Troisième Conférence Internationale d’Histoire Économique / Third International Conference of Economic History: Volume 2 [Reprint 2020 ed.] 9783111416922, 9783111052618

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Troisième Conférence Internationale d’Histoire Économique / Third International Conference of Economic History: Volume 2 [Reprint 2020 ed.]
 9783111416922, 9783111052618

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TROISIÈME CONFÉRENCE INTERNATIONALE D'HISTOIRE ÉCONOMIQUE

THIRD INTERNATIONAL CONFERENCE OF ECONOMIC HISTORY

ÉCOLE PRATIQUE DES HAUTES ÉTUDES — SORBONNE SIXIÈME SECTION : SCIENCES ÉCONOMIQUES ET SOCIALES

CONGRÈS ET

COLLOQUES

x

PARIS

MOUTON & C O MCMLXVin

LA HAYE

TROISIÈME CONFÉRENCE INTERNATIONALE

D'HISTOIRE ÉCONOMIQUE

MUNICH 1965 * *

THIRD INTERNATIONAL CONFERENCE

OF ECONOMIC HISTORY

Publié sur la recommandation du Conseil international de la philosophie et des sciences humaines, avec le concours financier de l'Unesco. Honoré d'une subvention de l'État de Bavière.

© 1969, École Pratique des Hautes Études and Mouton et Co.

Printed in France

PRODUCTION ET PRODUCTIVITÉ AGRICOLES (SECTION II)

Responsable

J. MEUVRET (Paris)

PRODUCTION

ET

PRODUCTIVITÉ

AGRICOLES

par Jean MEUVRET (École Pratique des Hautes Études, Paris)

I Problématique et possibilités d'atteintes synthétiques

Toute évaluation de la production est, aujourd'hui, simplifiée, grâce aux publications des services statistiques. Mais il n'en est pas de même dans le passé et, de moins en moins, à mesure qu'on remonte le cours du temps. Le rôle de l'historien apparaît alors comme essentiel. Mais ce rôle ne saurait se limiter à une collection passive de données. Pour qu'une telle collection soit utile, il faut qu'elle soit orientée en fonction d'un certain nombre de problèmes. D'autre part, sans méconnaître l'intérêt des suggestions qui peuvent venir du côté des économistes, il y aurait quelque danger à leur abandonner l'interprétation des résultats obtenus. Cela est vrai de l'étude de la production dans les différents secteurs de l'agriculture. Ce l'est encore plus si on pose les questions encore plus ardues qu'entraîne l'étude de la productivité. Nul n'était plus qualifié que M. Slicher van Bath pour donner un aperçu exhaustif de tout ce vaste ensemble et de son environnement technique, social et économique. On pourra se reporter à la publication intégrale de son rapport. Mais on peut juger de sa densité et

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de son ampleur par la table des matières que nous avons fait reproduire, ainsi que deux brefs extraits. L'intégration du thème proposé dans une analyse économique trouve un exemple dans la communication du professeur Hesse, dans le cas particulier de Baden-Wiirttemberg entre 1939 et 1961. L a production agricole n'est ici qu'un élément d'un développement général, où s'entrecroisent les déplacements démographiques et les réactions réciproques du domaine industriel et du secteur rural. Sans élargir, autant que ces auteurs, le cadre de notre discussion, nous devons poser une double question préalable : celle de la définition de la productivité agricole, et celle de savoir si on peut en espérer des atteintes synthétiques, fût-ce dans un cadre local. Avec M. Jacquart, nous définirons la productivité comme un quotient du produit global par l'ensemble des facteurs nécessités par cette production. Peut-on connaître directement ce quotient, en en trouvant rassemblés tous les éléments pour un lieu déterminé; ou peut-on espérer l'induire de recherches convergentes? La réponse la plus encourageante nous est pour l'instant donnée par notre collègue Gonzalo Anés Alvarez de l'Université de Madrid. Celui-ci conclut en effet son étude très précise des sources disponibles, en déclarant : « Certaines comptabilités permettent l'étude de la productivité. Il est possible de déterminer les coûts de production, salaires, outils et les récoltes obtenues. En appliquant les prix convenables à la recette obtenue (vendue et consommée), on peut étudier les fluctuations de la productivité, et calculer chaque année soit le bénéfice soit la perte de l'exploitation agricole. » Cependant, notre collègue ne nous cache pas que les livres de comptabilité « qui spécifient les dépenses de culture et les récoltes obtenues » sont « peu fréquents ». M. Jacquart est encore plus réservé sur ce point. Mais il croit que les efforts multipliés, comme ceux qu'il a tentés lui-même pour le sud de la région parisienne, dans des fonds d'archives assez divers, permettront par une construction patiente de réunir les éléments épars que seules les comptabilités proprement dites peuvent nous présenter rassemblés. Sur un point cependant, il indique une méthode dont il a fait un usage assez large. Une grande partie des exploitations rurales étant affermées, des séries chronologiques de loyers pour une exploitation déterminée à diverses époques peuvent être constituées. Si l'assiette de l'exploitation n'a pas changé, le mouvement des loyers a une signification qu'on peut interpréter comme symptomatique du mouvement de la productivité. Lorsque les loyers sont en nature et homogènes, on peut directement évaluer leur variation. Lorsqu'ils sont versés en argent ou en divers éléments de qualités variables, il faut évidemment les réévaluer en tenant compte des prix. Nous saisissons ainsi au moins une partie du « produit net », toutes les recettes contri-

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buant à le constituer, et toutes les dépenses à le restreindre. Si la productivité n'est pas vraiment « mesurée », par là son orientation dans le temps se trouve indiquée. Cependant, en attendant que des recherches de ce genre aient été généralisées, on peut examiner production et productivité, quantitativement ou du moins qualitativement, en en étudiant quelques éléments essentiels : les céréales, le bétail, la main-d'œuvre.

II Production et rendements des céréales aux époques anciennes

Les céréales constituent un objet de recherches prioritaire. Il faut entendre par là, dans beaucoup de pays et en particulier dans l'ancienne Europe, les grains panifiables; mais de plus, à l'échelle mondiale, le maïs et le riz. Ces produits étaient la base de l'alimentation. Ils ont eu longtemps un rôle prépondérant dans l'ensemble de l'économie rurale. La recherche des quantités produites semble être le premier résultat à atteindre. Faute de statistiques, quels moyens a l'historien d'obtenir des résultats globaux, même approximatifs? Deux directions semblent possibles. O n peut essayer d'atteindre la consommation. Ainsi, à supposer que la population française ait été d'environ vingt-cinq millions d'habitants vers 1775, et que la consommation des céréales ait été en moyenne, par tête et par an, de 4 hectolitres de céréales panifiables, on peut évaluer la consommation totale à une centaine de millions d'hectolitres. Mais cela suppose évidemment, si on veut en déduire un chiffre de production, la connaissance de la balance des exportations et des importations des grains de même espèce. Dans le cas de la France, il semble qu'il y ait eu compensation entre exportations et importations; et d'ailleurs le calcul sommaire que nous venons d'effectuer s'accorde assez bien avec d'autres informations. Mais que dire d'un pays exportateur comme la Pologne ou importateur comme la Hollande? Il ne semble pas d'ailleurs qu'aucun de nos collègues se soit engagé dans cette voie. Insistons pourtant sur les possibilités d'avenir qu'elle peut offrir. La démographie historique est une discipline en plein développement. Les enquêtes sur les anciennes formes d'alimentation peuvent nous aider à connaître les rations par tête. Enfin, à mesure que progresse le dépouillement des archives fiscales et des archives des ports, il est permis d'espérer connaître mieux les entrées et les sorties de céréales. Une autre direction de recherche est d'essayer d'évaluer les surfaces ensemencées et les rendements. Les historiens de l'agriculture

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appliquent plus souvent leur talent à des données de ce genre. L'étude des assolements devrait permettre de connaître grosso modo la fraction de l'ensemble de la surface cultivée qui était ensemencée en céréales consommables. Mieux encore, les documents d'archives devraient permettre de déterminer pour un lieu précis, la production par unité de surface, c'est-à-dire, le rendement. Sur ce dernier point, plusieurs de nos collègues nous apportent des contributions précieuses. En Pologne, le professeur Leonid Zytkowicz a utilisé les documents comptables (rationes frumentorum) des domaines appartenant à de grands seigneurs et exploités en régie directe (folkwark). Il a ainsi constitué 300 indices particuliers de rendements, dans divers domaines, pour un laps de temps allant du milieu du x v i e au milieu du x v m e siècle. Le point qui nous paraît devoir être souligné, est l'usage systématique qui est fait du rapport : productionsemence, c'est-à-dire, de l'expression du rendement par un chiffre de tant à la semence. Fort heureusement, le professeur Éytkowicz rappelle un fait banal, mais de grande portée ; c'est que « la proportion semences-superficie ensemencée dépendait de la fertilité du sol ». Je me permettrai d'insister sur ce fait et sur la difficulté de l'interpréter. Si l'enseignement des agronomes des pays d'Europe occidentale à partir du x v m e siècle avait été suivi d'effet, on aurait dû semer clair dans les terres riches, et dense dans les terres faibles. Mais, pour la France, force est de constater que la pratique est restée toute différente. Voici deux témoignages. L ' u n est l'enquête agricole de 1862. De tous les départements, celui de la Seine a la moyenne la plus élevée de rendement de froment : 25,90 hectolitres à l'hectare. L a semence moyenne y est évaluée à 3,03 hectolitres. L a moyenne la plus basse de rendement est celle de la Lozère : 9,22 hectolitres. O r , la semence est de 1,77 hectolitre. L'autre témoignage est fourni par une enquête de 1716. Dans une même région, celle de ChâteauThierry, on distingue des « terres médiocres et mauvaises » et des terres « bonnes et fortes ». O r , les semences étaient deux fois moins fortes dans les premières que dans les secondes. Vérité dans un climat, erreur ailleurs ? Selon la réponse qu'on pourra faire à cette question, les écarts en fait de rendements, non seulement d'une région à l'autre, mais d'une exploitation à l'autre, seront accentués ou diminués. Pour une évaluation globale, si importants que soient ces écarts dans l'espace, ils sont plutôt moindres que ceux qui se produisent selon les années, d'une récolte à l'autre, « dans les mêmes biens ». Fort raisonnablement, le professeur 2ytkowicz nous met en garde contre l'usage de la moyenne arithmétique. Il préfère grouper ses 300 indices selon un tableau de fréquence. Les récoltes ordinaires, qui représentent 63 % de l'ensemble, fournissent des rendements entre 2 et 4 à la semence. Notre collègue pense que ce résultat est encore valable

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pour le xvin e siècle, puisqu'il cite une évaluation officielle pour les biens royaux en Petite Pologne, à la date de 1789. Le rendement était de 3,3 par rapport à la semence. Il pense que cette donnée était valable pour l'ensemble de beaucoup de pays de l'Europe centrale. Le travail statistique le plus considérable qui nous soit présenté sur ce sujet, nous vient d'un historien hongrois, M . le professeur Lâszlo Makkai, de Budapest. Ce sont aussi des comptabilités de grands domaines, situés en différentes régions de la Hongrie, qui ont permis le calcul par phases approximativement quinquennales. Pour chacune de ces phases, nous avons les rendements du blé, du seigle, de l'orge et de l'avoine, pour chaque groupe étudié. Rendements à la semence, dont les chiffres du premier « barème » concordent remarquablement bien pour le xvii e et le xvni e siècle avec ceux obtenus pour la Pologne. Mais le travail de M . Makkai, s'il laisse de côté le x v i e siècle, s'étend sur la première moitié du xix e . La statistique par phases sert à suivre l'évaluation historique. C'est un souci analogue qui apparaît dans la note de M. Le Roy Ladurie sur les rendements du blé en Languedoc de la fin du xvi e siècle à 1825. Le résultat en est une évaluation à 4 fois la semence « au moins » durant un siècle et demi jusqu'en 1720 ou 1730 environ. Durant une phase d'essor de 1725 à 1825, on serait passé au coefficient 6. O n remarquera cependant que des résultats de ce genre reposent sur l'hypothèse, d'ailleurs justifiée en fait dans le présent cas, d'une quantité de semences invariable d'une époque à l'autre. Si on envisage seulement la production, une atteinte relativement directe et assez sûre est fournie par les dîmes. O n sait que les céréales étaient toujours soumises, sans exception, à la différence d'autres produits, à la dîme ecclésiastique. Si la quotité de celle-ci variait beaucoup d'un lieu à l'autre, elle ne changeait que rarement à travers le temps. La quotité étant généralement aisée à connaître et le territoire des paroisses étant fixe, on a, pour la production des céréales, une donnée globale dont les variations chronologiques sont intéressantes. Mais on n'atteint ainsi la productivité céréalière, même localisée, que si on suppose immuable la surface cultivée. A vrai dire, peu d'auteurs cherchent à chiffrer la production globale, fût-ce celle des seules céréales. Si les rendements les intéressent, c'est qu'ils y voient un test de progrès ou de stagnation. Ainsi se trouve abordée d'un certain biais la productivité. Mais est-ce là vraiment la productivité agricole?

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III L'élevage, élément de la productivité U n trait fondamental de l'ancienne agriculture du Japon est formulé ainsi par M . le professeur Araki : « Il n'y avait pas d'élevage proprement dit et, par conséquent, pas de combinaison de l'agriculture et de l'élevage. » Cette combinaison nous paraît par contraste caractéristique de l'agriculture européenne et avoir joué longtemps un rôle essentiel dans l'économie rurale des États-Unis d'Amérique. A partir de cette constatation, on peut se placer à deux points de vue. O n peut essayer de chiffrer les produits de l'élevage et s'efforcer d'en suivre le développement. Mais on peut aussi considérer l'élevage en fonction de l'utilisation du sol et de son intégration à l'ensemble de la productivité. Ici encore la statistique globale des animaux fait défaut à haute époque. Nous avons cependant des éléments de recensements partiels, en France, dès la fin du x v n e siècle et plus encore au x v m e . L'enquête de Lavoisier sur la Richesse territoriale en 1790 donne des chiffres qui peuvent servir de point de départ pour des confrontations utiles avec l'état postérieur et antérieur. Après tout, il est relativement plus facile de compter les bêtes que d'évaluer exactement les récoltes. Mais les animaux des siècles passés différaient sensiblement de ceux que la zootechnie a réussi à créer et à répandre. Le « poids vif », élément décisif pour la production de la viande, n'est pas le seul à considérer. L a quantité et la qualité des laines fournies par les moutons peuvent différer considérablement, et dans un sens qui n'est pas le même que celui de la fourniture de la viande. Pour les bovins, les progrès de la force de travail ne s'accordent qu'approximativement avec les soucis de l'engraissement. L a fourniture de lait par les vaches est encore autre chose. Sur ce dernier point, nous avons la chance d'avoir en M . Fussell un connaisseur averti. Sa communication nous donne sur l'économie laitière un aperçu particulièrement instructif. Il nous permet, pour une branche de production dont l'importance a été croissante, de suivre les progrès techniques et d'en mesurer les résultats, en Angleterre, Irlande, Allemagne et France. L a rareté des sources ne doit pas nous cacher l'ancienneté de pratiques de nature à améliorer le bétail. Dès la fin du x v i e siècle, une sélection avait commencé. Mais elle était le fait de grands personnages et n'était pas à la portée de modestes agriculteurs. D ' u n autre côté, un élevage productif de lait abondant supposait une nourriture riche, notamment en hiver. Seule l'extension des prairies artificielles a fourni une solution satisfaisante à cet égard. O n sait comment, connus depuis l'antiquité, le sainfoin, la luzerne

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et le trèfle ne furent utilisés que lentement et progressivement. Us tenaient déjà une grande place dans les Pays-Bas, lorsque leur renommée fut propagée en Angleterre, au milieu du xvii e siècle, par les écrits de Sir Richard Weston. Lentement d'abord, puis plus rapidement, celle-ci s'étendit encore. L a grande audace de l'agriculture anglaise au x v m e siècle fut d'en faire, de même que celle des plantes-racines, la culture en plein champ sur des surfaces assez importantes, jusqu'à rompre l'assolement traditionnel, en supprimant les jachères. Le fait de pouvoir élever dans de bonnes conditions le bétail même à l'étable, en hiver, a permis d'autres progrès. Les grands éleveurs qui ont créé les variétés modernes d'animaux sont aussi entrés en scène, au XVIII® siècle. Pour ce qui est spécialement des produits laitiers, d'autres innovations techniques ont joué, y compris l'usage d'instruments permettant un barattage plus rapide du beurre. Plus tard, de meilleurs transports ont offert la possibilité d'une consommation plus abondante en lait frais. On peut évaluer le progrès accompli par les rendements annuels de chaque vache laitière, entre 1600 et 1900, donc trois siècles. Il a été du simple au double. Des recherches de ce genre peuvent donc permettre de chiffrer peu à peu l'augmentation des produits de l'élevage à travers l'époque moderne. Mais la « combinaison » de l'élevage et de la culture des terres comporte une implication de secours et de limitations réciproques qui nous mène au cœur de l'histoire de la productivité dans les pays où cette combinaison a été réalisée. Dans son étude de la croissance de la productivité dans l'agriculture américaine de 1840 à 1910, le professeur William N. Parker, de l'Université de Yale, étudie ce qu'il appelle lui-même « un curieux problème ». Ce qui nous paraît le plus caractéristique dans ce problème, c'est le fait que la substitution du fourrage cultivé à la pâture « sauvage » doit être considérée dans un bilan de la productivité, comme un facteur « négatif ». En effet, avant 1860, les bois et les pâturages naturels fournissaient peut-être la moitié de la nourriture animale. Une importante portion du travail « libérée » par les progrès dans la production des récoltes a été absorbée par la croissance du fourrage cultivé par rapport au pâturage sauvage (wild.). Il est clair que l'ancien élevage, qui laissait plus ou moins vagabonder les troupeaux, supposait des espaces libres. Il demandait en revanche un faible travail. Si on compte la productivité en établissant le rapport entre l'objet produit et les dépenses d'énergie qu'il a coûté à produire, on peut dire que le nomadisme lui-même connaît une productivité qui est loin d'être négligeable. Pour restreindre la portée de cette formule un peu paradoxale, il convient de faire intervenir la surface cultivée ou gaspillée. L a densité de l'occupation du sol est le facteur dominant de son utilisation. Aux possibilités de culture

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intensive qu'offrent les rizières, correspondent des entassements de populations qui ignorent le bétail. Mais des agriculteurs sédentaires peuvent ne cultiver qu'une partie du sol et utiliser le reste en divers pâturages. S'il s'agit de prés naturels riches, où l'herbe pousse spontanément assez haute, leur usage était jadis presque exclusivement réservé aux bovins. En revanche, les pacages pauvres et secs convenaient particulièrement aux moutons qui avaient surtout besoin de beaucoup d'espace à parcourir. Il en résulte que le mouton a été longtemps un facteur limitatif des surfaces ensemencées. Non seulement il occupait les terrains les moins productifs, mais il était l'usager habituel de la terre laissée en repos par les assolements, c'est-à-dire de la jachère. Dans l'Angleterre de la fin du Moyen Age et du début de l'époque moderne, il a été le concurrent de la culture. Le cheval et le bœuf étaient associés étroitement au travail agricole, comme bêtes de trait et comme fournisseurs de la grosse masse du fumier. Leur amélioration en qualité encore plus qu'en quantité a donc favorisé l'augmentation de la production des céréales et c'est pour eux que la nouvelle agriculture au x v m e et au xix e siècle a multiplié les soins donnés aux prairies et surtout étendu les cultures propres à leur alimentation, aux dépens des jachères. Mais cette association fructueuse a pu changer de caractère ou bien même être rompue. M . William Parker nous dit combien, à côté d'une agriculture qui avait diminué les heures de travail nécessaires pour la production des céréales, l'élevage à base de fourrages cultivés a, au x i x e siècle, augmenté les charges des exploitations. Il y a plus : dans les climats humides, les bonnes terres à blé peuvent aussi, sans efforts, porter des prairies riches. L'élevage du gros bétail peut s'y substituer à l'agriculture traditionnelle. A la fin du x v m e siècle, en Normandie, ce phénomène est clairement décrit par le professeur Davies qui a étudié de façon approfondie le département français du Calvados. L a diminution de l'emploi dans la population agricole, avec toutes ses conséquences sociales, est alors la rançon de l'augmentation de la productivité à base herbagère. Dans l'état d'équilibre qui a longtemps régné dans une grande partie de l'Europe, sous la forme de l'assolement triennal, bien des nuances sont à discerner, que traduisent assez bien la prédominance de tel ou tel type d'élevage. Le docteur Saalfeld nous en donne une esquisse où ce facteur est dégagé pour l'ensemble de l'Allemagne, autour de 1800. Simplifions sans trop de caricature. A l'Ouest, au Sud-Ouest et dans les riches pays du Centre, là où l'intensité de la production était la plus forte, c'était l'élevage des bovins. Au-delà de l'Elbe, avec une agriculture « relativement extensive », prédominait l'élevage ovin. Retenons également la correspondance observée avec la densité plus ou moins grande de la population.

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IV Le facteur humain et ses cadres sociaux

Car c'est en définitive le travail humain qui utilise plus ou moins intensivement les ressources naturelles. L'étude du travail humain suppose celle de l'adaptation d'une population plus ou moins dense à un espace déterminé, mais met aussi en jeu l'organisation de ce travail en fonction des conditions sociales. Là où la densité de la population rurale est forte, c'est-à-dire la surface disponible par tête d'habitant faible, le travail humain est tout, en quantité et en qualité. L'alimentation indispensable ne peut être assurée que par de hauts rendements. Cet artisanat de la culture a ses titres de noblesse technique. M. le professeur Araki et nos autres collègues japonais Oishi et Tsuda nous montrent comment, dans leur pays, l'extrême densité de la main-d'œuvre et l'étroitesse des exploitations (i ha) se sont, même avant l'ère de Meiji, accompagnées de progrès en plusieurs secteurs. Dès le xvu e siècle, on note l'amélioration du système d'irrigation. Mais au xvm e et au xix e siècle s'y ajoutent la sélection des semences, des fumures plus efficaces et même des innovations dans l'outillage, plus perfectionné, quoique demeurant manuel. D'autre part, d'autres cultures non vivrières apparaissent avec une certaine économie d'échanges, notamment dans la région d'Osaka. Toute autre est l'innovation technique lorsque l'espace ne manque pas. Une civilisation industrielle qui peut absorber la main-d'œuvre « libérée » par la machine peut se tourner aisément vers cette solution, lorsque l'espace disponible est assez considérable et que les exploitations atteignent des dimensions suffisantes. Une productivité plus haute peut être alors recherchée, moins dans l'augmentation des rendements, que dans l'économie des forces productives. Que la géographie soit ici une dominante de l'histoire, nous le voyons bien par le fait que c'est un historien soviétique, M. le professeur Arutjunjan, qui a choisi comme thème de sa communication le « machinisme » en U.R.S.S. ; cependant que celui-ci se trouve parmi les éléments fondamentaux de l'analyse faite par M. William Parker de l'histoire agricole des États-Unis. On peut remarquer qu'aussi longtemps que l'augmentation de la population ne manifeste pas des exigences trop grandes, l'extension des surfaces défrichées et cultivées peut s'allier à un travail mécanique. La recherche des quantités globales avec un travail humain restreint est le point essentiel, plutôt que le souci de très hauts rendements. Les progrès du secteur industriel, non seulement absorbent la main-d'œuvre laissée disponible, mais aussi assurent, par ses fournitures d'outillages et de techniciens, un esprit nouveau

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dynamique et scientifique à l'ensemble de la nation. Par une « qualification » qui rapproche le paysan de l'ouvrier, il opère une fusion des deux éléments; point fortement noté par M . Arutjunjan. Du point de vue aussi bien social que technique, l'importance de ces transformations apparaît d'autant mieux que grâce à M . le professeur Yatsounski nous pouvons suivre depuis le xvi e siècle jusqu'à 1917 l'évolution de la production agricole en Russie. Or, c'est durant longtemps, par l'extention géographique des zones cultivées, que cette production a été augmentée. Très différent est le cas des pays où la production globale a été stimulée par l'exportation, sans que le rendement ait changé, mais seulement par extension des surfaces. C'est en définitive le bas prix d'une culture très extensive qui a permis à l'Argentine de vendre au dehors une grande partie des récoltes qui ont augmenté considérablement en surface, dans la seconde moitié du xix e siècle et au début du x x e siècle, sans que leur rendement ait évolué. Tel est le résultat du travail de Mme Haydée-G. de Torres. Ne peut-on ici faire un rapprochement avec l'exportation du blé dans l'ancienne Pologne? Mais, ici, comme le montre le professeur Zytkowicz, la question est dominée par un problème social. Le régime de la corvée fournissant la main-d'œuvre nécessaire à la grande propriété, les frais proprement dits de production se réduisaient presque à la semence. On obtenait ainsi à des prix de revient très faibles, un blé qui était acheté bon marché par les exportateurs. Ces grands propriétaires ont donc poussé à l'extension de la culture et essayé d'aggraver la corvée, plutôt qu'ils n'ont cherché à perfectionner les méthodes de culture. D'autre part, il est à remarquer que les gains réalisés ainsi étaient en grande partie dépensés « en échange des produits de luxe,... très souvent de provenance étrangère, ou bien thésaurisés dans les trésors familiaux », et par conséquent « ne favorisaient la vie économique du pays que dans une mesure très faible ». Il est clair, qu'avec des nuances plus ou moins importantes, nous avons là le problème du frein apporté par le féodalisme au progrès rural, dans la Hongrie étudiée par M . Makkai, aussi bien que dans l'Estonie et la Lettonie étudiées par Mme Leida Loone, du moins jusqu'au milieu du xix e siècle. La seconde moitié du xix e siècle a vu en principe une émancipation des paysans vis-à-vis des seigneurs. En fait, dans les pays baltiques, la prépondérance de l'ancienne classe a changé de forme juridique mais s'est maintenue sous forme économique. M . Miklôs Szuhay, en étudiant le développement de la production et des labours dans la Hongrie, de 1867 à 1914, nous donne un tableau relativement favorable à l'évolution capitaliste pour les dernières décennies du xix® siècle. Mais ce progrès se fit surtout par « l'élargissement des terres ensemencées ». Au début du x x e siècle, la

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classe dirigeante hongroise ne se risque ni à mécaniser l'agriculture ni à engager des dépenses d'engrais chimiques. M . Szuhay voit à cela deux principales raisons : d'une part, l a facilité à écouler cher la production sur les marchés autrichiens et, d'autre part, l'existence d'une réserve de main-d'œuvre à bon marché. L'histoire de la production agricole dans les pays tchécoslovaques à partir du x v i e siècle j u s q u ' à la première guerre mondiale, présentée p a r M . le professeur M a t e j e k , comporte une « périodisation » plus complexe. E n réalité, malgré certaines régressions, il semble bien q u e la paysannerie moyenne n ' a j a m a i s été écrasée p a r l a noblesse. L a variété des débouchés q u i se sont offerts de bonne heure à des formes différenciées de production semble, dès le x v i e siècle, donner un caractère original à l'agriculture. A partir de 1848, le système corvéable étant aboli, ces pays entrent tout à fait dans u n système d'économie de marché. Les progrès notés p a r M . M a t e j e k , rapprochent certainement le cas de la Tchécoslovaquie de celui des pays d ' E u r o p e occidentale. V u d'Angleterre, le grand propriétaire apparaît c o m m e un pionnier du progrès. Citons notre collègue R . A . C . Parker, de l'Université d ' O x f o r d , a u sujet des landlords du x v m e et du début du x i x e siècle. « Les landlords n'étaient pas des rentiers passifs. Ils investissaient dans leurs fermes ». Par les remaniements territoriaux, opérés grâce aux « enclosures », des exploitations nouvelles ont été créées; mais il ne fait pas de doute dans ce cas que la grande propriété a été ici l'instrument d'une agriculture plus intensive et d ' u n e productivité très accrue. L e capitalisme « bourgeois » que l'administration russe des dernières années du régime tsariste a rêvé d'implanter dans l'agriculture s'inspirait de la conception b e a u c o u p plus utopique, chère à b e a u c o u p de démocrates français, à savoir que le développement d'une classe paysanne à base de propriétés individuelles pourrait combiner u n renforcement du régime et un progrès technique. Tentative de courte durée, à laquelle la révolution de 1917 a mis fin, mais qui ne s'accordait ni avec la tradition communautaire de la paysannerie, ni avec l'exigence d'organismes ruraux puissants, que le socialisme a p u créer. Telle apparaît cette brève mais significative histoire dans l'exposé de notre collègue A n f i m o w . L'ensemble du monde d ' a u j o u r d ' h u i porte encore les traces des empires coloniaux d'autrefois. C e p e n d a n t les régimes coloniaux ont présenté dans le temps et dans l'espace de grandes variétés. Et les problèmes des pays libérés, qui forment grosso modo le « Tiers M o n d e » d'aujourd'hui, sont assez divers. Il n'a pas été possible de réunir à M u n i c h b e a u c o u p de spécialistes valables dans cet immense domaine. C e p e n d a n t d e u x d'entre eux nous ont apporté leur concours. M . Berthe est u n spécialiste du M e x i q u e colonial. Nous retiendrons de son analyse une v u e q u i est peut-être généralisable. Les colonisateurs

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s'intéressaient surtout à l'exportation et à la consommation urbaine. Une agriculture indigène subsistait, essentiellement vivrière, pratiquée par les Indiens. « Restés fidèles, pour l'essentiel, aux techniques agricoles préhispaniques, ils n'emploient que très rarement des animaux de travail. » Ce Mexique colonial appartient à un passé déjà lointain. Vieille colonisation, mais récemment émancipée, l'Inde est au premier plan de l'actualité. Sous le régime anglais, comme nous le montre M . Thorner, la production agricole a progressé entre 1891 et 1947, mais non pas suffisamment par rapport à la croissance de la population. Cette croissance équilibrait cependant à peu près la poussée démographique, sauf dans les pays groupés sous le nom de Bengale. Ici, avec une chute de la production du riz, surtout depuis 1914, une situation critique s'est produite. Les statistiques récentes sur la production des graines alimentaires permettent d'évaluer les progrès de l'Inde et du Pakistan, totalisés à 50 % sur la base de 1939. Les efforts d'organisation et de propagande, faits depuis l'Indépendance, réussiront-ils à accroître rapidement ces premiers résultats? Plutôt que de tendre à une conclusion, qu'il appartiendra aux débats de dégager, nous avons préféré résumer, en les enchaînant, les résumés fournis par nos collègues. Plusieurs autres coordinations auraient été possibles. C'est à eux d'y réfléchir.

LA PRODUCTIVITÉ LES PROBLÈMES DE LA SOCIÉTÉ EN EUROPE

AGRICOLE

FONDAMENTAUX PRÉ-INDUSTRIELLE OCCIDENTALE

(UNE ORIENTATION ET UN PROGRAMME)

par B . H . SLICHER VAN B A T H

(Wageningen - Pays-Bas)

Nous donnerons ici deux extraits de l'important rapport de M. Slicher van Bath : 1. La table des matières de toutes les questions traitées. 2. Le texte de deux paragraphes qui nous paraissent plus particulièrement en relation avec ce qui nous a été demandé. Jean

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I L A TABLE DES MATIÈRES I.

INTRODUCTION I.

Terminologie

2. Constantes

et

variables

I I . LES ASPECTS AGRICOLES DU DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE 1. Facteurs

importants

dans la production

agricole

2. Influence des circonstances naturelles darts la production

agricole

a) Influence du temps et du climat sur les récoltes des céréales. b) Influence des maladies des végétaux et des animaux. 3.

Changements

dans la production

agricole

a) La superficie cultivable. b) Les facteurs de rendement. c) Le cheptel. 4. Moyens pour une augmentation

a) b) c) d) e)

de la production

agricole

Nouvelles méthodes agricoles. La fumaison. Machines et matériels agricoles. Le travail. Mentalité des paysans.

5. Moyens

de mesure des aspects agricoles du développement

économique

I I I . LES ASPECTS SOCIAUX DU DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE 1.

Population

2. Structure

sociale

a) Structure professionnelle. b) Stratification sociale. 3.

Nourriture

4. Moyens

de mesure des aspects sociaux du développement

économique

I V . LES ASPECTS DE L'ÉCONOMIE DE MARCHÉ DANS LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE 1. Production 2. Prix

pour le

des céréales

marché

25

B. H. SLICHER V A N BATH

3. Relation entre les prix des céréales et les autres prix 4. Diverses formes

de marchés

a) Le marché local ou régional. b) Système de marchés interrégionaux. c) Le marché international. 5. Moyens de mesure des aspects de l'économie de marché dans le développement économique V.

INFLUENCE

DES

DÉVELOPPEMENT

FACTEURS

DE

L'ÉCONOMIE

DE

MARCHÉ

SUR

LE

AGRICOLE

1. Influence des facteurs

de l'économie de marché sur la production

agricole

a) Superficie cultivable et exploitation du sol. b) Facteurs de rendement. c) Agriculture et élevage. 2. Influences des facteurs de l'économie de marché sur les moyens destinés à augmenter la production agricole

a) Nouvelles méthodes agricoles. b) Machines et matériels agricoles. c) Mentalité des paysans. VI.

INFLUENCE

DES FACTEURS DE L'ÉCONOMIE DE MARCHÉ SUR LE

DÉVELOPPEMENT VII. VIII.

SOCIAL

EXPANSION ET CONTRACTION AGRICOLES CONCLUSION

26

B . H . SLICHER V A N

BATH

II L E TEXTE DE DEUX P A R A G R A P H E S DU C H A P I T R E

II

3. Changements dans la production agricole A u cours de l'histoire, on remarque une tendance générale à l'augmentation des productions agricoles. Cette ligne ne fut nullement montante continuellement, mais fut entrecoupée par des périodes de stagnation ou de baisse à la production. Dans ce qui précède, on a constaté que des huit facteurs nommés, surtout la superficie cultivable, les facteurs de rendement des céréales, le nombre de têtes de bovins et de moutons, étaient variables. Les autres facteurs, par contre, étaient restés constants. a) La superficie cultivable L'extension de la superficie cultivable par les défrichements se rencontre déjà à l'époque carolingienne, du x i e au xrv® siècle, de la fin du x v e au x v n e siècle et après 1750. Dans presque tous les pays d'Europe occidentale, on rencontre ces phases de défrichement. U n recul de la superficie cultivable peut être constaté dans différentes régions à la fin du Moyen A g e (Wüstungen) et, ceci peut-être à un degré plus faible, au x v n e siècle et au début du x v m e siècle. Ce sont aussi les périodes durant lesquelles on entend parler d'érosion et de sables mouvants. Les défrichements n'entraînent pas nécessairement une augmentation de la production des céréales, du fait que ces nouvelles terres peuvent très bien être employées comme pâturages ou comme terres de reproduction des végétaux de commerce. L'augmentation de la production agricole n'est pas uniquement le fait de l'extension de la superficie cultivable, mais aussi de l'amendement du sol et de l'amélioration des terres de culture par un meilleur drainage. A v a n t 1800, ces facteurs ne jouaient qu'un rôle minime. b) Les facteurs de rendement Par l'utilisation d'environ 12.500 facteurs de rendement, on constate qu'il y a de grandes différences dans le développement des régions européennes. Alors que pour la période allant de 1200 à 1800, dans quelques pays de l'Europe occidentale tels que l'Angleterre, les Pays-Bas et la Belgique, on assiste à un triplement; peu de changement a eu lieu en Europe orientale. Les parties nord, sud et centrale

B. H. SLICHER V A N

27

BATH

de l'Europe prennent une position intermédiaire. Les facteurs de rendement moyens étaient pour le blé, le seigle et l'orge : PAYS o u RÉGION

NIVEAU

A B

C

D

PÉRIODE

RENDEMENT

(Semence

Angleterre 1200-1249 France avant 1200 Angleterre, Pays-Bas 1250-1499 France 1300-1499 Allemagne, Scandinavie 1500-1699 Europe orientale 1550-1820 Angleterre, Pays-Bas 1500-1699 France, Europe du Sud 1500-1820 Allemagne, Scandinavie 1700-1820 Angleterre, Belgique, Pays-Bas. 1 7 5 0 - 1 8 2 0

3.7 3.0 4.7 4.3 4.2 4.' 7.0 6.3

6,4 10,6

L'augmentation de la production, calculée après déduction d'une unité pour les semences, est de presque 60 % en passant d'un niveau bas à un niveau haut. Pour autant que les données le permettent, on assiste à la fin du Moyen Age et pour la période de 1600 à 1750 à un recul des facteurs de rendement. Calculé d'après le facteur moyen de rendement du blé, du seigle et de l'orge, le recul est le suivant : PAYS OU RÉGION

Angleterre

Angleterre Angleterre, Pays-Bas Allemagne, Scandinavie . . Europe orientale

PÉRIODE

RENDEMENT MOYEN

POURCENTAGE

1250-1299

4,7

16%

^ôo-^g

5.3

14%

1400-1449

4,6

1300-1349

(Semence = 1 ) 4,1

DE RECUL*

I55°"i599

7.3

'3%

1550-1599

4,4

18 %

i55 -!599

4.5

17 %

1650-1699

3,9

1600-1649 1700-1749 0

6,5 3,8

* Pourcentage calculé après déduction d'une unité pour les semences.

c) Le cheptel Sur l'importance du bétail, on a beaucoup moins de données. Dans la première période du Moyen Age, le menu bétail (moutons, chèvres) l'emportait. Peu à peu il y a eu un décalage en faveur du gros bétail (bovins, chevaux). Tout indique qu'à la fin du Moyen Age et au x v u e siècle, en raison du passage de la culture à l'élevage, le nombre des bovins et des moutons a augmenté. Au cours des temps, un changement s'est opéré quant au but de l'élevage des bovins. A l'origine, on faisait l'élevage des bovins pour les peaux ; plus tard, la

28

B. H. SUCHER VAN BATH

production de la viande venait au premier plan, ensuite le beurre et le fromage, et de nos jours le lait. L'extension de la superficie des terres cultivables et en même temps l'accroissement du cheptel étaient jadis en contradiction. Il y avait équilibre entre les terres de culture et les pâturages et prairies de fauchage pour le bétail. Par le défrichement, la superficie disponible pour le bétail diminua. Ceci allait conduire à une diminution du bétail, ce qui eut pour résultat une diminution des engrais naturels pour les terres de culture. Une réduction du fumage eut irrémédiablement pour suite une baisse à la production. Ce n'est que par l'application de nouvelles méthodes dans la culture et dans la nourriture du bétail, que ce cercle vicieux put être brisé.

