Urbaniser les Alpes: Stratégies de densification des villes en altitude 9783035614930, 9783035614879

Stopping the Sprawl of Mountain Villages For plenty years, many popular mountain resorts have seen largely uncontroll

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Urbaniser les Alpes: Stratégies de densification des villes en altitude
 9783035614930, 9783035614879

Table of contents :
Sommaire
Résumé
Mise en contexte des villes alpines
Verbier: Le règne de l’individualisme alpin: chalet, voiture privée et étalement urbain
Zermatt: Modèle idéal de ville alpine piétonne ?
Avoriaz: Station intégrée innovatrice: nouveau « prototype » de densité et de mobilité alpines
Whistler-Blackcomb: Extension planifiée d’une station intégrée ayant atteint sa taille limite
Andermatt Swiss Alps: Densification contemporaine d’une « friche » militaire connectée à une infrastructure de mobilité
Synthèse comparative des cas: Verbier, Zermatt, Avoriaz, Whistler-Blackcomb, et Andermatt Swiss Alps
Stratégies de densification: Infrastructures alpines contextualisées
Bibliographie
Iconographie
Remerciements

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URBANISER LES ALPES

URBANISER LES ALPES Stratégies de densification des villes en altitude Fiona Pia

Birkhäuser Basel

à Wim et Axel

Sommaire 8

Résumé

10

MISE EN CONTEXTE DES VILLES ALPINES

80

AVORIAZ

70 26

VERBIER Le règne de l’individualisme alpin : chalet, voiture privée et étalement urbain

• 1 500 m

ZERMATT Modèle idéal de ville alpine piétonne ?

• 1 608 m

Station intégrée innovatrice : nouveau « prototype » de densité et de mobilité alpines • 1 800 m

188

SYNTHÈSE COMPARATIVE DES CAS Verbier, Zermatt, Avoriaz, WhistlerBlackcomb et Andermatt Swiss Alps + carte comparative insérée au dos de la couverture

196

146

ANDERMATT SWISS ALPS Densification contemporaine d’une « friche » militaire connectée à une infrastructure de mobilité

STRATÉGIES DE DENSIFICATION Infrastructures alpines contextualisées

• 1 444 m

124

WHISTLERBLACKCOMB Extension planifiée d’une station intégrée ayant atteint sa taille limite • 668 m

230

Bibliographie, iconographie, remerciements

Résumé

8

Aujourd’hui plus que jamais, l’aménagement du territoire, particulièrement dans les régions alpines, est au centre de l’actualité. L’urbanisation massive en montagne, initialement due à l’essor du ski, surtout dans les sites de plus de 1 400 m d’altitude, s’est faite de manière peu contrôlée pendant plusieurs décennies. Nous héritons ainsi de grandes urbanités, trop souvent réalisées au coup par coup, par simple multiplication de l’archétype du chalet individuel. La faible densité de ce modèle de développement a engendré un étalement urbain considérable, indissociable de l’usage de la voiture privée. Les résidences secondaires, important moteur économique à la montagne, sont pointées du doigt car considérées comme les principales responsables de cette occupation fragmentée et dispendieuse du territoire. Plusieurs organisations populaires se forment dans les pays alpins pour réclamer la protection de la nature, comme par exemple en Suisse où l’initiative de la Fondation Franz Weber marque en 2012 un basculement d'une exemplarité sans précédent dans l’urbanisation de la montagne. À cette occasion, la population a accepté à 50,63 % l’interdiction de construire de nouvelles résidences secondaires dans les communes où leur proportion est égale ou supérieure à 20 % du parc de logements total. Même si cette initiative a le mérite de mettre en évidence un état de fait – les Alpes réclament d’urgence de nouvelles dispositions légales, économiques et urbaines – la solution apportée à la problématique soulevée ne convainc pas. La stigmatisation de l’urbanisation et de la densité, telle que la véhiculaient notamment les photomontages choc de la campagne, n’est pas une réponse suffisante à l’étalement urbain alpin : car celui-ci n’est pas provoqué par l’urbanisation en soi mais plutôt par la dispersion du bâti. Quelles stratégies autoriseraient alors la protection du territoire alpin et de son paysage sans pour autant s’en tenir au statu quo que semblent implicitement viser ces initiatives ? Ne serait-il pas au contraire souhaitable de densifier encore plus ces villes de montagne pour prolonger leur cycle de vie et ainsi épargner à long terme d’autres territoires toujours « vierges » ? Ne faudrait-il pas développer des infrastructures de mobilité en adéquation avec une nouvelle densification alpine ? Ces deux hypothèses sont au cœur de ce livre.

Après une introduction générale résumant les enjeux majeurs actuels du contexte alpin, cette recherche propose une analyse ciblée de différents modèles représentatifs de villes et de mobilités d’altitude : Verbier (Valais, Suisse), Zermatt (Valais, Suisse), Avoriaz (France), Whistler-Blackcomb (Canada) et Andermatt (Uri, Suisse). La synthèse comparative de ces études de cas démontre, par des données chiffrées inexistantes jusqu’ici, non seulement les limites du modèle dominant de la ville alpine étalée et prolongée dans le territoire mais également celles de la ville compacte. Enfin, cette recherche expérimente spatialement, par le projet urbain et architectural, la taille maximale viable d’une urbanité alpine, en définissant une taille critique de densification. Aujourd’hui, il ne s’agit plus simplement de construire de nouvelles villes alpines en colonisant la nature presque intouchée comme le faisaient les stations d’hiver des années 1960, mais de concevoir des stratégies permettant de densifier les urbanités existantes, de  prendre en compte cet héritage alpin fortement bâti et présentant d’importants dysfonctionnements. Le projet prend comme base le cas de Verbier,  par ticulièrement représentatif des problématiques induites par l’étalement urbain dû à des initiatives individuelles de petite taille, liées à des opérations non concertées. Verbier est une  ville de montagne qui atteint actuellement son point de saturation : limite d’extension du bâti, congestion du réseau routier, tensions climatiques, dépassement du seuil admissible des résidences secondaires. Pour pouvoir résoudre conjointement ces divers problèmes, le projet imagine un nouveau modèle d’urbanisation alpine qui intègre densification urbaine et infrastructure de transport public. Celui-ci démontre que si le système de mobilité des villes alpines était jusqu’alors un vecteur d’étalement, il peut, en se redéfinissant, devenir garant d’un regroupement urbain de qualité en des sites stratégiques. Ce néotype est une infrastructure habitée, qui se forme et se déforme au gré des programmes, des flux et des contextes naturels. Le projet illustre et manifeste qu’il est possible, voire souhaitable, de densifier encore les villes d'altitude avant d’investir d’autres territoires « vierges ». Même si la montagne ne peut pas être pensée avec une solution unique – chaque cas est spécifique et nécessite une réponse contextuelle – cette expérimentation permet, à partir d'un cas sélectionné, de définir une méthode de projet pour penser chaque ville alpine.

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MISE EN CONTEXTE DES VILLES ALPINES

L’opinion publique a longtemps nié la véritable urbanisation des Alpes, la réduisant à l’image jugée idyllique du chalet individuel isolé au milieu d’une vaste nature vierge, au-dessus d’un village suisse similaire à celui mis en scène par l’Exposition nationale de Genève en 1896. Ce « trompe-l’œil » ou cette « synthèse pittoresque », pour reprendre les termes de Jacques Gubler1, « incarne l’image que la Suisse se donne à elle-même : un village agricole et artisanal […] où la montagne précise l’identité nationale ». Plus d’un siècle après, ce subterfuge exalte toujours l’imaginaire collectif. Dans son article « La Suisse comme hyperville »2, André Corboz dénonce ce mythe inlassablement choyé, le territoire helvétique est encore perçu comme « un pays agricole, habité par une population proche de la nature ». L’auteur précise que « la nostalgie de la « nature vierge » […] empêche la plupart des Helvètes de se rendre compte du phénomène de l’urbanisation ». Même si ces dernières décennies, plusieurs pionniers ont pertinemment démontré que la schématisation ville = urbain et campagne ou montagne = naturel était caduque, inventant des néologismes pour décrire un nouveau territoire en transformation, la collectivité continue d’imaginer ces deux entités en relation d’antonymie. Dans cette représentation faussée, le chalet est perçu comme un élément naturel et non-urbain alors qu’en réalité il est à l’origine de l’importante urbanisation alpine. De nombreuses villes d’altitude, surtout au-dessus de 1 400 mètres, se sont construites en se contentant de multiplier par milliers cet emblème « rural », initialement pensé pour répondre à un urbanisme fonctionnel de petite échelle3. S’il est vrai que les mayens retirés au milieu des pâturages, ainsi que quelques villages intouchés par le fort développement urbain (ex. : Commeire), existent toujours dans les Alpes, la taille des villes n’est pas celle de cet archétype mais celle qui résulte de sa prolifération et des infrastructures nécessaires pour le desservir. L’homme n’est plus seul au milieu de l’immense nature mais il est entouré de chalets, de routes et de pelouses artificielles. Les autorités ont souvent donné la priorité au désir d’individualisme procuré par ce modèle privé avec peu de planification globale anticipant son inadéquation 1 Gubler, J. (1975), Nationalisme et internationalisme dans l’architecture moderne de la Suisse. Voir notamment pp. 29-32 et p. 35. 2 Corboz, A. (2000), « La Suisse comme hyperville », journal Le Visiteur, n° 6, pp. 112-129. 3 Malfroy, S. (2005) rappelle dans le Dictionnaire historique de la Suisse que le chalet est un « terme suisse romand désignant à l’origine des constructions rurales édifiées sur des défrichements isolés ou sur des pâturages de moyenne et haute altitude ».

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Doc. 0 : le rêve : un chalet isolé au milieu de la nature

Doc. 0 : la réalité : la nature phagocytée par la multiplication du modèle chalet

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pour répondre rationnellement au vertigineux développement urbain issu de l’industrialisation du ski et dont l’extension s’est poursuivie de manière spectaculaire jusqu’à ce jour. La faible densité bâtie résultant d’un aménagement du territoire principalement fondé sur le chalet individuel a effectivement provoqué un étalement urbain considérable, confrontant les villes alpines actuelles à de sérieux dysfonctionnements. Bien que presque tous les ouvrages contemporains consacrés au territoire alpin aient le mérite de dresser différents portraits de la montagne urbanisée, aucun ne se concentre spécifiquement sur les problématiques urbaines résultant de cette occupation fragmentée et dispendieuse du territoire4. En Suisse, l’Office fédéral du développement territorial classe encore en 2005 les Alpes dans « un espace rural » opposé à l’espace urbain. Le contraste avec la frénétique urbanisation alpine, avançant au rythme d’un mètre carré par seconde, représentée un an après par l’initiative Sauver le sol suisse5, montre bien que l’enjeu de la montagne est autre. Il faudra incontestablement attendre les dernières initiatives populaires, notamment celle en Suisse de la fondation Franz Weber en 2012, pour éveiller une conscience collective de la nécessité de freiner l’étalement urbain alpin, principalement dû à la construction de résidences secondaires6. La problématique soulevée est légitime : l’urbanisation en montagne ne peut plus continuer à phagocyter la nature de manière inconsidérée. L’initiative rappelle que l’aménagement du territoire actuel est inadapté pour garantir une occupation rationnelle du sol : elle met les autorités face à leurs responsabilités. Les Alpes réclament de nouvelles dispositions légales permettant de protéger le patrimoine naturel en danger. Malheureusement, cet état de fait est dénoncé avec des stratagèmes de communication ambigus. Nous nous en tiendrons ici à la critique des images de la campagne, sans détailler le contenu de l’initiative, car le vote des citoyens a été très for tement influencé par ces  photomontages choc. Ceux-ci ne condamnent pas la dispersion du bâti mais stigmatisent au contraire la densité construite et l’urbanisation elle-même. 4 Urbanscape Switzerland (2003), Rapport 2005 sur le développement territorial (2005), La Suisse-portrait urbain (2006) et Projet de territoire Suisse (2010). Ultérieurement, même les indices de mesure développés par le programme de recherche PNR 54 Développement durable de l’environnement construit ne rendent aucunement compte du véritable étalement urbain alpin.

Commeire vers 1930 (avant l’industrialisation du ski)

Commeire en 2014 6 En interdisant la construction de nouvelles résidences secondaires dans les communes où leur proportion est égale ou supérieure à 20 % du parc immobilier total, l’initiative Pour en finir avec les constructions envahissantes des résidences secondaires marque un basculement d’une exemplarité légale sans précédent dans l’urbanisation actuelle des Alpes suisses.

5 Lancée en 2006 par F. Weber. Utilise la mise en scène de l’indicateur 1 m2/s – « chaque seconde, un mètre carré de sol disparaît sous le béton » pour présenter l’urbanisation comme une gangrène incontrôlée qu’il faut absolument stopper.

12 | Mise en contexte des villes alpines

0

500 m

Verbier vers 1930 (avant l’industrialisation du ski)

Verbier en 2014

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Doc. 1 : l’espace rural (en vert) selon la carte du rapport ARE, 2005

Doc. 2 : photomontage de l’initiative « sauver le sol suisse », 2006 « C’est le bétonnage effréné de notre précieuse terre suisse ! »

La propagande Weber inculque des raccourcis de pensée tels que densité = élément nocif pour la nature, densité = laideur ou bien urbanisation = « mitage du paysage »7. La comparaison de l’affiche pour l’acceptation de cette initiative avec l’affiche contre la révision de la LAT8 résume bien ces contradictions. L’une est censée critiquer le « mitage du paysage », et donc l’étalement urbain, l’autre blâmer la densification au sein du bâti existant ; les propos défendus sont radicalement divergents et pourtant les deux images sont presque identiques. Leur slogan peut se résumer ainsi : pour sauver la nature en danger, il faut arrêter d’urbaniser ou de densifier, il faut figer le statu quo. L’affiche remerciant la population d’avoir accepté l’initiative Weber représente Zermatt par un chalet isolé face au Cervin, prétendant que l’arrêt de toute nouvelle construction permettra de retrouver cette « authenticité » alpine. Cette conclusion résume bien le paradoxe remarquable soulevé par Weber : d’un côté, il admet et condamne « le mitage du paysage », de l’autre, il acquitte et idéalise le modèle urbain qui le provoque. De la même façon, les citoyens qui ont accepté l’ini14 | Mise en contexte des villes alpines

tiative sont nombreux à posséder – ou à rêver de posséder – un chalet à la montagne. Nous pouvons déjà nous demander si cette obstination à vouloir préserver la petite taille « naturelle » du chalet individuel, en se contentant de le copier au coup par coup comme un prototype idéal applicable à tous les contextes alpins, ne serait pas au contraire la principale responsable du grave préjudice porté à la nature d’altitude. S’il s’avérait que l’étalement urbain alpin était principalement provoqué par ce modèle d’urbanisation et non par l’urbanisation en soi, nous ne pourrions nous accommoder d’une stratégie qui affirme ne pas vouloir de « villes dans les montagnes »9 et semble se contenter de viser le ralentissement, voire l’arrêt, de toute urbanisation future. Le blocage du modèle économique des résidences secondaires – principal moteur alimentant l’urbanisation alpine – permettra peut-être de garder momentanément le statu quo, mais il est en même temps légitime de se demander si le « mitage du paysage » dénoncé sera durablement résolu sans une remise en question du modèle urbain dominant actuel.

Doc. 3 : affiche pour l’initiative Franz Weber, 2012

Doc. 4 : affiche contre la révision de la LAT, 2013

Le maintien du statu quo sous-entend surtout que nous acceptons d’abandonner les villes d’altitude existantes à leur état actuel, sans tenir compte des graves problématiques auxquelles elles sont soumises. Aujourd’hui, de nombreuses villes de montagne semblent atteindre leur taille limite viable. Le débat mené par Weber ignore la question essentielle de leur pérennité menacée alors qu’elle a une incidence majeure sur la protection du paysage et du « cher visage familier de nos hameaux […] et de nos villages traditionnels »10. Ces villes, généralement comprises dans une  « tranche » d'altitude située entre 1 400 et 1 900 m (certaines débutent leur emprise plus bas mais leur urbanisation s'étend souvent jusqu'à 1 400 m), ne sont pas isolées en haut de la montagne mais connectées (voir carte échelle territoriale des villes d'altitude, p. 19). De nombreuses infrastructures de mobilité (réseaux routiers, ferroviaires mais aussi transport à câble) relient ce niveau du territoire alpin à la ville de plateau qu'il surplombe et à la nature « vierge » qu'il jouxte plus en altitude.

7 Notre recherche préfèrera la notion d’étalement urbain à son synonyme « mitage du paysage ». Ce dernier s’appuie sur une définition du paysage alpin que nous considérons comme romantique et révolue, le réduisant exclusivement à la nature vierge et non-construite. 8 Même si elle a été élaborée indépendamment de l’initiative Weber de 2012, la révision de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire (LAT), acceptée par le peuple en mars 2013, a aussi pour objectif de freiner l’étalement urbain. Elle vise une densification au sein du bâti existant, en limitant les zones à bâtir dans les urbanités de faible densité, dispersées et isolées ; des zones à bâtir pourraient ainsi être déclassées en zone non-constructible. 9 Forum, RTS (2012), Résidences secondaires : le grand débat de Forum, 16 février 2012. 10 Weber, F. (2012), « Où est ma Suisse ? », Journal Franz Weber, janvierfévrier-mars 2012, p. 12.

15

Verbier

Zermatt

16 | Mise en contexte des villes alpines

Saas-Fee

Loèche-les-Bains

17

Nauders

Klosters-Serneus Flims

Engelberg

Arosa

Davos

Scuol St Valentin auf der Haide

Valbella Vaz-Obervaz

Andermatt

Grindelwald Wengen

Savognin

Zweisimmen

Samedan

Adelboden Château-d’Oex

Lenk im Simmental

Gstaad

San Bernardino Bellwald

Lauchernalp Leukerbad

Villars-surOllon

Blatten bei Naters

Anzère

Gryon

Crans-Montana Bürchen Vercorin

Morgins Avoriaz

Champéry

Riederalp

Les Diablerets

Leysin

Ovronnaz

Mayens-deChamoson Nendaz

Chandolin

Nax Veysonnaz

Saint-Luc Grächen

Grimentz

La Tzoumaz Verbier

Celerina/ Schlarigna

Zinal Saas-Fee

Saint-Martin

Zermatt Flaine

Breuil-Cervinia 18 | Mise en contexte des villes alpines Paquier

Saas-Grund

Bettmeralp

Madesimo

Pontresina St. Moritz

Livigno

2014 Échelle territoriale des villes d’altitude Extrait de coupe sur les Alpes entre 1 400 et 1 900 m d'altitude

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La multiplication et l’intensité des moyens de communication et de transports actuels relient en une seule entité et une seule temporalité l’urbain d’altitude et l’urbain de la vallée. La distinction faite par Weber entre la ville de loisirs exportée à la montagne comme seul appendice saisonnier et la « vraie » ville n’est-elle pas en train de devenir obsolète ? Nous assistons actuellement à un important changement de la configuration des composantes de  l’aire urbaine : le passage d’une ville de loisirs exportée en montagne à une ville qui prend la montagne comme territoire. En effet, un très grand nombre de fonctionnalités de la ville se sont déplacées et se déplacent à la montagne (congrès, salles de spectacles, musées, complexes éducatifs, commerces urbains et résidences permanentes aussi). De nouveaux modes de vie urbains apparaissent en altitude (pendularité, bi-résidentialité, etc.). L’attrait de la montagne s’explique par la recherche de nature en soi (vue, ensoleillement, fraîcheur estivale...), mais également par d’autres facteurs tels que l’internationalité, les avantages fiscaux ou l’immobilier. Notre recherche a interrogé et a défini la ville alpine en prenant en compte ces mutations territoriales contemporaines11. Si la ville alpine se dégrade, les dégâts se répercuteront donc sans aucun doute, à travers la mobilité, sur l’ensemble du territoire. Comment réagir à cette situation critique et nouvelle ? Certains spécialistes considèrent la congestion urbaine des villes alpines comme un état fini sur lequel il ne serait plus possible d’intervenir, et se limitent à préconiser la conception de projets « hors station ». Ils semblent, en réalité, chercher à fuir la ville, en espérant pouvoir reproduire ailleurs, sur des terrains constructibles plus isolés, la petite taille des « hameaux pittoresques ». On prétend que ces derniers « se fondent dans le paysage » alors qu’en fait ils reprennent, sur des parcelles plus réduites, le même modèle urbain que la ville étalée critiquée, en se contentant de remplacer les résidences secondaires par des hôtels ou des condominiums afin de garantir des lits chauds et obtenir ainsi l’autorisation de construire. De plus, cette petite urbanisation nécessite parallèlement la construction de nouvelles infrastructures pour la desservir et souvent pour la connecter aux réseaux de la vallée. L’absurdité de cette stratégie investit  davantage des sites encore relativement préservés et, surtout, laisse les villes alpines progressivement mourir et devenir à terme des grandes friches urbaines et de mobilité. Ne serait-il pas au contraire possible, voire souhaitable, de densifier encore plus les villes  d’alti20 | Mise en contexte des villes alpines

tude pour prolonger leur cycle de vie et ainsi épargner à long terme les autres territoires toujours « vierges » ? Ne faudrait-il pas développer des infrastructures de mobilité en adéquation avec une nouvelle densification alpine ? Ces interrogations seront au cœur de notre recherche. À la différence d’autres sujets alpins, la question fondamentale d'une densification des villes d’altitude destinée à résoudre leur saturation actuelle n’a pas encore fait l’objet d’une étude urbaine précise et approfondie. Or c’est principalement d’elle que dépend la protection durable de la nature alpine. Devant cette lacune majeure, ce livre semblait dès lors s’imposer. Précisons que le sujet retenu est bien sûr très dépendant des aspects socio-économiques et légaux. Nous avons dû prendre connaissance de cet important champ d'investigation, mais ce livre ne le mentionnera pas et se focalisera principalement sur l'analyse urbaine et sur la proposition de stratégies de projet. La première partie du livre, consacrée à l’analyse ciblée de différents modèles représentatifs de villes et de mobilités d’altitude, révèlera notamment que, pour la première fois depuis les années 1960, de nombreuses villes d’altitude atteignent aujourd’hui leur taille limite viable. Nous montrerons, par des données chiffrées inexistantes à ce jour, que l’ampleur des dysfonctionnements actuels (dépassement du seuil admissible de résidences secondaires, mais aussi, et surtout, tensions climatiques, limite d’extension du bâti et congestion des infrastructures de mobilité) semble effectivement annoncer la fin imminente d’un cycle de vie urbain12. Nous avons retenu cinq cas significatifs. Verbier est le cas suisse le plus représentatif de la ville d'altitude étalée et des problématiques induites par la faible densité du chalet individuel. Même si d'autres villes alpines, comme Crans-Montana, sont plus dispersées dans le territoire, Verbier est celle qui semble actuellement présenter la saturation globale la plus critique. L’analyse de Verbier confirmera que la densification prioritaire des dernières zones à bâtir encore disponibles au sein de la ville-même constitue une ultime chance pour résoudre sa non-durabilité et garantir sa pérennité. Néanmoins, la simple prolongation du système urbain existant, fondé sur la faible densité du chalet individuel et l’utilisation de la voiture, s’avèrerait totalement obsolète pour occuper et desservir rationnellement les derniers hectares disponibles et aussi pour résoudre globalement les problèmes existants devenus insoutenables. Contrairement à l’opinion commune, Zermatt ne constitue pas le contre-exemple idéal de Verbier.

Nous avons choisi Zermatt, non pas comme exemple idéal de ville piétonne, mais au contraire pour démontrer que la ville étalée ne peut être exclusivement piétonne. Zermatt est aujourd’hui soumise à une grave congestion routière provoquée par les nombreux flux de voitures électriques car, tout comme Verbier, elle s'est faite sans une planification directrice initiale des transports. Notre synthèse comparative montrera les nombreuses similitudes déconcertantes entre ces deux villes étalées de longueur presque identique. À l’opposé, il ne suffirait pas de reprendre le modèle historique de la ville nouvelle compacte des années 1960 : cet artefact urbain, dense, fonctionnel, dédié aux piétons et planifié globalement en une fois, permet (généralement) une meilleure occupation du sol mais il a été exclusivement pensé pour coloniser une nature vierge. On ne peut pas non plus appliquer tel quel le seul cas actuel dans les Alpes de ville compacte densifiant une urbanité préexistante car il répond à un contexte construit spécifique et non exportable. L’analyse de trois types de villes compactes fournira toutefois des inducteurs de projet indispensables pour questionner la densification actuelle de la ville étalée, sa taille limite, son rapport à la mobilité et à la nature d’altitude. 11 Plusieurs auteurs se sont intéressés à cette thématique, notamment Chenal, J., Kaufmann, V. (2006) et Messerli, P., Scheurer, T. et Veit, H. (2011). Par exemple, l’article de Paul Messerli dans la revue forum de l’ARE (1/2011) insiste sur les flux pendulaires entre le Haut-Valais et Berne ou entre Lanquart et Zurich, il affirme même que l’économie entre ville et montagne est en train de s’inverser. 12 Plusieurs auteurs ont questionné la notion de taille limite, nous pensons notamment à la cité-jardin d’Howard, E. (1898) ou à la ville compacte de Burton, E. (1999). L’article traduit de Viganò, P. (2013), intitulé Recycler les villes, éléments pour une théorie de la ville comme ressource renouvelable met également en évidence la notion fondamentale de cycle de vie.

21

Afin d'illustrer la ville compacte alpine historique, nous avons retenu l'exemple français d'Avoriaz. Emblème de la station intégrée, ce cas illustrera l’interdépendance entre taille, forte densité du bâti et mobilité piétonne : la distance maximale parcourable par un piéton définit la taille de la ville sans voitures. Nous montrerons que ce noyau urbain, conçu dans les années 1960 comme un microcosme fini pour trente ans, arrive aujourd’hui à saturation. Celle-ci est accentuée par la nécessité d’intégrer de nouveaux lits supplémentaires, comme l'a demandé récemment le promoteur. Ce besoin de croissance, non anticipé par le projet initial, questionne la taille du système, tout agrandissement mettant en péril le principe de mobilité et donc la viabilité même de toute l’urbanisation. En comparant Avoriaz et Verbier, nous découvrirons avec étonnement qu'aujourd'hui ces deux modèles opposés atteignent simultanément leur taille critique. Whistler-Blackcomb, ville compacte réticulée, constitue un exemple unique d'extension planifiée d’une « station intégrée » de base. Les cas français plus proches, comme Les Arcs (cas également composé de plusieurs noyaux piétons reliés entre eux) ne permettent pas de questionner les paradoxes urbains entre ville compacte et ville étalée que soulève le cas canadien. Whistler-Blackcomb définit dès sa conception un noyau piéton de base (Whistler) et intègre le futur besoin d’extension en planifiant un second noyau présentant les mêmes spécificités urbaines (Blackcomb). Cette stratégie préserve les qualités de la ville compacte sans qu’un éventuel agrandissement mette en péril le rapport « interne » entre taille et mobilité piétonne. À ce jour, les deux noyaux de WhistlerBlackcomb garantissent effectivement encore un bon fonctionnement urbain et économique. Nous verrons cependant qu’il ne suffit pas de concevoir ces « prototypes durables » pour créer la ville durable ; l’affectation du sol et la  mobilité entre les deux deviennent une question primordiale. Le développement urbain non planifié qui s’est fait ultérieurement autour des deux noyaux compacts contredit et ne prend pas en compte la densité construite et la mobilité piétonne existantes ; il a provoqué un étalement urbain et une congestion routière alarmants. En inversant la chronologie des étapes de l’urbanisation, nous pourrions lire le cas de Whistler-Blackcomb comme un Verbier dans lequel on injecterait, sur les dernières zones libres à bâtir, des noyaux compacts autonomes, indépendants de l’urbanisation existante. Cette projection permet de comprendre que la durabilité de Verbier ne serait aucunement résolue par 22 | Mise en contexte des villes alpines

un  système compact qui densifierait la ville en ignorant les problématiques du réseau routier existant. Andermatt Swiss Alps est le seul cas contemporain dans tout l'arc alpin de construction de ville compacte de grande taille densifiant un village existant. Le nouveau projet d’Andermatt prouvera que la prise en compte des infrastructures de mobilité préexistantes est un élément clé pour penser la densification de la ville alpine dont nous héritons. Contrairement à Avoriaz et Whistler-Blackcomb, ce projet compact de taille similaire n’est pas un artefact implanté au milieu d’une nature vierge, nécessitant la construction de nouvelles infrastructures de transport pour y accéder, mais un projet de densification se greffant sur les réseaux de mobilité et la ville existante. Pour connecter la nouvelle urbanisation au contexte existant, le projet invente une infrastructure hybride qui gère les diverses mobilités du site – le déplacement piéton de base et les mobilités existantes extérieures à ce système – et la protection contre les dangers naturels. Nous verrons que ce regroupement garantit une occupation du sol très rationnelle et permet également de contrôler, contrairement à Whistler-Blackcomb, toute future propagation urbaine « sauvage » autour du noyau compact de base et de la ville existante. Malheureusement, le nouveau projet d’Andermatt se limite à poser le bâti sur un ouvrage de génie civil et n’exploite par les potentialités spatiales et programmatiques d'une infrastructure que l'on pourrait habiter. Dans une deuxième partie, nous expérimenterons spatialement, par le projet architectural et urbain, la taille maximale viable de la ville alpine en définissant une taille limite de densification. Quel néotype contextuel permettrait de densifier qualitativement cette ville alpine étalée ? En prenant comme base d'étude la ville étalée de Verbier et afin de résoudre conjointement ses diverses saturations, nous verrons que la mise en réseau des dernières zones à bâtir et leur connexion avec le contexte existant s’avèrent fondamentales. Surtout, notre projet illustrera que seul un nouveau modèle d’urbanisation alpine, intégrant densification urbaine et infrastructure de transport public, peut garantir la pérennité de Verbier. Ce néotype démontre que si le système de mobilité existant était jusqu’à ce jour vecteur d’étalement, il peut, en se redéfinissant, devenir garant d’un regroupement urbain de qualité en des sites stratégiques. Le nouveau modèle urbain proposé n’est pas seulement conçu pour densifier et desservir rationnellement la ville construite existante mais aussi pour établir un nouveau rapport avec la nature d’altitude.

Le regroupement du système de transport et d’un programme habitable au sein d’une même infrastructure produira de nouveaux contextes intérieurs et révèlera autrement les contextes extérieurs. Les différentes coupes sur cette infrastructure habitée montreront comment une métrique de base se forme et se déforme en fonction des différents flux, activités et contextes naturels. Souvent résumée à un simple lieu de passage, l’infrastructure de transport se transforme ici en balcon public exclusivement piéton, où il fait bon s’arrêter, sentir l’air d’altitude, regarder au loin les sommets de plus de 4 000 m ou profiter de l’animation des quais. De nouvelles relations spatiales s’établissent également entre la nature et les programmes privés et publics regroupés autour de ce strip piéton : la forte densité construite du projet crée une nouvelle manière d’habiter qualitativement à la montagne. Nous montrerons que les infrastructures habitées projetées permettent de rajouter 250 000 m 2 à l’urbanisation existante. Pour atteindre le même nombre de mètres carrés construits, le modèle existant nécessiterait quatre fois plus de surface au sol que notre propre modèle. Si le projet permet donc une occupation plus rationnelle du sol, préservant la nature de l’étalement urbain futur, nous verrons que la taille des ouvrages proposés peut susciter certaines réactions : la nostalgie de voir disparaître le modèle du chalet individuel, sa petite taille, son caractère domestique et privé, etc. Il est temps d’admettre que le chalet isolé n’existe plus à Verbier. Surtout, la nature d’altitude a été longtemps colonisée par des infrastructures de grande taille telles que viaducs, tunnels et autres galeries couvertes ; pourtant, on ne compare jamais l’échelle du chalet avec l’échelle de ces infrastructures car ces deux modèles n’ont pas la même fonction. Aussi notre projet se définit-il volontairement comme un ouvrage de génie civil et non comme un grand bâtiment : sa taille doit être lue en rapport à l’échelle territoriale du transport. Il faut comprendre la densification proposée en relation avec cette grande échelle, le projet se limite à compléter un potentiel existant pour le pérenniser. La forte mobilité connectant Verbier à l’axe de transport principal de la vallée et la taille de l’urbanisation regroupant des infrastructures publiques permettent d’accueillir des activités urbaines à la montagne. La greffe des infrastructures habitées sur les réseaux de mobilité existants prend en compte les besoins des nouveaux modes de vie émergents dans les Alpes : nous montrerons que ceux-ci nécessitent une mobilité spécifique et une taille d’urbanisation minimale. Le projet anticipe ce que la ville d'altitude est appelée à devenir : une prolongation de la « vraie » ville réconciliée avec la nature d’altitude.

La ville alpine du futur ne se définira certainement plus par une seule entité compacte isolée au milieu de la nature vierge et nécessitant de nouvelles infrastructures de transport pour la connecter à la vallée mais par un ensemble constitué de la ville existante sur laquelle se grefferont plusieurs noyaux compacts reliés par un transport public. Bien qu'elles ne soient exportables telles quelles à d'autres contextes alpins, les infrastructures habitées révèleront des inducteurs de projet pour penser la densification de la ville d'altitude.

23

VERBIER Le règne de l’individualisme alpin : chalet, voiture privée et étalement urbain

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Un plateau à 1 500 m d’altitude, orienté plein sud avec une vue magnifique sur des sommets montagneux de plus de 4 000 m. Un site exceptionnel, presque vierge 60 ans auparavant, occupé seulement par quelques mayens d’alpage. Une nature de rêve, aujourd’hui transformée en cauchemar urbain selon les critères des défenseurs du mythe suisse. Une mutation qui s’est faite très tardivement mais très rapidement. En effet, du village agricole qu'il était, Verbier est devenu une station de sports d’hiver sans jamais développer un tourisme estival de cure contrairement à d’autres villages alpins. Les études dirigées par M. Meili13 dans les années 1940 sur différentes urbanités alpines montrent la petite taille de Verbier par rapport à Leysin ou Zermatt, par exemple, alors qu’aujourd’hui celle de Verbier dépasse largement la leur. Dans cette partie, nous résumerons d’abord l’évolution de la morphologie du bâti et des infrastructures. Nous analyserons ensuite deux projets d’aména­ gement d’ensemble, non réalisés mais qui sont à prendre en compte car ils permettent de questionner différemment la notion de densité. Nous nous concentrerons enfin sur l’analyse de Verbier aujourd’hui : atteignant sa taille critique, cette ville à la montagne est confrontée à plusieurs dysfonctionnements urbains qui mettent en danger sa pérennité même.

