !

Suivant la valeur de la constante d’équilibre, l’état d’équilibre est plus ou moins éloigné de l’état initial, et sera donc atteint à l’issue d’un transfert de plus ou moins d’espèces. On peut donner deux exemples extrêmes :  deux solutions électrolytiques de concentrations différentes dans le même solvant et séparées par une membrane non-sélective.

z Par exemple, considérons le contact entre deux solutions aqueuses de chlorure de sodium de concentrations

différentes (Cα et Cβ). On assimilera les coefficients d’activité des anions et des cations du même milieu (cette approximation, valable dans le cadre de la théorie de DEBYE-HÜCKEL, permet de simplifier les calculs sans diminuer la généralité du raisonnement). On notera alors a α et a β les activités des ions dans chacune des deux phases. A l’équilibre thermodynamique, RT a $ ! " # !$ = 0 + ln pour Na+ � a"

! " # !$ = 0 #

RT a $ ln � a"

pour Cl#

Cela conduit donc pour ce système aux relations suivantes à l’équilibre : ! " = ! # et a " = a #

y

L’état d’équilibre n’est atteint que lorsque le potentiel GALVANI et les potentiels chimiques de chaque type d’espèce sont identiques dans les deux phases. La tension de jonction est donc nulle à l’équilibre (qui peut être long à atteindre).  deux solutions contenant le même électrolyte dans deux milieux différents.

z Par exemple, considérons l’interface entre deux électrolytes polymères de natures différentes mais contenant

tous les deux les mêmes types d’ions, par exemple le cation Li+ et l’anion bis-(trifluorométhanesulfonyl)imidure noté TFSI−. Comme précédemment, on assimilera les coefficients d’activité des anions et des cations du même milieu et on notera alors a α et a β les activités des ions dans chacune des deux phases. A l’équilibre thermodynamique, 1 RT a $ 1 RT a $ ! " # !$ = ( µ °Li+$ # µ °Li+" ) + ln = ( µ °TFSI#" # µ °TFSI#$ ) # ln � � a" � � a" Ainsi,

2RT ln

a! = µ °Li+! + µ °TFSI#! # µ °Li+" # µ °TFSI#" = Cte a"

cette relation n’est rien d’autre que la loi d’action de masse pour l’équilibre suivant :

Li+! + TFSI "!

Li+! + TFSI "!

et il existe une tension de jonction non-nulle à l’équilibre : 1 ! " # !$ = ( µ °Li+$ # µ °TFSI#$ # µ °Li+" + µ °TFSI#" ) 2�

y

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE

153

Dans ce cas, lorsque la jonction multiple atteint l’état d’équilibre, celui-ci correspond à une tension de jonction non-nulle.

3.4 - EQUILIBRE THERMODYNAMIQUE

DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES

On décrit ci-dessous l’état d’équilibre des cellules électrochimiques en circuit ouvert. C’est-à-dire que l’on s’intéresse à l’état d’équilibre de ces systèmes lorsque l’on n’autorise pas la circulation d’un courant dans un circuit extérieur. Dans une cellule électrochimique, lorsqu’on autorise les échanges d’énergie électrique avec l’extérieur (fermeture du circuit sur une résistance par exemple), le système évolue vers un nouvel état d’équilibre, qui n’est pas décrit ici. Rappelons que dans une chaîne électrochimique à l’équilibre thermodynamique, les volumes conducteurs sont équipotentiels et la tension globale à l’équilibre est la somme de toutes les différences de potentiel aux interfaces [43]. En particulier, afin d’écrire de manière rigoureuse les relations issues de la thermodynamique pour les cellules électrochimiques à l’équilibre, il est indispensable dans cette section de ne pas omettre les jonctions électroniques terminales qui sont inévitables lors de la mesure expérimentale à l’aide d’un voltmètre. En effet, rappelons que les connexions internes d’un voltmètre sont toujours réalisées dans le même matériau : la mesure effectuée est celle de la tension VOLTA, qui pour deux mêmes matériaux est égale à la tension GALVANI. Par exemple pour la pile DANIELL, la tension mesurée correspond à : Cu’│Zn│solution aqueuse de ZnSO4││solution aqueuse de CuSO4│Cu De nombreuses applications dans le domaine de l’analyse chimique ont été développées, tant dans la réalisation de capteurs potentiométriques que pour des méthodes de dosage exploitant des mesures potentiométriques comme indicateurs. Dans le cadre de ce chapitre on ne s’intéresse qu’à la description des principes de ces méthodes potentiométriques à courant nul correspondant à des systèmes à l’équilibre thermodynamique, ce qui n’est pas le cas de toutes les mesures potentiométriques. En particulier, la description suivante est limitée à des cellules électrochimiques ne présentant pas de jonction ionique. Dans la pratique, on appliquera également ces résultats dans de nombreux cas expérimentaux où les tensions de jonction ionique peuvent être négligées [44].

3.4.1 - CELLULES ÉLECTROCHIMIQUES SANS JONCTION IONIQUE On considère des systèmes sans jonction ionique. Suivant les couples rédox, cela peut correspondre à un système expérimental ou à un système que l’on ne peut pas réaliser mais dont les caractéristiques thermodynamiques peuvent tout de même être définies. [43] La répartition des potentiels dans un système électrochimique à l’équilibre a été présentée dans la section 2.1.1. [44] Une discussion plus rigoureuse de ces questions est développée dans l’annexe A.3.2 : même si, numériquement, la tension de jonction ionique est négligeable, il peut être important de la considérer d’un point de vue fondamental.

154

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

ELECTROCHIMIE ET NEUROBIOLOGIE Document élaboré avec l’aimable collaboration de S. A RBAULT, Département de Chimie de l’Ecole Normale Supérieure à Paris

L’apport de l’analyse électrochimique à la biologie et à la médecine a débuté par les travaux de L. CLARK au début des années 1950. Celui-ci a proposé le premier capteur électrochimique basé sur une méthode ampérométrique permettant de doser l’oxygène dissous dans l'eau et plus particulièrement les fluides biologiques. Il faudra ensuite attendre le début des années 1970 pour que, par extension de ce type de dispositif, d’autres biocapteurs électrochimiques soient développés (détection spécifique du glucose, des neurotransmetteurs de nature chimique). Dans le cas de la neurobiologie, ces développements correspondent au besoin de comprendre les mécanismes de la transmission chimique de l’information neuronale qui a été démontrée depuis la fin des années 1960. Par ailleurs, au cours des années 1970, sont apparus de nouveaux outils électrochimiques : les microélectrodes. Ces outils ont rapidement trouvé un nouveau champ d’application, celui des mesures in vivo. En effet, les dimensions des microélectrodes, basées par exemple sur des fibres de carbone de 5 à 30 µm de diamètre, sont du même ordre de grandeur que celles des cellules vivantes. Elles sont donc faiblement invasives lors d’une insertion dans un tissu. Les études fondamentales ont d'autre part démontré que les microélectrodes offrent des constantes de temps d’analyse nettement plus faibles que celles des électrodes millimétriques conventionnelles. Il est ainsi possible de mettre en œuvre des méthodes comme la voltamétrie à hautes vitesses de balayage (plusieurs centaines de volts par seconde) pour étudier des phénomènes transitoires dans la gamme des millisecondes. Plusieurs équipes ont développé ce type d’analyses en utilisant des microélectrodes de carbone pour appréhender les mécanismes de libération de la dopamine, un neurotransmetteur majeur du système nerveux central. Les études initiées tout d'abord sur des tranches de cerveau de rongeurs, ont pu ensuite être conduites in vivo, au sein du cerveau d’animaux anesthésiés. Potentiel appliqué

Microélectrode Temps

5 μm

Courant détecté

OH

OH

Dopamine NH2

−2

e ––

+2

e –+

O 2H +

2H +

O

Temps

Dopamine-o-quinone NH2

Cellule

Stimulation

Principe de détection de la dopamine à la surface d’une microélectrode à fibre de carbone et visualisation au microscope d’une expérience de détection sur cellule unique

(Détection de la dopamine à gauche : d'après Trends Anal. Chem. 22, PHILLIPS P.E.M. & WIGHTMAN R.M., Critical guidelines for validation of the selectivity of in-vivo chemical microsensors, 509-514, © 2003, avec la permission d'Elsevier ; Microélectrode à droite : d'après AMATORE C., ARBAULT S., BONIFAS I., BOURET Y., ERARD M. & GUILLE M. : Dynamics of full fusion during vesicula exocytotic events: release of adrenaline by chromaffin cells. ChemPhysChem 4, 147-154. © 2003, Wiley-VCH Verlag GmbH & Co. KGaA. Reproduit avec permission)

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE

155

Des mécanismes essentiels de la neurobiologie des systèmes dopaminergiques ont pu ainsi être mis en lumière et ont été démontrés au cours des années 1980-1990. Les recherches développées par l'équipe de R.M. WIGHTMAN ont beaucoup contribué à ce domaine, en démontrant en particulier le processus de recapture par les neurones de la dopamine qui est libérée en excès au niveau de la synapse. Ce phénomène a été quantifié, étudié cinétiquement et pharmacologiquement, ce qui a permis, par exemple, de comprendre les effets retard induits par la cocaïne sur la libération de la dopamine dans les zones du cerveau qui sont liées aux activités d’apprentissage, à la mémoire et aux sensations du plaisir. Les évolutions techniques récentes, notamment en terme de miniaturisation des outils de mesure et de transfert de données par communication hertzienne, ont même permis de réaliser des analyses sur des animaux éveillés et en mouvement. Il est aujourd’hui possible de relier des mesures d’activité cérébrale avec le comportement de l’animal lorsque, par exemple, celui-ci est stimulé par la présence d’un congénère du sexe opposé ou lorsqu’il rentre dans un processus d’addiction à une drogue. Cependant, ces études in vivo sont fondées sur le principe d’une détection dans le fluide cérébral extracellulaire. Elles ne permettent donc pas une analyse du mécanisme de la transmission chimique des stimuli nerveux. Au début des années 1990, plusieurs équipes ont pu étudier ce phénomène à l’échelle d’une cellule vivante, en plaçant la surface d’un capteur électrochimique, telle une microélectrode de carbone, à une distance de quelques microns à l’extérieur de la membrane d’une cellule. La résolution quantitative de cette détection atteint actuellement des flux de 1000 molécules/milliseconde. Les étapes cinétiques du processus de libération, dit d’exocytose, peuvent ainsi être différenciées et analysées en fonction des paramètres biologiques et physico-chimiques de la cellule et de son environnement. De par ses avantages et sa complémentarité avec d’autres techniques d’investigation des processus membranaires, cette technique a été intégrée par les laboratoires de neurobiologie et a permis d’étudier l’exocytose de plusieurs types de neurotransmetteurs, mais aussi les processus de libération de beaucoup d’autres molécules d’intérêt biologique. Ces molécules peuvent être des neuromodulateurs (monoxyde d’azote, acide ascorbique…), des métabolites de l’activité énergétique cellulaire (oxygène, ATP, glucose…), ou encore des molécules hautement réactives issues de processus de défense immunitaire (peroxyde d’hydrogène, peroxynitrite…). Finalement, outre ses multiples apports à la mise en évidence et à la compréhension de mécanismes neurobiologiques fondamentaux, ce domaine de l’électrochimie a peut-être obtenu sa plus belle réussite par son utilisation au sein de services cliniques et de salles d’opération. Des capteurs électrochimiques sont en effet utilisés quotidiennement comme outils de diagnostic de l’état cérébral de patients traités suite à des accidents vasculaires cérébraux ou subissant de graves pathologies chroniques.

156

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

3.4.1.1 - GRANDEURS THERMODYNAMIQUES DE RÉACTION Pour des cellules électrochimiques simples on peut facilement, en utilisant les expressions précédemment démontrées des tensions GALVANI à différents types d'interface à l’équilibre, relier leur fem aux grandeurs thermodynamiques de réaction.

z Par exemple pour la cellule électrochimique suivante : Cu’ | Pt, H2 | solution aqueuse de H2SO4 et CuSO4 | Cu L'équilibre des deux interfaces électrochimiques s'écrit : 1 ! Cu " ! solution = ( 2 µ eCu + µ Cu2+ " µ Cu ) 2�

! Pt " ! solution =

& 1# 1 % µ + µ H+ " µ H2 ( � $ ePt 2 '

L’équilibre de la jonction électronique Cu’ | Pt entraîne l’égalité du potentiel électrochimique des électrons dans ! =µ ! ) et la relation précédente peut être écrite en fonction des paramètres de Cu’ : les deux métaux ( µ ePt eCu’ & 1# 1 ! Cu’ " ! solution = % µ eCu’ + µ H+ " µ H2 ( �$ 2 ' On a donc, en combinant ces relations : 1 ! Cu " ! Cu’ = 2 µ eCu " 2 µ eCu’ + µ Cu2+ " µ Cu" 2 µ H+ + µ H2 2� On voit ici l’importance de l’écriture complète de la chaîne avec les jonctions électroniques terminales pour faire une démonstration rigoureuse. En effet, comme les termes de potentiel chimique des électrons concernent les connexions qui sont faites du même matériau, ces termes, qui ne sont pas des données accessibles expérimentalement, s’annulent ( µ°eCu = µ°eCu’ ). Par conséquent, il ne reste plus que la relation avec les potentiels chimiques des constituants chimiques. Par définition de la fem, en choisissant Cu comme électrode de travail et Cu’ comme contre-électrode, U = ! Cu " ! Cu’ , on a : ! 2�U = µ Cu + 2 µ H+ ! µ Cu2+ ! µ H2 = " rG

(

)

l’enthalpie libre de réaction étant écrite pour l’équation-bilan suivante : Cu + 2 H+ Cu2+ + H2 On prendra garde au fait qu’il s’agit là d’une convention d’écriture pour définir sans ambiguïté les signes des grandeurs considérées.

y

Pour généraliser, on considère une cellule électrochimique, éventuellement fictive, où la somme des tensions de jonction ionique est nulle. On a les relations suivantes :

!rG = " e �U % $U ( !rS = # " e � ' * & $T )P + % $U ( . !rH = " e � -U # T ' * 0 & $T )P / , avec ν e le nombre stœchiométrique algébrique de l’électron dans la demi-réaction du couple rédox mis en jeu à l’électrode de travail et U la différence de potentiel interne entre l’électrode de travail et la contre-électrode, U = ϕ WE − ϕ CE .

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE

157

Attention, le choix précédent, qui privilégie le sens d’écriture de la demi-réaction rédox à l’électrode de travail, ne doit être pris que comme une convention, qui est nécessaire pour qu’il n’y ait pas ambiguïté sur les signes. En aucun cas ce sens ne représente un sens de réaction effective. En effet, rappelons que ces relations sont valables à l’équilibre thermodynamique, donc lorsque le système n’est traversé par aucun courant : les termes de cathode et d’anode ne sont donc plus adéquats. Lorsque les différentes espèces intervenant dans le bilan sont prises dans leur état standard, on définit de même une fem standard U ° :

U° =

!rG° "e �

Un ordre de grandeur usuel des enthalpies libres standard de réaction est 100 kJ mol−1. Il correspond à température ordinaire à des tensions standard de l’ordre du volt. Attention, pour des couples rédox faisant intervenir H+ ou OH− dans l’équation bilan de leur demi-réaction rédox, il faut préciser si l’état standard est défini pour H + ou OH−. Cela revient à préciser le pH considéré pour la définition de U ° : pH = 0

pour des conditions standard pour H+

pH = 14

pour des conditions standard pour OH− (a OH− = 1)

(a H+ = 1)

Rappelons que, dans les tables de données thermodynamiques (enthalpies libres et enthalpies standard de formation, les conventions suivantes sont utilisées :  l’enthalpie libre de formation (ou potentiel chimique) standard de tous les corps simples est nulle, quelle que soit la température ;  l’enthalpie libre de formation (ou potentiel chimique) standard des protons en solution est nulle : µ°H+ = 0 J mol"1 !T

z Par exemple, à partir des données thermodynamiques, on peut donner la fem standard à pH = 0 de la cellule suivante (avec l’hypothèse que la tension de jonction ionique est nulle [44]) : Pt | Cu | solution aqueuse contenant Cu2+ | | solution aqueuse contenant Mn2+, MnO4− et H+ | Pt’ Les tables thermodynamiques indiquent à 25 °C, avec la convention µ°H+ = 0 J mol!1 :

µ °H2O = ! 237,2 kJ mol!1

µ °MnO!4 = ! 447,3 kJ mol!1

µ °Mn2+ = ! 228,1 kJ mol!1

µ °Cu2+ = + 65,5 kJ mol!1

On écrit les deux demi-réactions rédox : Mn2+ + 4 H2O 5 e− + MnO4− + 8 H+ 2+ − Cu + 2 e ) × 5/2 ( Cu ⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯ 5 Cu + MnO − + 8 H+ Mn2+ + 4 H2O + 25 Cu2+ 4 2 Pour cet équilibre, en choisissant l’électrode de Pt’ comme électrode de travail, on a la relation : !rG° = " 5 �U ° Donc, en tenant compte du fait que le cuivre est un corps simple (µ °Cu = 0 J mol−1), on obtient à 25 °C : % 1 " 5 U° = ! $ µ° 2+ + 4 µ°H2 O + µ°Cu2+ ! µ°MnO4! ' = + 1,17 V 5 � # Mn 2 &

y

158

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

3.4.1.2 - LOI DE NERNST Rappelons que l’on définit comme référence des potentiels le système virtuel de l’électrode standard à hydrogène (ESH) :

%# a + = a H2 = 1 H+ /H2 avec , !T $ H %& " H+ = " H2 = 1 Le caractère virtuel de ce système est lié essentiellement au fait qu’une solution acide molaire n’est pas une solution idéale. En effet, si l’on peut trouver une solution acide dont l’activité moyenne soit égale à 1, le coefficient d’activité moyen sera différent de 1. Par définition, le potentiel d’un couple rédox par rapport à l’ESH correspond à la fem de la cellule électrochimique fictive où la demi-cellule mettant en jeu le couple rédox étudié est l’électrode de travail et où la contre-électrode est l’électrode standard à hydrogène à la même température, avec la somme des tensions de jonctions ioniques éventuelles nulle et les deux mêmes métaux terminaux. On a donc : E/ESH = ϕmétal − ϕmétal ESH

z Par exemple, le potentiel du couple Ag+/Ag par rapport à l’ESH est égal à la fem de la cellule électrochimique : Ag’ | Pt, H2 (std) | H+ (std) | | Ag+ | Ag Ag+ + ½ H2

En écrivant l’équilibre : on obtient : et : avec :

E =!

Ag + H+

& µ + "rG 1# 1 = % µ Ag+ + µ°H2 ! µ°H+ ! µ Ag ( = Ag � � �$ 2 '

E = E° +

E° =

RT ln aAg+ �

µ°Ag+ �

y

Le potentiel d’un couple rédox ne dépend donc ainsi que des données thermodynamiques relatives à celui-ci. De manière plus générale, on aboutit avec les conventions précédentes à l’expression suivante de la loi de NERNST :

E/Réf = E° /Réf +

RT ln a i!i !e � " i

où i représente chacune des espèces mises en jeu dans la demi-réaction rédox en dehors de l’électron, νi le nombre stœchiométrique de l’espèce i , ai son activité à l’équilibre et νe le nombre stœchiométrique de l’électron. Les données thermodynamiques permettent de prévoir le sens d’évolution spontanée d’un système suivant des critères thermodynamiques. Une telle discussion peut être menée, si on se limite à ces critères, à partir d’une échelle de potentiel [45], avec des raisonnements du type de ceux menés pour les réactions acido-basiques à partir d’une [45] Comme pour le tracé qualitatif des courbes intensité-potentiel décrit dans la section 2.3, c’est la valeur de potentiel standard apparent, lorsqu’elle est pertinente, qui sera positionnée et utilisée pour ce type de raisonnement.

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE

159

échelle de pKa . Ce type de présentation, avec la règle dite du γ, est utile pour des réactions rédox en solution [46]. Mais pour des systèmes électrochimiques, elle est vite limitée car l’intervention de la cinétique des différentes réactions peut venir bousculer ces prévisions et il est préférable de raisonner à partir des courbes intensité-potentiel (voir sections 2.3 et 2.4). Cela permet de retrouver les résultats obtenus à partir d’une échelle de potentiel, mais donne une vision plus large conduisant immédiatement à prendre en compte les aspects thermodynamiques et cinétiques…

z Reprenons un exemple d’évolution spontanée développé précédemment à l’aide des courbes intensité-

potentiel (voir la figure 2.33 dans la section 2.4.1). Il s’agit de la corrosion par le dioxygène d’une lame de cuivre plongeant dans une solution acide qui n’est pas désaérée. Trois couples rédox sont mis en jeu dans ce système, Cu2+/Cu, H+,H2O/H2 et O2/H2O,OH−, et sont positionnés sur l’échelle de potentiel thermodynamique apparent de la figure 3.11. Pour fixer les valeurs, on supposera que le pH du système est égal à 1 : le potentiel standard apparent du couple H+,H2O/H2 est égal à − 0,06 V/ESH et celui du couple O2/H2O,OH− à + 1,17 V/ESH. En ce qui concerne le cuivre, le potentiel standard apparent est aussi le potentiel standard du couple Cu2+/Cu : + 0,34 V/ESH. Les espèces présentes dans le système sont entourées sur ce schéma (par convention, les oxydants sont placés à gauche et les réducteurs à droite). E °app [V/ESH] O2

+ 1,17

Force des oxydants + 0,34

Cu2+

− 0,06

H+, H2O

H2O, OH− Force des réducteurs Cu H2

Figure 3.11 - Utilisation de l'échelle de potentiel thermodynamique apparent

Sur ce type de représentation (règle du γ [46]), il est facile de repérer s’il peut y avoir évolution spontanée ou non : une réaction est possible en présence d’un oxydant dont le couple a un potentiel standard apparent plus élevé (plus haut sur l’échelle) que celui du couple correspondant au réducteur qui va réagir. On retrouve ainsi le résultat de l’évolution spontanée de ce système à l’abandon, correspondant au bilan d’une réaction d’oxydation et de réduction traduisant la corrosion : 2 H 2O 4 H + + 4 e− + O2 Cu2+ + 2 e− ) ×2 ( Cu —————————————— O2 + 4 H+ + 2 Cu 2 H2O + 2 Cu2+ Il faut se rappeler que ce genre de raisonnement est fait suivant des critères purement thermodynamiques.

y

[46] La règle du γ permet d’identifier visuellement quelles réactions se produisent spontanément entre espèces de différents couples rédox. On l’appelle ainsi car elle consiste, lorsque cela est possible, à écrire la lettre grecque minuscule γ sur l’échelle de potentiel en partant de l’espèce Ox1 du couple avec le potentiel le plus élevé puis en allant sur l’espèce Red2 du couple avec un potentiel plus faible, identifiant ainsi les deux réactants. Les deux produits se retrouvent alors en finissant de dessiner la lettre γ : Ox2 puis Red1. La réaction Ox1 + Red2 → Red1 + Ox2 n’est possible que si Ox1 et Red2 sont tous deux présents dans le système.

160

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

3.4.1.3 - PRISE EN COMPTE DE

PLUSIEURS ÉQUILIBRES CHIMIQUES

Lorsque plusieurs équilibres chimiques interviennent, les concentrations à l’équilibre dépendent de l’ensemble et les équilibres rédox peuvent être déplacés par l’existence d’autres réactions (précipitation, complexation ou acido-basique). Par exemple, la présence d’espèces rédox peu solubles peut faire évoluer très sensiblement le potentiel standard du couple correspondant, comme cela est illustré dans le tableau 3.4. L’existence de complexes stables d’une (ou des deux) espèce(s) d’un couple rédox peut également faire évoluer très sensiblement le potentiel standard correspondant, comme illustré dans le tableau 3.5. Exemples de potentiel standard Tableau 3.4 - Influence de la précipitation Tableau 3.5 - Influence de la complexation E ° [ V/ESH ]

Couple

Ag /Ag

+ 0,80

3+

Fe /Fe

AgCl/Ag

+ 0,22

Fe(CN)63−/Fe(CN)64−

Couple +

2+

Hg2 /Hg Hg2SO4/Hg

+ 0,79 + 0,61

E ° [ V/ESH ] 2+

+ 0,77 3+

Fe(o-phen)3 /Fe(o-phen)3

+ 0,36 2+

+

+ 1,14 + 0,80

Ag /Ag +

Hg2I2/Hg

− 0,04

Ag(NH3)2 /Ag

+ 0,37

Pb2+/Pb

− 0,13

Au(CN)2−/Au

− 0,60

PbSO4/Pb

− 0,36



Au(SCN)2 /Au

+ 0,70

Le lien entre les potentiels standard des différents couples à partir des constantes d’équilibre s’établit très rapidement si l’on écrit les équations bilan des équilibres correspondants. On peut aussi utiliser la loi de NERNST à condition de tenir compte de toutes les espèces présentes en solution même si c’est en concentrations extrêmement faibles.

z Par exemple, retrouvons la valeur du potentiel standard du couple Fe(CN) 63−/Fe(CN)64− à partir de celui du couple Fe3+/Fe2+ et des constantes de complexation des ions Fe(CN)63− (pKd1 = 42) et Fe(CN)64− (pKd2 = 35).  Première méthode - En présence d’ions cyanure, les espèces largement majoritaires sont les complexes, mais il existe tout de même en équilibre une très petite quantité d’ions Fe3+ et Fe2+. On peut écrire la loi de NERNST pour ces deux couples : RT a Fe(CN)63! RT a Fe3+ E = E°Fe(CN)63!/ Fe(CN)64! + ln et E = E°Fe3+/ Fe2+ + ln � a Fe(CN)64! � a Fe2+ les deux écritures exprimant le potentiel d'électrode, qui a une valeur unique, ce qui entraîne :

E°Fe(CN)63!/ Fe(CN)64! = E°Fe3+/ Fe2+ +

RT a Fe3+ a Fe(CN)64! ln � a Fe2+ a Fe(CN)63!

E°Fe(CN)63! /Fe(CN)64! = E°Fe3+/ Fe2+ +

RT K d1 (a CN! )6 ln � K d (a ! )6 CN 2

soit, à 25 °C : E°Fe(CN)63!/ Fe(CN)64! = E°Fe3+/ Fe2+ ! 0,059 pK d1 + 0,059 pK d2 = + 0,36 V/ESH

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE

161

 Seconde méthode plus élégante et plus rapide (surtout si le nombre d’équilibres simultanés est grand) : 3+

Fe + 6 CN

!rG° = �E°Fe3+/ Fe2+

Fe3+ + e−

Fe2+ −

Fe(CN)6

3−

!rG° = RT lnK d1

!rG° = "RT lnK d2 Fe + 6 CN Fe(CN)6 ⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯⎯ !rG° = �E°Fe(CN)63"/ Fe(CN)64" Fe(CN)63− + e− Fe(CN)64− 4−

Ainsi,

2+



E°Fe(CN)63!/ Fe(CN)64! = E°Fe3+/ Fe2+ ! 0,059 pK d1 + 0,059 pK d2 = + 0,36 V/ESH

y

3.4.1.4 - CAS PARTICULIERS DE L’INTERVENTION D’ÉQUILIBRES ACIDO-BASIQUES L’influence des équilibres acido-basiques et donc du pH des électrolytes sur les valeurs de potentiel est très fréquente. On peut représenter cette influence (à l’équilibre thermodynamique) par différents diagrammes, généralement appelés diagrammes de POURBAIX ou diagrammes E/pH. L’utilisation de ces diagrammes est particulièrement intéressante pour prévoir le comportement thermodynamique de systèmes où plusieurs couples rédox interviennent, avec chacun une dépendance en fonction du pH différente. Cette étude concerne la chimie rédox en solution mais elle est aussi importante en électrochimie, par exemple dans le domaine de la corrosion, ou de la prévision des réactions (principales et parasites) à l’aide des potentiels standard apparents (voir section 2.4). L’utilisation de ces diagrammes ne donne que des informations sur un plan thermodynamique, et ce n’est qu’en incluant les paramètres cinétiques que l’on peut en général décrire complètement un système (voir section 2.3). On ne reprend pas ici le détail d’établissement et d’utilisation de ce type de diagrammes, que l’on peut trouver dans de nombreux ouvrages, seul un exemple est rapidement présenté ci-dessous.

z Pour le système Cl(+I)/Cl(−I), l’espèce contenant le chlore au nombre d’oxydation (+I) peut se trouver, suivant

le pH du milieu, sous la forme HClO ou ClO−. On a ainsi, suivant le pH, c’est-à-dire en fonction des zones de prédominance des formes acide et basique du Cl(+I), les deux couples suivants : Cl− + H2O HClO + H+ + 2 e−  couple HClO/Cl− : L’application de la loi de NERNST pour ce couple donne la relation suivante :

E = E°HClO/Cl! +

RT [HClO][H+ ] ln 2� [Cl! ]

soit, avec les conventions du tracé des diagrammes de POURBAIX, (ici [HClO] = [Cl−]), à température ordinaire : E = E °HClO/Cl! ! 0,03 pH = (1,5 ! 0,03 pH ) V/ESH Cl− + H2O ClO− + 2 H+ + 2 e−  couple ClO−/Cl− : L’application de la loi de NERNST donne la relation suivante pour ce nouveau couple :

RT [ClO! ][H+ ] 2 ln 2� [Cl! ] soit avec les conventions du tracé des diagrammes de POURBAIX, (ici [ClO−] = [Cl−]) et la continuité de E à pH = pKa, on a : E = E°HClO/Cl! + 0,03 pK a ! 0,06 pH E = E°ClO! /Cl! +

162

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

L’allure du diagramme de POURBAIX restreint aux système Cl(+I)/Cl(−I) est représentée sur la figure 3.12. On a aussi représenté (en pointillés) dans le même intervalle de pH, les deux droites des couples de l’eau. Une utilisation des diagrammes de POURBAIX est l’étude des domaines de stabilité des solutions aqueuses : par exemple, on peut lire facilement sur ce diagramme que l’eau de JAVEL (mélange équimolaire d’ions Cl− et ClO− avec un pH voisin de 10) n’est pas une solution stable thermodynamiquement, puisque son potentiel est supérieur à celui du couple O2/H2O,OH−. Cependant, comme la cinétique d’oxydation de l’eau par les ions hypochlorite ClO− est lente, l’eau de JAVEL conserve une relative stabilité aux échelles de temps usuelles. E °app [V/ESH] + 1,5 + 1,27 + 1,23

HClO ClO−

C O2



Cl

B A

H2O

0

4

pKa = 7,5

10

pH

H2

Figure 3.12 - Diagramme de POURBAIX du chlore en solution aqueuse restreint aux systèmes Cl(+ + I)/Cl(− − I)

Un autre exemple d’utilisation du diagramme de POURBAIX en électrochimie consiste à déterminer la courbe décrite par le potentiel à l’abandon d’une électrode inattaquable (par exemple en platine) trempant dans une solution désaérée d’eau de JAVEL lorsqu’on lui ajoute de l’acide sulfurique. Pour donner des valeurs numériques, considérons initialement une solution d’eau de JAVEL de concentration 0,5 mol L−1 en ions ClO− et Cl− à pH = 10. On suppose qu’elle ne réagit pas avec l’eau, la cinétique correspondante étant infiniment faible.  Le point représentatif de cette solution sur le diagramme de POURBAIX de la figure 3.12 est le point A (pH = 10 ; E = 1,12 V/ESH). Les ions ClO− et Cl− sont les espèces majoritaires de l’élément chlore en solution. On peut, à partir de la valeur du pKa , calculer la concentration en HClO (minoritaire) : 1,6 .10−3 mol L−1. Lorsqu’on diminue le pH (ajout d’acide sulfurique), on observe en premier lieu la réaction suivante : HClO ClO− + H+ − La concentration en ClO diminuant progressivement, on se déplace sur une courbe légèrement en dessous de la droite du diagramme de POURBAIX, puisque celle-ci représente le potentiel dans des conditions où Cl− et ClO− sont équimolaires (ce qui n’est plus le cas).

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE

163

 Au point B, c’est-à-dire à un pH égal au pKa du couple acido-basique HClO/ClO− (pH = 7,5), on a la même concentration pour ces deux espèces. Le potentiel est E = 1,26 V/ESH. HClO, ClO− et Cl− sont les espèces majoritaires de l’élément chlore en solution (Cl− en concentration 0,5 mol L−1 et HClO et ClO− en concentration 0,25 mol L−1).  Lorsqu’on diminue encore le pH (entre B et C), toujours grâce à la réaction principale précédente, ClO− devient minoritaire devant HClO. Par exemple au point C à pH = 4 (E = 1,38 V/ESH), HClO et Cl− sont les espèces majoritaires de l’élément chlore en solution (concentration 0,5 mol L−1). On peut alors calculer la concentration des espèces minoritaires : ClO− est en concentration 2 .10−4 mol L−1. Si on diminuait encore le pH, d’autres espèces chlorées apparaîtraient, comme le dichlore gazeux.

y

3.4.2 - ASPECTS EXPÉRIMENTAUX Rappelons que pour les mesures électrochimiques, on utilise des voltmètres avec des transistors à effet de champ, dont l’impédance d’entrée est particulièrement élevée [47]. Lors d’une mesure de tension, on peut trouver deux critères expérimentaux d’équilibre (nécessaires mais non-suffisants) :  pas d’évolution dans le temps de la valeur mesurée de tension,  indépendance de la valeur mesurée de tension en fonction des conditions hydrodynamiques (agitation mécanique) du système.

3.4.2.1 - JONCTIONS IONIQUES Dans le cas général, les tensions de jonction ionique à l’équilibre ne sont pas nulles et doivent être prises en compte dans la valeur globale de la tension. Cependant dans de nombreux cas expérimentaux classiques (par exemple, la jonction entre deux solutions par l’intermédiaire d’un pont salin), les jonctions mises en jeu sont des jonctions ioniques multiples pour lesquelles la somme des tensions de jonction à l’état quasistationnaire joue un rôle négligeable [48]. Lorsque c’est le cas, la tension mesurée aux bornes du système est très proche de la somme algébrique des tensions d’équilibre des interfaces électrochimiques [49].

3.4.2.2 - ELECTRODES DE RÉFÉRENCE Expérimentalement, tout couple rédox peut être utilisé pour réaliser une électrode de référence, pourvu que l’on maîtrise parfaitement la composition de celle-ci et que la

[47] L'impédance d'entrée est classiquement > 1012 Ω pour les appareils destinés à l’électrochimie. [48] Dans le cas de solutions séparées par une membrane ou un matériau poreux, l’état d’équilibre correspond au mélange parfait des deux solutions. Il n’est cependant atteint qu’après un temps extrêmement long si la porosité et/ou la géométrie de la zone interfaciale sont bien choisies (voir section 4.4.2). Dans ce cas-là, ce qui est important c’est donc l’état quasi-stationnaire rapidement atteint, pour lequel on a des différences de composition entre les solutions et des tensions de jonction non-nulles. D’un point de vue expérimental, on cherche à minimiser la tension globale de jonction ionique quasi-stationnaire. Différents exemples sont détaillés dans l’annexe A.1.1. [49] Une discussion plus rigoureuse de ces questions est développée dans l’annexe A.3.2 : même si, numériquement, la tension de jonction ionique est négligeable, il peut être important de la considérer d’un point de vue fondamental.

164

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

cinétique de la demi-réaction rédox n’intervienne pas [50]. Il faut en effet pouvoir considérer que l’interface électrochimique correspondante atteint l’équilibre thermodynamique rapidement par rapport à l’échelle de temps de la mesure, soit par exemple en un temps très inférieur à la seconde. Deux autres critères intéressants peuvent intervenir :  la somme des tensions de jonction ionique avec l’autre demi-cellule est minimale ;  le potentiel de la demi-cellule de référence demeure inchangé si un courant accidentel traverse cette électrode [51]. Trois exemples classiques, présentés dans la section 1.5.1.2, sont repris ici rapidement.

 Electrode à hydrogène (EH) Une électrode à hydrogène est réalisée par barbotage de dihydrogène dans une solution de pH connu, sur une électrode de platine (ou platine platiné [52]) avec la demicellule suivante : Pt platiné, H2 (1 bar) | H+ de concentration C | Cette demi-cellule fait donc intervenir le couple H+/H2 : H2

2 H + + 2 e−

et la loi de NERNST permet d’écrire à l’équilibre, le potentiel de cette demi-cellule :

E /ESH =

a + RT ln H � a H2

Rappelons que même si l’on choisit une concentration molaire d’un monoacide fort (on a alors une ENH), celle-ci n’est pas l’ESH car les composés réels ne sont pas standard. La figure 3.13 illustre cet écart sur le coefficient d’activité moyen des solutions d’acide chlorhydrique. Dans la pratique, si l’on veut utiliser une électrode à hydrogène dont le potentiel soit le plus proche possible de celui de l’ESH, on utilisera une solution acide légèrement plus concentrée que molaire. En effet, par exemple pour HCl, on utilise une concentration de 1,2 mol L−1, car l’activité moyenne est alors égale à 1,2 × 0,84 ≈ 1 (0,84 est la valeur du coefficient d’activité moyen lue sur la figure 3.13). Ces valeurs dépendent de la température du système. On utilise du platine platiné, pour que la réaction soit réellement rapide. Dans la pratique, il faut également réaliser l’équilibre entre le dihydrogène gazeux, le dihydrogène dissous dans la solution et l’hydrogène adsorbé à la surface de l’électrode.

[50] On parle souvent de couple rapide ou réversible, comme cela est défini de manière précise dans les sections 4.3.2.5 et 6. [51] Cette condition est par exemple vérifiée dans le cas d’une ECS : si cette électrode est traversée par un courant, des ions chlorure vont être soit consommés soit produits à l’électrode, mais la présence de chlorure de potassium solide (solution saturée) permet le maintien de la concentration en ions chlorure dans la solution. [52] Une définition rapide des caractéristiques et de l’intérêt pour l’électrochimie du platine platiné est donnée dans la note [67] de la section 1.5.1.2.

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE

165

Ces conditions ne sont pas faciles à maîtriser expérimentalement et l’utilisation de ce dispositif comme électrode de référence est donc délicate.

Coefficient d'activité moyen g±

3

2

1

0

0

1

2

3

−1

4

5

Molalité [mol kg ] Figure 3.13 - Coefficient d’activité moyen à 25 °C de l’acide chlorhydrique dans des solutions aqueuses à différentes concentration

 Electrode au chlorure d’argent Une électrode au chlorure d’argent est réalisée en utilisant un fil d’argent enrobé d’une couche de chlorure d’argent immergé dans une solution aqueuse de chlorure de potassium. On utilise en général une concentration élevée en ions chlorure (de 1 à 3 mol L−1), sans aller jusqu’à la saturation de KCl pour limiter fortement la formation de chlorocomplexes de l’argent (AgCl2− et AgCl32−) qui consommerait AgCl et des ions chlorure, ce qui fixerait le potentiel à une valeur différente de celle attendue. La chaîne électrochimique de la demi-cellule est ainsi du type : Ag | AgCl | solution aqueuse KCl de concentration C | AgCl est une phase séparée pure (activité égale à 1). C’est un solide ionique où seuls les ions Ag+ sont mobiles. On peut effectuer une description globale des équilibres mis en jeu dans cette demicellule, en faisant intervenir le couple AgCl/Ag : Ag + Cl−

AgCl + e−

La loi de NERNST permet d’écrire à l’équilibre, le potentiel de cette demi-cellule :

E = E°AgCl/Ag !

RT ln a Cl! �

z Il peut être intéressant de détailler plus précisément la structure de cette demi-cellule, qui fait intervenir

plusieurs interfaces, qui sont toutes à l’équilibre. On doit dans tous les cas retrouver l’expression du potentiel ci-dessus.

166

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

 Une première manière de décrire les équilibres de cette demi-cellule consiste à la détailler de la façon suivante : Ag | AgCl | solution aqueuse KCl de concentration C |  avec une interface Ag | AgCl qui est une interface réactive (voir section 3.3.4) :

Ag+AgCl + e− Ag où Ag AgCl est un ion Ag mobile dans la phase solide AgCl. On a donc, à l’équilibre, la relation : +

+

1 (µ + µ + " µ Ag ) � eAg Ag AgCl 1 RT ! Ag " ! AgCl = (µ eAg + µ°Ag+AgCl " µ°Ag ) + ln aAg+AgCl � � RT ! Ag " ! AgCl = Cte + ln aAg+AgCl �  avec une interface AgCl | solution de KCl qui est une interface réactive par échange d’ions Ag+, dans la mesure où l’équilibre de solubilité de AgCl entraîne la présence d’ions Ag + (en faible quantité) en solution à l’équilibre (voir section 3.3.4 : cas d’une jonction ionique simple avec AgCl qui est un solide ionique où seuls les ions Ag+ sont mobiles) :

! Ag " ! AgCl =

! sol " ! AgCl =

RT �

# aAg+ & µ °Ag+AgCl " µ °Ag+sol ln % AgCl ( + � $ aAg+sol '

Ag+sol + Cl−sol L’équilibre de solubilité de AgCl : AgCl + − entraîne, entre les activités de Ag et Cl en solution, la relation suivante :

ln (aAg+sol a Cl!sol ) = lnK éq =

µ°AgCl ! µ°Ag+sol ! µ°Cl!sol RT

Finalement, on obtient :

1 RT (µ + µ°AgCl " µ°Ag " µ°Cl"sol ) " ln a Cl"sol � eAg � RT ! Ag " ! sol = Cte " ln a Cl"sol �

! Ag " ! sol =

 On pourrait aussi considérer la deuxième interface comme une interface réactive en écrivant l’équilibre chimique sous la forme : Ag+AgCl + Cl−sol AgCl L’équilibre de l’interface considérée entraîne alors, entre les différents potentiels électrochimiques, la relation suivante : µ! Cl!sol + µ! Ag+AgCl = µ! AgCl On obtient l’expression de la différence de potentiel entre les potentiels internes des deux phases :

1 1 RT (µ " µ Ag+AgCl " µ Cl"sol ) = (µ°AgCl " µ°Ag+AgCl " µ°Cl"sol ) " ln (aAg+AgCl a Cl"sol ) � AgCl � � Finalement, on obtient de nouveau :

! AgCl " ! sol =

! Ag " ! sol =

1 RT RT (µ + µ°AgCl " µ°Ag " µ°Cl"sol ) " ln a Cl"sol = Cte " ln a Cl"sol � eAg � �

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE

167

Ceci permet d’écrire, en introduisant une électrode de référence [53] :

E /Réf = E°AgCl/Ag !

RT ln a Cl!sol �

y

Si l'on se réfère aux calculs purement thermodynamiques, on pourrait envisager de réaliser cette électrode de référence en mettant un fil d’argent au contact d’une solution saturée en chlorure d’argent, mais sans que ce dernier soit au contact de l’électrode d’argent. L’interface réactive serait alors l’interface Ag | solution dont le potentiel dépend de la concentration des ions Ag+ en solution. Cependant, cette concentration est extrêmement faible, car le chlorure d’argent est un sel peu soluble. De plus, le potentiel à l’équilibre étant de la forme logarithmique, le système est très sensible à de faibles perturbations (par exemple, une variation de concentration de 10−9 à 10−10 mol L−1 entraîne une variation de potentiel de 60 mV). La convection naturelle en solution ou le passage d’un très faible courant peut entraîner une évolution sensible du potentiel à l’abandon de cette électrode. Enfin la présence d’autres espèces électroactives en très petite quantité (par exemple le dioxygène dissous ou un autre couple rédox) peuvent entrer en compétition avec l’équilibre Ag+/Ag pour fixer le potentiel de l’électrode (potentiel mixte).

 Electrode au calomel (Hg2Cl2 ) Une électrode au calomel est réalisée par la mise en contact du mercure avec le calomel (Hg2Cl2, sel de mercure (I) solide et peu soluble dans l’eau) et une solution aqueuse de chlorure de potassium. Contrairement au système chimique précédent, il n’y a pas de risque de formation de chlorocomplexes et l’on utilise donc le plus souvent une solution saturée de chlorure de potassium (c’est-à-dire à température ordinaire une concentration voisine de 5 mol L−1). La chaîne électrochimique de la demi-cellule est ainsi du type : Hg | Hg2Cl2 | solution aqueuse KCl de concentration C | On peut effectuer une description globale des équilibres mis en jeu dans cette demicellule, en faisant intervenir le couple Hg2Cl2/Hg : 2 Hg + 2 Cl−

Hg2Cl2 + 2 e−

La loi de NERNST permet d’écrire, à l’équilibre, le potentiel de cette demi-cellule :

E = E°Hg2 Cl2 /Hg !

RT ln a Cl! �

[53] Il faut prendre garde à la signification précise de cette expression. La relation donnant la tension GALVANI ϕAg − ϕsol aux bornes de l’interface électrochimique est rigoureuse mais exprime une grandeur inaccessible expérimentalement. Lorsqu’on écrit finalement l’expression du potentiel E de l’électrode par rapport à une électrode de référence celle-ci n’est plus rigoureuse. En effet, elle implique le fait de négliger les potentiels de jonctions ioniques dans la chaîne électrochimique. Cela a pour conséquence, comme cela est détaillé dans l’annexe A.3.2, que l’on ne peut pas dire que l’on mesure l’activité des ions chlorure, comme cette expression pourrait le laisser croire.

168

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

PRODUCTION INDUSTRIELLE D’ALUMINIUM EN FRANCE Document élaboré avec l’aimable collaboration de Y. B ERTAUD et P. PALAU, ingénieurs à Rio Tinto Alcan, Voreppe, France

Initialement (1859-1887), l’aluminium fut produit, à Salindres (Gard), par réduction chimique de son chloroaluminate fondu NaAlCl4, en présence de cryolithe Na3AlF6, par du sodium métallique Na (procédé SAINTE-CLAIRE DEVILLE). En 1886, P. HÉROULT déposa un brevet de procédé par électrolyse de l’alumine Al2O3. Son brevet fut acheté en 1888 par la Société Electrométallurgique Française : la première usine fut construite à Froges (Isère). Les premières cellules étaient constituées d'un creuset tournant, pour limiter l'appauvrissement interfacial en alumine et mieux rassembler le métal en fond de cuve. Avec une différence de potentiel imposée U = 10 V (pour Uéq = 1,18 V), l'intensité était de 4000 A. Par la suite, avec des creusets fixes et une augmentation de la surface anodique, pour une même intensité la tension d’électrolyse a été réduite à 8 V.