4. Moyens pour une augmentation de la production agricole a) Nouvelles méthodes agricoles O n a tenté par toutes sortes de moyens d'augmenter la production agricole. Dans la culture des céréales, le facteur de rendement pouvait être relevé, si on arrivait à utiliser moins de semences. Cela pouvait être possible si on pratiquait la méthode de la culture en sillons; une idée qui prit seulement forme au x v m e siècle et qui a trouvé son application surtout après 1800. U n e autre méthode fut de semer plus tôt, en automne, les céréales d'hiver, ce qui permit d'obtenir, au début du x i x e siècle dans la Frise orientale, une élévation du facteur de rendement de 10,0 à 11,0. De nouveaux systèmes de culture donnèrent également de meilleurs résultats. Il est connu que la culture des papilionacées améliore la fertilité du sol. De plus, en alternant la culture des céréales avec celle des plantes fourragères, il fut possible d'entretenir plus de bétail, ce qui permit d'obtenir une augmentation du fumage des terres de culture. Dans les Flandres, on trouve des traces de telles méthodes datant peut-être du x m e siècle et avec certitude du x i v e siècle. U n autre système était l'alternance périodique de l'emploi du sol comme terres de culture (5 ans) et comme pâturages (5 ans). Dans le Slesvig-Holstein, par l'application de ce système, le facteur de rendement s'éleva vers 1700 de 4,8 à 6,6. Une utilisation plus intense du sol pour la culture des fourrages et des plantes de commerce et une élévation du facteur de rendement des céréales n'entraînent pas nécessairement une augmentation à la production annuelle des céréales. Par ce changement dans l'utilisation du sol, la superficie utilisée pour les céréales peut être diminuée. U n e amélioration put être également obtenue par la culture des

B. H. SUCHER V A N BATH

29

végétaux pouvant partiellement remplacer le blé dans la nourriture. O n cultiva de plus en plus le sarrasin, le riz et le maïs à partir du x v i e et du x v n e siècle. Les pommes de terre devinrent une nourriture importante au xvm® siècle. L a culture de la pomme de terre présenta l'avantage qu'à superficie égale on pouvait fournir 2 à 3 fois plus de gens qu'avec le grain. b) La fumaison Vers la fin du Moyen Age, on obtenait déjà de meilleurs rendements, comme on constate pour quelques fermes de l'Artois au x i v e siècle, ceci par une meilleure fumaison. D'après des données provenant des comptes de Robert Loder, un paysan de Harwell, près d'Oxford, au début du x v i i e siècle, il est montré qu'une augmentation dans le rendement des récoltes est la suite directe d'un fumage plus intensif. Pour obtenir un fumage suffisant, il était nécessaire de faire venir des engrais du dehors. Les frais d'achat et de transport pouvaient être récupérés seulement si les prix des céréales étaient relativement favorables et si les débouchés, pour le grain produit dans les grandes villes voisines, étaient assurés. c) Machines et matériels agricoles Les raisons pour lesquelles de nouvelles machines agricoles sont mises en service, peuvent être diverses : économie de travail, diminution des frais et augmentation du rendement. L a ferme familiale prédominait en Europe occidentale; or, le fermier ne considérait pas comme dépense son travail et celui de sa famille. O n s'efforçait surtout d'augmenter la production ; celle-ci on pouvait l'obtenir, entre autres, en labourant plus profondément et par ensemencements en sillons. L'attention se porta donc spécialement sur l'amélioration de la charrue, où la transformation importante fut de remplacer les pièces en bois par des pièces en fer ou en acier. Les prix relativement élevés du fer et les imperfections techniques dans la préparation du fer constituaient des entraves sérieuses pour l'amélioration de la charrue. Parfois, l'utilisation de nouvelles machines et de nouveaux outils était nécessaire pour convertir une production devenue plus élevée. Les barattes subirent une amélioration au x v i i e siècle dans quelques régions d'élevage, quand une augmentation à la production du lait se réalisa. Le barattage à l'ancienne manière ne permettait plus de traiter le lait à une vitesse suffisante. Les batteuses firent leur apparition au xix® siècle, après une augmentation du rendement en céréales.

3o

B. H. SLICHER V A N BATH

d) Le travail L e travail était un facteur important quant à l'augmentation de la production. A v a n t 1800, on ne disposait pas de sources mécaniques d'énergie dans l'agriculture. Les machines à vent et à eau étaient employées pour le traitement des produits agricoles, mais l'énergie ainsi obtenue n'était pas transportable, de sorte que l'emploi de la force du vent et de l'eau était impossible pour la production. O n ne disposait que de la main-d'œuvre et de la traction animale (essentiellement des chevaux et des bœufs). Une grande amélioration fut l'utilisation du collier à l'attelage des chevaux au i x e ou x e siècle, ce qui permit d'obtenir le maximum de force dans la traction des chevaux. L a main-d'œuvre et la traction animale sont des éléments qui sont restés presque constants avant 1800 : un homme pouvait labourer de 0,3 à 0,4 ha par jour, faner 0,4 ha, moissonner 0,2 ha à la faucille et battre environ 100 litres de blé. U n cheval pouvait tirer un chariot contenant une charge de 300 kg environ. Ce ne fut qu'après 1800 que ces rendements purent être dépassés après l'amélioration des machines agricoles et des races chevalines. O n peut établir qu'avant 1800 l'énergie disponible pour l'agriculture était directement proportionnelle au nombre de gens et de bêtes de somme. Une augmentation en nombre n'eut pas toujours une augmentation proportionnelle de production pour conséquence. Il y a un rapport étroit entre la superficie de la ferme et la quantité de main-d'œuvre que l'on y trouve. Surtout pour les petites fermes, il était difficile d'obtenir un équilibre tout à fait favorable. U n potentiel de « travail non effectué » aura souvent existé dans ces fermes. D'ailleurs, il est connu que jadis il y avait dans les fermes des personnes qui ne pouvaient pas prendre part, ou que partiellement, aux activités rurales, tels les malades, les infirmes, les simples d'esprit, etc. Le nombre de chevaux que l'on possédait à la ferme était également le plus souvent trop élevé, comme par exemple en Overijssel, Veluwe, en Alsace, dans le diocèse de Ratzbourg, le comté de Henneberg et la Finlande occidentale.

DAIRY

FARMING

1600-1900

by G. E. FUSSELL (Great

Britain)

One thing is as certain as it is obvious: no man can be a dairyfarmer unless he has a herd of cows, or the alternative of milking other animals, sheep mainly, goats, reindeer, horses or camels, less frequently. Cows, with sheep in decreasing importance except in some parts of Southern Europe, are the major source of milk supply. The dairyfarmer's cows must be in milk for some part of the year and therefore must first become mothers. There must be a bull to beget the cows, and of course the animals must be fed and housed in inclement weather. All this is admittedly quite elementary but is an essential preliminary statement. It is provoked partly by an opposite question : "how did the dairy farmer obtain his cows?". Doubtless, some were able to buy them, or received them by inheritance or otherwise; but an arrangement known in the SouthWest of England as "letting dairies" was made in very many widely different and widely separated areas. In Dorset, England, the system was concisely described by John Claridge in 1793. It was not known in other parts of the country. The cows were let out by the farmer to a dairy-man at a fixed price. The farmer provides a certain number of cows for one year, commencing at Candlemass, February the 2 nd , at a fixed sum. He feeds fodders and supports a specific number

32

G. E. FUSSELL

throughout the year. He finds a house for the dairy-man to live in, and allows him to keep as many pigs and poultry as he thinks proper, to carry his butter, etc., which, by producing offs pring yearly, is considered the material advantage to the dairy-man. The dairy-man paid an agreed sum as rent for each cow, and sold the produce, butter, skin, cheese, at the best price he could get. A somewhat similar system was still in vogue in the South of Ireland until the 1940's, when it was rapidly dying out. The owner of a farm who was unable or unwilling to work it himself, stocked it with cows and found a dairy-man to work it as a dairy-farmer. The dairy-man paid a per capita rent for each cow for a year, he was allowed to break up enough land to provide his family with potatoes, and to put up enough grass to make hay to keep the animals over the winter. The tenancy was renewable annually, usually in the first few months of the year. In 1776, the produce of each cow was generally one hundredweight of butter, with a guinea for horn-money, supposed to be the value of the year's buttermilk. The system was general over a rather wider area than in England, in the counties of Limerick, Waterford, Cork and Kerry. Great landowners in 17th century Germany made similar arrangements with dairy-men. They supplied cows, feed and cow-houses. The dairy-men looked after the animals and took the produce. The landowner took the dung for fertilizing his own farmlands. The dairy-man paid a fixed annual rent for each cow. The slight modification here is that the German landowners took the dung, an article that was scarce enough at that time. An English visitor to the Limousin found the same system there in 1950 or thereabout. Cattlebreeding was a major industry, devoted to the production of baby-beef, and to a lesser degree, draught oxen. The cows were taken to the mountains in summer, as in other Alpine grazing countries. The farmers hired the herds for the summer, and the cattle fed under the watchful eyes of subordinates, the cowherds who milked and made cheese to pay wages and who rented the cattle, a system said here to date back to monastic times. The famous Roquefort cheese was made from ewes' milk. Large flocks grazed the hill pastures, the lambs being taken from the ewes at birth. Some goats were grazed too. This business appeared to be organized on a profit-sharing basis. The details of the arrangements are obscure, though doubtless well-known to French historians. The system is analogous, if not precisely the same, as the stock-and-land lease, share cropping or "métayage", which were very general in England, France, Italy, a system both strongly condemned and highly praised. I do not think I need to discuss that here.

G. E. FUSSELL

33

The dairy-farmers at other places owned their own animals. In Cheshire, England, it was so, as it was in Friesland and other parts of the Low Countries. The graziers in some Alpine areas, too, were independent owners of their animals, and indeed of some of their farms. Similarly, the Normandy cattle were, in general, the property of the farmers as they were in many parts of Germany. The cattle keepers of the 17th century used many names to distinguish between breeds, but they did not mean very much, being largely devoted to place of birth and colour. In Europe, the Frisian or Dutch cattle enjoyed the reputation for great size: they were estimated to weigh as much as 2,000 pounds, live-weight supposedly. They were heavy yielders of milk, with not too much of a butter fat content. I think the latter is now improved. In 1760 to 1769, they were described as 2 ells long, with a short neck. They seem to have some connection with the cattle 'of long body', but it certainly seems likely that the latter influenced the breeds of Switzerland and the Alps, where productive dairy cows were grazed. Bishop Burnet made the assertion that all the cattle in Italy were grey or white in the late 17th century. Whether that has any significance or not, I do not know, but I should not think it is true in any event. In Central Europe, the trade in animals led to a complete mixture of breeds. A very large number of cattle was driven from Eastern Europe to markets in more Westerly parts, and mixed their blood with the local animals, so that in such countries, distinguishing breed characters was difficult if not impossible. These animals were small by modern standards. A beast of 600 pounds, live-weight, was regarded as a good average size in the early 17 th century England. The famous cows of Sillitoe weighted slightly more, 750 to 850 pounds. Nothing was known about the principles of breeding, of course, but the average dairy-farmer must have been intelligent enough to select the animals which he thought were the best. The major difficulty in the way of improving the breed was the lack of winter seed, before the introduction of artificial grasses and the field culture of roots. Cattle were fed, over winter, on a trifle of hay, leaves of trees, and, in the wine-growing areas, on the waste of the wine presses and so on. But I do not think it did them very much good. They were always pretty weak in the spring. The fodder crops which made all the difference had been known to the classic agronomes, and perhaps continued to be cultivated in Northern Italy and in some parts of Spain, but it was in the 16th and 17th centuries that they began to be appreciated in other parts of Western Europe. Though rotation of cropping, including forage

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G. E . FUSSELL

crops, was recommended by Torrello in 16th century Lombardy, and the water-meadows of Lombardy were reputed to yield five or six crops of green fodder a season, these developments did not directly affect the world North of the Alps. It was the example of Flanders and Brabant that made the great impression. At the same time, lucerne, said to have been introduced to Spain by the Arabs, had been conveyed across the Pyrenees provinces into Languedoc, thence to Burgundy, where some unidentified fodder crop was known as Burgundy grass, thence subsequently to the Rhineland. In the 16th century, there was also a fodder plant cultivated in Schleswig and Niederrhein. Towards the end of the 18th century, the preliminary job of producing enough feed to carry the livestock over the winter in good form had been done in a great many places scattered all over Western Europe. The scene was set for the breeder. The prototype of course is rather primitive. Modern dairy cattle are, as a result of all these efforts, very different from those of earlier times. Not only are many of them the progeny of selected ancestors, but they are the descendants of the long line, in terms of animal life, of well-fed and cared-for ancestors. Four centuries ago, the scarcity of winter feed was what kept the dairy cow small and very moderately productive. This is common knowledge. Professor Abel tells us that some marsh grazing was heavily overstocked in 1648: there had been some 160 beasts on 86 hectares in one place, or 2 per hectare, which seems very heavy. The size of cattle in different places varied very widely. The Frisians, as already said, were often reputed to weigh 2,000 pounds, liveweight, and their milk yield is large, though somewhat lacking in butterfat. Other breeds were not anything like this size, even if the Frisians really were. Keep and living conditions played a large part in milk yield. The cattle kept in great dairies in and about London, were supported on brewers' grain and other rich feeds, so that by being sent to their yield was exceptionally high. Some were grazed to track along the fields, but mostly these animals were kept indoors, like those in Dublin and the Harleian Dairy at Glasgow. At the other end of the scale were the tiny cows, doubtless similar in size and conformation to many in Medieval Europe, seen by a traveller in the most remote parts of Scandinavia and Finland in the mid-nineteenth century. Anyone who tries to deal with this subject owes a major debt to Professor Slicher van Bath, because of the figures he has collected in table 5 of his Agrarian History of Western Europe, as well of course as lesser debts to other historians and contemporary writers. Naturally enough, the Continental figures are usually in litres,

G. E.

FUSSELL

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the British being in gallons. Conversion from one to another, if done with complete accuracy, involves the equation, i gallon = 4.546 litres, but for general purposes, it is sufficient to adopt the figure 4.5 litres as the equivalent of one gallon. Thus I think it may be near enough to take 1,000 liters as approximately equal to 220 gallons. If this is done, the Frisian cow produced 1,350 litres or about 300 gallons, in the late 16th century, on one farm, each cow yielding daily 1 gallon or a trifle more. One herd at Harwell also produced 1 gallon a day per capita, but did not reach more than 200 gallons per lactation, which does not seem to be a proper parity. A very large yield seems to have been obtained at Lille (France) in 1776, some 1,764 litres, approximately 385 gallons. In Denmark, Schleswig-Holstein, the Netherlands, the same yield was not reached until the end of the 18th century, after which the yield in most countries was above 300 gallons. Here and there, 2 or 3 gallons a day was a maximum. This has been exceeded by Irish cows on Irish pastures in the late 17th century. About 3.84 gallons was not unusual in some parts of England in the mid-eighteenth century, if the didactic writers can be believed. But in the town dairies, yields up to 1,000 gallons, about 4,500 litres or more, a year, were obtained by overfeeding with rich foods and keeping the cows under cover. During the 19th century, British cows continued to give divergent yields, ranging between 400 and 600 gallons, or even more. But it is unlikely that the national average was more than 400 gallons, if as much, in 1900. The milk-recorded herds were probably the best, and do not reflect with precision what was being obtained from the average herd kept by non-progressive farmers. As much could probably be said of the European dairy-men. I have not gone into the quantity of butter and cheese made from a given quantity of milk in different places, or from the produce of the various breeds which were being more carefully selected and mated than ever before. Nor have I tried to do that in relation to the herds of miscelleanous cows, bought to the farmers' choice, that formed a large proportion of the cattle of sixty years ago. What does emerge from this outline is that more care was being taken by some dairy-farmers in the choice of their animals, or, if they bred their own replacements, in the selection of a bull; that some grassland was given at least a trifle of attention; that the new fodder crops and imported feeds (oilcake and so on) used to keep the animals in heart throughout the year. The consequence of these reasonable precautions was that the animals were more healthy and more uniformly productive, so that an increment of milk production, if

36

G. E. FUSSELL

I may hazard a guess, had been obtained during the three centuries, sufficient to make an average lactation give about double, at the end of the period, what it did at the beginning: from 2,300 to 4,600 gallons, with some much higher yields. These figures are not, however, very significant, because they are affected by so many variables, and all that is finally clear is that, as everybody knows, there had been some increase.

MEASUREMENT IN

AMERICAN

OF

PRODUCTIVITY

AGRICULTURE

1840-1910

by W . N. PARKER (Yale University)

I do not know much about farming as such, no more than about mining. But agriculture 'seems to me as most vitally important, and the increase in agricultural productivity is certainly fundamental to the understanding of economic development in the last 400 years. It is a subject about which, you will agree, very little has been done, in a quantitative way, as Professor Fussell has indicated: we all know that some productivity increase occurred, and we keep wondering how much. It also has the advantage of exemplifying the effect of a number of powerful dynamic elements in modern economic history — fairly simple ones which come through the details of productivity history. The simple expansion through population growth and increases in the supply of available land has itself been a source of productivity growth. New lands have been, not less, but more fertile than old, and there has been, even without technical change and even without a marked expansion, some possibility for a more efficient agricultural production. At the same time, as western populations have been clearing new lands and expanding into them, there has been a marked growth

38

W. N. PARKER

through industrialization, transport improvements, changes in the amount of earned cash income, which in turn have given opportunity for specialization and for productivity growth, even in the absence of technical change. Simultaneously with this, there has been a process of technical change which has risen, developed and communicated itself to agricultural populations, and been incorporated into their production structures. This has constituted the third powerful force in productivity growth. Finally, there is the element of organizational change, about which I will not have much to say here. In examining the effects of these elements on productivity growth in the United States, one observes, I think, that the history falls into four periods of which I wish to discuss only one, the second period. In the first period, from the colonial times until the early 19th century, there was simply the adaptation of crops from the Indians and the importation of seeds and animals from Europe and their adaptation to the new environment, the degeneration of the colonial cattle in some cases, the turning of specialized cattle into general purpose cattle, the turning of hogs into animals that could survive under Frontier conditions. There is a similar adaptation with people, some would argue, without pushing the point too far. There is also, of course, the setting-up of agricultural organization, the development of the two farm-sizes in the North and the plantations in the South, and the development of some elements of land policy which were to go further in the 19th century. This was a period I would say of little productivity increase, on the whole, so far as we are able to measure it. In the period 1830 to, say, 1920, we have the three elements working carefully in combination, to produce productivity growth. There is mechanization, as we know, wherever it is possible in the various crops; there is the westward movement onto new soil and areas, and there is a commercial growth, with the development of regional specialization moving very strongly, especially after 1850. Between 1920 and 1940, there is, very largely, simply the mechanization of power, the replacement of animals by the tractor, and with that, of course, the release of large amounts of land formerly used for feed. It is a period of market disturbance and of moderate productivity growth. From 1940 to 1965, we had secondly the new wave of productivity growth from the developments in biochemistry and animal breeding, in genetics, seed improvement, fertilizers and so forth, together with some further developments in mechanization, producing an

W. N. PARKER

39

enormous productivity growth, far outstripping that of the whole previous 150 years. So the period that I am talking about in the 19th century is a period which, in comparison with what had gone on before, was extremely dynamic, but in comparison with what has gone on recently, was one of a fairly modest change. Now the problem is, it would appear, to try to measure this productivity growth, to analyze it in the sense of trying to find out just what products and what processes exhibited it, and what operations exhibited it most clearly and most strongly; to find the trends in the productivity growth, both as to region and as to crop and operation, and then to explain in some more fundamental way what was the reason for them to be as they were. T h e aggregate productivity increase, as we can best measure it, appears to have doubled over the period 1840 to 1910. This is true whether one takes measures of total factor productivity in which capital was constant in weight, or if one looks to simple labour productivity in the seeds, giving the various crops suitable price weights. If one breaks this down, one finds, among the crops, a three-fold growth in meat; a six-fold growth in dairy and cotton; about a ninefold growth in corn, wheat, oats and barley; in other words about a six-fold growth in agriculture output over the 70 years. I f one looks at the inputs, one finds about a three-fold growth in land under cultivation and in the size of the agricultural labour force; and about a three- or four-fold growth in the number of work animals. Now, in order to analyse more closely, the independent effects of westward movement onto new soils, in this complex of change that occurred in this period, the effects of technical changes in labour per acre, and the effects of technical changes affecting output per animal unit, or output per acre, we have tried to work out a kind of statistical technique, and I am glad to say I do not have the time to go into the problems of the available data and the difficulties that I encountered. These can be examined more closely in a paper which will be coming out in the National Bureau of Economic Research, volume 30. I think the simplest w a y to explain what we tried to do is to take the activity of land-clearing. This is a fairly labour-consuming activity, in the forested areas, and an activity which, in the United States, of course, has consumed a large amount of agricultural labour in the mid-nineteenth century. Perhaps 10-15 % of the time of the agricultural labour force was devoted to clearing land in the 1850's. A n d this fell to about 3 % of the time of the agricultural labour force by 1900 to 1910, despite actual increases in the number of acres cleared. In the United States, land-clearing has taken place, basically,

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W. N. PARKER

under two different kinds of natural conditions: the forested areas, and the prairies and plains. The forested areas required somewhere between 20 and 30-35 hours per acre to clear sufficiently to produce the first crops. The difference between the two figures lies largely in the thoroughness with which stumps would be removed. T o clear up the prairie soil, even without the improvements in ploughs and the larger teams which came in after 1850, required perhaps 1.30 to 2-3 hours, so that the difference between these two is of the order of 10 or 15 to 1, in labour requirements. Assuming no change in the techniques of land-clearing (and indeed, so far as forested areas are concerned, there was virtually no change in these techniques, except for the use of dynamite in removing stumps), the mere shift to the Middlewest and to the plains, nevertheless released labour from this occupation. In the 1850's, 84 % of the land-clearing was in forested counties, in the 1900's, 30 % . We can get an index of the productivity of labour in land-clearing: assuming no technical change we would come to an index of 2.55, and assuming technical change in land-clearing, but keeping the proportions between the forested and the non-forested areas at their 1850 level, there would have been only an index of 1.32. So, without technical change in this activity, and with the simple shift into the acreages which were easier to clear, there would have been an increase of 2.5 times in this activity. O f course there is, as we all realize, the danger of giving an excessive degree of accuracy to some very rough and loose guesses as to the statistics. Nevertheless, it is perfectly obvious that if we have a differential of about 15 to 1 between the two areas, that the shift to the area which is easier to clear makes in and of itself a very great source of productivity improvement, and that one does not need much technical change in order to produce this. The major part of our work so far has been devoted to the crops: wheat, corn, oats and cotton. And here, in a sense, the same technique has been applied, that we applied in a simpler case to land-clearing. We have the land yields, the output per acre, in each of the major regions. We have the labour inputs per acre in each of these regions, both in the 1850's and the 1900's. And, finally, we have the share of each of these regions in national output. When we look at these data, we see that under the techniques of the 1840's and 1850's, there was not such a great regional difference in labour costs per acre, as there was in this land-clearing case; the only great difference being in corn, between of course the Middlewest and the North-East. There was, when we compare the 1850's to the 1910's, a very

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great interregional shift: crops moved strongly into the Middlewest. Consequently, h a d there been differences in the 1850's, the interregional shift would have produced, as it did in land-clearing, a very great productivity increase. It did not, because the interregional differences were not so great. A n d finally, one finds in each region a noticeable, striking fall in labour-inputs per acre. T h e indices show in wheat, from all sources, a labour-productivity increase of about four-fold (4.17 index); in oats, 3.63; in corn, 5 (or less than 5 ) ; in cotton about 2. W h e n we ask the source of this difference, w e find that it comes largely from the changes in labour per acre, within the regions taken b y themselves. So that w e must indeed, as historians have averted and suspected, attribute to mechanization the largest part of the source of productivity improvement. W h e n w e look at the actual operations in corn, wheat and oats, and compare task for task w h a t the labour costs must have been in the 1900's as compared with fifty to sixty years earlier, w e see that there are two principal sources of this productivity increase through mechanization: one is of course the reaper and the thresher, and the other is the substitution of the horsedrawn cultivator in several varieties for the hoe. T h e abandonment of hoeing in corn and cotton accounts for as much or more labour-saving than the reaper and the thresher. A n d this is done w i t h o u t any great increase in the size of the f a r m w o r k animal force relatively to the f a r m labour force. W h a t one observes, then, in looking at the crops in the United States in the 19th century, in the source o f productivity growth in the crops, is most strongly the differential i m p a c t of mechanization upon the different tasks. A n d one has the impression that applying a sort of standard group o f mechanical ideas to this bundle of operations in agriculture, produced productivity increases wherever the nature of the task would be simple enough to yield itself u p to a mechanical technique; that corn-picking and cotton-picking were delayed for so long because they were inherently mechanically more difficult tasks to mechanize, not because of any question of factor proportions in the growing of these crops. T h e n one asks w h a t was the effect of westward movement, if most of this productivity increase came f r o m mechanization? A n d of course, here, the answer is quite clear: westward movement a n d regional specialization permitted the g r o w t h in output under conditions of w h a t w o u l d h a v e been, in the absence of mechanization, relatively constant costs. T h e y were, in a sense, a permissive element w h i c h allowed output to expand without having diminishing returns, while, at the same time, the mechanical techniques were enforcing increasing returns to labour in the crops.

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Finally, in livestock, for which the work is not yet completed, it is clear that we are concerned not simply with labour input, but with the input of feed, with the growth in the economy of feed utilization. As best as we can measure it, yields of dairy-cattle on the average in the United States increased perhaps by 50 % over the period; the output of pork per animal in inventory, by 25 % ; and the output of beef, per animal in inventory, by perhaps 50 or 60 % . These are modest productivity increases, but they are similar to those in the yields per acre. So that in the whole field of improvements, both with practices in the management of land and the use of fertilizer and the choice of seed, and also in the improvement in livestock, and in feed methods and types of feed, the increases produced were of the order of 20 to 50 % , while mechanization was producing increases of the order of 2.2 to 4.4 times. There is an interregional shift in the crops, in livestock, which in turn is related not to labour-use as much as to the use of feed. In milk it would appear that there is a possible decline in the index of labour productivity, since there is no mechanical improvement in milking, and there is a very great increase in the labour required for feed, care, and compliance with sanitation requirements. Finally, in livestock, there is clearly a phenomenon of diminishing returns. O n e sees this, because there is certainly a shift from grazing, from open woodland and pasture to the use of feed-crops. T h e output of the feed-crops increases between 6- and io-fold during this period, while the output of meat increases only about 3 times, and that of dairy products about 6 times: so that there must have been a very strong substitution of feed for woodland-grazing, acorns and wild grass over the whole period. This is, in a sense, a shift in the direction of greater use of labour, a substitution of labour for land in the livestock production function, and it is certainly made possible only because of the greater economies of labour in the growing of the feed-crops themselves. So we come back here to the greater efficiency in grain-growing permitting livestock to increase at the rates that have been observed. T o summarize, then, I think we can say that, over this period, productivity doubled, in the presence of output expansion and geographical spread. Second, that most of this doubling is directly and immediately due to mechanization in grain production of fairly simple kinds; that the progress in seed and fertilizer and the other branches of agricultural technology is not very strong, certainly, compared to what it has been since the development of experimental stations and the developments of the 1930's and 1940's; that this occurred despite the end of much grazing in many areas, and the relocation of stock near

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the sources of feed; that the westward shift and the improvements in seed selection and practices held the yields of land stable, or permitted them to rise slightly, and the yield per animal to rise slightly over the period; and finally that mechanical technology had a varying impact on various crops, depending more strongly upon the nature of the task than upon the economic conditions under which these crops were grown. So far as statistics can lead us towards an explanation of the productivity increase in the 19th century United States, this is still not very far : it is really analysis that we have done rather than explanation. We still would like to ask these more fundamental questions : why were mechanical techniques adopted at the rate that they were? Why did the population move West at the rate that it did? Why was the response to market growth what it was rather than something either slower, or faster and more sensitive? We are pushed out of the statistics ultimately, at least out of this kind of statistical analysis, into these questions of intellectual history and of social history, social organization, and these are questions that have been taken up by Professor Easterlin's section in these meetings.

DIE

MECHANISIERUNG IN

DER

DER

LANDWIRTSCHAFT

U.D.S.S.R.

von J . W. ARUTJUNJAN (U.R.R.S.)

Ich lese jetzt nicht meine eigene Arbeit, aber ich will nur ganz kurz den Inhalt des Beitrags meines Kolleges Dr. Arutjunjan bekanntgeben1. Seine Arbeit behandelt die Mechanisierung der Landwirtschaft in der Sowjetunion und einige Fragen, die sich daraus für die Wissenschaftler ergeben. Die Mechanisierung der Landwirtschaft ist eins der Hauptprobleme, die die gegenwärtige Menschheit zu lösen hat. Die Landwirtschaft ist bis jetzt der zeit- und kraftraubendste Zweig, der riesige Vorräte an menschlicher Kraft, Arbeit und Wissen verschlingt, jedoch die Arbeit sehr spärlich entlohnt. Der Weg, den Menschen aus der Landwirtschaft frei zu bekommen, der Weg zur möglichst vollständigen Anwendung der menschlichen Talente und Kräfte in der Sphäre der Kultur und der Industrie führt über die Mechanisierung der landwirtschaftlichen Produktion. An die Mechanisierung der Landwirtschaft begab sich die Menschheit bekanntlich erst vor verhältnismässig kurzer Zeit. Wenn in der Industrie die Maschine bereits seit dem X V I I . und XVIII. Jht. i. La communication a été présentée par Mme Loone.

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den Menschen zu ersetzen begann, so hat es lange gedauert, bis dieser Prozess die Landwirtschaft ergriff. Und wenn auch im X X . Jht. die Mechanisierung ausserordentlich schnell fortschreitet, bleibt die Landwirtschaft bis jetzt noch ein grandioses Reservoir an menschlicher Arbeit. Der Kapitalismus und der Sozialismus haben verschiedene Wege zur Mechanisierung der Landwirtschaft ausgearbeitet. Bekanntlich sind für den Kapitalismus die Marktverhältnisse die wichtigsten Regulatoren der ökonomischen und sozialen Prozesse, darunter auch des Prozesses der Mechanisierung. Die Möglichkeit der Mechanisierung selber ergibt sich dann, wenn der Einsatz von Maschinen billiger als die Arbeitskraft ist, wenn die Mechanismen, Kraftstoff, Ersatzteile industrieller Arbeit verhältnismässig billig sind und die nicht qualifizierte körperliche Arbeit relativ teuer ist. Die Ausbreitung der Mechanisierung in der Landwirtschaft ist durch die Absatzmöglichkeiten der landwirtschaftlichen Erzeugnisse beschränkt. Der Kapitalismus ist an einem Wachstum der landwirtschaftlichen Produktion interessiert, das zu keiner wesentlichen Preissenkung führt. Die Mechanisierung entwickelt sich lediglich bei einer vorliegenden günstigen Marktkonjunktur schnell. Im Sozialismus geht die Entwicklung einigermassen anders vor sich. Im Sozialismus wird die Entwicklung der Mechanisierung durch die Marktverhältnisse nicht beeinflusst. Der sozialistische Staat hat Möglichkeiten, die ökonomischen Prozesse, die Festlegung ihrer Ausmasse und ihrer Arten in Übereinstimmung mit den erarbeiteten Plänen zu regeln. Um die sozialen und ökonomischen Aufgaben der Kollektivierung der Landwirtschaft, das Freimachen der Arbeitskraft für die Industrie usw. zu lösen, konnte in der Sowjetunion in den dreißiger Jahren der Staat den Prozess der Mechanisierung auf dem Lande forcieren, obwohl keine direkten kommerziellen Vorraussetzungen dafür vorlagen. Bezeichnend ist, dass gerade diese Jahre in der kapitalistischen Welt die Periode der Wirtschaftskrise waren, die von einem Fallen der landwirtschaftlichen Produktion und des Mechanisierungstempos begleitet wurde. Die Rolle des sowjetischen Staates bei der Mechanisierung der Landwirtschaft fand ihren direkten Ausdruck in der Einrichtung staatlicher Organe, die die technische Betreuung der Landwirtschaft unmittelbar durchführten. In der Anfangsperiode, als die meistenteils noch schwachen Kolchosen nicht in der Lage waren, die technischen Hilfsmittel zu kaufen und sie selbständig einzusetzen, gab das System der staatlichen technischen Betreuung der Landwirtschaft unter anderm die Möglichkeit, die Technik möglichst gleichmässig zu verteilen und unter maximaler Auslastung einzusetzen. Die Verwendung der Technik in der Landwirtschaft der Sowjet-

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union hatte gewaltige Auswirkungen vor allem sozialen Charakters. Indem der Sowjetstaat in der Landwirtschaft Maschinen verwendete, beschleunigte er den Übergang der Bauernschaft zur durchgehenden Kollektivierung. Die technische Rekonstruktion der Landwirtschaft beschleunigte und verankerte die Ergebnisse der sozialen Revolution auf dem Lande. Die Technik übte einen entscheidenden Einfluss auf die Arbeitsproduktivität in der Landwirtschaft aus. A m Ende des Jahres 1934 betrug die Bevölkerung in der Landwirtschaft ungefähr 91 Millionen Menschen und im Jahre 1939 84 Millionen, d.h. sie verringerte sich um fast 10 Millionen Menschen oder um 10 % . Gleichzeitig damit war die Erzeugung einer Reihe wichtigster landwirtschaftlicher Produkte gewachsen. Es machte sich der Aufstieg des wichtigsten und zugleich am stärksten mechanisierten Zweiges bemerkbar : der Getreidewirtschaft. Die Bruttoproduktion der Landwirtschaft verdoppelte sich in 10 Jahren, die Bevölkerungszahl ging aber zurück. Die Mechanisierung der Landwirtschaft forderte das Freiwerden riesiger Arbeitsressourcen fiir die Industrie. Die latente Reserve der Arbeitskraft, verbunden mit der Agrarübervölkerung, wurde im Zusammenhang mit der Mechanisierung noch sinnfälliger. Besonders bemerkbar machte sich in der Zeit der Kollektivierung in den von den Maschinen-Traktoren-Stationen ( M T S ) betreuten Kolchosen die nicht volle Ausnutzung der Arbeitsressourcen. Der Migrationsstrom aus der Landwirtschaft in die Stadt nahm zu. In den 4 Jahren der Kollektivierung nahm die Bevölkerung der Städte etwas weniger zu als in der dreissigjährigen Periode zwischen den Volkszählungen 1897 und 1926. Von 1925 bis 1936 nahm die Stadtbevölkerung der Sowjetunion fast um 30 Millionen Menschen zu. Die Geschichte liefert uns kaum Beispiele einer solchen Massenmigration der Bauernschaft. Die Mechanisierung der Landwirtschaft wurde von dem Wachstum des kulturellen und technischen Niveaus der Bauernschaft, von der Verbesserung ihrer Lebensbedingungen begleitet. Die landwirtschaftliche Arbeit wurde produktiver und rentabler. Auf dem Lande entstand eine viele Tausende zählende Armee von Industriearbeitern der Landwirtschaft. Den Angaben der letzten Jahre zufolge arbeitet wenigstens jeder 10. Kolchosbauer, und im Kubangebiet — der Region der Komplexmechanisierung — jeder 5., mit der Maschine. Die Mechanisatoren der Landwirtschaft nämlich zeichnen sich durch ein relativ hohes kulturelles und berufliches Niveau aus, indem sie sich in dieser Beziehung den Arbeitern nähern. Der ähnliche hohe Grad der Qualifizierung vieler Arten von Arbeiten und ihr industrieller Charakter bilden das wichtigste Element der sozial-ökonomischen und kulturellen Homogeneität der Gesellschaft. Das ist eine wichtige objecktive Voraussetzung für die Liquidierung der beste-

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henden Unterschiede zwischen den Arbeitern und den Bauern, zwischen der körperlichen und geistigen Arbeit, zwischen der Stadtund Landbevölkerung. Die Hebung der Qualifikation der landwirtschaftlichen Bevölkerung auf den Stand der Industriebevölkerung, die allmähliche Liquidierung nicht qualifizierter landwirtschaftlicher Arbeit trägt zum Ausgleich der materiellen Lebensbedingungen in Stadt und Land, zur schrittweisen Vereinheitlichung der Verteilungsverhältnisse bei. Die Vereinheitlichung der Eigentumsformen, des Charakters der Arbeit, der kulturellen und materiellen Lebenslage der einzelnen Bevölkerungskategorien, das alles sind verschiedene Strömungen eines grossen Stroms, der die sozialen Schranken zwischen den Menschen unterspült. Die Mechanisierung der Landwirtschaft, die diese Prozesse fördert, dient im Laufe der ganzen Geschichte des Sozialismus in der Sowjetunion, von der Kollektivierung bis zu unserer Zeit, als ein wichtiges Mittel zur Schaffung der klassenlosen Gesellschaft.

WECHSELBEZIEHUNGEN UND IN DER VON

ANPASSUNGSPROZESSE LANDESENTWICKLUNG

BADEN-WÜRTTEMBERG 1939 U N D

ZWISCHEN

1961

von P. HESSE (Université de Stuttgart)

1. Kurzfristig angeschwollenes Bevölkerungswachstum als Folge der einmaligen Wanderungsbewegung einerseits und das Gefalle der landwirtschaftlichen Produktions- und gewerblichen Standortsbedingungen anderseits haben seit 1945 vielseitige und langwierige Anpassungsprozesse des Gesellschafts-und Wirtschaftslebens an jene bewegenden Kräfte ausgelöst, die unter den damaligen Bedingungen im wesentlichen abgeschlossen sein dürften. 2. Die bei der regionalen Ausweitung attraktiver Arbeitsplätze erzielten Erfolge sind auf die praktischen Erfahrungen zurückzuführen, die seit über 100 Jahren mit der Anpassung der Arbeitsstätten an das Kräftepotential ursächlich zusammenhängen. Hierbei hat der Kräfteüberhang der Landwirtschaft als Folge der agrarischen Überbesiedlung bis in die Gegenwart hinein eine mitausschlaggebende Rolle gespielt.