Ville faite au coup par coup, course poursuite entre urbanisation et infrastructures de transport La croissance fulgurante de Verbier s’est faite au coup par coup, par la construction de chalets individuels, sans plan d’aménagement initial et provoquant un mitage du paysage conséquent. En 60 ans, Verbier a multiplié par trente la surface bâtie au sol de Verbier village, passant d'une implantation dense, rationnelle, dictée par le climat et la topographie, à une occupation du territoire étalée et artificialisée. Le plan du parcellaire est représentatif de ce développement urbain dicté par la satisfaction d’intérêts privés. Comme le résume déjà Charles-V. Barras en 1987 : une « multiplicité de promoteurs […], peu de planification urbanistique, en un mot l’individualisme généralisé ». Cet étalement urbain a rendu impossible le déplacement à pied, induisant obligatoirement l’utilisation de la voiture individuelle. Le binôme urbanisation-mobilité n’a lui non plus fait l’objet d’aucune anticipation, l’un devant fatalement rattraper le développement aléatoire de l’autre. « Les transports ont habituellement un effet structurant sur l’espace. À Verbier pourtant, les transports suivent la structuration de l’espace qui, elle, est dictée par la construction (lobby immobilier) »14. Nous pouvons résumer très schématiquement l’évolution du bâti de Verbier en deux grandes étapes principales : la colonisation des alpages par une nouvelle urbanisation qui s'effectue par étalement urbain puis par densification à l’intérieur du périmètre colonisé. Le développement sur les alpages15 débute lentement en 1950, s’accélère en 1960 puis significativement en 1970 pour devenir vertigineux en 1980–1990. Dès les années 2000  – lorsque les limites d'extension sont atteintes – jusqu’à aujourd’hui, la croissance se fait par densification dans le bâti existant. Les étapes clés du développement sont schématisées par les coupes 1–2 et les schémas 1 à 6. Les principaux plans de zones (documents 1 à 3) montrent le manque de planification globale initiale et un aménagement du territoire ultérieur pas assez directif qui n’a pas su éviter un étalement urbain inconsidéré. 13 OFT, Meili, A. (1945). Architecte zurichois, Armin Meili, a supervisé différentes études d’urbanités alpines et il s’est personnellement occupé de l’étude de Verbier. Nous analyserons son projet ci-après (pp. 36-39). 14 Kauffmann, V. (2002). Voir chapitre 9 et annexe 15.

Doc. 0.1 : extrait du plan parcellaire de Verbier (1 : 10 000)

15 Pour mettre en avant la future nouvelle urbanisation moderne sur les alpages, dédiée entièrement au ski et marquant la rupture avec le noyau historique agricole, les cartes officielles, dès les années 1960, distinguent clairement deux urbanités : Verbier station et Verbier village.

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1935

28 | Verbier

Coupe 1 0

500 m

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Schéma 1 : 1935

Schéma 3 : 1961

Schéma 5 : 2000

Schéma 2 : 1950

Schéma 4 : 1977

Schéma 6 : 2014

30 | Verbier

0

500 m

1935–2014 Évolution de Verbier

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2014

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Coupe 2 0

500 m

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Doc. 1 : plan des zones 1960

34 | Verbier

Doc. 2 : plan des zones 1977

Doc. 3 : plan des zones 1997, actuellement en vigueur

Schéma 7 : évolution de la zone à bâtir par plan de zones 123 ha en 1960 281 ha en 1977 235 ha en 1997

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Plan Meili vs SuperVerbier, étalement urbain vs compacité Comment le développement de Verbier station aurait-il pu se faire autrement ? L’intérêt de deux projets non réalisés réside dans la réponse qu'ils apportent à cette question, chacun avec la proposition d’un modèle urbain distinct s’insérant dans un contexte construit existant très différent. L’un, le plan Meili, propose en 1945 un aménagement d’ensemble pour le futur développement de Verbier station, qui n’est alors qu’un embryon de quelques pensions et chalets côtoyant les mayens préexistants sur les vastes terrains d’alpages. L’autre, SuperVerbier, imagine en 1970 une « cité touristique » satellite reliée par un téléphérique à Verbier station, déjà bien urbanisée. M. Meili anticipe dès 1945 les signes d’une spéculation foncière à Verbier station. Pour éviter « un développement inconsidéré », son plan définit des zones d'« interdiction à bâtir »16 (document 4, traitillés rouges). L’architecte dessine une nouvelle urbanisation qu’il considère comme maximale pour Verbier station et bloque ensuite tout le développement ultérieur environnant. Cette prise de position a le mérite d’anticiper et de planifier la limite des zones à bâtir. Malheureusement, malgré une intention initiale intéressante, le plan Meili propose une trop faible densité du bâti qui conduit à une occupation irrationnelle du sol. Comme le montre la comparaison des densités choisies (schémas 8 à 12), c'est le modèle urbain qui utilise le plus de surface au sol. Si la nature semble moins affectée par le projet Meili que par l’urbanisation qui s’est réellement produite, c’est seulement parce que la limite d’implantation du premier ne concerne que la partie inférieure du plateau, alors que la limite réelle de Verbier va bien au-delà (documents 1 et 3, schéma 7). La densité du plan Meili17 n’aurait pas été apte à contenir le fort développement déclenché par les sports d’hiver. Au début des années 1950, à peine cinq ans après le plan Meili, Verbier station a déjà dépassé les 2 500 lits ; en 1955, elle compte 3 500 lits18 et ce nombre croît de façon exponentielle pour atteindre presque 30 000 lits aujourd’hui. L'idée initiale de contenir tout le développement de Verbier station dans le plateau inférieur est louable, elle aurait été certainement possible, mais avec une toute autre planification de la densité construite. Cela aurait également permis de desservir l'urbanisation exclusivement à pied. Comme le confirme le  plan Meili, la mobilité piétonne est possible tant que l’étalement urbain ne dépasse pas une 36 | Verbier

Doc. 4 : plan Meili et « interdictions à bâtir », 1945

Doc. 5 : aménagements paysagers du plan Meili, 1945

certaine taille. La longueur de la route centrale du projet, d’environ un kilomètre, permet à un piéton de se déplacer aisément sur cet axe qui regroupe les programmes publics. Perpendiculairement et reliés à cette colonne vertébrale, des chemins, d'une longueur maximum de 500 m et exclusivement piétons, desservent les chalets individuels. Le regroupement de ceux-ci en plusieurs « poches », qui dégage ainsi des espaces de circulation libre entre ces zones d’urbanisation, permet à un skieur de rejoindre sans interruption le centre de la station depuis les pistes de ski situées plus haut. Le schéma de mobilité du plan Meili ressemble beaucoup à la mobilité réelle de Verbier station en 1950. Dans les années 1960, l’étalement urbain dépasse déjà les limites définies par le plan Meili et rend difficile la mobilité des piétons car les distances à parcourir sont trop longues. En l'absence d'un transport public (qui ne desservira Verbier station qu'à partir de 1974), la voiture s'impose comme seul moyen de déplacement possible. C’est dans un contexte urbain, déjà très construit, que naît en 1970 le projet de SuperVerbier. Bien que directement connecté à Verbier station, il

s'agit d'un  satellite autonome qui ne s’implante pas au milieu du bâti existant mais colonise les terrains « vierges » à 1 900 m d’altitude (document 6, schéma 14). La légitimité de cette implantation, hors du large périmètre des zones à bâtir du futur plan de 1977, est certes discutable. En effet, on peut reprocher au projet de ne pas s’implanter sur des terrains plus proches, en densifiant directement Verbier station. Néanmoins, SuperVerbier est intéressant car il met en cause l’urbanisation existante et surtout parce qu'il propose un modèle alternatif au chalet individuel. Le projet définit une compacité urbaine, desservie par un transport public, qui permet une occupation du sol plus rationnelle que celle de Verbier station. La comparaison des densités choisies (schémas 8 à 12) montre  que SuperVerbier est le modèle urbain qui utilise le moins de mètres carrés au sol. Notons aussi que sa surface d’implantation est presque identique à celle de Verbier village (même si la  densité est différente par la coupe).  Cette compacité en plan est intéressante car elle permet une circulation exclusivement piétonne à l’intérieur du « noyau » urbain. Comme son nom l’indique, SuperVerbier est un super bâtiment qui contient tous les services pour fonctionner de façon autonome. Son descriptif s’inspire des idées de gestion globale des stations intégrées. Contrairement à d'autres projets touristiques de mégastructures de la même époque, comme le fameux projet de Sunset Mountain Park dans les montagnes de Santa Monica à Los Angeles, SuperVerbier choisit de bannir la voiture. L'accès est pensé exclusivement en transport public : depuis Verbier Station, un téléphérique permet de rejoindre SuperVerbier, 300 m plus haut (schéma 14). Le choix d’un transport à câble est mieux adapté à la forte pente et moins onéreux que ne l’aurait été la construction de nouvelles routes. De plus, il s’inscrit dans une idée globale de nouvelle mobilité : SuperVerbier ne prévoit pas seulement le téléphérique pour se relier au plateau, il projette aussi de continuer le système pour rejoindre les futures pistes de ski. Malheureusement, SuperVerbier ne prend en compte que sa zone d’implantation, il ignore le contexte bâti existant, sans aucune réflexion globale sur le développement de Verbier station.

Doc. 6 : photomontage du projet SuperVerbier, 1970 16 OFT, Meili, A. (1945). Le plan Meili introduit 22 ans avant le plan des zones de 1977 la notion de zone inconstructible. Si celle-ci est une interdiction imposée pour la sécurité des personnes contre les avalanches dans le plan de 1977, elle est une volonté d’aménagement dans le plan Meili (voir pp. 193-203 pour l’analyse de Verbier station et intercalaire 29 pour la proposition de projet). 17 M. Meili est convaincu que Verbier station est prédestinée à un développement pour la cure estivale et accessoirement pour le sport. Il établit donc un programme et un nombre de 2 500 lits qui définiront l’aménagement pour une station principalement de cure. 18 Barbier, J., Nomazy M.T., Veuve L. (1974), partie 4.2.

La brève analyse du plan Meili et de SuperVerbier montre qu’aucun des deux n’aurait empêché l’étalement urbain de Verbier station tel qu’il a eu lieu. Néanmoins, ces projets ouvrent des pistes de réflexion qui permettent de mieux comprendre non seulement l’évolution qui s'est produite, ou qui aurait pu se produire, mais aussi les enjeux actuels que nous développerons ci-dessous. 37

1935

1945

2014

2014

1970

Schémas 8 à 12 : échantillons de densité : alpages, plan Meili, Verbier village, Verbier et SuperVerbier

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0

100 m

0 100 m

Schéma 13 : surface de sol occupé par le plan Meili en 1945, 118 ha, projet non construit

← SuperVerbier

Schéma 14 : surface de sol occupé par SuperVerbier en 1970, 1,7 ha, projet non construit

0

500 m

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Verbier 19 atteint aujourd’hui son point de saturation La situation critique actuelle de Verbier se manifeste par plusieurs paramètres : taille limite de densification, congestion des infrastructures routières, saturation climatique et dépassement du seuil admissible de résidences secondaires. Si cet état de fait semble commun à plusieurs grandes urbanités alpines, il est particulièrement extrême à Verbier. Nous analyserons le plan actuel selon divers critères d'analyse afin de quantifier avec des  mesures précises l’irrationalité du modèle urbain de Verbier. Taille critique et faible densité du bâti Le plan d’affectation des zones définit une zone constructible de 235 hectares (document 3). Celleci est divisée en quatre zones à bâtir principales appelées zones touristiques T1, T2, T3, T4 et correspondant à une dégression des densités (de 0,8 à 0,25). Ainsi, la surface de Verbier est construite à 60 % avec une densité du bâti inférieure à 0,3 et une hauteur au faîte de moins de 9 m, la moyenne des densités étant de 0,40. Notre analyse définit l’urbanisation de Verbier par celle du chalet individuel car malgré l’existence d’ « immeubles chalets » de plusieurs étages, la plus grande partie de l’urbanisation se base sur le chalet individuel.

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40 | Verbier

Pour pouvoir définir précisément la taille de Verbier, mais aussi pour faire les comparaisons nécessaires avec les autres études de cas, il s’est avéré indispensable de calculer les mètres carrés du bâti. La ville s’étant faite au coup par coup, la commune ne dispose pas d’un registre récapitulant les mètres carrés construits totaux. Il ressort de ce travail que Verbier a environ 963 000 m 2 construits hors sol en zone à bâtir et environ 34 000 m 2 en zone non-constructible20. La zone T1 compte 325 000 m2 construits soit 34 % de la totalité des mètres carrés construits. La zone T2, 233 000 m 2 construits soit 24 %. La zone T3, 242 700 m 2 construits soit 25 %. La zone T4 ne comptabilise que 117 500 m 2 soit 12 %. Les autres zones représentent 44 000 m 2 construits, soit 5 %. En construisant le plus grand nombre de mètres carrés, la zone T1 utilise la plus petite surface de sol, soit 15 % de la surface totale à bâtir. Selon le relevé, pour construire le même nombre de mètres carrés, la zone T4 nécessiterait quatre fois plus de surface de sol. L’analyse du plan cadastral a aussi révélé une caractéristique « cachée » de Verbier : sa densification souterraine. Cherchant à mesurer l’ampleur de cette densification, nous avons relevé les  autorisations de construire depuis 2003 jusqu’à  2013.  L'examen des autorisations de construire des années précédentes confirme que la densification souterraine se fait principalement depuis les années 2000 par la transformation de chalets individuels « standards » en chalets individuels de luxe avec de grands espaces en

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sous-sol. Le résultat de l’analyse des sous-sols démontre encore plus l’irrationalité du modèle urbain de Verbier : afin de préserver en apparence l’image idyllique du chalet individuel, il enfouit une vraie ville sous terre. La comparaison du rapport entre la surface construite hors sol et la surface construite sous-sol par zones est significative : la zone T1 n’a que 22 % de sa surface totale construite en sous-sol ; la zone T2, 25 % ; la zone T3, 30 % et la zone T4, 42 % (proportion qui, exceptionnellement, peut même atteindre 80 %). Les coupes 3 et 4 montrent l’inversion des densités entre le bâti en surface et le bâti en sous-sol. Cette forte densification souterraine accentue l’artificialisation de la nature déjà opérée en surface par l’étalement urbain et exige des travaux de génie civil d’envergure pour construire des chalets individuels. La nature, la topographie et le climat sont totalement niés. Verbier aujourd’hui compte environ 2 156 chalets, environ 1 350 000 m2 dont 963 000 m2 en surface, soit 71 %, et 387 000 m 2 en sous-sol, soit 29 %. Verbier est la démonstration contemporaine des limites de viabilité du développement urbain par le chalet individuel. Le plan nommé « taille » met en évidence les dernières parcelles publiques vides21, elles ne représentent plus que 3 % de la surface à bâtir totale. Ce pourcentage pourrait passer à 10 % si nous additionnions les zones de densification publiques définies par le schéma directeur du secteur de Verbier (document 9). À noter que la zone de densification au-dessus du quartier des

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Esserts et la zone d’affectation différée au-dessus du Sonalon sont considérées comme constructibles par ce plan. Dans le contexte actuel de la révision de la LAT, il faut questionner la création de nouvelles zones à bâtir. À Verbier, certains spécialistes proposent la densification par démolition et reconstruction de l’existant et ensuite un développement « hors station » ; par exemple, dans le domaine de Bruson où est prévu un projet de 1 100 nouveaux lits. Nous ne partageons pas cette vision « colonisatrice ». Aller construire à Bruson ne résout pas les problèmes actuels de Verbier et investit des territoires encore préservés. Cette prise de position est celle, insouciante, de l’homme des années 1960 qui colonisait le territoire vierge disponible. 19 Pour marquer la différence entre le village sportif et la ville d’altitude, nous faisons volontairement une distinction entre Verbier station – ville exclusivement liée au ski – et Verbier – ville contemporaine d’altitude – qui n’est plus exclusivement liée au ski mais accueille aussi des évènements urbains au même titre que la « vraie » ville. 20 Précisons que les quelques chalets et mayens hors zone à bâtir ont été construits avant la définition des zones avalanches du plan de 1977, mises à jour après les fortes avalanches de 1978. Depuis cette date, toute nouvelle construction hors zone à bâtir est formellement interdite. 21 Nous ne mentionnons volontairement pas les parcelles privées vides restantes. Dans une urbanisation dictée par les intérêts privés, il ne semble pas imaginable de compter sur ces terrains pour résoudre les problèmes urbains actuels à Verbier. Comme nous le verrons ci-après (p. 47), le schéma directeur du secteur de Verbier prend d'ailleurs seulement en compte les parcelles publiques.

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Coupes 3 et 4 : zoom sur la densité des sous-sols

0

50 m

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235 ha de zones à bâtir

963 000 m

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construits

0,146 COS

0,40 de densité

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Densités

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Hauteur du bâti (étages)

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de zones à bâtir publiques disponibles

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Taille

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N’est-il pas plus intelligent de classer en zone à bâtir la zone d’affectation différée ou la zone des Esserts, zones en limite de l’urbanisation existante de Verbier, et de déclasser les terrains constructibles des mayens de Bruson ? Construire à Verbier avec orientation sud et vue sur 4 000 m au lieu de bâtir dans l’ombre de Bruson avec vue sur l’étalement urbain ? Densifier un maximum Verbier qui bénéficie d’infrastructures existantes et où les prix fonciers sont les plus chers à déclasser ? Pourquoi ne pas utiliser c et te densific ation à Verbier pour faire d’une pierre deux coups, résoudre ses problèmes actuels et protéger les autres territoires « vierges » plus isolés ? Bien entendu, la création de nouvelles zones à bâtir ne semble justifiable que si elle s'inscrit dans une planification globale et si ces parcelles constituent une pièce urbaine indispensable. Aujourd’hui, la réflexion sur le modèle d’urbanisation des dernières parcelles disponibles à Verbier s’avère fondamentale. Surtout, leur planification ne peut se faire sans être pensée conjointement avec la mobilité. Celle-ci présentant actuellement d’importants dysfonctionnements, il semble impératif de proposer une résolution de l’état existant avant d’envisager la desserte de toute nouvelle densification, sans quoi le problème des flux serait encore aggravé. Congestion des infrastructures routières Le problème des flux met sérieusement en danger la qualité de vie à Verbier et confirme sa réputation « non durable ». Face à cet enjeu primordial, différentes études22 ont procédé à une analyse de la mobilité et ont tenté de proposer des pistes d’action pour résoudre la situation actuelle. Toutes les études concordent sur un point : aujourd’hui, il faut « inscrire Verbier dans un système de développement et de mobilité durables ». Il est essentiel de préciser d’emblée que, malgré l’importance des problèmes de mobilité que nous verrons ci-après, seule l’étude de 1991 du bureau Transportplan recense quantitativement les flux à l’intérieur de Verbier. Aucune autre étude ultérieure, et cela  jusqu’à ce jour, n’a effectué un nouveau relevé précis des flux internes, bien qu'ils soient aujourd’hui plus nombreux et plus fréquents. Nous devons donc fonder notre recherche sur des travaux qui datent de plus de 20 ans et qui ne sont pas exhaustifs car les études réalisées par des tiers cette dernière décennie n’ont pas procédé à une mise à jour de ces données. Il serait indispensable de faire une analyse précise de la mobilité actuelle avant d’entreprendre toute action à Verbier ; néanmoins, les documents disponibles nous permettent 46 | Verbier

de définir la problématique générale que nous avons complétée par une analyse urbaine. Les analyses faites par les laboratoires TRACELASUR de l’EPFL en 2010 et par Landolt & Cie SA, Transports Martigny et Régions SA et 6t-Bureau de recherche en 2014 rappellent le potentiel de mobilité à grande échelle de Verbier, au vu de sa proximité avec le bassin lémanique. Même si aujourd’hui la majorité des déplacements se font en voiture, la bonne accessibilité de Verbier en transports publics (train et télécabine) est un point important à exploiter. La mobilité de Verbier peut se résumer à un réseau principal sur lequel se greffe une multitude de petites ramifications privées (plan réseau automobile). Aujourd'hui, cet important réseau ne suffit pourtant plus à drainer les nombreux flux automobiles, pouvant atteindre 10 000 véhicules par jour. Les nombreux déplacements en voiture entre les zones étalées d’habitation et la zone centrale regroupant la majorité des activités, provoquent une congestion inquiétante : embouteillages, bruit, pollution, stationnement anarchique, etc. Ce phénomène est accentué en hiver par la neige. Cette situation est d'autant plus grave que pour répondre à cet engorgement, le bus, seul transport public desservant l'intérieur de l'urbanisation, s'avère inefficace car il ne peut pas emprunter d'autres voies que celles construites pour la voiture (plan réseau bus). Même s’il dessert gratuitement un rayon important de Verbier, le bus ne peut pas assurer son service public lors des  embouteillages. Le

Doc. 7 et 8 : congestion routière, transport public (bus) et piéton

Doc. 9 : schéma directeur, secteur de Verbier, commune de Bagnes, 2012–2014

déplacement à pied n’est pas non plus une option envisageable car les distances à parcourir sont trop grandes et surtout parce que le seul espace public pensé pour le piéton se résume à un trottoir discontinu le long de ce réseau principal, qu'il n’est guère aisé d'emprunter (plan réseau piéton). Le trottoir n’est d’ailleurs pas toujours défini par un changement de niveau ou de matérialité, souvent il est simplement délimité par un traçage au sol sur la chaussée ; en cas de forte circulation, les voitures envahissent facilement l’espace piéton. Ainsi, même si la télécabine reliant Le Châble à Verbier permet au piéton d’y accéder en transport public, rapidement et indépendamment du flux de voitures, son parcours se trouve de toute façon perturbé une fois arrivé à Verbier.

parallèlement la viabilité du  nouveau transport public. De plus, la discontinuité du tracé du nouveau funiculaire et son manque de connexion avec les transports publics existants, notamment la télécabine de Médran, ne garantit ni une desserte interne efficace de l'urbanisation, ni un lien avec la plus grande échelle (train). Surtout, le plan fait abstraction des déséquilibres climatiques existants et ne tient pas compte des contraintes naturelles lorsqu'il propose de bâtir la nouvelle route de contournement et deux des trois funiculaires projetés sur les zones de dangers rouges. 22 Transportplan (1991). Urbaplan, Transportplan, Drosera (2007). Kaufmann, V. et Munafò, S., EPFL-TRACE-LASUR (2010). Landolt & Cie SA, Transports Martigny et Régions, 6t-Bureau de recherche (2014).

Le schéma directeur du secteur de Verbier, mis à jour en 2014, propose pour la première fois une réflexion conjointe entre mobilité et densification (hôtellerie). Ce plan se fonde sur la précédente étude de 2007 (Transportplan avec Urbaplan et Drosera, Verbier, projet 2010–2015, redonner un avenir à la station, conception des espaces publics) en y apportant des améliorations significatives. Même si ce projet a le mérite de relever l'état d'urgence de Verbier, et malgré de louables intentions d'y répondre, le nouveau transport public imaginé ne constitue pas une alternative satisfaisante pour résoudre les diverses saturations actuelles. Nous mettons en question la stratégie de base elle-même qui nécessite la construction d'une nouvelle route de contournement pour garantir 47

48 km

de réseau routier pour desservir 936 000 m2 construits

48 | Verbier

Réseau automobile

0

200 m

49

Le réseau « piéton » principal est réduit au réseau automobile Les chemins piétons sont discontinus à l’intérieur de Verbier

50 | Verbier

Réseau piéton |

Chemin piéton

Chemin piéton hors Verbier

Remontées mécaniques

0

200 m

51

Le réseau du bus est saturé par le réseau automobile

52 | Verbier

Réseau bus

0

200 m

53

Saturation « naturelle » Plusieurs facteurs montrent significativement la forte artificialisation de la nature (topographie, végétation, dangers naturels) et ses limites actuelles. L’altitude et les conditions climatiques qu’elle impose renforcent l’absurdité du modèle urbain étalé en montagne. Même si Verbier est soumis à un climat d’altitude clément par rapport à d’autres urbanités alpines – orientation plein sud, faible brouillard, situation protégée des vents forts, 250 jours de soleil par an, soit l’équivalent de 1 822 heures d’ensoleillement annuel – les 29 jours de neige fraîche demandent un important entretien des infrastructures routières. Le climat est un facteur perturbateur supplémentaire d'un trafic déjà très congestionné. La topographie accentue ces difficultés hivernales. L’urbanisation s’est initialement implantée sur les terrains les plus plats mais l’étalement urbain s’est ensuite poursuivi sur des terrains très raides, ne suivant plus les logiques dictées par la topographie mais soumettant celles-ci aux besoins de la construction. Aujourd’hui, 77 % de la zone à bâtir se situent sur des pentes de 18 à 35 %, 11 % sur des pentes de 35 à 50 % et 12 % sur des pentes supérieures à 50 %, les nombreux talus et les murets de soutènement témoignent hors sol des fortes modifications du terrain naturel (plan topographie). On a tendance à définir Verbier comme un plateau à 1 500 m d’altitude ; or, si cela a effectivement été le cas dans le passé, aujourd’hui les constructions sont implantées hors de ce périmètre topographique jusqu'à atteindre les 1 800 m. Verbier présente un dénivelé construit de 300 m, ce qui accentue visuellement l’impact de l’urbain et induit des conditions climatiques variables au sein d’une même urbanité. Aujourd’hui, la presque totalité du sol à l’intérieur de la zone à bâtir est construite et le sol « vert » restant dans le périmètre est défini par une nature privée entretenue artificiellement (pelouses individuelles, golf, etc.) ; Verbier, ville de montagne, n'a pas d'espace public vert à l'intérieur de sa zone à bâtir. La nature est utilisée comme un dispositif spatial complémentaire pour privatiser son chalet individuel : Verbier compte 39 kilomètres de haies végétales et de nombreux arbres rajoutés. Surtout, le sol, initialement naturel, est si fortement phagocyté par l'étalement urbain qu'il ne peut plus continuer à jouer son rôle de « régulateur climatique » ; l'urbanisation est aujourd'hui soumise à de nombreux dysfonctionnements naturels. Si le plan d’affectation inclut les zones d’avalanches (197 7) et les zones d’instabilité de terrain (1997), il ne tient pas compte d’un danger pourtant fondamental à Verbier : l’eau. Ce danger fait l’objet d’une carte à part23. Au début, chaque propriétaire 54 | Verbier

détourne et enterre le tronçon de torrent traversant son terrain, qui le gêne pour construire son chalet. Il en résulte un réseau hydraulique réalisé au coup par coup, sans planification. Aujourd’hui, la commune s’occupe des cours d’eau mais ce manque de planification initiale a empêché d’établir un concept global de gestion du risque d’inondation : chacun protège sa parcelle par de petites interventions individuelles (muret, étanchéités, etc.). Les nombreuses constructions en surface et en sous-sol empêchent les torrents de s’écouler normalement, provoquant des inondations conséquentes à Verbier mais aussi par ricochet dans les « villages » en contrebas. Face à cette situation critique, plusieurs variantes ont été imaginées par le bureau Hydrocosmos qui précise que l’étude des crues de Verbier est la plus importante en Valais après le projet de Rhône 3. Comme pour les zones avalanches, la zone rouge des dangers liés à l'eau est inconstructible, la zone jaune n’est pas soumise à des restrictions particulières. Pourtant, cette zone de faible risque en surface, représentant 20 % de la surface à bâtir totale, pourrait devenir une zone rouge en sous-sol lorsqu’un chalet dispose de plusieurs étages sous terre. Pour être complète, la carte des dangers liés à l'eau devrait contenir un relevé précis des constructions et des écoulements en sous-sol. Le plan regroupant la totalité des dangers montre que 41 % de la surface à bâtir est en zone de danger (danger faible à fort). Aujourd'hui, plusieurs études sensibilisent à l'impact des changements climatiques qui accentueront ces problématiques. Néanmoins, les changements climatiques ont un aspect positif pour les urbanités d’altitude. Comme le rappelle une étude de l’EPFL-REME effectuée en 2012, l’augmentation des températures aura un impact sur la fréquentation estivale. Lorsqu’il fera très chaud en plaine, on recherchera la fraîcheur et la nature en montagne. Bien qu’elle soit artificielle et « urbaine » à l’intérieur de la zone à bâtir, la nature et la vue aux alentours restent spectaculaires (vues sur les sommets à 4 000 m, dont le Grand Combin). Surtout, elle est directement accessible depuis Verbier en transports publics (remontées à câble). Malheureusement, comme déjà mentionné précédemment, le schéma directeur du secteur de Verbier n’intègre pas ce grand potentiel de transports publics existants avec le futur projet de transport public interne de Verbier. De plus, comme nous l’avons aussi vu, la proximité entre le bassin lémanique et le Valais crée de nouvelles temporalités qui ne se limitent pas au tourisme d’hiver ou d’été mais qui influencent un nouveau mode de vie à l’année. Cet élément est à prendre en compte dans les réflexions sur les résidences secondaires.

Limite du modèle économique des résidences secondaires Verbier compte actuellement environ 64 % de résidences secondaires. N’ayant pu obtenir le recensement précis des résidences secondaires, nous avons fondé nos recherches sur les documents officiels actuels ainsi que sur les données de l’Office du tourisme. Sur la totalité des résidences secondaires, seules 5 % sont mises en location24. Aujourd’hui, Verbier a atteint son seuil limite de résidences secondaires (plus de 20 %), il ne peut donc plus en construire de nouvelles. Les dernières parcelles vides de Verbier peuvent néanmoins se construire si elles proposent un nouveau modèle économique basé sur l’hôtellerie et garantissant des lits chauds ; mais sans remettre en cause la faible densité du modèle urbain actuel, le mitage du paysage ne serait pas résolu pour autant. La problématique des lits froids à Verbier résulte directement du fort individualisme du modèle de développement économique : si d’autres urbanités alpines ont proposé dès leur conception initiale une gestion globale de ceux-ci (Avoriaz, WhistlerBlackcomb et Andermatt Swiss Alps), Verbier, qui s’est développé au coup par coup, n’a pas intégré cette donnée. Il semble compliqué de résoudre la problématique des résidences secondaires à Verbier en se basant exclusivement sur des solutions dépendantes des nombreux propriétaires privés (plan investisseurs). Comme le montre le schéma directeur, secteur Verbier, pour répondre aux nouvelles contraintes de l’initiative Weber, la commune se concentre plutôt sur les parcelles publiques disponibles. Aujourd’hui, si l’offre de terrains constructibles rétrécit comme peau de chagrin, la demande dans le secteur de l’immobilier reste toujours très élevée. La commune se base sur un programme hôtelier qui viendrait compléter le très faible pourcentage d’hôtels (plan mixité). Sur environ 29 000 lits, seuls 1 250 sont des lits hôteliers, soit environ 4,8 %. Jusqu’en 2013, Verbier ne comptait que 950 lits hôteliers, c’est-à-dire le même nombre qu’en 1960, alors qu’on ne comptait que 7 000 lits totaux25 : les lits hôteliers ont très peu évolué en 50 ans alors que les autres ont augmenté de façon exponentielle. À Verbier, le modèle économique qui a prévalu est le suivant : construire pour vendre et non construire pour exploiter. On assiste à une « gentrification alpine » regroupant une couche aisée de la population. Verbier vit du tourisme « financiarisé », des investissements internationaux et non de l’accueil des personnes. Rappelons que pour analyser per tinemment la  question des résidences secondaires, il est nécessaire de s’intéresser aussi aux nouvelles temporalités de Verbier. Aujourd’hui, l’occupation

ne peut plus être résumée comme dans les années 1960 à une période hivernale basée sur le ski. Celle-ci constitue bien sûr un facteur d’attraction important, mais qui n’est plus exclusif. Les activités culturelles estivales ou les nouveaux modes de vies à la montagne sont des éléments émergents à prendre aussi en compte. La commune de Bagnes s’est fixé un objectif d’occupation de dix mois par an avec des infrastructures ouvertes à l’année d’ici à 203526. 23 La carte des dangers hydrologiques de Verbier n’a été établie qu’en 2004 (alors que la moyenne suisse est l’année 1990), soit plus de 35 ans après le répertoriage des premières avalanches en 1968. Les réflexions sur les risques liés à l’eau font suite à un entretien avec Mme Niki Beyer Portner et M. Jerôme Dubois du bureau d’études Hydrocosmos, mandaté pour dresser la carte des dangers hydrauliques de Verbier. 24 Estimation basée sur les informations du site www.verbier.ch et les informations locales. Ces données sont une estimation et devront être vérifiées avec les données officielles de la commune lorsqu'elles seront disponibles. 25 Selon Barbier, J., Nomazy, M.T., Veuve, L. (1974). Voir graphique p. 4.2. 26 Dumoulin, C. (2010), lors de la conférence Verbier GPS 2010.

55

18 %

de surface à bâtir dans la zone avalanches (bleue)

20 %

de surface à bâtir dans la zone inondations (jaune)

3%

de surface à bâtir dans la zone de danger (rouge)

56 | Verbier

Dangers naturels |

Danger avalanches

Danger inondations

0

200 m

57

39 km de haies végétales

55 ha

de surface au sol occupée par le bâti et les routes

58 | Verbier

Natures |

Forêts

Pâturages

Nature artificielle

Golf

0

200 m

59

59 km de talus

93 km

de murets de soutènement privés

300 m de dénivelé

23 %

de zone à bâtir sur les pentes de > 35 %

60 | Verbier

Topographie | Pentes

18–35 %

35–50 %

> 50 %

0

200 m

61

± 2 000 investisseurs

62 | Verbier

Investisseurs

0

200 m

63

4,9 %

d’équipements publics

4,8 % d’hôtels

90,3 % de logements

64 | Verbier

Mixité

0

200 m

65

Il existe effectivement plusieurs urbanités de montagne, reposant initialement sur le ski, qui parviennent aujourd’hui à garantir, grâce à des évènements exclusifs, une occupation de presque 12 mois par an ; la fréquentation estivale est égale, voire parfois supérieure à l’hivernale. Le Verbier Festival est un exemple pertinent de nouvelle temporalité à Verbier créée par un événement alliant culture et nature. Prenant place de mi-juillet à début août, il assure en trois semaines presque 50 % de la totalité des nuitées hôtelières effectuées à Verbier de mai à octobre. En 2013, le festival attirait 50 000 personnes et enregistrait plus de 750 000 connexions dans 177 pays pour les 30 concerts retransmis en direct sur la plateforme de streaming27. Parallèlement à cette mutation, Verbier connaît aussi des changements dans la manière d’habiter. Même si, comme nous l’avons vu, son économie est principalement basée sur les résidences secondaires, Verbier connaî t aujourd’hui une augmentation de son habitat permanent. Verbier héberge environ 40 % de toute la population de la commune de Bagnes, 55 % des habitants sont suisses et 45 % sont étrangers. Plusieurs résidents habitent à Genève trois jours par semaine et à Verbier les quatre jours restants. D’autres habitent sept mois à Londres et cinq mois à Verbier, certains traders et gestionnaires de fortune ont même déménagé à l’année, leur travail pouvant être fait de la même façon à Londres qu’à Verbier. Les nouveaux équipements prévus par la commune et ceux construits récemment, comme la première école internationale de Bagnes en 2010, révèlent de nouvelles demandes résultant de l’arrivée d’une population en augmentation. Plusieurs reportages28 ont été consacrés à ces mutations mais aucune statistique ne recense cette particularité contemporaine de Verbier alors qu’elle modifie considérablement la vision traditionnelle qui le définit comme simple lieu touristique. Il faut également questionner l’intégration des populations locales dans cette évolution « internationale » de la montagne. L’initiative de Franz Weber condamne le fait que les prix excessifs du foncier ne permettent plus aux autochtones de vivre dans leur « village » d’origine, mais elle ne propose aucune solution à ce problème. Pour intégrer les populations locales, elle aurait pu imposer, par exemple, un quota minimum d’habitations à prévoir pour les autochtones lors de la construction d’un nouveau projet « touristique », comme cela a été fait dans certaines communes grisonnes.