Premières cellules d'électrolyse à Froges en1889

(Patrice MOREL (sous la direction de), Histoire technique de la production d'aluminium, 1991, Presses Universitaires de Grenoble - © Institut pour l'histoire de l'aluminium, droits réservés)

Les procédés d’électrolyse de l’alumine ont par la suite subi des évolutions technologiques importantes (automatisation du travail, recyclage des fumées, maîtrise des problèmes de brassage d’électrolyte et de métal dus aux champs magnétiques qui permit une très importante augmentation de l’ampérage), mais le principe est resté le même. L'électrolyte est une phase liquide de cryolithe Na3AlF6 fondue additionnée d’AlF3 dans laquelle on dissout de l’alumine en quasi-continu. Il contient également quelques % de CaF2, et éventuellement de LiF et MgF2. La dissolution de l’alumine s'effectue selon le bilan : 3 Al2O2F42– 2 Al2O3 + 2 AlF63– Lors de l’électrolyse, au niveau des électrodes, les réactions sont : CO2 + 2 AlF4– + 4 e– à l'anode Al2O2F42– + 4 F– + C – 3– à la cathode AlF6 + 3 e Al + 6 F– soit, en tenant compte de l'équilibre entre AlF63– et AlF4–, un bilan global pour les réactions principales d’électrolyse : 4 Al + 3 CO2 2 Al2O3 + 3 C

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE

+

169 Alumine et fumées recyclées

+ Anodes en carbone Bain à 950 °C Protection des côtés par du bain solidifié

Caisson en acier

Couche d'aluminium liquide servant de cathode



Bloc cathodique en graphite

Schéma de principe d’une cellule moderne de production d’aluminium (d'après un schéma de Rio Tinto Alcan)

A l'anode, la teneur en ions Al2O2F42– diminue donc. Si la solubilité de l’alumine est trop faible ou sa dissolution pas assez rapide, compte tenu de la densité de courant anodique, cette teneur interfaciale s’annule et il se produit un « effet d’anode », conduisant à la production indésirable de CF4. Pour des cellules modernes, la puissance imposée aux bornes de la série et le réglage de l’espace interpolaire donnent une intensité de l’ordre de 300 000 A, et pour chaque cuve une tension d’environ 4 V, dont 1,7 V de chute ohmique dans l’électrolyte, avec un rendement énergétique voisin de 0,5 et un rendement faradique voisin de 0,95. L’écart à l’unité provient essentiellement d’un phénomène de « navette chimique » par dissolution de l’aluminium métal dans l’électrolyte et sa réoxydation par du CO2 dissous dans l'électrolyte à proximité de l'anode.

Série de cellules AP 30 (300 000 A) (© Rio Tinto Alcan)

Les paramètres clefs guidant les évolutions technologiques sont : l’intensité, le rendement faradique, l’énergie consommée, la cinétique de dissolution de l’alumine et plus récemment la température. Par ailleurs, afin d’éviter l’émission de CO2, on cherche à remplacer les anodes en carbone par des anodes dimensionnellement stables produisant du dioxygène, mais au détriment du rendement énergétique.

170

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Pour des raisons pratiques et pour assurer la rapidité du système, le calomel est broyé avec du mercure et mis en contact d’une part avec du mercure (dans lequel plonge un fil de platine) d’autre part avec la solution aqueuse de chlorure de potassium [54]. Lorsque cette électrode doit être utilisée dans une solution contenant des sels d’argent, il est indispensable, pour éviter la formation de précipité de chlorure d’argent, d’ajouter un pont salin (manchon) avec un électrolyte ne contenant pas d’ions chlorure, généralement concentré afin de minimiser les deux tensions de jonction que l’utilisation du manchon ajoute. Ces électrodes sont indicatrices, c’est-à-dire que leur potentiel s’exprime en fonction de l’activité d’un type d’ion : le proton pour l'EH et l'ion chlorure pour les deux autres électrodes [55]. Ces électrodes peuvent, lorsqu'on peut fixer la concentration en solution des ions indicateurs, être utilisées comme référence sans jonction ionique. Cependant, en général on les utilise avec une membrane (ou un matériau poreux) les séparant de la solution étudiée. Il est alors préférable d’utiliser des solutions concentrées comme solutions de référence afin de minimiser les tensions de jonction ionique : par exemple une solution saturée pour l’ECS. De même, on admettra que le choix du chlorure de potassium (anion et cation avec des nombres de transport très proches) comme électrolyte de référence contenant des ions chlorure permet aussi de minimiser les tensions de jonction entre les solutions. Dans ce sens, le souci de minimisation des tensions de jonction est plus difficile à respecter pour l’électrode de référence à hydrogène en raison du nombre de transport élevé du proton en solution aqueuse. C’est un argument supplémentaire pour ne pas utiliser ce type d’électrode, délicate d’un point de vue pratique, si l'on ne peut pas l’utiliser sans jonction ionique [56].

[54] Un schéma de cette électrode de référence se trouve figure 1.14 dans la section 1.5.1.2. [55] Pour une formulation plus précise d'un point de vue thermodynamique, se reporter à l'annexe A.3.2. [56] Différents exemples d’estimation de la valeur numérique des tensions de jonction ionique pour des situations illustrant les propos de ce paragraphe sont donnés dans l’annexe A.1.1.

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE

171

QUESTIONS SUR LE CHAPITRE 3 1 - Dans un système électrochimique :  à l’équilibre thermodynamique, le courant est toujours nul  si le courant est nul, on est toujours à l’équilibre thermodynamique

vrai vrai

faux faux

2 - Pour les espèces suivantes dans leur état standard, on a :  µ °Cu = 0 J mol−1  µ °H+ = 0 J mol−1  µ °Cu2+ = 0 J mol−1  µ °H2 = 0 J mol−1

vrai vrai vrai vrai

faux faux faux faux

3 - En toute rigueur, dans une solution aqueuse contenant des ions, il est possible de mesurer individuellement pour chaque ion : faux  sa concentration vrai  son activité vrai faux 4 - Quelle est la force ionique (avec son unité) des solutions aqueuses suivantes :  contenant NaCl en concentration 0,1 mol L−1 ..............................  contenant Cu(NO3)2 en concentration 0,1 mol L−1 .............................. 5 - Selon le modèle simplifié de DEBYE-HÜCKEL, le coefficient d’activité moyen du soluté dans une solution contenant uniquement NaCl, comparé à celui d’une solution contenant uniquement Cu(NO3)2 avec la même force ionique, est plus grand

égal

6 - Pour un métal, on peut mesurer expérimentalement :  le potentiel électrochimique des électrons mobiles  le potentiel chimique des électrons mobiles  le potentiel GALVANI  le potentiel VOLTA

plus petit vrai vrai vrai vrai

faux faux faux faux

7 - De part et d’autre d’une jonction simple (c’est-à-dire avec réaction interfaciale ne mettant en jeu qu’une seule espèce) entre deux milieux dans lesquels l’espèce considérée a le même potentiel chimique standard, on observe toujours, à l’équilibre thermodynamique, des concentrations identiques en espèce échangeable, lorsque cette dernière est :  un ion vrai faux  une espèce neutre vrai faux 8 - On peut traduire l’équilibre thermodynamique d’une interface faisant intervenir RT aCu2+ le couple Cu2+/Cu par la relation suivante : !métal " ! électrolyte = Cte + ln 2 � aCu dans laquelle la constante est le potentiel standard du couple considéré, relatif à l’ESH

vrai

faux

172

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

9 - Ecrire les nombres manquants (et leur signe) dans les relations suivantes, qui caractérisent l’équilibre thermodynamique de la chaîne électrochimique suivante : Cu’ | Pt, H2 | solution aqueuse de H2SO4 et CuSO4 | Cu On choisit Cu comme électrode de travail et Cu’ comme contre-électrode (U = ϕCu − ϕCu’) ainsi que le signe de l’enthalpie libre de réaction correspondant à Cu + 2 H+ l’équation-bilan écrite ainsi : Cu2+ + H2 ΔrG = . . . . ^U = . . . . µ Cu . . . . µ H+ . . . . µ Cu2+ . . . . µ H2 10 - Compléter le diagramme simplifié de POURBAIX du fer, tracé ci-dessous pour une concentration globale en élément fer dissous en solution aqueuse égale à C0 , ([Fe3+] + [Fe2+] = C0) en indiquant :  les zones d’existence ou de prédominance thermodynamique des espèces suivantes : Fe, Fe(OH)3, Fe2+, Fe3+  le point représentant le potentiel (relatif à l'ESH) d’une lame de fer plongeant dans une solution de pH = pH1 contenant des ions Fe2+ à la concentration C0 E [V/ESH]

0

pH1

pH

D’autre part :  le point représentant le potentiel (relatif à l'ESH) d’une lame de fer plongeant dans une solution de pH = pH1 contenant des ions Fe2+ à la concentration C0/100 serait, par rapport au point précédent, situé à droite au même endroit au dessus au dessous  quelle réaction observe-t-on, pour le système précédent, si l’on impose à ce métal un potentiel de 0 V/ESH ? ............................................................  une lame de fer est stable dans une solution contenant des ions Fe3+ à la concentration C0 vrai faux 11 - Si une électrode de référence Ag, AgCl | KCl 1 mol L−1 | a été stockée avec son embout immergé dans de l’eau distillée, un étalonnage montre que sa tension après stockage est restée stable a diminué a augmenté

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

L’objectif de ce chapitre est de donner les moyens de décrire quantitativement les relations entre tension et courant en fonction du temps dans un système électrochimique. Lorsqu’un système électrochimique est parcouru par un courant, on observe à l’échelle macroscopique des mouvements d’au moins un type d'espèces chargées dans chaque phase. Cela entraîne donc que le système est dans un état hors équilibre.

4.1 - BILANS DE MATIÈRE Une fois défini le lien entre le courant et les grandeurs caractérisant le transport de matière, l’écriture des bilans de matière en volume et au niveau des interfaces permettra de décrire quantitativement les systèmes électrochimiques parcourus par un courant.

4.1.1 - DÉFINITIONS DES GRANDEURS MACROSCOPIQUES LIÉES AU COURANT Comme toute espèce élémentaire chargée possède une masse, la notion de courant est nécessairement liée à une notion de mouvement global de matière.

4.1.1.1 - FLUX DE MATIÈRE Tout mouvement global de matière, que ce soit pour une espèce chargée ou non, peut être quantifié par la quantité de matière (en mol) traversant une surface par unité de temps : c’est le flux (ou le débit) molaire de matière (en mol s−1). On définit une grandeur macroscopique locale associée, la densité de flux molaire de matière, qui est fonction de la position et correspond à une moyenne, autour du point considéré, sur un volume de taille grande devant les dimensions atomiques (supérieur à quelques dizaines de nm3) [1]. Cette dernière est donc définie par rapport à la quantité de matière de l’espèce i, dni , traversant !!"une surface d’aire élémentaire dS pendant une durée élémentaire dt. C’est un vecteur, N i , colinéaire et de même sens que la vitesse locale de l’espèce considérée (voir le développement ci-dessous), dont la norme (ou module) est définie par la relation :

!!" 1 dni Ni = dS dt

[1] De nombreux auteurs en électrochimie omettent, à tort, le terme densité et parlent de flux molaire alors qu’il s’agit bien d’une densité de flux molaire. Cela peut créer des incompréhensions puisque flux et débit ne sont alors plus synonymes, comme ils le sont dans de nombreux autres domaines scientifiques.

174

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

!!" avec : N i dni dS dt

la densité de flux molaire de matière, module en la variation de quantité de matière de l’espèce i l’aire d’une surface élémentaire l’intervalle de temps

[ mol m−2 s−1 ] [ mol ] [ m2 ] [s]

z Les vecteurs densité de flux de matière et vitesse locale sont colinéaires et de même sens. Le facteur de propor-

tionnalité entre ces deux vecteurs a naturellement un sens physique. L’exemple ci-dessous établit ce lien pour un système, dit à géométrie plane [2], c’est-à-dire pour lequel seules les variations suivant une direction de l’espace sont à considérer. !!" La figure 4.1 représente schématiquement un volume d’un tel système avec !i la vitesse locale des particules !" de l’espèce i , (S) une surface dont la normale, n , est parallèle au vecteur vitesse.

=w

id

t

ö wi

(S)

Figure 4.1 - Schéma d’un volume élémentaire dV parcouru par un flux de l’espèce i pendant le temps dt

La quantité de particules traversant (S) pendant le temps dt correspond à la quantité de particules présentes dans un cylindre avec une base d’aire S et de longueur ωi dt :

1 dni S dt dni = C i dV = C i !i dt S

Ni =

Pour l’espèce i , on aboutit finalement à la relation suivante (valable dans une géométrie quelconque) : !!" !!" N i = C i !i !!" [ mol m−2 s−1 ] avec : N i la densité de flux molaire de matière, module en [ mol m−3 ] C !!"i la concentration locale [m s−1 ] !i la vitesse moyenne locale, module en

y

4.1.1.2 - DENSITÉ DE COURANT Lorsque l’espèce i est chargée, la densité de flux de matière correspond également à une densité de flux de charge, qui est plus souvent appelée densité de courant : !" !!" j i = zi � N i !" ! avec : j i la densité de courant de l’espèce i , module en [ A m−2 ]

[2] La géométrie plane est la géométrie la plus simple. Elle fait partie des géométries appelées aussi « 1D », la distance à un plan étant le seul paramètre spatial. Les autres systèmes 1D classiques sont à géométrie cylindrique ou sphérique avec le rayon (distance à l’axe du cylindre ou au centre de la sphère) comme seul paramètre spatial.

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

175

!!" N i la densité de flux molaire de matière, module en le nombre algébrique de charge de l’espèce i zi ^ la constante de FARADAY

[ mol m−2 s−1 ] [ C mol−1 ]

En général, il y a plusieurs types d’espèces chargées en mouvement : le courant total est créé par le mouvement des différents porteurs de charge. On définit la densité de courant comme la somme vectorielle des densités de courant dues à chacun des porteurs de charge : !" !!" !!!" j = ! j i = ! zi � N i i

i

Dans l’utilisation de cette définition, on prendra garde au fait que la densité de courant est une grandeur locale. Par conséquent il faut écrire cette somme en ne prenant en compte que les espèces effectivement présentes au point considéré. Dans un système électrochimique, la nature des porteurs de charge peut être différente d’un point à un autre du dispositif. Cela est fréquent dans le cas d’une cellule de grandes dimensions où les espèces réactives à l’anode et à la cathode sont différentes. Mais c’est aussi toujours le cas autour d’une interface métal | électrolyte, comme cela est développé dans l’exemple suivant.

z Prenons l’exemple d’un système à géométrie plane avec une interface entre une électrode de cuivre et une

solution aqueuse contenant du sulfate de cuivre. Le vecteur densité de courant est identique en tout point de l’espace [3] mais il s’exprime de manière différente selon que le point considéré est dans le métal ou dans la solution. Dans le métal, il n’y a que les électrons qui soient mobiles tandis que dans la solution aqueuse il y a deux types de porteurs de charge : les ions Cu2+ et les ion SO42−. On a donc : !" !" !" !" !" !" !" j métal = ! ji = j e j électrolyte = ! ji = j Cu2+ + j SO4 2" i

i

Il serait faux d’écrire que la densité de courant est la somme vectorielle des densités de courant des électrons et des ions puisque ces espèces ne co-existent pas dans les mêmes zones de l’espace : !" !" !" !" !" j = ! ji = j e + j Cu2+ + j SO4 2" i

Une manière d’exprimer cela est de dire que l’observateur qui définit localement la valeur du courant n’a pas le don d’ubiquité : il ne peut pas voir bouger simultanément autour de lui des électrons et des ions.

y

4.1.1.3 - NOMBRE DE TRANSPORT Pour comparer la contribution au courant des différents types de porteurs de charge, on définit le nombre de transport d’un type de porteurs de charge comme le rapport entre la part de courant due à ce type de porteurs de charge et le courant total. Pour une géométrie quelconque, les différents vecteurs densités de courant ne sont pas nécessairement colinéaires et la définition générale d’un nombre de transport est alors la suivante : "# "# I !t i = i = j"#i . "#j I j.j [3] Cette propriété, valable en géométrie plane, est démontrée dans la section 4.1.2.

176

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Les nombres de transport sont des grandeurs locales. Ce sont des nombres sans dimension, qui peuvent a priori être positifs ou négatifs. Ils vérifient la relation :

! !t i

=1

i

Cette notion est peu utilisée dans un cas quelconque [4]. Son utilisation courante est limitée à des situations où seuls des phénomènes de migration sont à considérer : les nombres de transport sont alors notés ti et sont des nombres positifs compris entre 0 et 1 [5].

4.1.2 - BILAN VOLUMIQUE DE MATIÈRE Tout en restant au niveau macroscopique, et sans même étudier les origines physiques de l’existence des courants [6], on peut aborder quelques propriétés générales liées au passage d’un courant dans le volume d’un milieu conducteur [7]. Pour chaque type d’espèce, on peut écrire un bilan local de matière en volume : la variation locale de la quantité de matière dépend du bilan (lié au flux) entre les espèces qui sortent ou entrent et celles qui sont créées ou consommées localement (par une ou plusieurs réactions chimiques par exemple). Ce type de bilan peut être fait pour des espèces chargées ou non [8]. Comme cela est schématisé sur la figure 4.2, pour un système dit à géométrie plane, c’est-à-dire pour lequel les grandeurs locales ne dépendent que d’une dimension spatiale (homogènes !!" dans toute section perpendiculaire à l’axe x ), et en notant Nx,i la composante de N i sur l’axe des x , on peut écrire : variation dni

= entrée − sortie + = Nx,i (x ) S dt − Nx,i (x + dx ) S dt +

production locale wi dV dt

En faisant un développement limité du flux en sortie Nx,i (x + dx ) et en écrivant que dV = S dx, on obtient :

dN x ,i 1 dni 1 " % = N (x ) ! N x ,i (x ) ! dx ' + wi dV dt dx dx $# x ,i &

[4] Un exemple de l’utilisation de cette notion dans son sens général est développé dans l’annexe A.4.1. Cela permet d’illustrer notamment, dans un système où migration et diffusion sont à prendre en compte, que le nombre de transport le plus fréquemment utilisé, ti , n’a pas de sens physique alors que le nombre de transport électrochimique, t!i , traduit le rapport de la densité de courant de l’espèce considérée sur la densité de courant totale. [5] Cette situation classique de migration pure a été présentée dans la section 2.2.4.3. [6] La description des différents processus de transport de la matière et la mise en équation correspondante font l’objet de la section 4.2.1, tandis que la section 4.2.2 présente les principaux mécanismes mis en jeu microscopiquement. [7] La description de ce qui se passe au niveau des interfaces en terme de bilan de matière fait l’objet de la section 4.1.3. [8] Cette démarche qui consiste à dresser des bilans est par exemple un outil essentiel pour le génie chimique : bilan de matière mais aussi bilan énergétique pour des réacteurs ouverts.

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

(S)

177

ö Ni(x)

ö Ni(x +dx)

x

x +dx

x

dx Figure 4.2 - Schéma d’un volume parcouru par un flux de matière de l'espèce i

On a ainsi, pour une espèce i et pour un système à géométrie plane, la relation suivante : !N x ,i !C i =" + wi !t !x avec : Ci la concentration locale de l'espèce i Nx,i la composante algébrique sur l’axe des x de la densité de flux molaire de matière wi la vitesse locale de production de l’espèce i par unité de volume (au sens algébrique).

[ mol m−3 ] [ mol m−2 s−1 ] [ mol m−3 s−1 ]

La généralisation, pour une géométrie quelconque, donne la relation [9] :

!!" !C i = " div N i + wi !t Dans certaines conditions on peut atteindre une situation dite de régime stationnaire. Cette notion correspond à un cas particulier important d’un point de vue expérimental. Elle se caractérise notamment par une dépendance temporelle nulle des différentes concentrations, et le bilan de matière en volume en régime stationnaire s’écrit donc [10] : !!" div N i = wi De façon générale, en régime stationnaire ou non-stationnaire, il existe un lien entre la vitesse de production par unité de volume et les vitesses de réaction, définies en cinétique homogène. En effet, par définition, la vitesse d’une réaction chimique (v en mol m−3 s−1) est donnée par la relation :

v =

1 1 dni !i V dt

avec : V le volume du système considéré [ m3 ] νi le nombre stœchiométrique algébrique de l’espèce i [ mol ] dni la variation de la quantité de matière de l’espèce i dt l’intervalle de temps [s] dni /dt représente la vitesse de production de l’espèce i liée à la réaction considérée.

!!"

!X y !X x !X z . + + !x !y !z [10] Cette relation est appliquée souvent en électrochimie pour des systèmes quasi-stationnaires (voir la section 1.6.4).

[9] div est l’opérateur divergence : div X =

178

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Ainsi, de manière générale, lorsqu’il y a plusieurs réactions simultanées (voir exemple ci-dessous) : wi = " !ir vr réactions

Si, au sein du volume du milieu conducteur, c’est-à-dire loin des interfaces avec les milieux environnants, on écrit le bilan local en volume des charges à partir de l’expression des bilans volumiques de matière, on obtient :

! !t

# %% " z i � C i $ i

& !" (( + div j = 0 '

En effet le bilan de production locale de charge au sein de la solution est toujours nul.

z Par exemple lors de la réduction de certaines oléfines, R, en milieu organique contenant H+ et NO3− comme

électrolyte support, l’étape de transfert de charge à l’électrode produit un radical anion, qui réagit au sein de l’électrolyte. Un des mécanismes observés met en jeu trois réactions successives en solution. Après la réaction de transfert d’électrons à la cathode qui forme le radical anion noté R− : − R + e− R on observe, avec les vitesses volumiques notées respectivement v 1, v 2 et v 3 , une réaction de dimérisation du radical anion puis de protonation du dimère formé : v1 R22− 2 R− v2 R22− + H+ R 2H − v3 R 2H 2 R 2H − + H + On considèrera qu’avant réduction de l’oléfine, les seuls ions en solution sont les protons et les contre-ions nitrate. En cours de réaction (et en supposant que l’anode est suffisamment loin de la cathode pour que les phénomènes s’y produisant n’interviennent pas ici), le bilan local en volume pour les six types d’espèces en solution est le suivant : Bilan volumique !!" ![R" ] ×−^ = " div N R" " 2v 1 !t !!" ![R 2 2" ] ×−2^ = " div N R 22" + v 1 " v 2 !t !!" ![R 2H" ] ×−^ = " div N R 2H" + v 2 " v 3 !t !!" ![H+ ] ×+^ = " div N H+ " v 2 " v 3 !t !!" ![R 2H2 ] ×0 = " div N R 2H2 + v 3 !t !!" ![R] ×0 = " div N R !t !!" ![NO3" ] ×−^ = " div N NO3" !t

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE Le bilan volumique de charge (avec les coefficients multiplicateurs indiqués ci-dessus) donne donc bien : !" !" & !# " z i �C i ( = ) div j + � [ +2v 1 ) 2 (v 1 ) v 2 ) ) (v 2 ) v 3 ) ) (v 2 + v 3 ) ] = ) div j % !t $ i '

179

y

On retrouve l’équivalent de cette propriété en électromagnétisme avec l’expression : !" !" ch + div j = 0 !t [ C m−3 ] avec : ρ!"ch la densité volumique de charge j la densité de courant, module en [A m−2 ] L’application de ces bilans volumiques de matière aux milieux conducteurs des systèmes électrochimiques, et plus généralement aux chaînes électrochimiques, entraîne une propriété importante pour le courant, comme cela est démontré ici. L’hypothèse d’électroneutralité locale du milieu, qui est valable au sein de tout conducteur au niveau macroscopique après un régime transitoire très court [11], se traduit par : !" ! zi C i = 0 et donc div j = 0 i

Après ce régime transitoire, le flux de matière normal à l’interface entre le conducteur et les milieux isolants est nul. Par application du théorème d’OSTROGRADSKY [12], on déduit que le débit de charge est le même dans toutes les sections de conducteur (perpendiculaire ou non à la densité de courant, comme cela est représenté sur la figure 4.3) : !" !" !" !" !! j . n dS " !! j ’ . n’ dS + 0 = 0 (S)

(S’)

On peut également retenir que dans le cas d’une géométrie plane, le vecteur densité de courant global est identique en tout point d’une chaîne électrochimique : !" !j !" div j = =0 " j = Cte !x C’est ainsi, grâce à la propriété d’électroneutralité en volume d’un matériau conducteur, qui s'étend à une chaîne électrochimique, qu’on peut définir sans ambiguïté (en dehors du signe) le courant I, puisqu’il est le même dans toutes les sections : !" !" !" !" I = !! j . n dS = !! j ’ . n’ dS (S)

(S’)

Rappelons que le signe du courant dépend de l’orientation de la normale à l’interface et que la convention usuelle des électrochimistes consiste à orienter la normale du métal vers l’électrolyte, ce qui a pour conséquence que le courant est positif à l’interface avec une anode et négatif pour une cathode [13]. [11] Cette discussion fait l’objet de la section 3.1.1.1 : l’ordre de grandeur du temps d’établissement de l’électroneutralité dans un électrolyte est la nanoseconde. [12]

! "!

!! j . n #

dS =

"!

!!! div j

dV

[13] Cette convention de signe est illustrée sur les figures 1.5 et 1.7 et décrite de manière détaillée dans la section 1.4.1.3.

180

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

(S’)

(S)

ö n'

Figure 4.3 - Schéma d’un volume conducteur parcouru par un courant

4.1.3 - BILAN INTERFACIAL DE MATIÈRE 4.1.3.1 - CAS GÉNÉRAL Pour réaliser un bilan de matière de l’espèce i au niveau de l’interface, on considère un petit volume, d’épaisseur 2 δx très faible, qui inclut la zone interfaciale et dont les surfaces limites se trouvent respectivement dans les deux phases extrêmes, notées α et β, comme cela est représenté sur la figure 4.4, pour un système à géométrie plane. Phase α

Phase β ö Ni(+δx)

(S)

+δx

−δx

axe des x : normale orientée de α vers β

2 δx Figure 4.4 - Schéma d’une interface traversée par un flux de matière en géométrie plane

On notera Nn,i la composante de la densité de flux molaire de matière !!" !" de l'espèce i dans la direction normale à la surface au point considéré : N n ,i = N i . n . N n ,i est donc un scalaire. La normale est orientée par convention de la phase α vers la phase β [14]. On notera wSi la vitesse algébrique de production de l’espèce i par unité de surface (créée ou consommée localement par des réactions chimiques hétérogènes se produisant dans la zone interfaciale). Enfin on notera Γi la concentration surfacique de l’espèce i , c’est-àdire la quantité de matière par unité de surface dans le petit volume d’épaisseur 2 δx définissant la zone interfaciale (en mol m−2) [15]. [14] On peut choisir la convention inverse mais les signes des expressions qui suivent seront alors différents. [15] Cette notion est relativement complexe et une description plus rigoureuse dépasserait le cadre des objectifs de ce document. Il faudrait notamment faire appel à la notion d’excès de surface défini

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

181

En géométrie plane, la variation dni de la quantité de matière de l’espèce i dans le volume 2 S δx entre un instant t et un instant t + dt peut s’écrire : variation dni

= =

entrée Nn,i (−δx ) S dt

− −

sortie Nn,i (+δx ) S dt

= dΓi S On obtient donc :

N n ,i ! (+ " x ) # N n ,i $ (# " x ) = #

+ +

production locale wSi S dt

d% i + w Si dt

L’expression suivante est obtenue en faisant tendre l’épaisseur vers zéro pour une géométrie plane : d$ (N n ,i )«x =0»! " (N n ,i )«x =0»# = " i + wSi dt La généralisation à une géométrie quelconque s’écrit [16] :

(N n ,i )interface! " (N n ,i )interface# = "

$% i + wSi $t

avec : Γi la concentration surfacique de l’espèce i Nn,i la composante normale de la densité de flux molaire de matière de l’espèce i wSi la vitesse de production de l’espèce i par unité de surface (au sens algébrique)

[ mol m−2 ] [ mol m−2 s−1 ] [ mol m−2 s−1 ]

Attention, les signes indiqués ci-dessus tiennent compte de la définition précise de l’orientation de la normale à l’interface (de la phase α vers la phase β). La notation « x = 0 » est employée pour souligner que ce n’est pas une notion mathématique correspondant à une surface : on fait référence à une zone interfaciale. En particulier le passage à la limite correspond à δx très petit mais non-nul. Cependant dans la suite du document, pour alléger l’écriture, on se contentera d’écrire x = 0 pour les grandeurs relatives à l’interface (en géométrie plane). De même, toujours pour alléger l’écriture, on n’indiquera plus dans la suite du texte l’indice n pour rappeler que les relations sont écrites pour les composantes normales des densités de flux et de courant. Comme dans le cas des réactions homogènes dans les bilans volumiques, il y a un lien entre la vitesse de production par unité de surface et les vitesses de réactions hétérogènes : wSi = " !ir vSr réactions

où νir est le nombre stœchiométrique algébrique de l’espèce i dans la réaction r. dans le modèle de GIBBS pour décrire la thermodynamique des interfaces. Notons que l’on peut encore dire que Γi est l’intégrale de la concentration volumique sur une distance sur la normale à la surface égale à l’épaisseur de la zone interfaciale. La valeur de Γi ainsi définie dépend du choix de δx , mais on peut montrer que ce n’est pas le cas de sa variation temporelle, qui est le terme important dans les équations discutées dans le reste de ce document. [16] En particulier, lorsqu’on n’est plus en géométrie plane, la concentration surfacique Γi n’est plus nécessairement identique en tout point de la surface et devient une fonction de plusieurs variables (temps et espace), le terme qui intervient dans le bilan de matière interfacial est donc une dérivée partielle : ∂Γi /∂t , au lieu de dΓi /dt , en géométrie plane.

182

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

z On peut par exemple illustrer les bilans interfaciaux de matière sur un système avec une réaction de transfert

de phase entre une solution aqueuse de chlorure de potassium et une solution d’éther couronne (ligand L) dans un solvant organique (figure 4.5). EAU

L

K+

phase α

PHASE ORGANIQUE

phase β

+

KL

x

0

Figure 4.5 - Schéma d’une réaction de transfert de phase

On choisit d’orienter l’axe x dans la direction eau → solvant organique (phase α : eau et phase β : phase organique). On note vS la vitesse de la réaction surfacique : L + K+ KL+ En régime stationnaire, le terme de variation de la concentration surfacique est nul et le bilan de matière local à l’interface s’écrit donc : (N i )x =0! " (N i )x =0# = wSi En tenant compte du fait que les ions K+ ne sont pas mobiles dans la phase β, tandis que les espèces L et KL+ ne sont pas mobiles dans la phase α, on peut donc écrire :

(N L )x =0! " (N L )x =0# = wSL = " vS (N KL+ )x =0! " (N KL+ )x =0# = wS

KL+

= vS

(N K + )x =0! " (N K + )x =0# = wS + = " vS K

donc

(N KL+ )x =0! = (N K + )x =0" = # (N L )x =0! = vS

C'est en accord avec le sens des densités de flux de matière indiqué sur la figure 4.5 : NK+ et NKL+ sont de même sens alors que NL est de sens opposé.

y

4.1.3.2 - ESPÈCES ADSORBÉES On peut appliquer le même type de raisonnement pour une espèce adsorbée à l’interface. Ce type d’espèce n’est mobile dans aucune des deux phases (les espèces adsorbées peuvent éventuellement être mobiles le long de l’interface). Les flux normaux à la surface y sont donc nuls et la relation générale précédente se simplifie. Le bilan de matière local pour une espèce i adsorbée à l’interface s’écrit :

!" i = w Si !t En particulier, en régime stationnaire, puisque la concentration surfacique d’une espèce adsorbée est alors indépendante du temps, sa vitesse de production par unité de surface est nulle.

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

183

4.1.3.3 - INTERFACES ÉLECTROCHIMIQUES On se restreindra à la description des interfaces électrochimiques entre un métal et un électrolyte. Rappelons qu’il n’y a pas d’électrons libres et mobiles dans un électrolyte et pas d’ions mobiles dans un métal. Conformément aux conventions de signe des électrochimistes [17], la normale à l’interface est orientée vers le milieu dans lequel les ions sont mobiles, c’est-à-dire du métal vers l’électrolyte (figure 4.6) : MÉTAL

ÉLECTROLYTE

phase α

phase β

Figure 4.6 - Schéma d’une interface électrochimique

On obtient, pour une espèce i mobile dans l’électrolyte, la relation suivante :

(N i )interface = !

"# i + w Si "t

Attention, cette relation algébrique n’est valable que pour une espèce i mobile dans l’électrolyte, et si la normale à l’interface est effectivement orientée du métal vers l’électrolyte. Cette écriture fait apparaître deux termes. On peut donc séparer formellement chaque flux molaire de matière en la somme de deux termes :  un terme appelé faradique (courant, flux) [18]

( Nifarad )interface = wSi  un terme appelé capacitif [19] (ou pseudo capacitif pour une espèce neutre)

( Nicapac )interface = !

"# i "t

A une interface électrochimique réactive, les phénomènes de mouvement de charge font intervenir simultanément la réorganisation de la double couche et la réaction rédox hétérogène proprement dite. Dans les cas simples, par exemple lorsqu’il n’y a pas d’adsorption spécifique [20] et en présence d’électrolyte support, cette séparation formelle des densités de flux molaires, ou densités de courant, en un terme faradique et un terme [17] C’est le choix de compter positivement le courant à l’anode qui correspond à cette convention d’orientation de la normale à l’interface, comme cela est détaillé dans la section 1.4.1.3. [18] Ce terme est choisi car l’expression correspondante du flux de matière est la loi de FARADAY, décrite de manière intégrée dans la section 2.2.2.2 et démontrée dans la section 4.1.4. [19] Ce terme est choisi car le flux de matière correspondant est le plus souvent lié aux mouvements nécessités par la réorganisation de la double couche, dont la structure est proche de celle d'un condensateur (voir section 3.3.1). [20] Voir la section 2.2.1.2 pour une présentation succincte des phénomènes d’adsorption. On fait une distinction entre accumulation, par exemple liée aux réorganisations de la double couche, et adsorption spécifique quand un processus de liaison avec l’interface est en jeu.

184

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

capacitif traduit une réalité physique. En effet, les deux phénomènes correspondent alors à des mouvements d’ions différents :  pour les ions de l’électrolyte support, le bilan de matière local s’écrit :

"# i "t La part de courant due au mouvement des ions de l’électrolyte support est donc uniquement capacitive ;  pour les ions électroactifs, le bilan local de matière s’écrit : (N i )interface = !

(N i )interface = wSi La part de courant due au mouvement des ions électroactifs est donc uniquement faradique, c’est-à-dire liée à la réaction rédox interfaciale.

4.1.4 - DÉMONSTRATION DE LA

LOI DE

FARADAY

La loi de FARADAY, que nous avons vue précédemment sous sa forme intégrée (voir section 2.2.2.2), peut être démontrée à partir des bilans interfaciaux de matière. Dans les cas simples où il n'y a pas d'espèces spécifiquement adsorbées à l'interface électrochimique, il existe une relation de proportionnalité entre les différentes densités de flux d’espèces électroactives à l’interface. Cette relation se rapproche d'un bilan de matière tenant compte des nombres stœchiométriques, comme dans toute réaction chimique. On peut alors relier la quantité d’électricité passant dans le système (par exemple par l'intermédiaire de la densité de courant) et le bilan de la transformation de matière. Considérons un système électrochimique à géométrie plane où se déroule une réaction d’oxydation interfaciale faisant intervenir des espèces mobiles dans l’électrolyte. On choisit le métal comme phase α et l’électrolyte comme phase β, avec, à l’interface : | νRed | Red β

| νOx | Ox + | νe | e− β α

Rappelons que les nombres stœchiométriques sont comptés algébriquement dans les lois de la physico-chimie. On obtiendra donc une formulation générale qui peut s’appliquer indifféremment à une demi-réaction se déroulant dans le sens de l’oxydation (νe = + n) ou de la réduction (νe = − n) [21], pourvu que l’on considère aussi une vitesse algébrique de réaction correspondant au sens d’écriture de la réaction rédox. On peut écrire pour les espèces mobiles dans l’électrolyte (phase β) et pour l’électron dans le métal (phase α) le bilan de matière local pour la partie faradique :

( Nifarad )interface! " ( Nifarad )interface# = + wSi ( N efarad )interface! " ( N efarad )interface# = + w Se

[21] n est le nombre (positif) d’électrons échangés dans la demi-réaction rédox considérée (voir la section 2.1.2.1).

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

185

Les vitesses de production (notées wSi et wSe ) sont reliées à la vitesse de réaction rédox (notée vS ) : w Si = ! i v S

w Se = ! e v S

On obtient finalement :

( Nifarad )interface = !i v S ( N efarad )interface = ! " e v S

Il en découle, pour toutes les espèces mobiles dans l’électrolyte intervenant dans l'équation-bilan de la demi-réaction rédox, la relation vectorielle : 1 !!" farad 1 !!" farad (N i )interface = " (N )interface !i !e e Dans le métal, la seule espèce mobile est l’électron, donc : !" !!" !!" j = je = ! � N e Ainsi, pour une espèce i mobile dans l’électrolyte, on obtient l'expression suivante de la loi de FARADAY : !!" farad !" farad ! !!" farad ! !" farad j = � e (N i )interface ou (N i )interface = i j !i ! e� !" farad la densité de courant faradique, module en [ A m−2 ] avec : j [ C mol−1 ] ^ la constante de FARADAY νi le nombre stœchiométrique algébrique de l’espèce i !!" farad (N i )interface la densité de flux molaire faradique de matière à l’interface, module en

[ mol m−2 s−1 ]

Attention, cette relation est valable algébriquement à condition de respecter les conventions de signe choisies. Pour une interface, le bilan interfacial de matière a été écrit en orientant la normale à la surface du métal vers l’électrolyte. Comme cela a déjà été précisé, cela correspond à compter positivement les courants à l’anode et négativement ceux traversant la cathode. De plus, cette relation n’est valable que pour une espèce i mobile dans l’électrolyte. Le lien avec la forme intégrée de la loi de FARADAY, présentée dans la section 2.2.2.2, se fait aisément en introduisant la définition de la densité de flux molaire de matière :

N ifarad = On a alors :

dnifarad =

1 dnifarad S dt

!i farad j S dt !e �

On retrouve la loi de FARADAY sous sa forme intégrée en faisant une intégration entre les instants t et t + Δt : "i "i t +!t farad !nifarad = Q farad = I (t ) dt "e � " e � #t

186

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

CONSERVATION-RESTAURATION D’OBJETS ARCHÉOLOGIQUES Document élaboré avec l’aimable collaboration de E. G UILMINOT, ingénieur de recherche au Laboratoire Arc’Antique, Nantes

En terre ou en mer, le séjour prolongé d’objets métalliques ferreux ou cuivreux conduit irrémédiablement à leur altération par formation de produits de corrosion. Dans la majorité des cas, ces produits de corrosion contiennent des phases chlorurées. Après la fouille, ces objets dits « actifs » sont sujets à une reprise accélérée de la corrosion, qui entraîne la disparition irréversible de la surface d’origine où est inscrite l’histoire de l’objet (inscriptions, décors mais aussi les marques d’usures). Dans le cas des matériaux ferreux, les dégradations peuvent être plus importantes et conduire à la perte d’une partie, voire de la totalité de l’objet. C’est pourquoi, dès leur arrivée dans les ateliers de conservation-restauration, ces objets subissent un traitement destiné à les stabiliser. Mesure continue de l'intensité de courant du circuit

Contrôle hebdomadaire du potentiel du canon avec une électrode de référence

+

mA v

Mesure continue de la tension imposée aux bornes de la cellule

v

Alimentation stabilisée



Cathode = canon

Anode = grillage en acier inoxydable

Solution basique

Schéma du principe de traitement de stabilisation d’une pièce métallique (canon) par électrolyse (d'après un schéma aimablement fourni par E. GUILMINOT - Laboratoire Arc'Antique)

Lorsqu’ils proviennent du milieu sous-marin, les objets ferreux sont généralement entourés de concrétions ou gangue (mélange de calcite, de quartz et d’organismes marins) qui masquent la surface d’origine de l’objet. L’élimination de ces concrétions constitue la première étape du traitement, qui peut être menée par électrochimie. L’objet est polarisé cathodiquement tandis qu’une cage en acier inoxydable épousant la forme de l’objet est polarisée anodiquement. Le potentiel de l’objet doit être contrôlé soigneusement car le bullage d’hydrogène qui en résulte ne doit pas être trop important afin d’éviter la fissuration de ce dernier. Ce traitement cathodique doux a pour premier objectif de fragiliser la gangue afin de faciliter son élimination.

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

187

Le deuxième objectif du traitement électrochimique est l'extraction des chlorures provenant de la pièce vers l’électrolyte. Cette élimination est essentielle si l’on veut éviter que la pièce traitée ne se corrode à nouveau très rapidement lorsqu’elle sera exposée à l’air. La concentration en ions chlorure de l’électrolyte est mesurée périodiquement au cours de l’opération. Le traitement par électrolyse est terminé dès que la concentration en ions chlorure dans l’électrolyte devient suffisamment faible. Pour les objets provenant du milieu marin, les quantités d'ions chlorure à extraire sont très importantes : elles peuvent atteindre plusieurs kilogrammes de sels pour un canon en fonte de fer d’une tonne. Les bains doivent donc être renouvelés régulièrement, dès la saturation de la solution en ions chlorure. La durée du traitement va dépendre de la nature du matériau et du lieu d’origine. Pour les objets de grandes dimensions provenant du milieu sous-marin, les durées moyennes sont de 6 mois à 1 an pour les matériaux cuivreux, de 1,5 à 2 ans pour les fers forgés et de 2 à 3 ans pour les fontes de fer. Mais la stabilisation de certains canons très altérés en fonte de fer nécessite plus de 5 ans de traitement.

Etat avant traitement (© J.G. AUBERT - Laboratoire Arc’Antique)

Le traitement par électrolyse permet un nettoyage homogène et respectueux de la surface d’origine. Un tel traitement peut « faire parler » l’objet en révélant des inscriptions à sa surface, telles que la marque du fondeur, élément primordial à l’authentification et l’identification de l’objet.

Etat après traitement (© J.G. AUBERT - Laboratoire Arc’Antique). Canon provenant de l’épave de l’ALCIDE datant du début du XVIII e siècle, exposé dans la ville de Carantec

188

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

z L’exemple de la réduction des ions Fe3+ à l’interface avec une électrode de platine est schématisé sur la figure 4.7 pour un système à géométrie plane. On considère que la solution aqueuse contient les ions Fe2+, Fe3+, K+ et NO3− (KNO3 jouant le rôle d'électrolyte support). MÉTAL

Fe

e– Fe

3+ ÉLECTROLYTE

2+

x

0

Figure 4.7 - Schéma d’une interface où se déroule une réaction de réduction farad La loi de FARADAY se traduit par : j farad = �(N Fefarad 3+ )x =0 = ! �(N 2+ )x =0 Fe

Ce résultat peut être retrouvé par deux méthodes différentes, l’une exprimant la densité de courant dans le métal, comme dans ce qui précède, l’autre dans l’électrolyte. La première est plus rapide mais la deuxième permet de bien comprendre l’ensemble de ces relations. On peut également remarquer qu’il traduit, par une relation mathématique, le lien qualitatif que l’on peut déduire du schéma de la figure 4.7 : les vecteurs densités de flux de matière des espèces électroactives sont de sens opposés. On considère ci-dessous la demi-réaction dans son sens effectif de déroulement (réduction ici), en notant vS sa vitesse : Fe2+ e− + Fe3+

! Fe 2+ = +1 ! Fe 3+ = "1 ! e = "n = "1

On a donc :

Le bilan interfacial de matière pour chacune des espèces du système donne les résultats suivants (raisonnement identique au développement précédent) : farad (N Fefarad 3+ )x =0 = ! (N 2+ )x =0 = ! vS Fe

(N efarad )x =0 = vS farad farad (N NO )x =0 = 0 ! )x =0 = (N + K 3

Par définition, la densité globale de courant faradique en chaque point de l’espace s’écrit : !" !" !!" j = ! ji = ! z i � N i i

i

 en appliquant cette relation dans le métal, où seuls les électrons sont mobiles :

j farad= ! �(N efarad )x =0 = ! �v S  en appliquant cette relation dans l’électrolyte, où il faut tenir compte de tous les ions en solution :

(

farad farad farad j farad= � 3N Fefarad ! N NO 3+ + 2 N 2+ + N + ! Fe K

j

farad

3

)

x =0

= �(! 3vS + 2vS + 0 ! 0) = ! �v S

On obtient dans les deux cas la loi de FARADAY : farad j farad= ! �vS = �(N Fefarad 3+ )x =0 = ! �(N 2+ )x =0 Fe

y

Lorsque plusieurs réactions se produisent à la même interface, le même type de raisonnement permet de démontrer que les courants faradiques sont additifs, comme cela est illustré dans l'exemple ci-dessous.

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

189

z Reprenons l’exemple précédent mais avec une solution non-désaérée. Il y a alors deux réductions simultanées : celle des ions Fe3+ et celle du dioxygène dissous :

e− + Fe3+

vS 1

Fe2+





4 e + 2 H 2O + O 2 4 OH vS 2 Le bilan interfacial de matière pour chacune des espèces chargées du système donne les résultats suivants (raisonnement identique au développement précédent) : farad (N Fefarad 3+ )x =0 = ! (N 2+ )x =0 = ! vS 1 Fe farad (N OH ! )x =0 = 4 vS 2

(N efarad )x =0 = vS1 + 4 vS 2 farad farad (N NO )x =0 = 0 ! )x =0 = (N + K 3

On peut écrire pour la première demi-réaction : farad j 1farad = �(N Fefarad 3+ )x =0 = ! �(N 2+ )x =0 Fe

Si la deuxième demi-réaction était seule, on aurait : farad j 2farad = ! �(N OH ! )x =0

On obtient donc, lorsque les deux demi-réactions se produisent simultanément : farad j farad = ! �(N efarad )x =0 = ! �(N Fefarad 2+ )x =0 ! �(N ! )x =0 OH

c’est-à-dire :

j farad = j 1farad + j 2farad

y

Lorsqu’il s’agit de faire un bilan de matière sur un volume macroscopique d’électrolyte dans un système électrochimique, il faut prendre en compte toutes les causes de variations. La loi de FARADAY ne traduit que celles qui sont liées à une réaction électrochimique, comme le montre le premier exemple. Dans beaucoup de cas, la situation est plus compliquée :  sur l’ensemble du volume d’électrolyte, il faut prendre en compte le bilan des réactions à l’anode et à la cathode ;  s'il y a une circulation d’électrolyte, comme c'est le cas dans de nombreux exemples industriels, on a aussi une variation de la quantité de matière liée à la convection forcée.