F. HESSE

3. Den unlösbaren Wechselbeziehungen zwischen der Mobilität des Grundstückverkehrs und den vielseitigen materiellen Existenzbasen sind im agraren Bereich bereits vorteilhafte Relationen zwischen den Vollerwerbsbetrieben einerseits und den Zu- und Nebenerwerbswirtschaften anderseits entsprungen. 4. Im produzierenden Gewerbe haben die zwischen den Wohn- und Arbeitsplätzen der heterogenen Erwerbsquote bestehenden Wechselbeziehungen und -Wirkungen erhebliche Umschichtungen zur Folge gehabt. Eine starke Ausweitung der Arbeitsplätze zeigen besonders der Stahl-, Maschinen- und Fahrzeugbau und ebenso die Elektrotechnik, Feinmechanik und Optik. Leder, Textilien, Bekleidung, Nahrungs- und Genußmittel, Holz, Papier und Druck mußten dagegen gegendweise unterschiedliche, aber meist große Verluste an Arbeitsplätzen hinnehmen. 5. Die anhaltende "Bewegung der beruflich entfalteten Arbeitskräfte zum attraktiveren Arbeitsplatz" hat zu wachsenden Schwierigkeiten in der Wiederbesetzung vakanter Arbeitsplätze lohnextensiver Unternehmungen geführt. Namentlich in den großen zentralen Arbeitsorten sucht man diesen ursprünglich nicht vorhandenen Standortsnachteilen bei gefährdeter oder fehlender Wettbewerbsfähigkeit mit der peripheren Standortsverlagerung, Verschmelzung und Konzentration dieser oder jener Unternehmungen zu begegnen. 6. Den Anpassungsprozessen im agraren und gewerblichen Sektor sind die Dienstleistungen im weiteren Sinne im wesentlichen gefolgt. Sie fallen vor allem in dem Siedlungskörpern mit weniger als 2000 Einwohnern ins Gewicht. Namentlich im Einzugsbereich der nunmehr fast 900 zentralen Arbeitsorte 1 ( = rd. 26 % der Siedlungskörper) haben die fraglichen Siedlungskörper mit weniger als 2000 Einwohnern einen überwiegend tiefgreifenden sozialökonomischen Strukturwandel erfahren. 7. In der optischen Darstellung der sozialökonomischen Struktur, welche die äußere Verkehrslage der einzelnen Gemeinden zu bestimmten zentralen Arbeitsorten aufzeigt, schälen sich meist deutlich die Umrisse dieser oder jener Siedlungs- und Wirtschaftsräume mit bestimmter Struktur heraus, welche die Abgrenzung von übergeordneten "Regionen" mit ihren Leistungswerten erleichtert, über die sich aber noch keine einwandfreien Angaben machen lassen.

1. 1939 weniger als 500.

DISCUSSION M . M E U V R E T . — La première question s'adressera à notre collègue Parker. Je voudrais qu'il nous donne un aperçu comparatif, pour ainsi dire, plus complet qu'il ne l'a fait, de l'ordre de grandeur des rendements en céréales. Si je pose cette question, c'est que nous avons dans d'autres communications, qui n'ont pas encore été produites, des indications très précises sur ces rendements en céréales, et cette question qui paraît très limitée est d'une grande portée si l'on pense à un pays dont le progrès est caractérisé par la mécanisation. En effet, la mécanisation diminue surtout la main-d'œuvre, l'énergie déployée, mais elle ne donne pas des résultats en rendement tellement élevés. Elle a surtout comme efficacité de diminuer l'effort et les heures de travail, mais il convient de la comparer aux vieilles agricultures qui pendant longtemps ont utilisé beaucoup de main-d'œuvre et qui ont augmenté leur rendement en cherchant à perfectionner la culture proprement dite, perfectionnement que j'appellerai agrobiologique. Alors il est très important de chiffrer le rendement, c'est-à-dire les quantités produites d'une façon précise sur une surface donnée. La productivité doit à la machine des progrès indiscutables. Mais il y a une comparaison très intéressante à faire entre les agricultures du xix e siècle qui utilisent déjà la machine, notamment l'agriculture américaine qui a été pour ainsi dire la première à utiliser certaines machines, mais qui n'obtiennent pas des rendements très élevés, et la vieille agriculture anglaise ou hollandaise qui, au contraire, de très bonne heure, et de plus en plus, a obtenu, non pas par des méthodes de mécanisation, mais par une série de progrès que vous connaissez tous, des rendements supérieurs. Je parle rendement, je ne parle pas productivité. Voilà si vous voulez un terrain de recherches et à cet égard, cette question que je pose à notre collègue Parker, je la poserai aussi à d'autres. Il s'agit précisément de savoir ce qu'on obtient dans les premiers moments où l'on utilise le machinisme. Aujourd'hui on combine cette utilisation avec d'autres progrès, si bien que le problème n'est que partiellement parallèle. Alors je voudrais poser le problème du rendement, dans deux exemples : la mécanisation du xix e siècle aux États-Unis et les mécanisations plus récentes; je pense surtout à la Russie soviétique, dans les pays qui disposent d'assez grands espaces, mais qui évidemment bénéficient d'une technique qui est plus avancée, non pas seulement dans

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le domaine du machinisme, mais dans tous les domaines agronomiques. M . POSTAN. — I want to ask a question that I already asked Mr. Fussell privately: from the point of view of the history of Agriculture, the yields of milk per cow are interesting but not important. These yields explain to us very largely how efficient or inefficient was the breeding of animals and animal farming, and perhaps help to explain the standards of nutrition. But, from the point of view of agricultural trends, much more important than milk is muck: it is not the amount of milk cows produced, but the amount of muck they discharged, because the long trends of agricultural development very often depend much more on the ability of the agriculturist to maintain the fertility of the soil, than on most other factors, in pre-industrial civilizations. This is one subject which the historians of animalfarming have completely neglected, that is to say the factors affecting the ability of animals to fertilize the land. And I hope that next time Mr. Fussell, who already came to us with very detailed information, will tell us about the other natural functions of the animals in the fields, that is to say their solid manure and urine. My other subject is a piece of information. In England, medieval agricultural historians enjoy the good fortune of having a very large collection of documentary evidence. England is also an easily managed country, as a result of which we are able, for a number of estates, to study them not only with microfilms and parchments, but also, as Professor Tawney advised us, "with stout boots", and we have thus been able to link up some of our documentary studies with topographical analysis of the landscapes. As a result of these studies, my students and above all Jan Titow, a Polish student who settled in England, have been able to assemble for publication (they will be published shortly) figures of yields per acre and per bushel of seed, for something like 120 localities, for every year in the Middle-Ages, from 1209 to, roughly, 1485. We have been through something like a quarter of a million actual entries of harvests, and we extracted from them 30,000 or 40,000 reliable figures. The result of these figures is to show quite definitely that the general trend from about 1210-1220, almost everywhere was, for the yield per acre, to decline markedly; and for the yield per seed, to decline somewhat more irregularly, somewhat more slowly. We divided the estates into three groups: — those with a constant decline ( i t 118) — those with a constant rise ( ± 25) — those in which decline was followed by steady or rising trends. Thus the trend is fairly well indicated. For that reason, I very

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much regret that Professor Slicher van Bath is not here, because I would like to suggest to him that in the second edition of his book, he either cuts out altogether the early chapters dealing with the medieval yields, or modifies them very profoundly. The fault in these chapters is not his, but of those earlier writers on whom he depended, especially Beveridge and Bennett who used much too small a sample very uncritically. Their uncritical use is due to the fact that they were collecting yields from constantly improving lands: for the Bishops of Winchester, from whom the documents came, were constantly reducing the area of their cultivation, getting rid of bad acres and maintaining in cultivation only the better acres. So the quality of the land was increasing all the time, and the yields which have been collected, not only come from a very small sample, but a highly misleading sample. Even in these circumstances, Beveridge and Bennett discovered that the yields were constant, which really indicated that in the country as a whole the yields must have been falling. This particular subject links up very much with the question I asked Mr. Fussell about muck and urine: because when, from these statistics, we come to an attempt to explain why this particular decline in cultivation happened, the only plausible hypothesis is that the natural balance between the acres cultivated and the acres available for pasture was being constantly disturbed and was moving constantly towards strawcrops. Eventually, in the later Middle-Ages it became of course extremely difficult to maintain the natural fertility of the soil. This is only the hypothesis. But until we know a little bit more about animal farming in the Middle-Ages and a little bit more as to what the medieval ewe and the medieval cow could do to help the medieval peasant in keeping his land in good heart, we shall not be able to prove that particular hypothesis, and this is one of the reasons why I hope to hear more about muck from Mr. Fussell next time. M . M E U V R E T . — S'il y a eu changement en Angleterre au Moyen Age dans les proportions de l'élevage et de la culture et si la décadence ou la limitation de l'élevage en apportant une moindre fumure, est responsable de cette décroissance des rendements, j e serais tenté de rapprocher ces faits des problèmes qui ont été évoqués à partir du x v m e siècle au sujet de l'agriculture chinoise parce qu'un des drames de la Chine, c'est certainement qu'avec un travail humain considérable, elle a fait pousser beaucoup de céréales avec un bétail très limité. Ceci s'explique, d'ailleurs, par le fait que la solution céréalière, au point de vue alimentation, est une solution commode mais relativement dangereuse. A force de travail on obtient de hauts rendements qui permettent de nourrir approximativement une population très dense, alors que sur la même surface l'élevage ne donne

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pas le même résultat, quoique ce dernier soit une très bonne solution si l'on a une surface suffisante, alors si j'interprète bien la pensée de M . Postan, la poussée démographique, dans un pays, dont tout de même la surface d'élevage n'était pas illimitée, a poussé à une agriculture intensive, mais dangereuse, par le fait que cette intensivité obtenue à coup de travail a sacrifié l'élevage qui, probablement, disposait au haut Moyen Age d'espace de parcours relativement considérable. Je me permets de reprendre la pensée de M . Postan, de la traduire à ma façon et de demander à cet égard si, justement, ce problème très large est généralisable en dehors de l'exemple de l'Angleterre médiévale. M . P O S T A N . — M . Meuvret, j e crois que vous avez raison. C'est la question de la frontière entre les céréales et l'élevage qui était une mauvaise frontière. Mais c'était aussi le fait historique de l'état de la population anglaise. C'était une question du nombre des gens et du nombre des vaches. Cependant la situation de l'Angleterre n'est comparable qu'à celle des pays qui ont eu une structure analogue. M . W . N . P A R K E R . — I cannot get the kind of comparison that Professor Meuvret would like between American and European conditions with respect to yields. But I could say something briefly about techniques for maintaining yields in the 19th century, and about the relation between mechanization and the yield changes in United States. O n the whole, taking each region of the United States (the regions being defined by their similar yields), taken one for one, they do not show sharply rising yields until the late 1930's. T h e only exception to this is in cotton in the South-East in the late 19th century, when indeed the application of fertilizers to the cotton fields shows a noticeable effect. Otherwise, yields remained fairly stable (in corn, rising perhaps 10 or 15 % over the whole period; in wheat, similarly rising). Mechanization, in and of itself, does very little to alter yields, the only exception I think being in the substitution of the cultivator for the hoe, where indeed there is a better cultivation of the ground, a more thorough breaking-up of the soil, with some good effects on yields. Mechanization also permits regions where the mechanical equipment can be easily used, even though the natural conditions are somewhat less favourable, to be brought into cultivation: so that in the plains, even though wheat yields are 20 to 30 % below those in the Corn Belt, in the Ohio Valley and the North-East, nevertheless these areas were brought into cultivation in the 19th century because of the ease with which mechanical equipment could be employed

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and the grain could be grown cheaply, even at relatively lower yields. The question then arises whether the ease in using mechanical equipment did not provoke and tempt the American farmers into over-extending the area under cultivation in the plains. It probably did, with a very unfavourable effect on yields in the 1920's and early 1930's. So, mechanization has a somewhat favourable effect in such operations as harrowing and cultivating, it has a somewhat negative effect on yields, in permitting the extension of acreage into areas where natural conditions are somewhat less suitable. As for Professor Postan's muck, it is not very prominent in the United States in the 19th century. Americans did not use their muck, they simply moved to other lands when yields fell in any region. So that it is not quite fair to say that the output of milk per animal is not important in labour productivity in this period, because the increase in output of milk per animal results in a reduction in milkingtime per pound of milk: since it takes about as long to milk a goodyielding cow as it does to milk one that falls less freely. On the whole, it is about the only source of productivity improvement in dairying. A further question arises about the use of fertilizers, which is simply the skill with which it is applied. Presumably the European areas get a certain level of techniques and continue it from generation to generation, and yields tend to be maintained because of this. There is so little real knowledge of agricultural chemistry before the 20th century, that one has the impression that a good bit of the folk wisdom may be nonsense. In the United States, a good many of the theories about farming are pure folklore, and there is a vast confusion in theories about the proper way to farm. So I think we must never be too certain that any practice is useful because it has been much used. M . K U L A . — J'aimerais bien poser une question à Mme Loone 1 . Avant et après la grande collectivisation disons en rond l'année 29 et l'année 34, le nombre des bras humains occupés dans l'agriculture diminue, ça c'est sûr, vous l'avez dit. La quantité du travail mécanique augmente, c'est sûr aussi. La première question est : lequel de ces deux facteurs est le plus fort? Ma supposition est celle-ci : en se limitant à la période qui suivit immédiatement la grande collectivisation, c'est difficile de s'imaginer que l'industrie mécanique soviétique, avec la force dont elle disposait à l'époque, était capable de fournir le tracteur dans toute l'énorme étendue de l'Union Soviétique.

1. M m e Loone ayant présenté la communication de M . Arutjunjan.

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Ai-je tort ou raison? C'est à vous de me le dire. C'est la première question. La suivante, la production agricole globale, dans le pays, toujours dans ces limites très étroites, je crois qu'elle diminue, temporairement au moins en comparant l'année 34 à l'année 29. Peut-être ai-je tort, alors c'est à vous de me corriger. La dernière question, troisième et dernière : comment se présente le changement de la production globale en comparaison avec le nombre de bras humains, de la force vive mise dans la production agricole qui diminue sûrement? Mme L O O N E . — Da stellen Sie mir eine sehr schwierige Frage, denn ich habe ja nur den Beitrag von meinem Kollegen vorgelesen. Das ist nicht mein Fach, mit der Sowjetperiode beschäftige ich mich selbst nicht, so dass ich Ihnen vielleicht nicht die ganz genauen Antworten geben kann, denn ich habe die Daten nicht und Dr. Arutjunjan ist selbst j a noch nicht hier. Also, Sie wollten wissen, welcher dieser Faktoren — also die Mechanisierung oder die Frage der Arbeitskraft — welcher wichtiger, d.h. grösser war. Ich glaube nicht, dass man hier vergleichen und sagen kann, ein Faktor war grösser als der andere, denn der eine war das Resultat des anderen; denn es wurde erst mechanisiert, d.h. zuerst wurde die Mechanisierung eingeführt, und als Resultat verminderte sich die Arbeitskraft. Ihre eigentliche Frage war also wohl, um wieviel Prozent die Mechanisierung sich vergrösserte und die Arbeitskraft sich verminderte ? M. K U L A . — Die Verminderung der Arbeitskraft wurde durch einen Mechanisierungsgewinn ausgeglichen. Mme L O O N E . — J a , ganz bestimmt. In dieser Zeit, d.h. im Anfang der Kollektivisierung, also in den dreißiger Jahren, gab es noch nicht das Problem, dass die Leute die Kolchosen verliessen, weil sie andere Interessen hatten und in die Stadt wollten, sondern sie verliessen die Kolchosen deshalb, weil man sie nicht mehr brauchte. Also, die Mechanisierung machte einen Teil der Menschen in den Kolchosen nur überflüssig. Natürlich gibt es in den Sowjetunion auch das andere Problem, dass ein Teil der Menschen die Kolchosen und das Landleben verlassen will, um in die Stadt zu ziehen, aber dies Problem ist überhaupt nicht mit der Frage der Mechanisierung verbunden; das ist ein anderes Problem. Und man versucht, mit den verschiedensten Mitteln gegen diese Schwierigkeiten zu kämpfen und vielleicht ist es möglich, in dieser Hinsicht Verschiedenes zu tun, eben dadurch, dass man versucht, das Landleben auf das gleiche Niveau wie das

DISCUSSION

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Stadtleben zu bringen, um die Menschen auf dem Lande zurückzuhalten. Das ist ein Problem, aber es ist ein anderes Problem. Aber in diesen Jahren, also 29-34 v o r allem, bestand das Problem darin, dass die Menschen wirklich das Land verliessen, weil die Landwirtschaft mechanisiert wurde. Es war ja in den Thesen, die ich vorgelesen habe, gesagt, dass bis 1929, also bis zur Kollektivisierung, eine verborgene Arbeitslosigkeit und ein sehr grosser Menschenüberfluss auf dem Lande herrschte. Und nach 34, d.h. nicht gleich danach, aber im Prozess der Kollektivisierung und der Mechanisierung der landwirtschaftlichen Arbeit, ist dies natürlich vor sich gegangen. Dieser Prozess, dass die Menschen vom Lande weg in die Städte gehen, und diese verborgene Arbeitslosigkeit auf dem Lande haben wir nicht mehr in solchem Grade, wie wir damals hatten. Natürlich muss man sagen, dass die Landwirtschaft noch nicht in allen Teilen der Sowjetunion, dieses Riesenreiches, so hoch mechanisiert ist, wie sie sein sollte, und es gibt noch sehr viele Reserven für die Verminderung der Landbevölkerung. Die Menschen können noch vom Lande wegziehen, wenn die Mechanisierung fortgeführt wird. Ich kann ein kleines Beispiel nehmen aus den baltischen Sowjetrepubliken, Estland, Lettland, deren Verhältnisse ich besser kenne. Z.B. haben wir gerade eine sehr schwierige Frage der Arbeitskraft; es gibt nicht genug Arbeitskraft für die Fabriken. Denn die Fabrikproduktion ist in der sowjetischen Zeit 16 bis 19 mal gestiegen, d.h. innerhalb von 20 Jahren, und man hat nicht genug Arbeiter. Doch wir haben Reserven auf dem Lande und wir denken, dass wenn die Landwirtschaft gänzlich mechanisiert wird, alle Kolchosen auf ein hohes Mechanisierungsniveau kommen, dann wird man in der Stadt Arbeiter genug haben. Man hat diese Arbeitskraft ganz genau ausgerechnet, eine Bilanz gemacht; und es ist ganz klar, dass man in vielen Teilen der Sowjetunion noch so einen Überfluss an Arbeitskraft auf dem Lande findet. Nun ja, Potentiale würde ich sagen, Potentiale natürlich. Man braucht sie gerade, das ist ein potentieller Überfluss. Also jetzt braucht man diese Menschen auf dem Lande. Aber die Ursache ist die noch ungenügend hochgradige Mechanisierung in allen Teilen des Landes. Da waren vielleicht die Fragen, aber eine genaue Antwort kann ich dem Kollegen nicht geben, mir fehlen die Daten.

H Y D R A U L I C SYSTEMS IN T H E VENETIAN IN THE

SECOND HALF OF T H E

XVIth

STATES

CENTURY

by Carlo PONI (Universiti de Bologne)

In the second half of the 16th century, various economic factors strongly influenced the agriculture of Venice. There was an increasing demand for consumer goods for the growing urban population, and also for raw materials (silk, oil) for the expanding town industry. It became necessary to increase the productivity of the soil, and also the extension of the cultivated area. There were three aspects of agriculture innovation that seemed to promise an increased production: hydraulics, agronomy and patented inventions. Hydraulics were particularly involved in the state of Venice. In order to increase production, the state attented to promote large investments of capital, both public and private. And so it was that in 1556, a new agency was created, the "Commission for the uncultivated lands" ("Proveditorato dei beni inculti") with the purpose of studying and formulating plans for irrigating the dry areas, like the Campania di Verona, and for draining the state marshes. These marshes were numerous, especially in the southern parts of the state, where the river Adige approaches the coast in the last part of its course. The hydraulic engineers who were invited to take part in the Commission did what was expected from them. Christo-

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CARLO PONI

foro Salti, who seems to have been the most prominent among these engineers, proposed in 1557 a plan for drainage which would have made possible to cultivate about 50,000 hectares. A few years later, the same Salti could put forward the idea of irrigating the central part of the Veronese countryside, by means of a canal running from Lake Gaddo. It was also Salti who was asked by the Doge in 1567 to explain why the Adige, the largest Venetian river, was bursting its banks with increasing frequency and violence, flooding the lowlands around Verona, Padova, etc... and thus ruining the crops. The analysis of Salti hit on what was surely the correct explanation, the vast deforestation of the Tyrol, where the Adige begins. In order to remove or at least diminish the danger of flooding, Salti made the following proposal: to widen the existing canals, by taking water from the Adige so as to reduce the pressure of water in any emergency. He realized the impossibility of intervening in the Tyrol, which belonged to the Empire. It would take too long to analyze all the plans, either of the engineers of the Commission for the uncultivated lands, or of the private engineers, who were acting to a certain extent in competition with the public ones. Here it is enough to sketch two relatively analogous plans, put forward respectively by two engineers, Antonio Glisenti and Teodoro Del Monte. Glisenti maintained, in a letter presented to the Senate, that he had a system which was feasible, durable, quickly executed and of very little cost, considering the great benefit it would bring. His idea was to divert the course of the Adige, to make it pass through the Lake Gaddo, where it would lose the filth that it had gathered from the deforested Tyrol. This plan would, he said, first calm the wild and impetuous course of the Adige, thus making the rest of the Country, from Verona to the Sea, quite safe; irrigate the dry countryside of Verona, improve the drainage of the area subjected to flooding by the Adige; and last would make navigation possible from Venice to Lake Gaddo, and from Lake Gaddo to Verona. This plan and others that I do not mention here — notable for their size and boldness of design, but in some cases rather fantastic — remained dead letters. Salti argued against Glisenti that it was impossible to irrigate the countryside of Verona with water from Adige, because this countryside was 4 metres higher than the river. He also added that Glisenti could not connect Venice and Lake Gaddo, using the Adige, because the level of the lake was 21 metres higher than that of the Adige. In addition to technological disagreements, economic conside-

CARLO PONI

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rations hindered the schemes: not that Venice lacked capital, but the state hesitated to invest large sums in projects about which there was no agreement and the results of which were uncertain. However, in spite of these limitations, the Commission succeeded in putting into effect various decisions to promote the drainage in relatively small areas, with the aim of encouraging the formation of private drainage companies. The Commission ruled that landowners had to concede half of the drained territory to whoever did the drainage. Various drainage projects were undertaken around Padova and in the province of Rovigo. But I have the impression that none of the single drainage projects undertaken in the Venetian states was as important as that carried out in the duchy of Ferrara, with the decisive help of the Venetian capital. I am referring to the drainage of the marshes of San Giovanni, a subject I am now investigating in detail.

LA

PRODUCTIVITÉ

DANS AUX

LA XVIe

AGRICOLE

FRANCE DU ET

XVIIe

NORD SIÈCLES

par Jean

JACQUART

(Paris)

Simple esquisse d'un problème historique, difficile autant qu'important, cette communication vise surtout à dresser un inventaire des questions à poser et du matériel à interroger. Une réponse limitée tentera de définir une hypothèse de travail que les chercheurs pourront utiliser. L'accroissement global du volume de la production agricole présente en soi un grand intérêt. Plus de grains, c'est la possibilité de nourrir plus d'hommes. Mais cet accroissement peut ne provenir que d'un surcroît de travail, lui-même lié à un flux démographique. Dans ce cas, il ne s'agit que d'une réponse à un problème posé, sans aucun gain de productivité, au sens des économistes. De toute autre signification est l'accroissement de la production pour un travail égal, voire un travail moindre. Dans ce cas seulement on peut parler d'une meilleure productivité. C'est le moyen d'accumuler des capitaux, celui de libérer une partie de la main-d'œuvre paysanne et de l'employer ailleurs. Depuis longtemps, et avant même que l'histoire se soit mise à l'école des économistes, la fin du xvni e siècle a été présentée comme un de ces moments privilégiés où les changements techniques des

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systèmes de culture ont abouti à un accroissement réel de la productivité. Ainsi parlait-on de la Révolution agricole, en l'opposant aux longs siècles de « stagnation » qui auraient marqué le Moyen Age et les Temps modernes. Aujourd'hui, le problème est de savoir si cette immobilité fut réelle. Le résoudre serait mesurer les progrès réalisés entre l'époque de saint Louis et le milieu du x v m e siècle, opposer des périodes de croissance et de reculs, déterminer leurs liens avec l'évolution générale de l'Europe occidentale. Deux problèmes en vérité se trouvent liés : celui de la production globale, celui de la productivité, c'est-à-dire d'un quotient du produit global par l'ensemble des facteurs nécessités par cette production. L'application de cette notion à l'agriculture pose des problèmes, de nos jours même, à peu près insolubles, tant sont complexes les facteurs de production qui interviennent : amortissement du capital foncier, du train de culture, du travail familial non salarié, de l'autoconsommation. Pour les époques anciennes, ces difficultés sont impossibles à résoudre. Trois questions cependant peuvent être susceptibles de réponse : le volume global de la production, les rendements obtenus, la valeur de la production. Les documents sont, sur ces points, relativement abondants au x v m e siècle. Qu'en est-il des débuts des Temps modernes ? Les pays au nord de la Loire forment un secteur important du monde agricole français. Comme tendent de plus en plus à le montrer des études récentes, une « frontière géographique et culturelle », économique aussi, sépare la France du Nord de celle du Midi. Celle-ci a ses problèmes propres, sa conjoncture originale et même, du point de vue de la recherche, ses sources différentes. Au nord de la Loire comme au sud, « petite culture » et « grande culture » coexistaient mais la seconde revêtait, sur les grands ensembles de plateaux et de plaines à limon, une importance qu'elle n'avait nulle part dans le Midi. Deux grandes productions étaient à la base de la production agricole : les « bledz », c'est-à-dire toutes les céréales, à quoi l'on joignait quelques menus grains, et la vigne. On les retrouvait jusqu'aux frontières septentrionales de la France d'Henri I I ou de Louis X I V . Par leur importance elles doivent attirer l'effort des chercheurs. Les documents existent, à la fois dispersés, nombreux et décevants. Inventorions-les : — l'exploitation directe des petites tenures ne laisse que peu de traces. Au hasard des inventaires après décès, malheureusement imprécis jusqu'au milieu du x v n e siècle, on trouvera des taux d'ensemencement, des évaluations de façons culturales et de fumures, des chiffres de récolte, quelques données sur le coût des moissons et du battage. Les mêmes renseignements peuvent être fournis par divers documents tirés

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des minutes notariales ou des archives de juridictions (prévôtés et baillages) ; —- le faire-valoir indirect jouait toujours un rôle important. Dans toutes les provinces de la France du Nord, il correspondait souvent aux exploitations les plus vastes, les mieux outillées, les plus productives. Les baux à ferme, les règlements de compte entre fermiers et propriétaires peuvent donc fournir de précieux renseignements et permettre de différencier « grande culture » et « petite culture ». Mais leur intérêt principal est souvent, contrairement à la dispersion dans le temps et l'espace des renseignements concernant la petite exploitation du paysan-tenancier, de fournir des séries chronologiques longues. L'examen du mouvement des loyers, lorsque la superficie de l'exploitation reste constante, ne reflète pas seulement l'évolution de la rente foncière, considérée du point de vue du propriétaire, mais aussi, dans une certaine mesure, le mouvement général de la production. Il en est de même des baux de dîmes, lorsqu'ils sont individualisés. Leur montant, surtout lorsqu'il est stipulé en nature, a un caractère indicatif. Il va de soi que seraient préférables des registres de comptes enregistrant les quantités recueillies. Peut-être s'en trouve-t-il dans quelques fonds seigneuriaux ou ecclésiastiques, mais ils semblent rares dans toute la France du Noid, où le fermage comme mode de faire-valoir s'est étendu très tôt et très largement. Le premier soin des chercheurs devrait donc être de rassembler toutes les données utilisables, et spécialement celles qui forment série. Au rassemblement devra succéder l'exploitation des documents, qui pose bien d'autres problèmes : métrologie, conversion éventuelle des prix en quantités ou des quantités en prix, élimination des données concernant des années exceptionnelles, etc. Cet immense travail est à peine entamé. Dans les ouvrages d'histoire rurale ou dans les thèses de géographie régionale, dans les monographies locales, il est rare qu'on remonte au-delà du milieu du x v m e siècle. Ou bien, c'est le Moyen Age qui retient l'attention. On s'en tire en affirmant la continuité de la vie rurale. Aussi le bilan d'un dépouillement de la bibliographie reste-t-il très décevant. Quelques chiffres de rendements par rapport à l'ensemencement disent à la fois la pauvreté et la diversité de cette céréaliculture : 4 à 5 pour un dans les régions relativement favorisées de la plaine du Neufbourg ou de la campagne d'Alençon, 6 à 7 sur les plateaux limoneux qui environnent la capitale, beaucoup moins dans les régions pauvres comme la Puisaye ou le Gâtinais. Mais il est très rare que soient présentées et exploitées des séries longues. Les plateaux limoneux du bassin Parisien, grâce aux recherches de P. Goubert, de M. Venard, d ' E . Mireaux, et de P. Brunei, sont les secteurs les moins ignorés de cette France du Nord si diverse. Pour

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aller du connu à l'inconnu nous tenterons d'abord, à partir de cette région privilégiée, de dessiner un modèle susceptible de servir d'hypothèse de travail. A u sud de Paris, sur les plateaux limoneux qui annoncent la Beauce, on trouvait, dès la fin du Moyen Age, un certain nombre de grandes fermes seigneuriales, souvent possédées par des communautés religieuses, ce qui nous vaut des fonds d'archives mieux tenus et mieux conservés. Alors que le fermage en argent prenait de l'extension, un certain nombre de ces exploitations ont continué à être baillées contre un loyer en nature jusqu'à la fin du x v n e siècle. Le fermage représentant ainsi une part des grains récoltés, on peut penser que les exploitants n'acceptaient une augmentation substantielle du loyer que dans la mesure où l'accroissement de la production moyenne le leur permettait. Or, de l'étude de ces séries parallèles se dégage un mouvement général qui mérite d'être signalé. Dans le dernier quart du x v e siècle et jusque vers 1 5 1 0 - 1 5 2 0 , les loyers, d'abord très faibles, s'élèvent au fur et à mesure des progrès de la reconstruction agricole. Mais ce mouvement de hausse se poursuit jusqu'au-delà du milieu du x v i e siècle : la ferme de Rungis ( 1 1 0 ha), louée pour 12 muids en 1494 l'était pour 20 muids en 1 5 6 1 , et encore en 1 5 7 1 , celle de Savigny (100 ha) passa de 14 muids en 1477 à 17 muids en 1567, celle de Lhumery à Étampes vit monter son loyer de 6 muids en 1481 à 10 en 1506, à 14 en 1561 et celle de Villesauvage, au même terroir (200 ha), louée pour 22 muids de grains en 1481 le fut pour 30 muids dès 1520 et 32 en 1556. Cet essor remarquable fut brisé net par les guerres de religion. Si les baux font défaut pour cette sombre période, la chute des loyers, au lendemain de la pacification, est générale et importante. On ne s'en étonne point. Mais la remontée est très lente. Le fermage de Lhumery, tombé à 8 muids en 1595, tente de remonter à 12 en 1600, retombe à 9 en 1603 et reste à ce taux jusqu'en 1620. Celui de Rungis ne retrouvera qu'à cette date, sur un terroir favorisé, son niveau du milieu du x v i e siècle. Celui de Saclay, de 96 setiers en 1550, tombe à 36 en 1594 et ne parvient qu'à 66 vers 1660. L a hausse de la première moitié du x v n e siècle, attestée un peu partout, doit s'apprécier par rapport aux niveaux atteints vers 1560 et prend alors une autre dimension. Aux alentours du milieu du x v n e siècle, dès 1640-1650 en Beauvaisis, un peu plus tard au sud de Paris, une nouvelle baisse s'amorce qui va durer jusque vers 1720. Une étude des fermages stipulés en argent, compte tenu de la dévaluation de la livre tournois et du niveau des prix mène aux mêmes conclusions : le loyer en nature de la ferme seigneuriale de Wissous était de 30 muids en 1548. On passa au fermage en argent en 1556. Son montant équivalait à une quarantaine de muids. Tombé à la

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valeur de 3 ou 4 muids en 1595, ce loyer remonta lentement jusqu'à 30 muids en 1646. En 1675, on atteignait de nouveau la quarantaine, mais on retomba ensuite aux environs de 35 jusqu'à la fin du siècle. Ce mouvement semble général au centre du bassin Parisien (Brie, Beauvaisis, Hurepoix). Il serait souhaitable qu'une enquête s'étende aux autres secteurs de la France du Nord pour confirmer ou nuancer ces données, qui s'accordent mal avec ce qu'a trouvé René Baehrel en Provence. Mais le mouvement de la « productivité » n'est pas tout entier signifié par le volume de la production. L a composition de celle-ci, sa valeur, marchande et nutritive, interviennent également. Les rendements moyens des céréales « faibles » — seigle, orge, méteil — sont supérieurs à ceux du froment, mais la progression de celui-ci, même si elle se traduit par une baisse des quantités produites, doit s'interpréter comme un accroissement de productivité. Or, dans quelques secteurs, cette modification dans la composition de la production survient au cours de la période. Dès le début du x v n e siècle le froment domine dans la plaine de France, le riche Multien ou le Vexin, mais il fallut attendre la fin du siècle, voire le milieu du xvm e , dans le Valois, la Brie, le Beauvaisis. Toute la France de l'Ouest restait vouée au seigle. A u vrai, la transformation essentielle ne pouvait résider que dans l'utilisation de la jachère qui occupait, dans la majeure partie de la France du Nord, le tiers des terres chaque année. Très tôt, dans les régions fertiles, près des grands centres de consommation, des paysans entreprenants tentèrent quelques cultures dérobées. Elles furent d'abord l'œuvre de petits propriétaires, libres de leur mode d'exploitation. Sur leurs parcelles, quelques rangées de pois, de fèves, un peu de blé « froissis », du sarrasin dans l'Ouest, vinrent rompre la jachère. Mais ces expédients, en l'absence de fumures suffisantes, rendaient peu et épuisaient le sol. On ne pouvait tenter l'expérience que sur les champs les plus proches du village, les mieux soignés, les mieux enrichis. Cette pratique des cultures dérobées était interdite, en principe, par les baux et les propriétaires résistèrent durablement aux initiatives prises en ce sens par leurs fermiers. Pourtant, autour de 1620, il semble qu'il y ait eu, au moins dans les régions ouvertes à l'économie d'échanges, une extension de ces expériences. Au même moment, le sainfoin et la luzerne, jusque-là cultivés dans les jardins, occupent en culture permanente quelques parcelles soustraites ainsi à l'assolement traditionnel. Le phénomène se constate en Amiénois, en Brie, en Soissonnais, en Hurepoix. C'étaient autant de possibilités nouvelles ouvertes à un élevage spéculatif. Mais le mouvement resta limité et

J E A N JAG Q U A R T

7° fut brisé, momentanément, par la grande crise du milieu du x v n e siècle. Il fallut attendre le x v n i e siècle pour qu'il triomphe. Une autre solution fut adoptée, dès le xvii e siècle, dans la basse Alsace ou la campagne de Neufbourg : l'assolement y était biennal, faisant alterner le repos de la jachère avec une céréale panifiable — froment de préférence, — méteil ou épeautre. Certes, en six ans on ne faisait que trois récoltes au lieu de quatre dans le système triennal, mais il s'agissait de trois récoltes de grains panifiables, d'une valeur et d'une utilité supérieures. Enfin, à l'extrême nord du royaume, la Flandre, devenue française en partie au x v n e siècle, était le secteur où la productivité se trouvait certainement la plus forte. Depuis longtemps la jachère y était inconnue. Mais il n'est certainement pas possible de discerner là un mouvement de la productivité pendant les deux siècles considérés. Malgré le mouvement qui paraît se dessiner pour l'ensemble de la production agricole, malgré les quelques innovations limitées qu'on peut constater ici ou là : introduction de cultures nouvelles, recherche d'un meilleur équilibre de l'assolement, valorisation du revenu agricole par des cultures spécialisées ou un élevage spéculatif, le tableau qu'on peut dresser à la fin du x v n e siècle ne semble pas substantiellement différent de celui qu'on aurait pu voir deux siècles plus tôt. A u hasard des fluctuations cycliques ou des péripéties politiques, on peut dire que la productivité de l'agriculture oscillait entre un minimum et un maximum, un peu comme la masse démographique et peut-être au même rythme qu'elle. Mais il faudrait bien d'autres travaux pour que les hypothèses que nous présentons puissent se vérifier.

COMMUNICATION

DE M.