66 | Verbier

Verbier aujourd’hui, la fin d’un cycle urbain ? L’analyse des différents inducteurs actuels met en évidence l’artificialité de Verbier et le point de non-retour infligé par son système urbain. Verbier atteint sa limite viable : épuisement des parcelles constructibles, importants problèmes de mobilité, dérèglements climatiques, interdiction de construire de nouvelles résidences secondaires. Certains affirment pourtant que, contrairement aux artefacts alpins planifiés en une fois et « parachutés artificiellement » sur un territoire vierge, Verbier se justifie car il s’est fait, au fil des ans, naturellement. Verbier n’est pas naturel. Comme nous le montrerons dans le comparatif récapitulatif des différentes études de cas, il est le modèle qui porte le plus de préjudice à la nature. Il est temps d’admettre que le chalet individuel n’est qu’artifice. Alors, faut-il admettre que le cycle urbain de Verbier arrive à sa fin et doit-on « geler » son urbanisation dans l’état actuel ? Laisser cette ville devenir progressivement une friche urbaine ? Car si Verbier ne propose pas maintenant un projet urbain, économique, légal et social qui planifie radicalement et globalement à long terme ces diverses problématiques, et non plus au coup par coup, son urbanisation actuelle sera désuète et ne pourra garantir sa pérennité. Pourquoi ne pas penser la densification des dernières parcelles restantes comme une ultime chance pour résoudre la non-durabilité de Verbier ? Aujourd’hui plus que jamais, nous sommes à une époque charnière : nous avons le recul nécessaire pour constater les limites urbaines de la faible densité du chalet individuel, mais nous devons encore définir un contre-modèle à cette urbanisation. La partie « Stratégies de  densification » (p. 196), sera consacrée à la recherche d’un nouvel archétype alpin contextuel qui combine densification et mobilité. 27 Selon un communiqué de presse du 20e Verbier Festival. 28 Voir notamment le reportage RTS du 13 avril 2014 consacré à Verbier : Les traders sont de plus en plus nombreux à fuir les capitales de la finance pour le calme des Alpes.

ZERMATT Modèle idéal de ville alpine piétonne ?

70

L'opinion publique cite souvent Zermatt comme le contre-exemple idéal de Verbier. Pourtant, cette ville au pied du Cervin est en réalité construite sur un modèle d'occupation du territoire très similaire. Comme à Verbier, les importants dysfonctionnements actuels de Zermatt sont révélateurs de la taille limite viable atteinte par l'urbanisation. Même si Zermatt présente une meilleure densité bâtie (0,61), l'étalement urbain ne s'y est arrêté que lorsqu'il a atteint les limites imposées par le contexte naturel (topographie, dangers naturels). Ces contraintes, et non un modèle d'aménagement du territoire différent, ont limité son urbanisation à une largeur maximale de 1 km et à une longueur de 2,8 km, supérieure à celle de Verbier (env. 2 × 2,5 km). Aujourd'hui, Zermatt atteint également sa taille limite d'extension. Les nombreuses infrastructures routières de Zermatt ne suffisent pas à drainer les différents flux. Les voitures privées ont beau y être interdites, elle n'est pas pour autant une ville piétonne. Sa taille rend impossible un parcours exclusivement à pied car les distances sont trop grandes. Le recours à un moyen de transport mécanique s'avère donc indispensable. De surcroît, comme le soulignait déjà dans les années 1970 une étude de l'EPFL29, Zermatt bénéficie d'une excellente accessibilité en train mais n'a pas initialement défini un concept directeur des circulations au sein de son urbanisation : le mélange des différents flux (piétons, taxis, bus, calèches, etc.) perturbe considérablement les déplacements à pied. Zermatt, emblème de la ville alpine piétonne accessible uniquement en train, est aujourd'hui soumise à une grave congestion routière provoquée par les nombreux flux de voitures électriques. Une étude de l'ATE30 sur la mobilité de 14 « stations » désigne Zermatt comme celle qui présente la mobilité la plus durable en Suisse, Verbier se classant quant à elle en 12e position. Le résultat est fort discutable car il se fonde sur des indices qui ne rendent pas compte des problèmes de congestion routière, de perturbation pour les piétons ou d'attente aux arrêts. Elle se contente de décrire les transports « verts » dont dispose Zermatt sans questionner leur efficacité. On se contente de dire que Zermatt est la ville suisse qui compte le plus de voitures électriques31, comme si cela était un indice « écologique », et on nie l'importante congestion de cette ville alpine. On ne mentionne pas que Zermatt est la ville suisse qui compte le plus de vols de plaisance32, alors que cette mobilité constitue une pollution sonore et environnementale non négligeable33. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si les autorités de cette ville et celles de Verbier étudient aujourd'hui, chacune de leur côté mais en même

temps,  un  nouveau transport public efficace et extérieur à la congestion automobile. La commune de Zermatt a effectivement mandaté en 2007 un groupe de spécialistes pour étudier la mise en place d'un nouveau transport public permettant de désengorger les rues centrales. Le rapport rendu34 propose un tracé sur les zones d'infrastrutures publiques le long de la rivière. Il est surprenant de relever que ce nouveau transport public présente les mêmes défauts que ceux relevés pour Verbier : – Le nouveau transport public ne dessert pas toute la zone urbaine. – Son tracé est discontinu et n'est pas connecté à l'arrivée du train à Zermatt. – La nouvelle mobilité ne prend absolument pas en compte les dangers naturels (non mentionnés sur le plan) alors que le tracé s'implante principalement sur des zones rouges d'inondation. Ne faudrait-il pas au contraire concevoir le nouveau transport de manière à résoudre, en faisant d'une pierre trois coups, la congestion des voitures électriques, la densification des derniers hectares disponibles et la sécurisation du bâti déjà construit dans les zones d'avalanches rouges ? Quel néotype alpin, regroupant transport public, programme habitable et infrastructure de protection contre les  dangers naturels, permettrait de se greffer directement sur la gare existante et ainsi densifier durablement Zermatt ? Nous ne détaillerons pas ici l'analyse de Zermatt car elle ne révèle pas de nouveaux inducteurs significatifs par rapport à notre étude sur Verbier. Nous proposerons plutôt une approche synthétique mettant en évidence, par les cartes et des données chiffrées clés, les diverses saturations étudiées de Zermatt. La synthèse comparative des cas (pp. 188-193, et l’affiche à la fin du livre) montrera les similitudes troublantes entre Verbier et Zermatt et démentira les idées reçues sur la durabilité de cette dernière. 29 Barbier, J., Nomazy, M.T., Veuve, L. (1974). 30 Association transport et environnement (2011). 31–32 Selon les informations tirées de l’atlas de la Suisse 3D, EPFZ. 33 Un hélicoptère provoque un bruit moyen de 90 db à 300 m, une route à très forte circulation en moyenne de 70 db (informations de l’OFEV-office fédéral de l’environnement). 34 Le rapport détaillé de 2007 n’est pas rendu public mais la commune de Zermatt a publié le résumé du tracé (descriptif) et des variantes de transport envisagées dans sa revue officielle (Zermatt Inside, décembre 2007).

71

185 ha de zones à bâtir

1 135 360 m

2

construits

0,151 COS

0,61 de densité

72 | Zermatt

Densités | Hauteur du bâti (étages)

2-3

4

5

6

0

200 m

73

7%

de zones à bâtir dans la zone de danger (rouge)

Le tracé du train passe par les zones d’avalanches (rouges)

74 | Zermatt

Dangers naturels |

Danger avalanches

Danger inondations

0

200 m

75

35 km

de réseau routier « piéton » pour desservir 1 135 360 m2 construits

76 | Zermatt

Reseau |

Automobile

Piéton

0

200 m

77

AVORIAZ Station intégrée innovatrice : nouveau « prototype » de densité et de mobilité alpines

80

Face à l’important essor du tourisme de masse dans les années 1950, conséquence de l’application des congés payés de 1936 mais surtout de la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’État français prend conscience du besoin de planifier l’urbanisation à la montagne. Comme auparavant l’architecture moderne en « ville », l’architecture alpine est confrontée à l’invention d’un prototype urbain dense, fonctionnel et rentable, capable de loger un grand nombre de personnes dans un habitat minimum. Les analogies avec le langage moderne confirment les préoccupations communes : en 1964 naît la CIAM, Commission Interministérielle d’Aménagement de la Montagne, et ce n’est pas un hasard si elle reprend les initiales du Congrès International d’Architecture Moderne fondé trente six ans plus tôt. Précisons néanmoins que son but n’est pas exclusivement de répondre à un besoin social de base, comme c’est le cas dans l’aprèsguerre, mais aussi de planifier un besoin spéculatif afin de tirer le meilleur parti d’un tourisme de masse hivernal très lucratif. La CIAM définit une politique d’aménagement de la montagne appelée le Plan Neige35, basée sur la construction des stations de troisième génération36 ainsi que sur les infrastructures de transport nécessaires à leur desserte. Ces stations intégrées, artefacts dédiés au ski, sont injectées « artificiellement » dans une nature à l’état presque brut, dès 1 800 m d’altitude. Elles sont caractérisées par une gestion globale des opérations immobilières : maîtrise foncière, architecture, financement, construction, exploitation et commercialisation sont dirigés par un promoteur unique avec l’aide de l’État. C’est dans ce contexte de performance économique,  propice à une for te urbanisation de la montagne, que naît Avoriaz, laboratoire d’idées en matière d’urbanisme et de gestion financière. Les flux piétons de cette première station sans voitures ont structuré la conception même du plan masse. Jacques Labro37 définit d’abord les différents flux internes de la station et il conçoit ensuite l’architecture emblématique que nous connaissons, résultante d’une longue recherche du rappor t entre le construit et le contexte naturel qu’il décrit comme « le site physique et son atmosphère ». On résume malheureusement trop souvent Avoriaz à une architecture « mimétique » alors que ses spécificités sont autres. De nombreuses publications ont été consacrées à cette station intégrée ; notre analyse, après avoir pris connaissance de toutes les études existantes, vise à relever les points manquants non encore étudiés en détail et qui nous semblent pourtant essentiels. Nous exposerons d’abord très brièvement l’évolution morphologique de la station car elle correspond simplement aux étapes de construction

du projet planifié à l’intérieur du périmètre initialement prévu. Nous insisterons plutôt sur l’analyse du plan urbain et de ses outils de gestion immobilière novateurs. Nous nous concentrerons ensuite sur l’étude des enjeux actuels : conçu en 1964  comme un prototype à trente ans, le plan directeur a été capable de contenir un développement  sur cinquante ans sans sortir du périmètre initial. Mais aujourd’hui, Avoriaz atteint sa taille limite viable, ce qui met en danger sa pérennité même. Nous présenterons le projet d’extension imaginé par Jacques Labro comme alternative à la  saturation actuelle d’Avoriaz, ainsi que deux projets d’étudiants en architecture de l’EPFL qui abordent également cette problématique.

Un développement urbain réalisé selon une planification globale initiale Nous pouvons schématiser la réalisation d’Avoriaz en deux phases principales : de 1964 à 1994, la colonisation des alpages (schéma 1, coupe 1) par la construction de la totalité du plan masse de Jacques Labro (schémas 2 à 5) ; et de 2011 à 2015, la densification, à l’intérieur du périmètre du projet, par l’implantation de nouveaux immeubles non prévus initialement (schéma 6, coupe 2). Certes, les vingt années qui séparent ces deux étapes majeures ont donné lieu à plusieurs rénovations d’immeubles devenus obsolètes (taille des appartements, vétusté des matériaux, problèmes d’isolation et de confort, etc.), mais elles n’ont changé ni l’occupation du sol ni la densité construite d’Avoriaz38. 35 Le VIe Plan Neige prévoit initialement la réalisation de 350 000 lits mais seuls 150 000 seront réalisés (Inspection générale de l’administration et al. (2010)). L’État définit des sites à 1 800 m d’altitude, il exempte les projets des règlements locaux existants, participe à leur réalisation et à celle de leurs infrastructures de transport, notamment par des aides financières. Précisons qu’Avoriaz n’a pas été répertoriée par le Plan Neige, c’est un investisseur privé qui a découvert les potentialités du site avant. 36 La taille et la forte densité des stations intégrées permettent de regrouper en un seul site une grande quantité de lits : La Plagne 20 000 lits, Les  Arcs 1 800 18 000  lits, Avoriaz 18 000  lits, Flaine, plus modeste, 8 000 lits, etc. Voir notamment Lyon-Caen, J.F. (2004), qui résume l’évolution de la colonisation de la montagne depuis la fin du 19e siècle. 37 Jacques Labro est l’architecte qui a conçu la totalité d’Avoriaz de 1964 à nos jours. Si d’autres architectes associés ont fait partie de son bureau et ont contribué à des phases de planification d’Avoriaz, comme initialement Jean-Jacques Orzini et Jean-Marc Roques ou actuellement Simon Cloutier, J. Labro est le seul à avoir suivi le projet du début à la fin. 38 Nous rappellerons néanmoins ces rénovations importantes qui ont été le premier détonateur annonçant la limite du modèle de l’habitat minimum imaginé trente ans auparavant (pp. 102-103).

81

1960

82 | Avoriaz

Coupe 1 0

500 m

83

Schéma 1 : 1960

Schéma 3 : 1974

Schéma 5 : 1994

Schéma 2 : 1963

Schéma 4 : 1984

Schéma 6 : 2014

84 | Avoriaz

0

500 m

1960–2014 Évolution d’Avoriaz

85

2014

86 | Avoriaz

Coupe 2 0

500 m

87

Doc. 1 : plan du domaine skiable. Projet Vuarnet, 1961

Jusqu’aux années 1960, Avoriaz, anciennement nommée Avoreaz, se résume à des terrains d’alpages infertiles, gorgés d’eau et occupant un plateau vierge orienté au sud, à 1 800 m d’altitude en haut d’une falaise abrupte, au-dessus des nuages. En hiver, soit presque sept mois par an, la neige interdit à cette altitude tout accès par la route ; cet isolement est accentué par la rupture topographique du contexte naturel (coupe 1), séparant le plateau d’Avoriaz de la vallée habitée de Morzine, située 800 m plus bas. La difficulté d’accès et une nature peu clémente semblent expliquer pourquoi ces terres ont été délaissées et longtemps préservées de toute colonisation. La  gestion foncière des alpages semble montrer ce désintérêt privé : le sol n’appartient pas à plusieurs propriétaires privés mais en totalité au domaine public, à la commune. 88 | Avoriaz

Cette donnée sera d’importance majeure car elle simplifiera considérablement la réalisation d’Avoriaz, permettant une planification d’ensemble sans devoir se heurter aux nombreuses contraintes qu’aurait impliquée une négociation avec plusieurs propriétaires privés. En 1961, Jean Vuarnet, skieur de renommée internationale né dans vallée de Morzine, révèle, et surtout concrétise par un projet, le vrai potentiel d’Avoriaz : le ski alpin. En effet, le plan d’équipement du domaine skiable, imaginé par le champion olympique et publié dans la revue Le Ski39 (documents 1 et 2), montre qu’Avoriaz est idéalement située au cœur des pistes skiables de la région, ainsi qu’au centre du domaine des futures Portes du Soleil40. Les infrastructures de transport sont les premiers inducteurs de l’aménagement d’Avoriaz.

Séparation fonctionnelle des flux d’une station piétonne

Doc. 2 : photomontage des infrastructures. Projet Vuarnet, 1961

Il est intéressant de voir que ce plan propose un concept de mobilité global qui pense conjointement la mobilité « naturelle » et la mobilité « urbaine » : les remontées mécaniques font non seulement le lien entre Avoriaz et le haut des pistes de ski, mais aussi entre Avoriaz et la vallée habitée. Rappelons que le choix d’un transport à câble se justifie par la prise en compte des contraintes climatiques existantes, il permet d’accéder à 1 800 m d’altitude depuis la vallée, par tous les temps et indépendamment de la neige ; l’accès par la route est initialement mis de côté car il est trop coûteux et peu sûr. Ce choix déterminant définira dès le début la mobilité « douce » d’Avoriaz. Jean Vuarnet a déjà l’idée d’une station piétonne, sans voitures, non seulement pour l’accès mais aussi pour les déplacements internes. En 1963, l’accès en téléphérique marque le début de l’urbanisation du plateau (schéma 2). Très vite, la construction du bâti d’Avoriaz suivra. En 30 ans, sur un terrain initialement public cédé à un promoteur privé, Gérard Brémond41, financeur de la totalité de l’opération, et un architecte, Jacques Labro, concepteur du plan masse mais aussi de l’architecture de chaque bâtiment, transformeront les modestes terrains d’alpage en une ville de ski de 250 000 m2 construits, hébergent 18 000 lits. Les schémas 3 à 5 montrent les différentes étapes de la construction d’Avoriaz et de ses trois quartiers.

Le plan masse de Labro n’est pas le premier plan d’aménagement d’Avoriaz, il y a eu notamment les projets du bureau d’architecture Bertrand (1963). Le projet initial de Bertrand propose un plan masse basé sur le chalet individuel de style savoyard, desservi par des routes privées. L’implantation du bâti ne tient pas compte des spécificités naturelles du site et ne propose aucune innovation pour répondre aux besoins de l’époque, à savoir créer des « machines à skier » permettant d’héberger rationnellement des milliers de skieurs. La très faible densité de ce plan ne permet de construire que 6 000  lits sur l’ensemble du site (soit trois fois moins que le projet Labro). À la demande du promoteur et afin d’augmenter le nombre de lits, Bertrand propose un deuxième plan masse qui se contente de densifier le premier en remplaçant quelques chalets par des immeubles sans aucune spécificité alpine. L’intérêt du projet de Labro réside dans la proposition d’une nouvelle densité construite à la montagne, dictée par le contexte naturel et par la mobilité spécifique d’une station piétonne pensée pour le ski, et qui ne se résume pas au collage d’immeubles urbains sur les terrains d’alpage. La comparaison des différentes densités des projets Bertrand avec le projet Labro élaboré (schémas 7 à 9) permet de montrer la spécificité de ce dernier. Il atteint une densité de 0,71 alors que celle des projets Bertrand n’est que de 0,25. 39 Voir le descriptif complet du projet publié dans la revue Le Ski, n°  173, pp. 209-235. 40 L’idée novatrice de relier les domaines skiables de deux pays, les français autour d’Avoriaz avec les suisses autour de Champéry, est aussi l’œuvre de Jean Vuarnet. Le premier forfait de ski commun, qui marque officiellement la naissance d’un nouveau domaine appelé les Portes du Soleil, date de l’hiver 1969. Ce vaste domaine skiable compte aujourd’hui environ 650 km de pistes. 41 Avoriaz n’est pas la première station intégrée mais elle est la première à être financée par un privé et non par l’État (comme La Pagne). Construite presque en parallèle d’Avoriaz, Flaine bénéficie elle aussi d’un financement privé, celui du fortuné Éric Boissonnas.

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Schémas 7 à 9 : échantillons de densité : Projet Bertrand 1, projet Bertrand 2 et projet Labro et al.

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100 m

0 100 m

Doc. 3 : flux des skieurs structurant le plan masse, Labro et al., 1966

Doc. 4 : schéma de hiérarchisation des flux de skieurs, Labro et al., 1966

À l’instar des villages de montagne construits très densément, entre autres pour libérer les terres cultivables environnantes, Avoriaz est compacte pour libérer les terres skiables. L’idée d’une station sans voitures, qui donne la priorité au ski, est le concept de base qui définira la taille et l’implantation du plan de Labro. L’esquisse du plan directeur de l’équipe de Labro, publié en 1966 (document 3), fait ressortir l’importance des flux des skieurs (en bleu) comme principe de hiérarchisation du sol. Les pistes de liaison entre les différents domaines skiables sont l’élément majeur qui irrigue le plan, Avoriaz devient la rotule manquante qui permet de skier sans interruption. Les remontées mécaniques découlent de ce tracé, elles permettent de franchir la pente en montée pour garantir la continuité du parcours entre les différentes pistes internes et celles des domaines skiables. La définition des zones d’urbanisation (en jaune) résulte du tracé des pistes de ski internes. Une deuxième « couche » de flux (en rouge) est imaginée pour desservir les différents quartiers :

un réseau principal (ligne en traitillés rouges), qui part du parking, passe par le centre d’activités et aboutit à l’arrivée du téléphérique, permet de relier les deux accès opposés de la station tout en desservant les différentes zones d’urbanisation. Notons que même si cet axe est représenté en rouge comme l’accès en voiture, la circulation y est réservée aux traîneaux tirés par des rennes42, emblèmes de cette station sans voitures. Cette première ébauche est encore timide dans la  définition des tracés mais elle annonce déjà l’intention moderne d’une séparation fonctionnelle des flux. Le plan et la coupe schématiques (document 4) publiés en même temps que ce plan directeur permettent de comprendre les premières intentions. 42 Même si la distance d’un bout à l’autre d’Avoriaz est conçue de manière à ce qu’un piéton puisse se déplacer sans problème à pied ou à skis, les traîneaux sont un appoint pour le transport des valises, pour les personnes âgées, etc.

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Doc. 5, 6, 7 : coupes de hiérarchisation des flux, Labro et al., 1966

Doc. 8 : plan de masse et d’aménagement d’Avoriaz 1 800, Labro et al., 1974

92 | Avoriaz

Nous pouvons distinguer une superposition des différents flux hiérarchisés selon la topographie et selon une dégression des vitesses : les pistes principales qui contournent l’urbanisation assurent un accès aux remontées mécaniques reliant Avoriaz aux domaines skiables, les pistes secondaires permettent de rejoindre les immeubles directement à ski. La voie des traîneaux dessert l’intérieur de l’urbanisation, elle est reliée aux flux des skieurs et des piétons, elle est aussi en contact avec les commerces. Cette coupe présente déjà l’idée de passages piétons couverts permettant de se déplacer dans la station à l’abri des intempéries. Nous reviendrons à plusieurs reprises sur ce point essentiel. Les flux sont différenciés mais tous reliés entre eux. Précisons que dans le projet de Labro, la coupe est essentielle pour définir l’organisation des flux, les différentes esquisses de 1966 (documents 5 à 7) montrent l’importance des sections comme principal outil de recherche. Le plan masse de 1974 (document 8) radicalise les premières intentions et définit clairement trois types de flux internes : flux des skieurs sur les pistes de liaison, voies des traineaux et circulations piétonnes. Une large boucle de pistes de liaisons autour  du  quar tier des Dromonts,  qui s’élargit au-dessus du quartier de la Falaise permet de rejoindre les quatre domaines skiables et de traverser également à ski le centre de la station. Des élargissements ponctuels des pistes définissent des places en rapport avec les programmes publics de la station (place centrale des Mouilles, place du téléphérique, etc.). Les remontées mécaniques assurent la liaison entre les différents départs mais aussi la desserte de l’urbanisation même (arrêt intermédiaire du quartier du Perchoir). Les voies de traîneaux  sont dessinées en fonction des immeubles à desservir et de la topographie. Elles permettent de se déplacer sans effort et à pied à l’intérieur d’Avoriaz (par exemple si l’on porte des valises, ou que l’on veut sortir le soir sans marcher dans la neige). Le vocabulaire employé par l’architecte pour nommer les parcours de la station traduit bien cette prédominance du ski : « boulevard des skieurs », « front de ski », « ski enfants », « départ skieurs », etc. La taille d’Avoriaz n’est pas seulement déterminée par le périmètre constructible mis à disposition par la commune mais aussi, et surtout, par une volonté de définir une taille limite viable pour le piéton. La comparaison de plusieurs stations intégrées piétonnes ou de cas complexes contemporains permet de relever une longueur maximale viable commune pour un déplacement piéton d’environ un kilomètre. Avoriaz rentre dans cette catégorie mais sa topographie est néanmoins une contrainte

supplémentaire pour le piéton : s’il est effectivement possible de marcher un kilomètre sur du plat, en pente, le même kilomètre peut être plus difficile à parcourir. Or la pente peut dépasser les 50 % dans les quartiers des Essaveaux, des Alpages ou du Perchoir. Il est bien sûr possible d’emprunter les voies des traîneaux pour suivre une pente moins importante mais le parcours se rallonge nettement. Pour assurer un parcours piéton plus direct et plus court, Labro invente des dispositifs propres à Avoriaz qui permettent de franchir aisément la pente : des ascenseurs publics, des galeries couvertes, des rues intérieures ou des passerelles. Le plan de 1974 montre l’emplacement de ces éléments, intégrés dans les bâtiments lorsqu’il faut franchir une forte pente. Le plan de 1970 (document 11) exprime mieux la volonté d’un parcours piéton continu (hachures) malgré la topographie. Mais ce sont surtout les élévations (documents 9 et 10) qui permettent de comprendre cette idée de coupe qui se concentre ici sur le quartier des Essaveaux, la partie la plus pentue du site. Une alternance d’ascenseurs publics et de plateaux horizontaux rend aisément franchissable un dénivelé de 70 mètres, ces dispositifs43 créent un « faux sol », surélevé par rapport au terrain naturel mais ponctuellement connecté à celui-ci. Comme les skieurs qui circulent au niveau du sol mais qui utilisent un autre niveau pour franchir la pente (remontées mécaniques), les piétons ont eux aussi deux niveaux de référence liés à la topographie. Labro imagine ces catalyseurs de déplacements piétons lisibles en façade : les bâtiments participent ainsi à la mise en scène des flux publics. L’hôtel des Hauts-Forts (aujourd’hui transformé en appartements), construit en 1967-1968, est le premier bâtiment intégrant cette idée de mobilité piétonne publique (documents 12 et 13). Les bâtiments et flux forment un ensemble conçu en binôme. Avoriaz se caractérise par un fort lien entre densité du bâti et mobilité piétonne, l’une garantissant la viabilité de l’autre. 43 Outre les ascenseurs et les passerelles publics, le projet de 1969 intègre aussi des remontées mécaniques supplémentaires (à côté du chiffre 3 et du chiffre 5 sur le document 11, p. 95), non pour rejoindre facilement à ski les départs et les arrivées des pistes mais comme dispositifs permettant de franchir à pied la topographie. Ces remontées mécaniques ne seront pas conservées dans le plan définitif.

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Densités contextuelles L’idée d’une station piétonne définit donc la taille limite de l’urbanisation, compacte et dense pour répondre aussi aux exigences de rentabilité du promoteur. Avoriaz est un exemple significatif d’une nouvelle densité contextuelle en montagne. Résumer Avoriaz à une architecture mimétique imitant la nature est réducteur et, à notre sens, erroné : cette station intégrée est caractérisée par l’intégration d’une forte densité construite au contexte naturel et non pas par la simple imitation de celui-ci. « C’est la station qui fait le territoire ou le territoire qui fait la station ? »44: sans aucun doute, à Avoriaz le territoire fait la station. La prise en compte de celui-ci par Labro a déterminé en grande partie l’urbanisme et l’architecture ; mais la forte densité contextuelle d’Avoriaz révèle, transforme à son tour le territoire. Elle caractérise les spécificités naturelles du site : topographie, neige, ensoleillement, vents, vue, etc., qui sont ainsi dévoilées. Avoriaz propose une densité « climatique », réactive au climat du lieu. Labro émet dès 1966 l’idée de plusieurs quartiers (cinq initialement, puis trois) en les « particularisant »45. Il distingue trois types de densités en fonction du contexte naturel. J.-F. Lyon-Caen rappelle les termes employés par l’architecte pour caractériser ces trois « villages », notamment en fonction de leur lien avec la topographie : « Les Dromonts incorporé, Les Crozats adossé, La Falaise dressé »46. Comment Labro a-t-il réussi à intégrer la forte densité bâtie au contexte naturel ? Le travail en maquette a été un outil de projet fondamental dans la conception d’Avoriaz, « la main fait le travail que la tête constate »47. La coupe, qui, comme nous l’avons vu, a fortement structuré la hiérarchisation des flux, a aussi été indispensable pour définir l’implantation et la forme unique de chaque bâtiment. Nous ne décrirons pas ici les spécificités de chacun : l’Inventaire général du Patrimoine Culturel de Rhône-Alpes répertorie la majorité des constructions du site ; nous montrerons plutôt les dispositifs architecturaux caractéristiques qui permettent de « lier » la densité construite au contexte naturel et ainsi d’« expérimenter différentes manières de vivre en montagne »48. Le quartier des Dromonts est développé en premier. Même si la topographie en forme de butte coupe à une partie des terrains la vue panoramique sur les montagnes, ce quartier présente l’avantage d’être directement relié au téléphérique. Il est intéressant de noter qu’initialement, l’accessibilité a primé sur la mise en valeur du paysage ; il en résulte une densité originale et introvertie. Les constructions des Dromonts définissent le style et les principes architecturaux de base de toute la station, même s’ils seront adaptés pour répondre aux spécificités de chaque quartier. Les Dromonts occupent la plus 94 | Avoriaz

Doc. 9 et 10 : coupes circulation piétonne, Labro et al., 1970

Doc. 12 : plan de masse, immeuble des Hauts-Forts, Labro et al., 1967

grande surface au sol, 35 % de la surface totale d’Avoriaz, accueillant la plus faible densité du bâti 0,86 (sans compter la surface de la place centrale). Les Dromonts sont le seul quartier qui contienne des chalets individuels (mis à part les neufs chalets d’alpage existants aux Crozats) et des immeubles collectifs bas. La plus faible densité des Dromonts s’explique aussi par la conservation des sapins, qui subsistent seulement dans ce quartier et bloquent une partie de la surface au sol. Le schéma de 1966 (document 18) énonce les premiers principes de prise en compte du contexte naturel d’Avoriaz, parfaitement résumés par le texte d’origine49: « […] Se soumettre à la topographie. Rechercher les vues et les ensoleillements privilégiés. Se protéger contre les vents dominants. Tirer parti de l’enneigement et des transformations saisonnières […] ».

Doc. 11 : étude d’aménagement, Labro et al., 1970

Doc. 13 : passerelle publique piétonne, immeuble des Hauts-Forts 44 Philippe Bourdeau à propos des stations intégrées dans sa conférence à la 5e Biennale Européenne de La Montagne, octobre 2013.

47 Propos de Labro lors de sa conférence à l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Grenoble, le 29 novembre 2012.

45 Selon les termes employés dans l’article paru dans L’Architecture d’aujourd’hui, 1966.

48 Labro, J. in Recherche et architecture, 1970, p. 126.

46 Lyon-Caen, J.-F. (2012). Voir note 165.

49 Description reprise du descriptif du « processus de l’étude », in L’Architecture d’aujourd’hui, 1966.

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climat, n’est pas un geste romantique mais résulte d’une intention alpine destinée à intégrer, certainement aussi à camoufler un peu, la forte densité construite. Les deux principaux outils pour capturer la neige sont la toiture-façade et la toiture « porte-neige », les modes de construction et l’inclinaison de ces éléments étant définis pour retenir le plus longtemps possible la neige qui les recouvre. L’Hôtel des Dromonts50 (documents 14 et 15) est, à juste titre, très souvent cité comme un exemple représentatif de la toiture-façade en bois d’Avoriaz. Nous préférons néanmoins porter ici notre attention sur les différentes étapes du bâtiment Les Mélèzes51

Doc. 14 : façade de l'hôtel des Dromonts, Labro et al., 1966

Doc. 15 : hôtel des Dromonts, coupe projet, Labro et al., 1966

Si la recherche de la vue et de la lumière sont des éléments que l’on retrouve aussi dans les discours modernes sur la « ville » (avoir « l’air, le soleil et la vue depuis son logis »), ces facteurs sont différents à la montagne. L’altitude, la topographie et l’orientation définissent des spécificités alpines propres à Avoriaz : la vue sur les sommets montagneux, l’intensité de la lumière, du vent et surtout l’influence d’autres éléments climatiques comme la neige. La première coupe schématique publiée sur le bâtiment Les Mélèzes (document 19) résume, mieux que le schéma en plan, ces principes. L’intensité lumineuse hivernale semble déterminer la largeur maximale du bâtiment traversant, en moyenne égale à 16 m. La prise en compte de la topographie et de la neige – en d’autres termes, du rapport au sol et au ciel – sont les deux éléments naturels primordiaux qui semblent dicter l’architecture d’Avoriaz. Celle-ci est pensée comme un support mettant en scène la neige, la retenant, donnant une forme à cette « couche mouvante », présente six mois par an à cette altitude et qui fond progressivement dès le printemps. À Avoriaz, on habite sous un toit de neige, à l’intérieur de la neige. Cette transformation du paysage par Labro, qui utilise les spécificités du

car sa typologie en longueur nous semble mieux faire comprendre les séquences formelles d’un même bâtiment en fonction de son rapport au sol (documents 16 et 17). Les Mélèzes semblent jaillir de la neige, ou plutôt habiter la neige. Comme un élément vivant, le bâtiment se mue pour s’approprier le contexte naturel. La topographie donne une forme variable et souple à la neige, le volume construit aussi (documents 20 et 21).

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50 Voir notamment l’Inventaire général du patrimoine culturel de RhôneAlpes : http://patrimoine.rhonealpes.fr/dossier/hotel-de-voyageurs-dithotel-des-dromonts/50b013a9-5d1a-4fb1-b9ea-fac3ac1b395e (consulté en décembre 2016) 51 D’une longueur totale d’environ 115 m, le bâtiment Les Mélèzes a été projeté et construit en deux phases : Les Mélèzes 1 désignent la première, Les Mélèzes 2 la seconde.