4.2 - PASSAGE D’UN COURANT

DANS UN MILIEU CONDUCTEUR MONOPHASIQUE

L’allure des courbes intensité-potentiel et, plus généralement, les relations (I, U, t ) dans un système électrochimique font intervenir à la fois la cinétique des phénomènes aux interfaces (en particulier les transferts de charge aux interfaces réactives) et celles des phénomènes de transport de matière à l’intérieur des volumes conducteurs. On décrira en premier lieu ce dernier type de phénomènes, associé au passage du courant dans le

190

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

volume des milieux conducteurs, avant de revenir [22] sur les phénomènes liés au passage du courant à travers les interfaces. On se propose donc de décrire les phénomènes de transport de matière dans le cas particulier d’espèces chargées.

4.2.1 - PHÉNOMÈNES DE CONDUCTION : APPROCHE MACROSCOPIQUE 4.2.1.1 - DIFFÉRENTS MOTEURS DU TRANSPORT Reprenons la classification des différents moteurs de déplacement de la matière :  la migration correspond au déplacement d’espèces chargées sous l’influence d’un !!" champ électrique, E ;  la diffusion est le déplacement d’espèces, neutres ou chargées, sous l’influence d’un gradient de potentiel chimique. Par exemple, lorsque l’on met en contact deux solutions dans un même solvant contenant une espèce neutre M à deux concentrations différentes, le système tend vers son état d’équilibre, c’est-à-dire une solution homogène de concentration intermédiaire. Il y a, avant d’atteindre cet état d’équilibre, des états hors équilibre où l’on observe un déplacement spontané de M de la solution la plus concentrée vers la solution la moins concentrée. Ce phénomène, contrairement au précédent, est effectif aussi bien pour des espèces chargées que pour des espèces neutres. Bien que, le plus souvent, la diffusion soit associée à un gradient de concentration, celle-ci est plus précisément créée par un gradient de potentiel chimique, ce qui n’est pas équivalent : il peut y avoir gradient d’activité sans gradient de concentration. C’est par exemple le cas lors de la mise en contact de deux solutions dans un même solvant contenant le même soluté, d’un côté seul et de l’autre mélangé à un électrolyte support. Il existe initialement un gradient de force ionique qui entraîne un gradient d’activité, bien qu’il n’y ait pas de gradient de concentration. On peut regrouper les deux phénomènes précédents en utilisant la notion de potentiel électrochimique : ! = µ + z �! µ i i i Le gradient de potentiel électrochimique correspond donc aux moteurs du transport par diffusion et migration, qui sont couplés dans le cas général ;  la convection correspond au déplacement global du milieu, lorsque celui-ci est fluide. Ce mouvement peut être un mouvement de convection naturelle, par exemple sous les effets des forces de gravitation (différences de densité) ou des vibrations incontrôlées. Ce phénomène de convection naturelle, surtout sensible dans des systèmes de grandes dimensions, peut aussi être à l’origine d’observations expérimentales sur des dispositifs plus petits, ce qui est le cas par exemple en chimie analytique. On peut d’autre part utiliser un dispositif extérieur pour entretenir un mouvement de convection forcée du fluide (par exemple localement pour une électrode à disque tournante, EDT). Il n'y a pas de phénomènes de convection dans les matériaux solides.

[22] Cet aspect des phénomènes liés au passage du courant fait l’objet de la section 4.3.

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

191

L’existence d’un gradient de température peut avoir différentes conséquences indirectes sur les phénomènes de transport de matière. Tout d’abord, il entraîne en général un gradient de potentiel chimique et donc des phénomènes de diffusion. Il entraîne aussi généralement un gradient de densité du milieu et donc un mouvement de convection naturelle. De plus, on peut observer un couplage entre le flux thermique et le flux de matière (voir la section suivante). C’est le cas de l’effet SORET, ou diffusion thermique, qui correspond à l’observation d’un phénomène de transport de matière en présence d’un gradient de température, mais sans gradient de concentration.

4.2.1.2 - THERMODYNAMIQUE DES PROCESSUS IRRÉVERSIBLES LINÉAIRES Les phénomènes de transport de matière (et donc notamment de charge) sont nécessairement des processus irréversibles, au sens thermodynamique. On peut envisager une relation linéaire entre flux et force. Cette hypothèse de linéarité peut être remise en question si les forces appliquées au système deviennent importantes. Par exemple dans le cas du transport de matière par migration, on s’écarte d’un comportement linéaire lorsque l’on augmente l’intensité du champ électrique [23] ou si l’on utilise un champ électrique variable avec une fréquence très élevée [24]. Lorsqu’il y a dans le système plusieurs flux et forces, la thermodynamique des processus irréversibles linéaires postule une relation matricielle (avec une matrice symétrique : relations d’ONSAGER) entre les différents flux et les différentes forces. Les termes nondiagonaux non-nuls de la matrice traduisent le couplage entre phénomènes. Dans le cas étudié ici, les flux et les forces à considérer sont des grandeurs vectorielles et les flux de matière considérés sont relatifs au mouvement moyen du milieu. Les densités de flux molaires de matière de chaque type !!!" d’espèce (y compris le solvant, s’il y a lieu), !!" rel N i , et la densité de flux de chaleur, NT , sont créées par les gradients de potentiel ! , de chaque type d’espèce et par le gradient de température. Dans électrochimique, µ i le cas le plus général, on écrit : !!!!" !!!!" !!" rel # ! L grad T N i = !" Lik grad µ iT k k

!!!!" !!!!" !!!" # ! L grad T NT = !" LTk grad µ TT k k

Par la suite on se restreindra à des systèmes ne comportant pas de gradient thermique et tels que l’on puisse se ramener à une écriture où seuls les termes diagonaux Lii sont conservés : !!!!" !!" rel # N = ! L grad µ i

ii

i

Il faut prendre garde au fait que cette écriture qui parait simple, puisque chaque densité de flux est directement proportionnelle à une seule force, recouvre des couplages implicites par l’intermédiaire des termes de migration (qui font intervenir le même champ électrique) et de la relation d’électroneutralité. En ce qui concerne ce dernier [23] Pour une solution électrolytique, ce phénomène est connu sous le nom d’effet WIEN. [24] Ce phénomène est connu sous le nom d’effet FALKENHAGEN.

192

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

point, introduire la relation d’électroneutralité (couplage entre les concentrations) dans les relations d’ONSAGER, permet par exemple de réécrire les équations précédentes en éliminant le potentiel, ce qui a pour conséquence de remplacer les potentiels électrochimiques des ions par des expressions en fonction des potentiels chimiques des électrolytes. Ces derniers sont accessibles expérimentalement contrairement aux potentiels électrochimiques, qui sont essentiellement des concepts théoriques, très utiles au niveau pédagogique.

z L’exemple présenté ci-dessous illustre le couplage des expressions de densité de flux molaire de matière par la

relation d’électroneutralité. Nous le développons ici bien qu’il nécessite la connaissance des expressions mathématiques des différentes composantes de la densité de flux de matière qui ne sont exposées que dans les deux paragraphes suivants (voir sections 4.2.1.3 et 4). Considérons le passage d’un courant dans un système à géométrie plane avec une solution aqueuse comprenant un électrolyte 1-1, par exemple une solution d’acide chlorhydrique. On négligera la convection pour ne prendre en compte que la migration et la diffusion des différentes espèces. Comme il n’y a que deux types d’ions, l’électroneutralité du milieu entraîne l’égalité des concentrations en cation (H+) et anion (Cl−) en tout point du volume d’électrolyte : on peut observer un profil de concentration mais il doit être identique pour les deux types d’ions. On note C cette concentration unique. Les densités de flux molaires de matière des deux types d’ions s’écrivent alors sous la forme simplifiée suivante (voir section 4.2.1.4) : $ "C "# & N + = ! D+ "x ! u+ C "x % & N ! = ! D! "C + u! C "# ' "x "x

où D+ et D−, les coefficients de diffusion respectifs de H+ et Cl−, ainsi que u+ et u− leurs mobilités électriques (voir la définition dans la section 4.2.1.4), sont supposés indépendants des concentrations, et donc de x. En conséquence, ils sont considérés comme constants dans les équations. Si l’on écrit les équations de bilan en volume de ces espèces [25], on obtient deux équations différentes pour définir la variation temporelle de la concentration : * !C !2C ! $ !# ' !N + =" = D+ 2 + u+ &C ) ,, !x !x % !x ( !t !x + 2 , !C = " !N " = D ! C " u ! $&C !# ') " " ,- !t !x !x % !x ( !x 2 On peut donc extraire le terme de migration de la première équation pour le remplacer dans la deuxième et obtenir l’équation simple suivante :

!2C !C u"D+ + u+D" !2C = = D ± u " + u+ !t !x 2 !x 2 Le champ de concentration équivaut ainsi à celui d’un phénomène de diffusion pure (sans migration) d’une espèce (c’est-à-dire de HCl) avec un coefficient de diffusion moyen, D±. Cependant ce n’est pas strictement équivalent à la diffusion d’une molécule neutre car l’établissement d’un profil de concentration s’accompagne ici de l’établissement d’un champ de potentiel électrique.

[25] Les bilans volumiques de matière sont décrits dans la section 4.1.2. Il s’agit ici d’un système à géométrie plane et sans réaction chimique en volume.

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

193

Le lien entre les deux champs à chaque instant est déduit de la relation suivante :

D ) D) !2C ! # !" & %C (=) + u) + u+ !x 2 !x $ !x ' Comme cela est détaillé ensuite il faut également écrire les conditions aux frontières pour aller plus loin et décrire entièrement le système [26].

y

4.2.1.3 - LIEN ENTRE MIGRATION ET DIFFUSION Le traitement précédent, à l’aide des potentiels électrochimiques, suppose que les mécanismes de déplacement au niveau microscopique sont les mêmes pour la migration et la diffusion. Cette hypothèse peut conduire à des erreurs lorsque les porteurs de charge ne sont pas bien identifiés. C’est notamment le cas en présence d’une quantité importante de paires d’ions électriquement neutres. Dans ce cas-là en effet, ces paires d’ions participent à la diffusion sans contribuer à la migration. L'expression des densités de flux de matière en fonction du potentiel électrochimique implique l’existence d’un coefficient de proportionnalité identique pour les forces motrices de la diffusion et de la migration. Une autre manière d'exprimer cette relation entre migration et diffusion est d'utiliser la notion de mobilité électrochimique (ou mobilité absolue, u!i ), c'est-à-dire le module de la vitesse relative limite de l'espèce chargée lorsqu'elle est soumise à une force unité (pour une mole). Considérons !!" rel une espèce chargée soumise à des phénomènes de sa vitesse relative au mouvement moyen du milieu, de migration et diffusion avec ! i !" vitesse ! milieu . D’après cette définition de la mobilité électrochimique, et en gardant la convention utilisée précédemment dans la section 3.1 pour le potentiel électrochimique (c'est-à-dire une notation pour une mole), on peut écrire : !!" rel !!!!" ! i = " u#i grad # µi L’unité de la mobilité électrochimique est donc mol m2 s−1 J−1 ou mol m s−1 N−1 ou encore mol s kg−1. Grâce au lien entre densité de flux molaire et vitesse locale vu à la section 4.1.1.1, on retrouve la relation précédente de proportionnalité entre flux et force (thermodynamique des processus irréversibles linéaires) : !!" rel !!!!" = ! C u# grad # µ N i

i

i

i

Si l’on développe l’expression du potentiel électrochimique, on peut séparer les deux termes de diffusion et migration : !!!!" !!!!" !!" rel N i = ! C i u#i grad µi ! C i u#i z i � grad " !!!!" !!" !!" rel N i = ! C i u#i RT grad (ln ai ) + C i u#i z i � E [26] Il s’agit notamment d’écrire les expressions des flux aux interfaces électrochimiques. Différents exemples sont donnés dans la section 4.3. De plus un exemple proche de celui décrit ici, avec un électrolyte 1-1 en l'absence d’électrolyte support, est traité de manière complète dans l’annexe A.4.1. On montre en particulier le profil de potentiel stationnaire dans l’électrolyte. Une discussion sur la validité de l’électroneutralité est en particulier menée.

194

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Cette expression met en évidence, comme nous le détaillerons ensuite, que les coefficients caractérisant les termes de migration et diffusion ne sont pas indépendants. Mais attention, ce n’est pas parce qu’il existe un lien entre les facteurs de proportionnalité des composantes migration et diffusion, que les densités de flux de matière correspondant sont colinéaires et de même sens : les forces respectives (liées aux gradients de potentiel électrique ou d’activité) n’ont a priori aucun lien entre elles. Ainsi, par exemple, on peut rencontrer des cas où les courants de migration et de diffusion d’une espèce i sont dans le même sens et d’autres où ils s’opposent [27].

4.2.1.4 - EXPRESSION DES DENSITÉS DE FLUX MOLAIRE DE MATIÈRE ET DE COURANT

!" En présence de convection, le milieu est en mouvement à une vitesse moyenne ! milieu et la densité de flux molaire de matière relatif est du type : !!!!" !!" rel !!" !" # N i = C i (!i " ! milieu ) = " C i u#i grad µ i Si l’on passe aux densités de courant : !" !!" !!" !!" rel !" j i = z i � N i = z i � C i !i = z i � (N i + C i ! milieu ) !!!!" !!" !" !" ji = " C i z i � u#i RT grad (ln ai ) + C i u#i z i 2 �2 E + C i z i � ! milieu L'expression usuelle des densités de courant ne fait pas intervenir la mobilité électrochimique comme ci-dessus mais plutôt :  la conductivité molaire pour le terme de migration :

!i = z i 2 �2 u!i La conductivité molaire λi est exprimée en S m2 mol−1 (ou aussi usuellement en S cm2 mol−1). On trouve aussi des expressions faisant apparaître la mobilité électrique, ui , qui représente la vitesse relative limite d’une espèce chargée lorsqu'elle est soumise à un champ électrique unité (c’est-à-dire 1 V m−1) et s’exprime donc en m2 s−1 V−1. Il existe des relations simples entre la mobilité électrochimique, la mobilité électrique et la conductivité molaire d’une même espèce :

ui = z i � u!i avec : ui zi ^ u! i

et

!i = � z i ui

la mobilité électrique le nombre algébrique de charge de l’espèce i la constante de FARADAY la mobilité électrochimique la conductivité molaire de l’espèce i

λi  le coefficient de diffusion pour le terme de diffusion :

[ m2 s−1 V−1 ] [ C mol−1 ] [ mol m2 s−1 J−1 ] [ S m2 mol−1 ]

Di = u!i RT Le coefficient de diffusion Di est exprimé en m2 s−1 (ou aussi usuellement en cm2 s−1). [27] Des exemples de diverses situations sont décrits dans la section 4.3.1.5. On peut même envisager des situations où ces courants de migration et diffusion ne seraient pas colinéaires

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

195

Cette dernière relation est connue sous le nom de relation de NERNST-EINSTEIN [28]. Elle peut être écrite de manière équivalente avec la mobilité électrique :

� ui = zi Di RT On a alors l'expression suivante de la densité de courant de l’espèce i : !!!!" !!" !" !" j i = ! Di z i � C i grad (ln ai ) + "i C i E + C i z i � # milieu #%%%!% & #% " $%%%%& # !"%$% !"%$%%& ji convection ji diffusion ji migration avec le lien entre migration et diffusion (voir la section précédente) qui se traduit aussi par la relation : �2 !i = Di z i 2 RT Finalement,  pour un milieu conducteur idéal (par exemple une solution électrolytique infiniment diluée), on peut confondre activité et concentration et utiliser la conductivité molaire à dilution infinie, λi0, et le coefficient de diffusion à dilution infinie, Di0, pour obtenir l’expression simplifiée suivante des différentes composantes de la densité de courant de l’espèce i : !!!!" !!" !" 0 !" j i = ! Di 0 z i � grad C i + "i 0 C i E + C i z i � # milieu #%%%$%%%& #%$% & #%%$%%& !" 0 !" 0 !" 0 ji migration ji diffusion ji convection avec la relation :

!i 0 = Di 0 z i 2

�2 RT

On peut écrire de manière équivalente la densité de flux 0 fonction de Di0, λi0, u!i ou ui0 : !!!!" !!" !!" � Ni 0 = ! Di 0 grad C i + zi Di 0 C i E RT !!" !!" 0 #i 0 RT !!!!" #i 0 Ni = ! grad C + Ci E i 2 2 z � zi � i !!!!" !!" !!" 0 0 Ni = ! u#i RT grad C i + z i � u#i0 C i E !!" !!" zi ui 0 RT !!!!" Ni 0 = ! grad C i + ui 0 C i E z � z $i &&%&&' $i &&%&& ' !!" 0 !!" 0 N i migration N i diffusion

molaire de matière en

!" + C i " milieu !" + C i " milieu !" + C i " milieu !" + C i " milieu $&%&' !!" N i 0convection

[28] Certains auteurs l’appellent relation d’EINSTEIN et réservent la dénomination relation de NERNSTEINSTEIN pour la relation décrivant le lien entre la conductivité molaire à dilution infinie et les coefficients de diffusion d’un électrolyte Ap+Bp− :

! 0 = (p+ D+ z +2 + p" D" z "2 )

�2 RT

196

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

 pour un milieu conducteur quelconque (par exemple une solution électrolytique concentrée), les activités ne sont pas confondues avec les concentrations des espèces. Les coefficients d’activité, γi , tout comme u!i , λi et Di , dépendent a priori des concentrations de l’ensemble des autres espèces, même s’il n’y a pas de couplage entre flux des différentes espèces au sens de la thermodynamique des processus irréversibles. Comme on connaît rarement avec précision la relation entre activité et concentrations, le coefficient de diffusion Di est difficilement accessible expérimentalement. On peut alors introduire un coefficient de diffusion apparent Diapp, qui dépend toujours des concentrations de l’ensemble des autres espèces. En introduisant la relation ai = γi Ci dans l’expression générale de la densité de courant de diffusion : !!!!" !" j i diffusion = ! Di z i � C i grad (ln ai )

!!!!" !" j i diffusion = ! z i � C i Di grad (ln "i + lnC i )

on obtient :

!" $ " ln #i ' !!!!" j i diffusion = ! z i � C i Di & 1 + ) grad (lnC i ) " lnC i ( % soit, finalement :

!" $ " ln #i ' !!!!" j i diffusion = ! z i � Di & 1 + ) grad C i " lnC i ( % #%%$%%& Di app

Il convient de remarquer que le coefficient de diffusion apparent, Diapp, qui dépend des concentrations des différentes espèces par l’intermédiaire du coefficient d’activité, ne vérifie plus la relation avec λi dérivée de la loi de NERNST-EINSTEIN :

Di app z i 2

�2 �2 ! Di z i 2 = "i RT RT

On a finalement de manière tout à fait générale :

!!!!" !!" !!!" !" zi ui C i E + C i " milieu N i = ! Di app grad C i + |z i | #%!% & #% & !% !"$%%% !!% !" $%%& #!!% !% " $%% N i diffusion N i convection N i migration !!!!" !!" !!" !" j i = ! z i � Di app grad C i + "i C i E + C i z i � # milieu #%%% & # & !% !" $%%%% !!"%$%& #%!% !"%$%%% j i diffusion j i convection j i migration Dans la suite du texte, afin de ne pas alourdir les notations, on emploiera uniquement la notation Di , même lorsque le système considéré n’est pas idéal. On assimile donc Diapp et Di . Mais il faut garder en mémoire que, dans un cas quelconque, ces relations font apparaître les trois types de moteur du mouvement pour une espèce, avec des coefficients de proportionnalité sans lien simple entre eux. De plus la répartition entre les termes de migration et diffusion n’est pas accessible expérimentalement pour une espèce chargée. Seule une hypothèse du type de la relation de NERNST-EINSTEIN peut

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

197

permettre de donner une répartition quantitative entre ces deux termes [29]. Même si c’est une hypothèse très fréquemment utilisée, il faut savoir qu’elle n’est pas a priori rigoureusement valable en milieu non-idéal.

4.2.1.5 - EQUATIONS GÉNÉRALES

DANS UN CONDUCTEUR MONOPHASIQUE

Décrire dans le temps les valeurs du courant traversant un milieu conducteur est possible, d’après les expressions précédentes, si l’on est capable de décrire les profils de concentration de toutes les espèces ainsi que celui du potentiel en tout point et à chaque instant, c’est-à-dire si l’on connaît les fonctions Ci (x , y , z , t ) et ϕ (x , y , z , t ). Rappelons que, dans cette partie, on ne s’intéresse pas aux interfaces mais seulement au volume des milieux conducteurs. On ne cherchera donc pas, dans un premier temps, à décrire les conditions aux frontières [30]. La tension accessible à ce stade sera donc la différence de potentiel aux bornes du conducteur en dehors des zones interfaciales, c’est-à-dire le terme généralement appelé chute ohmique. Dans la plupart des systèmes électrochimiques, on peut considérer que l’électroneutralité est une propriété vérifiée au niveau macroscopique loin des interfaces (sauf dans les milieux peu conducteurs [31]). Cette relation ajoutée aux différents bilans de matière en volume de chaque espèce, auxquels on intègre les expressions des densités de flux de matière dans le cadre de la thermodynamique des processus irréversibles linéaires, donne un système de (n + 1) équations différentielles pour (n + 1) inconnues, les n concentrations et le potentiel :

!!" % "C i ' "t = # div N i + wi !i & ' $ zi C i = 0 ( i avec :

% !!" !!!!" !!!!" !" z ' N i = " Di grad C i " i ui C i grad # + C i $ milieu zi !i & ' w = f (C ) lois de la cinétique homogène j ( i

Ainsi, la géométrie du système étant connue, il est nécessaire et suffisant pour décrire entièrement le système et donner les relations (I, U, t ), de connaître l’état initial du système et les conditions aux limites, c'est-à-dire les relations à toutes les frontières du domaine, en particulier les interfaces électrochimiques.

[29] Un exemple de répartition entre migration et diffusion avec des coefficients différents pour les flux des cations et anions est traité dans cette section. Un autre exemple est traité dans l’annexe A.4.1. Dans les deux cas, on a considéré la relation de NERNST-EINSTEIN comme valide. [30] C’est notamment l’objet de la section 4.2.3. [31] Cet aspect est présenté dans la section 3.1.1.1. Si l’on ne peut pas se placer dans le cadre de validité de l’électroneutralité, il faut remplacer l’équation correspondante par une équation plus générale : une des équations de MAXWELL, s’il y a intervention non négligeable de phénomènes magnétiques, ou plus simplement l’équation de POISSON. Cela peut se produire dans des milieux peu conducteurs ou si l’on travaille à des échelles de temps pour lesquelles l’électroneutralité n’est pas encore atteinte (cela peut arriver si localement on appauvrit fortement le milieu en ions).

198

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Dans un cas général, une conséquence de la propriété d’électroneutralité en volume des milieux conducteurs ( ! z i C i = 0 ) est que la densité globale de courant de convection i est nulle et : !" !!!!" !!!!" !" j = ! � " z i Di grad C i ! " #i C i grad $ + � % milieu " z i C i i i #%% & "%$%%%& #%% "%$%%% j diffusion j migration

i #%"% %$% %% & j convection

On remarque aussi que si les coefficients de diffusion de toutes les espèces peuvent être considérés comme très proches, alors le terme de densité globale de courant de diffusion est pratiquement nul :

!i

si alors et alors

Di " D

' ! """"! """"! $ j diffusion ! " � D # z i grad C i ! " � D grad & # z i C i ) = 0 & ) i % i ( ! "! j migration ! j

Cette approximation, même si elle est souvent mise en défaut numériquement, est utilisée très fréquemment en électrochimie. Un exemple de système où une telle approximation n’est pas acceptable est détaillé ci-dessous. Un cas particulier important de ces équations volumiques est celui où le seul mode de transport de la matière d’une espèce donnée en un point donné de l’espace est la diffusion et où il n’y a pas de source locale volumique de matière (pas de réaction chimique homogène en particulier). Ce sont des conditions que l’on retrouve fréquemment en électrochimie, et qui seront notamment illustrées dans les sections suivantes (voir sections 4.3 et 4.4) et l’équation correspondante, qui est utile dans bien d’autres domaines que l’électrochimie, est connue sous le nom de deuxième loi de FICK [32] :

!C i = Di "2C i !t ou encore, pour un système à géométrie plane :

!2C i !C i = Di !t !x 2

z L’exemple donné ici est relativement complexe par rapport aux situations usuellement présentées dans les

livres d'électrochimie, notamment parce qu’il ne contient pas d’électrolyte support et présente des différences notables entre les coefficients de diffusion. Cependant il illustre, sur un système où les calculs restent simples,

[32] La première loi de FICK est l’expression de la densité de flux molaire de matière par diffusion :

!!"

!!!!"

N i = ! Di grad C i La démonstration de la deuxième loi de FICK à partir de la première s’écrit simplement en traduisant le bilan volumique de matière : !!" !!!!" !C i = " div N i = Di div (grad C i ) = Di # 2C i !t

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

199

en particulier parce que la géométrie est plane, les conséquences que peut avoir une différence entre coefficients de diffusion. On pourra revenir sur les détails de ces calculs après la lecture des sections 4.3 et 4.4.  Présentation du système étudié Considérons l’exemple de l’électrolyse d’une solution aqueuse désaérée contenant de l’acide chlorhydrique en concentration élevée entre deux électrodes de platine. Pour simplifier, on suppose que la réaction d’oxydation de l’eau est lente et qu'on observe à l’anode uniquement l’oxydation des ions chlorure en dichlore. A la cathode, on observe la réduction des protons en dihydrogène. Ces deux demi-réactions présentent donc un rendement faradique de 100%. On considère une cellule d’électrolyse à géométrie plane avec une convection forcée assurant, en dehors des deux couches de diffusion proches des électrodes, une solution de composition homogène. Comme il n’y a pas d’électrolyte support, migration et diffusion assurent le transport de matière dans les deux couches de diffusion alors que c’est la migration et la convection qui le font dans la zone homogène, comme cela est représenté sur la figure 4.8. e−

I

ANODE

2 Cl−

Cl2 + 2 e−

+

ö j

couche de diffusion

CATHODE



2 H+ + 2 e−

H2

couche de diffusion

DIFFUSION - MIGRATION CONVECTION - MIGRATION DIFFUSION - MIGRATION

Figure 4.8 - Schéma de la cellule d’électrolyse considérée avec les différents modes de transport de la matière mis en œuvre

Les conductivités molaires sont considérées égales à leur valeur à dilution infinie (voir le tableau 4.2 dans la section 4.2.2.4) et indépendantes des concentrations : λ+ = λ+0 = 35,0 mS m2 mol−1 et λ− = λ−0 = 7,6 mS m2 mol−1. On suppose également que la relation de NERNST-EINSTEIN est vérifiée. On a donc les valeurs suivantes de coefficients de diffusion à 25 °C : D+ = 9,2 .10−9 m2 s−1 et D− = 2,0 .10−9 m2 s−1.  Sens des différentes densités de flux de matière Dans les couches de diffusion, la réaction rédox détermine les densités de flux globaux de matière pour chaque ion (voir la loi de FARADAY dans la section 4.1.4). Dans la zone homogène il n’y a pas de diffusion donc le courant est confondu avec le courant de migration et définit les sens de flux de matière des ions (voir la section 2.2.4.2), conformément à ce qui est représenté sur la figure 4.9.

A N O D E

ö NH+

ö NH+

ö NCl−

ö NCl−

ö NH+ ö NCl− ö j

ddiffusion

ddiffusion

C A T H O D E

x

Figure 4.9 - Schéma de la cellule d’électrolyse avec les différentes densités de flux molaires de matière des ions dans les trois zones de l’électrolyte (un point représente un vecteur nul)

200

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Les développements suivants font appel à des notions qui sont précisées dans la suite (voir notamment la section 4.3.1) mais ils s’appuient sur des relations déjà abordées : expressions des densités de flux molaires de matière et loi de FARADAY.  Profils stationnaires de concentration Dans cet électrolyte 1-1, comme il n’y a que deux types d’ions, l’électroneutralité du milieu entraîne le fait que les concentrations en cation (H+) et anion (Cl−) sont égales et notées C en tout point du volume d’électrolyte : on peut observer un profil de concentration dans les couches de diffusion mais il doit être identique pour les deux types d’ion. En régime stationnaire, les densités de flux de matière sont identiques en tout point et données par la loi de FARADAY. Si l’on se focalise sur la couche de diffusion anodique, le flux de H+ est nul car seul Cl− est électroactif à l’anode : "$ N + = 0 # I N =! %$ ! �S L’expression des densités de flux molaires interfaciaux, en introduisant la relation de NERNST-EINSTEIN, conduit à : $ "C � "# && N + = ! D+ "x ! D+ RT C "x = 0 % & N ! = ! D! "C + D! � C "# = ! I &' "x RT "x �S ou encore : d'où finalement :

!C � !# =" C !x RT !x I !C = !x 2 D" �S

Le profil de concentration à l’anode dépend donc uniquement du coefficient de diffusion de l’espèce électroactive, ici l’anion. Tout se passe comme si l’on avait diffusion pure avec un coefficient de diffusion apparent égal à 2 D−.  Contributions relatives des densités de flux de matière par migration et diffusion en régime stationnaire Dans tout l’électrolyte, l’électroneutralité impose une contrainte forte qui se traduit en tout point du volume d’électrolyte par un lien entre les densités de flux molaire de matière par diffusion des deux ions (composantes normales algébriques) : "C N + diffusion !D+ "x D+ = = N ! diffusion "C D! !D! "x En ce qui concerne les termes de migration, le champ électrique étant commun, on a également en tout point du volume un lien entre les densités de flux molaire de matière par migration des deux ions : #$ N +migration !"+C #x " = =! + #$ N !migration "! "!C #x Si l’on reprend l’écriture de la loi de FARADAY pour les ions H+ dans la couche de diffusion anodique (flux nul), on en déduit la répartition entre migration et diffusion pour chacun des ions en régime stationnaire dans cette zone : N +diffusion N !diffusion N !diffusion N +diffusion N +migration D # " & = ! 1 et = = ! ! %! + ( = 1 N +migration N !migration N +diffusion N +migration N !migration D+ $ "! '

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

201

Ainsi les normes des densités de flux molaires de migration et diffusion d’une même espèce sont égales en régime stationnaire. Le courant stationnaire est dû en parts égales à la diffusion et la migration. Soulignons que cette répartition des flux de diffusion et migration reste formelle et s’appuie uniquement sur la validité de la relation de NERNST-EINSTEIN. D’autre part, le courant est entièrement transporté par l’espèce électroactive : les ions électroinactifs ne se déplacent pas macroscopiquement en régime stationnaire. Ce n’est pas le cas en régime transitoire, puisqu’il faut établir le profil de concentration stationnaire (le flux interfacial des ions non-électroactifs reste nul, mais en revanche la densité de flux transitoire n’est pas constante dans toute la couche de diffusion).  Relations quantitatives entre la densité de courant totale et la densité de courant de migration en régime stationnaire Si l’on reprend l’écriture de la loi de FARADAY pour les ions Cl− dans la couche de diffusion anodique, on peut écrire : I N ! = N !diffusion + N !migration = 2 N !migration = ! �S et finalement :

jmigration = j+migration + j!migration = � (N +migration ! N !migration ) " N+ % I " (+ % j migration = � N !migration $ migration ! 1 ' = $ + 1' # N !migration & 2S # (! &

Numériquement, on obtient donc du côté anodique :

jmigration = 2,8 j

et

j diffusion = 1! jmigration = ! 1,8 j

Si l’on reprend le même type de raisonnement du côté cathodique, on obtient :

N !diffusion =!1 N !diffusion jmigration =

donc :

et

N +diffusion =1 N +diffusion

I # !" & % + 1( 2S $ !+ '

ou encore numériquement du côté cathodique :

jmigration = 0,6 j

et

j diffusion = 1! jmigration = + 0,4 j

Dans cet exemple, comme dans la plupart des cas, la densité de courant de migration reste dans le même sens que la densité de courant totale même si elles ne sont pas égales. Ces deux vecteurs sont identiques lorsque les coefficients de diffusion sont égaux.

y

4.2.2 - PHÉNOMÈNES DE CONDUCTION :

MÉCANISMES ET ORDRES DE GRANDEUR

Dans la littérature, les mécanismes microscopiques des phénomènes de conduction électrique sont très fréquemment exposés à partir d’exemples où seule la migration intervient. En réalité, on peut, lorsque les porteurs de charge sont bien identifiés, considérer que les mécanismes microscopiques, décrits rapidement ci-dessous, sont également pertinents pour la diffusion. Ils décrivent comment le déplacement de matière sous l’effet d’une force extérieure s’effectue au niveau microscopique, sans se préoccuper de la nature des forces mises en jeu (migration ou diffusion).

202

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

LES PILES À COMBUSTIBLE

Document élaboré avec l’aimable collaboration de E. R OSSINOT, responsable de l’équipe pile et de A. RENARD, chargée de communication au sein d’Axane, Sassenage, France

Une pile à combustible est un système électrochimique qui fournit de l’énergie électrique grâce à des réactions électrochimiques spontanées faisant intervenir l'oxygène de l'air, et de l'hydrogène pour les systèmes les plus simples (d’autres combustibles sont également étudiés aujourd’hui). Dans la mesure où cette réaction principale produit uniquement de l’eau, cela en fait un système de choix pour une production non polluante d’énergie électrique. Comme dans de nombreux générateurs électrochimiques, plusieurs cellules individuelles sont associées, en série ou parallèle, pour obtenir les caractéristiques électriques (énergie, puissance) nécessaires aux applications. Il faut noter que les piles à combustible, du fait de l’utilisation de réactifs gazeux, présentent une singularité dans le paysage des générateurs électrochimiques : ce sont des systèmes ouverts constamment alimentés en gaz. La gestion peut en être plus compliquée que celle d’une pile ou une batterie fermée, mais cela a l’avantage certain de découpler les fonctions puissance et énergie du système. La puissance fournie dépend de la surface active des électrodes mises en jeu, tandis que l’énergie dépend de la taille du réservoir d’hydrogène associé au cœur de pile dans le système. Dans les systèmes de pile à combustible ayant une température de fonctionnement interne de l’ordre de 70 °C, l’électrolyte est un matériau polymère qui permet une conduction des protons. Une cellule est alors constituée de cet électrolyte placé entre deux électrodes, contenant un catalyseur. A l'anode, l'hydrogène est oxydé : 4 H + + 4 e– 2 H2

O2

A la cathode, l'oxygène est réduit : O 2 + 4 H + + 4 e– 2 H 2O Le bilan est : 2 H2 + O2

2 H 2O

p

p

p

p

H2 © Axane

H2O

Une solution énergétique disposant de nombreux avantages…  Haut rendement énergétique, excellente qualité de courant  Autonomie, mobilité et fiabilité  Aucune émission polluante (dans le cas du combustible hydrogène)  Modularité (cellules élémentaires mises en série et en parallèle)  Fonctionnement silencieux et simple  Utilisation en intérieur ou en extérieur (bonne résistance aux conditions climatiques) … et de larges débouchés

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

203

Le respect des contraintes environnementales étant une priorité, la pile à combustible devient un générateur d'électricité très prometteur dans les domaines du transport, du petit portable et de la distribution d'énergie.  Les applications nomades dites « mobiles » On peut citer par exemple des applications dans les télécommunications, la propulsion de petits véhicules électriques ou bateaux, des utilisations pour des missions scientifiques, des missions de secours (pompiers, équipes de secours, SAMU…), mais aussi dans le cinéma, le BTP pour tous types de travaux à toute heure et en tout lieu…

Exemples d’applications nomades (© Axane) Axane, filiale à 100% du groupe Air Liquide, a pour mission de développer les systèmes de piles à combustible alimentées en hydrogène qui constituent le cœur des offres d'alimentation énergétique d'Air Liquide Hydrogen Energy. Ces solutions énergétiques clefs en main sont destinées à de nouveaux marchés émergents (antennes de téléphonie mobile, événementiel, capteurs isolés…).

 Les applications sédentaires dites « stationnaires » Elles recouvrent les alimentations en continu sur des sites isolés : par exemple pour les antennes ou relais de télécommunications, l’éclairage de sites critiques ou encore l’alimentation d’appareils de mesure… Par ailleurs, elles sont aussi utilisées pour l’alimentation de secours (c'est-à-dire capables de prendre le relais d’un système de fourniture d’énergie principal en cas de défaillance de celui-ci) : par exemple pour les télécommunications, la santé ou le secteur bancaire…

Exemples d’applications sédentaires (© Axane) Un système installé dans des conditions d’amplitude et de rigueur climatiques (– 5° C à 33 °C et une humidité de 26% à 100%) a effectué plus de 10 000 h de fonctionnement continu (près d’un an et 10 MWh d’énergie cumulée fournie) sans maintenance.

204

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

4.2.2.1 - EXEMPLES DE MÉCANISME DE CONDUCTION Suivant les matériaux, différents mécanismes de conduction au niveau microscopique peuvent être proposés. Parmi les données expérimentales, l’influence de la température sur les propriétés conductrices est une information importante pour la détermination du mécanisme de conduction. Quelques types de mécanisme sont décrits qualitativement ci-dessous.

 Conduction électronique dans un métal Un métal peut être décrit par un réseau cristallin fixe de cations métalliques dans lequel circule un gaz d’électrons (modèle de bande, continuum d'énergie). Le modèle utilisé pour décrire le déplacement de ces électrons de conduction est le modèle du libre parcours moyen : les électrons subissent des collisions mais ne sont soumis à aucune force entre deux collisions. Celles-ci peuvent être dues à :  des impuretés qui créent des défauts dans le réseau cristallin (phénomène majoritaire à très basse température),  des phonons, qui décrivent des vibrations du réseau cristallin (phénomène majoritaire dès la température ambiante). La mobilité électrique des électrons est alors proportionnelle à la durée moyenne τ entre deux collisions, qui correspond au libre parcours moyen. Ce modèle permet de rendre compte qualitativement de l'influence de la température : lorsque la température augmente, la mobilité électrique diminue comme τ. Ce modèle permet aussi de rendre compte des différences entre les mobilités électroniques observées pour divers métaux, en introduisant différentes valeurs de τ et du nombre de porteurs de charge. L'ordre de grandeur de τ est la nanoseconde à très basse température et la femtoseconde à température ordinaire.

 Conduction ionique dans une solution électrolytique En solution diluée, on peut considérer que le déplacement des ions en solution est réalisé par des mouvements de type brownien, c’est-à-dire par des collisions entre ces ions et les molécules de solvant. En absence de force extérieure, la valeur moyenne statistique du déplacement des ions est nulle. En revanche, en présence d'une force extérieure, par exemple lorsqu’il y a un champ électrique extérieur, il existe une direction de déplacement privilégiée. Les collisions avec les molécules de solvant s’opposent statistiquement au déplacement des ions dans la direction de la force extérieure. Ainsi, il s’établit très rapidement (ordre de grandeur de la picoseconde à température ambiante en solution aqueuse, voir calcul suivant) un régime stationnaire où la vitesse moyenne des ions est déterminée par l’équilibre entre la force extérieure et la force de frottement du solvant.

!"

!"

z Dans un système sans convection ( ! milieu = 0 ), pour un ion (solvaté)!"de nombre de charge zi , le principe

fondamental de la dynamique fait apparaître le lien entre !!" l’accélération a et la somme des forces extérieures. En présence d’un champ électrique extérieur appliqué, E , les forces mises en jeu sont la force électrique et la force de frottement. Cette dernière !!" sera considérée dans l’approximation des frottements visqueux : elle est donc proportionnelle à la vitesse !i de l’ion dans le solvant. On obtient alors la relation suivante :

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

205

!!" !!" !!" !" d# z i e E ! " #i = m a = m i dt Cette équation différentielle du premier ordre s’écrit aussi : !!" " !!" d !i z e !!" + ! = i E m i m dt

!" Elle se résout facilement lorsque le champ électrique extérieur est constant ( A : constante d’intégration) :

!!" !" # " t z e !!" !i = i E + A e m " On obtient donc, après un régime transitoire dont la constante de temps caractéristique est ! = m " , un régime stationnaire avec une vitesse limite proportionnelle au champ électrique : !" z e !!" ! lim = i E " Pour obtenir un ordre de grandeur du temps nécessaire pour atteindre ce régime stationnaire dans des solutions aqueuses, on peut évaluer α en utilisant la mobilité électrique (ordre de grandeur 10−7 m2 s−1 V−1, voir le tableau 4.1 dans la section 4.2.2.3) égale à la vitesse limite pour un champ électrique unité : m m M ! = # 10$7 = 10$7 " e � e Pour la masse molaire d’un ion solvaté, on peut prendre environ 100 g mol−1, ce qui conduit finalement à un ordre de grandeur de 10−13 s pour la constante de temps caractéristique du régime transitoire.

y

Lorsque la température de la solution augmente, le principal effet est la diminution de la viscosité du solvant (donc du coefficient de frottement) et l’on observe en général une augmentation de la mobilité électrique des ions solvatés [33]. Dans une solution concentrée, les collisions des ions se déplaçant ne se font pas uniquement avec les molécules du solvant, mais aussi avec les autres ions (et surtout les ions de charges opposées) qui entraînent des molécules de solvant dans leur mouvement. Cela provoque le ralentissement du mouvement en augmentant le frottement du milieu. Ce phénomène, appelé effet d'électrophorèse, contribue à la diminution de la mobilité observée dans des solutions concentrées, en comparaison avec des solutions diluées. Un deuxième effet contribue à cette diminution : l'effet de relaxation. L'atmosphère ionique autour d'un ion en mouvement n’est plus symétrique [34] car la vitesse de formation/déformation de cette dernière n’est pas infinie. Le dipôle électrique ainsi créé s'oppose à l'action de la force extérieure et ralentit le mouvement de l'ion.

 Conduction ionique dans un solide cristallisé Dans les solides cristallisés, les mécanismes de conduction proposés font généralement appel aux défauts dans le réseau cristallin (lacunes ou ions en position interstitielle). Ces derniers sont créés par des désordres locaux. Ils ont une charge relative qui respecte

[33] Par exemple une solution aqueuse de chlorure de potassium, de concentration 0,02 mol L−1 voit sa conductivité passer de 0,25 S m−1 à 20 °C à 0,33 S m−1 à 35 °C. [34] Contrairement à l’hypothèse qui est posée dans le modèle de DEBYE-HÜCKEL (voir l’annexe A.3.2).

206

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

toujours l’électroneutralité globale. Par exemple, une lacune possède une charge relative opposée à celle de l’ion normalement positionné sur ce site du réseau. On peut citer comme principaux types de défauts :  Le désordre de SCHOTTKY, par exemple dans de nombreux halogénures d’alcalins : il y a autant de lacunes d’alcalin que de lacunes d’halogène.  Lorsque des ions se mettent en position interstitielle (cas des halogénures d’argent), là encore l’électroneutralité est respectée puisqu’il se crée simultanément une lacune de cation (désordre de FRENKEL).  Souvent, pour obtenir de bonnes propriétés conductrices, les cristaux sont dopés par des impuretés de valences différentes (cas de la zircone ZrO2 dopée par de la chaux CaO ou de l’oxyde d’ytrium Y2O3). Ce sont des défauts extrinsèques. L’électroneutralité est alors assurée par la création simultanée de lacunes ou d’interstitiels. Le mouvement d'un ion est représenté schématiquement sur la figure 4.10, dans le cas de la conduction lacunaire, par un mécanisme de saut d’un site occupé à un site vide.

: ion de charge anormale Figure 4.10 - Schéma d’un mécanisme de conduction dans un solide cristallisé

Plus la température est élevée plus les taux de défauts intrinsèques augmentent. En outre l’augmentation de température permet de franchir plus aisément la barrière de potentiel d’un site à l’autre (énergie d’activation).

 Conduction ionique dans un électrolyte polymère Dans un électrolyte polymère au-dessus d'une certaine température (appelée température de transition vitreuse), le comportement des chaînes de polymère est relativement proche de celui des molécules de solvant dans un liquide, bien qu’il n’y ait pas de déplacement macroscopique. Le modèle de conduction, appelé modèle du volume libre, est proche de celui que l'on peut développer dans certains milieux conducteurs liquides (sels fondus ou liquides ioniques). Le déplacement d'un ion est rendu possible par la déformation des chaînes de polymère (ou déplacement des molécules dans un liquide) adjacentes qui forment une cavité ou un volume libre dans lequel celui-ci peut aller.

4.2.2.2 - MESURES DE CONDUCTIVITÉ Quand la diffusion peut être négligée, la densité de courant globale est égale à la densité de courant de migration et s’exprime simplement :

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

!" j =

!!"

" !i C i E i

207

!!" = #E

Pour avoir accès au paramètre de conductivité globale, on impose par exemple une différence de potentiel aux bornes du conducteur étudié, avec un volume de géométrie connue, et on mesure le courant qui le traverse. Le rapport de ces deux grandeurs permet de déterminer la résistance et de remonter à la conductivité grâce aux paramètres géométriques de l’échantillon. Par exemple, pour un conducteur homogène en géométrie plane avec une section équipotentielle d’aire S, la différence de potentiel, U, entre deux sections distantes l’une de l’autre d’une longueur  , est du type :

U = RI

avec

R =

!! ! = S "S

z Dans certaines applications, des conducteurs électroniques transparents sont nécessaires. On utilise alors en général une fine épaisseur d’un oxyde conducteur électronique, déposé sur du verre. Compte tenu de cette géométrie particulière représentée sur la figure 4.11, le paramètre qui définit les propriétés de ce conducteur combine la conductivité (ou la résistivité) du matériau et son épaisseur :

R=

!L ! L = S e !

e

 S

ö E L

Figure 4.11 - Schéma d’un plaque conductrice

La résistance carrée, R, qui s’exprime en Ω correspond à la résistance qu’aurait une plaque carrée de ce conducteur ( = L). Par exemple pour une couche de SnO2:F (oxyde d’étain dopé au fluor de conductivité σ = 2,5 .105 S m−1, voir tableau 4.1) d’épaisseur e = 5000 Å, on obtient un conducteur en couches minces tel que :

R! =

1 1 ! = = = 8 % /!! #7 e " e 5.10 $ 2,5.10 5

y

Pour un métal, la mise en œuvre de cette technique est relativement facile (tension et courant continus). Certains raffinements (par exemple le dispositif dit « 4 pointes », ou l’élaboration d’échantillons de géométrie particulière) sont nécessaires pour des conducteurs électroniques de conductivité plus faible, comme certains semi-conducteurs par exemple.