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J'aimerais ajouter certaines réflexions sur ce que j ' a i écrit. D'abord, une première réflexion pour nous inciter à la prudence. Il est bon que les historiens de l'économie se servent du vocabulaire et des notions que les économistes mettent au point, mais il est nécessaire qu'ils ne le fassent qu'avec beaucoup de précautions. En effet, la productivité, au sens des économistes, c'est quelque chose de très précis qui suppose que l'on connaisse d'une part, le volume d'une production et, d'autre part, tous les éléments nécessaires à cette production. L a mesure de la productivité globale de tous les facteurs de production exige pour les économistes contemporains, une traduction en prix normalisés ou bien en heures de travail, et il est bien évident que

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JACQUART

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cette traduction pour l'agriculture et pour l'époque contemporaine est déjà très difficile. La mesure de la productivité agricole au xx e siècle est quelque chose qui fait le cauchemar des économistes. Lorsque nous essayons de transposer ces notions dans le passé, nous nous heurtons à des difficultés telles qu'en vérité, en parlant de productivité agricole, au xvi e ou au xvn e siècle — et sans doute à plus forte raison, encore que je ne sois pas médiéviste, au xn e ou au xm e siècle —, je crois que nous allons un peu plus loin que la réalité, nous baptisons mesure de la productivité agricole ce qui n'est que la mesure du reflet, et d'un reflet certainement lointain, de cette productivité. En effet, pour pouvoir mesurer économiquement la productivité agricole, il faudrait connaître non seulement le volume de la production dans le cadre ou bien de l'exploitation, ou bien de la région, ou bien de la nation, mais il faudrait connaître aussi tous les facteurs de production qui sont intervenus dans cette production. Certains de ces facteurs sont assez faciles à connaître. Il en est ainsi de la quantité de semences que l'on a répandue par rapport à une surface donnée. Il est bien évident aussi que les « facteurs de rendement » — pour parler comme M. Slicher van Bath — sont les plus faciles à connaître. La documentation existe, il faut la recueillir. M. Slicher van Bath l'a déjà fait pour des centaines, des milliers, peut-être des dizaines de milliers de chiffres de rendement, rendement exprimé (je crois que les problèmes de métrologie étant trop complexes pour être clairement résolus, c'est la meilleure solution) en quantité récoltée par rapport à la quantité semée. Mais les autres facteurs de la production agricole, pour les périodes lointaines de l'histoire, je crains fort que nous ne puissions jamais les connaître avec précision. Il en est ainsi très vraisemblablement, par exemple, des quantités de fumier répandues à l'hectare, de la quantité d'heures de travail humain consacrées à la production agricole et vraisemblablement de facteurs comme l'amortissement du capital foncier, l'amortissement du matériel agricole employé et toute une série de facteurs aussi complexes que ceux-là. Qu'est-ce que nous pouvons connaître par conséquent? Je crois, d'abord, et avant tout, deux choses : le rendement à la surface, à l'unité de surface par rapport à la quantité de semence et il est bien évident qu'en réunissant suffisamment de ces données on pourra avoir sur une longue période une idée suffisante du mouvement de ces rendements. On pourra réunir d'autre part un bon nombre de documents relatifs au volume global de la production, encore que pour la région que je connais un peu plus que les autres, c'est-à-dire le bassin Parisien, je ne sais pas si nous pourrons avoir tellement de renseignements globaux. Et puis, à partir de cette étude, nous pourrons peut-être obtenir une image du mouvement général, sur une longue période, de la production agricole. Je dois dire que ce que j'ai trouvé

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dans la région parisienne et ce que M . Goubert a trouvé au nord de cette même région semble en gros confirmer, au moins pour les grandes plaines limoneuses du nord de la France ou des Pays-Bas, un même schéma : c'est-à-dire une augmentation assez constante et assez forte de la production pendant tout le cours du xvi® siècle et vraisemblablement jusque vers la fin de ce siècle. Puis, avec des modalités différentes, une sorte d'affaissement plus ou moins long selon les régions, qui marquerait le x v n e siècle et enfin, semble-t-il, au xvin e siècle à partir de 1700 pour certaines régions, 1720, 1740 pour d'autres, un relèvement de cette productivité agricole. Dans mon résumé j'avais proposé comme une sorte de possibilité de saisir ce mouvement général de la production, d'utiliser, lorsque c'est possible, une série de baux à ferme conclus pour la même exploitation (cette exploitation ayant conservé la même superficie pendant une longue période) et autant que possible, une série de baux à ferme où le loyer soit exprimé d'une manière constante en nature. Il semble évident que le fermier qui prend une exploitation, au fur et à mesure que se renouvellent les baux, de six en six ou de neuf en neuf ans, n'accepte de payer un loyer plus élevé que s'il a la certitude ou du moins la probabilité, d'obtenir d'avantage de grains. Or, pour un certain nombre de fermes de la région parisienne j'ai disposé, depuis la fin du x v e siècle jusqu'à la fin du x v n e siècle, d'une série de baux avec malheureusement des trous dans cette série mais tout de même suffisamment de documents pour pouvoir dessiner une courbe, et ces courbes se recoupent d'une manière assez concluante. Ce mouvement est suffisamment concordant, semble-t-il, pour que l'on puisse en tirer pour la région parisienne des conclusions assez précises. Dans le dernier quart du x v ® siècle et jusque vers 1 5 1 0 1520, les loyers s'élèvent régulièrement et c'est tout naturel puisque nous sommes dans cette région de la France à la période de reconstruction qui succède à la guerre de Cent ans. Mais la reconstruction s'achève vers 1520, les terres sont remises en culture à cette époque-là; or, les loyers continuent de monter et ils continuent de monter jusque vers 1560, 1570. Ensuite, c'est l'épreuve des guerres de religion, particulièrement sévère autour de Paris et c'est l'effondrement des loyers, l'effondrement normal semble-t-il puisque, au lendemain des guerres de religion, la plupart des terres étaient en friche. Dans la première moitié du xvu e siècle les loyers remontent; mais ce qui me paraît le plus important, c'est que, lorsqu'ils atteignent de nouveau, vers le milieu du x v n e siècle, un sommet de la courbe, ils sont loin en dessous des niveaux qu'ils avaient atteints au milieu du xvi e siècle et ainsi on peut dessiner une sorte de courbe qui est assez concluante. Bien entendu, on peut penser que ce mouvement des loyers est le reflet de la production globale agricole. Lorsque nous aurons mesuré

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et déterminé pour un certain nombre de régions de l'Europe occidentale et d'autres pays, d'autres régions du monde, ce mouvement global de la production, il faut bien nous dire que nous n'aurons pas résolu du tout le problème de la productivité agricole, car cette augmentation de la production il faut l'expliquer. Elle peut venir, bien sûr, d'une augmentation de la productivité au sens économique, c'est-à-dire d'une amélioration des techniques, d'une production plus grande pour un travail égal ou pour un travail moindre. Mais elle peut venir également de toutes autres sortes de causes; elle peut venir de défrichements, elle peut venir d'un accroissement du nombre de bras qui se consacrent au travail agricole, elle peut venir d'un certain nombre d'améliorations techniques évidemment. Dans ce domaine je vois que les recherches peuvent aboutir à des résultats intéressants. Quant au nombre de bras employés à l'agriculture, c'est du côté de la démographie historique qu'il faudra se tourner pour trouver les réponses. Le xvi e siècle semble bien être partout un siècle d'accroissement démographique en Europe et est-ce que l'accroissement de la production, que l'on semble déceler entre 1500 et 1560, n'est pas simplement le reflet de l'accroissement démographique? L a fin du xvi e siècle, au moins en France, est marquée par un affaissement démographique et la première moitié du x v n e siècle par une reprise. Est-ce que le mouvement que nous avons déterminé tout à l'heure n'est pas simplement le reflet de ces conditions démographiques? C'est un premier problème, je ne le résous pas. J e le pose simplement. Deuxième point, les innovations techniques. J e crois que là, il faut être très prudent, il va de soi que les techniques agricoles n'ont pas fondamentalement varié entre la fin du Moyen Age et ce que nous avons coutume d'appeler la Révolution agricole. Il n'empêche qu'un certain nombre de changements petits, peut-être, mais significatifs, ont eu lieu. Dans la région parisienne, dans cette région vivifiée depuis longtemps par la présence d'un énorme marché de consommation urbaine, vers les années 1620-1640, il semble que l'on assiste à un certain nombre d'expériences techniques qui sont menées non pas par des propriétaires mais par ces grands fermiers-laboureurs qui sont si caractéristiques de ces régions du plateau du nord de la France, du bassin Parisien en particulier. C'est ainsi que l'on voit apparaître, en pleins champs, certaines parcelles qui sont soustraites à l'assolement triennal et qui sont plantées d'une manière systématique en sainfoin de façon à permettre un élevage spéculatif. J e veux dire qu'il était destiné à alimenter le marché parisien. Mais cet élevage, à côté des laitages, des fromages et de la viande vendus à la capitale, donnait aussi des quantités supplémentaires de fumures qui profitaient aux champs emblavés. De même il semble bien que la pratique des

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cultures dérobées, c'est-à-dire l'habitude de planter sur la sole de jachères, dès cette époque, quelques pois, quelques légumineuses, quelques haricots, quelques légumes, se soit, elle aussi, répandue dans ces années 1620, 1640. En liaison avec la présence de centres de consommation proches des régions qu'on étudie sur le plan agricole, on voit qu'il y a là une direction de recherches que nous pourrions essayer de suivre. De toute manière, et c'est par là que je terminerai, nous nous heurterons toujours, je le crains, aux problèmes de la documentation. Ces époques, assez éloignées de nous dans le temps, ne nous donnent que des renseignements souvent très précis, très intéressants, mais toujours fragmentaires, toujours isolés dans le temps et l'espace, et dont nous ne pouvons jamais savoir pratiquement s'ils représentent des cas d'exception ou bien des faits généraux. Prenons, par exemple, le cas du cheptel vif employé, du nombre d'animaux existant dans une exploitation rurale. Si nous avons la chance de trouver un inventaire après le décès du fermier, nous saurons combien il possédait lui-même de chevaux, de vaches, de moutons. Mais nous savons tous, que dans ces régions de l'Europe occidentale, la pratique du bail à cheptel était générale. Une partie du cheptel de l'exploitation n'appartenait pas à l'exploitant; elle appartenait souvent au propriétaire ou bien à un autre citadin qui la baillait à loyer; or, la plupart du temps, ce bétail n'apparaît pas dans l'inventaire après décès. Nous ne pouvons pas, exactement, affirmer que telle ferme, telle exploitation de cent hectares, vivait avec quatre chevaux, six vaches et une centaine de moutons. Ce qui me paraît devoir nous entraîner toujours à une extrême prudence dans les conclusions que nous pouvons tirer de cette étude de la production et de la productivité agricole dans les siècles passés.

LES RENDEMENTS

DU

BLÉ EN L A N G U E D O C

1

par E. LE ROY LADURIE (École Pratique des Hautes Études, Paris)

A - Quantité de semences utilisées pour un hectare : Une très vaste enquête est possible grâce au rapport local qui s'établit, paroisse par paroisse, du setier (volume de semence) à la séterée (surface semée correspondante). Ce rapport est connu grâce aux ouvrages de Guibal-Laconquie, an V I I , et Fort, an X I I I , dont l'enquête est révélatrice d'une métrologie villageoise plus que multiséculaire. Dans les 314 communes de l'Hérault, les rapports setierséterée les plus fréquents (respectivement dans 40 et 78 communes) sont : 49 litres de grain pour 20 ares (soit 2,45 hl à l'ha) et 66 litres pour 25 ares (soit 2,64 hl à l'ha). Dans le cas de certaines localités cependant (ainsi peut-être à Béziers) ce rapport n'est pas significatif, les habitants ayant adopté à une date indéterminée le setier d'un centre voisin, tout en conservant leur séterée traditionnelle — adaptée, elle, au volume du ci-devant setier local, tombé en désuétude — (ou bien cette discordance peut être due, inversement, à un changement de séterée sans modification du setier). 1. Cette note a déjà été publié en Annexe des Paysans du Languedoc, vol. II, Paris, 1966.

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Néanmoins, une enquête portant sur les 314 communes de l'Hérault donne des résultats extrêmement significatifs et groupés : dans 208 cas, le rapport setier-séterée implique un taux de semence compris entre 2,40 hl et 2,90 hl/ha. Dans 166 cas, ce taux est compris entre 2,40 hl/ha et 2,65 hl/ha. La médiane, pour les 314 communes, se situe à 2,52 hl. O n sème assez lourd, donc. Voici maintenant quelques données monographiques : 1. A Béziers, le champ de l'Agulhon, appartenant au chapitre, mesure 15 séterées (ADH G 195, f° 71, f° 175 r°, etc., an 1551), soit 2,40 ha. Vers 1580-1590, ce champ a été vendu à la famille Rocolles (ADH, G 901); en 1583 les Rocolles y sèment 1,5 setier d'avoine 1 , soit 3,4 hl/ha. 2. A la ferme Saint-Pierre de Béziers (ADH, G 938, an 1658, bail à mi-fruits), la semence, fournie moitié par le bailleur, moitié par le preneur, s'établit ainsi : SURFACE DES DIVERSES PARCELLES EN SÉTERÉES 92 48 27 202

séterées séterées séterées séterées

18 séterées (la séterée d e 16 ares)

QUANTITÉ TOTALE DE SEMENCE EN SETIERS 53 35 22 133

setiers seigle setiers a v o i n e setiers a v o i n e setiers sieisse (froment) 12 setiers sieisse (le setier d e 66 litres)

R A P P O R T HL/HA

2,38 h l / h a 3,01 h l / h a 3,36 h l / h a 2,72 hl 2,75

hl

O n voit que d'après ces données de l'Agulhon et Saint-Pierre, le taux des semences serait de 2,38 hl/ha pour le seigle, 2,73 hl/ha pour le froment, et 3,27 hl/ha pour l'avoine : les semeurs d'avoine ont la main lourde. 3. A la ferme du Viala, 142 ha de labours, dont 71 semés chaque année (ADH, G 779, arpentement de 1697), on conserve, en 1689 (ADH, G 973), 220 hl pour les semences, et en 1715, mais à la suite d'une mauvaise récolte, 170 hl seulement (ADH, G 997) : soit respectivement 3,1 hl/ha et 2,4 hl/ha. 4. Aux terres de Sallèles — qui font 192 séterées 2 de 19 ares dont la moitié semées, soit 18,2 ha semés —- le fonds des semences est de 108 setiers 3 de grains dont 40 setiers froment (Aude G 49, 20 août 1724), et 100 setiers dont 50 setiers froment (Aude G 50, 28 avril 1742) soit 70 hl de semence pour 18,2 ha, ou 3,8 hl/ha. Même en admettant que ce chiffre comporte une marge de sécurité, on voit que les agriculteurs ne lésinent pas sur la semence. 1. Séterée d e Béziers : 16 ares, setiers d e Béziers 2. A u d e G 4 7 , 9 m a i 1699. 3. L e setier d e Sallèles : 70 litres.

: 66 litres«

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A u total, le chiffre de 2,5 hl/ha, soit en poids 2 quintaux à l'hectare, paraît bien représenter le taux normal, ou même minimum pour le Languedoc d'Ancien Régime. Actuellement, les agronomes de l'École d'Agriculture de Montpellier sèment 1,3 quintal-hectare.

B - Rendement de la semence : rapport du grain récolté au grain semé 1. Domaine de la famille Rocolles à Béziers en 1 5 8 3 - 1 5 8 5 G„90i). ANNÉE RÉCOLTE

LIEU-DIT OÙ SE TROUVE LA PARCELLE

1583-84

Palignan













1584-85

Saint-Jeand'Aureilhan —

Palignan Saint-Jeand'Aureilhan Agulhon' Saint-Jeand'Aureilhan —













QUANTITÉ DE SEMENCE

RÉCOLTE NETTE EN GRAINS, AUGMENTÉE DE 2 0 % *

2 0 set. 43 + 9 froment = 5 2 set. 16,5 set. 23.5 + 4,7 froment = 2 8 , 2 set. 17 set. 3 0 + 6 = 3 6 set. froment 3 2 , 3 set. 106 + 21 seigle = 127 set. 9 set. 21 + 4 , 2 seigle = 2 5 , 2 set. 26 + 5,2 12,5 set. avoine = 31,2 set. 10 set. 8 + 2 = 10 set. avoine 9 set. 12,5 + 2.5 froment = 15 set. 2 set. 2 + 0 , 4 = 2 , 4 set. avoine 16 + 3 . 2 5 set. seigle = ig,2 set. 2 set. 2 + 0 , 4 = 2 , 4 set. avoine Moyenne. .

(ADH,

RENDEMENT A LA SEMENCE 2,6

p. I

i,7 p. I 2,1

p. I

3,9 p. I 2,8

p. I

2,5 p. I 1

p. I

i,7 p. I 1,2 p. I 3,8 p. I 1,2

p. I

2,2

p. I

1. Les comptes Rocolles indiquent, au chapitre des recettes, la récolte nette, en grains, semence future non déduite (la semence est en effet imputée au chapitre des dépenses). Mais cette recette nette en grains n'inclut pas la partie de la récolte ui est prélevée, en gerbes, par les décimateurs (7 pour 100 de la récolte), les coupeurs 7 à 8 pour 100), les dépiqueurs (5 pour 100), soit environ 20 pour 100 du total; il faut ajouter ces 20 pour 100 à la « récolte nette » pour obtenir la récolte brute. 2. Cf. supra, p. 76 : l'une des causes de ces faibles rendements, c'est qu'on sème très épais, comme le montre le cas du champ de l'Agulhon.

?

2. Témoignage du Languedocien Olivier de Serres (1600) : « Les semences, es bonnes terres, ne font communément que cinquener ou

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sixener ». Le rendement moyen, lui, ne serait J o n c guère supérieur à 4 pour i , vers 1600. 3. Témoignage de d'Aguesseau (ms. 603, Bibl. mun. Toulouse) : (cf. supra, vol. 1). 4. Domaine des Salles : année récolte 1681-82 : 3 pour 1 en blé, seigle, avoine (ADH, G 964). 5. Domaine de Coussergues (1684-1687). ANNÉE-RÉCOLTE

1684-8 5 1685-8 6 1686-8 7 Total

G R A I N S SEMÉS

G R A I N S RÉCOLTÉS +

376 436 462

1.586 + 318 = 1-417 + 284 = 1.178 + 236 =

1.904 1.701 1.414

4.181 set.

5-OI9

1-274 set.

20

%

set

-

Rendement à la semence : 3,3 pour 1, taux minimum, et 3,9 pour 1 compte tenu des 20 %. 6. Rendement habituel du grain autour de Montpellier : 4 pour 1, rendement record 7 à 8 pour 1 (18 juillet 1676 : Locke's Travels in France, 1675-1679 (éd. J . Lough), 1953, p. 105). 7. Ferme du Viala : semence prélevée sur la récolte en 1689 : 383 setiers sur 1.501 setiers, soit 3,9 pour 1, et davantage si l'on augmente la récolte (supposée nette? ) de 20 % (Source A D H , G 973). 8. Ferme du Viala, en 1715, récolte : 365 setiers froment, 370 setiers seigle, 51 setiers orge, 29 setiers paumoulle, 107 setiers avoine, soit, au total, 922 setiers de grains : semences prélevées sur cet ensemble : 81 setiers froment, 101 setiers seigle, 30 setiers orge, 5,5 setiers paumoulle, 40 setiers avoine, soit 257,5 setiers; rendement (minimum) : 3,6 pour 1. Rendement réel probable : environ 4 pour 1 (Source A D H , G 997)9. Ferme de Saint-Pierre en 1729 : récolte de blé, seigle, orge (50 setiers), 1.368 setiers; semence prélevée sur cet ensemble : 324 setiers. R a p p o r t semence-récolte : 4,2 pour 1, au minimum. 10. Coussergues (A. Chéron et G. de Sarret, Coussergues et les Sarret, Bruxelles, 1963, p. 260). A N N É E RÉCOLTE

1741-4 2 1742-4 3 1748-49

R e n d e m e n t m i n i m u m : 4,3 p . 1.

G R A I N S SEMÉS

GRAINS

RÉCOLTÉS

43i

1-834

1.124

4.788

4i9 274

2.145 809

Pour les années-récolte 1751-52 à 1759-60 (cinq années-récolte connues), le rendement m i n i m u m monte à 6 pour 1, à Coussergues. A la ferme d'Amilhac, 1768-69 (ADH, G 1037), sur 683 setiers

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de récolte (blé, seigle, avoine) on prélève seulement 112 setiers de semence, rapport : 6,1. En 1787-1792, les rendements de Coussergues, calculés sur 6 ans et 3 céréales (blé, seigle, avoine) montent à 9,7 pour 1 en moyenne; augmentation due en partie seulement à la mise encn lture de terres alluviales(Chéron et de Sarret, 1963, p. 291). Vers 1820, les rendements héraultais des céréales classiques (blé, seigle, orge, avoine) sont de 6,2 pour 1 (Creuzé de Lesser, 1824, tableau de la p. 451). Donc les rendements bloqués à 4 pour 1, ou moins, jusqu'en 1720 s'élèvent lentement à partir de 1720, et « décollent » franchement vers 1750. C - Rendement à l'hectare : 4? Dans la période de stagnation, jusqu'en 1720, il est en moyenne (d'après les données des paragraphes A et B) de : 2,5 hl X 4 = 10 hl/ha, ou, en poids, 8 qx/ha. Dans la période d'essor (1725-1825), il monterait 1 , toujours pour les céréales classiques, à 2,30 hl X 6,2 = 14,3 hl/ha.

COMMUNICATION

DE

M. LE ROT

LADURIE

Les sources du résumé qui précède, sur les rendements du blé en Languedoc sont tirées des Archives départementales de l'Hérault et de l'Aude. La région elle-même est assez étroitement délimitée, c'est celle de Montpellier, Béziers, Narbonne, donc une région petite, de climat sec, de terres plutôt maigres, de conditions climatiques et écologiques très homogènes. Cela permet tout de même une chronologie assez précise avec des écarts régionaux assez faibles. Les sources sont de deux types : monographies de domaines ou bien textes d'agronomes ou de fonctionnaires comme d'Aguesseau qui s'intéressent au rendement du blé dans leurs régions. O n peut critiquer ces sources les unes par les autres. Quelques mots d'abord sur les méthodes qui permettraient de connaître non pas exactement la productivité mais la production. La méthode de la rente que vient d'exposer Jean Jacquart est sûrement très importante. Il reste tout de même un problème, c'est que le prélèvement de la rente sur la production peut varier en pourcentage 1. D ' a p r è s CREUZÉ DE LESSER, Statistique du département de l'Hérault, 1824, p . 4 5 1 .

Montpellier,

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à cause de la présence de fermiers plus nombreux ou plus riches capables d'offrir des loyers plus élevés ou à cause d'une offre de terre plus réduite. Il est certain que dans l'évolution de la rente les diverses régions ne réagissent pas toujours de la même façon. D'après ce que j'ai retenu du très intéressant exposé de Jacquart, il semble que l'on pourrait schématiser l'évolution de la rente dans la région parisienne à peu près ainsi : un sommet vers 1560, puis une baisse de la production, puis une reprise qui n'atteint pas les triomphes du xvi e siècle. Mes données, tirées de treize domaines en Languedoc, sont tout à fait différentes et je m'empresse de dire que cela n'infirme nullement ce que dit M. Jacquart, cela montre simplement des diversités possibles. Je vois une stagnation au xvi e siècle, une montée dans la première moitié du x v n e siècle, montée qui pulvérise les records du xvi e siècle : c'est la grande différence avec les données parisiennes. Il y a, à ces évolutions divergentes, diverses explications. Je pense qu'il ne faut pas oublier le problème de l'impôt. Le fait fondamental en Languedoc c'est le tour de vis fiscal qui se situe vers 1620 à peu près. En Languedoc la taille est réelle, payée par le propriétaire, donc le propriétaire a tendance à répercuter sur le fermier, par une hausse de la rente, la hausse de l'impôt. Ce serait du moins une raison de la hausse languedocienne de la rente dans la première moitié du xvn e siècle. Peut-être dans la région parisienne l'évolution est-elle différente, la taille étant payée par le fermier, celui-ci, davantage écrasé par l'impôt dans la première moitié du x v n e siècle, serait hors d'état de payer une rente plus élevée à son propriétaire. Vous auriez ainsi une des explications, peut-être pas la seule, de cette évolution divergente. L a méthode des dîmes permet, a-t-on dit, d'atteindre la production, mais non pas la productivité. J'ai rencontré de très nombreuses dîmes en Languedoc. En gros, à travers une grande stabilité de la production aux xvi e et x v n e siècles, elles dessinent d'amples fluctuations, mais n'indiquent jamais, pour prendre le jargon actuel, un « décollage ». Malgré une baisse profonde aux guerres de religion, et pendant la crise Louis-quatorzienne, la production reste dans l'ensemble stabilisée. Les dîmes ne permettent pas de connaître parfaitement la productivité mais si on se fie à elles on doit penser que la productivité n'a pas « décollé » aux xvi e et xvn e siècles. J'en viens donc à la dernière méthode, celle du rapport des semences. Elle est certainement insuffisante, elle permet tout de même, comme l'ont montré M M . Slicher van Bath et Jacquart, une première approche. Trois étapes dans la solution du problème : Quelle quantité de semence est utilisée à l'hectare? Deuxième étape. Quelle est la proportion de la récolte à la semence ? Troisième étape. Quel est le rendement à l'hectare ?

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Quantité de semence à l'hectare d'abord. O n peut aborder le problème de deux façons. D'abord de façon métrologique : rapport du setier, unité de volume de la semence, à la séterée, unité de surface. Méthode monographique : dans tel champ, dans tel domaine on a semé tant à l'hectare. La méthode setier-séterée indique, comme j'ai pu le dire dans mon résumé, que la quantité de semence à l'hectare se situe en règle générale autour de 2,5 ou 2,6 hectolitres à l'hectare avec une forte tendance à des chiffres plus forts pouvant aller jusqu'à 2,8, 2,9 voire même 3 hectolitres à l'hectare, chiffres qui seraient insensés pour des agronomes ou des agriculteurs actuels. Si l'on prend maintenant les données monographiques on rencontre en 1583, d'après mon résumé, 3,4 hectolitres à l'hectare; en 1658, des chiffres qui s'échelonnent entre 2,4 et 3,2 hectolitres à l'hectare; en 1689, 3,1 hectolitres à l'hectare; en 1715, 2,4; en 1724-1742, 3,8 hectolitres à l'hectare. O n sème donc extrêmement lourd. Encore en 1825, I e préfet de l'Hérault donnera comme chiffre 2,5 hectolitres à l'hectare et même davantage. Il est intéressant de noter aussi que dans la période 1725-1740, où débute le « décollage » de la productivité, on sème toujours extrêmement lourd. Ceci pour dire qu'il est difficile d'expliquer ce « décollage » de la productivité uniquement par le fait qu'on sèmerait moins lourd et qu'ainsi on obtiendrait des rendements plus élevés en mettant moins de semence. Rendement de la semence. Les premières données sont de 1583-85, tirées d'un livre de raison d'un bourgeois de Béziers, Rocolles. Les rendements sont ridiculement faibles. Même en les augmentant de 20 % compte tenu de la part des décimateurs, des coupeurs, des dépiqueurs, on n'arriverait qu'à 2,2 pour 1. Il est certain qu'il y a eu une ou deux années très sèches, qu'il y a eu les guerres de religion, qu'il y a peut-être eu certaines fraudes du métayer ou du gérant qui a pu dissimuler une partie des rendements. Avec Olivier de Serres en 1600, nous atteignons la vaste expérience d'un agronome qui a cultivé la terre pendant quarante ans et qui, d'autre part, connaît très bien l'agriculture languedocienne ou provençale. Olivier de Serres dit que, dans les meilleures terres, les grains ne font que se multiplier par 5 ou par 6. Le rendement moyen s'établirait donc à 4 pour 1, meilleur peut-être que dans la période de 1580, la période des guerres où il n'était, par suite de mauvaises circonstances, qu'à 2 pour 1. Sous Colbert, d'Aguesseau donne des chiffres relativement élevés, 4 pour 1, mais aussi 5, 6, 7 pour 1 dans les bonnes terres. Il y aurait donc, ceci n'est pas contradictoire avec ce qu'a dit Jacquart, une légère hausse du rendement au xvii e siècle, l'économie se remettant des difficultés des guerres de religion. Toutefois John Locke, qui soigne ses poumons à Montpellier en 1676 et qui visite les fermes, dit que le rendement moyen est de 4 pour 1 et que les records sont

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de 8 pour i . Nous restons en 1676 à un rendement assez bon de 4 pour 1. Après 1680 la vraie crise Louis-quatorzienne commence en Languedoc, les sécheresses inaugurent des catastrophes qui dureront beaucoup plus longtemps que ces sécheresses. Les fermiers sont ruinés, des terres sont abandonnées. O n a pour un certain nombre de domaines, non pas le rendement de la récolte à la semence, mais le prélèvement de la semence sur la récolte, en vue de l'année suivante ; 3 pour 1 dans le grand domaine des Salles en 1681-1682; 3,3 pour 1 et, au plus, 4 pour 1 si l'on augmente ce chiffre de 20 % , comme je l'ai dit tout à l'heure, dans le domaine de Goussergues étudié récemment; 3,9 pour 1 et 4,7 pour 1, si l'on augmente encore de 20 % en 1689 dans une grande ferme; 3,6 pour 1 et 4,1 avec l'augmentation de 20 % en 1715 dans un autre grand domaine. O n remarquera donc que, jusqu'en 1715, les données monographiques n'atteignent jamais 5 pour 1. U n premier changement, peut-être épisodique (nous n'avons qu'une source), apparaît en 1729 dans le grand domaine de Saint-Pierre près de Béziers, qui dépasse 100 hectares. En fait, les fermiers obtiennent 4,2 pour 1 et si l'on fait l'augmentation de 20 % on arrive alors à 5 pour 1 pour la première fois d'après les données monographiques. Est-ce le fait d'une bonne récolte exceptionnelle? C'est possible. Toutefois les données de Coussergues, que nous possédons à nouveau en 1740, indiquent cette fois-ci une augmentation intéressante : 4,3 pour 1 pour une période de 10 ans. O n élimine donc l'écart climatique, l'écart cyclique : 4,3 pour 1 et avec une augmentation de 20 % , 5,1 pour 1 ; le cap de 5,1 pour 1 est, semble-t-il, franchi entre 1729 et 1740 ou 50. Dans ce même domaine de Coussergues à la décennie 1750-60 on arrive à 6 pour 1. A la veille de la Révolution 1787-1792 ou à la Révolution 9,7 pour 1, ce qui est très important et s'explique peut-être par un certain dessèchement des bonnes terres. Enfin, le préfet de l'Hérault en 1825 dit 6 pour 1. O n aurait donc, après une période d'hésitation, de très lentes montées jusque vers 1670-80, une stagnation à 4 pour 1 jusqu'en 1715 puis, à partir de 1729, une montée qui amènerait jusqu'à 6 pour 1 et quelquefois davantage. Comment expliquer cette hausse au x v n e siècle? Une explication serait qu'on aurait semé moins. Supposons qu'on sème par exemple 3 hectolitres par hectare au x v n e siècle, on obtient 3 pour 1, on récolte 9 hectolitres. Si l'on sème 2 hectolitres à l'hectare on a des chances, si l'année n'est pas trop mauvaise, de faire 4 ou 5 pour 1 et l'on obtient encore 8 pour 10 hectolitres. Il semble qu'au début du x i x e siècle on sème encore très lourd et qu'on ne puisse pas expliquer la hausse des rendements par une quantité de semences moindre. O n pense alors à une augmentation de la productivité de la semence

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83

elle-même, donc à une hausse de la productivité à l'hectare. Cette augmentation de la productivité de la semence pourrait s'expliquer comme en Catalogne par l'irrigation. En fait il n'y a guère d'irrigation en Languedoc au x v m e siècle. Le fait est limité aux régions situées plus au sud, aux régions ibériques. O n pourrait l'expliquer par une meilleure sélection des graines, ce n'est pas tellement le cas. Il semble en fait que les agriculteurs aient labouré plus consciencieusement, avec des labours mieux faits, plus fréquents, aient davantage sarclé leur blé, qu'ils aient fait leurs semailles au moment où celles-ci devaient être faites et non pas avec négligence comme c'était souvent le cas au x v n e siècle. Il semble aussi qu'il y ait eu quelques assolements de meilleure qualité, des plantes fourragères et surtout davantage de fumier grâce à l'essor de la population des villes, et donc des divers élevages. Il y aurait donc augmentation de la productivité de la semence, augmentation de la productivité à l'hectare. Y a-t-il, ce qui est la question fondamentale, pour nous, augmentation de la productivité par tête de producteur, par homme? Tout dépend comment on calcule. Je ne pense pas qu'il y ait forte augmentation de la productivité si j'ose dire horaire, la productivité de l'heure de travail. Les techniques sans doute se sont un peu améliorées, les charrues, ou plutôt les araires se sont perfectionnées, la charrue quelquefois a remplacé l'araire. Il est possible qu'il y ait une faible augmentation de la productivité horaire au x v m e siècle, mais, surtout, il y a, je pense, augmentation de la productivité de la journée de travail, ou de l'année de travail. Je m'explique : la journée de travail c'est la réduction de la sieste. La sieste dans le midi languedocien est un élément fondamental de la journée de travail et John Locke atteste que les ouvriers agricoles arrêtent le travail à deux heures de l'après-midi. O n peut arrêter le travail pour aller dormir, on peut aussi arrêter le travail pour commencer une autre journée chez un autre. Les deux solutions sont attestées dans les textes et il n'est pas inconcevable que les gens aient davantage rempli leur journée et davantage travaillé dans la période d'essor de la production au x v m e siècle. Et puis, il y aurait aussi une productivité plus grande de l'année de travail, les ouvriers travaillant davantage de jours dans l'année. O n aurait donc, au xvni e siècle, à en juger d'après cette augmentation des rendements des grains, et d'après ces données sur un travail plus grand, une société qui travaille plus, qui produit plus, et qui consomme plus. Resterait à expliquer pourquoi cette augmentation. Ceci évidemment nous mènerait un peu loin. J'insiste seulement sur la chronologie assez intéressante de cet essor de la productivité en Languedoc à partir de 1720-1730. Ici aussi le grand siècle

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ce serait le xviii e siècle. Reste à savoir si ailleurs il en est ainsi, ce qui n'est pas encore démontré. Il semble en tous cas que ces régions méditerranéennes aient vu « décoller » leur productivité après les régions nordiques étudiées par M. Slicher van Bath ou par M. Jacquart.

PRODUCTION

ET

DANS DE

LA

PRODUCTIVITÉ

LES

FIN

DU

DEUX

AGRICOLES

CASTILLES

XVII*

SIÈCLE

A

1836

par Gonzalo

ANES

ALVAREZ

(Université de Madrid)

L'étude de la production agricole présente, en Espagne, des problèmes difficiles à résoudre. Il est vrai que les enquêtes réalisées par le gouvernement pour s'informer, avec un but fiscal, de la production, furent beaucoup plus fréquentes dans l'Espagne de l'Ancien Régime que ce que l'on pourrait croire au premier abord. Les réponses, si connues, aux questionnaires de 1575 et de 1578 offrent, en particulier, des possibilités pour l'étude de la population, de la production, des charges qui pesaient sur les paysans, etc. L'intérêt de ces réponses est d'autant plus grand que ces enquêtes ne furent pas réalisées avec une finalité fiscale proprement dite. En outre, tout historien de l'économie espagnole est conscient de l'importance de la documentation que l'on connaît sous le nom de Catastro del Marqués de la Ensenada et du profit que l'on peut tirer de son utilisation systématique. Mais cette documentation ne permet pas l'étude des fluctuations, étant donné son caractère épisodique et, par conséquent, elle ne saurait être considérée comme source d'études conjoncturelles. Cependant il existe, en Espagne, des sources qui permettent une analyse rigoureuse de la production et de la productivité agricoles et

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ALVAREZ

qui rendent possible l'étude de leurs fluctuations. O r , cette documentation n'a jamais été utilisée dans ce dessein. A u cours' du x v m e siècle, en particulier, le gouvernement a essayé, à plusieurs reprises, de connaître la production des différentes contrées et régions du pays afin de disposer d'une information statistique qui lui aurait permis de réaliser une politique rationnelle de subsistance d'accord avec les possibilités fournies par chaque zone du pays. C e besoin d'information augmentait pendant les années de mauvaise récolte et c'est presque toujours à partir de ces années que le gouvernement réclame aux Corregidores, aux intendants, aux évêques, etc., les statistiques des récoltes, voulant ainsi faire des confrontations entre les informations de provenance civile et ecclésiastique. Il serait possible de dresser un répertoire de toutes les Ordonnances royales réclamant une information de ce genre, et même si leur réitération prouve qu'elles n'étaient pas toujours obéies, on peut, toutefois, se servir des chiffres des récoltes fournis par les autorités locales et ecclésiastiques au gouvernement central et constituer, avec eux, des séries courtes qui permettraient une comparaison des productions obtenues dans des périodes différentes du x v u i e siècle. C'est ainsi que, à partir de 1782, le Conseil de Castille réunit les statistiques de récoltes de grains fournies par les Corregidores et aussi par les évêques d'après les chiffres empruntés aux livres de tazmias (c'est-à-dire aux livres dans lesquels les dîmes perçues dans chaque paroisse étaient enregistrées) et à d'autres complémentaires. Vers le fin du siècle, surtout à partir de 1789, les Intendants réalisèrent un recueil systématique des chiffres des récoltes et c'est grâce à ce travail que le Conseil réussit une information statistique suffisante pour dresser des statistiques générales de production. En se servant de cette documentation, il est possible d'évaluer la production de grains dans les plus représentatives des régions productrices de céréales et de calculer les récoltes obtenues dans ces mêmes régions pour les périodes 1727-1733, 1790-1797, et 1802-1804 au moyen des chiffres fournis par la documentation de chaque village. Mais l'étude de la production pour ces périodes doit être confrontée avec d'autres chiffres provenant d'une documentation d'un autre genre. J e veux parler des dîmes proprement dites. L a dîme ecclésiastique présentant en Espagne quelques inconvénients, on ne peut pas l'utiliser comme indice de la production globale. O n sait que la casa mayor dezmera — par le privilège de la gracia del Excusado — au lieu de verser le montant des dîmes à l'Église, les versait aux Finances royales. C'était en outre la Real Hacienda qui choisissait tous les ans cette maison. Même si dans certains cas — mais ce sont les moindres — les dîmes payées par la casa mayor sont enregistrées dans les livres des tazmias, les séries des dîmes que l'on peut former en utilisant la docu-

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mentation ecclésiastique doivent être complétées avec les chiffres de El Excusado, fournis par les sources des archives de l'État. Il est aussi possible de confronter les séries de dîmes ainsi formées avec celles des Tercias Reaies (2/9 de la dîme) perçues par la Real Hacienda et accordées parfois à des particuliers. Cependant, étant donné que les tercias se présentent mélangées à d'autres revenus fiscaux, il est difficile parfois de procéder à leur détermination précise et, par conséquent, leur utilisation n'est possible que dans certains cas. L a documentation des archives diocésaines permet de connaître les dîmes perçues dans chaque diocèse et, pour confronter la véracité des chiffres fournis par les documents de ces archives, il est possible d'utiliser la source originale, c'est-à-dire les livres des tazmias conservés dans les archives des paroisses et certains d'entre eux dans YArchivo Historico National. L'étude de ces trois types de sources et leur utilisation convenable, étant donné la façon minutieuse avec laquelle sont enregistrés les chiffres — en spécifiant la production de chaque village — peuvent, en outre, être confrontées avec les séries de rendements de semences employées dans les granges situées dans les mêmes régions et pour lesquelles on dispose de sources d'un autre genre. Des séries de rendements peuvent être constituées au moyen de certains livres de comptabilité qui précisent la semence employée et la récolte obtenue. L'étude de la productivité agricole n'est possible que dans les cas où il existe des livres de comptabilité qui spécifient les dépenses de culture et les récoltes obtenues. Ces livres sont peu fréquents car il n'y avait que quelques couvents et quelques maisons nobles exploitant directement leurs terres. J'utiliserai de préférence la documentation provenant des monastères car, pour une partie importante, elle est conservée dans YArchivo Historico Nacional. Cependant, il y a aussi en Espagne des livres de comptabilité de provenance différente. J e pense aux comptes des granges exploitées directement par les Universités : dans la communication que j e présenterai au Congrès, j e ferai connaître des livres de comptes des exploitations agricoles directement cultivées par l'Université de Alcalà. Il serait nécessaire de comparer et de faire le parallèle entre le rendement des semences blé, orge, seigle, et le rendement à l'hectare puisqu'un surcroît ou une diminution de la quantité détermine une variation de la récolte obtenue pour une même surface de terre, facteur bien important, surtout quand on étudie une vaste période de temps. Mais il est impossible de connaître le rendement à l'hectare sauf dans les cas où le nom de la terre semée est précisé dans la documentation et où cette terre peut être identifiée grâce aux apeos (c'està-dire les relevés de propriété). En outre, en Castille, les jachères compliquent le problème. Cependant, on peut tirer des conclusions

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intéressantes de la récolte obtenue par semence employée. L a comparaison avec le rendement par fanega — ou à l'hectare — de la terre ensemencée peut se faire dans certains cas, ce qui permettrait ainsi d'évaluer, s'il y a eu des variations sensibles dans la période étudiée. Certaines comptabilités permettent l'étude de la productivité. Il est possible de déterminer les coûts de production — salaires, outils — et les récoltes obtenues. En appliquant les prix convenables à la récolte obtenue (vendue et consommée), on peut étudier les fluctuations de la productivité, et calculer chaque année soit le bénéfice, soit la perte de l'exploitation agricole.

