Denys d'Halicarnasse: Opuscules rhétoriques: Démosthène [2] 2251003959, 9782251003955

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Denys d'Halicarnasse: Opuscules rhétoriques: Démosthène [2]
 2251003959, 9782251003955

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COLLECTION DES UNIVERSITÉS DE FRANCE publiée sous le patronage de l'ASSOClATION GUILLAUME BUDÉ

DENÏS D'HALICARNASSE OPUSCULES RHÉTORIQUES TOME II DÉMOSTHÈNE

TEXTE ÉTABLI ET TRADUIT PAR

GERMAINE AUJAC /Professeur à Γ Université de Toulouse - Le Mirad

Deuxième tirage

PARIS LES BELLES LETTRES 2002

Conformément aux statuts de Γ Association Guilfoume Bude, ce volume a été soumis à Vapprobation de la commission technique, qui a chargé M. Jacques Bompaire d en faire la révision et den surveiller la œneciion en collaboration avec Mlle Germauie Aujac

Tous droits de traduction, de reproduction et d'adaptation réservés pour tous les pays. © 2002. Société d'édition Les Belles Lettres 95 boulevard Raspati 75006 Paris www. lesbellesleitres.com Première édition 1988 ISBN : 2-251-00395-9 ISSN : 0184-7155

v DÉMOSTHÈNE

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Le traité consacré à Démosthène par Denys d'Halicarnasse, Tun des plus complexes, sinon le plus complexe de ceux qui ont été conservés, a suscité bien des contro­ verses entre les critiques, désireux d'en dater la rédaction et d'en expliquer les contradictions internes1. Mutilé du début, ce qui nous prive de son titre, déparé par de nombreuses et importantes lacunes, il pose en effet beaucoup de questions, d'ensemble ou de détail, auxquelles il n'est pas toujours facile de donner des réponses sûres. Pourtant la démonstration faite par P. Costil dans son Esthétique littéraire de Denys ďHalicarnasse, essai de classement des opuscules (Paris, 1949), paraît à la fois cohérente et convaincante : elle permet de résoudre un certain nombre de difficultés. Pour P. Costil en effet, dont nous adoptons les vues, le Démosthène dans sa première partie (jusqu'au chapitre 33) aurait été rédigé très peu de temps après les Orateurs Antiques, conformément à l'intention 1. Sur la chronologie des opuscules, cf. par exemple S. F. Bonner, The literary Treatises of Dionysius of Halicarnassus, Cambridge, 1939 (repr. Amsterdam 1969) ; E. Kalinka, Wiener Studien, 43, 1922-23, p. 157-168 et 44, 1924-25, p. 48-68; С Pavano, « Sulla cronologia degle scritti retorici di D. d'A. », Atti della R. Accademia di Scienze, Letteri e Arti di Palermo, serie IV, voi. Ili, part. II, fase. II, 1942, p. 335 sqq. ; W. Rhys Roberts, D.H. The three literary Letters, Cambridge, 1901, p. 4-7. G. Rönnet (Denys d'Halicarnasse, Sur le Style de Démosthène, introd. trad, et commentaire, Paris 1952) adopte le classement chronologique proposé par P. Costil. Cf. aussi t. I, p. 22 sqq.

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exprimée par Denys en IV, 20, 7, de rassembler en un tome II trois opuscules analogues à ceux du tome I, et consacrés successivement à Démosthène, Hypéride et Eschine1. Calqué sur le modèle utilisé dans le tome I, le traité sur Démosthène aurait donc dû comprendre d'abord une étude sur la forme, puis une étude sur le fond. Conformément à ce plan, Denys a commencé par rédiger l'étude sur la lexis de Démosthène, en se référant à la théorie des χαρακτήρες2 : Démosthène y est considéré comme Tun des meilleurs représentants du style mixte. Mais, pris par le temps, effrayé peut-être aussi par la lourde tâche que constituerait l'étude du πραγματικός τόπος chez un auteur aussi divers que Démosthène, Denys a probablement préféré en remettre à plus tard la rédaction, et livrer tout de suite à ses amis l'étude sur la lexis qui pouvait se suffire à ellemême. Absorbé ensuite par d'autres tâches, la prépara­ tion de son ouvrage historique, la rédaction d'autres opuscules, en particulier la réponse à Pompée Géminos qui lui avait fait part de l'étonnement éprouvé par certains lecteurs devant la vivacité des critiques adressées à Platon dans ce traité sur la lexis de Démosthène, il n'a jamais dû avoir le loisir (ou peut-être ne sentait-il plus la nécessité) de compléter l'opuscule sur Démosthène par une analyse du fond. Puis vint le tournant constitué par la rédaction du traité sur La Composition stylistique ( = D.C.V.). Aux 1. Les opuscules annoncés sur Hypéride et Eschine n'ont vraisemblablement pas été composés. Mais le Rhéteur Anonyme (cf. infra, p. 40) semble considérer que le traité sur Hypéride a réellement vu le jour. Peut-être a-t-il confondu cet auteur avec Ieée qu'il ne nomme pas, bien qu'il enumere, dans le désordre, les traités sur « Lysias, Démosthène, Isocrate, Hypéride, Thu­ cydide ». 2. Pour les Caractères de style, classification d'origine théophrastienne, cf. J. D. Meerwaldt, Studia ad generum dicendi historiom pertinentia, Pars I, De Dionysiana virtutum et generum dicendi doctrina, Amsterdam, 1920, et plus récemment, F. Quadlbauer, « Die genera dicendi bis Plinius d.j. », Wiener Studien, 71, 1958, p. 55-111.

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χαρακτήρες λέξεως qui avaient jusque là guidé sa classification des styles, Denys, par une innovation hardie (ou qu'il présente comme telle, cf. VI, 1,9), substitue les harmonies ou syntheseis, insistant désormais sur la valeur sonore des textes littéraires, prose ou vers, comme élément décisif de différenciation. D'où une répartition nouvelle des auteurs, en fonction des harmonies utilisées ; Démosthène y est aussi considéré comme Tun des meilleurs représentants de l'harmonie moyenne. Gomme le D.C.V. ne donnait qu'une descrip­ tion très sommaire, et parfois insuffisante, de l'harmonie moyenne, Denys va profiter d'un moment de loisir pour étudier cette harmonie moyenne sur un exemple précis, celui de Démosthène, ce qui lui permet en outre de compléter ou de rectifier sur certains points douteux la théorie précédemment exposée. Il est probable que le Démosthène II, du chapitre 35 к la fin, est Tun des derniers écrits rhétoriques de Denys ; il n'a jamais pourtant circulé seul ; Denys Га joint, dès sa rédaction, à l'opuscule précédemment consacré à la lexis démosthénienne. La juxtaposition de ces deux écrits, liés ensemble par un chapitre 34 composé probablement bien antérieurement au Démosthène II, montre à l'évidence le chemin parcouru par Denys et l'évolution de sa doctrine. Inutile de vouloir rendre cohérent ce qui ne l'est pas : les jugements de Denys ont varié du Démosthène I au Démosthène II, mais il a choisi de présenter côte à côte, comme ne faisant qu'un, des analyses contradictoires sur bien des points, mais qui n'en illustrent que mieux le talent de l'orateur. I. LE PLAN DU TRAITÉ A. LE STYLE DE DÉMOSTHÈNE.

Privé de son introduction (qui devait comporter une adresse à son destinataire Ammée) par la perte d'un cahier dans l'archétype, le Démosthène commence abruptement dans le cours d'un extrait de Thucydide,

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exemple typique de style élevé. Il est probable que, dans les premières pages, Denys annonçait son intention de décrire les différents types de style, en donnant pour chacun des exemples empruntés aux auteurs les plus caractéristiques, afin de montrer que Démosthène avait pratiqué chacun de ces styles avec plus de talent que quiconque. 1) Les trois types de style: Denys présentait donc d'abord dans un premier chapitre le style élevé, dont l'initiateur pouvait être Gorgias1, et le meilleur représentant Thucydide. L'extrait de VOraison funèbre de Gorgias transmis par Syrianus devait servir de première illustration pour ce style, la seconde étant constituée par l'extrait de Thucydide par lequel débutent les manuscrits. A ce style insolite et recherché, s'oppose le style simple ou uni, le plus couramment utilisé ; Denys le décrit très brièvement (V, 2) parce que, son meilleur représentant étant Lysias, les traits principaux de ce mode d'écriture venaient d'être longuement analysés dans l'étude récente consacrée à cet auteur. Entre les deux, fait de mélange ou d'alternance, se situe le style mixte (V, 3) dont l'initiateur fut probable­ ment Thrasymaque2, et les bons représentants Isocrate et Platon. Pour illustrer son propos, Denys cite un extrait de Thrasymaque, évoque les analyses qu'il avait déjà consacrées, dans l'opuscule portant sur cet auteur, au style d'Isocrate (V, 4), puis présente avec quelque causticité les qualités et les défauts de l'expression chez Platon, à qui il reproche un usage excessif du style 1. Cf. II, 3, 5 où Denys indique, d'après Timée, que c'est à Gorgias que l'on doit l'engouement des Athéniens pour le style poétique et figuré, utilisé par la suite par Thucydide. 2. Sur le style de Thrasymaque, cf. par exemple, H. G. Go to ft, "Thrasymachus of Chalcedon and Ciceronian style", С Ph. 75, 1980, p. 297-311. Les rapports entre Thrasymaque, Théophraste et Denys sont examinés par G. M. A. Grube, A. J. РЛ., 73, 1952, p. 251-267.

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dithyrambique, citations tirées du Phèdre à Гарриі (V, 5-7) : certains passages de Platon feraient penser à du Pindare, indique Denys qui en donne pour preuve un fragment de dithyrambe. Ces auteurs pourtant, qui ont pratiqué avec quelque bonheur le style mixte, ne soutiennent pas la compa­ raison avec Démosthène qui en est le modèle le plus accompli (V, 8). Aussi Denys, dans les chapitres suivants (V, 9-32), va-t-il s'ingénier à démontrer que Démosthène surclasse, dans chaque type de style, les auteurs qui y ont le plus brillé. 2) La supériorité de Démosthène. La démonstration n'est d'ailleurs pas conduite de façon systématique. Pour souligner la qualité du style élevé chez Démosthène, Denys cite deux exemples, l'un tiré de la Troisième Philippique, l'autre de la Midienne ; Démosthène s'y montre supérieur à Thucy­ dide, dit-il, en ce que l'orateur utilise le style élevé avec plus de retenue et d'à-propos que l'historien (V, 10), dont Denys ne cite pas de nouvel extrait. En matière de style simple en revanche (V, 11-15), Denys propose un parallèle entre deux narrations dues l'une à Lysias l'autre à Démosthène, décrivant des faits de même nature. Au Contre Tisis de Lysias, Denys oppose le Contre Conon de Démosthène pour en conclure que, mieux que Lysias, Démosthène sait allier avec beaucoup d'à-propos la grâce à l'intensité. Le style mixte, celui dans lequel excelle Démosthène, jouit d'un traitement de faveur (V, 14-32). Quelques courts exemples tirés de divers discours montrent à l'évidence et la supériorité de Démosthène et la supériorité du style mixte. Pour illustrer ces points et les fonder sur des analyses réputées objectives, Denys va comparer Démosthène aux deux meilleurs représentants après lui du style mixte, Isocrate et Platon. Un extrait du discours Sur la Paix d'Isocrate, opposant le passé au présent, est mis en parallèle avec un passage traitant le même sujet de la Troisième

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Olynthienne, pour la plus grande gloire de Démosthène. Puis plusieurs passages de lOraison funèbre du Ménexène, comparés à un extrait du discours Sur la Couronne, font ressortir clairement aux yeux de Denys la distance qui sépare Démosthène d'un Platon indûment adulé1. La récapitulation (V, 33), qui termine cette étude sur la lexis en rappelant le plan qui a été suivi, montre que rien d'essentiel n'a été perdu par la mutilation du début. 3) Appendice conclusif. Suit un chapitre (V, 34) qui tranche sur le reste du traité par son vocabulaire, et notamment par l'utilisa­ tion du terme stoïcien de πλάσμα2 que l'on ne trouve nulle part ailleurs dans le Démosthène. Il est probable que sa rédaction est largement postérieure à l'achève­ ment du Dèmoslhène I ; peut-être Denys avait-il encore le projet de joindre à son analyse sur la forme l'étude sur le fond qui était de règle dans les Orateurs Antiques ; il déclare en effet qu'il introduit ces réflexions « avant d'aborder ce qui lui reste à traiter dans ce qu'il avait annoncé џ (V, 33, 5). Son propos est de dégager certains traits spécifiques qui caractérisent le style de Démos­ thène quel que soit le type utilisé : élevé, simple ou mixte. En fait, dans chaque type de style, Démosthène se singularise par les qualités du genre opposé : il a de la clarté dans le style élevé, de la tension et du mordant dans le style simple, de l'à-propos et du pathétique dans le style moyen, mais par dessus tout de la conve­ nance. Ce chapitre, qui semble apporter des corrections aux développements précédents, trahit l'embarras de Denys 1. Sur la réputation littéraire de Platon dans l'Antiquité, cf. Fr. Walsdorff, Die antique Urteile über Piatons Stil, Leipzig, 1927, qui indique que Panétius rapprochait Platon d'Homère. 2. Maie ce terme est employé dans le D.C.V., VI, 4, 9, dans le De Imitat ione, IX, 3, 5 et dans la Lettre à Pompée G emi nos, XI, 4, 3, en relation à chaque fois avec l'adjectif Ιστορικόν.

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devant les certitudes précédemment affirmées. Il ne contient pourtant aucune allusion à la théorie des harmonies, qui n'était probablement pas encore élaborée. C'est sans doute bien plus tard que Denys, conscient de l'insuffisance de la description de l'harmonie moyenne dans le D.C.7., a décidé d'y remédier à travers l'exemple de Démosthène. B. COMPOSITION STYLISTIQUE ou HARMONIE.

En manière d'introduction (V, 35) à cette deuxième partie, Denys indique qu'il va traiter de la synthesis, unanimement admirée chez Démosthène. Si Eschine en effet critique chez lui le choix des mots (et Denys répondra à ces critiques aux chapitres 55 à 57), il ne fait aucune réserve sur la qualité de sa synthesis. 1) les trois harmonies. Denys commence son étude par l'analyse des divers types d'harmonie, reprenant à quelques variantes ou rectifications près la description qu'il en avait donnée dans le D.C.V. Les trois harmonies fondamentales, dont les autres ne constituent que des variations (V, 36-37), sont l'harmonie austère, illustrée par un extrait de Thucydide (V, 38-39), l'harmonie polie, illustrée par un extrait du Panégyrique d'Isocrate (V, 40), l'harmonie mixte, illustrée par un passage d'Hérodote, et surtout par un extrait à double face de Démosthène (V, 41-46) ; dans ce relativement court passage, Denys décèle en effet la juxtaposition de l'harmonie polie et de l'harmonie austère. La qualité qui caractérise avant tout l'harmonie moyenne est la variété (V, 44) ; constamment utilisée par Démosthène, elle donne à son style la force persua­ sive indispensable dans l'éloquence de combat (V, 45) ; elle est fondée sur la convenance au sujet (V, 46). 2) les facteurs de la réussite. Conformément au plan annoncé en V, 36, 2, Denys, après avoir défini le type d'harmonie dont use Démos­ thène, va « tenter de découvrir les exercices qui lui ont

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donné une si grande qualité ». Les deux fins de toute création artistique étant la beauté et l'agrément, l'œuvre littéraire dispose pour les atteindre de quatre facteurs, que Denys avait déjà présentés dans le D.C.V.1 : la mélodie, le rythme, la variété, la convenance (V, 47-48) ; ils entrent aussi dans la composition des types d'harmonie. 3) originalité de Dèmoslhène. Enfin Denys avait promis de montrer « à quoi l'on reconnaît le type de composition propre à Démosthène ». C'est ce qu'il se propose de faire au chapitre 50 : on reconnaît le style de Démosthène à la mélodie (mais Denys ne la définit pas), aux rythmes (par la présence de vers2 savamment dissimulés dans sa prose), à la profusion d'expressions inhabituelles, à la variété des formules. Tous ces traits, qui donnent tant de beauté к la prose de Démosthène, viennent aussi bien (ou plus) de son travail que de ses dons naturels (V, 51-52). 4) Vaclion oratoire. Les chapitres suivants (V, 53-54) consacrés à l'action oratoire s'inscrivent dans le droit fil de cette étude sur la synthesis, qui par l'assemblage des mots donne au tissu sonore telle ou telle qualité. Les discours en général, et ceux de Démosthène en particulier, ont été composés pour être prononcés en public, avec un ton et des gestes adéquats, sans quoi ils restent lettre morte. Démosthène a attaché un soin particulier à construire sa prose en fonction de l'action oratoire. 5) réponse aux critiques d'Eschine. Les quatre derniers chapitres sembleraient constituer un appendice sans lien avec le reste si Denys n'avait pris la précaution de les annoncer en partie au début 1. Cf. v i , u . 2. Des exemples en avaient été donnée dans le D.C.V., au chap. 25.

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du Démosihène II ; il avait rappelé en effet les éloges qu'Eschine décernait à Démosthène pour la synthesis de sa prose alors qu'il ne cessait de critiquer chez lui le choix des mots. Ne voulant pas laisser ces critiques sans réponse, Denys réfute les propos d'Eschine, vrais ou supposés (V, 55-57) ; il y ajoute une réponse à d'autres censeurs qui reprochaient à Démosthène d'user trop souvent de la redondance : c'est par souci de l'équilibre rythmique de la phrase, dit Denys, que Démosthène se plaît parfois à allonger son propos. A son habitude, Denys termine son traité par l'annonce de futurs opuscules : une étude sur le fond devrait succéder à cette étude sur la lexis (sic) de Démosthène. Le vocable employé surprend un peu ; après tant de développements sur la synthesis, on aurait attendu un terme plus général, englobant à la fois la lexis étudiée dans le Démosthène I et la synthesis présentée dans le Démosthène IL Peut-être Denys, toujours pressé, a-t-il voulu étroitement unir les deux parties de son étude et, faute de mieux, a-t-il choisi le terme qui lui semblait le plus général. Peut-être aussi a-t-il tout simplement transposé à cette place les phrases qui, avec l'envoi à Ammée (qui était également le destinataire des Orateurs Antiques, t. I), terminaient le Démosthène I dans l'état primitif sous lequel il a d'abord circulé dans les milieux romains ; l'annonce de l'étude sur le fond conviendrait mieux à cette époque de la rédaction, où le traité sur Démosthène devait constituer le premier volet du tryptique dans les Orateurs Antiques t. IL On le voit, le Démosthène est loin d'être un traité simple et univoque. Sa complexité vient entre autres de ce qu'il représente deux élargissements successifs de deux états de la doctrine littéraire et esthétique de Denys. Dans un premier temps, Denys, par l'analyse des trois types de style, cherche à se doter d'une méthode rationnelle pour classer les orateurs ; il établit ainsi une « grille » dans laquelle il peut facilement situer Démos­ thène, mais dont il n'usera plus guère par la suite.

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Dans un second temps, c'est la grille des harmonies, récemment constituée dans le D.C.F., qu'il rectifie et complète pour rappliquer également à Démosthène. Ces deux grilles, fondées sur des critères différents, introduisent quelque divergence dans la classification des auteurs, mais quelle que soit celle à laquelle on se réfère, Démosthène y occupe toujours la première place dans le registre du « moyen », loin devant les autres. IL TYPES DE STYLE ET HARMONIES Denys avait terminé l'opuscule sur Isée en opposant le style précis et proprement agonistique dont Lysias est le modèle (IV, 20, 2 et 4) au style poétique et solennel d'Isocrate (IV, 19,2) et en annonçant des études ultérieures sur trois orateurs de la deuxième génération, Démosthène, Hypéride et Eschine, chez qui « l'on trouve la perfection de l'art rhétorique » (IV, 20, 7). Démosthène n'était pourtant pas totalement absent du tome I des Orateurs Antiques, Denys lui attribuait des qualités agonistiques à la manière de Lysias (II, 6,4), de la solennité attrayante à la manière d'Isocrate (II, 28, 2), et, dominant le tout, de la virtuo­ sité véhémente à la manière d'Isée (IV, 13, 3). Son appréciation de Démosthène semble pourtant contenir au moins une réserve quand il déclare que l'artifice est constamment et visiblement présent dans son œuvre (IV, 4, 5). Il est dommage que manque l'introduction du tome II qui aurait peut-être expliqué le changement de perspec­ tive qui s'est opéré chez Denys à la suite de la rédaction du premier triptyque. Cette modification se manifeste dans le désir qu'il a de substituer à des différenciations assez vagues (dans le tome I, Denys insistait plutôt sur les ressemblances que sur les différences entre les auteurs considérés) des principes plus nets de classement, à l'aide des types de style. Dans ce système nouveau, Lysias et Isocrate ont désormais une place bien déter-

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minée, Tun comme représentant du style simple, l'autre du style mixte, qui se distingue du simple par la présence des ornements. Le troisième secteur, par lequel Denys commence son exposé, est celui du style élevé dans lequel on trouve sans doute un orateur, Gorgias, Tinitiateur de ce type, mais surtout un histo­ rien, Thucydide. La perspective de Denys s'est donc élargie de manière à embrasser toute la prose littéraire, et pas seulement l'éloquence. Ainsi alors que, à la fin de Visée, Denys répartissait les orateurs en deux grandes écoles, celle de Lysias (à laquelle se rattachait Isée) et celle d'Isocrate (qui avait assimilé les leçons de Gorgias), assez proches au fond l'une de l'autre, Denys propose maintenant des genres extrêmes, le simple et l'élevé, avec comme champions Lysias pour le simple, mais Gorgias et Thucydide pour l'élevé, et un genre intermédiaire dont l'initiateur aurait été Thrasymaque (dont Denys en II, 6, 1 faisait un rival de Lysias sous le rapport de la densité du style) et dans lequel brillent Isocrate, Platon et surtout Démosthène. L'analyse des types de style concerne donc tous les auteurs en prose, philosophes et historiens aussi bien qu'orateurs (cf. V, 2, 1). 1) les types de style. A un classement assez flottant, Denys a donc substitué une répartition plus systématique, avec deux genres opposés, et un genre intermédiaire ; c'est ce dernier qui constitue la grande nouveauté de la doctrine : il est défini comme la « combinaison » des deux genres extrêmes, alliant les qualités nécessaires du style simple aux ornements du grand style. Denys cite comme exemple le style d'Isocrate qui s'apparente à celui de Lysias pour la pureté du vocabulaire et la clarté d'exposition, à celui de Gorgias et de Thucydide par la recherche et la solennité de l'expression. Pour Platon, qui utilise lui aussi un mélange des deux types de style, le dépouillé et l'élevé, c'est quand il s'en tient au style dépouillé qu'il réussit le mieux (V, 5, 2). Et

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l'on voit, aux exemples cités, que, tout en parlant de mélange, Denys pense en fait alternance. Le style intermédiaire est celui dans lequel voisinent des passages en style simple et des passages en style élevé, avec un dosage différent suivant les auteurs, et des variations plus ou moins rapides, plus ou moins appuyées. Quant il en vient à Démosthène pourtant, Denys semble insister sur son « mode d'expression unique », dans lequel se tissent ensemble les éléments les plus importants de chacun des styles opposés ; mais, dans le choix des exemples, c'est encore le principe de l'alternance qui domine, illustré par des passages en style élevé (V, 9-10), par d'autres en style simple (V, 11-13) ; pour ceux qui appartiennent au style mixte (V, 14-15), comme l'extrait de la Troisième Olynthienne (V, 21) ou celui du discours Sur la Couronne (V, 31). Denys se contente d'en montrer la supériorité sur des morceaux correspondants d'Isocrate et de Platon, ce qui le dispense d'analyser au fond la constitu­ tion de ce style mixte. Présenté comme un mélange, le style mixte est donc plutôt le résultat d'une alternance plus ou moins bien conduite. Sa qualité essentielle est la variété ; son mérite réside dans la convenance au sujet. Champion du genre mixte, Démosthène surpasse tous ses concur­ rents aussi bien dans le genre élevé, quand il le pratique, que dans le genre simple ou dans le genre mixte. Mais on est bien obligé de reconnaître que Denys affirme plus qu'il ne démontre. Partant de l'idée que les genres extrêmes sont défectueux parce que seule la mesóles peut réaliser la perfection, il tente de montrer que dans le genre élevé Démosthène surpasse Thucydide parce qu'il mêle aux passages du genre élevé les qualités agonistiques et la clarté du genre simple, tandis que dans le genre simple il surpasse Lysias par des qualités d'intensité et de grandeur qui sont inséparables de son propre style ; dans le genre mixte également, il l'emporte sur tous ceux qui l'ont pratiqué : il a plus de vigueur qu'Isocrate, plus de convenance que Platon.

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Procéder par comparaison épargne à Denys d'avoir à proprement définir et analyser le style moyen ou mixte. Démosthène d'ailleurs, salué comme le meilleur représentant du moyen, pratique en fait, suivant les occasions, les trois types de style, comme Denys se plaît à le souligner sur des exemples qu'il se garde de commenter dans le détail. Il y a donc là une certaine ambiguïté qui a dû faire réfléchir suffisamment Denys pour qu'il se sente obligé d'apporter quelques complé­ ments ou rectifications à sa doctrine : la classification en trois types de style (mais il emploie ici le terme de πλάσμα) n'est rien de plus, dit-il, qu'un schéma commode qui permet de clarifier les idées. La supériorité de Démosthène, redit-il, vient de ce que, dans chacun des styles extrêmes, il met des qualités du style opposé, et que dans son emploi du style moyen, il réunit les qualités des deux genres extrêmes, avec un sens aigu de la convenance (V, 34), Une fois de plus, le « mélange ь annoncé paraît se résoudre en une alternance. 2) les harmonies. L'admiration de Denys pour Démosthène est toujours aussi vive au moment où il rédige le Démoslhène II, mais elle s'applique surtout à l'harmonie de sa prose. Dans le D.C.V. en effet, en étudiant les divers types d'harmonie, aussi bien en poésie qu'en prose, Denys avait fait la part congrue aux orateurs. Il avait emprunté des exemples, pour l'harmonie austère, à Pindare et Thucydide, pour l'harmonie polie à Sappho et Isocrate ; pour l'harmonie moyenne, il avait simplement fait référence à Homère, « le coryphée et le guide » (VI, 24, 4), et à d'autres auteurs au nombre desquels figurait Démosthène, mais aucune illustration n'était venue appuyer ses propos. En revanche, dans les premiers et les derniers chapitres du D.C.V., Denys avait choisi des extraits de Démosthène pour illustrer le rythme de la prose (cf. VI, 8, 2 ; 9, 2-3 ; 9, 9) et avait salué en l'orateur « une sorte de cas limite, tant pour le choix des mots

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que pour la beauté de la synthesis » (VI, 18, 15). Mais c'est surtout dans l'avant-dernier chapitre, consacré à la prose poétique, que l'essentiel de la démonstration est emprunté à Démosthène : « Qui refuserait de reconnaître que les discours de Démosthène ressemblent à ce qu'on fait de mieux en matière de poésie épique ou lyrique, en particulier les harangues contre Philippe et les plaidoyers composés pour les procès publics? » (VI, 25,3). La rédaction de ces derniers chapitres du D.C.V. a probablement inspiré à Denys le désir de reprendre l'étude des harmonies en s'occupant exclusivement de la prose et de montrer sur des exemples que Démosthène est le meilleur représentant en prose de l'harmonie moyenne, comme Homère l'était en poésie. Et d'abord, pour répondre peut-être à des critiques qui avaient reproché à son schéma des harmonies, déjà exposé dans le D.CF., beaucoup trop de rigidité, Denys précise que, tous les écrivains recherchant la beauté de l'expression, ils empruntent pour l'atteindre des voies diverses suivant les dons naturels de chacun, ses admirations, la mode, ... ; les trois harmonies décrites par Denys représentent « les plus authentiques » à ses yeux, celles qui sont à la base de toutes les harmo­ nies particulières à chaque auteur, mais qui n'existent pas à l'état pur (V, 37, 1) ; il y a toujours mélange d'harmonies, avec seulement prédominance habituelle de certains éléments ; c'est cette tendance générale de l'expression qui permet de classer l'auteur considéré dans telle ou telle catégorie. La description de l'harmonie austère donne à Denys l'occasion d'introduire une précision ; on sait que cette harmonie se caractérise par une certaine lenteur d'élocution provoquée à la fois par l'utilisation de mots longs et par l'introduction d'intervalles entre les mots en hiatus ; Denys précise ici que ce temps vide causé par la rencontre entre voyelles équivaut au temps d'émission d'une demi-voyelle (V, 38, 3), et il renvoie pour plus ample informé aux métriciens et musiciens qui ont mesuré cet intervalle.

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Dans la description des harmonies extrêmes, Denys insiste particulièrement sur la manière dont les mots sont juxtaposés (ou bien comme soudés entre eux, ou bien séparés les uns des autres par la rencontre de lettres qui ne peuvent s'amalgamer), en un mot sur la junctura : c'est elle essentiellement qui lui sert, dans l'analyse des exemples, à distinguer les types d'harmonie. Il fait sans doute appel également au rythme, à la forme ou à la longueur des périodes, éventuellement à la construction syntaxique, mais ses déclarations restent le plus souvent assez floues, et l'absence d'exemples précis ne permet guère de cerner la portée exacte de ces éléments dans la constitu­ tion de chaque harmonie. Dans le développement spécial qu'il consacre au rythme par exemple, Denys se contente de reprendre certaines notions élémentaires qu'il avait exposées dans le D.C.V. (en évitant toutefois de confondre pied et rythme), ou de renvoyer son lecteur au traité précédent (cf. V, 49, 2). Dans ce traité pourtant, Denys ne s'était pas appuyé sur des analyses rythmiques pour différencier les auteurs : dans l'étude des exemples illustrant chaque harmonie, il privilégiait la junctura, plus facile à mettre en évidence ; c'est seulement dans le chapitre consacré à la description de la prose poétique que Denys recherchait, citations à l'appui, les vers ou les rythmes cachés dans maints passages de Démosthène ; mais il le faisait alors sans référence à un type particulier d'harmonie. Tirant probablement la leçon de son échec dans l'enquête entreprise lors de la rédaction du D.C.V.1, Denys ne cherche plus à dissocier les deux fins de l'œuvre d'art que sont la beauté (objectif ici de l'harmo­ nie austère) et l'agrément (objectif de l'harmonie polie) ; il reconnaît que ce sont les mêmes éléments, mélodie, rythme, variété, convenance, qui les produisent toutes les deux (V, 47,2-6) ; mais, variés à l'infini, ils peuvent créer mille harmonies diverses (V, 48, 7-8). 1. Cf. VI, 10,2-3 et 13, 1-3.

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Les corrélations, si subtiles, existant entre tel type concret de mélodie, rythme, variété et tel type précis d'harmonie, ne sont pas faciles à élucider ; Denys, conscient peut-être de sa défaite, renvoie sur ce point le lecteur à son propre bon sens. Chose curieuse, Denys qui réunit pour publication les deux parties de Démosthène ne fait aucun effort pour mettre le schéma des harmonies en rapport avec le schéma des types de style précédemment esquissé ; les deux grilles en efïet ne se recouvrent pas. Si l'harmo­ nie austère coïncide à peu près avec le genre élevé (Thucydide est le représentant officiel pour les deux), l'harmonie polie, qui en est l'opposé, n'a rien de commun avec le genre simple ; c'est Isocrate qui le représente le mieux, alors que dans le schéma précédent il était classé dans le genre mixte ; quant à Lysias, il a disparu, ce qui montre bien que Denys a complète­ ment échappé désormais à la tendance atticisante. On pourrait s'étonner de cette disparition et en demander la raison. Elle tient, semble-t-il, au change­ ment de perspective. La lexis ( = le style) appartient à tout homme qui parle, à tout auteur qui compose pour être écouté ou pour être lu ; elle concerne les mots et leur usage, ces mots indispensables à la communica­ tion entre les hommes ; elle s'adresse à l'intelligence. L'harmonie possède une valeur esthétique propre ; sans doute accompagne-t-elle toute expression parlée ; mais, parente de la musique, elle réclame comme elle une volonté délibérée pour devenir un moyen d'art ; elle ne peut être que le fruit d'un travail. C'est pourquoi peut-être Lysias, dont le parler est caractérisé par la simplicité, le naturel, l'absence d'apprêt (même si Denys a reconnu un instant, en V, 2, 7 par exemple, que ce naturel est un effet de l'art), n'a plus de place dans le paradis des écrivains véritables. Chez ces derniers en effet, tout est calculé, savamment dosé ; rien n'est laissé au hasard ; un travail incessant est seul capable de donner à l'œuvre d'art sa qualité inimitable. On comprend alors la passion que met

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Denys à prôner le travail du style, à le montrer à l'œuvre chez les grands écrivains comme chez les autres artistes, à proclamer à temps et à contretemps, et au risque de se répéter, que Démosthène doit tout, et en particulier la charge poétique de son style, à son travail acharné sur l'expression, même et surtout quand de grands intérêts étaient en jeu. La gloire est pour lui la juste récompense du labeur qui a fait de ses discours de* chefs d'œuvre impérissables. Son talent seul a valu à Lysias le succès que Ton sait ; son œuvre paraît désormais à Denys trop naturelle et spontanée pour qu'elle puisse nourrir une imitation. C'est que, si Denys a modifié sa doctrine au cours du temps et ses préférences en matière littéraire, il n'a rien changé dans son projet pédagogique. Son but a toujours été de proposer des modèles aux étudiants en rhétorique. Il y eut d'abord Lysias, quand la preoccupation majeure était de combattre les tendances asianistes et l'enflure du style. Mais à mesure que l'idéal atticiste reprenait de la vigueur (cf. I, 2, 5), Deciys a senti le besoin d'insister sur la valeur artistique de la prose, seule capable à ses yeux de donner à un texte sa pleine efficacité. Le souci du style devient alors primordial chez lui, lui faisant presque oublier l'inportance de la matière1 dans toute œuvre littéraire. Сошпе excuse, il allègue (cf. VI, 1, 7-8) qu'il est plus farile d'améliorer le style chez les étudiants en rhéto­ rique que de leur apprendre à penser, et que d'ailleurs la première opération peut et doit précéder la seconde. Décortiquer les procédés d'écriture des grands écrivains de l'Antiquité est une façon de proposer aux étudiants un éventail de modèles à imiter. Etudier Démosthène et ses procédés stylistiques dispense de toute autre étide puisqu'en lui sont rassemblés, de par sa position 'L II est significatif que dans le traité sur Isocrate, Denys vaite chez l'orateur l'élévation des sujets, la noblesse des sentimeite, en un mot la qualité de sa « philosophie politique », beaicoup plus que son style. Dans le Démosthène en revanche, il oncentre toute son attention sur le style.