Doc. 16 : Les Mélèzes (2), coupe du projet 7, Labro et al., 1967

Doc. 18 : schéma d'implantation

Doc. 19 : principe de coupe

Doc. 17 : Les Mélèzes (1), coupe du projet 6, Labro et al., 1966

Doc. 20 : immeuble Les Mélèzes sous la neige

Doc. 21 : immeuble Les Mélèzes sous la neige

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Doc. 22 : « porte-neige » du chalet Mont-Oya

Doc. 23 : toiture de l'immeuble Le Thuya

La neige englobe la totalité de la surface construite des Mélèzes et de l’hôtel des Dromonts, ne laissant apparaître que les fenêtres perçues comme des ouvertures dans le blanc. En revanche, les autres bâtiments, également recouverts de bois, ne sont pas un volume mais une toiture sous la neige. Pour exprimer la prédominance de l’idée d’habiter sous un immense toit de neige, Labro imagine différentes typologies de grandes toitures continues mais avec de nombreux changements de niveaux pour accentuer la variation du rythme de la neige en élévation. Le bâtiment Le Thuya exprime bien cette dramatisation de la toiture (document 23). Dans cette mise en scène reposant sur la présence de la neige, il est important que celle-ci soit longtemps conservée au froid, pour éviter qu’elle ne fonde ou ne se transforme en glace au contact du construit chaud sous-jacent. Labro utilise alors le « porte-neige », un principe constructif en somme très simple. Une charpente en bois, recouverte de lattes de bois, est posée sur une toiture en béton standard (dalle béton, pare-vapeur, isolation, étanchéité). Grâce à l’air extérieur circulant dans l’espace vide entre la « vraie » toiture et ce parement boisé, la neige est conservée à température ambiante. 98 | Avoriaz

Ces idées de base se retrouvent dans les deux autres quartiers d’Avoriaz mais elles sont déclinées sensiblement pour adapter les différentes densités aux spécificités naturelles de chacun. La construction du quartier des Crozats s’effectue sur une surface plus réduite (28 % de la surface totale d’Avoriaz), la densité du bâti de 1,1 (sans compter la place centrale et le terrain des chalets d’alpage) est fortement influencée par une topographie agressive, la plus pentue du site. Labro implante les bâtiments en diminuant leur hauteur en fonction de la topographie : les bâtiments à flanc de montagne sont les plus hauts d’Avoriaz ; ils peuvent atteindre 19 étages, alors que ceux qui donnent sur la place centrale et contiennent les principaux programmes publics ne comptent que deux étages, pour répondre à l’échelle humaine du piéton. Apparaissent de nouvelles typologies d’immeubles hauts perpendiculaires à la pente comme Le Snow ou Multivacances mais aussi d’immeubles longs et fins, comme Les Intrets et Les Fontaines Blanches, d’une longueur supérieure à 200 m pour une largeur pouvant se réduire à 10 m. Le quartier des Falaises est caractérisé par une topographie plus douce mais surtout par sa posi-

Doc. 24 : toiture du quartier La Falaise

tion théâtrale surplombant l’extrémité d’une chaîne de falaises. La surface au sol occupée par la zone du bâti est la plus petite d’Avoriaz (24 %) mais elle concentre une forte densité de 1 (sans compter la surface de sol des services). La hauteur des immeubles est supérieure en bord de falaise, pouvant atteindre 15 étages. L’immeuble Le Saskia est représentatif de ce quartier. Ces trois quartiers spécifiques sont articulés autour de la place centrale qui accueille en hiver le ski des enfants et sur laquelle sont orientés d’autres programmes publics de la station, par exemple les commerces et les restaurants. Cet espace public commun définit un grand vide et occupe une importante surface de sol, 13 % de la surface totale d’Avoriaz. Son implantation est en réalité déterminée par les spécificités climatiques du sol : du fait de sa topographie, il retient naturellement les eaux, constituant ainsi la zone la plus humide de la station et donc la moins propice à l’urbanisation. Précisons que la planification globale a permis de définir des espaces pensés comme des entités en soi. Parallèlement au plan directeur global de Labro, les divers systèmes de gestion d’Avoriaz, inventés et gérés par un promoteur unique, ont permis de

financer la construction de la totalité de la station mais aussi d’en assurer la viabilité pendant presque cinquante ans. Le promoteur d’Avoriaz a réalisé de nombreuses innovations dans le financement, la promotion et la gestion du parc immobilier52 (Festival du film fantastique, la multipropriété de Pierre et Vacances, etc.). Contrairement à Verbier qui se résume principalement à des résidences secondaires non louées, le promoteur d’Avoriaz définit différents modes de commercialisation immobilière qui garantissent des lits chauds (document 25). Néanmoins, même si Avoriaz est souvent associée à la parahôtellerie (location d’appartements avec services hôteliers), modèle qui garantit des lits chauds, nous verrons qu’aujourd’hui les modèles de gestion initiaux sont obsolètes. Avoriaz est aussi fortement concernée par la problématique des résidences secondaires. 52 Voir notamment l’article de Puthod, C. et D. (2011) qui traite partiellement ce sujet.

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Pleine propriété avec gestion locative sous bail avec gestion locative sans bail sans gestion locative Multi-propriété Hôtellerie Logements de fonction Constructions antérieures Services / divers

Doc. 25 : évolution des modes de commercialisation immobilière de 1965 à 1994, Mopty, EPFL 2015

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Doc. 26 : PLU (plan local d'urbanisme), commune de Morzine-Avoriaz, 2014

Avoriaz atteint aujourd’hui sa taille limite La densité construite du modèle urbain d’Avoriaz a permis de contrôler l’emprise sur le territoire pendant cinquante ans sans dépasser le périmètre conçu initialement. Pourtant, malgré cette meilleure « performance urbaine », il est intéressant de relever que nous sommes aujourd’hui à une époque charnière où les problématiques auxquelles est confronté le modèle étalé concernent aussi le modèle compact : limite d’extension, influence sur la mobilité, impact sur la nature, obsolescence du modèle de gestion immobilière. Comme le montre le plan local d’urbanisme (document 26), Avoriaz atteint sa taille critique. Aujourd’hui, l’objectif n’est plus, comme dans les années 1960, de concevoir un artefact dans une nature vierge, un prototype fonctionnel pensé uniquement pour le ski et conçu pour perdurer trente ans. Il s’agit plutôt d’inter venir dans un modèle urbain déjà construit, projeté initialement comme une entité finie et dont la conception n’a pas envisagé une éventuelle croissance ultérieure, une flexibilité du plan masse.

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Dépassement de la taille critique : densification ou extension ? Pour faire face à la baisse de fréquentation constatée dans les années 1990, Brémond entreprend la transformation de certains immeubles existants53, la taille et le confort des appartements ne correspondant plus aux exigences de la clientèle actuelle. Nous ne nous attarderons pas sur les spécificités architecturales des adaptations entreprises, mais il est important de mentionner ces transformations car elles sont le premier signe de l’obsolescence du modèle urbain initial. Cette problématique est surtout soulevée lorsque Brémond prévoit la construction de 55 000 m 2 supplémentaires pour récupérer les lits « perdus » (lors du regroupement des appartements existants en logements plus grands) et pour compléter l’offre de la station par des appartements haut de gamme. Afin d’y répondre, Labro propose un projet combinant une densification d’Avoriaz et une extension par la création d’une station satellite autonome. Dans cette première étude de 2003–200454, l’architecte suggère de densifier Avoriaz en construisant 29 000 m 2 . L’intervention prévoit de répartir le programme dans les trois quartiers en tenant compte de leur densité et de leur spécificité. Labro considère cette densification à l’intérieur d’Avoriaz et de la concession comme maximale pour garantir la viabilité de la station et ne pas mettre en danger ses fondements urbains. Cette variante de densification ne permettant pas de contenir tous les nouveaux mètres carrés demandés par le promoteur, Labro projette les 47 % manquants, soit 26  000 m 2 , dans une nouvelle station, nommée la Joux-Verte et située à environ 800 m de l’entrée nord-ouest d’Avoriaz, composée majoritairement de chalets individuels et de quelques immeubles collectifs bas. Si la taille de la nouvelle station (environ 700 m de long) permet de reprendre quelques principes urbains d’Avoriaz, tels que la mobilité piétonne ou la circulation à ski à l’intérieur de la station, ces premières esquisses témoignent d’un urbanisme beaucoup moins contextuel que celui de la station mère : le projet de la Joux-Verte pourrait s’implanter ailleurs ; ce n’est pas le cas d’Avoriaz. Indépendamment de l’urbanisme de la Joux-Verte, qui pourrait d’ailleurs être encore repensé, c’est l’idée même d’une station satellite qui pose un problème. La proposition d’une nouvelle station contredit les principes mêmes d’Avoriaz, notamment sa compacité qui permet de regrouper densément toute l’urbanisation en un seul endroit et de libérer la « nature » environnante, notamment les pistes de ski. Si Avoriaz naît d’innovations urbaines uniques en leur temps, l’idée d’une station satellite est au contraire une proposition colonisatrice banale que 102 | Avoriaz

l’on pourrait dater des années 1960–1970, lorsque la préservation du sol n’était pas encore une préoccupation de l’aménagement du territoire. En effet, de nombreux projets de cette époque se soucient peu des conséquences d’une expansion dans le territoire : on imagine une station de base, qui finit par atteindre sa taille limite, et selon les besoins du marché, on en construit une deuxième ailleurs, puis une troisième et ainsi de suite, avec une route pour les voitures qui les relie entre elles. La réalité est bien entendu plus complexe : il existe des stations intégrées comme Whistler-Blackcomb dont l’extension de la station de base a été anticipée et planifiée dès la conception du projet. Labro ne mentionne à aucun moment le dialogue entre Avoriaz et la nouvelle station satellite, qu’il considère comme autonome. Mais comment s’imaginer que chacune resterait isolée et qu’il suffirait de gérer chaque unité en soi ? De toute évidence, les programmes généreraient des flux entre les deux. Le projet ne comporte pourtant aucune réflexion sur la nécessité d’un transport public, alors que les distances à parcourir sont trop grandes pour un piéton. Il existe une contradiction flagrante entre une mobilité interne piétonne, d’un maximum de 1 000 m, comme base de l’aménagement même de chaque station, et la mobilité entre les deux stations qui se résume seulement à la prise en compte de la route existante. Le projet d’extension de Labro ne sera finalement pas retenu ; seule la densification à l’intérieur d’Avoriaz sera effectivement réalisée. À la demande du promoteur, Labro propose une deuxième variante plus dense, 40 000 m2 (2 200 lits) sont construits de 2011 à 2015, soit 16 % de la totalité des mètres carrés existants. La taille d’Avoriaz atteint aujourd’hui 290 000 m 2 . Le plan des densités montre la construction totale avec les nouveaux immeubles. Dans un entretien filmé55, l’architecte précisera que les nouveaux immeubles réalisés, malgré une densité supérieure à celle que prévoyait la première variante, s’intègrent relativement bien dans les quartiers existants. On sent toutefois moins d’enthousiasme pour la variante construite, comme si aujourd’hui la spécificité d’Avoriaz – sa densité – était devenue un élément contraire au projet. L’architecte pense d’ailleurs que l’extension se fera très probablement un jour, l’idée de densifier encore la station semble d’ores et déjà exclue. Pourtant, si la récente densification d’Avoriaz permet de répondre à la demande actuelle, dans quelques décennies la station sera sûrement confrontée une nouvelle fois à la question primordiale de son agrandissement. Est-il encore acceptable aujourd’hui d’imaginer le développement d’une station intégrée par simple multiplication du modèle de base quelques mètres

Doc. 27 : projet d'extension d'Avoriaz, Labro et al., 2003-2004

plus loin ou faut-il au contraire étudier des stratégies de densification dans l’urbanité existante ? Faut-il conclure que le cycle de vie d’Avoriaz a atteint son terme ou est-il encore possible de le prolonger ? Le projet de master de deux étudiants de l’EPFL essaie de répondre à cette problématique56 et montre qu’il existe des possibilités de densification à l’intérieur même d’Avoriaz avant d’aller investir la nature environnante. Alors que Labro définit la densité actuelle comme maximale, le projet de F. Bianco rajoute 15 000 m2 construits tout en préservant les qualités du site d’Avoriaz et en maintenant la taille actuelle de la station. Ce facteur est essentiel car tout agrandissement du noyau de base de 1 km a d’importantes incidences sur la mobilité piétonne et donc sur la viabilité même de la station. 53 Voir Mopty, T. (2015) qui résume en une carte les immeubles rénovés et réhabilités, p. 159. 54 Les données citées ici concernant le nombre de lits et les mètres carrés du projet d’extension d’Avoriaz sont extraites de Lyon-Caen, J.F. (2012), pp. 70-71. 55 Labro, J. (2014). L’architecture à l’épreuve du site : Jacques Labro à Avoriaz, In Situ, revue des Patrimoines, entretien réalisé par Laroche, C., chercheur au service du Patrimoine et de l’Inventaire – région Aquitaine. 56 F. Bianco et T. Mopty. Voir l’intégralité des deux projets sous: http://masterarchitecture.epfl.ch/page-114256-fr.html et http://master-architecture.epfl. ch/page-124053-fr.html (consulté en décembre 2016)

103

Taille critique et viabilité de la mobilité piétonne L’extension d’Avoriaz est bien entendue influencée en partie par les limites topographiques et les dangers naturels, mais elle est surtout déterminée par la forte interdépendance entre la taille de la station et la viabilité de la mobilité piétonne. Si dans une urbanité étalée et desservie principalement par la voiture une éventuelle extension de l’urbanisation ne change pas fondamentalement la mobilité globale, dans une station piétonne elle remet en cause tout son fonctionnement. Précisons que par mobilité piétonne nous entendons le déplacement à pied, car si dans le projet initial de Labro la principale mobilité « piétonne » de la station est le déplacement à ski, la mobilité qui dicte la taille limite maximale du bâti est bien celle du piéton, sans ski. Le récent agrandissement du quartier de la Falaise, appelé l’Amara, montre la limite du déplacement piéton. Implanté à l’écart, presque hors station, il requiert une extension de 300 m du réseau. La longueur totale d’Avoriaz est donc augmentée à 1,3 km. Si le déplacement à ski est effectivement peu touché par cette extension, le déplacement à pied montre déjà des dysfonctionnements : devenu trop long, il impose une utilisation accrue des chenillettes (transpor t « public » motorisé de la station57). Aujourd’hui, le nombre de ces déplacements supplémentaires reste encore modeste mais les inconvénients se font déjà sentir (bruit, conflits de circulation avec les piétons, etc.). Précisons que la mobilité entre l’Amara et le reste de la station semble avoir été volontairement limitée par l’implantation d’un programme privé propre à ce quar tier. L’exemple « piéton » de Zermatt l’a montré : au-delà d’une taille limite, la ville doit planifier les différents flux pour éviter qu’ils ne provoquent une congestion du trafic. Tout futur projet d’agrandissement du bâti actuel d’Avoriaz doit étudier en parallèle ses répercussions sur la mobilité. Outre la question primordiale du maintien de la taille limite initiale de 1 km, qui a permis de contenir les variations des flux internes pendant presque 50 ans, il est important de souligner qu’Avoriaz était déjà confrontée en 2011, avant l’extension de l’Amara, à deux problèmes de mobilité majeurs au sein du noyau de base même. Aujourd’hui, les ascenseurs et les passerelles publics, pourtant essentiels au parcours piéton pour franchir la topographie, ont été délaissés et mal entretenus ; leur obsolescence met en danger la mobilité et donne une image négative de ces espaces caractéristiques de l’architecture de la station. Malgré la prise en charge par la commune 104 | Avoriaz

depuis 1992 des coûts de transformation et d’entretien de ces éléments publics, il arrive encore que les escalators ou les ascenseurs soient en panne58, voire tout simplement fermés. En effet, pendant un tiers de l’année, toutes les infrastructures sont hors-service : les infrastructures internes à la station mais aussi les télésièges la reliant avec la nature environnante, et surtout la nouvelle télécabine, seul transport public d’accès. Les flux piétons de la station et ceux à plus grande échelle sont fortement impactés par ce manque d’exploitation. Malgré les potentialités d’une mobilité piétonne et d’une connexion efficace avec la vallée en transport public, l’accès se fait principalement en voiture. Il existe une ambigüité remarquable entre la mobilité de la station et la mobilité à plus grande échelle. Ces cinq dernières années, par exemple, la station a construit une nouvelle télécabine performante, qui favorise l’accès en transport public, mais paradoxalement les nouveaux bâtiments de l’Amara sont directement reliés au réseau routier par le seul nouveau parking souterrain privé de la station, ce qui incite les résidents à arriver exclusivement en voiture. Pourtant, cette télécabine est un atout de mobilité important. Pour encourager cette démarche, le projet prévoit même de prolonger l’actuel tracé Avoriaz-Prodains jusqu’à Morzine, pour permettre un accès direct depuis la station mère et rapprocher ainsi Morzine, Thonon, Genève ou Genève-aéroport. Cependant, aucun transport public « vert » ne relie Morzine aux villes voisines, seuls des bus assurent la liaison par la route. Le déplacement à pied au sein de la station, initialement prévu comme un simple substitut de la mobilité à ski, devient maintenant un enjeu primordial pour la pérennité d’Avoriaz. La desserte à ski est un principe rationnel et naturel dans une station de sports d’hiver conçue au départ pour n’être habitée qu’en saison hivernale, mais aujourd’hui il n’est plus imaginable de compter sur une mobilité basée principalement sur la présence de la neige. Les changements climatiques et la recherche d’une diversification de l’occupation requièrent nécessairement l’efficacité du parcours à pied. Climat et obsolescence de la mobilité à ski Malgré son incohérence grandissante, le déplacement à ski constitue encore aujourd’hui la principale mobilité interne d’Avoriaz. En descente, le flux des skieurs permet de desservir la station plus rapidement que le parcours à pied. En montée, le skieur, comme le piéton, dépend des transports mécaniques. Le déplacement à ski est sérieusement remis en question par le contexte actuel : si

en 1960, l’hiver d’Avoriaz durait presque sept mois et que la neige était abondante, aujourd’hui cette saison y dure à peine cinq mois, et l’enneigement, peu fiable à cause du réchauffement climatique, ne garantit plus la mobilité « skis aux pieds ». Il arrive, même en plein hiver à 1 800 m, que certaines pistes internes à la station manquent de neige, rendant impossible le déplacement continu à ski. Le flux des skieurs ne permet plus de se déplacer d’un bout à l’autre de la station et de rejoindre directement les pistes des domaines skiables (document 28 et plan réseau skieurs). Le trajet en hiver se fait parfois à skis, parfois à pied, skis sur les épaules, ce qui rend la circulation difficile. Il ne s’agit pas seulement de garantir, comme ailleurs, l’enneigement des domaines skiables, à Avoriaz, les conséquences du climat sont plus importantes puisqu’elles mettent en péril la mobilité de toute la station, et par conséquent sa viabilité. La mobilité d’Avoriaz naît, et meurt aujourd’hui, au gré du climat. Même si l’altitude la rend encore peu vulnérable au réchauffement climatique par rapport aux stations de moyenne montagne, paradoxalement la pérennité de ces dernières est moins dépendante du climat que celle d’Avoriaz. Il est essentiel de penser une nouvelle mobilité interne permettant un parcours continu, avec la neige et avec sa disparition progressive. Le manque de neige entraîne l’obsolescence naissante de la mobilité à ski mais il influence fortement aussi la définition des espaces publics. A l’origine, durant les hivers des années 1960, tout est beau : un unique sol blanc habille la topographie, il est continu, uniforme, sans limites. Même s’il accueille différentes activités hivernales (piste de luge, snowpark, ski débutant, pistes internes, etc.), celles-ci se déroulent toutes sur le même fond de neige. Cette image idéale d’un sol qui serait intouché par l’homme, où l’architecture semble jaillir naturellement, se dégrade avec la fonte de la neige. À certaines périodes de l’hiver, les activités sur l’espace public central sont déjà perturbées par le manque de neige ; sans enneigement artificiel, leur fonction initiale est parfois impossible. Avec le changement de saison, la fonte du tapis blanc s’accentue, l’espace public unique se divise en une multitude de sous-espaces sans qualité (document 28). À l’entre-saison, il est souvent impraticable et totalement délaissé (boue, mauvaises herbes, etc.). La requalification de cet espace public central, pensé pour être viable pendant les quatre saisons et non seulement en hiver, devrait faire l’objet d’une étude urbaine et paysagère. Pourtant, à ce jour, à l’exception d’un projet mené par un étudiant de l’EPFL59 qui aborde cette problématique, aucune autre analyse n’a été entreprise.

Relevons cependant que le sol entre les bâtiments présente une qualité alpine : l’herbe verte et autres fleurs y poussent naturellement, selon les règles de l’altitude, changeant de couleur et de matière selon les saisons. Et surtout, le sol vert d’Avoriaz est public, on peut circuler librement au sein de la station, même entre les chalets privés des Dromonts, alors que dans d’autres urbanités alpines, comme nous l’avons vu par exemple à Verbier, des haies et autres dispositifs privatisent la nature et surtout l’artificialisent, la « vraie » nature n’y existe pas. Le vert d’Avoriaz est naturel, il prolonge le sol alpin environnant qui pénètre simplement dans la station. La végétation y est encore verte mais devient déjà pierreuse ; la topographie singulière souligne les falaises rocheuses, paysage unique et reconnaissable de la station. La limite d’extension est en partie définie par les limites topographiques et les risques naturels mais la particularité de la taille d’Avoriaz est d’être principalement déterminée, comme nous l’avons vu, par le binôme taille du bâti – mobilité piétonne. L’abrupte topographie des falaises a certes délimité l’extension de l’urbanisation au sud et celle du quartier des Crozats au nord mais Avoriaz aurait pû facilement s’étendre au nord-ouest où les terrains sont plats et hors des zones de dangers. De même, le plan des dangers naturels montre qu’ils ont aussi eu relativement peu d’impact sur les limites construites d’Avoriaz, seul le quartier des Crozats est concerné : les nouveaux immeubles intègrent dans la partie nord des logements un mur paravalanches en béton pour se protéger des coulées de neige. 57 Une étude de transport a été mandatée par la commune de Morzine en 2014 pour pallier ces problématiques naissantes mais mettant déjà en danger la qualité piétonne d’Avoriaz. Le document Étude des flux logistiques des personnes et des marchandises résume les principales idées. 58 Voir l’énoncé théorique de Mopty, T. (2015). Son analyse détaille les importants coûts d’entretien que requiert le bon fonctionnement d’une station piétonne avec une exploitation saisonnière, pp. 58-65 notamment. 59 Ibidem. Le projet énonce l’idée intéressante de s’intéresser au vide et non au construit pour résoudre les problématiques actuelles d’Avoriaz.

105

41 ha de zones à bâtir

290 000 m

2

construits

0,160 COS

0,71 de densité

106 | Avoriaz

Densités | Hauteur du bâti (étages)

2-3

4

5

6

7-10 10-15 >16

0

200 m

107

Discontinuité du parcours à ski à l’intérieur d’Avoriaz

108 | Avoriaz

Réseau skieurs

0

200 m

109

0,6 km

de réseau routier pour desservir 290 000 m2 construits

1 km

de distance maximale à parcourir à pied

110 | Avoriaz

Reseau |

Automobile

Piéton

0

200 m

111

Rappelons que la différence d’altitude entre le « village » existant de Morzine et Avoriaz s’élève à 800 m ; ce dénivelé explique les décalages de températures qui d’ordinaire ne sont pas aussi marqués entre une station et son noyau d’origine : l’air d’Avoriaz est plus frais, en été, par exemple, avec sept degrés de moins qu’à Morzine, atout qui, le réchauffement climatique aidant, devrait attirer de plus en plus de résidents en quête de fraîcheur. Même si la station est facilement accessible par la télécabine publique et dispose ainsi d’une connectivité importante, Avoriaz peine à définir une occupation à l’année. Limite temporelle du modèle de gestion immobilière Conçue initialement comme une ville temporaire pour les skieurs, Avoriaz présente non seulement des dysfonctionnements urbains mais aussi des problèmes de gestion immobilière. La comparaison des modes de gestion initiaux avec ceux d’aujourd’hui et ceux de demain en projet montre clairement l’inefficacité de ces systèmes pour répondre à la problématique actuelle des lits froids (document 29). Si les différents baux de propriété initiaux permettent à Pierre & Vacances de gérer, en l’absence du propriétaire, la location d’une partie des lits de la station et de garantir ainsi une occupation accrue des logements, à l’issue du lien contractuel de neuf ans, le propriétaire refuse presque toujours de remettre son bien à disposition pour la location. Brémond a bien pris conscience, lors de la construction des nouveaux immeubles en 2011, de la nécessité de trouver un contrat actuel lui permettant de gérer à long terme la location des biens, non seulement pour des raisons de rentabilité mais aussi pour garantir une occupation plus rationnelle des lits. Il invente « la pleine propriété avec gestion locative permanente », en imposant un contrat de bail de durée indéterminée60. Si « la pleine propriété avec gestion locative permanente » est une piste d’exploitation intéressante car elle permet la location efficace dans le temps des lits inexploités, elle ne concerne malheureusement que les 9 nouveaux immeubles. Contrairement à l’image véhiculée par certains médias, Avoriaz n’est pas, dans sa globalité, un modèle qui évite les lits froids de manière exemplaire : sur 290 000 m2, environ 65 % sont des lits froids. Il est surprenant de noter qu’un modèle comme celui d’Avoriaz, initialement fondé sur la mise en location des lits, sera davantage confronté à la problématique des lits froids qu’une station construite dès le départ sur le modèle des résidences secondaires privées et non louées comme Verbier. 112 | Avoriaz

De plus, la temporalité d’Avoriaz accentue encore la gravité de la situation : une station complètement fermée six mois par an, habitée par moins de cinquante habitants permanents mais accueillant jusqu’à 18 000 résidents saisonniers en hiver, n’est plus un modèle urbain, économique et social soutenable. Aujourd’hui encore, l’hiver est la  période dominante, au printemps et en automne, l’occupation est presque nulle. Pendant ces six mois, la mobilité à l’intérieur de la station n’est d’ailleurs plus piétonne : des camions et autres véhicules pour la construction ou l’entretien des immeubles y circulent, dégradant la qualité de l’air par la pollution et le bruit. Il n’est pas étonnant que les quelques habitants permanents affirment vivre là par obligation, entre lieu désertique et chantier bruyant, avec une qualité de vie fortement affectée pendant ces quelques mois. Toute la promotion de la station est faite pour garantir une occupation en hiver et en été mais rien n’est entrepris pour réussir une occupation à l’année. Pourtant, Avoriaz a une taille et un programme qui lui permettrait d’accueillir une véritable ville, habitée à l’année. Il sera intéressant de voir au prochain chapitre qu’une ville de montagne comme Whistler-Blackcomb, qui suit des principes urbains en apparence similaires à ceux d’Avoriaz (taille, principe de mobilité piétonne à l’intérieur de la station, etc.), est très différente dans sa gestion immobilière et sa temporalité. Whistler-Blackcomb ou le Mont-Tremblant par exemple parviennent aujourd’hui à  garantir une occupation pendant presque 12 mois, avec une fréquentation estivale égale, voire supérieure à l’hivernale, notamment grâce à l’offre d’évènements exclusifs tout le long de l’année et à la mobilité « ville » – « montagne ». 60 Il s’agit du même modèle que celui vu précédemment, « la pleine propriété avec gestion locative sous bail », mais au lieu d’un bail d’une durée de neuf ans, renouvelable ou pas, obligeant le propriétaire à confier son bien pendant son absence à Pierre & vacances, le nouveau système a une durée indéterminée et ne peut être interrompu sans indemnités et autres conséquences sur la propriété.

Doc. 28 : variations de l'état du sol au gré des saisons, commune de Morzine-Avoriaz, 2014

113

Pleine propriété avec gestion locative permanente avec gestion locative sous bail avec gestion locative sans bail sans gestion locative Multi-propriété Hôtellerie Logements de fonction Services / divers

document 29: modes de commercialisation immobilière (initiaux, actuels et futurs), Mopty (EPFL 2015)

114 | Avoriaz

Avoriaz aujourd’hui, la fin d’un cycle urbain ? La planification globale d’Avoriaz et la compacité de son modèle urbain ont permis de contrôler pendant 50 ans l’empreinte sur le territoire. La mobilité singulière de cette première station intégrée piétonne, exclusivement pensée pour le ski, a induit une nouvelle densité construite à la montagne, la viabilité de l’une dépendant directement de la taille limite de l’autre. Avoriaz est un artefact contextuel qui naît de la symbiose entre un prototype alpin, un modèle théorique fonctionnel, et le contexte naturel. La synthèse comparative montrera que cet artefact planifié est bien moins artificiel que le modèle du chalet individuel, si souvent défini comme « naturel ». Cependant, si Avoriaz a garanti une occupation plus rationnelle et moins agressive du sol, elle est aujourd’hui confrontée, au même titre que certaines urbanités alpines étalées, à de nombreux dysfonctionnements urbains, économiques et sociaux. La force du projet initial, basée sur le lien mobilité piétonne – taille de l’urbanisation, ainsi que sur le lien mobilité piétonne – climat / temporalité, devient aujourd’hui la principale faiblesse de la station. Nous avons volontairement gardé la terminologie « station », qui date des années 1960, pour définir Avoriaz aujourd’hui, car elle est toujours très majoritairement focalisée sur la période hivernale et n’a pas encore réussi à intégrer une nouvelle temporalité pour être qualifiée de « ville ». Le changement climatique et la recherche d’une nouvelle occupation résidentielle confirment la fragilité de la station exclusivement hivernale ; le nombre élevé de lits froids révèle les limites du modèle économique. Doit-on en conclure que le cycle de vie d’Avoriaz est fini ? Faut-il la laisser progressivement mourir, devenir une friche touristique et construire une nouvelle station satellite comme le propose le dernier projet d’extension de Labro ? Ne faut-il pas au contraire imaginer des stratégies de densification permettant de prolonger la pérennité d’Avoriaz comme le suggèrent certains projets ?

115

Continuité du sol naturel à l’intérieur d’Avoriaz Le sol « public » est entièrement accessible, non délimité par des dispositifs privés

116 | Avoriaz

Natures |

Forêts

Pâturages

Nature artificielle

Golf

0

200 m

117

6%

de surface à bâtir dans les zones d’avalanches (rouges)

118 | Avoriaz

Dangers naturels |

Danger avalanches

Danger inondations

0

200 m

119

16,5 % d’équipement publics

2% d’hôtels

81,5 % de logements

120 | Avoriaz

Mixité

0

200 m

121

WHISTLER-BLACKCOMB Extension planifiée d’une station intégrée ayant atteint sa taille limite

124 | Whistler-Blackcomb

Le cas d’Avoriaz, qui constitue, comme nous l’avons montré, le contre-exemple de Verbier, a permis, par effet de contraste, de faire ressortir les faiblesses de la ville étalée, mais aussi de révéler les limites de la ville compacte. Si la taille de l’urbanisation est définie et planifiée pour garantir une mobilité exclusivement piétonne, nous avons vu que cette qualité majeure devient aujourd’hui une faiblesse : tout prolongement de la longueur maximale de 1 km met en péril la pérennité de l’ensemble du système. Whistler-Blackcomb, modèle emblématique de ville compacte réticulée, a anticipé dès sa conception cette problématique majeure en définissant un noyau piéton de base (Whistler) et le futur besoin d’extension à travers la planification simultanée d’un second noyau présentant les mêmes spécificités urbaines piétonnes (Blackcomb). Nous verrons que cette stratégie préserve les qualités de la ville compacte sans qu’un éventuel agrandissement mette en péril le rapport « interne » entre taille et mobilité piétonne; de fait, à ce jour, les deux noyaux de Whistler-Blackcomb garantissent encore un bon fonctionnement urbain. De plus, à la différence de la station d’Avoriaz qui ferme six mois par an, cette ville canadienne présente un modèle économique qui parvient à assurer une occupation sur les quatre saisons. Cependant, nous montrerons qu’il ne suffit pas de concevoir ces « prototypes durables » pour créer la ville durable : le développement urbain peu planifié qui s’est fait ultérieurement autour de ces deux noyaux compacts contredit leur densité construite et leur mobilité piétonne, provoquant un étalement du bâti et une congestion routière alarmants. Nous ne détaillerons pas ici l’analyse urbaine du noyau de base61 mais nous proposerons plutôt une approche synthétique mettant en évidence ses spécificités.

Une planification globale initiale selon les principes d'une ville sans voitures Interdépendance entre taille, densité et mobilité piétonne La construction en 1965 des premières remontées mécaniques pour le ski et de l’autoroute 99 sea to sky marque le début de l’essor de WhistlerBlackcomb62. Le plan masse dessiné par l’architecte Eldon Back imagine une nouvelle station intégrée directement greffée sur cette infrastructure routière (schéma 1). Cette forte accessibilité, qui permet

notamment de rejoindre Vancouver en seulement deux heures, privilégie dès le début l’automobile comme principal moyen de transport. Néanmoins, même si l’accès se fait en voiture, la nouvelle urbanité est conçue selon les principes d’une ville piétonne. Rappelons le fort lien entre taille limite de l’urbanisation et parcours piéton : la longueur de Whistler et de Blackcomb confirme une donnée clé relevée dans l’analyse d’Avoriaz, à savoir que la distance à parcourir à pied ne peut excéder 1 km. Le plan de Whistler se fonde sur une artère piétonne centrale, encadrée par le bâti et délimitée aux deux extrémités par une place principale (document 1) ; la coupe schématique (document 2) résume les principes urbains qui caractérisent ce parcours. Notons la nette séparation entre les différents flux : dans la rue piétonne centrale, le marcheur ne croise jamais la voiture, même visuellement. Les flux automobiles sont directement drainés depuis le réseau routier contournant l’urbanisation jusqu’au parking souterrain de chaque immeuble, libérant ainsi la surface pour un parcours exclusivement piéton. La largeur de cet espace public et la forme des bâtiments qui le bordent sont conçues pour assurer un ensoleillement suffisant malgré la forte densité bâtie. Tout le long de ce parcours, le plan directeur impose au rez-de-chaussée un programme public de manière à offrir une animation permanente ainsi qu’une arcade continue qui protège le piéton des intempéries. Dès le début, le noyau de Whistler se veut une entité finie ; sa taille est déterminée par la distance maximale de ce parcours piéton. Conscient que la rigidité de ce plan n’autorisera aucune extension future, l’architecte prévoit parallèlement la création d’un deuxième noyau, Blackcomb (schéma 2) ; il est implanté de manière à constituer avec Whistler le point d’arrivée des deux principaux domaines skiables de la région63. Bien entendu, la position de Blackcomb s’explique également par les contraintes naturelles : il se situe sur des terrains protégés et jouxte la zone des dangers d’inondations. Ce deuxième noyau reproduit les mêmes principes urbains que Whistler à une  plus petite échelle 61 Le noyau de base de Whistler est conçu selon les spécificités d’une station piétonne dont nous avons déjà vu les principes fondateurs avec l’analyse d’Avoriaz. 62 Même si le chemin de fer desservait la région depuis 1914, le développement urbain provoqué par cette infrastructure se résumait à quelques lodges implantés le long des lacs pour accueillir en été des vacanciers ou des pêcheurs amateurs, et à quelques industries exploitant le bois et les mines. 63 Depuis 2008, les pics des montagnes des deux domaines skiables sont directement reliés par la télécabine Peak to Peak qui survole la vallée sans aucun appui au sol sur une longueur d’environ 4 km. Cette installation, dont la portée est la plus longue au monde, offre une vue inédite sur le paysage naturel et constitue aujourd’hui une attraction en soi.