208

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Les valeurs expérimentales de conductivité électrique montrent de très grandes différences d’ordres de grandeur : de 107 S m−1 pour les métaux les plus conducteurs à 10−15 S m−1 pour les isolants [35]. Pour un conducteur ionique (ou de façon identique pour un semi-conducteur), la mise en œuvre de la méthode est nécessairement plus compliquée : les mesures de courant ou de différence de potentiel nécessitent des contacts métalliques avec le conducteur étudié et l’on introduit donc au minimum deux interfaces électrochimiques. Ces dernières provoquent en général une déviation à la loi d’OHM. On admettra que les conditions expérimentales habituelles (voir ci-dessous) permettent de minimiser l’impact des phénomènes aux interfaces électrochimiques sur la relation entre U et I . De plus, on prend toujours la précaution, pour des mesures précises de conductivité, d’étalonner la cellule utilisée sur un conducteur ionique de référence (le plus souvent, on utilise une solution aqueuse décimolaire de chlorure de potassium à température contrôlée). La valeur de la conductivité de cet électrolyte étant connue (il existe des tables en fonction de la température), on peut déterminer le facteur de proportionnalité, appelé constante de cellule. La mesure de la conductivité électrique d'un autre électrolyte (dans la même gamme de conductivité) est alors possible à l'aide de la même cellule conductimétrique. Il faut cependant noter que, si la valeur de la constante de cellule ainsi obtenue est très différente de celle indiquée par le constructeur [36] ou de celle déduite de la géométrie de la cellule, il ne suffit pas de corriger le facteur de proportionnalité : c’est un signe que les conditions de mesure ne sont pas adéquates (choix inadéquat de la fréquence de mesure, détérioration des électrodes, modification des effets de bords…). L’utilisation d’un générateur de tension alternative de faible amplitude et de fréquence adaptée (ordres de grandeur pour une solution aqueuse d’électrolyte à température usuelle : ΔV ≈ quelques mV et f ≈ quelques kHz) permet de minimiser les valeurs de courant traversant le système et d’augmenter énormément la part du courant capacitif par rapport au courant faradique. L’impédance du système déterminée expérimentalement est alors confondue dans ces conditions à la résistance du conducteur ionique. La fréquence ne doit être ni trop basse, pour éviter l’influence des phénomènes aux électrodes, ni trop élevée, pour éviter l’influence des propriétés diélectriques de l’électrolyte. De plus, l’utilisation d’électrodes métalliques présentant une très grande rugosité permet d’élargir la gamme de choix de fréquence de mesure [37]. [35] voir le tableau 4.1 dans la section 4.2.2.3. [36] Cette valeur liée à la géométrie de cellule, tient compte des éventuels effets de bords. Elle peut par exemple, pour une géométrie parallélépipédique de cellule s’éloigner légèrement du rapport /S. Elle correspond à ce qu’on appelle parfois la distribution primaire de courant (et provient de la résolution de l’équation de LAPLACE dans la géométrie particulière du système en considérant une conductivité constante d’électrolyte). Elle est généralement déterminée par une mesure expérimentale. [37] Dans ce cadre, le platine platiné est souvent utilisé (même matériau que pour la fabrication des électrodes de référence à hydrogène, voir section 1.4.1.2). L’augmentation de l’aire de contact avec la solution permet en effet, dans la mesure où la rugosité est plus grande que l'épaisseur de la double couche, d’augmenter substantiellement la capacité de double couche, en regard des caractéristiques diélectriques du système. Cela conduit dans le cadre d’une mesure d’impédance à une plus grande plage de fréquence où l’impédance du système est confondue à la résistance de l’électrolyte.

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

209

La conductivité électrique variant de manière significative avec la température, on a intérêt, pour des mesures précises, à utiliser un système permettant de thermostater le dispositif. Expérimentalement pour obtenir séparément la contribution des différents ions, une mesure de conductivité ne suffit pas : il faut réaliser des expériences complémentaires de mesure des nombres de transport.

4.2.2.3 - ORDRES DE GRANDEURS

DES PARAMÈTRES DE CONDUCTION

Le tableau 4.1 (pages suivantes) donne des valeurs des grandeurs caractéristiques du transport de matière pour différents porteurs de charge dans quelques exemples typiques de milieux.

4.2.2.4 - MODÈLES POUR LES SOLUTIONS INFINIMENT

DILUÉES

Dans une solution électrolytique simple infiniment diluée, on peut relier les paramètres caractérisant le transport de charge avec certaines propriétés du solvant. On peut en effet assimiler le déplacement d'un ion solvaté dans la solution au déplacement d'une sphère rigide dans un milieu visqueux. visqueux), pour une sphère de rayon ri D’après la loi de STOKES (hypothèse de frottement !!" rel en mouvement à une vitesse relative !i , dans un milieu de viscosité η , la force de frottement est de la forme : ! ""! rel f frott = ! 6 " ri # $i L’équilibre au niveau microscopique entre la force de frottement et une force extérieure unité (c’est-à-dire de module égal à 1 N) appliquée à l’ion i, assimilé à une sphère de rayon ri , entraîne un déplacement à une vitesse en régime stationnaire dont le module divisé par la constante d’AVOGADRO est égal à la mobilité électrochimique :

u!i0 =

1 6 ! " � ri

On obtient donc en fonction des propriétés du solvant (sa viscosité η) et de l'ion solvaté (son rayon ri ), une expression des constantes caractérisant :  la migration :

!i 0 =

z i 2 �2 6 " # � ri

 la diffusion (relation de STOKES-EINSTEIN) :

Di 0 =

RT 6 ! " � ri

210

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

211

212

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

On trouve dans la littérature les valeurs suivantes : Tableau 4.2 - Conductivité molaire à dilution infinie de différents ions en solution aqueuse à 25 °C

λ +0 [ mS m2 mol−1 ] H+ D

+

λ −0 [ mS m2 mol−1 ]

34,98

F−

5,54

25

Cl−

7,63



7,81

+

3,86

Br

Na+

5,01

I−

Li

7,70

+

7,35

OH

Ag+

6,19

OD−

K

+

7,34

Cu2+

10,7

NH4

2+

11,9

Zn2+

10,6

Ca

2+

10,8

Fe3+

20,4

Fe

Pb

2+



NO3

11,9



SO42−

7,14 16,0 3−

30,3

Fe(CN)64−

44,2

CO3

13,9

Fe(CN)6

14,2

19,92

2−

HCO3−

4,45

PO4

27,8

3−

De nombreuses tables de la littérature, qui font en fait référence à la notion d’équivalent, généralement abandonnée [38], n’indiquent pas directement les valeurs de conductivités 1 0 !i . molaires mais les valeurs de : zi Les données de conductivité pour des ions dont le nombre de charge est différent de 1 sont alors souvent présentées avec une fraction devant l’ion concerné, ce qui prête à confusion. Par exemple, pour Ca2+, la valeur que l’on trouve fréquemment dans la littérature est ! 1 2+ , avec la relation suivante : 2

Ca

!1 2

Ca2+

=

1 ! 2+ 2 Ca

Si l'on examine les valeurs portées dans la table précédente pour des ions de même charge, on voit par exemple pour la famille des alcalins (Li+, Na+ et K+) que la conductivité molaire tend à croître lorsque l'élément est plus lourd. Cette évolution est inverse de ce que l'on attend de la taille des ions telle qu'elle est portée dans les tables classiques, où elle correspond généralement à un ion non-solvaté dans un cristal ionique. Il faut cependant se souvenir que, dans la relation donnant la mobilité ou le coefficient de diffusion, on doit utiliser la taille de l'ion solvaté dans le milieu considéré (voir la relation de STOKES-EINSTEIN dans la section 4.2.2.4). L'ion Li+ étant plus petit, il a donc des interactions plus fortes vis-à-vis d'un solvant polaire tel que l'eau et sa sphère de solvatation est plus importante. Cette évolution est moins nette pour la famille des halogénures qui sont des anions plus gros et donc moins solvatés (sauf pour l’ion F− qui est petit). [38] L’exemple de calcul de nombre de transport développé dans la section 2.2.4.3 évoque cette notion.

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

213

Pour des ions de charges différentes, comme par exemple ceux issus de l'élément fer, on peut remarquer que les valeurs dépendent de l'état de complexation et du degré d'oxydation de Fe. Ce point n'est pas surprenant, mais il est plus délicat à interpréter à partir des valeurs brutes, car la charge devient différente selon l'état de complexation, il vaut donc mieux comparer les valeurs de la mobilité électrochimique ou du coefficient de diffusion qui ne font pas intervenir la charge. On trouve ainsi qu'à 25 °C le coefficient de diffusion de Fe2+ calculé par la relation de NERNST-EINSTEIN est 7,2 .10−10 m2 s−1 alors que celui de Fe3+ est 6 .10−10 m2 s−1. Ceci montre que l'ion nu Fe3+, plus petit, aura tendance à avoir des interactions plus fortes avec l'eau, et ceci d'autant plus que la charge est élevée, il aura donc une sphère de solvatation légèrement plus forte que celle de Fe2+. En milieu cyanuré, la situation est différente : les coefficients de diffusion respectifs deviennent 7,3 .10−10 m2 s−1 et 8,9 .10−10 m2 s−1. Il y a donc qualitativement une inversion du rapport des mobilités qui peut se justifier par le fait que l'ion Fe(CN) 64−, plus fortement chargé, sera moins mobile que Fe(CN)63− à cause des effets d'interaction avec les molécules d'eau plus intenses. La valeur anormalement élevée observée pour la mobilité du proton fait appel à des notions très différentes, encore controversées aujourd’hui. En effet, la taille du proton dans l'eau (ion hydronium H3O+) est sensiblement la même que celle de K+, or les conductivités molaires (ou les coefficients de diffusion) sont très différentes (facteur 5). Dans l’hypothèse d'un déplacement uniquement par processus de type STOKES, la valeur de mobilité des ions H+ solvatés serait faible étant donné leur taille. En fait, l'essentiel de la mobilité est dû à un mécanisme d'échange de H+ entre molécules d'eau voisines et convenablement orientées, connu sous le nom de « mécanisme de GROTTHUS ». Compte tenu des propriétés de l’espèce H+, un processus de type « effet tunnel » est envisageable. L'influence de la masse (entre H+ et D+) milite dans le sens de cette interprétation. Dans ce modèle, la vitesse de saut est par ailleurs contrôlée par le temps d'orientation favorable des molécules (mise en alignement de l'orbitale libre de O de la molécule H2O en vis-à-vis d'un élément H en liaison avec H3O+, comme cela est schématisé sur la figure 4.12).

Saut improbable

Position favorable au saut

Figure 4.12 - Schéma du mécanisme de conduction des protons dans l’eau par effet tunnel (mécanisme de GROTTHUS)

La modélisation est en fait assez complexe car chaque molécule mise à contribution dans ce mécanisme est liée aux molécules voisines (par liaisons hydrogène). De façon globale, il est admis que le déplacement physique de l’entité H3O+ par un processus de type STOKES n'intervient que dans une faible proportion (20% de la mobilité).

214

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

ELECTRODIALYSE Document élaboré avec l’aimable collaboration de A. S AVALL, Université Paul Sabatier à Toulouse et de F. LUTIN, Eurodia Industrie

Les cellules d’électrolyse à membrane ont de nombreuses applications dans l’agroalimentaire (laiterie, vinification, jus de fruits…), l’adoucissement de l’eau, l'épuration ou la valorisation d’effluents de galvanoplastie ou autre industrie chimique… Les plus connues sont sans doute le dessalement des eaux saumâtres à teneur en sel modérée (d’autres procédés, comme l'osmose inverse, sont utilisés en amont), et la déminéralisation de lactosérum en industrie laitière. En électrodialyse, on utilise deux types de membranes monopolaires, c'est-à-dire qui ne laissent passer qu’un seul type d'ions. Les membranes anioniques (MA) ne laissent passer que les anions et les cationiques (MC) que les cations. Cette sélectivité est due à une fonctionnalisation du matériau polymère constitutif. Ainsi, une membrane cationique est un matériau conducteur qui comporte par exemple des groupements sulfoniques ou sulfonates greffés sur le polymère constituant. De tels groupements bloquent le passage des anions (du même signe) à travers le polymère et laissent passer les cations. Les membranes anioniques comportent des groupements alkyl ammonium bloquant le passage des cations. La figure suivante en illustre le principe de fonctionnement. La solution qui circule entre deux membranes (anionique et cationique) est appauvrie ou enrichie en sel selon l'orientation du courant. Les réactions d'électrode se produisent aux extrémités de la cellule, dans les compartiments de l'anolyte et du catholyte (qui peuvent être différents de la solution à traiter circulant entre les membranes, pour diminuer les polarisations). Saumure concentrée Eau déminéralisée H2

Cl2 + O2 Na

Na

+

Na

+

Na+ Cl−

Anode Cl−

Na

+

Na+ Cl− Cl−

Na

+

+

Na+ Cl− Cl−

Na+ Cl−

Cathode

Cl−

Cl−

Anolyte

Catholyte MA

MC

MA

MC

MA

MC

MA

MC

MA

MC

Circuit de déminéralisation Circuit de concentration

Schéma de fonctionnement d'une cellule d'électrodialyse

Pour une meilleure efficacité, plusieurs modules (paires de membranes) sont montés en parallèle en ce qui concerne les écoulements de fluide, et en série au niveau électrique (le courant est identique à travers chaque compartiment). Pour l’ensemble de l’installation, il existe plusieurs modes de fonctionnement : soit par simple passage de la solution

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

215

dans une cellule, avec éventuellement plusieurs cellules en série au niveau de l'écoulement, soit en boucle (recirculation) sur une cuve.

Installation industrielle d'électrodialyse (© société Eurodia, Pertuis, France)

Les configurations de type filtre-presse sont un ensemble de modules où sont disposées, en alternance, des membranes anioniques et cationiques. Les compartiments intermembranaires, qui sont de faible épaisseur, comportent des espaceurs qui améliorent les conditions hydrodynamiques. Les circuits hydrauliques d'alimentation des fluides sont actionnés par des pompes sous forte pression (plusieurs bars) pour vaincre les pertes de charge dans l'écoulement. Les cellules industrielles sont constituées d'une ou deux centaines de modules, avec des surfaces de membrane qui peuvent atteindre le m2. Ces installations permettent d'adoucir des eaux saumâtres avec des débits de quelques centaines jusqu'au millier de m3 par jour, pour un coût énergétique de l'ordre du 1 kWh par m3. La nature des réactions d'électrode dans les compartiments aux extrémités de la cellule ne joue pas de rôle direct dans le fonctionnement de l'électrodialyse. La faible épaisseur (inférieure au millimètre) des espaces intermembranaires permet d'amoindrir la chute ohmique. Celle-ci peut cependant s'avérer très grande si l'on veut déminéraliser fortement la solution car elle devient alors peu conductrice. Lors du fonctionnement, des dépôts peuvent se former à la surface des membranes, par exemple suite aux variations locales de pH qui peuvent entraîner la formation d'hydroxydes avec les cations métalliques des solutions traitées. Un tel phénomène colmate et fragilise les membranes qui sont d'un entretien délicat. Il est alors conseillé d'inverser la polarité de façon périodique pour éliminer ces dépôts. Un démontage régulier demeure cependant nécessaire pour nettoyer les différents éléments.

216

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

4.2.2.5 - CAS DES SOLUTIONS CONCENTRÉES Dans le cas des solutions aqueuses contenant un seul électrolyte fort (un seul type de cation et d'anion), les études expérimentales ont permis, notamment à KOHLRAUSH, de proposer une expression de la conductivité molaire en fonction de la concentration de l’électrolyte : ! = ! 0 " Cte C

Λ0 est la valeur de la conductivité molaire extrapolée à C = 0. Cette grandeur est appelée « conductivité molaire à dilution infinie » de l’électrolyte (en S m2 mol−1) et correspond à la conductivité molaire pour un système idéal sans interaction entre ions. Cette formule expérimentale est valable pour des concentrations qui restent inférieures à environ 0,1 mol L−1. Ultérieurement, cette loi empirique a été mise en relation avec le modèle de conduction ionique en milieu électrolyte liquide avec les effets d'électrophorèse et de relaxation, qui sont importants en solution concentrée (voir section 4.2.2.1). Pour une solution d’un électrolyte fort de type 1-1, la conductivité molaire de l’ion i s’exprime par la relation :

!i = !i 0 " (A + B !i 0 ) C i avec A = 60,3 et B = 0,229 à 25 °C dans l’eau, si Ci est en mol L−1 et λi0 en S cm2 mol−1 ; λi0 est appelé conductivité molaire à dilution infinie de l’ion i (en S m2 mol−1). A, B et λi0 dépendent de la température. Compte tenu des valeurs de A et B, on peut considérer, avec une précision de l'ordre de 5%, que la conductivité molaire d'un ion est indépendante de sa concentration et égale à sa valeur à dilution infinie pour des valeurs de concentration inférieures à quelques 10−3 mol L−1 (à 25 °C). Dans ces conditions, la conductivité du milieu électrolytique est simplement proportionnelle à la concentration de l'électrolyte.

4.2.3 - CAS OÙ LA CHUTE OHMIQUE NE SUIT PAS LA LOI D'OHM MACROSCOPIQUE Dans de nombreux cas expérimentaux [39], on peut considérer que la conductivité est la même en tout point de l’électrolyte. On a alors un terme de chute ohmique proportionnel au courant traversant le système. Cependant ce n’est pas toujours vrai : en absence d’électrolyte support et si les couches de diffusion contribuent de manière significative à la résistance globale de l’électrolyte [40] !" , on ne !!" peut plus faire cette approximation. Bien que la loi d’OHM au niveau local ( j = ! E ) reste valable [41], dans la mesure où la [39] C’est le cas de système en présence d’électrolyte support ou encore de système pour lesquels on peut considérer que le volume des couches de diffusion est négligeable devant le volume total de l’électrolyte. [40] Un exemple de ce type est traité en détail en annexe A.4.1 : la contribution du transport par diffusion est importante dans tout le volume de l’électrolyte. [41] Il peut y avoir une complication supplémentaire si l’on s’intéresse à des milieux ayant des porteurs de charge avec des propriétés de transport de matière très différentes les uns des autres. On a en effet vu dans la section 4.2.1.5 que, dans ces conditions, le courant et le courant de migration ne

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

217

conductivité de l’électrolyte est fonction de la position spatiale, la relation entre la chute ohmique aux bornes de l’électrolyte et le courant, obtenue par intégration de la loi précédente, n’est plus une loi de proportionnalité avec une résistance constante. Dans de tels cas, on peut retenir que lorsqu’on augmente le courant en régime stationnaire, la résistance globale de l’électrolyte augmente. Ce phénomène est lié à la diminution des concentrations à l’approche d’une électrode qui entraîne une diminution locale de la conductivité de l’électrolyte. Il peut y avoir simultanément augmentation locale de la conductivité de l’électrolyte dans l’autre couche de diffusion mais la zone de faible conductivité a un impact bien plus important sur la résistance globale de l’électrolyte. Cela s’accompagne d’un écart à la stricte électroneutralité qui a une traduction immédiate sur l’allure des profils de potentiel dans l’électrolyte : ceux-ci ne sont plus, en géométrie plane, linéaires comme le prédirait la loi de LAPLACE. Lorsqu’on approche le courant limite en régime stationnaire, la résistance globale de l’électrolyte augmente très fortement. On atteint un domaine de fonctionnement où la relation d’électroneutralité ne peut même plus être utilisée pour calculer les profils de concentration.

4.3 - PASSAGE D’UN COURANT

À TRAVERS UNE INTERFACE ÉLECTROCHIMIQUE

Le passage d’un courant dans un système hétérogène fait intervenir des phénomènes en volume (transport de matière et éventuellement réactions chimiques en volume), ainsi que des phénomènes interfaciaux. Si l’on garde comme objectif la description des caractéristiques globales d’un système électrochimique (U, I, t ), les caractéristiques des interfaces, décrites dans ce paragraphe, interviennent à deux niveaux. D’une part elles définissent les conditions aux frontières des volumes pour la description des profils de concentrations et de potentiel, d’autre part elles déterminent la contribution des interfaces à la tension globale, c'est-à-dire les termes qui viennent s’ajouter à ceux de chute ohmique [42]. Dans certains systèmes électrochimiques, on peut trouver des conditions expérimentales pour limiter au maximum les interactions entre l’anode et la cathode : ces deux électrodes restent traversées par un courant identique, mais les phénomènes de transport de matière ayant lieu aux deux interfaces n’interagissent pas. C’est typiquement ce que l’on cherche en général dans une expérience menée dans un but analytique. On se limitera dans ce paragraphe à une telle situation et on ne s’intéressera donc ici qu’à la

!

!

"!

sont plus confondus ( j ! j migration = " E ). L’exemple détaillé dans l’annexe A.4.1 prend en compte cet aspect. [42] On peut se reporter à la section 2.2.3 ainsi qu’aux figures 2.15 et 2.16 de la section 2.2.4.2 pour la description qualitative des profils de potentiel dans un système électrochimique et donc les différentes contributions à la tension mesurée aux bornes d’un système électrochimique parcouru par un courant. Rappelons en outre que la description des profils de concentration ou de potentiel dont il est question ici est réalisée à une échelle spatiale de l’ordre de grandeur des couches de diffusion et pas à l’échelle des doubles couches (voir la section 3.3.1). En particulier, alors que le profil de potentiel est continu, si on le regarde à l’échelle des doubles couches, il apparaît discontinu aux passages des interfaces à l’échelle des couches de diffusion.

218

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

description d’une seule interface [43]. De plus, on ne traitera en détail que le cas d’une interface électrochimique, mais le même type de démarche convient pour une interface quelconque, comme par exemple une jonction ionique.

4.3.1 - PROFILS DE POTENTIEL ET DE CONCENTRATION À UNE INTERFACE 4.3.1.1 - PROFIL DE POTENTIEL On peut considérer, pour les échelles de temps courantes en électrochimie ( 10−15 s), que l’échange d’électrons à une jonction entre deux métaux est infiniment rapide (pas de barrière énergétique). Dans ces conditions, il n’y a pas de modification de la zone interfaciale d’une jonction métallique lorsque celle-ci est parcourue par un courant : en particulier, la tension de jonction électronique est la même que lorsqu’il y a équilibre, donc sous courant nul, comme cela est représenté sur la figure 4.13. j ö j

MÉTAL α

MÉTAL β

x

Figure 4.13 - Profils de potentiel à une jonction entre deux métaux de conductivités différentes (pentes différentes avec σ α < σ β ) à l’équilibre (pointillés) et lors du passage d’un courant (trait plein)

En revanche, pour les interfaces électrochimiques et les jonctions ioniques, le passage d’un courant perturbe l’interface. La tension aux bornes de l’interface (ou la tension de jonction dans le cas d’une jonction ionique) est généralement différente de celle observée à l’abandon. Elle dépend a priori de l’ensemble des paramètres du système et s’écarte d’une loi linéaire (loi d’OHM). Le plus souvent, on peut considérer que l’épaisseur de la double couche est beaucoup plus faible que celle des couches de diffusion [44]. On a typiquement :

#% $ " 10 µm &%

!double couche " 10 Å !couche de diffusion

'

δdouble couche  δcouche de diffusion

On se placera pour la suite dans le cadre de cette situation, c'est-à-dire dans les systèmes où les échelles géométriques dans l'électrolyte sont bien distinctes. Ainsi, à l’échelle

[43] Des exemples où les deux électrodes interagissent fortement au travers du transport de matière sont décrits dans la section 4.4. [44] On trouve des exceptions à la situation classique décrite ici, par exemple dans des électrolytes très peu conducteurs, pour lesquels l’épaisseur de la double couche devient importante (voir section 3.3.1) ou encore pour des expériences de très courte durée (par exemple voltamétrie à haute vitesse de balayage) ou dans des systèmes où les électrodes sont extrêmement proches. Dans ces deux derniers cas, l’épaisseur de la couche de diffusion est alors plus faible que 10 µm.

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

219

de la couche de diffusion, le gradient de potentiel (donc le champ électrique) est négligeable devant celui observé dans la double couche, comme cela est représenté sur la figure 4.14. Ainsi, le champ électrique, très intense dans la double couche, est bien plus faible dans le reste de l’électrolyte. Cependant, dans la mesure où les distances peuvent être importantes dans ce dernier, ce champ électrique relativement faible peut se traduire aux bornes de l’électrolyte par une différence de potentiel non-négligeable, correspondant au terme de chute ohmique. j e− ∆j0

DILATATION DE

x

dcouche de diffusion

L'ÉCHELLE SPATIALE

j e− ∆j0

ddouble couche

x

Figure 4.14 - Profil de potentiel à une interface électrochimique parcourue par un courant Δϕ0 est la tension aux bornes de la double couche.

D’autre part, le moteur de la réaction électrochimique se produisant dans la zone interfaciale est lié à la tension aux bornes de la double couche (notée Δϕ0 sur la figure 4.14). La relation entre la valeur du courant et celle de la tension aux bornes de la double couche est précisément l’objet des études et des modèles de cinétique électrochimique [45].

4.3.1.2 - PROFILS DE CONCENTRATION On rappelle que le bilan de matière à une interface fait apparaître chaque densité de flux molaire interfacial (et donc les densités de courant et les courants de chaque type de porteurs de charge) comme la somme de deux termes, appelés respectivement faradique et capacitif (voir section 4.1.3.3).

[45] Une description sommaire des modèles de cinétique électrochimique est donnée à la section 4.3.2.

220

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Pour une interface électrochimique, la densité de flux molaire de matière se décompose selon : "# i (N i )interface = (N icapac )interface + (N ifarad )interface = ! + w Si "t On rappelle également qu’il est facile d’introduire le courant dans ces équations par l’intermédiaire de la loi de FARADAY. Par exemple, lorsqu’une seule demi-réaction est mise en jeu à l’interface, on écrit :

(N ifarad )interface =

1 !i farad 1 !i farad j = I � !e � S !e

En présence d’électrolyte support, on peut montrer que les courants de migration des espèces électroactives sont généralement négligeables devant leurs courants de diffusion [46]. De plus, à l’interface, la composante normale de la densité de flux de convection est nécessairement nulle : l’électrode, paroi imperméable, constitue un mur pour le mouvement du milieu électrolyte. Ainsi, en présence d’électrolyte support, seule la composante normale de la densité de flux de diffusion interfacial, pour une espèce électroactive, est à prendre en compte. Dans ces conditions, et pour le cas d’une seule demi-réaction rédox à l’interface, la pente à l’interface du profil de concentration de chaque espèce électroactive est donc proportionnelle au courant faradique. Prenons l’exemple de l’oxydation des ions Fe2+ en Fe3+ dans un système à géométrie plane à l’interface entre une électrode de platine et une solution aqueuse contenant des ions ferreux, ferriques et un électrolyte support. Les conditions frontières pour les deux espèces électroactives s’écrivent, si l’on peut négliger le courant capacitif :

( N Fe2+ )x =0 = ( N Fe2+diffusion )x =0

=!

( N Fe3+ )x =0 = ( N Fe3+diffusion )x =0

=

# "[Fe2+ ] & I = !DFe2+ % ( �S $ "x 'x =0

I = !DFe3+ �S

# "[Fe3+ ] & % ( $ "x 'x =0

A l’interface, les pentes des profils de concentrations de Fe2+ et Fe3+ sont donc de signes opposés : pour une oxydation, le profil de concentration de Fe2+ est croissant, tandis que celui de Fe3+ est décroissant, l’axe des distances étant orienté de l’électrode vers l’électrolyte : I > 0. La figure 4.15 représente l’allure, à un instant donné, des profils de concentration de Fe2+ et Fe3+ lorsque l’épaisseur de la couche de diffusion [47] est faible devant les dimensions du système complet, par exemple dans une situation de transport semi-infini et en régime transitoire (voir section 4.3.1.3). [46] Cette propriété, qui est très généralement admise en électrochimie, a été démontrée sur un exemple dans l’annexe A.4.1. [47] L’épaisseur de la couche de diffusion, telle qu’elle est définie de façon globale à la section 2.2.1.1, dépend ici essentiellement du coefficient de diffusion de Fe2+ et du temps. Quelques données plus quantitatives sur les valeurs d’épaisseur de couche de diffusion dans un régime de diffusion semiinfinie transitoire sont données dans la section 4.3.1.3.

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

221

Comme DFe2+ > DFe3+ (voir le tableau 4.2 dans la section 4.2.2.4 [48]), la valeur absolue de la pente du profil de concentration de Fe3+ à l’interface est supérieure à celle de Fe2+. C

3+ [Fe ]x=0



e



[Fe3+]*



[Fe2+]* 2+

[Fe ]x=0 0

dcouche de diffusion

x

Figure 4.15 - Profils de concentration des ions Fe2++ (en noir) et Fe3++ (en gris) lors d’une oxydation [Fe2+]x=0 et [Fe3+]x=0 : concentrations interfaciales, [Fe2+]* et [Fe3+]* : concentrations loin de l’interface

Attention, on prendra soin de ne pas confondre ces profils de concentration, qui représentent des variations dans l’espace, avec les variations de concentration dans le temps : Fe3+ est produit par la demi-réaction rédox à cette interface, donc la quantité d’ions Fe3+ augmente dans le temps (fonction croissante), mais son profil de concentration dans l’espace est décroissant. Sur un profil de concentration comme celui de la figure 4.15, la notion de production (ou consommation) dans le temps peut être visualisée par la surface (c’est-à-dire l’intégrale) entre le profil à l’instant t et le profil initial, qui représente la quantité d’espèces produites (ou consommées) par unité de surface entre ces deux instants. En particulier, le fait qu’il y ait autant de Fe3+ produits que de Fe2+ consommés se traduit visuellement sur la figure 4.15 par l’égalité (en valeur absolue) des surfaces notées + et − [49]. [48] Les valeurs des coefficients de diffusion peuvent être calculées à partir des conductivités molaires à dilution infinie du tableau 4.2 (section 4.2.2.4) en utilisant la relation de NERNST-EINSTEIN (section 4.2.1.4) : 1 RT Di 0 = !i 0 2 2 zi � Afin que l’illustration soit plus démonstrative quant à l’effet d’une différence de coefficient de diffusion entre les deux espèces électroactives, le rapport utilisé pour le tracé des profils de concentration de la figure 4.15 est de 2 alors qu’en réalité les valeurs du tableau 4.2 donne un rapport de 1,2 dans le cas du couple Fe3+/Fe2+. [49] Cette propriété est généralisable sur des écarts entre profils de concentration à différents instants. Mais il faut prendre garde au fait que ce type de raisonnement ne peut pas s’appliquer lorsque l’on représente un profil de concentration dans un état stationnaire ou quasi-stationnaire. La signification de la surface entre le profil stationnaire et le profil initial est plus complexe à interpréter. Un exemple simple est discuté dans l’annexe A.4.2.

222

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Le bilan des charges des espèces électroactives dans la couche de diffusion fait apparaître une modification de la répartition des charges, et cela serait vrai même si les coefficients de diffusion étaient identiques. Dans l’exemple représenté sur la figure 4.15, comme dans toute oxydation, le bilan sur les espèces électroactives fait apparaître un excès positif de charges dans la couche de diffusion par rapport au sein de la solution. Dans l’exemple choisi, cela se traduit par un profil correspondant à la somme 2 [Fe2+] + 3 [Fe3+] qui n’est pas plat (courbe décroissante) dans la couche de diffusion. L'électroneutralité de la solution dans la couche de diffusion est maintenue : cela signifie que les autres ions électroinactifs (ici essentiellement les ions de l'électrolyte support ou, lorsqu’il n’y a pas d’électrolyte support, les contre-ions) compensent ces modifications de charge que la réaction rédox provoque dans la couche de diffusion. On observe donc également pour ces espèces non-électroactives des profils de concentration qui présentent des variations dans la couche de diffusion [50].

z Reprenons l’exemple de l’oxydation, à l’interface avec une électrode de platine, d’une solution aqueuse

contenant un électrolyte support KNO3, des nitrates ferreux et ferrique. Pour simplifier les discussions, on considérera que tous les ions ont des coefficients de diffusion très proches. Les profils de concentration des espèces électroactives ont été décrits précédemment. Même si l’on les représente rarement (car, en général, on s’y intéresse peu), les profils de concentration des espèces non-électroactives ne sont pas plats. Il faut cependant garder en mémoire le fait que, pour des flux de diffusion du même ordre de grandeur que ceux des espèces électroactives, comme ces espèces sont en concentrations bien plus importantes, les variations relatives de concentration sont négligeables. Les deux approches détaillées ci-dessous permettent de déterminer qualitativement l’allure des profils de concentration des espèces non-électroactives (K+ et NO3−).  Raisonnement qualitatif à partir de la relation d’électroneutralité en tout point de l’électrolyte La réaction d’oxydation remplace des ions Fe2+ par des ions Fe3+ dans l’électrolyte. Elle produit donc, en ce qui concerne les espèces électroactives, un excès de charges positif dans la couche de diffusion. Ce dernier doit être compensé par les ions électroinactifs. Ici, chacun des deux ions électroinactifs de l’électrolyte support contribue ainsi à compenser cet excès de charges positif : on observe un excès d’anion NO3− et un défaut de cation K+ dans la couche de diffusion par rapport aux concentrations initiales (figure 4.16). C



[NO3− ]*

e

[K+]*

x

Figure 4.16 - Profils de concentration des ions électroinactifs lors d’une oxydation [50] En plus de l’exemple qui suit immédiatement, on peut également se reporter à l’exemple traité dans l’annexe A.4.1.

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

223

Sur cette figure, l’échelle en concentration n’est, en proportion, que huit fois plus petite que celle de la figure 4.15. L’origine (concentration nulle) n’y serait donc pas visible. La différence entre les concentrations en solution homogène des deux ions électroinactifs, [K+]* et [NO3−]*, provient du fait que l’ion nitrate est également le contre-ion des deux cations électroactifs.  Raisonnement qualitatif à partir des flux molaires de matière interfaciaux Le raisonnement ci-dessous n’est rigoureux que sur les flux interfaciaux de matière. Pour un système à géométrie plane en régime stationnaire, il serait de plus valable dans toute l’épaisseur de la couche de diffusion (en effet dans ce cas les densités de flux de matière sont homogènes). Ici, en transitoire, les allures déduites de ce raisonnement à l’interface sont cependant généralement qualitativement correctes. Les conditions interfaciales pour les espèces électroinactives s’écrivent :

(N i )x =0 = (N i diffusion )x =0 + (N i migration )x =0 = 0 Ainsi, les flux interfaciaux de matière étant nuls, les deux composantes migration et diffusion sont nonnulles et opposées à l’interface. Le courant global de migration et le courant total sont confondus [51]. Les anions migrent vers l’anode et les cations vers la cathode : ici les anions migrent donc vers l’interface et les cations en sens opposé. Rappelons que la migration des espèces électroactives est ici négligeable (présence d’un électrolyte support). On obtient donc, dans la couche de diffusion, les sens des densités de flux de matière représentés sur la figure 4.17 (la taille des différents vecteurs représentés est arbitraire, seul leur sens est significatif). MIGRATION DIFFUSION

Fe2+

MIGRATION

e−

DIFFUSION

3+

Fe

MIGRATION

ö j

DIFFUSION

K+

MIGRATION DIFFUSION

NO3−

Figure 4.17 - Sens des densités de flux de matière dans la couche de diffusion pour une oxydation de Fe2+ en Fe3+

On a donc à cette interface : (N K+migration )x =0 > 0

(N NO3!migration )x =0 < 0

et et

(N K+diffusion )x =0 < 0 (N NO3!diffusion )x =0 > 0

Le flux de diffusion des ions K+ est dirigé vers l’électrode. Le profil de concentration de ces ions est donc croissant : on trouve ce résultat soit mathématiquement par l’expression de la densité de flux, comme proportionnel à l’opposé du gradient de concentration, soit en se rappelant que par diffusion les espèces se déplacent, dans un solvant donné, des zones les plus concentrées vers les moins concentrées. Le raisonnement est symétrique pour les ions NO3− qui présentent un profil de concentration décroissant dans la couche de diffusion. [51] Avec l’hypothèse posée ici de l’égalité des coefficients de diffusion cette propriété découle de l’écriture des différents flux de matière, comme cela est décrit dans la section 4.2.1.5.

224

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS On retrouve la même allure des profils de concentration que par le premier raisonnement (voir figure 4.16) qui part de l’électroneutralité de la solution en tout point.

y

Dans les deux sections suivantes, on décrit deux situations expérimentales usuelles, pour lesquelles on peut considérer, du point de vue du transport de matière, que les deux électrodes sont indépendantes l’une de l’autre :  un système sans convection, et pour un temps d’observation limité : le système en régime transitoire est alors caractérisé par un transport semi-infini. On représentera qualitativement les profils de concentration attendus pour une expérience de chronoampérométrie (figure 4.18) et une expérience de chronopotentiométrie (figure 4.19) ;  un système avec agitation contrôlée (convection forcée) : le système atteint rapidement un régime (quasi-)stationnaire.

4.3.1.3 - EXEMPLE DE RÉGIME TRANSITOIRE : LA DIFFUSION SEMI-INFINIE Dans un système sans convection, et pour un temps d’observation limité (par rapport au temps caractéristique du système prenant en compte les coefficients de diffusion et la distance inter-électrodes), l’électrolyte peut être séparé en trois zones : deux couches de diffusion proches des deux interfaces réactives et une zone intermédiaire de l’électrolyte qui ne présente pas d’inhomogénéité de composition. Les épaisseurs des couches de diffusion augmentent au cours du temps mais on considère ici qu’elles restent faibles devant la distance inter-électrodes. On parle de système en régime transitoire et on caractérise la situation à chaque interface comme étant une situation de transport semiinfini : dans cette situation, les deux électrodes sont indépendantes l’une de l’autre, en dehors du fait qu’elles sont traversées par le même courant. Pour simplifier la présentation, on considère que le système, à géométrie plane [52], contient un électrolyte support. Ainsi, on peut négliger la migration des espèces électroactives devant leur diffusion dans les couches de diffusion. D’autre part, toujours pour simplifier, on se limite à des systèmes rédox rapides avec des coefficients de diffusion égaux pour toutes les espèces électroactives. La description fait alors intervenir :  le bilan volumique de matière, se résumant à la seconde loi de FICK ici :

!C i !2C i = Di !t !x 2 C i = C i*

avec, à t = 0, ∀x :

[52] Dans le cas d’un système à géométrie plane, de nombreux auteurs emploient, dans le cas décrit ici, le terme « diffusion linéaire semi-infinie ». Nous préférons dans ce livre « diffusion plane semiinfinie » car le mot linéaire est ambigu : il est aussi souvent employé dans le contexte d’une opposition à de la diffusion « non linéaire », c’est-à-dire au sens des équations mathématiques. La 2e loi de FICK, comme usuellement écrite dans ce document, correspond à une équation différentielle linéaire et suppose que le coefficient de diffusion est une constante. Lorsque cette approximation ne peut pas être faite, la conservation de la matière s’écrit en géométrie plane : !C !t

=

! !x

(

D

!C !x

)

et l’équation différentielle est alors généralement non linéaire.

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

225

 la loi de FARADAY pour l’interface électrochimique et la relation liée à la cinétique de la réaction rédox (ici pour un système rapide, sous la forme d’une relation qui a la forme de la loi de NERNST avec les concentrations interfaciales, écrite ici pour le couple rédox Red) [53] : Ox + n e−

!t

* I $ #C ' N ix =0 = " Di & i ) = i % #x ( x =0 * e � S

et

E = E° +

RT [Ox] x =0 ln n� [Red] x =0

 les conditions semi-infinies : les concentrations tendent vers les concentrations initiales (qui sont les concentrations de l’électrolyte en dehors des couches de diffusion) lorsque la distance à cette interface tend vers l’infini (à l’échelle du système). On peut également traduire cette condition aux limites semi-infinie en écrivant que la densité de flux molaire de matière tend vers 0 : &C i * !t C i $$$$ ou encore N i = % Di $$$$ x "# " C i x "# " 0 &x

 Expérience de chronoampérométrie Un exemple typique de l’évolution temporelle du profil de concentration de l’espèce consommée à l’électrode de gauche et ne réagissant pas à celle de droite, est représentée figure 4.18, lors d’une expérience de chronoampérométrie. Imposer à une électrode un potentiel constant au cours du temps revient, pour un système rédox rapide à fixer la concentration interfaciale de l’espèce consommée (ici à gauche) [54]. Dans ce cas, la pente interfaciale du profil de concentration, donc le courant, évolue dans le temps [55]. Dans cette expérience de chronoampérométrie, l’épaisseur de la couche de diffusion évolue dans le temps. Un bon ordre de grandeur de cette dernière est donné par l’intersection entre la pente à l’interface du profil de concentration et le profil plat correspondant à l’instant initial : ! Dt [56]. Même si cette valeur est parfois confondue avec l’épaisseur de la couche de diffusion, il est préférable de bien les distinguer [57] : par exemple, à une distance égale à ! Dt , la concentration est encore écartée de 18% de la concentration initiale. L’épaisseur de la couche de diffusion est égale à 2,0 ! Dt pour une précision de 1% et 2,6 ! Dt pour une précision de 0,1%. [53] La définition de la rapidité d'un couple est donnée dans la section 4.3.2.6. les conséquences sur la loi cinétique sont décrites dans la section 4.3.3.2. [54] Les relations entre concentrations interfaciales et potentiel pour un couple rédox rapide sont données dans l'annexe A.4.2 et démontrées dans le cas où les coefficients de diffusion des deux espèces électroactives sont considérés comme identiques. [55] Pour les systèmes simples décrits ici, l’évolution du courant dans le temps permet de remonter au coefficient de diffusion de l’espèce concernée. Cette loi est connue sous le nom de loi de COTTRELL : I (t ) = n � S C * D ! t . [56] Le système d’équations définissant le système peut être intégré de manière analytique à l’aide des transformées de LAPLACE. Cette résolution est cependant au-delà des objectifs de ce document. On ne retiendra que les ordres de grandeur qui en découlent. [57] Rappelons que, comme cela a été défini dans la section 2.2.1.1, l’épaisseur de la couche de diffusion correspond à l’épaisseur du volume dans lequel les phénomènes de diffusion sont importants. On peut par exemple caractériser cela quantitativement par un écart minimal de 0,1% (ou 1% ou 10%… suivant la précision recherchée) de la concentration d’au moins une espèce avec sa valeur dans la zone homogène, où la contribution des phénomènes de diffusion est négligeable.

226

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS C DIFFUSION

t=0

t3

t↑

0



√ pDt 3

x

dt 3

Figure 4.18 - Evolution dans le temps du profil de concentration d’une espèce consommée lors d’une expérience de chronoampérométrie

 Expérience de chronopotentiométrie La figure 4.19 correspond à une expérience de chronopotentiométrie, pendant laquelle on fixe donc une densité de courant constante au cours du temps, ce qui revient à fixer la pente à l’interface (ici à gauche) du profil de concentration des espèces électroactives. Dans ce cas, la concentration interfaciale évolue dans le temps [58]. Dans cette expérience de chronopotentiométrie, l’épaisseur de la couche de diffusion évolue également dans le temps. Un bon ordre de grandeur de cette dernière est donné par l’intersection entre la pente à l’interface du profil de concentration et le profil plat correspondant à l’instant initial [56] : Dt 2

!

Cette valeur, tout en étant différente de la précédente, est du même ordre de grandeur. Ici, à une distance égale à cette épaisseur, la concentration est encore écartée de 14% de la concentration initiale. L’épaisseur de la couche de diffusion est multiple de l’épaisseur précédemment définie avec un facteur 2,2 pour une précision de 1% et 2,8 pour une précision de 0,1%.

[58] Dans ce type d’expérience, le temps caractéristique pour lequel on obtient une concentration interfaciale quasi-nulle est une donnée facilement accessible. En effet si l’on poursuit l’expérience, le passage du courant imposé ne pouvant plus être assuré par la réaction rédox principale, un autre système rédox est sollicité et cela se traduit par une brusque variation du potentiel mesuré. La mesure de ce temps caractéristique peut être exploitée pour déterminer des paramètres du transport de la matière. Pour un système simple, la relation mise en jeu est connue sous le nom de loi de SAND :

! =

n �SC* 2I

D" .

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

227

C DIFFUSION

t=0

t3

t↑

0

2

Dt 3 π

dt 3

x

Figure 4.19 - Evolution dans le temps du profil de concentration d’une espèce consommée lors d’une expérience de chronopotentiométrie

4.3.1.4 - EXEMPLE DE RÉGIME STATIONNAIRE : MODÈLE DE NERNST Il existe un autre type classique de conditions aux limites, rencontré par exemple quand on impose une convection forcée dans le système. C’est le cas avec une EDT dans un petit électrolyseur en chimie analytique, ou dans des électrolyseurs industriels lorsqu’un système de circulation forcée de l’électrolyte ou d’une électrode est installé. On peut montrer dans les cas simples [59] que l’on peut définir, en fonction des conditions d’agitation et des propriétés de transport des espèces mobiles, une épaisseur de couche de diffusion, qui est indépendante du temps, typiquement de l'ordre de 10 µm. On fait alors appel dans ces cas-là au modèle de la couche de NERNST en géométrie plane décrit à la section 2.2.1.1. Ce modèle, qui impose une concentration égale à la concentration initiale à partir d’une distance δ NERNST de l’électrode, fait apparaître en régime stationnaire une discontinuité mathématique des pentes des profils de concentration à cette distance δ NERNST de l’électrode. Le profil réel stationnaire ne présente pas de point anguleux. Le modèle donne donc des résultats faux au voisinage de δ NERNST. Mais il permet de retrouver très rapidement les caractéristiques exactes du profil de concentration à l’interface, et donc de rendre compte correctement de la densité de courant. Dans le modèle de NERNST, le profil de concentration dans la couche de diffusion des espèces électroactives est décrit à chaque instant par le système d’équations suivant :

[59] C’est un raisonnement relativement compliqué faisant intervenir des calculs d’hydrodynamique pour quantifier les densités de flux de matière par convection. Ce calcul pour une EDT a été développé par LEVICH (certains auteurs parlent de théorie de LEVICH). Il permet de justifier l’utilisation du modèle simplifié de la couche de NERNST et permet surtout de donner une expression mathématique de l’épaisseur de cette couche en fonction des paramètres du système. Cette relation, dite de LEVICH, est utilisée dans l’annexe A.4.2 : !i = 1, 611Di1/ 3 " 1/ 6 # $1/ 2 .