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« moyenne », tous les types de style et toutes les harmonies, en une synthèse originale qui peut fournir à elle seule le modèle pour tous les choix possibles. III. LA PLACE DE DÉMOSTHÈNE DANS LES OPUSCULES RHÉTORIQUES L'opinion de Denys sur Démosthène a-t-elle varié au cours du temps? Quels défauts ou quelles qualités reconnaissait-il à l'orateur quand celui-ci ne servait que de contrepoint à l'étude d'autres auteurs? C'est ce qu'il est intéressant de rechercher, et qui risque de réserver des surprises. 1) Première Lettre à Ammée. Si l'on admet le classement des opuscules proposé par P. Costil et exposé dans Γ Introduction (t. I, p. 2228), le premier des opuscules conservés, la première Lettre à Ammée, défendait Démosthène contre les prétentions de certains péripatéticiens contemporains qui en faisaient un simple élève d'Aristote et attribuaient les mérites de son éloquence à l'enseignement du philosophe. Denys y fait un éloge inconditionnel de celui qui fut « le meilleur de tous les orateurs » (X, 1,1), qui « a surpassé tous ses prédécesseurs, tous ses contem­ porains, et n'a laissé à personne la possibilité de le dépasser» (X, 2,1). Il vante sa virtuosité (deinotès) oratoire, admirée de la Grèce entière (X, 3, 2). Il cite le Contre Lepline, le discours qui, « de tous, a le plus de grâce1 et est le mieux écrit » (X, 4, 2). Et il conclut en faisant l'éloge du métier qui a permis à Démosthène de composer ses admirables discours (X, 12, 8). Virtuo­ sité, grâce (ce qui ne laisse pas de surprendre), soin 1. Denys en maintes occasions attribue à Démosthène de la grâce, ce qui peut paraître surprenant, mais qui montre que ce terme, dans la bouche de Denys, n'implique aucune idée de mièvrerie. Le Ps. Demetrius (III, 181) voit aussi de la grâce chez Démosthène, de par l'allure rythmique de sa prose.

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de récriture, telles sont les qualités reconnues à Démosthène. 2) Les Orateurs Antiques. Dans le Lysias, quelques critiques se font jour à l'adresse de Démosthène, que Ton peut, comme Thucydide, taxer parfois d'obscurité : chez Tun comme chez l'autre, « il y a beaucoup d'endroits que nous avons du mal à interpréter, beaucoup de passages obscurs exigeant explications» (II, 4,2), ce qui fait ressortir par contraste la clarté inhérente au style de Lysias. Pour la densité, « Démosthène est allé plus loin que Lysias, mais sans son humilité et sa simplicité, avec recherche et âpreté» (II, 6,4). En revanche, dans l'éloquence épidictique, Démosthène sait tenir l'auditoire en haleine, ce que ne sait pas faire Lysias (II, 28,2). Si Isée a droit à une étude particulière, c'est qu'il fut le maître de Démosthène, et que sa virtuosité est l'une des sources du talent de Démosthène (Isée IV, 3, 3). Cette virtuosité n'est d'ailleurs pas sans dangers, car elle fait suspecter la sincérité des orateurs ; aussi n'est-il pas étonnant que certains adversaires malin­ tentionnés, ici Pythéas, aient vu réunies en Démosthène « toute la malhonnêteté et la perversité humaines » (IV, 4, 4) ; Denys reconnaît d'ailleurs volontiers que «les discours d'Isée et de Démosthène, même quand les sujets portent sur un fait vrai ou sur un contrat légitime, ont un air suspect, à cause de la quantité des artifices utilisés» (IV, 4,5) et il leur oppose les discours d'Isocrate et (surtout) de Lysias qui sonnent plus juste et plus vrai même quand le fait raconté ne l'est pas. Denys trouve chez Isée un tour affecté «qui laisse pressentir la mise en œuvre démosthénienne » (IV, 7, 4), ainsi que l'utilisation du style disjoint, par demandes et réponses, dont Démosthène s'est fait plus tard une spécialité (IV, 13, 1). Citant un passage d'Isée, « très ramassé, d'une hardiesse extrême tant la construc­ tion est brève, acérée, étonnante, et qui n'est pas

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accessible à tous ni du premier coup », Denys ajoute que c'est le genre de formules dont use Démosthène (IV, 13, 2). La virtuosité véhémente de Démosthène, reconnaissable à l'agencement des mots, à l'utilisation des figures, est préfigurée dans maints passages d'Isée (IV, 13,3) : c'est que «tout chez Isée est un produit de ce métier dont plus tard Démosthène a fait un très large usage » (IV, 14, 1). Dans les parties démonstratives du discours, le point faible chez Lysias, Isée est plein d'ingéniosité, s'appuyant sur des arguments logiques qu'il présente avec minutie, utilisant l'amplification, faisant appel à l'émotion ; sur tous ces points, « il a fourni à l'art de Démosthène d'amples ressources, sans jamais chercher lui-même la simplicité de Lysias » (IV, 16, 3). Goût de l'argumentation subtile, usage de l'amplification, vir­ tuosité et pathétique, telles sont les qualités (ou les défauts?) implicitement reconnues à Démosthène, à quoi s'ajoute un certain manque de simplicité. 3) Le Démosthène I. Dans la première partie du Démosthène, Denys élargit son propos. Démosthène n'y est plus présenté comme l'élève d'Isée, mais comme un auteur parfaite­ ment original qui, refusant de prendre un modèle unique, orateur ou type de style, car il les trouvait tous imparfaits (même donc le genre moyen, tel qu'il était interprété par Isocrate et Platon), a voulu faire une synthèse de tous les éléments utiles, en les employant tour à tour dans une expression aux mille facettes, «tel le Protée de la fable » (V, 8, 2). Dans l'analyse des exemples qui suivent, Denys souligne chez Démosthène l'inhabituel des tournures employées, une certaine préciosité, de l'affectation quand il use du style élevé (V, 9) ; la pureté, la clarté, la concision de l'expression, la simplicité, quand il use du style simple (V, 13, 1-2) ; l'équilibre de la composition quand il use du style moyen (V, 14, 2). Aux yeux de Denys, Démosthène est supérieur à Thucydide dans

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le genre élevé parce qu'il sait ne pas abuser du style recherché, l'utiliser avec beaucoup d'à propos et, conservant toujours la clarté, en faire un élément décisif de persuasion ; il est supérieur à Lysias dans le genre dépouillé parce qu'il sait allier en permanence l'intensité à la grâce ; dans le genre mixte, il est supérieur à Isocrate par la noblesse et la grandeur, la vigueur ou l'émotion (V, 21,3-4), et supérieur à Platon par le souci constant de l'utile et du vrai, la luxuriance de son vocabulaire, la sincérité et le dynamisme, le sens de l'éloquence combative (V, 22, 2-3). Ainsi Denys qui faisait quelques réserves sur la matière mise en œuvre par Démosthène (caractère retors de l'argumentation par exemple) n'en fait plus aucune sur l'expression, qu'il trouve désormais parfaite­ ment claire. 4) Le traité de VImitation; la Lettre à Pompée Géminos. Dans ce qui reste du traité sur L'Imitation (rappelons que la rhétorique était définie comme «le talent, appuyé sur le métier, de faire un discours qui inspire confiance en matière politique, avec pour fin le bien dire »), un court passage présente les caractéristiques du discours démosthénien. Denys y voit en effet « de l'intensité dans l'expression, un bon dosage dans la peinture des mœurs, de la beauté dans le choix des mots, une disposition visant à l'utile, de la grâce liée à de la gravité, de la constance, toutes qualités qui séduisent au plus haut point les juges » (IX, 5, 4). Il mêle dans cette appréciation les qualités de fond aux qualités de forme sans distinguer les unes des autres, ce qui peut créer quelque confusion. Dans la Lettre à Pompée Géminos, Denys justifie, comme il l'avait déjà fait en V, 33, la méthode compa­ rative utilisée pour montrer la supériorité de Démos­ thène : «Si j'avais loué Démosthène en énumérant simplement ses qualités, j'aurais persuadé ses futurs lecteurs que c'est un bon orateur ; mais pour les persuader que c'est le plus fort de tous ceux qui se sont

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distingués en matière d'éloquence, il me fallait le comparer aux meilleurs auteurs» (XI, 1,7). Il redit que Démosthène est supérieur à Platon parce que, chez l'orateur, le style élevé ne sombre jamais dans la vanité ou le manque d'agrément (XI, 2, 6). Passant en revue les historiens, il indique que Théopompe pourrait peut-être rivaliser avec Démosthène en virtuo­ sité quand il se laisse aller à son inspiration naturelle (XI, 6, 10). 5) le Thucydide; le Dinarque. Denys interrompt une étude qu'il avait en train sur Démosthène (probablement le Traité critique perdu) pour accéder à la requête de Q. A. Tuberon et dire avec plus de précision ce qu'il pense (guère de bien) du style de Thucydide. Chemin faisant, il examine l'in­ fluence de l'historien sur Démosthène, le seul orateur à avoir rivalisé avec lui (VII, 53, 1) ; Démosthène en effet a pris chez Thucydide, selon Denys, un certain nombre de qualités que l'on ne trouve chez aucun des orateurs de ce temps là, et qui sont : « la rapidité, la concision, l'intensité, le mordant, la concentration et la virtuosité véhémente qui éveille les émotions » (VII, 53, 1). En revanche il s'est gardé d'imiter son emploi d'un vocabulaire par trop insolite ou de tournures frôlant le solécisme ; « il s'en est tenu à l'usage, embellis­ sant son elocution par les changements fréquents, la variété et le refus systématique de présenter une idée simplement, sans figure. Ce qu'il a imité, c'est l'enche­ vêtrement de la pensée, qui montre beaucoup de choses en peu de mots, qui étire en longueur la construction grammaticale, qui use d'une présentation paradoxale » (VII, 53,2-3). Pour convaincre le lecteur du bien-fondé de son analyse, Denys donne des exemples tirés du discours Sur les Symmories, insistant sur le caractère insolite de l'énoncé : « c'est plus fort que ce que dirait le toutvenant, et pourtant ce n'est pas abscons, ni obscur au point de réclamer une explication » (VII, 54, 3) ; car

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chez Démosthène m la recherche n'empêche pas la clarté » (VII, 54, 4), même quand l'élocution sort de l'usage courant et adopte un tour inhabituel. En manière de conclusion, Denys conseille à quiconque veut apprendre à bien parler de prendre comme modèle Démosthène, et «d'imiter ces constructions dans lesquelles brillent la brièveté, la virtuosité véhémente, la force, Γ intensi té, la magnificence, et les qualités qui leur sont apparentées » (VII, 55, 2). Dinarque est le seul orateur dont l'éloquence ressemble assez à celle de Démosthène pour que certains critiques aient pu hésiter à attribuer tel ou tel discours à l'un ou à l'autre. Démosthène pourtant, assure Denys, est aisément reconnaissable à un ton de voix, à la convenance qui varie avec chaque discours, mais aussi à la composition (synthesis), à l'acéré des formules, à l'organisation du discours, au pathétique, et surtout k la virtuosité véhémente. Aussi n'est-il pas très difficile de départager les deux orateurs : «Si la magnificence d'expression, l'inhabituel dans la composition, la vivacité de l'émotion, le mordant et l'esprit dans le moindre signe graphique, le souffle et la virtuosité véhémente sont omniprésents, il n'y a aucun obstacle à attribuer le discours à Démosthène » (XII, 7,4), tandis que si, sur ces points, on constate quelque faiblesse ou un manque de constance dans la perfection, le discours doit être rendu à Dinarque. Le portrait de Démosthène, on le voit, prend des couleurs de plus en plus flatteuses. Le style de l'orateur ne tombe jamais dans la platitude, est toujours dense et plein, possède une variété séduisante, de la véhémence et de la virtuosité quand il en faut pour arriver à ses fins, mais surtout un sens aigu de l'à-propos et de la convenance, avec toujours beaucoup de grâce et d'humanité. 6) le traité de la Synthesis. Aussi Démosthène va-t-il tout naturellement servir à illustrer l'étude de Denys sur la synthesis. Si l'on fait

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subir à certains extraits de cet orateur des réfections qui bouleversent la composition, on s'aperçoit aisément combien l'expression de Démosthène est « pleine et faite pour le barreau » (VI, 7, 6), ou encore combien la composition a de grâce (VI, 8, 3) ; de même on se rend aisément compte qu'une addition inutile au sens mais répondant à un souci d'harmonie, peut donner à la phrase un tour plus gracieux (VI, 9, 2). Denys, de plus en plus conscient de l'importance de la mélodie et du rythme dans la composition littéraire, insiste sur cet aspect du style de Démosthène. Il souligne qu'en certaines occasions, « Démosthène a cru bon d'attacher moins d'importance à la rigueur du sens dans les cola qu'à la beauté du rythme » (VI, 9, 9). Dans les chapitres présentant la prose poétique et la poésie-prose, Démosthène est, dans son domaine, placé sur un pied d'égalité avec Homère. C'est, aux yeux de Denys, celui des écrivains dont la prose est la plus riche en rythmes et vers de toutes sortes, si habilement enchâssés dans le discours qu'ils n'appa­ raissent qu'aux oreilles du connaisseur ; ce sont pourtant ces rythmes et ces vers qui, sans qu'on s'en aperçoive, donnent de la beauté à l'expression. « Qu'y a-t-il d'étonnant que Démosthène ait eu le souci de la belle sonorité, de la ligne mélodique » (VI, 25, 34), qu'il ait concentré son attention sur l'ordonnance des idées et la beauté formelle des mots (VI, 25, 31), lui qui désirait ne rien laisser au hasard, ni pour le fond, ni pour la forme? 7) le Démosthène IL Dans son dernier essai sur Démosthène, Denys souligne chez l'orateur l'harmonie du style, une harmonie pleine de raffinement, fruit d'un métier consommé (V, 35, 1-2). Pour montrer que le choix de Démosthène s'est porté sciemment sur l'harmonie moyenne, il renvoie le lecteur « à tous les passages où la mise en œuvre est solennelle, austère, empreinte de dignité, à tous ceux aussi où elle se montre pleine de séduction

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et ďagrément» (V, 43,1). Mélange ou alternance, l'harmonie moyenne se caractérise par la variété dans le tissu sonore ; Démosthène y excelle, et sait user de ce moyen pour produire en l'auditeur l'effet recherché : « on trouve ici des harmonies lentes et distendues, là des harmonies compactes et ramassées, tantôt des sons raboteux et mordants à Toreille, tantôt des sonorités douces et lénifiantes ; tantôt la phrase entraîne les auditeurs vers l'émotion violente, tantôt elle les dispose à l'impression morale » (V, 43, 2), tant est grand le pouvoir de la synthesis démosthénienne. Et celle-ci ne se borne pas à pratiquer en alternance plus ou moins rapide les harmonies extrêmes, elle sait aussi « nuancer à l'infini les formules de chaque discours, et, par un jeu subtil de tensions et de détentes », introduire mille variations dans le style (V, 46, 2). Denys reconnaît volontiers d'ailleurs que ces qualités mélodiques ou rythmiques, que ces modulations, tout en produisant l'effet voulu, restent le plus souvent inaperçues de l'auditeur ; « leur à-propos, leur juste proportion font qu'elles échappent à la perception ; tantôt elles s'enchevêtrent, tantôt elles sont fondues ensemble » (V, 48, 10), si bien que l'auditeur est séduit sans toujours en percevoir la raison. Gomme il l'avait fait dans le D.C.V., Denys insiste sur le rôle du travail dans la réussite de l'orateur : c'est à force d'exercices répétés et d'entraînement régulier que les formules apprises deviennent naturelles et sont employées avec pertinence (V, 51-52). On pourrait s'étonner du rôle joué par Démosthène dans les Opuscules rhétoriques si Denys n'avait lui-même expliqué les sentiments qui l'animaient à la lecture des discours de Démosthène, a l'enthousiasme » (au sens propre du terme) qui le soulevait alors et le faisait passer par mille émotions diverses. Alors que les discours d'Isocrate, si léchés, si sérieux, si élevés, ne lui procurent qu'un noble ennui, l'éloquence de Démosthène, vivifiée d'un bout à l'autre par un souffle puissant, le fait vibrer au gré de l'orateur. «A quel point alors les 2

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Athéniens et les Grecs devaient-ils être transportés par l'orateur... quand c'était lui-même qui prononçait ses propres discours, avec tout le prestige dont il jouissait, qu'il montrait au grand jour son émotion intérieure et la disposition de son âme, qu'il donnait à toutes ses paroles du lustre et de la couleur par une déclamation appropriée » (V, 27, 4-6). L'extraordinaire présence de l'orateur, après tant de siècles, le frémisse­ ment de vie et d'émotion, sensible encore dans ses discours, la tension dans l'élan oratoire, le dynamisme de l'expression forcent son admiration. L'aveu de Denys se produit dès le Démosthène I, lorsqu'il s'est mis à relire les discours de l'orateur pour y recueillir des matériaux utiles pour son étude. Alors, brûlant ce qu'il avait un instant adoré, il mesure la distance qui sépare Isocrate de Démosthène1 ; Lysias lui-même lui apparaît bien pâle. Nul autre parmi les orateurs, nul autre non plus parmi les historiens n'a autant de souffle ou de véhémence. Denys revient à la charge dans l'un des derniers chapitres du Démosthène II ; il montre sur des exemples comment, du texte même, peut s'induire la manière de le déclamer, avec « les accents, les inflexions de voix, les mimiques, les gestes des mains » (V, 54, 4). Chez Démosthène, l'action oratoire n'est pas une technique passe-partout, plaquée sur un texte ; elle est partie intégrante du texte, qui a pour rôle de souligner, d'expliciter les intentions de l'orateur, par une espèce de grandissement théâtral ; aussi est-elle un facteur essentiel pour la persuasion de l'auditeur, en contribuant à faire croire à la sincérité et à la spontanéité de l'orateur. Il faut beaucoup d'art pour que tout concoure au 1. Il mesure également l'importance de la forme pour mettre en valeur le fond. Une matière noble, si elle ne reçoit pas la forme appropriée, perd beaucoup de son intérêt et peut même manquer totalement de force persuasive. En III, 1,2, Denys avait souligné que les qualités indispensables pour un orateur (et qui faisaient défaut à Isocrate) étaient « la hardiesse et le volume sonore ».

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résultat cherché, beaucoup d'art pour avoir Гаіг naturel, dans l'expression comme dans la déclamation, alors que tout est calculé. Démosthène avait cet art-là ; c'est ce qui lui vaut l'admiration sans réserve de Denys. IV. LE TEXTE Le Démosthène est l'un des traités qui ne sont parvenus que par les copies, faites à la fin du xv e siècle à Venise, du manuscrit perdu Z dans lequel P. Costil a reconnu l'archétype du troisième corpus des Opuscules rhétoriques de Denys d'Harlicarnasse1. Ce manuscrit, déjà évoqué dans le tome I, puisqu'il contenait entre autres le traité des Orateurs Antiques, était lui-même constitué de deux codex indépendants, dont l'un2, celui qui nous intéresse ici, contenait le Démosthène et la première Lettre à Ammée) consacrée aux rapports de Démosthène avec Aristote. Ce codex, aisément reconnaissable parce que le nombre de lignes à la page était inférieur à celui de l'autre (32-33 lignes Teubner à la page, d'après P. Costil, contre 38-39 pour la partie contenant les Orateurs Antiques et le Thucydide), était en très mauvais état : à la perte du premier cahier, qui a fait disparaître le titre et une bonne partie de la description du style élevé, s'ajoutaient des détériorations diverses produites vraisemblablement par la moisissure qui avait dû ronger le haut des folios, d'où l'abondance des lacunes qu'attestent les témoins directs. Ce manuscrit Z a été copié plusieurs fois en entier vers la fin du xv e siècle, probablement vers 1480, à Venise où il se trouvait avant sa perte définitive, ou sa destruction, une fois les copies achevées. Pour le Démosthène, il existe de ce manuscrit trois témoins 1. Cf. P. Costil, Recherches sur la tradition manuscrite des Opera Rhetorica de Dengs d'Halicar nasse, Paris, 1949 (thèse complémentaire, exemplaires dactylographiés). 2. Pour l'autre codex, contenant les Orateurs Antiques, la Lettre à Pompée et le Thucydide, cf. t. I, p. 55-57.

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directs complets et un témoin direct incomplet. Ce sont : A = Ambrosianus D 119 sup ( = 267), papier, 280 χ 200 (écrit 190 χ 120), 30 lignes à la page ( = M dans Ted. Radermacher). Dans ce manuscrit très soigné, écrit de la main de Jean Rhosos pour le compte de Georges Merula qui l'acquit le 16 novembre 1482 comme l'atteste une note manuscrite sur la page de garde, le traité sur Démosthène suivi de la Lettre à Ammèe vient à la fin de la collection des Opuscules de Denys, après les Orateurs Antiques, la Lettre à Pompée et le Thucydide. Il commence un cahier, après deux folios laissés blancs ; mais le folio 97 ne comporte qu'un titre à l'encre rouge, Διονυσίου Άλικαρνάσεως περί της Δημοσθένους λέξεως, qui est repris comme titre courant en haut de tous les folios ; le texte ne commence effectivement qu'en haut du folio 98. A la fin du traité (fol. 138v), un explicit à l'encre rouge reproduit le titre ; la première Lettre à Ammèe commence sur le folio suivant. De nombreuses scolies à l'encre rouge, le rappel en marge du nom des auteurs cités, attestent le soin pris par Jean Rhosos pour donner à son texte une belle apparence. Le papier employé présente comme filigranes un chapeau de cardinal, du type Briquet 3388 ( = Florence 1475-79) et, à partir du fol. 115, une arbalète dans un cercle qui, aux dimensions près, ressemble au type Briquet 746 ( = Lucques 1469-73). I = Estensis α Κ 15 ( = gr. 68), papier, 260 χ 190 (écrit 195 χ 125), 30 lignes à la page. Le traité sur Démosthène vient en tête de la copie (fol. 17 à 50) mais deux cahiers blancs, ajoutés après coup, occupent les fol. 1 à 16, manifestant probablement l'espoir du relieur de retrouver un jour le début manquant. Le texte ne comporte ni titre ni notes marginales. Le papier utilisé pour la copie du Démosthène présente un filigrane uniforme, un chapeau de cardinal du type Briquet 3388, analogue à celui que l'on trouve dans le manuscrit précédent. La Lettre à

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Ammée suit, en cours de page, le traité sur Démosthène, mais la séparation est marquée par un titre à Tenere rouge. Ce manuscrit aurait été, selon P. Costil, la propriété de Georges Vaila, dont les manuscrits grecs furent acquis par Alberto Pio. V = Marcianus gr. X 34 ( = 1449), papier, 290 χ 225 (écrit 178 X 120), 31 lignes à la page, mais avec des variations allant de 28 à 33 lignes. Dans ce manuscrit, le Démosthène occupe les premiers cahiers (fol. 1 à 32), suivi en cours de folio par la Lettre à Ammée ; seuls les 31 premiers folios ont été copiés par Ermolao Barbaro ; à partir du fol. 31 v ( = V, 56, 5), il a laissé la plume à son secrétaire Thomas Didyme qui a terminé le Démosthène et a continué avec les autres opuscules du troisième corpus. Dans la partie copiée par Barbaro, les filigranes sont très divers, mais tous de type connu dans la région vénitienne. Le texte du Démosthène commence sans titre en haut du premier folio, mais dans la marge de droite, on peut lire un scolion Θουκυδίδου Ζκφρασις της στάσεως τώ; κερκυ­ ραίων qui reprend une expression d'Hermogène (περί Ιδεών Ι, 6, 227) commentant le passage de Thucydide par lequel débute le texte actuel du traité. Quelques notes marginales accompagnent le texte. J = Parisinus gr, 1743, papier, 235 χ 165 (écrit 153 χ 85), 24 lignes à la page. Ce manuscrit, d'une écriture penchée peu régulière, commence abruptement au début d'un cahier (fol. 2) par les mots σαντος αυτούς ου μόνον qui se trouvent au chapitre 12 du Démosthène, dans la citation du Contre Conon. Le premier cahier est signé à la fin (13v) du chiffre ζ, qui prouve Tamputation subie par ce manuscrit ; les folios 35 à 46, écrits sur du papier plus épais et plus sombre, sont insérés à Tintérieur du texte original de manière à réparer la bévue du scribe qui avait sauté un cahier dans la copie de son modèle ; cette réparation, contemporaine de la copie, a dû être faite par le scribe lui-même. Au folio 51 débute, en

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cours de page, la Lettre à Ammée. Les filigranes sont d'un type connu : chapeau de cardinal et arbalète dans un cercle. Quelques scolions explicatifs sont conservés en marge. Ce manuscrit eut lui-même deux apographes, copiés peu après lui, du temps où il n'était pas encore mutilé du début. L'examen des variantes dans la partie du Démosthène conservée par J ne laisse aucun doute sur la filiation. Ce sont : В = Parisinus gr. 1742, papier, 235 χ 160 (écrit 155 χ 85), 21 lignes à la page. Dans ce manuscrit, constitué de deux parties principales, le Démosthène occupe la seconde (fol. 66 à 128v), suivi de la Lettre à Ammée ; le filigrane, uniforme, est une ancre dans un cercle du type Briquet 459 ( = Vienne 1499) ou 463 (Venise 1498) ; les cahiers y sont régulièrement numérotés de 1 à 9. Un titre à l'encre rouge, en haut du fol. 66, annonce Θουκυδίδου Ικφρασι,ς της στάσεως των Κερκυραίων ; des guillemets à l'encre rouge mar­ quent les citations ; il y a quelques annotations marginales, également à l'encre rouge. Τ = Vaiicanus Palatinus 58, papier, 278 X 200 (écrit 200 χ 100), 30 lignes à la page ( = Ρ dans l'éd. Radermacher). Ce manuscrit constitué de trois sections contient dans sa partie centrale le traité sur Démosthène (fol. 33 à 79), précédant comme toujours la Lettre à Ammée. Le titre à Tenere rouge, précédé d'un bandeau, est le même que celui de В (il devait donc se trouver dans J) ; des scolies à l'encre rouge sont copiées dans les marges ; les cahiers sont numérotés de 1 à 6 (ou 7 si l'on tient compte de la Lettre à Ammée). Le filigrane, arbalète dans un cercle (type Briquet 746 = Lucques 1469-73), est uniforme dans cette partie. Il suit de là que, pour le traité sur Démosthène, l'archétype Z, modèle direct ou indirect de tous les manuscrits conservés, peut être reconstitué par le consensus des quatre témoins directs, Л, J, V, J quand ce dernier est disponible, sinon par le consensus de Л, /, V, Β, Τ (pour les douze premiers chapitres). Mais

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cet archétype lui-même, mutilé de tout un long dévelop­ pement initial sur le style élevé, abîmé par des lacunes dont témoignent honnêtement ses apographes directs, déparé probablement aussi par des fautes de copie ou d'autres lacunes dissimulées parfois sous des réfec­ tions anciennes, est un reflet assez pâle de ce qu'a dû être réellement ce traité de Denys, riche et divers, mais ne possédant assurément pas la clarté d'exposition ou la rigueur de classification que l'on trouvait dans les œuvres d'Hermogène. La tradition indirecte. Pourtant le Dèmosthène, soit dans sa version primitive quand il ne contenait que les trente-trois premiers chapitres, soit dans sa version définitive, a été souvent lu, approuvé ou critiqué. A l'ami de Pompée Geminos qui, choqué par les jugements sévères portés dans cet opuscule sur le style de Platon, réclamait plus ample explication, Denys répond par la Lettre à Pompée Géminos dans laquelle il reproduit verbatim (XI, 2, 1) le long passage incriminé (V, 5, 1 à 7, 1). Le nombre assez restreint de variantes montre que Denys n'a pratiquement pas remanié le texte du Dèmosthène I pour le joindre à son étude ultérieure sur les harmonies. Dans ce cas-là, l'emprunt de Denys à lui-même est officiel et présenté comme tel. Mais Denys reprend aussi à l'occasion des idées qu'il a déjà développées ailleurs, à peu près dans les mêmes termes, sans pourtant que la citation soit parfaitement exacte. Par exemple, en V, 51, Denys répond par avance, comme il l'avait fait dans le D.C.V. (VI, 25,30 sqq.), aux objections possibles de ceux qui contesteraient que tout, chez Dèmosthène, rythmes, sonorités, harmo­ nies, soit aussi exactement calculé que le prétend Denys ; beaucoup d'expressions employées sont proches parentes ; les comparaisons avec les autres artistes, les allusions aux autres écrivains sont les mêmes, mais la mise en œuvre, légèrement différente, ne permet pas d'utiliser un texte pour éventuellement corriger l'autre.

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Un autre exemple, assez curieux, est d'interprétation incertaine. Denys en effet a l'habitude de citer souvent de mêmes extraits d'auteurs, ceux probablement qui devaient être couramment et classiquement utilisés dans les écoles de rhétorique. C'est ainsi que la citation de Thucydide par laquelle débute le Démosthène dans son état actuel, lui sert aussi dans l'opuscule consacré à Thucydide1 : Denys y souligne les défauts de style et refait à sa manière certaines phrases pour leur donner plus de clarté ou plus de correction. Or le texte de Thucydide cité dans le Démosthène est en plusieurs endroits différent de celui cité dans le Thucydide, et même il intègre une fois au moins une correction proposée par Denys dans le Thucydide (¿ς το κοωνουσθαι au lieu de του καινοΰσθαι). Faut-il supposer que Denys possédait deux exemplaires légère­ ment différents de l'œuvre de l'historien, ou bien, plus simplement, qu'il n'était pas très pointilleux sur l'exactitude des citations? Les deux explications sont plausibles ; la seconde, qui paraît peu compatible avec la conception que se fait Denys du travail minu­ tieux des écrivains et de la valeur artistique de leurs œuvres, est pourtant confortée par la désinvolture avec laquelle il transcrit en attique, par exemple, les citations d'Hérodote destinées à montrer la qualité des harmonies chez cet écrivain2. Les plus importants utilisateurs de Denys furent pourtant les rhéteurs des siècles postérieurs. Quintilien s'en inspire, dans le chapitre (IX, 4) qu'il consacre à la composition stylistique : Denys y est nommément cité (88) à propos de l'appréciation des diverses formules 1. Cf. W. Kendrick Pritchett, Dionysius of Halicarnassus, On Thucydides, Berkeley-Los Angeles-Londres, 1975 ou encore H. V. Appel, Literary Quotation and Allusion, Diss. Columbia, 1935. L. Radermacher {Philologus, 59, 1900, p. 177-183) a montré que, dans le Démosthène, Denys citait à partir d'un texte, tandis que, dans le Thucydide, il le faisait de mémoire, du moine pour les brefs passages. 2. Cf. V, 41, 5. Denys avait déjà usé de cette pratique en VI, 3, 15 et 4, 8.