125

Doc. 1 : plan Whistler-Blackcomb (en traitillé orange, le parcours piéton principal), Ecosign 2013

Doc. 2 : coupe type de l’artère piétonne principale, Ecosign 2013

Coupe 1 (2014) 126 | Whistler-Blackcomb

0

500 m

(le parcours piéton s’étend sur 750 m au lieu de 1 km). Cette « réserve » de 250 m dans le parcours n’est pas anodine : elle assure la liaison pédestre entre les deux noyaux, en continuité de leur parcours piéton interne, sans dépasser la distance limite d’un kilomètre. Précisons néanmoins que cette longueur maximale est essentiellement pensée pour rejoindre les différents départs du front de ski : en effet, la distance de l’extrémité est de Blackcomb jusqu’au dépar t des télécabines de  Whistler n’excède pas 1 km et se parcourt aisément à pied ; tout comme la distance de l’extrémité ouest de Whistler au départ des télécabines de Blackcomb. Au-delà de ces distances, par exemple pour aller de l’extrémité d’un noyau à celle de l’autre, le parcours piéton requiert un moyen de transport mécanique. Le projet prévoit un bus public gratuit, contrairement au parking public payant, afin de dissuader les habitants d’emprunter leur voiture pour aller d’un noyau à l’autre. Whistler-Blackcomb apporte donc un élément de réponse en proposant l’idée d’une ville compacte composée de deux noyaux urbains reliés par une mobilité piétonne et un transport public. Ce système fonctionne en tant que tel mais il dépend malheureusement encore des flux automobiles : si le réseau routier – emprunté parallèlement par le bus et la voiture – est saturé, la liaison entre les deux noyaux ne peut plus être assurée en transport public. Même  si une télécabine relie Whistler aux hauteurs de Blackcomb, permettant de connecter les deux urbanités par un transport à câble, elle ne constitue qu’une halte dans un parcours conçu pour rejoindre les pistes de ski. Cette idée permettrait pourtant de relier plusieurs noyaux piétons indépendamment du trafic routier. Avant de montrer comment le modèle urbain des deux noyaux initiaux est menacé par l’important étalement qui s’est produit ultérieurement tout autour, nous résumerons d’abord le modèle économique de Whistler-Blackcomb qui garantit aujourd’hui une occupation pendant les quatre saisons. Un modèle économique pensé pour une occupation à l’année Les économistes s’intéressent souvent à WhistlerBlackcomb car même s’il est construit sur un terrain de propriété publique comme 90 % des resorts américains64, il constitue un cas unique de financement réussi entre les trois paliers de l’État (fédéral, provincial et municipal). Nous ne nous attarderons pas sur les détails de cette organisation, nous résumerons plutôt la manière

dont Whistler-Blackcomb parvient à fonctionner comme une « vraie » ville, habitée toute l’année. Le plan des zones et le règlement régissant les deux noyaux initiaux ne se limitent pas à définir des principes urbains et de mobilité mais imposent également un modèle de gestion économique. Par contrainte légale intégrée dans les contrats (de vente, d’exploitation, etc.), les bâtiments projetés doivent contenir obligatoirement des hôtels, des condotels ou des condominiums65. Les résidences secondaires non louées ne sont pas autorisées de manière à ne pas avoir de lits inoccupés dans un centre qui se veut animé toute l’année. Comme la vente est soumise dès le début à ces contraintes légales, il est communément admis de mettre sa résidence secondaire en location en cas de non utilisation. Contrairement à la Lex Weber qui se  contente d’interdire le modèle économique des résidences secondaires sans questionner en parallèle la densité bâtie et la mobilité, le plan de Whistler-Blackcomb impose dès sa conception trois facteurs majeurs interdépendants : une forte densité construite, une mobilité piétonne66 et un modèle économique garantissant des lits chauds. Le business model du projet ne se limite pas à définir cette gestion du parc immobilier, il propose surtout des stratégies qui réussissent à attirer plus de deux millions de visiteurs tout au long de l’année, 50 % en « hiver » (novembre à juin) et 50 % en « été » (de juin à novembre), avec une fréquentation en constante augmentation. La proximité, par l’autoroute entre Vancouver et Whistler-Blackcomb, ainsi que la taille et la mixité de cette ville de montagne, lui permettent de regrouper des activités capables d’accueillir cette fréquentation. Le ski reste encore aujourd’hui l’une des principales attractions : le domaine skiable est le plus vaste d’Amérique du Nord, sans compter le domaine de ski freeride, deux fois plus grand. 64 Selon données de Paul Mathews (Ecosign), relevées par Laurent Vanat (2006). 65 Le condominium désigne ici une résidence secondaire, située dans un immeuble locatif, que le propriétaire doit obligatoirement mettre en location, par le biais d’une agence spécialisée, en cas de non utilisation de son bien. Le condotel est un condominium géré directement par l’hôtel : les propriétaires bénéficient de l’ensemble des services de celui-ci tout en étant chez eux. Le contrat de vente type dans la zone du centre de Whistler contraint le propriétaire à occuper son bien 28 jours en été et 28 jours en hiver, le bien étant mis en location le reste de l’année. À la différence du modèle français de l’habitat minimum, les appartements de montagne du modèle américain sont spacieux, autant que les appartements « en ville » (environ 45 m2/ personne). 66 Les immeubles de Whistler-Blackcomb ont l’obligation légale de prévoir un parking au sous-sol afin que tous les propriétaires aient une place à disposition et ne stationnent pas de façon anarchique. La surface du sol à l’intérieur des noyaux est ainsi exclusivement réservée aux déplacements piétons, la circulation en voiture y est interdite.

127

128 | Whistler-Blackcomb

Schémas 1 à 3 0

300 m

129

130 | Whistler-Blackcomb

Schéma 4 0

1 000 m

131

Les autres nombreuses activités liées à la neige sont les suivantes : ski au milieu des arbres, ski héliporté, ski de fond autour des lacs, snowscout, foxski, luge, bobsleigh, tubbing, toboganning, balades avec chiens de traineau, motoneige, escalade de glace, patinage. En été, le bike park le plus réputé au monde par sa taille et ses infrastructures (environ 120 km de pistes cyclables), attire plus de 125 000 riders. Mais Whistler-Blackcomb offre de nombreuses autres activités de plein air : randonnées (environ 40 km de chemins balisés), balades à cheval, golf, parcours aventure, observation de la faune (ours), luge d’été, escalade, chute libre, zip line, pêche au saumon sauvage, rafting, natation, bateau, kayak, etc. D’autres activités comme l’alpine coaster, zorb, thrill kart ou les sources d’eau chaude, sont praticables tout le long de l’année, sans oublier le fameux ski sur le glacier de Blackcomb qui rassemble de nombreux camps de ski et de snowboard freestyle. Des activités « urbaines » s’ajoutent à ces programmes de loisirs liés à la montagne : de nombreux festivals comme le Crankworx festival, le Telus festival et les Bulleit Bourbon Canadian National BBQ Championships pour n’en citer que quelques-uns, mais aussi des cours de langues, des cycles de conférences, des cours de yoga, etc. Ces événements se sont réinventés pour satisfaire les attentes qui ont évolué en environ 40 ans. Le site internet de la ville67 répertorie toutes les activités par mois. Il est intéressant de noter que de janvier à décembre Whistler-Blackcomb propose des évènements originaux qui attirent les visiteurs tout le long de l’année. Cette animation permanente garantit aux exploitants la rentabilité de leurs installations, équipements ou services (remontées mécaniques, cinémas, piscines, boutiques, commerces, etc.)68. Le modèle urbain et économique planifié initialement semble donc garantir encore aujourd’hui la viabilité de Whistler-Blackcomb. Cette ville de montagne constitue-t-elle alors un modèle exemplaire qui n’est pas affecté, comme Verbier, Zermatt ou Avoriaz, par la taille critique de l’urbanisation et les diverses saturations en qui en résultent ? Notre analyse révèle qu’aujourd’hui, Whistler-Blackcomb atteint elle aussi sa taille critique : ce n’est pas une conséquence directe de la viabilité des deux noyaux compacts mêmes, mais le résultat des graves problématiques induites par l’urbanisation peu contrôlée qui s’est faite ultérieurement tout autour (schéma 3). On est loin aujourd’hui de l’image initiale de deux noyaux urbains entourés par l’immense nature vierge : les lodges individuels, les routes bruyantes et polluées et la nature artificialisée caractérisent ce paysage de montagne. 132 | Whistler-Blackcomb

Un étalement urbain ultérieur peu contrôlé : Whistler-Blackcomb aujourd'hui, la fin d'un cycle  urbain ? Il est surprenant de relever que tous les plans touristiques de Whistler-Blackcomb nient l’urbanisation autour des deux noyaux initiaux : ces zones d’habitation individuelle, desservies par la voiture, sont représentées comme des zones de forêt, uniquement occupées par des sapins et des chemins. Le plan schématique 4 montre pourtant l’emprise réelle de l’étalement urbain ; si le projet initial prévoyait une forte compacité pour n’utiliser que 59 hectares de sol (Whistler 47 ha + Blackcomb 12 ha) et préserver la nature environnante, aujourd’hui 3 235 hectares sont occupés par l’étalement urbain de toute la vallée. Surtout, comme le révèlent les nouveaux plans d’utilisation du sol établis récemment par les autorités, cet étalement urbain inquiète69. Ces documents ont pour but de définir, enfin, les limites de sa croissance et permettre de répondre aux graves dysfonctionnements qu’il provoque. Les plans déterminent un périmètre limite d’urbanisation à l’intérieur duquel est prévue une réserve prédéfinie pour les futures zones résidentielles. Nos plans d’analyse synthétisent la forte contradiction qui existe entre les deux composantes de la ville actuelle ; les fondements même de la ville compacte sont aujourd’hui « annulés » par ceux de la ville étalée. Le plan des densités bâties illustre que le noyau de Whistler a une densité de 1,09, celle de Blackcomb atteint 2,39 alors qu’elle ne dépasse pas 0,20 tout autour. L’étalement urbain provoqué par cette faible densité bâtie a pratiquement proliféré jusqu’aux limites imposées par les forêts, les lacs, les rivières et les zones de danger d’inondation. Le plan des mixités permet de comprendre ce qui provoque les nombreux flux entre les zones d’habitation individuelle et le projet initial : la quasi-totalité des équipements est regroupée dans ces « centres » attractifs. Si la mobilité dans les noyaux est encore piétonne aujourd’hui, le lien avec l’étalement urbain se fait majoritairement en voiture, provoquant une importante congestion routière (plan réseau piéton et réseau automobile). Bien qu’un service de bus gratuit relie la totalité de l’étalement urbain à la ville compacte70, ce transport public s’avère inapte à desservir efficacement l’urbanisation car il emprunte le même réseau saturé. Comme les déplacements à pied ont été clairement séparés des flux automobiles dès le départ, cette saturation tout autour du noyau piéton ne perturbe pas encore sa mobilité interne mais dégrade considérablement

la qualité de vie globale (vue sur les embouteillages, promenade bruyante, pollution, etc.). Indépendamment de la voiture, précisons que le parcours piéton présente lui-même déjà quelques problèmes de fluidité dus à une trop forte fréquentation : lors des évènements majeurs, il est difficile de déambuler sur l’artère principale qui peine à contenir toute la foule. Cette saturation se retrouve également dans les équipements publics, prévus initialement pour un nombre inférieur de visiteurs. Le plan des différents types de lits montre que les deux noyaux ne contiennent que des lits chauds alors que l’étalement environnant consiste principalement en résidences secondaires exclusivement utilisées par des propriétaires privés. Comme les équipements, les services et les infrastructures de transports fonctionnent à l’année dans les noyaux, le visiteur a toujours l’impression d’être dans un centre habité, même si les maisons environnantes sont souvent inoccupées. 67 https://www.whistlerblackcomb.com/events-and-activities/events (consulté en décembre 2016) 68 Le business model d’Intrawest, entreprise qui exploite une partie des infrastructures de Whistler-Blackcomb, est fondé sur ces idées. Le cas de Mont-Tremblant constitue un autre exemple pertinent de « modèle d’attractivité » à l’année : la fréquentation «estivale» est même supérieure à « l’hivernale » ; surtout, il parvient à garantir totalement des lits chauds alors que 60 % des acheteurs sont étrangers. 69 Le WUDCA – Whistler Urban Development Containment Area – et le RMOW – zoning map – (2015) sont l’équivalent suisse du plan directeur cantonal et du plan d’affectation communal. Voir notamment: https://www.whistler.ca/municipal-gov/strategies-andplans/ocp (consulté en décembre 2016) 70 Actuellement, 40 % du trafic est assuré par le bus, soit l’équivalent d’un million de passagers par an, et 60 % par la voiture. Voir plan du réseau de bus sous: http://bctransit.com/servlet/documents/maps/1403640576590 (consulté en décembre 2016)

133

59 ha de zones à bâtir

813 468 m

2

construits

0,240 COS

1,37 de densité

0,2

de densité de l’étalement urbain 134 | Whistler-Blackcomb

Densités | Hauteur du bâti (étages)

2-3

4

5

6

7-10 10-15 >16

0

200 m

135

6,9 km

de réseau routier pour desservir 813 468 m2 construits

1 km

de distance maximale à parcourir à pied

61 km

de réseau routier pour desservir l’étalement 136 | Whistler-Blackcomb

Reseau |

Automobile

Piéton

0

200 m

137

21 %

d’équipements publics

48 % d’hôtels

31 % de logements

71 %

de logement avec étalement urbain 138 | Whistler-Blackcomb

Mixité

0

200 m

139

56 % d’hôtels

23 % de condotels

21 %

de condominiums soit

100 % de lits chauds

autour : les logements non mis en location 140 | Whistler-Blackcomb

Lits

0

200 m

141

Doc. 3 : coupe type du parcours piéton et front de neige, Ecosign 2013

Limites du prototype exportable Ce bref résumé montre comment le fonctionnement de la ville compacte est aujourd’hui déstabilisé et remis en question par le développement autorisé de la ville étalée. Cette étude de cas permet d’affirmer qu’il ne suffit pas de concevoir des noyaux durables pour garantir un aménagement du territoire rationnel. L’étalement urbain qui s’est fait autour de la ville compacte constitue sans aucun doute un exemple aberrant d’occupation du sol qui ne tient aucunement compte du contexte naturel : on retrouve à Whistler-Blackcomb le même modèle urbain, fondé sur la faible densité de la maison individuelle, que celui de nombreuses « périphéries » américaines. Cependant, si Whistler-Blackcomb arrive encore aujourd’hui à contenir l’importance croissance résultant de son succès, c’est aussi grâce aux lits créés tout autour. Avec le recul actuel, on pourrait pourtant se demander pourquoi les concepteurs et les autorités se sont contentées de définir les règles urbaines et économiques de deux noyaux compacts sans préciser l’affectation du sol autour. Le projet initial a certes le mérite de soulever et de résoudre pertinemment la question de l’extension de la taille critique viable d’un noyau piéton de base, mais il n’anticipe pas le fait que le système de deux noyaux atteindra également un jour sa limite. Même s’il semble effectivement difficile d’anticiper toute croissance au-delà de 50 ans, le projet aurait dû parallèlement définir des règles d’aménagement pour les terrains alentour. Tous les mètres carrés construits actuellement dans les zones d’habita142 | Whistler-Blackcomb

tion individuelle le long de la vallée auraient pu être contenus dans seulement trois noyaux comme ceux de Whistler-Blackcomb, en utilisant 177 hectares au lieu de 3 235 : le rapport au contexte naturel aurait été plus proche de celui imaginé initialement. L’implantation des trois noyaux supplémentaires aurait bien sûr nécessité une réflexion approfondie sur la mobilité afin d’éviter les contradiction actuelles : le parcours piéton se résume effectivement à un artifice de mobilité encerclé par les routes automobiles, et le transport public censé relier les noyaux est inefficace car il emprunte le même réseau que la voiture. Le cas de Whistler-Blackcomb permet pourtant d’énoncer l’idée d’une ville compacte réticulée, formée de plusieurs noyaux piétons et connectée par un transport public indépendamment du réseau automobile. Nous verrons dans la partie « Stratégies de densification » (pp. 196-229) comment cette piste de lecture a alimenté notre proposition de ville contemporaine. Whistler-Blackcomb soulève également une autre interrogation essentielle : est-il pertinent de concevoir un prototype qui serait transposable à différents contextes naturels ? Nous avons vu que la coupe de Whistler est une coupe type que l’on retrouve dans d’autres projets d’Ecosign71. En effet, le modèle urbain et économique de la station intégrée américaine a constitué la référence d’une grande partie des projets japonais des années 1980 et 1990, inspirant plus tard des projets chinois, coréens72, indiens, d’Europe de l’est, etc. Même si les concepteurs affirment que ces prototypes tiennent compte de facteurs climatiques

Doc. 4 : application de la coupe type « américaine » à un projet en Inde (Himalaya), Mountainworks

(ensoleillement, neige, etc.), toutes les coupes se ressemblent. Le contraste avec les coupes d’Avoriaz est saisissant : nous avons vu que ce cas ne se limite pas à appliquer un modèle théorique fonctionnel à une nature vierge quelconque mais qu’il naît de la symbiose entre un prototype urbain et un contexte naturel spécifique. Ces projets, au contraire, semblent se contenter d’appliquer tel quel ce modèle théorique à n’importe quel contexte, en se limitant à varier le « style » des façades en fonction du pays (documents 3 et 4). On retrouve l’idée d’un plan compact structuré par une artère piétonne centrale animée qui aboutit sur le front de neige où les remontées mécaniques partent vers la nature : que l’on soit en Inde ou au Canada, ces prototypes conditionnent donc une même manière de vivre la montagne, en niant les spécificités contextuelles. Cette « simplification » est possible parce que ces stations sont souvent implantées en fond de vallée sur des terrains plats et, surtout, au milieu d’une nature vierge. Ce prototype ne pourrait pas s’appliquer tel quel comme modèle de densification de la ville alpine construite. En inversant la chronologie des étapes de l’urbanisation, nous pourrions lire le cas de Whistler-Blackcomb comme un Verbier dans lequel on injecterait, sur les dernières zones à bâtir libres, des noyaux compacts autonomes, indépendants de l’urbanisation existante. Cette projection permet de comprendre que la durabilité de Verbier ne serait aucunement résolue par un système compact qui densifierait la ville en ignorant le contexte naturel et construit existant. À notre sens, c’est là que réside la principale faiblesse du prototype de Whistler-Black-

comb : on se limite encore aujourd’hui à exporter un modèle initialement conçu pour coloniser des sites intouchés, comme on l’aurait fait il y a 60 ans73; cette stratégie ne questionne pas la vraie problématique contemporaine, à savoir comment densifier la ville alpine déjà construite. Nous verrons qu’Andermatt Swiss Alps est l’application du modèle urbain fonctionnel de la ville compacte à un contexte construit et naturel spécifique. Le projet invente une infrastructure contextuelle qui lui permet de se connecter rationnellement à la ville existante ; cet ouvrage d’ingénierie civile le contextualise, le rend unique. 71 Ecosign, Intrawest et Mountainworks, parmi d’autres, sont des bureaux d’étude spécialisés dans la conception de resorts (urbanisme des « villages », plan des pistes de ski, modèle économique d’occupation à l’année, etc.). La conférence d’Ecosign à Kaoponik (Serbie) en juin 2013 présentait plusieurs projets dans des contextes très différents mais conçus selon les mêmes principes. 72 Le Daemyung resort en Corée du Sud, appelé Vivaldi Park pour bien signifier son ouverture pendant les quatre saisons de l’année, propose à son tour de nouvelles idées pour attirer une forte clientèle, par exemple le ski alpin nocturne avec ouverture des pistes jusqu’à 5 h du matin. 73 Nous nous référons ici au modèle urbain, le modèle économique n’étant plus basé exclusivement sur la pratique du ski comme il y a 60 ans.

143

ANDERMATT SWISS ALPS Densification contemporaine d’une « friche » militaire connectée à une infrastructure de mobilité

146 | Andermatt

Au 13e siècle déjà, le principal axe de mobilité nordsud de la Suisse et de l’Europe passe par Andermatt. Artère majeure pour les échanges commerciaux et les exercices militaires, de multiples infrastructures de transport et de défense nationale – routes, tunnels, galeries et fortifications – urbanisent très tôt la nature. Alors qu’en 1930, voire en 1960, de nombreux villages de montagne ne sont encore accessibles que par un modeste sentier pédestre, souvent en cul-desac, Andermatt est un lieu de passage international, desservi par une route carrossable dès 1830 et par le train en 192674. Si le fort développement d’une majorité des urbanités alpines ne se fait que tardivement lors de l’essor du tourisme de masse hivernal, multipliant en 60 ans par plus de trente la surface d’occupation du sol du noyau villageois préexistant (Verbier), celle d’Andermatt n’a fait que doubler car son agrandissement est peu influencé par le tourisme. Les ressources financières d’Andermatt sont certes assurées par le secteur tertiaire mais l’armée reste un employeur essentiel pour les habitants du village existant. En 2005, ceux-ci se retrouvent au « chômage militaire » lorsque l’armée réduit considérablement son activité ; le terrain occupé par la place d’armes et autres installations de défense perd sa fonction initiale, devenant en partie une « friche » militaire75. La réaffectation de cet espace urbain délaissé inquiète les autorités ; en  effet, contrairement à d’autres terrains de montagne convoités par les investisseurs, celui-ci n’est pas, de prime abord, un site alpin idéal. Construit sur un terrain plat à 1 444 m d’altitude, touchant le flanc de la montagne qui l’encercle sur trois côtés, Andermatt offre un panorama de fond de vallée, sans vue  plongeante, sans pente orientée au sud. Un paysage militaire, autoroutier, de rails et d’infrastructures. Des conditions climatiques alpines difficiles – 3,5°C de température moyenne annuelle, 76 jours de neige fraîche par an, 150 jours de pluie – renforcent l’austérité de ce paysage. Dans le village existant, juste à côté de la friche militaire, l’ambiance cosmopolite et le glamour ne sont pas au rendezvous.

Dans ce chapitre, nous montrerons d’abord que l’évolution d’Andermatt se comprend principalement à travers l’évolution des infrastructures de transport et militaires. Elles ont dicté le développement, mais aussi paradoxalement, le déclin de l’urbanisation. Nous rappellerons ensuite les modifications dans l’aménagement du territoire qui ont été nécessaires en amont du nouveau projet pour permettre sa construction : il en ressortira que la grande taille influence les processus de négociation76. Nous verrons enfin que le nouveau projet s’inscrit dans la continuité historique d’Andermatt en inventant une infrastructure hybride, un socle en béton appelé podium, qui permet de planifier les différents flux du site, la protection contre les dangers naturels (et artificiels) et la forte densité du bâti. Sans cette idée d’infrastructure, le projet d’Andermatt Swiss Alps n’apporterait pas de réponses innovantes aux problématiques actuelles77. L’analyse montrera que le nouveau projet est un exemple incontournable dans les débats actuels sur l’aménagement du territoire.

Pourtant, en 2006, Orascom Development Holding AG repère les fortes potentialités de cette friche militaire (et de quelques terrains disponibles dans le village existant). La société égyptienne y bâtit actuellement le plus grand projet en cours de construction dans les Alpes. Même si ce projet contemporain a une taille similaire à celle de plusieurs stations intégrées, nous verrons que son rapport au contexte est très différent : Andermatt n’est pas un artefact implanté au milieu d’une nature vierge mais un projet de densification urbaine, bâti dans une nature déjà construite et greffé sur les réseaux de mobilité préexistants.

75 Nous employons friche entre guillemets car même si une majorité des terrains occupés initialement par l’armée sont délaissés par celle-ci dès 2005, Andermatt contient toujours des infrastructures militaires : le centre de compétences du service alpin, par exemple, y est toujours présent.

Un développement urbain greffé sur les infrastructures de transport Comme dans de nombreux villages de montagne, l’implantation compacte d’Andermatt est initialement influencée par des logiques topographiques et climatiques (protection contre les vents, les dangers d’avalanches, d’inondations, etc.). Cependant, même si l’implantation du village existant répond à des contraintes climatiques similaires à celles d’autres villages traditionnels alpins, celle d’Andermatt se singularise par sa mobilité particulière. 74 Le tunnel ferroviaire du Saint-Gothard, qui passe sous Andermatt et permet une connexion souterraine entre le nord et le sud de l’Europe, date de 1882. Cependant, il faudra attendre presque 50 ans pour qu’un second réseau ferroviaire soit construit en surface et desserve Andermatt.

76 Notons que la présente étude bénéficie, pour les aspects juridiques du projet ainsi que pour l’obtention de documents sources, de la précieuse contribution du Dre Nathalie Adank (MLaw, Université de Fribourg) avec laquelle nous avons organisé un workshop alpin en février 2014 dans le cadre du programme doctoral ComplexDesign. Nous intègrerons également certains apports des intervenants qui ont participé à cette journée. 77 Plusieurs articles, notamment l’ouvrage de Kruker, R. et Meier, V. (2012), analysent de manière pertinente l’étude socio-économique.

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Les cartes historiques montrent que le village est effectivement greffé sur l’axe de transport du Saint-Gothard ; le programme bâti est organisé de part et d’autre de cette route qui sert de passage international. Celle-ci relie très tôt des « villes » entre elles et non simplement la « ville » à un « village » de montagne, en intégrant Andermatt dans cet important réseau urbain. Cette accessibilité alpine singulière ne se retrouve que dans d’autres rares cas (et avec une moindre importance) comme au Grand-Saint-Bernard ou au San Bernardino. En permettant une accessibilité en carrosse ou en diligence, la construction de la route carrossable en 1830 (schéma 1), accélère fortement le trafic commercial préexistant depuis le 13 e siècle et développe, quelques décennies plus tard, un tourisme estival de cure. Andermatt est un lieu de passage important qui regroupe au sein d’un même village maisons d’habitation, bâtiments d’élevage et commerciaux, et grands hôtels de luxe78. Les infrastructures routières sont à l’origine d’importants échanges commerciaux et touristiques, mais elles seront aussi responsables de leur déclin. En effet, la construction du tunnel ferroviaire du Saint-Gothard en 1882, privilégiant le transport souterrain en train aux dépens de la route du col qui permet de traverser Andermatt en carrosse, isole le village du nouvel axe de mobilité. Il faudra attendre presque 50 ans avant qu’Andermatt ne soit desservi par le train en surface et encore quelques décennies supplémentaires pour que l’essor de la voiture privée redonne un nouvel élan à la route. La fin du 19 e siècle marque donc le premier déclin du trafic de passage d’Andermatt mais elle donne aussi au village une nouvelle identité singulière, liée non pas au tourisme mais à la présence de l’armée. Même si Andermatt est bien avant le 19e siècle un lieu d'exercices militaires, c’est surtout à partir de 1885 que la construction d’infrastructures de défense (fortifications, place d’armes, caserne d’Altkirch, poste de commandement, arsenal, etc.) affirmera la nouvelle affectation de « village militaire ». Pendant plus d’un siècle, l’armée sera une ressource économique importante, créatrice d’emplois pour la population locale. Andermatt se situe sur un axe de défense militaire majeur, particulièrement important lors de la Seconde Guerre mondiale. De nombreux ouvrages souterrains, camouflés et imitant la nature, caractérisent discrètement mais fortement le paysage79. L’armée érige aussi d’autres infrastructures (routes, réseaux d’eau et d’électricité, etc.) qui influencent directement le développement construit des urbanités de la région et en particulier celui d’Andermatt. Andermatt devient la référence géographique de la défense nationale alpine. Les équipements militaires sont construits à l’écart de l’urbanisation existante, entre 148 | Andermatt

Doc. 1 : Andermatt sur l’axe de stratégie de défense militaire

la route et le flanc nord-est de la montagne, sur les terrains plats des zones inondables. L’arrivée du train en surface en 1926, implanté entre ces installations militaires et le village, marque une nouvelle ère dans la mobilité d’Andermatt (schéma 2). En effet, même si la localité est déjà bien connectée par la route nord-sud et ensuite par la route est-ouest, le trajet en train permet de découvrir de nouveaux paysages à différentes altitudes et d’entreprendre la construction de nouveaux ouvrages d’art pour franchir les obstacles naturels80. Il est important de rappeler que ces infrastructures de transport servent aussi à drainer l’eau des montagnes ; ce sont également des infrastructures climatiques. Andermatt exploitera ce fort potentiel touristique en transport public pour se différencier des autres urbanités alpines. La singularité des sports d’hiver d’Andermatt réside aussi dans la collaboration, dès les années 1950, entre tourisme et armée. Dans les années 1960, Andermatt est une station d’hiver connue du grand public, accessible en voiture. La sortie du James Bond Goldfinger, dans lequel S ean  Conner y sillonne les routes sinueuses du Saint-Gothard, contribue probablement à cette renommée dans le monde de l’automobile (schéma 3). Afin d’éviter le passage du trafic routier croissant à l’intérieur du village d’Andermatt, une nouvelle route nationale de contournement est construite entre la gare et les terrains militaires (schémas 4 et 5). Celle-ci joue aussi un rôle climatique important, le remblai sous l’infrastructure routière servant de digue de protection contre les crues de la Reuss. Notons que l’ouverture du tunnel routier du Saint-Gothard en  1980 se fait cent ans après celle du tunnel ferroviaire. Les différents moyens  de transport pour accéder au village – train, voiture mais aussi transport à câble pour rejoindre les pistes de skis  –  en sur face et en sous-sol, permettent à A n d e r m a t t d e s’a d a p te r, a u f il d e s a n s ,

aux changements comportementaux en termes de mobilité. Pourtant, paradoxalement, malgré la  construction de nombreuses infrastructures de transport permettant une forte accessibilité et malgré un enneigement garanti jusqu’au début du printemps, offrant des conditions optimales pour le ski, le développement urbain d’Andermatt reste relativement modeste. Si dans d’autres villages alpins, où quelques maisons et mayens accueillant à peine 300 paysans se transforment en 60 ans en une véritable ville à la montagne de 30 000 lits, la population d’Andermatt, pendant la même période, n’augmente que de 800 à 1 300 personnes81. Alors que la surface de sol occupée par le bâti de ces mêmes villages augmente de plus de trente fois (exemple de Verbier), celle d’Andermatt évolue seulement de 4 à 7 hectares (schémas 2 à 5). Ce faible développement a « préservé » Andermatt de l’étalement urbain inconsidéré provoqué par le tourisme de masse. Andermatt est greffé sur un axe de circulation international et possède un héritage patrimonial construit important82 qui ne se résume pas à quelques mayens au milieu d’une nature intouchée. Ce paysage d’infrastructures, de ciment et de roche définit les terrains militaires sur lesquels s’implante le nouveau projet d’Andermatt Swiss Alps (schéma 6, coupe 2). 78 Scheuerer, S. (2011) étudie l’hôtellerie de luxe de la région, notamment à travers la documentation du Grand hôtel Bellevue d’Andermatt (détruit en 1986) et rappelle que celui-ci est une des premières destinations attirant un tourisme de luxe dans les Alpes suisses. 79 Burkhardt, A. (2003) se consacre à la fortification AW San Carlo et permet d’appréhender l’ampleur des constructions souterraines érigées par l’armée. Voir aussi l’inventaire des ouvrages de combat et de commandement, édité en 2005 par le Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports (DDPS). 80 Le Glacier-Express par exemple, train inauguré en 1930, qui relie SaintMoritz à Zermatt et s’arrête à Andermatt, traverse 91 tunnels et 291 ponts. Aujourd’hui, le Glacier-Express comptabilise à lui seul 200 000 passagers par an. Andermatt se trouve non seulement sur l’important axe de mobilité nord-sud mais aussi sur cet important axe de mobilité touristique suisse est-ouest. 81 Le dictionnaire historique de la Suisse (2009) précise qu’Andermatt compte 605 habitants en 1799, 677 en 1850, 818 en 1900, 1 231 en 1950, 1 589 en 1970 et 1 282 en 2000. Nous n’avons pas encore additionné ici les 5 300 lits prévus par le nouveau projet d’Andermatt Swiss Alps. 82 Voir le numéro consacré à Andermatt dans la série Découvrir le patrimoine, publié en 2004 par Patrimoine suisse, ainsi que l’inventaire ISOS de l’Office fédéral de la culture (OFC). Ces deux documents permettent de saisir la richesse de l’héritage construit d’Andermatt, dont la qualité architecturale de certains bâtiments a mérité d’être préservée.

Doc. 2 à 5 : forte présence militaire, Andermatt et alentours, 1905, 1944 et photos actuelles

149

2006

150 | Andermatt

Coupe 1 0

500 m

151

Schéma 1 : 1830

Schéma 3 : 1963

Schéma 5 : 2006

Schéma 2 : 1926

Schéma 4 : 1982

Schéma 6 : 2030

152 | Andermatt

0

500 m

1830–2030 Évolution d’Andermatt Swiss Alps

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2030

154 | Andermatt

Coupe 2 0

500 m

155

Le podium : une infrastructure contextuelle comme élément clé de la planification du projet complexe d’Andermatt Swiss Alps Nous qualifions le nouveau projet de « projet complexe »83 car les expressions « station intégrée » ou « station touristique », souvent employées pour le désigner, nous semblent inappropriées. Nous insistons d’emblée sur cette distinction car elle est révélatrice de la principale caractéristique d’Andermatt Swiss Alps : son lien au contexte existant, et particulièrement aux infrastructures de transport, la distingue fortement. Une station intégrée est un projet colonisateur de ville nouvelle exclusivement dédiée au ski et nécessitant de nouvelles infrastructures de transport pour la desservir, construites au milieu d’une nature presque vierge où seuls quelques mayens d’alpage et un sentier pédestre accessible en été, souvent en cul-de-sac, trahissent la présence de l’homme à des altitudes inhabitées. L’importante rupture topographique entre la ville du ski bâtie dès 1 800 m d’altitude et le village préexistant souvent implanté plus de 500 m plus bas, condamne tout rapport direct entre les deux urbanités pensées comme deux entités distinctes. On ne demande d’ailleurs pas l’avis des quelques centaines d’habitants du village, alors que le maire, avec l’appui des autorités nationales, et un promoteur unique planifient une ville de plusieurs milliers de touristes. Là-haut, la ville artificielle, capable de dompter la nature d’altitude pendant les mois les plus rudes de l’année, s’éteint en été. Pendant plus de cinq mois, les infrastructures de transport, qui ne servent qu’à relier la ville du ski aux pistes et à la vallée habitée, sont inutilisées. Le nouveau projet d’Andermatt n’est pas une station intégrée. Initialement, le canton d’Uri propose à l’investisseur égyptien des terrains en altitude, qui offrent les qualités idéales, aujourd’hui de plus en plus rares, d’un site de montagne : nature presque vierge avec une empreinte urbaine peu importante, vue panoramique, orientation au sud, calme, isolement, etc. Malgré la possibilité d’acquérir l’un de ces sites sur les pentes surplombant la vallée, l’investisseur juge plus intelligent d’implanter le nouveau projet à Andermatt même, sur les terrains militaires délaissés, en le connectant aux infrastructures de transport existantes. Andermatt Swiss Alps est un projet de densification de l’urbanisation existante, une greffe de nouvelle urbanité, non pas sur un terminus d’infrastructures saisonnières 156 | Andermatt

Doc. 6 et 7 : Andermatt en 2006 et en 2030

à construire mais sur l’axe de mobilité existant qui relie toute l’année Zurich à Milan. Le choix de construire le nouveau projet directement sur les infrastructures de transport existantes fait la singularité d’Andermatt Swiss Alps par rapport à la station intégrée type. L’implantation en fond de vallée, à la même altitude, en vis-à-vis du village existant (coupe 3), définit un rapport au contexte très différent de celui qu’entretient la station intégrée avec l’urbanisation préexistante. Comme nous le développerons ci-après, les

infrastructures, la topographie mais aussi d’autres facteurs comme la nature, le climat ou la politique contemporaine suisse, imposent à Andermatt Swiss Alps l’obligation de prendre en compte le contexte existant. Ce projet complexe se distingue des autres appellations vues précédemment (« station intégrée », « bigness », « hybrids », etc.) par son lien au contexte existant. Le cas d’Andermatt Swiss Alps montre qu’aujourd’hui, plus de vingt ans après la parution de S, M, L, XL84, il est en effet nécessaire de réinterroger la notion de bigness car celle-ci ne peut plus se résumer à la fameuse réplique « fuck context ». À l’opposé de la théorie de Rem Koolhaas, Andermatt Swiss Alps répond par « love context » ou plutôt « must love context ». Grande taille, entre contraintes et privilèges de l’aménagement du territoire Andermatt Swiss Alps est le plus grand projet en cours de développement dans les Alpes, 365 000 m 2 construits sur une surface de sol de 30 hectares85. Les documents 6 et 7 représentent une vue aérienne de l’état d’Andermatt en 2006 et un photomontage avec l’implantation du nouveau projet. Pour permettre la construction de ce dernier, les autorités ont dû modifier l’affectation de la zone militaire non constructible en zone « touristique » constructible, ainsi que quelques terrains de la zone agricole non constructible en zone « touristique » constructible86. La taille totale de la nouvelle surface de sol à bâtir ainsi obtenue (30 ha) correspond presque au double de la surface de sol construite pendant plusieurs siècles. Le premier plan localisé de quartier (PLQ), basé sur le masterplan de Denniston de 2007 (document 9), précise l’organisation spatiale de la mixité programmatique indiquée sommairement par les différentes zones du plan d’affectation ; il définit surtout le principe de fonctionnement du podium que nous présenterons dans les paragraphes suivants. Avant l’obtention des autorisations de construire, Orascom a dû prouver la durabilité du nouveau projet. Le podium intègre donc spatialement les conditions imposées par les autorités87 : mise en place d’un système de protection des crues permettant de sécuriser la zone inondable pour qu’elle devienne constructible, bonne gestion du trafic et de l’énergie, maîtrise de l’impact sur la nature, etc. Le masterplan de 2007 propose une nouvelle compacité urbaine à la montagne, la surface au sol occupée par les villas individuelles ne représente que 4 % de la surface totale du projet, alors que dans d’autres urbanités alpines le chalet individuel occupe la grande majorité de la surface à bâtir. Pourtant, la grande taille

compacte du nouveau projet, planifiée en une fois et à la « montagne », a été fortement critiquée. La perception négative de la taille et de la densité de ce projet complexe repose sur des jugements erronés : Andermatt Swiss Alps est défini comme un projet « pharaonique », « gigantesque », « démesuré », et Verbier, par exemple, comme un charmant « village de montagne », alors que ce dernier occupe huit fois plus de surface du « précieux sol suisse »88. La synthèse comparative (pp. 188-193, et l’affiche à la fin du livre) dément ces idées reçues. 83 Un projet de plus de 100 000 m2, « situé à une échelle intermédiaire entre le fragment de ville et le mégabâtiment […] intégrant des fonctions de mobilité, d’équipements et d’activités dans des opérations à la fois compactes et de grande taille […]. » Définition partielle extraite du document de requête du laboratoire EPFL-LAMU auprès du FNS, CompleXdesign – Construire à grande échelle, thinking big, mars 2010. 84 Koolhaas, R. et Mau, B. (1995). S, M, L, XL. The MonacelliPress. Bigness, New-York, pp. 495-516. 85 Cette surface ne concerne que la zone à bâtir du nouveau projet (y.c. infrastructure parking) et ne tient pas compte du nouveau golf ni de l’extension du domaine skiable entre Andermatt et Sedrun que nous présenterons brièvement ci-après. 86 Hors de la zone constructible, l’affectation de 130 ha de la zone agricole non constructible a été modifiée en zone de golf non constructible, permettant ainsi l’aménagement d’un parcours de golf de 18 trous (zone IG sur le plan). 87 Pour la totalité des détails légaux, voir : Canton d'Uri (2006), Andermatt Tourismus Resort. Anforderungen an die Masterplannung von Seiten Kanton Uri et Canton d'Uri, commune d’Andermatt (2007), Tourismusresort Andermatt. Anforderungen an die Quartiergestaltungspläne. 88 Terme repris directement de l’initiative Sauver le sol Suisse de Franz Weber, 2008.