228

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

!C i !2C i = 0 = Di !t !x 2 et les conditions aux limites suivantes : ) I # "C & N i x =0 = ! Di % i ( = i $ "x ' x =0 ) e � S

C i x !" N

ERNST

= Ci *

(concentration fixée à δ NERNST)

Un exemple typique de l’évolution temporelle du profil de concentration de l’espèce consommée à l’électrode de gauche et ne réagissant pas à celle de droite, est représenté sur la figure 4.20, lors d’une expérience de chronopotentiométrie [60]. Dans ces conditions de convection forcée, on atteint très rapidement un régime stationnaire à courant nonnul [61]. La pente du profil à l'interface est identique à celle donnée par le modèle de NERNST, comme cela est illustré sur la figure 4.20. C DIFFUSION

CONVECTION

t=0 tö∞ régime stationnaire ≠ équilibre (profil réel)

tö∞ régime stationnaire ≠ équilibre (modèle de NERNST)

t↑

0

dNERNST

dcouche de diffusion

x

Figure 4.20 - Evolution dans le temps du profil de concentration d’une espèce consommée dans un système à convection forcée [60] Comme évoqué dans la note [79] de la section 1.6.3, le terme de chronopotentiométrie est utilisé ici dans son sens étymologique (et non pas restreint à des systèmes où la diffusion est le seul mode de transport de la matière des espèces électroactives). Bien que le système soit à convection forcée et donc atteigne rapidement un régime stationnaire, on se focalise ici sur la période transitoire d’établissement de celui-ci. On s’intéresse ainsi à l’évolution dans le temps du profil de concentration lors d’une expérience à courant imposé. Dans ce type d’expérience, il faut de plus que le courant imposé soit inférieur en valeur absolue à une valeur limite, qui correspond à un profil de concentration stationnaire avec une concentration interfaciale nulle. Cette notion de courant limite, déjà introduite qualitativement pour le tracé des courbes intensité-potentiel dans la section 2.3.3.1, est détaillée et quantifiée dans la section 4.3.3.1. [61] En utilisant les résultats du cas précédent, on peut estimer le temps d’obtention du régime stationnaire : c’est le temps tel que Dt atteint la valeur de l’épaisseur de la couche de NERNST, 10 µm. Pour un coefficient de diffusion de l’ordre de 10−5 cm2 s−1, cela correspond à 0,1 s. Pour des conditions expérimentales usuelles, le temps caractéristique d’établissement du régime stationnaire est donc faible devant la durée totale de l’expérience.

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

229

L’épaisseur de la couche de NERNST est plus petite que l’épaisseur de la couche de diffusion dans la mesure où, à cette distance de l’électrode, le profil réel [62] montre encore une pente non-négligeable (écart de concentration égal à 11% par rapport à la concentration initiale). L’épaisseur de la couche de diffusion est égale à 1,5 δ NERNST pour une précision de 1% et 1,8 δ NERNST pour une précision de 0,1%. Ces quelques exemples permettent d’illustrer comment on peut, dans les cas simples, représenter qualitativement les profils de concentration en fonction des conditions frontières particulières du système. Ces exemples mettent aussi en évidence le fait que l’obtention d’un régime stationnaire à courant non-nul est soumise à des conditions expérimentales particulières.

4.3.1.5 - SENS DES DIFFÉRENTES DENSITÉS DE COURANT Pour les espèces électroactives, on peut rencontrer, suivant leur nombre de charge, tous les cas de figure de sens de déplacement de migration et diffusion. Généralement, le sens du courant de migration est identique à celui du courant total, qui est quant à lui directement lié au déroulement des réactions rédox. Le sens du courant de diffusion peut alors souvent être déterminé par différence, comme cela est illustré ci-dessous.

z Dans chacun des trois cas suivants schématisés sur les figures 4.21, 4.22 et 4.23, la demi-réaction rédox Cu considérée est la réduction du Cu(II) : Cu(II) + 2 e− La taille des vecteurs densité de flux de matière représentés est arbitraire, seul leur sens est significatif.  Cu(II) est sous la forme d’un cation : cas d’une solution aqueuse de Cu(NO3)2, sans électrolyte support MÉTAL

ÉLECTROLYTE

e



2+

Cu

MIGRATION DIFFUSION

Cu

2+

MIGRATION

ö j

DIFFUSION

NO3−

Figure 4.21 - Sens des densités de flux molaires de matière

 Cu(II) complexé est sous la forme d’un anion : cas d’une solution aqueuse de K2Cu(CN)4, sans électrolyte support MÉTAL −

e

Cu(CN)42−

ÉLECTROLYTE MIGRATION DIFFUSION

ö j

Cu(CN)42−

MIGRATION DIFFUSION

K+

Figure 4.22 - Sens des densités de flux molaires de matière [62] Il s’agit plus précisément du profil de concentration prévu dans le cadre de la résolution de LEVICH.

230

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

 Cu(II) complexé est sous la forme d’une espèce neutre : cas d’une solution aqueuse de CuCl2 et KCl MÉTAL

ÉLECTROLYTE

e



CuCl2 −

Cl ö j

MIGRATION DIFFUSION

CuCl2

MIGRATION DIFFUSION

+

K

MIGRATION DIFFUSION



Cl

Figure 4.23 - Sens des densités de flux molaires de matière

y

En présence d’électrolyte support, les ions de ce dernier ont, comme toutes les espèces électroinactives, des composantes de déplacement par migration et diffusion au voisinage de l’électrode qui sont en sens opposés et se compensent exactement [63].

4.3.2 - MODÈLE CINÉTIQUE D'UNE RÉACTION HÉTÉROGÈNE 4.3.2.1 - GÉNÉRALITÉS De nombreux phénomènes peuvent intervenir lorsqu’un courant traverse une interface électrochimique :  réactions de transfert de charge dans la double couche,  transport de matière par diffusion, migration et convection dans l’électrolyte,  réactions chimiques ou rédox en phase homogène dans l’électrolyte,  réactions d’adsorption - désorption dans la double couche,  réactions entre espèces adsorbées dans la double couche,  réactions d’insertion dans l’électrode : il se développe alors des profils de concentration d’espèces insérées dans le volume de l’électrode,  diffusion d’espèces à l’interface, le long de celle-ci (diffusion surfacique),  cristallisation… L’électrochimie interfaciale se focalise sur la réaction de transfert de charge mais celle-ci ne peut pas en général être dissociée des autres phénomènes. Rappelons que la vitesse d’une réaction de transfert de charge est directement proportionnelle à la densité de courant à l’interface. Comme dans tout phénomène cinétique se déroulant en plusieurs étapes successives et où on peut considérer comme valide l’approximation des états quasi-stationnaires, toutes les étapes ont la même vitesse qui est la vitesse de la réaction globale. Dans un cas général, cette vitesse dépend de l’ensemble des paramètres

[63] Un exemple de profil de concentration des ions de l’électrolyte support est détaillé dans la section 4.3.1.2.

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

231

cinétiques de chacune des étapes. Il existe cependant des cas limite, où une des étapes a une constante de vitesse très faible devant les autres. On dit parfois que cette étape est lente et les autres rapides. Cette terminologie est délicate puisque toutes les étapes ont la même vitesse. On préférera ici l’emploi des termes : étape déterminante ou limitante. On peut encore dire que c’est cette étape qui contrôle le phénomène global. En effet dans ce cas là, seuls les paramètres cinétiques de l’étape cinétiquement déterminante apparaissent dans l’expression de la vitesse globale. Cette terminologie sera appliquée dans cet ouvrage pour décrire les cas limites rencontrés lors d’une réaction de transfert de charge, qui est nécessairement couplée à des phénomènes de transport de matière. Pour le transfert de charge, qui a lieu dans la double couche, le moteur de la réaction est lié à la différence de potentiel interne aux bornes de cette double couche, et plus précisément la différence de potentiel entre le métal et l'électrolyte dans le plan de HELMHOLTZ [64].

4.3.2.2 - VITESSE D'UNE RÉACTION HÉTÉROGÈNE La cinétique électrochimique est un cas particulier de la cinétique chimique, avec quelques caractéristiques spécifiques que l’on va détailler. On s’intéresse aux réactions électrochimiques qui se produisent à l’interface, il s’agit donc de réactions de surface et non pas de réactions en volume. On définit ainsi une vitesse surfacique :

v =

1 1 # "ni & % ( !i S $ "t 'interface

avec νi le nombre stœchiométrique algébrique de l’espèce i dans la réaction considérée. Une vitesse surfacique s’exprime donc en mol m−2 s−1. Comme pour les réactions chimiques en volume, on peut décomposer les réactions surfaciques en étapes élémentaires. Pour chaque étape élémentaire, selon la règle de VAN’T HOFF, l’ordre global de la loi de vitesse est égal à la valeur absolue de la somme des nombres stœchiométriques des réactifs et l’ordre partiel de chaque réactif est égal à la valeur absolue de son nombre stœchiométrique dans la réaction considérée :

v =k

"

i =réactif

(C i interface ) !i

Lorsqu’un des réactifs est en concentration très importante à l’interface (par rapport aux autres réactifs), on peut considérer que sa concentration est constante : il y a une dégénérescence de l’ordre et l’on définit une constante de vitesse apparente contenant ce terme constant de concentration. Comme la concentration des électrons dans le métal est beaucoup plus importante que celle des composés électroactifs, elle peut être considérée comme constante et n’apparaît plus explicitement dans l’expression de la loi de vitesse apparente des demiréactions rédox élémentaires à une interface métal | électrolyte. Cela serait différent si

[64] Une description simplifiée de la double couche est présentée dans la section 3.3.1.

232

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

l’on voulait décrire les lois cinétiques rédox à une interface semi-conducteur | électrolyte, mais la description se limitera ici aux électrodes métalliques. Par exemple, pour la demi-réaction rédox du couple Fe3+/Fe2+, que l’on peut considérer comme une étape élémentaire : v oxydation Fe3+ + e− Fe2+ Fe3+ + e−

v réduction

Fe2+

la loi de vitesse s’écrit à une interface métal | électrolyte :

v oxydation = k oxydation [Fe2+ ] interface v réduction = k réduction [Fe3+ ] interface Pour ce mécanisme, que l’on appelle mécanisme E [65], les constantes de vitesse sont exprimées en m s−1. Il existe d’autres mécanismes élémentaires de type rédox en électrochimie :  l’électrosorption (une des espèces rédox est une espèce adsorbée),  l’insertion (une des espèces rédox est un composé d’insertion),  le dépôt (une des espèces rédox est un solide). La description qui suit est limitée aux systèmes rédox qui obéissent à un mécanisme E à l’interface avec une électrode métallique. Une étape rédox élémentaire, au sens cinétique du terme, ne peut faire intervenir que l’échange d’un seul électron. Ainsi, un couple rédox faisant intervenir deux électrons échangés, ou plus, correspond à un mécanisme cinétique complexe. Le nombre global d’électrons échangés peut parfois dans ce cas intervenir dans l’expression finale de la courbe intensité-potentiel, mais il faut, pour le démontrer, écrire l’ensemble des lois cinétiques pour chacune des étapes élémentaires impliquées. Cela est complexe et ne sera pas abordé dans ce document. Nous nous limiterons ici à l’écriture des lois cinétiques pour un mécanisme E, avec donc un seul électron échangé : |νe | = n = 1 et |νOx | = |νRed | = 1. Notons qu’il est d’usage, dans la plupart des documents présentant cet aspect de l’électrochimie, de généraliser ces écritures à des couples redox avec une valeur quelconque du nombre d’électrons échangés. Nous avons volontairement ici fait un choix différent en posant n = 1 car cette généralisation est le plus souvent erronée. Une discussion rapide de cet aspect, à partir d’un couple échangeant deux électrons, est menée dans l’annexe A.4.3.

4.3.2.3 - MODÈLE CINÉTIQUE

SIMPLIFIÉ DU MÉCANISME

E (UNE ÉTAPE)

Lorsqu’il s’agit d’une réaction rédox, le moteur de la réaction, et par conséquent les constantes de vitesse, dépendent notamment de la différence de potentiel à l’interface. De manière précise, celui-ci dépend de la différence entre le potentiel à la surface du métal et celui dans l’électrolyte au point où se trouve l’espèce électroactive au moment [65] E ici est pour « électrochimique ». Dans cette nomenclature, une étape réactionnelle en volume dans l’électrolyte est notée C. Un des mécanismes complexes les plus fréquents est ainsi le mécanisme EC.

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

233

du transfert d’électron. Les modèles cinétiques rendant compte de ce phénomène sont complexes, et nous nous limiterons ici à l’utilisation des expressions obtenues dans une description simplifiée classique de la cinétique électrochimique pour le mécanisme E. Dans ce cadre, les variations des constantes de vitesse de réaction rédox en fonction du potentiel peuvent être décrites à l’aide de deux paramètres cinétiques :  la constante standard de vitesse de réaction rédox, notée k °, qui est homogène à la constante de vitesse s’exprimant en m s−1 (ou aussi en cm s−1) ;  le facteur de symétrie, noté α (nombre sans dimension compris entre 0 et 1, choisi ici pour la réaction dans le sens de l’oxydation [66]). Les constantes de vitesse rédox s'expriment sous la forme :

� # & (E " E °) ( k oxydation = k° exp % + ! $ ' RT � # & (E ! E °) ( k réduction = k° exp % ! (1 ! " ) $ ' RT Ainsi k ° est la constante de vitesse d’oxydation et de réduction au potentiel standard E °. La plupart du temps, il est difficile de donner un sens physique précis à α. Cependant, on peut montrer, dans le cas d’espèces très simples (par exemple la réaction d’électrosorption du proton), que ce paramètre caractérise la différence de courbure entre les courbes d'énergie potentielle du système à l’état oxydé (proton) ou réduit (hydrogène adsorbé) en fonction de la distance à l'électrode. Dans ce modèle, les puits de potentiel de MORSE sont approchés par des courbes paraboliques autour du minimum, comme cela est représenté sur la figure 4.24. Energie MÉTAL

Hads

H+solv

ÉLECTROLYTE

Influence du potentiel 0 Plan d'adsorption

x

Figure 4.24 - Allure de puits de potentiel des réactifs et des produits pour la réaction d’électrosorption du proton : H+ solv + e− Hads [66] Attention, dans certains ouvrages, on utilise les notations αoxydation et αréduction (avec αoxydation + αréduction = 1, puisque le rapport des deux constantes cinétiques doit donner la constante thermodynamique d’équilibre), ou encore on privilégie αréduction , alors qu’ici c’est αoxydation qui a été choisi.

234

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Avec une approche plus globale, s’appuyant sur le modèle du complexe activé pour des réactions en phase homogène, on peut aussi dire que ce paramètre α caractérise le lien entre une grandeur thermodynamique caractéristique, ΔrG °, et une grandeur cinétique caractéristique c’est-à-dire l’enthalpie libre d’activation, ΔG ≠. Cette description simplifiée implique notamment que le milieu soit idéal (coefficients d’activité égaux à 1), ou tout au moins que les coefficients d’activité des espèces concernées puissent être considérés comme constants lors des variations de concentration liées au passage du courant. C’est par exemple le cas pour des systèmes comprenant un électrolyte support, puisque la force ionique est alors fixée par ce dernier et reste inchangée au cours de l’expérience. Dans ce dernier cas, le terme faisant intervenir les coefficients d’activité est considéré comme constant et est intégré dans la constante standard de vitesse de réaction. Pour alléger les notations, on utilise parfois un paramètre, noté ξ, dit « potentiel adimensionnel » qui vaut pour un couple rédox donné [67] :

! = avec, à 25 °C :

f =

� (E " E °) = f (E " E °) RT

� = 38,9 V !1 RT

On a alors :

et

1 = 25,7 mV f

k oxydation = k° e+! "

k réduction = k° e! (1!" ) # En électrochimie, la notion de vitesse sert à caractériser la capacité d’un système à faire passer plus ou moins de courant lorsqu’on s’écarte de l’équilibre. Cette propriété est en général déterminée par un grand nombre de paramètres. Par exemple, les réactions électrochimiques sont très généralement associées à des transports de matière pour apporter un réactif à l’interface et/ou en éloigner un produit. Dans le domaine de la cinétique électrochimique, de nombreux termes sont employés pour caractériser différentes situations typiques qui sont des cas limites avec des allures particulières des courbes intensité-potentiel associées. Ces termes ne sont pas toujours employés dans la littérature avec une rigueur suffisante. Dans les sections qui suivent, nous nous attacherons à définir de manière précise les termes usuels : systèmes rédox nernstiens (section 4.3.2.4), réaction rédox réversible/irréversible (section 4.3.2.5), système ou couple rédox lent/rapide (section 4.3.2.6). Une présentation approfondie des relations entre ces différentes notions est en outre disponible dans l'annexe A.4.4.

4.3.2.4 - CONTRÔLE CINÉTIQUE

OU ÉTAPE CINÉTIQUEMENT LIMITANTE, DÉTERMINANTE

Comme cela a déjà été souligné précédemment, le passage du courant met en jeu des phénomènes de transport de matière en plus de l’étape de transfert d’électron proprement dite. Dans le cas général, la relation courant-tension fait intervenir tous les [67] Attention, dans de nombreux documents de la littérature qui postulent implicitement une généralisation de ces lois aux couples échangeant plusieurs électrons, la définition du potentiel adimensionnel fait intervenir le nombre d’électrons échangés sous la forme : ξ = nf (E − E°).

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

235

paramètres cinétiques du système, ceux liés au transfert de charge et ceux liés au transport de matière. On parle alors parfois de contrôle ou régime mixte. Il est intéressant de considérer les deux cas limites détaillés ci-dessous, lorsque le courant est contrôlé soit par les phénomènes de transport de matière soit par le transfert de charge :  La relation courant/tension ne fait intervenir que des grandeurs caractérisant les phénomènes de transport de matière. On dit que les phénomènes de transport de matière sont déterminants ou limitants, au sens cinétique, ou encore que le système est contrôlé par le transport de matière. Par un abus de langage très fréquent dans la littérature, on dit aussi contrôle par diffusion, alors même que migration et convection peuvent intervenir. Il ne faut pas confondre cette notion d’étape cinétiquement limitante avec la notion de courant limite sur les courbes intensité-potentiel (voir annexe A.4.4). Dans ces conditions, on peut montrer que les profils de concentrations ainsi que la courbe intensité-potentiel peuvent être décrits en prenant des valeurs de concentrations interfaciales qui vérifient la relation suivante :

E = E° +

[Ox] interface RT ln � [Red] interface

Cette relation correspond à l’écriture de la loi de NERNST avec les concentrations interfaciales dans l’argument du logarithme. Il ne s’agit pas de la loi de NERNST au sens strict, dans la mesure où, dans ce système parcouru par un courant, les concentrations interfaciales sont nécessairement différentes des concentrations au sein de la solution. Certains auteurs parlent également dans ce cas d’équilibre local à l’interface, ce qui est incorrect puisque celle-ci, parcourue par un courant, est hors-équilibre. Cette ressemblance d’écriture avec la loi de NERNST est à l’origine du terme nernstien souvent utilisé pour qualifier ces systèmes. Mais attention elle ne signifie pas que les concentrations interfaciales suivent rigoureusement une loi de type NERNST. Il faut comprendre par ce terme que les valeurs (E,I ) d’un tel système peuvent être décrites par une telle approximation (voir annexe A.4.4). Notons pour finir que dans le cas d’un couple rédox quelconque dans des conditions de contrôle par le transport de matière (et/ou de réversibilité, voir ci-dessous), le mécanisme précis des différentes étapes correspondant à la demi-réaction rédox n’importe plus. On peut donc généraliser l’écriture d’un système nernstien avec l’expression des concentrations interfaciales suivant une loi du type :

E = E° +

[Ox] interface RT ln n � [Red] interface

avec n le nombre total d’électrons échangés. On peut se reporter à l’annexe A.4.3 pour une démonstration de ce résultat sur un couple rédox échangeant deux électrons ;  La relation courant-tension ne fait intervenir que des grandeurs caractérisant le phénomène de transfert d’électrons. On dit que l’étape de transfert électronique est limitante ou déterminante, au sens cinétique, ou encore que le système est contrôlé par la cinétique rédox. Certains auteurs emploient aussi le terme de contrôle par activation. Dans ces conditions, on peut montrer que les concentrations sont quasiment homogènes dans l’électrolyte et les concentrations interfaciales peuvent

236

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

donc être confondues avec les concentrations initiales ou encore les concentrations loin de l’interface, [Ox]* et [Red]* :

[Ox] interface ! [Ox]*

et

[Red] interface ! [Red]*

En général, un système ne correspond à un de ces cas limites que dans un certain intervalle de potentiel.

4.3.2.5 - RÉVERSIBILITÉ ET IRRÉVERSIBILITÉ D'UNE ÉTAPE ÉLÉMENTAIRE DE RÉACTION Les notions de réversibilité et d'irréversibilité d'une étape au sens cinétique sont définies en considérant les vitesses de réaction. Dans un mécanisme réactionnel, lorsqu’une étape élémentaire peut être considérée comme se produisant dans les deux sens, la vitesse de cette étape est égale à la différence des vitesses des réactions aller, v→, et retour, v← : v = v→ − v← On dit que cette étape est réversible (au sens cinétique, différent de la thermodynamique) si une des trois conditions suivantes, qui sont équivalentes, est vérifiée : v  v→

,

v  v←

,

v→ ≈ v←

Il faut prendre garde au fait que la dernière relation n’est pas une égalité exacte : ainsi, on n’a pas le droit d’écrire que leur différence (c’est-à-dire la vitesse globale) est nulle. Pour fixer les idées, c’est comme si la vitesse aller était égale à 1 000 001 et la vitesse retour à 1 000 000 (en mol m−2 s−1). La vitesse globale est égale à 1 et n’est pas nulle. C’est le même type de confusion qui est faite par les auteurs qui utilisent le terme d’équilibre local pour désigner une réaction hétérogène réversible [68]. On dit que cette étape est irréversible dans le sens aller (par exemple) si, et seulement si, la vitesse retour est négligeable devant la vitesse aller : v→  v← En conséquence la vitesse globale est quasiment égale à la vitesse aller : v ≈ v→ Dans ce cas là on n’écrit en général qu’une seule flèche dans le bilan de la réaction. On prendra garde, d’après ces deux définitions, au fait qu’on peut très bien avoir une étape réactionnelle qui ne soit ni réversible ni irréversible. Ce cas quelconque est parfois qualifié dans la littérature de situation quasi-réversible [69]. En électrochimie, dans la mesure où les vitesses dépendent du potentiel, ces notions sont à apprécier pour chaque valeur de ce paramètre : un même système peut présenter un transfert de charge réversible dans un intervalle de potentiel d’une expérience et irréversible dans un autre. Ainsi on ne doit pas, en toute rigueur, parler de la réversibilité [68] Le terme de réversible n’est pas synonyme de nernstien (voir annexe A.4.4). Même pour un mécanisme E, on peut trouver des systèmes nernstiens qui ne sont réversibles que dans une zone de potentiel très restreinte, autour de l’équilibre. [69] Cette terminologie n’est pas très heureuse dans la mesure où le cas général n’est pas davantage quasi-réversible que quasi-irréversible.

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

237

d’un couple rédox de manière générale, mais seulement de la réversibilité de la réaction rédox correspondante pour un potentiel donné.

4.3.2.6 - RAPIDITÉ D'UN COUPLE RÉDOX La notion de réversibilité d’une réaction rédox définie ci-dessus est parfois employée à tort et confondue avec celle de rapidité d’un couple, définie dans cette section. Même si dans de nombreuses conditions une réaction d’oxydoréduction réversible correspond à celle d’un couple rédox rapide, ces notions restent distinctes et de natures différentes. Pour définir précisément la notion de rapidité d’un couple rédox dans des conditions données, on dit qu’un couple rédox de mécanisme E est rapide (respectivement lent) lorsque la constante standard de vitesse de la réaction d’oxydoréduction est très grande (respectivement très petite) devant la constante de vitesse de transport de matière (notée m avec pour unité le m s−1) : k° k° 1 1 couple rédox rapide : couple rédox lent : m m Dans les cas simples considérés ici, la constante de vitesse de transport de matière est le rapport entre le coefficient de diffusion de l’espèce considérée et l’épaisseur de la couche de diffusion de cette dernière [70] :

m =

D !

En toute rigueur, il faut donc considérer l’ensemble des constantes de vitesse de transport de matière des différentes espèces électroactives. La notion de couple lent ou rapide est donc indépendante du potentiel appliqué (c’est une donnée intrinsèque au système), mais elle dépend d’autres conditions expérimentales, par l’intermédiaire de la constante de transport de matière. Cette dernière est en effet fonction des grandeurs caractérisant le transport de matière de l’espèce considérée (coefficient de diffusion ou mobilité électrochimique) mais elle dépend également d’autres caractéristiques du système, variables suivant le type d’expérience, comme l’illustrent les exemples suivants. Pour un même couple rédox mis en jeu, on peut, suivant les conditions expérimentales choisies, observer les caractéristiques d’un système lent ou celles d’un système rapide :  pour une expérience avec une électrode à disque tournant (EDT), en régime stationnaire, le paramètre m dépend de la vitesse de rotation de l’électrode ainsi que de la viscosité du solvant ;  pour une expérience de voltamétrie, le paramètre m dépend de la vitesse de balayage utilisée ; [70] Dans le domaine du génie des procédés, ce paramètre est appelé constante de transfert de matière. Elle est notée par certains auteurs km (notation qui a l’avantage d’insister sur le parallèle avec les constantes de vitesse de réaction notées k ). Pour être précis, il ne s’agit pas ici de l’épaisseur de la couche de diffusion telle qu’elle est définie dans ce document, mais de la valeur calculée à partir de l'extrapolation de la pente interfaciale du profil de concentration (voir section 4.3.1.4). Par exemple, dans le cas d’une expérience avec convection forcée, c’est l’épaisseur de la couche de NERNST qui est à considérer pour quantifier la constante de vitesse de transport de matière.

238

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

 pour une expérience de chronoampérométrie ou chronopotentiométrie, le paramètre m dépend du temps ;  pour une cellule en couche mince, le paramètre m dépend de la distance interélectrode… Pour fixer quelques ordres de grandeur, si l’on considère un couple rédox suivant un mécanisme E en solution aqueuse avec des valeurs usuelles de coefficients de diffusion (de l’ordre de 10−5 cm2 s−1) :  pour une expérience sur EDT (vitesse de rotation de l’électrode de l’ordre de 1000 tr min−1), le système rédox sera considéré comme rapide si k °  10−2 cm s−1 lent si k °  10−4 cm s−1  pour une expérience de voltamétrie, un couple rédox avec une constante standard de vitesse de réaction k ° = 10−3 cm s−1 sera, en fonction de la vitesse de balayage : rapide si v balayage  0,1 mV s−1 lent si v balayage  1 V s−1  pour une expérience de chronoampérométrie sans convection, un couple rédox avec une constante standard de vitesse de réaction k ° = 10−3 cm s−1 sera, en fonction de la durée de l’expérience : rapide si t  1000 s lent si t  0,1 s Rappelons que cette notion de rapidité d’un couple rédox ne suffit pas, à elle seule, pour caractériser l’ensemble du phénomène complexe associé au passage du courant. En particulier, si les caractéristiques liées au passage du courant dépendent effectivement du rapport k °/m , elles varient aussi en fonction du potentiel de l’électrode et des concentrations des espèces en solution.

4.3.3 - POLARISATION D'UNE INTERFACE ÉLECTROCHIMIQUE EN RÉGIME STATIONNAIRE La polarisation d’une électrode est une fonction du courant qui la traverse, et vérifie généralement que le produit π I est positif [71]. On s’attache ici à donner quelques relations quantitatives dans les cas les plus simples. Elles permettent de mettre en lumière les principaux phénomènes et leurs conséquences sur l’allure des courbes intensité-potentiel stationnaires. On considère un système à géométrie plane avec une électrode à l’interface de laquelle se déroule une réaction rédox, sans perturbation par les phénomènes se déroulant à l’autre électrode. On se place dans le cas d’un régime stationnaire pour lequel les phénomènes de migration sont, de plus, négligeables. C’est par exemple le cas d’un système en présence d’électrolyte support. La présence de ce dernier permet en effet de négliger non seulement les phénomènes de chute ohmique mais aussi la migration des espèces électroactives. [71] Le tracé qualitatif des courbes intensité-potentiel, détaillé dans la section 2.3.1, illustre cette propriété.

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

239

4.3.3.1 - PROFILS DE CONCENTRATION ET EXPRESSION DES COURANTS LIMITES L’influence de la cinétique du transport de matière des espèces électroactives se traduit, sur les courbes intensité-potentiel, par l’existence de paliers de courant, quelle que soit la cinétique de la réaction rédox, en particulier pour un mécanisme E, que le couple rédox soit rapide ou lent. Le tracé des profils de concentration des espèces électroactives en différents points de la courbe intensité-potentiel permet de comprendre l’existence de cette situation particulière, comme l’illustre la figure 4.25 pour le couple Fe3+/ Fe2+. C

0

C

C

[Fe2+]*

[Fe2+]*

[Fe2+]*

3+ [Fe ]*

3+ [Fe ]*

3+ [Fe ]*

d

x

I

E = Eéq I=0

0

x

d

0

d

x

E > Eéq I = I liman

E > Eéq I liman > I > 0

I liman

Fe2+

Fe3+

E [ V/Réf ] Fe2+

Fe3+

I limcat E < Eéq I = I limcat

E < Eéq I limcat < I < 0

C

0

C

d

[Fe2+]*

[Fe2+]*

3+ [Fe ]*

3+ [Fe ]*

x

0

d

x

Figure 4.25 - Allure des profils de concentration pour différents points de la courbe intensité-potentiel stationnaire du système Fe3++ /Fe2++

240

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

MICROSCOPE ELECTROCHIMIQUE (SECM)

À

BALAYAGE

Document élaboré avec l’aimable collaboration de R. SIDES, ingénieur d’applications, Oak Ridge, USA et de P.-J. VOISIN, responsable commercial, Elancourt, France, AMETEK - Princeton Applied Research

Lors d’une mesure électrochimique classique, le potentiostat mesure le courant global à l’interface électrode/électrolyte. Cependant un échantillon est rarement homogène et il se présente souvent sous la forme de sites locaux de natures différentes, par exemple, passivé ou non-passivé ou encore de caractère anodique ou cathodique. Le besoin d’étudier ces comportements électrochimiques locaux a conduit à la mise au point du microscope électrochimique à balayage (SECM, en anglais). Cette imagerie locale étant basée sur des mesures électrochimiques, les domaines d’application du SECM sont aussi variés que le sont ceux de l’électrochimie elle-même. Parmi les plus significatifs: l’étude de capteurs biologiques, de cinétiques de réaction, de membranes poreuses, de catalyseurs de piles à combustible et de mécanismes de corrosion. Un SECM se compose d’un système de positionnement, d’un bi-potentiostat, et d’une ultra-microélectrode (UME). Le système de positionnement déplace la sonde UME, au voisinage de la surface de l’échantillon. Le bi-potentiostat polarise indépendamment l’échantillon et l’UME tout en mesurant chacun des courants résultants. La sonde est une UME avec un polissage conique spécifique et possède généralement un diamètre actif inférieur à 100 microns. Le système de positionnement déplace la pointe tout en corrélant la position et les paramètres électrochimiques mesurés, créant ainsi des images de courant local.

cellule

caméra

image de la sonde

SECM AMETEK – Princeton Applied Research série VersaSCAN (© AMETEK)

Un type d’expérience SECM classique est la courbe d’approche en mode « feedback », pour laquelle un composé électroactif, appelé médiateur, est introduit dans l’électrolyte. Une des voies du bi-potentiostat est utilisée pour polariser la sonde, provoquant une réaction électrochimique lors de laquelle une espèce redox est générée, alors que l’échantillon lui-même (substrat) n’est pas polarisé. Le courant généré à l’UME est mesuré tout au long de son approche vers le substrat. Quand la sonde en est suffisamment proche, on observe une réponse locale différente du courant « bulk », obtenu lorsque la sonde est loin du substrat. Si l’approche est réalisée au-dessus d’un site conducteur du substrat, les espèces émises par la sonde peuvent être régénérées par le substrat. C’est pourquoi, le courant augmente quand la sonde s’approche du substrat : c’est le mode « feedback positif ». En revanche lors de l’approche d’un site isolant du substrat, la diffusion des espèces vers la sonde est bloquée par ce dernier, le courant de la sonde diminue en même temps que la distance sonde-substrat : c’est le mode « feedback négatif ». Toute une palette de comportements intermédiaires peut se

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

241

produire selon l’échantillon. L’analyse quantitative de telles courbes d’approche permet l’analyse très précise des cinétiques surfaciques locales. Lors d’expériences d’imagerie, le même type de courbes d’approche est également utilisé afin de positionner la sonde dans la zone à étudier, en prenant soin d’éviter tout contact : la distance sonde-substrat est alors typiquement de 2 à 4 fois le diamètre actif de l’UME. Ce dernier ne mesurant que quelques dizaines de microns, il est donc primordial qu’une méthode d’approche non visuelle de la zone soit mise en œuvre. En mode « générateur / collecteur », le SECM utilise le second canal du bi-potentiostat pour polariser le substrat et contrôler les réactions redox au sein du système. Par exemple, si des espèces redox se trouvent dans la solution à l’état Ox, alors l’échantillon peut être polarisé de façon à convertir Ox en Red. Si la sonde elle-même est polarisée dans une zone de potentiel où l’oxydation de Red est possible, le courant « bulk » est cependant nul car les espèces Red sont en concentration négligeable au sein de la solution. Cependant, dès que la sonde UME pénètre une zone où se trouvent des espèces Red produites par la réaction électrochimique à la surface de l’échantillon alors un courant est détecté par la sonde. Une imagerie devient possible, la sonde en se déplaçant à la surface de l’échantillon, permettant de localiser précisément les zones en fonction de leur réactivité électrochimique : à une position donnée, un courant élevé à la sonde résultera d’une concentration locale en Red plus importante, provoquée par une Red plus active à cet endroit précis. réaction Ox 1.5 1.2 0.9

0.3 0.0  0.3

y [mm]

0.6

 0.6  0.9  1.2 0

0.4

0.8

1.2

1.6

19

31

44

57

69

2.0

2.4

2.8

3.2

3.6

4.0

82

94

107

120

132

145

x [mm]

Itip [nA]

 1.5

Image issue d’un SECM AMETEK - Princeton Applied Research série VersaSCAN en mode « générateur / collecteur » (© AMETEK). L’échantillon est composé d’or et de résine époxy en présence de ferricyanure. A noter le courant élevé au dessus de l’or.

L’étude par SECM de capteurs ou de catalyseurs de piles à combustible fait usuellement appel à la réaction d’oxydation de l’oxygène et sans qu’il soit besoin d’ajouter un médiateur redox. La sonde SECM peut également détecter localement des espèces diffusant à travers des membranes poreuses ou issues, par exemple, de phénomènes de corrosion. On peut aussi utiliser parfois une électrode sélective d’ions comme sonde SECM. La résolution spatiale qu’apporte le SECM en électrochimie ouvre de nouveaux développements dans de nombreux domaines d’application.

242

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

On admet ici quelques caractéristiques des profils de concentration des espèces électroactives en régime stationnaire [72] : pour l’exemple du couple Fe3+/Fe2+ en présence d’électrolyte support et dans une géométrie plane, les profils de concentration en régime stationnaire sont linéaires. On suppose ici, par souci de simplification, que les coefficients de diffusion sont identiques. L’épaisseur de la couche de diffusion est donc fixe (régime stationnaire) et identique pour les deux ions électroactifs. Enfin, dans la solution homogène (par exemple agitée), la concentration en ions Fe 2+ est ici fixée supérieure à celle en Fe3+. L’exemple choisi met en œuvre un couple rédox rapide mais cette caractéristique n’intervient pas dans les allures des profils de concentration tracés ici et les relations écrites dans cette section : seule l'allure de la courbe intensitépotentiel stationnaire serait modifiée (voir sections 2.3.3 et 4.3.3.3). Dans le domaine anodique aussi bien que cathodique, les points de fonctionnement avec un courant égal au courant limite correspondent à des profils de concentration pour lesquels la concentration interfaciale de l’espèce consommée (le réducteur Fe2+ en oxydation et l’oxydant Fe3+ en réduction) est négligeable devant sa concentration en solution. C’est cette particularité du profil de concentration qui permet de déduire les expressions mathématiques des courants limite, comme cela est présenté ci-dessous. Comme la cinétique et donc le mécanisme exact n’interviennent pas dans la mesure où l'on ne décrit pas dans cette section les valeurs de potentiel et donc la courbe intensitépotentiel, le raisonnement détaillé ci-dessous considère la possibilité de nombres stœchiométriques quelconques pour l’oxydant, le réducteur et l’électron. En outre on envisage également la possibilité de coefficients de diffusion différents pour l’oxydant et le réducteur, contrairement aux simplifications introduites ci-dessus pour le tracé de la figure 4.25. Dans un tel système à géométrie plane où le seul mode de transport de matière des espèces électroactives est la diffusion, la densité de flux de matière est, en régime stationnaire, homogène et proportionnelle à la pente du profil linéaire de concentration :

N i 0!x !"i = N i x =0 = # Di

C i * # C i x =0 "i

Rappelons que la loi de FARADAY donne le lien avec le courant. Ici, pour une réaction rédox avec 100% de rendement faradique, la pente du profil de concentration est également proportionnelle au courant :

N i x =0 =

C i * " C i x =0 !i I = " Di !e � S #i

L’écriture de la relation précédente dans le cas particulier d’une concentration interfaciale nulle de l'espèce consommée (ou plus précisément négligeable devant la concentration dans la zone homogène de l’électrolyte), donne l’expression suivante du courant limite : " C * I lim = ! e Di � S i "i #i

[72] Ces caractéristiques correspondent au modèle de NERNST décrit dans la section 4.3.1.4.

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

243

En utilisant la notion de constante cinétique du transport de matière, mi , qui est définie ici comme le rapport du coefficient de diffusion sur l’épaisseur de la couche de diffusion :

mi =

Di !i

on obtient l’expression générale du courant limite suivante : " I lim = ! e � S mi C i * "i avec : mi

la constante de vitesse de transport de matière de l’espèce consommée i [ m s−1 ] Ci* la concentration de l’espèce consommée i au sein de l'électrolyte [ mol m−3] [ C mol−1 ] ^ la constante de FARADAY νi le nombre stœchiométrique algébrique de l’espèce consommée i νe le nombre stœchiométrique algébrique de l’électron [A] Ilim le courant limite, valeur algébrique S l’aire de la surface de l’interface [ m2 ]

Dans l’écriture de cette relation, il faut prendre garde au fait qu’en oxydation, le réactif est le réducteur, alors qu’en réduction le réactif est l’oxydant. Dans l’exemple précédent, on a donc : " I lim cat = ! e � S mOx [Ox]* = ! � S mFe3+ [Fe3+ ]* " Ox " I lim an = ! e � S mRed [Red]* = � S mFe2+ [Fe2+ ]* " Red Compte tenu des conventions de signe utilisées, on retrouve le fait que le courant limite anodique est positif alors que le courant limite cathodique est négatif. La relation générale entre le courant et les profils de concentration permet également de donner une expression des concentrations interfaciales pour un point de fonctionnement quelconque. On a en effet, d’après les relations précédentes (loi de FARADAY et expression du courant limite) : C i * ! C i x =0 I = I lim C i*

I % " d’où l’expression suivante de la concentration interfaciale : C i x = 0 = C i * $ 1 ! ' I # lim & Cette relation algébrique doit faire intervenir les courants limite anodique pour le réducteur et cathodique pour l’oxydant. Dans l’exemple du couple Fe3+/Fe2+, on a ainsi :

" I [Fe2+ ]x =0 = [Fe2+ ]* $ 1 ! I lim an # " I [Fe3+ ]x =0 = [Fe3+ ]* $ 1 ! I lim cat #

% ' & % ' &

244

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

On retrouve alors, par exemple pour un courant anodique (I > 0), que la concentration interfaciale en Fe2+ est inférieure à la valeur loin de l’électrode. En revanche, la concentration en Fe3+ est plus élevée au voisinage de l’interface qu’au sein de l’électrolyte (I /Ilimcat < 0). Dans les trois sections suivantes, on se limite à des couples rédox avec |νOx | = |νRed | = 1. En outre les sections 4.3.3.3 et 4.3.3.4 ne concernent que les couples rédox de mécanisme E, c’est-à-dire avec |νe | = n = 1 et |νOx | = |νRed | = 1.

4.3.3.2 - SYSTÈMES RÉDOX RAPIDES Rappelons qu’un coupe rédox de mécanisme E est dit rapide si sa constante standard de vitesse rédox est très grande devant les constantes de vitesse de transport de matière des espèces électroactives. On peut montrer que les couples rédox rapides, même s'ils ne sont réversibles que sur une gamme limitée de potentiel, sont en revanche nernstiens (contrôlés par le transport de matière) sur l'ensemble de la courbe intensité-potentiel (voir annexe A4.4). Dans cet intervalle, pour des polarisations conséquentes de l’interface, la limitation par les phénomènes de transport de matière entraîne l’existence d’un courant limite en régime stationnaire. Pour ces systèmes rapides, les très fortes polarisations correspondent à des systèmes qui restent nernstiens mais dont la réaction n’est plus réversible à ces potentiels. Cependant le courant ayant alors atteint le courant limite, ce changement ne se traduit par aucune modification sur les courbes intensitépotentiel. Le raisonnement suivant est valable pour tout couple rédox de mécanisme E rapide (|νe | = n = 1) mais il se généralise à tout couple rédox rapide et donc nernstien avec n ≠ 1 (voir annexe A.4.3). On choisit donc dans cette section des lois écrites avec un nombre d’électrons échangés quelconque, qui ne sont valables que dans le cadre de cette hypothèse. En utilisant le fait que ces systèmes soient nernstiens et les expressions des concentrations interfaciales en fonction du courant et des courants limite démontrées dans la section 4.3.3.1, on obtient les relations suivantes :

E = E° + E = E° +

RT [Ox]x =0 ln n � [Red]x =0

I lim an I ! I lim cat RT [Ox]* RT RT ln + ln + ln n � [Red]* n � ! I lim cat n � I lim an ! I

I ! I lim cat RT mRed RT + E = E° + ln ln n � I lim an ! I n � mOx !## #"### $ E 1/2

On peut donc aussi écrire l’équation de la courbe intensité-potentiel stationnaire d’un système rapide à partir des trois caractéristiques suivantes : les courants limites anodique et cathodique, I lim an et I lim cat , et le potentiel de demi-vague, E½. Ce dernier est simplement le potentiel de l’électrode (par rapport à une électrode de référence) lorsque le courant est égal à la demi-somme des courants limite anodique et cathodique (attention, ce sont des valeurs algébriques).

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

245

C’est aussi le point d’inflexion de la courbe intensité-potentiel [73] : I ! I lim cat RT mRed RT ln E = E 1/2 + ln avec E 1/2 = E ° + n � I lim an ! I n � mOx Si les deux espèces réactives ont des coefficients de diffusion très proches, leurs constantes de vitesse de transport de matière sont alors très proches et le potentiel de demivague est confondu avec le potentiel standard du couple rédox : E1/2 = E °. Cette relation générale peut aussi s’exprimer, pour l’étude d’un mélange d’espèces oxydées et réduites, en introduisant la surtension η qui est égale à : I lim an I " I lim cat RT RT [Ox]* & RT # = ! = E " % E° + ln ln + ln ( n � [Red]* ' n � " I lim cat n � I lim an " I $ On retrouve les allures des courbes intensité-potentiel décrites qualitativement précédemment en fonction des valeurs des courants limite :  si les deux courants limite sont non-nuls, on obtient l’allure représentée sur la figure 4.26. Dans ce cas, I = 0 correspond à un état d’équilibre. I Red

Ox I liman

I liman + I limcat  2 I limcat



E éq

Red

E [V/Réf ]



Ox

Figure 4.26 - Courbe intensité-potentiel stationnaire dans une solution contenant Ox et Red

 si un des deux courants limite est nul (par exemple si la solution initiale ne contient pas d’oxydant : I lim cat = 0 ), on obtient l’allure représentée sur la figure 4.27. Dans cet autre cas, I = 0 ne correspond pas à un état d’équilibre : le potentiel en ce point est alors un potentiel mixte. I Red

Ox

I liman  2

I liman E (I = 0)





E [ V/Réf ]

Figure 4.27 - Courbe intensité-potentiel stationnaire dans une solution ne contenant que Red [73] On peut vérifier, à partir des expressions analytiques de la courbe intensité-potentiel, qu’au potentiel de demi-vague la dérivée seconde du courant par rapport au potentiel est nulle.

246

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Dans le cas particulier du contrôle par le transport de matière, les surtensions (ou polarisations) sont alors parfois appelées surtensions (ou polarisations) de concentration.

4.3.3.3 - SYSTÈMES RÉDOX LENTS Rappelons qu’un coupe rédox de mécanisme E est dit lent si sa constante standard de vitesse de réaction est très petite devant les constantes de transport de matière des espèces électroactives. On peut montrer que les couples rédox lents correspondent, dans un intervalle de potentiel autour du potentiel standard, à des systèmes pour lesquels la relation courant/tension est contrôlée par le phénomène de transfert d’électrons. Les profils de concentration au voisinage de l’interface ne sont pas marqués et on peut considérer que les concentrations interfaciales sont égales aux concentrations au sein de l’électrolyte. Dans ces conditions, en exprimant les vitesses par les expressions détaillées dans la section 4.3.2.3 et en introduisant le fait que les concentrations sont quasiment homogènes et égales aux concentrations au sein de la solution, on obtient l’expression suivante du courant :

I ! � S k° (e + " # [Red]* $ e $(1$ " ) # [Ox]*) Lorsque l’on étudie un mélange d’espèces oxydée et réduite, le potentiel d’équilibre est défini. Avec les notations introduites dans la section 4.3.2.3, la loi de NERNST s’écrit :

!éq = ln

[Ox]* [Red]*

On peut introduire la surtension η dans l’expression précédente du courant :

I = � S k° (e + ! f " e + ! #éq [Red]* $ e $(1$ ! ) f " e $(1$ ! ) #éq [Ox]*) On obtient alors une équation connue sous le nom d’équation de BUTLER-VOLMER [74] :

I = S j0 (e + ! f " # e # (1## ! )f " ) avec j0 la densité de courant d’échange, qui est reliée à la constante standard de vitesse de réaction par la relation :

j0 = � k°° ([Red]*)(1!! ! ) ([Ox]*)! Le courant (ou la densité de courant) d’échange est proportionnel à la constante standard de réaction rédox. Ainsi plus le couple est lent plus la valeur du courant d’échange est faible. Il faut noter que le courant d’échange dépend également des [74] Attention, dans de nombreux documents de la littérature qui postulent une généralisation simple de ces lois aux couples échangeant plusieurs électrons, ces lois sont écrites en faisant intervenir le nombre total d’électrons échangés. La loi de BUTLER VOLMER est ainsi souvent écrite sous la forme suivante : I = S j 0 (e +! n f " # e #(1# ! )n f " ) . Cependant, comme démontré dans l’annexe A.4.3 sur un exemple simple, ce postulat est très souvent discutable et il est plus prudent d’en rester à des lois cinétiques sur des étapes élémentaires (avec n = 1) lorsqu’on souhaite décrire de manière quantitative précise un phénomène électrochimique où la cinétique rédox intervient de manière notable.