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rythmiques. Hermogène1 également est tout nourri de l'enseignement de Denys auquel il fait pourtant rarement référence. Ses commentateurs sont plus francs, Syrianus2 d'abord, à qui l'on doit d'avoir conservé une citation de Gorgias qui illustrait, dans le Démosihène, le premier chapitre consacré au style élevé. Commentant en effet un passage du περί ιδεών (II, 9, p. 377, 10-13 Rabe) où, dans le chapitre dédié à la deinotès, Hermogène évoquait les sophistes Polos, Gorgias, et Ménon, Syrianus (In Hermogenem Commentaria, p. 90 Rabe) note que « Penys l'ancien, dans le second tome des Caractères de style, parlant de Gorgias, dit... ». Cette citation de Denys, en incluant une de Gorgias, est d'autant plus précieuse qu'elle permet de combler en partie la lacune qui nous prive d'une grande partie de la description du style élevé, dont Gorgias est considéré par Denys comme l'initiateur8. La citation de Denys faite par Syrianus est tradition­ nellement mise telle quelle en tête du traité dans les éditions modernes ; pour éviter toute confusion, il a semblé préférable d'en rendre typographiquement la paternité à Syrianus, et de faire commencer le texte du Démosthène, tel que le livrent les manuscrits, en haut d'une page, sans titre, reproduisant la disposition originale des dits manuscrits. Le Commentaire de Syrianus a fourni la base du corps de scolies que l'on peut voir dans les marges des manuscrits d'Hermogène ; il a été également englobé dans les commentaires byzantins tardifs, notamment celui de Maxime Planude (cf. Walz, V, p. 548). Le commentaire de Syrianus édité par Rabe d'après deux manuscrits du xni e siècle, Marcianus gr. 433 et Messanensis Sancti Salvatoris 118, est moins complet que celui qui figure dans les marges de deux précieux manuscrits d'Hermogène, Parisinus gr. 1983 du x e siècle (fol. 250, note 15) et Parisinus 1. Pour Hermogène, l'édition de référence est celle de H. Rabe [Rhetores graeci, VI, Leipzig, 1913, repr. 1969). 2. Pour Syrianus, l'édition de référence est aussi celle de H. Rabe, I Commentario in libros περί ιδεών, Leipzig, 1892. 3. Cf. p. 3, η. 1.

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gr. 2977 du xi e siècle (fol. 295v, 1. 1), et qui sera donc retenu en priorité dans la présente édition. On doit à Syrianus une autre indication, peu fidèle à Denys, sur la qualification des types de style, « Denys dit qu'il existe trois types de style, le sec, le moyen, l'abondant, τον ίσχνόν, τον μέσον, τον άδρόν » (Rabe, ρ. 99, 18-20). Or si les deux premiers adjectifs font partie du vocabulaire de Denys, le troisième lui est étranger. Familier à l'auteur du Traité du Sublime (cf. 40, 4), ce terme était devenu classique dans la nomenclature des caractères de style ; aussi, anachroniquement, le trouve-t-on souvent dans les scholies marginales du Démosihène se référant au style élevé. Le Démosihène est nommément cité par le commenta­ teur d'Hermogène que l'on a l'habitude d'appeler le Rhéteur Anonyme, un fervent admirateur de Denys (cf. t. III, p. 47). A la fin en effet du livre I de son Περί ιδεών, Hermogène évoquait Denys, ce qui appelle une note du Rhéteur Anonyme mettant directement en cause le Démosihène. « C'est de Denys d'Halicarnasse qu'il est question, l'auteur qui a traité des types de style (χαρακτήρες) utilisés par Lysias, Démosthène, Isocrate, Hypéride, Thucydide. Du point de vue de la lexis, il a montré, notamment dans le traité sur Démosthène, qu'il y a trois types de style (λέξεως χαρακτήρες) ; le premier est έξηλλαγμένη καΐ περιττή καΐ εγκατάσκευος και τοις επιθέτοις κόσμοις άπασι συμπεπληρωμένη ( = V, 1,3), le second est αφελής ( = V , 2,1), ήν έτελείωσεν ó Λυσίας ( = V, 2,3), le troisième est μικτή και σύνθετος έκ τούτοιν τοϊν 8υεΐν(= V, 3, 1),ήν έπετήδευσεν 'Ισοκράτης και Πλάτων ( = V , 3,2). Et donc Démosthène, sélectionnant de tous ces styles la fraction utile, a constitué un mode d'expression unique, à partir d'un grand nombre, un mode d'expression varié, composé du mélange de tous les styles (έξ απάντων το χρήσιμον έκλεξάμενος, μίαν έκ πολ>ών διάλεκτον απετέλεσε, ποικίλην καΐ μικτήν έξ άπάσης ιδέας = V, 8, 2) ». Ce commentaire (Walz VII, p. 1049 = Paris, gr. 1983, fol. 217, note 62), qui reprend mot pour mot des expressions du Démosthène

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dans son état actuel tronqué, sans rien introduire d'autre, tendrait à prouver que, au moment de sa rédaction, qui ne peut être postérieure au x e siècle, époque où fut probablement copié le Paris, gr. 1983, le traité sur Démosthène était déjà amputé de son début : il est significatif en effet que la définition du style élevé reproduise celle qui, dans le Démosthène, termine la description et a été conservée dans les manuscrits de Denys, alors que celle du style mixte par exemple est empruntée au début du chapitre correspondant. Enfin Jean de Sicile, dans un commentaire au περί ευρέσεως d'Hermogène (cf. Bekker, Anecdota graeca, p. 1454), cite d'après Denys (à en juger par la coïncidence des fragments) la narration du Contre Tisis de Lysias (V, 11). Le texte livré par Jean de Sicile dans le Baroccianus 175 du xv e siècle (fol. 83) ou par le Parisinus gr. 2922 copié par André Darmarios au χνι β siècle (fol. 109) est plus complet que celui que Ton peut lire dans les manuscrits de Denys : l'exemplaire du Démosthène dont se servait Jean de Sicile n'était pas dénaturé par les détériorations matérielles qui ont affecté Z, l'archétype de tous les manuscrits actuels de Denys. Principes ďédition. L'établissement du texte, du moins du texte de l'archétype, est relativement simple pour ce traité dans la mesure où tous les manuscrits dérivent d'une source unique. Le revers de la médaille, c'est que Ton n'a aucun moyen d'aller au-delà, pour combler les lacunes ou réparer les dégradations diverses que l'on trouve dans l'ancêtre commun. Les quelques variantes que proposent les manuscrits sont le fruit, le plus souvent, des conjectures plus ou moins heureuses des copistes1 ; elles méritent d'être retenues dans la 1. Jean Rhosos en particulier (dans A) ou Ermolao Barbaro (dans V) corrigent le texte ou essaient de combler les lacunes de l'archétype.

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mesure où l'on peut espérer que ces scribes, dont quelques-uns sont fameux, avaient de la littérature grecque une meilleure connaissance que les modernes. Quant au titre, disparu de l'archétype, celui que propose Jean Rhosos en le tirant de Tune des dernières phrases du traité et qui est généralement adopté par les éditeurs modernes n'a pas plus de valeur que celui, visiblement erroné, qui peut se lire dans les apographes de J et qui n'est dû qu'à la bévue du copiste de J. Il en a outre le tort de masquer la dualité du traité. Aussi a-t-il paru préférable de s'en tenir au titre le plus neutre possible, analogue à ceux qui annoncent les diverses études constituant le tome I des Orateurs Antiques. Comme dans le tome I, l'apparat critique rend compte, chaque fois que Denys cite des extraits d'auteurs connus par ailleurs, du texte représentant le consensus des manuscrits pour les auteurs considérés1. J'ai intégralement collationné, sur micro-films ou sur le manuscrit lui-même, les quatre témoins directs, ainsi que B, l'apographe parisien de J, utile seulement jusqu'au chapitre 12 ; pour Τ (= Ρ chez Radermacher), je me suis en général fiée à la collation de Radermacher2. L'apparat critique fourni dans la présente édition diffère donc sensiblement de celui que l'on peut lire dans l'édition Teubner, qui ne rend compte que d'un témoin direct, A ( = M chez Radermacher) et de deux témoins indirects, В et T, tous deux copiés, 1. C'est ce que signifie la simple indication du nom de l'auteur. Quand il y a divergence, l'apparat fait état des leçons des manus­ crits d'après l'édition correspondante dans la Colleclion des Universités de France. 2. Je l'ai fait avec d'autant moins de scrupule que, frère jumeau de B, mais copié par un scribe plus consciencieux, il présente pratiquement les mêmes variantes que B, tout en évitant un certain nombre de bévues grossières dont le copiste de В est coutumier et que je me suis gardée de reproduire dans l'apparat, sauf exception (on les trouvera généralement indiquées dans l'édition de Radermacher). L'apparat de la présente édition ne contient en principe, jusqu'au chap. 12, que les leçons communes à В et Г, et qui donc, selon toute vraisemblance, dérivent de J.

NOTIGE

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plutôt mal, sur un même témoin direct, J. Le texte n'en est pas pour autant profondément modifié ; simplement le lecteur aura une vision plus claire de l'état de l'archétype Z à travers ses quatre témoins directs. La présentation générale du texte et de la traduction est la même que celle précédemment adoptée ; les citations sont toujours imprimées en italique, avec la numérotation en usage dans les éditions des auteurs concernés. Pour la traduction des citations, j'ai fait largement appel, même si je ne les ai pas toujours suivies à la lettre, aux traductions des différents auteurs présentées dans la Collection des Universités de France. Ce m'est un agréable devoir d'exprimer une fois de plus ma vive gratitude envers M. Jacques Bompaire qui, avec autant de courtoisie que de compétence, m'a aidée de ses critiques et de ses conseils, et grâce à qui ce Dèmoslhène est un peu moins imparfait. A MUe Odile Auger, qui a pris la peine de m'aider à relire les épreuves, j'adresse aussi mes sincères remerciements.

SIGLA

^

Ambrosianus D 119 sup. (== gr. 267) Estensis α К 5, 15 ( = gr. 68) Marcianus app. gr. X 34 (coli. 1449) Parisinus graecus 1743 (a V, 12, 2) __ \ В Parisinus graecus 1742 Τ Palatinus Vaticanus gr. 58 (usque ad V, 12, 2)

saec. XV ex. saec. XV ex. saec. XV ex. saec. XV ex. saec. XV ex. saec. XV ex.

v

Denys l'Ancien 1 , dans le second tome des Caractères de Style, dit à propos de Gorgias :

. 1. 1 De lui, je n'ai rien trouvé orgias comme plaidoyer judiciaire ; mis à part de rares harangues délibératives et quelques traités techniques, il a surtout laissé des discours d'apparat. Voici, dans cette catégorie, le caractère du type d'élo­ quence dont il use (il fait dans ce passage2 l'éloge des Athéniens qui se sont distingués à la guerre). Que manquait-il à ces citoyens de ce que des citoyens doivent avoir? Quy avaient-ils de ce que des citoyens doivent ne pas avoir? Puissé-je être capable de dire ce que je veux ! puissé-je vouloir dire ce qui convient, pour esquiver le ressentiment des dieux, pour éviter la jalousie des hommes ! Cest qu'ils possédaient des dieux le mérite, des hommes la mortalité. Ils jugeaient une indulgence secourable bien préférable à une justice intransigeante, bien préférable aussi à la minutie de la loi la droiture des paroles; ils considéraient comme une loi absolument divine et universelle de dire ou de taire, de laisser ou de faire ce qu'il faut quand il faut; ils avaient développé en eux deux 1. Pour ce passage, conservé grâce aux commentateurs d'Hermogène, cf. Notice p. 39. Sur Gorgias, l'initiateur du style t poétique et figuré », cf. II, 3, 4-5 ; I I I , 1, 4 ; IV, 19, 2. 2. Diels-Kranz, V.S. 82 fgt 6. C'était probablement la péroraison de VEpitaphios composé par Gorgias à la mémoire des Athéniens morts pour la patrie et prononcé peu après 421. Pour une appréciation de ce passage, cf. F. Blass, Die attische Beredsamkeit, 2 e éd. Leipzig, 1887, t. I, p. 47 sqq. et plus récemment J . D. Denniston, Greek Prose Style, Oxford, 1952, p. 12.

v {ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ) Διονύσιος ό πρεσβύτερος èv τω δευτέρω περί χαρακτήρων περί Γοργίου λέγων τάδε φησί * 1. 1 Δικανικοίς μ€ν ουν ου ττ€ρΐ€τυχον αυτού λ ό γ ο ι ς , δ η μ η γορικοΐς бе ο λ ί γ ο ι ς και τισι καΐ τέχναις, τοις бс ιτλβίοσιν бтгібсіктікоіс. Τ η ς бе ιδέας αυτού των λ ό γ ω ν τοιούτος ό χ α ρ ά κ τ η ρ ' έγκωμιάζίΐ бе τους l v π ο λ έ μ ο ι ς άριστ€υσαντας

'Αθηναίων * Τι γαρ άπήν τοις άνδράσι τούτοις, ών δεϊ άνδράσι προσεϊναι ; Τι δε και προσην, ών ον δεϊ προσεϊναι ; Ειπείν δνναίμην, ă βονλομαι, βονλοίμην δέ, â δεϊ, λαθών μεν τήν θείαν νέμεσιν, φογών δέ τον άνθρώπινον φθόνον. Ούτοι γαρ έκέκτηντο ενθεον μέν την άρετήν, άνθρώπινον δέ το θνητόν, πολλά μέν δη το πραον επιεικές τον ανθάδονς δίκαιον προκρίνοντες, πολλά δέ νόμον άκριξείας λόγων ορθότητα, τοϋτο νομίζοντες θειότατον και κοινότατον νόμον το δέον èv τω δέοντι και λέγειν Syrianus, In Hermogenem Commentarla (I, p. 90-91 Rabe). Sigla Ρ Parisinus graecus 1983 s. X (fol. 250) R Parisinus graecus 2977 s. XI (fol. 295 v°) V Marcianus graecus 433 s. XIII S Messanensis S. Salv. 118 s. XIII 3 αύτου post ούν praeb. PR || 9 καΐ om. VS || ού δει προ­ σεϊναι PR : δει άπεΐναι V διαπεΐναι S || 13-15 πολλά — ορθότητα om. VS || 13 πραον Spengel : παρόν PR || 15 τοΰτο PR : τούτον VS.

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DÉMOSTHÈNE

V, 1,1

qualités essentielles, Γ intelligence et la force physique, usant de Γ une pour délibérer, de l'autre pour exécuter ; ils secouraient ceux qu'une malchance injuste accablait, châtiaient ceux qu'une chance injuste favorisait; ils se montraient réfractaires à l'intérêt, partisans de la convenance; le sensé de l'intelligence arrêtait l'insensé de la force physique ; ils répondaient à l'insolence par l'insolence, à la courtoisie par la courtoisie, à Γ intrépidité par l'intrépidité, à la terreur par la terreur. En portent témoignage les trophées dressés aux dépens des ennemis, offrandes à Zeus mais aussi monuments de leur valeur. Ils n'ignoraient ni les instincts belliqueux, ni les amours régulières, ni la contestation armée, ni la paix harmonieuse ; ils montraient du sérieux envers les dieux par leur justice, de la piété envers leurs parents par les soins dont ils les entouraient, de la justice envers leurs concitoyens par leur souci d'égalité, du respect envers leurs amis par leur fidélité. Cesi pourquoi le regret de leur mort avec eux n}esl pas mort; immortel, en des corps non immortels, il vit alors qu'ils ont cessé de vivre1. Dans ce passage, Gorgias a accumulé les termes nobles ; énonçant des idées assez passe-partout, il use de parisoees, d'homéoarctes, ou d'homéotéleutes, pour embellir son propos d'un bout à l'autre, jusqu'à satiété.

1. Une traduction peut difficilement rendre compte de l'accumulation des figures de style et du cliquetis verbal que souligne le jugement qui accompagne l'extrait de Gorgias et qui, môme s'il n'est pas exactement de Denys, doit résumer assez bien sa pensée.

V, 1,1

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

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καί σιγαν και ποιείν , καΐ δισσά άσκήσαντες μάλιστα ων δει, γνώμην , τήν μεν βουλενοντες τήν δ9 αποτελούντες, θεράποντες μεν των αδίκως δυστυχούντων, κολασταΐ δε των αδίκως ευτυχούντων, αυθάδεις προς το συμφέρον, εύόργητοι προς το πρέπον, τω φρονίμω της γνώμης παύοντες το αφρον , ύζρισταί εις τους ύξριστάς, κόσμιοι εις τους κοσμίους, αφοξοι εις τους άφόξους, δεινοί èv τοις δεινόις. Μαρτύρια δε τούτων τρόπαια έστήσαντο των πολεμίων, Διός μεν αγάλματα, εαυτών δε αναθήματα, ουκ άπειροι ούτε έμφυτου "Αρεος ούτε νομίμων ερώτων οϋτε ένοπλίου ίριδος οϋτε φιλοκάλου εΙρήνης, σεμνοί μέν προς τους θεούς τω δικαίω, δσιοι δέ προς τους τοκέας τη θεραπεία, δίκαιοι μεν προς τους αστούς τω ϊσω, ευσεξεις δε προς Χούς φίλους τη πίστει. Τοιγαροϋν αυτών αποθανόντων ό πόθος ού συναπέθανεν, αλλ9 αθάνατος èv ούκ άθανάτοις σώμασι ζη ού ζώντων. Σεμνας γάρ ένταΰθα συμφορήσας λέξεις 6 Γοργίας εννοίας έπιπολαιοτέρας εξαγγέλλει τοις τε παρίσοις καί όμοιοάρκτοις καί όμοιοτελεύτοις καλλωπίζων διόλου προσκόρως τον λόγον.

1 καί έαν add. Diels-Kranz || 1-3 καί δισσα — αποτελούντες om. VS H 2 καί ^ώμην add. Fossiue || 5 αυθάδεις προς το συμφέ­ ρον om. VS H 6 της ^ώμης a d d · Sauppius || 7 ύβριστάς PR : υβρίζοντας VS || 10 εαυτών Diels-Kranz : τούτων codd. || 11 "Αρεος PR : "Αρεως VS || νομίμων PRS : νόμων V || 12 μέν Denniston : δέ V om. PRS || 16 ού om. V || άλλ* αθάνατος R : άλλα θάνατος PV άλλα αθάνατος S || ούκ έν V || άθανάτοις VS : άσωμάτοις PR || 19 έπιπολαιοτέρας PR : -παλαιό- VS || εξαγγέλλει PRV : -γέλλων S || 20 όμοιοάρκτοις PR : όμοιάρκτοις VS.

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DÉMOSTHÈNE

V, 1,2

2 3 . cdles g||if par hasardi étaient restées en arrière, apprenant les événements déjà survenus, cherchaient à aller plus loin encore dans les idées nouvelles2, en raffinant sur l'ingéniosité des entreprises ou Valrocilé des châtiments. 4 U acception habituelle des mots fut modifiée en fonction des actions à justifier. Une audace irréfléchie passa pour un courageux dévouement au parti, une temporisation calculée pour de la couardise déguisée, la modération pour le masque de la lâcheté, Γ intelligence de la situation générale pour de Γ inertie généralisée; vivacité et précipitation furent mises au compte de la virilité; c'était une sécurité d'élaborer un projet, élégant prétexte à dérobade3. 5 Le mécontent inspirait toujours confiance; à le contredire on devenait suspect. Intriguer avec succès était preuve d'intelligence ; prévenir les intrigues, d'habileté plus grande. Qui s'était arrangé pour n'avoir besoin de rien était un briseur de bande, tremblant devant l'adversaire. Bref, devancer qui se disposait à faire le mal valait des éloges, tout comme inciter à mal faire qui n'y songeait pas. 6 Ajoutez à cela que les liens familiaux se desserrèrent au profil des liens du parti, où l'on favorisait bien davantage les audaces inconsidérées ; loin de s'appuyer sur les lois existantes pour défendre leurs intérêts, de telles associations se dressaient en effet contre l'ordre établi pour satisfaire des convoitises. Les engagements mutuels y tiraient leur force moins de la loi divine que de l'illégalité perpétrée en commun. 7 On n'accueillait les propositions honnêtes de 1. Notes complémentaires, p. 161. 2. Le texte proposé ici diffère légèrement de celui que Ton trouve dans le De Thucydide où Denys conserve le έφυστερίζοντα de Thucydide, le του καινουσθαι (varié en 29, 3 par ες το καινουσθαι), n'ajoute pas le τη, mais introduit έπιπύστει à la place du πύστει de Thucydide et propose tantôt περιτεχνήσει en 29, 1, tantôt έπιτεχνήσει en 29, 4. Il est probable que Denys était peu pointilleux sur l'exactitude et la cohérence des citations qu'il faisait. 3. Notes complémentaires, p. 161.

V, 1,2

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

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2 3 ων, και τα άφυστερίζοντά που πύστει τών προγενομένων πολύ επέφερε τήν ύπερζολήν ές το καινοϋσθαι τάς διανοίας των τ* επιχειρήσεων περιτεχνήσει και [τη] των τ^ωρ^ών άτοπία. 4 Και τήν εΐωθυϊαν αξίωσιν των ονομάτων ες τα ίργα άντήλλαξαν τη δικαιώσει. Τόλμα μεν γαρ αλόγιστος άνδρία φιλέταιρος ένομίσθη, μέλλησις δε προμηθής δειλία ευπρεπής, το δε σώφρον του άνανδρου πρόσχημα. Kal το προς άπαν ξυνετον έπίπαν άργόν, το δ9 εμπλήκτως οξύ ανδρός μοίρα προσετέθη, ασφάλεια δε το έπιξουλεύσασθαι, αποτροπής πρόφασις εϋλογος. 5 Και δ μεν χαλεπαίνων πιστός αεί, 6 δε άντιλέγων αύτω ύποπτος. Έπιζου^σας δέ τις τυχών τε ξυνετος και ύπονοήσας hi δεινότερος. Προξουλεύσας δε δπως μηδέν αύτω δεήσει, της τε εταιρίας διαλυτής και τους εναντίους έκπεπληγμένος. 'Απλώς δε 6 φθάσας τον μέλλοντα κακόν τι δραν έπηνεϊτο καΐ δ έπικελεύσας τον μή διανοούμενον. 6 Και μήν και το ξυγγενες του εταιρικού άλλοτριώτερον έγένετο, δια το ετοιμότερον είναι άπροφασίστως τολμαν. Ού γαρ μετά τών κειμένων νόμων ώφε№ας al τοιαϋται ξύνοδοι, άλλα παρά τους καθεστώτας πλεονεξία. Kal τάς είς σφας αυτούς πίστεις ού τω θείω καΐ νομίμω μάλλον έκρατύνοντο ή τω κοινή τι παρανομήσαι. 7 Τά τε από

TEST. : 1-9 άργόν : DIONYSIUS, De Thucydide ( = Δ), VII, 29,

1-6; 10 ασφάλεια -

22 πλεονεξία: : ibid. VII, 30, 1-31,3.

1 έστασιάζε — πόλε add. Sylb. e Thuc. || άφυστερίζοντα Ζ : έφυστ- Δ Thuc. || 3 ¿ς το Ζ : του Δ Thuc. || 4 post καΐ add. τη Ζ || 8-29 το бе — διδόμενοι : καΐ τα λοιπά μεχρί του V || 13 τε ΖΔ : non hab. Thuc. || 15 αύτφ ΖΔ : αυτών Thuc. || 23 είς Ζ : ές Thuc. || καΐ νομίμω Ζ : νόμω Thuc. || 24 τ φ : το Ι.

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DÉMOSTHÈNE

V, 1,2

l'adversaire que pour sauvegarder l'avenir, si l'on avail le dessus, non par générosité. On aimail mieux se venger d'une offense que s'arranger pour ne pas la subir. Les serments de réconciliation, quand on en échangeait, ne valaient que sur le moment, tant que duraient les embarras de chacun, en l'absence d'un secours venu d'ailleurs. 3 Voilà donc un échantillon de ce style insolite, recherché, fortement structuré, plein à craquer de toutes sortes d'ornements ajoutés ; Thucydide en est le modèle et la règle1 ; aucun de ses successeurs ne Га dépassé ni n'a su l'imiter. 2. 1 Le second type est le style e sty e пш u n ^ s j m pj e > qU¡ ¿ 0 ^ apparemment sa mise en œuvre et sa vigueur à sa ressemblance avec le parler ordinaire ; il fut illustré par nombre de bons auteurs, historiens, philosophes ou orateurs. 2 Tous ceux en effet* qui ont publié des généalogies, ou traité d'histoire locale, qui ont étudié la philosophie de la nature, ou rédigé des dialogues à sujet moral (ce qu'a fait toute l'école socratique, Platon excepté), qui ont composé des harangues délibératives ou des plaidoyers judiciaires, ont toujours ou presque choisi ce type d'écriture. 3 L'auteur qui a mené ce style à sa perfection et en a fait ressortir le mieux les qualités particulières, c'est Lysias, fils de Képhalos, qui fut le contemporain de Gorgias et de Thucydide. Les choix littéraires, le talent de cet auteur ont été analysés dans mon ouvrage précé­ dent8 : point n'est donc besoin de revenir aujourd'hui sur la question. 1. Expression qu'affectionne Denys (cf. II, 18, 1 appliquée à Lysias, et plus tard V, 23, 1 appliquée à Platon, puis de nouveau VII, 2, 2 appliquée à Thucydide, mais en élargissant la formulation). 2. Notes complémentairesf p. 161. 3. Denys renvoie ici au Lysias, le premier opuscule du tome I des Orateurs Antiques, dont le Démosihène est censé être le premier volet du tome II. Denys insiste ici sur la simultanéité des divers types d'écriture.

V, 1,2

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

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των εναντίων καλώς λεγόμενα ένεδέχοντο έργων φυλακή, εΐ προϋχοιεν, καί ου γενναιότητι. Άντιτιμωρήσασθαί τέ τίνα περί πλείονος ήν ή αυτόν μή προπαθεϊν. Kal δρκοι εϊ που αρα γένοιντο ξυναλλαγής, èv τω αντίκα προς το απορον έκατέρφ διδόμενοι ίαχυον ουκ εχόντων αλλοθεν δνναμιν. 3 Ή μ€ν ουν εξηλλαγμενη και π€ριττή και έγκατάσκ€υος και τοις Ιπιθέτοις κάσμο^ απασι συμπεπληρωμενη λέξις, ής ορός και κανών ó Θουκυδίδης, δν ούθεις ουθ' ύπερεζάλετο των επιγινομένων оитс έμιμήσατο, τοιαύτη τις ήν. 2. 1 Ή бс έτερα λέξις ή λιτή και αφελής και δοκουσα κατασκευήν тс και Ισχυν τήν προς ιδιώτην εχειν λάγον [και] ομοιότητα πολλούς μέν €σχε και αγαθούς άνδρας προστάτας συγγράφεις тс και φιλοσόφους και ρήτορας* 2 Και γαρ ol τας γενεαλογίας εξενεγκαντες και ol τας τοπικας ιστορίας πραγματευσάμενοι και ol τα φυσικά φιλοσοφήσαντ€ς και ol των ηθικών διαλόγων ποιηταί, ών ήν το Σωκρατικόν διδασκαλείον παν εξω Πλάτωνος, και ol τους δημηγορικους ή δικανικούς συνταττόμενοι λόγους ολίγου δειν πάντες ταύτης εγενοντο της προαιρέσεως. 3 Έτελείωσε б э αυτήν καί εις άκρον ήγαγε της Ιδίας αρετής Λυσίας ó Κεφάλου, κατά τους αυτούς χρόνους Γοργία тс και Θουκυδίδη γενόμενος. Τίς δε ήν ή προαίρεσις αυτού και τίς ή δύναμις, cv τη προ ταύτης δεδήλωται γραφή και ουδέν δει νυν πάλιν υπέρ τών αυτών λέγειν.

TEST. : 3 Καί δρκοι — 6 δύναμιν : ibid. VII, 31, 4 — 7-9, 11, 21-22, cf. RHETOREM ANON., 1049 Walz VII*. 2 εί προΟχοιεν AI Thuc. : είπα οΟχοιεν Β εί πως ουχοιεν Τ || 3 ή om. BT H 10 έμιμήσατο AIV : έτιμήσατο ВТ ЦП καί seci. Usher II 14 προστάτας AVT : προς ταύτα Ι προς τάς Β || 22 Λυσίας ΑIV : λήρας Β λύρας Τ.

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V, 2 , 4

4 Qu'il me suffise d'ajouter une seule précision : dans la gamme des styles1, les auteurs dont j'ai parlé sont accordés à l'octave, vu qu'ils ont choisi les deux registres extrêmes, séparés par la distance maximum, et qu'ils les ont portés à la perfection avec un zèle tout divin ; entre la nêie et Vhypate2 en musique, il existe le même rapport que, en prose littéraire, entre le style de Lysias et celui de Thucydide. 5 L'un a le pouvoir de frapper les esprits, l'autre de leur être agréable ; l'un de faire se concentrer et se tendre la pensée, l'autre de la détendre et de l'amollir ; l'un de mener d'emblée à l'émotion violente, l'autre d'installer dans un climat moral3. Violenter et contraindre est le propre du style de Thucydide, ruser et escamoter les faits appartient au style de Lysias. 6 L'originalité audacieuse caractérise le type d'expres­ sion choisi par l'historien, la sécurité sans risques celui choisi par l'orateur4. ... parce que ne semble pas résider dans la recherche... il veut être sans recherche. 7 L'élaboration est néanmoins manifeste dans un style comme dans l'autre ; ces auteurs l'ont portée au paroxysme, chacun dans le mode qui lui est propre. L'un tend à faire croire qu'il y en a plus qu'en réalité, l'autre qu'il y en a moins. Des exemples illustrant cette façon de voir ne sont pas indispensables maintenant, me semble-t-il6. 8 Voilà donc deux caractères de style, à l'opposé l'un de l'autre dans leur manière de procéder, et tels sont les auteurs qui s'y sont distingués (ceux que je viens de citer) et qui sont remarquables, certes, les uns comme les autres, dans leur spécialité, mais à égalité entre eux, et donc imparfaits8.

1, 2, 3, 4, 5. Notes complémentaires, p. 161-162. 6. Il ressort de ce chapitre que Denys n'avait effectivement considéré dans sa description du style élevé que Gorgias et Thucydide (cf. 2.3). L'idée que les genres extrêmes sont imparfaits est un écho de la théorie théophrastienne (cf. aussi l'idéal aristo­ télicien de la mesotès).

V, 2,4

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

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4 'Αρκέσει бе τοσούτο μόνον ειπείν, δτι την διαπασών άρμονίαν οδτοι προς αλλήλους οι άνδρες ήρμόσαντο, τάς ακρότητας άμφοτέρας της λέξεως, αι πλείστον αλλήλων άπέχουσι, δαιμόνια σπουδή προελόμενοί тс και τελειώσαντβς. Και δνπερ ή νήτη προς {την) υπάτην ev μουσική λάγον έχει, τούτον ή Λυσίου λέξις cv πολιτική διαλέκτω προς την Ѳоикибібои. 5 *Ή μεν γαρ καταπλήξασθαι δύνα­ ται την διάνοιαν, ή бе ήδυναι, και ή μεν συστρέψαι και συντβΐναι τον νουν, ή бе άνεΐναι και μαλάξαι, και εις πάθος εκείνη προαγαγεΐν, εις бе ήθος αυτή καταστησαι. Και το μεν βιάσασθαι και προσαναγκάσαι τι της θουκυδίδου λέξεως ібіоѵ, то б' άπατήσαι και κλέψαι τα πράγματα της Λυσίου. 6 Kal ή μεν νεωτεροποιία καΐ το τόλμηρον της του συγγραφέως οίκεΐον Ιδέας, ή δ' ασφάλεια καΐ το

άκίνδυνον της του ρήτορος. . . . δτι ουκ cv έπιτηδεύσει φαίνεται . . . άνεπιτήδευτον elvai θέλει. 7 Κατεσκεύασται μεν ουν έκατέρα καΐ εις άκρον γ€ ήκ€ΐ της Ιδίας κατασκευής ' ρέπει δέ ή μεν επί το μάλλον ή πέφυκεν είναι бокеіѵ, ή δε επί το ήττον. Παραδειγμάτων бе καΐ ταύτης της λέξεως ουθέν εν τω παρόντι οΐμαι δεΐν. 8 Λύο μεν δή χαρακτήρες οδτοι λέξεως, τοσούτον αλ­ λήλων διάφοροι κατά τάς άγωγάς, καΐ άνδρες οι πρωτεύ­ σαντες εν αύτοΐς, ους διεξήλθον, δεινοί μεν εν τοις αυτών εργοις αμφότεροι, καθ* δ δε ϊσοι αλλήλων ήσαν, ατελείς.

5 την add. Sylb. || 6 τούτον A post coir : τοσούτον Ζ || 10 post καταστησαι pracb. ήδη τάλλα Ζ del. Sylb. πλην άλλα Rad. || 15 lacuna m fere 17 litt, praeb. codd. || 16 lac. fere 19 litt, praeb. codd. || 18 Ιδίας : οικείας I II 22 πρωτεύσαντες IV : προτεύσαντες ABT.