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villas

158 | Andermatt

podium

centre sportif

gare

hôtel The Chedi

village existant

Coupe 3 0

500 m

159

Doc. 8 : plan d'affectation des zones, commune d'Andermatt, 2009

Le financement de la totalité du nouveau projet, estimé à 1,8 milliard de francs suisses par un seul investisseur privé étranger, est aussi à l’origine de l’appréhension ressentie dans la population. Andermatt Swiss Alps AG est constituée à 51 % par l’investisseur M. Samih O. Sawiris lui-même et à 49 % par Orascom, dont M. Sawiris est l’unique président. Le succès de l’opération semble donc dépendre d’un seul homme. Si la totalité du projet n’est pas réalisée, elle laissera dans le paysage alpin un embryon urbain. La question n’est pas seulement d’ordre « esthétique » (le paysage serait dénaturé, en vis-à-vis du village existant d’Andermatt) mais elle relève aussi d’une nécessité politique, puisque l’économie de celui-ci semble dépendre totalement des emplois promis par le nouveau projet. Pour assurer sa finalisation globale, les autorités ont signé avec Orascom des « contrats d’infrastructure »89 qui définissent un échelonnement des différentes étapes de construction. Elles ne tiennent pas seulement compte de la rentabilité du programme pour l’investisseur mais lui imposent aussi la construction, selon des délais prédéfinis, 160 | Andermatt

d’équipements d’intérêt public, profitables également au village existant et à la région. Si la taille du projet complexe soumet l’investisseur à de nombreuses contraintes, elle constitue également un important levier lui permettant de négocier des exceptions aux procédures habituelles (autorisation d’un grand nombre d’hectares constructibles supplémentaires, dérogations à la Lex Koller et à la Lex Weber, rapidité d’adaptation du plan directeur et d’affectation, etc.). Les dérogations accordées, même si elles respectent le droit suisse de l’aménagement du territoire et de l’environnement90, soulèvent des questions : pourquoi la taille de ce projet complexe devrait-elle bénéficier de certains privilèges qu’un projet « ordinaire » n’obtiendrait pas ? L’élément de réponse serait précisément la taille. L’enjeu d’un projet comme Andermatt Swiss Alps n’est pas comparable à celui d’un chalet individuel : l’un est censé influencer l’économie de toute une région, donc aussi l’intérêt public, alors que l’autre ne sert que l’intérêt privé.

Doc. 9 : masterplan, base du premier PLQ, Denniston, 2007 89 En droit, le terme infrastructure comprend à la fois l’équipement au sens technique et l’équipement socio-culturel. 90 Selon la présentation de Mme Danja Brosi, juriste au sein de la direction de la justice du canton d’Uri, qui a montré les éléments constituant la base de planification coopérative.

161

1

investisseur privé pour le nouveau projet

162 | Andermatt

Investisseurs

0

200 m

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Doc. 10 et 11 : coupes indiquant l’emprise du podium, Denniston 2007

Grande taille et nécessité infrastructurelle Même si le premier masterplan de 2007 a nécessité d’importantes modifications ultérieures avant de constituer un exemple de densité qualitative à la montagne, il énonce déjà l’idée du podium comme infrastructure à la base de toute la conception d’Andermatt Swiss Alps. Nous nommons le podium infrastructure car il a bien le même rôle de support que certains ouvrages de génie civil : il répond à un besoin et à une échelle du territoire, il résout les différentes problématiques « techniques » de toute la nouvelle ville. Le podium est la « composante d’un système qui constitue une condition de possibilité préalable au fonctionnement de ce système »91 ; sans cette infrastructure qui « tient » tout le projet, Andermatt Swiss Alps ne serait pas viable. Une seule infrastructure gère les dif férentes mobilités du site, protège l’urbanisation contre les dangers naturels (inondations) et artificiels (pollution du sol), sert de socle structurel et technique commun à plus de quarante nouveaux immeubles, permet leur forte densité construite et offre un 164 | Andermatt

nouvel espace public piéton alpin. Nous analyserons dans les paragraphes suivants comment le podium résout les différentes problématiques spécifiques à la grande taille. Infrastructure, interfaces de transport et mobilité piétonne Rappelons qu’Andermatt, situé sur l’axe de transport nord-sud du Gothard (reliant Zurich à Milan) et sur l’axe est-ouest (reliant notamment Zermatt à St. Moritz), est très bien desservi par l’autoroute ainsi que par le train. Chaque jour, 81 trains desservent la gare d’Andermatt ; Zermatt, emblème alpin de l’accessibilité exclusive par le rail, ne compte que 50 trains par jour92. En moyenne annuelle, environ 5 100 voitures arrivent quotidiennement à Andermatt par la route du Saint-Gothard depuis Göschenen93. En hiver, la fréquentation moyenne en semaine est estimée à 2 500 véhicules par jour, avec des pics le week-end pouvant atteindre 7 400  véhicules par jour ; en été, la moyenne en semaine s’élève

Doc. 12 : plans schématiques indiquant l’emprise du podium, Denniston 2007

à 7 000 véhicules par jour et peut augmenter jusqu’à 16 000 voitures par jour le week-end94. Contrairement à d’autres urbanités alpines, où l’attrait du ski génère un trafic routier plus important en hiver qu’en été, la fréquentation d’Andermatt en voiture est supérieure pendant la période estivale. Cependant, par rapport à la taille du village existant, la mobilité hivernale reste malgré tout élevée. 91 Di Méo G., Infrastructure, in Dictionnaire de la géographie et de l’espace des sociétés. Lévy, J. et Lussault, M., éd. Belin, Paris, 2003. 92 Selon données des CFF et des MGB (2014). 93 Informations tirées de Verkehrsaufkommen Ist-Ausgangszustand. Schematischer Belastungsplan. Canton d'Uri. Source: données Ing. Büro Müller et compteurs cantonaux. 94 Selon données de TEAMverkehr (2014). M. Oscar Merlo, ingénieur civil EPFZ et associé du bureau TEAMverkehr

165

Doc. 13 : plan upper level, Denniston 2007

Doc. 14 : plan upper podium, Denniston 2007

Notons que le réseau routier existant d’Andermatt est jugé suffisant pour drainer le trafic actuel. La desserte singulière d’Andermatt toute l’année et sa proximité avec des métropoles importantes, à seulement deux heures en train et une heure trente en voiture de Zurich, et à un peu plus de trois heures en train et à environ deux heures vingt en voiture de Milan, caractérisent sa temporalité « urbaine »95.

7 000 à 9 800 voitures par jour). La planification de ce trafic supplémentaire a d’abord dû intégrer les exigences globales déterminées par le plan cantonal et le plan régional96, elle a ensuite défini un concept de mobilité locale qui tient compte de la desserte et du fonctionnement interne du nouveau projet ainsi que de son lien avec le village existant. Soulignons que la « taille de la mobilité » d’Andermatt Swiss Alps, notamment la construction de plus de 500 nouvelles places de stationnement, a rendu nécessaire une étude d’impact sur l’environnement (EIE)97. Avant d’obtenir le permis de construire, le nouveau projet a dû démontrer qu’il respectait les charges imposées par les autorités. Pour gérer ce trafic supplémentaire, le nouveau projet propose une infrastructure directement greffée sur le réseau routier existant et connectée à la gare. Le podium constitue ainsi l’interface des différentes mobilités du site : voiture, train, bus, télécabine, piéton. Cette densification urbaine sur les axes de transport constitue la principale singularité d’Andermatt Swiss Alps. Le premier plan masse de Denniston énonçait déjà en 2007 quelques

Les flux engendrés par le nouveau projet augmenteront significativement cette mobilité existante. Les  études de mobilité de TE AMverkehr se consacrent principalement à la gestion des flux automobiles supplémentaires car la fréquence actuelle des trains desservant Andermatt est jugée suffisante pour drainer les passagers supplémentaires accédant au nouveau projet. Le bureau technique estime que le trafic automobile augmentera de 2 900  véhicules par jour en hiver et de 2 800 en été ; le nouveau trafic doublera donc la moyenne hivernale existante en semaine (de 2 500 à 5 400 voitures par jour) et augmentera d’environ 30 % la moyenne estivale actuelle (de 166 | Andermatt

Afin de garantir l’efficacité optimale du podium esquissé en 2007, TEAMverkehr, en collaboration avec un bureau d’architecture chargé de la conception du podium, l’a redimensionné et a redéfini ses flux. Le nombre total de places de stationnement nécessaires selon les normes VSS98 doit s’élever au minimum à 1 925 et au maximum à 2 187, dont 1 679 au minimum et 1 723 au maximum regroupées dans le podium. Ces quotas ont ensuite été affinés selon des négociations propres au projet, comme la prise en compte des réclamations de certaines organisations environnementales. Le projet compte actuellement 1 970 places de stationnement, dont 1 750, soit presque 90 % de la totalité, sont contenues dans le podium99. Cette gestion des flux automobiles à l’intérieur du podium permet de libérer au-dessus toute la surface extérieure pour le parcours piéton, l’arrivée sur le site se fait en voiture ou en train mais la circulation au sein du nouveau projet est exclusivement piétonne. Le projet complexe d’Andermatt est entièrement conçu en fonction de cet espace public piéton. Le besoin de drainer tous les flux automobiles à l’intérieur de l’infrastructure découle principalement de l’idée de définir une ville piétonne et non l’inverse. Afin de garantir la continuité de la mobilité piétonne le long du nouveau programme, malgré les interruptions physiques ou visuelles produites par le contexte existant, le projet de 2007 travaille sur la variation des niveaux du podium. Doc. 15 : plan lower podium, Denniston 2007

principes généraux de fonctionnement du podium, les études de trafic de TEAMverkehr ont permis d’optimiser son efficacité en précisant la gestion des différents flux. Le plan et les coupes schématiques de Denniston (documents 10 à 12) résument l’emprise urbaine du podium. Implanté sur les anciens terrains militaires, il représente presque un tiers de la totalité des mètres carrés construits du nouveau programme. Il s’agit d’un socle en béton, non creusé dans la terre mais directement posé sur le terrain naturel, définissant ainsi un nouveau « faux sol » de référence huit mètres plus haut. L’intérieur du podium est principalement destiné à la gestion du trafic automobile. Au-dessus, une grande esplanade publique permet un déplacement exclusivement piéton au sein de la nouvelle ville. Les plans de chaque étage (documents 13 à 15) permettent de mieux comprendre le fonctionnement schématique du podium. Ce système empêche la congestion routière et les inconvénients qui en découlent, comme le bruit, la pollution, le stress des conducteurs ou l’invasion des espaces piétons par la voiture.

95 Précisons que le tunnel de base du Saint-Gothard étudiait initialement l’idée de créer un arrêt sous Sedrun : « Porta Alpina » aurait permis de relier Sedrun à Zurich et Sedrun à Milan par le train en raccourcissant le trajet d’environ une heure par rapport au parcours actuel. Andermatt aurait également bénéficié de ce projet, surtout avec les nouveaux transports à câble qui relient Sedrun à Andermatt. Voir notamment : Tunnel de base du Saint-Gothard, https://www.alptransit.ch/fr/projet.html, et Projet Porta Alpina, http://www.visiun-porta-alpina.ch/Home.29.0.html (consulté en décembre 2016) 96 Voir documents suivants : Canton d'Uri (2006), Richtplananpassung Urserntal, Erläuterungsbericht gemäss Art. 47 RPV. Canton d'Uri et S-ce (2008). Regionales Gesamtverkehrskonzept Ursern. Synthesebericht. Commune d'Andermatt et Basler+Partner (2008). Verkehrskonzept Andermatt. Schlussbericht. 97 Une étude d’impact sur l’environnement a également été imposée par la création d’un nouveau golf de plus de 9 trous. 98 Association suisse des professionnels de la route et des transports, voir notamment norme SN 240 281. 99 Les autres 130 places souterraines sont situées dans l’hôtel The Chedi ; les 90 places en surface sont majoritairement prévues pour la desserte du nouveau golf (70 places) et pour la dépose minute à la gare ou à l’hôtel The Chedi (20 places).

167

3,6 km de réseau routier pour desservir 260 000 m2 construits L’infrastructure est directement greffée sur l’autoroute existante

168 | Andermatt

Réseau automobile

0

200 m

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1 km

de distance maximale à parcourir à pied Infrastructure  =  espace public

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Réseau piéton |

Chemin piéton

Chemin piéton hors And.

Remontées mécaniques

0

200 m

171

Le sol du podium « se plie » pour passer sous l’autoroute, permettant ainsi de relier le nouveau programme disposé de part et d’autre. L’unité de la matérialité du podium crée une nouvelle continuité spatiale, une sorte de grand tapis uniformisant le sol piéton. Malheureusement, le projet de 2007 arrête le sol du podium au centre sportif et ne le prolonge pas pour inclure la totalité du nouveau programme plus au sud. La gare, par exemple, est déconnectée de ce nouveau sol public, et nécessite donc un système de transport supplémentaire pour être quand même reliée au podium. Pour éviter ces contradictions de mobilité et garantir une continuité du sol de l’infrastructure depuis la Reuss jusqu’à la gare, l’implantation du podium a été modifiée par les plans ultérieurs. La coupe schématique 3 du projet actuel résume l’évolution de l’emprise du podium et montre que ce nouveau sol public peut se suffire à lui-même pour garantir la continuité du parcours piéton le long du nouveau projet. L’implantation du podium (sous la nouvelle ville et non à côté) et sa compacité (regroupant tous les programmes et toutes les mobilités dans un espace aisément parcourable à pied) définissent une « véritable » ville piétonne (plan réseau piéton). Il est important de rappeler l’interdépendance entre la taille du projet et la mobilité piétonne. Andermatt Swiss Alps mesure d’un bout à l’autre environ un kilomètre. Le nouveau projet d’Andermatt doit déjà prendre en compte aujourd’hui son lien avec une urbanité et une mobilité existantes, « extérieures » à son système piéton de base. Le village existant peut-être lu comme un second noyau piéton, comme le Blackcomb déjà construit, auquel il faut se connecter. Si le déplacement piéton dessert aisément le nouveau programme ainsi qu’une partie du village existant encore situé dans la longueur de 1 km, il n’est cependant pas suffisant pour faire le lien avec le reste de l’urbanisation. Le concept de mobilité global prévoit la mise en place d’un nouveau transport public entre le nouveau projet et le village existant pour éviter que le lien entre les deux ne se fasse en voiture privée. Un réseau de navettes publiques permet ainsi aux habitants d’Andermatt d’accéder sans peine aux nouveaux équipements (centre sportif, commerces, golf, etc.) et inversement, les résidents du nouveau projet peuvent bénéficier du programme présent dans le village existant. Infrastructure et protection contre les risques naturels Le podium ne se résume pas à une simple infrastructure de mobilité, gérant les différents flux de la nouvelle ville, mais constitue également une infrastructure climatique, protégeant le nouveau projet 172 | Andermatt

contre les risques naturels et intégrant dans sa conception d’autres spécificités alpines naturelles comme la neige. Même s’il est implanté sur un terrain presque plat en fond de vallée, Andermatt est bien une urbanité alpine. En effet, le nouveau projet se distingue des projets complexes « en ville » par ses spécificités climatiques : l’altitude, les risques naturels, les chutes de neige, l’intensité lumineuse, la vue, les types de végétation, etc. ne sont pas les mêmes qu’à Sion, Brigue ou Ilanz. La vallée d’Urseren, dont Andermatt est le dernier village à l’est, est d’abord caractérisée par un risque d’inondation important. Le plan détaillé des risques d’inondation existant à Andermatt, selon le HQ 100100 (document 16), montre que les terrains militaires sur lesquels s’implante le nouveau projet sont majoritairement situés dans une zone de danger bleue, non constructible sans la mise en place d’éléments de protection contre les crues. Si l’autoroute et le talus bâti dessous constituent une digue de protection efficace pour une partie du village existant, leur position au sud de la place d’armes ne protège pas les terrains militaires. Afin de rendre le sol de l’armée constructible, le projet complexe d’Andermatt s’inspire du savoirfaire alpin local qui utilise les infrastructures de transport également comme système d’évacuation de l’eau. Le podium, infrastructure hybride, crée une nouvelle digue protégeant la totalité de l’ancienne place d’armes. Le nouveau projet détermine la hauteur des murs du podium de manière à ce que ce socle en béton puisse résister aux inondations : ses dimensions verticales sont presque les mêmes que celles du talus situé sous l’autoroute. En cas d’inondations extrêmes, avec des débits d’eau supérieurs à ceux prévus à ce jour, le podium pourrait également agir comme bassin de rétention de l’eau. Pour atténuer les effets des crues, des mesures de sécurité complémentaires ont été également prises directement sur la rivière (élargissement du lit, rajouts d’agrégats et remblais sur les bords agissant comme des petites digues, etc.). De plus, une distance de sécurité supplémentaire, créant une plus grande zone de danger rouge inconstructible, entre la rivière et la zone à bâtir, offre un espace de débordement naturel plus large, diminuant ainsi le débit de la rivière. Après toutes ces mesures (document 17), le plan des dangers d’inondation révèle que l’ancienne place d’armes est désormais une zone hors risques, non sujette aux inondations. Andermatt n’a malheureusement pas su exploiter les potentialités spatiales et programmatiques d’une infrastructure que l’on pourrait habiter. Néanm oins, m êm e si le n o uve au projet man que « d’architecture », les réflexions techniques sont astucieuses : l’idée de combiner infrastructure

Doc. 16 : risques d'inondation dans la zone du podium, HQ 100 (avant projet), Basler Hofmann

Doc. 17 : risques d'inondation dans la zone du podium, HQ 100 (après projet), Basler Hofmann

de transport et infrastructure de protection des dangers naturels avec urbanisation est novatrice. Le podium constitue également une protection contre les dangers artificiels (contamination du sol). Les terrains cédés par l’armée, notamment la place d’armes, sont en partie pollués par les anciennes activités militaires. Sur les 6 000 tonnes de matériaux contaminés répertoriés, 3 500 ont été évacuées à ce jour et 2 500 stockées pour être réutilisées au sein du nouveau projet101. La construction du podium directement sur le sol naturel, sans creuser dans la terre, ne présente pas seulement une importante économie de coûts de fouilles mais permet également de simplifier les travaux de dépollution. Précisons que même si la conception du podium n’a pas eu à intégrer d’autres dangers naturels, il est néanmoins soumis à de fortes chutes de neige et à d’autres conditions climatiques hivernales particulièrement rudes à Andermatt : 184 jours de neige glissante par an, 76 jours de neige fraîche, des chutes de neige pouvant atteindre jusqu’à 200 cm par jour, 169 jours avec une température inférieure à 0° C et une température annuelle  moyenne de seulement 3,5° C, un ensoleillement limité

à 1 435  heures par an, de fortes rafales de vent dépassant les 208 km/h à Gütsch102 (au-dessus d’Andermatt, à 2 332 m d’altitude). Le podium intègre ces contraintes climatiques, notamment par la gestion de la mobilité du nouveau projet. En canalisant tous les flux automobiles à l’intérieur de l’infrastructure, à l’abri des intempéries, ce trafic n’est pas perturbé par la neige. La maîtrise de la mobilité automobile permet de garantir, même en hiver, la qualité des parcours piétons. Au-dessus du podium, non touchée par les voitures, la neige reste un élément « esthétique », fraîche, blanche et propre, offrant un grand tapis blanc pour les déplacements exclusivement piétons. Cet espace public majeur, vers lequel sont orientés les nouveaux commerces, restaurants, arrêts des transports publics, centre spor tif, etc., est animé par les déambulations piétonnes. Andermatt Swiss Alps juge la forte densité du bâti sur le podium suffisante pour constituer un « dispositif de protection » hivernal efficace. Comme dans les villages alpins traditionnels, la compacité du nouveau projet crée une sorte de très grand bâtiment qui permet un déplacement à pied, presque ininterrompu, à l’abri des intempéries. La taille en plan de la partie centrale du podium, au nord de l’autoroute, est presque la même que celle du noyau historique du village existant, où les déplacements se font effectivement à pied tout le long de l’année. Si la nature au sein de nombreuses villes alpines se résume principalement à une agglomération de jardins individuels privatisés, le nouveau projet d ’A n der m at t e st c ar a ctér isé p ar un e se ule grande étendue minérale et publique. Le podium se déforme en plan et en coupe pour créer différentes séquences d’espace public définissant des relations spécifiques avec la nature du projet et la nature environnante (plan natures). 100 Plans remis par M. Beat Hodel, responsable de la section « environnement » au sein du bureau technique Basler Hofmann. HQ 100 est un indicateur de débit de crue survenant tous les 100 ans (en m3/s) ; il permet d’estimer le retour de l’événement constituant un danger et, notamment, d’anticiper les mesures nécessaires pour sécuriser une zone à bâtir. 101 Données fournies par le bureau technique Jäckli Geologie à Zurich, chargé d’évaluer la pollution existante des terrains militaires où s’implante le nouveau projet et le golf. 102 Données extraites des Normes climatologiques Andermatt, Office fédéral de météorologie et de climatologie MétéoSuisse.

173

83 %

de la surface à bâtir se trouve dans d’anciennes zones inondables, avant la construction de l’infrastructure de protection

174 | Andermatt

Dangers naturels |

Danger avalanches

Danger inondations

0

200 m

175

Infrastructure = espace public minéral

176 | Andermatt

Natures |

Forêts

Pâturages

Nature artificielle

Golf

Pierres

0

200 m

177

Même si le projet complexe est construit en fond de vallée, son lien avec la nature est fort : les transports publics ouverts toute l’année permettent d’accéder à la nature d’altitude en toutes saisons, qualité très rare à la montagne, offrant ainsi des nouvelles temporalités alpines. Le nouveau projet se concentre encore trop sur la promotion des avantages climatiques hivernaux de la région, en vantant le fort enneigement garanti qui classera le nouveau domaine skiable Ski Arena parmi les plus attractifs du pays, alors que l’accessibilité « verte » à l’année depuis le podium permettrait d’inventer de nouvelles activités alpines liées aux différentes saisons et pas uniquement à la saison hivernale103. Le nouveau projet pourrait par exemple proposer une autre temporalité du lien entre tourisme et armée, non seulement basée sur les sports d’hiver mais aussi sur la visite des bunkers aux alentours d’Andermatt. Il pourrait aussi combiner tourisme et sensibilité écologique, en imaginant des visites menées par les scientifiques ayant conçu le plus haut parc éolien d’Europe à Gütsch104. Surtout, le nouveau projet prend en compte la nature en la protégeant de l’étalement urbain, en définissant une forte densité alpine d’un nouveau genre. Infrastructure, nouvelle densité alpine et lits chauds La concentration des flux automobiles à l’intérieur du podium libère au-dessus un grand sol continu, disponible exclusivement pour la circulation piétonne et l’implantation du bâti. L’absence de voitures permet une forte compacité du plan. Le masterplan de 2007 énonçait déjà quelques principes d’implantation sur le podium. La coupe transversale sur sa partie centrale (document 11) exprime une dégression de la hauteur du bâti pour lier progressivement la « ville » à la « nature ». Avec le nouveau projet, on passe d’une forte hauteur (podium + huit étages) côté autoroute à une faible hauteur (deux étages) côté flanc de montagne. Cette première coupe semble exprimer une idée de densité bâtie en fonction du contexte existant, tantôt très serrée et urbaine côté réseaux de transport, tantôt espacée et verte côté Reuss et golf, mais l’implantation en plan est difficile à comprendre. Présentant de fortes lacunes, ce premier plan masse a été refusé par la commission des constructions. Des concours, workshops et autres procédures ultérieures ont été organisés par le maître de l’ouvrage afin d’améliorer la qualité du plan. Le centre est désormais défini par un ensemble urbain plus uniforme et ordonné, composé de 21 bâtiments, hauts de quatre à cinq étages et regroupés en sept îlots. La forme biaisée des immeubles et leur regroupement sont déter178 | Andermatt

minés pour permettre des relations visuelles avec le paysage du flanc de la montagne au nord, mais également pour définir des vues est-ouest sur la densité construite. Ces percées permettent également à la lumière de pénétrer dans toutes les façades et tous les espaces publics malgré la grande compacité et la profondeur du plan. Cette forte emprise au sol (0,61) et la forte densité bâtie (2,4), dessinées en fonction du contexte, caractérisent la partie centrale du podium. Il en résulte des relations spatiales singulières : on a la vue sur la pierre et le bois de la façade voisine, on marche dans des ruelles étroites, formées et encerclées par les volumes massifs du bâti, on sent le climat à travers la membrane construite du plan masse. Ce lien avec la densité bâtie est similaire à celui ressenti dans les villages alpins traditionnels où les habitations sont construites très proches les unes des autres pour produire un ensemble compact capable de se protéger rationnellement du climat. Notons que la taille du centre du podium et celle du village historique d’Andermatt sont très similaires (documents 18 et 20). Même si la densité bâtie sur la partie centrale du nouveau projet est plus de deux fois supérieure à celle du noyau existant, et bien que la largeur des rues et la hauteur du bâti soient aussi plus grandes, les proportions du vide et les espaces publics qui en résultent se ressemblent (documents 19 et 21). La densité moyenne du nouveau projet est de 0,87 : 260 000 m2 construits sur 30 hectares de sol à bâtir et de 1,22 si l’on prend en compte la surface du podium, soit un totval de 365 000 m2 (plan densités). La compacité en plan et les hauteurs de bâti maximales sont supérieures à celles de nombreuses villes alpines, définissant une nouvelle densité qui ne se résume pas majoritairement à la faible densité du chalet individuel. L a dé gression des hauteur s du bâti depuis l’autoroute jusqu’à la Reuss lie graduellement les programmes publics, côté bruyant, aux programmes individuels privés, côté calme et naturel. Entre les deux prend place la zone dense d’habitations collectives. Le projet complexe d’Andermatt regroupe en un seul site une gare de trains et de télécabines, un parking pour 1 970 voitures, un centre spor tif, un centre de congrès, des commerces, six hôtels, 42 immeubles regroupant environ 490 appartements, 25 villas, ainsi qu’un golf 18 trous (plan mixités). Ce programme tient d’abord compte du fort potentiel de mobilité d’Andermatt mentionné précédemment. Le nouveau projet complexe est souvent désigné comme une station touristique ou un village de vacances alors que sa mixité programmatique et sa mobilité le définissent, à notre sens, comme une véritable ville, avec des programmes

« urbains » et une temporalité « urbaine ». Le nouveau programme n’est pas exclusivement déterminé pour répondre aux besoins d’un resort isolé au milieu de la nature vierge, mais prend également en compte son lien avec le village existant dans lequel il s’insère, et, à plus grande échelle, avec la « ville ». 103 Le recul alarmant du glacier de Gurschen (au-dessus d’Andermatt) a nécessité en 2005 la mise en place de bâches pour contenir sa fonte. 104 Le village existant d’Andermatt exploite les spécificités climatiques de la région. L’énergie produite par les éoliennes de Gütsch depuis 2004 est passée en 10 ans de 150 000 kWh/an à 5 388 769 kWh. Voir données de l’Office fédéral de l’énergie : https://api3.geo.admin.ch/ rest/services/ech/MapServer/ch.bfe.windenergieanlagen/facility_GUE/ extendedHtmlPopup?lang=fr (consulté en décembre 2016).

Doc. 18 à 21 : zone centrale du podium, 2012, et place du village existant, 1905

179

Les nouvelles infrastructures de transport concentrées au sein du podium (parking et gare), qui permettent de relier le nouveau projet aux réseaux de transports existants, représentent 30 % de la totalité du nouveau programme. Ce pourcentage élevé rappelle l’importance de la gestion de la mobilité au sein du projet. Les équipements, qui en occupent 10 %, ont été également définis pour répondre au programme manquant du village existant. Les négociations entre l’investisseur et les autorités locales ont permis aux habitants d’Andermatt de bénéficier de nouvelles infrastructures (gare, infrastructure de protection contre les dangers) et de nouveaux équipements (centre sportif, centre de congrès, etc.), payés par un investisseur privé alors qu’ils sont usuellement financés par la commune. Cette coordination entre le nouveau projet et le village existant se retrouve également dans les autres parties du programme. Les nouveaux logements et hôtels correspondent à un standing de quatre et cinq étoiles, complétant ainsi l’offre déjà présente composée surtout de lits deux et trois étoiles ; même les menus des restaurants ont été faits pour que le nouveau projet ne concurrence pas les services du village existant. Andermatt n’est pas exclusivement une destination pour « riches étrangers », comme on le lit souvent dans la presse, mais une ville alpine regroupant une clientèle aisée et la clientèle existante, plus modeste. Mis à part les hôtels, qui occupent 20 % de la totalité du programme, tous les autres logements, représentant 40 %, sont exclusivement pensés comme des résidences secondaires. Le nouveau projet propose une gestion inédite de celles-ci (plan lits) : sur la totalité des 5 300 lits, environ 34 % sont hôteliers, 33 % se situent dans des résidences secondaires mises en location à travers les hôtels ouverts à l’année et seulement 33 % sont en résidences secondaires non louées. Le nouveau projet compte plus de 67 % de lits chauds. Dès sa conception en 2006, bien avant la votation populaire de l’initiative de Franz Weber en mars 2012, Andermatt proposait déjà une gestion des lits inspirée du modèle américain des « condominiums ». Si la stratégie économique d’Orascom est louable (construire et exploiter, et non pas seulement construire et vendre), précisons néanmoins que contrairement au modèle dont il s’inspire, le contrat de vente des appartements du nouveau projet n’impose aucune obligation légale contraignant le propriétaire à mettre son bien à disposition des hôtels. La mixité programmatique sur le podium conçue par ces différents bureaux s’accompagne d’une multitude de langages architecturaux, créant un « Disneyland alpin » hétérogène (documents  22 180 | Andermatt

à 25). Aujourd’hui, certains experts affirment que la grande taille n’est acceptée par l’opinion publique que si elle propose une diversité d’architectures permettant d’éviter un langage unique. La peur d’une unité prétendument totalitaire conduit à un agglomérat d’architectures disparates et exubérantes qui peinent à former un projet cohérent. Des projets comme Avoriaz, Flaine ou les Arcs, conçus par un seul bureau d’architecture ou un consortium limité de moins de cinq architectes, démontrent pourtant qu’un grand projet peut affirmer une unité sans être un projet totalitaire : chacun des bâtiments a sa particularité tout en créant un ensemble uniforme, un langage architectural cohérent. Andermatt Swiss Alps est radical dans sa proposition infrastructurelle mais son architecture peine à égaler l’idée fondatrice du projet.