COMMUNICATION

DE

M.

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L'accroissement de la production agricole en Espagne tout au long du x i x e siècle ne fait pas de doute. O n pouvait le supposer à partir de l'augmentation de la population. O n le constate aussi en comparant les chiffres des récoltes de plusieurs provinces dans les périodes 1828-1833 e t 1891-1897. L a difficulté consiste à préciser dans quelle proportion ces accroissements sont dus aux deux causes possibles : extension et intensification des cultures. O n peut se livrer à des appréciations concernant la première et on peut bâtir des hypothèses pour la seconde. Mais il est certain qu'une étude poussée devra tenir compte des rendements de semences, des coûts d'exploitations, des récoltes obtenues, etc., tels qu'on peut les déterminer à partir des livres de comptes d'exploitations agricoles. Aussi bien la périphérie que l'Espagne intérieure connurent au long du x v m e siècle une extension des cultures, surtout au cours de la seconde moitié du siècle. A partir du repeuplement intérieur, les revendications des paysans s'opposant aux privilèges de la mesta, l'accroissement de la rente de la terre sont des preuves de l'extension des cultures. U n exemple sûr et représentatif des nouveaux défrichements peut être fourni par l'ensemble des autorisations royales accordées pour le défrichement de terrains de pâture et de terrains en friche. Même si ces documents ne précisent pas d'habitude la superficie, et même s'il est impossible de déterminer l'emplacement de la surface défrichée, ils ont l'avantage de permettre de connaître, en gros, les besoins locaux en terres de labours et d'établir une première comparaison des degrés d'extension des cultures selon les régions, tout au moins des défrichements légaux. L'intensification des cultures fut possible grâce à de nouvelles irrigations et aux progrès des techniques. Pour le

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moment il me paraît impossible de faire des appréciations de longue portée sur l'intensification des cultures. Les autorisations accordées par les papes à la couronne de Castille, au sujet de la perception des dîmes qui résultèrent des nouvelles irrigations, et, plus tard, de nouveaux défrichements, ne concernèrent qu'une faible partie de ces cultures. La production obtenue et la semence employée sont faciles à connaître car elles apparaissent minutieusement enregistrées dans les livres de comptes. Toutefois ce n'est pas toujours le cas des dépenses qui souvent apparaissent bloquées dans un seul groupe en dépit de leur variété. Il est difficile de séparer les dépenses d'exploitation proprement dites de celles qui étaient considérées comme des dépenses de capital fixe car les livres de comptes ne différencient pas toujours les deux concepts. Il est vrai qu'une étude minutieuse des comptes devrait rendre possible la distinction qu'on trouve parfois entre les comptes généraux et les comptes particuliers. Leur analyse permet d'individualiser les moindres détails. Il est difficile toutefois, de connaître l'extension de l'étendue semée chaque année et pour chaque produit, car il est naturel que ceux qui étaient chargés de rédiger les livres de comptes n'aient pas jugé nécessaire de l'enregistrer. Il faut donc s'en tenir à l'extension totale de la grange ou de l'ensemble des parcelles qui formaient l'exploitation agricole afin de constituer un indice du profit ou de l'intensité de la culture. Toutefois la complexité des systèmes de culture exige, dans chaque cas, la détermination de celle qui était utilisée de façon concrète et comme les documents n'en parlent presque jamais il faut s'en tenir à ce qui était habituel dans la région. Mais ce qui en définitive présente le plus d'intérêt c'est le résultat économique de l'exploitation. C'est-à-dire, le total des dépenses et des recettes obtenues afin de déterminer les époques de profit dans l'agriculture et si le profit devenait difficile à obtenir, ou même les époques de pertes. Suivant les possibilités d'obtenir des bénéfices dans l'agriculture, nous assistons à des changements d'attitudes, à l'apparition des nouveaux courants de pensée au sujet de la terre, surtout dans la seconde moitié du x v m e siècle et en dernière incidence à d'importantes variations dans la structure de la propriété. Tout cela ne signifie absolument pas une sous-estimation des possibilités et du rôle joué par les différents facteurs de la production dans le processus reproductif. Car tout intéresse l'obtention du résultat final et peut-être parfois les prix de l'un d'eux sont responsables du mauvais déroulement de l'exploitation agricole. Mais j'insiste sur le fait qu'avant d'étudier les fluctuations de la productivité de chaque facteur et les possibilités de marché de chaque produit obtenu, il serait convenable de savoir à quoi s'en tenir au sujet de l'évolution temporaire des bénéfices des entreprises agricoles.

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J'ai fait une étude de quelques livres de comptes d'exploitations agricoles et j'ai relevé les dépenses, les produits de la récolte ou les prix de chaque produit. Si nous comparons les résultats de l'exploitation agricole de la fin du xvm e siècle à la moitié du xix e siècle et à la fin du xix e siècle, nous constatons que la montée du profit en relation avec les coûts en pourcentages est de 3,43% pour l'année 1871, 1,48 % pour l'année 1893. Cependant, à la moitié du xix e siècle, par exemple durant l'année 1839, on trouve 26,24 % de bénéfice par rapport aux dépenses et à la fin du xix e siècle, par exemple en 1880, 36,16 % par rapport à la dépense. En général, on pourrait faire une comparaison, par exemple du point de vue des sources, de toutes les informations qu'il est possible d'obtenir des chiffres des récoltes estimés par la dîme. J'ai dressé un tableau de toutes les sources que je peux employer pour l'étude de la production totale et des livres de comptes que j'ai pu utiliser pour l'étude du rendement des semences et des profits ou pertes des exploitations agricoles dans les deux Castilles. Puis j'ai fait une comparaison entre macro et micro économie.

DISCUSSION M . M E U V R E T . — Je voudrais évoquer deux questions : la question de la semence et aussi la question de la façon de calculer le rendement. Quand on ne peut pas avoir autre chose, il est très intéressant d'avoir des tableaux et même des tableaux comparatifs dans le temps, du rendement calculé à la vieille mode c'est-à-dire rendement de tant par rapport à la semence : 4 pour 1, 5 pour 1, 6 pour 1. Je ne méprise pas du tout ces résultats qui souvent demandent beaucoup d'efforts et qui sont très importants. Ils sont surtout importants pour suivre dans un même domaine bien défini, une évolution. Ils sont déjà plus difficiles à utiliser à mon avis au moins dans les pays occidentaux, lorsqu'il y a une très grande variété à la fois de sols et d'exploitations et des semences qui, j'allais dire d'une région à l'autre, mais d'un petit pays à un autre, peuvent varier énormément. Il est dangereux de lire trop l'histoire à rebours, néanmoins c'est une méthode qui a quelquefois sa valeur. Si vous consultez les statistiques agricoles du xix e siècle vous verrez que des départements comme la Seine ou la Seine-et-Oise ont, comme on pouvait s'y attendre, des maxima de rendements, j'entends le rendement chiffré à l'hectare. La Lozère est le dernier des départements français pour les rendements à l'hectare. Mais, plaçons-nous au moment de ces enquêtes agricoles, 1860 mais celles de 80 aussi : on sème beaucoup

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J'ai fait une étude de quelques livres de comptes d'exploitations agricoles et j'ai relevé les dépenses, les produits de la récolte ou les prix de chaque produit. Si nous comparons les résultats de l'exploitation agricole de la fin du xvm e siècle à la moitié du xix e siècle et à la fin du xix e siècle, nous constatons que la montée du profit en relation avec les coûts en pourcentages est de 3,43% pour l'année 1871, 1,48 % pour l'année 1893. Cependant, à la moitié du xix e siècle, par exemple durant l'année 1839, on trouve 26,24 % de bénéfice par rapport aux dépenses et à la fin du xix e siècle, par exemple en 1880, 36,16 % par rapport à la dépense. En général, on pourrait faire une comparaison, par exemple du point de vue des sources, de toutes les informations qu'il est possible d'obtenir des chiffres des récoltes estimés par la dîme. J'ai dressé un tableau de toutes les sources que je peux employer pour l'étude de la production totale et des livres de comptes que j'ai pu utiliser pour l'étude du rendement des semences et des profits ou pertes des exploitations agricoles dans les deux Castilles. Puis j'ai fait une comparaison entre macro et micro économie.

DISCUSSION M . M E U V R E T . — Je voudrais évoquer deux questions : la question de la semence et aussi la question de la façon de calculer le rendement. Quand on ne peut pas avoir autre chose, il est très intéressant d'avoir des tableaux et même des tableaux comparatifs dans le temps, du rendement calculé à la vieille mode c'est-à-dire rendement de tant par rapport à la semence : 4 pour 1, 5 pour 1, 6 pour 1. Je ne méprise pas du tout ces résultats qui souvent demandent beaucoup d'efforts et qui sont très importants. Ils sont surtout importants pour suivre dans un même domaine bien défini, une évolution. Ils sont déjà plus difficiles à utiliser à mon avis au moins dans les pays occidentaux, lorsqu'il y a une très grande variété à la fois de sols et d'exploitations et des semences qui, j'allais dire d'une région à l'autre, mais d'un petit pays à un autre, peuvent varier énormément. Il est dangereux de lire trop l'histoire à rebours, néanmoins c'est une méthode qui a quelquefois sa valeur. Si vous consultez les statistiques agricoles du xix e siècle vous verrez que des départements comme la Seine ou la Seine-et-Oise ont, comme on pouvait s'y attendre, des maxima de rendements, j'entends le rendement chiffré à l'hectare. La Lozère est le dernier des départements français pour les rendements à l'hectare. Mais, plaçons-nous au moment de ces enquêtes agricoles, 1860 mais celles de 80 aussi : on sème beaucoup

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plus fort en Seine-et-Oise que dans la Lozère. O n dépasse 3 hectolitres à l'hectare. J e ne crois pas du tout que le x i x e siècle, qui a vu un incontestable progrès agricole, ait semé léger, d'ailleurs L e R o y Ladurie a noté que dans son Languedoc les semences du début du x i x e siècle sont presque plus fortes que sous l'Ancien Régime. E h bien, les agronomes, depuis Duhamel du Monceau, vous diront qu'on devrait semer en ligne, avec un instrument de type semoir. En fait, les stations agronomiques ont obtenu au x i x e et au x x e siècle des rendements magnifiques, supérieurs à ceux de la plupart des exploitants les plus riches, sur des terres de dimensions restreintes, extrêmement soignées à tout point de vue, et sans qu'on ait établi le bilan financier, exact et complet de ce que cette culture soignée qui était en réalité du jardinage technique coûtait. J ' a i lu sous la plume d'un agronome authentique, mais qui était un homme de sens pratique, j e parle d'Hitier qui était le grand spécialiste du blé il y a encore un demi-siècle, un article dans le Journal d'Agriculture pratique. Hitier y dit : Les semences légères, le tallage des grains c'est fort bien en théorie, mais, en pratique, on obtient de hauts rendements en cultivant la terre le mieux possible, mais aussi en semant dru, parce qu'il coûte moins cher d'étouffer les herbes adventices avec une semence forte que de faire un sarclage. A la vieille mode, on opérait des désherbages que faisaient les bandes de femmes vers le printemps, alors qu'il coûtait moins cher dans les terres les plus riches de semer dru. Et remarquez qu'ici il y a un problème et là, le cas de L e R o y Ladurie, ou plutôt celui qu'il évoque, m'inquiète pour mes propres thèses. C e dont j e suis à peu près sûr c'est que dans les deux tiers de la France où il pleut, non pas massivement comme dans le Midi, mais d'une façon plus fréquente, le problème de l'herbe adventice est capital. Et naturellement on comprend très bien que l'on ait semé dru. Dans les pays méridionaux il est plus curieux de voir semer très dru dans des belles terres. O n comprend moins puisque le danger est la sécheresse, mais enfin on sarclait tout de même, par conséquent économiser sur le sarclage était une chose importante. Mais ce dont j e suis absolument sûr c'est que dans les terres du bassin Parisien au sens large, dans les belles terres, on semait encore très dru, dans les plus belles exploitations encore au début de ce siècle. J'ai un témoignage qui remonte à quelques semaines d'une personne qui est son propre chef de culture tout en étant propriétaire de 170 hectares, de très belles terres autour de Paris et qui m'expliquait qu'elle semait pas tout à fait un hectolitre et demi. Mais elle n'aurait pas fait cela, dit-elle, il y a quarante-cinquante ans, parce qu'on a maintenant des produits de désherbages, d'ailleurs délicats à utiliser. Ainsi la technique actuelle, la technique du x x e siècle avancé, a résolu ce problème de l'herbe adventice par une technique scientifique. Mais jusqu'au

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moment où cette technique s'est introduite dans les grandes exploitations on a semé relativement fort, beaucoup plus que dans la Lozère, car les mêmes statistiques, du x i x e siècle, nous donnent moitié moins de semence dans la Lozère. Pourquoi? D'abord parce qu'on craignait peut-être un peu moins l'herbe, mais aussi parce que lorsqu'en effet on n'avait que 8, 9, 10 hectolitres à l'hectare, il était tentant d'en économiser un ou un et demi. Je m'excuse de cette incursion sur un point très précis un peu limité d'ailleurs, mais j e voudrais tout de même donner un conseil : sur le plan international, si vous le pouvez, si la métrologie le permet vraiment et avec beaucoup de patience (il y a peu de métrologie qui résiste définitivement), j e souhaite qu'on chiffre le plus possible. Je préfère le système métrique, pour ma part, mais qu'on chiffre en acres et en bushels si l'on veut, ça n'est pas très grave. L'important c'est d'avoir des chiffres, parce que malgré tout, étant donné la variété énorme des ensemencements, j e crois que le chiffrage est la seule méthode, même sur le plan national, à plus forte raison, international, qui permette de vraies comparaisons. Voilà un point. U n autre que j e ne fais qu'évoquer rapidement, c'est que dans l'agriculture méridionale, peut-être pas tant languedocienne que dans celle des plaines de la Garonne, mais aussi j e pense dans beaucoup de pays, il y a l'implantation du maïs, et toutes les vertus qu'on a, depuis Arthur Y o u n g , reconnues à cette culture. Peut-être a-t-on exagéré ces vertus. Mais le maïs présente des caractères, soit dans les rendements, soit dans les éléments nutritifs qu'il fournit facilement, qui incitent les gens, peut-être, à cultiver mieux. C'est la grande idée que le géographe Faucher a propagée en France. Je me demande si elle reste vraie, aux yeux de nos collègues qui connaissent bien les agricultures méridionales au sens le plus large. M . VILFAN. — Les questions qui ont été traitées jusqu'à ce moment méritent une discussion internationale et en même temps, s'y prêtent. Chacun de ceux qui s'occupent de ces questions se trouve toujours devant un résultat qui le choque de prime abord : c'est le petit rendement, les petits taux de rendement qu'on constate en certaines époques et on est toujours un peu satisfait si l'on voit que des résultats semblables sont atteints aussi dans les autres pays. Cela donne un peu plus de confiance dans ces résultats, mais tout de même, en s'aperçoit qu'une certaine quantité de doutes persistent toujours. Qui a assisté, ce printemps, à cette semaine sur l'agriculture au Moyen A g e , à Spoleto, a pu entendre une discussion qui n'a pas mené au résultat entre Duby, Slicher van Bath et Abel. O n a entendu deux points de vue différents, en ce qui concerne le rendement au haut Moyen A g e : une tendance surtout représentée par M . D u b y qui croit

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à u n rendement relativement très petit, et d'autres tendances qui voulaient, tout de même admettre un rendement u n peu plus élevé. O n revient toujours à la question des sources et à la question de la technique dans l'emploi des sources. J e ne voudrais pas maintenant entrer dans des détails, surtout que M . J a c q u a r t a énuméré beaucoup de circonstances qu'il faut prendre en considération, on pourrait en énumérer encore beaucoup plus et j e voudrais me limiter seulement à quelques questions. Surtout une question qui se rapporte aux sources, ce n'est pas pour les semences, mais plutôt le bétail. J e ne suis pas tout à fait sceptique, en ce qui concerne le bétail à l'époque des x v i e , x v i i e siècles. V o u s avez cité l'exemple des inventaires qui donnent le bétail d'une ferme et qui ne contiennent pas le bail à cheptel. Enfin, j e crois qu'il n'existe pas seulement les inventaires comme sources. A u moins dans le pays d ' o ù j'arrive, la Yougoslavie, nous avons des données qui sont assez sûres, naturellement pas pour tout le pays, depuis le début du x v i e siècle seulement. J ' a i trouvé des listes pour des villages entiers qui tiennent aussi compte du bail à cheptel, ainsi vous avez un chiffre tout à fait exact pour tout le village, donc le bétail détenu en propriété ou en bail par les paysans. D e u x autres questions un peu plus générales : est-ce que ce mouvement des rendements basés de nouveau sur le bail n'est pas un peu en connexion avec un mouvement des prix vers le milieu du x v i e siècle d'une part, et avec une tendance qui est plus ou moins générale en Europe en ce temps, une tendance qui a mené dans l ' E u r o p e orientale à des résultats beaucoup plus forts (mais que l'on peut voir aussi en France, j e crois que Bloch en fait mention et qu'il enregistre des résultats), j e veux dire la tendance à modifier la répartition de la production entre, d'une part, le propriétaire et d'autre part, le paysan. Alors est-ce que cette tendance que nous voyons dans le bail est un résultat du rendement ou est-ce plutôt un résultat d ' u n mouvement social en Europe, qui, j ' e n ai l'impression, dans une certaine mesure se fait sentir aussi en France ? E t si vous permettez encore une question tout à fait théorique, plutôt en relation avec ce q u ' a dit M . L e R o y Ladurie. J e me demande, quant à ces calculs que nous avons vus pour le Languedoc, s'il s'agit toujours de la m ê m e surface? V o i c i pourquoi j e pose la question : si vous prenez la théorie de Ricardo, sur le rendement des terres, vous avez des terres d ' u n rendement plus haut et d'autres d ' u n rendement plus bas. C'est toujours sur cette terre où il y a le rendement le plus haut q u e ceteris paribus l'agriculture v a se concentrer. Si vous avez des défrichements, vous avez toujours u n rendement relativement plus bas. Si vous avez au x v i e siècle, une arrivée de blé des autres pays, si vous avez u n meilleur trafic, c'est logique que la terre d ' u n

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rendement un peu plus bas ne soit plus labourée, alors automatiquement le rendement de l'ensemble cultivé restant devient relativement plus important. Bref, on se demande si un rendement que l'on peut constater doit toujours être attribué à une technique nouvelle, par exemple à un meilleur labour, ou bien est-ce que c'est seulement le résultat d'une importation de grain ou de quelqu'autre chose, qui fait diminuer la superficie de terre labourée et ainsi accroître le rendement relatif de ce qui est resté. M. L E R O Y L A D U R I E . — En réponse à la question qui vient d'être posée, oui, il s'agit toujours, à peu près des mêmes qualités de terre, soit que les domaines considérés soient les mêmes domaines des chanoines de Béziers, autour de cette ville, soit qu'il s'agisse d'évaluations provinciales ou départementales portant sur un très vaste ensemble régional, qui reste malgré tout, en gros, le même d'un siècle à l'autre. Je suis heureux, d'autre part, que M. Meuvret ait constaté comme moi, qu'on semait dru et qu'il ait levé pour moi la dernière objection de conscience qui subsistait contre mes propres résultats : le dernier doute que j'avais, concernait précisément cette hausse de productivité du x v m e siècle. J'inclinais à penser qu'il s'agissait d'une hausse de productivité réelle, mais je me demandais encore parfois si elle ne pouvait pas s'expliquer simplement par une réduction de la quantité de semence versée à l'hectare. M. Meuvret m'a ôté mes derniers scrupules et je l'en remercie. La hausse du rendement après 1715, puisqu'on a continué à semer dru ne peut s'expliquer que par une hausse de la productivité, elle est donc d'autant plus intéressante à étudier. Il est vrai qu'on semait très peu en Lozère, mais la Lozère est un monde à part, non seulement les champs lozériens, mais peut-être aussi les statisticiens lozériens de 1840. Quant au rôle du mais, il est certain qu'il donne aux habitants, aux agriculteurs, l'habitude de désherber la terre, de la cultiver comme un jardin et qu'il est un facteur de hausse de la productivité en Aquitaine et même en certaines régions du bas Languedoc au x v m e siècle. M . V I L A R . — Je voudrais seulement faire quelques observations sur une question très générale, mais qui a été abordée ici, naturellement, à propos des exemples précis qui viennent d'être évoqués. Il s'agit des rapports entre l'extension des cultures et leur intensification. Il me semble qu'il y a deux cas très différents lorsque l'on voit une production d'ensemble augmentée. Elle peut augmenter par extension, mais s'il s'agit d'une reconquête du sol, je crois qu'à ce

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moment l'extension correspond à un rendement croissant, parce que l'on va des plus mauvaises terres aux meilleures terres reconquises. L'exemple que j'ai évoqué personnellement concerne la Catalogne dans la première moitié du x v m e siècle où le progrès se fait essentiellement par reconquête et par conséquent, le rendement va croissant, sans même qu'il ait besoin d'une intensification des méthodes. Mais il me semble qu'il en va de même pour tout ce problème du xvi e siècle qui a été évoqué ici et qui représente précisément une reconquête du sol (et ici naturellement je touche à quelque chose que je connais beaucoup moins, et ce n'est qu'une hypothèse) ; je pense que sans qu'il y ait besoin, peut-être de grande intensification des méthodes on peut apercevoir des rendements croissants. Et d'autre part, s'il s'agit d'une extension où ce sont des terres de plus en plus mauvaises qui sont abordées, il est certain qu'à ce moment-là, celui qui défriche dans une terre plus mauvaise est amené, pour concurrencer les meilleures terres, à rechercher des méthodes nouvelles et à essayer d'obtenir davantage sur un sol plus mauvais. Inversement celui qui était installé et qui voit la masse des productions augmenter et, par conséquent, l'offre augmenter sur le marché, peut avoir lui-même à travailler davantage, à essayer d'intensifier davantage. Or, il me semble que ces questions on ne les pose pas assez en général, précisément. Il faut toujours que la question générale soit posée à côté de la question particulière suscitée par l'observation qu'on est en train de faire. J'en viens maintenant à cette observation : Le Roy Ladurie a fait allusion précisément à la Catalogne en parlant des irrigations. Il est certain que les rendements croissants que j'ai constatés, qui me paraissent évidents pour la Catalogne du x v m e siècle, dans la première partie dans un certain sens, dans la deuxième partie dans un autre sens, c'est beaucoup à l'irrigation qu'on les doit. Cependant, je ne pense pas que ce soit exclusivement à l'irrigation, car j'ai constaté par exemple, sur le plateau de Moya des témoignages évidents de l'augmentation des rendements, et de l'intensification des cultures, sans qu'il soit question ici d'irrigation. Pour l'irrigation il y a autre chose qui m'intéresse, c'est dans une exploitation que j'ai étudiée récemment (l'article n'est pas encore paru) et que j'ai pu « suivre » pendant dix ans, et d'une façon extrêmement précise : toutes les semences sont données et toutes les récoltes sont données en face. Or, il est certain que nous avons là, un exemple très intéressant parce que les surfaces irriguées sont à côté des surfaces non irriguées. Ici, je fais une observation qui a été faite et répétée plusieurs fois, les sources sont toujours très difficiles à interpréter, mais nous avons tout de même des rendements en irrigation et des rendements en culture sèche. Or, on ne constate pas des différences tellement énormes entre le rendement en irrigation et le rendement en culture

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sèche. Seulement, dans la partie irriguée, on sème et on récolte chaque année tandis que dans la partie en culture sèche on ne sème et on ne récolte que tous les deux ans, quelquefois tous les trois ans, etc. Nous savons bien ce que sont les assolements en terrains secs dans un pays hispanique par exemple. Alors à ce moment, le rendement devient quelque chose qui doit se calculer, non pas en comparant seulement des semences et des récoltes, mais en comparant sur deux, sur trois ans ce qu'on a récolté sur tel terrain, et ce qu'on a récolté sur tel autre. Seulement si nous passons du rendement à la productivité, et malheureusement je sais bien que c'est la chose la plus difficile, jusqu'à présent nous avons essentiellement parlé rendement, et non pas productivité. De sorte que si l'on sème chaque année, sur un terrain irrigué et seulement tous les deux ans, ou tous les trois ans sur un terrain sec, il s'agit de savoir quel travail on met dans l'un et quel travail on met dans l'autre. Nous savons tous que sur un hectare de surface irriguée dans la région de Valence une famille ou deux familles peuvent vivre, et sur trente ou quarante ou cinquante hectares en plein terrain sec castillan une famille vit très difficilement. De sorte que le travail, qui est donné n'est pas le même suivant que nous avons tel ou tel type de culture. Alors le problème c'est de revenir, je crois, à la grande question posée; seulement elle était très difficile à traiter et tout ce qui a été dit aura été extrêmement utile pour la suite du travail, mais la suite du travail me paraît pour ainsi dire infinie; elle consiste à passer des problèmes de rendement et des problèmes de méthodes aux problèmes à proprement parler de productivité, c'est-à-dire : quelle est la quantité de maind'œuvre mise au service de telle production, de telle quantité produite? O r ceci, malheureusement nous y arrivons très difficilement. J'avoue que dans les exemples que j'ai eus, qui sont toujours des exemples de type baux à ferme, même quand ils sont extraordinairement précis, nous semons tant, nous récoltons tant, nous donnons tant au propriétaire, nous donnons tant à l'exploitant, il est extrêmement rare que l'on nous dise, l'exploitant utilise tant de personnes et tant de jours. Et alors là se pose le problème de Le Roy Ladurie c'est-à-dire, quel est le travail qu'un travailleur agricole, s'il est à la ferme ou s'il est journalier, s'il est travailleur direct ou s'il est fermier, qu'est-ce que chaque travailleur donne à l'exploitation? Ceci nous l'obtenons extrêmement difficilement, et, évidemment j e pense que ce que nous avons à faire dans l'avenir c'est peut-être d'essayer de serrer le problème d'encore plus près. M. J A C Q U A R T . — Je voudrais répondre aux quelques questions qui m'ont été posées et revenir sur les problèmes généraux comme vient de nous y inviter M. Vilar dans son intervention.

DISCUSSION

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Il est bien évident, et j e crois que nous pouvons donner raison à M. Meuvret, que la comparaison d'un pays à l'autre, d'une région à l'autre exigerait que nous puissions toujours chiffrer en mesures modernes, nos données. Malheureusement, cela n'est pas toujours possible, d'abord parce que les problèmes de métrologie ne sont peut-être pas l'objet de recherches suffisamment précises et suffisamment poussées encore à l'heure actuelle, et d'autre part et toujours, à cause du problème de nos sources car, vous le savez bien, lorsque nous trouvons un rendement de champ, la plupart du temps, rien ne nous indique si les quantités qui nous sont données, sont des quantités, dîmes déduites ou dîmes non déduites. Nous avons, une fois pour toutes ou à peu près, décidé que très probablement la dîme était déduite dans les inventaires après décès et que par conséquent il convenait d'ajouter aux chiffres que nous trouvons dans le document un pourcentage qui correspond à la dîme, nous l'affirmons, nous n'en sommes pas si sûrs. Or, j e prends un exemple précis. Une saisie en 1616 à Villejuif, à côté de Paris. Il s'agit de 4 arpents de terre, ce sont des arpents dont nous connaissons métrologiquement l'équivalence. O n a recueilli 17 setiers 9 boisseaux, ce sont des setiers de Paris, des setiers de méteil, nous savons là aussi combien ils valent en hectolitres. L e document nous indique ce qu'on a donné aux moissonneurs, ce qu'on a payé pour le battage, c'est donc un document exceptionnellement précis. Si l'on ajoute aux chiffres donnés la dîme à 8 % , puisque c'est le taux du village de Villejuif, on arrive à un rendement assez exceptionnel de 7 pour 1, c'est-à-dire, traduit en mesure moderne, de 21,9 hectolitres à l'hectare et en pensant que le méteil, mélange de blé et de seigle, pèse sensiblement 70 kilogrammes à l'hectolitre, et là encore c'est une évaluation, en mesure moderne cela nous donnerait un rendement sur un plateau exceptionnellement riche, le plateau de Longboyau « fertile comme petite Bauce », ainsi disait-on à l'époque, de 15,33 quintaux à l'hectare. Mais cet exemple est exceptionnellement précis, de tous ceux, des centaines, que j'ai pu trouver dans les inventaires après décès, c'est l'un des sept ou huit qui sont aussi précis, pour tous les autres on se retrouve devant des problèmes à peu près insolubles. Or, si simplement nous changeons le résultat, si nous estimons qu'il ne faut pas ajouter la dîme, il est bien évident que notre rendement ne sera plus de 15,33 quintaux à l'hectare mais, je n'ai pas fait ici le calcul, je pense de l'ordre de 12 quintaux à l'hectare, et ça n'est tout de même plus tout à fait la même chose. Si nous alignons des chiffres, les uns avec la dîme, les autres sans la dîme, et que nous établissons là-dessus nos comparaisons, nous risquons bien d'aboutir à des conclusions fausses. Voilà pour le premier point. Pour le deuxième point, pour ce qui est de semer serré, j e crois qu'effectivement on semait très serré et je crois que là c'est un fait à

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peu près général, semble-t-il, contrairement aux conseils des agronomes, on semait plus serré sur les terres riches que sur les terres pauvres et généralement, dans la région de Paris, autour de 2 à 3 hectolitres à l'hectare. Ici encore un problème se pose. Je me demande dans quelle mesure les traditions paysannes, les habitudes paysannes ne jouent pas. Je suis frappé du fait que dans la région que j'étudie et où l'on emploie trois sortes d'arpents, l'un valant 34 ares 19, l'autre 42 ares et quelques centiares et le troisième 51 ares, on sème, quelle que soit la région et quel que soit l'arpent, à peu près systématiquement à un taux de 8 boisseaux, de 6 boisseaux à l'arpent et, bien entendu, le taux d'ensemencement traduit en mesure moderne est très différent. Je me demande dans quelle mesure il n'y a pas là une tradition paysanne. M. Kula nous a mis sur une piste intéressante, la quantité de semence proportionnelle à l'arpent. L'arpent peut être proportionnel à la fertilité des terres, c'est-à-dire finalement à ce que peuvent supporter de semences les terres, il y a là peut-être une direction de recherche que nous pourrions exploiter. Mais là encore, vous le voyez, la traduction en chiffres d'aujourd'hui posera des problèmes difficiles. Pour répondre à M. Vilfan sur le problème du bétail. Eh bien, malheureusement, dans les régions du nord de la France nous n'avons pas de ces sortes d'inventaires ou, comment dirais-je, de recensements de bétail de nature fiscale qu'il peut utiliser. Beaucoup plus importante me paraît la réflexion qu'il a faite à propos du mouvement des fermages et que l'on doit mettre en liaison peut-être avec les conditions sociales de l'époque et avec, m'a-t-il semblé, une sorte de pression plus forte de la part des propriétaires vers le xvi e siècle. Je crois que dans une région riche, déjà très ouverte du point de vue du marché, à cause de la présence du grand centre de consommation qu'était Paris, je crois que les fermiers « discutaient », comme l'on dit aujourd'hui, négociaient en position de force avec leur propriétaire. Je suis frappé du fait (je ne prétends pas que cela puisse être partout pareil), qu'au moins dans la région parisienne, très près de Paris dès le milieu du xvi e siècle, le monde, la classe des grands fermiers-laboureurs forme un groupe social extrêmement fermé dont les gens se tiennent solidement les coudes, si je me permets cette expression un peu familière, dont les membres sont à peu près tous parents entre eux. Et je crois que dans la conclusion des baux, entre les propriétaires et les fermiers on ne se trouvait pas dans les conditions d'un marché ouvert, d'un marché où joueraient normalement l'offre et la demande. D'abord, parce que très certainement les fermiers, si je puis dire, s'entendaient entre eux pour ne pas tellement se concurrencer, c'est un premier point. Ensuite parce que les propriétaires préféraient sentimentalement ou matériellement, je n'en sais rien, garder la

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même famille, le même fermier pendant longtemps et que ces dynasties de fermiers tiennent la ferme pendant plusieurs baux très souvent, et très souvent aussi, pendant plusieurs générations. Lorsque l'on change de nom de fermier c'est tout simplement que la ferme est passée au gendre, mais en vérité c'est la même famille qui continue et ceci très souvent pendant soixante-quinze, quatre-vingts, cent années et parfois plus. D'autre part, dans la région parisienne il y avait un nombre assez exceptionnel de très grandes exploitations à l'échelle de l'époque. Il y a d'assez nombreuses fermes de plus de 100 hectares, or ces fermes exigeaient un matériel, des capitaux et une habitude, une expérience que finalement très peu de personnes possédaient dans le monde rural, et je ne crois pas que les fermierslaboureurs, au moins dans ce cas précis, fussent tellement défavorisés, tellement victimes, en quelque sorte, de la pression des propriétaires. Je suis frappé du fait, en particulier qu'au lendemain de la crise des guerres de religion, lorsqu'il a fallu remettre en culture, les propriétaires, pour garder leurs fermiers et les mêmes familles de fermiers, ont consenti dans le renouvellement des baux, au lendemain même de la pacification, à l'époque d'Henri IV, des conditions matérielles exceptionnelles pendant les premières années de la remise en culture et des avances de fonds. Enfin, pour répondre à M. Vilar, je ne pense pas que l'extension des cultures en quelque sorte annulerait cette grande montée de la production qu'il m'a semblé déceler à travers la montée de la rente en grain. Il semble tout de même que dans la région parisienne la reconquête des terres, la remise en culture, par rapport à ce qui pouvait se faire avant la guerre de Cent ans, soit terminée vers 1520. C'est du moins ce qui semble ressortir de l'étude assez complète de M. Fourquin sur cette région. Or, la montée des loyers continue jusqu'en 1570, et il semble bien que cette montée des loyers ne soit pas seulement le résultat de la remise en état du terroir, de la remise en culture des terres, mais correspond véritablement à un accroissement de la production, je n'ai pas dit de la productivité et j e ne le dirais pas, étant donné, vous avez pu le remarquer, que je suis plutôt partisan de la prudence que de la hardiesse. M . A L V A R E Z . — J 'ai quelques propositions à faire au sujet du livre de comptes que j'ai utilisé. Ce livre de comptes, en effet, permet une étude très précise des salaires agricoles et des profits de l'exploitation. O n peut faire une comparaison entre chaque type de salaire, malheureusement j e n'ai pas ici toutes les notes que j'ai faites mais comme j'ai une comptabilité des salaires dans les années 1670, 1678, je peux vous montrer cette comptabilité qui, je crois, permet une étude très précise des salaires en relation avec les rendements.

DISCUSSION

IOO

M . G O U B E R T . — Je voudrais d'abord insister sur ce qu'a dit Pierre Vilar concernant la différence fondamentale entre les régions où a lieu une augmentation de la production et peut-être de la productivité. Il y a les régions où l'extension est possible géographiquement c'est-à-dire où il y a encore de nouvelles terres à exploiter ou bien où l'on peut transformer peut-être une exploitation très extensive en une exploitation plus intensive. Alors qu'il y a d'autres régions où cet accroissement de la production est impossible. Je me demande même s'il n'y a pas, à la base, une différence fondamentale et très générale entre les régions qui ont, si vous voulez, leur plein au point de vue agricole dans, évidemment, la technique des xvi e , xvn e et début xvm e siècles et celles où le plein n'est pas fait. Par exemple, il est bien évident que le Languedoc, cher à Le Roy Ladurie, et la Catalogne de Vilar se ressemblent en gros, se ressemblent beaucoup plus qu'ils ne ressemblent à la Picardie ou au bassin de Paris où tout est « plein ». C'est évidemment enfoncer une porte ouverte que de dire ça, mais je me demande si elle est tellement ouverte. C'est quelque chose qu'il ne faut jamais oublier, nous raisonnons sur des chiffres en oubliant le contexte géographique. Or, il y a là quelque chose de tout à fait fondamental. Cela dit, je voudrais exprimer quelquefois mon inquiétude en entendant parler de rendement. Déjà je voulais dire ce que Jacquart a dit en ce qui concernait les sources de rendement. Mais quels rendements? J'ai entendu parler rendement céréalier. Quelles céréales ? C'est fondamental. Évidemment ceux qui nous ont parlé de rendement céréalier savaient bien, eux, de quelle céréale il était question. Pour le Bas-Languedoc il est bien évident qu'il s'agit de froment, de blé dur plus probablement; pour la région parisienne, je suis sûr que M. Jacquart sait très bien de quel rendement il parle.

M.

JACQUART.



«

C'est du méteil ».