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DÉMOSTHÈNE

V, 3 , 1

3. 1 Le troisième type était le e sty e mixte s^e m ¡ x t e j f o r m é p a r Ja combinai­ son des deux précédents. Le premier auteur à Гаѵоіг peaufiné et lui avoir donné son éclat actuel fut peut-être Thrasymaque1 de Chalcédoine (comme le pense Théo­ phraste)2, peut-être quelqu'un d'autre, je ne saurais rien affirmer. 2 Quant aux auteurs qui l'ont adopté, amélioré, et mené tout près de la perfection, ce furent, chez les orateurs, Isocrate d'Athènes, chez les philo­ sophes, Platon, le disciple de Socrate. Impossible en effet de découvrir d'autres écrivains, Démosthène excepté, qui aient tiré meilleur parti des qualités indis­ pensables ou utiles, et qui aient montré plus d'art dans l'emploi du beau langage ou des ornements ajoutés3. 3 Le style de Thrasymaque, s'il rasymaque

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style moyen, manifeste des choix littéraires en soi dignes d'intérêt ; formé ďun assez heureux mélange, il emprunte aux deux autres styles ce que chacun d'eux a d'utile. 4 Malheureusement chez cet auteur le talent n'est pas à la hauteur de l'intention, comme le montre l'exemple suivant, tiré d'une des harangues publiques4 : Je souhaiterais5y Athéniens, avoir vécu au bon vieux temps, dans la situation de jadis, quand il suffisait aux jeunes de se taire, car la conjoncture ne les contraignait pas à prendre la parole: leurs aînés administraient correctement la cité. Mais puisque la divinité nous a réservés pour une époque comme celle-ci, où dans la cité et laissent les malheurs 1. Denys avait déjà cité Thrasymaque de Chalcédoine (il. с 430-400) comme un émule de Lysias, en 11, 6, 1 (où il faisait également référence à Théophraste) et en IV, 20, 2-3. Voir à ce propos G. M. A. Grube, « Thasymachus, Theophrastus and Dionysiusf, A.J.P. 73, 1958, p. 256-267. 2. Théophraste, fgt 4 Schmidt (cf. A. Mayer, Theophrasti περί λέξεως libri fragmenta, Leipzig, 1910, p. 6). Denys, comme en II, 6, 1, semble ici contester l'opinion de Théophraste. 3. Le style mixte réunit les qualités indispensables du style simple et la recherche esthétique propre au style orné. 4. 5. Notes complémentaires, p. 162.

V, 3, 1

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3. 1 Τρίτη λέξεως {Ιδέα} ήν ή μικτή тс και σύνθετος ск τούτων των δυειν, ην ό μεν πρώτος άρμοσάμενος και καταστησας είς τον νυν υπάρχοντα κόσμον εϊτε θρασύμαχος ó Χαλκηδόνιος ήν, ώς οΐεται Θεόφραστος, εϊτε άλλος Tisi ούκ εχω λέγειν. 2 Οι бе έκδεξάμενοι και άναθρεψαντες και ού ττολυ αιτοσχόντες του τ έλειωσα ι ρητόρων μεν Ισοκράτης ó * Αθηναίο ς εγένετο, φιλοσόφων δε Πλάτων ο Σωκρατικός * τούτων γαρ άμήχανον εύρειν των ανδρών ετέρους τινάς εξω Δημοσθένους ή τάναγκαΐα και χρήσιμα κρεΐττον άσκήσαντας ή τήν καλλιλογίαν και τάς επιθέτου ς κατασκευάς βέλτιον άποδειξαμένους. 3 Ή μεν ουν θρασυμάχου λέξις, ει δή πηγή τις ήν όντως της μεσότητος, αυτήν τήν προαίρεσιν εοικεν εχειν σπουδής άξίαν * κέκραται γαρ ευ πως και αυτό το χρήσιμον

€Ϊληφ€ν ίκατέρας. 4 Δυνάμ€ΐ бе ώς ούκ ίση (τη) βουλήσει κέχρηται παράδειγμα εξ ενός τών δημηγορικών λόγων τόδε· Έξονλόμην μέν, ώ άνδρες 'Αθηναίοι, μετασχεϊν εκείνον τον χρόνον τον παλαιού κάί τών πραγμάτων, ήνίκα σιωπαν άπέχρη τοις νεωτέροις, τών τε πρα­ γμάτων ονκ άναγκαζόντων άγορενειν και τών πρεσξντέρων ορθώς τήν πάλιν έπιτροπενόντων. 'Επειδή δ9 είς τοιοϋτον ημάς ανέθετο χρόνον ό δαίμων ώστε της πόλεως άκονειν, τάς

TEST. : 1-2, 9-10, cf. RHETOREM ANON. 1049 Walz VII 1 .

1 ίδέα add. Sylb. || 2 τούτων τών Ζ : τούτοιν τοΐν Rhetor Il 6 άποσχόντες : απέχοντες Ι || 8 τούτων : πλοΰτον V || 10 άσκήσαν­ τας IVT : -τες AB || 11 άποδειξαμένους Sylb. : -δεξ- codd. II 12 et δή Schenkl : ή codd. || πηγή Sadaeus : λοιπή codd. Il 13 έοικεν om. Ι || 15 δυνάμει бе ώς Sauppius : δυνάμεως ' ώς бе codd. || τη add. Reiskius || 20 νεωτέροις : -ροισι ΙII22 δ' AV : δέ Ι καΐ (ante επειδή) BT || 23-24 τους — προς ego : lac. fere 20 litt, praeb. codd.

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DÉMOSTHÈNE

V, 3 , 4

Kfondre continuellement sur eux,> alors que les plus graves de ces maux ne sont le fait ni des dieux ni de la fortune, mais de nos gouvernants1, force nous est de parler. Il faudrait en effet être stupide ou alors infiniment patient pour continuer à se laisser malmener par les premiers venus et à endosser la responsabilité de complots ou de vilenies tramés par d'autres. Nous en avons assez du passé, et d'avoir troqué la paix pour la guerre, et d'avoir vécu dans les dangers jusqu'à présent, heureux de chaque jour passé, tremblant pour le lendemain, et d'avoir remplacé la concorde par les inimitiés et les dissensions intestines. Quand les peuples en général doivent à un excès de fortune d'être insolents ou turbulents, nous avons, nous, été sages dans la fortune, mais fous dans le malheur qui d'ordinaire rend sages les peuples. Pourquoi dans ces conditions hésiter à exprimer son avis, pour peu qu'on ait eu à pâlir du présent et qu'on estime détenir un moyen de renverser la Situation? Et tout d'abord, ces orateurs ou hommes politiques qui s'opposent les uns aux autres, je vous montrerai qu'ils sont par leurs discours, les uns face aux autres, dans la position où se trouvent, inévitablement, des chicaneurs sans cervelle : chacun croit dire le conti aire de son adversaire, sans s'apercevoir que, dans la pratique, l'action est la même, et que le discours de l'un est inclus dans le discours de l'autre. Il suffit de considérer les objectifs fondamentaux de chacun des deux partis. En premier lieu, la constitution héritée de nos ancêtres les embarrasse, car, très facile à connaître, elle s'applique indistinctement à tous les citoyens. Aussi

1. Diverses restitutions ont été proposées : έτερων μέν αρχόντων dans la première lacune, πάσχειν dans la seconde, sont retenus par Diels-Kranz, Denniston, Untersteiner et Usher. Celle que je propose me paraît mieux balancer la phrase.

V, 3,4

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

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бе συμφοράς αυτούς καΐ τούτων τα μέγιστα μη θεών ίργα είναι μηδέ της τύχης άλλα τών έπιμεληθέντων, ανάγκη δή λέγειν. *Η γαρ αναίσθητος ή καρτερώτατός έστιν, δστις έξαμαρτάνειν εαυτόν iri παρέξει τοις βουλομένοις καί της ετέρων έπιξουλής τε καί κακίας αυτός ύποσχήσει τάς αιτίας. "Αλις γαρ ήμιν ó παρελθών χρόνος και αντί μέν εΙρήνης έν πολέμω γενέσθαι καί δια κινδύνων είς τόνδε τον χρόνον την μέν παρελθοϋσαν ήμέραν άγαπώσι, τήν δ9 επιοϋσαν δεδιόσιν, αντί δ9 ομονοίας είς έχθραν καί ταραμάς προς αλλήλους άφικέσθαι. Kal τους μεν άλλους το πλήθος τών αγαθών ύξρίζειν τε ποιεί και στασιάζειν, ημείς δε μετά μεν τών αγαθών έσωφρονοϋμεν, èv δε τοϊς κακοις εμάνημεν, ă τους άλλους σωφρονίζειν εϊωθεν. Τί δητα μέλλοι τις ăv γιγνώσκει εΙπείν, δτω γε λυπεϊσθαι επί τοϊς παροϋσι καί νομίζειν Ιχειν τι τοιούτον, ώς μηδέν ετι τοιούτον ëcrtai ; Πρώτον μεν ούν τους διαφερομένους προς αλλήλους και τών Ρητόρων και τών άλλων αποδείξω γε προς λόγων πεπονθότας προς αλλήλους, δπερ ανάγκη τους άνευ γνώμης φιλονεικοϋντας πάσχειν · οιόμενοι γαρ εναντία λέγειν άλλήλοις ουκ αισθάνονται τα αυτά πράττοντες ουδέ τον τών ετέρων λόγον έν τω τών ετέρων λόγω ενόντα. Σκέψασθε γαρ έξ αρχής â ζητοϋσιν έκάτεροι. Πρώτον μεν ή πάτριος πολιτεία ταραχήν αύτοις παρέχει ρφστη γνωσθήναι και κοινότατη τοις πολίταις ούσα πάσιν.

1 συμφοράς VT : συμφο A IB || έμπίπτειν — είς ego : lac. fere 18 litt, praeb. codd. || 3 δή Sylb. : бе codd. || 8 δια κινδύνων codd. : κινδύνω Rad. || έλθεΐν add. Diels || 15 & add. Diels || γιγνώσκει Diels : -κειν codd. γεγωνίσκειν (del. είπεΐν) Rad. Il γέγονε add. Diels. || 19 προς λόγων ego : προλέγων codd. έν τφ λέγειν Diels παρά λόγον Usener || 23 τών έτερων Blass : έτέρω codd. σφετέρω Cobe t.

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DÉMOSTHÈNE

V, 3,4

pour tout ce qui relève de noire jugement est-il indispensable d'écouter ce qu'ont dit nos ancêtres ; pour tout ce que nos aînés ont réglé eux-mêmes, il faut s'en informer auprès des gens au courant1. 5 Tel est donc le mode d'expression de Thrasymaque. Son style est à mi-chemin des deux précédents ; il est tempéré ; c'est un havre commode pour s'élancer vers l'un ou l'autre type de style. 4. 1 Quant au style d'Isocrate, socra e l'auteur qui eut un très grand renom en Grèce parmi les sophistes2, sans que notre homme ait jamais prononcé lui-même le moindre plaidoyer, ni privé ni public, mais pour avoir rédigé beaucoup de belles œuvres, de toutes catégories, j'ai déjà exposé tout à loisir quels en étaient, à mon avis, les traits caractéristiques3. Rien n'empêche pourtant d'en rappeler ici briève­ ment l'essentiel. Ce style possède la pureté et l'exacti­ tude de celui de Lysias ; sans jamais employer de vocables archaïques, de néologismes, de termes dia­ lectaux, il use du vocabulaire le plus ordinaire et le plus courant. 2 II a une couleur morale, de la persuasion, de l'agrément, évite comme celui de Lysias le tour figuré ; mais au style de Gorgias et de Thucydide, il emprunte la magnificence, la solennité, la beauté d'élocution. 3 Quand il s'agit d'instruire l'auditeur le plus clairement possible sur le sujet choisi, Isocrate s'exprime dans le style direct et sans ornement de Lysias ; mais quand il 1, 2. Notes complémentaires, p. 162-163. 3. Le second opuscule rédigé par Denys était effectivement consacré à l'étude du style d'Isocrate. Mais il le comparait surtout à celui de Lysias, lui accordant moins de simplicité mais plus de magnillcence. Il n'était pas question de Gorgias dans cet opuscule, sauf pour indiquer (III, 1, 2) qu'Isocrate avait suivi ses cours, mais s'était gardé de l'imiter (III, 1, 4). Il n'était donc pas inutile pour Denys de reprendre la question en modifiant son exposé, puisqu'il fait désormais d'Isocrate le représentant du style mixte, à mi-chemin de la simplicité de Lysias et du style ornemental de Gorgias (et de Thucydide).

V, 3,4

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

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*Οπόσα μέν σΰν [εκείνων] της ημετέρας γνώμης εστίν, άκονειν ανάγκη λόγων των παλαιοτέρων, όπόσα δ9 αυτοί έπεϊδον oi πρεσξντεροι, ταντα δε παρά των είδότων πυνθάνεσθαι. 5 Τ ο ι α ύ τ η μέν οδν τις ή θ ρ α σ υ μ ά χ € ΐ ο ς έρμην€ΐα, μέση τοΐν биеіѵ και €υκρατος και cię αμφότερους τους χ α ρ α κ ­ τήρας έπίκαιρον άφ€τήριον. 4«

1 Ή

бе Ι σ ο κ ρ ά τ ο υ ς

λέξις, δς μ έ γ ι σ τ ον δ ν ο μ α

cv

τοις Έ λ λ η σ ι ν ( Ι σ χ € ν c m σ ο φ ί α ) , α γ ώ ν α μέν ουτ* ίδιον οΰτ€ δ η μ ό σ ι ο ν ουδέ ν α ( τ ο υ α ν δ ρ ό ς ) άγωνισαμένου, γ ρ α φας

бе σ υ ν τ α ξ α μ έ ν ο υ

ττολλας

και κ α λ α ς

€ΐς

άπασαν

ιδέαν λ ό γ ω ν , δντινα χ α ρ α κ τ ή ρ α €χ€ΐν сфаіѵсто μοι, δια πλ€ΐόνων μέν ¿δήλωσα тгротсроѵ. Οόθέν δέ κωλυσ€ΐ και νυν έττι κ€φαλαίων αυτά τ α α ν α γ ­ καιότατα сітгсіѵ * δτι τ η ς μέν Λυσιακής λ έ ^ ω ς το καθαρόν €χ€ΐ και τ ο άκριζές * оитс γ α ρ αρχαίοις оитс ττ€ττοιημένοις 0&ТС γ λ ω τ τ η μ α τ ι κ ο ι ς

όνόμασιν

αλλά

τοις

κοινοτάτοις

και συνηθ€στάτοις κέχρηται. 2 'Ηθική тс και π ι θ α ν ή και ήδ€Ϊά έστι και тгсфеиус τ ή ν τροπικήν, ώσττ€ρ έκ€ΐνη, [τήν άττλήν] φ ρ ά σ ι ν , τ η ς δέ Ѳоикибібои και Γοργίου τ ή ν μ € γ α λοττρ€ΤΓ€ΐαν και σ€μνότητα και κ α λ λ ι λ ο γ ί α ν €ΐληφε. 3 Και €ΐς μέν τ ό διδάξαι τ ό ν άκροατήν σ α φ έ σ τ α τ α δ τι β ο ύ λ ο ι τ ο , τήν άττλήν και ά κ ό σ μ η τ ο ν έρμηνείαν έτατηδ€υ€ΐ τήν Λ υ σ ί ο υ ,

1 εκείνων delevi : έπέκεινα Reiskius || 2 λόγων Diels : λέγειν coda. || 6 τοΐν δυεΐν A in ras. Τ : τοΐν δυοΐν Ι τοις δυεΐν VB II αμφότερους Ι : έκατέρους V (in lac.) τέρους post lac. 5 litt. ABT || 8 ή δέ 'Ισοκράτους V in lac. : κράτους post lac. 10 litt. A I B T И 9 έΌχεν επί σοφίςι Sylb. ex I I I , 1, 2 : lac. fere 12 litt, codd. || 10 του ανδρός Rad. : lac. fere 12 litt. codd. || άγωνισαμένου V : νισαμένου (σαμένου A) post lac. A I B T || 12 Ιδέαν IV : εΐδέαν ΑΒΤ || 15 λυσιακής AIV : λισακής Β λυρακής Τ || 16 το om. V || 17 οΟτε γλωττηματικοΐς o m . Ι || 19 τήν άπλήν seci. Rad. || 21 εϊληφε Ι : άνεβνηφε AVBT || 23 Λυσίου AIV : λύρου BT.

54

DÉMOSTHÈNE

V, 4,3

veut le frapper par la beauté du vocabulaire et habiller le réel de solennité et de grandeur, il modèle son style sur le tour artificiel et recherché de Gorgias. 4 Son défaut1 alors est d'être parfois maniéré, dans son zèle à rivaliser avec les figures nouvelles utilisées par Gorgias (anti­ thèses, parallélismes ou formules analogues, quand ils excèdent la mesure et viennent mal à propos, gâtent irrémédiablement la magnificence de l'expression2) ; un défaut encore plus grave de ce style, c'est, à la poursuite de la beauté dans l'élocution et le rythme, de toujours prendre des précautions contre les heurts de voyelles3, et toujours des précautions contre l'emploi de lettres au son raboteux. 5 Et puis il est, de toutes les manières, à la poursuite de la période, non pas une période dense et compacte, mais une période qui s'allonge, s'étale4, et, à l'image du cours sinueux des fleuves, décrit quantité de méandres. De là, souvent, trop de longueur dans le style, un manque de sincérité, ďémotion, de vie qui le rendent plus apte à l'éloquence d'apparat qu'au débat réel5. Les exemples viendront un peu plus tard, quand l'occasion le réclamera. 6. 1 Le langage de Platon veut être lui aussi un mélange des deux caractères de style, l'élevé et le dépouillé, comme je l'ai dit déjà6, mais il ne réussit pas aussi bien dans les deux σίοη

1. Denys est beaucoup plus net ici en dénonçant le défaut d'Isocrate. Ses critiques, dans l'opuscule consacré à Isocrate, restaient beaucoup plus nuancées et hésitantes. 2. Cf. III, 2 , 7 . 3. Cf. III, 2,4-5. 4. Cf. III, 2 , 3 . 5. Cf. III, 13, 3-5. Pour Isocrate comme pour Lysias, Denys renvoie aux traités particuliers consacrés aux deux orateurs, ou aux exemples qui seront cités plus loin, destinés à établir, par comparaison, la supériorité de Démosthène. 6. Renvoi probable à V, 3, 2. Les chapitres 5, 6 et 7 (premier paragraphe) sont textuellement repris par Denys dans la Lettre à Pompée (XI, 2, 2).

V, 4,3

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

54

cię бе то καταττλήξασθαι τω каХХсі των ονομάτων (Јг\У σ€μνότητά тс και μ€γαληγορίαν ırcpıOcîvaı τοις Ίτράγμασι την стѲстоѵ και κατ€σκ€υασμένην ψράσιν των ircpl Γοργίαν Ικμέμακται. 4 Άμαρτάν» бе cv otç cbpaiţcToi іготс, TOUS Γοργίου vcapoòs σχηματισμούς ζηλουσα (τα γαρ аѵтіѲста тс και ττάρισα και τα τταραπλήσια τούτοις ουτ€ μ€τριάζοντα OUT' CV καιρώ γινόμενα καταισχύν» την μ€γαλοΐΓρ€ΐΓ€ΐαν αυτής), και Ιτι μάλλον cv ots τήν cůctrciav διώκουσα και τήν €υρυθμίαν δι' cuXagciaç ucv λαμ£άν€ΐ το συγκρουσαι τά φωνη€ντα των γραμμάτων бі' cuXaÇcias бе ıroıcÎTaı το χρήσασθαί τινι των τραχυνόντων. 5 Διώκ€ΐ б' ек ιταντός τρόπου τήν ігсріобоѵ оибс ταυτην στρογγυλην και ιτυκνήν αλλ' όιταγωγικήν τίνα καΐ ιτλατ€ΐαν και ττολλούς αγκώνας» ботгср oi μή κατ' cuOcîav рсоѵтсс ποταμοί ποιουσιν, Ιγκολπιζομένην. Ταύτα μέντοι ιτολλαχή μακροτέραν тс αυτήν ıroıcî каі άναληθ€στ€ραν άπαθη тс και (άψυχο ν και) πανηγυρικήν μάλλον ή Ιναγώνιον. Τοις бе παραδ€ΐγμασιν ολίγον иатсроѵ, δταν ό καιρός άπαιτη, χρήσομαι. 5. 1 Ή бе δή Πλατωνική διάλΰκτος ßouAcTai μέν ctvai και αυτή μίγμα έκατέρων των χαρακτήρων, του тс υψηλού και ίσχνοΟ, καθ aire ρ €ΐρηταί μοι ігротсроѵ, ігефикс б' ουχ ομοίως προς αμφότερους τους χαρακτήρας €Οτυχής·

TEST. : 20-23 DIONYSIUS, Ad Pompeium, XI, 2, 1 ( = Δ).

1 ή add id i || 2 σεμνότητα : σεμνότης τητα Β || 4 έκμέμακται Krüger (cf. 13.6) : έκμέμακεν codd. || 7 oöV èv Sadaeus : οΟτε codd. || 8 εύέπειαν V : εύέπιαν ΑΙΒ || 9 μέν : τα μεν Ι || 14 ευθείαν Ι : ευθείας AVBT || 15 έγκολπϋζομένην Α : -καλλωπιζ- Ι -καλλοπιζ- V -καλπιζ- Β -καλοπιζ- Τ || 16 άναληθεστέραν ΑIV : άληθεστέραν Β (rest, mg.) Τ || 17 άψυχον καΐ add. Sadaeus : lac. fere 10 litt. codd. || έναγώνιον AIV : εγκώνιον Β (rest, mg.) Τ H 18 άπαιτη AIV : -τει ВТ || 21 μϊγμα : δείγμα Δ || 23 τους χαρακτήρας om. V. 3

55

DÉMOSTHÈNE

V, 5,1

caractères. 2 Lorsqu'il utilise le tour dépouillé, simple et sans apprêt, il possède énormément d'agrément et d'humanité ; il a de la pureté à suffisance, est transparent comme le plus limpide des ruisseaux, ne le cède en rien, pour l'exactitude et la subtilité, au style des auteurs qui ont adopté ce mode d'écriture ; 3 il recherche un voca­ bulaire courant, vise à la clarté, dédaigne tout ornement ajouté. La patine ou le duvet d'ancienneté1, impercep­ tible, qui affleure à la surface, lui donne un air de verdeur, de la fraîcheur, un lumineux éclat ; comme il en émane des plus odorantes prairies, un parfum suave s'exhale de ce style. 4 La volubilité n'y signifie pas commérage, ni l'élégance ostentation. Lorsqu'en revanche le style de Platon prend sans mesure son élan2 vers le raffinement et la beauté d'élocution, ce qui lui arrive fréquemment, il se gâte considé­ rablement ; il a alors moins d'agrément que dans le cas précédent, un hellénisme moins pur, plus d'épaisseur ; il obscurcit ce qui est clair, le transforme en ténèbres ; il étire en longueur l'idée qu'il faudrait ramasser en quelques mots. 5 II se répand en périphrases vulgaires, faisant étalage d'une richesse de vocabulaire vide de contenu ; dédaignant les termes propres, pris dans leur acception courante, il cherche des mots fabriqués, 1. Dans la Lettre à Pompée, le terme coordonné καΐ ό χνους est absent, ce qui a conduit Radermacher à le supprimer dans le Démosthène. Maie il est à noter que les deux termes sont souvent associés (cf. en particulier V, 38, 6 où άρχαιοπινής qualifie χνοΰς). Un scholion, attesté dans A, V et «/, modèle de В et ÜT, explique πίνος par ¿ύπος (crasse), et précise que χνοΰς désigne ici le léger duvet que Ton trouve sur les fruits et qui leur donne de l'éclat. Les images empruntées à la végétation, qui suivent immédiatement, incitent à conserver ici ce terme. 2. Cf. V, 3, 5, avec l'image du mouillage d'où l'on s'embarque dans l'une ou l'autre direction. Denys en fait semble contredire, dans ces deux expressions, ce qu'il affirmait au début (V, 3, 1 et V, 5, 1) que le style mixte est un « mélange » ; il le présente plutôt ici et plus haut comme une alternance entre deux genres de style opposés, dont les emplois restent distincts et que Platon utilise dans des cas différents : Platon, d'après Denys, excelle dans l'un de ces genres mais échoue dans l'autre.

V, 5,2

55

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

2 "Οταν μέν ουν την Ισχνήν και άφ€λή και άποίητον έπιτηδαιη φράσιν, έκτάπως ήδ€ΐά έστι και φιλάνθρωπος ' καθαρά γαρ άποχρώντως γ(ν€ται και διαυγής, ¿кттгср τά διαφανέστατα των ναμάτων, άκριζής тс και Xcimrj παρ' ήντινουν ίτέραν των [ci$] τήν αυτήν біоХсктоѵ €ΐργασμένων * 3 τήν тс κοινότητα бижсі των ¿νομάτων και τήν σαφήν€ΐαν άσκ€ΐ, πάσης итгсрібоиоа κατασκ€υής επιθέτου. "О тс πίνος αυτή και 6 χνοΟς ό της αρχαιότητος ή ρέμα καΐ λ€ληθότως έπιτρέχ€ΐ χλθ€ρόν τέ τι και τ€θηλός και μ€στον ώρας άνθος άναδίδωσι ' και ¿кпгср από των сиоЛсστάτων λ€ΐμώνων αδρά τις ήδ€Ϊα έξ αυτής фсрстаі. 4 Και обтс ΤΟ λιγυρόν COIKCV Ιμφα(ν€ΐν λάλον οδτ€ το κομψόν Ѳсатрікоѵ. "Οταν δέ cis τήν περιττολογίαν και τό каХХісітсіѵ, δ

πολλάκις ιΐωθι ποιιΐν, αμβτρον ¿ρμήν λάζη, πολλω χ€ΐρων ¿αυτής уіѵстаі * και γάρ άηδβστέρα της ¿τέρας και κάκιον έλληνίξουσα και παχύτερα фаіѵстаі μ€λαίν€ΐ тс то σαφές και ζόφω ποΐ€Ϊ παραπλήσιον сХксі тс μακρόν άποτ€ΐνουσα τον νουν, συστρέψαι δέον cv ονόμασιν ολίγοις. 5 Έκχ€ΐται δ' clę άπ€ΐροκάλους ігсріфраасіс πλουτον ¿νομάτων έπιδ€ΐκνυμένη ксѵоѵ, όπ€ριδοΰσά тс των κυρίων και cv τη κοινή χρήσ€ΐ κ€ΐμένων τά π€ποιημένα ζητ€Ϊ και ξένα και

TEST. : 1-22

DIONYSIUS, Ad

Pompeium, XI, 2, 1 ( =

Δ).

1-2 έπιτηδεύη : -δεύει V || 4 ναμάτων : σωμάτων Δ || 5 ήντι­ νουν ΙΒΤΔ : ήντινα ούν AV || είς del. Rad. : non hab. Δ || 7 ύπεριδοΰσα : -δοΰσαν Δ || 8 αύτη καΐ 6 χνους om. Δ del. Rad. || 9 χλοερόν : ίλαρόν Δ || 11 φέρεται : εισφέρεται Δ || 14 καλλιεπεΐν AIV : κάλλιον είπεϊν Amg ВТ κάλλιστον είπεΐν Δ || 15 χείρων : χείρον Ι II 16 της ετέρας om. Δ del. Rad. || 18 άποτείνουσα ν Δ : -τείνασα ΑΙΒΤ || 19 ante δέον hab. δέ Δ || έκχεΐται Δ : χεΐται codd. || 20 δ' om. Δ || ονομάτων om. Ι || 21 κενόν om. Δ Ц τε : δέ Δ || post κυρίων hab. ¿νομάτων Δ || έν om. Δ.

56

DÉMOSTHÈNE

V, 5,5

étrangers, fleurant Γ archaïsme. Surtout il se débat dans des tours figurés, prodigue les ornements ajoutés, manque d'à-propos dans les métonymies, est guindé, néglige de respecter la correspondance . 6 II regorge d'allégories qui manquent de mesure et d'à-propos. Il se complaît dans des figures poétiques totalement dénuées d'agrément, et tout parti­ culièrement dans les gorgianismes1 qu'il utilise puérile­ ment et hors de propos. « Il tient beaucoup du magicien quand il emploie des procédés de ce genre», comme Га déjà indiqué quelque part Demetrios de Phalère2 après beaucoup d'autres, car la fable rfesl pas de moi*. β. 1 Que nul n'aille supposer, aux propos que je tiens, que je condamne en totalité le style insolite et travaillé dont use Platon. Dieu me garde d'avoir jamais l'esprit assez obtus et grossier pour avoir une opinion aussi sévère sur un auteur aussi considérable : je n'ignore pas l'importance ou la qualité admirable des œuvres qu'il a produites, sur quantité de sujets, avec un talent consommé. 2 Ce que je voudrais simplement indiquer, c'est que, dans le style orné, il est coutumier de telles erreurs, qu'il se montre inférieur à lui-même quand il court après la grandeur et le raffinement de l'expression, alors qu'il se surpasse nettement quand il s'exprime dans un langage dépouillé, précis, apparemment sans

1. Gorgiae, l'initiateur du style orné (cf. le début perdu du Demostene), est accusé par Denys d'avoir exercé une influence néfaste sur l'éloquence attique (cf. II, 3,4 et IV, 19,2 par exemple). 2. Demetrios de Phalère, fgt 170 Wehrli {Die Schule des Aristoteles IV, Bale 1949). Wehrli place ce fragment dans le traité sur La Rhétorique composé par Demetrios, lequel aurait écrit aussi un Sur Platon (cf. Lettre à Pompée, XI, 1, 16). 3. Euripide, fgt 488 Nauck, déjà cité en III, 13, 1. Wehrli inclut d'ailleurs cette citation dans le fragment de Demetrios.

V, 5,5

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

56

άρχαιοπ ρ čiří). Μάλιστα бе χ€ ιμάντα ι ircpl την τροττικήν φράσιν, ττολλή μ€ν cv τοις сігіѲстоіс, άκαιρος б* cv ταΐς μ€τωνυμ(αις) σκληρά бе καΐ ου σώζουσα την άναλογίαν cv ταις {μ€ταφοραις). 6 'Αλληγορίας тс ігсріСаХЛстаі ττολλάς (και μακράς), оитс μέτρον έχουσα s оитс καιρόν. Σχήμασί тс ιτοιητικοΐς Ισχάτην ττροσζάλλουσιν άηδίαν και μάλιστα τοις Γοργΐ€ΐοις άκαίρως και μ€ΐρακιωδως cvaÇpuvcTaı. Και « π ο λ ύ ς ο TcXcnrţs cv τοις τοιούτοις παρ* αύτφ », ώς και Δημήτριος ό Φ ά λ η ρ ο ς €ΐρηκ4 ігои και άλλοι συχνοί πρότ€ρον ' ον γαρ εμάς δ μνθος. β. 1 Μηδβίς бе μ€ τα τοιαύτα ύττολάζη λέγ€ΐν άιτάσης καταγινώσκοντα της ¿ξηλλαγμένης και έγκατασκβύου λίξ€ως, ή κέχρηται Πλάτων. Μη γάρ δη ούτω σκαιος μηδ' αναίσθητος έγώ γ€νοίμην доте ταύτην την δόξαν бігср ανδρός τηλικούτου XaÇcîv, circi πολλά ircpl πολλών οΐδα μ€γάλα και θαυμαστά και áiro της άκρας δυνάμ€ως ¿ξ€νην€γμ4να oír' αυτού. 3 'Αλλ' Іксіѵо ένδ«ξασθαι ßouλόμ€νον δτι τα τοιαύτα αμαρτήματα cv ταΐς катааксиаіс cu«>6cv άμαρτάν€ΐν και χ«ρων μίν αυτός αότου уіѵстаі, бтаѵ το μέγα διώκη και ігсріттоѵ cv τη φράσ», μακρφ Si τινι άμ«νων, δταν την Ισχνήν και άκριζή και δοκοΟσαν uev

TEST. : 1-21

DIONYSIUS, Ad

Pompeium, XI,

2, 1 ( =

Δ).

2 post μέν heb. γάρ Δ || 3 μετωνυμίαις : έπωνυμίαις Δ II σκληρά : σκληράς BT || δέ ν Δ : om. in lac. ΑΙΒΤ || καΐ Δ : lac. fere 15 litt. hab. codd. 11 4 μεταφοραϊς Rad. : lac. fere 10 litt. ΑΙΒΤ μεταλλαγαΐς in lac. V μεταφοραΐς γίγνεται Δ II 5 και μακράς Rad. : lac. fere 8 litt. codd. μακράς καΐ πολλάς Δ II β προσβάλλουσιν : προβάλ- Ι || 7 γοργιείοις Reiskius : γοργίοις codd. γοργείοις Δ || 8 έναβρύνεται : έναμβρ- Ι II πολύς 6 τελετής Δ : πολυτέλεια τις Ζ || 10 πρύτερον om. Δ II 11 με poet τοιαύτα V || ύπολαβη : -λάβοι Ι ήγείσθω Δ || 13 ή IVA : om. ABT || δή Cobet : αν Ζ om. Δ || 14 μηδ' — έγώ om. Δ || 17-18 βουλόμενον Reiskius : -λόμενος ΖΔ Ц 18 τά Δ : om. Ζ || 19 μέν om. Δ II 20 καΐ alt. om. Δ.