Doc. 22 à 25 : différentes densités du projet

Andermatt en 2030, la fin d’un cycle urbain ? Le podium est une condition sine qua non pour garantir le bon fonctionnement du projet complexe d’Andermatt. Cette infrastructure unique permet de regrouper la gestion des différentes mobilités du site, la protection contre les risques d’inondation, et la définition d’une nouvelle forte densité alpine (voir coupe 3). L’organisation et la compacité du plan induites par le podium définis-sent un nouveau rapport à la nature d’altitude : comme le révèlera la synthèse comparative des différents cas étudiés, la faible occupation du sol et l’absence de flux automobiles au sein du nouveau projet (desservi par un grand sol public exclusivement piéton) préservent mieux le paysage que la ville alpine étalée, faite au coup par coup par simple multiplication de chalets individuels et de réseaux routiers pour la voiture. Notre propos n’est pas d’affirmer qu’il faut uniquement urbaniser les Alpes par de grands projets compacts conçus en une fois, mais plutôt de relever que la greffe de ces nouvelles urbanités sur les axes de mobilités majeurs et existants sont une piste de densification intelligente. La stigmatisation de l’urbanisation n’est pas une réponse convaincante à la problématique actuelle du mitage du paysage. Le projet complexe montre qu’il est possible, voire souhaitable, de construire grand, dense et durable ; construire grand et protéger la nature. La dimension du nouveau projet n’est pas le fruit du hasard mais correspond à une taille permettant de maîtriser son évolution urbaine et économique Comme le rappelle M. Sawiris105, la friche militaire d’Andermatt constitue une chance inouïe : elle lui permet non seulement d’appliquer ses principes d’acquisition, à savoir acheter des terrains sans valeur nécessitant peu d’investissement, mais elle a également la particularité d’être très bien desser vie par les infrastructures de transpor t existantes. M. Sawiris acquiert des terrains sans valeur et leur en donne en construisant le projet complexe ; en d’autres mots, il réussit à s’assurer le monopole d’Andermatt. En effet, si la taille du projet est déterminée par des raisons urbaines, elle correspond aussi à une taille d’investissement souhaitée par l’investisseur. La grande taille du projet complexe d’Andermatt permet de bloquer toute création de nouvelle zone à bâtir autour. La non-constructibilité des terrains autour du nouveau projet garantit à M. Sawiris le contrôle du développement immobilier d’Andermatt et de toute la vallée. Si après la construction d’Andermatt Swiss Alps il reste encore quelques terrains constructibles dans le village existant, leur taille est insuffisante pour pouvoir rivaliser avec le même segment de

marché que celui contrôlé par le nouveau projet. Il en va de même avec les résidences secondaires. Comme tout le développement urbain autour du nouveau projet est d’ores et déjà gelé, la taille du projet complexe restera par défaut la même et son fonctionnement ne sera donc pas mis en péril. Cependant, si la non-constructibilité du sol autour du nouveau projet semble résoudre actuellement la question de sa taille limite, il serait naïf de prétendre que cela suffit pour garantir la durabilité du projet à long terme. Qu’adviendra-t-il dans 50 ans, ou même avant, si le contexte politique change et réclame par exemple de nouveaux terrains constructibles dans les Alpes ? Andermatt Swiss Alps sera-t-il confronté, comme le sont actuellement plusieurs villes alpines développées depuis les années 1960, à la délicate question de la fin de son cycle de vie ? La taille limite du projet complexe d’Andermatt est déterminée, comme à Avoriaz ou à WhistlerBlackcomb, par la longueur maximale de 1 km qu’un piéton peut parcourir. Cependant, même si la taille du nouveau projet est conçue comme une taille « finie », son lien avec la mobilité existante permet de prolonger son cycle de vie au-delà de sa propre taille limite. Andermatt Swiss Alps n’est pas pensé comme une bulle isolée, efficace et autosuffisante au milieu de la nature vierge, où tout changement de taille implique une remise en question de cette entité autonome, mais comme une bulle en lien avec le contexte existant. La mobilité piétonne n’est pas seulement conçue en fonction de la longueur limite du nouveau projet, elle est également pensée en lien avec les transports publics desservant le village existant et les autres urbanités. Toute future densification ou extension du projet complexe d’Andermatt devra se faire en utilisant le point de départ du projet actuel : son lien avec le fort potentiel de la mobilité existante. La ville durable n’est pas forcément une seule entité compacte mais sera peut-être constituée de plusieurs noyaux de base compacts reliés entre eux par le train ou la télécabine existants. Une ville réticulée tenue par des transports publics « verts ». Andermatt Swiss Alps démontre que les infrastructures de mobilité sont un élément clé de la nouvelle densification urbaine en montagne. 105 M. Samih Sawiris, président d’Orascom Development Holding  AG, a exposé sa stratégie économique et de gestion du projet complexe d’Andermatt lors du workshop alpin du 20 février 2014 cité précédemment.

181

30 ha de zones à bâtir

260 000 m

2

construits

0,250 COS

0,87 de densité

2,4

de densité maximale sur l’infrastructure 182 | Andermatt

Densités | Hauteur du bâti (étages)

2-3

4

5

6

7-8

0

200 m

183

30 %

d’infrastructures de transport

10 %

d’équipements publics

20 % d’hôtels

40 % de logements

184 | Andermatt

Mixité

0

200 m

185

34 % d’hôtels

33 % de condotels

33 %

de logements non mis en location soit

67 % de lits chauds

186 | Andermatt

Lits

0

200 m

187

SYNTHÈSE COMPARATIVE DES CAS Verbier, Zermatt, Avoriaz, Whistler-Blackcomb, et Andermatt Swiss Alps

188

Il apparaît qu’en dépit de leurs spécificités propres et pour diverses raisons, ces exemples sont aujourd’hui confrontés à une problématique a commune : pour la première fois dans l’histoire de l’urbanisation alpine, le modèle de la ville étalée et celui de la ville compacte atteignent simultanément leur taille limite viable. Cette analyse a permis, à travers des dessins à la même échelle, comparant les mêmes paramètres choisis, de mettre en évidence quelques données clés récapitulées dans le tableau ciaprès (pp. 192-193). Ce tableau résume schématiquement l’irrationalité du modèle de la ville étalée et vient compléter les diverses saturations mises en évidences par l’analyse de chaque cas. La lecture croisée de ce document permet, entre autres, de montrer que le projet complexe d’Andermatt Swiss Alps, qualifié par les médias de « gigantesque » ou « pharaonique » est le modèle le plus rationnel et qui porte le moins préjudice à la nature d’altitude. La comparaison d’Andermatt Swiss Alps avec le « village » de Verbier, par exemple, révèle qu’en prenant en compte le même nombre de mètres carrés construits : – Verbier est plus de deux fois moins dense, six fois moins dense que le bâti du podium. – Verbier contient 60 % de chalets sur la totalité des mètres carrés construits, Andermatt Swiss Alps seulement 4 %. – Verbier nécessite quatorze fois plus d’infrastructures routières. – À Verbier, 41 % de la surface bâtie se trouvent dans une zone de danger, des milliers d’infrastructures privées sont nécessaires pour protéger les chalets des crues, alors qu’à Andermatt Swiss Alps une seule infrastructure protège la totalité du programme, aucune des nouvelles constructions ne se trouve dans une zone de danger. – Verbier compte deux fois plus de logements, cinq fois moins d’hôtels et deux fois moins d’équipements. – À Verbier, seulement 5 % des résidences secondaires sont mises en location contre 50 % à Andermatt Swiss Alps. Surtout, ce tableau illustre que la montagne ne peut pas être pensée avec une solution unique : chaque cas est spécifique et nécessite une réponse contextuelle.

189

VE ZE AV WH AN comparatif duZE pourcentage AV d'hôtels, proportionellement VE WH AN aux m2 construits comparatif du pourcentage d'hôtels, proportionellement aux m2 construits

VE ZE AV WH AN Limite de l'extension du bâti,AV comparatif du pourcentage VE ZE WH AN des surfaces totales dans zones de danger Limite de l'extension du bâti, comparatif du pourcentage des surfaces totales dans zones de danger

VER

ZER

AVO

WHI

VE ZE AV WH comparatif occupation du sol par le bâti

AND

VE ZE VE ZE AV WH AN Densité du bâti comparatif de la quantité de logements proportionellement VE ZE aux m2 construits Densité du bâti Densité du bâti

AN

VE ZE AV WH AN comparatif de la quantité de logements proportionellement aux m2 construits

Comparatif de l’évolution du bâti d’avant l’industrialisation du ski, jusqu’en 2015

VE ZE AV WH comparatif occupation du sol par le bâti

VE ZE AV WH AN Limite de l'extension du bâti, comparatif du pourcentage des surfaces totales dans zones de danger VER

ZER

AVO

WHI

AND

VE ZE AV WH AN Limite de l'extension du bâti, comparatif du pourcentage des surfaces totales zones de dans danger Comparatif du pourcentage de dans la surface bâtie totale les zones de danger

VE VER

= Verbier ZE Densité du bâti

ZER

VE ZE Densité= Avoriaz du bâti

WHI

AND

VER

ZER

AVO

WHI

AND

VEWH ZEAN AV VE WH ZE AN AV WH AN VE WH ZE AN AV comparatif duZE pourcentage AV d'équipements publics, comparatif de la quantité de logements proportionellement comparatif occupation WH AN du sol par le bâtiVE WH AN 2 proportionellement aux m2 construits construits aux mpublics, Comparatif du pourcentage de logements proportionellement aux m2 construits comparatif du pourcentage d'équipements 2 proportionellement aux m construits VE ZE AV WH comparatif occupation du sol par le bâti

AN

VE ZE AV WH AN comparatif de la quantité de logements proportionellement aux m2 construits

VE ZE AV WH comparatif occupation du sol par le bâti

AN

VE ZE AV WH AN comparatif de la quantité de logements proportionellement aux m2 construits

VE ZE AV WH AN Limite de l'extension du bâti, comparatif du pourcentage des surfaces totales dans zones de danger

VE ZE AV WH AN comparatif du pourcentage d'hôtels, proportionellement aux m2 construits

VE ZE AV WH AN ZER AVO WHI AND VER 2 comparatif des kml pour desservir les m construits VE ZE AV WH AN VE WH ZE AN AV WH AN VE ZE AV comparatif du pourcentage d'hôtels, proportionellement de l'extension du bâti, comparatif du pourcentage comparatif des kml pour desservir les Limite m2 construits 2 aux m2 construits des construits totales dans zones de danger Comparatif des km de routes nécessaires pour desservir les msurfaces

VE ZE AV WH AN comparatif du pourcentage d'hôtels, proportionellement aux m2 construits Comparatif du pourcentage d’hôtels proportionellement aux m2 construits

VE ZE AV WH AN Limite de l'extension du bâti, comparatif du pourcentage des surfaces totales dans zones de danger

VE ZE AV WH AN comparatif du pourcentage d'hôtels, proportionellement aux m2 construits

VER

ZER

AVO

WHI

AND

WH

AN

VE ZE AV WH comparatif du pourcentage d'équipements publics, proportionellement aux m2 construits

AN

VE ZE Densité du bâti

AV

WH

AN

VE ZE AV WH comparatif du pourcentage d'équipements publics, proportionellement aux m2 construits

AN

AV

WH

AN

VE ZE AV WH comparatif du pourcentage d'équipements publics, proportionellement aux m2 construits

AN

VE ZE Densité du bâti

AV

WH

AN

VE ZE AV WH comparatif du pourcentage d'équipements publics, proportionellement aux m2 construits

AN

VE ZE Densité du bâti

AV

WH

AN

VE ZE AV WH AN comparatif du pourcentage d'équipements publics, 2 Comparatif du pourcentage d’équipements publics proportionellement aux m construits proportionellement aux m2 construits

WHI

= Whistler-Blackcomb

WHI

= Whistler-Blackcomb + étalement alentours

AND

= Andermatt Swiss Alps

AND

= Andermatt Swiss Alps (seulement « podium »)

190 | Synthèse comparative des cas

VE ZE AV WH AN comparatif du pourcentage d'hôtels, proportionellement aux m2 construits

AVO

AV AV

AV

= Zermatt

AVO

ZER

VER

AN

VE ZE AV WH comparatif des kml pour desservir les m2 construits

AN

VE ZE AV WH comparatif des kml pour desservir les m2 construits

AN

VER

ZER

AVO

WHI

AND

DIAGRAMMES COMPARATIFS

Carte comparative insérée au dos de la couverture de cet ouvrage

191

Altitude de référence

Topographie

Vue

Occupation des sols

avant l'industrialisation du ski (1935 ou 1950) en 2015

Mètre carrés construits

Densité bâtie totale

Chalets individuels sur la totalité des m 2 construits Bâti sur zone de dangers naturels

Réseau viaire automobile

Réseau viaire piéton

Type d’investissement

Mixité programmatique

Résidences secondaires

192 | Synthèse comparative des cas

logements hôtels équipements publics dont louées (lits chauds) dont non louées (lits froids)

VERBIER

ZERMATT

AVORIAZ

WHISTLERBLACKCOMB (et étalement)

ANDERMATT SWISS ALPS

1 500 m

1 608 m

1 800 m

668 m

1 444 m

«plateau» 680 m au-dessus de la vallée

fond de vallée

«plateau» 1 000 m au-dessus de la vallée

fond de vallée

fond de vallée

sommets 4000 m

fond de vallée et sommets 4000 m

sommets

fond de vallée

fond de vallée

5 ha 235 ha

18 ha 185 ha

0.1 ha 41 ha

0 ha 59 ha (310 ha)

0 ha 30 ha

963 000 m2

1 135 360 m2

290 000 m2

813 460 m2

260 000 m 2

0,40

0,61

0,71

1,37

(0,2)

0,87

60 %

40 %

3%

0%

(90 %)

4%

41 %

38 %

6%

80 %

0%

48 km

35 km

0,6 km

6,9 km (61 km)

0,9 kml

discontinu

discontinu

continu

continu (discontinu)

espace public continu

investisseurs privés, au coup par coup

investisseurs privés, au coup par coup

1 investisseur privé planifié (initial)

investisseurs public-privé (planifiés) (privés)

1 investisseur privé planifié

90,30 % 4,80 % 4,90 %

69,50 % 17,60 % 12,90 %

81,50 % 2,00 % 16,50 %

31 % 48 % 21 %

40 % 20 % 10 + 30 %1 = 40 %

> 60 % 4% 96 %

> 40 % – –

81,5 %2 35 % 65 %

31 % (71 %) 100 % (env. 5 %) 0% (env. 95 %)

(1) infrastructures

(2) y.c. résidences de tourisme

(71 %) (20 %) (9 %)

40 % 50 % 50 % 193

STRATÉGIES DE DENSIFICATION Infrastructures alpines contextualisées

196

Aussi contradictoire que cela puisse paraître de prime abord, nous verrons que le fait d’urbaniser la montagne, en densifiant la ville construite, permettra de préserver durablement les territoires encore « vierges » ; à l’inverse, la dé-densification ne garantirait aucunement leur protection. Bien entendu, il ne s’agit pas de continuer à urbaniser toutes les zones à bâtir restantes dans les Alpes en se contentant de déguiser le chalet individuel en hôtel ou tout autre type de logement autorisé par la Lex Weber. Conscients de l’enracinement du mythe alpin dans nos esprits et de l’extraordinaire succès économique du chalet individuel qui en résulte, nous montrerons pourtant que la pérennité de la ville alpine, et donc la résolution des diverses saturations analysées dans les chapitres précédents, réclame un néotype urbain : des infrastructures habitées regroupant programme habitable et transport public connecté aux axes de mobilité existants. Bien plus, ce modèle d’urbanisation établira un nouveau rapport avec le contexte naturel, même au sein de la ville, en essayant de remplir cette double exigence à laquelle le chalet n’a pas su répondre : satisfaire le désir de vivre au grand air, en « harmonie » avec la nature, sans en même temps la détruire. Afin d’expérimenter, par le modus operandi, la taille maximale viable de cette densification, le projet se concentrera sur le cas de Verbier étudié précédemment. Le but de notre recherche appliquée n’est pas uniquement de montrer comment résoudre la saturation de cette ville alpine, ni, à l’opposé, de prétendre qu’il est possible d’imaginer à partir de ce cas précis un prototype exportable car le projet répond spécifiquement au contexte naturel et construit de Verbier. La démarche adoptée se propose d’extraire, à partir de cet exemple représentatif, des facteurs clés indispensables comme base de réflexion pour penser la ville alpine étalée, actuelle et future, ainsi que son lien à la mobilité « urbaine ». Les infrastructures habitées imaginées mettront en évidence des unités de mesure qui permettront non seulement de vérifier et compléter nos questionnements théoriques, mais également d’appréhender des notions abstraites comme la densité qualitative alpine, la spatialité contextuelle ou l’échelle territoriale du fait d’habiter à la montagne, résultant du regroupement infrastructure-programme-nature. Cette deuxième partie s’attachera à présenter ce nouveau modèle de densification et montrera en quoi le projet complexe est un outil de recherche fondamental. À la manière d’un concours d’architecture ou d’urbanisme, la présente partie donne une importance majeure au projet, qui devrait parler de lui-même, le texte ne faisant qu’accompagner le dessin.

Le tracé de la télécabine et l’implantation des infrastructures habitées Notre projet se fonde sur l’idée de laisser la nature suivre son cours, de ne surtout pas entraver ce processus inné, comme cela a été fait pendant les dernières décennies et continue de se faire encore aujourd’hui. Les schémas conceptuels (schéma 1) résument cette prise de position initiale: imaginer un transport public de faible impact qui survole les zones de dangers naturels, laissant le sol intact, et qui ne bloque pas les belles échappées visuelles existantes sur les sommets à 4 000 m, une des qualités majeures de Verbier. Hors des zones de risque et afin de rationaliser son emprise au sol, une nouvelle densification urbaine compacte se greffe directement autour de cette mobilité aérienne, la connectant ponctuellement au sol constructible. Ce regroupement crée un néotype d’infrastructure alpine qui définira des relations spécifiques entre transport, programme et nature. Ces premières esquisses de l’infrastructure habitée naissent de la volonté de préserver et sublimer le contexte naturel, tout en garantissant une desserte efficace de l’urbanisation. Après avoir considéré les différents modes de déplacement possibles, nous avons retenu la télécabine comme transport public à l’intérieur de Verbier. Nous pouvons résumer ainsi ses principaux avantages : facilité à franchir aisément la topographie, peu perturbée par les conditions climatiques d’altitude, système « ludique » mettant en valeur le panorama, petite taille des cabines106, faible emprise au sol et grande portée du système structurel, facilité d’insertion dans le contexte existant, très faible consommation énergétique, système très sûr, peu bruyant, flux continu sans attente, rapidité et faible coût de mise en œuvre et d’entretien107. 106 Les cabines de 4 à 8 personnes rappellent la taille de la voiture, permettant de retrouver au sein du transport public l’individualité du transport privé. 107 Une thèse de doctorat de l’EPFL LAMU-LASUR est entièrement consacrée à ce moyen de transport : Fernando Simas (2018). Pour la partie technique du fonctionnement des télécabines, nous avons bénéficié de la précieuse collaboration de Vincent Epiney, entreprise Garaventa, Sion. Voir également tableau récapitulatif de l’association le Chainon manquant : http://telepherix.free.fr/data/lespointsfortsdutramwayaerien.pdf (consulté en décembre 2016)

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Plan de situation

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200 m

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Le plan d’ensemble et la coupe déployée montrent le tracé continu du nouveau transport public et ses différentes altitudes, alternant déplacements aériens et traversées à l’intérieur de l’infrastructure habitée. La nouvelle télécabine qui remplacera le transport public actuel (bus) contourne l’urbanisation existante par un anneau et des ramifications pénètrent ponctuellement dans le  « centre », desservant la totalité de Verbier sans survoler les chalets et sans obstruer la vue sur le panorama. Implantées dans les dernières zones à bâtir publiques stratégiques, les infrastructures habitées sont essentielles au bon fonctionnement de la mobilité : desservant les zones urbanisées par rayons de maximum 500 m, elles permettent au marcheur, même dans les quartiers les plus pentus, d’atteindre le nouveau transport à pied depuis chez lui. Aussi la longueur de chaque gare est-elle déterminée par les changements de direction minimaux que requiert la géométrie du tracé. L’infrastructure a également une fonction structurelle essentielle, elle porte littéralement le système de transport, tendu entre les cinq ouvrages projetés. Le projet crée une mobilité et des espaces publics exclusivement piétons, indépendants de la congestion des réseaux automobiles. Précisons ici que même si un changement de mentalité dans nos coutumes nous conduira peut-être un jour à bannir totalement la voiture de Verbier, nous considérons irréaliste, à court terme, de l’exclure totalement du concept de mobilité. Le projet imagine donc d’autoriser ponctuellement les arrivées et les départs automobiles jusqu’à chez soi ou jusqu’à l’infrastructure habitée mais d’interdire ensuite les déplacements à l’intérieur de l’urbanisation en voiture : la mobilité interne se fait exclusivement en télécabine. Cette variante a l’avantage de dégager le réseau principal en priorité pour le piéton, lui permettant, par zone desservie, de rejoindre la gare de télécabine depuis chez lui, sans être continuellement perturbé par les nombreux flux internes des voitures, comme c’est le cas aujourd’hui.

Le nouveau transport à câble permet de desservir la totalité de Verbier en 15 minutes au maximum. Même si la télécabine est environ deux fois moins rapide que la voiture, elle garantit pourtant une meilleure performance qui s’explique par les raccourcis pris par son tracé, non influencé par les contraintes topographiques et climatiques. La comparaison est encore plus parlante lorsque le réseau routier est saturé par les embouteillages provoqués par les chutes de neige, le brouillard, etc., ou une trop forte fréquentation : la télécabine dessert alors Verbier sans être perturbée par les flux automobiles. On pourrait nous reprocher la longueur inhabituelle de la zone de freinage, tout le long de chaque infrastructure habitée, variant de 150 à 550 m, alors que le standard est d’environ 30 m. En appliquant cette moyenne type, il y aurait effectivement la possibilité de desservir la totalité de l’urbanisation plus rapidement. Il serait néanmoins regrettable de réduire le projet au simple raisonnement « technique » du système de transport, la différence de six minutes pour desservir Verbier ne le justifie pas. Surtout, le nouveau binôme transport-densification permet une occupation du sol beaucoup plus rationnelle que celle qui résulterait d’une réflexion séparée entre mobilité et programme bâti. Comme nous le verrons ci-après, le choix retenu permet d’intégrer pleinement le transport urbain dans le fonctionnement interne du programme et dans la définition spatiale de l’infrastructure habitée. De même, le tracé de la télécabine et l’implantation des infrastructures habitées ne résultent pas exclusivement d’une réflexion visant à garantir une desserte rationnelle de l’urbanisation, tout en respectant les « contraintes » naturelles, mais également d’une intégration de la nature environnante dans le parcours. Les rayons de desserte schématisés sur le plan d’ensemble montrent bien qu’ils sont déterminés autant en fonction du bâti que de la nature environnante. Surtout, le projet regroupe au sein de son programme les transports à câble exis-

alt. 1 865 m

alt. 1 500 m alt. 1 380 m

200 | Stratégies de densification

tants et le nouveau prévu par la Commune. Celui-ci dessert non seulement le cœur de l’urbanisation mais devient aussi le maillon manquant qui permet de rejoindre plusieurs transports publics existants jusqu’ici discontinus, en créant un nouveau parcours sans interruption (réseau piéton grande échelle, p. 202). Depuis la ville, le piéton accède désormais à la nature ainsi « rapprochée » : il peut atteindre les pâturages, les forêts, la bisse du Levron, plus haut les parois minérales et les glaciers, ou bien les autres urbanités d’altitude comme Bruson ou la Tzoumaz, sans être perturbé par les flux automobiles. Le transport établit ainsi un nouveau rapport avec le milieu naturel alpin ; il s’affirme comme le nouveau signe urbain de Verbier, devenue villepaysage.

Schéma 1

alt. 1 800 m alt. 1 600 m

Coupe déployée schématique sur le tracé du nouveau transport public

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L’infrastructure contextualisée Tirant parti de cette mise en réseau continue à l’échelle du territoire, le projet imagine un nouveau lien entre mobilité et programme : reliés par le nouveau transport, les équipements publics emblématiques projetés sont tous accessibles depuis la vallée « urbaine », sans que le passager ait besoin de bouger de sa cabine. Le projet intègre et complète les nouveaux programmes prévus actuellement par la commune de Bagnes108. Chacune des infrastructures habitées regroupe un équipement public, une gare de télécabines, diverses autres interfaces de transport et un hôtel couplé avec des logements. Chacune est caractérisée par son programme spécifique, par sa taille – pouvant atteindre une longueur de 550 m  –, ainsi que par son rapport particulier au bâti, aux flux, à la topographie, à l’altitude, à la vue, à la nature, etc. Nous nous concentrerons ici sur le développement de l’infrastructure située en haut du quartier des Esserts. Le plan de situation montre son implantation, en limite de la zone rouge d’avalanches, entre forêt et agglomération de chalets, connectée aux autres infrastructures habitées et aux réseaux routiers existants. Les variations de forme découlent de l’étude en coupe du rapport programme-transport-nature. Le projet définit d’abord une coupe type permettant de superposer rationnellement les différentes activités, cette métrique de base découle de la simple application des dimensions et du système porteur standard de chaque programme. La disposition idéale, hors contexte, de ces « boîtes » de largeurs

Réseau piéton grande échelle, avant/après projet

202 | Stratégies de densification

différentes permet de déterminer les potentielles mesures communes entre les programmes, en vue de développer un système hybride fonctionnel pour les regrouper. Le système structurel imaginé se compose de dalles portées en périphérie par des cadres disposés tous les 10 m, qui constituent le dénominateur commun de l’ensemble des programmes, et, à l’intérieur, par des poteaux répar tis selon la trame standard spécifique à chacun109. La gare des télécabines est placée au centre de l’infrastructure, où un cadre portant sur toute la largeur de l’espace agit comme élément de répartition des charges et garantit ainsi l’indépendance entre les différents systèmes porteurs. Cette hauteur structurelle nécessaire de 2,20 m de vide permet de créer parallèlement un étage technique regroupant toutes les installations à un seul niveau et de dévier rationnellement les flux techniques des étages au-dessus jusqu’au sol sans interférer dans l’espace des programmes publics. Ce parti structurel s’accompagne d’une volonté spatiale de mise en valeur de la gare comme cœur du projet, offrant un grand espace public continu, avec vue sur le panorama alpin. Cet espace central est traversé par la télécabine qui dessert, à la manière d’un tapis roulant, le balcon public animé par des stands et par les flux des quais. Depuis ce strip, les usagers accèdent au programme privé situé au-dessus, ou au programme public situé au-dessous. La coupe 4 illustre ces principes. Surtout, les différentes coupes sur la longueur de l’infrastructure (coupes 1 à 5) et l’élévation permettent de comprendre comment elle se forme et se déforme pour répondre aux besoins

programmatiques et s’adapter au contexte naturel. L’altitude d’implantation de l’infrastructure habitée résulte du niveau de référence optimal pour le strip, d’une part déterminé pour permettre la disposition rationnelle des différents programmes publics situés dessous en s’adaptant à la topographie existante, creusant le moins possible le sol naturel. L’auditorium, par exemple, est disposé à l’endroit où la pente permet d’accueillir un volume construit d’une largeur de 50 m et d’une hauteur de 23 m sans presque devoir intervenir sur le terrain (coupe 2), les cadres de la coupe de base se déforment vers l’avant pour contenir ce plus grand programme, orienté vers la vue. D’autre part, le niveau du balcon public est parallèlement défini en fonction des niveaux de mobilité : il doit tenir compte du tracé de la télécabine à la grande échelle et assurer également la connexion des autres interfaces de transports du projet avec le réseau routier existant. L’extrait du plan des différents flux illustre comment l’infrastructure intègre les mobilités existantes et les nouvelles : le projet permet par exemple de rejoindre directement depuis les pistes de ski, sans interruption de parcours par le bâti, le départ de la télécabine pour Savoleyres. En effet, aux extrémités, l’infrastructure s’élargit pour abriter l’interface des différentes télécabines qui montent vers la « nature » ou descendent vers « la ville » (coupes 1 et 5). Le niveau du strip se dédouble ponctuellement aux étages, signifiant par les déformations du transport public que l’infrastructure a un début et une fin. La longueur des cadres en élévation varie pour reprendre les variations du sol naturel montrées par ces différentes coupes, épousant et signifiant la silhouette de la montagne. Notons qu’il résulte de l’altitude de référence retenue différentes perméabilités entre le balcon public et la nature derrière : le strip est soit ouvert et affleuré au sol naturel, laissant les flux entrer librement, soit partiellement ou totalement enterré, orientant l’espace exclusivement vers la vue des sommets. Ces séquences ouvert-fermé le long de l’espace public continu offrent différents rapports avec la forêt située derrière, plus ou moins proche, phagocytant plus ou moins le construit. Dans les zones où le strip est en contact avec les zones bleues d’avalanches, le mur arrière est épaissi et renforcé. Même s’il est en dehors d’une zone d’inondation, la faible proportion de programme enterré permet à l’eau de continuer à couler sous l’infrastructure ; le projet pourrait également intégrer des bassins de rétention, afin de « soulager » l’urbanisation existante en aval des forts débits de crues. Les coupes et les perspectives à l’intérieur du balcon public illustrent surtout le nouveau type d’espace produit par le regroupement entre transport public et programmes. Si l’infrastructure alpine

était jusqu’à présent un simple lieu de traversée, elle devient ici un lieu où l’on s’arrête pour l’habiter. À  travers la structure on contemple le paysage alpin, au-dessus de l’agglomération de chalets ; on sent les spécificités climatiques dictées par l’altitude à 1 800 m : le vent frais, la lumière intense et les couleurs en résultant, l’odeur et l’ombre des sapins derrière, le brouillard dessous. On découvre une nouvelle densité construite où le transport établit des rapports insolites entre les divers programmes : directement depuis la télécabine, et sans sortir de l’infrastructure, on accède à sa chambre d’hôtel, on va écouter un concert au Verbier Festival, on part skier, on sort boire une abricotine sur le strip. Puis, on reprend la télécabine, survolant la nature, pour aller au marché de Verbier village, ou suivre un cours à l’école internationale, ou rejoindre la vallée. L’infrastructure typifie les programmes en révélant le contexte extérieur ; l’infrastructure devient contexte elle-même. 108 Le Schéma directeur du secteur de Verbier indique les nouveaux programmes prévus par la commune de Bagnes. Notre projet rajoute une nouvelle infrastructure sportive hippique pour le Jumping International de Verbier et une autre pour mettre en valeur le patrimoine de Verbier village. 109 La définition du principe structurel a bénéficié de la généreuse aide du bureau Structurame, Dr Damien Dreier.

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Plan de situation des Esserts

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Élévation 0

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Coupe 1 0

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Schémas des différents programmes

Coupes 0

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Vue depuis le strip en été

En complément des coupes, l’échelle des plans a pour but de montrer les principes de gestion interne des flux et l’organisation en plan des espaces qui en résultent, sans cependant rentrer par exemple dans le détail des typologies de chaque appartement. L’étage du strip et le plan partiel à plus petite échelle permettent de visualiser le rythme des circulations en fonction de la privacité du programme. On voit bien que la télécabine ne relie pas seulement une infrastructure à l’autre mais participe entièrement à la circulation interne : quand on porte des courses ou des skis et que l’on ne veut pas parcourir presque 500 m pour regagner son appartement, on peut prendre la télécabine qui dessert, à la manière d’un tapis roulant d’aéroport, le programme tout le long de l’infrastructure ainsi que l’accès aux différents flux verticaux. Placées selon les directives des normes, les  circulations verticales ont des rythmes différents en fonction des programmes à desservir. À l’arrière, peu perceptibles car noyées dans la largeur des cadres porteurs, les cages d’escaliers privées s’insèrent toutes les deux trames de structure, desservant ainsi rationnellement les appartements au-dessus. De part et d’autre de la télécabine, en accord avec les sens de descente et de montée à ce système, sont placés, toutes les cinq trames de structure, des escalators et des 220 | Stratégies de densification

ascenseurs permettant d’accéder au programme public situé en dessous. Cette desserte verticale publique se dédouble ponctuellement pour faire face aux importants flux supplémentaires induits par les autres gares de télécabines ou l’auditorium. L’étage des logements et du départ de la télécabine vers Savoleyres montre la flexibilité typologique offerte par l’infrastructure. À noter les nouvelles relations qui s’établissent entre transport et programme : le hall de l’hôtel est directement accessible depuis la gare de télécabine, on peut pratiquement partir skier depuis sa chambre. Les chambres types, résultant de la trame en façade, sont mono-orientées mais toujours avec vue et mesurent en moyenne 23 m 2 ; elles peuvent par regroupement constituer également de généreuses suites ou des dortoirs. Le couloir, borgne dans la majorité des hôtels, est ici éclairé naturellement à l’arrivée des circulations verticales, dégageant de petites aires d’attente avec vue sur la forêt. Les logements traversants gérés par l’hôtel peuvent être étroits et longs, à l’image de l’habitat minimum imaginé en montagne par des concepteurs comme Charlotte Perriand ; ou au contraire ils occupent plusieurs travées, en plan et en coupe, pour atteindre les dimensions d’un chalet individuel haut de gamme. De même, les espaces

extérieurs peuvent varier d’un balcon à une généreuse loggia. La largeur de 17 m des logements, bien plus grande que celle qu’on trouverait « en ville », tient compte de la forte lumière à 1 800 m d’altitude avec une orientation sud (ouest). Cette dimension maximale, garantissant un éclairage naturel sur toute la largeur de l’appartement, est vérifiée par les typologies de Labro qui a conçu des appartements de cette profondeur avec des orientations et à des altitudes très similaires. Précisons également que l’inclinaison des cadres en toiture et l’idée d’un vide d’air isolant afin de garder la neige intacte le plus longtemps possible s’inspirent également des toitures longuement étudiées par l’architecte d’Avoriaz. Les logements de l’infrastructure habitée sont caractérisés par cette largeur mais, surtout, ils se singularisent par la taille et la portée de la structure en façade (habituellement plus petites dans un programme domestique), ainsi que par le rapport au transport public. À travers la trame de la structure, le contexte extérieur est amplifié : le panorama alpin devant et la forêt derrière sont mis en scène par ces nouvelles dimensions. Placé sur le balcon de l’appartement, à l’abri du soleil direct et des regards, on peut également voir, quelques étages plus bas, l’animation des flux et des gens assis sur la terrasse ; on perçoit les autres infrastructures

reliées par le câble des télécabines. À travers le transport, particulièrement à l’étage du strip, on sent la forte densité du grand bâtiment habité, on ressent l’échelle du territoire, on découvre un nouveau lien avec le contexte alpin…

Vue depuis un appartement

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Plan de principe de flux internes, étage strip et hôtel - logements

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25 m

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Vue depuis le strip en hiver

Un projet à l’échelle du territoire Les infrastructures habitées présentées ci-dessus démontrent que si le système de mobilité existant à Verbier était jusqu’à ce jour un vecteur d’étalement, il peut, en se redéfinissant, devenir garant d’un regroupement urbain de qualité en des sites stratégiques. Le projet propose de nouvelles modalités de densification, qui permettent de rajouter 250 000 mètres carrés construits à l’urbanisation existante, soit 20 % de plus qu’actuellement, en n’utilisant que 15 hectares de sol, soit seulement 16 % de la surface totale classée en zone à bâtir. Pour atteindre le même nombre de mètres carrés construits, le modèle existant nécessiterait quatre fois plus de surface au sol que notre propre modèle ; 14 fois plus si nous ne comptions que l’emprise au sol effective des infrastructures habitées, ce qui serait plus juste dans la mesure où le transport ne réclame pas de surface supplémentaire nécessaire comme c’est le cas dans le modèle existant. Les infrastructures habitées proposent une densité bâtie de 1,7 alors que celle du modèle existant est en moyenne de 0,4 ; la nouvelle densité bâtie globale à Verbier serait avec le projet de 0,5. Rappelons, à titre de comparaison, que la densité construite du projet prévu à Bruson est d’environ 224 | Stratégies de densification

0,30, celle de Verbier village 0,41, celle de Zermatt s’élève à 0,615, Andermatt compte 0,87 (sans le podium), Avoriaz 0,71 et Whistler-Blackcomb 1,37 (sans compter l’étalement urbain autour). De même, les infrastructures habitées ne nécessitent pas d’extension du réseau routier, seulement quelques adaptations pour s’y connecter. Si le projet permet donc une occupation du sol et une mobilité plus rationnelles, la taille des ouvrages proposés peut susciter certaines réserves : la nostalgie de voir disparaî tre le modèle du chalet individuel, sa petite taille, son caractère domestique et privé, qui représentent l’idéal alpin pour la majorité des gens. À cela, nous répondons que le chalet isolé n’existe plus à Verbier, que l’échelle de cette ville n’est pas celle du chalet individuel, mais celle résultant de la multiplication de ce modèle et des infrastructures nécessaires pour le desservir : routes, chemins, éclairage public, haies de séparation entre parcelles privées et domaine public, etc. Il faut néanmoins souligner le mérite du modèle du chalet qui a réussi à garantir une unité architecturale d’ensemble et à ancrer un modèle de référence alpine dans l’esprit des gens, même si, comme nous l’avons démontré, les conséquences urbaines sont désastreuses. Pourtant, le projet souligne qu’il ne suffit pas d’implanter les immeubles hauts d’Avoriaz dans les

dernières zones à bâtir de Verbier : la densité bâtie serait certes un peu améliorée mais au détriment de l’unité réussie par le modèle d’habitation existant, et, surtout, cela ne résoudrait en rien les problèmes de mobilité actuels. Afin d’éviter la confrontation entre deux langages architecturaux définissant un même programme, et pour résoudre la saturation du réseau routier existant, les infrastructures contextualisées se réfèrent à une mixité et à une taille justifiées par l’échelle du transport. La nature d’altitude a été longtemps colonisée par des infrastructures de grande taille comme les viaducs, les tunnels et autres galeries couvertes. Pourtant, on ne compare jamais l’échelle du chalet avec l’échelle de ces infrastructures car ces deux modèles n’ont pas la même fonction. Aussi notre projet se définit-il volontairement comme un ouvrage de génie civil et non comme un grand bâtiment : sa taille doit être lue en rapport à cette échelle territoriale du transport.