M. G O U B E R T . — Le froment ne pèse pas le même poids à l'hectolitre que le méteil, que le seigle enfin, etc. On a parlé un petit peu du maïs aussi, il faudrait préciser ces choses-là. D'autant plus, que l'on compare le rendement des céréales, des blés, si vous voulez, en 1550, en 1580, en 1660. Alors là, il y a aussi une autre chose qui m'a inquiété, c'est ceci : c'est que, enfin au moins dans la région que je connais qui est plutôt au nord de Paris qu'au sud, mais enfin ce n'est tout de même pas très différent, on ne cultivait pas toujours les mêmes céréales. Ainsi, dans ces comptes de grandes exploitations, car il faut toujours en revenir là, aux grandes exploitations seigneuriales et surtout ecclésiastiques, j'ai pu constater qu'au xvi e siècle les fermages étaient des fermages en froment, et quelquefois encore, au début du xvii e siècle. Voyons cette pauvre époque de Louis X I V , qui est tout

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IOI

ce qu'on voudra, mais qui n'est certainement pas une grande période d'essor agricole, eh bien on en était revenu au méteil. Dans les mêmes grandes exploitations, les baux lorsqu'ils étaient formulés en nature portaient sur du méteil et non plus sur du froment, et le froment réapparaît dans ces mêmes grandes exploitations ecclésiastiques ou seigneuriales à la fin et souvent à l'extrême fin du x v m e siècle. Alors il y a dans ces problèmes de rendement, des différences de qualités qu'il sera nécessaire de faire entrer en ligne de compte afin de corriger les évaluations chiffrées. Je me méfie des chiffres, tout en les employant beaucoup : on nous parle de 3 pour 1, de 4,5 pour 1, de 5,6 pour 1, mais de quoi? Mais est-ce que c'est toujours de la même chose? Je n'en suis pas du tout persuadé. D'autre part, Jacquart l'a déjà dit, mais enfin, il n'est pas mauvais de le redire : lorsque telle terre donne 4 pour 1, de quel rendement s'agit-il? rendement brut, rendement semence déduite, rendement dîme déduite, rendement moissonnage et battage déduits ? Il arrive qu'on le trouve, il arrive qu'on ne le trouve pas. Et quand on ne le trouve pas c'est très inquiétant parce que, même dans un domaine d'une région comparable, supposons qu'on puisse retrouver un rendement, mettons de 4 pour 1 en 1620, puis de 4,5 en 1650, dira-t-on que cela a augmenté de 12,5, ou de 53 % ? L'économiste adore ces choses-là. Quand je les vois, moi, je me méfie toujours. Alors que, peut-être, dans le premier cas on nous aura déduit quelque chose qu'on n'aura pas déduit dans le second et qu'on ne nous l'aura pas dit. Car les braves gens qui nous livrent ces chiffres dans leurs papiers, savaient bien, eux, de quoi ils parlaient, mais nous? De temps en temps, évidemment, nous croyons comprendre, mais nous n'en sommes pas sûrs, alors j'avoue que vous avez peut-être des raisons d'ajouter la dîme, mais souvent j'ai hésité à franchir le pas. Dans les travaux anciens que j'ai faits je n'ai donné des rendements que lorsque j'étais sûr. Entre le rendement brut, ce que le champ a donné, et ce qui rentre chez le cultivateur, il y a une série de prélèvements qu'on essaie de chiffrer de temps en temps, mais dont on peut dire qu'ils varient entre 10 et 40 % et je n'exagère pas en disant cela. Or, ils ne sont pas toujours les mêmes, la dîme elle-même, varie : dîme déduite, dîme ajoutée. Dans le travail de Baehrel sur la Basse-Provence, ce qui est une chose tout à fait remarquable ce sont les tableaux statistiques de la fin, parce qu'ils sont la traduction des sources sans être passés par une interprétation personnelle. Et bien, il y a en particulier un tableau qui montre la dîme dans un certain nombre de localités de Basse-Provence. Autant que je m'en souvienne elle varie de 1 % à 15 %. Et quelquefois pour des terres différentes de la même paroisse. Et je me permets d'ajouter que pour la Bretagne les dîmes variaient de 2 à 3 pour 100 (c'était fréquent en Basse-Bretagne) jusqu'aux alentours de 10 % ce

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DISCUSSION

qui était courant en Haute-Bretagne, en particulier sur les terres des abbayes. C'est tout de même considérable et c'est ainsi que dans la même paroisse de Haute-Bretagne, dans la région de Redon, par exemple, il y avait une très grosse abbaye : si vous étiez sur le dîmage de l'abbaye c'était une dîme de 10 % , et en dehors du dîmage c'était une dîme à 3 %. C'est tout de même une différence très considérable. Alors, lorsque vous ajoutez x pour 100 pour la dîme que l'on a peutêtre déduite, permettez-moi d'être quelquefois inquiet. D'autre part, quand nous raisonnons sur des rendements de diverses céréales, nous restons dans un cadre spécial, celui de la culture céréalière. Je sais bien que pour les plaines du Bas-Languedoc et que pour les plaines du bassin Parisien, c'est probablement l'essentiel, mais il y a tout le reste. J'en reviens à la Bretagne. O n ne peut pas dire qu'un rendement se calculant sur du froment exprime l'originalité agricole du pays. Les rendements céréaliers traduisent une réalité profonde dans les grandes plaines céréalières, ailleurs, ils traduisent quelque chose, sûrement, mais pas l'essentiel. Si je prends des exploitations riches, côtières, de la Basse-Bretagne, j ' y trouve trois choses : il y a d'abord les cultures de froment sur les terres très riches, d'un froment que les gens ne mangent pas, c'est pour expédier à l'étranger, en Espagne notamment et en Angleterre aussi, là-dessus nous avons des rendements assez forts, mais ce sont des terres exceptionnellement riches, exceptionnellement bien engraissées. Nous avons, en second lieu, des rendements que nous ne pouvons généralement pas calculer sur les céréales réellement consommées, c'est-à-dire deux choses, le seigle et le blé noir, et enfin nous avons autre chose qui est probablement l'essentiel : c'est le bétail que nous connaissons bien. Dans ce cas-là le calcul des rendements céréaliers ne donne qu'une faible partie, et une partie qui n'est pas essentielle de la production agricole et qui ne peut absolument pas traduire l'évolution de cette production agricole puisque l'amélioration porte essentiellement, semble-t-il, sur le bétail qui se multiplie à la période d'expansion bretonne, c'est-à-dire à l'extrême fin du x v m e siècle. Enfin, dernière remarque. En ce qui concerne l'évolution de la rente, si vous voulez des loyers de grands domaines, c'est-à-dire presque toujours de grands domaines de l'Église ou de quelques grands seigneurs, nous connaissons, et depuis longtemps déjà, beaucoup de choses. Nous retrouvons des courbes qui, bien entendu, différeront d'une région à l'autre. Sachant cela, ce qu'il faut bien voir c'est que ces connaissances sont assez sûres mais sont limitées. Nous connaissons ainsi l'évolution de la grande culture, de la grande exploitation. En dehors de ces grandes cultures, de ces grandes exploitations, aussi bien dans le Languedoc que dans la région parisienne, il y a tout le reste, c'est-à-dire la multitude des tout petits

DISCUSSION

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paysans parcellaires que nous connaissons très peu et très mal et que nous ne connaîtrons probablement jamais très bien, parce qu'on n'a presque pas d'archives en France, se rapportant à eux. Alors quelle a été l'extension de la production chez eux, on ne sait pas, vraiment je ne sais pas. On a l'impression, pour les siècles, qu'en France, nous appelons modernes le xvi e , le xvn e et peut-être le xviii e , que tout cela oscille autour d'une médiocrité ou d'une misère, ou d'une demimisère je ne sais quoi, que nous flairons, que nous sentons, que nous essayons de reconstituer mais que je m'avoue pour ma part incapable de chiffrer. M. L E R O Y L A D U R I E . — Pour répondre à M. Goubert, j'ai personnellement indiqué dans mon résumé qu'il s'agissait de blé, seigle, orge ou avoine. La dîme est levée en gerbes, donc les rendements du blé sont calculés au grenier et il est presque obligatoire que la dîme soit défalquée. Quant à Zola, il a étudié ce qu'il appelait des rentes foncières, c'étaient souvent des dîmes en réalité. Le travail est à refaire.

PRODUCTION AU

ET

MEXIQUE,

PRODUCTIVITÉ DU

XVI* AU

AGRICOLES

XVIIIe

SIÈCLE

par J.-P.

BERTHE

(École Pratique des Hautes Études, Paris)

Le problème agraire est depuis plus d'un siècle au cœur de l'histoire mouvementée du Mexique : le régime de la terre a été l'enjeu de conflits d'une extrême violence et le thème de débats passionnés. On ne s'étonnera donc pas que l'histoire de la propriété et de la société rurales de la Nouvelle-Espagne ait fait l'objet de discussions et de recherches approfondies. Les problèmes de l'économie agricole sont loin d'avoir suscité semblable intérêt et, dans ce domaine, tout est encore à faire, ou presque, en dépit des études pionnières de Luis Chavez Orozco. Des comptabilités agricoles ont pourtant été conservées, dont quelques-unes couvrent d'assez longues périodes. Elles concernent généralement des plantations sucrières et des estancias d'élevage, plus rarement la production des céréales. Mais ces documents n'ont fait l'objet ni de publications, ni d'études systématiques. On ne peut donc guère qu'indiquer quelques directions de recherches et préciser les termes du problème. Une enquête sur la production, les rendements et la productivité agricoles du Mexique colonial doit tenir compte de divers facteurs propres à ce milieu historique.

io6

J.-P.

BERTHE

L e premier est le caractère extrêmement hétérogène des conditions de culture : les climats présentent toutes les nuances, du tropical humide au sub-désertique; aux effets de la pluviosité, s'ajoutent ceux de l'altitude qui commande la répartition des terres en trois zones étagées : chaudes (calientes), tempérées (templadas) froides (frias). Les taux de rendement (rapport de la récolte à la semence) dépendent des possibilités d'irrigation (cosecha de riego) et du régime des pluies (cosecha de temporal). Pour le blé, on pratiquait le plus souvent la culture irriguée et l'on obtenait une récolte par an, les dates des semailles et de la moisson variant considérablement suivant les régions. Pour le maïs, en terre chaude ou tempérée, on pouvait avoir deux récoltes dans l'année : la première, de riego, en j u i n ; la seconde, de temporal, en novembre. En terre froide, une seule récolte. Nous donnons en annexe un certain nombre de taux de rendement pour le blé et le maïs : ils proviennent de sources narratives ou administratives et devraient être vérifiés à l'aide de comptes domaniaux. Pour obtenir des chiffres de rendement par rapport aux superficies cultivées, il faudrait des précisions supplémentaires. Nous ignorons presque tout de la densité des ensemencements : les Indiens ne semaient pas le maïs à la volée, mais enterraient les grains, par trois ou quatre, dans des trous pratiqués à la coa. Les instructions agronomiques des jésuites, vers 1730-1740, prescrivaient de semer le blé, dru sur les terres légères, plus clairsemé sur les terres grasses et fertiles. Vers 1800, Humboldt notait « le même défaut dont les agronomes se plaignent dans presque toutes les parties de l'Europe, celui d'employer trop de semailles, de sorte que le grain se perd et s'étouffe » (pour la culture du blé). L a question des jachères est encore plus obscure. Tous les systèmes semblent avoir été pratiqués pour le maïs, depuis la culture sur brûlis, qui ruine le sol en peu d'années, jusqu'à l'utilisation continue des meilleures terres. Pour le blé, on tenait certainement compte de la richesse des sols. Vers 1540-1545, selon Motolinia, certains champs de blé d'Atlixco, cultivés chaque année, sans fumures, rendaient de 150 à 100 pour 1 : il est vrai qu'on y semait à la mode indienne, en enfouissant les grains à la main. Mais, en 1584, dans leur hacienda de Jésus del Monte, en terre froide, les jésuites pratiquaient la jachère biennale et envisageaient d'acquérir davantage de terres, pour ne cultiver chaque sol qu'une année sur trois. Les rendements ont-ils augmenté, à long terme, du x v i e au x v m e siècle ? Pour le maïs, probablement pas, si l'on en juge par les chiffres actuels sur les petites exploitations traditionnelles en terre froide (de 500 à 600 kg à l'hectare en 1930-1935). L a crise agricole de 1784-1785 fut en grande partie surmontée par l'extension des

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semailles de maïs d'hiver en terre chaude : mais les améliorations préconisées par Alzate (modification du calendrier de la culture du maïs; utilisation des jachères quadriennales des plantations de canne à sucre pour la production de maïs d'hiver; emploi de semences prégermées, à l'imitation des jardiniers indiens de la lagune de Mexico) ne semblent pas avoir connu d'application généralisée. Quant à la culture du blé, elle paraît avoir bénéficié, dans certaines régions, du perfectionnement des moyens d'irrigation. Mais les cultures céréalières ne rapportaient pas assez pour inciter les agriculteurs espagnols ou créoles à rechercher une amélioration sensible des rendements : ils préféraient se consacrer à l'agriculture de plantation. En effet, le second facteur important de l'économie agricole mexicaine à l'époque coloniale est la coexistence et la concurrence de types d'exploitations très différents. Les Indiens se cantonnent dans les cultures vivrières, maïs, haricots, piments (beaucoup plus rarement le blé, à l'époque où le tribut leur en imposait des livraisons en nature), généralement sur des terres de propriété communale. Restés fidèles, pour l'essentiel, aux techniques de l'agriculture préhispanique, ils n'emploient guère d'animaux de travail. Dans quelques cas seulement, ils se sont orientés vers des cultures de caractère commercial : vanille, cochenille, élevage du ver à soie. L'agriculture indigène constitue ainsi un secteur de faible productivité dans l'économie agricole de la Nouvelle-Espagne. Les colons espagnols ou créoles exploitent au contraire de grands domaines et produisent pour la vente : maïs et blé dans les haciendas céréalières, pour le ravitaillement des villes, des centres miniers et des flottes ; sucre dans les ingénias, pour la consommation urbaine et l'exportation ; élevage extensif du bétail dans les estancias, qui fournissent des animaux de travail et de bât, des cuirs (exportés massivement ou vendus aux mineurs), de la laine pour les tissages locaux, de la viande. Mais pour améliorer la rentabilité de leurs domaines, les colons d'origine européenne ont moins cherché à augmenter la productivité de leurs entreprises qu'à profiter au maximum des conditions socioéconomiques propres à une société coloniale et des privilèges dont ils bénéficiaient. C'est ainsi qu'ils cherchent à étendre leurs propriétés grâce aux donations de la puissance publique (mercedes de tierras) ou en empiétant sur les terroirs des villages indiens, auxquels ils disputent également la jouissance des eaux, rares sur les hauts plateaux. Ils ont pu aussi utiliser sur leurs domaines, du moins pendant un temps, les prestations gratuites dues par les indigènes au titre du tribut : corvées, redevances en nature. La question de la main-d'œuvre agricole a fait aussi l'objet de conflits incessants, dans un milieu éprouvé par une série de catastrophes démographiques, qui firent disparaître, en un siècle, les

io8

J.-P. BERTHE

g/io e de la population indienne. Les coûts de production variaient considérablement, suivant qu'une exploitation était obligée d'utiliser des esclaves africains de prix élevé — c'est le cas des moulins à sucre — ou qu'elle disposait d'Indiens soumis au travail obligatoire (indios de servicio, indios de repartimiento), ou encore de salariés, les uns réellement libres, les autres (peones) enchaînés à la hacienda par la pratique du servage pour dettes. L a structure de la société rurale s'est donc constamment montrée défavorable à l'amélioration de la productivité agricole. Pour que le problème se pose en termes nouveaux, il faudra attendre la double révolution du x x e siècle : réforme agraire et croissance démographique accélérée.

TAUX

DE

RENDEMENT

(Rapport de la récolte à la semence) 1530-1545

1546-1550 1580

1580-1585

Fin du x v i e Vers 1600

Début du

1785-1786

D'après Motolinia (Historia de los Indios), maïs : 300 pour 1, région de Puebla; blé : 150 à 100 pour 1, Atlixco (taux exceptionnel). D'après le Libro de Tasaciones, blé : 24 pour 1, sur terres fertiles de la région d'Atlixco. Description de V e r a Cruz, maïs : plus de 100 pour 1 d'ordinaire, parfois 150, Tierra caliente. D'après Acosta, Historia General, maïs : 300 pour 1, bonne récolte sur terres fertiles au Mexique et au Pérou. D'après J u a n de Cardenas, Problemas..., maïs : de 100 à 200 pour 1. D'après Mota y Escobar, Description de la Nouvelle-Galice, région de Guadalajara (ouest du Mexique, terres tempérées), blé : 20 pour 1 sur les bonnes terres, 10 pour 1 sur les terres médiocres; maïs : 50 à 100 pour 1. x v n e - Description de la ville de Nombre de Dios, vers 1608-1609, région de Nombre de Dios-Suchil, de climat subaride, maïs : 25 pour 1 ; blé : 15 à 20 pour 1, en cas de gelées, 10 pour 1. Pour 63 paroisses du Michoacan (Mexique centre-ouest) sur terres irriguées (source : Gaceta de Mexico),

J.-P. BERTHE

1785-1786

1793

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maïs : maximum 300 pour 1, minimum 50 pour 1 ; blé : 9 pour 1. Pour 51 paroisses du diocèse de Mexico (Mexique centre-est), maïs : taux de l'année commune, taux moyen : 185 pour 1 (de 270 à 135 pour 1 selon les paroisses) d'après le rapport de l'Intendant. San Juan del R i o (Mexique central, terre froide), maïs : 300 pour 1, sur les sols légers, 400 à 600 pour 1 sur les sols fertiles.

Humboldt fournit des renseignements plus détaillés pour la fin du x v m e siècle et les premières années du x i x e : Maïs : — Région de San Juan del Rio-Queretaro, sur les terres de meilleure qualité : taux pouvant atteindre un maximum de 800 pour 1. — Michoacan : un taux de rendement de 150 pour 1 est considéré comme faible. — Région centrale du Mexique : taux moyen général de 150 pour 1 (de 300 à 40 pour 1 pour la vallée de Mexico). — Région sèche (Mexique septentrional, entre les 38 e et 33 e parallèles) 80 à 70 pour 1. Blé : froment, culture irriguée. — Région Queretaro-Léon, 40 à 35 pour 1 (avec un maximum de 60 pour 1). — Intendance de Valladolid (Yuriria) : même taux. — Régions de Puebla, Atlixco, Michoacan, Guadalajara : 30 à 20 pour 1 (un taux de 16 pour 1 y est considéré comme faible). — Vallée de Mexico : 20 à 18 pour 1. — Celaya (plateau central) : la culture irriguée donne des taux de 50 à 40 pour 1 : la culture sans irrigation, de 20 à 15. D'après l'enquête de 1803 : — Intendance de Durango : maïs de 80 à 70 pour 1. (nord-ouest du Mexique, en climat subaride) blé : 20 à 15 pour 1. — Intendance de Guadalajara (ouest du Mexique) : maïs : 300 pour 1, sur terres médiocres, 100 pour 1.

PRODUCCIÓN

Y EN

PRODUCTIVIDAD LA

AGRÍCOLA

ARGENTINA

por H a y d é e G. de TORRES (Université de Buenos Aires)

El problema de la producción y de la productividad en países como el nuestro, la Argentina, en realidad tiene otra dimensión que el que se puede plantear, por ejemplo, y que ya se ha planteado en forma brillante, para paises que en nuestra terminología y para diferenciarlos con los nuestros, nosotros calificamos como desarrollados, o por lo menos con un estadium de desarrollo muy superior al de los paises que también solemos llamar periféricos, como el caso de Argentina. En realidad el problema para nosotros no se centra tanto en establecer los rendimientos por hectárea, los problemas que pueden acarrear crisis de alimentación, por ejemplo, sino en tratar de desentrañar los problemas de tipo más general, que hacen o que han llevado a un desequilibrio estructural, que en la opinión de estudiosos de la CEPAL (Comisión Económica para la América Latina), han conducido a paises como la Argentina a una situación que podemos definir como círculo vicioso, es decir, una situación sin salida. Argentina está entre aquellos paises que han desarrollado una producción, una ganadería y una agricultura de tipo extensivo, esto ha sido posible en la medida en que su extensión y su población lo han per-

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mitido. Su población, digo, pese a que originalmente, Argentina es un país de poca población frente a otros países sobrepoblados, que resolvió su problema de mano de obra por medio de la inmigración a fines del siglo xix, en resumen el problema se nos plantea de esta manera : una alta producción y una muy baja productividad, que en general y a partir del momento de la explosión agrícola, vale decir, más o menos al final del siglo xix, no ha sobrepasado nunca del hectolitro por hectárea, esto unido a una altísima producción como se ha señalado, este problema de bajos índices de productividad y alta producción, se da sobre todo en la agricultura y se caracteriza por haberse llevado a cabo primordialmente, por medio de agregado de tierras y mano de obra con esta característica, mano de obra no asalariada. Para entender cómo resolver este problema de mano de obra no asalariada, es necesario rápidamente referirse al grupo que posee la tierra en nuestro país, que es el mismo que encontramos por lo menos a fines de siglo xvin, xix, y del xx, aún hoy, que se autodenominó a fines del siglo xix la Oligarqía, sus características son muy importantes para entender este proceso, esta salida que se ha encontrado para aumentar la producción sin inversiones mayores, en muchos casos con ninguna inversión; es necesario hacer ver que en el caso de Argentina, como en otros paises americanos, estos terratenientes no lo fueron desde el principio, esta es la diferencia más importante entre Argentina y otros paises latinoamericanos, los antiguos paises del Imperio Español; en efecto, me estoy refiriendo a la zona este del país, a la zona del litoral que es la zona cerealera por excelencia y que agrupa prácticamente al 8o % de la población del país y además es la que nos interesa desde el punto de vista económico para los análisis y cualquier tipo de plan de desarrollo de crecimiento, etc. Este grupo inicialmente pequeño comerciante, con la misma incapacidad de decisión internacional en la distribución de productos, dado el sistema de monopolio español que no lo permitía, se caracterizó siempre por tener una actitud dual, por un gran sentido comercial para aprovechar el mercado a corto plazo, por aprovecharlo siempre en la medida en que los rendimientos fueron muy altos con muy poca inversión y por una gran dinámica también a corto plazo, es decir, son comerciantes que si la situación se da pueden ser productores, productores en este sentido; en Argentina a principios del siglo xix no se tiene la propiedad de la tierra para explotarla, se tiene en usufructo, como derecho en general del antiguo Derecho de Vaquería, es decir, el antiguo derecho de cazar las vacas directamente, es decir, no se practica la ganadería, se caza el animal. Esa es otra característica bastante típica del caso económico de la Argentina. El hecho mismo de la existencia de una cantidad enorme de ganado

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posibilitó la inexistencia en el litoral de la agricultura, por supuesto hubo una explotación agrícola en muy pequeña escala, pero la necesidad de alimentación de la población y la necesidad de la población y la necesidad de comercio quedaba totalmente cubierta con la explotación del animal, con la comercialización del cuero. Decía entonces de este grupo que se ocupa paralelamente o alternativamente de actividades comerciales o actividades productivas, en el sentido de contratar durante 2 0 3 meses del año peones gauchos para realizar las matanzas; a partir de 1810 no va a resistir la competencia de comerciantes europeos que se instalan en Buenos Aires, comerciantes europeos que ya tienen una experiencia y visión comercial más moderna y es entonces cuando se van a dedicar casi exclusivamente a explotar el campo, explotar el sector ganadero y no el sector agrícola, estamos alrededor de 1830 y hasta 1880 en esta zona, la zona del cereal, se comienza a desarrollar la agricultura. ¿Por qué se desarrolla la agricultura en la zona de cereal? Hacia 1880 el ciclo de vacuno está prácticamente terminado, los precios mundiales son adversos y sobre todo lo que requieren los mercados mundiales son alimentos, por el momento Argentina puede exportar como alimento la carne tasajo, tradicionalmente solo digno de los esclavos, según los documentos, o el animal en piécosa difícil de realizar en la medida en que no existen trasportes suficientes, adecuados para transportar estos animales a Europa, es decir, hacia 1880 la famosa civilización del cuero, el negocio del cuero del vacuno sobre todo, prácticamente ha llegado a un impass, que en apariencia se van a romper con la instalación de los frigoríficos hacia 1882, pero curiosamente los frigoríficos no van a posalvar esta situación, en la medida en que el vacuno está en el mismo estado en que nosotros lo podemos encontrar a principios del siglo XVIII, es decir, el animal en estado salvaje, sin ningún tipo de refinación, es decir, el frigorífico va a dar beneficios a creadores marginales, como los creadores de la oveja, del bovino. Nuestro grupo que ha conservado su gran sentido comercial sin embargo va a encontrar la manera de sortear este problema y capitalizar en su beneficio esta innovación técnica en el sector ganadero y es allí donde vemos que ingresa la agricultura, es decir, no se trata solamente de comprar animales finos, de cruzarlos, sino de mejorar los pastos, pero mejorar los pastos significa inversión, que en general es una palabra desconocida entre los grupos propietarios de la tierra, que ya son propietarios de la tierra, de toda la tierra disponible, sobre todo en la provincia de Buenos Aires, no porque no tengan capital, sino porque no tienen hábito de invertir. Es así entonces que este grupo que ya en este momento tiene también el poder político, después de un período relativamente corto, en que

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puede decirse que lo había perdido de cierta manera después de la caída de Rosas, encuentra la forma más inteligente para sus intereses, de llevar a cabo esta cobertura de pastos artificiales, fomenta la inmigración, que tampoco requiere inversión de capital, en la medida en que hay todo un círculo armado con Inglaterra que está profundamente interesada en la producción de materia prima, que va a subvencionar, con pasajes muy baratos la venida de emigrantes que va a llevar después sus barcos cargados con alimentos, con cereales sobre todo y estos ganaderos hacen una ley, la famosa Ley de Arrendamiento, que va a tener las consecuencias más graves para nuestro país, desde el punto de vista social, y que es el origen de esa situación, de ese círculo vicioso en el cual nos encontramos hoy. La Ley de Arrendamiento tiene la siguiente característica : se entrega al inmigrante tierra, cualquier cantidad de tierra, más tierra de la que puede disponer, de la que puede cultivar, no se le entrega nada más, alguna vez un poco de semilla. El campesino puede sembrar lino el primer año, tenemos que recordar que son tierras vírgenes, siembra lino el primer año, se queda con lo producido; siembra trigo el segundo año, se queda con lo producido; siembra alfalfa el tercer año y se la deja al propietario y se va, es decir, el propietario ha visto con solo esperar cubrir sus campos con pasturas artificiales. Lógicamente el campesino va a tratar siempre de conseguir tierras nuevas, en la medida en que las tierras vírgenes le van a dar mayor rendimiento en la primeras cosechas, que la tierra ya cultivada, y el sistema funcionó muy bien, mientras existieron tierras qué entregar; ya después de funcionar también cundo el campesino tuvo que roturar la tierra por segunda o tercera vez, que ha sido también una de las causas por las cuales actualmente existe en Argentina en una provincia, Tres Ríos, que es una de las provincias del litoral, la mitad de su territorio erosionado, lo mismo que la pampa, es decir, prácticamente incultivables por el sistema de cultivo. Este problema ha traído consecuencias de tipo sociales, que no tienen que ver con malas cosechas, que provoquen hambre, que la gente se muera de hambre, sino con otro tipo de problemas. Si pensamos por ejemplo, que en el censo del catorce hay 75 mil chacareros en el país, de estos tienen contratos por menos de tres años el 56 % (42.000); por solo 3 años, 10.000; y por 5 años, 13.000. Vemos que el sistema que ha comenzado alrededor de 1880 en 1914 continúa con la misma vigencia. En general estos chacareros son de origen extranjero, son inmigrantes. ¿ Cuáles fueron las consecuencias más notables de este sistema de producción ? Por supuesto, en un primer momento un crecimiento vertiginoso del producto bruto total, tan vertiginoso que pese a que podemos

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sospechar, que alrededor de un 90 % de este producto quedó en manos de un 2 % , el 10 % restante fue todavía tan alto, que es en esa época en que se forma una clase media muy numerosa en la Argentina. Sin embargo, pasada la etapa expansiva y cuando, como dije antes, se acaban las tierras vírgenes a repartir, a cultivar, se produce un movimiento de despoblación del campo o sea, de fuga de los campesinos a la ciudad. Es el momento en que tenemos nosotros por ejemplo : en 1869 la población urbana es el 28 % , la población rural el 72 %. En el 95 la población urbana es el 38 %, la población rural el 62 % . En 1914 la población urbana es el 53 %, la población rural el 47 % . Esto es en un país esencialmente agrícola, sin industria visible y sobre todo con una distribución de la población totalmente desequilibrada, porque de este porcentaje sobre una población inclusive actualmente de alrededor de 21 millones de habitantes, corresponden a la ciudad de Buenos Aires y sus alrededores cerca de 8 millones de habitantes. Es decir, hay un desequilibrio de población y en un país que está centrado en su comercio exterior, una distribución muy desigual de su población urbana y rural que se agudiza en la medida que pensamos, que el aumento de la producción agrícola no se hace en base a una introducción de innovaciones tecnológicas sino, a lo que ya he señalado, aumento de tierra y mano de obra sin salario. El problema entonces, vuelvo a decir, para nosotros, todavía no podemos ocuparnos de hacer análisis tan sutiles como los que he escuchado aquí, tenemos un problema más grueso que nos ha llevado a una situación, que como señalé antes, para los especialistas de C E P A L , pese a que Argentina está entre los paises de Latinoamérica cuya renta per cápita es una de las más altas, la situación está endurecida en este sentido, dado que la propiedad de la tierra continúa con las mismas características que cien años atrás, que el capital y los elementos de producción están en manos de un grupo sensiblemente pequeño dentro de la población, que este grupo pese a que se ha volcado actualmente, este grupo y algunos grupos nuevos formados en los últimos años, se ha volcado hacia la actividad industrial, se caracteriza ahora al revés que antes, por una inversión desmedida, inversión desmedida en este sentido; antes de cumplir, antes de ocupar toda la capacidad ociosa de las máquinas se las cambia, directamente se las cambia, esto redunda en beneficio de la producción, es cierto, pero deja diariamente un mayor número de mano de obra desocupada, como al mismo tiempo esta mano de obra desocupada no va a engrosar el mercado interno, cada vez estas máquinas nuevas, en las cuales nuestros viejos productores invierten parte de su capital, van a producir menos de lo que racionalmente pueden producir, en consecuencia tenemos una débil población rural, una cada vez población urbana marginal, aquellos que forman los

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cinturones que nosotros llamamos las Villas Miserias, y el porcentaje de población ocupada desciende, es decir, ¿ cuál es entonces el círculo que hay que romper ? Bueno, el círculo que hay que romper y que no se puede romper dadas ciertas condicones de tipo social, es el sistema de propiedad de la tierra. Este problema ha traído para Argentina y para otros paises americanos una serie de consecuencias de tipo social, se han presentado en Argentina y en otros paises problemas sociales anteriores, es decir, con las mismas características, que se presentan en Europa, cuando ya se ha producido la revolución industrial, con una realidad toalmente diferente, sin revolución industrial, sin industrialización, en Argentina hemos asistido a un afianzamiento de la clase proletaria, que produce una serie de tenciones de tipo social que agudizan este problema, o sea, nuestro problema de producción y productividad, todavía no los podemos centrar en los cálculos muy perfectos, pese a que existen las cifras, sino que nos tiene preocupados el problema más grande, más amplio de, para decirlo con una palabra, de un cambio de estructuras que posibilite la salida.

RÉSUMÉ M . VILAR. — Je voudrais évoquer successivement ce que nous a dit Mme de Torres ainsi que le résumé de Pierre Berthe, qui n'a pas pu assister au Congrès. Pour Mme de Torres, elle estime que le problème qui est posé pour l'Argentine ne peut pas être celui que nous avons posé jusqu'à présent, c'est-à-dire celui de la technique, de chiffres de productivité de chaque céréale, de chaque produit, mais qu'il s'agit de problèmes beaucoup plus vastes qui intéressent la structure même de l'Argentine. Il s'agit d'un pays qui depuis le début du x i x e siècle, a vu augmenter énormément sa production et absolument pas sa productivité. Et ceci surtout en agriculture, parce que le processus n'a pas été celui d'une intensification, comme bien entendu dans tous les pays neufs mais plus particulièrement en Argentine, et parce qu'il s'est produit simplement une agrégation de terres cultivables au fur et à mesure que des émigrants arrivaient. Mais, ceci a abouti à maintenir à la fois une énorme partie de la population (jusqu'à 80 %) dans la zone du littoral, tandis que l'immense arrière zone de l'Argentine occupe le minimum de population et est consacrée essentiellement d'abord à l'élevage, ensuite à l'agriculture. De sorte que le problème essentiel c'est celui qui concerne la propriété du sol et les modes de mise en valeur. L a propriété qui a commencé à la fin du x v n i e siècle par

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être non pas une propriété absolue mais simplement le droit de « chasser » le bétail, c'est-à-dire d'utiliser le bétail qui vivait à l'état demi-sauvage. O r , il en est résulté que la distribution même de la propriété est restée semblable à travers tout le x i x e siècle et même jusqu'à un certain point le x x e à partir des années 1810. Mais, des années 1810 aux années disons 1830 et même jusqu'à 1880, le développement n'est pas un développement agricole, c'est la période, le cycle de la civilisation du cuir. Civilisation du cuir c'est-à-dire d'un élevage qui n'est pas lui-même un élevage systématique dans lequel se produisent des investissements pour l'amélioration du bétail. Même lorsque vers 1880 (je vois d'ailleurs, que dans son résumé écrit, M m e de Torres avait rattaché cela à la situation agricole à partir de 1872), les propriétaires qui ne sont pas en réalité des producteurs, qui sont essentiellement d'anciens petits commerçants qui ont gardé le sens du commerce, savent s'adapter immédiatement, à court terme, à une situation nouvelle, en fait ils n'ont pas l'habitude d'investir à long terme et de savoir créer des conditions nouvelles. A partir de 1872 ou 1880, nous observons cette énorme augmentation de la production agricole qui dure jusqu'en 19x4 et qui fait que si l'on regarde les chiffres de production on a l'impression d'un développement véritablement monumental. Mais ceci se rattache aussi à ce système légal qui, à partir de la loi des baux agricoles de 1880, permet de créer, grâce aux pionniers qui arrivent de l'extérieur, une classe moyenne de producteurs agricoles, mais de producteurs agricoles qui préfèrent (parce qu'eux aussi regardent essentiellement le rendement à court terme) passer de plus en plus dans les terres vierges, de sorte que ce sont des terres qui s'ajoutent aux terres, mais sans qu'il y ait une véritable transformation des conditions de la production. Or, nous en sommes arrivés aujourd'hui à une situation que M m e de Torres a qualifiée de cercle vicieux, c'est-à-dire qu'en fait, nous nous trouvons d'une part avec une masse très réduite d'immenses propriétés, et d'autre part une agriculture qui, petit à petit, ayant créé des conditions insuffisantes pour le développement du revenu de l'agriculteur, a subi le phénomène général de dépopulation des campagnes avec cette énorme croissance des villes et plus particulièrement de Buenos Aires. L'Argentine se trouve aujourd'hui dans la situation en somme d'un pays avancé du point de vue des structures, c'est-à-dire où il y a peu de population rurale et énormément de population urbaine, seulement cette population rurale n'apporte pas de haut rendement à l'agriculture, et la population urbaine est une population à l'état de chômage latent en très grande partie, de sorte qu'il y a pour ainsi dire un pays qui subit les conditions sociales d'une révolution industrielle sans avoir une révolution industrielle correspondante : c'est le problème de l'Argentine actuelle.

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Alors je demande à Mme de Torres qu'elle me permette de commencer la discussion, avant même de terminer son résumé ou en terminant son résumé. Je ne pense pas que malgré tout cela empêche le problème des rendements. D'abord, l'intérêt : car au bout du compte la façon de préciser tous les problèmes qu'elle a soulevés, ce serait bien de voir les chiffres de rendement d'abord, les chiffres de rendement concret et, ensuite, de passer même au plan financier si c'était possible. Bien entendu je pense que ce sont les travaux en cours à l'heure actuelle qui s'attachent à résoudre ces questions, mais je crois que vous avez bien fait de soulever le problème beaucoup plus général des structures et de l'évolution de ces structures et du cercle vicieux où se trouve à l'heure actuelle l'économie argentine. Pour la communication de M. Berthe il s'agit de quelque chose qui est beaucoup plus proche des préoccupations qui jusqu'à présent ont été évoquées à cette tribune. Il s'agit du problème du x v m e siècle et véritablement des rendements agricoles. Ce qui me paraît le plus intéressant à noter, c'est d'abord, bien entendu, ce tableau géographique, mais sur lequel nous n'avons pas à insister parce qu'il est beaucoup plus connu, c'est-à-dire la division du Mexique en terres qui ne se ressemblent pas et d'autre part les énormes rendements qui nous sont donnés pour le xvi e siècle par les chroniqueurs des Indes. Ces chroniqueurs des Indes qui pour le xvi e siècle nous donnent, en particulier pour le blé, pour le maïs, des rendements qui nous paraissent énormes (j'ai toujours posé des questions et je me suis toujours demandé si c'était vraisemblable), mais nous commençons à comprendre qu'ils sont vraisemblables lorsque nous voyons qu'en fait, les Indiens, lorsqu'ils semaient le maïs, par exemple, le semaient véritablement à la manière d'un jardinage. Je vous lis le paragraphe de M. Berthe qui me paraît le plus intéressant : « pour obtenir les chiffres de rendement par rapport aux superficies cultivées il faudrait des précisions supplémentaires. Nous ignorons presque tout de la densité des ensemencements. Les Indiens ne semaient pas le maïs à la volée, mais enterraient les grains, par trois ou quatre, dans des trous pratiqués à la coa. Les instructions agronomiques des Jésuites vers 1730, 1740 prescrivaient de semer le blé, dru sur les terres légères, plus clairsemé sur les terres grasses et fertiles. Finalement nous nous apercevons d'une chose : c'est qu'au xvni e siècle on est passé d'une culture qui était une espèce de culture vivrière de jardinage chez les Indiens, donc intensive, à une culture de type extensif, contrecoup du développement de l'agronomie en Europe et du désir d'une exploitation plus large ». Alors c'est cela naturellement, qui est le plus intéressant, mais ce que nous donne M. Berthe c'est l'impression de la coexistence et de la concurrence de types d'exploitations très différents à partir du xvm e siècle où vous avez des Indiens qui se

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cantonnent dans les cultures vivrières, maïs, haricots, piments, etc., tandis que les Espagnols, cela est bien connu, pratiquent bien entendu davantage la culture spéculative, la culture coloniale. Ici, nous revenons un petit peu au thème de M m e de Torres, mais sans le porter jusqu'aux contemporains : ce sont les conditions socio-économiques propres à une société coloniale qui posent les principales questions. Car les Espagnols possèdent un certain nombre de types d'haciendas, un certain nombre de types d'exploitations et il est bien précisé que celles qui peuvent réussir matériellement, du point de vue financier, sont celles qui possèdent encore des Indiens soumis au travail obligatoire, indios de servicio, indios de repartimiento, ou alors des salariés sous le système du péonage. Mais en revanche, par exemple, celles qui sont obligées d'utiliser des Noirs dans le cas des moulins à sucre, des exploitations sucrières, sont dans une position beaucoup moins favorable. Pourquoi ? parce que la main-d'œuvre des Noirs, ou plus exactement le prix des Noirs, le prix de l'esclave est extrêmement élevé. Nous voyons se poser là, à la fin du x v u i e siècle, M . Berthe n'étant pas allé plus loin, nous voyons se poser le problème d'un certain nombre de types d'exploitations, certaines qui sont en difficulté à cause du prix de la main-d'œuvre noire, certaines qui poussent à un système extensif qui d'ailleurs ne réussira pas à créer les conditions de développement agricole nécessaires, et puis alors les exploitations d'Indiens qui sont pour ainsi dire en train de reculer par rapport à ce qu'elles avaient pu être dans un système bien antérieur. D'ailleurs il faut voir le tout. Si j'avais su que M . Chaunu était là j e lui aurais passé la parole, c'est lui qui aurait beaucoup mieux résumé certainement que moi la communication de Berthe. D'ailleurs, c'est lui qui v a probablement nous dire ce qu'il en pense puisqu'il s'est penché assez souvent sur ce type de questions. Ensuite il y a dans le résumé de M . Berthe un certain nombre de taux de rendements s'échelonnant du x v i e au x v m e siècle jusqu'aux fameux exposés de Humboldt. Mais là aussi, commençant la discussion, j e me permettrai de dire que j e me suis toujours posé le problème de la réalité de ces rendements (et pourtant Humboldt les décrit avec une précision telle que nous sommes bien obligés d'accepter son témoignage). Mais j'avoue que ces rendements de 800 pour 1 m'ont toujours paru un peu effrayants, à moins alors qu'il ne soient simplement ces choses expérimentales qui ressemblent au jardinage, où l'on sème deux ou trois graines et où l'on récolte d'énormes quantités de semences.