57

DÉMOSTHÈNE

V, 6,2

apprêt, mais organisé selon une structure impeccable et simple à la fois ; il est alors absolument sans défauts, ou n'en a que de tout à fait occasionnels, et insignifiants1. 3 Assurément j'aurais désiré qu'un auteur de cette envergure ait su se garder de toute critique ; mais les défauts que je signale, ses contemporains8 aussi les cri­ tiquaient (point n'est besoin de citer des noms), et luimême en faisait autant à son égard : c'est bien là le plus remarquable. 4 II était conscient, à ce qu'il semble, de son propre manque de goût ; il lui avait donné un nom, le dithyrambe8, terme que j'aurais eu moi-même scrupule à utiliser, bien que ce soit le terme exact. Ce défaut lui est venu probablement, à mon avis du moins, du fait que, nourri dans le dialogue socratique4, si précis et dépouillé, au lieu de lui rester fidèle, il s'est épris du style orné de Gorgias et de Thucydide. 5 Rien que de normal alors dans ce qui devait lui arriver : il a puisé aussi quelques-uns des défauts, en même temps que les quali­ tés, que présentent les caractères de style de ces auteurs. 7. 1 Je donnerai un exemple de style élevé chez Platon, que j'em­ prunterai à l'un de ses ouvrages les plus célèbres, celui où Socrate compose des discours sur l'Amour devant l'un de ses disciples, Phèdre, ce qui a valu au dialogue son titre. 2 Tout le début du traité a beaucoup d'éclat et déborde de grâces6. Le voici :

1. Ces précautions oratoires ne suffiront pas pour éviter à Denys les violentes attaques des partisans de Platon, comme en témoigne la Lettre à Pompée dans laquelle Denys est amené à préciser sa pensée. Dans le D.C.V., il adoptera une position plus nuancée vis-à-vis de Platon, qu'il critique pour le choix des mots, « quand il cherche une expression élevée, raffinée, trop travaillée » (18, 14), mais à qui il reconnaît beaucoup de qualités pour la synthesis musicale. 2, 3, 4, 5. Notes complémentaires, p. 163.

V, 6,2

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

57

άττοίητον ctvai κατ€σκ€υασμ€νην δ ' άμωμήτω καΐ офсХсі катааксијј біаХсктоѵ сигфертЈ * ή γ α ρ оибсѵ ά μ α ρ τ ά ν « καθάπαξ ή βραχύ τ ι κομιδή καΐ ούκ άξιον κατηγορίας. 3 Έ γ ώ бе ήξίουν τηλικουτον άνδρα ττ€φυλάχθαι ιτάσαν CITITIμησiv. Ταύτα μέντοι οι κατ' αυτόν сксіѵоѵ γ€ν6μ€νοι ως άμαρτάνοντι τ φ ανδρΐ ¿πιτιμώσιν, Δν τ α ονόματα оиѲсѵ δέομαι λέγ€ΐν, και αυτός έαυτφ * τούτο γ α ρ δ ή το λαμττρότατον. 4 "НмтѲсто γαρ, ώς соіксѵ, της Ιδίας αιτ€ΐροκαλίας καΐ δνομα сѲсто αύτη το διθυραμζον, б νυν αν ήδέσθην έγώ λέγ€ΐν αληθές δν. Τούτο бс παθ€ΐν SOIKCV, ώς μέν έγώ νομίζω, трафсіс μέν cv τοις Σωκρατικοΐς διάλογοις Ισχνοτάτοις ( ο δ σ ι ) και άκρι&στάτοις, ου μ€ΐνας б' cv αύτοΐς άλλα της Γοργίου και θουκυδίδου κατασκ€υής ¿paaOciç. 5 *Ώστ' оиѲсѵ Ιξω του €ΐκότος ¡μιλλι ігсіасаѲаі σιτάσας τινά και των αμαρτημάτων αμα τοις άγαθοΐς ων Ιχουσιν oi των ανδρών IKC¿VCI>V χαρακ­ τήρας. 7. 1 Παράδΰίγμα бс ποιούμαι της γ€ υψηλής λέξαως έξ ενός βιζλίου των πάνυ ικριζοήτων, cv φ τους ερωτι­ κούς біатіѲстаі λόγους ó Σωκράτης ιτρός Ινα των γνωρίμων Фаіброѵ, αφ' об την έιτιγραφήν €ΐληφ€ το βιζλίον. 2 Έ ν γ α ρ δή τ φ συγγράμματι τούτω ττολλήν μέν ώραν 8 χ ο κ a l χαρίτων εστί μ€στά τ ά πρώτα ταυτί *

TEST. : 1-21 (βιβλίον) DIONYSIUS, Ad Pompeium, XI, 2,1 ( = Δ).

1 άμωμήτω Δ : -μήτως Ζ || 3 καθάπαξ om. Δ II 5 μέντοι καΐ ol Ζ : γαρ οϊ τε Δ || 6 ώς — άνδρΐ Ζ : πάντες Δ || 7 δέομαι Ζ : δει με Δ || 8 ώς έοικεν Ζ : om. Δ || 9 το Δ : τον Ζ || 11 μεν : μέν γαρ V om. Δ || 12 οΰσι Γν"Δ : om. Α (in lac.) ВТ || 15 καΐ om. I || 19 βιβλίου AIV : βυβλίου ВТ || 20 διατίθεται Ζ : -τέθειται Δ || 22 βιβλίον ΑΙ : βυβλίον VBT || 24 μεστά τα AIV : μετά ВТ.

58

DÉMOSTHÈNE

V, 7,2

— Mon cher Phèdre1, où vas-tu donc et d'où viens-tu? — De chez Lysias, le fils de Képhalos, Socrate, et je vais de ce pas me promener hors des Murs, car j'ai passé làbas bien du temps, assis, depuis le petit jour.,. et caetera, jusqu'à la lecture du discours de Lysias, et, après cette lecture, encore un certain temps. 3 Et puis, comme en plein beau fixe une forte bour­ rasque qui soudain éclate, voilà qu'il bouleverse la limpidité de l'expression et se lance dans un style poétique de fort mauvais goût. C'est à partir de : — Allons11 Muses volubiles (λίγειαι), que vous deviez ce surnom à Voilure de voire chant ou bien à la race musicienne des Ligures, aidez-moi à manier la fable. 4 Qu'il y ait là cliquetis sonore et dithyrambe, avec grand luxe de mots mais peu d'idées, il le reconnaîtra lui-même. Au moment où il passe en revue les raisons qui ont fait donner à la passion le nom d'Éros, il déclare en effet : Quand le désir* irrationnel a triomphé de Vélan réfléchi qui nous pousse vers le bien, et qu'il nous porte vers le plaisir que procure la beauté, quand, renforcé par les désirs qui lui sont apparentés, il s'élance de vive force vers la beauté physique et sort vainqueur de sa démarche, il tire de celte force même (ρώμη) son surnom et s'appelle Èros. 5 C'est après cette périphrase démesurément longue pour exprimer un fait qui pouvait tenir en peu de mots qu'il dénonce lui-même son manque d'à-propos en ces termes : 1. Phèdre, 227 a. C'est le début du dialogue. 2. Phèdre, 237 a. C'est le début du premier discoure de Socrate. Le terme λίγειαι, comme λιγυρός en V, 5,4, est difficile à traduire ; il évoque le cri perçant et pressé des cigales, un chant à la fois clair et incessant, d'où la traduction adoptée. 3. Phèdre, 238 bc. C'est encore dans le premier discours de Socrate, avant qu'il ne s'interrompe pour se déclarer inspiré et « proche du dithyrambe ». Il est à noter que le texte fourni par les manuscrits de Denys difTère assez sensiblement de celui conservé par les manuscrits de Platon.

V, 7,2 m a

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

58

— ΤΩ φίλε Φαϊδρε, noi δή και πόθεν ; — Παρά Λυσίου, ώ Σώκρατες, του Κεφάλου. Πορεύο­ μαι δη προς περίπατον έξω τείχους. Συχνον γαρ èxeï διέτριψα χρόνον καθήμενος έξ έωθινοϋ μέχρι της αναγνώσεως του Λυσιακου λόγου και μ€τά τήν άνάγνωσιν ίως τινός. 3 ЕІѲ', окгігср ¿ξ αέρος сибіои και отаѲсрои ιτολυς аѵсμος καταρραγ€ΐς, тараттсі το καθαρόν της ψράσ€ως cç ιτοιητικήν έκφέρων απ€ΐροκαλίαν, ένθένδ' άρξάμ€νος *

Í37 α

— "Αγετε δή, Μοϋσαι, είτε δι9 ωδής είδος λίγειαι είτε δια γένος τα Λιγύων μουσικά» ταύτην ίσχετε τήν έπωνυμίαν, ξύμ μοι λάζεσθε του μύθου. 4 "Οτι 84 ψόφοι таит' curl και διθύραμζοι, κόμιτον ονο­ μάτων πολύν, νουν 8έ ολίγον ¡χοντ€ς, αυτός epe?« Δι«ξιών γαρ, αφ* ής αιτίας 2ρως ετέθη τω ігаѲсі τουνομα, και тјјбс χρησάμ€νος *

188 с

Ή γαρ &νευ λόγου δόξης επί τάγαθον όρμώσης κρατήσασα επιθυμία, προς ήδονήν άγουσα κάλλους καί των εαυτής συγγενών επιθυμιών, επί σωμάτων κάλλος έρρωμένως $ωσθεϊσα, νικήσασα άγο>γή, άπ* αυτής της $ώμης έπωνυμίαν λαξοϋσα, έρως εκλήθη. 5 Και τοσαύτην Ικμηκύνας ιτ€ρίφρασιν ολίγοις τοις όνόμασι δυναμένου ικριληφθηναι πράγματος €ΐηλαμζάν€ται της ακαιρίας της αυτός αυτού καί φησι *

1 δή : δέ Plat. || 10 ante Μουσαι nab. ώ Plat. || 11 μουσικον post γένος Plat. || άσχετε (έχετε V) τήν Ζ : έσχετ* Plat.» T έχετ* Plat. w || 17 τάγαθον Ζ : το ορθόν Plat. || 18 άγουσα Ζ : άχθεϊσα Plat. || υπό Plat. || 20 ¿ωσθεΐσα Plat. : -σαν Ζ || άγωγη Plat. : αγωγή Ζ || 21 ¿ώμης AVB Plat. : γνώμης IT || έπωνυμίαν Plat. : έπιθύμίαν Ζ.

5

10

15

20

59

DÉMOSTHÈNE

V, 7,5

— Chut1! maintenant, écoute-moi. C'est que, réellement, l'endroit m'a tout l'air d'être divin. Si donc il m'arrive quelquefois, dans le courant de mon discours, d'être possédé des Nymphes, ne t'en étonne pas. Mes paroles d'à présent ne sont plus bien loin du dithyrambe. 6 Ainsi, Ce ne sont pas celles des autres, mais nos propres paroles qui nous accusent*, pourrais-tu dire toi-même, ô divin Platon, d'avoir si grand engouement pour les sonorités creuses du dithy­ rambe. Et voici également, ce que dit Socrate dans la pali­ nodie, quand il veut s'acquitter envers Èros de sa péni­ tence ; il commence ainsi : Le grand Maître* qui règne dans le ciel, Zeus, conduisant son char ailé, s'avance le premier, ordonnant toutes choses el veillant à tout. A sa suite se presse une armée de dieux et de démons, rangée en onze sections. Seule en effet, Hestia reste au foyer des dieux. Ceux des autres qui ont été mis au nombre des douze dieux suprêmes sont chefs de file à leur rang, à la place assignée à chacun. Aussi sont-ils nombreux et magnifiques les spectacles offerts dans le ciel par les dieux bienheureux, quand ils évoluent, chacun pour son compte faisant ce qui lui revient. A leur suite, s'avance qui, à chaque fois, en a la volonté et le pouvoir, car l'Envie n'a pas de part au chœur des dieux. 7 Ces passages et d'autres anaPm axe et Platon j 0 g U e g ( o n e n p e u ^ с ^ г ¿es quanti­ tés), s'ils recevaient une mélodie et des rythmes4, comme les dithyrambes ou les hyporchèmes, seraient assez 1, 2. Notes complémentaires, p. 163. 3. Phèdre, 246 e-247 a. C'est, dans le second discours de Socrate, le passage qui annonce la description de la procession céleste des âmes. 4. Dans le D.C.V. (V, 18, 13), Denys vante «le génie tout particulier de Platon pour saisir une belle mélodie et un rythme heureux ».

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

V, 7,5

Ш d

59

— Σιγή τοίννν μου άκουε. Τω δντι γαρ θείος είναι έοικεν ο τόπος. "Ωστ9 èàv αρα πολλάκις νυμφόληπτος γένωμαι προϊόντος του λόγου, μη θαυμάσης. Τά νυν γαρ ονκέτι πόρρω διθυράμξων τινών φθέγγομαι. 6 « Τάδ* ουχ ύπ9 αλλων, άλλα τοις αυτών λόγοις άλισκόμεθα»^

5

φαίης αν» 8αιμονιώτατ€ Πλάτων, διθυράμζων ψόφους και λήρους ήγαιτηκότ€5. α

Α δ* lv τ η π α λ ι ν ω δ ί α τ ο ν Ιρωτα άφοσιουμενος αύθις ó

Σωκράτης €ΐρηκ€ν

сѵѲсѵбс άρξάμ€νος '

246 e

10

*0 μεν δή μέγας ήγεμών έν ουρανφ Ζευς έλαύνων πτηνον άρμα, πρώτος πορεύεται διακόσμων πάντα καΐ έπιμελούμένος. Τω δ9 έπεται στρατιά θεών καί δτι γένος тс το ανθρώπων πρώτη έγ€ννήσατο και καρπούς ήμερους αύτω συν€ξήν€γκ€ν, άξιον Ібсіѵ * d Έξελέξατο бе τών ζώων και έγέννησεν ανθρωπον δ συνέσει τε υπερέχει τών αλλίον καί δίκην καΐ θεούς μόνον 25 νομίζει.

3 ante Ιδεΐν hab. είπεΐν V || 4 τούτου : τούτο V || 7 αυτά Krüger : αυτήν Ζ || 9 ήμΐν Ζ : ημών Plat. || 10 τε καί κρίσις Plat. (cf. V, 28, 4) H δέ Ζ : δή Plat. || 16 τήν Krüger : της Ζ || 18 τών VJ : τον ΑΙ || 19 ούτω Ι : om. AVJ || 20-21 είπόντα, άλλα Reiskius : ειπών (είπον J) τά Αλλα codd. || 23 αύτω Capperonier : αυτών codd.

105

DÉMOSTHÈNE

V, 28,5

Je ne sais s'il existe un autre fait particulièrement fameux évoqué par Platon avec plus de banalité et de trivialité. 6 Passe encore de prononcer l'éloge de rhomme avec tant d'indifférence et si peu de vigueur, si du moins, au sujet de sa nourrice, il va user d'un tour original : Seule en ce temps-là, et la première, elle a porté une nourriture faite pour Vhomme, le fruit du blé et de l'orge1. 7 Dieux bons! Où sont donc ces riches fontaines plato­ niciennes, toutes bouillonnantes de grand style2? Quel maigre filet de voix qui goutte à goutte coule de la fameuse «bouche aux douze sources»8 du philosophe! — Mais c'est qu'il a été économe, assurément, et a relâché son style de propos délibéré, objectera-t-on peut-être. —- Et comment serait-ce possible, quand, trouvant que « lait » n'est pas un terme noble, il met à la place « source de la nourriture t4 dans le passage qui suit? 29. 1 Passons encore là-dessus, et examinons comment Platon a exprimé la grandeur de ce don fait à l'homme : ... qui nourrit excellemment et magnifiquement le genre humain5. Si l'un d'entre nous, pauvres rampants qui nous traînons à terre, disait de même : « excellemment et magnifique­ ment», quel accès d'hilarité déchaînerait-il! Mais lais­ sons encore cela. 2 El ce fruit-là, loin d'en être jalouse, elle Va distribué aussi aux autres9. Voudrait-on fournir un exemple d'expression fautive, « la terre qui n'a pas été jalouse du fruit » viendrait immédiatement à l'esprit, n'est-il pas vrai? C'est en tout cas mon avis. 3 Et puis, celle qui a répandu ses bienfaits sur l'humanité, qui a ensemencé de tels trésors la terre 1, 2, 3, 4, 5. Notes complémentaires, p. 170-171. 6. Ménexène, 238 a. Denys reproche à Platon sa « froideur », qui vient des figures de style mal utilisées.

V, 28,5

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

105

Ουκ οΐδα €Ϊ τι λαμπρότατον άλλο πράγμα τούτου €υτ€λέотсроѵ €ΐρηται Πλάτων ι και Ιδιωτικώτ€ρον. 6 Δώμ€ν αύτω το του άνθρωπου έγκώμιον ούτως ciıreîv όλιγώρως και άσθ€νώς, αλλά π€ρί γ€ της τροφής αυτού γ€νναία χρησ€ται ψράσ£ΐ ' Μόνη γαρ èv τω τότε και πρώτη τροφήν ήνεγκεν τον των πυρών καΐ κριθών χαρτζόν.

άνθρωπείαν

7 4 2 Ocol και δαίμον€ς, που το Πλατωνικον νάμα το πλούσιον και τάς μ€γάλας κατασκ€υάς καχλάζον ; Ούτως μικρολογ€ΐ και κατά στράγγα pei το δωδ€κάκρουνον ексіѵо στόμα του σοφού ; — Έταμκύσατο νή Δία και ύφήκ€ της κατασκ€υής εκών, ίσως τις ¿pei. — Και πώς ; 8ς ουκ оістаі το γ ά λ α σ€μνον сіѵаі όνομα, άλλα ττηγήν τροφής αυτό μ€Τονομάζιι διά των έξης« 29. 1 Έώμεν και τούτο, πώς бе της δωρ€άς αυτής €Ϊπ€ το μέγ€θος έξ€τάσωμ€ν * Ύ

Ωι κάλλιστα και Άριστα τρέφεται το άνθρώπειον

10

15

γένος.

ΕΙ τών ¿πιγ€ΐων τις ημών και χαμαι ερχομένων κάλλιστα και αριστα chrcv, δσον αν έκίνησ€ γέλωτα ; Πλην άφ€ΐσθω και τούτο. 2 Τούτον δε τον καρπον ουκ έφθόνησεν, τοις άλλοις.

5

20

αλλ* ένειμε και

Ει τις βουλήσ€ται παράδ€ΐγμα λαξ€ΐν διημαρτημένης λέξεως, ή του καρπού μη φθονησασα γ η ούχι πρώτη παρακ€ΐσ€ται ; Έμοι μέν γάρ боксі. 3 Ή δέ μ€ταδουσα τών εαυτής αγαθών άπασιν άνθρώποις και τηλικούτω

1 εί τι Sadaeus : εί επί Ζ || 4 χρήσεται Krüger : χρήσει καΐ Ζ || 9 καχλάζον : -ζων V || 12 εκών : ελών J || 13 πηγήν Ζ : πηγάς Plat. || 23 διημαρτημένης ego : μένης post lac. fere 17 litt. codd. || 24 ουχί Rad. : ούχ ή Ζ.

25

106

DÉMOSTHÈNE

V, 2 9 , 3

des barbares et des Grecs, méritait-elle d'être parée de verbes comme : « elle ne fut pas jalouse » de ces semences et elle les « a distribuées » aux autres? Qu'elle « ne fut pas jalouse » de ses voisins, ne fallait-il pas même éviter absolument de le mentionner? et à l'expression « distri­ buer les fruits » ne fallait-il pas substituer un terme plus noble, évoquant un don, une faveur ou quelque chose d'approchant? Mais passons! 4 Du présent d'Athéna, voici ce qu'il dit : Plus tard, c'est la naissance de l'huile, secours contre les fatigues, qu'elle a accordée à ses fils1. Que voilà des périphrases et du dithyrambe! 5 Mais à quoi bon continuer? D'un bout à l'autre du discours, on peut trouver des passages écrits sans exacti­ tude ni délicatesse, d'autres qui sont puérils ou froids, d'autres qui manquent de force ou de vigueur, d'autres qui sont pauvres en agréments ou en grâces, d'autres rédigés dans un style dithyrambique ou trivial*. J'aime­ rais mieux pour ma part que tout dans ce discours ait de la noblesse et soit digne d'estime. 6 En effet, c'est Platon qui écrit cela, un auteur qui, même s'il ne peut remporter le premier prix de style, imposera du moins une lutte de longue haleine à qui voudra lui disputer la seconde place! Mais en voilà assez sur ce chapitre. 80. 1 Les passages les mieux σ Prosopopèe v e n u s ¿|e n o tre auteur se trouvent, de l'avis de certains, vers la fin du discours, et je suis d'accord sur ce point ; aussi est-ce de ceux-là que je me servirai pour la comparaison avec Démosthène. 2 Donc, après avoir fait l'éloge des morts, Platon suppose que, avant de mourir à la guerre, ces héros avaient eux-mêmes dicté à leurs camarades présents le message qu'ils devraient délivrer à leurs fils ou à leurs pères s'il leur arrivait malheur au cours du combat. Voici le passage8 : 1. Ménexène, 238 a. 2, 3. Notes complémentaires, p. 171.

V, 29,3

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

106

καταστΓ€ΐρασα πλούτω βάρ£αρόν тс και 'Ελλάδα γήν, τούτοις αξία κοσμέΐσθαι τοις βήμασιν, δτι ουκ ¿φθόνησε των συρμάτων και δτι ίνειμεν αυτά τοις άλλοις ; Ού του UCV « μη φθονήσαι τοις πέλας » ουδέ μ€μνήσθαι παντάπασιν έχρήν, то бс « ν€ΐμαι τους καρπούς » σ€μνοτέρω ονόματι δωρ€ας ή χάριτος ή άλλου τίνος των τοιούτων ırcpıAaÇcıv ; Έώ ταύτα. 4 Τήν бс της 'Αθηνάς бсорсаѵ ούτως €ΐρηκ€ν ' 135 α Μετά δέ ταϋτα ελαίου γένεσιν, πόνων άρωγην, άνηκε τοις έκγόνοις.

5

10

Π€ριψράσ£ΐς πάλιν ενταύθα και διθύραμζοι. 5 Και τί бсі τα πλΰίω λέγβιν ; Δι' δλου γαρ αν τις cupoı του λόγου πορ€υόμ€νος τα μ4ν ουκ άκριζώς ουδέ λ€πτώς €ΐρημ€να, τα бс μ€ΐρακιωδώς καΐ φυχρώς, τα бс ουκ Ιχοντα ισχύ ν και τόνον, τα 84 ηδονής 4ѵбс& και χαρίτων, τά бс 15 διθυραμζώδη και φορτικά. Έγώ б' ήξίουν πάντα γ€νναια ctvaı και σπουδής άξια. 6 Πλάτων γάρ έστιν ó ταύτα γράφων, δς cl μη και τά πρωτ€Ϊα οΐσ€ται τής λέξΰως, π€ρί γ€ των бситсрсіи>ѵ πολύν αγώνα ırapcÇcı τοις διαμιλλησομένοις. 'Αλλά περί μέν τούτων αλις. 20 80 1 °Α бс δη κράτιστα €ΐρήσθαι τω άνδρΐ δοκουσί TIVCS Ιπι τη τ€λ€υτή του λόγου, κάγώ σύμφημι, ταύτα παραθ€ΐς cırı τον Δημοσθένην τρέφομαι. 2 Ό δη τον Ιπαινον αυτών δεξιών φησιν ¿πισκήφαι τοις παρουσιν cv τω πολέμω τους μέλλοντας Τ€λ€υτάν α χρή προς τους εαυτών παΐδάς тс και πατέρας άπαγγέλλ€ΐν, ci τι παθ€Ϊν αυτούς συμζαίη κατά τήν μάχην. "Εστί бс табс * 3 ού του : αύτου V || 4 post μεμνήσθαι hab. τοις πέλας codd. : del. Rei8kius || 5 έχρήν, το δέ Reiskius : κέχρηνται (κέχρηται Ι) ουδέ codd. || 9 ταΰτα Ζ Plat.* : τούτο Plat.TW || 19-20 διαμιλλησομένοις : διαμεληγομένοις Ι.

25

107

DÉMOSTHÈNE

V, 30,2

Je vous répéterai ce que j'ai entendu de la bouche de ces héros et ce qu'aujourd'hui ils aimeraient vous dire, s'ils en avaient à nouveau le pouvoir, à en juger par leurs propos d'alors. Oui, il vous faut croire ouïr de leur propre bouche les paroles que je vais vous transmettre et que voici: m Enfants, que vous soyez nés de pères valeureux, la cérémonie présente l'atteste. Nous pouvions vivre sans honneur, nous préférons mourir avec honneur plutôt que de vous précipiter, vous et votre postérité, dans l'opprobre, plutôt que de déshonorer nos propres pères et toute notre ascendance, tant nous avons conscience qu'il n'y a pas de vie possible pour qui déshonore les siens, et qu'un tel être n'a point d'amis, ni parmi les hommes ni parmi les dieux, ni sur terre ni plus lard après sa mort. Il vous faut donc, en souvenir de nos paroles, quel que soit le but poursuivi, le poursuivre avec courage, certains que, où manque le courage, tout, nos biens, nos activités, tout est infamie et vice. Vargent en effet ne donne aucune beauté morale à qui manque de courage (c'est aux yeux des autres qu'un tel homme sera riche, non à ses propres yeux); la beauté physique, la vigueur corporelle, quand elles sont l'apanage d'un couard ou d'un méchant homme, loin d'y paraître à leur place, y sont incongrues et ne font que mieux ressortir la lâcheté; de même un savoir quelconque, coupé de la justice ou plus généralement de la vertu, paraît industrie, non sagesse. Ainsi donc, au début, à la fin et toujours1, mettez toujours toute votre ardeur à nous dépasser tous,

1. Cette phrase avait été citée plus haut (26,8) par Denys comme exemple de mauvais style.

V, 30,2

107

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

Φράσω δε ύμϊν α τε Ακουσα αυτών εκείνων καΙ ola νυν ήδέως εϊποιεν ύμϊν, άναλαξόντες δύναμιν, τεκμαιρόμενος έξ ών τότ ІЪуоѵ. Άλλα χρή νομίζειν άκούειν αυτών εκείνων à ăv απαγγέλλω. "Εστί δε τάδε · «ΤΩ παίδες, δτι μέν έστε πατέρων αγαθών, αυτό μηνύει το νυν παρόν. Ήμϊν γαρ εξόν ζην μη καλώς, αίρούμεθα μάλλον τελευταν, πριν ύμας τε και τους έπειτα είς ονείδη καταστήσαι, καΙ πρίν τους ημετέρους πατέρας και παν το πρόσθεν γένος αίσχϋναι, ηγούμενοι τω τους αύτοϋ αίσχύνοντι αξίωτον είναι, καί τφ τοιούτω ούτε τινά ανθρώπων ούτε θεών ψίλον είναι, οΰτ9 επί γης οϋθ' ύστερον τελευτήσαντι. Χρή ούν μεμνημένους τών ημετέρων λόγων, ήν τι και αλλο άσκήτε, άσκεϊν μετ9 αρετής, είδότας δτι τούτου λειπόμενα πάντα καί κτήματα καί επιτηδεύματα αίσχρά καί κακά. Ούτε γαρ πλούτος κάλλος φέρει τω κεκτημένω άνανδρίαν (άλλοις γαρ ο τοιούτος πλουτήσει καί ούχ έαυτώ), ούτε κάλλος σώματος οϋτ9 Ισχύς δειλώ καί κακφ συνοικουντα πρέποντα φαίνεται αλλ' άπρεπή) καί επιφανεστέρα? ëχovτa τήν δειλίαν, πασά τε επιστήμη χωριζόμενη δικαιοσύνης καί τής αλλης αρετής πανουργία, é t a i t d e m o n trer que le style dont usait Démosthène était le meilleur, et qu'il s'adaptait parfaitement à tous les aspects de la nature humaine. J'ai tenté d'arriver à cette conclusion non pas en donnant des preuves tirées du seul Démosthène (car rien, je le savais, ne possède suffisamment de valeur propre pour que, considéré séparément, il soit vu tel qu'il est, en toute clarté), mais en comparant au style de Démosthène les styles, choisis parmi les meilleurs, des autres auteurs, orateurs ou philosophes ; la simple juxta­ position deux par deux faisait clairement apparaître à l'épreuve quel était le meilleur2. 2 Et donc, afin que mon propos suive un cours naturel, j'ai dénombré les types de style les plus remarquables, et j'ai passé en revue les auteurs qui se classent au premier rang dans chacun ; puis, après avoir montré que tous ces auteurs sont imparfaits, et brièvement exposé dans chaque cas les défauts principaux qui à mon sens expliquent leur échec, j'en suis arrivé à Démosthène. 3 Cet auteur, je l'ai montré, n'a pas cherché à imiter un seul modèle, que ce soit pour les types de style, ou pour les auteurs ; sans aucune exclusive, il a choisi chez chacun ce qu'il y avait de meilleur pour se forger une expression à la fois cou­ rante et pleine d'humanité ; c'est là ce qui explique son incontestable supériorité sur tous, et j'en ai donné des preuves. Une fois distingués les trois genres de style que je tenais pour les plus authentiques, le dépouillé, l'élevé, l'intermédiaire, j'ai montré que Démosthène avait, dans ces trois catégories de style, réussi bien mieux que quiconque ; pour ce faire, j'ai pris certains passages de son œuvre que j'ai mis en parallèle avec des passages correspondants, pris chez d'autres auteurs, qui, tout en étant dignes d'intérêt, n'étaient pas impeccables d'un bout à l'autre ni, comme chez Démosthène, ornés de 1. Notes complémentaires, p. 172. 2. Denys justine l'emploi systématique qu'il a fait de la méthode comparative, pour laquelle il a utilisé le schéma des χαρακτήρες λέξεως.

V, 33,1

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

116

88· 1 Ή irpóOcais ήν μοι, κατά το έπάγγ€λμα του λόγου, κρατίστη λέ$€ΐ καΐ προς άπασαν άνθρωπου φυσιν ήρμοσμένη μ€τριώτατα Δημοσθένη κ€χρημένον έπιδ€ΐξαι, και τουτό ус συνάγ€ΐν ¿π€ΐρώμην ουκ cf αυτής έκ€ΐνης μόνης τας π ί σ τ » ς διδούς (Цбсіѵ γ α ρ δτι оибсѵ αυταρκές ¿στiv, ¿φ' ¿αυτού θ€ωρούμ€νον, οΐόν έστιν άφθήναι και καθαρώς), αλλ' άντιπαρατιθ€ΐς αυτή τάς των άλλων ρητόρων тс καΐ φιλοσόφων Xc|cis τάς κράτιστα δοκοόσας €χ€ΐν και τη δι' αλλήλων βασάνω фаѵсраѵ ποιών τήν άμ«νω. 2 *!ν' οδν τήν φυσικήν όδόν ó λόγος μοι λά£η, τους χαρακτήρας των διαλέκτων τους αξιολογωτατους κατηριθμησαμην και τους πρώτους δντας cv αότοις άνδρας έπήλθον, стгсіта δ€ΐξας атсХсіс απαντάς CKCÍVOUS και καθ' б μάλιστα άστοχων €καστον ύπ€λάμ£ανον του τέλους έκλογισάμ€νος δια βραχέων, ήλθον έπί τον Δημοσθένη» 3 Τούτον бе ένας μέν оибсѵос άποφηνάμ€νος оитс χαρακτήρος ουτ' Ανδρός ζηλωτήν усѵсаѲаі, έξ απάντων бе τά κράτιστα €κλεξάμ€νον κοινήν και φιλάνθρωπον τήν έρμην€ΐαν катсаксиаксѵаі ^ к а і ) κατά τούτο μάλιστα διαφέρ€ΐν των άλλων, πίστ€ΐς υπέρ тоибс παρ€ΐχόμην, δΐ€λόμ€νο$ μέν τήν λέξιν clę τρεις χαρακτήρας τους γ€νικωτάτους τόν тс Ισχνόν και τον ύψηλόν και τόν μ€ταξύ τούτων, άποбсікѵис δ' αυτόν cv τοις τρισί yevcoi κατορθουντα των άλλων μάλιστα, Xc|cis τινάς αυτού λαμβάνων, αΐς άντιπαρεξήταζον ετέρας όμο€ΐδ€ΐς λόγου μέν άξιας, ου μήν άν€πιλήπτους ус τ€λέως ουδ', ωσπ€ρ €Κ€ΐνη, πάσας τάς

1 κατά Ζ : καΐ Sylb. || του λόγου Rad. : τούτο του Ζ || 7 άντιπαρατιθείς IJ : -παραθείς Α -παραθή V || 9 W ούν Reiskius : ίνα Ζ H 10 τους om. Ι || 12 πρώτους Οντάς Ζ : πρωτεύσαντος Kiessling Rad. H 14 άστοχειν έκαστον Vliet : άδέκαστον Ζ || 15 τούτον : τούτο J || 18 έρμηνείαν : -νίαν J II 19 καΐ add. edd. || διαφέρειν : -φέρει Ι || 26 τάς J : om. AIV.