4 - PASSAGE D'UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE

247

concentrations en solution du système étudié. Ce paramètre n'est donc pas, au contraire de la constante standard de vitesse de réaction, intrinsèque au couple rédox étudié. On peut déduire de la définition précédente les relations suivantes qui font clairement apparaître le rôle des concentrations en espèces électroactives :

j0

=

j liman !

j0

j limcat

I0

=

I liman

= !

I0

k° ! [Ox]* $ m Red #" [Red]* &% =

I limcat

!

k° " [Ox]* % m Ox $# [Red]* '&

!1+ !

Des exemples numériques de valeurs de j0 et k ° pour quelques cas expérimentaux sont rassemblés dans le tableau 4.3. Tableau 4.3 - Exemples de paramètres cinétiques Les diverses sources consultées pour dresser ce tableau donnent souvent des informations incomplètes sur les conditions expérimentales, rendant de ce fait les comparaisons difficiles. La mesure de constantes cinétiques n’est pas aisée à mener de manière précise et rigoureuse. Couple rédox

Conditions, à 25 °C

H+/H2

sur Pt, 1,2 mol L−1 HCl

+

−1

H /H2

sur Hg, 1 mol L

H+/H2

sur Pb, 0,25 mol L−1 H2SO4

H+/H2

sur Pb

H2O/H2

HCl

j0 [ A m−2 ]

k ° [ m s−1 ]

5 10−7,5 10−7,3 6 .10−17

sur Pt, 0,1 mol L

−1

−1

NaOH

0,6

H2O/H2

sur Pb, 6 mol L

NaOH

4 .10−2

O2/H2O

sur Pt, 1 mol L−1 H2SO4

10−4,6

Cl2/Cl−

sur Pt, 1 mol L−1 HCl

10

Cd /Cd(Hg)

sur Hg, extrapolé 1 mol L−1 Cd2+

Cd2+/Cd(Hg)

sur Hg

10−2

Fe3+/Fe2+

sur Pt

4 .10−5

2+

sur Pt , équimolaire 10−2 mol L−1

Fe3+/Fe2+ 3−

Fe(CN)6 /Fe(CN)6

4−

sur Pt, 1 mol L

−1

KCl

8 .104

102

10−4 10−3

L’allure de la courbe intensité-potentiel, résultat de la somme de deux exponentielles, est représentée sur les figures 4.28 et 4.29 pour α = 0,7 et deux valeurs différentes de j0. Dans le cas particulier où α = 0,5 qui n’est pas représenté ici [75], la courbe est symétrique par rapport au point (E = Eéq ; I = 0).

[75] Lorsque la détermination précise des paramètres cinétiques n’a pas été faite, on considère classiquement que α = 0,5.

248

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS I

Red

I 0 = j 0S

Ox

E° E [V/Réf ]

E éq

Red

Ox

Figure 4.28 - Courbe intensité-potentiel stationnaire pour un système rédox lent avec α = 0,7 et une valeur arbitraire de j0

I Red

E éq

Red

Ox

E [ V/Réf ]

Ox

Figure 4.29 - Courbe intensité-potentiel stationnaire pour un système rédox très lent avec α = 0,7 et j’0 0 . Pour atteindre l’état d’équilibre, la demi-réaction l’état initial : (µ M M e 0 rédox se déroule donc dans le sens de l’oxydation.

 Variations de concentration et quantité de matière liées à l’établissement de l’équilibre

L’oxydation des ions M2+ en ions M3+ entraîne l’apparition d’un excès de charge positive dans la phase β et négative dans la phase α (le métal). Ces excès de charge, exactement opposés, ne peuvent être, à l’équilibre, qu’en surface. L’établissement de l’équilibre thermodynamique se traduit par l’apparition en surface du métal de Δn mol d’électrons, et correspond du côté de l’électrolyte à la transformation de Δn mol d’ions M2+ en Δn mol d’ions M3+. [6] On peut estimer cette valeur dans le cas d’un couple M3+/M2+ en combinant les valeurs du potentiel standard de ce couple (E °), du potentiel absolu de l’ESH (estimé à 4,45 V/vide, voir section 1.5.1.1) et du travail d’extraction des électrons du platine (5,32 eV, voir section 3.2.2.3). On peut alors réaliser la combinaison suivante : M3+aq + ½ H2,gaz M2+aq + H+aq − | e | E ° eV e−gaz + H+aq − 4,45 eV ½ H2,gaz e−Pt e−gaz 5,32 eV ———————————————— M2+aq 5,32 − 4,45 − | e | E ° M3+aq + e−Pt Prenons quelques exemples de couples M3+/M2+ pour estimer l’ordre de grandeur correspondant. Pour le couple Fe3+/Fe2+, E ° = + 0,77 V/ESH et on obtient 0,10 eV = 10 kJ mol−1. Pour le couple V3+/V2+, E ° = − 0,26 V/ESH et on obtient 1,13 eV = 107 kJ mol−1. Enfin pour le couple Cr3+/Cr2+, E° = − 0,41 V/ESH et on obtient 1,28 eV = 122 kJ mol−1. C’est pourquoi, pour le calcul d’ordre de grandeur proposé ici de la variation de la quantité de matière pour l’établissement de l’équilibre rédox, nous avons pris une valeur de 100 kJ mol−1.

298

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

La différence de potentiel correspondante vérifie la relation suivante :

(!éq" # !éq$ )

% 0 %r S = 'n � > 0 &

A l’équilibre, l’enthalpie libre de réaction électrochimique est nulle. On a ainsi (en confondant différence de potentiels VOLTA et GALVANI) :

µ°M2+ ! µ°M3+ ! µ°e + RT ln

C éq" (M2+ ) C éq" (M3+ )

= (# éq" ! # éq$ ) �

Cette relation peut être écrite en ne faisant apparaître qu’une seule inconnue, Δn :

µ°M2+ ! µ°M3+ ! µ°e + RT ln

C 0" ! #n/!3

C 0$ + #n/!3

=

% !% �2 #n 2 #n � = & 0 &r ! 3 & 0 &r ! 2

La résolution de cette équation donne :

!C = ou encore :

!n

!3

= 9,5.10 "8 mol L"1

"

C 0#

!n = 9,5.10 "11 mol = 5,7.1013 molécules

ce qui correspond à une charge de surface de 9,2 µC cm−2. On a donc montré ici que, pour un équilibre rédox, les variations de concentration et de potentiel chimique dans chacune des phases entre l’état d’équilibre et l’état initial sont négligeables [5] : et C éqb ! C 0b "$C éqa ! C 0a # et µéqb ! µ0b %$ µéqa ! µ0a

 Variations de potentiel GALVANI liées à l’établissement de l’équilibre La différence de potentiel GALVANI entre les deux phases à l’équilibre est :

! éq" # ! éq$ =

% 'n � = 1,15 V & 0 &r S

Cette différence est répartie à parts égales entre les deux phases : ! éq" = # ! éq$ = 0,58 V .

 Variations de potentiel chimique liées à l’établissement de l’équilibre La variation de potentiel électrochimique de chacune des espèces dans sa phase entre l’état d’équilibre et l’état initial est : #1 ! =µ ! ! !µ e" éq,e" # µ 0,e" $ # (% éq" # % 0" ) � = + 55,7 kJ mol #1 ! 2+ = µ ! ! !µ M & éq,M2+& # µ 0,M2+& $ 2 (% éq& # % 0& ) � = + 111,4 kJ mol #1 ! 3+ = µ ! ! !µ M & éq,M3+& # µ 0,M3+& $ 3 (% éq& # % 0& ) � = + 167,0 kJ mol

avec :

! 3+ # !µ ! 2+ = 55,7 kJ mol#1 = !µ ! !µ M " M " e$

ANNEXES

299

En conclusion de cette annexe, on peut dire à travers ces exemples que, pour atteindre l’état d’équilibre au niveau d’une interface réactive, le comportement est très différent selon qu’il s’agit de réactions entre molécules (espèces neutres) ou entre espèces chargées (échange d’ions ou réaction rédox). Ces constatations, importantes pour les systèmes électrochimiques, peuvent être généralisées dans la plupart des cas [7] :  pour une réaction interfaciale entre molécules (échange ou réaction entre molécules), l’établissement de l’équilibre est réalisé par une réaction d’une quantité importante de matière au niveau de l’interface et donc une évolution des compositions de part et d’autre : $&C éq! " C 0! et C éq# " C 0# % et µéq# " µ0# '& µ éq! " µ 0!  pour une réaction interfaciale impliquant des espèces chargées (échange d’ions ou réactions rédox par exemple), l’établissement de l’équilibre est réalisé avec une réaction d’une quantité extrêmement faible de matière, et donc une absence d’évolution des compositions des volumes :

$&C éq! " C 0! % &' µ éq! " µ 0!

et

C éq# " C 0#

et

µéq# " µ0#

Dans ces cas là, l’établissement de l’équilibre est réalisé par ajustement de la différence de potentiel GALVANI entre les deux phases en contact.

A.4.1 - MISE EN ÉVIDENCE DU RÔLE D’UN ÉLECTROLYTE

SUPPORT SUR LE TRANSPORT DE MATIÈRE ET DE SES CONSÉQUENCES DANS UNE CELLULE D’ÉLECTROLYSE

Cette annexe a pour objectif d’illustrer sur deux exemples simples, pour lesquels on peut mener la quasi-totalité des raisonnements de manière analytique, les notions suivantes :  profils de concentration et de potentiel en régime stationnaire (en particulier estimation de la chute ohmique),  répartition des modes de transport de la matière (diffusion et migration, dans l’hypothèse de validité de la relation de NERNST-EINSTEIN) [8],  établissement du régime stationnaire,  limite de validité de l’électroneutralité de l’électrolyte.

[7] Les situations expérimentales où ce résultat doit être remis en cause correspondent essentiellement à des cas où le rapport volume des phases sur aire de l’interface est faible (ce qui correspond dans notre calcul à diminuer fortement la valeur de  ). [8] Rappelons (voir section 4.2.1) que la séparation quantitative des contributions de migration et diffusion n’est possible que si on fait une hypothèse sur leurs descriptions respectives. L’hypothèse la plus simple (même mécanisme microscopique pour les deux phénomènes et activités confondues avec concentrations) mène à l’hypothèse de NERNST-EINSTEIN utilisée ici.

300

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Les deux exemples correspondent à une électrolyse avec deux réactions rédox simples et opposées [9], dans deux électrolytes différents : un soluté 1-1 en solution avec et sans électrolyte support. Ils sont traités successivement mais l’intérêt réside également dans la comparaison de ces deux situations. On considère un système à géométrie plane composé d’une cellule d’électrolyse parallélépipédique, comprenant deux électrodes en argent planes et parallèles, de surface S = 1 cm2, distantes l’une de l’autre de L = 2 mm, reliées à un générateur de courant constant et plongeant dans une des deux solutions suivantes : solution S1 :

nitrate d’argent, AgNO3, de concentration C * = 10−3 mol L−1

solution S2 :

nitrate d’argent, AgNO3, de concentration C * = 10−3 mol L−1 + nitrate de potassium, KNO3, de concentration 10−1 mol L−1 = 100 C *

On suppose que le pH des solutions est ajusté de façon qu’il n’y ait pas de précipité d’oxyde d’argent, et que cependant la présence des protons et des ions hydroxyde joue un rôle négligeable dans le transport de matière. Ag+ + e−

A l’anode, on observe une dissolution de la plaque d’argent : Ag A la cathode, on observe un dépôt d’argent suivant la réaction : Ag+ + e−

Ag

On choisit l’anode comme origine de l’axe x normal aux électrodes, comme cela est représenté sur la figure A.15. Pour décrire un système complet, il est nécessaire de choisir une seule origine et une seule orientation de l’axe normal. Il faut alors être vigilant pour les signes dans les équations. −

I

ANODE

+

2

S =1cm

0

e

ö j

CATHODE



L

S =1cm2

x

Figure A.15 - Schéma de la cellule d’électrolyse considérée [9] L’intérêt de choisir une réaction d’électrolyse de bilan chimique global nul est qu’il y a alors possibilité d’atteindre des régimes stationnaires à courant non nul, faciles à décrire de manière analytique. Ils correspondent à un électrolyte inhomogène en composition, pour lequel les phénomènes de diffusion concernent l’ensemble du volume (une seule couche de diffusion d’épaisseur égale à la distance inter-électrodes, L).

ANNEXES

301

On assimile les grandeurs activité et concentration. On considère ici que ces réactions de transfert de charge sont très rapides devant les phénomènes de transport de matière. Ainsi la cinétique de transfert de charge n’intervient pas dans la valeur de la tension aux bornes de la cellule d’électrolyse, qui est entièrement déterminée par les phénomènes de transport de matière au sein de l’électrolyte. On suppose que les phénomènes de convection (naturelle ou forcée) sont négligeables : seules migration et diffusion seront prises en compte dans cette description [10]. Cette dernière est menée dans l’hypothèse de validité de la relation de NERNST-EINSTEIN, en considérant de plus que les paramètres caractéristiques du transport de matière (coefficients de diffusion et mobilités ou conductivités électriques) sont indépendants de la concentration et égaux aux valeurs à dilution infinie :

!Ag+ = !+ = 6,19 mS mol"1 m2 !NO

" 3

= !" = 7,14 mS mol"1 m2

!K+ = 7,35 mS mol"1 m2

et

DAg+ = D+ = 1,65.10"9 m2 s"1

et

DNO

et

DK+ = 1,96.10"9 m2 s"1

" 3

= D" = 1,90.10"9 m2 s"1

SOLUTION SANS ÉLECTROLYTE SUPPORT (SOLUTION S1) MISE EN ÉQUATIONS DU SYSTÈME  L’électroneutralité de la solution en tout point du volume entraîne (voir la discussion ultérieure pour la limite de validité de cette équation) : (≠ C * a priori) C+ = C−  Le système étant à géométrie plane, les vecteurs densité de flux de matière sont tous parallèles à l’axe x et on note Ni la projection algébrique de ceux-ci sur cet axe. Le bilan volumique de matière au sein du conducteur s’écrit pour l’espèce i (voir section 4.1.2, bilan volumique sans réaction homogène) :

!C i !N =" i !t !x dN i =0 dx c’est-à-dire que les densités de flux de matière deviennent homogènes dans tout le volume d’électrolyte en régime stationnaire.

en particulier, en régime stationnaire :

 Le système est également défini par les bilans de matière interfaciaux. Ici à l’anode, NO3− ne réagit pas, tandis que l’argent subit une oxydation. Le bilan de matière à cette interface s’écrit donc, en comptant le courant positivement à l’anode, comme usuellement (voir la loi de FARADAY à la section 4.1.4) : " I $ (N + )x =0 = �S # $ (N ) % ! x =0 = 0 [10] Dans la mesure où, pour les applications numériques, on a choisi une distance inter-électrode de 2 mm, négliger la convection naturelle n’est réaliste expérimentalement qu’avec un électrolyte gélifié ou polymère. Dans une solution, son influence ne peut pas être négligée en toute rigueur. On parle parfois de cellule en couche mince pour décrire ce dispositif.

302

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

On retrouve les mêmes relations si l’on écrit la loi de FARADAY à la cathode. Il faut alors prendre garde au fait que les conventions habituelles des électrochimistes pour une seule électrode ne sont pas respectées dans cette description d’un système complet, puisque l’axe normal à la surface est défini ici à l'interface avec la cathode, de manière non-conventionnelle, de l’électrolyte vers le métal (donc vers l’extérieur du système, voir figure A.15) [11]. Ainsi, pour Ag+ à l'interface avec la cathode, la loi de FARADAY devrait s’écrire : I 0 le courant mesuré dans le circuit, elle s’écrira donc : I >0 (N + )x =L = �S  Les différentes densités de flux de matière peuvent chacune s’écrire comme la somme de deux termes (diffusion et migration, voir section 4.2.1.4) :

$ & N + = !D+ % & N = !D ! ' ! En utilisant la relation de NERNST-EINSTEIN :

$ & N + = !D+ % & N = !D ! ' !

"C + ! u+ C + "x "C ! + u! C ! "x

"# "x "# "x

zi � ui , on peut réécrire : = Di RT

"C + � ! D+ C RT + "x "C ! � + D! C RT ! "x

"# "x "# "x

PROFILS STATIONNAIRES DE CONCENTRATION En régime stationnaire, les densités de flux molaires de matière N+ et N− sont constantes dans tout le volume de l’électrolyte, et égales à leurs valeurs interfaciales [12].  En combinant les relations précédentes pour éliminer le terme faisant intervenir le champ électrique, on obtient :

D! C ! N + + D+ C + N ! = ! D! C ! D+

"C + "C ! ! D+ C + D! "x "x

Avec C+ = C− et N− = 0, on obtient finalement :

N + = ! 2D+

"C + I = "x �S

[11] voir la planche intitulée « Convention sur le signe du courant ». [12] C’est bien le fait d’avoir deux réactions interfaciales opposées qui rend possible, dans ce système, l’existence d’un régime stationnaire à courant non nul (voir section 4.4.1.2).

ANNEXES c’est-à-dire :

303

I !C + =" = Cte !x 2D+ � S

Les profils de C+ et de C− sont donc linéaires :

C + = C ! = (C ! )x =L / 2 +

"L % I $ !x' 2D+ � S # 2 &

 La constante d’intégration (ici la concentration dans le plan médian de l’électrolyte, x = L/2) peut être déterminée en écrivant la conservation de la matière pour les ions Ag+ ou NO3−. Pour les ions nitrate, qui ne sont ni consommés ni produits aux électrodes, on écrit dans le volume V : """ C ! dV = C *V Pour les ions Ag+, on a une équation identique car le bilan matière global est également nul : la quantité de matière produite à l’anode est exactement compensée par celle qui est consommée à la cathode. L’intégration donne, quelle que soit la valeur du courant : (C ! )x =L / 2 = C *

L’équation des profils de concentration, identique pour les deux espèces, est donc du type : C+ C I I " 2x % "L % = ! = 1+ ! x ' = 1+ 1! 2D+ � S C * $# 2 I limS1 $# L '& C* C* & en introduisant I limS1 pour l’expression :

I limS1 =

4D+ � S C * L

Cette grandeur correspond au courant limite (voir section 4.3.3.1, avec une épaisseur L/2 et un coefficient de diffusion égal à 2D+), qui est égal, avec les données numériques proposées, à 31,8 µA. La figure A.16 représente, en grandeurs adimensionnelles, le profil de concentration stationnaire correspondant à un courant égal à 90% du courant limite (soit 28,6 µA). Elle correspond à une pente du profil C(x) égale à – 0,9 10−3 mol L−1 mm−1. On peut remarquer que lorsque le courant est très proche du courant limite, la concentration en ions à l’approche de la cathode devient très faible. Le milieu ne peut donc plus être considéré comme bon conducteur dans cette région et on ne peut plus appliquer les traitements usuels en électrochimie, dans la mesure où les écarts à l’électroneutralité deviennent trop importants : celle-ci ne peut plus être utilisée dans ce cas pour définir les profils de concentration dans cette zone proche de la cathode (voir section 3.1.1.1). La description du système devient plus complexe et ne sera pas développée ici : il faudrait reprendre un calcul incluant l’équation de POISSON pour définir le lien entre potentiel et concentration. On retiendra que la description présentée n’est plus valable quantitativement lorsque la valeur du courant est proche de celle du courant limite. Pour des courants plus faibles, il existe également un écart à l’électroneutralité lorsque le système est traversé par un courant. Cependant cet écart est très faible en terme de concentration.

304

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Cet aspect sera rediscuté ci-dessous après les discussions sur le régime stationnaire. 2

C/C*

1,5

1

0,5

0

0

0,25

0,5

x /L

0,75

1

Figure A.16 - Profil de concentration stationnaire dans la solution sans électrolyte support pour I = 0,9 IlimS1

DENSITÉS DE FLUX DE MATIÈRE ET DE

COURANT EN RÉGIME STATIONNAIRE

On peut représenter qualitativement les contributions respectives de diffusion et migration aux densités de flux molaires en tenant compte des points suivants :  le flux de diffusion est dirigé de la zone la plus concentrée vers la moins concentrée (voir figure A.16),  le flux de matière des ions Ag+ se divise en deux parts égales entre la diffusion et la migration (voir le facteur 2 D+ ci-dessus en régime stationnaire et dans l’hypothèse de validité de la relation de NERNST-EINSTEIN),  le coefficient de diffusion des ions nitrate est supérieur à celui des ions Ag +. DIFFUSION

MIGRATION

TOTAL (MIG + DIFF)

+

Ag

NO3 Pour les densités de courant, le sens est opposé pour l’ion nitrate car c’est un anion : DIFFUSION

MIGRATION

TOTAL (MIG + DIFF)

+

Ag

NO3−

Ag+ + NO3−

Les ions nitrate (électroinactifs) ne se déplacent pas macroscopiquement en régime stationnaire. Ce n’est, en revanche, pas le cas en régime transitoire, puisqu’il faut établir le profil de concentration stationnaire (le flux interfacial des ions nitrate reste nul, mais le flux transitoire n’est pas constant dans tout le volume de l’électrolyte comme cela est décrit plus loin).

ANNEXES

305

Le courant global de diffusion n’est pas nul à cause de la différence entre les coefficients de diffusion de l’anion et du cation. On peut montrer (un exemple de ce type a été développé dans la section 4.2.1.5) que :

I = 1,08 j 2t+ S

jmigration =

j diffusion = 1 ! jmigration = ! 0,08 j On notera que la séparation des flux de diffusion et migration reste formelle, c’est-à-dire liée à l’hypothèse de validité de la relation de NERNST-EINSTEIN.  Comme le flux molaire de matière de l’anion NO3− est nul : !t + = 1 Cela signifie que, en régime stationnaire, le courant est transporté en totalité par les cations (avec une répartition moitié/moitié pour les contributions de migration et diffusion). Cet exemple met en évidence la différence entre le nombre de transport électrochimique et le nombre de transport habituellement utilisé, lorsque les phénomènes de migration peuvent être considérés seuls :

t+ = t

+

Ag

=

!

+

Ag

!

=

"+ = 0,46 "# + "+

Alors que le nombre de transport électrochimique a une signification physique, le nombre de transport de migration n’est, dans ce cas particulier, qu’une grandeur virtuelle, issue d’un calcul : il ne correspond pas à la réalité des participations aux déplacements de matière.

PROFILS STATIONNAIRES DE POTENTIEL  En revenant aux écritures des densités de flux molaires de matière et en les combinant maintenant pour éliminer le terme faisant apparaître les variations de concentration, on obtient : � "# D!N + ! D+N ! = ! 2D+D! C RT + "x Donc, avec les expressions des densités de flux en régime stationnaire, N− = 0 et N+ = I/(^S ), on obtient : I 1 !" RT =# !x � 2 � S D+ C + Comme la concentration est fonction de la distance aux électrodes, cette relation n’est pas celle d’un profil de potentiel linéaire. On a :

!C + I = " !x 2D+ � S

#

!! RT 1 = !C + � C+

 En intégrant entre le plan d’abscisse x et le milieu de l’électrolyte x = L/2, où l’on prend arbitrairement l’origine des potentiels :

! =

RT C + RT ) I ln = ln + 1 + � C* � I lim S1 *

2x & , # %$ 1 " L (' . -

306

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Lorsque le courant est faible devant le courant limite, on obtient un profil quasiment linéaire, comme dans le cas de phénomènes de migration pure :

! "

RT I � I limS1

2x ' $ &% 1 # L )(

En ce qui concerne les tensions interfaciales, le fait que l’on considère le couple rédox comme rapide, permet d’écrire (voir section 4.3.2.4) :

! métal " ! solution = Cte +

RT ln [Ag+ ]interface �

La figure A.17 représente le profil de potentiel stationnaire correspondant à un courant égal à 90% du courant limite (soit 28,6 µA). 150

janode

j [mV ]

100 50

U = 151 mV

0

jcathode

− 50 − 100 − 0,1

0,1

0,3

0,5

x /L

0,7

0,9

1,1

Figure A.17 - Profil de potentiel dans la solution sans électrolyte support pour I = 0,9 IlimS1 La valeur du potentiel de l’anode est fixée arbitrairement. En revanche, celle du potentiel à la cathode s’en déduit.

La tension d’électrolyse est donc égale à :

U = ! anode " ! cathode = ! x =0 " ! x =L +

+

RT [Ag ]x =0 ln � [Ag+ ]x =L

I I RT limS1 =2 ln � I 1" I limS1 1+

Dans l’exemple illustré sur la figure A.17 (I = 0,9 I limS1 ) la tension d’électrolyse est égale à 151 mV (la chute ohmique est égale à 76 mV).

RÉSISTANCE D’ÉLECTROLYTE EN RÉGIME STATIONNAIRE Le calcul de la résistance globale de l’électrolyte est directement déduit des valeurs de potentiel à x = 0 et x = L : U chute ohmique = ! x =0 " ! x =L = R I

ANNEXES

307

RT R = ln I�

avec :

I I limS1 I 1! I limS1

1+

La courbe d’évolution de la résistance globale d’électrolyte en fonction du courant traversant la cellule est représentée sur la figure A.18. 5

R [ kΩ ]

4 3 2 1 0

0

0,25

0,5

I /I limS1

0,75

1

Figure A.18 - Résistance globale de la solution sans électrolyte support pour différentes valeurs de courant

La résistance globale dépend de la valeur du courant et le terme de chute ohmique n’est donc pas proportionnel à celui-ci comme ce serait le cas dans une loi d’OHM classique (par exemple en présence d’électrolyte support, comme l’illustre le cas de la solution S2 traitée ensuite). La résistance globale devient extrêmement importante lorsque le courant s’approche du courant limite, comme cela a déjà été discuté précédemment. Lorsque I est petit devant I limS1 , on peut faire un développement limité de l’expression générale : RT 2 L RI !0 " = = 1,62 k$ � I limS1 S(2 #+ ) C * Si l'on avait un électrolyte homogène en composition, on aurait :

Rmigration pure = et donc finalement,

L L = = 1,50 k$ S! S( "# + "+ ) C *

RI !0 =

Rmigration pure 2 t+

Cette relation est à rapprocher de la relation entre courant de migration et courant total, démontrée plus haut. En effet, dans toutes les situations la loi d’OHM au niveau local s’écrit : #$ jmigration = ! " #x

308

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

A cause de la différence entre les coefficients de diffusion, le courant de migration est légèrement supérieur au courant total. Ainsi la résistance déduite à partir du profil de potentiel et du courant global (seules données expérimentales) est légèrement supérieure à celle qui serait issue du calcul à partir de la conductivité de la solution.

ECARTS À L’ÉLECTRONEUTRALITÉ Dans ce cas ( I /I limS1 = 0, 9 ), le fait que le profil de potentiel ne soit pas linéaire dans l’électrolyte met en évidence un écart à l’électroneutralité en solution. En effet, l’application stricte de la relation d’électroneutralité entraînerait à travers la loi de LAPLACE un profil de potentiel linéaire, compte tenu de la géométrie du système. Ici, l’équation de POISSON permet d’évaluer numériquement cet écart à l’électroneutralité pour l’exemple précédent : # � d2! = " ch = (C " " C + ) 2 $ $ dx 2

C! ! C+ = !

" RT # I & 1 1 2 � � %$ I limS1 (' L2 # x I & 1 ! %$ L I limS1 ('

Par exemple, pour un courant de 28,6 µA ( I /I limS1 = 0, 9 ) :

à x = L

C− − C+ = − 2 .10−11 mol L−1

alors qu’on a calculé, à l'interface avec la cathode (x = L), C+ = 10−4 mol L−1

à x = 0

C− − C+ = − 4 .10−14 mol L−1

alors qu’on a calculé, à l'interface avec l’anode (x = 0), C+ = − 2 .10−3 mol L−1 On vérifie donc a posteriori que l’hypothèse d’électroneutralité est légitime pour établir les profils de concentration. Elle s’avère en revanche trop approchée pour établir le profil de potentiel à partir de la loi de LAPLACE. Celui-ci doit donc être déterminé à partir des profils de concentration, comme cela est décrit précédemment. Lorsque le courant est encore plus proche du courant limite, les concentrations en Ag+ et NO3− sont très faibles dans la zone proche de la cathode et les écarts à l’électroneutralité doivent alors être pris en compte pour la définition simultanée des profils de concentration et de potentiel (avec la loi de POISSON). De plus, il faudrait alors aussi considérer l’influence de la présence en solution aqueuse d’ions H+ et OH− (concentrations de l’ordre de 10−7 mol L−1). Le traitement précédent n’est donc plus valable. Cependant, l’électrolyte étant alors très résistif, l’allure de la courbe d’évolution de la résistance de l’électrolyte en fonction du courant reste qualitativement correcte, avec une brusque augmentation lorsque I tend vers le courant limite.

ETABLISSEMENT DU RÉGIME STATIONNAIRE ET CARACTÉRISATION DU RÉGIME TRANSITOIRE Si on ne se limite pas à l’étude du régime stationnaire, on ne peut plus considérer que les densités de flux de matière sont constantes dans l’électrolyte, ni que les ions électroinactifs sont immobiles. En revanche, en utilisant l’électroneutralité de l’électrolyte, on

ANNEXES

309

peut reprendre les équations générales écrites au début de l’annexe (et en effectuant le même type de calcul que dans la section 4.2.1.2) :

# !C !N + !N " % !t = " !x = " !x $ % D N + D N = " 2D D !C + " " + & " + !x On obtient de cette façon :

(D! + D+ )

"2C "C = 2D!D+ 2 "t "x

L’évolution vers l’état stationnaire correspond ainsi à la diffusion de AgNO 3 (diffusion concertée des anions et des cations), avec un coefficient moyen de diffusion dont l’expression est : 2D!D+ = 2 t!D+ = 2 t+D! D± = D! + D+ Le temps caractéristique de l’établissement de l’état stationnaire τ est défini par :

! =

L2 4D±

ici, avec les données numériques de l’exemple choisi, D± = 1,77.10−9 m2 s−1, alors τ = 566 s. La figure A.19 illustre l’évolution du profil de concentration lors de l’établissement du profil stationnaire dans cette expérience de chronopotentiométrie (pour un courant constant égal à 90% du courant limite, soit 28,6 µA). C

t=0

état initial

C* tö∞

t ↑

régime stationnaire ≠ équilibre

régime transitoire 0

L

x

Figure A.19 - Evolution dans le temps du profil de concentration en chronopotentiométrie vers le profil stationnaire

Il est important de retenir que, alors que les caractéristiques stationnaires ne dépendent que des paramètres de l’ion électroactif (ici D+), l’évolution temporelle pendant la période transitoire fait apparaître un paramètre lié aux propriétés des deux ions (par l’intermédiaire de D±).

310

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

La période transitoire correspond aussi à une évolution de la répartition entre migration et diffusion, qui atteint en régime stationnaire l’équirépartition (comme démontré plus haut dans le cadre de l’hypothèse de validité de la relation de NERNST-EINSTEIN). La figure A.20 illustre ce phénomène par l’évolution du rapport de la densité de flux de diffusion sur la densité de flux de migration pour Ag+, en tout point de l’électrolyte. 1

N+diffusion /N+migration

0,8 0,6

t↑

0,4 0,2 0

0

0,2

0,4

x /L

0,6

0,8

1

Figure A.20 - Evolution dans le temps du rapport diffusion/migration des densités de flux de Ag+

Dans la zone centrale de l’électrolyte, un certain délai existe avant que des modifications de concentration ne se produisent. Ainsi, dans cette zone et au début du régime transitoire, le courant est dû uniquement à la migration, puis la part de diffusion augmente en fonction du temps. Pour prolonger cette étude de l’exemple sans électrolyte support, il est intéressant de considérer le cas limite où le coefficient de diffusion de l’anion devient négligeable devant celui du cation. Le temps caractéristique d’établissement du régime stationnaire devient alors extrêmement grand. A une échelle de temps usuelle, on se situe donc toujours au tout début de la période transitoire pour laquelle la diffusion est négligeable dans l’ensemble de l’électrolyte. Dans ces systèmes, la composition de l’électrolyte n’évolue pas, quel que soit le courant imposé : on retrouve un système où la tension suit la loi d’OHM simple (avec uniquement des phénomènes de migration, comme dans un métal ou dans de nombreux solides ioniques, avec un seul type de porteur de charge). C’est ce type de système que certaines équipes de recherche essaient de développer pour les batteries au lithium en développant des électrolytes polymères où la charge négative reste fixée sur la chaîne polymère. De tels électrolytes permettraient de s’affranchir des limitations de puissance par les phénomènes de diffusion dans l’électrolyte.

SOLUTION AVEC ÉLECTROLYTE SUPPORT (SOLUTION S2) On considère dans ce deuxième cas l’électrolyse de la solution S2 avec électrolyte support. Sa composition, donnée au début de l’annexe, est une solution aqueuse contenant 10−3 mol L−1 de AgNO3 et 10−1 mol L−1 de KNO3. Dans la suite, les indices + et − désignent respectivement les ions Ag+ et NO3−.

ANNEXES

311

MISE EN ÉQUATIONS DU SYSTÈME  L’électroneutralité de la solution en tout point du volume entraîne :

C + + C K+ = C !  Dans ce cas, il n’y a pas de réaction en phase homogène et le système est à géométrie plane. On obtient donc, pour chaque type d’espèce, le bilan volumique de matière suivant : !C i !N i =" !t !x En particulier, en régime stationnaire :

dN i =0 dx

C’est-à-dire que les densités de flux de matière deviennent constantes dans tout le volume d’électrolyte en régime stationnaire.  A l’anode, K+ et NO3− ne réagissent pas, tandis que Ag est oxydé :

" I $ (N + )x =0 = � S $ # $ (N ! )x =0 = 0 $% (N + )x =0 = 0 K On retrouve les mêmes relations si l’on écrit la loi de FARADAY à la cathode (en prenant garde aux questions de signe, voir le cas précédent).  Les différentes densités de flux de matière peuvent chacune s’écrire comme la somme de deux termes (diffusion et migration) :

"C + "! # % N + = ! D+ "x ! u +C + "x % "C ! "! % $ N ! = ! D! "x + u !C ! "x % "C K + "! % %& N K + = ! DK + "x ! uK +C K + "x ou encore, par application de la relation de NERNST-EINSTEIN :

$ "C + � "# & N + = ! D+ "x ! D+ RT C + "x & & "C ! � "# + D! C! % N ! = ! D! RT "x "x & "C K + & � "# &' N K + = ! DK + "x ! DK + RT C K + "x

PROFILS STATIONNAIRES DES CONCENTRATIONS En régime stationnaire, les densités de flux molaire de matière N+, N− et NK+ sont constantes dans tout le volume de l’électrolyte, et égales à leurs valeurs interfaciales.

312

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

 En combinant les relations précédentes, pour éliminer les termes de diffusion, on obtient :

N + N K+ N ! � "# + ! =! (C + + C K+ + C ! ) D+ DK+ D! "x RT et finalement, avec C + + C K + = C ! et N ! = N K + = 0,

N + = ! 2D+ donc

N + = ! D+

� "# C RT ! "x

"C + � "# "C + C ! D+ C = ! D+ + + N+ "x RT + "x "x 2C !

Avec l’hypothèse, liée à la présence d’un électrolyte support, C+  C− , on obtient :

N + ! " D+

#C + #x

On peut donc considérer que, en présence d’électrolyte support, la migration des ions électroactifs Ag+ devient négligeable devant leur diffusion.  En reprenant l’expression de la densité de flux molaire de matière des ions Ag+, on montre que le profil de C+ est linéaire :

!C + I =" = Cte !x D+ � S Pour les ions électroinactifs, on obtient, en reprenant les expressions des densités de flux de matière, des profils linéaires, mais avec des pentes égales à la moitié du profil des ions électroactifs, ce qui permet de maintenir l’électroneutralité :

!C K+ !C " I =" = !x !x 2D+ � S  La conservation de la matière relative à chacun des types d’ions, permet de déterminer la constante d’intégration des profils de concentration en écrivant :

(C + )x =L / 2 = C *

(C K + )x =L / 2 = 100 C *

(C ! )x =L / 2 = 101 C *

En introduisant la nouvelle expression du courant limite dans ce cas (voir section 4.3.3.1, avec une épaisseur L/2 et un coefficient de diffusion égal à D+) :

I limS2 =

2D+ � S C * L

Le courant limite est donc égal à la moitié de la valeur obtenue sans électrolyte support. Les équations des profils de concentration sont les suivantes :

( C+ I " 2x % $1 ! ' *C * = 1 + I L & limS2 # * ** C + " I 2x % ) K = 100 ! $1 ! ' C * 2 I L & limS2 # * *C " I 2x % * ! = 101 + $1 ! ' 2 I limS2 # L & *+ C *

ANNEXES

313

Dans les deux solutions S1 et S2 , bien que la pente du profil de concentration de l'espèce électroactive Ag+ soit proportionnelle à I /Ilim, nous devons nous rappeler que le courant limite est deux fois plus petit en présence d'électrolyte support. Par conséquent, pour une valeur donnée du courant I, la présence d'électrolyte support entraîne une augmentation d'un facteur 2 de la pente du profil de concentration, comme l’illustre la figure A.21. 2

C + /C*

1,5

1

0,5

0

0

0,25

0,5

x /L

0,75

1

Figure A.21 - Profils stationnaires de concentration de Ag+ dans l’électrolyte pour I = 0,9 IlimS2 Comparaison de la solution S1 (sans électrolyte support, courbe en gris) et de la solution S2 (avec électrolyte support, courbe en noir), pour un même courant traversant le système électrochimique

Cette figure représente les profils de concentration stationnaires de Ag+ correspondant à un courant égal à 90% du nouveau courant limite (soit 14,3 µA), et on obtient une pente de – 0,9 .10−3 mol L−1 mm−1 pour la solution S2, avec électrolyte support, alors que la pente est la moitié pour la solution S1, avec le même courant. Cette différence de comportement peut s’expliquer qualitativement si l’on considère qu’en présence d’électrolyte support le courant est uniquement dû à la diffusion, alors qu’en absence d’électrolyte support, la moitié du courant stationnaire est transportée par migration. Il faut garder en mémoire l’idée que cette répartition se fait pour un même courant global, donc une même quantité de matière transformée par unité de temps aux électrodes, avec ou sans électrolyte support. Les profils de concentration des ions non électroactifs sont donnés sur la figure A.22 pour un même courant de 14,3 µA. Pour ces ions électroinactifs, les pentes des profils de concentration sont du même ordre de grandeur (moitié) que celle du profil de l’ion électroactif, mais comme la valeur moyenne des concentrations est au moins cent fois plus élevée, les variations relatives sont très faibles. C’est pourquoi ces profils ne sont en général pas considérés, même si leurs amplitudes sont tout aussi importantes que celles des espèces électroactives.

314

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS 103

C/C*

102 101 100 99 98

0

0,25

0,5

x /L

0,75

1

Figure A.22 - Profils de concentration stationnaire dans la solution S2 pour I = 0,9 IlimS2 pour les ions de l’électrolyte support : K+ (noir) et NO3− (gris)

DENSITÉS DE FLUX STATIONNAIRES DE MATIÈRE ET DE COURANT En lien avec les figures A.21 et A.22 (flux de diffusion de la zone la plus concentrée vers la moins concentrée), on peut représenter les différentes contributions des densités de flux de matière : DIFFUSION

MIGRATION

TOTAL (MIG + DIFF)

+

Ag K+

NO3− Pour les densités de courant, le sens est opposé dans le cas de l’ion nitrate car c’est un anion : DIFFUSION

MIGRATION

TOTAL (MIG + DIFF)

+

Ag +

K

NO3−

Ag+ + K+ + NO3−  Comme le flux de matière des anions NO3− et des cations K+ est nul en régime stationnaire : !t + = 1 Cela signifie que le courant est entièrement transporté par les ions Ag+, comme en l’absence d’électrolyte support, mais ici cela est réalisé en quasi-totalité par diffusion. Cette valeur est celle du nombre de transport électrochimique. Si les phénomènes de migration pouvaient être considérés seuls, on obtiendrait les nombres de transport habituels : ! + "+ t+ = t Ag+ = Ag = = 0,004 ! 101 "# + 100 "K + + "+

ANNEXES

315

tNO

et

! 3

= 0,49

tK + = 0,50

PROFILS STATIONNAIRES DE POTENTIEL  On a obtenu précédemment :

� !" N+ I =# =# 2D+C # RT !x 2D+ C � S  De manière rigoureuse, comme la concentration en anion est fonction de la distance aux électrodes, cette relation n’est pas celle d’un profil linéaire de potentiel. On a :

!" RT 1 = !C # � C#  Donc en intégrant entre le plan d’abscisse x et le plan d’abscisse x = L/2, où l’on prend arbitrairement l’origine des potentiels :

! =

I RT # C " & RT ) 1 ln % ln +1 + (= � * � $ 101C * ' 101 2 I limS2

# 2 x &, %1 " (. L '$

Grâce à la présence de l’électrolyte support, même pour un courant proche du courant limite, le terme I /(101 IlimS ) demeure très petit devant 1 et le profil est quasiment linéaire : 2

! "

$ I RT 2x ' &1 # ) 2 � 101I limS2 % L (

Cet exemple montre que, grâce à la présence d’électrolyte support, même pour un courant proche du courant limite, le profil de potentiel est quasiment linéaire.  En ce qui concerne les tensions électriques interfaciales, le fait que l’on considère le couple rédox comme rapide, permet d’écrire (voir section 4.3.2.4) :

! métal " ! solution = Cte +

RT ln [Ag+ ] interface �

La figure A.23 représente le profil de potentiel stationnaire correspondant à un courant égal à 90% du courant limite (soit 14,3 µA). La tension d’électrolyse est donc égale à :

U = ! anode " ! cathode = ! x =0 " ! x =L +

RT [Ag+ ]x =0 ln � [Ag+ ]x =L

I 1+ I limS2 RT RT [Ag+ ]x =0 ln = ln U ! I � � [Ag+ ]x =L 1" I limS2 Dans l’exemple illustré sur la figure A.23 (I = 0,9 IlimS ) la tension d’électrolyse est égale à 76 mV (la valeur du terme de chute ohmique est de 0,2 mV). 2

316

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS 150

j [ mV ]

janode 100 U = 76 mV

50

jcathode 0 − 50

− 100 − 0,1

0,1

0,3

0,5

x /L

0,7

0,9

1,1

Figure A.23 - Profil de potentiel dans l’électrolyte pour pour I = 0,9 IlimS2 La valeur du potentiel de l’anode est fixée arbitrairement. En revanche, celle du potentiel à la cathode s’en déduit.

RÉSISTANCE D’ÉLECTROLYTE EN RÉGIME STATIONNAIRE Le calcul de la résistance globale de l’électrolyte est directement déduit des valeurs de potentiel à x = 0 et x = L : U chute ohmique = ! x =0 " ! x =L = R I .

R =

! x =0 " ! x =L I

# 1+ RT % = ln % I� % %$ 1 "

I 1 101 2 I limS2 I 1 101 2 I limS2

& ( ( ( ('

Même pour un courant proche de IlimS , on peut faire un développement limité de l’expression générale : 2

R !

1 RT L = = 16,0 # � 101I limS2 S(2 "+ ) 101C *

Si l’on avait un électrolyte homogène en composition, on aurait :

Rmigration pure = et donc finalement,

L L = = 13,7 $ S! S(101 "# + 100 "K + + "+ )C *

R !

Rmigration pure C + * 2 t+ C" *

La résistance en présence d’électrolyte support reste pratiquement constante lorsqu'on fait varier le courant. Elle est, de plus, beaucoup plus faible que dans le cas précédent, sans électrolyte support. Mais la valeur de la tension aux bornes du système tend également vers l’infini lorsqu’on approche du courant limite car le terme de tension interfaciale cathodique tend vers l’infini (la concentration interfaciale tend vers zéro).

ANNEXES

317

ETABLISSEMENT DU RÉGIME STATIONNAIRE ET CARACTÉRISATION DU RÉGIME TRANSITOIRE Si on ne se limite pas au régime stationnaire, on ne peut plus considérer que les densités de flux de matière sont constantes dans l’électrolyte, ni que les ions électroinactifs sont immobiles. En revanche en utilisant l’électroneutralité de l’électrolyte, on peut reprendre les équations générales écrites précédemment :

!2C !C + !N + =" # D+ 2 !t !x !x L’évolution vers l’état stationnaire correspond ainsi à la diffusion de Ag+ avec un temps caractéristique d’établissement τ défini par :

! =

L2 4 D+

ici, avec les données numériques de l’exemple choisi, D+ = 1,65 .10−9 m2 s−1, τ = 606 s. A ce niveau, dans la mesure où D+ et D− sont du même ordre de grandeur, l’influence de la présence ou non d’électrolyte support n’est pas très importante.

A.4.2 - PROFILS DE CONCENTRATION À UNE INTERFACE Le tracé des profils de concentration est un outil très utile pour la compréhension des phénomènes électrochimiques. Il faut cependant garder en mémoire qu’ils ne représentent qu’une partie des phénomènes : ils ne visualisent que la diffusion. Par exemple, dans le cas décrit dans l’annexe A.4.1, l’anion NO3− présente un profil de concentration qui n’est pas plat, alors qu’il n’est pas consommé aux électrodes. En effet même si la diffusion tend à entraîner un transport de matière de l’anode vers la cathode, ce phénomène est exactement compensé par la migration : finalement il n’y a pas de transport global de matière pour ces ions en régime stationnaire. Une autre difficulté réside dans la différence d’interprétation de ces profils de concentration en terme de consommation ou production de matière pour des profils en régime transitoire ou en régime stationnaire. Afin d’illustrer cette différence, considérons l’exemple du système comprenant des ions Fe2+ et Fe3+ en présence d’électrolyte support et avec deux électrodes inattaquables, en géométrie plane (même géométrie que dans l’annexe A.4.1 : voir figure A.15). Les réactions rédox sont donc, comme dans l’exemple de l’annexe A.4.1, exactement inverses l’une de l’autre :  à l’anode (x = 0), on observe :

Fe2+

 à la cathode (x = L), on observe :

Fe3+ + e−

Fe3+ + e− Fe2+

Pour les ions électroactifs, on peut négliger la contribution par migration. De plus, on ne s’intéressera pas ici aux ions de l’électrolyte support. Les paramètres de transport de matière des deux ions électroactifs mis en jeu seront pris constants et égaux à [13] : [13] La valeur pour Fe2+ est déduite du tableau 4.2 de la section 4.2.2.4 en utilisant la loi de NERNSTEINSTEIN, celle de Fe3+ est sous estimée (puisqu’elle vaut en réalité 0,60 .10−9 m2 s−1 d’après le tableau 4.2), afin que l’influence de la différence de ces deux valeurs soit plus facilement visible.