DISCUSSION M . MANDROU. — Ce que j e voudrais dire concerne l'Europe centrale et il s'agit essentiellement de problèmes de documentation. Il est bien évident, et je crois que M . Jacquart et M . L e R o y Ladurie ne me démentiront pas, que les plus grosses difficultés qui sont rencontrées lorsque nous étudions ces problèmes en France sont d'abord des difficultés de documentation. Les avertissements de M . Goubert qui s'adressaient à de futurs chercheurs plus qu'aux chercheurs engagés étaient certainement nécessaires parce que chaque fois qu'un Français se penche sur ces problèmes à partir des sources françaises, il est toujours tenté d'extrapoler à partir de chiffres qui sont isolés, à partir de données qui valent pour quelques années, qui valent pour de très courtes séries. Même lorsque l'on a dix ou quinze années de rendements à la suite, on s'estime déjà bien heureux et on est très content, à partir de là, d'essayer de dégager une idée générale concernant tel ou tel problème. Or, j e crois qu'il ne faudrait pas mettre de côté les documents, les renseignements que peut nous fournir l'Europe centrale dans ce domaine. Je travaille (et j e ne parlerai pas des résultats, pour la bonne raison que j e ne suis pas assez avancé) depuis des années sur les biens fonciers des Fugger dans la région d'Augsbourg. J'ai été amené, d'autre part, récemment, au cours d'un voyage en Tchécoslovaquie, à demander ce qui pourrait se trouver dans les archives tchèques concernant les mêmes problèmes, et j e dirai très rapidement maintenant combien les séries que j e peux être amené à manipuler d'une part, en Allemagne, et combien les séries que j ' a i entrevues au cours d'une rapide visite en Tchécoslovaquie d'autre part, me paraissent supérieures aux séries françaises. Pour les Fugger, d'abord. Vous savez qui sont les Fugger, j e n'ai pas besoin d'expliquer longuement que ceux-ci s'étant enrichis très rapidement au début du x v i e siècle ont toujours eu la préoccupation d'acheter des terres et de gouverner à leur guise, c'est-à-dire en s'insérant dans le régime seigneurial, mais en exigeant de la part des paysans qui étaient devenus leurs sujets une comptabilité très stricte. O r , cette comptabilité stricte des Fugger, elle est conservée depuis les années 1520, 1560 où se sont faites les premières acquisitions jusqu'à 1806 et jusqu'à 1848 selon les cas. C e qui signifie que pour certains villages, vous avez chaque année, ce qu'on appelle le Giiltbuch, c'est-à-dire le livre des ressources. Le Giiltbuch donne chaque année pour chaque paysan ce que le paysan a remis à l'intendant des

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Fugger, c'est-à-dire au représentant du seigneur dans le village. D'autre part, nous avons pour chaque année le livre de récapitulation, dans lequel cet intendant des Fugger a fait l'ensemble de ses comptes, et qui est un livre de caisse à proprement parler, c'est-à-dire qu'il comprend en fin d'exercice ce qui reste effectivement dans la caisse une fois que tout a été traduit en argent suivant les exigences comptables des Fugger. Or, ce livre de caisse confirme, complète même assez admirablement ce que donne d'autre part le Giiltbuch. Ces livres n'existent pas, bien sûr, quel qu'ait été le soin de la famille des Fugger à conserver jusqu'aujourd'hui leurs archives, ces livres n'existent pas pour toutes les années sur deux siècles ou deux siècles et demi ou trois siècles bien sûr. Mais vous avez pour certains villages des séries continues sur deux siècles. Des séries continues qui seraient d'ailleurs assez difficiles à exploiter de façon artisanale mais qui cependant vous donnent une description de la vie du village, de la vie de chaque paysan année après année, qui me paraît assez facile à exploiter dans le sens qui nous préoccupe ici. A Prague, il ne s'agit pas de bourgeois qui s'installent sur des terres et qui se féodalisent. Pour parler rapidement, le phénomène qui a permis de conserver jusqu'à maintenant une très belle documentation dans ce domaine c'est le phénomène de la germanisation après la montagne Blanche. Dès 1630-1650 vous avez une sorte de recensement général des terres qui passent entre les mains des Allemands et ce recensement se fait maison par maison, paysan par paysan, qu'il s'agisse de grandes exploitations ou qu'il s'agisse de simples journaliers qui ne possèdent qu'un simple petit bout de terre et un jardin : tout cela est dûment enregistré et (c'est la chose qui m'a étonné le plus) se trouve confirmé en gros, de cinquante en cinquante ans jusqu'au temps de Joseph II. J'ai vu deux séries d'archives tout aussi admirables l'une que l'autre, d'une part aux Archives de Prague et d'autre part dans ce petit château un peu isolé à quarante kilomètres au sud-ouest de Prague, à Trebonn. Vous avez donc d'abord un premier tableau, en 1630-1650 qui reflète la mainmise des Allemands sur les seigneuries qui étaient précédemment occupées par les Tchèques. Ensuite un tableau vers 1680, un autre au début du x v m e siècle, et un quatrième, enfin, au temps de Joseph II, c'est-à-dire dans les années 1780-1783. I l y en a même un cinquième, qui est celui sur lequel travaille encore le cadastre tchèque à l'heure actuelle, qui se situe au début du x i x e siècle. Mais même avec les quatre premiers, nous disposons, ou plutôt les Tchèques disposent, d'une documentation extraordinaire sur le fonctionnement du régime seigneurial, et la situation des paysans, et les rendements obtenus par eux, car les descriptions ne se contentent pas de dire comme le font d'ailleurs les intendants des Fugger quelle est la part de terre dont dispose chaque paysan : les

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descriptions tchèques donnent également le cheptel, donnent également le rendement habituel de chacune de ses terres, ce que vous complétez par ailleurs par des indications sur les revenus, c'est-à-dire sur les rentrées faites entre les tableaux dont je vous parlais à l'instant. Encore une fois, je ne veux pas parler maintenant des résultats, enfin de ce que l'on peut obtenir dans les différents cas à partir de données comme celles-ci, mais je voudrais signaler quelques petits points, qui répondent un peu aux préoccupations qui ont été exprimées ce matin. M. Goubert déplorait que la plupart des documents exploités aient été des documents qui concernaient de grandes exploitations hospitalières ou bien de couvents, etc., c'est-à-dire toujours de grands domaines et parfois même de très grands domaines. Une documentation comme celle dont je vous parlais à l'instant, est une documentation qui concerne également les petits paysans. Il ne s'agit pas simplement de très grosses exploitations qui ne fonctionnent pas, même d'un point de vue agronomique, de la même façon qu'un village composé d'une demi-douzaine de paysans (qu'on appellerait des « coqs de village » en France), de laboureurs, et d'une trentaine, d'une quarantaine de journaliers. D'autre part bien des détails de ces questions qui ont été évoquées ce matin peuvent trouver une explication à partir de tels documents. La question des défrichements par exemple. Je n'ai jamais rencontré de village souabe où les défrichements n'aient été signalés parcelles après parcelles. Ce qui permet de distinguer ce que j'appellerai l'ancien champ du nouveau champ. Les transformations que subit le cheptel également, sont toujours mentionnées avec le plus grand soin. Ceci tient en partie, pour la Souabe, je crois à des raisons géographiques, c'est-à-dire la proximité de la Suisse. Lorsque l'on introduit des vaches suisses dans un cheptel c'est toujours mentionné. La distinction se voit également sur le prix. Dans l'estimation qui est faite du cheptel, on distingue toujours la vache d'Allgau, la vache du pays, et la vache suisse, il y a une différence d'un à deux florins entre les vaches suisses et les autres, au profit des vaches suisses d'ailleurs. Quant à un autre problème, encore, que je veux évoquer en un mot, c'est le problème de la dîme. La dîme française, si je puis ainsi m'exprimer, la dîme en France était perçue par des décimateurs, par des gens qui avaient obtenu la ferme de la dîme. En Allemagne la dîme a été souvent sécularisée, elle est tantôt perçue par l'intendant des Fugger, par exemple, ça lui arrive très souvent. O n achète des dîmes comme on achète autre chose. Elle est perçue aussi par le curé, bien souvent, et dans de nombreux villages le rendement de la dîme varie d'année en année dans des proportions considérables, simplement parce que les paysans arrivent à obtenir qu'ils ne paient pas

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leur dîme au curé. Ce sont là des conditions de tractation tout à fait particulières que nous n'imaginons pas dans l'exemple français et qui existent fort bien ici. Je viens de dépouiller ces dernières semaines les documents qui éclairent le sort de trois villages au début du xvn e siècle pour lesquels je connais l'endettement de chacun des paysans. Je constate que dans 80 % des cas, ces paysans sont endettés auprès de leur curé. Ils se sont débrouillés pour ne pas le payer alors que les endettements envers la seigneurie sont beaucoup plus rares, la seigneurie se faisant mieux respecter que le curé. Ceci pour vous indiquer simplement combien de précisions on peut obtenir dans différents domaines à partir de documentations aussi importantes et aussi continues que celles que nous fournissent les pays d'Europe centrale, pour des raisons générales que je ne pourrais pas évoquer maintenant, qui tiennent sans doute au fait que le régime seigneurial s'est conservé plus rigidement ici qu'il ne s'est conservé en France. M. L I S A N T I (Brésil). — Le rapport de Mme de Torres m'a, j e dirais, forcé à venir vous dire ce que je pense du cas brésilien. D'abord que les conclusions de Mme de Torres sont sensiblement valables pour le cas brésilien. N'oublions jamais que le Brésil avait une économie esclavagiste. Ensuite, nous savons que dans l'Amérique soit argentine, soit brésilienne, l'investissement agricole est traditionnellement une attitude passive, si j'ose dire, la terre est un grand facteur d'épargne sans plus. J'oserais dire que l'agriculture brésilienne a passé plusieurs siècles sans grands changements technologiques. Ce qui est énorme. En ce qui concerne des comportements assez différents de ceux qu'on trouve en Europe, je pourrais citer plusieurs exemples. A côté de ce qu'indiquait Mme de Torres, un taux de rendement assez bas et une grande production, je pourrais indiquer des comportements aussi disparates, tels que baisse des prix, et grande production pour essayer de se rattraper. N'oublions jamais que l'esclave était le capital investi, il était déjà là. Donc, le forcer à cultiver plus de terres, ce n'était qu'une question de décision du maître. Très simple d'ailleurs. Je dirais que là nous retrouvons la présence du court terme et l'absence, encore une fois, d'une notion plus dépouillée du long terme. En ce qui concerne la lenteur de l'évolution technologique même de cette agriculture, j e ne pensais pas intervenir, je n'ai pas apporté de chiffres. Mais j e peux dire que l'ensemble des terres cultivées au Brésil de 1850 à 1950 est passé disons de 1 à 2 pour 100, tandis que la population était multipliée par plus de 7, ce qui vous montre l'énorme problème évoqué par Mme de Torres, même pour le cas brésilien. M. Vilar, par la suite, avec pertinence, a parlé de l'importance du rendement. J'en conviens, je suis tout à fait d'accord.

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DISCUSSION

Simplement, j e ne peux pas ne pas être d'accord avec Mme de Torres, qui a dit, nous avons d'autres terres à défricher, pour parvenir à des détails aussi précis et aussi beaux que ceux qui ont été évoqués ici, soit par M . Mandrou, soit par M . Berthe et autres. Mais j e dirais que pour le seul cas où l'on puisse parler d'une révolution du cercle brésilien le cas pauliste, vous avez raison et fortement raison, parce que quand on quitte le secteur d'exportation, c'est-à-dire quand on quitte le café et que l'on étudie les taux de rendement, on observe que le café, évidemment s'est amélioré, nous sommes d'accord, mais quand on touche à l'horticulture eh bien on observe une amélioration nette et très importante parce que sans horticulture on n'arriverait pas à la révolution industrielle. M . C H A U N U . — M . Goubert évoquait tout à l'heure à propos de la France le problème des pays ouverts et des pays fermés, des pays clos. Je crois là que pour l'Amérique c'est évidemment une problématique qui s'impose et M . Lisanti nous a apporté un précieux témoignage à savoir avec l'Argentine celui d'une Amérique ouverte. M . Berthe dans son rapport nous apporte en quelque sorte l'autre volet, le témoignage d'une Amérique close : il y a une Amérique close, du moins au x v i e siècle, avant l'effondrement de la population, c'est le cas du Mexique, c'est le cas peut-être de certains morceaux du Pérou et puis il y a l'Amérique ouverte. Alors, malgré la remarque de M . Lisanti, j e suis quand même plutôt d'accord avec M . Vilar, j e crois que, même dans cette Amérique ouverte et même s'il y a des problèmes de structures qui sont des problèmes capitaux, cela ne nous dispense pas, certes, de nous pencher vers les rendements. Et c'est alors, justement si nous nous penchons vers les rendements que nous pourrons affirmer, ce qui est vraisemblable, c'est-à-dire qu'il y a une mutation spatiale et non pas une modification d'ordre qualitatif. Mais j e crois évidemment que l'essentiel c'est cette opposition entre des pays ouverts et des pays clos ou relativement clos. Il est à la fois évident et absurde que pour trouver quelque chose de comparable en Europe, ou quelque chose de grossièrement comparable en Europe à l'Argentine du x i x e siècle, il faudrait que nous nous tournions vers le x n e siècle peut-être même bien antérieurement encore. Il y a là deux choses, et deux mondes tout à fait différents à l'intérieur de l'Amérique et si l'on fait évidemment une assimilation il y a une Amérique close et il y a une Amérique ouverte. D'autre part, le point technique extrêmement important soulevé par M . Vilar est celui de ces rendements qui sont des rendements curieux. Évidemment, lorsque nous voyons un rendement de 300 pour 1 en 1530, 1545 même dans la région de Puebla, ça nous fait un peu froid dans le dos. D'un autre côté, j'avoue que moi quelquefois, quand

DISCUSSION

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j e vois des rendements de 1 à 2, ça me fait aussi froid dans le dos, pour une autre raison c'est parce que j e pense quand même que l'homme doit survivre. Alors j e crois qu'évidemment il faut prendre ces données avec humour et peut-être certainement considérer qu'il s'agit de cas tout à fait exceptionnels. D'une autre manière, dans un autre domaine quand même, si nous nous tournons vers les travaux assez cohérents de nos collègues nord-américains, sur lesquels bien sûr on peut discuter, sur lesquels nous ne sommes pas tous d'accord, mais enfin, si nous acceptons, si vous voulez, les dernières données de Borah qui accorde 25 millions d'habitants, bien largement, aux 500.000 kilomètres carrés du plateau de l'Anahuac, c'est aussi une chose qui nous fait froid dans le dos, n'est-ce pas, nous avons peine à imaginer 50 habitants par kilomètre carré dans un pays qui n'est pas l'Europe et nous pensons que seule l'Europe ou seules, du moins, les parties les plus nobles de l'Asie ont droit à de telles densités humaines. Cela nous paraît vraiment renverser l'ordre des choses auxquelles nous sommes habitués. Cependant les tours de force, peut-être de cette agriculture du maïs, sont un argument ou rentrent disons dans un faisceau de probabilités, qui renforce à mon sens les thèses des historiens de Berkeley. Mme H A Y D É E DE T O R R E S . — M. Vilar m'a demandé quelques chiffres, quelques précisions, parce que j'ai parlé d'une façon un peu générale. Oui, il est vrai que nous sommes en train de faire des recherches statistiques et surtout une expérience qui a commencé en Argentine, à Buenos Aires pour l'époque contemporaine, à Rosario pour l'époque coloniale, sous la direction du Professeur Sanchez Albornoz qui est ici. On peut donc faire une collection de matériel chiffré, critiqué, on peut établir des statistiques pour mesurer la croissance économique. C'est un plan que peut-être on pourra réaliser en Argentine, on en a fait déjà une partie, on continue et on peut le faire pour le reste de l'Amérique, pas pour nous, mais pour chaque pays. Mais nous avons déjà quelques éléments et je vais parler des rendements très bas. M. Vilar a maintenant quelques chiffres qui sont vraiment trop bas. Nous avons fait le rapport entre population, investissements et la politique de la banque qui est très liée avec les plans gouvernementaux, c'est-à-dire de l'oligarchie. J e voudrais dire en relation avec la culture extensive, la possibilité d'agrégation des terres. On doit penser qu'en Argentine il y a un territoire de deux millions sept cent mille kilomètres carrés. Or, quand a commencé l'agriculture, une agriculture extensive, elle occupait seulement à peu près un million et demi, le reste était occupé par l'Indien. A partir de ce moment-là on a occupé le reste,

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DISCUSSION

non pas grâce à des investissements particuliers, mais par l'effort du gouvernement qui tirait ses revenus des impôts généraux sur la consommation. En Argentine, il n'y avait pas d'impôts sur la propriété, sur la richesse. A u xix e siècle c'était l'impôt sur la consommation. Cela veut dire que les avantages qui ont profité à de petits groupes se sont faits sur l'effort de toute la population et on a exploité presque la moitié du pays pour tirer des profits. Et pour finir, vous savez bien que le commerce extérieur de l'Argentine est centré autour de ses produits agricoles : l'agriculture, l'élevage. A la fin du x i x e siècle l'agriculture et l'élevage sont arrivés à 94 % de l'exportation. En 1900 déjà l'agriculture représentait 10 à 15 % de l'exportation. En 1910 l'agriculture et les produits de l'élevage réunis représentaient encore 94 % de l'exportation mais l'agriculture y intervenait dans la proportion de 55 %. C'est l'expression de l'essor de l'agriculture.

LANDLORD AND

AND

TENANT

19 th C E N T U R Y

IN

18 th

CENTURY

ENGLAND

by

(The

R . A . C . PARKER Queen's College, Oxford)

What I want to talk about is, I think, slightly different from what has been largely discussed so far, that is to say rather to consider how increases in agricultural productivity came about, at any rate one sort of way in which these increases came about, rather than simply directly considering what the increases themselves were. I am sorry to say I have very few figures to offer by way of quantitative statements of actual increases in agriculture production. What I want to discuss is, in particular, the way in which English landowners contributed to increasing the productivity of the farms exploited by their tenants, through the investment they laid out and through the influences of one sort or another that landlords exercised over their tenants. O n the second page of my résumé, as far as the 18th century is concerned, I should have pointed that there is a limitation on the area of my statements: these remarks are drawn almost entirely from one very substantial estate in Eastern England, in Norfolk, which in some ways presents slightly special characteristics. O n this estate, at any rate, the leases laid down restrictions on cultivation. "Restrictions" is too negative a word, perhaps, since the terms of the leases

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R.A.C.

PARKER

on which farms were let to tenants in fact included directions to the tenants as to the cropping system, the system of what they were to grow on their farms. T o give one instance only, a lease of 1751 prescribed to the tenant that he should follow a six-year rotation: 1 st 2nd 3d 4th 5th 6th

year: year: year: year: year: year:

corn corn turnips corn sown grass sown grass,

and then back again to the same sequence. This is what one might call a progressive rotation, and here is an instance of a rotation which would certainly tend to a productive agriculture being imposed on the tenant by the landlord. It is difficult to be certain how far provisions of this sort could be or were enforced, by which I mean enforced in legal terms in a court of law: that might be difficult. But I think it is practically certain that tenants regarded these prescriptions in their leases as having considerable binding force. A t any rate, in the 19th century, one finds complaints from tenants bound by conditions in these leases which they were beginning to regard as outworn, complaints that they were still imposed on them, which suggests that they paid some attention to them. I cited various types of investment provided in by landlords in the farms they owned. In so far as this investment involved more than maintenance and repair, it obviously involved net investment and net saving. This point seems to me to have some bearing on the remarks made in the opening session of this conference by Professor Kuznets and some of the speakers who followed him. Professor Kuznets seemed to argue that in pre-industrial societies, savings existed, investment existed; but that it was, in a sense, economically futile; that large quantities of investment were needed simply to remain in the same place. Y o u built, for example, an earth dam at great expense, which almost immediately collapsed and you had to build it again. T h e speakers who followed, or some of them, appeared to argue that there was no savings at all, of any serious kind, in early or largely agrarian societies, and in particular, that however great the income it did not produce a high rate of saving on the part of the richer members of an agricultural society: landlords characteristically saundered their incomes on, I suppose, pictures and lavish houses, domestic servants and that sort of thing. I think my own conclusion, at any rate for England, must be quite a different

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PARKER

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one that in fact landlords did save and did invest, that their spending involved investment on improvement as well as spending on maintenance, and that those improvements could be, and frequently were, of a durable type. Professor Habakkuk, I remember, seemed to argue that 18th century barns and houses and such things, were more or less "féodales" when they were constructed. As for the estate that I am principally talking about, large numbers of the buildings which were constructed in the 18th century at the expense of the landlord, are still there, and still being used. There is a large barn, constructed in 1770, which has remained perfectly waterproofed and now contains a substantial grain dryer. I might perhaps offer some quantitative statements about productive investment. In the years 1731 to 1757, on the Coke estate in Norfolk, about 17 % of gross rents, of gross income, was laid out on repairs and improvements. It is difficult, of course, to distinguish with great clarity between repairs and improvements, but I think it is fair to say that about half was improvement as distinct from repair and maintenance. That is to say, for these two decades, about 8 % of the gross income of the landlord in question was being invested in improvements to the farms he owned. This seems to me a perfectly respectable rate of saving or investment. I suspect that this investment produced something like a 6 or 7 % return. (This is a rather hazardous guess based on some very doubtful calculations.) The rents from these estates in Norfolk rose by about 25 % in the years 1718 to 1742, and over the years 1718 to 1759, a rather longer period, by about 40 %. I take the view of M. Jacquart this morning, that it is fair to regard increases in rents as a measure of increased agriculture productivity, provided of course other things are equal. And "other things" are, in this period, largely equal, that is to say prices of grain at any rate are stable, though it is true that prices for products from sheep are rising somewhat. But I think it is fair to say, over the first half of the 18th century, that productive investment in this estate produced an increase in agriculture productivity of something of the order of 25 to 35 %. This sort of investment seems to have been much greater in the first half of the 18th century than in the second half. In the second half of the 18th century, it appears that tenants began to bear the burden of a higher proportion of the investment on their farms, which implies an increasing supply of tenants with increasingly substantial capital. Where their capital came from is something that seems to me to require more exploration. T o give an instance of productive investment drawn from one part of this estate, between 1733 and 1741, the rents from that portion of the estate rose by about a third, from £626 to £816 in seven years.

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PARKER

The basis of the increase was the investment by the landowner of £1,456 on creating a new farm out of lightly grazed or infrequently cultivated waste or semi-waste land, by building a new barn and farmhouse, putting up new fences, making ditches and hedges, clearing the ground of thorns and cleaning ground to make it ready for ploughing, which I think produced a return of about 7 % on the investment. Another type of investment I mentioned was enclosure, which is the best known type of investment by landlords. The effect on agriculture productivity, measured again — which I hope is safe — through rents, was probably something of the order of 50 %. At any rate in the same areas, rents on unenclosed land, that is to say land in strips, subject to customary regulations of cultivation, was about 5 shillings an acre, and at the same time, in the same areas, enclosed land produced about 7 shillings and 6 pence an acre. I think it is fair to regard this difference as the assumed difference in productivity, between two types of land. I also referred to the influence that landlords might exercise through example and social contact. What I have in mind there, to take one example is the existence on many estates, as on this one, of home farms, farms kept in hand by the landlord and cultivated directly under his supervision of the supervision of his agent. From the home farm at Holkham, in Norfolk, on the Coke estate, come my only figures for yields, which, I am afraid, are rather unsatisfactory ones, and are in terms of yields per acre, and not in terms of yield as against quantities of seeds sown. There are solid and reliable figures for 1782 to 1787. Over those years, we find average yields per acre of 31 bushels of barley, 21 bushels of wheat, and 37 bushels of oats. It is possible to make a comparison between barley and wheat yields of the 1780's, and the yields of the early 1950's in fact from the same farm: in the early 1950's, barley yields were about 40 bushels to the acre, as against 31 bushels in 1780. Wheat yields in the early 1950's were rather over 40 bushels in the acre, as against 21 bushels in the 1780's, which, especially for barley implies an extraordinarily high yield for the 18th century, subject to reservations about the amount of seed sown.

AGRICULTURAL

PRODUCTION

IN C A L V A D O S A T T H E END OF T H E O L D R E G I M E by A.

(University

DAVIES

College of

Swansea)

My interest lies in the period of the French Revolution, particularly in the role of the peasantry during that revolution, and this consideration has led me to examine something of the rural economy of the second half of the 18th century. I have taken that part of the ancient province of Normandy which is contained within the present day department of Calvados for two reasons: it provides, I think, a very interesting and instructive area in which to study some of the problems of agriculture, firstly because the area was by no means an agricultural back-water, but was, on the contrary, very affected by the methods and techniques of the new agriculture in the second half of the 18th century, and by the intrusion of English ways of large-scale farming. It was one of the most populated, one of the richest and therefore one of the most important departments in France, offering quite a flourishing agriculture; secondly, it is an area that consists of quite a number of natural regions or "pays" which differ geologically, topographically and agriculturally. I have listed these in the résumé of my paper: — in the East, there is the area of the "Pays d'Auge", the area that covers almost the whole of the present-day arrondissements of Pont-

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A . DAVIES

l'Eveque and Lisieux, a region that for a long time has been famous for its pastures and renowned for its dairy products, especially of course the well-known cheeses of Camembert, Pont-l'Eveque and Livarot, and well known too for its cider and its famous cider-brandy, Calvados; — to the West is the plain of Caen-Falaise, which appeared in the Old Regime, as now, as a region of large-scale cultivation and a fertile cereal-producing area; — still more to the West, lies the area that is still known to-day as it was in the 18th century, as the Bessin, which is bounded on the West by the Cotentin and the Avranchin, and coinciding roughly with most of the present day "arrondissement" of Bayeux. The eastern part of it is geographically similar to the plain of Caen, growing some wheat, but for the rest of it, its clay soils and its humid mild climate made it a region of excellent pasture which has long been famous for its cattle and for the very high quality of its dairy products; — finally, in the South-West of the area, there is the picturesque region of the Norman Bocage, which consists, geologically, mostly of granites and shists, and resembles pretty well the Armorican Massif. The nature of the soil and the prevailing westerly wind in that part of Europe have given it a high degree of humidity, and it is an area of abundant vegetation, of small enclosed fields and high hedgerows with unproductive soils and very poor communications. Indeed, in the 18th century, it was one of the poorest corners of the West of France. Thus, all in all, Calvados was not an area, you will appreciate, in which arable farming was making or was likely to make a good deal of progress. Both its size and its climate made it a region that was particularly rich in pasturage, and suitable therefore for livestock farming or for dairy farming. Not surprisingly, there was already during the i8th century a general tendency to abandon arable farming for pasture farming and therefore to go in for the richer profits of livestock trading, although of course the poor state of communications with the rest of France still made it very necessary to grow a certain amount of cereals. This change over to pasture farming was in harmony, as I suggested, with the physical and climatic conditions of the area. There was no need for the farmer, in Normandy, to wait for the so-called "Century of Enlightenment" with its prompting of enclosure edicts and the propaganda of the Physiocrats, to encourage him to move in this direction: nature had already long invited him to do so. And by the end of the Old Regime, he had for a long time been in the habit of abandoning arable farming and changing over to pasture farming. Now the point I think is, that whereas stock farming did not hold

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the position that it has to-day in the economic life of the French countryside as a whole, and was confined pretty well to small regions of relatively low fertility, regions for example like the old massifs of Brittany and the "Massif Central", nevertheless, Normandy was an exception to the general rule. And in the opinion of Arthur Young, as you remember, neither England nor France had pastures that could be compared to those of Normandy. The great part of the region was the Eastern part, the part that was going over fast from arable to pasture, a transformation that had been going on since the 17 th century. Already during the 17 th century, there is plenty of evidence for it being a region consisting chiefly of pasture and meadow. The tax-rolls of the "Vingtième" during the second part of the 18th century show therefore a process that is just speeding up. The inspectors of taxes comment on the insufficiency of grain in that part of the countryside. Indeed the "curés" of the area petition the monarch to the same eifect. The fundamental reason for this was obviously that the increased pasture was being used for the fattening of cattle that cattle-breeders were bringing from provinces such as Maine, Anjou, Poitou and Brittany, and subsequently, after about seven months of feeding, were selling them, either directly in the famous fairs of Gibray and Poissy, or else indirectly in markets such as Neubourg, Routot and Beaumont and then to the capital-city of Paris, to Caen and to Rouen, at a time when cities were becoming increasingly meat consumers. The continued rise in the price of meat during the 1770's and the 1780's made stock breeding a sector of agricultural life that was sheltered from the depression at least until the fodder shortage of 1785, and hastened this extension of stock breeding and the consequent conversion of land that had once been under grain. The result was two-fold: in the first place, it meant that the area was becoming increasingly dependent on other regions, especially on adjoining ones, for the supply of grain. Secondly of course, because livestock farming needed less manpower than arable farming, there was taking place a reduction in the demand for manual labour at a time when the ranks of rural labourers were increased and swelled by the demographic expansion of the 18th century. This new agricultural practice meant a source of profit for those who held land, this is why one does not find it in literary evidence. But one finds occasionally explicit demands from people that a landlord be allowed to convert at least a quarter of his land for pasture, without paying any "taille" on it at ¡all. No doubt, people who drew up statements of that kind were actively engaged in the process and were profiting from it. But the process caused, as I said, a redundancy of farm labourers, and complaints of this kind emerge

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DAVIES

quite clearly in the documentation of the years of the Revolution, when, as you recall, the question of grain supply in the country as a whole became extremely acute. The protests, however, were quite unavailing: the freedom of cultivation that was demanded in the French Revolution facilitated and speeded up this change that had been going on since the 17th century, and the 19th century witnessed yet a greater transformation: improved communications everywhere led to better markets, farmers were released from anxiety about feeding themselves, and a crisis in the domestic industry of course resulted in emigration to the towns. These were very favourable conditions for the success of the propaganda of an organization like the "Association Normande", which advocated increase of livestock, production of more fertilizers, economy in the use of manpower, and generally speaking called for the prospect of greater gain at less expense. Not surprisingly therefore this programme evoked during the 19 th century a great response from the farmers of the "Pays d'Auge" and reached a culmination point after the first World War, when, as Mr. Fussell suggested yesterday, the herds more or less conquer the soil and the stocks dealer and the dairy company really came into their own. This process is very marked there. It is marked also in the Bessin, though to a lesser extent, but for reasons of time I cannot and need not elaborate it quite so much. One point, however, remains to be made. It is that these regions were highly dependent upon neighbouring provinces for the supply of grain. The Norman peasant was a great eater of bread, like his fellow-peasants everywhere throughout France. The potato had not yet become a significant element in the diet of Frenchmen, in spite of the attempts made, firstly by individuals, and later by the government, to promote its cultivation. In Normandy as in France, it took a long time for the potato to make its way. Corn prices were rising at the end of the Old Regime, and the average daily consumption of bread per head in the department seems to have been about two "livres". Except for the poor regions, where peasants lived on rye, barley and buckwheat, people ate a bread made only, or mainly, of wheat, "le pain brid". Now, the acuteness of the problem was brought to a head by the actions of the French government during the last years of the Old Regime. The government, in an attempt to encourage agriculture, thought to get remunerating prices for it, and legislated certain periods of free trade: from 1763 to 1770, from 1774 to 1777, and from 1787 to 1788. There is room to doubt, I think, whether these regulations were implemented on the local level in an effective way, but it seems that they were acceptable to large farmers. But the small farmers and the day-labourers never accepted the idea. It was a short step therefore for them to incriminate every-

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one who had anything to do with the trade in grain. The consequences were disturbances, riots in countryside as well as in towns from 1760 onwards, police action, the dispatch of troops, in short the whole social ferment from which the Peasant Revolution of 1789 grew.

DISCUSSION M. MEUVRET. — Je voudrais poser deux questions. Je commencerai par la communication de M. Davies. Je relève que la Normandie, le Calvados, qu'il a étudiés avec tant de soin, ont trouvé, avant la Révolution, leur vocation d'élevage. C'est-à-dire quelque chose qui n'était pas nettement dessiné dans l'ancienne France, mais qui se dessine désormais : une sorte de spécialisation. Il ne s'agit pas de monoculture, il ne s'agit même pas de culture, il s'agit du passage qui, au xix e siècle, se produira dans beaucoup d'endroits en France, du passage d'une partie des champs de la culture à l'élevage. Ce qui aux yeux de l'économiste non seulement du xvm e siècle mais de nos jours peut être considéré comme une rationalisation, l'intérêt c'est que cette rationalisation a eu sa contrepartie sociale. Le fait d'utiliser moins de main-d'œuvre évidemment a forcé à un exode vers Paris et M. Davies a évidemment été particulièrement attentif au fait que cette crise parmi d'autres a été de celles qui ont fait affluer une population assez mécontente et en situation difficile à Paris à la veille de la Révolution. Voilà un cas typique d'incidences sociales du progrès de l'économie rurale. Je voudrais demander simplement à M. Davies s'il admet bien la portée que je donne à son étude. L'autre question s'adresse à notre collègue Parker. Nous avons une étude sur les chefs d'entreprises, qui pose un problème général. Qui en agriculture, au xix e siècle, en particulier, est chef d'entreprise? Le chef d'entreprise pourrait être le propriétaire, mais, dans le cas du fermage, il y a partage de l'initiative. Or, ce partage de l'initiative pose le problème du rôle du propriétaire et du rôle d'un tenancier. Ce dernier d'ailleurs, dans le cas des grosses fermes, est un tenancier qui peut avoir non seulement des moyens mais un certain « éclairage » agronomique. Dans cette période critique de la fin du xvm e et du xix e siècle il est particulièrement intéressant de savoir quel est le rôle au point de vue du progrès agronomique des chefs d'entreprises. J'ajoute que ceci amorce un peu les discussions sur le progrès technique dans des cadres plus ou moins socialisés. Ce qui est le problème qui sera évidemment soulevé par les communications provenant des États socialistes.

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one who had anything to do with the trade in grain. The consequences were disturbances, riots in countryside as well as in towns from 1760 onwards, police action, the dispatch of troops, in short the whole social ferment from which the Peasant Revolution of 1789 grew.

DISCUSSION M. MEUVRET. — Je voudrais poser deux questions. Je commencerai par la communication de M. Davies. Je relève que la Normandie, le Calvados, qu'il a étudiés avec tant de soin, ont trouvé, avant la Révolution, leur vocation d'élevage. C'est-à-dire quelque chose qui n'était pas nettement dessiné dans l'ancienne France, mais qui se dessine désormais : une sorte de spécialisation. Il ne s'agit pas de monoculture, il ne s'agit même pas de culture, il s'agit du passage qui, au xix e siècle, se produira dans beaucoup d'endroits en France, du passage d'une partie des champs de la culture à l'élevage. Ce qui aux yeux de l'économiste non seulement du xvm e siècle mais de nos jours peut être considéré comme une rationalisation, l'intérêt c'est que cette rationalisation a eu sa contrepartie sociale. Le fait d'utiliser moins de main-d'œuvre évidemment a forcé à un exode vers Paris et M. Davies a évidemment été particulièrement attentif au fait que cette crise parmi d'autres a été de celles qui ont fait affluer une population assez mécontente et en situation difficile à Paris à la veille de la Révolution. Voilà un cas typique d'incidences sociales du progrès de l'économie rurale. Je voudrais demander simplement à M. Davies s'il admet bien la portée que je donne à son étude. L'autre question s'adresse à notre collègue Parker. Nous avons une étude sur les chefs d'entreprises, qui pose un problème général. Qui en agriculture, au xix e siècle, en particulier, est chef d'entreprise? Le chef d'entreprise pourrait être le propriétaire, mais, dans le cas du fermage, il y a partage de l'initiative. Or, ce partage de l'initiative pose le problème du rôle du propriétaire et du rôle d'un tenancier. Ce dernier d'ailleurs, dans le cas des grosses fermes, est un tenancier qui peut avoir non seulement des moyens mais un certain « éclairage » agronomique. Dans cette période critique de la fin du xvm e et du xix e siècle il est particulièrement intéressant de savoir quel est le rôle au point de vue du progrès agronomique des chefs d'entreprises. J'ajoute que ceci amorce un peu les discussions sur le progrès technique dans des cadres plus ou moins socialisés. Ce qui est le problème qui sera évidemment soulevé par les communications provenant des États socialistes.