5

10

15

20

25

117

DÉMOSTHÈNE

V, 3 3 , 3

toutes les qualités. 4 Faire appel à Isocrate et à Platon, auteurs admirables entre tous, pour les comparer à Démosthène ne me paraissait pas déplacé ; comme ces écrivains, fidèles tenants du genre moyen qui est le meilleur, y ont acquis une excellente réputation, je voulais montrer que, même si ces auteurs sont supérieurs aux autres, ils sont incapables de disputer à Démosthène le prix d'excellence1. 5 J'ajouterai encore quelques d D¿ ' Yfbà mots sur le style avant de passer à la partie qui me reste à traiter2 de l'étude . 34. 1 Ils concernent les traits qui accompagnent également les trois formes d'écriture et qui sont des signes distinctifs et des marques indélébiles de tout discours démosthénien. 2 Je rappellerai d'abord les qualités dont je disais que, particulières à chacune des autres formes de style, elles se rassemblent dans le style de Démosthène8 : cela rendra mon propos plus facile à saisir. A mon avis en effet, comparé aux auteurs qui ont usé d'un style élevé, raffiné, insolite, Démosthène, qui en a usé avec un plus grand souci de clarté et d'accessibilité à tous, est nettement supérieur. 3 Ce sont ces qualités-là qu'il recherche dans toute mise en œuvre qui comporte de la grandeur, et ce sont aussi ces qualités si caractéris­ tiques dont il fait preuve, en maintes occasions, avec un vocabulaire élevé et teinté d'exotisme. 4 Comparé aux auteurs qui pratiquent le style uni, dépouillé, dénué de raffinement, Démosthène me semble les dépasser de beaucoup par la tension du style, la gravité, la rudesse, le mordant ; ce sont là, avec d'autres

1, 2, 3. Notes complémentaires, p. 172.

V, 33, 3 арстас

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ έχουσας.

4 Και

γαρ

ή

117 τ€

Ισοκράτους

και

Πλάτωνος καίτοι θαυμασιωτάτων ανδρών μ ν ή μ η каі σ ύ γ κ ρ ι σ ι ς ουκ Ιξω του €ΐκότος 4γίγν€τό μοι, α λ λ ' , ¿πει τ ο υ μέσου και κρατίστου χ α ρ ά κ τ η pos ούτοι ζηλωται γ€νόμ€νοι μ€γίστης δ ό ξ η ς Ι τ υ χ ο ν , ί ν α δ€ΐ|αιμι, καν ci τών ά λ λ ω ν άμ€ΐνους curi, Δημοσθέν€ΐ γ € ουκ άξιους όντας ά μ ι λ λ ά σ θ α ι ircpi τών άριστ€ΐων. 5 ' Ο λ ί γ α τούτοις CTI ττροσθάς тгсрі τ η ς λέξ€ως, стгі то καταλ€ΐπόμ€νον της { π ρ ο κ € ΐ μ έ ν η ς } θ€ωρίας μέρος μ€ταζήσομαι. 84«

1 Τ α ύ τ α бе ϊ σ τ ι ν α τοις τρισι ττλάσμασιν ομοίως

тгарстгстаі και €στι π α ν τ ό ς λ ό γ ο υ Δημοσθ€νικου μ η ν ύ μ α τ α χ α ρ α κ τ η ρ ι σ τ ι κ ά και аѵифаірста. 2 Ύττομνησω бе π ρ ώ τ ο ν μέν α ς τ ο ι ς ά λ λ ο ι ς ττλάσμασιν Ιψην Ιδίας άρ€τάς σ υ μ ζ € ζηκέναι τω Δ η μ ο σ θ έ ν ο υ ς [ ή Λ υ σ ί ο υ ] , Iv* €υσυνοτττος μ ά λ ­ λ ο ν γ έ ν η τ α ί μοι ó λ ό γ ο ς . Δοκ€ΐ δ η μοι τών μέν υψηλή καΐ π ε ρ ι τ τ ή και έ ξ η λ λ α γ μ έ ν η λέξ€ΐ Κ€χρημένων κατά τ ο σαψέστ€ρον και коіѵотсроѵ τ η 4ρμην€ΐα κεχρήσθαι ττρουχειν ó Δ η μ ο σ θ έ ν η ς . 3 Τούτων γ α ρ cv π ά σ η κατασκ€υή σ τ ο χ ά ζ β τ α ι μέγ€θος έ χ ο ύ σ η και ταύταις

κέχρηται

χαρακτηρικωτάταις

άρ€ταΐς

cırı

της

υ ψ η λ ή ς και ÇcvoırpcıroGç ονομασίας ώς γ € μ ά λ ι σ τ α . 4 Τών бе τ η ν λιτήν και Ισχνήν каі άττέριττον €τατηδ€υόντων ψράσιν τω τόνω της λέξ€ως сбокеі μοι διαλλάττ€ΐν και τω ß a p e i και τη στρυψνότητι και τω тгікраіѵсіѵ ώς стгі

1 τε : γε Ι || 2 καίτοι Kiessling : καΐ τών Ζ || 3 εικότος A J : είκότως IV || έγίγνετο : έγένετο Ι II 4 γενόμενοι : γινόμενοι Α || 8 προσθείς : προστιθείς Ι || 9 προκειμένης add. Usener (cf. V, 43, 13) : om. in lac. fere 10 litt. AIV om. sine lac. J || 12 έστι Rad. : επί Ζ || 13 άνυφαίρετα Α p.c. V : άνυφέρετα J om. I || 14 ας ego : α Ζ || 15 τφ ego : τοις Ζ || ή Λυσίου del. Reiskius || 25 στρυφνότητι IV : στριφ- AJ.

118

DÉMOSTHÈNE

V, 34, 4

du même genre, les traits caractéristiques du style de Démosthène quand il adopte ce mode d'écriture. 5 Comparé aux auteurs qui ont pratiqué le style moyen, le meilleur à mon avis, Démosthène l'emporte sur eux, pensais-je, par un série de qualités : la variété, l'équilibre, l'à-propos ; mais aussi le pathétique, la combativité, l'énergie ; et enfin la convenance qui, chez Démosthène, monte jusqu'aux astres. 6 Telles sont les qualités, disais-je, qui accompagnent séparément chacun des trois modes d'écriture, et ce sont d'elles, estimais-je, que le talent de Démosthène , tout en étant l'escorte naturelle de tous les modes d'écriture, c'est dans les secteurs retenus qu'elles se montrent sous le jour le meilleur et le plus remarquable. 7 Si quelque contra­ dicteur1 estimait calomnieuse la division ci-dessus parce que, après avoir réparti en trois les qualités de style qui sont l'apanage commun de toutes les formes d'écriture, elle attribue à chaque qualité son domaine spécifique, voici ce que je répondrais : c'est dans le secteur où chacune des qualités de style se montre sous le jour le plus agréable et offre l'usage le plus utile que j'estime qu'il faut la ranger ; les auteurs de manuels procèdent ainsi, qui assignent comme secteur propre à la clarté, à la concision, à la force persuasive la narration, non qu'il ne faille admettre ces qualités nulle part ailleurs (ce serait une belle absurdité) mais parce que c'est dans la narration qu'elles sont le plus nécessaires. 35. 1 Eh bien donc, après ces •ГшПГ" P r é c i s i o n 8 > P a r l o n s maintenant de s γ и ique j & composition stylistique dont use notre homme. Si je reconnais du raffinement dans l'har­ monie2 du style chez Démosthène et soutiens que cette harmonie laisse loin derrière elle celle des autres orateurs,

1, 2. Notes complémentaires, p. 173.

V, 34,4

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

118

το πολύ · ταύτα γαρ έστιν εκείνου χαρακτηρικά του πλάσματος παρ' αύτω και τα παραπλήσια τούτοις. 5 Των бе την μέσην διάλεκτον ήσκηκότων, ην δη κρατίστην αποφαίνομαι, κατά ταύτα διάφερε iv αυτόν ύπελάμζανον ' κατά την ποικιλίαν, κατά την συμμετρίαν, κατά την εύκαιρίαν, CTI προς τούτοις κατά το παθητικόν тс каі έναγώνιον και δραστήριον και τ€λ€υταΐον το πρέπον, б των άστρων ψαύει ιταρά Δημοσθένει. 6 Ταύτα μέν ουν χωρίς έκάστω των τριών πλασμάτων παρακολουθ€ΐν Ιφην και ек τούτων ήξίουν την Δημοσθένους δύναμιν (μάλιστα γίγνεσθαι ' ταύτα γαρ άττεφαινόμην) πεφυκότα μέν και τοις άλλοις παρακολουθείν πλάσμασι, κρατίστην бе δψιν έχοντα και €κπρεπ€στάτην cv τούτοις τοις χωρίοις. 7 Ei бе τις αξιώσει συκοφαντών την διαίρεσιν,

5

10

4π€ΐδή τάς κοινή παρακολουθούσας πάσι τοις πλάσμασιν 15 άρ€τάς τρίχα διανείμασα το ίδιον έκάσταις άποδίδωσιν, εκείνα άν εΐττοιμι προς αυτόν, δτι καθ' б μάλιστα χωρίον έκαστη των αρετών δψιν тс ήδίστην έχει και χρήσιν ώφελιμωτάτην, κατά τούτο τάττειν αυτήν άξιώ, επεί και της σαφήνειας και της συντομίας και τοΰ πιθανού χωρίον άποφαίνουσιν oi τεχνογράφοι την διήγησιν ( ο ύ χ ) ως ούκ άλλαχου ουδαμου δέον εξετάζεσθαι τάς άρετάς ταύτας (πάνυ γαρ άτοπον), αλλ' ως cv τή διηγήσει δέον μάλιστα. 85. 1 Φέρε δη τούτων είρημένων ήμΐν λέγα>μεν ήδη και (περί της συνθέσεως) των ¿νομάτων fj κέχρηται ó άνηρ. "Οτι μέν ουν π€ριττή τίς έστιν ή της λέξεως της Δημο­ σθένους αρμονία και μακρω δη τινι διαλλάττουσα τάς

1 το : τφ Ι || ταύτα Sylb. : ταύτην Ζ || 11 μάλιστα — άπεφαινόμην addidi : lac. susp. Rad. || 18 τε : бе J || χρήσιν A p.c. : χοή Ζ И 21 ούχ add. Reiskius || 23 άλλ' ως Reiskius : άλλως Ζ || δέον Reiskius : бе Ζ || 24 λέγωμεν IV : λέγομεν AJ || 25 περί της συνθέσεως add. Reiskius.

20

25

119

DÉMOSTHÈNE

V, 35, 1

1

la fable n'est pas de moi . 2 N'importe qui, j'en suis sûr, se porterait garant de cette qualité de son style, pour peu qu'il ait un minimum de connaissance en matière d'art oratoire ; ses contemporains d'ailleurs admiraient manifestement chez lui cette qualité et cherchaient à imiter, sur ce point en particulier, son habileté technique, et ce, malgré le peu de sympathie que certains éprou­ vaient à son égard, ce qui ôte tout soupçon de flagorne­ rie ; certains même se montraient franchement hostiles et lui livraient des combats sans merci. 3 Dans leurs rangs, se trouvait l'orateur Eschine2, un homme excellemment doué pour l'éloquence, qui, sans être à mon avis tellement supérieur aux autres orateurs, ne le céderait à personne d'autre qu'à Démosthène. Or, concernant la virtuosité oratoire de Démosthène, Eschine critique certains points de langue avec sévérité, et parfois calomnieusement, jouant en cela son rôle d'opposant. 4 C'est ainsi qu'il lui reproche les néologismes, le manque d'agrément, le tour préten­ tieux, la soi-disant obscurité, le mordant, et bien d'autres défauts de ce genre3 ; c'était encore une façon, disais-je4, de dénigrer l'adversaire ; cependant, pour alimenter ses calomnies, il utilisait précisément des arguments vraisemblables6. 5 Sur la composition stylistique en revanche, il n'a rien pu και біаррсі διά τής ακοής ήδέως πως και άσπαστώς оибсѵ ήττον ή τά δι* ωδής και οργάνου μουσωθέντα κρούματα και μέλη. 8 "Ετι τής συνθέσ€ως ταύτης Ιστί και τά κώλα бсіѵаіс

ποιήμασιν €μφ€ρή, μαλακόφωνα και λιία, πολύ το κωτίλον Ιχοντα, κατά τίνα φιλότητα φυσικήν συζ€υγνύμ€να άλλήλοις. Έξ ¿ ν ή π€ρίοδος συνέστηκ€ν * оибсѵ γάρ ΐξω тгсріобои συντίθησιν. 9 "Ετι των ρυθμών, els as δή άποτ€λειται π€ριόδους, ου TOUS αξιωματικούς βούλβται λαμζάν€ΐν άλλα TOUS χαρΐ€στάτους * еикорифоі 8ή φαίνονται και €υγραμμοι διά τούτο και cis сбраѵ ασφαλή τ€λ€υτώσι. 10 Τών бе σχημάτων бсі διώκ€ΐν κινητικώτατα τών όχλων ° καλλωπίζ€ται γάρ και τέθηλ€ τούτοις, cav άχρι του μη λυπήσαι Tas άκοάς προζαίνη, ων cloiv αϊ тс παρισώ-

2 συνυφάνθαι : συνηφανθαι Α || 4 τούτω ΑΙ : τούτο VJ || 7 γραμμάτων Krüger : πραγμάτων Ζ || 9 ή add. Krüger || 10 ¿ύσις : £ήσις Ι || 11 νάματα Kiessling : σώματα Ζ || αύτοΐς : αύτης J rest. mg. Ι) άντικρούοντος Sylb. : άνακρούοντος Ζ || 14 δεινώς Ι : δεινά Α δεινώς α VJ || 15 ante ποιήμασιν hab. τοις Ι || 19 έτι Rad. : επί Ζ || δή αποτελείται Usener : бе αποστέλλεται Ζ διαστέλ­ λεται Rad. || 23 δει διώκειν Ζ : διώκει Sylb. || 24 έαν Ζ : αν Rad. II 25 προβαίνη Ζ : -voi Usener || ών Holwellius : ώς Ζ.

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DÉMOSTHÈNE

V, 40,10

mes, les assonances, les antithèses, ou encore les paronomases, les oppositions, les répétitions en anaphore, et beaucoup ďautres figures du même genre, qui sont les moyens d'expression de la poésie ou du lyrisme. 11 Tels sont à peu près, à ce qu'il me paraît, les traits caractéristiques de cette harmonie. Comme exemples de ce style, je peux citer chez les poètes Hésiode, Sappho, Anacréon ; chez les écrivains en prose, Isocrate d'Athè­ nes et ceux qui se sont mis à son école1. 12 J'ai déjà cité précédemment ι p 0 0 ^' 6 ." certains passages d'Isocrate, quand ση gynque ^ ¿écrivais ¿ans s o n e n s e mble le type de style propre à cet auteur2 ; on pourrait les utiliser pour contrôler la justesse de nos théories sur la composition stylistique : la vérification serait facile. Mais pour ne pas avoir l'air d'introduire une rupture dans la suite des développements en invitant le lecteur à se reporter à des exemples donnés au début du traité, empruntons maintenant un passage au Panégyrique (ça ne prendra pas beaucoup de temps à lire8) ; Isocrate y passe en revue les hauts faits des Athéniens lors de la bataille de Salamine. 13 Voici le passage en question : 96 ... Comme ils étaient incapables de se mesurer à la fois avec les deux forces de Vennemi, ils firent sortir de la cité tous les habitants et passèrent dans Vile voisine, afin de séparer les risques et de ne pas se battre sur les deux fronts à la fois. Eh bien ! où pourrait-on trouver des citoyens plus valeureux, plus dévoués à la Grèce? Refusant d'être responsables de Vasservissement des Grecs dans leur majorité,

1. Notes complémentaires, p. 176. 2. Allusion à la première partie du Démoslhène (ce qui prouve que le Dem. Il n'a jamais circulé seul), où le style d'Isocrate se trouve analysé dans son ensemble, d'abord au chapitre 4, où Denys le présente comme un bon représentant du genre mixte mais ne cite pas d'exemples, puis aux chapitres 17 à 20, où il analyse des passages du Sur la Paix, mais en partant d'un tout autre point de vue. 3. Notes complémentaires, p. 176.

V, 40,10

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

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açış και παρομοιώσ»ς και άντιθέσ€ΐς και τα παρωνομασμένα τά тс άντιστρέφοντα και τα έπαναφ€ρόμ€να και άλλα πολλά τοιαύτα ποιητικής και μ€λικής λέξ€ως όργανα. 11 Τοιαύτα τινά μοι και ταύτης ctvai фаіѵстаі χαρακτη­ ριστικά της αρμονίας. Παραδΰίγματα δ' αυτής ποιούμαι 5 ποιητών μ4ν Ήσίοδόν тс και Σαπφώ και 'Ανακρέοντα, τών бе π€ζή λέξ€ΐ χρησαμένων Ίσο κράτην тс τον 'Αθήναιον και τους CKCÍVU) πλησιάσαντας. 12 Εΐρηνται μέν ουν και πρότ€ρον ήδη λ4ξ€ΐς τινές, cv als τον δλον χαρακτήρα αυτού τής λέξ€ως υπέγραφον, 10 4ξ ών και τά π€ρί τήν σύνθ€σιν, ci τοιαύτα canriv ota λ4γομ€ν ήμ€Ϊς, ού χαλ€πώς αν τις ΐδοι. "Ινα бе μή δόξωμ€ν διαρτάν τάς ακολουθίας, τους άναγινώσκοντας ¿πι τά cv άρχαΐς ρηθέντα παραδ€ΐγματα κ€λ€υοντ€ς аѵаагтрсфсіѵ, λαμζανέσθω κάνταυθα ек των Πανηγυρικών αυτού λόγων 15 λέξις ou πολλήν διατριβήν παρέξουσα τοις άναγνωσομένοις, cv fj біс£срхстаі τά πραχθέντα 'Αθηναίοις π€ρι τήν cv Σαλαμΐνι ναυμαχίαν. 13 "Εστί бе ήδ€ * 96 ... *Επειδή γαρ ουχ οϊοί τε ήσαν προς άμφοτέρας άμα παρατάξασθαι τάς δυνάμεις, παραλαξόντες άπαντα 20 τον δχλον έκ τής πόλεως εις τήν έχομένην νήσον έξέπλευσαν, lv9 έν μέρει καΐ μή προς έκάτερα κινδυνεύωσι. Καίτοι πώς αν εκείνων άνδρες άμείνους ή μάλλον φιλέλληνες δντες επιδειχθεϊεν, οίτινες Ιτλησαν έπιδεϊν, ώστε μή τοϊς πολλοίς αίτιοι γενέσθαι τής боѵЫас, 25 ερήμην μεν τήν πόλιν γιγνομένην, τήν δε χώραν πορθου-

1 τα alt. om. Ι || 4-5 χαρακτηριστικά om. Ι || 7 τον 'Αθήναιον : τών 'Αθηναίων V || 10 ύπέγραφον : ύπέφαινον I rest. mg. || 15 αύτοΰ post λόγων Ι || 21 ¿κ Ζ : τον έκ Isoc. || 22-23 καΐ μή — κινδυνεύωσι Ζ : προς έκατέραν κινδυνεύσωσιν Івос.гв || 25 πολ­ λοίς Ζ : λοιποις Isoc.

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DÉMOSTHÈNE

V, 4 0 , 1 3

ils se sont résignés à voir leur cité désertée, leur contrée ravagée1, les sanctuaires pillés, les temples incendiés, et toute la guerre dirigée contre leur patrie! 97 Non contents de cela, ils étaient prêts à combattre seuls contre douze cents trières, mais ils n'en eurent pas le loisir. Piqués au vif devant un tel courage, les Péloponnésiens, qui se disaient aussi que, en cas de désastre des nôtres, eux non plus ne trouveraient pas de salut, mais que, en cas de victoire, leurs cités seraient déshonorées, furent contraints de prendre leur part de risques. Le tumulte de l'action, les cris, les exhortations, lot ordinaire des combats sur mer, nul besoin de les décrire longuement. 98 En revanche, les traits singuliers qui nous rendent dignes de l'hégémonie et viennent confirmer mes théories, il est de mon devoir de les indiquer. Notre cité avait une telle supériorité, quand elle était intacte, que, même détruite de fond en comble, elle a réuni, pour défendre la Grèce du danger qui la menaçait, plus de trières que tous les autres combattants, et des trières qui pouvaient se battre contre deux fois leur nombre. Personne en tout cas n'est assez mal disposé envers nous pour refuser de reconnaître que celte victoire navale nous a fait gagner la guerre, et que, de cette victoire, notre cité a été l'artisan. 99 Eh bien donc, si une expédition doit se faire contre les Barbares, qui doit en prendre la direction? N'est-ce

1. Cf. Démosthène, XVIII, 204, cité par Denys dans le Démosthène I, en 31, 2.

V, 40, 13

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

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μένην, ιερά бе συλώμενα καΐ νεώς έμπιπραμένους, άπαντα δε τον πόλεμον περί την πατρίδα τήν αυτών γενόμενον ; 97 Kal μήν ούδε ταϋτ9 άπέχρησεν αυτοϊς, άλλα προς διακοσίας καί χιλίας τριήρεις μόνοι διαναυμαχεϊν ουκ έμέλλησαν, ου μήν εΐάθησάν γε. Καταισχυνθέντες τε γαρ Πελοποννήσιοι τήν άρετήν αυτών καί νομίσαντες προδιαφθαρέντων μέν τών ημετέρων ουδ* αυτοί σωθήσεσθαι, κατορθωσάντων δ* είς άτιμίαν τάς αυτών πόλεις καταστήσειν, ήναγκάσθησαν μετασχεϊν τών κινδύνων. Και τους μεν θορύξους τους εν τω πράγματι γιγνομένους καί τάς κραυγάς και τάς παρακελεύσεις, ă κοινά πάντων εστί τών ναυμαχούντων, ουκ οίδ* б τι δει λέγοντας διατρίζειν. 98 ΛΑ δ* ëcrriv Ιδια και της ηγεμονίας άξια καί τοις προειρημένοις όμολογούμενα, ταύτα δ* έμον έργον εστίν ειπείν. Τοσούτον γαρ ή πόλις ημών διέφερεν, δτε ήν ακέραιος, ώστε ανάστατος γενομένη πλείους μεν συνεζάλετο τριήρεις είς τον κίνδυνον τον υπέρ της 'Ελλάδος ή σύμπαντες οί ναυμαχήσαντες, δυναμένας δε προς δίς τοσαύτας κινδυνεύειν. Ουδείς γ' οϋν προς ήμας οϋτως έχει δυσμενώς δστις ουκ αν όμολογήσειε δια μεν τήν ναυμαχίαν ήμας τω πολέμω κρατήσαι, ταύτης δε τήν πάλιν αΐτίαν γεγενησθαι. 99 Καίτοι μελλούσης στρατείας επί τους βαρξάρους ίσεσθαι, τίνας χρή τήν ήγεμονίαν ίχειν ; Ου τους èv τω

1 έμπιπραμένους Ι Ι soc. : έμπιμπραμένους AVJ || 3 γενόμενον Ζ : γιγνόμενον Isoc. || 4 ουδέ Isoc. : μηδέ Ζ || άπέχρησεν Isoc. : άποχρήσαι Ζ || 5 χιλίας καί διακοσίας Isoc. || 6 εΐάθησαν : εΐώθησαν Α || γε non hab. Isoc. || τε non hab. Isoc. | | 1 1 γινόμενους AVI : γιγνομένους J γενομένους Isoc. || 13 λέγοντας Ζ : λέγοντα Isoc. || 14 Αξία : άξιον Α || 16 τοσούτον I Isoc. : τοσούτου AVJ || 19-20 δυναμένας — κινδυνεύειν non hab. Isoc. || 20 γ* οδν Ζ : δέ Isoc. || 23 γεγενησθαι Ζ : γενέσθαι Isoc.

DÉMOSTHÈNE

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V, 40,13

pas ceux qui, dans la guerre précédente, ont acquis la plus glorieuse réputation, qui bien des fois à titre personnel se sont exposés les premiers au danger, et qui, dans les luttes pour la communauté, ont mérité le premier prix? N'est-ce pas ceux qui ont abandonné leur patrie pour le salut de tous et qui, antiques fondateurs de bon nombre de villes, les ont sauvées, depuis, des pires infortunes? Ne serait-ce pas nous faire une injure grave, quand nous avons pris la plus grande part à la peine, de nous attribuer la plus petite part des honneurs et, quand nous sommes jadis montés en première ligne pour la défense commune, de nous forcer aujourdłhui à nous mettre à la remorque ď autrui? L'harmonie mucte

41. .ß

1 La troisième harmonie, dont digais

que

¿¿^

un

mélange

1

des deux autres , prenant à chacune les éléments les plus utiles, ne possède pas de caractère particulier ; suivant le désir ou la capacité qu'ont les tenants de cette harmonie d'éviter tel trait de style ou d'adopter tel autre, le dosage est différent, comme en peinture dans les mélanges de couleur. 2 Pour cette harmonie, le modèle suprême est le poète Homère2 ; l'on ne saurait citer en effet de style mieux ajusté que le sien sous le double rapport de l'agré­ ment et de la solennité. Parmi ses imitateurs, on compte beaucoup de poètes épiques ou lyriques, beaucoup aussi d'auteurs tragiques ou comiques, d'historiens, de philo­ sophes ou d'orateurs antiques. 3 Les mentionner tous serait un gros travail3 ; je m'en tiendrai aux auteurs qui se sont illustrés en prose, et n'en présenterai que deux, ceux que je considère comme les plus importants : un historien,

1. Même présentation que dans le D.C.V., VI, 24, 1 : l'harmonie mixte ou intermédiaire n'a pas de caractère propre, d'où la difficulté de la définir, même à l'état pur. 2. Même éloge d'Homère dans le D.C.V., VI, 24, 4. 3. Notes complémentaires, p. 176.

V, 40,13

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

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προτέρω πολεμώ μάλιστα ευδοκιμήσαντας και πολλάκις μέν ìòiq. προκινδυνενσαντας, èv бе τοις κοινοϊς των αγώνων αριστείων άξιωθέντας ; Ου τους τήν αυτών κατάλιπόντας περί της των άλλων σωτηρίας κάί τό γε πάλαιαν οίκιστάς πλζίστονν πόλεα>ν γενομένους κάί πάλιν αΰτας έκ τών μεγίστων συμφορών οιασώσαντας ; Πώς δ9 ουκ αν δεινά πάθοιμεν, εΐ τών κακών πλείστον μέρος με­ τάσχοντες Ιλαττον ταϊς τιμαις ¡ίχειν άξιωθείημεν, κάί τότε προταχθέντες προ τών άλλων, νυν έτέροις άκολουθεϊν άναγκασθείημεν ; 41. 1 Της бе τρίτης αρμονίας, ην Ιφην μικτήν έξ άμφοΐν ctvai τα χρησιμώτατα έκλέγουσαν άφ* скатеρας, ούδ€ΐς έστι χ α ρ ατή ρ ίδιος, αλλ' ώς αν oi μ€τιόντ€ς αυτήν προαιρέσιως ίχωσιν η δυνάμ€ως τα μέν фиусіѵ, та δέ XoÇcîv, ο&τως κίρνανται καθ aire ρ lv τ% ζωγραφία τα μίγματα. 2 Ταύτης της αρμονίας κρατιστος μέν ¿YCVCTO κανών ό ιτοιητής "Ομηρος, και ουκ αν τις ciiroi λέξιν άμ€ΐνον ήρμοσμένην της сксіѵои προς άμφω ταύτα, λέγω бе την тс ήδονήν και το σ€μνόν. Έζήλωσαν бе αυτόν έπων тс πολλοί ποιηταί και μ€λών, сті бс τραγωδίας тс και κωμωδίας, συγγραφ€ΐς тс αρχαίοι και φιλόσοφοι και ρητορ€ς. 3 Ων απάντων μ€μνήσθαι πολύ αν Ιργον €ΐη, арксасі бс τών cv λόγοις δυναστ€υσάντων ους έγώ κρατίστους ctvai πείθομαι био παρασχέσθαι μόνους, συγγραφέων μέν Ήρό-

2 προκινδυνεύσαντας Isoc. : διαπροκινδ — Ζ || 3 αριστείων : άριστείαν Α || 3-4 καταλιπόντας περί Ζ : εκλιπόντος υπέρ Isoc. || 4 γε Ζ : τε Isoc. || 5 πλείστων Ζ : τών πλείστων Isoc. || 8 έλαττον ταις τιμαϊς Ζ : έν ταΐς τιμαΐς έλαττον Isoc. || άξιωθείημεν Ζ : -θεΐμεν Isoc. || 9 προ Sylb. : προς Ζ υπέρ Isoc. || τών Αλλων Ζ : απάντων Isoc. || 10 άναγκασθείημεν Ζ : -θεΐμεν Isoc. || 13 αυτήν Sylb. : αύτφ Ζ || 15 κίρνανται : κρίνονται Ι || 19 αυτόν : αυτών V.

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DÊMOSTHÈNE

V, 4 1 , 3

Hérodote, et un philosophe, Platon ; c'est que la dignité et la grâce sont toujours présentes ensemble dans leurs harmonies1. D'ailleurs, n'importe qui peut vérifier par un examen attentif la justesse et le bienfondé de mon opinion. 4 Par exemple, qui ne tomberait го ote. . d'accord que le passage suivant est à mi-chemin de l'harmonie austère et de l'harmonie d'agrément, et qu'il a pris à chacune ses meilleurs élé­ ments? Hérodote y prête à Xerxès un discours délibératif sur la question de l'expédition contre la Grèce. 5 Le passage concerné a été transcrit en attique2 : 8 « Perses, je ne serai pas le premier à instituer cet usage chez vous; je l'ai reçu en héritage pour le mettre en pratique. J'apprends en effet des anciens que nous ne sommes jamais restés en repos, depuis que nous avons ravi aux Mèdes Uhégèmonie, après Vexpulsion ďAslyage par Cyrus: с1 esi un dieu qui nous mène dans cette voie, et nous, à le suivre, nous avons souvent avantage. Les succès de Cyrus, de Cambyse, de mon propre père Darius, les peuples qu'ils ont conquis, sont connus de tous; nul besoin de les rappeler. Pour moi, depuis que je suis monté sur ce trône, je réfléchissais aux moyens de ne pas être en reste de gloire avec mes prédécesseurs et d'augmenter non moins qu'eux la puissance des Perses. Or, à la réflexion, je découvre que nous pouvons acquérir, en sus de la gloire, une terre comparable à la nôtre pour la taille et pour

1. Cette phrase définit l'harmonie moyenne, dans laquelle aux yeux de Denys coexistent les caractères des harmonies extrêmes. Mais la citation d'Hérodote n'est pas commentée ; il n'y a pas d'extrait de Platon ; et donc on ne sait trop où exactement Denys voyait de la dignité ou de la grâce chez les auteurs cités. 2. C'est une habitude chez Denys (cf. VI, 3, 15 ; 4, 8), d'autant plus surprenante que la modification des sonorités qui s'ensuit ne lui permet pas d'apprécier à sa juste valeur « l'harmonie » propre à Hérodote.

V, 41,3

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

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δοτον, φιλοσόφων бе Πλάτωνα * και γαρ και αξίωμα και χάρις αυτών сігітрсхсі ταΐς άρμονίαις. Ei бс ορθά έγώ και сікота €γνωκα тгсрі αυτών, έξΰτάσαι τω βουλομένω окотгсіѵ ίστιν. 4 Фсрс δη τις ουκ αν όμολογήσ€ΐ€ν της тс αυστηράς και της ήδ»ας αρμονίας μέσην ctvai тт|ѵбс την λέξιν, και τά κράτιστα €ΐληφέναι τταρ' έκατέρας, fj κέχρηται Ηρόδο­ τος Ξέρξη тгсріѲсІс τον λόγον от' сбоиАсието тгсрі της προς τους "Ελληνας атратсіас ; 5 Μ€τακ€κόμισται δ' cię την 'Ατθίδα διάλβκτον ή λέξις *

5

10

9

8 "Ανδρες Πέρσαι, οϋτ* αυτός καθηγήσομαί νόμον τόνδ έν ύμίν τιθείς παραδεξάμενός τε αύτω χρήσομαι. Ής έγώ πννθάνομαι των πρεσξυτέρων, ουδένα χρόνον ήτρεμήσαμεν, έξ οϋ παρελάξομεν τήν ήγεμονίαν τήνδε παρά

Μήδων, Κύρου καθελόντος Άστυάγην · άλλα θεός τε οΰτως ενάγει καΐ αυτοϊς ήμϊν πολλά έπνοϋοι συμφέρεται έπι το αμεινον. "Α μέν δή Κϋρός τε xal Καμξύσης πατήρ τε ο έμος Δαρείος κατειργάσαντο έθνη, έπισταμένοις σοκ αν τις λέγοι. Έγώ ó', επειδή παρελαξον τον θρόνον τούτον, έφρόντιζον δπως μή λείψομαι των πρότερον γενομένων έν τη τιμή τηδε μηδ9 έλάσσω προσκτήσομαι δύναμιν Πέρσαις. Φροντίζων δε ευρίσκω άμα μεν κϋδος ήμϊν προσγινόμενον χώραν τε ής νϋν κεκτήμεθα

8 περιθείς : περιτιθείς V || έβουλεύετο Sylb. : έβούλετο Ζ || 12 ώς Ζ : ώς γαρ Herod. || 13 ουδένα χρόνον Ζ : ούδαμά πω Herod. II 14 έξ οΰ Ζ : έπείτε Herod. || 16 ενάγει Ζ : Αγει Herod. || έπιοϋσι Ζ : έπέπουσι Herod. cp έφέπουσι Herod. cett . || 17 ά μέν δή Ζ : τα μέν νυν Herod. || 18 καΐ προσεκτήσαντο Herod. || 19 ούκ Ζ :PDεδ ούκ Herod. || επειδή Ζ cett : έπείτε Herod. || 20 λείψομαι IJ Herod. : λείψωμαι AV Herod. . || 21 γενομένων : γινομένων J || 21-22 προσκτήσομαι I Herod.* : -κτήσωμαι AVJ Herod. cett . || 23 ήμϊν : ύμϊν V || προσγινόμενον Herod. : -γενόμ- Ζ || κεκτήμεθα Ζ : έκτη μέθα Herod.