318

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

DFe2+ = 0,72.10!9 m2 s!1

DFe3+ = 0,40.10!9 m2 s!1

On considérera successivement une expérience de chronopotentiométrie avec :  diffusion plane semi-infinie (pas de convection ni migration des espèces électroactives et deux électrodes éloignées),  diffusion plane stationnaire (pas de convection ni migration des espèces électroactives et deux électrodes proches l’une de l’autre),  diffusion-convection selon le modèle de NERNST (pas de migration des espèces électroactives). Enfin pour compléter l’étude, on détaillera les conditions interfaciales en chronoampérométrie en diffusion plane semi-infinie avec un couple rédox rapide (et une réaction réversible) et avec des espèces électroactives présentant des coefficients de diffusion différents.

CHRONOPOTENTIOMÉTRIE AVEC DIFFUSION PLANE SEMI-INFINIE Le premier cas est celui qui est décrit qualitativement dans la section 4.3.1.2. Si l’on complète la figure 4.15 en reprenant la description de la section 4.3.1.3, figure 4.19, on obtient à un instant donné t les profils de concentration représentés, coté anodique sur la figure A.24 et côté cathodique sur la figure A.25. La loi de FARADAY permet alors de donner l’expression des concentrations interfaciales à l’anode :

!

# "[Fe2+ ] & [Fe2+ ]* ! [Fe2+ ]x =0 I = !DFe2+ % = !DFe2+ ( �S D 2+ t $ "x 'x =0 2 Fe )

de même :

[Fe2+ ]x =0 = [Fe2+ ]* !

2I �S

t DFe2+ "

[Fe3+ ]x =0 = [Fe3+ ]* +

2I �S

t DFe3+ !

Comme cela est décrit dans la section 4.3.1.2, les deux surfaces grisées sont identiques (en valeur absolue) : elles représentent la quantité de matière produite ou consommée entre l’instant t et l’instant initial. On peut retrouver ce résultat à partir des relations précédemment établies : un bon ordre de grandeur des surfaces est en effet donné par l’aire algébrique des triangles délimités par les pentes à l’interface à l’instant t. On a ainsi :

AFe2+ =

D 2+t 1 2I t [Fe2+ ]x =0 ! [Fe2+ ]* 2 Fe = ! 2 �S " "

AFe3+ =

D 3+t 2I t 1 = + = !AFe2+ [Fe3+ ]x =0 ! [Fe3+ ]* 2 Fe �S " 2 "

(

(

)

)

Une autre manière de visualiser cette conservation de la matière (autant de matière produite que de matière consommée dans le cas choisi) serait de tracer la courbe d’évolution dans l’espace de la somme [Fe2+] + [Fe3+]. La valeur à l’interface est supérieure à la somme

ANNEXES

319

[Fe2+]* + [Fe3+]*, cette quantité décroît, devient inférieure à [Fe2+]* + [Fe3+]* puis passe par un minimum et réaugmente pour tendre vers [Fe2+]* + [Fe3+]*. Si les deux coefficients de diffusion étaient égaux, la somme [Fe2+] + [Fe3+] serait partout égale à [Fe2+]* + [Fe3+]*, traduisant une conservation de la matière en tous points de l’espace. En revanche lorsque les deux coefficients de diffusion sont différents, il n’y a plus conservation de la matière en tous points. Toutefois il y a bien conservation globale sur l’ensemble de la couche de diffusion (comme définie dans la section 2.2.1.1) : l’aire algébrique de la surface comprise entre les courbes ([Fe2+]* + [Fe3+]*) et ([Fe2+] + [Fe3+]) est nulle. C [Fe3+]x=0

A N O D E



[Fe3+]*



[Fe2+]*

[Fe2+]x=0 0

2

x

DFe3+ DFe2+ 2 p p

Figure A.24 - Profils de concentration côté anodique de Fe3++ (gris) et Fe2++ (noir)

C

[Fe2+]x =L [Fe3+]*



[Fe2+]*



C A T H O D E

[Fe3+]x =L L−2

DFe3+ DFe2+ L p L−2 p

Figure A.25 - Profils de concentration côté cathodique de Fe3+ (gris) et Fe2+ (noir)

x

320

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

CHRONOPOTENTIOMÉTRIE AVEC DIFFUSION PLANE STATIONNAIRE Lorsque les deux électrodes sont proches, un régime stationnaire s’établit après le régime transitoire dont le début a été décrit ci-dessus. Les profils de concentration des espèces électroactives en régime stationnaire sont représentés sur la figure A.26. Les profils de concentration correspondent aux relations suivantes :

DFe2+ d’où :

[Fe3+]x=0

![Fe2+ ] ![Fe3+ ] I = = "DFe3+ !x !x �S

[Fe2+ ] = [Fe2+ ]* +

" I L% $x ! ' DFe2+ � S L # 2&

[Fe3+ ] = [Fe3+ ]* !

" I L% $x ! ' DFe3+ � S L # 2&

C

2+

[Fe ]x=L



A N O D E

C A T H O D E

[Fe3+]* [Fe2+]*



[Fe2+]x=0 3+

[Fe ]x=L 0

L/2

Figure A.26 - Profils stationnaires de concentration de Fe

x 3+

(gris) et Fe

2+

(noir)

La concentration moyenne de chacun des deux ions dans l’électrolyte reste égale à sa valeur initiale puisque les deux réactions rédox sont opposées : comme l’illustre la figure A.26, on retrouve cette valeur de concentration moyenne au milieu de la cellule, en x = L/2. Les surfaces grisées ont des aires différentes parce qu’elles ne représentent plus des quantités de matière consommées entre deux instants. Cet écart en régime stationnaire est dû à la différence entre les temps d’établissement de ce régime stationnaire pour les ions Fe2+ et Fe3+ car leurs coefficients de diffusion ne sont pas égaux.

CHRONOPOTENTIOMÉTRIE AVEC DIFFUSION-CONVECTION SELON LE MODÈLE DE NERNST On introduit ici de la convection forcée en se limitant à la description simplifiée du régime stationnaire par le modèle de NERNST (voir section 4.3.1.4). Les profils de concentration correspondants sont représentés sur la figure A.27.

ANNEXES

321

[Fe3+]x=0

C

[Fe2+]x=L



A N O D E

C A T H O D E

[Fe3+]* 2+ [Fe ]*



2+

[Fe ]x=0

[Fe3+]x=L 0

L

dFe3+ dFe2+ 3+ +

x

2+ +

Figure A.27 - Profils stationnaires de concentration de Fe (gris) et Fe (noir) pour un régime de diffusion-convection dans l’approximation du modèle de NERNST

Les profils de concentration côté anodique sont décrits par les relations suivantes : # x & I " 1( [Fe2+ ] = [Fe2+ ]* + % DFe2+ � S $ !Fe2+ ' # x & I " 1( [Fe3+ ] = [Fe3+ ]* " % DFe3+ � S $ !Fe3+ ' Pour fixer les idées, on peut utiliser la relation de LEVICH, qui donne une expression analytique de l’épaisseur de la couche de NERNST pour des expériences avec électrode à disque tournant : !i = 1,611 Di 1/ 3 " 1/ 6 # $1/ 2 avec : δi Di ν Ω

l’épaisseur de la couche de NERNST le coefficient de diffusion la viscosité cinématique de l’électrolyte [14] la vitesse de rotation de l’électrode [15]

[m] [ m2 s−1 ] [m2 s−1 ] [ rad s−1 ]

Ainsi, comme cela est représenté sur la figure A.27, la couche de NERNST des ions Fe2+ est plus épaisse que celle des ions Fe3+. Les aires algébriques des triangles délimités par les profils stationnaires et initiaux sont ainsi :

AFe2+ = AFe3+

I (" Fe2+ )2 1 1,6112I % $ ( [Fe2+ ]x =0 ! [Fe2+ ]* " Fe2+ = ! = ! 2 2 � S # '& DFe2+ *) 2DFe2+ � S

(

)

I (" Fe3+ )2 1,6112I % $ ( = = 2 � S # '& DFe3+ *) 2DFe3+ � S

1/3

1/3

+ ! AFe2+

[14] Attention de ne pas confondre la viscosité cinématique ν (en m2 s−1) et la viscosité dynamique η (en Pa s) utilisée par exemple dans la loi de STOKES (voir section 4.2.2.4). La relation qui lie ces deux grandeurs fait intervenir la masse volumique ρ du milieu : ν = η /ρ. [15] 1 tr min−1 = 2π /60 rad s−1.

322

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

Ces deux valeurs ne sont pas égales en valeur absolue car elles ne représentent pas des quantités de matière consommées entre deux instants.

CHRONOAMPÉROMÉTRIE AVEC DIFFUSION PLANE STATIONNAIRE Dans une expérience de chronoampérométrie, les profils de concentration au niveau de l’électrode de travail ont, à chaque instant, la même allure que ceux décrits ci-dessus dans le cas d’une expérience de chronopotentiométrie (voir figure A.24). En revanche, l’évolution dans le temps des profils de concentration, et notamment celle de l’épaisseur de la couche de diffusion, est différente, comme cela a été décrit dans la section 4.3.1.3. Il y a été souligné que, pour un couple rapide, fixer le potentiel de l’électrode de travail (expérience de chronoampérométrie dans une zone de potentiel où la réaction est réversible) revenait à fixer la valeur des concentrations interfaciales des espèces électroactives (voir figure 4.18). C’est un résultat qu’il est facile de démontrer lorsque les deux coefficients de diffusion sont égaux. En effet, en combinant les équations (bilan de matière, conditions initiales et limites) pour Fe3+ et Fe2+, on obtient alors le système suivant :

! !2 ([Fe3+ ] + [Fe2+ ]) = D 2 ([Fe3+ ] + [Fe2+ ]) !t !x avec :

t !0

[Fe3+ ] + [Fe2+ ] = [Fe3+ ] * +[Fe2+ ] * " ([Fe3+ ] + [Fe2+ ]) = 0 t >0,x = 0 D "x " ([Fe3+ ] + [Fe2+ ]) = 0 t >0,x =L D "x

La solution unique de ce système est : ∀t, ∀x

[Fe3+ ] + [Fe2+ ] = [Fe3+ ]* + [Fe2+ ]*

Cette relation est en particulier valable à l’électrode de travail. En la combinant avec la condition de réversibilité : [Fe3+ ]x =0 = e! [Fe2+ ]x =0 on obtient les expressions des concentrations interfaciales suivantes, qui montrent qu'elles sont indépendantes du temps :

[Fe3+ ]* + [Fe2+ ]* 1 + e! ! e = [Fe3+ ]* + [Fe2+ ]* 1 + e!

[Fe2+ ]x =0 = [Fe3+ ]x =0

(

)

Le fait que les concentrations interfaciales soient, pour un couple rapide, fixées par le potentiel de l’électrode, est un résultat qui, même s’il est plus compliqué à démontrer [16], [16] La démonstration des résultats donnés ici peut être faite en utilisant les transformées de LAPLACE.

ANNEXES

323

reste valable lorsqu’il existe une différence entre les coefficients de diffusion. Dans ce cas, on a : [Fe3+ ] + [Fe2+ ] ! [Fe3+ ]* + [Fe2+ ]*

et

! DFe2+ [Fe2+ ]* [Fe3+ ]* + # D 3+ Fe # [Fe2+ ] x =0 = # DFe2+ " + e! # DFe3+ # #$ [Fe3+ ]x =0 = e ! [Fe2+ ]x =0

Les concentrations interfaciales sont donc fixées dans une expérience de chronoampérométrie. Cette propriété n’est pas vérifiée pour un couple rédox lent.

A.4.3 - RÉACTION ÉLECTROCHIMIQUE MULTIÉLECTRONIQUE Il est très fréquent de rencontrer des espèces électroactives dont l’oxydation ou la réduction implique plusieurs étapes. Parmi elles, on peut trouver des étapes dites chimiques, au cours desquelles aucun transfert électronique n’est mis en jeu, et des étapes rédox différentes selon la nature des espèces électroactives : des espèces dissoutes dans un solvant ou plus généralement dans un électrolyte, des espèces adsorbées, des espèces insérées (matériau d’insertion) ou encore avec une des espèces électroactives sous forme solide, éventuellement l’électrode elle-même. L’élucidation de tels mécanismes est une tâche complexe et de nombreux systèmes rédox ne peuvent pas encore être décrits en détail au niveau cinétique. Citons trois exemples de mécanismes complexes qui ont été étudiés dans la littérature :  Mécanismes faisant intervenir des espèces adsorbées. C’est le cas des couples O2/H2O, H+/H2, Cl2/Cl−, etc. Dans le cas de la réduction du dioxygène, très important dans le développement des piles à combustible, un des mécanismes possibles est : O2 + H+ + e−

OHads + Oads

Oads + H2O +

OHads + H + e

2 OHads −

H 2O

Le bilan du couple rédox fait intervenir quatre électrons et s’écrit : O2 + 4 H+ + 4 e−

2 H 2O

Dans le cas du dégagement de dihydrogène, un des mécanismes qui a été démontré sur de nombreux types d’électrode est le mécanisme connu sous le nom de VOLMERHEYROVSKI : H + + e− Hads H+ + e− + Hads

H2

Le bilan du couple rédox fait intervenir deux électrons et s’écrit : 2 H+ + 2 e−

H2

324

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

 Mécanisme faisant intervenir des espèces en solution, avec une étape chimique qui se déroule essentiellement dans la couche de diffusion : RX + e−

R• + X−

R• + e−

R−

R− + H+

RH

Dans cet exemple, le bilan du couple rédox s’écrit : RX + 2 e− + H+

RH + X−

et fait intervenir deux électrons, mais en trois étapes dont les deux premières sont des étapes de mécanisme E. Lorsqu’on se place au niveau moléculaire pour envisager le déroulement d’une réaction rédox, il est naturel de considérer, à partir des connaissances de base de cinétique chimique, qu’un acte élémentaire ne peut pas faire intervenir plus de 2 ou 3 entités. Ainsi, lorsqu’on écrit par exemple le couple MnO4−/Mn2+ : MnO4− + 8 H+ + 5 e−

Mn2+ + 4 H2O

il est tout à fait illusoire de penser qu’un ion MnO4−, 8 H+ et 5 électrons interagissent dans le même processus réactif concerté au niveau moléculaire. Cette écriture est nécessairement le bilan de plusieurs étapes élémentaires. Pourtant, lorsqu’on passe au niveau macroscopique des caractéristiques intensitépotentiel, il n’est pas rare que ce principe soit quelque peu malmené. De nombreux auteurs utilisent en effet des lois issues de concepts développés pour un mécanisme E (voir section 4.3) dans des conditions qui s’éloignent notablement de ce cadre. En particulier, on trouve fréquemment des études ou des ouvrages d’électrochimie, traitant de phénomènes impliquant des réactions rédox multiélectroniques, dans lesquels la cinétique électrochimique est traduite uniquement en introduisant le nombre d’électrons global, n ≠ 1, dans une expression de type mécanisme E, donc en écrivant un pseudo-mécanisme E à n électrons : ! n�(E !E °) (1!! )n�(E !E °) % " ! RT I = n�S k° $ [Red]x =0 e RT ! [Ox]x =0 e '& #

ou pour un mélange dans lequel Red et Ox sont présents au départ :

$ [Red]x =0 ! n �" [Ox]x =0 # I = I0 & e RT # e [Ox]* % [Red]* avec

(

I 0 = n�S k° [Red]*

(1# ! )n �" RT

' ) (

) ( [Ox]* ) 1!!

!

Nous voudrions ici regarder de manière plus rigoureuse cette question en prenant l’exemple d’un couple rédox impliquant le transfert de deux électrons [17] : A

C + 2 e−

[17] Pour simplifier l'écriture, nous ne faisons pas apparaître ici les charges des espèces électroactives.

ANNEXES

325

dont le mécanisme serait deux étapes de mécanisme E : A

B + e−

B

C + e−

On considère que les caractéristiques de ces deux étapes sont E °1, k°1, α1 pour le couple B/A et E °2, k°2, α2 pour le couple C/B, et on suppose que tous les coefficients de diffusion sont égaux. De manière tout à fait générale, le courant correspond aux deux étapes élémentaires et s’écrit donc (additivité des courants faradiques lorsque l’on écrit la loi de FARADAY, c’està-dire le bilan de matière interfacial) :

(

)

(

I = �S k°1 [A]x =0 e!1"1 # [B]x =0 e #(1#!1)"1 + �S k°2 [B]x =0 e! 2"2 # [C]x =0 e #(1#! 2 )"2 avec :

!1 =

� ( E ! E °1 ) RT

et

!2 =

)

� ( E ! E °2 ) RT

Au vu de cette relation complexe, on comprend qu’il faut des conditions très particulières pour espérer réduire cette expression en celle d’un pseudo-mécanisme E à 2 électrons écrite plus haut. Un autre point qui peut compliquer l’écriture du modèle et sa résolution et par conséquent les relations intensité-potentiel, est l’intervention, a priori inévitable, d’une réaction en phase homogène dans l’électrolyte. Dès lors que deux couples rédox avec des espèces électroactives en solution jouent un rôle, on peut envisager la réaction en solution suivante : 2B A + C La constante de l’équilibre de médiamutation K dépend directement des valeurs de � (E °2 " E °1) = ln K . En revanche la cinétique potentiel standard : on notera !! ° = RT de cette réaction est a priori décorrélée de la cinétique hétérogène des deux couples rédox mis en jeu. Dans certains cas, notamment pour des mélanges de composés, l’allure des courbes intensité-potentiel est ainsi fortement modifiée par la réaction en phase homogène. Cet aspect est en général complexe et ne sera pas pris en compte ici. Les valeurs des différents paramètres utilisés dans la suite du texte pour illustrer cette discussion ne sont pas à prendre dans l’absolu. C’est souvent plus le rapport entre eux qui importe, comme par exemple la valeur de k°1/k°2 . Dans la suite de l’annexe six cas différents seront décrits, toujours en faisant l’hypothèse que l’équilibre en phase homogène n’intervient pas de manière importante sur les caractéristiques intensité-potentiel :  système contrôlé par le transport de matière (nernstien)  première étape irréversible et cinétiquement déterminante  système à 2 électrons avec E °2 >> E °1  système à 2 électrons avec E °2 = E °1  système à 2 électrons avec E °2 > E°1 Pour des réactions rédox pas trop lentes, dès que E °2 − E °1 est supérieur à 250 mV (ou encore Δξ ° > 10), on observe deux réactions rédox successives et bien séparées en potentiel. Par exemple en régime stationnaire, la courbe intensité-potentiel d’une solution contenant uniquement l’espèce A présente deux vagues successives, comme l’illustre la figure A.28. 2

I /m S [A]*

1,5

B

C

1

A

0,5

0 − 25

− 20

− 15

B

− 10

−5

0

ξ

5

10

15

20

25

Figure A.28 - Courbe intensité-potentiel stationnaire d'un système contenant A seulement au sein de l’électrolyte avec Δξξ ° = 20 ; α 1 = 0,25 ; k°1 /m = 40 ; α 2 = 0,6 ; k°2 /m = 1

Il n’y a que pour une situation où le premier système serait très lent que l’on pourrait avoir, pour une solution ne contenant que l’espèce A, une seule vague irréversible qui semblerait correspondre à 2 électrons. La figure A.29 illustre les courbes intensité-

328

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

potentiel stationnaires que l’on obtiendrait dans ce cas particulier pour une solution contenant A seulement, avec un premier couple B/A lent et un deuxième couple C/B rapide tel que : 1 RT k°1 E °2 < E °1 ! ln !1 � m (voir E1/2,an pour un couple lent, section 4.3.3.3) 2

I /m S [A]*

1,5

A

C

a

1

0,5

0 − 20

1/ 2

=

− 10

° 2

0

1 1

ln

k °1 m

10

20

30

ξ

10

40

50

60

70

80

1

I /m S [A]*

10−1 10−2

e: nt e p

10−3 −4

α

10 /1 ln

b

10

10−5 10−6 10−7 − 20

log 2 − 10

0

10

20

30

ξ

40

50

60

70

80

Figure A.29 - a - Courbes intensité-potentiel stationnaires d'un système contenant A seulement au sein de l’électrolyte, avec le couple C/B rapide et Δξξ ° = 20 ; α 1 = 0,25 ; k°1 /m = 10− 4 (pointillé), 10− 5 (gris), 10− 7 (noir). b - Représentation de TAFEL

Rappelons que ces résultats ne sont valables que si l’on considère que l’équilibre de médiamutation, thermodynamiquement favorable, est infiniment lent. On obtient effectivement une allure qui ressemble à une vague d'un système à 2 électrons. Le potentiel de demi-vague est égal à :

E = E °1 !

1 RT k°1 ln !1 � m

ou encore

! = !

"! ° 1 k°1 ! ln 2 !1 m

ANNEXES

329

Là encore on peut formellement introduire αapp = α1/2 et kapp = 2k°1 pour retrouver l’expression d’un pseudo-mécanisme à 2 électrons, qui correspond d’ailleurs à l’expression démontrée dans le cas d’une première étape irréversible cinétiquement limitante. Cette expression n’est correcte que dans la zone fortement anodique. En effet, lorsqu’on regarde dans le détail, on voit dans la représentation de TAFEL deux segments de droite parallèles (pente α1/ln 10 par décade de courant) et décalés de log 2. Ce décalage est dû au fait que pour ces potentiels cathodiques pour le couple C/B, c’est-à-dire pour E < E °2 , la vitesse et donc le courant d’oxydation de B en C sont nuls. On a ainsi dans cette zone de potentiel : I = �S k°1[A]x =0 e!1"1 alors que dans la zone anodique :

I = 2�S k°1[A]x =0 e!1"1

SYSTÈME À 2 ÉLECTRONS AVEC E°2 = E°1 Dans le cas où E °2 = E °1, et toujours pour un équilibre en phase homogène très lent, on ne peut envisager un pseudo-mécanisme à deux électrons que si les paramètres des cinétiques des deux couples sont très proches : k °1 ≈ k °2 et α1 ≈ α2 . Cette situation est irréaliste en pratique.

SYSTÈME À 2 ÉLECTRONS AVEC E°2 > E °1) I = 2^Sk °1([A]x = 0 eα1ξ1 − [B]x = 0 e− (1−α1)ξ1) = 2^Sk °1[A]* eα1ξ1 On a donc la même pente que pour le couple B/A dans la zone irréversible en oxydation (pente = α1/ln 10 par décade de courant) mais une constante cinétique double (2^Sk °1[A]* à E °1).  pour une surtension très forte en réduction, donc avec l’étape 2 limitante (E °2 >> E °1) I = 2^Sk °2([B]x = 0 eα2ξ2 − [C]x = 0 e− (1−α2)ξ2) = − 2^Sk °2[C]* e−(1−α2)ξ2 On a donc la même pente que pour le couple C/B dans la zone irréversible en réduction (pente = − (1 − α2)/ln 10 par décade de courant) mais une constante cinétique double (2^Sk °2[C]* à E °2). Dans la zone intermédiaire, on distingue les deux cas étudiés :  pour le segment de droite intermédiaire, on s’intéresse d’abord au cas où la cinétique du couple C/B peut être considérée comme non limitante, réversible (ξ1 < 0 et ξ2 > 0 petits en valeur absolue et k °1 0 et ξ2 < 0 petits en valeur absolue et k °2 0 ou encore : πan > 0 (I > 0) et π cat < 0 (I < 0) Pour un couple rédox, une seule branche si soit Red soit Ox n’est pas présent dans le système

Influence de la cinétique de transport de matière

2.3.2 Existence d’un courant limite généralement proportionnel à la concentration, au cœur de l’électrolyte, de l’espèce consommée

Influence de la cinétique rédox

2.3.3 Surtension d’autant plus importante, en valeur absolue, que la cinétique des réactions rédox est lente

2.3.6 Zone de potentiel d’électroinactivité de la demi-cellule avec, au contact d’une électrode donnée, Définir le le solvant et l’électrolyte support, ou encore fenêtre de stabilité rédox de cette demi-cellule domaine d’électroactivité

Prévision des réactions Prévoir l’évolution spontanée d’une électrode à l’abandon

2.4.1 Faire le raisonnement à l’aide des courbes intensité-potentiel (aspects cinétique et thermodynamique) et pas seulement à l’aide d’une échelle de potentiel thermodynamique (règle du γ) Potentiel mixte à l’abandon hors équilibre : interface siège d’au moins deux demi-réactions différentes (une oxydation et une réduction)

Prévoir les réactions lors du passage forcé du courant

2.4.3 Lorsqu’il y a plusieurs réactions possibles à une interface, la demi-réaction principale est celle qui présente, pour le même courant, la plus faible polarisation (en valeur absolue). La réaction globale principale est celle qui nécessite la plus faible tension imposée

Prévoir les réactions lors du passage spontané du courant

2.4.4 Lorsqu’il y a plusieurs réactions possibles à une interface, la demi-réaction principale est celle qui présente, pour le même courant, la plus faible polarisation (en valeur absolue). La réaction globale principale est ainsi celle qui fournit la plus forte tension, la plus forte énergie électrique au circuit extérieur.

352

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE CE QU’IL FAUT SAVOIR

ÉLÉMENTS DE RÉPONSE

Potentiel Potentiels VOLTA et GALVANI

3.1.1 ϕ : potentiel interne ou GALVANI, non mesurable

Ecrire le potentiel électrochimique et les activités

3.1.2 µ! i = µi + zi � !

Les conventions des tables thermodynamiques

3.1.2 Pour les corps purs simples : potentiel chimique nul

ψ : potentiel externe ou VOLTA, mesurable

avec µi = µ °i + RT lnai

Pour une solution : asolvant ! 1 ai = "i

Ci C°

Pour définir µ°i d’un ion i en solution : !T µ°H+ = 0 J mol"1

Système monophasique Utiliser la loi d'action de masse

3.2 K éq (T ) = " ai!i

avec #rG° + RT lnK éq = 0

i

K éq , ai et !i sont des nombres sans dimension (!i algébrique) Utiliser la notion d'activité moyenne d'un soluté

3.2.1 Pour un soluté Ap+ B p! : a = a±p = a!p!a+p+

avec p = p+ + p!

(pour le cas simple AB, a± = a+a! est mesurable

alors que a+ et a! ne le sont pas individuellement)

Définir et calculer la force ionique d'un électrolyte

1 2 3.2.1 F ionique = !C i z i

Utiliser la loi limite de DEBYE HÜCKEL (+ limites de validité)

3.2.1 log ! ± = Az +z " Fionique

2

i

avec A # 0, 5 L1/2 mol"1/2 (solutions aqueuses à 25 °C)

valable pour Fionique < 10−3 à 10−2 mol L−1

Interface Décrire la double couche électrochimique

3.3.1 La double couche électrochimique désigne la zone de faible épaisseur (quelques 10 Å) où il n’y

Décrire l'équilibre d'une interface réactive

!= " µ 3.3.2 ! rG # i !i = 0

a pas électroneutralité en raison d’une accumulation de charge de part et d’autre d’une interface électrochimique (analogie avec un condensateur, appelée aussi zone de charge d’espace) Décomposition de cette zone en deux couches : couche de HELMOLTZ et couche diffuse

en prenant soin de noter dans quelle phase est chaque espèce i

i

Décrire l'équilibre d'une 3.3.4 L'équilibre, correspondant à µ! i ! = µ! i " , s'établit par échange d'une quantité d'ions très jonction ionique ou faible (les variations de concentration entre l'état initial et l'équilibre sont négligeables). électronique avec échange Il en résulte une variation de la tension de jonction. d’une espèce chargée Décrire l'équilibre d'une 3.3.4 Etablissement d’une tension interfaciale à l’équilibre : interface électrochimique ( 1% 1 RT réactive ! métal " ! électrolyte = '' µ emétal + $ #i µi ** = Cte + ln+ ai#i #e i # � �& e ) i

FICHES DE SYNTHÈSE

353

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE CE QU’IL FAUT SAVOIR

ÉLÉMENTS DE RÉPONSE

Système électrochimique Faire le lien entre la fem 3.4.1 !rG = " e �U = " e � ( # WE $ # CE ) (à l'équilibre) et les données avec νe le nombre stœchiométrique algébrique des électrons dans la demi-réaction de l’interthermodynamiques face de l’électrode de travail. Exploiter qualitativement un 3.4.2 E [V/ESH] diagramme E /pH

Pour pH < pHi Ox1 + Red2 Ox2 + Red1 Pour pH > pHi Ox1 + Red2 Ox2 + Red1 Pour pH = pHi , équilibre Ox1 + Red2 Ox2 + Red1

Ox1 Red1 Ox2 Red2

pHi

pH

354

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

4 - PASSAGE D’UN COURANT : PROCESSUS HORS-ÉQUILIBRE CE QU’IL FAUT SAVOIR

ÉLÉMENTS DE RÉPONSE

Bilans de matière Les relations entre densités de flux de matière et de courant Ecrire le bilan de matière local en volume, en utilisant la notion de vitesse de réaction

!!" !" 4.1.1 j = ! zi � N i i

!!!" 4.1.2 !C i = " div N i + wi !t wi = " !ir vr

en géométrie plane :

!N x ,i !C i =" + wi !t !x

réactions

avec νi r le nombre stœchiométrique algébrique de l'espèce i dans la réaction r, de vitesse vr Ecrire le bilan de matière interfacial

4.1.3

Ecrire le bilan de matière à une interface électrochimique : courants capacitif et faradique

4.1.3 Pour une espèce i mobile dans l’électrolyte (normale orientée du métal vers l'électrolyte) : "# i = ! + w Si (N i )interface "t terme capacitif terme faradique (électrolyte support) (espèces électroactives)

Utiliser la loi de FARADAY

4.1.4

(N i )interface! " (N i )interface# = "

j farad = �

! e farad (N i )interface !i

$% i + w Si $t

normale orientée de # vers !

pour une espèce i mobile dans l’électrolyte

Transport de matière Ecrire les 3 composantes des densités de flux de matière ou de courant

!!!" !" ! !" 4.2.1 !" ji = ! Di z i � gradC i + "i C i E +C i z i � # milieu #%% %$% & #% & !" $%%& # !" !"%$%% ji migration ji diffusion ji convection

!!!" !" !!" !" z N i = ! Di gradC i + i ui C i E +C i # milieu zi % & # #!% & !"$%% !"$%& #!% !!% " $% N i migration N i diffusion N i convection

En un point donné, la densité de courant globale de convection est nulle (électroneutralité). Si, de plus, les coefficients de diffusion des porteurs de charge sont égaux, la densité de courant globale de diffusion est nulle et donc le courant total est confondu avec le courant de migration. Relation de NERNST-EINSTEIN

4.2.1

u Di = u!i RT = i RT zi �

ou

!i = Di z i 2

�2 RT

relation qui vient du lien existant entre les phénomènes de migration et de diffusion (dans le cadre de l’hypothèse d’un même mécanisme au niveau microscopique) Loi de KOHLRAUSCH

4.2.2 ! = ! 0 " Cte C

FICHES DE SYNTHÈSE

355

4 - PASSAGE D’UN COURANT : PROCESSUS HORS-ÉQUILIBRE CE QU’IL FAUT SAVOIR

ÉLÉMENTS DE RÉPONSE

Interface Tracer l’allure des profils de concentration et définir la couche de diffusion

4.3.1

C

[Fe3+]x =0

e−

Fe2+ e− + Fe3+ Courant proportionnel à la pente à l’origine du profil de concentration, en présence d’électrolyte support (première loi de FICK et loi de FARADAY) :



[Fe3+]*



[Fe2+]*

#

I

(( 'x=0

( N Fe2+ )x =0 = ! �S

j 2+

[Fe ]x =0 dcouche de diffusion

2+ & ]

( N Fe2+ )x =0 = !DFe2+ %%$ "[Fe"x

x

Cas particulier du courant limite : concentration interfaciale négligeable de l’espèce consommée Ecrire les lois de vitesse dans 4.3.2 � " % v oxydation = k° exp $ + ! (E ! E °) ' [Red]x =0 = k° e!" [Red]x =0 le cas le plus simple RT # & du mécanisme rédox E � " % vréduction = k° exp $ ! (1 ! ! ) (E ! E °) ' [Ox]x =0 = k° e !(1!! )! [Ox]x =0 RT # & Définir les notions de couple 4.3.2 k° k° !1 couple rédox lent : "1 Couple rédox rapide : rédox rapide/lent m m k° est la constante standard de vitesse de réaction rédox, elle est intrinsèque au couple m caractérise la vitesse de transport de matière et dépend donc des conditions de l’expérience Pour une expérience en régime stationnaire sur EDT en solution aqueuse (m = D/δ), un couple rédox suivant un mécanisme E est : rapide si k° > 10−2 cm s−1 et lent si k° < 10−4 cm s−1 Définir les notions de réaction réversible/irréversible

4.3.2  Une étape est dite réversible si et seulement si la vitesse globale de la réaction est très petite devant la vitesse aller et la vitesse retour : v ! v! et v ! v" Par conséquent, les vitesses aller et retour sont quasiment égales : v ! " v#  Une étape est dite irréversible dans le sens aller (par exemple) si et seulement si la vitesse retour est négligeable devant la vitesse aller : v ! ! v" Par conséquent, la vitesse globale est quasiment égale à la vitesse aller : v ! v "

Expression de la courbe intensité-potentiel d’un couple rapide

4.3.3

E = E° +

RT I ! I limcat RT [Ox]x =0 ln (système nernstien), donc E = E1/2 + ln n � I liman ! I n � [Red]x =0

avec : E1/2 = E° +

" RT m Red ln et I lim = ! e �S mi C i * (i espèce consommée) "i n � m Ox

356

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

4 - PASSAGE D’UN COURANT : PROCESSUS HORS-ÉQUILIBRE CE QU’IL FAUT SAVOIR

ÉLÉMENTS DE RÉPONSE

Représentation de TAFEL de 4.3.3 la courbe intensité-potentiel stationnaire d’un couple lent de mécanisme E

logI f a  ln 10

f −(1−a)  ln 10 logj 0S

avec : f =

RT

= 38,9 V 1 à 25 °C h [V]

(

)

Expression de la courbe intensité-potentiel stationnaire d’un couple lent de mécanisme E dans la zone BUTLER VOLMER

4.3.3 I = �S k° e + !" [Red]* ! e !(1! ! ) ! [Ox]*

Caractéristiques de la courbe intensité-potentiel stationnaire d’un couple lent dans la zone irréversible

4.3.3

Expression de la courbe intensité-potentiel stationnaire d’un couple de mécanisme E dans le cas général

4.3.3 I = �S k° e + !" [Red] !(1! ! ) ! [Ox]x =0 x =0 ! e

(

Si Ox et Red présents : I = S j 0 e avec : j 0 = � k° ([Red]*)

(1! ! )

+! f !

!e

!(1! ! ) f !

)

!

([Ox]*)

1 RT k° ln ! � m Red 1 RT k° = E° + ln 1 ! ! � m Ox

Potentiel de demi-vague en oxydation : E1/2an = E ° ! Potentiel de demi-vague en réduction : E1/2cat

(

ou encore :

1 I

)

1 1 = + Id I tc contrôle transport de matière contrôle transfert de charge

RÉPONSES 1 - NOTIONS DE BASE 1.2.1 1 - Un anion est toujours chargé négativement

ü vrai

faux

vrai

ü faux

1.2.1 2 - Un oxydant est toujours un cation 1.2.1 3 - Dans la demi-réaction suivante : 1.2.2 CoCl42− + 2 e− Co + 4 Cl− indiquer :  le couple rédox mis en jeu  l’espèce oxydée du couple  le nombre de charge (algébrique) de l’oxydant  le nombre stœchiométrique (algébrique) du réducteur  l’élément subissant l’oxydoréduction  le nombre d’oxydation de l’élément oxydé  le sens d’écriture de la réaction ü oxydation

CoCl42−− /Co CoCl42−− −2 −1 Co + II réduction

ü vrai

1.2.1 4 - On peut réduire un anion à la cathode 1.3.3

1.2.2 5 - Quel est le nombre d’oxydation habituel de l’oxygène dans un composé ?

faux − II

Parmi les composés suivants, préciser (en les entourant) ceux où l’oxygène est :  à son nombre d’oxydation usuel H 2O

FeO

OH−

H 2O 2

ClO4−

F 2O

CO2

CO

ClO4−

F 2O

CO2

CO

 à un nombre d’oxydation supérieur H 2O

OH−

H 2O 2

FeO

1.2.2 6 - Quel est le nombre d’oxydation de l’oxygène dans O3 ? −III

−I

0

+I

+III

1.2.3 7 - Ecrire la demi-réaction rédox du couple SiO2/Si en milieu acide Si + 2 H2O

SiO2 + 4 H+ + 4 e−

1.3.2 8 - Un électrolyte est :  un milieu à conduction ionique ü vrai faux  un récipient servant à réaliser une électrolyse vrai ü faux  un composé qui se dissout dans un solvant en donnant des ions ü vrai faux  un monsieur qui fait une électrolyse vrai ü faux  une personne électrocutée vrai ü faux

358

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

1.3.2 9 - Les sels fondus sont des milieux à conduction majoritairement électronique

vrai

ü faux

1.3.2 10 - Les semi-conducteurs sont des milieux à conduction de type électronique

ü vrai

faux

1.3.2 11 - Un électrolyte peut se trouver sous forme :  solide  liquide  gazeuse

ü vrai ü vrai vrai

faux faux ü faux

vrai

ü faux

vrai vrai ü vrai

ü faux ü faux faux

1.3.3 12 - L’ordre de grandeur usuel de l’épaisseur d’une zone interfaciale métal | solution électrolyte aqueuse est de quelques micromètres 1.3.3 13 - En électrochimie, la cathode : 1.4.4  est toujours l'électrode négative du dispositif 1.5.1  présente toujours un potentiel relatif à ESH négatif  est toujours le siège d’une réduction

1.4.1 14 - On réalise une électrolyse entre une électrode de 1 m2 de surface pour laquelle la densité de courant est égale à 1 mA cm−2 et une électrode dont la surface active est un carré de 10 cm sur 10 cm. La valeur de la densité de courant (en valeur absolue) à cette deuxième électrode est 10−3 A m−2

1 A m−2

103 A m− 2

1.4.3 15 - Compte tenu des réactions d’électrode données, compléter le schéma suivant, en y précisant :  les positions de l’anode et la cathode  le sens du courant (ou de la densité de courant)  le type de dispositif extérieur (à placer en remplacement du point d’interrogation sur le schéma) +



2– PbO2 + SO4 + 4 H + 2 e  PbSO4 + 2 H2O

CATHODE

+

Résistance, lampe, moteur… – e I

Pb + SO42–  PbSO4 + 2 e–

ANODE



RÉPONSES

359

1.4.1 16 - Dans un montage expérimental à 3 électrodes, celles-ci sont appelées : 1.6.2  électrode de travail  contre-électrode ou électrode auxiliaire  électrode de référence Quel est le nom de l’appareil électronique utilisé généralement au laboratoire dans ce cas ?

potentiostat

1.5.1 17 - En électrochimie, une électrode joue un rôle particulier, c’est l’ESH.  Quel est ce rôle particulier ? système fixant l’origine des potentiels  Que signifient ces initiales ? Electrode Standard à Hydrogène  Quel est le couple rédox mis en jeu ? H+ /H2  Il existe une différence de potentiel entre l’ESH et l’ENH ü vrai faux 1.5.1 18 - Citer 2 types d’électrodes de référence utilisables expérimentalement, en précisant le couple rédox mis en jeu :  ECS : Hg2Cl2/Hg  électrode à chlorure d’argent : AgCl/Ag 1.5.1 19 - Un fil d’argent recouvert de chlorure d’argent est plongé dans une solution aqueuse contenant du nitrate de potassium. Cette électrode peut être utilisée comme électrode de référence pour des mesures de potentiel, repérables dans l’échelle des potentiels 1.5.2 20 - Pour un système ou une électrode parcouru(e) par un courant, qui, à l’abandon, n’était pas à l’équilibre, il faut employer uniquement le terme de ü polarisation

vrai

ü faux

surtension

1.6.5 21 - Compléter l’allure des courbes de variation en fonction du temps de la tension et du courant, lors d’une expérience simple de chronoampérométrie U

I

t

t

360

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

2 - DESCRIPTION SIMPLIFIÉE DES SYSTÈMES ÉLECTROCHIMIQUES 2.2.1 1 - Les trois processus de transport de la matière sont :  diffusion  migration  convection 2.2.1 2 - On considère une interface entre du cobalt (métal) et une solution de Na+Cl− dans l’acétonitrile (un solvant organique) où se déroule la réaction : CoCl42− + 2 e− Co + 4 Cl−  Cette interface est réactive ü vrai  Par convention, le signe du courant est positif ü vrai

faux faux

2.2.2 3 - La loi de FARADAY exprime, pour une réaction rédox, la quantité de matière transformée en fonction de la quantité d'électricité qui traverse l’interface considérée. Le coefficient de proportionnalité fait intervenir au numérateur :  la température vrai ü faux  la constante de FARADAY vrai ü faux  le nombre d’électrons vrai ü faux  le nombre stœchiométrique de l’espèce considérée ü vrai faux 2.2.2 4 - Dans une installation industrielle de production d’aluminium, la réaction principale à la cathode fait intervenir le couple Al(III)/Al avec un rendement faradique de 90%. La quantité d’aluminium produite en une heure dans une cellule d'électrolyse fonctionnant avec un courant de 300 000 A est 3,4 .103 mol

103 mol

3,6 .103 mol

104 mol

2.2.3 5 - La polarisation globale d’une chaîne électrochimique peut être décomposée en différents termes. Dans un système sans jonction ionique, comment appelle-t-on le terme qui s’ajoute aux deux polarisations interfaciales pour constituer la valeur de la polarisation globale d’une chaîne électrochimique ?

3,4 .106 mol

la chute ohmique

2.2.4 6 - La concentration d’une solution contenant une espèce à 0,1 mol L −1 est aussi égale à 100 mol m− 3

10−4 mol m−3

100 mol cm−3

10− 4 mol cm− 3

2.2.4 7 - En admettant que la conductivité molaire des ions Cu2+ en solution aqueuse est une constante égale à 10 mS m2 mol −1, la valeur de leur conductivité dans une solution où ils se trouvent à une concentration de 0,1 mol L−1 est 1 S cm−1

10− 2 S cm− 1

1 S m− 1

10 S m−1

2.2.4 8 - Dans un système électrochimique, l’ajout d’un électrolyte support diminue pour des ions électroactifs :  leur nombre de transport ü vrai faux  leur conductivité ionique vrai ü faux

RÉPONSES

361

2.3.1 9 - Sur le schéma suivant :  hachurer le demi-plan correspondant à un fonctionnement anodique  indiquer les demi-réactions dans chaque demi-plan, avec les conventions usuelles d’écriture, en prenant pour exemple le couple Fe3+/Fe2+ I

Fe

2+

Fe

3+

E [V/Réf]

p E (I = 0) Fe2+

Fe3+

 que représente la flèche noire pour le point de fonctionnement représenté par un point noir ? la polarisation (ou, ici, la surtension) anodique de l’électrode considérée 2.3.1 10 - Sauf dans des cas très particuliers, on peut prévoir le signe de chacune des deux polarisations interfaciales en fonction du système étudié. Ainsi, dans la plupart des cas, on peut dire que :  la polarisation de l’électrode positive est positive vrai ü faux  la polarisation de l’anode est positive ü vrai faux 2.3.3 11 - Représenter sur le même schéma l’allure des courbes intensité-potentiel stationnaires de trois systèmes qui auraient le même potentiel à l’abandon et les mêmes courants limites de diffusion : un rapide (a), un lent (b) et un très lent (c). I

a Red

b

c

Ox

E(I = 0) E [V/Réf] Red

Ox

362

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

2.3 12 - Représenter sur le schéma suivant la courbe intensité-potentiel stationnaire d’un système comprenant une électrode de travail inattaquable plongée dans une solution aqueuse désaérée contenant des ions Fe2+ (et sans Fe3+) en quantité justifiant l’existence d’un courant limite. L’électrode de référence est une électrode au calomel saturée. On admettra que les « murs du solvant » sont déterminés par les demi-réactions rapides de l’eau (en supposant pH = 0). On indiquera sur le schéma les valeurs numériques pertinentes de potentiel, ainsi que les réactions mises en jeu. E (ECS) = + 0,24 V/ESH E °H+/H2 = 0 V/ESH (à pH = 0)

E °Fe3+/Fe2+ = + 0,77 V/ESH E °O2/H2O = + 1,23 V/ESH (à pH = 0)

I

− H2O, OH

Fe2+ − 0,24

H2

H+, H2O

O2

Fe3+ + 0,53

+ 0,99

E [V/ECS]

RÉPONSES

363

2.4.2 13 - Complétez le schéma suivant (qui représente sur le même diagramme les courbes intensité-potentiel stationnaires des deux électrodes d’une même cellule électrochimique) en y indiquant par des flèches :  la tension à l’abandon du système, U (I = 0)  la polarisation π− de l’électrode négative pour le point de fonctionnement représenté par un point noir  la polarisation π+ de l’électrode positive pour le point de fonctionnement correspondant pour cette électrode (que l’on repérera sur le schéma)  la tension de fonctionnement correspondante, U (I ≠ 0) I

//

U (I ≠ 0)

−(< 0)

E +(I = 0)

E −(I = 0) //

+(> 0)

E [V/Réf]

U (I = 0)

 le fonctionnement représenté sur le schéma correspond à une électrolyse

ü vrai

faux

364

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

3 - DESCRIPTION THERMODYNAMIQUE 3.1 1 - Dans un système électrochimique :  à l’équilibre thermodynamique, le courant est toujours nul ü vrai  si le courant est nul, on est toujours à l’équilibre thermodynamique vrai 3.1.2 2 - Pour les espèces suivantes dans leur état standard, on a :  µ °Cu = 0 J mol−1  µ °H+ = 0 J mol−1  µ °Cu2+ = 0 J mol−1  µ °H2 = 0 J mol−1

ü vrai ü vrai vrai ü vrai

faux ü faux faux faux ü faux faux

3.2.1 3 - En toute rigueur, dans une solution aqueuse contenant des ions, il est possible de mesurer individuellement pour chaque ion : faux  sa concentration ü vrai  son activité vrai ü faux 3.2.1 4 - Quelle est la force ionique (avec son unité) des solutions aqueuses suivantes :  contenant NaCl en concentration 0,1 mol L−1 0,1 mol L− 1 −1  contenant Cu(NO3)2 en concentration 0,1 mol L 0,3 mol L− 1 3.2.1 5 - Selon le modèle simplifié de DEBYE-HÜCKEL, le coefficient d’activité moyen du soluté dans une solution contenant uniquement NaCl, comparé à celui d’une solution contenant uniquement Cu(NO3)2 avec la même force ionique, est plus grand égal plus petit 3.2.2 6 - Pour un métal, on peut mesurer expérimentalement :  le potentiel électrochimique des électrons mobiles  le potentiel chimique des électrons mobiles  le potentiel GALVANI  le potentiel VOLTA

ü vrai vrai vrai ü vrai

faux ü faux ü faux faux

3.3.3 7 - De part et d’autre d’une jonction simple (c’est-à-dire avec réaction interfaciale ne 3.3.4 mettant en jeu qu’une seule espèce) entre deux milieux dans lesquels l’espèce considérée a le même potentiel chimique standard, on observe toujours, à l’équilibre thermodynamique, des concentrations identiques en espèce échangeable, lorsque cette dernière est :  un ion vrai ü faux  une espèce neutre ü vrai faux 3.3.4 8 - On peut traduire l’équilibre thermodynamique d’une interface faisant intervenir RT aCu2+ 3.4.1 le couple Cu2+/Cu par la relation suivante : !métal " ! électrolyte = Cte + ln 2 � aCu dans laquelle la constante est le potentiel standard relatif à l’ESH du couple considéré

vrai

ü faux

RÉPONSES

365

3.4.1 9 - Ecrire les nombres manquants (et leur signe) dans les relations suivantes, qui caractérisent l’équilibre thermodynamique de la chaîne électrochimique suivante : Cu’ | Pt, H2 | solution aqueuse de H2SO4 et CuSO4 | Cu On choisit Cu comme électrode de travail et Cu’ comme contre-électrode (U = ϕCu − ϕCu’) ainsi que le signe de l’enthalpie libre de réaction correspondant à Cu + 2 H+ l’équation-bilan écrite ainsi : Cu2+ + H2 ΔrG = − 2 ^U = + 1 µ Cu + 2 µ H+ − 1 µ Cu2+ − 1 µ H2 3.4.1 10 - Compléter le diagramme simplifié de POURBAIX du fer, tracé ci-dessous pour une concentration globale en élément fer dissous en solution aqueuse égale à C0, ([Fe3+] + [Fe2+] = C0) en indiquant :  les zones d’existence ou de prédominance thermodynamique des espèces suivantes : Fe, Fe(OH)3, Fe2+, Fe3+  le point représentant le potentiel (relatif à l'ESH) d’une lame de fer plongeant dans une solution de pH = pH1 contenant des ions Fe2+ à la concentration C0 E [V/ESH] Fe3+ Fe(OH)3 Prédominance Existence 0

Fe2+

Fe pH1

pH

D’autre part :  le point représentant le potentiel (relatif à l'ESH) d’une lame de fer plongeant dans une solution de pH = pH1 contenant des ions Fe2+ à la concentration C0/100 serait, par rapport au point précédent, situé à droite au même endroit au dessus au dessous  quelle réaction observe-t-on, pour le système précédent, si l’on impose à ce métal un potentiel de 0 V/ESH ? Fe2++ + 2 e− Fe  une lame de fer est stable dans une solution contenant des ions Fe3+ à la concentration C0 vrai ü faux 3.4.2 11 - Si une électrode de référence Ag, AgCl | KCl 1 mol L−1 a été stockée avec son embout immergé dans de l’eau distillée, un étalonnage montre que sa tension après stockage a augmenté est resté stable a diminué

366

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

4 - PASSAGE D’UN COURANT : PROCESSUS HORS ÉQUILIBRE 4.1.1 1 - Complétez le schéma suivant pour la réaction interfaciale CoCl42− + 2 e− Co + 4 Cl− en y indiquant qualitativement dans les deux phases!!: "  les différents vecteurs densité de flux de matière ( Ni ) !!"  les différents vecteurs densité de courant ! ( ji )  le vecteur densité globale de courant ( j) !  le vecteur normal à la surface ( n ) en accord avec la convention usuelle sur le signe du courant MÉTAL (cobalt, Co)

ö Ne

ö je ö j

ÉLECTROLYTE

-ö NCl− ----ö NCoCl42− ö j Cl− ---ö j CoCl42− ö n

4.1.3 2 - Pour une espèce adsorbée à l’interface, le flux interfacial et la vitesse de production en régime stationnaire sont nuls

ü vrai

faux

4.2.2 3 - Dans une même expérience d’électrochimie, où seuls peuvent changer le courant et le potentiel, un couple ou une réaction rédox peuvent être :  rapide ou lent, suivant le point de fonctionnement vrai ü faux  réversible ou irréversible, suivant le point de fonctionnement ü vrai faux 4.2.2 4 - Quel est l’ordre de grandeur (et l’unité) de la conductivité électrique d’une solution aqueuse à température ordinaire contenant des anions et des cations en concentration 0,1 mol L−1 ? 1 S m− 1 = 10− 2 S cm− 1 4.2.2 5 - Quel est l’ordre de grandeur (et l’unité) du coefficient de diffusion d’un ion en solution aqueuse à température ordinaire ?