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DISCUSSION

M. FUSSELL. — Since the theme of this section of the conference is productivity, I would like to add one word to Mr. Parker's paper: he says that in 1782 to 1787, the average yield of barley on the Coke estate in Norfolk was 31 bushels and the average yield of wheat, 21 bushels. Many years ago, I wrote a small paper under the title of Wheat production and population in the 18th century, in which I attempt to show that the increase in productivity of wheat during that century had been from, roughly, 20 bushels to 22 bushels per acre. I therefore think that the productivity of the Coke estate in the period 1782 to 1787 was probably no greater than the national average, although it would be much greater, of course, than on many individual farms. Mr. STURGESS. — Mr. Parker, you mention the rise in rents in the latter part of the 18th century, which you accept as an adequate indicator of profitability and therefore, presumably, of increases in output, whether it be yields or other forms of total output in agriculture. At the same time you say that the burden of fixed investment was been passed on to the tenant: surely this would complicate the movement in rents, in that rents would not rise so much if this was happening. Secondly, a point about yields: I can't remember the exact figures, but generally, yields, you say, were rising on this one estate. To what extent was this on newly enclosed land or on old enclosed land? On the Coke estate, generally, I think, it was on light land, which previously had not been cultivated and now was being cultivated under a corn rotation (a four course or this six course as you said). So that a comparison between yields from, say, 1730 to 1750 would not be very meaningful, as the figures for the latter year would include yields from new land which before had not undergone any kind of cultivation, and therefore problems of fertilizers and so on do not arise. One more question: what exactly does what you call a "satisfactory" level of improvements mean? You take, I think, 12 or 13 % as a satisfactory level. Is it satisfactory in the sense that they are depreciating their existing capital at 12-13 % ? And, also, if you have a high level of repairs and a relatively low level of improvements (improvements here being fixed investment as opposed to every annual expenditure noted as repairs), could this not show that the fixed investment was at a very low level, a very inefficient level, and that they were spending a lot of money from year to year in repairs, simply to maintain a relatively inefficient level of fixed equipment? Low repairs and high fixed equipment mean that the estate is being improved, in other words the relationship of one to the other,

DISCUSSION

137

repairs to improvement or fixed investment is more relevant in simply looking at one over a long period. M . de M A D D A L E N A . — (S'adressant au professeur Parker) : Vous écrivez, à la fin de votre résumé, au sujet de la position du landlord, que celui-ci cherchait à « ...maximise (his) income because of (his) desire for political influence ». Je vous demande si cette position peut être comparée à celle des propriétaires fonciers de l'Europe continentale, je ne dis pas au même moment, peut-être, mais au xvn e siècle : c'est-à-dire que la terre leur donne prestige, leur donne une influence, qu'il s'agit donc d'une situation féodale. Il est difficile de dire qu'en Angleterre il y a une néo-féodalité comme sur le continent, mais votre réflexion porte à discuter aussi ce problème. D'autre part, la terre n'est pas richesse par elle-même, vous le dites auparavant, la terre est un instrument pour produire des richesses. Il faut avoir de l'argent, des capitaux à placer pour rendre la terre productive. Où les landlords trouvent-ils cet argent? Où sont les sources de l'argent? Est-ce seulement le revenu de la terre qui l'apporte, ou bien l'argent vient-il par d'autres chemins? M . R . A . C . P A R K E R . — 1 . Source of money used by landlord for investment: my impression is from the estate I know best, but I think this is probably true of most great estates of the 18th century, that the primary source of money used for agriculture investment was quite simply the money coming in from farms in the form of rents. Money was certainly, of course, borrowed by landlords, but in general borrowed to meet large capital sums required particularly to endow daughters. But the process of investment in land could generally be done, and was done I think, out of income. 2. Political influence: the possession of land certainly implies a position of prestige, I suppose in all European countries. What I had in mind when I wrote my remarks about the desire for political influence being a possible source of readiness in the part of the landlord to invest in his estates in England, was this: (this is an extremely tentative point which I am in no way certain about), but it seems clear that in England landlords cared a great deal about getting themselves, or getting their nominees, elected to the House of Commons. In order to do that, they required the respect, the admiration, the gratitude of voters. Voters did not automatically do what landlords wished them to do: therefore voters and those who influence voters must be kept contented. And one way of doing that, I would suggest, is by investing in their farms. It may be (I would like to know more about this), that English landlords were more inclined

138

DISCUSSION

to invest in agriculture than Continental landlords, and if this is so, the political structure may have been one reason for it. Another point which I have in mind is that the English landlord who owned lands in Ireland in the 18th century managed those lands in a quite different fashion, indeed hardly managed them at all. A n English landlord who possessed Irish lands, as far as the Irish lands were concerned, was simply a passive rent-receiver, and I suspect the difference in the importance of political influence may have had some bearing on this contrast. 3. Mr. Meuvret raised the point about "chef d'entreprise", about who was running agriculture. The landlord, as I suggested, was able to dictate, in some ways, how agriculture should be conducted, through the lease. On a day-to-day basis, contact with tenantry would be maintained through a full-time steward employed by the great landlord. The tenants themselves, at any rate on the larger farms, men of sometimes high, sometimes moderate social standing, were themselves the men who controlled and directed the activities of the labourers, of the men who ploughed furrows and sowed the seeds and so on or sometimes men themselves employed professional, full-time bailiffs, to deal with day-to-day running of their farms. I have an example of the way in which influences were passed between landlord and tenant, over a question of drilling at the end of the 18th century: in 1802, Arthur Young reported that the farm of Coke at Holkham was well drilled. Shortly afterwards, we find Coke offering prizes in Norfolk for accounts of experiments in drilling. In 1816, a tenant named Fitzroy, one of the tenants with a relatively high social status, wrote to Coke that he was sowing part of one field broadcast, and part drilled, to convince his bailiff of the virtues of drilling. In 1819, the president of the Board of Agriculture spoke at one of Coke's agricultural shows, which was one of the means by which influence was disseminated among his tenants, and he spoke against drilling. But at the end of the meeting, having contemplated Coke's experiments, he turned round and spoke in favour of drilling. This sort of relation between a landlord and the outside world, and between a landlord and his tenant, is I think an essential part of the way in which new experiments were transmitted. 4. M y yield figures were drawn from the home farm, at Holkham, directly managed by the landlord, and not from the whole Coke estates. It would be extremely surprising if they were very much higher than the national average, since of course the estates in question had extremely light soils. 5. M y figures for movements in rents were drawn from the first half

DISCUSSION

139

of the 18th century. It was for the second half of that century that I spoke of the burden of improvements being shifted on the tenants. As for the question of improvements on newly enclosed or old enclosed land, there have been improvements on both. N o doubt, as far as fixed investment is concerned, a high proportion tended to go into newly enclosed land. But I think it is fair to speak of improvements in productivity as being things which derive both from lands hitherto totally uncultivated, lands lightly cultivated, lands heavily cultivated, but in a technically backward way. 6. As for the point about depreciation, I tried to distinguish between money spent on repairs, on maintenance of existing capital (an extremely difficult thing to do, of course), and money spent on improvements as distinct from maintenance. M y figure of about 8 % for improvements as distinct from 17 % or so for improvements and repairs is in fact based on the statement made by the Coke's stewards themselves. I do not think it is true to say that the figure for improvements is really a sort of concealed repair figure. I think there is a fair distinction. There were, in fact, completely new buildings being built, new investment being carried out. As for its being a "satisfactory" proportion of rents to return to the estate, there my remark was entirely stimulated by professor Kuznet's observations and by the observations of some speakers who followed him. Prof. K u z n e t appeared to assume, as I said, that there was no serious or worthwhile productive investment going on at all. Some of the speakers w h o followed seem to suppose not merely that the investment which was being made was not productive, but that there simply was not any. So when I said it seemed satisfactory, I was thinking against such continental or world observations, rather than against British agricultural practice. M . DAVIES. — (En réponse à M . Meuvret) : 1. The question of partage and the technical improvements associated with it: T h e significance of the economic results attained thereby, of course, differs a good deal from one natural region to another, in so far as the area consists of them which I outlined in my paper. T h e printed lists certainly show a significant increase of yield, but the breaking down of these would depend on a close reckoning being made of the different regions in which the areas concerned lie. Here, there is great variation even within a limited area: may I refer to the point that Mr. Goubert made this morning when he was talking about the differentiations in the levying of the "taille" in Brittany. T h e same would apply here in so far as the result of partage is concerned. 2. T h e question of the social implication of changes in agricultural production and the abandoning of the countryside for the towns as a result:

140

DISCUSSION

In the second half of the 18th century of course, these changes in agricultural production in Calvados which I talked about, resulted in movements to neighbouring towns, Caen, Rouen and Cherbourg which were undergoing a good deal of change and of building. Particularly there was a drift towards Paris. The towns invariably tended to push out people who were drifting in from the countryside, because they could not handle them, and because means of public assistance were too few for them to cope. They rejected them therefore, and in the countryside you had a rather considerable number of peasants moving around, a great deal of vagabondage, and in short the whole raw material from which the revolts came and out of which the "Grande Peur" of 1789 grew.

PRODUKTION

UND

LANDWIRTSCHAFT UND

INTENSITÄT IN

ANGRENZENDEN

DER

DEUTSCHLAND

GEBIETEN

UM

1800

von D.

SAALFELD

(Universität

Göttingen)

Den vorgesehenen Beitrag für diese Sektion habe ich in seiner geographischen Aussage etwas erweitert zu dem Thema : „Die Produktion und Intensität der Landwirtschaft angrenzenden Gebieten um 1800".

in Deutschland und

Wegen der begrenzten Zeit sollen hier nur die wichtigsten Ergebnisse vorgeführt werden, soweit sie anhand statistischer Veröffentlichungen im Kartenbild oder in einer graphischen Zeichnung dargestellt werden konnten. Alle Aussagen beziehen sich auf die Zeit um 1800. Auf der Abbildung ist die Ausdehnung des Ackerbaus für insgesamt 64 Verwaltungsbezirke, Kreise, Landesteile oder kleine Territorialstaaten dargestellt worden, und zwar wurde das Ackerland auf die gesamte Gebietsfläche der einzelnen Bezirke bezogen. (Hier abgestuft nach Anteilen unter 15 v.H., 15-20, 20-30, 30-40, 40-50 sowie 50 und mehr Prozent Acker je gesamte Gebietsfläche.) Die größte Ausdehnung erreichte der Ackerbau mit 57 v.H. in dem Teil Thüringens, der zu Sachsen gehörte, gefolgt von Hohnstein,

142

D.

SAALFELD

Ansbach, Göttingen/Einbeck und Hildesheim, wo das Ackerland mehr als die Hälfte der Bodenfläche einnahm. Weiterhin wurde ein starker Ackerbau in der bayerischen Rheinpfalz, in der Altmark und in Magdeburg, im Gebiet um Meißen und in Böhmen betrieben. Allgemein lag der Ackeranteil über dem Durchschnitt aller Gebiete durchweg in Mitteldeutschland, in westdeutschen Landesteilen und weiten Distrikten Süddeutschlands; schließlich erreichte er in Schlesien den Mittelwert Deutschlands. Abbildung Die Ausdehnung

des Ackerbaus (Ackerland

1

in mitteleuropäischen in vH der Gebiets

fläche)

Landesteilen

um

1800

k

Der geringste Ackeranteil wurde mit nur 5 v.H. des Areals fiir Tirol ermittelt. Ebenso blieb er in den sächsischen Gebirgslagen sowie in der Niederlausitz unter 15 v.H. Relativ wenig Ackerbau wurde schließlich östlich der Oder und in der nordwestdeutschen Tiefebene betrieben.

D. SAALFELD

143

Insgesamt ist nach Bittermann die Ackerfläche Deutschlands — innerhalb der Grenzen von 1937 — mit einem Drittel des Gesamtareals zu veranschlagen. Es blieben also weite Ländereien für andere Nutzungen übrig. Der Landwirtschaft dienten sie vornehmlich als Viehweiden sowie der Gewinnung von Winterfutter und Einstreu. Wie stark die Viehhaltung in den verschiedenen (mitteleuropäischen) Landesteilen um 1800 nun tatsächlich war, zeigt die nächste Abbildung. Abbildung 2

Die Stück einem Den um 45 Gebiet

Stärke oder Dichte der Viehbestände wurde ausgedrückt in Großvieh (abgekürzt G V ) j e 100 ha Gebietsfläche (gleich qkm). höchsten Viehbesatz mit 50 G V j e qkm wies Bayreuth auf; lag er in der Altmark, in Magdeburg, Braunschweig und dem um Meißen. Recht hoch war er auch in Tecklenburg/Lingen

144

D. SAALFELD

und schließlich noch in Ostfriesland, der Grafschaft Mark und im Kreise Leipzig. A m wenigsten V i e h wurde mit nur 7 G V j e qkm in Tirol gehalten. Relativ niedrig war der GV-Besatz auch in der Niederlausitz und schließlich allgemein im östlichen Mitteleuropa. Eine Ausnahme bildete Ostpreussen, wo der Viehbesatz den Durchschnitt Deutschlands um 1800 sogar übertraf. Dieser betrug 25,4 G V j e qkm, errechnet nach Bittermann für Deutschland in den Grenzen von 1937. Nach den von mir ausgewerteten Statistiken scheint mir dieser Wert zu niedrig gegriffen. Im Durchschnitt aller erfaßten mitteleuropäischen Landesteile betrug der Viehbesatz nämlich 30,2 G V j e qkm. Das jedoch nur nebenbei. Viel wichtiger ist hier die Feststellung, d a ß die Gebiete mit geringem Ackerbau in ihrer landwirtschaftlichen Erzeugung keineswegs zu einer starken Viehhaltung tendierten. Abbildung 3

D. SAALFELD

145

Faßt man nämlich die beiden bisher vorgeführten Kriterien — den Ackeranteil und den Viehbesatz j e qkm — zusammen, um zu Aussagen über die Intensität der landwirtschaftlichen Nutzung in den einzelnen Regionen zu gelangen, ergibt sich folgendes. Hier wurden Bezirke mit geringem bis schwachem Ackerbau und schwachem Viehbesatz als Extensivgebiete und auf der anderen Seite solche mit hohem Ackeranteil und starkem Viehbesatz als Intensivgebiete bezeichnet und weitere Abstufungen der Betriebssysteme nach einem bestimmten Verhältnis von Ackerbau und Viehhaltung zu einander und zur Gesamtfläche vorgenommen. Danach wurden die fruchtbaren Bördegebiete von Westfalen über Mitteldeutschland und Böhmen bis nach Schlesien hinein um 1800 sowohl ackerbaulich als auch viehwirtschaftlich relativ intensiv genutzt. Dasselbe ließ sich für Teile Westdeutschlands und weite Landstriche Süddeutschlands nachweisen. Die Viehwirtschaft stand in diesen Gebieten, wie aus den zeitgenössischen Quellen hervorgeht, eindeutig im Dienste des Ackerbaus. Diesen zentralen Getreidebauregionen schlössen sich im Nordwesten Viehzuchtgebiete mit mittlerem bis starkem Viehbesatz und schwachem bis mittlerem Ackerbau an. Im östlichen Mitteleuropa und in den Gebirgslagen dagegen wurde der Boden landwirtschaftlich extensiv genutzt : sowohl die Viehbestände als auch das Ackerland blieben hier — bezogen auf die Gesamtfläche — weit unter dem Durchschnitt aller untersuchten Gebiete. Während in den Gebirgslagen das geringe Ausmaß der landwirtschaftlichen Nutzung seine Ursache in den unwirtlichen natürlichen Verhältnissen hatte, war dieses im östlichen Mitteleuropa offenbar auf die Ungunst der Verkehrslage zurückzuführen. Aus dem gleichen Grunde war hier noch viel „Wildland" im Sinne Thünens vorhanden. Der Waldanteil blieb nämlich im östlichen Teil Deutschlands und Mitteleuropas nicht unwesentlich unter dem Durchschnitt aller erfaßten Bezirke. Im einzelnen möchte ich hierauf nicht weiter eingehen. Ließ sich aus den räumlichen Unterschieden in der Organisation der Bodennutzung neben den natürlichen Umweltbedingungen anschaulich der Einfluß der Verkehrslage aufzeigen, so kommen in dem Ergebnis der nächsten Abbildung schon stärker die Auswirkungen der Agrarverfassung zum Ausdruck. A u f diese Karte sind die durchschnittlichen Getreideerträge einzelner landwirtschaftlicher Betriebe nach zehn- und mehrjährigen Buchführungsergebnissen aus der Zeit um 1800 dargestellt. Die Ertragshöhe des Getreidebaus je Flächeneinheit — ausgedrückt in 100 kg je ha Getreidefläche — wurde in Beziehung zum mittleren

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D. SAALFELD

Abbildung 4 Getreideerträge einzelner landwirtschaftlicher

Betriebe in Mitteleuropa um 1800

(mehr-u viel jährige Ertragsergebnisse in 100 kg jeha) 1

Getreideerträge in dz (= 100kg) je ho (8 5dz/ha = 100 i

I

Mittlerer Getreideertrag in Deutschtd. um tSOO = 8.5 dz je ha (=1001

Getreideertrag Deutschlands gebracht, der nach Bittermann 8,5 dz je ha betrug und gleich 100 gesetzt wurde. Dieser Mittelwert wurde in allen erfaßten Betrieben überschritten. Das arithmetische Mittel der Getreideerträge aus allen 13 Betrieben betrug 12,6 dz/ha und lag damit u m 48 v.H. über dem Durchschnitt Deutschlands. Es handelt sich also um Ertragsergebnisse von Spitzenbetrieben und — mit einer Ausnahme — auch u m Gutswirtschaften. Die außergewöhnliche Ertragshöhe läßt sich damit erklären, d a ß sich die Grundherren für ihre Eigenwirtschaften bessere Böden vorbehalten hatten und d a ß sie durch die Agrarverfassung wenig behindert wurden, neue Erkenntnisse in der Landwirtschaft anzuwenden. Ahnlich lagen die Verhältnisse bei den erfaßten Bauernhöfen. Es handelt sich hier um zwei Betriebe der Familie Möllinger in Pfeddersheim und Monsheim (Krs. Worms) in der Rheinpfalz.

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D. SAALFELD

Das Land lag in wenigen Parzellen in der Nähe der Höfe. Ein Flurzwang bestand nicht, und das Ackerland wurde nach Art der „freien Wirtschaft" bestellt. Zufolge der Bodenfruchtbarkeit und der Tüchtigkeit der Besitzer wurden hier von 1798 bis 1812 im Durchschnitt der Jahre 19,1 dz Getreide je ha geerntet. Die Betriebsergebnisse sind uns durch Schwerz überliefert. Abschließend möchte ich noch auf Zusammenhänge zwischen dem Stand der volkswirtschaftlichen Entwicklung und der Landbewirtschaftung in den untersuchten Gebietsteilen hinweisen. Sowohl die Verkehrs- (oder Markt-) läge als auch der Stand der volkswirtschaftlichen Entwicklung wirken sich auf die landwirtschaftliche Betriebsorganisation über das Preisgefüge aus. Wie es damit im ländlichen Raum um 1800 bestellt war, wurde bisher nur unzureichend erforscht. Geht man jedoch von der Tatsache aus, daß in den Ballungsräumen der Bevölkerung und Gewerbezentren das Preisniveau relativ hoch lag und sich die Marktverhältnisse für die Bauern relativ günstig gestalteten, so kann festgestellt werden, daß mit zunehmender Bevölkerungsdichte und demzufolge mit zunehmender Gunst der Marktlage die Bodenfläche um so intensiver sowohl ackerbaulich als auch viehwirtschaftlich genutzt wurde. Abbildung 5 Bevölkerungsdichte und Ackeranteil an der Gebietsfläche in mitteleuropäischen Landesteilen um 1800 Ackerfläche in v.H. der Gebietsfläche 60

44 Einw. je qKm

n

Mittelwerte

Deutsch-

lands um 1800

I

1



.*

»Ii.

Einwohner je qKm

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D. SAALFELD

In dieser graphischen Darstellung sind die Bevölkerungsdichte und der Ackeranteil miteinander in Beziehung gesetzt worden. A u f der Abszisse (d.h. auf der x — Achse) wurde die Bevölkerungsdichte, ausgedrückt in Einwohner j e qkm, aufgetragen und auf der Ordinate (der y — Achse) der Ackeranteil in v.H. der Gebietsfläche. Jeder Punkt des Koordinatensystems dokumentiert also die Werte eines bestimmten Gebietes. So betrug z.B. der Mittelwert für Deutschland um 1800 nach den Ermittlungen von Bittermann : x = 44 Einwohner j e qkm und y = 33 v.H. Acker. In dem unteren linken Viertel des Koordinatensystems häufen sich die Werte aus den östlichen Gebietsteilen Mitteleuropas und Tirols. Daran schließen sich mit niedrigem Ackeranteil, aber zunehmender Bevölkerungsdichte die Gebirgslagen (die sächsischen Kreise Vogtland und Erzgebirge sowie der Spessart) an, gefolgt von den Ackerbauund Viehzuchtgebieten des west- und norddeutschen Tieflandes. U m den mittleren Ackeranteil Deutschlands gruppieren sich Getreidebaubezirke von Südniedersachsen bis Schlesien, während das obere rechte Viertel des Bezugssystems — gekennzeichnet durch relativhohen Ackeranteil und eine dichte Bevölkerung — von Böhmen, den sächsisch-mitteldeutschen sowie den süddeutschen Ackerbau- und Gewerbezentren eingenommen wird. Hier umschlossen von der Altmark, Thüringen, Hildesheim, Böhmen und der Oberpfalz. Die Beziehungenzwischen dem Ackeranteil ( = y) als einer Funktion der Bevölkerungsdichte ( = x) wurden für alle 64 Werte berechnet mit y = °>349 x +

12,06.

Diese Zusammenhänge sind allerdings keineswegs gesichert. Der Korrelationskoeffizient betrug nämlich nur r = 0,495. Anders sieht es aus, wenn man die Gebiete ausschließt, wo wegen der Ungunst der natürlichen Verhältnisse einer Ausbreitung des Ackerbaus enge Grenzen gesetzt waren. Das waren einmal die Gebirgslagen und z u m anderen die feuchten Niederungsgebiete. In den übrigen 53 Bezirken, wo die Dreifelderwirtschaft der Landwirtschaft ihr Gepräge gab, bestand mit y = 0,4856 x + 8,34 sogar eine enge Funktion zwischen den beiden Kriterien; sie war mit r = 0,711 auch gut gesichert. Wenn in diesem Beitrag einige zahlenmäßig faßbare wirtschaftliche Erscheinungsformen der Landwirtschaft dargestellt und vornehmlich die ökonomischen Ursachen dafür aufgezeigt wurden, so soll nicht verkannt werden — und damit komme ich zum Schlu ß — , d a ß daneben andere Faktoren, wie die Agrarverfassung und Gesellschaftsstruktur, starke Einflüsse auf die Bodennutzung und landwirtschaftliche Betriebsorganisation ausübten. Doch möchte ich meinen, es sollten für die Erklärung wirtschaftlicher Tatbestände zunächst auch wirtschaftliche Gründe herangezogen werden.

PRODUCTION DE EN

ET

PRODUCTIVITÉ

L'ÉCONOMIE

POLOGNE

AUX

AGRICOLE

XVP-XVIIle

SIÈCLES

par Leonid

ZYTKOWICZ

(Université de Torun)

Nous avons l'intention de nous occuper de la période qui va du xvi e au xvm e siècle. Les sources ne permettent pas de remonter à une époque plus lointaine. Vers la fin du xvm e siècle, dans l'agriculture polonaise et celle des pays voisins, de profondes transformations conduisent jusqu'à la décomposition de la ferme corvéable ainsi que de la féodalité. L a structure traditionnelle de la culture du blé change et, naturellement, le rendement de l'agriculture. L'étendue territoriale étudiée dans ce rapport exige un court commentaire : les frontières politiques ne doivent pas être prises trop en considération, car il y avait des terres polonaises qui se trouvaient, à l'époque qui nous intéresse, hors de la frontière de la République : la Silésie, une grande partie de la Poméranie. Nous tâcherons de prendre en considération ces territoires dans la mesure où le permet l'état actuel des recherches. Pour d'autres raisons on ne peut pas passer sous silence les terres lithuaniennes, de la Ruthénie blanche et d'Ukraine qui par suite de l'accord de 1569 ont été unies à la République. Le niveau et le rendement de l'agriculture décidaient de la position de l'État, influençaient indirectement son attitude politique.

LEONID ¿YTKOWICZ

De plus, la connaissance du développement de l'économie rurale permettra, d'une manière plus proche de la réalité, d'apprécier mieux certains phénomènes — comme le progrès ou la régression économique, les destructions de guerres — et de distinguer les événements particuliers des faits généraux de la vie économique du pays. L'étendue des informations fournies par les sources ne permet pas, à vrai dire, de faire un calcul global de la production agricole. C'est au xvin e siècle qu'apparaissent les sources de provenance fiscale qui procurent certaines possibilités sous ce rapport. Certainement le xix e siècle est tout à fait dans une autre situation. Ainsi pour la période des xvi e -xvm e siècles il faut se contenter de quelques indices du niveau de la production agricole. Le rendement d'une unité définie du sol est bien difficile à désigner. Les renseignements donnés par les sources sont très divergents. En outre de graves obstacles limitent la connaissance suffisante de la métrologie historique. Le système de la culture des terres avait pour conséquence que toute la terre destinée à la culture n'était pas ensemencée chaque année. Ce qui nous permet d'éviter beaucoup de ces difficultés, c'est la notion du rendement du grain comme indicateur du niveau de la production agricole, c'est-à-dire la proportion de la récolte par rapport à l'ensemencement. En général, justement un tel facteur de rendement est accepté par les chercheurs polonais. En outre la composition de l'ensemencement, l'apparition de nouvelles plantes cultivables, le système de la culture, l'application de l'assolement, etc., sont révélateurs du niveau de l'agriculture et des rendements. En Pologne féodale l'élevage ne jouait pas un rôle aussi important que la production végétale. Mais, eu égard à l'étendue du problème, on se bornera maintenant à examiner la production du blé proprement dit et la production de quatre céréales principales. La nature des sources impose encore une restriction du sujet. L'analyse des différentes catégories de sources, où l'on peut trouver des renseignements en ce qui concerne la production agricole, commande de s'appuyer, avant tout, sur les comptes comme les plus dignes de confiance. Dans certains cas, les informations des inventaires des biens terriens peuvent être estimées comme équivalentes. Par contre, les données relatives aux biens royaux paraissent exagérées ; elles informent non sur l'état réel de la production, mais surtout sur les possibilités de la production dans les conditions favorables. Toutes les espèces de sources énumérées se rapportent au folwark (réserve seigneuriale) et non à l'exploitation paysanne, donc surtout aux grandes propriétés. Les sources les plus riches se rapportent au xvi e et à la première moitié du xvii e siècle plus qu'à l'époque comprise entre la moitié du xvn e siècle et la moitié du xvm e . Depuis la moitié du xvm e siècle le nombre de sources augmente considérablement.

LEONID ¿YTKOWICZ

C'est la conséquence du progrès économique et du perfectionnement de l'administration des biens fonciers. Bien que l'historiographie polonaise s'intéresse à la production agricole depuis longtemps (F. Bujak, R . Grodecki, J . Rutkowski) les recherches systématiques commencent relativement depuis peu. L'attention des chercheurs est attirée surtout vers le x v i e siècle et le début du x v n e (Mme Wawrzyúczyk, M M . Topolski, Majewski, Wyczañski), la seconde moitié du x v m e et le début du x i x e siècle (M. B. Baranowski, M m e Kostrowicka). M . Wyczañski a présenté (i960) à la i r e Conférence internationale d'Histoire économique à Stockholm, un exposé relatif à la question du niveau des récoltes de blé en Pologne depuis le x v i e siècle jusqu'au x v m e siècle. Eu égard à l'état des sources, on ne s'occupe pas beaucoup de la période qui va du x v n e jusqu'à la moitié du x v m e siècle, toutefois on peut citer des travaux précieux concernant cette période. Des possibilités bien meilleures s'ouvrent pour les recherches sur les récoltes depuis la seconde moitié du x v m e siècle et, évidemment, au x i x e . Surtout les comptes de différents latifundia permettent de faire les calculs détaillés des récoltes et de la structure des ensemencements. Profitant du riche matériel de livres de comptes, on s'occupait, d'une manière très active, dans le milieu de Wroclaw de la recherche au sujet des récoltes en Silésie. Mais il manque encore les résultats des recherches systématiques sur les plus grands latifundia de cette période. Certainement les travaux auront pu profiter des cadastres dressés par l'administration autrichienne et prussienne après le démembrement de la Pologne. Jusqu'à présent, font défaut des recherches systématiques en Lithuanie et en Ruthénie blanche. Q u a n t à l'Ukraine il faut mentionner de précieuses études de A . I. Baranowicz, sur les comptes des récoltes en Volhynie au x v m e siècle; de M m e W . A . Markin sur les biens des Czartoryski dans la seconde moitié du x v m e siècle; de W. Serczyk, concernant les biens de Human. L a science de l'U.R.S.S. s'occupe, d'une façon de plus en plus active de l'histoire agraire de la Ruthénie blanche, de la Lithuanie et de l'Ukraine. A preuve les nombreux rapports de ce type présentés au cours des symposiums annuels d'histoire agraire de l'Europe orientale. En général il faut constater que les historiens polonais ont réalisé un important effort dans leurs recherches concernant le rendement des récoltes. C e problème devient une des questions centrales des recherches sur l'histoire de l'économie rurale à l'époque féodale. Il faut signaler qu'un historien hollandais éminent, B. H . Slicher van Bath, en confrontant à peu près 11.500 données détaillées sur les récoltes dans les différents pays de l'Europe, depuis 1810-1820 (la Russie jusqu'en 1850), cite jusqu'à 2 1 , 6 % de données qui concernent

152

LEONID

ZYTKOWICZ

la Pologne. C'est le pourcentage le plus élevé des pays envisagés par l'auteur. Ce pourcentage serait encore beaucoup plus élevé si l'auteur pouvait profiter complètement de la littérature polonaise. Depuis l'apparition du travail de Slicher van Bath (1963) les recherches polonaises ont fourni de nouveaux matériaux. Ainsi le bilan général de la contribution polonaise indique que dans la sphère des recherches sur la production agraire — et peut-être de l'économie agricole en général — , la science polonaise, dans un temps relativement court, a enrichi très efficacement notre connaissance de l'histoire de l'économie rurale, tant dans le domaine des faits que dans celui des méthodes. Par la force des choses, une réflexion s'impose quand on lit les travaux des chercheurs étrangers consacrés au problème de la production agricole. D'un côté, l'historien polonais se trouve dans une situation plus difficile, ne serait-ce qu'à cause de la destruction et du mélange des archives, surtout à l'époque qui précède le milieu du x v m e siècle. Mais en même temps les débris sauvés — par exemple la comptabilité des propriétés rurales — sont parfois beaucoup plus riches que ceux qui sont à la disposition des historiens de certains pays de l'Ouest. C'est la conséquence de la différence des structures agraires. Dans les pays où le folwark ne s'est pas développé (surtout celui qui ne produisait pas pour le marché, et où la production était concentrée dans la ferme du paysan) le besoin de faire les comptes, de décrire des biens n'existait pas. Mais à l'Ouest, de beaucoup plus riches matériaux de sources ont été formés par l'administration d'État, surtout à l'époque du développement de la fiscalité; les conditions sociales de la production agraire ont contribué à fournir des sources très abondantes. Le sort tragique de la Pologne tout au long de son histoire fut la cause de leur destruction, en ce pays. Il faut constater cependant que les recherches antérieures sur la production agraire en Pologne forment une importante contribution surtout pour la période qui va du milieu du xvi e siècle au milieu du xvn e et depuis la moitié du xvin e siècle. Les 100 années intermédiaires sont les moins connues. Il est à craindre que l'état des sources ne permette pas de compenser cette lacune. Le caractère des sources a contribué à ce que les recherches se rapportent surtout à la production des grands domaines. Il est peut-être loisible d'exprimer l'espoir que les recherches ultérieures sur la seconde moitié du x v m e siècle et la première du x i x e permettront de comprendre mieux la période précédente. Caractérisons brièvement les conditions sociales de la production agraire en Pologne à l'époque qui nous intéresse. On sait que vers la fin du x v e siècle commence en ce pays la transformation du système agraire qui consistait dans la propagation successive de l'agriculture

LEONID ¿YTKOWICZ

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basée sur la corvée. Ce système domine la vie économique jusqu'à l'époque des grandes réformes agraires au xix e siècle. Les prémisses économiques fondamentales étaient l'accroissement de la demande du blé dans certains pays de l'Europe occidentale ce qui créait les possibilités d'exporter le blé polonais par la voie de mer, par Gdansk surtout. Eu égard à la distance de Gdansk de beaucoup de régions de production et aux difficultés du transport, le grand producteur était dans de meilleures conditions pour vendre son blé que le moins riche. Ce fait avait une importance considérable pour le futur développement des relations économiques et sociales sur le territoire de la République d'alors. Il signifiait que la classe féodale avait de meilleures possibilités d'augmenter son revenu en produisant le blé dans sa propre ferme, que de continuer à maintenir le système des redevances. Mais le phénomène le plus important n'est pas que le folwark était en état de vendre un fort pourcentage des récoltes malgré les bas rendements. Il est plus essentiel qu'il ait pu organiser de son chef le transport de blé à Gdansk et diminuer les frais du transport. Ainsi, en est-on venu successivement à la dégradation de la ferme de paysan et en même temps à une grave restriction du rôle d'intermédiaire du marchand local dans le commerce du blé. Ce n'était que dans les régions du pays où le marché local était plus développé, ou bien près de Gdansk, que la classe féodale était moins intéressée à l'agrandissement des folwark; les redevances paysannes étaient restées le principal revenu du propriétaire. Un folwark typique en Pologne c'est le folwark corvéable. Cela résultait du bas niveau des forces productrices, du faible rendement du travail, des maigres récoltes, du bas prix et des conditions difficiles de la vente du blé par le producteur. Évidemment nous traitons comme une forme de corvée l'embauchage forcé des paysans. En revanche l'embauchage libre apparaît dans les régions plus développées économiquement, comme le delta de la Vistule, les propriétés foncières situées tout près des villes plus grandes. Dans les conditions alors « normales » faire dépendre la culture du folwark du travail mercenaire n'aurait pas eu de sens économique, car le prix de la production aurait diminué et même, peut-être, aurait englouti tout à fait le revenu du seigneur. Par exemple les évaluations pour plusieurs folwark corvéables de l'évêché de Wroclaw en Silésie indiquent qu'à l'époque 1531-1582 les semailles et la modeste consommation du folwark engloutissaient environ 60 % des récoltes des blés principaux. Outre cela la propriété foncière supportait les frais de l'administration, de la construction et de la réparation des bâtiments, du transport du blé à Gdansk, etc. Dans ces conditions, la corvée — sauf dans des circonstances spécifiques — devenait pour la classe féodale la solution la plus simple et la plus avantageuse pour ne pas dire la solution unique.

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Il faut attirer l'attention sur un phénomène probablement peu mis en relief par les chercheurs. Les seigneurs féodaux recevaient à Gdansk des sommes importantes pour leur blé vendu. Le plus souvent cet argent était dépensé sur place, à Gdansk, pour les achats de luxe. Cela signifie que cet argent passait à côté du marché local. C'est à un faible degré seulement qu'il contribuait à l'intensification de la circulation monétaire dans le pays. Autant qu'on le sache ce n'est qu'à l'époque de la décomposition du régime corvéable en Pologne que l'on peut constater l'investissement par la classe dominante d'une partie de son bénéfice dans l'agriculture. Les conditions sociales en Pologne ont permis à la classe féodale non seulement d'introduire le système corvéable, mais aussi de le maintenir aussi longtemps qu'il a été profitable pour elle-même, jusqu'à ce que le développement des forces productrices, le progrès de l'agrotechnique, aient fait du travail mercenaire une forme économiquement plus avantageuse de l'exploitation d'une grande propriété foncière. Le système corvéable avait assuré à la classe féodale des résultats économiques plus favorables pour elle que le système du cens. Le système corvéable a créé des conditions néfastes au développement social et économique du pays. La répartition du revenu social s'est formée d'une manière évidemment peu propice au développement des forces productrices dans l'agriculture. Le changement du système agraire n'entraîna pas l'accroissement de la productivité du travail. On ne peut pas nier que dans la première phase de son développement le folwark a contribué à l'accroissement de la production agricole; mais il est hors de doute que son rôle a été régressif en général. Le rôle de l'exploitation paysanne a subi un changement essentiel : elle a cessé d'être le producteur principal de la masse de blé mis sur le marché. La politique économique de la classe féodale l'a rejetée peu à peu au niveau de l'économie naturelle. Toute l'initiative économique s'est trouvée entre les mains de la noblesse, pratiquement des magnats. La question de la crise ou plutôt de la régression économique — vivement discutée à présent — exige toujours des recherches analytiques détaillées. Elle est liée à la question des conséquences économiques des guerres du xvn e et du début du xvm e siècle. Il manque surtout des études sur la reconstruction économique d'aprèsguerre. Généralement on admet que les conséquences des guerres n'ont été surmontées que vers le milieu du xvm e siècle. Ce serait une grave faute de généraliser cette opinion pour tout le territoire de la République d'alors. Il n'y a pas de raison non plus pour accepter la régression, dans la première moitié du xvn e siècle, de l'Ukraine, de la Lithuanie et de la Ruthénie blanche.

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Ensuite il faudrait présenter le degré du développement du folwark, c'est-à-dire, la partie occupée de la terre labourable. L a réponse n'est pas facile. A . Gostomski — auteur du manuel classique sur l'organisation de l'économie rurale (1588) — recommande une répartition des terres labourables entre le village et le folwark, afin que les paysans après avoir acquitté les redevances et la dîme ecclésiastique, obtiennent autant de blé que le seigneur. Cela ne signifierait qu'une prépondérance peu importante d'espace des champs de paysans sur ceux du seigneur. Il semble qu'en pratique le folwark ne soit pas parvenu à une telle expansion. Dans les biens de la noblesse moyenne vers la fin du x v i e siècle, le folwark occupait environ 16 % à 25 % d e l'étendue totale des champs cultivables. Dans les grands latifundia, il semble, que ce pourcentage était plus bas. D'après les calculs de M . Biskup, concernant la Prusse royale, la superficie du folwark devait être supérieure à 25 % de tous les champs cultivés dans cette région. Les auteurs de la Voivodie de Plock comptent schématiquement 33 % des champs pour le folwark (env. 1578). M . WyczaAski a accepté pour tout le Royaume près de 33 % . Les données les plus sûres sont de la fin du x v m e siècle et des débuts du x i x e ; par exemple, en Petite Pologne occidentale (1785), le folwark occupait environ 28 % et les paysans c. 70 % des terres cultivables. Pour la Grande Pologne (1810) ces chiffres sont : 45 % et 53 % ; pour la Lithuanie et la Ruthénie blanche (vers le milieu du x i x e siècle), env. 30 % et 70 % . Bien sûr il ne faut accepter qu'avec beaucoup de réserves les résultats de la statistique d'alors. Ni les conditions sociales et techniques, ni le système de la culture des champs ne laissent présager de riches récoltes. L'assolement triennal prédominait, mais la jachère durait très souvent plus d'une année. Il existait aussi l'assolement biennal. Le faible niveau de l'élevage ne permettait pas de pratiquer la fumaison régulière des champs. Ajoutons encore qu'il nous manque de discerner quelles catégories du sol étaient « fertiles » dans les conditions de l'époque féodale. Les critères de fertilité d'aujourd'hui peuvent se montrer trompeurs par suite du changement des outils agricoles, des conditions ¡hydrographiques, etc. L'introduction des nouvelles plantes dans la seconde moitié du x v m e siècle contribua à stériliser plus promptement le sol eu égard à la différentiation des besoins de ces plantes. Mais alors d'autres facteurs commencent à agir en sens contraire : le progrès de l'élevage, la culture de plantes potagères, plus tard le passage à l'assolement, l'amélioration des outils et de la culture des champs. O n doit constater le caractère hautement extensif de l'agriculture dans toutes les régions de la République. D'ailleurs il se manifeste

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