ιЪ

20

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DÉMOSTHÈNE

V, 4 1 , 5

Vagrément, et plus luxuriante encore, tout en prenant notre revanche et châtiant des coupables. Aussi vous ai-je réunis aujourd'hui pour vous dévoiler les actions queje médite: j'ai Vintention de poser un joug sur VHellesponl1 et de mener mon armée par VEurope jusqu'en Grèce, afin de tirer vengeance des Athéniens pour tout le mal qu'ils ont fait aux Perses et à mon père. Voyez : Darius, qui brûlait lui aussi de marcher contre ces hommes, est mort avant d'avoir pu se venger; moi donc, j'agirai en son nom et au nom de tous les Perses, et je ne m'arrêterai que lorsque j'aurai pris et incendié Athènes. Ces gens-là ont commencé à nous attaquer, mon père et moi, contre toute justice. Tout d'abord, ils ont marché contre Sardes avec Aristagoras de Milet, l'un de nos sujets; ils ont incendié sanctuaires et bois sacrés. En second lieu, que ne nous ont-ils pas fait quand nous avons débarqué sur leur territoire, sous le commandement de Datis et d'Artapherne, comme tous vous le savez. Au regard de tout cela, j'ai pris la résolution de marcher contre eux, et j'y trouve aussi, à la réflexion, bien des avantages. En effet, si nous les battons, eux et leurs voisins qui habitent la terre de Pélops le Phrygien, nous montrerons que la terre perse n'a d'autre frontière que le ciel de Zeus, car le soleil

1. Allusion au pont de bateaux qui a permis à Xerxès de faire passer ses troupes d'Asie en Europe.

V, 41, 5

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

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ουκ ελάσσονα ουδέ φλαυροχέραν παμφορωχέραν χε, αμα бе χψωρίαν καί χίσιν γινομένην. Δια δη χαϋχα νυν ύμας έγώ συνέλεξα, ίνα ă διανοούμαι πράχχειν ύποθώ ύμϊν · μέλλω ζεύξας xòv Έλλήσπσνχσν έλαννειν σχραχον δια χής Ευρώπης επί χήν *Ελλάδα, Ινα * Αθηναίους χιμωρήσωμαι δσα δή πεποιήκασι Πέρσας χε καί πατέρα xòv έμόν. Όραχε μέν δή καί ΔαρεΧον προθυμούμενον σχραχεύεσθαι επί χους άνδρας χούχους, αλλ* δ μεν χεχελεύχηκε, καί ουκ έξεγένεχ9 αύχω χιμωρήσασθαι · εγώ δ9 υπέρ χ9 εκείνου καί χών αλλων Περσών ου πρόχερον παύσομαι πριν §λω χε και πυρώσω χάς Αθήνας. 01 γε έμέ χε καί παχέρα xòv έμον υπήρξαν άδικα ποιοϋνχες. Πρώχα μέν είς Σάρδεις έλθόνχες άμα Άρισχαγόρα χω Μιλησίω, δούλω бе ήμεχέρφ, ένέπρησαν χα χε αλση καί τα ιερά. Δεύτερα dé ήμας ola ¿ορασαν είς χήν γην χήν σφεχέραν άποξάνχας, δχε Δαχίς χε και *Αρχαφέρνης έσχραχήγουν, έπίσχασθέ που πάνχες. Τουχων μένχοι ένεκα άνώρμημαι έπ9 αυτούς σχραχεύεσθαι, αγαθά δ* εν αύχοϊς χοσάδε ανευρίσκω λογιζόμενος. ΕΙ χούχους χε καί χοός χούχοις πλησιοχώρους καχασχρεψόμεθα ol Πέλοπος χου Φρυγος νέμονχαι χώραν, γην [τε] χήν Περσίδα άποδείξομεν χφ Διός αίθέρι δμορον

1 ελάσσονα : -σωνα V || φλαυροτέραν ΑΙ Herod. : φαυλοτέραν VJ || 3 8ιά бе ταύτα Ζ : διό Herod. || νυν ύμας Ζ : ύμέας νυν Herod. A B C ύμέας Herod. cett . || Ä διανοούμαι Ζ : τα νοέω Herod. II 4 ύποθώ Ζ : ύπερθέωμαι Herod. || 5 έλαύνειν Ζ : έλ&ν Herod. || 6 Πέρσας IV Herod. : Πέρσαις AJ || 7 όρατε Ζ Herod. c : ώρατε Herod. cett . || μεν om. V || δή Ζ : νυν Herod. || 8 προθυμούμενον Ζ : ίθύοντα Herod. || 9 αύτφ Ζ Herod.*1· : οι Herod. 8 || 9-10 τιμωρήσασθαι Herod. : -ρήσεσθαι Ζ || 11 post πρίν hab. ή Herod.ABCP άν ή Herod. DR8V || 13 άμα Herod. : παρά Ζ || 15 τα alt. om. V H έδρασαν Ζ : ίρξαν Herod. || 16 τήν γην non hab. Herod. H τε om. I || 18 άνώρμημαι Z : άναρτήμαι Herod. || 20 τε del. Sylb. : non hab. Herod. || 22 δμορον οδσαν Ζ : όμουρέουσαν Herod. c p όμορέουσαν Herod. cett .

134

DÉMOSTHÈNE

V, 41,б

n'éclairera aucun pays qui soit limitrophe du nôtre; je ferai de tous ces territoires, avec votre aide, un seul pays, en traversant VEurope de bout en bout1. D'après les informations que j'ai recueillies en effet, il ne restera pas une cité, pas une nation capables de livrer bataille, une fois supprimé le peuple dont je parle. Ainsi, coupables ou non, tous passeront docilement sous notre joug. Quant à vous, voici ce que vous aurez à faire pour m'être agréables: quand je vous aurai fixé le moment où vous devrez venir nous rejoindre, il vous faudra tous mettre une grande ardeur à vous présenter; celui qui viendra avec l'armée la mieux équipée recevra la récompense la plus appréciée dans notre pays. Telles sont les consignes à suivre. Mais pour ne pas vous paraître prendre seul les décisions, je mets l'affaire en délibération, et j'invite qui d'entre vous le désire à donner son opinion. » 42. 1 Je souhaiterais fournir bien ďautres exemples encore de la manière propre à l'historien ; la démonstra­ tion en serait plus solide. Ce qui me retient pour l'ins­ tant, c'est la hâte que j'ai de tenir mes promesses et ma crainte de paraître importun. Aussi Platon l'admirable me pardonnera-t-il, j'en suis sûr, de ne pas présenter

1. Xerxes vise donc à l'empire universel : la victoire sur les Grecs lui ouvrira, croit-il, toute l'Europe jusqu'à l'Océan exté­ rieur.

V, 41,5

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

134

οϋσαν · ού γαρ δη χώραν γε ουδεμίαν κατόψεται ô ήλιος δμορον οΰσαν τη ημετέρα, αλλ9 αύτάς άπάσας έγώ αμα ύμϊν μίαν χώραν θήσω, δια πάσης έξελθών της Ευρώπης. Πννθάνομαι γαρ ώδε έχειν · οϋτε τινά πόλιν αυτών ουδεμίαν οϋτε ёѲѵос ανθρώπων ούδεν ύπολείπεσθαι ήμϊν δ οΐόν τε Ισται έλθεϊν είς μάχην, τούτων ών έλεξα ύπεζηρημένων. Οϋτως ol τε ήμϊν αίτιοι έξουσι δούλων ζνγον οίτε αναίτιοι. *Υμεϊς δ* αν μοι τάδε πονουντες χαρίζοισθε · έπειδάν ύμϊν σημήνω τον χρόνον είς δν ήμϊν ήκειν δοκεϊ, προθύμως ύμας απαντάς δει παρεϊναι · δς δ9 αν έλθη έχων κατεσκευασμένον στρατον κάλλιστα, δώσω αύτφ δωρεάν, ή δή τιμιωτάτη νομίζεται έν ημετέρου. Ποιητέα μέν δή ταϋτ9 εστίν οΰτω. "Ινα δε μή Ιδιοξουλεύειν ύμϊν δοκώ, τίθημι τα τιραγμα ές μέσον, γνώμψ κελεύων υμών τον βουλόμενον άποψαίνεσθαι. 42. 1 Έζουλομην сті irXcíu) τταρασχέσθαι παραδείγματα της τοΟ συγγραφέως αγωγής ' Ισχυρότερα γαρ ή ττίστις ούτως αν έγέν€το. Νυν 8' €ξ€ΐργομαι, σπουδών eirl τα Ίτροκ€ΐμ€να καΐ αμα δόξαν υψορώμ€νος ακαιρίας. Συγγνώσ€ται δή μοι και Πλάτων ο θαυμάσιος ci μή ιταραθήσο-

1 γε Herod. : τε Ζ || 6 non hab. Herod. || 2 δμορον ούσαν Ζ : δμορον έουσαν Herod.8 ομουρον έουσαν Herod.0«1*. || αύτάς άπάσας Ζ : σφέας πάσας Herod. || 3 έξελθών Ζ : διεξελθών Herod. || 4 αυτών Ζ : ανδρών Herod. || 6 ήμϊν Ι Herod. : ύμϊν AVJ || δ Ζ : το (ante ήμϊν) Herod. || οϊόν τε : οΐονται J II 7 ήμϊν : ύμϊν V || αίτιοι Herod. : αντίο ι Ζ || 8 αναίτιοι Herod. : 'Αθηναίοι Ζ Ц 9 χαρίζοισθβ Herod. : -ζεσθε Ζ || 10 ήμϊν Sylb. : ύμϊν ΙΑ J om. V non hab. Herod. H δοκεϊ Ζ : δει Herod. ||11 ύμας άπαντος δει Ζ : πάντα τινά ύμέων χρήσει Herod. || έλθη Rad. :ABCP Ζλθοι Ζ ήκη Herod. || 12 κατεσκευασμένον Ζ : παρεσκ- Herod. παρασκευασάμενον DRV Herod. U δωρεάν Ζ : δώρα Herod. || 13 ή δή τιμιωτάτη Ι : ήδη τιμιωτάτην ή AVJ τα τιμιώτατα Herod. || post νομίζεται hab. είναι Herod. || δή : νυν Herod. || 20 προκείμενα Rad. : υπο­ κείμενα Ζ. 8

DÉMOSTHÈNE

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V, 42, 1

aussi des extraits de son œuvre. Devant des connais­ seurs, un simple rappel suffit1. 2 Mon objectif en effet, en présentant les différentes harmonies avec leurs traits caractéristiques et les auteurs qui se sont distingués dans chacune, était d'éviter que, lorsque j'avancerais l'idée que Démosthène a pratiqué l'harmonie mixte ou moyenne, l'on ne vienne m'objecter : « Quelles sont donc les harmonies extrêmes? Quelle est la nature de chacune des deux? En quoi consiste ce mélange ou ce dosage? extrêmes. » 3 A ce premier motif qui rendait, à mon sens, ces pré­ liminaires indispensables, s'en ajoute un second : c'est le désir que mon traité, au lieu d'être austère et d'une seule venue, comporte quelques récréations culturelles2. Assurément, si présenter trop de hors-d'œuvre de ce genre ne serait pas bon, il ne le serait pas non plus de les refuser quand le sujet les réclame. 48.

Olγηthieve enne

le

1 Puisque j'ai déjà indiqué8 choix

de

Démosfchène

>

c,e8t

maintenant à chacun de contrôler la véracité de mes dires en considérant d'abord tous les passages de Démosthène où la mise en œuvre est solennelle, austère, empreinte de dignité ; en considérant ensuite tous ceux où elle se montre pleine de charme et d'agrément4. 2 S'il est encore besoin de démonstration, il n'y a qu'à prendre n'importe quel discours de Démos­ thène, commencer à n'importe quel endroit et s'avancer, en analysant le style dans le détail ; on trouvera ici des harmonies lentes et distendues, là des harmonies compactes et ramassées, tantôt des sons raboteux et mordants à l'oreille, tantôt des sonorités douces et léni­ fiantes ; tantôt la phrase entraîne les auditeurs vers l'émotion, tantôt elle les dispose à l'impression morale5,

1, 2, 3, 4. Notes complémentaires, p. 176-177. 5. Lien intéressant à noter entre l'harmonie austère et le πάθος, l'harmonie polie et 1'ήθος.

V, 42,1

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

135

μαι каксіѵои Xc^ciş· Ή γαρ υπόμνησις ώ$ cv сібооіѵ ικανή. 2 Ταύτα бе δη βουλόμ€νος Tas тс διαφοράς των αρμο­ νιών και τους χαρακτήρας αυτών και τους πρωτ€ύσαντας cv αότοις διήλθον iv*, сігсібаѵ αποφαίνωμαι γνώμην δτι την μέσην тс και μικτήν άρμονίαν сігстг)бсиа€Ѵ б Δημο­ σθένης, μηδ€ΐς ύποτυγχάνη μοι ταύτα λέγων * « ΑΙ γάρ ακραι TÍVCS cíolv άρμονίαι ; Kai τίς αυτών έκατέρας (ý\) φύσις, και τίς ή μΐξις ή ή κρασί ς αυτή ; Ουδέν γαρ δή των {αρμονιών ΐσμ€ν των) άκρων ». 3 Τούτου μέν δή πρώτου χάριν, ъкпгср 2φην, сксіѵа ήναγκάσθην тгроспгсіѵ, стгсіта, ίνα μοι μή μονόκωλος J μηδέ αυστηρός & λόγος, αλλ' 8χη τινάς ситгаібситоис διαγωγάς. Оитс γαρ λίαν παρέχ€ΐν τας τοιαύτας προσθήκας

OUTC απαιτούντος του λόγου παραλιπ€ΐν καλώς αν ϊχοι· 48· 1 Δ€δ€ΐγμένης δή μοι της αιρέσ€ως του ρήτορος ταύτης, ήδη τις irap' έαυτω σκοπ€ΐτω τα λ€χθέντα δτι τοιαυτ' εστίν, ένθυμούμ^ος μέν δσα σ€μνώς катсаксиаогтаі τω ανδρι και αυστηρώς και άξιωματικώς, ένθυμούμ^νος δέ δσα τ€ρπνώς και ήδέως. 2 Ει δέ κάνταυθα боСсі τι бсіѵ [ή πίστις] άποδ€ΐξ€ως, δντινα βουλίται τών λόγων αυτού ττροχ€ΐρισάμ€νος και αφ' об βούλ€ται μέρους άρξάμ€νος, καταζαινέτω тс και σκοπ»τω τών λ€γομένων Ικαστον, cl τα μέν άνα^ζλημένας ζχ€ΐ τάς αρμονίας και δΐ€στώσας, τα δέ προσκολλώσας και συμπ€πυκνωμένας, καΐ τα μέν άποτραχύν» тс και irucpaívci τήν ακοήν, τα δέ ırpauvcı και Xcaívci, και τα μέν cis πάθος сктреігсі τους άκούοντας,

1-2 είδόσιν Ικανή Sadaeus : είδόσι και Ζ || 5 αποφαίνομαι : -φαίνομαι Α || 8 ή add. Sadaeus Ц 10 αρμονίων ίσμεν τών addidi : lac. fere 10 litt. AI || 12 μοι post μή V || 14 λίαν παρέχειν ego : πιστεύειν Ζ || 16 αίρέσεως Rad. : διαιρέσεως Ζ || 21 ή πίστις del. Rad. H 25-27 καΐ τα μέν — λεαίνει om. Ι.

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DÉMOSTHÈNE

V, 43,2

tantôt elle produit encore mille autres effets variés, par la seule vertu de la composition stylistique. 3 En voici un exemple. Je prendrai pour illustrer mon propos des passages choisis sans intention délibérée, les premiers qui me tomberont sous la main. Celui-ci est tiré d'une des harangues contre Philippe1 : 22 Si l'un d'entre vous, Athéniens, voyant la chance de Philippe, se dit qu'il est de ce fait un redoutable adversaire, il a la prudence d'un sage; c'est une grande aide effectivement que la chance, ou plutôt c'est l'essentiel dans toute affaire humaine. Et pourtant, moi qui vous parle, si l'on me donnait à choisir, je préférerais la chance de notre cité, pour peu que vous consentiez, si peu que ce soit, à agir correctement, à la chance de Philippe. 4 Dans ces trois périodes, pratiquement tous les mots2 entrent dans une composition pleine d'eupLonie et d'agrément, du fait que leurs ajustements se caracté­ risent par la continuité sonore et le moelleux ; très rares sont les mots qui brisent l'harmonie des ajustements et la font paraître raboteuse. Dans la première période, on ne compte de heurts de voyelles qu'en deux endroits, dans ώ άνδρες Άθη/αϊοι et dans εύτυχοΰντα ορών8, ce qui brise la contiiuité sonore. 5 En deux ou trois autres endroits, la juxta­ position de demi-voyelles < e t d'aphones>, lettre* qui par nature ne peuvent pas adhérer étroitement entre elles, dans le τον Φίλιππον ou dans ταύτη φοίερον προσπολεμήσαι, jette un léger trouble dans la sororité et l'empêche de paraître moelleuse.

1. Démosthène, Deuxième Olynlhienne, II, 22. 2. Denys analyse d'abord un ensemble de trois périodes bon exemple à son avis d'harmonie moyenne, mais il se borne ei fait à envisager la juxtaposition des mots (hiatus, heurts entre consonnes, etc.) à l'intérieur des périodes. Ce passage rtlève, d'après Denys, de l'harmonie polie ; mais, curieusement, il œ cite que les exceptions, hiatus et heurts de consonnes. 3. Notes complémentaires, p. 177.

V, 43,2

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

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τα δ' cis ήθος υπάγεται, τα δ* αλλάς τινάς εργάζεται και πολλάς διαφοράς irap* αυτήν την σύνθεσιν. 3 Ota έστι ταυτί* χρήσομαι δε παραδείγμασιν ουκ ¿ξ εττιτηδευσεως, αλλ* ots ενέτυχον, ¿ξ 4νός των Φιλιππικών λαζών '

5

22 ΕΙ δέ τις υμών, ώ ανδρες 'Αθηναίοι, τον Φίλιππον εντνχονντα δρών, ταύτη φοξερον προσπο%ζμησαι νομίζει, σώφρονος μέν ανθρώπου τιρονοία χρτβαι · μεγάλη γαρ $οτνή, μάλλον бе δλον ή τύχη παρά πάν? εστί τα των ανθρώπων πράγματα, Ον μήν άλλ' ίγωγε, εϊ τις αϊρεσίν Ю μοι δοίη, τήν της ημετέρας πόλεως τύχην αν έλοίμην, εθελοντών ă προσήκει ποιεϊν ύμων κάί κατά μικράν, ή τήν εκείνον. 4 Έν ταις τρισί ττεριόδοις ταύταις τα μεν άλλα ¿νάματα πάντα ευφώνως тс σύγκειται και ήδεως τφ συνέχεις σφόδρα και μαλάκας αυτών εΐναι τάς αρμονίας * ¿λίγα б' εστί παντάπασιν & διιστησι τάς αρμονίας καΐ τραχείας φαίνεσθαι ποιεΐ αυτάς. Έν μεν τη πρώτη περιόδω κατά δύο τόπους τα φωνήεντα συγκρουόμενα, cv тс τω ώ ανδρες 'Αθηναίοι και ¿ν τφ εντνχονντα όρων, διιστησι το συναφές. 5 Και κατ' άλλους δύο τόπους ή τρεις τά ήμίφωνα (και άφωνα) παραπίπτοντα άλλήλοις τά φύσιν ούκ έχοντα συναλείφεσθαι, cv тс τφ τον Φίλνππον και cv τφ ταύτη φοξερον προσπολεμησαι% ταράττει τους ήχους μετρίως και ουκ ε§. φαίνεσθαι μαλακούς.

6 άνδρες om. AJ || 8 προνοΐα : διανοία Ι λογισμφ Dem. || 9 παρά om. Ι || 12 υμών Ζ : υμών αυτών Dem. || 15 τφ om. V || συνεχείς Rad. : συγκεϊσθαι Ζ || 19 et 22 τόπους Kiessling : τρόπους Ζ || 21 post ορών hab. ά καΐ Ζ ά Rad. || 22 καΐ άφωνα add. Rad. || 24 τον : τών Α:

15

20

25

137

DÉMOSTHÈNE

V, 43,6

6 Dans la seconde période, la combinaison des mots μεγάλη γαρ ροπή est raboteuse du fait que les deux ρ ne peuvent adhérer étroitement Tun à l'autre ; il en est de même dans ανθρώπων πράγματα, où le v n'est pas dans le même plan sonore que la lettre qui suit ; il y a déchirure du son dans μάλλον бе δλον ή τύχη, où les voyelles brèves encadrant le temps intermédiaire le distendent encore1. 7 Dans la troisième période, si Ton voulait faire adhérer fortement entre elles les voyelles, en les écrasant2 comme on le peut pour οϊομαι et δέον, on n'en trouverait pas qui puissent s'unir Tune à l'autre. Quant aux consonnes, il n'y a qu'en deux ou trois endroits qu'on peut en trouver qui n'assurent pas une liaison lisse avec les lettres qui leur sont contiguës, dans le αίρεσίν μοι δοίη par exemple ou dans της ημετέρας πόλεως. 8 Jusque-là, c'est la seconde harmonie qui triom­ phait ; mais dans la suite, c'est la première, plus dis­ loquée que l'autre ; 22 Car beaucoup plus nombreux sonile le vois, les moyens de gagner la bienveillance des dieux chez vous que chez Philippe. 23 Seulement, à ce que je pense, nous restons assis sans rien faireI Ce n'est pas quand on est inactif que l'on peut se montrer exigeant envers ses amis, encore bien moins envers les dieux! 9 Dans ce passage en effet, il y a manifestement beaucoup de heurts de voyelles, de demi-voyelles, d'aphones8, avec pour résultat des arrêts et des hésita­ tions dans les ajustements sonores, et beaucoup de rugosité dans l'émission vocale.

1. Rappel de la remarque faite plus haut (38, 2-3) de l'existence d'un temps intermédiaire, équivalent à la longueur d'émission d'une demi-voyelle, quand il y a rencontre de voyelles ; il s'y ajoute l'indication intéressante que ce temps intermédiaire s'allonge quand il est encadré par deux voyelles brèves. Les manuscrits de Démosthène portent en fait бе то δλον. 2, 3. Notes complémentaires, p. 177.

V, 43,6

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

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6 Έν бе τή бситсра ігсріобсо τραχύνεται μέν ή σύνθ€σις cv τω μεγάλη γαρ ροπή, δια το μή аиѵаХс(фсаѲаі та био ρ ρ, και cv τφ ανθρώπων πράγματα, δια το μη аиХХсаіѵсσθαι (το ν ) τφ έξης ' διασπάται δ' cv τφ μάλλον δέ δλον ή τύχη, βραχέων φωνηέντων πολύν τον μ€ταξυ χρόνον ircp ιλαμζανόντων. 7 Έν бе τη τρίτη ттсріоби) τα φωνη€ντα μέν, ci τις αυτά βούλοιτο συναλ€ΐψας έκθλίβ€ΐν ¿ютгср то οϊομαι και δέον, ουκ αν cupo ι συμπλ€κ6μ€να αλλήλοις. Των бе συμφωνουμένων δυσιν η τρισι χωρίοις την Xciónyra μή φυλάττουσαι συν τοις ιταρακ€ΐμένοις €υρ€θησονται lv τφ αϊρεσίν μοι δοίη και cv τφ της ημετέρας πόλεως. 8 Μέχρι μέν 8ή τώνδ€ ή бситсра та ττρωτ€Ϊα αρμονία фсрсі, έν δέ τοις έξης ή ιτροτέρα (διέσιτασται ( γ α ρ ) μάλλον της ετέρας) · 22 ... Πόλο γαρ πλείονς άφορμάς είς το τήν παρά των θεών εϋνοιαν ίχειν δρω ύμϊν ένούσας ή έχείνω. 23 *Αλλ', οϊομαι, καθημ^α ουδέν ποιουντες. Ούκ evi δ* αυτόν άργοϋντα ουδέ φΐίαις έπιτάττειν, μή τι γε θεοϊς. 9 Έν τούτοις γαρ δη та тс φωνη€ντα ιτολλαχή συγκρου6μ€να δήλα έστι και τα ήμίφωνα καΐ άφωνα, έξ ων στη ρ ιγ μου ς тс каі έγκαθισμους αϊ άρμονίαι λαμβάνουσι και τραχύτητας αϊ φωναι συχνάς.

4 το ν add. Rad. || 5 πολύν Sylb. : πολύ Ζ || 7 τα : τφ Α || 9 εύροι Reiskius : ευροις Ζ || 10 τρισΐ IV : τρισίν AJ || 11 σύν τοις παρακειμένοις Sadaeus : συντυπ... μόνοις (μένοις V) cum lac. Ζ || 12 δοίη J : διδοίη AIV || τήν add. Usener || 13 τώνδε : των J || post δευτέρα hab. περίοδος V || 14 γαρ add. Reiskiue II 17 εχειν non hab. Dem. || ύμΐν : ήμιν Ι || 18 οϊομαι Ζ : οΐμαι Dem. || 19 post έπιτάττειν hab. υπέρ αύτου τι ποιεϊν Dem. || post γε hab. δή Ι δή τοις Dem.

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DÉMOSTHÈNE

V, 4 3 , 9

Les périodes qui succèdent immédiatement1 ne pré­ sentent, elles, aucun hiatus de voyelles, ce qui donne une allure rapide à la composition stylistique, mais les rencontres d'aphones et de demi-voyelles entaillent rémission vocale, qu'elles rendent rugueuse à proportion. 11 en est de même dans la suite2, car tout est composé de la même manière. 10 A quoi bon s'attarder davan­ tage? Si donc les juxtapositions de mots relèvent chez lui de l'harmonie mixte ou moyenne, on peut en dire autant de la mise en œuvre des cola et de leur assemblage, de la longueur et de la forme des périodes, des rythmes qui définissent périodes et cola?. En effet, même si l'orateur parle souvent par commata (et même la plupart du temps c'est ainsi qu'il compose), il ne fait pas maigre usage du style périodique. 11 Et ces périodes4 sont tantôt bien arrondies et fermes, comme faites au tour, tantôt distendues, abandonnées, avec des cadences négligées. En longueur, les unes sont assez rapides, exactement proportionnées au souffle de l'homme, d'autres sont beaucoup plus développées, attendant la quatrième pause respiratoire pour en arriver à la halte finale. 12 Pour la formulation, on peut trouver ici des for­ mules solennelles, austères ou archaïsantes en quantité, plus loin des formules flexibles, polies, décoratives. 13 Pour les rythmes, ils sont en maints endroits virils, empreints de dignité et de distinction ; on y trouve assez rarement des rythmes d'hyporchème, des rythmes ioniens ou des rythmes brisés. Nous traiterons des rythmes ultérieurement5, quand le sujet s'y prêtera mieux. Pour le moment, je vais simplement ajouter quelques remarques que ce développement me semble réclamer, et puis je passerai à la suite de l'exposé annoncé.

1, 2, 3, 4, 5. Notes complémentaires, p. 178-179.

V, 43, 9

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

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Έιτ€ΐθ' αι ταύταις έπιζάλλουσαι ircpíoSoi διαστάσεις μέν ου λαμζάνουσι φωνηέντων, και παρά τούτο έπιτρόχαλος αυτών έστιν ή σύνθ€σις, άφωνων δέ και ήμιφώνων συμζολαις 8ιαχαραττ6μ€ναι τραχύνουσι την φωνην συμμέτρως. 5 Και ταλλα бе τον αυτόν άπαντα κατ€σκ€υασται τρόιτον. 10 Τί γαρ бсі τα πλϋίω λέγοντα μηκόν€ΐν ; Ου μόνον бе ai των ονομάτων συζυγίαι την μικτην άρμονίαν λαμζάνουσι irap' αυτω και μέσην, αλλά και των κώλων κατασκ€υαί тс και συνθέσ»ς και τα των π€ριόδων 10 μήκη тс και σχήματα και οι ιτ€ριλαμζάνοντ€ς αύτάς тс και τα κώλα ρυθμοί. Και γαρ ( c l ) και κατά κόμματα πολλά €ΐρηται τω άνδρί, καΐ τά π λ α σ τ ά γ€ ούτως катсаксоаотаі, και cv ιτ€ριόδοις ουκ ολίγα. 11 Των бс ітсріобшѵ at μέν €ΐσιν сикорифоі και στρογγύλαι ωσπ€ρ airo τόρνου, at 15 бс Cimai тс και κιχυμέναι και ουκ {χουσαι τάς βάσ€ΐς ικριττάς. Μήκ€ΐ тс at μέν θάττους ωστ€ συμμ€τρηθηναι προς άνδρας πν€υμα, at бс πολλω μοζους, otai και μέχρι της τ€τάρτης άναπαύσ€ως προ€λθουσαι тотс λήγ€ΐν cię πέρας· 20 12 Των тс σχημάτων сѵѲа μέν αν τις cupoi та σ€μνά και αυστηρά και αρχαία πλ€ονάζοντα, сѵѲа бс та λιγυρά και γλαφυρά και Ѳсатріка. 13 Και των ρυθμών πολλαχη μέν τους άνδρώδΰΐς και αξιωματικούς και CUYCVCÎÇ, σπανίως бс που τους ύπορχηματικούς тс και Ιωνικούς και διακλωμένους. Υπέρ ών ολίγον υστ€ρον έρουμ€ν * стсрос γάρ έπιτηδ€ΐότ€ρος αυτοΐς Ισται τόπος. ΝυνΙ δέ, б προσαπαιτ€ΐν соіксѵ ó λόγος CTI προσθ€ΐς> έπι τά λοιπά των προκ»μένων μ€ταζήσομαι.

12 εΐ addidi || κατά : τά Ι || 13 post τά lac. su8p. Reiskius || 17 θάττους Ζ : έλάττους Sadaeus || 22 λιγυρά : λυγιρά J || 27 γάρ om. Α.

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DÉMOSTHÈNE

44.

V, 44, 1

1 Sur quoi portent-elles? J'ai d'abord que la composition mixte est la meilleure, et je déclare que c'est Démosthène1 qui, de tous les auteurs, l'a uti­ lisée avec le plus de mesure, faisant alterner en un juste rapport des moments de tension et de détente2, donnant à l'allure de son discours tantôt plus de dignité, tantôt plus d'élégance. Mais pourquoi donc Démosthène évitet-il d'emprunter toujours une seule et même voie? Et à quelles règles obéit-il quand il fait prédominer tel ou tel type de style? 2 A la première question, je répondrai que Démos­ thène a suivi l'enseignement de la nature et de l'expé­ rience. Il a appris en effet qu'une mise en œuvre stylistique de même type ne convient pas aux foules qui se pressent aux panégyries ou dans les écoles de rhétorique8, et au public des tribunaux et des assem­ blées. Dans le premier cas, l'auditoire n'aspire qu'à être distrait et séduit ; dans le second, il vise à être instruit sur la question débattue et cherche l'utile. Aussi Démosthène estimait-il que, dans un plaidoyer judiciaire, il fallait fuir les mots séduisants, les sonorités mélodieuses, tandis que dans un discours d'apparat, il fallait éviter une trop grande sécheresse et un style trop archaïsant4. 3 Des panégyriques, nous ne saurions en citer de lui, car tous ceux qu'on lui attribue sont de quelqu'un d'autre (c'est en tout cas ma conviction) ; ils n'ont pas le moindre trait caractéristique de Démosthène ni pour les idées ni pour le vocabulaire, et, du point de vue de la composition stylistique, ils sont complètement manques : par exemple YOraison funèbre, vulgaire, vide, puérile, ou encore Y Éloge de Pausanias, tout plein de verbiage sophistique (les démonstrations sur ce sujet6 ne seraient pas à leur place ici). ^ЈМтЈмем

déclaré

1, 2, 3, 4, 5. Notes complémentaires, p. 179.

V, 44, 1 44.