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84 ha 250 000 m2 0,3

17 km de routes

parcours piéton discontinu

Modèle chalet selon zone existante T3 (p. 226) Modèle infrastructure habitée (p. 227)

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15 ha 250 000 m2 1,7

0 km de routes

parcours piéton continu

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Inducteurs de projet Même si les infrastructures habitées sont contextualisées et non exportables telles quelles vers d’autres villes alpines, et à la lumière de nos études de cas, il est possible de définir, comme suit, quelques inducteurs de projet : – La densification de la ville d’altitude ne doit pas seulement être pensée pour rajouter des mètres carrés construits dans les dernières zones à bâtir mais surtout comme stratégie pour résoudre les diverses saturations de la ville actuelle, garantir sa pérennité et protéger durablement la nature d’altitude environnante. – La densification se basera, en priorité, sur les terrains publics disponibles afin de permettre une planification et une mise en œuvre simplifiées. – La densification des dernières zones à bâtir ne peut néanmoins continuer à se fonder sur la faible densité bâtie du modèle dominant actuel (le chalet individuel), elle doit proposer un nouveau modèle urbain qui garantisse une occupation rationnelle du territoire. – Ce néotype devra être conçu en regroupant au sein d’une entité compacte programme habitable,

espace public piéton, infrastructure de transport et infrastructure climatique, selon le contexte construit et naturel spécifique à chaque ville alpine. – La coupe constituera un outil fondamental pour définir l’organisation de ce nouveau regroupement programmatique et son lien au contexte. – Le tracé du nouveau transport public doit être indépendant du réseau automobile. Un concept global de hiérarchisation des différents flux – existants et nouveaux – devra être établi en les différenciant mais en permettant des interfaces d’échange pour les relier ponctuellement. – Le nouveau transport public doit penser une mobilité continue qui dessert efficacement à « l’interne » la nouvelle densification et l’ensemble de l’urbanisation pré-existante, et qui à « l’externe » se connecte sans interruption aux transports publics existants à plus grande échelle : transports vers la « ville » et transports vers la « nature ».

250 000 m2 en appliquant le même modèle que Verbier, en colonisant de nouveaux territoires vierges

228 | Stratégies de densification

Nature hyperconnectée Nous avons ainsi tenté d’apporter un nouveau regard sur les villes alpines. Les infrastructures contextualisées se réfèrent à une mixité et à une taille justifiées par l’échelle de la mobilité contemporaine : notre recherche permet de les penser comme des villes à part entière et non plus simplement comme des villes de ski. Notre réflexion n’a pourtant pas pour ambition d’apporter une réponse définitive et figée au problème. Tout d’abord, elle se heurte à une interrogation majeure, celle  de la densification proposée qui atteindra un jour ses limites : dans 50 ans, les infrastructures habitées ne seront peut-être plus aptes à contenir le développement urbain futur. Si la ville alpine ne peut plus être densifiée, quelles stratégies pourraient alors assurer à l’avenir la préservation de la nature « vierge » ? Ce livre a démontré que la question de la connectivité est aujourd’hui majeure. La notion de développement durable nécessite de faire intervenir cette connectivité dans les modèles alpins. Ainsi, des urbanités hyperconnectées, même des hameaux, deviennent des lieux stratégiques. Notre définition

de la ville alpine nous conduit à repenser en des termes différents l’avenir de certaines petites urbanités de montagne, délaissées et en friche, alors qu’elles sont situées sur un axe de transport existant majeur. Les exemples de Bourg-Saint-Pierre ou du San Bernardino illustrent pertinemment ce patrimoine en désuétude : pensées comme des villages pour le ski, ces petites entités n’ont aucun avenir ; conçues à travers leur lien de mobilité privilégié avec la ville, elles présentent un atout territorial important. La densification de ces petites urbanités alpines hyperconnectées constituerait-elle leur unique chance pour garantir leur pérennité ? Cette stratégie, imaginée en deuxième temps de la densification des villes alpines proposée dans notre recherche, permettrait-elle d’éviter à long terme la colonisation de la nature encore intacte ?

250 000 m2 en densificant Verbier avec infrastructures habitées

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ÉTUDE DE CAS : AVORIAZ DOCUMENTS OFFICIELS CARTOGRAPHIE Carte 2014, IGN, Institut national de l’information géographique et forestière Terrain en 3D, IGN, Institut national de l’information géographique et forestière PLANS D'AVORIAZ, DOCUMENTS SOURCES Archives départementales de la Haute-Savoie, inventaire du fond Jacques Labro (n°153J) ; consultation sur place : www.archives.cg74.frw2 Base de dessins mise à disposition aimablement par AAA, Atelier d’Architecture d’Avoriaz, M. Simon Cloutier. PLU (Plan local d’urbanisme) et règlement communal Commune de Morzine (2014), Étude des flux logistiques des personnes et des marchandises. Inventaire général du patrimoine culturel de Rhône-Alpes. Présentation d’Avoriaz par quartiers et par bâtiments : http://patrimoine.rhonealpes.fr/recherche/globale?texte=avoriaz&type= et http://www.parcoursinventaire.rhonealpes.fr/stationski/-La-stationfonctionnelle-revele-le-.html (consulté en décembre 2016) Base de données du ministère de la Culture : http://www.culture.gouv.fr/public/mistral/merimee_fr?ACTION=CHERCH ER&FIELD_4=AUTR&VALUE_4=LABRO%20JACQUES (consulté en décembre 2016) AUTRES Office de tourisme d'Avoriaz : www.avoriaz.com Inspection générale de l’administration et al. (2010), Bilan de la loi du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, Rapport administratif. Commune de Morzine (1997), Plan de prévention des risques naturels prévisibles, P.P.R, Rapport de présentation. OUVRAGES ET RAPPORTS DE RECHERCHE Bianco, F. (2014), Morzine-Avoriaz : densification d’une infrastructure existante. Le téléphérique des Prodains comme nouvelle porte d’entrée pour la station (F), travail de master, EPFL-ENAC. Blin, P. et Dufresne, G. (2008), Avoriaz ou la transformation d’un paysage, Solin. Bremond, G., Chouchan, L., Vuarnet, J., Romer, J.-C. (1992), Avoriaz memories. Festival international du film fantastique d’Avoriaz 1973-1992, Media-planning, France. Bourreau, C. (2004), Avoriaz, l’aventure fantastique, La Fontaine de Siloé, Chambéry. Bouygues, A. (2006), Téléphérique pour l’enfance, Nouvelles Éditions Place, Paris. Dufresne, G. et Blin, P. (1993), Avoriaz ou la transformation d’un paysage, Éditions de L’Épure, Paris. Knafou, R. (1978), Les stations intégrées de sports d’hiver des Alpes françaises, Masson, Paris e.a. Lyon-Caen, J.F. (2012), Jacques Labro, architecte urbaniste de l’imaginaire au réel, collection Portrait, éditions CAUE, Annecy. Lyon-Caen, J.F. (2003), Montagnes : territoires d’invention, éditions École nationale supérieure d’architecture de Grenoble, équipe de recherche architecture-paysage-montagne. Mopty, T. (2015), Cités Alpines, la fin de l’hégémonie touristique dans les stations de haute-montagne, travail de master, EPFL-ENAC. Picard, G. (1990), Avoriaz. Les Fantômes du Festival, Hermé, France. Révil, P. (2004), Les pionniers de l’or blanc, Glénat, Grenoble. Souvy, C. (1978), Morzine au fil des siècles, éditions Jean Vuarnet, Morzine. Wolgensinger, B. (1981), Maisons en montagne, Éditions du Moniteur et Office du livre (chalet à Avoriaz, pp. 32-33). ARTICLES A&S, Architecture et Stations, « Avoriaz, une station intemporelle », éd. CAUE 74, n° 1, hiver 2008-2009, pp. 10-15. A&S, Architecture et Stations, « Avoriaz, la station prend un nouvel élan », éd. CAUE 74, n° 2, nov. 2009, pp. 20-22. Bourreau, C. (2007), « Avoriaz, de l’alpage à la station », in Balades culturelles entre vallée d’Aoste et Haute-Savoie - Avoriaz, Morzine,

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ÉTUDE DE CAS : WHISTLER-BLACKCOMB DOCUMENTS OFFICIELS CARTOGRAPHIE Resort Municipality of Whistler, Whistler Map: http://maps.whistler.ca/ WhistlerMap/Default.aspx (équivalent suisse: système de données fournies par Swisstopo) WUDCA, Whistler Urban Development Containment Area et RMOW, zoning map : https://www.whistler.ca/municipal-gov/strategies-and-plans/ocp (consulté en décembre 2016, équivalent suisse: plan directeur canton et plan d'affectation commune) Rapports concernant l’énergie, le transport, etc. disponibles sur le site internet Municipality of Whistler, notamment: https://www.whistler.ca/sites/default/files/related/community_energy_ and_climate_action_plan.pdf (consulté en décembre 2016)

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https://www.whistler.ca/sites/default/files/related/rmow_2014_annual_ energy_-_ghg_emissions_performance (consulté en décembre 2016) Informations sur les bus publics, notamment plan des bus de la région de Whistler : http://bctransit.com/servlet/documents/maps/1403640576590 (consulté en décembre 2016) Tous les autres plans que nous avons jugés nécessaires pour analyser le projet et non disponibles auprès des autorités ont été mis à notre disposition par Ecosign Mountain Resort Planners Ltd. AUTRES DOCUMENTS Ecosign Mountain Resort Planners Ltd (2013), Conférence du président Paul Mathews à Kaoponik, Serbie, juin 2013. (Document non publié, mis à disposition par l'entreprise). Ecosign Mountain Resort Planners Ltd (2014), The Whistler Story. (Document non publié, mis à disposition par l’entreprise). Vanat, L. (2013), 2013 International Report on Snow and Mountain Tourism. Overview of the key industry figures for ski resorts. Document disponible sur www.vanat.ch (consulté en décembre 2016) Vanat, L. (2006), « Whistler Blackcomb, station unique ? », Montagne Leaders n° 194, mars 2006, pp. 38-47. Barnett, B. (2000), Whistler: History in the Making, Pique Publishing Inc. Lloyd Kyi, T. (2004), Whistler, Canada Series, Whitecap Books, Vancouver, 04/06/2004. Mc Mahon, A. (1980), The Whistler Story, A. McMahon Publisher, New York. Beaudy, M. (2007), Whistler : Against all Odds, Mountain Press Publishing Company, Missoula. Vogler, S. (2009), Only in Whistler : Tales of a Mountain Town, Harbour Publishing Harbour.

ÉTUDE DE CAS : ANDERMATT DOCUMENTS OFFICIELS CARTOGRAPHIE Carte 1928, Topographischer Atlas der Schweiz, Berne Carte 1932, Topographischer Atlas der Schweiz, Berne Carte 1951, Schweizerische Alpenposten, Berne Carte 1982, Skitouren und Wanderkarte, Kümmerly+Frey Carte 2014, Swisstopo (swiss map online) Données GeoVITe – EPFZ Geodata Portal DOCUMENTS CANTON ET COMMUNE Canton d’Uri (1999), Auszug Richtplan. Canton d’Uri (2006), Kantonaler Richtplan. Richtplananpassung Urserntal vom Regierungsrat erlassen. Canton d’Uri (2006), Andermatt Tourismus Resort. Anforderungen an die Masterplanung von Seiten Kanton Uri. Canton d’Uri (2006), Richtplananpassung Urserntal, Nachhaltigkeitsbeurteilung. (évaluation de la durabilité du projet Andermatt Swiss Alps). Canton d’Uri, commune d’Andermatt (2006), Tourismusresort Andermatt. Anforderungen an die Quartiergestaltungspläne. Canton d’Uri, commune d’Andermatt (2006), Teilzonenplan Tourismusresort Änderungsplan. Canton d’Uri et S-ce (2008), Regionales Gesamtverkehrskonzept Ursern. Synthesebericht. Commune d’Andermatt et Basler+Partner (2008), Verkehrskonzept Andermatt. Schlussbericht. Canton d’Uri, commune d’Andermatt (plans de 2006, 2009 et 2011), Zonenplan Siedlung. Commune d’Andermatt (2013), Bau- und Zonenordung (BZO). AUTRES Site du canton d'Uri : http://www.ur.ch/de/verwaltung/dienstleistungen/ welcome.php?dienst_id=3913&page=7 (consulté en décembre 2016) Office fédéral de la culture OFC, ISOS-Inventaire fédéral des sites construits d’importance nationale à protéger en Suisse. (Andermatt : ISOS 4193) Office fédéral du développement territorial ARE (2012), Tourisme et développement durable. Bonnes pratiques et pistes d’action, OFCL, Publications fédérales, Berne. Autres documents spécifiques au nouveau projet Andermatt Swiss Alps : tous les documents sources que nous avons jugés nécessaires pour analyser le nouveau projet (de 2006 à ce jour) ont été aimablement mis à disposition par le maître de l’ouvrage, ASA AG. Basler & Hofmann (2008), Tourismusresort Andermatt Umweltverträglichkeitsbericht. Genehmigungsexemplar.

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Iconographie Les documents non mentionnés dans l'iconographie ont été entièrement produits par l'auteur, en utilisant les données de base des documents mentionnés dans la bibliographie par chapitre, sous « cartographie ». Les dessins produits ont été faits avec la précieuse aide de Joachim Fritschy, Roberto Sega, Valentin Baertschi et surtout Quentin Andréotti et Axel Jaccard. Les photomontages ont été faits avec Caal architectes (Rafael Aliende), et la perspective intérieure: xy-ar.ch (Amélie Poncety). MISE EN CONTEXTE DES VILLES ALPINES Document 0 : Photo de chalet isolé, Verbier et photo de l'étalement urbain, Verbier. Axel Jaccard. Document 1 : L’espace rural en 2000. Office fédéral du développement territorial, ARE (2005). Rapport 2005 sur le développement territorial. Document 2 : Photomontage de la campagne de l'initiative Sauver le sol suisse (2006), Fondation Franz Weber. Document 3 : Photomontage de la campagne de l'initiative Pour en finir avec les constructions envahissantes des résidences secondaires (2012), Fondation Franz Weber. Document 4 : Photomontage de la campagne pour la révision de la LAT (2013), Comité interpartis.

ÉTUDE DE CAS : VERBIER Document 0 : Photo de Walter Bibikow. Document 0.1 : Extrait du plan parcellaire de Verbier. Plan 2014 cadastral SIB, services industriels de Bagnes. Document 1 : Plan des zones 1960, commune de Bagnes. Document 2 : Plan des zones 1977, commune de Bagnes. Document 3 : Plan d'affectation des zones 1997, commune de Bagnes. Documents 4 et 5 : Plan Meili (état actuel-projet en rouge et indications aménagements « nature »), OFT, Meili, A. (1945). Document 6 : Photomontage projet SuperVerbier s.a. (1970). Documents 7 et 8 : Photos de congestion routière, Balleys, D., Vergères, A. (2008). Document 9 : Schéma directeur, secteur de Verbier, commune de Bagnes.

ÉTUDE DE CAS : ZERMATT Document 0 : Photo de Zermatt. Crédit Anshar-Shutterstock.

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ÉTUDE DE CAS : AVORIAZ

ÉTUDE DE CAS : ANDERMATT

Document 0 : Photo de Patrick de Goumoëns. Document 1 : Photomontage des remontées mécaniques desservant Avoriaz et le domaine skiable. Projet Jean Vuarnet 1961. Publié dans la revue Le Ski, n° 173, juillet 1961. Document 2 : Plan d’équipement du domaine skiable autour d’Avoriaz. Projet Jean Vuarnet 1961. Publié dans la revue Le Ski, n° 173, juillet 1961. Document 3 : Esquisse des flux du plan masse Labro et al. 1966. Publié dans Architecture d’Aujourd’hui, n° 126, 1966. Document 4 : Schéma de hiérarchisation des flux des skieurs. Labro et al. 1966. Publié dans Architecture d’Aujourd’hui, n° 126, 1966. Documents 5, 6, 7 : Coupes de principe de la séparation des différents flux station. Labro et al., 1966. Document 8 : Plan de masse et d’aménagement d’Avoriaz 1800. Labro et al. 1974. Document gentiment mis à disposition par l’architecte. Documents 9 et 10 : Étude d’aménagement, coupes. Labro et al. 1970. Publié dans Recherche & Architecture 1970/2. Document 11 : Étude d’aménagement, plan masse. Labro et al. 1970. Publié dans Recherche & Architecture 1970/2. Documents 12 et 13 : Immeuble des Hauts-Forts, Plan masse, Labro et al. 1967 et photos E. Dessert. Région Rhône-Alpes, Inventaire général du patrimoine culturel et Archives municipales de Morzine. Document 14 : Hôtel des Dromonts, photo E. Dessert. Région RhôneAlpes, Inventaire général du patrimoine culturel et Archives municipales de Morzine. Document 15 : Coupe de l'hôtel des Dromonts. Labro et al. 1966. Publié dans Architecture d’Aujourd’hui, n°  126, 1966, (avec légendes supplémentaires rajoutées par l'auteur). Document 16 : Les Mélèzes (2), coupes transversales projet 7. Labro et al. 1967. Région Rhône-Alpes, Inventaire général du patrimoine culturel et Archives municipales de Morzine. Document 17 : Les Mélèzes (1), coupes transversales projet 6. Labro et al. 1966. Région Rhône-Alpes, Inventaire général du patrimoine culturel et Archives municipales de Morzine. Document 18 : Schéma des principes d'implantation. Labro et al. 1966. Publié dans Architecture d’Aujourd’hui, n° 126, 1966. Document 19 : Coupe de principes d’implantation, immeuble Le Mélèze. Labro et al. 1966. Publié dans Architecture d’Aujourd’hui, n°  126, 1966. Documents 20 et 21 : Photos de l’immeuble Les Mélèzes. T. Mopty. et J.-F. Lyon-Caen, Région Rhône-Alpes, Inventaire général du patrimoine culturel et Archives municipales de Morzine. Document 22 : Chalet Mont-Oya, photo de la toiture, J.-F. Lyon-Caen. Région Rhône-Alpes, Inventaire général du patrimoine culturel et Archives municipales de Morzine. Documents 23 : Toiture de l’immeuble Thuya. Photo E. Dessert. Région Rhône-Alpes, Inventaire général du patrimoine culturel et Archives municipales de Morzine. Document 24 : Toitures du quartier La Falaise. Photo E. Dessert. Région Rhône-Alpes, Inventaire général du patrimoine culturel et Archives municipales de Morzine. Document 25 : Schémas de l’évolution des modes de commercialisation immobilière de 1965 à 1994 (modifiés partiellement par l'auteur). T. Mopty, énoncé théorique 2015, École Polytechnique Fédérale de Lausanne. Document 26 : Plan local d'urbanisme (PLU), Commune de MorzineAvoriaz, 2014. Document 27 : Perspective du projet d'extension d’Avoriaz. Labro et al. 2003-2004. Publié dans Jacques Labro, architecte urbaniste de l’imaginaire au réel, 2012. Document 28 : Orthophotos partielles (zone plateau) indiquant la variation de l’état du sol à chaque saison. Commune de Morzine-Avoriaz 2014. Document 29 : Schémas de synthèse des modes de gestion initiaux, actuels et futurs (modifiés partiellement par l'auteur). T. Mopty, énoncé théorique 2015, École Polytechnique Fédérale de Lausanne.

Document 0 : Sous l’infrastructure routière d’Andermatt. Photographie (recadrée) de B. Brechbühl et F. Pedrazzetti. Document 1 : Andermatt sur l'axe national de défense miliaire, Armasuisse (2004). Document 2 : Place d’armes d’Andermatt, carte postale militaire de 1905, Mediathek, Confédération suisse, n° 2103. Document 3 : Patrouille militaire skiant sur Andermatt, carte postale militaire de 1944, Mediathek, Confédération suisse, n° 1508. Documents 4 et 5 : Bunkers autour d’Andermatt. Photographies Fabrizio, L. Documents 6 et 7 : Orthophoto Andermatt en 2006, Swisstopo et photomontage Andermatt en 2030, ASA AG. Document 8 : Plan d'affectation des zones 2009, commune d’Andermatt. Document 9 : Masterplan 2007 servant de base au premier plan localisé de quartier, Denniston et ASA AG. Document 10 : Coupe longitudinale sur le remblai d'autoroute, 2007, Denniston et ASA AG. Document 11 : Coupe transversale 2007, Denniston et ASA AG. Document 12 : Plan schématisant l'emprise du podium, 2007, Denniston et ASA AG. Documents 13, 14, 15 : Plan Upper Level, Upper Podium et Lower Podium, 2007, Denniston et ASA AG. Documents 16 et 17 : Zooms sur les risques d’inondation HQ 100 zone podium, avant et après les mesures de protection prises par le projet complexe d’Andermatt, Basler & Hofmann et ASA AG. Documents 18 à 21 : Zoom sur la zone centrale du podium, ASA AG et zoom sur le village historique existant d’Andermatt, Swisstopo. Place du village en 1905, carte postale militaire de 1905, Mediathek, Confédération suisse, n° 2083 et vue de la place du village sur le podium en 2030, Miroslav Šik et ASA AG. Documents 22 à 25 : Vues des différentes densités, mixités du programme. 1. Gare, Germann & Achermann. 2. Zone nord, Herzog architekten avec Ruppeiner Deiss, 3. Zone centre podium, Miller & Maranta, 4. Zone villas. ASA AG.

ÉTUDE DE CAS : WHISTLER-BLACKCOMB Document 0 : WSSF Big Air Competition, © www.alamy.com. Document 1 : Plan du projet, Ecosign. Document 2 : Coupe de principe de l'artère piétonne, Ecosign. Document 3 : Coupe de principe de l'artère piétonne et du front de neige, Ecosign. Document 4 : Perspective de projet en Inde fondé sur le même principe urbain, Mountainworks.

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Remerciements La publication de ce livre a bénéficié du généreux support de l’École Polytechnique Fédérale de Lausanne. Je tiens également à remercier vivement les personnes qui ont travaillé avec cœur à la publication de ce livre : – Toute l'équipe de Birkhäuser et De Gruyter, particulièrement Alexander Felix et Regina Herr (gestion de projet), Sven Schrape (mise en forme texte, version allemande et anglaise), Richard Palmer (traduction français-anglais), Beate Susanne Hanen (traduction français-allemand), Keonoana Peterson  (révision, version anglaise), Ellen Mey (révision, version allemande), François Mortier (révision, version française), Christen Jamar (relecture version anglaise), Hilke Bemm (relecture version allemande), Aurélie Duthoo (relecture version française), Heike Strempel (production). – Axel Jaccard pour la conception graphique – Swiss Typefaces : créateurs de la famille de police de caractère Suisse Le présent ouvrage prend comme base la thèse faite à L’École Polytechnique de Lausanne (thèse n° 7167) dans le cadre du programme doctoral Complexdesign. Je tiens à rappeler ici toutes les personnes qui ont contribué auparavant à ma recherche : – Tout d'abord la Pre Inès Lamunière, directrice de thèse (EPFL, LAMU) – Les membres du jury, Pre Paola Viganò (EPFL, LAB-U), Pr Vincent Kaufmann (EPFL, LASUR), Pr Olivier Crevoisier (UNINE), Dr Thomas Scheurer (ICAS, ISCAR). – Le relecteur de la thèse, Jordi Pià. – L'aide à la production des dessins, Quentin Andréotti. Avec la participation de Valentin Baertschi, Joachim Fritschy, Olivier Di Giambattista et Roberto Sega. – L'aide à la production des photomontages, Rafael Aliende (CAAL Architectes) et Amélie Poncety (xy-ar.ch). – Le soutien à la recherche : FDDM (Fondation pour le développement durable des régions de montagne), Eric Nanchen ; Altitude 1400, Lucien Barras ; ISCAR (International Scientific Committee on  Research in the Alps), Thomas  Scheurer et Marion Regli ; Orascom, Samih Sawiris ; Structurame, Damien Dreier ; Axel Jaccard, designer industriel. – Les enseignants du programme doctoral complexdesign, Pr Bruno Marchand, Pr Jacques Dubey, et Pr Harry Gugger et mes collègues de cours, dont Nathalie Adank, Marta Brandao et Nelson Vera. – Les autres enseignants, Pr Luca Ortelli, Pr Franz Graf et Pr Dominique Perrault. – Tous mes collègues de l'EPFL, d'abord Deborah Piccolo mais aussi Marine Durand, Roberto Sega, Fernando Simas, Raphaël Dessimoz, Xavier Apotheker, Virginie Lemarié, Estelle Lépine, Sonia Curnier, Shin Koseki, Yvan Delemontey, Loïc Fumeaux, Dario Negueruela, Patricia Guaita, Isabel Concheiro. – Les étudiants de l'EPFL Timoté Mopty, François Bianco, Angélique Morand et Marion Mory. – L' atelier de maquettes de l'EPFL, Antoine Gagliardi, Laurent Emmenegger et Mitch Heynick. – L'IT3, Nicolas Chevalley et Jérôme Zufferey. – La reprographie de l'EPFL, Steeve Chevalley, Enver Kalimashi, Carinne Christinaz et Vincent Plantier. – Les autres personnes suivantes de l'EPFL : Andreas Mortensen, Chantal Strickler, Isaline Wahli, Stéphane Decoutère, Sandra Bottà, Melody Meyer, Lydia Roduit, Sandrine Perroud. – Toute l'équipe du Polychinelle. – Le président de la commune de Bagnes Eloi Rossier, Bertrand Deslarzes, Thierry Maret, Eric Fumeaux, Jean Baillod, Jean-Claude Lambiel, Caroline Perraudin , Serge Amos, Valérie Sauge, Marie Lyse Seuret, Magali Moreillon. Damien Balleys et Alex Vergeres, JeanYves May, James Medico, Frédéric Dorsaz et Olivier Schalbetter, Reto Sommer, Niki Beyer et Jérôme Dubois, François-Joseph Baillifard, Vincent Epiney, Damien Hoffmann. – Luca Lerjen et Bernhard Arnold. – Simon Cloutier et Jacques Labro, Yves Kinossian. – Le président Commune d'Andermatt Roger Nager, Danja Brosi, Samih Sawiris, Ihab Morgan et Doris Anderegg, Kurt Aellen, Beat Hodel,

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Oscar Merlo, M. Max Germann et M. Martino Epp, Benedikt Loderer, Philippe Mouchet, Thomas Werlen, Christine Rohr, Karin Suini, Philippe Müller et Manuel Bigler, Peter Moerkerk et Markus Oehrli, Martin Zehnder, Bianca Amrein, Léo Fabrizio. – Laurent Vanat, Paul Mathews. – Bernard Attinger, Marcel Maurer, Benoît Greindl, Joël Tettamanti, Patrick de Goumouëns, Franca Pedrazzetti et Beat Brechbühl, Corinne Feuz, Daniel Frank, Alfredo Primavesi, Philippe Bourdeau, Rosa De Marco et Cristina Mattiucci, Lucile Solaris, Fabien Grenon, Philip Jodidio, Didier Bender, Simon Matthey-Doret, Celia Luterbacher, Laétitia Bongard, Hans-Georg Bächtold de la SIA, Catherine Bolle, Marc Fischer, la FSU, la revue Tracé, la revue Forum, l'organisation mondiale du tourisme UNWTO et le gouvernement d'Andorre, eco.villages aux Diablerets, ForumAlpinum, les Carnotzets Scientifiques, canal 9, le Club 44, la Biennale Européenne de la montagne, swissinfo.ch. Je remercie avec gratitude mes amis, je pense tout particulièrement à Ana-Inès et Damien, ainsi qu'à Ambre et Luc, Nathalie, Jehanne, Alan, Yves et Claudia, Deborah et Fabrice, Hahn, Madeleine, Christophe et Élise, Michael et Anne-line, Amélie et Loïc, Jean et Lucie, Victoria et Gordo, Christian et Antoinette, Guiseppe et Laurence, Marc et Sandrine, Flo, Cormino, Mark, Ruth et Jean-Claude. Je remercie avec tendresse ma maman, ma sœur Jelena et son mari Triloki, mes frères Jordi et Albert, sans oublier mon papa et mon frère Eric ; ainsi que Jordi Servet et Aquiles. Je remercie enfin, avec tout mon amour, Axel et notre enfant Wim.

Auteur Fiona Pia, architecte et dr ès sciences EPFL Collaboratrice scientifique EPFL Architecte associée de Fiona Pia Architectes, Lausanne

Gestion du projet Alexander Felix, Regina Herr Conception graphique Axel Jaccard, directeur CCHE Design Révision François Mortier Relecture Aurélie Duthoo Production Heike Strempel

Image couverture © Caal Architectes et Fiona Pia Polices de caractères utilisées Suisse, © Swiss Typefaces Papier Amber Graphic, 120 g/m2 Impression DZA Druckerei zu Altenburg GmbH, Altenburg Distribution ISBN  978-3-0356-1487-9 Birkhäuser Verlag GmbH, Bâle Case postale 44, 4009 Bâle, Suisse Membre de Walter de Gruyter GmbH, Berlin/Boston Ce livre est aussi paru en : e-book (ISBN PDF 978-3-0356-1493-0), version allemande (ISBN 978-3-0356-1486-2) et version anglaise (ISBN 978-3-0356-1719-1)

Information bibliographique de la Deutsche Nationalbibliothek La  Deutsche Nationalbibliothek a répertorié cette publication dans la Deutsche Nationalbibliografie ; les données bibliographiques détaillées peuvent être consultées sur Internet à l’adresse http://dnb.dnb.de. Les droits d’auteur de cet ouvrage sont protégés. Ces droits concernent la protection du texte, de l’illustration et de la traduction. Ils impliquent aussi l’interdiction de réédition, de conférences, de reproduction d’illustrations et de tableaux, de diffusion radiodiffusée, de copie par microfilm ou tout autre moyen de reproduction, ainsi que l’interdiction de divulgation, même partielle, par procédé informatisé. La reproduction de la totalité ou d’extraits de cet ouvrage, même pour un usage isolé, est soumise aux dispositions de la loi fédérale sur le droit d’auteur. Elle est par principe payante. Toute contravention est soumise aux dispositions pénales de la législation sur le droit d’auteur.

© 2019 Birkhäuser Verlag GmbH, Bâle Case postale 44, 4009 Bâle, Suisse Membre de Walter de Gruyter GmbH, Berlin/Boston 987654321 www.birkhauser.com

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CARTE COMPARATIVE

VERBIER

ZERMATT

AVORIAZ

WHISTLER-BLACKCOMB

ANDERMATT SWISS A LPS

Occupation des sols et zones a bätir

pp. 27-30

p. 71

pp.81-84

p.125

pp.148-152

1935

5ha

18ha

0,1ha

Oha

14ha village existant

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0

500m

t818ph8rique a venir 1{ 963 )

autoraute a venir {1965 )

_,

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! /

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·;

·;j Occupation des sols et zones a bätir

2014

2030 pour Andermatt Swiss Alps

pp. 30-35

p. 71

pp.84-87

pp.125-131

235ha

185ha

41ha

59ha

pp.152-155

47ha village existant

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0

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310ha

500m

avec etalement" ' ..:. urbain autour

30ha

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nouveau projet

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77ha

'

au total

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I

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Contexte naturel

pp. 54-59

pp.104,116-119

pp.74-75

pp.172-177

42ha

7ha

5ha

25ha

zone bleue danger avalanches

zone rouge danger avalanches

zone rouge danger avalanches

8taient en zones inondables avant l'infrastructure de securisation du podium qui agit comme une digue

0,5ha

31ha

·.

zone bleue s� :::" danger ava Ia n ch:e: /.2: ""7

zone rouge danger inondations

��

4ha

5ha

zone bleue

zone rouge danger inondations

47ha

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zone jaune danger inondations

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e l e danger inondations

21ha

(I

zone Jaune danger inondations

Reseau viaire (voitures)

48km pou r936 ooo m2 construits

Urbanlser les Alpes Fiona Pia, © 2019 Birkhäuser Verlag GmbH, Basel

pp.104,108-111

pp.76-77

pp. 46-53 -'

pp.132-133,136-137

pp.164-172

35km

0,6km

6,9km

0,9km

pour1 135360 m2 construits

pour290 ooo m2 construits

pour813468 m2 construits

pour260 000 m2 construits

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6 { 1 km avec etalement urbain autour)

2 { ,7 km sont des routes preexistantes)

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"\

CARTE COMPARATIVE

VERBIER

ZERMATT

AVORIAZ

WHISTLER-BLACKCOMB

ANDERMATT SWISS A LPS

Densite bätie

pp. 40-46

pp. 71-73

pp.102-103,106-107

pp.132-135

pp.178-183

0,40

0,61

0,7 1

1,37

0,87

2030 pour Andermatt

2014

Swiss Alps

Whistler: 1,09 Blackcomb: 2,39

/ '"

Verbier:

0,20

1,22

densite de

sur l'infrastrueture

Zermatt:

1'8talement

du po dium

1'135'360m2 construits sur 185 ha de surface a batir.

urbain autour

963'000m2 construits sur 235 ha de surface a batir.

Avoriaz: 290'000m2 construits sur 41 ha de surface a b8tir. Whistler-Biackcomb: 813'460m2 construits sur 59 ha de surface a batir. Andermatt Swiss Alps: 260'000m2 construits sur 30 ha de surface a batir,

(l

en comptant l'infrastructure du podium 365'000m2 construits sur 30 ha de surface a b8tir.

o

soom

Zoom sur Ia densite bätie 2030 pour Andermatt

2014

Swiss Alps

oo/o

40°/o

60°/o

Pourcentage de chalets individuels sur Ia totalite des m2 construits

00

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50m

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Mixite du programme

pp. 55, 64-65

pp.112,120-121

pp.127,132,138-139

pp.178-180, 184-185

..

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4,9°/o d'Elquipements 0

500m

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publies

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4,8°/o d'hötels

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90,3°/o'.',

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16,5°/o

21°/o

d'8quipements

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publies

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