10− 9 m2 s− 1 = 10− 5 cm2 s− 1

4.3.1 6 - L’évolution du profil de concentration d’une espèce électroactive d’un couple rédox rapide, illustrée sur la figure ci-dessous, est celle que l’on peut observer lors d’une expérience :  en régime stationnaire vrai ü faux  de voltampérométrie vrai ü faux  de chronoampérométrie ü vrai faux

RÉPONSES

367

 de chronopotentiométrie

vrai

ü faux

C t=0

t↑

x

0

4.3.1 7 - Le schéma suivant représente des profils de concentration pour une solution contenant les espèces Fe3+ (trait gris) et Fe2+ (trait noir), trait pointillé : instant initial, trait plein : instant t. Ce sont des profils résultant du passage du courant à une interface avec une électrode de platine et dans une solution où on peut négliger la convection et la migration des espèces électroactives, Fe3+ et Fe2+. Dans ce cas :  la situation représentée correspond à une oxydation ü vrai faux  comment appelle-t-on la grandeur δ ? épaisseur de la couche de diffusion  le coefficient de diffusion de Fe2+ est supérieur à celui de Fe3+ ü vrai faux  les deux surfaces grisées sont égales ü vrai faux  compléter le schéma en traçant qualitativement les profils de concentration que l’on observerait si le courant était supérieur tout en gardant un δ du même ordre de grandeur. C

[Fe3+]* 2+ [Fe ]*

0

d

x

368

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

4.3.1 8 - A l’approche d’une interface électrochimique du type métal | électrolyte, on définit la double couche et la couche de diffusion. En général, la couche de diffusion est beaucoup plus mince que la double couche

ü faux

vrai

4.3.3 9 - Parmi les points de fonctionnement indiqués sur la courbe intensité-potentiel stationnaire suivante : I

I H

G F

E [V/Réf]

0

D

C

B A

lesquels correspondent au profil de concentration schématisé ci-dessous ? A

B

C

D

E

F

G

H

I

C

[Fe2+]* [Fe3+]*

0

d

4.3.3 10 - Dans les cas usuels, en régime stationnaire, le courant limite anodique est proportionnel à la concentration :  en oxydant à l'interface avec l’électrode  en oxydant au sein de la solution  en réducteur à l'interface avec l’électrode  en réducteur au sein de la solution

x

vrai vrai vrai ü vrai

ü faux ü faux ü faux faux

BIBLIOGRAPHIE EN FRANÇAIS  Atlas d’équilibres électrochimiques. M. POURBAIX. Gauthier-Villars (Paris) 1963 Un des ouvrages de référence pour les données thermodynamiques électrochimiques de nombreux systèmes inorganiques en solution aqueuse : potentiels chimiques standard, potentiels d'oxydoréduction, diagrammes E/pH. Il comporte également des données de paramètres cinétiques pour la réduction du proton en milieu aqueux. Il est très utile pour la compréhension de la corrosion en milieu aqueux.  Electrochimie. Principes, méthodes et applications. A.J. BARD, L.R. FAULKNER. Traduction : Masson (Paris) 1983 Voir commentaires sur l’édition anglaise.  Usuel de chimie générale et minérale. M. BERNARD, F. BUSNOT. Dunod, Bordas (Paris) 1984 Compilation de données numériques sur un assez grand nombre de grandeurs physicochimiques et thermodynamiques, essentiellement d'espèces inorganiques : par exemple des constantes d'acidité (pKa), y compris en solvants non aqueux, des constantes de solubilité et de complexation. Concernant l'électrochimie, on y trouve les potentiels d'oxydoréduction de nombreux couples, les conductivités molaires des principaux ions en solution aqueuse, des coefficients d'activité d'électrolytes, quelques caractéristiques de cinétique (densité de courant d'échange et coefficient de transfert…).  L’oxydoréduction. J. SARRAZIN, M. VERDAGUER. Ellipses (Paris) 1991 A partir de descriptions d’expériences simples, il rassemble les concepts fondamentaux sur l'oxydoréduction, essentiellement en phase aqueuse, avec étude des différents paramètres (pH, complexation, précipitation…). S'appuyant sur la thermodynamique et la cinétique, et s'étend à l'électrochimie pour y poser les concepts de base, il s'adresse aux étudiants débutants, mais aussi aux scientifiques plus chevronnés, par exemple des enseignants.  Electrochimie analytique et réactions en solution (tomes 1 et 2). B. TREMILLON. Masson (Paris) 1993 Ouvrage didactique pour chercheurs et ingénieurs chimistes et physico-chimistes, concernant un large spectre de milieux d’études. Nombreux exercices et problèmes théoriques non résolus. Tome 1 : Traitements analytiques en solutions aqueuse, organique, sels fondus. Tome 2 : Aspects théoriques de l’électrochimie, applications, méthodes électrochimiques d’analyse. Excursions vers matériaux d’intercalation, électrolytes solides, électrodes semi-conductrices, photoélectrochimie, effet thermoélectrique.  Electrochimie des solides. C. DÉPORTES, M. DUCLOT, P. FABRY, J. FOULETIER, A. HAMMOU, M. KLEITZ, E. SIEBERT, J.L. SOUQUET. Presses Universitaires de Grenoble (Grenoble) 1994 S'adresse aux étudiants en master ou en thèse ainsi qu'à la formation permanente de chercheurs ou ingénieurs spécialisés. L'ouvrage est consacré aux systèmes électrochimiques utilisant des électrolytes en phases solides (cristaux ioniques, céramiques, verres et polymères). Les concepts propres à cette discipline sont posés (thermodynamique des défauts ponctuels et des phases amorphes, mécanismes de transport, conduction

370

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

mixte, réactions d'électrodes à gaz) ainsi que les méthodes d'études qui sont spécifiques. Quelques applications y sont également décrites.  Cinétique électrochimique. C. MONTELLA, J.P. DIARD, B. LE GORREC. Hermann (Paris) 1996 Pose les concepts de base de l'électrochimie, mais développe surtout les aspects théoriques de la cinétique des réactions aux électrodes. Parmi les méthodes utilisées, la spectroscopie d'impédance occupe une place assez importante, ainsi que la voltampérométrie. Les systèmes principalement étudiés sont la réaction redox, l'électrosorption, l'insertion ainsi que le mécanisme de VOLMER-HEYROVSKY. Niveaux master, formation ingénieurs et chercheurs. Ces mêmes auteurs ont également publié chez le même éditeur en 2000 et 2005 deux livres d’exercices de cinétique électrochimique (régime stationnaire et méthode d’impédance).  Chimie physique expérimentale. B. FOSSET, C. LEFROU, A. MASSON, C. MINGOTAUD. Hermann (Paris) 2000 (2e édition en 2006) Destiné principalement aux étudiants se préparant aux concours d'enseignants (CAPES, agrégation), il rassemble la description et le commentaire de 110 expériences en chimie physique, dont environ 40 liées à l’électrochimie. Il comporte de plus en première partie des descriptions de différentes techniques, en particulier électrochimiques.  Electrochimie physique et analytique. H.H. GIRAULT. Presses polytechniques et universitaires romandes (Lausanne) 2001 (2e édition en 2008) L'électrochimie est abordée par des concepts fondamentaux de la physicochimie et de la physique, et les aspects théoriques sont traités d'un point de vue mathématique rigoureux. Consacré aux milieux aqueux, l’ouvrage décrit les phénomènes propres à l'électrolyte et aux interfaces. Diverses méthodes d'étude sont détaillées (ampérométrie, impédance, voltampérométrie). Surtout destiné aux étudiants en fin de formation, voire aux chercheurs.  L’indispensable en électrochimie. V. BERTAGNA, M. CHEMLA. Bréal (Rosny-sous-Bois) 2001 Rassemble les concepts de base sous forme de 24 fiches thématiques où figurent la plupart des formules essentielles (100 pages). Surtout destiné aux classes préparatoires et aux étudiants des premières années universitaires (dont les IUT) avec des exemples en solutions aqueuses. Sa présentation est également bien adaptée à une utilisation comme formulaire ou comme glossaire.  Electrochimie. Des concepts aux applications. F. MIOMANDRE, S. SADKI, P. AUDEBERT, R. MEALLET-RENAULT. Dunod (Paris) 2e éd. 2011 Vision globale des concepts d'électrochimie, allant de la théorie élémentaire (thermodynamique, transport, cinétique aux électrodes…) aux principales applications (générateurs, corrosion, électrosynthèses, capteurs). Les méthodes d'études électrochimiques y sont également décrites et l’ouvrage donne un aperçu sur l'électrochimie organique. Niveaux master, écoles d'ingénieurs. Une douzaine de travaux pratiques sont sommairement décrits et quelques problèmes non résolus sont proposés (corrigés sur site web).  De l’oxydoréduction à l’électrochimie. Y. VERCHIER, F. LEMAÎTRE. Ellipses (Paris) 2006 Pour étudiants en premières années d'université. S'appuie sur les concepts d'oxydoréduction, y compris les dosages et les diagrammes E/pH, pour introduire ensuite les bases élémentaires d'électrochimie (thermodynamique et cinétique des réactions aux électrodes) avec une démarche adaptée au public visé. Il comporte de nombreux exercices élémentaires.  Capteurs électrochimiques. Fonctionnement, utilisation, conception. Cours et exercices corrigés. P. FABRY, C. GONDRAN. Ellipses (Paris) 2008 Consacré aux applications de l'électrochimie pour la conception de capteurs d'espèces ioniques, moléculaires ou gazeuses. S'adresse aux étudiants de licence, master, ou élèves ingénieurs, mais il est aussi destiné à l'autoformation. Les concepts élémentaires sont rappelés et exploités pour différents types de transduction (capteurs ampérométriques, conductimétriques et potentiométriques). Il comporte également des problèmes corrigés.

BIBLIOGRAPHIE

371

 Articles de l’Actualité chimique nov-déc 1989 : 143-147, J.F. FAUVARQUE. janv-fév 1992 : 1-148, numéro spécial L’électrochimie janvier 2003 : 31-41, D. DEVILLIERS, E. MAHÉ. février-mars 2009 : 9-119, numéro coordonné par F. BEDIOUI.  Articles des Techniques de l’ingénieur

EN ANGLAIS  Instrumental methods in electrochemistry. Southampton Electrochemistry Group. Ellis Horwood Limited (Chichester) 1985 Niveaux master et doctoral. Descrition des principales méthodes électrochimiques (stationnaires, non stationnaires) appliquées à divers concepts, tels modèle cinétique de transfert électronique, double couche, électrocatalyse. Chapitres particuliers sur l’électrocristallisation, les méthodes spectroscopiques et optiques, la conception d’une expérience d’électrochimie, avec l’instrumentation correspondante.  Industrial electrochemistry. D. PLETCHER, F.C. WALSH. Chapman and Hall (London) 2nd edition 1990 Niveaux master et ingénieurs. Concepts fondamentaux, génie électrochimique, description exhaustive des applications industrielles, y compris traitements de surface, corrosion, capteurs.  Electrochemical systems. J.S. NEWMAN. Prentice Hall Inc. (Englewood Cliffs, New Jersey) 2nd edition 1991 Présentation de l’électrochimie par une approche macroscopique en 4 parties : thermodynamique des cellules électrochimiques, cinétique électrochimique, processus de transport, puis distribution du courant et transfert de masse dans les systèmes électrochimiques (y compris électrodes poreuses et électrodes semi-conductrices). Problèmes non résolus en fin de chapitres.  Principles of electrochemistry. J. KORYTA, J. DVORAK & L. KAVAN. John Wiley & Sons (Chichester) 2nd edition 1993 Niveaux master en chimie physique, biologie, matériaux. 6 chapitres : équilibres des solutions électrolytes, transport, transfert de charge, double couche, cinétique (avec présentation condensée des méthodes électrochimiques d’analyse), électrochimie des membranes et bioélectrochimie.  Fundamentals of electrochemical science. K.B. OLDHAM & J.C. MYLAND. Academic Press Inc. (San Diego) 1994 Niveaux master et doctoral. Présentation très mathématisée en 11 chapitres, incluant des rappels essentiels de physique et de chimie, et de thermodynamique des solutions ioniques. L’ensemble des notions et des méthodes électrochimiques modernes est traité. Problèmes non résolus en fin de chapitres.  Electrochemistry, principles, methods and applications. C.M.A. BRETT, A.M. OLIVEIRA BRETT. Oxford University Press (Oxford) 1994 Présentation en trois parties, avec une évolution du niveau licence vers le niveau master. Chapitres 2 à 6 : thermodynamique et cinétique électrochimiques. Chapitres 7 à 12 : stratégie expérimentale et méthodes électrochimiques d’analyse. Chapitres 13 à 17 : applications (capteurs, électrochimie industrielle).

372

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

 Principles and applications of electrochemistry. D.R. CROW. Blakie Academic & Professionnal, Chapman & Hall (London) 1994 Niveau master. Physico-chimie des solutions, équilibres, transports ioniques, double couche, NERNST, cinétique, applications, applications industrielles et capteurs. Problèmes résolus en fin de chapitres.  Electrochemical process engineering. A guide to the design of electrolytic plant. F. GOODRIDGE, K. SCOTT. Plenum Press (New York) 1995 Ouvrage à l’intention des étudiants chimistes et ingénieurs aux niveaux master et doctoral. Concepts de génie électrochimique, cinétique, écoulements diphasiques, électrocatalyse, modélisation de réacteurs.  Electrochemical methods. Fundamentals and applications. A.J. BARD, L.R. FAULKNER. John Wiley & Sons (New York) 2nd edition 2001 Niveaux master et doctoral. Présente les concepts scientifiques, les méthodes électrochimiques d’analyse, l’instrumentation, les techniques physiques d’analyse des interfaces, la photoélectrochimie. Problèmes non résolus en fin de chapitre.  Modern electrochemistry. J.O’M. BOCKRIS et al. Plenum Press (New York) 2nd edition Introduction à l’électrochimie moderne : chaque notion est assise sur une théorie unique destinée à ouvrir sur des approfondissements. Développements mathématiques en annexe. Niveaux master et doctoral. Vol. 1 : Ionics. J.O’M. BOCKRIS, A.K.N. REDDY, 1998. Présentation historique puis description des notions de chimie physique indispensables à la compréhension des propriétés des électrolytes (interactions ion-solvant et ionion, transport des ions, liquides ioniques). Vol. 2A : Fundamentals of electrodics. J.O’M. BOCKRIS, A.K.N. REDDY, M. CAMBOA-ALDECO, 2000. Description des interfaces électrifiées, de la cinétique électrochimique, des méthodes transitoires d’analyse, de la mécanique quantique appliquée à la cinétique électrochimique. Vol. 2B : Electrodics in chemistry, engineering, biology and environmental science. J.O’M. BOCKRIS, A.K.N. REDDY, 2000. Aspects fondamentaux de la photoélectrochimie, de la conversion et du stockage électrochimique de l’énergie, de la bioélectrochimie, et de l’électrochimie pour l’environnement.  Fundamentals of electrochemistry. V.S. BAGOTSKY. John Wiley & Sons, Wiley-Interscience (Hoboken, New Jersey) 2nd edition 2006 Les trois premières parties traitent les aspects classiques de l’électrochimie à un niveau licence/master. La quatrième partie aborde des sujets modernes pointus au niveau recherche (électrochimie des solides, polymères conducteurs, méthodes physiques d’analyse, électrocatalyse, photoélectrochimie, bioélectrochimie, électrocinétique, interfaces entre liquides immiscibles, simulations numériques, nanoélecrochimie…).  Electrochemistry. C.H. HAMANN, A. HAMNETT, W. VIELSTICH. John Wiley & Sons, Wiley Vch Verlag GmbH (Weinheim) 2nd edition 2007 Traitement assez exhaustif de la physicochimie des électrolytes et de l’électrochimie (cinétique, méthodes d’analyse) et ses applications, avec une attention particulière portée sur les méthodes physiques (spectroscopiques, optiques) d’examen des interfaces électrochimiques.

PRINCIPAUX SYMBOLES Symboles Signification

Unité usuelle

Remarque

ai

activité de l’ion i

sans unité

voir section 3.1.2



activité moyenne d’un soluté

sans unité

voir section 3.2.1

A

paramètre de la loi de DEBYE-HÜCKEL

½

L mol

−½

≈ 0,5 L½ mol−½ à 25 °C voir section 3.2.1

Ci (ou C ) concentration de l’espèce i ou [i ]

mol L−1

[1]



concentration de référence (état standard)

mol L−1

= 1 mol L−1 voir section 3.1.2

C*

concentration au sein du volume loin de l’interface

mol L−1

Cx = 0

concentration à l’interface (x = 0)

mol L−1

C °P

capacité thermique molaire standard

J K−1 mol−1

voir section 4.1.3

D (ou Di ) coefficient de diffusion (de l’espèce i)

cm2 s−1

voir section 2.2.1 [2]

D i0

coefficient de diffusion à dilution infinie de l’espèce i

cm2 s−1

voir section 4.2.1

e

charge d’un électron

C

= − 1,6 .10−19 C

E

potentiel d'une électrode (demi-cellule)

V/Réf

relatif à la référence choisie voir section 1.5.1

E° !" ! E (E )

potentiel standard d'un couple rédox

V/Réf V m−1 (module)

f

champ électrique (module) � f = RT

V−1

= 38,9 V−1 à 25 °C

^

constante de FARADAY

C mol−1

≈ 96 500 C mol−1

Fionique

force ionique d’un milieu

mol L−1

voir section 3.1.2

[1] Conversion d’unité pour une concentration : C = y mol L−1 = y ×103 mol m−3 = y ×10−3 mol cm−3. [2] Conversion d’unité pour un coefficient de diffusion : D = y cm2 s−1 = y ×10−4 m2 s−1.

374

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

G ! G

enthalpie libre (fonction de GIBBS)

J

enthalpie libre dans un système électrochimique

J

H

enthalpie

J

I

courant (intensité)

A

Ilim !" j (j)

courant limite (diffusion)

A

densité de courant (module)

A m (module)

voir section 1.3.1 [3]

k

constante de BOLTZMANN

J K−1

= 1,38 .10−23 J K−1



constante standard de vitesse de réaction rédox (mécanisme E)

cm s−1

voir section 4.3.2 [4]

Kéq

constante d’équilibre

sans unité

, L

distance entre deux points, largeur

cm

LD

longueur de DEBYE

Å

voir section 3.3.1 [5]

LH

épaisseur de la couche de HELMOLTZ

Å

voir section 3.3.1

mi

constante de vitesse de transport de matière de l’espèce i

cm s−1

voir section 4.3.2

mi (m°)

molalité de l’espèce i (état standard)

mol kg−1

voir section 3.1.2

convention de signe : voir section 1.4.1 voir section 2.3.2 −2

Mi (ou M ) masse molaire de l’espèce i

g mol−1

n

nombre d'électrons échangés dans une demi-réaction rédox

sans unité

ni !" n

quantité de matière de l'espèce i

mol

n.o.

nombre (ou degré) d’oxydation

sans unité

1 !!" N i (N i )

constante d’AVOGADRO

mol−1

= 6,02 .1023 mol−1

densité de flux molaire de matière de l’espèce i (module)

mol m−2 s−1 (module)

voir section 4.1.1 [6]

P (P °)

pression (état standard)

bar

P ° = 1 bar [7]

[3] [4] [5] [6] [7]

nombre positif voir section 1.2.1

vecteur normal à une surface

Conversion d’unité pour une densité courant : j = y A m−2 = y ×10−4 A cm−2. Conversion d’unité pour une constante de vitesse rédox : k = y cm s−1 = y ×10−2 m s−1. Conversion d’unité pour une distance :  = y Å = y ×10−10 m = y ×10−1 nm = y ×10−4 µm = y ×10−8 cm. Conversion d’unité pour une densité de flux molaire : N = y mol m−2 s−1 = y ×10−4 mol cm−2 s−1. Conversion d’unité pour une pression : P = y bar = y ×105 Pa = (y / 1,013) atm.

PRINCIPAUX SYMBOLES

375

Pi

pression partielle de l’espèce i

bar

pH

potentiel Hydrogène

sans unité

pH = − log a H+

pKi

relatif à la constante d’équilibre Ki

sans unité

pKi = − log Ki

q,Q

charge électrique

C

r farad

rendement faradique

sans unité −1

−1

voir section 2.2.2 = 8,314 J K−1 mol−1

R

constante du gaz parfait

J K mol

R

résistance

Ω

S (S °)

entropie molaire (état standard)

J K−1 mol−1

S

aire (ou section) d'une surface S

cm2

t

temps

s

T

température

°C

[9]

ti

nombre de transport de l’espèce i

sans unité

voir section 2.2.4

t!i

nombre de transport électrochimique sans unité de l’espèce i

voir section 4.1.1

ui

mobilité électrique de l’espèce i

m2 s−1 V−1

voir section 4.2.1

u!i

mobilité électrochimique de l’espèce i

mol m2 J−1 s−1

ou mol s kg−1 ou mol m s−1 N−1 voir section 4.2.1

U

différence de potentiel

V

V

potentiel électrique (sens général)

V

vr

vitesse volumique d'une réaction

mol m−3 s−1

voir section 4.1.2

v Sr

vitesse surfacique d'une réaction

mol m−2 s−1

voir section 4.1.3

wi

vitesse locale de production volumique d'une espèce i

mol m−3 s−1

voir section 4.1.2

w Si

vitesse locale de production surfacique d'une espèce i

mol m−2 s−1

voir section 4.1.3

x

variable de position

m

xi

fraction molaire de l'espèce i

sans unité

y

taux d'insertion

sans unité

voir section 2.1.2

zi

nombre de charge d'une espèce i

sans unité

nombre algébrique voir section 1.2.1

[8] Conversion d’unité pour une aire de surface : S = y cm2 = y ×10−4 m2. [9] Conversion d’unité pour une température : T = y °C = (y + 273) K.

[8]

376

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

SYMBOLES GRECS Symboles Signification

Unité usuelle Remarque

α

facteur de symétrie

sans unité

δ

épaisseur (par exemple couche de diffusion)

µm

ΔrH (ΔrH °) enthalpie de réaction (enthalpie standard de réaction)

J mol−1

ΔrG (ΔrG °) enthalpie libre de réaction (enthalpie libre standard de réaction)

J mol−1

γi

coefficient d’activité de l’espèce i

sans unité −2

voir section 4.3.2

voir section 3.1.2

Γi

concentration surfacique de l’espèce i

mol m

ε

permittivité diélectrique d'un milieu

J−1 C2 m−1

ε0

permittivité diélectrique du vide

J−1 C2 m−1

= 8,855 .10−12 J−1 C2 m−1

η

surtension d'une cellule ou d'une électrode

V

voir section 1.5.2

λi

conductivité électrique molaire de l'espèce i

S cm2 mol−1

voir section 2.2.4 [10]

λ i0

conductivité électrique molaire de l’espèce i à dilution infinie

S cm2 mol−1

voir tableau 4.2, section 4.2.2

Λ

conductivité molaire d'un soluté

S cm2 mol−1

voir section 2.2.4

µi (µi°)

potentiel chimique de l’espèce i (état standard)

J mol−1

voir section 3.1.2

! µ i

potentiel électrochimique de l’espèce i

J mol−1

voir section 3.1.2

νi

nombre stœchiométrique d’une espèce i dans une réaction

sans unité

valeur algébrique voir section 1.2.1

ξ

potentiel adimensionnel � ! = (E " E °) = f (E " E °) RT

sans unité

voir section 4.3.2

π

polarisation d’une cellule ou d’une électrode

V

voir section 1.5.2

ρ

résistivité électrique d'un milieu

Ω cm

voir section 2.2.4

ρch

densité volumique de charge

C m−3

voir section 4.1.3

[10] Conversion d’unité pour une conductivité électrique molaire : λ = y S cm2 mol−1 = y ×10−4 S m2 mol−1.

PRINCIPAUX SYMBOLES

377

σ

conductivité électrique d'un milieu

S cm−1

voir section 2.2.4 [11]

σi

conductivité électrique de l'espèce i

S cm−1

voir section 2.2.4 [11]

σch

densité surfacique de charge

C m−2

τ

constante de temps

s

ϕ

potentiel GALVANI ou potentiel interne

V

voir section 3.1.1

χ

tension électrique de surface

V

voir section 3.1.1

ψ !!" ! i (! i )

potentiel VOLTA ou potentiel externe

V

vitesse de déplacement de l’espèce i (module)

voir section 3.1.1 −1

m s (module) voir section 4.1.1

[11] Conversion d’unité pour une conductivité électrique : σ = y S cm−1 = y ×102 S m−1.

7KLVSDJHLQWHQWLRQDOO\OHIWEODQN

INDEX

INDEX A

abandon .......................................................... 1,24,123 potentiel à l'— ............................... voir potentiel tension à l'— ................................... voir potentiel accumulateur ......................................... voir batterie accumulation............................................ 68,142,183 activation ............................................ voir surtension activité ................................................................. 56,127 — moyenne .............................................. 132,287 coefficient d'— ...................... 127,137,165,196 adsorption .......................................................... 69,182 alimentation électrique ......................................... 42 aluminium (production d') .............. .3,79,124,168 amalgame ................................................................. 255 AMPÈRE .......................................................................... 17 ampérométrie ..................................................... 43,49 analyse ........................................................... 6,153,154 anion ............................................................... 12,79,214 anode ................................................... 24,28,31,35,86 — soluble ........................................................... 135 anolyte ...................................................... 214,258,264 applications de l’électrochimie . 4,265, planches ARRHENIUS ........................................................................ 3 autodécharge ......................................... voir batterie

B

batterie .............................................................. 6,32,35 autodécharge d'une — ................................. 118 — lithium ...................................................... 72,256 — plomb ...................................3,73,117,255,288 charge d'une — .......................... voir électrolyse décharge d'une — ...................................voir pile BECQUEREL .................................................................. 3,41 bilan — HITTORF ................................................... 262,263 — interfacial de matière................................ 180 — volumique de matière ..................... 176,197 bioélectrochimie ................................................ 8,154 BODE (diagramme de) .............................................. 46 BUTLER-VOLMER ............................................................... 4 équation de — .................................................. 246

C

calomel ............................................................. voir ECS capacitif (courant ou flux) .................. voir courant capteur ................................................. 6,8,60,153,154 CARLISLE ............................................................................ 3 cathode................................................ 24,28,31,35,86 catholyte .................................................. 214,258,264 cation.............................................................. 12,79,214 CE (contre-électrode)........................................ 27,43 cellule électrochimique .................. 26,74,153,258 chaîne électrochimique ............ 23,26,74,153,288 chaîne galvanique ................................................... 23 charge — d'une batterie ........................ voir électrolyse flux de —.................................................... voir flux nombre de — ................................... voir nombre porteur de — ....................................................... 19 quantité de — ............................................... 18,70 transfert de — ................................. voir transfert chimique analyse — ...........................................voir analyse potentiel — ..................................... voir potentiel chronoampérométrie .............. 45,49,225,238,322 chronopotentiométrie .................. 45,226,238,318 chute ohmique ............................ 41,74,77,216,306 cinétique ............................................ 85,189,323,336 — du transport de matière .................... 91,237 — rédox................................................ 94,232,237 contrôle — .......................... voir étape limitante paramètre — ............. voir constante de vitesse circuit ouvert ........................................ voir abandon coefficient — d’activité ........................................ voir activité — de diffusion ................................voir diffusion — de partage ................................... voir partage — stœchiométrique ...................... voir nombre compacte ...................................................voir couche concentration — interfaciale ................................... 225,243,322 — surfacique ..................................................... 180 profil de — ............................................. voir profil

380

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

conducteur (milieu, matériau) ............................ 19 — électronique................................................... 20 — ionique ............................................................. 20 — mixte ................................................................. 23 conductimétrie ....................................................... 208 conduction .......................................... 19,63,190,201 conductivité — électrique ....................................... 77,208,210 — électronique........................................... 79,204 — ionique ..................................................... 79,204 — molaire ..................................................... 82,194 — molaire (table de) .............................. 210,212 mesure de — ..................................................... 206 constante de vitesse ............................................. 232 — du transport de matière ................. 237,243 — standard de réaction rédox ........... 233,237 — standard de réaction rédox (table de) 247 contre-électrode ..............................................voir CE contrôle — cinétique .............................. voir étape limitante — mixte ......................................................... voir mixte convection ................................................. 63,190,253 — forcée ...................................... 63,190,227,257 — naturelle ......................................... 63,190,257 corrosion ...................................... 7,105,118,134,186 — galvanique ................................................ 25,30 courant de — ................................... voir courant potentiel de —............................... voir potentiel vitesse de — ........................................ voir vitesse COTTRELL........................................................................... 4 loi de — ............................................................... 225 couche — compacte ............................................. 142,231 — de diffusion ................................... 63,218,225 — de HELMHOLTZ ............................................... 142 — de NERNST ....................................................... 227 — diffuse ............................................................ 142 double — électrochimique ... 69,142,183,218 couple rédox ................................................................. 8 — lent ........................................... 95,237,246,336 — rapide ...................................... 94,237,244,336 couples rédox de l’eau .................... 59,98,106,277 courant (ou flux) ............................................... 17,173 — capacitif .................................................. 69, 183 — de corrosion ........................................... 30,106 — d'échange ..................................................... 246 — faradique ........................................... 69,96,183 — limite ........................................ 91,101,239,337

densité de — ........................ 17,29,108,174,194 signe du — ....................................... 28,31,86,183 courbe intensité-potentiel ........................... 85,238 CREMER.............................................................................. 4

D

DANIELL ............................................................................. 3 pile — ......................................................... 26,54,75 DAVY.................................................................................. 3 ddp (différence de potentiel) .............................. 35 débit................................................................... voir flux DEBYE (longueur de) ...................................... 142,291 DEBYE-HÜCKEL loi de — ............................................................... 137 modèle de — ............................................ 136,291 décharge (pile, batterie) ..............................voir pile demi-réaction — principale ....................................... 73,110,112 — rédox.............................................................. 8,14 densité de courant ............................... voir courant dépôt ................................................ voir électrodépôt déterminante (étape —) ...... voir étape limitante diagramme — de POURBAIX (E/pH) ................................ 61,161 — d'EVANS ............................................................. 85 — de zones ........................................................ 337 diffusion .............................................................. 63,190 coefficient de — ............................................... 194 coefficient de — (table de) ........................... 210 coefficient de — apparent ........................... 196 coefficient de — moyen ....................... 192,262 — linéaire .......................... voir géométrie plane — plane .............................. voir géométrie plane — semi-infinie ................................................... 224 domaine d’électroactivité ................................... 102 double couche électrochimique ........voir couche

E

échange (courant d') ........................... voir courant ECS (électrode au calomel saturée) ..... 22,38,167 EDISON .............................................................................. 4 EDT (électrode à disque tournant).... 47,227,237 EH (électrode à hydrogène) ......................... 36,164 EINSTEIN ......................................... voir NERNST-EINSTEIN électrique charge — ............................................. voir charge conductivité — ........................voir conductivité mobilité — ........................................voir mobilité

INDEX potentiel — ..................................... voir potentiel résistivité — ................................... voir résistivité véhicule — .......................................voir véhicule électroactive (espèce) .............................. 24,97,184 électroaffinage ............................................................. 6 électrochimie................................................................ 1 électrochimique capteur — ........................................... voir capteur cellule — ............................................... voir cellule chaîne — ...............................................voir chaine double couche — ............................ voir couche fenêtre — ............................. voir mur du solvant interface — ..................................... voir interface mobilité — ........................................voir mobilité navette — ........................................... voir navette potentiel — ..................................... voir potentiel électrode ............................................................... 22,23 — à disque tournant ............................. voir EDT — à hydrogène .......................................... voir EH — au calomel saturée ........................... voir ECS — auxiliaire ..................................................voir CE — bloquante ................................................ 69,142 — combinée .................................................. 22,24 — de pH ................................................. 3,6,22,287 — de référence ......................................... voir Réf — de travail................................................ voir WE — idéalement polarisable ........ voir bloquante — modifiée .......................................................... 23 — normale à hydrogène ..................... voir ENH — standard à hydrogène ..................... voir ESH — volumique ...................................................... 25 électrodépôt .................................................. 6,73,232 électrodialyse .............................................. 7,214,266 électrolyse ...............................3,5,32,35,80,110,114 électrolyseur ...................................... voir électrolyse électrolyte ................................................................... 20 — faible ................................................................. 20 — polymère ........................................ 20,152,206 — solide .................................................. 20,60,205 — support .....................65,83,136,184,222,299 électronégativité ...................................................... 13 électroneutralité............................... 18,65,124,179, .......................................................197,217,222,308 électroosmose......................................................... 143 électrophorèse ........................................................ 143 effet d’— .................................................... 205,216 électrosorption ................................................. 69,232 électrosynthèse ........................................................... 4

381 ENH (électrode normale à hydrogène) .... 37,164 environnement ............................................................ 7 équilibre thermodynamique ...................... 53,104, ...................................................... 123,130,141,294 ESH (électrode standard à hydrogène) .... 36,164 espèce électroactive ................... voir électroactive étape limitante...................... 231,234,251,326,338 état standard ........................................................... 127 EVANS (diagramme d') ................... voir diagramme

F

facteur de symétrie ............................................... 233 FARADAY ........................................................................... 3 constante de — .................................................. 56 loi de — ................................................ 70,184,220 faradique courant —.......................................... voir courant rendement — ............................. voir rendement fem (force électromotrice) ...................... 27,55,156 FERMI (énergie de, niveau de) ............................. 140 FICK (lois de) ..................................................... 198,224 flux (ou débit) — de charge ........................................................ 18 — molaire de matière .................................... 173 densité de — ............................................ 173,194 force ionique................................................... 133,292 fugacité ...................................................................... 127

G

GALVANI ...................................................................... 2,10 potentiel — ..................................... voir potentiel galvanique ...................... voir chaîne ou corrosion galvanoplastie .......................................................... 3,6 galvanostat....................................... voir intensiostat gamma (règle du) .................................................. 159 générateur ........................................................voir pile géométrie plane .............................. 78,177,198,224 GOUY-CHAPMAN-STERN (modèle de ) ................... 142 GROTTHUS ......................................................................... 3 mécanisme de — ............................................. 213 GROVE ............................................................................... 3

H

HALL .................................................................................. 3 HELMHOLTZ (couche de) ..........................voir couche HENDERSON (relation de) ........................................ 271 HÉROULT ........................................................................... 3 HEYROVSY......................................................................... 4

382

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

hétérogène réaction — ......................................... 144,181,230 système — .................................................... 23,217 HITTORF ............................................................. voir bilan

I

idéalité .............................................................. 127,195 impédancemétrie ........................................ 44,46,49 insertion (matériau d’) ........................ 14,57,72,128 intensiostat .................................................. 43,44,276 intensité du courant ............................ voir courant interface ........................................................ 23,66,141 — électrochimique ............................. 24,66,217 — idéalement polarisable ................................... ......................... voir électrode bloquante — réactive ........................................... 66,143,294 irréversibilité d’une réaction ..................... 236,341

J

JACOBI ............................................................................... 3 JAVEL (eau de) ........................................................... 162 jonction ....................................................................... 25 — électronique (métallique) ................. 25,148 — imperméable/perméable .......................... 68 — ionique ............................................... 25,54,149 — simple/multiple ............................................ 68 potentiel de — (ionique) ... voir tension de — tension de — ............................................ 148,271 JOULE (effet —) ............................................. 82,86,265

K

KOHLRAUSCH .................................................................... 3 loi de — ............................................................... 216

L

LAPLACE (loi de)........................................ 125,217,308 LATIMER (convention de) ....................................... 129 LECLANCHÉ ........................................................................ 3 lent (couple) ................................... voir couple rédox LEVICH (relation de) ........................................ 227,321 limitante ..................................... voir étape limitante limite (courant) ...................................... voir courant

M

MAXWELL (équations de) ....................................... 124 mécanisme E........................................... 232,246,324 membrane ............................................................ 5,259 — sélective ................................................... 21,214

méthodes électrochimiques ................................ 48 microélectrolyse ...107 et voir quasi-stationnaire microscope électrochimique (SECM) ............. 240 migration ...................................................... 63,77,190 mixte contrôle (régime) — ...................... 235,251,338 potentiel — ..................................... voir potentiel mobilité — électrique ............................................. 194,210 — électrochimique ................................ 193,210 molaire conductivité — .......................voir conductivité flux — .......................................................... voir flux molalité ...................................................................... 137 montage — intensiostatique .................. voir intentiostat — potentiostatique ............... voir potentiostat multiélectronique (réaction) .............................. 323 mur du solvant ............................................ 93,99,102

N

navette électrochimique ............................ 108,258 NERNST .............................................................................. 3 couche de — ......................................voir couche loi de — ........................................ 55,104,151,158 modèle de — ............................................... 64,227 NERNST-EINSTEIN (relation de) ............................... 195 nernstien (système) .............................. 235,326,343 neurobiologie.......................................................... 154 nombre — (ou degré) d’oxydation .............................. 13 — de charge ........................................................ 12 — de transport .......................... 82,175,265,305 — stœchiométrique .....voir stœchiométrique NYQUIST (diagramme de) ........................................ 46

O

OHM (loi d’) .................................................... 75,77,216 ohmique (chute)...................... voir chute ohmique ONSAGER (relations d') ............................................ 191 oxydant ........................................................................... 8 oxydation ....................................................................... 8 oxydoréduction ....................................................... 1,8

P

partage (coefficient de) ...................................... 147 pH (électrode de) .............................voir électrode

INDEX pile (génétateur) ...................... 6,33,35,80,112,114 — à combustible........................... 6,70,100, 202 — VOLTA ................................................... voir VOLTA PLANTE .............................................................................. 3 platine platiné .......................................... 36,164,208 point de fonctionnement .................. 107,114,282 POISSON (loi de) ............................................... 124,308 polarisation ............................................ 41,76,86,238 résistance de — ......................... voir résistance polarité d’une électrode ........ 27,35,40,80,86,115 polarographie ..................................................... 7,104 polymère ..............................................voir électrolyte pont salin ...................................................... 26,55,273 poreux .................................................................. 21,259 potentiel .............................................................. 35,123 — à l’abandon ........................................... 41,104 — adimensionnel ............................................ 234 — chimique .............................................. 123,126 — de corrosion ................................................. 106 — de demi-vague ............................. 93,244,251 — de jonction ..................................voir jonction — effectif de réaction .................................... 101 — électrique ................................. 35,54,123,285 — électrochimique ................................ 128,190 — GALVANI (interne) ................................ 125,285 — mixte ...................................................... 105,282 — standard .............................................. 55,93,97 — standard apparent ...........58,62,97,161,282 — VOLTA (externe) ................................... 125,285 potentiométrie ......................................................... 43 potentiostat ....................................... 43,44, 240,275 POURBAIX (diagramme de- ............ voir diagramme prévision des réactions ........................................ 104 principale (réaction) .............................voir réaction profil ............................................................................. 24 — de concentration...............219,239,242,317 — de potentiel........................54,75,81,142,218 pseudo-référence .................................................... 39

383 récepteur............................................. voir électrolyse réducteur ....................................................................... 8 réduction........................................................................ 8 Réf (électrode de référence)................... 22,35,163 régime — mixte ...................................................voir mixte — stationnaire ......................... voir stationnaire — transitoire.................................voir transitoire relaxation (effet de) ...................................... 205,216 rendement faradique ....................................... 71,97 résistance — carrée .............................................................. 207 — de concentration ........................................ 252 — de polarisation ............................................ 252 — de transfert de charge ............................. 252 — électrique .... 78,306 et voir chute ohmique résistivité électrique ................................................ 77 restauration électrochimique ............................ 186 réversibilité d’une réaction........................ 236,341

S

quasi-réversibilité d’une réaction ........... 251,341 quasi-stationnaire (régime) ............................ 47,89 .................................................. et voir stationnaire

SAND (loi de) .............................................................. 226 SECM ................... voir microscope électrochimique semi-conducteur .............................................. 20,232 solide ionique .................................... voir électrolyte soluté .............................................................. 20,56,138 solvant.................................................................. 56,138 mur du —............................. voir mur du solvant spontanée (sens d’évolution) ............................ 159 stationnaire (état ou régime) ................... 46,88,177,227,260 stockage de l’énergie .................................... 6,72,90 stœchiométrique (nombre ou coefficent) ........................... 9,56,70 STOKES (loi de) ........................................................... 209 STOKES-EINSTEIN (relation de) ................................ 209 supercondensateurs ................................. 69,90,143 support (électrolyte) .................... voir électrolyte surtension ....................................................... 41,76,80 — d’activation............................................. 96,252 — de concentration ........................................ 252 symétrie (facteur de) ....... voir facteur de symétrie système électrochimique complet . 107,114,253

R

T

Q

rapide (couple).............................. voir couple rédox réaction rédox ........... 16,73 et voir demi-réaction

TAFEL ................................................................................. 4 représentation de — ..................... 248,328,340

384

ÉLECTROCHIMIE - CONCEPTS FONDAMENTAUX ILLUSTRÉS

tension ................................................................... 35,74 — à l’abandon ........................................... 41,115 — de jonction ..................................voir jonction — électrique de surface ................................ 126 thermodynamique équilibre — ...................................... voir équilibre grandeur — de réaction — .......................... 156 table de données — ....................................... 129 transfert — de charge ........................................................ 24 — électronique (ou d’électrons) .................. 24 transitoire (état ou régime) .......................... 45,224 transport nombre de — ................................... voir nombre — de matière ............................... 17,91,189,299 travail électrode de — ......................................... voir WE — d’extraction .................................................. 140

V

véhicule électrique ................................. 72,117,203 viscosité .............................................. 64,209,237,321 vitesse — d’avancement........................................ 70,230 — de corrosion ............................................. 30,70 — de réaction surfacique .................... 181,231 — de réaction volumique ............................. 177 VOLTA .......................................................................... 2,10 potentiel — ..................................... voir potentiel pile — ............................................................ 2,10,26 voltamétrie ................................................... 46,49,237 volume libre (modèle du) ................................... 206

W

WE (électrode de travail) ................................. 27,43