139

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

1 T í бе TOUT' Ιστιν ; ΈΐΓ€ΐδή κρατίστην μεν 2φην

ctvai τ η ν

μικτήν

оиѵѲсоіѵ, τ α ύ τ η

бе κ€χρήσθαί

φημι

τον Δ ή μ ο σθένην α π ά ν τ ω ν μ€τριώτατα των ά λ λ ω ν , Ι π ι τ ά ocıç бе και avcoeis α ν ά λ ο γ ο υ ς cv α υ τ ή π ο κ ι σ θ α ι , тотс μέν

άξιωματικωτέραν,

тотс

б* cwpcKcoTCpav

ποιουντα

5

την ά γ ω γ ή ν , τι δ η іготс βουλόμ€νος ou ігорсистаі μίαν alci και τ η ν αυτήν обоѵ ; Και τ ο cv тфбс ή тфбс тгХсоѵаСсіѵ χ α ρ ά κ τ η ρ ι π ο ί ο ι ς τισίν ópíj£ci κανόσι ; 2 Δ ο κ € Ϊ δη μοι фиосі тс και ircipa διδαχθ€ΐς ό άνήρ, πρώτον μ ί ν IKCÎVO катаиаѲсіѵ δτι ο υ χ όμοιας αιταιτουσι

10

κατασκ€υάς XcÇcuç οί π ρ ο ς τ ά ς π α ν η γ ύ ρ » ς και σ χ ο λ ά ς аиррсоѵтсс δ χ λ ο ι τ ο ι ς €ΐς τ α δικαστήρια και τ ά ς ¿κκλησίας ά π α ν τ ω σ ι ν , α λ λ ' o t μ£ν Απάτης ¿ρέγονται και ψ υ χ α γ ω γ ί α ς , οι бе δ ι δ α χ ή ς ¿ ν έ π ι ζ η τ ο υ σ ι και ьіфсХсіас. Оитс δ ή τ ο ν cv δικαστηρίοις λ ό γ ο ν фсто бсіѵ κ ω τ ί λ λ ϋ ν και λ ι γ α ί ν ι ι ν ,

15

оитс τ ό ν стгібсіктікоѵ α ύ χ μ ο υ μ€στόν ctvai και π ί ν ο υ . 3 Πανηγυρικούς

μ ί ν οδν λ ό γ ο υ ς

ουκ 2χομνΙαν κάί δύο καΐ τριάκοντα πόλεις επί Θράκης έώ, ας άπάσας οϋτως ώμώς άνηρηκεν ώστε μηδ9 εΐ πώποτε ώκίσθησαν §αδιον ήν προσελθόντας είπεϊν. Kal το Φωκέίυν τοσούτον ёѲѵос άνηρημένον σιωπώ. 2 Ενταύθα ή λέξις αυτή διδάσκ€ΐ τίνος ύποκρίσεως δει αύτη. Διηρηκώς γαρ το πλήθος των άνηρημένων ύπό Φιλίππου πόλεων επί Θράκης ου ψησιν ερεΐν ' о и χι таит* οδν είρωνευόμενον δει λέγειν και αμα ύπαγανακτουντα και παρεντείνοντα τον ήχον ; 3 ΕΙτ' ci και ψησιν ούκ εχειν ερεΐν ταΟΘ* ωσπερ δεινά και πέρα δεινών, δμως οδύρεται πόλεων κατάλογον και τελείαν αναίρεσιν διεξεισιν, ως

TEST. : 12-16 De elocutione, 263.

1 φαίη : φαίει Α || 8 αυτήν Rad. : της Ζ || 9 σαφές Sylb. : σαφώς Ζ || παραδειγμάτων Krüger : πραγμάτων Ζ Ц 10 έπιχειρείτω : -^ειρήτω Ι || 14 ώμώς : όμως Ι || μηδ* εΐ Dem. : εί μηδέ Ζ || ωκίσθ^σαν Ζ : φκήθησαν Dem. || 15 £άδιον ήν προσελθόντας Rad. : ¿φδιον ήν προελθόντας Ζ προσελθόντ' είναι £άδιον Dem. || τοσού­ τον post έθνος Dem. || 21 εΤτ* ει καΐ Rad. : έπειτα Ζ || 23 τελείαν Usener : ταχεΐαν Ζ || αναίρεσιν Sylb. : αϊρεσιν Ζ.

154

DÉMOSTHÈNE

V, 54,3

leur anéantissement si total qu'il ne reste pas la moindre trace d'un ancien habitat! 4 N'est-ce pas la colère en tout cas et la pitié qu'il convient de laisser déborder en prononçant ces mots? — Mais, dira-t-on, pour exprimer la colère ou le deuil, quels sont les accents, les inflexions de voix, les mimiques, les gestes des mains1? — Ceux-là même dont on use quand on éprouve réellement ces sentiments, car il serait bien sot de chercher pour l'action oratoire un autre maître que la vérité. 5 Puis Démosthène ajoute : Mais la Thessalie, en quel état est-elle? Philippe n'y a-t-il pas aboli les démocraties existantes pour y imposer des tétrarchies, afin de réduire en esclavage non seulement des cités isolées, mais des régions entières? 27 El les villes d'Eubée ne sont-elles pas déjà sous le joug des tyrans, et cela, sur une île toute proche de Thèbes et d'Athènes? Ce passage réclame une action oratoire différente. Démosthène pose d'abord une question, puis il fournit une réponse, et, à chaque étape, il s'indigne et fait grandir l'effroi. Il faut assurément une action parti­ culière pour l'interrogation, une autre, particulière aussi, pour la réponse, une autre encore, particulière, pour l'amplification. On ne peut prononcer tout cela sur le même ton ni avec les mêmes inflexions de voix. 6 A la suite, vient : Et il ne se contente pas d'écrire sans passer aux actes; il court vers Γ Hellespont; hier, il marchait contre Ambracie; il tient Elis, cité considérable dans le Péloponnèse; il a tramé des complots contre Mégare. Ni la Grèce ni la terre barbare ne suffisent à Vambition de cet homme.

1. Denys considère ici aussi bien «les inflexions de voix que les attitudes corporelles » (V, 53, 4).

V, 54,3

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

154

ούδ' ίχνος CTI λοιπόν Ιχουσών της παλαιάς οικήσ€ως. 4 Ου δι' οργής τ' οδν ταύτα υπ€ρζαλλούσης και οίκτου λέγ€σθαι προσήκει ; — Tıvcç обѵ cUriv οργής και ολοφυρμου τόνοι και έγκλίσ€ΐς και σχηματισμοί προσώπου και ψοραί χ€ΐρών ; — *Ας οί κατ' άλήθ€ΐαν ταύτα π€πονθότ€ς 4πιτ€λοΰσι ' πάνυ γαρ βΰηθ€ς άλλο τι ζητ€ΐν υποκρ(σ€ως διδασκαλ€ΐον, άφέντας την άλήθβιαν. 5 Και αύθις επιφέρει ο ανηρ * Άλλα θετταλία πώς ίχει ; Ουχί τάς πολιτείας αυτών άφηρηται και τετραρχίας καθέστακεν, ίνα μη μόνον κατά πόλεις, άλλα και κατά έθνη δουλεύωσιν ; 27 ΑΙ δ9 èv Ευζοία πόλεις ουκ ήδη τυραννοϋνται, καΐ ταϋτα èv νήσω θηξών καΐ ' Αθηνών ; Ταύτα πάλιν стсраѵ ύπόκρισιν άπαιτ€ΐ. ПиѵѲаѵстаі γάρ, сіт' άνθ υποφέρει και παρ' Ικαστον άγανακτ€ΐ και то беіѵоѵ aute ι. "Ιδιον бс δη που σχήμα π€υσ€ως, ібюѵ б' άνθυποφορας, ίδιον б э αυξήσεως. Ou δύναται ταΰτα 4νί τόνω και μι$ μορφή φωνής λέγεσθαι. 6 Τούτοις €Κ€ΐνα Ітгстаі * Kal ου γράφει μέν ταϋτα, τοις δ9 ¿ργοις ου πονεϊ, αλλ9 έφ9 *Ελλήσποντον οϊχεται, πρότερον ήκεν έπ9 9Αμζρακίαν, Τ Ηλιν ίχει τηλικαύτην πόλιν èv Πελοποννήσω, Μεγάροις έπεξούλευσεν. ОШ ή 'Ελλάς οΰθ9 ή βάρξαρος χωρεϊ τήν πλεονεξίαν του άνθρωπου.

7 διδασκαλεϊον Reiskiiis : -κάλιον Ζ || 9 Θετταλία : -λίαν Ι || post πολιτείας hab. καΐ τας πόλεις Dem. || 10 άφήρηται Ζ : παρήρηται Dem. || τετραρχίας : -χίαν Ι || καθέστακεν Ζ : κατέστησεν Dem. || 12 Εύβοία : Εύοία J || 13 πλησίον add. Sylb. e Dem. || 21 Άμβρακίαν : Άμαρακίαν J || 23 post επεβούλευσεν (-σε Dem.) hab. πρώην Dem. || χωρεί post πλεονεξίαν Dem.

155

DÉMOSTHÈNE

V, 5 4 , 6

Est-il possible de prononcer ces paroles pour l'agré­ ment, avec les accents des chants de la parodos, comme un récit ordinaire? Les mots eux-mêmes ne hurlent-ils pas, et n'enseignent-ils pas, même sans parler, comment déclamer ce passage ? : « Ici, un ton courtois ; là, accélère; là, ralentis ; ici, brise la continuité ; là, lie à ce qui suit ; en disant ceci, sois compatissant ; en disant cela, fais-toi méprisant ; sois effrayé ici, cinglant là1 ; ici, enfle le ton ». Aucun doute, à mon avis. 7 Et donc, serait-il possible à un individu qui aurait Tâme d'une bête, ou plutôt l'inertie d'une pierre, à quelqu'un d'insensible, d'incapable d'agitation ou d'émotion, de déclamer le texte de Démosthène? Non, assurément, car disparaîtrait alors la qualité primor­ diale du texte, le souflle2 ; ce serait comme un beau corps, mais privé de vie et de mouvement. 8 II y aurait encore beaucoup à dire sur ce point, mais comme ce traité est déjà de longueur suffisante, il me faut, je pense, arrêter là mon propos ; j'ajouterai quand même encore un point pour compléter ce que je viens de dire. Le style de Démosthène, qui a toutes les qualités < n e > manque d'enjoue­ ment3 (ce que beaucoup appellent la grâce) ; il en possède l'essentiel. < . . . > Mais ies dieux aux humains n'octroient pas tout ensemble; ils ont pourtant octroyé l'humour aussi4 aux discours de Démosthène, car aucune des qualités que la divinité a accordées à l'un ou l'autre, elle ne l'a refusée à Démos­ thène. 65. 1 Quant aux critiques d'EsRéponse à Eschme с Ы п е à Г е п с о п 1 р в d e Démosthène, critiques calomnieuses, comme je le disais5, qui accu­ saient l'orateur tantôt d'user d'un vocabulaire acide et

1, 2, 3, 4, 5. Notes complémentaires, p. 184-185.

V, 54,6

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

155

Ταύτα сѵсаті προφέρ€σθαι ηδονή cv τταροδικοΐς μέλ€σιν ¿ммгср ιστορίαν ; Ουκ αυτά βο$ και бібоаксі ττώς αυτά бсі λέγ€σθαι, μόνον ου φωνην αφιέντα * « Ενταύθα αστ€ΐον ήχον, ταύτα έστκυσμένως сіігс, таит' άνα&ζλημένως, бсирі δ' атгоХітгс το συν€χές, Ινταυθοΐ σύναψον τα έξης, τούτοις 5 συνάλγησον, τούτων καταφρόνησον, ταύτα 4κδ€ΐματώθητι, ταύτα διάσυρον, ταύτα αυξησον » ; Έμοί μέν боксі. 7 ΟύκοΟν Ιστιν αλόγου ζώου ψυχήν €χοντα, μάλλον бе λίθου φύσιν νωθράν, άναίσθητον, ακίνητον, άπαθη, τήν Δημοσθένους тгрофсрсаѲаі λέξιν ; Πολλού γ€ και бсіѵ, 10 cırcı το κάλλιστον αυτής αγαθόν атгоХсітаі, то тгѵсиаа, και ουδέν бюіосі σώματος καλού μέν, ακίνητου бе και vcKpoG. 8 Πόλλ' αν τις cis τούτο το μέρος еітгсіѵ €χοι, του бе

συντάγματος ικανον υληφότος ήδη μήκος αυτού ττου 15 κατατταυσαι χρη τόν λόγον, CKCÎVO CTI νη Δία τοις €ΐρημέvoıs ττροσαττοδόντας δτι ττασας Ιχουσα τας арстас ή Δ η ­ μοσθένους λέξις ( ο ύ ) Хсітгстаі еитратгсХіас, ην oí πολλοί καλουσι χάριν. Πλ€Ϊστον γαρ αυτής μ€τέχ€ΐ μέρος. (...)

Ον γάρ πως αμα πάντα θεοί δόσαν ανθρώποισιν '

20

δμως бе καί τους άστ€Ϊσμους €ν€ΐμαν έν τοις Δημοσθένους λόγοις * ουδέν γαρ ών έτέροις τισίν сбижсѵ αγαθών ó δαίμων έκ€ΐνω έφθόνησ€ν. 55. 1 *Α δέ ус Αισχίνης ігсрі аитои γράφ€ΐ συκοφαντών, ¿кзппгср Ιφην, τοτέ μέν ώς τακ pois καί ττ€ριέργοις όνόμασι

1 παροδικοϊς Usener : παρωδικοΐς Ζ || 2 ούκ αυτά ßoqi Dobra eus : ού καταβοά Ζ || 4 ήχον : εΐχον Α || 8 ούκουν έστιν Rad. : ούκ ένεστιν Ζ || 12 διοίσει : δειήσει J II 14 πόλλ* Αν Bad. : πολλά Ζ || έχοι Reiskius : έχει Ζ || 18 ού add. Reiskius || 19 lac. susp. Rad. || 20 ού γάρ Ζ : άλλ'ού Нот. || 21 δμως δέ ego : ώς Ζ || ενειμαν Meerwald t : άμα έν Ζ || 25 όνόμασι : νοήμασι Ι.

25

156

DÉMOSTHÈNE

V, 55, 1

précieux, tantôt de choisir des mots vulgaires et dénués d'agrément, elles sont faciles à réfuter. Que Ton veuille bien examiner séparément chacun des chefs d'accusa­ tion, et Ton découvrira que les uns méritent plutôt Téloge que la critique, tandis que les autres n'ont aucun fondement de vérité. 2 Mettre de l'acidité dans le langage, quand les cir­ constances le demandent1 (et elles le demandent souvent, en particulier dans les arguments qui font appel à rémotion), est tout à l'éloge de l'orateur, s'il est vrai que la seule chose que nous demandions au talent ora­ toire, ou du moins celle que nous demandions en priorité, c'est de faire de l'auditeur un austère gardien des lois, un acide examinateur des fautes, un punisseur inexorable des illégalités2. 3 Or, si l'on embellit son propos de mots délicats, il n'y a pas moyen de faire naître la colère, la haine ou tout autre émotion de ce genre ; pour obtenir ce résultat, il est indispensable de découvrir sans doute des idées porteuses de ce genre d'émotions, mais aussi de les habiller de mots qui, par nature, sont acides à l'oreille8. 4 Si donc Eschine montrait que Démosthène choisit le mauvais moment pour utiliser le style acide, ou qu'il en met trop et calcule mal la quantité, il aurait raison de condamner ce défaut ; mais il n'a rien de tel à montrer ; il condamne en bloc le langage de l'émotion, qui est pourtant tout à fait à sa place dans les discours publics ; et donc, à son insu, c'est un éloge4 qu'il adresse à Démosthène par cette critique, comme je l'indiquais.

1. Respecter la convenance est la grande caractéristique du style moyen. 2. Cf. Platon, République, III, 398 a-b. 3. Notes complémentaires, p. 185. 4. La couleur pathétique du style, dont Г« acidité » est un élément, est Tun des aspects de la véhémence démosthénienne.

156

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

V, 55, 1

χρωμένου, τότε δ' ώς άηδέσι καΐ φορτικοΐς, раб ¿as έχει Tas α π ο λ ο γ ί α ς * Ει γ ε τ ο ι βουληθείη TIS χωρίς εκαστον των

εγκλημάτων

σκοπείν,

τα

μεν

liraiνου

μάλλον

ή

κ α τ η γ ο ρ ί α ς άξια εύρήσει, т а б' ουκ αληθώς είρημενα υ π ' αυτού.

5

2 Τ ο μεν γ α ρ πικραίνειν τ η ν διάλεκτον δταν άπαιτώσιν οι καιροί ( π ο λ λ ά κ ι ς бе ά π α ι τ ο υ σ ι και μ ά λ ι σ τ α cv τ ο ι ς παθητικοίς τών ε π ι χ ε ι ρ η μ ά τ ω ν ) , έγκώμιόν εστί τ ο υ ρητοposi ει γ ε δ η το ποιεΐν τ ο ν άκροατήν а и σ τ η pòν τών νόμων φ ύ λ α κ α και πικράν εξεταστήν τών αδικημάτων και τιμωρον ά π α ρ α ί τ η τ ο ν τών π α ρ α ν ο μ ο ύ ν τ ω ν π α ρ ά της

10

ρητορικής

δυνάμεως ή μόνον ή μ ά λ ι σ τ α τών ά λ λ ω ν ά π α ι τ ο υ μ ε ν . 3 Ά μ ή χ α ν ο ν δε τρυφεροις

όνόμασι καλλωπίζοντα

την

διάλεκτον ό ρ γ ή ν ή μΐσος ή τών π α ρ α π λ ή σ ι ω ν τι κινήσαι παθών^ αλλ* α ν ά γ κ η και ν ο ή μ α τ ' έξευρειν α δ ή τών τοι-

15

ούτων εσται παθών ά γ ω γ ά , και ό ν ό μ α σ ι τοιούτοις αυτά περιλαζεΐν οΐς πέφυκεν ακοή πικραίνεσθαι. 4 ΕΙ μεν oSv μ ή κατά τ ο ν οίκεΐον

καιρόν τ η π ι κ ρ α ι ν ο ύ σ η

διαλέκτω

χ ρ ώ μ ε ν ο ν άπεδείκνυεν αυτόν ή π λ ε ο ν ά ζ ο ν τ α εν α υ τ ή και τ η ς π ο σ ό τ η τ ο ς ά σ τ ο χ ο υ ν τ α , εΐκότως αν ως άμαρτάνοντα δ ι ε ζ α λ λ ε ν * б δε τούτων μεν ουδετερον έχει κοινώς

δε δ ι α ζ ά λ λ ε ι την παθητικήν

20

δεικνύναι,

διάλεκτον,

ουσαν

επιτηδειοτάτην εις π ο λ ι τ ι κ ο ύ ς π α ρ α λ α μ ζ ά ν ε σ θ α ι λ ό γ ο υ ς , λ ε λ η θ ό τ α εγκώμια μεταφέρων εις τ ά ς κατηγορίας, ώ σ π ε ρ

εφην.

TEST. : 9-10,

25

cf.

PLATO, Вер.,

III,

398

а.

2 τοι : τι Ι || 9 εΐ γε Sylb. : είτε Ζ || 12 μόνον Rad. : μόνος Ζ || άπαιτουμεν Reiskius : έπαινοΰμεν Ζ || 19 άπεδείκνυεν : -δείκνυμεν J.

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DÉMOSTHÈNE

V, 56, 1

56. 1 Concernant le style précieux1, on pourrait faire à Eschine la même réponse : c'est une qualité de Démosthène, là aussi, qu'il tourne en dérision. 2 Ad­ mettons d'abord que le vocabulaire précieux dont parle Eschine est ce que nous nommons aujourd'hui expres­ sion raffinée, sortant de l'ordinaire (ce n'est pas une raison, parce que notre époque impose aux choses beaucoup de noms au hasard et, par confusion, emploie souvent ce mot dans le sens de « excès de zèle »2, pour imaginer que les anciens usaient du terme dans ce sens-là). 3 Si donc Eschine avait employé cette expression pour persifler le manque d'à-propos ou la surabondance des formules insolites, s'imaginant que Démosthène s'est rendu coupable de ces deux défauts, il est manifeste­ ment dans l'erreur ; 4 car c'est dans les harangues publiques ou dans les plaidoyers politiques que, considé­ rant la grandeur et la dignité des sujets, notre orateur utilise abondamment ce genre de mise en œuvre, alors que dans les plaidoyers civils, qui portent sur de minces affaires de contrats entre particuliers, il pratique le style courant et habituel, avec quelques rares passages en langage raffiné, qu'il évite du reste de souligner et qui, du coup, passent inaperçus. 5 Si en revanche, en employant cette expression, c'est l'inhabituel dans son ensemble et en lui-même que condamnait Eschine, c'est une belle absurdité de sa part, de persifler précisément cette virtuosité véhémente8 qui est si nécessaire à l'orateur. Car savoir exprimer les idées autrement que la foule, tirer le vocabulaire vers plus de solennité, vers un tour plus poétique4, c'est cela que nous exigeons surtout d'un orateur politique de talent. 6 Les traits en question sont donc tout à l'éloge de la virtuosité de Démosthène ; quand Eschine les présente comme des défauts, à tort certes, mais avec quelque logique peut-être puisqu'il est son ennemi et qu'il ne peut trouver d'autre reproche à lui faire, c'est inconsidérément, à mon avis, qu'il profère ces calomnies. 1, 2, 3, 4. Notes complémentaires, p. 186.

V, 56, 1

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

157

56. 1 Τα б' αυτά κ oi ircpl της περιέργου λέξεως εχοι τις αν ειπείν προς τον Αίσχίνην, επειδή και ταύτην αυτού χλευάζει την άρετήν. 2 Δεχέσθω бе τις την περιεργίαν των ονομάτων ύπ' αύτου (λεγομένην) λέγεσθαι νυνι περιττην έργασίαν και έ£ηλλαγμένην των cv εθει (ού γαρ δή γ« 5 d ό καθ' ημάς βίος πολλά και άλλα είκη τιθείς cırı τοις ιτράγμασιν ονόματα καΐ ταύτην άδιαφόρως κυκλεΐ την λέξιν επί της πολυπραγμοσύνης, οδτω και τους αρχαίους εικός αύτη κεχρήσθαι). 3 Ει piv οδν την άκαιρίαν ή τον πλεονασμών της έξηλλαγμένης ερμηνείας διασύρων καΐ 10 ταύτα εΐρηκεν, ως του Δημοσθένους περί έκάτερον αυτών άμαρτάνοντος, ψεύδεται περιψανώς ' 4 ο γαρ άνήρ cv μεν ταΐς δημηγορίαις και τοις δημοσίοις αγώσι προς το μέγεθος καΐ το αξίωμα των υποθέσεων αποβλέπων κέχρηται τη τοιαύτη κατασκευή πολλάκις, έν бе τοις ίδιωτικοΐς λόγοις 15 ους περί μικρών συμβολαίων ίδιώταις άνθρώποις έγραψε, την κοινήν και συνήθη λέξιν επιτηδεύε ι, σπανίως δε ποτέ τήν περιττήν και ουδέ ταύτην έπ' αυτοφώρω, αλλ* ώστε λαθεΐν. 5 ΕΙ бе κάνταυθα τφ γένει της εξαλλαγής δλω πολέμων ταυτ* εΐρηκεν Αισχίνης, άτοπον τι ποιεί πράγμα, 20 ταύτην διασύρων τήν δεινότητα ής πλείστης τφ ρήτορι бсі. Το γαρ μή τοις πολλοίς ομοίως έκφέρειν τάς νοήσεις, αλλ' επί το σεμνότερον και ποιητικώτερον έκζιζάξειν τήν ονομασίαν παρά της πολιτικής δυνάμεως μάλιστα άπαιτουμεν. 6 Ταύτα μεν οδν εγκώμια της Δημοσθένους δει- 25 νάτητος δντα ώς αμαρτήματα φέρων Αισχίνης ουκ αληθώς μέν, ευλόγως б' ίσως, εχθρός ων και ουδέν άλλο διαζάλλειν δυνάμενος, άπερισκέπτως, ώς έγώ κρίνω, συκοφαντεί.

4 λεγομένην add. Reiskius || 10 ερμηνείας : άκαιρίας Ι Ц 16 έγραψε Sylb. : έγραφε Ζ || 18 αύτοφώρφ Ι : -φόρφ AV -φέρφ J || 22 το Ι : τφ AVJ || 24 μάλιστα om. V || 24-25 άπαιτουμεν Reiskius : -τοΰντες Ζ || 27 άλλο Reiskius : μάλλον Ζ.

DÉMOSTHÈNE

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V, 57, 1

57. 1 Quant à prétendre que Démosthène a usé de mots vulgaires et dénués d'agrément, d'où lui est venue cette idée, je me le suis tout particulièrement demandé. 2 Car je ne découvre chez Démosthène1 rien de ce qu'Eschine lui reproche d'avoir dit : par exemple qu'il ne faut pas arracher Valliance de Vamitié, ou que certains ¿bourgeonnent la cité, ou on a coupé les nerfs du peuple, ou nous sommes cousus dans des nattes, ou on nous enfile à Γ étroit comme des aiguilles ; ce à quoi Eschine ajoute par dérision : Et cela, fourbe, qu'est-ce? Des mois ou des monstres?* Des mots vulgaires ou dénués ďagrément, je n'ai pu réussir à en trouver d'autres, dans aucun des discours de Démosthène, et cela, alors qu'il nous reste quelque cinquante ou soixante mille lignes de cet orateur. 3 Si pourtant l'on découvre quelques constructions dénuées d'agrément, vulgaires, grossières, elles se trouvent dans les discours apocryphes, par exemple dans les deux Contre Aristogiton*, ou dans la défense Contre une accusation de corruption, ou dans le plaidoyer Pour ne pas livrer Harpalos, dans le Contre Neaira4, dans le discours Sur le traité avec Alexandre6, et dans beaucoup d'autres que Démosthène n'a jamais écrits (c'est ce que je montre dans un autre ouvrage· consacré à Démosthène). Mais en voilà assez à propos des critiques d'Eschine contre Démosthène. 58. 1 II y a un autre trait de style n¿°d апыі 4 u e c e r ^ a m s o n t signalé comme une q σ · Bty qualité caractéristique de l'orateur, d'autres comme un défaut7 : c'est l'utilisation de pluσ

1, 2, 3, 4, 5. Notes complémentaires, p. 186. 6. Référence au traité critique sur Démosthène (perdu) dans lequel Denys joignait, aux arguments externes et historiques, des remarques de style, pour décider de l'authenticité des discours. 7. Dans ce chapitre, Denys prend parti dans une discussion sur l'emploi par Démosthène de certaines figures, ici le pleonasmos ou redondance. Peut-être répond-il à une critique de Cécilius.

V, 57, I

ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

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57. 1 То бс фаакеіѵ фортικoîs καΐ άηδέσι τοις ¿νόμασιν αυτόν κ€χρησθαι тгоѲсѵ сігт|ХѲсѵ αύτω Xcyciv, υπέρ ττάντα €γωγ€ Τ€θαύμακα. 2 Ουδέν γαρ βρίσκω τούτων τταρα Δημοσθέν» κ€ΐμ€νον, ών »ρηκέναι φησίν αυτόν Αισχίνης, otov δτι ου δει της φιλίας άπορρήξαι τήν σνμμαχίαν 5 και δτι άμτιελουργοϋσί τίνες την πόλιν και ύποτέτμηται τα νεύρα του δήμου και φορμορραφούμεθα και ènl τα στενά τίνες ωσπερ τάς βελόνας διείρουσιν, otç αυτός έττιτίθησι διακωμωδών ' ταύτα δέ, ώ κίναδος, τι έστι ; ^/^ατα ή οαΰ/шта ;

ιο

оибс ус άλλα τινά φορτικά και αηδή ονόματα cv оибсѵі των Δημοσθένους λόγων cupcîv δ€δυνημαι και ταύτα 1ГСѴТС ή 2ξ μυριάδας στίχων ¿ксіѵои του ανδρός καταλ€λοιιτότος. 3 Ei μέντοι τινές cv τοις фсибсігіурафоіс curl λόγοις άηδΰΐς και φορτικαί και αγροικοι ката- 15 аксиаі, ώς έν τοις κατ' Άριστογ€ίτονος β' και έν τή απολογία των δώρων και έν τω Strepi τ ο υ ) μη έκδουναι "Αρτταλον και έν τω κατά №αίρας και έν τφ ırcpl των προς 'Αλέξανδρον συνθηκών έν άλλοις тс συχνοίς ους ό Δημοσθένης ουκ сурафсѵ, έν έτερα δηλουταί μοι πράγμα- 20 reía τά тгсрі Δημοσθένη. Και π€ρί μέν ών Αισχίνης έπιτ€τίμηκ€ν αύτω, ταύτα ικανά. 58. 1 "Ηδη δέ που каксіѵо τ ιve s οι μέν ώς χαράκτη ρ ικον ot δ' ώς αμάρτημα του ρητορος έσημ€ΐώσαντο, λέγω δέ 25

5 δει Aesch. : δέ Ζ || της φιλίας άπορρήξαι Ζ : άπορρήξαι τής εΙρήνης Aesch. || 7 φορμορραφούμεθα Aesch. : -μοραφ- Ζ || 8 βελόνας : βελόντας J || 10 ώ Reiskius ex Aesch. : ού Ζ || τι Reiskius ex Aesch. : τις Ζ || 13 στίχων post εκείνου Ι 11 14 èv τοις ψευδεπιγράφοις Rad. : ένιοι ψευδεπίγραφοι Ζ || 15 λόγοις Β : λόγοι AIVJ || 16 τοις Blassius : τη Ζ || 17 περί του add. Rad. Il 24 χαρακτηρικον : -ρισηκον Ι.

159

DÉMOSTHÈNE

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sieurs mots parfois pour signifier une seule et même chose, comme dans // sera possible à Philippe d'exécuter et d'accomplir ce qu'il veut, ou dans Sans savoir qui ce Midias peut être, sans en avoir aucune idée, ou dans En présence de sa sœur, qui était encore une petite fille, une enfant1, et dans toutes les expressions analogues. 2 Ceux qui voient dans ce trait une particularité typique du style de Démosthène sont dans le vrai, car notre homme en fait bon usage, comme aussi de concision et de brièveté, plus souvent et avec plus d'à-propos2 que quiconque. 3 Ceux en revanche qui mettent ce trait au nombre de ses défauts sans avoir examiné de près les raisons qui portent Démosthène à user habituellement de redondance dans le vocabulaire, ont bien tort de l'accuser ; en portant cette condamnation, ils semblent réclamer à tout prix la brièveté3 (que, comme je disais, Démosthène pratique plus souvent que quiconque et avec plus d'à-propos), sans se préoccuper aucunement des autres qualités ; ils semblent perdre de vue que l'orateur doit viser la clarté, la vie, l'ampleur, la beauté rythmique dans la composition stylistique, et que, outre cela, il doit donner à son style de l'émotion, une couleur morale, de la combativité, qualités dont dépend, pour la majeure part, le don de persuasion. 4 Or toutes ces qualités, ce n'est pas la brièveté qui peut le mieux les

1. Successivement Troisième Philippique, IX, 3 ; Contre Midias, XXI, 78 ; id. 79. 2. Le sens de Га-propos est la qualité primordiale de Démos­ thène, qui lui permet d'user à bon escient de figures opposées : redondance (pléonasme) ou concision (brachylogie). 3. Notes complémentaires, p. 186-187.

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ΔΗΜΟΣΘΕΝΗΣ

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το πολλοίς όνόμασι το αυτό πράγμα δηλουν еѵіотс δη, otá

COTI τ αυτί *

Φιλίππω δ* έξέσται και πράττε w καΐ ποιεϊν δ τι βούλεται, και Τον Μειδίαν γιγνώσκων,

τούτον

ουκ είδώς δστις ποτ9 εστίν, ουδέ

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και Της αδελφής εναντίον κόρης hi και παιδος οϋσης, και πάντα τα τοιαύτα. 2 "Οσοι μ4ν οδν Ιδίωμα του χαρακτήρος αυτό άποψαίνουσι του Δημοσθένους, ¿ρθώς λέγουσι * κέχρηται γαρ αύτω χρησίμως ό άνήρ, ûcnrcp και τη τμητική [και τή] βραχυλογία πάντων γ€ μάλλον και сикаірбтероѵ. 3 "Οσοι б' cv αμαρτήματος αυτό μοίρα φέρουσι, τάς αιτίας ουκ Ιξητακότες δι' ας сісаѲсі тгХсоѵа^сіѵ cv τοις αύτοΐς ¿νάμασιν, ou δ€οντως αυτού κατηγορουσιν, αλλ' Ιοίκασιν οι τούτο συκοφαντουντ€ς την βραχυλογίαν ек παντός άπαιTcîv (ην, оттер сітгоѵ, παντός μάλλον και еикаіратсроѵ παρέχ€ται), των бе άλλων аретаѵ ουδ€μίαν, ουκέτι συνορωντ€ς δτι και της σαφηνβίας бсі στοχάζ€σθαι τον ρήτορα και της έναργ€ΐας και της αύξήσβως και της π€ρι την σύνθΰσιν των ονομάτων €υρυθμίας, υπέρ άπαντα бе ταύτα του παθητικήν тс каі ήθικήν και ¿ναγώνιον ποΐ€ΐν την λέξιν, cv οΐς ίστιν ή πλ€ίστη τοΟ πιθανού μοίρα. 4 Τούτων бе των άρ€των Ικάστην ουχ ή βραχυλογία κράτιστα

1 δή Rad. : δέ Ζ || 3 δ'έξέσται Sylb. καΐ πράττειν καΐ ποιεϊν Ζ : καΐ λέγειν ούκ — εστίν Ζ : ούδ' εί γέγον* είδώς οΰσης Ζ : εΥ ένδον (οΟσης secl. Weil) κόρης εναντίον Dem. || 17 έκ : περί Ι.

e Dem. : δέξασθαι Ζ || καΐ πράττειν Dem. || 5 Dem. || 8 έν